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DERNIERE RÉPONSE
A LA DEMANDE FORMÉE CONTRE L ’ÉTAT
AU NOM DE S. A. R. Mgr LE DUC D’AUM ALE,
RELATIVEMENT AUX VIDES DE LA FORÊT DE TR ONÇAIS.
L ’administration des domaines a rempli un devoir sacré en défendant
les droits de l’Etat contre des prétentions qui ne sont fondées ni endroit
ni en équité. En répondant au premier Mémoire publié dans l’intérêt de
Son Altesse Royale, les agents du domaine se sont scrupuleusement ren
fermés dans les questions de fait et de droit qui résultaient même des
ont r a p p e l é ces actes, les ont cités
a c t e s p r o d u i t s par l’adversaire; ils
textuellement, et se sont abstenus de toutes réflexions en dehors de la
cause. Le dernier écrit publié au nom du prince semble cependant ac
cuser l’administration de réticence et de mauvaise foi ; cet exemple ne
s e r a p a s suivi. Les agents du d o m a in e , tout en défendant
avec chaleur
et conviction les intérêts qui leur sont confiés, ne s’écarteront pas du s y s
tème de modération q u ’ils ont adopté ; ce ne sont pas des moyens de
considération qui peuvent opérer la décision du procès en litige, et pour
repousser la demande intentée contre l’ Etat, il suffit de s’appuyer sur
les actes et les lois.
On devait naturellement penser qu ’après un jugem ent de première
instance, longuement et fortement motivé, deux longues p la id o irie s
devant la Cour royale, deux mémoires imprimés, la cause était en état
de recevoir une décision, et qu’il ne s’agissait plus que de se présenter
devant les magistrats compétents pour appeler leur attention sur les
moyens invoqués de part et d’autre. L’administration de S. A. R. n’en
a pas jugé ainsi: un nouvel imprimé a été distribué, sans doute pour o b
tenir de nouveaux délais, pour embrouiller la question, détourner l’at
tention des magistrats du véritable point en litige, et égarer l’opinion
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'* •
C2 )
publique. Ce nouveau Mémoire ne contenant rien qui n’ait été réfuté
dans la réplique du domaine, on aurait pu se dispenser d’y répondre j
aussi sera -t-o n court dans ces dernières observations, et se contenterat-o n de quelques réflexions sommaires, réservant une réfutation plus
complète, lorsque les parties se retrouveront en présence devant la Cour
royale, et il faut bien l’espérer, pour la dernière fois.
Le contrat d’échange du 26 février 1661 contient l’abandon au prince
deCondé de tout ce qui constituait le duché de Bourbonnais en général
et sans exception, si ce n’est des bois futaies que ce prince ne pouvait ni
couper n i abattre.
L ’administration n’a jamais contesté cette vérité , n'a point altéré le
sens de l ’acte, l'a cité dans son Mémoire textuellement, sans en omettre
un seul m o t; mais, en même temps, elle a ajouté: La forêt royale de
Tronçais n’a pas été comprise dans cet acte d'échange, i° parce que la
législation qui régissait la F rance à celte é p o q u e s ’y o p p o s a i t ; 2 0 parce
que la même f o r ê t n e f a i s a i t p u s p a r t i e intégrante du duché de Bourbon
nais, étant une propriété personnelle des anciens ducs de Bourbon, qui
leur était advenue, non par don de la Couronne, mais par acquisition à
titre privé.
i° La législation du temps s’y opposait: les parties contractaient en
16G1, sous l’empire de l’édit du domaine de février i
566 qui était loi de
l’Etat, et qui proscrivait d’une manière absolue l’aliénation des grandes
forêts, ainsi que des vides qui se trouvaient dans l’intérieur ou aux reins
d ’icelles. Cet édit ne distinguait pas entre les aliénations perpétuelles et
les engagem ents; ce u x-ci étaient regardés comme de véritables aliéna
tions, l'engagiste ayant les mêmes droits qu’ un acquéreur ordinaire ,
pouvant user et abuser, changer, dénaturer les objets à lui engagés, les
aliéner à son tour. De plus, toute aliénation des biens du domaine était
de sa nature révocable, et l’histoire nous apprend que chaque souverain,
à son avènement au trône,se faisait un devoir de révoquer toutes les alié
nations du domaine consenties par son prédécesseur, soit qu’elles fussent
pures et sim ples, soit qu’elles fussent à titre d’engagements. (O rdon
43G, i 483 , i 5 i 7 , i 5 a i , iS a y , i 53y , 1 i>50, ctc.)
L’édit de février i 5GG s’appliquait donc à toute aliénation de grandes
nances de i / io i, 1
forêts de l’Llat, sans distinction entre les aliénations pures et simples et
les aliénations à titre d’engagement.
�(¿ 61
(
3
)
L’acte d ’échange de 166 1, contracté sous l’empire de cet édit, a xld
en respecter les dispositions ; il ne contient aucune dérogation formelle
à la législation existante; ce n’est pas un acte sohnn el émané de l’omni
potence royale, du pouvoir souverain exerçant les fonctions législatives,
mais un simple acte d’administration qui se renfermait dans les limites
légales, ne dérogeait en rien aux lois en vigueur, et concédait au prince
de Condé tout ce qu’il était permis à Louis X I V de lui concéder, tout ce
qui était légalement dans le commerce et non frappé de prohibition.
La législation s’opposait donc à ce que la forêt de Tronçais lût com
prise dans l’acte d’échange de 1 6 6 1, et à défaut de termes formels, con
statant d’ une manière incontestable que Louis X I V a voulu faire un acte
de souveraineté, en violant les lois existantes, la présomption légale est
q u ’il a vo u lu s’y renfermer.
20 La forêt de Tronçais ne faisait pas partie intégrante du duché de
Bourbonnais, en ce sens q u ’elle était possédée par les ducs de Bourbon ,
non comme fief relevant de laCouronn e, assujéli à certaines redevances,
prestations ou servitudes, mais en pleine propriété, comme chose à eux
personnelle, dont ils p o u v a i e n t d i s p o s e r à l e u r v o l o n t é , s a n s être assu—
jétis à a u c u n e formalité envers la Couronne. Confisquée sur le connéta
ble de Bourbon, non comme une dépendance du duché de Bourbonnais,
mais bien par suite de l’arrêt du parlement qui avait prononcé la con
fiscation de tous les biens du connétable, sans aucune distinction, elle
n’a cessé, depuis ce moment, de faire partie du domaine de I’Etat, dit
Coellier de Moret, dans son Histoire du Bourbonnais, dit encore M. L e pècheux, dans sa requête adressée à l’assemblée nationale.
Elle appartenait si bien à l’Etat, que Charles X , alors comte d’Artois,
demanda en
1775, qu’on la
lui accordAt à titre de supplément d’apanage';
sa demande fût rejetée, non pas parce qu’elle avait déjà été engagée h la
maison de C o n d é , mais parce que l’Etat 11e pouvait pas aliéner une
aussi belle forêt.
L ’acte déchange de 1GG1, en concédant au prince de Condé le duché
de Bourbonnais , ne lui a pas concédé tout ce qui avait appartenu au
connétable do
B o u rb o n ,
qui constituait le grand
à
quelque litre que ce
fief
en <liiclic—pairie en 1327.
fût,
mais seulement ce
formant le duché de Bourbonnais, é r ig é 1
�Les actes intervenus depuis , ne peuvent laisser aucun doute sur ce
point, que les forêts royales , régies par l’édit de i
566 ,
n’étaient pas,
n’avaient pas dû être comprises dans l’acte d’échange de 1661 , et que
ce prince lui-m êm e ne pensait pas pouvoir réclamer ces forêts.
Remarquons d’abord que cet acte contient la vente formelle des bois
taillis et de haute fu ta ie , et qu’ensuite vient la réserve des bois de haute
futaie qu’il ne pourra n i couper, n i abattre. Ainsi, d’ une part, les bois de
haute futaie sont vendus au prince, et d’ un autre côté, ces bois de haute
futaie sont réservés au roi. Comment concilier ces deux clauses contra
dictoires? Dans le sens indiqué par les agents du prince, il n'y a pas de
conciliation possible ; la prétendue concession des bois de haute futaie
n’existe p a s , n’est qu ’un leurre, une dérision, un lapsus calami] les
forêts royales couvertes de futaie auraient été cédées au prince de Condé,
sous la condition qu’ il n’en jouirait jam ais, puisque lors m ê m e que les
arbres auraient été coupés et vendus, le sol r e p r o d u i s a n t de nouveaux
arbres, et d e v a n t à p e r p é t u i t é r e s t e r futaie, la réserve aurait été perpé
tuelle, et la cession nulle, suivant cette adage : Donner et retenir ne vaut ;
e lle s agents du prince reconnaissent ( page 4 de la r é p o n s e ), que c’est
ainsi qu’on doit interpréter la convention.
Dans le sens du domaine, tout s’explique, il ne reste aucune obscurité ;
on a cédé au prince de Condé tout ce qui était aliénable dans le duciié de
Bourbonnais, toutes les petites fo rê ts, eu taillis ou bois f u ta ie , sans
exception, sous la seule réserve des arbres (le haute futaie qu ’il ne p o u
vait ni couper, ni abattre; cVst-à-dire, sous la réserve des arbres alors
existants, lesquels demeuraient réservés au roi tant qu’ils étaient sur pied ;
mais cette réserve cessait à mesure que les arbres étaient abattus, soit qu’ils
formassent des bouquets épars dans les héritages abandonnes, soit qu ’ ils
fussent réunis en forêts d'uni: contenance au dessous de cent cinquante
hectares; et une fois ces arbres coupés et e n levés, ce prince devenait
propriétaire libre du sol dans lequel ces arbres avaient été implantés, et
jouissait des taillis qui croissaient à la place de ces arbres futaies enlevés.
C ’est ainsi d’ailleurs q u ’il en a agi pour les trente-trois petites Ibiêls qui
lui ont été assignées en 1G88. Dans le premier système, contradiction
form elle, impossibilité absolue d'expliquer les termes de l’a cte; dans lu
second, clarté, justesse, application facile. Ne doit-on pas toujours in -
�u
( « )
terpréter un contrat dans le sens le plus c la ir , dans celui qui exclut
toute équivoque ?
Si la forêt de Tronçais eût été comprise dans l’engagement de 166 1,
quel sujet de contestation eût pu s’élever entre l ’Etal et les agents du
prince? Quel était le rôle qui restait aux agents des maîtrises? Ils n ’a
vaient plus à s’occuper de la défensabilité ou non défensabilité des bois;
leur garde, leur conservation ne les concernaient plus, car tous les taillis
appartenaient au prince, et ce dernier devait veiller à leur conservation,
comme il l’a fait pour les trente-trois petites forêts qui lui apparte
naient, après l’arrêt de 1688. Les gardes du roi n’avaient plus qu ’ une
chose à faire, surveiller les arbres futaies alors existants ; le roi n’avait
conservé de droits que sur ces arbres ; leur tâche devenait bien facile
à remplir : il suffisait de quelques visites de temps à autre ; le prince au
contraire avait à surveiller les taillis, les vides, les usurpations commises
par les propriétaires riverains, et cependant la forêt continue d e lr e con
fiée exclusivement aux officiers du domaine , sans que le prince ait
nommé un seul agent pour supporter sa part de la surveillance.
L ’administration des biens d e S . A. II. prétend, ( p a g e d e s a r é p o n s e )
5
que les agents du domaine voulurent empêcher le prince de jo uir des
taillis de la forêt de Tronçais ; que ce fût là ce qui donna lieu à l’arrêt
de 167a , et que, par suite de manœuvres de leur part, ils parvinrent à
faire ériger en principe, que l’âge du taillis serait réglé à dix ans au lieu
de trente ans, selon la coutume du pays.
Le procès-verbal de réformation de 1G71 donne un démenti à ce rai
3
sonnem ent, car il établit que la forêt deTronçais contenait 1 8 , oo a r
pents dont
3oo
arpents seulement en bois futaie de bonne nature, 1G60
arpents en vieux chênes sur le retour et en partie étêtés, et
3
1 G, /io ar
pents en vieilles ventes de tous âges, ju sq u ’à neuf et dix ans. Le prince
aurait donc dû jouir de ces 16 ,
34o arpents qui évidemment, dans le sens
qu’on veut donner à l’acte de 1G 6 1, étaient compris dans sa concession,
notamment de toutes les coupes qui avaient été faites depuis dix ans ; et
cependant, il n’est pas a r t i c u l é q u ’il ait fait un seul acte de possession
sur ces coupes, q u ’il ait même manifesté quelque prétention à cet é^ard.
Ni dans l'arrêt de 1672,
ni dans celui de 1688, on ne voit rien qui ait
rapport à la forêt de T ronçais. Celte iorèt, non plus que celles de Les-
�(
6' )
pinasse, Dreuil, Soulangis, Grosbois et Civray , ne sont pas même
nommées.D’après la réponse que nous lisons, on aurait enlevé au prince
6 34o
de Condé, dans la seule forêt de Troncáis, i ,
arpents de bois taillis
auxquels il avait des droits incontestables: on lui en aurait seulement
accordé 4726, auxquels il avait également droit, et cependant il ne se
plaint pas, il ne réclame rien au delà, il se trouve très content de la p o r
tion qu ’on lui assigne; c'est lui qui poursuit l ’homologation du travail
des experts, qui sollicite un arrêt conforme, et rien dans la procédure
ne conslate qu ’il se soit plaint de la lésion énorme que cet arrêt devait
lui faire éprouver.
A i n s i , dès 1672 et 168 8 , le prince de Condé reconnaissait q u ’il n’a
vait aucun droit sur les forêts royales, quoique ces forêts continssent des
taillis de n e u f à dix ans , et quoiqu’on lui eût vendu tous les bois tant
taillis que de haute futaie, sans aucune autre réserve q u e de ne pas
couper les bois de haute futaie; et il l a i s s a i t p ro n o n c e r , ou plutôt, il
sollicitait u n a r r ê t qui le «léponillait des quatre cinquièmes de ce qui au
rait été sa propriété légitim e, s’ il eût entendu alors son acte d’échange
comme on voudrait l’entendre aujourd’hui.
L ’administration des domaines n’a pas discuté l’arrêt du conseil de
167a , parce qu’elle n ’en a pas de copie dans son dossier, et qu’elle ne
le connaît que par la production qu’en a faite l’adversaire; mais , que
porte donc cet arrêt ? Nous allons le citer textuellement, tel que nous
le trouvons à la page
7 de la réponse.
« Le roi en son conseil, conformément audit contrat d ’échange du
aG février 1GG1, et avis du sieur T u b œ u f, a ordonné et ordonne que le
dit sieur prince de Condé jo uira des p âturages, panages, paissons,
glandee et p êc h e , de la coupe des bois taillis dépendant dudit duché de
H ourbonnais, et des amendes provenant des délits d’ iceux , à la charge
que l’adjudication desdits panages sera faite pour chacun an , sans
frais, par les officiers des forêts du H ourbonnais; les fermiers dudit
sieur prince de Conde appelés, lesquels s e r o n t tenus de visiter lesdits fo
rêts pour régler le nombre de porcs qui pourront être inis en chncuned’icelles ès-lieux défcnsahles et permis , dont ils dresseront leur procèsverbal, et à la charge aussi que les coupes desdils bois taillis seront réglées
à l’Age de dix ans , suivant l'etat qui en a clé dressé, et que la vente et r e -
oolement d’ iceux seront faits par lesdits oiliciers, etc. »
�( ^ ;
On prétend tirer un grand avantage de ces mots s conformément audit
contrai d'échange , ledit sieur prince de Condé jouira des pâturages, etc. ;
e to n dit :«la forêt de Troncáis était donc comprise dans l’acte d ’échange
de 1 6 G 1 , p uisqueleprince a joui des pacages de cette forêt, et que l’ar
rêt de 1672 énonce que le droit de pacage est dû conformément au con
trat d’échange.
La conséquence n’est pas rigoureusement j u s t e , car si la forêt de
Troncáis a été cédée au prince par l’acte d’échange de 1661 , à q u o i bon
se faire donner ou confirmer en 1672 le droit de pacage sur cette
même forêt? Le droit de propriété n’em p o rte-t-il pas nécessairement le
droit de pacage? ce dernier droit n’e st-il pas une partie du prem ier?
P e u t-o n concevoir un propriétaire qui n’aurait pas le droit de faire pa
cager ses bestiaux sur sa propriété? D i r a - t - o n q u e la réserve des bois de
haute futaie insérée dans l’acte d’échange nécessitait cet a n êt? Mais cette
réserve ne s’étendait qu’à la défense de couper les bois de haute futaie, et
le pacage des bestiaux ne peut jamais être nuisible aux bois de haute fu
taie; il n’y a que les jeunes taillis qui soient exposés à la dent des ani
m aux, et tous les bois taillis étaient la propriété du prince, sans aucune
réserve. Ce n’est pas dans les taillis qu’on introduit les p o rcs, car il est
rare que les taillis produisent du gland ; pourquoi donc accordait-on
au prince en
1672, un droit qu’il possédait nécessairement depuis 1G61 ,
sur lequel aucune difiicullé n ’avait pu raisonnablement s’é le v e r,
dont la reconnaissance en
1G72 ,
et
impliquait une contradiction formelle
avec le droit de propriété conféré en 1GG1 ?
k s -lie u x dèfensables et perm is, dit le même a rrêt: pourquoi celte res
triction? Il n’y a défense d’introduire de bestiaux dans un bois que
quand ce bois est je u n e , au dessous de cinq ans ; o r , tous les bois de
celte nature, dans le sens de la dem ande, appartenaient au prince de
Condé; il d e v a it profiter même de toutes les coupes de bois futaie,
après l ’enlèvement des arbres réservés.
Le prince se trouvait soumis
sur ce point aux restrictions générales imposées aux propriétaires sur
leurs propres b o is , mais il n’y avait aucune nécessité d’en faire m en
tion dans l’arrêt de 167a ; cette restriction démontre que dès ce momenl,
il y avait des bois do l’Ktat, non dèfensables, soit dès lo r s , soit suscep
tibles de le devenir, qui n ’étaient pas la propriété du p rin ce, et.qup
�par suite, (ous les bois du Bourbonnais n’avaient pas été cédés au
prince par l’acte de
1661.
Les officiers des forêts sont chargés chaque année de faire l'adjudica
tion des pacages dans les bois et forêts du Bourbonnais: pourquoi celte
précaution, si ces forêts sont comprises dans l’acte d’é ch an ge? Si elles
sont la propriété du prince , pourquoi ne jo uira—t-il pas par lui-m êm e
de c e pacage? pourquoi ses agents ne procéderont-ils pas directement
à l’adjudication?O n objecte (p a ge 8 de la réponse), que l’Etat avait un
grand intérêt à surveiller le repeuplement des forêts dont le sol aliéné
temporairement devait, dans un temps plus ou moins é lo ig n é , faire
retour à son profit. Cette objection aurait quelque poids, si la même
mesure avait été appliquée à toutes les autres forêts abandonnées au
p rin ce; mais elle disparait quand on voit q u ’en
1688 ,
les agents de
l’ Elat cessent de s’occuper des trente-trois petites forêts r e c o n n u e s pour
avoir fait partie de l’éch an ge ; que le
prince
j o u i t par lui-m êm e de ces
p e t i t e s f o r ê t s , les fa it g a r d e r par ses a g e n ts, par des gardes à ses gages ,
sans que l’Elat conserve sur elles aucune surveillance autre que celle que
les agents forestiers exercent généralement sur toutes les propriétés
boisées. Mais l ’Etat avait bien le même intérêt à surveiller ces trentetrois forêts, elles devaient aussi faire retour au domaine dans un temps
plus ou moins éloigné. Le prince n’avait également sur elles q u ’un
droit précaire. Pourquoi donc, celte différence? pourquoi cet abandon
coupable de la part de l’administration à l’égard de ces trente-trois
petites forêts, quand elle se montrait si sévère, si rig o u re u se , si tra cassière à l’égard des autres forêts?
On a d i t , dans la première réponse aux observations, que ce droit de
pacage avait été par erreur et abusivement accordé au prince de Condé
par l’arrêt de 167a ; et plus on examine cet a rrê t, plus on se confirme
dans cette opinion. 11 est évident q u ’on a voulu favoriser le prince , en
lui accordant plus que ne lui conférait l’acte d’échange de 1G61, et que,
pour y parvenir, on a été obligé d’em ployer ces mots : conformément au
contrat d'échange ; c a r , ou bien l’acte d’échange comprenait toutes les
forêts du Bourbonnais, sans e x cep tion , et dans ce ca s, l’arrêt de 167a
est r id ic u le , sans o b j e t , un véritable non sens ; ou bien les grandes fo
rêts n’élaienl pas comprises dans le même acte d’é ch an ge , et dans ce
�(
9
)
ca s, l’arrêt de 1G72 accorde au prince un droit qu’il n’avait pas aupa
ravant; mais comme il fallait colorer en apparence cette extension don
née au contrat, on a ju g é convenable d’ajouter ces m ots: conformément
au contrat d'échange, mots qui pouvaient en imposer à une époque où les
propriétés du domaine étaient assez mal administrées, mais qui ne sou
tiendrait pas aujourd’hui un examen sérieux.
On s’appuie encore sur ces mots : le prince jouira de la coupe des
bois taillis dépendants du duché de Bourbonnais , et on ajoute : cela
est-il clair ?E h bien ! si le prince s’appuie sur ce'tte déposition de l’arrêt
de 1 6 7 2 , nous lui répondrons : vous prétendez aujourd’h u i , en 1842,
que ces mots s’appliquent à toutes les forêts du Bourbonnais ! donc
vous avez dû profiter des coupes qui ont pu être faites dans les grandes
forêts. Comment se fait-il donc que dans des temps voisins de cet arrêt,
vous n ’ayez jamais réclamé aucun droit sur la forêt de Tronçais? Votre
arrêt est de 1672 ; il y avait en 1G71, iG ,
34o arpensde bois taillis, dans
Tronçais, de tous âges , même de neuf à dix a n s, et vous ne pouvez pas
articuler un seul fait, n o n p a s d e jo u issa n ce , mais m ô m e de réclama
tions sur ces taillis ! Au moment même où vous obteniez un arrêt aussi
favorable, vous en connaissiez tellement l’e s p r it , que vous laissiez sous
vos y e u x , couper la forêt de T ro n ça is, en 1G71 , la forêt de Gros-Bois
plus tard , celles de Lespinasse et autres; les coupes de ces bois lutaies
faisaient tomber les forêts dans votre domaine, et vous gardiez le silence !
Vous vous gardiez bien d’élever aucune réclamation ! Vous n’exerciez
aucun acte de poursuite, ni de possession , et ce n’est q u ’au bout de
cent soixante-dix ans qu’ il vous vient
l’idée de donner à cet arrêt une
nouvelle interprétation!
Mais il y a [dus , le système de la demande est p r o s c r i t par les termes
mêmes de l’arrêt de 1G72. A la vérité, cet arrêt accorde au prince de
Condé ht coupe des ho
'8
taillis (lu duché de JSoutbonnais, n u is , ajoute
plus bas : suivant l'état qui en a été dressé; or l’état dressé par le com
missaire T u b œ u f , quoique fort large, quoique très favorable au prince ,
ne contenait pas une parcelle de la forêt de Tronçais, ni des autres forêts
royales.
Les agents du prince , en citant avec complaisance les mots :
t jouira de la coupe des bois taillis du duché de Bourbonnais, » se g a r
dent bien de faire remarquer la restriction qui suit ces mots. Ils veulent
�prouver que l’arrêt accordait au prince tous les bois du Bourbonnais, et
malheureusement pour leur système , celte restriction fatale , suivant
l ’état qui e n a é té dressé, vient les démentir et constater qu’on n’a accordé
au prince que la coupe des bois taillis dont l’état est annexé à l’a rrê t,
état qui ne comprend pas les grandes fo rê ts, parce que jamais le roi
n’avait entendu concéder au prince les grandes forêts, propriété inalié
nable aux termes d e l ’édit de i
566.
Sans doute, il semble résulter de l’arrêt de 167a, qu ’ un droit de pa
cage sur les forêts de'l’Etat aurait été accordé au prince de Condé ; s’il
s’agissait en ce moment de statuer sur l'exercice de ce droit de pacage,
il y aurait lieu d’examiner s’il a été légalement accordé, s’il devait ou
non s’étendre à la forêt de Tronr.ais, s'il a été exercé constamment et
sans trouble; de quelle manière il s’exercait ; s’ il n’y a pas eu confusion
entre les mains de l’Etat par suite de la confiscation opérée en 1791 ; si
l’administration a pu et dû en ordonner la suppression en i
83o.
Mais
comme il ne s’agit en ce moment que d ’une question de propriété, et
q u ’on n’invoque le fait de pacage que comme un fait de possession pou
vant conduire au droit de p ropriété, il serait oiseux de s’engager dans
une discussion prématurée. Seulement, la concession, ou si l’on veut, la
reconnaissance, par l’arrêt de
167a , d’ un droit de pacage dans les
forêts de l’Etat, est la preuve la plus forte, la plus convaincante, que ces
mêmes forêts n’avaient pas été cédées au prince par l ’acte d ’échange de
1G61, ou bien il faut dire que les agents du prince ainsi que les m agis
trats qui onl pris part à cet arrêt, étaient les gens du monde les plus
ineptes et les plus ignorants.
L ’arrêt de iGSBest encore plus clair que celui de 167:2. On y ht un
effet que par le règlement de 1672 011 a abandonné au [»rince certains
taillis qui 11e devaient pas lui appartenir, soit parce qu ’ ils sont en lutaie,
soit parce qu'ilb *ont enclavés dans le corps des buis et futaies de S . M . Ainsi
donc, en 1G88, S. .M. avait dans le bourbonnais, des bois et futaies qui
lui appartenaient, m algré l’acte d ’échange de IGGI ! Nous dirons à no
tre lour : K st-ce clair? Ainsi, en
IG72,
le commissaire T u b œ u fv o u s avait
fait la délivrance des taillis auxquels vous pouviez [avoir droit; mais ce
commissaire était allé trop lo in , il avait été beaucoup trop complaisant;
il vous avait attribué des bois qui étaient enclavés dans les bois de Sa
�( H
)
Majesté ; on vous enlève ces bois qui ne pouvaient pas vous appartenir ,
parce qu’ils étaient frappés d’inaliénabilité ; on vous attribue trentetrois petites forêts dont vous pourrez disposer, toutefois après que le ro*
aura fait couper tous les arbres futaies qui s’y trouvent,; car en 1G88, on
1672 , on veut se renfermer scrupuleusement
dans les dispositions de l’acte d ’échange de 1661 , et le prince renonce
n’est pas aussi léger qu ’en
à jamais, pour îui et ses successeurs, à rien demander pour le surplus des
autres bois qui lui avaient été attribués en 1672 ! Que peut-on conclure
de cet arrêt, sinon qu’ il prouve clairement que le.'roi possédait dans le
B o u r b o n n a is des forêts royales non cédées au prince, su r lesquelles ce
dernier 11e pouvait prétendre aucun droit, qui étaient réservées à
Couronne?
Q u ’on rapproche maintenant cet arrêt, qui parle en termes exprès des
bois ou futaies de Sa Majesté, de l’arrêt de 1672 qui accorde un droit de
pacage sur les forêts du roi, et de l’édit de 1
566 qui
prohibe les aliéna
tions des grandes forêts : tout se lie, tout s’e n ch a în e , tout est consé
quent. Le roi, par l’acte d ’échange de 1661 a cédé au prince de Condé
tout ce qui était aliénable d’après la législation, et se réserve tacitem ent,
par la seule iorce de la loi, les grandes forêts inaliénables. L’arrêt de
1672 concède au prince, à lort ou à raison, un droit de pacage sur les
forêts réservées;l’arrêt de 1688 consacre l’existence de ces forêts réser
vées au roi, et réprime l’extension que le commissaire T u b œ u fa v a it don
née aux droits du prince ;tout est clairement expliqué.
Q u ’on adm ette, au contraire, le système de la demande. L ’acte de
1661 accorde au prince tout ce qui constitue l’ancien duché de Bour
bonnais sans exception , en y comprenant les grandes forêts, malgré l’é
dit p ro h ib itif de 1
566 ; puis,
en 1 6 7 a, intervint un arrêt qui concède nu
prince un droit de pacage sur les mêmes forêts dont il a acquis la pro
priété ; ensuite, en 1688, nouvel arrêt qui enlève au prince certains
taillis comme étant enclavés dans les forêts du roi, quoique ces forêts
soient la propriété du prince! Quel gâchis! quelle énigme à deviner !
quelle sagacité pour en découvrir le sens!
On se récrie b e a u c o u p sur ces mots : Forêts royales, forets du roi. On dit
que ces noms étaient donnés indistinctement à toutes les forêts du Bour
bonnais. Celle assertion n’est pas exacte ; sans doute, avant Pacte d’é
�change de 1 6 6 1, toutes les forêts du Bourbonnais étaient forêts royales ,
puisqu’elles appartenaient toutes au roi ; mais à partir de cet acte , on
ne connaissait plus comme forêts royales que celles qui étaient restées
au domaine, et n’étaient pas devenues propriétés du prince de Condé.
Ainsi on disait la forêt royale de Tronçais, de Dreuille, de Lespinasse ,
de G ros-Bois, même quand ces forêts avaient été coupées ; tandis q u ’on
ne disait pas la forêt royale de Champeaux, de Marseauguet, deR igoulet,
etc., quoique ces forêts continssent des futaies, parce que ces forêts
a v a i e n t été cédées au prince, et étaient sorties du domaine de la C o u
ronne. Cette distinction n’est donc pas aussi futile qu’on a l’air de le
croire.
La demande fonde la plus grande partie de ses raisonnements sur une
équivoque. Le prince , d it-o n , a toujours jo u i, depuis 1GG1 ju sq u ’en
i
830 ,
sauf les années passées dans l’émigration, des pacages de l a f o r ê t
de Tronçais ; or, que demande aujourd’hui Son A l t e s s e ? C e s mêmes pa
c a g e s dont la p o s s e s s i o n ne lui a j a m a i s été contestée, qu’on n’ose pas
nier aujourd’h ui, et qui est justifiée par une foule d ’actes qu’on a rap
portés devant la C ou r.
D ’abord, l’administration ne convient pas que le prince ait constam
ment joui sans trouble de ce droit de pacage; sans doute, il en a joui
plusieurs fois, «à plusieurs reprises, soit par l ’ignorance, la négligence ou
la connivence des ofïiciers de l’ Etat; mais en admettant comme vrai ce
qui est contesté, voyons de quelle manière il jouissait, et si celte jo uis
sance a pu lui conférer un titre pour réclamer la propriété de 898 h ec
tares de la forêt de Tronçais.
Remarquons d’abord qu ’ il s’agit en ce moment d’une demande en dé
sistement, non pas de laforêt de Tronçais toute entière; le prince 11eré
clame rien de toute la partie boisée; il ne réclame ni la partie couverte
en futaie, ni les taillis nombreux provenant des coupes successives faites
depuis cinquante-trois ans, quoique, dans son système,lotit lui appar
5 8 hectares de terrain non
tienne légitimement, mais seulement q
boise,
faisant partie du périmètre de la forêt; et pour fonder celte demande, il
dit : L'administration reconnaît, et des actes nombreux le constatent ,
que j ’ai, depuis iGG 1,011 du moins depuis 1G72 ju s q u ’en 179J, et de
5
puis 18 r ju s q u ’en t
83o, jo u i du
droit de paciigusur ces
5 (j8 hectares
�( <3 /
de terrain ; on ne peut donc pas me contester la propriété de ce terrain,
puisque j ’ai en ma faveur uneaussi longue possession.
Qui n e croirait d’aprés cela que Je droit de pacage concédé au prince
par l’arrêt de 1673 et exercé par lui depuis celte époque, soit constam
ment, comme il le soutient, soit par intervalles, comme le prétend l’a d
ministration, s’appliquait spécialement au terrain revendiqué ? Que c’é
tait précisément sur les vides de la forêt que ce pacage avait lieu, et que
c’était le produit de ces mêmes vides qui était versé dans la caisse du
prince? Eh bien! cela n’est pas. On a voulu abuser la Cour et les lecteurs
au moyen de ces mots '.Droits de pacage exercés et pacages revendiqués. La
vérité est que les
598 hectares qu ’on réclame
aujourd’hui, étaient pres-
qu ’étrangers au droit de pacage perçu, ou du moins y entraient pour
une part si faible, qu’ils n’étaient d’aucune considération dans la ferme
qu’on en faisait annuellement.
Les droits de pâturages, panages, paisson, glandée et pêche compris
dans l’arrêt de 1C72, se composaient
1° des droits
de pâturage, pacage
et paisson, expressions synonitnes qui s’appliquaient aux bêtes a u mailles, ou vaches. C e droit ordinairement n’était pas affermé; il n’était
exercé que parles habitants des dix communes usagères qui avaient des
titres en vertu desquels ils pouvaient envoyer chaqueannée leurs bestiaux
pacager dans la forêt de Tronçais, moyennant une redevance annuelle
de cinq sols par tête ; 2° des droits de panage et glandée, consistant à
envoyer un certain nombre de porcs
dans la forêt de Tronçais, lors -
qu’il y avait du gland ou de la faine en suffisante quantité. Les d i x com
munes usagères exerçaient ce droit, aussi moyennant une redevance de
cinq sols par tête; mais lorsque l’année était bonne et que la récolte de
glands e x c é d a i t les besoins des usagers, on affermait le surplus à un a d
judicataire ; 3° enfin du droit de pêche dans les ruisseaux, creux ou ré
servoirs qui pouvaient se trouver dans la forêt de Ironçais. Les terrains
réclamés par S. A.
H. ne contiennent
ni étangs, ni ruisseaux, ni réser
voirs ; cc droit de pêche est donc tout à fait étranger à la demande. Ces
mêmes terrains 11e contiennent pas un arbre, dyne ils ne produisent pas de
g la n d s; donc encore les droits de panajje et glandée SUllt ¿gfllcniCIli
étrangers
ù la demande. L e prince ne peut donc fonder sa demande
que sur /e droit de
pâturage proprement dit ; or, ce droit
de
pâturage
�( 14 )
restreint aux seuls bestiaux des usagers (sauf i’abus que pouvaient en
faire quelquelois les agents de l’administration), était d’une faible impor
tance , car les usagers n’étaient pas nombreux. E h bien ! ce droit, tout
modique qu’il était, ne s’exerçait pas spécialement sur les vides de la
forêt, mais bien en niasse sur la forêt tout entière , sur les futaies sur
les tallis, sur tout ce qui était déclaré défensable. Si les usagers n’avaient
pu envoyer leurs bestiaux que sur les vides, ils n ’auraient pas soutenu de
longs procès pour maintenir leurs droits, car ces vides épars dans la fo
rêt, couverts de mauvaises bruyères et d’ajoncs, ne produisaient même
pas d ’herbe propre à la nourriture des animaux. C’était dans les futaies t
dans les taillis, qu’on conduisait les bestiaux des usagers, dans
ce
qu ’on appelait les jeunes ventes, aussitôt que l’administration e n avait
proclamé la défensabilité. Jamais les vides de la forêt n’ont donné lieu à
une adjudication spéciale ; jumais ils nesont entrés en c o n s i d é r a t i o n daus
le prix de l’adjudication ; jamais iis n’ont été r e g a r d é s comme des pâtu
ra ges, et d a n s les t i t r e s d e s c o m m u n e s usngères, il est constamment ex
pliqué que les habitants de ces communes ont le d r o i t d’euvoyer pacager
leurs best,aux daus les bois iulaies et taillis de la forêt de 'fronçais , è s lieux défensables, sans faireaucune mention des vides.
Ainsi, on peut répondre avec avantage aux prétentions du prince :
Vous revendiquez ces
598 hectares
parce que l’arrêt de
1G72 vous
a c
corde ou vous reconnaît les droits de pâturage, panage, paisson, glandée
et pêche. Mais ce droit de pèche sur lequel vous vous appuyez, vous a u
torisait donc à réclamer tous les cours d’eau, étangs, creux ou réser
voirs qui se trouvaient dans la forêt de Tronçnis? Pourquoi n'en récla
m ez-vou s pas ? Mais ce droit de panage "et glandéc que vous dites avoir
exercé pendant cent cinquante ans sur toute la partie boisée de la forêt
de 'fronçais, vous autorisait donc à revendiquer toutes les parties de
cette forêt qui ont été couvertes de bois, au fur et A mesure que le bois
est coupé ? Comment donc ne réclamez-vous aucune parcelle du terrain
(pii produisait le gland ou la faine? Le droit de pâturage a dù être exercé
par vous de la même manière sur la totalité de la forêt de 'fronçais , il
vous autorisait donc à réclamer la totalité tic celte forêt ! Pourquoi donc
vous restreignez-vous aujourd'hui à
5()8 hectares, quand vous pourri* z
en demander plus de*G ,ooo? Quelle raison pouvez-vous alléguer pour
�( .5 ;
avoir possédé ces
5g 8 hectares plutôt que tout le reste de la forêt ? Com
ment se fait-il que votre prétendue possession s’applique spécialement
et uniquement à ces
5g 8 hectares,
lorsque vous dites avoir possédé le
tout de la même manière, par les mêmes voies, en vertu des mêmes
actes ? Citez-nous un seul acte de possession spéciale sur le terrain que
vous revendiquez; rapportez un seul écrit, un seul fait duquel il puisse
résulter que les vides de la forêt aient été regardés comme ne faisant pas
un seul corps, un tout indivisible avec la forêt elle-m êm e, et alors vous
pourrez faire comprendre comment vous aurez pu acquérir des droits
particuliers sur ces vides, quand vous n’en avez pas sur le reste. Ju squ elà votre prétention est insoutenable.
On ne pouvait, dit la demande, jouir de ces vides qu ’au moyen du pa
cage, et en recevant chaque année le prix de l’adjudication , le prince
exerçait tous les actes de' possession) possibles. Ce raisonnement ne dé
truit nullement l’objection que nous venons de faire, que ces terrains
vides n’ont jamais fait l’objet d’une adjudication séparée, e tq u e leprince
n’en a joui que comme il jouissait du surplus de la forêt qu'il ne reven
dique pas ; mais il manque lu i-m êm e de solidité. Si l ’intervention des
officiers de la maîtrise dans l’adjudication de la glandée se justifiait par
la nécessité de veiller à ce que les bois réservés au roi fussent gardés
avec soin , cette intervention était tout a fait inutile en ce qui concer
nait ces vides ; là, il n’y avait pas d’arbres à conserver, pas de repeuple
ment «à surveiller, puisque le sol lui-même appartenait au prince. Rien
n’cmpêchait que ce dernier n’en jo u it directement, par ses agents seuls,
qu'il n’en lit faire une adjudication séparée, qu’ il n’en usât à sa volonté,
comme il faisait des (erres vaines et vagues en grande quantité dans la
province, et que ses agen's affermaient, amodiaient ou aliénaient ; le
prince en aurait retiré un produit bien autre que celui q u ’ il en retirait
lorsque ces vides se trouvaient confoudus avec la totalité de la forêt de
Tronçais; et scs agents avaientsi peu l’idée que leur maître e û t q u d q u e s
droits de propriété sur ces terrains, que pendant un espace de cent cin
quante ans, 011 ne peut pas citer un seul fait de possession qui s’applique
à ces vides.
On a dit, dans l’intérêt du dom aine, que le a
3 mars 1830 ,
le baron
de Surval, agent du prince de Coudé, avait élevé, pour la première (ois ,
�(
‘0
)
la prétention que la forêt de Tronçais avait été comprise dans l’acte d’é
change de 16 6 1; et là dessus les agents du prince se récrient et incul
pent la bonne foi de l’Etat, en soutenant que dès 1 6 6 1 , le prince a tou
jours joui des pacages, panages, paissons et glandées dans la forêt de
Tronçais; c'est ainsi q u ’on cherche toujours à confondre le pacage avec
le droit de propriété, lorsque ces deux
droits sont évidemment tout à
fait distincts et séparés.
Ledom aine a donc été bien fondé à soutenir :
i® Que le contrat d’échange de 1661 ne comprenait pas les forêts
royales d’ une certaine importance ; il n’y avait pas besoin pour cela que le
contrat contint des réserves expresses ; les grandes forêtsétaienc frappées
d ’ inaliénabilité aux termes de l’édit de 1
566, la
réserve était donc de
plein droit; il aurait fallu, pour q u ’elles fussent comprises dans l’échan ge,
un acte formel, émané de l’autorité royale, agissant c o m m e souveraine ,
sous la forme d’o rd o n n a n ce , édit ou d é c l a r a t i o n , revêtu de la signature
du roi, p o r t a n t dérogation textuelle aux lois existantes ; un tel acte
aurait pu avoir effet ju sq u ’à révocation, mais il n’en a point étéainsi.
Le contrat de 1661 n’est qu’ un simple contrat civil, passé par le roi
comme administrateur des biens du domaine , soumis à toutes les e xi
gences de la législation alors existante, et on ne peut pas, on ne doit pas
supposer que cet acte fût contraire à la loi.
20 Que les arrêts de 1672 et 1688 font connaître et expliquent le con
trat d’échange, et la propriété de forêts réservées au roi.
Toutes les arguties de la demande ne pourront détruire ce fait que
l’arrêt de 1672, en accordant au prince le droit de pacage dans toute l’é
tendue (1rs forêts du Bourbonnais, a reconnu par là qu'il y avait des fo
rêts qui n’avaient pas été cédées au prince par l’acte d’échange de 16 6 1,
et q u ’il n’est pas permis à quiconque a du bousens de supposer q u ’on lui
accordât un droit de pacage sur des terrains qui étaient sa pleine propriété,
en vertu d’un titre antérieur. Que si ou lui accorde par le même arrêt le
droit d’exploiter les taillis dans toutes les forêts dépendant du d u c h é , ce
droit est en même temps restreint par ces mots : Suivant l'clat qui en a vie
dressé ; il est constant q u ’aucune des forêts royales ne se trouvait com
prise dans cet état ; le prince est forcé de reconnaître lui-même, q u ’il n’a
jamais exercé ce droit, quoique de nombreuses coupes aient été faites
�( 1? )
V f
'
dans la forêt de Tronçais,soit à l’époque même où cet arrêt a été rendu,
soit de 1779 à 1792, époque de son émigration, soit depuis son retour
de l’émigration. Ce même arrêt restreint formellement son droit sur ces
bois taillis, à ceux compris dans l’état dressé par le sieur T ubœ u f,
q u i
ne
péchai^ pas par trop de rigueur contre Son Altesse Sérénissime ; q u el’arrêt de 1688, en restreignant encore les effets de l ’arrêt de 16 7 2 , constate
q u e
le
sieur
T u b œ u f a eu tort d’accorder au prince des bois enclavés
dans les bois de S. M. ; que le roi possédait dans le Bourbonnais d’autres
bois que ceux aliénés, et déclare que le prince, n i ses successeurs, ne
pourront
rien
prétendre dans ces bois : o r, si l’arrêt de 1688 enlève au
prince et à ses successeurs toute prétention quelconque sur des bois qui
cependant avaient été reconnus en 1672, comme étant sa propriété , à
plus forte raison d o it-on lui refuser toute prétention quelconque sur des
bois qui ne lui avaient jamais été attribués.
3° Que jamais la forêt de Tronçais n'a fait partie de cetéchange, mais,
au contraire, est toujours demeurée propriété exclusive de la Couronne.
Cela a été démontré de la manière la plus évidente par ce qui a été dit
5
plus h a u t, par l’édit de i GG, par les arrêts de 1G72 et de
1688 , et par
tous les actes qui ont suivi l’acte d’échange.
h° Que les vides existans dans cette forêt n’ont jamais cessé d ’en faire
partie.
Celte proposition n ’avait élé discutée dans la première réplique du
domaine, que parce que, lors des premières plaidoieries devant la Cour
royale, l’avocat du prince, en désespoir de cause, revendiquait ces vides
comme devant être compris sous la dénomination générale de terres
vaines et vagues, et comme tels, donnés au prince, aux termes de l’acte
de 1G61. Il devenait alors important de prouver que ces vides n’étaient
pas des terres vaines et vagues, dans le sens ordinaire de ces mois, mais
qu’ ils étaient parties intégrantes de la forêt royale, compris dansson pé
rimètre, et réputés forêt tout aussi bien que les parlies boisées: Aujour
d’ hui qu’on n’ose plus reproduire les argumentations grammaticales de
l'audience, il devient inutile de discuter un fait qui n ’est pas contesté.
11 ne faut cependant pas conclure d e l à que l’administration recon
naisse que les vides qui existent en ce moment dans la forêt de Tronçais,
soient les mêmes que ceux qui existaient, soit en iGG i, à l’époque du
3
s-
�contrat d’échange, soit en 1 6 7 1 , à l ’ époque de la réformation ; c’est là un
point de fait fort douteu x, sur lequel il n’appartient à personne d e d o n ner une réponse exacte. La iorêt de Tronçais a dû é p ro u ve r plusieurs
changements dans une période de cent quatre-vingts ans. Des parties
alors boisées ont pu être réduites à l’état de vides,
par suite de l’exploi
tation des arbres et de la négligenee des agents forestiers; des vides ont
pu être semés et repeuplés, com m e, en effet, il y a eu des semis ordon
nés et exécutés à différentes époques, et aucune mémoire d ’homme ne
peut rem onter assezhaut pour déposer vérité sur ce fait.
Le procès-
verbal de 1671 signale des vides n o m breu x, sans indiquer leur conte
nance, ni leur situation, et ce point restera toujours dans l’obscurité.
5° Que le p r in ce d e C o n d é n’a ja m a is exercé aucuneaction su rc es vides.
Cette proposition est encore démontrée par ce qui a été dit plus haut
Quel est le seul acte de possession exercé par le prince de Coudé s u r ces
vides? Les a -t-il affermés, cultivés, donnés à bail ou à cens ? les a - t - i l
r e n f e r m é s de fossés, changés de cu lture? Ses gardes ou ses agents ont-
ils dressé un seul procès-verbal contre les usu rpateu rs, à quelque titre
que ce s o it ? Ont-ils exercé un seul acte de poursuite? IN'ou, non, mille
fois non. Seulement, Son Altesse aurait reçu pendant un laps de temps
plus ou moins considérable, le produit du droit de pacage. Mais com m e
on l’a dit, c e n’étaient pas les vides de la forêt qui étaient affermés , c’é
tait la forêt toute entière, c’étaient le pâturage, 2a glandée et la pêche ;
sur la somme de quatre à cinq mille francs que produisaient annuelle
ment ces droits, la glandée seule entrait pour les deux tiers , et dans
Je tiers restant, les vides de la forêt ne figuraient pas même pour un
vingtième. Si le prince de Coudé ne peut retirer aucun avantage de cette
jouissance en ce qui concerne le sol planté en futaies et en taillis, co m
ment peut-il s’en prévaloir seulement pour les vides? Comment la même
cause peut-elle produire des effets différents ? Voilà ce que les agents du
prince n’ont pas pu encore nous expliquer.
0" Que
les agents du prince n’ont pas osé soutenir les conséquences de
leurs raisonnements.
Il n ’y a ici ni inexactitude ni faux raisonnements. Les écritures signi
fiées par les agents du prince font foi q u ’en première instance, ceux-ri
prétendaient que le sol même des forêts royales était engagé sous la
�seule réserve des arbres existants, et qu’à m esurequ’ un arbre futaieétait
coupé, le prince pouvait s’emparer du sol d’où on l’avait enlevé, e t , il
faut bien en convenir, le rédacteur de cette écriture était conséquent
avec l’esprit de la demande; si le prince a un droit à une partie q u e l
conque de la forêt de Tronçais, îl a incontestablement droit à la totalité,
à mesure que les arbres futaies seront coupés ; l’acte d’échangede 1661
est trop clair sur ce point pour prêter à l’équivoque. Mais devant le tri
bunal de Montluçon, l’avocat du prince pressentant l ’impossibilité où il
était de soutenir un tel système, abandonna toute prétention au terrain
couvert de bois futaie, et, plus lard, devant la Cour royale, demanda
acte de ce que le prince renonçait à toute réclamation sur la forêt de
Tronçais, soit futaies, soit taillis ; déclaration irrégulière, sans aucune
valeur, puisqu’elle élaif faite au nom d’ un prince mineur, sans aucune
autorisation de son conseil d’administration.
Le domaine a donc eu raison de dire que les agents du prince ont re
culé eux—mêmes devant les conséquences de leur système et les ont
amoindries à chaque phase du procès.
Dans les documents cilés par les agents du prince et attribués aux
84
agents de l’admininistralion des eaux et forêts en i i , 18 1
5 et
1816 ,
il n ’est question que du droit de pacage ; nulle part on ne reconnaît au
prince un droit de propriété, sur quelque partie que ce soit des forêts
royales, pas plus sur les vides que sur les parties boisées. La lettre de
MM. liaison, Marcotte et Chauvet, du
2 G janvier
1822 , n'est relative
qu'aux droits de pacage, et on peul remarquer en passant que ces mes
sieurs parlent de quatre bois qu ’ ils apppellcnt domaniaux et qu’ils disent
situés dans l’arrondissement deiJannat, tandis que deux de ces bois, les
brosses de la Louere, et les brosses de Vinas, appartenaient au prince e t
étaient situés dans le canton d’IIérisson, arrondissement de Montluçon.
( ’.’est par erreur qu’on dit que les anciens seigneurs de Bourbon avaient
concédé, en 1
375, des droits d ’usag« aux habitants de dix communes li
mitrophes ; c’est bien de 137», à la vérité, (pie datent les premières let
tres patentes accordées à ces communes par Agnès de Bourbon ; mais ces
lettres constatent que ce droit leur appartient et est exercé depuis long
temps en vertu d'anciens litres qui ne sont pas rappelés ; mais la teneur
des lettres de 1 375 constate que ce ne fut pas une concession faite pnr les
�( 20 )
ducs de Bourbon, mais au contraire, la reconnaissance d’un droit légi
time, exercé, non pas sur les vides de la forêt, mais sur les futaies et
taillis, car des vides il n’en est pas dit un mot.
Le fait rapporté (page 12 de la première répliqué), est justifié par le
rapport d’ une déclaration faite le 27 pluviôse an 11, devant le directoire
du district de Cérilly, par les nommés Bouchicot, qu’ ils sont détenteurs ,
à titre d’engagement, des anciens bâtiments de la châtellenie de la
Bruyère-l’Aubépine, suivant une adjudication à eux faite au bureau des
finances deMoulins, le 28 avril 1786. Cet acte sert à prouver que si l’acte
de 1661 comprenait la châtellenie de la üruyère-l’ Aubépine, il y avait
néanmoins dans cette châtellenie des objets dont le prince de Condé ne
jouissait pas, et qui étaient restés la propriété du roi ; comme ces sortes
d'adjudications étaient précédées de longues formalités, d’affiches et de
publications, 011 ne peut pas supposer que les agents du p r i n c e qui ré
sidaient sur les lieux, eussent laissé vendre, au profit du roi, ce qui ap
partenait à leur maître , quelque modique qu ’en fut la valeur.
On repousse l’argument tiré de la production du procès-verbal d e r é formation de 1 6 7 1, et cependant cet argument nous parait puissant. L ’ar
ticle
3 , titre 37, de
l’ordonnance de
1G69 ,
enjoignait aux grands maî
tres, en faisant leurs visites, de faire mention de toutes les places vides
existantes dans les forêts ou aux reins d’icelles ; de désigner celles qui au
raient été aliénées, engagées, ou données à cens, et celles qui, étant li
bres encore, pourraient être repeuplées*
Ce fut en conformité de cette ordonnance qu’eut lieu la réformalion
générale de la forêt de Trouvais. Cette opération fut annoncée par des
affiches, des publications dans toutes les paroisses riveraines; elle dura
plus de deux ans ; le commissaire réformateur Leferon procéda à une
visite scrupuleuse ; il signala de nombreuses anticipations
commises
par les riverains, et l’existence de vides dans les différents cantons ; mais
il ne dit pas (¡tic ces vides avaient été engagés ou aliénés ; au contraire ,
il les signale tous, com m e faisant partie du sol forestier, devant être re
piqués eu glands , ce qui constituait un (rouble aux prétentions du
prince. Ce procès-verbal a élé lu, enregistré et transcrit dans les maî
trises de Moulins, Cérilly et Hérisson, sansaucunc opposition de la pari du
desagen lsdu prince. Depuis, el en i8u8, il a élé décidé par la Cour royale
�( 21 )
de Riom que ce procès-verbal avait force deloi, parce qu’il avait été revêtu
de t o u t e s »es formalités alors nécessaires, et qu’il faisait foi en justice.
Tous ceux qui possédaient les terrains déclarés anticipés pau le com m is
saire Leferon, ont été condamnés à se désister de ces terrains, par le
seul m o tif q u ’ils avaient gardé le silence lors des opérations. Par la
même raison, le prince ne peut pas réclamer aujourd’hui, comme lui
appartenant, des vides qui ont été reconnus, en 1 6 7 1 , n’avoir été ni alié
nés, ni engagés, et être la propriété de l’Elat. On ne peut pas décider ,
en
faveur du prince, autrement qu’on n’a décidé contre les propriétaires
riverain s,
puisque le titre invoqué est le m ê m e; la position des rive
rains était même plus fa vo ra b le , car ils possédaient, e u x , ils possé
daient réellement, comme propriétaires; ils n’avaient jamais été trou
blés , jamais poursuivis, tandis que le prince ne peut invoquer aucun
fait de possession réelle sur les objets qu’ il revendique.
Vainement vient-on dire que le prince n e possédant que précaire
ment, n’avait aucun intérêt à contredire les opérations du réformateur.
C elui-ci ayant reçu mission de constater quelles étaient les parties des
forêts aliénées ou engagées , ses décisions, non contredites dans le délai
v ou lu ,
étaient irrévocables. Ainsi,
lors même qu’en iGGr, on aurait
compris la forêt de Iron çais en tout ou en partie dans l’engagement du
prince de Condé, il suffirait que le procès-verbal de 1671 constatât que
la forêt de Tronçais était libre, et qu’aucune de ses parties n’avait été e n
gagée, pour que le silence gardé par le prince, lors de l’enregistrement
de ce procès-verbal, pût lui être opposé en ce moment comme une fin
de non-rccevoir.
C ’est encore à juste titre que le domaine a fait valoir la concession
faite à M.
N icolas
Hambourg en 1788, comme une preuve que le prince
de Condé ne se croyait aucun droit sur la forêt de Tronçais, et on disait:
I.e prince de Condé se prétend propriétaire de tous les vides de la forêt
île Tronçais ; il articule qu ’ il n’a cessé d ’en jo uir sans aucun trouble , et
cependant, en 1 T88, un arrêt du conseil concède à.M. H ambourg quinze
arpents pour y construire des forges, et lui accorde la jouissance p en
dant trente ans, de tous
les
vides qui se trouvent dans les trois triages
de la l.andc-lilanchc, de la Bouteille et de Montaloyer, pour en tirer
tout le produit qu’ il pourra , à la charge, par le concessionnaire, deles
�(
22
)
ensemencer en glands, cinq ans avant l’expiration de sa jouissance, et
deles rendre en nature de bois.
S’il y a au monde un acte public de propriété, c’est sans doute c e lu ilà ; on ne pouvait pas apporter un plus grand trouble à la jouissance du
prince, puisqu’on le dépouillait ainsi , sans indemnité, de ce qu’il pré
tendait lui appartenir dans ces trois cantons ; sans le consulter et pour
toujours , ces vides, ainsi aliénés au profit de M. Hambourg, étaient en
levés à toujours au prince , puisqu’apiès les trente ans de jouissance
concédés à M. Ram bourg, ils devaient être boisés et retourner à l’Etat ;
et cependant il garde le silence. Les habitants des communes usagères ,
lésés dans leurs droits d’ usage, bien moins encore que le prince de
Conde, ne suivent pas son exem ple, ils réclament ; ils adressent pétitions
sur pétitions aux ministres, au conseil d ’Etat, à l ’assembléenationale;ils
exposent leurs droits, produisent leurs titres, invoquent l e u r jouissance
non interrompue pendant cinq siècles au moins, et ne disent pas un
mot du prince de Condé, qui ne figure en aucune manière dans le p ro
cès. Mais si le prince eût été réellement engagiste de la forêt de Troncáis^
s’ il eût eu un titre légal à faire valoir, ne se serait-il pas empressé de se
réunir aux réclamations de ces dix communes? N’eût-il pas soutenu ses
intérêts personnels en même temps que les leurs ? Les habitants usagers
qui avaient alors à lutter contre un homme habile et fortement protégé ,
n’auraient-ils pas sollicité avec ardeur Son Altesse de se joindre à e u x ,
s’ ils lui avaient reconnu un droit quelconque snr la forêt de 'fronçais ?
!S’auraient-ils pas vivement recherché le patronage d’ un prince aussi
haut placé, et dont l’influence pouvait si bien contrebalancer les pro
tections de M. Ham bourg? Eh b i e n ! non ; les habitants des dix co m
munes n’ont pas même l’idée que ce prince soit engagiste cl que s c s in (érêls soient lésés, ils ne prononcent pas même son nom dans leurs pé
titions, et les agents zélés (lu prince ne forment aucune opposition , lais—
suit M, H am bourgse mettre en possession de ce qui lui a été concédéLes moyens opposés par les agents du p rin c e, à cette concession,
sont vraiment curieux. On avait trouvé commode de nier la concession,
eu première instance; l’avocat du domaine n ’avait pas cette pièce dans
mm )
dossier ; aussi, quoique ce fait fût de notoriété publique, le tribunal
de Montluçon ne put le prendre en considération dans les motifs du j u
�(
=3
)
gement. Devant la c o u r , l’arrêt de 1788 est rapporté : on ne peut plus,
nier , que d it-o n ?
n Malgré l’engagement fait au prince de Condé , du duché de B o u r « bonnais , l’Etat n’en conservait pas moins la faculté de vendre ou aliéa ner tout ou partie de ce d u c h é , en remboursant au prince tout ou
« partie de sa finance d ’e n g a g e m e n t, et c’est précisément ce qui au« r a i t l i e u , si d éjà, à celte é p o q u e , les préludes de la révolution ne
« s’élaient fait sentir, ce qui devait détourner l’attention du prince qui
«• se trouvait appelée sur des objets d ’une importance bien plus grande
« (p a ge 26 de la réponse. ) »
En supposant l’exactitude de ce p rincip e, toujours fallait-il que le
remboursement précédât ou accompagnât la dépossession ; il fallait o b
server certaines formalités , faire connaître au prince sa dépossession ,
faire procéder à une estimation des objets dont on le dépouillait, afin de
connaître qnelle était la somme qui lui était due proportionnellement
dans la finance qu’il avait payée. O r , trouve-t-on rien de semblable
dans la concession Ratnbourg ? le prince a - t - i l été p r é v e n u ? y a - t - i l eu
des pourparlers entre lui et M. Hambourg ? ou entre lui et les agents du
domaine? On n’en trouve nulle part aucune trace. L ’arrêt du conseil qui
prononce cette concession , est du 7 lévrier 1788 ; il a élé enregistré au
greffe de la maîtrise de Cérilly le i
5 avril s u iv a n t , et dès le premier mai
M. Hambourg campe dans la forêt de T ro n ça is, à la téle de cinq cents
o u vriers, bouleversant le terrain q u ’on venait de lui concéder, bâtis
sant, défrichant, fossoyant sans aucune autre opposition que de la part
des usagers qui bataillaient en vain, mais qui du moins , combattaient
de toutes leurs forces, en leur nom , sans parler du prince non plus que
si on ne l ’eût jamais connu.
Il est très facile, cinquante ans après l’é v én em en t, de parler d’ inten
tion , de dire (¡ne le prince de Condé aurait élé remboursé sans la révo
lution ; mais encore faudrait-il donner des preuves , des indices du moins
de ce qui se strait fait. S’il eût été question entre l’ Ktat et le prince de
Condé, d'arrangements, d’indemnité, de remboursement pour la concesM011 Hambourg, il auraitdù en rester des traces ; desoftVes,dcs demandes
ont du être faites de part et d’uutre. H apporte-t-on un seul document
qui y ait Irait? C ’est au mois de février 1788 que la concession a été
�faite , après soumission rendue publique; la mise en possession a eu lieu
im m édiatem ent, et ce n’est que dans le courant de 1 7 9 1 , plus de trois
ans a p rè s, que le prince a ém igré ; en supposant qu ’ il fût alors préocupé
des événements politiques, encore une fois , ce n’était pas lui qui s’o c c u
pait de ses intérêts financiers ; il payait des hommes d’affaires pour g é
rer,
administrer ses biens et non pour faire de la politique; et s’il eût
été iondé à réclamer une indemnité , il ne s’en serait que plus hâté de la
faire liqu ider, afin d’augm enter ses ressources pécuniaires au m o m e n t
de quitter la France.
Mais il est bien avéré,
bien constaté que trois années entières se sont
écoulées depuis la mise en possession de M. R a m b o u rg , et que le prince
de Condé n ’a élevé aucune contestation, rien d em andé, rien opposé ,
tandis que les dix communes usagères, fortes de leurs titres, disputaient
à outrance et dénonçaient au roi lui-même l’illégalité de la c o n c e s s i o n ,
exemple que les agents d u prince n ’ a u r a i e n t p a s manqué de suivre avec
bien p l u s d’a v a n ta g e , si le prince avait eu un litre ¡égal contre l’Elat.
C ’est en 1823
seulement que la concession faite à M. Ram bourg est
devenue définitive. O r , le prince de Condé a v a i t , dès 181/1, été remis
en possession de tous ses biens non vendus; il avait donc intérêt à s’o p
poser à cet arrangement qui
préjudiciait â ses droits ; il avait eu neuf
ans pour faire la recherche de ce dont il avait été dépouillé ; ses agents
avaient connaissance de la concession H am b o u rg ; un procès assez sé
rieux existait entre ce dernier et l’E ta t, devant le conseil d’état, et ce
pendant le prince a laissé consommer la transaction sansy former aucune
opposition ; et lorsqu'il s’est présenté pour réclamer sa part dans le
milliard de l'indem nité, il n’a rien réclamé pour les terrains cédés dé
finitivement à M. Hambourg.
« l.a concession faite à M. Hambourg est un des actes les plus scanda« leux qu’on ait pu se permettre en violation des lois, et il est assez.
« étonnant que l’Klat ose l’invoquer (p a g e a(» delà réponse. ) »
INVst-il pas vraiment extraordinaire d'entendre un pareil langage dans
la bouche des agents du prince? Quoi ! vous soutenez., et vous ave/, fait
plaider devant la cour que le roi Louis XIV a p u , dans un simple acte
notarié, violer facilement une loi positive, formelle, solennelle, que se»
prédécesseurs regardaient comme le palladium du d o m a in e , e n e n g a -
�( f r f ;
(
23 )
géant à perpétuité toutes les forêts royales du duché de Bourbonnais,
et vous osez soutenir quele roi Louis XVI n’a pas pu valablement concé^
d e r , par un arrêt du conseil d’E la t, sous sa présidence, une faible par
tie de la forêt de Tronçais , pour trente années se u lem e n t, à la charge
onéreuse d’y construire des forges , et de semer en glands des terrains
stériles! Quoi! lorsque l’acte d’échange de 16 6 x n’annonce en aucune
manière l’intention de déroger à l’édit de
1
566 ,
vous voulez bien que
cet édit soit foulé aux pieds; vous aviez érigé en principe, qu’en France
la volonté même tacite du roi suffisait pour paralyser les lois les plus
sacrées, et vous venez maintenant attaquer une concession formelle, faite
par le roi en son conseil, avec les formalités accoutumées, et vous criez :
« Le roi n’avait pas le droit d’agir ainsi ! » Vous renversez donc vous
même tout le système que vous avez élevé à si grands Irais ! Et remar
quez cependant la différence: dans le premier cas, Louis X I V aurait
engagé à perpétuité, ou du moins pour un temps illim ité, toutes les fo
rets royales du Bourbonnais , sans considération d’amélioration , sans
aucune garantie pour les inésus et dégradations , tandis que dans le se
cond cas, Louis X V I ne consentait qu’une ferme , un bail de trente a n s ,
sous la condition q u ’on construirait des forges et fourneaux qui demeu
reraient propriété de l’Etat , et qu’on ensemencerait en bois 200 h e c
tares environ qui ne produisaient rien. Dans le premier cas, on aliénait
le fonds lui-m êm e, ce qui était prohibé par l’édit de (
566 ; dans le se
co n d , il ne s’agissait que d’une coupe de bois qui était toujours dans
le domaine du roi
Ce n’est pas q u ’on veuille ici prendre la défense de la concession Ham
b o u r g , ni en soutenir la légalité ou l’opportunité ; on l’a c i t é e , non
comme une chose légale, mais comme un fait qui démontre le peu de
fondement de la demande de S. A. K. Seulem ent, M. Hambourg a pour
lui une concession formelle et non équivoque , appuyée d’ une possession
p u b liq u e , paisible et non interrompue depuis cinquante quatre ans , et
d’une loi postérieure qui tranche toutes difficultés , tandis que S. A. n’a
en sa fa veu r, ni titre, ni possession.
Qu’importe encore que l’arrêt du conseil du trois février 1778, qui
concède à un sieur Moniot la forêt de Gros-ltois, ait été rendu d’ une ma
nière aussi illégale que l’arrêt du 7 février 1788 ? Qu'importe fjue c»'sarrêis
�( 26 )
aient été contraires aux lois ou n o n ? C e n’est pas leur lé g a lité qui est en
question ici ; il ne s’agit pas de savoir si les concessionnaires ont ou non
dilapidé. Ces arrêts
ne sont rappelés que pour constater qu’à diffé
rentes époques , des concessions ont été faites de la part de l’ Etat dans
les forêts royales dont le prince se prétend aujourd’hui en g a giste , et
qu’à aucune de ces époques, le prince n’a élevé de plaintes; que jamais
¡1 ne s’est prétendu lésé dans ses droits , quoique ces concessions fussent
de nature à porter une atteinte grave à ces mêmes droits, s’ ils avaient
existé. Que ces concessions fussent illégales, c’était un motif d é p l u s
pour les agents du prince de s’opposer à leur exécution ; et si elles étaient
tellement en opposition avec la lé g isla tio n , avec les intérêts de l’ E t a t ,
croit-on que les réclamations d’un seigneur aussi puissant que l’était le
prince de C o n d é , lorsqu’ il aurait élevé la voix , à la fois dans l’intérêt
du domaine et dans son intérêt p rivé , n’auraient pas suffi pour em p ê
cher la consommation de ces actes? Si donc il a gardé le silence, c est
qu’ il a reconnu q u ’il n’avait ni droit ni qualité pour réclamer.
Le silence du prince s’est perpétué long-tem ps. A insi, en 1 8 2 8 ,1 e
géomètre Gadoin a été chargé d’arpenter et de limiter la forêt de
Tronçais. Ce géomètre a rédigé un long procès-verbal par lequel il a
signalé de nombreuses anticipations commises par les riverains sur le
sol forestier. Ces anticipations prétendues s'appliquent [jour la plupart à
des vides de la foré*, et embrassent en grande partie les terrains récla
més aujourd’ hui par S. A. Par suite de ce procès-verbal, des demandes en
désistement ont été dirigées au nom de l’Etat contre tous les détenteurs,
et le prince n’est point intervenu , n’a formé aucune demande : cepen
dant, dans le système du prince, c’était lui qui était plutôt intéressé «pie
l'Etat. Il s’agissait précisément des vides sur lesquels l’ Etat n’aurait eu
qu'un droit purement éventuel, incertain et très é lo ig n é , tandis que le
prince avait un intérêt a c t u e l, puisqu’ il se prétendait propriétaire de
ces mêmes vides. Plus de quinze procès ont été intentés par le dom aine,
el ont été suivis tant devant les tribunaux civils de Montluçon et Mou
lins, que devant la Cour royale, et l’administration du prince y est cons
tamment demeurée étrangère, parce qu ’à cette époque, cette administra
tion n’avait pas encore eu l’idée, survenue depuis, on 11e sait comment ,
que la forêt de Tronçais fût comprise dans l’acte d’échange de
i (>(m
�H
( *7 )
C'est bien vainement que la demande cherche à expliquer comment il
se fait qu’au lieu de réclamer la forêt de Tronçais tout entière, elle se
borne à en demander 598 hectares; ses raisonnements entortillés ne la
feront pas sortir de ce dilemme : ou la forêt de Tronçais toute enlière se
trouve comprise dans l’acte d’échange de 1661 , ou elle ne s’y trouve
dans aucune de ses parties ; elle n’a pas pu être scindée , et les parties
vides de celte forêt n'en ont jamais été séparées. Si la forêt vous a été
e n g a gé e , vous avez droit à la totalité de cette forêt, futaie quand elle
cessera de l’être , taillis au fur et à mesure qu’on aura coupé les arbres,
et terrains incultes ou non bo isés, et alors pourquoi ne demandez-vous
que
598 hectares?
En vertu de quel titre , en vertu de quel droit de
mandez-vous une partie de préférence à telle ou telle autre? Vous avez
dit à l’audience que vous ne réclamiez pas tous les vides; qu’il en exis
tait d'autres que vous abandonniez, parcequ’étant situés dans l’intérieur
de la f o r ê t , leur possession causerait quelques collisions avec l’adminis
tration des Eaux ei Forêts ; quelle est donc la base du choix que vous
faites entre les différents vides? Tâchez de vous expliquer plus claire
m ent, et de démontrer quel est le titre sur lequel vous vous appuyez.
Si la forêt de Tronçais n ’est pas comprise dans l’acte d’é ch an ge , comme
les vides de cette forêt ne font qu ’ un seul et même tout avec les parties
boisées, ont toujours été soumis aux mêmes lois, aux mêmes règle
ments, à la même administration , à la même surveillance, qu’ils n’ont
jamais été jouis à part, vous n ’avez 011 votre faveur ni titre, ni possession
pour les
598 hectares
que vous réclamez aujourd’hui.
Pour en terminer avec les objections faites par la demande , et ré
pondre d’ une manière définitive à ses imprimés , on lui dira :
i°. Que le domaine n’a rien avancé qui ne soit parfaitement exact , en
annonçant que la maison de Bourbon a concédé, â différentes époques ,
une grande partiedes terres vaines et vagues qui existaient dans reten
due du duché de Bourbonnais. Il existe, dans les archives départemen
tales, plus de six cents actes d’arrentements, amodiations, sous-engage
ments ou ventes consentis par les agents du prince , et on en a cité un
grand nombre dans la première réponse du domaine. Sans doute, il en
existait d ’autres dont les communes ou même de simples particuliers se
sont emparés , soit avant la révolution de 1789, par la négligence des
�f;-
(
)
agents du prince, soit depuis cette révolution, en vertu des lois de 1791
et 1 793 , mais l’Etat ne peut en être responsable , et le prince n’a aucune
action contre le domaine,
à raison de ces usurpations , car le domaine
lui a rendu tout ce qui se trouvait entre ses mains en 18142®. Que l'explication donnée à l’occasion d e là Lande-Martin , située
dans la forêt de G avray, est parfaitement vraie et résulte de la corresp on
dance de M. Gattier, alors préfet d e là Manche, avec M. l'inspecteur des
eaux et forêts. Ce dernier, dans son rapport à M. le préfet, déclare que
la Lande-Martin est tout à fait distincte et séparée de la forêt de G a
vray dont elle n’a jamais fait partie; que déjà , en 1666, celte lande
était jouie par les habitants de la commune deMesnilbonant qui l’avaient
séparée du bois par des fossés de toute ancienneté ( rapport de M. C h a millard, commissaire réformateur en 1666) ; or, si dès longtemps avant
1666, elle était séparée du sol forestier, si elle ne faisait pas p a r t i e de la
forêt de G avray, elle se trouvait comprise n é c e s s a i r e m e n t dans l’engage
ment consenti au comte de Toulouse en 1678 , puisque ce n’était alors
qu’un terrain vain et vague; il n ’y avait donc aucun motif pour refuser
d’en faire la délivrance à M. Déplacé, cessionnaire des terrains engagés
à la maison d’Orléans. C’est d’après ce rapport que M. le préfet de la
Manche a ordonné la délivrance de la Lande-Martin , qui
n’était
point soumise à l'administration forestière, et on ne peut trop s'éton
ner des allégations contraires conten ues, page 29 de la réponse du
prince, quand on sait q u ’un des agents les plus actifs du prince, celui-la
même auquel est confiée la direction du procès actuel, a été person
nellement en cause dans le procès relatif à la Lande-Martin, et doit avoir
entre ses mains toutes les pièces concernant ce procès. On ne peut en
faire aucune application aux vides de la forêt de 'Fronçais, qui ont tou
jours été reconnus comme faisant partie du sol forestier, et ont été , à
différentes reprises, soumis au repeuplement de la part de l’adminis
tration.
1
« °. Que le domaine a agi avec franchise, lorsqu’ il a dit que les terrains
réclames par le prince dans l’exploit introductif d'instance n’existaient
pas en totalité, tels qu'ils sont désignés dans la dem ande, et voici p ro
bablement ce qui a causé l’erreur des agents du prince. Le tableau pré
senté en 1819 par le directeur des domaines de l’ Allier, a dû nécessaire-
�(
29
)
meut être fautif et inexact , car, à cette époque, la forêt de Tronçais
n’était ni expertisée, ni cadastrée; on n’a pu s’appuyer que sur de vieux
documents qui n’avaient aucune authenticité, ou sur des plans partiels ,
exécutés en 1808, 1809, r 8 io , 1 8 1 2 ,1 8 1 4 et r 8 i6 , à l’occasion de procès
soutenus par l’administration forestière contre des riverains, plans tous
erronés, contradictoires entr’eux, et qu ’on a été obligé d’abandonner ;
l’état fourni par le conservateur, en i
83 i , a
dû être fait d’après le pro
cès-verbal du sieur Gadoin , géomètre chargé par l’administration d ’ar
penter la forêt de Tronçais en
1828; mais cette opération du sieur
Gadoin a donné lieu à de nombreuses contestations. Ce géomètre ,
faisant, ou croyant faire l’application du procès-verbal de 1671 , avait
compris dans le périmètre de la forêt, une grande quantité de terrains
possédés pnr les propriétaires riverains ; ceux-ci ont combattu les o p é
rations du géomètre Gadoin; plus de vingt procès ont eu lieu devant les
tribunaux de Montluçon et Moulins, et même devant la C o u r, et pres
que tous les propriétaires riverains ont gagné leurs procès contre l’Etat ;
en sorte que le plan Gadoin n’est pas plus exact aujourd’hui , en ce qui
concerne le périmètre de la forêt de T ro n çais, que ne l’étaient les plans
de ses prédécesseurs.
Toujours est-il q u e , depuis l’instance e n g a g é e , et même depuis les
plaidoiries qui ont eu lieu devant la c o u r , l’administration forestière a
l'ail procéder à des recherches desquelles il résulterait que toutes les
parcelles réclamées par le prince , à l’exception d'une très petite partie ,
seraient aujourd’ h u i, non enlre les mains du domaine, mais bien entre
les mains de dix à douze propriétaires riverains qui ont ou des litres an
ciens , ou des jugem ents et arrêts récens qui les maintiennent dans leur
propriété. Lors donc que le prince réussirait à faire consacrer un prin
cipe aussi monstrueux (pie celui qu'il in v o q u e , il lui serait impossible
d’obtenir l’abandon des
598
hectares qu’ il réclame , parce que le d o
maine 11e pourrait donner que ce dont il jouit lu i-m ê m e ; une opération
d ’experts sur les lieux deviendrait indispensable ; et en définitive, tout
en gagnant son procès e n d r o i t , Son Altesse se trouverait , eu f a it , n’a
voir plaidé (pie pour un principe. Il est vrai que ce principe une fois
admis , les conséquences pourraient en être immenses par la suite , et
c’est peut-être bien là le véritable , le seul but du procès actuel.
�4°. Que
malgré le délai de deux mois accordé par la Cour pour pro
duire de nouvelles pièces, délai qui s’est étendu à quatorze mois, aucune
production nouvelle n’a été faite de la part de la demande qui cependant
avait tout à prouver, tandis que l’état possesseur n’avait invoqué qu ’ une
seule pièce , le procès-verbal de réformation de 1 6 7 1, pièce qu ’il s’est
empressé de produire et qui, depuis un an, est à la disposition des con
seils et agents du prince. Il n’y a rien de plus commode pour se dispen
ser de rapporter des titres que de recourir à un incendie qui aurait eu
lieu, il y a cent trente ans ; avec cette excuse, bonne ou mauvaise, on a
réponse à tout.
5°. Qu’enfin, on
invoque à tort la générosité du prince de C ondé ( en
1661 ), en faisant remarquer qu’ il cédait au roi le duché d’A lbret pro
duisant un revenu de 49,828 francs, tandis que le duché de B o urbo n
nais ne produisait rien alors. Ce moyen de considération em ployé comme
servant de complément aux moyens j u d i c i a i r e s du prince, n’est pas
mieux fondé que tous les précédents, car l ’histoire nous apprend que
l’acte d’échange de 1661 fut im p osé au roi par le traité de paix de 1659 ,
sollicité par les Espagnols dans les rangs desquels le prince de Condé
portait les armes contre la France , et malgré l’opposition du cardinal
Mazarin ; et il est positivement dit dans l’acte d’échange lui-même, que
les revenus du duché de Bourbonnais étant en ce moment touchés par
Anne d’Autriche, mère de Louis X IV , à titre de d o u a ir e , le prince de
Condé, en attendant que ces revenus soient devenus libres, recevra an
nuellement de l'Etat une rente double du revenu dont il était privé. Qui
donc se montrait généreux dans ce contrat ?
30 décembre 1842
Moulin», imprimerie de P A DESROSIERS
�
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A name given to the resource
Factums Godemel
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aumale. 1842]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
séquestre
émigrés
forêts
destructions révolutionnaires
droits féodaux
Condé (Prince de)
eaux et forêts
exploitations forestières
glandée
droit de parcours
pacage
domanialité
possession des vides
élevage porcins
triages
forges
Description
An account of the resource
Titre complet : Dernière réponse à la demande formée contre l’État au nom de Son Altesse Royale Monseigneur le Duc d'Aumale, relativement aux vides de la forêt de Tronçais.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Typographie de P. A. Desrosiers (Moulins)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1842
1661-1842
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2927
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2924
BCU_Factums_G2925
BCU_Factums_G2926
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53613/BCU_Factums_G2927.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Bonnet-de-Tronçais (03221)
Tronçais (forêt de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Condé (Prince de)
destructions révolutionnaires
domanialité
droit de parcours
droits féodaux
eaux et forêts
élevage porcins
émigrés
exploitations forestières
forêts
forges
glandée
pacage
possession des vides
séquestre
triages
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53612/BCU_Factums_G2926.pdf
819a3fba3c0e9cc6ab32403335f4b9d8
PDF Text
Text
w
RÉPONSE
A LA RÉPLIQUE
COUR ROYALE
DE
RIO M
A FF A IR E
concernat
LA F O R Ê T D E T RO N ÇA I S
(Allier).
FAITE PAR LE DOMAINE DE L’ÉTAT,
REPRÉSENTÉ PAR M. LE PRÉFET DE L’ALLIER,
Aux observations
PRESENTEES
de S .
A.
R.
DANS L ’ I N T É R Ê T
Mgr l e
Duc
D ’A U M A L E ,
A L ’O C C A S IO N
De la R éclam ation de T errains vagues au x abords de
la F o re t Tronçais.
------ -»«=saT=-tegmrO==»---------
L'administration de S. A. R. monseigneur le duc d’Aumale, en
produisant un écrit intitulé : Observations pour S. A. R . monsei
gneur le duc d ’A um ale, à l ’occasion d ’une demande form ée en son
nom, contre l'administration des domaines et forêts, en restitution
de terrains vains et vagues aux abords de la forêt de Tronçais, n’a
eu pour but que d’éclairer la question pendante devant la cour de
Riom, et de donner des justifications tendantes à prouver que la
réclamation n’avait rien d’insolite, étant fondee autant sur le droit
que sur l’équité.
E lle a produit ses moyens, rendu compte des faits, et cité les ac
tes avec une fidélité scrupuleuse ; elle devait donc s’attendre a une
S . A. K. Mgr le Duc d’A n
m a le , appelant.
L e Domai ne de l’Ë t a t ,
intimé.
�__ 2 _
semblable conduite de la part de son adversaire, qui n’a pas com
plètement suivi la même marche.
On n’a pas l’intention, ici, de suivre pas à pas l’administration
des domaines dans la voie qu’elle s’est ouverte ; on s’occupera seule
ment de signaler les erreurs, de rétablir les omissions importantes,
et de redresser les raisonnements dont les conséquences sont fausses
ou vicieuses. On se bornera donc ù citer divers passages de l’écrit
publié par le domaine, en y faisant, autant que possible, une courte
réplique.
Avant tout, il est indispensable de se bien fixer sur trois points
principaux :
1° Quels sont les droits appartenant au prince de Condc résul
tant du contrat d’échange du 20 février 16G1 P
2° Quels sont les modifications apportées à ce contrat par l’arrêt
du 17 mai 1672 ?
3° Enfin, et c’est l'a la question, la forêt de Tronçais faisait-elle
partie du duché de Bourbonnais au moment de l’engagement P
Pour la solution de cette dernière question, on renvoie aux piè
ces citées dans les Observations , qui démontrent de la manière la
plus évidente, que la foret de Tronçais était une dépendance du
duché dès avant 1 3 7 5 ;— Qu’ainsi, quel que fût le titre en vertu du
quel le connétable de Bourbon possédât cette forêt au moment de la
c onfiscation opérée en 1531, cette même forêt n’en faisait pas moins
alors partie intégrante du duché, avec lequel elle ne formait qu’un
seul tout ; que forcément elle s’est trouvée comprise dans l’engage
ment de 1001, puisqu’il comprend tout le duché et scs dépendances
sans aucune réserve , rt que la foret «le Tronçais n’en est pas nom
mément exceptée ni aucune autre.
C’est un point désormais incontestable et acquis à la cause; toutes
�les dénégations du domaine, toutes les subtilités qu’il établit, ne
sauront le faire changer.
Quant aux deux autres questions, c’est en citant le texte des actes
qu’on doit s’éclairer ; or, c’est ce que l’administration des domaines
n’a pas fait.
Voici d’abord la clause du contrat d’échange du 26 février 1661,
par lequel le prince de Condé est devenu engagiste du duché de
Bourbonnais :
« E t au moyen de ce que dessus, lesdits seigneurs-commissaires,
« en vertu dudit pouvoir à eux donné par sa majesté et au nom
*< d’elle, ont, en contre échange et pour récompense desdits duché
« d’AIbret, terres et seigneuries y annexées et autres droits ci« dessus ;— cédé, délaissé, quitté et transporté, et par ces présentes
«• cèdent, quittent, délaissent et transportent audit seigneur prince,
« présent, stipulant et acceptant pour lui, les siens et ayant-cause,
« promettent fournir et faire valoir, garantir de tous troubles, hyt pothèques, débats et empêchements quelconques.
« Ledit duché de Bourbonnais, scs appartenances et dépendan« ces, soit métairies et domaines, moulins, rivières, étangs, bois
«
«
«
«
«
<
«
«
taillis cl de haute futaie , prés, vignes, terres labourables et non
labourables, vaines et vagues, dîmes, terres, champarts, cens,
rentes, droit de commise, servitudes, mortailles, confiscations,
aubaines, déshérences, fiefs, foi et hommage et vassalités, greffes,
et tous autres droits généralement quelconques appartenant audit
duché de B o u rb o n n a is, sans aucune chose en excepter , réserver
ni retenir, en ce qui en reste à engager, fors pour le regard des bois
do haute futaie qu’il ne pourra couper ni abattre .........................................
<
Déclarant lesdits seigneurs-commissaires, que l’intention de
« sa majesté est, qu’au présent délaissement dudit duché de Bour« bonnais, soient comprises les châtellenies île Moulins, Bourg-lc-
�—
4
—
« Comte, Cérilly, Lssel, L a Bruière, la Chaussière, Bécey, Cheva« gnes, Riousse et Chantclle. »
Il résulte donc de la lettre de ce contrat, que tous tes droits uti
les , toutes les dépendances, tous les reueiius, tous les produits du
duché, s a n s a u c u n e e x c e p t i o n , étaient attribués au prince de Condé,
sauf, toutefois, l’exploitation de la haute futaie exclusivement réser
vée au roi. Mais,là sc borne l’exception, et l’administration des do
maines a beau équivoquer, il est impossible de trouver une autre
restriction.— Ainsi, forcément, il faut, bon gré malgré, admettre que
tout ce qui dépendait du duché de Bourbonnais, sans aucune excep' tion , si ce n’est celle de l’exploitation de la haute futaie, appartenait
au prince.
Il suit de l'a que si la forêt de Tronçais dépendait du duché, comme
de fait elle en faisait partie dès avant 1375, tous les droits utiles qui
s’v rattachaient, sauf toujours l’exploitation delà haute futaie, étaient
lapropriété exclusive du prince de Condé.
Vainement l?administration des domaines viendra dire, comme
elle le fait, pages 12 et 13 de sa R épliqu e -.— «Si la foret «le Troncais
« eût été comprise dans l’engagement de 1601, d’après les termes
» généraux de cet acte, chaque portion de cette foret non couverte
« de futaie ou qui aurait cessé de l’être, serait devenue la propriété
« du prince, qui n’aurait pas souffert qu’on portât atteinte à scs
« droits en repeuplant. »
De ce que le bois de haute futaie était coupé, il ne s’en suivait pas
que lesol fût un terrain vague et sans culture; le taillis devait repous
ser, et le prince avait un grand intérêt à 1e laisser se reproduire pour
en jouir. Le domaine du roi se serait opposé d’ailleurs, à ce qu’on
défrichât, et il aurait eu raison, car un terrain planté de (>ois n’est pas
un terrain vaque.— C’est lorsqu'il était en cet état que le prince avait
le droit d’y établir une autre culture, si bon lui semblait, et de le
"»ustraire à l’action forestière; mais après la confection d’une coupe
�de bois, il n’est pas possible de soutenir avec raison, que le sol est
improductif, puisque ce sol contient dans son sein les éléments de
reproduction qui se développent dès l’année suivante ; aussi jamais
le prince n’a-t-il élevé une pareille prétention qui eût été ridicule.
S’il n’a pas joui du taillis dans la foret de Tronçais, la raison en
est toute simple: — c’cst qu’on ne lui en a pas laissé le temps, et que
les intrigues des agents du domaine sont venues tout d’abord para
lyser son droit.
En effet, l’échange est de 1661, et c’est peu d’années après que
des discussions fort sérieuses s’élevèrent enti’e les agents du prince
et ceux du domaine, qui voyaient avec peine leurs fonctions à peu
près annidées par cet échange ; dès lors, ils employèrent tous les
moyens imaginables pour ressaisir leur importance. Aussi, c’est par
suite de leur mauvais vouloir que fut rendu l’arrêt de 1672, dont il
va être parlé ci-après ; et encore bien que cet arrêt consacre les
droits du prince de Condé d’une manière éclatante, néanmoins les
agents du domaine parvinrent, par surprise, à y faire établir un
principe inconnu jusque-là, en réglant Page du taillis a dix ans, au
lieu de trente ans, selon la coutume du pays.
Le procès-verbal de réformation du 11 février 1671 met en évi
dence la raison pour laquelle les agents du domaine ont agi ainsi,
pour empêcher le prince de jouir du taillis dans la forêt de Tronçais,
comme il en avait le droit.— Ce procès-verbal constate (pie la forêt
contient 18,300 arpents; que dans ce nombre il y a, I o 300 arpents
en futaie de bonne nature.
( Le prince ne pouvait pas exploiter cette quotité, par la raison
que c’était une futaie.)
2® 10(10 arpents en vieux chênes sur le retour et en partie étêtés.
( Le prince ne pouvait pas encore exploiter pour son compte celte
quotité, puisque ce n’était pas l'a du taillis, mais de vieux chênes que
l’on regardait comme futaie. )
�r v
—
G
—
« 3° E t 16,340 arpents exploités en vieilles ventes (le tous âges ,
« ju squ ’à n eu f et dix a n s , lesquels il était à propos de récéper pour
« tenir lieu de ventes ordinaires de ladite forêt. »
Or, comme cette quotité se trouvait soumise au droit du prince,
les agents du domaine se sont empressés d’opposer des difficultés a
l’exploitation et ont enfin obtenu, subrepticement, ({ue Page du taillis
fût réglé a dix ans. — Par l'a ils ont enlevé au prince le droit qui
lui appartenait sur ces 16,340 arpents, qu’ils ont fait considérer
comme futaie; en sorte que toute la forêt de Tronçais, en ce qui
concerne l’exploitation des b o is, s’est trouvée soustraite à l’action
résultant du contrat d’échange. — Les agents du prince ont vaine
ment réclamé contre cette spoliation ; on leur a répondu qu’il y
avait chose jugée !...
Voilà ce (pie l’administration des domaines se garde bien de faire
connaître; elle aime mieux raisonner par supposition.
Mais de ce que le prince n’a pas pu, par la force des choses et par
suite des cantonnements faits postérieurement, exercer son droit de
taillis sur la forêt de Tronçais, cela ne le [»rivait en aucune façon
des autres droits résultant du contrat d’échange, et confirmés par
l’arrêt de 1672 ; aussi a-t-il continué d’en jouir.
C’est ici le lieu de faire connaître le dispositif de cet arrêt que le
domaine s’est abstenu de citer, d’examiner ni de discuter; — il qua
lifie l’arrêt, de « /légué te présentée au roi par le prince <le Coudé,- »
afin de donner à penser que son dispositif est la demande formée
par le prince et non pas une décision judiciaire, Conséquemment il
lie prend pas la peine d’en apprécier ni la lettre ni l’esprit, et quand
il est forcé de le citer, c’est seulement pour dire que subrepticement ,
ou p ar erreu r , on a accordé au prince des droits de palnragc équi
valent à des droits d'usage, mais qu'on ne lui a pas reconnu des
droits de propriété.
Cet arrêt est cependant assez important pour qu'on (’examine avec
�—
7
attention, car il contient la décision de la question relative à la ré
clamation de S . A. Iî., s’il est reconnu que la forêt de Tronçais
faisait partie du duché de Bourbonnais.
Voici son dispositif :
« Vu ladite requête, ledit contrat d’échange du 26 février 1661
« et l’avis du sieur Tubeuf ; — oui le rapport du sieur Colbert, con« seiller ordinaire au conseil royal, contrôleur général des finances;
r< — le roi en son conseil, — conformément audit contrat d'échange
« du 26 février 1661 et avis du sieur Tubeuf, a ordonné et ordonne
« que ledit sieur prince de Condé, jou ira des pâturages, panages,
« paissons, glandées et pêche; de la coupe des bois taillis dépendant
t dudit duché de Bourbonnais et des amendes provenant des délits
« d’iceux, a la charge que l’adjudication desdits panages sera faite
i par chacun an, sans frais, par les officiers des forêts de Bourbon« nais, les fermiers dudit sieur prince de Condé appelés, lesquels
« seront tenus de visiter lesditcs forêts ¡jour régler le nombre des
« porcs qui pourront être mis en chacune d’icelles, ès lieux défen« sables et permis, dont ils dresseront leur procès-verbal, et à la
« charge aussi que les coupes desdits bois taillis seront réglées à
« l’âge de dix ans , suivant ljfitat qui en a etc dressé, et que la vente
« et récolement d’iceuv seront faits par lesdits officiers, sans aucuns
« frais, les fermiers dudit sieur prince appelés, qui seront tenus de
« laisser les anciens baliveaux et les modernes, à peine d’en répon« dre en leur propre et privé nom. v
Cet arrêt établit donc une chose bien formelle : c’est que confor
mément au contrai d'échange , le prince avait droit au pacage, etc.,
cl à la coupe des taillis dans tous les bois et forêts dépendant du
duché de Bourbonnais. — Ainsi, ce n’est pas un droit nouveau qu’on
lui confère subrepticement ou par erreur, c’est un dvoil de propriétâ
préexistant dans lequel on le confirm e; droit résultant au courrai
d ’échange de 1061 — C’est la un fait clair, précis, contre lequel
�—
8
—
toute équivoque est impossible et dont l'administration des domaines
aurait pu se convaincre si elle avait pris la peine d’examiner avec
bonne foi et impartialité l’arrêt de 1672.
Que cet arrêt fixe, comme il l’a fait, contrairement aux usages
reçus en Bourbonnais, l’âge du taillis à dix ans, ce n’est pas la la
question; c’est une restriction arbitraire, abusive, apportée dans le
résultat pécuniaire qui appartenait au prince, mais ce n’est pas une
restriction à son droit au taillis sur la totalité des foi'êts dépendant
du duché. — Ce droit rapportera moins, il est vrai,mais il s’exercera tou
jours sur la même étendue , au fur et à mesure des coupes de futaie.—
Remarquons bien, cl 011 ne saurait trop insister l'a-dessus, que l’arrêt
de 1672 signalé par l’administration des domaines à plusieurs repri
ses, comme interprétant le contrat d'échange et n’accordant abusi
vement au prince (¡uc des droits de pâturage et de p êch e , dit for
mellement : que c o n f o r m é m e n t au contrat d'échange de 1GG1, le
prince jou ira
de
B
de
o u r b o n n a is,
la
coupe
des
bo is
t a il l is
dépendant
du
duché
etc. — Cela est-il clair? — Est-ce l'a une jouissance
accord ce abusivement et subrepticement? — N’est-ce pas au contraire
la reconnaissance la plus formelle, la plus explicite que l’on puisse
faire , que l’exercice de cette jouissance émanait du contrat d’é
change et que c’est conformément à la lettre de ce contrat que le
prince est maintenu dans la propriété qui lui a été cédée?
Ce même arrêt de 1672 charge, il est vrai, les officiers des forêts de
faire chaque année, et sans frais, l’adjudieation des partages dans les
bois et forêts du duché de Bourbonnais; mais qu’cst-cc que cela
prouve? — Rien; sinon «pie l’état avait un grand interet a surveiller
le repeuplement «les forêts, dont le sol aliéné Icmporaircmentdcvait,
dans un temps pinson moins éloigné, faire retour a son profit. —
C’est dans cette vue que tes agents de l’administration devaient fixer
chaque année, concurremment avec les agents du prince, le nombre
des porcs admis au panage, pour que la semence du gland et de la
�î
—
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y
—
faîne,, fût laissée en quantité suffisante pour la reproduction. —
Ainsi, c’est tout simplement une mesure d’administration et de con
servation <jui a été prescrite, dans la prévision de la rentrée en pos
session des bois et forêts. — Que l’administration des domaines ne
vienne donc pas signaler cette mesure comme prohibitive des droits
cédés au prince, car elle n’en est, au contraire, qu’ une conséquence,
eu égard à la précarité de ces droits.
D’après cela, s’il est prouvé, comme on le pense, que la forêt de
'Fronçais ainsi que les autres grandes forêts dans lesquelles le prince
de Condé a exercé des droits de pacage et autres, dépendaient du
duché de Bourbonnais, tout est jugé, puisqu’alors ces forêts se trou
vaient virtuellement comprises dans l’engagement de 1661, fait sans
aucune réserve, si ce n’est celle de la futaie. — Dès lors aussi la ré
clamation de S. A. H. est justifiée, malgré l’étrange assertion
faite par le domaine (page 7 de sa Réplique), qu’il existait dans
le duché de Bourbonnais des bois qui n'avaient pas été cédés au prince
par le contrat d'échange , et qui demeuraient réservés au roi.
Oïi le domaine trouve-t-il cette réserve énoncée, même implicite
ment, dans le contrat de 1661 P — On lui porte le défi d’en justifier.
»
Maintenant on va parcourir les principales allégations faites par
le domaine.
Page 3 de la Réplique, le domaine dit :
« Le 23 mars 1830, 1« baron de Surval, intendant général des
« domaines et finances du prince de Condé, élevant, pour la prem ière
fois, la prétention que la forêt de Tronçais avait été comprise
« dans l’échange de 1001, réclama la remise des terrains vains et
« vagues aux abords de cette foret, etc. »
On a souligné dans ce p a ra g ra p h e , les mots : pour la prem ière fois ,
afin de faire voir jusqu'il quel point on peut ajouter foi aux assertions
du domaine.— Or il est bon île savoir cpie depuis le contrat d ecluinge
«
2
,
�\tr)
—
10
—
jusqu’au moment tic l’émigration, la maison de Condé avait joui
des pacages, panages, paissons et glandées provenant de la forêt de
Tronçais, comme le prouvent plusieurs documents, et notamment un
bail du 11 septembre 1781, énoncé dans les observations déjà pro
duites devant la Cour en faveur de S . A. H. (pièce 16). — (v)ue de
puis 1815 le prince de Condé a été réintégré dans la jouissance de
ces mêmes droits, en vertu de son contrat d’échange, ainsi que l’ad
ministration des forêts l’a elle-même reconnu positivement par plu
sieurs actes émanés d’elle, notamment en ce qui concerne la forêt de
Tronçais.— (V oir les pièces n°* 10, 11, 12, 13, 14 et 15, citées pages
18, 19, 20 et 21 des Observations déjà produites.)
Pages 4 et 5 de cette Réplique, le domaine s’exprime ainsi : —
« C’est avec les pièces mêmes produites par l’adversaire, que le do
it inaine espère démontrer de la manière la plus convaincante :
« 1° Oue le contrat d’échange de 1661 ne comprenait pas les fo« rets royales du bourbonnais d'une certaine im portance. »
Oii donc le domaine a-t-il découvert cela dans le contrat d’é
change? — Le texte de ce contrat a été ci-dessus rapporté ; — il com
prend tout ce qui dépendait du duché — sans aucune exception , et
on ne conçoit pas comment le domaine a pu trouver des réserves là
où il n’en existe pas.— Ainsi, quelle que fût l'importance des bois et
forêts, ces objets étaient compris dans l’engagement, sauf l’exploi
tation de la futaie.
« 2° Oue les arrêts du conseil de 1672 à 1688 font connaître et
« expliquent le contrat d’échange et la propriété des forets réservées
« au roi ; »
On a vu plus haut le texte de l’arrêt du 17 mai 1 6 7 2 ; or ce texte
ne mentionne nullement des réserves de forêts an profil du roi; il
se borne à maintenir le prince de Condé dans la jouissance pleine et
entière des droits résultant «lu contrat d’échange de 1661, et notam
ment dan» le droit d'exploiter le taillis dans toutes tes forêts depen-
�—
11
—
dant du duché. — Voilà l’explication du contrat de 1661, et on voit
que ce n’est pas du tout celle donnée par le domaine.
Quanta l’arrêt du 14 août 1688, il n’explique en aucune façon le
contrat d’échange de 1661, dont il ne s’occupe pas ; encore moins
l’arrêt du 17 mai 1G72, dont il ne dit pas un m ot; il contient sim
plement l’homologation de deux projets de règlements ou cantonne
ments, que le prince de Condé a acceptés de guerre lasse (encore
bien qu’ils lui fussent très préjudiciables), pour se soustraire à l’in
fluence fâcheuse des agens du domaine dans l’exploitation du taillis.
Or c’est pour ravoir ce droit de taillis dans toutes les forêts du du
ché, qu’on abandonnait au prince une certaine quantité de bois, en
pleine jouissance et sans contrôle. — Ainsi, la conséquence que le
domaine veut tirer de cet arrêt est entièrement fausse et ne porte
sur rien. — A la vérité l’arrêt dit qu’au moyen de l’abandon fait au
prince, le surplus des bois taillis appartiendra entièrement 'a sa ma
jesté, sans (pie le duc de Bourbon ni ses successeurs puissent y rien
prétendre ; — mais il est évident que l’effet de cette stipulation n’a
pour objet que le surplus des bois taillis auquel le prince avait droit
et qu’il abandonnait, c’cst-iinlire à l’exploitation de ce taillis ; —
qu’ainsi cette stipulation ne peut en aucune façon s’appliquer aux
autres droits dérivant du contrat d’échange et de l’arrêt de 1672;
— que dès lors tous ces autres droits sont restés dans leur intégrité
pour être exercés par le prince, qui les a effectivement fait valoir
tant avant l’émigration que depuis la restauration, et particulière
ment dans la foret de 'fronçais.
Si véritablement cette foret, et d’autres détenues par le domaine,
n’avaient pas fait partie de l’engagement, on se demande comment
il serait possible que l’administration des forêts, si susceptible alors
et aujourd’h u i, ait laissé a la maison de Condé une jouissance, pres
que deux fois séculaire, de droits dont elle n’était pas propriétaire?
Kn définitive le domaine est d’accord avec S. A. H. sur ce point,
�—
12
-
que l’on a tout pris au prince de Condé sans lui rien donner en com
pensation.
« 3° Que la forêt de Tronçais n’a jamais fait partie de cet échange,
« mais, au contraire, est toujours restée propriété exclusive de la
« couronne. »
On ne reviendra pas ici sur ce qui a déjà été dit à ce sujet et sur
les preuves qui ont été fournies dans les observations faites en faveur
de S. A. H., § IV , page 13 et suivantes, établissant de la manière la
plus irréfragable que la forêt de Tronçais était une dépendance du
duché de Bourbonnais. On renvoie donc à la lecture de ce para
graphe pour toute réfutation de l’assertion faite par le domaine.
« 4° Que les vides existant dans celte forêt n’ont jamais cessé d’en
« faire partie.
j>
S’ils avaient cessé de faire partie de la forêt de Tronçais, on ne les
réclamerait pas aujourd’h u i, puisqu’alors ils auraient été restitués
au prince. — Ce dernier jouissait des pâturages que produisaient ces
vides, et peu lui importait qu’ils fussent ou ne fussent pas distraits
de la forêt; l’essentiel était d’avoir un produit. — Mais aujourd’hui
que le ministre des finances, sous l’inspiration de l'administration
des forêts, a retiré arbitrairement à S . A. H. les droits qui lui ap
partenaient dans les forêts du Bourbonnais en prétendant que ce
n'étaient (pie des droits d'usage, il y a lieu de réclamer la propriété
des vides, sauf à intenter plus tard une nouvelle action pour faire
restituer les autres droits appartenant à S. A. U. dans les forêts du
Bourbonnais, et dérivant tant du contrat d’échange de 1001, (pie de
l'arrêt du 17 mai 1072.
On est donc d’accord que les vides réclamés n’ont jamais cessé de
faire partie de la forêt de 'Fronçais, en ce sens seulement qu’ils n’en
ont pas été distraits, et que le prince, «pii en percevait les produits,
n’avait aucun motif pour en demander matériellement la séparation,
�—
13
-
encore bien qil’il en eût le droit. — Il n’a pas usé de ce d ro it, et
voila tout.
« 5° Que le prince de Condé n’a jamais exercé aucun droit de pos« session sur les vides. »
Ou’est-ce que c’est donc que de percevoir les produits de ces vi
des, si ce n’est exercer un droit de possession?
En vérité, on joue ici sur les mots.
Page G de son argumentation, le domaine dit : — « A prendre cet
« acte à la lettre (le contrat d’échange de 1661), il semblerait d’a<( bord que les prétentions de S . A. sont fondées, et que tout ce
« qui se trouvait compris dans les dépendances du duché de Boui •< bonnais a fait partie de l’échange dont il s’agit. Dans ce système,
« qui e'tait celui soutenu par les agens du prince en première ins« tance, les forêts royales étaient elles-mêmes engagées sans aucune
«
«
«
«
réserve, si ce n’est celle des arbres existant. On verra bientôt
qu’un tel système entraînerait des conséquences telles, que les
agens du prince n’ont pas osé les soutenir et les ont abandonnées
successivement à mesure qu’elles se développaient. »
Il y a ici inexactitude et faux raisonnement.
D’abord, qu’est-ce que le domaine entend par forêts royales? —
Toutes les forets du duché de Bourbonnais étaient royales , puisque
tout le duché était un domaine de la couronne.— Ainsi la distinction
que veut faire ici le domaine est une subtilité inventée pour la
cause.
lin second lieu, ces forêts n’étaient pas engagées avec la réserve
seulement des arbres existants , mais avec celle de la fu taie , ce qui
est bien différent, car telle forêt était en grande partie aménagée
en futaie, ce qui ôtait au prince la possibilité d’exploiter ces por
tions souvent considérables et comportant quelquefois la presque
totalité d’une forêt.
Kn troisième lieu, on a soutenu en première instance, comme
�on soutient aujourd'hui, que toutes les forêts du duché se trouvaient
comprises dans rengagem ent, sans déserter aucune des conséquences
résultant de celle proposition. Ainsi donc, il y a inexactitude à pro
clamer que les agents (lu prince n’ont pas osé soutenir ces consé
quences, et les ont abandonnées successivement à mesure qu'elles se
développaient.— Ou a seulement dit, en répondant aux objections du
domaine, que S. A. II. ne réclamait pas le sol de ces forêts planté
et en rapport , mais qu'il prétendait avec raison que les droits de
pacage, panage, etc., lui appartenaient, ainsi que les terrains vains
et vagues , laissés à l'état d’inculture depuis plus d'un siècle, comme
ceux réclamés dans la forêt de Fronçais.
Page 7, le domaine dit : — « En admettant le système soutenu au
« paragraphe précédent (qu e toutes les forêts du duché étaient
« comprises dans l'engagement), le prince de Condé était cngagisle
(i de toutes les forêts du Bourbonnais ; les bois taillis et de haute futaie
« lui appartenaient; il pouvait en jouir, faire et disposer comme de
« chose lui appartenant. Une seule exception était apportée à l’uni« vcrsalité de ses droits : il ne pouvait couper ni abattre les bois de
« haute futaie; il pouvait donc exploiter les taillis, jouir seul des
« panages et glandées sans le concours des officiers des maîtrises ;
<t il pouvait établir des gardes en son nom pour la conservation de
« scs droits.
« dépendant 011 voit qu'aussitôt après l'échange consommé, des
« contestations s'élevèrent relativement à la jouissance des bois tail« lis et des droits de pacage, panage, glandée, amendes, etc.; on voit
« <pie les fermiers du prince, troublés dans leur possession, deman< dent la résiliation de leurs baux. D'où pouvaient provenir ces
« troubles? Evidemment de ce que les fermiers voulaient étendre
* les droits cédés au delà «les limites «le la concession ; évidemment
* de ce qu’il V avait doulc sur l'étemlne «les droits cédés, parce
« qu'indépendamment «les bois taillis compris dans l’acte d'échange
�*
—
15
—
* de 1661, il en existait dans le Bourbonnais qui n’avaient pas été
* cédés au pi’ince et qui demeuraient réservés au roi ; parce que les
« limites n’étaient pas bien établies entre ces deux sortes de bois;
« que les fermiers du pi’ince voulaient exercer indûment des droits
« sur les bois non compris en l’acte d’échange, et que les officiers
« des maîtrises étendaient trop loin les forêts réservées.
« Aucune contestation n’était possible, dans le sens qu’on veut
« donner à l’acte de 1661. Tant que le prince 11e coupait pas les bois
« de haute futaie, les officiers des maîtrises 1 1e pouvaient élever
« aucun débat.
« Ils n’ avaient pas à s’en m êler, sauf à eux à surveiller la conscr
it vation des arbres réservés, arbres auxquels la dent des bestiaux ne
« pouvait faire aucun mal. Cependant des contestations s’élevèrent :
« elles ne peuvent avoir pour objet que l’explication, l’interpréta« tion de l’acte d’échange de 1 6 6 1 ; et c’est alors qu’est rendu l’ar« rèt du conseil du 1 7 mai 1 0 7 2 .
« Cet arrêt ordonne que le prince jouisse des pâturages, panages.
« paissons, glandées et pêche dans les forêts du roi situées en Bour<( bonnais, et que le sieur TubcuF, intendant du Bourbonnais, dresse
« un état des bois taillis abandonnés au prince. »
Quand on lit ces divers paragraphes et qu’on se laisse impression
ner par le ton d’assurance avec lequel ils sont débités, 011 serait
porté à croire que le domaine ne dit «pie la vérité et rien que la
vérité ; il n’en est rien cependant, et tout ceci est inexact.
D’abord 011 fera remarquer que dans le dernier paragraphe qui
vient d’être transcrit, et en parlant des dispositions de l’arrêt du 17
mai 1672, le domaine a commis sciemment une omission importante,
en n’énonçant «pie les droits de pâturages, etc., sans parler aucune
ment îles droits de taillis dans toute l'étendue du duché , qui sont
précisément ceux dont il Faut s’occuper ; encore n'a-t-il parlé de
�f
—
16
—
ccu\ tic pâturage et autres, que pour dire plus tard, que ceux-ci
n’avaient été accordés au prince que subrepticement et par erreur ,
tandis que l’arrêt porte 'a son début, que c’est conformément au con
trat d ’échange de 1001 que le prince est maintenu dans la jouissance
do tous lesdits droits, y compris ceux au taillis.
Tous les autres raisonnements du domaine sont a contrario sensu.
— En effet, l’acte d’échange cède au prince tous les biens et droits d é
pendant du duché de Bourbonnais sans aucune exception, si ce n’est
la réserve de la haute futaie au profit du roi. C'est là la seule et uni
que réserve, et encore une fois on porte le défi au domaine d’en
trouver un autre résultant soit du contrat d’échange, soit de l’arrêt du
17 niai 1072. — Donc, toutes les grandes et petites forêts dépendant
du duché étaient attribuées au prince engagiste, et la distinction que
veut faire le domaine en prétendant qu'il y avait des forets apparte
nant au roi et non engagées, est au moins puérile.— Non, il n’ y avait
pas, dans le duché, de forêts non engagées; toutes l’étaient, quelle
que fût leur contenance; et si parfois on se servait des expressions
forêts du roi, c’était uniquement pour désigner celles de ces forêts,
ou les parties desdites forêts, qui se trouvaient en futaie.
Le prince, nonobstant les officiers à ses gages, ne pouvait jouir
des droits qui lui appartenaient dans les forêts, sans supporter le
concours des officiers des maîtrises, car ceux-ci devaient veiller a ce
que les agents du prince de Coudé ne fissent rien pour déranger
l'aménagement adopté; ne pussent opérer que les coupes permises,
et n’empêchassent le repeuplement du sol forestier par l’exercice
illimité du panage.— Comme tout ce dont jouissait le prince devait
faire retour îi l’état dans un temps plus ou moins éloigné, le do
maine avait un grand intérêt à faire contrôler par des agents, à lui,
la conduite des agents du prince.— C’est de ce contact que sont nées
toutes les difficultés: du côté du prince, pour soutenir ses droits, et
du côté des olficiers des maîtrises pour les ressaisir, en faisant du
�/.cl«!, afin tic reconquérir leur importance.— De l'a ces discussions, ces
collisions sans cesse renaissantes, non pas sur les limites des bois cé
dés au prince uo réservés au roi , eonnne le dit le domaine, mais unique
ment sur l ’âge du taillis , que par une prétention étrange, inconnue
jusqu’alors dans la contrée, les officiers des maîtrises prétendaient
fixer à dix ans , afin de faire rentrer dans leur administration une
plus grande quantité de futaie. Il n’y avait donc pas doute sur la
limite des droits, mais dissidence sur l’âge jusqu’auquel le bois était
réputé taillis.— C’était trente ans, suivant les usages accoutumés.—
De plus, il y avait aussi dissidence sur la manière dont le panage pou
vait être exercé.— On voit donc que des contestations étaient possi
bles, puisqu'elles ont. eu lieu, mais on se trompe étrangement sur
leurs motifs.
On demeure convaincu de tout cela quand 011 lit la requête pré
sentée au roi, en son conseil, par le prince de Condé, et a l’occasion
de laquelle l’arrêt du 17 mai 1672 a été rendu.
\ oici ce qu'on y trouve après l'énoncé du contrat d'échange, des
droits cédés, el de la réserve de la haute futaie : « — C’est la seule réa serve fia haute futaie) quiaitété faite par ledit contrat, suivant lequel
« il (le prince) doit jouir de tous les revenus dudit duché et de toutes
<r les dépendances d’icclui, tout et ainsi que la défunte Heine-mère en
« jouisait; tellement que c'est ¡1 juste titre que ledit sieur prince a
« joui paisiblement jusqu'à présent des paturages, panages, paissons,
« glandées, amendes, confiscations, de la pcche et de la ('basse, et
« de la coupe des hois taillis dudit duché et des amendes provenant
« des délits d'iceux. Néanmoins les olficicrs de la réformation des eaux
« et forêtsont troublé ledit sieur prince, et empêchent les fermiers de
« jouir desdits droits, el notamment en l'année dernière 1071, ce (pii
« lui a causé un li é grand préjudice, parce que lesdits droits étant très
« considérables et faisant la plus grande partie des fruits et revenus
« duditduché, les fermiers ont voulu abandonner leurs Fermes ;
�« mais, depuis peu, le sieur Tubeuf, commissaire départi dans les
« provinces du bourbonnais et Iierry (et non pas intendant du
« Bourbonnais , comme le qualifie le domaine), ayant pris connais-
t sance de ces contestations cl entendu les officiers de ladite réfor« malion et ceux du prince (1), il a été d’avis de lui laisser la jouis« sance libre desdils pâturages, panages, paissons , glandées, pêche;
« DE LA COUPE DE TOUS I,ES BOIS T A I L L I S DÉPENDANT DUDIT DUCHÉ, et
« des amendes provenant des délits d’iceux ; celle des coupes de la
« haute futaie appartenant'a sa majesté, 'a cause de la réserve qu’elle
« a faite de ladite futaie, par ledit contrat d’échange, ce qui fait
« voir que le trouble (pii a été fait audit sieur prince, est un effet
« de la haine que lesdits officiers des eaux et forêts ont conçue contre
« les ferm iers. »
Le domaine dit, page 9 : — « Il est à remarquer (pie, dans tous
• ces arrêts (celui de 1072 et celui du 14 août 1688), les forets de
« T ronçais, (irosbois, Dreuille, Lespinasse et Civray ne sont pas
« mêmes nommées. » — et il infère de l'a qu’elles n’étaient pas com
prise dans l'engagement.
Le fait (pie signale le domaine n’a rien d’élonnant d’après ce (pii
vient d’être dit, et il aurait dù le comprendre : — c’est qu’il ne s'esl
pas trouvé dans ces forêts, au moment du cantonnement fait en 1087
et 1088, de bois taillis au dessous de dix ans ; ou (pie, mieux encore,
pour éviter des contestations futures, on s’est attaché à donner au
prince des bols isolés, pour que ses officiers et scs gardes n'eussent
aucun contact avec ceux des maîtrises. — On voulait opérer une sciseion, et on a pris une mesure rationnelle. — Voilà pourquoi les fo
rêts susdesignées ne sont
( I)
('c ri
|k i s
nommées dans l’arrêt de 1088; celui de
prouve, n n lg ré l’.ijtertion contraire «lu domaine, que le prince avait
nom me de* officier« pour d irig e r l’cxerrirp de
engagement.
d roit* dans 1« foréls so u m i« « A v m
�—
19
—
1672 n’avantpas eu à s'en occuper. — Toutefois, on doit faire obser
ver ici que la preuve <jue le prince avait des droits dans ces forêts,
c’est qu’il a continué de jouir de ceux de pacage et panage, ainsi qu ’il
résulte des procès-verbaux des agents du domaine, notamment de
l’état dressé le 9 octobre 1815. où la forêt de Dreuille et celle de
l ronçais sont désignées comme étant de celles dans lesquelles le
prince a droit d’exercer des droit de pacages et de panage. (Voir
page 20 des Observations et la pièce n° 13.)
Dans un autre procès-verbal du 6 septembre 1 8 1 5 , dont une
ampliation a été envoyée à l’administration du prince par M. Nièpce,
conservateur des forêts à Moulins, on lui indique le nombre des
porcs qu’il peut faire mettre au panage dans les forêts de Munay,
Moladier, Bois-Pelan, Bagnolet, Grosbois et Civray , toutes désignées
comme étant des forêts royales, « dans lesquelles, est-il dit, ces
sortes de produits appartiennent à monseigneur le prince de Comté,
« dans le duché de Bourbonnais. »
l'ar la lettre d’envoi de ce procès-verbal, le conservateur dit : —
« J ’ai l’honneur de vous adresser copie d’un procès-verbal, dressé
<c par M. Moroge, sous-inspecteur forestier de l’arrondissement de
« Souvigny, portant reconnaissance de l’état de la glandée dans les
* bois de son altesse sérénissime, monseigneur le prince de Comté,
« dépendant de son duché de Bourbonnais. » Cette lettre est du 9
septembre 1 8 1 5 , n" 4 2 8 8 , 10e conservation.
\ oil'a un énoncé émane de l’administration des forêts elle-même,
qui vient merveilleusement à l’appui de ce qu’on a dit ci-dcssus, à
«
savoir, «[ne toutes les forêts du duché, grandes et petites , se trou
vaient comprises dans 1 engagement.
¡Nous savons bien que le domaine prétend (pie la reconnaissance
de droits, faite par un de scs employés, ne peut lier l'administra
tion, et qu’une erreur ne crée pas un droit ; toutefois l’erreur pa
rait s’être prolongée pendant bien long-temps, puisqu'elle est presque
�—
20
—
deux fois séculaire ! .... Néanmoins si le domaine, ou son organe,
parle ainsi de la reconnaissance faite par un employé de l'adminis
tration des forêts (notez que c’est un conservateur), voyons ce qu’il
dira d’une pareille reconnaissance, se rattachant à d’autres bois, faite
p ar l’administration des forêts elle-m êm e , en personne.
O r, voici ce que cette administration écrivait à M. de Galigny,
intendant général des biens de son altesse sérénissime monseigneur
le duc de Bourbon :
ADMINISTR ATION D ES FO R E T S.
l r c DIVISION.
iV° 18.
—
Aliénations.
DÉPARTEMENT DE I.’Al.I.IETi.
« Paris, le 26 janvier 1822.
« Monsieur,
« L’administration des forêts est dans l’intention d’aliéner, en
« exécution de la loi du 25 mars 1 8 17, dans l’arrondissement de
« (rannat, département de I’Allicr, quatre parties de bois dans les« (¡licites monseigneur le duc de liourbon a des droits de pacage et
« de panage.
« Ces sont les bois dits :
« Beatidouin, d’une contenance de. . .
31 h. 02 a.
« Le Magotirant, de....................................
25
50
<( Les Brasses tic la Loucrc, de................
171
.‘17
« E t les Brasses de V cnas, de................ 2 4 1
«
D’après les renseignements que nous nous sommes procurés
<t sur ces bois, il est certain qu’il serait très avantageux de les ven« dre avec la faculté de défrichement; tandis qu’en réservant les
« droits de son altesse sérénissime et sans la faculté du défrichement,
« le trésor ferait une perte qui s'élèverait à moitié eu sus................
�‘• é h
—
21
—
..................................mais cette faculté pourrait amener l’anéantisse<c ment des droits de son altesse sérénissime.
« Ces diverses circonstances, dont nous vous prions de donner
« connaissance au p rin ce, nous font désirer de savoir s i, dans fin « térêt de l'état , son altesse sérénissime veut bien consentir a
<c (pie les bois dont il s'agit, soient vendus avec la faculté du défri« cl tentent, sauf, par la caisse d ’amortissement, à tenir compte des
« dioits, en faisant à leur égard l ’application de la loi du 14 ven« tôse en V I I , ou s ’ils doivent être vendus avec la charge de ces
i droits.
« Etant pressés pour l’aliénation des b o is, nous vous prions,
« monsieur, de nous inform er le plus tôt possible des intentions de
« son altesse sérénissime.
a Nous avons l’h on neu r, etc.
u Les administrateurs des forêts.
« Signé R aison, Marcotte et C hauvet. »
Son t-cc des employés ordinaires qui ont fait une reconnaissance
aussi e x p licite, concernant des bois autres que ceux abandonnés au
prince par les cantonnements de 1G87 et 1G 88? — N’cst-ce pas
l'adm inistration elle-même «jui l’a faite par l’organe «le ses adminis
trateurs ? — Le domaine les traitera-t-il aussi avec le dédain «pt'il
emploie envers un conservateur f E l cela ne prouve-t-il pas, contmc
on ne saurait cesser de le répéter, q^*’ toutes les forêts du d u ch é .
grandes et petites , étaient comprises dans rengagem ent?
C’est ici le ras de faire rem arquer, qu’à mesure «pie le domaine
a vendu <l«:s bois avec faculté de défrichem ent dans le Hourbonnais,
il a imposé la condition d éfaire le rachat des droits «le pacage, e tc..
«|ui appartenaient au p rin ce, lequel rachat a été lait ettectivem ent,
�«>*>
suivant divers actes authentiques reçus par les notaires de Moulins
et autres lieux.
Enfin, tout cela ne prouve-t-il pas, avec la dernière évidence,
comme on l’a déjà expliqué plusieurs fois, que par cette clause, insé
rée dans l’arrêt du 14 août 1088 : — « moyennant quoi le surplus
« des bois taillis cédés nu suppliant , par l’état arrêté en 1672, par
« le sieur Tubeuf, dem eurera entièrement à sa m a jesté , sans que
t ledit seigneur duc de Bourbon, ni scs successeurs, y puissent rien
« v prétendre ; » — on n’a entendu stipuler que sur les bois taillis
uniquement , sans s’occuper des autres droits appartenant au duc
de Bourbon d’après le contrat d’échange, et dont la reconnaissance
ainsi que le mode d’exercice avaient d’ailleurs été réglés par l’arrêt
du 17 mai 1672.
Ce droit de taillis s’exercait sur une étendue de 5 6 ,000 arpents de
bois et forêts existant dans le Bourbonnais, d’après les réformations
de 1672 à 1688; ainsi en prenant pour hase cette quotité afin de la
comparer aux droits de pacage, de panage, etc., exercés par le prince
en vertu du contrat d’engagement, on reconnaîtra bien vite que,
grandes et petites, toutes les forêts du Bourbonnais, suns exception ,
étaient soumises à ce droit.
En effet, les états dressés par le domaine indiquaient que le prince
devait exercer lcsdils droits sur 5 1 ,3 5 0 arpents environ, notam
ment dans les forêts de M oladier, M essarges , fJagnolet, Grosbois,
Civray, 'Fronçais, Lespinassc, Drcuillc, C hàteau-f'harles , inversât*
Mat ernai, toutes au dessus de 500 hectares, ci. . .
5 1 ,3 5 0
Les bois cédés au prince, d’après les cantonnements,
contenaient 4,726 arpents, ci.............................................
4,726
I otal égal, sauf 77 arpents.
.
.
.
5(5,07(5
Or, si on déduisait sur cette quantité les 11,000 hectares ou
2 2 ,0 0 0 arpents que comporte la forêt de Tronçais, comment arrive
rait >011 au chiffre résultant des reformations?
�«
—
23
—
Cela prouve donc com plètem ent, que cette forêt était comprise
dans l’engagement. — Si elle n’en avait pas fait partie, comme le sou
tient le domaine, à quel titre alors, depuis 1661, le prince aurait-il
joui des droits de pacage, panage, etc. f — Le domaine est forcé de
reconnaître que c ette jouissance a eu lieu; mais qu’il justifie donc en
vertu de quel titre elle se serait perpétuée pendant près de deux siè
cles, si ce n ’est en conformité du contrat d’engagement.— 11 est vrai
qu’il affirme, nonobstant les dispositions précises du contrat de 1661
et de l’arrêt de 1672, que c’est abusivement et par erreur !...
Ouant à la propriété de la forêt de Troncáis, comme dépendance
du duché de Bourbonnais, on n’a jamais prétendu, comme le dit
l’avocat du domaine (page 11), que l’abandon de cette forêt eût été
fait au connétable de Bourbon par diverses communes; au contraire,
on a dit positivement que la forêt de Troncáis appartenait en pro
priété aux seigneurs de Bourbon, qui avaient accordé en 1375, c’cstà-dire cinquante et un ans après que le Bourbonnais fut érigé en
duché-pairie par Charles IV , des droits d’usage dans cette forêt à dix
communes limitrophes; qu'ainsi les lettres patentes des ducs de
Bourbon, accordant ou confirmant ces droits d’usage, étaient an
térieures de cent cinquante-deux ans à la mort du connétable de
Bourbon. ( Voir pages 17 et 18 des observations faites en faveur de
S . A. II.)
Si cette forêt a été confisquée en 1523 et réunie au domaine eu
1531, ce n’est pas comme une propriété privée , mais bien comme
une dépendance du duché. — Kn supposant même un instant qu’elle
eût été acquise depuis l’érection de ce duché, ce que rien ne justifie,
elle ne s’y serait pas moins trouvée réunie, car toutes les fois qu'un
seigneur augmentait par acquisition les biens de sa seigneurie, ils y
étaient incorporés. — I-:» distinction que veut faire le domaine est
plus (pie subtile; rien ne vient à l’appui de son raisonnement; les
faits et les actes sont contre lui, et le document qu’il invoque, signé
du sieur Lepescheux, députe près I assemblée nationale par les coin-
�mimes usagères, 11c clil rien de ce qu'il veul y trouver; il se borne à
énoncer que la forêt de fron çais a etc confisquée en 1523 sur le
connétable de Bourbon qui la possédait en pleine propriété.— ■C’est
d’ailleurs de cet temanière, et en toute propriété, que la totalité du
duché appartenait à la maison de Bourbon, sous la mouvance de la
couronne, par suite de la donation qui fut faite de partie des biens
composant ce duché, par Charles-le-Sim ple, au chevalier \ymard,
en 922.
Le domaine (pajje 12 de sa Réplique) prétend que la châtellenie
de La Bruyère, dont la forêt fie Tronçais dépendait, n’était pus com
prise dans l’engagement, et il en tire la preuve de ce que les terrains
occupés auparavant par les château, basse-cour et fossés, ont été
vendus, en avril 1780, au profit du roi, sans l'intervention du prince
de Condé. — D’abord ce fait n'est pas démontré; mais en admet tant
qu’il existe comme on l’annonce, cela ne prouverait rien, si non t[ue
le prince n’a pas été informé de cette vente, ou n'a pas voulu élever
de réclamations pour un objet de si peu d'importance, puisqu’il ne
s’agissait tout au plus que d’une couple d'arpents de terrain couverts
de décombres. — Ce qui est vrai, ce qui est hors de doute, malgré le
svstèmc adopté par le domaine, c’est que la châtellenie de La Bruyère
était nommément comprise dans l’enftajjemcnt, et, pour s’en assurer,
son avocat n'avait qu’à lire l’acte de 1001 , il y aurait mi, à rémuné
ration des objets cédés, l’énoncé suivant : <
— « Déclarant lesdits sei« «fiieurs-commissaires, que l’intention de sa majesté e s t, qu'au
" prése n t délaissement dudit duché de Bourbonnais, soient cnmpri-
>< ses , les châtellenies de Moulins, Bourp-le-i .ointe, Cerillv, l ssel,
*» La flritièrc, la Chaussière, etc. »
Le domaine, pour prouver (pie le prince n'avait aucun droit dans
!;t forêt de Tronçais, d it(p a "c 1N) «put lors de la réfornialion de
celle fnrêl, en 1071, les commissaires délégués désignèrent les dif
férents vidft*. qui s’v trouvaient, en indiquant le mode de repeuple
ment. et que le prince il’» lait aucune protestation à cet éjjard. —
�'
SÇI
—
25
Singulier raisonnement en vérité: le prince ni ses agents n’avaient
aucunement à se préoccuper tic ce que disaient ou écrivaient les
agents du domaine, et c’était seulement au moment de l’exécution
qu’ils pouvaient contester. Or les vides signalés en 1671 comme de
vant être repiqués, sont restés, pour la presque totalité, en état d’in
culture, (le terrain vague , sans aucun repiquage. On n’a donc eu
aucune opposition à former, et c’est parce que ces vides étaient en
core à l'état de terrain vain et vague au moment de la réclamation,
(pie la revendication en a été faite.
Mais dit encore le domaine ( p . 1 9 ) : « Par acte du 7 février 1788,
a le roi concéda à M. Hambourg, dans la forêt de Fronçais, l’exploi(t tation de quarante coupes sur une étendue de 5,1 1 2 arpents
« 40 perches; et pendant trente ans la jouissance des vides exis« tant dans les triages de Landes-lès-.Vuches, Monlaloycr et la Bou« teille, pour les coupes être exploitées et les vides être employés à
« l’établissement, des forges et usines qui s’v trouvent aujourd’hui.
M ..........................................................................................................................
< ('cite concession, temporaire dans l’origine, est devenue définitive
« au moyen d’une transaction autorisée par une ordonnance royale
.< du 10 décembre 1823, postérieurement à la rentrée du prince de
« Condé, et à laquelle cependant il n’a formé aucune opposition. »
Ce raisonnement n’a rien de concluant, car, en premier lieu,
malgré l’engagement fait au prince de Condé, du duché de Bour
bonnais, l’état n’en conservait pas moins la faculté de vendre ou
aliéner tout ou partie de ce duché en remboursant au prince tout
ou partie de sa finance d’engagement, et c’est précisément ce qui
aurait eu lieu si déjà, à cette époque, les préludes de la révolution ne
s’étaient fait sentir, ce qui devait détourner l’attention du prince
qui se t rouvait appelée sur des objets d’une bien autre importance.
Depuis la rest mration, cl d’après la loi du 5 décembre 1814, on
ne devait rendre aux émigrés que les biens non vendus; le prix des
0
�-
26
—
autres se liquidait dans l’indemnité; et comme les agents du prince
avaient perdu la trace de tous ses biens à la recherche desquels ils
étaient sans cesse, il n’y a rien d’étonnant qu’on ait omis de porter
dans lebordereau d’indemnité ce qui pouvait être dit à ce sujet.— Ainsi
rien de plus naturel «pie l’oubli de la concession faite à M. Ham
bourg, après vingt-cinq années d’émigration et de troubles révolu
tionnaires.
Mais puisqu’il est ici question de la concession faite au sieur Ham
bourg, cl que le domaine cile cette concession comme un fait à
opposera la réclamation de son altesse royale; il est bon d’en
dire ici deux m ots, car c’est un des actes les plus scandaleux qu’on
ait pu se permettre en violation des lois, et contre lequel cependant
l'administration des domaines n’a pas élevé une seule observation.
— Vussi cette concession a-t-elle fait jeter les hauts cris u toute la
province, et c’est à cause d’elle, a cause des déprédations commises
à son sujet dans la fo ret, que les dix communes qui y exerçaient
des droits d’usage, députèrent le sieur Lepeschcux a l’assemblée na
tionale, en 1790, afin de présenter un mémoire justificatif de leurs
droits méconnus et usurpés.
l/i concession, en effet, parait avoir été obtenue par des moyens
qu’on n’est pas appelé ici a examiner; toutefois elle a eu lieu en viola
tion de l’ordonnance de 1009, et notamment du règlement du 9 août
qui défendaient d'aliéner aucune forêtd e fn taieou partie d'icelle,
et d'établir aucune forge, fourneaux , e tc., sinon en vertu de lettres
patentes bien et dûment vérifiées dans les cours , fi peine de 300 francs
d amende ., de démolition des forges , fourneaux , etc . , et confiscation
îles bois , charbons , mines et ustensiles servant à leur usage.
Or M. Hambourg n’a point obtenu les lettres patentes qui de
vaient être vérifiées dans les cours , qui, certainem ent, sc seraient
refusées à leur enregistrement.
- \ la vérité, l’arrêt de concession
dispense de remplir cette formalité; mais le pouvait-il, puisqu'elle
�—
27
-
était substantielle, de l’essence du contrat et formellement ordonnée
par la loiP — M. Hambourg a coupé à son profit cinq m ille cent
douze arpents quarante perches de futaie superbe, contrairement
aux lois, sans la moindre observation de la part des officiers des
maîtrises, tandis que précédemment ces mêmes officiers avaient fait
une guerre si injuste, si acharné au prince à cause du taillis auquel
cependant il avait des droits incontestables.—On ne veut pas expli
quer ces faits; 011 s’était même abstenu d’en parler dans les obser
vations déjà produites, et on ne les signale ici que par suite de la
citation, au moins extraordinaire de la part du domaine, de la con
cession dont il s’agit, comme étant un fait à opposer au prince..
One le domaine vienne ensuite énoncer dans son argumenta
tion (page 1 9 ), également comme preuve contre la demande de
S. À. H., un autre arrêt du 3 février 1778, qui concède la forêt de
Grosbois. — On lui répondra que celte concession par laquelle on
abandonne trois m ille arpents de fu taie magnifique , est tout aussi
scandaleuse que celle dont on vient de parler, ayant été faite d’une
manière aussi illégale à un sieur M oniol, qui se fit subroger un sieur
L cv ach er , qui lui-même rétrocéda cette concession h un sieur ffnj,
dont les affaires étaient régies par le syndic de ses créanciers, ce qui
indique qu’il était en état de faillite. — Or, ce même sieur Orv ob
tint ensuite un arrêt du conseil qui lui concéda encore l’exploitation
de quatre autres forets en fu taie , à la charge de construire deux
fourneaux qui n’ont jamais existé qu’en projet, ce qui n'a pas em
pêché les coupes d'avoir lieu.
Tout cela pratique dans 1111 court espace de temps, 1 1 c sent-il pas
l’agiotage, la m altôtc?— Et c’est avec les forêts de l’état qu’on ali
mente de telles m anœ uvres!...
Page 2 0 , le domaine s’exprime ainsi : « En suivant l’argumentation
« ries agents du prince, on 11e peut trop s’étonner (pie la demande
« ait été aussi restreinte; car il en résulterait que la foret de T ron-
�v
—
28
—
« cais, comprenant 2 2 ,0 0 0 arpents ou 11,000 hectares, n’avait, en
«
«
«
<
1071, que 150 hectares de futaie ; d'où naît la conséquence (pic le
prince aurait droit à 10,8o0 hectares, et qu’en se restreignant, on
ne sait pourquoi, à 598 hectares, il fait don à l’état de 10,252
hectares. Encore une fois, pourquoi une demande aussi res-
* freinteP »
Est-ce là une question sérieuse, et comment est-il possible de rai
sonner ainsi, en présence des actes par lesquels le prince a renoncé
à l’exercice du droit de taillis dans les forets autres (pie celles à lui
abandonnées en entier par les cantonnements de 1087 et 1G88P —
V quel titre viendrait-il réclamer aujourd’hui 10,252 hectares de
terrains couverts de bois? — Si ces terrains étaient à l’état de landes ,
de terrains vains et vaques , et qu’ils fussent ainsi depuis un temps
immémorial, nul doute qu'ils auraient été revendiqués; mais en
état de coupes ou de produits, il faudrait avoir perdu toute espèce
de bon sens pour en demander la restitution. — Voilà pourquoi on
s’est borné à la réclamation des 598 hectares.
Il
n’y a donc ni restriction ni don de la part du prince, «pii
s’est borné à l’exercice strict et rigoureux d’un droit qui lui appar
tenait.
Pour en finir avec les objections faites par le domaine, on lui
dira :
1° Ou’il avance un fait complètement inexact, en annonçant (pic
la maison de Bourbon a concédé à diverses époques toutes les terres
vaines et vaques qui existaient dans l'élendue du duché de Bourbon
nais. — One les portions de ces terres cédées par le prince, ne com
portent qu'une très faible partie de la totalité, et que le surplus est
aujourd’hui détenu parles diverses communes du bourbonnais, qui
se les sont attribuées comme biens communaux.
2» <hic l’explication qu'il donne à l’occasion de la lande Martin ,
située dans la forêt de(lavray (M anche), et restituée à la coiripa.
�—
29
—
gnie duCotcnlin, comme cessionnaire de la maison d’Orléans, est
complètement erronnée, attendu que cette lande est dans la foret
elle-m êm e, entourée des bois de cette forêt, à travers laquelle il faut
Faire un assez long trajet pour arriver à ladite lande ; qu’elle a tou
jours fait partie du sol Forestier jusqu’au moment où la remise en a
été Faite à la compagnie du Cotentin, qui a Fait abattre à son profit
divers arbres restés sur cette lande, comme débris de la forêt; que.
jusqu’au moment de cette remise l’administration forestière louait,
le pacage a son profit et en percevait le produit; qu’enfin les fossé?
creusés autour de cette lande n’avaient été ouverts que pour empê
cher les bestiaux fie pénétrer dans les parties boisées, et non pas
comme marque distinctive <pie la lande ne faisait pas partie du sol
forestier; ces fossés servaient d’ailleurs à l’écoulement des eaux qui
auraient fait dépérir les bois.
3° Que malgré la nouvelle dénégation faite sur l’existence des
vides réclamés dans la forêt de Tronçais, ces vides n’en subsis
tent. pas moins; qu’ils ont été reconnus et indiques par le domaine
lui-même dans l’état dressé le 17 juillet 1819, par le directeur
dans le département de l’Allier, et intitulé : — « Tableau des ter<c rains vaques , landes, marais, terres incultes de toute nature, pos« sî'.dks PAR le domaine à l'époque du 1er ju illet 181 il. » — Dans le
quel état se trouvent désignés les terrains réclamés par son altesse
royale; qu’en outre, par la lettre écrite par 31. le conservateur des
forêts de l’ VHier à 31. le préfet du même département, le 27 oc
tobre 1831, au sujet de la soumission faite de ces terrains au nom de
son altesse royale, 31. le conservateur reconnaît positivement toutes
les parcelles, sauf une dont la quotité avait été mal énoncée; laquel le
lettre se termine ainsi : « — H me paraît résulter de ce qui précède,
« que sur les 000 hectares 30 ares de vides et clairières réclamés à
» titre d’engagement, // en existe évidemment .VJl hectares •)(> cett>< tiares faisant partie de la forêt de T ron çais , possédés par l’état. »
�Comment est-il possible après cela, d’opposer une dénégation ?
4° Que des recherches ont effectivement été faites dans les diverses
archives, comme l'énonce le domaine, pour se procurer des docu
ments au soutien de la demande faite au nom de S. A. R .; — que ces
recherches ont eu pour résultat de fournir une partie des pièces
énoncées dans les Observations, et qui présentent beaucoup plus
d'importance que le domaine ne voudrait leur en accorder, lui qui
ne produit rien ; qu’enfin ces recherches auraient été beaucoup plus
fructueuses, surtout à la cour des comptes, si un incendie qui a eu
lieu en 1720, n’avait détruit une partie des archives de
cette
cour.
On clora cette discussion déjà trop longue, en faisant observer que
dans les biens donnés en échange par le prince de Condé, il s’en
trouvait pour une valeur de 100,474 fr. qui lui appartenait person
nellement et non pas à titre d’engagement ; que cependant on ne
lui a jamais tenu compte de cette valeur; qu’en outre le duché d’Albret, par lui cédé, produisait un revenu net de 4 9 ,8 2 8 fr., tandis
que le duché de Bourbonnais ne produisait rien alors.
Imprimerie et Lithographie de MAULDE et RENOU, rue B A IL L E U L 9 E T 1 1 7 5 5
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aumale. 1842]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
séquestre
émigrés
forêts
destructions révolutionnaires
droits féodaux
Condé (Prince de)
eaux et forêts
exploitations forestières
glandée
droit de parcours
pacage
domanialité
possession des vides
élevage porcins
triages
forges
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse à la réplique faite par le domaine de l’État, représenté par le préfet de l'Allier, aux observations présentées dans l'intérêt de Son Altesse Royale Monseigneur le Duc d'Aumale, a l'occasion de la réclamation de terrains vagues aux abords de la forêt de Tronçais.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie et lithographie de Maulde et Renou (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1842
1661-1842
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2926
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2924
BCU_Factums_G2925
BCU_Factums_G2927
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53612/BCU_Factums_G2926.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Bonnet-de-Tronçais (03221)
Tronçais (forêt de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Condé (Prince de)
destructions révolutionnaires
domanialité
droit de parcours
droits féodaux
eaux et forêts
élevage porcins
émigrés
exploitations forestières
forêts
forges
glandée
pacage
possession des vides
séquestre
triages
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53611/BCU_Factums_G2925.pdf
89f2afb5301801670ad42c8ab9e38b49
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Text
RÉPLIQUE
AUX OBSERVATIONS
FAITES
P o u r S. A. R. Mgr le D u c
d
’A
u m a le
,
appelant,
CONTRE
L E D O M A I N E DE L’ É T A T ,
REPRÉSENTÉ
PAR
M.
LE P R É F E T
I)E
L ’ ALLIER.
Par contrat passé devant Mes Boulard et Quarré, notaires à Paris, le
26 février 1 6 6 1, S. A. R. Monseigneur le prince de Condé a cédé, à titre
d'échange, à Sa Majesté le roi Louis XIV, le duché d ’ Albret et la baronnie
de la Durance, qu ’ il possédait, partie de son chef, et partie à titre d ’enga
gement.
En contre-échange, le roi a cédé au prince, à titre d’engagement, le
duché de Bourbonnais, avec tontes ses dépendances, dont jouissait
alors la reine douairière, Anne d ’Autriche, veuve de Louis XIII.
P a r ce t acte, le roi cède au prince le duché de Bourbonnais, ses ap
partenances et dépendances, soit métairies et domaines, moulins, riviè
res, étangs, bois taillis et de haute futaie, p rés, vignes,
bourables et non
labourables,
terres la
vaines et vagues, dîmes, terrages,
cham part, cens, renies, droits de commises, servitudes, mortailles et
confiscations, aubaines et desherence, fiefs et foi, hommage et vassalités,
greffes et tous autres droits généralement quelconques, appartenant a u
dit duché de Bourbonnais, sans aucune chose en excepter, réserver ni
�fft
2)
retenir, en ce qui reste à engager, sauf pour le regard des bois de haute
futaie, qu ’il ne pourra couper ni abattre.
Le prince s’est mis en possession des objets qui lui ont été cédés : un
procès-verbal de prise de possession a dû être dressé, des inventaires ont
dû être faits.
D ’après ce contrat d ’échange, la pleine propriété des taillis appartenait
au prince; il n’y avait de réserve que pour les bois de haute futaie, que
le prince ne pouvait couper ni abattre ; du reste, il était libre de faire des
objets cédés tout ce qui lui convenait.
Cependant, dès 16 7 1, dix ans après l’acte d ’échange, des difficultés s’ é
levèrent entre l’administration des domaines et les agents du prince, re
lativement à la jouissance de différents bois que ces agents prétendaient
avoir été compris dans l’échange, ce qui était dénié par les officiers des
maîtrises.
Le 17 mai 16 7 2 , une enquête est présentée au roi en son con
seil , et le 1 a
août su iv a n t, en
exécution
d ’un
arrêt du conseil
d’E t a t , un état des bois concédés au prince de Condé est dressé par le
sieur Tubeuf, intendant du Bourbonnais, commis à cet effet. Dans cet
état ne figure pas la forêt de Tronçais en tout ou en partie ; seulement,
l’arrêt du conseil décide que ce prince jouira du d/vit de pacage dans
les forets de Sa Majesté.
De nouvelles difficultés s’étant élevées à l’occasion de l’exécution de
l’arrêt du 12 août 167a, une nouvelle instance eut lieu devant le conseil
d ’Etat : deux projets de règlement furent arrêtés par des commissaires
nommés à cet effet, et un arrêt du conseil du
août 1G88, en h om olo
guant ces deux projets, attribue au prince les bois taillis qui y sont dési
gnés, en réservant néanmoins les futaies qui pourront s’v trouver, et se
termine ainsi :
« Moyennant quoi, le surplus des bois taillis cédés au suppliant par l’état
« arrêté en 167a par le sieurTubeuf, demeurera entièrement à Sa Majesté,
« sans que ledit sieur duc de Bourbon et ses successeurs y puissent rien
« prétendre. »
Il n’est nullement question de la forêt de Tronçais dans ces règle
ments, et depuis i(jGi , comme auparavant, cette forêt a toujours été
administrée, gardée, gérée par l’ K la t, à l’exclusion des agents du prince.
�(
3
*w *,
)
En 1792, monseigneur le prince de Condé ayant émigré, le duché de
Bourbonnais, compris dans l’acte d ’écliange de 1661, fut mis sous le sé
questre et réuni au domaine de l’Etat.
Par suite de la loi du
5 décembre r 8 i 4 , les biens non vendus qui avaient
appartenu au prince de Condé, lui furent restitués; et dans cette restitu
tion, furent compris les objets étant entre les mains de PEtat, comme
ayant fait partie du duché de Bourbonnais.
Le
23 mars i 83o , l e baron
de Surval, intendant général des domaines
et finances du prince de Condé, élevant, pour la première fois, la préten
tion que la forêt deTronçais avait été comprise dans l ’échange de 16 6 1,
réclama la remise de terrains vains et vagues aux abords de la forêt de
Tronçais, et fit soumission de payer le quart de la valeur de ces terrains,
en exécution de la loi du i/j ventôse an 7.
Cette demande, renouvelée après la mort du prince par l’administra
teur des biens de monseigneur le duc d ’Aumale, héritier testamentaire
du dernier duc de Bourbon, fut rejetée par un arrêté du préfet de l’Allier,
du iG juillet 1832, approuvé par le ministre des finances, le 1 " octobre
suivant.
L’ administrateur des biens du prince fit alors assigner M. le préfet de
F Allier, comme représentant l’Etat, à comparaître devant le tribunal de
Montluçon, pour s’entendre condamner h la restitution de
5q 8 hectares
de terres vaines et vagues, situées aux abords de la forêt de Tronçais, aux
olires de payer à l’ Etat le quart de la valeur desdits terrains.
Le Domaine soutint en première instance que la forêt de Tronçais n ’a
vait jamais fait partie de l’ échange de 1661, et il le prouva en produisant
l’arrêt du conseil de 1G72, l’arrêt du conseil de 1688, une concession
faite, en 1788, par FEtat, a MM. Hambourg-, le domaine repoussa les pré
tentions du prince, en démontrant que l’ Etat avait toujoursjoui des vides
de la forêt comme de la lorêt elle-même, et que le prince, n’ayant en sa
faveur ni litre, ni possession, n’ayant point été dépouillé des terrains ré
clamés par Follet des lois sur Fémigration, ne pouvait invoquer les dis
positions de la loi du
ventôse an 7.
O s moyens de défense eurent un plein succès devant le tribunal de
Montluçon qui, par jugement du \f\ août 18/|(), rejeta la demande for
mée au iK'in de S. A. B .
�w»
(4)
Appel ayant été interjeté devant la Cour de I\.Loin, les plaidoiries avaient
été entamées et terminées, lorsque la Cour, voulant éclairer sa religion et
s’entourer de tous les documents nécessaires, mais sans entendre rien
préjuger sur les moyens invoqués de part et d ’autre, réservant au co n
traire toutes les questions, tant de fait que de droit, ordonna, par l’arrêt
interlocutoire du i4 décembre rS ^ i, que dans les trois mois le prince
justifierait, soit p a r le procès-verbal de prise de possession du duché, soit
par toute autre pièce, que la forêt de Tronçais dépendait dudit duché au
moment de l’ engagement.
Trois mois et plus se sont écoulés sans que les agents de S. A. aient ju s
tifié d ’aucunes pièces; et cependant la plus grande latitude leur a été don
5
née : depuis i 8 1 , les archives départementales, les archives générales
du royaum e ont été mises à la disposition des
agens du prince de
Condé et de ses successeurs ; toutes les portes leur ont été ouvertes, aucun
moyen ne leur a été refusé; s’ ils ne rapportent rien aujourd’hui, c ’est
q u ’ ils n’ ont rien trouvé de favorable à leur cause. L ’Etat ne soutient pas
ses droits avec mauvaise foi, et si le prince eût justifié d ’un seul acte qui
eut établi la justice de ses réclamations, un acquiescement à la demande
eût été la suite immédiate de celte production.
F/administration des Domaines avait invoqué devant la Cour le procèsverbal de réformation de la forêt de Fronçais, opéré en 1ÎÎ71 ; l’adver
saire en a demandé la production : l’administrai ion s’est empressée de
satisfaire à ce vœu. Ce procès-verbal est depuis long-temps à Riom; co m
munication en a été donnée aux agents de S. A.
Un mémoire imprimé a été distribué de la part deM. Lacave I.aplagne,
administrateur des biens de S. A. II. Dans l'intérêt du Domaine, on va
répondre à ce m ém oiie, en adoptant la même marche, en le suivant dans
tousses raisonnements; et c ’est avec les pièces même produites par l'ad
versaire ({lie le Domaine espère démontrer, de la manière la plus con
vaincante ,
i" Que le contrat d’ échange de i (»(>■ne comprenait pas les forêts roya
les du liou rbon naisd’une certaine importance;
v»° Que les arrêts du conseil de iii7 u à 1688 font
connaître et
expliquent le contrat d ’échange et la propriété des forêts réservées
au roi ;
�( 5)
3° Que
la forêt de 'Fronçais n’a jamais fait partie de cet é c h a n g e ,
niais, au contraire, est toujours restée propriété exclusive de la Cou
ronne ;
° Que les vides existant dans cette forêt n’ont jamais cessé d ’en faire
4
partie ;
" Que le prince de Condé n’ a jamais exercé aucun droit de possession
5
sur les vides;
6° Que la loi de l’ an 7 n’est pas applicable à l’espèce.
§1".
Origine du duché de Bourbonnais.
L’histoire 11e fournit sur ce point que des données fort obscures. On
pense que Bourbon fut érigé en seigneurie par Clovis Ier, en 609, puis en
baronnie, par Charletnagne, en 770. Charles-le-Sim ple en fit don à
Aymard 011 Adhemard, parent de IIugues-le-G rand, en 9 13 , sans doute
pour acheter sa protection auprès de ce puissaut comte qui faisait sou
vent la guerre au souverain.
34
Il fut érigé en duché-pairie, non pas en 1 ^ , mais bien au mois de
décembre 1327, par Charles-le-Bel, en faveur de Louis
1er,
fils ainé de
R obert-de-France; il fut séquestré sur Charles de Bourbon, connétable
de France, à la demande de Louise de Savoie, mère de François I", qui
prétendait y avoir des droits du ch ef de Marguerite de B o urbon,sa mère;
enfin, après la mort du conuelable et de Louise de Savoie, il fut réuni à
la Couronne par François I", fut attribué successivement au douaire de
plusieurs reines, et engagé à Louis II, prince de Condé.
§11EchtiW’e entre le Hoi et le prince de ('onde.
5
Dès l’année 1i» 1, le prince de Condé, se laissant diriger par des c o n
sidérations d ’ambition personnelle, avait abandonne la co u r ; et après
avoir causé quelques troubles à l’aris, s’était joint aux Espagnols et taisait
la guerre à son pays. Le traité des Pyrénées, signe en
après huit
�(6)
«.nuées de guerre civile, stipula formellement des avantages pour le prince
de Condé, malgré l’opposition du cardinal Mazarin, qui ne pouvait lui
pardonner tous les embarras q u ’il lui avait causés; mais le cabinet espa
gnol ayant menacé de donner au prince des places fortes dans les Pavsbas, Mazarin pensa q u ’il valait mieux faire au prince un établissement
au centre de la France et loin des frontières. Telle fut la cause de Pacte
d ’échange du 26 février 1G61. Le prince de Condé ne subit pas la loi : il
la dicta; il 11e fit pas de sacrifices : il obtint des avantages; c ’était un
puissant seigneur révolté qui faisait acheter sa soumission , et l’acte d ’é
change rappelle qu ’il est fait en exécution des promesses faites au prince
par le traité paix.
Le duché d ’Albret et la baronnie de la Durance étaient loin de valoir le
d u c h é d e Bourbonnais; et si les commissaires ont reconnu, qu ’en 16G1,
la dépense excédait le revenu, c ’est qu’à cette époque, les droits utiles
étaient perçus par Anne d ’ Autriche, mère du roi, qui en jouissait pour
son douaire; et le prince de Condé eut soin de stipuler, q u ’en atten
dant q u ’il fut mis en possession du revenu attaché au duché, il lui serait
payé une rente annuelle double du revenu q u ’il aurait eu droit de per
cevoir.
Le prince 11e faisait donc aucun sacrifice; au contraire, il gagnait
chaque année tant que le revenu n’était pas réuni au fonds.
P a r c e l acte d ’éclumge, ainsi q u ’on l’a dit, le roi cède en conlr’ échan
ge, au prince le duché de Bourbonnais, ses appartenances et dépendan
ces, métairies, domaines, moulins, rivières, étangs, bois taillis et de
hante futaie, prés, vignes, terres, labourables et non labourables, vaines
et vagues, dimes, terres, champarts, cens, rentes, droits de commises,
servitudes, tnortailles, confiscations, aubaines, déshérences, fiefs, foi et
homm age et vassalité, greffes et tous autres droits généralement quel
conques
appartenant
audit
duché
de
Bourbonnais, sans
aucune
chose en excepter, réserver ni retenir, en ce qui reste à engager, sauf
pour le regard des bois de haute futaie, q u ’il ne pourra couper ni abattre.
A prendre cet acte à la lettre, il semblerait d ’abord que les préten
tions de Son Altesse sont fondées, et que tout ce qui se trouvait compris
dans les dépendances du duché de Bourbonnais a fait partie de l’échan
ge dont il s’agit. Dans ce système, qui était celui soutenu par les agents
�( 7 )
du prince, en première instance, les forêts royales etaient elles-mêmes
engagées sans aucune réserve, si ce n’est celle des arbres existants. On*
verra bientôt q u ’un tel système entraînerait des conséquences telles que
les agents du prince n’ont pas osé les soutenir et les ont abandonnées
successivement, à mesure qu ’elles se développaient.
§ 1HArrêt du 17 mai 1672. — Arrêt du i/j août 1688.
En admettant le système soutenu au paragraphe précédent, le prince
de Condé était engagiste de toutes les forêts du Bourbonnais ; les bois
taillis et de haute futaie lui appartenaient ; il pouvait en jouir, faire et
disposer comme de chose à lui appartenant. Une seule exception était
apportée à l’ universalité de ses droits : il ne pouvait couper ni abattre les
bois de haute futaie ; il pouvait donc exploiter les taillis, jouir seul des
panagesetglandées sans le concours desofficiersdes maîtrises ; il pouvait
établir des gardes en son nom pour la conservation de ses droits.
Cependant 011 voit qu ’aussitôt après l’échange consommé, des co n
testations s’élevèrent entre
les officiers de ces maîtrises et les agents
du prince, relativement à la jouissance des bois taillis et des droits de
p a c a g e , p an age, glandée, amendes, etc. On voit que les fermiers du
prince, troublés dans leur possession, demandent la résiliation de leurs
baux. D’où pouvaient provenir ces troubles? évidemment de ce que les
fermiers voulaient étendre les droits cédés au delà des limites de la
cession ; évidemment de ce q u ’il y avait doute sur l’ étendue des droits
cédés, parce qu ’indépendamment des bois taillis compris dans l’acte d ’éch a n g ed e 1GG1, il en existait dans le bourbonnais qui n ’avaient pas été
cédés au prince et qui demeuraient réservés au roi ; parce que les limites
n’ étaient pas bien établies entre ces deux sortes de bois, que les fer
miers du prince
v o u la ie n t
exercer indûment des droits sur les bois non
conqu is en l’acte d ’échange, et que les officiers des maîtrises étendaient
trop loin les forêts réservées.
Aucune contestation n’ était possible, dans le sens qu ’011 veut donner
à l’acte île iGGi . Tant que ce prince ne coupait pas les bois de haute fu-
�y*
(8)
taie, les officiers des maîtrises ne pouvaient élever aucun débat. Tous les
bois taillis appartenaient au prince ; il pouvait en disposer à sa volonté,
couper même les baliveaux sur taillis, lorsqu’ils n’avaient pas atteint l’ âge
de 60 ans, temps requis pourêtre réputés futaie; il pouvait affermer le droit
depacage, panage etglandéesansl’intervention des ofiiciersdes maîtrises.
Car, encore une fois, le roi ne s’était réservé que les bois de hautefutaie,
et l’exercice des droits dont 011 vient de parler ne pouvait préjudiciel- en
rien aux bois de haute futaie; les officiers des maîtrises n’ avaient pas à
s’en m ê le r , sauf à eux à surveiller la conservation des arbres résen’és a r
bres auxquels la dent des bestiaux ne pouvait faire aucun mal. Cependant
des contestations s’élevèrent : elles ne peuvent avoir pour objet que l’ex
plication, l’interprétation de l’acte d’ échange de 1661 ; et c ’est alors q u ’est
rendu l’arrêt du conseil du 17 mai 1G72.
Cet arrêt ordonne que le prince de Condé jouisse des pâturages , panageSj paissons, glaridée et pêche dans les forêts «lu roi situées en Bourbon
nais, et que le sieur Tubeuf, intendant du Bourbonnais, dresse un état des
bois et taillis abandonnés au prince.
En exécution de cet arrêt, le sieur T u b e u f dressa un état des taillis qui
deviennent la propriété du prince, s’élevant en totalité à
arpents.
L eprin ce de Condé 11e réclama pas contre l'arrêt du 17 mai 1G72, ni
contre le règlement opéré par le sieur lu b e u f. O11 a soin de dire, dans le
mémoire imprimé, que le prince était occupé alors à la guerre de Hol
lande, et blessé au passage du Rhin. Maistout le inonde sait que les prin
ces 11e s'occupent jamais personnellement de la gestion de leurs affaires.
Le prince de Condé, homm e de guerre, avant tout, ne pouvait apporter
le soin convenable à ses a lia ires d ’intérêt ; mais il avait un conseil, des
agents actifs et bien payés qui administraient sa fortune, et si l’ arrêt eût
été contraire aux intérêts du prince, ses agents eussent bien songé à récla
mer.
Quoiqu'il en soit, les officiers des maîtrises réclamèrent eux-mêmes con
tre le règlement opéré par le sieur Tubeuf; ils prétendirent q u ’on avait
compris à tort, parmi les taillis abandonnés au prince, î/îm/W.» enclavés dans
les forets de Sa Majesté.
Sili ces réclamations', M M . de la Nu/.anchère, grand maître des eaux et
forêts, et lé v rie r , lieutenant général du domaine du Bourbonnais, rédigé-
�frri
( 9 )
re n td e nouveaux procès-verbaux, les i8 o c to b re 1686 et a g o cto b re 1687,
par lesquels
33 petites forêts, contenant
ensemble 4726 arpents, furent
abandonnées en entier au prince de Condé, et sur ces procès-verbaux inter
vient, le t/j août 1688, un arrêt du conseil d ’état qui, les homologuant, au
torise le prince à se mettre en possession des 4726 arpents de bois qui lui
sont abandonnés, et à nom m er directement des gardes ; moyennant quoi
le surplus des bois taillis, cédés au suppliant par l’état arrêté en 1672 par
le sieur T u b e u f, demeurera entièrement à Sa Majesté sans que ledit sieur
duc de Bourbon , ni ses successeurs y puissent rien prétendre.
Il est à remarquer que dans tous ces a rrê ts, les forêts de T ro n ça is,
Gros-Bois, Dreuille , Lespinasse et Civray ne sont pas même nommées.
Que peut-il résulter de ces deux arrêts ?
i" Que l’acte d ’écliange de 1661 ne cédait pas au Prince de Condé
tous les bois quelconques situés en Bourbonnais -, mais il en était qui
restaient réservés au R o i, et nous en donnerons la raison au § VII ciaprès.
a° Que si l’acte d ’échange eut contenu tous ces bois généralement
qu elco n ques, sous la seule réserve de ne pas couper ni abattre les futaies,
il n’aurait pu s’élever aucune contestation sur la jouissance des taillis,
des droits de pacage, panage, glandée, e t c . , puisque le prince devait
jouir du tout, dans toute son étendue, sans réserve.
3° Que
les bois eussent dû être gardés aux frais du Prince, ainsi que
l’arrêt de 1G88 l’a ordonné pour les bois taillis qui lui ont été concédés.
4° Que l’arrêt de
1G88 eût été d ’ une injustice révoltante équivalant à
un acte de confiscation, puisqu’en concédant au Prince
47 '-*^ arpens
de
bois taillis, dont il ne pouvait prendre possession q u ’après que le Roi
aurait fait enlever le bois futaie, 011 ne lui concédait rien de nouveau , et
q u ’en lui enlevant tous les autres taillis énoncés dans le règlement de
T u b e u f, 011 portait une atteinte notable à l’acte d ’échange qui lui donnait
un droit sur le tout.
r»° Q u ’on ne peut expliquer cette étrangeté que par cette considération
que les grandes forêts du Bourbonnais 11e faisaient pas parlie de l’acte
d ’échange, étaient restées la propriété du Roi, c’ est-à-dire de l’Étal,alors
confondu avec la personne du Roi.
�( ï<* )
6° Enfin que ce$ arrêts de 167a et 1688 n’ont pas modifié l’acte d ’é
change de 1661., mais l’ont expliqué.
7“ Que le droit de jouir des pacages , panages et glandées des forêts
dq B ourbonnais, concédé au Prince de Condé par l’arrêt du conseil de
1672, prouve surabondamment que ces forêts n’avaient point été com
prises dans l’engagement ;
car l’abandon de la propriété emporte néces
sairement le droit de p a c a g e , et ce droit n’ayant rien de contraire à la
réserve,des bois de haute futaie, il était tout-à-fait dérisoire de les con
céder à celui qui était déjà propriétaire du fonds.
§ IV.
La forêt d e ï r o n ç a i s a toujours, dit-on , fait partie du Duché de Bour
bonnais , et conséqueinment s’est trouvée comprise dans l’engagement
de 1661.
L ’administration des domaines 11’a pas affirmé d ’une manière solen
nelle que jamais la forêt de Tronçais n ’avait fait partie du Duché de Bour
bonnais, et son avocat n ’a pas tenu le langage absurde q u ’on lui prête.
L ’avocat de l’administration a plaidé que, d ’après une ancienne tradi
tion, dont il ne pouvait justifier l’origine, la forêt de Tronçais ne faisait
pas partie du duché de Bourbonnais. Ce duché était constitué de diffé
rentes parties arrachées, par l’importunité des courtisans, à la faiblesse
des rois de France. Seigneurie en
3 7
5o«j,
baronnie en 770, duché-pairie en
1 * , il était possédé par la maison Bourbon à titre de grand fief relevant
immédiatement d e là Couronne, et com m e tel, soumis à de certaines con
ditions de service militaire, de foi et hommage, etc.; et il était réversible
à la Couronne en cas «l’extinction de la famille à laquelle il appartenait.
I*a forêt de Tronçais parait avoir été la propriété privée de quatorze c o m
m unes ou
paroisses sur le sol desquelles elle était située; et com m e les
frais de garde absorbaient, et au-delà, les revenus q u ’on en pouvait tirer,
et qu'elle était en proie aux dévastations de tous les habitants, les c o m
munes propriétaires en abandonnèrent la propriété aux dues de Bourbon
qui , dès - lors , la possédèrent , non
pas comme une dépendance
de leur d u c h é , mais bien com m e une propriété privée qui leur était
�( r, )
•
advenue autrement que par les dons du souverain, et n ’était soumise à
aucune des conditions imposées aux possesseurs de fiefs.
Ce ne fut pas au connétable de Bourbon que fut fait cet a b a n d o n ,
com m e le dit l’auteur du Mémoire imprimé pour Son Altesse , mais bien
à un de ses ancêtres, et antérieurement même à l’érection en duchépairie.
11 serait impossible de rapporter la preuve de Ce fait, qui rémonte à plus
de cinq cents ans, mais il est de notoriété publique dans le pays; il est re
laté, dans un Mémoire présenté à l ’Assemblée nationale, et signé par le
sieur Lepescheux, député du district de Cérilly. En plaidant devant la
Cour, l’avocat de l’administration, qui n ’avait qu ’une copie libre et non
signée de ce Mémoire, trouvée dans des papiers de famille, ayant voulu
s’en aider, l’avocat de Son Altesse rejeta ce document comme n’ayant au
cune authencité ; mais, com m e on le relate dans le Mémoire imprimé,
et q u ’il parait que les agents du prince en possèdent une copie authenti
que, ce fait doit passer pour constant.
Cette forêt a été confisquée et réunie au domaine de l’Etat en 1
523,
non pas comme une dépendance du duché de Bourbonnais, mais parce
que l’édit de confiscation, rendu contre le connétable de Bourbon, p o r
ta it s u r
tous les biens, sans exception, du coupable, soit q u ’il les tînt à
titre de fiefs, soit qu’ il les possédât à titre privé; et depuis cette réunion,
la forêt de Tronçais n’a jamais cessé de faire partie du domaine de la
Couronne, jamais elle n ’en a été détachée ; l’acte d ’échange de 1661
contenait bien la cession du duché de Bourbonnais, circonstances et dé
pendances, mais ne contenait pas tout ce qui avait appartenu aux ducs
\le Bourbonnais, à quelque titçe que ce fût.
Les documents rapportés par le prince sont tout à fait insignifiants,
l ’eu importe que des historiens aient placé la forêt de Tronçais dans les
dépendances du duché de Bourbonnais ; ces historiens n’ étaient sans
doute pas des jurisconsultes ; et ce qui prouve d ’ailleurs que leur témoi
gnage 11e peut avoir que peu de valeur, c’est qu'ils diffèrent entre eux
sur rétendue, sur la valeu r, c’est qu'ils annoncent qu elle a été primiti
vement coupée en
cinq ans après l’acte d ’échange. On voit même
dans 1111 de ces documents que la forêt de Tronçais est totalement vendue,
c’ est-à-dire coupée, à peu de chose près.
�( 12 )
Enfin, on prétend tirer une induction favorable au prince de ce que
ces documents disent que la forêt de Tronçais dépendait de la châtellenie
de la Bruyère-FAubépin, et que celte châtellenie dépendait elle-même du
duché de Bourbonnais. Or, par acte du 18 avril 178G, les terrains occu
pés auparavant par les château, basse-cour, cour et fossés d e là BruyèreFAubépin, ont été vendus par la chambre du domaine, au profit du roi,
sans l’intervention du prince de Condé. Ainsi, ces bâtiments n’ étaient
donc pas compris dans l’ engagement de 1G61.
Il est inutile d ’examiner les différents actes cités dans ce Mémoire et ser
vant à établir que la fo rè l de Tronçais appartenait aux ducs de Bourbou
dès le XIIIesiècle ou au commencement du XI Vesiècle. Ce fait est re co n n u ,
mais 011 soutient q u ’elle ne lui appartenait qu ’à litre privé, et qu ’ elle
n ’a pas fait partie de l’engagement de 1GG1.
On n’a jamais nié que le Prince n’ ait exercé des droits d ’ usage sur les
pacages de la forêt de Tronçais ; ces d ro its, qui lui ont été concédés, sans
doute abusivement, par l’arrêt de 1G72,11’ont pas été contestés avant la
révolution, mais ces droits étaient eux-mêmes la preuve que ce Prince ne
s’est jamais considéré com m e propriétaire du sol forestier.
Com m e propriétaire, il eut eu le droit de jouir com m e bon lui semblait
i° des v id e s , qu’ il aurait pu aliéner , a rre n te r, c u ltiv e r , défricher, e t c . ;
des taillis qu ’ il pouvait c o u p e r , en observant les règlements ; des paca
ges dont il aurait pu user, soit par lu i-m êm e, soit en les afTermant d irec
tement par ses agents. Au lieu de ce la , 011 voit q u ’il ne peut ¡tas toucher
aux taillis; la forêt est coupée presque en entier , en iGGG , si on en croit
un document invoqué par le Prince: dès lors le sol tombe dans son do
maine , aux termes de l’acte de 1GG1 ; et cependant on voit que le Prince
n’exerça ni par lui-mème, ni par ses a g e n ts, aucun acte sur ces f o r ê t, fu
taie , bois-taillis, ou vides ; il n’ a poitiL de gardes en son nom , la forêt
est administrée par l’htat, surveillée par les olliciers de F Etat,les paca
ges sont affermés chaque aimée directement par l’ Etat ; seulement le prix
en est payé dans la caisse du Prince, en conformité de l’arrêt de 107a ;
peut-on voir là aucun des caractères du droit de propriété? Nest-ce pas
au contraire une preuve que ce Prince n’avait d ’autre droit que celui
accordé par l’arrêt de 1G7U, etqu’il ne pouvait réclamer davantage ?
Si la forêt de Tronçais eut été comprise dans rengagement de 1GG1 ,
�( i3 )
d ’après les termes généraux de cet acte, chaque portion de' cette forêt non
couverte de futaie ou qui aurait cessé de l ’être, serait devenue la pro
priété du Prince, qui n’ aurait pas souffert q u ’on portât atteinte à ses
droits en repeuplant. Eh b ie n ! depuis 1671 jusqu’à présent, l ’adminis
tration forestière n’a cessé de faire des actes de p ro p rié té , soit par des
repeuplem en ts, soit par l’ouverture des routes , soit par des concessions
à des particuliers, sans opposition du Prince de Condé.
Si depuis 1815 jusqu’en 1
83o l’administration a laissé jouir ce Prince de
ce même droit de pacage et g la n d é e , ce fait s’explique suffisamment par
l’esprit de réaction du temps, par l’ignorance où l’on était des titres qui
formaient ces droits, par la persuasion où l’on était que l’arrêt du Conseil
de 1G72 avait conféré au Prince 1111 droit irrévocable; mais l’ignorance
d’ un fonctionnaire public 11e peut pas fonder une fin de non recevoir
contre les droits de l’ état; quinze ans d ’erreur ne suffisent pas p our opé
rer la prescription, et l’ administration a sagement fait d’abolir en 1831
un droit accordé abusivement et contraire aux lois du royaum e; au sur
plus, cette jouissance invoquée par le Prince 11e peut s’appliquer q u ’au
droit de pacage, et com m e ce d r o it , tout à fait contradictoire avec le
le droit de propriété réclamé par le P rin ce , n ’est pas en question aujour
d ’h u i, il est inutile de s’y appesantir plus long-temps.
§ V.
Règlements de 1G7» et 1G88.
O11 a déjà répondu à ce paragraphe lorsqu’on a traité le §
111. On
n’a
jamais prétendu que les deux règlements dont il s’ agit eussent modifié ou
détruit les termes de l’acte d’ échange de 16G1. Si cela é ta it, il faudrait
bien s’y conform er, puisque ces règlements ont été exécutés sans récla
mation pendant 1 :k> ans. On a dit et 011 répète que ces arrêts et règle
ments servent à expliquer l’esprit du contrat de iGGr .N ’oublions pas que
sans mienne exception ni
rcsi ivc, sont donnés au Prince, et toutes les futaies, sous la seule excep
dans le contrat de iGGi tous les bois taillis,
tion des bois de haute futaie qu ’il ne pourra couper ni abattre.
O r, lorsqu’ après une clause aussi générale, on v o it, en 1G72, un ar
�( <4 )
rêt du Conseil qui accorde au Prince un droit de pacage dans les forêts
du R o i , et qui lui fixe les bois taillis qui lui appartiendront ; lorsqu’on
vo it, en 1688, un autre arrêt revenant sur celui de 16 7 2 , retirer au
Prince des taillis q u ’on lui avait c é d é s , par le motif q u ’il y a eu erreur ;
que ces bois sont enclavés dans les bois de Sa Majesté, et dire q u ’ au moyen
de la nouvelle indication q u ’on lui fa it , le surplus des bois taillis qui lui
avaient été cédés demeurera entièrement à Sa Majesté, sans que le duc
de Bourbon et ses successeurs y puissent rien prétendre , quelles autres
interprétations peutron donner à ces arrêts, sinon celles-ci :
Vous n ’aurez aucun droit, ni vous, ni vos successeurs, à tels et tels bois
taillis, quoique situés en Bourbonnais; donc 011 ne vous avait pas donné
p a r l’acte d ’échange tous les bois taillis situés en Bourbonnais. Les taillis
qui restent la propriété du r o i , sont enclavés dans les forêts de Sa Ma
jesté; doncSaM ajesté avait en Bourbonnais des forêts autres que celles
comprises dans votre acte d ’échange ; et com m e vous avez accepté l’arrêt
du règlement de 1688 qui désignait nommém ent et spécialement tous le
bois qui vous étaient attribués, com m e vous n’avez élevé aucune r é c la
mation , il s’en suit naturellement que vous 11e pouvez demander aujour
d’hui que les bois énoncés dans l’arrêt de 1688 qui a réglé définitivement
les droits des parties.
Cet arrêt doit être regardé com m e une espèce de partage ou de bor
nage entre le roi et le prince, li a dit au dernier: Le roi possède en Bour
bonnais des bois autres que ceux qui vous ont été cédés : il peut y avoir
confusion poui'distinguer ce qui appartient à chacun d e v o n s ; déjà le
com m issaireTuheufa procédé au partage, mais il a commis des erreurs
q u ’il faut redresser. Voilà votre lot : vous aurez, droit à trente-trois petites
forêts dont la désignation suit; cela seulement vous app artient, et vous
n’avez aucun droit à ce qui reste.
Vainement l’auteur du Mémoire auquel on répond veut donner le
change à la justice, en disant que cet arrêt n’avait d ’autre but que de ré
gler un mode dVxploilation ; que c ’était un échange entre le prince et l’Ktat ; (jne le prince acceptait des forêts en échange de taillis, sur lesquels il
renonçait; on ne conçoit un échange que toutes les fois que chacune des
parties contractantes donne quelque chose du sien ; o r, i c i , que donnait
d o n c l’ Klat? Rien ; ca rd a n s le système du prince, tout lui appartenait, les
�( I 5,
petited forêts com m e les grandes ; t o û t , sauf le bois d e haute futaie. L’ E
tat ne lui donnait pas les trente-trois petites forêts, puisqu’ elles étaient la
propriété du prince. Aux termes de l’acte de 1GG1 ¿on ne lui donnait rien;
car l’arrêt énonce formellement que le prince ne pourra en prendre pos
session q u ’après que le roi aura fait couper et enlever tous les; bois futaies
qui s’y trouvent, ce qui pourra se faire' en quatre ans ; ainsi^ dans cet ar
rêt , on ne déroge pas à l’acte de 1661 ; au co ntraire, on l’exécute rigou
reusement. Ainsi, ce prince-ne reçoit r ie n , absolument rien ; 011 lui donne
ce qui est à l u i , ce qu ’on reconnaît lui appartenir ; et le prince cède des
taillis qu ’il prétend lui appartenu1, mais qui font corps avec les forêts de
Sa Majesté. On demande si un tel acte peut être qualifié d ’étrange? L ’une
des parties donnait tout et 11e recevait rien. On ne conçoit pas davantage
q u ’on puisse qualifier cet arrêt de simple mode d ’exploitation ; il ne s’a
git pas d ’exploitation , lorsque le prince s’interdit toute espèce de préten
tions, pour lui et ses successeurs , sur des taillis q u i , dans le système sou
tenu aujourd’h ui, étaient sa propriété exclusive.
§ VI.
De nombreux vides existaient-ils dans la forêt do Tronçais, en 1G61 ?
On ne com prend pas bien quel intérêt s’attache à la solution de cette
question. Jamais l’administration forestière 11’a nié Inexistence de vides
dans
la forêt de Tronçais, soit à l’ époque d e 're n g a g e m e n t de 1661, soit
avant, soit depuis.
D’après les principes qu ’on a éinis plus h au t, la forêt de Tronçais
n’ayant pas été comprise dans l’engagement de 1G 6 1, les vides q u ’elle
peut contenir n ’ont pas pu y être compris non p lu s, car ils' ont toujours
fait partie de la forêt; ils ont été compris dans son périmètre', eiltotiré» d<*
bornes, soumis à la surveillancedel’administration forestière, et doivent
suivre le mêm e sort.
Si l’on suppose la question de principe jugée en faveur du prince, il res
terait à examiner une question de fait bien importante. Il ne s’agirait pas
de savoir s’il y avait ou non des vides dan« la forêt de Tronçais, en 1GG1 ,
mais de savoir si ces terrains réclamés par le piince aujourd’hui^ sont
identiques avec ceux qui étaient vides en 1GG1, cl à la1charge de qui la
preuve de ce fait doit cire mise.
�(
16
)
Et c ’est ici le moment de faire une observation sur le peu de confiance
que les agents du prince mettent dans les m oyenspar eux invoqués; jus
qu’à présent, ils ont soutenu que la forêt deTronçais faisait partie de l’en
gagement de 1661 , et que le prince et ses successeurs n’avaient jamais
perdu leurs droits à cette propriété ; si cela e s t , si leurs raisonnements
sont concluants, ils ont le droit de réclamer non seulement les vides,mais
encore les taillis, mais encore le sol couvert de futaies, à mesure que les
futaies disparaîtront, ce qui doit infailliblement arriver dans un temps
plus ou moins reculé. D ’après les principes qu’ils invoquaient, ils étaient
conséquents avec eux-mêmes. Lorsque dans leurs écritures signifiées en
première instance , ils élevaient cette prétention, leur confiance diminuait
à mesure q u ’on approchait du dénoûm ent; car en plaidant devant le tri
bunal de Montluçon, ils ne parlaient plus du sol en futaie, mais seulement
des taillis et des vides; devant la C o u r , ils se sont restreints aux vides ,
sans pouvoir donner aucune raison de la distinction qu’ ils consentaient à
faire. Telle est la rigueur des principes invoqués dans cette affaire , que si
les agents du prince sont fondés , ils doivent réussir pour la totalité des
forêts domaniales du Bourbonnais (il y en a cinq), et leur restriction aux
vides seuls est un non sens ; et s’ils ne sont pas fondés , ils n’ont droit à
rien. 11 n’y a pas ici de transaction possible : ou aucune parcelle de la forêt
de Tronçais n’est comprise dans rengagem ent de 1GG1 , ou le sol tout en
tier d e là forêt s’ y trouve com pris; toutes les distinctions q u ’011 voudra
faire 11e reposeront sur rien ; et on défie de justifier d ’une manière plausi.
b le la restriction au principe rigoureux énoncé en l’acte de 1GG1 .Mais les
agents du prince ont cherché 1111 autre moyen d ’attirer les vides d elà fo
rêt, en les qualifiant de terres vaines et vagues; or , disent-ils , l’acte d ’é
change de iGf>i contient les terres vaines et vagues ; donc le prince peut
aujourd’hui réclamer les vides de la forêt deTronçais qui ne sont que des
terres v a in es
et vagues : la question de droit se trouve donc transformée
en une question grammaticale.
D’abord, s i , com m e on l’a soutenu plus h a u t , la forêt de Tronçais n’ a
pas été comprise dans l’acte d ’échange , on 11e pourra pas soutenir que les
vides de cette forêt en aient été détachés pour être cédés au prince. On
entend par vide d'une f o r ê t , une pal lie du sol forestier qui 11e se trouve
pascouverte de bois, accidentellement ou par toute autre caiise , mais
tftùn’en fait pas moins partie du sol de la Ibrét.
�( ll )
On entend, en général, par terres vaines et vagues, des terrains incultes,
a bandonnés, sans clôture , à la merci du premier venu , et sans aucune
espèce de revenu productif. Un terrain clos soit de fossés , soit de buis
sons, renfermé même par des b o r n e s , cesse d ’être une terre vaine et va
gue, lors même qu’il resterait inculte pendant des siècles ; en Bourbon
nais il existe un assez grand nombre d ’héritages clos, dont une partie seu
lement est susceptible de culture, et l’autre partie couverte de rochers ou
cailloux, n’ a jamais été cultivée; et jamais l’idée n’est venue à personne
d ’appeler cette partie inculte une terre vaine et vague. Une terre vaine
et vague n ’appartenait pas à une personne privée : elle était, suivant les
différentes coutumes, la propriété ou du roi ou du seigneur féodal, ou de
la com m une sur le territoire de laquelle elle était située; mais les terrains
non couverts de bois existant soit au milieu des forêts, soit autour de la
fo r ê t, enfermés de fossés, séparés des autres propriétés par des bornes ,
n ’étaient pas des terres vaines et vagues proprement dites: ils faisaient
partie des forêts , étaient compris dans leur périmètre, et nommés foret,
com m e la forêt elle-même. Ils n ’étaient point abadnonnés au premier venu,
leur propriété n’ était pas incertaine, et il n’ était pas permis d ’y mener pa
cager les bestiaux, sans payer une redevance. Il y avait donc des caractè
res bien distincts entre ces terres vaines et vagues en général, et les vides
des forêts. Le contrat de 1GG1 concède au prince d e C o n d é les terres vai
nes et vagues du duché de Bourbonnais, c ’est-à-dire tous les terrains en
friche, non renfermés, » ’appartenant à personne en particulier, abandon
n é s; c’est là ce qu’on entendait par cette expression ; et si l’on demandait
où étaient situés ces terrains vains et vagues, on répondrait que le prince
et ses successeurs ont consenti plus de Goo actes d ’aliénation de ces sortes
de terrains. Dans l'ancienne maîtrise de Cérilly seulement, 011 en trouve
5
quatorze réalisés en iGG , 1GG8, iGG<), 1G70, 1G75, 1G8/1, 170a, 1708 ,
177G et 1 78G, comprenant des parcelles de terres vaines et vagues p ro ve
nant des com m unes d ’Ainay-le-Château, Cérilly, Saint-Bonnet-le-Désert
et Charenton ; m a i s jamais le prince d e C o n d é n’a arrenté une seule parcellesituée dans le périmètre d e là forêt de Tronçais, parce (pie jamais il
5
ne s’est cru propriétaire , jamais , pendant i/j ans, il 11 a ete cleve au
cune prétention à cet égard.
3
�( ‘8 )
Comprendre les terrains non boisés, situés dans une forêt, dans la dé
nomination générale de terres vaines et vagues, serait donner à cette ex
pression une extension contraire à l’usage, à la raison et à l’intention des
parties, manifestée par les actes qui ont suivi de près l’acte d ’échange
de 16 6 1 .
En effet, l ’ordonnance de 16*69, a r t-
titre 27, enjoignit aux grands
maîtres, en faisant leurs visites, de faire mention de toutes les places v i
des, non aliénées ni données à cens ou afleages, et d ’indiquer leur avis
pour le repeuplement. En exécution de cette ordonnance, il fut procédé,
en 1 6 7 1, à la réformation de la forêt de Tronçais, qualifiée foret royale.
Et dans le procès-verbal dressé par Jean Leferon, commissaire à ce dé
parti, et Hurault de Saint-Denis, grand maitre des eaux et forêts, on lit
dans chaque triage de la forêt de Tronçais :
i° Garde l’Àrmananche, contenant trois cents arpents, la moitié entiè
rement ruinée, sans aucun rejet, pour le repeuplement de laquelle il fau
dra repiquer des glands dans les endroits nécessaires.
■
>.°Goûte d ’Ardent, pour le repeuplement de laquelle il faudra repiquer
des glands dans les places vides.
Et ainsi de suite. Dans chaque canton de la forêt de Tronçais où se
trouvent des vides, MM. les commissaires disent qu ’il faudra repiquer des
glands, repeupler.
Or, ce procès-verbal, fait en 16 7 1, a été lu, publié à Moulins, Cérilly,
Hérisson, sans que les agents du prince de Coudé y aient formé opposi
tion ou aient élevé aucune réclamation ; il avait lieu dix ans seulement
après rengagement de 1661 ; ces commissaires devaient mentionner les
>ides engagés, et ils n’hésitont pas à dire qu ’il faut repeupler toutes les
places vides.
Donc, à cette époque, personne ne pensait que les vides d e l à forêt
de Tronçais pussent être compris dans l’acte d ’engagement de 1661, ce
procès-verbal ayant été revêtu des formalités ordonnées par les 'lois de
l'époque, et devenu loi de l’ Etat, il a été regardé par la Cour elle-même
comme étant valablement opposé à toute personne qui ne l’a point at
taqué.
Ce procès-verbal, au surplus, a été exécuté constamment, et toujours,
à quelque époque que ce soit, l’ Etat a considéré les vides de la forêt de
�( i9 )
Tronçais com m e sa propriété exclusive, et en a disposé ainsi, sans o p p o
sition de la part du prince. Ainsi, plusieurs arrêts du conseil, ren
dus à plusieurs intervalles, ordonnent de repeupler les vides de cette
forêt.
Ainsi, une décision du grand m aître, rendue en 1774» porte q u ’il
sera pourvu incessamment au repeuplement des vides de la forêt de
Tronçais.
Un autre arrêt du conseil d ’Etat, du
de
G rosbois,
3 février
1778, concède la forêt
qui se trouve tout à fait dans la mêm e conditition
que la forêt de T ro n ça is, à la charge de repeupler 196 arpents de
vides.
Un autre arrêt du conseil, du
i /j
septembre
1 7 7 9 , ordonne la
mise en coupe de la forêt de Tronçais pendant quarante années, et
décidé en même temps qu’il sera pourvu au repeuplement de 16 11
ar
pents de vides.
Par acte du 7 février T788, confirmé par ordonnance du 17 mars
suivant, le roi concéda à M. Nicolas Hambourg, dans la forêt de Tron
5
çais, l’exploitation de quarante coupes sur une étendue de n a arpents
4o perches; et, pendant o ans, la jouissance des vides existant dans les
3
triages de I .andes-les-Auches, Montaloyer et la Bouteille, pour, les coupes,
être exploitées, et les vides être employés à l’établissement des forges et
usines qui s’y trouvent aujourd’hui, e là la charge d ’ensemencer en glands,
les dix dernières années de sa jouissance, toutes les places vides existant
dans ces trois cantons. Cette concession, temporaire dans l’origine, est
devenue définitive au
moyen
d ’une transaction autorisée par une
ordonnance royale du 10 décembre
83
i u , postérieurement à la ren
trée du prince de Condé, et à laquelle cependant il n’a formé aucune opsition.
Il est donc clairement prouvé que jamais le prince de Condé 11’a cru
être propriétaire engagiste des vides de la (orêtde fronçais, et que 1 Etat,
au contraire, a toujours agi comme propriétaire exclusif de ces mêmes
vides, en les comprenant dans les biens non engagés, en ordonnant leur
repeuplement, en les concédant, soit à temps, soit à perpétuité, sans au
cune opposition de la part du prince.
La prétention qu’ il élève aujourd’hui est donc tout à fait nouvelle, re-
�( 20 )
%
I •>
#
•
poussée par le texte du contrat, par l’ exécution donnée a ce contrat, parun silence de cent cinquante ans, et par les faits nombreux qui lui sont
contraires.
Du moment que les agents du prince reconnaissent qu’ils ne peuvent
avoir aucun droit sur le sol planté en futaie, non plus que sur les taillis,
0*11 ne peut comprendre comment ils auraient des droits sur le terrain
non boisé en ce m o m en t, mais qui peut l’avoir été à une époque quel
conque ; et, dans tous les cas, ce serait encore à prouver que ces vides
qu ’ils réclament aujourd’hui sont identiquement les mêmes que ceux qui
existaient à cet état de vides en 1661, preuve qui deviendrait impossi
ble, car l’état de la forêt de Tronçaisa éprouvé de notables changements
5
depuis 1 o ans ; des cantons vides ont été re p e u p lé s, des cantons boisés
ont été coupés et attendent le repeuplement; la justice n’ aurait aucun
moyen p our reconnaître la vérité, et il est évident que la preuve testimo
niale est inadmissible.
En suivant les argumentations des agents du prince, 011 11e peut trop
s’ étonner que la demande ait été aussi restreinte, car il en résulterait que
la forêt de Tronçais, comprenant 22,000 arpents ou 11,000 hectares,
5
n’avait, en 1 6 7 1, que i o hectares de futaie; d ’où naît la conséquence
85o hectares, et qu ’en se restreignant, 011
à 5g 8 hectares, il fait don à l’Etat de 10, 25 a hectares.
que le prince aurait droità i o ,
ne sait pourquoi,
Encore une fois, pourquoi une demande aussi restreinte?
Le point de droit combattu , il devient inutile d ’aborder le point de
fait.
C e p e n d an t, deux mots, en passant, sur la demande en elle-même. Il
parait qu ’elle a été construite sur un projet de procès-verbal d ’arpentage
de la forêt de Tronçais; car, depuis l’appel interjeté , MM. les agents-forestiers ont cherché à reconnaître les parcelles de lorrains réclamées par
le P rince, et ils doivent déclarer q u ’il leur a été impossible d ’en faire
l’application sur le lerrain; ou bien 011 demande ce que l’état ne possède
p as, ou bien il y
erreur, contusion dans les confins et les situations.
On demande précisément le terrain occupé par les usines de M. Rambo u rg , terrain qui a fait l’objet de la concession de 1788 et de la tran
83
saction de 1 a ; deux domaines possédés par M. M ichel, ancien ban
quier à Moulins, par lui acquis de M. d e S in é l y , prétendus usurpés sur
�( 2r )
la forêt de Tronçais, et qui font l’objet d ’un procès pendant devant la
C o u r; d ’autres propriétés devenues depuis lo n g -te m p s propriétés pri
vées et qui ne sont plus dans les mains de FEtat.
Dans le cas ou les principes invoqués par l ’Etat ne triompheraient pas
devant la C o u r , il faudrait nécessairement une application de la demande
sur les lieux ; mais on pense qu ’il est inutile en ce moment de faire va
loir ce m o y e n , les droits de FEtat étant trop clairement établis, pour
q u ’il y ait lieu à une application.
§ VII.
Législation domaniale concernant les terrains enclos dans les forets de
FÉtat.
C ’est avec confiance que FEtat a soutenu que la législation sous l’em
pire de laquelle a eu lieu l’acte d ’engagement de 1G61 , 11e permettait pas
l’aliénation des forêts d ’une certaine étendue, non plus que des terrains ,
marais, vides enclos dans les forêts.
C ’est en vain que l'on prétendrait établir une distinction entre les
aliénations perpétuelles et les aliénations à titre d ’engagement; ces der
nières avaient les mêmes effets que produisaient les premières: l’engagiste pouvait jouir comme bon lui semblait, s o u s - e n g a g e r , échanger,
distraire, changer l’ état dos lieux. Cela est si vrai, que dans le duché
de bourbonnais, plus de Goo actes de cette nature ont eu lieu de h part
des engagistes, et le rédacteur de ce Mémoire a lui-même vendu , il y a
peu d ’années, un héritage, que son aïeul avait acquis en 177a du Prince
de Condé. Les iuconvéniens attachés aux concessions perpétuelles se
retrouvaient dans les ventes à titre d ’engagement ; et si, en prescrivant
les aliénations des places vides dans les forêts, 011 avait en vue, com m e
011 le dit dans le mémoire , d ’empêcher que les forêts royales ne fussent
grevées de servitudes intolérables, 011 11e voit pas comment une c o n
cession à titre d ’engagement n’aurait pas produit les mêmes inconvénients.
L’article
3 du titre •i']
de l’ordonnance de 1GG9, d it-o n , p rouve que
ces sortes d ’aliénations étaient permises, puisqu’il ordonne de faire men-
�•’
(•rç
(
W
0.1
)
tion des vides non aliénés ; donc , a jo u te-t-o n , les vides pouvaient
être aliénés valablement.
Cet article prouve seulement que des vides avaient pu être aliénés
avant l’ édit de 1
566 , et alors
ces aliénations auraient été respectées, des
vides auraient pu aussi être aliénés dans les petites forêts ; on sait que la
jurisprudence admettait une distinction importante entre les grandes et
les petites forêts.
Au surplus, une telle aliénation ne se présumait pas; il aurait fallu
q u ’elle fut formellement exprimée , et le contrat d ’engagement de 1661 ,
ne parlant que des terres vaines et vagues en g é n é r a l, sans énoncer nom
mément ces vides des forêts, il n’ était pas permis de comprendre ces vi
des dans les terres dont nous avons parlé plus haut. Jamais les maîtrises
n’ont entendu classer les vides des forêts dans les terres vaines et va
gues; ils n’ont jamais été compris dans les dispositions des lois de 1791 et
r 793 , et il est inoui qu ’aucune commune , sous l’empire de ces lois, ait
réclaméla propriété des terrains vides compris dans le périmètre des forêts.
Dans le Mémoire auquel on répond , on a cité un arrêté du préfet de la
Manche du 18 avril 1
83 a, par lequel un M. Joseph Constant de Place, agis
sant com m e directeur d ’une C om p a g n ie, concessionnaire des domaines
engagés à la maison d’O rléan s, a été envoyé en possession d ’un videcontenant
5ohectares environ , appelé la lande Martin,
faisant partie de la
forêt d e G a v r a y , et soumissionné par cette Compagnie, en vertu de la loi
du 14 ventôse an V I I , et on trouve une parfaite analogie entre cette es
pèce et celle soumise à la Cour.
Il y aurait analogie , en effet, si on s’en tenait au texte de l’arrêlé qui ne
donne aucun motif delà décision. La demande de cette Compagnie n’a
pas éprouvé de contestation de la part de l’ IUtat, et 011 en trouve le motif
dans leS archives de l’administration forestière; c’est que d ’après le pro
cès-verbal de réformation d e là forêt de G avray, dresse en 1666, il est re
connu que le canton Piérieux, non boisé , a toujours été séparé de la forêt
par des fossés laits de toute ancienneté ; ainsi, dès 1666 , le canton de la
lande Martin ne faisait pas partie du sol forestier, dont il était séparé par
des fossés de toute ancienneté; c ’est que l’ inspecteur des eaux et forêts
consulté en 18 'b , a déclaré que cette partie, n’avait jamais appartenu au
sol lori’slior.
�En est-il de mêmeaujourd’hui pour les vides réclamés,lorsque ces vides
ont toujours
fait
partie intégrante de la forêt de fro n ç ais ; q u ’ ils sont ren
fermés dans son périmètre, séparés par des bornes des propriétés voisi
nes, compris dans le procès-verbal de 1671 , constamment reconnus par
les agents
fo re stie rs
cédés par l’ Etat,
, soumis au repeuplement par plusieurs arrêts, co n
pour
être repeuplés. Ce moyen disparait comme tous les
autres.
§ VIII.
Les agents du prince n ’ont jamais joui des vides q u ’il réclame.
Nous avons démontré que la forêt de Tronçais 11’était pas comprise
dans l’acte d ’échange de 1G6 x. Le prince de Condé a-t-il pu acquérir
par prescription la propriété des vides qu’ il réclame ? Cette question n’est
pas même soulevée dans le M ém o ire, et cependant, elle était importante,
car en supposant que les terrains réclamés se trouvassent compris
dans l’acte d ’échange, le prince n’aurait-il pas pu perdre par la prescrip
tion une partie de ses droits?
On a énuméré plus haut les nombreux faits de possession exercés sur
ces terrains par l’Etat.
Ilssontdélimitésen i
36c), 167001
1671 , reconnus com m e faisant par-
partie d e là forêt de T ro n ça is, et soumis au repeuplem ent, com m e n ’é
tant pas aliénés, ni engagés , et le procès-verbal qui le constate est lu, pu
blié aux audiences des maîtrises de Moulins, Cérilly, Hérisson, sans ôpposilion de la part du prince ni de ses agents, dix ans après l ’acte d ’é
change.
Ils sont séparés par des bornes des propriétés voisines et enclavés dans
le périmètre de la forêt.
Ils sont, à différentes reprises, par des arrêts du conseil, soumis au
repeuplement. Des parties de la forêt sont vendues, et les adjudicataires
soumis à repeupler.
IJ11 aménagement est fait dans la forêt de Tronçais en 1779, et on sou
met l'adjudicataire à ensemencer les vides.
En 1788, une concession est faite à M. Hambourg; on lui donne pour
�( 24 )
trente ans, tous les vides de trois cantons de la forêt de Tronçais, à la
charge par lui de les repeupler dans les dix dernières années de sa co n
cession ; et le prince garde le silence.
83
Cette concession, temporaire dans l’ origine, devient définitive en i a ;
et le prince ne réclame pas.
En présence de tous ces faits, qui indiquent une propriété pleine, ab
solue, une possession publique, paisible, exclusive, non interrompue,
quels sont les faits de possession que peut invoquer le prince ?
Pendant une période de cent cinquante ans, il a aliéné toutes les terres
vaines et vagues du Bourbonnais; il n’a pas touché un seul des vides de
la forêt. Jamais les gardes ne se sont introduits sur ces vides; jamais ils
n’ ont fait une setde démonstration de propriété; jamais les agents les
plus zélés du prince n’ont élevé la voix pour combattre les prétentions
de l’administration des domaines, qui se disait, dans des actes solennels,
propriétaire exclusive de la forêt ; jamais ils ne se sont opposés à aucune
mesure prise par l’ administration, et tendant à diminuer l’étendue de
ces vides ; il ne se sont jamais récriés contre le repeuplement, contre les
concessions temporaires "ou perpétuelles
de ces vides.
Quels sont
les faits de possession qui ont été plaidés, tant en première instance
qu’en appel ? il n’y en a q u ’ un seul : le prince a joui du droit de
pacage.
Le jugement du tribunal de Montluçon a fait justice de ce moyen, et
les motifs qu ’il en a donnés ne souffrent pas de réfutation ; mais on ne
peut s’empêcher de faire une réflexion.
Le prince de Condé a joui du droit de pacage depuis l’arrêt de iGya
jusqu’en 1792, époque de son émigration.
Il ne l’exeroait pas par lui-même, ainsi qu ’on l’a dit plus hau t, mais
chaque année les ofliciers de la maîtrise donnaient en adjudication le
droit de pacage , panage et glandée pour toute la partie défensable
d e l à foret de Tronçais, futaie, bois taillis et vides, sans distinction,
et le produit était versé dans la caisse du prince, ou partagé entre lui
el l’ Ktat.
Or, ce revenu se composait, comme 011 vient de le dire, du pacage
et de la glandée ; la glandée y entrait chaque année pour les deux tiers
uu m oins,car c ’est là le principal revenu; et le pacage des vaches dans
�fri*»
la forêt est peu important. Or, ces deux tiers ayant pour objet le pro
duit des glands, auraient dû conférer au prince de C ondé un droit de
possession sur les chênes qui produisaient ces glands; et cependant 011
convient q u ’il n’en a aucun. Le tiers restant représentait le droit de p a
cage sur tous les cantons défensables de la forêt ; et en supposant q u ’il y
eût sur 11,000 hectares 4,000 hectares non défensables, et c ’est beaucoup
dire, restaient 7,000 hectares dont le prince retirait tout le produit;
comment donc n ’a-t-il pas acquis la possession des futaies et des taillis
sur lesquels s’exercait le droit de pacage? Et on convient qu ’ il n’en a pas.
Et comment donc ce même droit, qui ne peut rien opérer sur les futaies,
rien sur les taillis, peut-il operer un droit de propriété sur
5g 8 hectares
seulement, laissant en dehors 10,402 hectares sur lesquels il s’est exercé
simultanément? Comment un fait de possession, exercé sur la généralité
d ’ un immeuble, peut-il créer un droit sur la dix-huitième portion, sans
en créer un semblable sur les dix-sept autres, lorsque, d ’ailleurs, il a
été exercé de la même manière sur le tout collectivement? Pourquoi la
possession frappe-t-elle spécialement et exclusivement sur les 598 hec
tares réclamés, et ne frappe - t - elle pas sur le reste? Ou le prince de
Condé a prescrit le tout 011 il n’a rien prescrit. Il faut dire, avec vérité,
qu’ aucun fait de possession n’a été articulé contre l’Etat, et qu’il est d é
montré, au contraire, que l’Etat a toujours possédé exclusivement lés
vides dont il s’agit depuis 1G61 jusqu’en 1792, époque de rémigration
du prince.
Quant à la possession que ce prince a exercée depuis son retour dé
f émigration, c’est-à-dire depuis 1 8 1
5 ju squ’en i 83o,
outre q u ’elle est
la même qu ’avant la révolution et qu ’elle ne s’est jamais exercée spé
cialement sur les terrains réclamés, on peut dire q u ’elle a été le résultat
de l’erreur; il suffit de lire la correspondance de l’agent du prince avec
l'administration, pour être convaincu qu ’on a cru l’agent du prince sur
sa parole; q u ’on 11c* s’est pas donné la peine de lire l’acte d ’échange de
1GG1 ; qu ’on a agi avec incurie et par le seul motif que le prince perce
vant , avant la révolution, le droit de p acag e , devait le percevoir
après ; 011 ne peut pas se faire un litre d ’ une telle condescendance , et
d ’ailleurs, elle 11e peul servir à r ien , d’après les raisons déduites plus
haut.
A
�riç)j
< ,0 )
§ ix.
La loi du 14 ventôse an 7, peut-elle être invoquée par le prince?
Pour pouvoir invoquer la disposition de cette loi, il fallait être en
possession du domaine qu ’on désirait conserver ; or, on a vu qu ’en
1792 le prince de Condé n’ était point en possession des vides de la forêt
de Tronçais; que l’Etat n’avait jamais cessé d ’en être propriétaire, d ’en
jo uir à titre exclusif, sans opposition de la part de personne : donc il n ’v
a pas lieu à l’application de cette loi, non plus que de toutes les autres
lois rendues sur la matière.
La loi du
5 décembre
i
8 i/ j n ’est pas plus favorable aux prétentions
du prince. Cette loi remettait aux émigrés les biens non vendus dont ils
avaient été dépouillés par l’effet des lois révolutionnaires. Eli bien ! le
prince de Condé, avant son émigration, ne possédait pas la forêt de 'Fron
çais, ni aucune partie de cette forêt ; il 11e possédait pas notamment les
vides existant dans les trois cantons de Monlalover, les landes Blan
ches et la Bouteille, puisque c ’était M. Hambourg qui en était le déten
teur en vertu de la concession de 1788. Ce 11'est pas en vertu des
lois
sur l’émigration que ces terrains ont
de l’Etat : donc la loi du
5
décembre 18 1
fait partie du
4 n’a pas pu
domaine
en ordonner la
restitution.
I)e tout ce qui précède, il résulte clairement :
i° Que la forêt de Tronçais n’a jamais fait partie de l’ acte d ’echange
de 1661, soit parce qu’ elle ne faisait point originairement partie du duché
de Bourbonnris, mais qu’elle appartenait aux anciensducs, à litre privé,
sans donner lieu à aucune redevance envers le roi, et que, confisquée
sur le connétable de Bourbon et réunie au domaine de l’ Etat, elle 11’cn
a jamais été séparée depuis; soit parce que les dispositions de l’édit de
5
1 (jf> s’opposaient aux aliénations des grandes forêts; soit enfin parce
que les actes qui ont suivi ont fait connaître <|ne le roi s’était réservé des
forêts autres que celles cédées au prince.
u° Que l’arrêt dérèglem ent de 1G7U, en concédant au prince de C om b
le droit de jo uir des pacages dans les forêts du roi, fait suffisamment con
naître que ce prince 11’élait pas propriétaire de ces forêts, piiisqu’aulre-
�( 27 )
ment on lui aurait accordé un droit que nul ne pouvait lui refuser, et
dont la concession exclut nécessairement toute possession antérieure.
3° Que l’arrêt du conseil de
1688 a fixé définitivement et sans retour les
droits du prince dans les bois et iorêts qui couvraient le Bourbonnais , et
que le prince 11e pouvait rien réclamer dans tous les bois et forêts qui ne
se trouvaient pas compris dans cet arrêt.
4° Que les vides existant dans
gagement de
t 661
la forêt de Tronçais au moment de l’en
, ne sont rien moins que les vides actuels survenus par
5
les exploitations qui ont eu lieu dans la forêt de Tronçais depuis 1 o ans.
5° Q u’il y a une différence entre les vides d ’une forêt et les terres vaines
et vagues; que les vides d ’ une forêt compris dansson périmètre, entourés
de fossés ou séparés par des bornes des propriétés voisines, délimités
dans un p rocès-verb al, font corps avec la forêt dont ils dépendent, et ne
peuvent jamais être confondus avec des terres vaines et vagues, situées
ç à e t l à , non cultivées, non closes, non abandonnées au premier occu
pant , et qu’ 011 ne peut pas confondre les vides réservés par la législation,
avec les terres vaines et vagues cédées au prince par le contrat de 1661.
G0Que jamais le prince de Coudé 11’a élevé aucune prétention sur la fo
rêt de Tronçais, non plus que sur les vides qui en dépendent; que depuis
1761 ju squ’à 1792, l’administration des domaines a toujours exercé sur
cette forêt le dominium plénum sans restriction, sans réserve, au vu et su
des
agents
du prince, sans aucune opposition de leur part.
7“ Que le prince de Condé n’a jamais exercé aucun acte de possession
u t i l e sur les vides qu’ il réclam e, et que la jouissance des droits d ’ usage
qu ’ il invoque comme un fait a l’appui de sa possession , est tout à fait insi
gnifiant , puisqu’il portait sur la généralité de la forêt de T ro n ça is, tandis
que les agents du prince reconnaissent que ce fait 11e peut avoir aucune
influence sur les dix-sept dix-lmilièmes de la propriété , et qu ’il suit né
cessairement de là qu’ il ne peut en avoir davantage sur l’autre dix-hui
tième.
8" Que le prince de Coudé n’étant pas, n’ayant jamais été engagiste de la
forêt de Tronçais, ne peut invoquer les dispositions de la loi du i/j ventôse
an VII, non plus que des lois postérieures, et que sa demande doit être
rejetée.
<)" l’nfin que le prince de Condé n’étant pas en possession des terrains
�* v»,
( 28 )
q u ’il réclam e aujourd’h u i, au m om ent de son ém igration, et n’en ayant
pas été dépouillé par l’effet des lois révolutionnaires , ne peut d ’aucune
m anière invoquer la loi du
5 décem bre 1814 qui s’est bornée à restituer aux
émigrés leurs biens non vendus, réunis au dom aine de l’Etat, par les lois
sur l’ém igration.
On aurait pu étendre beaucoup plus loin la discussion de la dem ande
form ée sous le nom du prince, mais on a cru devoir se borner à répondre
au M émoire im prim é, sans date ni signature, sous le nom de S. A. R . Lors
de la plaidoir i e qui aura lieu incessamm ent, on se réserve de com battre
les m oyens qui seront présentés d ’une m anière plus com plète ; les droits
d e l’ Etat sont certains, clairs, positifs ; ils reposent sur des actes, sur des
faits précis et incontestables. Les défenseurs d e l’Etat prennent l'engage
m ent de suivre leur adversaire sur tous les terrains où il voudra les co n
duire , de répondre à toutes les objections qui leur seront faites, et de dé
m ontrer que le jugem ent du tribunal de Montluçon est à l’abri de toute at
taque.
Montluçon , 1er juillet 1842.
M O U L IN S T Y P O G R A P H IE D E P A
D ESN OYERS
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Aumale. 1842]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
séquestre
émigrés
forêts
destructions révolutionnaires
droits féodaux
Condé (Prince de)
eaux et forêts
exploitations forestières
glandée
droit de parcours
pacage
domanialité
possession des vides
élevage porcins
triages
forges
Description
An account of the resource
Titre complet : Réplique aux observations faites pour Son Altesse Royale Monseigneur le Duc d'Aumale, appelant, contre le domaine de l’État, représenté par monsieur le préfet de l'Allier.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Typographie de P. A. Desrosiers (Moulins)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1842
1661-1842
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2925
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2924
BCU_Factums_G2926
BCU_Factums_G2927
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53611/BCU_Factums_G2925.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Bonnet-de-Tronçais (03221)
Tronçais (forêt de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Condé (Prince de)
destructions révolutionnaires
domanialité
droit de parcours
droits féodaux
eaux et forêts
élevage porcins
émigrés
exploitations forestières
forêts
forges
glandée
pacage
possession des vides
séquestre
triages
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/22/39342/BCU_Recherches_sur_les_proprietes_medicales_R75323.pdf
05f1876ca64f8e86cc392d1bedc29aa7
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RECHERCHES
SUR LES
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PROP1\IETES MEDICALES
DES EAUX ~,[NÉRALES
DE
TllERMALES ET FROIDES
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otUibrcin ùr 1'1JjospÎrc bc lUttrot , ( ecanlol),
Nulle uutre 1art on ne saurait. trouver aulant de
ressources pour un grand Etablissement thermal , cL pcuH\tre n'y u-t-il qu'il le vouloir pOUl'
que Cbuudesaigucs, uujourd 'hui si négligc!e, devienne un jour le Carlsbad de la l 1rancc,
( M. DEnTLlAND, - Recherches sur 11s eaux
dt! 1Jlonl-cl' Or, page 770 -1823, )
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Nulle uutre 1art on ne saurait. trouver aulant de
ressources pour un grand Etablissement thermal , cL pcuH\tre n'y u-t-il qu'il le vouloir pOUl'
que Cbuudesaigucs, uujourd 'hui si négligc!e, devienne un jour le Carlsbad de la l 1rancc,
( M. DEnTLlAND, - Recherches sur 11s eaux
dt! 1Jlonl-cl' Or, page 770 -1823, )
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Qui manel in palrifl et palriarn cognosccrc lcrnn it,
Is mihi nOD ci vis , scd peregrinus cril. ( D ELAunuB. )
�AVANT-PROPOS.
E écrivant ces recherches, je n'ai point
eu la prétention de faire une monographie complèle sur les Eaux de Chaudesaigues. J'aurais regardé une pareille œuvre
comme au-dessus de mes forces, et j'aurais reculé devant J'enlreprise. Frappé de
l'oubli oll se lrouvenl ce Eaux admirables, j'ai voulu seulement rappeler sur
elles l'allenlion pubJÎllue qu'elles avaient
captivée un inslant , il Y a plusieur années. J'aurai aU inll but que j me suis
proposé, i mon rai ble travail provoque
la création d'un livre plu digne de c
�VI
beau sujet. Je prie donc le lecteur de considérer les faits contenus dans les pages
qu'il va parcourir, non comme l'expression
complète des vertus médicales des Eaux
de Chaudesaigues, mais comme des matériaux d'attente destinés à servir à la construction d'une œuvre oll ces verlus seront établies avec lout le développement
qu'eUes comportent.
�RECHERCllES
sun
LES
PROPRIÉTÉS MÉOlCUES DES EAUX DE CIUUDESAIGURS.
--QCouaitléloatious llréliluiuaires .
Depuis que le bien~êtr
matériel est devenu plus
général, que l'aisance s'est répandue par la division des fortunes, l'accroissement de l'industrie el
l'essor du commerce; depuis, surlout , que les
voyages sont devenus faciles el commode pal' la
création de ce vaste réseau de belles routes qui
couvre la France, les Eaux minéral s ont vu
affiuer de toute part des malades et des curieu ' .
La science a répondu à cet élan universel, et l'on
a vu les aux de toules les natures, analysées par
la chimie el leurs erfels thérapeutiques observés el
l' cueillis avec soin pal' des fi 'dccin habiles. Sou
leur sUl'veillanc el sou leur direction, le succè
obtenus ont été i llombreu, et si éclatant que le
Couvernement ou des compagnie industrielle se
sont empressés de compléter par des établissements
�-8aussi utiles que magnifiques ces richesses que la
nature a distribuées, avec tant de profusion, à
notre patrie. Quoique les travaux publiés par les
médecins sur les eaux minérales soient nombreux: ,
quoique beaucoup d'enlr'elles soient devenues le
sujet de savantes éludes et d'admirables constructions, il en est encore quelques-unes qui, aussi
riches et aussi salutaires, sont restées plongées
dans un injuste oubli. Parmi celles qui, pr leur
position lopographique , par le degré de leur thermalilé, par leut abondance, étaient dignes de
l'attention du Gouvernement, les Eaux de Chaud saigues doiv nl être placées au premier rang.
Un sôjour d plu ieurs semaines dan cette ville,
pendant d lIX années con écu lives , t l'exercice
de la médecine dans une onlrée peu "Ioignée de
ce tuermes, m'ont permis d recueillir quelques
faits ur lesqu 1 est basée une partie de e lravail.
L e[jtimeot de mon infériorité cL ma po ition de
méd ci n, 'trang r à la 10 alité, m'eussent mpêcb6
dl' livrer à l'impression, si je n' u SC con idMé
que, bi fi que l'aU olion publique eM été iL ée,
oil par le soins de 1\1. Earlier, ancien dépulé du
Canlal (1) , oit par les analyse chimique deMlH.
(1). On IlO saurait s' imaginer combien cct honorable citoyen Il
déployé de zélo (lour fixer sur Choudesnlgucs l'att nlion du Gouvernement ol pour obtenir dos savallts l'analyse clJimlcluo do ses
Enux.
�-9Berthier (1) el Chevallier (2), soit par le témoignage
imposant qu'avaient rendu de la vertu de ces eaux
des savants aussi dislingués que 1\11\1. Darcet (3) ,
Alibert (li.) et Bertrand (5), néanmoins les médecins
devaient rester encore dans l'incertitude sur les
cas où elles peuvent être prescrites avec avantage.
Peu de travaux, propres à vulgariser leurs propriétés médicales, ayant été imprimés, j'ai pensé
qu'il élait d'un médecin désireux de se rendre
ulile , et d'un bon citoyen d'ajouter de nouveaux.
matériaux. à ceux qui existent déjà, afin de rendre
moins imparfaites les notions qu'avaient pu l'épandre jusqu'ici quelques publications remarquables pal' le talent avec lequel la partie chimique y
esttrailée , mais où la partie médicale a été omise
ou ne s'est présentée que comme acce soire.
1\1ou but, dans ces recherches, a été d'étudier
les effets physiologiques ellhérapcutique des caux
de Cbaudesaigues , aussi ne dirai-je rien de la partie historique, comme ne présentant qu'un intérêt
très-secondaire. 11 ne s'alTit point pour moi de savoir ce que furent
de Chaudesaigues.
l e~rmcs
(il'
Annales d smilles. j 820.
(2 . Essui sur Cllaudesaiguos , in r~o.
(3 . loUre udressée au minislro de l' inlorieur, en 182G.
4 . 1!:lérnenls de Thérapeutique, tome 3 , pa go 382.
. l\ccherches sur Ics Eaux Thermales du 1\10111-d'Or.
~5
2
�-10Que, dans des temps anciens, ils aient eu une
grande célébrité, peu importe aux malades de nos
jour
~ J que
la pbrase tant citée de Sidoine Apollinaire (1) soit applicable à Cbaudesaigues ou au
Mont-d'Or; que Savaron, le père Sirmond, et
Legrand d'Aussy (2) aient lort ou ('ai80n , je ne
chercherai point à le démontrer; je la is8erai aux
médecins inspecteurs de ces eaux ces savantes discussions (3) , et moi, sans me préoccuper de ce
, je lâcherai de faire connaître ce qui
qui fut (~)
exisle aujourd'hui et ce qui peul être un jour. Je
(1 ). Sidoine ApO llin uire, dans sa lellre il so n ami Aper ou
Aprus, s'exprime aillsi: cc Calcnle. et nun c Jla'iw, le sca"ri cacc yernnlirn 1'I1clola pumicibus aqu3 sulruris nique je 'or08is ne
cc philisiseontibus Innguidis rncdi cubili piscillu deloclal. » ( Edi lion
avec commenlaires par Jcan-Daptisle Pi c. Uv. 5, Icare U " page
1SG. ) ,
(2) . Notice SUI' Chaudcsaigllcs ]laI' M. Dcssa urct ct l'ouvrago
cilÔ de 1\(, Uertrund.
(3). M. Dorlrnnd applique au Mont-d'Or la phrase do J'Ev()que
de Clermont, ct 1\1:. Grossal, dan s son mlÎmoire inédit, la revendi que ]lnur haud esaigur,s.
(<'1) . Dans des fouilles l'aile l, Chaudesaigncs . on Il trouvé dcs
rc tes d'un 'ien établisse ments thormaux. Celle d 'collverte d'a nliques pi scines ct de monnnil's rOllluincs no prouve polilt que 1 s
l'olnoin cussent rcconnu dan s 'cs caux des propriétés curatives
co nt re cl s lIancti~
s ct "l'rminces; ellc étublit sO ul ment <tu ' ils snl'aient mi ux que 1 s inrligcn s uUliser les ricllesses des pays conquis,
Ils aVllient pousséjusqu'ùl'nbus l' usuge d 'S boins, 'tr.ellc hnbilude
fit qn ' i1 ~ ülov orC nL, pros des sourc s Ihel'1110les , des Illonulncnls
dOllt on fié 'ombre chnque jour de mngnifiques t/(Ihris, L'étude Ihérapolltiquo /1 été une œuyro resc rvéo 'lUX m Idccins modernes ; l'u lIliquité ne leur a loi 56 aur.un jalon pour les gui" r dOlls ces rechercll es,
�-11terminerai là des con idérations préliminaires déjà
assez longues pour une œuvre que je n'ai pas la
prétention de renù re complète. Je Ile dirai donc
rien sur les généralilés relatives aux bains, douches, elc. , ces questions ne pouvant êtrc convenablementtrailées que dans des ouvrages spéc iaux.
De plus, j'ai lOUjOU1'S regardé comme une superfétation qui peut plaire au , gens du monde, mais
qui nuit à la science, ces digressions composées
de réflexions SUI' la philosophie, l'hislo ire , la politique, et dans lesquelles l'imaginali.on du médecin
fail de giganle ques effort pour prouver que les
fables du Cygne de Léda, du taureau d'Europe,
elc., sont d'in génie uses fictions qui n'ont d'autre
but que de faire re sortir toute l' utilité de bains
dans la conserva lion de la san té. Quelque médecins hydrologue ,il est vrai, ont interrogé L'histoire cl n oul tiré des considérations inléres ante
l)a1' le talenl avec lequel il les ont pré entées.
Pour moi, j'ai pen é ne pouvoir bien remplir lu
lâche que je me uis impo ée, flu'en remplaçant,
dans un ouvragc d'une étendue 'irconscritc, les
aper{~us
trop génél'aux par de fails d"ob crvation
spéc iale .
�12Situatioll «le CJhall«lesaigues. - PrOltriétés
Ithysiqucs, A.nalyse elaillli(lUe tle ses Eaux.
- Usages tlOlllestiques.
Les Eaux Thermales de Chaudesaigues sortent
par d'innomhrables points du Cond d'un très-étroit
bas in où a été bâtie la petile ville de ce nom.
Celle gorge, arrondie en entonnoir, est formée
par d'arides montagnes qui déplaisent par leur
monotone uniformité. Elle n'est du l'CS le ellemême qu'un de enfoncement d'un aulre bassin
plus vaste, circonscrit, à 1'9 uest ct au nord, par
les montagnes du Cantal, au roidi, par celles
d'Aubrac, l à )'e l cl au nord, par la série des
monts gran iliclue appel ~s Margeride.
A Cha.udesaigues la nature emble inerle ct
frapp ée de torpeur. On n'y vo it aucun vestige de
celle virrueul' de végétation qui caractérise les
roontaO'ne vol anique voi ine. De bruy 1re ,
de genêt croisse nt sur un 01 maigr , à trav r
lequ 1d s roche schysleuse monlr ntl 'urs arNes
dépouillée. Peindr' cc pelit valloll av c de brillant couleurs, lui donner de forme attrayanle ,
le tapis el' d prairi s riant· l fleurie , trouver
dans les mau sades in 'galité de ses montagn sc
nccidenls du so l qu'on a appelés de velle horreurs,
�-13parce qu'ils font naître de grandes émotions par
leur caractère grave et majestueux, par le souvenir de déchirements et de convulsions dont ils
sont les témoins irrécusables , ce serait mentir ou
se faire une étrange illusion. Toutefois, la parlie
du sud présente un aspect moins allristant. L'œil
se repose agréablement sur quelques verles prairies
enlourées d'arbres, et sur un bois qui couvre le
pendlant d'une colline cou ronnée par le château
du Coufour.
Sans doute, quand on voudra s'éloigner de la
ville, on pourra trouver, comme dans tous les
pays de montagnes, des sites pilloresques, comme
on en voit un fort connu à la côte de Lanneau (1).
Ce chemin, lracé dans le gneiss el le mica-chyste (2) d'un rocher presque perpendiculaire, donne
une idée de la puis ance de l'homme contre les
ob taclos qu'oppose la nature aux effort de son
génie. La Truyère, qui arrose le pied de celle
montagne, offre SUi' SeS bords des tableaux quelquefois sauvages, mais toujours imposants . Celle
rivi ère qui, pendant l'hiver, è l un lOl'l'ent impétueux , paraît s'être creu é son lit par de loug et
(1.) Voyez Legrand d'Aussy. Voyage en Auvergne et ln Notice
de 111. Dcssaurcl.
(2) Description historique ct scientifique du Cnntal , par 1\1. J. n.
Douillel.
�-t4puissants efrol,ts, à travers les Ilancs les plus
durs des roches primilives.
Si encore on s'élève sur les hauleurs qui dominent la ville, on voit un vaste panorama de montagnes se déployer au regard, et la variété des sites que 1'00 contemple fait diversion à la disgracieuse uuiformité des collioes qui forment le vallon.
La situation de Chaudesaigues est heureuse pour
un établissement san itaire. L'air y est pur comme
dans lous les pays montagneux; l'atmosphère n'y
est jamais chargée de ces miasmes qui l'codent un
climat insalubre. Sa position, abritée des vents
d'ouest qui règnent si souvent dans le Cantal,
l'end sa température douce ct égale, ct fait que les
malades peuvent sc livrer à un exercice salutaire,
ans redouter les inconvénients des variatiolls trop
brusques de température. De plus, pour créer
d'agréables promenades, il suffirait de planter
d'arures les bords de routes de Hodez, de ainLFlour, de aint-Ché ly. Cc omurages permettraienL
aux malade d'aIl ,)' , Cil s'él vant sans l'fort par
une pente peu rapide, l'espirer SUI' les hauleun; Utl
ail' moin ' chaud, cL savourer le plai il' qu'on
éprouve à projeter au loin le regard, lorsqu'on
vient de quiller un lieu où il e t borné. Le soir,
lorsque le baiO'neur doit redoul r l'air vif de
�-15points élevés et qu'il ne doit plus gravir les
coteaux d'alentour ~ il pourrait trouver au cenlre
de la ville des promenades plus abritées. Les quais
qui bordent le ruisseau convenablement entrelen1ls
et parsemés de siéges, deviendraient un lieu de
réunion où l'on passerait quelques instanls, en
quiltantla LabIe, avant de rentrer dans les salons
pour y terminer la soirée,
Ce n'est là qu'une légère esquisse de ce que l'on
peut faire actuellement, sans de grands frais; car
la créalion d'uu grand établissement entraînerait
des améliora lions plu important .
En outre, le pays abonde en gibier. La chair du
moulon conserve l'arôme du thym qui le nourrit,
et devient un mets aussi sain que recherché. Le
poisson, ct Cil particulier la truile, est commun
daos le ruis eaux de environs, Cl des communicalions faciles avec le midi permellent de fairo
arriver des vins do flualité ct des f,'uits excellent.
Les sources thermales ont remarquables par
leur abondance, pal' J haut degré de lem chaleur,
par leurs propriété médici nal s.
La sourc' du Pal', la plu abondante comme la
plus chaude, naît à la IJase de la montagne ap-
�-16pelée Lajarrige, et domine la ville de telle sorte
qu'elle peut être conduite partout où l'on voudrait
bâtir l'Établissement thermal. Située dans un étroit
carrefour, celle fontaine, précieuse' et admirable
richesse, n'a reçu aucun des ornements que l'art
lui devait. Elle coule sur une simplo goullière de
granit, et se déverse dans un aqueduc couvert, à
travers lequel elle va mêlel' ses eaux brûlantes aux
110ts glacés du ruisseau. Le volume de son jet, qui
étonne l'étranger qui la contemple, n'est cependant
que la moilié de la source toute entière, dont
l'autre partie sert en été à ('usage des bains, ct en
hiver à récIJauffer les demeures des habitants.
D'après le observation de 1\1. Chevallier, elle
donne 230,"·00 litres en vingt-quatre beufes (1);
Sa température est de quatre-vingts degrés centigrades; elle varie cependant entre 79 0 el 81 0 ,
L'ouv l'lure pal' laquelle elle 'échappe est tapissée
par un d' pot ocracé dont l'analy e il été faite par
plu ieur chimistes. D'allrès MM. Chevallier,
LonCTchamp ' ct Cavenlou, cc dépôt serait cxclusivem -nl formé pal' du su lfure de fer, cL M. Berthier ,'aurait trouvé composé de cal'bonale de
chau ,' , d'oxyde rouge, de fcr, de silice, de carbonate de fer (2) .
(1) E sni sur Chnudcsnlgucs .
(2) Podovigoo , Th6so de 1833 , pago 13.
�-17La source de l'Estende est aussi très-abondante.
Elle naît SUI" le bord du ruisseau et sa posilion plus
basse la rend moins aple à être ulilisée. C'est une
portion de ceUe source qu'on a conduile dans la
cuisine de l'hospice où les buveurs vont la prendre
et où elle est également employée aux usages domestiques de l'établissement. On a calculé qu'elle
donnait environ trenle-quatre litres par minule ou
deux mille quaranle litres par heure . L'cxamen
chimique de ses Eaux a démonlré dans sa composition une peti le différence avec ceUe des autres
sources: je la signalerai plus loin. Dans son voisinage exisle celle de la Grolle-du-Moulin, remarquable par le lieu où elle sort el par l'énorme dégagement de ,gaz qui sc fait li sa surface. Ces deux
sources ont entr'eUes une corrc pondance telle
que, lorsque la source de L'Eslende donoe 70 0 ,
celle de la grolle marque 60 0 , ct, lorsque la première manJue 720 , la seconde donne 620 •
Dans ce même lieu, on observe un phénomène
des plus admirables: on voil de Lous les poinls du
ruisseau urgir de nombreux filets d'cau lhermale
avec dégagement gaz cu, ,et i L'on plonge la main
dans l'cau du Remontalou (1) , on est étonné qu'en
(1) Nom ùu ruisscau qui travcrse Chauùesuigues.
3
�-18gratlanlle sable de son lil, à uu pouce de profondeur , on le trouve tellement cbaud qu'il est impossible d'y endurer le doigt. Cc fait si curieux,
joint à l'existence de nombreuses sources d'cau
thermale dans les différenls points de la ville, porle
à penser qu'elles proviennent toutes d'un ré ervoir
unique, et qu'arrivées sous le sol, elles s'y font
jour par toules les fissures qu'il présenle. C'est par
la longueur plus ou moins grande du trajet que
chaque filet d'cau lhermale parcourt, qu'on peul
expliquer la différence de leur température. Ainsi,
l'on voit à l'hôteL Felgèl'e le remarquable phénomène de lrois sour e voi ines dont ['une est froide,
l'autre Liède cl la lroi ième fort chaude. 11 naît
encore dans 1 s maisons ùu même quarlier des filet nombreux ct importanls par leur volume el
leur lempérature. n a calculé que tonles les
sources tlt rmales, indépendamment de celle du
Par, donllelll cent qllalr -villgl-sept litr par
minule : c qui porle la omme totale fournie en
vingt-qualro heures à l'énorme quantité de cinq
cenl qualre-vinITl-dix-neuf mille sL ccnl flnutr vioITls litre (1).
(1) Projet d'un Elnbllssemcnt thermal il Chaudesa igues. nrochure pllblléo [lor ordre de M. 1 préfet Dclnmarro.
�-19Ces Eaux sont limpides. sans odeur, fades au
goût, onctueuses au toucller. 1\1. Chevallier rapporle qu'à certains jours, et sans doute sous certaines influences atmosphériques, les eaux de
l'Estende donnent lieu à un dégagement d'hydrogène sulfuré. J'ai observé moi-même, en l'estant quelques minutes dans les cabinels d'étuve,
que, par moment, il s'exhale du tuyau qui conduit la vapeur une odeur bitumineu e. Ce fait
s'accorde bien avec le résultat des travaux de ce
chimiste qui a constaté que l'éther, versé sur le
résidu de l'évaporation d'une certaine quantilé
d'cau thermale, dissolvait une matière qui, l'éther
s'étant évaporé, restait blanche et avait une odeur
bitumineuse. Ce chimiste lui trouve de l'analocrie
"
avec la pellicule irisée qu'on observe aux sources
voisine du moulin du Dan. 11 pense que celle
matière bitumineuse, saponifiée pal' les els alcalins, e'l di soute dan l'au. Ou voit dan le
tableau suivant le résultat de son analyse.
( Voù' le Tableau d'auh'c pari.)
�-20Eau. - Un litre .
SUBSTANCES
MI:SÉHALES.
Molière organique. . .. traces. (races. (races. traces.
Molière bitumineuse . . . . 0,0060 0,0060 0 ,0060 0,0060
Chlorure de magnesium .. 0,0060 0,0060 0,0067 0,0060
Chlorure de sodium dissous
par l'alcool . . . . . . . 0,0051> 0,0052 0,0055 0,001>7
Silice disso ulO par l'alculi. 0,0230 0,027fl 0,0285 0,0282
Sulrate de soude . . . . • . 0,032ii 0,0000 0,0000 0,0000
Cblorure <le sodium . . . . 0,1 2(;30,12300,12700,1300
SOlls-carbonate de soude .. 0,3020 0,1:)030 0,i.i020 0,50 15
Oxydo de fer . . . . . . . . 0,0060 0,0035 0 ,0057 0,0060
Carbonate do chaux . . . . 0,0160 0,01.70 O , O'~(j
O,~60
Carbonute de magnésie.. . 0,0080 0,0077 0,0070 0,0080
Sili ce . . . . . . . . . . • . 0,0800 0,0803 0,0800 0,0815
Chaux combi née ù lu silice. 0,0020 0,0017 0,0020 0,0013
Traces de sels de 11olosse ct
perto ...• .• . . . . . 0,0036 0,0333 0,032H 0,0310
----0,0378 0,031)8 0,()30S O,OH!> 1
1\1. Chevalli r a de plu con laté qu la source
du Par conliclit une p lile quaotil· de oufre
qui n'e t pa démontré par les réaclifs, mais
qui, en passant il l'élal d'l1ydrosulfal d'ammo-
•
�-2tniaque par l'action de la chaleur, peut être décelée au moyen de la distillation.
Qu'il y a loin de cette composition indiquée
d'une manière si précise à celle qu'assignait à ces
caux Duclos, conseiller et médecin ordinaire du
Roi (1) ! Le chimiste du 17 e siècle se bornait à reconnaitre dans l'eau thermale de Chaudesaigues
une matière mucilagineuse, semblable au frai de
la grenouille et un sel nitreux alcalin. La chimie
était alors dans l'enfance; depuis, celle science a
fait des progrès aussi rapides qu'étonnants ct en
fera problablement de nouveaux. Qui donc oserait
affirmer que l'analyse de 1\1. Chevallier ne paraîtra
pas à nos neveux aussi incomplète que nous le
semble aujourd'hui celle de Duclos?
L'espèce et la quantité des principes minéralisaleurs des eaux qui nous occupent les ont fait comparer à celles ùe Plombières, sur lesq uelle clic onl
l'avantage de leur haute temp"rature ct de leul' situation au centre de la France. Ne doit-on point
pen cr que le lherme du département du Canlal
sonl destinés à devenir au moin aussi célèbres qu e
ceux du département des Vosges?
(1) Obscrvation sur Ics eaux minérales de plu ieurs provi nces
do la France, raites en l'académie des sciences Cil "onnée 1670 eL
1071 , pal' Duclos, conseiller ct médecin ordinalrc du Roi.
�-22Voilà ce que la nalure a fait pour Chaudesaigues.
Voyons maintenant comment les hommes ont utilisé jusqu'aujourd'hui celle précieuse richesse.
Elle a été appliquée aux usages domestiques •
puis l'industrie l'a mise à profit et enun l'art médical lui a demandé des guérisons .
Il n'est pas indifférent pour le médecin d'examiner comment ces eaux sont employées dans les usages de la vie: le peuple s'en serl pour préparel' la
soupe qui eslle mels dont il u e le plus. JI met du
pain, du beurre el du sel daos un vase, le remplit
avec l'eau du Pal', el , après quelques minutes de
repos, il oblient un polage sa in et sans mauvai
goût.
Les intestin de animaux que l'on égorge pOUl'
la consommation sont lavés avec la même eau,
acquièrent une blancheur fort grande, el sont dépouiIlés de toute rnauvai odeur.
L'u age le plu remarquable qui soil fail des
ea ux thcrmales est, ans contredit, 10 ehauffag'
de maisons P 'odant l'hiver : l'administratioll
muni ipal a pourvu à lcur distribution. Elle so nt
amenée dan 1 uque quurli '1' par de conduit
de pill, ct r e~l
au r 'z-d -chat! (II' dau des
�-23réservoirs recouverts par de larges dalles; elles
s'écoulent ensuite par des ouvertures qui ont été
convenablement ménagées. Ces différentes applications des eaux sont si imporlantes que M. Berthier a calculé que les sources de Cbaudesaigues
équ ivalent, pour les habitants, à une forêt de
chênes de cinq cent quarante hectares, et l'IJ. Lecoq, qu'en évaluant le charbon de bois à quatre
ceutimes le 1 ilogramme, il en faudrait pour cent
cinquante-six francs par jour pour obteni.· une
même quantité d'eau chaude, indépendamment
de tonte main d'œuvre, mise de fonds, etc. ('1).
Celle derniëre évaluation est encore au-dessous
de la vérité, car dans le Cantal le charbon de bois
vaut plus de quatre centimes.
On peut se demander si ce mode de caléfaclioll
des appartements n'est point san inconvénient
pOUl' la santé de ceux qui le habitent. L'llygiène
puhlique n'a-t-elle rien à redire? c'est une question
qui peut (!tre facilementl'ésolue par les médecius
de la localité. lLux seuls auraient pu nou faire
connaître, par une statistique c, acte, i les habitués des maiso1ts caoudos ( mai ons chaudes ) ne
sont pas plus sujets que les autre à celle foule de
(t ) ChaudeS/ligues CL ses caux lhermales. BrocllllfO in-S o, 1836.
�-24maladies ot:Casionées pal' le passage brusque d'un
lieu chaud et humide dan s uu autre sec et froid.
Il leur eût été facile de noter la tempéra ture des
habitations chauffées par l'cau thermale, et de la
comparer à celle des appartements chauffés par
les moyens ordinaires . L'hygromètre eût indiqué
si l'hum idité n'était po int surabondante et pa rtant
nuisible. Dans des cas de celle nature, on ne peut
juger à priori, car souvent la sa ine observation
des faits vient détruire les déductions que l'on peut
tirer des théories les plus raisonnab les . Les rapports de l'organ isme avec les influences extérieures
sout si nombreux el quelquefois si impénétrables,
qu e les esprits les plu ingénieux cl les plus éclairé' ne sauraienlles saisir tou s. L'expérience, guidée par le /lambeau du raisonnement el do la
science , est seule irréfragable, et les médec in qui
ne 'appuient pas SUl' ses résulLats marchent au
ha sard ,t finis ent toujours pal' s'égarel'.
L'induslrie a encore appliqué la chaleu r des
aux au lavage des la ines qui aCfluièr nl par Ile
une l>lanchoUl' éclalante ct un moelleux qui (e
rend plus propres au Olage et au li sage. Au i
vo it-on le peuple de Cllaude a igu' , depuis les
enfants le plu jeune jusqu'aux vieillards , tricot r avec pel' évérance pendant tous les instant de
�-25la Journée. J'ai toujours été étonné que l'esprit de
commerce n'ait point amené dans celle localilé les
perfectionnements qu'a reçus aujourd'hui ce genre
d'industrie. On n'y voit encore qu'un seul métier;
tous les vêtements de lailLe sont confeclionnés à
l'aiguille: c'est, comme je l'ai dit, t'occupation
de tou les habitants qui ont acquis dans ce genre
de travail une dextérité urprenante. On y file peu.
Une partie des laines dont le désuintage a été opéré
à Chaudesaigues, est filée dans des filatures étrangères et y est rapportée pour être lran formée en
jupes, gilels, bas, mal'cllandises qui sont pour
le pays l'objet d'un grand commerce. Si je di ais
que ceS eaux UlCl'males sont très-favorable à la
teinlure des li sus ct des fils de diverses natures,
00 aurait de la peine à croire que des laines leinles
et filées sont nvoyées de Paris pOUl' être mises en
œuvre: c'est pourlanl ce fini a li 'U à ClJaudesaigues . Les ouvrières les plus habites en fonl des
ceintures, de bonnets, des robes d'enfants, de
pelils brodef[u ius fort él"gants qui sont vendus dans
les magasins dû la capitale.
É'"blisf!JClucntl!l ~I'aCJ.l"UX
Il''I'tiellliel's.
Longtemps Challdesaigues n'cul à offrir au pelit
nombre de malades qui s'y r ndaient qu'une pis-
4
�-26...;..
cine éLroite(1) et quelques rares baignoires. Mais,
lorsque J'éveil ful donné sur les avantages que l'on
pouvait retirer de ces eaux, l'aflluence des baigneurs s'accrut, ct quelques établissements particuliers s'élevèrent. Aujourd'hui celle viUe en I)OSsède quatre plus ou moins impal'fails, pLus ou
moins bien tenus .
.Je vais tracer une rapide esquisse de chacun
d'eux.
L'Établissement Verdier Je plus récemment créé
possède quatre cabinets de bains et deux cabinet
d'étuve. Chaque baignoire est dominée par un robinet de douche dont la plus élevée, en supposant
le réservoü' rempli jusqu'au bord, a envil'on trois
mètres 25 centimètres de chute. Au robinet de chaque douche s'adaptent des tubes de rechange dont
la lumière a des diamètres différents. Celui de la
plus forte est de onze millimètres, ct celui de
la plus faible, sans parler de la douche en arrosoir, n'est que de six millimètres. Chaque baignoire est munie de deux robinets destinés, l'un
à verser de l'eau chaude, l'autre de l'eau lhermale refroidie. Les réservoirs qui alimenlent les
douches et celui où se refroidit L'cau thermale sont
en zinc et en cuivre. Bienlôt cet lhablissement
(3) Celle piscine, abandonnée aujourd'hui, se voit encore dans
l'élablissement FelgCre.
�-2'1possèdera deux réservoirs d'cau refroidie, afin que,
pendant que l'un foumira l'cau nécessaire à l'admillistralioll des Bains, l'aulre puisse se remplir
ct sc refroidir, sans que le service soit interrompu.
Alors il n'arrivera plus, comme aujourd'hui,
qu'on ne puisse préparer un bain tempéré par défaut d'cau thermale refroidie. Aussi cet Établissement pourra-t-il fournir plus de quatre-vingts
ba ins d'un soleil à l'autre.
L'Jtlablissement Clavières se compose de quatre
cabinets de bains contenant cinq baignoires, d'un
cabinet d'étuve ct d' un cabinet de douche. De plus
deux robinets de douche s'ouvrent au-dessus des
deux baignoires placées dans le même cabinet; la
plus élevée de ces douches a près de quatre mètres
de chute, lorsque son réservoir est plein. Les
bassins destinés au refroidissement de l'eau thermale y sont faits en maçonnerie.
Les deux Établissements dont je viens de parler
sont tenus avec beaucoup de soin et de propreté.
L'Établissement Felgèl'e possède quatre cabinets
de bains et six baignoires surmontées chacune
d'un tuyau de douche, dont la chule n'a l)as plus
de six à sept pieds. Deux baignoires sont en métal
et les autres sont de belles cuves en lave de Bouzentès. Les deux cabinels qui contiennent ces cuves
�-2S~
précôdent chacun une petite cave obscure qui
forme un cabinet d'étuve. Le voisinage de la
source thermale doit faire présumer que la température en est très-élevée. Les deux salles de
bains dont je viens de parler sont incommodes,
parce qu'elles servent de passage aux malades qui
se rendent à l'éluve, et quoique cl.Jaque baignoire
soit isolée par un rideau, l'isolement n'est pas
assez complet pour que tout malade puisse s'y
trouver à sou aise, et l'est trop pOUl' que celui qui
aime à causer, cn prenant son bain, puisse le faire
agréablement. De plus, tous ces cabinets sont fort
noirs el fort trisles.
En expriman t ainsi toule ma pensée, je n'ai
point eu l'inlention de dépréciel' cet élablissement;
mais je devais donner à mes observa lions un cours
d'aulant plus liùre qu'il esl le seul susceptible
d'une grande extension . 11 est voisin du Par;
l'hôlel est vasle ct possède de beaux appartements
et un large escalier qui perIDet de porler en chaise
les malades jusque dans leur chambre. De vastes
cours, de nombreux corps de logis donnent la
facilité d'y créer des thermes qui pourraient
réunir l'utile à l'agréable. Que faudrait-il pour
cela? du zèle, de l'activité que le propriétaire
possède à un haut degré, et une mise de fonds qui
�-29certainement deviendrait très-poduc~ive.
Si Chaudesaigues devait renoncer à l'espérance d'un
établissement public. celui de M. l"elgère, reconstru il sur une échelle plus vaste et sur un plan plus
convenahle, serait sans contl'Cdit le seul qui pourrai t le suppléer.
Il me reste à parler de l'Établissement Bonnefoi,
le moins important de tous. Il a été créé sans fl'ais
dans le moulin du Ban. li ne possède que deux
baignoires et un cabinet d'étuve. Les eaux qui
l'alimentent sont celles dites de la Crotte-duMoulin, qui, après avoir l'échauffé l'étuve, vont
sc déverser dans un puils; de là une pompe les
élève dans deux tonneaux placés au-dessus des
baignoires. Ces réservoirs fournissent aux bains et
aux douches. Ce pelit Élablissement, où tout est
grossièrement organisé, l'end des services à celle
classe inléressante de cultivaleurs qui apporle une
économie sévère jusque dans les soins que réclame
une sanlé délabrée par de rudes travaux.
Dans lous ces Établissements, l'administrallon
de l'eau thermale a lieu d'une manière trop uniforme pour les maladies si variées qui s'y rencontrent, et celle uniformilé me semble presque
un avantage, cal' lorsqu'elle n'existe pas, elle est
remplacée par une anarchie dangereuse. On peut
�-30~
dire qu'ils pêcbent autaul par le manque d'uLle
direction éclairée que par l'organisation matérielle. Quelquefois c'est l'eau de la douche ou du
bain qui se trouve ou trop froide ou trop chaude;
d'aulres fois, comme il u'y a point ùe piscine, il.
arrive que les malades sont obligés d'atlendre lrèslonglemps pour prendre leurs bains ou d'en
abréger la durée, lorqu'i} y a affiuence.
Il est aussi très-fàcbeux qu'on ne puisse varier
l'élévation de la douche; car que de degrés inlermédiaires entre le choe d'une colonne liquide
ayant une chute de soixante pieds, ~ome
à
Enghien (1) et celles de Cbandesaigues, et par
conséquent queUe différence dans l'action de puissances aussi inégales!
La doucbe latérale est remplacée par la douche
descendante; mais la position à laquelle celte
dernière force alors le malade est très-fatigante.
et l'oblige à en abréger la durée. Elle ne peut du
reste, en aucun cas. remplacer la douche ascendante. On a cherché à suppléer à son défaul en
faisant construire un tube de fer-blanc, long et
recourbé. On adapte cet appareil à un robinet de
douche; mais il est si imparfait, si incommode.
(1) PoUssier cl lloulron-t.:hal'iurd.-l\Ialluel des eaux minérales.
�-31que les malades répugnenl à se soumeUre à ce
moyen, el les médecin:; à le leur prescrire.
A Chaudesaigues point d'éluve par encaissement,
poinl de véritable douche de vapeur. Celle qui esl
conduite dans les étuves pur un tube de fer-blanc
peul être ulile pour l'application locale de la
chaleur humide, mais ne peut nullement agir
comme la douche de vapeur qui est efficace, nonseulement par le calorique, mais encore par la
percussion de son jet: enfin on n'y a point encore
inlroùuit les perfeclionnemenls qu'a subis celte
branche de la lhérapeulique.
A ccl élal d'imperfecLion vient se joindre, je ne
saurais assez le répéter, le vice plus radical encore
du défaut de direction et de surveillance. Les malades sont livrés à leurs propres instincts. ils ordonnent eux-mêmes la durée, le degré de chaleur
de leurs bains, de leurs douches: ils sonl leurs
propres médecins. Un garçon et une tille de service,
dans chaque Établissement, sont chargés de l'administration des bains, ct doivent suffire à tout.
11 est impossible que, malgré le zèle et l'intelligence
qu'ils y apportent, malgl'é l'activité la plus infatigable, ce service ne soit pas en souffrance.
Souvent un malade est oublié dans le bain, dans
l'élu ve; personne ne répond à la sonnelte qu'il
�-32agite vainement. D'autres fois l'eau thermale refroidie manque. et l'on ne peut abaisser le degré
d'une douche ou d'un bain trop chaud .
Le mode de réfrigél'alioll empluyé pour faire
perdre à l'cau thermale une par lie de son calorique,
est vicieux. parce qu'il prive le liquide minéral de
ses principes volatils, et parce qu'il peut arri vel'
que. soit imprévoyance. soit défaut de capacilé du
bassin. la quantité d'rau refroidie devienne insuffisanle. Alors. si un malade a besoi.n d'un bain tempéré. il se voit obligé de s'en passer ou de le prendre trop chaud.
Un autre des inconvénients que je dois signaler
provient des dimensions e: iguës des cabinets d'étuve
qui ne peuvent recevoir qu'une seule personne .
Aussi, celles qui s'y rendent en sortant de leur Lain
sont souvent obligées d'attendre: on devrait. du
moins. les multiplier. En prétendant que tout ce
qui regarde l'usage médical de l'cau thermale se
fait mal à Cbaudesaigues • je n'ai point entendu
accuser la volonté et les lumières du médecin inspecteur. Elles se trouvent paralysées pal' l'impossibilité où il est d'imprimer à ceUe admio istration
une direction sage et éclairée. 11 ne possède, en
effet, aucun moyen d'action sur ceux qui administrent les bains. Pour que sa surveillance et son
�'-33autorité devinssent erocaces, il faudrait qu'aucun
malade ne plll prendre lin bain d'eau thermale.
sans son ordonnance qui fixerail le degré el la
durée du hain ct de la douche. Je comprends que
sa présence à Chaudesaigues, pendanl la saison
des caux, devrait èlre de tous les inslants, que
celle inspection devrail l'absorber en enlier, à
l'exclusion de celle de Sainle-Marie, ct que, seul
peUL-être, il ne pourrait suffire à toules ses
exigences; mais l'inspecteur adjoint, qui ne l'est
<lue de nom, ne devrait-il point partager tous ses
travaux? S'il en était nin i, l'on verrait s'améliorer rapidement l'organisation matérielle des
établissements particuliers, el s'élendre au loin la
réputation de cc eaux. Quels nouveaux succès
n'obtiendrait-on pas! Dans combien de cas les
bains très-chauds, <?rdonné à propos, administrés avec la prudence qu'ils exigent, ne produiraient-ils pas des effets merveilleux.! Des douches élevées. donneraient aussi des résultats que
l'on ne peul demander à celles donl la chule est
médiocre. Mais je reviendrai plus lard sur ce
sujet, en parlant des applications que l'on peut
thermalisées que celles qui nous
faire d'eaux au~si
occupent.
5
�onR~EUVATION
DE DlVEUSES MALADIES
TnAITÉES
D."RlB LES E~UX
DE ICU,1UDESAIGUES,
Avant d'examiner les effels physiologiques et
lhérapeutiques dos Eaux de Chaudesaigues, j'ai
crU convenable de présenter les observations que
.le possède , parce que c'est par leur analyse et
leur rapprochement que je suis parvenu à élablir
les points capitaux qui dominent celte queslion,
Peut-êlre les délails dans I.esquels je serai obligé
d'entrer parailront-ils faslidieux aux gens du
monde; mais les médecins qui voudront se pénétrer de ce qu'il y a de pratique dans ces recherches, seront plus satisfaits d'y trou ver des
faits particuliers que de simples généralilés qui
peuvent paraitre d'autant plus incertaines que
chacun sait jusqu'à quel point l'imagination de
l'auteur peut égarer sa bonne foi ,
Lorsque les l'ails seront sous les yeux, lorsque,
pour ainsi dire, on verra les eaux agir SUI' chaque
individualité morbide, l'homme de ['art pourra
�-35juger ûe leurs effet et des circonslances qui ont
pu les modifier, et saisir dans sa pl'alique les cas
analogues il ceux dont les descriptions lui auront
été soumises. La science a-t-elle d'ailleurs un
appui plus soliùe que les fails eux-mêmes groupés
avec ordre et inlelligence. Isolés, ils n'avaient
qu'une valeur secondaire; rapprochés, ils ont pris
une signification qui souvent se change en loi.
Convenons que la médecine n'a marché sûrement
que depuis que les fails particuliers, sur lesquels
sont fondées lcs généralités, ont été soumis avec
détail à. l'appréciation du public. C'est depuis lors
que les théories saus fonùement ont llU être I"epoussôes avec avantage par celle saine et judicieuse crilique qui n'admet de vérités que celles
qui ont reçu la consécration de l'expérience.
Tcs observations qui vont suivre seront groupées en ayant égard, soit à l'appareil organiquc
affeclé, soit à. la nature spécifique de la maladie.
J'ai préféré cet ordre comme plus naturel et plus
clair. Je n'ai point recueilli moi-même toules
celles que je présenterai au lecteur; mais en consignant ici chacune d'elles, j'aurai soin de nommer le médecin à qui elle apparliendra, afin de
ne dépouill.el' personne de sa propl'Ïélé et de son
mérite.
�-36lUaladlcliI dc l'al.lnn'CUttc l'InnCl''''t.tloll .
OnSE.lIVATION 1 r e (
rec ueillie !lar M. Verdier (1).
Une femme d'environ .!i-O ans, d'une constilutioLl
nerveuse, arriva à Chaudesa igues dans le moi s de
juillet 1826, avec hémiplégie du côté fl'aucLle el
pal'alysie de la langne. Cette paralysie, qui datait
de trois ans ct qui ava it ré isté à tous les moyens
curatifs qu'on avait employés, avait pour cause de
violen ts chagrins que la malade avait éprouvés.
Le lendemain de son arrivée, elle fut soumi cil
l'usage de l'eau thermale en boisson, en bains,
en douche. La dose de l'cau prise intérieurement
était de quatre à cinfr verres tous les malins, et la
durée du bain de trois quarls d'Lleurc par jour .
La tempéralul'e du bain (2) cl de la douch e était
d'environ quaranle degrés centigrades. Après di x.
jours de l'em ploi de ces moyens, la malade put
artic ulel' quelques mots eL sc faire co mprendre
avec facililé. Les extrémilés paralysées furenl
susceptibles d'exécuter quelques mouvem enls, el,
(1) Les observaLions de M. Verdie!' onl été publiées dans l'ossa i
sur Chnudesaigues de 1\1. Chevallier.
(2) JI m'ost impossible de croire (Ju'i1 n'y ait pas CI'I'IlU!' su\' le
degr~
de température du bain, car un séjour de trois !juarts
tl ' heure dans un bain anssi chaud ct'\! provoqué dcs acc idents
graves chez une malade qui avait été précédemlllent frappée d'UIJOplcxle.
�-37après être l'estée quelque jours à Chaudesaigues ,
ellc en pur lit saus sc ressentir, pour ainsi dire,
de son affection. Cette malade est revenue en
1827; je l'ai trouvée dan l'état où elle était
l'année précédente, lors de son départ. Elle a
employé pendant quinze jours les mêmes moyens
et est repartie complètement guérie. L'eau thermale
en boisson procurait à cette malade deux ou trois
elles tous les jours. Le bain ct la douche provocluaient cbez elle des sueurs abondantes :" }dunt deux heures.
Lo cas do paralysie que l'ou vient de lire élait
certainement la suite d'ulle hémorragie cérébrale. La malade prit des douches ct des bains à
une température si élevée', que je snis porté à
croire qu'il s'est glissé une erreur lypograllhique
dans l'essai sur Chaudesaigues de M. Chevallier.
Ces moyens procurèrent une guérison définitive.
Evidemment le eaillol sanguin que eontenail le
foyer apoplectique n'avait pas été complètement
résorbé, ou il avait été remplacé par un kyste
séreux. La compression des fibres cérébrales voiines existait encore, il reslait donc il. l'homme
de l'art à favoriser la résorption du caillot, et à
�-38rappeler dans la partie pa ralysée la puissance nerveuse . Les douches et les bains devaient ag ir dans
ce cas à la manière des excitants locaux qu i sont
indiqués et qui avaient été em ployés sans succès.
Mais la paralysie de la lan gue ne pouvait être inIluencée pal' l'action des douches . Cer tainemen t
des modifications fonctionnelles, telles que de copieuses diaphorèses, ou d'autres supersécrétions
déterminées pal' l'usage des eaux, on t dù contribuer efficacement à faire disl)araître la trace des
désordres que l'apoplexie avait laissés dans I.a
texture du cerveau. Il es t à regretter que M. Verùier
ne nous ait point donné un détail p lus compl et des
symptômes . Y avait-il lésion de la sensibilité de
la peau et des autres organes des sens? Il est fâcheux aussi que ce médecin ne nous ait point fait
part des changements que purent éprouver les autres fonctions. L'appétit fut-il mod ifié? la circulation devint-elle plus rapide ou plus lente? se
montra-t-il des signes d'excitation cérébrale? la
sécrétion urinaire fut-elle accrue ou diminuée? La
solution de toutes ces questions, en éclairanl la
th érapeutique des l ~ aux
de Cbaudcsaigues , eût
jeté un plus grand intérêt sur l'observation précédente. L'ancienneté de la maladie, l'âge de la malade, l'absence de prédisposition organique aux
�-3 9congestions sanguines auLorisaien
t, dans ce cas ,
l'emploi des bains de Chaudesaigues.
Le fait sui van t prouve que , lorsque ces con
ditions ne sont
pas réu nie s, les mal ade s, loin
de reco uvr er la
san té, peuvent trou ver la mor l dan
s un bain qui
plus lard leur eût élé salulaire.
OBSERVATION 2 0 ( par M.
Brém ont (1).
Un nommé lris son , de la commun
e d'O rad our ,
d'un tempérament lym pha tico -sau
gui n , por lan t
une paralysie des membres sup érie
urs avec dou leur ct tour noie men t de tête , ver
lige , ele. , annon çan t une compression cér ébr
ale, eut , à la
suite d'un bain lrop cha ud, une
atta que d'ap oplexie con tre laquelle Lous les rem
èdes employés
ne pro duis iren l qu'u n soulagemen
t mom enta né de
deu x jour s. L'at taqu e rep rit ensuite
plus de vigueur
que jam ais, et le malade mo uru l
le qua lriè me ou
cinquième jou r.
Si l'ad min istr atio n des bains de Cha
udesaigues
n'ét ait pao livrée à une complèt
e ana rch ie, ce
mal ade n'eû t pas été admis à pre ndr
e un bai n, et
(1) Mati ère ' médicale des Eaux
therm ales de Chau desa igue s,
brochure in-q.o , p. 7.
�_f~O
l'on n'aurait pas eu à déplorer une mort donl on
aurait pu peut-être garantir le malade, en combattant les symplômes d'byperémie cérébrale qu'il
présenlait.
OnSERVATIO
30
( pOl'
l'Auteur ).
l\1. lIc D.... , couturière, âgée de trente ans,
d'une constitution peu forle , avait fait une chute
en 1833, cl s'élait violemment frappée à la têle.
Depuis, dil-elle , elle s'en était toujours ressentie.
Elle était aussi suj ette à la migraine depui longtemps. Quelques mois avant l'hiver de 184.1, elle
devinl trisle ct mélancolique. A la fin de février
de celle même année, elle fut saisie, après une
vive contrariété, d'une forle céphalalgie qui perisla jusqu'au lendemain, jour où elle éprouva
dans la tête une sensation indéfinissable. Elle ne
perdit point l'usage de ses sens, el cc ne fut qu'un
peu plus lard qu'elle reconnut un affaiblissement
s i gra nd du bras ct de la jambe gauches, qu'elle
ne put se servir de ces membres. Elle fut saignée
e t purgée deux fois, et des frictions furenl faites
avec le liniment volatil. Ce ne fut qu'au bo~t
de
ix semaines qu'elle put travailler un peu, malgré
la gran \, faiblesse existant encore du côlé gauche.
Elle se rend it il Chaudesaigues , au mois de juillet
�-4t-
184.1 , y prit dix bains, neuf douches et seulement
deux étuves. Aucun de ces moyens ne la fii.9at
transpirer. La douche qu'elle faisait tomber sur
le côté malade déterminait toujours de la céphalalgie. Les fonctions digestives ne furent nullement
modifiées par ce lraitement. Elle en éprouva une
grande faligue génél'ale, et en même temps un
accroissement nolable dans la force du bras et de
la jambe gauches, La sensibililé n'avait jamais été
lésée. La malade partit, satisfaite de son élat ,mais
assuran t qu'il ne lui serait pas possible de supporter encore la douche.
Il n'y avait que cinq mois que Mlle, DU. avait
été frappée d'apoplexie, lorsc!u'elle vint à Chaudesaigues. En thèse générale , je regarderais ce
laps de temps comme insuffisant pour pouvoir exposer un apoplectique à l'action pertubatrice des
eaux thermal~s.
11 est vrai que ceUe malade était
d'une conslitulion peu développée, que la circulation était chez elle peu acUve, et qu'il avait
fallu des causes mOI'ales pour appeler vers le cerveau celte hyperémie qui se termina par hémorragie. On remarquera cependant que les douches
déterminaient vers la tête un afllux sanguin qui
6
�-42'eM pu devenil' d'autant plus funeste que la transpiration ne venait pas en atlénuer les effets.
Néanmoins il survint une amélioration r.apide dans
les conLraclions musculaires des membres paralysés, et l'on ne peut se rendre compte de ce phé- .
nomène que par l'excitation locale, déterminée par
les bains et par la percussion de la douche. J'avoue
que, maIgre ce succès constaté par moi-même, je
n'oserais ordonner aussi prémalurément l'usage
de ces eaux, même dans des cas ana logues .
OBSERVATION ~o
( par l'Auteur ).
M,llc M.... , âgée de 4·0 ans, avait éprouvé, il Y
a dix-huit ans, à l'époque de la mort d'un parent,
une frayeur si vive que loute son organisalion en
avait été ébranlée. Depuis lors, elle fut atleinle
d'un mal de tête qui la rendait incapable de toule
espèce de travail; de plus elle éprouvait, trois ou
quatre fois par an, des espèces d'allaques carac- .
térisées par une céphalalgie très-violente, qui semblait lui reLirer la langue, par des vomissemenLs
continuels et par la perte du sentiment, poussée à
un tel degré qu'on la croyait mouranLe. Pendant
.qu'elle élaiten proie à. ces symplômes, on ne pouvait
rien lui faire avalel', et on se bornait à quelques
frictions sur les membres. M.lle M· .. • assurait que
�-43- .
l'apparition de sa maladie n'avait coïucidé avecla disparition d'aucune éruption dartreusc , ni
avcc la suppl'cssiou de l'écoulement menslruel. A
voir son teint vivement coloré el le bon état de la
nutrilion générale, les nombreux médecins qu'elle
avait consultés lui avaient tous conseillé des saignées générales au bras, au pied, el des saignées
IOt:ales de tous les genres; ces moyens n'avaient
jamais apporté un soulagement durable. Les pédiluves et les purgatifs qui avaienl été employés
avec excès n'avaient donné aucun résultat utile.
Les exuloires n'avaient pas eu plus de succès.
Consulté moi-même par la malade, j'avais cru
devoir insister sur des moyens déjà infructueux.
Je lui avais ordonné des applications de sangsues
à la vulve, l'usage prolongé de pilules aloétiques
pour élablir une révulsion durable sur les gros
inleslins, et des bains cIe siege irrilanls qu'elle
devait prendre. cinq à six jours avant l'époque
menstruclle , à l'effet d'augmenter cette évacuation
périodique; mais le résultat ne fut pas plus heureux.
La malade, désespérée, sc rcndi:t à Chaudesaigues dans le commencement de juillet, et y prit,
sans interruption, vingt-deux bains et vingt-deux
• douches sur la tête. La durée de chaque douche
�· -44était d'une demi-heure. Les premières fatiguèrent
beaucoup la malade. La céphalalgie s'était considérablement accrue; elle éprou va des verliges,
son teint devint encore plus animé, une éruption
de gros boutons, ayant les caractères d~ l'acne indurata, se fit sur la face; mais bienlôt l'action des
douches ne fut plus douloureuse, et tous les phénomènes signalés, à l'exception des boulons, se
dissipèrent. La malade restait deux heures dans
son bain, elle qui n'avait jamais pu supporler les
bains domestiques, ct si plus tard cHe en réduisilla
durée à cinq quarls d'heures, c'esl que l'afOuence
des malades la força à l'abréger. Elle avait essayé
les étuves, mais y avait renoncé, parce qu'elle s'cn
était trouvée plus fa liguée encore que des douches.
A mon arrivée à Chaudcsaigues, je la trouvai
dans un étal très-sati faisant. La céphalalgie avait
di~paru
1 l'appétit élail devenu très-vif, les évacuations alvines étaient nalurelles, quoique la
malade bût quelques verres d'eau thermale. La sécrétion urinaire était restée la même. Elle m'apprit aussi qu'en sortant du bain, elle transpirait
très-abondammen t dans son \il, et que cette transpiration était surlout copieuse aulour de la tête.
Lorsque celle malade quilla Chaudesaigues , il lui
restait encore quelques trace de ['éruption dont
�-4·5j'ai parlé. Ceci se passait à la fin de juillet, et voici
ce qu'elle m'écrivait à la date du 28 octobre suivant :
« Monsieur le docteur, lorsque j'eus l'honneur
(( de vous voir à Chaudesaigues, je vous promis
(1 de vous donner des nouvelles de ma sanlé, et
« je me serais acquitlée de ce devoir depuis long« temps, sans une gl'ande et continuelle aboncc dance de sueur qui me prit en quiLlant les
(1 bains,
au commencement d'août. J'ai trans« piré jour et nuit jusqu'au quatre du courant.
« J'élais obligée de changer de vêlements à tout
( instant du jour. :Mon corps a été tout couvert de
CI
pourpres semblables à la pelite vérole, et pour
c( faire disparaitre cette maladie, j'ai mis un vési:'
« catoire à chaque bras. Aujourd'hui tout est dis« sipé, el je ne nis pas mal. Le sang des règles
cc est plus abondanl et plus coloré, ma tête est
c( bien déchargée; mais je suis sans courage et
« très-sensible au froid qui m'indispose, etc. ,)
Je revis la malade le trois mai suivant, et elle
me donna de vive voix des détails plus précis sur
sa santé. Depuis qu'elle avait quitlé Chaudesaigues,
elle allait bien, la céphalée avait toul-à-fait disparu. Son embonpoint rendait bon témoignage de
la régularité des fonctions nutritives. Elle me ré-
�-46péta ce qu'elle m'avait écrU • . que la transpiration
s'était prolongée longtemps et ajouta que cette transpiration s'étant supprimée, la jambe où elle porte
habiluellement un caulère s'était énormément tuméfiée et élait devenue douloureuse. Quelques
temps après, la sueur s'étanl rétablie, la moitié
droite du corps se couvrit d'une éruption formée
de papules rouges enflammées, à laquelle succéda
un e desquamation de l'épiderme. Ce fut le dernier
phénomène critique que présenta sa convalescence. En juin 18H , elle est revenue à Chaudesaigues, plutôt par précaution que l)ar nécessité.
Ce cas de céphalée est cerlainement des plus
remarquabl es. Sa longue durée et l'opiniâtre résislance que cette affection avait opposée à des
moyens aussi énergiques. que d'abondantes et
nombreuses saignées, tant déplélives que révulsives, que des drastiques. des révulsifs culanés.
des exuloires permanenls el temporaires el~d'au
tres médications empruntées à la pharmacie,
auraient pu faire craindre une lésiou organique,
si l'on eût élé rassuré par l'intégrité des fonctions
qui se trouvent sous la dépendance du cerveau.
Cette céphalée si continue ne pouvait être regardée
�-47comme symptomatique d'une affection de l'estomac, car il n'existait chez celle malade ni gaslralgie , ni gastrite. Elle ne tenait pas non plus au
peu d'abondance de l'évacua lion menstruelle, car
si on eùt dû l'atlribuer à une pléthore locale consécutive à une répartition inégale de la masse
sanguine, celte pléthore eût été délruile, du
moins momentanément, par les dépll!lioos si
grandes et si variées dans leur mode du système
vasculaire sanguin. Etait-elle sympathique d'un
état maladif ~de
l'utérus, élat qui du l'es le ne se
révélait pur aucun signe? c'est ce qu'on ne saurait
prétendre, à moins de baser son opinon sur des
hypothèses sans fondement. Pouvait-on la regarder
comme de nature rbumatismale ? rien ne me semble dans ce fait justifier cette supposition; car la
malade avait toujours habilé une maison saine,
et sa profession d'inslilutrice , en la forçant à une
vie sédentaire, nc la meUait point dans la nécessité de s'exposer, comme les autres habila.nts
de la campagne, aux brusques variations de la
tempéralure, cause si puissante de rhumalisme.
Enfin devait-on la considérer comme purement nerveuse? cette manière de voir si vague, si peu significative , est souvent un moyen commode dont
les médecins se servent pour couvrir l'ignorance
l
�-48où ils sont de la nature de certaines maladies. Certainement on conçoit qu'une surexcitation nerveuse donne lieu à de la céphalalgie; mais on
comprend difficilement que celte surexcitation
dure quinze ans sans affecler l'organe dans sa
structure .
Les seclateurs des doclrines galéniques et les
chimiâll'es plus modernes eussent été moins embarrassés que nous pour donner de ce fail une explicalion pleinemenl satisfaisante pour eux. Une
acrimonie des humeurs porlée sur le cerveau leur
eût rendu raison de celle opiniâlre céphalée. Aujourd'hui encore, beaucoup de médecins verront
dans ce cas un vice dartreux qui, fixé sur le cerveau ou ses membranes, a élé déplacé par la puissance des douches el des bains, et s'est manifesté
par l'éruption dont les caractères ont éLé décrits.
Cette théorie peut être fondée; mais qu'est ce qui
en prouve la vérilé? A-l-on vu le vice agir sur
l'organe affeclé, et l'éruption qui a coïncidé avec
la disparition de la céphalée est-elle un témoin
irrécusable de son exislence? Ne voit-on pas souvent des maladies trouver leur solution dans ces
grands mouvements de l'organisme suscités ou par
l'art ou par la nature? La peau ne peut-elle se couvrir de vésicules, de papules, de pustules, elc. ,
•
�-49sans que celte éruption ait pour but l'élimination
d'une matière morbifique dont jusque-là rien
n'avait rail soupçonner la présence. Qu'à. la disparilion d'une dartre succède une maladie, el qu'à
la réapparition de la dartre la maladie guérisse,
on sera forcé de convenir qu'il existe entre ces
deux affections un lien dont la nature nous
échappe; mais que par snite on admette que toute
maladie qui disparaît en même temps que survient
une éruption à la peau, est duc à une matière
morbifique qui a quitté un organe pour se porler
sur un autre, je dirai que c'est créer un être
imaginaire, et que de pareilles explications seront pLus nuisibles qu'utiles à une science qui ne
peul faire des progrès que par une observation
éclairée, quelque lente que soit celte voie. Pour
moi, je "ois, dans le fait qui nous occupe, un état
morbide qu'on ne saurait analyser dans l'élat actuel des connaissances médicales, disparaitre sous
l'influence d'une modification importante de la vitalité de la peau, modification par laquelle l'exhalation de cet organe devient très-active et se
lrouve même insuffisante pour le débarrasser de
tous les lluides qui s'y porlent, de sorle que le
ystème capillaire, vers lequel s'opère ce grand
mouvement Qu . ionuaire, manife te son élal de
7
�-50réplétion par l'apparition, tantôt de simples rougeurs, tantôt d'élevures du derme, (anlôt de papules, elc. Vouloir pénétrer plus avant dans celle
gl'ave question de pathologie générale me semble
dépasser les limites du connu, et se lancer dans le
vaste champ de l'imagination. C'est pour cela que
je ne chercllCrai pas à expliquer le singulier phénomène d'une éruplion papuleuse bornée à la moitié droite du corps, quan(l la diapllOrèse qui en
éLait certainement la raison délerminante couvrait la peau d'une manière générale. 11 serait
aussi difficile de s'en rendre comple que de dé- .
couvrir la condition pathogén ique qui empêche Je
zona de dépasser la ligne médiane.
Ce sont là de ces problèmes qu'il n'a pas encore
été donné à la science de résoudre. Espél'ons qu'un
jour l'intelligence humaine parviendra à soulever
un coin du voile qui nous dérobe encore tant de
secrels dans l'organisation de l'homme. Toutefois,
sans s'anêter à ces discussions théoriques , ~e médecin praticien appréciera le résullal consigné
dans l'observation précédenle, et sera conduit à
conseiller les bains ct les douches de Chaudesaigues dans des cas' analogues. Je terminerai ces
réUexions en faisant observer que, ql,loique ces
.eaux thermales soient peu minéralisées, il existe
l
'
1
i:
1
1
1
1
�-51entre eHes et l'cau ordinaire une différence telle,
que nolre malade qui n'avail,iamais pu supporter
un bain domestique, éprouvait un bien-être trèsgrand. dans ceux d'eau thermale.
OUSEIIVATlON 50 (
par l'Auteur. )
:M"', ancien marchand ambulant, âgé de 50 ans
environ, vinl me consuller, en 184·0, pour une
céphalalgie accompagnée d'assoupissement, de
bouffées de chaleur à la face el de coloration vive
des joues . Des saignées générales soulagèrent le
ma lade. Je prescrivis ensuile des laxatifs pour
opérer une révu lsion sur le tube intestinal; mais
l'usage du slilfate de magnésie, dont M*H prenait
quarante grammes tous les cinq à six jours, détermina. après trois ou .qu~tre
PJises, une gas trite
le leint prit une
légère. L'appétit fut ~,
nuance jaunâtre et l',épigastre devint sensible à la
pressioJi. Dans la pensée qu'en activant les ronclions "de la pe~u
par des bains et des doucbes minérales ' et cn provoquant ainsi des pertes abondantes par l'exhalation cutanée, on verrait disparahre cette hypérémic cérébrale habitue\l~
Je
conseillai à MW de se rendre à Chaudesaigues . .le
croyais d'autant pl1~
convenable de l'y envoyer
r
�"
-52-
1
que je ne doutais pas que sa gastrite ne disparût
sous l'influence des bains et de l'cau de l'Ilôpilal
prise en boisson. Cc malade s'y rendit, en effet,
pendant que j'y étais moi-même. (juillet 1841).
Chaque jour il prenait un bain d'une heure, laissail tomber la douche sur la tête pendant demiheure, restait un quart d'heure dans l'étuve la
plus chaude, et buvait cinq à six verres d'eau
thermale . Après trois à quatre jours de ce traitement, la transpiration devint très-abondante;
mais ce fut le seul phénomène crilique qui sc manifesta. M'" n'eut point de diarrhée; la sécrélion
urinaire resta la même; mai la céphalalgie dimin ua , le teint devint plus clair, l'appélit plus
vif, les nuits plus calmes. Néanmoins ce malade,
tout en proclamant qu'il reconnaissait une grand'
amélioration dans son état, conservait sa tristesse
habiluelle. Il quitta Chaudesaigues, après avoir
pris quinze bains et autant de douches et d'étuves.
Un mois après son retour dans ses foyers, 1\1'" vinl
me consuller de nouveau pour des souffrances analogues à celles qu'il éprouvail, avant de prendre
mes premiers conseils. Etonné de celle prompte
réapparition des accidents, j'examinai allenlivement ce malade, j'interrogeai toutes les fonctions
avec soin, et je découvris une maladie du cœur
�-53avec bruit de soume. 1\1''' mourut quelques temps
après.
On s'étonnera, peut-être avec raison, que celte
observa lion figure parmi les maladies des centres
nerveux plutôt que parmi celles de l'appareil de la
circulation. Je reconnais que sa place eût ét~
11lus convenable dans cetLe dernière catégorie;
mais mon attention ayant été fixée sur l'engorgement des vaisseaux cérébraux, et l'action des
eaux, ayant modifié cet épiphénomène d"une manière favorabLe, j'ai cru pouvoir lui assigner la
11lace qu'elle occupe.
Lorsque M'" me consulta pour la première fois,
si mon examen eût été approfondi, j'aurais reconnu la lésion organique du cœur, et probable-ment je ne l'aurais pas envoyé à. Chaudesaigues.
Toutefois, L'action de ces eaux, loin d'être -nuisible, produisit un effet salutaire, quoique de peu
de durée. Il n'est donc pas sans intérêtde chercher
il apprécier leur manière d'agir dans ce fait particu lier; mais, avant tout, il importe de fixer d'une
manière plus précise la nature de l'altération du
cœur. Le bruit de soume se raisait enlendre à la
place du premier bruit; le pouls était régulier et
�-54modérémenl développé ; I~ conlraclion ventriculaire n'avait pas l'énergie de celles qu'on observe
dans les hypertrophies, de sorte que je crus devoir '
m'arrêter à l'idée d'"tm relrécissemenl encore peu
avancé. Celle lésion admise, comment les symptômes d'hypérémie cérébrale purent-ils être favorahlement modifiés par l'usage des caux de Chaudesaigues? On ne peut certainement s'en rendre raison que par la révulsion opérée SUl' la peau, révulsion donl le principal effet fut une abondante
exhalalion de liquide, et par suite la diminution
de la sérosité du sang. Ainsi, l'engorgement cérébral disparut. parce que d'un e part le Ouide sanguin se porta à la périphérie cutanée, cl que de
l'aulre sa masse fut diminuée. Malgré L'heureuse
modification qui s'en suivit, je n'oserais conseiller
l'emploi de la douche cl de l'étuve à un malade
affecté d'un retrécissemcnt des orifices valvulaires,
avec disposition aux congeslions cérébrales, car on
ne peut être assul'éde provoquer une copieuse diaphorèse, ainsi <[ue le prouve l'ohservation 3c • On
a à craindre alors que l'irritation produite pal' le
traitement, n'étant pas contr'ebalancéc pal' la déplétion <[ue la sueur fait subir au système vasculaire, ne devienne promptement funeste.
�-55OnSEI\VUION 6 0 (
par l'Auteur ) .
C'" , marchand-ambulant, d'un tempérament
lympl.Jatique et sanguin, fut atteint en 1838 d'une
fièvre liCl'ce dont le déhut présenta des symptômes
généraux assez graves. Le sulfate de quinine ayant
mis fin aux accès, le nlalade par lit pour sa tournée
qui d'ordinaire dure dix mois. Pendant le voyage,
les accès reparurent. Ces récidives se montrèrent
successivemenl à Paris et en Bourgogne et furent
chaque fois comballues pur le sulfale de quinine,
sans qu'on pllt arrêter définitivement le relour des
accès qui étaienl devenus quolidiens. Cependant le
malade avail pris, disail-il , dans moi us d'un an ,
pour quarante francs de sulfale de quinine et pOUl'
trente de quinquina sous toutes les formes. Son
estomac avait été fatigué par ces médicaments el
par les nombreux purgatifs qu'il avait pris. L'appélit s'élait conservé; mais loul ce {ju'il mangeait
le gonllait beaucoup. Ces accès n'avaient laissé,
à aucune époqu.e, de signe d'engorgement de la
l'ale. C'" ,rinl en Auvergne en juillet 1839, et
se rendit, à celle époque, aux eaux de Vic-surCère où il resla quinze jours. Il commen«,:a cl prelldre quinze à dix-huil verres d'cau minérale cbaque maliu , et poussa cette dose jusqu'à quaranle-
�-56huit verres. Il allait alors sept à huit fois à la selle,
urinait beaucoup ct avait un appétit très-vif. La
langue s'était déchargée, les accès ne revenaient
plus: le malade sc lrouvait très-bien. De relour
chez lui, les accès reparurent avec cette seule modification qu'après le stade de la sueur, le malade
éprouvait des fourmillements avec prurit, tantôt
dans une partie du corps, tantôt dans une autre,
et des douleurs aux malléoles et aux épaules qui
l'empêchàient de marcher pendant trois à quatre
heures. Tous ces symptômes persistèrent jusqu'en
juillet 184.0; à celle époque, le malade sc rendit
à Cbaudesaigues. Là, après avoir"pris deux bains
qui ne déterminèrent aucun accident, il se soumit
à la douche qu'il reç,ul sur lout le corps, et Ilt
usage de l'eau de l'Hôpital. Ce trailement provoqua l'apparilion de douleurs générales et de vomissemenls bilieux très-abondants, qui durèrent
toute une matinée. Les douleurs se firent sentir
pendant quatre à cinq jours, et diminuèrent graduellement: ce ne fut qu'après leur disparition que
C'" pri t trois on quatre fois l'étuve, Outre les
phénomènes que je viens de décrire, l'usage des
{laux détermina d'abondantes sueurs. L'appétit
conserva sa vivacité, les selles conlinuèrent à rester naturelles, l'émission de l'urine ne fut pas
�-57augmentée, et ce malade qui avait été sur le point
de renoncer à ce traitement, qnilla Chaudesaigues, très-bien rétabli. Arrivé chez lui, il conlinua à transpirer beaucoup pendant une semaine.
Depuis quinze mois la fievre intermiltenle n'a pas
reparu.
Si j'avais à me juslifier de la place que j'ai assignée dans cet ouvrage à l'observation qu'on vient
de lire, je m'appuierais sur l'opinion des médecins qui regardent la fièvre intermiltente comme
une maladie des centres nerveux. Celte manière
de voir, toule controversable qu'ellc est, me semble la plus probable: du l'este, quelque soit son
siège, j'étais d'autant plus aise d'insérer ici ce
fait, que les médecins qui ont écrit sur les propriétés des eaux de Cbaudesaigues, n'ont cité rien
d'analogue. De plus, celle affeclion qui, chez ce
malade, n'avait été que palliée par les eaux acidules de Vic-sur-Cère, avait été radicalement
guérie par celles de Chaudesaigues qui imprimèrent à l'organisme des modifications physiologiques importantes. Il est vrai que celle observation
a besoin, pour acquérir toute sa valeur, d'ê~re
corroborée par des l'ails semblables. Cependant,
8
�-58quand nous aurons étudiHa manière d'agir de ces
caux sur l'appareil de la digestion, on ne sera
pas étonné qu'elles puissent faire disparaHre des
fièvres rebelles par suite de la surexcitation intestinale produile par l'abus du quinquina.
lUabulies des ol'galles tles sells.
ÛDSERYATION 7 é
( par l 'Auteur ),
V'" , âgé de 56 ans, cullivateur , d'une conslilution robuste, était atteint, depuis deux ou
trois ans, d'une surdité presque complète. Il attribuait celte infirmilé à l'intempérie des saisons , à
laquelle il s'était so uvent exposé. Il vint à Chaudesaigues dans les premiers jours d'aolll. Après
avoir reçu quatre à cinq douches sur la tête el
après autant de bains d'cau minérale, il reconnut
qu'il entendait mieux. Celte amélioration fut également constatée par ses commensaux. Il lui arriva
alors de faire un écart de régime et de rester le
même jou r longtemps exposé à l'ardeur du soleil.
Dès lors il retomba dans son premier état de surdité; mais, après avoir pris de nouveau quatre à
cinq douclles, il se maniresta chez lui une amélioration nouvelle, quoique moins marquée que la
première, et tout fait croire qu'il eût complètement
�-59recouvré l'ouïe, s'il eot mis de la persévénlDce dans
ce traitement. Appelé par des affaires urgentes, il
quitta Chaudesaigues le dixième jour après son
arrivée. J'ai su depuis que ce mieux ne s'était pas
soutenu .
L'observation précédente est si incomplète que
je n'aurais pas songé à la publier, si deux améliorations successives n'eussent prouvé que les
douches de Chaudesaigues peuvent être utiles
contre des surd ités indépendantes d'une lésion organique ou de l'engouement de la caisse du tympan. En les prescrivant dans des cas pareils, c'est
se conformer aux préceptes du 'docteur Hard qui
regarde ce moyen comme très-efficace (1). Un autre motif qui a fait donner place ici à celte obser,'alion , c'est que les Eaux de ClJ.audesaigues sont
rarement appliquées aux maladies des organes des
sens, et que par conséquent un fait qui fixe l'attention des mé~ecins
peut être uUle, malgré son
insuffisance scientifique. La manière donlla surdité avait apparu chez V'" tendrait à la faire regarder comme de nature rhumatismale. Je ne
donne cependant celte opinion que comme une
(t) Diclionoaire des sciences médicales. Tome 113, page ~ · 73.
�-60simple conjecture. Le rhumatisme est une affection dont la nature est peu connue et si difficile à
étudier qu'on ne saurait meUre trop de réserve à
se prononcer.
On va lire une observalion qui n'cst pas sans
analogie avec la précedente, et donlle résullat est
plus satisfaisant.
OnSERVATION 8 0 ( pur
Il
rAuleur ).
D'" , cultivateur, âgé de 20 à 25 ans, d'une
constilulion robuste, ayant toujours joui d'une
bonne santé, s'exposa à un vent frais pendant
qu'il était en sueur; il sentit surlout le froid autour de la têle. Quelque temps après, il remarqua
quc sa vuc s'affaiblissait; il ne dislinguait plus le
grain qu'il venait de lancer, lorsqu'il semait son
champ à la volée, suivant la coutume du pays.
Cette affection fit des progrès , et il devint tout à
fait aveugle. De temps en temps il voyait tous
les objets qui l'entouraient, comme s.i une lumière
brillanle fùt venue luire dans l'obscurilé. Le malade consulta, à ceUe époque, des médecins qui
constatèrent l'existence d'une amaurose et lui conseillèrent , entre autres moyens appropriés, l'application d'un seton à la nuque, seton qui, pendant longtemps, ne suppura que très peu. Des su-
�-61dorifiques lui furent pre crits el administrés, mais
la peau fut rebelle à leur action. D'" , désespéré,
se décida à partir pour Paris, atin de prendre les
conseils des médecins les plus renommés. On lui
conseilla d'essayer les douches de Chaudesaigues
avant d'entreprendre cc voyage. Le malade suivit
cet avis, et prit, dans l'lttablissement Verdier,
une trentaine de douches sur la tête et autant de
bains: de plus, il avait soin d'exposer le derrière
des oreilles au tuyau de l'étuve comme moyen révulsif : chaque matin il buvait quelques verres
d'cau de l'Hôpital, et coupait son vin avec l'eau
gaze uze de Sainte-Marie. Celle médication détermina une transpiration modérée et rendit plus active la secrétion urinaire. L'état de l'appétit ne fut
point modifié, et les selles restèrent naturelles.
D'" m'a assuré que, pendant tout le temps de
son séjour à Chaudesaigoes, sa vue ne s'était pas
améliorée; cependant les personnes qui lui donnaient des soins m'affirmèrent qu'elles avaient
constaté une .amélioration notable, avant qu'il
quittât les bains. Quoi qu'il en soit, le malade
lui-même m'a raconté qu!en repassant la forêt du
Lioran pour se rendre chez lui (1) , il put dislin(1) Le malade babitait 1'8l'rondisscmcnL d'Aurillac.
�-62guer les arbustes des grands arbres, ce qu'il ne
faisait pas à son premier passage; c'était alors le
22 juillet. Rentré dans sa famille, les sueurs continuèrent, la suppuration du selon devint trèsabondanle, et en même temps que ces phénomènes de sécrétions physiologiques et pathologiques
eurent lieu, le malade eut la satisfaction de voir
l'état de sa vue s'améliorer progressi vement chaque
jour; de telle sorte que le quinze août suivant, il
put lire la messe dans un livre d'heures à caractères ordinaires. Depuis lors, c'est-à-dire depuis
quatre ou cinq ans, celle guérison ne s'est pas démentie. Ce fait, qui m'avait été signalé par M.
le docteur Bonniol, me parut digne d'intérêt:
je cherchai et , je parvins à recueillir moi-même
de la bouche de DU ' les renseignements que l'on
vient de lire. Je profitai de sa visite pour examiner
l'état de ses yeux. L'œil gauche était exempt
de toute lésion. La cornée, l'humeur aqueuse, le
cristallin, l'humeur vitrée étaient parfaitement
translucides; la rétine était très-sensible à la lumière; le cristallin de l'œil droit était opaque et
d'un blanc presque laiteux; la pupille n'était pas
dilatée et le globe oculaire était affecté d'un tremblement convulsif, très - apparent pour l'observateur , mais peu sensible pour le malade.
�-63-
Le peu d'ancienneté de celle amaurose eL la
connaissance de la cause qui l'avait produite
étaient, de l'avis des ophtalmologistes, des circonstances favorables à la guérison. Plusieurs
médecins qui ont écrit sur celle affection ont conseillé les douches d'eau minérale dans le traitement des amauroses dites rhumatismales, et le
fait que je viens de rapporter confirme pleinement
la justesse de ce précepte. Que dire de la formation conséculive de la cataracte de l'œil droit?
doit-on l'attribuer à la même cause qui a produit
la goutte sereine, ou n'en est-elle qu'une complicaÙon indépendante? je l'ignore. Il aurait fallu
observer cette maladie depuis son début pour se
former une opinion sur cc point.
lUalatlies tle l'al'l,arell resl,iratoil·e.
OnSllllVATION !Io (
por ,'Auteur ).
Le même individu qui fait le sujet de l'observalion sixième, après avoir joui d'une santé parfaile jusqu'au trois juin 1841, commit alors
l'imprudence de quitter sa cravate et sa chemise de
flanelle, pendant qu'il avait cbaud. 11 fut saisi
�-64d'un violent mal de gorge avec perte de la voix,
qui fut combattu par des saignées générales et
l'emploi de tisanes émollientes. A celle phlegmasie succéda celle de la muqueuse bronchique,
qui persisla jusqu'au 10 juillet 1841, époque à
laquelle, de son propre mouvement, ce malade
se rendit à Chaudesaigues; il Y prit des bains, des
douches, des étuves, el y but beaucoup d'eau de
l'I1ôpilal. De copieuses sueurs furent Pl'ovoquérut'
par ce trailement, et sous son influence la toux
devint moins fatigante, et l'expectoration plus
facile, mais non plus abondante. L'appétil se faisànt senlir d'une manière moins vive que l'année
précédenle, C'" voulut essayer de le réveillel' en
buvant le malin de l'eau gazeuse de Sain le-Marie ;
mais ce liquide lui pesa; je lui conseillai de le
couper avec parties égales d'eau thermale, et ce
mélange lui fut favorable. Il ne fut pas purgé par
l'eau thermale. Il quitta Chaudesaigues , parfaitement guéri de son rhume, quinze jours après y
êlre arrivé.
OllSEl\VATlON 100 (
par l'Auteur ).
G.... , âgé de 36 ans, d'une constitution faible,
vint me consulter en 184·0. 11 éprouvait des douleurs vagues dans les reins et dans le ventre, et
�-65toussail habituellement. L'examen de la poitrine
donnait un bruit respiratoire très-pur. Le cœur
ballait d'une manière normale. La coexistence dè
douleurs rhumatismales avec une bronchite me
portèrent ù lui conseiller l'usage des caux de
Chauclesaigues. Il alla y passer quinze jours. Il
but, je ne sais par quelle prescription, de l'eau d'e
Sainte-Marie, qui détermina une surexcitation
très-grande ct de l'insomnie. Le calme se rétablit
aussitôt qu'il en eul suspendu l'usage et qu'il l'eut
remplacé par celui de l'eau de l'Hôpital. Il prit en
même temps des bains et des étuves, et fit tomber
la douelle sur les épaules. Celte médicatiou détermina de grandes sueurs; mais ni l'expectoration
ni la toux ne furent modifiées. L'émission de l'urine
et les évacuations alvines restèrent les mêmes.
L'appétit qui à Chaudesaigucs avait été lauguissant
prit de la vivacité quand il eut quiLté celte ville.
G'" conserva une grande disposition à transpirer.
après être rentré chez lui. 11 partit ù l'arrièresaison pour le. Berry où il passa l'hiver, et à son
relour il m'assura qu'il avait beaucoup moins
toussé que les années précédentes.
OBSERVATION
11 0
(
ree. par M. Verdier.)
M. D"·, âgé d'environ soixante-huit ans, d'une
9
�-66constitution plétborique èt d'un embonpoint considérable, souffrait depuis quatre ans d'un œdème
aux cuisses et aux jambes, avec ulcérations aux
téguments de ces extrémités. Cette infiltration était
regardée par son médecin comme la conséquence
d'une ancienne affection asthmatique qui, le printemps précédent, avait fait des progrès considérables, mais qui avait totalemen t cédé aux
divers moyens employés pour la combattre. L'affection des jambes fut aussi traitée par tous les
moyens qui portent leur action sur le tube intestin al ct sur les ,'oies urinaires, sans que leur
effet améliorât l'état du malade. Quoiqu'ayant la
respiration très-libre, il lui était impossible de se
coucher , et il passait toutes les nuits sur une
chaÎse. Il avait beaucoup de difficulté à se mouvoir et à marcher, quoique soutenu par des forces
étrangères. Ce malade se rendit, le 13 août 1826,
à Chaudesaigues, où il fit usage des étuves. Ce
moyen fut employé deux fois par jour, sous mes
yeux, pendant trois semaines. Le malade prit
aussi trois à quatre verres d'eau thermale tous les
matins. Chaque étu"e qui était d'un quart d'heure
à une demi-heure, provoquait chez lui des sueurs
très-aùondantes. Celle méthode seule , en augmentant les fonctions de la peau sans trop d'exci-
�-67talion, et en produisant une sueur comme spontanée, parait avoir été 'sumsante pour détruire
chez ce malade une affection qui avait résisté à
tous les autres moyens . L'œdème disparut dans
peu de temps, les uLcérations se cicatrisèrent; et
M. D*'· se coucho, dort et marche avec beaucoup
de facilité. IL est venu, le 9 juillet 1827, témoigner aux étuves de Chaudesaigues la reconnaissance qu'il leur devait.
Nous ,'oyons dans le cas précédent les sueurs,
provoquées par les étuves. faire disparaître un
œdème avec ulcération des extrémités inférieures.
L'âge, la constitution pléthorique, l'embonpoint
de M. Dm, et cette orthopnée qui le forçait à
passer les nuits sur une chaise, pourraient faire
soupçonner l'existence d'une affection du cœur ou
des gros vaisseaux, si la disparition complète et
durable des symptômes n'éloignait cette idée.
regrettons que le médecin qui a
Toutefois nou~
recueilli cette observation ne nous ait point transmis les éléments de son diagnostic, et n'a.it point
cherché à découvrir la lésion dont l'infiltration et
l'orlhopnée pouvaient être symptomatiques. Nous
devons noter que, chez un malade dont le tem-
�-68pérament semblait contr'indiquer les étuves, elles
ont produit une amélioration prompte. Leur inno(mité dans ce cas s'explique par la déplétion que
faisait subir au systeme vasculaire profond l'excitation des téguments ct l'abondante diaphorèse
qui la suivait. Nous comprendrions aussi parfaitement que de pareils phénomènes criliques déterminassent la solulion d'un engouement passif des
l>oumons ou de la muqueuse des bronches, lésions
qui du reste ne devaient pas ex ister chez 1\1. D* ** ,
puisque sa respiration était libre.
OnSERVATlON 120 ( par
lU. Drémonl ) (1).
Une femme, de Loubaresse ( Lozère), âgée de
35 ans environ, d'une constitution moyenne, d'un
tempérament bilioso-sanguin, sc rendit à Chaudesaigues, chez Claviéres, en août 1827, attaquée
de douleurs laiteuses qui s'étendaient depuis l'aine
gauche jusqu'à la plante des pieds, occupant particulièrement le trajet du nerf crural et de la partie
supérieure du sciatique. Elles embarrassaient tellement les mouvements du membre, que la malade était forcée de faire habiluelleroent usage des.
crosses, depuis quinze mois que durait cetlemala(1) :Mat. méd. des Eaux de Cboudesoigues, poge if.
�-69die. Quelques jours après sa dernière couche ;
n'ayant pas nourri, la moindre secousse lui occasionnait de vives souffrances dans la parlie affectée.
Elle a,'ait consullé plusieurs médecins ; mon oncle,
de Nouviale en Planèze, entr'autres , qui lui ordonna les bains. La douche fut d'abord essayée ;
mais les parties étaient si sensibles que la malade
ne pulla supporter; dès lors on emploie à sa place
·les bains, les douches de vapeur sur la par lie affectée , cadis (1) sur la peau; la transpiration locale ct
générale devient abondante ; la moindre chose fait
traJ) spirer la malade; elle es t conlinuellement en
moiteur . Trois jours su ffisent pOlU améliorer son
état; les parties deviennent moins sensibles; la malade commence à meUre sa jambe à tef1"e ; six jours
après elle supporte la douche, parle de quitter les
crosses pour marcher avec des bàlons; et enfin,
après quinze jours de prise, elle part de Chaudesai gues enlièrement guérie de sa douleur. La même
malade portait en même-temps une affection tuberculeuse de poitrine qui s'améliora. Les douleurs
n'ont plus r eparu, mais cette amélioration de poitrine ne se soutint que quelque temps; la femme
en mourut un an après. Je n'observai daos cette
(1) Nom d'une étorfe de laine fabriqu ée dans le midi do 14
France.
�-70-
cure d'autres phéllomênès remarquables que la
sueur. La malade, en prenan t nos bains, fit en
même temps usage de nos eaux. inté1'ieurement.
La nature laiteuse des douleurs qu'éprouvait
cette malade ne peut aujourd'hui servir de sujet à
une discussion scientifique. Les médecins savent
que ces douleurs sont des rhumatismes auxquels
sont très-sujettes les femmes qui allaitent et celles
qui ont récemment sevré. Certainement, si M. le
docteur Brémont , moins imbu de doctrines humorales surannées, eût attentivement examiné le
membre souffrant, et analysé l'élat des muscles et
des arliculations de cette partie. il fût arrivé à un
diagnostic plus précis et plus en harmonie avec
l'état actuel de la médecine, et l'on doit penser que
ces douleurs laiteuses se seraient transformées en
une sciatique ou un rhumatisme articulaire ou
musculaire de lajambe gauche. Du resle, je n'aurais point placé dans celte catégorie l'observation
qui précède, mais la coexistence d'une phthysie
tuberculeuse améliorée même momentanément me
semble un fait important dans l'appréciation de
l'action thérapeutique d'eau~
thermales siluées
�-71dans une contrée où celle affection très-répandue
n'épargne pas plus l'en fance que l'âge mÜr (1);
je dois dire aussi que j'ai dù m'emparer de tous
les faits dans lesquelles ces eaux ont été dirigées
contre les maladies dites internes, car ils sonl fort
rares encore.
ltlalRtlies tIc l'a.,.,a,,'cil digestif.
OnSERVATION
13 0
(
par 1\1. Verdier ).
X''', âgée d'environ quarante-huit ans, d'un
tempérament pléthorique . résidant à Paris, éprouva à la cessa lion de ses règles des douleurs
très-vives à l'épigastre et à la région du foie . La
peau avait pris une teinte jaunâtre. La ma lade
dormait peu, et son appétit était nul. Son estomac
ne pouvait supporter l'ingestion du moindre aliment sans éprouver de nouvelles douleurs . Celte
affection ful combatlue par les saignées locales, et
les adoucissants tant à l'intérieur qu'à l'extérieur;
mais l'abdomen acquit un volume considérable, et
on percevait par le toucher des indurations chro(1) La phthisie tuberculeuse est une maladie qui s'observe trèssouvent dans les montagnes de la IInute-A.uvergne. Depuis se pt
nns que je pratique la médecine dans cette contrée, j'ai été appelé
ft donner des soins il un très-grand nombre de phlbisiques. J'ai
constaté, une fois, une caverne tuberculeuse chez un enfant de
&ix ans, dont la mère avait succomM Il celte cruelle maladio_
�-72niques à la région du foie. La malade éprouvait
parfois des douleurs assez vives; le sommeil était
pénible, et l'appétit n'était pas meilleur. Le médecin, désespérant de l'état de sa malade, lui conseilla de venir respirer l'air de l'Au vergne, patrie
de son mari, d'aller même prendre les bains de
Vichy ou du Mont-d'Or . Se trouvant plus à portée
des eaux de Cbaudesaigues, elle vint , dans le
mois de juillet 182'1, prendre mes conseils. Je
l'engageai fortement à faire usage de nos bains, et
à faire tomber principalement ]a douche sur la
région du foie. Le bain était d'une heure ct la
douche d'une demi-heure par jour; la malade
prenait en même temps l'eau gazeuze de SainleMarie, à la dose de quatre à cinq verres tous les
malins, Au boul de quinze jours il n'existait plus
de douleur, le volume du ventre était diminué,
les indurations disparurent, la malade recouvra le
sommeil et l'appétit, la digestion s'opéra parfaitement, enfin les couleurs ct la gaieté ordinaire
reparurent insensiblement , et M.rne X··· repartit
pour Paris au commencement de septembre, et ne
se ressentit pas des faligues du voyage.
Le fail précédent est un cas bien caractérisé de
�-'13gastro-duodéno-hépatite chronique. Cette guérison
n'a pas besoin de commentaire et ne doit pas être
perdue pOUl' l'avenir des thermes de Chaudesaigues. On pourrait prétendre, il est vrai, que
ceUe cure doit être exclusivement attribuée à l'usage des eaux gazeuzes de Sainte-Marie; il me
semble plus probable que seules elles n'eussent
point été aussi salutaires à cette malade. L'excitalion qu'elles d6terminent dans les organes digestifs eût fail passer la phlegmasie chronique à
l'état aigu, si les bains et les douches, en déterminant uu mouvement centrifuge des fluides circulatoires, n'eussent opéré une efficace dérivation.
OnSERVATION 140 (
par l'Auteur ).
n
. , âgée de 45 ans, bien réglée, éprouvait ,
depuis sept ans environ, des douleurs d'estomac qui
s'irradiaient dans la région dorsale, dans les Oancs,
mais surtout dans le côté droit. La malade mangeait
peu et n'avait. du reste que fort peu d'appétit. EUe
n'était point altérée, et les douleurs qu'elle éprouvait n'étaient jamais occasionnées, disait-elle, par
l'alimentation, quoiqu'elle eût reconnu que des
mets légers passaient plus facilement. Elle vomissait quelquefois des liquides jncolores et trèsoo
tO
�-'14peu acides, ct ce vomissement la soulageait.
L'épigastre était sensible à la pression, ct la malade, loin d'avoir à la peau celle chaleur qui
tourmente ordinairement ceux qui sont atteints
d'inflammations, était au contraire fatiguée par
une sensation continuelle de froid. EHe prétendait
que cc symptôme était survenu à la suite d'un
violent chagrin qu'elle avait éprouvé lors de la
mort d'un ùe ses parents. Pendant tout le cours de
sa maladie, elle avait été consUpée, excepté pendant un an qu'cHe fut sujette à la diarrhée.
Celle constipation existait quand elle vint à Chaudesaigues à la fin de juillet 184·0. Elle n'y resta
que neuf jours, ne prit que sept bains et crut
devoir les interrompre pal' suite de l'irruption
du flux menstruel. Elle restait une heure dans
le bain ct demi - heure dans le cabinet d'étuve; ellc laissait tomber la douche sur Le
'côté droit et sur la partie inférieure du sternum,
l'épigastre étant trop sensible pour la recevoir.
Elle prenait chaque jour quatre ou cinq verres
d'eau de l'Estende, et à chaque ingestion elle
éprouvait du bien-être. Ces bains, ces douches,
ces étuves, ces eaux prises en boisson, déterminaient d'abondantes transpirations. La quantité de
l'urine n'avait pas augmenté, mais ce liquide était
�-75plus rouge el plus chal'gé qu'à l'ordinaire. La
constipation persista. La haute température des
étuves ne donna naissance à aucun symptôme de
congestion cérébrale, à aucun autre d'emharI'a s
gastrique; la malade au contraire se sentit soulagée. Quelques jours après son arrivée à Chaudesaigues , elle recouvra l'appétit et le sommeil. E\le
ne vomit plus; la circulation plus active rapporta
la chaleur à des membres qui en étaient privés, et
une loucorrhée, qui existait depuis longtemps, de-vint beaucoup moins abondante. La malade, émerveillée de celle rapide amélioration, pensait que
le repos avait fait tous les fra is de la guérison
pour elle qui se livrait avec ardeur et persévérance
aux rudes travaux des champs; mais de retour
dans ses foyers, elle s'y livra de nouvea\t avec la
même cunstance, sans que sa santé en fût ébranlée. Je la vis dix mois après son retour des eaux,
et je trouvai que son teint était naturel et qu'ellQ
avait pris de l'embonpoint.
Combien la guérison de celle gastralgie avec
dispepsie a été rapide! Cette affection qui durait
depuis sept ans s'est dissipée d'une manière presque miraculeuse. A de t:rllelles souffrances suc~
�-76cède un état de blen-êtrè; à de l'inappétence 1 le
désir des aliments et une facilité très-grande des
digestions. Toutes les fonctions se régularisent. La
circulalion plus active fait affluer vers la peau
une quantilé de sang suffisante aux phénomènes
de la calorification 1 la muqueuse vaginale cesse
de sécréter des produits morbides; enfin l'harmonie
s'établil enlre toutes le fonctions de l'économie;
et, pour tous ces changements 1 neuf jours de traitement ont suffi. Évidemment l'augmentation trèsgrande de l'exhalation cutanée 1 l'élimination par
les urines de matières excrémcntilielles ont dû
rendre plus active l'absorption inlerstitielle 1 les
vaisseaux e sont dégorgés 1 la sensibilité organique est devenue plus régulière 1 et de ce concours
de modifications pbysiologiques estrésullé cet élat
normal des organes et cette harmon ie de fonctions
qui constitue la sanlé.
Je vais consigner à la suite de ce fait quelques
souvenirs d'un cas analogue.
OnSEJ\VATlON
1lSo ( par l'Auleur ).
Une dame de ma connaissance 1 âgée de I~O ans 1
ayant toujours joui d'une bonne santé 1 éprouvait 1
depuis six moi ,une di pepsie complète. Elle n'a-
�-77vait aucun appétit; sa bouche était pâteuse, sans
que la langue fût chargée. Elle n'était point altérée;
l'épigastre élait insensible à la pression. Aux heures
des repas, elle se meltait à table, mangeait par
raison et par habitude, sans plaisir comme sans
dégoût; à cela près , sa santé était parfaite. Quelques médecins lui avaient conseillé de se rendre
à Vichy; mais son mari étant atteint d'un· rbumatbisme articulaire cbronique, ct devant se
rendre aux bains de Cbaudesaigues, elle l'y accompagna. Arrivée sur les lieux, elle cbercha à
utiliser pour elle un voyage dont la santé de son
mari avait été la cause délerminante ; et, sur l'avis
de quelques personnes étrangères à l'art médical,
elle but chaque matin quatre à cinq verres d'eau
de la source de l'Estende. Elle sucrait légèrement
cette boisson dans le but d'en faire disparaître
la fadeur. Après avoir continué ce trailement
pendant une douzaine de jours, elle partit, parfaitement délivrée de sa maladie. J'ai eu occasion
ans après son retour des eaux, et
de la voir deu~
la solidité de sa guérison ne s'était point démentie.
OnSEUVATlON 160 (par l'Auteur).
M. A. J"', âgé de 28 ans, d'un tempérament
�-78sanguin, livré aux rudes travaux des champs,
s'exposait souvent aux intempéries des saisons. Il
fut atteint d'une douleur à l'épaule gauche, qui
avait son siége dans les muscles de celle partie.
Comme elle lui laissait d'assez longs intervalles de
relâche, le malade ne voulut rien faire pour s'en
(lélivrer. Dans le courant de l'année 1839, il fut
affecté plusieurs fois de violentes coliques, et pendant leur durée, il n'y avait ni soif, ni vomissement , ni diarrhée. Ces coliques furent combattues avec succès pal' des applications de sangsues,
des lavements ct des cataplasmes laudanisés; le
malade, atlealif à tout ce qui touchait sa santé,
reconnut qu'elles succédaient d'ordinaire aux douleurs de l'épaule, el que ces dernières cessaient,
lorsque les autres se faisaient sentir. li me fit part
de cetle observation. Peusant alors que ces coliques pouvaient être de nature rhumatismale, je
lui conseillai d'aller prendre des bains et des douches à Chaudesaigues ; il s'y rendit et obtint une
guérison radicale.
Le malade dont je viens de citer l'observation,
avait su analyser son état el avait pu instruire le
médecin de tous les changements qui survenaienl
�-79-et le mettre ainsi en posiLion de lui donner d'uliles conseils. Combien d'habitants de la campagne pourraient êlre soulagés, si l'homme de
l'art auquel ils n'ont recours qu'à ]a dernière extrémité, pouvait être instruit de tous les phénomènes de leurs maladies, et par suite en découvrir
la véritable nature! Loin de là , les médecins qui
pratiquent dans les campagnes sont à peine consuItés une ou deux fois dans le cours d'une maladie longue et obscure. Comment donc pourraientils arriver toujours à celte précision de diagnostic sans laquelle la thérapeutique marche en aveugle et au hasard?
OnSERVATlON
170
(
par \' Auteur ).
1\1*** , cuisinière, âgée de 30 ans, d'un tempé-
rament nerveux, fut aUeinle, en 1838, d'une
bronchile aiguë, des plus intenses et des plus opiniâtres. La durée de cette affection affaiblit beaucoup la malade, et c'est durant cet élat de faiblesse que se développèrent des symptômes hystériques très-prononcés, qui furent efficacement
combattus lmr des antispasmodiques. Enmai 1840,
M'" éprouva une gastrite aiguë légère qui ne tarda
pas à se dissiper. Elle vomissait quelquefois un peu
�-80de sang liquide qu'elle croyait expectorer. Elle ne
toussait point. et l'auscultation donnait des résullats très-rassurants sur l'état des voies respiratoires.
Pendant tout le cours de l'année 184,0, l'évacuation menstruelle fut régulière, mais peu abondante . Sa position de cuisinière dans une auberge
l'obligeait à des travaux fatigants. Elle éprouvait
souvent un sentiment de douleur à l'épigastre et
sous le sternum: sa bouche était mauvaise, son
appétit nul, et un goût de sangla tourmentait sans
cesse. A la fin de juillet, elle voulut aller prendre
des eaux minérales. Un concours de circonstances
qu'il est inutile de raconter la conduisirent à Cbaudesaigues. Là, elle se plongea une première fois dans
un bain tempéré, y tomba en syncope, el l'on fut
obligé de l'en sortir. 11 en fut de même le lendemain; dès lors elle dutrenoncer aux bains. J'arrivai à Chaudesaigues sur ces entrefaites, ct je conseillai à la malade de s"en tenir à l'usage intérieur de l'eau thermale: son estomac la supporta
très bien. Pendant les premiers jours, elle vomit
un peu de sang caillé ct éprouva un bien-être marqué, après l'avoir rendu. Son pouls était normal,
il n'existait point de sensibilité à l'épigastre, point
de diarrhée. L'appétit était très-vif, insatiable,
�-81les digestions très-faciles. En arrivant aux Eaux,
1\1"* avait un teint jaunâtre, une figure fatiguée.
En huit jo\ll's son teint devint rosé, sa figure
épanouie; elle m'ail, en un mot, toules les apparences de la bonne santé. Enfin, après une
douzaine de jours de séjour, des symptômes de
I)léthore sanguine se manifestèrent, le pouls s'éleva, la face s'injecta; il survint des maux de
tête et des vertiges, ct ces symptômes coïncidèrent
avec l'époque présumée du retour des menstrues.
Je fis suspendre l'cau prise en boisson et prescrivis
deux pédiluves d'eau thermale, un bain de siége
de même nature chaque jour, la diminution de la
quantité des aliments ct une application de sangsues à la vulve. Ces prescriptions furent suivies,
à l'exception de la dernière. L'irruption des règles,
qui ne larda pas à avoir lieu, fit cesser Lous ces
symptômes de pléthore. La malade partit alors de
Chaudesaigues, délivrée du goùt ùe sang, avec
un appétit trés-vif et un bien-être qui lui était
inconnu depuis longtemps.
Au premier abord on est porté à penser que le
repos seul pouvait opérer cette guérison chez une
malade épuisée par une vie active et de pénibles
11
�-82tl'avaux. Cependant nous devons remarquCl' que
ces eaux si peu minérali ées ont déterminé une
excitation du système va cula ire général et donné
de l"'nergie à la menslruation qui depuis longtemps
Mait languissante. L'état de l'eslomac a également
subi une heureu e modification. La légère hématémèse, à laquelle était sujelle la malade, s'e t renouvelée les premiers jours et est devenue une crise
salutaire, puisque l'amélioration l'a suivie de près.
La circulation étant devenue plus régulière dan les
vaisseaux qui di tribuent leurs ramifications aux
diverses luniques du ventricule, les fonctions de
cet organe se sont rétablies, et ce rétablissement
'est manife té par le retour de l'appétit, l'activité
de la cbymification etl'apparilion de Lou le, phénomènes qui annoncent une assimilation parfaite.
L'excitation produite par l'usage de l'eau thermale
à l'intérieur favorise quelquefois l~ ré olutioll des
phlegmasies chroniques. Je me rappelle avoir vu
à Chaudesaigues une dame de 40 ans, alteinte
d'une gastrite chronique qui avait résisté aux
émollients et au régime lacté. L'usage des eaux
continuéseulementpendant deux semaine améliora
notablement son état. On ne pouvait douter de
l'cxistence de la phlegma. ie ga triquc, cal' la langue était rouge et èche, la soif vive, les alimen\s
�-
~ 83-
rejetés pal' le yomisscment aussilôt après leur ingestion, cl la sensibilité de l'épigastre assez développée. A ces symptômes sc joignait un grand état
de faiblesse qui rendait dangereux l'emploi des
émissiolls sanguines.
OliSEUVAT10N
1Sc ( pur l'Auteur ).
l'lille D"· , âgée de 4·0 ans, d'une bonne constitution, ayant beaucoup d'embonpoint, était fatiguée
par une constipation opiniâtre avec sentiment de
constl'ictiOll douloureuse · dans le 't'entre. Elle se
rendit à Cltaudesaigues dans 10 courant de juillet
18U, pour y accompagner un autre malade. 1\1e
trouvant à ceLte époque dans celle ville, je lui
conseillai des bains, la douche ascendante et l'usage interne de l'eau de l'Hôpital. Elle ne se soumit
qu'au premier el dernier de ces moyens, et l'effet
en fut prompt et favorable. Cinq à six jours après
son arrivée, elle se sentit délivrée de la sensation
pénible de con$triction abdominale et put aller librement à la selle. L'appétit était Yif, et le sentiment de bien-être qu'elle éprouvait la rendail fort
contente. Celte guérison ne fut accompagnée d'aucun phénomène critique apI)J'éciable. La malade
quitta Cbaudesaigues quatorze jours après son ar-
•
�-84rivée. De retour dans ses foyers, les douleurs se
renouvelèrent avec beaucoup d'intensité, mais se
dissipèrent bientôt.
OnSERVATION
190
(
pur
l'Auteur
J.
G.. •• âgée de 27 ans. d'un tempérament
sanguin, souffrait, depuis environ sept ans, d'une
douleur siégeant dans la région du foie. Cette douleurs'exaspérait légèrement par la pression, n'augmentait pas les mouvements du tronc, devenait
plus vive dans les temps froids et humides et disparaissait, comme par enchantement, par la chaleur
du lit. La malade passait quelquefois des mois entiers, sans en re sentir la moindre atteinte. Le foie
n'avait point augmenté de volume et n'étaillesiége
d'aucune tumeur saisissable au palper. Il n'existait
ni n'avait jamais exislédejaunissc; l'allpélils'était
bien conservé; on n'observait aucun signe de réaction fébrile. Quelquefois la malade ressentait une
irradiation de la douleur dans l'épaule droite; on
avait cherché à comballre cet état par une application de sangsues et celle d'un vésicatoire saupoudré avec de l'acétate de morphine. Consu1l6 alors
par l\fme G*" ,je prescrivis une nouvelle applicalion de sangsues; puis la douleut' sc montrant d'une
Mme
�-85manière périodique, la malade prit du sulfale
de quinine qui fit disparaHre l'inlermittence, sans
détruire la douleur. Je Yoyais fort rarement Mme
G··· qui habilaitla campagne. Cependant informé
qu'elle souffrait loujours , ct persuadé que celle
affection était une simple pleurodynie, je lui fis
conseiller d'aller aux caux de Chaudesaigues. Elle
'y rendit en juillet 1838 , Y prit des bains et nt
lomber la douche sur le côlé douloureux. La percussion trop violente de la colonne liquide accrut
l'intensité des douleurs. Aussi, d'après les conseils
de M. le docteur Bonniol , elle renonça à cc moyen
ct se borna à exposer le côté douloureux il la vapeur du tuyau qui s'ou ne dans les cabinels d'étuYe.
La malade restait trois quarts d'heures dans un
bain tempéré, passait de là à l'étuve, puis était
porlée dans son lit où elle transpimil abondamment. Bientôt elle éprouva une amélioration
sensible, les douleurs disparurent, l'appétit devint
trés-vif; peut-être étail-il excité par l'usage de
l'eau gazeuse de Sainte-Marie qu'eUe buvait mêlée
au vin de ses repas. Enfin elle quitta Chaudesaigues
dans un état parfait de bien-être. Pendant son
voyage, elle l'es la lout un jour sans prendre d'aliments ; le SOil' elle mangea beaucoup et' en eut une
l'orte indigestion. Dès lors, la douleur reparut.
�-86l'appétit devintlanguiss'anl. Elle essaya de le ranimer en prenant de temps en temps un sel purgatif
vendu par des Sœurs de la Charité. Ce sel entretint
de l'irritation dans l'estomac, et au mois de septembre suivant, elle eut un vomissement de sang,
après avoir resté longtemps exposée au vent. Elle
continua à souffrir jusclu'en juillet 1841 , époque
à laquelle ses occupations lui permirent d'avoü'
recours de nouveau t-aux eaux de Chaudesaigues.
Elle y passa quinze jours, en revint souffrante, il
est vrai, mais sa douleur se dissipa trois semaines
après sa rentrée. Depuis huit mois, elle ne l'a plus
ressentie, quoique les froids de l'hi ver aient été
rigoureux.
J'ai longtemps hésité à placer cette observation
dans la catégorie où elle se trouve, attendu que
le diagnostic différentiel n'en est pas sans difficullé. Après y avoir mûrement réfléchi, j'ai abandonné l'idée d'une pleurodynie il. laquelle je m'étais
d'abord arrêté, et j'ai cru devoir considérer ce
fait comme un cas rare de névralgie du plexus
hépatique. En effet, l'absence de douleurs dans les
mouvements du tronc, leur disparition pendant
la nuit qui d'ordinaire exaspère celles qui sont
�-87rhumatismales, la coexistence de la douleur de
l'épaule gauche que l'on ne peut expliquer que par
les filets: que le foie reçoit du nerf phrénique, la
non-existence d'une pleurésie à laquelle on pOUl'l'ait attribuer cetle irradialion , ainsi que le pense
l\f. le docteur Louis, la réapparition de la douleur
après une indigestion, m'ont porlé à croire que
mon premier diagnostic était erroné. Du reste, la
manière de voit' que je viens d'adopter peut certainement fournir malière à controverse: peutêtre pourrait-on rapporter cet ensemble de symptômes à une congestion sanguine de l'organe hépatique , congestion qui, il est vréii , eût pu donner naissance à la douleur, mais qui aurait aussi
déterminé des modifications dans la sécrétion biliaire. D'ail\(~US
peut-on penser que le froid eût
constamment produit celte congestion sans agil' en
même temps sur d'aulres organes, tels que les
poumons qui sont plus exposés à ses influences?
Ne voit-on pas au conlraire, chaque jour, les
névralgies recGnnaLtl'e pour cause les variations
brusques de la température? Je ne puis étayer mon
opinion, je l'avoue, de l'exemple d'une pareille
névralgie; .le n'en connais aucune dans les auteurs. l\f. le docteur Barras décrit une gastralgie
hépatique et une gastro-hépatalgie, et cite le mé-
�-88decin anglais Jonshon 'comme ayant souvent observé celle affection; 'mais la description qu'il en
donne n'a aucune ressemblance avec le fait dont
il s'agit. Les cas de gastralgies hépatiques, observés par ces deux médecins, me semblent des gastra lgies avec irradiation sympathique du côté du
foie et ayant atteint assez de gravité pOUl' produire lous les phénomènes de l'hypocondrie: leur
opinion n'exclut en ricn l'idée d'une névralgie
idiopathique des plexus nerveux du foie.
Itlalatlies cIe l'al.paJ.'eil .le la sécl.'étioll
1.u·ina.i..,c.
OnSJl:I\VATlON 200 ( par
MlIO
l'Autour ).
J"', âgée de "'·0 ans, était aUeinte d'une
douleur rhumatismale ayant son siége à la cuisse.
Cette douleur, après avoir été fixée pendant quatre
ans sur ce point, se porta au ventre. C'était surtout la nuit qu'elle se faisait sentir; alors la malade urinait trois ou quatre fois. Cba(lUe émission
de l'urine était douloureuse; ce liquide était rouge
et très-sédimenteux. La région hypogastrique était
sensible à la pression. Tes douleurs cxistaient par
moment dans tout l'abdomen, el s'jrradiaient vers
la région lombaire. Les voies digestives présen-
�-89taient aussi quelques désordres : diminution de
l'appétit, point de soif, point de vomissements,
digestion pénible des viandes salées, insensibiliLé
du ventre à la pression, même pendant les douleurs, constipation pendant quatre ou cinq jours,
suivie de selles liquides. La malade éprouvait toujours une sensation de froid. Cet état durait depuis
trois ans et s'était aggravé chaque année, lorsque
je lui conseillai les bains de Chaudesaigues où elle
se rendit en juillet 1838. Là, livrée à eHe-même,
elle prenait les bains aussi chauds qu'elle pouvait les endurer, laissait tomber, pendant ulle
demi-heure, la douche sur le ventre, et restait
pendant vingt ou vingt-cinq minutes dans l'étuve
la plus forle de l'établissement Verdier. La douche
succédait au bain et l'étuve à la douche. Elle sc
rendait ensuite dans son lit, prenait un bouillon
et transpirait pendant deux heures. Elle fut constipée pendant les quatre ou cinq premiers jours de
'Son séjour à Chaudesaigues, puis elle eut la diarrhée qui persista jusqu'à son départ. Elle avait de
l'appétit, mangeait avec plaisir; mais ensuite ses
digestions étaient pénibles, douloureuses même.
Elle atlribuait les souffrances de son estomac à un
dégagement de gaz qu'elle cherchait à combattre
pal' un remède populaire, l'infusion d'anis. Cette
12
�-90boisson chaude et aromatique la soulageait réellement. Elle y eut recours les deux premières années; mais la troisième elle prit, d'après mon conseil , en gu ise de café, un verre d'cau de l'Estende
sucrée. Ce moyen rétablit la facilité des digestions
d'une manière aussi prompte que complète (1).
Pendant tout le temps de son séjour à Chaudesaigues, Mlle JO" ressentit vivement les douleurs abdominales et les difficultés d'urin~;
mais elle en
fuq délivrée dès 'qu'elle fut rentrée dans son domicile.
La guérison de la maladie que je viens de décrire ne fut pas le seul bienfait qu'elle dut à ces
eaux. Je vais raconter les résultats heureux
qu'elle en relira. Lorsqu'elle était en proie à une
émotion morale triste, elle éprouvail d'abord une
violente céphalalgie avec élancements, puis la
douleur de ftêle disparaissant, elle sentait sur la
l'égion du cœur une forte compression, avec le
sentiment d'un affaissement si grand qu'elle ne
pouvait parler, quoiqu'elle entendit tout ce qui
se passait autour d'elle; alors le moindre bruit lu;
était insupportable. A cet état qui durait sept à
huit minutes succédait une faiblesse pareille à
(1) l\'l. Podcvigne, da'ns sn .tMse , avait assigné cette llropriélè
à t'eau thermale do Cbaudesalgues.
�-91celle qu'épl'ouve un convalescent à la suite d'une
longue maladie, Ces symptômes que je regarde
comme hyslériques t ne se montrèrent plus après
sou retour des eaux, Mlle ru avait encore été sujette à uue ophtalmie double, caractérisée par
une injection ·lrès-Iégèl'e des conjonctives t et une
yive douleur dans les yeux qu'elle ne ressentait
que le malin et le soir. Celle affection é,lyait disparu t après une durée de quatre à cinq mois,
sous l'influence d'une application de sangsues et
d'un llUrgalif; plus tard celle singulière ophtalmie
ayant reparu, une saigoée au bras la fit disparaître; mais elle ne larda pas à se montrer de
nouveau t el la malade n~eo
fut définitivement délivrée qu'après son relour des bains de Chaudesaigues.
De plus, Mlle J'" anit éprou vé dans soo jeune
âge un affaiblissement de la vue, dont elle ne fut
délivrée que par une éruption de teigne qui lui
survint à l'âge de sepl ans et qui occupa tout le
cuir chevelu jJ1squ'à œlui de (lix-lJuil t époque de
l'apparition des règles. Cette affection t contre
laquelle on avait dirigé de nombreux remèdes
conseillés, soit par des médecins', soit par des personnes étrangères à l'art, disparut alors presque
complèlement, 11 ne resta qu'une croùte de la
�-92grandeur d'une pièce de cinq francs, et dont la
malade se délivrait momentanément en l'enduisant
d'un corps gras: cetle crollte ne cessa de se reformer que lorsque la malade eut pris les bains de
Chaudesaigues. D'après les détails donnés par la
malade, l'odeur, la couleur des croûtes et la calvitie que leur présence a déterminée, m' ont porté
à croire que cette teigne était le porrigo favosa de
Willan.
Dans l'observation précédente, les douleurs vé-.
sicales et intestinales me semblent dues au rhumatisme qui, s'étant porté sur la tunique musculeuse
de la vessie ct des intestins, donnait lieu aux désordres fonctionnels signalés. Celle manière devoir
me semble justifiée par le caractèl'e nocturne des
douleurs, par leur migration de la cuisse au ven-.
tre. Evidemment les bains d'eau thermale étaienl
indiqués ct devaient réussir, Dans ce fait il importe
de noler que les douleurs devinrent vives pendant
la durée du traitement ct qu'elles disparurent,
quand il fut terminé; que d'abondantes sueuJ's fuJ'ent le phénomèno critique de celle cure, el que
l'eau thermale prise après le repas rendit la digeslion très-facile, Ce qui n'est pas moins digne de
�-93remarque, c'est la disparition d'une croûte de favus existant depuis trente ans et rebelle à tout autre moyen, et celle de ces phénomènes hystériques
que je n'avais pas observés moi-même, et que
par conséquent je n'ai pu décrire que fort imparfaitement.
lUalstlies du SystèlllC aJ.·tleul"iJ.·e.
OBSERVATION
21 0
(
par 1\'1. Grussal ).
Une fiUe de 28 ans était atteinte, depuis dix
ans, d'une tumeur blanche de l'arliculation du genou. Elle avait traversé une rivière dans un moment oû elle transpirait, et attribuait à celte imprudence le développement de son mal. Le volume
de l'articulation malade avait doublé. Blanche,
luisante, rénillenLe au toucher, celle articulation
à demi fléchie ne lui permettait plus de mouvements,
sans causer les plus vives douleurs, et ces douleurs,
développées depuis plus de six mois, étaient porlées au point qu'elles ue lui laissaient plus de repos.
Les tendons des muscles fléchisseurs de la jambe
avaient acquis de la rigid ilé ; les muscles gastrocnémiens ou bifémoro-calcaniens s'étaient émaciés
et la jambe ne prenait pas toule sa nourriture:
�-94enfin on voyait une série de veines bleuâtres disséminées sur toute cette peau luisante. A celle
conges lion lympbalillue que je pensais être le prélude d'une suppuration commençante, soit du
tissu graisseux dégénéré, soit du cartilage interarliculaire ou de l'une des extrémités spongieuses
du fémur ou du libia, je lui prescrivis quelques
moyens externes qui pouvaient opérer du soulagement. tels que liniment volatil narcotique, frictions mercurielles, vésicatoires volants, douches
artificielles, seton placé près du condyle interne;
rien ne put alléger son état. Huit mois se passent
dans des souffrances croissantes, et je me voyais
contraint de proposer l'amputation. La saison des
eaux arrive; je lui conseille, sans trop y compter, les bains et notammenl les douches fréquentes de Chaudesàigues ; eh bien, à ma grande surprise, et après six semaines de séjour qui furent
passés dans l'emploi de trois douches pal' jour et
d'un bain suivi d'une étuve sèche. la malade revint chez elle avec beaucoup moins de douleurs,
puisqu'elle commençait à reprendre du sommeil.
Six mois après, elle put s'appuyer légèrement sur
le membre malade. L'année suivan te, elle reprit
les mêmes moyens de traitement, et le succès en
de la tuful mal'qué par la diminulion du v~lume
�-95meur anldlosée et IHlf une plus grande nourriture
du membre, et enfin la troisième saison des eaux
ne fit que confirmer la cure et consolider un membre qui a néanmoins resté il demi fléchi.
Voilà un cas de tumeur blanche bien caractérisée. M. Grassal avait employé tous les moyens
indiqués; lous avaient élé infructueux: enfin,
l'amputation apparaissait comme dernière et triste
ressource. L'état du genou l'eM fait juger indispensable à tout médecin praticien. Les eaux
de Cbaudesaigues l'ont rendue inutile. La malade
a élé guérie après trois saisons aussi bien qu'il
était permis de l'altendre , vu les désordres organiques qui existaient déjà. Cetle observation eût
été encore plus intéressante, si le médecin qui l'a
recueillie nous eût appris quel avait été l'effet des
douches sur le genou malade. Déterminaient-elles
". une vive excitation locale? avail-on été obligé de
la combattre par des antiphlogistiques? en un
mot la phlegmasie chronique était-elle passée à
l'état aiguë avant de disparailre? et l'état général
de la malade, il était indispensable d'en rendre
compte. Les fonclions nutritives avaient-elles été
modifiées d'une manière favorable? l'appélits'élait-
�-96prononcé rapidement?' Les émonctoires naturels
avaient-ils donné issue à une grande quanlité de
matières excrémenlitielles? C'est par de lels détails
qu'on initie le médecin à la manière d'agir des
eaux, ct qu'on peut soulever un coin du voile qui
nous dérobe les mystérieuses opérations de la nature.
OBSEnVATlON
22c ( par 1\1. Verdier ).
Un maréchal de Saint - Flonr, âgé d'environ
trenle-six ans, doué d'un tempérament fort et
robuste, portait, il y a près de deux ans, au genou
droit, une tumeur lymphatique d'un volume extraordinaire. Les os de la jambe étaient devenus
courbés et avaient pris, pour ainsi dire, la forme
d'une faucille, Tous les moyens que le malade
essaya pour se procurer du soulagement, furent
presque sans effet. Il arriva à Chaudesaigues vers
la fin de juillet 1826, ne se trainant qu'avec peine .
à l'aide d'uue béquille. 11 ne prit que quatorze
doucbes qui dissipèrent enlièrement la douleur,
opérèrent en parlie la résolution de la tumeur, et
mirent le malade dans le cas de se rendre à pied à
Sainl-Flour. Il est revenu en, 1827, prendre quelques douches. La jambe malade est aussi droite
que l'autre: la tumeur est presque dissipée.
�-91-
1\'1. Verdier n'a pas donné les cal'actères de la
tumeUl' de ce genou. Etait-elle formée par l'articulalion elle-même ou simplement juxta-posée à
cet organe? Le médecin est indécis entre une tumeur blancbe, une hydarthrose, une arthrite
chronique sans dégénérescence des tissus. Toulefois, cette observation présente de l'intérêt, car il
est rare de voir une affection, qui dure depuis
deux ans, disparaître presque complètement,
après un traitement de quatorze jours.
OJlSERVATION 230 (
par 1\1. Verdier).
Une jeune fille des environs de Saint-Flour,
âgée de huit ans, éprouvait depuis deux ans une
douleur très-vive, qui élait fixée à l'articulation
ilio-fémorale gauche avec déplacement de la tête
du fémur. Elle fut transportée à Chaudesaigues
dans le mois de juillet 1826; elle se traînait à
l'aide de deux béquilles; elle fut mise de suite à
l'usage des bains et des douches, et l'effet qu'elle
en retira fut si prompt qu'au bout de huit jours
la douleur fut complètement dissipée. La malade
éprouvait seulement un peu de faiblesse de la
13
�-98jambe gauche qui l'obligeait, pOUl' sc soutenir ct
marcher, de s'appuyel' SU l' un bâlon qu'elle abandonna après quinze jours de l'usa
~e
des bains cl
des douches. Celle malade esl revenu e à Chaudesa igues dan s le mois d'août 1821; elle m'assura
qu'elle n' avait pas éprouvé, depuis l'année précédente, le moindre senliment de douleur.
Toutes les eaux thermal es sont propres à la
guérison des luxations sponlanées commençantes .
,J'en ai vu traiter ct guérir par les eaux de
Saint-Nectaire. M. Bertrand, du Monl-d'Or, et
M. Chevalier (1) , de Bagnols (Lozère ) , cilent des
observalions analogues . 1\L Grassa l en a vu guérir
aussi par l'emploi des douches de Chaudesaigues.
n cile le ·fait d'un militaire chez lequel l'allon gement du membre était considérable el qui guérit
parfaitement.
OUSERVA'.t IO N 2!~c
(par M. Verdier ).
Le nommé B'" D"', âgé de 23 ans, d'uue
constitution faible, après s'ê tre mouillé plusieurs
(i) Recherch es S ill' los ea ux the rmal es de Bagnols, les bains
( pres Mende ) 18iO.
�-99rois il la pêche, fllt atteint, il ya envil'Oll cinq
de douleurs vives aux articulations des extrémités, avec engorgement de celles des phalanges. li se J'endit à Cllaudesaiguesdans le courant
de l'été de 1822 , perclus des bras et des jambes,
ne pouvantleuJ' imprimer le moindre mouvement,
ans éprouver des douleurs aiguës et lancinantes.
Il fit usage des bains, des douches et des étuves.
Au bout de quinze jours il éprouva un grand soulagement. Trois semaines apl'ès qu'il fut rentré dans
ses royers, les douleurs et les engorgements des
arlicnlations furent entièrement dissipés, et DU'
partit pOUl' la Normandie où il resta dix. mois sans
le moindre symptôme de son affection arthritique.
De retour chez lui, il éprouva une nouvelleatlaque,
mais qui se déclara avec moins d'intensÎlé que la
première: il eut recours aux mêmes moyens curaLi rs et en relira les mêmes effets. Trois ans sc sont
écoulés depuis, et D' " n'a pas éprouvé la moindre
douleur et a continué ses voyages en' Normandie.
Se trouvant cette an;née-ci au sein de.sa famille,
il est venu prendre pal' précaution quelques bains
et quelques douelles.
"ilS,
Ce cas ùe rhumatisme articulaire qui avait alla.-
�-100qué toutes les grandes articulations des membres,
avait déterminé l'engorgement de celles des phalanges. Il arrive quelquefois que l'arthrite rhumatismale , après avoir assailli plusieurs fois les grandes elles petites articulations, disparaît en laissant
après elle un engorgement avec déformation des
petites articulations, de sorte qu'on pourrait
croire que ces malades ont été atteints de lagoulle.
Je me rappelle, à ce pro po , l'exemple d'une dame
de soixante ans, d'un tempérament très-sec, que je
vis à Chaudesaigues. Elle avail cu une inflammation
de toutes les articulations des membres. Après avoir
été en proie à de vives souffrances et être restée
longtemps privée tlu mouvement, elle vit les grandes articulations reprendre leur élat normal; mais
il lui était impossible de se servir des mains dont
les doigts étaient raides et déformés. Dès qu'elle
put supporler la voilure, elle se rendit à Chaudesaigues, et en quittant celte ville, l'inlensilédes
douleurs avait déjà beaucoup diminué. Trois sai~
sons des bains améliorèrent sou élat • mais ne la
guérirent pas complètement. Celleaffeclion abeaucoup des caractères de la goutte el beaucoup d'autres du rhumatisme. Souvent il est difficile d'élablir une ligne de démarcation entre ces deux maladies.
�-1011\1. Verdier a aussi inséré daos l'essai sur Ch audesaigues un cas de fausse ankilose du genou, que
je n'ai pas jugé convenable de reproduire, parce
que ce genre de guérisons présenle d'autant moins
d'inlérêt qu'on en observe chaquejonr de pareilles
dans tous les établissemenls lhermaux. Pour mon
compte, j'ai envoyé à Chaudesaigues plusieurs
fraclurés, et ils en ont tous reliré beaucoup d'avantages.
OnSERVATlON
2 iJc ( par M. Verdier ).
Mlle. C'" , âgée de 18 ans, éprouva, à la suite
d'une suppression des règles, une douleur vive
avec inflammalion des téguments à l'arliculation
tibio-tarsienne droite. On appliqua des sangsues et
des cataplasmes émollients qui dissipèrent l'inflammation, sans diminuer l'intensilé de la douleur qui fut permanente pendant près d~un
an. La
malade ne pouvait appuyer son pied et ne se soutenait qu'au moyen de deux béquilles. Au mois
d'août 1826, elle se rendit à Cbaudesaigues; buit
douches dissipèrent entièrement celle douleur, et
Mlle C'" n'en a plus éprouvé depuis.
La rapidilé de la guérison est remarquable. Une
�-102al'thl'itc ·qui se prolonge peul dégénél'er en tumeur
blanche, el cette crainte doit engager les médecins
il envoyer prendre des douches les malades atteints
d'affections pareilles.
OnSERVATION 260 ( par ('Auteur ) .
P"*, fille âgée de ~,1
ans, institutrice, d'une
constitution lymphatique et scrofuleuse, éprouva,
depuis janvier jusqu'en juillet 184·0 , des douleurs
articulaires générales; leur intensité était plus
grande la nuit que le jour. Sa peau était sans
cesse recouverte de sueurs; l'appétit était nul;
mais si la malade mangeait, les digestions étaient
faciles. Elle ne toussait pas et sa respiration était
liùre. Elle se rendit, en juillet 1840 , à Chaudcsaigues, où, dans l'espace de quinze jours, elle
prit quatorze bains, autant d'étuves et douzc
douches. Tous les matins, elle avalait cinq vcrres
d'eau thcrmale qu'elle allait puiser elle-même à
la source dc l'Estendc. L'usage de cclte eau ne
détcrmina point de diarrhée, mais régularisa les
selles qui étaient très-rares cl très~péniblc.
D'abondantes sueurs fUl'enl provoquées par ce
traitement, et les urines, sans êtrc plus copicuses,
déposèl'cnL un sédiment épais . Pendant tout le
�-103temps que la malade élail dans le bain ou dans
le cabinet d'étuve, elle ne ressentait aucune douleur, aussi voyait-elle arriver avec peine l'instant
d'en sortir. Pendant les premiers jours, la vue
ùes aliments inspirait du dégoût à la malade; mais
l'appétit languissant ne tarda pas à se réveiller.
Lorsque la malade fut rentrée chez elle, elle continua à transpirer pendant quelques Lemps encore;
depuis lors elle n'a plus senli de douleurs. La fille
P'" esl retournée à Cl1audesaigucs en août 184.1,
Y a pris treize bains tempérés et seulement trois
étuves, ct cbaque jour sa peau s'est couverle
d'une aboudante sueur ct cst devenue le siége
d'une éruption pustuleuse qui n'a disparu qu'après
avoir cessé les bains. Elle a pris en outre douze à
quinze verres d'eau de l'Eslende par, joUI' , et celle
cau a agi cette année à la manière d'un laxalif.
Son appélit a été très-vif. Depuis son relour des
bains, elle se porle parfaitement.
Dans cette observation, la Cure a élé admirable.
Les bains et les eaux de Cbaudesaigues ont nonsetllement rait disparaître des douleurs articulail'es, mais encore ont fortifié la santé d'une femme
lymphatique ct scrofuleuse. 11 est remarquable
�-104qu'à chaque sai on des bains, le pb6nomènes
, la maladc
critiques aicnt été différcnts. En 18'~0
avait eu dcs sueurs abondantcs , ct ses urincs
avaicnt été très-sédimcntcuscs ; en 1841 il survint
une éruption pustuleusc générale et une diarrhée
qui dura autant quc le traitemcnt. Ces dernicrs
phénomènes me semblent la manifestation d'une
action plus puissante des eaux; aussi, après leur
apparition, la maladc ressenti.l une amélioration
très-grandc dans l'élal de sa san lé.
OnSERYATlON27o ( pariU. IJrémonL ) (1).
Carboncl , huissier, de Picrrcfort , âgé de cinquante ans envil'on, d'un tempéramcnt biliososanguin, à la suite d'une entorse du genou qui
avait été, à trois rcprises di ffércn tes , frois é,
meurlri par un rhabillcur , sous prélexte qu'il y
avait luxation de cct article, se trouva atteint
d'unc tumcur blanche arthritique, pour laquelle
on avait plusieurs fois appliqué des sangsues. Un
an après lc premier accidcnt , commcnccment de
la maladie, le malade sc rend à Cbaudesaigucs,
chez Clavièrc , cn avril 1830: physionomie saine,
constitution moyenne, ne pouvant marcher qu'a(1) Brochure citée, page Ho.
�-105voc des béquilles, genou droit plus gros que \'auIre, douloureux à la pression sur le côlé externe,
mouvements gênés. Pour plier ou pour étendre la
jambe, il fallait que le malade s'aillât de ses mains;
don leur vive, pour peu que le malade porte sur ce
membre. La peau du genou est J'ouge. Légère diminution de grosseur dans la partie iuférieure de
la cuisse. Avant la prise des bains, quinze sangsues, fJ'ictions avec la pommade de laurier, pendant deux jours, pour diminuer l'irl'italion augmentée sans doule par la fatigue du voyage, el qui
aurail pu contre-indiquer l'emploi de la douche,
en nous faisanl craindre le renouvellement de l'étal inOammaloire aigu, plutôt que la solution que
le malade venait cltercher à Chaudesaigues. Les
effets répoudent à notre attente; deux jours après,
l'enDure cèùe un peu, les douleurs sont à peine
sensibles. Léger purgatif pour .. nngel' les voies embal'l'assées. Le onze dumoi il commence nos eaux;
douche liquide pendant une heure, douche de
vapeur immédiatement après, demi-heure. Sept
jours se passent sans produire aucun trouble chez
le malade La transpiration se fait bien, mais sans
fièvre et sans être trop abondante. Le genou se dégorge de jour en jour et devient (Jlns libre; il est
continuellement dans une chaleur qu i n'incommode
14
�-106pas le malade qui perd pourtant son appétit. Langue chargée, parfois quelques envies de vomir;
le dix-neuf vomitif. Hepos pour la douche liquide,
ne perdant pas de vue l'in'ilation locale qui peu
ou prou se continuait, mena rait même d'augmenter. La douleur devenant plus sensible sur le côté
externe de l'a rti cle tendu, gorgé, tand is que tout
le reste était assez libre. Autres quinze sangsues
son t posées sm' l'endroit affeclé , pommade de la urieur, continuation du remède. Enfin, après dixsept ou dix-huit jours de prise, le malade se retire
dans un état tout sati sfaisan t, le genou égal à celui
du côté opposé , si cc n'est le cô té externe où l'il'l'italion avait toujours été plus prononcée, légè remenl gonflé, le mouv ements forl libres, sa ns
pourtant que le malade pu isse trop appuyer S UI' sa
jambe: 11 le fait sans douleur, mais celle-ci ne tarderait pas à sc faire sentir , s' il voulait s'en se rvir
pour marcher, Le repos es t ordonné pour deux
mois. Fumigations aroma tiqu es pour soutenir et
aider l'action de nos hains. Au hout d'un mo is , le
malade quille ses crosses; deux mois après, il es t
en même de marcher sans bâton, radicalement
guér i.
Celte observation n'est pas sans iutérèt. Elle a
�-107été décrite avec ùétail par 1\1. Brémont; et, si l'on
est péniblement affecté par le style beaucoup trop
négligé de ce médecin, on est satisfait de le voir
rendre compte des phénomènes qu'il a observés.
L'examen attentif qu'il en fait le rend capable de
leur imprimer une direction salutaire ou de les
combatlre, lorsqu'ils dépassent Jes limites. Ainsi,
ce cas grave d'arthr ite chronique ùu genou est traité
avec discernement. Les accidents inflammatoires
sont d'abord combaltus par des applications de
sangsues et des épithèmes émollients; puis le malade est soumis à l'action de la douelle qui détermine une transpiration modérée, une chaleur
douce ct agréable autour de l'articulation malade.
Si des signes d'embarras gastrique viennent compliquer cet état, un vomitif est ordonné à propos.
11 im!lorte , Cil effet, que les premières voies soient
libres, car l'illtégrité des fonctions digestives esl
nécessaire à la répal'ation des pertes que fait faire
à l'économie la grande activité des fonctions sécl'étoires. Cel embarras gasll'ique intercurrent
s'observe assez souvent chez les malades soumis à
J'action des eaux de Chaudesaigues: j'en ai vu
plusieurs exemples. Je pourrais placer ici d'autres
observations analogues que j'ai recueillies moimême; mais elles augmenteraient le volume de
�-108ces recherches sans ajoutèr à leur intérêt Je terminerai cette catégorie par un fait que j'emprunterai encore à M. Brémonl.
OnSERVATION 28c ( par 1\1. nrémonl) (J ) .
Une femme de Mons 1 en 1 lanèzc , d'un tempérement bilieux, d'une constitution médiocre 1 sans
être pourtant maladive 1 se voillout à coup et sans
savoir pourquoi percluse du bras droit qu'elle ne
peut plus remuer. Elle lemet dans de l'eau fraÎclle ,
pendant qu'il était endormi; notez qu'elle était en
moiteur. Une douleur vive se déclare pendant l'action du bain 1 dans loute l'étendue du membre; le
moindre mouvement la rend encore plus sensible.
Des sangsues ct un cataplasme émollient sont appliqués; il s'ensuit un soulagement marqué; lesdouleurs cèdent·; le bras et l'avant-bras deviennent
plus libres, reprennent leurs fonctions, mais il
reste un élat d'alJathic douloureux (2) dans la mail)
el ses dépendances 1 et de raideur dans se articulations. Le médecin ordonne alors 1 un mois apré
le commencement de la maladie, la douche et les
1
(1) nroclJUre citée page 39 .
(2) Ces deux mols jurent de se trouver ensemble. lis expriment
deux étals essentiellemont opposés : l" absenoo ct la présence de
la douleur.
�-109baios de Chaudesaigues: ils sont pris chez Felgère.
La douche occasionne une vive douleur à la malade; la main devient un peu plus l'aide. La douleur de so urde menaçail de prendre un caractère
vif et tout celui qu' elle avait cu dans le temps.
Après lI'ois jours de prise, la malade me consulte:
mouvements perclus dans les doi gts ct la main
malade paralysée; doul eu r toutes les fois que la
malade veut étendre ou Héchir, soit la main, soit
les doigts; raideur dans les articles; léger gonHement à la partie aulérieure de l'articulation du
poignet; tout le l'este du COI'pS libre; les autres
fonctions se faisant d'ailleurs assez bien. Suppression de la douche à cause de l'inflammation des
synoviales que je considérai comme la cause des
doiIleurs et de la raideur des arlicu lations, trop
proche de l'élat aigu pOUl' avoir recours à un résolutif si excitanl ; bains locaux avec frictions sur
la partie; étuve locale avec friction 'idem plusieurs
fois par jour; cadis snI' la peau qui ne ful mis
que SUI' la fin . .:rous les bains produisirent un soulagement marqué. Dès le débulla main est beaucoup plus douce pendant leur action : plus tard
clic est aussi libre que celle du côté opposé . A une
époque seulement un peu retardée de la prise des
bains, elle devient raide, les mouvements peu ou
�-110prou gênés, et cela, Je 'pense. parce que la malade ne cherche pas assez à soutenir la transpiration locale suscitée pal' nos bains. Elle part de
Chaudesaigues en voie de guérison, après douze
jours de prise.
L'instantanéité de l'invasion de cette maladie
est si peu ordinaire qu'en commençant de lire
cette observation, on peut croire qu'il s'agit d'une
paralysie consécutive à uue hémorrhagie cérébrale;
mais en continuant la lecture, on ne larde pas à
reconnaître que ce fait est un cas de rhumatisme
articulaire du membre droit supérieur. L'imprudence qu'avait commise la malade, en plongeant
dans l'eau froide un bras tout en sueur, n'avait
pas peu contrilmé à aggraver cette affection. JI est
évident que l'état aigu était encore tl'Op prononcé,
quand la malade se rendit à Chaudesaigues, ct
sans les sage conseils de M. Brémont , les douches
eussent pu devenir fune tes. On doit toujours se
rappelel' que des moyens aussi excitants que la
douche et ,'étuve ne doivent être administrés que
lorsque l'inllammation est passée il l'état de duonique.
�-111lUala.lies du Systènle IIlu8eulaire.
ODSEltVATlON 290 (
par MM. Grassa) et Chevallier ).
Favier Simon, de Sainte-Marie ( Cantal) , âgé
de 4·5 ans, ayant constammept joui d'une bonne
santé, pionnier de son état, fut, en 1827, renversé par un éboulement de matériaux, sous lesquels il se trouvait placé pour y extraire de la
piene. La cuisse et la jambe gauche supportèrent
tout l'effort de la chute des corps. La cuisse, notamment sur son articulation coxofémorale fut le
lieu où la pression et l'écartement des parties se
firent le plus sentir; car il était dans une attitude
de demi-flexion de toutes les jointures et comme
ngenouillé. Le sujet éprouva aussitôt les souffrances les plus vives, et il fnt pris de tiraillement de
l'arcade crurale, avec pression douloureuse des
muscles extenseurs de la cuisse. La masse des corps
qui opéraient cc désordre pesait sur les muscles
fessiers, et la résistance vive fut opérée par un
bloc de pierre portant sur toute la direction de
l'aine et le haut de la cuisse. Débarrassé des décombres, il senlit aussitôt tout le membre engourdi et privé de mouvement, sans lésion extérieure ni désordre interne de l'articulation. Con-
�-112traint de garder le lit pendant quatre mois, Favier
éprouva, pendant tout ce temps , de vives souffrances, telles que des crampes très-intenses des
muscles jumeaux, des rétractions vives des tendons des muscles fléchisseurs des orteils, cc qui
faisait craindre qu'il n'y efll luxation. Enfin, le
malade sen lait des fourmillemenls passagers, et il
y avait insensibililé du membre. On .l'avait enveloppé, immédiatement après cet accident, dan s
une peau de mouton fraîchement écorché, ct on
lui appliqua des sangsues au pli de l'aine. N'ayant
éprouvé que très-peu de soulagemenl aux douleurs si souvent répétées, il résolul de se lenir en
repos, espérant lout du lemps et 'de la patience.
En effel, la sensibililé sembla revenir graduellement, cl plus tard, à l'aide d'une crosse, il put
exercer de légers mouvements; mais, aux moindres contractions vives des muscles, il survenait
souvent de la rétraclioll dans les fléchisseurs ct un
engourdi sement plus prononce du membre. Dans
un tel état, ce malade, de l'avis des médecins,
s'est fait conduire à Chaudesaigue3 pour y prendre
des douclles. Soumis à notre observation et jugeant la paralysie incomplète par l'effet de la lésion du nerf crural, nous avons été peu surpris de
l'effet avantageux que le malade a éprouvé de
�-113l'action des doucbes thermales (ces effels s'étant
nomhre de fois réal isés). Dès la troisième douche,
les contractions musculaires se sont trouvées moins
vives el moins fréquentes; les fourmillem ents ont
presque entièrement disparu. A la sixième douche
le malade commençait à march er sans héquille,
toules les douleurs avaienl disparu, et l'on pouvait
assurer qu'en conLinuant ce traitement, il s'en retournerait dans ses foyers parfaitement guéri, et
qu'il pourrait reprendre ~cs
anciennes occupations (1) .
Dans ce fait les masses musculail'es avaient été
violemment comprimées, et l'inflammation qui
avait suivi celle vaste contusion était la seule cause
de l'impossibilité des mouvements et de l'excessive douleur à laquelle ils donnaient naissance. Si
des saignées générales et locales, abondantes et
répétées, si des épithèmes émollients eussent été
appliqués, sans contredil la position de ce malade
se serait plus rapidement améliorée. Quoi qu'il en
soil, Simon allendit dans une situation bien trisle
et bien douloureuse le retour de la saison des
(1) Exlrait de l'essai sur Cbaudcsaigucs , pages 64-, 65, 60.
15
�-114bains, et il leur dut une guérison digne d'êtr'e
notée. L'inflammalion musculaire, si bien caractérisée par ces rétractions des muscles fléchi sseurs,
par ces crampes, pal' la douleur dans les mouvements, disparut par l'action bienfaisante des
bains et des douches. Ainsi, une myolite trêsétendue fut grandement améliorée, en quelques
jours, par l'effet de l'eau thermale. Je ne doute
certainement pas que des bains d'eau commune
n'eussent été favorables au malade, mais aussi je
suis convaincu que leur action n'eûl été ni aussi
prompte ni aussi complète. Plusieurs observations
nous ont déjà prouvé leur différence .
OnSEUVATJON 30 0 (
par M. Verdier ).
Bne femme de la commune de Jabrun, âgée de
I~O
ans t d'une constitution débile, ayant toujours
élé bien réglée, éprouvait, depuis quatre ans, des
douleurs aiguës qui assiégeaient toute la surface
de son corps et qui augmentaient par la moindre
pression et par la moindre secousse. Ses membre,;
étaient si faibles qu'elle ne pouvait se servir' de ses
jambes et de ses bras. On avait épuisé pour elle
tous les secours de la médecine, lorsque, pour
dernière ressource, elle cul reco urs aux bains de
�-115Cbaudesaiglles où elle 80 fil transporler au mOis
de juilleL 1829. Son indigence la fit admeltre à
l: bospice de celle ville, oû elle resla deux mOis.
Elle fit usage, pendant vingt-cinq jours, des bains,
des douches el des étuves. Au bout de huit jours,
elle sc servit de ses bras pour se coiffer, ct, après
une vingtaine de bains, elle descendit et monta, san
appui, les escaliers de la salle où elle avait son lit.
Ses forces reparurent â mèslh
~ l que les douleurs 'se
dissipèrent, el la fualade ool'lH de l'hospice dâ.'ns
l'élat le plus satisfaisant. et fit deux lieues à Jjied
pOUl' se rendre chez elle.
OnSJlRVATlON
3ie (
par ~f.
B.rémont ) (1) .
Une femme, de Vedrine , âgée de CÎnquanlecinq ans, d'une constitulion forle, d'un tempérament Iympbatico-sanguin, alleinLe. à la suite de
sueurs rentrées. de douleurs rhumatismales qui
affectaient les deux bras, depuis cinq à six mois
au moins, ct chez laquelle les sangsues, les canlltal'ides et l'esssence de térébenthine en ffIction.
ct autres moyens anaLogues n'avaient presque rien
fait, se rend à Chaudesaigues avec les symptômes
(1) Drochurc citée, pago Hi.
�-1J6suivants: de vives douleùrs s'étendaient depuis les
épaules jusqu'aux mains: parfois la malade pouvait , quoique avec peine t se servir de ses membres; mais le temps changeait-il t les douleurs devenaient assez fortes pour l'embarrasser dans ses
fonctions. La malade prélenùait que la douleur
avait son siége sur les os. Elle est soumise à l'usage de la douche t du bain et des éluves sèches
en août 1829. Le remMe n'est point sans effet sur
elle; les premiers jour~
t les douleurs semblent augmenler, un léger état fébrile les accompagne, la malade devient altérée de jour en jour. JI survient de
la constipation el de l'inappélence t et enfin. après
quatre ou cinq joul's t un urticaire se développe
sur toule la peau, el la figure seule en e t exempte. Cette éruption fut accompagnée de chaleur t de
rougeur de la peau el d'une douleur qui sembla
dominer la première. Celle éruption se soutint
pendant toute la prise des bains. La malade t après
douze jour de prise t se relire, ne sachant trop
que penser de son élal. Chez elle elle fail usage de
la tisane de sureau t sans autre remède que l'huile
de laurier en friclion , qui ful ordonnée pour terminer la cure. Elle esl parvenue à une guérison
complète, n'ayant usé des friclion que pendant
une quinzaine de jours. 11 lui re la de légères dou-
�-117leurs qui disparurenl à leur tour, quatre à cinq
mois après. Le mouvement lluxionnaire qui se
passa chez clle à la peau ne fut sans doute pas
étranger à sa guérison. L'on peut dire que c'est
lui qui fit changer Je mal. No tez que la malade ne
transpira presque pas pendant la prise des bains.
Si j'ai inséré ici celle observation, ce n'est pas
que la maladie en elle-même soit rare et remarquable: tous les praticiens onl, cha{(u'année, sous
leurs yeux, beaucoup de cas pareils qui sont guéris par l'usage des eaux thermales. Les rhumalismes musculaires sont du nombre de ces maux
qui, très-répandus, mettent rarement la vie en
danger, mais la rendent bien pénihle. J'ai voulu,
en reprodui sant cc fait. arrêler l'attention sur les
phénomènes critiques qui se sont manifeslés chez
une malade soumise à l'action des bains de Chaudesaigues. Dès -le début, un mouvement fébrile se
déclare, des signes bien caractérisés d'irritation
de la muqueuse gasll'if}ue se développent et sont
bienlôt suivis d'un urticaire général qui persiste
pendant loute la durée des bains.
L'éruption orliée esl· elle ici l'effet de l'action
�- 118directe de l'eau lhermale sur. la peau, ou doil-on
la considérer comme une manifeslation sympalhique de l'élal pathologique ries premières voies?
L'une et ['aulre manière de voir me semblent admissiùles. L'urticaire lient souvent a l'état morbide des voies digeslives; muis ['uction tonique,
l'action excilante de l'eau thermale ne peut-elle
pas, en appelant un afflux sanguin vers le syslème
dermoïde, y détel'miner une él'tlplion? Cette explication parait d'autant plus raisonnable que, dans
le cas qui nous occupe, le réseau capillaire cutané
ne pouvait se dégorger par la voie si commune de
transpiration, puisque ce phénomène n'eut pas
lieu. En admettant même ceLLe dernière hypothèse,
il resterait toujours à expliquer pourquoi, ici, un
urticaire s'est manifeslé, quand ailleurs nous avons
constaté un acné, ailleurs des puslules ou des papules. Cette différence tiendrait-elle à des diversités jndividuelles de l'organisation ou de la vitalité des couches qui composent le tégument exlérieur ou encore à des modifications également individuelles dans la composition des fluides null'itifs ou excrémen titiels ? Sans doute ces phénomènes ne sont point des jeux de hasard; ils sont
certainement le résullat de mouvements organiques
dont les loi ~ nouS échappent, cl, s'il n'esl pas
�-119donné à l'intelligence humaine de pénétrer leur
profondeur mystérieuse, espérons du moins que
l'expérience apprendra, un jour, aux médecins à
provoquer, à modifier, à combattre ces mouvements vitaux d'une manière sûre ct ulile à la santé
des hommes,
OnSERVATION 320 ( pal'
l'Auleur ).
Une femme, âgée de 40 ans, d'une constitution
robuste, fut atteinte d'une inflammation aiguë de
la parUe antérieure et inférieure de l'avant-bras.
Faisant peu de cas de son mal, et espérant une
guérison spontanée, elle ne consulta aucun médecin. Néanmoins. malgré la longue négligence de
la malade, l'intlammation ne sc· termina pas par
Suppuration; mais, comme elle avait affecté
toutes les gaines synoviales qui facilitent le glissement des nombreux tendons situés dans cette
partie du bras, des adhérences s'étaient établies
entre eux et avaient même embrassé dans leur
formation les nerfs qui se distribuent aux doigts.
Les mouvements de flexion de la main sur l'avantbras et des phalanges les unes sur les autres
étaient devenus impossibles, et quand :cette femme
essayait d'imprimer un mouvement à un seul
�-120doigt, tous ~ les
autres étaient mus par le même
effort. La pulpe de ces organes avait perdu sa
sensibilité tactile, au point que la malade était à
peine affectée par le contact des corps qu'elle
toul:hait. Toute la main était le siége d'un engourdissement. Désespérée de ne pouvoir faire le
travail de son ménage, elle me consulta. Après
avoir vainement tenlé des bains gélatineux, des
frictions de toute naLure, je lui conseillai l'usage
de la douche de Chaudesaigues. Elle s'y rendit au
mois d'août 184.0, fit tomber la douche sur le
poignet, prit des bains et des étuves, à la suite
desquelles elle transpirait beaucoup. Le choc de la
colonne liquide n'irriLa pas la partie malade, et
toules les grandes fonctions de l'organisme continuèrent à se faire avec régularité. Des raisons
d'économie engagèrent celle femme à partir
de Chaudesaigues, après neuf jours de traitement. Trois mois après celte époque, j'eus occasion de la revoir, et je constatai plus de facilité
et d'étendue dans les mouvements de flexion, plus
de sensibilité dam; le toucher. La malade pouvait
'déjà se servir de celle main pOUl' pourvoir aux besoins d'une jeune famille, et elle rapportait à l'usage
des douches de Cbaudesaigues celle amélioration
marquée d'un état qui semblait au-dessus des ressources de l'arl.
�-121OJl5ElIVATIOl' 330 (
par l'Auteur ).
M.. C'" , âgé de 78 ans, était dans un état d'infirmité lei, qu'il ne poU\'ail ni marcher, ni se servir de ses mains Les mouvements de flexion du
tronc étaient complètement impossibles. Cette immobilité, à laquelle il était condamné depuis
longte!Dps, lui avait fait perdre l'appétit. Son
existence élailtrès-pénible. Envain s'était-il adressé
à tous les médecins de la ville qu'il haùitait , envain avait-il suivi avec exactitude toutes leurs
prescriptions, son élat n'avait pu être amélioré,
Décidé à lout tenler pour sortir d'une posilion
<lussi cruelle, il se rendit à Chaudesaigues, malgré tout ce qu 'un trajet de 24 lieues et un pareil
traitement paraissaient avoir de téméraire pour
un homme aussi âgé et aussi souffrant. Là, il ne
prit que quelques bains, et la perturbation qu'ils
déterminèrent dans ceLLe organisation décrépite
fut telle, que les médecins, craignant une issue
promptement -funeste, l'engagèrent à retourner
dans sa famille, bien persuadés que le terme de
sa vie n'était pas éloigné. Ce pronoslic ne se réaJisa pas; car, peu de Lemps après son arrivée à
Aurillac, ce respectable vieillard recouvra l'usage
de tous ses membres et sentit reoaill'e SOIl appétit.
16
�-122Plein de reconnaissance pour des eaux qui, me
disait-il, lui ont non-seulement sauvé la vie,
mais la lui ont rendue douce et agréable, il est
venu depuis chaque année passer une douzaine de
jours à Cbaudesaigucs, cl se soumettre <lU même
traitement. Je l'y ai vu en 1840, prenant chaque
jour un bain qu'il supportait très-lJien, malgré ses
80 ans. Son appétil était vif et ses digestions parfaites. 1\ possédait toute la liberté de ses mouvements. Chaque matin il déjeûnait copieusement ;.
onze heures, et à ce repas il coupait son vin avec
J'cau gazeuse de Sainte-Marie. A quatre heures il
prenait un bain d'eau thermale , y restait une
heure, et à six. heure du second repas. il mangeait moins et coupait son ViD avec de l'eau thermale.
L'âge avancé du malade dODne de l'intérêt à
celte observation; elle prouve que les vieillards
peuvent retirer des bains de Chaudesaigucs un allégemcnt aux infirmités qui aflligent si souvent
leurs derniers jours. Je rapprocherai de l'observation précédente un fait qui n'a d'autre analogie
avec elle quc l'ancienneté de la maladie: il m'a
été raconté pal' M. le doclem Brémont de SaintFlour.
�-123Une femme, atteinte d'un lumlJago qui depuis
dix ans l'obligeait à marcher le corps fléchi cn,
avant, fut cnvoyée à Chaudesaigllcs pal' les conseils du père de ce médecin, Elle prit des douchcs
SUI' la région lombaire, des bains et des étuves, et
revint chez elle parfaitemcnt guède.
Ne possédant aucun détail sur celle observa Lion
je ne l'aurais pas insérée ici, si je n'eusse pensé
qu'elle offrait de l'intérêt à cause de l'ancienneté·
de la maladie et de la rapidité de la guérison.
OUSIlIlVATlON
3{.c ( pal' M. Drérnont) (1) .
M. C''', d'un tempérament bilioso-sanguin,
constitution bonne, ayant déjà eu une autre fois la
même maladie qu'il avait gardée quatre ou cinq
mois au moins, se présente à moi en janvier 1830,
avec une affection tétanique de la mâchoire inférieure. Douleur SUl' les côtés el au sommet de la
tète, insomnie J point de fièvre, appétit ordinaire,
le pouls seulement un peu concentré, les dents si
rapprochées les unes des autres, que le malade
pouvait tout au plus introduire la pointe d'uue
cuiller dans la bOllche , pOUl' avaler quelques ali(1) Ilrochul'c citée, pagc 8.
�-124ments Ijquides; traitement calmant opiacé, antiphlogistique, pendant quatre à cinq jours; nul
changement. Le bain liquide tempéré, l'étuve sèche sont alors ordonnés. La transpiration qui ne
se faisait que d'une manière imparfaite se rétablit,
devient même plus abondante que de coulume. Son
écoulement est fa vorisé par de la laine que le malade tient sur les parties affectées, ou pal' des habillements plus forts dont il a soin de s'accoutrer.
De jour en jOUl' les muscles de la mâchoire se détendent, le malade ouvre un peu plus la bouche; à
la plac.e d'aliments liquides, il en reprend de
solides; l'insomnie, les douleurs de tête di paraissent aussi. Quinze bains suffisent pour amener
la guérison de la maladie. Dans celte crise qui se
passa dans quinze jours, je n'observai d'autre
phénomène remarquable que la sueur. Toules les
autres sécrétions furent libres dans le courant de
la maladie, si cc n'est les selles légèrement resserrés. Bains chez Clavières. Le même malade
avait fait usage de bains domestiques dans sa
première maladie, qu'il m'assura être la même ct
qu'il attribuait à la même cause, sueur rentrée,
sans qu'il pût dire qu'il en avait retiré grand bien,
car la maladie avait duré plusieurs mois, et ce
n'était qu'a force de remèdes qu'il en était guéri.
�-125Une différence si marquée dans l'emploi d'un remède qui était le même cn apparence, nous annonce (lue les principes constituants de nos eaux
n'ont pas peu contribué à la crise qui a si rapidement amené la solulion de la maladie, le malade n'ayant d'ailleurs pri3 d'autre remède pendant
la prise des bains que des infusions de coquelicot
avec l'eau minérale; un régime doux et modéré.
Ce fait devait-il être regardé comme dépendant
d'une lésion des centres nerveux, ainsi que la douleur de tête pouvait le faire croire, ou comme une
affection propre des muscles élévateurs de la mâchoire inférieure? Celle dernière manière de voir
me paraît seule admissible. En effet, la récidive
de la maladie, après une suppression brusque de
transpiration, sa solution par une abondante diaphorèse, Lendent à justifier celte opinion. Je dois
noter la différence des effets oblenus par l'usage
des bains domestiques et des bains d'cau minllrale,
différence qui n'a pas échappé à M. Brémont. 11
est vrai que la guérison pourrait être aussi bien
allribuée aux étuves qu'aux bains, et celle remarque aurait peu de fondement, si elle n'était: corroborée pal' des fails cilés anlérieurement.
�-126OIlSIlUVA'fION
35" (par M. Verdier ).
M. C'" , âgée de 20 ans, éprouva, en 1824 ,
à la suite d'une transpiration supprimée, une céphalalgie violente qui dura trois jours el à laquelle
succéda unc douleur vive à l'épigastre, laquelle, au
bout de quatre à cinq jours, sc porta SUl' la région
hypogastrique et envahit successivemenl les hanches, les cuisses et les jambes. La malade éprouvait alors une faiblesse extraordinaire aux exlrémités inférieures et ne pouvait leur imprimer le
moindre mouvement, sallS êtr·c en proie à des douleurs insupportahles. Les sangsues aux malléoles
et les vésicaloires aux mollets dissipèrent entièrement les douleurs; mais la faiblesse devint com.pIète et générale. Cependant, au bout de quelques
jours, elle se borna de nouveau aux extrémités inférieures et surtout à la droile. M. C'" garda six
mois le lit dans cet étal. Lorsquc la belle saisou
arriva, elle essaya de marcher avec deux béquilles
el se traîna ain si pendant quelques mois. Elle Se
fit transpurtcr à Cbaudcsaigues , prit les bains, la
douche pendant deux semaines. Huit jours de leur
emploi furent suffisants pour donner à la maladc
la force de marcher avec une seule béquille qu'clIc
ahandonna quelquc Lemps après. En 1826, ellc se
�-127rendit de nouveau aux bains de Chaudesaigues.
En 1827 , elle y est revenue pour la troisième fois.
Elle marche avec facilité et éprouve une légère
faiblesse à la jambe droite qui est un peu atrophiée.
Ce fait est encore un de ceux qui par le manque
de détails, se refusent à être analysés et dont par
conséquent le diagnostic est. obscur. Cette impossibilité de mouvoir les extrémités inférieures, sans
déterminer de vives douleurs, tenait-elle à une inflammation de la partie inférieure de la moelle
épinière ou des membranes qui l'enveloppent? je
ne le pense pas. Elle me semble due plutôt à une
affection du tissu musculaire lui-même. Si la cause
du mal eût eu son siége dans le prolongement rachidien, les deux extrémités inférieures eussent
été, dans tous les temps el à tous les degrés de la
maladie, affectées d'une manière à peu près semblable; car irn'est pas à présumer qu'une lésion
de la moelle épinière se fût aussilong temps bornée
à une moitié de cel organe. Quoi qu'il en soit, la
nature des symptômes, leur marche, leur mobilité ont dû mériter à ce fait une place dans cet ouvrage. Quand des cas analogues se présenteront à
�-128l'observation des praticiens, ils seront bien aise
de s'appuyer sur l'autorité d'un pareil exemple,
pour prescrire à leur malade l'usage des bains et
des douches de Chaudesaigues.
lU"Il.dics ,lu systènac osscux.
OBSERVATION 360 (
par M. Grassal).
Des trois faits rapportés par ce médecin, dans
son mémoire manuscrit, le premier est celui d'un
état de carie vertébrale lombaire, avec gibbosité
( mal de pOlt), parvenu au point de produire
l'engourdissement, le fourmillement et le tremblement des memdres abdominaux, émaciés el affaiblis au point qu'ils ne pouvaient soutenir le poids
du corps sans le secours des crosses. Cet état,
qui existait sans de trés vives douleurs, sans gonflement du ventre et sans paralysie du rectum ni de
la vessie, était survenu à la suite de douleurs vagues, produites par le séjour dans une habitation
humide et malsaine. Après deux mois de douches
sur la colonne épinière, et quelques bains suivis
d'un grand repos, le malade cessa de ressenlir
l'engourdissement et le fourmillement. Trois mois
après, sa marche a été plus assurée; et , à la se-
�-129t.:onde et troisième année de l'emploi des mêmes
moyens, la guérison s'est complétée par le raffermissement de la courbure des lombes.
Cette guérison est un succès remarquable: trois
-saisons ont suffi pour arrêter un mal si grave et si
rebelle à lous les moyens par lesquels on le combat. Probablement il n'existait point encore d'abcès par congestion; M. Grassal n'en parle pas. Il
ne dit rien non plus du tempérament, de l'âge du
malade, et du régime auquel il se soumit ultérieurement. Sans doute l'effet des eaux dût être
d'accroitre l'énergie dos fonctions nutritives, et
ces modifications qui sans doute furent graduelles
-devaient être recueillies par l'observateur. La vitalité du tissu osseux étant peu active, le mouvement de composition et de décomposition qui
s'opère sans cesse dans le corps humain, s'y manifestant d'une manière plus lenle, il en est résulté que cette amélioration a été plus longue à
oObtenir que dans les cas divers que nous avons
-décrits ci-dessus.
Les eaux minérales froides ou thermales sont
17
�-130ùes moyens puissants, quand elles sont prescrites
à propos et que leur emploi est dirigé avec discernement; mais elles sont loin d'être une panacée
universelle. Quand une maladie a été rebelle aux
agents thérapeutiques employés contre elle, les
médecins sont toujours disposés il y recourir comme ell désespoir ùe cause. Le hasard leur est quelquefois favorable; mais plus souvent encore les
malades perdent inutilement un temps précieux et
font de gmndes dépenses. Un diagnostic plus sûr
éviterait bien des prescriptions erronées. Je me
rappelle à ce sujet l'histoire d'un prêtre qui avait
été successivement envoyé à Chaudesaigues et à
Vichy, dans le but de combattre quelques désordres des fonctions digestives. Il n'avait retiré
aucun soulagement de ces voyages et de ces eaux.
Un examen approfondi fit reconnaître la présence
d'une petite hernie de l'eslomae dont les tuniques
s'étaient fait jour à travers les fibres des muscles
larges de l'abdomen, à deux pouces environ de la
ligne blanche. L'observation suivante servira encore d'appui aux réflexions précédentes.
OnSEIIVATlON 370 ( par l'Auteur ).
N'· I., âgé de 35 ans, d'un tempérament sanguin,
d'une constitution robuste, actif', intrépide, s'était
�-131livré, dès son jeune âge, aux rudea travaux de la
campagne, et avait longtemps affronté avec mépris
les intempéries des saisons . Plus tard il fut aLleint
d'un lumbago très-douloureux. Le malade se rendit alors à Chaudesaigues, y reçut la douche sur
la partie affectée, prit des bains, sc soumit aux
étuves pendant une quinzaine de jours, et dut à
ce traitement une guérisun complète. Plus tard
encore le même malade fut pris d'une vive douleur au bras droit. Quand il se soumit à mon
examen, je reconnus une tuméfaction de l'extrémité inférieure de l'humérus. Cetle tumeur était
très-sensible à la pression. L'articulation du coude
était saine, les mouvements de flexion étaien t
faciles; mais l'e xtension complète de l'avant-bras
SU I' le bras était impossible. Celte impossibilité ne
pouvait être attribuée qu'au soulèvement des muscles fiécl.Jisseurs de l'avant-bras, par la lumeur de
l'humérus, ou à l'inOammalion de ces mêmes
muscles. Je crus reconnaÎlre dans cette tumeur
une périoslosê ayant son siége à la partie inférieul'e
de l'humérus. On ne pouvait en effet l'attribuer à
une inflammation des muscles; car elle était dure
et séparée de la masse musculaire; d'ailleUl's il
était à présumer qu'une phlegmasie de ces organes
aurait eu une marche moins lenle. Ce ne pouvaü
�-132 elre un spina-ventosa, affecLion qui attaque toute
]a ciJ'confél'ence d'uo os, tandis qu'ici la partie
antérieure de l'bumél'us était seule alleinte. Ce
diagnostic ful confü'mé plus tard pal' un des chirurgiens de l'Hôtel-Dieu de Clermont-Fenaud.
Quand le malade se soumit pOUl' la première
fois à mon examen, il se rendait à Chaudesaigues.
Convaincu que la sensibililé de la partie malade
rend J'ait dangereux l'usage de la douche, et que
les bains domestiques simples ou médicamenteux
seraient aussi efficaces que ceux d'eau thermale,
Je l'engageai à ne pas perdre un Lemps précieux et
à se soumettre cllez lui à un trailemenl rationnel, .
tel que des saignées locales, des ba ins des épithèmes émollients et par la suite à l'usage .de moyens
résolutifs. NU', l1e tenant aucun compte de mon
avis, se rendit à Chaudesaigues. Un médecin qu'il
consulta, considérant cette affeclion comme une
rétraction des fibrès musculaires à laquelle il attribuait le défaut d'extension du membre, lui promit un bOl) effet des eaux, et lui ordonna de
prendre des douches en arrosoir, des bains de vapeur, et de forcer le mouvement d'exlension alors
qu'il serait soumis à l'action de ces moyens. Le
malade suiviL inulilement celle prescription, et.
après unc quinzaine de jours, il quitta Chaucles-
�-
133-
aigues aussi souffrant qu'avant d'y aniver. Un an
après cette époque, la sensibilité de la pério3tose
avait disparu; mais la tumeur était restée la même
et gênait toujours les mouvements d'extension.
Né".·ftlgies.
De nombl'euses observations de névralgies sciatiques, trailées par les eaux de Cùaudesaigues, ont
été publiées. Je choisirai seulement quelques-unes
d'enll"elles pour les consigner dans ces recherches.
Depuis longtemps les thermes du département du
Cantal ont joui d'une grande réputation contre
ce genre de maladie. La guérison du marquis
de Boisredon, citée par M. Bonnel de la BrageJ'esse, ne contribua pas peu à éveiller l'attention sur les puissants effets de ces eaux. Sans doute
toutes les diverses névralgies seraient heureusement modifiées par ce mode de traitement. J'ai regretté de ne trouver partout que des sciatiques. J'ai
cependant recueilli moi-même un cas de névralgie
intercostale qûi trouvera sa place dans ce chapHre.
On se rappellera également que j'ai donné plus
haut une observation de névralgie viscérale.
OllSERVAl'IOl'(
38e (pal' M. Verdier ).
Un meunier des envÎI'ons de Murat, âgé de 65
�-134ans, d'une constitution pléthorique, était altein t,
depuis trois. mois, d'une douleur qui partait de la
hanche et s'étendait jusqu'à la malléole externe;
il lui était impossible de faire exécuter au membre
le plus léger mouvement, sans donner lieu à des
douleurs vives et lancinantes. Il arriva à Chaudesaigu es dans le mois de juillet 182li· : je prescrivis
l'application de vingt sangsues qui ne produisirent
aucun effet sensible. Enfin, le malade fut soumis à
l'usage de la douche et de l'étuve pendant quinze
jours. Il restait une demi - heure par jour dans
l'étuve, et passait de là dans un lit où il suait abondamment pendant deux heures. Ces moyens suffirent pour détruire, en dix jours, une affection qui
s'était déclarée avec une grande intensité ct qui
avait résisté à son début aux moyens qu'on avait
employés pour la combattre. Au bout de quinze
jours, le malade partit deChaudesaigues et y laissa
même le souvenir' des souffrances qui l'y avaient
amené. Dans le couraut du mois d'aoM 1827 , je
reçus des nouvelles de l'individu qui fait le sujet
de celte observation, et j'appris que, depuis qu'il
avait fait usage des eaux de Chaudesaigues, il
n'avait plus éprouvé le moind,'c symptôme de sa
maladie.
�-135OBSERVATION
39 0
(
par M. Verdier ).
Le siour V'" , de Chaudesaigues, âgé d'environ
72 ans, d'une constitution forte, exerçant la profession de LeintUl'ier, fut atleint , il Y a environ 8
ans, d'une névralgie sciatique qui le força à garder
le lit pendant deux mois. CeLLe affection, qui se
déclara pendant le mois de décembre d'un hiver
fort rigoureux, résista à tous les moyens qu'on
employa pour la combattre: lcs purgatifs, les diaphorétiqucs, les calmanLs à l'intérieur et en applicalion, les vésicatoires, etc., ne diminuèrent pas les
Souffrances du malade. On essaya d'établir une
douche daus son appartement au moyen d'un tonneau auquel on adapta un Luyau de fer-blanc. Ce
tonneau, placé ùans un appartement supérieur,
contenait deux hectolilres d'eau thermale qu'on
laissait refroidir jusqu'à cc qu'ellc n'eût plus que
quarante degrés centigrades. Celle douelle avait
une chute d'environ six pieds. Le malade en prenait une par jour. Ce moyen, continué pendant
environ trois semaines, fut plus que suffisant pour
opérer la guérison complète d'une affection qui ne
se déclara pour la seconde fois que six ans après,
( au commencement de décembre 1826), époque à
laquelle je fus appelé pour donner mes soins au
malade.
�-136Malgré la rigueur de la saison, je lui conseillai
l'usage de ·Ia douche Cl de l'étuve qui dissipèrent
entièrement, en qu ioze jours, toule espèce de douleurs. La solution de celte affection s'opérait toujours chez ce malade par des sueurs abondantes,
effet de la douche el des éluves.
Jusqu'ici nous avons constamment vu les malades attendre, malgré les plus vives souffrances, la
saison de l'élé pour se rendre aux eaux. Ce fait est
le premier exemple que je connaisse de l'emploi de
la douche de Cbaudesaigues pendant l'hiver. Le
succès a été très-rapide et les suHes de ce tra'ilemenl ont éLé des plus heureuses . Quoiquc je ne prétende pas qu'on doive ~e rendre indifféremment
atlX eaux à toutes les époques de l'année, je crois
que, dans quelques cas exceptionnels, on dcvrait
y avoir recours plulôt que laisser des malheureux
en proie à d'atroces douleurs.
OnSllnVATION li.O o ( par
M. Verdicr ).
Agnès B"', âgée de 52 ans, souffrait, depuis
28 mois, d'une névra lgie sciaLique qui la forçait à.
l'csler continuellement assise. Les douleurs s'exas-
�-131péraient lorsqu'elle était . couchée, el devenaient
encore plus vives lorsqu'elle voulait essayer de
marcher. Elles partaient de la hanche et s'étendaient jusqu'au genou. Plusieurs moyens tentés
pour combattre cette affection furent infructueux.
Fatiguée de tant de souffrances, Agnès B'" se
rendit à Chaudesaigues dans le mois de juillet
182G. Elle fil usage, pendant quinze jours, des
bains, des douches et des étuves, et but lous les
matins trois verres d'eau thermale. Elle n'éprouva
du soulagement que deux mois après l'emploi de
ces moyens : les douleurs commCl1{:aienl à se dissiper, elle sentit plus de force à sa jambe ct marcha bientôt sans appui. En 1821 , l'effet des bains
fut plus prompt. Deux jours après les avoir ahandonnés, Agnès se sentit complètement débarassée
de quelques douleurs vagues qu'elle éprouvait en
arrivant. La douche, l'étuve ct les bains opérèrent seuls la guérison complète d'une affeclion
qui avait résisté avec tant d'opiniâtreté à une infinité d'autres -moyens.
Nous avons vu des guérisons devenir complèles
pendant le séjour des malades à Chaudesaigues, el
d'autres se faire attendre plusieurs mois. L'obscr18
�-138vation qu'on vient de lire doit être rangée parmi
ces dernières. Ainsi, le médecin ne saurait promeUre au malade une guérison loujours rapide,
et ce dernier ne doit point perdre espérance,
quand il quillerait les eaux sans être soulagé. On
voit quelquefois les douleurs les plus aiguës ne
disparaître que deux ou trois mois après le relour
des malades dans leurs foyers.
OnSERVATION 410 (
par M. Verdier ).
Pierre F* .', des environs de Saint-Flour, âgé de
55 ans, souffrait 1 depuis 8 mois , ~ d'une
névralgie
sciatique. Les douleurs avaient commencé pal' se
faire senLir à la région lombaire , ~ puis
s'étaient
successivement propagées à la hanche, et avaient
fini par se fixer à la partie postérieure de la cuisse
gauche. Parfois elles étaient si fortes qu'eUes empêchaient le malade de marcher. Le 20 ao'Ût t 827,
il vint à Chaudesaigues, il fit usage de la douche
et de l'étuve 1 ct parlit au bout de dix jours 1 entièrement débarrassé de sa sciatique. Celle affection
avait résisté aux frictions avec J'alcool camphré,
aux fumigations aromati{Jues , aux vésicaloires,
�OUSIlItVA1' 10N ' !~2c
139(
(JUI'
M, Vcrdicr ) .
Madame Anne G"', âgée d'environ 35 ans tétait
alteinte, depuis dix Illois t d'une névralgie scialique. Les douleurs qui avaient été fixées pendant
quelques almées sur la tête t avaient assiégé successivement l'épigastre et la poitrine. Elles Turent
combatlues par une infinité de moyens qui ne
furent pas infructueux; mais elles se fixèrent de
nouveau sur la région ischiatique droile t ct elles
s'étendaienl jusqu'au genou. La malade était restée
dans cet étal pendant neuf à dix mois, lorsqu'au
mois de juillet 1821 t :elle partit pOUl' Bagnols où
elle fit usage des bains et des étuves qui ne produisü'ent aucun effet satisfaisant: les douleurs au
contraire avaient augmenté d'intensité. Elle se décida à venir à Chaude aigues le 7 août suivant, et
y fil usage pendanl quinze jours de la douche et de
l'étuve. De retour dans ses foyers t elle n'éprouva
presque plus de douleurs t el quinze jours après t
elle était parfailemenl guérie.
On ne pent conclure de ce fail que les eaux de
Bagnols sont moins efficaces contre les sciatiques
�-
140-
que celles de Chaudesa'igues, car nous avons vu
que souvent l'amélioration se faisait attendre plusieurs mois après la saison des bains. M. le docteur Chevallier a du reste constaté à Bagnols de
nombreux cas de guérisons de sciatiques.
OIISEUVATION 430 ( pOl'
1\:1. Verdier
J.
Le sieur J. B"', cultivateur, âgé de 45 ans, fut
atteint, dans le mois demier 1 d'une douleur qui
s'étendait de la région ischiatique droite 1 en
cotoyant la face postérieure de la cuisse 1 à la
partie supérieure et externe de la jambe. La mal'che était gênée et presque impossible. Le malade
fut soumis à l'usage des frictions faites avec l'alcool camphré 1 la teinlure de canlharides 1 des liniments volatils, des fumigations aromatiques, des
vésicatoires, elc. ; et tous ces moyens furent sans
effet. La douleur 1 disait-il, n'en était que plus
irritée. Il arriva à Chaudesaigues le 19 août 1827,
et n'y resta que jusqu'au 30 du même mois. Il
prit la douche et l'étuve. Après cinq jours de
l'usage de ces moyens, la douleur avait diminué
d'intensité, et le 29 août, le malade ne souffrait
plus.
�-141OJlSEIIVATlON 41\ 0
( pur M. Drémonl )
(1).
Au commencement d'août 1826, une femme
d'un lempérament sanglJin, d'une constitution 01'diuaire, n'ayant jamais été malade, si ce n'est
quelques douleurs de tête, avant ou après la menstruation qui n'avait jamais élé abondante chez
elle, se rendit à Chaudesaigues chez Felgère pour
y lJrendre les bains. Elle était alteinte d'une
scialique droile qui lui faisait porter les crosses et
J'empêchait de sortir; parfois. même elle gardait le
lit. Elle était dans cel état depuis qualre ou cinq
ans: J'jen ne l'avait soulagée que l'essence de lérébenllline. Ce soulagement se bornait à pouvoir
sortir avec les crosses, pour aller entendre la
messe. La douleur élant moins vive, les bains et
les douches liquides furent employées ( celle de
vapeur n'exislait pas alors). Les étuves entières
furent mises de côté, à cause des vertiges et douleurs de tête _qu'éprouvait cette femme depuis sa
maladie. La malade, qui allribuait sa maladie â
l'humidité qu'elle avait gardée SUI' elle après s'être
mouillée, reste une douzaine de jours à Chaudesa igues et s'en retourne, se croyant plus malade
(1) Drochure citée . Page 13.
�-1~2
qu'elle n'y était venue. Hue s'était passé chez elle
d'autre tr.ouble extraordinaire que l'augmentalion
des douleUl's et l'apparition de nouvelles, mais légèl'es au membre opposé. Les sueurs n'avaient été
guère plus abondantes que de coutume. Elle n'avait
point eu de fièvre. Les fonctions se faisaient comme
de coutume, sauf une légère diminution de l'appétit. EIle ml'! fait ses adieux bien tristement, prenant de l'essence de térébenthine pour se frictionner
de nouveau. Elle n'a pas plutôt suspenclu l'usage
des bains que les douleurs commencent à céder de
jour en joUI'. Un mois après, elle quitte les crosses
pour ne se servir que d'un bâton. Enfin deux mois
après, elle est radicalement guérie , ne s'étant
servie de ,'essence de térébenthine que les quinze
premiers jours.
Dans le fait précédent, point de sueUl's abondantes, point d'aulres sécrétions accrues, point de
pbénomènes critiques, à moins qu'on ne considère
comme tel "accr'oissement des douleurs. Néanmoins
la guérison eut lieu et fut rapide après la cessation des doucbes. 1\ faut reconnaître dans l'action
des caux quelque chose de caché/.et admettre que
ce qui tombe sous nos sens n'est qu'une partie des
�-
14.3-
modifications opérées dans les mouvements de l'organisme.
OnSERVATION
41S o
( par
l'Auteur ).
lU. D'" , âgé de 45 ans, d'un tempérament sec
et nerveux, d'une bonne constitution, s'etait livré
avec passion au plaisir de la pêche et avait souvent gardé, pendant des heures entières, ses vêtements mouillés: de plus, sa profession d'instituteur l'avait obligé d'aller d'un village à l'autre
par les temps les plus froids, pour y donner ses
leçons. Au mois de mars 1840, il ful saisi d'nn
lumbago qui fut comballu par des applications de
sangsues; puis une très-vive douleur se fit sentir
entre la tubérosilé sciatique et le grand trochanter,
et de là s'étendit au nerf poplité externe. Des vésicatoires furent appliqués sur ces différents points
et pansés avec du cérat conlenant un sel de morphine. Un purgatif, composé de mallDe et de séné,
détermina de violentes coliques, des selles sanguinolentes et une forle fièvre que suivit une éruption
confiuenle de boutons vésiculeux. Cette éruption
envahit la jambe malade, les parties génitales,
l'abdomen, Je cou et les bras. La jambe devint
aussi le siége d'un gonflement inflammatoire lrèsgrand qui ful efficacement comballu pal' des ap-
�-144plications émollientes: Les vésicatoires, le mouvement fébrile, l'éruption forent sans influence
sur la douleur. C'est alors que le malade désespéré
de l'inutilité des moyens employés pour le soulagel', prit le parti de se rendre à Chaudesaigues.
Il y arriva, marchant péniblement et la face couverte des restes de l'éruption. 11 prit douze bains,
autant de douches et d'étuves qui le firent abondamment transpirer, quoiqu'il ne bût, chaque
matin, qu'un verre d'eau thermale. Il quitta
Cbaudesaigues beaucoup moins souffrant. Lors de
son départ, la face était nelle, les crolltcs et les
boutons avaient disparu; mais il marchait encore
péniblement, et ce ne fu t qu'un mois après que
ses mouvements redevinrent libres. L'amélioration
de la maladie de la peau nc fut pas durable. L'éruption se renouvela à la face, fut combattue
sans succès par des bains sulfureux, et ne disparut définitivement que six mois après. Au mois de
mars 18!~,
la névralgie sciatique affecta l'autre
jambe, mais se dissipa promptement. Quand M.
D*" revint à Chaudesaigues, en juillet 18~
,
il marchait très - librement et n'éprouvait que
des douleurs vagues aux approches des changements de temps.
�1f~5-
Dans l'observation qui précède, une première
aison des eaux n'a pas amené une guérison définitive; mais on doit convenir que sa durée fut
trop limitée, et ce qui e t bien digne de remarque,
c'est que l'élimination produite par l'éruption et
la révul ion qui en élait la suite naturelle ont eu
moins d'effet que l'accroi sement de la transpiration et la percussion de la douclle sur la partie
malade. C'est à ce dernier agent, joint aux bains
et au ' 6luves, qu'était duc la supersécrélion de
la peau, car le malade ne buvait <lu'un verre
,<J'eau Lhermale.
OnSERVATION
flOc ( par "Autcur ).
1\1. T''', âgé de 50 an ,d'un tempérament sec,
d'une bonne constitution, ayant loujour joui
d'une bonne sanlé, ful aLleint de violents accè de
névralgie sciatique. Les douleurs bornées d'abord
au nerf du même nom, s'étendirent bientôt à
toutes les ramifications qu'il fournit, et ne tardèrent pas à envahir l'autre membre inférieur.
Ain i le malade éprouvait ce éclairs de douleur
({ulgura doloris ) ur le trajet, ' oit des nerfs poplilé, oH des nerfs planlaires. Ce élancemenLl
19
�-14·6(lui arrachaient au malade des plaintes et des cris,
malgré son énergique courage, envahirent plus
tard les extrémilés supérieures, et aux époques du
retour des accès, le malade éprouvait un élancement, tantôt sur le trajet du nerf sciatique,
tantôt sur celui du nerf poplité; un moment il le
ressentait aux ramifications du radial ou du cuhital , et l'éprouvait, la minute suivante, au nerf
plantaire. II attribuait son mal au froid et à l'humidité auxquels il s'était exposé en se livrant,
pendant sa jeunesse, au plaisir de la pêche. Souvent il avait gardé pendant une partie des nuits
ses vêtements mouillés par les pluies des orages
fréquents dans nos montagnes. La nature rhumatismale de celle affection semblait prouvée par son
excessive mobilité et par le mode de développement
de la douleur qui précédait toujours et aUllonçait
avec certitude les variations futures de la température. Celle affection cruelle, presqu'insaisissable
à cause de ses bru ques changements de siége ,
avait été comballue l'ar l'usage des calmants à l'intérieur et en friction. L'acétate de morphine avait
été appliqué sur la pat'lie externe de la jambe et
sur le trajet UU Jlerf scialique par la méthode endermique. Le succès obtenu par ces moyens avait été
de courte durée. L'amélioration que le malade
�éprouvait alors pouvait être attribuée à loute autre
cause, cal' la disparition des douleurs était aussi
rapide, aussi instantanée que leur invasion. Quelquefois la série de ces acces sc prolongeait assez,
pour réagir sur le système circulatoire, et le malade avait de la fièvre. La saison des eaux étant
arrivée, il se décida à demander à celles de Cbaude!'aigues quelque soulagement à ses douleurs. Il
prit des bains, des étuves et des douches sur la
colonne vertébrale. La transpiratiou qui survenait
ensuite etait très-abondante. 11 ne resta qu'uno
douzaine de jours à ces tltermes ct les quitta chassé
par l'enoui. L'aonée suivante, les souffrances furent moins vives et les accès de douleurs furent plus
éloignés. Cette amélioration aurait dû porter le
malade à tentel' une seconde saison, mais il s'y
refusa et eut il s'en repentir. Les douleurs s'accrurent ct sc rapprochèrent. li Y revint pour la seconde
fois, en 1836, et, sans être guéri, il éprouva un
soulagement marqué. Il pril de nouveau les bains
et les doucfies en 1837 • et sa position resta la
IOIJme. En un mot, les eaux de Chaudesaigues ne
le guél'il'ent pas radicalement, mais adoucirent notablement ses souffrances: Ce malade succomba
eo 1839 à une népbrite albumineuse.
�-U8-
Les caractères de mobilité, de rapidité dans
l'invasion qu'offrait la névralgie générale que je
viens de décrire, sonl remarquables. II était difficile d'assigner à la douche un point spécial d'action, et, dans celle di fficu llé , il étail naturel de la
diriger sur l'organe central d'où émanent les nerfs
des èxtrémités: aussi le malade avait reçu le choc
de la douelle SUl' la colonn vertébrale. Comme
dans la majorité des faits observés, les sueurs furent abondantes. Le malade rentré chez lui ne ful
point totalement délivré de ses douleurs, mais elles
furent moins intenses et moins fréquentes: peutêtre fCtl-il arrivé à une guérison complète, si , au
lieu de dix à onze jours qu'il passait à Chaudesaigues, il se fût résigné à y rester trois semaines.
J'ai vu des malades ne retirer de l'avantage des
bains qu'en les conlinuant longtemps el même en
faisant deux saisons dans le cours du même élé.
Les névralgies qui affectent les nerfs des extrémités suivenl souvent une marche différente de
celle que je viens de décrire. Chez plusieurs
malades la douleur avait paru d'abol'd au point
d'émersion du nerf sciatique. Celle douleur,
nprès avoir été quelque temps bowée au tronc du
�-149nerf, s'étendait graduellement à toule la partie
postérieut'e du membre, de sorte que lous les muscles qui reçoivent leurs nerfs du sciatique ct de ses
branches devenai ent sensibles à la pression el incapables de se contractCl', comme si les masses
musculaires eussenl été enflammées, Il n'existait cependant dans ces organes ni chaleur ni tuméfaction,
et la circulation générale ne donnait aucun signe
de la réaction rébrile qui accompagne les phlegmasies aiguës, C'est dans des névralgies de cette espèce,
névralgies que j'appellcrai fixes, par opposition à
celles qui ont un caraclère dc mobilité si grand,
c'est dans ces névralgies, dis-je, que les bains ct
douches de Chaudesaigues sont très-efficaces.
ÛUSIl IlYATlON
Il,70 (
plll'
l'Auteur ') .
Au mois de mars 181.0, je donnai des soins à
une dame d'une constilulioll robusle, âgée de 48
ans, et enco~
bien réglée. Elle avait élé sujette,
pelldanttoule sa viè, Ù quelques légers symptômes
hyslériques qui ne se développaient que sous l'influence du chagrin. Elle éprouvait, depuis plusieurs années, une douleur vive à la parlie postérieure de la poitrine, tantôt à droite, tantôt à
gauche. Je fi ,dans le principe, peu d'allention
�-
150-
à celte douleur dont la durée était coude: je la
regal'dais comme une simple pleurodynie. Néa nmoins. pendant l'hiver de 184.0 , elle se fixa du
côté droit ct devint très-violente el très-tenace.
Ayanl alors atlenli.vement examiné la partie malade ,je constatai les phénomènes suivants: [a douleur avait son siége au neuvième espace intercostal: à la partie postérieure de cet intervalle costal
existait un point douloureux, circonscrit, permanent , et pendant [es exacerbalions un point douloureux antérieur sc faisait violemment sentir à
l'épigastre . Le point médian dont parle M. Valleix (1 ) n'existait pas. La chaleur du lit ou toute
autre appliquée [ocalement soulageait la malade.
Tantôt les mouvements du tronc semblaient exaspérer la douleur, tantôt ils ne produisaient point
cet effeL. Jusqu'au mois de mars 18~O
, rien n'a-
vait été dirigé contre celte affeclion. Des frictions,
aVec le liniment volatil camphré ou [e baume
tranquille, n'avaient pu être supportées, tant la
sensibilité de la peau était grande . Je prescrivis
successivement des sangsues et des applications
d'acétate de morpltine pal' la métbode cndermique.
La malade refusa de sc soumettre à ces LUoyens ,
(1) Archives généra les de médecine.
;}o
sl\rie, LOIllO 7,
[1 .
20.
�-151 espérant toujours que ses douleurs seraient aussi
promptes à disparaitre qu'autrefois. Le pouls se
conservait régulier, sans fréquence. Le malade
éprouvait de l'engourdissement à l'extrémité des
doigts. Ce symptôme, joint à la nature de son
tempérament et à rapproche du temps crilique,
me fit juger une saignée opportune, ct je la pratiquai; dès lors les douleurs névralgiques dispal'urent, et la malade se rétablit très-vite. Elle
conserva SUl' le côté droit une démangeaison dont
l'état de la peau ne rendail pas comple. J'observerai que le lendemain de la saignée, le temps
changea bl'Usquement , la lIeige tomba avec abonùance , néanmoins l'améliora lion obtenue se conlinua , cc qui est contraire au résullat obtenu par
le médecin que j'ai cilé plus baut. Dans les mois
qui s\livirent mars, les douleurs reparurent el
souvent avec une intensité telle que la malade De
pouvait faire le moindre mouvement, sans que la
douleur lui arrachât des cris el des larmes. Elle
éprouvait dans les membres des contraclions invoJonlait'cs; sa parole devenait brève et ses phrases
peu suivies. Son pouls s'accélérait alors, on eùt pu
craindre l'invasion d'une phlegmasie cérébrale;
mais ces symptômes se dissipaient bientôt. Ils n'étaient évidemment dus qu'à l'cxcitation sympa-
�- 152thique de l'encéphale produite pal' la vivacité des
douleurs. Pendant les mois de juin et juillet, la maJade ressentit une douleur quelquefois très-vive,
souvent supportable, mais permanente pendant
le jour; la chaleur du lit la faisait disparaître et
la malade dormait. Les fonctions digestives ne
s'alléraient que lorsque les douleurs s'étaient
vivement et longtemps fait senlir . L'évacuation
menstruelle se continua it d'une manière normale.
Telle était la posi tion de la malade lorsqu'elle sc
rendit à Chaudesaigues en aot:tt 18!~O.
Elle y prit
des bains ct fit tornller la douche sur le point douloureux postérieur. Le cboc de la colonne liquide
lui était agréable, landis que sur les autres points
de la périphérie cutanée, elle en était péniblement impressionnée. Il lui semblaÏl que la douche,
en tombant sur le point malade, frappait sur une
partie très-peu sensible. Elle passait ensu ile dans
un cabinet d'étuve , dont la température ne dépassait pas trente degrés réaumul": elle n'y restait
que cinq ou six minutes, car un séjour plus long
la fatiguait. E lle se rendait ensuite à pied dans un
lit chaud, buvait un verre d'eau thermale sucl'ée,
et restait là envil'on une hCUI'e: la transpiration qui
survenait était presque nulle comparativement à
celle qu'éprouve la majorité des baigneurs. Après
�-153 la seconde douche, disparurent les douleurs que
la malade avait ressenties d'une manière conslanle depuis · un mois. Elle se trouva beaucoup
mieux; l'appétit devint vif et les selles naturelles.
EnOn elle quitta Chaudesaigues après onze jours
de traitement. Je ne dois pas oublier de noter que
celle malade avait toujours élé fatiguée par les
bains domestiques qu'elle avait pris dans l'espoir
de diminuer ses souffrances.
c'est-a-dire environ
Au mois de janvier 18~t,
cinq mois après, une douleur vive se fit sentir à
la parlie postérieure du côté gauche. Elle occupait
plusieurs espaces intercostaux, le huitième, le
neuvième et le dixième. Elle n'existait ni à la
partie antérieure, ni à la partie médiane de ces
même:> espaces, ci cela près, elle offrait les mêmes
cùactèrc$ que celle qui avait existé l'année précédente du côté droit. La malade se décida cetto
fois à la combattre par une application de sangsues qui l'enleva instantanément Ce ne fut
qu'au commencement de l'été suivant que les
douleurs se montrèrent de nouveau> occupant
plus souvent le côté gauche que Je droit, et existant toujours le long des goutlières vertébrales.
On eût dit que -les branches postérieures de cinq
ou six nerfs intercostaux élaient seules affectées.
20
�--154 Ces douleurs ava ient moins d ' intensité (IU'en 18l~O;
mais elles avaient envahi plus d'espace Cl se renouvelaient plus so uve nt. La malade ne voulut
se soumettre à aucun traitement ju s qu '~ n juillet,
époque à laquelle ell e retourna à Cllaudesai gues.
Elle .r prit, pendant quinze jours , des bains, des
. ùouches et des étuves . Elle fit tomber la douch e
le long des gouttières vertébrales , mais spéc ialement sur la gaucl1e où, depuis un an , ses douleurs ava ient eu leur principal siége. Les modificalions impri mées à l'économie furent peu appréci.ables. Les fonctions restèrent à leur état normal.
La transp irat ion ell e-même fut à peine sensible. Ce
ne fut cependant que quatre mois après son retour
des eaux qu 'elle éprouva. du côté gauche, quelques Douvelles douleurs qui, d'abord peu vives,
furent remplacées par d'autres très-intenses , siégeant du côté droit, côté sur leque l elle ava it moins
sou vent dirigé la douche en juillet 18~ · 1. Ces douleurs occupaient un espace de quatre à cinq pouces
carrés vers l'angle des huitième , neuvième ct
dixième côtes, et présentaient les caractères de
. celles des années précédentes, sau f qu'il n'ex ista
plus de point douloureux antérieur. La malade se
borna à garder le lit et à sc Caire pratiqu<,r quelques friction s avec le baume tranquille.
�-155-
L'observation précédente, que j'ai coosidérée
comme un cas de lIévralgie in tercostale, manque
peut-être de quelqu es-uns dee; caractères que M.
Valleix a récemment assignés à celte affection. Ce
n'est pas qn'ils a ient pu écbapper à mon examen,
car j'y ai apporté la plus grande a tlention. A chaque retour ùes douleurs, j'ai cberché à cons taler
le point douloureux méd ian et antérieur, et comme
je l'ai dit, ce n'est que la première année que j'ai
pu notcr un point douloureux épigastrique. Si j'ai
cru devoir regarder celle affection comme un e
névralgie des branchcs postérieures des nerfs intercostau x , c'est qu'elle m'a semblé se J'approcher
davantage de la névralgie qu e du rhumatisme
musculail'e qui occupe général ement un espace
moins limité. De plus, la douleur pleuroc1ynique
s'accroit constamment par les mouvements du
tron c , eL quoique lU . Valleix aiL remarqué qu e
dans la névralgie intercostale , il existe trois points
douloureux correspondant aux points d'émersion
des branches qui deviennent superficielles, je ne
crois pas qu' il doive toujours en être ainsi. Je ne
vois pas pourquo i l.e5 branches postérieures de!')
nerfs dorsaux ne pOl1rraiclJl être affectées de né-
�-156vralgie sans la participatiou des branches antéJ'iemes. Pour moi, on doit penser que chez la malade qui fait le sujet de celle observation, la névralgie envahit, en 184.0, le nerf intercostal proprement dit, et que les années suivantes elle n'occupa que les branches postérieures. Du l'es le , ces
douleurs ne pouvaient dépendre que d'une névralgie ou d'uu rhumatisme musculaire, car rien,
dans l'élat de la peau, du tissu cellulaire ou des os,
ne rendait raison de leur existence. 1\ suffit aussi
de lire le récit précédent pom être convaincu
qu'elles n'étaient point symptomatiques d'ulle
phlegmasie de la plèvre on du poumon. Il n'existait
en effet ni toux ni oppression; l'ausculation faisait
entendrc un bruit très-pm; le mouvcmenl fébrile
ne se développait qu'après de longues douleurs, et
disparaissait avec elles. Il m'a semblé important
de bien étahlir le diagnostic dans le cas qui nOlis
occupe, parce que c'est ainsi seulement qu'on peut
appr"CÎer la puissan e réelle d'un agent thérapeutique. Si ma manière de voir est contestable, j'ai
mis sous les yeux du lecteur le détail des l'ails, il
pourra juger ct adopter une opinion différente de
la mienne .
.Tc n'ai point été étonné d' n'avoir à enregistrer
flu'une guéri on incomplète, car pel'sonne n'i-
�-
157-
gnore que les névralgies en général et celle des
nerfs intercostaux en particulier, sont su.iettes à
récidives, et que souvent même clics sont rebelles
aux moyens que l'art dirige contre elles. Cep en(]ant je dois observcr que l'action de la douelle
dissipa une douleur qui, depuis plusieurs mois,
ne laissait pas de repos à la malade, et (lue dans
ce cas où les bains domestiques avaient toujours
été défavorables, ceux d'eau thermale ne furent
pas contraires, si même on ne doit pas leur attribuer une part du résultat obtenu. Enfin je noterai
que les sécrétions ne furent pas augmentées et 'lue
la transpiration elle-même Cl été toujours nulle.
Je ne dou.le pas que, si, par un plus loug séjour
à Chaudesaigues et par conséquent par l'emploi
plus longtemps continué des bains, des douches
et des étuves, celle malade eût provoqué ceLLe
abondante sueur que nous avons vue être si efficace, elle n'eût obtenu une guérison plus complète. On ne saurait nier que chez certains individus ces moyens sudoriOques doivent être employés
avec une longue persévérance, pOUl' qu'ils déterminent l'effet que l'on oblient chez d'autres par le
stijour d'un quart-d'heure dans un cabinet d'étuve
ou par un simple bain d'eau thermale.
�-
158-
lUahuUes tic )a pe" ...
OBSERVATION 480 (
par l'Auteur ) .
G'" âgé de 24· ans, marchand amhulant, avait
été atteint, il Y a sept ans, d'une gale dout il ne
s'était jamais cru guéri. Cbaque année dans ses
voyages, il visitait les pharmaciens des villes où
il passait. L'un lui donnait une pommade, l'autre
une lotion contre la gale; rien n'avait réussi à le
guérir. ]!.n juin 18'~O,
ce malade eut l'ecours à
mes conseils. Je constatai cbez lui une affection de
la peau, caractérisée par des croûtes épaisses et
de vives rougeurs de derme. A mon avis, celle
éruption, semblaùle à un eczèma impéliginodes ,
avait succédé à la gale, et devait peut-être son
origine aux traitements il'fationnels qui avaient été
prescrits, Convaincu que les abonda ntes sueurs ,
provoquées par l'action des étuves, favori seraient
la chute des croûtes, et que ùes bains , légè rement
alcalins, imprimeraient au système del'OlOïde un e
modification salutaire, je lui conseillai de se
rendre aux thermes de Cllaudesaigu cs. li y arriva
à la fjn de juin 184.1 , y prit vingt baills , quillze
douches ct autant d'étuves, etrcvint parfaitement
guéri. II bu vait chaque malin sept il huit ven es
�-159d'eau de l'Hôpital, ct à scs repas de l'eau dc
Sainte-Marie; il avait un appétit lr'ès-vif, allait
naturellement à la garde-robe, urinait plus qu'à
l'ordinaire et cependant transpirait beaucoup, Le
médecin inspecteur dcs eaux, effrayé de l'ancicnncte de cette maladie, avait conseillé à ce maladc
d'ajouter à ses bains du sulfure de potasse. G"* ne
Ic fit que quatre fois, parcc qu'il remarqua que les
bains d'eau thermale purs lui étaient plus saluLaires.
Parmi lcs observations rapportées dans les8pagcs précédentcs, il Cil est quelques-unes qui sont
des exemples dc maladie de la peau, guéries par
les eaux de Chaudesaigues. Je ne rôpèterai point
ce que j'ai dit alors; mais je raconterai en quelques
mols les souvenirs que j'ai conservés d'un malade atteint d'inflammation des folliculcs sébacés
de la facc, et auquel j'ai longtcmps donné des
soins. Celle affection contre laquelle ayaient
échoué les douches artificiellcs de vapeur. les
lotions acidcs, savonneuses, alumineuses, Ics
cmbrocatioLls avec des pommades au calomel, au
soufre, les purgatifs, les dépul'atifs dc tout
g'cllre, et que les eaux sulfurcuscs de Bagnols
( Lozère) avaient aggravéc, cette affcclio.n, dis-je,
�-160 fut notablement et heureusement modifiée par les
bains de Cltaudesaigues combinés avec des lotions
fréquentes ct l'usage de l'eau thermale à l'intérieur. Cc succès, quoiqu'incomplet, est digne d'être
noté, et prouve que les propriétés curatives de ces
eaux contre les maladies de la peau méritent
d'être étudiées avec soin.
lUabulies SYltltiiitique8.
OIlSERVATlON
-COu ( par M. Verdier).
Mme A. A·'·, âgée de
ans, d'un pllysique
fort cl vigoureux, ayant été alleinte dans le
temp d'uneaffectionsyphilitique, éprouvailde} uis
près de quatre ans ùes douleurs qui paflaient du
sommet de la Lête et envahissaient les extrémités
supérieures ct inférieures; elles se renouvelaient
avec beaucoup d'intensité aux approches d'un
temps froid cl LlUmide. La malade arriva à Chaudesaigues le 16 aoûl1827, Y resta quinze jours et
fit usage pendant cc temps des bains, des douches
el des étuves. Au boul de dix jolll's de leur emploi, elles donnèrent lieu à formation de pustules
dans la bo uche et SUI' tout le corps. Celle éruption
ne fut pas plutôt déclarée que les douleurs dis1~5
�-161parurent comme par enchantement, et cinq jours
après, la malade était complètement guérie. D'après les renseignements qui m'ont été donnés depuis au sujet de celle malade, j'ai appris qu'elle
éprouvait une douleur vague et passagère qui s'étend de la partie supérieure et externe d,e la jambe
gauche jusqu'à la malléole.
Cette observation donnée par 1\1. Verdier comme un cas de syphilis, a été rangée dans celte catégorie, quoiqu'on puisse douter que ces dou leurs
fussenl de nature syphilitiques, L'éruption de pustules dans la bouche et sur la peau eût pu devenir
un moyen précieux de diagnostic, si l'auteur de
J'observation en eût décrit les caractères; néanmoins il est probable que c'est sm' eux qu'il basa
son opinion.
ODSERVAl'lON 500 ( par
M. Drémonl ) (1) .
Ir", marchand de vins, d'un tempérament
bilioso-sanguin, d'une conlilution toute délabrée,
malade depuis six ans au moins, ayant consulté,
d'après son aveu, vingt-deux médecins dont je
(1 ) Drochure cilée. Page 19.
21
�-162faisais le dernier, atteint d'une affection vénérienne constitutionnelle, pour laquelle la plupart
des médecins lui avaient fait avaler du mercure,
avait pris des remèdcs de Lous, sans parler de
ceux de commère, sans qu'on puisse dire qu'il
eût fait un traitement complet, tant il était changeant et inconstant; nouveaux médecins, nouveaux remèdes, ou administration différente. Aucun médecin ne pouvait tenir en compte ce que
les autres avaient fait, parce qu'il les faisait
appeler les uns à l'insçu des autres. La plupart du
temps il se fiait aux charlatans de campagne qui
avoisinent nos villes. Tout, jusqu'aux rhabilleurs,
lui devenait bon et obtenait auprès de lui le titre
de médecin. Il avail passé cinq ans au moins tous
en remède, lorsqu'il me consulta au commencement de 1828. Tout son corps était affecté; légères périostoses a la tête, sur les tempes, gommes
au cou, sur les parties latérales de la poitrine, aux
aisselles; quelques-unes en suppuration formaient
de larges pluics; membres inférieurs énormes,
leucophlegmasiés, avec des douleurs intolérables
et si vives qu'il fallait une nécessité absolue pour
se laisser toucher; exostoses qui, nonobstant le
gonflement de la jambe, venaient encore faire
saillie au debors; ventre tendu, ballonné par des
�-
163-
gazs qui étaient sans doute le fruit de digestions
mal faites. L'individu avait parfois le dévoiement;
il conservait d'ailleurs l'appétit; des veines variqueuses rampaient sur la poitrine; le pouls était
parfois intermittent. tandis que le cœur embarrasé,f~int
sentir ses pulsations jusque dans le basventre, semblait nous annoucer qu'il s'hypertrophiait; enfin c'était l'Ull des tableaux: les plus sinistres que nous offre la vérole. lHa position était
aussi embarrassante que celle des médecins qui
m'avaient précédé. Tisane de salsepareille et
gayac. muriate d'or en friction sur la langue.
J'employai ce spécifique moins pour l'espoir qu'il
m'inspirait que pour me sortir de l'incertitude où
j'étais sur les doses de mercure employé, pensant
bien qu'il avait été porté trop loin, vu l'état variqueux: de certaines veines, de fréquentes hémorrhagies du nez. l'appauvrissement du sang, la
dégénéra lion générale scorbutique. Régime doux:,
un peu de vin au vepas. Chose extraordinaire,
après dix jours de traitement, toutes les gommes,
periosto es, exostoses ont disparu, les plaies guérissent, la leucophlegmatie des membres diminue,
le douleurs cèdent peu ou prou, mais pas en
raison de tous les autres symptômes. Dans Je
courant de mai, mQn malade exténué se l'end à
�-164·Chaudesaigues, chez Clavières, avec les symp ....
tômes suivants qui résistaient à toul ce qu'il faisait
depuis quelque temps. Les fonctions digestives se
font assez bien, mais le venll'e esl toujours lendu,
ballonné, offrant toujours quelques vaisseaux variqueux; pouls pelit et fréquent, douleurs vives
toujours aux jambes, pour peu qu'il les remue;
gonflement strumeux des articulations du genou,
toutes recouvertes de vaisseaux variqueux; raideur
et demi-flexion de cet article; œdème aux pieds.
Le malade n'a guère plus que la peau et les os.
Douche liquide, une heure sur le genou, étuve
entière de deux heures immédiatement après. Le
malade sorL de là louL en nage et garde cette
sueUl' deux heures. Il mange dans la journée,
quoique son pouls soit fébrile. II boit beaucoup
d'eau el est en moiteur pendant tout le cours de la
journée. Il devient constipé de jour en jour, et
perd l'appétit SUI' la fin. Dix-huit jours se passent, le malade pour la première fois s'appuie sur
ses jambes. Des aides le soutenant, il fait quelques
pas. Les douleurs ont disparu, mais reslent une
faiblesse dans les membres inférieurs, une raideur dans les articulations, suite nécessaire d'uue
maladie si longtemps continuée SUI' ces parties, du
défaut d'exercice, ct qui aura de la peine à dis-
�-165paraître enlièrement. Le l'entre en partie revenu
sU!' lui-même, les genoux désenUés, plus doux
qu'ils n'avaient été, mais toujours peu ou prou
fongueux, Le malade est dans l'élat le plus satisfaisant, cl cerles l'on peut dire que l'on a obtenu
de lui tout cc qu'on llouvail espérer, sauf un peu
111 US de souplesse dans les arliculalions et un peu
plus de force. Purgation pour ranger les voies:
le malade se remet insensiblement. Jl est revenu
l'année d'après, sans douleur, avec de légères fongosilés au genou, raideur à cel arlicle qui, quoique
moins courbé, n'a pu finir de s'étendre, et pouvant marcher avec les crosses, une personne le
soutenant; toutes les autres fonctions se faisant
d'ailleurs assez bien, le corps même s'étant reslauré, Le mouvement fébrile cbez lui suscité par
nos bains, lermina la cure d'une maladie qui,
sans eux, l'aUl'ail déjà amené, malgré le traitement le mieux raisonné ou du moins qui l'aura il
lenu dans Ull état de souffrauce insupportable jusqu'à la fin de ses jours. Si le malade ne marche
pas aujourd'uui , c'est le ramollissement et la désorgan isalion des nerfs inférieurs occasionnés par
le mercure qui ell est seul cause. Tout cc qui reste
doit êlre regardé comme mercuriel. La maladie
essentielle a disparu.
�-t66-
Sous cet assemblage de phrases mal c~u5es
,
de locutions ll'iviales et surannées, sous le voile
de ce style peu digne d'un homme dont le grade
fait présumer des éludes littéraires et scientifiques,
on trouve un fait de syphilis constitutionnelle vraiment plein d'intérêt. On y voit une organrsation
sapée jusque dans ses fondements par cette maladie cruelle qui empoisonne la vie jusque dans sa
source, luUer péniblement contre ces a tteinles.
profondes, et tout ce qu'ont fait les hommes de·
l'art rester inefficace ou aggraver le mal; tel est
le trisle tableau peint par 1\1. Brémont. Mais estil naturel de croire qu'un malade, dont la confiance en ses médecins est si chancelante, qu'il en
consulte vingt-deux dans l'espace de cinq ans,
qu'un tel malade, dis-je, ait pris des doses surabondantes de mercure? li est plus probable qu'il
ne mettait aucune insistance à •exécuter les prescl'iptions qui lui étaient faites et qu'il les abandonnait dès les premiers jours. Ne doit-on pas
penser que, loin d'avoir avalé à longs traits le liquide métallique, il n'est jamais arrivé à une dose
suffisante? Où sont, dans cette observation, les
Iiymptômes de saluration mercurielle? Où est la
�-167ptyalisme? Où voit-on décrit cel état de la bouche qui accompagne l'abus des préparations hydrargyriques? Certainement je reconnais que l'effet du muriate d'or a été remarquable, et que M,
Rrémont l'a prescrit à propos, Mais laissons le
traitement et son opportunité, et considérons ce
fail dans ses rapports avec l'administration des
eaux thermales de Chaudesaigues. Il y a lieu de
s'étonner qu'on ait osé pro voquer d'abondantes
sueurs et par conséquent des perles considérablés
chez un individu aussi fortement débilité. Le succès justifie, il est vrai, cette témérité, mais, à
mon avis, dans des cas analogues, l'emploi de ces
eaux sera plus souvent funeste que favorable. Ma
manière de voir n'est pas une simple présomption;
mais elle m'a été suggérée par le raisonnement,
et un fait que j'ai observé moi-même sur les lieux
lui a donné de la con;;istance dans mon esprit. Ma
mémoire ne me fournit point tous les détails de
celle observation, je me rappelle seulement qu'un
,jeune hommé des environs d'Aurillac, âgé de 35
ans, couvert de périostoses et de tumeurs gommeuses, faliguô pal' des douleurs atroces, débilité par
des voyages et un mauvais régime, ayant fait plusieurs traitements anli-vénériens, fut obligé de
quiller Chaudesaigues dont les bains et les étuves
le rendaient beaucoup plus malade.
�-168Ce que je viens de dire ne m'est point dicté par
la prétention d'imposer des lois dans une matière
qui ne m'est pas encore assez familière: j'ai voulu
seulement avertir les médecins et leur soumettre
mes doutes. Peut-être l'observation ultérieure
viendra-t-elle infirmer mon ,opinion en prouvant
que les bains et étuves de Chaudcsaigues sont puissants contre la vérole constitutionnelle. Toutes
les théories viennent en effet se briser contre l'expérience, et ce que Baglivi disait de son siècle, je
pourrais le dire avec plus de raison de nolre époque: Quidquid hodiernam lheoriam à priscà distinguit
ruditate , id omne debcmus philosophiœ exprimntal~
nostro hoc seculo institutœ , (1) .
(1). Daglivi. Opera medica, in-lio , page 2.
�RÉSUMÉ GÉNÉRAL,
A.etion l.hYlliolo,;ique des Eaull..
Nous venons de voir des cas de guérisons remarquables, soit par la nature, soit par la gravité du mal. Tâchons d,mc de nous expliquer la
manière dont les eaux thermales de Chaudesaigues agissent sur les organes de l'homme; et,
,p our y arriver d'une manière s'Ûre, cherchons-la
(Jans les rails que nous venons de soumettre au
lecteur. Très-souvent (J'abondantes sueurs ont eu
lieu; nous avons relevé le nombre de fois où ce
-p hénomène a été noté, et, si nous ne donnons
point ce chiffre, c'est qu'il ne peut avoir toute sa
valeur, attendu que dans beaucoup de cas où la
-d iaphorèse Sl d'Cl être abondan te, on n'cn a fait
aucune mention. Les observations insérées dans
ces recherches ne rendent pas toujours compte de
l'étal des fonclions. Les médecins qui les ont recueillies semblent n'avoir eu d'autre but que de
(:onstater une guérison, sans s'inquiéter des phéIlomènes qui l'ont précédée ou suivie. Ce reproche
22
�-
170-
doit s'appliquer aussi aux faits qui m'appartiennent; car très-souvent je n'ai pu noter que ce
que racontaient des malades que je retrouvais
longtemps après la saison des eaux. La statistique ne pourra donc nous êlre que de peu
d'utililé dans l'appréciation des mouvements organiques suscités par les eaux lhermales. Je me
bornerai à consigner ici les résullats généraux de
ma propre observation.
Les sueurs sont un des phénomènes les plus
conslants, et dans le nombre des faits qu'on vient
de lire, on en compterait près de la moitié (1) où
la transpiration a élé abondante. De plus, la
sueur prend un caractère alcalin très-prononcé,
ainsi que je lai .constaté chez plusieurs malades
qui buvaient chaque jour plusieurs ,'erres d'eau
tl1ermale. Un morceau de papier de tournesol,
rougi par un acide et placé sur le ventre, la poitrine ou sous l'aisselle, était bientôt ramené à sa
couleur primitive. La peau est évidemment l'organe le plus influencé par les eaux de Cbaudesaigues dont la nature alcaline, comme l'a dit 1\1.
(1) 22 sur 40. On doit observer que M. Verdier il toujoul's passé
sous silence ce phénomcnc , si ce u'esl dons deux cas , eL que les
fails empruntés à ce médecin sonL en grand nOlllbrc. Ainsi, si
l'on retranche du tolulles sei~
obscn'Olions qui lui alJparlieunent,
on aura la proportion de 22 il 33, bien dirrél'cIIlo de c('lIe de 22
! 1i0 qu'on avait oblenue.
�-171Chevallier, doit rendre la transpiration plus active.
Ces eaux la nettoient parfaitement, la rendent
plus souplc et la débarrasscnt des substances qui,
en s'accumulant, empêchent les pores de faire
leurs fonctions. Elle devient souvent aussi le siége
d'éruptions de diverses natures: ainsi nous avons
cité des cas d'urticaires, de pustules, de vésicules,
etc. Ces phénomènes ont toujours été des crises favorables , el on est porlé à les regardcr comme le
résullat de l'élimination de matières nuisibles qui
se trouvaient combinées avec les parties constituantes de l'organisme.
La plupart des médecins s'accordent à rcconnaitre que, sous l'influence de ces eaux, l'état des
fonctions digestives s'améliore, que l'appétit devient
vif, les digestions faciles. Néanmoins j'ai vu chez
plusieurs lJuveurs des symptômes d'cmbarras gastrique . se développer, et plusieurs faits de ccs recherches confirment mon assertion . Il m'a semblé
forl rare de les voir agir comme laxatives, ainsi que
le prétend M. Chevallicr. En général, pendant leur
usagc, les évacuations al vines se fonld'une manière
normale; il arrive mêmc quelquefois qu'il se manifeste de la conslipation. Ainsi, on trouve dans
les fa ils précédents trois ou quatre cas où la diarrhée a été nolée et à peu près autant où les malades.
�-172se sont plaints de constipation, tandis que généralement celte fonction se faisait normalement. POUl"
expliquer ces changements apportés dans l'accomplissement des [onctions digestives, ne pourraiton pas dire que la nature alcaline des eaux les
rend propres à alcaliser le chyme et à lui communiquer ainsi les propriétés organiques du chyle.
Cette manière de voir concorderait avec celle des
physiologistes qui pensent que la bile n'a pas d'autre but dans l'acte de la digestion.
La sécrétion de l'urine n'est pas augmentée dans.
la majorité des. cas: l'acti vilé de l'excrétion cutanée rend raison de ce fait. L'urine, comme la
sueur, prend un caractère alcalin; elle ramène
au bleu le papier de tournesol rougi par un acide
et verdit très-bien le sirop de violp-tle.
MM. Verdier et Grassa!, n'ayant rapporté aucun cas d'emploi de ces eaux dans des maladies
des organes respiratoires, n'onl point parlé des
changements que la sécrétion bronchique éprouve.
Dans les faits que j'ai observés moi-même, la matière de l'expectoration n'a pas changé. La toux
est devenue moins pénible sans être plus grasse,
et a fini par di paraitre sans que la sécrétion bronchique fût plus abondante. Comment aurait-il
pu en être autrement 1 quand tous les Ouides s'-'
portaient à la peau?
�-173-
Du côté de l'encéphale on a observé quelquefois'
des signes d'excita lion , lels que céphalalgie,
bourdonnements, verliges ; mais ces phénomènes
devaient être plutôt le résultat de l'administralion
intempeslive d'étuves et de bains chauds que d'une
propriété inhérente aux eaux, Elles sont en effet
peu excitanles; aussi voit-on des vieillards chez
lesquels les congestions sanguines seraient si funesles, s'y soumellre sans courir aucune espèce
de danger. Quelquefois elles déterminent un peu
d'accéléra lion dans le mouvement du sang; l'ar1ère bat rapidement et avec force, et la peau conserve plus de chaleur. Mais ces modifications ne
s'observent que lorsque leur action fait passer à
l'état aigu une affection chronique, ou qu'il existe
chez le malade un état pléthorique qui eût dû être
préalablement détruit. Dans tout autre cas, les
bains el les éluves , par les sueurs qu'ils provoquent, apportent dans la circulation de la lenleur et de la régularilé.
D'autres "fois c'est l'accroissement des douleurs
existantes et l'apparition de nouvelles qui suivent
l'emploi des bains et des douches, Celle excilation
arlificielle est plus sou ven l favorable que nuisible,
et il n'est pas rare de voir des malades rentrer
dans leQrs foyers avec des souffrances bien plus
�-
17-i· -
vives qu'en les quittant, et obtenir, après quelques,
jours de repos, une guérison complète.
A.etion théa'apentbiue _les Eaux.
Si, revenant sur nos pas, nous examinons les.
observations consignées dans la deuxième partie
. de cet ouvrage, nous arrivons à ce résultat que
les eaux de Chaudesaigues , même imparfailement
adminislrées, peuvent comhallre avec succès un
grand nombre de maladies graves et rebelles.
Des paralysies, suites d'apoplexie; une céphalée
durant depuis quinze ans, une fièvre intermillente
rebelle au quinquina, une hypérémie cérébrale
habituelle, dépendante d'une maladie du cœur,
une amaurose onl disparu sous l'inlluence de ces
eaux. Un cas de surdité commençante avait été
heureusement modifiée, ct on avait droit d'atten-·
dre sa guérison, si le malade eût élé plus docile.
Des individus atteints, l'un d'un anasarc[ue attribué il un asthme, les autres de bronchiles , un
autre d'une plllysie pulmonaire, ont obtenu, ceuxci du soulagement, ceux-là une guérison complète. Quant aux maladies de l'appareil digeslif,
j'ai rapporté des cas de gaslrite chronique, de
gastralgie, d'hépatite clnonique el <le désordres
�-175-
des fonctions digestives dues, soit au rhumâtisme ,
soit à d'autres causes encore moins saisissables,
et toutcs ces affections ont été som'cnt guédes pour
toujours, d'autres fois pour un temps plus ou
moins long.
Quelquefois, pour atteindre ces heureux résultats, il a fallu des bains, des doucbes, des
étuves; souvent les bains seuls ou l'eau seule,
prise en boisson, ont suffi. Il n'y a que le médecininspecteur qui puisse juger des circonstances qui
exigent la combinaison de ces moyens ou l'administration isolée de chacun d'eux.
Les guérisons de tumeurs blanches, de luxations spontanécs que j'ai rapportées, doivent engager les chirurgiens à ne point faire courir aux
malades les chanccs d'une amputation, avant
d'avoir essayé l'aclion des eaux thermales.
Ce genre de médication est aussi très-favorable
contre les innammations musculaires, soit rhumatismales, soit de cause ex.tcrne, et l'on ne doit
pas cl'aindl'e de les prescrire même à des vieillards,
puisque le sujet de la 32c observation est un octogénaire qui trouva à Chaudesaigues, j'oserai
presque dire, la fontainc de Jouvence. On peul Jes
conseiller aussi à des malades alteints du mal de
pott, ainsi que le prouve l'observation de mon-
�-176 sieur Grassal; mais il faut attendre, avant de les
administrer, que les premiers accidents inllammatoires soient passés.
De plus, nous avons vu beaucoup de névralgies sciatiques, une intercostale et d'autres affectant successivement plusieurs nerfs de l'économie, traitées et guéries par les bains, les
douches et les étuves.
Un cas d'eczema impetiginodes, el un autre
d'inllammalion des follicules sébacés out trouvé
dans ces bains une médication précieuse, et
1\:1. le docteur Donniol m'a affirmé qu'il avait vu .
de nombreux cas de prurigo disparaHre sous leur
influence. La composilion chimique de ces sources
rend raison de leur puissance médicatl'ice conlre
ce genre de maladie.
On ne peut expliquer la propriété anli-syphi- •
Iitique que leur prêtent 1\'11\'1. Brémont et Verdier,
que par la facullé qu'elles ont de déterminer vers
la peau un travail éliminatoire. Du reste, j'ai exprimé ma manière de voir sur ceLLe question dan s
les réflexions dont j'ai fait suivre les observations
de ces médecins.
Enfin l'on peut croire que la propriété qu'ont ces
eaux d'alcaliser tous les Ouides excrémentiels, doit
les rend re propres à corn ha lt re la gra velle, la pierre,
�-
177-
la
opinion, toute théorique, a besoin'
de
lion de l'expérience, mais ce
qui
oins contestable, c'est la possibilité
par cette alcalisation leur puissance
d'expliq
médicatrice dans quelques maladies des voies dige lives. La science n'a-t-elle pas, en effet, établi
dan" "es derniers temps que, dans certaines affeclÎ('\(J ., i :'ritati ves de ces organes, les liquides sécrétés
:.. la surface de la muqueuse prennent
cide anormal? et n'est-il pas raisonel' que ces fluides, étant l'amenés par
lvec l'eau thermale à leur état alca's fonction s reCOUV1'ent leur régula-
médecin-Ill
ped~ur
ésumé, l'analyse des observations
1 la secoude partie de ces rechermaladies dont on a lu l'histoire ne
seules conlre lesq uelles les eaux de
sc montrent efficaces. M. Grassal,
, vante leurs effets bienfaisants
contre la gale invétérée, les éruptions miliaires qui surviennent après les couches , le dartres , les scrophules,
les rétractions des muscles, des tendons, des ligamens,
les ankiloses commençantes, les rhumatismes chmniques, les gibbosités vertébrales, les tumeurs blanches.
Elles provoquent, dit-il, les éruptions syphililigues,
23
�-178excitent les vieux ulcères blafards ou
, et aident ~eur
cicatrisation.
1\1. Brémont s'exprime de la
suigrande
vante (1 ) : Nos eaux peuvent devenir
ulilité dans la plupart des maladies chroniques en général ; mais celles contre lesquelles leur vertu ne peut atre
nullement contestée, celles qtû bien
", 1\imltent
chercher leur fin à Chaudesaigues
chroniques des membranes muql;
chronique, la leucorrhée, la gaf
cUffiwllés des digestions qui en clé
sies lentes, les contractures spa J
membres, le spasme nerveux ct
ire, les douleurs essenliellemen '
néphnJtiques, diverses maladie ,
en dépendent, les prétendus d
qui en proviennent. Les mata
deur des articulations, les an".
muqueux et lymphatiques des ar
ment même des viscères , la paraly,
rhumatisme chronique et goutteux, les aépols av tUl~ ,
la sciatique.
Voilà cerlainemenl une bien longue série de maladies conlre lesquelles 1\1. Brémont conseille les
eaux de Chaudesaigues. Il serait à désirer que ces
(1.) Drochure citée. Pago 22.
�-179indications fussent appuyées de l'autorité d'un
grand nombrc de fa ils , POUl' moi, ce médecin a
plus fail pOlU' la thérapcutique de ces eaux, en
insérant dans son Mémoire six obsc rvation s intéressantes, qu'cn donnant cette surabondance de '
noms, Est-ce en drcssant une longuc liste qui
pQul'I'ait servir de table à un traité complet de
pa,lhr' "' :{> , et cn ajoutant que cc sont là les afe guér issent tell es eaux thermales,
uade les médecins et qu'on leur fait
;onnaîtrc les cas dans lesquels ils peu5crire? Non, il leur faut des observaIf.
iagnostic so it bien établi, où les sympal et les effets des eaux soient bien
éralure des eaux de Chaudesaigues
'ès - propres à produirc des effets
orsqu'i1 est oécesssail'c d'obtenir une
lergique, Ne pourrait-on pas, pal'
ans le cas où le moxa est indiqué,
Sur le point malade U11 courant d'eau
.Ir très-chaude, en protégeant les parties voisines au moyen d'un appareil convcnable ?Ainsi, la haute température des caux de Chaudesaigu es serait utilisée 1 ct la puissante action de
lcur caloriquc, limitée à des points déterminés ,
�-180deviendrait une arme précieuse contre des affections rebelles à des moyens plus doux. Rappelons
ici ce que M. le docteur Bertrand a écrit dans son
beau livre sur les eaux du Mont-d'Or, en parlant
des bains tempérés: c( Les cas où les bains tempé« rés conviennent, ne sont point rares; leur uti« tilité est réelle et leur action incontestable. J'ai
c( vu de nombreuses guérisons dont ils av[
cc bonne part à revendiquer, je n'en do
« mais je doute bien moins encore que
", Il
« du Mont-d'or ne tombassent en désl
cc jamais ces bains étaient mis eu pre!
( des secours que l'on y trouve , si l'u
« à les faire prévaloir sur les grands l
(t
pect sévère de ceux-ci, la circonsp
(c leur emploi ct la surveillance trèsc( exigent, prêlent grandement la ma
cc férence qui serait départie aux pre
ceux-ci tout irait doucement el san
cc mais ce qui irait très-doucement j
c( les guérisons. »
Il suffit d'avoir passé quinze jours à Chaudesaigues pour être s"Ûr que ce moyen si puissant,
auquel les eaux du Mont-d'Or doivent leur grande
vogue, n'est employé que rarement et, pour ainsi
II:
(lire, au basard .
�-
...
l'
=-
't 81-
Les grands bains du Mont-d'Or sont aussi dans
certains cas un moyen de diagnostic excellent.
Ainsi, M. Bertrand nous apprend que, « Pendant
« l'immersion, les douleurs occasionnées par la
« carie des os ou par l'infection vénérienne sont
« exaspérées. Celles au contraire qui dépendent
« il" rh""'1atisme diminuent dès les premières
!t ne tardent point à s'assoupir».
,- de nos observations prouvent que
.} dans les bains de Chaudesaigues dé.t assoupissement des 'douleurs de nature
Jale.
sc demande comment des eaux faible~
[
.rgées de principes minéralisateurs peuner des, résullats que l'on attendrait en
composés analogues, mais artificiels, on
à de reconnaître que l'analyse chimique
. pas suffisamment compte de la puissance
e.utique des eaux thermales. Il parait bien
. .este que, quelqu'avancée que soit la chimie
)rne , elle ne saisit pas Lous les mystérieux inou:;v.ients de leur composition intime. Ne pourraiton pas penser que les principes minérals~eu
,
introduits dans les voies digestives et de là dans le
torrent circulatoire, sont soumis à des réactions
chimiq:ues qui donnent des produits nouvealLX. Si
�-- 182ces réactions sont réelles, elles ont lieu jusque
dans les parties les plus profondes de l'organisa lion
et peuvent développer un calorique qui, indépendamment de celui des eaux. thermales stimule d'une
manière salutaire les fonctions organiques. Il est
vrai que dans l'économie vivante les lois physiques
sont dominées par le principe vilal et que les réactions ne s'y passent plus comme dans le ya~ r
dan s lequel opère ]e chimiste; mais, en
nt
l'hypothèse précédente à sa juste valeur,
p lt
on pas croire que le calorique des eaux. lil
quoiqu e identique au calorique ordin
ru
trouve plus inlimément combiné avec
cules liquides , et qu e , porté avec elles iJ
1 . "
des fluides circulatoires, il va délel'fninCl
organes une excitation douce, uniforme,
de laquelle tous les mouvements de la
croissent, J'absorption interstitielle devi
active ct opère le dégorgement des organel
laires et le retour à l'état normal des orga
rencbymateux. Ne conçoit-on pas aussi ql
excitation s'étendant à l'innervation elleà celle fonction suzeraine qui semble ten
sa dépendance toutes les autres, ces dernières
n'en deviennent que plus parfaites et plus régulières, Ce qui tend ft Ill'ouver qu'il existe une diffé-
�-
18'3-
l'ence entre la manière d'être du calorique naturel
des eaux et celle du calorique artificiel, c'est
l'expérience faite par le médecin qui a ajouté
quelques pages à l'ouvrage de 1\1. Martinet. Il assure qu'en échauffant artificiellement les eaux minérales froides de Plombières au même degré que
le sont les eaux thermales, elles ne sont point
pOUl' cela aussi faciles à dig'érer, ni aussi excif'1ntes que le sont les eaux chaudes naturelles (1),
'chant toujours à se rendre compte de
s eaux thermales, on comprend qu'une
~ abondante, et souvent répétée, opère
ystème veineux une déplélion qui favo1 1
sorption intérieure. On conçoit aussi que
cuations alvines nombreuses, que la séurinaire accrue dans une proportion su) il celles des liquides ingérés, donnent le
usullat; mais évidemment tout ne se borne
':- phénomènes pl.ysiologiques, car souvent
rsécrétions sont absentes: il nlUt donc adune autre cause. L'action des moléculçs
minérales sur les tissos organiques)la percussion
de la douche sur les parties malades, l'excilalion
modérée des capillaires de la peau par le bain,
(1) Martinet, Traité d~ s maladies chroniques et des principales
manicres de Ic ~ guérir, Edition de l'a n xr, ('J803). Puge 167.
�-184sont des modes d'agir dont on ne peut révoquer
en doute l'efficacité, mais qui ne satisfont pas
pleinement un esprit avide de connaître la dernière raison des choses. Plusieurs médecins ont
pensé que la puissance médicatrice des eaux thermales était due à la pr'ésellce de la matière organique qu'elles contiennent toutes à des degrl'ls divers. Celte substance, d'une assimilation
portée dans l'économie, peut réparer pr<
ment les pertes qu'elle a subies, calmer l
contact émollient l'éréthisme des papille' 'el
veuses sur lesquelles elle s'applique, temlt
chaleur.morhide des parties enLlammées ,
(lU
plir les fibres des tissus affectés de spasr
r
ramener ainsi l'ordre et l'harmonie dans Il !
mouvemenls do l'organisme. On compr(
mieux encore l'efficacité de ceUe substance
les maladies, s'il était prouvé qu'elle COD
cet élément primitif de toute vie que certail
turalistes ont regardé comme le générateur spontané des êtres vivants les plus simples, lesquels
ne seraient arrivés que par des modifications successives aux formes qui aujourd'bui élal!lissent
enlr'eux de si énormes difféI'ences. Cette manière
de voir est partagée par un homme dont la vie
laborieuse honol'e l'Au vergne, et qui a nohlement
�-185payé à cette contrée ses lettres de naturalisation
par de nombreux travaux d'histoire naturelle (1).
Du Illode ,1'Olhllillistl'Otioll .Ie s Eaux.
Les eaux prises en boisson peuvent être graduellement portées de la dose de deux verres à celle
de quinze et même de vingt verres par jour, sans
que les voies digestives en soient fatiguées. En général, les malades boivent quelques verres d'eau
thermale dans le lit, et vont ensuite compléter
leur prise à l'Eslende ou à l'Hôpital. Je pense que
le lieu ct la position du malade sont indifférents et
qu'il doit choisir la manière dont les eaux passent
le mieux.
La durée du bain tempéré doit être, dans la
plupart des cas, de plusieurs heures: ce n'est qu'en
restant longtemps plongé dans le LaiD qu'on en obtient des résultats heureux. 1\1. lUartinet rapporte
l'observation d'un malade atteint de douleurs d'estomac, de flatuosités avec difficultés de digestion,
qui, après avoir essayé des médications de tous
les genres, se rendit à Plombières. Il y resta six
(1) Mémoire inséré dans les annales du Congrés scientinque.Clermont-Ferrand. - par 1\1. Lccoq, professcur de botanique el
directeur du jardin des plantes à Clermont-Ferrand.
24
�-186mois, et ce ne fut qu'après le quatrième qu'il
commença à ressentir une amélioration daos son
état. Ce malade prit chaque jour un bain de quatre
heures à 26° réaumur et reçut la douche pendant
une heure, tant sur la région épigastrique que sur la
région ombilicale. Ses digestions devinrent plus faciles avant l'expiration des quatre mois; mais ce ne
fut qu'à cette époque qu'il rendit par les selles des
glaires qui, au dire de M. Martinet, engorgéaient
les organes abdominaux et dont l'évacuation fut
suivie d'une guérison complète (1 ). L'ouvrage
de ce médecin abonde en observations analogues,
et je n'ai rapporté celle-là que pour prouver qu'on
ne retire pas des eaux de Cbaudesaigues tous les
effets possibles, parce que la durée du séjour et
des bains est trop courte . .Tc comprends qu'il faudrait des piscines ou de très-nombreuses baignoires, pour qu'un grand nombre de malades pût
prendre des bains prolongés.
Les bains chauds sont ceux dont la température est au-dessus de 29 degrés, réaumur. Leur
durée ne doit être que de dix à vingt minutes, el
l'on doit en sortir lorsque la face s'injecte et se
couvre de sueu,' , que la céphalalgie et les élour(t) Ouvrage cité. Page 331.
�-181dissements se font sentir. Quelques médecins conlleillent de s'y préparer par un bain tempéré;
celte précaution me semble convenable. Je bornerai là ce que j'ai à dire du bain chaud pOUl'
ne pas répéter ce que j'ai écrit plus haut sur sa
valeur thérapeutique.
La douche doit-elle être de longue durée? Quel
doit être le diamètre de la colonne liquide 1 Ja
hauteur de la chute? Doit-on en prendre plusieurs
pal' jour? Quelle doil être sa température? On ne
peut répondre à toutes ces questions par des préceptes généraux. La durée, la hauteur de la chute,
Je diamètre, la température, en un mot la puissance de cet agent doit correspondre aux indications que chaque individualilé morbide offre à
remplir. Ainsi, nous avons vu le sujet d'une des
observations de lU. Grassal prendre trois douches
pal' jour; ainsi, il arrive souvent à Chaudes aigues que des malades reçoivent la douche pendant
une heure sur le point affecté, el, suivant M. le
docteur Martinet, on peut en prolonger la durée
jusqu'à deux heures, en la promenant sur diverses régions du corps; ainsi l'on sait que, dans tou t
établissement thermal bien organisé, il exisle des
douches de hauteurs différentes ; à Luxeuil, (laI'
�-188exemple, la douche la plus élevée a trente pieds,
et à Enghien, soixante (1 ).
L'étuve est un moyen d'agir sur l'écop.omie qui
a beaucoup d'analogie avec le bain chaud; sa dur ée doit être la même : cependant il est des malades qui en supportent plus facilement les effets.
Il est bon de s'y accoulumer, en s'exposant
d'abord à celles dont la température est la moins
élevée: il est aussi très-convenable de s'y préparer
en prenant quelques bains qui assouplissent les
lissus ct déterminent une détente favorable à la
transpiration.
D1U'ée Ile 'a saison des ERu•.
Les malades peuvent se rendre à Chaudesaigues
depujs les premiers jours de juin jusqu'au milieu
de septembre. L'usage a consacré, pour la durée
d'une saison, une période de deux scmaines; mais
si l'on considère la qualilé peu il'rilanle du liquide
minéral et les heureux résuILats obtenus à Plombières par un plus long séjour, on doit penser que
dans beaucoup de cas ce laps de temps est insuffisant.
Pour mon compte, je crois que, dans la plupart
(1) Pntissier el Doulron·Charlard. Manuel des eaux minéralo.
naturelles. 1837.
�-189des maladies chroniques, ces bains longtemps continués détermineraient des effets merveilleux. Dans
l'élat actuel de ces thermes, malheureusement plusieurs causes se réunissent pour porter les malades
à en abréger la durée. C'est aux médecins à détruire
celle funesle tendance. Qu'ils se persuadent donc
bien CJue la nature peu excitante des eaux thermales de Chaudesaigues permet d'en continuer longtemps l'usage et les rend ainsi très-propres à combattre les maladies chroniques qui exigent toujours
un traitement long et persévérant; car ce n'est
point en un jour, en une semaine qu'on ramène à
l'état normal des organes qui ont subi de graves et
d'anciennes altérations. Ce passage de la maladie à
la sanlé n'a lieu d'ordinaire que par des modificaon
tions graduelles et peu sensibles . Si quelfoi~
àUeint ce but avec une rapidité qui tient du prodige par l'emploi de cCl'laines eaux thermales trèsacLives, il n'en est pas moins vrai qu'on y arrive
plus sûrement en continuant longtemps l'usage de
celles dont l'action accélère et facilite les mouvements de l'organisme sans déterminer ces pertubations fonctionnelles, plus souvent nuisibles que
salutaires. Ainsi à Plombières, dont les eaux thermales ont tant de similitude avec celles qui nous
occupent, les malades continuent, pendant plu-
�-190sieurs mols, l'usage des eaux et des bains, non
seulemenl sans éprouver d'accidents, mais encore
avec les plus grands avantages. A Chaudesaigues ,
comme à Plombières, si le mode d'administration
était identique, si les malades apportaient la même
résignation à endurer les ennuis d'un long traitement, on obtiendrait les plus beaux résultats·
dans la cure des maladies chroniques du tube digestif, de celles surtout pour lesquelles les eaux
de Vichy sont trop stimulantes.
�-
191-
DES AUTRES SOURCES mNÉRALES FROIDES
DE CIIIl.UDESIl.IGUES.
De la souree fie la Conclantine.
Les eaux thermales ne sont pas la seule ricbesse
minérale dont la nature a gratifié Chaudesaigues :
celle ville posséde encore une source précieuse
d'une autre nature.
On la nomme source de la Condamine.
Elle naît à un kilomètre environ des portes de
la ville, à travers les fissures du rocher dans lequel
a été creusée la roule de St-Flour qu'elle domine ,
de trois à quatre mètres. Le propriétaire n'a rien
fail pour la rendre abordable. Aussi est-on obligé,
pour en approcher, de gravir péniblement une
penle ardue " mais fort courte. Sans doute si les
médecins, appréciant mieux son importance thérapeutique, l'eussent conseillée à de nombreux malades, le propriétaire n'aurait pas craint de faire
des dépenses qui certainement lui seraient devenues
productives.
�-192Propriétés physiques et chimiques. - La source de
la Condamine est froide, limpide, d'une saveur
légèrement styptique. EUe dépose sur son passage
une couche ocracée ; elle donne, dans son état actu el , environ deux cenIs litres d'eau par heure.
Mou ami le docleur Bonniol a donné dans sa thèse
sa composition chimique. Voici le résullat de l'analyse qui a été faite par ses soins:
Carbonate de soude.
Carbonate de chaux. ( Peu. )
Oxide de fer.
Chlorure de sodium.
Des traces de matière animale.
Cette analyse n'indiquant point la quantilé des
sels qu'eile a décelés, laisse ignorer quelle est sa
nature réelle. Est-clle acide, alcaline ou ferrugi' neuse? J'ai cherché à résoudre celte question par
un examen bien imparfait sans doule, mais qui
m'a convaincu que cet eau est fortement chargée
de composés ferrugineux, et qu'elle contient une
petite quanlité d'acide carbonique libre. En effet,
la décoction de noix de galle lui a donné une
teinte noire très-prononcée, et cette même décoction jetée sur le dépôt qui recouvre les cailloux
qu'elle arrose a changé en noit' sa couleur jaune.
�-193Elle rougit, mais faiblement, le papier de tournesol. Je ne doute pas que, si cette source mieux
captée était examinée à sa sortie du rocher, cette
réaction ne fût plus prononcée.
Propriétés médicales. - L'eau de la Condamine n'a
été employée jusqu'aujourd'hui à aucun usage médical. Cet oubli m'étonne d'autant plus que, nonseulement elle peut à elle seule être très-efficace
dans beaucoup de maladies, mais qu'en outre il est
bien des cas où elle peut servir d'utile auxiliaire aux eaux thermales. Ainsi, il serait avantageux d'associer son emploi intérieur aux douches
ascendantes ou aux injections vaginales avec le
clyso-pompe, dans le lraitemtmt de beaucoup de
leuchorrées. Elle serait aussi très-propre à combattre les chloroses, les fièvres intermittentes avec
engorgemenl de la rate, les scrophules , les débilités des organes digestifs, à la suite de fièvres graves , ct généralement toutes [es affections où [es
toniques et surtout [.es ferrugineux sont indiqués.
Sa situation sur une roule royale à mille métres
de la ville est d'autant plus favorable qu'elle serait
pour les buveurs llO but de promenade et les forcerait à un exercice salutaire.
Les avanlages que je viens de signaler seront
25
�-
194-
sans aucun doute confirmés par l'expérience, et je
suis convaincu que l'eau ferrugineuse de ClJaudesaigucs sera un jour aussi bien ulilisée que celle de
]a Bourdeille à Plombières.
Je ne saurais lrop engager le propriétaire de
cette source à la recevoir dans un peli t pa vilion
qu'il construirait sur le bord de la roule, en l'adossant à la montagne d'où elle sort.
Des sources de Sainte .. lUnrie.
Ce serait un oubli, quand il s'agit des thermes
de Chaudesaigues , que de ne pas parler des sources froides de Sainte-Marie qui en sont, en quelque
sorle, un accessoire. Les baigneurs en font un si
fréqu ent usage: qu'il m'a semblé convenable de
faire connaître ce que je sais SUI' les propriétés de
ces caux.
Sainte-Marie est un joli village situé sur une
plaine élevée, à trois lieues de d:slance de Chaudesaigues. Dans son voisinage et au fond d'unc
gorge étroite et profonde existent deux sources minéral es qui lui ont emprunté son nom: l'une et
l'autre sourdent à travers les fissures d'une roche
scbysteuse.
La plus ancienn ement connue que nous appelle-
�.- 195rons source Vidalenc , du nom de son projéL~ie
,
est surmontée d'un petit pavillon où le médecininspecteur donne ses consultations. Un énorme
grillage, formé de madriers de chêne, empêche
de puiser de l'eau minérale, sans le consentement
du propriétaire. Celle source se divise cn deux filets reçus chacun dans un pelit bassin creusé daus.
le scbysle de la rocbe. Le plus considérable fournit
à la consommation desbuveurs; l'autre serLde collyre dans les ophtalmies cbroniques. Le premier filet
peut donner cent cinquante IiLres d'cau par heure.
A quelques pas de la source Vidalenc en nait une
autre nouvellement découverte dans la propl'iéte
du nommé Teissel. Celte source, dont la nature est
la même que celle de la précédente, n'a pas été
recherchée d'une manière convenable. Lorsque je
la visitai en juillet 18!~
, elle n'était pas couverte
et rien n'empêchait le mélange des caux pluviales
et des infiltrations supérieures. On dislinguait, en
outre, autour de lasource principale, des filelsd'eau
gazeuse dont l'existence prouvait qu'elle avait été
mal caplée.
Ces sources sont également distantes des villages
de Ste.-Marie, de Roubelet et du Pont-de-Tribou1 .
Pour arriver aux deux premiers, on est obligé do
gravir des colliDes escarpées, tandis qU'OD se ~end
�-196au troisième par un chemin en plaine, dont on
pourrait fa ire, avec quelques dépenses , une promenade agréable et utile aux buveurs.
Propriétés physiques ct chimiques . - L'eau de Sle.Marie est limpide , d'une saveur piquante. Elle a
une très-grande analogie avec l'cau de seHz naturelle et est de beaucoup préférable à celle que,
sous ce nom, l'industrie livre journellemenl il la
consommation. Elle ne trouble pas le vin rouge et
lui donne un goût agréab le; elle laisse dégager une
quantité considérable de gaz, surtout il l'approche
des orages: sa composition chimique a été donnée
par M, le docteur Bonniol dans sa thèse. Elle contient l suivant l'analyse qui en a été faite,
Une grande quantité d'acide carbonique libre;,
Du carbonate de soude;
De l'oxide de fer:
Un peu de chlorure de sodium;
Du carbonate de chaux;
Du carbonate d~ magnésie.
J'ai constaté moi-même qu'elle rougit promptement le papier de tournesol et que la décoction de
noix de ga lle lui communique une couleur violette
due au gallaledc fer. Celle eau contienlévidemment
plùs d'acide carbonique etmoios d'oxide de fer que
celle de la Condamine.
�-
197
-=-
La source Vidalenc fournit chaque année à l'exportation environ cinq mille lilres qui, pris sur les
lieux, se paient chacun cinq centimes. De plus chaque buveur paie au propriétaire une rétribut ion
d'un franc cinquante centimes pour une saison, et,
comme il s'yen rend chaque année de douze à
quin ze cents, le produit de celte source s'élève à
un e somme qui varie entre deux m ille et deux
mill e cinq cenls francs, sur laquelle le propriéta ire
cn donne un e de quatre cent cinquante au médec in
inspecteur.
Ce produit serait moins élevé sans contredit, si
Teisset faisail des travaux convenables pour bien
capter la source qui lui appartient.
Propriétés médicinales.- Ces eaux sont conseillées
daus les cas d'atonie du tube digestif, dans certaines in{]ammalions de l'apparei l gén ito-urinaire,
dans la cblorose et l'aménorrhée. (1). (( Elles font
disparailre, dit 1\1. Grassal dans un cab ierd'observalions inédites , les dis pepsies, les vomisseme nts
glaireux, les légers embarras bilieux avec céphalalgie , certains engorgements chroniques du foie,
quelques ictères en ravivant les digestions. E lles
tendent à dissiper la mélancolie cl l'hypocondrie;
utiles dans les borborygmes , elles font cesser
(1). Thèse de:M. le docteur Donniol, 1833, page 23.
�-198 quelquefois les diarrhées chroniques, etc ... (1). »
J'ai envoyé à Sainte-Marie plusieurs malades sujets à des urticaires et ils ont élé délivrés de ladisposition morbide qui favori sait la reproduction de
cet exanthème. Ces eaux. réussissent aussi contre
certains étals maladifs des voies digestives qu'il est
souvent difficile de caractériser. Ainsi, elles sont
salutaires à des malades dont l'appétit est languissant, qui transpirent au moindre mOU\'emenl et
qui voient leurs forces diminuer peu à peu, à ceux
qui, après une longue maladie, ont de la peine à
recouvrer leur vigueur première: enfin je les ai
vues guérir quelques cas de gastralgies avec atonie.
Mode d'administration.- Les malades se rendent
de bon matin à la fontaine minérale et y boivent
autant d'eau qu'ils peuve.nt en ingérer jusqu'à midi ,
beure du premier repas. Plusieurs d'enlr'eux sont
fatigués par l'énorme quantité de liquide dont ils
se gorgent, mais de retour dans leurs foyers, I~
calme se l'établit et ils commencent à ressentir les
bons effets de l'eau minérale.
La durée d'une saison ne dépasse guère dix il
douze jours pour chaque individu, et il s'y rcnd
des buveurs, tant que le temps est chaud et que Ics
voyages sont faciles,
(1) Nolice sur les eaux de Cbnuùosoiguc5 par i\I. DeSSQurcl.
poges 13 el H.
�-
199-
DE LA NÉCESSITÉ D'UN GRAND ÉTABLISSEMENT
A CH:\.UDESAUWES.
J'ai raconté, dans les premières pages de ces rechercbes, cc que j'a vais \'u à Chaudesaigues, J'ai dit
que, quoique depuis 20 ans les établissements particuliers se fussent beaucoup améliorés, ils éta ient
encore loio de suffire au x exigences de l'art médical.
Mais ce qu'il est juste d'ajouter , c'est que les propriél3ires ne peuvent introduire chez eux un grand
nombre d'améliorations utiles, mais coûteuses,
parce que depuis longtemps Chaudesaigues se croit
à la veille dc posséder un établissement public,
ni, le préfet DeIamarre, ce magistrat aussi infatigable qu'intelligent, avait fait dresser par un babile architecte le plan d'un établissement thermal
magoi/Jque, Ce plan, tracé dans de grandes proportiOIlS , nécessitait des dépenses si élevt!es qu'une
société d'actionnaires ne pouvait allendre d'une
pareille entreprise des avantages pécuniaires suffi-
�-200sants. Une aussi admirable construction ne pouvait
surgir que par la munificence du Gouvernement,
et celte œuvre eM été pour lui un litre à la reconnaissance des populalions et une gloi re véritable
pour notre époque , car les monuments utiles transmellenl , plus sùrement que tous les autres produits
des beaux arts, aux genérations futures, le sou ye\.
nir de la richesse et de la grandeur de celles qui
ne sont plus. Aussi , ce peuple, dont la dominalion
avait embrassé le monde connu , papulus IClle rex,
nous a laissé une haute idée de sa magnificence et
de sa civilisation, en élevant près de ces suurces
bienfaisantes des temples qui n'étaient pas seulement consacrés aux divinités dont son imagination
aimait à peupler ces lieux, mais près desquels les
malades Lrouvaienl des piscines où ils plongeaient
leurs membres souffrants et où ils puisaient , pour
ainsi dire, une vie nouvelle. Les soldats venaient
s'yrefairedcs faligues de la guerre, y recouvraient
la force et l'agilité, et la patrie retrouvait en eux
d'utiles défenseurs.
Il est bien à regretter que le Gouvernement n'ait
point entrepris celle œuvre dont lui seul pouvait
faire les frais. Toutefois, si une société de simples
particuliers ne peut s'élever à tant de magnificence,
elle peut atteindre ]e même but dans des limites
�-201plus modestes, et trouver dans le résultat un juste
dédommagement à ses sacrifices.
1\1. de Bantel , préfet actuel du département,
continue avec zèle la lâche de son prédécesseur qui
est devenue la sienne, et il use de toute l'influence
que sa position lui donne pour doter le Cantal
d'un établissement destiné à accroître sa pro.!
l '
prUté. En 184·0 un nouveau plan a été dressé
et ses proportions plus restreintes font espérer
que Cbaudesaigues recevra enfiu, de la main de
l'bomme, le complément indispensable des richesses que la nature lui a départies, Ainsi Ml\r.
d'Arcet, Dessaul'et et Barlier, dont la conslantc
soll icitude a aplan i les nombreux obstacles (lui
entravaient l'accomplissement de ce projet, auront
la satisfaction'de voir leurs démarches couronnées
du succès. Ce l'éSll/{nt sera la noble ct digne récompense de leurs soins et de leurs travaux,
On trouvera dans le futur étahlissement tout ce
que l'arl moderne a inventé de commode et de perfectionné: des piscines, de nombreux cabinets de
bains avec des robinets de douches au-dessus des
baignoires; des douches séparées, avec des chules
d'élévation différente; des étuves sèches; des bains
et des douches de vapeur; des étuves par enca issemen t; des salles de strigi lia lion et de massage. Il
26
�-202111e semblerait convenable que, dans les nouveaux
thermes, des baignoires fussent spécialement afec~
tées à des hains que l'art rendrait médicamenteux,
soit en augmentant les doses des principes consli~
tutifs de l'eau minérale, soit en y ajoutant des
substances étrangères à sa composition. Je voudrais
aussi y voir des appareils de fumigations générales
ct partielles, cinabrées et sulfureuses: leur utilité
serait d'autant plus grande que beaucoup demalades ne peuvent trouver ces ressources dans les
villes de provinces et dans les campagnes. lis se
rendraient alors à Chaudesaigues pour y prendre
des fumigations ou des bains artificiels, comme
d'autres y viendraient prendre des bains d'eau
thermale.
Le principal avantage de la création d'un grand
établissement thermal serad'imprimer à l'administration des eaux celte haute et utile direction qui
doit être un des principaux attributs du médecininspecteur. Alors on ne verra plus, comme aujourd'hui, son rôle se borner à quelques rares conseils
donnés à des malades qui les réclament plus rarement encore ct à quelques apparitions dans les établissements particuliers. Là où régnait l'anarchie,
règnera l'orùre si nécessaire dans j'exécution de
prescriptions médicales; les effets des eaux se-
�-203l'ont mieux étudiés, parce que les malades sel'ont forcés de rendre compte de leur état à des
médecins dont l'ordonnance pourra seule leul' "
faire ouvrir les cabinets de bains, de douches,
d'étuves, elc. etc. Personne ne conlestera que
la conséquence de tous ces perfectionnements ne
soit l'aŒuence de malades appartenants à celte
classe de la société qui, par ses mœurs ct ses habitudes, recherche autant les distraclions agréables
qu'un soulagement il des douleurs physiques. Ce
concours embellira le séjour de Chaudesa!gues; des
réunions s'y formeront, et l'on y verra éclore les
plaisirs et les délassements de tous les genres. Dès
lors l'ennui endémique pour les étrangers dans un
lieu oq l'on ne trouve pas un livre, pas un salon,
pas un abri, pas un ombJ'age pOUl' éviter l'ardeur
du soleil, disparaîtra sans retour. Qui ne saiL combien cet état de l'esprit est funeste à ceux que leurs
souffrances conduisent à Cbaudesaig"ues! 115 ont
rarement le courage d'y séjourner tout le temps
nécessaire., parce que celui fJlI'i~
y passent est
empoisonné pal' une espèce de nostalgie écrasante. Cette affection morale, par l'affaissement
(IU'elle détermine dans l'économie toute entière,
apporte, physiologiquement parlant, tul grave
obstacle il l'accomplissement régulier des fonctions
nuLritives.
�20!~-
Appelons donc de Lous nos vœux la réalisation
d'un projet aussi éminemment utile, et rappelonsnous qu'un monument consacré à la guérison des
infirmités humaines honore plus un peuple qu'un
temple élevé ù la vicloire.
FIN.
�,
DES llIATIERES.
rl'ABLJ~
AVANT-PROPOS . . . . . . . . . . . . . page
.Considérations preliminaires. . . . . . . . .
Situation de Chaudesaiguos. - Propriétés physiques, Analyse chimique do ses Euux.-Usages
domestiques. . . . . . . . . . . . .
OJlSJlRVATlONS de diverses maladies trailecs par
les Eaux de Chaudesaigues.. . . .
Maladies de l'appareil de l'innervation.
Maladies des organes des sens.. .
Maladies de l'appareil respiratoire.
Maladies de l'appareil digestif. . .
Maladies de l'appareil de Ja seaétion urinaire.
Maladies du système articulaire. .
Maladies du système musculaire.
Maladies du système osseux. .
Névralgies. . . . . .
Maladies de la peau. .
Maladies syphilitiques.
RÉSUMÉ GÉNÉRAL.
.
.
Action physiologique des Eaux.
3
7
12
34
36
08
63
71
88
D3
111
128
1;;:;
Hi8
1 GO
1 G9
169
�-206Action thérapeutique des Eaux.
Du mode d'administration ' des Eaux.
Durée de la saison des Eaux. . . .
t74
1815
188
 UTIlES SOURCES minérales froides de Chautlesaigues. . . . . . . . . .
191
De la source de la Condamine
191
Des sources de Sainte-Marie.
194
DES
DE LA NÉCESSITÉ d'un grand Établissement à Chaudesaigues. . . . . . . . . . . . . . . .
FIN Dil LA T..lllLIl .
i 99
���
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Title
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Le Thermalisme
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Description
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<p>La médiathèque Valery Larbaud de Vichy conserve plusieurs centaines d'ouvrages consacrés au thermalisme.<br />En partenariat avec l'Université Clermont Auvergne, est ici mise en ligne une sélection...<br /><a href="https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/exhibits/show/lethermalisme">En savoir plus sur le Thermalisme</a></p>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Recherches_sur_les_proprietes_medicales_R75323
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chaudes-Aigues
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Teilhard Laterrisse, Jules
Title
A name given to the resource
Recherches sur les propriétés médicales des eaux minérales, thermales et froides de Chaudesaigues, (Cantal)
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Librairie médicale de Fortin, Masson et Cie
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1842
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Subject
The topic of the resource
Eaux minérales – France – Cantal (France)
Eaux minérales – Emploi en thérapeutique
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
VI-206 p.
application/pdf
Description
An account of the resource
Demi reliure, dos et mors de plat toilé marron, titre, auteur et cote inscrits en doré sur le dos, plats papier marbré jaune et noir. Ex-libris manuscrit sur la page de garde de Jules Teilhard à Victor Fleury, professeur à l'école de médecine de Clermont-Ferrand
Type
The nature or genre of the resource
text
Language
A language of the resource
fre
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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Eaux minérales – Emploi en thérapeutique
Eaux minérales – France – Cantal (France)