1
100
503
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53064/BCU_Factums_G0903.pdf
5443cc2d9757cf0ceafb033f08792963
PDF Text
Text
P O U R
C H A P P E L , Officier de
santé pharm acien ?habitant à Clerm ontFerrand Défendeur ;
M a r ie - J u l i e n
C O N T R E
D
M a r g u e r i t e M O N E S T I E R , son-
ame
épouse se disant autorisée par justice ,
Demanderesse,
, demeurant en la même ville,
'
' L
•*
en divorce.
•
■
<1
'
:
"
-L’aimer, e n ê tr e aim é e est ton esttonplusdouxpartage partage.
• '
' i
,
T r a d u c tio o d e M ilto n .
•
E t a i t - i l donc dans la destinée de la D am e C h ap p el d’être là'
prem ière , depuis la publication du code civil , à donner au public
l’exem ple scandaleux d ’une dem ande en divorce ? . . . . U ne fem m e
�(o
née dans un état honorable, pouvait-elle pousser l’oubli de tous
les devoirs et de toutes les bienséances, au point de réclamer des
tribunaux la dissolution de son m ariage, d’y venir abjurer solemnellement sa qualité d’épouse , et d'oser soutenir en même lerns ,
par une singularité qui tient du délire , qu’aucun acte lc-gal ne lui
q conféré
ce respectable titre? Convenait-il , enfin, à une mère de
famille de tenir une conduite qui ne tend rien moins qu’à com
promettre son état et celui de sa HUe, à diffamer son m ari, e t
'
à se mettre en spectacle de la manière la plus désagréable ?
Un tel excès d’égarement est en opposition manifeste avec les
bonnes mœurs.
Certainem ent, si la Dame Chappel n’était pas livrée à de perfides
conseils, si des impulsions étrangères ne l’agituio ni sans cesse, il
serait facile de la rappeler à elle-m êm e, par la seule considéra
tion des conséquences funestes de ses téméraires démarches j
niais son imagination sédu te ne so co m p laît que dans T e n e u r ,
et la rend également insensible à la voix de la raison , comme à
celle de la nature.. Il est cruel pour le C.en C h a p p el,
.
. .
m
’
V
'
qui a
«
employé tous les moyens pour conquérir son affection , de ne
trouver en elle que des sentimens de h ain e, et ce qui le rend
peut - être plus à plaindre est de sen tir, quand tout est changé
pour lu i, qu’il lui est impossible de changer lui-même.
Aussi
malgré la vive d a t e u r qu’il ressent de voir «a femme
cumuler contre lui les imputations les plus calomnieuses, pour
..
t
ce creer des moyens apparens d’obtenir du tribunal la rupture du
,
»001$ conjugal,
"
...............................................
pi qtioiquerde tels procédés soient capables d’irriter
qjfigqiymf eu.rspruit, l’obje* >le Ç.eh Chappel ne pferdraijaniaia «le vue
qu’il e^t ppqux ,, qu’jlt.çst, père , et ¡qüeopoür frvpîr la p a is, il n’c s ï
point de'sacriQce que de pareils titres ne détermiuent. Pénétré de
�.y
(?)
celte vérité et fort de la pureté de ses intentions , connaissant
.
t
• ».
tie n d’ailleurs la nmin perfide d’où parlent les trails les plus
envenimés qui ont été dirigés contre lui } il tiendra toujours un lan
gage conforme à la loyauté de son caractère , espérant avec confianco
que les magistrats trouveront dans leur propre conscience , des
motifs plus que suffisansde rejelter une demande, qui est tout-àla-fois odieuse y n u lle , inadmissible et mal fondée.
F
.
-.;j ii
A
15 T
S.
L e 9 messidor an n , la Dame Chappel a présenté au C.<*
B o y e r, premier ju g e , faisant les fonctions de président , une
requête expositive des faits qui l’ont déterminée à provoquer le divorce
contre son m ari ; m ais reco n n aissan t elle-même la fra g ilité de se»
moyens , elle s’est réservé d’attaquer son mariage de n u llité , sur
le fondement que les publications et l’acte du mariage ont été rédigés
par le C .cn C h a p p el, son beau p è re , alors officier municipal. E lle
a joint à cette requête, pour pièces justificatives de sa demande ,
i.° l’extrait dudit acte de mariage du 5 o frimaire an 8 ; 2." une
lettre sans d a te, à elle écrite par son mari ; 5 .° une ordonnance
du tribunal en date du 8 prairial an n , rendue sur sa pétition ,
en la cliambre d’instruction , et portant autorisation pour form er
et poursuivre sa demande en divorce. L e C .cn Boyer a rempli le
voeu de la loi ; il a représenté à la Dame C h a p p e l, avec l’éner
gie du
sentim ent,
les
conséquences funestes de la
demande
quelle voulait engager; il n’a rien omis pour lui faire abandonner
projet si violent : mais la Dame Chapelle a été in éb ran lab le
dans ses résolutions ; en sorte que le C.cn Boyer a dressé pro
cès - verbal
ja remise
desdites pièces
et a ordonné que
�C4 ) '
lès deux époux seraient ci lés devant lu i , en la chambre d’ins^
truction, à jour et heure fixes. Le. iG , le s . deux époux o n f
comparu devant le C.en B o yer, qui leur a fait toutes les repré
sentations propres à opérer entre eux un rapprochem ent, et il
a constaté par son procès - verbal leurs dires respectifs. O n ’ y
voit que le C .cn Cliappel a déclaré qu’il ne
consentait pas au
divorce ; qu'il a demandé que son épouse se réunisse à lui ; qu’i l i
l’a même sollicitée de revenir dans sa. maison , promettant d’avoir'
pour elle tous les égards possibles , en un m ot, de la traitera
iparitalenient ; qu’au -cprçtraifce son épouse ayaitrejetté cetteinvitation
,
d is a n t
qu’après ce (^ e lle avait éprouvé
,
elle ne pouvait
compter sur les promesses du O n .. Cliappel , et qu’ainsi elle persistait dans sa demande en divorce. L ’obstination de la Dame
Cliappel a donc ren d u . vaines et infructueuses les remontrances et:
les sollicitations du m ag istra tL e 2 0 . du même mois , sur le rapport du C.en Boyer et sur les •
conclusion s du commissaire du Gouvernem ent, il a été rendu par
le trib u n a l une ordonnance, qui a permis à la Dame Cliappel de.
faire citer son mari à comparaître en personne a 1 audience a huis,
clos
dans les délais de la lo i , pour répondre aux fins de sa;
req u ête de divorce, q u i, en outre, l’a autorisée-à rester pendant!
le cours de l'instruction , dans la maison de ses- père et m è re ,,
et à voir son enfant, quand bon lui semblera j mais sur la remise
de l’enfant, a sursis à faire droit.
L e 25 >therm idor, des deux époux se sont présentés à l’audience
à huis clos.
L a Dame Chappei a fait exposer les motifs de- sa demande >,
¿lie a représenté les
pièces
qui l’appuyent et a nommé
l</s-
té moins quelle se propose de faire entendre. Son m aria ensuite*
�fO'
>r .
fait proposer 9es
(<)
observations
sur
celte
dematide ' j ' qu’il
a soutenu être tout-à-la-fois odieuse , nulle , inadmissible et
^ ^i ^
•i'
• 1• f 1' *
**
mal fondée, et il a ind ique, en tant que de besoin et seule
ment 'pour
satisfaire
i
à
la
loi , les
’
produire.
Il a été ¿Tressé
observations
témoins
i il
'
procès-verbal des
qu’if
pourrait
u t / f'
comparutions" , dires et
des parties , qui Pont signé ; ensttité le
tribunal
a renvoyé les deux époux à l’audience publique du je u d i, 7
fructidor prochain, heure de 8 du matin , a ordonné la com
munication de la procédure au commissaire du Gouvernem ent,
et a commis pour rapporteur le (Xen Boyer.
C ’est dans ce t état
d ivo rce de
la
q u ’il
s’agît de savoir si la
D am e C lia p p e l p eu t
dem ande
en
ê tre adm ise , ou si au con
tra ire elle doit
ê tre rejeltée.
Nous
soutenons ayec
l ’affirmative de
cette dernière proposition.
confiance
"
M O Y E N S *
Plusieurs
t
doivent
considérations
des magistrats toutes les fois
se
présenter dans l’esprit
qu^il s’agit d’un divorce. « Les
)) tribunaux ( dit leC.cn Treilliard , conseiller d’É ta t, dans son dis)) cours .sur la loi du divorce,) ne sauraient porter une attention
j» trop sévère dans ^instruction et Pexamen de ces sortes d’af)) faires........ 1-1 ne iaut ppint affaiblir dans l’ame du. magistrat
)) ce sentiment profond de peine seorette qu’il doit éprouver,
y
t
» quand on lui parle de divorce»...,,
E n effet , que d« réflexions ne
action !.....
'
fait pas naître une pareil!^
.r
�( O
Premièrement , l’on ne peut se dissimuler que le divorce,
. ^
■
•; .. i ^
_
3, '
J,J' •, i'1■
'
quoique permis p a ra la loi , n’imprime à la pensée quelque
cl;ose d’odieux , qu’il ne soit généralement réprouvé par l ’opinion
publique , comme
\
’,< up
étant une occasion de scandale - et comme
.
. . ..
• .•
entraînant' avec lui des maux graves et
.
.
T
certains , lors même
que
l'usage en paraît justifié par les circonstances , à plus
et > . • t: " • joov ;
1
jforte raiso.n , tpiand il est évident que l’on en abuse. C ’est ce
Il v/nb t ëtîo...jC ;n m
qui a toujours retenu le* femmes vertueuses , qui,, d’avance e xcu Y t lijíJOj I1’ ’ OUplUiKJ
'10.i, ':
.■> tu . , [
séos dans ,une .pareille démarche par la notoriété des souffrances.
::m
r . ‘. . n n o lr to r. t ri:inr:i i.o -
o'iiiîmi
. f» »■•ïi» ;-ovj r,c h i ' ■: i . i
que d’indigne^ maris^.leur^font éprouver^ ^ préfèrent- cependant
dévorer leurs chagrins dans le .silence.
° .1
.J r
II. iOq.ji.-,
• ..
Secondement ,. quelles inductions ne peut - on pas tirer de la.
np oUí i r. rv. :
J: t: '
i
conduite, d’uneo jeune fepime ,
-
*• '•/
..........
1
qui invoque par préférence .le-
divorce à i a séparation de corps! De quelle défaveur ne s’en yironne-t-elle pas elle - même , en réclamant la dissolution d^uilt
lien dont elle avait juré aux pieds des autels de respecter l’in
dissolubilité ! E t si le parjure est toujours honteux, combien ne
d oit-il pas paraître plus révoltant j dans fa circonstance où l’in
térêt de l’enfant réclame la conservation du noeud conjugal, à qui
i l 1doit1 l’bkiâtertcfe’ et f i légitimité!'
'
“
’
*
f0 Tioiâîeih^ilènt y le Jdivorce est Fimage de l'a mort naturelTél
P a r
'le divorcc',’'íes époiix sont , pour ^insi dire , anéantis Tun.
pbiif ^ f * ? t e r n i f ë
commence déjà poiir e u x , "puisque0 lai
loi leur ; ôte jusqu’à l’espoir dfe se réunir ’ jamáis. Phis màlh’e ureux
que si 'là mort !l'inêmo; les eût l séparés
1 leur
présence
dans lé_ monde i:entrétieut e n -e u x le souvenir am er1 de
ancienne liaison; elle ex cite 'le s regrets' de lu n
leur
les l'emords de
llautrei; elle l e s ’f fiicerd eJ86 rappeler le passé, lorsqu’ils auraient
le plus besoin de
s’oublier pour ¡ ’avenir. Privés du bénéfice
�(7)
'du temps q u i, dans le’ cas dp la mort n atu relle, effaceiinsenii-*;.
blement les objets, les divorcés ne trouvent que des occasions
tiop fréquentes d’éprouver les j>Ius douloureuses impressions.-'
Quatrièm em ent, quel •sort le divorce ne prépare-t-il pas aux
enfans nés du mariage que l’on veut dissoudre ? Innocentes
victim es, leur é ta t, leur éducation, leur fortune, tout est com
promis. Élevés sous de si funestes auspices ,
devoir être encore
l’avenir
plus sinistre pour eux ; il est
semble
impossible
de calculer les maux qui les attendent; de nouveauxi.engagemens les feraient tomber sous une dominaliomélrangèreii.Qrplielins du vivant même de leurs père et rmèré
c’est end vain qu'ils-
les appelleraient; à peine trouveraient-ils dilûfe’ kelui là qui le dépôt j
en serait -confié , ces) soins tendres et généreux-- qu’ilsaout droit
d'ut tend ro de loiis les deux, .’ il
:ir
-.r'abnc ?.->l
:p!
i
-Cinquièm em ent, le C .e>i TreilH ard, dana son disoours jp récitér j
pose en principe que « le divorce en,;Ini,-çmêmai nenpeut- pas» ê t r e un b ien ,
puisque c ’est ,}e remède d'un
» le divorce-lue doit pas êtie
)) mal
non plus
tmflisil jquar.>
signalé
çynnnp.ilUnu
s’il . peut être uni.remède quelquefois ; néceijsaireijj)i;queti
J) d’ailleurs il est-reconnu 1er incontestable—q u e'la \lo i doil.\QÎTrir^
» à des époux outrag^s.-^' maltraités , zen périlinde sUjur»:ojQiw»[>>a
» des moyens de- me tire là couvert! lejür ülumneurtnetnleiW) yie/Difi
Médiloii» ces-pensées Ji ehnous, iaj-sirons^tfaiteniefrt ’l îesprM ô?«
la loi >!6ür •te K d ivo çcèiiiÇ eH fsp o ia it /de' \dbirte\qire,».lev;divorc6^
n’ est-'pais'un bîen ; rnmis> s i l i .'es k:u n rt<réinède
il faiit icdjvenlFF
qute c\\st un -tèri'îble rewèdeijitqu’on newdoit ,appliqüen)qu'ûvlwnit
xri«îI'éVtTêni^,i let dflns3uii'iMffl6 «Iffwèfcpéfé^ sanslitjuçi j iearJteûJBdoT
étant plus dangereux que le mal , ou-'tombefaTtm Jahs; Jfiuconirj
Vôiitem d’ôpéfei? par^'lo^ittojyon’ d ’u » ’ lefc
iü:wgra.rj}<l
�(8)
mal yrsans aucun bienl Aussi' la pensée du-Iegisktetif 11 f s* P oin*
équivoque à cet égard , puisqu'il rie. ««Justine- ce remè&e .qu-aux
époux obligés de mettre à, couvert leur
honneur^et le u r
IJtonc ?ii'ffaut examiner .scrupuJettyeme.nt si la i ";niiue qiû;‘-cm ai'^e
le ••■divorce.] <ist exactement dansi-Ta position de iik '^ 10 a Ç°ll',ert
ton •honneur et sa vie, ' v
i
i: .
-irai ,
* L e baron dePuiTeudorf., tomi JF, p . 208, quoique ass
.:
;
^aFP"
rablejau divorce, .convient pourtant qu’il serait également dés.*l0ri“
jiêiei^t nuisible que le mariage p u t . être dissous sans» de frès-'i'
fortes i’àisons, même du consentement des parties; car une telle t
licence troublerait extrêmement l’ordre ét Ja paix des familles et [
par conséquentule l ’Etdt,.
-i
••••;.
. î
)Sixièmement j en 1matière idc d ivorce, il est essentiel de se ;
rappeler les anciennes
co rp s fi
maximes
touchant
les
séparations
de ;
puisque; là l o i ' n o u velle o u v re ég alem en t ces deux t voies
sur leëmiçmes m otifs, e t'n e les distingue que par la d ifféren ce \
des;«ifetô.tjejatif« au noeud conjugal. O r , dans l’ancienfrégime >(
il fallait que les mauvais1traitemens fussent excessifs pour don—< '
ïifePfiicu tv la 'réparation ;de c o r p s 1: suivant le chapitre 1 5 J de
restitution'# spoliatorum > aux ' décrétalcs, il n’y avait lieu à la
séparation! que : 'datis le 'cas • oui: la ■
'femme n ’avait
aucun autre ;
moyen de;gaiantir .sa; vie ’de lia "cruautiê ^d’un 1 époux dénaturé.
Si'tajitci sit i>iri sœ vitia , ut mulierii trepidanii non posait suffi-'
ciens ,securilcis provideri. A lia vérité j la jurisprudence 11e suivait,
pÛS à la lettre là disposition du droit ca n o n , ¡et ' appréciai les
m
a u v a i s
¡traitem ens, suivant l a ’nature) des
circonstances et les,
conditions et qualités des parties’, m a is :toujours fallait-il qu’i l s .
parussent infiüim ent gravas, j
i n: •»!
:ru
1 ;r . . , t'i
Com m e fh o m ie ù r est encore plu» p récieu x que la
in, )■
>
vie , su r-
�C9 )
tout pour «ne femme vertueuse, il y
avait
encore lieu à la:
séparation de co rp s, lorsque par des injures atroces
et
de»
outrages réitérés, un mari avait eu l’indignité d e ' chercher à
déshonorer. 6a f e m m e s a n s qu’ella lui en eût donné le moin
dre. sujet. . Ces maxime» dérivent encore aujourd’hui de l’arliclo
C C X X V de la loi du d iv o rce , portant que « les. épOQX pourront
)> réciproquement demander le divorce pour excès , sévices , ou
» injures graves de l’un d’eux envers l’autre w. Sur quoi , f le
C'". Treilliard a observé « qu’il ne s’agit pas là da simples >mou»> vemens de vivacité, de quelques paroles dures échappées rlans des
» instans d’humeur on de mécontentement ,
de quelques refus
» même déplacés de la part d'un des é p o u x , mais de véritables
» excès , de mauvais traitemens personnels , de sév ic es , dans
» la rigoureuse acception de ce mot sæ vitia, c ru a u té , e t d ’in -
» ju r e s
portant un gra n d caractère do gravité
S e p tiè m e m e n t, dans ces sortes d’affaires,
».
il y a quantité de
choses soumises à la pure sagacité des juges , et le plus souvent
la
disposition particulière de leurs esprits influe singulièrement
sur l’événement
de la contestation. Sans
rigueur jetterait dans
opprimée , mais
le désespoir
aussi
trop
de
doute que
trop
de
une femme u véritablement
condescendance
produirait
1 effet le plus funeste, en donnant à toutes celles qui- ai meut
1 indépendance ,
l’envie
et
l ’espoir de
b r i s e r 1 lesi
liens
dii
mariage. Une telle facilite nous conduirait bientôt à ces temps
de désordre
que le divorce produisit chez les romains ,
et
qui étaient tels que le philosophe Sénèque disait : » Il n’y a
w point aujourd'hui
Elles
de femmes
comptent leurs
années ,
consuls, mais par le nombre
qui oient honte
non
par le
du divorce*
nombre, des
des maris qu’elles ont eus *
�' Q {-10 )
v elles sortent de chez un mari pour se remarier', et ne se
» remarient que pour quitter ensuite le nouveau
mari qui le»
» épouse ». Juvénal , dans sa sixième sa ty re , a peint ces indignes
moeurs V de manière à en inspirer toute l’horreur ;
progrès furent si!rapides
et' leurs
que lès empereurs Théodose et Valen-
tinien spécifièrent dansPune lo i, les seules causes pour lesquelles
Je divorce pourrait être! autorisé ; et comme ces causes ne;furent
pas assez restreintes, l’usage du divorce ‘ deVint encore assez fré
quent pour perpétuer le scandalé deslmocurs , le danger de l’exem
ple , la division des familles et la perte dés enfans.
H u itiè m e m e n t, il ne faut point perdre de vu e, que dans tou
tes les nations où le divorce est permis su r'‘ plus ou moins de
motifs ,
la loi qui l’autorise est d e ; pure
tolérance.
De tôut
teti'ipSj le torrent des moeurs entraîna les lo is; èlles sont obli
gées de suivre l’homme de loin ,’ de se
prêter , de céder uil
peu à ses écarts, m ais toujours' dans l’intention , non pas d^àutoriser le m a l, mais seulement d’en empêcher un plus grand".
C ’est la reniarqué de B u xto rf ;’Jdans son traité de spomaÙbus
divorliis , où il prouve1,que la foi sut1 le divorce est une to lé
rance ,Ume'éonnivence politique, et nullement un prétexte ou une
autorisation directe. C rest ainsi que Moïse , voyant que le désir de3
secondes :noces , l’attrait d’une "fem m e, bu plus* riche , ou plus
'jeunoîy’’ ou- plus b elle,
port'àii ' les ' Juifs ^'au' meurtre ^de* leurs
premières femmes , ou à nno°vïo tfcbordëé”, aima mieux 'm o n
trer de l’indulgence pour ia'rupture du m ariage, que de per
p é tu e rie z règne 'des. haines è t’ 'clcs
homibijcs. Notre' lo i'd u
•divorce tfet de même ùne condescendance du législateur
lçjr\po-
rel , à un'übus que! notre position 'semble avoir' rencfy/ néces•fairç, C q n’est qu’à regret que le/'Gouvernem ent ' l’a ' proposée j
�'Ç i )
ïàv le 1 conseiller ‘d’Etat^, ° ' T r c i l b a r c l d i t : « Nous ne • connais-
5) soiis pas d’acle plus soÎémhel que
celui du
mariage.
C ’est
5) par le mariage que les :lumilles se forment et que la société
-tr n
..
•
,
¡ r ‘-
,
•* :, ' •
,
» se perpetue... De tous les contrats, il n en est pas un seul
J
'
' i ** *
'■ l l <
'
î*
*’
» dans lequel on doive plus desjrër l ’intention et le vœu ' de la
. j ‘l f ;
J 41
» perpétuité de la
- ,
'r .
part de ceux qui contractent'
[
Ensuite,
il fait voir qu e, dans notre position , on ne peut se flatter de
^
j
;î * *'
*'
*'
trouver le moyen ’ d^assortir si parfaitement les unions conju1
‘ n•
1
'
’ l 'I' l .
•'rï.
gales , d inspirer si fortement aux époux le sentiment et 1 amour
(II ' ' ■*■■<.
. -I
de leurs devoirs respectifs , qu’il ne s’ en trouve quelques-uns
')7*
•
•;i! '
'
■,:»
capables d’excès propres à déterminer leur séparation. L a loi
,0
}
***' *' ' :) H
'' ‘
n’autorise donc l’emploi du remède du divorcé que par la néces§ité de notre état présent et de
mœurs.
Le
la corruption
législateu r n e1 dissim ule
p o in t
sa
actuelle 'd e s
douleur
d’être
ré d u it à cette extrémité , puisqu’il fait des vœux poufique quel-
qu’institulion ou quelque loi salutaire épure l ’espèce hum aine >
au point de pouvoir se passer d’ un pareil remède. 1
‘‘
Toutes ces réflexions doivent donc exciter dans l’ame
<c
des
juges une détermination également salutaire de n^accueillir une
• *' :i" ■
*
,
demande en divorce qu’autant que les circonstances en démon
treraient l’indispensable nécessité.
C eci, p o sé , .examinons les motifs que
la Dame
Cliappel a
donnés pour établir sa dem ande, et par une saine critique ,
voyons si les faits dont elle se p la in t, sont de nature a exiger
.4 r -
l ’usage du remède auquel elle a eu recours.
Sa requête
contient dix-sept
chefs d’accusation contre son
m a r i, et depuis à l’audience à huis clos, elle en a ajouté U°*s
autres , consignés au procès-verbal ; ce qui fait
en ton* vingt.
Sans doute que la Dame Cliappel a pensé que la quantité de»
�V.}
( I»)
imputations était propre à éblouir le public , et à le
rendre
favorable à sa cause ; mais elle s’est trompée, car devant les magistrats
et aux yeux
de tout homme sensé, c’est la qualité seule
des
faits qui peut faire sensation. Vainement a-t-elle cherché à peindra
son mari sous les couleurs les plus odieuses ; il y-a long-tems que
la justice est en garde contre le prestige d’ une fausse peinture« Il n’y a point de fem m e, dit le célèbre C o cliin , tome V , p» 47 y qui, formant une demande en séparation r ne fasse un portrait
3) affreux du caractère et des procédés de son mari 5 il n’y en a
i) point qui n ’articule des faits graves et souvent circonstanciés ,,
)> et qui ne demande permission d ’en faire preuve. Quand le mari
)) s’oppose à la preuve , on ne manque jamais de s’écrier que c’est
» un éclaircissement innocent ; que les faits sont vrais ou qu’ils
)) sont faux j que s^ils sont faux t les enquêtes doivent faire le
î) triomphe {lu mari et couvrir la femme de confusion j que s’il»
3)
sont vrais , il serait so u vera in em en t in ju ste de refuser à la femme
ï) la liberté d’en faire preuve et d’en tirer les avantages qui doij) vent affermir son repos et la mettre à l'abri des persécutions.
» auxquelles elle est exposée. Mais ces vains prétextes n’en impo» sent pas à la justice. E lle sent l’inconvénient d'admettre trop
v légèrement de pareilles preuves r soit par le danger de cette
» preuve en elle-mêm e , soit parce qu’elle perpétue une division
3) funeste et scandaleuse par les longueurs qu’elle entraîne , soit
» enfin , parce qu’il se trouve souvent des fins de non recevoir ,
)> qui ne permettent plus d’écouter les plaintes affectées d’une
5) femme qui n’aspire qu’à l ’indépendance.
)) C ’est ainsi que la Dame R apally , qui articulait les faits les
« plus graves et les plus circonstanciés , qui se plaignait queson
mari l’avait presque égorgée et ne lui ayait laissé qu’un reste
�c u)
» de vie pour s’échapper de. sa maison et pour implorer le secours
)) de la justice , fut cependant déboutée de sa demande à fin de
)> permission de faire preuve d’un événement si cruel : c’est ainsi
» que la Dame de M archeinville, la Dame d’Ervillé et plusieurs
» autres ont été aussi déboutées de pareilles demandes , la cour
)> n’ayant pas témoigné moins de réserve pour admettre des preu» ves de cette qualité , que pour prononcer définitivement des
« séparations qui offensent toujours l’honnêteté publique et qui
» présentent à la société les exemples les plus dangereux et les
» plus funestes«.
C ’est particulièrement dans cette cause que le tribunal recon
naîtra la nécessité de rejetter une demande en divorce, qui n’est
appuyée que sur des faits , dont les uns sont rejettés par la loi
ineme comme insignifians pour autoriser une pareille action, et
dont les autres sont de p ure im agin ation et impossibles à prouver,
de l’aveu même de la Dame Chappel. Une analyse succincte de
tous ces faits suffira pour convaincre le tribunal de la vérité de
notre proposition.
i.° L a D am e Çhappel déclare q u 'il y
-
a incom patibilité d 'h u
meur et de caractère entre elle et son m ari. Elle s’imagine
viyre encore sous le règno de la loi du 20 septembre 17 9 a , qui
donnait aux époux un prétexte commode pour divorcer, puisqu'a
défaut de raisons , il suffisait, pour satisfaire le caprice , d’alléguer
cette prétendue incompatibilité. Mais les nombreuses et intéres
santes victimes dJun si léger prétexte , ont mis le Gouvernement
dans le cas de le proscrire de la législation, et ce n’est plus
aujourd’hui un moyen de divorce.
a.° E lle im pute à son m ari de fréq u e n te r les fe m m es dé
bauchées et les lieux de p ro stitu tio n , et même elle prétend
�7O
/O
;
( M )
q u 'il a eu 'recours aux remèdes que nécessitaient les suitet
de ' ces mauvaises
persuadera'-t-elle
fréquentations. A qui la
que son
et d e tJim cu rs, pour lui
mari
Dame Cliappel
fût assez dépravé
de ‘ goûts
préférer des m isérables, dont la vue
seule inspire le dégoût ? Avilir son mari p a r ’ de pareils repro
ches , c’est encore plus
s’avilir soi-même.
Cette
outrageante
imputation est d ’ailleurs tout-à-fait gratuite , car outre qu’elle
est sans fondement et même dénuée
de vraisemblance , cJest
qu’encore la loi n ’admet point de pareils faits pour appuyer
une demande en divorce. Diaprés l’art. C C X X IV de la loi du 00
ventôse an X I , « L e mari ne peut êlre accusé d’adultère que
» dans le" cas' où il aura tenu sa concubine
dans la maison
î) commune ■
’»i O r , i c i ,'i l n ’est'pas question de concubine ; mais
p a r'ü n excès de1! mechàncèVél!, on veut décrier la conduite du
C ‘ n.
Cliappel et
le peindre absolument
comme u n - libertiri.
He ureusement quo les personnes lionnêles des deux sexes, que
le C .en Cliappel v o i t ‘ habituellement , lui
rendent justice.
Sa
santé n ’a jamais éLé compromise , et com m e1son épouse riese
plaint ’'pas que la sienne ait été en danger , il en résulte que
ce ’moyen est tout-à-fait illusoire.
J 3
L a D am e Cliappel reproche ' à son mari de courir les
cafés et d ’y perdre au jeu tout le produit de
son commerce.
Si le fait était vrai , cela pourrait donner lieu à une sépara
tion de biens et non pas au divorce. Mais le C.cn Cliappel n est
pas un joueur , il n ’en a jamais eu ni les goûts ni les facultés.
Au reste , il ne pouvait rien perdre aux dépens de sa femme ;
car depuis près de quatre ans qu’il est marié , il r/a
pu par-
-venir à déterminer son beau-père à lui donner le plus léger
à-com pto sur la modique pension annuelle de 800 i1~, qu’il avait
ponslituée à
fille. L e C.en Cliappel a d o n c, lui se u l, support«
�(OV)}
les
charges du
mariage.
Les»’joueurs
sont presque
toujours
noyés de dettes; au contraire , le C.«i Chappel a payé celles
qu’il avait contractées pour ses frais de noces , et si le Ç.en
Monestier
voulait
s’acquitter envers lui , son
commerce
et
l’état de ses affaires seraient dans le meilleur ordre. E st-il donc
défendu à un m a ri, sous peine du d ivo rce, d'aller au café pour
s’y délasser de ses occupations ? Ne voyons-nous pas quantité
d’honnêtes gens se permettre cette recréation ? Peut-on leur en
faire un crime ? non , sans doute.
Ainsi ce reproche prouve
tout-à-la- fois le désir et l’embarras de le trouver coupable.
4 .° Z.« D am e Chappel se p la in t de ce
refusait
aux
dépenses nécessaires
de
que son mari
son
pitoyable m otif pour un divorce ! L a Dame
ménage.
se
Quel
Chappel a é t é ,
fcôrnme son mari , logée et nourrie dans la m aison,
et à la
table du- C.cn C h ap p el, père , qui a eu pour elle tous les égards
et toutes les attentions possibles ¿''elle ne pouvait donc avôiu
aucune difficulté, ni aucun souci touchant les dépenses du m é
nage. Serait-ce dortc ‘au sujet des" dépenses de sa toilette et do
ses plaisirs , qu’elle se plaint de
quelques 'lésines , de la part
de son m ari? Mais chacun là-dessus doit calculer sa i dépense
sur ses facultés , 'e t 'i l semble que c’était^bien honnête,
dans la
position du C .eu Chappel ,
un ütou
décent,
o-.
taisies
de tenir sa ^femme sur
sans être encore obligé de1*subvenir à*'tontès ses fan—
Cependant il' nrest personné q u i,- a v e c itn : commercé
:!
m édiocre, eût fait plus de sacrifices pour satisfaite les :goûts de
tj
1
son épouse. La
Damo
Chappel avait une 'dormis'tiquo'i exclusif
veinent attachée à son service1;' ello 'était tfès'-bii1n ’ 'hiise", allait
souvent
au t>al et au 'ip ectacle : ‘ û h 'ïid i'à it
pas Irop'co
fallait faire5 do plus "p our' la ' co'nteuter J niais ce q u ’il y a de
�certain , c’est quo toute autre femme eût été fort’ contente. Au“
reste , elle ne disconviendra pas, que les C ’eus C happel, père et
lils , lui ont p ro p o sé plusieurs fois de lui abandonner pour son
e n tre tie n e t ses plaisirs la pension
de 8 0 0 * , quo ses père
et
mère lui ont constituée dans son contrat de mariage , espérant
que cette destination déterminerait le C.cn Monestier à payer
c e lte
pension ; mais la Dame
Chappel a toujours refusé cette
offre généreuse.
5 .° E lle se plaint d ’ injures atroces et d ’outrages très-graves ,
qu'elle prétend a voir
reçus journellem ent de son m a ri, au
p oint q tie lle a passé sa
vie dans les chagrins et les pleurs ,
et n'a éprouvé ni adoucissem ent, ni relâche dans son m alheur.
Ce sont lesi termes de sa requête. Il est facile de reconnaître
ici
l'exaltation des idées d’une femme qui cherche à apitoyer
le public sur son sort et, à exciter en sa faveur quelques mouvemens do
s e n s ib ilité .
C ’est; un pur conte , débité pour le besoin
de la cause ; aucune fçmme n ’a passé une vie plus agréable que
la Dame Chappel. Quels instans réservait-elle donc pour pleurer ,
elle qui s.0 levait à onze heures, faisait ses quatre repas, em
ployait à sa tpilette une bonne partie do la journée et passait
tes soirée« dans les société?, les spectacles , les bals ou les promqnadqs ? Ca n’est point là l’existence d’une femme continuel
lement gémissante sur ses malheurs. D ’une p a rt, la notoriété pu
blique dément S0,n assçrtjon >et de l’autre , si
nous la réduisons
à s’expliquer sur tes injures et les outrages dont elle se plaint ,
elle naus retrace* des scènes de théâtre, qu’elle applique à son
•î
jnari avec trè ^ p eu de discernement.
6.°PeiV pifÇQnstajioie^ljeB injures et les outrages dont elle se plaint,
elle Façopte «Vabord quff $o.n piari revenait du je u aveç une
�(I7)
très-m auvaise humeur,, lo^smême que ses pertes étaient modi
ques ; que. pendant la, nuit il ne lavait , prenait un poignard
et. dans sa fcènêate g estic u la it,,, menaçait de. tuer sa fem m e ,
sa fille
et lui-même ; que lés choses \en étaient <>enu#s d
ce
p oint qu’elle )Voyait arriver chaque
nuit en frém issa n t'/
qu'elle f u t obligée de fa ir e coucher,un e domestique dans $a
chambre , pour le ¡retenir dans ses insla/is de délire. Voilà: donc
1g C-en Cliappcl transformé en un n o u veau 'B éw erley, qui^ d an i
poix désespoir veut poignarder
tout ce qu’il a ide rplus clïer^et
se débarrasser ensuite luiim ême d’une . vie qui lui est im por
tune. De pareils tableaux sont
deéti.nés à, produire
au théâtre
de grandes sensations!, mais dans le temple de la ju stice, c’est
en vain que l’on cherche à ém ouvoir , si l’on ne parvient à per
suader. O r ici , nulle vraisemblance , nulle justesse
situations ; par conséquent, faux portrait.
il’uno fem m e
s’échauflb , elle sait.donner
Quand
dans les
l’imagination
aux choses' les plus
indifférentes , un caractère de ¡gravité, L e C.cn G lia p p el , qui a
servi , possède différentes . espèces d ’armes , parmi lesquelles est
un de ces poignards antiques, qui ressemble ¡beaucoup àiün mau
vais couteau de -cuisine. Son épouéesip-à jamais témoigné
quiétude de cette arm é, qui reposait: tranquillement
d ’in
dajls 'une
■commode de son appartementr;' cependant») depuis plus d’un an
q u e lle a- quitté :son mari 1, voua îvoyez- comme 'elle a , su tirer
partie do la scenai.du poignard de Béwerley^ il. n ’y manque’qu’una
chose j!ic’es.t qu’elle convient de l’impossibilité da là
preuve: -,
puisque la 8cèné(s}est’ pdssée-'darife èomappartemont pendant la
nuit. Ce sont là de epsî images pliosphariques ■
qui ont beaucoup
d’éclat et peu de consistance ; la .'justice* nb. s’fe'st- jamais laissa
tromper par de pareilles fictions , quii.peûveüt auBsi p ren d re leuç
source dans quelque mauvais rêve.
2
�SX
( *8 y
7.° La Dame C h appel, poursuivant son ré cit, ajoute qiüurt
jo u r sa domestique fa is a n t le Ut de son m a r i , trouva un grand
couteau o u v e r t, destiné sans doute à remplacer le p o ig n a r d ,
ce qui ne f ît qu'ajouter à ses fra y e u rs. Quelle fertilité dans
l ’invention!...
L e C .cn Chappel porte habituellement un couteau
de peu de valeur et d ’environ six pouces de longueur ; peutêtre l’aura-t- il laissé dans l’appartem ent, sur la commode , ou sur
la cheminée , ou même sur son lit ( car on ne dit pas dans la
requête
o ù ,la .'domestique>l’a trouvé ) ; eh bien ! en voilà assez
pour jetter la Dame Chappel dans une frayeur mortelle., pour
autoriser son d ivorce, pour lui faire prendre son mari en h o r
re u r.
La justice ne s’affecte pas au gré .des parties pour des.
choses sî indifférentes.
■i8.° P endant qu’elle ' ¿Lait enceinle , scni m a r i la j è l t a d baa
du lit et Vobligea de p a sse r la nuit toute nue sur le carreau r
quoiqu'il f i t un très-grand f r o i d , qui lui glaça le sang . Encora
une; seine eecrette d’horreur^ ilont la lecture des mauvais romans
pouvait seulé fournir lJidée à la Dame Chappel.' E st-il croyable
qu’ un fait de cette importance ait été- passé sôus silence dans/sa;
req u ête, et qu’elle en aiip arlé pour la première fois à l’audience,
de huis clos du 22 thermidorodernier ? Rien n’ est plus facile que
d’inventer. Mois à quôi-hoti.yahandonner aux écarts de son imar
gination , quand on en est rtîduit à dife que la scène sîcst.passé
dans le mystère ? L a justice méprise les discours romanesques^.
e t le C .en Chappel ne! peut ¡être obligé de combattre des chimères.
Il suffit de remarquer que la fausseté de l’imputation se démon
tre par le 'fait même : car si Cliappel avait pu : exercer envers sn
femme un pareil'acte de barbarie , ■
sur-tout dans le temps de sagrossesse> ellé' aurait dû en.' périr ,o u to u ta u moins éprouver les
�0 9 >
pins graves accideng, et-cependant elle ne s’en est jamais plaihtç,
•cllevn’èn a'pas dit un.m ot d an s sa requête, quoique remplie de
détails mihù'lrcux et inéigriifians » et sa mémoire ne lui a'rappelé
ce cruel événement qu’à la tlerniète • audience. C^est en vérité se
jouer de la justice , que d’oser débitei4 de pareils contes.
.o4>
9.^ A u mois de Jlo rèa l an g , au sujet du paiem ent et une fa ç o n
" l'y ■'
1
■
.! :o: .■
’ •.:!) .
' ■ i’/'r ;
de robe p o u r Sjaj)elile} le Cen. Çhappel entra enfu r e u r et porta a son
épouse un violent coup de poing dans Vestom ac , qui fa illit la renverser. Une personne présente voulut se perm ettre quelques obser
vations, mais le Çc». Çhappel la m it à la porte. D ’ une circonstance
■
'
¡tt
t Oiülî. ..
/.
h,
très-simple, la Dame Cliappel en Tait un su je t.d e plainte
, (
tres-
sérieux. Elle veut parler d’un petit/débat qu i'eu t lieu entre les
deux ép o u x, au sujet, non du paiement d’ une façon de robe pour
sa p e tite , m ais de la c le f (le la b an q u e , qiie le' C .cn Cliappel
11e voulait plus confier à sa femme
tout l ’argent que. produisait la vente
parce qu elle 's’ emparait de
des drogues. Oubliant sa
iaiblesse , la Dame Cliappel. voulut arracher de vive forcé là clôf
"\ I 1
•í1i Í1J. •*. .]
-' ‘f
rl ' f'‘'(t ’
d elà banque, que le C.cn Çhappel tenait dans ses m ains, vè t
dans sa vivacité., elle se frappa le poignet contre la banque. L a
Demoiselle Brous.se , présente à ce d éb at, prit chaudement les
intérêts de son sexe et de la Dame C lia p p e l, son intime am ie,
en sorte que s’etant permis quelques réflexions impertinentes , le
C.cn Cliappel se crut autorisé
affaires ; cette
à la prier de se mêler de ses
Demoiselle prit cela pour un congé et so rtit
aussi-tôt. Voilà le fait dans son exaclitude. D e-pareilles brouilleries ne sont point des causes déterminantes de divorce.
• : J »•-'f ‘* •
>
io .°
Un jo u r ,
la Dame
en présence
du C.en Monestier ,
Chappçl , son mccri t l ’ outragea
.
oncle
grièvement
�( 20 )
p en d a n t'p lu t de detix heures , et lui répéta plusieurs f o is de
s'en, aller de la m aison , q u ’ i l f a lla it qu’ elle n'eût point
de
cœur pour rester avec lu i, q u 'il lu i en fe r a it tant qu'elle serait
bien obligée de s ’en aller. L e récit de la Dame Chappel est
marqué au coin de l’exagération sur certains fa its , et de la faus
seté sur les autres. L a circonstance qu’elle rappelle ici ne donna
•'l
lieu qn*à des propos de vivacité fort -excusables. C ’était encore
au sujet de la clef de la banque , dont la Dame Chappel abusait
pour prendre l’argent, sans en vouloir donner a son m a ri, qui dit
au C .en Monestier , oncle : « Vous m’avez fait un mauvais cadeau ,
» vous m’avez donné une méchante fem m e, je travaille comme
)> un m alheureux, et je ne puis pas avoir Îe sou, elle prend tout».
Rappelons-nous que la loi du divorce ne tient aucun compte des
paroles
dures
échappées dans la vivacité, et ne donnons pas à
de pareils propos plus d’importance qu’ils n’en méritent.
I i.°
P fiu r
rendre
ses outrages publics ^ le
C en.
Chap—
n el ouvrait la porte de sa boutique , et criait d lue - lêle. L a
...
. j /.
-u
»;:j ,
[
Dame. Chappel vçut absolument faire passer son mari pour
ifî
un fou , ,mais tout le monde sait bien qu’il ne l’a jamais é té ,
Àj
et qu’en .aucun temps , il n ’a excité ni désordre, ni scandale
dans le public. Si ce fait était de rature à mériter une preuve r
ses voisinai seraient les premiers à lui rendre justice, mais ce n ’est
pas le cas.
12.0 L e s représentations de la fa m ille de la D am e Chap
p e l n ’ ont p u produire aucun effet sur Vesprit de son mari.
Quand et comment la famille Monestier a -t-e lle fait des repré
sentations au C™, Chappel ? L e C en. Monestier , p ère, ne lui a
jamais témoigné ni affection , ni déplaisir, si'c e n’est une fois quo
le C 0,\ Chappel s’avisa de lui demander quoiqu’argent pour allèr
�/T
( 2I )
à Paris acheter des objets utiles pour son com m erce, ce qui parut
lui faire de la peine , quoiqu’il se dispensât de lui donner la moin
dre chose. Quant à la Dame M onestier , elle a toujours traité le
C on. Cliappel du haut de sa grandeur ; il se rappelle notamment
qu’à l’occasion .de la petile brouillerie dont nous avons déjà parlé,
et qui eut lieu en présence de la Demoiselle B rousse, sa femme
ayant été se plaindre à sa mère , la Dame M onestier, accompagnée
de la Dame M ign o t , se
donna la peine de venir chez lui pour
lui signifier, avec ce ton hautain et impérieux qui tient à son
caractère, qu’il n ’élait pas fait pour épouser sa fille , et quoique
le O n. Cliappel pouvait fort bien lui répondre de maniéré à rabais
ser son amour p ro p re , il voulut pousser le respect envers sa belle
m è re , jusqu’à garder le silence sur une pareille impertinence :
aussi , la Dame M ign o t, voyant sa so u m issio n , crut que c’était le
cas «le lui représenter avec douceur combien un mari doit être
ilatté d’étre le très-liumble serviteur des volontés de son épouse,
et reconnaître que son premier devoir est de lui accorder une
pleine et entière confiunce, et de lui obéir en toutes choses, parce
c’est le vrai moyen d’avoir la paix dans son ménage.
i 5 .° L a D a m e
Va
diffamée ,
en
Cliappel
disant
se p la in t encore que son m ari
à certaines personnes qui il vau
drait bien la voir enceinte > p o u r Paccuser d ’ adultère ,j q u 'il
était fâ c h é qu'elle ne f i t p as de connaissance p o u r a voir occa
sion de là renvoyer. Ce n’est pas assez de faire passer son mari
pour fou , la Dame Chappel veut encore le peindre comme un
homme in ep te, qui ne sait pas qu’autant il est facile de commettre
l ’adultère , autant il est difficile de le prouver. C ertes, lo C on. Chapr
pel vient une conduite bien opposée aux intentions qu’on lui prête,
et sa seule résistance au divorce met assez l’honneur de sa femme
�h co u vert, pour qu'elle ne craigne pas les discours de la méchan
ceté. Il est vrai que des femmes ont obtenu leur séparation do
corps contre des maris qui les avaient. injustement poursuivies
judiciairement pour cause d’adultère C ’était la peine
de leur
calomnie et la satisfaction due à un outrage véritablement grave ;
mais ceux-là plaidaient pour perdre leur fem m e, et le C cn. Chapp e l, au contraire , plaide pour la conserver.
1 4 '° P our Vobliger de sortir de la maison ,
le C.
Chap-
pel lui écrivit une lettre sans date , oit il term ina p a r lui dire
de pr&ndre son p a rti , de p a rle r d sa fa m ille , parce que p o u r
lu i', son parti est bien p r i s , q u 'il va quitter Clermont. Rien ne
prouve mieux l’illusion de la Dame C lia p p el, que d’avoir osé pro
duire elle-mêm e
une le ttre , qui lui rappelle tous ses torts et
prouve jusqu’où sa conduite envers son m aria été injuste et déso
lante. C ’est dans un excès'de douleur, les larmes aux yeu x , que le
C en. Chappel épanche son c œ u r, et témoigne à sa femme combien il
est malheureux de n ’avoir pu lui inspirer le moindre retour de
tendresse. L a cause de son désespoir n ’était propre qu’à la flat
te r , ou du moins à l’attendrir, si déjà son cœur n ’eût été loin de
lui. L e tribunal, qui a cette lettre sous ses yeux , n ’en peut juger
autrement.
i 5 .°
La
D am e Chappel
fa it proposer
une
prétend que son
séparation volontaire ;
m ari lui
q u ’elle y
a
con
sentit , d condition qu'elle aurait son enfant et q u ’il p a y era it
4 0 ^" p a r mois pour sa nourriture et son entretien ; m ais que
le C.en Chappel ne voulut p a s céder l’enfant. Jamais le C.en
Chappel n 'a fait faire à sa femme une pareille proposition , c’est
au contraire ce qui lui fut astucieusement proposé par un ami
perfide ,
qui
est hauteur de leur discorde , et à qui il répon-,
dit qu’on lui Qterait la vie plutôt que de quitter son enfant.
�( *3
j 6.° E n sortant de la maison ,
la D am e Chappel emmena
sa f i l l e , mais elle avait l’attention de
jo u r s
Venvoyer tous les
voir son père q u i , abusant de sa confiance , la retin t ,
donna des coups de p ie d à la servante qui l a va it amenee et
la m it à la porte ¡en disant qu’il ne voulait p a s que sa mère
eût cet e n fa n t , ni q u e lle la vît. 11 est vrai que la Dame Chapp e l , se retirant chez son pére , emmena sa domestique et sa
fille , avec tous ses effets , ceux de l’enfant et même
plusieurs
effets de son mari. Celui-ci crut drahord que sa femme revien
drait bientôt d’elle-même dans sa maison ; mais voyant qu'elle
ne se pressait pas , il usa de son d roit, en retenant son enfant,
dans l’espoir que la mère serait plus empressée de revenir chez
lui. L a domestique , qui était toute dévouée à sa maîtresse , voulut
remporter cet enfant , elle se perm it d’insulter le C .e«i C happel,
qui lui donna tm co u p
porte.
Depuis ce teins
de p ie d
dans le
cal et la
mit à la:
, la Dame Chappel n ’a montré aucun
attachement pour sa fille, dont le C .en Chappel a eu le plus
grand soin. Dans tout cela , le C.en Chappel a fait
ce
qu’il
avait le droit de faire.
17.° D eux
sur le
mois après sa sortie ,
boulevard
du
étant avec des D am es
sém inaire , la
D am e
Chappel
venir sa f i l l e , que portait la servante j son prem ier
vit
m ouve
ment f u t de la prendre dans ses bras et de la caresser , m ais
son m ari survint qui Varracha b ru sq u em en t, il aurait m utité
les membres délicats de cet e n fa n t, si elle ne le .h ii eût cédih
Voilà positivement l'a1 scène' de( la vraie mère dans le jugement
dè Salomon. L a Dame Chappel ne dit pas’qûe , sous le prétexté
de caresser sa fille , elle sé^ sauva
chez elle et força son mari
de courir après pour la lui reprendre. Il en vint bien « b o u t,.
�(h )
sans violence et sans
faire aucun mal à, l ’enfant ; sa tendresse
pour ccüo petite est assez connuo, pour qu'il ne craigne pas
qu’on lui reproche d’être mauvais père,
18,°
L e a p r a iria l dernier , la D am e
à son m a r i, pour lui proposer
le
Cliappel écrivit
divorce p a r
consente
m ent m utuel ; m ais il ne daigna p a s lire sa lettre et la
reçut
avec mépris ; il veut vivra séparé, m ais ne veut p a s
consentir au divorce. Oui , toute proposition de divorce est in
compatible avec les sentimens duC.cn Chappel et de sa famille ;
mais loin de vouloir vivre sépare , i! n ’a cessé d’inviter son
'
j
épouse à se réunir à lui ; les procès-verbaux des précédentes
séances en font foi et prouvent que c’est elle seule qui veut
l
vivre loin de lui.
ig .°
I l y & P cu de jo u rs que le C.en
Chappel vint
avec
plusieurs je u n e s gens , sous les fen êtres de son épouse, p o u r
l'insulter en l ’appelant mie , mie poupée , il contrefaisait
sa voix pour n'être p<fs reconnu, et s’est sauvé , quand on est
venu p o u r le reconnaître ; c ’est-à-dire, qu’on ne l’a point re
connu , et cependant sa femme l’accuse. Elle a cru devoir ajou
ter ce fait
à ceux insérés
dans sa requête.
Lorsqu’elle en a
parlé à l’audience de liuis clo s, elle a excité la pitié autant que
la surprise $ car, des enfans de six ans ne s’amuseraient pas à
aller sous des fen êtres, pour l’appeler , m ie , mie poupée. O r ,
qui croira que des jeunes gens çe. donneront la peino d’aller avec
son mari , exprès pour dire de pareilles sottises ? Qui supposera
le C.Çn Chappel capable d’aile? troubler le repos de sa femme
depuis sa
demande en divorce jj lui qui a usé envers elle do
toutes sortes d’égards avant qetto demande ? Il faut que la Dame
Chappel ait l’esprit trpubléi flpur alléguer des rêveries de celtç
espèce.
�0i
( *5 )
L e C.CK C happel a mis le comble à ses injures en
fa isa n t notifier un commandement au C.en M onestier , son
beau-pére} p o u r qu’il ait à lui p a y e r les arrérages de la
pension de son épouse ; c a rd a n s ce com m andem ent, il ose dire
que le C.en M onestier , loin d'autoriser sa fille dans une action
de divorce , aurait du la renvoyer chez son m ari ; que Fort
n ’ignore p o in t que celle action a pour objet de fa ir e rendre
à la Dame Chappel son indépendance , afin de lu i fa ir e ensuite
consentir des arrangemens destructifs de l ’institution d ’héri
tière portée dans son contrat de mariage ; qu'une telle conduite
dispense le C.en Chappel de tous les égards q u ’il a eus p o u r
son beau-père ju sq u 'il ce jo u r ; qu 'il est teins qus le C.c,ï
M onestier remplisse ses e ngagemens. Quoi ! c’est une insulte
20*
de forcer par les voies juridiques , un beau-père à satisfaire aux
promesses authentiques qu’il a souscrites en mariant sa fille !
E st-ce donc aussi un crime <le lui rappeler qu’il importe à son
lionneur et au bonheur de sa fille , que la nature et les.m œ urs
ne soient pas outragées par une demande en divorce , toute fon
dée sur la calomnie ou
sur de misérables prétextes ? N ’est*il
pas permis à un mari qui éprouve les plus indignes procédés,
d en révéler les causes secrelles et de dévoiler le
concert
de
iiaudes dont on veut le rendre victim e , ainsi que son épouse
et son enfant ? Un beau-père qui autorise sa iille dans la dé
marche la plus imprudente , qui vient jusques dans le tribunal
approuver sa résistance à toutes les invitations , soit de son
m a ri, soit des magistrats
Certes , le C.<-u C h ap p el,
repousse avec deduin de
son plus mortel ennemi
, peut-il encore exiger quelques égards ?
traité plus indignement qu’un étranger,
la maison de son beau-père , tandis que
, le C .en Louirette , auteur de toutes les
discordes qui existent entre lui et sa femme , y est reçu à cha
que instant du jour , ne peut plus voir dans le C.en Monestier
qu’un homme dont il doit déjouer la . politique. En un m o t, il
a droit de demander ce qui lui est dû , il en a besoin ; sou
btiau-père se refuse injustement à l'acquit de conventions sacrées
qu il lui est facile de remplir j rien n’est donc plus légitime
que de 1 y contraindre par les voies légales.
4
�., w , .
(îty
.
,,
.
M aintenant, qu'il nous soit permis ¿'‘interroger la conscience
&es magistrats et de feur demander s i , d’après les principes reçus
en cette matiere', il ’est possible d’admettre Paetion intentée par
la Dame Chappel. Nous sommes convaincus du contraire", parce
qué‘ toute ta cause doit se réduire à cette unique question : Lii
viè^et l’honneur'de la Dame Chappel sont-ils en p é ril, au point
qu’elle ne puisse,les m ettre à couvert autrement que par un
divorce ? O r , sur cette q u e s l i o n i l n’est personne de bonne
fo i qui ne tienne aussi-tôt pour la négative. Il n’y a ici aucuns
faits de sévices., mais de simples brouilleries passagères , suivies
d'une cohabitation paisible; il n^y a point non plus d’outrages,
ni d’in ju res, portant un g^and caractère de gravité, mais seulemfent des'propos de vivacité provoqués par la Dame Chappel
elle-même". Aucune juste cause n’a déterminé sa so‘rtie de la mai
son de son mari. E n pareille circonstance, serait-ce donc le cas
¿ ’admettre unie preuve des faits par elle allégués ? non , parce que
cétte preuve né peut avoir lieu sur les faits importans q u i, de
son propre a v e u , se seraient passés dans le mystère de la n u itr
èl qui n ’o n t été imaginés que pour le b esoin de la cause, et que
celte preuve serait illusoire sur les autres faits insignifiuns pour
un divorce. E n se réservant , dans sa req u ête, d’attaquer son
ïriàriage de nullité, n ’est-ce pas avouer qu’elle ne peut réussir dans sa
cTetfiande eii divôrce ? C’est donc le cas de se rappeler la doctrine
de l'illustre Cocliin déjà c ité , et d’élo ù ifer, dés le princip e, une*
affaire qui 'h ’eut jamais du paraître. Admettre la p re u v e , ce
serait* prolonger inutilement des débat4 scandaleux, entretenir ¡a
h a in e 'èt'les Vaines espérances d’uné épouse égarée ; ce serait forèer le C '“.' Chappel 'de rompre lé silence touchant les témoins
{produits* càritre lui par son épouse , ‘ agraver le inal sans o b je t,
jjerpêtiiev leè diseentiôns eritre deux familles destinées à vivre
ÜUns la paix d’une alliance'étem elle. ’
‘ 1, "
D ’aillfeurS , quel danger lie présenterait pas une preuve .admi
nistrée^ par des témoins intéressés, tels que là plupart de ceux
produits par la Dame C h a p p e l, qui a osé indiquer, pour justifier
sdiT accusation, cem ênie L o u irette, ‘auteur de ses divisions avec
son époux , ennemi mortel du C*“'. Ü ftappèl, puisqu'ils ont eu les
�(*7 Í
•
rixes les plus viólenles, au point que Louirette lui a iiré ,t!e u x
coups de pistolet ,xkns un moment où le C tu. Chappel était sans
ormes ; la Dame M ignot, qui est l’ame et le conseil de la famiile
M onestier, qui a acquis un empire absolu sur l’esprit de Ja Dame
C h ap p el, e t' la dirige •par ses leçons autant que par ses exem
ples ; la fille Chavagnat, qui jouit de la plus mauvaise réputation ,
qui passe publiquement pour recevoir des cadeaux et des liabillemens de la Dame C h ap p el, afin de lui être favorable, q u i, étant à
son service } lui était si totalement dévouée qu’elle méprisait
ouvertement les ordres de son maître ; la Demoiselle Brousse f
confidente et amie intime de la Dame C lia p p el, et dont les mau
vais conseils n ’ont pas peu contribué à l'éloigner de ses devoirs ;
le C e'\ M onestier, p è re , q u i, pour l’exécution de ses p ro je ts ,
maintient sa fille dans une résolution qu’elle n’eût osé soutenir
elle -m êm e ; la Dame Monestier , qui a toujours traité son gen
dre avec hauteur et dédain , qui ne c o m p r e n d pas qu^un mari ne
soit pas l’esclave de sa femme , et veut que tout genou fléchisse
devant sa fille comme devant e lle , etc. , etc.? Assurém ent, outre
Finutilité de la p reu ve, son danger résulte ici de la disposition
particulière des esprits des témoins
produits par la Dame Chap
pel ; et lorsque la justice cherche la v é rité , elle ne peut s’expo-'
ser elle-mêm e à s’environner des ténèbres du mensonge. T out concourt donc à rejetter , to ut-à-la-fois , et la preuve et la demande
en divorce.
L e Ccn- Chappel a poussé jusqu’ici les égards pour son é p o u s e ,
jusqu’au point de rester seulement sur la d éfen sive; un autre à
sa place , pourrait la faire repentir de son agression, en lui rap
pelant ses torts avec aigreur ,, .mais l’espoir de la r a m e n e r par
^oüJigijt-iÊncore^et Jg ¿i^ jo sç naturellement à l'indulg^Ticp et
j.aijl oncles ^flejnses d^nt elîé^ Ju rîait sentir l’a
mertume. Cependant il ne peut dissimuler au*}nb 1inal que plu
sieurs“ causer ont aîtéré là* prtiy d<r san ménrrge; r*-fce-cam»rt*re
capricieux de son épouse; 2.0 Son obstination à recevoir ,.J?ia|gré
ses défenses, le C.en L o u ire tte , long - lemps encore après qu’il
eût rompu toute liaison avûc lu i , et qu’il eût re co n n u la perfidie
�( »8 )
de ses conseils et de sa prétendue am itié; 3 .° L es tons dédaigneux:
qu’ elle prenait enve rs le C.en C h ap p el, qu’elle traitait , pour la
moindre contrariété , de b u to r, g o u ja t , m anant , et autres ter
mes indécens , dont une femme honnête ne doit jamais se se rv ir,
sur-tout â l ' égard de son mari ; 4 .“ L ’esprit de dissipation de son
é p o u se , son goût pour une dépense nullement proportionnée à ses
facultés. Voilà , en peu de mots , les causes des petites querelles
qui ont eu lieu entre les deux époux , et quoique les torts soient
évidemment du coté de la Dame Chappel , un mouvement de
repentir de sa part peut encore les faire oublier. Il est si peu
d'unions dont quelques nuages n ’altèrent la douceur et la p u re té ,
que les époux sont bien obligés d’apprendre à supporter leurs
mutuels défauts ; car s i , pour la moindre brouillerie , l ’on avait
recours au divorce, le mariage rie serait plus qu’ un concubinage
et une source perpétuelle de désordres.
Term inons par une seule réflexion : la vie et l’honneur de la
Dame Chappel ne sont et n ’ont jamais été compromis ; la posi
tion des deux époux n ’est point désespérée ; il n’y a donc pas
lieu d ’e m p lo y e r à le u r ég a rd le r e m è d e terrible du divorce. A u
c o n t r a ir e , il est de leur devoir et la justice est intéressée à les
ré u n ir, afin de rép arer , par l’exemple d’une vie douce et paisi
b le , l ’outrage que la Dame Chappel a déjà fait à l ’honnêteté
publique, par le scandale de sa demande.
C H A P P E L.
Le C.en B O Y E R , Rapporteur.
C. L .
R O U S S E A U ,
Jurisconsulte.
À Clerm on t, chez, V E Y S S E T , Imprimeur de la Préfecture
du Puy-de-Dôme.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chappel, Marie-Julien. 1803?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boyer
Rousseau
Bonnefoi, Avoué
Subject
The topic of the resource
divorces
nullité
jugement moral du divorce
appréciation de la notion de mauvais traitements
séparation de corps
témoins
premier divorce clermontois depuis la promulgation du code civil
violences sur autrui
maltraitance
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Marie-Julien Chappel, officier de santé pharmacien, habitant à Clermont-Ferrand, défendeur ; Contre dame Marguerite Monestier, son épouse, se disant autorisée par justice, demeurant en la même ville, demanderesse en divorce.
Annotations manuscrites : voir le jugement qui admet la preuve des faits, et l'arrêt infirmatif au journal des arrêts de Riom, an 12, p. 88.
Table Godemel : divorce : Considérations générales sur le divorce. – caractères des sévices propres à le justifier.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
Circa 1804
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0903
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53064/BCU_Factums_G0903.jpg
appréciation de la notion de mauvais traitements
divorces
jugement moral du divorce
maltraitance
nullité
premier divorce clermontois depuis la promulgation du Code civil
séparation de corps
témoins
violences sur autrui
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53123/BCU_Factums_G1025.pdf
ce779e6b2d97f0e33a0eceed0048e187
PDF Text
Text
MEMOIRE
POUR
Léonard
R I X A l N , propriétaire, habitant de la
ville de Clermont-Ferrand, appelant;
CONTRE
A n t o i n e R I X A I N , propriétaire,
habitant de La
ville de Mauriac 9 intimé;
E T
C O N T R E
D E L M A S propriétaire, habitant de
la ville de Mauriac, aussi intimé.
A n to in e
L es juges, dont est appel, paroissent avoir méconnu,
dans cette cause, les principes de droit les plus familiers,
les plus incontestables.
A
�F A I T S .
>
D u mariage de Jacques Rixain et T h érèse-A n d ré de
L o u v e r t, père et mère com m uns, sont issus cinq enfans,
A n to in e , Germain-Gaspard, Thérèse, M arie, et Léonard.
A n t o in e , l’aîné, a été marié à la maison.
P a r son contrat de mariage, du 6 juin 1764, les père
et mère l ’instituèrent leur héritier général et universel,
sous la réserve d’une somme de 28000 francs pour former
la légitime des autres quatre enfans; savoir, 24000 fr.
de la part du père, et 4000 francs de la part de la mère.
Thérèse entra en religion : les père et mère lui consti
tuèrent, pour sa dot l'eligieuse, une somme de 2Ôoo f r . ,
dont 2400 francs du chef du p è re , et 100 francs du chef
de la mère. Elle est décédée du vivant des père et mère.
M a rie a contracté mariage le 10. janvier 1 7 7 4 , avec
le sieur Delmas : de ce mariage est issu A n to in e Delmas
qui figure dans la contestation comme représentant sa
mère décédée en 1780/'
,
r
G erm ain -G a sp a rd se dévoua à l’état ecclésiastique.
L e 1 5 février 1776, le père voulant, est-il dit, régler et
fixer la légitime paternelle dudit Germain son fils, lui
donna par donation entre-vifs et irrévocable,
U n four bannal ( 1 ) avec une cham bre, boutique et
( 1 ) 11 ne faut pas induire de ce mot bannal, qu’il y eût un droit
de bannalité attaché. On l ’appeloit ban n al, parce q u ’il ne sorvoit
pas uniquement pour l ’usage de la m aison ; qu’il servoit pour le
p ublic, pour tous ceux qui volontairement y venoient faire cuire,
m oyen nan t une petite rétribution.
�s û
m
grenier y attenant, situés dans la ville de M auriac ;
Une terre et petit pré attenant, situés au terroir de
la Bizette ;
A u tr e terre située au terroir Delfraissi.
Il se réserva, durant sa vie et celle de son épouse, l’ usu
fruit des objets donnés.
Cette donation n’a point été insinuée»!
L e i 5 juillet 1 7 7 7 , le père a fixé également la légitime
de Léonard R ix a in ; il lui a cédé et délaissé, du consen
tement de l’aîné présent à l’acte, pour tout droit de légi
time paternelle, une somme de 9000 francs,à prendre
sur un contrat de i s q o o francs, dû-par le sieur Dorcet,
et les intérêts qui pourroient être dûs dudit contrat ,
lesquels intérêts formoieut un objet d’environ 1000 francs.
A u moyen de ce transport, Léonard Rixain a été satis
fait de ses droits paternels.
*
• L e 11 janvier 177g, L éon ard R ixain a contracté mariage
avec la demoiselle Raimond. 11 est inutile de rappeler
les différentes clauses du contrat de mariage ; on ne rappel
lera que celle relative à la contestation.
« E n même faveur du m ariage, e s t-il d it , R ix a in ,
« p r ê t r e , donne de son chef au futur époux son f r è r e ,
« à titre de donation entre-vifs et irrévocable, la moitié
« des biens fonds qui ont été donnés audit donateur, au
« même titre de donation entre-vifs, par le sieur Rixain
« père.
Suit le détail des héritages.
« Sans néanmoins, est-il ajouté , aucune garantie que
« des faits et promesses dudit R ixain , p r ê tr e , donateur,
« et avec subrogation au profit du f u t u r ép o u x , à la
A 2
�< h
(4 )
« m oitié de tous les droits de légitime et autres dudit
« R i x a i n , prêtre , du c h e f paternel.
« L u i donne en outre la moitié des biens qui lui échoi« ront à titre de légitime ou institution , dans la suc« cession de la mère.
« Lesdites donations ainsi faites à la charge de l’usu« fruit et de la jouissance, envers lesdits père et m ère,
« et au dernier vivant. »
Cette donation a été insinuée au registre de fo r m e ,
le 27 avril suivant.
L a mère est décédée en 1 7 8 8 , et le père en 1 7 8 9 , sans
avoir fait d’autres dispositions que celles ci-dessus.
L e père a laissé des propriétés d’une valeur considé
rable. L a fortune de la mère étoit mobilière : elle consistoit uniquement dans la somme de 4656 francs qui lui
avoit été constituée par son contrat de mariage.
R ix a in , prêtre , est décédé en 1 7 9 1 , sans avoir pareil
lement fait de dispositions. Sa succession a été à partager
par tiers entre ses deux frères, et D clm as, son neveu, fils
de M arie , sa sœ u r, prédécédée.
Noua disons par tiers. L a donation faite par R ix a in ,
p rê tre , à L é o n a rd , quoiqu’ il n’ait pas été dit qu’elle
étoit faite par p r é c ip u t, n’étoit pas un obstacle ce que
celui-ci vînt à la succession. O n sait qu’en pays de droit
é c rit, et sous l’empire des anciennes lois, les donations
n’étoient sujettes à rapport qu’en ligne directe ; qu’on
pouvoit en collatérale cumuler la qualité d’héritier et de
donataire.
* '
' En cet état, quels étoient les droits du sieur R ix a in ,
autres que ses droits directs paternels ?
�( 5 )
"Il avoit à prétendre,
D a n s la succession deda m è re, consistant en la somme
de
4656
fr. par elle apportée en d o t ,
i°. U n douzième de son ch ef, montant'de sa légitime
dé rigueur;
20. Gomme donataire.de la moitié des droits maternels
de : R i x a in , p rê tre , la moitié d’un p a r e il. douzième ;
3°. Gomme héritier du ; même R i x a in , prêtre , pour
un tiers, le tiers dans l’autre moitié d’un pareil douzième :
D a n s les biens du p è r e , du chef dudit R i x a in , p r ê tr e ,
aux mêmes q ualités,
L a moitié des fonds donnés".partie père audit R ix a in ,
prêtre , et dont celu i-ci'a v o it disposé<en faveur ;de son
frère par son contrat de m ariage, et lin tiers dans l’autre
moitié.
E t en cas de difficulté, la moitié de la légitime de
rigueur dudit R i x a i n , p r ê t r e , à. laquelle il avoit été
subrogé , et un tiers dans l ’autre moitié.
; . v,
P a r exploit d u 23 ventôse an 12 , il a formé demande
de ces divers droits.
Il a-fait citer au tribunal d’arrondissement de M a u r ia c ,
après avoir épuisé la voie de la conciliation
a în é , -détenteur de tous les biens
R ixaiu
et An toin e D elm as,
so n n e v e u .
Il a conclu contre R ixain aîné , à ce qu’il fût con
damné à lui payer le douzième qu’il ainendoit de son
chef dans la som m e'd e 4 656 fr. montant de la dot de
la mère , et du chef de R ix a in , prêtre , la m o itié , et un
tiers dans l’autre moitié de-pareil douzième , avec intérêts
depuis le décès du père \
�( 6 )
A cc qu’il fût condamné à venir à division et par
tage des biens donnés par le père à Rixain , p r ê tre , par
l’acte de donation du 16 février 1 7 7 5 , pour lui en être
délaissé la m oitié, et un tiers dans l’autre moitié:
E t où les juges y feroient quelque difficulté y il fût con
damné à venir à division et partage de tous les biens
meubles et immeubles dépendans de la succession du père
commun , pour en être distrait un douzième formant la
légitime de droit de R i x a in , prêtre , et ledit douzième
distrait, être divisé pour lui en être délaissé la moitié et
le tiers dans la moitié ;
• A v e c restitution des jouissances et des dégradations des
objets' qui lui. seroient attribués depuis le décès du père.
• K t contre A ntoine D clm as, cohéritier par représen
tation de sa mère dudit R ixain , p r ê tr e , à ce que le
jugement à intervenir fût déclaré commun avec lui.
; S u r cette demandé, jugement contradictoire est inter
ven u , le 23 messidor an 12 , dont les motifs sont la trans
cription'des défenses des parties adverses.
Ce jugement est ainsi conçu:
« Attendu que par le contrat de mariage d’A ntoine
« R ix a in , défendeur , du 6 juin 17^4 > ses père et mère
k l’ont institué leur héritier général et universel, sous
« la seule réserve de disposer de la part du p è re, d’une
« somme de 24000 Irancs, et de la part de la m è r e , d’une
«
*•'
k
a
«
somme de 4000 l l’yiics ?
« Attendu q ue, par ces mêmes réserves , les père et
mère dudit Antoine Rixain se sont imposés des bornes
à leur libéralité qu’ ils n’ont pu outre-passcr , et que
conséquCmmeiit ledit Rixaiu père 11’a pu , au préju-
�(7 )
« dice de ladite institution, donner à Germain-Gaspard
« R ixain des immeubles faisant partie de ladite insti« tution;
,
,
« Attendu d’ailleurs que la donation qu’il a faite de
« ces im meubles, par acte du 1 5 février 1 7 7 5 , est nulle
« faute d’avoir été insinuée, aux termes de l’ordonnance
« de 1731 ;
«
«
«
«
« Attendu q u e , d’après cela , ledit Germain R i x a in ,
prêtre , n’a pu donner valablement à Léonard R ix a in ,
son frère, dans son contrat de mariage du 26 janvier
1 7 7 9 , les immeubles à lui donnés par son p è r e , puisque
la donation faite par celui-ci étoit nulle;
« Attendu que ledit R ix a in , p rê tre , n’a pu donner
« non plus dans le même contrat dema^ipgp, du 26 jan«
«
«
«
vier 1 7 7 9 , et du vivant de ses père et m è re , qui ne
sont décédés q u’en 1788 et 1789 , les droits légitimaires
qu’il pouvoit alors espéi’er dans les successions à échoir
de ses père et m è re , parce que- tout pacle sur-la suc-
c< cession d'une personne vivante est n u l , et contre les
« bonnes mœurs ;
35 A ttendu que ledit R i x a i n , défendeur , a toujours
« offert de payer audit R ix a in , dem andeur, son douzième
« dans la succession m aternelle, et son tiers dans le
«.douzième des légitimes paternelles.et maternelles de
« R ix a in , p rêtre , leur frère commun , après 1111 compte
« à faire entr’e u x , et de plusieurs sommes réclamées par
« ledit Rixain , défendeur , et que ledit Rixain , deman« d eu r, ne s’est pas expliqué sur les prétentions du d é« fendeur ;
« L e tribunal, sans avoir égard à la donation faite par feu
»
�( 8 )
«
«
«
«
«
«
«
«
R ix a in 'p è re , à Germ ain-Gaspard Rixairi-, p r ê t r e , au
profit de Leonai-d R ixain , des objets cdmpris-en ladite
donation de 1 7 7 5 , qu’il déclare de nul effet, cette’première 'donation ] étant nulle ,- sans s’arrêter: non plus
à la1 donation également'faite par le même contrat de
mariage de 1779 , par ledit Rixain , prêtre , au profit
dudit Léonard R ix a in , de la moitié de ses légitimes
paternelle et maternelle, qui 11e lui étoient pas alors
«'acquises, puisque ses père et mère étoient encore
« vivans , et qu’il ne pouvoit faire aucune convention
« sur leur future succession qu’il ne pouvoit pas re«
«
«
«
cueillir ; déclare aussi Iesdites donations nulles ; donne
acte audit A n t o in e 'R ix a in , d éfen d eu r, des offres qu’il
a faites d e'p fy er audit Léonard RiXain son douzième
de la siicccssion mobilière de T h é r è s e - A n d r é , mère
com m u n e, de lui payer aussi son tiers du douzième
« formant la légitime maternelle dudit Gennain-G aspard
« ’R ix a in , et l’autre tiers audit B e lm a s , et de venir à
« partage avec lui ôt ledit Delmas du douzième dans les
« biens du père commun , revenant audit Germain-;Gas« pard Rixain pour sa légitime paternelle, pour en être
« délaissé un tiers audit Léonard Rixain , un autre tiers
« audit Delmas , et le dernier tiers au défendeur, auquel
« demeurent réservés tous scs moyens de compensation,
« exceptions ; fins de n o n -recevo ir, et défenses demeu« rant réservées audit Léonard Rixain ; à l’elfet de quoi
« ils contesteront plus amplement, dépens réservés. »
Jiconnrd Rixain-a interjeté appel de ce jugement; et
c’est sur cet appel que les parties attendent la décision
souveraine de la cour.
M OYENS.
�Jz/
(9 )
.
t
M hO Y E N S ,
L a contestation présente les questions suivantes:
L e père commun a-t-il p u , s’étant réservé seulement
une somme de 24000 fr. à disposer en a rg e n t, fixer la
légitime de R ix a in , prêtre, en,fonds ? L a donation du
i 5 février 1775 est-elle nulle: sous ce rapport?
Cette donation est - elle n u lle , comme n’ayant point
été insinuée ?
Les intim és, héritiers chacun pour une portion de
R ixain , p r ê tr e , ,étant en cette qualité tenus, pour la
part qu’ils amendent dans la succession, des engagemens
dudit R ixain qui a transmis à l’appelant partie de cette
donation, peuvent-ils exciper du défaut d’insinuation?
Dans tous les cas, la donation faite par R ixain , p r ê tr e ,
à l’appelant, de la moitié de ses droits paternels, est-elle
valable? doit-elle avoir son effet?
L ’appelaut, indépendamment de la donation à lui faite
par R ix a in , p rê tre , soitdela moitié des objets particuliers
c o m p r i s dans la donation du 1 5 févi'ier 1775, soit de la m oi
tié de ses droits légitimaires, a - t - i l droit comme cohé
ritier à. une portion dans le surplus des biens dudit
R ix a in , p rêtre, décédé sans avoir fait d’autres disposi
tions? E u d’autres termes, p e u t- il cumuler la qualité
de donataire et d’héritier?
Telles sont les questions sur lesquelles la cour a à
prononcer.
B
�in
\vt
( IO )
P R E M Ì È R E
Q U E S T I O N.
L es juges dont est appel ont jugé que le père s’étant
réservé uniquement une somme en argent à disposer,
n’avoit pu donner des fonds en payement de la légitime.
C ’est une erreur , et une erreur que le plus simple rai
sonnement va rendre sensible.
Celui qui fait une institution , avec réserve d’une
som m e, n’a pas ordinairement cette somme en ses mains.
Il ne peut se la réserver à prendre sur les deniers qu’il n’a
pas -, il ne peut se la réserver à prendre que sui- ce qui
compose la succession. Il a donc le droit de disposer des
fonds de la succession, des immeubles comme des meu
bles , jusqu’A concurrence de la somme résçrvée : tout ce
que l’héritier institué peut exiger , c’est qu’il ne dispose
point au delà!
Celui qui fait une institution, avec réserve d’une
somme, ne promet pas que sa succession sera composée
de tels ou de tels fonds ; il promet seulement sa succes
sion , moins la somme, ou la valeur i*eprésentative d e là
somme qu’il s’est rései'vée.
I c i , la disposition du père est d’autant plus à l’abri de
toute critique, que les fonds donnés à R ixain, prêtre,
ont été donnés en payement de sa légitime; en payement
d ’une dette sacrée, d’une dette que la loi lui imposoit,
d’une dette qui étoit en même temps celle de l’héritier,
d’une dette que l’héritier n’auroit pu se dispenser d’ac-
�( ” )
quitter iluinmeme en fonds; le légitimaire ayant le droit
d’exiger sa portion en corps héréditaires.
. .
L ’instituant :n’a point les mains tellement liées par l’ins
titution , qu’il ne puisse disposer dés fonds de la succes
sion , vendre et aliéner, pourvu que ce ne soit point en
fraude de l’institution ; et ce n’est point en fraude de
l’institution , lorsqu’il n’excède point le montant de la
réserve ; lorsqu’il dispose pour acquitter autant la dette
de l’héritier que la sienne '/lorsqu’il dispose pour acquitter
en fonds, une dette due en fonds ,une dette que l’héritier
n’auroit pu se dispenser, comme on vient de l’observer,
d’acquitter luirmeme en fonds.
L ’héritier ne pourroit se plaindre qu’autant que les
fonds donnés seroient de plus grande valeur. Mais c'est
un cas particulier; on présumeroit alors qu’il y a fraude,
et le cas de fraude est toujours excepté.
Ce n’est point par ce m otif que les juges dont est appel
se sont décidés. Ils ont jugé en droit que le père s'étant
réservé une somme en argent à disposer, n’avoit pu
attribuer des fonds en payement do la légitime. On est
loin d’adopter leur système.
Rixain aîné dira-t-il que les fonds donnés excèdent
la légitime ? qu’ils excèdent la réserve?
Feu importeroit d’abord qu’ils excédassent la légitim e,
pourvu qu’ils n’excédassent point la réserve; et on va dé
montrer , par le calcul le plus sim ple, qu’il s’en faut qu’ils
excèdent la réserve.
L e père commun s’est réservé une somme de 24000 fr.
Sur cette som m e, il a disposé en faveur de Thérèse ,
B 2
�V
(12 )
lors'de ’son- entrée en" religio n , d’une somme de I2400' f. ;
ensuite, en faveur de>M arie > dans son1 contrat "de ma
riage avec D e lm a s, 'd’une sommé de 3795 francs; il a
disposé, en dernier lieu , en faveur de l’appêlant d’uné
somme d’environ 10000 francs ; ces sommes réunies s’élè
vent à celle de 16195 francs ;) il restoit donc libre ,*én:ses
mains , avant d’avoir épuisé la r é s e r v e fune sommé
de 7805 francs. î - '
•
J> ^
'vw ’
Quels sont les objets compris dans la donation ? U n
four. Ce four s’affermoit 130 ou i 5o francs. Que Rixain
aîné produise les baux à ferme. Les autres héritagesisont
une terre et petit p ré , consistant, est-il dit , én dix septerees de te rre, et une autre terre de la contenue dé dix
quartelées ; en tout onze septerées et demie. Il est à ob
server que la septerée à M a u r ia c , comme à A u r illa c ,
n’est que de 400 toises. >L a septerée de la meilleure qua-*lité ne se vendoit pas, avant la r é v o l u t i o n a u delà)de
i 5o francs. Q u ’on juge maintenant.
' .
u •
Peu im porterait, avons-nous d it , que le père eût excédé
la légitim e, pourvu qu’il n’ait point excédé la réserve;
et réciproquement nous dirons : Peu importeroit qu’il ait
excédé la réserve , pou rvu qu’ il n’ait point excédé la
légitime de droit. L a légitime est une portion que la
loi réserve aux enfans, qu’elle retranche des biens du
p è r e , même malgré le père : c’est une réserve lé g a le ,
qui est indépendante de la réserve conventionnelle.
Rixain aîné auroit donc à prouver que les fonds donnés
cxcéd oien t, et la légitime , et la réserve. Il n’uura garde
de s’engnger dans cette vérification.
/
-
�s/y ,
c * 3- v
ii'Enfiri 'y excederoîent-ils ,•.la :dn zia tÎQn n'jau rb i t!point été
nulle? pour icela ; elle! seroit, seulement jsujettq¡à» tetraji-,
chement : ce qui prouve detplùs'en-plusleim aljugé/.du
jugement.
I»!
.
«ut■ V / iH *.*' *»iovnoq n ■*>I;j J i-j-/ .
! U î : . : . J)
„
1IV
JO
. 0*1- / i l
'
r '!0*[
SE C 0 N DE
il
l;
/;
„
i'.. -
:
)
UH
H 1)7
j i l l ’;
QU ESTIO N ..,
' JII.1
n
o
3
f
JlO V li
i
i; l i p
l
'■;!
.
r
•.
X iC ijD f(î:i
:i; . f , , r -
c/i Onvne peut dissimuler qüe la donation du x 5 février
1775 n’a point été insinuée du .vivant du père -y et que
dès-lors elle ¡est n u lle, aux termes de l’ordonnance de
i7 3 iv ) ‘Mais les* intimés peùvent-ilsise prévaloir de cette
nullité .-dérivant du fait du:défutit^;donti|s sonjt héritiers,
pour une portion ? 'C ’est cei qu’il s’agit.¡d’examiner, ¡n
jrinbn/i. .noiJ.-utir«îai‘i oh 71101 ?•!> *. p !<>:Jo
■
; -,
TROISIÈME
I I ' ' ' n b l l . r . ' ‘J .
t ‘ ’i l ' V i q
QUESTION.
ç f
. . •»i
:
i .i ¡/un;':;
t
. O j j f t i ’i
'¡-Les adversaires ne manqueront ipoint d’objecter que le
donateur n ’est; point garant d e là chose! donnée v.que son
obligation, àjcèt égard , est différente de celle du vendeur ;
qu’il est censé ne donner la chose que telle, et autant
qu’il l’a .; qu’il seroit injuste ¡qu’on pût s’armer contre le
bienfaiteur , de son bienfait.
, r' ;
: rf j
)
.Cette proposition est vraie qnj.général, mais .elle de
mande d’être expliquée. L e donateur 11’esl,point garant
de la chose donnée, c’est-à-dire, qu’il n’est point garant
que la chose donnée lui appartient; mais il. est garant
de ses faits et promesses. Il n’est point garant que la chose
donnée lui appartient; mais-il ne tfaut pas que ce soit
par son fait que la chose ne lui a point appartenu, ou
�A Ù .
(' h y
a cessé ’¡de; ldi appartenir ; autremèrit il faticFroit cjrrôiqù’il
dépend (JiiJid‘Oïiatduridefrévoquer la. donation j cantre la
m à x im a ,idonnbntfyretenir ne- vaut: ; ’
oo : in' ; . ' ■
A - t - il été au pouvoir de Rixain , prêtre, en" ne satis
faisant point au vœu de l’ordonnance, d’annuller la
donation qu’il ’ a v o it faite lui-même à "sdn3 f r è r e , et en
vu e de laquelle le mariage a été contracté?
' L e pc'ré vivo itâ I’époque>du mariage ;'il ïnv^curenéôre
pluâièüF^ 'ûrlnéi's depuis. L ’article^aÔ ide- Tordonnance de
Î731 pòrte, que les donations pourront être insinuées,
âprès le délai de quatre m ois, même après le dccès du
d^nàfàirb^fprtulivüi que' le^donatelir- soit encore vivan t;
elle «apporte seulement cette modification ,-que la donation,
n’aura alors effet que du jour de l’insinuation. Pendant
que le père a Existé , et pendant plusieurs aimées après
le mariage, ila tenu à R ixain, prêtre, de valider son titre,
de s’a^swrer incommiitablement impropriété dos>objets par
llii dônn'és. A -t-il pu} eh no ¡satisfaisant point à ld foriiiàlitó prescrite par'lïordonnaiico, annullor ses propres
engagement ?
Il auroit donc fait à l'appelant un avantage illusoire!
Celui qui donne , est maître de donnery ou de ne pas
donner. M a is, lorsqu’il a d on n é, il 11e peut rien faire
directem ent, ni indirectement qui puisse porter atteinte
ù la donation, qui puisse enfreindre le principe de l’ irréVt>cabilité, caractère essentiel do toute donation entré vifs.
Ltì dònateuì*, comme, celui cjui v e n d , est1 toujours ga
rant de
faits et pi’orriesses. •
S i'l’abbé tlixàin v.ivoit;; si l'appelant réclainoit contre
lui l’exécution de la donation, l’abbé Rixain pourroil-il
�jn
c; «5 ï _
sé[ défendre dè l ’exécuter, en disantricjuc la donation à
■
*
«
lui faite , par le père commun , n’a. point été insinuée,
et qu’il nia pu donner ce qui ne lui appahenoit pas* O n
lui ré p b n d ro it, avec avantage, que'ic’est par son fait
q u’elle n’a point été insinuée.
Mais le doute, s’il pou voiten existei',est levé par la clause
mpme du contrat’de mariage. L e contrat de mqriage prirte:
Sans autre garantie que de ses f a i t s et promesses. Il a
donc* garanti ses faits et promesses : cette obligation de
garantie a passé à ses héritiers. Les adversaires sont donc
garans e u x - m ê m e s , au moins pour la part et portion
pour, laquelle ils sont .héritiers 3 de la nullité qu’ils
opposent.
• ••
vj
: A-.
■ ' - Jo •
j
<;!>':
Q U A T R I È M E
! '
Q U E S T I O N .
f
Par le contrat de mariage de l’appelant, R ix a in , prêtre,
commence par lui donner la moitié des objets compris
dans la donation du i 5 février 1775. Siibsidiairement,
il lui a transmis la moitié de ses droits légitimâmes pa
ternels. Les juges, dont est appel, ont déclaré cette dona
tion subsidiaire également aiulie, comm’e cqntenant un
pacte sur une succession future. C ’est le m otif qu’ils ont
donné de leur décision.
1
1
Si ce m otif n’étoit point consigné dans lin jugem ent,
on auroit peine à penser qu’il fût sérioux.
Est-ce ici un marché odieux sur la succession du père?
Est-ce ici un pacte moyennant un prix ? P e u t-o n assi
miler la donation dont il s’agit à1un pacte par lequel
l ’nn vend et l’autre achète, à vil p rix , des droits sur
�^
, \VL
f
i6 )
une succession future qu’on est impatient dè d évorer? L a
loi.a proscrit ces conventions, comme renfermantr>lè Vœu
inhumain de la m o rt d’autrui. Ce vœu respire dans le
vendeur et dans l ’aclieteur ; dans le vendeur [qui, trou
vant la mort de celui dont il attend la :succession trop
lente , cède à fo rfa it, et cède à un prix d’autant plus
modique , qu’il vend un droit incertain , un droit qui
peut.même devenir caduc , par son prédécès-, dans l’adietéur qui a à désirer, non-seulement de'bénéficier, mais
de n’être pas en perte. La clause dont il s’agit renfermet-elle rien de semblable ? Que reçoit R ixain donateur ?
Qiie donne Rixain donataire1? : Absolument rien; O n
ne voit qu’ un bienfait d’une p a r t , et l’acceptation de ce
bienfait de l’autre. Est-il défendu d’exercer et d’accepter
une libéralité ?
Si R ix a in , prêtre, avoit donné tous ses biens à ven ir,
la donation auroit;bien sans doute .été, valable;, .elle auroit
cependant bien compris les droits légitimaires à recueillir
dans la succession .du père. • 1
j
L a donation n’est pas principalem ent, prin cip a liter,
des droits légitimaires k échoir. L a donation commence
par des. objets fixes et. certains ; le donateur commence
par donner les héritages particuliers compris dans la
donation à lui faite par le père , et dont celui-ci étoit
saisi; donation-, à la v e n t e , non - insinuée , mais qui
pouvoit l’être, tant que le père vivoit. L a donation des
droits légitimaires n’est que sécondairo , et à défaut
d ’exécution de la première ; c’est.une sûreté, une garantie
que le-fr^re a voulu donner sur les [biens A venir. Et
quelle loi alors défeûdoit d’engnger les biens à venir?
Mais
�( *7 )
' r Mais tout pacte sur la succession future étoit-il in
terdit ? L a l o i , au code Q uam vis de p a c t ù , permettoit
les conventions sur successions futures, entre m ajeurs,
po u rvu que ce fût du consentement de celui de cujus.
Cette lo i a été suivie en France ; on peut voir ce que
dit à cet égard Lebrun. Ici la donation a été faite en
présence du père, ou de son fondé de pouvoir ; elle a été
faite par contrat de mariage, en vue de l’établissement
de l’appelant ; et l’on sait que les contrats de mariage
sont susceptibles de toutes sortes de clauses.
CINQUIÈME
QUESTION.
Cette question est suboi’donnée à la décision des pré
cédentes. Il n’y auroit pas lieu , si la cour se déterminoit
à déclarer les deux donations nulles ; il ne s’agiroit point
alors d’exdminer si l’appelant peut réunir la double qua
lité de donataire et d’héritier; mais si , comme on le
présum e, la cour se détermine à infirmer le jugement
qui a déclaré les deux donations nulles, l’appelant, pour
venir à la succession, pour avoir droit au partage des
biens dont R i x a in , prêtre , n’a point disposé, sera-t-il
obligé de rapporter la donation? O n soutient avec con
fiance la négative.
Les parties sont régies par le droit écrit , et aucun
jurisconsulte n’ignore qu’en pays de droit écrit le rapport
n’avoit lieu qu’en d ire cte, et non en ligne collatérale.
L ’appelant réclame l'exécution de son contrat de ma
riage ; il réclame les •avantages qui lui ont été assurés
C
�( 18 )
D e v o i t - i l s’attendre à éprouver de la
par son frère.
contradiction ?
Nous terminerons par une dernière observation.
L e jugement dont est appel réserve à Rixain tous
m oyens de com pensation. Il est ajouté , à la vérité ,
excep tio n s, f in de n on -recevoir, et défenses réservées
au co n tra ire: à l ’effet de q u o i, est-il d it, les parties
contesteront plus amplement;
E t , à raison de cette plus ample contestation, réserve
les dépens.
Quels sont ces moyens de compensation ? L e sieur
Rixain auroit dû les exp liquer, les établir; il auroit dû
au moins en former demande : il ne l’a point fait. Dans
aucune de ses requêtes il n’a pris aucunes conclusions à
cet égard; il s’est contenté de dire vaguement que l’ap
pelant lui doit, que l’abbé R ixain devoit à la succession
du père commun ; mais il n’a point formé de demande.
Les juges dont est appel ont ordonné une plus ample
contestation sur des demandes non formées.
S’il lui est dû par l’appelant, qu’il l’établisse : l’applant offre de le payer sur le ch amp.
M e. P A G È S - M E Y M A C , juriscon sulte.
M e. M A L L E T , avoué.
A R I O M , de l ’imprim erie de LANDRIOT, seul im prim eur de la
C our d ’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rixain, Léonard. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Mallet
Subject
The topic of the resource
successions
héritier universel
légitime
four banal
pays de droit écrit
contrats de mariage
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Léonard Rixain, propriétaire, habitant de la ville de Clermont-Ferrand, appelant ; Contre Antoine Rixain, propriétaire, habitant de la ville de Mauriac, intimé ; Et contre Antoine Delmas, propriétaire, habitant de la ville de Mauriac, aussi intimé.
Table Godemel : Cumul : le cohéritier peut-il, après l’ouverture de la succession du légitimaire donateur, cumuler la qualité de donataire et d’héritier, c’est-à-dire prendre ce qui lui a été donné par son frère, et, de plus, sa part dans les objets dont il n’a pas été disposé ? Institution d'héritier : 3. le père commun qui, en faisant une institution d’héritier contractuelle en faveur de son fils ainé, se fait réserve d’une somme déterminée pour former la légitime des quatre autres enfans, a-t-il pu composer la légitime de l’un d’eux en bien fonds et lui en faire donation ?
a-t-il en cela préjudicié à l’institution ? le légitimaire donataire a-t-il pu donner valablemt, à un autre de ses frères, légitimaire comme lui, dans son contrat de mariage, une partie des immeubles donnés ; et, en cas de difficulté, lui donner la moitié des droits légitimaires qu’il pouvait espérer dans les successions échues de ses père et mère ? le cohéritier peut-il, après l’ouverture de la succession du légitimaire- donateur, cumuler la qualité de donataire et d’héritier, c'est-à-dire prendre ce qui lui a été donné par son père, et, de plus, sa part dans les objets dont il n’a pas été disposé ? Donation : 6. le légitimaire-donataire a-t-il pû donner valablement, à un autre de ses frères, légitimaire comme lui, dans son contrat de mariage, une partie des immeubles donnés, et, en cas de difficulté, lui donner la moitié des droits légitimaires qu’il pouvait espérer dans les successions à échoir de ses père et mère ? 10 – 563.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1764-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1025
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0737
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53123/BCU_Factums_G1025.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Mauriac (15120)
La Bizette (terroir de)
Delfraissi (terroir de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
contrats de mariage
donations
four banal
héritier universel
légitime
pays de droit écrit
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53183/BCU_Factums_G1225.pdf
ca80fc749fb569cac3cd42f6cbbe51cb
PDF Text
Text
o
r
MÉMOIRE
POUR
avoué à Ambert, accusé de com
A n t o i n e DUPIC,
plicité de faux;
CONTRE
TRIBUNAL
L e com m issaire du g o u v e r n e m e n t ,
'
et le citoyen
BARRIERE,
poursuivant,
plaintif.
U n avoué, en prison pour une accusation de faux , appelle
nécessairement sur lui l’attention publique. Son état est tout entier
dans le domaine de l’opinion, et elle exige qu’avant de se justi
fier devant ses juges, il donne publiquement le tableau de sa con
duite, quand il ne craint pas d’en rendre compte.
L e cit. Dupic est accusé de complicité d’un fa u x , com m is,
dit-on, par un huissier, en supprimant les copies d’une notifica
tion de transcription à des créanciers inscrits.
L a participation du cit. Dupic consiste dans la rédaction du
projet de cette notification , faite par lui sur papier lib re , et
remise , non pas à l’huissier, mais aux parties, q u i, à ce qu’il
paroit, se sont adressées à plusieurs huissiers pour les corrompre.
L e cit. Dupic ignore si cette corruption a eu son effet , et
cette incertitude lui a fait rechercher le corps de délit dans la
procédure, dont copie vient de lui être remise. M ais, au lieu d’un
original d’exploit sans copies, il y a vu une copie sans original,
Barthélémi Roussel, a-t-il dit, a donc fait usage de cet exploit
contre ses créanciers, et ceux-ci ont été privés de la faculté d’en
chérir. Mais non, Roussel interrogé ignore lui-même s’il y en
A
cr imine l
SPÉCIAL
d
u
puy de Dome
j
1
�un; et tout ce qu’on voit de certain dans la procédure, c’est que
le cit. Barrière a voulu deviner qu’il y avoit un exploit faux ;
qu il n’a pas même cherché à savoir si on le lui opposcroit pour
lui faire perdre ses créances , et qu’il a mieux aimé faire une
dénonciation, soi-disant civique, sous le prétexte ridicule d’un
tort possible et imaginaire.
Quoi qu’il en soit, le cit. Dupic est accusé , et dans les fers:
avec un état et une fam ille, il ne peut, sans doute, supporter que
très-impatiemment d’être compromis dans une querelle étrangère.
D ’autres considérations peut-être l’afiligeroient plus encore; mais
l’expérience du malheur lui a appris qu'il faut toujours s’attendre
au pire, et que dans les événemens majeurs on doit moins compter
sur les hommes que sur la justice, le temps ou le hasard. Il lais
sera donc les réflexions et les plaintes, pour ne s’occuper que des
causes de l’accusation dont il est victime.
F A IT S .
L e cit. Dupic avoit été chargé, comme avoué, de plusieurs
affaires pour le cit. D um aret, de L y o n , qui a des propriétés à
Saint-Germ ain-l’Hcrm.
Il a eu aussi la confiance de Barthélemi Roussel, cultivateur,
passant pour avoir une très-grande aisance, et auquel on ne
donnoit pas une mauvaise réputation.
Dumaret et Roussel eurent un procès pour arrérages de ferme,
pendant le papier monnoie. L e tribunal d’appel ordonna que
D um aret, demandeur, scroit interrogé sur faits et articles pour
des reçus qu’ils n ’avouoit pas; Roussel ne consigna pas les frais
du vo yage; l’interrogatoire n ’eut pas lieu , et il fut condamné.
Quel que fût le sentiment qui l’agitùt après cette condamna
tion , il alla demander au cit. Dupic s’il pouvoit vendre. La
réponse fut affirmative et devoit l’être ; il ne s’agissoit ni de la
quantité de biens à vendre, ni du p rix; tout cela ne pouvoit être
que 1 affaire du consultant.
�C3 )
Roussel conduisit ensuite son acquéreur, simulé ou non, chez le
cit. D upic, croyant qu'il pouvoit recevoir cette vente. Celui-ci les
mena chez le cit. C lavel, notaire, qu’il trouva dans la ru e, et
auquel il dit qu’il s’agissoit de passer un acte : il les quitta sans
autre explication (i).
Vraisemblablement le cit. Clavel ne voulut pas recevoir cet acte;
si c’étoit faute de certificateurs, Roussel n ’en dit rien, car Dupic
le connoissoit assez pour offrir de l'être. Mais il vint lui dire que
Clavel avoit pensé que Roussel ayant été protuteur ne pouvoit
pas vendre solidement, et qu’il le prioit de les mener à un autre
notaire. Alors on alla chez le cit. Ponchon.
L e premier mot de Ponchon fut de demander des certiiicatcurs; pour cette fois, Dupic étoit présent, et offrit de certifier
l’identité de Roussel. Que ceux qui cherchent des raisons à tout
veuillent bien expliquer pourquoi ils refuseraient de certifier la
simple identité de ceux qu’ils connoissent.
Mais le cit. Ponchon rappela au cit. Dupic qu’il fulloit deux
certificateurs : Dupic auroit pu sans doute s ’en adjoindre un autre;
mais c’éloit bien assez de se croire obligé à ne pas refuser lui—
m êm e; il fut bien aise que l’acte s’ajournât.
A u départ de Roussel , le cit. Ponchon donna à quelqu’un la
commission de lui faire venir un nommé Girodon, de Marsac ,
son débiteur. Roussel ayant ouï ce no m , dit au cit. Ponchon
qu’il connoissoit aussi ce Girodon, qui ne refuseroil pas d’être
son certificateur (2). ,
Peu de jours après, on retourna chez le cit. Ponchon: Je cil.
Dupic se croyoit encore obligé d’être un des certificateurs; il 11 y
voyoit aucun motil réel de répugnance; l’acte fut projeté et dicté
par le notaire. D upic, absent pendant ce travail, attendoit qu’oa
vînt le chercher pour signer.
Lorsqu’il revint , la dictée en étoit aux certificateurs ; il on
(1) Déposition du cit. C lav el, 2e. témoin.
(a) Déposition du cit. Ponchon.
A 2
�« ¿t.
( 4 )
entendit nommer deux, et dès-lors il ne vit plus de nécessité ii
être là, en troisième. Pour ne pas fatiguer R oussel, il appela le no
taire en particulier, et lui dit que sa signature devenoit inutile (i).
L e même jou r, Roussel dit au cit. Dupic qu’il vouloit aller
à Lyon payer M . D um aret, qui l’avoit tenu quitte pour 800 fr. ;
tandis que B arrière, son agent d’affaire , qui se disoit cessionnaire de la créance, vouloit G,000 f. L e cit. Dupic écrivit; et
il étoit si peu de moitié dans un projet de iraude, que dans cette
lettre il avertissoit Dumaret que Roussel venoit de prendre des
arrangemens. 11 croyoit si peu que Roussel eût projet de réduire
tous ses créanciers à 5oo f . , que dupe, lui-même, il s’offroit pour
caution de 800 f. et 20 quartons de blé au cit. Dumaret (2).
T ou t sembloit terminé pour le cit. Dupic ; mais quand l’acte
fut enregistré et expédié, l ’acquéreur vint le lui porter, pour le
prier de le retirer cle la transcription, avec les extraits d’inscription.
Malgré la diligence recommandée par cet acquéreur, le cit. Dupic
avoit perdu cette affaire de vu e; mais Convert, plus pressé, vint
lui-même à Àmbert , et le cit. Dupic l’accompagna pour retirer
l ’acte et les extraits du bureau des hypothèques.
11 fut question alors de la notification de ces extraits aux créan
ciers; on chargea Dupic de la faire: il en fit le projet où il tacha
de renfermer tout ce qu’exige la loi pour les formes ; et comme,
par un hasard qui se trouve heureux, il n’avoil pas de scribe pour
en faire transcrire l’original et les copies sur papier tim bré, il se
contenta d’écrire en marge qu’il falloit écrire l’exploit tel qu’il étoit,
sans rien omettre, et il le remit aux parties elles-mêmes ( 5 ), qui
l ’emportèrent pour en consulter, à ce qu’elles dirent, la validité,
à Saint-Germain.
C ’est ici où il faut dire , puisque la position du cil. Dupic l’y
(1) Même déposition.
(2) Lettre écrite le 5 fructidor an 1 0 , au cit. Ribonlet , cote /VZ.
(3) Déclaration de Iloque à tous les avoués , 1 2 '. i 5e. 16 e. 20e. 2 1 e. 29e.
33e. 34 '. tém oin, cote 3çj.
�oblige, que peu après la remise de ce projet d’exp lo it, Roussel
et Couvert ayant sans doute médité leur suppression de copies,
et peut-être ayant déjà tenté de l’exécuter, revinrent chez le cit.
Dupic lui dire, que, pour empêcher Roussel d’être victime de ses
créanciers, un homme Ircs-capable leur avoit conseillé de suppri
m er les copies de la notification dont il avoit fait le projet, et
ils lui proposèrent, s’il vouloit s’en charger, de lui payer ce
qu’il voudroit, offres qu’ils portèrent jusqu’à 1,800 f. ou 2,000 f.
L ’indignation du cit. Dupic à celte proposition étoit contenue
par l’envie qu’il avoit de recouvrer son projet d’exploit : il le
demanda sous un prétexte; mais sans doute la leçon étoit bien
faite ; on répondit que le projet avoit resté à Saint-Germain ; et
alors le cit. D u p ic, par un reste d’égard pour son ancien client,
se contenta de le menacer d’une dénonciation, s’il usoit de ce projet,
ou s'il signifioit l’exploit sans copies.
11 paroit que les Roussel et Convert ne furent pas trts-effrayés
de celte m enace, puisque le même jour, ou peu de jours après,
ils cherchèrent à acheter la probité de trois huissiers.
Il n’est pas question, comme l’a dit Barrière dans sa dénoncia
tion, de Roque, huissier de confiance de D upic; de Roque fils,
clerc de Dupic ; de l ’exploit dicté à ce dernier par Dupic : tout cet
arrangement captieux, pour rattacher Dupic à tout, est démenti
par un fait du pur hasard.
C ’est que les Roussel et Convert, au lieu de s’adresser d’abord
à ce Roque fils, pour écrire sous la dictée , et à ce Roque père, pour
signer de confiance, se sont d’abord adressés à un gendarme (Privât,
qui est en jugement el en prison), pour le prier d’acheter une signa
ture d’huissier, moyennant 48 fr. (1).
Trivat n ’alla pas chez Roque; il alla chez Àchard, lui proposa
ses 48 fr. ; Achard refusa.
Après A chard, Privât alla chez Monleillet : Monteillet refusa
( i 1) Déclaration de M onteillet, A ch ard, la veuve Pom m ier, et de Privât
lui-inèmo.
A 3
�( 6 )
encore; et ce fut après ces deux huissiers qu’on s’adressa à R oque(i).
Roque, à ce qu’il paroît, alla boire avec Roussel et Corwert.
L ’exploit fut fait : la signature fut payée, dit-on, avec une tasse
d’ argent; et l ’huissier alla en personne faii’e enregistrer l’exploit à
St. A nthêm e, bureau étranger aux parties, aux créanciers, et à
l ’huissier lui-même.
L e cit. Dupic ignoroit tout ce tripotage d’huissier, de gendarme
et d’enregistrement, se confiant dans l’idée qu’il avoit dissuadé
Roussel de tout projet frauduleux , lorsque le cit. Barrière est
venu avec fracas, à A m bert, dénoncer à la chambre des avoués
un prétendu exploit dont il avouoit suspecter seulement l’existence.
Si la chambre des avoués eût connu cet exploit supposé si nuisi
b le , elle auroit vu que, pour en détruire l’e ffe t, il n’étoit pas
besoin d’une procédure criminelle ; mais elle ne put le juger que
sur les rapports infidèles du cit. Barrière; elle demanda une dénon
ciation écrite. L e cit. Barrière sortit avec le cit. Crosmarie pour la
rédiger. C ’est après cela qu’on manda le cit. D upic, pour s’expli
quer et répondre (2).
A u premier mot d’un projet d’exploit, il faut le dire, le cit. Dupic
6e confirma dans l ’idée que le6 Roussel avoient eu peur de sa menace.
Il leur en sut intérieurement bon gré; et, regardant dès lors toutes
les clameurs du cit. Barrière comme une terreur panique, il ne
voulut pas révéler leur turpitude, et les exposer à un procès crimi
n el, dès qu'ils s’étoient repentis.
M ais quand, au lieu d’un simple soupçon, il ouït dire qu’un
exploit avoit été fait réellement, et que, pour lui en cacher la
connoissance ii lui-même, on l ’avoit fait enregistrer à St. Anthêm e,
alors son premier mouvement fut de déclarer avec vivacité qu’il
éloit vrai qu’on lui avoit offert 1800 fr. pour supprimer les copies
de cet exploit; et il termina par demander que celle explication 11e
fut pas réduite à une simple conversation entre collègues; mais
(1) Int’ rrog.itoire de Privât et Roussel.
(*) Déclaration des avoués.
�J>$(T )
( 7 )
que la dénonciation fût remise au substitut du tribunal crim inel(i).
C ’est ainsi qu’un prétendu coupable a provoqué lui-m êm e une
instruction judiciaire, au lieu de la redouter; il a voulu être con
fronté avec ceux qu’on disoit n’avoir agi que par ses conseils. Il est
en jugement avec eux ; et certes s’il avoit préparé et fa cilité le
fa u x , ils n’auroient pas manqué de tout rejeter sur son compte,
pour se disculper sous le prétexte de leur ignorance.
T e l est le précis exact des faits confirmés par les dépositions. S ’ils
ont suffi pour rendre le cit. Dupic suspect, il est au moins bien
certain qu’ils ne peuvent le faire considérer comme coupable. Ce
seroit sans doute assez, pour l’établir, de ce qu’il a déjà d it; mais
' il doit suivre sa défense sous toutes les faces, parce qu’on ne peut
traiter légèrement une accusation qui attaque la liberté et l’honneur.
M O Y E N S .
S- IL e cit. D upic est étranger au délit dénoncé.
Si le cit. Dupic jouissoit d’une fortune brillante, on n’eut pas
osé l’accuser d’un faux minutieux, et d’avoir vendu son honneur à
celui qui vouloit le commettre. Mais c’est un malheur inséparable
de la médiocrité qu’elle est en butte aux soupçons enhardis , et
qu’en rougissant de leur injure elle n’en est pas moins obligée de
les combattre.
M a is, quelle que soit la calomnie qui poursuit le cit. D upic,
ouvertement ou dans l’om bre; s’il n’a pas reçu de ses ancêtres
l ’héritage de leur illustration ( 2 ) , il en a reçu celui d’une probité
qu’il n’avoit jamais ouï suspecter dans l'exercice de son état et des
(1) Procès verbal de la cham bre, cote 9 , expliqué par les déclarations dei
avoués.
(») Guillaume D u p ic, l’ un d’eux, étoit grand bailli d’Auvergne en i 35o.
A 4
V
�f
.
(8)
fonctions qu/il exerce depuis 1789 (1 ) ; et cet héritage, quoi qu’on
en dise, il le transmettra intact a ses enfans.
Le cit. Barrière devoit voir le passé avant le présent, n?épouser
la passion de personne; ne pas croire qu’ il lui suffiroit, pour réussir,
d'indiquer trente-neuf témoins avec note de ce'qu’ils dévoient dire;
ne pas mentir à sa conscience, lorsqu’il savoit que le conseil d'un
faux venoit d’un autre que du cit. Dupic ; et enfin méditer un peu
plus, avant de dénoncer, quelle éloit la nécessité et quelle seroit
la suite de sa diffamation.
Il est peut-être sans exemple qu’un défenseur soit en jugement,
parce qu’un huissier n’a pas posé des copies d’exploit; sous prétexte
que ce défenseur a conseille cet exp loit, et en a fait le projet.
Est-ce donc le conseil, 011 le projet, qui ont valu une accusation?
Mais ce seroit une chose bien périlleuse, que de donner des con
seils, s’ils exposoient aux résultats d’un commentaire fort différent
quelquefois du con seil lu i- m ê m e , et si on couroit la chance d’être
incarcéré par provision, pour éclaircir jusqu’à quel point le conseil
a influé sur le mode de l’exécuter.
Si c’est le projet, c’est peut-être pis encore; car il seroit inouï de
trouver dans le projet d’un exploit quelque chose de relatif à la
suppression des copies qui en seront faites ensuite.
Il y a plus : car, dans l'existence de ce projet m êm e, tout autre
qu’un dénonciateur passionné doit voir la preuve que l’auteur du
projet n’a pas entendu se mêler de ce qui seroit fait au delà.
Sans doute Dupic, voulant faire faire celte suppression de copies,
auroit écrit l’original, et même, si on veut, les copies; il auroit
tout fait signer par l ’huissier qu’on suppose lui être si bien dévoué,
et il auroit tout retenu.
( 1 ) Le cit. D u p ic, accusé , a été reçu au serinent d'avocat au parlement
«le P a ris, en 178 9 ; accusateur public au tribunal «lu district d’ Am bert,
procureur national des eaux et forêts, greffier, avoué à Ambert avant l’an a
et «lepnij l’an 8. Depuis sa détention , il a été nommé membre de l’univer*ite de jurisprudence, sur la p résen tation du m aire d'^l/nherc.
�( 9 )
Mais on aime mieux choquer toutes les vraisemblances pour
l’uccuscr. On -veut qu’il ail été assez imbécille pour faire marchander
des probités d’huissiers de rue en rue, avec son projet d’exploit à
la m ain, et que , pour comble de simplicité, après s’êlre mis en
évidence par le refus successif de deux huissiers, il ait donné ainsi
au troisième une pièce de conviction de cette importance.
On ne veut pas voir qu’il y a incompatibilité dans ces deux
suppositions. Mais il y a constitution d’un autre avoué, dit le
dénonciateur. Mais les parlant à ne sont pas en blanc; mais il y
a une noie marginale et une date fixe; mais Dupic a nié devant
ses collègues avoir fait ce projet. Mais tout cela se He à la vente
qui elle-même étoit frauduleuse; et Dupic y a participé, puisqu’il
est allé chez les notaires.
Voilà donc, sans l’affoiblir, tout le faisceau de l’argumentation
qui est résumée contre le cit. Dupic. Eh bien, que ce faisceau soit
divisé ou entier, il est impossible qu’il tienne contre le simple regard
de l’impartialité.
O iii, Dupic a constitué un autre avoué que lui : mais il dtoit
l’avoué ordinaire du cit. D um arel; e t, dans un exploit qui devoit
lui être signifié, il a pu aviser, sans crim e, au moyen de ne pas
perdre cette confiance.
O ui, il a rempli les parlant à. L ’huissier auroit confondu entre
le domicile réel de chaque créancier, et leur domicile élu. L e ré
dacteur a voulu éviter une nullité, et il ne laissoit rien à fin ir,
précisément parce qu’il 11’avoit à se mêler que d’un simple projet.
L a note marginale confirme ce qu’on vient de dire. Il étoit à
croire qu’un huissier de Saint-Germain Iranscriroit cet exploit.
L a date du i 5 fructidor, mise en marge du projet, n’est pas de
la main de D upic, quoi qu’en dise la dénonciation; donc il a passé
par d’aulres mains : d’ailleurs l'enregistrement du 20 suppose un
exploit du 17 (1).
L e cit. Dupic a nié ce projet; il en a donné les raisons : il
(1) Cote 4.
�M
.
C «o )
ne croyoit pas qu’on eut osé faire l’exploit. Sans doute ce n ’étoit
pas par supposition qu’on ignoreroit la part qu’il y avoit, puisque
la dénonciation qu’on venoit de lui lire, et où il est dit que le
projet est de sa m ain, devoit'dicter sa réponse. S ’il a agi par mé
nagement, il n’a plus rien ménagé ensuite, lorsqu’il a vu qu’il y
avoit un abus de sa bonne foi ; et on ne dira pas qu’il ait agi comme
s’il craignoit les éclaircissemens.
Ce n’est donc pas là une objection contre le cit. D upic, et ce
seroit attaquer la chambre des avoués; car le moyen de croire
qu’elle ait voulu tendre un piège à un de ses collègues, en lui de
mandant s’il avoit écrit un projet dont elle étoit déjà saisie, et
qu’elle savoit bien être de son écriture? Aussi quand elle a inséré
dans son procès verbal qu’il avoit déclaré tous les faits calomnieux,
on voit que cette rédaction étoit pour abréger, puisque cette con
cision est démentie par tous les témoignages des avoués eux-mêmes,
et que l’un d'eux rapporte même l’explication que le cit. Dupic
donna à sa réponse (i).
Enfin, qu’y a-t-il de commun entre le transport de Dupic chez
deux notaires, et une suppression de copies d'exploit? S’il eût voulu
ou cru faire une fraude, auroit-il ainsi parcouru les études de
notaires avec Roussel? se seroit-il présenté pour son certificateur?
et après tout cela auroit-il fait courir et laissé son projet d'exploit,
pour consommer sa conviction? Certes, la fraude ne marche pas
ainsi avçc éclat, et ne laisse pas sur sa route des signaux de reconnoissance.
(i) Le douzième témoin dépose que D upic expliqua « qu’avoir suivi les
» parties chez un notaire, avoir retiré l’état des inscriptions, avoir fait un
>* projet de n otification, n’étoit pas repréhensible ; et qu’il n’appeloit faits
» calomnieux que ceux qui tendoisnt à le rendre com plice d ’un faux, h
�( II )
§.
11.
I l n’y a pas de fa u x ; le cit. D upic n’en est pas complice.
L e cit. Dupic n ’a pas cherché à se défendre par des fins de non
recevoir, parce que, n’ayant rien à se reprocher, il lui étoit égal
d’être accusé d’un délit quelconque : mais un crime de faux est un
poids si terrible pour un homme public, qu’il doit, s’il le peut, en
détourner de lui jusqu’à la seule dénomination. C ’est donc déjà un
grand intérêt pour le cit. D u p ic, d’examiner s’il y a eu un fau x, et
s’il a pu y être compris sous prétexte de complicité.
Déjà on peut dire, en général, qu’il n ’y a pas de faux dans
une suppression de titre, parce qu’un faux en écriture n’est pas un
acte d’abstension ou négatif, et qu’il suppose une action tendante
à altérer ce qui est, pour le transformer en ce qui n ’est pas.
Aussi ne voit-on pas qu’en principe on mette sur la même ligne
les suppressions de titre et les faux qu i, dans le droit crim inel,
semblent faire deux délits bien distincts.
Lange, en traitant du fa u x , observe que « l’on ne peut former
» une inscription de faux au sujet de la suppression des actes,
» parce que l'on ne peut déclarer fausse une pièce qui ne paroit
» p as; mais que parmi nous on en fait la poursuite comme d’un
« larcin (i). »
L e tribunal de cassation a été plus loin encore, dans un jugement
du i 5 nivôse an n , comme pn va le voir par l’extrait entier copié
sur l’arrêtiste (2) : « Un créancier, porteur d’une reconnoissance de
» 55 o f r ., reçoit du débiteur un acompte de i 5 o f r . , et en inscrit
» le reçu au dos du billet. Par la suite, le créancier gratte et efface
» cette quittance, et cite le débiteur en payement de 55 o fr. L e
» faux y est attaqué par le débiteur. L e tribunal spécial ( de la
(1) Pratic. f r . , cliap. X IV , du faux , tom. I I , pag. 64, édition de 172g.
(aj Journal du palais, n°. i i , page
«
3
344
�\
( 12 )
»
»
»
»
Manche ) a cru y voir un faux en écriture privée..........mais le
tribunal de cassation n’a considéré ces rature et grattage d'écrilure que comme une suppression d’ acte tendant à libération.
Sur ce m otif, il a cassé et annullé le jugement de compétence. »
L ’application de cette décision se fait sans peine ; car s i, entre
le créancier qui a gratte un écrit, et l’auteur d’un projet d ’exploit
posé ou non, il faut chercher un faussaire, ce n’est certes pas le
premier qui sera jugé l’être moins.
Pourquoi d’ailleurs vouloir trouver un faux où la loi n’en indique
pas? C a r, sans doute, un huissier qui ne pose pas des copies, ne
commet pas un délit d’invention nouvelle ; et dès-lors il faut cher
cher comment la loi punit, pour juger la culpabilité par la peine.
L a première loi qui paroisse s’être occupée de ce délit, est l ’or
donnance de 1 555 . A u tit. V I elle d it, art. X I : « Pour obvier à
» plusieurs inconvéniens qui peuvent advenir de ce que souvente» fo is, quand les huissiers signifient quelques requêtes ou autres
» choses, ils n’ en baillent copie, ce qui vient à gros intérêt des
» parties, nous avons enjoint et enjoignons auxdits huissiers de
» bailler promptement lesdites copies.......... sur peine de Go sols
» d’anietule pour la première fo is, et pour la seconde sur peine
» d’amende arbitraire. »
L ’ordonnance de 1GG7 veut, en l’art. II du lit. II, qu’il soit laissé
copie des exploits, à peine de nullité et 20 fr. d’amende ; et en
l ’art. III, qu’il Soit fait mention, en l’original et copie, de ceux à
qui elles ont été laissées, à peine de nullité et même amende. En
l ’art. V II du tit. X X X I I I , elle veut qu’il soit laissé au saisi copie
de l’exploit. L ’art. X I X est consacré à fixer la peine de l’inobser
vation : « T o u t ce que dessus sera observé par les huissiers , à
» peine de nullité, dom m ages-¿nierais .,. interdiction, cl 100 fr.
» d ’amende. »
Ainsi le pis-aller, dans les cas les plus graves, est l’interdiction
et des doinmages-inlérêts, outre la nullité et une amende.
Pourquoi donc être plus sévère que la loi elle-même; augmenter
les peines, (juand, dans l'incertitude, on doit les restreindre; appeler,
�( *3 )
sous le nom de faux , des peines corporelles, quand la loi en indique
textuellement d’autres?
L e genre de ces peines prouve donc que le délit dénoncé par le
cit. Barrière n’ est pas un faux.
S ’il y avoit un fa u x , il y auroit trois distinctions à faire entre
les accusés : l’auteur du faux, celui qui l’a voulu, et ceux qui l’ont
facilité. L ’huissier tient le premier ran g; Roussel, le deuxième;
D upic, P rivât, Roque fils et Couvert, le troisième. Si les deux
premiers ne sont pas en délit, c’est avoir prouvé que le cit. Dupic
n’est pas complice.
L e faux consisteroit dans ce que l’original eonstateroit le con
traire de ce que l’huissier a fait. Mais pour dire qu’il y a un fau x,
il s’agiroit de v o ir, dans cet original , s’il a certifié avoir porté
sept copies, tandis qu’il ne les a pas portées; car s’il n’y avoit pas
dit expressément les avoir portées, il est clair qu’il n’y auroit pas
même l'ombre d’un faux.
Cependant on veut qu’il y ait un fau x, et cet original ne se voit
pas : on veut qu’il soit constant qu’il certifie autre chose que ce qui
a été fa it, qu’il soit constant que les créanciers n ’ont pas reçu de
copies; et précisément l’un d’eux a été ouï en témoignage, et s’est
présenté avec sa copie. T ou t cela étonne, et fatigue l’imagination.
Aussi la loi ne permet pas, il faut le dire, que des accusations
de faux soient .admises d’après la seule terreur des parties inté
ressées; elle entend vo ir la pièce suspectée, avant de s’enquérir
s ’il y a un délit et des coupables : sans cela, en e ffet, comment
jugeroit-elle qu'il y a un faux?
« Dans t o u t k s les plaintes en faux, dit l’art. D X X V I du code
» des délits et des peines, les pièces arguées de faux sont déposées
» au g re ffe.. . . . elles sont paraphées......... etc.
» Le tout ii peine de nullité'. »
Ici quelle est la pièce iausse ? E s t-c e la copie produite par le
dernier témoin? Non ; puisqu’elle est la preuve contraire de la
dénonciation. Ce n’est d’ailleurs pas elle qui a donné lieu au procès,
puisqu’elle n ’a été connue que quand le cit. Dupic étoit en prison.
�( *4 )
Est-ce le projet? N o n ; car il n’a rien de commun avec les copies
supprimées, et avertit au contraire l’huissier qu’elles doivent être
posées. Est-ce enfin la relation de l’enregistrement? mais on ne
s’est pas même avisé de la dire falsifiée.
Voilà cependant tout ce qui est déposé au greffe; on n ’a donc
pas satisfait â la prem ière formalité que la loi exigeoit à peine de
nullité.
Ce n ’est pas seulement parce que la loi le dit ainsi, qu’on l’ob
serve; mais c’est qu’en effet il est inconcevable de préjuger qu’un
huissier a fait un faux sans connoître la pièce fausse.
Dira-t-on qu’il est intéressé à ne pas la produire? Mais le faux
est un délit m atériel, qui veut une culpabilité de fait. L a lo i, au
reste, ne se commente pas ; elle a voulu un dépôt de pièces avant
l’instruction, comme elle a voulu qu’avant de poursuivre un homi
cide de fait, on sût s’il y avoit un homme mort.
Evidemment un juri ne peut pas déclarer qu’ il est constant qu’il
y a un faux : alors il n’y a plus de questions subséquentes.
Si donc il n’est pas constant que l’huissier Roque soit l’auteur d’un
fa u x , comment concevoir qu’il y ait des complices? Roussel ne peut
être convaincu de l’avoir voulu et p a y é ; et m êm e, par respect
pour les principes, il faut dire qu’il est extraordinaire qu’un créan
cier ait pris l’initiative, avant desavoir s’il y avoit un exploit faux,
et si on le lui opposerait. Il ne peut pas dire qu’il craignoit cet
exploit pour l’avenir, comme on le diroit d’une obligation fabriquée
sans le débiteur. Sa créance étoit exigible; et, au lieu d’en pour
suivre le payement, au lieu de ne voir, même dans l’exploit en
registré ù St. Ànthêm e, s’il existoit, qu’un exploit nul ( i ) , il é*
(i)
« Les huissiers feront enregistrer leurs actes, soit au bureau de leur ré» siden ce, soit au bureau du lieu où ils les auront faits. » L . 22 frim aire
an 7 , art. X X V I .
« Toute violation des formes prescrites, en matière c iv ile , par les lois
» émanées des représentans du peuple, depuis i j S j , donneiont ouverture à
» cassation , quand même elles ne prononceroient pas la peine de nullité.,
l'- \ germinal an 2 , art. II.
�( i5 )
mieux aimé s’en croire empêché, et chercher un faux avec le même
zèle qu’un autre mettroit à en éviter le résultat; en un m ot, se
créer un fantôme pour avoir la jouissance de le combattre.
Mais si Roussel a voulu faire un fa u x , ne vaut-il pas autant
croire qu’il s’en est tenu au désir, et ne l’a pas consommé; ou, si
on veut, qu’ayant son exploit dans sa poche, il a craint les suites
d’un fau x, et l’a déchiré sans en faire usage.
Alors la tentative du crime n ’est pas un délit ; car il fa u t, d’après
la loi ( i ) , qu’il n’ait pas dépendu du coupable que la tentative du
crime n’ait eu son succès.
i
Ce principe nouveau est conforme aux anciennes m axim es, qui
ne regardoient le faussaire comme coupable, que s’il usoit de l’acte
faux. S i talis utebatur illo instrumento fa ls o .... quia s i non produæerit, non potest com pelli producere (2).
'
Les auteurs admettoient m êm ela résipiscence en cette matière,
au delà de la production de la pièce fausse.
« Aujourd'hui, par l’usage, il est permis en France à tous ceux
» qui ont produit des pièces fausses, quoiqu’ils en aient été les
» fabricateurs ou n o n , de s’en départir, sans pouvoir être recher»chés.... Seulement ceux qui les ont produites sont, nonobstant
» cette déclaration, responsables des dommages-intérêts (3). »
Qu’on avoue donc que le cit. Barrière s’est grandement écarté
de ces principes, en faisant incarcérer plusieurs citoyens, pour la
prétendue falsification d’un exploit dont on pouvoit ne pas se
servir, et qu’on ne lui avoit pas opposé, même indirectement.
Si Roussel aussi n’a pas fait un faux, à plus forte raison faut-il
dire que le cit. Dupic n’est pas coupable de l’avoir préparé et faci
lité. Cette vérité est si claire, que le moindre raisonnement seroit
oiseux.
(1) Loi du 22 prairial an 4.
(2) Boerins , d t 'd s . 29t. J11I. c la r ., liv. 5.
(3) Bornier, toui. I I , pag. m . Scoevola, a d leg. 2 4 , d e ja ls i s . P ap on ,
livre 7.
�C 16 )
Toule l’accusalion, on le répète, porte sur. Roque et Roussel.
Us pourvoient être coupables , sans que les autres le fussent : mais
s’il n y a pas de faux pour eu x, il n’y en a pour personne. Il est,
au reste, démontré dans la première partie que le cit. Dupic y est
absolument étranger.
Aucune loi ne peut être invoquée contre ce qu’il a fa it; et sa
position est tellement favorable, qu'il peut défier son dénonciateur
de motiver un jugement qui le condamne.
L e conseiller d’état Portalis, qui a présenté la première loi déjà
décrétée du code civil, a dit : « Il faut que le juge ait le droit d’in» terpreter les lois, et d’y suppléer : il n’y a exception que pour
» les matières criminelles. L e juge, dans ces matières, choisit le
» parti le plus doux si la loi est obscure et insuffisante, et il absout
» l’accusé si la loi se tait sur le crime (i). »
Voilà le dernier état de la législation. Si le cit. Dupic craignoit
une peine, il trouveroit là l’expression positive de son absolution :
mais cet examen n’appartient qu’à ceux des accusés qui auroient
des reproches à se faire; le cit. Dupic ne veut se présenter qu’à
découvert et sans armes, parce qu’il se repose autant sur l’impar
tialité du tribunal dont il attend la décision , que sur le témoignage
de sa propre conscience.
Chacun ici peut être sainement jugé par ce qu’il a fait. Privât,
accuse, avoue avoir cherché des huissiers, sur la réquisition de
H ousse!; Roussel, accusé par Dupic lui-m êm e, ne l’accuse p as,
même en récrimination ; Roque, accusé, se cache : Dupic seul a
prévenu les recherches de la justice.
Mais il est accusé ; il esl en butte aux conjectures. Que ceux qui
sont prompts à juger jettent un regard sur eux-mêmes : les actions
les plus indifférentes peuvent avoir des résultats fâcheux. Personne
ne peut se dire assuré d’être à l’abri d’une accusation.
E n niisujnS, il n’y a pas de fa u x , parce qu’il n’y en a pas sans
la pièce fausse.
(i) Code c i v i l , première livraison
, page 17.
�t y 0)
Cff.
C 17 )
Il n’y a pas de fa u x , parce qu’on ne voit pas si l’original, sup
posé existant, mentionne faussem ent que les copies ont été posées.
Il n’y a pas de fa u x , parce que le contraire de la suppression clés
copies est prouvé par le rapport qu’un créancier a fait d’ une copie.
Il n’y a pas de faux, parce qu’une suppression de copies n'est pas
un faux.
Il n’y a pas de corps de délit, et il y a nullité, parce que la pièce
arguée n’a pas été déposée au greffe, d’après le texte de la loi.
Ainsi le délit n’est pas constant.
S ’il y a fa u x , il est constant qu’il a été machiné entre Roussel
et Roque seulement, et que le citoyen D upic, après avoir remis
un projet d’exploit aux parties, n’a eu aucune part directe ni in
directe à ce qui s’est passé ultérieurement.
Ce qu’il a fa it, lors de la vente et depuis, marque sa franchise
et l’ahsence des précautions que la fraude n’oublie pas. Ce qui a été
fait hors sa présence ne laisse pas douter que, s’il se méditoit un
fa u x ; on le préparoit et on l’a consommé sans lui.
Bien loin donc qu’il soit constant que le cit. Dupic soit complice
d’un faux, il est au contraire très-constant qu’il ne l’est pas.
Ainsi s’évanouit une accusation grave et pénible, dont le résultat
éloit aisé à prévoir, mais dont le caractère médité et haineux a
besoin de toute l’attention d’un tribunal éclairé et intègre. L e cit.
Dupic la demanderoit à titre d’indulgence, s’il n’étoit certain de
l’obtenir à titre de justice. Il ose seulement demander célérité, dans
l’impatience bien juste d’être rendu à son état, à sa femme, à ses
enfans, et de ne plus courber sa tête sous le poids insupportable
d’une odieuse diffamation.
L. F. D E L A P C H I E R , homme de loi.
>
�( 18)
i
L e JU R IS C O N S U L T E S O U S S IG N É , qui ¡1 vu le mémoire justifi
catif pour le cit. D upic , signé du cit. Delapchier son conseil , adhère
entièrement aux principes qui y sont développés ; pense que l ’application
en est juste ; e t , par une suite , il est d’avis que le cit. Dupic doit être
a c q u itté sans difficulté' de toute inculpation , dans une aff.iire où la justice
est à la recherche d’un f a u x qui ne paroit pas e x is te r , et qui d’ailleu rs,
en le supposant réel , seroit absolument étranger à cet accusé.
Il n’y a point de corps d e d é l i t , ni par conséquent de coupables.
On prétend en effet que l’huissier Roque , chargé de notifier un contrat
d’acquisition, le certificat de transcription et les extraits des inscriptions
hypothécaires subsistantes , aux créanciers in scrits, pour satisfaire à l’ar
ticle X X X de la loi du 7 brumaire an 7 , se borna à faire un original
de notification, et supprima les copies, afin de priver les créanciers de
la faculté d’enchérir.
L a représentation d ’une des cop ies, faite par l ’un des créanciers , dément
déjà l’assertion qu’il ne fut fait qu’un simple original ; mais quand la sup
pression des coptes seroit vraie , ce fait matériel ne constitueroit pas lui
seul un faux , il n’en résulteroit qu'une n u llité dans la notification. Pour
constituer le fau x, il faudroit que l’huissier ne se fût pas borné à trahir
son devoir , en ne délivrant pas aux créanciers les copies commandées
par la loi , et qu’il eût attesté dans l ’original de la notification la d é li
vrance de copies qu’il auroit supprimées. Alors , mais alors seulem ent, il
auroit commis un f a u x , par la fa u sseté de la relation qu’il auroit faite,
d ’ un point de fait sur lequel l’acte de son ministère qui la contiendroit ,
étoit destiné à f a ir e f o i .
E n un m o t, le faux consisteroit dans cette relation mensongère , et
ne peut se trouver que là. E h bien , que l ’on produise donc l'original
d’exploit; qu’on le dépose au greffe, au désir de la loi. Q u’on dise au
tribunal : Prenez et lisez ; voyez dans cette pièce la relation mensongère
d ’un bail de copie qui n’a pas été fait : alors l ’accusation aura une base.'
M ais cette relation mensongère , prétendue insérée dans un acte public ,
ne paroit point ; quel est le résultat ? qu’on poursuit une chimère , une
vision. «D ans tout jugement crim in el, la première question tend essen» tielleinent à savoir si le fait qui forme l ’objet de l’accusation, est cous
it tan t on non , » nous dit l’article C C C L X X IY du code des délits et des
peines.
Or , lorsque le tribunal sp écial, dont les membres cumulent les fonc
tions de jurés pour reconnoitre le f a it , ayec colles de juges pour appli-
�19
quer la loi ,î s’inte r r o g e r l u i m êm e et se dem an d era L e fa it dé noncé .
savoir
q ue l’ huissier R o q u e a m entionné . dans l'origin a l d e n otifica
tion. don t il s 'a g i t , qu 'il avoit d é livré copie a chaque c r é a n c i e r i n s c r i t
est-il con stan t : Et p o urra-t-il ,sans voir, ,1a pi è c e r é p o n d r e a f f i r m a t i
v e m e n t Ou i , l e f a i t es t c o n s t a n t N on sans d o u te , et p a r l a croulera
tou t l'éd ific e que l’on a bâti en l’air. L ’huissier sera nécéssairem en t absous
faute de corps de d e l i t c o nstant: O r s i l e p r i n c i p a l a c c u s é e s t a b s o u t
à d é fa u t d e c o r p s d e d é l i t , c o m m e n t p o u r r o i t - i l a v o i r d e s c o m p l i c e s
• M ais, tout décisif q u ’est c e moyen pour faire acquitter le cit le cit. D u p ic
p a r le tribunal , il ne suffiroit peut-être pas pour l e j u s t i f i e r d e t o u t s o u p ç o n
aux yeux du publ ic. L a m a lig n ité d ir o it s 'il a é c h a p p é à la p e in e c'e s t
que la p iè c e a rg n é e d e fa u x a disparu. Eh b ien ! la malignité va se taire
aussi car en supposant qu'il eut été commis un faux par l'huissler Roque
et que le délit fut prouvé , la prévéntion la p lu s a rm ée seroit dans l’im
.
puissance d’élever c ontre D u pic même u n s o u ç o n r a i s o n n a b l e d 'a v o i r
participe à l a prévarication de cet officier ministériel Que produit-on
contre D u p ic ,
M a is
en effet ? un projet de notification écrit d e sa main.
d resser le, projet d ' un acte de procédure voulu p a r la lo i e s t c e
c o mmettre un crim e ? Com m e la passion est aveugle ! Au lieu de l'a ccu ser
la production de
ce projet s u ffit s e u le p o u r p u b lie r s o n in n o c e n c e c a r
e n f i n u n p r o j e t d r e s s é p a r u n a v o u é n 'a u r o i t p a s c o u r u l e m o n d e , i l
auroit resté entre les mains de l'avoué rédacteur , si ce lu i c i a v o it d u
être l'artisan et le m inistre d e la dénonciation ,si la transcription du
projet s'étoit fait chez lui s'il avoit fait signer
l ’original de confiance
p a r l ' h u i ssier R o q u e s ans le charger des c o p i e s
Du fait constant que le projet produit p a r les moteurs de cet te affaire,
étoit sorti des mains de D u p ic , résulte d on c la conséquence qu'il l’avoit
livré à l'acquéreur p ou r qu ’il fit faire sur ce type les notifications voulues par la loi ; que dès-lors rien de ce qui s 'e s t f a i t d e p u i s n ' a é t é f a»i *t
n i p ar lu i, ni sous sa direction. Enfin ,q u e s i l 'h u i s s i e r a v o i r p r é v a r i q u é
dans ses fonctions , en vendant sa signature au bas d ’un exploit par leq uel
il auroit attesté faussement avoir délivré d es c o p ie s q u i n’ont jamais été
rem ises, tout cela seroit com plétement prouvé étranger à D u p ic , par la
seul production de son projet.
'
à Clermont-Ferrand -, l e 15 fl oréa l ,an 1 1
BERGIER
A R I O M , de l’imprimerie de L A N D R I O T , seul im prim eur du Tribunal
d ’appel. — A n X I .
V
I __
1
�" f t * * - « * * n, /
7 ¿ l -------(
V ~ 'u *"*■ “ •"> *= **- w a «.
° ^ Hoor « * * % & _ » Ù. U ^ & s r 'h '* i } f ¡~ + X á u r
^ ***•&. ^ <ax»W i Ì .
'^ /
,UU^
^ 'fc<rÉ ^ j r
A iu t& f
/ y / °''
tM»
auuu^o cA t^aw JU utn xi 'i * . .
Ok>HAivi o b u 2 r » r
S fw Jt í^ »*A“
#D«uo<A^ / t ^
Mlk^WM. <AMlÚ^- t)«.
^ " W " * ^ ¡^ u«m (T Í
® * * * '* - U < x »
^U toM t/tt-
¿LCMm Í Ci^JwÚ r- <\ cZc^
Ì
A
U.
(M tU M .
« U U lU
Í» ^ * * * C S ÍU
vi cA>- (o tin & x ^ ^ * .' »*«> A*xt^\\*jtr •>• « J f e í í r «k*i«uí
•■ t*x «MO»IUA*j
/fr «» t e l*
4 \ ^ Jm
&M CA¿ C u* IW V ».
'1
^
^M X U /¿LCW v^kól
^
( ¿ S iy < M A
y tu i
4
UM «
(M IA « p *
^ U*'*M
/o. ^«Jbr «Lu / ít a « ¿ » ir / ova
/tJ£U.
*
/
y, /v ^ ^ " W ^ w jo U
^ - / c w v / k L ^ ‘ w * r^ ',Ä -*/
p ^ 'U <*Ar CWVla/S^T-
o X . u í ÌS.
^ 1* J W t^ Y M A
v,
^AAMUXT 6 m
^-*.VI bvr cü«A lt=ar-^Ä » é t M t J f j J ^ y , il< u ^ f> J
ÿfotAtp* ^
CA^JkA. W « O ^ K --- W * A * k ‘ J ,
O/txvl CAA- U iu A fts ^ r
/’ *
i
L
Í
J
¡
^
ttrjA f^ A A T
y V j . « r ; / W ~ ------ * - « * - " * — -* V ~
O r t 't J f i r w M '^ O I i á .
«k. «AA^-nI
0 aa¿(
(d u a / im J
IU|4 U ^ m^i
/ ' tw
* nuM
•
/Vu tw• ^-v
i r '
‘P*+ V« i' f»<>
¿ « .«
- • f'«»»Atvvj/,
vr
f V
^
O^ c u l t o r
.
"** * - / ^
^Ow«A A i ^CAIUA (Ji /Ía / (iiaAxiiiA>(
- .
/
'
^ Ú Í m í . ^ w » .u t iÁ ^ A » w * a r cui^ mm^ - - .
^IU^OmmMj a»>Jt<r«Mr ^ « ^ * €*->
4*
tv (**rfàtm ft ' iï^ /NVl
Î * ÿ L ,'f> * r
^
r Ä*K f C^A*ir»ÍUM
4
ß jjy/^.i
|^ > ,
< u tï/ Ç /*> *■ ?, » - />
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Dupic, Antoine. An 11]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Bergier
Subject
The topic of the resource
huissiers
faux
fausse identité
corruption
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Antoine Dupic, avoué à Ambert, accusé de complicité de faux ; contre le commissaire du gouvernement, poursuivant, et le citoyen Barrière, plaintif.
Annotations manuscrites.
Table Godemel : huissier : le défaut de délivrance de copie par l’huissier, ministre de l’acte, ne constitue qu’une nullité dans la notification. pour constituer un faux, il faudrait que l’huissier eut attesté, dans l’original, la délivrance de copie qu’il aurait supprimée (l’original n’était pas représenté).
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
An 2-An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1225
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0227
BCU_Factums_M0312
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53183/BCU_Factums_G1225.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ambert (63003)
Saint-Germain-l'Herm (63353)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
corruption
fausse identité
Faux
huissiers
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53195/BCU_Factums_G1306.pdf
147187eed80fea81b09759740d0d1170
PDF Text
Text
PRECIS,
COUR
d
Servant de réponse à Griefs et Moyens d’appel
signifiés le 2 thermidor an 1 2
POUR
M
T R E IC H D E S F A R G E S , v e u v e L a c h a u d ;
J e a n C O U D E R T ; et L é o n a r d C H A D E NIE R , v e u f
d ’A n t o in e t t e B e y n e s , tant en son nom qu’en qua
lité de père et légitime administrateur de ses enfans ;
tous h abitans de la ville ou commune de M ay m a c ,
intim és;
a r ie
CONTRE
J e a n - B a p t i s t e T R E I C H L A P L E N E , habitant
du lieu de la P lè n e , commune de M a y m a c, appelant
de sentence rendue en la ci-devant justice de SaintA ngel le 17 m ai 1782.
D E s mines de charbon, abondantes et précieuses ? qui
devroient être p o u r les parties une source de richesses,
ont donné lieu jusqu’ici à des procès ruineux. L ’appeA
’a p p e l
SÉANTe
A RI OM.
�V&
* . V.
( O
lant, au lieu de contester un droit évident et certain,
auroit dû. se réunir aux intimés , pour obtenir du gouvei’nement l’autorisation nécessaire. Il a voulu se livrer
à une discussion qui ne peut le conduire à rien d’utile.
Il ne doit pas se flatter qu’une possession furtive et clan
destine détruise un titre authentique : ce n’est point en
cachant sa jouissance qu’on peut acquérir une prescription.
F A I T S .
L e i er. décembre 1736, François Beynes , aux droits
duquèl sont lès intim és, vendit à Jean Beynes, dit char
bonnier , deux pièces de terre , situées dans le village de
la Pleau, l’une appelée le B a sn et, et l’autre la Charouillière.
L e prix de la vente fut fixé à la somme modique de
145
16^; mais le vendeur déclara se réserver, du con
sentement de l’acquéreur, la moitié du charbon qui
pourroit se creuser ou s’cxtraire dans la pièce de terre
appelée la Charouillière. Les frais d’exploitation devoient
être supportés par moitié entre le vendeur et l’acquéreur.
L e 25 mars IJ 55 , Pierre Beynes, fils de Jean acqué
reur en 1736, vendit à Jean T r e ic li, père de l’appelant,
différens immeubles où il y avoit des mines et carrières.
La terre de la Charouillière fut comprise dans cette
vente, avec les mines et carrières; et, dans le contrat, il
ne fut fait aucune mention de la réserve exprimée en
l’acte de 1736; au profit de François Beynes, vendeur
originaire.
Le 29 août 1768 Antoine Beynes, fils de François,
�C3 )
vendit à Marie la P l è n e v e u v e Treich , mère de l’ap
pelant, tous les héritages et mines jde charbon qu’il possédoit au communal de la Pleau.
Ce même Antoine Beynes, fils de François qui s’étoit
réservé en 1736 la moitié du charbon qui pourroit s’extraire dans la terre de la Charouillière, voulut user de
cette faculté ; e t, pour y parvenir, il proposa à la daine
Marie Treich Desfarges 9 veuve Lachaud , et à Jean
C oudert, un traité d’association.
L a dame veuve Lachaud, et Jean C oudert, étoient
propriétaires, chacun d’un q u art, des mines communes
de houille ou charbon de pierre qui se trouvoient dans
le village de la Pleau. Ces mines étoient contiguës à celles
de la Charouillière, de sorte qu’on pouvoit; exploiter ces.,
dernieres par les premières ; ce qui facilitoit infiniment
l’opération d’Antoine Beynes.
En conséquence, le i 5 décembre 1 7 7 7 , il fut passé
un traité, par lequel il est convenu que la dame veuve
Lacliaud , et Coudert, demeurent associés au droit qu’a
Antoine Beynes , de creuser dans la terre de la Cha
rouillière.
Cette association est faite par tiers, en supportant dans
la même proportion les frais de fouille et creusement, qui
sont à la charge de Beynes, conformément à l’acte de
1736 , relaté au traité.
Beynes, de son côté , est associé..au droit qu’ont la
dame veuve Lachaud et Coudert, de creuser dans les
communes du village, aussi pour un tiei-s dans la pro- ,
portion du d roit, en supportant aussi un tiers des frais.
Mais il est expliqué, entre les parties, que si Beynes n’a voit
A 2
�^' 1*0
- *
( 4 )
j
i
!,
;
!
pas le droit' de creiiser et prendre la moitié du charbon
de la Charouillière, la société n’auroit aucun effet,
En exécution de ce traité de société, les parties avoient
commencé l’exploitation , lorsque le 6 août 1781 la veuve
Treich la P lë n e , représentée par l’appelant, se plaignit,
devant le juge de Saint-Augel, dès fouilles qu’elle disoit
avoir été faites à son insu dans la terre de la Charouilliir e , dont elle se regardoit comme seule propriétaire.
Elle demanda et obtint des défenses provisoires de
continuer la fouille ; mais, en attendant, elle prit un autre
moyen pour empêcher les intimés de creuser chez eu x:
elle chercha à les engloutir dans leurs mines, en prépa
rant un éboulement de tex’rein qui fut sur le point de
leur être fatal.
Les intimés rendirent plainte contre cette veuve témé
raire; elle fut décrétée de soit ouï : mais les parties furent!
ensuite renvoyées à fin civile -, les' défenses provisoires
faites aux intimés furent levées en donnant caution.
Ea discussion s’entama sur le fond ; toutes les demandes
furent jointes ; et enfin, le 17 mai 1782 , le juge de SaintA ngel rendit un jugement définitif après appointement,
par lequ el, « sans avoir égard à la demande de la dame
«> la Plëne , veuve Treich , du 6* août 1781 , tant sur le
« chef de propriété de la totalité des carrières à charbon
« par elle prétendues lui appartenir en seule dans le
« champ de la Gharouillière, que sur le chef encore de
« son a c t i o n eii trouble, à raison de l’ouverture et d e 1
«“l’exploitation des fouilles par elle prétendues avoir été
« faites par les intimés;
« Sans avoir pareillement égard à la prescription’ op- -
�te l
» posée par la dame la P lè n e , dont elle est déboutée»
« faisant droit sur les conclusions de la dame veuve.
« Lacliaud, Çoudert et Beynes, les déclare propriétaires
« chacun pour un tiers,; tant-de la moitié entr'eux trois
« dans les carrières de cliarbdn de la pièce de terre de 1
« la Charouillière ,; appartenante en superficie en son« entier à la dame la Plène,.que' de la moitié encore
«- entr’eux. trois à eux appartenante, et à chacun d’eux
«• pour un tiers, du communal de la P lea u , et des car
te riùres- en. dépendantes.; Il est fait défenses à la veuve
« la Plène de les troubler’dans leur propriété.* »
t
- M ais, « attendu que Beynes, non plus que ses associés,
k:' n’ont point réclamé dans le temps contre l’exploitation.
« et perception de charbon que la veuve la Plène a faite, .
« avant l’introduction de l’instance, dans les lieux con«- tentieuX'j publiquement et o u vertem en ten vertu de
« son Contrat du 2Ô mai 1755 , et au vu et au su tantr
« dudit Beynes que de ses associés, sans opposition ni
« réclamation , ni offres de leur part de parfournir ù la r
« moitié des, frais et-impenses de creusement , pour se
« procurer leur part revenante du charbon creusé avan t.
« l’introduction d’instance,, là veuve la Plène estj rën« voyée de cette demande, déchargée de- tout compte
« du charbon extrait, comme les associés sont renvoyés, t
« et déclxargés-de tout compte de clujrbon creusé et perçu ,
« par eux sur les lieux contentieux compensa tidn//ctr
« décharge demeurant respectivement-faite ,à ce.L égard ,
« et entre toutes parties, etc. çtc. »- . I-es autres dispositions du jugement sont inutiles à i
Appeler : on n’a môme rapporté cQtte dernière partie
° 4*
�( 6 )
qu’à raison de ce que l’appelant entend se faire un moyen
de prétendus aveux, q u i, dans son système, résultent
des expressions de cette partie du jugement.
L a dame veuve la Plène interjeta appel de cette sen
tence devant le sénéchal de Tulle ; mais, pendant que les
parties discutoient entre elles, survint un tiers qui sut
profiter de ces dissensions.
Un sieur Fénis Saint-Victour se fit concéder par l’in
tendant de Limoges l’exploitation de ces mines contentieuses; il en a joui exclusivement jusqu’en 17 9 1, et alors
la suite du procès étoit sans intérêt.
Mais une loi du 28 juillet 1791 rendit aux proprié
taires de la surface le droit d’exploiter les mines, et voulut •
qu’on leur donnât toute préférence pour l’exploitation,
lorsqu’ils la demanderoient.
Eu vertu de cette lo i, les anciens propriétaires se remi
rent en possession. Ils jouirent des mines dont il s’agit
jusqu’en l’an 6\ chacun fit son exploitation particulière;
ils y furent même autorisés par des arrêtés de l’adminis
tration centrale du département de la Corrèze , des 6
novembre 1791 , et 19 juin 1793.
En l’an 6 nouvel ordre de choses. Les propriétaires se
réunirent avec Jean Mazaud , pour l’exploitation de
la Pleau et de Janoueix. Il en fut passé acte le 24 nivôse
an 6 : Mazaud étoit le directeur. Cet acte d’union fut
homologué par arrêté de l’administration , du 23 ventôse
an 6, En conséquence, la concession des mines fut faite
à Mazaud, pour les exploiter pendant cinquante ans, con
formément à la loi.
Mai§ l’article 3 de l’arruté portoit qu’il en seroit donné
�(7)
'connbissance à l’appelant, qui avoit alors succédé à sa
mère. Il devoit déclarer, dans le délai de quinzaine, s’il
; entendoit se réunir aux propriétaires dénommés en l’acte
d’union. Ce délai passé, il étoit censé avoir renoncé à
la faculté qui lui étoit accordée par la loi.
Cette union cependant n’avoit eu lieu qu’à raison de
ce que le directoire exécutif, en confirmant un arrêté clu
ministre de l’intérieur, du 8 floréal an 5 , a vo it, par
autre arrêté du 24 du même m ois, annullé les conces
sions particulières et séparées.
L ’arrêté de l’administration, qui ljomologuoit le con
trat d’union, fut soumis à la sanction du gouvernement:
l ’appelant y forma opposition ; mais il n’a pas été statué
sui cette ;opposition.
’
■
Ce n est qu’après tous ces incidens, après avoir souf
fert la pleine jouissance des intim és, depuis 1791 jus
qu’en l’an 6 , que l’appelant imagina de donner suite à
l’appel interjeté par,sa m ère, de la sentence de SaintAngel. L ’acte de reprise est du 26 frimaire an 7.
. Cette affaire fut d’abord portée au tribunal civil de
la Correze, et ensuite au tribunal d’appel séant à Limoges.
- Alors s’éleva une question de compétence : Les tribu
naux pouvoient-ils connoître d’une matièi’e purement
administrative , sur laquelle le gouvernement exerçoit
une grande surveillance, et dont les administrations
avoient été saisies depuis 1791? Les intimés soutinrent
que le tribunal d’appel de Limoges ne pouvoit pronon
cer sur la contestation. I,’appelant prétendit, au con
traire, que la discussion qui s’élevoit entre les parties
¿toit une question de propriété , qui ne pouvoit être
�;(8)
portée que devant lès tribunaux ; et qu’à k cour d’appol
de Limoges appartenoit seule le droit de prononcer sur
le bien ou mal-jugé de la sentence de Saint-Angel.
Ce système fut adopté par le tribunal de Lim oges,
qui retint la cause, x>ar jugement du 22 ventôse an 9 ,
-sans préjudice du droit des parties pour poursuivre au
près du gouvernement l’homologation de l’arrêté du
23 nivôse an 6 , ou pour s’y opposer.
L e 28 germinal suivant, jugement définitif, qui, fai
sant droit sur l’appel interjeté par la mère de l’appelant,
« dit qu’il a été mal jugé; émendant, garde et maintient
« l’appelant dans le droit et possession où il étoit, à la
«. suite de ses auteurs , avant le 'trouble, de jouir de toutes
« les mines à charbon existantes dans la terre de la Cha-tc rouillière ; fait inhibitions et défenses aux intimés
« de l’y troubler; le relaxe, en.la qualité qu’il agit, de
« l’accusation intentée contre sa mère et ses gens et
« préposés; condamne les intimés solidairement a rendre
« et restituer à l’appelant tout le charbon par eux in« dûment perçu dans la pièce de la Charouillière, sui
te vant l’état que l’appelant cin fournira, sauf contredit,
xi et ce depuis le trouble jusqu’au jour o ù , par l’eiîet de
« la loi du 28 juillet 1791 , l’exploitation des mines
k
dont il s’agit a été concédée par arrêté de l’adminis« tration cenLrale du département de ila Corrèze, en
« date du 23 ventôse an 6; condamne aussi solidairexî ment les intimés en cent francs de ilômmnges-intérêts )
* si mieux n’aiment les parties qu?il's soient fixés par
« experts, sans préjudice à l’appelant de la restitution,
« en temps et dieu;, s’il y échct ;■du charbon que les
« intimés
�w
C9 )
....
« intimés auroient perçu dans la pièce de la Charouîl« lière, depuis l’époque de Parrêté du 23 ventôse an 6,
« et des dommages - intérêts de l’appelant ; déclare n’y
« avoir lieu à statuer sur les autres chefs de la sentence;
« ordonne la restitution de l’amende, et condamne les
« intimés en tous les dépens. »
: :
Les motifs qui ont déterminé le jugement sont intéressans à connoître. On prétend que la i'éserve énoncée en
l’acte de 1736, même du consentement de l’acquéreur,
n’y est apposée que comme un supplément du prix déjà
stipulé ;' que'cette clause n’avoit pu faire retenir au ven
deur la propriété’ de ' la moitié de là mine de charbon
existante sous le terrein aliéné ; qu’il n’en dérivoit en sa
faveur qu’une simple action conti’e l’acquéreur, en ré
clamation de cette moitié de charbon.
Mais On décide que cette action en soi est prescriptible,
comme toutes les auti’es, par le laps de trente années.
Les intimés ont avoué et soutenu que ni François Beynes,
auteur d’Antoine, ni Antoine lui-même, n’avoient jamais
joui de la mine dé charbon depuis le contrat de 1736
jusqu’en 1780, ce qui embrasse un espace de 44 ans.
Cet intervalle de temps est plus que suffisant pour
prescrire une action qui de sa nature se perd et s’éteint
faute de l’exercer dans les trente années, terme préfini
par la loi.
Cette action est prescrite par le non-usage. Jean Beynes,
premier acquéreur , et Jean T reich , père de l’nppclant,
et l’appelant lui-même, ont possédé la moitié d’une mine
avec titre suffisant pour en acquérir la propriété, avec
honnë fo i, et sans interruption, pendant plus de trente
B
�u»,
((IO )
ans., Cette prescription se trouvait „donc acquise, et dèslors l ’examen et la solution des autres questions agitées
au procès devient inutile.
Ces motifs ne sont ni raisonnables ni fondés en1point
de droit. Indépendamment de ce que le droit d’extraire
le charbon d’une mine non encore exploitée-, est une fa
culté de fait qui ne peut se prescrire, ou du moins de
ce que la prescription ne pourrait commencer à courir
que du moment où la mine seroit ouverte et exploitée^
publiquement, et sans réclamation f c’est qu’il n’y a jamais*
e u , dans le fait, aucune ouverture sur la terre de. la Charonilliere ; il n’en existe pas même encore.
S’il a été extrait du charbon dans cette terre, ce
n’est que clandestinement et furtivement, en s’entroduisant par les mines du communal de la Pleau;.
• O r , l’appelant n’a été propriétaire, des m ines,ou de
partie des mines du communal de là Pleau, que depuis^
1768.
On se rappelle que ces mines appartenoient, savoir,
moitié à Antoine Beynes, un quart-à la, dame veuve L acliaud, et un quart à Jean Coudent l’appelant et ses
auteurs étoient absolument étvangçrs. à cette propriété.
Ce ne fut que le 29 août 1768, que la mère de l’appe
lant acquit d’Antoine Beynes la moitié des mines du
communal. Ce n’est que de ce moment qu’il a pu exploi
ter du charbon : 01*,, depuis 1768 jusqu’en 1780, que le
procès a commencé* il ne pouvoit y avoir de prescrip
tion ; le fait est bien évident. -, . .
D ’un autre côté, il n’y auroit pas même de prescrip
tion quand on ivoudroit faire paxtir la possessipur; do
�( -il)
l’appelant depuis 175$. "Antoine Beynes, fils du vendeur
de 1736, ri?est né que le premier août 1733 son père
est décédé en 1745. Antoine Beynes n?est donc devenu
majeur que le premier août 1768; et dépuis cette époque
'jusqu’à la demande',-il*-ne se seroit^coiiléiqU e*vingtdeux ans utiles.
f ) j-.î o.>
L ’appelant ne peut ^prétendre un droit;exclusif Jqu’en
vertu de son contrat de i j 55 , qui ne contient point la
réservç d’exploiter. Il ri’a pü charlger'Jla nature de sa
possession que du 'jour de >sà vente, pûisqiië -Tacquéreur
dé 1736 lui a-laissé‘ignorer la réserve insérée dans son
contrat d’acquisition. Il n’y a donc pas même de pres
cription en point de fait, ‘j ' ■ "
Ces différentes propositions recevront plus de dévelop
pement dans la suite.
. r.
. y{
Sur la signification qui fut faitç aux intimés de ce
jugem ent, ils se pourvurent en-cassation.
Ce jugement a été cassé par arrêtdu 14 nivôse an 1 r , vf e _
et les parties renvoyées en la co u r pour faire statuer sur
les contestations respectives.
Y oici les motifs de l’arrêt de cassation : -■
« V u l’article 8 de la loi du 12 juillet 1791 , ainsi
« conçu :
« Toute concession ou permission d’exploiter une mine
« sera accordée par le département, sur l’avis du direc
te toire du district dans l’étendue duquel elle se trouvera
« situee.1E t ladite permission ou concession ne sera
« exécutée qu’après avoir été approuvée par le roi ,
w conformément à l’article 5 de la section 3 du décret
0 du 22 décembre 1789.
r
B 2
�« V u l’article 13 du titre i o ’de*la loi du 24 août 1790 ,
« qui veut que les fonctions judiciaires soient distinctes
« et demeurent essentiellement séparées des fonctions
« administratives.
« .Considérant que l’administration centrale du dépar« tement de la Corrèze a homologué , par un arrêté
« du' 23 ventôse an 6 , un acte d’union passé le 24
« nivôse précédent, entre les propriétaires des mines
« de la Pleau et de Janoueix ;
« Que cet acte d’union avoit pour but l’exploitation
« des mines en commun , sous la direction de Jean
« Mazaud *,
« Qu’en conséquence de cette union, la concession
_.« des mines fut faite audit Jean Mazaud par Padministra« tion centrale , pour les exploiter, conformément à la
« l o i , pendant l’espace de cinquante ans ;
« Que lorsque cet arrêté fut soumis à la sanction du
* « gouvernem ent, Treich la Plène ( l’appelant ) y forma
. « opposition , et que le gouvernement n’a point encore
« prononcé sur cette opposition.
« Considérant qu’il résulte de la requête d’appel de
; « la veuve Treich la Plène , du 23 septembi’e 1782 ,
« qu’elle concluoit à ce qu’en réformant la sentence du
« premier ju g e, le tribunal d’appel la maintînt dans le
« droit et possession où elle étoit avant le trouble de
« jouir de toutes les mines de charbon de la Charouillière,
« avec défenses de la troubler ;
’
« Que le tribunal d’appel séant h Limoges a néan« moins regardé , lors de son premier jugement du
« 22 ventôse an 9 , la contestation comme du ressort de
« l’autorité judiciaire,
�' ( i 3 ':)
« Considérant que cette contestation étoit èssentiellement administrative, puisqu’elle avoit pour but de
i-enverser la possession , la jouissance, qui dérivoient
de l’arrêté de l’administration centrale du 23 ventôse
an 6 ;
: « Que lors du jugement sur le fond , en date du
« 28 germinal an 9 , Treich la Plène a été réellement
« maintenu dans le droit et possession où il étoit avant
« le trouble de jouir de toutes les mines de la Cha« x’ouillière ;
« Q u’il a été fait défenses aux demandeurs en cassa« tion de troubler T i’eich la Plène dans cette possession;
« Qu’il est évident, sous ces rapports, que le tribunal
. « d’appel ne s’est pas borné à prononcer sur la propriété;
« Que ce tribunal a, par son premier jugement, retenu
« la cause pour prononcer sur la possession- et sur la
jouissance demandées;
.
« Que ce tribunal a ensuite adjugé cette possession
« et cette jouissance à Treich la Plène, en faisant même
« défenses à ses adversaires de le troubler ;
« Qu’il a violé par là les lois ci-dessus transcrites, et
« s’est mis en opposition avec l’arrêté de l’administra. « tion centrale, du 23 ventôse an 6 , tandis qu’il auroit dû
« se borner à se déclarer compétent sur le droit de pro• « priété , sauf aux parties à se p ou rvo ir, après que le
« droit de propriété auroit été fixé, pardevant l’adminis« tration supérieure, pour être établi ainsi qu’il appar« tiendroit.
-,
«
«
«
«
« L e tribunal casse les jugemens des 22 ventôse et 28
*■“ germinal an 9 . »
�'( 1 4 )
En exécution de cet a rrê t, les parties sont venues en
la cour , et c’est en cet état qu’il s’agit de prononcer
aux parties.
L ’appelant a proposé ses griefs contre le jugement de
Saint-Angel. Les moyens qu’il a fait valoir ne sont en
général qu’une critique de l’arrêt de la cour de cassation ;
il a passé très-légèrement sur le fond de la cause, et n’a
pas cru devoir l’examiner.
Suivant l u i , on ne doit plus examiner la question de
compétence. L ’arrêté du 23 ventôse an 6 a été rapporté,
et dès-lors tout,est du ressort des tribunaux.
La question de compétence n’est pas celle qui intéresse
le plus les intimés. Pleins de confiance dans les lumières
et la sagesse des magistrats qui doivent prononcer sûr
leur s o r t, ils n’examineront que subsidiairement ce qui
peut être dans l’attribution de la cour.
L e rapport de l’arrêté du 23 ventôse an 6 ne peut
changer l’état de la cause. Si l’arrêté du 23 ventôse
an 6 est rapporté , ce n’est qu’en tant qu’il homologuôit
le contrat d’union pour l’exploitation des mines , sous
la direction de Jean Mazaud,
Cet arrêté mis à l’éca rt, il n’y a plus d’union ni de
direction ; mais cela n ’empêche pas que le mode d’exploi
tation des mines, ou la concession, n’appartienne tou
jours aux corps administratifs ; que la possession pour
l ’avenir, ou la faculté d’exploiter, ne soit une émana
tion du gouvernement , parce que les mines sont tou
jours une propriété publique , sous l’autorité immédiate
du chef de l’em pire, qui en peut disposer à son gré. Les
anciennes comme les nouvelles lois-n’ont pas varié sur
�1
**$
C
)
ce point-, et si les nouvelles ont apporté quelques modi
fications aux principes anciens, en faveur, des propriétaires-;
de 1a surface, ce n’est que pour leur accorder, une pré
férence lorsqu’ils la demandent ; mais jamais le législa
teur ne s?est départi du droit de concéder ,. ou au moins
¿ ’autoriser, l’exploitation suivant le mode qu’il prescrit. \
, En un m o t, la question de compétence:est jugée ; il
n’y a point à. revenir sur ce point : La jouissance future,
le mode d’exploitation à venir, ne peuvent émaner, que du
gouvernement. Que reste-t-il donc’ à rjuger ? La question
de la nue propriété , qui se réduit à ces termes :
. i°. La réserve portée en la vente de 1.7.36., est-elle,
une simple1 action prescriptible , à défaut de l’exercer
pendant trente ans, ou cette action ne commence-t-elle à,
courir que du jour où l’exploitation, a lieu publiquement 5
et sur le tevrein sur lequel frappe la réserve ?
-2 ? . Une jouissance clandestine et furtive, dans les en
trailles de la terre, sans que le tiers intéressé puisse en
être informé ou instruit , peut-elle acquérir un droit
quelconque à celui qui cache avec soin ses actes de pos
session , et s’empare de la chose d’autrui à l’insu du
maître ?
3°. En supposant une possession publique et utile , se
seroit-il écoulé, dans l’espèce particulière , un temps
suffisant pour prescrire ?
a
_L examen de ces différentes propositions amène néces
sairement certains details sur de px*étendusf aveux ou
déclarations, qui demanderont une discussion particulière
et qui ne tournera pas à l’avantage de l’appelant.
I-a réserve portée en l’acte de 1736 n’a pu prescrire.
�u t
C 16 )
C’est un principe certain en matière de prescription,'
qu’une faculté de fait et non de d roit, f a c t i non ju r is,
comme le disent les auteurs, est imprescriptible de sa
nature : une faculté de ce genre dépend uniquement de
la volonté de celui à qui elle appartient, si et liceat et
lubeat. Telle est la doctrine de Dumoulin sur la Cou
tume de Paris, §. I er. glos. 4 , n°. i 5. D u n o d , dans
son traité des Prescriptions, part. i ,e. , cliap. 12 , n°. 2,
est du même avis, et donne un exem ple, d’après Cancérius, de ce qu’on doit entendre par cette faculté im
prescriptible. L e propriétaire, d it-il, d’un château ruiné
depuis un temps im mém orial, pourra le faire rétablir,
et conti-aindre ses vassaux à fournir an rétablissement,
quand c’est la coutume, ou qu’il y a titre contre eux;
parce qu’encore qu’il y ait ici un droit fox-mé contre
les sujets , et une action prescriptible de sa nature,
elle dépend néanmoins d’une faculté de fait qui est im
prescriptible ; c’est de rétablir le château ou de ne pas
le faire; et cette faculté concerne l’action qui lui est
accessoire.
Ne doit-il pasen être de même du droit qu’on se réserve
d’exploiter une mine dans le champ dont on vend la
surface ? La faculté que se réserve le vendeur dépend
uniquement de sa volonté. S’il veut l’exercer, il en est
le maître ; il peut ne pas en user si cela lui plaît : mais
aussi lorsqu’il veut l’exercer la faculté conserve l’action,
quand bien même il n’auroit pas usé de son droit de
temps immémorial.
Si 011 pousse plus loin l’argument, et qu’on veuille
plier jusqu’à convenir qu’en général une action est pres
criptible ,
�•a « *
( i? )
criptible, il faudroit encoi'e distinguer l’action qui est
toujours active, d’avec celle dont l’exercice n’est pas
continuel. Cette dernière, dit Coquille sur Nivernais,
chap. 1er. art. 16 , ne pourroit se prescrire par une
simple jouissance de la part d’un tiers ; il faut encore
qu’à cette jouissance soit jointe la connoissance vi’aie ou
vraisemblable de la partie intéressée : et telle est la
r è g le , d it- il, en la prescription de tous droits dont
l’exercice n’est pas continuel, n i ordinairement appa
rent. Coquille cite à l’appui de son opinion la loi 2 au
Cod. D e Servit, et aquâ, loi Quamçis saltus, if. D e acq.
velam itt. Poss.
O r , on ne prétendra pas sans doute que le droit
d’extraire ou creuser une m ine, soit une action d’un exer
cice continuel ; on ne peut le faire qu’avec de grands
frais , et dans un temps opportun ; on peut accélérer
ou suspendre ; il peut se rencontrer des empôchemens
ou des obstacles qui gênent ou arrêtent momentanément
l’exei'cice du droit ; et celui qui a la faculté en use quand
il lui p laît, ou qu’il en a le pou voir, sans qu’on puisse
lui opposer la prescription.
S i , comme le dit Coquille , la jouissance d’un tiers
est insuffisante, à moins que la partie intéressée n’en ait
connoissance, l’appelant oseroit-il dire que les intimés ont
connu sa jouissance ou son exploitation ?
Non-seulement cette assertion seroit invraisemblable,
elle seroit encore impossible. En effet, il ne suilit pas
d’une jouissance furtive et clandestine. La clandestinité,
dit D ü n o d , chap. 6 , est un obstacle à la prescription,
parce que celui qui se cache pour jouir est présumé en
C
�( 18
mauvaise foi ; et que cachant sa jouissance,~ les intéressés
qui ne l’ont pas connue sont excusables de ne s’y être pas
opposés. Clandestinum fa c tu m semper presumitur
dolosum. L oi pen. íf. P ro suo. Cliirn possidere eum dici?nus , q u i furtivè - ingressus est possessioJietrt, igno
rante eo quem sibi controçersiani Jacturum .suspicabatur, et ne Juceret timebat. L oi 6 , fi'. D e acquir.
P oss.
' ■
,- •
En appliquant ces principes à l’espèce, si l’appelant ou
sa mère ont extrait du charbon de la terre de la Charouillière, ils l’ont fait furtivement et clandestinement. Il nepourroit y avoir de possession publique, de jouissance connue
de la partie intéressée , qu’autant qu’il y auroit eu des
ouvertures pratiquées dans la terre de la Charouilliere,
sur laquelle frappoit la réserve de 1736; ce n’est que
par cette jouissance publique, que les parties intéres
sées auraient pu être informées ou instruites , et réclamer
contre une exploitation qui blessoit leurs intérêts ou leurs
droits.
. L ’appelant osera-t-il prétendre qu’il a été fait des ouver
tures dans la terre de la Gharouillière ? Ce fait est abso
lument désavoué ; et les intimés offriraient de prouver
que toute cette surface est intacte, qu’il n’a jamais été
pratiqué, ni même fait de tentative d’ouvrir sur ce champ
contentieux.
Les intimés n’ont donc pu perdre leurs droits, puis
qu’ils n’ont pu les exercer ; on 11’a donc pu prescrire contr’e u x , puisqu’il n’y a pas eu de jouissance publique
connue on vraisemblable ; et dès - lors il faut écarter
une prescription q u i, comme le dit D upérier, est tou-
�*4 *
( i9 )
'jours odieuse, que la plus légère circonstance peut faire
disparoître.
- Si l’appelant ou sa mère ont extrait ou pr's à la
dérobée du charbon dans la partie de la Charouillière,
‘ils n’ont pu le faire qu’en s’introduisant par les mines
'du communal de la Pleau ou du bois de Maury qui
'confine cette terre, lequel bois est une propriété parti
culière à l’appelant. S’il s’est introduit par le com munal,
il n’a pu le faire que depuis 1768 , lorsqu’il a acquis la
portion d’Antoine Beynes dans ces mines communes.
;S’il l’a fait par son boisJ, cette entreprise a été occulte et
impénétrable. En un m o t, tant qu’il n’a pas fait de
fouille dans la terre sujette à la réserve, tout ce qu’il
a fait pai* d’autres voies est un acte téméraire et répré
hensible ; il n’y n'ipas d e ’bonne foi , ni de possession
utile : il l’a fait a l’insu de celui qui n’auroit pas manqué
de s’y opposer-, mais qui n’a pas pu le faire tant qu’on
ne le lui a pas dénoncé. Cliun facere videri Cas s i us
scribit eum qui celaçit adçersariurn , neque ei denun-ciavit si modo tirnuit ejus controversiam , aut imere
dcbuit. L o i 3 , §. 7 , iF. Quod vi aut clàm. '
Que l’appelant cesse donc d’invoquer la prescription
et la bonne f o i, lui qui depuis 1780 n’a cessé de vexer
les intimés et de les troubler dans leur jouissance; lui
qui vouloit exploiter exclusivem ent, et mettre à con
tribution ses voisins qu’il regardoit comme des rivaux.
L ’appelant ne paroît pas vouloir contester les prin
cipes qu’on vient d’exposer ; il en critique -seulement
l’application, e t‘ voici à cet égard son raisonnement:
François Beynes, représenté par les intimés, se réserva
C 2
;
t
�( 20 )
à la v é rité , même du consentement de Jean Beynes
acquéreur , la moitié du charbon qui pourroit se creuser
dans la terre de la Charouilliére, en supportant la moitié
des frais d’exploitation.
Il pourroit être fondé à réclamer l’exercice de cette
faculté contre son acquéreur ou ses héritiers. Mais lorsque
l’auteur de l’appelant a acquis cette terre de Charouilliere de Pierre Beynes, fils de Jean acquéreur de 1736;
Pierre Beynes vendit purement et simplement la terre
de la Charouilliére par l’acte du 2 5 mars i j 55 ; ce
contrat ne fait aucune mention de la réserve contenue
en la vente de 1736.
L ’appelant en tire la conséquence que la nature de la
possession a changé ; que lui acquéreur pur et simple,
ignorant la réserve , a été de bonne foi ; qu’il est ici
tiers-possesseur, que dès-lors il a pu prescrire contre cette
faculté par une jouissance de trente ans.
L e principe est vrai en général. L e tiers-acquéreur
qui achète purement et simplement d’un possesseur précaii-e , et qui ignore le vice de la possession, peut pres
crire par une jouissance paisible de trente ans. Mais ce
principe ne s’applique que dans le cas de l’acquisition d’un
immeuble ordinaire ; et tant pis pour le vrai propriétaire
s’il souffre la jouissance ou la possession du tiers sans
réclamer pendant trente ans ; il doit être puni de sa
négligence par la perte de ses droits. Il faut qu’il y ait
quelque chose de certain parmi les hommes ; et une
jouissance paisible anirno dom ù ii, pendant ti’ente ans ,
éteint toute action de la partie intéressée , qui s’est laissée
dépouiller sans sc plaindre.
�i **/
( 21 )
f Mais ici il s’agit d’une mine qui s’exploite dans les en
trailles de la terre. Les opérations de celui qui exploite
ne peuvent être connues qu’autant qu’il en existe des
traces, qu’autant qu’il y a ouverture sur le lieu même,
sur la propriété grevée de la réserve.
Tant que le propriétaite ignore la possession du tiers,
qu’elle ne lui a pas été dénoncée, qu’il n’a pu la con^
noître, ce tiers-acquéreur n’a pu posséder utilement:
la raison s’offenseroit d’une prétention contraire. O r, il
est impossible qu?Antoine Beynes, fils de François ven
deur en 173 6 , ait pu être instruit de l’exploitation.
Il n’étoit propriétaire d’aucun terrein dans le voisi
nage , il ne pouvoit s’introduire dans aucunes mines contiguüs, ni porter un œil scrutateur sur les usurpations
ou les manœuvres occultes de l’appelant.
’
. Il n’a pu le d écouvrir qu’en 17 7 7 , époque où il s’as
socia avec les autres in tim és, pour les mines du com
munal de la Pleau ; c’est alors seulement qu’il a décou
vert la fraude ; c’est en s’introduisant dans les mines pour
lesquelles il étoit associé, qu’il a reconnu les ouvrages,
ou les manœuvres ténébreuses de l’usurpateur , qu’il a
découvert les galeries souterreines pratiquées par l’appe
lant , et qui annonçoient une extraction considérable
commencée depuis long-temps. C’est alors que les plaintes
ont commencé , que l’action est née à die deteçtœ
J r a u d is , le seul moment où il a pu exercer ses droits
et sa faculté droits auxquels il étoit bien éloigné de
renoncer, puisqu’ils sont l’unique cause, l’objet exclu
s if, la condition de son admission il la société stipulée
en 1 777*
,
�(
22
)
Mais ,. objecte l’appelant, les intimés ont connu son
exploitation et sa jouissance : la preuve qu’ils ne l’ont
pas ignoré est consignée dans le jugement de SaintA n g e l, dont est appel: cette sentence, par une disposi
tion expresse, les déboute de la demande qu’ils avoient
formée en restitution ùe jouissances, sur le fondement
que l’appelant avoit exploité en vertu de son contrat de
17 5 5 , au vu et su des intim és; donc, dit-il , il a
prescrit.
A cet argument se présentent plusieurs réponses pércmptoires. i°. Il est difficile d’expliquer cette disposi
tion du jugement d’après la procédure et les écrits des
intimés, où non-seulement on ne trouve aucunes traces
de ces aveux , où au contraire on répète sans cesse qu’on
n’a pu connoître l’exploitation de l’appelant ou de ses
agens. D ’un autre cô té, cette relation seroit même con
tradictoire, avec les dires de l’appelant, qui ne cesse de
s’écrier, soit lors des procès verbaux du bureau de
p a ix , soit dans ses écritures , que son exploitation dans
cette partie ne remonte qu’à dix-huit mois. 30. 11 faudroit encore ici distinguer Antoine Beynes ou Chadenier qui le représente, des autres intimés. En effet, la
dame veuve Lachaud , et Jean Coudert, étoient pro
priétaires pour chacun un quart des mines communes
qui confinent la terre de la CharouiUière, et avoient
pu s’apercevoir de l’exploitation furtive de l’appelunt
ou de sa mère; mais Antoine Beynes étoit dans l'impuis
sance de la connoître avant l’acte d’association de 17 77 ,
puisque ce n’est qu’à cette époque et pour la première
fois qu’il a pu s’introduire dans les mines duconununal,
et par là s'instruire des manœuvres de l’appelant.
�( *3 \
Mais ce qui tranche toute difficulté en point de fait,
c?est qu’il n’y auroit pas même de prescription utile,
quand la relation du jugement seroit aussi vraie qu’elle
est inexacte.
En effet, François Beynes, père d’A n toin e, vendeur
en 1736 , est décédé ¡en 1745 -, son extrait, mortuaire est
produit au procès; il est m ort, comme on voit, avant
1755 , époque de la.vente de Pierre Beynes, fils de son
acquéreur.
Si l’appelant, par cette acquisition, prétend comme
tiers avoir change la, nature de la possession defson ven
deur, ce n’est que du jour de son contrat pur et simple ,
qui ne fait aucune mention de la réserve dont étoit
grevée la propriété de Pierre Beynes.
O r , Antoine Beynes n’est né qu’au mois d’août 1733;
il n’est par conséquent devenu majeur qu’au mois d’août
1758 ; et à partir de ce moment jusqu’en 1780, il ne se
seroit écoulé que vingt-deux ans utiles pour prescrire.
Cette réponse est sans réplique; elle est appuyée sur
un fait qu’il n’est pas possible de détruire ; sur l’acte de
naissance d’Antoine Beynes, qu’op ne peut révoquer en
doute.
Sans doute que l’appelant n’invoquera pas la prescrip
tion de dix ans, admise en droit écrit; cette espèce de
prescription , que les lois appellent usucapió, non-seu
lement exige titre et bonne foi, mais encore une posses
sion continuelle et non-interrompue : H is qu i bonâ Jidc
acceptant possessionern et continuât cnn, jiec interruptani inquietudinc htts tenuerunt , solct patrocinavi.
T-*oi uniq. au Cod. D e Usuc.
�.1
/
.
5 24 )
L e sieur Treich la Plène n’a jamais eu de possession
continuelle ou publique : on a mis en fait qu’il n’y avoit
jamais eu de mine ouverte dans la terre de Charouillière , pas plus dans la partie acquise en 1736 , que
dans celle que possédoit antérieurement l’appelant ou sa
mère. Les intimés ont déjà offert la preuve de ce fait
s’il étoit désavoué ; ou du m oins, d’après la dénégation
des intim és, ce seroit à l’appelant à établir qu’il y va
exploitation par la terre de Charouillère.
Voudroit-il élever quelque doute sur l’application du
titre de 17 3 6 ’, à cet égard encore les intimés n’ont à
craindre aucune vérification, et donnent les mains à toute
expertise.
E nfin, si on considère que depuis la sentence de SaintA n gel les parties ont été privées de leurs mines ; que
le sieur Fénis Saint-Victour en obtint la concession de
¿’intendant de Lim oges; qu’il en a joui jusqu’en 1791 ;
qu’à cette époque les propriétaires de la surface ayant été
réintégrés dans leurs droits par la loi du 28 juillet de la
même année , l’appelant a souffert la jouissance des in
timés sans se plaindre, depuis 1791 , jusqu’en l’an 6;
que ce n’est qu’en frimaire an 7 qu’il a imaginé de re
prendre l’ancienne instance ; on demeurera convaincu
que ses poursuites sont vexatoires, et qu’il est tout à la
fois non-recevable et mal fondé dans sa prétention.
En résumant, la question de compétence ne peut être
examinée en la cour; l’arrêt de la cour de cassation est
absolu en cette partie. Ce qui a pu se passer dans la
suite 11e change pas la nature de la cause. L e rapport de
l'arrêté de ventôse an 6 peut bien ôter à Mazaud, direc
teur ,
�z n
le u r , le droit d’exploiter, peut même anéantir , si l’on
v e u t , le contrat d’union ; mais il n’en est pas moins vrai
que la cour d’appel ne peut connoître, ni de la jouis
sance à venir, ni du mode d’exploitation. Ces objets sont
subordonnés aux règlemens administratifs et à la volonté
du gouvernement.
La seule question soumise à l’examen de la cour est
celle de savoir si Chadenier et ses associés sont ou non
co-propriétaires de la mine de la Charouilliere réservée
par le vendeur en 1736
Si cette faculté a pu se prescrire en point de droit;
si en point de fait il se seroit écoulé un temps suffisant
pour acquérir la prescription.
On croit avoir démontré que jamais l’appelant n’a eu
de possession publique et continuelle, comme le demande
la loi •, que, dans tous les cas, l’action des intimés seroit
toujours entière ; et c’est à quoi se réduit toute cette af
faire, plus effrayante par son volum e, qu’elle n’est dif
ficile dans sa décision.
M . B A R R E T - D U C O U D E R T , rapporteur.
_
M e. P A G E S ( de R i o m ), ancien avocat.
!%
J
Îî*
C
c “ *‘
A R IO M ; de l’imprimerie de L
a n d r i ot
la Cour d’appel.
> >
0 •
, seul imprimeur de
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum.Treich Desfarges, Marie. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Pagès
Vernières
Subject
The topic of the resource
mines
intérêt général
propriété du sol
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
sociétés
charbon
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis, servant de réponse à griefs et moyens d'appel signifiés le 2 thermidor an 12, pour Marie Treich Desfarges, veuve Lachaud ; Jean Coudert ; et Léonard Chadenier, veuf d'Antoinette Beynes, tant en son nom qu'en qualité de père et légitime administrateur de ses enfans ; tous habitans de la ville ou commune de Maymac, intimés ; Contre Jean-Baptiste Treich La Plene, habitant du lieu de la Plène, commune de Maymac, appelant de sentence rendue en la ci-devant justice de Saint-Angel le 17 mai 1782.
Annotation manuscrites: « 12 fructidor an 12, confirmation du jugement, journal des audiences, an 12, p. 553. »
Table Godemel : Mines : 2. peut-on prescrire contre un droit d’usage de mines, réservé par un acte, pour prouver qu’on a exploité ostensiblement, pendant le temps nécessaire à la prescription ? quel est le temps nécessaire pour opérer cette prescription entre présents et entre absents ?
les mines de houille ou de charbon sont-elles des propriétés nationales ou particulières ? Mines : 3. à quelle autorité administrative ou judiciaire, appartient-il de statuer sur les contestations relatives au droit d’exploiter telle ou telle mine, réclamé par plusieurs ?
concession d'exploitation par l'administration départementale
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1736-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1306
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0249
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_M0407
BCU_Factums_G1307
BCU_Factums_G1308
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53195/BCU_Factums_G1306.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Maussac (19130)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
charbon
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
intérêt général
Mines
propriété du sol
sociétés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53196/BCU_Factums_G1307.pdf
8dd98855606fa6e158bfb1d2fbf66fa5
PDF Text
Text
sun
UNE
C O N T E S T A T I O N
R E L A T I V E
A LA
POSSESSION
ET
r_ f
PROPRIETE
DE M INES A CHARBON.
A
DE
RIOM,
l ’im p r im e r ie
im p rim e u r
de
de
l a
LA N D R IO T,
c o u r
A oût 1804.
d ’a p p e l.
s e u l
�MEMOIRE
COUR
D ’APPEL
EN RÉPONSE,
SÉANTE
A RIOM.
POUR
P ie r r e - Jean - B a p t i s t e
TREICH
LA
P L E N E , appelant 7
CONTRE
T R E I C H - D E S F A R G E S , veuve
L a chaud
J e a n COUDER
et L é o
n a r d C H A D E N I E R , intimés.
M arie
,
,
A VEC des titres de propriété , et la garantie des lo is,
le sieur Treich a été jusqu’à présent à la merci de tout
le monde. Un ancien vendeur qui se croyoit intéressé
A
�à lui faire un procès y associa deux autres individus
absolument étrangers à ce débat ; et pendant que les tri
bunaux en étoient occupés, pendant l’appel d’une sen
tence qui n’a besoin que d’être lue pour être condamnée,
un intendant disposa du sujet de la querelle au profit
d’un inconnu. Bientôt celu i-ci trouva en son che
min la révolution , qui lui ôta sa p ro ie, et la remit
aux mains du possesseur, sous la surveillance adminis
trative. M ais, dans la rapide succession des surveillans,
ceux du lendemain détruisirent la volonté de ceux de
la veille; et, après un calios d’arrêtés administratifs con
tradictoires , la confusion alloit devenir d’autant plus
grande, que le procès sur la propriété étoit encoi'e en
suspens devant les tribunaux. Une cour d’appel pro
nonça sur cette propriété : mais, comme si c’étoit un
attentat d’avoir éclairci la diiliculté , on fit un crime à
son arrêt d’avoir confondu l’accessoii’e avec le principal;
et, ce qui doit le plus étonner, la cour de cassation, étourdie
sans doute par cette Babel de décisions et d’incohé
rences , a adopté ce système et cassé l’arrêt comme in
compétent , non pas quant au jugement delà propriété,
mais quant à celui de la possession , qui néanmoins étoit
aussi en litige. Quoi qu’il en soit, cette multitude d’ar
rêtés ne peut-plus aujourd’hui embarrasser la cause;
le ministre de l’intérieur les en a écartés; et il s’agit
simplement de savoir si le vendeur d’une mine, qui l’a
vu exploiter pendant 45 ans sans y rien prétendre,
a p u , après ce long espace, et sous prétexte que dans
sa vente il existoit une réserve dont il n’a jamais fait
usage , réclamer une copropriété contre un tiers déten-
�•
ZS7
( 3)
teur; si encore il le p eu t, après avoir'vendu le surplus
de ses droits sans aucune mention de ceux qu’il veut
faire revivre. Gomme cette cause est tout entière dans
les faits ; que les intimés nient aujourd’hui une posses
sion qu’ils ont avouée dans d’autres temps ; et qu’ils se
fondent sur un seul acte qui est détruit par plusieurs
autres actes et circonstances , l’appelant est obligé de pré
senter ces mômes faits avec un certain détail absolument
nécessaire à l’intelligence de ses moyens.
F A I T S .
A u village de la P le a u , dans le département de la
Corrèze , sont des mines de houille ou charbon de
terre appartenantes à divers particuliers. Jean Treicli ,
père de l’appelant, en étoit le principal propriétaire.
En 1747 ? ü acquit de Pierre Beynes sa portion dans
la terre appelée improprement le communal de la Pleau,
parce qu’elle appartenoit à quatre propriétaires.
L e 2 5 mars 1755 , il acquit du même Pierre Beynes
tout le terrein où étoient ses mines et carrières à charbon,
dans lequel fut comprise la terre appelée la Charoulièra
qui fait l’objet de la contestation. Ledit héritage vendu,
est-il d i t , tant pour ce qui concerne les mines et car
rières à charbon, que pour les bois , terres et buges qui
sont au-dessus , moyennant 3000 thf II fut dit que l’ac
quéreur entretiendroit un marché fait avec le maréchal du
lieu pour sa provision de charbon , et que le vendeur
auroit lui-meme sa provision annuelle dans les carrières
vendues,
A 2
rt'-
�( 4■)
Cette terre de la Charoulière, qui a en surface trois
septerées , avoit été vendue audit Pierre Beynes par
François Beynes, aïeul d’Antoinette, femme Chadenier;
savoir, deux septerées avant 1736, par un acte qu*î
l’on ne connoîtpas; l’autre septerée fut vendue avec une
autre terre par acte du i er. décembre 1736; et cette
septerée vendue y est confinée de jou r avec autre partie
de la même terre, ci-devant délaissée par ledit vendeur
audit acquéreur.
On y remarque encore la clause suivante : « Sous
« la réserve expresse que fait ledit vendeur, du consen« tement dudit acquéreur, de la moitié de tout le eliar« bon qui pourra se creuser dans ladite terre appelée la
« Charoulière, une des deux ci-dessus vendue, à la charge
« que les frais et dépens qui conviendront faire pour
« le déterrement du charbon, se répartiront également
« entre ledit vendeur et ledit acquéreur. » .
Mais tout prouve que cette charge fut rédimée bientôt
après, indépendamment encore de ce qui résulte de l’acte
ci-dessus de l'jôô.
Antoine Beynes, fils et héritier dudit François, tant en
son nom que comme cédataire de ses frères et sœurs, vendit
à Marianne la P lè n e , veuve dudit Jean Treich (mère de
l’appelant), par acte du 29 août 1768, un terrein appelé
Chazalas, « confrontant de toutes parts avec le chemin
« de T u lles, les carrières communes dudit village de la
« Pleau, avec autres carrières et terrein de ladite de« moiselle la P lèn e, etc. ; ensemble les carrières h char« l)on de pierre, pratiquées et î\ pratiquer dans ladite
« pièce de terrein, etc. j comme aussi a vendu à ladite
�)
<*
demoisélle la Plène’ la part et portion appartenante
audit vendeur, èsdites qualités, sur les carrières situées
dans lé communal de Pleau, etc. ; sans par le vendeur
se faire aucune réserve de sa portion dans ledit comm unal, etc; ; demeure chargée ladite acquéreuse d’exécuter les conventions portées au contrat du 29 septembre 1766,' etc. ; de même aussi sera obligée ladite acquéreuse , de délivrer au vendeur et aux siens la quantité de soixante quartes de charbon annuellement,
tant èt si longuement qu’il se l'ecueillera du charbon
dans lesdites carrières ci-dessus vendues, à la charge
que le vendeur ou les siens seront tenus de les creuser
eux-mêmes ou faire creuser à leurs dépens, etc. »
Cet acte de 1766 (lequel seul Antoine Beynes voulut
rappeler ) etoit un ti-aité par lui fait avec Bernard Dodet
pour extraire le charbon de ladite terre Cliazalas, con
frontant, dîsoit—il lui - même audit acte, d’une part la
charbonnière commune, et d’autre part la charbonnière
des héritiers du J e u sieur Treich le cadet.
Antoine Beynes n’avoit guère d’autre ressource que sa
rente de soixante quartes de charbon , qu’il fit valoir
quelque temps, sans avoir garde de réclamer aucun autre
droit en vertu de l’acte de 1736. Il la vendit le 6 janvier
I 7 7 I >et Marianne la Plène la remboursa par acte du 27
du même mois.
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
c
Tout se reunissoit donc à séparer entièrement les in
térêts de Marianne la Plène d’avec ceux dudit Beynes,
lorsque Marie Treicli-Desiarges, par jalousie de voisi
nage , à cause de la charbonnière du communal dont elle
avoit acquis une partie depuis quelque temps, après avoir
�(6 )
essayé de faire à Marianne la P Ièn e,en 1 7 7 5 , un pro
cès criminel qu’elle fut forcée d’abandonner, découvrit
l’acte de 1736, et, ne pouvant en user elle-m ême, elle
eut recours à un moyen jusqu’alors inconnu pour chi
caner un voisin. Elle se fit associer par ledit Beynes ,
en 1777? avec Jean Couder, à la fa c u lté de creuser
dans la terre de la Charoulière en entier, et en échange
on associa ledit Beynes au charbon à recueillir dans le
communal.
A la vérité on ne supposa pas tout à fait que le droit
de Beynes fût bien certain ; car il fut ditque s i ledit Beynes
ri avoit pas ce droit de creuser dans la terre de la Cha-*
roulière, la société ( évaluée à 4
n’auroit aucun effet.
Les tx-ois associés se mirent en œuvre au mois d’août
1781 , firent une fouille dans le communal, où la veuve
Desfarges avoit une portion, et de là ils poussèrent leurs
travaux sous la terre de la Charoulière, qui domine ce
communal.
M arie la Plène aussitôt présenta une requête, de
manda le transport du juge de Saint-A ngel, lequel fit sur
les lieu*:, le 8 août 1781, un procès verbal qui fixa les
prétentions des parties, et qu’il est essentiel d’analiser,
parce que les intimés feignent d’ignorer comment lo
premier juge a constaté des dires qu’ils désavouent à
présent.
Les Desfarges, Beynes et Couder, qui d’abord ne sembloient se défendre qu’en soutenant que leur fouillé'
11’avoit pas pénétré’sous la Charoulière, essayèrent néan
moins le ton offensif, et déclarèrent audit procès verbal
qu’ils preuoieut les démarches de la veuve la Plène pour
�C7 )
un trouble à leur propriété ; que les causes dont sc servoit et s ’était ci-devant servie ladite demoiselle la Plène,
pour tirer du charbon de la terre de la Charouliere,
pox-toient un préjudice notable audit Beynes et autres, au
droit de retii’er du cliarbon de ladite terre, et que ladite
demoiselle la Plène ne pouvoit s’empêcher de leur faire
compte de la m oitié de ce charbon depuis le temps qu'elle
avoit acquis.
Ils ajoutèrent la demande qu’il leur fût donné acte de
leurs réquisitions et réclamations , sous réserve de la
restitution de la m oitié du charbon ci-devant retiré de
la Charouliere par la demoiselle la Plene depuis son
acquisition , et autres que de droit.
D e son côté, la demoiselle la Plène se plaignit de ce
qu’on avoit fait un chemin soutei'rein, pour venir, par cette
feinte adroite, dans sa charbonnière ouverte ,• mais qu’on
ne pouvoit s’aider du titre de 1736, parce qu’il n’avoitpas
d’application , et que d’ailleui's il étoit doublement
prescrit.
Pendant cette première diligence les intimés ne se liatoient pas moins de fouiller le charbon ; ils avancèrent si
rapidement, et avec si peu de précautions, qu’ils pensèrent
se trouver pris sous la galerie de la veuve la P lèn e,
parce qu’ils ne se donnoient pas la peine de mettre des
étais. La veuve Desfargcs crut faire une heureuse diver
sion en rendant plainte.
La veuve la Plène et ses ouvriers furent décrétés de
soit oui, et interrogés ; mais la veuve Desfarges en fut
pour sa tentative, et la procédure fut civilisée.
Ou continua le procès civil, et les intimés prirent, le
�(
8}
20 novembre 1781, les conclusions qu’ils avoient annon-*
céeslors du procès verbal, c’est-à-dire, i°. qu’à Favenir
le charbon fût partagé par moitié ; 20. que pour le passé
la demoiselle la Plène fût condamnée à leur restituer
6000 cartes du charbon qiûelle a retiré et ¿fait creuser
sous le champ de la Charoulière, et ce pour leur
m oitié, à quoi ils se restreignent ; 30. à la moitié dudit
charbon retiré de ladite terre depuis Vinstance 40. en
2000
de dommages-intérêts.
L e 17 mai 1782 intervint la sentence du premier juge,
qui déclare les intimés propriétaires de moitié des car
rières de charbon qui sont dans la terre de la Charou
lière , et de moitié-de celles du communal de la Pleau
(q ü in ’étoient pas en litige); mais, attendu, est-il dit, que
les intimés n’ont pas réclamé dans le temps contre Yexploitation de charbon faite avant Vinstance par la de
moiselle la Plène , publiquement et ouvertement, en
vertu de son contrat de l'/Sô, au vu et su dudit Heynes et
de ses associés, s a n s réclamations, la veuve la Plène esÇ
renvoyée de la demande en décharge de tout compte du
charbon extrait, et ils sont renvoyés eux-mêmes de toute
demande. Le surplus de cette sentence règle le modo
d’exploitation pour l’avenir.
Les Beynes, Couder et veuve Desfarges n’ont point
attaqué ce jugement,
La veuve la Plène en interjeta appel en 1782. Cet appel
fut instruit en la sénéchaussée de Tulle : elle étoit sur
le point d’obtenir justice.
M ais, Sic vos 7ion 7iobis, un nommé Saint-Victour
profita de ces querelles pour persuader que l’exploitation
de
�ΠPi);
de ce3 mines étoit en. .mauvaises- mains ,^ril.* en Qj^igfc,
d’abord de l’intendant de Limoges la concession pour
un an ; puis il fit valoir ses dépenses, l'excellence de son
administration.? .s.Qi>.fVftilité;,
en .^783 une.
concession dt?< q u ^ , a ^ V; I;0 >üfJR;.;, l£ ? b
'-r> ,{
La loi du .28 jnülçt, i 791 -ejçp^aj^ej
^ t?Hr *1
qui néanmoins ne fut pas découragé ¡| et.qui, dans toutes
les phases de la révolution, se tint aux avenues des
administrqtions et de^m^ni^ères,,
sqUicitçr quelques?,
uns des arrêtés ci-après , et.en0venir,fde longue
à,
réussir. -, • • •• • g •j 1,. . t fifr
V» •,*#ï«I «»f ni
Les mines étant squlem eqt,soi^la s^ry^illan^e.^dministrative , les propriétaires de Plenu obtinrent , le
6 novembre 179.1-, un arrêté du départeipent dela.Cor-j
rèze, qui les î-cmettoit en possession de .Jours, caijrièrçs.■
.
Saint-Victour intrigua et prétendit quqlui-seul ayçit mjs>
les charbonnières 011 état de produit; il fallut ides enquêtes
pour le vaincre. Enfin, en 1793, il parut çéder, çt.fit
faire par Beltinger, son asspciq, un .traité avec Pierre-..
Jean Treich appelant;, lequ el, eonçédoit, à prift. fyje ?)
audit Bettinger, l’exploitation de ses mines pendant vingt
ans. L e département homologua ce tvaité le 19 juin 1793^
D ’autres changemens amenèrent d’autres intrigues; On.
fit écrire uu ministre de l’intérieur pfir le ministre de la
m arine, pour les mines de Pleau; on eut des avis de 1$,
commission des mines, d’autres de,celle des travaux pu
blics. On fit ordonner que les propriétaires exploi(,eroient en commun.
,
L e département de la> Corrèze p rit, les 5 ot i 5 plu
viôse an 5 , deux arrêtés qu’il, crut être: en cçnformilv,
• B
.:
..
�A
'f
ç 10, )
.
.
de Ces' reglemëns ; niais ils furent cassés par le ministre
de’ l’intérieur,, le 8 floréal an 5.
Les propriétaires des mines se réunirent, le 24 nivôse
an 6 , 'pour 'organiser une exploitation en com m un, sous1
la direction de^Mazaud. On pressent 'que Treich appe-’
laht, et principal propriétaire, Ae poüvoit y 'participer à
cause du traité qu’il avoit lait avec Bettinger.
Un autre obstacle s’opposoit à cette union. Les arrêtés
des' 6 novembre ¿791 *ét •ig ^ jü ïn ' 1793 subsistoient*
énèôre1, ;,et étoient1 exécutes.0 *•
Mais le bien général ne permit pas sans doute à l’adrniriistrâtion de 'la Corrèzè de se laisser guider servile
ment par des décisions sous la foi desquelles on avoit
traité y et de se laisser maîtriser par dés considérations
particulières. L e ‘plus'difficile! rie fut donc pas de vaincre
ce' léger empêchement : !vui
•*
•“
, , r.........
”:
. . .
' 1D ir u ti t œ d ific a t, mutât quadrata rotundis.
\*
L e département de l’a n '6 cassa, le 23 ventôse, les
arrêtés du département ou plutôt des départemens
de 1791
I 793 * L ’union de la compagnie Mazand
fût homologuée, et il fut enjoint' à Treicli de déclarer
soiis quinzaine s’il entendoit s’y réu n ir, sinon il étoit
censé avoir renoncé à son droit.
Treich se pourvut près des autorités supérieures; il
òsa même élevér sa! v ô ix jusqu’au chef de l’état ; et
biéntôt noiii verrons’ qu’il ii*a pas supplié en vain.
}
Cependant cet arrêté dò l’an 6 ctttit le dernier état
des choses, lorsque l’appel de T re ich , fils et héritier
de Marie la Piène-, fut porté à T u lles, comme tribunal
choisi par les parties : i l !fut ensuite dévolu à la cour
d’appel de Limoges.
�'
C «■ )
Les adversaires , forts de la.-décision administrative ?
contestèrent d’abord la compétence judiciaire : mais
comment un arrêté, auroit - il pu suspendre un appel
pendant? D ’ailleurs l’arrêté ne régloit(.rien sur la pro
priété des parties : la cour de Linioges- retint donc^ la
contestation.
,
, .
■
.
.
un >:r
:••>! • t) o
Les parties plaidèrent au fond ;, et le 28 germinal
an ^
9 intervint l’arrêt suivant
1
« Considérant qu’il résulte du contrat du 1e1'. déçein« bre 1736 une vente pure , simple et parfaite de
« l’entier fonds de la portion de la terre la Çharoulière,
« qui fut vendue par cet acte ;,que la réserve énoncée
« à la suite de cet acte , même du consentement de
« l’acquéreur, n’y est apposée que comme un supplé
es ment du prix déjà stipulé ; qu’ainsi cette clause n’avoit
« point fait retenir au vendeur la propriété de la
« moitié de la mine de chài'bon existante sous le ter« rein aliéné ; qu’il n’en dérivoit contre l’acquéreur
a qu’une simple action en réclamation de cette moitié
« de charbon ; que cette action en soi est prescriptible
« comme toutes les autres , par le laps de trente années;
« que les intimés ont avoué et soutenu, au procès , que
« n i François JBeynes , auteur cCAntoine , n i , ledit
« A ntoine lui-même , navoient jam ais jo u i de la mine
« à charbon , depuis ledit contrat de 1736 , jusqu'en
c< 1780; ce qui embrasse un espace de quarante-quatre
v ans , plus que suffisant pour prescrire ;
« Considérant que cette action est prescrite par le
« non-usage; que Jehn Beynes, premier acquéreur,
« Jean Treich, père de l’appelant, et l’appelant lui-même,
B 2
¿ i»
�* •
r . ***
*1,■
ont possédé ladite moitié clë initie, -ay.cc titre suffisant
pôui* en acquérir là propriété avec bonne foi et sans
interruption pendant plus de trente ans; qu’ainsi celte
prescription àe trouve acquise" èn faveur de l’acquéreur ; qué des-lors l’examen et là Solution des autres
questions agitées au procès deviennent inútiles , etc.
« L e tribunal dit-qu’il a été mal ju g é;.... garde et
« maintient l’appelant aü droit et possession de jouir
« des mines à charbon existantes dans la terre la Cha« roulière ; ... le relaxe de l’accusâtion et plainte;...
« condamne les intimés à lui rendre le charbon par
« eux perçu dans ladite terre , ... depuis le trouble jus
te qu’au jour.... de 1’arrêté du 23 ventôse an 6 ,... et
« 100 ^ de dommages-intérêts ,.... sans préjudice à la
« restitution en temps et lie u , s’il y éch et, du charbon
« perçu depuis ledit jour 23 ventôse an 6 , etc. »
I-es intimés se pourvurent en cassation sur quatre
moyens. Celui de l’incompétence fut rejeté à l’unanimité
en la section des requêtes. L e prétexte de la minorité de
Beynes , qu’il ne prouvoit encore pas régulièrement,
lit réussir l’admission. La Section civile rejeta à son
tour'ce moyen , et s’attacha à l’incompétence : il en est
résulté que l’avis de huit juges l’a emporté sur celui de
vingt-trois.
*
«
«
«
«
«
Quoi qu’il en soit, les deux arrêts de Limoges ont été cas-^
ses le 14 nivôse an 11, pour avoir statué sur la possession
en même temps que sur la p ropriété, parce q u e , dit
l’arrêt, la possession dérivoit de l’arrêté du 23 ventôse
an 6,*.., et cependant cet arrêté avoit été respecté à Lim o
ges comme une barrière insurmontable. Les parties sont
�( i3 )
renvoyées à faire statuer sur leur appel en cette cour.
Les intimés se figurèrent que cet arrêt de cassation étoit
un triomphe définitif, et ils allèrent de suite se mettre en
possession des mines de Charoulière : ils y disposent
aujourd’hui en maîtres.
Mais bientôt les plaintes que Treicli avoit portées au
pied du trône ont été fructueuses. L e ministre a donné
ordre au préfet de la Corrèze de casser l’arrêté du 23 ven
tôse an 6. Cela a été effectué par arrêté du 27 floréal
an 12 , qui permet pour un an à Treich et autres d’ex
ploiter chacun dans sa propriété, à la charge de s’expli
quer dans ce délai pour régler le mode d’extraction ¡V
venir.
N ’y ayant donc plus d’empêchemens administratifs ,
l’appel a ete suivi en la cour. Les intimés ne voudroient
y plaider que sur la propriété; ils prétendent que leur
droit est imprescriptible, et qu’il ne s’est pas écoulé de
prescription , soit à cause de la clandestinité, soit quant
au délai suffisant pour prescrire.
M O Y E N S .
Ce n’est pas un très-grand malheur qu’une bonne cause
soit remise en jugement après avoir été gagnée en der
nier ressort , lorsque la cour suprême n’a blâmé cette
décision que dans un très-petit accessoire. Mais 011 ne
peut s cmpecher de s’étonner grandement que l'arrêt
d’une cour d’ap p el, reconnue compétente pour le fond
du procès et pour la majeure partie des accessoires, ait
été pleinement cassé, sans que cet arrêt, au fond, soit
suspect d’aucun vice.
�(
1
4
)
A u reste, le sieur Treicli se consolera aisément de
cette vicissitude , q u i, en jugement comme en adminis
tration , n’épargne pas les choses les plus irréfragables ;
car si son arrêt de Limoges a été cassé, il a au moins
l’avantage que le moyen de non-prescription, sur lequel
les intimés avoient insisté davantage, n’a pu être accueilli
ni à la section des requêtes , ni à la section .civile , et
que l’arrêt de la cour de cassation, dans tous ses motifs,
n’attaque aucunement l’arrêt de Limoges dans les ques
tions de la propriété, et même de la possession antérieure
à l’an 6 , mais seulement pour s’être mis en opposition
à l’arrêté du département, du 23 ventôse an 6.
Les motifs de cassation font naître une idée bien na
turelle : car ils sont fondés , non pas sur le droit qu’avoit
la compagnie Mazaud à la possession, mais sur la pos~
sibililé qu’elle y eût droit, quand le gouvernement auroit
ratifié l’arrêté de l’an 6.
O r , Mazaud n’ayant plus ni arrêté ni expectative , ne
faudroit-il pas dire que sublatâ sausâ tollitur effectus ?
et que la cassation étant fondée sur une condition nonsuivie d’événement, il n’y a aucun obstacle à ce que l’arrêt
de Limoges subsiste.
On répondra qu’il y a chose jugée ; mais on se dejnanderoit laquelle ? et cette réponse même nous con- du ira au moins h être persuadés que c’est bien sans
nécessité, et surtout sans motifs existans , que le droit
des parties est remis en litige.
D’Argontrédéploroit la misèredesplaideurs et l’éternité
des procès: M iseri litigantes 1 de quibus nihil certi est
c o n s l i t u t u m , et quod ah arbitrio cujusqtte et opinatione
potiùs pendet, quant àccrtis regulis. Mais qu’auroit-ildit
�2.(yOÿ
( i5 )
si, outre les tribunaux, il eût fallu parcourir lin cercle d’ad
ministrations sans être plus certain le lendemain que la veil
le , et sans que ces administrations le fussent elles-mêmes?
Quoi qu’il en soit, supposons, car il faut bien le sup
poser , que les choses sont au même état que lors de la
cassation, et par conséquent qu’il existe un arrêté du'
23 ventôse an 6.
Si cet arrêté subsistoit aujourd’h u i, la cour auroit à exa
miner encore la même question de compétence relative
ment à la possession des mines; et il seroitbien difficile,
on ose le d ire , qu’elle se conformât mieux que la cour
de Limoges à la démarcation des pouvoirs; car pourroitelle faire plus, que d’arrêter ses condamnations à l’époque
où l’administration avoit disposé de l’avenir ?
Mais , dans tous les sens possibles, le passé étoit dans
le domaine judiciaire ; les jouissances de 1781 à 1791
étoient en litige par la sentence de S ain t-A n gel , et par
l’appel de la veuve Treich.
—
Les jouissances de 1791 à l’an 6 étoient encore l’objet
de l’a p p el, et on ne peut pas invoquer l’art. I er. de la
loi du 28 juillet 1791 ; car s’il place les mines sous la
surveillance administrative, il n’ôte pas le fait de la pos
session , et d’ailleurs elle étoit autorisée par deux arrêtés
de 1791 et de 1793.
Ces deux arrêtés n’ont été rapportés que le 23 ventôse
an 6 , mais jusque-là ils avoient eu leur exécution, et ce
dernier arrete ne les rapporte aussi que pour l’avenir.
Ainsi Lim oges, loin d’être en opposition à des arrêtés
administratifs, s’y étoit au contraire entièrement con
formé : ainsi la cour, en statuant de m êm e, s’y conformeroit encore.
�c 1 6 }
Maïs elle n’a pas même l'empêchement de cet arrêté,
de l’an 6 ; e t , quoi qu’en disent les intim és, rien ne
s’oppose aujourd’hui à sa pleine compétence ; car l’arrêté
du préiet, en cassant celui de l’an 6 par ordre du mi
nistre, n’a pas borné cette infirmation à un seul ch ef,
comme ils le supposent. L ’arrêté est cassé.
A u reste, il est toujours vrai que la compagnie Mazaud
n’a plus le privilège exclusif. L e droit d’exploiter est
rendu à chaque propriétaire, au moins provisoirement •,
et d’ailleurs encore il est véritablement oiseux de recher
cher quel reste d’existence a l’arrêté de l’an 6 \ car si les
intimés ont joui avant l’an 6 , ils ne doivent rien ù la
compagnie Mazaud , qui n’existoit pas, mais à T re ic h ,
qui avoit le droit de jouir. La question de propriété
emporte donc avec elle la question des jouissances.
A in s i, bien loin de se restreindre à moins que n’a jugé
L im oges, il semble que la cour n’a aucun empêchement
à adjuger même les jouissances postérieures à l’an 6 ;
car la compagnie Mazaud n’a jamais Cil de droit ni de
possession sur les propriétés de l’appelant, seulement elle,
y avoit une expectative au cas que Treich ne réussît pas
dans sa réclamation auprès du ministère. Mais l’arrêté do
l’an 6 n’est plus, La compagnie Mazaud , d’après mémo,
les intimés ( page 14 de leur mémoire ) , n’a plus de
droits ; et s’il est vrai que la possession des mines ait
besoin d’une autorisation , le sieur Treich l’a encore,
obtenue. Ainsi l’effet le plus, immédiat do çolte obten
tion doit être que ceux qui posséderont dans ses pro
priétés malgré lui , doivent lui rendre compte,
A u reste , il s’agit ici de compétence, et par consé
quent
�z ll
( 17 )
quent d’Ordre public : la cour y statuera danà sa sagesse;:
Il suffit à l’appelant de rentrer dans ses 'propriétés ; et»
il n’y voit d’autre obstacle que l’obstination de ses^
adversaires.
; .
=
i
;
. . > •/
• *•
j -;""
»5 C1 i. *' i
. Soit que là cour juge toute>'la ^possession, ou .seule
ment une partie de la .possession ,-il est aù moins cer
tain qu’il n’y a de vrai litige que sur la propriété.
D ’après cela, si l’arrêt de Limoges est cassé, même pour
ce qu’il avoit compétemment jugé’ , le sieur Treich ne,
sera pas plus embarrassé de prouver à Riom qu’-ù,
Limoges qu’il est seul propriétaire de la Charoulière_
et des mines qui en dépendent. Ses preuves à cet égard
ne sont pas équivoques.
i° . Il tient cette propriété de Pierre Beynes. Elle
est vendue sans charges.
. 2°. Son titre est fortifié par le fait même du pre
mier vendeur , q u i, achevant d’aliéner ses propriétés
adjacentes et droits de mines , -ne s’est fait aucune
espèce de réserve.
.•
,
.y
3°. 11 a joui plus de 10 ans avec {titre et bonne foi :
il a joui même plus de 30 ails sans trouble ni récla
mation.
1!
40. Cette jouissance est constante au; procès* ‘ :p i
»
Les intimes ne se. sont pas dissimulés toute la puis
sance dé ce dernier moyen ; aussi ils s’efforcent de la
diminuer par des négations.
Ils n’ont jamais avoué, disent-ils, que Marie la Plène,
.
�c iS )
vcuve T reicli, ait joui, et ris-ne trouvent aucunes traces de
cet aveu ; et l’appelant, au contrâii'e , a toujours d it,
suivant eu x , au bui^eau de paix , et dans ses écritures,
n’avoir ouvert de carrière dans la terre de la Charoulière que depuis dix-huit mois.
A u bureau de paix ? les1parties n’y sont jamais allées.
Dans les écritures de l’appelant ? il a toujours d it , ab
ovo , qu’il y avoit jouissance et prescription. C’est donc!
dans les interrogatoires? Mais de quel interrogatoire a-t-on
voulu parler? est-ce de celui de 1775? est-ce de celui de
1781 ? car la veuve Desfarges est armée de deux procès,
criminels qu’elle a soin de produire avec son procès civil.
L e premier interrogatoire est vraiment une pièce;
curieuse; et, s’il faut juger la sentence de 1782 par les.
interrogats de 177^ , la comparaison ne sera pas trèsavantageuse par la sentence. L e juge demande à la veuve
la Plène s’il n’est pas vrai qu’elle est propriétaire des
moitié du communal, et autres carrières ; .....s’il n’est pas
vrai qu’elle tient sous son joug les liabitans du v illa g e ;...
s’il n’est pas vrai qu’elle a coutume de lasser les parti-,
culiers qui ont essayé de creuser du charbon, etc. Ellerépond qu’elle est proprié taire: de moitié du communal,
et de plusieurs autres carrières particulières ; ...qu’elle
n’empêche pas les particuliers de creuser où ils ont droit,
mais qu’elle a toujours fait ses efforts pour les empêcher
de creuser dans ses fonds.
Ce ne sont là que des*pauvretés , cela est vrai; mais,
au lieu d’y trouver une preuve que la veuve la Plène
ne jouissoit p a s, on y voit au contraire qu’elle entendoit très-bien jouir seule de ses carrières, envers et contre
tous ; elle ne s’en défendoit pas.
�21
$
'( 19 ,)
' Sont-cc les interrogatoires de 1781 ? Car il est parlé
de dix-liuit mois dans l’interrogatoire de Martin Beynes
et dans celui de sa femm e, qui ont rendu compte, de la
derniere excavation qui donnoit lieu à la plainte. Mais la
veuve la Plène explique, dans son interrogatoire du
même jo u r, que cette carrière n’e,st,qu’une continua
tion de creusement ,* et .plus .loin' elle parle encore de
ce nouveau creusement.
,
Comment la veuve la Plène auroit-elle, en effet, menti
à'la vérité contre elle-même, lorsqu’on lit dans les écri
tures de ce même procès de 1 7 8 1 , qu’elle,a toujours
joui. « Les contrats de ven te, dit-elle ( dans la requête
« copiée à la suite de ces interrogatoires dans les pièces
« des intimés ) , ont toujours été suivis d?exécution
« par la jouissance paisible et tranquille que la sup« pliante a eue seule des fonds y mentionnés, notam« ment de la terre de la Charoulière , à l’exclusion de
« tous autres, et sans opposition. »
Non-seulement la veuve la Plène a parlé de sa pos
session constante, mais les intimés ne l’ont jamais désa
vouée en première instance. Leurs réquisitions,au procès
verbal du 8 août 1781 , leurs conclusions.dans la requête
du 20 novembre suivant, qui en font le complément,
ne laissent aucun doute à cet ' égai'd. L ’appelant ne les
rappellera pas, parce que la cour a dû, se convaincre, pav
le seul récit des faits, que ce point de jouissance exclu
sive étoit constant dans la cause.
Qu’y a-t-il encore de plus exprès et de plus concluant
que la lin de la sentence de 1782, pour prouver que cette
C a
�possession a eu lieu au vu et su dés adversaires, publi
q u e m e n t e t sans réclamation.
Ils n’ont pas interjeté appel de cette sentence; donc le
débouté -, motivé sur la jouissance exclusive à leur vu et su ,
demeure inattaquable : le motif et le dispositif ne peuvent
se séparer. Enfin, peut-on douter dé la possession constante
de Treich , après avoir vu les aveux faits devant la cour
de Lim oges, et rappelés dans les motifs de son arrêt ?
Ainsi la jouissance des Treich est constante; ainsi les
Beynes n’ont jamais joui ni fait de réclamation de la
réserve qui se trouve au contrat de 173^. O r , avec ces
points de fait, il sera aisé de prouver que l’appelant
doit être tranquille par la prescription, indépendam
ment des moyens qui résultent des actes de 1768, 1769
et 1771.
V e u t-o n considérer Antoine Beynes isolément, et
comme s’il plaidoit contre Pierre Beynes son acquéreur?
alors, à la vérité, il faudroit une prescription de trente ans.
O r, cette prescription s’y trouve, car Antoine Beynes
n’a jamais articulé avoir joui ; et , de l’époque de sa
vente en 1736 jusqu’à 1781, il y a prescription, comme
l’a jugé la cour de Limoges, car il y a quarante-quatre
ans.
Les intimés essayent d’en diminuer la durée en disant
qu’Antoine Beynes étoit mineur. D ’abord, outre qu’il
ri’étoit 'pis seul héritier dil vendeur, il n’y pas moins
trente-deux ans utiles sur sa tdte; et si les intimés, dans
leurTmémoire (pag. 1 1 ) , veulent trouver neuf ans de
moins, c’est qu’ils ne comptent pas l’intervalle de 1736
à 1705.
�Z i)
( 2i )
* Pour justifier cette déduction, ils disent que c’est en
1755 seulement que la cause de la possession a été changée.
Mais il n’est pas nécessaire de changer la cause d’une pos
session pour prescrire par trente ans; car cette prescrip
tion n’exige aucune autre condition que la possession à
titre de propriétaire; neque Loua fuies requiritur, sedsola
possessio per tricennium. L e Code civil encore rappelle
sur ce point les anciens principes.
- « On peut prescrire contre son titre, en ce sens que
« l’on prescrit la libération de l’obligation que l’on a
« contractée. » (A rt. 2241.)
t■
Nous avons considéré la prescription du côté de Beynes
vendeur, et elle est acquise par trente ans; mais il reste à la
considérer du côté de Treich acquéreur en 1755; et, sous
ce point de vue, il suilit de dix ans de prescription.
■
> La loi comprend expressément dans la prescription de
dix ans les charges auxquelles le fonds est asservi, et
personne ne doute que, dans la plupart des pays de droit
écrit, cette prescription n’ait été constamment admise.
L e parlement de Bordeaux, d’où il paroît que ressortissoit l’ancien Lim ousin, admettoit la prescription de dix
ans en faveur du tiers possesseur, ainsi que l’enseigne
Lapeyrère, lettre P , n". 83.
, A la v é rité , son annotateur inconnu prétend que Bor
deaux n admet que la prescription de 1rente ans. Mais la
cour jugera lequel des deux mérite d’être p référé, au
cas qu’il y eut lieu d’aborder cette question secondaire.
, Lapeyrère avoit d it, au n°. 60, que la prescription
s’acquéroit par dix ans au tiers possesseur, suivant arrêt
de règlement de 1626.
�C 22 )
Mais , au reste , deux moyens prouvent qu’elle doit
avoir lieu dans la cause.
. i° . Tous les parlemens qui ont refusé d’admettre la
prescription de dix ans se fondent sur l’Authentique Malœ
J id e i, et en tirent l’induction que la bonne foi ne se
présume pr.s contre le propriétaire, parce qu’on ne peut
pas présumer qu’il ait connu son droit et n’ait pas réclamé.
Cessât longi temporis prcescriptio, si verus domi~
nus ignoret ju s suum et aliénation em fa ctam . Dans ce
cas il n’y a que la prescription de trente ans.
Mais comment ne pas voir qu’Antoine JBeynes n’est
point dans le cas de cette loi? 11 n’a pas ignoré son droit,
puisque l’héritage vient de lui-m êm e, puisque ce droit
est porté par un titre de son fait.
Il n’a pas même ignoré la vente de i j 5 5 , car en 1766
et en 1768 il reconnoissoit les héritiers Treich pour
propriétaires des carrieres voisines et du ténement de la
Charouliere.
, En second lieu , l’Authentique M alœ fidei ne se rap
porte qu’à la vente d’un immeuble; et les parlemens qui
la reçoivent ont néanmoins continué-d’adopter la pos
session de dix ans quant aux charges et hypothèques
dont l’immeuble lui-même est grevé, et que Dunodm et
sur la même ligne quant à la prescription de dix ans. '
O r , la réserve de partager le charbon à extraire,
énoncée en l’acte de 1736, qu’est-elle autie chose qu’une
charge, une servitude, un droit h des fruits temporaires?
E t 11’étoit-il pas ridicule que le juge de Saint-Angel
appelât ce droit une propriété, et jugeât que les intimés,
même Couder et la veuve Desfarges; étoient propriétaires
�X 7ï
( 23 )
pour moitié', comme si après une ventele' vendeur demeuroit propriétaire; et comme si dans un fonds il y a voie
deux p r o p r ié té s l’une du tréfonds et l’autre de la super
ficie.
M ais, dans tous les cas, il est superflu de remonter à
çette réserve;de 173$, parce que Jeam Treich ayant acquis
£n-1755 -, sans qu’elle fût mentionnée, a joui avec bonne
fo i, au vu et'su du vendeur, qui'connoissoitlson droit;
ainsi ¡l’appelant a prescription suffisante.
- Les intimés répondent que la prescription n’a couru
dans l’espèce par aucun laps de temps; d’abord, parce que
c’est un droit de pure faculté; en second lieu , parce que
s’agissant de possession sous la terre, il y a clandestinitéj
? Autant vaudroit avoir dit etiam per mille a n n o s,
comme le dit Dumoulin sur le Titre vicieux. Cependant,
il'faut cm convenir, il seroit un peu dur de songer que
de vieux titres portant réserve d’un droit peuvent tom
ber des nues à la vingtième génération, et dessaisir ceuxlà même qui- ont pour eux le titre et la bonne foi sans
s’attendre à 1aucun trouble.
‘
L ’espèce de Cancérius, rapportée par D u n od , parmi les
exemples qu’il donne des droits de pure faculté, est déjà
contraire à l’ un des faits principaux de la cause; c’est quo
si le propriétaire d’un château ruiné n’a pas perdu la fa
culté de le faire réparer par les habitans, c’est pnree qu’il'
ne l7a pas reparé sans eu x; sans quoi le dr oi t seroit pres
crit. O r , ici Beynés avoue qu’on a joui sans lui.
Mais, à la pagesuivante, Dunod explique la cause d’une
manière à épargner à l’appelant, une.discussion plus éten
due sur les droits de pure faculté.
�'^VvI*
CH )
« Il faut distinguer entre la pure faculté, qui a son
« fondement dans la nature, dans le droit public commun
« h tous ou à plusieurs d’une même société, et dans la
« liberté de faire ou de ne pas faire certaines choses,
« sans aucune -préexistence ou mélange de litr e , de
« cojivention ou d’action; et celle qui vient d’un titre,
« qui tire son origine iVun co n tra t, qui est propre à
« celui qui a le titre, qui résulte d’un droit form é, qui
« produit une action , et qui peut être déduite en ju
te gemeut.
« La première de ces facultés n’est pas sujette à la pres« cription, tant qu’elle n’est pas intervertie. M ais la se« conde se prescrit sans interversion , parce qu’elle dé« rive d’une convention et d’une action qui sont pres
te criptiblcs et dans le commerce ordinaire, à moins
a qu’elle ne tombe sur des choses qui sont d’une condi« tion à ne pouvoir êti’e prescrites. » (D unod, pag. go.)
- Ces principes s’appliquent sans effort à la cause. L e
vendeur de 1736 avoit son droit dans son propre titre;
il a pu le faire valoir ; il avoit une action : donc sa ré
serve étoit prescriptible, comme l’avoit jugé la cour d’appel
de Limoges.
'
Remarquons d’ailleurs qu’en cette partie les moyens
des intimés s’entredétruisent. Ils prétendent que Beynes
a eu le droit, non pas seulement d'attendre qu’on creusât
pour partagor , mais de creuser lui-même.
-r ' ■
La preuve, c’est qu’il a associé pour creuser ; la preuve,
c’est qu’on a creusé soi-même, et plaidé pour soùtenir
qu’on en avoit le droit.
La preuve cn iin , c’est que la sentence de 1782 adjuge
ce
�C 2 0 ) ................................
cc droit; c'est qu’elle déclare les intimés propriétaires de
la moitié de la mine.
. Une propriété n’est donc pas une pure faculté ; et
conçoit-on un propriétaire qui conserve son droit snns
prescription, quand un autre en jouit d’après lui-même
exclusivement ?
Mais celte jouissance, d it-on , a été clandestine.
A cela il n’y auroit qu’un mot à répondre ; c’est
que la sentence de 1782 dit que la jouissance a eu lieu
au vu et su d’Antoine Bcynes. O r, cette sentence n’est
pas attaquée par les intimés. Dira-t-on que cette sentence
est annullée par l’appel ? Mais il n’y a appel nécessaire
ment par celui qui perd son procès, que pour la partie où
il le perd.
D ’ailleurs, il est de principe que les aveux consignés
dans un acte subsistent malgré son annulation , comme
l ’enseigne Cochin , tome 5 , page 274 , et comme l’a jugé
la cour de cassation le 29 floréal an 7.
Ce qui vient d’ètre dit s’applique ù l’arrêt de Lim oges,
qui mentionne l’aveu de la possession.
Mais l’appelant ne veut pas écarter ce moyen de clan
destinité seulement par une fin de non-recevoir. Car ici
les parties sont loin de ce qu’on peut appeler une posses
sion clandestine : il n’y en a ni dans le fait ni dans le droit.
Dans le fa it, aucun habitant de la Pleau n’a mieux su
que Bevnes tous les tours et détours des charbonnières ;
et quand il se fait un moyen de ce que la Chnroulière
n’a pas eu d’excavation verticale, Usait bien qu’à la Plcau
D
�(26)
on n’a jamais, comme en F lan d re, exploité ces mines
par des puits.
La montagne où est la houille est en cône régulier ;
par conséquent, pour creuser dans une surface, il faut
creusir par une tranchée horizontale au pied du plan
incliné. Pur ce moyen , qui est le seul usité à la Pleau, rien
n’indique mieux où se dirige la fou ille, et il est impos
sible de s’y tromper.
La procédure prouve d’ailleurs que c’est dans un tertre
de la Charoulière que se trouve l’une des ouvertures ;
d’autres sontiiu com m unal, mais au pied de la Charoulière, et en direction de cette mine.
A u x termes du droit, une possession clandestine sup
pose le d o l, c’est-à-dire , l’intention de cacher ce qu’on
fait à celui qui a intérêt de le savoir. Il n’est pas besoin,
pour l’établir, d’aller rechercher d’autres principes que
ceux-là même consignés au mémoire des intimés :
C l à m p o s s i d e r e e u / n d i c i r n u s , q u i F U RTivk i n g r e s s u s
e s t p o s s e s s io n e / } / . , i g n o r a n t e e o q u e m s i h i c o n t r o p e r s ia n ifa d u ru m s u s p i c a b a t u r , e t nefa c e r c t t i m e -
L. 6 , fi'. D e a c q . P o s s .
Voilà donc trois choses qu’il faut regarder comme'
constantes: i°. que Marie la Piène ait jouifuitive/nenl2°. qu’elle ait craint une action de la part d’Antoine
b a t.
Beynes; 3°* (['^’Antoine Beynes ait ignoré la possession.
L:i sentence de 1782 repond a tous ccs faits, en disant
que Marie la Piène n joui publiquement. La plainte de
1775 prouve aussi qu’elle 11e craignoit pas les'mauvaises
�Àï\
‘
( 27 )
contestations ; et enfin les écritures des intimés, ci-dessus
rappelées, contiennent la meilleure réponse à leur moyen.
Mais quand tout cela îvexisteroit p a s, vit-011 jamais
appeler clandestine la possession de celui qui a un titre ?
La clandestinité n’est réprouvée que pour celui qui a
voulu prescrire par le seul, secours de la possession, et
parce que sans possession publique il n’a vraiment pas
de possession.
•
■r'i ,
Mais celui qui a un titre n’a besoin d’avertir per
sonne qu’il jouit ; car c’est en vertu de son titre qu’il pos
sède , et le vice de clandestinité ne lui est point appli
cable.
1
•
Dunod , invoqué par les intimés, après avoir cité la
loi 6 , dit à la page suivante : « Celui qui a joui en vertu
« d’un titre ne peut être regardé comme possesseur clan« destin , son titre le faisant supposer de bonne foi dans
« le commencement; ce qui suffit pour prescrire suivant
« le droit civil. »
1
>
L e Code civil répète que la bonne f o i , quand il y a
un titre , est toujours présumée , et que c’est h celui qui
allègue la mauvaise foi a la prouver. ( Art. 2268. )
.
Les intimés disent qu’on devoit avertir Beynes pour,
fouiller le charbon; mais ils convierinent au nfoins que
l’ usage n’étoit pas de le faire par écrit :’ et d’ailleurs, on
le rép ète, ils se sont dits copropriétaires.
Il 11 y a donc aucun obstacle cà ce que la prescription
ait eu son cours; et ÏYeich ayant un titre et bonne loi
depuis 1755, a valablement prescrit contre les entreprises
des associés de 1777.
•
1
n
Ce n’est pas que la prescription lui soit un moyen néJD 2
�m
y
(
)
cessaire ; c a r, indépendamment de la présomption bien
fondée , que la réserve de 1736 a dû être rachetée comme
l ’a été celle de 1768, par un acte que Treicli avoit dés
espéré de trouver; il doit demeurer, ce semble , pour
chose absolument évidente, qu’Antoine Beynes a renoncé
à cette l'éserve de 1736 par tous les açtes qu’il a passés
ensuite.
Com m ent, en effet, Antoine Beynes, qui a toujours
habité le village de la P leau, qui a passé sa vie dans les
mines de l’endroit ( et on peut en offrir la preuve ) ;
Antoine Beynes , qui en 1766 faisoit un traité pour ex
traire du charbon dans ses propriétés , auroit-il manqué
d’y comprendre la Charouliève, s’il y avoit eu le même
droit d’extraction ?
- ;
• Comment Antoine Beynes, qui vendoit en 1768 tous
ses droits aux mines, en se réservant du charbon, 11’auroit-il pas rappelé l’ancienne réserve ? Tout prouve donc
qu’elle n’existoit plus, ou qu’il y renonçoit.
1 L ’appelant avoit proposé un subsidiaire à Limoges ,
et il étoit fondé ; c’est q u e , dans tous les cas , n’y ayant
qu’une septerée de la Charoulière, vendue en 1736 , et;
cette terre ayant trois septerées, la réserve no pouvoit
frapper ¿{lie sur la terre alors vendue, et non sur celle
qui l’a voit été depuis long-temps : caries conventions no
se réfèrent qu’à l’acte présent, s’il n’y a stipulation con-f
traire; e t , dans le doute., l'interprétation se feroit contre
le vendeur, in euju s potcstale J u it fogem apertjùs dii
cere. La. sentence de Saint-Angel étoit donc encore vi
cieuse, même sous ce rapport.
Cette défense se résume en peu de mots. La propriété
�( 29 )
de la Charoulière est sans difficulté à Jean Treich . I.es
actes qu’il a passés avec les Beynes , prouvent que cette
propriété est affranchie de toutes charges. Il est constant
d’ailleurs qu’Antoine Beynes n’a jamais joui , depuis
1736 , du droit qu’il réclame. Il est constant que Treich
et Marie la Plène ont joui exclusivement et publique
ment , au vu et su dudit Beynes, sans réclamation de
charges ni de copropriété.
Ainsi Beynes a perdu son d ro it, soit contre son acqué
reur , soit contre le tiers-détenteur, par une possession
de trente ans.
Ainsi Treich a acquis la franchise de la terre la Charoulière, par la possession de dix ans entre présens, comme
acquéreur , et même surabondamment, en ajoutant sa
possession a celle de son vendeur , comme il a droit de
le faire, il peut invoquer la prescription de trente ans.
Conséquemment, sous tous les points de vue possibles,
la prétention des intimés n’est qu’une tracasserie , et la
sentence de Saint-Angel avoit été justement infirmée par
la cour de Limoges.
M . B A R R E T - D U C O U D E R T , rapporteur,
M e. D E L A P C H
E R , avocat.
Me. M A R I E , licencié-avoué.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Treich la Pleine, Pierre-Jean-Baptiste. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
mines
intérêt général
propriété du sol
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
sociétés
charbon
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Pierre-Jean-Baptiste Treich La Plène, appelant ; contre Marie Treich-Desfarges, veuve Lachaud, Jean Couder, et Léonard Chadenier, intimés.
Table Godemel : Mines : 2. peut-on prescrire contre un droit d’usage de mines, réservé par un acte, pour prouver qu’on a exploité ostensiblement, pendant le temps nécessaire à la prescription ? quel est le temps nécessaire pour opérer cette prescription entre présents et entre absents ?
les mines de houille ou de charbon sont-elles des propriétés nationales ou particulières ? Mines : 3. à quelle autorité administrative ou judiciaire, appartient-il de statuer sur les contestations relatives au droit d’exploiter telle ou telle mine, réclamé par plusieurs ?
concession d'exploitation par l'administration départementale
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1736-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1307
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0407
BCU_Factums_M0249
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_G1306
BCU_Factums_G1308
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53196/BCU_Factums_G1307.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Maussac (19130)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
charbon
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
intérêt général
Mines
propriété du sol
sociétés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53197/BCU_Factums_G1308.pdf
c9fedc8b2ffd23c7ca5fc250f2434fcd
PDF Text
Text
M
E
M
O
I
R
E
AU CITOYEN B O N A P A R T E ,
PR EMIER CONSUL D E LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE,
;
D
J ' '1
■'
■■ - *
j
:
la part de P i e r r e - J e a
L A P L E N E propriétaire,
de Maymac.
e
C
it o y e n
p r e m ie r
C
1
r
:
»
T R E I CHdemeurant en la Ville
n -B a p tis te
onsul
,
P e n d a n t que le falut de l’É ta t, appelle toute votre furveillance y
fur les trames perfides d’ un ennemi qui médite le crime , fera-t-il
permis , à un malheureux perfécuté ,
plaintes & fes réclamations ?
de vous faire entendre fes
Propriétaire d’une mine de houille qui fefoit fa fortune , il en fut
dépouillé par un arrêt de faveur. Réintégré dans fa propriété, par
la loi du z8 juillet 1791 , on veut la lui ravir encore : des homA
�( * J
fnes envieux en convoitent la conceifioo. Ç ’eft à vous à décider fi
à ion préjudice elle peut leur être accordée.
La convoitjfe excepte de l’intérêt p u b lic , comme fi, l’exploitation
des mines p ou voit
être plqs avantageuse à la République faite par
des conceffionnqircs , que faite par l’expofant lui-m êm et II démontrera
fans peine
toute
Yhypocrijîe
de ce prèttxu : mai? lorsque tant de
foins excitent votre vigilance &
que tant de conceptions occupent votre
génie, peut-il espérer que vous pourrez prêter l ’oreille à fes obfervatiorçs ?
O u i fans doute. U n g r a n d
à la
tête d ’une
puiflance
M a g is tr a t ,
prépondérante ,
Juftice ne méritent pas moins d’attention
celui fur-tout q u i eft
fait que les lois &
la
que les armes ; que fi les
armes font respe&er le G ouvernem ent & y font fleurir la lib e r té ,
les lois & la Juftice y font aufli r e s p e c t e r les droits des Citoyens ,
en y faifant régner la paix & le bon ordre.
Aufli n’aguères a-t-on v u renaître'le fiècle de Solon , & remplacer
Yédifice informe de nos l o i s , par un code c iv il ditté par la fagelTe ,
au m ilieu même des agitations politiques.
Il ne refte d o n c , C i t o y e n p r e m ie r C o n s u l , il ne refte h TreichLaplene, qu’à vous faire connoître les faits relatifs à la queftion ,
à vous déduire fes raifons & fes motifs : il eft sûr , par votre juge
ment , de triompher des _Y^es fpéculations de la cupidité , & de
repouffer les tentatives de tous les perfonnages ré u n is, pour confom mer fa ruine.
F
L e s m in es dont
A
s’a g i t ,
village du même n o m ,
I
T
S
appelées de
commune de
.
Lapleau j
font fititéeS au
M auffac, département de
1^
Çorrcze , & renfermées dans le fem d’une montagne qui a la figure
d’un cône affez régulier.
La
majeure partie
en
appartient à Treich-Lapltnt ~
} en vertu dç
�( 3 )
plufièurs contrats en date des 14
2.5
mars
1755
&
a vril
1^97 » *5
o&obre 1 6 1 9 7
19* août 1 7 6 8 , qui conftatént'q u’elles étoient
ouvertes depuis le i5 .feme fiècle.
Ses
auteurs , les
regardant
comme
un
tréfor ,
s’appliquèrent
foigneufenient à les u tilife r , & né négligèrent ni fo in s, ni dépenfes,
ni travaux
pour
en àméliorér l’exploitation. Pour lui donner plus
ü’étendùe &
de confiftance , ils firent pratiquer dès galeries fouter-
rain es, foit
pour extraire lé
ea u x ; &
charbon ,
foit pour faire ecouler les
à 'fo r c e de fr a is , ils vinrent à bout dé retirer de ces mints
une quantité dé charbon aflez abondante pour fournir aux
publics.
befoihs
I
„
Leur exemple reveilla l’induftrie des autres particuliers qui pofledoient
des héritages de furface. C eux-ci cherchèrent auiîi à fouiller
dans
leur terrain. Mais (6it que ce terrain s’affaiiat à mefure des excava
tions &
que par mal-adreffe ils ne puffent donner à" leurs travaux
aucune folidite , foit que ious la ligne ¿ë leurs propriétés, le charbon
dts mines ne fut pas aufïi pur 8c auili abondant que dans les carrières
de Treich-Laplene ; ils s’avifèrent de pénétrer dans ces carrières par
le moyen d’un fentier
fou terrain , d’y
exploiter
même à tranchée
o u v e r te , ce qui fut caufe d’un p rocès,dont il n’a pu encore v o ir
la fin.
*
C ’étoit en 17 8 1. Son père ¿toit m ort depuis long-temps , & il Ufiirpatum
t •
,
A
_
,
, .
.
mines île la
etoxt encore en bas age. Sa mere porta plainte au Juge de St.-A n g il roulierre &
contre la veuve LACkAUD , Antoine B ey n es & Jean COUDER ( c’étôient
7
N
les ufurpateurs ) ; elle conclut à être maintenue dans fa p ro p riété,
pofleifion ôc jouiiTance &
cfes
cet °1
aveclaveim
chaud,
à ce qu’ils fiiflent condamnés à lui rèjiituer
le charbon extrait ou enhvè, avec domfnages-intcrcts & dépens. Mais
c e t o it une pauvre veu ve ifolée &
fans a p p u i, dont
le
droit fut
facrifie par le Juge de St.-Angel au crédit 5c aux protections de
fes adverfaires.
,
• '
.
.
L a carrière :>dont ils s’étoient Emparés , étoit circoriscrite dans les
limites d’une tfcrre appelée de Ja Charoulierié , qui avo it été vendue
aux ancêtres de Treich-Laplene, par ccux d’Antoine Beyne ; celui-ci
A 1
t
�( 4 )
pour légitimer fon ufurpation ' & celle de íes conforts,' prétendit que
fes auteurs s’étoient réfervés de prendre du charbon dans ladite terre.
Cette réferve étoit
effectivement flipulée par un contrat de 1 7 3 6 ;
mais elle étoit prescrite par un laps de 44 ans &
ceux qui l’avoient faite à extraire eux-m êm es,
reftre in te
au
tiers
de la
n’autorifoit pas
elle étoit d’ailleurs
terre &c vérification faite àés confins du
terrain u fu rp é, il fe trouvoit que l’exploitation n’a v o it: pas été faite
dans les parties défignées p our l’exercice de ladite réferve.
•
..
.
L a mère de Treich-Laplene fit va lo ir tous ces m oyens. Ils étoient
victorieux .& fans réplique : néanmoins ,
fes
adverfaires furent
fenttnce du
relaxés
iy mai
elle
O n verra
grâce à }a prévention ,
condamnée aux dépens par
bientôt
que iTur l’appel qu’elle
en interjetta , le Tribunal d’appel de Limoges a vo it rendu juitice
à Treich-Laplene , lorsque celui Je caflation eft venu çaffer fon juge
ment fous un faux( m otif d’incompétence ;
ce qui a ’ néceffité
íe
ren voi de la caufe au Tribunal d’appel de Riom où elle eft actuelle
ment pendante.
Mais laiiTons là ce procès pour fuivre
conteftation
Yiflour con-
préfente,
i j..„-
<.
les faits inhérents à la
/
D éjà l e s m ines de Laplèàu avoient acquis quélqùe renommée ,
n° dcs°m¡nes ^es P^re ^ mère de «Treich-Laplene en retiroient une fi grande quantité
Lapleau.
de ch a rb o n , qu’outre le débit qu’ils, en fe fo ien t, ils en ¿iv o ien c
toujours leurs magafins
garnis. C ’en fut
aiTez pour q u e ces. mines
devinflent un objet d’envie 8c d’ambition pour les fpéculateurs,..
St.-ViÙour à qui la veuve T réich a v o i t ’ f a it , pendant trois aris;
des livraifons de h o u ille , y jetta fon dévolut. ( C ’étoit le propriétaire
de la manufacture d’armes à feu de T u l l e ) ; auparavant il avo it une
autre mine
Argei\tac, d’où il (retiroit lé charbon néceiTaire à la
confommation de cette manufacture ; mais la coriceifiori lui en ayîint
4#
été enlevée ,
il brigua celle des mines dt Lapleau , &
oeuvre pour l’obtenir.
fut épargné.
La rufe ,
D ’abord, il
mit tout en
l’in trig u e , le m enfonge, rien ne
acheta à
Lapleau
un
p e t it . morceau
de
terrain , afin d’exploiter concurremment avec les autres propriétaires j
�( 5 )
& à peine eut-il com m encé, qu’ il prétendit qu’ils exploitoient d’une
manière nuiiible.
I l fit , à l ’intendant de L im oges, l’expofé le
plus infidieux ; 8c Ret{uêie p
le plus menfonger. 11 a v a n ça , que les .habitants ou propriétaires de
în^ dani.'
Lapleau n’avoient jamais fait d’exploitation en rè g le , mais feulement
niogcs.
quelques trous de fix à fept pieds , qu’ils étoient forcés d’abandonner
lorsqu’ils étoient pleins d’eau.
Q u ’ils abandonnoient aufli un filon
,
lorsqu’il fe plongeoit à une certaine profondeur pour en chercher un
autre à fleur de terre ; qu’en un mot ils s’étoient bornés à quelques
fouilles'fuperficielles.
..
'
r
Il difoit que ces mines étoient les feules capables d’alimenter la
|
manufa&ure de T u lle. Il les repréfentoit comme une reflource pré-
I
cieufe, à la confervation de,, laquelle étoit attaché le
maintien , ou
la ruine de cet établiifement. Et cependant le nouveau conceifionnaire
de la mine d’Argentac s’étoit obligé d’entretenir la manufafture de
tout le charbon ,qui lui ieroit néceflaire. Il fît v a lo ir fur -tout que
depuis la guerre d Amérique les beibins de cette manufaihire s’étoient
accrus ;
qu’il étoit forcé de m ultiplier fes travaux & de fabriquer
une plus grande quantité d’arm es, d’où
il
concluoit qu’on devoit
augmenter le produit des mines dans la môme proportion.
L ’ intendant
întereffc à ne
:
q u i , d’après cet expofé pompeux , crut v o ir l’État
pas laifler
Vexploitation
des
mines entre
des mains
ineptes, écrivit de fuite à fon fubdélégué de prendre des renfeignements fur les faits articulés & de lui en faire le rapport. Les chofes
ne pouvoient mieux aller pour St.-Viclour. Le fubdélégué étoit fon
ami intime , c’étoit le Ju^e de St.-Angel qui venoit impunément de
condamner
la mère de Treich-Laplene. Il lui fit déclarer ce qu’il
vo u lu t ; le certificat qu’il en obtint , ne
des affertions qu’il avo it inféré dans
fut qu’une
copie exafte
fa requête. Aufli pour la for
tifier eut-il foin de faire atteller par quatre individus colludants avec
lui , qu efFe&ivement . les propriétaires
excavations à ciel o u v e rt, &
n’avoient
fait que quelques
que lorsque les trous étoient pleins
t
;
�( 6 )
d’eau ,
fllon pro-
ils les abandonnoient pour en creufer d’autres ( i ) ,
C ’eft par l’effet de
un°auiime inconcevable ,
ces manœuvres &
de ce
'qui St.-ViBôiïr obtint de
com plot vraiment
l’iriteridant uné permiffion
p rovifoire d’exploiter pèndant iin an.
D urant cet i'ntervale il rédoubla d’efforts pour fe faire accorder
une conajfion de plus longue durée. Il partit pour Paris où il s’affocià
avec le C itoyen Serilly ,
dont le père étoit fecrétaire de Monfxeur
de Calone , contrôleur-général des finances : avec
il vainquit tous
cette prote&ion ,
les o b ftacles, il n’eiit befoin que d’alléguer pour
être cru , il entaffa aufii , menfonge fur menfonge.
Il eft confiant qu’il n’a vo it fait aucune innovation ] qu’ il s’étoit
;
fervi des ouvrages de la veu ve T rëich , & n’a vo it fait qüè continuer
d ’exploiter fes carrières. Cependant dans la requête qu’il préfentâ ail
confeil d’É t a t , il prétendit qu’il a vo it fait des frais immenfes, qu’il
a v o it percé dans fa b a fe , la montagrie dè L àp elau , dont les habitante
n’avoient
fait
que
grater
le
fommet.
Q u’il a vo it fait pratiquer
plufieurs g aleries, dont auparavant ces derniers ignoroiènt l’ufage.
i -85 conces-
A vec
V^flourpour
conceÏFlon P o u r l’espace de quinze ans , par arrêt du x z avril 1783,
des fuppofitions auiïi imaginaires , aufli fauffes ,
il obtint
co n feil d’E tat confidéra que durant le court espace de la con-
’annees.
ceflîon provifoire que lui a vo it accordé l’inten dan t, il n’a v o it pas
pté
poilible
à
St.-V iilour , de fe couvrir de fes dépenfes. II con-
fidéra qu’il auroit été injufte de le priver du fruit dfe fes travaux ;
tel
fut
le
m o tif
qui le
détermina à la prolonger, L ’e rre u r, la
fauffeté des faits , ne conduifent-eÎles pas toujours à l’injuiticè ?
La veu ve T reich forma oppofition à cet a r r ê t, foutint que depuis
ppnfaàl’arrèt un temps immémorial elle étoit en poiTeflion d’exploiter fes mines ;
conceflion :
r
.
ccftdéboutée qu’à raifon de c e , elle avo it toujours paye les vingticmes & împoveuve T r e i c h
inl o n
° P P o ll~
fu ions royales
,
tant pour la fuper/icie du terrain que pour la m atière,
( 1 ) C e lu t Jean D e m a t h ie u , A n t o i n e
q u i firent ce tte d é c l a r a t i o n c o j n p l a ifa a t c .
K
Bennes,
Jean
&
a u tre J e a n C o u d e r
�( 7 )
§£ conclut à être maintenue
dans
ion exploitation. Mais
le décès
de Moniteur D r o u x , ion premier a v o c a t , fuspendit pendant
deux
ans Tes pourfuites. C e ne fut qu’au bout de ce tem p s, que le confeil
d’Etat chercha à éclairer fa religion ,
encore ne laiffa-t-il pas à I3
veu ve T reich la faculté de prouver ,
par tém oin s, la fauffeté
des
faits que St.-V i£our a v o it impudemment avancé.
Il ne confulta que l ’in ten d a n t, & l ’intendant ne lui donna d’autres
informations que celles qu’il a vo it
reçu de fon fubdélégué :
ayant
été trom pé, il trompa à forç tour le confeil d’Etat. Il s’éto it bien
transporté fur les mines pour en faire l ’inspe&ion ; mais ce n’étoit
pas après un laps de quatre an n ées, que fans enquête contradiâoire
on pouvoit reconnoître l’état dans
lequel St.-Viclour a v o it pris les
mines ; St.-Fictour a v o it fait comme
les fré lo n s, il
s’étoit attribué
les travaux de l’induftrieufe a b e ille , l’intendant croyant qu’ils étoient
fon o u v ra g e , parce-que ddns le principe fon fubdélégué le lu i avo it
attefte, en donna avis au confeil d’E t a t , & fur le rapport de M r.’
de Calone, la mère de Treich-Laplene fut déboutée de fon oppofition.
Aux termes de fa concejjion , St.-Viéiour devoit l ’in d em n ifer ; mais
cette indemnité étoit
li médiocre ,
dépenfé le double de ce
qu’elle eut
que pour
retiré ,
l’obtenir elle auroit
c’eft pourquoi elle fut
forcée de tout abandonner. C ’eft ainfi que jadis U foibk étoit obligé
de courber la tête fous le joug du puijfant. C ’eft ainfi que plufieurs
fois le patrim oine du pauvre devint la proie du riche. O temps ! . .
’ô mœurs ! . ;
Il falloit une révolu tio n pour rétablir Treich-Laplene dans fes droits ;
car en vain , ¿tant
devenu
m ajeu r,
a v o it-il
réclamé à fon tour
contre les arrêts rendus à fon préjudice*? il n’a vo it pas eu même
1 avantage de faire lire fa
tificatives.
requ ête, quoique, affortie de pièces jus?
Heureufement pour lui cette révolution s’opère par fuite des défordres
oh la France ctoit plongée. Sôuvent le bien naît de l’excès du mal.
Après avo ir proclamé les droits de l ’homme ,
Jo p p reiü o n ,
en brifant
délivré
le peuple de
les chaînes de la fervitude qu’a vo it forgé
�(8 )
Yanarchïe féodale ; on s’occupe de faire cefièr les abus particuliers ;
de venger le droit facré de propriété des atteintes de l’ambition.
D éjà "une foule
de propriétaires étoient en réclamation
les injuftices qu’on leur avo it
fait ,
contre
en concédant à des étrangers
le droit d’exploiter leurs mines , l ’A s s e ^ b l é e N a t i o n a l e , ce centre
de lu m ières, dont l’œ il
déraciner les v ic e s ,
vigilan t
faififfoit toutes les
chargea fes comités
occafions
d’agriculture &
de
de com
merce d’examiner le mérité de leur demande ; & après avo ir entendu
les
divers
rapp orts,
elle rendit la lo i du
28 juillet
1791 , qui
rappelle à la vie les principes préexiftants fur la matière ; mais que
la faveur ou la vénalité avoient ^ plongé dans le fommeil.
du 58 juillet
Sachant concilier l’intérêt public avec l’intérêt p r iv é , elle annulla
ii qui annul-toutes les conceffions privilégiées , comme étant le fruit de lin ju ftic e ,
St -'viaour? &
ne laiffa fubfiiler que
confentement libre &
celles qui avoient été confirmées par le
par écrit
des propriétaires ,
ou celles
qui
avoient pour objet des mines découvertes par les concejjionnaires.
La feule obligation à laquelle elle affujettit les propriétaires réinté1
grés , envers les concejjionnaires déchus ; c’eft de leur rembourfer de
J
i
gré à gré , ou à dire d’experts , la valeur des ouvrages ou travaux
dont ils «profiteroient. Elle autorifa mêm e. tout propriétaire de furface
de jouir de celles de ces mines qui pourroient être exploitées jusqu’à
çent pieds de profondeur , ce qui doit s’entendre fans a vo ir befoin
d 'autre autorifation.
En vertu de cette l o i ,
Treich-Laplene &
les autres propriétaires
du* ténement de Lapleau , préfentèrent une pétition au D ire& oire du
département de la
Corrèze', pour fe
faire autorifer
à
rentrer en
poffeiïion de leurs mines.
',r pormiflîon J11
Le fix novembre 1791 , arrêté qui les y autorife , ‘ à la charge
^parlement île
¿ ’¡nj emnifer le conceffionnaire déchu , conformément à la
iaCorri’zo'l rcicli *
t
.
7
„
, •«•prcml la pos- loi ; le neuf du même ■
mois Treich-Laplene le fait l i g n i f i e r a i ^
!^s°,ldefCS,,U” V l^onr & fes affociés ; le 1 5 , il fe met en poffeiïion &
rédiger procès-verbal par le miniftère d’un notaire.
en fait
Enfin
�* 3 *
(9)
Enfin il
fe cro yoit tranquille déformais \ en payant à St.-Viclour
les ouvrages dont il profiteroit. Illufion ! espérance trompeufe !
St.-Ficiour refufe de traiter ;
que
jamais pour
ne. pas
loin d’y
confentir
lâcher fa proie.
il
s’agite plus
11 attaque l'arrêté qui
faifoit jouir les propriétaires de Lapleau du bénéfice
de la loi du
1 8 ju ille t , & fe pourvoit auprès d u M i n i s t r e R o l l a n d pour le faire
annuller.
Il fit dériver cette
prétendue
n u llité ,
de ce
que fuivant lui le
département de la Corrèze n’étoit pas compétent pour ordonner le
renvoi en pofleiîion des propriétaires ,
&
que cette demande ctoit
du reffort du Tribunal. I l prétendit que la lo i du i8 juillet n’annulloit
pas fa conceiîïon ; &
pour le prouver il produiiit le fyftème de
menfonge , à l’aide duquel il l ’avo it obtenue.
« La lo i
m ain tien t, dit-il , les conceiîionnaires
a&uels qui ont
» découvert les mines qu’ils exploitoient ; or , c’eft m oi qui ai fait
» .la découverte des mines de 'Lapleau & qui les ai exploitées le
» premier. A v a n t , les propriétaires de la furface n’avoient fait que
» quelques
trous &
» fuperficielles
tiré
ne peuvent
de
la
croûte de mine. Ces
être prifes pour une exploitation : dès-
» lors le département de la Corrèze a mal compris &
» l’article
6
de la
excavations
mal entendu
loi ; il en a fait une fauffe application ».
T o u s ces raifonnements étoient abfurdes , l’autorité adm iniflrative
ctoit feule compétente pour réintégrer les propriétaires du ténement
de Lapleau dans la joui fiance de leurs mines. La permiflion par eux
demandée & obten ue, ctoit d’ailleurs de furérogation ; car la Joi ne
les aftreignoit à aucune form alité ", ils .pouvoient , en vertu d i c d l e ,
fe mettre en pofleiîion, fau f à payer au conceffionnaire fon indem
n it é , d après
experts.
le règlement qui en feroit fait à l’amiable ou par
D e s -lo rs, il ne fut pas difficile à Tretch-Laplene d’écartcr la ten
tative de St.-Vïclaur. Pour prouver la fauffeté
de tout ce que ce
dernier a vo it dit fur la découverte des m ines,
il eut une cccafion
13
�H
,
( 10 )
bien favorable. C ’eft le procès qu’il fut oblige de foutenir relative
ment à
l’indemnité ,
pour
l’appréciation
de
laquelle
il
falloit
néceffairement connoître & comparer l’état dans lequel St.-Vi£tour
avoit pris les mines & l’état dans lequel il les a vo it laiffées.
Une grande conteftation s’élève à cet égard : elle eft portée au
Tribunal du diftrift d’ U ffe l, comme étant celui de
l’arrondiffement.
C ’eft alors que Treich-Laplene fait tomber toutes les déclam ations de
St.-Viclour & de fes adhérents ; c’eft alors qu’il démontre , dans toute
fon évid en ce, la furprife qui a vo it été faite en 1783
d’État du R o i , ainfi qu’à l’intendant.
au confeil
1
1
Il
demande à
être
admis à
prouver j que lorsque St.-Viclour
■
s’empara des mines de Lapleau , les fiennes étoient dans un état
d ’exploitation aufli régulière que poflîble. Et le 24 août 1792 il
J
fait une enquête compofée de dix témoins , qui dépofent tous d’une
v o ix un an im e, qu’effe£Hvement elles étoient bien
folidées ,
que dans le terrain
étayées &
con-
appelé le G enevrier il exiftoit trois
galeries de chacune 70 à 80 toifes ,
l’une fervant au découlement
des e a u x , les deux autres à l’extra&ion de la houille. Que St.-Viclour
(
n ’innova rien pendant quatre ans &
>
i
une grande quantité de charbon ,
par jour.
qu’il
fit extraire néanmoins
quelquefois
deux cent
quartes
Cette enquête clôt la bouche à St.-Viclour. Forcé de reconnoître
la vérité & de fubir la l o i , il donne ordre au C ito yen Bettinger
fon affocié , de traiter comme propriétaire gérant la manufacture d’ar
%
• "Viflour cft
mes à feu de T ulle.
Le
16
juin
1793
Bettinger &
Trcich-Lapknc traitent enfemble.
itre fa ddcîii- Treich-Laplene vend & cède aux aiTociés de la manufaûure la
c; il traite faculté d'exploiter fes mines de Lapleau pendant yingt ans ; & Bettinger,
c'I'rcicli-La,
,
,1 1
■
.ne : celui-ci outre les autres conditions du traite, s oblige , en ja qualité de propriétaire
ipÎoitcr^Hfe's £*rant *
^Ul Pay er ^ charbon à raifon • de vingt centimes la quarte,
■es pour 20 de quatre-vingt livres pefant.
[
11 s’oblige en o u tre , par claufe expreffe, de jouir des m i n e s con~
�< *D i'
(xi )
formément aux lois] & de les exploiter fuivant les règles de Part \ d'avoir
toujours fur place la. quantité de houille nécejfaire à la confommation
de la
manufacture , afin ,
Laplene
la perte de fes
efl-il dit , de ne pas occafîonner à Treichmines par la concejjîon qui pourroit en être
accordée à fon détriment.
Q uant à Yindcmnitc que
idemeure compenfée avec
Trtich-Lapltne
devoit à St.-Victour \ elle
celle que St.-Viclour lu i devoit pour le
temps qu’a v o it duré fa jouiffance. Les parties fe tiennent d’ailleurs
quittes de dépen s, dommages-intérêts , & fe mettent hors de cour
& de procès.
C e traité eft hom ologué par arrêté du département de la Corrèze
du
19
du même mois.
Il femble que d’après cet a û e St.-Viclour ne v a plus penfer à la^st-Viftonr
conceflion de
1783 9 qu’il y a
renoncé pour toujours.
Cependant j^ tnt.C|0f"tr
excite par quelques protecteurs , on le v o it bientôt fe livrer à de voit’ pour'
nouvelles démarches pour faire renverfer & le traité fouscrit par annullertn
,
A ,
,
Btttingtr S>C les deux arretes du département de la Corrèze
n o v e m b re
1791
'
tran la cu o n
du 6 fcc par fon|
6C 1 9 Ju in 1 7 9 5 .
'
cié que to»
' ‘
arrêtes qui)
voient tlécl
Il propofe un nouveau moyen de nullité contre ces deux arrêtés, fa conceüic
Il leur reproche de ne pas a vo ir été fournis à la fa n û io n , ou du ci^ devant R o i , ou du D irectoire e x é c u tif, conformément à l’article 8
de la lo i du 18 juillet 17 9 1.
I
M ais comme cette lo i ordonnoit d’accorder aux
propriétaires de
fu rface, la faculté d’exploiter les mines, de préférence aux étrangers ;
il s’attache principalement au moyen d’éluder
cette
dispofition.
Il
imagine de fe plaindre que l’exploitation des mines de Lapkau , étant
divifee
entre tous les propriétaires, & ceux-ci exploitants à volonté
chacun
dans
fon terrain , la manufaflure d’armes à feu de T u lle
manque la plupart du temps de la
houille néceffaire à fon entre
tien. Il demande qu on prenne des mefures efficaces pour qu’elle ne
fo it
pas fujette à cet inconvénient.
,
�II y
avo it bien de la perfidie dans cette taftique “ bien de l'im J
pudence dans ces allégations ,
car on a v u que Btttinger, affocié
de St.-Vïctour, s’étoit obligé par le traité pafle avec Tràch-LapUne ,
d'approvisionner la
été produit ,
j|
j!;
auroit donc dit
.
C epen dant
manufafture
il
p arvien t
G o u vern em en t une
à
de
T u lle. C e traité feul , s’il eut
faire rejetter. íes plaintes.
les
m efure du
accréditer
&
à faire
réfu ltat de laq u elle i l
prendre au
fe p rom ettoit
la concejfion.
■
iftour fait
in erla re u -
u n ^el,i homme lui fufiit pour furprendre la crédulité des autorités
des diverfes conilituees : cet homme eft
1
l,
1ingénieur
,
.
, ,
,
,
M ic h e qui a vo it ete charge
‘euîe1- ilCfe
^a*re ^a v ^ te ^es m"mes de Lapleau & de conftater les vices &
.* que les les inconvénients du genre d’exploitation dont fe plaignoit St.-Ficlour,
rié taires n e
‘ -iétT&quTl
^ et ingénieur , dont on ne peut fe difîimuler la connivence avec
‘ndralacon- S t.-V ic lo u r , fit un rapport à l ’agence des m in es, par lequel il
!n^aus°^s" propofa de contraindre les propriétaires du lieu de L ap leau , à fe
réunir en fociété
d ’entr’e u x ,
i
à
pour les
exploiter fous
défaut de quoi d’en
la
provoquer
furveillance
la
de l’un
concejfion. Cette
demande a vo it pour but de faire obtenir la concejfion à forç protège :
'
parce-que l ’un &
’
priétaires extra& eurs puffent fe c o n c ilie r.
l’autre regardoient com m e im poflible
que les pro-
L ’ingénieur fit plus pour S t.-V i& our
car comme celui-ci avo it
une forge d’acierie à Miremont près Excideuil , département de la
D o rd o g n e , il
propofa la confection d’ un canal com m unicatif à la
rivière de D ordogne , pour faciliter l’exportation de la houille , foit
Miremont , foit à Bergerac ,
:
!
i
ou
autres ateliers
établis dans les
contrées de la D ordogne ou de la Gironde.
C e plan étoit infenfé , parce-que le canal eut coûté à la République plus de fix m illions ,
c ’eft-à-dire cinq m illions de fois plus
qu’il n’eut valu ; néanmoins il ne laifia pas que de féduire l’agence
des mines qui
le propofa à Ton tour
• publics. Cette agence adopta encore ,
la commifiîon des travaux
avec une confiance a v e u g le ,
�* ÿ t
le m oyen indiqué
y ji
< ' î >.
*
par fon ingénieur pour l’exploitation des mines.
C ’efl pourquoi le 1 7 fru& idor, an h u it, dans le rapport qu’elle fit à
la commiflion des arm es, elle propofa : 1 .° d’annuller tant l’arreté
du fix novembre 17 9 1 que celui du 19 juin 1793 , portant hom o
logation du traité du
16
du même m o is;
2.® D e réunir en une feule exploitation toutes les extradions qui
fe faifoient dans les mines de Lapleau. & de Janoueix ; d’ordonner à
cet effet la réunion des extrafteurs en une
feule fociété. Et en cas
de refus de la part de ces derniers , d’annoncer par affiche la conceffion desdites mines,
à exploiter d’après les
Cet avis
dans
qui ne
& de l’accorder à ceux qui fe foumettroient
règles
doit
de l’art.
le jour qu’à l’erreur
&
à la prévention
laquelle l’agence des mines fut entraînée, flattoit les défirs de
S t.- ViUour ; il fit fon poifible pour le
faire adopter. Il
intrigua
auprès de
toutes les autorités ; il follicità chez tous les Miniftres \
&
par-tout le prétendu
défaut
de l’interruption
travaux de la manufacture.
allégua
imaginaire
des
de
houille
&
le danger,
Ses follicitations ne ceffèrent pas qu’il n’eut obtenu l’adoption
du projet. Il comptoit ii peu que les propriétaires des mines de Lapleau
s’ aflocieroient pour exploiter en commun , qu’il réclama d’avance la
concejjion au C ito ye n Benezech , Miniftre de l ’intérieur , qui ren vo ya
fa demande à l ’adm iniftration centrale du département de la Corrèze.’
Mais il fe trompa dans fes conjeûures ;
le huit floréal an 5 le St.-Viftour^ e
Miniftre adopta la propofition du confeil des mines. Et le 24 nivôfe
an 6 les propriétaires de Lapleau fe réunirent pour demander l’exploi. .
. ,
r
.
1
tation , q ui leur fut adjugée le 13 ven tô fe
c o m p a g n ie
M azau .
Treich-Lap lent fut le
an 6 ,
fon^tientc; 1<
propriéuiicsi
reunillent ex
fous le nom de CCpté Treich
feul qui refufa
d’entrer ^ n^nnent *1
dans cet a£te d’ union Sc q Uj - v o u lu t , a vec raifon , conferver le p ro - concelRon.
d u it de fes mines 6c le droit
de les exploiter.
Ladm iniftration centrale de la C orrèze ordonna qu’il feroit tenu
«le déclarer , dans qu in zain e, s’il entendoit fe
propriétaires ; à défaut de
réunir .aux autres
quoi fon filence feroit pris pour une
�.( *4 )
renonciation
à
la faculté qui lui étoit accordée par la loi. II ne
reftoit -plus qu’à faire approuver cet arrêté par le D ireftoire , pour
que Treich-Laplene fut dépouillé de l’exploitation de fes mines , & par
conféquent St.-Ficlour à qui il en a vo it
tranfaâion
concédé le droit par
la
paffée avec Bettinger.
A in fi, St,-Victour devient dupe de fa trâme artificieufe. Il tombe
lui-m êm e dans le piège qu’il a v o it vo u lu tendre à tous les pro
priétaires des mines de Lapleau ; il eft obligé de réclamer contre fon
propre f a it , tout comme Treich-Laplene à qui il cherchoit à enlever
1
le bénéfice du traité du
16 juin 1793. Q uel fatal dénouem ent!
! "Viilour &
T ous deux s’empreffent de former oppofjtion à l ’hom ologation
îich-LapIene j e l»arrêté du 23 ventôfe an 6 , rendu en faveur de la compagnie
.^poiental arJ
f
_
.l* du 23 yen- Maçau. O n verra par la fuite les nouvelles intrigues de S t.-V ictou r,
I? an
celles de la fociété Mazau , contre lesquelles Treich-Laplene eft
traint de fe défendre. Mais nous fommes forcés
\
Suite relative au procïs des mines de la
n ila n c e d u
de revenir au procès
intenté contre la Dam e veuve Lachaud & conforts.
1
> l’an 9 Treichj
con
p r o -
Charoulïère'.
Il ¿toit reité indécis au ci-devant Sénéchal de T u lle. Treich-Laplene
profite du premier moment lucide qu’on lui laide pour en reprendre
5Charoulibree ^ n^ance au Tribunal d’appel de L im oges, à qui la nouvelle organifation judiciaire en attribuoit la connoiffance.
D eu x queftions y font agitées : la compétence & la prescription.
cxceptedel’ar-
L a Dam e Lachaud &c conforts prétendoient que le Tribunal n’étoit
■
.l'c a n V & l’on pas compétent pour ftatuer fur le mérite de la fentence du Juge de
utient que 1° St.-Ancel du 17 mai 1782. Elle faifoit réfulter cette exception du
ribunal d ap°
'
.
Jîl de Ijimoges fameux arrêté de 1admimilration centrale de la Corrcze du 23
}t<!'oTentatgricv. ventôfe an fix. Treich-Laplene, en foutenant la compétence , foutenoit
au fon d s, que la réferve de prendre du charbon dans la terre de
f
la C h aroulicre, que s’étoient faite les auteurs d’Antoine Beynes ,
1
ctoit prescrite ,
d’oii il co n d u o it
qu’il avo it
été
mal jugé ,
&
�0C±
( ‘5 )
demandent que les Intimés fuiTent condamnes à lui
poflefïion & jouiflance
✓
Le
zz
delaifler la libre
de la terre & de la mine de la Charoulière.
ventôfe an n e u f , le Tribunal d’appel
de Limoges c o n - L e
Tribuj
fidérant qu’il s’agiffoit de prononcer fur le bien ou mal jugé d’une m ogeffed?
fentence antérieure à l’arrêté du xx ventôfe an 6 ; que d’ailleurs rc compote:'
J
1
t
retient la c. ,
cet arrêté n’étoit pas exécutoire , n’ayant pas été approuvé par le
premier Conful, fe déclara com pétent.
Le
2.8 germinal fuivant ,
*
ftatuant fur l’a p p e l,
i
il confidéra que Le a^germî^
la prescription ¿toit acquife\ & en réformant la fentence du Juge de
St.-Angel , il maintint Treich-Laplene dans la pofleiïion oïi il é t o it ,
c e ^ u Jugéji
S L -A n g elj
à la fuite de fes auteurs, de jouir de toutes les mines de la Charoulière ,
Treichmaii
&
“ ,!P<ïans, lapi,
icilion des «•
fit défenfe à la Dam e Lachaud & autres de l’y troubler.
J
• La Dam e Lachaud. & conforts fe pourvoient en
ces deux jugements.
caffation contre
Leur pourvoi eft m otivé fur quatre moyens :
i.° Excès de pouvoirs de la part des Juges de L im oges;
1.0 Suppofition d’un jugement
par lequel
on
prétendoit que le
Tribunal civ il de T u lle avo it reconnu l’incompétence ;
3.0 V iolation de l’ordonnance de 1667 Par la
jugement d é fin itif,
des parties ;
nonobftant la
prononciation du
notification du
décès
de l’une
4.0 Prétendue m inorité interruptive de la prescription;
Le premier m oyen eft re je tte , à l’unanim ïté, à la feâion des mé
moires. Le fécond l’eit aufli , parce qu’il n’étoit fondé que fur une
allégation dénuée de preuve. Il en eft de même du troifièm e, par la
raifon que le décès d’Antoinette Beynes , arrivé pendant la litispen
d ence,
n a v o it
été
notifié qu’après le rapport
du p ro cès, & une
ou deux heures avant la prononciation du jugement. La requête n’eft
admife que fur le dernier moyen pris de la minorité : moyen dénué
de fondement & que
Tteich-LapUne avo it complètement refuté dans
la réplique en griefs que les demandeurs avoient eu foin d’eximer
de leur doflier.
roulibrè?
�( 16 )
L’admiflion de leur requête, n’étant donc que l’effet de la furprife *
ne devoit avo ir qu’un fuccès éphém ère, & devoit écheoir au creufet
d’une discuifion contradictoire. La Dam e
Lachaud qui le p révoyoit
&
qui s’ctoit rendue à Paris à deux fin s, & pour fuivre le procès
&
pour tâcher de faire hom ologuer l ’arrêté du 23 ventôfe an fix ,
fe rabattit fur fon prétendu moyen d’incompétence , quoiqu’il eut
été généralement méprifé par tous les Juges des requêtes. Et comme
c’étoit
fa feule
œ uvre pour
la
arm e,
unique
reffource ,
elle mit
tout
en
faire accueillir. C ’eft une femme a d ro ite , qui eft
à-la-fois l’auteur &
la
fon
le ibutien
de
la conteftation fur les mines de
Charoulière , & l’ame de la fociété réunie fous le nom de com
pagnie. Ma^au. T o u t
ce que
l’intrigue peut a vo ir de plus fo u p le ,
tout ce que la fubtilité peut a vo ir de plus captieux , fut em ployé
par elle.
A v a n t de hafarder fon pourvoi en caffation, elle eut l ’adreffe de
préfenter au C ito yen CHAPTAL , Minijlre de £Intérieur , une pétition
par laquelle elle demandoit la confirmation de l’arrêté du 23 ven
tôfe an 6 , &
l’annullation provifoire
par
vo ie
adminiftrative des
fusdits jugements : elle cherchoit par là à enchaîner l’opinion du
Tribunal fuprême, & à le forcer enfuite à les caffer lui-même en
vertu de la décifion miniftérielle qu’elle auroit obtenue.
Le
Miniftre
ne put accéder à
cette
dem ande,
non - feulement
parce qu’elle étoit attentatoire à l’autorité ju d iciaire, mais encore parce
que le confeil des mines ,
dans un rapport du mois de prairial an 7 ,
s’ctoit oppofé à l’exécution de l’arrêté ; mais il fit circuler une instruftion fous la date du 18 meffidor an n e u f, dont la Dam e Lachaud
fe prévalut fortement &
qui paroît avo ir
influencé
le
Tribunal
de caffation.
Dans cette in ftruttion ,
le Miniftre
d’accord avec le
confeil des
m in e s, pofoit en p rin cip e , que depuis la loi du 28 juillet 179 1 ,
les mines font propriétés nationales , &
que
pas même les propriétaires de furface ,
nul ne peut les exploiter,
fans
s’y être fait autorifer
par les corps adminijlratifs, Le Citoyen Giraud , commiilaire du G ou
vernement
�( 17 )
vernement près la a.ème
fes co n clu fio n s,
fe âio n
civile J .adopta ce principe dans
il en tira deux conféquences :
|:
.
La première , qu’il ne pouvoit. exifter entré Treich-Laplene &. la
D am e
Lachaùd & conforts! de conteftation fu r la propriété des mines
de la Charoul'àrc.
"O
La
.
'
feçonde ,
.
. .
•
f"■
,
■
que les T rib u n au x
t
ne font pas
*| ■:
compétents pour
accorder la permilîion d’exploiter les mines.
'
D e là il conclut que le T ribu nal -dfappel a vo it commis un abus
ide p ouvoir- en maintenant
desdites
Treich-Laplene, entpoffeiïion, &
jouiffance
mines.
Il fît réfulter un autre m o tif d’incompétence de la lo i du 24 août
1790 & de l’arrêté du 23 ventôfe an 6 de l’adminiffration centrale de la
Corrèze. 11^ dit que fuivant l ’article 1 3 , titre1 2 de la lo i p ré c ité e ,
les Juges ne peuvent , à peine de
fo rfa itu re,
troubler de quelque
maniéré que ce fôit les opérations; des', corps adminiftratifs. Que
d’apres 1 arrête la veu ve Lachaud & conforts ctoient autorifés à ex
ploiter 6c jouir les mines de la Charoul'ùre , comme comprîtes dans
l ’étendue de leur cônceffion ; que le T ribu n al
contrevenu à cet a rrê té ,
d’appel éto it dès-lors
& que par conféquent il y a vo it violation
de la lo i. .
C e fyftème eut
fimple majorité :
22 ventôfe
&
plufieurs contradiûeurs , il ne fu t admis qu’àl la L<ii4myôii
mais
28
forte qu’un moyen
eut un plein fucccs
il
prévalut néanmoins ; les, jugements des
germinal
a a ç> furent caffés &
De
^ aeppelT j
unanimement, re je tté , à lu feâio n des. requêtes ,
inoges a t
à la fe&ion c iv ile ;
annullés.
de forte que l’opinion, de
fept ou huit Juges l’emporta fur celle de 22 ou. 23.
R É F U T A T I O N
«
p g
ç £
ou s’il a v o it le
e n 'lè s com m entant, d’ én changer les difpofitions &
dénaturer le fens : Si lu i &
les Juges qui
avoient reçu le don ¿infaillibilité,
les Pouvo^
|
P R É J U G É
Si lés inilrù&iôns du ■
Miniflre ctoient des lois ,
p o u v o ir ,
caffatio« '.
d’en
ont partagé fon opinion
il faudroit respecter, comme un
�¿4»
,
;
C 18 )
oracle de
'
fageiïe /:.le ' jugçment - qui a ‘cafle ceux que le T ribu n al
d’appel avo it rendus, en
faveur de Treich-Laplene.
Mais quel eft le mortel qui eft infaillible fur la terre? Ne faito n pas^ que les lumières & ¿es venus n’affranchiffent pas toujours les
'Magiflrats de l’èrrèur ? Le T ribunal de caflation nous en
offre lu i-
même la preuve par les divers exemples de variations qu’on trouve
'dans les recueils de fa Jurisprudence. Il eft donc permis à T reich Laplene de démontrer l’erreur du
fyftème qui a fait triompher la
D am e Lachaud malgré- l’autorité respeûable de ceux qui l’ont .profefle.
i
C e fera au Tribunal "d’appel de R iom ; devant qiii là caufe &
les parties ont été re n v o y é e s, a apprécier fes preuves & Tes raifon i
!
nements. La lo i fera fon guide &
|!
§.
fa bouffole,
P r e m i e r .
E J î - i l v r a i d abord qu e
.
.
.
le s m in es de h o u ille ou charbon de
terre f o n t une p ro p riété N a tio n a le ?
]
>s q u e d ’a t la lo i « o u , les m i n e s
L e M i n i s t r e & le confeil des mines nous permettront de foutenir •
le contraire.
L ’article premier de la loi du
.
« Les mines tic minières ,
îenteaPaux ” ainfi
que les b itu m e s ,
28
,
juillet 1 7 0 1
tant métalliques
charbon de
eft ainfi conçu :
>'
que
1
non métalliques ,
terre ou de pierre &
p y r it e ,
en. ce fens feulement que ces
y, fubjiances ne pourront être exploitées qiie de fon confentement & fous fa
riétaires de » font
çe"
. .
à
la dispofition
de la
N a tio n ,
» furvtillance ».
C et article ne dit pas que les mines
appartiendront à la Nation ;
mais feulement qu’elle pourra en dispofer. Il s’explique , il n’attribue
à l’État que le droit d’en permettre &
,
Cependant fi
elles
euflent été
produit , le prix ou
auroient été réfervés
d’en furveiller l’exploitation.
déclarées propriétés
la valeur des matières
au
Nationales ,
extraites ou
le
extraire
Gouvernement. C ’eft tout le contraire ÿ
l ’indemnité eft_ attribuée aux propriétaires de la furface.
�$ O Ï>
( *9 ) '
A la charge J eft-il d i t ,
d’indemnifer d’après les règles qui feront
prescrites , les propriétaires de la furface.
L ’article v a plus lo in , il ajoute : « que ces propriétaires jouiront
» de celles de ces mines qui pourront être exploitées ou à tranchée
» o u v e rte , ou avec
foile &
lumière , jusqu’à
cent pieds de pro-
» fondeur ». C ’eft-à-dire qu’il les autorife à les exploiter fans avoir,
befoin d’autre autorifation.
Ainii , ¿es mines de houille ne font donc pas propriétés Nationales ¡
mais bien propriétés particulières.
E t qu’on fuive les autres dispoiitions de la lo i , on verra que le
Légiflateur les a
confidérées par-tout comme appartenantes aux pro
priétaires de furface.
L ’article 6 décheoit tous les conceffionnaires, de celles qui étoient
exploitées par les propriétaires avant les conceiïions & ordonne que
CCS iïîiTics retourneront A ces derniers•
A u ro it-il prononcé
cette reftitu tion , s’il
eut entendu les réputer
propriétés Nationales ? Cette idée eft inconciliable avec la déchéance
des conceffionnaires , parce qu’alors il eut été faos raifon pour décheoir ceux-ci &
Ce
rétablir ceux là.
retabliffement
mines, a
des propriétaires
été déterminé par un
dans l ’exploitation
m o tif quelconque ; &
de leurs
quel autre
m o tif peut-on fuppofer que celui de redimer ces propriétaires d e l’injuftice
qu’on leur a v o it fait en les dépouillant.
O r , fi c’eft là le but du Légillateur ,
il a donc reconnu qu’ils
avoient droit à la propriété des mines. L ’article 6 n’eft donc établi
que pour faire respe&er ce droit , pour le venger des atteintes qu’il
a v o it reçu ,
à YÉtat.
L ’article
non pas pour le détruire en
10 J porte en outre
appropriant les mine^
que nulle concefiion ne pourra être
acco rd ée, qu’auparavant Je propriétaire de la furface n’ait été requis
de s’expliquer s’il entend ou non procéder à ^exploitation.
C i
�W y
( ao )
C et article reconnoît encore
quelque
droit aux propriétaires de
la furface , puisqu’il leur accorde la préférence fur les conceffionnaires»
C e droit d’où
peut-il
d é r iv e r , fi ce
n’eft pas de la
propriété
qu’ils on t fur les matières qui font enfouies dans leur terrain ?
" C ette vérité réfulte inconteftablemefit, de ce qu’on ne peut extraire
ces matières fans les
in d em n ifer, lôrfqu’ils
n’exploiferft
pas eux-
mêmes ; de ce que le produit o u la valeur n’en éft point attribué
au Gouvernement ; de ce qu’il n’a que le droit d’én pèrmettré &
d ’en furveiller l’exploitation.
•„'Si PAiTemblée conftituante
mines „■de
charbon
a v o it. entendu approprier à i ’E tat les
de. terre y elle eut
appartiendroient à la N ation &
qu’à la
charge ,
déclaré
que
ces
fubftances
qu’elles ne pourroidftt être «^traites
par les conceflionnaires , d’en payer la ,v a le u r au
Gouvernem ent. Elle eut attaché un prix au droit de conceflion : elle
ne Peut accordé qu’au plus offrant &
dernier enchérifîèur.,
-,
»
Au contraire ,
elle attribue le droit d’exploiter de préférdftcè aux
propriétaires de furface. En cas de refus de leur p a r t ,. elle fonmet.
(
le conceflionnaire à les indemrtifer.. T o u s ces privilèges font â tt ii"
jj
butifs du droit de propriété ;
priétaires des. mines.
:
r
\ts que de
¡s t e m p s les
\es d o n t s’ a o n t été p r o aes
parut“
,
n
•
i
tt
Rois de France.
.
.
L >ordonnance donnée par C h arles V I le 30
maîtres des
très-fonds
ctoient feules exceptéeSi
"
les recdnnôît donc pré^
tous temPs ies mines de charbon ont été regardées- com m e
propriétés particulières ; citait un principe confacri paie les- E d i t s
la lo i la plus ancienne
.1:
1I
airtfi elle
fur les métaux.
Aiaii 14 15 , qui eft
que nous ayons , q u alifio it I’es> propriétaires,,
&
propriétaires
des
mines.
C elles de l?<Mf
L e M onarque n’a v o ir q u ’uni-droit dé dixièrtto
*•
*
Henry IV-donn? au mois de juillet 16 0 7 un Edit qui'Affranchit de
|
ce d ix iè m e, les mines de fou fre,
falpêtrfc ,
fe r,
,
charbon de .terre , ardoife 8c autres1 fortes de pierres,
O cre, pétroil' ;
�François Premier íe b o m a ,
( «
)
par
fon ordonnance
1 5 2 0 , à faire défenfe de travailler
aux
m in e s,
du
&
17
oû obre
de les o u vrir
fans la p'ertriiflidn du Roi»
Un
cette
arrêt rendu au confeil le 19 mai
permiifion
les ^ propriétaires
1698 J dispenfa même de
des mines de charbon , &
leur
permit de les ou vrir 8c de les mettre en exploitation,
C é ne fut que par un arrêt du 14 juillet 1744 , rendu en forme
dé règlement * qu’il leur fut fait une nouvelle défenfe de les exploiter
fans en à v o it obtenu là pérmiffión du contrôleur-général des finances.
Mais toujours eft-il
que le M onarque
ne prétendoit point que
les mines lui appartinfent par droit de fouveraineté.
T oujours, eft-il
qué lés propriétaires d’heritâges renfermants des mines, n’étoient aitu-.
jèttis à la form alité des perm iffions, que pour celles non ouvertes & dont
1 exploitation n’etoit pas entamée.
Com ment concevoir dès-lors que la lo i du 28 juillet 179 1 a
dépouillé de cette propriété les particuliers pour l’approprier à la
N ation ?
Comment le concevoir fur-tout lorsqu’elle décheoit les conceflionnaires des mines ci-devant exploitées par les propriétaires , que pour
rétablir ceux-ci dans leur ancienne exploitation.
Cette prétention eft fi étrange qu’elle révolte tous les propriétaires
dont les mines de houille &c autres matières combuftibles font toute
la richeffe.
E h . la nullité prononcée
des
anciennes
convaincre que le Légiflateur n’ eut
co n cevo n s fufHt pour
en- v u e , que de rappeller
les
principes /«r le droit de propriété , que de faire ceffer les injuftices Si
les aftes arbitraires commis au préjudice des particuliers,
E t l’on veut que cette loi foit créatrice d’ une lcgiflarion nou
v e lle ? q u elle dépouille les' propriétaires fur lés réclamations de qu?
’
�( 22 )
elle fut renduç ? O n veut faire tourner à leur ruine une lo i
faite
ppur la réforme des abus ?
Le premier M agiftrat e il trop jufte pour laiffer introduire ce fyftème
fubverfif dans l’adminiftration ; il ruineroit les propriétaires qui poffèdent
des mines dans leur terrain , &
n’enrichiroit pas le G ou vern em en t,
puisque la loi* n’attribue à la République aucun droit fur le produit
Sc la fubftance des mines.
Il ne profiteroit qu’aux
conceffionnaires, aux fpéculateurs; &
à
tous ces-hommes qu’on peut appeler les vampires & les fang-fues de
I
l’E ta t; & il faut é v it e r , dit un célèbre publicifte , que la fueur du
p a u vre , le plus pur fang des peuples
I
l
I
!-•
ne deviennent pas la proie
des fa v o r is , des aigles & des vautours.
Aucune mine de charbon de terre n’eft donc propriété Nationale
pafee-que
la
loi- fe borne à faire défenfe aux particuliers de les
exploiter fans le confentement de la N a tio n ,
Mais raifonnons dans le fens du Miniftre & des Juges du Tribunal
de caflation, qui ont
pofé en principe , que
d’après la
nouvelle
légiflation on ne reconnoit plus de propriétaires de mines.
i
ji
i ,(
K
La Dam e
L achaud
&
co n fo rts
avoient
ufurpé celles
de
la Cha-
roulière ; ils s’etoient fait maintenir dans cette ufurpation par fentence
du 17 mai 1782 ; vo yo n s fi le T ribu n al de Limoges étoit incom
pétent pour - rétablir Treich-Laplene dans fa jouiffancc.
1
.(2
‘ ribu na lcl’a p de L im o g e s
1 tlcu lcom p cÎ)Our r é f o ra icn te n ce
',lL ,782 , & il ne
fi v o it le faire
’* in p r o n o n —
■t la m a in te —
[ tle T r e i c h ! len ed an sfon
icn n e poÜes-
1,
§,
I I.
O n cherche par-tout cette incompétence &
on ne la trouve nulle
part. Treich-Laplene a v o it été exproprié en vertu d’un jugement ; il
falloit bien qu’ il fut réintégré en vertu d’un jugement. Q u i pouvoit
reformer la Jentence obtenue par fes adverfaires qu’un Tribunal d’appel?
qui pouvoit le réintégrer que l’autorité judiciaire ?
P ou voit-il
s’adrefler
aux corps
adminiftratifs ?
mais
les
corps
adminiftratifs ne font pas compétents pour infirmer ou confirmer les
'
�. •
.
( 23 )
jugements*; puisque les deux autorités ne peuvent s’immiscer dans tes
opérations l’une de l ’autre. F alloit-il qu’il abandonnât fa propriété
à fes ufurpateurs ? mais nulle lo i d ivin e ni humaine ne l’y obligeoit.
Le premier devoir de tout C ito yen eft de réclamer fo n .b ien pour le
conferver à fa famille.
On a
- ,
*
coniidéré qu’aucune queftion de propriété fu r Us mines ne
peut exiiter entre particuliers ; c’eft une' erreur que nous venons
de
démontrer.
du
Mais raifonnons dans • cette
fu p p o iitio n ,
de l’aveu
Miniftre de l ’in térieu r, de l’aveu des Juges qui ont cafte les jugements
de Limoges. Ce n’eft que
depuis
la lo i du 18
juillet 1791
que ces
fortes de queftions ne peuvent être agitées.
O r , la conteftation fur laquelle le T ribunal d’appel a v o it à ftatuer
n’ étoit pas nouvelle. Elle s’étoit élevée dans l’ancien régime dans un
temps où il ¿toit reconnu que ¿es mines appartenoient aux propriétaires
de furface ; elle avo it été jugée par fentence de 1 7 8 2 , Treich-Laplene
en a vo it
interjette appel. Il falloit bien prononcer fur le bien ou
mal jugé.
Et
com m ent
re&ifier
l’injuftice de la
fentence de l ’ordinaire
de
S t.-A n gel ? com m ent faire d ro it de l ’appel de Treich-Laplene, qu’en
le m aintenant en pofleiTion des mines de la Charoul'ùre &
condam nant
la D am e Lackaud 6* conforts au défiftat.
Mal-à-propos les Juges de cafiatiôn ont-ils dit. que par cette pro
nonciation , le Tribunal d’appel de Limoges
d ’accorder la
lo i
du
28
permiflion
juillet ,
d’exploiter : droit
s’étoit arrogé le droit
q u i , aux termes de la
appartient à l’autorité adminiftrative. Les T ri
bunaux d appel font o b ligés d’examiner la caufe dans l ’état ou elle
s’eft préfentée devant les premiers Juges. D e fa ir e , en réformant ce
que ceux-ci auroient dîi fa'ire ? ieur p ron on ciation fe rapporte au
paffé, on la confidere comme lî elle étoit intervenue quelques hetires
après les jugements dont eft appel. Et com m e le Juge de St.-Angel
étoit
compétent
pour rétablir
mines de la Charoulicre , le
auffi.
Treich-Laplene dans
Tribunal
d’appel
la
pofleiTion des
de Limoges l’étoit
�( 14 )
§.
Il
y
a
plus.
Tmch-Lapltnt
J
I
pour
I.
exploiter
p’avo.it pas bçfoin
d ’obtenir la permiflion des corps adminiftratifs. Lft loi }’y, autorifoit
de droit , &c il étoit d’ailleurs autorifé par l ’arrêté du département
de la Corrèze du 6 novembre 17 9 1.
Cette propofition détruit dans fa bafe le prétendu premier moyen
d’incompétence. Il ne, s’agit que d'en, proqveç l’affirmative ; 6i cette
preuve fe puife dans* la lo i dif 2,8- juillet 17 9 1.
l'enc6r^avoit~
b e fo in p o u r
L ’article premier porte ,
/.
.
comme on
l’a obfervé : « Que les mines
>> de charbon de terre ne pourront êtrç
exploitées: quei du corçfente-
¡Hapcrini^- ” me^t de
N ation & fous fa fur vaillance., à la charge d’incjemnifer
1 de l’a u t o r it é „ içs propriétaires, de la furface ». Il ajoute : « que ceux-ci jouiront
»unifirative.
^ ^
outre de celles dç ces, mines qui peuyent être exploitées ou à
>> tranchée ouverte ,
ou ayeç foffe & lu m iè re , jusqu’à cent pieds
» de profondeur feulement ».
Cette faculté a néceflairement un but , ou celui de dispenfer les
propriétaires de furface de demander la permiflion d’expioiter jusqu’à
cent pieds de p rofondeur, ou celui de reltreindre à ce dégré l'ex
ploitation des mines.
Le but de la loi ne peut pas être de lim iter à cent, pieds, de pro
fondeur- la
auçune
faculté
raifon
d’exploiter
Us
mines ,
pour empêcher de les
parce
qu’il
n’y
avo it
exploiter plus à fonds. Cette
prohibition feroit. d’ailleurs contraire à l’économie politique & par
ticulière ,
puisque fouvent ce n’eft qu’au-deiTous de cent pieds que
fe trouvent les meilleures fubftances minérales.
•
la
C e but ne peut pas être non pli^s de reftrëindrc à cette profondeur
préférence qui eft accordée aux propriétaires de furface. fur. les
conceflionnaires , puisque l’article 10 v e u t , fans d iftin û io n , qu’aucune
conceffion ne puiiTe être accordée qu’auparavant les propriétaires de
furface n’ayent été requis de s’expliquer.
L ’intention
�L ’intention manifefte du Légiilateur n’a donc été que de permettre J
T>ar l’article premier de la l o i , aux propriétaires d’exploiter jusqu’à
cent pieds fans a vo ir befoin d’autre autorifation.
r
O r , les mines de la Charoul'ùre dans la
s’agiffoit de rétablir Treich-Lapleat
jouiffance desquelles il
n’étoient & ne font encore pas
creufées à un tel dégré. Première raifon pour laquelle Treich-Laplene
n’a vo it pas befoin de permiflion pour exploiter.
L ’article
6 en prononçant la déchéance des conceffionnaires des
mines d éco u vertes,
ordonne en outre que ces mines retourneront
aux propriétaires qui les exploitoient avant les concertions ,
O u il faut convenir que ces propriétaires jadis exploitan ts, font
encore dispenfés par cet article
ploiter , ou
il
faudroit
dire
des demandes
qu’on
peut
en permiflion d’ex
leur
refufer ce qxie la
lo i leur accorde,.
En effet, les propriétaires de furface qui font affujettis à demander
la permiflion pour exploiter peuvent être privés de ce droit fi leur
propriété feule
étendue
ou réunie à celles de leurs affociés n’eft pas d’une
propre à former
une exploitation. C ’eft la dispofition
l ’article 10.
de
i
O n ne peut concevoir l’idée qu’on
peut
priver les propriétaires
dépouillés par des concertions y de la rentrée en jouiffance des mines
qu’ils exploitoient avant. C e feroit étrangler le fens &
l’esprit de
la lo i. L’article 6 veu t que les mines foient rendues aux propriétaires
qui les exploitoient avant les
concertions.
rem pli.
propriétaires
La réintégration
des
Son but ne feroit pas
dépouillés
deviendront
illu fo ire, s il dependoit des corps adminiftratifs de la leur refufer.
S i donc la lo i les
couvertes &
rétablit dans la jouiflànce des mines jadis dé
exploitées par
eux ,
fi
on ne peut leur
bénéfice de cette lo i. Il faut c o n v e n ir , de toute
les
affranchit de l ’obligation
adminiftratifs à les
de
exploiter ,
fe
faire
puisque
enlever le
néceflité ,
qu’elle
autorifer par les corps
ceux
qui
font
D
fujets à
�( *4)
cette permiflion peuvent
en certains cas ,
être
déchus
de leur
demande.
O r,
Treich-LapUru eft du
nombre
des
propriétaires à qui des
çonceifions injuftes^ avoient enleve l’exploitation ' de leurs mines. Ses
^uteurs exploitoient celles de la terre de la Charoulière long-tejîips
avant la conceifion obtenue par St.-Viclour. Il étoit dorçc epcore
fous ce rapport dispense de la permiflion du département de l i
Corrèze pour rentrer *èn jouiffance.
A u fait , il eil deux cas oit les propriétaires de furface nè font
pas afireints à cette* permiflion : celui où leurs mines ne font pas'
creuiees à cent pieds, & celui où ils font rétablis dans celles qu’ils
exploitoient avant les conceflions annullées par la lo i.
E t ii l’on veut à toute force ,
que pour o u vrir une mine &
pour entamer une exploitation , le propriétaire de fitrface ait befoin
de fe faire autorifer ; il faut toujours avouer que celui qui exploitent
avant la l o i , fur-tout avant l’arrêt de règlement de. 1 7 4 4 , n’y eft
pas
obligé.
Cet
arrêt
respe&a
l’exploitation
des
propriétaires
qui
avoient
ouvert des mines auparavant. Il fit feulement défenfe d’en o u vrir
d’autres fans la permiflion du contrôleur-gcncral. C e feroit fuppofer
la lo i de 1791 in tro d u â ive d’un droit nouveau , &
effet in ju fte ,
que de prétendre
qy’elle afliijettit
lui donner un
ces
mêmes pro
priétaires au befoin de l’autorifation pour continuer leur jouiffance»
T e l n’eft pas le but de cette l o i , car loin d’a b ro g e r, elle •con
firme les anciens principes ; le Légiflateur a montré fa fagefle dans
l'article 6. Une preuve qu’il n’a point entendu foumettre
les- pro
priétaires qui exploitoient long-temps a v a n t , à demander une permiflion
pour continuer d’exploiter ; c’eil qu’il a déchu les conceflionnaires
qui -avoient obtenu la conceifion de celles de ces mines déjà decou-^
verte* & exploitées par les propriétaires ,
pour
y
réintégrer
ces
derniers.
11
cil
donc prouvé
que
TreithrLaplent
n’a vo it
pas
befoin
de
�¿(1
( *7 )
demander la permiffion pour exploiter les : mines de la
qui font ouvertes avant
1744 ôc que fes auteurs avoient toujours
exploitées jusqu’au moment de
Cette 'permiffion
il
Charoulière
la
l’ufurpation,'
tenoit de la
!
lo i , 'e lle
a vo it
d’ailleurs
'été accordée par l’arrêté du département de la Corrèze à qui il s’étoit
fcdrefle pour évincer St.-Vi&our. D ès-lôrs le T ribu n al d’appel n’empiétôit
pas fur l’autorité adminiftrative en le m aintenant dans la poiïeflxQn
desdites -mines de la Charoulière.
>
C ’eft en confondant la permiffion d’exploiter \ avec
la mife
en
poffeffion des mines devant être exp lo itées, que les parafants du
fyftème d’incompétence fe font fait illufion. La permiffion peut être
du domaine des Corps adm iniftratifs,
fi elle n’eft l’office de la loi.
Mais le droit de faire délaiffer la propriété &
jouiffance de l’objet fur
lequel cette permiffion doit être exercée eft du reffort des T rib u n a u x ,
parce qu’ ils font juges des différents qui s’élèvent entre les C ito y e n s ,
le Tribunal d’appel n’a v o it pas fait autre c h o fe , donc il n’a vo it pas
excédé fes pouvoirs.
Il ne refte plus qu’à examiner le fécond m o tif, par lequel on a
prétendu qu’il ctoit incompétent.
*
O n le fait réfulter de l’arrêté du 23 ventôfe an fix , qui attribue
l ’exploitation des mines de Lapleau &
Janoueix , aux propriétaires
unis fous le nom de com pagnie' Ma^au , avec qui Treich-Lapkne ne
vo u lu t pas fe joindre.
Cette conceffion, dit-on j « comprend les mines de la Charoulière ;
v &
a vo ir condamné la D am e Lachuud &
conforts ,
qui font du
»> nombre des conceffionnaires, à s’en défifter, 'c’eft a vo ir contrevenu
» à l’arrêté adm iniftratif »,
§.
1 y ,
U N E SEULE O B SE R V A T IO N détruit cet argument. C ’eft que l’arrête
n’étoit pas exécutoire , «\ défaut d’être approuve par le premier Conful j
&
qu’il n’a jamais cté exécuté,
D "
�C**)
L ’article 8 de la lo i du 28 juillet 1791 ; s’exprime àinfi : « T oute
» conceflion ou permiflion d’exploiter une mine ,
fera accordée par
» le Département , fur l’avis du D iftrift , dans l’étendue duquel elle
» fe trouvera iitu c e , 6* ladite permijjion ou concejfion ne fera exécutée
» qu'après avoir été approuvée par le R oi , conformément à l’article 5 ,
» de la feftion 3.ème y du décret du 22 décembre 1789 ,
» affemblées admiriiftratives ».
fur les
C et article feul établit que l ’arrêté dont on excepte , n’étoit pas
exécutoire jusqu’à l ’approbation du p r e m ie r C o n s u l ,, qui ne l’a pas
fanftionné &
qui ne le fan&ionnera pas.
Et la preuve qu’il n’a jamais reçu d’exécution , c’èft que nonobftant^
Treich-Laplene a toujours joui & continue encore de jouir , des autres
mines concentrées dans fon terrain , ou quoiqu’il en folt St.-ViU'our,
à qui il céda le droit de les exploiter par traité du 16 juin 1793.
>
D ans cette occu rren ce, il n’étoit donc pas poflible que le Tribunal
d ’appel de Limoges contrevint à cet a rrê té , puisqu’il étoit fans fores
& fans vigueur. Auffi , entendit-il fi peu le co n tra rier, qu’il renvoya
la D am e Lachaud &
conforts par-devers le Gouvernem ent pour le
faire hom ologuer.
Pour y porter a tte in te ; il eut fallu que les adverfaires euffent
tenus les mines de ta Charouliïre en vertu de la conceflion ; & ils
11e les tenoient que par ufurpation , & en vertu de la ièntence du
Juge de St.-Angel. Ils ne pouvoient pas les jouir en vertu de l’arrêté
puisqu’il n’étoit pas exécutoire , & puisque s’il ne fu t intervenu
qu’après
Pinfirmation de la fentence &
après que Treich-Laplene eut
cté en poiTeiTion,.on n’auroit. pas pu l ’évincer fans l’avo ir fait approuver^
Difons donc que fous ce fécond rapport, il n’ÿ avo it ni excès de
p o u v o ir, ni tro u b le , ni immixtion de la part du Tribunal d’âppel de
Limoges , dans l’autorité admi'niftrative.
Difons que tous les raifonnements contraires, ne font que paradoxes j
erreurs &c fubtilités , que la faine raifon dispenfe de rçfuter.
�3 1 3 « ’
( 29 )
En
résu m é,
Il eft prouvé
l ’incom pétence a llégu ée n’eft qu’ü n e chimère."
i .° que
dans les anciens principes , les mines de
houilles ne fefoient point partie du d o m a in e'd e la
la
n o u v e lle
couron ne;
que
. légiflation n’a rien changé à cet égard; d’oit la confé-
quence que la propriété d’une mine peut très-bien faire le fujet d’une
conteftation entre particuliers.
z.o Quand la lo i du 18 juillet 1791 j les àuroît déclarées propriétés
nationales , il fuffit que dans l’ancien régime elles fuffent propriétés
particulières , pour que les Tribunaux foient compétents pour ftatuer
fur une queftion de propriété , élevée dans ce temps-la..
C elle qui eft agitée entre Treich-Laplene &
la Dam e Lachaùd , eft
de ce nombre : elle avo it été jugée fpar fentence de 17.8a, ; il ne
s’ agit que de pronpncer fur le bien ou mal jugé ; & comme ce b ie a
ou mal jugé ne peut s’examiner que d’après les lois & la jurispru
dence d’alors , le
le premier Juge.
T rib u n al d’appel eft aufli compétent que l’étoit
Aucune a u to rité, qu'un Tribunal d’appel, n’a le droit de condamner
la D am e Lachaud & conforts , au déûftat des mines de la Charoulière.
La lo i du z8 juillet 1790 n’en a pas transmis la compétence aux
Corps adminiftratifs , & on ne peut pas l ’invoquer parce-que fe feroit
lu ï donner un effet rétroa& if.
3.0
!
Fut-elle ap p lica b le, le point de compétence feroit toujours le
même. Elle ne donne que le pouvoir aux Cérps adminiftratifs de
donner des permiifions d’exploiter ; &
il eft plufieurs mines pour
•desquelles elle n’affujettit pas les particuliers ou propriétaires de iürface,
de demander cette permiflîon. Telles ion t'celles qui étoient ouvertes
£C exploitées par ces propriétaires
avant les conceiïions qu’elle dé
clare nulles. O n peut encore ajouter celles qui’ ne font pas creufées
jusqu’à trois cent décimètres.
De
ce nombre font les mines de la .Charoulière : elles
ouvertes
&
étoient
en exploitation lors de la conceflion générale obtenue
par St.-V iilou r,
Treich-Laplene en eut repris la jouiffançe en vertu
�( 3° )
de la loi
fi‘ la Dame- Lachaud & conforts n’avoîent pas eu une
fentence qui confacroit l’ufurpation qu’ils en avoient fa it , d’oîi il fuit
que l’autorité judiciaire ctoit feule compétente pour la réprimer.
4.0
Soutenir que le rétabliflement de Treich-Laplcne, dans fon an
cienne poffeflîon, porteroit atteinte & contrarieroit l’arrêté de l’adminiftration centrale de la C o rrè ze , c’eft un paradoxe évident. Si cet
arrêté étoit exécutoire, fi la Dam e Lachaud &c conforts jouiffoient
desdites mines en vertu d’ic e lu i, il y
auroit contrariété &
attentat
aux opérations de l’autorité adminiftrative. Mais ce n’eil ni l’un ni
l ’autre ;
la compagnie Mazau n’exploite point encore , &
ne peut
exploiter ; par conféquent il faut commencer par rétablir les chofts
dans leur état prim itif.
Ainfi , le T ribu nal d’appel de Riom n’a pas d’autre prononciation
à adopter que celle du T ribunal d’appel de Lim oges. Im p a rtia l,
éclairé &
courageux dans fes princip es, comme il l ’a toujours é t é ,
il ne doit céder à aucune espèce de prévention , pas même à celle
que peuvent inspirer le m érite,
la réputation &
l’autorité des M a-
giftrats qui ont prononcé ou émis leur opinion dans cette affaire. La
loi , la raifon , la vérité : v o ilà fes régulateurs.
Et en fe prononçant fur la compétence , il doit d’autânt moins
craindre pour fon jugement le fort qu’ont éprouvé ceux du Tribunal
d’appel de Limoges ;
que ces jugements n’ont été cafles que par la
m inorité des membres du T ribunal de caffation , contre l’opinion du
plus grand nombre.
Cette discuiïïon , C ito yen p r e m ie r C o n s u l , quoique p aroiffanf
¿pifod iqu e, n’eft pas fans analogie avec celle que Trelch-LapUne doit
vous préfenter , contre les demandes en conceifion de S t,-V 7clour &
de la compagnie Maçau. En même-temps qu’elle éclaire le Tribunal
de Riom fur fa compétence , elle réfute plufîeurs erreurs de principes
dont on veut entacher la législation &
fur laquelle on fonde l’espoir
d’envahiffcment de toutes les mines de Laplau.
REPR EN O N S la fuite des faits relatifs aux manœuvres des préten
dants , ôc on fe convaincra de cette vérité.
�O n a v u St.-Viciour trompé dans ion attente par l’ unîon des proprié-
pj
taires de furface qu’il avo it lui-même provoquée , s’oppofer à l’approbation de
l’arrêté
du
23
vèntôfe
an
fix ,
qui leur conféroit
>jj;!
l’exploitation des mines. Jusqu’alors il ne s’étoit fervi que de voies
t î■
;
o b liq u es, que de moyens artificieux pour s’affranchir des engagements
il ;
qu’il a vo it contra&é avec Treich-Laplene : déformais fa cupidité fe
! fi
dévoile & il marche droit à fon but.
• Il demande l’annullation , non-feulement de l’arrêté du 23 ventófe \ Déclamation,
mais même du traité fait avec Treich-Laplene, & il réclame hautement ^¿'les^proVn
la conceffion. C e n’eft plus du prétexte de manquer de charbon > taires.
dont il fe fe r t , comme il le fefoit lorsqu’il cherehoit à faire réunir
-J-;
les diverfes extradions que chaque propriétaire fefoit dans fon terrain ;
|■!
il
attaque de front les qualités perfonnelles des propriétaires réunis
p our exploiter ;
art , &
il allègue leur ign o ra n ce, leur impéritie dans cet
leur défaut de moyens pécuniaires; il prétend que les mines
font des propriétés publiq ues, d o n t’l’exploitation p e u t, fans injuftice,
être confiée à des C itoyens qui n’ont aucune propriété de la furface.’
L ’ intérêt eft un fi grand mobile , que les intrigues & les involutions
de
conduite &
de
fyftème de St.-V iciour, pour envahir l’objet de
fa co n v o itife , ne préfentent rien d’ étrange. Mais ce qu'il y a d’étonnant , c’eft de v o ir le Confeil des mines qui a vo it propofé lui-même
de contraindre les propriétaires à fe réu n ir, pour établir une exploi
tation commune , fous la direction d’un c h e f, faire im fécond rapport
an
M in iftre, pour les écarter &
pour empêcher
l’approbation de
l ’arrêté qui leur conféroit cette exploitation.
• Ce rapport eft du mois de prairial an fept. O n y dit : «que la Le confeil des
•
w
n
,
•
. .
» compagnie M a z a u , daprès íes propres a v e u x , n a ni les moyens
» pécuniaires, ni les connoiflances théoriques ou pratiques requifes
» pour garantir au Gouvernem ent une bonne exploitation ».
» Q ue quant à Tnich-Lapàine , il s*eil fait une faufie idée de fon
» droit de propriété ; qu’on ne lui contefte pas celle de la furface ,
» qu’il peut la labourer , en récolter les f r u its , l’affermer , la vendre ,
» mais que le fonds ou l’in térieu r, la m in e , le charbon caché dans-
nes
s ’o n p o f
phomolo^atî
�( 3 0
» les entrailles de la terre ; le droit de l’en extraire, d’en dispofcr,
» de le vendre ;
que tout cela eft inconteftablement une propriété
» p u bliq u e, & que c’eft la jurisprudence de tous les pays & de tous
» les temps ».
O n obferve
« que la conceflion des mines de
Lapleau convient
» mieux aux entrepreneurs de la manufacture d’armes de T u lle qu’à
» tout autre. Mais comme le défaut de débouchés-, l’état'de langueur
» de la m anufafture, le s . reproches graves qui font faits à ces En» trepreneurs , empêchent
de
pouvoir
décemment
leur donner 1?
» conceflion ; on leur conferve le moyen &c l ’espoir d’être mieux
» accueillis dans un temps moins fâcheux ».
Le Confeil des m in es, termine par conclure à ce que tous arrêtés
de conceflion , tant
générale que p articu liè re , pris en 1791 ,
1795
& en l’an 6 , foient annullés ; que tous aûes & conventions paffées
fur le droit de propriété prétendu fur les mines & fur leur produit par
lçs propriétaires de la furface , le 1 foient égalem ent, & à ce que l’on
accorde , à chacun d’e u x } de iimples permiflions p ro vifo ires, limitées
& révocables à v o lo n t é , d’extraire du charbon jusqu’à trente mètres
de profondeur, en attendant que les Entrepreneurs de la manufacture
rétabliflent leurs affaires, leur crédit & leur bonne réputation auprès
du G ouvernem ent, pour pouvoir leur rendre la conceflion.
- T e l eft ce rapport qui donna lieu fans
miniftre du
18 meflîdor an n e u ft &
doute à l’inftruQion du
q u i fa germer dans la tête de
quelques Magiflrats l'idée que LES m i n e s fo n t des propriétés nationales.
Plus il eft défavorable à la compagnie
espère en
tirer d’avantage. D éjà
il
Ma^au, plus St.-Ficlour
le regarde
comme
un
gage
afliiré de la conceflion. Mais fa demande n’obtient pas plus de fuccès
que celle de Mazau. En vain l ’un &
l’autre dans une guerre polé
mique fe disputent-ils les dépouilles de Treich-Lapltnt ? La Juftice &
l’impartialité- voyants
&
cette lettre
fcandaleufe ,
protègent l’opprimé
le couvrent de leur égide,
O n veut parler du G é n é ra l, Préfet du département de la Corrèze :
CE M a g i s t r a t aufli louable par fon éq u ité que recom m andable par
fa
�«bd!
( 33 )
ria b ra v o u rè , InacceiTible à l’intrigue & à la
prévention
n’écoute
•que la lo i & la Juitice ; le lô p l u y iô f e an i z il rend en conféquencc
l ’arrêté
fuivant :
« V u la lettre du M IN ISTRE D E L ’IN T É R IE U R du 2.6 brumaire
» dernier , pour l’inviter à émettre /on avis fur les conteftations rela» tives aux m in es de charbon fituées à Lapleau ».
« V u a u fli,
»> les
dans le plus grand d é t a il, les pièces produites par
parties contendantes ,
» respectives
du C itoyen
» Maqau, d'autre
part ;
après un mûr examen des prétentions
Trtich-LapUnt d’une p a r t , .de la fociété
&c enfin des entrepreneurs &
propriétaires
» de la manufacture d’armes à feu de T u lle ».
« Confidérant que par l ’arrêté de ¿oncefjion du
» le
délai accordé
au
C ito yen
Trtich-LapUnt
i8 ventôfe an 6 ,
pour
déclarer s’il
» entendoit ou non faire partie de la fociété , fu t fix é a quinzaine,
>> contre les dispojîùons formelles de l’article 10 de la lo i du 18 juillet
» 1 7 9 1 , qui proroge ce délai jusqu’à iix m o is ; dispositions d’autant
33 plus favorables au C ito yen Treich-Laplene , qu’il eft un des prin«
»> cipaux propriétaires ».
« Confidérant que
le
jugement du
T ribu n al
de caflation ] "en
» annullant celui du T ribunal d’appel de la H aute-V ienne, a rendu
» indécife la propriété de la terre'd e la C h a ro u liè re ,
conteftée par
» le C ito yen Treich-LapUnc à la yeu ve Lachaud ; & qu’attendu que
»> la
lo i aflure la
préférence à
» réunie, à celle .de iès aflbciés
celui dont la propriété feule ou
eftr d’une étendue -propre à ; former
» une ¡exploitation , »il paroît convénable d ’attendre , de preffer même
» le jugement à ' intervenir ;
&
cela avec - d’autant pliis , de raifon,
» que la terre dont il s’agit éft extrêmement abondante en charbon »,
« Confidérant,-enfin que l'adm irti/lrationdela manufacture d’armes
» n’é ta b lit. fe$ droits- à ¡ l’exploitation qu’à la f a v e u r , des, arrêtés du,
» confeil d ’Etat de 1783
» ? 8 juillet
r . >
&
* 7 8 6 , renverfts entùryyefttpar la {»¿¡¡du,
iyç)i.y qui ne maintient .que .les . feuls conceilionnaires.
r: .
r "
,-
rsc
-
•:
'•
{•->
-
»> qui font ou propriétaires de lurfaçe ou auteurs de la découverte
1
.. . . . . . .
» «es mines »,
'■-1j
■-
' .
1. .•!
j - .
•f
E
: :
" -
L e Préf
p arler
C o r rè zJ
auepe
l u r la
il c o n v i
tendre '
fio n d u ’
d ’a p p e l ]
f u r le p i l
m i n e s d<"
r o u l ic r e
�b *
¿Y*
( 34)
« Q ue
les
prétentions
de la
m anufafhire \ confédérées ious ce
» double rap p ort, paroiffent dénuées de fond em ent,
v u que d’ ua
» côté ces adminiftrateurs ne jullifient point fuffifamment être pro» priétaires de
|
furface ,
&
que de l ’autre la découverte de cette
» mine remonte à deux fiècles , c’ eft-à-dire à une époque antérieure
» à l’établiffement de la mantifa&ure , qui' ne date que de 1 6 ^ ».
'
*•
*' it ■
* ■
•. .
« Confidérant
1
d ’ailleurs
que Yadminijlratîon de la manufa&urç a
» reconnu , d’une manière bien formelle , la nullité de la conceflion
» de 1783 ,
par le traité paffé
» mois de juin
avec
le C ito ye n
1793 , c’eft-à-dire près
Treich-iaplene a;i
de deux. ans. après la . lo\
» du 28 juillet ».
1.
« Par tous ces motifs
«
eftime q iiil riy a lieu. à. délibérer fu r la
i
» demande des entrepreneurs & propriétaires d)e la. manufacture <îarmes ;
!
» que pour ftatuer- définitivement fur la. conceflion de f a n fi
il
» convient d'attendre la décijion. du Tribunal £ appel du Puy-dezDome ^
» chargé de prononcer fur la .propriété de la terre de. la C h a m a ille ,,
» afin de connoître-, avec plus de p récifion , la propriété des parties
» contendantes ».
les te n ta -
'cspropri-
jj
.
fem blé que -d’dprès
•
cet
•
arrêté
:
le s entrepreneurs de la -m a n u -
b tic la ma- fafture ainfi que la compagnie Mazau auroient dû abandonner h ura
.ure& ilela pr^tentjons oll attendre la décifion du procès f u r i e s mines dé,liai
aginc
51a
^ jîarou|j^re> Cependant les uns &
les autres
perfiitejit. dans
leilrs
demandes Si. continuent de folliciter auprès du Gouvernem ent’ pourles faire -a ccu e illir; les. premiers ,
rapport
procès
du confeil
pendant au
parce qu’ils..fo n t enhardis, par Ie<
des mines ; les derniers. ,
ftorç prétexte qusmlfl-.
T rib u n a l d’appel, de R iom
u e . regarde qpe j a ;
mine & non la furface de la terre de la. Charôulière.
'
Il s’ ag it d o n c , C ito yen 'premier Çonful\ de prononcer fur les pré
tentions des parties contentantes'y ttiais pour- cela il faut -examiner'
plufieurs queftions t
*.
i
ih ■
>
-
1
La première eft de favoir ii l’arrêté du 23 vent#fe an 6 , rendu
par l’adminiftration centrale de la
Corrèze , doit être annullé.
�( 35 )
L a fécondé î s’il y
a lieu d’ordonner la conceflion des mines de
Lapleau & Janoueix.
- —
• f
;i
—
-
La troifième , fi en ce cas les propriétaires de furfacè ne doivent
pas être préférés aux, entrepreneurs de la manufacture de T u lle.
La quatrième ,
fi celu i qui poflede le terrain le plus contigu 6c
le plus va û e ne doit pas a vo ir fur-tout la préférence«
L a cin q u ièm e, fi dans tous les cas on peut le forcer à s’unir aux
autres propriétaires,
lorsque l ’étendue de ik furface
pour Former ùné exploitation.1
' “* ' " " f '
eft allez vafte
'
.
Ji(
Treich-Laplent v a fe livrer à l'examen de toutes ces questions, &
' il en fera réfulter la preuve que ni la
entrepreneurs de la manufacture ,
compagnie M azau , ni les
ne peuvent lu i enlever l ’exploitation
des mines que renferme la furface de fon terrain.
I> *
L ’ arrêté
du
2$
v e n tô je
c e n tr a le , d e la
C e tte
Q U E S T I O N .
an
> rendu:, p a r ïa d m in ifir a d o n
C o rrect 3
d o it- il être, a n n u ité ? t
queftion peut être dépendante tout comme indépendante
des queftions fubfidiaires : elle
en dépend
fi l’arrêté n’eit infeCté
d’aucun vice intrinféque capable de le faire annuller. Elle en eit indépendante, s’ il exifte quelque nullité qui puiffe dispenfer de l ’examen
du
fonds.
'' î.
;
Il eil certain que l’arrêté en contient une radicale en ce qu’il ne
donne que quinze jours à Treich-Laplene pour déclarer s’il entendojt
fe réunir aux autres propriétaires , tandis que l’article
du 2.8 juillet 1 7 9 1 ^
Cette nullité
"arrêté du 16
la
accordoit fix mois.
*'
eft inconteftable ,
10 de la lo i
,
•
le Préfet l ’a reconnue dans fon
p luyiôfe d e rn ie r, puisqu’il a relçvé Trekh-Laplcnc de
déchéance prononcée contre lu i.
E 2
L ’a r r ê t é
radicak
nul.
�. C }6 )
M ais pour prouver que quand
eft vicieux &
l’arrêté feroit au ifi-régu lier, q u 'il
n u l, il ne pourrait être approuvé dans aucun cas ;
nous paflons aux queftions fubfidiaires,
-,
•..
i ,
I I.ème ! Q U E S T I 'O N.‘ " “ ‘
-•
iî
.
‘ '-i
'
r.t
A
Y a-t-il lieu d'ordonner la c'onceffion des mines de Lapledu.
& Janoùeix.
’• ù
, ,.nb;
qu’il n'y a
^
négative eft d ém o n trée,
elle détruit
fa n sd o u te toutes les
ià ordon-espérances de ceux qui convoitent les mines de Treich-Lapltne.
;onceifion .
•*
’
aines de
Q r ^ ja conceffion j es mines n’eft que la permiifion de les ex*
p loiter accordée à quelqu’ un par une grâce du Souverain.
.
E lle eft contraire au droit de propriété & .n e peut être accordée
qu’en vertu d’une lo i ou par quelque
m o tif d'intérêt & de befoin
public.
-
E t quelle eft la
lo i ou le m o tif d’intérêt public
celle des mines de Lapleau ?
*
D e lo i , il n’en exifte aucune;
-
C elle
du
qui
néceflite
s.
28 ju illet
179 1
porte
bien que les mines ne pourront être exploitées que du confentement
&
fous la
Surveillance de la
Nation ; mais elle permet aux pro
priétaires de furface d en jouir jusqu’à
elle leur permet encore
cent pieds de profondeur ;
de jouir fans lim itation
de
celles
qu’ils
exploitoient avant les anciennes concevions. *
Ne feroit-ce pas la vio ler que de concéder un droit d’exploitation
au
préjudice
de
ceux
q u i,
comme
Treich-Lapltne,
fe trouvent
dans ces deux cas ?
Cet argument
eft
tra n ch a n t,
on
ne
peut
fe
fouftraire
la
conféquence forcée qui en dérive.
D ira-t-o n
que cette lo i fuppofe qu’on peut
ordonner une con-
c rflio n , puisqu’elle défigne l’autorité qui doit l ’accorder 8c les formalités
à remplir ?
�,r
' ’ fj; ,
* ■
'*
' '!? •
i
i
O u i l fans' doute j il jêft . poffible qu’il y r a *t ^‘ eu à” ;|’ordonnerr
Mais ce n’eft qu’en certains cas. C e n’eil &
ce ne peut
être que
lorsque les befoins publics fe 'font’ fentir & r qtiè les propriétaires de
furface laiffent dans lési entrailles, de la terre' une; matièfe 'devenue
néceffaire à l’ufage public ou p riv é .
: l*'-
1:0 -
¡rajurj-
Voilà le feuf. caso oh l ’on- peut transférer 'à 'quelqu’un^ le clroit
d’exoloiter une mine.
Mais
'
lorsque, les ‘ propriétaires
de
furface
'
’
exploitent
' ”
H
par
eux-
mêmes , lôis qu’ils font autorifés par la lo i à exploiter. Alors point
de poifibilité d’accorder de, cdnceilion à leur détrim ent.*”
A
Ces
principes ont
été profeffés de. tous tem ps;
qu’on
parcôure
tous les brevets de conceifion accordés fous le règne de Louis X IV ,
, on
n’en trouvera, pas un feul oii l’on n’eut excepté les minés fouilléts
par les propriétaires de furface.
T e l fut celui donné le
•qui fut
' iJ~
16 Juillet
1689 au D u c de M ontauiier
confervé à la DucheiTe d’Uzés.
ploiter les mines qui feroient
Il ne perm ettoit que d’ex
découvertes
en
dédommageant les
propriétaires de gré. à g r é , & l’arrêt de confirm ation,
Madame d’Uzés ,
obtenu p a r
ne fut auffi enregiftré qu’à .condition^ de laifler
continuer aux propriétaires la- fouille dfs mines ouvertes.
i
**
.
.
Sur l’oppofition que les Religieufes de Ste. F lo rin e , en Auvergne^
formèrent à
cet
a r r ê t,
il fut même
décidé
que le privilège ne
pourroit s’exercer fur les.m ines nouvellem ent découvertes au préjudice
des propriétaires.
i0
n
C ’eft pourquoi in te r v in t, le 13- m ai 1698 , l’arrêt de règlement
qui permit à ceux qui avoient des mines de houille dans leur
terrain de les exploiter fans être tenus d’en demander la permiflion.
C e n’eft qu’à mefure que
le trône
s’approcha de la décadence ;
lorsque des abus fans nombre fe furent introduits dans le m iniflère,
&
qu’une ambition
dém éfurée, une
cupidité
ians born es, euient
tout fournis aux calculs de l’infâme agiotage ; ce n’eft qu’alors que
�1 ^ 0
w
l’on fe permit de tra fiq u e r de la fortune publique & particulière &
•’‘dé dépouiller'les pVô'priétaires par des1 côriceïTionsJ1
.
L’AiTeroblée; cohftituante vint; m ettre u n ''te rm e . à ces a b u s f a i r e
3 teiïer,. fours.ide^ fjn ju iv e s & .j-appeler ,rd^ns itoute leur pùreté les
principes dont on s’étoit écarté..; r^q .,0 ^ ,,q
/J / ...\
a
^ i ! V oyàj;pourqiu)}. çlle annulla toutesr l^S conceflions qui lavoient eu
pour objet des mines découvertes &
exploitées par des propriétaires
de furface ; ainfi il n’eft p oin t.d e lo i ^qui permette d’en accorder au
' prejudide 'des ‘ propriétaires qui font autonfés ‘à-'exploiter. !
.lolii.
*
.
t
, c. lojtjc Jri'■. f
:* .
:r
A défaut .-de - lo i. peut-on 'citer quelque 'm o tif d’intérêt p u b lic ?
j'i Jl eil certain qu’il eft des cas oit l’on p eu t'o b lig er les propriétaires
, à , fouffrir la réunion de leur
terrain ravec celui des
voifins
pour
\'A.
exploiter généralement les mines enfouies dans les divers ^héritages
limitrophes.
.■
¡..
t,
r-^ T el
eft
Celui
ou
les Extradions ? partielles ne 'donnent pas un
-produit fufïifant à l ’entretien, des befoins1publics & égal à celui qu’on
.pourroit retirer d’une exploitation générale.
*
*'
•
'
’
)j*
* Mais ce cas fe rencBhi^re-t-il^dans l ’hypothèfe ? Eft-Jl. aux environs
‘de Lapléau qiiéîques forges ou manufaûures qui foient au dépourvu
de charbon F-Exrfte-T-il quelques particuliers qui crient à la pénurie?
« ' N otl ! ^lé iêul etabliflement important qu’il y ait dens la contrée
'environnante , eft la manufacture d’armes à feu de T u lle : Et cette
m anufaSùre -e‘ft-am plem ent 'approvifionnée ; toutes les autres forgés
des m aréchaux, ferruriers, clo u tiers,
¿joflfiinabje regorge de tonte ;part. ,
11
& c . , le font’ auffi ; la matière
,
/
n’y a donc pas de raifon pour chercher i\ augmenter le produit
desdites mines par l’ctabliflement d’une feule &
unique exploitation;
car à quoi bon extraire plus de houille qu’il n’en faut pour l’ufage
lo cal }
a i'
Le moyen d’augmentation
feroit utile &
néceflaire fi la houille
p ou voit ayoïr quelques autres ¿¿bouchés &C fi l’on ïivo it des moyens
�Q>2&
( 39 )
faciles de transport; f i , par exemple , il exiftoit un canal de co m
munication “ entrel'les m im s& C la. Dordognt, tel que l’a v o it projett^
l’ingénieur
Miche.
w
.,
•
1; ( ^
iJ .
.
tJ p
* -r
„ ■^
..
•
. . . . . . . .
Mais point de débouché?, .point d ç canaux d’exportation ; le charbon
coûteroit trop de frais d e .,v o itu re , o n , eft forcé de le garder pour
• -\?:n v î n c r ^ i v n a
■
l’ n ï i . A -lin . ■
eo.i r r - . / j
la confom m ation. du pays.
- ,
.
ne, . v- Llir
•:?) r:jk; t
y
. .* o . .
D ès-lors,, p o in t.d e motifs d ’intérêt public qu i oblige d’ordonner la*
conceffion
des mines , n i d e t réunir, les diverfes extradions en. ,une
feule : chaque propriétaire doit être maintenu 4ans l’exploitation qu’il,
fa it fur fon terrain.
•
. : o r'.
.
U i: - V {
'.I
î . i v i ;
su
/
r ::'.-;n ::o
St.-rP'L(!our.i \ .convoitant . cette,; co n ceffio n ÿ , fentit. U bien
que le.
feul m oyen d’y donner lieu ..¿to it.le cas-de pénurie de charbon , occafionnée p a r la diviûon des ,ç:xtra£Uoi}s ^-qu’i^ fuppofa impudemment
que la tna.nufafture. dpnt ^l-.çtoij: le ^ifefteuf.'^pétoit expQÎee 'à çn
m anquer
&
à interrom pre fes tra v a u x dansun.lteçrvps ç ù la. Frarççe
étoit. en guerre .^vec les^ PuiiTances coalifées de l ’E u ro p e, & oîi la
fabrication des armes n’ exçitoït' pas moins l’émulation 5c. la prévoyance
dès F ra n ça is'q u e la défénfe1 de la P atrie/ ,
1
‘ 4"
.
I,
•. ;
: z Î:ôv: On quo>L-;iJGJ SIIJ.Î i: . jn>,; b .-.(
on
Il
alléguolt; fan^î c£Î&i l’infufÇfancç, div.produij jàes; j?xp]mt8tions i*sï
iL l’attribupit ifoit .à ^^négljgence jblQ ît i^-rixnpéiiÿe deSi extraâeury.'.
Ces jérémiades étoient répétées dans . toutesillesL'lettres qu’il écrivoit
aux M iniftres.
■
. ■
• ' -.Tl-'Oi
c -j
'■'IiiJO.I •_;> i . ::. n
.
-
,
i -. \n r ,■
■
■\
t C e fu t.la caufe principale*qui. détermina. Je.Gm ivem epient à dïdohnerla réunion:des propriétaire^ 4e?Iurfacbry & r<eWeycice.;dJune.exploitation.
unique & ' générale* î n'/)jp
A ;/ T il j;I îrif-/I
t
^
C e prétexte de la part d e ^ - r ô ^ K ^ n eioit ’qu’«« artifice‘dont le*
dénouement* ne ltii : f u t p a s 'fa v o rà b le i; i l.ç ft .p r o u v é que les . mines y
Aon\iTjeitli-LapUne.'îiVo\x. cédé l’fcxploitàiion^à.lafmanufeûure^ étoient^
d-’ù a produit interne' fupérieurt ;Vlfe»r: b'efoins.';; q.uc.td’ailleursi fyttiriger:
s’étoit ob lig é lu i-m êm e, par le traité, du j 646)0,ii79.3.!*i/de l’àlirnentèrt
& ; o^e tenir toujours ijur place la r c o m i t é de charbon npçeffaire, à
cet Entretien, ,
« - :
. .
~’X '/;
, • ..
îfi • ( .
•
'
,
,.r
' n • :-i:
,
t:r.-..n
�»u«
U M
- r ii,Il
V 3*» £•'•>
A --: t vfrjiü. i« tJ:'- r ' ;
;t; if;. •
nen fa u t, pas davantage aujbuçd hui _pour ecartér le projet de
cette exploitation générale &
poiir annulier l’arrêté du 23 ventôfe
an fix. Il ne doit fon exiftence qu’à la perfidie : cette perfidie étant
d évoilée il 71e peut ’ plus fùbfiftèr, Ceßariie c à ü jk , cejfat effecliis,
I
;
j i. -
'•
t.
, „j
r
^' r
|
''P o rtan ts nos regards fur l ’a v e n i r , envifageron s-nous q u ’elle eft la
m anière
d’exp loiter q u i peut o ffrir plus dè prospérité &
d ’avarttagé la du rée desdites mines
p rolon ger
*-r il n’eft p a s'd ifficile de fe co n
v a in c re qu ’ une ex p lo ita tio n générale feroit m oins frü Q u eu fe, fous ce
r a p p o it,q u e
1
les e x tra d io n s p a rticu lières,'
Les conceffionnaires
1
y .
ne vifent point à la confervation des mines
qu’ils'exploiten t : tra v a ille r à accroître lès produits de leur conceflion
à "e x tr a ir e 1 précipitam m ent &
en a b o n d a n c e ,
facrifier à leu r intérêt
la durée de l ’e x p lo ita tio n : tel ‘eft le plan de Ieür condu ite ; les mines
fönt des reffources qu’ils craignent d e ' rte‘ pa$Kà ÿo ir épuifées avant le
tefme de leur cçnceflion(T
'»
t*
-
: f. &
•L
• r» >’ ” ” $03 2?,onn7i; .v 1 r 3371: o r ■; :is .
Les propriétaires au contraire qui fouillent les mines que' contient
leur terrain , lés regardants comme aine riçheffe p o u r leur fam ille ,
ne s’attachent pas ta n t, à fàire'tout-à-coup de grands p ro fits, qu’à en
foigner la iource fie en piölönge'r^la duréeJ Ils extrayencMâ fùbftance
aveom én agem én t, ils exploîteWt^d’après les règles de l? a « i& ne négli
gent' lauicuh'm oyea1 d’am élioration,
!> ¿yj f ù. :
tiV ..-* '■ < ■
Audi v o it-o n
g r a n d e ' Bretagne,
que les mines de houille de Neuwcaftle & de la
.qui:font en ce: genre’ les premières, mines du.monde
font exploitées avec le plusl grand,fùccès-, parce, qu’elles lexfon t par
les propriétaires, fuivant la R E M A R Q U E qu’en fa it Mr, M oj-andj en i
fç>p O uvrage .fur l’art d’exploiter les mirçes,.
. E t s’il fallo it un
exem ple', qü’élles
^
^
^
dépériiTent ; plutôt entre
les.
mains jdes côneeflionnairesn qu’enti-ç.-les mains . des propriétaires de
furface ^ nous le trouverions dans ilia 'co n d u ite de St,-V iB ou r, h iim êm e, farts-l'aller çherchjer lailleuns, ;
’
■
t 1 ' '*• r'h »
''
- J * *
' \
;
r>
Lorsqu’il prit l’exploitation dé celles de Treich-Laplene \ cette exploi
tation étoit la mieux en o rd re ;
les mines étoient étayées *: il ÿ
a v o it
�( 41 )
a vo it des galeries fpacieuiês de 80 toifes de longueur fur 5 de la rg eu r;
des pilaftres de charbon qui foutenoient le fol. Q uatre ans après qu’il 4
fut entré en jo u iflan ce, il abattit les p ilaftres, il élargit les galeries
d’extraûion pour les faire é c ro u le r, &
com bla celles d'écoulement.
V oilà les belles règles* de l ’art qu’il em ploya. V o ilà fa noble & heureufe
exploitation.'
‘
.1
/
j
T ou s ces faits iont conftatés par l ’enquête qui fut faite au T r i
bunal du D iilr id d’Uffel , lorsqu’il fallut
eftimer l’indemnité qu’il
a v o it à prétendre comme conceflionnaire d é c h u , pour les ouvrages '
dont Trtich-Lapltne devoit profiter.
D ifons donc q u e , fous aucun ra p p o rt, il ne peut y a vo ir lieu à
accorder de co n ceiïïo n ,
ni à ordonner une feule exploitation des
mines de L ap le a u , que la lo i le défend &
qu’aucune raifon d’Êtat _
ni d’intérêt public ne le commande.
I I I« w
^
Q U E S T I O N .
JE N ca s d e co n c e jjio n } le s p ropriéta ires d e fu r f a c e n e 'doiventils pas être préférés aux Entrepreneurs de la manufacture
|
|
de ‘Tulle ?
O n eft étonné ou p lu tô t indigné de v o ir mettre en problème un Railbns q
point de droit aufli clairement &
lo i du l8 juillet I 7 9 I .
auiïï formellement réfolu par la
’
propriétaj
En effet, cette lo i attribue I dans tous les c a s , l’exploitation, de
de prefri
,c
aux
-
preterence aux propriétaires de furface.
Les propriétaires de furface , porte
la préférence &
l’article 3 ,
la liberté d’exploiter les
trouver dans leurs
fonds ;
&
la
auront toujours
mines qui
pourraient fe
permiffion ne pourra leur être
refufée , lorsqu’ils la demanderont.
N ulle conceflion
ne
pourra
cntl
«eurs de 1,
nufaüurc.-i
être a cco rd ée,
ajoute l’article
10 \
qu’auparavant le propriétaire de la furface n’ait été requis de s’exF
j
�( 41 ) )
p liq u e r, dan s.le délai de ifis mois
s’il entend b u 'n o n ,-p ro c é d e r à
l ’exploitation, z\xx mêmes clattiès & conditions que les concefliorrnaires,
'•
'
. 1^ '
r
¡j/w
^La loi; du 13. pluviôfe an, 9 n’a, rien c h a n g é à . cette dispofitipn :
elle n’a fait que reftreindre
4 deux
mois l’explication des propriétaires
ce . qui confirme la préférence qu’ils ont fur les conceflionnaires.
-t
^
IrU';
**
*
£
Auiîi S-t.-Viciour v o ya n t les propriétaires fe réunir pour accepter
l ’exploitation, générale ordonnée par le M iniitrerde l ’Intérienr ,
d’inutiles efforts pour obtenir la conceilion. à leur, préjudice
fît-il
auffi:
cette conceffion leur fut-elle accordée de préférence à lu i.
'
1
*
Q uelle eft donc
la
raifon im puliive
•
de
.
-1*1
fort infiilence a â u e lle ?
la même fans doute qui l’a toujours enhardi dans fon. entreprife 5
c’eit l’espérance qu’il a , en de puiflants protecteurs r lé rapport, fur-?
tout fait au mois de prairial an fept par le confeil des mines , où
l ’on a repréfenté.M azau 6 f compagnie com m e des gens fans moyens
pécuniaires &
fans connoiflances théoriques ou pratiques pour faire
une bonne exploitation.
Treich-Lctplent n’eft pas plus te partifan- de cette compagnie que
celui des entrepreneurs de la manufacture ; il prouvera bientôt % au
contraire , que la compagnie Ma{au n’eft pas digne de l’exploitation
dont Va chargée- l’arrêté du 23 ventôfe an 6 ; raifon pour laquelle
il1 n’a jamais v o u ly entrer dans le contrat d’union.
Mais en défendant la caufe des propriétaires , il défend la Tienne
propre ; il dit donc
conjectures &
qu e ce n’eil pas avec
des
allégation s,
des
des probabilités1 qu’Ort peut écarter lis propriétaires:
pour donner à des étrangers la. preference que la loi leur attribue.
I l d it qiiQ ft. la compagnie Mo^au ne
réunit
pas-
toute
l’aptitude
néoeffairc pour garantir au Gouvernem ent une bonne exp lo ita tio n .,
elle ne comprend pas tous les propriétaires; que lui fe préfente pour
iùpgléer. ¿\ fes défauts & qu’il tient le premier rang avant les entre
preneurs de la m anufaûure;
�Ces entrepreneurs ne peuvent pas lutter, contre les droits iàcrés de«
propriétaires. La lo i proscrit leur prétention en. termes énergiques; •
N ous
avons
combattu
vlcloricufcment le ' fyftème propofé par lfe
confeii des m in es, que les propriétaires de fùrfàcé n’ont aucun drok
de propriété fur les fubftances m inérales,'. Nous ayons- prouvé que
..de tous les temps Us mines de houille ont été reputées appartenir au*
particuliers dans les héritages desquels elles font enfouies ; que la
lo i du 28 ju illet 179 1 ne fait que confirmer ces principes d’une
manière plus folemnelle.
•
.
Suppofons néanmoins ,
. .:>
"
' ' : ?!‘ V' . .
1
contre v é r i t é , que les mines foient des
propriétés Nationales , comme le prétend le confeii des mines. Q u i
mieux que les propriétaires de furface mérite de profiter de la fubstance, de la matière & du produit de celles (que contient leur terrain î
qui
mieux qu’eu x - mérite
d’en
profiter ï
fait la découverte de ces mines ,
lorsque
fur-tout
ils ont
lorsquïils les ont mifes en exploi
tation , lorsqu’ils fe font épuifés en travaux^ &
en dépenfes pour la
confeûion des ouvrages de l’art. Ne feroit-ce pas 4une injuftice
ré
voltan te que de leur enlever tout le profit lorsqu’ils ont pris toute
la peine ?
Pourquoi d’ailleurs les fruftrer à l’avantage des entrepreneurs de
la manufa&ure ? ceux-ci offrent-ils plus de g aran tie, plus de facultés
pécuniaires, plus de talents & de connoiflances dans l’art d’exploiter f
Tout
cela n’eft
ridicules &
que
fuppofitions dénuées de fondem ent, prétextes
artificieux.
,
ip
Q ue les entrepreneurs foient plus rich e s, que les propriétaires le
foient m o in s, peu importe , p ou rvu que les propriétaires le foient
affez pour faire l’exploitation. C e n’eit qu’une raifon de plus pour
que les entrepreneurs duiTent fe
contenter . de leur fo rtu n e ,
fans
chercher à envahir celle d’autrui.
Q uant aux talents &
connoiflances dans l’art d’e x p lo ite r,
on ne
(ait qu i' en a le p lu s , ou de la compagnie Mazau , ou des entre
preneurs de la raanufafture ; toujours eft-ii vra i que ni les uns ni
les autres n’en ont fait un bon ufage,
F z '
�Les propriétaires qui compofent la compagnie
la
plupart
laifïe
écrouler leurs mines &
Ua^au “
ont pour
affaiffer leur • terrain ;
les
entrepreneurs ont auifi dégradé celles de .Treick-Laplene , lorsqu’ils les
ont jouies en vertu de la ccmceflion: obtenue par St.-Viciour en 1783.
Treich-Laplene eft le feul- q ui a it fait
preuve d’une fage & bonne
e xp lo itatio n ; tém oin l’enquête faite au T rib u n a l du diftri£t d’ Uffel.
Ses mines
■
m it en
é to ie jit1 dans le m eilleur
pofleifion
: celles des autres propriétaires
dépériffem ent c o m p le t, &
Il
St.-Viciour s’en
état lo rsq u e
étoien t dans un
ils ne les on t guère am éliorées depuis.
eit maintenant le feul propriétaire dont Us mines (oient foignées
& régulièrement exploitées : elles font riches & abondantes ;
des autres propriétaires font ftériles &
C ’eft lui ' qui poflede en outre le terrain le plus
plus contigu : ce terrain
contenant
celles
négligées.
a rro n d i. & le
64158 mètres quarrés eft aflez
étendu pour y affeoir une exploitation.
Ces
de ‘ la
deux faits font
manufa&ure ,
conftatés par la pétition
préfentée
au
Préfet
du
des
entrepreneurs
département de la
Corrèze , au mois de meflidor dernier : par l’arrêté du Préfet du 16
p luviôfe , & par un plan figuratif qui eft dépofé dans les archives
de la Préfecture.
Dès-lors s’il y a une concefïion à accorder , c’ eft lu i qui doit
l ’obtenir s’il eft vra i que la loi donne la préférence à celui dont
la propriété
eft d’ une étendue propre à une
exploitation. C ’eft ce
qu’on v a discuter dans la queftion fuivante :
IV .
L
e
propriétaire dont le terrain e jl le m ie u x arrondi ô
étendu p o u r une
ich - Laplerc
.ut le pnnciI propriétaire
Q U E S T I O N .
ex p lo ita tio n 3 ne
a jfe \
d o it- il p a s p lu tô t obtenir
la concejjion que le s autres ?
. .
1 t
L a f e i r m a t iv e eft réfolue par le fécond § . de 1 article 10 de la
du »8 ju ille tj ainft c o n ç u : « D a n s le cas d’acceptation par lç
autre*..
�C 45 )
» propriétaire de la furface , il aura la préférence pourvu toutefois
» q e fa piopriété feule ou réunie à celle de fes affociés foit d’une
» étendue propre à former une exploitation ».
A ux termes de cet article ,
il eft évident que la lo i appelle en
première lig n e , le propriétaire dont le terrain eft d’une étendue propre
à former une exploitation & q u e lle n’appelle en fécondé ligne qua
les propriétaires réunis en fociété.
C eu x -ci excluent les conceilionnaires ; mais ils font exclus à leur
tour par les propriétaires à moyens égaux d’exploitation.
C e font les principes que le M i n i s t r e lui-même a profeffés dans
fon inftruûion du 18 meifidor an neuf.
La préférence , y
d i t - i l, doit être accordée au propriétaire de
terrain à moyens égaux d’exploitation ; c’eft-à-dire fi fa propriété feule
ou réunie h celle de fon aflocié eft fuffifante pour afleoir une ex
p loitation utile.
O n v o it que quand il s’agit de délivrer un b revet de concefiîon'
on préfère toujours celui dont la propriété feule eft égale en resfources à celles des autres propriétaires réunis.
.
Le
Préfet
du
département de la
Corrèze a
auiïi partagé
cette
opinion , & appliqué la lo i dans ce fens par fon arrêté du 16 pluviôfe
an 12 ; puisqu’ avant de ftatuer définitivement fur la conceifion , il
a été d’avis d’attendre le jugement du procès rela tif aux mines de la
Charoulièré , pendant au T ribu nal de R iom .
, Il ne l’a fait que parce-que la’ propriété de ces mines peut décider
entre les propriétaires quel eft celui à qui eft due la préférence.
E t certes Treich-LapUne ne craint pas que ces mines lui foient en
levées. Ot> ne lui contefte pas la fu rface, dès-lors on ne peut lui
disputer le fonds.
D ’oîi il fuit qu’il
propriétaires.
a droit à
la conceifion
fur
tous les
autres
�' ‘ C e 1n’eft pas précifcniént lcten d u e du terrain qu’il faut confidcrer ;
c ’eftJ a.. contiguïté , c’eft l’abondance de 1a mine.
O r , parmi e u x , en’ eft-il le moindre qui ait une propriété auifi
^ tenante ,
des mines auifi fertiles S i auffi riçhçs en charbon ? Non.
T o u s leurs héritages font entrecoupés par les Viens. C e fait eft attefté
tnôtne par les Entrepreneurs de-la manufacture qui fe font ainfi exprimés
dans leur pétition,
» Trtick-Lapltnt eft le principal propriétaire , la furface de fa pro>> p riété-eft contigue & d’une vafte éten due, les mines que nous y
» exploitons régulièrement font riches & abondantes; fi les propriétaires
t> de la furfece doivent
a vo ir une conceifion : çeft à tous égards
» Treich-Laplene qui doit l’obtenir ; parce-que la furface du terrain de
» la compagnie M a z a u eft féparée & feç travaux d’exploitation ruinés ».
Demandera~t>on à Treich-Lap/w nne intelligence aCtive ? . . , il peut
rivaUfer fans yan ilé
avçc tous Je? prétendants à la conceifion.
L ui demandera-t-on une m oralité fur laquelle le*' G ouvernem ent
puiffç repofer fa confiance ? , , , qu’on l’accufç fi on a quelque fait à
Jiii rçprocher. Q u ’on intçrçoge fe rép u ta tio n , qu’on prenne des renfeignements fur fon compte.
L ui .demandera-t-on. enfin la juftification de Tes facultés pécuniaires ? . . .
Les fo lia tio n s dont il a été tour à tour la victim e lui ont fait un
tort
irréparable;
mais fa fortune im m obiliaire eft
iiiffifante p our
garantir le Gouvernem ent. Il ne faut pas ctre millionnaire pour faire
exploiter
les mines de Laphau ; douze ou
à cette çjcploitation
quinze, ouvriers fuffifent
il faut feulement avo ir de quoi faire les avances
‘de leur falaire journalier.
Une circonftance d’ailleurs qui achève de lui mériter toute confiance ,‘
c’eft que fi les m oyens lui manquent il a du crédit ; il peut appelle*
fon fecours ou s’adjoindre des hommes plus péctinieux. r
Il
a déjà traité avec les Entrepreneurs de la manufacture
pour
l ’exploitation de fes mines , il peut traiter encore fur la conceifion ;
la loi ne défend pas ces fortes de traités : ils font la prospérité du
�S& i
à&£
( 47 )
com m erce, ils ortt toujours été favorifés & perm is, ainfi que i’enfeigrié
Mr. Morand.
D ès-que Henry I V , par fon Édit de 1 6 0 7 , eut .affranchi des droits
du dixième les mines de charbon de terre , les propriétaires
traitèrent
avec des compagnies pour l’extraûion du ch arb on ; fouvent lé9 coriJ
ventions étoient renouvellées : les compagnies
'
1;.
donnoient tantôt le
quart ou le cinquième du bénéfice aux propriétaires, tantôt une fomme
an n u elle, ou tant par mefure de charbon extrait.
L \ irage de ces tranfaftions s?eft continuellem ent pratiqué depuis ;
' 4®
fe
‘¡7,
pratique e n c o re , parce qu’il n’a rien d’illic ite , &
qu’il n’y a
rien de plus naturel qu’un propriétaire puiffe céder ÔC vendre le produit
d'une mine qu’il a droit d’exploiter.
Q u e fi Treich-Laplene é p ro u v o it la m o in d re difficulté ftfr la préférence
q u i l r é c la m e ;
il foutient que d’après
refufer le d ro it d exp lo iter
d’une etendue
propre
à
fes m ines
form er une
la loi*, on ne' p eut pa1? fu i
fép'arément
dès qu’elles font
ex p lo ita tio n . •—r V o y o n s s’il- y
eft fondé.
P
Y.èm
e QUESTION.
TreicB-Lapfene
,
U T - O n forcer
a s'unir aux autres
propriétaires lorsque V¿tendue de la furface de fon terrain
efi propre a former me exploitation.
é
P o u r p rouver la
•*
t
1
e
d é g a tlv e , il né finit pas1 de tetfte plus précis Priuves que d a n
j
. 1»
^
de la loi que le § . de l a « . r0 que nous avons cite fur la queition
précédente.
a u cu n c a s T r c i c h L a p l c n e ne peu|,>
ê t r e p ri v é d e 1 ex-;.;'
p lo itatio n p arti-
U n propriétaire dont le terrain eft d’une étendue propre ;\ former ™lt\crede fes mi"
une exploitation-, obtient la corcefiîon de préférence, Pourquoi à plus
forte raifon n’obtiendroit-il pa:> la faculté d’exploiter féparément dans
fa propriété ?
Le Gouvernement cherche moins à diminuer le nombre des co n -
�( 4« )
cédions &
à les faire frapper fur une 'étendue immenfe de pays ,
qu’à établir de bonnes & fruftueufes exploitations.
C e n’eft pas lorsque la conceifion embraffe une fi grande étendue \
que les mines font mieux fouillées : il ne fe fait que des extradions
fuperficielles,
Elles1 font
beaucoup
plus
foigneufement
exploitées
concédions font reftreintes dans de juftes limites &
tations font plus
nombreufes ,
pourvu
lorsque
les
que les exploi
qu’elles ne fe nuifent pas
entr’elles & qu’elles ayen t toutes aiTez de latitude*
En ce cas chaque concelïionnaire , ou chaque chef d’exploitation ;
eft à même de porter un œ il plus attentif fur les travaux ; il y a
moins de négligence & plus d’exaâitude
dans les extradions : on
ne faute pas d’un endroit dans un autre , on fouille régulièrement
toutes les couches ou filons.
C ’eft auifi ce que le Miniftre a reconnu ; car il obferve qu’une
conceifion qui s’étendroit fur toute une co n trée, ne donneroit lieu
qu’à de mauvaifes e x tra d io n s, qu’il eft de l’intérêt de la fociété de
ne pas perm ettre, parce qu’elles font en général beaucoup plus nuiiibles Ôc dangereufes qu’utiles.
Il
ajoute encore que plufieurs concevions peuvent être lim itrophes;
qu’une même fo c ié té , un même conceifionnaire peut en avo ir plufieurs :
mais que toutes doivent être en a & iv itc ; de forte que la principale
chofe qu’il recommande eft la bonne & régulière exploitation.
A i n f i , il n’y a aucun doute que Treich-LapUne doit être affranchi
de la rçunion
les cas il
des furfaces des mines de Lapleau , &
que dans tous
doit être autorifé à continuer d’exploiter celles qui font
dans fon terrain,
Demathieu n’a qu’une petite mine dépefie dont il ne retire
que du
toit de charbon. La Dam e Lachaud & Jean Couden n’ont auifi pour
toute furface que la m oitié d’un petit champ appellé le Communal :
miférable terrier épuifé qui n’a rien produit depuis plus de vin gt ans.
S’ils exploitent aujourd’hui ainfi que Jean Chadenier, ce n’eft que les
mines
�• %»
( 49 )
'
mints de la Charoulière par eux ufurpées Bc retenues en vertu de la
Sentence du ci-devant Juge de St.-Angel.
Ma^au ri’ eft pas plus avancé ; cet homme qu’on a placé à la tête
de la compagnie ,
comme s’il eut cté un homme confommé dans
l ’art de l’e x p lo ita tio n , ne fait ni lire ni écrire ainfi que le lui ont
reproché les Entrepreneurs de la
m anufacture, & il s’eft toujours
borné à faire quelques excavations à ciel o u v e r t, qui font devenues
des réfervoirs à chaque fois qu’il a plu.
Quant à Barthélémy M a la u re n t, Pierre M onteil , François BeiTou
ils n’ont jamais eu de mines ouvertes ni connues ; la Dam e Lachaud
ne les fît intervenir dans ion Mémoire imprimé que pour rendre fa
caufe plus intéreffante &
faire approuver plus facilement l’arrêté du
13 ventôfe an 6.
En g é n é r a l, les mines de ces particuliers font n o y é e s , écroulées ;
ruinées & ne donnent que de mauvais charbon , même en très-petite
quantité : c’eft du charbon tendre , friable , fe décompofant à l ’air
ôc d o n t , pour ainfi dire , o n ne peut faire ufagc.
Tandis que les mines de. Treich-LapUne , qui font les plus fertiles
font auifi les feules qui foient en bon
état &
qui préfentent des
nffourcts , parce qu’elles ont toujours été cultivées avec foin.
D ans ces circonftances, ne feroit-ce pas lui faire un tort confidérable ;
que dit-on ! ne feroit-ce pas le ruiner que de le fprcer à s’unir à eux &
à les admettre à partager le produit de fes m in es, de fes travaux &
dè fes dépenfes ? O u i , &
cette réunion ne feroit pas moins perni-
cieufe au G ouvernem ent, car ces particuliers au lieu de travailler à
la prospérité des mines , ne feroient qu’y porter la dévaftation qu’ils
on t exercée fur leur propre terrain.
L a loi , la raifon & l’intérêt public ne permettent pas à Treichtaplene d’appréhender une injufticc fi criante. Si on accordoit une
conceffion A fon préjudice des autres mines de L a p le a u , on le main*ticndroit d’autant m ie u x , dans le droit d’exploiter les Tiennes, que
le produit de fon exploitation fuffit à l’entretien de la manufacture
d’armçs à feu de T u lle , &
qu’il a traité avec les Entrepreneurs.
G
«¿6
�( 50 )
Sur quelque point que T/eich-Laplene foit attaqué , il eft donc kl ’abri des invafions que les prétendants à la concelîîon veulent faire '
de ion terrain Sc des mines de houille qu’il renferme.
D ’abord l’arrêté du 23 ventôfe an 6 , nul en lui-même , ne fut
déterminé que par l’allégation apocriphe de St.-Viciour , que la manufaihire de T u lle étoit Couvent
en danger de manquer de charbon.
La faufteté de cette fuppofition ayant été démontrée , il fe trouve fans
caufe & dès-lors il d o it demeurer fans effet.
Il
ne peut pas être approuvé d’ailleurs , parce qu’il n’y a pas lieu
à concefïion ; la concefïion étant contraire au droit de p ro p riété, ou
de préférence , qu’a chaque propriétaire d’exploiter Us mines qui font
dans fon terrain , ne peut être accordée que par des motifs d’intérêt
public , Sc il n’en eft aucun dans l’hypothèfe ; les extradions a&uelles
des propriétaires , prodnifent aflez de houille pour la Confommation
locale ; il n’exifte aucun autre débouché.
Y
eut-il même quelque raifbn qui put déterminer le Gouvernement
à ordonner la concefïion des
m in e s
feroit pas les Entrepreneurs à qui
de Lapleau & Janoueix, ce ne
on devroit l ’accorder : la loi les
exclut en faveur des propriétaires ; & comme elle donne la préférenceà celui d’entr’e u x , dont la propriété feule eft d’ une étendue propre
à former une exploitation, c’eft Treich-Laplene qui doit l’obtenir comme
principal propriétaire.^
x
La furface de fon terrain com portant au furplus une exploitation
&
fes mines étant fertiles & en bon état ,
autres propriétaires font ftériles &
pendant que celles des
dégradées , on ne peut le forcer,
à leur en faire p a r t , ce feroit fouler aux pieds tous les principes d e ,
juftice &
d’équité.
A vec des droits ii folidement é ta b lis, quel triomphe Treich-Lapline
ne
d oit-il
pas espérer fur
ceux qui portent envie il fa fortune ?
fur-tout ayant pour Juge celui qui n’eft placé à la tête du G ouver
nement
que
pour le
bonheur des François ,
qui s’eft
fignale ,
jusqtvà préfent , autant par fa fageffe , fes talents & fes vertus , que
par .fes avions héroïques &
nouveaux
bienfaits.
qui fe fignale
tous les jours par de
�£ 5 /
(5
1
ctf*
)
r
L u i , dont le
génie pénétrant perce
tous
les
fecrets
calcule
toutes les démarches & déjoue tous les complots des nouveaux B orgia,
lui qui ne s’occupe qu’à régénérer les
fleurir
les
fciences &
démêler les
les arts
fourberies
&
mœurs & les lois ,
régner la
des fpéculateurs de
Juftice ,
à faire
faura auffi
conceffion &
garantir
l ’expofant de leurs pièges.
Treich-Laplene n’espère pas moins de fuccès auprès du M iniftre, du
Préfet & de toutts les autorités compétentes : fa caufe eft trop légitime
pour
que
tous
ces M A G IS T R A T S qui concourrent de tout leur
pouvoir à feconder les vues libérales d’un Gouvernement fa g e ,
ne
lu i rendent pas la Juftice qu’il réclame.
C ’eft
p o u rq u o i,
C ito yen
PR EM IER
CO N SUL ,
Treich-Laplene
demande qu’il vous plaife caffer & annuller l ’arrêté du 13 ventôfe
an 6 , rendu par l ’adm iniftration centrale de la Corrèze.
E t en cas de nouvelle demande en conceffi o n , de la part des
prétendants, il conclut d’hors & déjà à ce qu’il foit décidé & arrêté,
par toute autorité compétente , qu’il n’y a pas lieu à l’ordonner ;
que fi on l’accorde
c’eft lu i qui
doit l’obtenir de préférence
ou
la permiff ion de continuer d’exploiter les mines qui font dans fon
te rra in , attendu qu’il contient en fuperficie 64558
mètres quarrés.
T R E I C H - L A P L E N E .
A
De
l’imprimerie
L e
L I M O G E S ,
de
i5
F
r a n ç o i s
F l o r é a l ,
An
C
h a p o u l a u d
XI I ,
.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Treich la Pleine, Pierre-Jean-Baptiste. An 12]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Treich-Laplène
Subject
The topic of the resource
mines
intérêt général
propriété du sol
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
sociétés
charbon
manufacture d'armes
propriété nationale
industrie
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire au citoyen Bonaparte, Premier consul de la République française, de la part de Pierre-Jean-Baptiste Treich-Laplene, propriétaire, demeurant en la ville de Maymac.
Table Godemel : Mines : 2. peut-on prescrire contre un droit d’usage de mines, réservé par un acte, pour prouver qu’on a exploité ostensiblement, pendant le temps nécessaire à la prescription ? quel est le temps nécessaire pour opérer cette prescription entre présents et entre absents ?
Les mines de houille ou de charbon sont-elles des propriétés nationales ou particulières ? Mines : 3. à quelle autorité administrative ou judiciaire, appartient-il de statuer sur les contestations relatives au droit d’exploiter telle ou telle mine, réclamé par plusieurs ?
concession d'exploitation par l'administration départementale
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de François Chapoulaud (Limoges)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 12
1736-An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
51 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1308
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0407
BCU_Factums_M0249
BCU_Factums_G1306
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_G1307
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53197/BCU_Factums_G1308.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Maussac (19130)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
charbon
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
industrie
intérêt général
manufacture d'armes
Mines
propriété du sol
propriété nationale
sociétés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53198/BCU_Factums_G1309.pdf
5f9d3559cb8a63063e77c3dd40ae6c5f
PDF Text
Text
P
'
R
É
P O U R le Sieur C
C O N T R E
le B
C
I
S
apelle
u r e a u
d e
, défendeur,
B i e n f a i s a n c e
de
la V ille d 'A u rilla c, demandeur.
L a Dame G ALIEU décédée en 178 9 , avait, par
son testament du 5 octobre 1785, institué pour son
héritier le sieur C ap e lle , son neveu , à la charge
d’une quantité considérable de legs divisés en trois
classes.
A la tête de ceux de la seconde est un legs de 80,000
fait à l'OEuvre de la miséricorde de la V ille d’Aurillac,
Congrégation non approuvée.
C e legs est ainsi conçu :
Pour exécuter les pieux desseins qui m’ont été
communiqués par feu M. Cabred en s, mon frère,
je lègue aux pauvres de l’OEuvre de la miséricorde
« de la V ille d’Aurillac , laquelle Oeuvre est administrée
par de pieuses dames, et dont M e. Fontanges est la.
Supérieure, la somme de 80,000, à la charge néan-
moins que les Administrateurs de ladite œuvre
seront tenus de payer annuellement et à perpétuité
�( 2 )
» aux Frères macédons de l’école chrétienne établis
j) à Aurillac, la rente et pension annuelle que feu M,
Cabredens s’était obligé de leur payer par acte e tc .,
» sans laquelle condition je n’aurais légué à ladite
jî œuvre que Go,ooo ; qu’il sera employé 20,000 pour
?> assister MM. les Pretres de la V ille et Communauté
» d’Aurillac qui seront dans le besoin, et même ceux
» des environs si le revenu de ladite somme le permet;
» que le revenu des 4°>000 restans sera employé à
assister et soulager les pauvres que ladite (Euvre a
3) coutume d’assister , etc. etc.
<ç Je veux et entends qu’au cas que l’œuvre de la
» miséricorde vînt à être réunie dans le temps à
» l’hôpital général , ou à tout autre hôp ita l , le legs de
» 80,000 que je fais à ladite œuvre , fasse retour à
» mon héritier. » ,
L e testament porte en outre que cette somme sera
payée aux termes ensuite fixés aux Dames administrant
ladite œ u vre, sur les quittances u fournir par Me. de
Fontanges leur Supérieure.
Et attendu l’impossibilité de payer des legs si con
sidérables , ( ils se portent à près de 000,000 ) avec
le prix du m obilier, il est dit qu’après le décès de la
testatrice il sera procédé à la vente du mobilier et de
divers immeubles désignés, parmi lesquels se trouvent
des fiefs , à l’effet de quoi elle nomme le sieur Cayla
�_ C5 )
exécuteur testamentaire , ou plutôt fiduciaire , pour
que celui-ci acquitte lesdits legs avec le prix desdites
ventes, ou des revenus de la succession qu’il percevra
jusqu’à ce que l’héritier ait atteint sa 25 me année ,
(prairial an i 3 ) , terme jusqu’auquel doit durer l’exé
cution testamentaire ou plutôt la fiducie, bien que
par le décès du sieur Capelle il arrivât un autre héritier
qui ne fût pas m ineur, voulant que cet exécuteur
testamentaire ne puisse être recherché ni pressé par
personne , mais que pour vendre il puisse choisir et
attendre le moment qui lui paraîtra convenable ; de
sorte qu’il n’y pouvait être fo rc é , et que par suite il
pouvait retarder le payement du legs jusqu’au dernier
moment de l’exécution , jusqu’en prairial an i5.
L e payement des legs de la première classe devait
être fait dans l’an du décès. Ces legs absorbaient plus
que le prix du m obilier, de sorte que les legs suivans
ne pouvaient être acquittés qu’avec le revenu des
biens restans, et le produit de ceux vendus. Cette
circonstance est précieuse à recueillir.
Quant aux legs de la seconde classe, ils devaient
être payés à fur et mesure que les ventes des biens
ou les revenus de l’hérédiLé auraient produit des
fonds suffisons.
La révolution survint j au milieu d’uri désordre
¿pouvantable, toutes les corporations furent dissouLes,
�C4 )
Gt les biens de toutes les Institutions aumônières
allèrent se fondre et se perdre dans la main de la Nation.
D epuis, un Gouvernement sage , travaillant de
toute manière à réparer tant de m aux, a rétabli ou
créé des Bureaux de bienfaisance.
Celui de la V ille d’A urillac, autorisé par un arrêté
du Gouvernem ent, demande la délivrance du legs
fait à l’œuvre de la miséricorde.
Pour commencer , supposant le legs valide au
fonds , nous nous bornerons d’abord à proposer les
exceptions qui tendent à reculer l’époque du payement
ou à restreindre la quantité.
Il devrait être accordé terme à l’héritier jusqu’en
prairial an i3.
L ’exécutcur testamentaire ou plutôt le fiduciaire,
car le sieur Cayla doit être regardé comme t e l , puis
que selon le testament, il devait rester en possession
de toute l’hérédité, à la charge seulement de rendre
tout ce qui se trouverait entre ses mains , à la fin de
l’exccution ; le sieur C ayla, disons-nous, avait terme
pour acquitter ce legs , jusqu’en prairial an i3 ; c’està-dire , jusqu’à ce que ledit Capelle eût atteint l’àge
de 25 ans, soit qu’il restât héritier , ou qu’un autre
môme majeur fût appelle à son défaut. Cela résulte
�341
( 5 )
du testament, car d’un coté on ne peut supposer que
les revenus accumulés pussent remplir le legs avant
cette époque ; de l’autre, l’exécuteur qui ne pouvait
être recherché et pressé par personne, pouvait re
tarder et renvoyer les ventes à ce temps.
Or , quoique l’exécution et la fiducie ayent cessé
avant l’époque prévue par la testatrice, et qu’avant
ce temps l’héritier ait été mis en possession , il ne
doit pas pour cela être privé du terme : car il avait
été accordé , non en faveur de l’exécuteur et du fi
duciaire qui devait tout rendre, mais seulement en
faveur de l’héritier ; et cela est si v ra i, qu’il n’avait
pour objet q u e de faciliter l’acquit des legs , et de
dégrever la succession d’autant, en permettant d’ac
cumuler les revenus, ou en donnant le temps de vendre
avantageusement, au moyen de quoi jusqu’à celle
époque il ne pouvait être dû aucun intérêt. T e l est
d’ailleurs le sens de la L. 36 de cond. et demonst.
Dans ces 80,000 , une somme de 20,000 est léguée
à condition que l’œuvre de la miséricorde payera
aux Frères macédons de l’école chrétienne, la rente
et pension à laquelle feu M. Cabredens s’était obligé
envers eux par acte du
etc. ; condition sans la
quelle il n’eût légué que Go,OOO.
Cette partie du legs est donc subordonnée à l’acte
dont s’agit : cette disposition n ’a pour objet que de
�fixer le mode suivant lequel il devra être executé ,
de décharger l’héritier de cette obligation, et de la
remettre à un tiers. T elle est la cause et la condition
du le g s , sans cela il ri eût été légué que 60,000.
Mais le Bureau de bienfaisance qui en deman
dant les 80,000, demande aussi cette partie du legs ,
aurait dû d’abord prouver que les Frères macédons
ont obtenu des lettres patentes sur cet^ a cte, ou tout
au moins qu’il est dans la classe des exceptions por
tées par l’art. 3 de l’édit de 1749; ce que nous nions,
et sans quoi il est nul : que l’acte est postérieur à la
Déclaration de 1762 , et qu’en ce cas les Frères macédons étaient proprement une école de charité , sans
quoi l’acte serait nul encore , parce qu’il donnait une
rente constituée , tandis qu’aux termes de l’édit de
1749 il ne pouvait être donné que des rentes sur
l’Etat ou autres de cette espèce.
Ainsi tombe et l’acte par lequel feu M. Cabredens
s’était obligé envers les Frères macédons, et la dis
position testamentaire qui lui correspond.
L e legs est d’ailleurs caduc , car son o b je t, ainsi
que l’obligation de M. Cabredens ont péri avec les
Frères macédons ; de sorte que la condition pour la
quelle on a expressément légué, sans laquelle on n'eût
légué que (jo,000 , n existe plus.
Ajoutez à cela qu’une partie du capital de la rente
�c 7 )
; , _ .
pour le service de laquelie ie legs avait été fa it, s«
trouve remboursée , ainsi qu’il résulte'des quittances
produites par le sieur Capelle.
Sur les Go,ooo restans , 20,000 sont légués pour
que le revenu soit employé à soulager MM. les Prêtres
pauvres de la ville d’Aurillac.
Il n’est malheureusement que trop sûr que cette
classe , horriblement décimée par la révolution , est
en proie à la plus affreuse m isère; mais le Gou
vernement va faire cesser ce scandale ; les anciens
titulaires auront un traitement ; les Evêques , sans
doute , se feront un devoir de placer ceux qui n’en
auront pas ; de sorte que sous peu tous les prêtres
existans se trouveront à l’abri du besoin ; les prêtres
à venir n’auront pas plus à craindre ; car les titres
cléricaux seront désormais de 5 oo de rentes.
Ainsi donc , si le revenu des 20,000 ne suffit pas
pour les besoins actuels des prêtres , à l’avenir il sera
plus que suffisant, et il serait juste que l’excédent
revienne à l’héritier. Il demande en conséquence à
être autorisé à retenir ces 20,000, tant qu’il le vou
dra, à la charge d’en payer l’entier revenu, ou partie
suivant qu’il en sera besoin, par ce moyen le retour
sera exact et parfaitement d’accord avec les volontés
de la testatrice; il ne sera ni moindre, ni excessif.
�L ’héritier demande à prélever la quarte falcidie
sur le legs entier ou réduit.
On a répondu que pour prélever la quarte , il fallait
être héritier bénéficiaire. Si cela était, le sieur Capelle
n’étant pas encore parvenu à sa 55 me- année pourrait
se faire relever d’une acceptation faite en minorité ;
mais nous ne ferons pas valoir ce m oyen, parce que
le principe avancé par le Bureau de bienfaisance est
absolument faux. Il est vrai que pour prélever la fal
cidie, il faut avoir fait inventaire , pour constater la
binasse de la succession. £ ici il a été fait ) Mais il
ne l’est pas, qu’il faille être héritier bénéficiaire. Làdessus nous renverrons aux auteurs qui ont traité la
matière.
On a ensuite supputé , accumulé des zéros. Ces
brillantes exagérations doivent être réduites de plus
de moitié ; et quand cela ne serait pas, la testatrice
chargée envers l’héritier d’un riche fideicommis, a du
le lui remettre franc et quitte ; et ce iideicommis pré
levé , on verra que ce qu’elle laisse de son chef ne
remplit pas les legs qu’elle a faits.
Enfin, comme il sera établi dans le cours de la
discussion qui suit , l’héritier a le d roit, aux termes
de la Déclaration de 17Ç2 ou 1774 > d’offrir le paye
ment de ce legs en rentes sur l’E tat, et le Tribunal
ne pourrait le lui refuser.
M OYENS
�M i
C 9)
MOYENS
AU
FONDS.
L ’affaire présentée sous ce premier rapport, nous
l’examinerons au fonds, et nous discuterons la validité
du legs.
L e legs dont il s’agit est-une fondation. Les fonda
tions sont définies ; « une dotation faite à un Etablis
sement pour l’acquit d’une ou de plusieurs charges. «
Pour déterminer la validité d’une fondation, il faut
considérer quàtre choses : i °. quel est le Corps auqueion donne ; 20. quelles sont les formalités nécessaires
pour saisir ce Corps ; 5 °. quels biens on peut lui don
ner , 4°. quels4sont les termes dans lesquels on a
donné.
1 C ’est, je pense, traiter la question sous tous ses
rapports possibles, et sous tous ces rapports il sera
.constant que le legs est nul.
ï °.
Quel est le Corps auquel on a légué ?
C ’est un principe de droit public qu’il ne peut exister
de corporations, et qu’elles ne peuvent obtenir d’exis
tence légale que par l’approbation du Gouvernement.
C e principe consacré par les lois romaines, a traversé
les siècles , et a été reçu par tous les empires raison»
uablement constitués.
a
�Il a cto régularisé en France par divers édits ,
notam m ent par ceux de 1666, de l'jhQ , et par la
déclaration de 1762 qui n’a été enrégistrée au Parle
ment de Paris qu’en 1774
Ils se réunissent tous pour déclarer illégaux les
Corps non approuvés , et pour prononcer la nullité
de tous actes faits à leur profit.
Qu’on lise l’édit de 1749. Cela se trouve â chaque
article ; nous nous contenterons de rapporter l’art. 9
ainsi conçu r
»
»
»
»
»
»
«
<c Désirant assurer pleinement l’exécution du présent
édit, concernant les Etablissemens mentionnés dans
l’art. 1. ( qui sont tous Chapitres, Séminaires,
C ollèges, Maisons ou Communautés religieuses,
même sous prétexte d’hospice , Congrégations , Confrairies, Hôpitaux, ou autres C orp s, Communautés
ecclésiastiqu es , sécu lières , religieuses ou laïques ,
de quelque qualité qu’elles soient etc. etc. ) déclarons
» nuls tous ceux qui seront fa its sans avoir obtenu nos
» lettres patentes , et les avoir f a i t enregistrer dans les
» form es ci-après prescrites , voulons que tous les actes
» et dispositions qui pourraient avoir été fa its en leur faveur
» directement ou indirectement, ou par lesquels ils pour» raient avoir obtenu des biens de quelque nature
» que ce soit, à titre gratuit ou onéreux, soient dé-
�M y
C a )
»
»
«
»
»
»
»
claris nuls t sans qu il soit besoin d'obtenir des lettres de
récision contre lesdits actes , et que ceux qui se
seraient ainsi établis , ou qui auraient été chargés
de former lesdits Etablissemens , soient déclarés déchus de tous droits résultans desdits actes , nonobstant
tous consentemens exprès ou tacites qui pourraient
avoir été donnés à l’exécution desdits actes ou
» dispositions. »
L ’article 2 prononce la n u llité, quand même ces
dispositions seraient fa ite s à la charge d'obtenir des lettres
patentes.
Ces articles sont formels , et tombent d’aplomb sur
l’espèce, ils prononcent également la nullité des
Corps non approuvés, et des dispositions faites à
leur profit.
Ici l’Etablissement , la Corporation , PHôpital, la
Congrégation ,sous prétexted!hospice , dite l’œuvre delà
miséricorde n’est point approuvée, donc elle est nulle,
donc aussi les actes faits à son profit directement ou
indirectement, à elle-même, ou à ceux qui l’adminis
trent , sont n u ls, d’une nullité absolue , car il n’est
pas besoin de lettres de récision ; d’une nullité irré
parable , et dont ils ne pourraient être relevés dans
le cas où ils seraient approuvés par la suite ; car l’art. 2
prononce }a nullité quand même les dispositions s q -
*
�( 12 )
raient faites à la charge d’obtenir les lettres patentes'
c’est-à-dire , quand môme le bienfaiteur voudrait,
a u tan t qu’il est en lu i, se conformer à la loi de l’E ta t,
voudrait, autant qu’il est en lu i, couvrir et réparer
l ’incapacité du Corps auquel il donne ; enfin ces actes
sont nuls , d’une nullité que le ministère public doit
poursuivre, « nonobstant tous consentemens exprès ou
tacites des parties intéressées » , et ainsi qu’il est plus
expressément dit dans divers autres articles de cet édit.
L e Bureau de bienfaisance écrasé par cet article r
tâche de se re le v e r, et dit : c’est «aux pauvres de
l’œuvre de la charité, et non à l’œuvre que l’on a
donné.
Faible et misérable argument, que pulvérise la rai
son d’accord avec les lois , et la lettre du testament.
« Civibus civitatis legatuin , vel iidei commissum
» datum civitati relictvrm videtur. » L. 2. de reb.
dub. L e legs fait aux pauvres de l’œuvre est fait à
l’œuvre.
L a lettre du testament n’est pas moins expresse ,
c’est au corps qu’il a été légué ; 'car ce n’est que les
revenus des 80,000 (pii doivent être employés à sou
lager les pauvres , que Pauvre a coutume d'assister ; et
par qui doivent-ils être employés ? par l’œuvre qui
a coutume de les assister : ce n’est point aux pauvres
�*
c '« 3 - y
mais au corps que l’on a lé g u é , puisqu’on le charge
d ’une rente annuelle envers les Frères m accdons, -*
d’une fondation perpétuelle envers MM. les prêtres
pauvres de la V ille d’Aurillac, C e n’est point aux
pauvres qu’on a légué , puisque ce n’est point eux
qui peuvent demander , recevoir , et quittancer. Il
n’y a pas même fideicommis , car ils n’auront jamais
de droit et d’action pour posséder. C ’est pour leur
soulagement ; mais ce n ’est pas sur eux que l’on
a fondé : ils sont l’o b je t, et non les dépositaires
de la fondation i ce n’est point eux qui forment le
corps et la congrégation de l’œuvre de la miséri
corde , mais bien les pieuses dames qui administrent
cette œuvre ", car les pauvres n’auront jamais de puis
sance et de drôit ni dans l’administration, ni contre
les administrateurs.
(
L ’on a ensuite prétendu que par un acte ordinaire
on pouvait léguer à un être étranger , non existant,
que le legs vaudrait, si le légataire venait à exister ,
et le Bureau de bienfaisance appliquant ce principe ,
a dit : nous représentons l’œuvre ¡dp la miséricorde ,
nous existons légalement, donc le legs vaut ; et il
a cil é en preuve deux arrêts qui déclarent ■
valables
des legs faits à des posthumes-iiés m <5t ’i3 mois
après le décès de leur Père testateur.
Autant d’erreurs que de mots:1'lie ' legs fait à un
�étranger non existant ne vaut p o in t, car il n’aurait
pas de m olif raisonnable : ces dispositions permises
dans les contrats de mariage par une exception au
droit , ne le sont qu’en faveur des descendans , et
ont un m otif, car on les affectionne d’avance.
Il n’est pas possible que le Bureau de bienfaisance
représente civilement Tœuvrp de la miséricorde , car
on ne peut pas représenter civilement ce qui n’a point
existé civilement : Nous reviendrons ailleurs sur cet
argument.
Quant aux arrêts cités , s’il n’y avait pas erreur ,
il y aurait mauvaise foi. En e ffe t, ils n’ont pas juge
que des legs faits par le Père à ses en fans posthumesnés i i ou i3 mois après son décès, étaient faits
à des enfans qui n’existaient p o in t, car ils auraient
jugé que des enfans posthumés étaient bâtards , et il
y aurait eu contradiction entre- le mot et la chose ;
mais ils ont jugé que des enfans liés 11 et i3 mois
après le décès étaient légitimes , et par conséquent
étaient conçus au temps du décès.
On a ajouté que le legs fait à des incapables pour
rendre à des capables était bon; ce qui est vrai des
incapacités relatives, et non des absolues, comme celle
du Corps dont n,ous parlons.
�( i 5 )
Mais à quoi boil ces argumens. L ’article est formel,
les dispositions en faveur des Corps non approuvés
sont nulles, d’une nullité radicale , absolue , irrépa
rable , quand même ils seraient faits à la charge d’ob
tenir des lettres patentes ; et on ne peut concevoir un
événement qui ressuscite une pareille disposition.
On oppose aussi mal à propos l’article 5 de l’édit
de 1749 , que l’on a embrouillé avec art pour en faire
le nœud de l’affaire : pour le résoudre, il suffira
d’expliquer cet article conçu comme il suit :
^ N ’entendons comprendre dans les deux articles
p r é c é d o n s l e s fondations particulières , qui ne ten-
»
»
«
«
»
»
«
»
»
liraient a Vétablissement d’aucun nouveau corps , collège,
011 com m unauté , ou à l ’ére ctio n d’un nouveau titre
de b én éfice , et qui n ’auraien t pour o b je t que la
célé b ra tio n de messes obits, la subsistance d’étudians, ou de pauvres ecclésiastiques ou séculiers etc.,
ou autres œuvres pieuses de même nature et également utiles ; à l'égard desquelles fondations il ne
sera pas besoin d'obtenir nos lettres patentes , et il suffira
de faire homologuer lesdits actes ou dispositions en
nos parlemens etc. etc., q u i, est-il ajouté, pourvoiront à l’administration desdites fondations.«
Cet article ne dispense de la formalité des lettres
patentes auxquelles il substitue l’homolagation , que
�( '6 )
les fondations particulières et les actes qui les con-*
tiennent, et non les Corps à qui elles sont confiées.
En effet , il n’y est question que de fondations parti
culières qui ne tendraient point à établir un nouveau corps ,
à Végard desquelles il ne sera point nécessaire d’obtenir
des lettres patentes , mais il suffira de Vhomologation
dans les cours supérieures f* cela est clair,
Or , des fondations confiées à un Corps non ap
prouvé , tendent nécessairement à établir \m nouveau
Corps , soit qu’il les emploie à obtenir des lettres pa
tentes pour se faire approuver , soit qu’il les emploie
à exercer le but de son institution , et par-là à s’éta
blir plus fortement quoique d’une manière illégale.
L ’article 3 de la déclaration de 17G2 ou 1774 con
firme cette explication : « déclarons R avoir voulu
» com p ren d re au nombre des fondation^ mention>5 n ées en l'a rtic le 3 d e l’é d it d e 1 7 49 ? les fonda
it tions des vicairies , ou secondaires amovibles , des
9> chapelains qui ne sont point en titre de b é n é fic e ,
» des services , prières , lits , places dans les hôpitaux
)y et autres établissemens duement autorisés , des bouillons,
« tables des pauvres des paroisses ; ( les fabriques
» sont des corps duement autorisés ) des distributions à des pauvres ou autres établissemens qui ,
» ayant pour objet des œuvres de religion et de
» charité
�»
y)
»
»
C 17 )
charité , ne 'tendraient point à e'tablir des nouveaux
Corps , collèges, etc, : voulons,quà l'égard desdites fo n dations , il en soit usé comme il est dit par l’article
3 de l’édit de 1749- »
C ’est ici qu’il faut remarquer la prudence et l’éco
nomie de la loi : elle a voulu d’un côté empêcher
que les corporations ne devinssent trop riches , et de
l’autre, asssurer l’exécution des fondations.
L e Gouvernement est de droit le protecteur et le
conservateur né de toutes les fondations, et le lé
gislateur a voulu que les Corps approuvés l’avertissent
à chaque fois qu’ils en recevraient ; mais pour les
fondations particulières , c’est-à-dire qui n’auraient pour
objet que quelques individus , et q u i par conséquent
seraient peu considérables , il a voulu que quand elles
seraient faites à des hôpitaux et fabriques ; car c’est k
eux seuls que peuvent se rapporter ces espèces con
tenues dans les articles précités. L e législateur f
disons-nous, a voulu que ces Corps ne fussent point
tenus d’avertir le Gouvernem ent, et les a dispensés
de la formalité gênante et dispendieuse des lettres
patentes, sauf l’homologation , faite dans une cours
supérieure, de l’acte qui établit la fondation : ( ce
gui n’a point été fait ici. )
JEt cela était raisonnable , car les hôpitaux étant
5
�.
C >8 )
.
.
alors administres par les premiers magistrats de l’endroit , et les fabriques par les Curés qui avaient uneexistance légale, et un ofiiee c iv il, le Gouvernement
avait des agens auprès de ces Corps , pour surveiller
l’exécution et' l’emploi de la fondation ; mais cela
n’est plus applicable aux Corps non approuvés. Telle;
est leur position, que d’un côté , le Gouvernement;
n’a point auprès' d’eux des agens qui les surveillent r
et l’avertissent des dispositions faites à leur profit, et
que de l’autre , ils ne peuvent eux-mèmes l’en avertir,,
car le premier regard de sa toute puissance les ferait
rentrer dans la poussière et le néant dont.ils n’auraient
pas du sortir.
Si donc le Gouvernement nTa pas des surveillans
auprès des Corps non approuvés s’ils ne peuvent
demander sa surveillance faute de moyen de
correspondre avec lui , qu’est - ce qui garantira
leur fidélité ? qu’est - ce qui garantira l’exécution
des fondations qui leur auront été confiées ? qu’est-ce
qui empêchera qu’un Corps établi t sous prétexte
d’hospice et de charité , n’abuse de la confiance du
fondateur, pour détourner la fondation à son profit ?'
- Ici le Bureau de bienfaisance n’osera pas présenter
l’arrété du Gouvernement qui l’autorise à accepter
le legs, comme des lettres patentes portant appro
bation de la congrégation de l’œuvre de la miséri-
�C ■!£) 5
¿corde. T ou t ce qu’il peut faire, c’est de le présenter
«comme lettres patentes confirmant le legs : ce que
nous discuterons dans le paragraphe suivant.
Donc la congrégation de l’œuvre de la miséricorde
n’est pas approuvée, donc le legs qui lui a été fait
e s t absolument nul.
D es form alités prescrites pour saisir le Corps sur lequel
on fon d e.
L a nullité résultant de l’illégalité du Corps sur le
qu el on fonde , est une nullité principale , et qui em
porte toutes les nullités secondaires ; de sorte que
pour traiter de celles-ci , il faut pour un moment
oublier la première.
II suit des ¿dits rendus sur la matière , et de ce
que nous avons d it , qu’en principe général les fon
dations doivent être confirmées par lettres patentes.
Cette formalité à - 1 - elle été observée ?
L e Bureau de bienfaisance présente l’arrêté qui
l ’autorise à accepter le leg s, comme des lettres pa
tentes.
Nous lui répondrons q u e , si ce sont des lettres
patentes , elles sont obreptices , et que le Gouverne
ment a été trompé sur l’état du corps légatairç.
�( 20 )
Il est en effet de principe , que les lettres patentesne sont accordées que conditionnellement, et sous
cette clause expresse ou tacite , s a u f notre droit sa u f
le droit d’autrui. Sauf notre d ro it, c’est-à-dire, sauf le
droit public et les lois politiques ; sauf le droit d’au
trui , c’est-à-dire , sauf les lois civilesO r , l’arrêté qu’on nous oppose, s’il était autre'
chose qu’une simple autorisation, et un. règlement
éventuel du mode d’administration, répugnerait aux
lois politiques, car il serait en contravention avec
l’édit de 1749» il répugne<auxÎois civiles, car, comme
il sera prouvé ailleurs, le legs est caduc à cause de
l’événement prévu par la testatrice.
Ces principes sont de droit public et social, ils
appartiennent, à ce droit que Justinien , au commen
cement de ses institutes, appelle le droit immuable des
nations; sans eux il n’y aurait plus que despotisme, d’où
il faut conclure qu’ils sont non seulement respectés,
mais encore recommandés par notre gouvernement.
Ils ont été de tout temps admis en F ran ce , ils
appartiennent au droit ancien comme au droit nou
veau ; car la monarchie aussi avait sa liberté et son
respect pour les propriétés : ils sont consacrés par le
concours unanime et imposant des auteurs de la juris
prudence et des ticlits.
�3J 7
< 21 ?
• Ët sans aller plus loin, voilà pourquoi l’édit de 174g
introduit un grand, procès sur la vérification des lettres
patentes, pourquoi l?artiele 7 veut ,sous peine de nullité,
qu’il soit fait une enquête de commodo et incommodo,
qu’elles soient communiquées aux procureurs-généîaux des Cours souveraines , pour être par eux requis
ce qu’ils aviseront, aux supérieurs médiats et immé
diats du Corps sur lequel on fonde, aux seigneurs
des biens donnés , et enfin aux autres personnes dont
l ’avis et le consentement seront jugés nécessaires, qui
so n t, comme on peut voir par l’article X , les enfans
et les héritiers même présomptifs dut bienfaiteur.
V oilà pourquoi l’articlé 8 parle des appositions faites
soit avant soit après l’enrégistrement desdites lettres,
sur lesquelles oppositions il devra être statué ainsi
qu’il appartiendra \ de sorte que tantôt il pourra arriver
que la lettre patente (_ comme aujourd’hui l’arrêté dii
Gouvernem ent, s’il pouvait être regardé comme te l,
ce qui n’est pas : ) de sorte , disons-nous , que tantôt
il pourra arriver que la lettre patente soit écartée par
les cours souveraines, et tantôt que cette lettre p a
tente , revêtue de la sanction judiciaire, vérifiée, homo
loguée , de\Tenflè' loi , soit annullée par les mêmes
cours qui l’ont enrégistrée.
L ’autoTité royale et celle des parlemens n’ont pas
honte de se rétracter et de reculer devant la simple
o t£
�opposition d’un particulier, que dis-je, elles procla
m en t ce droit donné contr’elles au dernier des indi'vid u s, et s’en font un titre de gloire.
E t si cela était ainsi sous la monarchie, à plus forte
raison , cela doit être sous notre Gouvernement plus
. libre et plus populaire.
r
Ainsi donc, si cet arrêté était une lettre patente, il
devrait être écarté comnie obreptice et contraire au
droit politique et civil.
Il devrait encore être annullé conformément aux
articles 5 , 6 et 7 de l’édit de 1749, qui prononcent
la nullité en cas d’inobservation des formalités qu’ils
prescrivent.
Mais le Tribunal n’aura point cette p ein e, car cet
arrêté n’est point dans l’espèce, ce que devraient être
des lettres patentes ; et cela résulte de ce qu’il ne
peut recevoir les formalités nécessaires pour leur vali
dité , de ce qu’il ne peut devenir la base d’un grand
procès, magni processus , de ce qu’il n’est point destiné
à devenir une loi , comme des lettres patentes enre
gistrées , de ce qu’il n’est qu’un acte de simple admi
nistration , un acte qui autorise à recevoir, et régie
l’emploi, en cas que l’on reçoive.
Que le Tribunal se rassure , il n’aura point à com
battre cet arrêté , car il ne raisonne que condition-
�C 23 )
tièllem ent, et dans la supposition- de* la-validité du
legs ; car il ne touche point au fond de la question,
qui de droit est remise à la décision des Tribunaux f
et sur laquelle le Gouvernement n’a point empiété.
i
L e Bureau de bienfaisance oppose ensuite l’article 5
de l’édit de 1749 et de la déclaration de 1774» qui
dispense certaines fondations de la formalité des lettres
patentes,
>
. Il est v ra i, mais cet article ne parle que des fon
dations particulières , fa ite s à des Corps duement autorisés :
o r , d’un coté s l’œuvre de la miséricorde n’était pas
autorisée , de l’autre , la fondation n’était point parti
culière , c’est-à-dire individuelle , ou relative seulement
à quelques individus,
De plus, cet article impose-la formalité de l’homo
logation , et ici il n’y en a pas : la demande en déli
vrance du legs ne peut en tenir lieu , car on ne procède,
pas devant une cour supérieure, on ne procède pasu
dans les formes nécessaires pour homologuer.
Ainsi le Bureau de bienfaisance ne rapporte' pas de
lettres patentes qui ratiiient la fondation ; cette fon-,
dation et le Corps sur lequel 011 a fondé ne sont point
dans les exceptions portées par l’arlii le 5 ; et quand
on le supposerait, il n’y- pas eu homologation comme
�C 24 )
il est prescrit, à peine de n u llité, ainsi qu’on pourrait
le prouver.
«
D ’ailleurs la disposition fût-elle revêtue des formar
lités requsies , le Corps n’étant pas approuvé , elle
est absolument nulle.
L e legs est-il fait en biens dont il soit permis de
disposer en faveur des gens de main-morte ?
L ’article i 4 de Inédit de 1749 défend aux gens de
main-morte d’acquérir, posséder, recevoir à l’avenir
aucuns immeubles , rentes foncières, droits réels ,
rentes constituées sur les particuliers , sans avoir au
paravant obtenu des lettres patentes pour l’amortis
sement.
Les articles i 5 et 16 étendent la disposition aux
fonds droits réels, et rentes réputés meubles par les
coutmues et statuts , aux acquisitions , échanges ,
ventes, e tc ., donnations simples ou à charge de fonda
tion , etc. e tc., à titre gratuit ou onéreux.
L ’article 17 défend à l’avenir toutes dispositions de
dernière volonté pour donner aux gens de main-morte
des biens de la qualité marquée par l’article 14, quand
môme elles seraient faites à la charge d’obtenir-des
lettres patentes , ou qu’au lieu de donner directement
dçs
�des biens fonds aux gens de main-morte , celui qui les
aurait donnés, aurait ordonné qu ils- seraient vendus ou
régis par d’autres , pour leur en remettre le prix ou les
f
—»
revenus.
•
•'[ »
'
*
C et article comme on v o it, contient deux parties ,
l’une prononce la nullité des dispositions de der
nière volonté qui donneraient aux gens de main-morte
des immeubles, et autres biens désignés par l’art. i4L ’autre 'assimile aux dispositions prohibées d’im
meubles etc. , celles par lesquelles le testateur aurait
ordonné que les biens seraient vendus ou régis par-,
un tiers , chargé de remettre au Corps institué , ou
légataire , le prix desdits biens vendus ou des revenus
perçus.
Les arrêts appliquent rigoureusement la seconde
partie de cet article. 'Les Parlemens ont pensé en fait,
qu’il était de leur devoir de rejeter et de prévenir tous
les moyens détournés , toutes les fraudes par les
quelles on chercherait à éluder les dispositions de
l ’édit 1749 ; ils ontpensé en droit, que dans ces cas, le
J)rix représentant la chose vendue , devait être sujet
à la rigueur.de l’article.
Ainsi un arrêt de 1755 déclare nulles , qu an t aux
immeubles, les dispositions d’un huissier de Yitri ,
par lesquelles il avait légué tousses biens à l’hôpital
4
�vi.'* \
0 6 )
üe'cette ville. L e testateur avait a jo u té ,'si la dis-,
position est contraire à l ’édit de 1749 >je charge mon
exécuteur testamentaire de vendre tous mes biens^
fonds et contrats, pour le prix en être employé e a
rentes , dont il soit permis de disposer en. faveur des
gens de main-morte.
L e Curé de Berneuil lègue à sa fabrique 12,000 à
prendre chez des tiers où ils sont déposés* Ceux-ci
avaient aliéné les sommes , et en avaient donné deux
reconnaissances, portant promesse de passer contrat r
au bas de chacune de ces reconnaissances, le Curé
dresse un codicile par lequel il les lègue à sa fabrique.
La cause était favorable , la promesse de- passer con
trat avait été ignorée du m aître, elle n’avait point
eu d’effet \ la fabrique arguait encore des dispositions
de la déclaration de 1762 enregistrée et exécutée
dans les autres parlemens, mais non encore dans celui
de Paris ; cependant arrêt de 17G4 qui casse les
codicilles.
La dame Coquetariat lègue à la fabrique cTAillant
3,4oo , pour faire un fond destiné à l’entretien dun
vicaire : de cette somme 1,000 doivent être pris sur
ses, meubles , et 2,400 sur ses immeubles . . . . con
testation . . . La fabrique disait qu’on ne lui avait légué
qu’une somme pécuniaire, qu’on n’avait pas rappellé
�C 37 )
les immeubles , pour ordonner qu’ils seraient vendus,
mais seu lem en t pour fixer la part contributoire des
divers héritiers , car la testatrice avait des héritiers
de meubles, et des héritiers d’immeubles. Arrêt des
1764 qui casse le legs pour la partie qui doit être
prise sur les immeubles.
iVoyons si le» legs dont s’agit est dans l’espèce, et
s’il, est aussi favorable,
.
.'i ,
L a dame Galieu à fait trois classes de legs. Ceux
de la première classe doivent être acquittés dans l’an
du décès , pour ceux de la seconde , l’exécuteur tes
tamentaire .chargé de les payer, ne pourra être pressé ,
de sorte qu’il pouvait retarder la délivrance du legs
jusqu’au dernier moment de l’exécution.
Pour le payement de ces legs, elle .ordonne qu’après
son décès on vende ses meubles*'-Mais le prix qui
pouvait en provenir ne devait-pas suffire, il était visible
qu’il serait.absorbé par ces legs exigibles dans l’an du
décès de la testatrice. Elle a donc voulu qu’ils fussent
payés avec c e prix qu’ils devaient absorber ; quant
aux legs de la seconde classe non exigibles , elle a
donc su qu’ils ne pouvaient être payés àvec le prix
d’un mobilier déjà absorbé ; elle a donc voulu qu’ils
fussent payés avec le prix des immeubles vendus, et
iles revenus perçus.
;i
‘
�Cela est manifeste, quant on se rappelle qu’elle veutr
d’un côté, que l’exécuteur testamentaire ne puisse être
pressé pour l’acquit de ces legs, et de l’autre qu’il ne
puisse être pressé pour Vendre. Elle* v e u t. qu’il ne
puisse être pressé d’acquitter les legs , parce qu’il ne’
peut être pressé de vendre et réciproquement de*
sorte q u e , comme nous l’avons' déjà d i t ,. ili peut re
tarder jusqu’aux derniers momens de l’exécution, et
la vente des immeubles , et l’açquit des legs. Ces
deux volontés se correspondentv (
Donc la dame Galîeu à sou cpl.ê1soriJlegs ne pourrait être acquitté qu’avec le prix’ des‘'immeubles et
des revenus , donc elle a voulu qu’il Je fût'",’ .donc
elle a légué le prix d’immeubles à vendre et de re-venus à percevoir, donp 1la- disposition est idans le
das prévu parirl’art, i ÿirde Fédit tle 'tïy / ^ , donc aux1
tenines de -cet, article elUiiést riulle. Cola est aussi évi^-f
dent qu’une proposition de-m athém atiques.^^ H’1 :
:
-î *
- V ' » r " : *I
. l » t i . » . O J Î ' . I;
. , [ u.> -
»
■}•L ’article '9 de la /déclaration) dèi •t 17G2.) ou 17.74;
youlaiitJavicins'er.lesi'Hôpitaux ot; .mitres- ètablissomens.
dé .charité, leur* permèt de, recevoir dQ^iii^mcublcs ;)
dérogeant à cet égard, à 1 art. i ydd réclit i74fj>, r(],1i l 1,r’0~
noiiicç la nullité des ..actes de dernière volon té, par i
lesquels il leur en serait légué, .v, ¿ry. - v ; 1 ¿-jf.
�2>¿í
C 29 )
On observera d’abord, qu’il n’est dérogé à l’art. 17
de l’édit 17 49 que Pour Ia partie qui prononce la
nullité , mais non pour la partie qui assimile aux dis
positions de biens fonds, celles qui ordonneraient que
des immeubles seront vendus , ou le revenu perçu par
des tiers , pour le prix en être rendu aux Corps lé
gataires. Ainsi cette partie de Part, étant maintenue ,
les héritiers de ceux qui auront ainsi lé g u é , devront
être traités comme íes héritiers de ceux qui auraient pu
rement légué des immeubles. Ainsi aux termes des art.
suivans et notamment du r5 , ( déclaration de 1762
ou 177 4 y le sieur Capelle aurait le droit d’offrir en
rentes sur l’Etat y le payement des 80,000 qui devaient
être acquittés avec le produit des immeubles à ven
dre , et des revenus à percevoir.
Il est v r a i que ,1’arÊ^ X I oblige; íes héritiers qui
profiteront de cette fa c u lté ,^ retirer lçs- immeubles
dans Jjaruiée de l’cruver^ure. de,la suççes^Îon! Mais le
sieur Capelle ne pouvait être tenu de retirer ie prix
considéré ici comme d’immeuble légué , puisqu’il ne
l’a. pas. fourni-^ il a fait plus tjue le retirer , puisqu’il
la retenu. n
.
,
' '
. ;
.
.
■*
*» •
',
, :i:n n o j
> v u ir
Í
. Maintenant, cçsartkl^ n ejs.ont point applicables à
un Corps non approuvé , et nous ne.sommes/entrés,
daus ces'.détail^ ,qi^:,pou^ pjrpuxer^e plus{ eji pju$ la
«Wllité
¡ ¡ j x l ; '- ' jju
-i in;
3
�____________ (
5 0 )
Quels sont enfin les termes dans lesquels on a légué ?
Outre la clause de retour exprimée dans l’acte ,
expressis ver bis , il est une condition résolutoire, qui
résulta des termes dans lesquels on a légué.
L e legs est fait aux pauvres que Vqeuvre a coutume
d'assister, c’est-à-dire aux pauvres que l’œuvre choisit,
dont le choix est laissé à soi* arbitre ; car rien ne
pouvait la gêner.
O r il est de principe général que quand un arbi
trage , un droit d’élection sont laissés à un tiers , lui
seul peut arbitrer et choisir; que s’il ne le peut , ou
ne le v e u t , la stipulation tombe.
L a L. 45 de verb. ob. , après l’avoir expressément
décidé , dit : c< magis probandum est à personâ ,
non esse' recedendum cui arbitrium confertum est. »
L.a L- 44 ajoute ; « si non arbitretur stipulatio non
v a le t , adeo ut si pœna àdjecta sit, ne ipsa quidem
pœna commitatur. »
1
’
C e. principe ainsi exposé au titre général des obli
gations , est répété au titre de chaque obligation par-t
ticulière ^ voir ceux de contrah. empt. au code pro
s’ocib >' dé locat!' etc., et'è'.', de hæred. inst. de légat,
etc. , etc. , etc. ;
•'
La loi ‘ m u ltk J de cônd. et déinQnst. pose , le cas
où un héritier ou légataire a été chargé d’élever-un
�$ 6ï
C 3 0
.
tombeau sur les plans d’un tie rs, et elle dit : « si
cujus arbitrium est, non vivat, vel adesse rei nonpossit,
vel arbitrari nolit, multanon commititur ab hærede. «
L a peine , la déchéance portée par le testament n’est
pas encourue , pourquoi ? parce que l’obligation est
tombée.
Ici l’héritier était chargé de donner 80,000 pour
être employés suivant l’arbitrage des pieuses dames
composant l’OEuvre de la miséricorde, en d’autres
termes pour être employés à l’assistance des pauvres
qu’elle a coutume d'assister. La congrégation n’existe
p lu s, on ne peut savoir quels sont ceux qu’elle aurait
choisis , car ce n’est pas la généralité des pauvres
qu’elle assistait, puisqu’elle n’était point hospice gé
néral, c’étaient des pauvres choisis dans la généralité :
ce n’est pas à la généralité des pauvres que la dame
Galieu avait lég u é , mais seulement à ceux choisis
dans cette généralité.
Eh b ien , la Congrégation chargée d’arbitrer, de
choisir, la Congrégation qui devait fournir le plan sui
vant lequel le monument aumônier devait être élevé ,
n’existe plus. « Non adest, non v iv it, non potest
arbitrari « donc « stipulatio ( legatum ) non valet. »
L e Bureau d e bienfaisance oppose à cela q u ’il repré
sente l’œuvre. Nous avons prouvé qu e cela n’était pas
�( 3a )
possible, et dans un moment nous ajouterons à la
previve donnée ; mais en attendant, supposons-le
puisqu’il le veut.
« Non recedendum est à personâ cui arbitrium
confertum est. » Le droit d’é}ection, d’arbitrage étant
fondé sur la confiance, est personnel, comme elle :
ce droit donné à l’œuvre ne peut passer au Corps
qui la représente, non plus que celui donné à un in
dividu ne peut passer à son héritier \ aussi les lois ne
distinguent p o in t, elles prononcent absolument : celle
de obligat. dit « stipulatio non valet « , et la loi m u lta ,
avant de prononcer , « multa non committetur » n’exa
mine pas si l’architecte a. laissé des héritiers , pu plutôt
(des élèyjes qui aient pris son genre, son faire, son style:
Donc de droit l’arbitrage, l’élection sont person
nels, et cela est juste : car qui sait si Me. G alieu ,
liée avec Me. de Fontanges, n’était pas dans le secret
de ses coutumes , de ses choix; qui sait môme si elle
ne lui avait pas fait des recommandations particulières
et verbales.
E t cela est d’un grand poids dans la cause; car en
matière d’aumône, et de legs pie, les recommandations
verbales sont admises et exécutées contre la lettre du
testament, sur la déclaration de Fexécuteur testa
mentaire ou du fiduciairc.Témoin
�\
( 53 )
Tém oin un arrêt du parlement de Paris, du 2 aôut
ï 7 5 4 , dont voici l’espèce : M. D evau x, chanoine à
Chartres fait son testament, après quelques disposi
tions pieuses, il ordonne que-le restant de ses bien?
sera employé aii soulagement des pauvres.'Il nomme
ensuite un exécuteur testamentaire. L e Bureau de
l’hôpital de Chartres réclame le legs , comme fait à
l’hôpital ; l’exécuteur testamentaire conteste , et pré
tend avoir des recommandations particulières et ver
bales en faveur des jeunes étudians : arrêt au profit
de l’exécuteur testamentaire.
Mais la disposition de la testatrice a corroboré celle
du droit; en e ffe t, elle a ordonné que le legs ferait
retour à l’héritier aussi-tôt qu’il ne serait plus admi
nistré par l’OEuvre, aussi-tôt qu’elle serait réunie à
l'h ô p ita l, ou à tout autre hôpital. Nous reviendrons
bientôt sur le sens de cette clause, qui dans la cause
est profond et décisif.
Mais le Bureau de
Corps que l’OEuvre ?
bienfaisance est-il le même.
Qu’est-ce qui établit l’indentité d’un Corps ?
C ’est i°. sa continuation par des membres indi
viduellement aggrégés , et non par un nouveau Corps
qui le remplacerait brusquement , ce qui cxd u d
toute idée de continuation.
•
-
' •
5
.
�c 34 )
1 C ’est 2°. Tidentité de principes de réglés , enfin de
tout ce qui forme l’esprit d'un Corps.
Or , y a-t-il identité à cet égard entre l’OEuvre'et
le Bureau de bienfaisance. Rendant également justice,
et applaudissant également aux principes des hommes
bienfaisans qui le composent, et des pieuses dames
qui administraient l’œ u vre, j’oserai cependant dire
qu’il n’y a pas identité, et là-dessus j’en appellerai
à la conscience de tout homme qui ne seTa ni entêté
ni prévenu. J’ajouterai en preuve , que Me. de Fontange exerce et continue de son côté les œuvres de
la miséricorde. Si ses principes étaient les mêmes que
ceux du Bureau, ne viendrait-elle pas se placer à leur
tête ou parmi e u x, et joindre des efforts, qui réunis ,
seraient plus heureux.
Elle ne le fait p as, et si elle voulait le faire elle ne
serait pas reçue : de sorte que ce C orps, qui se prétend
le même que celui de l’œ uvre, rejetterait la Supé
rieure de l’œuvre.
Il y a plus, le Gouvernement n’a pas voulu q u e los
Corps qu’il créait eussent les mêmes règles , les mêmes
principes, le même esprit que ceux qui étaient dé
truits. S’il l’avait vo u lu , il les aurait rétablis, comme
il a rétablîmes hermites du Mont St. Bernard , ou tout
au moins il aurait composé les nouveaux Corps des
débris des anciens ; s’il ne voulait pas de femmes , il
ne manquait pas d’hommes élevés dans ces institutions.
�Ç 35 )
Or il ne l’a pas fa it, et dans tous les Bureaux" de
bienfaisance de la République , il n’y a peut-être pas
un seul individu ayant appartenu à ces Corps ; du
moins il y en a très-peu. Donc , etc.
L e Bureau de bienfaisance oppose qu’il a été appelle
à représenter l’œuvre. Pour, l’établir, il allègue qu’il
est institué pour le même objet ; savoir, pour l’assis
tance des pauvres, et la distribution des secours à
domicileMais de droit un corps ne représente pas tous les
corps institués pour le même objet; de d ro it, il n’est
pas le même , sans quoi il faudrait dire que l’œuvre
représentait les F ille s et les Pères de la charité, etc. etc.
De d ro it, un corps ne représente pas et n’est pas
l’héritier de tous les corps, q u i, institués pour le même
o b jet, viennent à p érir, à plus forte raison de ceux
qui ont péri avant qu’ilj# existaisant»
Si le Bureau de bienfaisance était aujourd’hui dé
claré l’héritier de l’œ uvre, demain, par la force des
mêmes principes, il pourrait demander à être déclaré
l’héritier des Templiers ou de toute autre institution
du même genre, qui aurait péri mille ans avant lui.
E n fm , il est des corps comme des individus, on
n’a jamais prétendu que ceux-ci fussent de la même
famille et fussent appellés à se représenter et à sc suc-»
céder , parce qu’ils exerçaient la même profession.
�(SC)
Ainsi donc le legs doit faire retour à l’héritier par
l’effet et l’événement de la condition résolutoire ta
citement exprimée par ces mots : les pauvres que l'œuvre,
a coutume d’assister.
Examinons maintenant quel doit être l’effet de la
condition résolutoire expressément énoncée dans la
clause qui suit.
« Et au cas que l’oeuvre de la miséricorde vint à
être réunie à lTIôpital gén éral, ou à tout autre hôpital ,
je veux que le legs fasse retour à mon héritier. »
La condition a eu lieu , puisqu’il y a eu confusion
des Corps et des biens.
Il y a eu confusion des Corps, car toutes les insti
tutions aumônières de France ont été réduites à une
seule espèce, qui les a toutes remplacées, savoir les
hospices généraux.
Il y a eu confusion de biens , elle s’est opérée
dans la main de la Nation , qui s’en est emparée ;
témoin entre autres lois celle du 19 mars 1793 , qui
ordonne que les biens des hôpitaux ; c e u x des do
tations et donations en faveur des pauvres, seront
vendus Comme nationaux : la Nation par ces loisét autres , a délaré /’assistance des pauvres , dette na
tionale , et s’en est chargée : ainsi d o n c, comme on
l’a d it , elle est devenue le véritable hôpital, l’hôpital
universel d e l’empiro \ et les hôpitaux'qui sont restés,
�t
( 37)
n’étant plus propriétaires et indépendans , n’ont été
que l’a gen t, et l’intermédiaire par lequel cet hôpital
universel exerçait l’hospitalité.
Mais dit-on, il n’y a plus confusion, et de nouveaux
Corps ont été établis ; c’est parce que de nouveaux
Corps ont été établis , que la confusion des anciens
n’a pas cessé, et qu’elle dure encore ; quand il n’y aurait
plus confusion , qu’importe ? le droit du légataire
n’en a pas moins été résolu , le legs n’en a pas moins
dès l’instant fait retour à l’héritier, tout n’en est pas
moins consommé.
A u reste, je vais plus loin, je soutiens que les rapport?
que le Bureau de bienfaisance nous dit exister entre
l’œuvre et lui , sont une preuve que la condition
prévue est arrivée, et que l’événement dont il s’a g it,
savoir la réunion , a eu lieu cil sa faveur : je le prouve.
En cas de réunion de deux Corps , qu’est le
Corps auquel on réu n it, par rapport à celui qui
est réuni ? il hérite de ses droits , il lui est substitué ,
il le remplace , il le représente.
O r , le Bureau de bienfaisance ne cesse de répéter
qu’il hérite des droits de l’œuvre , qu’il lui est subs
titu é , qu’il la remplace , qu’il la représente ; c’est en
vertu de. ce prétendu titre qu’il a g it, qu’il demande.
Donc , etc.
�. X 38>
Quand la tentatrice a écrit, au cas que l’œuvre
vint à être réunie à l’hôpital gén éral, ou à tout autre
' h ô p ita l , c’est comme si elle avait é crit, au cas que
l’hôpital général, ou tout autre hôpital vienne à rem
placer et à représenter l’œuvre.
IVIais pourquoi a-t-elle dit l’hôpital gén éral, ou tout
autre h ô p ita l , parce qu’elLe a voulu s’énoncer d’une
manière générale , qui put embrasser jtoutes les insti
tutions de ce genre ; et -cela était conséquent à la
clause dont nous avons parlé plus h au t, par laquelle
elle léguait exclusivement à l’œuvre de la miséricorde,
»et rejetait tout autre Corps ^de ce genre , tout autre
institution aumôriière, charitable , pitoyable , pour nous
servir des termes des anciennes chartes.
O r , on ne peut douter que le Bureau de bienfaisance^foit une institution aumônière , pitoyable ,
charitable , donc il est compris dans l’expression :
Vhôpital générai ou tout autre hôpital.
Donc les rapports qui le lient à l’œuvre de la mi
séricorde , et dont il prétend tirer son droit, sont une
preuve qu’il n’en a pas : donc le titre auquel il de
mande , prouve qu’il n’a point de titre pour demander.
Mais enfin qui lui aurait donné les droits qu’il
vient exercer ici ? de qui tient-il sa mission ? ce n’est
que du Gouvernement ; or le Gouvernement n’avait
point de droit au legs dont s’agit ; donc il n’a pu
lui en donner,
�w
C 39 ) _
Comme cette partie de l’affaire est non pas la plus
contraire aux adversaires, car les autres ne le sont
pas moins , mais celle où l’injustice de leur demande
.frappe le plus ceux qui n’ont aucune connaissance du
d roit; c’est sur ce point, que pour en imposer au
public , ils ont entassé les sophismes.
C ’est là leur dernier refuge, c’est là que nous
allons les forcer.
On a d’abord opposé que toute clause résolutoire
apposée à un legs pie était immorale, et partant nulle.
L ’argument est neuf : c’est la première fois qu’on
l’avance , faisons en sorte que ce soit la dernière.
Cette proposition est à contre sens de la raison et
des lois.
En effet, une condition résolutoire ou négative ne
peut être immorale, qu’autant que l’obligation qu’elle
résout, est commandée par les mœurs ou par les
lois : telle serait la condition résolutoire de l’obli
gation de payer les impôts, ou de nourrir son père
pauvre.
Mais quand l’obligation n’est pas recommandée par
les mœurs ou par les lo is, la condition qui la résout
ne peut pécher contr’elles.
Celui qui a la puissance et le droit de ne pas faire,
a bien la puissance et le droit de ne faire qu’à m oitié,
en tel ca s, en tel temps, en un m o t, de ne faire que
�:
>76
'■<•
c *>
y
conditionnellement. Et la Dame G alieu, qui avait
incontestablement, le droit de ne pas donner, avait
bien aussi celui de ne donner que sous les conditions
implicites et explicites dont nous avons parlé.
Les lois ne sont pas moins formelles ; nous en ci
terons une dans l’espèce , d’une fondation de jeux
funèbres.
On sait que ces jeux étaient dans l’antiquité ce que
sont de nos jours les oraisons funèbres, les prières,
les messes; la différence est que les anciens appelaient
Autour du tombeau, l’ambition avec ses jeux , ses tu
multes , ses disputes, ses combats , scs haines et ses
vengeances ; tandis qu’aujourd’hui nous y appelions
l’indulgence et les bénédictions du C ie l, des réflexions
morales sur la double nécessité de mourir et de bien
faire, des souvenirs honorables pour celui qui n’est
plus, et des idées consolantes pour ceux qui sont restés,,
Hé b ien , la L. T itïis Lucius de anuuis légat . , pose
l’espèce qui suit : Titius Lucius lègue à la République
une certaine somme, à condition q u e les reven u s en
seront employés à des jeux funèbres en son honneur.
Elle décide que si la condition n’est pas rem plie,
les héritiers répéteront ce qui aura été p a y é , et retien
dront ce qui sera du.
La glose fait plus , elle renvoie à la loi n de cond.
indeb. « Si hœres arbitratu lib e rti, monumcntuin
facere
�j ,r r
.
<
41 5
facere jussus, ( tcstamento ) pecuniam iiberto dederit,
et is accepta pecunia monumentum non faciat, conditione tenetur. » La glose décide donc que la Répu
blique est tenue des conditions qui lui sont imposées,
' aussi rigoureusement que le dernier affranchi.
Il n’y a d’exception à ces principes que quand les
conditions «ont illicites , comme celles de célébrer
ces jeux dans un emplacement prohibé par les lois ,
ou quant la condition étant purement m odale, ne
peut être exercée : alors le testateur est censé avoir
principalement voulu donner, et n’avoir fixé le mode ~
que secondairement.
On trouve des exemples dans le droit romain.
On a ensuite opposé une loi de 1790 , q u i, à l’égard
<les fondations dont la Nation s’est emparée, veut que
les héritiers du fondateur ne puissent profiter des
clauses de retour, apposées dans les actes constitutifs.
L ’argument tout misérable qu’il e s t, ne prouve
point en faveur de la conséquence des adversaires
qui citent cette loi’ , après avoir prétendu que les
clauses de retour apposées dans ces actes étaient im
morales, et par conséquent nulles.
Si ces clauses étaient immorales et nulles , pour
quoi le Législateur a -t-il eu besoin d’en prévenir
l’effet par une l o i , peut-être odieuse ?
Examinons maintenant la loi qu’on nous oppose. .
6
�( 42 )
Une loi qui déroge au droit commun ne peut être
étendue. Dans celle-ci, il ne s’agit que de fondations
déjà validées, déjà exécutées , dont les biens se trou
vaient entre les mains des Corporations supprimées ,
et dont la Nation s’était emparée ; mais il n’y est au
cunement question de celles dont les biens ne sont ni
saisis ni rem is, qui ne sont point exécutées ni vali
dées , dont le droit est contesté.
T e l est donc le système des moyens avancés par le
sieur Capelle.
L e Corps n’était point approuvé , de là une nullité
absolue, irréparable.
L e Corps étant approuvé, l’acte de fondation au
rait du être ratifié par des lettres patentes , tout au
moins par l’homologation dans une cour supérieure.
I
Les biens donnés ne sont point de la nature de
ceux dont il est permis de disposer, aux termes de
l ’article i4 d e l’édit de 1749. Les Corps non approuvés
ne peuvent être compris dans les exceptions portées
par les déclarations suivantes.*
E nfin, le legs est nul par l’événement des condi
tions résolutoires V' explicitement ou implicitement
portées dans le-testament.
�c 43 >
11 nous reste maintenant à répondre à quelques ob
jections détachées.
,
*
L ’adversaire a prétendu que le legs pie réd u it, ne
faisait point retour à l’héritier, mais deyait être em
ployé à des usages pieux.
Nous nous contenterons de lui répondre qu’apparamment il n’a pas lu les articles 10 , î i et 12 de
l ’édit de 1 749 On a blâmé la demande et la réclamation de l’hé
ritier , elles ont été représentées comme l’acte d’une
avidité condamnable, que les Tribunaux devaient
s’empresser de flétrir.
Certes , telles ne furent point les opinions, tels ne
furent point les exemples de ces hommes illustres ,
dont le nom sera toujours cher à la magistrature,. des
ÎDaguesseau , des Gilbert de V oisin s, des Joli de
F le u ry , des Seguier, etc., etc. Ils savaient et ils pu
bliaient que ces demandes et ces réclamations, loin
d’être répréhensibles, sont au contraire encouragée»
et recommandées par le législateur.
En effet, les articles 10, n et 12, donnent le droit
de réclamer les biens ainsi donnés, non seulement
�Ho
C 44 >
'
aux héritiers, mais encore aux enfans et autres héri
tiers présomptifs q u i, vivant même le donateur , seront
envoyés en possession y que s’ils ne veulent ou n’osent
exercer ce droit, la loi de suite et sans attendre, le
remet au Seigneur dont les biens dépendent ; et si
celui-ci se ta it, alors les procureurs-généraux doivent
en poursuivre la confiscation..
L ’article ajoute : il vrai que ces biens ainsi con
fisqués au profit du r o i s e r o n t par lui employés en
faveur d'un autre hôpital, au soulagement des paur
vres , ou à quelque usage public.
Mais ce n’est là qu’une mesure particulière, qui est
étrangère aux principes constitutifs de l’édit ; le prince
écartant toute idée de fiscalité, n’a pas voulu se gorger
de la dépouille des citoyens.
Il
a été opposé que l’intérêt public exigeait que la
fondation fût acquittée, que tout devait se taire de
vant cette considération d’un ordre supérieur, et on
s’est complaisamment arrêté sur cet argument.
Mettons içi de côté la sensibilité , affection toujours
honnête et généreuse , mais qui doit aussi céder à la
' raison ; et voyons si l’intérêt public exige que toutes
les lois politiques et civiles d’un Etat soient immolées
aux prétentions dusimple Bureau de bienfaisance.
L ’intérêt de l’E ta t, l’intérêt public , c’est le respect
pour les lois politiques et civiles, et par suite pour
les propriétés.
�Ml
C 45 )
Ce n’est point l’intérêt d’un jo u r , d'une heure ,
d’un m om ent, celui d’un ou de quelques individus;
La société qui reste , ne considère ni l’instant qui
s’écoule, ni l’homme qui passe, et l’un et l’autre ne sont
pour elle qu’un point fugitif, que le temps absorbe et
dévore : ses jours à elle sont des siècles , ses enfans
sont des masses entières , c’est eux seuls qu’elle
considère quand il s’agit de stipuler ses intérêts, e t
non quelques individus , qui tour-à-tour se présentant
sur son théâtre, n’y' sont que des usufruitiers d’un
instant , pour lesquels fout est viager , tout est mo
mentané dans l’ordre social.
Mais quel serait enfin le produit de cette grande
mesure , de cette considération d’un ordre supérieur,
à laquelle on veut , sans hésiter, faire le sacrifice de
tout ce que les Nations doivent respecter sous peine
de vie , des lois de l’Etat et de la propriété. •
'' >
C et intérêt public, nous le dirons, n’est autre chose
d’un côté, que la facilité donnée au Gouvernement
d’économiser quelques écus , en le dispensant de
payer ce qu’il donne, et ce qu’il doit pour l’assistance
des pauvres ; de l’autre, celle de recevoir quelque
argent, parce que le fonds du legs doit être placé
en rentes sur l’Etat.
�Eli bien ! ce n’est point là l'intérêt public : nous
irons plus loin; ce n’est pas la volonté du Gouverne
m ent; en douter serait ne pas lui rendre justice.
Malheur donc à cette opinion vaine et dangereuse,
,qui renversant les id ées, place l’intérêt public dans
une économie momentanée , à laquelle ' il fait céder
toutes, les lois, et appelle des conséquences funestes.
Anathême à ces principes q u i, s’ils étaient connus »se
raient également réprouvés, et par le Gouvernement,
fier de commander à un peuple généreux et libre , et
par la Nation qui s’applaudit d’avoir trouvé un C hef
qui se fait honneur de respecter ses droits.
Enfin , 1’on a prétendu que le legs est favorable.
Mais sur quoi donc serait fondée cette faveur,
éerait-ce sur les articles 2 , 3 , 9 , 10 , n , 12 , i 4 ,
i 5 , 16 , 1 7 , 1 9 , 20 , 21 , 2 2 , de l’édit de 1749» et
sur les déclarations qui l’expliquent ? serait-ce sur les
clauses du testament ?
Si la faveur n’est qu’une couleur honnête donnée
à l’injustice, ah ! sans doute le Bureau de bienfaisance
a droit de la réclamer. Et encore sera-t-il difficile,
sera-t-il impossible de trouver un vernis qui puisse
effacer et couvrir taut de nullités : mais si au con
traire ce mot exprime le respect dû à une réclamation
(jui réunit pour elle la force du droit et de l’équité,
�C 47 5
alors c’est à l’héritier qu’elle est d u e, car il à pour lui la
loi de l’E ta t, qui défend de donner aux Corps non
approuvés, et la loi de l’équité qui ne permet point que
les familles soient dépouillées pour enrichir des Cor
porations , même des hôpitaux , parce que la spolia
tion d’une famille produit plus de misérables, que
n’en peut soulager l’opulence d’un hôpital. 11 a pour
lui la lettre du testament. Et si la' dame Galieu ( i )
imprudemment évoquée par l’adversaire , pouvait un
moment soulever la pierre du sépulchre , et franchir
les barrières de la mort , son ombre pâle et indignée,
ne crierait-elle pas à l’adversaire.
l8,
« Pourquoi êtes-vous venu troubler le silence et la
ap’ » paix du tombeau, pourquoi m’avez-vous appellé ?
» quare inquietasti me ut suscitarer. »
« Ma volonté n’est-elle pas claire, n’est-il pas evident
que j’ai voulu vous exclure , que vous n’avez pas
« plus de droits que l’autorité qui vous envoie : pour» quoi donc m’avez-vous appellé ? quare inquietasti me
» ut suscitarer. Eli bien , je vous répondrai, je vous
» dirai que vous-même ne croyez point à la validité
» du le g s, je vous dirai que vous confiant en des
s) circonstances étrangères , vous avez osé mentir à
» votre conscience ; que vous avez espéré séduire les
^ J M. Juliic avilit dans so plaidoirie «voquc l’ombre de 1* Jame Gai*00,
�( 48 )
» Juges en leur proposant de s’associer à la bienfaisance
» d’un testateur, mais vous vous serez trompé : vos
» Juges savent que le legs est r évoqué , ils savent
« que leur devoir est de dire rigoureusement droit à
» t o u s , et que là où la justice finit, l’injustice com
» mence. »
P. S. L e sr. Capelle n’a pu se procurer le testament du sr. Gérauld
G alieu ; mais il n’en est pas moins vrai qu’il y a eu une substitution.
A u reste , cela est étranger à la question , et c’est par les principes
qu’il faut décider.
L e sr. Capelle a découvert que la quittance dont nous avons parlé
au com m encem ent, est relative à un autre acte que celui rapporté
dans le testament ; il doit à sa loyauté d’en avertir les Juges.
L e citoyen L am ourou x, P résiden t,
Rapporteur du délibéré.
B E R T R A N D , fils.
SE V E R A C ,
Avoué.
A Saint-FJou r, de l'imprimerie de V e. S A R D I N E .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Lamouroux
Bertrand fils
Séverac
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour le Sieur Capelle, défendeur, contre le Bureau de Bienfaisance de la Ville d'Aurillac, demandeur.
Table Godemel : Legs : 4. un legs fait en 1785 aux pauvres de l’œuvre de la miséricorde, est-il fait aux pauvres ou à l’œuvre ? doit-il être classé dans les cas de prohibition prévus par les articles 1, 2, 9 et 10 de l’édit de 1749 ? est-il, au contraire, compris dans l’exception portée par l’article 3 de cet édit ?
La condition que ce legs ferait retour à l’héritier dans le cas de réunion de l’œuvre, soit à l’hôpital général, soit à tout autre hôpital, est-elle une preuve que le legs était fait à l’œuvre et non aux pauvres de l’œuvre ?
la réversion s’est-elle opérée dès le moment où le gouvernement a cumulé les revenus de toutes associations corporatives et administratives d’hospices ?
Legs considérable devant aller en partie à l’œuvre de la miséricorde à Aurillac. La Révolution survint et les biens des congrégations sont saisis. Le bureau de bienfaisance créé à Aurillac demande la délivrance du legs fait à l’œuvre de la miséricorde
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Veuve Sardine (Saint-Flour)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1785-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1309
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_G1310
BCU_Factums_G1311
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53198/BCU_Factums_G1309.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
legs
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53199/BCU_Factums_G1310.pdf
46a8239a4e78d916e12824947929d365
PDF Text
Text
M É M O I R E
P O U R
DE
LA
L E S
V ILLE
L É G A T A IR E S
SOMME
DE
8 OOOO t1~.
RIOM,
L’ i m p r i m e r i e
IM P R IM E U R
D ’A U R I L L A C ,
D’U N E
A
D E
P A U V R E S
L A N D R I O T ,
d e
DE
LA
Juin
COUR
1804.
D ’A P P E L .
SEUL
�MEMOIRE
POUR
Les Pauvres d’Aurillac, représentés par le Bureau
de bienfaisance de cette v ille , appelant;
C O N T R E
,
L e sieur C A P E L L E héritier de madame
G A L I E U.
de
I L existe un corps q u i , né avec la société, est destiné à
durer autant qu’elle. Objet de la prévoyance du législa
teur , de la bienfaisance des particuliers, des sollicitudes
de la religion, les lois veillent pour le protéger, des mains
généreuses le nourrissent, la piété se charge de le con
soler, et tous les hommes le respectent, car le respect est
D û au malheur.
A 2
�(4)
L es ■pauvres
composent ce corps
\
les pauvres, c’ est-
à-dire, cette portion des citoyens de chaque état, à qui
le ciel a donné la v ie , et refusé les moyens de la soutenir :
membres souffrans de la société, en les recevant dans son
sein elle contracte l’engagement sacré de les secourir.
L ’arbre fertile ne prive aucun de ses rameaux de la sève
qui les féconde.
L ’homme a donc ménagé des ressources à l’homme
contre les disgrâces de la nature ou de la fortune. Il est
des biens mis en réserve pour ceux qui n’en ont point :
la société encourage et protège les dons faits à la pau
vreté par l’opulence. Ces b ien s, ces d o n s , fruits de la
munificence des princes ou de la générosité des parti
culiers, se nomment également
fondations :
ce sont des
dépôts inviolables consacrés par la charité publique -, ce
sont des eaux salutaires dont l’humamté, la bienfaisance,
la religion gardent la source.
Des pauvres se présentent aujourd’hui pour réclamer
une de ces fondations : c’est l’unique débris échappé au
naufrage qui a englouti tous leurs biens ; c’est un legs de
80000
, dernier gage du souvenir d’une femme ver
tueuse dont ils pleurent encore la perte. L ’héritier le
refuse *, des premiers juges l’ont annullé : mais le gouver
nement l’approuve , mais toutes les lois l’autorisent___
les magistrats supérieurs le confirmeront. Il est digne de
la justice de protéger les monumens de la bienfaisance ;
et l ’autorité publique doit consacrer les dernières volontés
d ’ une femme assez généreuse pour vouloir faire le bien
au delà même du to m b eau , et assez heureuse pour Je
pouvoir-
�1
b{ 4
( 5 )
C ’est à des femmes que madame de Galieu avoit confié F A I T S .
la distribution de ses bienfaits. Les femmes semblent des
tinées par la nature à soulager les infortunés; leur pitié
est plus douce, leur compassion plus affectueuse, leurs
soins plus délicats que ceux des hommes : elles sont des
gardes avancées, placées sur la route du malheur pour le
découvrir; elles apparoissent dans ces obscurs asiles où
il se dérobe aux regards, telles qu’un D ieu bienfaisant
qui ramène avec lui l’espérance. Quels pleurs ne se sèchent
point à leur approche ! quels maux ne sont pas adoucis
par leurs soins! que de consolations sorties de leur bouche!
que de dons échappés à leurs mainsi
Sans parler iei des Sœurs de la charité , des Hospitaliè
res et des autres femmes qui se consacroient par des vœ ux
au service des pauyres, plusieurs villes comptoient avant
la révolution des associations de dames pieuses, réunies
par le seul intérêt de la religion et de l’humanité : on
les nommoit indifféremment Dames de la charité, Dames
<le la miséricorde, Trésorières des pauvres. R i o m , Clermont avoient les leurs, et parmi elles comptoient leurs
noms les plus illustres. O n en trouvoit dans toutes les
paroisses de Paris
on en trouvoit aussi dans la ville
d ’Aurillac.
Les Dames de la charité
étoient ordinairement les
dames les plus respectables et les plus distinguées de
-chaque v ille : c’ étoienL des femmes du m onde, les unes
m ariées, d’autres v e u v e s , d’autres célibataires. Elles ne
faisoient aucun vœu ; libres d’abandonner à leur gré
un joug qu’elles s’imposoient librement.
Elles ne for-
moient point de corps; dégagées de tous liens piiblics,
�( 6 )
ne retirant d’ autres fruits de leurs travaux que le plaisir de
faire le bien, distinguées non par des signes particuliers
mais parleurs vertus, connues de l’autorité seulement par
leurs bienfaits, comme la fleur modeste par ses parfums.
Solliciter la piété dans les temples, et la bienfaisance
dans les maisons ; obtenir de l’avare pitié des dons qu’elle
refuse à un hom m e, et qu’elle accorde
a
une femme;
secourir l’infortuné qui se cache, en lui dérobant la main
q u i le nourrit ; assister l’artisan m alade, trop pauvre
pour soutenir sa famille privée de ses travaux, trop fier
pour mendier un lit à l’hôpital ; porter aux douleurs
des remèdes, et des consolations aux chagrins : voilà les
fonctions et les plaisirs des Dames de la charité. Dirai-je
des maux plus secrets qu’elles soulageoient ? parlerai-je
des nourrices récompensées , des orphelins recueillis,
des filles dotées, et de tant d’autres bienfaits oubliés
avec les bienfaitrices ?
J ’ai dit que la ville d’Aurillac avoit ses
charité :
Da?jies de la
on les nommoit dans cette v i l l e , comme dans
la plupart des provinces méridionales,
de. la miséricorde ;
Dam es de l'œuvre
ce q u i veut dire , dames chargées
-du travail de la charité. T e l étoit leur titre à G re n o b le,
à M ontpellier, etc. A Figeac, on en trouve la preuve
dans le testament de madame de G a lie u , qui lègue le
revenu de l’une de ses terres aux pauvres
la miséricorde
de £œuvre de
de Figeac. Croira-t-on que ce titre par
ticulier soit le seul fondement du procès que l’héritier de
madame de Galieu intente aux pauvira ? C r o i r a - t - o n
que ce procès n’auroit jamais ex isté , si quelques dames
pieuses d ’Aurillac
n’avoient
été connues que sous le
nom de Dames de la miséricorde
?
�( 7 )
Leurs aumônes , leurs quêtes, leurs soins, étoient le
seul Lien des pauvres de cette v i l l e , dont la population
s’élève à plus de dix mille âmes. Il n’y avoit alors qu’une
seule paroisse, et cette paroisse etoit sans fabrique et
sans marguilliers. Toutes les oblations, les fondations,
et les autres objets affectés aux fabriques dans la plupart
des paroisses du royau m e, se trou voient à A u r illac entre
les mains des prêtres connus sous le nom de Communalistes , érigés en titre de collégiale par des lettres pa
tentes, et q u i , après avoir prélevé les frais du service
de l’é g lis e , se partageoient ce qu’il y avoit de reste ,
sans en faire aucune part aux pauvres.
L a ville av o it, à la v é rité, un Hôpital ; mais cet éta
blissement ne juuissoit que d’ un revenu médiocre. L a
classe indigente et laborieuse du peuple attaclioit d’ailleurs
une espèce de lionte aux secours qu’elle auroit pu trouver
dans l’hôpital. O n ne comptait de fonds destinés au sou
lagement des pauvres, qu’ une rente de 432
payable
sur la quittance des éclievins et du curé ; ils en confiè
rent la distribution aux Dames de la miséricorde.
Le
zèle de ces dames sembla s’accroître lorsque la
marquise de Fontanges se joignit à elles : le trésor des
pauvres s’enrichit de ses libéralités. L ’évêque de T r o y e s ,
son oncle, y ajouta les siennes. Plusieurs femmes riches,
jalouses d ’imiter de si nobles exem ples, r i v a l i s è r e n t de
charité avec madame de Fontanges. O11 fit aux pauvres,
dont les Dames de la miséricorde prenoient soin , divers
legs dont plusieurs sentences du bailliage de V ie ordon
nèrent la délivrance. Les quêtes devinrent plus nom
breuses •, les assemblées de charité plus régulières ; le
�(8)
curé d’Aurillac les p résid oit, en son absence madame
de Fontanges prenoit sa place : cet honneu r, dû à son
n o m , l’étoit plus encore à son zèle. C ’est sans doute ce
qui fait dire à madame de Galieu, dans son testament,
que la marquise de Fontanges étoit la supérieure des
Dames de l’œuvre de la miséricorde. Jamais elle ne reçut
ce titre de supérieure; il n’étoit donné , comme on sait,
qu’aux femmes qui étoient à la tête d’un couvent, d’une
communauté. Comment des dames qui avoient des époux,
des enfans, des engagemens avec le m o n d e, auroientelles formé une communauté ? Comment madame de
Fontanges, épouse et m è r e , en auroit-elle été la supé
rieure? ce titre est incompatible avec ceux qu’elle avoit
reçus des lois et de la nature.
A cette ép o q u e, vivoit à Aurillac une veuve extrême
ment riche et sans enfans : on la nommoit FrançoiseDorothée de Cabridens. E lle avoit été mariée au sieur
de Galieu de F ig e a c , qui lui avoit laissé tous ses biens,
sous la condition de rendre la terre de G rialou , située
dans le Q u e r c i , à l’un de scs parens. Pour remplir la
substitution, madame de Galieu fit une donation de cette
terre ù l’abbé C a b r i d e n s de C l a v i è r c s , son f r è r e , parent
d ’ailleurs du sieur de Galieu. L a donation fut passée
à Paris en 1 7 7 4 , et l’abbé de Cabridçns a joui de la
terre jusqu’il sa mort.
C ’étoit un homme aussi recommandable par sa piété
que par sa bicnfaisance.il fut question, en 1 7 7 7 , d’éta
blir à Aurillac une école de Frères de la doctrine chré
tienne, pour l’instruction des enfans des pauvres. L ’abbé
de Cabridens donna, pour cet établissement, une rente
de
�( 9 )
de
65o ^ ,
et un capital de ioooo
ff',
Il voulut que ces
sommes demeurassent à jamais consacrées à l’instruc
tion de la jeunesse, môme en cas de retraite des Frères
de la doctrine chrétienne. L ’acte authentique fut passé
avec les officiers municipaux d’Aurillac, le 29 septembre
1777.
L ’abbé de Cabridens destinoit encore/d’autres bienfaits
aux pauvres de sa ville natale. Il jouissoit d ’une grande
fortune. L a succession de madame de G a lie u , sa sœ u r,
est composée de biens situés en A u ve rgn e et en Querci.
T ous ceux d’Auvergne appartenoient à l’abbé de CabriT
dens ; savoir, les domaines de Faillitou et de la Bartassière, qui viennent d’être vendus plus de 80000
, et
le fief de Clavières, qui vaut à peu près cette somme.
Je ne pai'le pas de plusieurs maisons et de
quelques
autres immeubles de médiocre valeur. L a fortune de
l ’abbé de Cabridens s’étoit encore accrue par le don de
la terre de Grialou, dont il pou voit disposer à son gré.
Madame de Galieu, sa/ sœur, n’avoit point d’enfans. U
crut devoir à son é t a t , à son caractère , d’adopter les
pauvres pourries siens; mais, pressé par l’âge, et assiégé
par les infirmités qü’il traîne à sa suite, il confia
h
sa
sœur l’exécution des pieux desseins qu’il avoit conçus.
Il la chargea de vendre les biens qu’il possédoit en A u
vergne, au profit des pauvres. Il lui indiqua ceux qu’assistoient les Dames de la miséricorde pour l’objet de
ses secours, et il la chargea de payer la rente qu’il avoit
destinée
l’éducation de la jeunesse. Ces dispositions,
il ne les consigna point dans un testament. Sa sœur pos
sédoit toute sa confiance. Il ne vouloit pas, lui d it -il,
B
�tjuc le public pût en douter. Il lui laissa donc
sa succession tout entière.
Mais madame
ab intestat
de Galieu a
pris soin de nous apprendre à quelles conditions : en
fh aux pauvres, pour rem plir, dit-elle,
les pieux desseins qui lui ont été communiqués par
son,frère avant sa m o r t , et en ordonnant de vendre,
léguant 80000
p our acquitter ce le g s , tous ses biens d’A u v e r g n e , c’està-dire, tous ceux qui lüi venoient de l’abbé de Cabridens.
Cependant la maison de madame de Galieu étoit assiégée.
Q u e d’amis, que de parens ne se trouve pas une testatrice
opulente ! Q ui pourroit dire toutes les manœuvres, pein
dre toutes les intrigues qu’on employa pour obtenir la
première place, ou du moins une place dans son tes
tament ?
'
L e jour si long-temps attendu arriva enfin : ce fut le
4 octobre 1785. M adame de Galieu a v o i t , à ce qu’il
p a r o ît, plusieurs parens au même degré : c’étoient des
enfans de ses cousines germaines, c’est-à-dire, ses neveux
bretons. D e u x liabitoient Aurillac. L e troisième vivo it
à Saint-Constant, village à q u e l q u e s l ie u e s de cette ville :
on le nommait le sieur C a p e l l e , et il avoit quatre enfans,
deux filles et deux fils. Madame de Galieu choisit l ’aîné,
alors âgé de cinq ans, pour son héritier; elle lui substitua
5011 frère, sans faire aucune mention des filles. L a substi
tution ne s’est pas ou verte, et Pierre-Antoinc-Urbain
Capelle, cousin au quatrième degré de madame de Galieu,
jouit seul a u jo u rd ’h u i d’ une fortune dont i l ne p o u vo it
espérer tju’un douzième, suivant l’ordre de lu nature,
puisqu’il auroit été obligé de partager avec son frère
�(
II )
et ses deux sœurs le tiers qui revenoit à son père.
Ces détails feront juger si ¡’extrême faveur que croit
mériter l’héritier de madame de Galieu, si cetle prédi
lection spéciale que lui p o r to it, dit-il, sa bienfaitrice,
si ces droits respectables du sang et de la nature qu’il
invoque, sont des prétentions fondées ou de vaines chi-inères. Quelle faveur extrême ne mérite pas un héritier
préféré à des parens plus rapprochés! préféré à son propre
père , à son frère ,
à
ses sœurs ! Quelle prédilection spé
ciale n’a pas témoignée madame de Galieu à un enfant
de cinq ans, qu’elle n’avoit jamais v u , qu’elle n’a choisi,
on le sait, que parce que la foiblesse de son âge sembloit ne pas. lui permettre de cqntrarier les volontés de
sa bienfaitrice! Combien sont respectables les droits du
sang et de la nature, lorsqu’ils sont invoqués par un
héritier que ni le sang ni la nature n’appeloient person^
nellement à la succession*
Madame de Galieu laissoit environ
5qqooq ^
de biens^r
çn meubles, en créances > ou en terrçs,,E lle(poçsédoit
le iief de Grialou, celui de C lavières, les domaines de
F e ic e lle , de Lacoinbe, de F a illito u , d e l à Bartassière*.
etc. ; des maisons à A r p a j o n , à A u rilla c,
Figeac; un
mobilier considérable. E lle a fait, il est v r q i, des legs
en très-grand n o m b re : ils s’élèven t, dit l’héritier, à.
270000
tf~.
O n veut l’en croire ; mais enfin la moitié
de celte somme est consacrée à acquitter les detles de la
nature ou de l’amitié ; il n’y a que l’autre moitié qui
soit destinée à des œuvres de charité ou de religion. Ces
legs ne paroîtront pas exorbitans relativement aux forces
de la suçcession, et quand ou songera aux conditions
B 2
�' 1•‘J.
( 12 )
imposées par l’abbé de Gabridens à madame de G alieu ,
sa sœur et son héritière.
Entre les legs pieux , on remarque celui du revenu
de la terre de G r ia lo u , laissé pendant un an
vres de Tœuvre de la miséricorde
aux pau
de la ville de Figeac.
Ce legs a été fidèlement payé ; il devoit l’être avant la
rév o lu tio n ; il n’étoit pas considérable. L ’on n’a point
demandé si les Dames de la miséricorde de Figeac avoient
des lettres patentes.
-
Il est une autre disposition qui excite de vives récla
mations, qui ( s’il en faut croire l’héritier ) est nulle
faute de lettres patentes', qui du moins a fait retour à
la succession , qui enfin doit être réd u ite, t o u j o u r s sui
vant rh ë i’itièr. E lle est faite en faveur des pauvres de
rdcuvre de la miséricorde d ’Àurillac : elle est l’objet de
ce mémoire.
O n sait que l’abbé de Cabridens avoit laissé tous ses
biens à sa sœur, à de Certaines conditions. V o ic i de quelle
manière madame de Galieu les a remplies.
■
E t pour rém plir , d it-elle, les pieux desseins qui
vr ïn’ont été communiqués par Jeu monsieur Cabri« dens , mon frè re } avant son décès , je lègue aux
pauvres de l ’œuvre d e là m i s é r i c o r d e d e la v i l l e d ’A u « rillac laquelle oeuvre est administrée par de pieuses
«
(.(.'
« damés, et dont madame la marquise de Fontanges est
« la supérieure, la somme de 80000
; à la charge
« néanmoins que les administrateurs de l’œuvre seront
« tenus de payer annuellement, et à perpétuité,
aux
« Frères de l’école de la doctrine chrétienne établis à
« A u rilla c, la pension et rente annuelle que monsieur
�« l’abbé
( 13 )
clé Cabrîdens, mon. frère, s’étoit obligé
de-
« leur payer par les actes passés avec eu x, et avec les
« consuls
et communautés
d’Aurillac , sans laquelle
« condition je n’aurois légué à ladite
« somme de 60000
tt‘.
Je veux
œuvre que la
qu’il soit employé le
messieurs les "prêtres
de la ville et communauté d’A u rilla c, qu i seront
dans le besoin , et encore les autres prêtres des en-
« revenu de 20000 ^ pour assister
«
«
« virons de ladite v i l l e , si le revenu de ladite somme
« de 20000
peut le comporter ; et que le revenu des
à soulager et assister
le surplus des pauvres que ladite œuvre a coutume
tïassister. Je veux en conséquence que la somme de
« 40000 *** restantes soit employé
«
«
« 80000
, ci-dessus léguée aux conditions mentionnées,
« soit payée auxdites dames administrant ladite œuvre ,
« sur la quittance qui en sera foux*nie par ladite dame
« marquise de Fontanges, leur supérieure, et aux termes
« ci-dessous fixés. »
:
Madame de Galieu ne fixa aucun terme précis pour
le payement de ce legs : mais elle chargea son exécuteur
testamentaire de recueillir, jusqu’à ce que son héritier
eût atteint l’age de vingt-cinq ans, tous les revenus de sa
succession , et d ’employer ces revenus à acquitter nonseulement le legs fait à. l’œuvre de la miséricorde, mais
tous ceux qu’elle laissoit. Elle destina au même usage le
prix de tous ses biens d’A u v e r g n e , ‘dont elle ordonna la
vente conformément aux intentions de l’abbé de Cabri
dens. Elle nomma le fils de son exécuteur testamentaire
pour remplacer son père, s’il v e n o i t à mourir, avant que
le sieur Capelle eût atteint vingt-cinq ans. Enfin elle prit
�î
( 14} ■
.
toutes les précautions que pouvoit suggérer la prudence
à
une bienfaisance éclairée. Vaines précautions!
soins-
inutiles ! T a n t de mesures, si sagement concertées, n’ont
servi qu’à faire voir que personnenepeut se flatter aujour
d’hui d’étendre son pouvoir au delà de son existence; que
les héritiers testamentaires , aussi avides et plus ingrats
que ceux du sang, ne trouvent jamais assez considérable
la succession qu’ils n’osoient espérer; et qu’ils regardent
presque comme un vo l personnel les legs que leur bien
faiteur s’est permis de faire, et ceux de ces legs surtout
que la religion a dictés, la religion qui seule plaide au lit
de la mort la cause des malheureux.
Madame de Galieu survécut quatre ans à son testament»
Ses résolutions ne se démentirent point : elle mourut sans
y avoir rien changé, au mois de janvier 1789; heureuse
de quitter, pour le séjour de l’éternel repos, une terre où
fermentoient déjà tant de semences de discorde! Elle
mourut : les pauvres la pleurèrent, et ils la pleureront
long-temps.
Surveillante fidèle des intérêts des pauvres, la marquisede Fontanges, qui se trouvoit à Paris à cette époque
s’occupa de leur faire délivrer le legs de 80000
ti~,
T
que
madame de Galieu leur avoit laissé. L ’article 3 d’un édit
de 1749 veut que toutes les fondations faites en faveur
des pauvres soient approuvées par le parlement, qui
nommera des administrateurs au legs ( sans doute si le
testateur n’en a pas nommé ). L a marquise de Fontanges
se rendit chez M . le procureur général, pour le prier de
demander en son nom l’iiomologation nécessaire. M . le
procureur général y conseutit. i l traça la marche qu’on
�Q*cy?)
t i5 )
Revoit suivre. Il îa llo it, d i t - i l , remettre une copie du
testament au procureur du roi près le bailliage d’Aurillac,
qui la lui adresseroit, en l’invitant à requérir que le legs
fût approuvé par le parlement. M . le procureur général
promit de le demander. Ce fait est certain : madame de
Fontanges, qui vit encore, madame de Fontanges, qui
habite A u r i l l a c , l’attesteroit ; et un tel témoignage ne
sera pas récusé.
L e testament fut envoyé à Paris, vers la fin de
ï
79 .
Les troubles survenus alors, les alarmes de la magistrature
sur son état, firent négliger cette affaire, comme beaucoup
d’autres, par le procureur général. Il étoit peu question
de fondations, lorsqu’on ne s’occupoit qu’à détruire. Bien
tôt le parlement fut supprimé, et sans lui l’homologation
devenoit impossible.
Cependant l’exécuteur testamentaire de madame de
Galieu s’étoit mis en possession de tous ses biens, con
formément ù ses volontés ; il devoit les garder jusqu’à ce
que l’héritier eût atteint vingt-cinq ans. Il fit l’inventaire
des meubles, et les vendit pour acquitter une partie des
legs. Il voulut ensuite faire p rocéder, suivant les ordres
de la testatrice, à la vente des biens d’Auvergne. L e sieur
C ap elle, père de l’héritier qui n’avoit alors que neuf ans,
s’opposa à cette vente : il représenta que le moment n’étoit
pas favorable à la vente des immeubles ; et il avoit raison,
l ’année 1789 aclievoit son cours.
Mais les troubles qui commencoient, et les désordres
plus grands encore dont ils étoient avant-coureurs, inquiét oient p eu le père du sieur Capelle : ce qui l ’alarmoit ,
�400
V
( i6 )
c’étoit la nécessité de payer des legs qu’il regardent comme
son bien propre; et sa conduite l’a assez montré.
Ce ne fut qu’en 17 9 2 , et après avoir laissé écouler les
années moins orageuses de 1790 et 1 7 9 1 , que l’exécuteur
testamentaire fit rendre un jugement qui l’autorisoit à
vendre les biens désignés par madame de Galieu : ce juge
ment est du-27 janvier 1792. D ès que le sieur Capelle père
le connut, il fit solliciter une suspension de vente; l’exé
cuteur testamentaire y consentit. Mais enfin, pressé sans
doute par les légataires, et après un délai de six m ois,
il fit poser des affiches qui indiquoient au i 5 juillet les
premières enchères, et l’adjudication définitive au 30 du
même mois.
L e 30 juillet 179 2 , l’assemblée déjà formée, les enché
risseurs réunis, le sieur Capelle père, manifestant alors
le projet qu’il avoit formé depuis long-temps de ne point
acquitter les legs faits par madame de Galieu, projet suivi
depuis par son fils ; le sieur C ap elle, d is-je, fit signifier
à l’exécuteur testamentaire, et au notaire chargé de rece
voir les enchèi'cs , un acte d’appel du jugement qui 01donnoit la vente. Cet incident surprit et troubla rassem
blée; et on vendit seulement quelques petits biens épars,
à l ’aliénation desquels consentoit le père de l’héritier.
L ’exécuteur testamentaire auroit fait sans doute statuer
sur l ’appel du jugement du 27 janvier; mais il n’y sur
vécut pas long-temps : son fils prit alors l’administration
et la jouissance des biens de la succession. Ainsi l’avoit
ox-donné la testatrice, jusqu’à ce que son héritier eût
iitleiiit l’âge de vingt-cinq ans : mais ce qu’elle ne vouloit
pas,
�4 o !
( 17 )
pas, mais ce qu’elledcfendoit, il abandonna bientôt après
les rênes de l’administration qui lui étoit confiée, et toute
la succession, au sieur Capelle père, qui mourut avec la
joie de la transmettre entière à son fils, mais avec le remords
peut-être d’avoir payé d’ingratitude la bienfaitrice de sa
famille, qui s’étoit défiée de lui avec raison, et qui avoit
nommé â son héritier d’autres administrateurs que son
père.
Ainsi l’héritier de madame de Galieu possède depuis
douze ans une fortune qui ne lui appartiendroit même pas
encore, car il n’aura vingt-cinq ans que l’année prochaine!
Ainsi n’ont pas été acquittées les dettes de la charité et
de la religio n , que les revenus dont il jouit de voient
éteindre ! Ainsi s’accomplissent les volontés suprêmes de
ces hommes que la justice place sur leur lit de mort comme
des législateurs dont toutes les paroles deviennent des
oracles! Les exécuteurs testamentaires exécutent ainsi les
vœ ux les plus chers de leurs amis qui ne sont plus !
Si quelque chose peut excuser la foiblesse de ceux qu’avoit choisis madame de Galieu, c’est le sinistre état de la
France au moment où ils remirent ou plutôt laissèrent
échapper le pouvoir confié à leurs mains. L e soleil de 1793
nvoit lui : tout se bouleversoit, tout périssoit, et les talens
et la vertu, et la religion et la patrie.
Alors parurent ces lois à jamais mémorables, qui dé
clarèrent qu’il n’y avoit plus de pauvres, que la bienfai
sance nationale n’en souffriroit plus. Puisqu’il n’y avoit
plus de pauvres, les biens que les siècles avoient accu
mulés pour leur soulagement devenoient inutiles : la
Jaisance nationale
bien-
s’en empara. U n décret rendu eu 1794
C
GO*.
�( 1 8 )
réunit au domaine’ de Tétat toutes les propriétés des hos
pices, toutes les fondations particulières faites en faveur
de l’indigence; en un m o t, l’actif et le passif de tous les
établissemens de charité. Les hôpitaux devinrent des ca
sernes , les maisons de secours des maisons de force, les
églises, le dirai-je! des écuries. . .
Q ui auroit alors osé
réclamer la fondation faite par madame de Galieu? Les
Dames de la miséricorde étoient dispei-sées plutôt que
supprimées; les unes avoient fui aux approches de l ’oi-age,
d’autres habitoient les prisons, le reste gémissoit en silence.
Ces jours affreux semblent déjà loin de nous. U n héros
a paru, suivi de la victoire, et de la sagesse plus utile que
la v i c t o i r e : ses premiers soins ont été de rendre leur
cours à ces sources salutaires et pures qu’ alimente la cha
rité publique. Il a rétabli les hôpitaux dans leurs biens;
il a relevé ces autels à l’ombre desquels les infortunés
trouvoient toujours un refuge ; il a rem placé, s’il est pos
sible , les Dames de la miséricorde, les Dames de la cha
rité , et tant d’autres anciens et dignes tuteurs des pauvres,
en créant, dans la plupart des villes de l’empire, des bu
reaux de bienfaisance.
Les administrations de ces nouveaux établissemens sont
distinctes de celles des hôp itau x , aussi-bien que leurs attri
butions. L e gouvernement a ordonné que les hôpitaux
auroient des administrateurs particuliers, chargés de régir
les biens qui leur étoient rendus, et ceux que des personnes
bienfaisantes consacreroient à fonder de nouvelles places,
ou à conserver les anciennes, dans ces tristes asiles des dis
grâces de la nature et de la fortune.
;
L e s bureaux de bienfaisance sont une reuuion d’ hommes
�( T9 )
charitables, q u i, nommés par le gouvernement, recueillent
sous ses auspices les dons que la pitié offre à l’infortune,
et surtout à l’infortune qui se cache’, ils sont chargés de dis
tribuer ces secours qu’on appelle à domicile. U n arrêté du
gouvernement leur attribue tous les biens affectés à l’entre
tien des Hospitalières et Filles de charité, toutes les fon
dations relatives à des services de bienfaisance, à quel titre
et sous quelque dénomination que ce soit. C ’est pour les
bureaux de bienfaisance que le comte de Rumford a ima
giné ses soupes économiques. Ce sont eux qui sont chargés
de les distx’ibuer.
.
.
(
-,
U n de ces établissemens a été formé à Aurillac i l y a trois
ans : d’anciens magistrats le composent; et les pauvres n’ont
qu’ un reproche à leur faire, c’est de ne leur offrir que du
zèle, et de ne leur donner que des promesses.
O n a dit quelle étoit la misère des pauvres d*Aurillac
avant que les Dames de la miséricorde s’occupassent de les
soulager. Ces dames, dont plusieurs vivent encore, n’ont
pas repris leurs fonctions, devenues sans objet, depuis que
le gouvernement a chargé de l’administration des biens des
pauvres les bureaux de bienfaisance : celui d’Aurillac se
propose d’engager quelques-unes de ces femmes respectables
à se joindre à lui pour la distribution des secours à domicile.
Ces secours ont été nuls jusqu’à ce jour; la seule espérance
des pauvres, c’est le legs qui leur a été fait par madame de
Galieu.
O n a dit que ce legs n’avoit été payé ni par l ’exécuteur
testamentaire, ni par l’héritier de madame de Galieu. L e
bureau de bienfaisance, chargé par les lois de veiller aux
intérêts des pauvres, ne tarda point à le demander au sieur
C i
�fc
( 20 )
Capelle, qui fut cité en conciliation, et ensuite devant ics
juges de première instance d’Aurillac, pour être condamné
à le payer. L e sieur Capelle commença par récuser tous ses
juges, sur de futiles prétextes; et bientôt il obtint de la cour
de cassation un arrêt qui renvoya la connoissance de l’af
faire aux juges de première instance de la ville de SaintFlour.
Les pauvres auroient pu se plaindre de cet arrêt, et
peut-être le faire réformer. Il avoit été obtenu sur un e!
requête qui ne leur avoit pas été communiquée : il étoit
rendu sur un faux exposé des faits. M a is, certains de la
justice de leur cause; ils crurent qu’aucun tribunal ne
d e v o itle u r paroîire suspect, et ils citèrent à Saint-Flour
l ’héritier de madame de Galieu.
Cependant, suivant les dispositions de l’article 3 de
l’édit de 17 4 9 , toutes les fondations devoient être homo
loguées par le pai'lement, q u i, par attribution spéciale,
remplaçoit le prince dans cette fonction. Cette formalité
n’avoitpas été remplie à l’égard du legs fait par madame
de Galieu ; la suppression des parlemens ne l’avoit pas
permis. Les pauvres crurent d e v o i r d e m a n d e r au gou
vernement un arrêté q u i , tenant lieu d’homologation ,
approuvât le leg s, autorisât le bureau de bienfaisauce
à l’accepter en leur n o m , et fît connoître à l’héritier de
madame de Galieu que le bureau exerçoit tous les droits
des Dames de la miséricorde.
Toutes les pièces, tous les l’cnseigrfemcns nécessaires
furent envoyés à Paris. L e ministre de l’intérieur se fit
rendre compte de l’a lia ire, et, sur son rapport, fut donné,
le 7 juillet 1802, l’aiTÔlé du gouvernement qu’on va lire.
�4 oJ
( 21 )
Copie de TArrêté des Consuls.
Les consuls de la république , sur le rapport du mi
nistre de l’intérieur,
L e conseil d’état entendu,
Arrêtent ce qui suit :
A r t ic l e i er.— L e legs de 80000 tf",fait à l’Œ u v re delà
miséricorde de la ville d’A u rilla c, par madame FrançoiseDorothée de Gabridens, veuve G a lie u , suivant son tes
tament du 4 octobre 1785 , reçu par M arm ontel, notaire
à Aurillac , enregistré, sera accepté
de ladite ville
au nom des pauvres
par le bureau de bienfaisance, rempla
çant aujourd’hui l’Œ u v re d elà miséricorde, pour la dis
tribution des secours à domicile.
A r t . 2.— L e montant de ce legs sera rcuni aux autresbiens et revenus des pauvres de la ville d’A u r illa c , pour
être administré et régi par les membres du bureau de
bienfaisance, à l’instar des autres biens des établissemens
de charité.
A
rt.
3. — L e legs étant fait en argent, il sera employé
en acquisition de rentes sur l’état.
A
r t . 4 . — Les administrateurs du bureau de bienfai
sance feront, sur les biens de la succession de la tes
tatrice , tous les actes conservatoires qu’exigera la garantie
des droits des pauvres d’Aurillac.
A r t . 5. — E n cas de contestation ou de refus de la
part des héritiers, les administrateurs du bureau
de
bienfaisance poursuivront la délivrance du legs devant
�V*.
(
22
)
les tribunaux, en s’y faisant préalablement autoriser, clans
les formes voulues par les précédens arrêtés.
A
rt.
6: —
Une somme annuelle de
65 o if~
sera pré
levée sur le revenu du le g s , pour être employée par
le maire à l ’instruction de la jeunesse, sous la direction
et la surveillance du préfet du département.
A
rt.
7. — Pour remplir les autres intentions de la
testatrice, il sera pareillement p rélevé, sur le montant
des rentes, une somme annuelle de 1000
, représen
tant au denier vingt un capital de 20000 ^ , pour être
employée chaque année à secourir les prêtres de la ville
et des environs, qui se t r o u v e r o n t dans le besoin.
A r t . 8. — En cas qu’il n’y ait pas de prêtres indigens,
ou en assez grand nom bre, la somme ou le restant de la
somme sera distribué aux pauvres par le bureau de bien
faisance.
A r t . 9. — L e ministre de l’intérieur est chargé de
l’exécution du présent arrêté , qui sera inséré au Bulletin
des lois.
L e premier consul, signé B o n a p a r t e .
T e l est l’arrêté du gouvernement, en faveur de9 pauvres
d’Aurillae. L e bureau de bienfaisance, autorisé par le pré
fet, a poursuivi le jugement de l’affaire, qui lui paroissoit
décidée a l’avantage des pauvres par cet arrêté. Les pre
miers juges n’en ont pas ou cette idée; le procureur im
périal seul a conclu au payement (|u legs. Quant aux juges
de St.-F lou r, ils ont pensé que madame de Galieu n’avoit
pi\s fait un legs aux pauvresd’A urillu c, mais fyien à l’Œ uvro
�4 oy
'
°-
( 23 )
de la miséricorde \ qu’ils ont considérée comme un corps;
ils ont jugé que ce prétendu corps étoit une communauté
illicite, non approuvée, qui n’a voit pas été fondée pa r des
,
lettres patentes; que par conséquent elle étoit nulle el inca
pable de recevoir des libéralités. Par ces motifs, les premiers
juges ont déclaré le bureau de bienfaisance non-recevable
.
dans sa demande.
Analyser les erreurs qui servent de base à leur décision,
et réfuter successivement les fausses conséquences déduites
de ces deux faits supposés constans et qu’il falloit prouver,
s a v o ir, que les Dames de la miséricorde formoient une
com munauté,.et que madame de Galieu a légué à cette
communauté, et non aux pauvres, la somme que son frère
avoit destinée à des œuvres de charité , ce seroit v o u lo ir ,
,
sans être utile à la cause , affoiblir l’intérêt qu’elle doit
inspirer. Etablissons la justice de la demande , el laissons
l’éclat de la vérité dissiper les ténèbres de l'erreur.
lia cause, en cet état, présente des questions également MOYENS,
im portantes aux yeux du barreau et des hommes du monde.
O n n’agite plus ici des discussions purement civiles. Ce
n’est point la fortune d’un particulier; c’est l’ordre, c’est lé
droit public qui est en suspens.
Sera-t-il permis à un tribunal inférieur de s’ériger en
réformateur des arrêtés du ©
iiouvernement,7 et de déclarer
les pauvres d’une ville considérable incapables de recevoir
un legs, lorsque le gouvernement les a reconnus capables
d ’en profiter ?
Ces mêmes juges, s’ ils n’ont pas excédé leur compétence,
u.’ ont-ils pas porté atteinte au droit public, eu déclarant les
�K-
»
( 24 )
pauvres d’Aurillac non-recevables à demander un legs
qui leur a été fait en 1 7 8 5 , et que l’arrêlé du gouver
nement, tenant lieu d ’homologation, a rendu valable?
V o ilà les deux questions de droit public que fait mûtre
cette affaire; leur examen est l’objet principal de ce mé
moire. O n y ajoutera une seconde partie, dans laquelle on
réfutera rapidement les moyens subsidiaires opposés par
l ’héritier de madame de Galieu devant les premiers juges ;
savoir, que le legs a fait retour à la succession, et que du
moins les magistrats doivent le réduire.
P R E M I È R E
P A R T I E .
O n a dit que les deux propositions qu’il s’agit de prou
ver dans la première partie de ce mémoire, l’incompétence
des premiers juges, l’erreur dans laquelle ils sont tom bés,
sont des questions de droit public. C ’est que les fondations
et tout ce qui les concerne font partie du droit public. Pour
le faire v o i r , et pour établir en même temps la capacité
des pauvi’es en général à recevoir des liJjcrali tés, il est
nécessaire
de rappeler des principes qui s’appliquent
également aux deux propositions à démontrer.
Les pauvres , en nom co lle c tif, dit J. M ,
Ricard ,
forment un corps irrégulier que les lois n’ont point créé,
et qui subsiste par soi-m êm e , toujours renouvelé , tou
jours existant. Les législateurs de R o m e , aussi-bien que les
nôtres, o n t toujours autorisé les dispositions faites à leur
profit. Elles sont même de toutes les libéralités les plus
favorables.
Il est inutile d’en doimer la raison. Chacun voit que lu
nécessaire
�( 25 )
nécessaire du pauvre fait le superflu-du riche, et que c’est
à la bienfaisance éclairée à réparer les injustices de l’aveuglé
fortune;
• >i .1 r ■
_
.i
Les dons faits aux pauvres, considères comme iïn corps y
se nomment en général fondations. Les fondMi'oriS'Sont
de droit public, parce que le gouv,ei‘nem'ënÎlsëhl‘(créé<
^
établit les corps, èt prononce sur' tout ce qui lfe3 rëgàrdéi
C’est par cette raison que d iverséd itso n t pourvu 8'1<1
manière dont les* fondations pourroieiit être fàiteÿ} à lëüè
'•
1
acceptation et à leur administration au nom des pauvrës;
La déclaration de 1749 formoit le^dërniei* drôit sur cetW
inatière avant la revolutio'n/TSii'vdici lefe dtépc>sÎtil>hsrifèM'
latives à la cause :
'
.¡¡ioc^h ;jo î oUiiî
•
2H ij-ioc; K- <Î,:jdDOD j'J ain^i
D éclaration de ï ‘7 40.'' *•? '40i'
>>•'''! " ■
•
I • •
" { r i-n !
*!il ':!iB
,
:;r
ÀTVrrCLii t er.— Voulons^qu’il n^püis'së’ eti-lî f^ t^ W u ii
nouvel établissement 'dè1 chapitres,!I'dollé^és, séiWiïàire^^
maisons ou communautés religieuses',1tttôineloité prétexte
d’hospices-, congrégations, confréries;, hôpitauk du dutroi
corps, et communautés, soit ecdësiastiqü esséculière^
ôu régulières, soit laïquës, de quelque Qualité'qu’elles
soient ; ni pareillement aucÜrfe rioùVelle ci*éatiônJdé fchaJ
pelles, si ce n’est 'en vertu' de notre' pèrmtesioncSiiires^e^
portée par nos lettres1pâttinltfes*,^À&gistr^es- en nos jjar‘4
lemens ou conseils supérieurs.
A
rt.
■
’
2. — Défendons de faire à l’avenir aucune dispo
sition par •aCfé dë'dfekricfrc vo lü M é ^ 'Ô ifi’ fôiidér'i’m nou
vel étitblïsséiliënt dè' la ‘qtia li té ' ’de11cfctlx‘ ^in«'sont '1îhéiiï
tioriné^ daris^l’urticle'précéclenty^peiii'ti'dè hullfte^cjüiûid'
D ’
�. .( 2 6 )
même la disposition seroit faite à la charge d’obtenir nos
lettres patentes.
i '
.
A r t . 3. — N ’entendons comprendre dans les deux ar
ticles, précédons les fondations particulières , qui ne tendroient à l ’établissement d’aucun nouveau corps, collège
ou communauté,, ou à l’érection d’un nouveau titre de
bénéfice , et quL.n’auroient pour objet que la célébration
de messes ou obi^s yla
subsistance d'étudians pu de pauvres
ecclésiastiques oji séculiers, etc., ou autres œuvres pieuses
de même.nqturç, et également utiles au public; à l’égard
desquelles; £qnda|ion^;ljie ^era p o in t nécessaire d’obtenir
nos ¿lettres. pateaies;^
sni tir a de. laire homologuer les
actes ou dispositions qui les contiendront^ en n o sp arle mens et conseils supérieurs ^ sur les conclusions ou réqui
sitions de nos procureurs, généraux. Voulons qu’il soit en
même temps pourvu par nosdits parlemens à Padministrftt^n des.hijwi^.dç^tiu^s «d’exécution. desditjssibndatipns,,
et, jijUX comptes.qui qn seront l’cndus*.
0, A
r t ^ 9-
;
.
,
:— Annulions, tous les actes ou dispositions qui
pourraient avo^r ét^ faits directement o u indirectement
en faveur des. établissemens mentionnés en l’article xcr.
A r t . 29..— ,Toiitesl^s ^ci^andes ibrruçesenexécution du
preseiit édit.seront portqps directement en la grand’cliam 1ire ¡du pqrlçmcnt, çjt ce pçjy^i.vement
poijr
y
à tous autres jugesr
t*tpc.statu^jsux* lc^ cotypiijsjoiis.de notre px-ocureur
■V . ’i1 :
■or . 1
(
au un •iifiyvi 'l v - i 1ni * !» ¿hnï ' I'
(]pc^ ra ^ o n ,, A * : » wfTi jusqu’^ nos
pftiir.faire^vfil^ir.Je^fondations.'dwtinC’es,ù l^.s.ubfiistance
(Je? p^uvï9a,;içl’^btq^i^ l^iojxxalcigatjon du parlexnent, q u i
�( *1 )
ïcmplaçoît le prince dans cette fonction, et qui étoifc
Chargé' de nommer des administrateurs aux legs qu’il
approuveroit.
Depuis que l’empereur a pris les rênes de l’é ta t, lô
droit public a changé relativement aux fondations. Ce
ne sont plus les cours d’appel qui les autorisent. L e gou
vernement s'est réservé ce soin ; et 11 a nommé à jamais,
pour les administrer, les bureaux de bienfaisance et les
administrateurs des hôpitaux. Cette prérogative du chef
de l’état lui demeure attribuée pour toujours par l’article
910 du Code c iv il, portant : « Que les dispositions au
« profit des hospices, des pauvres d’ une commune, ou
« des
établissemens d’utilité publique , n’auront leur
« effet qu’autant qu’elles seront autorisées par un arrêté
^
du gouvernement.
, re
p r o p o s itio n
E n cet état de choses, il s’agit d’examiner s’ il a été
.
,
.
In c o m p e -
permis à un tribunal inférieur de s’ériger en réformateur
tence despre-
d ’un arrêté du gouvernement, et de déclarer les pauvres
pLurpronon-
d’Aurillac incapables
de recevoir un don dont le D
gouver- cer
?"r ,la
1
c a p a r i i e des
nement les avoit jugés capables de profiter.
pauvres.
Jamais le tribunal de Saint-Flour n’a pu s’arroger
ce droit. Ce n’est point à ceux qui tiennent la balance
de la justice,
h
diriger le gouvernail de l’état. L e chef
de l’empire prononce seul sur l’existence et la capacité
des corps qui font partie de son empire. Ses actes su
prêmes 11e sauroient être ni suspendus, ni réformés, ni
a un 11liés par les autorités secondaires. L e droit public
est aujourd’hui l’arche sacrée que les cours elles-mêmes
ne peuvent toucher ; et des magistrats inférieurs ont bien
D a
�(
)
osé y porter atteinte, en déclarant nul un legs ap p ro u v é ,
autorisé p arle gouvernement, sous prétexte que le gou
vernement n’a pas autorisé, approuvé le corps auquel
il a été laissé, et par conséquent le legs lui-même !
E h quoi! le gouvernement aura reconnu la capacité
des pauvres d’Aurillac pour accepter des libéralités en
1 7 8 5 , par l’entremise des Dames d e là miséi’icorde; et
un tribunal de première instance déclarera les pauvres
non - recevables dans leur dem ande, précisément par
défaut de capacité! Cependant le gouvernement est l ’uni
que juge de cette capacité : le gouvei’nement seul peut
donner ou r e fu s e r aux p a u v r e s les qualités nécessaires
pour recevoir comme pour demander. Ainsi c’est en vain
que le ministre de l’intérieur, que le conseil d’état, que
l’empereur lui-m êm e, ont jugé que les pauvres avoient
été l’objet, et les Dames de la miséricorde les ministres
de la bienfaisance de madame de Galieu
\
c’est en vain
que l’empereur, voyant que de pieuses dames avoient
été remplacées par des hommes charitables, leur a or
donné d’accepter et de recueillir les dons de madame de
Galieu au nom des pauvres ! en vain il a réglé l’emploi
du bienfait, conformément aux v œ u x de la bienfaitrice!
inutilement il a voulu qu’une partie du legs fût appliquée
à l’instruction de la jeunesse; une*autre consacrée au
s o u l a g e m e n t des ecclésiastiques indigens ; une autre des
tinée à s e c o u r i r , dans leurs humbles demeures, les pau
vres de toutes les classes! Ce règlement d’administration
publique a été pesé dans la balance des juges de,SaintFlou r ; e t, trouvé trop léger, il s’évanouira comme un
songe, devant l'intérêt personnel de l’héritier de madame
�44&
(
29
)
de G alieu. N ou s avons d ro it de m ieu x augurer de la
sagesse des magistrats suprêm es : c’est à eux qu’ il est
réservé de ven ger l ’ordre p u b lic d’un tel scandale.
I l seroit superflu de p réten d re que l’arrêté du g o u
vernem ent est contraire au x deux prem iers articles de
l’édit de 1 7 4 9 , puisqu’il autorise le bureau de bienfai
sance à a ccep ter, au nom des p a u vre s, un legs qui n’a
pas été laissé aux p a u v re s, mais à l’Œ u v re de la m iséri
c o r d e , com m unauté non a p p ro u v é e , nulle p ar consé
quent , et au nom de laquelle le bureau ne peu t rien
dem ander. Il est certain d’abord que l ’arrêté n’est p oin t
contraire à l’article 1 e1' . , mais bien conform e à l’article 3
de l’édit de 1749. Cet article autorise les legs laissés au x
p auvres, à condition q u ’ils seront hom ologués. L e g o u v e r
nem ent approuve et h om ologue le legs fait par m adam e
.de G a lie u , parce qu’il le considère com m e fait au x pau-r
vres seu ls, par l’entremise des D am es de la m iséricorde.
11 ne faut que relire le texte de l’a rrêté , p ou r se con
vain cre de cette vé rité. M ais en fin , et quand on suppose
ra it que le gouvernem ent a d éro g é à l’ édit de 1 7 4 9 , il
n’appartient p a s , encore une f o is , aux autorités judi
ciaires d’annuller les actes ém anés du p o u v o ir suprêm e.
S i l’arrêté a été su rpris, que l’h éritier de M cle. de G alieu
se p o u rvo ie au conseil d’état p o u r le faire réform er.
U n e objection plus so lid e , en a p p a re n ce, sera de sou
tenir qu en vain le g o u v e rn e m e n t, par l’article 5 de son
arrêté , auroit ren voyé aux tribunaux la connoissance
des contestations qui p ou rroien t s’ élever au sujet de la
délivrance du legs fait par madame de G alieu , s’ il n’étoit
pas perm is aux juges de s’ écarter de l’avrêté. Il est vrai
�C 3o )
que l’ un des articles porte : « Q u ’en cas de contestation,
« ou de refus de la part de l’héritier, le bureau de bien« faisance poursuivra la délivrance du legs devant les
« tribunaux. » O n convient que l’autorité judiciaire est
chargée d’ordonner le payement du legs, en cas que l’hé
ritier s’y refuse, ou qu’il élève des difficultés mal fon
dées. C ’est une formule répétée dans tous les arrêtés sem
blables , dont sont remplies les archives des lois. Mais
l ’héritier ne peut contester, les juges ne peuvent exa
miner,
que ce qui a rapport au droit c iv il;
savoir,
la validité du testament, la capacité de disposer de la
testatrice , la quotité du legs , p a r e x e m p l e . T o u t ce qui
est de droit public est au-dessus de leur atteinte. L a capa
cité des pauvres, pour recevoir comme pour demander ,
fait partie de ce même droit p u b lic; et le gouvernement
seul s’est réservé d’en décider. Cependant c’est précisé
ment par défaut de capacité que les premiers juges ont
déclaré les pauvres d’Aui'illac non-recevables dans leur
demande. C ’est trop abuser sans doute de l’ambiguité
apparente des clauses de Farrêté. Comment supposer le
gouvernement assez contraire ù lui-même dans les arrêtés
qu’ il Vend chaque jour au p r o f i t d es pauvres, pour per
mettre aux tribunaux de prononcer sur la capacité des
demandeurs, lorsqu’il a reconnu cette capacité par Pacte
même qui saisit les juges? Comment concevoir le sens
de l’article 910 du Code civil, qui veut que les disposi
tions en faveur des pauvres n’aient d’eflet qu’autant qu’ils
fuiront été autorisés à recevoir et
h demander
par le gou
vernement, si les juges peuvent, après l'arrêté rendu,
déclarer que les légataires n’ont pas de qualité pour
demander.
�4
i*
( 31 )
Il est inutile d’employer d’autres raisons à réfuter une
objection qui n’est que spécieuse; et l’on croit avoir suf
fisamment prouvé que les premiers juges ont excédé leur
compétence
7
en déclarant les pauvres d’Aurillac non-
recevables dans leur demande , par défaut de capacité. Si
cependant on pouvoit penser encore que le tribunal de
Saint-Flour a eu le d r o it , malgré l ’arrêté du gouverne
m ent, de prononcer sur la capacité des demandeurs, il
sera facile d’établir que ce tribunal a ,, dans tous les cas,
porté atteinte au droit p u b lic , en déclarant les pauvres
d’Aurillac non-recevables à demander un legs qui leur
avoit été fait en i y 8 5 , et que l’arrêté du gouvernement,
tenant lieu d’homologation, a rendu valable.
O n l’a déjà prouvé : les legs faits aux pauvres sont les
plus favorables de tous. L ’article 3 de l’édit de 1749 ren-fe rm e
a
p r o p o s itio n
Le
leg s
.
a
à ce sujet des dispositions précises, que voici : « Les
fondations faites pour la subsistance de pauvres étn- riiiac, et l’arf •
r
•
« tliansr ecclésiastiques ou séculiers y seront valables ,
à
la
rèté du gouvemement ,
« charge de faire homologuer par le parlement les actes d-homologa^
« qui les contiendront. » L e parlement est chargé, par
le môme article,, de n-ommer des administrateurs aux.fon
dations qu’ il approuvera.
L e legs fait par madame de Galieu, s’il a été laissé aux
pauvres,, et non à l’œuvre de la miséricorde, comme le
prétendent les premiers juges, devoit d o n c , pour devenir
valable, être homologué par le parlement.
La révolution n’a point permis aux tuteurs des pauvres
de remplir cette formalité : mais le gouvernement actuel
y
a suppléé
\
et on a fait voir que son arrêté tenoit e n -
renJi
�( 32 )
tièrement lieu d’homologation. L ’évidence de cette vérité
inippe d’ailleurs tous les yeux. Il ne s’agit que de prouver
que le legs fait par madame de Galieu a été laissé nom
mément non moins qu’uuiquementaux pauvres d’Aurillac.
Mais cela meme devient évident par les circonstances
qui ont précédé le legs, par les termes du legfe lui-même'.
L ’abbé de Cabridens, homme d’une bienfaisance éclairée
par la religio n , se voit riche au delà de ses espérances,
et par son patrimoine, et par le don de la terre de Grialou
que lui a fait sa sœur : il n’a que des parens éloignés ; il
veut faire d’utiles aumônes; il jette les yeux autour de
lui, et voit les pauvres d’Aùrillac dénués de tout secoursJ
et même du bienfait inestimable de la première instruc
tion. Il commence par donner, en 1 7 7 7 , une rente de
6 5o
et une somme de 10000
pour l’instruction de la
jeunesse. E t qui n o m m e - t - i l pour diriger cette bonne
œ uvre? les Frères de la doctrine chrétienne.
Résolu de verser d’autres bienfaits encore sur les pauvres
de la ville qui l’a vu naître, il ne veut pas charger ses
derniers jours des pénibles soins de vendre ses propriétés;
il ne veut pas dépouiller une sœur qui lui est chère : c’est
h
elle qu’il confie, a v a n t de m o u r i r , l’exécution de ses
pieux desseins. Etoit-ce en effet les Dames de l’œuvre de
la miséricorde qu’un homme aussi bienfaisant avoit en
v u e , ou les indigens qu’elles soulageoient? Cet ecclésias-*
tique éclairé, q u i, dans l’acte de 1 7 7 7 , prévoit que les
Frères de l’école chrétienne pourroient être supprimés,
et donne en ce cas la rente de
65 o 1t~ à
la ville, pour
l ’instruclion de la jeunesse, 11e fondoit-il que sur le pré
tendu corps appelé l’Œ u vvc de la miséricorde, et non
pas
�4 ‘f r ,
( 33' )
p ns sur les pauvres, objet des secours depl’jCEuvrc-?' N e
l'entend-on pas parler par la bouche de sa sœur,, partager,
distinguer les indigens en ti*ois classes, pauvres à instruire,
pauvres ecclésiastiques, pauvres honteux? Ecclésiastique,
il témoigne une prédilection spéciale aux ecclésiastiques
indigens; bienfaiteur éclairé, ilseeourt, par préférencè,
. l ’iniortune qui rougit de solliciter des secours.
1! ;
N o n , jamais les magistrats ne croiront que l’abbé de
Cabridens ait eu de pieux desseins en faveur des Dames
delà miséricorde, et non en faveur dé ces pauvres qu’elles
.avoient choisis pour l’objet de leurs soins : cependant
madame de G ’alieu ne fait , ditrelle,
desseins de sonfrère.
qvi èxécilier les pieux
Si donc l’abbé de Cabridens n’avoit
en vue que les pauvres, si madame de Galieu n’a fait
qu’exécuter ses charitables volontés, ce n’est qu’aux pau
vres qu’elle a pu , qu’elle a dû léguer, qu’elle a lé g u é , et
à trois classés de pauvres distinctes et clairement désignées :
• aussi dit-elle qu’elle lègue
aux pauvres^ V o ic i
les expres
sions dont elle s’est servie : a E t pour exécuter les pieux
a desseins qui m’ont été communiqués par l’abbé de
« Cabridens , mon f r è r e , avant sa m o r t , je lègue
«
pauvres de TŒuvre de la miséricorde
a ux
d’ Aurilluc, la-
« quelle Œ u v re est administrée, etc........ la somme de
«
80 0 0 0 tf*, dont une partie sera employée
h l ’ in s t r u c t i o n
« de la jeunesse, une autre au soulagement des pauvres
« ecclésiastiques, le reste enfin à s e c o u r i r les autres pau« vres que l’Œ u v re a coutume d’assistcf. » :
^
Vj
Les circonstances qui ont précédé le;legs s’accordent
donc avec les termes dans lesquels /il
jconçu , . pjoyr
montrer qu’il a clé fait aux pauvres, pf. k.lypisrcksses de
�(. 34, )
' pauvres, et que par conséquent les Dames ¿6 l’œuvre
<
. n’étôient-chargées que d’en toucherde capital, de le placer
en contrats de rente, et d’en distribuer le revenu ; le tout
, de l ’agrément du parlement.
•
»Tous les esprits ne sont pas également frappés de la
. justesse d’une preuve qui n’est formée que par une réunion
de circonstances et d’inductions tirées de ces circonstances.
- Appelons ;le raisonnement au secours des faits , et que
toutes les armes de la parole fassent triompher la vérité.
Si le legs étoit laissé aux pauvres d’A u r illa c , sans autre
explication ,; personne'ne douteroit qu’il ne fût valable.
’ T o u te la difficulté vient donc de ce qü’il est laissé aux
j pauvres de l’Œ n vre de la miséricorde, d’où l’on prétend
3 induire qu’il est fait à l’Œ u vre elle-même. E h b ien , qu’on
-•admette l’hypothèse où il seroit fait simplement aux pau!'vres d’Aurillac i que seroit-il arrivé?.
>
Il étoit nécessaire que le parlement homologuât le tes‘ tament. Q ui aurait demandé l’homologation? L ’exécuteur
testamentaii’e, dira-t-on, l’auroit d em an d ée.. . Soit; mais
qui nuroit reçu les fonds, qui les auroit administrés? Les
administrateurs choisis par le parlement; car l’édit de 1749
~ le charge d’en nommer. E h bien ! s’il eût plu au parlef'ment de choisir les Dames de la miséricorde, pour dis
t r i b u e r léil fonds, et leur supérieure pour les recevoir,
; n ’étoit-il pas le maître? E t quel choix plus sage auroit pu
*''‘faire Tn 11tort lé'publique? C ’étoit doubler le prix du bien
fait q u e d’en corificr la distribution à de si pures mains ;
3 ¿’étoit cofnmetti’é la vertu modeste, la piété éclairée, la
1 élviritô vigilante; à l’exécution des derniers vœux de la
' VCrtii, d<} îtf *piété; de la charité.
�C 3* )
Objectcra-t-on que le parlement nVuroit pas nommé
les Dames de la miséricorde? P ou rqu oi? parce qu’elles,
formoient un corps illicite. Il faudroit d’abord prouver
qu'elles formoient un corps. Mais ensuite, et toujours en,
supposant que le legs eut été fait simplement aux pauvres
d’Aurillac, l’autorité publique ne reconnoît pour corps,
dans l’état, que ceux que sa volonté a créés. L e parlement ,
n’auroit donc point jugé illicite un corps qu’il n’auroit
pas même reconnu pour corps. Informé par le substitut
du procureur général, auprès du bailliage d’Aurillac, des
bienfaits et du zèle des Dames de la miséricorde, le par
lement les auroit sans doute, commises à la distribution du
don de madame de Galieu. Peut-être même il auroit or
donné que les fonds seroient versés entre les mains de ces
dames; peut-être aussi il auroit exigé alors que les éclievins veillassent à l’emploi des sommes en contrats de rente,
suivant l’intention de la testatrice , et que les contrats
fussent passés en leur nom : précaution sa g e , parce que
les Dames de la miséricorde n’étoient qu’une association
passagère, et parce que la ville et son corps municipal
devoient toujours durer.
Ici triomphe la justice de la cause des pauvres; la vérité
paroit ici dans tout son jour. Ce que le pai’leinent auroit
fait, auroit pu faire, la testatrice l’a pu faire : elle l’a fait.
L e parlement auroit pu choisir , pour administrer les
fonds laissés par madame de Galieu, les Dames de la mi
séricorde; madame de Galieu les a choisies, elle a pré
venu le choix de l’autorité : elle l’a-indiqué,du moi^s,
car les fondations, on le répète, sont de droit publip, ^
l’autorité publique peut changer- les administr,aleurs nomE
2
�( 3* >
niés par le fondateur, comme elle peut confirmer son
choix.' Il falloit bien que le legs fût reçu au nom des
pauvres, fût placé au profit des pauvres, fût distribué à'
ces mêmes pauvres. I,a testatrice a chargé les Dames de
la miséricorde de tous ces soins, toujours sous la conditioh que l’autorité publique ratificroit ses volontés par
ticulières.
Q ue les premiers juges viennent dire maintenant que
l’Œ u v re de la miséricorde étoitun corps, et un corps non
approuvé ; qu’ils tirent des termes mêmes dans lesquels est
Conçu le legs, la preuve que la testatrice rogardoit l’Œ u v re
de la miséricorde comme une com munauté, comme un
Corps existant dans l’état, et qui devoit toujours exister.
Cela n’est pas constant : mais enfin qu’importe l’opinion
qu’avoit la bienfaitrice de ceux qu’elle chargeoitde la dis
tribution de son bienfait, si elle ne les regardoit en effet
que comme des administrateurs, comme on vient de le
prouver ?
L ’Œ u v re môme, fût-elle un corps ( c e qu’on n i e ) , ce
corps ne f û t- il pas approuvé, quelle loi empêchoit la
testatrice de préposer un tel corps
h
la distribution de
son bienfait, toujours sous la condition que le parlement
npprouveroit ce c h o ix ?
• L ’édit de 1749 v e u t - i l que les dispositions faites aux
pauvres soient annullées, lorsque la distribution en a été
confiée à des personnes incapables, ou
à
des corps non
approuvés? N on : l’article 3 de l’édit confirme toutes les
f o n d a t i o n s en faveur des pauvres, à la charge de les faire
homologuer : mais i l ‘ ne dit pas que si l'administration a
e t c ‘laissée à des inains incapables, les fondations seront
�4A-
(3 7 )
annullées; il ordonne, seulement au parlement 'de nom-»
mer des administrateurs à la fondation.. N ’est-ce pas dans
le cas où ceux qui auront été nommés seront indignes ou
incapables de cette honorable fonction ? Peut-on expli
quer autrement cette dernière disposition de l’éd it, et
seroit-elle applicable, si les administrateurs choisis étoient
des personnes dignes de toutè la confiance publique, ou
des corps légalement établis ,f tels1que des1 hôpitaux ou1
des fabriques?
: •' i
• *>-
< C ’est en vain que l ’on s’aveugle sur la justesse(dc cette
conséquence, et que l’on soutient q u e , s’il en étoit ainsi *
rien ne seroit plus facile que d’éluder la prohibition de
l’éditj ejn>léguant indirectement à desiCorps illicites, qu’on
nommeroit simples administrateurs en apparence/Erreur
évidente! L e corps, ou la personne à qui le legs seroit
laissé, ne's’opposeroit-il pas à l’avidité du corps chargé
de l’administration.? L e parlement ne d om in erait-il pas
d’autresiadministîâfeuts? E h quoi! madame Gàlieu choisit)
trois classes depativres pour ses ¡légataires ; elle: rend son
testament public, notoire dans la ville entière d’Aurillacy
par l’ordre de vendre tous ses biens d’A u v e r g n e ; elle or
donne de placer le capital de son legs \ pour n’en distribuer*
que les revenus; et l’on osera dire(que l’Œ u v re de la misé
ricorde, que ce corps chimérique tjùi n’existe que dans
l’imagination du sietir Capelle et des premîers juges, auroit
pu s’enrichir des dépouilles des pauvres, et détourner &'
son profit la source dest charités: d ’uné. femme vertueuse!
C c s t trop abuser db L’obscurité qu’oû. ¡voudrait répandre'
sur la cause la plus claire, .-.. ir ...
•; :V;
1 ;
, N e laissons pas môme à l’erreur le dernier retranche-^
�( 38 )
ment qii’elle élève contre la vérité. L ’Œ u vre de la misé
ricorde , ce corps illicite! fcette communauté illégale! qui
avoit une supérieure! une assistante! un receveur! un
titre particulier (disent les premiers juges)! n’étoit point
un corps, n’étoit point une communauté; c’étoient quel
ques daines vortueuses rassemblées pour faire le bien. Les
communautés'ne meurent jamais. Ce sont des personnes
dans l ’état. Elles ont leurs biens, leurs statuts, leurs'ehefs.
Les dames de la miséricorde étoient des femmes du monde^
mariées, veu ves,' célibataires, qui ne faisoient pas de
v œ u x , q u i n ’avxnentpas de biens. Elles s’étoient chargées
Seulem ent der distribuer ceux qu’on donucroit aux pauvres.
Q u i a apprit aux.premiers juges qu’elles avoiçnt un titre
p,i rticulier^inine assistante, tiné supérieureiu n receveur ?
Les Dames 'de la miséricorde n’avoient pas de titre par
D am es de Vœuvre
d?autres villes Uamc's
ticulier. O n les nommoit & Aurillac
de, là. miséricor.lc / comme dans
de là charité. C e mot d 'œuvre ne
désigné point tin corps
nouveau) : i l signifie itraVail, et indique les modestes fonc-i
^ions des femmes pierïses qui s’étoient dévoilées au service
des pauvres. Les Dames de la miséricorde n’avoient pa^
d7«ssistîinte. I;eu r prétendu r ec e v eu r, c?étoit l’une d’ellesy
choisio;:entre les autres pour recueillir les dons des poiv
üpnnés généreuses.* lElles n’avoient pas de chefs. Madame
die Foutanges; il est v r a i , est appelée par m.-idame de
(Jalieu leur supérieure; mais c’est un titre imaginé par
la; testatrice-y.Qujubiqueiment inVenté' pour désigner celle
que
égaïeïià voiciil) cluirgée de présider leurs assemblées'
en l'absence du curé d’Aurillac. Ltiiduré Id’AuriUuc, qui
CtoH.leui’) y m l a b l c chefp dcvoit assister/ cçmrne oii vient
�C 39 )
de le dire, à toutes leurs réunions,'et on en rapporteroît
la p r e u v e , s’il le falloit. Ces dames s’étoient réunies naguère:
leur société se seroit rompue à la mort des plus zélées,
comme toutes les sociétés. E lle est rompue en effet aujour
d’hui , quoique plusieurs des associées vivent encore, et
entr’autres la plus illustre.
!
i
M ais, à quoi bon tant de détails pour apprendre ce qu’à
S a in t-F lo u r seulement ,on ignore , ,ce que chacun sait à.
Aurillac comme ù Clermont, comme dans la ville où on
écrit ce mémoire. Cette ville aussi avoit ses Dames de la
charité. Furent-elles'jamais considérées, co m m cu n e com
munauté ?
•-
«: i , i
•,( a v }
, • v»
C ’en est assez sans doute pour montrer qiie le legs fait
par madame de Galieu n’a été laissé qu’aux pauvres, et
non pointa un corps imaginaii*c. Il est donc valable, puis
que l’an’êté du gouvernement supplée à. l’homologation ;
et les premiers juges ont porté, atteinte a,u.di'oit public,
en déclarant les pauvres d’Aur,illac non recevables à de
mander un legs qui leur a été laissé nommément non
moins que directement, un legs que le gouvernement a
autorisé. D ’ailleurs^ lp gouvernement avoit déjà ¡reconnu
lu capacité des pauvres'pour recevoir et pour^emnrtdeV):
il n’appartenait plus au tribijnal; de. ¡Saint^-.Flaur d’en
décider. Ce tribunal a donc î\ la fois excédé sa compétence
et mal jugé nu fond. Son .jugement doit donc être infirmé
sous ces deux rapports.
., I(
•
f:
d e u x i è m e ' P a r ï i e. - 1
i
*f
i
'l
• .1 ' .
c;. :
y /•: >r
S
Moyens
L ’héritier de madame de G a lie u , plus instruit qvje siiliairi's
poses par
personne de la foiblesse de sa cause, après que la validité ritier.
�C40)
du legs .qû’ il prétend nul a été démontrée, soutiendra',
:comme il l’a fait devant les premiers juges, que du moiiis
de legs a fait retour , si l’on peut ainsi s’exprimer, à la
v
succession dont il étoit séparé, et il se fera une dernière
-ressource de la condition de retour écrite dans le testa
ment de sa bienfaitrice,
J' : ) • •
r
’ ■• !
i°.Pr^(pn(îu-
•
r
! |
1;
,
L a voici : « E t dans le cas, d i t - e l l e , où l’Œ u v r e de
¿''la""succès- c< la miséricorde viendroit, par la suite des temps, à être
¿ion
« réunie à l’hôpital général d’A u rilla c , ou à tout autre
« hôpital, je veux et entends qu’en ce cas le legs de
« 80000 tf", que je fais ù ladite Œ u v r e , fasse retour à mon
ce héritier. »
Que peut-on espérer d’une clause aussi extraordinaire,
qui est contraire au droit du pouvoir suprêm e, et qui
'fait dépendre le retour du legs d’un événement qui 11’est
-pas encore arrivé, et n’arrivera vraisemblablement ja
mais? Cependant le sieur Capelle a fait de ce moyen un
‘des principaux motifs de ses refus. Foible , impuissant
'auxiliaire, qui ne défendra point une cause privée de
scs appuis les plus solides depuis que la validité du legs
est démontrée! Inutile et dernière ressource, qui ne
résistera point à la force du droit public et de la vérité!
f‘
Dans les jnatières qui appartiennent au droit p u b l i c ,
il faut se garder de cette o p iu io u , trop générale, que
l’intention du testateur est la suprême loi; qu’ il peut
resserrer les siècles dans le cercle de sa v o lo n té , et donner
des chaînes aux générations qui n’ont pas encore reçu
-1; > *-r. iliîi
o.
■1 * H)’jour. Il faut'mettre de sages restrictions à ce raisonne..¿jî
frient dosâmes généreuses, que le bienfaiteur est libre d’imposer
�( 4* )
'
poser des conditions à des bienfaits librement accordés.
Ce raisonnement peut être fo n d é , lorsqu’il s’agit, dans
le droit civ il, de savoir si un légataire a droit à un legs
qui ne lui a été fait qu’à de certaines conditions : c’est
alors la volonté du testateur qu’il faut considérer. Mais
les fondations sont de droit p u b l i ç , comme l’héritier
dé madame de Galieu en convient sans doute ; et les
vrais principes du droit public sont que le bienfaiteur
peut ne point d on n er, mais qu’il n’est pas toujours libre
de reprendre. Il est le maître de ses biens ; mais ils appartenoient avant lui à la société, et ses dons ne sont en
effet qu’une dette. L e
bien public est son b u t ; mais
c’est à l’autorité publique à le remplir de la manière la
plus utile à l’é ta t, la plus convenable aux circonstances.
O n trouve le développement de ces principes dans les
préliminaires de l’ouvrage nommé par l’illustre Grotius
le D roit de la guerre et de la p a i x , et dans la première
partie du D roit p u b lic, de M . Domat.
C ’est ainsi que des sommes, destinées par le fondateur
à élever une église, ont été employées par le prince à
doter un hôpital ; c’est ainsi que divers arrêts ont changé
les administrateurs nommés par un testateur à la fonda
tion , et que le gouvernement actuel a chargé le bureau
de bienfaisance d’ Aurillac de distribuer aux pauvres les
dons de madame de Galieu, qui avoit confié ce soin aux.
Dames de la miséricorde.
Toutes les clauses par lesquelles un fondateur met des .
entraves aux droits de l’autorité publique sur sa fondation,
sont donc regardéescomme non-écrites ; c’est une maxime
de la jurisprudence romaine, comme de la nôtre. T elle est
F
�( 4* )
la condition mise par madame de Galieu à son bienfait.
O n diroit qu’elle-m êm e en a reconnu le vice ; elle l’a
placée ou plutôt cachée à la fin de son testament, comme
une idée étrangère à son cœur, et qui ne lui avoit pas été
inspirée au moment où elle commençoit son testament
par laisser 80000
aux pauvres.
M adame de Galieu vouloit bien soulager les pauvres : mais
elle vouloit que les Dames de la miséricorde fassent les
seuls ministres de sa bienfaisance; elle leur attribuoit ex
clusivement le droit de distribuer ses dons. C ’est, dirat-on , parce qu’elle les destinoit uniquement aux pauvres
que l’Œ u v re soulageoit, c’est-à-dire, aux pauvres honteux,
aux pauvres qui n’alloient point à l’hôpital. Si cependant
le parlement avoit jugé qu’il seroit plus utile à la ville
d ’augmenter les fonds de l’hôpital général que d’employer
les dons de madame de Galieu en secours à domicile, s’il
n’eût voulu homologuer le legs qu’à cette condition, peuton douter que la ville tout entière n’eût réclamé contre
la clause de retour stipulée par la testatrice? L e parlement
sans doute n’y auroit eu aucun égard : il eût usé du droit
que lui attribuoit l’édit de 1749, de nommer des admi
nistrateurs aux fondations soumises à l’homologation, et
il auroit attribué aux administrateurs de l’hôpital celle de
madame de G a lieu , s’il avoit jugé plus utile d’en faire
cet usage.
E n fin , un moyen victorieux contre la prétendue clause
de retour invoquée par l ’héritier, c’est l’arrêté du gouver
nement qui prononce tacitement qu’elle est comme nonécrite. Quand on supposeroit même que l’événement
prévu par la
testatrice est arrivé, ce qui est fa u x , le chef
�4^/
( 43)
de l’état, usant de son autorité suprême, a déclaré que
la réunion du legs à la succession ne s’est point opérée ;
il a reconnu la capacité des légataires; il a nommé de
nouveaux administrateurs aux dons de madame de Galieu.
L ’autorité judiciaire n’a point le droit de réformer cet
acte, émané de la première des autorités.
Mais la clause de retour, non-seulement est contraire
au droit public, non-seulement est annullée par l ’arrêté
du gouvernement, elle est encore illusoire autant qu’inu
tile. L ’événement qu’elle prévoit n’arrivera jamais, sui
vant toute apparence; du moins il n’est point encore
ari’i v é , comme il est facile de le démontrer.
Est-ce le prétendu corps appelé l ’Œ u v re de la miséri
corde qui a été réuni à un hôpital? cela est impossible.
O n a prouvé que ce corps n’existoit point. L a testatrice,
d i r a - t - o n , pensoit qu’il existoit, car elle suppose que
l ’Œ u vre de la miséricorde pourroit être réunie à un hô
pital. Cette objection rentre dans la proposition déjà
réfutée, que les Dames de la miséricorde formoient une
communauté. Ce n’est pas la le ttr e , c’est l’esprit de la
clause qu’il faut chercher. L a testatrice a voulu prévoir
le cas où les biens destinés à être distribués aux pauvres
par les Dames de la miséricorde seroient réunis à ceux
de l’hôpital général d’Aurillac ou de tout autre hôpital;
elle ne vouloit pas que ses bienfaits, consacrés à soulager
l ’indigence laborieuse, servissent à nourrir l’oisiveté et la
paresse dans un hôpital, comme il ai’rive quelquefois. Ses
cx-aintes ne se sont pas réalisées, ses desseins n’ont pas été
trompés; aucune loi de la révolution n’a confondu les
biens destinés aux secours à dom icile, avec ceux que la
F a
�( 44 )
générosité publique offre à tous les pauvres indistincte
ment dans les hôpitaux : ces biens ont toujours été dis
tincts, comme lies administrateui’s qui les régissoient. Je
le prouve.
L a première loi rendue au sujet des établissemens de
bienfaisance, c’est celle du 18 août 1792 , qui supprime
toutes les associations, confréries et congi'égations de piété
ou de ch a rité , et qui ordonne que leurs biens seront
administrés et vendus comme les autres domaines natio
naux. D ès ce jour plus de secours à dom icile, mais point
de réunion des biens des pauvres qui les recevoient aux
biens des hôpitaux.
L a loi du 19 mars 1793 rétablit les secours à domicile:
elle ordonna qu’il seroit form é, dans chaque canton, une
agence chargée de la distribution du travail et des secours
aux pauvres; que ces secours seroient divisés en secours
pour les pauvres valides., et secours à domicile pour les
pauvres infirmes.
Enfin parut le fameux décret qui déclara propriété
nationale l’actif et le passif: des hôpitaux et des autres
établissemens de bienfaisance. L ’article 4 o r d o n n e à la
commission des secours publics de faire parvenir ( aux
administrateurs des hôpitaux ) les fonds nécessaires aux
besoin^, dq. ces établissqn^çps, pour leur dépense courante,
jusqu’à ce que la distribution des secours soit définitive
ment arrêtée;
Ainsi furent conservés, et les administrateurs des hô
pitaux , et les secours que tous les pauvres indistinctement
recevoient dans,ces établissemens, comme les secours à
domicile revoient été par, la loi du 19 mars 1793? cIui
�4*9
( 45 )
charge de leur, distribution les agences des cantons ; ainsi
n’ont jamais été confondus x ni les bjeijs.cles diverses classes
de pauvres, ni les administrateurs de ces biens.
Les choses sont demeurées en cet état jusqu’à la loi qui
maintient les hôpitaux dans ceux* de leurs biens qui n’ont
pas été vendus. Peu de temps après, et en 1 7 9 6 , fut
rendu.le décret qui crée des bureaux de bienfaisance,,
chargés spécialement dé la distribution des secours à do
micile. Ces bureaux remplacèrent les agences établies par
la loi du 19 mars 1793 ; et bientôt un décret leur rendit
les biens, des pauvres qui ftvoi,ent ^échappé à la vente
ordonnée par le décret du 18 août 1792. L e legs fait par
madame de Galieu est de ce nombre.
Ces détails o n t.p a ru nécessaii’es pour montrer que,
jamais les biens destinés aux secours à domicile n’ont, é,tér
réunis à ceux des h ô p ita u x , comme le prétend le sieur,
Capelle : il faut fermer les ye u x à l’évidence, pour sou
tenir une pareille opinion. Il est vi*ai que pendant quel
que temps les biens destinés au soulagement de toutes les
classes de pauvres ont été réunis, au domaine national,,
et confondus, si l’on v e u t , dans le même trésor, dans,
le trésor public : mais cette source commune se divisoit,,
pour ainsi d ir e , en de,ux ruisseaux dont le cours étoit
séparé. Bientôt les sources sont devenues distinctes comme
les ruisseaux; mais jamais celui quo devoit alimenter la,
bienfaisance de madame de Galieu n’a été tari.
C ’est donc inutilement que l ’héritier de madame de
Galieu prétendroit que le legs réclamé par les pauvres
afait retour à la succession. Ses raisons sont aussi foibles
�úfio
i'**!*
i
( 4« )
à cet égard que les prétextes qu’il allègue pour obtenir
la réduction de ce même legs.
U ne somme de 80000 ^
est exorbitante, s’éc rie -t-il,
relativement aux forces d’une succession que la révolu
tion a presque anéantie. L a suppression des cens lui a causé
des pertes immenses} incalculables. Il
est vrai: des rentes,
et en assez grand n o m b re, sont perdues pour lui ; mais
enfin l’héritier de madame Galieu ignore-t-il que la réduc
tion d’un legs ne peut plus être demandée quinze ans
après l’ouverture de la succession , et lorsqu’en acceptant
l ’hérédité sans condition , il s’est exposé aux disgrâces
comme aux faveurs- de la fortune ? Mais encore quelles
preuves, autres que ses plaintes, a-t-il donné jusqu’ici
de l’insuffisance de la succession ? O ù est l ’inventaire des
meubles ? O n sait qu’il existe : pourquoi ne pas le pro
duire ? O ù est celui des créances ? L ’état des immeubles,
les baux à ferm e, où sont-ils ? Quels contrats de rentes
établissent les
détrimens énormes
que la suppression des
cens lui a causés ? Il sera un moins riche héritier, il est
vrai; mais il sera riche encore: devoit-il l’étre, s’il n’a voit
été héritier? on en a p p e l l e à l u l - m ô m e . Il sera un moins
riche héritier : mais il vient de vendre les domaines de
Faillitou et de la Bartassière, plus de 80000
mais il
lui reste la terre de Clavières, qui vaut cette somme; mais
la terre de Grialou lui appartient; mais il possède des
vignes dans le Querci ; mais il ne compte que vingt-quatre
a n s , et depuis dix années la succession de madame de G a
lieu lui produit 10000
de revenus; Grâce à ces événe-
jncus qu'il accuse, il les reçoit, ces revenus, qui, suivant lo
�C 47 )
testament de sa bienfaitrice, nedevoient lui appartenir qu’à
sa majorité ; ces revenus qui jusqu’alors devoient être
employés à acquitter les dettes de l’amitié et de la religion;
ces revenus que grossit encore l ’intérêt produit par le ca
pital du legs que les pauvres attendent depuis quinze ans.
Que l’héritier de madame de Galieu se garde donc d’in
voquer des motifs de considération à l’appui de ses £oibles
droits ! Des motifs de considération en favètlirtîe^ ca*se l
il auroit mieux fait de garder le silggfife ; çe fl’est paVà^hri
de les réclamer. Ils se présentent en foule pour combattre
ses prétentions. L a morale, la religion, la pitié, l’intérêt
public, viennent au secours des pauvres. L a morale, invo
quant le respect dû aux derniers vœ ux d’une femme ver
tueuse , s’écrie que le legs qu’ils réclament est une dette
plutôt qu’un bienfait. L a religion, offrant à nos regards
le lit de mort de l’abbé de Cabridens, le montre dépo
sant dans le sein d’une sœur chérie ses volontés expia
toires ou bienfaisantes, et précédé dans le séjour céleste
par les prières reconnoissantes des pauvres , comme par
un doux encens. L a pitié attendrit les cœurs sur les souf
frances des indigens d’une ville entière, gémissans sans
secours depuis quinze années, n’espérant plus qu’en ce
le g s , dernière ressource qu’on veut leur ravir. L ’intérêt
public peint les malheurs des temps ; la misère, fille de
la guerre extérieure et des discordes intestines; les hô
pitaux dévastes, les établissemens de charité détruits : il
représente que ces jours ne sont plus, où il sembloit néces
saire de refroidir la bienfaisance : il repousse ces pré
jugés trop funestes et trop répandus, que c’est un abus
de
faire Faumône;
que semer les dons, c’est faire naître
�l
'
.
_
( 48 )
les pauvres, q u i, malgré ces idées
libérales
, sont plus
nombreux que jamais. E nfin, toutes les affections nobles
et généreuses appellent à protéger cette cause les hommes
vertueux, les hommes religieux, les hommes du monde,
les hommes d’état: leurs efforts, réunis à la force du droit
public et des lois, entraîneront la balance de la justice.
.J U L E S *
L
^A æa
A ux
J.
I
j
B.
M A L L E T ,
avoué.
E C O N S E IL S O U S S I G N É , qui a lu le m ém oire ci-d essu s,
Estime que les m oyens qui s’y trouvent développés sont con
form es aux principes du droit public , auquel appartient la cause.
Il est certain , d ’ abord, que l ’ârrété du gouvernem ent est une reconnoissance form elle de la capacité des pauvres d ’A u r illa c , et que
les juges de S ain t-F lo u r ont excédé leur com pétence en les décla
rant n o n -receva b les dans leur dem ande, précisém ent par défaut
de capacité. A u fo n d , les droits des dem andeurs ne sont pas m oins
évidens que l’erreur des premiers juges. L es circonstances et les
term es du legs dém ontrent assez q u 'il a été laissé aux pauvres, et
à trois classes de pauvres ; et que les D am es de la miséricorde
étoient seulem ent chargées d ’en faire la distribution. O n ne parle
pas des m otifs de religion et d ’intérêt public que les pauvres in
voquent à l’appui de leur demande. L a justice n’ a pas besoin dans
cette cause du secours de l ’équité ; et l’esprit n ’est pas m oins satis
fait que le cœ ur.
D é lib é ré à C le rm o n t, l e , 10 juin 1804.
B O I R O T , B E R G I E R , B E I L L E -B E R G I E R .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bureau de bienfaisance de la ville d'Aurillac. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jules
Mallet
Boirot
Bergier
Beille-Bergier
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les pauvres de la ville d'Aurillac, légataires d'une somme de 80000 francs. Mémoire pour les Pauvres d'Aurillac, représentés par le Bureau de bienfaisance de cette ville, appelant ; contre le Sieur Capelle, héritier de madame de Galieu.
Table Godemel : Legs : 4. un legs fait en 1785 aux pauvres de l’œuvre de la miséricorde, est-il fait aux pauvres ou à l’œuvre ? doit-il être classé dans les cas de prohibition prévus par les articles 1, 2, 9 et 10 de l’édit de 1749 ? est-il, au contraire, compris dans l’exception portée par l’article 3 de cet édit ?
La condition que ce legs ferait retour à l’héritier dans le cas de réunion de l’œuvre, soit à l’hôpital général, soit à tout autre hôpital, est-elle une preuve que le legs était fait à l’œuvre et non aux pauvres de l’œuvre ?
la réversion s’est-elle opérée dès le moment où le gouvernement a cumulé les revenus de toutes associations corporatives et administratives d’hospices ?
Legs considérable devant aller en partie à l’œuvre de la miséricorde à Aurillac. La Révolution survint et les biens des congrégations sont saisis. Le bureau de bienfaisance créé à Aurillac demande la délivrance du legs fait à l’œuvre de la miséricorde
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1785-1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1310
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1311
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53199/BCU_Factums_G1310.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
legs
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53200/BCU_Factums_G1311.pdf
1b40ecb078869d8abdfa6ec5c1addfa6
PDF Text
Text
MEMOIRE
D’APPEL
SEANTE
EN R É P O N S E ,
A RIOM.
POUR
P
- An t o i n e - U r b a i n C A P E L L E ,
propriétaire, habitant du lieu et commune de
Saint - C o n s ta n t , intim é;
i e r r e
CONTRE
Les
A
d m i n i s t r a t e u r s
d u
B
u r e a u
de
de la ville d’Aurillac, appelans d'un Jugement rendu au Tribunal d'arron
dissement de Saint-Flour , le 20 floréal an I I .
b i e n f a i s a n c e
L es administrateurs du bureau de bienfaisance de là
ville d’A u rillac réclament la délivrance d’un legs de
A
�( 2 )
80000 francs , fait par la dame Galieu aux Dames de
la miséricorde de cette ville. Ils seront lus avec intérêt,
lorsqu’ils feront valoir le sentiment.
L e pauvre a des droits incontestables sur l’abondance
du riche. L ’humanité , la religion nous font un devoir
de soulager nos semblables dans le malheur.
Mais la politique doit mettre des bornes à ces libéralités
indiscrètes qui dépouillent les familles et m ultiplient les
pauvres au lieu d’en diminuer le nombre.
N ’a-t-on pas remarqué qu’en faisant vivre gratuitement
un grand nombre d’hom m es, on soudoyoit l’oisiveté et
tous les désordi’cs qui l’accompagnent ? et lorsqu’on a
voulu exam iner l’utilité des fondations particulières,
par rapport au bien public , on n’a fait qu’en dém ontrer
les inconvéniens, comme l ’impossibilité d’en maintenir
l ’exécution.
C ’est à la société tout entière, c’est au gouvernem ent,
qu’il appartient de créer des établissemens durables pour
les besoins généraux de l’humanité.
L ’homme p r iv é , qui a la noble passion d’etre u tile,
et veut secourir les infortunés, doit dispenser ses bien
faits avec discernement. Il lui est interdit de verser ses
largesses sur des corporations illégales, qui ne peuvent
Être permanentes, dont les membres peuvent avoir des
vues louables, mais linissent presque toujours par dégé
nérer.
L e sieur Capelle applaudit à l’écrivain, lorsqu’ il rend
hommage aux vertus et h. la piété de ces dames respec
tables qui trou voient le bonheur dans la bienfaisance,
visitoieut la chaumière du p a u v r e , soulageoient ses
�(3)
besoins, et lui donnoiént cet marques de pitié touchante
qui consolent sans hum ilier. Sexe aim ab le, digne de
tout notre respect, qui fut créé pour notre bonheur!
femmes vertueuses et tendres, qui prodiguiez vos soins
à ces membres souffrans de la société! comment vous
a-t-on traitées dans ces temps m alheureux de trouble et
de confusion? par qui avez-vous été remplacées? dans
quelles m ains, grand D ieu ! seroit tombé le legs de la
dame G a lie u , si vous aviez eu qualité pour eu obtenir
la délivrance?
Ces cruels souvenirs font disparoître l’illusion ; le pres
tige s’évanouit, et on peut froidement discuter la ques
tion de la validité du legs que les administrateurs deman
dent au sieur Ca pelle.
F A I T S .
Françoise D orotliée Cabridens, veuve et héritière de
sieur Geraud G a lie u , est décédée à A u rillac dans le
courant de janvier 1789. E lle avoit fa it, le 4 octobre
1786 , un testament mystique et secret, dont il est néces
saire de conuoître les dispositions principales.
E lle institue pour son héritier universel P ie rre -A n toine-Urbain C a p clle , fils aîné du sieur C apelle, son
neveu. E lle fait aussi des legs considérables, qui sont
divisés en trois classes. Les legs pieux s’élèvent à la
somme de 128600 fr. Les autres legs se portent à une
somme de 77300 fr. ; ce qui donneroit en totalité une
somme de 205900 fr ., sans y comprendre des legs par
ticuliers en usufruit, de m obilier non apprécié , et de
A 2
�■ U ii
(4)
plusieurs immeubles en toute p ro p rié té , dont on peut
porter la valeu r, sans exagération, à 64000 fr.
Parm i les legs p ie u x , un seu l, de la seconde classe,
et le plus considérable de to u s, donne lieu à la contes
tation. Ce legs est fait en ces termes :
«c P o u r exécuter les pieux desseins qui m’ont été
« communiqués par feu M . Cabridens, mon fr è r e , je
« lègue a u x pauvres de VŒ uvre de la miséricorde de
« la ville d’A u rillac, laquelle Œ uvre est administrée par
« de pieuses dames, et dont madame de Funtanges est
« la su p érieu re, la somme de 80000 f r ., à la charge
« néanmoins que les administrateurs de ladite Œ uvre
« seront tenus de payer annuellem ent, et à perpétuité,
« aux Frères macédons de l’école chrétienne, établis à
« A u rillac , la rente et pension annuelle que feu M.
« C abridens, mon fr è r e , s’étoit obligé de leur payer
« par les actes passés avec eux et avec les consuls et
« communautés d’A u rillac ; sans laquelle condition je
« n’aurois légué à ladite Œ uvre que 60000 fr. ; qu’il
« sei’a em ployé 20000 francs pour assister messieurs les
« prêtres de la ville et communautés d’A u r illa c , qui
« seront dans le besoin, et encore les autres prêtres des
« environs de la v ille , si le revenu de ladite somme
« de 20000 fr. peut le com porter ; et que le revenu de
«
«
«
«
«
«
la somme de 40000 fr. restant de celle de 60000 f r .,
soit em ployé à assister et soulager le surplus des pauvres que ladite Œ u vre a coutume d’assister. Je veux
en conséquence que ladite somme de 80000 fr. ci-dessus
léguée, aux conditions mentionnées, soit payée auxdites dames administrant ladite Œ uvi’e, sur la quittance
�¿1> i
(5)
« qui en sera fournie par ladite dame de F ontanges,
« leur supérieure, et ce aux termes ci-dessous fixés.
« Je veu x et entends qu’au cas où ladite Œ uvre de la
« miséricorde v în t , dans le tem ps, à être réunie ù l’hô« pital général de la ville d’A u rilla c , ou à tout autre
« hôpital; je veux-, d is -je , audit cas, que le legs de la
« somme de 80000 f r ., que je fais à ladite Œ u vi'e, Ja sse
« retout à mon héritier. »
Il résulte d’une délibération du bureau de bienfaisance
d’A u rilla c, du 16 pluviôse an 9 , que l ’Œ uvre de la misé
ricorde ,• qui étoit administrée par des dames pieuses,
mères de fam ille, ne s’étoit form ée en cétte même ville
qu’en 1777.
A p rès le décès de la dame Galieu , il fut procédé à
l ’ouverture de son testament. E lle avoit nommé pour son
exécuteur testamentaire un sieur C a y la , qui étoit chargé
de vendre son m obilier et divers immeubles désignés,
et qui en même temps devoit jouir de tous les revenus
de la succession, jusqu’à ce que l ’héritier eût atteint sa
vingt-cinquièm e année.
L e prix des ventes et des revenus de la succession devoit
•être employé par l’exécuteur testamentaire à l’acquitte
ment des legs.
L e sieur Cayla se m it en possession des biens de la
testatrice, et il fut procédé à un inventaire du mobilier.
Los legs de première classe, autres que celui qui fait
l’objet de la dem ande, devoient être payés dans l’année
du décès. L e prix du m obilier fut insuffisant pour les
acquitter : tout le surplus devoit donc être pris sur les
revenus de la succession.
�,r
.
<■6 )
' I l est probable qu’en 1789, époque de l ’ouverture de la
succession, l’association des Dames de la miséricorde étoit
dissoute. 11 est au moins certain que cette Œ uvre n’a jamais
réclamé ni formé aucune demande en délivrance du legs
de 80000 fr.
M ais le sieur G ayla, exécuteur testamentaire, vouloit
faire procéder à la vente des immeubles désignés pour le
payement des legs de la seconde classe. Il s’y lit môme
autoriser par un jugement du tribunal de district d’A u rillac, du 27 janvier 1792; et il en avoit vendu pour la somme
de 58ooo fr. lorsque lé sieur A ntoine Capelle, père et tuteur
de l’héritier de la dame G alieu , se rendit appelant de ce
jugem ent, et fonda son appel sur ce que les intérêts de
son m ineur seroient blessés par l’aliénation d’autres biens.
Il y avoit des ressources suffisantes pour l’acquittement
des legs, dans le remboursement des dîmes et autres droits
casuels, qu’on pou voit alors espérer. D ’ailleurs, le sieur
Capelle père soutint que le legs de 80000 fr. avoit pour
objet rétablissement des Sceurs-grises (*), et une rente au
profit des Frères macédons; que dès que toutes congréga
tions étoient supprim ées, ce legs devenoit caduc, et beau
coup d’autres étoicut également susceptibles de réduction.
Pendant ces discussions le sieur Gayla père vint à décé
der. Son iils, en vertu du môme testament, prit la jouis
sance des biens, qu’il a gardée jusqu’en 1796. Il n’est pas
exact de dire qu’il remit l’hérédité au sieur Capelle père.
Ce dernier refusa constamment de s’en clu rg e r; et ce n’est
(*) C ’est une erreur qui s’est glissée dans le» copies : il n’est point question
lie Sœuri-grises dans le testament,
�4 ^
i l )
qu’après son décès que le sieur Cayla fils, Voulant se dé
barrasser d’une administration onéreuse, rendit la succes
sion au sieur Ray, tuteur du sieur Capelle fils.
Il n’y avoit aucune époque déterminée pour le paye
ment des legs de la seconde classe, dont celui-ci fait partie.
Il est d it, dans le testament, « que ceux de la seconde classe
K seront payés suivant l’ordre qu’ils ont dans le testament,
(c et seulement à fur et mesure que le sieur Cayla aura
« en main des fonds suffisans, soit au moyen des produits
« des ventes, effets, meubles et im m eubles, soit des reve« nus des biens de l’hérédité, sans que pour le payement
« des legs le sieur Cayla puisse Être pressé pour la vente
« des immeubles que la testatrice veut être faite de ses
« biens d’A u v e rg n e , lui donnant pou voir exprès de ne
« faire la vente qu’autant qu’il trouvera être plus utile
« pour Tintérêt de son h éritier, et encore sans qu’il soit
« tenu de payer aux légataires aucun intérêt de leurs
« legs. »
lies employés de la régie nationale furent les premiers
à vouloir exiger un legs qui étoit nécessairement devenu
caduc par la suppression des corporations, ou qui étoit
nul comme fait à une corporation illégale.
F ort expéditifs en la form e, les employés de la régie
décernèrent une contrainte contre le sieur C apelle, h éri
tier de la dame G alicu , pour le payement de cette somme
de 80000 ii'. L e 8 thermidor même année, ils firent un
nouveau commandement*, e t, sur l’opposition qu’y forma
le sieur C ap elle, il s’engagea au tribunal de prem ière
instance une contestation qui n’a pas eu de suite.
Certes! si le sieur Capelle avoit encore à discuter contre
)
�( 8 )
la rég ie, cette prétention bursale n’obtiendroit pas la fa
veu r des tribunaux. Il est permis de douter que la régie
voulut faire de cette somme l’em ploi auquel elle étoit
destinée,
Bientôt après, l’hospice d’A urillac voulut encore s’attri
buer le le g s, et en forma demande contre le sieur Capelle.
Cette prétention ne tendoit qu’à faille exécuter la clause
de réversion contenue au testament, au profit de l’héritier;
et l’hospice 11’a pas cru devoir insister.
M ais, le 19 brum aire an 9 , on a organisé à A u rillac
un bureau de bienfaisance, dont les membres furent nom^
més par le préfet du Cantal; et, le 16 pluviôse suivant,
les administrateurs prirent un arrêté pour faire citer lo
sieur Capelle en payement de ce legs.
C ’est dans cet arrêté qu’on voit que l’Œ uvre de la
miséricorde s’étoit form ée en 1777. Les administrateursy disent que cette Œ uvre n’a jamais été supprimée x
qu’elle n’a fait que changer d’administration.
Suivant e u x , d’après l’article 3 de l’édit de 1749»
l’CEuvre de la miséricorde n’avoit pas besoin de lettrespatentes.
L e cas p ré v u par la testatrice, p o u r le retour à l’héri
tier de la somme de 80000 f r ., n’étoit pas a rriv é ; le
Ico-s devoit donc être versé dans leurs mains,
T els sont les moyens sur lesquels ils appuyèrent leur
citation devant le tribunal d’A u rillac. Le sieur Capelle
crut devoir récuser ce tribunal. E t comme on a paru
im prouver la récusation , il est de son devoir de rap
peler les motifs qui le déterminèrent à cette démarche.
L e sieur D clorlz-L abarth e, l’un des juges, est membre
�( 9 )
«lu bureau de bienfaisance ; les sieurs L a val et Serieys,
juges, avoient déjà actionné le sieur Capelle , comme ad
ministrateurs de l’hospice de la même v ille ; ils a voient eu
la délicatesse de se récuser.
L e sieur Destaing , président, avoit ouvert son opi
nion sur la cause. Les trois suppléans, les sieurs G u ita rd ,
Julheset V e rn io ls, l’un étoit le défenseur du sieur Capelle,
les deux autres étoient membres du bureau de bienfai
sance. Il ne restoit que deux défenseurs au tribunal d’A u ïilla c , qui ne pouvoient remplacer les juges, et qui d’ail
leurs refusoient d’en connoître comme juges, par des rai
sons particulières.
E n fin , cette affaire intéresse les pauvres de la ville
d’A u rilla c, et devoit fixer l’attention ou l’intérêt de tous
les liabitans ; il étoit de toute nécessité de faire juger la
cause par des hommes dégagés de toute prévention : en
conséquence, la cour de cassation, par arrêt du 4 plu
viôse an d i x , renvoya la cause et les parties devant le
tribunal civil de Saint-Flour.
Ce jugement fut signifié le 23 pluviôse an 10 ; et, le
3 ventôse suivan t, les administrateurs citèrent euxmêmes le sieur Capelle devant le tribunal commis par
la cour de cassation.
Il est remarquable que jusque-là les administrateurs
6?étoient permis de procéder sans aucune autorisation.
Ils justifièrent postérieurem ent, i ° . d’un arrêté du gou-;
vernem ent, du 18 messidor an 10 , qui autorise le bu
reau de bienfaisance à accepter , au nom des pauvres
de la ville d’A u rilla c, le legs dont il s’agit, et à en pour
suivre la délivrance devant les tribunaux; 20. d’un arrêté
B
�l-..
( 1 0 }
du conseil de préfecture, qui autorise les administrateurs
à continuer, devant les trib un aux, les poursuites com
mencées contre le sieur Gapelle, pour raison du même legs.
O n verra dans la suite que l’arrêté du gouvernem ent,
obtenu sur pétition non-com m uniquée, et toujours sauf
le droit d’autrui, est la pièce principale sur laquelle s’appuyent les administrateurs.
D evant le tribunal de S ain t-F lo u r, les administrateurs
entreprirent de prouver différentes propositions.
i° . Suivant eux , les legs faits pour cause pie devoient
recevoir leur exécu tio n , et être jugés favorablement.
Xi’incnpacité du légataire ne rend pas même nul le legs,
mais autorise seulement les tribunaux à en désigner
l’emO
ploi et l’application.
2°. Les pauvres en nom collectif n’ont jamais été
regardés comme incapables de recevoir des legs , et
l’exécution des libéralités exercées envers eux a toujours
été ordonnée.
3°. L ’édit de 17 4 9 , et autres édits et ordonnances
antérieurs, en prononçant la nullité des legs faits au
profit des corps et communautés non patentées, ont
toujours excepté les legs qui avoient pour objet des
fondations particulières pour la subsistance des pauvres.
40. Ils vouloient faire considérer l’arrêté du gouver
nement comme une homologation suffisante pour sanc
tionner ces sortes de legs.
• 5°. L e legs dont il s’agit n’avoit pas été fait à l’Œ u vre de la m iséricorde, comme corps et communauté;
mais il fut laissé nominativement aux pauvres d’A u rilla c;
et si la testatrice a ajouté de ¿'Œ uvre de la miséricorde >
�44&
( 11 )
cela n’a été que pour désigner l’espèce et la qualité- des
pauvres auxquels elle vouloit que le revenu du legs fût
distribué , et les personnes auxquelles elle vouloit eu
confier la distribution.
6°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
remplacent dans leurs fonctions les Dames de la miséri
corde, et sont les vrais administrateurs des pauvres en
faveur desquels le legs a été fait par la dame Galieu.
7°. L a M iséricorde n’a jamais été réunie i l’hôpital
d’A urillac ni à aucun autre hospice. Les fonctions des
personnes chargées de la distribution des secours à dom i
cile, n’ont jamais été supprimées. L e corps législatif n’a
pas été à portée de statuer sur la fondation pieuse de
la M iséricorde; mais cette fondation est du nombre
de celles qui ont été conservées.
8°. L a condition du retour n’est pas arrivée telle
que la testatrice l’avoit p révu e; et, en matièi’e favorable,
on ne peut étendre la condition d’un cas à un autre.
9°. O n ne peut subordonner l’exécution d’une fon
dation pieuse, contre l’intention même du fondateur qui n’a
pu les p révo ir, à des circonstances extraordinaires, illé
gales, momentanées, et qui n’ont dû leur existence qu’aux
orages et aux excès inséparables d’une grande révolution ,
surtout lorsque tout est rentré dans la ligue prescrite par
le fondateur.
io °. La réduction du legs n’est pas admise en général.
E n supposant qu’elle pût l’être, elle doit être demandée
d’abord après l’ouverture de la succession, et les choses
étant entières. L ’héritier qui accepte une succession se
soumet à toutes les charges, et court tous les risques :
B a
�V ,H
C 12 )
L ’héritier n’a même pas fait de
Mes périt dom iho.
pertes considérables.
i i °. L ’héritier pur et simple ne peut être admis à la
distraction de la quarte falcidie. Elle n’a lieu qu’au profit
de l’héritier surchargé, qui établit les charges par un loyal
inventaire : d’ailleurs la distraction n’a p;:s lieu pour les
legs pies. 11 im pliqueroit de demander tout à la fois, et
la réduction du le g s , et la distraction de la quarte. Enfin
rien n’établit l’insuffisance de la succession pour faire face
aux legs.
D e son cô té, le sieur Capelle soutint, i° . que le legs fuit
u l’Œ uvre de la m iséricorde étoit cadu c, soit lors de sa
confection, soit au moment de fou vertu re de la succes
sion de la testatrice : le prétendu légataire ne form oit
aucune corporation, aucune dotation, aucun établisse-:
ment avoué par la loi.
2°. L a condition prévue par la testatrice étoit arrivée'
L e gouvernem ent, en supprimant tous les établisseinens,*
même ceux qui n’avoient pas une existence lé g a le , a
cumulé l’actif et le passif de toutes les corporations
associations et hospices: d’où il résultoit que le legs auroit
cessé d’être e x igib le, du m oment que l'intention de la
testatrice ne pouvoit être rem plie, que le legs ne pouvoit
être versé dans les mains à qui elle le coniioit exclusi
vem ent; et alors la réversion devoit avoir lieu au profit
de l’héritier institué.
3°. L e patrimoine de la dame Galieu avoit éprouvé
des diminutions de tout g en re , des pertes considéra
bles , par l’effet de la force majeure.
4°. L a dame veuve Galieu n’a voit été instituée héri-
�4 4 /
( 13 )
Jtièrc par son m a ri, de qui elle tenoit la plu s'grande
partie de sa fortune , qu’à la charge expresse de trans
mettre l’hérédité au sieur Ca pelle , son petit-neveu et
son liéritier présom ptif; et la dame Galieu dcvoit moins
se considérer comme p ro p rié ta ire, que comme usu
fruitière de son mari.
5°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
etoient sans qualité pour réclamer les 20000 fr. affectés
aux Frères m acédons, ainsi que la même somme affectée
aux ecclésiastiques malades et pauvres ; et le sieur Gapelle
ne pou voit être tenu que d’en payer annuellement l’in
térêt.
6°. E n pays de droit é c r it, l'héritier institué ou
ab intestat est autorisé à distraire la quarte falcidie ;
et la succession de la dame G alieu est ouverte en pays
de droit écrit.
7 0. L ’édit de 174 9 , et la déclaration de 1 7 7 4 , auto
risent le débiteur de legs pieux à. acheter des rentes
sur l’état ; et le sieur C apelle, en ce cas, pouvoit user
de cette faculté , et fournir des rentes sur l’état pour le
payement du leg s, en supposant qu’il y eût capacité
pour le recevoir.
La cause portée en cet état au tribunal de Saint-Flour ,
le 20 floréal an 11 , il est intervenu un jugement con
tradictoire , qui déclare le legs fait par Françoise-D oro
thée de Cabridens, veuve de Geraud Galieu , à l’Œ uvrc
de la miséricorde de la ville d’ /Yurillae, par son testa
ment du 4 octobre i j 85 , nul et de nul eilèt : en con
séquence déclare les administrateurs du bureau de bien
faisance de cette même ville non - recevables dans la
�* VU w
■ ■
t 14 ^
demande par eux form ée contre le sieur C ap elle, héri
tier de la dame G a lie u , en délivrance de ce môme
le g s , et condamne les administrateurs en tous les dépens.
Ce jugement est fondé sur les motifs suivans :
« i° . D ’après la disposition des lois romaines, cons« tamment adoptée par la jurisprudence française, aucun
« corps ou communauté quelconque ne peut légalement
« exister sans l’approbation du gouvernem ent ; et de
« tels établissemens sont incapables de recevoir aucun
« legs.
P ar une exception néanmoins établie par la
jurisprudence des tribunaux en faveur de la cause
pie , les legs pieux faits au profit des communautés
illicites étaient appliqués aux pauvres ou autres
œuvres p ie s, et la disposition, même imparfaite ,
n’empêclioit pas que les legs y contenus n’eussent
leur effet. M ais le privilège de la cause pie a reçu
une première restriction par les ordonnances de 1731
et 1 7 3 5 , et il a reçu une restriction plus forte par
l’édit de 1749. Les arrêts qui établissent une jurisprudence favorable à la cause p ie , sont tous antérieurs
à l’édit de 1749.
cc 30. Dans les dispositions de cet é d it, qui ren ou cc 2 ° .
«
«
«
cc
cc
cc
cc
cc
a
cc
cc
«
cc
«
a
te
ce
«
velle les défenses de form er aucun établissement
de corps ou communauté quelconque , sans l’obtention préalable de lettres-patentes, sont nommément
compris les hôpitaux et toutes maisons ou com m u
nautés sous prétexte d’hospiçes. Par une disposition
rigoureuse et nouvelle , qui ajoute à celle des précédenies lo is , il est défendu de fonder de tels établis-
�/
44Ÿ'
( x5 )
« semens par disposition de dernière Volonté , quand
K même la disposition seroit faite à la charge d’obtenir
« des lettres-patentes.
« 4 0. L ’exception portée en l’article 3 de l’édit qui
« dispense de l’obtention des lettres-patentes, et n’exige
K que l’homologation du parlement pour fondation de
« messes ou o b its, la subsistance d’étudians ou de pau« vres ecclésiastiques séculiers, et non l’établissement
« d’aucun nouveau corps ou com m unauté, ne peut i*aiK sonnablement recevoir sou application lorsque la
« disposition est faite à un corps ou communauté non« approuvé , parce qu’en ce cas l’exception seroit en
« contradiction avec l’article 9 de l’é d it, q u i, pour la
« pleine exécution de l’article 1 e1' . , non - seulement
« déclare nuls tous établissemens du genre de ceux
« mentionnés en cet article , mais encore déclare nuls ,
« sans distinction, tous actes ou dispositions qui seroient
k faits en leur faveur, directement ou indirectem ent,
« sans qu’il soit besoin de lettres de rescision, nonobs« tant toute prescription et tout consentement exprès
« ou tacite donné- à l’exécution des actes contenant la
« disposition.
« 5°. Adm ettre l’exception portée en l’article 3, au
« profit d’un corps non-approuvé , seroit fournir un
« moyen indirect de fonder l’éellem ent, contre le vœu
« de la lo i, des établissemens qui , quoique déjà exis« tans, n’auroient eu jusque-là qu’une existence éphé« m è re , faute de moyens suflisans.
« 6°. L ’article 10 de l’édit , par une disposition infî—
« niment rigoureuse, veut que les enfaus ou héritiers
�( i6 )'
présomptifs , du vivan t même de ceux qui ont fait
les' dispositions mentionnées en l’article 9 , puissent
réclamer les biens donnés ou aliénés, et s’en faire
envoyer en possession , même avec restitution de fruit*?,
du jour de leur demande. Cet article, innovant à celui
de l’édit de 1666, q u i, pour peine de l’inexécution
de la lo i, en cas de disposition au profit de l’établis
sement non-approuvé , en appliquoit le bénéfice aux
hôpitaux , fait entièrement cesser le privilège de la
'cause pie.
« 7 0. Les déclarations de 1 7 6 2 , de 1774
1780 ,
qui contiennent quelques dispositions nouvelles rela
tivem ent aux biens dont on peut disposer au profit
des h ô p ita u x , ne contiennent aucune innovation aux
articles 1 , 2 , 9 et 10 de l’édit de 1749. Si les cir
constances ont apporté quelques changemens aux
motifs qui ont dicté la loi de 1749 ; si la législation
même étoit changée d ep u is, elle ne pourroit avoir
d’effet rétroactif; et les tribunaux doivent juger sui
vant le droit acquis antérieurement aux parties.
« 8°. L e legs qui fait l’objet de la contestation a été
fait à une corporation ou communauté non légale
ment établie , à l’Œ uvre de la miséricorde de la ville
d’A u rilla c, qui n’avoit point obtenu de lettrcs-pntcntes.
S’il est dit que le legs a été lait aux pauvres de l’Œ uvre
de la m iséricorde, il n’est pas raisonnable de pré-i
tendre que ce soit uniquement pour désigner la classe
des pauvres h laqitelle la testatrice entendoit faire du
bien. L ’Œ uvre de la miséricorde ayoit tous les carac
tères qui peuvent faire distinguer un corps , une
com m unauté,
�44°)
C *7 )
« communauté , puisqu’elle uvoit une supérieure, une
« assistante , un receveur-, elle étoit désignée et reconnue
« sous un titre particulier, ïŒ u v r e de la miséricorde.
« Cette Œ uvre devoit toujours subsister ; c’est l’Œ uvre
« que la testa.trice avoit envisagée, plus encore que les
■
« individus qui la fo rm o ien t, puisqu’elle vouloit qu’il
« n’y eût que les revenus de 60000 fr. qu’elle léguoit,
« qui fussent employés à perpétuité à secourir les pau* vres, eeelésia&tiques et séculiers, qu’elle avoit en v u e ,
« et que l’Œ uvre avoit coutume de soulager ; puisqu’elle
« chargeoit l ’Œ uvre de p ayer, en l’acquit de M . de Cabri« d en s, et à perpétuité, la pension à laquelle il s’étoit
« obligé envers les Frères macédons ; puisqu’elle avoit
« prévu le cas de la réunion de l’Œ uvre à l’hôpital
v g é n é ra l, ou à tout autre hôpital. Toutes ces choses
v ne sont applicables ni aux pauvres in dividu els, tels
« "que les pauvres honteux que la testatrice avoit en
« vue , ni aux dames composant l’Œ u vre de la m isé« ricord e, considérées comme individus.
« 90. L a loi elle-m ême , comme la raison , s’accordent
« pour cette interprétation av«c l’arrêté des consuls,
« q u i, autorisant le bureau de bienfaisance à accepter le
« legs dont il s’a g it , l’a qualifié de legs f a it à tQ iu v re
« de la m iséricorde , quoique le gouvernem ent ait eu
<c sous les yeux la clause du testament p o rta n t, f a i t
« a u x pauvres de TŒ uvre de la m iséricorde.
« io ° . C ’est à ce titre que le gouvernem ent, qui a pu
« ignorer que cet établissement n’avoit pas été précédé
« de lettres-patentes, l’a considéré comme légalement
C
�c
1
8
}
« représenté, par suite des lois des 16 vendémiaire et 7
« frim aii’e an cinq,
« Cet arrête d’ailleurs ne préjuge rien sur l’ invalidité
« ou la validité du legs, puisqu’en cas de contestation
« il renvoie les parties devant les tribunaux,
« E n fin , en appliquant les lois précédemment ana« lisees, le legs fait a l’Œ uvre de la miséricorde d’A u —
« rilla c, est nul et caduc comme fait à un incapable;.
a e t, d’après l ’article 10 de l’édit de 174g , l’héritier seul'
« doit profiter de la nullité ou de la caducité du legs, »
Les administrateurs du bureau de bienfaisance ont
interjeté appel de ce jugement , et insistent sur la déli
vrance du legs de 80000 fr. L e sieur Càpelle va s’occuper
de répondre à leurs griefs ; m ais, avant d’entrer dans la
discussion des moyens qui militent en sa faveur, il est à'
propos de relëver quelques inexactitudes qui ont échappé
aux administrateurs dans le récit des faits.
1
Q uoiqu’il paroisse peu im portant de savoir si l’hôpitaî
d’A u rillac ne jouissoit que d’un revenu m édiocre, comme
l’ont prétendu lfcs appelans , on doit d ir e , d’après la
notox-iété p u b liq u e , que cet hospice étoit et est encore
convenablement et richement d oté, proportionnellem ent
à la population de la ville. M ais on ne connoît pas les
sentences de V ie , qui ont ordonné la délivrance des legs
faits à l’Œ uvre de la miséricorde. L e bailliage de V ie
n’auroit pas été compétent pour connoître de ces deman
des; et ces prétendus jugemens n’existent pas. •
L ’Œ uvre de la miséricorde n’étoit pas même une cor
poration. O n se souvient avec rcconnoissance de ces r é u
nions pieuses qui s’étoient formées daûs les villes p rin ci-
�( 19 )
pales. Les dames charitables qui en faisoient partie for«
moient une société particulière , et parfaitement lib r e ,
qui n’étoit assujétie à aucune règ le, n’ étoit point établie
d’une manière perm anente, et dès-lors ne pouvoit re
cevoir aucun legs. O n doit supposer que l’intention du
testateur, lorsqu’il fait un legs p ieu x , cherche à main
tenir l’exécution de ses volontés ; il désire survivre à
lui -m ê m e , faire respecter sa mémoire par des actes de
bienfaisance durables, et il ne peut l’espérer qu’autant
q u ’il choisit des corporations légales, dont l’existence est
nécessaire et protégée par le gouvernement.
' L a dame veuve G alieu, que l’on représente comme ex
trêmement riche, et sans enfans, tenoit la plus grande par
tie de sa fortune de la tendresse de son époux : elle avoit été
chargée par lui de remettre leur hérédité au sieur Capelie
son neveu, père de l’intim é, et qui étoit aussi le cousin ger
main de la dame Galieu. Brouillée depuis long-tem ps avec
le sieur Capelie p è r e , et ne voulant point qu’il fût l’ob
jet de ses libéralités , elle crut tout à la fois pou voir satis
faire son propre penchant, et rem plir les intentions de
son m a r i, en faisant passer ses biens au sieur Capelie
iils. L ’abbé de Cabridens, frère de la dame G alieu , étoit
sans doute un homme recommandable par sa piété et par sa
charité; mais la fortune dont il jouissoit provenoit de sa
sœ ur, ou du moins de la donation qu’elle lui avoit faite en
i
-A- vérité on prétend qu’il étoit propriétaire de tous
les biens situés en A u v e r g n e , et auxquels madame de
Galieu avoit succédé. O n cite avec emphase les dom ai
nes de F aillitou, de la Bartassière, et du fief de Clavièx*es.
Ces deux premiers domaines ne s’élèvent point à une
C a
\
�1^ 5Z
!
I
¡
1
f.
( 20 )
somme de 60000 fr., et le dernier, que l’on a qualifié im píoprement de fief, puisqu’il ne l’a jamais été* ne vaut pas^
la même somme. Il n’a fait aucune disposition , et tout
ce qu’ont dit les appelans page 9 de leur m ém oire, ne
sont que des allégations dénuées de toute vraisemblance.
Pourquoi dire encore que la dame Galieu a préféré le
sieur Capelle à des parens plus proches : elle n’en avoit
aucun dans la ville d’A u r illa c , qui fût au même degré*.
L e sieur Capelle p è r e , neveu du sieur Galieu , étoit
cousin germain de la testatrice sa v e u v e , et son parent
le plus proche. A in si le sang et la n atu re, pour se ser
v ir des expressions des appelans, appeloient personnellement le sieur Capelle à la succession de la dame G alieu.
O n vante aussi le fief de G rialou , qui faisoitr partie de sefr
propriétés, et qui ydans l’état actuel , ne produit pas 800 fïv
de rente.
• A la page 12 du m ém oire, on prétend que l’Œ uvrede la miséricorde de la ville de Figeac avoit été payée d ti
legs porté par le testament , et on ajoute que l’héritier n’a
point demandé si les Dames de Figeac avoient des lettres-*
patentes. Mais les administrateurs n’ignorent point sans
doute que lrŒ uvre de la miséricorde de Figeac est une
corporation patentée, une communauté de filles d e l’éta»
blissement de saint V in cen t de P a u le , q u i, depuis plus
d*un siècle, jouissoit d’une existence légale, et envoyoifc
des sœurs de son ordre dans une foule de villes.
■ L es administrateurs sont également inexacts, lorsqu’ils
disent, page 14» que-madame de Fontanges^se trouvant
à Paris après le décès de la testatrice, avoit fait des dé-»
marches pour obtenir la délivrance du legs. Ce fait est
�(
21
)
absolument faux et controuvé : on peut m ême-assurer
qu’à l’ouverture de la succession de la dame G alieu , la
société des Dames de la miséricorde étoit dissoute ; et les
administrateurs sont hors d’état de prouver que depuis
le décès il ait été fait aucune démarche par qui que ce
soit pour obtenir la délivrance du legs.
L e sieur Capelle désavoue également que son père se
soit jamais immiscé dans la jouissance des biens de la dame
Galieu ; ils n’ont été remis au fils qu’après la mort du
p è re, et il n’en jouit que depuis 1795. Si le sieur Capelle
père s’opposa r en 179.2, à la vente de quelques immeu
bles , c’est que déjà le sieur Cayla en avoit vendu pour
58ooo assignats, dont il n’a fait aucun usage, et qui
n’ont été remis à l’héritier qu’en l’an 4 , époque de la
plus grande dépréciation du papier-monnoie.
Les membres du bureau de bienfaisance préten dent,
page 19 , qu’ils ne peuvent offrir aux pauvres que du zèle
et des promesses ; cependant ils jouissent d’un revenu de
1000 f r . , ce qui présente déjà quelques ressources. M ais
les membres du bureau de bienfaisance peuvent-ils espérer
déposséder jamais des revenus considérables ? Ils doivent
tout obtenir de la confiance de leurs concitoyens , de leur
charité ,.de leur piété : les quêtes , les aumônes , les dons
m anuels, doivent com poserprincipalem ent et exclusive
ment leurs revenus; ils en sont les distributeurs, et c’est là
Punique but de leur établissement.
_ Maintenant il s’agit de présenter quelques observations
préliminaires sous le poin t de vue de l’intérêt p u b lic ;
car s’il faut en croire les adm inistrateurs, qui paroissent
•»voir des vu es,élevées, lewr cause est une question do
droit public.
�4M
' * «'
( 22 )
M a is com m ent Tordre et le droit public seroient-ils
en suspens ( pour se servir des ternies des appelans ) ,
parce que le legs de 80000 fr. fait à l’CEuvre de la misé
ricorde seroit contesté ?
Q u’étoit l’Œ uvre de la m iséricorde? une association
libre , composée de dames distinguées par leur piété et
leur bienfaisance, et qui recevoient de la confiance de
quelques citoyens généreux des souscriptions volontaires.
Ces établisseinens étoient bornés à certains lieux et à
certains temps-, ils n’entroient point dans le système de
l’administration générale ; ils pouvoient obtenir des secours
particuliers, lorsqu’il s’agissoit de remédier aux maux
d’une disette , d’une épidém ie , ou de pourvoir à l’en
tretien de quelques vieillards et de quelques orphelins.
Ces corporations momentanées, qui pouvoient se dis
soudre à chaque instant, avoient cet avantage inestimable
qu’elles n’étoient sujettes à aucun abus im portant, parce
qu’elles avoient des vues vraiment utiles, comme la con
tribution de chacun étoit entièrement volontaire.
Mais pouvoient-elles recevoir des le g s, des fondations
perpétuelles, lorsqu’il étoit possible q u e , par la disso
lution de la société , les fonds fussent détournés de leur
destination ? N ’étoit-ce pas laisser aux fondateurs le regret
de les avoir confiés ? et bientôt la source devoit tarir!
Dans ces sortes d’établissemens on ne considère que
l’utilité actuelle; c’est toujours elle qui détermine la gé
nérosité des bienfaiteurs : mais le besoin cesse-t-il, la libé
ralité cessé, et son cours se tourne vers d’autres besoins.
Q u’on cesse donc de s’écrier que les bureaux de bienfai
sance, comme autrefois l’Œ uvre de la m iséricorde, avoient
�4 X*
C 23 )
capacité pour recevoir des legs et des fondations perpé
tuelles. Ce n’étoit pas là le but de leur institution ; et le'
préambule de l’édit du mois d’août 1749 nous apprend
suffisamment,, que le législateur a senti le danger de ces
fondations , et a voulu l’empêcher pour l’avenir. « Les
« familles, est-il d it, ont souvent le déplaisir de se voir1
cc privées de leur fortune , par les dispositions que les
« hommes ont à form er des établissemens nouveaux qui
K leur soient propres , et faire passer leur nom à la pos« térité avec le titre de fondateurs. L e m eilleur usage
w que l’on puisse faire de l’autorité dans une matière si
a im portante, est de concilier autant qu’il est possible
cc l’intérêt des familles avec la faveur des établissemens
« véritablement utiles au public. »
O u aura bientôt occasion de revenir sur les dispositions
de cet édit •, mais pour suivre le même ordre de défense
des administrateurs, qui ont soutenu que le tribunal de
Saint-Flour étoit in com pétent, et n’avoit pu connoître
de la validité du legs , il convient d’abord de discuter
cette première proposition.
Les administrateurs du bureau de bienfaisance ont
transcrit dans leur m ém oire l’arrêté des consuls, en date
du 18 messidor an 6 , qui les autorise à recevoir le legs
contenu au testament de la dame Galieu. L ’article 5 de
cet arrêté p o rte , « qu’en cas de contestation ou de refus
« de la part des-héritiers, les administrateurs du bureau
« de bienfaisance poursuivront la délivrance du legs
« devant les tribunaux , en s’y faisant préalablem ent
« autoriser dans les formes voulues par les précédens
« arrêtés. »
�( H 3
Il est bien é v id e n t, d’après cet article , que l ’arrêté ,
comme l’ont dit les premiers ju ges, ne préjuge rien sur
la validité ou invalidité du legs. Il étoit inutile sans doute
<le renvoyer devant les .tribunaux, pour prononcer sur
\cs contestations qui pouvoient s’élever à cet égard , si
l ’arrêté du gouvernem ent, comme on vent le prétendre,
eût été im pératif et absolu.
C ’est un acte de simple adm inistration, qui autorise à
recevoir si le legs est dû , et en règle l’emploi en cas que
l ’on reçoive.
I l en est de cet a rrê té ,* comme il en étoit
»
autrefois des lettres de bénéfice d’inventaire ou des let
tres de restitution.. Ces lettres , qui émanoient du souve
rain , étoient indispensables, soit pour accepter condition-;
ncllem ent une succession, soit pour se pourvoir contre
y 11 engagement indiscrètement contracté. M ais pour
q u ’elles eussent leur exécu tio n , les faits devoient être
vérifiés par les trib u n a u x , qui n’en prononcoient l'enté
rinement qu’autant qu’ils reconnoissoient la légitim ité des
motifs,. A u roit-on pu dire aux tribunaux , lorsqu’ils refusoient d’entériner de semblables lettres , qu’ils s’érigeoient
en réformateurs des arrêtés ou des ordres du gouverne
ment , qu’ils refusoient d’admettre une demande que le
gouvernem ent autorisoit? T e l est cependant le vice du
raisonnement des administrateurs. Ils ont obtenu , sur
pétition non communiquée , un arrêté qui les autorise
à recevoir un legs. Cet arrêté n’est point donné en conuoissance de cause: on ne voit aucune contradiction, et
on autorise à recevoir ; mais c’est toujours sauf le droit
d’a u tru i, sauf à faire juger devant les tribunaux , en cas
de contestation , si le legs doit être ou non acquitté. T e lle
est
�¿ fit
C *5 )
est la seule idée raisonnable, le seul point dè vue s'oua
lequel on puisse faire considérer l’arrêté du gouverne
ment ; et les administrateurs n’ont pas voulu s’apercevoir
qu’en présentant cet acte d’administration comme im pé
ratif et absolu , ils transformoiei.it une simple form alité
en un acte de despotisme qui répugnerait à tous les prin
cipes de liberté si solennellement proclam és, si soigneu
sement maintenus. Q u’on ne dise donc plus que le tri
bunal de S a in t - F lo u r , en examinant le mérite de la;
demande du bureau de bienfaisance, s’est arrogé le droit?
de réform er les actes du gouvernem en t, que fce n’est
point à lu i à diriger le gouvernail de Tétùt. Ces expres-1
sions im propres sont absolument vides de sens. 11 faudrait1
au moins rayer l ’article 5 de cet arrêté, parce qu’en vaitile gouvernem ent auroit-il renvoyé devant les tribunaux
le droit de prononcer sur la délivrance du legs dont il1
s-agit, s’il n’avoit pas été permis aux juges de s’en écarter!
Les appelans ont senti toute la force de cet argum ent;mais ils veulent restreindre l’objection pour tout ce q u i1
a rapport au droit c iv il, savoir: la validité du testament,
la capacité de disposer de la testatrice», la quotité du legs
par exem ple ; mais tout ce qui est de droit public est
au-dessus de leur atteinte, et, suivant eu x , la capacité des
pauvres pour i*ecevôir comme pour demander fait partie'1
de ce même droit publie.
Il est assez difficile de com prendre ce qùé les adminis
trateurs ont entendu par ce raisonnement. Ori ne conteste*
pas la capacité en général des bureaux de bienfaisance
pour recevoir ou demander des legs qui leur seixVîehf^
confiés depuis leur création. O u sait que le gou vern em en t1
D
-K |
1
�C 26 )
seul s’est réservi le droit de les y autoriser , et ce n’est pas
ce que les juges de Saint-Flour ont examiné. Ils ont seule
ment décidé que ce n’étoit pas au bureau de bienfaisance
que le legs avoit été fa it, puisque ce bureau n’existoit.
pas lors du décès de la testatrice. Ils ont décidé que l’as
sociation des dames pieuses à laquelle le legs avoit été
fait , étoit incapable de le recevoir ; et s i , d’après les
appelans eux-m êm es, les premiers juges avoient droit de
çonnoîtrie de la'valid ité du testament, d e là capacité do
disposer et de la quotité du le g s, on ne voit pns comment
ils n’auuoient pas eu le droit de prononcer sur la validité
de ce même le g s c o m m e n t il auroit été interdit à Thé—
ritier de discuter devant les tribunaux la capacité de la.
testatrice ou du légataire.
O n doit donc écarter ce premier moyen d’incompé-tence, pour s’occuper de la validité du legs ou fondation!
de la dame Galieu ; et, pour en apprécier le m érite, il.
faut en revenir à l’édit de 1749, qui fait la loi dans celte
matière..
D ’après l’article 1". de cet é d it, il ne peut être form e
aucun établissement qu’en vertu de lettres-patentes enre
gistrées dans les cours. Sous ce mot général d’établisse-ment , on y comprend nominativement les hospices ,
congrégations , confréries , h ô p ita u x , etc.
L ’art. 2 défend de faire ù l’avenir aucunes dispositions
par acte de dernière volonté pour fonder un nouvel éta
blissem ent, o ira u proiil des personnes qui scroicnt char-gées de le form er , le tout à peine de nullité , ce qui sera
observé quand même la disposition seroit faite à la charge
d’obtenir des lettres-patentes.
’
�•
( 27 )
L ’article 9 déclare nuls tous les actes et dispositions qui
pourroient avoir été faits en faveur des établissemens non
autorisés., directement ou indirectem ent; et tous ceux qui
auroient été chargés de form er ou administrer ces établis
semens, sont déchus de tous les droits résultans des actes ou
dispositions, sans qu’il soit besoin de lettres de rescision,
nonobstant toute prescription , tous consenteinens exprès
ou tacites qui pourroient avoir été donnes à l'exécution de
ces actes ou dispositions.
Par l’article 1 0 , les en fans ou présomptifs héritiers
seront admis, même du vivant de ceux qui auront fait
lesdits actes ou dispositions , à réclamer les biens par eux
donnés ou aliénés ; ils doivent en être envoyés en pos
session pour en jouir en toute p ro p riété,avec restitution
des fruits ou arrérages, à com pter du jour de la demande
qu’ils en auront formée.
Ces dispositions rigoureuses et prohibitives viennent
naturellement s’appliquer au legs dont il s’agit. L ’Œ u vre
de la miséricorde n’étoit qu’ une association libre non
approuvée , une congrégation sous prétexte d’ / u sp ice,
qui n’avoit point été revêtue de lettres-patentes : donc
les dispositions faites à son p rofit, directement ou indi
rectem en t, à elle-même ou à ceux qui l’adm inistrent,
sont nulles d’ une nullité viscérale. L e sieur Capelle pourroit en réclamer la restitution, si le legs a voit été payé*,
nonobstant tou te prescription, toute approbation expresse
ou tacite : c’est la seule conséquence qui puisse résulter des
termes irritons des articles 9 et 10 de l’édit de 1749.
L es administrateurs prétendent que cet édit n’est point
applicable, Ce n’est point à l'Œ uvre de la miséricorde quu
D a
�I .»'.
c
2
8
3
le legs a ét<? fa it, mais bien a u x pavores de’ l’Œ uvre. Les
pauvres en nom collectif sont capables de recevoir.
L e sieur Capelle avoit déjà répondu en cause principale
à ce foible argument. « L e legs fait aux pauvres de l ’Œ uvre,
« a-t-il dit dans son m ém oire, est fait à l’Œ uvre. Civibus
« cw itatis legatum, vel jîd e i cotnm issum , datum civitath
« relictum videtur, loi 2 , D e rebus dubiis. L a lettre
v. du testam ent, co n tin u e-t-il, n’est pas moins expresse.
« C ’est au corps qu’il a été lé g u é , car ce n’est que les re cc venusdes 80000 ^ qui doivent être employés à soulager
a lés pauvres que l’GEuvre a- coutume d’assister ; et pai*
a qui doivent-ils être employés ? p a r l ’Œ u v re ,q u i a cou—
« turne- de les assister. Ce n’est point aux pau vres, mais>
« au corps que l’on a légué , puisqu’on le charge d’une
vu rente annuelle'envers les Frères m acédons, d’une fon~
« dation perpétuelle envers les prêtres pauvres de la ville*
a d’A u rillac. Ce n’est] point aux pauvres qu’on a légué ,
a• puisque ce n’est point eux qui peuvent diemander /
« recevoir et1 quittancer: Il n’y a pas même fidéicom m is,
« car ils- n’auront jamais de droit et d’action pour possé«• der;-c’est> pour leur-soulagem ent, mais ce n’est pas su c
«- eux que l’on a fondé. Ils sont l’ôbjet et non lfe9 dépo—
«■sitaires de la fondation : ce n’est point eux qui forment’
<r le corps et là congrégation de l’Œ uvre de la- m iséri«< corde , mais bien les pieuses dames qui administroient
et’ cette Œ u v re ; car les pauvres n’auront jamais de puis—
sance et de droit?, ni' dansi l?adminislration , ni contre*
« les- administrateurs. »
Les, administrateurs invoquent1 l’article 3’ de l’édit de
*749 ? qui*excepte les fondations particulières, qui ne ten»
�46
i
c z9 y
droient à l’établissement cl’aucun nouveau co rp s, collège
ou com m unauté, ou à l’érection d’un nouveau titre de
bénéfice , et qui n’auroient pour objet que la célébration
des messes ou obits , la subsistance d’étudians ou de
pauvres ecclésiastiques ou séculiers, etc. A l’égard des
quelles fondations, il ne sera point nécessaire d’obtenir
de lettres-patentes , il suffira de faire hom ologuer les actes
ou dispositions qui les contiendront, dans les parlemens
ou conseils supérieurs, chacun dans son ressort, sur les
conclusions des procureurs généraux. E n se plaçant dans
ces exception s, les appelans ajoutent : L a révolution n a
point permis aux tuteurs des puuvres de rem plir la for
malité de l’homologation-, mais l’arrêté du gouvernem ent
doit tenir lieu de cette homologation.
Cette o b je c tio n s o u v e n t ren o u velée, et toujours dé-truite, n’a pas échappé aux premiers juges. Ils ont sage
ment pensé que l’exception portée par l’article 3 étoit
étrangère a la cause, puisque la disposition est faite au
profit d’un corps ou communauté non approuvée. Dans
ce cas., disent-ils., l’exception seroit en contradiction avec
l’article 9 de. Fédit;. ce seroit fournir un moyen indirect
de fonder réellem ent, contre le vœu de la l o i, des établissemqns q u i, quoique déjà existans, n’auroient eu jusque-là
qu’une existence éphém ère faute de.moyens suflisans.
L ’article 3 11e dispense de la formalité des lettres-paten
tes , auxquelles il substitue l’hom ologation, que les fon
dations! particulières et les-actes, qui les contiennent, et
non les corps à qui elles- sont confiées. Dos fondations
confiées à un corps non approuvé tendent nécessairement
à établi n un nouveau corps-, coutru la prohibition expresse
de l’édit de 1749.
�( 30 )
On pourroit citer un exem ple particulier et très-récent,
pour établir que le legs fait à l’Œ uvre de la miséricorde
est caduc, et doit appartenir à l’héritier. M . de Séguiran,
évêque de N evers, fit son testament le 3 avril 178 9 , et
m ourut le même jour. Par une clause de ce testament, il
veut et entend que les biens qu’il laissera soient employés
à l’execution des établissemens de charité qu’il avoit com
m encés, et principalement de celui de la maison des Frères
de l’instruction et charité chrétienne, et des fonds nécessaires pour leur subsistance.
Les héritiers du testateur se pourvurent auprès du corps
législatif; ils soutinrent que le legs étoit caduc, et par là
réversible à ses héritiers légitimes. Un de leurs principaux
moyens étoit que les légataires n’en avoient pas demandé
la délivrance. Cependant les Frères de l’instruction et les
Sœurs de la charité, que ce legs concernoit, étoient revê
tus de lettres-patentes, et dès-lors sembloient avoir capa
cité pour en réclamer la délivrance.
O n convient de tous ces faits, dans- le rapport qui fut
fait au conseil des Cmq-cents, le 21 germinal an 6 , par
le représentant Desmoulins. L e rapporteur est d’avis que
la succession doit être remise i l’héritier; il se fonde
sur ce que le légataire n’a pas été saisi, lorsque le legs
pouvoit être demandé, et le nouvel ordre de choses en ayant
changé la destination, l’intention du testateur ne seroit pas
rem plie ; pf>r conséquent le legs doit être réversible pour
les héritiers. Cet acte de justice lui paroît indispensable,
et le projet de décret qu’ il propose a été converti en loi
par le conseil des Anciens.
Cette loi particulière et locale n’a point été im prim ée;
�4 6 2
( 3* )
mais le sieur Cnpelle est nanti du rapport, et sans doute
on trouvera une grande affinité entre cette espèce et celle
qui donne lieu à la contestation.
Comme M . l’évéque de N evers, la testatrice n’est
décédée qu’en 1789; le legs fait à l’Œ uvre de la M isé
ricorde n’a point été réclam é; les dames à qui il étoit
destiné n’en ont pas demandé la délivi’an ce, elles n’en
ont jamais été saisies ; le nouvel ordre de choses a changé
la destination d u'legs ; il n’existe plus de Dames de la
m iséricorde; les Frères macédons sont supprimés; les
intentions de la testatrice ne peuvent plus être remplies :
le legrs est donc caduc ; il est donc réversible à l’héritier.
E t comment les intentions de la dame Galieu pourroient-elles être rem plies? elle a principalement et exclusi
vement en vue les Dames de la m iséricorde, et notam
ment madame de Fontanges , leur supérieure; les revenus
de la somme de 80000 fr. doivent être distribués h une
classe de pauvres particulièrement désignés, et que ces
dames avoient coutume d’assister. 11 ne peut y avoir de
véritable substitution à une corporation de ce genre : ce
D
7
n’est plus le même objet ni les mêmes individus. L ’arrêté
du gouvernem ent même, que lesappelans veulent regarder
comme absolu, change la nature du legs. L ’article 3 veut
que la somme principale soit employée eu acquisition
de rentes sur l’état. Etoit-ce à la décharge du gouverne
ment que la dame Galieu avoit légué cette som m e? Les
hospices en gén éral, comme les bureaux de bienfaisance,;
11e peuvent aujourd’hui recevoir îles capitaux ou des
remboursemens qu’en les versant dans les mains du gou
vernem ent, qui en paye l’iutérêl à quatre pour cent; ou.
�( 32 )
en achetant des rentes sur l’état, qui ne représentent
point l’intérêt que la testatrice avoit stipulé.
Il
n’est donc plus possible de maintenir l’exécution des
volontés de la testatrice. Dès-lors le legs ne peut plus
être exigé.
Q u’importe que l’abbé de Cabridens ait eu de pieux
desseins en faveur des pauvres que les Dames de la misé
ricorde assistaient ; il n’a manifesté ses volontés par aucun
acte. Si la dame Galieu a déclaré q u’elle vouloit exé
cuter les pieux desseins de son frèx*e, elle a expliqué en
quoi consistoient ces pieux desseins. Comme elle, il avoit
en vue les Dames de la miséricorde , les Frères macédons. N i les uxies ni les autres n’existent plus; il est donc
impossible d’ordonner la délivrance du legs, et l’héri
tier seul peut en profiter.
L es appelans, qui veulent faire triompher la vérité par
toutes les armes de la p a role, disent que si le legs
étoit laissé aux pauvres d’A u r illa c , sans autre explica
tion , personne ne doutei'oit qu’il ne fût valable. Mais
c’est précisément mettre en fait ce qui est en question.
L es pnxivx*es forment un cox*ps irrégulier, qxii n’est suscep
tible ni d’adm inistrer, ni de recevoii-. Il faut un interm édiaire pour la distribution , et 011 ne peut confier
cette même distribution qu’à un corps dont l’existence
est approuvée par les lois de l’état. Si le corps ou l’hos
pice n’est pas fondé en vertu de lettres-paferites, le legs
est caduc, et revient à l’ héritier en vertu de l’article 10
de l’édit de 1749* Bientôt les appelans s'égarent et tirent
des conséquences bien étranges. L e parlem ent, disent-ils,
auroit hom ologué uu legs fuit aux pauvres , ilau ro it au
torisé
�4&
( 33 )
torisé les Dames de la miséricorde à en faire la distribu
tion. Ce que le parlement auroit fait, la testatrice a pu
le faire. Dans tous les ca s, les fondations sont de droit
p u b lic; l’autorité peut changer les administrateurs nom
més par le fondateur, comme elle peut confirmer son
choix.
'
Si ce sont là des maximes de droit p u b lic, on ignox’e
où les appelans ont pu les puiser. La règle la plus cer
taine en matière de testamens, c’est que la volonté du
testateur fait la règle ; il n’est point permis d’aller contre
ses intentions; e t, lorsqu’il y a impossibilité dans l’exé
cution , le legs devient caduc et retourne à l’héritier.
V o ilà les vrais principes du droit public et social. L ’au
torité a scs lim ites: comme elle doit respecter les p ropi’iétés , elle est protectrice et non usurpatrice.
S’il est en usage parmi nous de dire que les fonda
tions sont de droit public , ce n’est qu’en ce sens , que la
société est intéressée à leur conservation ; mais elles ne
peuvent exister sans la sanction de ceux qui agissent en
cette partie au nom de la société. A l’époque de la fon-:
dation faite par la dame G a lie u , le legs ne pouvoit
avoir d’effet, qu’autant que la corporation désignée pour
le recevoir eût été revêtue et autorisée par des lettrespa tentes.
'
L ’iE u vre de la m iséricorde n’avoit aucune existence
légale. Voudroit-on même raisonner dans le sens le plus
favorable aux administrateurs ; ils conviennent qu’il falloit au moins l’homologation du parlement : ils ne sup
pléent à ce vice de forme , que par l’arrêté du gouver
nement, de l’an d ix ; et vouloir qu’un arrêté, postérieur,
E
�(
'
3
4
)
de treize années à l’ouverture du legs, puisse fa're re
v iv re une disposition caduque, lorsque les choses ne sont
plus entières, après une révolution qui a bouleversé
les fortunes , supprimé tous les établissem ens, c’est évi
demment donner u n effet rétroactif à un acte de simple
administration , qui n’a rien décidé sur la validité du
le g s , ou a présumé le consentement de l’héritier à en
verser le montant.
Il
est contre toutes les rè g le s, contre toutes les idées
reçues ,de prétendre qu’un legs dont l’effet s’est ouvert
en 1789 , puisse être réglé par les lois actuelles; qu’un
legs essentiellement nul dans l’ancien ordre de choses,
puisse être valable dans le nouveau ; qu’une libéralité
faite à l’Œ uvre de la miséricorde depuis 1785 , puis, e
être acceptée, dix-sept ans après, par un bureau de bien
faisance , dont la création est toute récente. Ce seroit
succéder avant de naître , ce seroit renverser l’ordre de
la nature.
E t le sieur C ip elle ne doit-il pas espérer la faveur de
la justice, lorsqu’il se trouve dans une position si dif
férente de celle qu’il avoit le droit d’espérer? L a fortune
de sa bienfaitrice n épi’ouvë une diminution si considé
rable depuis la révolution , qu’elle sufiiroit à peine pour
le remboursement des legs des trois classes. Etoit-ce là
l’intention de la testatrice ? eut-elle été aussi libéi’a le ,
si elle n’avoit pas été opulente?
E lle veut que les legs soient payés de la manière la
plus favorable à son héritier; elle ne suppose aucune di
minution dans ses revenus , qu’elle affecte spécialement
A l’acquittement des legs, pendant la m inorité de son lié r
�('35 y
ri lier. Si elle perm et de; ¡.vendre, quelques-im m eubles,
elle dés'gne les moins précieux ; encore a-t-elle.excédé
ses pouvoirs en ce poin t, parce que c’est éluder la dispo.sit'on des articles 1 4 , i 5 et 16 de l’édit de 1749.
- E t cependant, si le sieur Capelle pouvoit être tenu
d’i.rquitler le ; legs de 80000 f r . , il seroit dans l’indispen
sable nécessité de vendre tout ce qu’il possède, tout ce
qu’il a obtenu de la testatrice. O r , a-t-elle voulu le dé
pouiller ? L ’ institution universelle seroit-elle donc un
titre illusoire?
; '
.
D ’après ce3 considérations m ajeures, le sieur Capelle
doit-il s’occuper de ses demandes subsidiaires? Comme en
cour souveraine elles sont sans conséquence , et n’afloiblissent pas les moyens principaux , le sieur Capelle pro
posera quelques observations à cet égard.
L e bureau de bienfaisance , établi par une loi du 7 fri
maire an 5 , ne s’est pourvu qu’en l’an 10 pour obte
nir la délivrance du legs: il le demande en entier ; ce
pendant le capital de 20000 fr. destiné aux Frères maçédons, et pour l’éducation de la jeunesse, n’est point
dans les attributions du bureau de bienfaisance, qui est
spécialement et exclusivem ent chargé de la répartition
des secours h dom icile *, dès-lors il est sans qualité pour
réclamer la somme destinée à l’instruction.
20. 11 y a encore à prendre: sur le legs pareille somme
de 20000 f r ., dont le revenu est affecté au soulagement
des ecclésiastiques; le sieur C ap elle, dans tous les cas,
ne pourroit être obligé que de payer le revenu de cette
somme , sans qu’on puisse le contraindre à en verser le
principal.
�{ >Ù
v ''
( 3* )
3°. E t toujours dans l ’hypothèse que le surplus du '
legs pourroit être e x ig é , le sieur Capelle au moins seroit
autorisé à le payer en rentes sur l’état. Il seroit assez
extraordinaire qu’on voulût le contraindre à verser la
somme pour être em ployée par les administrateurs en ac
quisition de rentes sur l’état; ce seroit vouloir qu’il ver
sât les deniers dans les coffres du gouvernem ent, et certes
ce n’est pas là ce qu’a entendu la testatrice. Il faut d’ail
leurs se reporter à l’époque de l ’ouverture du testament
( 178 9) : alors , d’après l’article 18 de l ’édit de 1749 , les
gens de main-morte étoient dans l’interdiction d’acqué
rir autre chose1que des réntes constituées sur le r o i , sur
le clergé, diocèses, villes ou communautés; et l’article 13
de la déclaration du 20 juillet 1762, enregistrée au par
lement en 1 7 7 4 , autorise les héritiex-s et représentant des|
donateurs ou testateurs à donner, en pavem ent, desrernboursemens des rentes de la nature de celles dont il est
perm is a u x gens de jnain-m orte de f a i r e T a cq u isition ,
p a r Varticle 18 de Tédit de 1749. Ce subsidiaire, au
m oins, ne pourroit être i*efusé à l’in tim é; il a pour lui'
la disposition expresse des lois qui étoient alors en
vigueu r, et qui ont du r é g i r l e l e g s dont i l s’ a g i t .
40. L e sieur Capelle est encore le maître de distraire
la quarte falcidie sur une succession ouverte en pays de
droit écrit. O n sait que cette quarte est la quatrièm e
partie des biens de .l’hérédité ; qu’elle se prend eu égard
h la valeur des biens au temps du décès, et non à ce
qui est arrivé depuis, soit diminution ou augmentation.
L o i 30, lo i 73, ad J'a ie.
4 , au Cod.
T o u t héritier testamentaire ou ab intestat a lç droit
�ét(û ü )
( 37 )
^
(le la distraire, lorsqu’ il a été fait inventaire ; et, dans
l ’espèce , cette formalité a été remplie. E lle se distrait
des legs, quelle que soit leur nature; pour alimens, ou
à une com m unauté, ou pour legs destinés aux œuvres
publiques. L o i 6, adfaie. §. i, au Cad. Et le sieur GtpeLle
se réserve, dans tous les cas, de demander cette distraction,
s’il y a lieu.
5°. E n fin , p o u rro it-o n obliger le sieur Capelle de
payer ce legs sur le cham p? Il n’est point encore parvenu
à la majorité prévue par le testament; il n’atteint sa
vingt-cinquièm e année qu’en l’an 13 : d’après le testa
ment , il ne doit aucun intérêt jusqu’à cette époque ; 011
ne peut même exiger le principal. Il avoit conclu subsidiairem ent, en première instance, qu’il lui fût accordé
cinq ans pour le i-emboursement ; et on rend assez de
justice aux administrateurs pour croire qu’ils accéderoient
à cette modification.
Mais c’est trop s’arrêter à des subsidiaires auxquels
le sieur Capelle ne conclut qu’à toutes fins. Il n’est pas
un riche h éritier, et il étoit né pour l ’être. Pourquoi
donc vouloir lui ravir les foibles débris de la fortune
qui lui étoit destinée? D e quelle considéi'ation peut être
un legs de cette nature pour les besoins généraux d’une
classe aussi nombreuse ? c’est une goutte d’eau répandue
sur une vaste m er, et dont l’utilité ne sera jamais sentie.
Les bienfaits particuliers ne diminuent pas la pauvreté
générale. Toutes les affections nobles et généreuses
s’opposent à ce q u ’on dépouille un héritier légitim e,
sans nécessité pour l’ intérêt public. L 'hom m e d'état ne
s’occupe que de grandes choses, et connoît les abus des
E
3
�fondations particulières, qui absorberaient à la longue
toutes les propriétés. L 'h om m e religieux vient au secours
de ses semblables, et garde le silence sur ses bienfaits.
L 'h o m m e du monde pense que les fondations sont pres
que toujours des monumens de vanité et d’o rg u eil, et
les apprécié à leur juste valeur. L e m agistrat, impassible
comme la loi dont il est l’organe, prononce sans pré
vention sur les questions qui lui sont soum ises, et ne
fait point acception des personnes. C ’est dans le temple
de la justice que les h ommes sont véritablement égaux
-en droits.
r
s
M e. P A G E S ( d e R iom ) ancien avocat,
f
M e. M A R I E , avoué.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle, Pierre-Antoine-Urbain. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Pierre-Antoine-Urbain Capelle, propriétaire, habitant du lieu et commune de Saint-Constant, intimé ; contre les Administrateurs du Bureau de Bienfaisance de la ville d'Aurillac, appelans d'un Jugement rendu au Tribunal d'arrondissement de Saint-Flour, le 20 floréal an II.
Table Godemel : Legs : 4. un legs fait en 1785 aux pauvres de l’œuvre de la miséricorde, est-il fait aux pauvres ou à l’œuvre ? doit-il être classé dans les cas de prohibition prévus par les articles 1, 2, 9 et 10 de l’édit de 1749 ? est-il, au contraire, compris dans l’exception portée par l’article 3 de cet édit ?
La condition que ce legs ferait retour à l’héritier dans le cas de réunion de l’œuvre, soit à l’hôpital général, soit à tout autre hôpital, est-elle une preuve que le legs était fait à l’œuvre et non aux pauvres de l’œuvre ?
la réversion s’est-elle opérée dès le moment où le gouvernement a cumulé les revenus de toutes associations corporatives et administratives d’hospices ?
Legs considérable devant aller en partie à l’œuvre de la miséricorde à Aurillac. La Révolution survint et les biens des congrégations sont saisis. Le bureau de bienfaisance créé à Aurillac demande la délivrance du legs fait à l’œuvre de la miséricorde
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1785-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1311
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53200/BCU_Factums_G1311.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Saint-Constant (15181)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
legs
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53201/BCU_Factums_G1312.pdf
7e43d4f6015970ff64e8733a1d15c044
PDF Text
Text
4»
MÉMOIRE A CONSULTER
E T
CONSULTATION
PO UR dame F l e u r i e t t e - L o u i s e - F r a n ç o i s e
D ’A R G O U G E S , veuve d’Antoine-Philippe
de la Tremouille-Talmond;
CONTRE le Directeur de la Régie de l’Enregistrement et des Domaines.
M a r i e - S uzan n e - F rançoise d 'A rgou ges mourut à Paris le
9 brum aire an 2.
Son héritière fut madame de Talm ond , qui accepta la suc
cession , prit qualité dans l’inventaire fait à sa requête, et se
trouva dès lors en possession, de droit, des biens héréditaires.
'
�[
( 2 )'
Elle acquit également la possession de fait de ces b iens, nonobs
tant son inscription sur la liste des émigrés.
Madame de Talm ond avait en effet réclamé contre cette ins
cription aussitôt qu’elle en avait eu connaissance. Les motifs
qu’elle fit valoir furent d ’une évidence si frappante , qu’elle ob
tint sa radiation provisoire dans le mois de vendémiaire an 4Mais l ’injustice de son inscription était tellement notoire,
que l ’on n’avait mis aucun séquestre sur les biens de madame
d ’Argouges.
Sa radiation provisoire confirma sa possession de fait -, elle
continua sa jouissance.
L a loi du 19 fructidor an 5 l ’obligea de sortir de F ran ce,
'p a r suite de la mesure générale qui'atteignit tous les prévenus
d’émigration sans distinction.
L e séquestre fut alors apposé sur tous ses biens , en con‘ formité de la circulaire du ministre des finances, du 27 fruc
tidor ; alors seulement les immeubles de la succession de ma
dame d ’Argouges furent frappés du séquestre.
»
Parmi ces immeubles se trouve la terre de Mézières , située
dans l’arrondissement de Blanc, département de l ’Indre.
L e fondé de pouvoir de madame de Talm ond n’avait point
fa it, dans le tem s, la déclaration prescrite pour le paiement
des droits de mutation -, et les orages révolutionnaires , h la
suite desquels il p érit, l ’en empêchèrent vraisemblablement.
Madame de Talm ond ignorait cette omission , e t , pendant tout
le teins qu’elle a joui de ses b ien s, la régie des domaines
n ’a fait aucune démarche pour l ’en avertir.
Par l’effet du séquestre , le préposé de la régie a administré
ses propriétés , pendant environ trois ans, sans faire lui-même
cette déclaration.
L a radiation définitive de madame de Talm ond ayaut enfin
�•***
(3)
été prononcée, elle'est rentrée en possession le premier flo
réal an 8.
C'est depuis, après sept années d ’un silence absolu, et sous
la date du g frimaire an g , que la régie des domaines a dé
cerné contre madame de Talm ond une contrainte de ig , 4 i 9
fr. , pour le droit simple résultant de la déclaration à fournir
pour les biens de la succession de mademoiselle d’A rgouges,
situés dans l’arrondissement de Mézières.
Cette contrainte a été visée par le juge de paix de M ézières,
le x x frimaire an g.
L e même jour , elle a élé signifiée au domicile de madame
de Talm ond à C orbançon, avec commandement.
Le
du même m o is, nouvelle contrainte pour la même
somme et le mèjne objet.
L e x4 , visa du juge de paix de Mézières.
L e 3 nivôse suivant, signification au domicile de madame
de Talm ond à Paris.
L e 6 germ inal, elle a formé son opposition motivée. Toutes
poursuites de la part de la régie ont resté suspendues jus
qu’au 2 germinal an io.
A celte époqu e, madame de Talm ond a été cités devant le
tribunal de première instance de Blanc / en déboutement de
son opposition.
La régie a même , par son exploit, amplié sa demande
primitive ; elle préleud aujourd’hui faire condamner madame
de Talm ond au paiement du demi-droit en su s, et en con
séquence, au liou de i g ,4.19 fr. , elle réclame la somme de
a 7 ,186 fr.
Jugement par défaut , ajljudicatif des conclusions prises par
la régie, sous la date du iG lloréul an xo.
�( 4 )
Opposition à ce jugement d e l a rpart de madame d e-T a lmond.
L ’instance est liée , et il s’agit de faire prononcer.
Madame de X’alinond oppose à la demande de la régie deux
fins de non-recevoir établies sur la prescription que la loi pro
nonce , et quo la régie a encourue.
L a loi du 22 frimaire an 7 contient sur ce point des dispo
sitions précises. L ’article 6 est conçu en ces termes :
« Il y a prescription pour la demande des droits, après cinq
années , ¿1 compter du jou r du décès pour les successions nondëclarëes.
« Les prescriptions ci-dessus seront suspendues par des de« mandes signifiées et enregistrées avant l ’expiration des délais.
< Mais elles seront acquises irrévocablem ent, si les poursuites
« com mencées sont interrompues pendant une a n n é e , sans
«. f/u’il y ait d'instance devant les ju g es com pétèns , quand
« môine le premier délai pour la prescription ne serait pas ex« pire. »
On soutient que la régie a encouru la déchéance de son
action sous ce double l’apport.
D ’une p a r t, le droit de mutation était ac juis à compter du
jour du décès de mademoiselle d ’A rgou ges, époque de l ’ou
verture de la succession.
O r , du 9 brumaire an 3 , au 9 frimaire an 9 , il s'est écoulé
s ix ans et onze mois. La prescription de cinq ans était donc
acquise..
D ’autre part , la régie a même encouru la déchéance irré
vocable de son action, en ne faisant aucunes poursuites sur
�4 V
(3)
son commandement du 12 frimaire an g , et en laissant éconlev ,
depuis cette cpocjue jusques au 2 germinal an 1 0 , date de sa
demande ju d iciaire, un délai de quinze mois et vingt jours ,
c’est à dire trois mois et vingt jours au-delà du terme ilxé
par la loi.
Les dispositions de la loi sont trop précises pour étrç mé
connues.
Les faits sont certains, et ne peuvent ctre désavoués.
L ’exception proposée mérite toute la faveur duc à un moyen
légal , qui tend à repousser une action rigoureuse , et en faveur
d ’une mère de fam ille, déjà trop infortunée, à qui, les évène*
mens de la révolution ont enlevé les objets les plus chers, à
son cœ u r, une fortune considérable, le repos qui la fuit de
puis dix a n s, l ’espoir même d ’une existence conforme à scs
habitudes et à ses. besoins.
A ces principes , à ces faits et à ces considérations , la régie
oppose , pour toute défense , que la prescription a été inter
rompue par le séquestre apposé sur les biens de madame de
Talm ond, Supposant que ce séquestre aurait opéré la confis
cation des b ien s, elle soutient que le receveur du domaine
n’a pu faire une déclai'ation sur des biens acquis à la nation
et qui n’ont appartenu à madame de Talm ond que depuis sa
radiation définitive.
L a régie n’a proposé encoi’e aucun moyeu de défense sur la
déchéance qu'on lui oppose.
C ’est en cet état de choses, d ’après les faits et les moyens
réciproquement allégués, que madame de Talm ond dçmaude
l’avis de ses Conseils.
�I
( 6)
CONSULTATION.
\
V u ' le mémoire ci-dessus et les pièces y jointes,
L E COIS S El L SOU SSIG N É estime que la résistance de madame
de Talm ond aux prétentions de la régie est fondée sur des moyens
de droit et sur des considérations extrêmement favorables. L e
texte précis de la loi du 22 frimaire an 7 justifie les fins de
non-recevoir qu’elle oppose , et ne peut être éludé par les faits
dont on cherche à so prévaloir.
Discutons séparément les deux moyens.
Quant au premier , il est incontestable ,
En principe , que la régie encourt la déchéance pour le
paiement des droits de m utation, après cinq ans , à compter,
du jour du décès.
En fa it, qu’il s’est écoulé plus de cinq ans depuis le décès
de mademoiselle d ’Argouges jusqu'à l ’époque du premier
commandement.
La ré"k‘ ne peut nier le principe.
Elle n’échapperait à son application qu’en prouvant qu’il
11e s’est pas écoulé cinq ans depuis le moment où il y a eu
ouverture au paiement des droits.
C ’est ausii là le but de scs efforts.
�4**
(7)
Son système se réduit à confondre l'époque à laquelle il y
eut ouverture au paiement des droits par le décès de made
moiselle d ’ A rgougcs, et par la translation de la propi’iété sur
la tête de l ’iiéritière , avec l ’époque où madame de Talm ond
a été irrévocablement maintenue dans son titre de propriété.
Suivant ce système , le paiement des droits a dû avoir lieu
non à l ’époque du décès , mais à l’époque où H iérilier a été
définitivement rayé de la liste des émigrés.
L a régie le prétend a in si, parce qu’elle suppose que l ’ins
cription sur la liste a dépouillé madame de Talm ond de ses
biens pour en investir la nation.
D ’où l ’on conclut que les droits n’ont pu cire payés à la na
tion par ses propres agens, et qu’il n’a été, dès lors , nécessaire
de faire des poursuites qu’au moment où la nation s’est désinvestie de ces propriétés pour les céder à madame de T a l
m ond, réintégrée dans ses droits politiques et civils.
L e résultat de cette prétention est de faire établir
Que la prévention seule d ’émigration a opéré la confisca
tion •,
Q u’elle a dépouillé de leurs biens les propriétaires l’éputés
émigrés , malgré leurs réclamations solem uelles, leur radiation
provisoire , et l’adoption définitive de leurs réclamations.
Que la restitution des biens aux prévenus d ’émigration étant
un acte spontanée de bienfaisance, non un acte rigoureux et
indispensable de justice, les droits de l'émigré ne peuvent
commencer qu’à l'époque où la restitution a été consentie par
un acte public et irrévocable.
T o u t est erroné dans ce système , et principalement dans
l ’application que l'on veut en faire à la consultante.
Les faits particuliers de la cause la repoussent.
Les principes s’élèvent contre une prétention opposée aux
�(8 )
premières règles de la m orale, de l'équité , d ’une sage poli
tiq u e, et. aux dispositions littérales de toutes les lois rendues
sur la matière.
i°. Et , d’abord , il n’est point exact de dire en fait que
madame de Talm ond n’a été investie de ses droits et de sa
propriété q u ’à l ’époque de sa radiation définitive.
Il est certain , au contraire , que la propriété des biens lui
a été transférée par tous les moyens qui pouvaient en opérer
la transmission et la consolider.
A u jnoment di,i décès , elle appréhende la succession par
les actes q u i, suivant l’usage, investissent l ’héritier , constituent
son acceptation , consomment la m utation, et rendent le suc
cesseur passible de toutes les charges d ’une hérédité , eu même
tems q u ’ils lui en acquièrent tous les avantages.
Ces actes sont la réquisition du scellé, la confection de l ’in
ventaire, l ’acceptation expresse de la qualité d 'h éritière, la
prise de possession des biens de la succession.
Ces actes sont de telle, nature, ils sont si bien constitutifs
du droit de propriété, ils sont tellement irrévocables , indépendans des évènemens u ltérieurs, personnels à l’héritier, et
favorables aux tiers, que , dans aucun tems , madame de Tâlmond ne serait admise à répudier l ’hoirie qu’elle a ainsi ac
ceptée •, qu’elle est pour toujours tenue des dettes •, qu’elle n’eût
pas été admise à délibérer à l ’époque de sa radiation défini
tive -, qu’elle ne pourrait argumenter de l'interruption qu’elle
a éprouvée dans sa possession; en un m ot, que ses.droits et
ses obligations prennent leur source dans la transmission pri
mitive et réelle qui s’opéra à son égard au moment du décès
de mademoiselle d ’Argouges.
T o u t a concouru d ’ailleurs à confirmer cette investiture de
propriété.
�(9 )
Depuis le 9 brumaire an a , jusqu’en l ’an 6 , la terre Je
Mézières n’est point mise sous le séquestre^ quatre ans s’écou
lent sans que la possession de la consultante soit troublée.
Sa radiation provisoire , prononcée au mois de vendémiaire
an 4 , consolidé sa jouissance.
Dès 1793 , le ministre des finances avait défendu l’aliénation
de ses biens séquestrés. Cette m esure, que l ’on a malheureuse
ment meconuue pour ses biens propres , dont une grande.partie
a etc aliénée, nonobstant les défenses/indique assez l'opinion
q u ’avait l’autorité de l ’injuste prévention d ’émigration qui
pesait sur sa tête.
Cette mesuré m ettait, à plus forte raison, hors de la main
mise nationale les biens qui n’ avaient pas même été frappés
du séquestre.
'
jt.
El s i, en l ’an 6 , par suite de la mesure générale prise envers
tous les prévenus d ’émigration, les biens provenant de la suc
cession d ’Argouges furent compris dans le séquestre, la lettre
du ministre des finances , du 27 fructidor an 5 , qui provoqi a
cette formalité , annonça suffisamment qu’elle n’était que pro
visoire , momentanée, et à litre purement conservatoire.
Observons en passant qu’elle devait l’être , d ’autant plus que
nulle disposition de la loi du 19 fructidor an 5 ne l ’avait
ordonnée à .l’égard des prévenus porteurs de radiation provi
soire , et que cette disposition, purement ministérielle , déjà in
compétente et hors du cercle des attributions du m inistre, n’a
jaïnais pu acquérir la force et la stabilité d ’un acte législatif.
Peut-on dire , lorsque des faits de cette espèce sont constatés,
que madame de Talm ond n’a été investie de sa propriélé que le
premier floréal an 8 ? E li! comment pouvait-elle l ’être pour
que la transmission s’opérât d’une manière plus certaine, plus
solem uellc, plus légale? Eùt-elle été autrement investie de ses
a
�d ro its, et posséderait-elle à tout autre titr e , si le séquestre
n’eût jamais éié apposé sur ses biens? Lui contesterait-on au
jourd’hui sa qualité d ’h éritière, son acceptation form elle, son
investiture de d r o it, et sa possession de fait ?
Les évènemens ultérieurs ont pu troubler sa jouissance , mais
ils n’ont pu effacer un fait positif. Ce qui a existé peut cesser
d ’ètre ; mais rien ne peut ’aire que ce qui fut n ’ait pas existé.
E t , dès lors , tout ce que l ’on peut d ir e , c’est que la posses
sion de madame de Talm ond a été interrompue-, que son droit a
été suspendu ; qu’il lui a été momentanément ravi pour lui
être rendu ensuite ; qu’elle a été privée des biens de la suc
cession d’A rgouges, comme elle l’a été de ses biens personnels,
dont on ne peut pas soutenir que la propriété ne lui fût plei
nement acquise avant le séquestre.
Cela étant, le tems de la déchéance a nécessairement couru
au préjudice du fisc*, et pour le dém ontrer, il nous reste à éta
blir que l ’apposition du séquestre n'a pu suspendre la prescrip
tion. C ’est le moyen principal de la légie qu’il faut attaquer
dans sa b ase, et dans toutes ses conséquences.
2°. Dans le système de la régie , la déchéance ne serait
point encourue , parce qu’on suppose que la nation a été pro
priétaire des biens de mademoiselle d ’Argouges jusqu'au
premier lloréal an 8 , époque de la radiation do madame de
Talm ond.
Nous disons , au contraire , que la propriété et la possession
de madame de Talm ond ont pris leur date au moment du décès ;
mais ou ne peut disconvenir que cette possession a été inter
rompue de fait pendant le séquestre.
L a question se réduit alors à savoir si le délai de la dé
chéance n'a commencé qu’après la main levée du séquestre,
ou si l’apposition intermédiaire du séquestre a interrompu les
�•M l
( ” )
délais -, si madame de Talm ond n ’a jamais acquis la pro
priété , ou si elle en a clé dépouillée par l’effet de la mesure
qui lui en a enlevé momentanément la possession.
'
Sous les deux rapports , la question est la même -, il s’agit tou
jours de savoir si la main mise nationale sur les biens d ’un pré
venu d ’émigration est une véritable confiscation.
Nous sommes bien loin de le croire; et pour démontrer le con
traire , il suffit d’exposer les principes reçus de tous les tems sur
les confiscations, les dispositions des lois relatives aux émigrés ,
la jurisprudence établie sur ce point contre la régie , la propre
opinion de la régie elle-même, manifestée par la conduite de scs
agens.
D ’après les principes, il ne peut y avoir lieu à confiscation
qu’autant qu’il y a prononciation d ’une peine contre le coupable,
emportant mort civile.
O r , il est constant que la mort civile n ’a lieu qu’au moment
de la condamnation prononcée et exécutée , ou après les cinq
ans de la contumace. C ’est cc que nous attestent tous les auteurs ,
et notamment Le prêtre , cent, i , cliap. 84 ", Lacoinbe, en ses
matières crim inelles , part. 1 , n°. 24 ; et Lebrun , T ra ité des
S u ccessio n s, liv. 1 , chap. 1 , sect. 3 , qui rapporte à ce sujet un
arrêt soleinncl du parlement de Paris , du 24 mars i 6 o 3 .
)
On connaissait bien , dans la jurisprudence française, des
cas où la morl civile était encourue par le seul fa it, lorsqu’il s’a
gissait, par exemple ,.des crimes de lèse-majesté , de d u el; de
parricide , etc. On pensait, à cet é^ard, non que la conviction et
le jugement ne fussent toujours et dans toutes les circonstances
d ’absolutinécessité, mais seulement que l’accusé étant convaincu,
les effets de la mort civile remontaient au jour où le crime avait
�( 12 )
été commis, et que la mort iüême (lu coupable ne pouvail le sous
traire à un jugement.
De là , cet!e maxime établie par Loyscau , en son T raité des
O ffices , liv. i , cliap. i 3 , n°. 5 o .• qu ’en France nul n ’est in
fâm e ipso jure •, mais c ’ est une règle "endraie que tout ce
qui avait heu ipso facto , et ipso jure au droit romain , re
quiert à nous sentence de'claratoire.
D e là , les règles éïablies par l'ordonnance de 1670, titre 2 2 ,
poxir.faire le pi’ocès au cadavre ou à la mémoire de l'accusé d'un
crime capital.
Ces principes sont fondés sur les premières inspirations de l ’é
quité naturelle , consacrée par le droit positif. Une accusation
ne peut jamais opérer l’eiFet d ’une conviction légale. Le soupçon
qui peut atteindre avec une égale facilité et le criminel que la no
toriété publique accuse, et l ’innocent que la haine , la calom nie,
et des indices trompeurs peuvent injustement diffamer ; ce soup
çon , qui provoque les recherches, qui appelle la justification, qui
autorise les rigueurs , qui nécessite un jugem ent, n’est pas luimême un titre absolu de condamnation, et par conséquent un titre
de peine.
Aussi voyons-nous que toutes les lois ont protégé , avec une
égale sollicitude , le maintien de l ’ordre public et l ’élat civil des
citoyens. Elles poursuivent l’accusé , mais elles ne flétrissent que
le coupable. Elles impriment à l’opinion définitive du magistrat
le caractère d elà vérité, mais elles autorisent lon^-’. emsle doute.
L e jugement môme reste sans effet, si l ’accusé meurt avant son
exécution. L ’absence du coupable appelle aussi dos mesures d ’in
dulgence , et le tenis que la loi lui donne pour se représenter et
sc défendre appartient tout entier aux présomptions de l'inno
cence.
�, ( ,1i 3 )
Ce sont les mêmes principes de raison et d ’iiumanilé qui ont de
tous les tems ré.,i les questions relatives aux coniiscations.
L à législation romaine a'jsur ce po^nt des règles que nous
avons adoptées , comme les érhànations de la sagesse , qui fit ap
peler le droit romain la raison écrite.
Un accusé était absent : ses biens étaient annotés : mais s’il se
représentait, et était absous , ses biens lui étaient rendus. L . i ,
et 5 fTT. de requir. v e l absent. damnai. — h . i , a et 4. — Cod. de
requir. reis.
,n
1
Pendant cette main mise de l ’autorité publique, tout était en
suspens ; et bien loin de considérer cette'mesure comme une
pein e, la loi ne la présentait elle-même que comme une invitation
à l ’accusé de venir se justifier : Cu n absenti reo , nous disent les
lois, gravia crimina intentantur, sententia festin a rin o n s o lc t,
sed annotari, ut requiratur , non utique ad pœ nàhï , sed ut
potestas c i sit purgandisc', si-potuerit.'
Aussi conservait-il tous les caractères du citoyen et du père de
famille pour les biens dont le fisc ne s’était pas donné l ’adminis
tration.
Aussi, la prescription , qui ne peut jamais avoir lieu lorsqu’il
s’agit d ’une confiscation absolue , avait-elle lieu pour les biens
sujets à Y annotation, et que le fisc n'avait pas revendiqués,
ainsi qu’on le recueille de la loi 2 , § 1 , cod. de requir, reis.
Cette annotation n’était que l ’eflet de l'absence , et ne précé
dait jamais la condamnation , quand l’accusé se présentait pour
se défendre.. Dans ce cas , la loi lui laissait l’administration de
tous ses biens : ni reatu constïtutus bona sua adrninislrare po
te si' ; eique debitor rectè bond fu ie j olvit. — L. 46 , § 6 , ff. de
ju re fisci.
|
¿Tous «es actes étaient valides à l ’égard des tiers.
�( *4 )
L e débiteur se libérait valideraient en ses mains. L . 4 *, ff. de
solut.
L e créancier avait le droit de le ppursuivre. L . 4 ^ , ff. cod.
Ces maximes ont é té , comme nous l ’avons d it, adoptées par
notre jurisprudence, et appliquées surtout aux confiscations.
Il a toujours été l'eçu parmi nous que la confiscation n ’était
acquise d ’une manière définitive et irrévocable qu’en vertu d ’une
condamnation prononcée et meine exécutée , tellement que les
biens du condam né, mort dans le teins intermédiaire à Ja pro
nonciation et à l’exécution , n ’étaient point soumis à la confisca
tion. C ’est ce qu’ont jugé les arrêts rapportés par Larocheflavin ,
liv. 6 , titre a 3 , art. 5 , et par M eyn ard, ltv. 4 t cliap. 52.
L ’article 28 de l ’ordonnance de Moulins , en déçlarant le con
dam né, par jugem ent, dépouillé de ses biens, voulait cependant
que les cp\iiiscataires ne pussent en. disposer pendant les cinq ans
de îa contumace. Alors seulement, et après l ’expiration de ce délai,
la propriété était consolidée dans leurs mains.
L ’ordonnance de 1G70 a été plus loin encore :
L ’article 3o du titre 17 veut que, pendant les cinq ans de la
contumace, les.confiscataircs se bornent à percevoir les fr u it$ et
revenus des biens des condamnés, et n e puissen t s'en mettre en
possession.
Par l’article 3 i , le législateur s’interdisait à lui-même le don
de tous les biens confisqués pendant le même délai.
E t , enfin , l ’article 3 a veut qu’après le délai de la contumace
les confiscataires 11e puissent se mettre en possession effective des
biens qu*après s*être pourvus en ju stice pour en obtenir la per
mission , et après avoir fait faire un procès-verbal de l ’état de
tous les biens confisqués.
Notre législation a môme été sur ce point plus indulgente que la
loi rom aine, qui maintenait la confiscation, après l ’exp rU u m
�( 15 )
du délai d ’un an , lors même que l ’accusé parvenait à se faire
absoudre , post sententiam latam et cinnam, in pcenam contumacice.
Mais de toutes ces lo is, dont les différences sont peu impor
tantes à relever i c i , résultent ces points certains et fondamen
taux pour toutes les législations d ’un peuple sage , humain et
éclairé:
Q u ’il ne peut y avoir de mort civile sans un jugement ;
Q u’il ne peut y avoir lieu à confiscation sans qu’il existe de
mort c iv ile ,
E t , par conséquent, sans qu’il soit intervenu un jugement qui
applique celte peine.
C ’est ce que Loyseau nous atteste dans son T ra ité des Offices,
liv. 1 , chap. i 3 , n°. 92 et suivans.
1
C el auteur, examinant ’toutes les questions relatives à l ’accu
sation qu’on peut intenter contre un officier, soutient que nonseulement la confiscation de l ’oflîce 11e peut être que la suite
du jugement , mais il nous donne aussi pour maximes :
i°. Que la suspension même de l ’officiér pendant l ’accu
sation n’entraîne pas note d]infam ie, e t , à plus forte raison ,
privation des droits civ ils , dans lesquels il faut mettre au pre
mier rang le droit de propriété;
3°. Que l ’infamie résultant d’une amende 11e résulte pas de
la peine en elle-même , mais de la conviction acquise par
la condamnation : non milita , sed causd , dit la loi , ff. de
pœ nis.
Ces principes , applicables à toutes les espèces de délits , ne
Sont point étrangers à celui de l ’émigration.
M ille circonstances peuvent ¡.jouter à la sévérité des peines
contre ce délit politique. Rien ne peut en rendre l’application
arbitraire, barbare, et contraire aux premiers sentimens de la
�( '6 )
morale et de l ’humanité. L a poursuite de ce délit egt subor
d onnée, .comme celle de t us !es a u t'e s .a u x formes protectrices
de l'innocence, aux règles de prudence et de circonspection, q u i,
sans blesser, les intérêts d ’un gouvernement qui veille à sa con
servation , respectent et protègent les droits de tous les citoyens,
dont eljes sont la garautie.
Nous ne devons pas aller chercher dans les anciennes législa
tions les règles qui doiyent nous gouverner aujourd'hui sur
cette matièip ; nous les trouverons toutes dans les lois rendues
depuis 1792.
Ce n’est pas que les lois antérieures ne pussent nous offrir des
principes d'une vérité éternelle, et des exemples utiles à ap
pliquer.
Nous verrions dans les états libres des tems anciens l ’érrçigrar
tion d’un citoyen rangée au nombre des droits attachés à sa* qua
lité d ’honune libre.
Athènes donnait à ses citoyens le droit d ’examiner les lois et
les coutumes , de s’éloigner et d ’emporter leurs biens,
,
Rome république proclam ait, par l ’orgaue de C ic é ro n , ce
droit de tous les citoyens, comme la plj.is belle prérogative des
membres d ’un état conseryateur des véritables maximes de la li
berté : O Jura prœclara.... ne quis in civitate maneat invitus.
Ou sent aisément qu’à ces époques la législation ne pouvait
que marcher d'accord avec les maximes de la politique, et que
des peines telles que la mort, civile et la confiscation ne pou»
vaient être appliquées à l’usage d ’un droit naturel, respecté çt
autorisé.
M a is, lors même que les principes politiques changèrent avec
la constitution de l ’état , les peines prononcées contre l ’éipigration ne furenj; jamais étendues jusqu’à entraîner, la. mort çivile de l ’absent.
<
1
�4
<i>>
( «7 )
Même , en distinguant l’émigration p er fugam , qui n’était
autre chose qu’un changement de dom icile, de la fuite vers
l ’ennem i, qui constituait la trahison et l’état de révolte , malo
consilio et proditoris animo , les lois n’avaient prononcé, dans
l ’un et l’autre cas, que la privation des droits de cité, civitatem
etfam iliam . C ’était la peine connue, dans le d roit, sous le nom de
mediam capitis diminutionem , qui n’entrainait d ’autre consé
quence que celle de la peine connue sous le nom de aquœ. et
ignis interdictio.
Rome , maîtresse du monde par ses armes et par ses lois , ne
comptait pas le nombre de ses ennemis. Sa majesté ne pouvait
être offensée par l ’abandon de quelques individus , dont la dé
sertion lui paraissait excusable , si elle n’était pas crim inelle, peu
redoutable, si elle était le fruit de la rebellion , e t , dans tous les
cas , indifférente pour le salut du corps politique. Elle se bornait
à ne plus regarder comme citoyen celui qui voulaitcesser de l ’être,
même celui qui se présentait comme son ennemi. M ais, dans toutes
les hypothèses , la privation du droit de cité n’allait point jus
q u ’à dépouiller un particulier de la faculté d’acheter, de ven dre,
de donner et de passer tous les contrats qui dérivent du droit des
gens. C ’est ce qu’annonce clairement la loi i 5 , ff. de interdict. et
relegat ; et c'est ce que Cujas a savamment démontré dans sa dis
sertation 9 , liv. 4 >sur la loi 19 , $ 4 * ^ de Capt. etc.
Ainsi , dans le droit romain , point de mort civile dans le cas
d ’émigration reconnue et de rébellion ouverte. A.plus forte rai
son ne l’eût-il pas autorisée sur une simple accusation, sur des
soupçons vagues , et malgré les réclamations du citoyen accusé
de de ection ou de révolte contre son pays.
Notre ancienne législation française 11e contient aucune loi
précise' contre l'émigratlon. C e n’est pas que des exemples, fa
meux n’aient présenté au législateur cette importante question à
3
�résoudre , et que des circonstances difficiles , telles quo celles- qui
suivirent la révocation de l ’édit de Nantes , n ’eussent dû appeler
sa sollicitude et môme sa sévérité. «Mais , comme l’observe M. de
« Bret dans scs plaidoyers / liv . 3 , décis. 7 , il est permis aux
« Français d’aller chercher une meilleure fortune , en quoi con« siste principalement la liberté naturelle des hommes -, et de là
« vient (ajoute ce magistrat) que les anciennes formules des con« cessions qui se faisaient de la liberté, contenaient ces paroles ex« presses : eam denique pergat partent quantumque volens,
i< elcgcrit.y>
Aussi tous les auteurs nous attestent que nulle peine n’a ja
mais été portée en France contre ceux qui vont demeurer en
pays étranger. On peut consulter sur ce point B acquet, T raité
du droit d’A u b a in e, chap. 4 ° > n°. 4 > C h o p in , du D om aine
de la F r a n c e , liv. 2 , tit. 2 , n°. 29-, P ap ou , not. 3 , liv. 6-,
titre des L ettres de N atu ralitê , etc. , etc.
Cependant, lorsque, dans des cas graves , le ministère public
s*est élevé contre des Français accusés de s’être rendus coupa
bles de rebellion et de félonie , en passant à l ’ennem i, 011 a tou
jours tenu en principes que l ’accusation seule, que les jugemens
mêmes qui ordonnaient des saisies et prononçaient des décrets
de pi'isc-dc-corps, ne pouvaient entraîner ni mort civile , ni
confiscation -, c’est ce qui fut reconnu dans l'affaire célèbre du
cardinal de Bouillon, lors des arrêts rendus en 1710 et 1711.
Les biens du cardinal avaient été saisis, et tous ses revenus sé*
questrés ; mais 011 regarda ce séquestre, non comme une confis
cation absolue , qui ne pouvait être le résultat que d’un juge
ment définitif, mais comme une simple saisie-annotation , dont
reflet , suivant le droit f n’est autre que celui d'une mesure
provisionnelle, conservatoire, qui 11e dépouille pas de la pro
p riété, et ne la transporte point au saisissant) et observons ca-
�4 ^
.
( «9 )
core que , dans ce cas , il ne s’agissait pas seulement d ’un
simple abandon de domicile , d ’ une fuite momentanée que
d e malheureuses circonstances pouvaient justifier ; il s’agissait
de la prévention d ’un crime de lèse-majesté , pour lequel la
confiscation remonte au teins du délit.
Ces maximes tutélaires de l ’innocence, ces lois qui ne sont
que l ’expression de la justice naturelle, ne sont point étran
gères aux dispositions que les évènemens de la révolution out
entraînées contre les émigrés. Notre b u t, en rappelant des vé
rités reconnues par tous les gouvernemcns, des principes essen
tiellement attachés à la législation de tous les peuples civilisés, -a
été de démontrer que tel est leur em pire, q u e , malgré la sé
vérité de notre code pénal contre les ém igrés, on ne les a pas
même méconnus en France à une époque où le choc de toutes
les passions exagérées devait étouffer le langage de la raison
et de la justice.
Les lois rendues depuis 1792 contre les émigrés sont extrê
mement rigoureuses. Mais nous osons dire qu’elles le paraissent
bien davantage encore par la manière dont on a souvent voulu
les exécuter , que par leurs dispositions littérales prises dans
le sens qu’elles doivent a v o ir, et dans les conséqueuces qu’elles
doivent entraîner.
L a régie des domaines en donne dans cette cause un dé
plorable exemple : elle veut faire juger par les tribunaux que
le séquestre apposé sur les biens d ’un prévenu d ’émigralion
doit avoir le même effet qu’un jugement de confiscation ) de
telle sorte qu’en cette matière l’accusation seule doit être assi
milée à un jugement de p ein e, et devenir un titre de convic
tion.
C e système résiste, comme 011 le v o it, à toutes les lois
naturelles et positives ; mais il est diamétralement opposé aus*
�aux lois de la m atière, qui sc trouvent précisément cîdquées,
à cet égard , sur les usages de tous les lems et de tous les lieux.
L a loi du 27 septembre 1792 fut la première qui prononça
la confiscation et la vente des biens des émigrés.
L ’article 6 de celle du 38 mars 179^ définit ce que l’on
entend par émigrés : elle annonce que ce sont les Français qui
ont quitté le territoire de la république depuis le premier
juillet 1789, et ceux q u i, absens de leur domicile, ne justifie
raient pas de leur résidence en France depuis le 9 mai 1792.
L ’article premier du titre premier de la loi du a5 brumaire
an 3 contient les mêmes dispositions. Elle prononce ensuite les
mêmes peines contre les coupables.
Mais de ces dispositions générales contre les émigrés , de la
fixation des mesures répressives ou afllictives déterminées contre
•un délit caractérisé par la lo i, il ne s’ensuit pas que leur applica
tion ait dû être faite d ’une manière absolue, arbitraire, sans exa
men , et sans aucune espèce de recours de la part des individus in
justement accusés. On 11e peut pas le dire davantage des lois sur
l ’émigration , qu'on n’oserait le soutenir de toutes les lois pénales
q u i, en prononçant sur tous les crimes qui peuvent troubler
l’ordre social, n ’ont jamais entendu que leur rigueur s’éten
drait , ipso fa cto et sans conviction , sur tous les malheureux
qu’une accusation capitale menacerait de leur application.
T o u t ce qui résulte des dispositions qui ont prononcé les
peines de bannissement, de mort civile, de confiscation contre
les émigrés , c’est que ceux qui seraient reconnus coupables d ’un
délit jusqu’alors inconnu et alors caractérisé, subiraient le sort
qu’ ils auraient encouru par leur désobéissance.
C e «pie l’on peut en conclure encore, c’est que , dans la pour
suite de ce délit, la loi a manifesté une sévérité plus grande que
pour tous les autres. Notre code pénal n ’oifrait point encore
�A«) >
'( 21 )
d’exemple d ’une saisie des biens de l’accusé , à l ’instant même
de l ’accusalion , et d ’une privation de ses revenus pendaut l ’ins
truction du procès : on n'avait jamais prononcé l ’interdiction pro
visoire des actions civiles contre un prévenu constitué in rcatu.
M ais, de ce que les mesures dans la poursuite ont été plus sé
vères , on ne peut en induire que leurs effets doivent être ab
solus et assimilés à ceux d ’un jugement contradictoire, sans
lequel il ne peut y avoir de conviction légale, et de condam
nation définitive.
Les lois mêmes que l’on invoque établissent, au contraire,
comme positives ,
L a possibilité d ’uue accusation injuste ;
L a faculté de réclam er;
L a réintégration de l ’accusé dans tous ses droits politiques et
civils provisoirement suspendus.
La loi du z 5 brumaire an 3 contient un titre exp rès, re
latif a u x réclamations contre l ’ inscription sur la liste.
Les articles 17 et 18 du titre 3 fixent les délais dans les
quels les réclamations doivent être faites.
L ’article 20 porte qu’/Z ne pourra être procédé à la vente
des m eubles et immeubles d es citoyens portés sur des listes
d’ émigrés , avant le jugem ent de leurs réclamations fa ites
en terns utile.
Les articles 2 1 , 22 et 23 déterminent le mode de jugement
sur les réclamations.
«
«
«
«
L ’article 26 veut que «les décisions du comité de législation soient exécutées sans, recours , soit qu’elles prononcent
la radiation , soit qu'elles renvoient aux tribunaux criminels
pour l’application des peines , soit qu’elles l’ejelleut les demandes. »
�.W
*\
( aa )
Les articles 27 et 28 déterminent le mode de publication
des jugeinens de radiation.
L ’article 3o et autres statuent sur les réclamations formées
à l ’époque de la promulgation de la loi.
L ’article 33 ordonne la réintégration dans leurs biens de ceux
qui seront rayés.
'
Enfin , l ’article 34 assure même le remboursement du capital
des ventes faites dans l ’intervalle, à ceux qui n’auraient pas ré
clam é en teins utile , et qui n’auraient pu , par conséquent, jouir
de la suspension provisoire ordonnée par l ’article 20.
Et ce n ’est qu’après avoir ainsi réglé toutes les mesures re
latives à la défense des accusés, au jugement de leurs récla
mations , à la conservation, de leurs droits pendant l ’instruc
tion , que la loi du a 5 brumaire s’occupe du tableau des peines
dans un titre subséquent. C ’est là que } présupposant que toutes
les formes ont été remplies , elle fixe le sort des individus q u i,
par un jugement contradictoire , ou par la conviction résultante
de la contumace encourue par leur silence dans les délais pres
crits , se trouvent soumis à la peine qui devient alors l ’effet de
l ’application de la l o i , application expresse ou tacite, mais tou
jours directe , positive et individuelle.
Comment peut-on soutenir , après des dispositions aussi pré
cises , que l’ inscription seule sur la liste a opéré le même effet
que celui d’ un jugement? La loi ne s’est-elle pas expliquée assez
clairement ?
L ’inscription sur la liste n ’est par elle-même qu’une accusa
tion , d ’autant moins grave en s o i, qu’elle n ’a pas présenté au
dénonciateur les risques qu’il court dans les accusations ordi
naires ; et qu’une triste expérience nous a prouvé que les pas
sions haineuses ou spoliatrices avaient fait surgir plus de dénon-
�( *3 )
cîatîons fausses, que l ’amour de la patrie n’en a produit de
fond ées.
Mais cette accusation établie nécessite un jugem ent, d’après le
texte même de la l o i , et jusque-là le sort de l ’accusé a resté en
suspens.
O r , le confiscalaire, définitivement investi, a ie di'oit d’aliéner,
et on ne songe pas à le lui interdire.
L a loi nous a dit que l ’on jugerait les réclamations faites dans
le délai lixé , et que toutes les mesures de saisie , séquestre, etc.,
ne seraient que conservatoires , puisque l ’aliénation des biens resr
terait suspendue.
Elle a dit qu’en cas d ’absolution le citoyen absent resterait
dans la possession de ses biens. O r , une confiscation provisoire
n’est pas une véritable confiscation translative de propriété. L e
droit de propriété ne peut pas rester en suspens ; il faut qu’il se
fixe et se consolide i o r , ce n’est pas donner la propriété que de
restituer.
L a loi a annoncé que l ’autorité compétente ne condamnerait
que ceux qui seraient convaincus , ou ceux contre lesquels leur
silence ou le refus de comparaître tiendraient lieu de conviction.
N ’est-ce pas dire assez que , jusqu’au ju gem ent, tous ceux
qui ont comparu, obéi à la lo i , réclamé leurs d roits, justifié
leurs plaintes , ont pu être accusés, mais n’ont été ni convaincus ,
«i jugés?
•;
N ’est-ce pas dire assez que celui sur le sort duquel il n’a pas
été statué , ou vis-à-vis duquel il n’existe qu’une prononciation
provisoire, subordonnée à une décision définitive, n ’a pu en
courir la p ein e, qui 11e serait que le résultat de la conviction
opérée par le jugement ou par la contumace ?
N ’est-ce pas là avoir consacré tous les principes reçus en ma
tière d ’accusation ?
�*^<V'
( 24 )
N ’esl-ce pas , en fin, avoir conservé aux citoyens leur existence
civ ile , la propriété et le domaine incorporel de leurs biens , tant
qu’ils n’en ont pas été définitivement dépouillés par le voeu du
juge , ou par la présomption de la loi , présomption que ne peut
jamais suppléer celle de l’homme , et surtout de l ’homme qui ac
cuse , et qui ne peut être à-la-fois accusateur et juge?
Toutes les lois postérieures n’ont rien changé à ces principes
gravés au coeur de tous les hommes , avant que le législateur les
consacrât dans ses codes , principes inaltérables , qui traversent
les siècles et le torrent des passions humaines, et surnagent audessus d ’elles.
Il est important même de remarquer que, lorsque la loi du 19
fructidor an 5 établit, contre les émigrés rayés provisoirement,
des mesures extraordinaires, 'elle garda un silence absolu sur le
séquestre de leurs biens, dont la jouissance leur avait été rendue,
en attendant leur radiation définitive. Une secousse révolution
naire exaspéra tous les esprits, et éveilla toutes les défiances. Les
dispositions sévères contre les individus furent reproduites, mais
les principes furent respectés. ’
::
/l;
L ’opinion seule du ministre en ordonna autrement. Mais alors
même q u e , par sa circulaire du 37 fru ctid or, il alla plus loin
que la l o i , et qu’il disposa du sort et de la subsistance de tant
d ’infortunés , il sentit bien qu’il ne lui appartenait pas de pro
noncer une peine , et que sa volonté 11e pouvait s’exprimer dans
les formes législatives ou judiciaires. C ’est sous íes rapports ad
ministratifs qu’il annonça cette mesure. Alors même l ’intérêt na
tional parut moins l ’occiiper que le sort des individus que la
loi c o n d a m n a i t à une absence et enlevait au soin de leurs pro
pres affaires. C e ne fut point à titre de peine , mais comme'une
mesure d’ordre et de protection pour les prévenus, qu’il ordonna le
séquestre : il voulut faire remplacer leur gestion par celle d ’un !
�( 2 5 }
préposé du gouvernement'; nwis il se garda bien de prononcer
une saisie , moins encore une confiscation que ‘là loi ne pro
nonçait pas.
Ne jugeons pas ici la ÿégularité de cette m esure, sa justice
et ses'résultats ; ne considérons que l’opinion qui l’a dictée, et
les motifs qui1,-servirent à l ’étayer. Ils prouvent suffisamment
que le séquestre apposé en l ’an 6 , aii préjudice des émigres
en réclamation , ou-rayés provisoirement , n ’a jamais été consi
déré comme une confiscation qui dépouillât absolument le con
fisqué de sa propriété , pour en investir le confiscataire.
»
T elle est la position de la consultante , et l’application de
tous nos raisonnemens Se fait facilement à sa cause.
I
Madame de Talm ond était inscrite sur la liste des émigrés.
Cela n ’empêcha point sa mise en possession des biens de
la succession d ’Argougcs, et sa jouissance: paisible pendant quatre .
ans. •' *•* J • '
.
- ;•
i: ■
' ' •'
" ■*
Elle avait réclamé en tems utile.
i>
’■Une défense particulière d ’aliéner ses biens lui avait appliqué
honiinàtivcment la disposition générale de la loi. ' •
: iwi
Sa [radiation provisoire fut prononcée. ■-g»
»nos
Scs biens lui furent rendus.’ 1 iJ;
J/iob ;;ir- „ ; j 'if-:
“ Lorsque le séquestre ordonné par la lettre dû ministre soumit
à l'annotation ceux de ses biens qui n ’en avaient jamais été
frappés ,j : il est absurde de-soutenir que la nation s'cii em para,
et en a joui comme propriétaire jusqu’au moment de la radiatioii définitive, et qu’elle ne les’ a' rendus à cette éjioquc
que |iàr lun don dèrenu Jlé fprincipC de Jla propriété de la con
sultante. r'
¡- •_«[ *1!t'.IÎ. f’fr: : , • ,.Vi
Là' régie ne pourra jamais le soutenir d?après les lois que
nous venons d ’examiner. Elles résistent trop1à cette ùnlerprétation forcée.
Ifo J.'i'ib o t u io w i o'i'V" *„•*> i;l
�v y v -n ,
( 26 )
Mais elle cherchera â sc prévaloir sans doute d'une dispo*
sition de la loi du 22 frimaire an 7 , dont il est facile d ’écarter
l ’application.
L ’article 24 de celte loi porte que « le délai de six mois
« ne courra que du jour de ,1a mise en possession , pour la
« succession d ’un absent •, celle d ’un condamné, si ses biens sont
« séquestrés -, celle qui aurait été séquestrée pour toute autre
« cause y celle d ’un défenseur de la patrie , s’il est mort en acn tivité de service hors de son département ; ou enfin celle qui
« serait recueillie par indivis avec la nation. »
On voudra conclure de cet article que , puisque le délai
pour l ’héritier n’a couru que du jour de sa mise en posses
sion , la prescription contre la régie n ’a pu courir que de la
même époque.
Voici notre réponse:
i°. Si la régie réduit la question à ce point, elle recon
naît donc la justice de tous les principes que nous venons
d ’établir. Il est donc vrai que le séquestre ne peut être par
lui-même assimilé.à une confiscation , et que l ’on a eu tort de
soutenir que les agens de la nation n ’ont pas dû se faire payer
sur des biens dont la nation elle-même était propriétaire. L e
séquestre, d ’après cet article , lie deviendra une cause d ’in
terruption que parce que la loi du 22 frimaire l ’aura ainsi
déterm iné, et non parce qu’il a dépouillé le prévenu d’émi
gration.
.(
' . n; |
Mais alors il s’agit de savoir si cet article s’applique vérita
blement aux délais de Iti prescription j car si cela n ’est, point , la
régie , abandonnant le principe général qu’elle avait d ’abord
établi 4 ne pouvant'»plus soutenir que les mots séquestre et
confiscation sont (-synonymes , n’aura pas même à sou appui
la dci'nière ressource dont elle se prévaut.
�J
( *7 )
O r , nous pensons que les dispositions de la loi du aa fr i
maire ne s’appliquent nullement aux délais de la prescription *,
et la conséquence que la régie veut en tirer est également con
traire à la lettre et au sens de cette loi.
w
Quant au texte de la lo i , il est absolument muet sur la pres
cription que la régie peut encourir par son silence. L ’article 24
ne statue que sur lçs délais dont jouira l ’héritier séquestré •, il
détermine seulement que ces délais ne prendront cours que du
jour de sa mise en possession effective. 11 ne prononce nulle
ment sur les obligations et les droits de la régie-, rien n’indique
que la loi ait eu pour objet de statuer sur ce p o in t, et cepen
d a n t, dans le système adverse, et d ’après le principe de récU
.procité dont on veut faire une conséquence nécessaire de la lo i,
il eût été tout simple d’ajouter que les délais pour la pres
cription contre la régie ne com menceraient égalem ent à cou' rir que du jo u r de la mise en possession d e l ’h é r itier , et
seraient suspendus pendant le séquestre.
L e législateur ne l ’a pas d it, parce qu’il n’a pas voulu et n’a
pas dû le dire 5 et c’est en le démontrant ,qiie noya prouverons 5
que le raisonnement de la régie est en contradiction avec le sens
de la lo i, et le but qu’elle se propose. — Tâchons de nous expli
quer clairement.
,
A u dpçès dç chaque citoyen un droit de mutation est acquis
au trésor public.
^
,
D e l'établissement dp ce droit naissent diverses obligations
prescrites par la lo i, et qui doivent être remplies dans les formes
et sous les peines qu’elle a déterminées.
Elle impose aux héritiers l ’obligation de déclarer la valeur
des biens recueillis, d ’en payer le droit, et de faire cette dé
claration et ce paiement dans un délai de six mois^à peine de
6uppoi’ter uu double droit. !
-ny>n »; in.
j
�I '•'* w
(28 V
Elle impose à la régie l’obligation de demander le paiement
des droits dans- un délai de cinq ans , à peine cl.e déchéance.
Ces obligations sont distincles *indépendantcS'l’une de l ’autre;
elles ont également pour but d’assurer le paiement1des droits.
Mais l ’une prononce une peine contre le redevable ; l’autre lui
fournit une exception contre le lise. L a raison en est simple :
l’une est le fait du redevable lui-même , tenu de fournir la décla
ration ; l'autre est ld : fait de la ré g ie , tenue de le poursuivre.
L e redevable et l ’agent du fisc ont chacun les moyens de se
conformer à la loi :
-I;
Le prem ier, en sacrifiant une portion de la propriété qu’il
acquiert à la libération d’une charge qui la grève ;
Le,.second, en'faisant des poursuites dans le tems requis ,
et en usant de tous les moyens de contrainte que la loi met à
sa disposition.
'
".rv
.
On voit assez q u e , dans le cours ordinaire des choses, ces
deux obligations n’ont aucune dépendance/aucune liaison en-tr’elles , et qu’il est’ possible de les gouverner par des principes
qui ne soient .pas les mêmes.
> 1
;
L e cas est arrivé qiie des biens ont été momentanément en
levés à leurs propriétaires , et mis dans les mains dé la régie >'
à titre provisoire, par forme de garantie et de nantissem ent,
pour les administrer et jouir des fru its, au lieu et place des
propriétaires , et jusqu’à leur réintégration.
.
"'{ 1
n <:
■Nous avons déj'ufprouvé ([u(iccllc\saisic-anno(ation n ’a pu
dépouillerlle propriétaire pour''investir la nation : N e c aufferre
proprielatcm , nec transferre dominiutm
*>
Les individus ainsi dépossédés sont donc restés propriétaires,
mais sans jouissance de leurs biens.^ i
•>
'
'
C ’est.à foison dei;cctte circonstance extraordinaire , et dans
l'objet de venir ù leur secours, que lu loi-du 22 frimaire a.été
rendue.
�( *9 )
L e .législateur a senti qu’il n'élait pas. juste
D e . soumettre au paiement des droits des particuliers privés
de leurs biens -,
.
;
D e faire courir un délai fatal contre des citoyens dont les ac
tions civiles étaient suspendues •,
D e prononcer des peines contre celui pour lequel la privation
même provisoire de ses biens était déjà une peine assez forte.
C'est à ces propriétaires sans action , sans moyens et sans
qualité que l ’on a appliqué l’axiome de droit : Contra non
valentem agere non currit prcescriptio.
Mais* les mêmes considérations n’ont pu faire appliquer cette
exception à la régie.
L ’action de la régie a toujours été ouverte , et n ’a jamais élé
suspendue, ni de fait ni de droit.
Cette action n’est point une action directe et personnelle
contre l’heritier ; elle est réelle , hypothécaire et privilégiée j
elle s’exerce sur les biens, dans quelque mains-qu’ils viennent
à passer.- On ne peut pas dire qu’elle est vaine , parce que le re
cours contre la personne peut être illusoire ; elle est toujours
utile, parce que l ’objet sur lequel elle porte ne peut lui échapper.
Elle prend sa source dans un droit certain et incontestable.
Il est dès-lors bien évident que le séquestre, qui a pu devenir
pour le propriétaire un motif de ne pas payer , et autoriser une
exception en sa faveur, n’a'pas dù , par cela seul, introduire la
même exception au profit de la régie , qui a du et pu se faire
payer , ou du moins en former la demande.
Elle l ’a du , parce qu'il n’y avait aucun inconvénient à le
fa ire , et aucun m otif pour l ’en empêcher. La propriété était
grevée du paiement des droits : cette propriété a-t-elle dù rester
dans lçs mains de la nation ? La formalité du paiement des droits
n’était plus qu’une mesure d ’ordre et de comptabilité : devait-
�i
( 3o )
elle retourner à son premier propriétaire? Les droits se trouvaient
acquittés à sa décharge, sans dommage pour l u i , et .par le fait
du représentant que la loi lui avait d onné, et qui devait ad
ministrer en son nom , comme il aurait administré lui-même.
El , dans le fa it, la régie a tellement pu se faire payer,
qu’elle n ’a eu qu’à faire une simple application des revenus
à une charge préexistante et préférable à toute jouissance de
la part de l’héritier et de ses représentans.
Aucune raison plausible n’aurait donc pu faire suspendre
l’action de la régie pendant le séquestre, dès q u ’il est prouvé
qu’elle pouvait l ’exercer justement et utilement.
Toutes les raisons de convenance, de justice et d ’humanité
tendaient, au contraire, à faire introduire en faveur de l ’héri
tier séquestré la prorogation d ’un délai qui n’a pu raison
nablement commencer qu’avec sa jouissance.
—
T e l a donc été le but de la loi que nous discutons, q u e ,
sans arrêter l ’action de la régie qui ne pouvait pas l’ê tre ,
elle a soustrait l ’héritier à des peines qu’il n’avait pu en
courir.
L a position d ’un héritier séquestré a dès lors été celle-ci
à son entrée en jouissance:
L a régie avait-elle perçu les droits ? il s’est trouvé libéré.
N e les avait-elle pas fait percevoir? a lo rs, de deux choses
l’une :
Ou l ’action de la régie était encore ouverte, et alors l ’héri
tier a eu six mois pour faire sa déclaration;
Ou l ’action de la régie était prescrite, et alors on n’a plus
eu rien à lui demander.
1
■
T e lle est , suivant nous , la seule manière raisonnable d'in
terpréter la lo i, et l ’on voit que notre interprétation 6e con-
�Soi
( 3. )
cille parfaitement avec le silence qu’elle a gardé sur le cours
de la prescription.
A in s i, concluons, sous ce premier rap p ort, que c’est inu
tilement que la régie invoquerait une disposition qui ne la
concerne pas.
2°. Mais allons plus loin , et supposons que la fausse in
duction que l ’on veut tirer de l ’article 34 puisse être ac
cueillie.
Dans ce cas même la régie ne pourrait l’appliquer à la
cause de madame de Talinond.
L ’article 73 , titre 12 de la loi du 22 frimaire an 7 , n ’abroge
les lois alors existantes que pour l’avenir.
Ce n’est donc que pour l ’avenir que la loi du 22 frimaire
a statué. Elle n’a pu avoir d ’effet rétroactif.
L a prescription de cinq ans contre la régie était prononcée
par une loi antérieure , celle du 19 décembre 1790. L ’article
18 contient sur ce point la même disposition que l ’article 61
de la loi du 22 frimaire an 7.
Mais la loi du 19 décembre 1790 ne renferme aucune dispo
sition semblable à celle de l ’art. 24 de la loi dvi 22 frimaire.
11 est- dès lors bien évident^ que la régie ne pourrait se pré
valoir de la disposition d ’une loi qui n ’existait point encore
à l’époque où la prescription était déjà pleinement acquise
contre elle.
Le décès de mademoiselle d ’Argouges ayant eu lieu le 9
brumaire an 2 , les cinq ans ont été révolus le 9 brumaire
an 7 > deux mois environ avant la publication de la loi du
22 frimaire.
L a conséquence est inévitable.
L a régie n’a pu justifier sou inaction par une disposition
�t
( 32 )
qui n ’existait pas. Elle ne peut invoquer une exception qui
n ’a pu lui servir de règle.
C e ne sera plus , si l ’on veut , la prescription prononcée
par l ’article 61 de la loi du 22 frimaire an 7 que madame
de Talm ond lui opposera -, ce sera le môme moyen pris
dans le voeu de l ’article 18 de la loi du 19 décembre ï 7i)°Mais alors nous avons eu raison de p ro u ver, comme nous l ’a
vons fait en commençant, que le séquestre n ’était pas par luimême suspensif des droits de propriété. La cause se trouve ainsi
réduite à cette première question , sur laquelle nous pouvons in
voquer même à notre appui la jurisprudence du tribunal de cassa
tion.
tE lle résulte principalement d ’un jugement rendu le 26 frimaire
an 8 , dont nous allons rapporter les circonstances et les motifs ,
tçls qu’ils sont consignés sur les registres du tribunal.
. Jeanne-M arguerite-Charlotte Sabourin , veuve Morisseau ,,
dpcéda à Fontenay-le-Peuple le i 5 brumaire an 2 , laissant un
grand nombre d ’héritiers.
Quelques-uns de ces héritiers étant émigrés , le séquestre fut
apposé sur tous les biens de la succession , généralement et sans
distiuction.
Un arrêté du département de la* Vendée , du 24 germinal an
5 , régla enfin les droits respectifs de la nation et des co-héritiers républicoles.
Les droits d’enregistrement pour la mutation intervenue n’a•
f. /
/
f
valent pas ete payes.
Les 2.5 frimaire et 19 pluviôse an 7 , saisie et contrainte de la
part de la ré g ie , pour une sbmmc'de 2.r5,ioo livres.
Sur l’opposition des héritiers , la contestation fut-portée de
vant le tribunal civil de la Vendée. •
Les héritiers prétendirent que la demande de la régie élAit
�S a
(33)
proscrite, ait en du qu’elle avait été formée après les cinq ans de
puis le décès de la veuve Morisseau.
L e 25 germinal an 7 , jugement du tribunal civil de la V en
dée , qui rejeta la demande de la régie comme prescrite.
Ce jugement fut fondé sur l ’article 18 de la loi du ig décem
bre 1790, et sur l ’article Gi de la loi du 21 frimaire an 7.
Pourvoi en cassation d e là part de la régie.
Elle prétendait que cette prescription s’appliquait uniquement
au cas où les choses allaient suivant le cours ordinaire, et où
aucun obstacle ri’empêchait les héritiers de se mettre en posses
sion ; que c’était aussi à ce cas que s’appliquait le mode d ’in
terrompre la prescription , en signifiant une demande ; mais
q u e , lorsqu’une succession 11’était encore entre les mains de
persojine, et qu’il était incertain s’il y aurait des héritiers,
comme dans le cas d ’un séquestre, il était évident qu’aucun
droit n’était ouvert ; qu’on ne pouvait rien dem ander, rien si
gnifier à personne ; que le faire serait une témérité ; qu’il fal
lait donc attendre l ’époque de l ’ouverture des droits par la mise
en possession de fait des héritiers.
C e système , absolument conforme à celui que la régie sou
tient aujourd’h u i, fut rejeté par le tribunal de cassation.
On argumenterait inutilement de quelques décisions rendues
par le même tribunal dan6 une hypothèse qui ne ressemble nulle
ment à celle de la cause actuelle. Pour prévenir l ’abus que l’on
pourrait en fa ire , il est bon de les rappeler, et de fixer ici une
distinction importante qui consolidera même les principes que
nous invoquons.
L e tribunal de cassation a j ugé le 22 vendémiaire an 9 ,
dans la cause de la veuve Bonol , héritière du C en C u illeau,
condamné révolutionnaireinent dans le mois de prairial an 2 ,
que les délais de la prescription n’avaient commencé à courir
�( 34 )
contre la régie qu’à dater du 21 prairial an 3 , époque de la
restitution des biens des condamnés à leur famille , et non à
l ’époque de la mort du condamné.
Une semblable décision est intervenue , le 30 prairial an 10 y
dans la cause des sœurs D éfieux, héritières du C en Servanteau de
l’Échasserie , condamné en 1793 par le tribunal révolution
naire.
Il est facile- d'apercevoir tout de suite les motifs de ces jugemens.
Dans l’hypothèse où ils ont été ren d u s, il existait des jugemens de confiscation. Ces jugemens , dont il ne faut pas cher
cher à discuter la. justice et la régularité , n’étaient pas uno
am ple accusation -, ils ne constituaient pas simplement l ’accusé en
état de prévention-, ils l’avaient jugé coupable-, ils avaient laforme d ’un acte judiciaire, contradictoire , solemnel et définitif ;
ils. avaient été exécutés -, quelle que fût la nature du pouvoir ter
rible duquel ils émanaient , ils avaient dû produire tous le&
effets attachés aux actes portant le caractère d ’un jugement , et'
par conséquent investir le confiscataire des biens« déclarés con
fisqués.
A lo rs, véritablem ent, il; n'y avait eu ni héritiers , ni trans
mission do p ropriété, puisqu'il n’y avait pas de succession.
A lo r s , enfim, les agens de la nation, devenue propriétaire
ipso fa c to , n’avaient pu remplir aucune formalité vis-à-vis des
héritiers qui ne possédaient les biens du condamné ni par
le d roit, ni par le fait , et qui les reçurent véritablement des
mains du gouvernem ent, à l ’époque du 31 prairial an 3 , par
un acte spontanée de la bienfaisance* nationale, éclairée et d i
rigée par la«, justice.
Mais toutes ces considérations , rapprochées de uotro h y
p o th è s e ju s tifie n t, d’autant plus le sy6tômc que nous soute-
�( 35 )
nous -, elles prouvent que la propriété d ’un citoyen ne peut
jamais lui être ravie que par la volonté qui le dépossède, ou
par un jugement qui le dépouille.
.
.
Les conséquences de tous nos raisonnemens sont bien simples :
Si madame de Talm ond n’a jamais perdu la propriété des
biens séquestrés, si sa dépossession passagère n ’a pu avoir
l’effet d ’une confiscation absolue , la régie , qui administrait
pour elle , et provisoirem ent, aurait'dû faire ce que madame
de Talm ond eût fait elle-même si sa jouissance n ’eut pas été
interrompue.
A défaut de déclaration de la part du préposé chargé de
l ’administration des biens , l’administration générale devait*
conserver les droits de la nation par une demande.
Cette double qualité d ’administrateur redevable et d ’agent*
de la nation , chargé des recouvremens des droits b u rsau x, ne
présente aucune espèce d ’incompatibilité.
L a régie elle-même a tracé à' ses préposés , dans sa' circu
laire dü mois d ’août 1793, la marche qu’ils' devaient süivVe',
et le mbdé de- comptabilité auquel ils devaient' se cotifûnnér
dahs cé cas.
Mais dans le xiombrc dés’ pièces qui ribtis' ont été représen
tées par madame de T a lm o n d , il s’en trouve une qui nous
fournit un exemple frappant de la contradiction qui existe
entre la prétention actuelle de la ré g ie , et l ’opinion qu’elle a
solcmnellement manifestée pendant la durée môme du sé
questre.
On a mis sous nos yeux , et l ’on présentera au tribunal
un état des inscriptions que la régie a prises sur la terre môme
de M ézières, pour la conservation des droits de la nation , à
raison de diverses rentes dont çelte terre était1 grevtîd' au
profit de plusicii’rs établisseriienY ecclésiastiques stippriiilés.
�( 35 )
Ces inscriptions sont au nombre de s ix , et pour un princi
pal de 25,465 livres.
Elles ont été prises le 24 floréal an 7 , pendant la durée
du séquestre , et un an avant la radiation définitive de madame
de Talm ond.
C e fait éclaircit suffisamment tous les doutes : il range en
faveur de noti’e système l ’opinion môme de l ’adminisU'ation,
qui n’a pu cx’oire tout à la fois que les droits de la nation
devaient être conservés sur les biens, et q u e , cependant, la na
tion en était propriétaire ; qu’elle a dû agir pour la conservation
des hyp othèques, et ne pas agir pour le paiement des droits
d ’enregistrement ; enfin , qu’il y avait dépossession envers ma
dame de T a lm o n d , dans un cas, et propriété grevée des charges
constituées par les actes , dans un autre.
C ’est par-là que nous terminerons une discussion qui nous
parait portée au dernier degré d’évidence , et sur laquelle nous
n ’avons cru devoir insister que pour éta b lir, une fois pour
toutes, des principes sur lesquels les agens du gouvernem ent,
chargés de l ’exécution des lo is, ne devraient pas répandre les
incertitudes d ’un doute qu’ils ne partagent même pas.
L e second moyen de madame de Talm ond est aussi décisif
que le premier.
11 repose également sur des principes et sur des faits cer
tains.
En principe, la régie encourt la déchéance lorsqu’elle né
glige de former sa demande daqs l’année qui suit le commande-
�■Soy
( 37 )
ment : le texte de la loi est précis -, le jugement du 2G frimaire
an 8 , que nous avons cité plus hau t, l ’a formellement con
sacré.
En fa it, la demande n’a été formée que quinze mois et vingt
jours après le commandement du 12 frimaire an g.
L a conséquence est inévitable.
L a régie ne s’étant pas encore expliquée sur ce point , il se
rait difficile de prévoir comment elle pourra échapper à un
moyen aussi tranchant.
Dira-t-elle que madame de Talm ond s’est adressée au ministre
des finances, et que la régie a été tenue de s’expliquer sur scs
réclamations ?
’
On lui répondra:
i° . Que le recours de madame de T a lm o n d , à la protection
du gouvernement, contre les injustices de ses agens , n’empê
chait point lu suite de l ’action judiciaire, que rien ne pouvait
interrompre, et que la loi soumettait à un délai fatal;
20. Que les représentations de madame de Talm ond auprès
du ministre n’ont donné lieu à aucun sursis, à aucun obstacle
qui ait paralysé les poursuites de la régie ;
3 °. QuO, bien lofth de là , le rÀ nistre, reconnaissant la compé
tence et l’indépendance du pouvoir judiciaire , n’a pas voulu
prononcer lui-même , et a laissé le ' soin aux parties de faire
statuer par les' tribunaux ; 4
4 °. Et enfin, que la régie a si peu imaginé que le recours de
la consultante auprès du ministre dût arrêter l'action judiciaire ,
q u e lle s’est p ou rvu e, quoique trop tard , par devant le tribu
nal de Blanc , avant même que le ministre eût prononce.
Ces considérations 11e permettent pas de croire que la régie
puisse échapper à la déchéance qu’elle a encourue.
Le tribunal observera , d ’ailleurs , qu’il s’agit ici de protéger
�débris d’ une fortune que l ’autorité même des lois n’a pu sauve
garder. Les malheurs de madame de Talm ond sont connus •, ils
sont irréparables : mais si rien ne peut effacer ses douleurs , il
est au pouvoir des magistrats de ne pas les aggraver en core,
lo rsq u ’ un moyen légal , favorable et décisif, permet à la jus
tice de venir au secours de l’infortune. D éjà assez de sacrifi
ces ont été imposés à la consultante ; elle a payé plus que sa
dette aux besoins de la patrie. L a patrie a contracte a son tour
une dette aussi sacrée envers les victimes d ’un régime dont le
souvenir ne peut être effacé que par la loyauté , la bienfaisance,
et le désintéressement d ’un gouvernement généreux et répa
rateur.
Délibéré à Paris le 23 thermidor an I I .
M. M ÉJAN .
j
ssZ d > / z/ '/ / l^
D E L 'I M P R I M E R I E D E B R A S S E U R
N o ta .
A IN E , R U E D E L A H A R P E , N °. 477.
O n t ’ engage , dan» c ette im prim erie , à
donner , dans l e co u rt espace de
quatre h e u re s, sans frais extra ord in aires, l ’épreuve d’ une feu ille d'im pression , pourvu
que lesi feu illets de m anuscrit ne soient écrits que d’ un côté.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. D'Argouges, Fleuriette-Louise-Françoise. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Méjan
Subject
The topic of the resource
biens nationaux
régie des domaines
successions
émigrés
séquestre
prescription
droits de mutation
confiscations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter et consultation pour dame Fleuriette-Louise-Françoise d'Argouges, veuve d'Antoine-Philippe de la Trémouille-Talmond ; Contre le directeur de la régie de l'enregistrement et des domaines.
notes sur les engagements de l'imprimeur à imprimer dans des délais de 4 heures après dépôt des feuillets du manuscrit.
notes sur les engagements de l'imprimeur à imprimer dans des délais de 4 heures après dépôt des feuillets du manuscrit.
Table Godemel : Mutation (droit de) : 2. de quelle époque a lieu l’ouverture du paiement des droits de mutation pour décès, à l’égard de l’héritier inscrit sur la liste des émigrés ? est-ce du jour du décès de celui auquel il succède, ou, seulement, de celui où l’héritier a été saisi de la propriété par sa radiation définitive ?
le séquestre des biens, par la nation, a-t-il interrompu le cours de la prescription établie par l’article 6 de la loi du 22 frimaire an 7 ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Brasseur aîné (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1793-Circa An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1312
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Blanc (36018)
Mézières (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53201/BCU_Factums_G1312.jpg
biens nationaux
confiscations
droits de mutation
émigrés
prescription
régie des domaines
séquestre
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53202/BCU_Factums_G1313.pdf
f22011822726927b977c72c61c832de7
PDF Text
Text
MEMOIRE
S I G N I F I É ,
POUR
Sieur C l a u d e B E L L A V O I N E , propriétaire,
habitant du lieu d’E c o l e , mairie de B r o u t , arron
dissement de G a n n a t , appelant
CONTRE
F rançois
priétaires
intimés.
B
et
B O N N A M O U R ,p r o
habitans en la commune de B ro u t,
A n to in e
IE N des personnes sont encore éloignées de la lettre
et de l’esprit du nouveau régime hypothécaire.
A uparavant, celui qui osoit entreprendre une saisie
réelle pour arriver au payement de sa créance , ne le
A
�faisoit qu’en tremblant. Les formes prescrites se ressentoient de la barbarie du temps qui les avoit produites:
les pi'aticiens y avoient rnêlé leurs idées. D e là des us
et coutumes compliqués à un tel point, que le créancier
timide, ayant à choisir entre deux m aux, préféroit sou
vent le sacrifice de son d û , aux chances devenues mal
heureusement périlleuses des procédures.
Par la loi du i l brumaire an 7 , l’on a voulu remé
dier à ces inconvéniens, vraiment ailligeans pour les
créanciers. Sous les anciennes lo is, pas une disposition,
pas un usage dont l’inobservation ne fût un motif de
nullité. La loi 2e.‘du 11 brumaire an 7 , au contraire, a
indiqué une procédure infiniment simple ; et dans aucun
de ses articles ne sont écrits ces mots , à peine de nullité.
La raison de cette différence, est que l’on est enfin revenu
de cette maxime ti*iviale et fausse , que le débiteur est
plus favorable que le créancier. Celui-là doit être favo
rable aux yeux des magistrats, qui tient ses engagemens:
cclui-là doit être vu défavorablement, qui s’y soustrait.
Les tribunaux sont institués pour forcer les citoyens à
remplir leurs obligations. Un débiteur qui ne paye point
paroît enfin devant la justice avec l’aspect q u i l ui est
propre , qui n’appartient qu’à lui. L e débiteur qui con
teste à l’ombre de misérables chicanes, est en quelque
sorte en état de révolte contre l’action de la loi. Ainsi
donc les égards sont dûs au créancier. Aussi la cour de
cassation a-t-elle jiigé , dans plusieurs circonstances, pour
le créancier contre le débiteur. Elle a senti vivement la
position de celui qui ne poursuit que la rentrée du sien ;
elle a proclamé le grand principe , qu’une créance légi-
�cft S
(
3
)
time ne doit pas périr sur cet océan de formes inventées
par la mauvaise foi.
Contre ces vérités connues de tous ceux qui ont pris
la peine de suivre la jurisprudence, il se trouve encore
de ces gens qui s’étudient particulièrement à entraver
l’action de la justice, qui imaginent des moyens de nul
lité hors la loi. Je viens d’en faire la pénible épreuve.
- Je dois à un travail assidu, à des calculs exacts, une
fortune honnête : c’en a été assez pour exciter contre
moi tous les efforts malins de la jalousie et de l’oisiveté.
On le sait ; de l’envie à l’inimitié il n’y a qu’un pas, et
il est très-glissant : l’on se permet de haïr, de condamner
celui que l’on ne connoît pas, et que l’on ne cherche point
à entendre. Mes succès m’ont fait des ennemis, et par
tout ils vont criant que môme avec bon droit je dois
perdre mes procès. Pour le coup ils se tromperont, parce
que je plaide devant une cour qui voit les affaires sans
acception de personne. Ma cause est si sim ple, que l’on
dira que ce n’étoit point le cas d’un mémoire imprimé :
mais il m’a semblé nécessaire pour prévenir de nouvelles
attaques.
F A I T S .
En vertu d’acte notarié, du 13 janvier 1788, et de
jugement du 2 messidor an 7 , je suis créancier de la
succession de François Bonnamour, père des intimés ,
d’une somme de 2433 fr.
c.
François Bonnamour est décédé en brumaire an 1 1 ,
et a laissé quatre enfaus, qui sont les intim és, et deux
■mineurs pubères.
A a
5
Oj(
�5 (A;
*( 4 )
Après le défcès de François Bonnamour , il y a eu
opposition et rémotion de scellés.
Les mineurs ont été émancipés : François Bonnamour
a été nommé leur curateur.
Bonnamour père ayoit quinze inscriptions aux hypo-r
thèques sur lui.
Ici il faut que j’explique q u e, par contrat des 16 et
29 brumaire an 6 , Bonnamour père avoit acquis deux
domaines de la part de M e. Bveghot-Polignaç, avocat,
moyennant la somme de 18400 francs, dont il n’a rien
payé.
Des créanciers de M>. Breghot ont inscrit, tant sur
lui que sur Bonnamour père.
M ariçn Ossaye et consorts étoient créanciers inscrits
de M e. Breghot d’une somme de 2486 fr. 95 c . , en vertu
d’un jugement rendu au tribunal civil de R io m , le 16
frimaire an 10.
J ’avois fait un calcul qui m’avoit semblé juste. J ’avois
pensé qu’en achetant les droits de certains des autres créan
ciers j’en diminuerois le nombre ; et que, par ce m oyen,
les frais d’une vente judiciaire des immeubles Bonnamour
seroient beaucoup moins coûteux, J ’y entrevoyois l’avan
tage de mes débiteurs et le mien.
L e 2 floréal an 1 1 , Ossaye et consorts me subrogè
rent à leur créance contre M e. Breghot.
J ’en aurois fait autant avec les autres créanciers, s’ils
eussent été raisonnables ; j’aurois. évité beaucoup de frais :
mais à la fin j’ai aperçu que j’aurois qompromis, mes
deniers.
L e 10 prairial suivant, je citai en conçüiaüon les enfans
5
Bonnarupur.
�5
C )
L e 20 du même m ois, il y eut procès verbal de nonconciliation entre nous.
Antoine Bonnamour répondit qu’il ne vouloit prendre
aucune qualité, mais renoncer ù la succession de son
père.
François Bonnamour dit , i° . pour lui-m êm e, qu’il
n’entendoit point se porter héritier pur et simple , mais
seulement sous bénéfice d’inventaire ; 2°. pour les deux
mineurs , qu’ils se rendroient aussi héritiers bénéficiaires.
Point de répudiation de la p a r t d’Antoine Bonnamour.
Pas un des actes nécessaires, de la part de François
Bonnamour et des deux mineurs , pour régler la qualité
d’héritiers sous bénéfice d’inventaire.
Eu cet état, je les assigne tous quatre, le 6 messidor
an i l , au tribunal civil de l’arrondissement de Gannat,
1°. en déclaration de titres exécutoires; 2°. en autorisa
tion à exercer les droits de Marien Ossaye et consorts.
L e 24 thermidor suivant, j’obtiens contr’eux jugement
par défaut faute de com paroir, adjudicatif de mes con
clusions.
. Ce jugement leur est signifié le 9 fructidor aussi sui
vant.
Le 19 vendémiaire an 12 , je leur fais faire un
commandement de payer.
L e 20 nivôse suivant, je discute le mobilier des deux
mineurs : il y en a deux procès verbaux de carence.
L e 14 ventôse , je lais faire un commandement de
payer. Je déclare que je vais passer à l’expropriation
forcée des immeubles désigués eu tête de ce coinman-.
dénient.
A 3
. .
�•
:
'
X 6 >
•
,
Les 17 j 19 et 20 germinal des affiches sont posces \
un exemplaire en est déposé au ‘g reffe, et le tout est
notifié aux parties saisies et aux créanciers inscrits.
I/adjudication est indiquée pour le i floréal ( foire
en la ville de Gannat ) ; je choisis ce jo u r - là , pour
qu’il y ait plus de publicité et plus d’enehérisseurs.
L e 10 floréal, cinq jours avant celui assigné pour
l’adjudication, François et Antoine Bonnamour, pour
ce qui les concerne seulement , forment opposition
au jugement par définit du 24 thermidor. Ils fondent
cette opposition sur une répudiation qu’ils annoncent
sous lardate du £ fructidor, et dont ils ne me dorment
y
point copie.
L e i nous en venons à l'audience des premiei’s juges,
je demande que l’adjudication soit faite.
Francois et Antoine Bonnamour concluent à èti’e reçus
1*
J
opposans au jugement par d éfau t, et que la qualité
d’héritiers purs et simples soit rayée du jugement. Ils
offrent de payer les dépens de contumace. Ils ne deman
dent rien de plus (1).
J ’ai soutenu cette opposition n on -recevah le, pour
n’avoir pas été formée dans la huitaine-, elle l’a été
finit mois après la signification du jugement. J ’ai opposé
5
5
(1) L e sieur Bassin a conclu h ce que François et autre Fran
cois DbrincitnOur fussent "reçus opposans ail jitgement du 24 ther
midor àn i x , et que les parties fussent remises au même et se/n' blable état qu’ elles étoient auparavant ; et, au principal, attendu
ieicr renonciation à la succession dudit défunt Bonnamour leur
p ir e , que la qualité d’héritiers purs et simples fû t rayée du susdit
jugementt aux. o f f r e s d e p a ï e k l e s dépens de c o n tu m a c e .
�S u
C ? -)
qu’on ne m’avoit point signifié la répudiation du 8 fruc
tidor.
Enfin , j’ai dit qu’il falloit toujours faire l’adjudi
cation , i° . parce que j’avois saisi non-seulement en
vertu du jugement du 24 thermidor an 1 1 , mais encore
en vertu des titres des 13 janvier 1788 et 2 messidor
an 7 , qui étoient exécutoires contre les enfans Bonnam o u r, suivant l’art. 877 du Code civil ; 20. parce qu’en
supposant l’existence de la répudiation de François et
Antoine Bonnamour, il en résultoit qu’il ne demeuroit
pour héritiers que les deux mineurs , et que cela suflisoit
pour qu’il y eût partie légitime pour faire vendre.
L e sieur Breglrôt, héritier de M °. B regh ot, l’un dés
créanciers inscrits, a pris mêmes conclusions que moi.
Toutes mes poursuites ont été anuullées , et j’ai été
condamné aux dépens (1).
.
( 1 ) A tte n d u que le jugement du 24 thermidor an 1 1 , en v e rtu
duquel la partie de Juge a poursuivi sur celles de Bassin l ’expropria
tion forcée dont est question au procès, est un jugement par dé
faut faute de comparoir, rendu en premier ressort, attaquable par
conséquent par la voie de l ’opposition, après le délai de huitaine
de sa signification, lorsqu’il n ’a pas acquis la force de chose jugée;
A tten d u que d ’après les dispositions de l’article 12 de la loi du
38 ventôse de la présente année, l ’adjudication d ’un hien ne peut
se faire qu’en vertu d ’un jugement définitif en dernier ressort, ou
passé en force de chose jugée; q u e , d ’après les dispositions dudit
article, la poursuite ne peut s’exercer en vertu de jugement par
défaut durant le délai de l’ opposition ;
A ttendu que les parties de Tiassin se trouvent dans un délai utile
pour former opposition au jugement du 24 thermidor dernier;
A 4
�■
V
.
( 8 }. .
J ’ai appelé de ce jugement; j’ai du le faire, et pour
l’outrage fait aux vrais principes, et pour les intérêts
des autres créanciers, et pour mes propres intérêts,
parce que si ce jugement demeuroit, dans l’arrondissement
de Gannat il n’y auroit plus moyen d’entreprendi'e
utilement une expropriation.
D I S C U S S I O N .
L ’on ne sauroit me contester, et dans le fait l’on ne?
me conteste pas ma qualité de créancier de la suc
cession de François Bonnamour.
Celle qui m’est personnelle est établie par l’acte notarié
du 13 janvier 1788, et par le jugement du 2 messidor
an 7. Ainsi point de difficulté sur ce point.
11 11’y en a pas plus sur la créance que j’ai achetée
de Marien Ossaye et consorts. Elle résulte , i° . du
jugement obtenu par Ossaye, etc. contre M e. Breghot,
au tribunal civil de Riom , le 16 frimaire an 10; 20. de
la subrogation que m’ont consentie Marien Ossaye et
consorts , le 20 floréal an 11 ; 30. des deux contrats de
vente des 16 et 29 b r u m a i r e an 6 , par M°. Breghot
L e tr ib u n a l, jugeant en prem ier r e s so r t, reçoit lesdites parties
d e Bassin opposantes au ju g em en t rendu par d é fa u t contre elles,
le 2/} therm idor d e r n ie r ; ce fa is a n t, r e m e t lesdites parties en l’état
où elles se trouvoient avant icelui : statuant au principal, declare
nulles et de nul effet les poursuites faites par la partie de Juge
pour parvenir h l ’expropriation forcée des biens immeubles com
pris en l’ affiche du 17 germinal dernier, et la condamne en tous
les dépens*
�(
9
)
à Bonnamour père, moyennant la somme de 18400 fr. ,
dont le principal et les intéi'êts sont encore dûs par la
succession de Bonnamour père.
A cet égard , outre que ma créance est bien justi
fiée , au tribunal de Gannat je me suis trouvé en présence
avec le sieur Breghot. Comme m o i, il a conclu à l’ad
judication sur expropriation : il a donc reconnu ma
qualité de son créancier, en vertu du jugement du 16
frimaire an 10 et de la subrogation du 2.5 lloréal an ir .
Des contrats de vente des 16 et 29 brumaire an 6 il
suit que la succession Bonnamour en doit au sieur Eregliot
le prix principal et les intérêts. A in s i, autorisé par le
jugement du 24 thermidor an 1 1 , autorisé encore par
les anciens principes et par les dispositions du Code
c iv il, en exerçant les droits du sieur Breghot mon débi
teur , j’ai pu saisir par expropriation sur la succession
Bonnamour père.
Cela posé , mon droit est certain. L ’ai-je exercé réguliè
rement ? voilà la question unique à juger aujourd’hui.
Sur ce p o in t, il ne faut pas confondre un créancier
poursuivant avec un créancier ordinaire. L e premier
travaille non - seulement pour lui , mais encore pour
tous les autres ; il arrive môme souvent que les deniers
des immeubles vendus sont épuisés par des créanciers
antérieurs à lui. Il est donc vrai qu’au résultat il opère
l’avantage des créanciers en général.
Par cette raison de l’utilité de tous , le poursuivant
mérite une protection singulière de la justice. S i, lors
que ses poursuites sont conformes à la règle , il sur
vient quelque incident im prévu, qui vicie la saisie, ce
A
5
�( Iô )
n’est pas à lui d’en supporter les frais. Les tribunaux
doivent l’autoriser à les employer en frais extraordi
naires de privilège. C’est ainsi que cela s’est toujours
jîràtiqué au palais : cet usage est infiniment sage.
En cet état des choses , je demande pourquoi, en
recevant l’opposition des adversaires au jugement par
défaut du 24 thermidor an 11 , l’on m’a'condam né en
tous les dépens ?
Ces term es, tous les dépens, comprennent et ceux
relatifs au jugement du 24 thermidor an 11 et ceux
relatifs à l’expropriation. Personne n’ignore que cette pro
cédure, faite contre quatre parties saisies et quinze créan
ciers , est très-coûteuse : tous les frais s’élèvent au moins
à 1000 fr.
Quel motif y avoit-il donc pour me faire perdre ainsi
lë quart de ma créance ? A v o it-o n quelques fautes à
reprocher à ma procédure ?
J ’avois suivi la marche que tout le monde prend en
pareil cas. L e jugement du 24 thermidor an 11 est
très-régulier et très-juridique : j’ai donc pu et dû agir
en conséquence.
11 est vrai que les premiers juges on t, de leur propre
m ouvem ent, mis en principe , que n’ayant qu’un juge
ment par défaut, je ne pouvois faire adjuger ( ils s’ap
puient de l’art. 12 de la loi du 28 ventôse dernier ) ,
et qu’ils ont jugé que les adversaires étoient encore dans
le délai de l’opposition , lorsqu’ils en ont fait une le
10 floréal dernier.
Premièrement, la loi invoquée parles premiers juges
est l’article 221 du Code civil.
porte: « La pour-
5
11
�«
«
«
«
«
suite peut avoir lieu en vertu d’un jugement pro Vf-’
soire ou définitif, exécutoire par provision, nonobstant
appel ; mais Fadjudication ne peut se ja i r e qu après
un jugement définitif en dernier ressort, ou passé
en force de chose jugée.
« Lia poursuite ne peut s'exercer en vertu de jitge« mens rendus par défaut d u r a n t l e d é l a i d e
« l o p p ositio n . »
De cette dernière disposition il suit qu’un créancier,
en vertu de jugement par défaut, ne peut agir en expro
priation forcée tant que son débiteur est dans le délai
de Popposition ,* mais que , passé ce d élai, rien ne l’em
pêche de faire saisir et vendre.
J
D ’une explication contraire il résulteroit qu’un débi
teur , qui n’auroit que des immeubles , auroit intérêt à se
laisser condamner par défaut, puisque le créancier ne
pourroit pas agir utilement en vertu du jugement de
condamnation : la raison repousse une conséquence aussi
sauvage.
• Mais quel est le délai de l’opposition? L ’ordonnance
de 1667 en donne un de huitaine, contre les jugemens
rendus en dernier ressort. Elle ne dit mot sur les sen
tences sujettes à appel. Lors de la rédaction de l’ordon
nance , l’on demanda la voie de l’opposition pour ces
sentences. Elle ne fut point admise, par la raison qu’un
juge à quo ne peut se réformer. Néanmoins l’usage a
prévalu. Les oppositions ont eu lieu en tribunal infé
rieur. L ’on commença par appeler, et convertir l’appel
en opposition. Dans la suite l’on en est venu à l’opposition
directe, par requête de procureur à procureur • mais
�( 12 )
toujours on a pensé qu’il falloit la former dans la hui
taine , et cela à l’imitation des oppositions aux jugemens
en dernier ressort par défaut.
Je conviens pourtant que l’on s’est ensuite relâché du
principe établi uniquement par l’usage, et que l’on recevoit
l’opposition pendant trente ans , en première instance
tout comme en cour d’appel, contre l’ordonnance de 1667.
M ais, sur l’appel, c’étoitun abus contre lequel les nou
veaux tribunaux sont revenus, pour s’attacher uniquement
à la disposition de l’ordonnance de 1667 , qui rejette
l’opposition par la fin de non-recevoir après huit jours,
à compter de la signification de l’arrêt à personne ou
domicile.
Ici même raison d’extirper l’abus ancien. L ’ordon
nance ne donne que huitaine pour former opposition
aux jugemens en dernier ressort. L ’on a étendu sa dispo-'
sition aux sentences. Il faut y adapter les mêmes conséséquences, dès que le principe est le même. Il est temps
de dire qu’il y a aussi fin de non-recevoir (1).
L ’ordonnance de 1667 n’accorde que huit jours sur
ap p el, afin que les choses ne soient pas toujoui-s en état
d’incertitude. Il y a même m o t i f pour la première in
stance. L à , comme l à , le créancier doit ne pas être en
perplexité perpétuelle. Il seroit souverainement injuste
qu’ il eût un titre dont il ne pourroit pas se servir pen
dant trente ans. Je vais plus loin : je dis qu’il y auroit
absurdité.
(1) M . Jousse , sur l ’art.
5 du
titre
55
de l ’ordonnance de 1GG7,
dit : « O11 peut se pourvoir par opposition, dans la huitaine ,
« contre cette sentence, au lieu d ’en interjeter appel. »
�3
( i )
Dans la cause, j’ai fait signifier mon jugement le 9 fruc
tidor an 11. L ’opposition des adversaires n’est que du
10 floréal dernier. D ’une époque à l’autre , il y a huit
mois. Dans l’intervalle, j’ai fait faire plusieurs commandemens de payer, procès verbaux de carence, saisie et
notification en expropriation forcée. Cette contumace
vaut bien quelque chose. Mes actes répétés les ont suffi
samment avertis. Rien ne sauroit les excuser de n’avoir
formé leur opposition que cinq jours avant l’adjudication,
au moment où j’avois fait pour 1000
de frais. Il y
auroit de leur part tout au moins affectation perfide,
affectation faite pour leur mériter toute la défaveur de
la justice.
A u reste , mon jugement étoit signifié depuis le 9 fruc
tidor an ix . Les adversaires n’avoient que huitaine
pour former opposition. Quand le Code civil a dit que
l’on ne pourroit exproprier en vertu d’uu jugement par
défaut, durant le délai de îopposition , cela doit s’en
tendre avant l’expiration de la huitaine de la significa
tio n du jugement. Ce n’est pas un principe nouveau.
.Avant ce Code civil , l’on pensoit et l’on jugeoit que
.pendant cette huitaine l’on ne pouvoit pas suivre l'exé
cution d’une sentence par défaut, ni par saisie mobilière,
-ni par saisie immobilière. Mais l’on tenoit et l’on doit
tenir encore pour constant, en point de d ro it, que passé
ce délai rien n’empêche le créancier d’aller en avant,
par la raison que la justice n’ordonne jamais en vain.
Mon commandement en expropriation n’est que du
,1 4 ventôse an 1 2 , postérieur de six mois à la s:gnifica-tion de mon jugement. Alors le temps de l’opposition
�CI.4).
étoît plus que prétérit, et j’étois parfaitement libre de
saisir par expropriation, puisqu’il n’y avoit point d’op
position à mon jugement. Je l’ai fait le 19 germinal
suivant.
D euxièm em ent, une opposition à un jugement par
défaut, faite hors le délai de huitaine, en l’admettant
eomme recevable, n’a pas l’effet de détruire ce qui a été
fait entre l’expiration de la huitaine et l’opposition venue
à tard. Celui qui a agi dans cet intervalle 7 l’a fait en
vertu d’un titre légitim e, d’un titre émané de la justice.
Aussi l’ordonnance de 1667 et la jurisprudence constante
de tous les tribunaux obligent-elles l’opposant à refonder
les" dépens ,de contumace et ceux de l’opposition ? Ces
dépens comprennent tout ce qui est relatif tant au juge
ment qu’a ce qui a su ivi, parce que ces frais sont préju d icia u x j ils ne servent point pour le fond de l’affaire.
Il est de justice que celui qui les a occasionés, en ne
comparoissant pas, les supporte.
Nous en étions dans cette position. Aussi, par leurs
conclusions lors du jugement dont est appel, les adver
saires ont-ils offert celte réfusion de dépens de contumace.
Les premiers j u g e s >au lieu d ’o r d o n n e r celte r é f u s i o n ,
m’ont condamné en tous les dépens. Il s’ensuit, i°. qu’ils
ont jugé contre les offres des adversaires , puisque ceuxci c o n s e n t o i e n t cette réfusion ; 20. qu’ils ont jugé ultra
petita, puisque les adversaires n’avoient pas conclu aux
dépens contre moi.
Troisièmement, en droit, l’iiéritier direct, qui a renoncé
à la succession d’un défunt , doit tous les dépens faits
contre lui jusqu’à l’instant de la signification de sa ré"
�¡5
S'J3
(
).
pudiation. Ce principe est écrit dans tous nos livres.
Dans la cause, parleur requête d’opposition du 10 floî'éal dernier, les adversaires ont bien annoncé' une répu
diation , sous la date du 8 fructidor an n .
D ’une part, ils ne m’en ont point fait donner copie,
ni en première instance , ni sur l’appel \ ainsi je puis les
considérer encore comme héritiers.
D ’un autre côté , la signifieroient-ils aujourd’h u i, ils
devroient supporter les dépens faits jusqu’à présent.
; Dira-t-on q u ’au bureau de paix Antoine Bonnamour
a déclaré vouloir répudier, et que François Bonnamour
^ opposé que lui et ses mineurs n’entendoient être qu’hé
ritiers bénéficiaires ?
t
i°. Quant à Antoine Bonnamour , il ne lui suffisort
pas d’alléguer qu’il renonceroit; il falloit qu’il le fît ex
pressément au greffe du tribunal de Gannat. Xi’art. 784
d u Code civil le veut ainsi.
2,0. Quant à François , il falloit qu’ il fît inventaire ,
qu’il donnât caution, etc. en conformité de la section 3,
chap. , liv. 3 du Code civil. Il n’en a rien fait : les
«lcitx mineurs en ont usé de même.
En cet état, ne m’ayant été justifié, ni d’aucune répu-'
diation , ni d’aucun de ces actes qui constituent l’héri
tier sous bénéfice d’inventaire , je puis et je dois 11e voir
encore dans les quatre enfans Bonnamour que des héri
tiers de leur père , que des héritiers purs et simples.
Quatrièmement, qu’ont fa it, qu’ont demandé les deux
iBonnamour majeurs ?
Ils ont formé opposition au jugement du 24'thermidor;
«et -, à l’audience du i floréal dernier , ils ont demandé
5
'5
�( 16 )
d’être reçus opposans à ce jugem ent, et que la qualité
d'héritiers purs et simples fû t rayée du susdit jugement,
au x offres de payer les dépens de contumace ; ce sont
leurs propres expressions : voilà toutes leurs conclusions.
Il n’y a rien de plus ; il n’y en a point en nullité de ma
procédure en expropriation forcée. Supposant une répu
diation de leur p art, à la date du 8 fructidor an 11 , ils
se plaignent seulement de ce que je les ai fait condamner
en qualité d héritiers purs et simples. Ils se bornent là;
en sorte q u e , selon e u x , tout auroit été réparé par cette
radiation, M on jugement subsistait pour le surplus de
ses dispositions : il demeuroit dans toute sa valeur contre
les deux mineurs.
J ’aurois pu , si je l’avois voulu , soutenir François
Bonnajnour personnellement h éritier, parce que lors
du procès verbal fait au bureau de paix le 20 prairial
an 1 1 , il avoit dit qu’il entendoit être héritier bénéfi
ciaire , et que semel hœ res, semper hœres. En ayant
exprimé son intention, et n’ayant pas rempli les for
malités voulues par les articles 793 , 794 et 807 du
Gode civ il, j’aurois été à même de le faire juger héritier
pur et simple, Mais je veux en iinir; j’ai mis l’incident
de côté ; j’ai dit : « Si vous n’étes pas héritier , au
« moyen de votre renonciation , toute la succession de
« votre père appartient aux deux mineurs; l’expropria« lion forcée est dirigée , et contre vous, et contre eux,
cc Vous ôtés, j’ai encore dans eux des parties légitimes,
« des parties saisies, contre lesquelles je demande sub(f skliairement que l’adjudication soit faite. »
ÜU cet é ta t, qu’uvoient à prononcer les premiers
�c 17 )
juges ? S’il leur plaisoit de regarder les adversaires
comme non-héritiers, par l’effet d’une renonciation qui
ne m’étoit point signifiée.; dans ce sens, ces juges n’avoient qu’à recevoir, l’opposition des adversaires au ju
gement du 24 thermidor , et à ordonner la radiation de
leurs nom s, à la charge par eux de refonder les dépens
de contumace. Ces dépens auroient été la moitié de
tous ceux faits jusque-là.
- Mais alors restoient les deux mineurs. Ceux-là étoient
h éritiers, puisqu’ils n’ont point répudié. Ils avoient
to u t, suivant l’article 786 du Code c iv il, portant : L a
"part du r e n o n ç a n t accroît à ses cohéritiers. Donc
l’adjudication pouvoit et devoit être faite contre e u x ,
et à l’audience indiquée^
A u lieu de cela, les premiers juges ont annullé ma
procédure.
Leur jugement est n u l, et n’est point juridique.
i° . Il n’est point juridique ; je viens de le démontrer.
20. Il est n u l, parce qu’il a jugé ultra petita. Les
adversaires n’avoient pas. conclu à la nullité de l’expro
priation. Les nullités ne se suppléent point par les juges;
au contraire, elles se couvrent par la défense au fond, de
la part des parties. Ce principe est établi par l’ordon
nance de i6 6 7 ,titre , article , par l’avis de M .Jousse,
et par la jurisprudence.
Dans cette position, en parcourant,, et la loi du 11
brumaire an 7 , et le Code c iv il, et les recueils de la
cour de cassation, je ne trouve rien qui dise qu’il y a
.nullité dans ma procédure.
(
JDuu?. la loi. du 1 1 brumaire , je ne reconnois plus ces
5
5
�18
(
> . ;
• , ••
anciennes, ces dégoûtantes formalités, qui étoient l’effroi
du créancier légitime , et qui favorisoient le débiteur
ré tif; je vois au contraire une marche toute simple , une
procédure prompte pour forcer le débiteur1à exécuter
ses engagement.
:ri ‘ • ' !:" ’ ,r’ •
Si dans le Gode civil l’on trouve dès mesures sages et
conservatrices pour le débiteur, afin d’empêcher qu’il
soit dépouillé ex abrupto , il y a aussi cette vérité qui
eût dû être de tous les temps , cette vérité qui com
mande de rendre à chacun le sien.
E n fin , la cour de cassation n’a jamais varié ; toutes les
fois qu’on lui a présenté de pitoyables moyens de chi
cane, elle les a rejetés avec indignation, et a appris
très-clairement aux débiteurs qu’il faut payer, et ne pas
lasser, ruiner les créanciers, x ' •
L ’esprit inquiet est sans ressource; tout est aujourd’hui
pour le juste et contre l’injuste , et je d is, avec la plus
grande confiance, que le jugement de Gannat doit être
infirmé. Il le sera; et les adversaires qui, sans les de
mander, ont obtenu des dépens contre m oi, doivent y
être condamnés.
Mais une simple condamnation de dépens ne me conduiroit rien : j’ai à faire à gens insolvables ; leur répu
diation à la succession de leur père le dit assez. Je de
mande donc d’être autorisé à les employer en frais
extraordinaires de poursuite, pour en être payé par
'privilège.
Eu cela j’ai pour moi le fait et le droit.
Dans le fa it, par ma saisie j’ai travaillé pour l’avan
tage de tous les créanciers inscrits ; comme poursuivant
�Jzï
(
1
9
)
.. . ■ " * a
j’ai été en quelque sorte leur mandataire. Ma procédure
est régulière : si les premiers juges l’ont mal v u e , s’ils
l’ont condamnée par des motifs qui ne sont pas juridi- r
q u es, ce n’est pas ma faute. La cour réformant leur
jugement r il ; s’ensuivra que j’ai agi méthodiquement :
mais alors ce n’est point à moi à supporter le poids de
l’insolvabilité des adversaires. L e seul moyen d’en empêc her est de m’autoriser a les employer en frais extraor
dinaires de poursuite.
A cet égard, j’ai en ma faveur l’ancien droit; j’ai en
ma faveur nombre d’arrêts des parlemens : j’ai plus que
tout cela ; j’ai un arrêt de la cour, du 4 prairial dernier,
♦
rendu sur les conclusions de M . Touttée. M e. Marie
plaidoit pour le sieur F ayet, saisissant, et M e. Pagès-Meimac pour la partie saisie. L e tribunal de Saint - Flour
avoit ann ullé la procédure du sieur Fayet ; sur l’appel
elle a été maintenue, et la partie saisie condamnée aux
dépens des causes principale et d’appel. L e sieur Fayet
a été autorisé à les employer en frais de privilège
d’expropriation. M e trouvant en même position, je ré-,
clame même justice, et je l’attends avec sécurité,
BELL AVOINE.
GOURBEYRE.
A. R I O M , de l’im p rim erie de L a n d r i o t ,
la C o u r d'ap pel. — A n 12
.
seul im p r im e u r d e
dit
�ü lr * A m
fi' r-
^-W<u Ì m, A
u^m2Äbj(u>u
' rn
¿C
£ ^ÎtuivJÙü cr
^
4
<t^ìU)k. u lt vi^)^ÁaTvcvÍt Tv%
“ <AA.
c )o u * -¿ ^
Ü
^
r ^
A
^•XtÁT
^ U # X lͿ ~
M
O
^
l
^ U v u ir
C ju v J | ^ ¿ ijO
t¡
•’ >
ciwi fc-»
oaa
><ì'f j,
ÍA* ou^~^-^iU
\¿M
*J
/
y ^ fu i^ X A A J ju d t“
W
tA J J M J O
'A
« *C *~
/Íft^yiA.
dif .
«aí- Ifi&C'
4\'ovJr^O«^Í^Í) AAACMJ^ /• <Au/^t
4
^
t'j
O -tAAA e* U à Cj uà/*
m js
ci^ i^
4
4
I^UA ^ A>OaaJK-¿j» ^ U V M a a A A A J L M
0¡fl
¿ X ir
¿ (a
p 'A .C íjú k .
d *
f O-UXT
vi 1 •
C ü w ^ O a a a o o ji f
<AA.vi /
y 1
/
- «AAA
•)*..
- -*
■.\if
.
^ u il(> A |L . / il ^ACjÙtùk i O S J e ^ t / u u ^ « »
^ U ju tx o
IAJUL/U\
CA>uZu~ « A
«A-
u J ú iw »
C J**A *ju lr-tW tú «*> í
8ÄA"
•#_!_■'-%.•
' ‘ ..........
'
OW*1a»A«u*>'-AflCA^M
‘J-■
ے;
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bellavoine, Claude. An 12]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bellavoine
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
créances
loi du 11 brumaire An 7
successions
expropriations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire signifié pour Sieur Claude Bellavoine, propriétaire, habitant du lieu d'Ecole, mairie de Brout, arrondissement de Gannat, appelant ; contre François et Antoine Bonnamour, propriétaires, habitans en la commune de Brout, intimés.
Annotations manuscrites: arrêt du 13 fructidor an 12, 1ére section.
Table Godemel : Expropriation forcée : 2. sous l’empire de l’ordonnance de 1667, une expropriation forcée n’a pu être poursuivie en vertu d’un jugement par défaut faute de comparoir, rendu en premier ressort, quoiqu’il eut été notifié, et suivi de plusieurs procès verbaux de carence, car il était susceptible d’opposition.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 12
1788-An 12
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1313
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Broût-Vernet (03043)
Mayet-d'Ecole (03164)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53202/BCU_Factums_G1313.jpg
Créances
expropriations
loi du 11 brumaire an 7
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53241/BCU_Factums_G1501.pdf
4ee946b7dc5a54b0b86d7a2f0bce17ed
PDF Text
Text
ME MO I R E
P O U R
C la u d e
R O U X , notaire à Gannat, intimé et
appelant -,
C O N TR E
Les
I
l
h é r it ie r s
D E D A R D , appelans et intimes.
s’agit de servitudes.
Les maisons des parties sont situées dans la ville de G a n n a t,
ci-devant régie par la coutume de Bourbonnais.
Elles sont contiguës, et sc confinent, sans m oyen, de nord
et midi.
L e mur de lisière de la maison des héritiers de Bard, aspect deb i s e dans toute son étendue la cour du sieur Roux.
Il y dans ce mur de lisière plusieurs jours ou fenêtres qui don
nent sur la cour du sieur Roux,
*
\
�( O
Ces jours sont garnis de barreaux de f e r ; quelques-uns même
paroissent être à verre dormant et à hauteur de coutume.
L a principale et la plus incommode de ces fenêtres, est une
croisée de construction récente, pratiquée au rez-de-chaussée de la
maison des héritiers de Bard, presque à fleur de terre de la cour du
sieur Roux.
On dit de construction récente, ce qu’il est aisé de vérifier, soit
par la maçonnerie, comparée à celle du surplus du bâtim ent, soit
par la forme de la fenêtre, soit parce que le mur est surplombé,
tandis que les jambages de la croisée sont perpendiculaires et n’ont
rien perdu de leur aplomb.
C ’est cette croisée qui est la vraie cause et le principal objet de
la contestation.
L e sieur Roux, qui a un état public, étoit dans le cas d’éprouver
plus qu’un autre les inconvéniens d’une grande croisée qui donnant
sur sa cour et sur l’c n u i , Jo sa maison, permettoit au propriétaire
voisin de tenir registre de tous ceux qui entroient chez lui ou quî
en sortoient, et de tout ce qui s’y passoit.
Il crut devoir user du droit que lui donnoit la lo i, de faire réduire
à hauteur de coutume, avec fer maillé et verre dormant, celte fe
nêtre et tous les autres jours qui avoient été pratiqués dans ce mur
de lisière»
Cette première contestation en a fait naître d ’autres sur le droit
d ’égout et le tour d’échelle;
E t par le jugement qui est intervenu sur cette contestation, le i S
floréal an i 3 , le sieur de Bard a été condamné à étouper la fenêtre
dont il s’agit et les autres jours pratiqués dans le mur de lisière, si
mieux il n’aimoit les réduire à hauteur de coutum e, avec fer maillé
et verre dormant.
L e tribunal a accordé au sieur de Bard le droit d egout et le tour
d ’échelle ;
E t par une singularité dont on voit peu d ’exemples, il lui a per
mis, d’o ffice, de pratiquer une porte dans la cour du sieur R o u x ,
pour user du tour d ’échelle à volonté.
�( 3 )
Les parties sont respectivement appelantes de ce jugement ;
Les héritiers de Bard, en ce que ce jugement leur refuse le droit
de vue pleine sur la cour du sieur Roux ;
E t le sieur R o ux, en ce qu’il leur accorde le droit d ’égout, le tour
d ’échelle, et la servitude intolérable d ’une porte dans sa cour, qui
ne lui permettroit plus d'être clos chez lui, et rendroit sa maison
inhabitable.
En coutume de Bourbonnais, comme en coutume de Paris, on
ne connoît point de servitudes sans titres.
« On suit, dans cette coutume, dit A u r o u x , sur l’article 5 i g ,
« la disposition de la coutume de Paris, article 186, qui est gé« nérale. »
IVota, dit M . François de C u len t, quod hoc ju re utim ur, ut
servitutes per se nunquam longo tempore usu capi p o ssin t, adeb
ut requiratur titulus.
M . Auroux ajoute : « Je l’ai vu ainsi juger plusieurs fois en cette
« sénéchaussée. »
A u surplus, ce principe n’est pas contesté par les héritiers de Bard;
mais ils prétendent être dans un cas d ’exception, et ils fondent cette
exception sur quatre moyens.
L e premier, sur la prétendue existence d ’une ruelle entre leur
maison et remplacement qui forme la cour du sieur Roux ;
L e second, sur leur contrat d ’acquisition de 177a, contenant
énonciation de quelques-unes des servitudes dont il s’agit;
L e troisième, sur la prescription résultante du silence du sieur
R oux ou de ses auteurs, pendant trente ans après contradiction;
Le quatrième, sur ce qu’ils appellent la destination du père de
famille.
s. IerS u r la prétendue ruelle.
Les hcniiers de Bard rapportent un acte d ’échange clc leur maiA a
�(4 )
son., passé devant Franconin, notaire à G an n at, le 4 avril 1672,
entre Gilberte Martin et Annet CouchartI.
Par cet acte, celte maison est confinée , au nord, par une place
appartenante à G ilbert D ela rue ; une ruelle entre d eu x avec son
étable ; le tout, de bise.
Si les héritiers de BarJ entendent excîper de ce titre pour en in
duire qu’il existoit entre les propriétés des parties une petite rue ayant
issue aux deux extrémités, ils ont contre eux le témoignage irrécu
sable de la localité, qui dépose contre la possibilité de toute espèce
d'issue à l’aspect de nuit, et celui d ’une multitude innombrable de
titres, soit du fait des auteurs du sieur Roux, soit du fait des auteurs
des héritiers çleBard, qui constatent que leur maison et l’emplace
ment formant la cour du sieur R o u x , se sont joints de tout temps
sans intermédiaire.
S ’ils entendent en exciper pour en induire une ruelle commune
entre les propriétés J C8 parties, le sieur R oux invoquera, avec la
même confiance, le témoignage de ces titres, qui, tous sans ex
ception, constatent avec la même uniformité qu’il n ’ y a jamais eu
ni co-propriété, ni usage commun entre les parties, d ’une pré
tendue ruelle au delà du mur de lisière de la maison des héritiers,
de Bar 1.
Ces faits sont prouves, i°. par une reconnoissance du terrier de
Villemont, du 5 1 mai i/jGG, par laquelle Antoine Luilier, bourgeois
de G annat, reconnoit un cens à la seigneurie de Villemont, pour
une maison appelée « l'hôtel l ’ourlier, et passe devant icelui hôtel,
« situé en la ville de Gannat ;
« T en an t à la grande rue commune , devers orient ; à une autre
« rue com m une, de laquelle on va de la grande rue au moulin Bous« sard, devers nord ; à la cour et aises du Confessant, devers oc« cident ; et h la maison du Confessant t appelée la S a lle - V ie ille ,
« devers m idi. »
Cet hôtel P o u rlicr, désigné dans cette reconnoissance, forme
aujourd'hui la partie orientale de la cour du sieur R o ux, qui joint la
grandi* rue : 011 trouve encove.dans la cour les ï ’ondemens îles an
�( 5)
ciens bitimens etles pavés, qui distinguent celte partie du surplus de
la cour et des bâtimens du sieur Roux.
L a maison appelée S a l l e - V i e i l l e est aujourd’hui la maison
des héritiers de Bard.
Ainsi il résulte évidemment de ce premier titre, que l’emplace
ment de l’hôtel Pourtier joignoit immédiatement, à l’aspect de
m i d i , la maison des héritiers de Bard.
E t comme cette maison étoit allodiale, tandis que le surplus de la
propriété du reconnoissant étoit grevé de cens, on ne peut pas
douter que le sieur Luilier n’ait été plutôt porté à étendre la con
tenue de la maison de la Salle-Vieille, qui étoit allodiale, que la
partie adjacente, qui étoit en censive.
Mais l’énonciation de ce premier a c te , qui constate que cette
maison de la Salle-Vieille n ’étendoit pas ses dépendances au delà
de sa muraille de lisière à l’aspect du nord, est confirm ée par une
multitude de titres postérieurs.
L e sieur R oux commencera par rapporter ceux émanés des pro
priétaires qui l’ont précédé. Il fera ensuite usage de ceux émanés
des auteurs de ses adversaires.
D u 19 avril 16 6 1, il a été fait donation de la maison apparte
nant aujourd'hui au sieur R o u x , par Gilbert Delarue, au profit
de Didier Rambaud.
On donne à cette maison pour confin immédiat, de m idi, .la
maison des héritiers de défunt Jean M artin.
Cette donation est antérieure de onze ans à l’échange de la
maison.des héritiers de B ard, fait en 167a, entre la veuve Martin
et Annet Couchard.
L e 10 janvier 1678, Ilenri Guyard forme une action hypo
thécaire contre Gilbert F a u ch e r, comme possesseur de.la maison
-appartenant aujourd’hui au sieur ,Roux ; ;et dans l'exploit-de [d'omandc, cette maison est confinée, de midi, par la maison d A nnat
Couchard.
Lu i 5 octobre 1678, cette .maison est saisie ,réellement, à la r<?~
quelc d ’IIcnri G u y a rd , sur Gilbert Faucher; .et dans cette saisie
�(G )
réelle, on la cotifinc également par celle d 'A n n e t Couchard, de
m id i, toujours sans intermédiaire.
L e 6 novembre 173g, Gilbert Faucher, petit-fils d’autre Gil
bert, partie saisie en 1678, vend cette maison à Claude Chomelte
et sa femme; et dans cet acte, elle est confinée immédiatement, de
m id i, par la maison des héritiers Ile r o n , qui étoient'les descendans d’Annet Couchard.
L e 5 mai 1744, Claijde Chomette a consenti une rente de quinze
livres au profit de la veuve Bechonnet, et a hypothéqué cette rente
spécialement sur cette m aison, qui est confinée immédiatement
par la maison de la veuve et héritiers f e u M *. François Ileron ,
de midi.
L e 27 avril 1772, les héritiers Chomette ont vendu cette maison
au sieur Loizel-Darranges; elle est encore confinée, dans cet acte,
sans intermédiaire, de m id i, par la maison de la dame de L a p oterie, qui étoit une l»<SrltU>rG Ileron.
L e 5o novembre 177 3 , le sieur Loizel-Darranges a subrogé pu
rement et simplement le sieur G u y o t, à l’effet du contrat du i5
avril 1 7 7 2 , aux mêmes charges, clauses et conditions.
L e r . mai 1774» le sieur Guyot a passé acte de ratification, au
profit des héritiers Bechonnet, de la rente de i 5 liv. spécialement
hypothéquée sur sa maison; et cette maison y est confinée, de
m id i, a u x hdtimens de M . le chevalier de B a rd , venus de la
dame Ile r o n , veuve Lapoterie.
L e 25 mars 1787, le sieur G uyot a consenti au terrier Villemont une reconnoissance nouvelle des cens dûs sur sa maison,
en vertu de l’ancienne reconnoissance consentie par Jean Luilier,
le 3 i mai 1466.
On lit, dans la première partie de cette reconnoissance, que le
sieur Guyot reconnoit devoir au seigneur de V ille m o n t, à cause
de sa terre de Gannat, cinq coupes froment et cinq deniers tour
nois de cens, « pour et à cause d'une cour où étoit autrefois un
» hôtel Pourtier, et passe devant ic e lu i, situé en ladite ville de
» Gannat, rue St. Jacques, paroisse St. Etienne, quartier du pont
�( 7 )
»
»
ri
»
Cervelon, joignant la grande rue publique, ou route royale de
Gannat à Aigueperse, d ’orient; la maison de M . de B a rd , ché
valier de S t. L o u is , qu i j u t appelée la S a lle - V ie ille des L uilier, de midi. »
Enfin, le sieur Roux a acquis cette maison du sieur G u y o t, le
a i pluviôse an 6; et dans cet acte, la maison de Bard a été in
diquée pour confin de m id i, sans intermédiaire, comme dans
tous les litres précédons.
Mais ce n’est pas seulement des titres émanés de ses auteurs,
que le sieur Roux tire la preuve que le terrein qui forme sa cour
a joint de tout temps, sans intermédiaire, la maison des héritiers
de Bard ; cette preuve résulte encore d'un grand nombre de titres
émanés des propriétaires de cette maison.
L e 5o janvier 1703, François Héron et Gilberte Couchard, sa
fem m e, fille d’Annet, qui avoit consenti l’acte d ’échangc de 1672,
consentirent une rente de 5 o liv. au profit des religieuses de Notre*
Dam e de Gannat; ils donnèrent pour hypothèque spéciale leur
maison, en la confinant, de bise, sans intermédiaire, par la bassecour d’ A n to in e Faucher.
L e 3 juin 1 7 1 8 , le même François Héron consentit rcconnoissance d’une rente de 5 liv. 14 s , > due aux religieux Auguslins, sur
sa maison; et elle est encore confinée, dans cet acte, par la cour
d'A n toin e Faucher, de bise.
D e François H éron, cette maison a passé à la dame Lapoterie,
sa fille ou sa petite-fille, qui l’a vendue à Antoine de Bard , le 22
avril 1772.
Par cet acte de vente, la dame Lapoterie confine sa maison
p a r le s bdtimens et la b asse-cour de M . L o iz e l- D arranges ,
'venus des en/ans et héritiers C h om ette, de nuit et bise.
Voilà donc la contiguïté, sans intermédiaire, de la basse-cour
du sieur Roux et de la maison des héritiers de B ard, établie et
reconnue depuis des siècles, et cela par les auteurs respectifs des
parties, et par les parties elles-mêmes.
A la preuve de cette contiguïté, sans intermédiaire, résultante
�de la multitude des litres rapportés par toutes les parties, se joint
la possession des lieux dans cet état.
D e tous temps le sieur Roux et ses prédécesseurs ont joui de
leur basse-cour jusqu’au pied du mur de lisière de la maison des
héritiers de Bard; c ’est un fait qui n’a pas été désavoué dans la
cause, et qui ne sauroit l’être.
C e fait est d ’ailleurs prouvé par l’état même du local.
L e mur de clôture de la cour du sieur R o u x , sur la grande
r u e , joint immédiatement, à l’aspect de m id i, le mur de lisière
de la maison des héritiers de Bard.
A l’autre extrémité de ce même mur de lisière, le mur de l’é
curie du sieur R o u x , aujourd’hui buanderie, joint encore immé
diatement le mur de la maison des héritiers de Bard.
D e sorte que tout le terrein qui forme la cour du sieur R oux,
se trouvant circonscrit par ses m u rs, il est évident que tout ce
terrein est sa propriété exclusive, et que les héritiers de Bard ne
peuvent y prétendre aucun droit de co-propriété, avec d ’autant
plus de raison, que s’ils y en avoîcnt jamais e u , c<; qui n'est pas,
ils l’auroient perdu, et par leur propre ave u , consigné dans les
actes émanés d’e u x , et par la prescription des siècles.
M a i s , dira-t-on, commentse peut-il qu’on ait fait mention d ’une
ruelle dans l’acte d’échange de 1672?
On répondra d ’abord que cette énonciation est une erreur
évidente, d ’après les expressions mêmes dont on se sert dans
cet acte.
La maison des héritiers de Bard y est confinée « par une place
» appartenante à Gilbert Delaruc , une ruelle entre deux avec son
» étable , le tout de bise. »
Une place est un endroit vacant, qui est sans bAlimens; celte
place éloil en effet l’ancien hôtel P ourticr, qui avoit été délruit
cl changé en cour.
• O r , comment concevoir une ruelle dans une place vide? ou , si
l ’on v e u t, comment concevoir une ruelle entre celle place vide
et un bâtiment quel qu'il soit ? Une ruelle suppose un espace cntro
�( 9 )
tre deux murs qui forment uñe petite rue ou un passage de quel
ques pieds de large; toutes les fois qu’il y a un mur d’un côté et
une grande place vacante de l’ autre , il n’y a plus de ruelle. Ainsi
l’énonciation de cet acte est inconciliable et contradictoire avec
elle-même.
Veut-on qu’elle soit vraie , que celte ruelle fut réellement exis
tante en 1672, ce qui est démontré faux par tous les titres anté
rieurs et postérieurs , on n’ en pourroit encore rien conclure contre
le sieur R o u x ; parce qüë cet acte né dit pas que cette ruelle fû t
commune entre Gilberte Martin et Gilbert Delarue , et que G ilberte Martin ne cède par cet acte aucun droit sur celte prétendue
ruelle à Annet Couchardj auquel elle transmet la propriété de sa
maison'.
•* * •
On ne peut même pas dire que ce soit ici un oubli de la pari de
Gilberte M arlin, car cette prétendue ruelle y est expressément rap
p e l é e mais sans faire mention qu’elle y eût aucun droit ni de
co-propriété , ni d ’usage , que cette ruelle enfin eût rien de com
mun avec elle.
A u surplus, ce qui peut avoir donné l’idée de celte prétendue
r u e lle ,c ’est qu’àutrefois', lorsque la partie de la cour du sieur R o u x,
qui est sur le bord de la grand’rue à l’orient*, formolt l’auberge
appelée Y H ôtel P o u r lie r, désignéedans la reconrioissance de 1466,
il y avoit nécessairement un passage à l’extrémité méridionale de
celte auberge, soit pour conduire à l’écurie qui éloit au fond d e là
cour les chevaux des voyageurs, soit pour conduire à :elte même
cour qui éloit derrière'et à l’occident de cet H ô tel Pourtier.
On l’a déjà d it , o n ‘remarque encore'dans ¿elle cour les traces
de celte ancienne construction de l’Hôtel Poiirlier, et'ces traces
laissent apercevoir l'existence ancienne de ce'passage destiné à con
duire soit à la c o u r/ s o it à l’écurie.
‘Mais tout cela prôuve de plus en plus que celte partie du local,
comme le surplus de la coUr du sieur R o u x, a formé de tous temps
une dépendance et une propriété exclusive inhérente à ia maison
du sieur Ilo u x ; ce qui'est confirmé par la'possession la plus paisible
lî
�( 10 )
et on même temps la plus ancienne, puisqu’elle remonte à plusieurs
siècles.
Ainsi disparoit la première exception invoquée par les héritiers
de Bard , contre le grand principe , nulle servitude sans titre. O a
verra bientôt que la seconde n’est pas mieux fondée.
s. I I .
S u r les prétendus titres énonciatifs.
Remarquons d’abord que ces titres énonciatifs seroient sans con
séquence, parce que ce sont des titres constitutifs qu’exige la loi,,
des litres émanés de parties respectivement intéressées, et non de
simples énonciations, et surtout faites dans des actes émanés de
ceux qui avoient intérêt à faire ces énonciations, et qui abusoient
pour les faire de l’absence et de l’ignorance des parties intéressées.
Mais d ’ailleurs, quels sont donc ces prétendus titres énonciatifs?
ils ne sont ni anciens , ni gammés.
C e n’ est pas dans l’échange de 1672, rapporté par les héritiers
de Bard qu’on trouve ces énonciations ; on y trouve la création
d ’une ruelle qui n’existoit pas, et on n ’y voit pas un seul mot de
servitudes sur la cour du sieur Roux.
Ce n’est pas dans l’acte de constitution de la rente de 5o liv. au
profit des religieuses de G a n n a t , du 3o janvier 1703; la maison
des héritiers de Bard y est exactement confinée, et il n ’y est encore
pas dit un mot de servitudes.
Même silence dans lareconnoissancede la rente d e 5 liv. i/f sous,
au profit des religieux Augustins , du 3 juin 1718.
II n’en est pas davantage question dans l’acte du 3 août 17^ 9,
qui a réuni sur la tête de la dame Poterie la propriété de la totalité
de la maison de François Héron son père ou son aïeul.
C ’est pour la première fois qu’on voit ces servitudes énoncées
dans l’acte de vente consentie par la dame de la Poterie à Antoine
de Bard , du 23 avril 177a.
On lit dans le détail des appartenions dont cette maison est com
posée çe qui suit :
�(il.)
« Un salon bas, percé de trois croisées, dont deux prenant jour» sur la grand’rue , à l’aspect de jour ; Vautre dans la basse-cour
» v o is in e , à Vaspect de bise ; quatre pièces hautes et des greniers
». régnant sur le tout, couverts à tuiles creuses; ainsi et de mêmeque
» ladite maison se limite et com porte, circonstances et dépen» dances.
dont on v ien t de
;
. V T ou r'f d’ éch
i' elle dans la basse-cour
»■ —r
» parler.
'
» Joignant la grand’rue, de jour; le ruisseau d ’A n d e lo t,d e m id i;
» les bdtimens et la basse-cour de M . L oizel-D a rra n g es, venu
» des enfans et héritiers C h o m ette, de nuit et bise. »
Antoine de Bard fait dresser procès-verbal de l’état des lieux, le
3o du même mois d ’avril, et dans ce procès-verbal il rappelle encore
avec complaisance la croisée du salon et les autres fenêtres qui
prennent jo u r sur la cour venue des héritiers Chom ette.
Il rappelle encore avec sa même compIaî8ance le pretendu droit
de tour d’échelle.
Enfin , il rappelle aussi la prétendue ruelle, en ces termes :
« T o u r d ’échelle dans la basse-cour venue de Chomette; entre
» laquelle basse-cour et ladite maison, il y avoit autrefois une ruelle
» joignant icelle m aison , etc. »
Ce sont là ce que les héritiers de Bard appellent des titres énonciatifs.
M a i s , outre que ce ne sont pas des titres énonciatifs qu’exige la
loi pour établir des servitudes, mais des litres constitutifs, il est
ridicule de présenter, comme des titres propres à faire quelque im
pression à la justice, i°. des actes aussi nouveaux, tandis que la loi
ne donne quelque créance aux titres énonciatifs, que lorsqu’ils sont
marqués du sceau de l’antiquité, in antiquis enuntiatwa probant ;
a.* Des actes étrangers aux parties intéressées à ces servitudes,
qu’ellrs n’onl jamais connus, et qu ’elles n ’ont pas dû connoilrc , parce q u ’elles n ’ont pas dû en soupçonner l’existence.
A u surplus , rien n ’est plus propre à faire stnlir le pou de
cas qu ou <J0Jt f aîre t|es énonciations de servitudes qu’on a aficclé de transcrire dans celte vente et dans le proccs-Ycrbal
Ba
�' ( 12 )
de l ’état des lieux qui*-l’a suivie, que-la circonstance dans la
quelle ont été faites ces énonciations.
L a maison du sieur-Roux avoit -été vendue p?r les héritiers
Chomelte au sieur iLoizel-D arran ges , le 22 avril 1 7 7 2 , huit
jours avant la vente de la dame de la Poterie à Antoine de Bard.
Les héritiers Chomette avoient inséré dans la vente qu’ils
avoient consentie au sieur. Loizel - Darranges , qu’ils, vendoient
leur maison ‘fra n ch e et quitte de charges , servitudes, . notam
ment de celles indûment pratiquées par d es v u e s , jours et
fenêtres sur ladite maison /vendue t ù , la m aison,de, la dame
de la P o terie.
•Cette clause a sans doute.été connue de la dame (de la Po
terie; e t, de suite, en vendant sa maison , elle a affecté, ainsi
que son acquéreur, dans son procès verbal de l’état des lieux,
d ’énoncer toutes îes servitudes qu’ils ont jugé â propos.
Mais ces actes, encore un coup-, ne prouvent.-rien contre
le sieur R o u x , soit a raison de leur nouveauté, soit à raison
des circonstances qui ont déterminé ces énonciations , soit parce
que ces actes ont été absolument inconnus au sieur R o u x et
à ses prédécesseurs.
Ces actes prouvent, au contraire, contre les héritiers de Bard,
en ce qu’on y rappelle sans cesse la cour du sieur Roux comme
confîn, sans intermédiaire, aspect de bise : aveu précieux, de
la part des parties adverses, de la possession et de la propriété
exclusive du sieur Roux , jusqu’au pied du mur de lisière de leur
bâtiment.
.
§. I I I.
F in de non-recevoir opposée au sieur R o u x , résultante du pré
tendu silence du sieur H oux et de scs auteurs, pendant 3o ans
après contradiction.
• H est constant qu’en point de droit, les servitudes, quoi«/»«-*
établies sans titre, sont consacrées par la prescription, lorsque,.
�(( i3 )
après contradiction, celui qui à intérêt de s’en plaindre, a gardé
le silence pendant trente ans.
1
n*' ' ' '
Mais jamais on né' fit une plus fausse application du prin•
»
. 11<»
y. ... j
i|' \ •>r lII**
cipe
qu à ,1i) espece.
(D ’abord on pourroit invoquer, s’ il en étoit besoin, l'article
3 du titre 5 de la l o i c l u ’ 20 août 1792 , qiilLà l’suspendii 'la
prescription de tous les 'droits-corporels'et incoiip6tiels] diepuïs
le 2 novembre 1789 jusqu’au 2 ' novembre 1 7 9 4 ; ^ 'comme les
héritiers de Bard n’entendent sans doute faire remo'ntbr' la prti' tendue contradiction et" lé coursMé' la prescription dont ils excipen t, qu’au titre d ’acquisition' d’A htoine'deiIÎard/’dè l ’àfinëe
17 7 2 , il s’en fa u d roit' de plusieurs1 années que''le të rm é 'fata l
ne fût expiré. ’ ‘
£—
*
Mais ce moyen est superflu : dans le f a i t , il n’y a point eu
de contradiction ; et ,* dans le'df'oit *
cette contradiction
seroit réelle elle’ n'àuroit ’pas les ’car aéiÜres ' qu’eklge" la loi pour
operer la prescription.
—
u imi
On dit qu’il n ’y a pas eu de contradiction ; et en effet , il
est impossible 'de se former l’idëé d ’üné ’c’ontr&dictiôn* sur un
droit quelconque, sans'suppdser dëu'x1pa r t ies‘e/2'préserice, dont
l ’une prétend avoir tel droit, que l’autre conteste.
Ici, les parties n ’ont jamais été'en présence avant la demande.
L a darne'de’ la Poterie avjugé à -pr'ôpos" d ’insérer daiis sa vente
¡1 Antoine de B a rd , qu’elle avoit des servitudes sur la cour de
son voisin; et Antoine de B a rd a réitéré cette énonciation dans
le procès verbal qu’il a fait dresser de l’état des lieux'.'"'
Mais ni cette vente ni ce procès verbal n ’ont été faits contra
dictoirement avec ce voisin : il n’y a pas'été appelé, l i a ignoré
qu’on se préparoit ainsi des armes contre lui dans l’ombre; et
il l’auroit sans doute ignoré éternellement, si la contestation,
et la vraie contradiction qui s’est élevée tout récemment entre
1<JS parties, n ’a voient mis Antoine de Bard cl ses représentant
dans lt; Cils j ç
|os m citrc au jour.
11 est dune évident nu’il 11’y a pas eu de contradiction entre
�(
*4 )
les parties sur les prétentions qui les divisent, jusqu’au moment
de la demande; q u e , dès-lors, le silence du sieur Roux et
celui de ses prédécesseurs, depuis ces actes de 17 7 2 , n’ a pu lui
n u ire, et rien changer à sa position.
M a i s , ( il y a m ie u x , ) q u a n d , abusant des mots et des
choses , on voudroit regarder dénonciation insérée dans ces actes ,
à l’insçu du sieur Roux et de ses prédécesseurs, comme une
vraie contradiction, elle n’auroit pas les caractères q u ’exigent
les lois pour opérer la prescription.
« Il faut remarquer , dit Auroux , sur l ’article 619 , déjà cité,
» que notre coutum e, dans le présent article, se contente pour
» l’établissement d’une servitude, à défaut de titre, d ’unepos» session trentenaire après la contradiction ; en quoi elle est
» conforme à la coutume de Nivernais, chapitre 10 , article 2 ,
» et à la coutume de B e r r i, titre 1 1 , article 2 ; ..........ce qui
» doit s’ entendre, scion Ijatliaumassière , dans son commentaire
» sur cet article de la coutume du B e r ri , d'une contradictioji
» ju d icielle. »
Mais c’est trop s’étendre sur un moyen aussi pitoyable en fait
et en droit, et qui ne méritoit pas même d ’être relevé.
S- IV .
S u r la prétendue destination du père de fa m ille.
Il faut distinguer ici entre les quatre espèces de servitudes qui
donnent lieu à la contestation :
L e s jours ou fenêtres ;
L e droit d ’égout ;
L e tour d’échelle ;
E t la porte.
O n ne prétend pas sans doute invoquer la destination du père
do famille pour le tour d’échelle, puisqu'il n ’existe et 11c peut
exister aucune trace physique et apparente de ce prétendu droit.
L es parties sc trouveroient donc à cet égard dans toute la
�( i5 )
rigueur des principes , c ’est-à-dire , que ce droit ne pourroit exis
ter sans titre, s’il n’étoit fondé sur la loi municipale qui rendoit
superflues, et la demande qu’en a formée le sieur de B a r d , et
la disposition du jugement qui Ta accueillie.
On lit dans l’article 5 io de la coutume de Bourbonnais, que
« quand aucun fait édifier ou réparer son héritage, son voisin
» est tenu lui donner et prêter patience à ce fa ire , en réparant
» et amendant diligemment, par celui qui édifie, ce qu’il aura
» ro m p u , démoli et gâté à sondit voisin ; et ne peut pour ce
« le réédifieur, acquérir droit de possession contre ni au préju:> dice de celui qui a souffert ladite réparation ou édifice. »
L e sieur Roux est donc obligé de donner et prêter patience
aux héritiers de Bard toutes les fois qu’ils voudront réparer
réédifier leur maison : et il ne falloit pour cela ni demande
jugement.
Si le sieur de Bard en a usé ainsi précédemment, c’est
vertu dè la l o i , qui l’y autorisoit ; m ais il ne peut pour
et
ni
en
ce
acquérir droit de possession au préjudice de c elu i qu i a souf
fe r t ladite réparation.
On ne peut pas mieux invoquer la destination du père de fa
mille pour la porte , dont le jugement a ordonné l’ouverture dans
la cour du sieur R o u x ,' puisqu’il n ’existe encore aucune trace phy
sique de cette porte, et que l’état des lieux, réuni aux titres rapportés,
prouve évidemment qu’il n’en a pas existé depuis plusieurs siècles.
M a is, pour ne pas revenir sur cette servitude, et ne rien lais
ser à désirer sur cet o b je t, puisqu’il en est ici question , exa
minons sur quel fondement et à quelle fin le tribunal de Gannat
a pu ordonner l’ouverture de cette porte.
*
Seroit-ce à raison de l’existence de la prétendue ruelle, rap
pelée dans l'échange de iQ'jz ?
1
Mais on a v u , d'une part, que dénonciation de cet acte ¿toit
fausse et insignifiante , puisqu’on suppose que cette ruelle étoit
entre la maison de Bard et une place vide; ce qui ne se peut.
�( ?6)
D ’autre part, que cet acte ne suppose ni une ruelle commune
ni une co-propriété entre les parties.
D ’autre part encore, quedes titres innombrables, qui embras
sent plusieurs siècles, attestent que le mur de lisière de fa maison
de Bard joignoit sans moyens la cour de la maison R o ux; ce qui
exclut toute idée d’un droit de co-propriété et d’usage commun
sur cette prétendue ruelle.
Seroit-ce parce que les premiers juges auroient considéré l’ou
verture de cette porte comme une conséquence nécessaire du tour
d ’échelle, qu’ils ont accordé à Antoinp de B a r d , et comme un
moyen d ’en faciliter l’usage?
Mais l’article 5 io de la coutume de Bourbonnais, qui permet
à celui qui veut réédificr ou réparer son bâtiment de passer chez
son voisin pour cette réédification ou réparation , 11e lui permet
pas d’avoir une porte, et suppose évidemment, au contraire ,
.qu’il sera, tenu dépasser par la porte de ce voisin, qu’elle oblige
à donner et prêter patience.
E t quand on supposeroit le tour d’éclielle le plus étendu et le
plus incontestablement établi par titres, il ne pourroit jamais en
résulter le droit d’avoir une porte dans la cour et dans là maison
de son voisin.
(
, . L e siçur Roux a pour l’usage de sa maison une porte cochère
et une seconde porte plus petite., l’une et l’autre sur la même
ligne et donnant sur la grand’rue ; quels que fussent les droits
des héritiers de Bard , tout ce qu’ils pourroient exiger, ceseroit
que le sieur Roux leur en fît l’ouverture lorsqu'ils en auroient
I
( , .*
, *' ^
■»( /
besoin pour la reedincation ou réparation de leur maison. Mais
il sero.it sans exemple qu’il leur fût permis d’ouvrir une troisième
porte dont ils auroient, l'usage exclusif.
♦
.
1 ,,.
.
,
.. A u . ^ r p l u s , pour sentir toute l’absurdité d ’une pareille dis
position, il suffit de faire ce dilemme
Ou cette nouvelle porte qui scroit pratiquée par les héritiers
de Bard pourroit être fermée par le sieur Roux ; ‘ou elle no
pourroit pas l’être.
�( »7 )
SI elle pouvoit être fermée par le sieur R o u x , elle serbit Inu
tile aux héritiers de B a r d , et autant vaudroit user des deux au
tres qui existent dans le même mur et sur la même ligne ,
puisqu’il seroit aussi facile au sieur Roux d’ouvrir ces anciennes
portes que la nouvelle.
Si cette porte ne pouvoit pas être fermée par le sieur R o u x ,
il seroit donc chez lui comme au milieu d ’une place publique ;
ce qui ne peut se concilier avec les principes de l’ordre social,
qui veulent que chacun soit en sûreté chez soi. Tutum caique
tectum.
A u surplus, les héritiers de Bard voudroient-ils prendre sur eux
la responsabilité d ’une pareille porte, ouverte à volonté dans la
maison d ’un notaire, dépositaire de la fortune publique, soit par
les papiers précieux attachés à son état, soit par les versemens
journaliers en numéraire qui en sont une suite nécessaire ?
C e chef du jugement dont est appel, est donc aussi inconsidéré
qu’il est injuste; aussi contraire à l’ordre social, qu’il est incon
ciliable avec les localités et avec tous les usages reçus en matière
de servitude.
Mais ce qui rend cette disposition du jugement dent est appel,
encore plus inconcevable , c’est qu’Antoine de Bard n ’avoit pas
même tenté d ’obtenir cette étrange servitude. Q u’on lise les de
mandes du sieur de Bard, consignées dans scs écrits, soit devant
le juge de p a ix , soit devant le tribunal de G a n n a t, on n ’y trou
vera pas un mol de cette porte, dont il est seulement question
pour la première fois dans ce jugem ent, sans qu’on puisse en de
viner la cause.
Quoi qu’il en soit, il résulte de cette dernière circonstance,, que
la disposition du jugement dont est appel, en ce qui concerne
celle porte, n ’est pas seulement injuste et ridicule sous tous les
points de vue; mais qu’en cela les premiers juges ont encore ac
cordé aux héritiers de Bard celte porte d ’office, et qu’ils ont j"gé
ultra patita, ce qui rend leur décision de plus en plus absurde cl,
insoutenable.
G
�U ne resle donc que deux, espèces de: servitudes auxquelles
puisse s’appliquer-le moyen tiré de la prétendue destination dupère de fa m ille , celles1 dfc>l’égout et des jours et fenêtres.
A l ’égard du droit d ’égout, il est facile à l’œil le moins exercé
de s’apercevoir que les auteurs des héritiers de Bard ont allongé
leur toit avec des bouts de chevrons: postiches et des planches
sur lesquelles on a posé des tuile»' qui déversent les eaux dans
la cour du sieur Roux;
Il y a. lieu de croire que précédemment les eaux du toit- des
héritiers de Bard se rendoient dans la rue, à l’orient, par un canal
ou ranchaud.
E t ce qui ne permet pas d ’en douter, c’est qu’à l’aspect do midi
10 toit de latmaison des héritiers de Bard se termine par un canal
ou:ranchaud qui conduit les eaux pluviales dans celte rue, el qu’il
y a parfaite uniformité de construction entre les deux toits do
midi et de bise, i» l'exception de l’addition, du côté de bise, des
chevrons postiches, des planches ot des tuiles qui dévcrscnl les
eaux dans la cour du sieur Roux.
Le sieur Roux se plaint decelte innovation , qui, étant faite sanstitre , n ’est qu’une usurpation que le temps même n’auroit pu con
sacrer; et se trouvant forcé d ’en venir en justice avec ses voisins,
11 croit devoir invoquer avec confiance la loi qui l’affranchit do
celte servitude, comme de toutes les autres qu’on veut lui>imposer.
Enfin, il reste à s'occuper dfe l’article important des» jours et'
fenêtres, et de l’application qu'entendent faire à cet article les hé
ritiers de B a rd , de la prétendue destination du père de famille.
Il faut d ’abord bien distinguer la grande croisée pratiquée dans
le salon au rez-de-chaussée, qui donne sur la courdu sieur R o u x ,
dès1autres jours ou fenêtres qui se trouvent dans le mur de lisière
dés héritiers de Bard.
C elle grande croisée est de construction récente; ce qui est cons
taté , non-sculcmeilt par sa fo rm e , qui est à lat moderne, et lf»
même que celle des deux croisées qui donnent sur la rue; maij>i
�C »9 )
encore par l’êxactitude d e là perpendiculaire dés jambages cle cette
fenêtre, tandis que le reste du mur a perdu son aplomb ; ce qui
démontre évidemment qu’elle n ’a été construite q j e depuis que le
mur est Sur-plômb'é, puisque Si elle avoit existé antérieurement,
elle auroit nécessairement suivi l’inflexion du m u r, et auroit perdu
son aplomb.
O r , si cette construction est récente', on ne peut pas invoquer,
pour la maintenir, lâ destination même tacite dû père cle famille,
puisque les maisons de Bàrd et Roux étoient dans différentes
mains depuis lés tcfmps les plus reculés ; on ne peut pas dire que
le père de famille qui pôssédoitla totalité des deux maisons R oux
et de B ard , en ait sorti l’une dé ses m ains, avec la condition ta
cite oü présumée de respéctér cette croisée qui n ’existoit pas.
M ais, d’ailleurs, il ne faut pas croire que cette destination du
père de famille soit l’effet tl’iirio simple présomption ; l’article 216
de la coutume de Pâris , qiii formé le droit commun de là France
dans ces matierès, porte qiie « destination du père de fa m ille
» vaut titre, quand elle est ou a étép a r éc rit, et non autrement. »
A in s i, la loi ne connoit cette destination du père de famille,
qu’autant qu’elle est établie par écrit, et non autrement ; et ici nonseulement la destination du père de famille n’est pas prouvée par
écrit, mais il ést prouvé jusqu’à l’évidence, par la forme et la
nouveauté de la croisée, qu’elle n ’a été construite que plusieurs
6iècles après que les'deux maisons ont cesse d ’appartenir au même
propriétaire.
On ne peut donc pas abuser de cette prétendue destination du
père de famille pour maintenir cette croisée, qui, d’ailleurs, par
sa position', est'intolérable p o u f le sieur Roiïx, en ce que personne
11e peut entrer ni sortir de sa'm aison, et qu’il ne peut rien s’y
passer qui lie puisse servir d^uliment à là curiosité indiscrète ou i
la malignité des voisins.
i-c qnè dit ici le ¿ietir R o u x , est sans application au voisin recommnncluble qui liabitoit celte maison au moment où est née la
Contestation ; mais pouvoit-il mettre le sieur Roiix à l’aljri de Pin*
C 3
�( 20 )
discrétion de ses domestiques, et le sieur R oux n ’avoit-il pas à
craindre pour l’avenir des propriétaires ou des locataires d’une
tout autre trempe que celui qu’il a perdu ?
On sait que les héritiers de Bard , pour se concilier l’opinion
publique, ont soin de répandre que si on supprime cette fenêtre,
leur salon ne sera qu’un cachot obscür.
Mais qu’on se désabuse sur cette prétendue obscurité.
D ’abord , la croisée n ’a pas toujours existé, puisqu’elle est
toute récente, et le salon n'en a pas moins été habitable et habité.
Cependant alors il n’existoit qu’une fenêtre sur la ru e , comme
au premier étage, formée sans doute par des pierres en croix et
des vitres de plomb ; et aujourd’hui il y a deux grandes croisées
sur la rue, construites à la moderne, comme celle qui donne su?
la cour du sieur Roux.
Ces croisées sont à l’orient; elles donnent sur une rue trèslarge dans cet endroit, et sont en face d ’une autre rue également
dirigée à l’orient , de manière que rien n ’intercepte la lum ière,
et qu'il est difficile de trouver un appartement plus parfaitemenjt
éclairé.
A u surplus, ce qui prouve que ces deux croisées sont plus que
suffisantes pour éclairer parfaitement le salon du rez-de-chaussée,
c’est qu’il n ’existe qu’une seule fenêtre sur la même rue à la cham
bre supérieure du premier étage correspondante au salon, et que
celte chambre supérieure est encore parfaitement éclairée, au point
qu’il n’est jamais venu en idée aux anciens propriétaires de cher
cher à se procurer une lumière plus abondante , qui leur eut peutêtre été incommode , et dans tous les cas absolument superflue.
Quant aux autres fenêtres qui sont dans le même mur de lisière,
de la maison des héritiers de Bard, le sieur R oux les avoitsupportéea
avec patience, et peut-être les eût-il tolérées plus long-temps par
égard pour son voisin , parce qu’elles étoient à des étages supé
rieurs, à une hauteur considérable du plancher, closes à fer maillé
et quelques-unes à verre dormant; mais l’impossibilité de supportée
plus long-temps les inconvcniens de la grande croisée pratiquée aut
�(
21
)
rez-de-chaussce, au niveau de sa cour, l’ayant forcé de faire valoir
ses droits, il les a exercés dans toute leur plénitude, et il a conclu
à ce que tous les jours pratiqués dans cette muraille fussent bou
chés ou réduits à hauteur de coutume et scellés à fer maillé et verre
dormant.
L e grand moyen que font valoir les héritiers de Bard contre le
jugement dont est appel, qui a ordonné que ces jours seroient
étoupés ou réduits à hauteur de coutum e, est encore tiré de la pré
tendue destination du père de famille.
Si on les eu croit, avant i 58o , époque de la nouvelle rédaction
de la coutume de Paris, la simple destination du père de famille
suffisoit sans écrit pour établir une servitude; et supposant comme
certain le fait de l’existence de ces jours avant i 58o , ils en con
cluent qu'ils doivent être respectés.
Ils appuient ce raisonnement d'un grand étalage d'érudition; ils
mettent à contribution l’ ancienne coutume de Paris, article q i , les
commentateurs, les arrêtistes, tous les auteurs qui ont traité des
servitudes, et les arrêtés de M . le président de Lam oignon, qu’ils
citent comme une loi formelle, ou au moins comme l’interpréta
tion d’une loi existante ; tandis que ces arrêtés n'étoient qu’un pro
jet de loi future; que M . de Lamoignon convient lui-même que
son projet est contraire aux lois existantes, et qu’incertain si ce
projet vaut mieux que les lois qu’il propose de réformer, il termine
sa discussion sur ce point par d ire, avisez quid justius.
Quoi qu’il en soit, si le sieur Roux avoit intérêt de faire perdre
de vue le vrai état de la question , il ne manqueroit pas de s’égarer
avec ses adversaires dans ces savantes dissertations ; mais fidèle au
plan qu’il s’est tracé, il se contentera de réduire la cause sur cet
objet, comme sur les précédons, à des idées simples mais lumineuses*
II est d’abord à propos d’observer que parmi ces jours, qui sont au
nombre d e six , il faut distinguer les troispetiles fenêtres ou ouverturcs (lu' on tété pratiquées dans le grenier, de celles qui s o n t au-dessous*
Ces trois petites fenêtres, qui n’ont entr’elles aucune unifor—
n u téj en ce qu’elles ne sont ni sur la même ligne, ni de la même
�(
)
hauteur, ni de la môme largeur, ni de la même forme, sont d ’une
construction toute récente et même plus nouvelle que la grande
croisée ouverte au rez-de-chaussée dans le salon.
Quant aux trois autres, qui sont inférieures, elles paroissent
être d ’une construction moins récente; mais elles ne sont encore
ni sur la même ligne, ni de même largeur, de même hauteur,
de même forme. On voit que toutes ont été faites successive
ment et en différons temps; et la précaution qu*on a prise de Ici
fermer avec barreaux de fe r et verre dorm ant, annonce assez quô
les propriétaires dé la maison de Bard n ’ont jamais entendu en
faire des vues droites', et qu'ils ne les ont euic-mêmes considérées,
dans tous les tem p s, que comme des vues purement précaires.
M a is, au surplus, quelle que soit la nature de ces jours, tous les
raisonnemens des héritiers de B a rd , tirés de la prétendue destH
nation du père de famille \ et cFe l'article q i de l’andenne coutume
de P a ris, sont absolument sans application â l'eSpèce.
Il
faut bien distinguer, dkns les coutumes muettes, l’influence
de l ’article 216 de la nouvelle coutume de Paris, qui est conçu en
ces termes :
1
« Destination du père de famille, vaut titre, quand elle est ou
» a-été par écrit, et non autrement. »
De celle de l’article'91 de l’ancienne coutum e, qui porte que
« par ladite coutum e, disposition ou destination du père de fa« mille, vaut titre, »
«
L ’article a i6 de la nouvelle coutume a été adopté comme droit
commun dans les coutumes müettcs, parce que c^étoit on quoique
façon la raison écrite; qu’il étoît juste d ’assimiler la destination
du père de fam ille, prouvée par son écrit, à un titre constitutif
de la servitude, attendu que cette' destination écrite étoit ellemême un titre qui devoit êtr« respecté.
Mais lsart. 91 de l’ancienne coutume n’étoit autre chose qu’une
d é ro g a tio n h la liberté naturelle et primitive de tous los fond s,
une e x c e p tio n ’ a'u droit c o m m u n , à la maxime générale, nulle
servitude sans titrer
�( 25 )
' O r , une pareille exception n’a jamais fail loi dans les coutumes
m uettes, comme l’étoit celle de Bourbonnais ; elle a du être ri
goureusement circonscrite dans.son territoire, et les; héritiers de
Bard, malgré les dépenses qu’ils ont faites en< érudition , ne nous
citent pas un seul exemple que cettet disposition de l’anciennb
Coutume1 de Paris ait été'étendue à aucune autre coutum e, et
spécialement à celle de Bourbonnais.
J Mais supposons pour u n instant que cette disposition de l'an
cienne coutume de Paris ait-étendu son empire sur celle de Bour
bonnais , jusqu’à la rédaction de la' nouvelle coutume de Paris'^
qui al eu1 lieu en r58o ; qu’én rcsulteroit»il ? que les héritiers de
Bard seroient tenus de'prou ver .deux choses :
L a première, que leur m aiso n , qui formoit a u t r e f o i s celle ap
pelée la S a lle - V ie ille , rappelée dans lü roconnoisSancc de 1466 ^
et Yh ô te l P ourtier, qui forme aujourd’hui la cour du sieur R o u x ,
ont été séparés, et ont passé dans différentes mains avant i 58o ,
époque de la rédaction de la nouvelle coutume de Paris.
L a seconde, qu’au moment de' cette désunion , les; jours ou fe
nêtres existaient^ et existaient dans l’état où ces jours ou‘fènôtres
sont aujourd'hui. ■»
••
O n dit que les Méritiers dei Bard seroient tenus de prouver l’ un
et l’autre de ces faits.
Car s’ils prou voient seulement que ces maisons ont été dés
unies avant i 58o , et qu’il ne fu t pas prouvé que ces fenêtres
existaient avant cette désunion, là preuve seroit insignifiante , puis
qu'on ne pourroif pas en induire la destination du père de
famille.
C e qui est confirmé par l’article 6q3 du c o d e , qui n’admet
la destination du père de famille , qu’autant qu’ il est prouvé
que c ’ est par lu i que les choses ont é té m ises dans l'éta t
duquel résulte la servitude.
Et s’ils prouvoient.que la désunion des deux maisons a été faite
après i 58o , ils prouveroient inutilement que les fenêtres ont existé
dans les temps antérieurs* puisqu’aprèscottcéppque,.il falloitnéces-
�(2 4 )
sairement une destination du père de fam ille, justifiée par un
écrit émané de lui-m êm e, pour établir une servitude, aux ter
mes de l'article 216 de la coutume de Paris.
O r , non-seulement les héritiers de Bard ne prouvent pas ces
deux fa its, mais ils ne prouvent même ni l’un ni l’autre; on
ne trouve dans les titres rapportés aucune trace de la désunion
des deux maisons antérieurement à 158o , époque de la rédac
tion de la nouvelle coutume de Paris, et encore moins la preuve
que ces jours ou fenêtres existassent avant cette même époque
de
j 1580 , et avant la
Cependant c ’est aux
que les servitudes étant
la liberté naturelle, qui
désunion.
héritiers de Bard à tout prouver, parce
odieuses par elles-mêmes, et contraires à
est d ’ailleurs consacrée par le texte précis
de la l o i , toute la faveur est pour celui qui cherche à s'en af
franchir contre celui qui cherche à grever son voisin et à flétrir
son héritage de l’empreinte de la servitude.
Les premiers juges, en ordonnant que ces fenêtres seroient
bouchées ou réduites aux us et hauteur de coutum e, n ’ont
donc fait que rendre hommage aux principes ; et le sieur Roux
en attend la confirmation dans cette partie, avec toute la sécu
rité que doivent lui inspirer la justice de sa cause et les lumières
de ses juges.
M e B O I R O T , ancien jurisconsulte.
DEVEZE,
A C L E R M O N T , de l'im prim erie de
Landriot,
avoue.
im primeur do la p r é fe c tu r e
placc du V ieux-M a r c h é maison Viallanes anciennement.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Roux, Claude. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Devèze
Subject
The topic of the resource
servitude
coutume du Bourbonnais
tour d'échelle
droit d'égout
mitoyenneté
prescription
terriers
hôtels particuliers
ruelles
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Claude Roux, notaire à Gannat, intimé et appelant ; contre les héritiers de Bard, appelans et intimés.
Table Godemel : Destination du père de famille : 1. - équivaut à un titre, mais en quels cas ? Servitude : 2. en coutume de Bourbonnais, comme en coutume de paris, on ne connaît point de servitude sans titre, la plus longue possession ne peut y suppléer, si ce n’est après contradiction. Des titres simplement énonciatifs, émanés d’une partie intéressée ou étrangère seraient-ils suffisants pour maintenir une servitude établie ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 13
1661-Circa An 13
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1501
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53241/BCU_Factums_G1501.jpg
coutume du Bourbonnais
droit d'égout
hôtels particuliers
mitoyenneté
prescription
ruelles
servitude
terriers
Tour d'échelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53242/BCU_Factums_G1502.pdf
909b27e6f454feb8207dae025e0f2c10
PDF Text
Text
ai
COUR
D ’A P P E L
SÉANT
%»' » iu<«k iir
A RI OM.
J a c q u e s C H A V E , appelant ;
C O N T R E
Jeanne
L
A
VALLA, et E l i s a b e t h FERRIER,
sa fille , majeure intimées.
,
recherche de la paternité est interdite , et c’est
dans nos mœurs un scandale de moins. D ans ce secret de
la nature , le législateur ne p o u v o it que s’en rapporter à
la crédulité de l’ h o m m e , ou se jeter dans le vagu e des
conjectures : le prem ier parti seul étoit juste; la loi l’adopte;
et aucun enfant naturel n’a le droit de nom m er son p è re
que celui qui a vo ulu se déclarer tel.
N ul acte ne doit donc être plus lé g a l, plus lib r e , que
cette déclaration. L e soupçon seul de contrainte est incomA
�1
( o
patible avec elle ; car si elle n’est pas clairement l ’eiTet
^
spontané de la réflexion , le bu t m oral de la loi n’existe
plus.
* - *'* -uXLî^ g\
L ’appelant réclam e contre l ’oubli de ces p rin c ip e s, et se
place sous la protection de la c o u r , p o u r faire annuller un
***'
acte in fo r m e , auquel on l’a fait participer par la violence ;
4
il demande à n’être par foi’pè île rçcpnnqître un enfant. ' ',
•
y* " '
■
U fX«rilÉi)
qui ne fut jamais le sien.
-y*
^
^
L es premiers juges n ’ont pas vo u lu admettre là jîreuve*«'^ >*u
q u ’il étoit à m êm e d ’o ff r ir ; et si cette o p in io p ,'p o y v o it ^ .*
p ré v a lo ir , il en résulteroit que , contx;e ,le-*vœu'de i« l a i f
un h o m m e donneroit son nom m algré lui à u n 'e n fa n t
**••?
n a tu r e l, seroit contraint de prendre soin d’un étrtfng^r,-' *- >
et de lui laisser sa succession.
. ;
*" '
F A I T S .
Jeanne Valla^ et Elisabeth F e rrie r, sa fille, habitent le
lieu de M a z e t , m airie de Cham bon. L eu rs habitudes et
leurs mœurs étoient à peine connues de Jacques C h a v e ,
qui demeure à la distance d ’environ une lieue de leur
domicile.
Son â g e , plus avancé m ôm e que celui de la m ère, ne lui
eût donné aucun prétexte de se rapprocher de la fille. U n
séducteur à ch e v e u x blancs est ra re ; au village il ne connoît pas l’oisiveté qui nourrit les illusions, et la m onotonie
de ses travaux rustiques avance l’amortissement de ses
sensations, en occupant toute son existence.
Ces femmes étoient donc absolument étrangères à Clia ver
lorsque tout d’ uu coup il s’est trouvé m êlé à leur destinée
**
�(3)
SU
p ar une de ces sourdes m anœuvres que l ’enfer seul peut
faire concevoir.
U n matin à huit heures ( le 21 germ inal an 9 ) , Jacques
C have , m a la d e , est brusquem ent arraché de son lit par
deux frères de la fille F errier , suivis de trois autres jeunes
gens armés de bâtons ou de fourches. Il se disent envoyés
par le sieur de B an n es, m aire de C h a m b o n , et comman
dent i'i C have de les suivre dans la maison de ce sieur de
Bannes. Il s’habille et les suit.
L à il trouve Jeanne V a lla qui paroit en grande ç o l e r e ,
l ’accueille par des injures grossières , lui dit que sa fille est
a c c o u c h é e , depuis quinze j o u r s , d’un garçon dont il est
le p è r e , suivant le récit de sa fille et de M . le m aire de
C ham bon , et q u ’il faut signer sur le cham p l’acte de
naissance.
C h a ve , étourdi d ’une vespérie aussi in a tten d u e, pressé
entre les cris de la m ère , les coups de poings des f r è r e s ,
et les menaces de leurs trois hom m es d’esco rte, veut éle ver
la v o i x , et in v o q u er la notoriété p u b liq u e; des bâtons sont
levés contre lui p o u r toute réponse : il sollicite la justice
du m aire , mais le m aire le pren d à part p o u r lui dire
q u ’ il falloit céder à la circonstance, et que sa v i e .n etoit
pas en sûreté. L ’avenir a appris à C h a v e quel interet pres
sant le m aire lu i- m ê in e avoit a ce que la calom nie eut
une direction certaine.
O n com prend alors que cette derniere insinuation a
ébranlé le courage de Chave. L e sieur de Bannes prend
aussitôt le registre des actes, y efFace quelques mots, en subs
titue d’a u tre s , et remet une plum e à C h ave : une seconde
résistance am ène de nouvelles violences. I l fait enfin ce
q u ’ on exige ; il signe.
�(4)
E n sortant de chez le m a ire , les satellites le mènent au
cabaret, se font donner ù b o ire , le forcent à p a y e r, mettent
l ’enfant dans ses bras , lui font les pins horribles menaces
s’il dit un m ot ; et se retirent.
Sans doute il m an gu e à ces faits beaucoup de circons
tances
importantes ; mais C h a v e , glacé d’épouvante ,
étoit-il libre de r é flé c h ir ? L a plupart de ces détails ont
échappé à sa m é m o ire , ou plutôt à son attention».
Enfin C h a y e , revenu de son étourdissem ent, p ut réflé
ch ir sur les conséquences de l ’acte qu ’on venoit de lui
e x t o r q u e r , et sur le parti q u ’il avoit à prendre.
L a dém arche la plus pressée et la plus indispensable,
étoit de se débarrasser de l ’innocente créature q u ’une
m ère dénaturée avoit rejetée de ses bras p o u r l'aban
don ner aux. soins d ’un étranger. C h a v e hésita s’il la
r d p p o r te r o it, dans la n u i t , à la porte des F e rrie r : cepen
dant la l’e l i g i o n , l’hum anité , peut-être la terreur pourlu i-m è m e , l’em p ortèren t sur son d é g o û t , et il fit porter
l’enfant à une nourrice.
M a is aussitôt, et en signe de sa protestation, il rendit
plainte au juge de p a ix de T e n c e ; le juge de p a ix le
ren voya au magistrat de sûreté : mais com m e la plainteéloit dirigée aussi contre le m a ir e , les autorités délibé r è r e n t , et ne résolurent rien.
C h a v e in q u ie t , et ne voulant pas que son silence p ût
d éroger a son d r o i t , se décida à citer, le floréal an 9 ,
5
tant Jeanne V a lla et sa fille , que le m aire lui - même-,
p o u r v o ir dire q u ’il seroit restitué contre la reeonnoissince de paternité qui lui avoit élé extorquée p:ir la
v io lé iit e , et que le m aire seroit tenu de rayer du registre
�3ï
XO>
( 5 >
ce qui concernôit ladite reconnoissance •, et la m ere et
la iille p our être condamnées à reprendre l’e n f a n t , payer
ses alimens chez la n ourrice , avec dommages-intérets.
O n pense bien qu’au bureau de p aix la fille F e rrie r
ne manqua pas de faire la réponse d’ u sag e, qu ’elle avoit
été séduite et abusée sous promesse de m ariage , et q u ’elle
seroit en état de p ro u v e r les familiarités de C h ave avec
elle ; celui-ci l ’en d é fia , et ajouta m êm e q u ’il offroit de
p ro u v e r c e u x avec qu i elle avoit eu fréquentation.
T o u t cela étoit de trop de part et d ’a u t r e , puisqu’il
n’èst permis de rien p ro u v e r
et la fille F e rrie r ne
risquoit rien à faire b onn e contenance. Q u o i qu'il
en
s o it, un p rem ier ju g e m e n t, du 28 p luviôse an 1 0 , m it
le m aire hors de p ro cès, com m e ne p o u v a n t être juge
sans au torisation , et a p p o in ta les autres parties en droit.
Cet appointement ne fournit pas plus d’éclaircisse
ment. C h a ve persista toujours à offrir la p reu ve de la
violence exercée contre lui -, et les femmes F e r r i e r , q u i ,
au bureau de p a i x , n’a voien t paru a vo ir aucune crainte,
firent leurs efforts p o u r soutenir cette p reu v e inadmis
sible. L e u r système p r é v a lu t ; et le 14 fructidor an 1 0 ,
le tribunal d ’-Yssengeaux rendit le jugem ent qui suit.
.1
« Considérant que l'article 2 du titre 20 de l'ordonnance de 1GG7
défend de recevoir la preuve par témoins contre et outre le contenu
aux actes publics; qu'à la vérité la force, la violence, sont un
moyen pour les faire rescinder, mais qu’en ce cas il faut articuler
de menaces graves, qui feroient craindre pour la vie nietus rnortis,
ou que la partie obligée auroit souffert ‘cliarte privée, ainsi que*
Renseignent Domat en ses Lois civiles, et Potlûtr en son T ra ité
des obligations;
�7
( 6 )
» Considérant que Jacques Chave n ’a articulé qu’il lui ait été
fait aucune menace, ni qu’il ait été commis aucun excès sur sa
personne, ni dans son domicile, ni dans celui du maire où il s’étoit
rendu pour reconnoilre pour lui appartenir reniant d o n t s’éloit
accouchée Jsabeau Ferrier; et qu’étant dans ce dernier domicile,
il pouvoit articuler sans crainte les excès ou menaces qu’il auroit
éprouvés, contre ceux qui s’cn seroient rendus coupables envers
sa personne. »
Jacques Chave est débouté de toutes ses demandes tant princi
pales que subsidiaires, et il est condamné aux dépens.
Cependant C h ave avoit offert expressément de faire
p reu v e de menaces et violences : ses écritures en font foi.
Il étoit p riv é alors d ’un m oyen important. L ’expédition
de l’acte de naissance produite aloi*s au procès, ne mentionnoit ni les surcharges ni les ratures ; elle étoit délivrée
par le sieur de B a n n es, m a ire , qui avoit trop d ’intérêt
à en cacher l’irrégularité p o u r la faire soupçonner. A u
reste, C have s’est p o u rv u en la cour contre le jugem ent,
et il sera question d’exam iner de quelle influence la form e
de cet acte doit être p o u r la décision du procès.
M O Y E N S .
L ’ancienne législation française étoit extrêm em ent dure
contre les enfans naturels; et cependant, par une étrange
inconséquence., elle admettoit les preuves de paternité
sans distinction. A u jo u r d ’hui la loi a fait p o u r eu x
davantage : mais sans v o u lo ir percer le mystère qu i
cou vre leur naissance, elle rejette désormais les proba
bilités et les fausses conséquences; .elle ne vo it dans
l ’enfant né hors le mariage q u ’ une innocente créature
�^ / 7
/
digne de la pitié de tout le m o n d e , mais ne tenant à la
société que par celle qu i lui a donné le jour. Si cepen
dant un hom m e , gu id é par des apparences q u ’il a ie droit
djapprécier lui - m êm e , et cédant à l’impulsion de sa
conscience,
veut se don ner le titre de p è r e , la loi le
lui p erm et, s’ il n’est engagé dans les liens du mai’iage :
mais com ptant p o u r rien aujourd’hui toutes les démons
trations exté rie u re s, elle exige une déclaration authenti
que et non éq u iv o q u e ; elle prescrit à l’acte une solen
nité plus grande que p o u r la naissance m êm e de l ’enfant
légitim e.
L ’intention du législateur étoit si claire, q u ’elle a ôté
tout prétexte à l ’astuce, et n’a laissé de voies q u ’au faux
ou à la violence. M ais à q u i peut être réservée l ’une ou
l ’autre de ces vo ie s criminelles ? Ce n’est pas à la fille tim ide
q u i , rougissant encore d ’ une prem ière foiblesse, et par
tagée entre l’am ou r de son enfant et la honte de sa nais
sance, n’en ose no m m er le père que dans le secret de son
c œ u r, et se fait l ’illusion de penser que le mystère dont
elle s’en velop p e la p rotégera contre l ’o pin ion qui fait
son supplice.
M ais que feront ces femmes d é b o u t é e s , qui ne voient
dans la prostitution qu ’ une h a b itu d e , dans leur avilisse
ment q u ’ un éta t, et dans leur fécondité qu’ un acciden t?
Incertaines elles-mêmes d’ une paternité q u ’elles déféroient
naguères suivant leurs convenances, elles n’en arrachoient
pas moins des sacriiices pécuniaires aux homm es qui leur
étoient souvent les plus étrangers , mais q u ’ép ouvanloit
la perspective d’ une honteuse et p ublique discussion. Si
on leur laisse en trevo ir aujourd’hu i une tolérance queU
�(; » )
c o n q u e, que leu r coûtera-t-il de tenter d’autres voies p ou r
en ven ir aux mêmes lins? E t s’ il est près de leur demeure
un citoyen paisible, q u i, p ar ses mœurs douces et réglées,
puisse passer p o u r pusillanim e, quelle difficulté y aura-fc-il
de répandre adroitement que c’est là le c o u p a b le , d’ip téresser contre lui qu elqu e personne c r é d u le , de l’effrayer
lu i-m êm e sur les dangers de sa résistance, d’ameuter s’il
le faut ceu x qui ont un intérêt réel <iu succès de la n é g o
ciation ! Jadis il falloit des témoins,«aujourd'hui il ne faut
q u ’une simple signature; tout cela p eu t s’exécuter avec
rapidité : ce n’est q u ’un changem ent de com plot.
Heureusem ent cette rapidité m êm e ne laisse pas au
crim inel le calm e de la réflexion : souvent scs fautes le
trahissent, e t , quelques légères qu ’ elles soient, il faut les
com pter avec scrupule; car on est bien assuré qu’ ellesne
sont pas un simple résultat de sa n égligen ce, mais q u ’elles
ont é c h a p p é à l’excès de sa précipitation.
C e u x qu i ont gu id é la fille F e rrié r dans ses démarches
n ’ont pas visé à l’exactitude ; la co u r en sera convaincue
bientôt par la form e de l’acte de naissance qui fait son titre.
U n e seconde décou verte la convaincra encore q u ’il ne
s’agit point ici de ré p a r e r , envers une fille s é d u ite , des
torts que la m alignité suppose toujours. L a fille F errier
a , le 20 prairial an n , donné une n ouvelle p reu v e de
sa con tinence, en faisant baptiser un fils sous les auspices
de son frère et de sa m è r e , que l’acte apprend m êm e avoir
été sage-femme en cette circonstance.
Il ne paroît pas que p our cette fois la m ère et la fille
Fen-ier aient jugé à propos de réunir un conseil p o u r
disposer du nouveau n é , et lui élire un père ù la p lu
ralité
�(?)
ralité des suffrages; il est vraisem blable que la précédente
tentative les avoit intimidées.
• Q u o i q u ’il en soit, et soumettant cette découverte p ré
cieuse aux réflexions de la cou r , l’appelant ne s’en occu
pera pas plus lo n g -te m p s , et se contentera d’observer
q u ’ il n’y a rien de légal dans la prétendue déclaration de
paternité q u ’on lui a fait sig n er, et au surplus que les faits
-de violences articulés suffiront p ou r la détruire. C ’est à
l ’examen de ces deux propositions que l’appelant réduit
sa défense.
i ° . L a d éclaration de "paternité n e s t pa s légale.
Ija lo i du 12 bru m aire an 2. s’occupoit de trois espèces
d ’enfans naturels, après a vo ir décrété en principe qu ’ils
^toient successibles.
i° . C e u x dont le p è r e é t o it d é céd é , et il leu r suffisoit
de p ro u v e r une possession d’ é t a t , par des soins donnés
à titre de p a te rn ité , et sans in terru p tion ; 2°. xles enfans
d ont le père et la m ère seroient encore vivans lors du
C o d e c i v i l , et leur état civ il y étoit re n v o y é ; 3 0. de ceu x
dont la m ère seule seroit décédée lors de la publication
d u C o d e , et alors la reconnoissance du p è r e , faite devant
l ’oilicier p u b l i c , rendoit l’enfant successible.
Il s’agit ici d’ un enfant de la seconde espèce ; et le p ré
tendu p ère , quel qu ’il s o i t , de m êm e que la m è r e , sont
dits vivans.
O r , quelle nécessité, quelle
urgence y a v o i t - i l de
p réve n ir la publication du Code civ il , en faisant faire
une déclaration que la loi ne demandoit p a s , et q u ’ello
B
�ajournent au contraire ? N ’a percevroit - on pas déjà le
do l dans cette extraordinaire p révoyance ?
D ira -t-o n que le Gode civ il prescrit aussi une décla
ration au th en tiqu e, et q u ’ on n’a pas v io lé la loi en la
devançant ? M ais qui blâm era les législateurs de l’an 2 ^
d ’a vo ir vo u lu p r é v o ir q u e leur système ne seroit peutêtre pns celui du C o d e civ il ? qu i leur reprochera d’a v o ir
supposé que les dispositions de ce code seroient déli
bérées avec plus de maturité , et de s’être défiés de le u r
p rem ie r système sur une innovation aussi im p o rtan te?
Ils vo u lu ren t rég le r le passé seulement ; et les débats
qui ont eu lieu sur la lo i transitoire du 14 floréal an 11 ,
nous apprennent assez q u ’il n’y a eu , dans l ’intervalle d e
l ’an 2 à l ’an 1 1 , aucune législation touchant les enfans
naturels. L es bulletins de la c o u r de cassation sont aussi
rem plis d’arrêts qu i ont cassé tous les jugeinens dans lestjuels les tribunaux avoient vo u lu r é g l e r , m êm e p r o v i
soirem ent , le sort de quelques enfans n a tu re ls, pendant
cette lacune d e n e u f ans.
Il ne p o u v o it donc être question d e fixer l ’état d e
l’enfant d ’Elisabeth F e rrie r q u ’après le Code c i v i l , dont
l ’art. 334 p orte que la recounoissauce sera faite par un acte
a uthentiqu e, si elle ne l’a pas été par l ’acte de naissance.
M ais fût-il indifférent q u e la rcconnoissance contestée’ „
•ait été faite avant ou après le Code c iv il, m algré la sus
pension totale e x ig é e par la cou r d e cassation , et rappelée
par la loi transitoire; cette reconnoissance n ’en est pas
moins ir r é g u liè r e , car elle n ’est faite ni par l’acte d e
naissance lu i-m êm e, ni par un acte séparé authentique*
V oici com m ent cet acte est littéralement écrit au registre*
�c » î
A c T I
D I
N à Î S S A S C I i
rt D u huitième jour du mois de germinal, l’an 9 de la répu« blique française. A cte de naissance de Jacques^ f i l l e ( Ce mot
» est effacé, et on y a substitué au-dessus, dans Vinterligne,
» F e r r i e u , que l’ on a encore effacé, et l ’on a écrit à côté G11 a v e . ),
» né hors de mariage, né le septième jour du mois de germinal,
» à sept heures du soir, fils d ’isabeiu Ferrier, non mariée, domi» ciliée du lieu de la Marette, susdite commune, et Isabeau Ferrier,
» non mariée; le sexe de l’enfant a été reconnu u n e ( On a couvert
» d’encre la lettre e . ) f i l s , né hors de mariage : premier témoin,
» Jean-Pierre Ferrier, demeurant à C iiam bon , département de
» la H a u te - L o ir e , profession de cultivateur, âgé de irente-neuf
» ans; second témoin, Pierre Rue], demeurant à C h a m b o n , dé-*
u partement de la H a u t e - L o ir e , profession de tailleur d ’habits,
» âgé de cinquante-quatre ans. Sur la réquisition à nous faite par
» Marie R u e l, sage-fem m e de ladite accouchée, avons inscrit le
» sus-nommé Jacques Feuuieu ( C e mot est raturé, et l’ on a mis
y> au-dessus, dans l’ interligne, C iia v e. ), portant l e n o m d e sa
» m è r e ( Ces mots ont été rayés, et l ’on y a substitué ces mots :
» l e n o m d u p è r e . ); et ont la déclarante ne savoir signer, et les
» témoins signé. Ferrier, R u e l, signé à l'original. »
« Ledit Jacques Chave père reconnolt ledit Jacques son fils, de
» ladite déclaration de la présente, acte; le reconnoit pour son
»> véritable fils, avoir droit à tous ses biens, en présence de Jean» Louis Riou. ( -f* Ici est un renvoi. ) Constaté suivant la loi, par
» moi Annet de Bannes, maire de la commune de Cham bon, fai» sant les fonctions d ’officier public de l’état civil. Ledit maire
» approuve toutes les ratures ci-dessus. D e Bannes, maire, signé.
“
Et de Pierre C allon , et de Jean-Pierre Fresclict, et de Jeanw Pierre Ferrier ; et dit Jacques Ghavd a signé avec les tcmoin$.
13 2
�_»
t
(
)
» Ont signé, ledit Pierre Callon a déclaré ne savoir signer , C liave,
» R io u , Freschet, Fcrrier. D e Bannes, m aire, signé. »
( Nota. L ed it renvoi est en marge, en travers. )
■
Pour copie figurée :
L e secrétaire général de la préfecture
de la Haute-Loire ,
BARRÉS.
Il est aussi ¿vident q u ’il puisse l ’ê t r e , que cet acte se
compose de deux parties Lien distinctes , qui në sont pas
d ’un m êm e c o n t e x t e , ne sont pas l’ouvrage du m ê m e
m o m e n t , et cependant ne sont pas deux actes absolu
m ent séparés.
i° . A c t e de naissance bien parfait et très en r è g le , d’un
enfant né dyls a b e a u F e r r ie r , s a n s m en tion d u p ère.
O n lu i donne le nom de sa mère. Il y a deu x témoins
de cct a c te , Josep h F e rrie r et M a rie R u el. L ’acte est
donc com plet : le v œ u de la lo i d u 20 septembre 1792
est rem pli.
,
2°. V ie n t ensuite une déclaration de C h a v e , qui est à
la suite du p rem ie r a c t e , et qui a exigé des surcharges.
M a is p e u t - o n , de bonne f o i , y v o ir un acte authen
t i q u e , une reeonnoissance de paternité telle q u e la loi
la com m ande et que la raison la c o n ç o it ?
Cet acte n’a aucune date , parce q u ’en effet il a eu
lie u
le 21 g e r m i n a l, et a été ajouté a un acte terminé depuis
le 8. Com m ent supposer en effet q u e celte déclaration
finale fait partie de l’acte du 8 ? Les témoins dénommés au
.prem ier u c signent pas la déclaration.
�/
37
( 13 )
O n a raturé et interligné le prem ier acte de naissance,
sans faire i*ien ap p ro u ver aux prem iers témoins. L e maire
se u l ap p ro u ve t o u t , m êm e ce q u ’il lui plaira de raturer
e n c o re ; les autres t é m o in s , C h a v e l u i - m ê m e , ne font
aucune approbation. O r , il est de p rin cipe que les ratures
et interlignes sont inutiles dans les actes, s’il n ’y a appro
bation des parties et témoins.
Il est un autre p rin cipe élémentaire en rédaction d’actes,
quelque peu d’ importance q u ’ils aient; c’est que les tém oins
dénommés en l’acte signent à la fin : ici la sage-femme et
le f r è r e , qui ont déclaré la naissance le 8 , n ’ont pas signé
à la fin. Si c’est un seul et m êm e acte, les uns l’ont signé
au m ilie u , et d’autres à la fin : chose bizarre et rid ic u le ,
qui ne peut s’a llie r avec la g r a v ite de l ’acte qu’on prétend
maintenir.
Q u e p e u t - i l résulter d’un acte de cette e s p è c e , si ce
n ’est de la pitié p o u r ses ré d a c te u r s , et une conviction
intime que ce n’est pas C h a v e qu i est allé déclarer la n a is
san ce d’un enfant com m e s’en disant le père ?
L e but de la lo i n’est donc pas rem pli ; car dans qu elqu e
form e que dût être une reconnoissance de p a te r n ité , il la
falloit dans l’acte m êm e portant la déclaration de naissance,
ou bien il falloit un acte p a rtic u lie r, daté lu i- m ê m e , et
qui 11e fût pas réd igé dans une form e ayant p o u r but de le
rattacher à un autre acte, auquel il ne peut appartenir.
Car rappelons-nous q u e l ’article 334 du Code civ il dilt
que la reconnoissance sera faite p a r l’acte de naissance,
«u p a r un acte ath en tiqu e; à qu oi l’article 62 ajoute que
la c té de reconnoissance sera inscrit sur les registres n sa
date y et q u ’il en sera lait m ention en m arge de l’acle de
naissance.
f-V
�7
C «*
B.appelons-nous encore que le but bien positif de la loi
est de ne com pter p o u r rien les reconnoissauces antérieures
au c o d e , quand l ’auteur est vivant. Il en est de cela com m e
des testamens antérieurs à l’an 2, q u ’ il falloit refaire p o u r
les circonscrire dans les termes du droit nouveau. L a loi
a eu ici un but plus m oral : les changernens apportés au
système passé justifient sa mesure dilatoire.
E t ne nous abusons pas sur l ’im portance des formes
dans une matière aussi délicate : on est si scrupuleux
p o u r tant d’autres actes! U n seul m o t é q u iv o q u e en un
testam ent, détruit toute la volon té d’ un père de fam ille;
u n e donation exige encore des formes plus m ultipliées.
Ces actes sont-ils donc aussi importans qu e celui où il s’agit
de transmettre sou nom et sa fortune ; où il s’agit de plus
e n c o r e , de vaincre l ’opinion et de surm onter sa p ro p re
répugnance ? D ’ailleurs , p o u rq u o i 11e p ourrion s - nous
pas dire p o u r un tel acte ce que R ica rd dit des tcstam ens,
« q u e toute leur force consiste dans leur solennité, et toute
« leu r solennité consiste dans les formes ? »
A u jo u r d ’hui il faut y ajouter une v é rité bien c e r t a in e ,
c'est que la seule supposition q u ’un h o m m e est tenu et
obligé de se charger d ’ un enfant naturel sans sa libre
v o l o n t é , est incom patible avec le système indubitablem ent
reçu sur la législation des enfans naturels.
20. Cette d écla ra tion de p a tern ité est n ulle , s 'il y
a
violen ce. L e s f a i t s a rticu lés suffisent. L a preuve en
est a d m issible.
On est extrêmement sévère dans le monde pour ju ger
�5
( i
)
des eiTets de la p eu r d’autrui ; e t , quand on en com
mente les p articu larités, on détaille très-ponctuellement
la conduite qu ’ on auroit tenue en pareille occurrence.
Cependant rien n’est plus difficile à rég ler p o u r soi-m êm e;
c a r , en d e u x cas semblables , le m êm e in d ividu se c o n dui roit rarem ent deux fois de la m êm e manière. M ais
celui q u i raisonne ainsi est de sang-froid , par cela seul
qu’il ra is o n n e , tandis que le p rem ier elfet de la terreur
est d ’absorber toutes les réflexions / p o u r ne laisser place
q u ’à une seule id éed om in an te, la conservation de soi-même.
Q uelques auteurs , partageant sur ce point les idées du
v u lg a ir e , sem bleraient aussi se m on trer difficiles à ad
m ettre la p lup art des excuses fondées sur la crainte. 11
faut d is t in g u e r , d is e n t - ils , la cra in te gra ve et la crainte
l é g è r e , et on ne peut tro u v e r de m oyen rescisoire q u e
dans celle qui su ffiro itp o ur ébranler la ferm eté de l’h o m m e
le plus in tré p id e , m etus n o n v a n i h o m in is , sed q u i in
1
h om in etn co n sta n iissim u m c a d a i, . 6 , fF. Q u o d m etus
causa.
Ces a u te u rs, s’en tenant à une lo i isolée démentie p a r
beaucoup d’autres, n’ ont pas v o u lu ap ercev o ir, dans cette
rigueur étrange, un m on u m ent de la iierté romaine plutôt
qu’une règ le générale. Ce p e u p le , qu i avoit détruit le
tem ple é le v é p ar T u llu s à la C ra in te , n’ éto it, en la pros
crivant p ar ses lois, que conséquent avec lu i-m êm e . Sous;
un système de conquêtes sans b o rn e s, et avec une consti
tution toute m ilitaire, quel rom ain p ou vo it allégu er u n e
crainte lé g è re ! E le v é dans les carpps, son excuse m êm e
eut consacré sa houle , et la loi étoit rigoureusement juste
en exigeant de lui l’intrépidité d ’uu soldat.
�L a France militaire ne réprouvera pas cette législation
sévère ; elle l ?c*ût créée e lle -m ê m e , s’il falloit un code au
courage. M ais les actes civils des simples particuliers ne
se règlent pas par des m axim es nationales; la théorie
principale des lois consiste à les a p pro p rier au x mœurs
de ceux q u ’elles doivent régir.
G ardons-nous donc de l’exaltation , quand elle est hors
de m esure; ne nous obstinons pas à tro uver un Scévola
dans un laboureur tim id e , qui ne connut depuis sa nais
sance que sa charrue et le hameau de ses pères.
L es auteurs les plus judicieux du droit n’ont eu garde
aussi d’appliquer sans distinction la sévérité des principes
romains. D o rn a t surtout, à qui les premiers juges ont fait
Finjure de prêter une opinion si contraire à son discer
n e m e n t, D om at , dont l’ouvrage im m ortel n ’est que le
précis des lois rom aines, bien loin de se fonder sur la
loi 6 , ne la signale que p o u r en blâm er la rudesse.
« N ous avons v o u l u , d it-il, rétablir les principes na« tu rels, et rendre raison de ce que nous n’avons pas mis
« cette règle du droit rom ain parmi celles de cette sec« t i o n ......... T o u tes les voies de fait, toutes les violen ces,
■
v toutes les m enaces, sont illicites; et les lois condam« lient non-seulement celles qu i mettent en p éril de la
k vie ou de quelque tourm ent , mais toutes sortes de
« voies défait et mauvais traitemens. E t il faut rem arquer
« que com m e toutes les personnes n ’ont pas la m êm e
« fermeté p o u r résister à des violences et â des menaces,
ce et que plusieurs sont si foibles et si tim ides, q u ’ils 11e
« peuvent se soutenir contre les moindres impressions,
« un n e d oit pas b o rn er la p rotection des lo is con tre les
« m en a ces
�/-«
4 ^
( ij )
« m enaces et les v io le n c e s , à ne réprim er que celles
« q u i so n t capables d ’abattre les personnes les plus
« intrépides ; mais il est juste de p rotéger aussi les plus
« tim id es............
« 11 est t r è s - j u s t e , et c ’est -nôtre u sa g e , que toute
« violence étant illic ite , on réprim e celles m êm e qui
« ne v o n t pas à de tels ex c è s, et qu’ on répare tout le
« préjudice que peu ven t causer des violences qui enga« gent les plus foibles à qu elqu e chose d’injuste et de con« traire à leur intérêt : ce qu i se tro u ve m êm e fondé sur
« quelques règles du droit r o m a i n ............et ces règles
« sont tellement du d ro it n a t u r e l, q u ’zV ne p o u rro it y
« a v o ir d ’ordre dans la so ciété des h o m m e s , s i les
« m oin dres violen ces
étaien t réprim ées. » ( Sect. 2 ,
des vices des c o n v e n t i o n s , p ré a m b u le .)
•’
Il est peut-être inu tile, après a vo ir cité D o m a t , de faire
d’autres recherches ; mais les prem iers juges ont encore
fait l’ injure à P o th ie r de lui prêter des principes qui ne '
sont pas lës siens.
•
Cet auteur cite les lois ro m a in e s , et par conséquent
les rappelle
lelles q u ’elles sont. M ais il termine son
article de la crainte par dire que « le p rincipe qui ne
« connoît d’autre crainte sufTisante p o u r faire pécher un
« contrat par défaut de lib erté, que celle qui est capable
« de faire impression sur l’hom m e le plus c o u r a g e u x , est
« trop r ig id e , et ne doit pas être suivi parmi nous à la
« lettre ; on d o it, en cette m a tiè r e , a v o ir égard à l'â g e,
« an se x e et à la con d itio n des personnes ( i) ; et telle
( «) Expressions copiées mot pour mot en l'art. 111 a du Code civil.
c
�C 18 )
« crainte q u i ne seroit pas jugée suffisante p o u r a vo ir
« intim idé l ’esprit d’un hom m e d ’un âge m û r ou d’un
« m ilita ire , et p o u r faire rescinder le contrat qu ’ il aura
« f a i t , peut être jugée suffisante à l’égard d ’ une fem m e .
« ou d ’ un v ie illa r d , etc. » ( T ra ité des
page i re. , cliap. I er. , n°. 2 5 , in fin .)
obligations,
Si l’opinion respectable de ces auteurs avoit besoin d’être
fortifiée par d ’autres citations, on les puiseroit dans les lois
romaines elles-m êm es, q u ’il ne faut pas juger par un
fragm ent u n iq u e , et q u i, au c o n traire, nous enseignent
ce que D om a t et P o th ie r vien nen t de nous apprendre.
T o u t consentement doit être l i b r e , disent plusieurs
lo is; e t, p o u r être restitué, il n’est p is besoin d’une v i o
lence c o r p o re lle , mais seulement d’ une crainte inspirée
à celui qui contracte; q u p a d ju sta m restitu tio n is ca u
sa/n n ih il refert u tràm y i an inetu q u is c o g a tu r . . , .
et q u o a d effecturn ju r is u tro b i deest c o n s e n s u s , a c
libéra volu n tas p a tie n tis , ut velle Ji,on videatur. L . 1 , 3 ,
7 e t ü , ff. q u o d m et. C. L . 1 1 6 , de r e g .ju r. ( in C o rv in o .)
Ces lois étoient bien- inoin§ dures, que nç l ’pnt sup
posé les premiers juges; car elles ordonnoient de recevoir
la preuve de la c ra in te , quand m êm e C h a ve auroit été
hors d’état de désigner aucun de ceux qui la lui avoit
inspirée;, n on tatne/i ne cesse est des ig n a r e, perso n am
q u œ m etum in t a lit, sed s u jjic it p r o u a r e in c tiu n , q u ia
7/ietus habet in se ignorantiar//. f , . 14. ff. eod.
En lin , ce qui achève de convaincre que ces lois savole,nt
aussi se mettre à la portée de la foi blesse des h o m m es,
cYst q u ’elles expliquent q u ’ il 11’étoit pas nécessaire de
p ro u v e r l'existence d’un danger- r é e l , mais seulement
�4 $
*
(* 9 )
'.
.
,
.
.
la crainte de ce d a n g e r , qui en elTet devoit detruire le
i)
consentement. S i ca u sa f u is s e t , c ü r p ericu lu m tim eret\
q u am vis p ericu lu m uerb n on f u i s s e t . . . . non con sid é-.
ra tu r e v e n tu s, sed ju s ta opin io.
e0l^‘
1
L e tribunal d’Yssengeaux avoit donc un guide bien sûr:1
A u lieu d’adopter l’antique rig u e u r d ’une lo i oubliée par*
les Rom ains e u x -m ê m e s , il a 4jugé que la crainte inspirée
à C h a ve n’avoit pas été un m o tif suffisant p o u r le con
traindre ; e t cependant il ig n o ro it jusqu’à q u e l'p o in tC h ave avoit été contraint ou menacé ; il l’ ignoroit ët ai
v o u lu l ’ignorer to u jo u r s , en refusant de s’ éclairer par uné'
p reu ve : cependant les faits articulés étoient graves. C h a v e
ofl’r oit et o iïïe encore de p ro u v e r ces f a i t s articulés", etnotam m ent,, i° . que le 21 g e rm in a l îcs frères F e r r ie r ’et*
d ’autres h o m m e s arm és de bâtons SOLlt'Venus c h e z 'l u i
2°. q u ’ils l ’ont forcé de se lev er et de les s u iv r e ,'e n le
m en açan t;
3 0.
que chez de Bannes ils se sont opposés
toute e x p lica tio n , l ’ont in ju rié, menacé et frappé*,
4°.
à*
que1
de Bannes l’a pris à part pour: l ’exhorter à céder à la fo r c e 1
et éviter un plus grand m a l; °. qu’on l’a fd rc é'd e Vëriir'
5
dans un cabaret, où on lui a remis un e n fa n t, avec de
nouvelles menaces.
M a is , a dit le tribunal d’Yssengeaux/, C lia v e 5, soiti dé'
sa m aison.et conduit chez le m aire, p o ù vü it récltfifrér.
■
C e seroit une réflexion b ieiyn atu rèlle, si les faits même'de la caiise n’ étoient déjà venus la détruire ; car ce m aire
lu i-m êm e étoit si peu disposé à user de son a u t o r ité ,'
qu’ il est difficile de ne pas le juger au contraire intéressé1
à l’événem ent.
’
I
1'
il
Muis à quelle protection , il faut' le d ire , auroit pu
�( ' 2 °- )
s’attendre un m alheureux à la m erci de c in q :individus ,
dans le domicile isolé d ’un m aire de v illa g e ? Battu à ses
y e u x , Chave p o u vo it-il se croire dans un asile in viola
b l e ? L e maire lu i-m êm e, l ’e x h o rta n t'à céder à la fo r c e ,
m.ettoit le com ble à sa terreu r, et déclaroit, ou sa p ro p re
c o m p lic ité , ou au moins son impuissance.
L ’acte le m oins im portant d e là v ie seroit vicié par une
semblable v i o l e n c e , à plus forte raison celui de tous les
actes le plus incom patible avec la m oindre contrainte. U n
p ère de famille a contracté un engagement sacré envers
m*s enfans par son m a ria g e; mais c e l u i- l à m êm e qu i
auroit p rocréé des enfans naturels, ne tient à eux par
aucun lien c iv il :.so n h o n neur et les sentimens de la
nature deviennent leu r unique titre , si la paternité lui
a semblé certaine. L es enfans naturels n ’ont point de
fam ille; tel est le langage d e là lo i : elle ne veut pas qu ’ils
en aient une. Q u an d leur père se nom m eroit hautem ent
dans le m o n d e , il ne seroit tenu à rien; la loi lui perm et
seulement de se. déclarer tel par un écrit libre et authen
tique : forcer sa volon té seroit donc se croire plus sage
qu ’elle.
M ais si la loi n’exige rien d’ un père , si elle consi
dère com m e un vice m oral de lui don ner un iils que
sa prop re vo lo n té cependant n’a pas désavoué , peut-on
soutenir l’ idée révoltante q u ’ un h o m m e sera contraint
m algré lui^d’adopter un enfant dont il n’est pas le p è r e ?
Q u i lui donnera la force de supporter , dans sa de
m e u r e , la vue habituelle d ’une créaLure si étra n g è re,
placée là p ou r sa honte im m u a b le, sans aucune com pensatioU'SatisiaisantQ ? et qui oseroit répondre que dans
�4 > '
( 21 )
^
cette situation de d é sesp o ir, aigri p a r u n sentiment d’in
justice , il p û t assez maîtriser une fu re u r c o n v u ls iv e ,
q u i seroit tout à la fois le tourm ent de l’innocence
et
son p ro p re Supplice ?
E loign on s plutôt de vagues suppositions fondées sur une
p u re chim ère. L a p révo ya n ce des magistrats distinguera
la v é rité et les convenances , et éloignera d’aussi sinis
tres présages. O n ne donne p o in t à u n h o m m e l ’enfant
q u ’il repousse avec m épris , qu and la lo i n’en fait pas
un devoir. L a c o u r doit p ron o n cer ici sur les consé
quences d ’un acte l i b r e , et tout p r o u v e q u ’il n’y a pas
eu de liberté dans celui qu i donne lieu au procès. C h a v e ,
con d uit p a r la f o r c e , m enacé dans sa r o u t e , a signé
sous le bâton ; et, p o u r se s e r v ir des expressions de D o m a t,
si un consentement de cette espèce étoit jugé validç , ce
■seroit un a tten ta t a u d ro it n a tu re l ; i l n y a u r o it p lu s
d ’ ordre dans la so cié té des hom m es.
L a conduite d’Isabeau F e rrie r , l ’ép oque de ses co u -ches, c’est-à-dire, de celles qu i donnent lieu au procès,,
le c h o ix de ses croupiers , le lieu de la scèn e , la cir
constance q u ’ un acte de naissance a été c h a n g é , e t c . , tout
cela donneroit lieu à des réflexions beaucoup plus éten
dues , m a is.q u i sei’oient oiseuses, tant que la p reu ve
de la violen ce ne sera pas ordonnée.
Cette p r e u v e , sans con tred it, est adm issible; aucune
ordonnance ne la p r o h i b e ; et ce qui é to n n e , c’est que
les prem iers juges n ’aient pas v o u lu p ronon cer en connoissance de cause.
Il est possible que la m alignité toujours nvide de calom
nie , et toujours difficile ù d é t r o m p e r , prétende que C h a v e
�%
,
. .
( 22 )
n ’a pas été tout à fait innocent envers Elisabeth F errier
de ce dont on l ’accuse : mais il en prend le ciel à tém o in ,
cette fem m e lui fut toujours étrangère.
C h a v e , maître de ses actions , célibataire , feroit sa
jouissance principale de se v o ir re v iv r e dans un fils qu ’il
croiroit le sien ; à son âge, et avec ses principes re lig ie u x ,
il s’en feroit un devoir. Ces deux puissans m obiles ne
peuven t donc être vaincus 'q u e par quelque chose de
plus puissant e n c o r e , une conviction in tim e , une insur
m ontable répugnance.
Il ne demande pas à être cru sur p arole ; et si son
p rem ie r m oyen ne suffit p a s , il offre la p reu ve des v i o
lences qu i l ’ont forcé à donn er sa signature : et certes,
quand la cou r se sera assurée que C h a ve a été forcé de
sortir de son d o m ic ile , mené chez le m aire par cinq
h o m m e s , menacé et battu , elle a p p réc ie ra alors toute
la valeu r d’ une signature donnée dans de telles circons
tances ; et lorsque la vertueuse Elisabeth F e rrie r sera
convaincue q u ’il ne lui est plus libre de faire de sa p ro
géniture une charge p u b liq u e , peut-être s’e fforcera-t-elle
d e mettre un terme a sa féco ndité et au scandale de sa
conduite.
M . G I R O T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat,
M e . M A R I E , lic e n c ié avoué.
~
A R IO M , de l'imprimerie de L andriot , seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Therm idor an 15.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chave, Jacques. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Girot
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
enfants naturels
faux
menaces de mort
reconnaissance de paternité
code civil
actes de naissance
violences sur autrui
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jacques Chave, appelant ; contre Jeanne Valla, et Elisabeth Ferrier, sa fille, majeure, intimées.
Table Godemel : Paternité : 1. la déclaration de paternité d’un enfant naturel est nulle, si elle a été arrachée par la violence. quels caractères doivent avoir les faits de violence ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1801-An 13
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1502
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0705
BCU_Factums_M0307
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53242/BCU_Factums_G1502.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes de naissance
Code civil
enfants naturels
Faux
menaces de mort
reconnaissance de paternité
violences sur autrui
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53243/BCU_Factums_G1503.pdf
9aad24efaa8885eca62418e5dea806ad
PDF Text
Text
EXPOSÉ DE F A IT S ,
En suite desquels est la Consultation de messieurs
B E R G I E R , B E I L L E - B E R G I E R et
A N D R A U D } Jurisconsultes
POUR
Sieur A n to in e VIDAL, Expert-Géomètre et Notaire
public , en qualité de légitime administrateur de ses
enfans mineurs , et
V ID A L , sa fille
majeure, habitans du lieu de Mezenasserre, com
mune de St.-Christophe, appelans et demandeurs
en opposition
C
Le sieur
,
a t h e r i n e
contre
R E D O N C H A T , propriétaire
J
S A L V Y Notaire public, et M
- A
R E D O N C H A T son épouse intimés et défendeurs
en opposition.
ean
F rançois
,
ar ie
n n e
�EXPOSÉ DE F A IT S ,
En suite desquels est la Consultation de messieurs
B E R G I E R , B E I L L E - B E R G I E R et
A N D R A U D Jurisconsultes ;
POUR
Sieur A ntoine V I D A L , Expert-Géomètre et Notaire
public , en qualité de légitime administrateur de ses
enfans mineurs, et C a t h e r i n e VIDAL , sa fille
majeure, habitans du lieu de Mezenasserre, com
mune de St.-Christophe, appelans et demandeurs
en opposition;
Le sieur
,,
CONTRE
,
,
R E D O N C H A T propriétaire
J
S A L V Y Notaire public, et M
- A
R E D O N C H A T son épouse intimés et défendeurs
en opposition.
ean
F rançois
,
arie
nn e
Martin Garcellon , propriétaire de deux domaines appelés
Tougouse et Blaval , transmit sa succession à Guillaume Garcellon, dit G uillen, marié à Marguerite D ufayct.
A
�CD
L e mariage desdits Guillaume Garcellon et Marguerite Dufayel
donna le jour à huit enfans :
Antoinette, qui fut mariée à Benoît Jam y , et desquels descen
dent les appélans ;
Martin , mort en 1 7 1 7 , et dont la postérité s’est éteinte;
Sim on, mariéà Agnès Ferluc, décédé en 1 7 1 6 , laissant quatre
enfans, l’cprésentés par AntoinetteBèrc, veuve Tabarier, et par
Marie Vidal , épouse de Martin Hébrard, qui 11e sont pas en
cause sur l ’appel ;
Pierre, décédé en 1 7 1 9 , et auquel on n’a pas connu de pos
térité ;
M arguerite, morte sans postérité ;
Catherine', morte fille en 1702;
Antoine, mort en 1735;
E t Jean , curé de St.-Projet , mort en 1721 ;
Tou s, à l’exception de Jean, curé de St.-Projet, répudièrent
çiux successions de leur père et aïeul. Jean Garcellon les accepta
sous bénéfice d’inventaire.
M artin, Simon el Pierre Garcellon, z .e , .e et 4 .' enfans de
Guillaume Garcellon et de Marguerite Dufayet étaient associés
dans un commerce: leur association avait existé avec Pierre
J fincher.
3
31
L e 4 septembre 1709 Blancher leur céda son fonds de com
merce , et dissout la société avec eux. Les frères Garcellon s’obli
gèrent de lui- payer une somme de 19,000 francs, et se char
gèrent d’ncquilter les dettes de la société.
Pour sûreté et acquittement du prix de la cession, les frères
Guiccllon subrogèrent Blancher aux hypothèques par eux ac
quises sur les successions de Martin et Guillaume Garcellon,
leur aïeul et père.
A u x termes de leur association , les survivans succédaient au
promim- déc'édé. Ils laissèrent beaucoup de dettes, el point d’iminrublo*.- I.our actif consistait dans le fondsde commerce et dans
les créances q u ’ils s’étaieut faites contre les successions de leur
�3
(
)
père et aïeul, et qu’ils avalent déclaré s’ élever à i i , d j 5 liv. S s.
Les enfans de Martin et Simon répudièrent aux trois succes
sions. L e sieur Blancher , leur créancier , lit nommer Pierre
Espinasse curateur aux hoiries vacantes. .
Ces enfans de Martin et de Simon Garcellon furent pourvus
d’un tuteur: ce fut Pierre Garcellon que l’on c r o i t être leur
grand-oncle.
L a succession de Jean Garcellon, curé de St.-Projet, ouverte
comme on l ’a vu en 1721 , le 21 septembre, fut dévolue à Antoi
nette Garcellon , femme J a m y , aux enfans de Simon Garcellon t
venant Jure suo , par représentation de leur p ère, et à Antoine ,
7 .' enfant, désigné dans la généalogie. Alors les enfans de M ar
tin n’existaient plus.
Antoinette Garcellon demanda le partage de la succession au
tuteur des enfans de Simon Garcellon et à Antoine G a r c e l l o n ,
dit cadet. Ceux-ci contestèrent sa demande , sur le fondement
qu’elle avail été f o r c l o s e .
Par sentence du
mai 1720, rendue au bailliage de Salers,
5
elle fut admise au partage; mais il ne fut pas fait.
Parurent les créanciers des successions de Martin , Simon et
Pierre Garcellon, qui réclamèrent leurs créances sur les domaines
de Tougouse et Blaval, hypothéqués aux sommes duesauxdites
successions, par celles de Martin et G u illau m e, aïeul et père.
Jean et Catherine Blancher, se disant héritiers bénéficiaires
de Pierre Blancher leur frère et oncle, formèrent demande contre
Antoine Garcellon, dit cadet, Pierre Garcellon tuteur des enfans
de Martin et Simon Garcellon, et Antoinette Garcellon, Benoît
Jamy son mari, au paiement de la somme de 19,000 fr. à eux
due en vertu de l ’acte de cession de commerce du 4 septembre
*709Une sentence du 12 mai 172Ï) ordonna que les Blancher corninuniqueraionl leurs titres de créances , et que les Garcellon et
J a m y , héritiers ab intestat de Jean Garcellon praire, qui était
héritier bcnc/iciaire de Martin et G uillen G a r te llo n , scs père
A 2
�et a ïe u l, communiqueraient
faits à Pierre Blanclier ;
U )
les quittances et états de paiemens
Ordonna que le sieur P ra d el, le curateur à l’hoirie desdits
M a rtin , Simon et Pierre Garcellon, et autres intéressés, seraient
appelés en particulier et mis en cause.
Par autre sentence du 19 juin 1728, rendue entre les mêmes
parties et Pierre Espinasse curateur aux hoiries vacantes , et les
créanciers connus desdites successions, il fut ordonné que tous
les meubles et effets délaissés par les Garcellon frères , au jour
de leurs décès, en quoi qu’ils consistent et puissent consister, et
par exprès l’effet de la subrogation du paiement de la somme de
19,000 fr. mentionnée au contrat du 4 septembre 1709, avec les
intérêts du jour de la demande formée contre Jean Garcellon
prêtre , en qualité d'héritier de Martin et G uillen Garcellon ,
èes père et a ïe u l, seront rapportés et mis en masse ; auquel rap
port seront tous détenteurs, dépositaires ou débiteurs contraints,
et notamment Antoine Garcellon, Antoinette Garcellon, femme
Li&
Jamy, etPierre Garcellon tuteur, à celui delà somme de 19000 fr.,
à laquelle ledit Jean Garcellon prêtre, en qua lité d'héritier de
ses père et aïeul avait été condamné.
Premier juillet 1733, sentence de la sénéchaussée d’Auvergne
sur l ’appel des deux précédentes, contre Antoine Garcellon, dit
ca d et, Pierre Garcellon , tuteur des enfans mineurs de Martin
et Simon G arcellon, appelant d ’une part ; Jean Blancher et
Louise Blancher, sa nièce, héritiers de Pierre Blancher, inti
més, d’autre part;
E t lesditsBIancher, demandeurs en assistancede cause , d’une
part; et Benoît J a m y , en qualité de légitime administrateur de
scs en fans , et d’Antoinette Garcellon, Catherine Jamy , fille
dudit Beuoîtet de ladite Antoinette Garcellon , et Fiancois Doinal
son mari , défendeurs , d’autre part ;
Confirme les sentences de 1725 et 1728; cc faisant, condamne
1rs
appelons, en qua lité d'héritiers purs et simples de Jea n
Garcellon prêtre , icelu i héritier de M artin et G uillen Gar-
�J3
(5) •
cellon , personnellement pour leurs parts et portions , et hypo
thécairement pour le tout, à payer aux intimés les sommes dues
à P ierre, Simon et Martin G a rcello n , en vertu des titres de
créances, énoncés au contrat du 4 septembre I7°9» aux(l ue^s
Pierre B la n d ie ra été subrogé.
Déclare la sentence commune à Benoît et Catherine Jamy ,
dans les qualités dans lesquelles ils sont pris ; les condamne
personnellement et hypothécairement au paiement des mêmes
sommes.
Déclare affectés et hypothéqués au, paiement d’icelles, les
biens immeubles des successions de Martin et Guillaume Gar
cellon , permet de les faire saisir et vendre en la manière or
dinaire.
On rapporte ici ces faits pour établir que Jean Garcellon,
curé de S a in t-P ro jet, n’était pas héritier de Martin , Simon et
Pierre Garcellon a^ant laissé des e n f a n s , et dont les successions
avaient d ’a i l l e u r s été répudiées ; et pour justifier l ’appel d’un
jugement qui condamne les appelans , en qualité d’héritiers de
Jean Garcellon , au paiement de la dette de Simon et Pierre
Garcellon.
Ces faits Rétablis par les pièces à l ’a p p u i, écarteront les énon
ciations vagues et furtives insérées dans des actes de procédures
postérieures , et à la faveur desquelles les intimés veulent sou
tenir que Jean Garcellon était héritier, et a été déclaré héritier
de Martin , Simon et Pierre Garcellon.
L es faits qui suivent, sont propres à la cause.
En vertu de la sentence du i . er juillet i j
, les Blancher firent
33
saisir réellement les domaines de Tougouze et B la v a l, provenus
de Martin et ensuite de Guillaume G arcellon, par procès-verbal
du 26 mai xy35.
L a saisie fut suivie jusqu’à la sentence d’attestation, cepen
dant il ne parait pas qu’il y ait eu de bail judiciaire dépouillant
les débiteurs , et mettant les biens sous la main du ballistre judi
ciaire , jouissant pour les créanciers saisissans et opposans.
A3
d
�<
C6 )
Un arrêt du 11 mars 1786, rendu au parlement de Paris, entre
les s i e u r s Bertrandy, successeurs dqs Blnncher, d’une p a r t, Gas
pard Delprat , mari d’Antoinette Garcellon , l ’une des filles de
Simon Garcellon , Pierre Hébrard , Catherine Domal son épouse,
Marie Domal, Joseph Fiiiol son mari , d’autre part , en con-.
damnant de nouveau lesdits Hébrard et Domal , au paiement de
la somme de 19,000 francs, et intérêts, ordonna qu’il serait fait
déduction sur lesdites condamnations, entre antres articles , de
la somme de 31,924 francs , valeur des jouissances perçues par.
les enfans Bertrandy et leurs auteurs, depuis et compris xy ,
35
date de la saisie réelle, jusques et compris 177ÎÎ. En sorte que
cet arrêt, rendu en ce point sur les offres de Bertrandv , décide
qu’il n’y a point eu de bail judiciaire des domaines saisis , et
q u e les Bfanchor et Bertrandy en ont successivement jo u i, dès
l ’iuslant du procès-verbal de saisie réelle jusqu’en 1776. Cette
remarque est essentielle; elle fera un moyen de la cause.
• Dans la suife , des jugemens de 1793 et 2 frimaire an 6 , ont
ordonné la radiation de la saisie réelle , ét renvoyé en possession
des biens saisis, les successeurs des héritiers de Jean Garcellon,
curé de St.-Projet.
E n cet élal de choses , le sieur Jean S a lv y , Marie Pvedonchat
son épouse, Jacques, A n n e , Jeanne-Françoise et Marie Pvedon
chat, intimés, sortirent de la poussière une sentence incompé-,
tente et injuste, rendue à la juridiction consulaire deClermont,
par défaut, en 1721 , contre Jean Garcellon , curé de St.-Projet,
peu de jours avant son décès, et dont 011 n’avait pas osé suivre
l’exécution.
Celte sentence , obtenue par Guillaume Kedonchat, aïeul des
intimés , condamne consulairenicnl cl par corps , Jean Garc'dlon , curé, en qualité d’héritier en partie de Pierre Garcellon »
ion IVère, au paiement de- la somme de ,4.% liv. s. ; elle est
3
3
au si rendue contre Antoine Garcellon cadet , et Pierre Gnrr»*!!oii, tuteur des enfans de Martin et Simon Garcellon , aus-ii
héritier* eu partie de Pierre Garcellon leur ouclc, et do Martiu
�V ?
.
)
et Simon leurs pères. Nous remarquons que chacun est con
damné personnellement pour sa part seulement, et qu’ainsi la
(7
dette fut divisée. Autre remarque, le tuteur fut aussi condamne
à aller en prison pour ses pupilles.
Guillaume Redoncliat fit signifier cette sentence suivant que
l’atleste un original d’exploit rapporté le 17 mai 1721 ; et il faut
croire que les parties condamnées 11’en eurent pas connaissance.
Après trente-trois ans de l ’obtention de cette honteuse sentence,
nulle par incompétence , absurde par les condamnations par
corps prononcées contre le curé de St.-P rojet , pour la dette
d ’autrui et contre un tuteur; injuste encore dans la condamna
t i o n personnelle, et en qualité d’ héritier de Pierre, Martin et
Simon Gnrcellon, p r o n o n c é e contre les non-successeurs. Jacques
3
'lledonchat né en 1706 , lit le o juillet 1764, une opposition
irrégulière à la saisie réelle faite à la requête de défunt Jean
B la n ch er, d e s biens i m m e u b l e s d e s s u c c e s s i o n s répudiées de
M artin, S i m o n et P i e r r e G a r c e l l o n , sis ès villages de Tougouze
et Blaval s u r le curateur , à ladite succession.
Nous disons cette opposition irrégulière, parce qu’elle ne frappe
pas sur la saisie réelle faite sur Benoît J a m y , François Domal
son gendre, Antoine et Pierre Garcellon , par procès-verbal du
26 mai 17.35 ; et que la saisie réelle non datée , des biens des
successions répudiées de Martin , Simon et Pierre Garcellon ,
snr le curateur auxdites hoiries , est étrangère aux appelans et à
celle des domaines de Tougouze et Blaval. L ’on établira dans
la discussion la nécessité d’ une opposition bien positive, datée,
et bien précisée.
Il n’y eut pas de notification de cette opposition sourde.
Antoine Raoux, Jean S alvy, Marie, Anne lledonchat et autres,
l’ont réitérée plus régulièrement au mois de décembre 1783.
En 1787 , les Salvy et lledonchat ont fait assigner M argue
rite Garcelon fille , Pierre lLcbrnrd, veu f de'Catherine Domal,
Antoine V id a l, appelant, et Marie llébrard son épouse , Joseph
J i l i o l , Marie Domal son épouse, Gaspard D e lp ra t, en qualité
�C8 )
<le père et légitime administrateur de Joseph Delprat , fils et
héritier d'Antoinette Garcellon, pour voir déclarer exécutoire
co n ti’eux les billets souscrits par Simon et Pierre Garcellon , et
la sentence consulaire de 1721 , rendue contre Jean Garcellon et
autres, et pour être, en conséquence, condamnés, même soli
dairement, à payer en deniers ou quittances la somme principale
de
3,456 liv. 3 s. avec les intérêts depuis l’opposition formée aux
scellés des effets desdits feus Garcellon.
A la dénomination des parties assignées, l’exploit n’énonce pas
la qualité dans laquelle ils sont pris,et on ne la trouve pas claire
ment dans le corps de l’exploit. Il y est dit : « Pour en qualité,
« tant de leur chef que de celui de leurs auteurs et prédécesseurs,
« même ledit sieur Hébrard d’usufruetuaire des biens de défunte
« d em oiselle........... Domal son épouse , d’héritiers et jouissant
« les biens des successions desdits défunts sieurs Garcellon ;
« v o i r , etc. »
Cette -assignation a été suivie d’une sentencr par défaut,
faute de comparaître , en date du i . er juin 1787, adjudicative
de la demande ; la sentence paraît avoir été signifiée le 3 août de
la même année.
Airectant toujours par principes héréditaires de surprendre
des condamnations, notifiées sous la cheminée, et de laisser
écouler de longs délais avant de faire connaître les jugemens, afin
d’acquérir la force delà chose ju g é e , les intimés ont demeuré dans
l’inaction jusqu’au 29 nivôse an 1 2 , époque à laquelle ils ont
fait signifier le jugement de 1787 , avec commandement de
payer. L a signification a été suivie d ’une saisie-arrêt, qui a
empêché le sieur Vidal de toucher une somme de ,000 francs,
3
de hquelle il est en souffrance.
V i d a l , en sa qualité de légitime administrateur de ses enfans
mineurs, et Catherine Vidal sa fille majeure, sont appelans de
t>c jugement , et r.'est de cet appel qu’il s’agit.
Mous ferons remarquer q u ’Anloinette fierc, veuve Tabarier,
Marie Vidal et Antoine ilélnard son m a ri, 11e sont pas appe
la is
�'»>
.
*
lans du jugement qui les frappe cependant ; qne la crcance des
intimés , supposée légitime , et exigible des héritiers des débi
teurs originaires, serait due en entier par lesdits Berc et V i d a l ,
comme descendans de Simon Garcellon qui avait souscrit les
billets qui forment les titres primitifs de créances; qui aussi ont
fait assigner les intimés pour justifier de leurs titres de créances,
et qui seraient garans des appelans , s’ils supportaient quelques
condamnations.
Qu’ainsi c’est purement par hum eur, que les intimés se sont
adressés aux appelans, et par obstination qu’ils résistent à leurs
défenses.
B
�CONSULTATION.
Ï^ E
C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a examiné avec la plus
scrupuleuse attention toutes les pièces, procédures, sentences,
arrêts et jugemens relatifs à l’aiFaire pendante à la cour d’appel
de R i o m , entre le sieur Antoine V idal , légitime administra
teur de ses enfans, héritiers de feue Marie Hébrard leur mère,
et Marie V i d a l , m ajeure, sa fille aînée, appelans d’un jugement
rendu au ci-devant bailliage de Salers , le i . er juin 1 7 8 7 , et
les héritiers R edo n chat, intimés,
E s t D’a v is , i.° que l’appel de la sentence p ar défa u t du i .e*
juin i 'j ñ j est receivable, quoiqu’il n’ait été interjeté qu?après les
dix ans, à compter de l’exploit de signification qu’on en rapporte,
principalement, parce que les condamnations qu’il prononce tom
bent sur des m ineurs, et que l’appel n été interjeté avant qu’il
y eût dix ans de majorité d’écoulés ;
2 .0
Que cet appel est fondé parce qu’il adjuge une créance
illégitime dans le principe, et d’ailleurs éteinte par une double
prescription, avant la demande.
Justifions ces deux propositions.
PREMIÈRE P R O P O S I T I O N .
L 'a p p e l e s t rcccv a b le.
Quel est le délai dans lequel était recevablc l’appel des jugejnens rendus par les tribunaux de l’ancien régime;, lorsqu’ils
étaient susceptibles d’etre attaqués parcelle voie? il fallait dis
tinguer: après trois ans écoulés depuis la signification , légale
ment faite, celui qui avait obtenu la sentence pouvait sommer
le condamné d’en interjeter ap p el, et s’il n’y avait pas d’appel.
�dans les six mois à compter de cette sommation , il n’était plus
recevable. (A rt. 1 2 , tit. 27 de l ’ordonnance de 1667).
Si le condamné venait à mourir dans les trois ans, ses héri
tiers , majeurs, avaient une année de plus de délai , et six mois
encore après la nouvelle sommation qui lui était faite d’appeler.
( A r t. i . Ibid. )
A défaut des sommations ci-dessus , les sentences n’avaient
force de chose jugée qu’après dix ans , à compter du jour de
leur signification. (A rt. 17 ).
5
Ajoutons que ces fins de non. recevoir n’avaient point lieu
contre les mineurs , pendant le tems de leur minorité, et jusqu’à
ce qu’ils eussent vingt-cinq ans accomplis, terme après lequel
les délais commençaient seulem ent à courir. ( A rt. 16 ).
Cette exception, en faveur des mineurs , eût été suppléée de
d ro it, quand elle n’aurait pas été littéralement écrite dans l ’or
donnance , car il est de règle générale , que les p r e s c r i p t i o n s de
toute espèce, sont suspendues pendant la minorité, a moins qu’il
n’y ait dans la loi une disposition contraire pour quelques cas
particuliers.
Appliquons ces règles à l'affaire présente.
L e jugement du 1 .« juin 1787 ne fut point rendu contre des
mineurs; mais Marie Hébrard , épouse du sieur V i d a l , l’une des
parties condamnées , mourut en 1789 , deux ans après le juge
ment , et laissa trois enfans en bas âge : le plus âgé des trois était
Catherine V idal qui n’avait alors que sept à huit ans; les autres
deux sont encore mineurs; la prescription a donc dormi pendant
tout cet intervalle de tems , et conséquemment elle était loin
d’ôtre accom plie, lorsque l’appel du 14 pluviôse an 12 fut in
terjeté.
Marie Domal , autre partie condamnée par le même jugemriit du 1 .cr juin 1787 , céda scs droits sur les biens de la famille
(-»nrcellon au sieur Vidal qui n’accepta la cession qu’au nom de
scs ciilaus mineurs, en qualité do tuteur légal et administrateur
légitime de leur personne et biens , par acte du dix-sept juillet
U 2
�(
12
)
i?9 7 ( 0 - A c^,te ^l)ôrPie >lesdix-ans accordés à la cédante, pouf
appeler de la sentence de 1787, n’étaient pas encore complète
ment révolus ; car ce jugement n’avait été signifié que le 3 août
17B7, conséquemment le 17 juillet 1797, il n’y avait encore que
neuf’ ans onze mois quatorze jours d’utiles pour la prescription
d’écoulés. Alors elle fut suspendue par la minorité des cédataires (2 ), d’où il suit que l ’appel est venu dans un teins utile ,
aussi bien en ce qui concerne Marie D o m a l, qu’en ce qui con
cerne Marie Hébrard , épouse du sieur V id al , représentés l’un
et l ’imtre par les enfans V idal.
Cependant il est possible que Catherine V id al ait tardé plus'
de seize jours après sa majorité à former son appel ; alors en
joignant les neuf ans onze mois quatorze jours qui avaient couru
sur la tète de Marie D o m a l , avant qu’elle cédât ses droits, au
tems intermédiaire entre le jour de la majorité de Catherine
V id a l et l’acte d’appel, on pourrait peut-être trouver dix années
utiles d’écoulées contr’e lle , et conséquemment la prescription
aurait été accomplie pour le tiers qu’elle amendait dans la ces
sion de Marie Domal ; mais , dans ce cas , la suspension de la
prescription pour tous droits corporels el incorporels, pronon
cée par la loi du 20 août 1792 , viendrait à son secours, et la
mettrait encore à l’abri de la lin de non recevoir. Cette l o i , tit. 3,
art. 2, porte en effet : que « L a prescription pour les droits cor« porels et incorporels appartenant à des particuliers, demeure
«
«
*
«
suspendue depuis le 2 novembre 17ÎÎ9 , jusqu’au 21 novembre 1794 , sans qu’elle puisse être alléguée pour aucune
partie du teins qui se sera écoulé pendant le cours desdites
cinq aimées». O r , si l’on retranche ces cinq années des dix
années, et quelques jours seulement de majorité, qui peuvent
5
(1) 28 Mcîiiilor an , voir le jugement du tribunal civil, du 2 frimaire
011 6 , au v.° du premier feuillet.
(2) Bomjon, Droit commun de la France, tom. 2, p. 573 j lien ris, Louet
el lhüdtauj Duplessis, etc.
�avoir couru , soit sur la tête de Marie Doraal cédante, soit sur
celle de Catherine V id a l cédataire, il ne restera guère que la
moitié du teins nécessaire pour la prescription du droit d’appeler.
On dira peut-être que l ’article cité de la loi du 20 août 1792 >
doit être sainement entendu ; que la suspension de la prescrip
tion qu’il prononce, n’est pas générale et indéfinie ; que le légis
lateur n’avait en vue d'affranchir de prescription que les rentes
foncières, constituées, et autres redevances quelconques, etqu’elle
est sans application aux a u t r e s actions. Sans prétendre que la loi
dont il s’agit, s’applique à toutes sortes de prescription indistinc
tement , on lest en droit de soutenir que l’on n’en abuse p a s ,
lorsqu’on l’invoque uniquement pour soutenir que l’appel d’un
jugement par défaut , inconnu de l ’appelante , serait venu à
tems, quand il aurait été .interjeté quelques jours, ou quelques
mois après les 10 ans de majorité, à la suite d’une révolution
pendant laquelle l’état de l’ordre judiciaire et des tribunaux a
subi tant de variations. S ’il est u n e m a t i è r e , en e f f e t , ou la pres
cription ait dû être suspendue pendant les troubles, l’agitation et
les bouleversemens de la révolution , c’est bien certainement la
prescription du droit d'appeler des jugem enspardéfaut, faute de
comparoir, rendus avant la révolution, soit à cause de la per
suasion où l’on était généralement que la faculté d’appeler de
cette classe de jugemens , durait o a n s , soit à raison de l’incer
titude où l’on était jeté sur la manière de procéder en cette m a
3
tière, par les variations continuelles des tribunaux et de l ’ordre
judiciaire.
N ’hésitons donc pas à conclure de tout ceci que l ’appel du sieur
V id a l au nom de ses enfans m ineurs, tant du chef de Marie
Ilébrard leur mère que du chef de Marie Domal femme Filiol ,
leur grande tante, et celui de Catherine V id a l sa fille ainée du
même chef, ont été formés à tems, e t s o n t rccevables sacs diüicuhe.
Voyons maintenant s’ils sont fondés.
�Preuves de la seconde proposition.
L ’appel du sieur V i d a l , au nom de scs enfnns mineurs et da
Catherine V idal sa fille a in é e , est bien fondé.
L a sentence rendue, le i . er juin 1787, nu bailliage de Salers,
dont l’appel est à ju g er, fu t prononcée ,
i.° Contre Pierre Hébrard, veu f de Catherine D om al, en qua
lité d’usufruitier de ses biens.
Antoine V i d a l , en qualité de mari de Marie Hébrard, et son
épouse héritière de Catherine Domal sa mère;
Joseph Filiol, en qualité de mari de Marie D om al, et contre
son épouse;
Tous représentés maintenant par les appelant.
2.0
Contre Gaspard Delprat, veuf d’Antoinette Garcellon , et
contre Marguerite Garcellon , sa belle sœur fille majeure, repré
senté par les héritiers D elprat, par Martin Hébrard , Marie V idal
son épouse, Antoinette I erc veuve de Joseph T a b a rier, qui ne
sont point appelons.
Son dispositif est ainsi conçu : « Nous avons contre les dé« faillans donné défaut, et pour le profit, faute par V idal et
3
« Filiol d ’avoir autorisé leurs femmes , avons ¡celles autorisées
«
«
«
«
«
k
«
<r
«
en justice............... D éclarons exécu to ire, contre lesdits Garcellon , Hébrard, Domal et Delprat, en qualité, tant de leur
chef que de celui de leurs ailleurs, même ledit Hébrard , d ’usufruitiers des biens de ladite défunte Catherine Domal son
épouse, d'héritier et jouissant lesbiensdesdits sieurs Garcellon,
tant lesdits billets, exploits , sentence et oppositions, en date
des 20 septembre et 16 novembre 1716, 28 et o août 1719 ,
2 mai 1720 , 11 mars et 17 mai 17 2 1, o juillet 1754, et z
décembre 17^3.
3
3
En conséquence, condamnons les défaillant, èsdits noms et
qualités, chacun personnellement pour la part c l portion dont
�5
*¿5
( i )
ils sont héritiers des défunts G a rcello n , et hypothécairement
pour le to u t, à payer aux demandeurs, en deniers ou quittances
valables , la somme principale de 3 , 4 0 6 livres, avec les intérêts
d’icelle depuis l’opposition formée aux scellés apposés sur les
efiels desdits feus sieurs Garcellon, et en tous frais et dépens; le
tout adjugéparlasentencedudit jour n mars 1 7 2 1, ainsi qu’aux
frais de mise d’exécution ; condamnons en outre les défaillans
aux dépens de la présente instance ;
Disons enfin que lesdits Y id a l et Filiol seront tenus d’indiquer
des biens de leurs fem mes, etc.
Les appelans ont à se plaindre de ce jugement sous deux
points de vue ;
E n ■premier lie u , parce qu’il fait revivre, en ce qui concerne
les appelans, une vieille créance dont l’origine était illégitime ,
et qui avait été éteinte depuis long-tems par la prescription ,
lorsque le tribunal de Salers en ordonna le paiement.
E n second lieu , parce qu’il condamne hypothécairement leurs
auteurs , au paiement de la créance entière.
Ces deux griefs exigent d ’être développés séparément pour
éviter la confusion qui est Pécueil le plus à craindre dans cette
affaire extrêmement compliquée.
P R E M I E R GR I E F .
Prescription.
L e Dernier des titres de créance, produit par les intimés lors
du jugement du i . er juin 1787 , est une sentence obtenue par
Guillaume lle d o n clm t, leur a u te u r, contre Jean G arcellon,
prêtre, curé de Si. P ro jet, Antoine Garcellon son frère, comme
héiit iers, en partie, de Pierre Garcellon leur défunt frère , et
encore contre autre Pierre Garcellon , tuteur des enfans mineurs
de Martin et de Simon Garcellon , héritiers, en partie, de Pierre
premier, leur o n cle, ainsi que de Martin et de Simon , leur
père, le 11 mars 1 7 2 1 , signifiée à domicile, le 17 mai suivant.
sè
�( ,ï 6 )
Depuis cette éqoque jusqu’à la demande en déclaration de ce
jugement exécutoire, formée par les intimés, le 2 mai 1787 ,
on trouve un intervalle de tems de 66 ans. Les intimés prétendent
(m a ïs sans le justifier), que Guillaume Redonchat mourut en
1720; qu’il laissa Jacques Redonchat son fils mineur, et que la
prescription dormit jusqu’en 17 3 1, époque à laquelle ce fils at
teignit sa majorité. Ce fait n’est pas établi ; mais en le supposant
vrai, et quand il ne faudrait partir, pour compter la prescription,
que de 1781 , il resterait toujours , de cette dernière époque à
56
l’année 1787, époque de la nouvelle demande,
ans, conséquemment un intervalle presque double du tems nécessaire pour
acquérir la libération de la créance dont il s’agit, dans une cou
tume comme celle d’A u vergn e, où tous droits et actions se pres
crivaient par le laps et espace de 00 ans continuels et accomplis,
d ’aprcs l’article II, titre 17 de la coutume. Les intimés essayent
d’écarter ce moyen tranchant; mais y réussiront-ils? On va en
juger par la discussion des objections sur lesquelles ils fondent
leur espoir.
P r e m iè r e o b je c tio n con tre ta p rescrip tio n .
L e s biens de la famille Garcellon furent mis en saisie réelle,
en l’année 1735, à la requête d’un sieur Bertrandy , créancier,
et les biens saisis furent administrés jusqu’en 1786 par le com
missaire aux saisies réelles, qui jouit au nom de tous les créan
ciers du saisi, et qui par conséquent conserva les droits de tous.
De 1721 îi 1735 il 11’y aurait que 143ns d’utiles, quand même
011 ne défalquerait pas le teins de la minorité de Jacques RedonL-hat. La prescription a dormi pendant la durée de la saisie réelle
jusqu’en 1786. D e cette dernière époque a la demande sur la
quelle es» intervenu le jugement de 1787, dont ¡1 y a appel ,011
11e trouve p is deux mis; d’où il suit que c’est une illusion de mettre
quelque confiance daus la prescription de la créance.
Réponse.
�( «7 )
Réponse.
'
&
C ’est pour la première fois qu’on a prétendu que la saisie réelle
des biens du débiteur interrompt la prescription, n o n seulement
en faveur du créancier saisissant, ce qui n’est pas douteux, mais
encore à l’égard de tons les créanciers indistinctement, du jour
de sa date, ou si l’on v e u t, de sa notification au débiteur saisi.
On a toujours pensé et avec raison,
i°. Que la prescription était interrompue en cas de saisie réelle,
A l’égard du saisissant, par la simple saisie notifiée, et du jour
de la notification ;
. A l’égard des créanciers opposans, du jour de leurs opposi
tions qui leur rendent l’effet de la saisie réelle commun.
2°. Que le cours de la prescription reste suspendu, tant a l égard
du poursuivant, qu’à l’égard des créanciers opposans , pendant
tout le tems qu’il y a des baux judiciaires, par la raison que le com
missaire aux saisies réelles jouit au nom de tous les créanciers,
de l’immeuble saisi q u i est leur gage, et dont les fruits ^doivent
se distribuer, comme le prix de la vente, par ordre d’hypothèque.
Mais la jurisprudence n’a jamais donné à la saisie réelle l’effet
d’interrompre la prescription en faveur des créanciers non oppo
sans , parce que jusqu’à leur opposition ils sont étrangers à la
poursuite; elle est à leur égard res inier alios acta\ et au lieu de
conserver leurs droits sur l’im meuble, le résultat de la vente par
décret qui laterinine, devaitêtredepurgerleurhypothèque. En un
mot la saisie réelle seule n’a jamais été unepoursuite utile, en aucun
sens, aux créanciers qui négligeaient d’y prendre part, par une
oppositiou régulière. Les intimés doivent donc renoncer à l’es
poir qu’ils paraissent avoir conçu, de faire considérer la saisie
réelle de iy35 comme un acte interruptif par lui-mCme , et du
jour de sa date , de la prescription de leur créance.
Seconde objection contre La prescription.
' l i é bien ! soit : il fallait une opposition de la part de nos auteurs
G
'
i
�-* \ »
( i8 )
à la saisie réelle, avant l’accomplissement de la prescription de
leur créance, pour que cette saisie réelle conservât leur droit;
mais cette formalité conservatrice ne fut pas négligée, puisque
nous rapportons l ’opposition qu’ils formèrent à la saisie réelle
des domaines de Tougouse et de B la v a l, le o juillet 1754. Notre
créance n’était point encore éteinte, à cette époque, par la pres
cription , parce qu’elle avait, été suspendue par le décès de
■
3
Guillaume R ed o u ch at, créancier originaire, en 1 7 2 3 , et la
minorité de Jacques, son fils, jusqu’en 1731 : l’interruption qui
s’opéra alors effaça tous les tems antérieurs. Depuis 1754 jusqu’à
la radiation de la saisie réelle, elle a resté suspendue : nouvelle
interruption en 1783, par une seconde opposition, et en 1787,
par la demande suivie du jugement de cette date. A i n s i , point
de prescription; il n’y en a pas même l’apparence.
Réponse.
L e s intimés placent la mort de Guillaume Redonchat, qui
avait obtenu la sentence de 17.21 , au 27 décembre 1723 : c’est
l i n fait à vérifier. M ais, supposons qu’il soit e x a c t , la suspension
de la p r e s c r i p t i o n jusqu’à, la majorité de son fils, en 1781, en
sera la conséquence, il est vrai, et il en résultera qu’effectivement
les trente années nécessaires pour prescrire leur créance n’étaient
pas révolues lors de l’opposition formée le o juillet 1754. Mais
3
que gagneront les intimés à celle découverte, si l’opposition du
o juillet, dans laquelle ils placent toute leur confiance , 11’a
aucun rapport à la saisie réelle de 1735, à laquelle on voudrait
l’appliquer aujourd’h u i, pour mettre leur créance à l ’abri de la
prescription? Rien. Une opposition étrangère à la saisie réelle à
laquelle 011 voudrait la rattacher, se rangera nécessairement dans
la classe des chiffons inutiles. O r , ce fait que l’opposition de 1754
ne s’appliquait point à la saisie réelle de 1735, se démontre par
3
la simple lecture de la pièce : il en fut signifié copie en tête do
l’assignation pour comparaître au bailliage de Sulcvs, le 2 mai
�*9
(
) >
Ï7S7. Et que voit-on dans cet acte d’opposition? Jacques Hedonç h a t, fils et héritier de G uillaum e, comparaître au greffe du
bailliage de Salers, et déclarer quoi? q u 'il s'oppose à la saisie
réelle des biens meubles des successions répudiées de Martin ,
Simon et Pierre Garcellon , sis ès pillages de Tougouse et
B la v a l, sur le c u r a t e u r auxdites successions, à la requête de
fe u Jean B lan cher; à ce que sur le p rix qui proviendra des
dits biens ledit R edonchat soit pa yé de la somme de
liv.
en principal, portée par sentence de la ju rid ictio n consulaire
3436
de C lerm on t, du 11 mars 1721.
i°. L a saisie réelle du 26 mars 1785-n’avait été faite, ni sur
les biens des successions répudiées de M artin, Simon et Pierre
Garcellon, ni sur le curateur auxdites successions ; elle l’avait,
été sur B en o ît J a m y , et François D o m a l, son gen d re, co
dernier administrateur légitim e de ses enfans et de défunte
¿(Lnne J a m y , iceux héritiers de ladite A nne Jamy , leur mere,
et d’Antoinette G a r c e l l o n , leur a ï e u l e , qui étaient héritières en
partie de Jean G arcellon, curé de Saint-Projet ; sur Antoine
Garcellon, autre héritier en partie de Jean Garcellon, prêtre j
et sur Pierre Garcellon, tuteur des enfans de défunts Martin et
Simon Garcellon, lesquels étaient également héritiers en partie,
de leur propre chef, du même Jean Garcellon, prêtre, décédé le
31 septembre 1 7 2 1 , conséquemment après ses trois frères ,
( Simon, décédé le 26 septembre 1716 ; Martin, mort le i jan^
vier 17 x7, et Pierre, mort le 14 septembre 17x9. )
5
2°. Les biens saisis n’étaient pas ceux des successions répu
diées de Simqn, Martin et Pierre Garcellon,mais deux domaines,
l ’un appelé Tougouse, et l’autre appelé Blaval, provenus de la
Buccession de Jean Garcellon, curé de St.-Projet, et auparavant
de celles de Guillaume, ou Guillen Garcellon, débiteur de Blanch&r, saisissant.
3 .°
Enfin elle ne fut pas faite par un créancier des successions
répudiées de Simon, Martin et Pierre Garcellon frères, associés
pourle commerce; elle fut faite au contraire en vertudes créances
�y
\
que ces trois frères avaient cédées à Blancher, parlraitd du 8 no
vembre 1709 , sur les domaines de Tougouse et de B la v a l, pro
venus des successions de Martin i . er et de Guillen Garcelion ,
auxquelles ]es cédans avaient répudié, et qui avaient été recueillis
par Jean Garcelion prêtre (1).
Il n ’y a donc r i e n decominun entre la saisie réelle des domaines
de Tougouse et de Blaval par procès-verbal du 26 mars 178^ ,
dont les appelans ont fait prononcer la radiation, et la prétendue
saisie réelle faite sur un curateur aux successions répudiées des
frères Garcelion", à laquelle Jacques Redonchat forma opposi
tion en 1764.
On ne trouve entre ces deux saisies jéelles, l’une très-certaine,
et l’autre peut-être chimérique, ni identité de personnes, ni
identité de biens saisis. L a diversité des personnes est évidente;
la diversité des biens ne l ’est guère moins; car l’opposition porte
sur la saisie re'elle de biens que l’on désigne comme des héritages
épars et détachés, qui appartenaient aux successions répudiées
des frères Garcelion , marchands-associés dans les territoires des
villages de Tougouse et de Blaval ,au lieu que la saisie réelle de
1 7 3 5 , frappait sur deux corps de dom aine, provenant de la
s u c c e s s i o n de Jean Garcelion prêtre ; et il est bon de remarquer
que l’opposition de Jacques Redonchat se réfère si peu à la saisie
des domaines de Tougouse et de B la v a l, du 26 mars 1735, qu’elle
n’y est même pas énonce'e par sa date.
Voilà donc une opposition lout-à-fait étrangère , soit aux au
teurs des appelans qui n’y sont aucunement dénommés , soit i\
la saisie réelle faite sur eux et sur les autres co-propriétaires des
domaines de Tougouse et Blaval. Or , comment une opposition
qui 11’a de rapport ni avec les auteurs des appelans, ni avec
( 1 ) T o u s c e s faits sont c o n s i g n a s d a n s l e j u g e m e n t du t r i b un a l c i vil , d u
2 f r i ma i r e a n 6 ,
cluituséc
de
r e n d u a v e n les i n t i m é s ; et d a n s la s e n t e n c e d e la s é n é -
R iom ,
du
Gma i
p o u r s u i v a n t la s ai s i e r l c l l c .
177
6, r e n d u e
avec B e it r a n d y , créancier
�(• 21 )
leurs biens., et qui ne leur fut point notifiée dans le tems, paur-^
xait-elle avoir interrompu la prescription qui courait en leur fa
veur? Tout le inonde ne sait-il pas que « /’interruption civile
« n’opère pas régulièrement d’une personne à l’autre, ni d une
« obligation ou d’une action à une autre »,com m e le dit Dunod,
traité des prescriptions, page 61 ?
Concluons que la prescription a continué de courir après l’op
position faite sur un curateur qui n’avait aucun rapport avec
les auteurs des appelans , et qui ne les représentait à aucun
titre , comme auparavant ; et par une suite-qu’elle était acquise
depuis long-tems, lorsque les intimés voulurent rectifier leur op
position de 17^4 par une seconde mieux libellée et mieux ap
pliquée , qu’ils firent en 1783, et à plus forte raison, lorsqu’ils
formèrent en 1787 la demande accueillie par le jugement dont
est appel.
U11 moyen si décisiT dispense de faire remarquer d’ailleurs,
que l’opposition de 1754, e û t elle é t é a p p l i q u é e à la saisie réelle
de 1735 , et f a i t e r é e l l e m e n t s u r les auteurs des appelans, elle
n’aurait pas été plus efficace; et pourquoi ? parce que l’opposi
tion faite au greffe sans être dénoncée au saisi, n’interrompt la
prescription que dans le seul cas où la saisie réelle étant suivie
de baux judiciaires, constamment soutenus , par l’effet desquels
tous les opposans jouissent des fruits du gage commun de leurs
créances, en attendant que la vente judiciaire en soit consom
m ée, l’action de chaque créancier est conservée entière par cette
jouissance du commissaire , au nom de tous. Or , la saisie réelle
de 1735 , au lieu d’être suivie de baux judiciaires réguliers et
soutenus, 11e servit que de prétexte au sieur Blaneher saisissant,
et
après lui au sieur Bertrandy son héritier, pour s’emparer,
d’autorité, des biens saisis, et en jouir pignorativement ; si
bien que par arrêts de la Cour de parlement, des années 1779»
Ï786 et 178 7, les héritiers Eertrandy furent condamnés à ren
dre compte des jouissances de ces biens , à dire d’experts, de
puis et compris 1735 , jusques et compris 1775 , et à faire l ’im
�putation de ces jouissances sur leur créance. Ce n’est que posté
rieurement à 1777 , qu’il y eut des baux judiciaires réguliers et
sérieux. De là il suit que Blancher et Bertrandy ne jouirent de
1735 à 1775 des biens saisis que pour eux seuls exclusivement ',
çt non pour tous les créanciers ; conséquemment qu’ils ne con
servèrent à l’abri de la prescription, que leur créance seule.
M o tif de plus de déclarer celle des intimés prescrite , dans l'in
tervalle de 1721 à 1783, époque où ils firent, mais trop tard,
une opposition régulière sur la saisie réelle de 1735, accompa
gnée alors de baux judiciaires subsistans.
L e premier grief desappelans contre le jugement dont ils se
plaignent, résultant de ce qu’il a fait revivre contr’eux une
créance éteinte par la prescription , est donc invinciblement
justifié ; et Pinfirmation du jugement est d?autant plus inévi
table sous cc point de vue, que la prescription qui est ■ordinaire
ment un moyen odieux, se trouve une exception favorable dans
l ’çspèce , aliimdu que la prescription, dont les appelans invo
quent le secours , n’a éteint qu’une créance originairement illé
gitime , que Guillaume Rcaoncbal s’était fait adjuger en i j 2 i r
par des juges incompétens, contre de p r é t e n d u s h é r i t i e r s de
Pierre , Martin et Simon Garcellon, ses débiteurs, dont les suc
cessions étaient répudiées, ainsi que le prouve l’opposition fai té
par Jacques R e d o n ch a t, sou lils, en 1754, que nous venons
d ’analyser. L a surprise avait versé sur les auteurs des appelans
une dette qui leur était étrangère. L a prescription les en a libé
rés. Ce résultat n’est que la réparation d’une injustice; et c’est
un motif bien puissant pour que la Cour d ’appel s’empresse
d’accuLillir avec autant de laveur ce moyen de libération ,
qu’elle l'accueille avec répugnance , dans les circonstances
ordinaires.
Passons au second grief.
�(tf)
S
e c o n d
g
r
i e
f
.
,
L a solidarité hypothécaire est prononcée sans fonde
ment, entre tous les condamnés par le jugement
dont, est appet.
L e moyen de prescription peut être opposé en tout état de
cause, et sur l’appel comme en cause principale; mais il ne se
supplée point. Tous les condamnés, par le jugement de 1 7 8 7 ,
ont également droit de l’opposer; mais tous 11’ont pas pris la
voie de l’appel pour se mettre à même d'en faire usage : peutêtre même n’est-il plus tems pour eux de prendre cette voie. De
là il résulte que les condamnations prononcées contr’eux per
sonnellement subsisteront, nonobstant que les appelans soient
déchargés de la partie de la dette prescrite qui les regardait per
sonnellement. E n cet état de choses, si la condamnation soli
daire, prononcée hypothécairement par le jugement dont est
appel, subsistait, il en résulterait donc que les appelans, dé
chargés du paiement de la dette pour leur contingent person
nel, pourraient être contraints de payer par l ’effet de la solidité
hypothécaire, prononcée par le jugement dont est appel , le
contingent des autres condamnés, sauf leur recours; c’est à quoi
ils ne doivent pas rester exposés, par deux raisons : sa vo ir, en
premier lieu, parce que la solidarité hypothécaire qui a été pro
noncée l’a été sans fondement ; la seconde, parce que dans tous
les cas, la prescription qui les a libérés de l’action personnelle,
les a libérés également de l’action hypothécaire.
Nous disons que la solidarité hypothécaire pour la créance
en tière, a été prononcée sans fondement, et en effet, il est cons
tant et c’est chose jugée entre les parties , par jugement rendu
ou tribunal c iv il, le 2 frimaire an 6 , que les domaines de T ou gouse et de Blaval , dont les appelans possèdent la moitié qui
leur fut attribuée par ce ju geaien t; proviennent de la succès«
�( i-t )
sion de Jean Garcelon, prêtre , ouverte en 17 2 1, et qu’ils appar
tenaient à cette succession sans partage; enfin que les appelans
possèdent et n’ofijt;jouais possédé aucun autre immeuble de
la,famille Garcellon que.la.moitié de ces deux domaines.
J est également constant que Jean Garcellon , prêtrq, n’était
pas seul débiteur de la créance adjugée aux ailleurs des intimés
1
ppr la sentence consulaire du 11 m us 1721, ni à beaucoup près ;
qu’il n’avait été condamné, par cetté sentence, qu’à payer son
cbnfingenfcohime'béritier pour 1111’ qïiart de Pierre Garcellon,
fcèn défunt frère, conjointément avec Antoine Garcellon, son
aufrè frère survivant ‘avec les en fan s dé'M artin Garcellon , et
avec c ë u i de Simon Gitrcéllon : et attendu qu’ il résulte du même
jugémènt que Pierre (rarcéllou n’était îui-mêm'e débiteur que du
tiers de’ la créance entière, il est conséquent, que ce tiers distri
bué entre les quatre branches d’héritiers, né donnait à la charge
'dé Jean Gmvt,llôn"qu’un douzième de la dette (1).
T1 n'y avait aucune solidité entre les côndnmnés', et il ne pouVnit'pasj Vu avoir, puisque les condamnations n’étaient frtnddes
que sur dès actes sous seing-privc; de 1A , il résidte que les biens
clé Jean 'Garcelon n’étaient hypothéqués qu’au douzième de la
detlç entière , et par une dernière conséquence, que les appelans
rie possèdent que dés immeubles provenus de Jeîirt Garcellon ,
ils ne seraient tenus hypothéchirement que du douzième d e là
créhnce, pour lequel il y nvaif eu condamnation contre l u i , par
I.¥ sénU'iiéé de 1721, et quô la condamnation hypothécaire pro*
noiicée pour le tout ,r serait déntlée de tout fondement, quand
]aJércanéé subsistera il 'encore.1
Mais ce n’est pas tout : ■n-ou.*; ’avons prouvé que la prescription
î)vîiit éteint la créance èhtièré, long-tems' avant lé jugement de
( 1 ) P o u r h i c » e n t e n d r e c c ' f n ^ e m e n t do n t l e d i s p o s i t if est 1111 p eu c o n f u s ,
il f.iui s;* r a p p r o c h e r d e l ’ e x p l o i t d e d e m a n d e s ur leiji/el il fui r e n d u , et a u q u e l
î l ‘-e r^fêi t v
'u ■
■
■
■
;
!
S a 1e r s ,
�*5
'(
)
Salers. de l’année 1787 , dont est a p p e l, si les codébiteurs qui
11e sont point appelons , ont jugé à propos de renoncer ù la pres
cription en ce qui les concerne , ils n’ont pas eu le droit d ’y
renoncer au préjudice des appelans ; et ceux-ci ont incontesta
blement droit d’invoquer cette exception tutélaire, que la loi
leur oiïie pour se dispenser de payer la dette cCautrui.
R É S U M É .
\
Nous croyons avoir porté, jusqu’à la démonstration, la preuve
des assertions annoncées en commençant, savoir:
1.° Que l ’a p p e l, interjeté par les enfans V id a l, ou à leur notn,
du jugement rendu au bailliage de Salers en l’année 1787 , est
recevable, quoiqu’il n’ait pas'été intérjeté daiis les dix ans de la
signification , parce qu’il a cté interjeté dans les dix ans de la
majorité des appelans, et que toute prescription dort pendant la
minorité; notamment la prescription du délai d’appeler, aux
termes de l’art. 16 , titre 27 de l’ordonnance de 1667 ;
2.° Que cet appel est fondé, parce que la créance de
liv.
3,436
eu capital, et de plus de 80 ans d’intérêts, adjugée par la sen
tence attaquée, était illégitime dans l’origine , et doublement
prescrite lorsqu’elle fut adjugée ;
Que la prescription n’avait été interrompue par aucun acte
judiciaire utile, depuis 1721 jusqu’en 1787, et 11’avait été sus
pendue , par des minorités que pendant sept ans; •
.° Enfin que si les débiteurs de la plus grande portion de
3
cette cré.mce , ont jugé à propos de renoncer au bénéfice de la
prescription et de l’appel, les appelans ne peuvent pas souffrir
de leur résignation ou de leur collusion , et supporter , sauf leur
recours, la charge de la dette enliè’re, par l’ell'et d’une solidarité
hypothécaire, qui n’a jamais existé que pour une faible partie
de la dette, et qui est éteinte, pour le tout, par la même pres
cription qui les a libérés de leur contingent personnel.
D
�(26)
E n cet état, les appelans doivent attendre avec sécurité l ’évé
nement de leur a p p e l, qui ne peut que leur être favorable.
D
élibéré
à
3
C lermont-Ferrand , le 18 nivôse an 1 .
BERGI ER,
BEILLE-BERGIER.
L E C O N S E IL S O U S S I G N É , qui a vu la présente consulta
tion, est du même avis, et par les mêmes raisons.
D é lib é r é
à R io m , le 20 nivôse an 1 3.
ANDRAUD.
O
B S E R
V A
T I O
N
S .
L
A Cour pourra se convaincre par l’examen des titres origi
naux de la créance, qu’une vente de fromage portée par la police
du 8 avril 17 19 , a eu pour prix l es deux b i l l e t s a n t é r i e u r s dont
il n’est fait aucune réserve, et q u i, à 16 fr. de différence près ,
font la même somme que le prix de la vente; que Guillaume
Redonchat fit au moins double emploi de 1664 livres lors de sa
demande eu 1720.
M.e V A Z E I L L E , avoué.
A "
à.
^
A ,
/t a t r J .
^VaV 6
À
R I O M , D E L ’I M P R I M E R I E D U P A L A I S , C H E Z J . C . S A L L E S .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Vidal, Antoine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Beille-Bergier
Andraud
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
créances
tutelle
saisie
généalogie
prescription
droit intermédiaire
Bailliage de Salers
Description
An account of the resource
Titre complet : Exposé des faits, en suite desquels est la consultation de messieurs Bergier, Beille-Bergier et Andraud, Jurisconsultes ; pour Sieur Antoine Vidal, expert-géomètre et notaire public, en qualité de légitime administrateur de ses enfans mineurs, et Catherine Vidal, sa fille majeure, habitans du lieu de Mezenasserre, commune de Saint-Christophe, appelans et demandeurs en opposition ; Contre le sieur François Redonchat, propriétaire ; Jean Salvy, notaire public, et Marie-Anne Redonchat, son épouse, intimés et défendeur en opposition.
Annotation manuscrite: « 17 prairial an 13, 1ére section. Attendu que depuis la signification du jugement du 1er juin 1787 il ne s'est pas écoulé sur la tête des enfants Vidal dix ans utiles de majorité. Reçoit l'appel sur le fond. »
Table Godemel : Appel : 6. l’appel d’une sentence rendue en 1787 est recevable, après les dix ans de la signification, s’il ne s’est pas écoulé dix ans depuis la majorité.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 13
Circa 1709-Circa An 13
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1503
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Bonnet-de-Salers (15174)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53243/BCU_Factums_G1503.jpg
Bailliage de Salers
Créances
droit intermédiaire
généalogie
prescription
saisie
Successions
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53244/BCU_Factums_G1504.pdf
692163da95883c00c4c553bae0505470
PDF Text
Text
3 ,/ a a M
œeye&Z* H
MÉMOIRE
TRIBUNAI]
d
’
.
S É A N T A R IO M ]
POUR
F
a p p e i
et L é g e r T O U R R E S , propriétaires, habitans
de la commune de St. Sandoux; C L A U D E T O U R R E S ,
habitant du lieu d’E l i a t , commune de Ludès; autre
C l a u d e et M a r i e T O U R R E S , habitans de la com_m une de Plauzat; appelans d’un jugement rendu au
tribunal d’arrondissement de C lerm ont, le 22 floréal
r a n ç o is
an 1 1 :
CONTRE
M i c h e l G A U T H I E R , o fficier de sa n t é , habitant
à St. S a n d o u x ; A n t o i n e G A U T H I E R , cultiva
te u r, habitant du même lieu autre A n t o i n e G A U
T H I E R , C O T H O N et A n n e G A U T H I E R son .. >
épou se, P i e r r e M O R E L et M a r g u e r i t e G A U T H I E R , J e a n J U L I A R D et A n n e G A U T H I E R
sa f em m e, A n t o i n e R I V E , R O D I E R et M a r i e
�G A U T H I E R sa fe m m e , F r a n ç o i s B E S S 01S et
M a r i e G A U T H I E R safem m e j tous intimés :
EN
P R É S E N C E
,
G A U T H I E R père, dit L a b o r i e u x
cultivateur, habitant de la commune de St. Sandoux ,
aussi appelant du même jugement.
D ’A n t o i n e
Q U E S T I O N S .
i *. Un prêtre déporté étoit-ilfrappé de mort civile ?
2". Sa succession est-elle réputée ouverte à compter de la mort
civile, ou seulement de la mort naturelle?
5*. Les frères du défunt, qui ont reconnu leur père héritier des
acquêts de sonfils , et ont traité avec lui dans cette qualité , sontils recevables h lui contester aujourd’hui cette même qualité?
4*. Ont - ils pu actionner en désistement des tiers qui avoient
traité avec le père, dans cette confiance?
5*. Les immeubles cédés à Pierre Tourres étoient-ils propres
ou acquêts dans la personne du défunt ?
A
a ¿té marié deux
fois ; il a eu huit enfans de son premier mariage , et de ce
nombre étoit Didier Gauthier, prêtre , vicaire et communaliste de la paroisse de St. Sandoux.
L e 8 novembre 1788 , Anne L ab o rieu x, tante de D idicr Gauthier p rê tre , lui fit une donation de plusieurs
immeubles, avec réserve d'usufruit.
La révolution arrive j Gauthier, prêtre, est d abord conn t o in e
G
a u t h ie r
-L a b o r ie u x
�77
( 3 )
du.it dans la maison de réclusion , et ensuite transféré à
Bordeaux, ou il avoit été embarqué sur les vaisseaux des
tinés au transport des prêtres déportés. C’est en 1793
qu’il fut transféré à Bordeaux; il y est décédé le 10 ni
vôse an 3 , sur les vaisseaux de la république.
D u moment de sa réclusion, Gauthier, prêtre, avoit
été considéré comme mort civilement; il fut fait inven
taire de son mobilier les 20 brum aire, 4 et 5 frimaire
an 2 ; tous ses meubles furent vendus par le district, et
le prix versé dans la caisse du receveur de l'enregistre
m ent, suivant sa quittance du 7 prairial an 2.
Ses immeubles furent affermés, le 8 germinal an 3 , par
l’administration du district : de sorte qu’il n’y avoit aucun
doute sur la déportation comme sur la mort civile en
courue par Didier G authier, prêtre.
Antoine Gauthier père étoit donc appelé, du moment
de la déportation, à succéder à son fils, du moins pour les
meubles et acquêts, en vertu de l’article 3 du titre 1 2
de la Coutume d’Auvergne. Les frères du défunt recon
nurent les droits et la qualité du père. On voit par leur
réponse à un procès verbal du bureau de p a ix , du 5 flo
réal an 4 , que le p è r e , comme successeur des acquêts
de son fils, demandoit son m obilier, et que les enfans
répondoient qu’après la déportation de Jeur frère ce mo
bilier avoit été vendu par le district, et qu’ils n’en avoient
profité directement ni indirectement.
Par un acte authentique, du 2 1 fructidor an 5 , A n
toine Gauthier traite avec M ichel, un de ses fils ; il y prend
la qualité d'héritier des acquêts defeu D id ier G authier,
2
*
�(. 4 )
.son fils , et se départ d’un immeuble qui faisoit partie de
-cette succession, moyennant la somme de 100 francs. .
Par autre acte du 17 frimaire an 6 , Antoine Gauthier,
•toujours en qualité d’héritier quant aux acquêts de son
fils prêtre,, fait échange d’une rente foncière de i 5 francs,
qui avoit appartenu au défunt, avec l’un de ses fils, et
prend en retour la propriété d’une voûte, en forme de
cuisine, situee près de sa maison.
On voit par un procès verbal, fait au bureau de paix
•le 1 1 frimaire an 7 , qu’Antoine Gauthier-Laborieux est
assigné, en qualité c£héritier des acquêts de son Jils
pour le payement d’une somme de 17 4 francs que ce
dernier devoit au cit. Ligier-Rochette.
- Antoine Gauthier, en mariant Anne Gauthier, l'une
de ses filles, avec Jean Ju liard , lui avoit promis la
douzième portion des successions qui lui écherroient.
Anne Gauthier , femme Ju liard , l’a fait assigner pour
obtenir ce douzième dans les meubles et acquêts de son
Jils , et en inain-levée d’une saisie-arrêt que son père
avoit fait faire entre les mains de Mazoire , notaire,
comme se prétendant créancier de sa fille ; l’exploit est
du 4 frimaire an 9.
P ar un traité du 2 1 nivôse an 8 , Antoine Gauthier
père cède ï\ autre Antoine Gauthicr-Gothon, son gendre,
et à Anne G au thier, sa fille, la propriété d’un contrat de
rente foncière de 3 francs 5o centimes, à lui due comme
héritier des acquêts de je u D idier G authier , sou fils,
qui avoit acquis cette rente du cit. Cohade.
L e 14 fructidor an 9 , Antoine Gauthier, héritier des
�( 5 )
acquêts de son fils, donne à titre de ferm e, à Antoine
V o l p è t e , une terre et trois pièces de vigne désignées au
b a il, et qui avoient été acquises par défunt Didier Gau
thier , du cit. Bonfils.
Antoine Gauthier a payé à l’enregistrement les dro.ts
d’ouverture de la succession de son fils, ainsi qu’il résulte
de la quittance donnée par le receveur le 2 1 fructidor
an 6.
’ Par jugement rendu au tribunal civil du P uy-de-D ôm e, 1
le 14 frimaire an y , Antoine Gauthier , héritier des
acquêts de son fils, a été condamné à payer à Anne
Laborieux , tante du défunt, i° . une somme de n 8 5 fr.
en assignats; 20. 265 fr. en num éraire, pour argent prêté
à défunt Didier Gauthier pendant sa réclusion à Clermont
et sa déportation
Bordeaux; 3 0. celle de 12 0 francs,
à laquelle Anne Laborieux s’étoit restreinte pour la nour
riture qu’elle avoit fournie pendaut cinq mois A défunt
Gauthier, à l’époque de sa réclusion à Clermont : enfin ,
le même jugement condamne le père à la remise d’une
couverture en laine, de deux draps d é lit , trois serviettes,
trois chemises, et huit livres d’ huile,qu'Anne Laborieux
avoit fournis à défunt Didier Gauthier, lors de son départ
pour Bordeaux,
'
Antoine Gauthier - Laborieux , étant en possession de
tous les acquêts de son fils , passa un contrat d’échange
avec Pierre T o u rre s, représenté par les appelans; cet
acte est du 20 germinal an 4.
Antoine Gauthier, héritier des meubles et acqu êts de
son fils aîné, délaisse et garantit à Pierre Tourres les héritages, rentes, meubles et autres choses, objet de la dona-
3
�( 6 )
' tion faite à défunt Didier Gauthier par Anne Laborieux,
sa tante, ?e 8 novembre 1 7 8 8 , sous la condition que
Pierre Tourres remplira les charges de cette donation ,
et qu’il ne pourra en jouir qu’au décès de la donatrice quis’en est réservé l’usufruit.
Pierre Tourres lui délaisse et garantit en contre-échange,
i ° . entour vingt quartonnées de terrein, dont partie en
verger et ensaulée, et plusieurs autres champs désignés et
confinés dans cet acte; 20. il lui délaisse la jouissance, pour
sa vie, d’ un pré et saulée. et une pension viagère de
quarante pots de vin et cinq setiers conseigle ; il lui
fournit encore quittance d’ une somme de 9 5 francs qui
lui étoit due par défunt Didier Gauthier; au moyen de
quoi Pierre Tourres devient propriétaire des immeubles
compris en la donation de 1788.
Lorsque le cit. Tourres voulut se mettre en possession
de ces objets, après le décès d’Anne Laborieux donatrice ,
les enfans Gauthier s y opposèrent; et on voit , par le
procès verbal du 1 3 frimaire an 1 0 , que les enfans Gau
thier rcconnoissoient que leur père étoit héritier des
acquêts de son fils , puisque le motif de leur opposition
fut uniquement fondé sur ce qu’ ils prétendoient que
l'objet de la donation étoit un propre au défunt, d’après
l’article 8 du titre 12 de la Coutume, que dès-lors leur
père , ni son acquéreur, n’avoient rien à y prétendre.
Sur cette opposition, et le 16 du même mois de fri
maire an 1 0 , Pierre Tourres prit le parti de citer Pierre
Gauthier au bureau de paix, pour prendre son fait et
(ou^e. Il cita pareillement les enfans Gauthier pour voir
ordonner l’cxécution de son contrat d’échange, avec res-
�< l\
( 7 )
. . . .
titution'de jouissances, payement des dégradations, et
dommages - intérêts.
Mais, au bureau de paix , les enfans Gauthier changè
rent de langage. Lors de leur opposition, ils ne réclamoient
les objets compris en la donation que comme étant un
propre à défunt Didier Gauthier ; mais, lors du procès
verbal fait au bureau de paix le 21 frimaire, ils déclarèrent
qu’ils étoient seuls héritiers de leur défunt frère ,* d’après
la loi du 17 nivôse an 2 , et que leur p è r e , ou son acqué
r e u r , étoit sans qualité. L e père, à son tour, soutint qu’il
étoit seul héritier des meubles et acquêts de son fils; il
prit le fait et cause du cit. Pierre Tourres. Ce dernier est
décédé dans le cours de l’instance j ses enfans ont repris à
son lieu et place.
Bientôt il s’éleva de vives discussions au tribunal de
Clermont, sur la demande du cit. Tourres. Cette qua
lité d'héritier des acquêts, si souvent reconnue par les en
fans Gauthier, fut contestée avec acharnement.
• Les héritiers Tourres soutinrent au contraire que le
contrat d’échange devoit avoir son entière exécution.
Iæs héritages qui en faisoient l’objet avoient été donnés
à l’abbé G au th ier, par Anne Laborieux sa tante ; ils
avoient formé pour lui des acquêts; et sa succession , en
cette partie, lors de sa mort civile, avoit été dévolue
de droit à Antoine Gauthier p è re , en vertu de l’art. 3
du titre 12 de la Coutume d’Auvergne.
L ’époque de la mort civile de D idier Gauthier ne
pouvoit être douteuse. Vicaire et communaliste à SaintSandoux , il étoit tenu de prêter les sermens prescrits aux
fonctionnaires public6json refus avoit entraîné sa dépor-
4
�toi
,v
c 8 )
tntion , 'conformément à la loi du 26 août 1 7 9 2 , et il
avoit été conduit à Bordeaux pour être déporté.
1
L e décret du 17 septembre 17 9 3 assiiniloit en tous points
les prêtres déportés aux émigrés. La loi du 22 ventosean 3
étoit également rigoureuse, et faisoit remonter la mort
civile des prêtres à celle du 17 septembre 1793.
Les héritiers Tou rres, ainsi qu’Antoine Gauthier père,
se trouvoient dans cette position heureuse, qu’ ils pouvoient invoquer avec faveur la disposition de ces lois ré
volutionnaires , qu’ ort rappelle souvent -avec regret. Ils
opposoient également avec succès les fins de non-recevoir
invincibles résultantes de tous les actes authentiques et
judiciaires où les enfans Gauthier àvoient reconnu si disertement et si expressément les droits et la qualité de
leur père.
La cause , portée à l’audience du tribunal d’arrondisse
ment de C lerm on t, fut plaidée avec solennité pendant
deux audiences des 24 et 28 ventôse an 1 1 . Il fut or
donné un délibéré ; mais les juges, se trouvant au nombre
de quatre, furent divisés, et il s’ensuivit partage dans
les opinions.
L e tribunal, en déclarant le partage, ordonna que la
cause scroit plaidée de nouveau ù l’audience du 21 floréal
nn i i , en présence des mêmes juges et du cit. Bartsup
pléant, qui fut appelé pour lever le partage. Mais le 21
floréal il intervint un jugement contradictoire, qui dé
bouta les héritiers Tourres et Gauthier père de leur de
mande envers les enfans Gauthier, et les condamna aux
dépens.
Faisant droit sur la demande en recours et garantie, for-
�« 2>
niée parles héritiers T o u rres, contre Antoine Gauthier,
ce dernier est condamné à les garantir et indemniser de
l’inexécution du contrat d’échange du 20 germinal an 4i
en conséquence , il est tenu de restituer aux héritiers
Tourres les objets donnés en contre-échange : il est or
donné qu’il sera procédé à l’estimation des dommagesintérêts dûs aux héritiers T o u rre s, ainsi que des restitu
tions de jouissances faites par Antoine Gauthier; il est
condamné à leur payer le montant de toutes les estima
tions, ensemble les intérêts depuis la demande.
■ E t pour faire apprécier la solvabilité d’Antoine Gau
thier pour ce recours, le tribunal, à raison du grand âge
d’Antoine Gauthier, parce qu’il est sans ressourcés, con
damne les cnfans Gauthier à lui payer une pension ali
mentaire de 800 francs, qui est déclarée insaisissable, et
ordonne que sur la pension alimentaire que le père demandoit à ses enfans, les parties contesteront plus am
plement.
<
Ce jugement est fondé sur plusieurs motifs ; on ne
rappellera que ceux qui sont particuliers aux héritiers
Tourres.
ü n exp.ose , i ° . qu’il n’est pas prouvé que Didier
Gauthier fût fonctionnaire public en 17 9 0 , ni même sa
larié par la nation.
20. Que rien n’ établit que Didier Gauthier ait été dé
porté par aucun jugement des tribunaux ou arrêté d’ad
ministration ; qu’ il n’est pas prouvé qu’ il se soit déporté
Volontairement avec passe-port.
*
On ajoute, qu’ il est constaté par un arrêté du dircc-
5
�toire du département du Puy-de-Dôme , qui ordonne la
vente du mobilier de Gauthier p rê tre , qu’il est décédé
le 10 nivôse an 3 à Bordeaux , et que Bordeaux fait partie
du territoire français ; tandis que d’après les lo is , notam
ment celle du 22 ventôse an 2 , la confiscation des biens
des déportés de cette classe n’avoit lieu qu’à compter de
la sortie du territoire français.
On dit encore que rien n’établit l’époque à laquelle
Gauthier prêtre s’étoit rendu à Bordeaux ; si c’est posté
rieurement ou antérieurement à la loi du 17 nivôse an 2 ;
qu’il est même notoire que dans le département du Puyde - Dôme les déportations de fait n’ont eu lieu qu’en
avril et mai 1794 On en tire la conséquence, que Didier Gauthier n’ayant
pas encouru la mort civile par la déportation , et sa mort
naturelle n’étant arrivée que le 10 nivôse an 3 , sa
Buccession s'est ouverte sous l’empire de la loi du 17 nivôse
an 2 , qui la défère à ses frères et sœurs, à l’exclusion
de son père.
Parla même raison, Gauthier père n’a pu vendre ni
échanger les objets compris dans la succession de son fils,
puisque ces objets ne lui appartenoient pas.
Mais l’échangiste, comme le vendeur, est tenu de garantir
l’arquéreur de l’éviction de la chose vendue ou échangée.
Tels sont les motifs qui ont déterminé le jugement;
et on remarque que les premiers juges n’ont pas même
abordé la question résultante des fins do non-recevoir,
et la reconnoissance par les en fans de la qualité du père.
• Les héritiers Tourres et Antoine Gauthier ont inter-
�( 11 )
jeté appel de ce jugem ent, en ce tribunal: il s’agit d exa
miner le mérite des moyens des appelans, et de discuter
les objections proposées par les intimés.
: L ’ordre de la matière conduirait naturellement à dis
cuter, avant tout, la fin de non-recevoir qui s’élève contre
les intimés. Mais on croit devoir établir d’abord que
Didier Gauthier prêtre étoit mort civilement, antérieure
ment à la loi du 17 nivôse an 2. Cette première propo
sition justifie le droit et la qualité du père pour succéder
aux acquêts de son fils.
Les frères du défunt ayant reconnu la qualité du père
par des actes multipliés, leveroient tous les doutes sur la
mort civile, s’il pouvoit en exister.
On discutera, en troisième ordre, les objections pro
posées p a r les intimés, sur la question de savoir si les
biens donnés au défunt, par Anne Laborieux sa tante,
doivent être considérés comme acquêts. C’est en effet à
ces trois questions que sc réduit toute la cause.
P R E M I È R E
PROPOSITION.
Didier Gauthier prêtre étoit mort civilement avant
la publication de la loi du 17 nivôse an 2.
: Les lois promulguées dans ces temps de persécutions
et de troubles , étoient infiniment rigoureuses. On ne
fera pas la nomenclature de tous les décrets qui ont été
lancés contre cette classe de citoyens*, ou ne les cite
jamais qu’avec dégoût : on doit donc se contenter de rap
porter les lois principales. Celles du 26 décembre 1 7 9 0 et
1 7 avril 1 7 9 1 , avoient assujéti tous les prêtres, lonclion6
�tv
( 12 )
naires publics ou pensionnés de la nation } au serment
de la Constitution civile du clergé.
L ’article I er. de la loi du 26 août 1 7 9 2 , ordonne à
tous les ecclésiastiques q u i , assujétis à ce serment, ne
l’auroicnt pas prêté, ou qui, après l’avoir prêté, l’auroient
rétracté, de sortir, sous huitaine, hors des limites du dé
partement de leur résidence, et dans quinzaine, hors du
territoire français.
Passé ce délai, les ecclésiastiques non-sermentés devoient
être déportés à la Guiane française, ainsi qu’il résulte de
l’article 3 de la même loi.
L ’article 6 condamne aux mêmes peines tous autres
ecclésiastiques non-sermentés, quoique n’étant point assu
jétis au serment, lorsque par quelques actes extérieurs
ils auront occasioné des troubles , ou lorsque leur éloi
gnement sera demandé par six citoyens domiciliés dans
le même département.
Il n’est personne qui ne se rappelle combien cette dis
position a été funeste pour les ecclésiastiques réfractaires,
non-fonctionnaires publics. Il n’en est pas un seul dans
ce département qui ait échappé à la proscription ; les
listes en furent faites avec la plus cruelle exactitude, et
signées par six citoyens.
L e décret du 17'septembre 1 7 9 3 , par une disposition
unique, déclare applicables, en tous points , aux prêtres
déportés, les dispositions des lois contre les émigrés ; et
on sait que la loi du 28 mars 17 9 3 1 pin* sa première dispo
sition, a déclaré que les émigrésétoient mortscivilement.
lia loi du 22 ventôse an 2 a complété ce code, si on
peut appeler ainsi le recueil de ces lois révolutionnaires.
�s jr
( 13 )
L ’article i cr. de cette loi ne fait aucune distinction. Les
biens de tous les ecclésiastiques, fonctionnaires publics
ou non , salariés ou non , qui ont été déportés ou reclus,
sont confisqués et acquis à la république. L ’article 4 de
la même loi fait remonter l’effet de la confiscation , à
compter du décret du 1 7 septembre 1793»
* En s’arrêtant sur ces dispositions, comment pourroit-il
y avoir du doute sur la mort civile de Didier Gauthier?
Il a été reclus en octobre 17 9 3 , et il fut fait inven
taire de son mobilier par le commissaire du district, au
mois de brumaire an 2 , qui répond précisément au mois
d’octobre 1 7 9 3 , c’est-à-dire, au premier jour de la ré
clusion de Didier Gauthier. Ses meubles ont été vendus
par l’administration , et le prix vei’sé dans la caisse du re
ceveur de l’e n r e g is tr e m e n t , qui en a donné quittance le
7 prairial an 2 -, tous ses immeubles ont été séquestrés
et affermés par le district. Gomment l’administration
auroit-elle pu prendre ces mesures, si l’infortuné Gau1 thier n’avoit pas été considéré comme compris dans les
dispositions des lois des 1 7 septembre 17 9 3 et 22 ventôse
an 2 ? L a vente de son mobilier, le séquestre et la ferme
de ses biens immeubles sont postérieurs à cette loi ; toutes
ces mesures ont été prises en exécution d’icelles : Didier
Gauthier étoit donc considéré comme mort civilement
depuis la loi du 17 septembre 1 7 9 3 ; dès-lors sa succes
sion a été ouverte à compter de sa mort civile.
Mais comment Didier Gauthier d’ailleurs auroit-il pu
échappera la déportation? il étoit vicaire et communaassujéti au serment prescrit par les lois des 26 décembre
�M
V '
( 14 )
1790 et 17 avril 17 9 1 : comme vicaire, il étoit fonction
naire public; comme communaliste, il étoit bénéficier, et
par conséquent avoit droit à une pension de l’état : enfin,
il a été reclus et déporté. D e sorte que s’il est fonction
naire public ou pensionnaire de l’état, il se trouve frappé
par la loi du 26 août 1 7 9 2 , article I er. ; s’ il n'éloit pas
fonctionnaire public ou pensionnaire de l’état, il seroit
dans l’espèce de l’article 6 de la même loi.
* Les intimés , en réponse à ces m oyens, opposent,
i ° . que les héritiers Tourres n’établissent pas que Didier
Gauthier fût vicaire à St. Sandoux. Mais les héritiers
Tourresont-ilsbesoin derecourir àcettepreuve? ilsseroient
d'abord dans l’impossibilité de rapporter les lettres de
vicaire, qui ne portent pas minute, et dont il n’existe pas
de traces. La notoriété seule les a instruits de cette circons
tance , et cette notoriété est suffisante. On ne conteste pas
que le défunt fût communaliste, que dès-lors il avoit droit
h une pension ; mais on prétend que les héritiers Tourres
ne prouvent pas encore que Didier Gauthier fût salarié
par la nation. Ces objections ne sont que des prétextes
futiles. II seroit bien difficile d’établir qu’un prêtre a été
salarié par la nation , si on exigeoit le rapport des quit
tances. Ne sait - on pas que les réfractnires n’ont jamais
rien reçu sur la pension qui leur étoit accordée?
On dit encore qu'on ne rapporte pas d’arrêté des corps
administratifs, qui ait prononcé nominativement la dépor
tation de Didier Gauthier. Il est vrai qu’on n fait des
recherches vaines sur ce point; m ais, parce qu’on nuroit
perdu ou soupirait un arrêté de ce genre, que la plupart
des administrations ont enlevés de leurs cartons, n’existe-
�t-il pas des moyens pour y suppléér? L ’inventaire, et la
vente des meubles faite par le district ; la quittance du
receveur, du prix provenu de la vente de ces meubles ;
le séquestre et la ferme de ses biens immeubles ; la réclu
sion de l’individu, sa déportation sur les vaisseaiix de la
république ; toutes ces mesures de rigueur ne peuvent
avoir été faites qu’en vertu d’un arrêté, et en prouvent
l’existence,quand on seroit dans l’impossibilité de rap
porter l’arrêté nominatif.
> Qu'on ne dise pas que Didier Gauthier n’a pas quitté
le territoire français, qu’ainsi il ne doit pas être consi
déré comme déporté : ce n’est là qu’une équivoque. Il
subissoit au contraire une déportation plus rigoureuse,
puisqu’il étoit embarqué sur les vaisseaux de la répu
blique , ce qui n’avoit lieu qu’en vertu d’une condamna
tion; et d’ailleurs, la loi ne fait aucune distinction entre
les déportés et les reclus. O r , 011 ne pourroit pas contester
que Didier étoit au moins reclus, puisque son père, en
qualité d’héritier des acquêts de son fils, a été condamné
par jugement à payer le montant des fournitures qui
avoient été faites à son fils pendant sa réclusion.
‘ L a mort civile de Didier Gauthier est donc une cer
titude. Elle remonte au 17 septembre 179 3. C’est de cette
époque, et d’après les lois qui étoient alors en vigueur,
que sa succession a été ouverte. Antoine Gauthier, père,
0 succédé aux meubles et acquêts de son iils , d'après
1article 3 du titre 1 2 de la Coutume d’A u v e rg n e , qui
régissoit la personne et les biens, et qui n’a voit alors
été abrogée par aucune loi.
Ce père octogénaire peut donc invoquer la l o i , 1équité
�(
1
6
}
et la faveur. Cette foible portion des Liens de son fils étoit
la seule consolation qu’ il pût espérer dans son infortune.
L a succession des ascendans, établie par le droit rom ain,
étoit singulièrement restreinte et modifiée par la Coutume
d'Auvergne. L ’article 3 du titre 12 a tempéré la rigueur
de l'ancienne Coutume, qui excluoit les ascendans de toutes
successions, ce qui répugnoit à tous les principes du droit
naturel. La loi du 17 nivôse elle-même appeloit les ascen
dans à succéder, lorsque le défunt n’avoit laissé ni frère,
ni sœur ; et le Code civil, qui ramène tout aux véritables
principes, fait aujourd’ hui succéder les ascendans concur"remment avec les frères et sœurs du défunt.
Il est donc vrai que les lois rigoureuses peuvent être
quelquefois utiles, et qu’il peut par fois résulter quelque
bien d’un grand mal, puisqu’un père trouve l’occasion
de les invoquer pour obtenir une foible portion des
biens de son enfant. Si on doit être ingénieux dans pluisieurs circonstances pour en écarter l’application; si on doit
rechercher strictement l’observation des formes; ce n’est
que quand ces mêmes lois tendroient à dépouiller une
famille , ou l’individu qui en a été frappé, des biens qu’il
possédoit : mais lorsqu’il s’agit de porter des secours à un
père octogénaire et dans le besoin, on doit appliquer ces
mêmes lois sans répugnance , puisqu’enfin elles ont un
heureux effet.
Antoine Gauthier, garant formel de toutes les pourr
suites qu’éprouvent les héritiers Tourres , ne doit - il pas
être aujourd'hui à l’abri de toutes recherches ? Il a disposé
d'une portion d’immeubles, qui lui étoit légitimement
acquise; et quand on voudroit, contre l’évidence, contre
�9
( i7 )
toute raison, supposer l’omission de quelque vaine for
malité, équivoquer sur des mots, les cnfans Gauthier,
intimés, seroient sans droit comme sans action, comme
on va le démontrer.
S E C O N D E
P R O P O S I T I O N .
Les intimés ont reconnu le droit et la qualité du père^
et sont non-recevables dans leur demande en désistement.
L e jugement dont est appel, dans ses motifs, ne s’est
pas occupé des fins de non - recevoir. On a mis de côté
tous les actes dont il avoit été justifié pour prouver que
les enfans Gauthier avoient reconnu que le père étoit
héritier des acquêts de son fils.
C’est en cette qualité q u e , le 5 floréal an 4 , il a demandé
à ses enfans la restitution du mobilier du défunt,qu’ils
avoient en leur p o u vo ir, parce q u e , sans doute, ils se
l’étoient fait adjuger lors de la vente publique qui eut
lieu. Ils opposent en réponse cette'vente publique, à leur
p è r e , et soutiennent qu’ils n’ont profité de ce mobilier
ni directement ni indirectement. Ils reconnoissoient donc
par là que le père auroit eu droit à ce mobilier, s’il eftt
existé en nature, ou s’ils en avoient profité.
L e 21 fructidor an 5 , le père traite avec M ic h e l, un de
fies fils; e t , en sa qualité d’héritier des acquêts du défunt,
il se départ, au profit de Michel, d’un immeuble qui
faisoit partie de cette succession, moyennant la somme
de 100 francs.
I jt‘ 17 (rimaire nn 6 , il donne en échange h un autre
de ses fils un contrat de rente de i 5 francs, qui avoit
�( >8 )
appartenu au défunt, toujours en qualité d’héritier des
acquêts de Didier Gauthier, et reçoit en contre-échange
la propriété d'une cuisine voûtée, contiguë à sa maison.
E n fin , dans tous les actes qu’il a passés avec ses enfans, ou en leur présence avec des tiers, ils ont toujours
reconnu cette qualité.
Il
a subi des condamnations, comme tel, soit à la re
quête de Ligier - Rochette , soit â la requête d’Anne
Laborieux , et ses fils lui en ont laissé payer le montant,
n’ont pas imaginé de venir i\ son secours, ni de récla
mer contre le défaut de qualité.
Antoine Gauthier a donné, à titre de ferme, des héri
tages provenus des acquêts de son fils; et les autres enfans
ont laissé jouir paisiblement le ferm ier, qui a versé le
montant de la ferme dans les mains du père, sans récla
mation de la part des intimés. Il résulte, sans doute, de
ces actes multipliés , une fin de non-recevoir insurmon
table et invincible, qui arrête toutes réclamations de la
part des enfans. Ils ont reconnu que leur frère étoit mort
civilement : si c’est une e rreu r, ce seroit une erreur
de d ro it, contre laquelle on ne peut être relevé, et dèslors leur demande doit être écartée sans retour.
Vainement les intimés opposeroient-ils, comme ils l’ont
dit en cause principale, que l’acte d'échange passé avec
Pierre T o u r r e s , dont ils demandent la nullité, est anté
rieur aux actes qu’on présente comme des fins de nonrecei/oir. Que cet échange soit antérieur ou postérieur
aux actes émanés des enfans Gauthier, cette circonstance
est indiffère nie. Ils n’ont pas ignoré l’acte d’échange du
29 germinal an 4 ; ils ont vu leur père jouir constamment
�. ( 19 ^
des héritages qui lui avoient été donnés en contre-échange ;
ils lui ont vu recevoir la rente qui lui étoit donnée en
retour; ils ont gardé le silence pendant plus de six ans
sur ce traité, et ce n’est qu’après la mort d’Anne L a b o
rieux , qui s’étoit réservé l’usufruit des objets donnés à
son neveu, qu’ils ont imaginé d’attaquer l’échange de
nullité.
Mais ils ne peuvent espérer aucun succès, de cette récla
mation tardive et ambitieuse , qui tendroit à opérer la
ruine absolue de leur p è re , et à le dépouiller entière
ment de ce qu’il possède.
L a défense des intimés en cause principale dénote assez
qu’ils n’espéroient pas priver leur père des meubles et
acquêts du défunt; car ils ont principalement insisté sur
un moyen de droit qui pouvoit changer l’ état de la
question. Tout en accordant au père la qualité d’héritier
des meubles et acquêts, ils ont fait de grands efforts pour
soutenir que les biens donnés par Anne Laborieu x, à
défunt Didier Gauthier son neveu, étoient un propre dans
la personne du défunt, et par conséquent ne pouvoient
appartenir à l’héritier des acquêts. Cette discussion plus
sérieuse mérite un examen particulier.
T R O I S I È M E
PROPOSITION.
Les biens donnés par donation en tre-vifs, ¿\ défunt
D id ie r Gauthier, sont acquêts en sa personne.
L article 3 du titre 1 2 de la Coutume , accorde aux
ascendans un droit de successibilité, « quant aux meubles
�c 20 )
» et «’cquêts autrement faits et advenus aux descendans,
» que par hoirie et succession ab intestat. »
Ces derniers termes de la Coutume, succession ab
intestat , semblent lever toutes les difficultés. Ils ne peu
vent signifier autre chose, sinon que les ascendans sont
privés de tous les biens auxquels les enfans succèdent
comme héritiers du sang, mais qu’ils doivent recueillir
tous ceux qui adviennent aux descendans par donation
entre-vifs ou à cause de mort. L a Coutume , en défé
rant aux ascendans les meubles qui ne viennent pas de
succession ab intestat , ne leur a-t^elle pas conféré tous
les meubles provenus des successions conventionnelles?
c’est ce qui sort naturellement des expressions de l’article.
Si la loi n’eut pas entendu faire de limitation, elle se seroit
arrêté à ces mots, p ar hoirie ou succession , sans ajouter
ces derniers, ab intestat , qui alors seroient devenus
inutiles. Tout ce qu’on pourroit dire en c o m m e n ta n t et
expliquant le texte de la Coutume, seroit contraire aux
termes de l’article et à l’esprit de la loi.
Si le fils a succédé ab intestat , il ne transmet pas cette
portion de biens à ses ascendans ; s’il les a recueillis par
une donation ou un legs , ses ascendans lui succèdent.
Voilà la seule manière d’entendre et d’expliquer l'article.
Mais l'article 8 du même titre a fait naître de grandes
discussions. L e dernier commentateur lui-même ne peut
s'empêcher de remarquer qun la décision est obscure, le
style singulier , et la rédaction bizarre. En effet, en voici
Je texte littéral:
« E t à cette cause, pour ne frustrer les collatéraux
�y
(21 )
.».qui par. ci-devant succédoient aux Liens de l’estoc d’où
» étoient provenus les biens donnés à celui ou ceux qui
» les devront avoir ab intestat, ne se peuvent direac» quêts, et ne changeront la nature du côté dont ils sont
•» provenus , combien que par çi-devant entre les coutumiers y ,eut sur ce grande altercation. »
Comment expliquer cet article d’une manière satisfai
sante? L e dernier commentateur ne se flatte pas d’y avoir
xéussi. Il n’adopte pas même l’avis de Basmaison , qui
pense que la Coutume en ce point n’a eu pour objet que
•de limiter l’article 6 , qui donne aux parens paternels
les meubles et acquêts ; mais il est bien éloigné de çroirp
•que cette décision ait voulu restreindre les droits, suc■cessifs des ascendans, et il leur défère tous les biens donnés
à un enfant par les ascendans eux-mêmes , ou par d’au
tres parens, parce qu’il regarde ces biens comme des
acquêts, en vertu de l’article 3 ; et Basmaison entendoit bien la Coutume.
L e dernier commentateur, après avoir successivement
rapporté les opinions de ceux qui l’ont précédé, se trouve
fort embarrassé , et ne porte aucune décision. A u milieu
de cette obscurité., les idéejs les plus simples sont les meil
leures; il faut remonter au principe, pour fixer la nature
des biens, distinguer les donations faites en ligne directe
ou en ligne collatérale.
Pour celles faites en ligne directe, on peut soutenir
avec fondement qu’elles sont propres à la personne de
1 enfant, puisque les donations de ce genre ne tombent pas
dans la comnnijinuté. conjugale ; mais pour celles faites en
ligne collatérale, 011 ne peut les considérer que comme
�%
C 22 )
des acquêts, puisqu'elles font partie de la communauté,
lorsqu’elles sont faites pendant le mariage , à moins qu’il
n’y ait une stipulation contraire. L e dernier commentateur
convient de ce principe; il rappelle la disposition de
l'article 246 de la Coutume de P a ris, qui le dit expressé
ment, et plusieurs arrêts recueillis par Louet et Brodeau,
ainsi que par H enrys, qui tous ont jugé conformément.
M ais, quoique le dernier commentateur reconnoisse
que les donations faites en ligne collatérale sont de v é r i
tables acquêts dans la personne de celui qui en est
l’objet, voulant concilier le texte de l’article 8 avec le prin
cipe , il se demande à lui-même , si au moins on ne doit
pas considérer comme propre la portion qui seroit reve
nue ab intestat au donataire, s’il n’y avoit pas eu de do
nation ; et il incline à penser que cette portion doit être
retranchée des acquêts, et appartenir aux héritiers des
propres , au préjudice des ascendans.
Cette question secondaire seroit absolument oiseuse
dans l'espèce ; parce qu?il faudroit au m oins, pour ad
mettre cette espèce d’accommodement, que le donataire
eût pu succéder comme héritier ab intestat au donateur,
et on 11e peut succéder qu’autant que l’on survit au do
nateur; le dernier commentateur est obligé d’en convenir.
O r , Didier Gauthier a prédécédé Anne Laborieux sa
tante donatrice, par sa mort civile comme par sa mort
naturelle: de sorte qu’en mettant de côté cette distinc
tion , qui paroît plus subtile que solide; en partant de la
disposition de l’article3 , et du principe certain et reconnu ,
que tout ce qui est donné en ligne collatérale est réputé
acquêts , c;n doit conclure que tout ce qui fait partie do
�-<VJ
( 23 ) A .
la donation d’Anne Laborieux a dû appartenir à Antoine
Gauthier p ère , à titre de successibilité.
Il
n’y a point ici de succession ab intestat pour Gau
thier fils. Anne Laborieux étoit sa tante maternelle; elle
pouvoit avoir d’autres frères ou sœurs, et sa succession se
diviser à l’infini. N ’y eût —il que les enfans du premier
lit d’Antoine Gauthier, ils étoient au nombre de huit.
La portion ab intestat seroit donc infiniment modique
sous ce rapport. Mais Didier Gauthier a prédécédé sa
tante, et par conséquent ne peut, être compté parmi ceux
qui étoient habiles à lui succéder. Il n’y auroit donc
aucun retranchement à faire, même dans le système du
dernier commentateur, et tout est acquêts pour Didier
Gauthier.
- Après trois siècles de la rédaction de la Coutum e, les
praticiens n’ont pu s’accorder entr’eux sur le sens de
l ’article 8. Cette question dorénavant ne naîtra plus d’après
le nouvel ordre des successions ; mais il n’y a jamais eu
de difficulté sur l’article 3 , et lorsqu’il s’agit d’un droit de
successibilité pour un ascendant on doit plutôt l’étendre
que le restreindre.
Il
faut donc d ire , avec la Coutume, que tout ce que le
fils possède par acquisition ou par donation, en un mot
toute succession conventionnelle, est réputé acquêt en sa
personne, puisque la Coutume n’excepte que les succes
sions ab intestat - qu’ainsi Antoine Gauthier a dû recueillir
tout ce qui avoit été donné à son fils par Anne L a b o
rieux 5 que dès-lors il a valablement transmis aux héritiers
lo u rre s les immeubles qui donnent lieu à la contestation.
L e s prem iers juges n’ ont pas daigné jeter leurs regards
�(
2
4
}
sur cette difficulté; il n’en est fait aucune mention dans leurs
motifs : elle méritoit cependant leur attention aussi-bien
que la fin de non-recevoir qu’opposoient les appelans. Ils
se sont arrêtés à de vaines formalités, lorsqu’il s’agissoit,
de dépouiller des tiers qui avoient traité de bonne foi;
lorsqu’il s’agissoit de priver, un.père du droit de succéder
à son fils, pour une portion fort exigue, et dans un temps
où le C ode civil établit la succession des ascendans comme
un droit naturel et reconnu par les législateurs les plus
célèbres dont les décisions font encore la règle parmi
nous.
Les appelans se flattent d’avoir prouvé que Didier
Gauthier étoit mort civilement avant la loi du 17 nivôse
an 2. Ils n’ont fait que se réunir aux intimés eux-mêmes,
qui l’avoient reconnu de la manière la plus expresse et
la plus formelle, en accordant à leur père le droit de suc
céder à son fils, quant aux meubles et acquêts. Les appe
lans ont donc établi le mal-jugé du jugement dont est
ap p e l, et la nécessité de le réformer.
Par conseil ; P A G E S ( d eR iom ), ancien avocat,
B R U N , avoué.
À R I O M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d ’appel.— A n 12.
�eu*, ro
V* /“«'Âwv fp ' ^ ^ A~ítix,Lr; íj/^
'■A * * . ' ^ L Z Z ' t ? ^ ^
e*jJÍÍi^fc<,u^ ^ ' íí+jxiKfc*^
/■* <i*4
/ - « * “
^ £*Í Ä« fli «-a-> -~.4 /ÍÚ-5
p j-C iU ù *.
r
'
/*
*
tf
ü |i ^ / ï * '«
“ ■ 'f t
:u / u a u ju
c u u » .^ ^ .
f><)*
/^«-^-/'WLfcîic
"\
r
r
° * (***Ak c»
^ ,
°*^"
. n, v
*
/ 6 “ ' ’ , M *»■ /*• «*A4/l*— C A u t / o . t *
'
i, •
-if
r
.
r
#
^
-
/ f t V in ^ A f f c lü n t
‘
7
v f«uJk./% \ l i Li v»
v«~fca
’ ■-u (<*1 ví».^t**í.
n i —/ v ^ .
|> r* / / ilo" A ‘
,
ù
,
_
- /7*
U . cC l
[ ' À A ~VU l i t i c i . t u U J
* i^ r aiwjj'i» 'bfc«»
a. A'V.
*(/* ^ u'cJ^^IUf tiu¿Ck.^ *AA
<«4ÍcyMA ^a!Í( b*J[—
lí^
j
I«
^ t ^ o u i - yw c^- /a
ü fi
a i u 7 ^ 1 ^
- •■M.*CUteXl«uAa. &
COw*^U*T
^UA. ^uítt* CkI"
^A "i <»«4CWVI
VMMréóu
ei- ¿i y^uuy ■wtM*
éLxa^s,—„ .
J ^ ’cGf ^ a«» .¿yfcir A¿tT
f»'~
i~U fii-Huv^ C « , ^
oJit¿>odt7
&ir ■ *ff¿ «L /»cfiOY^.
/«.
tw. <> V0kU^
UOM4 ^ 4. CWiOfU ^OU-U^CAjt ^CA.^U*^4>
^ U « / y u ^ U l^ « k t u M
7 >t
/aÁtuu
tu v m A f « j| u j4
^ u J U k J t
¿ IO
m a í
^
/ / íO Í:' / ( " i c
C ilk
lu í
¿ u
/ (o
u
I
CiMy V/'** .
^
.» >
co<y¿>
a
^
u
m
^ U
i ^ O
u Y
^ f
om ÚJ«mMm.
^^ ^ <^30l/fciCO14^ Uc/uAtU\A Ov\ U^JUI*
—
'
/^ ^ ^ *J°, ^.OUtliÍLcu^^Ju J\UjJjUL ^ Vm««AA
0\ lyt*. c A j/ h /*2V. c^»*Jr«a / ^ < M
^
^
^ c^
‘» ^ •^ - f«-/tL:— r > 1«— . ,»y_.
c*ä/««
^ V O^v^i, ^ --fjL¿« ^ /«LjfcÚ. ^«-V
|T<**fr_Mr_% ¿u>
y < j^ i«»»r /♦***-*• ^ ^
.t
J
------- a ^
j /, . ^
*
^ T ' 1
/
^
i
í
^
.
t
ü
,
A lt A l
V
&
í,
* ft’
*****
...
AAA> o^eu íl- p - — a . «**
<**r ^
�o ft
' fy v« ¿ «
o ¿ j¡4
^
X.
g i<
„ ¿ Ü jJL
~¿f«L
^
JA—'
/u^uAum JL L J vJZZ
j^ A , ----- - /™ / Ä
« A A u v ^ ^ h tf « /f'*.**•
rt^ ' i^**
Um iwh.M ..r T>t /•àriu »*^*»*
Y <“* ^ ‘ l" ^**- /uuyi^i^ ^ilHV UO.« «Wlltu' »AÄu~4^ ,u'**' ^
u ,
UUaa^ 0üv« a i
^
/
-
-V
»
^
,... ^ . ¿ L ~ / —^ «T* *— Ä p **
V i
mé ~
¿ ^ * r
Cli\ UUaM O'-Jf" cf*
^
J
•
j* /*A*Aji\UA4,
*
O
ijt^MulfwA* /to
^ ^
ye J.< ~ L n ^ * - o - .f i f cuJt- K ^ C i ~ '* L- / .• « ^ w ^ r -
Auu^uù^ a*Lkvcfr¿ Of^. L ~ A > ° — I».
*-~v
'
^ *j,~ ^ r * * - c—
aJOt. V '
/
// b uJUu.- U“ <<>y
^
^
- “ä *«
-
**-
/ *
^
«*ry*fq**>>
~~
- * = < • > />
^
«—
^
vU
_
. . ' ^iifcr
,
¿ v > U t Z i~ * *
I / U V J .. f* S
Z
. ' »,
ò y ^ n w ^
‘YkLil* «•** sa£a ***4 /*/«-». UA y*N**»
/ »V
'icx.ifc
«jfc
¿ p U fS *
mm /
«* u
- p —
tT * -
vwv».' o
/
äU
r
ß,w ’ if —*«^r
cd / < -. w
~ ~ v V
---
~ “i —
r «r-
/ '
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Tourres, François. An 12]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Brun
Subject
The topic of the resource
successions
mort civile
mort naturelle
officier de santé
donations
prêtres déportés
prêtres
coutume d'Auvergne
successions des ascendants aux acquêts
conflit de lois
prêtres réfractaires
biens nationaux
ventes
reclus
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour François et Léger Tourres, propriétaires, habitans de la commune de Saint Sandoux ; Claude Tourres, habitant du lieu d'Eliat, commune de Ludès ; autre Claude et Marie Tourres, habitant de la commune de Plauzat ; appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Clermont, le 22 floréal an II ; Contre Michel Gauthier, officier de santé, habitant à Saint-Sandoux ; Antoine Gauthier, cultivateur, habitant du même lieu ; autre Antoine Gauthier, Cothon et Anne Gauthier son épouse, Pierre Morel et Marguerite Gauthier, Jean Juliard et Anne Gauthier sa femme, Antoine Rive, Rodier et Marie Gauthier sa femme, François Besson et Marie Gauthier sa femme, tous intimés : En présence d'Antoine Gauthier père, dit laborieux, cultivateur, habitant de la commune de Saint-Sandoux, aussi appelant du même jugement.
notation manuscrite : texte complet du jugement du 2 frimaire an 13, 1ére section. La cour dit mal jugé et ordonne que l'acte d'échange du 20 germinal an 4 sera exécuté.
Particularités : notation manuscrite : texte complet du jugement du 2 frimaire an 13, 1ére section. La cour dit mal jugé et ordonne que l'acte d'échange du 20 germinal an 4 sera exécuté.
Table Godemel : Mort civile : un prêtre déporté est-il frappé de mort civile ? sa succession est-elle réputée ouverte à compter de la mort civile, ou seulement de la mort naturelle ? les frères du défunt, qui ont reconnu leur père héritier des acquêts de son fils, et ont traité avec lui en cette qualité, sont-ils recevables à lui contester postérieurement cette qualité ? ont-ils pu actionner en désistement, des tiers qui avaient traité avec leur père, dans cette confiance ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 12
1788-An 12
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1504
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Sandoux (63395)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53244/BCU_Factums_G1504.jpg
biens nationaux
conflit de lois
coutume d'Auvergne
donations
mort civile
mort naturelle
officier de santé
prêtres
prêtres déportés
prêtres réfractaires
reclus
Successions
successions des ascendants aux acquêts
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53245/BCU_Factums_G1505.pdf
50674ed26bc53e3975a4863c5a3f7c2f
PDF Text
Text
•
3 -9
P R EC I S
I
POUR
M arie
G A N I L , intimée ;
•
'
»
CO N TR E
J a c q u e s B E N O I T , garçon remercié, appelant ;
o u
E x a m e n du droit qu'ont les fille s de refuser
les garçons avec lesquels elles ont passé contrat
de mariage.
_
_
r
I l est rare, et plaisant à la fois, de voir un garçon
demander de l’argent à une fille, comme un dédomma
gement du refus qu’elle a fait de l’épouser, après un
contrat de mariage.,Depuis long-temps, sans doute, l'accord le plus difficile à faire , c’est celui des intérêts ; mais
personne n’ignore que l’acte qui les règle n’enchaîne point
encore les é p o u x , et que jusqu’au pied des autels , chacun
d’eux est libre de retourner sur ses pas. '
Si la galanterie française a quelquefois puni, par des
dommages-intérêts, des hommes qui refusoient d’exécuter
un contrat de mariage, ce sont d’innocentes victimes im
molées de temps en temps à l’honneur ombrageux du
beau sexe, fleur délicate que le plus léger souffle peut
ternir. La réputation des garçons est plus robuste ; et
l'appelant, qui se fait aujourd’hui leur chevalier, n’aura
de son côté ni les rieurs, ni les juges.
�I
( O
F A I T S .
Jacques Benoît, c’est son n o m , fils d’un cultivateur
des environs de M u râ t, fit cohnoissance , il y a quatre
ans, avec un laboureur de Chalinargues, village voisin,
père d’une fille de vingt-cieux ans, nommée Marie Ganil.
Jeune, riche et jolie, Mariepax-ut à ses yeux un parti digne
de ses recherches. L ’âge lui convénoit, la figure le tento.t;
la fortune décida sa mère. Elle demanda Marie pour son
fils, etU?obtint. L e père consentit, la iille se tut*, c’est
la règle.
L e contrat de mariage fut passé le 18 août 1801.L ’époux
reçut en don, de sa mère , le quart de ses biens en pro
priété et en usufruit. L e beau-père donna ■
à sa fille, en
avancement d’hoirie , quelques meubles, et une somme
de 2000 ^ , dont son gendre reçut la moitié le jour même
du contrat. Les frais de l’acte furent payés par le futur
époux , suivant l’usage; ils's’élevoient à 280 tt.
^ Il ne s’agissoit plus que de fixer le jour de la célé
bration. Elle fut remise, d’un commun accord , au 24
août', six jours après le contrat.
Cependant le beau-père faisoit des prépara tifs immen
ses. Cette circonstance n’est pas à négliger. Tous les fours du
'village étoient chauffés pour la noce; une vach e, ( le diraije! cette profusion est-elle croyable? ) une superbe vache,
est achetée. Déjà le couteau fatal étoit levé sur sa tête,
lorsqu’une nouvelle imprévue vient suspendre les prépa
ratifs d’une fête dont le héros menace d’être absent. On
dit que Benoît est infidèle; on remarque qu’il n’est point
venu chez sa prétendue depuis le jour du contrat; point
de lettre de sa part ; point d’ami chargé de ses excuses.
L e 24 août, jour fixé pour la célébration, le 2 5 , le 26,
un mois entier s’é c o u le .. . . Benoît ne paroît point.
Autant qu’on en peiit juger par les pièces de la procé
dure , quelque nuage s’étoit élevé entre les familles,
�»0*
(3)
depuis le jour où fut dressé lp contrat de mariage. La
fille vouloit être mariée pur les prêtres de sa paroisse ;
1 (? mari n’uvoit foi qu’à ceux de la sienne. Chacun prêchoit pour son saint. 11 paroît que celui de Benoît eut tort.
La fille, déjà piquée de se voir contrariée, s’offensa d’être
négligée. Son père lui avoit dit qu’elle vouloit se marier ;
son cœur lui dit qu'elle ne le vouloit plus. On assure que les
énormes provisions qu’il avoit faites, et surtout la vache
déjà achetée, firent long-temps hésiter le père. Mais la
fille ayant mis sa mère dans son parti, la gloire l’emporta
sur l’intérêt; le pain fut partagé avec les voisins, et la
vache qui avoit coûté 72 ***, ven d u e, à 12 ^ d,e perte,
aux bouchers de Murât.
Que faisoit cependant Benoît? Benoît, indifférent tant
qu’il se crut sûr d’être préféré, devint pressant dès qu’il
craignit de perdre sa conquête. T o ut à coup il se présente
pour réclamer les prétendus droits que lui donnoit son
contrat de mariage : il étoit trop tard; il avoit laissé passer
l ’heure du berger.
En pareil cas, on se tait, d’ordinaire: Benoît juge à
propos de mettre tout le monde dans la confidence de
sa disgrâce; il veut épouser par force, ou être refusé
devant témoins.
Le 28 septembre 1801, suivi d’un notaire et de deux
témoins, il se rend chez sa prétendue; il la somme, ainsi
que son père et sa mère ( ou diroit qu’il veut les épouser
tous trois), de procéder à la célébration du mariage. L e
père, la mère et la fille s’effrayent d’abord, et répondent
que « c’est la faute personnelle de Benoît, si le mariage
a n’est pas encore célébré ; que s’il veut attendre jusqu’au
K printemps, et se marier devant les prêtres de leur
” paroisse, ils donneront leur consentement au mariage. »
Mais^ tout à coup la fille prend du' c œ u r, et ajoute
« qu elle ne veut plus épouser Benoît, et qu’elle consent
« que leur contrat de mariage soit dès à présent annullé
« comme non avenu. » Et Benoît réplique à ce gracieux
2
�( 4 )
compliment « qu’il ne veut point différer la célébration
« du mariage, ni attendre le printemps; » et il proteste
de se pourvoir en justice. Voilà l’extrait fidèle de l’acte
de sommation qui existe au procès. *
Benoît a tenu parole : assez simple pour en appeler aux
hommes de l’injustice d’une femme, ne pouvant lui faire
autre chose, il a voulu du moins lui faire un procès.
A van t les hostilités il y a eu, suivant l’usage, un pourparler au bureau de paix, entre les puissances belligé
rantes. Ces pourparlers , comme on sait, sont à peu
près aussi utiles que les déclarations de guerre qui se
publient quand les deux peuples se sont déjà battus pen
dant six mois. .
11 est curieux d’entendre parler la fille au bureau de
paix. « Benoit, dit-elle, ne s’est pas présenté le 18 août,
« jour fixé pour la noce; il s’est fait attendre jusqu’au 11
« septembre. Pendant ce délai sa prétendue n’a aucune
« faute à se reprocher. L e retard de Benoît est pour elle
« un affront et une injure dont elle a lieu de se plaindre ;
cc ayant été rebutée par lu i, ainsi que l’ i n d i q u e c e long
« délai, elle a eu le temps de sentir une pareille inconduite
« qui va nuire à son établissement; elle déclare qu’elle
« compromettroit son honneur d’épouser celui qui l’a
cc ainsi dédaignée. Il n’ignoroit pas que c’est le garçon
« qui fait tort à la fille, et non la fille au garçon. Elle
« étoit si bien disposée à se marier à l’époque fixée ,
« qu’elle avoit acheté 72
une vache qu’il a fallu re« vendre aux boucliers de M u r â t, sur laquelle elle a
« perdu 12 ttr. Elle avoit en outre fait cuire le pain et
« acheté une foule d’autres provisions , etc. »
Quant à Benoît* il ne répond rien, il ne désavoue rien
au bureau de paix ; il se réservoit sans doute cette res
source devant la cour.
Bientôt il assigne Marie et son pore devant lc$ juges
de Murât;mais ce n'est plus pour la forcer de l’épouser*
c’est pour lui faire payer la rançon de sa liberté. Parlons
�vrai ; c’est pour se dispenser de lui rendre cette somme
de iooo ,h qu’il avoit reçue ù compte de sa dot, et qu’il
retient encore. T el est le motif de son assignation, de son
appel, de toutes ses poursuites.
il demande modestement à ses juges 3000 ^ de d.çmimages-intérèls pour répai-er la perte de son temps, et le
tort causé à sa réputation par le refus qu’il a éprouvé ;
3000
pour le dédommager de la perte des avantages
que lui faisoit sa mère en faveur de son mariage; 280
pour les frais de son contrat de mariage qu’il a payés au
notaire; enfin 19
iy J pour le coût de l’acte par lequel
il a sommé le p è r e , la mère et la fille de l’épouser.
Marie réclame, de son côté, la*-restitution de sa dot,
et demande à son tour ( pour montrer sans doute qu’elle
étoit fâchée tout de bon plutôt que sérieusement) 300
de dommnges-intérêts en réparation du mépris de Benoît,
et de l’affront qu’il lui a fait , en refusant le premier
d’exécuter le contrat de mariage qu’il avoit signé.
La décision des-premiers juges est fort sage: « Il
« paroitbien, disent-ils, que c’est Marie et non Benoît
« qui a refusé ( la négligence de Benoît ne peut-elle pas
« passer pour un refus? ) d’accomplir le mariage entre
« eux projeté, et dont le contrat avoit.été passé. Mais
« les mariages étant libres, le défaut d’accomplissement
« d’une union projetée ne peut donner, à aucune des
« parties le droit de demander des dominages-intérets,
« à moins que des'circonstances particulières ne servent
« de fondement à une pareille demande, surtout de la
« part du garçon. Cependant, comme le refus de Marie
K fait que Benoît est en perte des frais du contrat de ma« ruige qu’il a payés, et qu’il 11’auroit pas payés si Marie
* n ;>voit pas consenti à le passer; comme, d’un autre
« coté , la dot reçue par Benoît doit Être restituée, le
« mariage n’ayant pas lieu. >5
Pai ces motifs , les premiers juges condamnent Benoît
à rendre la somme de 1000 ^ qu’il a reçue à compte de
3
�. r
(6)
la dot de M arie, avec l’intérêt depuis la demande, sur
laquelle somme sera néanmoins déduite celle de 280 ***
pour les frais du contrat de mariage que Benoît a payés.
Sur le surplus des demandes des parties en dommagesintérêts, etc. elles sont mises liors de cour et de procès,
dépens compensés.
Ce jugement n’est pas rigoureux sans doute pour Benoît.
La balance semble même pencher de son côté'; car ses
demandes injustes sont rejetées , et il n’est point con
damné à payer les frais faits par Marie pour s’en défendre.
Cependant il accuse la prévention des magistrats , dont
il devroit remercier l’indulgence.
Il interjette appel de leur décision ; et depuis trois ans,
ou peu s’en faut, il fatigue la patience de ses adversaires,
ne pouvant détruire leurs raisons.
11 attend plus du temps que de la justice, et il espère
mieux des événemens que des lois : ils semblent le servir
eu effet. Depuis qit’il accuse l’infidélité de sa maîtresse,
elle a montré qu’elle savoit etre fidèle; et son mariage
l’ayant mise au pouvoir de l’époux qu’elle a choisi, lui
a rendu son consentement nécessaire pour résister à celui
qu’elle a refusé : de là l’intervention du mari; de li\ de
nouveaux délais.
La cour y va mettre un terme : il est plus facile d’éclairer sa justice , que de la mettre à portée de la rendre.
M O Y E N S .
B en oît, qui ne peut avoir la personne, veut du moins
garder le bien : c’est le vrai motif de son appel. Son pré
texte est de n’avoir pu obtenir 3000 ^ en dédommage
m e n t de l’inexécution d’un mariage qui lui convenait,
et 3000 ir encore pour réparer la perte des avantages
que lui faisoit sa mère en faveur de cet établissement. Le
second grief est la suite de l’inexécution du mariage ,
et rentre clans le premier. Il n’est question , pour les
�1p>
( 7 )
détruire l’un et l’autre, que de prouver que l’incxécutîon
-du mariage projeté n’a pu donner lieu à des dommagesintérêts : c’est l’objet de ce précis.
Benoît prétend encore, il est vrai , que les premiers
juges lui ont fait tort de 19 ^ 17^, prix de l’acte par
•lequel il a sommé Marie de l’épouser. G’étoit bien la
rpeine d’un appel, dont les faux frais, fût-il môn}e heu
reux , surpasseroient cette somme. Ce'grief tombe de luim êm e, si les deux autres sont détruits, et il est inutile
de le combattre.
D e tous les engagemens, le plus ancien et le plus nou
veau , lé plus critiqué et le plus en usage, le plus doux
ou le plus am er, le mariage, consiste dans l’union des
personnes plutôt que dans celle des biens : c’est un contrat
purement personnel, qui se forme par la volonté, qui
s’accomplit par le fait. Dans cet état si peu naturel, nommé
l’état de nature, la volonté et le fait ne font qu’un. Une
femme et un homme se rencontrent, se plaisent, s’unis
sent, et leur union fait le mariage. Mais quel mariage!
c’est celui des lions et des tigres : c’est celui de tous les
êtres pour lesquels le flambeau de la raison ne luit pas.
I<a société peut seule donner au, mariage un caractère
digne de la majesté de l’hom m e, image de Dieu. L a
société attire sur les.deux époux les regards du ciel et de
la terre : ils passent du temple des lois dans celui de
l’Eternel. L e prince ratifie, protège le lien conjugal : la
Divinité le bénit et le féconde; tout s’ennoblit, tout
s’embellit. Une mère soutient les pas d e là jeune vierge;
la pudeur couvre ses yeux de son bandeau ; le mystère
enveloppe de son voile le lit nuptial ; l’amour y sçme
des fleurs ; l’hymen change ces fleurs en fruits, gages
precieux et doux de l’accomplissement d’une union pré
parée par celle des volontés.
A in si, dans l’état de nature, l'accomplissement du
mariage fait le mariage, qui n’est proprement que l’union
des personnes. Dans l’état de société, le mariage consiste
4
*
�('8 )
dans l’union des personnes, mais plus encore dans celle
des volontés. Je ne parle pas de cette volonté involon
taire, pour ainsi d ire, qui ne voit que les apparences,
qui n’est fixée que par des avantages fugitifs; je parle d’une
volonté éclairée par les lumières de sages parens, d’amis
fidèles , dui’able >parce qu’elle n’est touchée que des qua
lités de l’àme, libre surtout/parce qu’elle n’est soumise
qu’à la vertu.
Aussitôt que deux personnes sont animées de cette
volonté de s’aimer , de se consoler mutuellement ; dès
que la force a promis un appui à la foiblesse , qui lui
promet en retour le bonheur, et que le prince et l’église
ont mis leur sceau à cette noble résolution , le mariage
existe. Mais il n’existe qu’alors : il n’est que projeté , jusqu’u celte déclaration publique et solennelle. Les lois ,
d’accord avec la raison, veulent que jusqu’à cet instant
chacun des é p o u x , libre encore, puisse se dérober à un
joug dont il craint d’être accablé. Souvent la réflexion,
tardive est venue rompre un engagement précipité. Sou
vent une main amie, écartant les fleurs qui lui cachoient
les écueils de la route , a détourné l’imprudente , qui
déjà y posoit le pied. La fuite est courage alors , et l’in
constance sagesse. Il est permis d’hésiter, quand il s’agit
de se donner sans retour. On recouvre une fortune per
due : mais qui peut réparer sa pi'opre perte ?
Mais parce qu’il faut un frein à la légèreté , et des
bornes à la fragilité humaine, un instant v ie n t, instant
solennel, consacré par toutes les pompes religieuses et
civiles, après lequel la voix du repentir cesse d’être
écoutée : c’est celui où les époux se jurent devant Dieu
et devant les hommes une foi mutuelle. Alors il n’est
plus temps de retourner sur ses pas ; le nœud , l’indis
soluble nœud est formé.
Il faut donc décider, en saine jui '.prudence, que jus
qu’aux pieds des autels chacun des époux peut regarder
en arrière; et c’est ainsi qu’on doit entendre ces maximes y
�‘ lo /
(9)
qu'ón ne peut gêner les inclinations, et que les mariages
sont libies. L ’honneur dû au plus honorable des engagemens, le respect que mérite le plus auguste des liens,
doivent faire adopter cette règle dans toute son étendue,
et rejeter comme une profanation de la liberté , de la
d'gnité de l’homme, ces demandes-de dommages-intérêts
fondées sur des refus.çéçipirequcs de se marier.
/. , ’
C ’est une moderne et funeste opinion qui,considère
comme un conti*at de louage ou de cheptel, lé mariage,
ce chaste nœud, ce lien céleste et consolateur, si .nobjle,
qu’il n’a que la vertu pour'motif^ si durable, que la
mort seule le peut.rompre; si nécessaire, qu’il fonde et
perpétue seul la société,..^es motifs qui portent deux cœurs
vertueux à s’unir, sont au-dessus d’un lâche intérêt : les
cœurs se donnent, et ne.s’achètent pas ; aucune promesse
ne peut ni les lier,,, ni être déliée à prix d’argent, jus
qu’à celle qui est faite en présence dçs, deux autorités
reines des .hommes.
: , ,
•• ... i (
.
O n pva objecter les fiançailles elles condamnations pé
cuniaires prononcées contre celui des fiancés qui manquoit
a sa foi. Je sais quelles étoient ces conventions connues
des Juifs, puisque Racliel fut fiancée à Jacob, connues
des Grecs et des Romains, adoptées parmi nous, et au
jourd’hui inusitées, par lesquelles un homme et une
femme se promettoient réciproquement de s’épouser. Cet
usage avoit sa grâce; l’attente pouvoit donner un nou
veau prix à l’épouse qu’un époux avoit long-temps aimée
fiancée : il pouvoit être utile. Celui de nos rois qu’on a
surnommé le Juste l’a consacré par une ordonnance.
Mais l’inexécution des fiançailles donnoit-elle lieu à des
dommages-intérêts?
-A Rom e, où les fiançailles étoient suivies d’arrhes et
de presens de noces, le fiancé infidèle perdoit ses arrhes,
et la fiancée inconstante rendoit le double de ce qu’elle
«ivoH reçu : quant aux-présens, -on les r,endoit toujours,
à moins qu’ils ne devinssent íe prix d’un baiser dérobé
�k
( i° )
à là' jeune vierge, qui, en ce cas, en retenoit la moitié.
Parmi nous, qui avons du mariage des idées plus
nobles que les Romains , présens et arrhes se rendent
dans tous les cas. La justice n’a aucun égard à ces dédits
imaginés comme sûretés d’une promesse de mariage; ils
n’ont force de loi qu’au théâtre : c’est la jurisprudence
établie par le droit canonique, et par un arrêt du 29
août 1713 , rapporté au sixième tome du Journal du
palais.
On trouve, il est v r a i , des arrêts qui ont accordé des
dommages-intérêts à celui des fiancés auquel on manquoit
de parole : mais ces arrêts sont des èxceptions peut-être
mal fondées k la règle générale que l’on tire de la nature
même du mariage. En supposant même que les jugemens
qui doivent faire la règle des mœurs soient souvent dictés
par elles, il faut faire une distinction entre les hommes
et les filles. Quant aux hommes, les préjugés que l’on
peut citer en leur faveur sont tous fondés, non sur le
manque de foi ou sur le tort qu’ils ont souffert, mais
sur la dépènse et la perte du temps que peut leur avoir
causée la recherche du mariage. La liberté n’est pas con
testée; l’intérêt seul entre considération. Cette observation
n’est point sans fondement, et s’applique à la cause; elle est
appuyée d’un arrêt du 10 mars 17 13 , cité par M . Pothier,
arrêt qui défend'aux juges d’ajouter à la condamnation de
dommages-intérêts ces mots: S i m ieux rfaime épouser,
parce qu’ils blessent la liberté des mariages,
La galanterie particulièi'e à nos bons aieux avoit in
troduit. , à l’égard du beau sexe, une distinction si déli
cate qu’elle en est subtile : on taxoit, on évaluoit, on
apprécioit l’affront qu’avoit pu éprouver une fille par le
refus de son fiancé. Si l’on estimoit que ce refus pour
voit l’empêcher de se marier à un autre, on lui accordoit
des dommages-intérêts comme une réparation de son
malheur. O11 eût dit qu’avec de l’argent elle pouvoit se
passer d’un mari, ou plutôt que c’étoit un moyen assuré
�r ï
^
(' î ï )
de lui en faire trouver un. Cette jurisprudence bizarre étoit
une suite de nos mœurs. 11 n’y a assurément que nos
anciens chevaliers qui aient pu imaginer qu’une fille perd
une partie de son mérite parce qu’elle perd un amant,
et qu’elle doit paroître ou moins belle ou moins sage parce
qu’il lui plaît d’être volage ou intéressé.
Dans la cause, ce n’est point une fille qui réclame des
dornmages-intérêts. Mais quand même l’ancienne juris
prudence auroit autorisé les garçons à en demander,
après des fiançailles rompues, il faudroit examiner ici si
mi contrat de mariage est aussi favorable qu’un acte de
fiançailles. Les fiançailles sont une professe mutuelle re
lative à l’union des personnes et non des biens* Cette pro
messe étoit écrite et faite depuis l’ordonnance de Blois,
devant quatre pareins qui sex*voient de témoins ; elle étoit
accompagnée des prières de l’église, et sanctifiée parses
bénédictions. Il ne s’agit dans cette cause que d’un contrat
de mariage. Quels sont donc les droits que donne un
pareil acte ? Quelle est son utilité , son origine?
Le mariage est l’union des cœurs et des personnes.
Mais l’amour , mais la tendre amitié ne soutiennent pas
la vie. Les douceurs de l’aisance ajoutent même un nou
veau prix aux charmes du sentiment; et s’il faut des vertus
aux époux, il leur faut des biens encore. A u ssi, tandis
que de jeunes amans ne songent qu’aux intérêts de leurs
cœurs, la prudence paternelle s’occupe des intérêts de leur
fortune. Les deux familles assemblées pèsent, discutent,
rédigent les conventions matrimoniales. L ’existence des
en fans est assurée en même temps que leur naissance est
prévue. On veille aux intérêts de la foi blesse; l’on ménage
à la vieillesse un appui ; il faut un acte qui renferme , qui
garantisse ces conventions ; c’est celui qu’on nomme parmi
nous
n un contrat de mariage.
O
acte , comme on le voit, n’est que la suite et l’ac
cessoire
du mariajn;. Le mariage existe smis lui;7 mais f il
1
n existe que pur le mariage. L ’antiquité la plus reculée
,
.
. O
�nous offre un exemple de cette distinction: L e beau-père
de TôbiCj, en hil'donnant sa filléy lu i:dit : « Que le Dieu
« d ’Abraham , d’Isaae et de Jacob voiis unisse lui-meme,
« et bénisse votre union ’ » ; et prenant ensuite ce qu’il
falloit pour écrire y on dressa le contrat de mariage. ■
Il est si vrai que 16 contrat de; mariage est la suite de
l’uniondes persopneà, quel’on voit souvent des époux sans
fortune, s’unir sans faire aucune convention relative à leurs
biens , par une raison fort simpleJ Les coutumes autrefois,
le Gode civil aujourd’h u i , disposent pour eux des fruits
de léu,r industrie ; et quoiqu’il ne soit point précédé d’un
contrat,le mariage n’en es't pas moins parfait et accompli.
L ’acte, improprement''hommé contrat de mariage,
( puisque c’est le mariage même qui est le contrat ) n’étant
que l’accessoire et la suite de l’union des personnes, il
en résulte deux conséquences; l’une, qu’il ne devroit être
rédigé qu’après le mariage; l’autre, que les conventions
qu’il renferme sont subordonnées à l’accomplissement de
l’union dont elles sont la suite.
Pourquoi donc notre usage, confirmé par l’article 1394
du Code civil, est-il de passer le contrat avant la célé
bration?
On en peut donner plusieurs raisons, tirées de la na
ture du cœur humain. L e législateur a craint l’empire du
sexe le plus ' fbiblé et la légèreté de celui qui ne risque
que sou bonheur à être volage. T e l homme se seroit
dépouillé pour sa maîtresse, q u i ne veut plus nourrir
sa femme ; et' uu'autre'n’a pas cru ttop acheter de toute sa
fortuüo la beauté', ' le* grâces , les talens, qui'ne voudroit
p as‘‘ si le sacrifice étoit A refaire, sacrifier- la moindre
partie de son'superflu. D ’un autre côté, parce que la
contradiction <&t l'apanage de l ’humanité, on voit des
époux plus soumis que des amans, et des femmes qui n’ont
immolé leur liberté le jour de leur mariage, que pour
régner le reste de leur vie sur leurs maîtres. C’est pour
prévenir la séduction dfes* unes et la légèreté des autres,
�NI
( n )
et par d’autres vues aussi sages, qu’il n’est plus permis
aux époux de disposer entr’eux de leur fortune après
le mariage, et qu’on a voulu, contre l’essence môme de
ce noble engagement, que Punion des biens précédât
celle des personnes.
Mais il n’en est pas moins certain que les conventions
que contient le contrat de mariage renferment toujours
la condition que l’union projetée aura lieu. Subordon
nées au mariage, s’il s’accomplit, elles subsistent, elles
s’évanoui .sent s’il est rompu. C’est la doctrine de la raison ;
c’est ce qu’enseigne son auguste et presque infaillible in
terprète , M. D om at, au chapitre des dots et des mariages.
11 est donc contraire aux lois de la raison , et par consé
quent à la justice, de réclamer un dédommagement pour
la perte des avantages portés par un contrat de mariage,
lorsque le mariage n’a pas lieu. De semblables demandes
ne sont que ridicules.
Les contrats de mariage n’étant relatifs qu’aux biens ,
ne donnent aucun droit sur les personnes. Ils sont moins
puissans à cet égard que les fiançailles , et ne peuvent
jamais autoriser des demandes de dommages-intérêts
comme celle qui donne lieu à la contestation actuelle.
Elle n’est née que de cet usage qui veut que le contrat
de mariage se rédige avant le mariage même; s’il ne l’eût
été qu’après la célébration , ou si l’on n’en eût point
passé , il n’y auroit point aujourd’hui de procès.
Je vais plus loin. Je suppose que de nos jours le contrat
de mariage tienne lieu de fiançailles, comme plusieui’s
arrêts semblent l’avoir décidé , les raisonnemens géné
raux qui ont servi de moyens jusqu’ici, conduisent à ce
résultat, qu’en général aucune promesse de mariage ne
se résout en dommages-intérêts. Nos mœurs ont forcé
quelquefois les magistrats à déroger à cette règle
en laveur d’un sexe timide et délicat; mais jamais l’on
11 accorde aux hommes que la restitution de leurs dépenses,
�( 1 4
}
lorsqu’elles sont considérables. Le prétendu tort fait à leur
réputation ou à leur fortune n’est compté pour rien.
Il
est plaisant, après cela, d’entendre un garçon deman
der mille écus en réparation du tort qu’à souffert son hon
neur. Que son honneur, l’honneur d’un homme aussi dis
tingué, aussi recherché que lu i, tient à peu de chose!
Quel honneur frêle et délicat, qui ne résiste pas au refus
d’une jeune fille! O n d iro it, à l’entendre demander une
sommeaussi considérable, que sa gloire est à jamais perdue
auprès des beautés de Chalinargues , et qu’il ne peut plus
obtenir leur choix qu’à beaux deniers comptans !
Mais si sa gloire lui est si chère, quel soin doit prendre
M arie de la sienne? N ’est-elle pas compromise par la
négligence d’un amant alors favorisé? Etrange amant!
qui n’a pas foi au curé de sa maîtresse, et q u i , refusant
de se marier dans la paroisse qu’elle a choisie, veut com
mander même avant le mariage ! il méritoit bien d’être
remercié,
Benoît allègue les dépenses qu’il a faites, le temps qu’il
a perdu. C ’est un temps bien précieux que le sien ! il
l’évalue au moins- à i 5 oo ^ : c’est payer un peu cher les
soupirs qu’il a poussés pendant un mois peut-être. Il
s’enrichiroit plus à ce compte à ne rien faire pendant un
mois, qu’à travailler l’année entière. Quant à ses dépenses,
on ne voit pas, il ne fait pas connoître celles qu’il a faites.
Ses présens de noces! il n’en est pas question, Que veut
donc , que peut réclamer Benoît ?
Dans tous les cas, les dépenses se compensent mutuel
lement. Et qui remboursera celles de Marie et de son
père, ces provisions, cette superbe vache qu’il a fallu
revendre en p erte, et tant d’autres profusions qui ne
sont point désavouées?
Reste à savoir quel dédommagement exigeroit la perle
des avantages que faisoit la mère en faveur du mariage.
Cette perte n’est pas irréparable, et Benoît est vraiment
�( 15 )
trop modeste. Un garçon dont le mérite est si rare que
mille écus suffisent à peine pour le venger d’un refus,
doit-il craindre d’en essuyer un nouveau? Ces libéralités,
ces profusions dont il se vante dans une première re
cherche, lui gagneront facilement les cœurs dans une
seconde : un choix aussi avantageux lui attirera les
mêmes avantages de la part de sa mère. On peut même
penser que le soin qu’il prend pour conserver sa gloire
et sa fortune, va lui donner une célébrité utile à son
établissement.
L.
/
J U LHE.
Me. H U G U E T , avoué.
A R IO M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Ganil, Marie. 1805]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Julhe
Huguet
Subject
The topic of the resource
fiançailles
contrats de mariage
noces
bureau de paix
annulation d'un mariage
dot
mariage
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Marie Ganil, intimée ; Contre Jacques Benoit, garçon remercié, appelans ; Ou examen du droit qu'ont les filles de refuser les garçons avec lesquels elles ont passé contrat de mariage.
6 pluviose An 13, 2éme section. Arrêt confirmatif
Table Godemel : Fiancé : le fiancé, refusé après préparation du contrat de mariage, est-il fondé à réclamer, contre la fille qui ne veut pas procéder au mariage, des dommages intérêts, autres que le remboursement des avances par lui faites ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1805
1801-1805
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1505
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chalinargues (15035)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53245/BCU_Factums_G1505.jpg
annulation d'un mariage
bureau de Paix
contrats de mariage
dot
fiançailles
mariage
noces
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53246/BCU_Factums_G1506.pdf
92d9ff98b9f508d7808a29e4c0bc217d
PDF Text
Text
_______________________________________________________________________
•m—
—
n—
■^—
—
!—
i—
^ t —
—
■—
—
m m » w a amam p
MEMOIRE
u S
m
w
w
4 à
w
ET CONSULTATION
C0UR
P O U R
D ’A P P E t
G i l b e r t L A F O N T , propriétaire, aubergiste de
*****
___
la commune de N é ris-le s-B ain s, appelant de
jugement rendu au tribunal de Montluçon, le
14 nivôse an 1 ;
3
ET
ENCORE
POUR
J e a n B O U R N E T , M a r i e L A F O N T , son épouse;
J e a n F O R IC H O N , et M a r i e L A F O N T , sa
femme; appelans d’un jugement rendu au même
tribunal, le 19 ventôse an 1 1 ;
CONTRE
C a th e r in e
-
-
LAFONT,
veuve et commune de
Gilbert-Marie L a f o n t , habitante de la même
commune de N é r is -le s -B a in s , intimée..
Q U E S T IO N
M É D IC O -L É G A L E . '
A quels signes peut-on reconnoître qu’un enfant est né
vivant ?
L e 14 brumaire an 10, Catherine L afon t, intimée, a
épousé Gilbert Lafont. L e père de Catherine l’institua
A
�I#
( o
son héritière universelle, et lui abandonna, dès l’instant
m êm e, les biens qu’il possédoit dans la commune de
Néris.
Il fut stipulé entre les époux une communauté con
jugale. L e mari devoit habiter dans la maison de son
épouse, et confondre une somme de 300 fr. pour prendre
part à la communauté; le reste de ses biens devoit sortir
nature de propres.
Les époux se donnent réciproquement l’usufruit de
tous leurs biens, en cas de non enfans survivans, et
pendant la viduité.
Ce mariage n’a duré que jusqu’au 27 fructidor an 10,
époque du décès de Gilbert-M arie L a fo n t, âgé de vingttrois ans.
L e 21 frimaire an 1 1 , Catherine Lafont a accouché
d’un posthume-, ses couches furent laborieuses et pénibles.
L ’enfant est sorti mort du sein de la mère : c’étoit une
fille. L e même jour on a dressé deux actes civils, c’est< à-dire, l’acte de naissance et celui du décès. Ces actes
sont ainsi conçus :
« A cte de naissance d’un enfant né en ce b o u rg, à
« trois heures et demie après m id i, du légitime mariage
« du défunt G ilbert-M arie Lafont et de Catherine La« font : le sexe de l ’enfant a été déclaré être un enfant
« femme. Prem ier tém oin, François C orre, tisserand,
« voisin à l’enfant-, deuxième tém oin, Marguerite Roclie« fo rt, accoucheuse, domiciliée audit bourg. L e premier
« témoin a signé ; le second a déclaré ne le savoir. Fran« çois C o rre, âgé de quarante ans; le deuxièm e, de
« soixante-six ans.
�« Sur la réquisition à nous faite par Louis L afon t,
« propriétaire, aubergiste, grand-père de l’enfant, aussi
« domicilié audit b o u rg, qui a signé avec le premier
« témoin. Constaté par moi adjoint au maire de la com« mune de N éris, faisant les fonctions d’officier public,
« le maire absent. Signé R eynaud, adjoint. »
O n remarque deux choses importantes à la lecture de
cet acte; i ° . que l’enfant n’a pas été présenté à l’officier
public, conformément à la lo i; 2°. qu’on ne lui a donné
aucun prénom.
Suit l’acte du décès, ainsi conçu :
« A cte de décès d’un enfant fem m e, né du légitime
« mariage de défunt Gilbert-M arie Lafont et de Catlie« rine L afo n t, décédé ledit jour en ce bourg, à quatre
« heiu’es après m idi; né audit lieu le même jour, h trois
« heures et demie de l’api’ès-m idi. Sur la déclaration
« faite par le citoyer/Louis Lafont, propriétaire, auber« giste, grand-père de l’enfant, âgé de cinquante ans,
« et de François C orre, tisserand, âgé de quarante ans,
« tous les deux domiciliés audit b o u rg, qui ont signé.« Constaté par moi Pierre R eynaud, adjoint du maire
« de la commune de N éris, le maire absent, »
Ce sieur Reynaud étoit tout à la fois curé de Néris
et adjoint de la commune ; il avoit été mandé , en sa
première qualité, au moment des couches de Catherine
L afo n t; on lui avoit présenté l’enfant, auquel il avoit
trouvé un reste de chaleur , et il l’avoit baptisé sous
condition.
La sage-femme elle-m ôm e, qui avoit remarqué que
1 enfant étoit en danger lorsqu’il étoit dans le sein de sa
A 2
�4
. • .
C )
m ère, avoit pris la précaution de l’ondoyer avant que
l’enfant fût so rti, et lorsqu’il présentait les pieds.
L a notoriété publique avoit appris que cet enfant étoit
né mort : les parentes et voisines qui assistoient à l’accoucliement l’avoient ainsi déclaré ; elles n’avoient aperçu
aucun signe de vie à l’enfant. La mère elle-m êm e, au
milieu de ses douleurs, téraoignoit la plus grande inquié
tude ; elle croyoit avoir accouché d’un enfant mort : mais
l ’accoucheuse, pour rassurer son esprit dans ce moment
critique et douloureux, lui avoit dit que son enfant étoit
vivant. T e l est toujours l’usage dans ce ras. Catherine
Lafont a persisté à vouloir s’en rapporter à ces paroles
de consolation, et à en tirer parti : elle est accouchée
dans un temps où la loi du 17 nivôse étoit en vigueur,
et où dès-lors elle devoit succéder à son enfant, s’il étoit
né viable. E lle a annoncé sa prétention aux héritiers dé
son mari : mais ceux-ci, qui étoient parfaitement instruits
de la v érité , et qui savoient que l’enfant étoit né m ort,
ont cherché à faire valoir leurs droits \ ils ont d’abord
pris la précaution de faire saisir entre leurs mains et eü
celles des tiers tout ce qui pouvoit être dû à la succession
de G ilbert-M arie L a fo n t, leur frère et beau-frère.
Bientôt s’est engagée une lutte considérable entre les
parties. Catherine Lafont a fait citer au bureau de p aix,
le 12 ventôse an 1 1 , en m ain-levée de la saisie-arrêt,
avec dommages - intérêts ; elle a soutenu qu’elle étoit
seule héritière de son enfant, et que tout devoit lui ap
partenir.
Les voies conciliatoires ayant été sans succès, elle a
présenté requête au tribunal de M ontluçon, le 12 ven-
�5
(
)•
^
tôse an n , pour voir dire, par provision, qu’elle auroit
pleine et entière main-levée des saisies-arrêts, sous toute
réserve de ses autres actions. A l’appui de cette requête
elle a justifié de son contrat de mariage , de l’acte de
décès de son m ari, et des actes de naissance et de décès
de son enfant.
L e 19 ventôse an 11 elle a obtenu un jugement par
d éfaut, qui lui adjuge ses conclusions.
Mais ce premier jugement n’étoit qu’un prélim inaire;
et Catherine Lafont avoit sa principale confiance dans
les deux actes de naissance et de décès de son enfant, qui,
suivant e lle , établissoient que cet enfant avoit vécu une
demi-heure; elle les opposoit aux héritiers de son mari.,
comme un obstacle invincible à leurs prétentions, et
comme un moyen certain de s’approprier la succession
de son enfant.
Gilbert Lafont crut d evoir, dans cette circonstance,
s’inscrire en faux incident contre ces deux actes; il con
signa l’amende, conformément aux articles 8, 9 et 10 de
l’ordonnance de 1737; e t, muni de'Sa quittance, il pré
senta requête au tribunal de M on tluçon , tendante à ce,
qu’il lui fût permis de s’inscrire en faux incident contre
les deux actes dont il s’agit, avec sommation à Catherine
Lafont de déclarer si elle entendoit se servir de ces deux
pièces. La requête fut présentée et signifiée les 1 , 2 et
3 germinal an 11. L e 7 du même mois, Catherine Lafont
fit sa déclaration qu’elle entendoit se servir de ces mêmes
pièces, et le même jour elle en fit le dépôt au greiï'e; il
en fut dressé procès verbal le 10 ; et le sieur Lafont pré
senta ses faits et moyens de faux -ainsi qu’il suit.
�(6)
IL expose que plusieurs personnes étaient présentes à
l’accouchement de Catherine L a fo n t, veuve de G ilbert;
que l’une d’elles, en soutenant la mère , aperçut les
pieds de 1,’enfant sortir les premiers ; toutes les personnes,
s’écrièrent : V o ilà un enfant mort. L a sage-femme de
mande et prend de l’eau bénite, et s’empresse d’ondoyer
l’enfant dans le sein de la mère ; elle emploie cinq à six
minutes pour achever la délivrance; elle prend cet enfant,
qu’elle met dans les bras de M arie Gusse, épouse de Fran
çois Corre. Immédiatement après la sage-femme demande
de l’eau-de-vie, elle en frotte la tempe de l’enfant et autres
parties de son corps ; elle ouvre avec un de ses doigts la
bouche de l’enfant, la bouche se referme de suite : la
pâleur étoit sur son visage, ses yeux étoient fermés; en
uii m ot, l’enfant étoit vraiment mort né.
François C orre, l’un des témoins dénommés aux actes
de naissance et de m ort, sur la déclaration duquel les actes
ont été rédigés par l'adjoint, n’étoit pas présent à l’accou
chement de Catherine Lafont; il n’arriva dans l’apparte
ment de l’accouchée que dans l’instant où la sage-femme
ensevelissoitl’enfant pour le faire inhumer.
L a femme de Corre, en palpant l’enfant, dit à son époux :
V a s avec L o u is L a fo n t (aïeul maternel de l’en fan t),
Ju ire fa ir e ces actes de naissance et de décès. C’est dans
le môme instant que les actes de naissance et de décès ont
été rédigés sous la date du 21 frimaire an u ,
G ilbert Lafont expose encore que l’enfant n’a pas, aux
termes de l’article 6, titre 3 de la loi du ao septembre Ï792,
été porté à la maison commune de Néris : qu’il n’a pas
été présente a l’adjoint. Il n’a point ute fait rnême de ré-*
�>4
'( V O
tjuisition à l’adjoint de se transporter à la maison où étoit
l’enfant; il n’a par conséquent remarqué aucuns signes de
vie de sa part. Il n’a rédigé les deux actes que sur la décla
ration des deux témoins, du nombre desquels étoit l’aïeul
maternel, partie intéressée, et François Corre, qui avoit
seulement vu ensevelir l’enfant.
Il n’a été donné aucun prénom à l’enfant, ou du
moins l’acte de naissance n’én contient aucun ; ce qui
est contraire à l’art. 7 du même titre de la loi citée.
Les professions des père et mère de l’enfant ne sont
pas énoncées dans l’acte de naissance. L e mcme acte
de naissance est muet sur les professions et domiciles des
tém oins, contre le vœu du même article.
Par tous ces m otifs, Gilbert Lafont conclut ù ce que
les deux actes de naissance et de décès soient déclarés
faux, et rejetés de l’instance.
L e jugement intervenu sur cette requête, en date du
3 floréal an 1 1 , ayant égard au premier moyen de faux
énoncé par Gilbert Lafont contre les deux actes dont il
s’agit, déclare ce premier fait pertinent et admissible, en
ce qu’il tend à prouver que l’enfant femelle étoit mort
avant de naître; ordonne qu’il sera informé de ce fait,
tant par titres que par tém oins; et à l’égard des sept
autres moyens de faux présentés par le sieur L a fo n t, il
est ordonné qu’ils demeureront joints à l’incident de faux,
pour en jugement y avoir tel égard que de raison.
Il a été informé en exécution de ce jugement. L e
ptemier tém oin, qui est Pierre Reynaud, desservant de
la succursale de N éris, et adjoint de la com mune, dé
d a le que le a i frim aire, un peu açant quatre heures
¿¿4
�(8)
île t après-midi, il fut appelé par Marie Bournet, épouse
de Gilbert Lafont, dit Chamblant, pour aller administrer le baptême à un enfant né du légitime mariage de
déiunt G ilbert-M arie Lafont et Catherine Lafont. On
lui dit que cet enfant étoit en danger de mort ; il y
courut, et chercha à s’assurer de son existence : il le
toucha, et lui sentant u n 1reste de chaleur, il crut, dans
le doute, pouvoir risquer le sacrement de baptême, qu’il
lui administra à telle fin que de raison. Cette cérémonie
religieuse fin ie, il inteiTogea , comme officier public,
M arguerite R ocliefort, accoucheuse, qui lui attesta que
• l ’enfant étoit né vivant. Après être sorti de -la m aison,
François C o rre, tisserand, voisin de l’accoucliée, et Louis
L a fo n t, gran d -p ère maternel de l’enfant, vinrent lui
déclarer que Catherine L afont, veuve de G ilbert-M arie,
avoit mis au monde un enfant fem elle, à trois heures et
demie de 'l’après-midi; que l’enfant étoit mort à quatre
heures du même jour. Sur leur déclaration relative à
la vie de cet en fan t, il rédigea son acte de naissance;
et sur leur déclaration relative à son décès, ainsi que
sur ce qu’il avoit vu lui-m êm e, il rédigea son acte de
m ort,
«
L e second témoin est François C orre; il.déclare-que
le jour que Catherine Lafont est accouchée , la femme
'du nommé Pignot vint le chercher dans la vigne où il
étoit; elle lui annonça que le curé étoit venu à la maison
de Catherine Lafont pour baptiser son »enfant, et lui dit
que le curé, comme adjoint et officier public, le trou
verait bon pour signer Pacte, Sans expliquer s’il s’agissoit
' d’acte de naissance ou de décès. Il se rendit en elle t en
la
�u »
( 9 ) .
. '
la maison de Catherine Lafont. Il vit l’enfant sur les
genoux de sa fem m e, et ne se st nullement assuré par
lu i -m êm e s'il étoit mort ou vivant lorsqiüil est venu
au monde. L e même soir il alla avec Louis L a lo n t,
grand-père de l’enfant, pour faire faire les actes de
naissance et de décès, chez le sieur Reynaud, oilicier
public. Celui-ci leur dit que les actes n’étoient pas encore
rédigés, et les renvoya au lendemain pour les signer :
effectivement il s’est rendu le lendemain chez le sieur
R eynaud, et a signé les deux actes.
L e troisième témoin est Marie L a fo n t, femme à Jean
T rim ouille, dit Pignot. Elle a déclaré être cousine ger
maine de Gilbert L afon t, et par conséquent alliée au
même degré de Catherine I^afont. Quoique l’ordonnance
défende d’entendre des témoins à ce degré de parenté,
comme il y en a plusieurs autres dans le même cas, tant
dans l’information que dans l’enquête de l’intim ée, l’ap
pelant n’a pas cm devoir proposer aucuns reproches dans
les circonstances extraordinaires où se trouvent les parties.
Les parens sont des témoins nécessaires ; et si on peut
soupçonner de la prévention ou de la partialité dans la
déclaration de ces mêmes parens, la cour d’appel appré
ciera quel degré de conliance ils peuvent inspirer. L ’ap
pelant s’en rapporte à cet égard à la prudence de la cour.
Ce tém oin, au surplus, déclare que comme parente,
amie et voisine de Catherine L afon t, elle s’est rendue
chez cette dernière au moment où elle sentoit les douleurs
de l’enfantement; elle la trouva debout, et soutenue des
sous les bras par la femme de Gilbert Lafont et Marie
Bournct. A van t que l’enfant parût, elle, déclarante, a
E
�( 10 )
vu tomber de ses excrémens; aussitôt elle a dit à Marie
Bournet: V en fa n t est m ort, parce qu’elle l’avoit déjà vu
arriver ainsi. Elle a ouï dire que les enfans qui lâchoient
ainsi leurs excrémens étoient morts avant de naître.
L ’enfant a paru les pieds premiers : l’accoucheuse le lui
fit voir sorti jusqu’aux reins, et lui fit signe que l’enfant
étoit mort. Elle lui demanda de l’eau bénite, qui fut
apportée aussitôt : l’accoucheuse l’a ondoyé sur la partie
du corps qui étoit visible. L ’enfant a resté plus d’une
demi-heure ù venir entièrement au inonde. L ’accoucheuse,
lui dit : E n tre la main du côté du cœ ur, et tu le lui sen
tiras encore battre ; elle lui a répondu : Je ne m’y connois
pas. Mais dès l’instant qu’elle a vu la partie du corps qui
sortoit ainsi, l’enfant lui a paru m ort, ainsi qu’après qu’il
a été venu au monde. Lorsqu’il fut entièrement sorti du
sein de sa m ère, l’accoucheuse lui demanda de l’eau-devie pour le frotter; elle lui en mit au visage, lui a mis
les doigts dans la bouche et y a souillé : l’enfant n’a donné
aucuns signes de vie. La femme Corre le prit sur ses
genoux ; m ais, émue de l’idée que cet enfant pouvoit
être mort, les genoux lui tremblèrent, et ce tremblement
se communiquoit i\ l’enfant. La femme Corre disoit que
cet enfant portoit signe de v ie , et qu’il falloit le porter
à l’église pour le faire baptiser; elle, déclarante, répondit :
Nous serons mal reçues, si nous portons à. M . le curé un
enfant mort. La m ère, qui n’étoit pas encore entièrement
délivrée, dit alors : Mon enfant est peut-être m ort; pour
la tranquilliser, on lui répondit que non. M . le curé
arriva, toucha l’enfant à divers endroits, prit de l’eau
bénite, le baptisa et se retira. L e nommé Corre, qu’ou
�fa i
oil
( n )
avolt envoyé chercher,'arriva aussi, et sa femme lui dit :
T u iras faire faire l’acte de cet enfant; ne manque pas de
dire que tu Vas du vivant, parce q u il Vétoit. Cependant
dans ce temps-là 011 se mettoit en devoir d’ensevelir l’en
fant; et le nommé Corre et Louis Lafont se rendirent
chez M . le curé. D epuis, Catherine Lafont est venue
chez elle, déclarante, et lui a dit : Vous disiez autrefois
que mon enfant étoit venu au monde vivant, et actuel
lement vous dites qu’il étoit mort ; elle lui répondit :
Nous te disions cela dans les temps pour ne pas t’inquiéter
dans l’état où tu étois : je te conseille de t’accorder avec
tes beaux-frères, parce que si je suis appelée en justice
je ne pourrai m’cmpêclier de dire la vérité ; mais elle
répliqua : Ils auront tout, ou je l’aurai. L e témoin ajoute
de plus que Louis Lafont, père de Catherine, lui avoit
fait beaucoup de menaces sur ce qu’elle étoit disposée à
dire la vérilé.
L e quatrième témoin est M arie B ournet, femme de
Gilbert Lafont ; elle est également cousine germaine des
appelans et de l’intimée. Elle dépose que pendant que
Catherine Lafont étoit au mal d’en fan t, elle la tenoit
avec une autre femme nommée Catherine Lafont ; que
l’enfant parut long-temps avant que la mère fût délivrée.
La sage-fem m e demanda de l’eau bén ile, et, en l’on
doyant, dit : J e crois le baptiser en cas dé vie. Elle dit
aussi ù la femme Pignot : T ouch ez, commë son cœur bat.
Cette femme répondit : Vous connoissez votre m étier,
pour moi je ne m’y connois pas. Après tous ces propos,
1 enfant resta près d’ une demi-heure à venir au monde.
L o isq u ’H parut, elle, déclarante, détournant les yeu x,
B 2
J
�tx6
(et
( ** )
ne l’a nullement regardé ; elle ne s’est occupée qu’à mettre
la mère au lit. Pendant qu’elle y travailloit, elle a en
tendu dire dans la maison : L ’énfant a encore de la vie.
E lle, toujours sans le regarder, a dit de le porter à l’église :
l’accoucheuse s’y est opposée. L a déclarante alors a été
bien aise de trouver un prétexte pour sortir de la maison,
et est allé chercher M . le c u ré , qui y est venu. Ce n’est
que long-temps après que M . le curé est arrivé, qu’elle
est rentrée dans la maison, et alors l’enfant étoit sans vie.
M argueviteLafont, veuve Bonnefoi, cinquième témoin,
encore cousine germaine des parties, déclare s’être trouvée
dans la maison lorsque Catherine Lafont est accouchée.
Lorsque l’enfant a commencé à paroître, la sngc-femme
a témoigné de l’inquiétude sur son compte, et a demandé
de l’eau bénite pour l’ondoyer : cependant elle a dit plu
sieurs fois qu’il avoit de la vie. Catherine Lafont a été
à peu près une demi-heure sans se délivrer : lorsqu’elle
l’a é té , la sage-femme s’est emparée de l’enfant, et a de
mandé de l’eau-de-vie. E lle, déclarante, étoit auprès de
la sage-femm e et de l ’enfant; et lorsque la sage-femme
lui a frotté le visage avec de l’eau-de-vie, elle a remarqué
que l’enfant a fait un léger soupir, ce qu’elle a regardé
comme signe do vie : mais depuis elle ne lui en a vu
donner aucun autre.
Telle est l’analise exacte de l’information faite sur une
demande en faux incident, qui étoit aussi indifférente
.qu’inutile dans la cause. On ne voit pas, en effet, quelles
inductions Catherine Lafont pouvoit tirer d’un acte de
naissance qui ne donne aucunes lumières sur le fait im
portant qu’il s’agissoit de vérifier. Cependant Catherine
�*3
U *
(
)
Lafont, effrayée de cette démarche, crut devoir demander
permission de faire une preuve contraire •, et en vertu
d’un jugement du tribunal de M ontluçon, du 7 nivôse
an 12, qui l'y autorise, elle a fait procéder à une enquête
dont on va également dépouiller les déclarations.
L e premier témoin est Marguerite R ocliéfort, veuve
de Gilbert Lafont : c’est la sage-femme qui a accouché
Catherine Lafon t; elle est âgée aujourd’hui de soixantedouze ans; elle est tante par alliance de toutes les parties.
E lle déclare que lors des couches de Catherine Lafont,
elle fut appelée pour lui porter les secours de son art.
Lorsqu’elle fut auprès d’e lle , et qu’elle voulut toucher
la malade, elle trouva que les pieds de l’enfant se présen
taient les premiers; elle sentit que ces pieds remuoient
dans sa main : à mesure que le corps de l’enfant avançoit
de sortir, elle s’apercevoit toujours de son mouvement;
lorsqu’elle fut à même de porter la main sur le cœur
de l’enfant, elle en sentit les pulsations; elle proposa
à la femme P ign ot, qui étoit auprès d’elle, d’y toucher;
ce qu’elle ne voulut faire. I/enfant fut à peu près 1111
quart d’heure à sortir du sein de la mère ; dès l’ins
tant qu’il fut sorti, elle ne lu i sentit plus de mouve
ment : elle demanda sur le champ du vin pour l’en
frotter, ainsi qu’il est d’usage. A u lieu de v in , on lui
porta de l’eau-de-vie ; elle en prit dans la main et en
passa sur le visage de l’enfant : dans ce moment l’enfant
a fait un gros soupir, qu’elle a regardé comme un signe
de vie; mais elle ne lui en a pas distingué d’autre. Aussitôt
elle a remis l’enfant à la femme C o rre, pour s’occuper
de la mère. L e curé de la commune, qu’oji avoit envoyé
�U 1
( 14 )
chercher, est ven u, et a baptisé l’enfant. L a déclarante
le prévint qu’elle avoit pris la précaution de l’ondoyer
avant qu’il fût sorti entièrement du sein de la mère.
François D urin , second témoin, non parent des parties,
a dit avoir soupé chez le sieur Etienne Forichon , officier
de santé, le jour des couches de Catherine Lafont : le sieur
R eynaud, c u ré , étoit à ce souper. Pendant qu’on étoit
à table, le déclarant dit que la veuve Lafont étoit accou
chée : le curé répondit o u i, et dit qu’il avoit été appelé
chez elle, comme officier public. J ’ai touché, d i t - i l ,
l ’enfant sur l’estomac, je lui ai senti de la chaleur ; j’ai
cru lui remarquer de la vie, et j’ai rempli les fonctions
de curé en lui donnant le petit baptême,
L e troisième témoin est M arie B ourn et, femme de
Gilbert L afon t, cousine germaine des parties : c’est la
même qui a été entendue dans l’information faite à la
requête de l’appelant; et comme la déclaration qu’elle a
réitérée est absolument la même que celle précédemment
faite, il est inutile de s’en occuper,
Claire G ilet, femme de François Corre, quatrième té
m oin, non parente, dépose qu’elle étoit chez Catherine
Lafont lorsqu’elle est accouchée. A près que l’enfant a
été entièrement sorti du sein de sa m ère, la sage-femme
a demandé du vin; on lui a donné de l’eau-de-vie. Après
que la sage-femme a eu essuyé un peu cet enfant, elle l’a
porté sur-les genoux d’elle déclarante, et lui a dit de le
laver avec du v in , qu’elle alloit prendre soin de la mère.
E lle a pris l’en fant, l’a lavé avec du vin qu’on lui a
porté dans un plat, lui a vu remuer les bras trois ou
quatre fois, lui a^ vu égalemont battre le cçeur, et lui a
�( 15 )
distingué des mouvemens dans le visage lorsqu'on lui
passoit du vin sur cette partie : elle a remarqué qu’il soupiroit; mais l’enfant est resté mort sur ses genoux, et il
a été impossible de distinguer le moment où il a cessé
entièrement de vivre. ■
Gilbert-Jérôm e Guillem in, cinquième tém oin-, déclare
que quelque temps après les couches de Catherine Lafont,
et dons un temps où l’on disoit que les héritiers Lafont
vouloient s’inscrire en faux incident, il a.;soupe avec le
curé de N éris, qui lui dit qu’au moment où Catherine
Lafont avoit accouché il avoit été appelé chez elle comme
officier public; qu’il s’y étoit rendu, et avoit aussi exercé
les fonctions de curé en baptisant son enfant; ce qu’il
n’auroit fait s’il n’eût cru s’être assuré de son existence;
que quelque temps après la sage-femme qui avoit accou
ché Catherine Lafont lui avoit dit chez lui que l’enfant
étoit venu au monde vivant, et qu’elle l’avoit ainsi dé
claré à son confesseur.
L e sixième témoin , Georges Forichon , officier de
santé, déclare que quelque temps après l’accouchement
de Catherine L afon t, et au moment où l’on disoit que
les héritiers Lafont se pourvoyoient en faux incident, il
s’éloit trouvé chez Mari en Forichon avec le sieur R ey
naud , curé de la commune. L e sieur Reynaud dit en sa
présence que le nommé' Corre étoit venu-chez, lui lui
déclarer qu’il avoit vu l’enfant de Catherine Lafont en
V iei que s’il venoit à se rétracter il le dénonceroit au
commissaire du gouvernement. Il ajouta qu’au moment
des couches de Catherine Lafont, il avoit été appelé chez
elle; qu’il avoit senti de la chaleur à son enfant, et lui avoit
�tto
< SI
( 1« )
administré le baptême en cas de vie, sans pouvoir assurer
qu’il fût vivant. Il a aussi ouï dire à plusieurs femmes
que la nommée P ig n o t, femme Trim ouille, leur avoit
déclaré que l’enfant de Catherine Lafont étoit né vivant,
qu’elle lui avoit vu porter plusieurs fois son bras à la
tête, et lui avoit remarqué plusieurs autres signes de vie.
A la suite de ces enquêtes, Catherine Lafont, qui ne
comptoit pas infiniment sur la déclaration des témoins,
s’est bornée à soutenir qu’elle n’avoit besoin d’autres
preuves de viabilité que l’extrait de naissance qui constatoit que son enfant avoit eu vie ; et quoique cet acte
de naissance constatât que l’enfant n’avoit pas été présenté
' ù l’officier public, un moyen aussi futile a fait impression
sur les premiers juges. L e 14 nivôse an 13, la cause portée
à l’audience, après plusieurs séances, est intervenu juge-^
ment contradictoire qui déboute Grilbert Lafont de sa
demande en inscription de faux incident, le condamne
à l’amende de 60 fr. par lui consignée, conformément
cjux articles 4 et
du titre 2 de l’ordonnance de 17 3 7 ,
et en tous les dépens.
A van t de rendre compte des motifs qui ont déterminé
les premiers ju ges, il est à propos de rappeler que le
procureur im périal, dans ses conclusions, observa qu’il
né suffisoit pas pour qu’un enfant puisse succéder et trans
mettre , qu’il eût donné des signes de vie dans le sein
de sa mère; qu’il falloit qu’il fût né vivant; Il remarqua
que de l’ensemble des dépositions des témoins, présentées
respectivem ent, il résultoit seulement que l’enfant de
Catherine Lafont avoit fait un soupir après être sorti tout
4 fait du sein de sa mère; que quelques-uns de ses membres
a voient
_
5
�U1
*7
(
)
avoient palpité. M ais, ajouta-t-il, les auteurs ne sont pas
d’accord sur la question de savoir si ces signes sont carac
téristiques de vitalité. Plusieurs veulent que l’enfant ait
jeté des cris ; d’autres se contentent d’un souille, d’un
soupir; mais aucun n’a régardé la palpitation des membres
comme un signe évident et certain. Il observe avec jus
tesse que le Code civil ne s’explique pas sur les caractères
qui peuvent prouver que l’enfant a eu v ie , ni sur la ma
nière de le prouver. Il conclut en conséquence à ce que
avant de faire droit il soit ordonné qu’un docteur en rnéidecine et un docieur en chirurgie, nommés par le tribunal,
donneront leur avis sur la question de savoir si les sou
p irs, restes de chaleur et de palpitation, dont ¡Varient
quelques-uns des témoins, sont des signes certains de vita
lité; ou si, malgré ces signes, l’enfant doit être réputé
mort né.
Mais le tribunal, peu touché de cette opinion marquée
au coin de la sagesse et de la prudence, en a pensé autre
ment. Il donne pour motif d’une décision précipitée, pour
ne rien dire de plus, i° . que tous les acte^ de l’état civil
font foi jusqu’à inscription'de faux ; 2°. qu’il est établi
par l’acte de naissance que l’enfant de Catherine Lafont
est né à trois heures et demie le 21 frimaire au 11 ; 30. qu’il
est établi par l’acte de décès que, le merne jour, le même
enfant est décédé à quatre heures après m idi, c’est-à-dire,
demi-heure après sa naissance ; qu’ainsi il est prouvé par
acte authentique que l’enfant est né vivant.
Les premiers juges ajoutent que Gilbert Lafont a pris
la voie de l’inscription en faux incident contre ces deux
actes; que par là il s’est imposé la luehc de prouver que
C
,
�(
1 8
5
cet enfant étoit mort avant de naître : mais il n*a pas
rempli cette tâche. L e premier témoin a senti un reste
de chaleur à l’enfant, et lui a administré le baptême à
telle fin que de raison. 11 a ensuite interrogé, comme offi
cier public, l’accoucheuse, qui lui a attesté que l’enfant
étoit né vivant. L e second témoin ne s’est pas assuré par
lui-même de l’existence de l’enfant. L e troisième a tou
jours regardé l’enfant comme mort avant de naître; il l’a
jugé ainsi aux excréjpens qu’il a vu tom ber, aux signes
que la sage-femme a faits,: cependantila même sage-femme
lui a dit. que le cœur de l’enfant battoit encore, lui a
proposé d’y porter la m ain , ce qu’elle n’a voulu faire.
Lorsque l’enfant a été sorti du sein de la mère, le témoin
ne lui a remarqué aucun signe de v ie , quoique la sagefçimne.. l’ait frotté a v e c de l’e a u - d e -v ie , lui ait mis.les
doigts dans la bouche et y ait souillé. L e quatrième témoin
ne s’est pas assuré par lui-même si l’enfant avoit vécu après
sa naissance; mais il a entendu dire dans la maison que
renfant^existoit encore. L e cinquième lui a vu faire un
léger .soupir^qu’il. a,.:rçgai;dp çon^me un signe de vie.
Mais de ces cinq témoins , ¡Je troisième est le seul qui
soutient que cet enfant étoit mort; il pensoit ainsi, d’après
la chute des excrémens et les signes de l’accoucheuse.
Cependant cette même accoucheuse a dit que le, cœur de
l’enfant battoit, a proposé au térrçoin d’y porter la main,
ce qu’il n’a voulu faire , parce qu’il ne s’y connoissoit pas.
L e tribunal, considérant que le prçmicr témoin ,a senti
de la chaleur à l’enfant; qu’il a interrogé l’accoucheuse;
qu’elle lui a attesté que l’enfant etoit né vivant; qu’elle
l’a ainsi déclaré lorsqu’elle a été appelée en témoignage ;
�!9
Ias
(
)
que le quatrième témoin avoit ouï dire dans la maison,
après la naissance de l’enfant, qu’il avoit encore de la vie;
que le cinquième témoin lui a vu faire un soupir qu’il
a pris pour un signe de vie.
Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces décla
rations que l’enfant a plutôt vécu après sa naissance qu’il
n’étoit mort avant de naître; que Gilbert Lafont n’a pas
détruit les deux actes de naissance et de décès, ainsi qu’il
se l’étoit proposé; qu’on en est d’autant plus convaincu,
quand on considère que le quatrième témoin ouï à la
requête de Catherine Lafont, à qui l’accoucheuse a remis
l’enfant pour donner des soins à la m ère, confirme la
déclax’ation de la sage-femme, lui a vu battre le cœ ur,
lui a distingué des njouvemens au visage, et a remarqué
qu’il soupiroit; que d’ailleurs il paroît constant que cet
enfant étoit parvenu au terme prescrit par la nature; qu’il
n'avoit apporté au monde aucuns vices de conformation,
ni aucuns vices de putréfaction.
Les premiers juges concluent que ces dernières circons
tances , jointes aux actes civils et aux déclarations des
témoins, doivent suffire pour constater la vie de l’enfant,
ou au moins le faire présumer vivant.
Ils considèrent encore que Catherine L a fo n t, qui a
été m ère, qui en a couru les dangers, qui a perdu son
enfant, doit obtenir la consolation que la loi lui accorde;
et dans leur sagesse ils en-trouvent assez pour débouter
Gilbert Lafont de sa demande , pour attribuer à une
éti'angère tous les biens d’ une fam ille, et enrichir un
second m ari, qui la consolera mieux encore.
Quel état d’incertitude et d’anxiété pour les parens du
C a
�mari ! Il semble qu’une'* question de ce genre méritoit
peut-être plus d’examen et de maturité; elle tient à l’ordre
public, elle intéresse la société toute entière. L e procureur
impérial sembloit avoir tracé la seule marche que les pre
miers juges avoient à suivre; et les héritiers Lafont, usant
des moyens que la loi leur accorde, bien convaincus de
l’impartialité de la cour d’appel, dont les arrêts sont de
grands exem ples, se sont pourvus contre ce jugement.
Mais avant que la cour prononce, ils désireroient réunir
une plus grande masse de lum ières, en s’adressant aux
jurisconsultes et aux docteurs , pour leur demander une
splution sur le point de savoir si l’enfant femelle dont
Gilherine Lafont est accouchée, a été capable de recueillir
et transmettre la succession de son père.
JLiES a n c i e n s a v o c a t s e t l e s d o c t e u r s
E N M É D E C IN E R É U N IS , qui ont pris lecture des
pièces et mémoires de la cause d’entre Catherine Lafont
et Gilbert Lafont, et notamment de l’information du 13
prairial an 1 1 , de l ’enquête du 10 messidor an 12 , du
jugement définitif dont est appel, du 14 nivôse an 13 ;
ensemble des mémoires à consulter;
que l’enfant femelle dont est accouchée.
Catherine Lafont n’a pas donné des signes de vie assez
évidens pour qu’il ait été capable de recueillir et de
transmettre une succession.
E u examinant cette question en point de d ro it, on peut
E
stim ent
�K J
( 21 )
décider, d’après la loi et les jurisconsultes-, que les signes
de vie que semble donner l’enfant, lorsqu’il est encore dans
le sein de sa m ère, sont absolument indifférons. On ne
considère l’enfant que du moment qu’il a vu le jour, qu’il
est hors du sein de la m ère, ou entre les bi*as de la sagefemme. L a loi pénultième, au code D e posth. hœredib.
inst. en a une décision précise. S i vivus perfectè natu*
est, lit e t, illico postquàm in terram cecidit, vel in manibus obstetricis decesserit, nihilom inùs testamentum
rumpit. Ces expressions, perfectè natus e s t, annoncent
assez qu’on ne doit s’attacher à l’enfant, et remarquer les
signes de vie, qu’autant qu’il est entièrement sorti ex utero
matris. Toutes les expressions de la loi présupposent né
cessairement que l’enfant a entièrement vu le jou r, qu’il
est débarrassé de toutes les entraves : jusque-là il n’est
réputé qu’une portion des entrailles de la mbvc}pars viscerum matris.
11 est certain, nous dit Henrys, tom. 4, p. 202, 5e. plaid.
n °. 2, qu’un enfant ne peut être censé vivant, ni capable
de succession, s’il n’est hors le ventre de la m ère, et s’ il
ne touche la terre, ou du moins ne se trouve entre les
bras de la sage-femme. Quelques signes de vie qu’il ait
pu donner, ils ne sont pas plus considérables que les
actions vitales qu’il a pu faire dans le ventre de la mère.
Comme ce 11’est pas assez qu’il ait eu vie dans le sein ma
ternel, s’il ne vient à naître, il ne sufïit pas aussi que,
venant h sortir, il paroisse vivant, et en donne quelques
signes, s’il ne sort entièrement et ne quitte la matrice.
Il faut qu’il s’en détache, autrement- il est plutôt censé
une portion de la mère qu’une personne vivante : il ne
«ci
�( 22 )
vit que par elle, et n’a pas d’autre subsistance; et par
conséquent ne peut établir un degré dans les successions.
M . Domat, Lois c iv ile s, tit. 2 , n°. 6 , enseigne que
les enfans qui sont encore dans le sein de leur mère n’ont
pas leur état réglé, et qu’il ne doit l’être que par la nais
sance. Jusque-là, dit-il, ils ne peuvent être comptés pour
des enfans, non pas même pour acquérir à leur père les
droits que donne le nombre des enfans. P a rtu s antequàni
edaturym uîierisportio est, velviscerum , L . ï, §. 1, ff. D e
inspect. vent. P a rtu s nondiim ed itu s, homo non rectc
f u is s e dicitur. L . 9, in jin . ff. A d leg.Jalc. Henrys s’appuie
également sur l’avis de Bartliole, d’A lc ia t, de Tiraqueau,
dans son commentaire sur la loi S i unquiim , au code D e
revocand. donat., ouvrage très-estimé; et enfin de T e rtu llien , qui s’exprime ainsi : M entior s i non statïm injfan s utvitam vagitus satura v it, hoc ipsum se testatur
sensisse ? atque intellexisse quod natus est : omnes sirnul
dedicans sensus , et luce v isu m , et sono auditum , et
lannore gustum , et aere odoratum, et terra tactum.
Il résulte de ces autorités que, pour réputer un enfant
viable, il ne suffit pas qu’il ait paru vivant au passage,
il faut qu’il ait donné des signes de vie après être entiè
rement sorti du sein de la m ère, aux termes de la loi 3
ci-dessus citée : S i vivus perfectè natus est,
Ilen rys, t. 3 , liv. 6 , cliap. , question 21 , examine
encore à quels signes on peut reconnoître si l’enfant est
vivant après qu’il est sorti du sein de la m ère, et si l’éjec
tion des excrémens notamment est un signe suffisant de
vitalité. H paroît qu’Hemys a voit cherché la solution dans
¿os pères de la médecine, dans Ilippocrate, Galion et
5
�ia
6
C 2 3 )'
Avicène \ il décide, d’après l’autorité de ces grands
hommes, quel’éjectiondes excrémens n’est pas une preuve
de vie. D ’après Hippocrate, liv. 4 , aphorisme 23, et l’ex
plication que donne Galien de cet aphorisme , cette éjec
tion arrive souvent dans un cadavre, pai’ce que les excré
mens s’épanchent et tombent d’eux-mêmes. Si la chaleur
vitale en est la cause commune, il ne s’ensuit pas qu’elle
soit absolument nécessaire ; c’est aussi souvent une preuve
de dissolution qu’une preuve de vie : dès-lors on ne peut
en tirer aucune preuve de vitalité.
• Bretonnier appuie l’opinion d’Henrys; il se fonde sur
le sentiment de Ménocliius , de Paul Zachias, dans ses
Questions médico-légales, liv. 1 , tit. 2 . quest. 6 , n°. 8,
qui décide que l'enfant ne doit être réputé viable qu’au
tant qu’il rem ue, crie , éternue, et épanche son urine :
S i voce/n e miser i t , s i spiraperit, s i membra distenderitj'velse m overit, s i sternulaverit, et urinam reddat,
Bretonnier cite encore Acaranza , médecin espagnol,
en son traité D e partit, nos. 32 et 3 4 , qui exige des
signes évidens et certains, et qui apprend qu’en Espagne
il y a une loi qui définit qu’aucun enfant n’est censé
parfait et viable, s’il ne survit pendant vingt-quatre heures
après sa naissance, et s’il n’a reçu le baptême. Jure verb
nostro regio , lege taiiri nullus est partus m aturus, et
vitalis qui viginti quatuor horas ab editione non superv ix e r it, et sitnulJ'uerit baptizatus.
Bretonnier ne peut s’empêcher de remarquer que cette
lo i est Irès-judicieuse, et qu’elle devroit être adoptée parmi
nous pour éviter toute difficulté. En eil’e t , nous sommes
encore dans un état d’incertitude sur ce point : il eût été
�(H )
à désirer que le Code civil contînt un règlement à cet
égard; niais on n’y trouve qu’une seule disposition qui
puisse s’y appliquer ; c’est celle exprimée en l’art. 725
qui porte que l’enfant qui n’est pas né viable est incapable
de succéder.
Il faut donc en revenir aux anciens principes ; et on'
ne peut trouver de meilleur guide que R icard , dans son'
Traité des dispositions conditionnelles, chap. ,sect. ,
n°. 503 etsuivans, où il soutient qu’il faut dés signes de>
vie évidens et certains,parce que la mort étant certaine,
c’est à celui qui veut tirer avantage de la vie de véx*iGer
sa prétention par des témoignages convaincans.
O n pourroit encore invoquer l’opinion de L e B ru n ,
dans son Traité des successions , et une foule d’autres
auteurs qui n’ont fait que copier les précédens. En appli
quant ces autorités à l’espèce particulière, on remarque,'
i°. que l’enfant ne doit être considéré que lorsqu’il est*
sorti du sein de la mère. Tous les mouvemens qu’on a
pu apercevoir dans l’instant de la délivrance, avant que
l’enfant ait touché la terre, ou qu’il soit sur les genoux de *
la sage-femme , sont insignifians,
•
2°. Lorsqu’il est sorti du sein de la m ère, il faut des
signes de vie évidens et certains, des mouvemens n o n ’
équivoques, et qui ne soient pas un reste de palpitation
ou de chaleur. Il 11es’agit donc que d’analiser les enquêtes,'
et d’examiner si on y trouve des présomptions assez fortes,
ou des preuves que l’enfant de Catherine Lafont est né
vivant.
'
On commencera par celle faite à la requête de Cathe
rine L afd u tj.ct ce n?est pas intervertir l’ordre, quoique
celte
5
5
�*5
(
)
cette enquête soit postérieure à l'inform ation, parce‘que
la mère devoit prouver que l’enfant avoit eu vie , tandis
que l’objet de l’appelant étoit d’établir que l’enfant étoit
mort. né.
■
L a sage-femme, premier témoin , et cousine germaine
des parties , a remarqué d’abord que les pieds de l’enfant
se présentoient les premiers ; elle sentit les pieds de cet
enfant remuer dans sa main ; à mesure que le corps de
cet enfant avançoit de sortir , elle s’apercevoit toujours
de son mouvement: elle porta la main sur le cœ ur, elle
en sentit les pulsations; elle proposa à la femme Pignot
d’y tou ch er, ce qu’elle ne voulut faire.
<
Ces premiers signes aperçus par la sage-femme ne peu
vent donner aucunes lumières. L ’enfant n’étoit pas encore
né ; il étoit toujours dans le. sein de la m ère, et ces moiir
vemens appartenoient à la mère. U n corps inanimé , sus
pendu , se meut par son propre poids ; mais ce m ouve
ment ne peut être regardé comme un signe de vitalité,
»Les pulsations du cœur remarquées toujoursr dans le
sein de la m ère, ne seroient pas plus convaincantes; mais
dès qu’il ne faut considérer l’enfant que lorsqu’il a touché
la terre, on ne doit pas s’arrêter à des signes aussi équi
voques.
La sage-femme ajoute que l’enfant fut à peu près un
quart d’heure à sortir entièrement; e t , dès l’instant qu’ il
fut sorti, elle ne lu i a plus senti de mouvement : circons
tance remarquable, qui prouve que l’enfant n’a jamais
pu être compté au nombre des êtres vivans. Lorsqu’elle
u passé de l’eau-,de-vie sur le visage de l’en fan t, il a fait
uu gros soupir qu’elle a regardé coiu.me un signe (Je vie;
^
.D
�(26)
mais elle ne lui en pas distingué d'autres. E li quoi ! un
seul soupir, qui peut n’être qu’ un mouvement expiratoire,
remarqué dans un instant de trouble, seroit-il donc suffisant
pour faire présumer la vitalité ? L a sage-femme a remis
l’enfant à la voisine pour s’occuper de la mère : le curé
est v e n u , et a baptisé l’enfant -, mais elle a prévenu le
curé qu’elle avoit pris la précaution de l’ondoyer avant
qu’il fût sorti du sein de la mère.
Cette sage-femme , qui ne s’appesantit pas davantage
sur les détails de son opération, déclare ensuite ne savoir
n i lire n i écrire. Comment une femme illitérée pourroitelle inspirer quelque confiance dans une matière aussi
importante? Peut-elle avoir assez de connoissances dansson
art, pour raisonner et tirer des conséquences sur des signes
aussi incertains que ceux dont elle rend compte ? Sa décla
ration ne pourroit être de quelque poids, qu’autant qu’elle
seroit appuyée oii corroborée par l’opinion d’un homme
de l’art. Il est assez étrange q ue, dans un moment aussi
critique, on n’ait pas appelé un médecin ou un chirur
gien : l’état de la mère et de l’enfant sembloit exiger cette
précaution ; l’intérêt de toutes les parties le commandoit
impérieusement ; et c’est à la mère , ou au grand-père
présent, qu’on doit faire le reproche de n’avoir pas cons
taté les faits d’une manière certaine , puisque , pour se
servir des termes de R icard , elle devoit tirer parti de la
vie de son enfant; et c’étoit à elle à l’établir.
L e second témoin est un marchand cafetier qui soupoit
en villeavec lecuré,le jour des couchesde Catherine Lafont,
et qui ne répète que ce qu’il a oui dire au curé , qui
étoit un des convives. Sa déclaration est donc absolument
insignifiante.
�( 27 )
Vient ensuite la femme Bournet^ cousine germains
des parties , qui n’apprend autre chose, sinon que l’enfant
a été ondoyé avant qu’il fût sorti. Elle a entendu la sagefemme proposer à la femme Pignot de le loucher , pour
sentir comme son cœur battoit ; cette femme a refusé de
le faire : pour elle , elle n’a jamais porté les yeux sur l’en
fant. D e la manière dont elle s’exprim e, il paroît qu’elle
le croyoit m o r t, et qu’elle avoit quelque répugnance à
le considérer. Cependant elle a entendu dire qu’il avoit
de la vie ; elle a recommandé , dans ce cas, de le porter
à l’église : mais on a répondu qu’il ne falloit pas aller à
l’église , et seulement envoyer chercher le curé. Elle étoit
charmée de trouver un prétexte pour sortir de la maison ,
parce qu’elle étoit elle-même fatiguée ; elle s’est empressée
d’aller chez le curé; elle n’est rentrée que lorsque celui-ci
sortait, et pour lors elle a vu que l’enfant étoit décidé
ment mort.
On ne voit pas quelles inductions on pourroit tirer de
cette déclaration. Y a -t-il, dans tout ce qu’a dit le témoin,
quelques signes de vie évidens ? Cette femme n’a pas osé
jeter les yeux sur l’enfant dans les premiers momens ;
cependant elle soutenoit la mère ; elle a été témoin des
alarmes de la sage-femme : enfin elle 11’a vu l’enfant que
lorsqu’il étoit décidément mort.
Claire Gilet étoit chez Catherine Lafont lorsqu’elle est
accouchée. Après que l’enfant a été entièrement sorti du
sein de la m ère, la sage-femme l’a essuyé un peu avec de
1 eau-de-vie ; elle l’a ensuite porté sur les genoux d’elle
G ile t, lui a recommandé de le laver avec du vin , ce
qu elle a iait ; elle lui a vu remuer les bi'as trois ou quatre
D a
�y*
n*i
( 28
fois, lui a vu battre le cœ ur, lui a distingué des mouvemens dans le visage lorsqu’on lui passoit du- vin , a re
marqué qu’il soupiroit ; mais l’enfant est resté m ort sur.
ses genoux : il' lui a été impossible de distinguer le moment
où il a entièrement cessé de vivre.
•
Cette’ Claire Gilet est la femme de François Corre.
Peut-pn compter sur ce qu’elle dit avoir aperçu ? O11
verra bientôt- qu’elle trembloit elle-m êm e de tous sesi
membres;¿et ce qu’elle a cru sentir ou apercevoir peut
être l’effet de■
l'imagination effrayée: car, dans L’état où.
il paroît qu’étoient tous les assistans ; il ne seroit pas.
étonnant que le dépôt d’un cadavre sur ses genoux lui
eût inspiré de l’effroi. M^ais s’il est vrai qu’il n’y a qu’un»
point entre la vie et la m ort, et que ce point étoit im-r
perceptible pour le témoin lui-même , puisque Penfant»
est resté mort sur ses genoux sans qu’elle ait pu distinguer
le moment où il a cessé de v iv r e , de quel poids peut être
une déclaration aussi incertaine?
X^es cinquième et sixième témoins n’étoientpoint présens
à l’accouchement ; ils ne parlent que sur la relation qui
leur a été faite par le curé et quelques femmes, plusieurs
jours après les couches de Catherine Lafont. L eu r dépo
sition n’est donc d’aucune importance pour le fait dont
il s’agit ; et c’est à quoi se réduit l’enquête de Catherinel
Lafont.
L ’information faite à la requête- de l’appelant laisse
encore moins de doutes sur la mort de l’enfant. L e curé,
qui est le premier témoin , fut appelé un peu avant quatre
heures par M arie Bournet (. troisième témoin de l’en
quête ) , pour aller administrer le baptême à l’enfant,
�9
'
( * .)
q u i, lui dit-on, étoit cd danger de mort. Il‘ y. courut f
chercha.à s’assurer de son existence, le toucha; et,'.lui,
sentant un reste de chaleur, il crut dansjle doute, pouvoir
risquer lé sacrement de baptêm e, qu’il lui administra, à,
telle lin que de raison.
• .
.
.
Ce langage, annonce assez que le curé avait des doutes;
il s’exprime-.plutôt en homme religieux, qu’en, homme
instruit. Ce-reste de chaleur, avoit été contracté dans le;
sein de la m ère, et n’étoit point un signe de'.vie y il n e
couroit aucun.danger en administrant,le baptême, et remplissoit un devoir, en ne le donnant q u à tellefin que derai
son, Si la sage-femme lui a dit que l’enfant étoit né vivant;:s’il a rédigé ensuite les actes de .naissance et -do décès>
comme officier p u b lic, il ne l’a fait que sur la déclara
tion de François Corre et de l’aïeul maternel ; mais il n?en
étoit pas mieux, éclairé -, on.ne lui a pas même représenté»
ïenfantv - ;>•
-,
Il
résulte de la déposition de François C o rre , qu’it
n’étoit pas. présent à l’accouchement; qu’on l’est vemij
chercher dans sa vigne. On lui a annoncé que le curé,
étoit allé u la maison.de Catherine Lafont pour baptiser,
son enfant; ou lui a dit q,ue le cu ré , comme adjoint .et
officier public , le trouverait bon pour signer Pacte, sans,
expliquer s’il s’agissoit d’acte de naissance ou de décès.,
Il se rendit en effet en la maison de Catherine L afon t;
il vit l’enfant sur les genoux de sa femme. Il ne s’est nul
lement assuré par lui-même s’il étoit mort ou vivant; sa.
femme lui a dit qu’ il étoit vivant lorsqu’il est venu au.
m onde, et le même !soir il-est allé le déclarer ainsi à
1 officier public,. Quelle confiance doit-on avoir en. ces
�MX
M
3
•
( ° )
actes de naissance et de décès, dès que l’un des témoins
déclare qu’il ne savoit pas lui-même si l’enfant avoit eu
v i e , et lorsque celui qui l’accompagne est l’aïeul maternel
de l’enfant ? On ne conçoit pas même comment l’appelant
a pu avoir besoin de s’inscrire en faux contre ces deux
actes. Loin de chercher à les détruire il faut les conserver,
puisque ces deux actes ne sont faits que sur la relation
d’un témoin qui n’a rien v u , et d’un autre qui est inté
ressé k la chose. L ’enfant n’a pas été représenté ; l’oifiçicr
public ne sait rien et n’atteste rien par lui-même. Les
deux actes de naissance et de décès sont faits dans le même
instant ; et loin d’être avantageux à Catherine L afo n t, ils
tendent au contraire à prouver que l’enfant n’a pas eu un
moment d’existence.
L e troisième témoin de l’information est M arie Lafont y
femme Pignot; c’est elle qui a vu tomber les excrémens
avant que l’enfant parût : elle a regardé cette circonstance
comme un signe de dissolution. E lle a dit que l’enfant étoit
m o rt, parce qu’ellél’avoit déjà vu arriver ainsi, et qu’elle
avoit ouï dire que les enfans qui lâchoient ainsi leurs excrémens étoient morts avant de naître. L ’enfant a paru les
pieds premiers ; l’accoucheuse le lui a montré sorti jus
qu’aux reins ; elle lui fit signe qu’ il étoit mort ; elle lui
demanda de l’eau bén ite, et l’ondoya sur la partie du corps
qui étoit visible. L ’enfant a resté encore plus d’une demiheure à venir entièrement au monde. L ’accouchcuse lui
a dit : Entre la main du côté du cœur , et tu le lui sentiras
encore battre ; elle a répondu qu’elle ne s’y connoissoit
pas. Mais dès l’instant qu’elle a vu la partie du corps qui
jsortoit ainsi , lenfant lui a paru moi-t , ainsi qu’après
�11*•
( 31 )
qu’il a été venu au monde. Lorsqu’il a été entièrement
sorti, l’accoucheuse l’a frotté au visage avec de l’eau-devie , lui a mis les doigts dans la bouche, y a soufflé ; l’en
fant n’a donné aucuns signes de vie : la femme Corre l’a
pris sur ses genoux. Emue de l’idée que cet enfant pouVoit être m o rt, les genoux lui trembloient ; ce tremble
ment se communiquoit à l’enfant. La femme Corre disoit.
qu’il portoit signe de vie, et qu’il falloit l’envoyer à l’église
pour le faire baptisei\ Marie Lafont répondit qu’on seroit
mal re çu , si on portoit à M . le curé un enfant mort. La
mère n’étoit pas encore entièrement délivrée; elle s’écria :
M on enfant est peu t-rôtre .mort ! Pour la tranquilliser, on,
lui dit que non. L e cu ré, qu’on étoit allé chercher , est
ven u , a touché l’enfant à divers endroits, a pris de l’eau
bénite, l’a baptisé, et s’est retiré. L e nommé C orre,
qu’on a voit envoyé chercher, Ust aussi venu. Sa femme
lui a dit : Tu iras fa ir e fa ir e Pacte de cet enfant; ne man
que pas de dire que tu Tas vu vivant, parce qiCil üétoit.
Dans ce temps-là cependant on se mettoit en devoir de
l’ensevelir. D epuis, Catherine Lafont est venue la voir,,
et lui reprochoit qu’autrefois elle disoit que son enfant
étoit venu au monde vivant, et qu’actuellement elle disoit
qu’il étoit mort. Elle lui répondit : Nous te disions cela dans
le temps pour ne pas t’inquiéter dans l’état où tu étois.
On s’est appesanti sur cette déposition , parce qu’elle
est plus détaillée et plus circonstanciée que les autres. L e
témoin a mieux observé : plus rapproché de l’accou
cheuse , il a été à portée de tout v o ir , de tout remar
quer; et scs observations, ainsi que son récit, prouvent
a n en pas douter, qxie l’enfant n’a eu aucun instant de vie.^
�WK
^ * |4
3
( *)
'
L ’autre témoin est M arie Bournet, qui a été aussi enfendùe dans l’enquête, et qui ne fait que répéter sa décla
ration.
Il
n’en reste plus qu’un , qui est Marguerite L a fo n t,
veuve Bonncfoi; elle s’est trouvée dans la maison deCatlierine Lafont au moment de ses couches ; elle est cousine
germaine ; elle a rem arqué, lorsque l’enfant a commencé
a paroître, que la sage-femme témoignoit de l’inquiétude;
qu’elle a demandé de l’eau bénite pour l’ondoyer.Cependant
cette sage-femme a dit plusieurs fois qu’il avoit .de la vie.
Catherine Lafont a été à peu près une demi-heure sans
se délivrer. Lorsqu’elle l’a été , la sage-femme a frotté
. le visage de l’enfant avec de l’eau-de-vie ; e t, pendant
cette opération , la déclarante a remarqué que l’enfant a
fait un léger soupir. Elle l’a bien regardé comme signe
de v ie ; mais depuis elle ne lui en a vu donner aucun
autre,
.
Ce sont là les seuls éclaircissemens qu’on a obtenus sur
le fait important qui gissoit^en preuves. 11 faut en con
venir'; si de légers signes aussi équivoques pouvoient être
déterminans sur une question d’un si grand intérêt, la
fortune des citoyens seroit sans cesse flottante et incer
taine! encore les témoins ne sont-ils pas d’accord sur ces
signes si légers et si douteux. A la lecture des enquêtes,
on voit que le moment des couches de Catherine Lafont
fut un moment de terreur et d’effroi pour tous les assis
tons. Des femmes parentes et officieuses , ordinairement
si touchantes dans ces tendres soins , n’éprouvent que de
la répugnance et de la crainte; l’une refuse de toucher
l’enfant; l’autre éprouve un tremblement universel lors
qu’on
�14*
33
(
)
qu’on le dépose un instant sur ses genoux , et s’aperçoit
bientôt qu’elle ne tient qu’un cadavre. On ne s’occupe
que de la mère , on cherche à la rassurer par des paroles
de consolation : mais on a la conviction de la mort de
l’enfant. Dans les heureuses couches, l’instant de la déli
vrance est un moment de joie ; on n’éprouve que le plaisir
de voir naître son semblable ; et l’heureuse délivrance
d’une jeune mère de famille comble tous les vœux : on
l’environne, on la félicite ; elle est accablée de caresses.
La naissance de l’enfant est annoncée avec sensibilité :
c’est un jour de fête. I c i , au contraire , les assistans sont
consterne^ ;la mère est inquiète, un silence funeste l’épou
vante: elle s’écrie, M on enfant est m ort! On veut la ras
surer suivant l’usage ; on craint une révolution dans l’état
critique qui précède la délivrance : mais il est impossible
de feindre ; et les témoins, en rendant compte des détails,
ne présentent qu’un tableau de deuil et de douleur.
L ’enfant est né sans vie! voilà la seule induction qui
puisse résulter des enquêtes. Les circonlocutions, les hési
tations des témoins ne permettent pas de douter. On
plaint la m ère; mais on est convaincu que son enfant
est mort avant de naître.
- La succession de cet enfant pourroit-elle consoler une
m ère? A h ! que l’intérêt approche peu de ce sentiment
que la nature a gravé dans son cœ ur! et ce n’est qu’avec
l’œil du mépris qu’on doit envisager ce m otif du juge
ment dont est a p p el, portant « que Catliçrine L a fo n t,
* qui a été m ère, qui on a couru les dangers,doit être
« -consolée par la succession. » L e cœur n’a pas dicté ce
E
�’ ( 34 )
m otif absurde ; et dans les tribunaux , lorsque l’esprit
n’est pas convaincu, là finit le ministère du juge.
Loin de nous ces motifs de considéi-ation, qui nous
' jetteroient dans un arbitraire dangereux, et qui sont mar
ques au coin de la dépravation et de l’insensibilité.
Si on les envisage même sous le rapport politique, est-il
bien intéressant que les biens d’un individu passent dans
une famille étrangère, qu’ils aillent enrichir un second
époux aux dépens des héritiers légitimes (* ) : on ne voit
pas ce qu’y gagneroit la société ; on ne trouve pas de motifs
assez puissans pour faire fléchir la sévérité des lois , in
tervertir l’ordre des successions.
Les premiers juges se sont encore déterminés par la
circonstance que l’acte de naissance devoit faire foi. Mais
cct acte de naissance, que prouve-t-il ? L ’officier public, le
seul qui puisse donner par son caractère quelque authen
ticité à sa déclaration , n’atteste i’ien par lui-mêm e; il ne
'rédige que sur la relation d’autrui, sur le rapport d’un
aïeul intéressé qui n’a rien vu , rien entendu ; sur la dé
claration d’un homme qui a avoué n’avoir pas vu l’enfant
vivant.
Les information et enquête détruisent la déclaration
de François Corre , seul témoin à l’acte de naissance. L ’officier public, qui a encore la qualité de curé , n’est pas
même en état d’attester le fait ; il est dans l’incertitude ,
lorsqu’il remplit les devoirs de la religion dont il est le
ministre.
L o rsq u e le m ém oire étoit à l ’im pression, on a été instruit que
C ath erin e L a fo n t \enoit de contracter un second m ariage.
�35
(
)
II aperçoit, il sent un reste de chaleur ; il risque, dans,
le doute, le sacrement de baptême , à telle fin que de
raison. L ’acte de naissance rédigé par lui ne fait donc
aucune preuve, et ne devoit pas influer sur la décision
des premiers juges.
Jusqu’ici les jurisconsultes ont seuls raisonné d’après
les principes du droit et les assertions des auteurs les
plus accrédités \ ils croient avoir rempli leur tâche ; ils
se flattent d’avoir démontré que l’enfant de Catherine
Lafont n’étoit pas viab le, et n’a pu transmettre une suc
cession qu’il étoit incapable de recueillir. Les docteurs à
leur to u r , après avoir mûrement examiné l’information
et l’enquête, pensent que ces deux pièces ne donnent pas
Une solution satisfaisante.
Elles ont besoin d’une explication et d’un développe
ment puise dans les principes de la physique médicale,
afin d’atteindre ce degré de probabilités médico-légales
qui doit édifier les magistrats.
Pour répondre affirmativement ou négativement sur
la vie ou la mort de Venfant Lafon t au moment de sa
naissance, il est nécessaire d’exposer que la vie est un
mouvement continuel, successif et réciproque des solides
et des fluides de tout corps animé, formant l’ensemble des
fonctions qui résistent à la mort,
I^a vie se divise en animale et en organique.
La vie organique se compose d’une succession habi
tuelle de contractions, d’oscillations,’ d’assimilations, d’ex-
�( >u
C 3 6 )
crétions , qui fait rèjeter ou retenir les molécules des
corps qui peuvent servir ou nuire à son accroissement;
elle est indépendante de la perception ; elle est commune
aux animaux et aux végétaux (*).
La vie animale consiste dans la perception des sensa
tions nuisibles ou utiles, agréables ou douloureuses ; la
faculté d’exprim er par la vo ix articulée ou inarticulée,
ses désirs et ses craintes, ses peines et ses plaisirs.
Cette vie est le partage exclusif de tous les animaux ,
et constitue essentiellement leur existence.
P our déterminer si l’enfant Lafont a joui de l’une et
de l’autre v ie , les docteurs entreront dans l’analise de
l’information et de l’enquête, en s’attachant seulement
aux déclarations des témoins de visu.
L ’un a senti des restes de chaleur ; un autre a dit avoir
vu rendre des excre'mens avant la naissance complète ;
un autre propose de toucher le cœur , q u i l dit battre
encore ,* un autre dit avoir vu rendre un seul et dernier
soupir ; un autre dit avoir senti les pieds de l’enfant
remuer entre ses mains , ainsi que le mouvement du cœ ur,
lui avoir fait des frictions sur le visage avec de l’eau-dcv ie , lui avoir mis le doigt dans la bouche , y avoir soufflé,
et vu rendre un dernier soupir ; un autre dit avoir mis
l’enfant sur ses genoux , lui avoir lavé le visage avec de
l’e a u - d e - v ie , avoir vu remuer te bras et soupirer *
un autre enfin déclare- que les genoux de la femme sur
{*) Bichat, Rrcclicrches physiolog. sur la vie et la mort.
�MO)
37
(
)
lesquels étoit placé l’enfant lui trembloient de pour, et que
ce tremblement s’eloit communiqué à l’enfant.
Ge tremblement de genoux ainsi communiqué à l’ènfant, ne peut-il pas en avoir imposé pour un mouvement
qui lui fut personnel ?
Quelles inductions tirer de ces déclarations? Les signes
de vitalité qui en résultent n’indiquent autre chose qu’un
reste de contractilité et d’irritabilité, attributs, de .la vie
organique, mais indices de la cessation encore récente de
la vie animale.
Parmi les signes les plus saillans de cette contractilité
organique , il faut compter les déjections dés matières
fécales dont il est parlé, dans les dépositions , long-temps
avant la sortie de l’enfant du sein dç sa m ère, annoncées
par l’un des témoins comme symptôme de mort.
Les signes non équivoques de la vie animale consistent,
comme on l’a d it, dans la perception des sensations nui
sibles ou utiles, etc. Si l’enfant Lafont eût épx*ouvé le
contact de l’air atmosphérique sur la surface du corps ;
si ses poumons eussent eu la force de supporter le volume
d ’air nécessaire pour la respiration , première fonction de
la vie animale, il l’auroit exprimé par les cris toujours
naturels aux nouveaux nés ; aucunes déclarations ne font
«îention de ces cris; quelques-unes seulement parlent
d un dernier soupir, d'un léger soupir : mais ce dernier
mouvement expiratoirc, atonique et passif, n’est point la
respiration.
La respiration se compose du double mouvement actif
�133
(
)
de l’inspiration, et passif de l’expiration : un dernier
soupir , un léger soupir, doivent donc être considérés
comme le dernier mouvement expiratoire passif, propre
ment dit expiration dernière, ou la m ort, et peut-être
encore comme l’effet de l’insuflation..........
Tous les signes de vitalité qu’on peut recueillir de l’in
formation et de l’enquête , ne sont que des indices de
contractilité et d’irritabilité, attributs de la vie organique,
tels qu’on les observe sur les cœurs nouvellement arrachés
du sein des animaux , sur les têtes récemment séparées
de leurs troncs , sur les chairs encore palpitantes des ani
maux pendus à la boucherie, sur les trachées-artères ou
l’arynx des oies, que les enfans insufflent dans les rues
pour en tirer un bruit semblable aux cris de l’oie ; tels
enfin qu’on les excite, par les nouveaux procédés galva
niques , sur tout ou partie des animaux morts depuis
peu.
Si la distinction que les docteurs viennent d’établir
étoit arguée de subtilité métaphysique, ils répondront
qu’elle est reconnue par tous les physiologistes modernes;
q u e, puisée dans la nature, elle doit être consacrée par
la loi ; et qu’au commencement du siècle dernier cette
grande vérité fut pressentie par Paul Zacliins, dans son
fameux Traité sur les questions médico-légales. Cet auteur
s’exprime en ces termes: P r o mortuo habetur, qui vi-r
çere non potest.
Par tous ces motifs , le conseil estime que si l’enfant
Lafont a porté en naissant quelques restes de vie orga
nique, il n’a pas joui dçs conditions qui çonsituenl la vio
�IM
39
C )
toute entière ; e t , pour s’expliquer plus nettement, qu’il
est mort avant d’être né.
D
é l i b é r é
8 5
à R io m , le 24 novembre 1 o .
P A G E S (de R io m ), B A R T H E L E M I ,
ancien avocat.
doct. en méd.
ANDRAUD,
anc. av .
D E VAL,
anc. av.
GRANCHIER,
anc. av.
C H O S S IE R ,
doct. en méd.
G E R ZA T,
doct. en méd.
M e. V E R N I È R E , avoué licencié.
A R I O M , de l’im prim erie de L
andriot,
seul im prim eur de la
C o u r d ’appel. — F rim aire an 14.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Lafont, Gilbert. An 14]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Bartelemi
Andraud
Granchier
Chossier
Deval
Gerzat
Vernière
Subject
The topic of the resource
posthume
successions
viabilité nouveau-né
médecine légale
accouchement
témoins
vices de forme
actes de naissance
faux
sage-femme
baptême
experts
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire et consultation pour Gilbert Lafont, propriétaire, aubergiste de la commune de Néris-les-Bains, appelant de jugement rendu au tribunal de Montluçon, le 14 nivôse an 13 ; Et encore pour Jean Bournet, Marie Lafont, sa femme ; appelans d'un jugement rendu au même tribunal, le 19 ventôse an II ; Contre Catherine Lafont, veuve et commune de Gilbert-Marie Lafont, habitante de la même commune de Néris-les-Bains, intimée.
Table Godemel : Viabilité : à quels signes peut-on reconnaître qu’un enfant est né vivant ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 14
1801-An 14
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1506
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0323
BCU_Factums_G1508
BCU_Factums_G1507
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53246/BCU_Factums_G1506.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Néris-les-Bains (03195)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
accouchement
actes de naissance
baptême
doctrine
experts
Faux
médecine légale
Posthume
sage-femme
Successions
témoins
viabilité nouveau-né
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53247/BCU_Factums_G1507.pdf
41c22927303d1dd7adfe05ab3aa1ad73
PDF Text
Text
CONSULTATIONS
MÉDICALES
d
'appei
D E RIOM
POUR
G ilbert
L A FO NT,
appelant ;
CONTRE
Catherine
L A F O N T , et L
P E T A U T O N , son mari
L
e
ouis- A u guste
,
intimés.
CONS EI L S O U S S I G N É , consulté su r les
signes qui constatent évidemment qu’un enfant est né
vivant,
E
s t i me
COUR
qu’il ne faut s’arrêter qu’à ceux qu’on
aperçoit sur l’enfant entièrement sorti du ventre de la
A
�mère : tout ce qui se passe pendant ¡’accouchement
n’étant pas mouvement propre de l’enfant, il ne regarde
pas la clialeur du corps de l’enfant comme un signe
notoire qu’il est sorti vivant : le cadavre la conserve
long-temps. Il faut donc pour constater Lien sûrement,
bien légitimement la vie du nouveau n é , qu’on aperçoive
le jeu du poumon, le mouvement alternatif d’inspiration
et d’expii’ation ; que la circulation du sang soit soute
nue ; qu’il y ait dilatation et contraction alternative du
cœur et des artères : ce qui n’est pas assuré par unrseul
battement de cœur qui peut s’apercevoir, même dans
un cœur détaché de la poitrine.
L e conseil pense donc que quand la certitude que
l’enfant a respiré , que le sang a circulé, n’est pas consta
tée par un homme de l’art, le signe univoque et seul in
contestablement sûr de la vie du nouveau n é , est le cri,
le vagitits si désiré par les m ères, et si bien entendu
par elles, que par ce cri la plupart connoissent le sexe
du nouveau né.
DÉLIBÉRÉ
à,C lerm o n t-F erran d , ce 14 frimaire
an 14.
M O N E S T I E R , D . iV. M .
D U L A C , V . M. M.
�us
(3)
J
e
SO U SS IG N É , docteur en chirurgie, après avoir
lu attentivement le mémoire de Gilbert L afon t, tendant
à prouver que l’enfant en question n’est pas né vivant,
P
ense
q u ’il ne p e u t y a v o ir de doute à cet é g a r d ,
et q u ’il p a r o ît, d’après les faits m ê m e , que cet enfant
a p éri dans le travail de l ’accoucliement.
L ’absence des m ouvemens, celle des cris qu’il jette
ordinairement; l’absence de la ligature du cordon om
bilical , absence qui peut être présum ée, puisque la
sage-femme n’en parle pas : ligature qu’elle n’auroit
pas manqué de faire , si elle eût cru l’enfant vivant ,
sont une masse de présomptions en faveur de sa mort.
Quant à la chaleur de son corps , seul^ m otif qui a
déterminé le prêtre à lui administrer le baptême , il
n’est personne qui ne sache que la chaleur n’est pas
la vie , et qu’elle se conserve encoi’e plus ou moins
long-tem ps, suivant l’individu et le genre de mort.
Personne ne parle de l’avoir vu respirer , d’avoir
senti les battemens du cœur ou des artères •, et certes,
si ces signes avoient existé, il en auroit paru d’autres
plus décisifs en core, tels que les mouvemens des pau
pières , de la bouch e, des m em bres, l’éternument et
les cris. Que n’a - t-o n pas fait pour le rappeler à la
v i e ? Les frictions avec l’e a u -d e -v ie étoient un bon
A z
“t
�(4)
m oyen, mais on pouvoit en ajouter d’autres; et si on
les a négligés, c’est parce qu’on les a jugés inutiles.
Les battemens du cœur qu’on a sentis dans le mo
ment de Paccoucliement, ne peuvent prouver que l’en
fant a vécu après sa naissance , mais seulement qu’il
vivoit un moment aupai'avant, avant d’etre débarrassé
des liens qui l’unissoient à sa mère ; et que la demiheure qui s’est écoulée depuis l’instant où la sagefemme a senti les battemens du c œ u r , jusqu’à celui
de la naissance , a été plus que suffisante pour qu’il
pérît : et on en sera d’autant plus convaincu, si l’on
jette un coup d’œil sur la manière dont s’opère l’ac
couchement par les p ied s, qui est le cas de l’enfant
dont il s’agit.
Cet accouchement s’opcx-e par les seules forces de la
nature, 011 par l’art. Dans le premier cas, l’enfant est
chassé jusqu’au-dessous des bras; mais alors le volum e »
de la tete et des bras oppose une plus grande résis
tance , et le cordon ombilical qui se trouve placé sur
les parties latérales de la tete de l’enfant, souifre une
compression qui intercepte la circulation de la mère
à l’enfant, qui est le seul moyen d’existence de ce der
nier. O r , on conçoit que s’il tarde quelque temps à
sortir, cette compression le fait périr nécessairement.
Si l’art vient au secours de la mère et de l’enfant, i l
�/ ■
JP
( 5 )
clierclie à rendre sa sortie plus prom pte, en tacliant
d’abord de dégager' les bras l’un après l’autre : reste
ensuite la tête, qui remplit alors exactement la cavité
du petit bassin , et exerce toujours sur le cordon une
compression funeste, pour peu qu’elle dure. 11 faut
donc
que l’accoucheur emploie une force suffisante
pour la sortir le plutôt possible ; et il ne peut pai'venir à ce but, qu’en tirant sur le corps de l’enfant;
mais il faut que ces efforts se fassent en ligne directe,
et soient calculés sur le degré de force des ligamens et
des muscles qui unissent la tête de l’enfant à son tronc,
sans quoi on court le plus grand risque, ou de le dé
coller, ou de luxer la première vertèbre sur la seconde:
de là , rupture de la moelle de l’épine, et mort subite.
Si ces accidens arrivent quelquefois entre les mains
de gens habiles, à plus forte raison combien ne doiton pas les craindre, lorsque l’accouchement est livré
aux mains d’une femme dont l’ignorance ne peut être
révoquée en doute, puisqu’elle ne sait ni lire ni écrire.
E t qui peut répondre que la mort de l’enfant n’ait
été occasionnée ou par les mauvaises manœuvres de la
sage-femme, ou par la compression qu’a éprouvée le
cordon ombilical en restant comprimé pendant demiheure que la tête a resté engagée dans le bassin. L ’ac
couchement a dû encore être d’autant plus pénible, que
�(6)
c’étoit le prem ier, et que les parties ont dû offrir plus
de résistance.
J ’espère que
ces réflexions sont du plus grand
poids, et méritent d’etre prises en considération.
Peut-on regarder comme un signe de vie cet unique
et léger soupir que l’on croit avoir entendu faire à
l’enfant, dans le temps qu’on lui administroit des fric
tions sur la figure? N ’est-il pas plus naturel de penser
que ce n’étoit qu’un mouvement mécanique imprimé
par le frottement sur des parties jouissant encore de toute
leur élasticité, et par lu compression que l’on a pu
faire sur la poitrine de l’enfant, en lui administrant
ces secours. J ’en dis autant du mouvement du bras»
qu’on a cru apercevoir : une position sur un plan non
horizontal, comme les genoux, suffit pour en rendre
raison , sans avoir recours à line action vitale qui
n’existe pas. On ne peut donc de ces diiférens mouvemens en conclure que l’enfant étoit vivant.
Pour me résumer, je pense qu’un enfant ne peut être
censé vivant, tant qu’il est encore dans le ventre de sa
m ère; que les seuls signes positifs qui annoncent la vie ,
lorsqu’il est né, sont les mouveinens bien distincts et répé
tés des membres , des paupières, de la bouche, l’étcrnument, la respiration, les battemens du cœur et des
artères, et les cris. L ’enfant dont il s’agit n’a donné
�( 7 )
aucun de ces signes Lien évidens ; en conséquence il
me paroît prouvé qu’il a péri dans le travail de l’accou
chement ; et on ne peut pas dire qu’il est né vivant ,
puisqu’il est mort avant de naître : la naissance ne datant
que du moment où l’on respire, et où l’on commence
à sentir les influences de l’air atmosphérique.
D
é lib é r é
à Clerm ont-Ferrand, le 8 janvier 1806.
C I I O M E T , D . Ch. P .
D u même avis , par les mêmes motifs.
A Clermont-Ferrand , le 8 janvier 1806.
DULAC,
;D. M . M .
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d r io t , seul imprimeur de la
Cour d ’a p p e l.— Janvier 1806.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Lafon, Gilbert. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Monestier
Dulac
Chomet
Subject
The topic of the resource
posthume
successions
viabilité nouveau-né
médecine légale
accouchement
témoins
vices de forme
actes de naissance
faux
sage-femme
baptême
experts
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultations médicales pour Gilbert Lafont, appelant ; contre Catherine Lafont, et Louis-Auguste Petauton, son mari, intimés.
Table Godemel : Viabilité : à quels signes peut-on reconnaître qu’un enfant est né vivant ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1801-1806
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1507
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1506
BCU_Factums_G1508
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53247/BCU_Factums_G1507.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Néris-les-Bains (03195)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
accouchement
actes de naissance
baptême
doctrine
experts
Faux
médecine légale
Posthume
sage-femme
Successions
témoins
viabilité nouveau-né
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53248/BCU_Factums_G1508.pdf
bbdb16b80d8877ae69743f114aa845cb
PDF Text
Text
M
E
M
O
I
R
E
D ’A P P E L
EN
R É P O N S E ,
POUR
C a th erin e
LAFONT,
et L o u i s - A u g u s t e
P E T A U T O N , son mari, habitant à Néris-lesBains, intimés;
C O N TR E
LA FO N T, J e a n -B a p tis te B O U R N E T , J e a n F O R I C H O N , M a r i e et autre
G ilb e r t
L A F O N T leursfemmes habitant aussi
à Néris, appelans.
M a r ie
Ce n' etoit pas une assez grande douleur pour une m ère
d avoir perd u, en quelques mois d’intervalle , son époux
et son enfant; il a fallu q u e pour satisfaire l’avidité de
A
deriom.
�• ■\
* >'
'
( o
quelques collatéraux, elle fût contrainte d’entendre encore
les plus m inutieux détails de ce douloureux sacrifice, et
d’en peser scrupuleusement toutes les circonstances.
Il étoit consolant pou r elle de penser que sa fille avoit
eu rang parmi les enfans des hom m es, et que des mains
de la religion elle étoit descendue heureuse dans le tom
beau : mais l’intérêt ne com pte pour rien les opinions
et les mouvemens de la nature; il ne respecte pas plus la
cendre des morts que le repos des vivans.
Cependant si les tribunaux sont obligés de tolérer d’in
discrètes recherches, ce ne peut être q u’avec un sentiment
d’indignation qui force à désirer qu’elles soient infruc
tueuses; et sans doute toute la rigueur de l’examen est
réservée à ceux q u i, attaquant les actes les plus sacrés,
s’ imposent la tâche de les anéantir.
Cette vérité a servi de base à la décision des premiers
juges. P o u r arguer de faux un acte de naissance , les
appelans s’étoient soumis à p rou ver que l’enfant de Ca
therine L afon t étoit né m o rt; mais ils n’ont présenté que
des doutes au lieu des faits positifs qu’ils avoient annoncés.
D e sa p art, au con traire, l’intimée/a établi clairem ent la
vérité de l’acte de naissance qui faisoit son titr e , et q u i,
pour faire pleine C-i entière fo i, n’auroit eu nul besoin de
preuve auxiliaire.
Néanm oins les appelans ne se sont pas jugés vaincus;
et le secours qu’ils n’ont pu trouver dans leurs enquêtes,
ils l’ont cherché dans des consultations de médecins dont
l ’opinion auroit été sans doute bien puissante s’ils avoient
vu , mais qui ont été réduits à ne présenter que des
hypothèses et des incertitudes, et, sur la foi de quelques
�¡¿y
(3)
faits insignifians, à 'présumer que l’enfant pouvoit elre
venu au m onde sans vie.
A u reste, la cour ne se rendra qu’à sa propre con
viction dans une cause entièrem ent réglée par les lois
civ ile s, et encore plus claire par les faits dont on va lui
rendre compte.
F A I T S .
Catherine Lafont ép o u sa,le 14 brum aire an 10, GilbertM arie L a fo n t, son cousin.
Seule h éritière de son p è re, qui lui abandonnoit dèslors tous ses b ie n s, elle fut assez heureuse pour offrir à
son époux un sort avantageux. Quant à lu i, il avoit vendu
tous ses droits successifs à G ilbert L a fo n t, son frère ,
partie adverse, pour une somme m odique de 10000 fr.
Les ép oux stipulèrent un gain m utuel d’ usufruit, en
cas qu’il n’y eût pas d’enfans survivans.
Ce mariage n’a duré que dix mois et dem i; et le 27 fruc
tidor de la même an née, la f o n t est m ort à vingt-trois
a n s, laissant sa jeune veu ve enceinte de six mois.
A u terme de ses couches elle app ela, outre une sagefem m e, des pareutes ou des amies; m ais, loin de sup
poser qu’elle pouvoit survivre à son enfant , plus loin
encore d’avoir réfléchi que cette survie lui donneroit
une succession , le hasard a voulu qu’elle 11e s’entou
rât que de la fam ille de son mari : c a r , depuis sa dou
loureuse perte , c’étoit là sa société habituelle , pour
chercher des consolations dans ses entretiens et dans ses
souvenirs.
A
2
�( 4 )
Ses couches furent extrêm em ent 'laborieuses ; mais
n’ayant éprouvé aucune incom m odité pendant sa gros
sesse, la vigueur de son âge seconda la nature, et elle
m it au monde une fille.
Il n’est que trop vrai que cette malheureuse enfant
a voit cruellem ent souffert de ces efforts. Ses m ouvem ens,
prolongés jusqu’à sa délivrance , indiquoient le besoin
du repos; car la m ême fatigue qui accabloit la mèi*e dût
à plus forte raison agir sur une foible créature, qui avoit
besoin du plus grand x*epos pour échapper à la mort.
M ais la raison ne cède que trop souvent aux procédés
de l’habitude. O n tourm ente les enfans sous prétexte de
les soulager, et le souffle de vie qui les anime est quel
quefois incapable de résister à ces ¡prétendus soulagemens.
O n suivit donc pour l’enfant de Catherine L afont la
•m éthode ordinaire. L e cordon om bilical co u p é, on cher
cha du vin pour lui frotter le visage et réparer ses forces;
on ne trouva que de l’e a u - d e - v ie , et on ne l’em ploya
pas moins au m êm e usage. L e résultat du remède ne fut
pas aussi heureux qu’on l’a voit pensé : les muscles du
visage se contractèrent, la respiration repoussée se dilata
par des soupirs, l’enfant remua les b ras; mais ce n’étoit
là qu’ un dernier effort de la nature, bientôt la vie acheva
de s’éteindre.
Pendant que l’enfant luttoit encore contre la m ort, le
curé fut m andé; et quoiqu’ il n’arrivât que lon g-tem p s
après l'accouchement , il ne trouva pas moins à cette
enfant des signes de v ie , car il lui administra le baptêm e,
quoique la sage-femme lui eût rapporté l’avoir déjà 011doyée par précaution.
«
�(
5 )
A p rès le baptêm e, le curé se retira pour aller faire
l’acte de naissance ; car il étoit aussi adjoint et officier
public : il ch o isit, avant de p a r tir , ses deux témoins.
Ces témoins, en effet allèrent à la m airie , et on les
renvoya au lendemain. Comm e alors l’enfant étoit m ort,
les deux actes furent faits l’un à la suite de l’a u tre , le
>21 frim aire an n .
Catherine L afont étoit h éritière de son enfant par la
loi du 17 n iv ô se , ce qui avoit dû p eu t-être exciter la
jalousie des adversaires.
11 est naturel qu’ils fussent plus occupés de cette suc
cession qu’elle-même;. et tout ce qui s’étoit passé devoit
leu r être con n u , puisque Catherine L afon t, comme elle
vient de le d ire, avoit été entourée de la fam ille de son
m a ri, c’est-à-dire, de la fam ille des adversaires : la sngefemme elle-m êm e étoit leur tante. N éanm oins, et dans
cet instant m alheureux où le sacrifice de sa fortune lui eût
été totalement in d iiféren t, aucun des adversaires n’ima
gina d’élever le m oindre doute sur un acte de naissance
q u i, dans une petite com m une, et d’après ce qui s’étoit
passé, n’avoit été un secret pour personne.
T ro is mois se passèrent, et les adversaires laissèrent
prendre à la veuve la récolte de quelques vignes dépen
dantes de la succession : après ce tem ps, ils jugèrent con
venable de com m encer sourdement les hostilités.
Comm e G ilb ert L afon t avoit acheté les droits de son
déiunt frè re , dont la succession étoit créancière du prix
de ces droits céd és, il se fit faire une saisie-arrêt par ses
beaux-lrères Bournet et F o ric h o n , dans la vue d’embar-
�(6 )
rassct* Catherine L a fo n t, et n’osant pas lui-m êm e com
m encer le procès.
G ilbert L a fo n t, fit encore en ses propres mains une
saisie-arrêt, sans titre ni autorisation; et on en fit une
troisième ès-mains du sieur S o u lie r, n o ta ire , débiteur
de la succession.
L e prem ier sentiment de la veuve L afon t fut d’être in
dignée d’une conduite qui paroissoit fondée sur un soup
çon injurieux pour elle; dès-lors elle ne voulut plus rien
m én a ger, et poursuivit ses adversaires en payement et
m ain-levée de saisie, le 12 ventôse an 11.
A lo rs G ilb ert L afon t fut forcé de s’ex p liq u er, et il crut
l’intim ider davantage en s’inscrivant en faux contre les
deux actes de naissance et de décès ci-dessus rappelés :
mais Catherine L afont lui fit signifier sur le cham p la dé
claration expresse qu’elle entendoit se servir de ces deux
actes, et G ilb ert L afont fut obligé de donner suite à sa
procédure. G ilbert L afont présenta les faits par lui arti
culés, et offrit de prouver que l’enfant étoit m o r t- n é ,
ayant la pâleur sur son visage, les yeux ferm és, et que
tous les assistans s’écrièrent : V o ilà un enfant m o rt;
que l’adjoint n’avoit pas vu l’en fa n t, et n’avoit rédigé
les actes que sur la déclaration de deux témoins.
E n vertu de jugement du 3 floréal an 1 1 , G ilbert
L afon t fit entendre cinq témoins.
est essentiel de re
m arquer qu’il alfecta de ne pas appeler celui qui devoit
donner plus de lum ières, la sage-femme. Quant à ceux
11
entendus à sa req u ête, voici ce qu’ils ont déclaré.
L e prem ier témoin est le c u ré -a d jo in t, qui a adinU
�tér
(?)
nistre le baptêm e et fait l’acte civil; A v an t le bapteme
il a touché l’enfant et lui a, senti de la chaleur.
L e second tém oin , F ra n ço is C o r r e , ne sait pas si
l’enfant étoit vivan t ou m ort.
L e troisièm e, M a rie L a fo n t , fe m m e P ig7tot, la plus
proche parente des adversaires, sait tou t, et a connu que
l ’enfant étoit m ort à l’éjection de ses excrém ens. L a sagefemme lui fit signe qu’il étoit m o rt; elle lui dit aussi de
toucher le coeur de l’enfant pour sentir qu’il b a ttoit, mais
le tém oin répondit qu’il ne s’y com ioissoit pas. L a sagefemme lava l ’enfant, et lui m it les doigts dans la bouche;
il ne donna aucun signe de vie. Puis la femme C orre le
p rit sur ses genoux , et ses genoux trem blèrent par la
crainte qu’elle avoit de la m ort de l’en fan t, et ce trem
blem ent se com m uniquoit à l’enfant. L e curé v i n t , le
toucha h divers en d ro its, et le baptisa
puis la femme
Corre dit à son m ari d’aller faire faire l’acte de naissance,
et de ne pas m anquer de dire au curé ( q u i venoit de
sortir) que l’enfant étoit né vivant. A p rès cela elle avoue
qu’elle a dit e lle -m ê m e à la m ère que son enfant étoit
vivant, mais que c’étoit pou r la tranquilliser; et que lors
qu’elle a vo u lu dire autrem ent, L ou is L afont lui a fait
beaucoup de menaces.
L e quatrièm e tém o in , M a rie B o u r n e t, ne sait rien
par elle-m êm e ; elle confirm e la proposition faite par la
sage-femme à la P ign o t de toucher les battemens du cœur,
et la réponse de celle-ci qu’elle ne s’y connoissoit pas.
Enfin elle a ouï dire dans la maison que l’enfant étoit
vivant.
L e cinquièm e tém oin , M arguerite L a f o n t , veuve
�*iU
v " - 1
(8)
I
H o n n e fo i, a vu la sage-femme in q uiète, lorsqu’elle de
manda de l ’eau bénite pour ondoyer l’enfant; cependant
elle a dit plusieurs fois qu’il étoit vivant. Quand on a
frotté le visage de l’enfant avec de l’eau-de-vie, elle a
rem arqué qu’il a fait tin léger so u p ir , ce qu'elle a re
gardé comme un signe de v ie ,• elle n’en a pas remar
q u é d’autres.
Cette enquête, comme le disent très-bien les adversaires,
étoit parfaitement in u tile; et en effet il n’y avoit rien de
moins p rou vé que le faux m atériel de la naissance de
l ’enfant. Q uatre témoins attestoient plutôt la vie que la
m ort ; un seul attestoit la m ort par ses p aroles, et ce
qu’il a indiqué pou r la prouver donne plutôt à présum er
!
pour la vie. Les faits du baptêm e et de la naissance restoient donc dans toute leur force.
N éanm oins, et par surabondance, Catherine L afon t
vo u lu t aussi faire une enquête; et il ne faut que la parcourir pou r être convaincu de la vie de l’enfant,
j
L e prem ier témoin est la sage-fem m e ; elle sentit les
'
mouvem ens de l ’enfant dans ses mains : elle sentit les
pulsations du cœ u r, et proposa à la femme P ign o t d’y
toucher. Quand l ’enfant fut sorti elle ne sentit plus de
m ouvem ent, c’est pourquoi elle demanda du vin. O n lui
porta de l’e a u - d e - v i e , et quand elle en passa sur le
visage de l’enfant, il lit un soupir. A lo rs ayant à s’occu
per de la m è re , elle a remis l’enfant à la femme C orre
(quatrièm e témoin ci-après). E lle avoit ondoyé l’en faut;
Je curé est venu et l’a baptisé.
L e second tém oin, F ra n çois D u r i n , a soupe avec lo
!
curé le soir des couchas. L e curé dit avoir vu l’enfant,
avoir
f
i
�avoir touclié son estom ac, senti de la ch a leu r, cru re
marquer de la v ie, et baptisé l’enfant.
L e troisième témoin est M a rie B o u r n e t, déjà entendue.
L e quatrièm e tém oin, la fem m e C o rre , a gardé l’en
fant sur ses genoux après que la sage-femme eut fait les
frictions d’eau-de-vie au visage ; elle a elle-m êm e lavé
l ’enfant avec du v in , lu i a v u rem uer les bras trois ou
quatre fo is, lu i a senti battre le cœ u r , a distingué des
rnouvemens au visage quand on y passoit du vin , a re
m arqué que l’enfant soupiroit ; mais il est m ort sur ses
g e n o u x , sans q u’elle ait pu distinguer l’instant où il a
cessé entièrem ent de vivre.
L e cinquièm e tém oin, Q u illem in , a soupé avec le curé
quelque temps après les couches. Il dit qu’il avoit exercé
ses fonctions en baptisant l’enfant, ce qiüïl n 'a u roit pas
f a i t , s ilii eût cru s être assuré de son existence. La sagefemme a dit encore au tém oin que l’enfant étoit venu
au monde v iv a n t, et qu’elle l ’a voit ainsi déclaré à son
confesseur.
L e sixièm e té m o in , Georges F o riclio n , a ouï dire au
curé qu’il avoit senti de la chaleur à l’en fan t, et admi
nistré le b ap têm e, sans p o u voir assurer qu’ il fût vivant.
Il a ouï dire à plusieurs femmes que la Pignot (c e lle
qui a dit l’enfant m ort ) avoit dit qu’ il étoit né vivant ;
et qu’elle-m êm e, femme P ig n o t, lui avoit vu plusieurs
fois porter les bras à la tête , et avoit rem arqué plu
sieurs autres signes de vie.
L e 14 niyôse an 13 les parties en sont venues à l’au
dience où il ne s’agissoit que d’opposer l’acte de naissance
u 1 enqucle d irecte, et m ême les enquêtes entr’elles. 11
B
�est vrai que le procureur im périal vouloit renvoyer la
décision à deux docteurs en médecine et en ch iru rgie,
mais le tribunal de M ontluçon ne pouvoit se rendre à
cette opinion qui n’en étoit pas u n e; en conséquence,
après avoir pesé toutes les dépositions et la force des prin
cipes, il a fait droit aux parties par le jugement qui suit.
« Considérant que tous les actes de l ’état civil font
« foi jusqu’à inscription de faux ; qu’il est établi par un
« acte extrait des registres de la commune de N éris, que
« l’enfant de Catherine L afont est né à trois lieures et
« dem ie, le 21 frim aire de l’an 11 ; qu’ il est établi par
« un autre acte que le même jour le même enfant est
« décédé à quatre heures après m id i, c’est-à-dire, demi«
«
a
«
«
heure après sa naissance; qu’ainsi il est prouvé par actes
authentiques que l’enfant est né vivan t; que pour détruire ces deux actes, G ilbert L afon t a pris la voie
de l’inscription en faux incident; que par conséquent
il s’est imposé la tâche de prouver que cet enfant étoit
« m ort avant que de n aître; et il s’agit d’exam iner s’il
« l’a rem plie ; que le prem ier tém oin par lui produit
«
se
«
«
«
«
«
a senti un reste de chaleur à l’en fan t, et lui a admi
nistré le baptême à telles fins que de raison, a ensuite
in terro g é, comme oilicier p u b lic, l ’accoucheuse qui
lui a attesté que l’enfant étoit né v iv a n t; que le secon d , quoique témoin dans les deux actes, a déclaré
ne s’être pas assuré par lu i-m ê m e de l'existence de
l’enfant; que le troisième a toujours regardé l’enfant
« comme m ort avant que de naître; qu’il l’a jugé ainsi"
« aux exçréinens qu’il a vu tom ber, aux signes que la
« sage-femme lui a faits ; que cependant la même sage-
�tu
( II )
« femme lu i a dit que le cœur de l ’enfant battoit encore,
(< lui a proposé d’y porter la m ain , ce qu’il n’a voulu
« fa ire; qu’après qu’il fut entièrem ent sorti du ventre
« de la m ère, il ne lu i a rem arqué aucun signe de v ie ,
« quoique la sage-femme l’ait frotté avec de l’eau-de-vie,
« lu i ait mis les doigts dans la b ou clie, et y ait soufflé;
« que le quatrièm e ne s’est pas assuré par lui-m êm e si
« l ’enfant avoit vie après sa naissance, mais qu’il a en« tendu dire dans la maison qu’il étoit encore v iv a n t;
« que le cinquièm e lui a v u faire un léger soupir qu’il
« a regardé comme un signe de v ie ;
« Q ue de ces cinq témoins , le troisième est le seul
« qui soutienne que cet enfant étoit m o r t, parce qu’il
« le pensoit ainsi d’après la chute des excrémens et les
« signes de l’accoucheuse ; cependant cette m ême acçou« clieuse a dit ensuite que le cœur de l ’enfant battoit,
« a proposé au tém oin d’y porter la m a in , ce qu’il n’a
« vo u lu fa ire , disant qu’il n’y connoissoit pas.
« Considérant. que le prem ier tém oin a senti de la
<c chaleur à l’enfant, a interrogé l’accoucheuse, qui lui a
« attesté que l ’enfant étoit né viva n t; que cette m êm e
« accoucheuse l’a ainsi déclaré lorsqu’elle a été appelée
« en tém oignage par Catherine Lafont; que le quatrièm e
« témoin a ouï dire dans la m aison, après la naissance
v de l’enfant, qu’il avoit encore de la vie ; que le cinct
“
«
«
«
quième lui a vu faire un soupir qu’il a pris pour un
signe de v ie ; que de l’ensemble de ces déclarations il
résulte plutôt que l’enfant a vécu après sa naissance,
qu il n’étoit mort avant que de naître; qu’ainsi G ilbert
L afon t n’a pas détruit les deux actes de naissance et
B 2
�111.
,y
k
«
«
«
«
( 12 )
de d écès, ainsi qu’il se l ’étoit ptoposé ; qu’on en est
d’autant plus convaincu quand on considère que le
quatrième tém oin ouï à la requête de Catherine L a fé h t,
à qui l’accoucheuse rem it l’en fan t, pour donner des
soins à la m ère, a confirmé la déclaration de cette sage-
« fem m e, lui a v u battre le cœ u r, lui a distingué des
« mouvem ens dans le visage, et a rem arqué qu’il sou«
«
«
«
p iro it; que d’ailleurs il paroît constant que cet enfant
étoit parvenu au terme prescrit par la nature; q u ’il
n’a apporté au monde aucun vice de conform ation ,
ni aucun signe de putréfaction; que ces dernières cir-
« constances, jointes aux actes de l’état c iv il, aux décla« rations des tém oins, doivent suffire pou r constater là
« vie de l ’enfant, ou au moins le faire présum er vivan t;
« de m anière que Catherine L a fo n t, qui a été m è r e ,
« qui en a couru les dangers, qui a perdu son enfant,
« doit obtenir la consolation que la loi lui accorde.
« L e tribunal déboute G ilbert L afont de sa demande
« en inscription de fa u x , le condamne en l’amende de
« 60 francs, consignée conform ém ent à l’ordonnance de
« 173 ?) et aux dépens. Fait et jugé à M on tlu çon , le 14
« nivôse an 1 3 , etc. »
A p rès ce jugem ent, Catherine Lafont en a obtenu un
second le 23 ventôse su ivan t, lequel prononce la m ain
levée des saisies-arrêts, et condamne G ilbert L afont à
payer ce qu’ il doit au défunt.
Quant aux Forichon et B ournet, autres parties, il avoit
déjà été rendu contre eux un jugement le 19 ventôse
an 1 1 , prononçant aussi contre eux la main - levée de
leur saisie-arrêt \ niais ils avoient gardé le silence en
�/■ *»
3
( i )
attendant l ’événement de l ’inscription de faux que G ilbert
L a fo n t, débiteur, avoit seul osé hasarder. G ilbert L afont
a interjeté appel du jugem ent du 13 nivôse an 1 3 ; les
autres parties ont interjeté appel de celui du 19 ventôse^
an 11 : et quoiqu’ils ne se soient pas réunis en prem ière
instance, ils ont fait joindre leurs appels.
M O Y E N S .
L a jonction demandée par les Bournet et Forichon
est aussi singulière que le but de leu r appel. O n con cevroit cette jonction, si G ilbert L afon t avoit interjete
appel du jugement du 23 ventôse an 1 3 , pai'ce que ce
jugem ent et celui du 19 ventôse an 1 1 , frappent égale
m ent sur des saisies-arrêts. M ais le jugem ent du 14 ni
vôse an 13 prononce sur une inscription de faux à la
quelle les Boufnet et Forichon n’ont voulu prendre aucune
part. Comm ent se fait-il donc qu’aujourd’hui ils veuillent
se rendre commun le jugem ent qui y fait droit ?
Dans leur appel les Forichon ont demandé que les con
clusions par eux prises en prem ière instance leur fussent
adjugées ; et ils n’en avoient pris aucune. L e u r appel
au fait n’a aucune base , car ils n’ont pu fonder leur
saisie-arrêt que sur le faux de l’acte de naissance', et ce
pendant ce faux n’a jamais été articulé par eux.
Ces réflexions suffisent donc pour répondre à l’appel
de Forichon et Bournet. Il ne reste plus qu’à exam iner
les moyens proposés sur l’appel de G ilbert Lafont.
Ils se réduisent à dire i° . que les enquêtes prouvent
le faux de l’acte de naissance ; 20.' que les signes de vio
�( H )
rem arqués par les'tém oins ne sont pas suffisans, d’après
les lois et les notions de la médecine.
,
. -»-r'
'Ce sont ces deux prétentions qu’il faut exam iner, pour
en dém ontrer l ’erreur. ’
P
r e m i è r e
q u e s t i o n
.
L e s enquêtes prouvent-elles le f a u x de Tacte de n ais
sance ?
- A u cu n acte ne m érite une foi plus grande que les
actes de l’état civil ; les ordonnances nous l’enseignent,
et la raison nous dit qu’il im porte au bon ordre de ne
les détruire qu’avec la preuve claire et évidente d’un faux
m atériel.
- C a r , comme le dit M . C o ch in , les registres de nais
sance sont des monumens publics a u x q u els la lo i veut
q u ’on donne une foi entière, comme dépositaires de l’état
des hommes.
Il ne faut pas être plus exigeant que la lo i; elle se con
tente, pour la déclaration des naissances, du tém oignage
du père s’il est viva n t, et de celui de la sage-femme ou
l’accoucheur, si le père est m ort ou absent ; car l’accou
cheur a lui-mêm e un caractère p u b lic, et seul il fait foi
de la naissance. ( L o i du 20 septembre 179 2 , tit. 3 , art 2.
Code c iv il, art.
.) Il faut en outre deux tém oins, mais
56
ce n’est pas pour attester la naissance, c’est seulement
pour attester la déclaration.
Enfin il faut que l’enfunt soit porté à l'officier public,
ou qu’il vienne s’assurer de sa naissance. ( L o i du 20 sep-
�fis
tem bre, tit. 3 , art.
( ' 15 )
) V o ilà tout ce que la loi a exigé.
Quand elle a dit qu’ un acte’ de l’état civ il feroit fo i, eL
que la preuve ne seroit pas reçue contre ce qu’il énonce,
c’est une chose assez bizarre qu’on pense l’anéantir, sous,
prétexte d’une inscription de fa u x , par la même voie de
la preuve testimoniale. Ce ne seroit qu’un pur changement
de fo rm e, si les trib u n au x, en expliquant la loi par le
sens qu’elle présente, ne pensoient que celui qui s’inscrit
en faux s’engage à quelque chose de bien plus positif qu’au
résultat d’une simple enquête, puisqu’un acte public ne
peut être anéanti par une preuve testimoniale.
Sans doute si 011 présentoit un extrait de naissance faux,
la justice ne dcvroit y ajouter foi que jusqu’à la preuve
du faux ; et c’est là le but de l’art. 45 du Code civil : mais
quand il s’agit de dém entir la déclaration dont la loi s’est
contentée, sans contredit aucune preuve testimoniale ne
doit suffire pour faire tom ber l’acte ; ou bien il falloit
dire franchement que les actes de naissance ne faisoient
foi que jusqu’à la preuve contraire.
Ces réflexions, présentées à la prudence de la co u r, n e'
tendent point à éluder l’examen des enquêtes; et pour
cela il n’y auroit qu’ un seul mot à d ire , c’est qu’au lieu
d'y vo ir la preuve de m ort annoncée, on a peine à trouver
qu’un seul tém oin ait certifié ce fait sans en douter luimême.
Que devoit prouver G ilbert L afon t? et qu’a-t-il p ro u vé?
Ses faits de faux étoient clairs et précis. 11 se soumetloit
à établir, io. q ue plusieurs personnes étoient présentes
lo is des couches, et que toutes ces personnes s'écrièrent :
V o ilà un enfant m ort j
�(i6)
2°. Q ue la sage-fem m e ayant frotté l’enfant avec de
Teau-de-vie, elle ou vrit sa bouche avec un de ses doigts,
mais que sa bouche se referma de suite; qu’il étoit pâle,
et avoit les yeux fermés ;
3°. Q ue François C orre n’arriva dans l’appartement
que dans l ’instant où la sage-femme plioit l’enfant pour
le faire enterrer;
4°. Q ue la femme Corre dit à son époux d’aller avec
L ouis L afon t faire faire les actes de naissance et de décès,
qui furent rédigés dans le même instant;
°. Q u’il n’a été fait aucune réquisition à l ’adjoint de
se transporter dans la maison où étoit l’enfant; qu’il n’a
5
par conséquent rem arqué aucuns signes de v i e , et qu’il
n’a rédigé les deux actes que. sur la déclaration de deux
tém oins, dont l’un étoit l’aïeu l, partie ipféressée, et l’autre
avoit seulement vu ensevelir l’enfant.
L e prem ier fait n’est attesté en partie que par un tém oin
qui est démenti par tous les autres. Ce ne sont pas toutes
les personnes présentes qui s’écrièrent : V o ilà un enfant
m ort; c’est la femme P ign ot qui prétend seule l’avoir dit à
M arie B ou rn et, parce qu’elle a vu tom ber des excrém ens;
mais M arie Bournet ne le confirme pas,
Cette P ign ot qui a voulu tout dire est tombée dans le
piège ordinaire des m enteurs; elle se contredit elle-m ême
sur tous les points. L ’accoucheuse lui fit signe que l’enfant
etoit m o rt, et cependant l’accoucheuse l’engagea à sentir
battre son cœ ur; elle refusa de s’assure?: si l’enfant étoit
v iv a n t, parce quV/fe ne s y con noissoit pas : cependant
d ie avoit déjà dit que l’enfant étoit mort.
1
Ces contradictions s’accordent parfaitement avec « dé
position
�( 17 )
position du tém oin F o riclio n , qui a ouï dire à plusieurs
femmes que cette m ême P ign o t leur avait attesté que
l’enfant étoit v iv a n t, et qu’elle lu i avoit rem arqué p lu
sieurs signes de vie. Cette malheureuse a ensuite changé
absolument de langage -, et ceux qui la connoissent ne s’en
étonnent pas.
Toutes les personnes présentes n’avoient pas dit : V o ilà
un enfant m o rt; puisque tous les autres témoins présens
ont rem arqué des signes de vie plus ou moins prononcés.
L e deuxièm e fait n’est p rou vé par aucune déposition,
si on en excepte la circonstance attestée par la m êm e
P ig n o t, que la sage-femme ou vrit la bouche de l’enfant :
fait is o lé , faux et inutile. M ais personne n’a dit que la
bouche se refermât de suite, et que l ’enfant eût, en nais
sant, ni de la p â le u r, ni les yeu x fermés.
L e troisièm e fait n’est encore déclaré par aucun té
m oin. C orre n’a pas dit être venu seulement quand on
ensevelissoit l’enfant, mais l’avoir v u sur les genoux de
sa femme. L a loi n’exigeoit pas m êm e de l u i , com m e
tém oin , qu’il attestât la naissance, elle ne l’exigeoit que
de la sage-fem m e; et il étoit tém oin de l’attestation seule
ment. S’il avoit déclaré la naissance, com m e tém oin instrumentaire il feroit encore f o i , et ne seroit $as admis
à se rétracter.
Jg
L e quatrièm e fait étoit aussi insignifiant que le précé
d en t, et n’est pas déclaré de la m ême m anière par ld
V ig n o t, quoique ce soit elle qui ait dicté évidem m ent
les faits articulés par l’adversaire.
Il y a même quelque chose d’essentiel à rem arquer dans
ce que disent Corre et la Pignot. Celle-ci assure avoir tout
vu depuis les couches jusqu’à riulium ation , et cependant
C
�(i8)
Corre dît que c’est elle qui vint le chercher à sa vign e;
elle s’est donc absentée quelque temps.
L e cinquièm e fait est dém ontré faux par tous les té
m oin s; car bien loin que le sieur R e yn au d , adjoint, ait
rédigé ses actes sans se transporter dans la maison où étoit
l’enfant, et sans le v o i r , il dit lui-m êm e y être venu et
•l’avoir vu. T o u s les témoins parlent de ce fait, et la P ignot
elle-m ême déclare que le sieur Reynaud toucha l’enfant
à plusieurs endroits, et le baptisa.
A in si rien de ce que G ilbert JLafont avoit offert de
p ro u ver ne l ’a été. L ’acte de naissance demeure donc dans
toute sa force.
Q uand on ôteroit de son enquête tous les signes de vie
articulés par ses propres tém oins, il ne resteroit que des
doutes sur la m ort de l’enfant; et des doutes ne détruisent
pas un acte.
Ces doutes encoi’e ne sont com m uniqués que par un
seul témoin qui a refusé de toucher l’enfant, et qui n’ayant
pas voulu s’éclaircir veut cependant com m uniquer tous
les éclaircissemens.
Il faut se méfier d’elle, puisqu’elle s’en est m éfiée ellem êm e; d’ailleurs ses contradictions appellent aussi la mé
fiance, quand elle ne seroit pas personnellement suspecte,
comme la plus proche parente des adversaires. D ’ailleurs
c’est une chute d’excrém ens qu’elle a regardée comme
signe de mort. Sur ce fait m êm e, qu’ il est étonnant qu’elle
ait pu vérifier avant la fin des couches, de quel poids
peut être 1111 semblable tém oignage? C ’est là cependant
la seule preuve de la m ort qu’elle d on n e, ou plutôt la
seule preuve qu e fournit l ’enquête.
�( 19 )
I-e curé auroit été un tém oin im portant s’il avoit as
sisté au commencement des couches ; mais il a fallu l’en
voyer chercher et l’attendre : et q u o iq u e , dans ce délai
assez lo n g , la vie de l’enfant n’ait pu que d im in u er,
cependant à son arrivée il a encore senti de la chaleur;
et si l’enfant avoit été m ort - n é , cette chaleur n’auroit
pas duré jusqu’alors , surtout à la fin de décembre. Ce
qu’il y a de certain c’est que le curé n’atteste pas que
l ’enfant fût m o rt, c’est qu’au contraire il l’a baptisé comme
v iv a n t, et après un prem ier baptême. O r , suivant les
règles, ce prem ier baptême suffisoit, n’y eût-il eu que du
danger, Canonistœ d icun t sufficere quod aliquod mernbrum b a p tizetu r, ut sit infans christianus.
A in si ce second baptême fait par un prêtre est une
présom ption authentique de la v ie , d’après les auteurs :
à celte présom ption se joint la preuve légale de la vie
par l’acte de naissance fait par le m êm e témoin. A in s i,
quand il m arquerait les conjectures de m ort les plus
fortes, jamais il n’y auroit lieu d’annuller son propre acte
p u b lic , qui parleroit plus haut que sa déposition.
O n vo it d’ailleurs dans cette déposition du curé une
retenue qui abrège trop les détails, et qui s’explique assez
par l’inquiétude que devoit lui donner m algré lui une
inscription de faux contre son propre acte.
Mais cette circonspection est corrigée par les témoinsD u rin et G u ille m in , à qui le curé a dit à différons inter
valles qu’ avant de baptiser l’enfant il s’étoit assuré de
son existence.
vSi à cela on ajoute les dépositions de la sage-fem m e,
de la veuve Bonnefoi et de la femme C o r r e , il n’y aura
plus à douter; çar les mouvernens de l’enfant dans la main
C 2
�Vt o
(( 20 y
de la sage-fem m e, les batteme?is du Cœur, leâ soup irs,
les bras remués trois à quatre fo is , la contraction desmuscles du visa g e, sont sans contredit des signes évidens
d’existence.
Cent tém oins, qui diroient avoir vu un individu m ort,
ne détruiroient pas le tém oignage de ceux qui l’ont vu
vivant. L es apparences de la vie et de la m ort sont sou
vent difficiles à reconnoître, et peuvent d’ailleurs avoir
lieu quelquefois alternativement.
S
e c o n d e
q u e s t i o n
.
L e s sigjies de vie rem arqués p a r les tém oins s o n t- ils
sitjjisans ?
Les lois françaises sont muettes sur cette question, etla jurisprudence s’est toujours basée sur les lois rom aines,
qui ne laissent presque rien indécis.
A peine l’enfant étoit conçu qu’ il étoit com pté parmi
les créatures, et réputé vivant toutes les fois qu’il s’agissoit de son intérêt.
Si cependant il m ouroit avant de naître, il n’étoit pas
réputé avoir v é c u , parce qu’alors en effet son intérêt
'é to it n u l, et il étoit inutile qu’il eût vécu pour l’intérêt
d’autrui.
M ais dès l’instant qu’ il étoit n é , il devenoit capable de
succéder et de transm ettre, quelle que foible et courte
qu’ait pu être sa v ie , licet
illico
decesserit. L . 2 , cod..
l ) e post. hœr.
Cependant les écoles ne s’accordoient pas sur les preuves
de la v i e , ’ lorsqu’il s’agissoit de savoir quand un testa
ment étoit auuuüé par la naissance d’un posthume. Les
�»
( 2*. ) ^
proculeïens, qui étoient les rigoristes du droit, vouloient
que l’enfant, pour être réputé avoir v é c u , eût c r ié , ciamorem ew iserit. M ais les sabiniens n’étoient pas de cet
avis, et répondoient que la foiblesse ou un défaut d’or
ganes peuvent em pêcher les cris de-l’enfant, quoique visi
blem ent il existe. Justinien termina ce débat par la loi
Ç u o d diù certa tu m , et d it, en approuvant l’opinion des
sabiniens, que le testament étoit rom pu si l’enfant étoit
né v iv a n t , quand m êm e il seroit m ort im m édiatem ent
après sa naissance, et m êm e dans les m ains de la sagefemme.
S a b in ia n i existim a ba nt s i viçus natus esset e t s j
v o c e m n o n j e m i s i t rum pi testamentuin : eoruni etiam
nos laudarnus sen ten iia m , et sa n cim u s, si pei'fectè na
tus e s t , licet i l l i c o postquarn in terrain cecidit veî
s o b s t e t r i c i s d ecessit, rum pi testam entum. L o i Ç u o d d m , code D e posth. lib.
in
m a n ib u
Cette supposition d’une m ort aussi prom pte, pour ainsi
d ire , que la naissance, marque assez que la loi n’a pas
exigé des signes de vie bien prononcés , puisque le son
de la vo ix ne lui a pas même semblé nécessaire.
11
y a p lu s, car la loi encore a p révu le cas où un
accouchement auroit été tellem ent forcé et difficile que
l’enfant n’auroit pu être extrait qu’en partie. Si la p or
tion qui a v u le m onde est celle en qui consiste princi
palement l’existence, l’enfant n’en est pas moins réputé
avoir vécu , quoiqu’incapable de conserver la v ie ; et la
loi en ce cas se contente du m oindre souille.
S i non integrum a n im a l cditurn s i t , cum s p i r i t u
tarnen, adeo testam entuin rum pit. L . 1 2 , il’. D e lib e n s
et post/l.
�m
( 1 2 )f
Ces principes ont toujours été adoptés par la jurispru
dence; et les auteurs du droit les enseignent comme des
maximes certaines.
L ebrun se plaint avec éloquence de ceux qui veulent
pour signe de vie avoir entendu la v o ix de l’enfant ;
« comme si, d it-il, la nature attentive à d’autres choses,
« ne pou voit pas, dans un petit espace de temps, v iv re
« et m ourir sans se plaindre : au contraire l’on peut d ire,
« ajoute-t-il, que l’enfant qui se tait ainsi en naissant,
« subsiste en partie par ce silence, parce que la nature
« m énage ses forces pour prolonger sa v i e , et évite do
« la dissiper en accens superflus. » ( L iv r e i , chap. 4 ,
sect. 1.)
M . D o m a t, cité par les adversaires, s’occupe des cas
où l’enfant est né avant le terme ordinaire ; et quoique
dans l ’usage on n’ait jamais regardé com m e viable un
enfant né avant le septième m ois, M . D om at distingue
le cas où il s’agit de son état personnel, de celui où il
est question de savoir s’il a succédé et transmis la succes
sion. Dans la prem ière espèce, c’est-à-dire, curn agitur
de statu e t j i t quœ stio sta tû s, M . D om at pense que l’en
fan t, avant sept m ois, n’est pas réputé avoir vécu : mais
quand il ne s?agit que de transmettre la succession à ses
h éritiers, cîtm agitur de transrnissione hœ redita tis, les
raisons 11c sont plus les m êm es, et il n’im porlc plus que
l’enfant ait pu v iv re , il suilit qu’il ait vécu; et M . Dom at
cite des arrêts qui ont réputé successibles des enfans do
quatre et cinq m ois, nés même par l’opération césarienne.
( L i v . 1 , sect. 1 , n°. 5 , p. 2 .)
Rem arquons qu’ici il s’agit d ’un enfant venu à tonne
après neuf m o is, et dès-lors légalement viable,•
�- 23 ^
H enrys, cité encore par les adversaires, 11e leur est pas
plus favorable que D om nt; il parle d’une cause où il s’agissoit d’ un enfant q u i, loin d’êlre regardé comme mort
pour avoir i*ejeté des excrém en s, 11’avoit au contraire
donné d’autres signes de vie constans. V o ic i littéralement
le fait rapporté par M . H enrys lui-m êm e, ce U ne m ère
« n’ayant pu rendre son enfant qu’avec peine et violence,
« et cet enfant n’ayant donné d’autre signe de vie que
« par les excrémens qu’il avoit ren d u s, cela fit douter
« s’il avoit survécu la m ère ou non. C eux qui avoient
« intérêt qu’il fût plutôt né vivan t que m o rt, ne man« quèrènt pas d’user de précaution , et de faire ouir par
ce devant le juge la sage-femme et un médecin. I,e p ré« texte qu’ils en prirent fut au sujet de l ’en terrem en t,
« et sur le refus que le curé p ou voit faire de le mettre
« en terre sainte. Y ayant eu procès en ce siè g e , nous
« fûmes ouïs pour le procureur du r o i.. . . La sage-femme
«
«
«
et
«
ne s’étant arrêtée qu’à l ’éjection des excrém ens, et en
cela n’ayant pu parler que par l’organe du m éd ecin ...
le rapport nous paroissoit précipité et affecté ; nous
crûmes qu’il y avoit plus d’apparence d’ en ordonner
un second__ que puisqu’on n’avoit établi la vie de
cc l’enfant que sur ce signe se u l, les médecins en p o u « voient aussi-bien juger que s’ils avoient été présens à
« l’enfantement. Nos conclusions furent su iv ies, et un
K nouveau rapport fut ordonné. Y ayant eu appel au pai*“ ^emen t, la cour a cru que le prem ier rapport devoit
c< suffi1'e ; en un m o t, que su r le d o u te, et dans les cir« constances du f a i t , il,fa llo it plutôt ju g er que f enfant
« avoit eu vie , que d'être m ort-né. » ( Quest. 2 1 , liv. 6. )
Enfin A caranza, cité aussi par les adversaires, d it, au
�( H )
rapport de B reton n ier, dans son traité D e p à rtu , ch. 16 ,
n°. 3 2 , que le m oindre signe de vie suffit s’il est certain, *
Dans une cause qui dépend toute entière d’un fait pii'blic et légalem ent attesté, que de simples indices ne peu
vent d étru ire, les réflexions des docteurs consultés p a i
les adversaires ne conduiront pas la cour à tout l’éclair
cissement qu’elle avoit lieu d’attendre de leurs lum ières;
car ces docteurs n’ont pu se déterm iner que par le vague
des enquêtes : aussi leur opinion se réduit-elle à un système;
M ais quelque brillant que puisse être un système, jamais
l ’incertitude n’amena la conviction.
'
.
L e raisonnement des docteurs consultés se réduit à cecn
L a c h a le u r, les m ouvem ens de l ’en fan t, ses soupirs et le
battement de son cœ ur, peuvent avoir trom pé les tém oins,
parce que les genoux trem bloient à celle qui tenoit l’en
fant sur ses g e n o u x , et ce trem blem ent, com m uniqué A
l’enfant, a pu en im poser pou r un m ouvem ent qui lui fût
personnel. L e seu l soupir entendu étant un dernier sorjpir,
n’a été q u’un m ouvem ent exp iratoire, sans inspiration,
parce que les poumons n’ont pas eu la force de supporter
le volum e d’air nécessaire à la respiration. Les sigues de
vitalité rem arqués ne sont qu’ un reste de contractilité et
d’irritabilité tels qu’on les observe sur les têtes nouvel
lem ent coupées, sur le larynx des oies, et nu galvanisme;
T o u t cela n’étoit qu’un indice de la cessation encore
récente de la vie animale.
>
L a base de ce système est une simple possibilité : le fait
principal qui le inotive n’est pas exact, cl par conséquent
lu système s’évanouit tout cutier.
Le
�I
25
(
)
L e tremblement des gen o u x, im puté à la.fem m e C orre,
n’est pas attesté par elle; et sans doute sa déposition devoit
être la plus notable à l’égard d’un fait qui lui étoit per
sonnel.
L e soupir appelé un dernier soupir est encore une
erreu r; car puisque les docteurs ont choisi les témoins
q u i parloient de v is u , ils ont dû rem arquer que la sagefem m e, après avoir lavé l’enfant avec de l’e a u - d e - v ie ,
entendit un gros soupir j puis elle le rem it à la fem m e
C orre pour s’occuper de la m ère. O r , à son tou r, la fem me
C orre lava l’enfant avec du v i n , et alors remarqua que
l ’enfant so u p ir o it, qu’il avoit des mouvemens dans le
visage, qu’il remua les bras trois ou quatre fois, et que
Je coeur lui battoit.
Ces soupirs ne sont pas les mêmes que ceux entendus
par la sage-fem m e quelque temps auparavant. Il n’y a
donc pas, comme l’ont cru les docteurs, un seu l et der
n ier soupir.
A lo r s , et sans exam iner s’il est possible qu’un enfant
sortant du sein de sa m ère rende de l’air par expiration,
sans en avoir jamais asp iré, il est au moins certain que le
prem ier de ces soupirs, à supposer qu’il n’y en ait eu que
•deux, n’est pas un dernier m ouvem ent expiratoire passif.
A p rès cette exanim ation, il seroit impossible de conce
vo ir qu’un second soupir eût pu succéder au prem ier. C ’est
bien assez d’admettre un prem ier soupir dans un nou
veau n,é, si scs poumons n’ont pas eu la force de sup
porter le volum e d’air nécessaire à la respiration.
Les signes de vitalité rem arqués aux têtes fraîchement
poupées ne semblent devoir rien prouver h l’égard d’un
pjifunt qui ne s’éteint que par foiblesse, Dans une tête
D
�r.
" '
. . .
r
, •
coupée, la vie surprise, p o u r ainsi d ire, pendant sa fo rce ,
s’arrête encore dans une partie'restée saine. Les muscles,
irrités ordinairem ent par la m oindre blessure , le sont
bien davantage par leur section entière; et leur contrac
tion com m unique à tout ce qui en dépend un jeu m é
canique qui n’est pas la v i e , mais qui en est l ’apparence.
A u contraire quand un corps entier s’éteint par débi^"lité ou dissolution ', ce m ouvem ent des muscles rie peut
ii
pas survivre à l’atonie de l’organisation ; à plus forte
raison dans un enfant nouveau, qui n’auroit pas eu la fo ire
de supporter une seule aspiration, toute contractilité et
irritabilité, semble une chose entièrem ent impossible.
*
L e larynx des oies ne répète leur cri que pendant la
durée du souffle qu’on y com m unique; ainsi il n’y a pas
de vitalité dans ce qui exige une fonction étrangère.
L e galvanisme peut bien, par une combinaison de m é
ta u x , produire sur des chairs inanimées une com m otion
dont nos sens imparfaits ne peuvent pas apercevoir lu
cause : m ais, quelle qu’elle so it, elle est le produit d’un
appareil q u elco n q u e; et jamais un corps n’a répété les
inouvemens galvaniques hors la présence de cet appareil.
Rem arquons une vérité frappante. Dans leur propre
opinion les docteurs ont supposé que la vitalité môme
qu’ ils présum oient dans l ’enfant, étoit l’indice de la ces
sation en cart récente de la vie animale.
V o ilà donc une présomption de m ort attachée A la con
viction que l’enfant vivo it encore un instant auparavant.
O r , cet instant, où est-il? qui peut le saisir aujourd’h u i,
quand les assistans ne Font pu recon n oître? Com m ent,
dans une m atière aussi conjecturale que les signes de la
�H1
( 2?' V
m o rt, les docteurs assureront-ils que l’enfant de Cathe
rine L a fo n t, venu à terme en l’an n , soit m ort avant,
ou pendant l’extractio n , ou une minute après sa nais
sance, avan t, ou pendant son b ap têm e, ou in rnanibus
o bslciricis, suivant le langage de la loi.
L a sage-femme l ’a gardé quelque tem ps; après elle, la
femme, C orre l’a gardé-; puis le c u r é , mandé pour le
baptiser, est v e n u ; et c’est après tout cela qu’on a été
certain de sa m ort.
, ,■ r .
.
- ,
t
'
Quand il n’y auroit pas de signes de vie l’econnus, rien
ne seroit plus conjectural que les signes de la m o rt, et
en ce cas même il faudroit seulement douter.
C a r , comme le dit M» W in s lo w , « si la chaleur du
« corps et la mollesse des* parties flexibles sont des signes
« incertains d’une vie encore subsistante, la pâleur du vi« sage, le froid du corps, la roideur des extrém ités, la
« cessation des m ouvemens et l’abolition des sens externes,
« sont des signes très-équivoques d’une m ort certaine....
c< 11 est incontestable que le corps est quelquefois telle« ment privé de toute fonction v ita le , et que le souille
« de la vie y est tellement cach é, qu’il ne paroît aucune
« différence, de la vie et de la mort. » ( Dissertation.sur
l’incertitude des. signes de la m o r t, page 84. )
E t c’est parce que les signes de la m ort sont plus dou
teux que ceux de la v ie , que les auteurs de médecine
h’ gale se contentent des moindres indices pour présum er
la vie de reniant.
S i sp ira v en t, dit Zuchias ,• s i mem hra d isten d en t, s i
se m o v en t, .si sternutaverit, s i urinant red^at. •( Quest,
xuédico-leg. liv .
tit. , n°, 123.) Cependant la plupart
5
D 2
�WV
\>\
• . ... (
3
de ces cas pourroient se prendre encore plus pour de
simples m ouvem ens de vitalité musculaire.
Foderé m arque une notable différence entre le cas où
l’enfant seroit m ort dans le ventre de sa m è re , et celui'
où il ne m eurt que pendant sa naissance. A u prem ier
cas, l’état qu’il décrit des souffrances de la m ère ne laisse
pas de doute; au deuxièm e cas, il indique comme signe
de m ort le défaut de pulsation et de chaleur des artères
ombilicales : néanmoins il cite encore des exemples où
ccs signes mêmes ont trom pé les praticiens. ( M édeciue
c iv ile , tom. i , n ° . 288.)
M ahon ne pense nullem ent que la pulsation des artères
soit un sim ple indice de vitalité et de contractilité. « L a
«
cc
«
«
«
continuation du battement du cœur et de la circulation
du sang en gén éral, dit-il, est un indice bien plus sûr dé
la vie de l’enfant après sa naissance. Cette fonction est,
de toutes celles qui tom bent sous les sens, la plus im portante de la vie animale. » ( M édecine lé g a le , tom. 2 ,
pag- 393- 3
Si donc nous ignorons quand est m ort l ’enfant de Ca
therine L afon t, au moins ne l’étoit-il pas quand son cœur
battoit encore; et si les mouvemens des bras et du visage
sont, comme les soupirs, des signes douteux de la v ie , au
m oins tous les raisonnemens de l’univers ne prouveroient
pas qu’ils sont des signes de mort.
C ar il faut pour les adversaires des signes évidens de
m o rt, puisqu’ils attaquent un acte de naissance.
E h ! où en serions-nous, si h chaque m ort il falloit élever
autant de doutes et d’incertitudcs?
Les hommes sont convenus de regarder comme i’ins-
�( 29 ) ^
#
tant fixe de la m ort celui de la cessation totale de la cir
culation du san g, suivie de la roideur des membres; et
les intérêts de toutes les familles se règlent chaque jour
sur la foi de cette croyance.
On: sait bien qu’il est de loin en loin des exceptions
à cette rè g le , et que des personnes ont v é c u , après avoir
eu tous les signes ordinaires de la mort,
c M ais on ne vo it pas pou r cela que ces phénom ènes
changent les notions de l’habitude; et certes nul ne certifieroit vivant un homm e sans pouls et sans fle x ib ilité de
m em bres, parce qu’il en auroit v u v iv re d’autres ayant
les mêmes symptômes de m ort.
Com m ent donc est-il possible de décider qu’ un enfant,
qui conservoit du m ouvem ent , etoit cependant m o r t,
par cela seul qu’il est des exemples que des individus
morts ont quelquefois donné des signes de vie.
Cependant il ne s’agit ici que de fixer l’époque précise*
d’ une m ort reconnue récente ,* et au lieu de la rechercher
dans des possibilités et dans des h ypoth èses, pourquoi
ne pas supposer aussi une cause plus im m édiate et plus
naturelle?
'
.
• .,
L es couches de; Catherine L afon t ont été laborieuses;
I
7
voilà un fait connu.
, ‘
L ’enfant a dû être très-acçablé, et avoir besoin du plu9
grand calm e; si on l ’a tourm enté on n’a pu que lui nuire :
Voilà la prem ière présom ption certaine.
Mais au lieu de lu i laisser du x*epos on lui a coupé le
cordon om bilical, on l’a frotté avec de l’eau-de-vie, puis
avec du vin.
P ou rqu oi donc ne pas croire que ces opérations ont
�$ e *
('3 0 '
achevé d’éteindre une vie encore ré cen te, plutôt que
d é s ig n e r une époque antérieure, sans aucune certitude, ;
mais pnr sim ple soupçon.
^ ' *ni >{
Ici au moins nous présentons :un système qiii "anime *
hase, et cette base est assise^sur une grande autorité.)
« Lorsque l’enfant, dit H ipp ocrate, est »sorti du>!gein:'
« de sa m ère avec effort, com m e il est fo ib le , il ne fautj
« p a s lui c o u p e r 'l’om bilic q u’il n’ait crié et'uriné/*»
( 'H ippocr, de sùperf. ch,
)
yb
'i
' - I ■
r-i
E t qu’ori n’objecte pas que ce sont là des principes d’an-<
cîenne th éorie; A lphonse L e r o i, qui les rap pelle, ajoute ;
5.’
-*I
ru
« Nous développerons ailleurs ce précepte excellent, que
cc nous tâchons chaque jour de rétabjir. » ( A lp h . L e r o i,
pratique des accouclicm ens. )
: 1
)
L a section du cordon om bilical a donc pu nuire à un
enfant déjà fo ib le ; des frictionâ d’e a u -d e -y ie sur’ son
visage ont dû m ême lui causer une l’évolution qu’il étoit
hors d’état de supporter : c’est en ce m om ent q u eu es
soupirs ont annoncé le dernier effortfde la n ature; e t’
quand le spasme a arrêté le battemenÉidé son; cœ u r, il
a résulté de cette siïsperl^ion rtiêmé^que Jc’est alors seu
lement qu’il a cessé de vivre.
* f
Si ce n’est là qu’une présdm ption ,>-'cl1é> a p o u r elle les
dépositions des témoins qui ont vu des m ouvem eus ’jus-r
q u’aptès la friction d’eau-cte-vite : mnis,d,aÎllle ui‘s, daiisî lo
dctotb m êm e, la réligion , laph ysiq u e ét les lois-puésument
que l’enfant a vécu.
1 ' '•
„1
,
>
i ih) 'i i-. ii»!
1
r ‘ 'ReniarqiiorÀ’ co nVbîeri'eii^oVé^ ti
jiorï do dn. <vio
est ici plus favorable que dans l’espèce des lois voiiiainrs. J ,;ï
il sVigissoit'(ilLM‘6tTrprLJ'ni1i
4
efrPj <
*.•¿tpuru; pei' Iu
�1p o u r,Ie :^ s th u m £ ,':sMr^^
, in m anïbus ohs~
tetricîs; ic i, au contraire, iï s’agit < e présum er la vie en
faveur d’une m ère, et de supposer que la nature a suivi
son cours oi’din aire, en faisant naître vivan t un enfant
q u i,'v e n u -à term e, étoit légalem ent viable.
’
^
'A Cj
\
3
O n a articulé contre l’acte de. naissance des vices de
form e, mais ils sont im aginaires, et n’em porteroient au
cune peine de nullité. L e seul vice conséquent serait de
‘ n’avoir pas porté l’enfant à là maison com m une ; mais
la loi dit seulement qu’il sera présenté à l ’officier p u b lic,
Jet l’officier public l’a vu.
u. ' ‘r
O n se fait un moyen de ce que Catherine L afon t a
contracté récem ment un second mariage. M ais qui peut
lui reprocher ce que la loi et les bienséances autorisent:
' depuis trois ans elle n’a plus le bonheur d ’être épouse
ni m ère, et l’obéissance qu’elle doit à son père ne lui a
pas permis de mettre un plus long term e-au désir qu’ il
manifestoit chaque jour de se donner un nouveau sou
tien. M ais au reste, quelle influence cet événem ent peut-il
avoir pour la cause, et surtout pôur infirm er un juge
ment antérieur ?
•
■
Ce n’est pas moins une m ère qui réclame la succès«
*
»
.
sion de son enfant, luctuosam hœ reditcitem , suivant le
langage de la lo i. O n a blâmé les premiers juges d’avoir
dit que celle qui avoit co u ru 'les dangers de la maternité
méritait la préférence dans le doute ; mais ce m otif, bien
loin d être aussi absurde qu’on le p réten d , est entière
ment puise dans la nature et dans la m orille, comme il
1 est dans l’opinion des plus sa vans auteur^, et notamment
�C 32 )
-de D o m at, qui parle de la faveur de la cause du père ou
de la m ère qui survivent à leur enfant.
Cujas d it, com m e les prem iers juges, que la plus favo
rable interprétation devoit être pour la m ère en sem
blable circonstance, B e nignius est credere ordinem nar
turœ servasse f o rtu n a m , ut in dubio m a tr i fa v e a m u s ,
-quœ in luctu est magno , propter am issum f ilium et
m a r itu m , q uam agnatis. ( C uja c, ad leg. 26, D e pact.
dot. )
A quels titres en effet seroîent plus recommandables
d es collatérau x, qui ne voyant dans les dangers d’une
m ère q u’une exp ectative, et dans ses m alheurs qu’ une
succession, veulent tout renverser pour en faire leur
p r o ie , e t , irrités de trouver une barrière dans un acte
authentique, osent ro u vrir les tom beaux de leur fam ille,
p o u r chercher une heure in certain e, et recueillir pour
ainsi d ire la vérité dans le néant ? L a cour ne verra en
eux q ue des profanateurs av ides, qui d’ailleurs, dans leurs
m oyens im puissant, sont encore bien loin d’avoir satis
fait à ce qu’ils s’étoient imposés à eux-mêmes pour par
v enir à renverser un acte d’ordre p u b lic , par le m otif
u nique de leur intérêt particulier.
»
M e. D E L A P C H I E R , avocat,
M° . T A R D I F , licen cié a v o u é x
A RI
O M , de l'imprimerie de L a n d rio t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Nivôse an 1 4
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Lafont, Catherine. An 14]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Tardif
Subject
The topic of the resource
posthume
successions
viabilité nouveau-né
médecine légale
accouchement
témoins
vices de forme
actes de naissance
faux
sage-femme
baptême
experts
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Catherine Lafont, et Louis-Auguste Petauton, son mari, habitant à Néris-les-Bains, intimés ; contre Gilbert Lafont, Jean-Baptiste Bournet, Jean Forichon, Marie et autre Marie Lafont, leurs femmes, habitant aussi à Néris, appelans.
Table Godemel : Viabilité : à quels signes peut-on reconnaître qu’un enfant est né vivant ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 14
1801-An 14
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1508
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0722
BCU_Factums_M0723
BCU_Factums_M0323
BCU_Factums_G1506
BCU_Factums_G1507
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53248/BCU_Factums_G1508.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Néris-les-Bains (03195)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
accouchement
actes de naissance
baptême
doctrine
experts
Faux
médecine légale
Posthume
sage-femme
Successions
témoins
viabilité nouveau-né
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53249/BCU_Factums_G1509.pdf
5b7017f3eaf2cc3056fda117a19f5248
PDF Text
Text
CONSULTATIONS
SU R
LA N U L L I T É d ’ UN DI VORC E.
�CONSULTATIONS
SUR M É M O I R E I M P R I M E ,
P O U R
M a r g u e r i t e C O U G U E T -F L O R A T , veuve du sieur
de Reyrolles, intimée;
C O N T R E
C a th e r in e
M A I G N E , appelante de jugement du
tribunal de première instance séant au P u y , rendu
le 24 floréal an 13.
L E C O N S E I L S O U S S I G N É n’hésite pas à penser, avec
l'estimable auteur du mémoire imprimé pour la dame CouguetA
�(O , F lo ra t, que le jugement du tribunal du P u y , q u i, sans s’arrêter
au fantùme de divorce opposé à cette v e u v e , a décidé que le
sieur de Reyrolles est mort son é p o u x , rend un hommage trop
pur aux mœurs , à la justice et aux lois , pour que l’appel porté
devant la sage cour de Riom doive lui inspirer des craintes.
La demoiselle Maigne se pare de la qualité de seconde femme
et de veuve du divorcé de Reyrolles ; mais elle sait bien que ce
sont là des titres usurpés; que son mariage essentiellement nul,
pour avoir été précipité, quand il auroit été précédé d’un divorce
r é e l, ne l’arracha point à la honte du concubinage, et ne couvrit
m êm e pas ses désordres de l’excuse et du manteau de la bonne
foi ; car elle ne pouvoit pas ign orer, lorsqu’elle engagea sa foi
au sieur de Reyrolles, divorcé depuis dix mois seulem ent, elle
ne pouvoit pas ig n o rer, disons-nous , la loi qui interdisoit à
l'époux divorcé de contracter un nouveau mariage dans l’année
du divorce (1) : ce mariage en outre présente d’autres vices
inutiles, quant à présent, à rapporter.
D ’un autre côté , jamais elle n’a , pendant ce prétendu ma
riage , goûté les douceurs de la maternité.
C e n’est donc ni pour couvrir son honneur, ni pour conser
ver un état à ses enfans, qu’elle s’acharne à dégrader cette
épouse infortunée; c’est uniquement pour retenir, sans retran
chement et sans partage, la riche dépouille du d éfu n t, devenue
sa proie par un testament surpris à la crainte et à la foiblesse ;
uniquement pour nager dans un superflu plus abondant, et le
réserver à des collatéraux avides.
A h ! si la balance de la loi pouvoit être un instant flottante ou
incertaine dans cette lutte affligeante pour les mœurs , l’im
pulsion du sentiment et l'humanité la feroient pencher bien vite
en faveur de l’épouse légitim e, à qui la cupidité ose disputer les
(«) A rt. a , $• 5 de la loi du 20 septembre 1792.
�y
'( 3 )
;
avantages matrimoniaux que le plus solennel et le plus saint
des contrats lui avoit assurés, et qu’ une courtisanne voudioit
réduire au plus extrêm e dénûment.
Mais la dame Florat de Reyrolles n’a pas besoin d’émouvoir
le sentim ent, pour réunir les suffrages à la cour d’appel comme
elle les a réunis en première instance : il lui sufiit de faire pailer
la loi.
L e sieur de Reyrolles lui engagea sa foi aux pieds des a u tels,
le 8 novembre 1774 1 avec toutes les formalités légales que la
loi du temps exigeoit pour former un mariage indissoluble.. Ce
m ariage, légalement contracté, ne devoit être dissous que par
la mort de l’un des époux. Une loi postérieure en disposa autre
m en t, et voulut que ce lien sacré pût être rompu , entre les
deux é p o u x , par le divorce , dans les formes qu'elle déter
mina. Le sieur de Reyrolles , dans le délire de la passion qui
l ’égaroit, vo u lu t tenter de rompre par cette nouvelle voie les
sermens qui l’unissolent à son épouse ; mais conduisit-il l’en
treprise au terme marqué par la loi? il s’en faut bien. Un acte
de divorce précipité , arbitraire, et monstrueux dans sa contexture , la fit avorter au tiers de la route ; car le divorce, provoqué
par lui seul le 24 m£d 179^> sur la simple allégation de l ’incom
patibilité d’humeur et de caractère , devoit être précédé de trois
assemblées de parens dans un intervalle de six mois de délai au
moins , afin de préparer par de sages conseils , et de mûrir par
la réflexion, un rapprochement entre les époux , qui est le pre
mier et le principal vœu de la loi (i). Eh bien ! il fut prononcé
le 28 juillet même année, à la suite d’une seule assemblée de
parens ou d’amis conciliateurs , par une complaisance de l’offi
cier de l’état c iv il, qui eût été co u p ab le, si sa prévarication
n étoit pas excusée par l’ineptie dont il a consigné la preuve
dans 1 exercice de cet acte de l’autorité pu bliqu e, en pronon
çant non la dissolution du mariage civil et religieux tout à la fo is,
(1 ) A r t i c l e s 8 , 9 , l o et s u i v a n s
,
§. 2 ils la lo i d u 20 s e p t e m b r e 1 7 9 a .
A
2
�(4)
que les ¿poux avoient contracté devant le ministre du c u lte , sui
vant les lois du temps, le 8 novembre 1774» mais seulement la
dissolution des conventions civiles du m ariage, contractées la
veille devant Couguet jeune et H éraud , notaires.
Une prononciation si prém aturée, quand on veut y trouver
la dissolution du mariage par divorce fondé sur l'incompatibi
lité d’humeur qui n’y est p a s, et si bizarre , quand on se borne
à y voir la dissolution des conventions matrimoniales qui y est
seule, peut-elle être présentée de bonne foiaux tribunaux comme
un acte de divorce sérieux? Le bon sens , la raison et la loi y
verront-ils jamais autre chose qu’une monstruosité , ou un jeu
du délire et de l ’esprit de vertige?
Vainem ent on multipliera les efforts pour y trouver un acte
de divorce légalement prononcé par le consentement mutuel des
époux : jamais on ne parviendra à faire illusion.
i°. Le consentement mutuel des époux n’avoit été mis par la
loi au rang des causes légitimes de divorce , qu’avec des condi
tions propres à en assurer la spontanéité , la réflexion et la per
sévérance. Ces conditions n’étoient pas livrées à l’arbitraire des
époux ; elles avoient été tracées avec soin par le législateur, et im
périeusement commandées. Ce genre de divorce devoit être provo
qué par le mari et par la femme réunis, et agissant conjointem ent,
par un acte de convocation de six au moins de leurs plus proches
parens, signifié par un huissier, non de la part de la femme au
m ari, ou de la part du mari à la femme , mais par un acte de
convocation signifié aux parens de la part du mari et de la femme
conjointement (1) ( celle-ci autorisée expressément à cet effet
par le mari ) (2) ; l’assemblée des parens devoit se former par un
( i j A r tic le s 1 et 2 de la loi du 20 septembre 1 7 9 2 , §. 2.
(2) L'autorisation de la feim ne par le mari n ’est pas littéralement exigée
p.ir la loi du 20 septembre 1 7 9 2 , mais elle est prescrite p a r les lois générales
p o u r tous les actcs (jui concern cn t la personne de Ici fem uje en puissance Uu
m ari.
�5 )
concert unanime des époux ; en un m o t, à jou r f i x e , et au lieu
convenu avec les parens ou amis. Un olficier municipal devoit
être requis de s’y rendre , à l’effet de dresser un acte contenant
simplement que les parens ou amis avaient entendu les époux
en assemblée dûment convoquée , et qu’ils navoient pu les
concilier (1).
Un mois au moins après la date de cet acte , les époux persé
vérant dans leur dessein, avoient la l'acuité de se présenter , tou
jours conjointement et de concert, devant l’officier public chargé
de recevoir les actes de mariage ; e t , sur leur demande , cet
officier public ètoit tenu de prononcer leur divorce sans con
naissance de cause (2).
Est-ce avec un pareil concert que les 'époux de Reyrolles pro
cédèrent pour faire prononcer la dissolution de leur mariage ?
non. Les vit-on se réunir pour convoquer conjointement et de
concert l’assemblée de leurs parens et amis à un jour convenu
entr’eux? non. Point d’acte fait de concert par les époux réunis,
mais seulement des actes isolés et hostiles de chaque coté ; point
de convocation notifiée conjointement aux parens , mais seule
ment des réquisitions réciproques et successives du mari à la
iem in e, et de la femme au mari : partout la marche et les ca
ractères du divorce par incompatibilité d’humeur ; nulle part la
marche et les caractères du divorce par consentement mutuel
et spontané.
20. Les époux se présentent le 27 juin devant les parens :
sera-ce pour leur exposer qu’il leur est impossible de supporter
plus long-temps le tourment de leur union , et qu’ils demandent
conjointement le divorce? nullement. Le mari rappelle l’acte
signifié de sa part à son épouse, le 24 mai* à 1effet de pro
voquer le divorce par incom patibilité d ’humeur; la fem m e, de
son co té, rend compte de l’acte de représailles que l’amour-
Article /,.
1, 2) Article 5 de la même loi mèinu §. a.
,
A3
�w (¿ç**
. . .
.< 6 )
propre irrité lui avoit fait notifier à son m ari, le 27 du même m ois,
pour lui déclarer qu’il n’avoit fait que prévenir ses intentions,
qui étoient les mêmes que celles de son mari; ce qui veut dire
qu’elle désiroit comme lui un divorce pour incom patibilité d ’hu
meur , si les tentatives trois fois réitérées de conciliation voulues
par la l o i , étoient infructueuses. Les arbitres firent aux deux
époux les représentations qu’ils jugèrent propres à les rappro
cher. La dame de R eyrolles, loin de se refuser à une concilia
tion qu’elle désiroit , leur répondit q u ’elle éloit disposée ¿1
suivre en tous points la volonté de son mari ; et par consé
quent de se réunir à l u i , s’il vouloit se désister de son projet
de divorce. Le m ari, au contraire, déclara qu’il persistoit au
divorce ; mais il est clair qu’il persista s e u l, et que tout se
réduisit, de la part de la fem m e, à une résignation passive à
la volonté de son époux.
Que voit-on dans tout cela qui ressemble au concert unanim e,
au consentement réciproque, persévérant et également spon
tané des deux cù té s , que la loi demande pour autoriser le di
vorce par consentement m utuel? rien assurément. On n’y voit
donc pas les préliminaires impérieusement exigés pour ce genre
de divorce.
5". Enfin on ne trouve pas non p lu s , dans l ’acte de divorce
du 28 ju illet, la preuve de l’accomplissement de cette impor
tante condition exigée par l’article 5 de la lo i, que le divorce
fût prononcé par l’officier public, sur la demande des époux;
car il ne fut demandé ni par le m ari, ni par la femme. Le
récitatif de l’acte prouve en effet qu’ils se bornèrent à requérir
cet officier de prononcer la dissolution de leur contrat de ma
riage passé devant Couguet jeu n e et Ilé r a u d , notaires : ce
n’étoit pas là l’objet du divorce, ni de la mission que l’officier
public avoit reçue de la loi. Le divorce ne détruit pas les con
ventions matrimoniales , il ne détruit que le mariage lui-m ém e,
par rapport à la personne des époux ; c est-à-dire, rengagement,
de rester unis jusqu’à la m o rt, et soumis aux devoirs qu’en-
�(7 )
2
ü
\
traîne la société conjugale contractée devant les ministres de
la loi. Ce fut bien là le prononcé de l’officier p u b lic, puisquil
déclara que leur meninge ¿toit dissous , et qu’ils etoient libres
de leurs personnes ; mais ce n’étoit pas ce que les époux lui
avoient demandé. Encore une fois, ce n’étoit pas du mariage
contracté entr’eux le 8 novembre 17745 devant le ministre de
la loi et du c u lte , qu’ils avoient requis l'officier public de pro
noncer la dissolution , mais uniquement du contrat de mariage
passé la veille devant Couguet jeune et Héraud , notaires. Leur
réquisition étoit dérisoire , elle étoit un fau ; l’officier public
eut l’ineptie de ne pas s’en apercevoir , et de prononcer gra
vement un divorce qu’on ne lui demandoit pas. Que conclure
de là ? que cette prononciation arbitraire et d 'o ffice, d un di
vorce qui n'étoit pas dem andé, n’est qu’ une monstruosité, une
illusion , un vain formulaire de paroles vides de sens , que le
poids de la loi fit rentrer dans le néant au même instant où
elles sortirent de la bouche do la sottise affublée du costume
de l’autorité publique. Sunt verba et voces, prœtercti que nih.il.
Les époux restèrent donc époux après avoir joué cette espèce
de comédie ridicule.
Aussi l ’épouse a trouvé protection et accueil dans les organes
de la l o i , en première instance : pourroit-elle craindre d’être
repoussée dans une cour, appui de l’infortune et gardienne de
l’ordre public?
O u i, vous serez repoussée, nous dira avec une insultants
arrogance l’opulente demoiselle Maigne , parce que vous avez
élevé contre vous des fins de non-recevoir i n s u r m o n t a b l e s , soit
par la constante adhésion que vous avez donnée au divorce pen
dant onze années consécutives , vou s, dame Florat-Reyrolles,
qui venez aujourd’hui faire entendre pour la première fois des
plaintes ; soit par YOtre silence jusqu’après la mort du sieur de
Reyrolles.
Des fins de non -recevoir contre l’ordre public et dans des
questions d’état! La demoiselle Maigne se ila tte -t-e lle donc
�% •!
M
(8)
que la cour d'appel oubliera cette maxime aussi ancienne que
la société , et qui vient d’étre renouvelée par l’article 6 du
Code civil : cc On ne p eu t déroger par des conventions par
ti ticulières a u x lois q u i intéressent l'ordre public et les
« bonnes mœurs ? w II faudroit cependant l’oublier , et ad
mettre en principe qu’il est permis de déroger par des con
ventions p rivées, aux lois qui intéressent l’ordre public et les
m œ urs, pour valider par une adhésion , soit expresse, soit
incite, un divorce dans lequel les formes légales ont toutes été
m éprisées, et pour donner de la consistance à ce fantôme.
Loin de nous un si étrange abus , qui frapperoit d’impuissance
les lois régulatrices de l’ordre s o c ia l, et 11e laisseront que le
caprice pour directeur de l’ordre public et des mœurs ! Sans
doute il est permis de transiger sur les intérêts civils qu’un di
vorce valablement prononcé laisse à régler entre les époux; ce
11e sont là que des points secondaires et de droit purement
privé : mais transiger sur la validité du divorce en lui-m êm e,
et rendre valide, par une approbation formelle ou tacite, celui
qui seroit nul par la violation des formes légales, c ’est là un
objet qui intéresse l’ordre public et les bonnes mœurs , un
objet par conséquent qui ne sauroit être du domaine de la
volonté arbitraire des parties.
L ’arrét de la cour de cassation, du 24 pluviôse an i 3 , que la
demoiselle Maigne appelle à son secours , n’a rien de contraire
à ces régies. On l’a démontré dans le mémoire, pag. aG et 37 ; et
la seule lecture des motifs de l’arrét de la cour d’appel de Trêves ,
qui étoit attaqué , et qui fut maintenu , suifit pour cette démons
tration. L e sieur Boehler, après avoir reconnu dans plusieurs
contrats la validité du divorce obtenu par sa fem m e, avoit cepen
dant tenté de le faire annuller par justice. Son épouse repoussoit
les nullités, et d’ailleurs elle se prévaloit de ce que son mari avoit
reconnu la validité du divorce. L ’arrét avoit déclaré le mari
non recevable dans sa demande eu nullité ; mais pourquoi ? non
parce que le inari avoit reconnu la validité du divorce , mais paroc
�)
( 9
que Cette validité étoit réelle. A tten d u que les moyens de n u l
lité sont sansjoiulem ent, étoit-il dit dans l’arrë t : c e m otif tranche
tout.
Enfin répétons ce qu’on a dit dans le mémoire , qu’il n’y a pas
eu un seul acte d’approbation d irecte, expresse et form elle de la
validité du d ivo rce, en ce qu’il avoit dissous ce m ariage, et
déclaré les époux libres de leurs personnes ; pas un seul acte d’exé
cution du divorce , sous ce point de vue , de la part de la dame
Florat de Reyrolles.
Pourquoi donc n’avez-vous pas formé opposition au second ma
riage de votre époux, si vous ne regardiez pas le premier comme
dissous, lui dira-t-on encore? Elle répondra : Pourquoi mon époux
a t-il trompé ma vigilance, en anticipant de deux mois le terme
d’une a n n ée, pendant lequel il lui étoit interdit de former de
nouveaux liens, dans le cas même où son premier mariage eût été
légalement dissous (i)?
Mais encore , pourquoi différer jusqu’après la mort du sieur de
Reyrolles pour réclam er le titre d ’épouse, si vous n’en étiez pas
déchue? continuera-t-on. Pourquoi? parce qu’il auroit fallu se
mettre aux prises avec l’implacable Maigne, qui auroit fait réparer,
par un second divorce , les vices du premier. Mais , après to u t,
la fin de non-recevoir qu’on voudroit induire du silence gardé pen
dant toute la vie du sieur de Reyrolles , n’aurolt eu de poids ,
m êm e sous le régime des lois romaines , que dans le cas où l’acte
de divorce n’auroit été attaqué que plus de cinq ans après le décès
du sieur de Reyrolles. Ici la nullité a été dem andée, non-seule
ment dans les cinq ans , mais même dans les six mois du décès. La
fin de non-recevoir dont il s’agit n’est donc qu’une illusion. C ’est
ce que la cour de cassation a formellement décidé par arrêt rendu
en l’an 10 , entre la demoiselle Preaudeau et l ’héritier de Davignon , son mari divorcé (2).
(1) A r tic le 2 , §. 3 de la loi du 20 septem bre 1792 , précitée.
(2)C et
arrêt est rap porté dans le r e c u e il de S ir e y , «n 10 , page G5.
�< 5 * 0
S .
C i° )
Il ne nous reste plus qu’à parler d’une dernière fin de non-recevoir que l’on prétend puiser dans la loi transitoire du 26 germinal
an 1 1 , d’après laquelle on raisonne ain si, comme dans l’affaire
Mac-Mahon. « Le texte de l’article i fir. de la loi est ainsi conçu :
« Tous divorces prononcés par des officiers de l’état c iv il, ou au« torisés par jugement , avant la publication du titre du Code
« civil relatif au divorce, auront leurs effets conformément aux
« lois qui existoient avant cette publication.
cc Le terme générique tous , embrasse indistinctement la géné« ralité des actes qualifiés divorces , afin qu’ils aient leur effet.
« Le législateur ne demande qu’une chose ; c ’est qu’ils soient
cc prononcés par un officier de l ’état c iv il, quelle que puisse être
cc l’irrégularité de leurs formes. »
K otre réponse est prompte , et nous la tirons de l’arrêt même
qui intervint dans cette affaire cé lèb re , dont le détail se trouve
dans tous les recueils , et où on remarque que la loi transitoire
du 26 germinal fut spécialement discutée. L ’émigré rentré MacMahon ne fut pas déclaré par la cour de cassation, non recevable à demander la nullité du divorce prononcé contre lui
pour la cause d’absence , par le m otif que la loi transitoire
du c.6 germinal an 11 , interdisoit toute réclamation contre les
divorces prononcés avant la publication du Code civil , quel
ques nullités de forme qu’on pût leur reprocher : la cour de
cassation repoussa y au contraire, absolument ce m oyen, nous
dit l ’arrétiste (1). Le sieur Mac-Mahon fut seulement déclaré
non recevable , à cause de sa qualité d’émigré rentré ; et
te attendu qu’il résulte des dispositions de la loi du 20 sepcc tembre 1792, expliquées par l’avis du conseil d’é ta t, du 11
« prairial an 12 , approuvé par l’empereur le 18 du même mois,
cc que les absens de France rentrés ne peuvent point attaquer
cc les actes de divorce faits pour cause d’absence , dans ce sens
( i ) R ç c e u i l J e S i r e y , an 1 3 ,
page 216 .
�2oJ
( n )*
« qu’ils puissent reînettre en question l’a ffa ire , et discuter la,
te cause de divorce. «
Tous les cloutes sont dissipés , ce semble.
La nullité absolue de l’acte de divorce prononcé entre les époux
de Reyrolles , le 28 juillet 1793 , ne peut pas être mise en pro
blème* ; elle n’est couverte , et elle ne pouvoit l’étre , par aucune
fin de non-recevoir. Le jugement du tribunal du P u y , q u i , en
l ’a ccu e illan t, a déclaré le mariage des époux Couguet-Florat et
Claude de Reyrolles subsistant jusqu’au décès de ce dernier , et
qui a maintenu , en conséquence, la dame de Florat^ dans les
titres et les droits de veuve du sieur de Reyrolles , ne pourra donc
trouver que des approbateurs parmi tous les amis de l’ordre et
des mœurs.
D
élib é r é
à
Clevmont-Ferrand , le 8 janvier 1806.
BE R G 1E R , B E I L L E - B E R G I E R .
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a vu la présente con
sultation , est entièrement du même avis et par les mêmes
raisons. Le divorce étant n u j, dans une matière d’ordre p u b lic,
les fins de non-recevoir ne peuvent pas couvrir la nullité. On*
ne croit pas pouvoir rien a jo u ter, ni aux moyens établis dan»’
la consultation pour prouver la nullité du d ivo rce, ni aux ré
ponses qui y sont faites aux fins de n o n -recev o ir proposées.
On n’a rien trouvé dans le mémoire de la demoiselle M aigne,
qui a paru après cette consultation , qui n’ait été prévu ; et il
ne reste dans ce mémoire que l’apologie du divorce.
D é l i d é i v é à Riom , le 19 janvier 1806.
a n d r a u d
, g a s c i i o n , b o r y e .
oo.
�X j E CO N SE IL SO U SSIG N É , q u ia vu le mémoire en réponse
de la demoiselle M aigne, la consultation de MM. Andraud ,
Gaschon et Borye , du ig janvier 1806, et revu sa consulta
tion première du 8 janvier, qui, quoiqu’antérieure au mémoire
de la demoiselle M aigne, en a prévenu les m oyens, et y a
répondu d’avance,
P e r s is t e , avec un nouveau degré de confiance , à penser
que le divorce prononcé entre le sieur de Reyrolles et la dame
C o u g u et-F lo ra t, le 28 juillet 179 3, est nul de toute nullité,
et que les fins de non-recevoir par lesquelles on prétend en
écarter l’examen , ne sont que de pures illusions.
Si la demoiselle Maigne a c r u , dans son mémoire , ou plutôt
dans son libelle, prouver que la modération n’est pas son caracr
tère, et que son ton n’est pas celui de la d écen ce, elle a par
faitement réussi : si elle a prétendu persuader que le tribunal
du Puy a mal jugé, en décidant que le sieur Reyrolles est mort
l’époux légitime de la dame Couguet F lorat, elle a manqué son
but.
Rien de nouveau dans ce m ém oire, qui n’ait sa réponse dans
celui de la dame Couguet Florat et dans les consultations im
primées qui l’accompagnent. Un seul fait mérite d’étre relevé:
en veut parler de l’exploit d’assignation donnée, dit-on, à la
requête de la dame Couguet F lo ra t, au sieur de R eyrolles, à
comparoitre et se trouver le 28 ju illet, par-devant l’officier
pu b lic, pour voir prononcer le divorce d’entre les parties, lui
déclarant que comparant on non , il y sera procéda tant en
absence qu'en présence {1). La demoiselle Maigne a-t-elle pesé
cette dernière phrase , lorsqu’elle a produit l’exploit dans le-
(1) V o i r le* pngej 38 et
3g
du m ém o ire de la dem oiselle M a ig n e ,
�20/
( i3 ) M
."
quel on la trouve, comme une pièce tranchante et décisive,
pour caractériser le divorce par consentement m utuel? Si elle
l’a pesée , comment n’a-t-elle pas aperçu que cette pièce est
au contraire une démonstration que le divorce provoqué n étoit
qu’un divorce pour incompatibilité d ’humeur et de caractère?
En e f f e t , le divorce pour incompatibilité d’humeur et de
caractère, est le seul qui puisse être prononcé sur l’assignation
donnée par un seul des époux à l’autre, et en Xabsence comme
en présence de l’époux appelé , d’après les articles 5 et 6 , sec
tion 5 de la loi du 20 septembre 1792, relative aux actes de
l’état civil. Quant au divorce par consentement m u tu e!, ce
n’est pas sur l’assignation donnée par l’un des époux s e u l, au
jour qu’il lui plait de fixer, que la loi veut qu’il soit prononcé,
c ’est sur la demande qu’en font conjointem ent les deux époux ,
qui se présentent spontanément et d’un commun accord , à cet
e ffe t , devant l’officier public , en la maison com m une, a u x
jo u r et heure qu’ il aura indiqués. ( Art. 5 de la loi citée. )
Ici la pièce produite par la demoiselle Maigne prouve irré
sistiblement que les deux époux ne se présentèrent pas spon
taném ent et sans assignation devant l’officier p u b lic, aux jour
et heure qu’il leur avoit indiqués, pour requérir conjointement
le divorce ; qu’ils ne comparurent l’ un et l’au tre, au con traire,
que sur Yassignation donnée par un s e u l, et aux jour et heure
que le provocant avoit lui-méme indiqués : donc elle prouve
irrésistiblement qu’ils ne comparurent pas pour requérir un di
vorce par consentement m u tu el, mais uniquement pour requérir
un divorce pour incompatibilité d ’humeur et de caractère ; d’où
il suit que ce n’est qu’un divorce pour incompatibilité d’hum eur
qui fut pronon cé, et par conséquent un divorce dont il est
impossible de se dissimuler la n u llité , puisqu’il fut prononcé
prématurément, et sans observer les délais et les trois épreuves
successives qu’exigeoit la loi pour ce genre de divorce. Ainsi
ta pièce que la demoiselle Maigne a produite en triomphe se
�( 1 4 .)
retourne contre elle-m ém e, et ne servira qu’à m ieux assurer
sa défaite.
D e l i b é r é à Clerm ont-Ferrand, le 21 janvier 1806.
B E R G I E R.,
}
A RIOM , de l’imprimerie de L a n d rio t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Janvier 1806.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Couguet-Florat, Marguerite. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Beille-Bergier
Andraud
Gaschon
Borye
Bergier
Subject
The topic of the resource
divorces
remariage hâtif
nullité du mariage
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultations sur mémoire imprimé, pour Marguerite Couguet-Florat, veuve du sieur de Reyrolles, intimée ; contre Catherine Maigne, appelante de jugement du tribunal de première instance séant au Puy, rendu le 24 floréal an 13.
Table Godemel : Divorce : la loi transitoire du 26 germinal an onze rend-elle inattaquables les divorces faits en éxécution de la loi du 20 septembre 1792, fussent-ils irréguliers et contraires aux formes voulues par cette loi ? La nullité du divorce a-t-elle été couverte par la qualité de femme divorcée prise par la femme dans différens actes, par cette possession d’état, et par le décès du mari divorcé ? en cas de nullité du divorce le traité fait entre les époux divorcés, relativement à leurs intérêts privés, seraient-ils infecté du même vice ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1774-1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1509
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0706
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0309
BCU_Factums_M0615
BCU_Factums_M0524
BCU_Factums_G1510
BCU_Factums_M0707
BCU_Factums_G1511
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53249/BCU_Factums_G1509.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
divorces
nullité du mariage
remariage hâtif
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53250/BCU_Factums_G1510.pdf
0e03ee9468ccd7d5c986df0c7b112fbe
PDF Text
Text
M
É
M
O
I
R
E
P O U R
M
ar g u er ite
C O U G U E T - F L O R A T , v e u v e du sieur
de
R
eyrolles,
i nt i mé e;
COUR
C O N T R E
D ’A P P E L
D E RIOM .
C a th erin e
M A I G N E , se disant aussi veuve dudit
____
sieur d e R e y r o l l e s , appelante.__________ 1er s e c t i o n
i-M
L a demoiselle Maigne n’est pas satisfaite d'avoir usurpé une
grande fortune, et empoisonné la vie d'une malheureuse épouse;
elle ose lui disputer encore un titre respectable reçu aux pieds des
autels, et opposer une formule révolutionnaire et illégale au plus
sacré des engagemens. L e désir de tout contester à son adversaire
l’a aveuglée et jetée dans cette inconséquence. Pour exposer sa haine
devant les tribunaux, il lui a semblé doux d ’y être en scène ellemême; et elle n ’a pas crain t, dans son propre pays, de livrer sa
vie toute entière à de pénibles souvenirs.
U ne première tentative devoit la convaincre que la passion n ’est
pas le plus sur des guides. Condamnée par les juges qui la connoissoient le mieux, elle avoit lieu de croire qu’un système de calomnie
ne prévaudroit pas contre les principes, et qu’une cour supérieure,
gardien naturel des lois de l’empire, ne porteroit pas légèrement une
atteinte dangereuse au lien sacré du mariage, le premier fondement
des sociétés civiles.
L a dame de R eyrolles avoit été justement indignée du genre de
défense d abord adopté par la demoiselle M a ig n e, et son premier
A
�( 2 3
mouvement avoit été d’user d'une représaille Lien légitime. Plus en
état que personne , dans sa triste position , de rendre compte
des iaits et gestes de sa rivale, elle n ’avoit rien tu de ce qui la tourmentoit depuis tant d’années, et il lui paroissoit consolant de la
poursuivre encore, comme un remords vengeur, de la forcer à
sentir le poids de son opulence, et de mériter enfin une haine
qu’elle ne provoquoit pas.
Cependant la dame de Reyrolles a réfléchi que cette jouissance
décevante n ’étoit pas digne de la majesté de la cour ; en consé
quence elle s’est fait un devoir scrupuleux d ’écarter de son récit
touj*#- les épisodes étrangères à ses moyens. L a réclamation d’un
état civil présente d ’ailleurs trop d ’intérêt par elle-même, pour que
cet intérêt soit sacrifié à des personnalités et à une stérile vengeance.
L e mariage est-il un contrat d ’ordre public ; c’est-à-dire , une
femme sous la puissance maritale a-t-elle p u , après un divorce
nu l, traiter irrévocablement avec son mari? et si le mariage n ’étoit
pas légalement dissous, a-t-elle pu consommer cette dissolution
par un acte privé?
T elle est la principale question de cette cause; et il faut avouer
que sans cette espèce de vandalisme philosophique, qui a brouillé
long-temps toutes les idées morales, on rougiroit de la trouver dif- .
ficultueuse. Mais avec la gloire du nom français renaissent de jour
en jour ces antiques maximes, dont nous n ’avons éprouvé l'ébran
lement que pour sentir les funestes conséquences de nos vicissitudes.
Aujourd’hui le mariage, placé sous l’égide de la religion et sous la
sauve-garde de la magistrature, a reconquis sa dignité primitive;
et tout ce qui tend h la maintenir retrouve dans les tribunaux une
protection salutaire, indépendante des personnes et des circons
tances.
F A I T S .
L a dam e C o u g u e t - F lo r a t contracta mariage avec le sieur de
R e y r o lle s , médecin , le 7 novem bre 177/1, et se constitua en dot
scs biens échus et ù é ch o ir, c ’est-à-dire, q u ’elle donna plein pou-
�X»
( 3 )
.......................................
voir à son époux de rechercher et régir une fortune inconnue à
elle-même. L e contrat mentionne la stipulation d ’un douaire, et
autres avantages matrimoniaux.
Les premières années de ce mariage furent heureuses. Devenue
m ère, et possédant toute l’affection de son époux , la dame de
Reyrolles étoit loin de prévoir que cette félicité seroit détruite par
une femme qui alors ne lui sembloit nullement à craindre, et que
le sieur de Reyrolles paroissoit juger avec rigueur.
L a destinée de la dame de Reyrolles en disposa autrem ent, et
bientôt elle se convainquit que les goûts des hommes ne se règlent
pas toujours par leur estime. D ans sa fierté , elle abandonna un
époux parjure, à sa nouvelle conquête, et se retira chez la daine
de F lo r a t, sa grand’mère.
C et éclat, imprudent peut-être , tourna tout entier au profil de
sa rivale; la dame de Reyrolles lut privée de tout secours , de ses
bijoux; et poussée d’infortunes en infortunes, pour obtenir six
louis de son époux , il exigea qu’elle les reçût de la demoiselle
Maigne. T e l étoit, après dix ans de mariage, l'humiliation à laquelle
étoit condamnée une épouse : tels étoient les premiers chagrins
qu’elle fut obligée de dévorer.
Une réconciliation apparente succéda à ce premier orage. Dupe
de son cœur et de sa franchise , la dame de Reyrolles se trouvoit
encore heureuse des égards de son époux; mais l’illusion qu’elle
s’efforça long-temps de se fa ire , céda !i l’évidence : l’ indignation
étouffa tous les calculs d’intérêt personnel, et l’épouse outragée ne
connut plus les ménagemens de la dépendance.
Les sieur et dame Caklaguès, parens de la dame de Reyrolles ,
aüoient s’établir à Limoges. Affliges de sa position, ils lui propo
sèrent un asile ; et celle qui dominoit le sieur de Reyrolles ne sen
tant que le plaisir d ’être délivrée d’une surveillaute incom m ode,
pressa de consentir à cette séparation.
Combien étoit déjà changé le sort de la dame de Reyrolles! elle
avoit un époux ; une étrangère lui faisoit oublier ses sermons et
scs t evoirs : elle avoit eu un enfant; la m ort, moins cruelle, le lui
A 2
�........................................................ ( 4 )
aYoit ravi à l ’âge ôù il étoît incapable de tendresse. C ’est ainsi
qu’épouse sans époux, mère de famille sans enfans , la dame de
Reyrolles a vécu plusieurs années à Limoges , abandonnée aux
consolations de l’amitié et aux fantômes de l’espérance.
Elle avoit touché assez régulièrement à Limoges une pension de
bienséance que lui faisoit le sieur de R e yro lles, par égard pour la
maison de Caldaguès; mais au commencement de la révolution
elle ne reçut plus r i e n , et revint à Brioude.
Cette espèce de résurrection d ’une femme oubliée parut lui re
donner le charme de la nouveauté, et réveiller dans le cœur du
sieur de Reyrolles des feux mal éteints. Il est certain qu’il eut fait
son bonheur de rompre ses chaînes, et de mériter l'affection de
son épouse, si la prévoyance allarmée de la demoiselle Maigne
n ’eût cherché à la hâte à détruire ce premier mouvement par toutes "
sortes de moyens.
Mais tel est le sort d ’un homme subjugué; le sieur de Reyrolles
-voyoit, et il n ’osoit voir; il v o u l o i t , et ne pouvoit s’enhardir à vouloir:
l'homme le plus impérieux n’est donc qu’un foible enfant devant
la passion qui le domine. L e premier acte de foiblesse qu’il s’est
laissé surprendre, est l’abandon qu’un vaincu fait de ses armes;
il reste désormais sans défense, et se dévoue à l’esclavage.
L a demoiselle Maigne triompha , et le premier usage de sa
victoire fut de dicter les conditions et de profiter de la faveur des
circonstances.
Alors existoit une loi récente , que quelques femmes regardèrent
comme un présent du ciel et une faveur de la Providence. Après
la dissolution de la monarchie, de la féodalité et de la puissance
paternelle, en quelques jours d ’intervalle, et avant d ’attaquer la
religion dans ses solennités, il n ’y avoit plus qu’une destruction in
termédiaire à prononcer; et le lien du mariage, malgré son antique
i n v i o l a b i l i t é , fut dissoluble indistinctement par le divorce.
Cette innovation étoit trop précieuse à la demoiselle Maigne
pour qu’elle ne s’empressât pas de la saisir. En conséquence , le
a/| mai 1797,
¡1 fut signifié ù la dame de Reyrolles, de la part de sou
�313
5
(
)
m a r i, un acle par lequel il déclaroit qu’il entendoit divorcer pour
cause d’absence, et pour incompatibilité d ’humeur et de caractère;
en conséquence de quoi il nomrnoit trois amis , et lui faisoit som
mation de nommer de sa .part trois parens ou amis.
Dans cette conjoncture que pouvoit faire une épouse? plaider?
les tribunaux n ’étoient pas compétens ; résister? la loi ne le lui permettoit pas : souvent le demandeur se faisoit lui-même signifier
une réponse, et le divorce n ’en alloit pas moins à sa fin.
Quoi qu’il en s o i t , le 27 mai il fut d é claré , à la requête de
la dame de Reyrolles, que pour satisfaire à la sommation du 34
elle nommoit trois parens, ajoutant que le sieur de R eyrolles, en
provoquant son divorce , n’avoit fait que prévenir ses intentions.
L e 27 juin il fut tenu une première assemblée de famille, tou
jours motivée pour absence et incompatibilité; et après les dires du
demandeur et la tentative de conciliation des parens, on lit la ré
ponse suivante : Sur quoi ladite Couguet-biorat leur a répondu
q u elle étoit disposée à suivre en tout point la volonté de son
mari ; mais que si son dit mari persiste à requérir le divorce ,
elle y donne les mains.
.
Cette réponse si naïve , où l’obéissance seule se laisse apercevoir,
étoit en elle-meme insignifiante : mais on voulut lui donner un sens.
Les longs délais de rincompatibilité s’accordoient mal avec l’im
patience de la demoiselle Maigne. On crut donc découvrir dans
les dires de la dame de Reyrolles des matériaux suffisans pour para
chever un divorce par consentement m utuel, pour lequel il 11’y
avoit plus qu’un mois à attendre.
En conséquence, à la date du 28 juillet 1785, un mois après la seule
assemblée de famille, on fit rédiger un acte de divorce , dans lequel
on suppose qu'il a été requis par les deux époux, d’après la procé
dure voulue pour le consentement mutuel.
Cet acte fut porté à la dame de Reyrolles par un valet du comité
révolutionnaire, long-temps, quoiqu’on en dise , après la date qui
U1 u cl'; donnée : elle signa , il 11’y avoit pas à hésiter ; d ’aillçurs
son r e lu s, en l’exposant, 11’eùt fait que rendre cette pièce inu
�(6)
tile , et forccr à reprendre la suite du premier mode de divorce.
Ainsi s’accomplit cette œuvre d ’iniquité, et la demoiselle Maigne
eut enfin levé le plus grand des obstacles : mais comme si le ciel
5e fut joué de ses plus chères espérances , l’époque de son ma
riage qu’elle avoit tant hâtée s’éloignoit de jour en jour ; et pendant
quelque temps il y eut lieu de croire que le sieur de Reyrolles,
pénétré de la perte volontaire qu’il avoit sollicitée, oublioit la pro
cédure monstrueuse qu’il avoit ébauchée, et revenoit à scs pre
miers engagemens.
L a dame de Reyrolles se livra de bonne foi à une si douce rési
piscence ; elle feignit même ne pas remarquer qu’il ne venoit chez
elle qu’à la dérobée et avec la timidité d’un esclave. Enfin , une
grossesse lui parut le comble du bonheur, et le gage assuré d’une
réconciliation après laquelle elle soupiroit depuis si long-temps.
Mais les assiduités du sieur de Reyrolles n ’avoient pas échappé
aux ennemis de son épouse. T r o p adroits pour faire un éclat, ils
frappèrent des coups plus certains, et le poison de la calomnie vint
ébranler l’imagination foible d ’un homme que le premier mouve
ment fa ¡soi t agir, et q u i, dans ce qui concernoit ses passions , ne
savoit jamais penser par lui-même. C ’est ainsi que, dans sa confiance
aveugle, la dame de Reyrolles se croyoit encore épouse quand ses
ennemis ourdissoient sa perte : Inquirebant mala sib i, et dolos
totd die meditabantur.
L a grossesse de la dame de Reyrolles fournit une vaste champ
à leur malignité; l’époux lui-mènie fut entraîné à douter contre sa
conviction intime; cl ce que la dame de Reyrolles avoit cru être le
sceau de la paix devint en un instant le signal de la discorde et de
la haine.
T o u t d ’un coup la scène change : on profite diligemment de la
disposition d’esprit où on a mis le sieur de Reyrolles , et son ma
riage avec la demoiselle Maigne est consommé le 11 messidor
an a , douze jours avant que la dame de Reyrolles, sur son lit
de douleur, donnât le jour à une malheureuse créature sous d’aussi
sinistres auspices.
�7
(
)
N o n , le ciel ne l ’a point béni, ce fatal mariage ! 11 a entendu l ’anathème prononcé par une épouse dans sa désolation ; et elle n a
pas eu la douleur de savoir plus heureuse qu’elle celle qui l’avoit
chassée du lit conjugal. En portant un nom usurpé , la demoi
selle Maigne né trouva plus dans le sieur de Reyrolles cet être
soumis sur lequel elle a voit exercé tant de fois une capricieuse
puissance.
L a demoiselle Maigne avoit calculé cet effet habituel du mariage ;
et pour se prémunir contre son résultat , elle profita d’une époque
où le sieur de Reyrolles venoit d’être destitué de sa place de rece
veur du district, pour proposer un testament mutuel qui fut respec
tivement signé en l’an . Quelque temps après, une séparation
5
volontaire les a éloignés jusqu’à la mort.
Cependant la dame de Reyrolles, abandonnée à sa situation péni
ble , dévoroit ses chagrins et se devouoit à sa destinée. Occupée
des soins maternels que demandoit le premier ûge de sa fille , elle
attendoit avec résignation que le sieur de Reyrolles, rendu de nou
veau à ses premiers liens , s’occupât de deux êtres qu’ il avoit si
cruellement traités. M a is, au lieu d’un retour à la nature, il ne fit
plus apercevoir son autorité maritale que par des hostilités et par
l’abus de son administration.
Il avoit recueilli la succession considérable de l’aïeule de son
épouse, avoit traité de gré à gré avec un cohéritier pour le partage
des immeubles, et s’éloit emparé des effets mobiliers, sans compte
ni mesure.
Néanmoins, demeurant libre d ’en fixer la consistance, et pour
consommer la ruine de son épouse , le sieur de Reyrolles lui fit
faire , le 7 messidor an 4 > un acte d ’offres de 7000 francs en man
dats territoriaux, pour le m o n ta n t, d it-il, d e c e q u ’il avoit touché
sur sa dot , attendu que ladite Couguet avoit toujours éludé de
déclarer ce qui pouvoit lui être dû ; qu’ elle ne cherchoit qu’ il re
tarder la libération dudit Iieyrolles , qu’il étoit de son intérêt
d’ opérer le plutôt possible.
L a dame de Reyrolles répondit qu’elle ctoit surprise et lassée
�(,‘ ï
C8 )
des procèdes iniques de son m ari, et refusa les offres. Il y eut
procès verbal de non conciliation , après lequel elle fut assignée
le 21 messidor su iv a n t, devant le tribunal d u P u y , en réalisation
et validité desdites offres.
Ces diligences avoient lieu à la dernière heure du papier-monnoie;
le numéraire reparut au commencement de l’an ; et, dans ce pre
mier instant où l’opinion en augmentoit la valeur, le sieur d e R e y-,
5
rolles se hâta de faire proposer à sa femme une modique somme de
6000 francs pour tout terminer ; ajoutant, pour l’intimider, que
si elle 11e l’acceploit p a s , les offres de l'an 4 seroient jugées vala
bles , parce qu'elles avoient eu lieu avant la suppression du papier.
En vain la dame de Revrolles
demanda-t-elle à être éclairée sur
%/
la valeur réelle de sa propre fortune ; il fallut obéir à la puissance
maritale , et céder à la crainte de n ’avoir que les mandats offerts
au lieu du numéraire promis, si elle s’exposoit à aller plaider dans
un tribunal presque inconnu , à douze lieues de son domicile.
L a dame de Ileyrolles signa donc un traité le 16 frimaire an
5,
par lequel on lui fit dire qu’elle étoit venue à compte avec son
m ari, et qu’après communication prise de l’inventaire de son aïeule
et d ’un partage de 1785, il lui revenoit 126 liv. 10 sous ; à quoi
ajoutant d ’aulres articles touchés par son m a r i, quoique non com
5
pris dans l’inventaire, en valeur de S jô liv. 10 sous, le sieur de
Reyrolles se trouva tout juste débiteur des Gooo fr. qu’il vouloit
p a ye r, et dont Pacte porte quittance.
A compter de cette époque les époux furent séparés , et la dame
de Reyrolles n ’eut plus qu’à s’étourdir sur le passé et à supporter
6on sort avec courage : elle se consuloit avec sa fille, et celle con
solation même lui lut enviée. Après le 18 fructidor , ou lui donna
l'alarme sur le sort de celte enlant , qui 11’avoit pas encore d’état
civil. On lui persuada que les peines de la loi pourroimt l’alti ind i e , et elle se décida à faire une déclaration à l'officier public, fin
n ’eut garde de transcrire la qualité qu’elle vouloit se donner, par
la raison q u ’il eut été incivique de mépriser un divorce, et que
le sieur de Ile}fo lles, redevenu puissant, n ’auruit pas trouvé bon
q u ’il
�V/
9
;
(
)
qu’il fût fait mention de lui sans sa participation. L a dame de
Reyrolles déclara donc seulement qu’il lui étoit né une fille le 21
messidor qui suivit son divorce. Com m e ce divorce étoit daté de
l’an 2 de la liberté, on supposa la naissance de l’enfant au 21 m es
sidor an . Cette erreur a été reconnue par la demoiselle Maigne,
et seroit aisée à rétablir à l’égard d’un fait aussi notoire.
Dans ces entrefaites le sieur de R eyro lles, nommé receveur du
département de la Ila u te -L o ire , alla s’établir au P u y. L à , ayant
vécu près de six années séparé absolument de la demoiselle Maigne,
qui liabitoit Brioude, il fut atteint de la maladie qui l’a conduit
au tombeau.
5
A cette époque terrible, où l’homme, ne trouvant plus d’asile
dans les illusions du monde, voudroit réparer dans un instant les
fautes de sa vie toute entière, l’opinion générale a rendu au sieur de
Reyrolles la justice d ’attester qu’il n’avoit rien plus à cœur que de
se réconcilier avec sa fem m e, et de lui en donner, par un testament
honorable, la seule preuve qui fût désormais en son pouvoir.
Én e f f e t , il est de notoriété au P u y que le sieur de Reyrolles
avoit fait un testament par le q u e l, cassant celui qu’il regardoit
comme un monument de foiblesse et de honte, il léguoit 40000 f.
à la dame de Reyrolles personnellement, et faisoit en faveur du
sieur Vauzelles , ex-législateur, une disposition considérable.
Aussitôt que la demoiselle Maigne apprit la maladie du sieur
de Reyrolles, elle voulut se mettre à portée de déranger des projets
dont elle ne pouvoit douter. Craignant de ne pas se hâter assez,
elle envoya au Puy le sieur Granchier le m ercred i, et arriva ellemême le vendredi suivant. Sa vue fit une révolution singulière au
sieur de Reyrolles , q u i, à ce q u ’on assure, se tourna brusquement
du côté opposé, et se couvrit la tête avec un mouvement con'vtilsit. Quoi qu’il en soit, il expira le même jour 18 floréal an 12.
Cette mort soudaine servoit mieux la demoiselle Maigne que!
tous les plans qu’elle avoit pu concevoir. Seule dans la maison du
Sft.ur de Reyrolles, et en attendant les scellés qui 11e dévoient être
poses que le lendemain , au lieu do verser des lurmes stériles qu’ilt
li
�valoit mieux réserver pour la pantomime des audiences, la de
moiselle Maigne étoit libre de tout parcourir. U n certain porte
feuille vert avoit paru donner de l’inquiétude au défunt : il n ’a
plus paru ; et le public qui se trompe rarement en conjectures dé
sintéressées, paroit avoir été imbu de l’idée que dans ce porte-feuille
gissoient les papiers les plus précieux, et surtout le dernier tes
tament. E t qu’on ne dise pas que c ’est là une fable de pure ima
gination ; ce bruit avoit pris une telle consistance, que le sieur
Vauzelles, légataire, a rendu sur ce m o tif une plainte en suppres
sion de ce testament.
L a dame de Reyrolles ne donnera pas d’autres détails d’un fait
qu’elle n ’a appris que par la notoriété publique. C e n’est point la
fortune du sieur de Reyrolles qu’elle ambitionne; elle ne demande
rien qui ne soit à elle-même; elle veut son état civil, sa d o t, et ne
dispute point à la demoiselle Maigne une opulence chèrement
achetée, et dont la source équivoque n ’est de nature à donner du
crédit que vis-à-vis quelques collatéraux.
Après la mort du sieur de Reyrolles, ce n ’étoit plus que des
tribunaux que son épouse pouvoit attendre justice; en conséquence,
le 19 thermidor an 12, elle fit citer Catherine Maigne en payement
de ses dot, trousseau et gains matrimoniaux, e t, en tant que de
besoin, en nullité du divorce et actes postérieurs.
L a demoiselle Maigne ne savoit pas encore à fond le rôle con
venable à la circonstance. Cette tendresse soi-disant conjugale qu’il
falloit supposer à un homme dont les dernières volontés avoient
été d’enrichir sa fidèle moitié, ne s’allioit guere avec un domicile
constamment séparé, et à douze lieues de distance. Cependant la
demoiselle Maigne, qui avoit toujours habité Iirioude, et qui ignoroit les moindres affaires du sieur de Reyrolles, proposa un déclinatoire, soit qu’elle crût qu’il n’avoit pas transféré au Puy son do
micile de droit, soit qu’elle fut entraînée par la vérité à convenir
qu’elle n ’avoit pas le même domicile de fait que celui q u ’elle disoit
son époux; elle ignoroit que le sieur de Reyrolles avoit acquis une
maisou au I’ u y , s’en dcclaroit habitant dans les actes publics, et
�~
C n )
avoit même fait rayer sa cote mobilière à Brioude. En conséquence,
et par ces motifs , elle fut déboutée de son déclinatoire par juge
25
3
ment du
frimaire an i .
A u fond la demoiselle Maigne répondit que la dame de Reyrolles
n ’étoit pas recevable dans sa demande, soit à cause de la loi du
26 germinal an 1 1 , soit parce que la demande n ’avoit été formée
qu’après la mort du sieur de Reyrolles, soit parce que la dame de
Reyrolles étoit divorcée par un acte requis et signé par elle-même;
qu’elle avoit traité avec son mari en qualité de femme divorcée,
et avoit pris la même qualité dans plusieurs autres actes , no
tamment dans la déclaration de naissance d’un enfant né un an
après le divorce; qu’à l’égard d’elle-même Catherine M aigne, elle
n ’avoit point à craindre le sort de ce d ivo rce, parce qu’elle étoit
mariée légitimement, héritière universelle , et que le sieur de
Reyrolles avoit tellement persisté dans cette volonté pendant sept
ans, qu’à sa mort on avoit trouvé le testament de la demoiselle
Maigne parmi ses papiers les plus précieux.
Il est inutile de rappeler les moyens opposés par la dame de
Reyrolles à cette défense de la demoiselle M a ig n e , les faits cidevant narrés les indiquent; et il suffit de dire qu’en déclarant le
divorce nul, les premiers juges ne virent plus dans la dame de
Reyrolles qu’une épouse restée sous la puissance maritale, n'ayant
pu dès - lors traiter valablement avec son époux , ni prendre
une qualité qu’elle n’ avoit pas. En conséquence, par jugement du
24 floréal an i , le tribunal du P u y, sans s’arrêter aux fins de
3
non-recevoir proposées par Catherine M aigne, déclara nul l’acte
de divorce du 28 juillet 1793, et tout ce qui l’a précédé, de même
que le traité du
5 frimaire
an
5;
remit la dame de Reyrolles au
nieme état où elle étoit avant lesdits actes ; condamna Catherine
g u ig n e , en qualité d ’héritière du sieur de Reyrolles, à lui payer,
1 • oo ir. pour le montant de son trousseau stipulé en son contrat
de mariage du 7 novembre 1774 ; 20. 1200 fr. pour scs bagues et
joyaux; 3 . /(00
pOUr sa pCns*lon viduelle; 4*. à lui fournir un
3
logement garni et meublé, suivant son état et sa fortune, dans le
B 2
r
�dernier domicile du défunt, à la charge par ladite dame de Reyrollea
de constater l ’état dudit mobilier qui lui sera remis, pour être renduà qui et dans le temps de droit; °. à payer à ladite dame d e R e y -
5
5
rolles i oo fr. pour son deuil et celui de sa domestique; et à l’égard
du payement de la dot, le tribunal ordonna que les parties contesteroient plus amplement, et’ à cet effet fourniroient leurs états res
pectifs, sa u f débats. Les inscriptions de la dame de Reyrolles furent
maintenues jusqu’à parfait payement, et il fut ordonné que ledit
jugement seroit exécuté en la forme de l’ordonnance nonobstant
l’appel.
Celte dernière disposition donna lieu à la demoiselle Maigne de
hâter singulièrement son appel et ses poursuites. Impatiente de
jouir sans entraves, elle remontra à la cour que la douairière d ’un
receveur général ne pouvoit vivre avec des saisies qui arrêtoient des
comptes extrêmement pressans, et que la trésorerie nationale la
pressoit pour les rendre. L a c o u r , par son arrêt provisoire du
3
24 floréal an i , a fait défense d ’exécuter le jugement jusqu’à son
arrêt définitif.
L e s parties sont aujourd’hui sur le point de faire juger le fond
de la contestation, et la dame de Reyrolles attend sans inquiétude
une décision qui ne peut être que conforme à la morale et à la
justice.
M O Y E N S.
T o u te la défense de la demoiselle Maigne est fondée sur ce
paradoxe : L e mariage est une simple convention privée; il peut
être détruit de gré à gré par un simple acte, qui supplée les formes
de la l o i , ou qui en dispense.
L a défense de la dame de Reyrolles est de d ire, au contraire,
que le mariage est un lien destiné à l’union de deux fam illes,
intéressant la société entière, et ne pouvant êlrc dissous que dans
la rigueur des formes légales.
Sans doute la solution de ces deux systèmes est écrite dans le
�( 13 )
. . . .
cœur de tous ceux qui n’auront pas oublié ces principes immuables
qui résistent au fracas des révolutions et à l’éblouissement des
systèmes.
Ici il est constant qu’en 1774 la dame de Reyrolles a été mariée
avec toutes les solennités civiles et religieuses, et que son époux
n'est mort qu’en l'an 12. 11 s’agit donc d’examiner si le mariage
a été légalement dissous par un divorce. Mais la dame de R e y rolles oppose des fins de non-recevoir, qu’il faut examiner; et ses
prétentions donnent lieu aux questions suivantes : i°. L a dame
de Reyrolles est-elle recevable à demander la nullité de son divorce
après la mort de son m a ri, et malgré la loi du 26 germinal an
onze ? 2’ . A u fond , le divorce opposé est-il valable ? *. Si ce
divorce n’ a pas été valable , a-t-il pu néanmoins être validé par
la' convention particulière de la dame de Reyrolles?
3
P
r e m i è r e
Q
u e s t i o n
.
L a dame de Reyrolles est-elle recevable à demander la nullité
de son divorce après la mort de son m ari, et malgré la loi
du 26 germinal an w ?
Sur quoi donc seroit fondée la première fin de non-recevoir?
sur une loi romaine ? mais elle ne s’applique pas : ne de statu
defunctorum post quinquennium queratur. Ici le sieur de Reyrolles
est mort en l’an 12, et il ne s’est pas même écoulé six mois de son
décès à la demande.
C ’est encore moins le Code civil qui favoriseroit la demoiselle
Maigne. L ’article 188 porte que « l’époux au préjudice duquel a
» «té contracté un second mariage, peut en demander la nullité,
» du vivant même de l’époux qui étoit engagé avec lui. »
L a loi ne permet donc de se pourvoir avant la mort de l’époux,
qu a titre de grâce; et il semble, par scs expressions, que c'cst à
regret qu elle y a consenti : elle laisse entrevoir le conseil de ne pas
user de ce consentement ; et ce mot m<fme, qui semble pour ainsi
�*4
(
)
dire échappe à la plume du législateur, est cependant de la plus
grande moralité.
Q u ’est-ce en eifet qu’une demande de ce genre, formée par l'é
poux abandonné contre l’époux coupable, si ce n ’est une espèce de
dénonciation ouvrant le champ le plus vaste à la discorde, et ren
dant désormais toute réconciliation impossible?
Est-ce une foible épouse qui, du vivant de son mari, osera l ’ap
peler devant les tribunaux pour lui dire : Je veux qu’on vous oblige
à me rester fidele i Mais si une seule fois peut-être, dans l’anti
quité, la sensible Ilypparette a reconquis par un appel en justice,
la tendresse du plus infidèle des époux, combien d’autres s'indigneroient d ’être ainsi troublés dans leurs affections, et vengeroient
leur amour propre par un abandon plus éternel! Car les hommes,
qui font les institutions, n ’ont créé que la puissance maritale; et
quels que soient les dons que le sexe ait reçus de la nature en dé
dommagement de sa foiblesse, ce pouvoir d’équilibre n ’est plus
qu’une divinité imaginaire, quand les premières affections ont perdu
leur prestige. Malheur donc à l’épouse inconsidérée qui tenleroit de
proclamer son abandon et de chercher son époux jusque dans les
bras d’une rivale I
Il est bien plus dans l’ordre qu’une femme prudente ferme les
yeux sur les torts de son époux, et qu’elle tolère son infidélité pour
espérer son inconstance : le même caprice qui l’a éloigné du lit
conjugal peut l’y ramener repentant et fidèle. L e lien sacré du
mariage est comme l ’amour de la patrie. Cunctos ducit, et im-
rnemores non sinit esse sut.
,
T o u t devoit faire penser à la dame de Reyrolles que son goût
pour la demoiselle Maigne ne devoit être qu’éphémère : leur ha
bitation séparée , une haine qu’ils ne dissimuloient plus , annoncoient une rupture prochaine; cl sans les difficultés que le Code
civil a ajoutées au divorce, il est notoire que le sieur de Reyrolles
auroiL vaincu la répugnance de divorcer une seconde fois, car il
ne cachoit à personne qu’il n ’étoit retenu que par cette considéra
tion. Quoi qu’il en soit, la dame de Reyrolles a fait ce qu’elle
�%Z2>
5
( i
)
clevoit faire; tant qu’elle a eu de l’espoir, elle a gardé le silence;
et quand la mort ne lui a plus présenté qu’une étrangère à pour
suivre, elle a réclamé scs droits.
L a demoiselle Maigne n ’est pas le premier héritier qui ait op
posé que la nullité d’un divorce ne pouvoil pas être demandée contre
lui. Mais la cour de cassation a décidé le contraire par arrêt du
14 vendémiaire an 10.
L a deuxième fin de non-recevoir n ’a pas même le mérite de
fonder un raisonnement sur le bon sens.
Parce que la loi transitoire du 26 germinal a dit : Tous divorces
prononces, etc., auront leurs effets, on en a conclu qu’à compter
de cette loi il n’étoit plus possible d’attaquer les précédons divorces.
C ’est-à-dire que si la veille de la loi nouvelle un divorce avoit
été prononcé sans aucunes épreuves, les époux n ’en seroient pas
moins séparés à jamais; et c ’cst ainsi qu'on fait l'injure au légis
lateur de lui prêter des pensées irréfléchies et monstrueuses.
Mais la d e m o i s e ll e Maigne n’a réussi à se faire un moyen de la
loi du 2G germinal qu’en tronquant entièrement l’article invoqué.
« T o u s divorces prononcés par des officiers de l’état civil, ou
» autorisés par jugement, avant la publication du titre du Code
» civil relatif au divorce, auront leurs effets conformément aux
» lois qui existoient avant cette publication. »
Ainsi le législateur n’a pas commis la faute de valider ce qui étoit
nul, il a au contraire déclaré ne valider que ce que la loi existante
lors du divorce approuvoit expressément. Incivile erat, nisi totd
legeperspectd, judicare. Maintenant que l’article entier est rétabli,
l ’objection de la demoiselle Maigne se rétorque contre elle.
D
e u x i è m e
Q
u e s t i o n
.
L e divorce du 28 ju ille t 1793 est-il valable ?
Comment le seroit-il? il y en a trois dans un seul.
Ces trois espèces de divorces exigeoient trois sortes d’épreuves et
�6
( i
)
de procédures. L e sieur de Reyrolles, plus pressé qu’il ne devoit
l ’être, a m a l g a m a t o u t , et interrompit au milieu de son cours une
première procédure, pour lui en substituer une seconde qui ne s’y
allioit pas.
L a nature de toute procédure se fixe irrévocablement par la
demande introductive. L e sieur de Reyrolles, par son exploit ori
ginaire du 24 niai 1793, avoit formé demande en divorce, soit
pour absence depuis neuf ans, soit pour incompatibilité d’ humeur
et de caractère. Cependant le divorce est prononcé sous prétexte
de consentement mutuel.
L e divorce pouvoit être dem andé, comme cause déterminée pour
absence pendant cinq ans sans nouvelles , ou pour abandon pen
dant deux ans. ( 2". loi du 20 septembre 1792,
1 , art. 4. )
Si le sieur de Reyrolles eût voulu un divorce pour absence pen
dant cinq ans sans nouvelles, il lui falloit pour première pièce
un acte de notoriété constatant celte longue absence ( §. 2 , art. 17 ) :
mais sa femme étoit près de lui le 24 niai i j g S .
S’il eût voulu un divorce pour abandon pendant deux ans , il'
falloit assigner sa femme devant un tribunal de famille ( art. 18 ) ,
parce que le fait d’abandon comportoit une défense justificative.
O r , il étoit constant que la dbme de Reyrolles n ’étoit allée à
Limoges qu’avec l’agrément de son mari , qu’elle y recevoit ses
lettres et une pension annuelle. Mais ce n ’est pas pour abandon que
le sieur de Reyrolles demanda le divorce : Pexploit n ’en dit rien.
Pour incompatibilité d’h um eur, le sieur de Reyrolles avoit sa
marche tracée d’une manière positive.
« Il convoquera une première assemblée de parons, ou d ’amis à
» défaut de parens , laquelle ne pourra avoir lieu qu’un mois après
« la convocation. ( § . 2 , art. 8. )
» L a convocation sera faite par l’un des officiers municipaux...,
« L ’acte en s e r a signifié à, l’époux défendeur. ( A r t . 9, )
» Si la conciliation n’a pas lieu , l ’assemblée se prorogera à deux
« mois , et les époux y seront ajournés. A l’expiration des deux
« m ois..... si les. représentations ue peuvent encore concilier les
époux,
�(
17
)
» époux , l ’assemblcc sé prorogera 5 trois mois. ( A rt. 10 et n . )
» Si à la troisième séance le provoquant persiste, acle en sera
» dressé. 11 lui en sera délivré expédition , qu’il fera signifier à
» l’époux défendeur. » ( A rt. 12. )
L e sieur de Reyrolles provoqua un divorce le 24 m ai, sans acle
de convocation d ’un officier municipal.
Il 11e nomma point de parens; il indiqua seulement des am is,
sans même exprimer que ce fût à défaut de parens.
L a première assemblée eut lieu le 27 juin 1793
en fut dressé
acte; mais aucune signification n ’ a été faite à la dame de R cy ro lle s, parce que les moteurs craignoient que dans l’intervalle les
choses fussent pacifiées.
.11
Il 11’y a ainsi pas eu de divorce pour incompatibilité d’humeur,
pas plus que pour absence.
C e seroit donc un divorce par consentement mutuel qu’il faudroit valider.
Mais l’acte primitif y est un obstacle perpétuel; on veut cepen
dant que les actes qui suivent aient corrigé cette première procédure.
L a loi en exigeoit une absolument différente. •
« L e mari et la femme qui demanderont conjointement le di» vorce, seront tenus de convoquer une assemblée de six au moins
» des plus proches parens, ou d’amis à défaut de parens. ( §. 2 ,
art. 1". )
» L ’assemblée sera convoquée à jour fixe et lieu convenu avec
» les parens ou a m is .. . . L ’acte de convocation sera signifié par
» un huissier aux parens ou amis convoqués. ( A rt. 2. )
» Les deux époux se présenteront en personne à l’assemblée; ils
>> y exposeront qu’ils demandent le divorce. » ( Art. « )
L e but de la loi se remarque assez par la différence des actes
préliminaires.
L ’incompatibilité pouvoit n’avoir lieu que de la part d’un époux:
la procédure devoit donc avoir des formes hostiles ; c ’est pourquoi
la convocation devoit être réglée par un officier m unicipal, et un
C
4
�V ( 18 )
huissier devoit sommer l’époux défendeur de concourir à la forma
tion de l’assemblée , et d’y comparoître.
Mais le divorce par consentement mutuel supposoit de la part
des époux un accord préalable né d’une égale satiété de -vivre
ensemble. L a loi vouloit donc la preuve évidente qu’ils avoient
un désir unanime de mettre fin à une cohabitation insupportable ;
et de là vient que, pour éprouver l’uniformité de cette vocation,
la loi exigeoit une simultanéité dans les démarches.
A i n s i , bien loin de se signifier par huissier une nomination de
parons , et par actes séparés , ce qui marquerait une provocation ,
la loi a voulu que le mari et la femme indiquassent ensemble les
parens, en les choisissant par moitié; ellea voulu qu’ils demandassent
le divorce conjointement : ce qui exprime avec clarté que la loi ne
veut ni demandeur ni défendeur.
L a demoiselle Maigne objectera-t-elle que le but est également
rempli quand l’un des époux a requis le divorce et q u e l’a u trey a
consenti ? Mais voilà une provocation , voilà un défendeur en
divorce : ce n’est plus une demande conjointe , et l’intention de la
loi est manquee.
Souvent l’incompatibilité d’humeur pouvoit être égale; mais la
moralité de l ’un des époux peut répugner à un remède désiré
par l’autre. T e l époux ne se résoudroit jamais à vouloir le di
vorce , q u i , provoqué par une demande, trouve dans sa fierté une
adhésion qui n ’éloit pas dans son cœur; sa répugnance est vaincue
par l’idée que la loi ne lui a offert aucun moyen de résister à l’at
taque, et, dans son accord même, son opinion est soulagée en se
disant qu’il n’a point été le provocateur.
Mais pourquoi chercher l’intention de la loi quand elle est claire?
Non omnium quœ a majoribus constituta sunt ratio reddi potest.
II est encore un principe bien constant en fait de lois rigoureuses
c ’est que toutes les formalités doivent être suivies à la lettre sous
peine de nullité ; et la loi du /, germinal an 2 a étendu cette peine
à l'inobservation des formes prescrites par toutes les lois rendues
depuis 178g.
�227
( !9 5
Ce seroit donc s’abuser étrangement que de voir dans la procé
dure qui a p ré c éd é e divorce prononcé le 28 juillet 1793, les actes
préliminaires d’un divorce par consentement mutuel.
Non-seulement cette procédure n ’est pas conforme à la lo i,
mais le sieur de Reyrolles a donné un autre nom au divorce par
lui demandé. Il a requis seul le divorce ; et si sa femme a répondu
par un second acte qu’il n’avoit fait que prévenir ses intentions,
elle n ’a pas pour cela changé la nature d’une demande, tellement
indélébile qu’elle ne comportoit ni opposition, ni débats, ni ju
gement.
Lors de l’assemblée, la dame de Reyrolles ne paroit encore que
pour répondre ; elle ne requiert pas le divorce, elle veut seulement
suivre la volonté de son mari. A u lieu de demander conjointement
le divorce, elle donne les mains à la demande, .y/son mari y persiste.
Alors le mari persiste ; donc c’est lui seul qui veut le divorce,
c’est lui seul qui le provoque et qui le consomme.
Voilà cependant ce que l’officier public , dans l’oubli de scs
devoirs , a reçu comme les épreuves suffisantes d ’un divorce.
U n divorce commencé pour incompatibilité d ’humeur exigeoit
une foule d’actes et de longs délais ; cet officier public s’est contenté
d ’un seul acte et de trente-trois jours de délai.
C ’est donc ainsi que la sainteté du mariage auroit été mise à la
merci de l’arbitraire ou du caprice, pour ne rien dire de plus.
Mais il seroit insensé de justifier cette procédure dans ses délais
etdanssa forme; elle a péché encore par une irrégularité non moins
grande. L e sieur de Reyrolles semble avoir voulu esquiver les repré
sentations de sa famille, car il n ’a appelé aucun de ses parens à
son divorce.
Ici encore la loi a marqué entre les deux procédures une dif
férence notable. Pour l’incompatibilité d ’h u m eu r, il suffisoit de
parens ou amis ; mais pour le consentement m u tu e l, la loi a voulu
la convocation des plus proches parens.
S i , comme veut le dire la demoiselle Maigne , il eût clé égal
d ’avoir des amis, c ’étoit inutilement que la loi étoit plus exigeanto
C 2
0J
�pour le consentement mutuel. Mais , sans raisonner plus long-temps
sur un point déjà trop évident , il suffit de remarquer que la loi
ne vouloit des amis qu 'à défaut de parens.
Oseroit-on supposer qu’à Brioude le sieur de Reyrolles n’avoit
pas de parens? cela est aisé à démentir : mais si cela eût été
vrai, il falloit au moins l'exprimer. T o u t acte de formalité doit por
ter avec lui-même la preuve que cette formalité a été remplie. Déjà
la cour d’appel, dans une cause sem blable, a annullé un divorce
entre dep habitans d eR iom , par arrêt du 26 pluviôse an 10 , sur le
m o tif que les actes n ’exprimoicnt pas que des amis n ’eussent été
appelés qu’à défaut de parens.
Que signifie même cet acte si précipité, qu’on dénomme si impro
prement un acte de divorce? L ’officier public, de sa pleine puissance,
y dissout un contrat de mariage passé devant Couguet et Ilêra u d ,
notaires, le 7 novembre 1774* Mais jamais on n ’a ouï dire que ce
fût le contrat notarié qui donnât l’état civil aux époux, et consti
tuât le mariage. Avant 1792, l’église donnoit tout à la fois l’état
civil et le sacrement; le mariage rie tenoit son essence que de la
célébration. O r , ce n’est pas l’acte de célébration du 8 n o v e m b r e
qui a,été dissous, mais un simple contrat privé, réglant des affaires
d ’intérêt, et totalement incapable d’opérer un mariage.
Enfin , la loi du 20 septembre a exigé que « tous actes de divorce
» fussent sujets aux mêmes formalités d’enregistrement et de publi» cation que l'étoient les jugemens de séparation » ( §. , art. 11. )
O r , le divorce opposé ne parolt pas même avoir été enregistré.
On avoit objecté à la dame de R e y r o l l e s qu’elle-même avoit assigné
pour la prononciation du divorce. Elle ignore si aucun exploit
existe, car elle n’en a jamais donné l’ordre ; mais, quand on sup
poserait le contraire, prétendroit-on sérieusement qu’une défende
resse en divorce a pu provoquer à son tour un divorce par con
sentement mutuel ?
Un exploit après le changement de formalités auroit rétabli la
procédure pour incompatibilité d ’humeur , et cet exploit même
seroit une nullité de plus.
5
�C 21 )
T
b o i s i è m i
Q
u e s t i o n
.
S i le divorce n’a pas été 'valable, a-t-il pu néanmoins être validé
par une convention particulière de la dame de Iiejrrolles ?
Un contrat qui n ’intéresse que les deux parties peut snns doute
ne dépendre que d ’elles seules, et alors il est rompu aussitôt qu’elles
en ont exprimé la volonté.
Mais un contrat qui intéresse la société entière ne peut se dis
soudre que par des actes publics et authentiques, et dans les formes
rigoureusement exigées. Cette différence est sensible, et tient à la
nature du contrat de mariage.
Oser dire qu’il est un simple contrai privé n’est qu’une héresip
insoutenable; elle e$t condamnée par toutes nos lois; et les R o
mains eux-mêmes, qui cependant admettoient la répudiation et le
divorce, nous ont transmis les idées grandes et nobles qu ils avoient
sur l’importance du mariage.
« Parmi toutes les institutions humaines, a dit Juslinien , rien
)> n ’est si sacré et si important que le mariage, car c’cst par lui que
» se forme la suite des générations; c’est par lui que se peuplent
« les régions et que les cités fleurissent : il est le conservateur de
» la république et la source de sa prospérité. »
N ih il in rebus morlalibus périndè venerandum est alque matrimoniurn : quippeex quo liberi, omnisque deinceps sobolis sériés
ex istâ t, quod regiones atque civitates frequenter reddat, undè
dénique reipuhlicœ coaugmentatiofiat. ( Novell . 140. )
T o u t ce qui lenoit au mariage participoit chez les Romains de
cette considération. Les dots étoient aussi considérées comme objet
d’intérêt public : Reipublicœ interest dotes mulierum salvas esse.
L e divorce avoit aussi mérité l’attention du législateur ; il en
détcrrrnnoit les formes, et exigeoit l’avis de la famille et la présence
de sept témoins, afin que leur nombre, leur influence et leurs re
présentations fussent un frein à la rupture du mariage, (ffi- D ç
divortiits et répudias. )
�v
>/
s
(
22
)
Et si les formes n ’étoient pas exactement suivies, le divorce étoit
radicalement nul : Nullum divortiutn ratum est. ( L . g. eod. )
Quand cette nullité n’auroit pas été textuelle, elle eût cté pro
noncée par la loi qui por toit que toutes les conventions faites contre
le droit civil, contra juris civilis regulas, étoient nulles de plein
droit, et ne produisoient aucune action, (/ ,. 28, f f . D e pactis.)
O r, il iv étoit pas douteux que la forme de dissolution du mariage
ne fut réglée par le droit civil : Jure civili dissolvere solet matrimonium. ( L . 1 1 , f f . D e divort. et rep. )
D ’autres lois disent expressément que tout ce qui tient à l’état
des hommes n ’est pas en leur pouvoir, parce qu’on ne peut changer
la condition des personnes : Status hominis v e l conditio personarum mutari non potest. ( L . liberos, c. D e lib. c .)
Sans doute ces principes suffiroient pour établir qu’un divorce
n’est pas susceptible d’être validé par des conventions particulières;
et il résisteroit d’ailleurs au bon sens que la loi eût exigé des formes
rigoureuses, et que cependant elle eût permis aux époux de s’en
dispenser indirectement.
Mais la loi, après avoir exprimé scrupuleusement les formes à suivre
pour le divorce, avolt aussi prévu que des é p o u x trop p e u attachés
à son observation pourraient se permettre des traités pour valider ce
qu’elle ne valide pas; et, par une prévoyance très-conséquente, elle
repousse ces conventions illégales, et les déclare radicalement nulles.
Pactiones sane s i quœ adversus preesentia scita nostree majes-
tatis fuerint attentatee, tanquam legibus contrarias nullam habere volumus firmitatem. ( L . 8 , code D e repudus.)
Ainsi la question est diserlement jugée par la loi elle-même.
Si un divorce n’a pas été légalement f a i t , les époux ne peuvent
ensuite le valider par aucune convention.
Sans doute la demoiselle Maigne ne prétendra pas que ces prin
cipes soient combattus par aucune loi française. On demande,
dit Vinnius, s’il est permis de transiger sur la validité des mariages:
oui,* répond-il, s’il s’agit de valider le mariage : Ut sponsa maneal sponsa, placet transactionern valere ; mais la transaction est
�2
z>\
( 23 )
absolument n u lle , s’il s’agit de relâcher le lien du mariage. ( Vinn.
D e trcins. )
L a demoiselle Maigne opposera-t-elle, la loi du 20 septembre
1792. Mais quelle que fût l’opinion du temps, elle n ’y trouvera
rien de favorable à son système. « L a dissolubilite spontanée du
» mariage , disoit le rapporteur de cette loi , la liberté d’en con» tracter un second , après un premier qui ne seroit pas légalement
»> rom pu, seroit une liberté immorale et impolitique. »
Aussi la loi du 20 septembre s’exprime-t-elle d’une manière trèsconforme aux principes enseignés par les lois romaines.
« L e mariage est dissous par le divorce légalement prononcé.
» Les époux ne peuvent contracter un second mariage qu’après
» que le premier aura été dissous conformément aux lots. »
Que la demoiselle Maigne ne se dissimule pas toute la force de
l’expression ne peuvent. Toutes les fois, dit Dumoulin , qu’elle se
trouve dans les lois de rigueur, elle marque la plus forte des prohi
bitions ; elle ôte la puissance de di’oit et de fait , et a le même
résultat que l’impossibilité absolue.
Il en résulte donc que la demoiselle Maigne n’a jamais pu être
l ’épouse du sieur de Reyrolles
fait conformément aux lois.
7
dès que son divorce n’a pas été
L e Code civil répète ces dispositions de la loi du 20 septembre.
Rien n’est plus cla ir, et il est difficile d ’y voir que si le divorce
n ’est pas légalement prononcé, on pourra dissoudre le mariage par
des conventions particulières.
D ’ailleurs, suivant le Code c iv il, il faut pour la validité d’une
convention, i°. la capacité de contracter, 2U. une cause licite dans
l ’obligation. ( A r t . 1108. ) O r, suivant l’art. 1124, la femme mariée
est incapable de contracter clle-mêine ; e t , d ’après l’art. n 5 3 , la
cause est illicite quand elle est prohibée par la l o i , ou contraire à
l’ordre public.
Se départir de son état civil est sans doute la plus grande dis
position qu’une femme mariée puisse faire; et cependant elle n’a
pas la capacité de iaire des dispositions 'bien moindres. Comment
at
�( h
)
traileroit-clle librement avec son mari , à qui elle doit obéissance,
et qu’elle est obligée de suivre partout où il juge à propos de ré
sider? ( A rt. i et 214. )
L e mari lui-même , chef de la puissance maritale , ne peut y
déroger et s’en départir par une convention. ( A rt. i
. ) Com
ment donc concevoir que le mariage soit dépendant d ’une transac
tion , quand la puissance maritale n’en seroit pas susceptible, elle
qui n ’est cependant qu’un effet ou une émanation du mariage?
Jusqu’ici la dame de Reyrolles a supposé un traité sur la vali
dité de son divorce ; et , dans ce cas m êm e, il est évident qu’un
traité seroit nul : mais il n’en existe d’aucune espèce ; et ce que la
demoiselle Maigne appelle à son secours , est seulement une appro
bation du divorce , résultante du traité de l’an
et de quelques
25
388
5
exploits.
L a dame de Reyrolles, objecte la demoiselle Maigne, s’est donnée
plusieurs fois la qualité de femme divorcée: donc elle a approuvé,
elle a ratifié, elle a validé son acte de divorce.
Ce qu’on n ’oseroit pas dire pour l’acte du plus mince intérêt, la
demoiselle Maigne le propose avec assurance pour une dissolution
de mariage. ■
Mais peut-on s’imprimer une qualité qu’on n’a p a s , et perdre
par un eul mot son état civil ? U n mineur cesse-t-il de l ’être en
s e disant majeur? et un époux, en se disant veuf, cesseroit-il d’être
engagé dans les liens du mariage ?
6
L ’exécution d’un acte n u l , dit M . Cochin dans son 37'. plai
doyer , n ’en a jamais opéré la ratification ; c a r , dans les cas où
la loi donne dix ans pour réclamer, si chaque acte d’exécution
opère une ratification , il faudroit dire que la loi n ’a accordé aucun
délai ; et au contraire tout le monde sait qu’il ne laut considérer que
l ’acle n u l , et compter pour rien son exécution.
D e même , la dame de Reyrolles ayant coopéré par sa signature
premier acte n u l, c’est-à-dire , à son divorce, tout ce qu’cllo
a fait ensuite n’en a été que l’exécution.
à
u n
J1 falluit qu’elle réclamât ou exécutât. Mais,' étant en puissance
maritale ,
�( 25)
maritale, elle avoit au moins dix ans pour réclamera compter du
décès de son mari : jusque-là elle éloit donc forcée d’exécuter un
divorce nul , car son intérêt n’étoit pas de réclam er, de peur que
son mari ne divorçât une seconde fois plus régulièrement.
Sans doute la restitution de sa dot étoit la première exécution
du divorce ; et on a vu comment elle fut forcée par des offres à
traiter pour ce que voulut le sieur de Reyrolles. L e compte d’ins
truction qu’il lui devoit comme mandataire, pour avoir touché des
droits successifs inconnus, exigeoitd’après les lois un détail qu’il n’a
pas donné; et quand celle partie de la cause , pendante encore de
vant les premiers juges , sera remise en discussion , la dame de
Reyrolles prouvera l’abus évident de la puissance maritale, et le
tort considérable qui lui a été fait.
L a dame de Reyrolles n ’a point traité sur son divorce : elle n ’a
fait que Pexécuter par c o n t r a i n t e . P o u r exister, elle fut obligée de
former quelques demandes ; et sans doute pour la régularité dès
exploits, ne pouvant sc dire autorisée du sieur de R eyrolles, elle
étoit forcée de se dire divorcée pour recevoir ce qu’elle demandoit.
Mais toutes les fois que cette qualité n'étoit pas de forme néces
saire, la dame de Reyrolles s’abstenoit de la prendre ; elle peut
représenter plus de soixante actes où elle ne se l’est pas donnée ;
elle a même prouvé, par les registres de son m a r i, qu’il n ’a pas
cessé de lui donner par écrit le nom de Florat-Rejrolles après le
prétendu divorce.
L ’exécution d’un acte n u l, on le répète , n ’a jamais produit une
ratification ; et le Code civil a fait aujourd’hui une loi du célèbre
passage de Dumoulin sur cette matière. « L a ratification d ’une
» obligation contre laquelle la loi admet Faction en nullité ou en
» rescision , n ’est valable que lorsqu’on y trouve la substance de
>> cette obligation , la mention du m otif de l’action en rescision,
» et l’intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée. »
( Art. 1
.)
Une donation nulle île peut même être ratifiée : il faut la refaire
eu forme légale. ( A rt. i c). ) U n divorce auroil-il moins intéresse
D
558
53
L
�*
( a 6 )
le législateur? et pensera-t-on qu’il fut plutôt susceptible d’une
simple ratification ?
L a jurisprudence ne s’est jamais écartée de ces principes. Un
jugement a été cassé le a messidor an 4> parce que des quittances
données en viduité avoient été réputées ratification d’une vente de
3
bien dotal en coutume d’Auvergne, « attendu que les formalités
» n’ ont pas été remplies, et que Vexécution pendant plusieurs
» annees du traite du ...... n’ a pu 'valider un acte nul dans son
» principe. »
Cependant la demoiselle Maigne insiste, et il lui semble que tous
les principes qu’on vient de lui rappeler ont été renversés par un
arrêt récent de la cour de cassation, qui a jugé en thèse, dit-elle,
que le mariage et le divorce ne sont plus des contrats d ’ordre public,
et qu’on est non recevable à demander la nullité d’un divorce quand
on l ’a approuvé par des actes subséquens.
Mais ce n ’est là qu’une calomnie de la demoiselle Maigne contre
la cour de cassation , qui ne peut être sérieusement accusée d’un
tel paradoxe. Il n’étoit question devant elle que d’un divorce 'va
lable, d ès-lors la cause n’est plus la même.
Cependant un arrêt de cassation est une a r m e trop puissante
pour qu’ il suffise de ne se défendre contr’elle qu’avec cette seule in
dication. L a dame de Reyrolles va en rappeler l’espèce précise, et
il sera aisé de voir que la demoiselle Maigne a voulu seulement
abuser de quelques expressions fugitives et ambiguës d ’un arrêt de
circonstance.
« L e sieur Boehler, après avoir reconnu dans plusieurs contrats
» la validité du divorce obtenu par sa fem m e, avoit cependant
» tenté de le faire annuller par justice.
» Celle-ci, en repoussant les nullités, opposoit d’ailleurs et pé»
j> remptoirement que son ci-d eva n t mari étoit; non recevable,
» attendu qu’il avoit reconnu la validité du divorce.
» A rrêt de la cour d’appel séante à T rêv es, qui admet la fin de
» non-recevoir ; attendu que les moyens de nullité étoient sans
» fo n d e m e n t ; et encore, attendu que le mari a pu et voulu renoncer
�( 27 )
h au droit qu’il avoit de contester les effets civils du divorce de son
» épouse.
» Pourvoi en cassation, pour contravention à l’article 6 du Code
» civil.
» Le demandeur soutenoit qu’une convention tendante à faire
» valoir un acte de divorce n u l, seroit contraire à l’ordre public
» et aux bonnes mœurs ; qu’ainsi, en supposant le fait de recon>i noissance ou consentement par le m ari, la cour d’appel n’auroit
)) pu conclure, en point de d r o it, que par la force de cette con» vention le divorce fut devenu inattaquable.
» A r r ê t . — Attendu qu’en ajoutant à la considération de la non
» application des lois invoquées par le demandeur aux actes par
» lui attaqués, celle de l’approbation par lui donnée à la régularité
». de ces actes, et même celle de la reconnoissance par lui faite dans
» d ’autres actes publics de sa qualité de femme divorcee, à celle
»•qui a fiiit prononcer le divorce d ’avec lui, la cour d’appel n ’a
» pas violé l ’art. 6 du Code civil, q u i , défendant de déroger par
» des conventions particulières à l ’ordre public et aux bonnes
» mœurs, et bornant sa défense à ce qui concerne ces objets d ’in» térôt public, a voulu permettre l’effet des reconnoissances et celui
» des transactions sur l’ intérêt civil et privé; ce qu’il a formelle» ment exprimé dans l'art. 2046, et ce que la loi transitoire de
» floréal an 11 a spécialement appliqué au divorce.
» La cour rejette.
» D u 24 pluviôse an i . — Section des requêtes. »
( S irey , an
pag. 2a3. )
Combien de différences notables entre cet arrêt et la cause!
Après un divorce demandé et obtenu par une fe m m e , c’est le
mari qui, n’étant sous la puissance de personne, fait des conven
tions sur ce divorce.
11 traite librement; il n ’est pas incapable.
il traite sur les intérêts civils du divorce.
II ne traite pas seulement sur la suite du divorce, mais il reconnoit par plusieurs actes la validité du divorce.
D 2
5
�\
( ?8 }
En plaidant, il ne peut pas même prouver que le divorce ait été
nul d ’aucune nullité.
L a cour d’appel en effet ne se décide que par ce motif.
En cassation, l’époux n ’essaye pas même encore de prétendre que
son divorce est n u l, et il se borne à une dissertation polémique
sur l’effet de la ratification qu’il a donnée.
Ainsi la position de la question n ’étoit pas de savoir s’il avoit
pu transiger sur un divorce n u l, mais s’il pouvoit faire rescinder
un traité relatif aux intérêts civils, par cela seul qu’il avoit aussi
transigé sur la validité du divorce.
C ’est donc encore le fait qui a décidé la cour de cassation • et
si ses motifs donnent à méditer sur leur sens, il n ’en résulte qu’une
plus grande conviction qu’elle a clairement distingué ce qui tenoit
à l’ ordre public et à l’ intérêt civil et privé, et qu’elle ne s’est dé
cidée à juger aussi le sieur Boehler non recevable, qu’en ce que, le
divorce étant valable, ses traités étoient étrangers à l’ordre public.
11
L e m otif pris de l’art. 2046 du Code le prouve.
porte qu’on
peut traiter sur l’intérêt privé résultant d’un délit. On n ’est donc
pas libre de traiter aussi pour l'intérêt de la société.
E t comme une femme ne peut pas être épouse respectivement
au corps social, et divorcée pour sa famille et pour elle-même,
il en résulte qu’elle peut bien traiter pour son intérêt privé, mais
seulement après que l’ ordre social n’ a plus d’ intérêt; c’est-à-dire,
quand son divorce a été consommé conformément aux lois.
L ’arrêt de cassation est donc bien loin d’être favorable à la de
moiselle M aigne, qui ne peut pas exciper d ’un divorce légal, après
lequel sans doute la dame de Reyrolles eût pu traiter sur les intérêts
civils résultans de son mariage.
L a demoiselle Maigne , en citant cet a rrê t, a prétendu, avec
le rédacteur, que l’article 6 du litre préliminaire du Code ne porte
qu’une prohibition obscure et incertaine, qui ne peut s’appliquer
à la cause, parce que les traités sur les divorces ne sont pas d’ordre
public.
Il est vrai que ce rédacteur propose cette obscurité, seulement
�C 2g )
comme un doute; mais il termine de manière à prouver qu’il ne
s’est pas décidé comme la demoiselle Maigne l’entend.
Cependant sa première application semble fautive; car en rédui
sant la définition d’ordre public à ce qui concerne l’état de la
république, quodadstatum reipublicce pertinet, il n’a pas remar
qué que l’expression fus publicum éloit alternativement employée
par les lois romaines pour le droit public et pour l’ ordre public;
ce qui comporte encore une nuance nécessaire à distinguer, comme
on peut le prouver par des exemples.
Lorsqu’avant les novelles , la défense de distraire la falcidie
n’étoit pas permise, si un testateur avoit voulu en prescrire la dis
traction, à peine par son héritier de payer une somme aux léga
taires, celte disposition étoit déclarée nulle, comme contraire au
droit public , et toute action étoit déniée aux légataires ( i ) . . .
Cependant une telle nullité n’intéressoit aucunement l état de la
république.
Si en donnant la dot au mari on avoit stipulé qu’il ne contribueroit pas aux frais d’inhumation que la loi meltoit à la charge
de la dot, celui qui avoit payé ces frais n ’en avoit pas moins une
action en répétition contre le mari, et il ne pouvoit pas opposer sa
stipulation, parce que la loi la déclaroit nulle et attentatoire au
droit public (2)... Cependant encore Vétat de la république étoit
fort étranger à cette convention.
_______________ ____________IL__________________ _
( 1 ) F rater cum heeredem sororem scriberet, et alinm ab e n , cui dona tum v o le b a t , stipulari en ravie ne fa lc id iâ uteretur , et ut certam pecuniarn , si contrà fe c isse t , prœstare , privntornm cautione legibus non esse
fefragandum constitit : et ideo sororem j u r e l ' U h l i c o retentionem habituram , et actionem ex stipidatu denegandam. ( L. i 5 ,ff. A d leg. fa le. )
(2)
N eratiu s queerit s i is q u i dotem d ed era t pro m uliere , stipulants
est.... ]ye yni el m aritus in fu n u s co n ferrâ t, an fu n eraria m ari tus teneatur?
e t a it...
Si aliu s fu n e ra v it, posse
eum m aritum convenire, quia p a c lo hoc
j u s p u b l i c u m in frin gi non possit. ( L . 20 , J f. D e relig. et sum pt.)
�( 30 )
Ces dispositions n ’étoient donc que d’ordre public, et la loi ne
vouloit pas qu’elles pussent être éludées par des conventions par
ticulières. Comment donc seroit-il proposable de supposer à la
prohibition de dissoudre le mariage, un moindre intérêt d ’ordre
public ? et au lieu de se jeter dans l ’application vague de la loi 6 ,
cod . D e pa ctis, et de l’art. 6 du C o d e , comment ne pas trouver
une nullité radicale aux divorces faits sans toutes les formalités,
quand la loi a dit : ISullam ratum est divorlium, n isi, etc.? com
ment ne pas trouver une nullité radicale dans les conventions sur
les divorces, quand la loi a dit : Pachones nullam habere volumus
firmitcitem, tanquam legibus contrarias? enfin, comment ne pas
voir une disposition prohibitive et irritante dans la loi du 20 sep
tembre, quand elle dit qu’un second mariage ne p eu tè Ire contracté
qu’après un divorce légal ?
Ouand les lois sont si claires, comment seroit-il possible de
penser qu’une femme, à qui un divorce illégal n ’a pas ôté la qua
lité île femme mariée, ait pu s’en priver elle-mêm e en se disant
divorcée, et en ne transigeant pas même sur la validité du divorce
q u ’on, lui oppose?
Que reste-t-il donc à la demoiselle M aigne, si ce n ’est de faire
diversion à la cause par la naissance d’un enfant, survenue, dit-elle,
long-temps après le divorce? Mais d’abord elle est convenue que la
date donnée à cette naissance étoit une erreur. Que n’avouoit-elle
avec la même franchise les circonstances explicatives dont elle étoit
mieux informée encore. On verroit qu’un époux chancelant entre
une épouse et sa rivale , déterminé à fixer son irrésolution par un
retour à ses devoirs , en est tout à coup détourné par une séduc
tion toujours active ; habilare fa cit sterilem in donio , et la mère
fie ses en fans, repoussée comme une vile esclave, est obligée de céder
ù une étrangère les honneurs du lit conjugal.
Eh ! qu’importe à la demoiselle Maigne cette naissance; est-ce
bien à elle à scruter la conduite d’une épouse? Si cette conduite
éloil blâm able, cet adultère qu'elle proclame ue seroit-il pas
�(3 0
son propre ouvrage? n ’en porterait - elle pas le poids éternel?
Mais il ne s’agit point ici de la naissance d ’un enfant ; il suffit
à la dame de Reyrolles de déclarer qu’elle n’ a point à en rougir,
et qu’elle est à même de présenter des témoignages non équivoques
pour sa justification. L e fait de celte naissance n ’est ici employé
que comme moyen de la cause, et parce que la qualité de femme
divorcée y est donnée à la dame de Reyrolles. Mais ne seroit-il
pas bizarre que, dans la commune où un divorce a été prononcé,
l ’officier public eût lui-même rendu à la femme la qualité d’épouse?
L ’objection est donc absolument nulle , et rentre d ’ailleurs dans la
discussion précédente, où elle trouve sa réponse.
Ainsi s’évanouissent tous les moyens de la demoiselle Maigne,
et se justifie la décision des premiers juges.
L e nom de veuve du sieur de Reyrolles lui e6t ô t é , mais il lui
en reste la fortune. L a dame de Reyrolles se borne à vouloir ce
qui lqi appartient, d’après son contrat de mariage. ]N est-ce pas
assez qu’elle soit réduite à le demander à la demoiselle Maigne ;
qu’après vingt-neuf ans de mariage elle ait quelque chose à lui
e n vier, et que le sort de l’une et de l’autre soit aujourd'hui si
différent?
U ne règle de droit a prévu ces caprices de la fo rtu n e ,et le vœu
du législateur n ’a pas balancé : M elius estfavere repetitioni quant
adventitio lucro. L e sort des parties seroit écrit dans cette loi
seule , s’il n ’étoit déjà réglé par des principes d’une plus haute
importance.
A u x yeux de la morale et de l’opinion, l’intimée ne cessera pas
d ’être la veuve de Reyrolles; elle le sera de même aux yeux de la
co u r, puisque les lois ne réputent pas son mariage dissous. L a
demoiselle Maigne ne laissant pas de postérité, il ne s’agit point
ici du danger d’ôter un état civil à des enfans nés dans la bonne
foi. A in si, les principes demeurent dans toute leur lorce , et ne
sont vaincus par aucune considération. L a demoiselle Maigne est
réduite à des fins de non-recevoir. Mais que signifient de misérables
�( 33 )
s u b t e r f u g e s dans une cause de cette nature ? Les magistrats n’y
verront q u ’ u n mariage ou un divorce, c ’e s t - à - d i r e , un objet
m a j e u r et d ’ordre public. Alors disparoitront les personnes, l’in
térêt seul de la société sera mis en balance, et l’arrêt de la cour
sera tout à la fois une leçon de morale et un monument de juris
prudence.
Signé F L O R A T , veuve D E R E Y R O L L E S ,
Me
'
D E L A P C H I E R , avocat.
M e C R O I Z I E R , licencié avoué.
A. R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
C o u r d ’appel. — F rim aire an 1 4
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Couguet-Florat, Marguerite. An 14]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Croizier
Subject
The topic of the resource
divorces
assignats
substitution de testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire Pour Marguerite Couguet-Florat, veuve du sieur de Reyrolles, intimée; Contre Catherine Maigne, se disant aussi veuve dudit sieur de Reyrolles , appelante.
Table Godemel : Divorce : la loi transitoire du 26 germinal an onze rend-elle inattaquables les divorces faits en éxécution de la loi du 20 septembre 1792, fussent-ils irréguliers et contraires aux formes voulues par cette loi ? La nullité du divorce a-t-elle été couverte par la qualité de femme divorcée prise par la femme dans différens actes, par cette possession d’état, et par le décès du mari divorcé ? en cas de nullité du divorce le traité fait entre les époux divorcés, relativement à leurs intérêts privés, seraient-ils infecté du même vice ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 14
1774-An 14
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1510
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0706
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0615
BCU_Factums_M0524
BCU_Factums_M0707
BCU_Factums_M0309
BCU_Factums_G1509
BCU_Factums_G1511
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53250/BCU_Factums_G1510.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
divorces
substitution de testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53251/BCU_Factums_G1511.pdf
93f9c0a1beb9ea176f5c2c3476e86cd0
PDF Text
Text
M
E
E N
M
O
I
R
E
R É P O N S E ,
COUR
D ’A P P E L
DE RIOM.
P O U R
Dame
M A I G N E , veuve du sieur
, appelante d’un jugement rendu
C ath er in e
R e y r o lle s
au tribunal du P u y , le 24 floréal an 1 3 ;
CONTRE
M a r g u e r ite
COUGUET-FLORAT,
intimée.
Thésaurus est malorum, mala mulier.
HESIOD.
La
femme Couguet ose entrer en lice avec la dame
veuve de Reyrolles; et telle est son audace, qu’elle prend
in itia tiv e , et s’empresse de publier sa honte et son in
famie.
A
�(
O
E lle figuroit dans la cause comme intimée; il étoit dans
l’ordre qu’elle attendît, sinon une provocation de celle
qu’elle outrage, au moins une défense publique de sa part.
L a dame de Reyrolles, plus modeste, auroit désire ne
laisser aucunes traces d’une discussion de cette nature :
la solennité de l’audience étoit déjà assez pénible. Il est
cruel sans doute d’être obligé de révéler à la justice les
écarts et les excès d’une femme sans pudeur, qui n’a
pensé à l’infortuné, jadis son époux , que lorsqu’il a
cessé d’exister.
i
Mais la femme Couguet a de grands motifs pour tâcher
de prévenir l’opinion. Elle devoit se hâter de faire son
apologie; elle n’a pas craint de prostituer les noms d’é
pouse et de mère : et pourroit-elle invoquer la faveur
de ces noms sacrés, quand elle en a méconnu tous les
devoirs, lorsqu’elle a voulu rompre les liens solennels
qui l’unissoient à son époux, lorsqu’elle s’est déshonorée
par ses excès?
Pour diminuer ses torts, elle accuse celle qu’il lui plaît
de nommer sa rivale ,• elle insinue avec adresse qu’une
femme bien née ne pouvoit lier son sort à celui d’un
homme dont l’épouse étoit vivante.
Est-ce bien la femme Couguet qui tient ce langage?
Ignore-t-elle que la dame veuve Reyrolles, sans intérêt
comme sans ambition, ne céda qu’à la pitié ; qu’elle étoit
loin de pi'évoir alors que son mari pût jamais parvenir
à la fortune ?
O u i, elle eut le courage d’offrir à un malheureux les
consolations qui étoient en son pouvoir. Sa résolution fut
un sacrifice à l’amitié : elle conserva l’estime publique.
�(
3
)
Sa dém arche, approuvée de ses am is, justifiée par ses
concitoyens, fut excusée par ceux-là même qui ne com
posent pas avec les principes, et dont on respecte l’opi
nion en feignant de la braver.
T o u t s’envenime dans la Louche de la femme Couguet :
des réunions de société deviennent des liaisons criminelles.
Mais il n’y a point de scandale lorsqu’il y a titre légi
time ; et l’état de la dame veuve Reyrollcs est incontes
table aux yeux de la loi.
L e précepte sublime qui consacre l’indissolubilité du
mariage n’est pas sorti de la main des hommes ; il fut
souvent au-dessus de leurs forces. C h a r l e m a g n e , le plus
grand de nos rois, fit divorce avec sa prcmici’e femme,
et sa seconde épouse n’en, .fut pas moins reine légitimé.
Cependant les historiens vantent la ferveur et la piété
de ce monarque : suivant eu x, son zèle pour la religion
fortifia sa puissance. Sans vouloir remonter à des exemples
anciens, on sait que le divorce, admis dans la loi de M oïse,
le fut long-temps parmi les chrétiens, et existe encore eu
Pologne comme loi fondamentale, quoique les Polonais
soient catholiques.
E nfin, le héros invincible qui nous gouverne, qui a
porté le nom français au plus haut degré de gloire et de
prospérité, a voulu que le divorce fût maintenu dans la
grande chartre de nos lois. La disposition du Gode civil
doit désarmer la censure et la critique, qui d’ailleurs ne
seroit qu’une burlesque déclamation, une misérable pa
rodie chez la femme Couguet.
La dame veuve Reyrolles sait apprécier ces indécentes
clameurs. Puisqu’elle se voit obligée de descendre^ une
A 2
�(
4
)
justification publique pour repousser la calomnie, elle va
se renfermer dans le récit exact des faits de la cause, et
prouvera bientôt, par l’analise des actes qu’elle a en son
pouvoir, qu’en parlant d éfa its et gestes, cette expression
familière et déplacée dans un mémoire ne peut convenir
qu’à une héroïne de la classe de la femme Couguet, fort
accoutumée d’ailleurs à ne rien gazer.
F A I T S .
Il n’est que trop vrai que le sieur de Reyrolles a eu le
malheur d’épouser Marguerite Couguet. Ce mariage fu
neste eut lieu par une suite de circonstances dont le sieur
de Reyrolles ne s’est jamais rappelé qu’avec chagrin.
L e sieur de Reyrolles père, parvenu à un âge avancé,
étoit épris des charmes de la dame B ertrand, veuve
F lo ra t, mère de la femme Couguet. Cette femme artifi
cieuse ne voulut consentir à son mariage avec >le sieur
de Reyrolles p ère, qu’autant que le fils Reyrolles épouseroit M arguerite Couguet*, et, pour n’être pas déçue de
ses espérances, elle exigea que le mai-iage de sa fille
précédât le sien, ce qui est arrivé.
Le, consentement du sieur Reyrolles fut un effet de
son obéissance et de son respect : mais il pressentoit déjà
ce qu’il avoit à craindre; et il n’a pu compter aucuns
momens heureux pendant la durée de son union.
L a dame veuve Reyrolles se respecte assez pour passer
sous silence les écarts de la demoiselle Couguet. Les lettres
qui furent trouvées dans un m ouchoir, les voyages fré
q u e n c e s longues absences, les séjours à Bord, A urillac
�(
5
)
et L im oges, feroient un épisode peu digne de figurer
dans un mémoire.
La fortune de la demoiselle Couguet ne devoit pas la
flatter d e l’espoir d’un mariage aussi avantageux. Le sieur
Reyrolles fils, héritier institué de son père, exerçant un
état honorable dans la société, pouvoit, sans être taxé
de présomption, avoir des vues plus élevées pour son
établissement.
En effet, par le contrat de mariage du 7 novembre
17 7 4 , on voit que la demoiselle Couguet se constitue
en tous ses droits échus par le décès de son aïeul, dont
la clame Solliliage , son aïeule, étoit usufruitière. Elle
garde le plus profond silence sur la succession paternelle.
La généreuse aïeule .veut bien lui faire, en avancement
d’hoirie , le délaissement de la jouissance de quelques
misérables contrats de 5o sous, 7 livres 10 sous, et de
10 francs : le plus considérable est de 60 francs. Parmi
ces contrats, plusieurs ne sont que des rentes constituées.
T o ta l, 600 francs par an, payables de cette manière, et
à la charge de les rapporter au partage, ainsi que les
arrérages courans.
Il est stipulé un gain de survie de 1200 francs, un
douaire de 400 francs, et un logement dans la maison
de l’époux.
La demoiselle Couguet, peu de temps après son ma
riage, ne se conduisit pas de manière à mériter l’estime
publique, et s’inquiéta peu de ses devoirs : elle n’a pres
que jamais habité avec son époux; et c’est après neuf ans
d’absence que le sieur de Reyrolles se d é t e r m i n a à user
du bénéfice de la loi du 20 s e p te m br e 1 7 9 2 .
�u
(
6
)
L e 24 mai 179 3, le sieur de Reyrolles fit signifier à
la dame Couguet un acte par lequel il déclara « qu’il
« entendoit jo u ir de la faculté du divorce, aux termes
« de la l o i , sur le fondement que sa femme avoit quitté
« la ville de Brioude depuis entour n euf a n s, et encore
« plus sur leur incompatibilité d’humeur et de caractère. »
Il nomme pour composer le conseil de famille les sieui*s
Dalbine et Croze, tous deux juges du tribunal de Brioude,
et le sieur G ranchier, receveur du droit d’enregistrement
de la même ville.
Il fait sommation à la demoiselle Couguet d’en nom
mer aussi trois de sa p a rt, dans le délai d’un m ois, de
les indiquer, afin qu’ils puissent se réunir à la maison
commune pour tacher de concilier les époux ; et leur
faire les représentations convenables.
L e 27 du même m ois, la demoiselle Couguet répond,
par un acte signifié au sieur R eyrolles, « qu’il n a J a it
a que la -prévenir en lui notifiant, par acte du 24 mai,
« qu’il entend jouir de la faculté du divorce; elle accepte
« la déclaration, et lu i notifie de sa part quelle veut
« jo u ir de la même faculté. » Elle nomme et indique les
f'- jurs Couguet-Florat, M artinon-Flagcat, et Caldaguet,
pour composer le tribunal de fam ille, et se reunir a ceux
nommés par son mai’i ; elle les assigne en conséquence
par le même acte, pour être présens le 27 juin lors pro
chain devant l’officier public qu’elle désigne, et à raison
du divorce respectivement demande par les deux époux.
Il résulte du premier procès verbal dressé par l’officier
public de la ville de Brioude, que les parens réunis, ayant
fait des représentations aux époux, la dame Couguet rér
�^ 4 7
.
r(
7
}
.
.
pondit qu’elle étoit disposée à suivre en tout point la
volonté de son m ari, et q u e , s’il persistoit à demander
le d ivorce, elle y donnoit les mains.
L e mari ayant persisté, il fut dit qu’il n’y avoit lieu h
conciliation, et ce fut la dame Couguetqui s’empressa de
faire signifier à sa requête le procès verbal, par acte du
9 juillet 1793 j eHc annonce que ce procès verbal a été
rédigé par l’oflicier p u b lic, sur la demande en divorce
fo r m ée respectivement par les parties, et conformément
à l’article 4 du §. 2 de la loi qui détermine les causes,
le mode et les elfets du divorce.
E lle donne assignation au sieur de R eyrolles, pour
comparoître le 28 du même mois devant l’oliicier pub lic,
et pour y voir prononcer le divorce à?entre les parties,
suivant et conformément à l’article 5 du même §. de la
loi du 20 septembre 1792.
E n fin , sur cette assignation, les parties comparaissent en
la maison com m une, le 28 ju illet, jour capté, assistées de
Jean T ou rrelte, Jean R o u x , Laurent G ranet, et Pierre
Dalbine \ Vun et Vautre requièrent Vofficier public de prononcer la dissolution de leur mariage, et l'officier public
le prononce ainsi sur leur réquisition , après avoir cons
taté que les époux avoient observé les délais exigés par
la loi.
Ce divorce a été approuvé par la femme Couguet. On
aura bientôt occasion d’analiser une longue série d’actes
par lesquels la femme Couguet a pris la qualité ùefem m e
divorcée.
Elle a gardé le plus profond silence pendant onze an
nées que le sieur de Reyrolles a survécu.
�W
( 8 }
L e 9 messidor an 2 , le sieur Claude R eyrolles, alors
receveur du district deB rioude, a contracté mariage avec
la demoiselle Catherine Maigne ; elle étoit alors sous la
puissance de son père. Ce mariage a été célébré solen
nellem ent, et après les affiches et les formalités d’usage.
Par son contrat, la dame de Reyrolles s’est constituée
une maison située à Brioude , meublée et ustensilée,
estimée aimablement à 20000 francs; un trousseau, bagues
et bijoux , évalués à 2400 fr.; plus, la somme de 12000 fr.
prix de la cession de scs droits maternels échus au profit
de ses frères , et le cinquième qui lui revenoit dans une
somme de 3000 francs, faisant partie de la succession de
la dame L agran ge, sa mère.
La fortune de la dame Reyrolles lui permett.oit de vivre
dans une honnête aisance ; la condition de l’épouse étoit
au moins égale i celle du inai'i, et toutes les convenances
se trouvoicnt réunies. Son contrat est honoré de la pré
sence de ses parens, et des premiex*s f onc t io nnai re s de la
ville ; on y voit le sieur V auzelles, les sieurs Dalbiue et
Pissis, juges, etc.
L e sieur de Reyrolles s’estimoit heureux de cette alliance,
et n’a cessé de donner à son épouse des preuves de sa
tendresse, de son affection et de sa confiance.
Le i 5 pluviôse an 5 il fait son testament, par lequel
il institue la dame son épouse pour lui succéder en tous
scs biens, sans aucune condition ni réserve.
Cet acte ne peut être considéré comme le fruit de la
séduction ou de la foiblesse ; il est fait dans un temps où
Je sieur de Reyrolles jouissoit de la meilleure santé ; il est
olographe : c’est un monument d’amour et de tendresse.
Une
�( 9
)
Une disposition aussi absolue est la plus douce récom
pense de l’affection, de ces tendres soins , de ce zèle em
pressé, qui consplent des maux de la vie.
Ce n’est qu’après ce testament que le sieur de Reyrolles
a obtenu la place de receveur général du département de
la Haute-Loire. Ce premier emploi de finances, qui a aug
menté sa fortune parce qu’il en a rempli les fonctions
avec exactitude, l’obligea de résider en la ville du Puy,
chef-lieu du département.
Mais il n’y fixa pas son domicile d’une manière per
manente; ses biens , ses propriétés à Brioude ne devoient
pas etre négligés ; l’exploitation ne pouvoit etre confiée
a b s o l u m e n t à des étrangers ou des mercenaires.
Son épouse se chargea de ce soin, mais allbit souvent
séjourner auprès de son m ari; comme celui-ci venoit tous
les mois à Brioude se délasser de ses travaux, et jouir des
charmes de l’am itié, du plaisir qu’il avoit toujours goûté
dans un intérieur aimable et paisible.
La dame de R eyrolles, pour repousser les injures et les
atrocités delà femme Couguet, a cru devoir se munir d’une
partie de sa correspondance avec son époux ; elle a porté
toutes ses lettres, principalement de* l’an 12, qui fut la der
nière année de la vie d’un époux chéri. Partout on y trouve
les expressions les plus tendres d’amitié et de confiance ; on
les voit se terminer sans cesse par ces mots touchans : J e
suis tout 11 toi fo u r la v ie , ménage la santé.
C’est ainsi qu’il écrivoit encore à cette amie si chère
le 4 flore alan 12 , trois jours avant sa mort funeste qu’il
etoit bien loin de prévoir , et qui fut un de ces coups
B
�( 1° )
de foudre qui n’afïïigent que trop souvent •la pauvre
humanité.
L ’infortuné se sentit mortellement atteint ;il veut mourir
dans les bras de son épouse : on fait partir sur le champ
uii exprès en toute hâte. L a dame Reyrolles recevant la
nouvelle, mande à l’instant même le sieur Chautard ¿offi
cier de santé , en qui son mari avoit confiance, et marche
jour et nuit pour rejoindre son époux.
Elle a la douleur de le trouver sans espoir; ses forces
se raniment pour faire des adieux touchons à une femme
désolée ; on l’arrache à ce spectacle funeste au moment
où le sieur de Reyrolles expire. Il a cessé d’exister à dix
heures du soir : on fait partir son épouse à l’instant même,
toujours accompagnée du sieur Chautard qui l’avoit suivie;
elle est de retour à Brioude dès le lendemain.
Cependant la maladie du sieur Reyrolles étoit connue;
déjà on savoit à la préfecture qu’il n’y a v o i t pour lui
aucun espoir de retour à la vie. Dans le moment même
de sa m ort, le préfet fait requérir le juge de paix de se
transporter dans la maison du défunt pour y apposer les
scellés. Cette précaution étoit impérieusementcommandée
par l’intérêt public, chez un receveur général. La nature
de ses fonctions ne pcrmeltoit aucun retard , n’auroit pas
même excusé les procédés, les convenances qu’on observe
ordinairement partout ailleurs.
L e sieur de Reyrolles a rendu le dernier soupir le 7
lloréal an 1 2 , à dix heures du soir. Dans le même ins
tan t, le juge de paix procède à l’apposition des scellés;
l ’inventaire n’a eu lieu que le x8 prairial suivant : la daine
�i n
( 11 )
veuve Rey rolles n’y a comparu que par un fondé de pou
voir. L ’inventaire a été fait en présence d’un conseiller de
préfecture délégué par le préfet, et de tous les ayans droit.
On a trouvé le testament de la dame de Reyrolles, con
tenant au profit de son époux une disposition universelle,
une tabatière ornée du portrait de ladite dame de Rey
rolles : ces objets étoient déposés parmi les efTets les plus
précieux.
L e fa m eu x ’p ortefeuille maroquin r e r i, si indécem
ment réclamé, est également compris dans l’inventaire ;
et si la dame Vaüzelles a été présente à cette opération ,
elle en avoit le droit comme la plus proche parente : mais
c’est pour la première fois que la dame veuve Reyrolles
a entendu dire que le siéiir Vaüzelles avoit rendu plainte
en soustraction d’un prétendu testament. C’est encore une
de ces assertions calomnieuses que peut se permettre une
femme qui n’a rieri'à perdre.
L e sieur de Reyrolles , loin d’avoir hésité ou témoigné
quelques regrets sur ses dispositions libérales envers son
épouse, n’a manifesté qu’une seule crainte. Peu versé dans
l’étude des lo is , il avoit voulu s’éclairer sur les disposi
tions du Code civil relativement aux testamens.
La dame son épouse seroiten état d’établir qu’il a con
sulté plusieurs jurisconsultes, pour avoir la certitude que
le Code civil ne eliangeoit rien ;\ la forme des testamens'
olographes; et lorsqu’il fut entièrement rassuré , il vint,
avec toutes les démonstrations du plus tendre intérêt ,
témoigner à sa femme la satisfaction qu’il éprouvoit en
la comblant de ses bienfaits.
11 etoit disposé à renouveler ses dispositions, pour lui
B 2
it
�( 12 )
donner uue nouvelle preuve de son amour, et sa femme
mit tous ses soins à le détourner de ces tristes idées, qui
ne sont souvent que des pressentimens sinistres.
Comment a-t-on osé dire que le sieur Reyrolles avoit
changé d’affection, lui qui, dans un moment de danger,
après une dénonciation calomnieuse, ne crut devoir con
fier q ü’à son épouse ces manœuvres ténébreuses de quel
ques ennemis perfides, et la chargea d’aller le justifier
auprès du-gouvernement ?
L a femme Couguet ignore-t-elle que la dame Reyrolles
se rendit à Paris en l’an 9 , pour y rendre c o m p t e de la
conduite de son époux, et parvint à dissiper tous les
nuages, sut éclairer les ministres, et justifier son époux
avec autant de dignité que de succès?
E lle n’a pas encore ignoré qu’au retour de la dame
de R eyrolles, son époux s’empressa de publier ce service
signalé, et d’en témoigner sa reconnoissance dans les
expressions les plus affectueuses et les plus tendres. .
Enfin, dix années d’une union heureuse avoient pénétré
les époux d’un attachement réciproque, d’une confiance
sans bornes, et leur bonheur fut toujours sans nuage.
Quel singulier contraste va jn’ésentei; la femme Couguet
dans sa conduite ! A peine a-t-elle allumé le flambeau de
l’hymen , qu’elle indispose son époux par une légéreté et
une coquetterie qui lui font négliger tous ses devoirs.
Bientôt elle s’avilit par des liaisons scandaleuses et crimi
nelles ; des scènes continuelles et publiques la signalent
et l’exilent des sociétés honorables; elle abandonne la
maison de son ép o u x, après avoir souillé le lit nuptial:
elle ne fut mère qu’en se déshonorant.
�( i3 )
Elle cou rt, voyage, s’arrête pour déposer des. fardeaux
incommodes, suites ordinaires de l’incontinence et de la
débauche. Ses déportemens la font chasser de la maison
du sieur Caldaguet, où elle s’étoit réfugiée à Lim oges-,
et c’est après neuf ans d’absence que le sieur de Reyrolles
use enfin du seul remède que lui présentoit la loi.
La femme Couguet va au-devant du divorce; d’abord
elle déclare avec impudeur que son époux ri a fa it que
la prévenir , quelle est dans Vintention d’user de la
même fa cu lté. Bientôt elle prend l’initiative ; c’est elle
qui fait notifier le premier procès verb al, et assigne son
m a ri, pour voir prononcer le divorce respectivement
demandé.
Elle sc glorifie bientôt de la qualité de fem m e di
vorcée ; elle la prend dans tous les actes qui se suc
cèdent.
L e 17 vendémiaire an 2, traité entre elle et son frère ,
où elle se qualifie de ci-devant épouse du sieur de
Reyrolles.
Dans un acte précédent, du 23 septembre 1793,
devant Salveton, notaire, elle avoit traité en la même
qualité de ci-d ev a n t épouse, avec le nommé Gabriel
Sabbalier.
L e 10 frimaire an 3 , elle reçoit de Jacques Eymard ,
devant G ren ier, notaire, une somme de 3000 francs,
principal d’une rente foncière due à sa famille; elle
traite toujours comme ci-devant épouse.
17 prairial an 3 , elle fournit encore une quit
tance notariée au nommé Jean Pruneyre fils; elle sc dit
fem m e divorcée du sieur Reyrolles.
�( i4 )
Mais le 13 frimaire an 5 , traité entre le sieur Claude
Reyrolles et M arguerite Couguet, femme divorcée dudit
R ey ro lles, et traité qu’il est important d’analiser.
Par cet acte, les parties exposent qu’elles sont en ins
tance au tribunal c iv il, à raison des offres que le sieur
de Reyrolles avoit fait faire k la dame Couguet, de ce
qu’il avoit reçu de sa dot.
On rapporte qu’il est intervenu une sentence le 28
fructidor an 4 , et par défaut, qui ordonne, avant faire
droit définitif aux parties, qu’eiles procéderont au compte
de leurs créances respectives devant le juge de paix de
la ville de Brioude.
On procède volontairement à ce compte. Lo sieur de
Reyrolles produit l’inventaire des meubles et effets dé
laissés par l’aïeule de la dame C ouguet, le partage qu’il
a fait avec le sieur Couguet, comme fondé de pouvoir1
de la femme Florat.
Il présente ensuite l’ctat des sommes qu’il a payées à'
la décharge de la succession de la dame Solliliage, les
créances qu’iba reçues, etc.
La femme Couguet fait à son tour ses réclamations
dans le plus grand détail, et notaminent'elle répète la
pension que le sieur Heyrolles ne lu i a pas payée pen
dant Vannée antérieure à leur divorce.
Elle demande les intérêts, de ses capitaux, qu’elle pré
tend avoir couru à son profit depuis la demande en
divorce.
Compte fait, l e j sieur de Reyrolles se reconnoît débi
teur de la;somme de 6000 livres, numéraire, qu’il paye
4 l’instant, et dont le traité porte quittance.
�lis
( 1$ )
Il lui cède, pour tenir lieu des intérêts, les arrérages
de rente qui ont couru pendant la durée du mariage, et
qui se portent à une somme de 5oo francs.
L e sieur Reyrolles déclare qu’il n’a reçu d’autre rem
boursement de capitaux, qu’une rente de 20 francs due
par André lio n n e , et que ce capital a été compensé avec
autre de pareille somme qu’il a payé en décharge de la
dame Solliliage, au sieur Thomas , curé de Brioude; il
déclare encore qu’il n’a point prélevé un legs de 1000 fr.
que la femme Couguet prétend lui avoir été fait par
son aïeule.
L e sieur de Reyrolles ajoute q u e, voulant renvoyer
la femme Couguet entièrement indem ne, il lui remet
présentement quatre couverts d’argent. Celle-ci lui donne
décharge de tous les titres et dossiers qui la concernent,
et dont l’énumération est contenue au traité. Enfin il est
dit que les parties se tiennent respectivement quittes, et
se désistent des demandes qu’elles se proposoient de former
l’ une contre l’autre.
Depuis cette transaction qui liquidoit tous les droits
de la femme Couguet, et faisoit cesser les rapports qui
avoient existé entre les parties, le sieur de Reyrolles
n’a plus entendu parler d’une femme qu’il méprisoit à
juste titre.
Survient un autre incident qu’on ne peut passer sous
silence.
c< L e 16 brumaire an 6 , M arguerite Couguet-Florat,
« fem m e divorcée de Claude de Reyrolles,' habitante de
« la ville de Brioude, comparoît devant l ’oificier public
« de cette commune, pour y déclarer que le 23 mes-
wx
�(
«
«
«
«
«
«
«
16
)
sidar an 3 , trois heures du s o ir , elle s est accouchée
d'un enfant fem elle , et a requis de constater sa naissance, et les prénoms d’Anne-Eugénie qu’elle entend
lui faire porter; ce qui a été fait en présence de François
Perron, Jacques Jonquoi, et Marie M agaud, veuve de
François M artel, sage-femme, qui a déclaré avoir
accouché la dame Couguet-Florat de sa dite fille. »
Cette singulière déclaration si tardive, puisqu’elle n’est
que de l’an 6 , apprend que le 23 messidor an 3 , c’esti\-dirc, deux ans moins vingt-un jours, après la prononcia
tion du divorce,la femme Couguet a accouché d’une fille ;
elle se garde bien de nommer le père de l’enfant, et ce
n’étoit pas alors au sieur de Reyrolles qu’elle en attribuoit
la paternité. Pourroit-elle avoir oublié que le-père est fort
connu, que plusieurs lettres bien tendres, écrites par elle,
dans lesquelles elle parloit de cet enfant de Vam our,
se trouvoient entre les mains d’une femme outragée,
divorcée par rapport à cette liaison scandaleuse, et ont
été lues publiquement à l’audience de la cour d’appel,
pour fonder un reproche, et écarter son témoignage
dans une enquête faite entre ces deux époux? Que la
femme Couguet se tienne pour bien avertie que ces lettres
ne sont pas perdues.
Enfin, pendant onze années entières, la femme Couguet
a, vécu sans élever aucune prétention, jouissant de sa
liberté , et se félicitant d'un divorce qui la rendoit maî
tresse de ses gôuts et de ses passions : elle s’y livra avec
ipdçcence et sans frein ; elle a même pris le loisir de délibérer avant aucune levée de bouclier.
L e sieur de Reyrolles étoit décédé le 7 floréal ; les
scellés
�tslÊ
( 17 )
scellés sont apposés ; l’inventaire est fait et parfait au Puv
comme à Brioude, et partout où le sieur de Reyrolles
avoit des biens : silence de la femme Couguet. On ap
prend bientôt que la dame Maigne étoit héritière uni
verselle de son m a r i, et que scs affaires étoicnt dans le
meilleur ordre.
L a femme Couguet conçoit l’idée d’y avoir part, trois
mois après le décès. La première démarche de la dame
Couguet, après ce délai, est de prendre le deuil du sieur de
Reyrolles; elle se montre couverte d’un crêpe funèbre.
L e 2 messidor an 12, et en vertu de son contrat de ma
riage du 7 novembre 1774? elle s’intitule veuve du sieur
de Reyrolles, et prend une inscription sur ses biens, de
la somme de soixante-six mille livres.
L e 25 du même mois elle demande une cédule au juge
de paix du P u y , où elle expose qu’elle entend demander
contre Catherine M aign e, qui se prétend héritière testa
mentaire du sieur de R eyrolles, le payement et la res
titution de ses droits matrimoniaux.
Elle fait également des saisies-arrêts entre les mains
du sieur Dursus, receveur général, successeur du sieur
de Reyrolles.
Expliquant plus amplement ses prétentions lors du
procès verbal fait au bureau de paix, le 19 therm idor,
elle conclut, i°. au payement de la somme de 6000 francs,
à laquelle elle se restreint pour la valeur du trousseau
qu elle s’étoit constitué lors de son contrat de mariage,
et q u i, par cet acte, est estimé à 300 livres.
2°. A u payement de la somme de 1100 francs, pour
bagues et joyaux; 30. celle de 400 francs par année pour
C
�\
i ' \ •% *
C 18 )
le montant de sa pension viduelle ; elle demande qu’il
lui soit délaissé un logement dans la maison de son mari,
aux offres qu’elle fait de fournir un état des meubles,
linges et ustensiles qui lui seront délivrés pour habiter
ce logement ; plus 5ooo francs pour les habits de deuil ; et
enfin une somme de 5oooo francs à laquelle elle veut
bien se resti’eindre pour ses droits dotaux reçus par le
sieur de Reyrolles, avec les intérêts à compter depuis
la demande.
Pour ôter tout prétexte h la dame veuve Reyrolles ,
qui ne manquerait pas de présenter l’acte de d ivo rce,
elle en demandé la nullité, ainsi que de tout ce qui a
précédé et su iv i, parce que tout est contraire à la loi.
L a dame veuve de Reyrolles répond, par son fondé
de pouvoir, qu’elle est citée devant un juge incompétent;
et sans préjudice de ses moyens de nullité et d’incompé
tence , elle demande la nullité de l’inscription et de tous
autres actes que la dame Couguet s’étoit permis de faire
contre e lle , sans droit, comme sans qualité.
lie même jo u r, 19 thermidor an 12, exploit de la dame
Couguet, devant le tribunal d u P u y , où elle reprend les
mêmes conclusions.
Simples défenses sur l’incompétence , le 12 brumaire
an 13. L e sieur de Reyrolles avoit toujours été domi
cilié et imposé à Bi’ioude. L e 29 frim aire, jugement du
tribunal du P u y , qui retient la cause.
L a dame veuve Reyrolles, sans préjudice de ses moyens
demande, par requête du 20 ventôse an 1 3 , la main
levée provisoire de l’inscription et des saisies-arrêts faites
à la requête de la femme Couguet.
�ZSo)
»
( 19 )
L e 6 floréal an 13 , jugement qui accorde la mainlevée
provisoire de la saisie-arrêt faite entre les mains du sieur
D ursus, receveur général.
Enfin , la cause portée sur le tout à l’audience du tri
bunal du P u y , le 24 floréal an 1 3 , il y fut rendu un
jugement contradictoire, dont la teneur suit:
« L e tribunal, sans s’arrêter ni avoir égard aux fins
« de non-recevoir pi’oposéespar la dam eM aigne, ni aux
« autres fins et conclusions dont l’a démis; faisant droit,
« quant à c e , à celles prises par la dame C ouguet, a dé« claré nul et de nul effet l’acte de divorce du 28 juillet 1793,
« ainsi que tout ce qui l’a précédé ; c o m m e aussi a déclaré
« nul et de nul effet le traité passé le 3 frimaire an 5 ,
« entre la dame Florat et le sieur de Reyrolles ; remet
« la dame Florat au même état qu’elle étoit avant lesdits
« actes; condamne la dame M aign e, en sa qualité d’hé« ritière du sieur de R eyrolles, à faire payement et dé« livrance à ladite Couguet, i°. de la somme de 300 fr.
« pour le montant du trousseau stipulé au contrat de ma« riage du 7 novembre 1774 ; 20. de celle de 1200 fr.
« pour le montant de ses bagues et joyaux ; 30. celle de
« 400 francs annuellement, montant de la pension v i
te duelle ; 40. à fournir un logement garni et meublé dans
« le dernier domicile du sieur de R eyrolles, suivant son
K état et sa fortune, à la charge par la dame Couguet,
K suivant ses offres, de faire bon et valable chargement
K du mobilier qui lui sera rem is, pour être rendu à qui
tc et dans le temps de droit ; 5°. à payer la s o m m e
« de i 5oo francs pour tenir lieu de l’habit de deuil et
« de celui de son domestique; aux intérêts des sommes
C 2
�(
( r
C 20 )
« adjugées depuis la demande ; et sur le payement de la
« somme de 5oooo francs, résultante des cas dotaux de
« la femme F lo ra t, ordonne que les parties conteste« ront plus amplement ; qu’à cet effet elles fourniront
« leurs états respectifs , sauf impugnation.
« E t au surplus, a maintenu les saisie et inscription
« faites la requête de la dame C ou guet, l’a renvoyée
« en continuation de saisie jusqu’au parfait payement des
« condamnations prononcées contre la dame M aigne,
a pour lesquelles le tribunal ordonne que le présent juge« ment sera exécuté en la forme de l’ordonnance, no« nobstant appellation, et sans y préjudiciel’ ; a condamné
« la dame Maigne aux dépens. »
Les motifs des premiers juges sont curieux à connoître ; ils examinent d’abord les différentes questions qui
naissent dans la cause.
i° . La loi du 26 germinal an i i rend-elle inattaquables
les divorces faits en exécution de la loi du 20 septem
bre 1792 , fussent-ils irréguliers et contraires aux formes
prescrites par cette loi ?
20. L e divorce dont excipe la dame Maigne est-il nui?
30. La nullité a-t-elle été couverte par la qualité de
fem m e divorcée résultante des actes opposés , par la
possession d’état de la femme Floi'at de fem m e divorcée,
par le mariage de la dame M aigne, et par le décès du
sieur de Reyrolles ?
40. Dans le cas où le divorce seroit déclaré n u l, le
traité du 13 frimaire an 5 est-il infecté du même vice?
5°. Faut-il adjuger à la femme Couguet, en tout ou en
partie , les demandes par elle formées?
�6°. Doit-on maintenir les saisies-arrêts et inscriptions
auxquelles elle a fait procéder?
7°. L ’exécution provisoire doit-elle être ordonnée?
« Considérant, sur la première question , que la loi
« du 26 germinal an i i , en décidant que tous les di
te vorces auront leur effet conformément aux lois qui
« existoient avant la publication du Code c iv il, a par là
« même laissé dans leur entier les droits qui étoient acquis
« en vertu des lois précédentes.
« Que cette vérité se puise dans la loi même , puisque,
« dans sa seconde p artie, elle ordonne que les divorces
« commencés seront continués suivant les formes exigées
« par les lois en vigueur à l’epoque de la demande en
« conciliation.
« D e ces deux dispositions, il en résulte clairement que
« la loi du 26 germinal an n n’a pas interdit les plaintes
« fondées sur la loi du 20 septembre 1792 , ou sur toutes
« autres ; que d’ailleurs la loi du 26 germinal oiTriroit une
« antinomie , en ce que , par la partie prem ière, les di« vorces faits sans égard pour les formes prescrites seroient
« inattaquables , tandis q u e , dans la seconde partie, elle
« rappelleroit les citoyens à la stricte observation de ces
« mêmes formes.
« Considérant que la fin de non-recevoir opposée se
« trouve encore en contraste avec l’avis du conseil d’état,
ic du 18 prairial an 1 2 , qui permet aux émigrés et aux
« absens rentrés d’examiner la forme extérieure et maté« rielle de leurs divorces, puisque d’après la lo i, n’y ayant
« aucune forme h suivre ù. leur égard , on ne leur a pas
« permis de scruter le seul acte requis pour opérer la
�r>*
(
22
)
dissolution de leur m ariage, si la loi du 26 germinal
an 11 avoit validé sans distinction tous les divorces;
qu’enfin le rejet de cette fin de non-recevoir est encore
appuyé de l’arrêt rendu par la cour de cassation, le
30 ventôse dernier.
« Considérant, sur la seconde question, que pour pou
voir apprécier justement les moyens de n u llité, il est
d’autant plus indispensable de connoître les motifs qui
ont fait provoquer le divorce, que la loi du 20 sep
tembre 1792 a C1’éé des formes particulières à chacun
des motifs propres à opérer la dissolution du mariage;
que le moyen le plus sûr de parvenir à cette connoissance, est de remonter à l’origine de la provocation,
et de s’attacher aux actes qui ont suivi.
« Considérant que l’acte du 25 mai 1793 contient de
la part de défunt de Rejrrolles, au nom de qui il est
signifié, l’expression formelle qu’il veut faii'e prononcer
le divorce pour cause d’absence dépuis neuf ans, et
pour incompatibilité d’humeur et de caractère ; que
cette intention n’a pas été contrariée parla dame Florat,
puisqu’on trouve dans l’acte en réponse, du 27 du mois
de m ai, qu’elle accepte la déclaration faite par son
mari ; qu’en la faisant, il n’avoit fait que prévenir ses
intentions, qui étoient les* mêmes que celles de son
mari ; que lors de la comparution à l’assemblée du 27
juin , les époux 11e changèrent pas les motifs du di
vorce ; d’un côté , les actes ci-dessus analisés sont trans
crits dans le procès verbal; et de l’autre, on y dit que
je sieur de Reyrolles persiste dans le divorce par lui
provoqué.
�2 ÎS ,
( 23)
« Que l’acte du 17 juillet suivant n’a pu opérer ce clian« gement, quoiqu’il contienne citation pour voir pro« noncer le divorce, de conformité à l’article 5 du §. 2
« de la loi du 20 septembre 1792, attendu que cet acte
« n’est signifié qu’;\ la requête d’un seul époux , de qui
« il ne dépendoit pas de se départir des motifs de pro« vocation sans le concom's de la volonté de l’autre.
« Attendu aussi que cet acte ne peut êti’e considéré
« que comme l’exécution des poursuites antérieures, puis« qu’il porte assignation pour les voir clôturer par la
« prononciation de l’officier civil; qu’il est donc évident
« que le divorce se rapporte aux actes des ±5 , 27 mai
« et 27 juin 1793 j qu’il n’a eu d’autres motifs que l’ab« sence et l ’i n c o m p a t i b i l i t é d’humeur et de caractère, et
« que c’est sous ces deux rapports qu’il doit être examiné.
« Considérant que les motifs de l’absence reposent sur
« des faits faux, la dame de Florat n’ayant habité Limoges
« que du consentement de son mari ; que d’ailleurs l’ab« sence ne remonte pas à cinq ans sans nouvelles ; qu’en« suite le divorce seroit nul , pour n’avoir pas été pré« cédé de l’acte de notoriété exigé par l’article 17 du §. 2
« de la loi du 20 septembre 1792.
« Considérant que ce divorce fait pour cause d’incom« patibilité d’humeur et de caractère est également n u l,
« les époux s’étant affranchis du délai,des preuves, des
cc assemblées périodiques prescrites par les articles 8 , 9 ,
c< 10 et 11 de la loi du 20 septembre 1792, et 11’ayant pas
« voulu observer les délais prescrits pour la première
« assemblée, jjour avoir composé cette assemblée d’amis
�( H )
ail lieu de parens, et pour n’avoir pas obtenu de l’of
ficier civil l’ordonnance exigée par l’article 5 de la sec
tion 5 de la loi du 20 septembre 1792 , sur l’état civil
des citoyens.
« Considérant que fût-il possible de rapporter ce di
vorce au consentement m utuel, malgré ce qui a été
précédemment établi, malgré que la citation du 25 mai
I 793 ai"t été faite de conformité à l’article 29 du §. 2,
c’est-à-dire, de conformité au mode déterminé pour
l’incompatibilité d’humeur et de caractère, il seroit
toujours nul, faute par les époux d’avoir fait assigner
conjointement les parens, d’avoir observé le délai d’un
mois plein entre le jour de la convocation et celui de
rassemblée, formalité exigée par l’article I er. du §. 2;
que ce divorce seroit n u l, dès qu’il avoit été mis en
fait que le mari avoit à Brioude un oncle, des cousins
germains et parens rapprochés, que l’épouse avoit aussi
des cousins germains ; dès que rien ne constate l’appel
des parens, ni les motifs de leur absence de l’assem
blée j quoique l’article I er. du §. 2 exige impérieuse
ment que les plus proches parens soient appelés; elle
ne permet d’en appeler d’autres ou des amis qu’à défaut
des premiers : que ce divorce seroit enfin n ul, en sup
posant toujours qu’il eût été fait par consentement
mutuel, puisque l’article 4 du même §. 2 exige que
les époux comparaissent à l’assemblée et demandent
conjointement le divorce ; ce qui. no se rencontre pas
dans le procès verbal du 27 juin, où on lit que la femme
Çouguet-Ï’loral leur a fait réponse qu’elle étoit disposée
« à
�tC f
( 2 .5 )
« a suivre en tout point la volonté de son m ari, et que
« si son mari persiste à requérir le divorce, elle y donne
« les mains.
« Considérant que le divorce est encore n u l, quand
« même on ne s’attaclieroit qu’au procès verbal du 28
« juillet 179 3, puisqu’il est positif que les deux époux,
« s’étant présentés devant l’officier public, n’ont requis
« nommément que la dissolution de leur contrat de ma« riage, et non l’acte de célébration consistant dans la dé« claration faite par les parties devant le curé de la paroisse
« de Notre-Dame de Brioude, qu’elles se vouloient res
te pectivement pour époux; puisque les opérations de l’of« ficier public sont , aux termes des articles 7 et 8 de la
ce section 5 de la loi du 20 septembre 1792, sur l’état civil
ce des citoyens, subordonnées à la réquisition des époux ;
ce qu’ainsi la réquisition qui fut faite par les mariés de
ce Reyrolles et Florat, le 28 juillet 1793, ne se rapportant
ce qu’au contrat de mariage, il en résulte que l’officier civil
ce n’a prononcé que sur cette demande, qui, étant hors de
ce son attribution, ne devoit pas être portée devant lui;
ce qu’ainsi il auroit commis un ultra petit a , et que couce séqueminent l’acte de célébration qui forma le lien conce jugal, le 8 novembre 1774, est resté dans son entier,
ce et n’a reçu aucune atteinte par la déclaration de l’officier
« public, du 28 juillet 1793, soit qu’on ne la regarde
K que comme se rapportant à la réquisition faite, soit
ce qu’on ne la considère que comme ayant pour objet la
a dissolution de la célébration du mariage.
ce Considérant, sur la troisième question, qu’il étoit
ce certain, avant le Code c iv il, abstraction ' de ' toutes
D
�(
*6
)
« choses tenant: ù l’oi’dre public , que pour constituer
« une approbation, il falloit le concours de trois choses,
« i° . que l’acte vicié fût ti'anscrit ou rappelé, 20. que
« les nullités eussent fixé l’attention des parties, 30. que
« ces dernières fussent capables de traiter : principes qui
« ont été confirmés par l’article 1338 du Code civil;
« que suivant ces principes il ne peut y avoir de doute
« que les actes opposés à la dame Florat ne peuvent être
« considérés comme des approbations, puisque l’acte de
« divorce n’y est ni transcrit , ni rappelé ; et que les
« parties gardant le silence sur les nullités , la dame
« Florat n’étoit pas capable de traiter, puisque l’effet le
« plus sensible de la caducité du divorce, est de laisser
« sous le lien marital la femme qui n’en pôuvoit sortir
« qu’en se conformant à la loi du 20 septembre 1792-,
« que d’ailleurs pour que cette approbation fût valable,
« il falloit le concours de toutes les personnes intéressées
« dans l’acte n u l, et qu’ici le sieur de Reyrolles n’ayant
« pas approuvé le divorce, puisqu’il n’a pas pris la quac< lité d’époux divorcé, il s’ensuit que quand il existeroit
« une approbation , elle seroit insuffisante, le divorce
« ne pouvant subsister pour l’un des époux, et être in« signifiant pour l’autre.
« Considérant que quand on pourroit trouver dans les
« actes opposés tous les caractères qui les feroient regarder
er comme approbatifs, ils scroient encore indifférons dans
« la cause, attendu que s’agissant du divorce, q u i, à
« l’instar du mariage, tient au droit public, il n’est nas
« permis aux particuliers d’y déroger, suivant la loi 38,
« au ff. D e pactis, et l’art. 6, titre préliminaire du Code
�( 27 )
c iv il, confirme par un arrêt de la cour de cassation,
du 6 pluviôse an n , qui a décidé que l’état des per
sonnes n’est pas dépendant de leur volonté , qu’elles
ne peuvent le changer qu’avec le secours de l’autorité
publique.
« Considérant que la possession d’état de femme di
vorcée de la dame Florat ne peut résulter de quelques
actes , d’autant mieux que ce qui y est contenu se trou
verait contrarié, i° . par un plus grand nombre d’actes
par elle produits, dans lesquels elle n’a pas pris la
qualité de femme divorcée; 2°. par l’envoi d’argent
qui lui a été fait par son mari , et où celui-ci lui a
donné le nom de F l o r a t - H e y r o l l e s ; que cette posses
sion d’état, fû t-elle vraie, deviendrait indifférente,
ainsi que le mariage de la dame Maigrie, aucune lo i,
tant ancienne que moderne, n’ayant décidé qu’il étoit
défendu à un premier époux de réclamer son état,
malgré une possession contraire, et malgré le second
mariage de son conjoint.
« C o n s i d é r a n t que la demande de la dame F l o r a t ne
peut être rejetée, de cela qu’elle est venue après Je
décès de son époux, la loi Principaliter, au code IDe
lib e r , n’ayant été reçue par la jurisprudence, ainsi
qu’ il a été jugé par un arrêt de la cour de cassation,
du 14 vendémiaire an 10, qui a confirmé la nullité d’un
divorce contre l’enfant né du second mariage de l’époux
divorcé; d’ailleurs cette lo i, fût-elle suivie, la dame
Florat se trouverait dans l’exception qu’elle prononce,
n’ayant pas agi directement en nullité du divorce, niais
bien par action secondaire, suite de l’exception qui
D a
�c 28 )
« lui a été opposée devant le bureau de paix et devant
« le tribunal.
« Considérant, sur la quatrième question, que le di
te vorce étant n u l, la dame de Florat n’a jamais cessé
« d’ôtre l’épouse du sieur de Reyrolles; qu’en cette qua« lité , et aux termes de leur contrat de mariage, l’alié« nation des biens de l’épouse étoit prohibée, puisqu’ils
« se trouvoient dotaux; que cette prohibition, s’étendant
« à tous les actes passés à des tiers, comprenoit néces« sairement ceux faits avec le mari ; qu’ainsi la nullité
« du traité du i 5 frimaire an 5 est le corollaire immé« diat de la nullité du divorce.
« Considérant, sur la cinquième question, que si plu« sieurs des demandes de la femme Florat ne sont pas
« susceptibles de difficultés, à cause qu’elles ont été dé« terminées par l’acte du 7 novembre 17 74 , il n’en est
« pas de même de celle relative à la restitution de la
« dot, de celle en payement de l’habit de deuil, et de
« celle en condamnation de 6000 francs pour le trous« seau; que les 5oooo francs réclamés pour la dot ne
« sont pas justifiés etre dûs à la f e m m e Florat, et que
« cette justification ne peut résulter que des titres cons« tatant le retirernent, de la part du sieur de Reyrolles,
k de semblable somme due à son épouse ; que la somme
« de 5ooo francs pour habit de d eu il, paroît exhorbi« tante, et nécessiter mie réduction ; que le trousseau
« ayant été estimé 300 francs dans le contrat de mariage
k la dame Florat n’étoit pas fondée à demander 6000 fr.
« au lieu des 300 francs dont 011 vient de parler.
« Considérant, sur la sixjeme question, que d’après
�( 29 )
les motifs ci-déviant déduits, la dame Florat étant
créancière de l’hoirie de son m ari, on ne peut que
maintenir les saisies-arrets et les inscriptions auxquelles
elle a fait procéder.
« Considérant, sur la septième et dernière question,
« que la dame de Florat est porteuse d’un titre p a ré ,
« qui est le contrat de mariage du 7 novembre 17 7 4 ,
« établissant les demandes qui lui ont été adjugées;
« qu’ainsi l’exécution provisoire doit être prononcée ,
« attendu qu’elle est un point d’ordonnance, etc. »
Ce fatras mal digéré 11’étoit susceptible ni d’analise,
ni d’abréviation ; il eût été encore plus inintelligible :
et ce jugement n’a pu soutenir l’cpreuve d’une discussion
provisoire.
Sur la demande en défenses et en mainlevée de saisie
formée par l’appelante, est intervenu arrêt de la cour,
du 8 fructidor an 13, qui ordonne qu’au principal, sur
l’appel, les parties procéderont en la manière ordinaire;
et cependant fait défenses à la femme Couguet de mettre
le jugement dont est appel à exécution ; fait mainlevée
provisoire à l’appelante de la saisie-arrêt faite entre les
îm ain ^ u ^ ieu r Dursus, receveur général du département
de la Haute-Loire. En conséquence, autorise le tiers saisi
à vider ses mains en celles de la dame veuve Reyrolles;
quoi faisant, il en demeurera bien et valablement déchargé ;
àjla chai’ge néanmoins par l’appelante de donner bonne
et suffisante caution, de représenter les objets saisis, s’il
est ainsi dit et ordonné en fin de c a u s e ; l a q u e l l e caution
sera reçue devant le tribunal d’arrondissement de Brioude,
qui est à cet effet commis. Ordonne que lors de la déli«
«
«
«
�( 30 )
vrancc des objets saisis, procès verbal d’iceux sera dressé
par le premier notaire sur ce requis, parties intéressées
présentes ou dûment appelées. Les dépens sont réservés
en définitif.
En cet état , la femme Couguet n’a pas craint de
publier un mémoire où elle essaye de justifier sa con
duite, et auquel la dame veuve de Reyrolles est bien
obligée de répondre. Mais avant d’examiner les objec
tions de l’intim ée, et de discuter les moyens victorieux
qui s’élèvent en faveur de la dame veuve Reyrolles, on
demandera à la femme Couguet jiourquoi elle s’est dis
pensée de rappeler que c’est à sa requête que le procès
verbal du 27 juin a été signifié, avec assignation au 28
juillet, pour voir prononcer le divorce réciproquement
demandé.
Cet acte fait crouler son système de n u llité, et il étoit
prudent de le passer sous silence.
Ou lui reprochera aussi de ne pas a v o i r bonne mé
m oire, lorsqu’elle dit que l’acte du 28 juillet 1793 lui. a été
porté par un valet du comité révolutionnaire*, elle devoit
se rappeler que ces comités n’étoient pas établis à cette
époque, que le sieur de Reyrolles n’en a jamta*- été
membre; et on verroit même dans le décret qui les forme,
que la place de receveur de district, qu’occupoit le sieur
de R eyrolles, le rendoit incapable de faire partie de ce
comité : mais le trait est lancé, et qu’importe qu’on soit
ou non exact.
Mais il est impossible de se défendre d’un sentiment
d’ indignation, a la lecture du passage de son mémoire
où elle parle du fruit de ses débauches et de sa dépra-
�( 31 )
vation : le sujet étoit délicat. Suivant elle, le sieur de
Reyrolles, par un tendre penchant qu’il ne pouvoit vain
cre, vient furtivement rendre hommage a ses charmes;
et quoiqu’il parût
la dérobée, et avec toute la timi
dité d’un esclave, elle se livre sans réserve, et bientôt
les suites se laissent apercevoir.
V oilà la première fo is , dans tout le cours de l’ins
truction, que la femme Couguet a osé se démasquer, et
fait entrevoir ses vues artificieuses.
Cependant, d it - e lle , sa grossesse fournit un vaste
champ à la malignité de ses ennemis : le sieur Reyrolles
lui-même fut entraîné à douter, contre sa conviction
intime.
Fernme audacieuse et vile! comment a-t-cllel’impudeur
de s'exprimer ainsi sur un fait aussi public? veut-elle
faire rappeler que, bravant tous les regards et la honte,
elle affectoit d’insulter au sieur Reyrolles en se montrant
sans cesse au public, et affectant de passer et repasser
sous les fenêtres du sieur R eyrolles, avec l’homme qui
l’a voit affichée?
Pour donner quelque vraisemblance à cet odieux ro
man où le vice est toujours en action, elle oublie la date
qu’elle a donnée elle-même à sa déclaration de mater
n ité, faite en l’an 6 , quatre ans après son d ivorce, et
où on v o it, d’après elle-même et la sage-femme, qu’elle
a accouché le 23 messidor an 3 ; elle répond que c’est
une erreur de date, qu’elle vouloit dire que cet événe
ment avoit eu lieu en l’an 2, onze jours après le mariage
du sieur de Reyrolles avec la dame Maigne. Mais l’artifice est grossier : une mère ne commet pas de pareilles
�J V v.
C 32 )
erreurs; et de telles assertions achèvent de la couvrir de
mépris.
Plus loin elle est encore inconséquente, lorsque, sup
posant chez le sieur de Reyrolles un v if repentir de scs
fautes', dans ce moment terrible de vérité, elle dit qu’il
a fait un testament par lequel, révoquant celui du i5 plu
viôse an 5 , il faisoit au premier objet de ses amours un
legs de 40000 h\, et donnoit le surplus de ses biens au
sieur Vauzelles. Mais que la femme Couguet s’accorde
donc avec elle-mcme!
S’il' étoit vrai que le sieur Reyrolles eût eu le bonheur
d etre père, s’il avoit triomphé de la foiblesse de sa pre
mière femme après l’avoir abandonnée et fait prononcer
son divorce, il étoit naturel que ses regards se tournassent
sur l’étre infortuné qui lui devoit le jour.
Dans ce moment terrible il eût voulu être juste, et
l’amour paternel eût été le dernier mouvement de son
cœur. Comment donc auroit-il dépouillé cet enfant d’une
fortune que la femme Couguet voudroit faire croire si
considérable, pour enrichir un étranger, à la vérité son
parent, mais qui ne devoit occuper que la dernière place
dans son affection ?
Etrange contradiction! et lorsque la malignité lui fait
dire q u e’ce testament a été soustrait, qu’on a enlevé un
certain portefeuille de maroquin vert ( qui cependant
est inventorié ) , que le sieur Vauzelles a rendu plainte
en soustraction , 011 ne peut que lui repondre mentiris
impi/dentissime. La dame veuve de lleyrollos rapporte
le ebrtificat du magistrat de sûreté du tribunal du P u y,
« qui attesté qu’il 11c lui est jamais parvenu directement
« ni
�2Y2>
( 33 )
ni indirectement aucune plainte officielle ou judiciaire
sur l’imputation faite de la soustraction d’un testament
prétendu fait par feu M . de Reyrolles, non plus que d’un
portefeuille contenant des papiers et effets du sieur de
Reyrolles. »
C ’est encore vouloir tirer parti de to u t, que de faire
un reproche à la dame veuve Reyrolles d’avoir décliné
la juridiction du P uy : on lui pardonnera sans doute
d’avoir manifesté un sentiment de préférence pour ses
juges naturels, et qui avoient certes une plus grande connoissance locale. Mais la femme Couguet prétend que la
dame veuve Reyrolles n’a demandé son renvoi qu’à raison
de ce qu’elle étoit trop connue au Puy. Comment pouvoit-elle y être connue, si elle n’y a jamais résidé ? La
femme Couguet, dans son délire , ne s’aperçoit pas de ces
petites contradictions; elle oublie qu’elle venoit de dire
que la dame de Reyrolles n’avoit jamais résidé avec sou
époux pendant son séjour au Puy ; elle dit ensuite qu’elle
y étoit trop connue.
Que signifient d’ailleurs ces digressions ? ce n’est pas le
point de la cause. La dame Reyrolles n’a pas insisté sur
l’incompétence ; elle a consenti de plaider au fond : il ne
s’agit donc que de discuter le mérite du jugement dont
est appel.
M O Y E N S .
cc
«
«
«
«
La défense de la dame veuve de Reyrolles se divise en
deux propositions principales.
Dans la première, elle établira que le divorce d’entre
le sieur Reyrolles et la femme Couguet a été valablement
E
�( 34 )
prononcé ; qu’il est conforme en tous points à la dispo
sition de la loi du 20 septembre 1792.
Dans la seconde, elle démontrera que ce divorce, fût-il
irrégulier, la femme Couguet seroit aujourd’hui non recevable à s’en plaindre : elle y a acquiescé. Des lins dé nonrecevoir insurmontables écartent sans retour sa prétention
ambitieuse.
§. 1er.
Tje divorce est valable.
La loi du 20 septembre 1792 , dans son préam bule,
suppose qu’il est urgent de faire jouir les Français de la
faculté du divorce. « Cette faculté, aux termes de la loi,
« résulte de la liberté individuelle dont un engagement
« indissoluble seroit la perte. » L e magistrat, le citoyen ,
n’a pas le droit de scruter les motifs du législateur; l’un
est l’organe et le ministre de la l o i , l’autre doit se sou
mettre avec respect.
Parmi les causes du d ivo rce, la loi dit qu’il a lie u ,
i°. par le consentement mutuel des époux; 20. sur simple
allégation d’incompatibilité d’humeur ou de caractère ;
30. sur des motifs déterminés, parmi lesquels elle place
l’absence de l’un des époux sans nouvelle pendant cinq ans.
L e §. 2 de cette loi indique le mode de divorce par
consentement mutuel. L ’article 4 de ce §. porte : « Les
« deux époux se présenteront en personne à l’assemblée;
« ils y exposeront qu’ils demandent le divorce. Les parens
« ou amis assemblés leur feront les observations qu’ils
« jugeront convenables; si les époux persistent dans leur
�Z ïi
( 35 )
dessein, il sera dressé, par un officier municipal requis
à cet effet, un acte contenant simplement que les parens
ou amis ont entendu les époux en assemblée dûment
convoquée, et qu’ils n’ont pu les concilier. La minute
de cet acte, signée des membres de l’assemblée, des deux
époux et de l’officier m unicipal, avec mention de ceux
qui n’auront su ou pu signer, sera déposée au greffe de
de la municipalité ; il en sera délivré expédition aux
époux gratuitement, et sans droit d’enregistrement. »
L ’article 5 du même §. s’exprime ainsi : « Un mois au
« m oins, et six mois au plus après la date de l’acte énoncé
« dans l’article précédent, les époux pourront se prê
te senter devant l’officier public charge de recevoir les
« actes de mariage , dans la municipalité où le mari a son
« domicile; e t , sur leur demande, cet tifficier public sera
« tenu de prononcer leur divorce, sans entrer en con« noissance de cause. Les parties et l’officier public se
« corrformeront au x ¿formes prescrites à ce\sujet dans
« la loi , sur les actes çle naissance ¡ mariage et décès. »
Cette dernière loi sur les actes de naissance, section 5 ,
articles 3 et 4 , contient des dispositions qu’il est égale
ment utile de rappeler.
« Lorsque deux époux ( art. 3 ) demanderont conjoin
te tement le d ivo rce, ils se présenteront accompagnés de
« quatre témoins majeurs devant l’officier public , en la
« maison commune, aux jo u r, lieu et heure qu’il aura
H indiqués ; ils justifieront qu’ils ont observé les délais
« exigés par la loi sur le mode de divorce ; ils représen
te teront l’acte de non-conciliation , qui a u r a dû leur être
ce délivré par leurs parens assemblés; et, sur leur réquiE 2
«
«
«
«
«
«
«
«
«
�( 36 )
k sition, l’officier public prononcera que leur mariage
« est dissous.
« II sera dressé acte du tout ( art. 4 ) sur le registre des
« mariages ; cet acte sera signé des parties, des témoins
« et de l ’officier p u b lic, où il sera fait mention de ceux
« qui n’auront pu ou su signer. »
L ’application de ces lois se fait bien naturellement à l’es
pèce particulière où se trouvent les parties. Il est vrai que,
par le premier acte du 24 mai 1793,1e sieur de Reyrolles
notifie à la femme Couguct qu’il veut jouir de la faculté
du divorce, sur le fondement qu’elle a quitté la ville de
Brioude depuis entour neuf ans, et dans laquelle il a appris
qu’elle étoit revenue depuis quelques jours ; et encore
p lu s, sur leur incompatibilité d’humeur et de caractère.
Dans ce premier acte, c’est l’époux qui provoque , et
il demande le divorce sur simple cause d’incompatibilité.
Il étoit tout simple qu’il prît cette forme , ayant cessé
de cohabiter depuis long-temps avec la femme Couguet \
n’ayant aucun rapport avec elle, il ne pouvoitni requérir,
ni prévoir son consentement, surtout lorsque la loi lui
oifroit un moyen plus simple ? qui ne l’obligeoit à aucun
aveu , et le dispensoit de publier des torts d’un genre que
le mari ne se plaît jamais à révéler.
Il nomme en conséquence trois parens ou amis qu’il
indique, avec sommation à la femme Couguet d’en nom
mer trois autres, à l’effet de comparaître dans le délai
d’un m ois, à compter de la notification, en la maison
commune, etc.
Jusque là tout est conforme a la loi pour le mode pres
crit sur simple incompatibilité.
�'Z ir
( 37 ) _
Trois jours après, le 27 m a i, la femme Couguetlui
notifie de sa part q iiil ne fa it que la prévenir, en dé
clarant qu’ il entend jouir de la faculté du divorce ; elle
accepte la déclaration , et dit qit’elle veut jo u ir de la
même f a c u l t é en conséquence , elle nomme les sieurs
Couguet, son frère, Martinon - Flageat, et Caldaguet,
pour composer rassemblée de famille; elle fait plus, elle
notifie ses intentions au domicile des trois individus nom
més par son mari, elle les requiert de se trouver à la maison
commune, le 27 juin lors prochain , par-devei’s Poflicier
municipal qu’elle dénomme, à raison, est-il d it, du di
vorce par eu x respectivement demandé.
Certes, voilà bien un divorce p a r consentement mu
tuel , puisque , d’une p a rt, elle semble fâchée que son
mari l’ait prévenue, e t , de l’autre, elle apprend aux ar
bitres que le divorce est respectivement demandé.
E h ! qu’on ne dise pas, comme les premiers juges,
que ce divorce est fondé sur l’absence , ou sur incom
patibilité d’humeur , et qu’il est nul sous ces deux rap
ports : ce n’est là qu’une absurdité.
Il fallo it, dit-on, pour constater l’absence, un acte de
notoriété, et c’eût été un m otif déterminé. L ’absence n’est
pas le m otif de la demande; si le mari expose ou se
plaint de ce que sa femme n’habite pas la ville de Brioude
depuis neuf ans, il fonde encore plus sa demande sur
l’incompatibilité d’humeur.
Mais cette première sommation ne fait qu’annoncer
l’intention, le projet du mari d’agir seul, et de se passer
du consentement. Cette sommation étoit inutile, car la
�C 38 )
loi n’en exige pas lorsqu’il y a consentement mutuel, il suffit
que les époux se présentent en personne à l’assemblée,
accompagnés de leurs parens ou amis.
Ainsi il ne faut compter pour rien cette première som
mation , qui n’eût été utile qu’autant qu’il y auroit eu
résistance de la femm e; et alors il falloit passer parles
épreuves que la loi prescrit. Mais dès que la femme Couguet
loin de résister , annonçoit au contraire sa satisfaction de la
demande du m ari, il ne s’agissoit que de se présenter
à 1’assemblée, et la femme Couguet a tant de crainte d’un
changement de volonté, qu’elle s’empresse d’assigner ellemême les parens indiqués, et les requiert de se trouver
devaut l’officier public.
Ce n’est pas to u t, après le procès verbal de non-con
ciliation, au jour indiqué , c’est elle qui prend la peine
de le signifier au sieur de Reyrolles; et quel est son lan
gage ! « elle signifie le procès verbal de non-conciliation,
« dressé entre les parties, par le sieur Borel, officier mu
tt n icipal, en présencè de l’assemblée de fam ille, le 27
« juin , sur la demande en divorce fo rm ée respect ive« ment par les parties ; lequel procès verbal, dit-elle,
« a été dressé suivant et conformément à Varticle 4
« du §. 2 de la loi qui détermine les causes, le mode
« et les effets du divorce, du. 20 septembre 1792 ; elle donne
« assignation au sieur de Rejn-olles, à comparaître et se
« trouver le 28 juillet, à dix heures du matin, par-devant
« l’officier public chargé de recevoir les actes de mariage
« et deces, dans la municipalité de la ville de Brioude }pour
« t oir prononcer le divorce d'entre les parties, suivant
�je>
( 39 )
« et conformément à ¿''art. 5 du même
de la loi du 20
« septembre 1792, lai déclarant q u e , comparant ou non,
« il y sera procédé tant en absence que présence. »
O r, ces articles 4 et 5 du §. 2 de la loi du 20 septembre,
sont précisément ceux qui s’occupent exclusivement du
mode de divorce par consentement mutuel. Comment
la femme Couguet peut-elle aujourd’hui récriminer, après
un consentement si souvent répété ; lorsqu’il a été dans
son intention de divorcer, lorsqu’elle choisit, pour abréger
et jouir plus vite de sa liberté, le mode de consentement
mutuel, exprimé en tant de manières, au point qu’il est
impossible de l’envisager sous un autre rapport?
V ient ensuite l’acte de divorce. Et que font les époux?
ils se présentent l’un et l’autre spontanément, assisté , non
pas comme au procès verbal de non-conciliation, de trois
parens chacun , mais assistés simultanément de quatre té
moins majeurs, conformément à l’article 3 de la loi. sur
les actes de naissance, décès et mariage. Que dit l’officier
public ? il expose que Claude Reyrolles et M arguerite
Couguet l’ont requis de prononcer la dissolution de leur
mariage , contracté le 7 novembre 1774 ; et l’ofïicier pu
b lic , après avoir vérifié que les époux ont observé les
délais exigés par la l o i , et visé Vacte de non-concilia±
tio n , du 27 ju in , dont la minute est déposée au secré
tariat , prononce, au nom de la lo i, que le mariage
d’entre Claude Reyrolles et Marguerite Couguet est dissous,
et qu’ils sont libres de leurs personnes comme ils l’étoient
avant de l’avoir contracté.
Il est curieux de lire dans les motifs du jugement dont
est appel, que l’ollicicr public n’a pas dissous le mariage,
�( 40)
qu’il n’a annullé que le contrat, et n’a point parlé de l’acte
de célébration ; que si le premier est anéanti, le second
reste, et qu’alors il n’y a pas de divorce.
Sans doute que les premiers juges n’ont pas lu cet acte,
car autrement ce m otif seroit un chef-d’œuvre d’ineptie,
ce qu’on ne doit pas supposer. Ce n’est pas le contrat
qu’annulle l’ofïicier p u b lic, ce n’est pas du contrat dont
les parties demandent mutuellement la dissolution, mais
bien du mariage,• et l’oflicierpublic prononce, sans ambi
guité comme sans équivoque, que le mariage est dissous,
sans relater alors la date du contrat.
Il est h remarquer encore que les parties, comme l’oiïicier public, ont si bien entendu procéder suivant le mode
prescrit pour consentement m utuel, que dons son visa il
ne rappelle que le procès verbal de non-conciliation,
seule pièce requise par l’article 4 du §. 2 de la loi ; il ne
fait aucune mention de la première sommation du m ari,
fort inutile , dès que la femme désiroit et demandoit ellemême le d ivo rce, mais qu’il auroit fallu rappeler si le
divorce avoit eu lieu de tout autre manière. Enfin l’of
ficier public se conforme en tout point à la loi sur les nais
sances, mariages et décès, aux termes de l’article 5 invoqué
par la femme Couguet, et dont elle fait elle-même l’ap
plication au divorce qu’elle désire et sollicite.
Il faut maintenant laisser à la femme Couguet le plaisir
de jouer sur les m ots, de dire q iü ily a trois divorces au
lieu d’i/n. Que les ép o u x , par un seul acte, ou par deux
actes si précis, aient consigné leur volonté mutuelle de
d ivorcer, il semble que ,cc fait est absolument indifférent.
Il suffit sans doute qu’ils aient manifesté leur consente
ment
�z*b r
(4 0
ment réciproque, et que, pour y parvenir, ils aient simul
tanément convoqué leurs parens ou amis au nombre ,
jo u r, lieu , heure, et devant l’officier public , conformé
ment à la loi.
Cette loi d’ailleurs ne prononce pas la peine de nullité
pour l’inexécution littérale de quelques dispositions indif
férentes. La seule peine qu’elle prononce en cas d’inexé
cution de quelques-unes des formes par elle prescrites, est
exprimée dans la section 5 , n°. 9. « L ’officier public qui
« aura prononcé le divorce, et en aura fait dresser acte
« sur les registres des mariages, sans qu’il lui ail été jus« tifié des délais, des actes et des jugemens exigés par la
« loi sur le divorce, sera destitué de son état, condamné
« à 100 francs d’amende, et aux dommages-intérêts des
« parties. »
Il résulte des termes de la l o i , que l e ’divorce une fois
prononce a toujours son effet : c’est un changement d’état
irrévocable, et consommé par l’acte du divorce. S’il y a
inobservation dans les formes prélim inaires, c’est à l’of- '
ficier public qu’elle en attribue la faute ; elle punit scs
omissions comme sa négligence , mais elle ne prononce
aucune peine contre les parties, et n’a pas voulu qu’011
annullât un divorce prononcé. On ne peut suppléer aux
dispositions pénales , ni les étendre au delà de ce que la
loi a voulu et prévu : tout autre système seroit subversif
des règles et des maximes les plus constantes.
E n fin , il est bien extraordinaire que ce soit surtout la
femme Couguet qui entreprenne de se plaindre des vio
lations de forme , lorsque c’est elle qui , par des actes gé
minés, a donné au divorce le caractère de consentement
F
�l'V >
( 42 )
mutuel ; elle devroit surtout apprendre dans quel article
de la loi elle a trouvé que les époux q u i demanderont
conjointement le divorce ne peuvent former cette de
mande par des actes séparés : le divorce ne Bera-t-il pas
réciproque, lorsqu’il a été mutuellement accepté?
La femme Couguet objecte encore que la loi exigeoit des
parons pour composer l’assemblée de famille; que ce 11’est
qu’à leur défaut que la loi permet de se servir d’amis: elle
reproche au sieur de Rçyrolles d’avoir manqué à cette
forme essentielle, en ne nommant que des amis.
L ’objection porte sur un fait inexact. M. Croze-Montbrizet, alors juge, et actuellement procureur général im
périal à A lexandrie, étoit un des plus proches parens du
côté paternel. L e sieur de R eyrolles, dont la mère étoit
de L y o n , n’avoit aucun parent maternel que M . Vauzelles,
ex-législateur. Il est notoire qu’ils étoient alors divisés,
et ne se voyoient jamais : cii'constance qui empêcha sa
convocation.
Quant à la femme Couguet, elle suivit la même mar
che ; elle ne convoqua qu’un seul parent et deux amis.
La loi qui permet de remplacer devant l’officier public,
dans la première assemblée, les parens par des am is, même
ceux qui ont été compris dans la sommation , indique
assez qu’elle n’a pas exigé rigoureusement ce choix ; elle
n’a pas voulu qu’on fît constater préalablement le défaut
de parens par des actes de notoriété ou des sommations
judiciaires, pour une forme purement administrative.
Dans l’espèce de l’arrêt de la co u r, rendu pour des
parties de cette v ille , une foule de circonstances s’élevoient
contre le divorce, où il n’y avoit qu’une seule partie pour-
�g**ji
. ( 4 3 L
suivante. I c i, au contraire, les deux parties ont concouru
aux actes préliminaires et à l’acte de divorce : elles ne
peuvent donc revenir contre leur propre fait.
T e l est le malheur de la femme Couguet , qu’elle est
réduite à récriminer contre de prétendues nullités qui
sont de son fait; non-seulement elle a agréé, approuvé
les arbitres nommés par son m ari, en faisant notifier ses
intentions au domicile de chacun des arbitres, par l’acte
du 27 mai 1793 , et en les requérant de remplir leur
m ission, mais elle-même n’a nommé qu’un seul parent
et deux amis. Comment pourroit-elle doue s’en plaindre ?
Il est donc évident, i°. que le divorce a été fait et pro
noncé par consentement m utuel, et sur la réquisition
réciproque des deux époux ; 20. que toutes les formes
prescrites par la loi ont été régulièrement observées.
§•
II.
L e diçorce fû t - il irrégulier, lo, fem m e Couguet est
aujourd'hui non recev cible à Vattaquer.
L e Code c iv il, en laissant subsister le divorce dans
notre législation,. a prescrit d’autres formes et d’autres
motifs ; mais le législateur a senti en même temps que
s ’ j I devoit être plus rigoureux, il ne devoit exciter aucunes
secousses, aucun retour sur ce qui étoit déjà fait et con
sommé avant la publication de cette partie du Code.
Cette précaution annonce qu’on a voulu jeter un voile
sur des divisions intestines que la x-évolution avoit souF 2
�( 44)
vent excitées, et qu’il ne falloit pas rouvrir des plaies
déjà cicatrisées. Une loi transitoire, du 26 germinal a n u ,
a manifesté l’intention du législateur.
Elle porte : « Tous divorces prononcés par des o jji« ciers de Tétat civ il, ou autorisés par jugement, avant
« la publication du titre du Code civil relatif au divorce,
« auront leurs effets conformément aux lois qui existaient
« avant cette publication. »
En appliquant cette loi à l’espèce particulière , le di
vorce dont il s’agit a été prononcé par l’officier public
de la commune de Brioude, lieu du domicile des parties,
et par le fonctionnaire qui seul en avoit le pouvoir.
La loi ne va pas scruter tout ce qui s’est fait avant, tout ce
qui a précédé la prononciation du divorce ; elle s’exprime
en termes généraux et absolus: Tous divorces pronon
cés , etc. Dès-lors que peuvent signifier les détails minu
tieux dans lesquels la femme Couguet cherche ù se perdre
pour écarter les termes de la loi ? Si la femme Couguet
pouvoit prouver que l’acte a été dressé par tout autre que
celui qui en avoit le caractère et le pouvoir , qu’il a été
prononcé par un citoyen qui n’étoit pas officier public,
alors elle soutiendroit peut-ctre, avec quelqu’apparence
de raison , qu’il n’existe pas de divorce.
Mais lorsqu’il y a pi’ononciation légale du divorce,
entre deux époux majeurs, après sommation , procès
v e r b a l de non-conciliation, dans les délais prescrits par
la lo i, sur la demande réciproque des conjoints; qu’ils
ont e u x -mêmes signé l’acte de d ivorce, comme une
preuve de leur réquisition, de leur persévérance, de
�C 45 D
leur consentement, et de leur approbation à la disso
lution du mariage : alors tout est irrévocablement con
sommé; la loi ne permet aucun retour.
Et de quelle importance pourroient être certaines
irrégularités qui se rencontreroient dans les actes pré
liminaires ? Ces actes préparatoires , qui doivent être
naturellement comparés à de simples actes de procédure,
ne peuvent plus être examinés lorsqu’il y a approbation
011 acquiescement. Toutes les nullités, les défauts de
form e, se couvrent par le silence des parties, lorsqu’ils
ne sont pas produits in limine litis.
i
L a dame Couguet dii'a-t-elle qu’elle n’a pas approuvé
ces actes prélim inaires, lorsqu’aussitôt après la pronon
ciation du divorce, elle a pris la qualité dç, fem m e di
vorcée dans une foule de traités, quittances, dont on a
fait l’énumération en commençant; lorsqu’elle a tran
sigé avec le sieur de Reyrolles., le 13 frimaire an 5 , où
elle est en qualité comme fem m e divorcée ;
Lorsque dans cet acte elle reçoit tout ce qui lui est dû,
tout ce que le sieur de Reyrolles avoit reçu pendant le
m ariage, pour elle ou à cause d’elle ;
Lorsqu’on voit qu’elle s’acharne à demander une pen
sion que le sieur de Reyrolles ne lui avoit pas payée la
dernière année du mariage ( ce qui prouve encore une
séparation antérieure ) ;
Lorsqu’elle demande les intérêts de sa dot, ¿1 compter
de la demande en divorce ,* et qu’enfin elle donne dé
charge au sieur de Reyrolles de toutes les pièces, partage, titres , dossiers , que le sieur de Reyrolles avoit
eus en son pouvoir ?
�i
f
( 4 6 )
Elle répond, à la vérité, que dans d’autres actes pos
térieurs elle n’a pas pris la qualité d&fem m e divorcée;
mais dans les actes qu’on a examinés, si elle ne se dit
pas femme divorcée, elle ajoute encore à ses approba
tions multipliées, puisqu’elle ne prend d’autre nom que
le sien , sans y ajouter jamais celui du sieur de Reyrolles. La qualité de femme divorcée n’est pas si glorieuse
qu’on ne puisse bien se passer de la prendre : mais lors
qu’on ne prend pas le nom du m ari, c’est qu’on se re
garde comme absolument libre, c’est qu’on a oublié ou
qu’on veut faire oublier qu’on a été mariée.
Enfin n’a-t-elle pas approuvé le divoz*ce, en voyant
sous ses yeux le mariage du sieur de Reyrolles sans au
cune opposition de sa part, en gardant le silence pendant
plus de dix ans sans se plaindre?
A-t-elle cru honorer la mémoire du sieur Reyrolles,
ou en imposer au p u b lic, par cette jonglerie de prendre
le deuil trois mois après lo décès du sieur de Reyrolles,
lorsque, le lendemain de sa mort, elle affecta de se livrer
à ses habitudes de plaisir et de dissipation?
La dame Couguet a essayé d’écarter ces fins de nonrecevoir, qui paroissent insurmontables.
Elle prétend d’abord que celle résultante de la loi
du 26 germinal an on ze, n’a pas même le mérite d’être
fondée sur le bon sens; elle y trouve que le législateur
a déclaré ne valider que ce que la loi existante lors du
divorce approuvoit expressément. Suivant elle, la dame
Reyrolles a tronqué la lo i, quand elle a voulu en indjiire qu’à- cpnapter.de sa publication 011 ne pouvoit plus
attaquer les précédens divorces : il en résulteroit, dit-elle,
�( 47 )
que si la veille de la loi un divorce avoit été prononcé
sans aucune épreuve , les époux n’en resteroient pas
moins séparés à jamais.
Cette objection bien analisée s’évanouit bientôt ; d’a
bord , il ne s’agit point ici de divorce prononcé avec
précipitation et sans épreuve-, on a distingué, dans cette
discussion, les irrégularités essentielles et absolues, de
celles qui auroient pu se glisser dans la forme de quel
ques actes préliminaires et peu imp'ortans -, et on n’est
pas allé jusqu’à dire que les formes inhérentes à l’acte
de divorce' étoient couvertes par la loi ; mais on soutient
qu’il résulte du sens et de la letti-e de cette loi , que lès
divorces prononcés par l’ollicier public doivent obtenir
leur effet.
Si la loi eût voulu que les divorces prononcés par
l’officier public, en vertu de la loi de 1792, pussent être
encore attaqués, elle auroit dit que les divorces prononcés
par Vofficier de l ’état c iv il, conformément aux lois qui
existoieiït avant la publication, auroient leur effet : dans
ce sens, et en ajoutant sans aucune interruption ces mots :
conform ém ent, etc., à la suite de la prononciation de
l’officier civil, alors on auroit pu dire que la loi permet
l’examen des formes antérieures au divorce prononcé.
Mais la dame Couguet tronque la loi par la transpo
sition cl’ un de ses membres; transposition qui en altère
tout le sens. En elfet, la loi ordonne d’une manière ab
solue que les divorces prononcés, etc. seront exécutés;
la suite, conformément au x lois, etc., ne vient et ne se
l’apporte qu'aux effets civils qui sont la suite du divorce,
�et pour lesquels la loi du 20 septembre 1792 a un titre
particulier intitulé, D es effets du divorce; effets qui sont
bien difïerens de ceux que lui attribue le Code c iv il,
puisque, dans la première ( n°. 6 ) , les droits de survie,
douaire, et autres gains, sont, dans tous les cas de di
vorce, éteints et sans effet, tandis que, dans le Code civil
( art. 299 ) , les gains et avantages matrimoniaux sont
réservés aux époux, dans le seul cas de divorce de con
sentement mutuel.
L a loi du 26 germinal a donc voulu fixer cette diffé
rence des effets, en consacrant tous les divorces faits par
les officiers de l’état civil.
L a question est purement grammaticale. Il est évident
que le texte de la loi est conçu de manière à ce que les
mots conformément au x lois ne se rapportent point aux
divorces prononcés, mais bien à leurs effets, que la loi
a voulu déterminez'.
Enfin cette loi est fondée sur un grand m otif d’intérêt
public. En décrétant cette proposition, en confirmant
tous les actes de divorce prononcés jwr les officiers pu
blics ou par jugemens, elle a voulu par là consacrer les
possessions d’éta t, sur lesquelles sont fondés l’honneur
et le repos des familles.
La femme Couguet, aujourd’hui si formaliste, a mé
prisé le titre d’épouse, a fui pendant longues années la
compagnie de son mari. Peu occupée de la dignité de
son état, elle n’a témoigné aucuns regrets sur la demande
du sieur Reyrolles; elle s’est empressée d’y donner les
mains; elle a provoqué elle-même la prononciation du
d ivo rce,
�( 49)
divorce; et sans doute si elle eût fait entendre une voix
gémissante lorsque les choses étoient encore entières,
avant que le sieur ïleyrolles eût formé d’autres nœuds,
elle eût pu se flatter d’inspirer quelqu’intérêt. Mais main
tenant qu’il existe un autre mariage , de quelle consé
quence ne seroit-il pas d’enlever l’état de la dame veuve
R eyrolles, lorsqu’elle a contracté sur la foi publique ,
après un divorce px-ononcé par l’ofïicier de l’état civil ,
et surtout après l’indifférence et le silence de la femme
C ou guet, qui n’a pas réclamé lors de la publication du
second mariage?
Eh quoi ! n’est-il pas honteux d’entendre dire par la
femme Couguet qu’elle étoit forcée d’exécuter un divorce
n u l, et qu’elle ne devoit point faire entendre sa v o ix ,
dans la crainte que son mari ne divorçât plus régulière
ment une seconde fois? Elle cro}Toit donc ce divorce nul;
et cependant elle l’approuvoit par des actes m ultipliés,
et dans toutes les circonstances; elle voyoit les affiches et
publications du nouveau mariage du sieur R eyrolles, et
se gardoit bien de se montrer, de peur qu’il ne divorçât
plus régulièrement. Quelle idée donneroit-elle de sa mo
ralité ! Ainsi les actes approbatifs , son silence même ,
n’étoient qu’une longue suite de perfidie ; elle se réservoit
de demander la nullité du divorce, lorsque l’état des
choses auroit changé, lorsque son époux auroit cessé
d’exister, lorsque ne pouvant plus se réunir à celui qu’elle
ji’avoit cessé d’hum ilier, elle n’auroit plus qu’un vil in
térêt pour mobile ; lorsque son époux auroit porté la dé
solation, et tait le dernier outrage à une f a m i l l e lionoG
�• (
5°
)
rable, qu’il auroit enlevé, sans le savoir, l’honneur, l’état
et la fortune d’une autre épouse.
A quel degré d’infamie faut-il être descendu, pour
oser manifester une aussi coupable prévoyance , pour se
faire parade d’un raffinement de méchanceté ! Ne seroitelle pas elle-même la complice de l’erreur de son ép ou x,
du piège qu’elle lui auroit tendu, du précipice qu’elle
auroit creusé sous les pas de celle qu’elle nomme sa rivale ?
Dans quel code pourroit-elle trouver la récompense de
cette atroce perfidie ?
Quel est donc le but de la femme Couguet en attaquant
le divorce? ce n’est pas par un sentiment de respect pour
la dignité du mariage, par attachement à ses devoirs, ou
pour se réunir ¿1 son époux.
Tant qu’il a été libre, elle l’a méprisé; lorsqu’il a con
tracté de nouveaux nœuds, elle s’est glorifiée du titre de
femme d ivo rcée, o u , si elle oublie cette q u a l i t é , elle ne
prend que son nom de famille, sans jamais y ajouter celui
du sieur de Reyrolles. C’est donc un intérêt pécuniaire,
auri sacra J a m e s , qui l’a déterminée dans ses démar
ches, tandis que la dame veuve Reyrolles défend son hon
neur, son éta t, et la possession paisible de cet état pen
dant dix années.
T ou t est favorable quand il s’agit de défendre son état;
tout est odieux dans ce qui tend à le faire perdre ; e t,
dans le doute, il fajut toujours pencher pour conserver
l’honneur des citoyens. C’est ainsi que s’exprime le célèbre
Cochin , dans la cause de la daine Artaud , t. i de ses
œ uvres, p. 5g 6.
�(
(5 0
M ais, dît la dame Couguet, les fins de non-recevoir
ne peuvent être opposées lorsqu’il s’agit d’une question
d’état.
L ’état des hommes est sacré aux yeux de la loi ; il tient
à l’ordre public , et on ne peut jamais déroger A ce qui
est d’ordre public.
Cette maxime, très-vraie dans certains cas, doit cepen
dant être modifiée. Il est constant, en thèse générale ,
que tous actes volontaires, toutes transactions sur l’état
des citoyens, ne lient pas irrévocablement les parties qui
ont contracté ; il faut toujours l’intervention de l’autorité
publique.
A in si, par exem ple, deux époux nC'pourroient pas
transiger amiabiement sur la dissolution de leur mariage.
M ais, lorsque l’autorité publique est intervenue, lorsque
l ’officier de l’état civil a prononcé le divorce , et dé
claré , au nom de la lo i, que les époux étoient libres,
alors les approbations données aux actes préliminaires
font disparoître des moyens insignifians de forme.
C ’est ce qui a été disertement jugé par un arrêt de la
cour de cassation, du 24 pluviôse an 1 3 , que la femme
Couguet a vainement entrepris de combattre. Cet arrêt
a jugé une question d’ordre p u b lic, qui naissoit de l’ar
ticle 6 du Code civ il, ainsi conçu : « On ne peut déroger,
K par des conventions particulières, aux'lois1 qui inté« ressent l’ordre public et les lionnes mœurs. » Cet article
est tiré de la loi 45 au if. De regulis ju r is , prívaloTuni conçentio ju r i publico non derogat.
Dans
l ’espèce
d e cet
arrêt,
lo sieur B o e h l e r
avoit,
�♦*
4 •*
( 52)
comme la femme Couguet, reconnu dans plusieurs con
trats la validité du divorce que sn femme avoit provoqué
et obtenu. Il tenta cependant de le faire annuller en
justice par des défauts de forme. L ’épouse, en repous
sant les nullités prétendues, opposoit que le sieur Boehler
étoit non recevable, attendu qu’il avoit reconnu la vali
dité du divorce par des actes subséquens.
La cour d’appel de Trêves adm it, par son arrêt, les
lins de non-recevoir. Il est vrai que cette cour, par son
premier m o tif, disoit que les moyens de nullité étoient
sans fondement; mais, par un second, il étoit diserte-
ment exprimé et décidé que le mari avoit pu et voulu
renoncer aux droits qu’il avoit de contester les elfets civils
du divorce de son épouse.
Pourvoi en cassation pour contravention à Part. 6 du
Code civil; arrêt de la cour de cassation, qui regarde l’ap
probation donnée par le mari à la régulai’ité des actes, et
la reconnoissance par lui faite, dans des actes p ublics, de
la qualité prise par son épouse defem m e divorcée, comme
péremptoire. On ajoute que le Code civ il, en bornant sa
défense h ce qui concerne les objets d’intérêt public , a
voulu permettre l’effet dès reconnoissances, et celui des
transactions sur l’intérêt civil et privé : ce qui est for
mellement exprimé dans l’article 2046 du Code civ il, et
ce que la loi transitoire de floréal an 11 a spécialement
appliqué au divorce; en conséquence, la cour rejette, etc.
La femme Couguet oppos.e de bien foibles réflexion?
sur cet arrêt. Suivant e lle , ce n’est qu’ un arrêt de cir
constance',’ coinnje si l«i cOu-v régulatrice pouvoit s’ar
rêter
�( 53 )
rêter à des circonstances, lorsqu’elle est exclusivement
instituée pour veiller à la conservation des lois, et en
empêcher la violation.
M ais, dit la femme Couguet, ce n’est ici qu’un mari
qui avoit capacité de traiter, et qui n’a transigé que sur
les effets civils du divorce , au lieu qu’e lle , qui étoit en
puissance de m ari, n’avoit pas la liberté d’approuver ou
de transiger. ..
Mais par la loi de 1792, la femme mariée est liabile
à poursuivre l’action en divorce, et à en suivre les effets;
elle a à cet égard la même capacité que le mari.
Si l’arrêt de la cour de Trêves avoit jugé que le di
vorce n’étoit pas n ul, il jugeoit aussi que les approba
tions écartoidnt la demande.en niiUité^jJ^is CP,.quj. J’endj»
encore la dame de Reyrolles plus favorable, il n’y avoit
point, dans l ’espèce du sieurJBoeliler, uji second mariage;
au lieu qu’ipi jl_faudroit prononcer la nullité d’un ma' ; liage contracté publiquem ent, légalement et de bonne
J fç l, sur la foi d’ un, divorce prononcé pafT autdritô^ ublique, et approuve pár les parties irrtél-essécs.
'* '''A insi croule le système xle la • femino-C^ouguet ¿ Ji^,
dame, yeuve; •iUyrollçs ne poussera pas ;plus loin là dé•
_
^'
irLonsJ^jitkin. J1 est.temps de terminer sa défense. La
femme Couguet ne peut inspire^ aucun 1intérêt ; ■
elle
ne plaide que de lucro captando. La dame de R ey
rolles défend son honneur, son état, le titre sacré d’é
pouse. Combien il lui en a coûté de se voir obligée de
descendre dans l’arène! Si la femme Couguet a e m p l o y é
les couleurs les plus noires contre e lle , eu a m o n ce l an t
�(5 4 )
des calomnies, la dame Reyrolles s’est attachée à ne dire
que la vérité. Elle s’adresse à des magistrats éclairés,
pénétrés de toute la gravité d’ une question d’état, qui
sauront apprécier le roman de la femme Couguet, et
conserver à l’appelante son titre d’épouse, et l’état qu’elle
a possédé pendant plus de dix ans sans réclamation.
Signé M A I G N E , veuve D E R E Y R O L L E S .
M e. P A G E S ( d e R i o m ) 7 ancien avocat.
M e. V E R N IÈ R E , avoué licencié,
JfCMAjüCixr
{%
^
o .V
^
t,
„ ^ xJltruuJ ul ftk. u j i J c J i ï Au aik. 4*
„ ¿ w -a -
~
r "
^
1f>t/p . H - « / « 'y , IW > $“* * *
A RIOM, de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Janvier 1806.
,
U
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Maigne, Catherine. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Subject
The topic of the resource
divorces
remariage hâtif
nullité du mariage
conflit de lois
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour dame Catherine Maigne, veuve du sieur Reyrolles, appelante d'un jugement rendu au tribunal du Puy, le 24 floréal an 13 ; contre Marguerite Couguet-Florat, intimée.
Particularités : notation manuscrite : « 29 janvier 1806, jugement confirmatif. Mais arrêt de la cour suprême du 10 février 1809 qui casse. Elle décide en thèse « quel la loi transitoire du 26 germinal an 11 maintient indistinctement tous les divorces antérieurs au code civil, en ce sens qu'il n'est plus permis de remettre en question la cause de ces divorces ni la régularité des actes de poursuites. Voir Sirey, 1807, partie 1, p. 82. »
Table Godemel : Divorce : la loi transitoire du 26 germinal an onze rend-elle inattaquables les divorces faits en éxécution de la loi du 20 septembre 1792, fussent-ils irréguliers et contraires aux formes voulues par cette loi ? La nullité du divorce a-t-elle été couverte par la qualité de femme divorcée prise par la femme dans différens actes, par cette possession d’état, et par le décès du mari divorcé ? en cas de nullité du divorce le traité fait entre les époux divorcés, relativement à leurs intérêts privés, seraient-ils infecté du même vice ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1774-1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
54 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1511
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0706
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0615
BCU_Factums_M0524
BCU_Factums_M0707
BCU_Factums_G1509
BCU_Factums_G1510
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0615
BCU_Factums_M0524
BCU_Factums_M0707
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53251/BCU_Factums_G1511.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conflit de lois
divorces
nullité du mariage
remariage hâtif
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53252/BCU_Factums_G1512.pdf
5d1c5daa1c6d9d3a80e59c159bb1da36
PDF Text
Text
MEMOIRE
POUR
E l é aza r d - R o s t a n g - E t i e n n e
DAUDIN ,
propriétaire
CONTRE
,
C A P E L L E ci-devant conseiller au.
bailliage et siège présidial d'Aurillac ;
F r a n ç o is
e n
D 'A n t o i n e
p r é s e n c e
DESPRATS,
E t de dame M a r g u e r i t e S O B R I E R ,
de Jean D a u d i n .
veuve
Peu de causes méritent autant l’attention de la
cour.
Quels que soient les faits qui y ont donné lie u ,
A
�(*)■
le sieur Daudin ne se permettra aucun écart ; il n’aura
garde d’oublier qu’il plaide contre un ancien magis
trat; il respectera, dans son adversaire, et la charge
dont il a, été revêtu, et le tribunal dont il a été membre.
«
F A I T S .
L e domaine de V e rn e t, dont il s’a g it, a appartenu
originairement à Etienne Descaffres.
L e 3 avril11773 ,'Étienne Descafiïes fit son testament,
par lequel, après différens legs k différens neveux, il
légua à la dame Sobrier', veuve Daudin, sa nièce, tout
son m obilier, et l’usufruit de tous ses immeubles, jus
qu’à la majorité de Daudin son fils, et institua ce der
nier pour son héritier général1et universel; et attendu,
est-il dit, que l’héritier ne peut; actuellement recueillir
l’hérédité , le testateur nomme pour exécutrice testa
mentaire ’la dame Sobrier, à laquelle, est-il ajouté, il
donne plein et entier pouvoir de vendre ou délaisser
des biens immeubles de son hérédité pour le payement
des legs et des dettes passives. ■
Le premier mars 1782 , la dame Sobrier, veuve Dau
din, simple usufruitière, a vendu au sieur Capelle le
domaineTde V ern et, dépendant de la succession. C’est
ce domaine que fait l’objet de la contestation.
Rien de plus simple que les termes de la vente. La
dame veuve Daudin vend purement et simplement, en
s o n nom et comme chose a elle appartenante , avec toute
garantie, ce domaine, moyennant la somme de 21600 fr.,
dont le contrat porte quittance.
�( 3 )
.
'
Mais comment cette vente a - t - e l l e été consentië?
C ’est ce qui reste à développer ; ce qu’il a fallu enfin ;
dévoiler, puisque Capolle en a imposé la nécessité.1
Le jeune Daudin, héritier .institué ,! âgé alors seule-’;)
ment de 19 ans, avoit conçu la passion la plùsl violente^
pour celle qui est aujourd’hui son épouse. Cette pas
sion fut encore irritée par l’opposition d’une mère ,
qui ne désiroit pas voir sitôt l’établissement de son
fils. Il résolut de vaincre tous les obstacles , et de con
tracter, en pays étranger, un mariage auquel il ne
voyoit point de possibilité en France. Pour exécuter
ce projet, il falloit des ressources pécuniaires : il s’adressa
au sieur Capelle.
I^e hasard l’avoit mieux servi qu’il ne pouvoit espérer.
La dame veuve Daudin, dans un moment où ses infir
mités ne lui permettoient pas d’a g ir, pleine de con
fiance dans un fils unique qu’elle aimoit aveuglément,
lui avoit confié des signatures en blanc. Muni de ces
signatures, il en fit confidence au sieur Capelle , et lui
proposa en même temps de lui vendre le domaine de
V ern et, domaine contigu à une autre de ses propriétés,
et par conséquent singulièrement à sa bienséance.
Capelle n’eut garde de laisser échapper une si belle
occasion.
Il fut d’abord incertain s’il prendrait un acte de loca-.
terie perpétuelle pour éviter le droit de lods , ou s’il
prendvoit un acte de vente : il s’arrêta à ce dernier parti.
On fut bientôt d’accord sur le p rix ;' Capelle le fixa
lui-meme à 13800 f r ., cheptel et grains tout compris.
�t r4 )
!Mais comment 'rédiger l’acte de vente ?
Il ne pouvoit acheter du fils, parce qu’il étoit mineur.
La mère a v o it ,à la vérité , pouvoir par le testament
de vendre ; mais le pouvoir n’étoit donné qu’à la charge
de l’emploi,- : '
• Capelle ne trouva d’autre expédient, que de faire
consentir la vente purement et simplement par la mère,
et en son nom.
-C e point arrêté, il délibéra s’il prendroit une vente
sous seing privé , à l’aide d’une des signatures en blanc.
Il y trouva trop d’inconvéniens ; la vente sous seing privé
ne lui donnoit ni hypothèque ni date contre des tiers.
Il pensa qu’il ne pouvoit contracter avec sûreté que
par acte devant notaire.
- Mais ici même les obstacles augmentoient. Comment
parvenir à une vente pardevant notaire ? Il falloit que
la mère compaïût elle-même. On ne pouvoit la sup
pléer par l’interposition d’une autre personne : les suites
en auroient été trop dangereuses. On ne pouvoit la
suppléer non plus par les signatures en blanc ; le notaire
ne s’y seroit pas prêté. Il falloit donc que la mère se
présentât. Mais comment l’y déterminer ? Comment la
déterminer à vendre ce qu’elle savoit ne pas lui appar
tenir? à vendre 13800 fr. , cheptel et grains, un domaine
qui-valoit près du double ?
,
f .
!■D ’un autre côté , la ven te, même consentie p arla
nière en son nom , pouvoit assurer les deniers, mais
n’assuroit pas la propriété : nonobstant cette vente,
Gipelle n’étoit pas moins exposé à être évincé un jour
par le fils.
�( 5 )
Toutes ces difficultés furent aplanies*
Il fut convenu qu’on feindroit de porter le prix à
une somme beaucoup plus considérable , dont le contrat
porteroit quittance ; que Gapelle feroit des billets ou,
lettres de change, pour l’entier montant de la somme;
qui seroit énoncée en l’acte de vente : mais qu’en même
temps , et à l’instant de l’acte, le sieur Daudin remettroit
secrètement une quittance de l’excédant, et qu’il rempliroit à cet effet une des signatures en blanc étant en
ses mains. A u moyen de cette quittance, Capelle ne de
meurait effectivement obligé que pour 13800 fr.
La quittance délivrée , les billets représentatifs de
l’entier prix devoient être remis à la mère , des mains
de laquelle le fils se promettoit bien de les enlever ; ce
qui étoit facile par la confiance sans bornes de la dame
Daudin , qui n’avoit rien de iéservé ni de secret pour
lui. Les billets enlevés, Capelle devoit les acquitter jus
qu’à concurrence du prix convenu.
Il restoit une dernière précaution. Capelle n’entendoit avancer les deniers qu’autant qu’il auroit la pro
priété incommutable du domaine. Pour se mettre à
l’abri de toutes recherches de la part du fils , il falloit
imaginer encore un moyen.
Ce moyen fut de faire remettre , avant tout , par
le sieur Daudin , une ratification , avec la date en blanc,
qu’il rempliroit comme bon lui sembleroit, à l’époque
de la majorité : et comme il étoit encore indécis s’il
prendroit une vente pour un prix fixe et déterminé ,
ou une locaterie perpétuelle , il la fit générale. Elle est
conçue en ces termes ;
�( 6 )
« Je soussigné approuve et ratifie les actes que ma
« mère a consentis en faveur de M. Capelle , con« seiller , du domaine du Vernet et tout ce qui ea
« dépend , et promet le faire jouir en vrai propriétaire.
« Fait le
- 1
Signé Daudin de la
« Fabrie. » Il n’est pas indifférent d’observer qu’il n’est
pas d it , Fait double,
La- date a été depuis remplie. lia ratification est rap
portée aujourd’hui , à la date du 21 mars 1788. Il paroît
encore qu’il a été fait des altérations et des surcharges
sur plusieurs letti;es du corps de l’acte.
L e plan ainsi concerté et préparé , la mère se rendit
à Aurillac , et là elle consentit la vente dont il s’agit.
Par cette vente , elle vend en son nom , avec pro
messe de garantir , fo u r n ir et fo ir e valoir, au sieur
Capelle , acceptant, le domaine de V ern et, tel q u il
se poursuit et comporte, avec les bestiaux et outils
d'agriculture , ensemble, sur la récolte pendante par
racines , la quantité de 5o setiers de blé seigle , et le
quart de ce que la récolte pourra produire en sus des 5o
setiers , moyennant la somme de 21600 f r . , dont le con
trat porte quittance. En représentation du prix , Capelle
délivra des billets ou lettres decliange ; et Daudin, de son
côté , lui remit, en particulier, et à l’insu de la mère, la
quittance convenue , dont il avoit rempli une des signa-*
tures en blanc.
Iln e s’agissoit plus que d’enlever les billets ou lettres
de change. Daudin n’eut pas de peine à y parvenir ;
et ; au moyen de ce , il effectua le projet qu’il avoit
�( 7 )
conçu d’aller en Italie contracter l’union dont il faisoit
dépendre son bonheui’.
11 partit effectivement le n mai 1782.
La mère s’aperçut bientôt de l’enlèvement djs effets.
Elle rendit plainte devant le sieur Sistrières , lieute
nant général civil et criminel au ci-devant bailliage
de Vie. Il y eut des témoins entendus. Le fils ayant
ensuite fait la paix avec sa mère , cette procédure n’eut
pas d’autres suites.
Elle fit naître cependant un autre procès.
Le sieur Sistrières , seigneur ou se prétendant seigneur
du domaine de V ern et, éclairé par l ’information sur
le véritable prix de la vente , v o u lu t exercer le retrait
féodal. C a pelle craignant que Daudin ne fît une décla
ration contraire à ses intérêts , lui fit parler par un de
ses parens ; et ce fut à cette occasion que celui-ci lui
écrivit la lettre du 10 août 1783 , lettre dont Capelle a
cru pouvoir faire usage , et qu’on transcrira plus bas.
Cette instance a été pareillement terminée à l’amiable
par un acte du 5 mai 1789 , passé entx-e le sieur Sistrières
et Capelle. Il paroît que par cet acte Sistrières s’est
départi de sa demande.
Daudin, à l’époque de la vente , étoit, comme on l’a
déjà d i t , âgé seulement de 19 ans.
L e temps a amené la réflexion. Il n’a pas tardé à
reconnoître combien il avoit été lésé , combien on avoit
abusé de son inexpérience.
. •
Après avoir cherché inutilement à terminer ¿\ l’amia
ble avec le sieur Capelle, il a pris le parti de céder au
�( 8 : i
jsieur Desprats, par acte du 2 vendémiaire an 8 , tous
les droits qu’il pouvoit avoir résultans du testament
d’Etienne Descafîres , même les actions rescindantes et
rescisoires, moyennant le prix convenu entre eux , porté
dans l’acte à la somme de 6000 fr. seulement , et sous
la condition d’acquitter toutes les dettes et charges de
la succession. Par une clause particulière, il est dit qu’il
demeure convenu que Desprats pourra agir et exercer
les droits et actions cédés, au nom du cédant; à l’effet de
quoi le présent acte lui tiendra lieu de procuration pour
intenter audit nom toutes demandes , sans que ladite
procuration puisse être révoquée par le vendeur, comme
faisant partie de l’acte.
Cette vente et cession a été enregistrée le même jour,
2 vendémiaire , et transcrite au bureau des hypothèques
le i 5 du même mois,
1
En cédant ses droits , le sieur Daudin croyoit se
rédimer de tout procès : on va voir lo contraire,
Desprats ne tarda point à agir,
L e 4 du même mois de vendémiairo , et avant la
transcription, il fit citer Capelle, sous le nom de Daudin ,
comme il en avoit le pouvoir par l’acte , en conciliation
sur la demande qu’il se proposoit de former en désis
tement dudit domaine dont il jouissoit, est-il dit , en
vertu d’une vente surprise à la dame veuve Daudin,
Capelle comparut sur cette citation, par son fils , qui
répondit qu’il étoit d’autant plus étonnant que Daudin
l ’accusât d’avoir usé de surprise, qu’il ayoit lui-môme
approuvé et ratifié la vente.
La
�f 9>
La conciliation n’ayant pas eu lieu , Capellc crut
devoir agir de vitesse. Il actionna, le premier, Daudin ,
sous le nom duquel il avoit été cité au bureau de paix ,
devant les juges du tribunal de Saint-Flour, par exploit
du 8 brumaire suivant, pour voir dire qu’il seroit gardé
et maintenu dans la propriété et possession dudit do
maine , se voir faire défenses de l’y troubler , et se voir
condamner aux dépens.
Le 9 du même mois, Desprats obtint une nouvelle
cédule du juge de paix. Dans cette cédule , après avoir
rappelé la cession qui lui avoit été consentie par Daudin ,
il exposa qu’il avoit été convenu par ledit acte qu’il
pouiToit agir au nom de son cédant, à l’effet de quoi
l ’acte lui tiendroit lieu de procui’ation ; qu’il avoit en
conséquence cité, sous le nom dudit D audin, Capelle ;
mais que celui-ci ayant excipé d’une prétendue ratifica
tion , qui pouvoit faire naître des discussions entre e u x ,
il entendoit agir en son nom , et se subroger aux pour
suites encommcncées.
La conciliation ne réussit pas plus cette seconde fois
que la première.
. Le procès verbal de non-conciliation est du 16 bru
maire. Dès le lendemain 17 , Desprats fit assigner Capelle
au tribunal civil de Saint-Flour, et conclut par l’assigna
tion au désistement du domaine, avec restitution des jouis
sances et dégradations depuis l’indue détention.
Le i 5 iloréal, jugement contradictoire intervint, qui,
sans préjudice du droit et des moyens respectifs des par
ties , ordonna , avant faire droit , que dans la décade
Capelle seioit tenu de déposer au greffe du tribunal civil
33
�i* ..
( 10 )
la ratification du contrat de vente consentie par Daudin,
dont il avoit excipé à l’audience , sinon qu’il seroit fait
droit.
Capelle ne se pressa pas d’exécuter le jugement.
Les tribunaux civils ayant bientôt après cessé d’être
en activité, Daudin le fit assigner, par exploit du 23
thermidor an 8 , au tribunal d’arrondissement d’Aurillac , pour , faute par lui d’avoir déposé la ratification,
soit au greffe du tribunal civil de Saint-Flour, soit à
celui du tribunal d’A u rillac, conformément au jugement
rendu entre les parties, se voir condamner à se désister
du domaine, avec restitution des jouissances et des dé
gradations, h compter de l’indue détention ; sauf, est-il
d it, audit Daudin, à s’arranger avec celui auquel il
avoit vendu ses droits, c’est-à-dire, avec Desprats.
Par le même exploit, il fit citer Desprats pour assister
en la cause , et prendre telles conclusions qu’il aviseroit.
Le 7 fructidor, ’ Capelle prit enfin le parti de dépo
ser l’acte', il fut dressé procès verbal du dépôt , lor3
duquel procès verbal, le greffier, qui avoit le plus grand
intérêt, pour ne pas s’exposera être compromis lui-même,
de constater l’état de la pièce, telle qu’elle IuLétoit re
mise, vérifia et constata que dans le corps de l’acte, et
sur plusieurs lettres, il paroissoit qu’on avoit passé la
plume avec une encre plus noire.
Le 9 vendémiaire an‘9, nouvelle citation, aux mêmes
fins,’ par Daudin, tant à Capelle qu’a Desprats; citation
nécessitée par le rétablissement des avoués.
' Le 9 frimaire, demande en recours de Capelle contre
la veuve Daudin, demande qui a ensuite été renouve-
�5 oj
( II )
lce par autre citation du 29 messidor an 9 , après avoir
essayé la voie de conciliation ; formalité qui avoit été
omise lors de la première citation.
Le 25 ventôse an 9 , Capello a présenté requête à
l ’effet de faire interroger sur faits et articles, et Daudin,
et Desprats, et la dame veuve Daudin.
,
Comme il a cherché à tirer avantage de ces interro^
gatoires, il est nécessaire de les mettre en partie sous
les yeux du tribunal.
I
n t e r r o g a t o i r e
r
S’il
connoît
d e
D
a u d i n
.
r
des dettes actuellement existantes de
la
succession d’E tienn e Descaffïes ?
A répondu en conuoître, sans pouvoir dire à quelle
somme elles peuvent se monter.
D ’où provient sa créance sur sa mère , à raison de
laquelle il lui a fait souscrire des engagemens pour
une somme considérable , par actes des 7 octobre 1790
et 28 novembre 1792 ?
A répondu que les différens actes souscrits par sa
mère, en sa faveur, jusqu’à concui’rence de 47 à 48000 fr.,
eurent pour motifs des arrangemens de famille, étrangers
au sieur Capelle.
Pourquoi il n’a vendu que 6000 fr. l’entière succession
de DesçafFres ?
A répondu que l’événement de l’acquisition dont se
ehargeoit Desprats étant très-incertain , il n’en voulut
pas donner une plus forte somme ; que le répondant fut
>
3 2
�C ** )
obligé d’accepter à cause des besoins où il étoit en ce
moment, et qu’il seroit inutile de détailler ici.
Poui-quoi, malgré les ventes consenties par sa mère,
il n’a pas été payé des sommes qu’elle lui doit?
A répondu que ces ventes n’avoient pour objet que
des arrangemens de famille, et que ces ventes n’avoient
pas été faites dans l’intention de les opposer au sieur
Capelle.
Pourquoi il a vendu à Chaunac pour iooo fr. ses
créances mobilières, dont celles sur sa mère montent à
48000-fr. ?
A répondu que c’étoit pour des motifs d’arrangemens de famille, étrangers au sieur Capelle, et au procès
dont il s’agit.
S’il a payé les frais des ventes consenties à Desprats
et à Chaunac ?
A répondu que oui; mais qu’il avoit fait ces avances
pour leur compte.
Si le 2 vendémiaire an 2 il n’étoit pas créancier
du sieur Desprats d’une somme - considérable ?
A répondu que depuis plus de 10 ans il a fait des
affaires avec le sieur Desprats ; qu’ils ont été débi
teurs et créanciers mutuels ; mais qu’il ne se rappelle
pas si à cette époque il étoit créancier ou débiteur.
I
n t e r r o g a t o i r e
de
D
e s p r a t s
.
Si à l’époque de la vente qui lui fut consentie par
Daudin , il n’avoit pas connoissance que Capelle avoit
acheté depuis long-temps le domaine de Vernet ?
�3o y
^ 13 ^
A répondu avoir ouï dire que Capelle jouissoit de
ce bien en vertu d’un acte n u l, comme ne l’ayant pas
acquis du véritable propriétaire.
S’il connoissoit quelques dettes passives de la succes
sion d’Étienne Descafïïes ?
A répondu «voir ouï dire qu’il y avoit des dettes
passives -, mais qu’il n’en avoit point de connoissance
paria ite.
S'il avoit payé les frais de vente ?
A répondu que Daudin eu avoit fait les avances, et
qu’il les lui avoit remboursées.
Si à cette époque il ne devoitpas à Daudin une somme
considérable ?
A répondu qu’il ne lui devoit pas grand’cliose ;
qu’ayant des comptes courans avec lui depuis longues
années , et se trouvant tantôt débiteur , tantôt créancier 3
il ne pou voit fixer de combien il étoit débiteur.
Pourquoi il avoit tardé jusqu’au i 5 vendémiaire à
faire transcrire la cession ?
A répondu qu’il est libre à tout acquéreur de faire
transcrire quand il le juge à propos.
In t e r r o g a t o ir e
de
la
dame
veuve
D
a u d in
.
.
Pourquoi, à différentes époques, elle a souscrit des
actes qui la constituent débitrice de son fils de sommes
considérables ?
A répondu que c’est pour certains arrangemens et
conventions de fumille , dont elle ne doit compte à per
sonne.
-v
�Cwt>
V ; .•
( 14 )
Si elle sait que son fils a vendu k Desprats la suc
cession dont dépend le domaine de Vernet qu’elle vendit
au sieur Capelle le I er. mars 1782?
A répondu qu’elle n’a aucune connoissance des affaires
que fait son fils.
Si elle sait qu’il a vendu ses créances mobilières à
Chaunac ?
A répondu de même.
Si elle a paj^é des legs portés au testament d’Etienno
Pescaffres ? si elle a payé des dettes pour la succession de
son mari ?
A répondu que oui.
A quelles sommes peuvent se monter les difFérens
payemens ?
A répondu que les ayant faits à différens termes et
époques , elle n’en a pas conservé la mémoire.
Si Cliaunac lui a fait notifier la vente que son fils lui
a faite de ses créances mobilières?
A répondu que oui,
Pourquoi, après avoir vendu ses biens , elle doit encore
des sommes considérables à son fils et à d’autres personnes ?
A répondu que les circonstances de la révolution lui
ayant occasioné des dépenses et des sacrifices considé
rables , elles ont absorbé les fonds, et l’ont mise dans
l ’impossibilité d’acquitter sa dette.
A la suite de ces interrogatoires, et le 8 floréal an 9,
Capelle a présenté une requête'contenant ses premières
défenses. .Dans cette requete il commence par rendre
compte du testament d’JËtieune Descaflrcs. il rappelle
�( i5 )
le pouvoir donné par ce testament à la mère de vendre.
Il explique après comment la vente a eu lieu.
« Les legs, dit-il , ou les dettes reconnues par le
« testament , montant à i 58 oo f r ., en ce non compris
« les autres dettes et charges de la succession , tout le
« mobilier étant légué à la veuve, il étoit indispensable
« de vendre des immeubles pour liquider l’hérédité ;
« c’est sans doute ce qui détermina celle-ci à vendre.
« Daudin devoit connoître la destination nécessaire de
« cette vente dont il fu t nn des négociateurs. Devenu
« majeur il ratifia volontairement la vente, par acte du
« 21 mars 1788 ; d’autre part, la veuve Daudin paya
« les legs et dettes d’Etienne Descaffres.
ce A ussi, ajoute-t-il, r a s s u r é par le pouvoir que le
a testament, dont il avoit la connoissance, donnoit à
« la veuve Daudin , par l’emploi utile du prix de la,
« vente, et par une ratification que rien ne rendait
cc nécessaire, il se croyoit propriétaire irrévocable du
« domaine, lorsqu’il s’est vu citer en désistement. »
Il expose ensuite que Daudin , Desprats et la veuve
Daudin ont concerté ensemble le projet de lui enlever
une propriété qu’il avoit payée le double de sa valeur ;
qu’ils ont concerté le projet de lui enlever même tout
espoir et toute ressource de garantie sur les biens de la
dame Daudin , en simulant une infinité d’actes pour
faire disparoître sa fortune.
De là il passe au récit de la procédure.
Venant aux moyens, il a soutenu d’abord que la mère
avoit pouvoir de vendre , que le testateur avoit pu va
lablement donner ce pouvoir.
�Voici comment il s’exprime :
« Il est constant aujourd’h u i, par le rapport du tes
te tament d’Etienne Descaffrcs, du 3 avril 1773, que
« le sieur Daudin est son héritier, et conséquemment
« que le domaine de Vernet lui a appartenu. Mais le
« même testament ne lui a fait passer la succession que
« sous la condition expresse portant plein et entier pou
ce voir à la veuve de vendre pour le payement des dettes
« et legs : la clause est conçue uno contextu avec celle
ce qui renferme l’institution; elles sont indi visibles. Ce
ce pouvoir , oi’dinaire dans les testamens, n’a rien de
ce contraire ni aux bonnes mœurs, ni aux bonnes lois,
ce Les lois i re. et 3e. au Code, Quando decreto opus non
ce est , le consacrent d’une manière expresse.
ce La mère Daudin n’a pas mésusé de ce pouvoir : elle
ce vendit 21000 fr. un domaine qui ne valoit que les
e< deux tiers; elle fit payer la convenance et la fantaice sie : elle a employé le prix ,à l’acquit des dettes et
ce des legs. »
Il ajoute qu’on le dispensera, sans doute , de rapporter
les quittances des créanciers et légataires : la collusion
de toute la famille Daudin étant trop évidente, pour no
pas croire qu’on a cherché, par toutes les précautions
imaginables, à lui en dérober la connoissance ; que dans
le fait on ne connoît aucun créancier; que le conserva
teur des hypothèques a constaté , par son certificat du
ir pluviôse an 9 , qu’il n’y avoit aucune inscription sur
les biens d’Etienne Descafl'res ; qu’il y en a une, h la vérité,
de 10000 francs sur les biens de la dame ^Daudin par
Gabriel Chaunac a en vertu du testament du 3 avril 1773,
qui
�( 17 )
qui paroît être celui d’Etienne Descaffres ; mais qu’indé
pendamment qu’on ne voit pas qu’il soit rappelé dans le
testament, on voit encore moins ce qu’il auroit à de
mander à la veuve Daudin , qui riétoit pas héritière
& Etienne Descaffres.
Il a soutenu que la vente étoit encore irrévocable
comme ayant été ratifiée par le fils.
Défendant particulièrement à la demande de Desprats,
il a dit que la cession à lui consentie , datée du 2
vendémiaire an 8 , étoit nulle , comme frauduleuse et
simulée ; qu’au surplus cette cession n’avoit pu lui trans
mettre plus de droits que n’en avoit son cédant.
Il ne s’est pas borné là : il a soutenu que la ratification
faite par Daudin , en majorité , ne le rendoit pas seule
ment personnellement non-recevable a pi'ovoquer le dé
sistement , mais le î-endoit encore garant de la demande
de Desprats ; qu’il n’avoit p u , au mépris de cette rati
fication , vendre le même objet à un autre , et qu’il
devoit être condamné , même par corps, comme stellionataire , à faire cesser la demande de Desprats , ou en
ses dommages-intérêts.
Il a insisté sur la demande en recours par lui formée
contre la veuve Daudin ? qu’il a dit dans tous les cas ne
pouvoir être contestée.
11 a soutenu enfin que tous les actes passés , soit par
Daudin, soit par la dame veuve D audin, et par eux si
mulés , en fraude de la garantie, actes dont il a fait
l’énumération , étoient nuls.
Il a conclu , en conséquence , à ce que , joignant tou
tes les demandes , faisant droit sur le tout j)ar même
G
�(i8)
jugement : en ce qui touchoit Daudin , il fût déclaré
purementetsimplement non-recevabledans sa demande ; en
ce qui touche Desprats , que la vente du 2 vendémiaire an
8 fût déclarée nulle, frauduleuse et simulée ; subsidiairement que Desprats fût déclaré purement et simplement
non-recevable dans sa demande ; et où , soit Daudin , soit
Desprats parviendroient à leurs fins , faisant droit sur la
demande en garantie formée contre la dame Sobrier, et
sur celle qu’il formoit présentement contre Daudin ,
ils fussent condamnés , et Daudin par corps , comme
stellionataire , à le faire jouir du domaine , sinon à lui
en payer la valeur , ainsi que le montant des construc
tions et améliorations qu’il y avoit faites , à dire d’ex
perts , à lui rembourser les frais et loyaux coûts de la
vente , et aux dommages-intérêts résultans de l’éviction ,
suivant l’estimation qui en seroit faite par les mêmes
experts , et en tous les dépens.
Desprats , Daudin et la dame veuve Daudin ont ré
pondu chacun à cette écriture.
Desprats a soutenu la sincérité de la cession. Il a d it,
au surplus, que Capelle la contestait sans objet ; qu’en
effet , ou la vente consentie à C apelle étoit valable ,
ou elle ne l’étoit pas. Que si elle étoit valable , peu
importoit que Daudin eût revend u ou non , et que la
seconde vente eût été transcrite ou non ; que Capelle
n’en conserveroit pas moins la propriété , en vertu de
la première vente q u i, étant antéi’ieure à la loi de b ru
maire an 7 , n’étoit point sujette à la transcription pour
la transmission de la propriété : que si , au contraire ,
la vente faite à Capelle n’étoit point valable, peu lui
�5 /3
( 19 )
importait d’être obligé de se désister envers Daudin ,
ou envers celui à qui Daudin avoit vendu.
Daudin a répondu qu’on ne pouvoit lui opposer la
vente consentie par sa mère -, que cet acte lui étoit étran
ger : qu’à la vérité elle avoit , par le testament , pou
voir de vendre ; mais que , d’une part, le testateur n’avoit
pu donner ce pouvoir ; e t, d’autre p art, que le pouvoir
avoit été donné à la charge de l’em ploi, et que C apelle
étoit loin d’établir, ou de pouvoir établir que le prix
eût été employé conformément à la volonté du testateur :
Qu’on ne pouvoit lui opposer davantage la ratification :
qu’à la vérité elle paroissoit aujourd’hui à la date du 2
mars 1788 , époque à laquelle il avoit atteint la majo
rité ; mais qu’il avoit été facile à Capelle de remplir
comme il avoit voulu la date qu’il avoit eu soin de
laisser en blanc ; date si visiblement remplie après coup,
que les chiffres et m ot, 21 mars 1788 , étoient écrits
d’une plume , d’une encre et d’une main différentes ;
que pour affoiblir le contraste on avoit eu la précaution
de repasser la plume sur les lettres du corps de l’acte ,
et de leur donner la teinte de l’encre de la date ; mais
que malheureusement la plume de la date s’étant trouvée
plus fine que celle qui avoit servi à écrire le corps de l’acte,
avoit laissé à découvert une partie de l’ancienne écriture,
en sorte que sur la même lettre il paroissoit deux encres :
Que cette ratification étoit nulle à tous égards ;
Comme donnée en minorité ;
Comme vague te générale, s’étendant indistinctement
à tous actes quelconques que la dame Daudin auroit pu
souscrire 5 tandis qu’il est de principe que toute approC 2
/ilí
�C 20 )
bation, pour être valable, doit être faite en connoissance
de cause , avec laconnoissance du contenu en l’acte que
l’on entend approuver et confirmer ;
Comme n’ayant pas été faite double.
... Quant à la demande en recours et dommages-intérêts
que Capelle avoit imaginé de former contre lui, il a dit
qu’il n’y en avoit jamais eu de plus ridicule ; qu’il n’y
«voit de sa part ni stellionat, ni fraude; que c’étoit lui
au contraire qui réclamoit contre la fraude. Il a au sur
plus offert, comme il l’avoit toujours fait, de faire rai
son de la somme de 13800 fr. , payée effectivement par
le sieur Capelle, ou de la compenser, ensemble les m-térêts, avec la restitution des fruits ou dégradations.
• La veuve Daudin a défendu aussi de son côté a la de
mande en garantie dirigée contre elle. Sa défense a été
simple ; elle a soutenu Capelle non - l’ecevable, comme
payant eu connoissance du vice.de l’acte, et non-seule
ment comme en ayant eu connoissance, mais comme
ayant coopéré la fraude.
Le 7 ventôse an 10 , nouvelle écriture de Capelle.
Dans cette écriture, il a commencé, comme de rai
son , pnr son apologie ; il s’ést efforcé d’écarter les faits
de dol et de surprise qu’on lui imputoit.
S’il faut l’en croire , il ignoroit par quel motif la
dame Daudin s’étoit déterminée à lui vendre le domaine
dont il s’agit. Il a assuré qu’il avoit acquis, parce que
cette acquisition lui convenoit; qu’il s’étoitpeu inquiété
de savoir quels étoient les titres de propriété de celle
:qui lui vendoit, parce qu’elle avoit une fortune suffi
sante pour le garantir; que le prix avoit été fixé ¿\
�3 / /
( 21 )
zi6oo f r ., et paye comptant. II a dit qu’il falloit'toute
l’imagination de Daudin pour jeter de l’odieux sur une
négociation aussi simple ; que Daudin avoit cru se ren
dre intéressant en s’accusant d’avoir surpris à sa mère
des blancs seings, pour donner le moyen de réduire la
vente au prix seulement convenu, mais que le fait est
invraisemblable; que s’il avoit eu des blancs seings, il
n’auroit pas eu besoin de combiner une intrigue aussi
compliquée ; qu’il auroit eu sur ,les billets de la mère
tout l’argent nécessaire à son projet de voyage; que
d’ailleurs, dès que le prix de la vente étoit payé comp
tant , que. le contrat même portoit quittance, une quit
tance séparée, adaptée à l’un des blancs seings , n’au
roit pu avoir aucun effet ; que pour parer à cette ob
jection, Daudin avoit supposé que le prix avoit été
payé en billets, mais que pour éviter une invraisem
blance il étoit tombé dans une autre; que cette quit
tance auroit été datée et donnée avant ou après la vente.;
.que donnée avant, elle n’ auroit. été d’aucune valeur,
puisque les billets auroient été postérieurs; que si elle
■eut été post-datée, l’acquéreur ne sc serait pas mis à la
merci du vendeur qui, après s’être emparé du billet.,
«aiiroit pu protester contre la quittance, et la faire an.imlier ; que l’on ne pouvoit pas supposer une pareille
imprudence; que l’embarras de Daudin pour donner un
«mploi à ces blancs seings, étoit te l, qu’ il ne sav-oit pas
dire s’il eu avoit fait un billet, une quittance ou une
«contre-lettre; qU(. le SPU{ -fuit qui paroissoit être v r a i,
«étoit celui de l’enlèvement commis par Daudin de l’ar
gent que sa mère avoit reçu du prix de la v e n t e ^
�'«
(
/
que la mère avoit aussitôt porté plainte qui n’avoît
pas eu de suites, Daudin ayant su à son retour dés
armer sa mère ; mais que la plainte et la réconciliation
étoient étrangères à celui qui avoit acquis de bonne foi et
payé comptant le domaine ; qu’il étoit vrai encore que
le sieur Sistrières, lieutenant général civil et criminel,
devant qui la plainte avoit été portée, et les témoins
entendus , avoit pris occasion de là pour former une
demande en retrait, mais qu’il s’étoit désisté par traité
du 5 mai 1789; qu’il étoit étonnant que Daudin cher
chât à l’inculper, après avoir été le premier à lui ren
dre , à l’occasion de ce môme procès , toute la justice
qu i lui étoit due. Ce sont ses expressions.
A l’appui de cette dernière assertion, il a produit et
fait signifier trois lettres.
Une première du 28 mars 1782, une seconde du 10
août 1783, dont on a parlé plus haut, sans songer aux
inductions qui en l'ésulteroient contre lui-même.
En voici les termes : « Monsieur, le curé de Lyon m’a
« marqué que je ne m’étois pas assez e x p liq u é au sujet
« des affaires : voici plus clairement ce qui eu est. Lors« que je fus arrivé, je subis interrogatoire-pour savoir
c< ce que f a i reçu de vous. Sistrières croyoit et croit
a encore que vous n’aviez fait de billets que pour
« 14000 fr, J’ai répondu que vous en aviez fait pour
« le contenu au contrat, ce qui l’interloqua fort dans
« ce temps. Quoi qu’il en soit, je no vous nuirai jamais,
« parce que vous m’avez payé ce que vous m’avez promis,
« Si Sistrières fait travailler a Riom cette affaire au nom
« de ma m ère, elle l’ignore. Je vous prie de me mar
�te quer ce qu’il faut que je lui fasse faire pour ne pas
« être compromis dans les discussions que Sistrières
« a avec vou s, et que je crois très-mauvaises. A u prê
te mier jour, j’aurai l’honneur de vous v o ir , et nous con« férerons plus librement. »
1
Et une troisième, du 26 mars 1785, à l’occasion d’une
censive que le seigneur de Valadi réclamoit sur partie
du même domaine de V e rn et, ainsi conçue :
« Monsieur, je n’ai reçu votre lettre que ces jours
« derniers. Je me hâte de vous marquer que j’ai demandé
« à ma mère si elle a jamais payé de la rente à M. de
« Valadi. Elle m’a dit qu’elle avoit entendu dire que
« M . Descaffres lui en donnoit ; mais qu’elle ne sait
« pas si c’est du domaine de Vernet ou de Raulhac,
« car on nous en demande aussi pour Raulhac. Nous
« n’avons jamais vu de reçu dans les papiers de mon
« oncle pour l’objet dont il s’agit. Tâchez de terminer
« cela à votre profit : je serai dispensé par là de payer
« une vingtaine d’écus d’arrérages. Je n’ai pas trouvé
« l’échange des héritages appartenans à mon oncle et
« à M . de Sistrières. Vous ne devez pas douter que
« je ne voulusse vous obliger ; mais ce papier - là
« s’est sans doute perdu à la mort de mon oncle.
« L ’oncle Sobrier doit arriver dans peu du Querci;
« peut-être me donnera-t-il des renseignemens : je vous
« en lerai part. »
1
Il a prétendu qu’il résultoit de ces lettres , et une
nouvelle approbation de la vente, et la preuve que
X)audm 11 avoit imaginé qu’après coup , et pour le besoin
de la cause , toutes les imputations qu’il s’est permises.
�C 24 )
De là passant à la discussion, il a développé, et les
moyens qu’il avoit déjà fait valoir, et ceux que son
imagination lui avoit suggérés depuis.
- Après avo ir, dans sa requête du 8 floréal an 9 , prin
cipalement insisté sur le testament, il a imaginé tout à
coup de prétendre qu’il étoit nul.
Il a inféré de cette nullité que la propriété du
domaine avoit passé, après la mort de DescaiTres, non
sur la tête de Daudin, mais sur celle de la m ère, plus
proche d’un degré ; que celle-ci avoit vendu sa propre
chose ; qu’elle seule pourroit réclamer, et qu’elle ne
réclamoit pas ; que Daudin et Desprats étoient sans
qualité.
Il a fondé la nullité sur ce que de dix tém oins, y
compris le notaire, qui y avoient assisté, il falloit retran
cher les deux derniers surnuméraires, ces deux témoins
n’ayant assisté qu’à la lecture, et non à la rédaction ;
qu’il falloit encore retrancher Etienne Terisse , comme
n’ayant signé ni été requis de ce faii’e : ce qui réduisoit le nombre à sept, y compris le notaire , tandis
qu’il en falloit un de plus, le testateur étant privé de
Ja vue.
Il a insisté avec complaisance sur cette nullité.
Revenant ensuite subsidiairement à ses premières
défenses, il a dit : Qu’en supposant même la validité
du testament, la vente ne seroit pas moins inattaquable
d’après le pouvoir donné à la mère de vendre : qu’à
ja vérité il ne rapportoit pas les quittances des créan
ciers et des légataires constatant l’emploi, conformément
viu Vfïî.u du testateur j mais qu’il étoit d’abord trop é v i
dent
�( 2 5 )
dent qu’on avoit pris dans la famille Daudin toutes
les précautions imaginables pour lui en dérober la connoissance, et qu e, d’un autre côté, il étoit hors de doute,
et prouvé par les réponses mômes consignées dans les
interrogatoires, que les dettes et les legs avoient été acquit
tés ; que l’emploi étoit ainsi justifié par le fait.
Il a dit que dans tous les cas la î-atification auroit cou
vert le vice de l’acte ; que cette ratification operoit
seule une fin de non-recevoir invincible contre la ré
clamation de Daudin -, qu’en vain on cherclioit à en
faier rapporter la date à la date môme de la vente,
c’est-à-dire du i et. mars 1782, pour en induire qu’elle
avoit été souscrite en minorité ; que quand cela seroit,
il n’en seroit pas plus avancé *, qu’il auroit du toujours
se faire relever dans les dix ans de la majorité ; qu’en
vain on objectoit encore qu’elle étoit conçue en termes
généraux ; qu’aucune loi n’exigeoit qu’elle fût spéciale ;
qu’il suiïisoit qu’il fût constant que celui qui ratifioit
avoit eu connoissance de l’acte ; qu’aucune loi n’exigeoit, non plus, que la ratification fût faite double ; que
Daudin n’avoit pas fait un nouveau contrat, qu’il avoit
consenti simplement que le premier eût son effet-, qu’une
pareille approbation pouvoit ôtre faite de toutes sortes
de manières , même par une simple lettre ou une
quittance,
A ces deux moyens résultans, et du pouvoir donné
par le testament , et de la ratification , il en a ajouté un
troisième : la prescription. Il a dit qu’en pays de droit
écrit il étoit constant qu’on prescrivoit avec titre, p^r
dix ans entre présens , et vingt ans entre absens ; qu’ici
D
�( 2 6 )
il avoit titre et possession de plus de dix ails , déduction
faite même du temps de l’absence de Daudin ; qu’ainsi
sous cet autre rapport Daudin étoit encorenon-recevable.
Relativement à Desprats , il a soutenu que toutes les
circonstances concouroient à prouver la simulation de
la cession du 2 vendémiaire an 8.
i°. L ’antidate évidente. Comment, a-t-il d it, si la ces
sion avoit été véritablement à la date du 2 vendémiaire,
le premier acte hostile , la citation devant le juge de paix,
qui est du 6 vendémiaire, postérieure de 4 jours , auroit-elle été au nom de Daudin ? Comment cette cession ,
qu’on a été si pressé de faire enregistrer , puisqu’elle
est enregistrée du même jour , n’a-t-elle été transcrite
que le i 5 ? N’est-il pas évident qu’on a profité de la
communication donnée au bureau de paix de la ratifi
cation , de la remarque qu’on a faite qu’elle n’étoit point
enregistrée , pour aviser au moyen de la rendre sans
effet ■
, qu’on a alors imaginé la cession ; qu’on a profité
du délai que la loi donne pour l’enregistrement des actes,
pour en faire remonter la date au 2 vendémiaire ,
et qu’en même temps, pour obvier à l’objection résultante
de la citation donnée, postérieurement à la cession , au
nom de Daudin , on a inséré da,ns l’acte la clause que le
cessionnaire pourroit agir au nom du cédant?
2°. La qualité des parties. Daudin créancier de
Desprats , et parla ayant un empire absolu pour le faire
condescendre à ce qu’il désireroit.
30. La succession entière vendue 6000 fr. ,. tandis que
le domaine de Vcrnet avoit été vendu, seul, 21600 fr. ,
et de l’aveu même de Daudin , au moins 13800 fr. ,
�( *7 )
et le domaine de Raulhac, vendu auparavant, 10177 fr.
40. La multiplicité des actes passés par la mère , par
le fils , pour dérober le gage de la garantie ;
5 °. L ’impossibilité d’alléguer la moindre cause de cette
vente précipitée , autre que celle de rendre sans effet
la ratification ;
6°. L ’avance faite par le vendeur des frais de cette
cession, ainsi que d’autre vente , consentie à Cliaunac
à la date du même jour 2 vendémiaire.
Il a conclu de la réunion de toutes ces circonstances ,
qu’il ne pouvoit y avoir de doute sur le concert de
fraude.
Il a observé , au surplus , que les mêmes moyens qui
militoient contre la réclamation de Daudin , militoient
contre celle de Desprats.
Quant à la demande en garantie , par lui form ée,
contre Daudin comme stellionataire , et encore quant
à la demande en garantie solidaire formée , tant contre
la dame Daudin , que contre Daudin lui-même, et sur
la nullité des actes par eux passés en fraude de cette
même garantie , il s’est borné à persister dans ce qu’il
avoit précédemment dit.
Tels sont en analise les moyens que Capelle a fait
valoir dans sa requête du 7 ventôse an 1 0 , et auxquels
il a donné le plus grand développement.
Daudin et Desprats y ont répondu. Ils ont établi
quant au testament, d’une p a rt, qu’il étoit valable, et
de l’autre , que Capelle n’étoit pas recevable à l’attaquer ;
qu’il ne pouvoit l’attaquer, ni comme exerçant les droits
de la veuve Daudin sa venderesse , puisque celle-ci
D a
�^ 28 ) : l’avoit approuvé et exécuté , ni de son propre chef,
puisqu’il l’avoit approuvé lui-même.
Quant à la prescription de dix ans, qu’il ne suflisoit
pas d’avoir titre; qu’il falloit encore titre et bonne fo i;
que de plus, si l’on déduisoit, et le temps de l’absence ,
et le temps pendant lequel la prescription avoit été
suspendue par les nouvelles lo is, il ne s’étoit pas écoulé
le temps requis pour cette espèce de prescription ; qu’enfin'
l’usure ne se prescrivoit pas.
La cause en cet état portée à l’audience du 25 thermi
dor an 10, est intervenu, sur les plaidoiries respectives
des parties, un jugement qui a ordonné qu’il en seroit
délibéré.
Avant le jugement sur délibéré , et le 20 brumaire
an 11 , Daudin présenta requête par laquelle il de
manda. , sous réserve de ses moyens de nullité contre la
ratification , et subsidiairement seulement, qu’il lui fût
donné acte de ce qu’il reconnoissoit l’écriture du corps
de la pièce , ainsi que la signatux-e , pour être de sa
m ain, et désavouoit avoir écrit le mot et les chiffres 21
mars 1788; qu’en conséquence il fût procédé à la véri
fication de la date de l’acte.
L e 4 pluviôse, autre r e q u ê t e aux mêmes fins.
Daudin conclut de nouveau à ce qu’il soit ordonné
que par experts convenus ou nommés d’office il soit
procédé à ladite vérification; lors de laquelle opération
ils vérifieront et constateront,
10. Si le caractère de l’écriture du corps de la pièce
et de la signature D a u d in , étoit conforme à la manière
dont il ¿crivoit en 1788 , ou si au contraire il étoit plus
�(29).
S z y
analogue à la manière dont étoit formé le caractère de
son écriture vers 1782 , et à laquelle de ces deux épo
ques- paroissoit se référer davantage l’écriture du corps
de la pièce et de la signature ;
20. Si lors de la confection et rédaction de la ratifi
cation , la place destinée à recevoir la date ne paroissoit
pas avoir été laissée en blanc , et si ce blanc 11’avoit pas
été rempli après coup des mot et chiffres 21 mars 1788 *
et si ces mot et chiffres n’avoient pas été tracés avec
une plume , une encre et une main différentes ;
30. Si pour faire illusion à la vue 011 n’avoit pas
essayé de repeindre les lettres du corps de la pièce et de
la signature Daudin , avec la môme enci'e dont 011
s’étoit servi pour tracer les mot et chiffres 21 mars 1788 *
et si cette encre 11’étoit pas plus noire , et ue tranchoit
pas sur celle plus terne et plus ancienne du corps de la
pièce et de la signature.
Capelle ne manqua pas de combattre cette demande.
Il soutint qu’elle étoit nulle et contraire aux règles de
l’ordre judiciaire; d’une part, les juges ne pouvant sta
tuer que sur les fins et conclusions qui avoient été prises
lors du jugement qui avoit ordonné le délibéré ; e t ,
d’autre part, parce que Daudin reconnoissant la signature,
prétendant seulement que la date avoit été remplie après
coup, et d’une autre main, il n’avoit que la ressource
de l’inscription de faux.
II a ajouté que de plus elle étoit frustratoire ; que le
premier fait tenoit à une infinité de causes et de nuances
trop impossibles à vérifier , et 11e pouvoit présenter un
motif assez certain de décision ; que le second et troi
sième fuit étoient également inutiles à vérifier.
�( 3° )
Il importe de mettre sous les yeux du tribunal cette
dernière partie de la requête en date du 11 pluviôse :
voici comme il s’exprime, ou son défenseur pour lui :
« Il est fort inutile de faire vérifier si la date 21 mars
« 1788 est de la main de Daudin , si elle est écrite de
« la même main et encre que le corps de la pièce. Le
« contraire a été constamment avoué. Daudin n’avoit qu’à
« en demander acte.
*
« Puisqu’il est constant qu’elle n’a pas été . écrite par
« Daudin , mais par une autre main , avec une encre
« et tine plume différentes , il est bien constant aussi
cc que la date ne fut pas mise au même instant que
« Daudin écrivoit la pièce : deux mains ne pouvoient
« écrire à la fois sur le même papier. Il est donc encore
« fort inutile de faire vérifier un fait reconnu et physi« quement constaté. Mais de tout cela il ne résulte aucun
« moyen de faux. Il n’y a que Daudin qui puisse expli« q u er comment cette pièce a été écrite, puisqu’elle est
« de son fait. Il suffit à Capelle do dire qu’elle lui a été
« remise telle qu’elle est : il faudroit que Daudin prouvât
« que l’acte a été remis, ou v u , sans date, ou qu’il l’a signé
« en 1782,
/
« Le troisième fait est encore inutile à vérifier , et le
« résultat en est in d ifféren t, puisqu’il est impossible de
« dire par qui, et quand, ces prétendues surcharges ont
<
■
< été faites. La pièce étant du fait de Daudin , il est
« présumé l’avoir remise telle qu’elle est présentée, tant
« qu’il ne prouvera pas le contraire. Cette pièce lui a
« été communiquée a Saint—Flour du temps que la cause
« étoit pendante au tribunal civil. Le procès verbal du
<< greiliçr à qui elle a été déposée , dit bien que dans le
�&ZS
( 31 )
corps de l’acte, et sur certaines lettres , il paroît que
l’on a repassé la plume d’une encre plus noire. Mais
ce procès verbal ne constate pas le nombre de ccs
prétendues surcharges , ni l’identité de cette encre
avec celle de sa date, ni môme qu’il y en eût sur la
signature Daudin. C’est cependant alors que cela auroit
k dû être constaté , puisque la pièce cessoit d’être au
« pouvoir du sieur Capelle. »
A la suite de cette requête il a conclu à ce que Daudin
fût déclaré non-recevable dans sa demande en vérification;
et, faisant droit sur les nouvelles demandes qu’il formoit
par la présente requête , dans le cas où les conclusions
précédemment prises contre Daudin ne lui seroient point
adjugées , attendu que par l’effet des fraudes par lui pra
tiquées et par la dame Daudin sa mère , il étoit nanti
de tous les biens affectés à sa garantie, sans s’arrêter à ses
offres, lesquelles seroient déclarées courtes et insuffisantes,
il fût condamné solidairement avec la dame Daudin à lui
payer , i°. la somme de 21600 fr. , prix principal ,
ensemble les frais et loyaux coûts ; 2°. les réparations et
améliorations ; 3°* ^cs dommages résultans de la vente
par lui faite de la maison de son ancien domaine de
V ern et, ceux qui pourroient être dûs au fermier pour
la résiliation du bail , et ceux résultans de l’éviction.
Sur cet incident les parties furent renvoyées à l’au
dience ; et le i 5 du même mois de pluviôse, jugement
contradictoire intervint, qui joignit au délibéré.
Le délibéré a ensuite été prononcé le i 5 germinal.
Voici les dispositions du jugement :
Le tribunal, jugeant à la charge de l’appel, sans s’ar-
«
et
«
«
«
«
�( 3 0 .
rêter ni avoir égard à la demande formée par Çapelle en
nullité de la procédure faite postérieurement au juge
ment du délibéré du 25 termidor an 10 , non plus
qu’à la demande de Daudin en vérification de la ratifi
cation dont il s’agit, déboute les parties de leurs deman
des , dépens entre elles compensés à cet égard. Sans
s’arrêter pareillement aux demandes de Çapelle en nul
lité du testament d’Etienne Descaffres , et de la vente
du 2 vendémiaire an 8 , consentie par Daudin à Dcsprats, dont il est débouté , non plus qu’à la vente du
I er. mars 1782 , et à la ratification du 21 mars 1788 ,
lesquels deux actes sont déclarés nuls et de nul effet.,
ordonne que le testament dudit Etienne Descaffres , ainsi
que la vente faite à Desprats le 2 vendémiaire an 8 ,
seront exécutés suivant leur forme et teneur ; en consé
quence condamne lo sieur Çapelle à se désister, en faveur
dudit Desprats, du domaine du V ern et, dont il s’agit,
comme faisant partie de la succession dudit Descaffres,
dont ledit Daudin est héritier , avec restitution.des fruits
et intérêts d’iceux , à compter du jour de la demande ju
diciaire , ainsi que des dégradations , s’il y en a , et con
damne le sieur Çapelle aux dépens envers les sieurs
Daudin et Desprats.
Le môme jugement, faisant droit sur les demandes en
recours et garantie formées de la part de Çapelle, tant
contre la dame Daudin que contre son fils : en ce qui
touche la dame Daudin, la condamne à relever et ga
rantir ledit •Çapelle des condamnations, contre lui pro
noncées, avec intérêts et dépens; en conséquence, à
rendre et rembourser audit Çapelle la somme de 21600I.,
prix
�( 33 y
.
prix principal de ladite vente par elle consentie, frais et
loyaux coûts d’icelle, avec intérêts du tout à compter
du jour de la demande ; la condamne , en outre , aux
dommages-intérêts résultans de l’éviction, et à ceux ré
sultans aussi de la vente faite par Capelle de la maison
qu’il avoit à son domaine de V ernet, comme aussi à
ceux qui seront dûs au fermier pour la résiliation de son
bail, le tout avec intérêts légitimement dûs; et ce sui
vant l’estimation qui en sera faite par experts pris ou
nommés d’oflice, lesquels experts estimeront en même
temps les dégradations, réparations et améliorations qûi
peuvent avoir été faites par Capelle dans ledit domaine,
pour, après leur rapport fait et rapporté, être ordonne
ce qu’il appartiendra ; dépens , quant à ce, réservés.
En ce qui touche ledit Daudin; le même jugement le
condamne /suivant ses offres, à rendre et rembourser
au sieur Capelle , sur et en tant moins du prix- de la
vente, la somme de 13800 francs, ainsi1 que les ré
parations et améliorations suivant l’estimation qui en
sera faite par lesdits experts, avec les intérêts du tout*
légitimement dûs; sauf à lui à se régler avec Despratsj
à qui il a vendu, pour la valeur des améliorations dont
ce dernier doit profiter. Il ordonne ensuite que , sui*
la demande en garantie solidaire parformée Capelle
contre la dame Daudin et son fils , les parties con
testeront plus amplement pour leur être fait droit ,
ainsi qu’il appartiendra ; dépens, quant à ce , réservés-:
déclare l’assignation donnée par Capelle ù la dame Daudin,
le 9 frimaire an 9, ensemble la procédure qui en a été
lavsuite , nulle et de nul effet ; en conséquence , conE
�:•>
_ ( 34)
damne Capelle aux dépens faits à cet égard, et condamne
la dame veuve Daudin aux dépens envers toutes les
parties.
Daudin a interjeté appel le premier, par acte du 1 5
messidor, en ce que, sur la demande en garantie soli
daire, il a été ordonné une plus ample contestation.
Capelle a interjeté appel indéfiniment aux chefs qui
lui étoient gréveux, par acte du 27 messidor.
Quoique cet appel soit postérieur , et que sous ce
rapport il puisse être considéré comme appel incident,
néanmoins Capelle doit être regardé comme principal
a p p e la n t, puisqu’ il a succombé sur tous les points delà
contestation, à l’exception de celui à l’égard duquel il
a été ordonné que les parties contesteroient plus am
plement.
• La dame Daudin et Desprats se sont aussi rendus appelans.
Desprats, en ce que Capelle, condamné envers lui au
désistement, n’a été condamné à lu restitution des jouis
sances et des dégradations, qu’à compter du jour de la
demande, et non depuis l’entrée en possession.
Et la dame D audin, en ce qu’elle a été condamnée
à relever et garantir Capelle de toutes les condamnations
contre lui prononcées e n v e r s Daudin et Desprats , et en
tous les.dommages et intérêts résultans de l’éviction.
C’est sur ces appels que la contestation a été portée
en la cour.
Il: s’agit maintenant de développer les moyens, et
d’abord de justifier le jugement en ce qu’il a condamné
le sieur Capelle à se désister du domaine qui fuit l’objet
�. ( 35)
du litige. Il ne sera pas difficile, malgré tous ses efforts,
d’y parvenir.
M O Y E N S .
Il ne peut déjà exister de doute sur les faits : le sieur
Capelle a pris soin de se condamner lui-même.
Il a désavoué d’avoir traité avec le fils, d’avoir acheté
du fils.
Il a désavoué que le fils lui ait fait confidence des blancs
seings, et encore plus qu’il lui ait donné, à l’instant de
la vente, quittance d’une partie du prix , à l’aide de l’un
de ces blancs seings.
Il a désavoué que le prix ait été payé en billets, et
que ces billets , après l’enlèvement, aient été acquittés
au fils jusqu’à concurrence de la somme de 13800 fr .,
montant du prix convenu.
Voici comme il s’exprime , ou, si l’on veut, son dé
fenseur , bien avoué par lu i, dans sa requête du 7 ven
tôse an 10.
« Le sieur Capelle ignore pour quels motifs la dame
« Daudin se résolut à lui proposer la vente du domaine
« de Vernet. Cette acquisition lui cônvenoit, parce qu’il
« avoit un autre domaine dans ce village. Il s’inquiéta
« peu de savoir quels étoient ses titres de propriété \
« elle avoit une fortune capable de garantir et de rassu« rer l’acquéreur. Le prix fut convenu et arrêté à 21600 f.,
« et payé comptant. Il étoit exorbitant, mais il étoit
« celui de la convenance.
Plus bas : « Pour se prêter aux arrangemens de Dau« din yil faut supposer que le prix fût payé en billets, et*
E 2
»
�( 3« )
«
«
«
k
«
«
qu’avant la vente Daudin avoit donné quittance de
partie au moyen d’un des blancs seings....... Sur ce
premier point, il faut se référer à la vente authentique du I er. mars 1782, d’après laquelle les 21600 fr.
ont été payés comptant à la dame Daudin. Rien ne
peut détruire cette clause de la vente.
Quelques lignes plus bas : « Daudin poursuit son
« conte, et dit qu’il enleva les billets. Il est en con« tradiction avec la vente, qui fait foi que les 21600 f.
« ont été payés comptant ; ce qui exclut toute idée de
a soustraction d’effets. »
Et il a l’imprudence de produire lui-môme parmi les
lettres du sieur Daudin, une du 10 août 1783, qui le
confond.
Que dit cette lettre ?
« Sistrières croyoit et croit encore que vous n’aviez
« fait de billets que pour 14000 fr. J ’ai répondu que vous
« en aviez fait pour le contenu du contrat. »
Donc il avoit fait des billets ! donc il n’avoit pas payé’
comptant en numéraire ! donc il en a déjà imposé sur ce
premier point !
Suivons toujours la lettre.
« Je ne vous nuirai jamais. »
Donc il craignoit que Daudin ne lui nuisît ! et celuici ne pouvoit lui nuire qu’en déclarant la vérité. S’il
ayoit fait des billets pour l’entière somme de 21600 fr.,
ou qu’il eût véritablement payé cette somme, auroit-il
eu cette crainte ?
« Je ne vous nuirai jamais, parce que vous m’avez
«. payé ce que vous m’avez promis. »
�£3 \
C 37 )
Donc c’est au fils que les deniers ont été comptés
après l’enlèvement des billets !
« Vous m’avez payé ce que vous m’avez promis. »
Donc il n’a pas payé l’entier prix porté au contrat!
donc il y a eu concert de fraude entre lui Ct le fils,
pour tromper la mère !
Comment échappera-t-il à ces conséquences?
Comment n V t-il pas réfléchi qu’il produisoit contre
lui-même l’arme la plus victorieuse?
Se retranchera-t-il dans la vente? Dira-t-il que contre
un acte authentique on n’admet point de preuve testi
moniale , encore moins de simples allégations, qu’il
n’y a que l’inscription de faux?
Il ne s’agit point ici d’allégations; il ne s’agit point
ici de preuve testimoniale.
11 y a preuve é c rite , et preuve du fait même de l’adVersaire , puisqu’elle émane d’une pièce par lui produite.
La ratification n’est-elle pas une nouvelle preuve, et
qu’ il a traité avec le fils, et qu’il connoissoit le vice de
la vente ?
Il a désavoué , et il le falloit bien pour la cause,
qu’elle lui ait été remise ù l’époque de la vente, et que
la date ait été laissée en blanc. Il a soutenu que c’est en
majorité, et à l’époque du 21 mars 1788, que Daudin
a librement, et en pleine connoissance de cause, ratifié
la vente.
Et sur la vérification demandée, il a été obligé d’a
vouer que la date, les mot et chiffres 21 mars 1788,
etoiènt écrits d’une autre main , d’une autre plume et
d’une autre encre.
�( 30 ;
Il a été obligé d’avouer que ces. mot et chiffres n’avoient pas été écrits au même instant que le corps de
la pièce.
Il a été obligé d’avouer plus ; que les lettres du corps
de l’acte avoient été surchargées.
Ces aveux'ont été acceptés.
De ces aveux ne résu lte-t-il pas la preuve la plus
évidente des faits avancés par le sieur Daudin, du fait
principal, que la date a été laissée en blanc?
Indépendamment de ces aveux, l’inspection seule de
la pièce suflisoit pour le prouver.
Une remarque essentielle , c’est que l’écriture et l’encrç
de la signature , en même temps qu’elles diffèrent de
récriture et de l’encre de la date, concordent parfaite
ment avec celles du corps de l’acte.
La concordance avec le corps de l’acte prouve que
le corps de l’acte a. été écrit et qu’il a été signé uno
contextu.
La différence avec la date prouve qu’elle a été mise
ex intervallo , et lorsque l’acte étoit déjà signé.
On d it , lorsque Vacte étoit déjà signé : e t , en effet,
si la signature avoit été mise après l’insertion de la date,
de deux choses l’une ; ou elle auroit été mise au même
moment que la date, et alors l’encre de la signature
auroit concordé avec celle de la date , ce qui n’est pas;
ou quelque temps après, et alors on conçoit que l’encre
de la signature aijroit pu être différente de celle de la
date , mais elle auroit été plus différente encore de celle
du corps de l’acte, avec laquelle cependant elle con
corde,
�332
( 39 )
,
.
.
Il est donc évident, par l’inspection de la pièce, indé
pendamment des aveux arrachés au sieur Capelle par la
crainte de la vérification , que la date a été mise après
coup ; que lorsque l’acte a été signé , il n’étoit point
revêtu de sa date; que par conséquent la date a été
laissée en blanc.
*
Ce fait une fois constant, il doit demeurer également
pour constant, que la ratification a été consentie, non
en majorité , mais en minorité.
Que Capelle explique autrement à quelles fins la date
aurait été ainsi laissée en blanc ! qu’il explique com
ment Daudin, après avoir écrit le corps de l’acte , n’auroit pas écrit en même temps la date! n’avoit-il'pas
la force d’écrire quelques caractères de plus ?
Dira-t-on qu’après avoir écrit l’acte , et avant de lui
donner son complément par la date, il a voulu prendre
encore le temps de réfléchir ; qu’en conséquence Pacte
a demeuré en simple projet ; que- s’étant ensuite déter
miné , on a mis la date ?
Mais alors auroit-il signé ? Signe-t-on un acte avant
qu’il soit parfait? N’auroît-il pas remis à signer, comme
il remettoità écrire la date? ou, s’il vouloit tant,signer,
he pouvoit-il pas écrire , dater et signer , sauf à remettre
l’acte quand bon lui semblerait ?
Comment ensuite la date se rencontreroit-elle, nonseulement d’une autre plume et d’une autre encre,
mais encore d’une autre main ?
Capelle n’a garde de dire que la ratification lui a été
remise sans date : il comprend qu’il se condamnerait
trop lui-même. Son système est, au contraire, de dire
�( ,4 0 )
que la ratification lui a été remise avec la date.’ Mais
alors comment cette date seroit-elle d’une autre main?
Daudin ayant écrit le corps de l’acte, n’auroit pas écrit
aussi l;1 date ! Gomment concevoir qu’il eût présenté au,
sieur Çapelle un acte écrit, partie de sa m ain, partie
d’une main étrangère? et Çapelle l’auroit-il accepté? *
. Comment encore expliquer les surcharges?
Vaines difficultés ! Çapelle écarte toutes ces objec
tions d’un mot.
, Rien de plus simple que sa réponse.
Est-ce à moi , d it-il, qu’il faut demander pourquoi,comment? C’est Daudin seul qui peut le savoir; c’est,
lui seul qui peut l’expliquer; c’est lui qui m’a remis
la pièce telle qu’elle est : je n’en sais pas davantage.
Que Daudin prouve qu’il me l’a remise autrement : s’il
ne le prouve pas , s’il ne prouve pas qu’il me l’a remise
avec la date en blanc, l’acte doit faire foi.
’ .
Et vite il a recours à ce brocard de d ro it, que Pacte
fait foi jusqu’à inscription de faux.
Il est bien ici effectivement question de preuve et
d’inscription de faux , lorsque le fait est avoué , lorsque
l’adversaire est obligé de reconnoître que la date est
d’une autre plum e, d’une autre encre et d’une autre
main!
Cette réponse ne satisfaisoit cependant pas à tout; il
restoit encore les surcharges. Çapelle ne pouvoit pa§
dire qu’il avoit reçu l’acte ainsi surchargé ; il auroit donné
une trop singulière opinion de sa dextérité et de son
intelligence en alfaires : il falloit imaginer une nulrç
liaison, Convenir que les surcharges avoient été corn?
mises
�( 41 )
mises depuis? Mais comment faire cet aveu ? Il ne pouvoit dire qu’elles avoient été commises depuis le dépôt
au greffe. Le greffier avoit eu la précaution de constater
l’état de la pièce, et elles existaient déjà. Avant le dépôt?
Autre embarras : il falloit supposer que l’acte étoit revenu
au pouvoir de Daudin ; autrement c’étoit se reconnoitre
soi-même l’auteur des altérations, C’étoit s’avouer cou
pable. Et comment mettre en avant une pareille pro
position ? comment lui donner une couleur ?
Capelle n’a point été en peine : il a dit que la pièce
avoit été communiquée à Daudin , à Saint-Flour , dans
le temps que la cause étoit pendante au tribunal civil.
C’est dans la même requête du 11 pluviôse : on en a
transcrit plus haut les termes ; et alors tout s explique.
On pourroit cependant demander au sieur Capelle
comment il ne s’est pas plaint, à l’instapt ? comment il ^
r çu cette pièce ainsi surchargée, sans réclamation ? com
ment , en remettant la pièce au greffier, il n’a pas pro
testé contre les surcharges, surtout dès que le greffier
les constatoit ?
.
. Est-ce devant des juges éclairés , devant un tribunal
renommé par ses lumières , qu’on propose de pareils
moyens !
Il importait de commencer par fixer l’opinion du
tribunal sur les faits : l’honneur, l’intérêt de la caüse
en faisoient un devoir, au sieur Daudin. Il s’agit mainienant d’entrer dans la discussion des nïoyens de droit:
nous suivrons le sieur Capelle dans les diverses objec
tions qu’il a faites.
’
.
, F
�(4 0
P R E M I È R E
O B J E C T I O N .
N ullité du testament etEtienne Descaffres : quelle est
cette nullité ?
Capelle a prétendu qu’il falloit retrancher du nombre
des témoins instrumentales les deux témoins surnu
méraires , comme n’ayant assisté qu’à la lecture, et
Etienne Térisse , comme n’ayant ni signé, ni été requis
de signer-, que, ces témoins retranchés, il n’en restoit
que sept , y compris le notaire, et que le testateur
étant privé de la vu e, il en falloit huit, aux termes de
l’article 7 de l’ordonnance de 1735.
On a vu quelle est la conséquence qu’il a tirée ensuite
de cette nullité.
~ Sans le suivre dans la discussion à laquelle il s’est
liv ré , il en resteroit toujours, de son propre aveu, sept,
y compris le notaire ; ce qui suifiroit pour la validité
du testament.
A la vérité , l’article 7 de l’ordonnance des testamens,
porte que si le testateur est aveugle , ou s i, dans le
temps du testament , il n’a pas l’usage de la vue , il sera
appelé un témoin, outre le nombre porté par l’article
5 . Mais le testateur étoit-il aveugle ? avoit-i! perdu
l’usage de la vue ? Il est dit : A cause de la faiblesse
de sa vue. A voir la vue foible , est-ce être aveugle ? estce être privé de l’usage de la vue ? A voir la vue foible ,
c’est y voir foiblement ; c’est ne pas avoir la vue excel
lente mais c’est y voir,
�3W
( 43)
L ’adversaire a donc fait une fausse application de cet
article. L ’intérêt l’a aveuglé.
Il auroit encore moins fait cette objection , s’il avoit
réfléchi sur la disposition de l’art. 45 de la même ordon
nance. Cet article, en exigeant qu’il ne puisse être admis
que des témoins signataires , fait exception à l’égard des
testamens passés ailleurs que dans les villes ou bourgs
fermés. Il suffit pour ceux-ci qu’il y ait deux témoins
signataires. Peu importe donc que Terisse ait signé ou
non , puisque , indépendamment de Terisse , il y a tou
jours le nombre de témoins signataires suffisant.
En supposant le testament n u l, pourroit-il s’en pré
valoir ? Il ne pourroit, sans doute , avoir plus de droits
que la dame Daudin, sa venderesse; et celle-ci seroitelle recevable à attaquer le testament, après l’avoir ap
prouvé et exécuté ?
Elle l’a approuvé et exécuté , en s’emparant , aussi
tôt après le décès, de tous les meubles , en vertu du
legs à elle fait, en propriété, du mobilier.
Elle l’a approuvé et exécuté , en se mettant en pos
session de tous les immeubles, en vertu du legs d’u
sufruit.
Elle l’a approuvé et exécuté , en acquittant partie
des legs.
Dans un acte du 20 janvier 1774 , on voit qu’elle .a
pris expressément la qualité d’exécutrice testamentaire.
Par cet acte , un nommé Etienne Rame , laboureur ,
en qualité d’héritier de Catherine Descaffres , sa m ère,
transige avec la dame veuve Daudin , en qualité , est-il
d it, d'exécutrice testamentaire <£Etienne Descaffres }
�( 44 )
et comfiie mère et tutrice cCEtienne Daudin ¡ son
fils, ce dernier héritier dudit Descaffres , sur la de
mande en entérinement des lettres de rescision prises par
Catherine Descaffres , contre la renonciation faite aux
successions échues et à échoir de Pierre Descaffres et
Marguerite Déconquans , et sur la demande en paye
ment de la somme de 800 fr. , pour legs à lu ifa it par
Etienne Descaffres, par son testament du 3 avril 1773,
desquelles demandes il se départ , moyennant la somme
.de 1620 fr. , en sus de celle de 300 fr. , qu’il devoit au
dit Descaffres , et qui lui a été , est-il ajouté , pareil
lement léguée par ce dernier.
Capelle lui-même en a excipé et argumenté dans sa
requête du 8 floréal an 9 contenant ses premières dé
fenses ; il s’en est fait un principal mojen , il en a ré
clamé l’exécution. Il a insisté sur le pouvoir donné , par
ce testament, à la mère de vendre ; il va même jusques à dire qu’il n’a acheté qu’en conséquence de ce
pouvoir. Il emploie plusieui*s pages à prouver la légiti
mité d’une pareille clause. Dans un endroit il s’exprime
ainsi : Rassuré par le pouvoir que le testament, dont
il avoit connoissance , donnoit à la veuve Daudin , ......
il se croyoit propriétaire irrévocable. Dans un autrç
endroit , il dit : I l est co n sta n t aujourd'hui , par le
rapport du testame?it (£Etienne Descaffres , du 3 avril
1 7 7 3 } que le sieur Daudin est son héritier, et que la
propriété du domaine lui appa rien oit ; mais le testa
teur ne lui a f a i t passer sa succession que sous la
condit on expresse de plein et entier pouvoir à la mère
cde vendre. Plus Las \On ne voit pas ce que Chaunac
�auroit pu demander à la veuve Daudin , qui riétoit
pas héritière d’ Etienne Descaffres.
C’est après s’être exprimé ainsi , et dans la requête
du 7 ventôse an 10 , qu’il a changé tout d’un coup de
langage , et qu’il a imaginé cette prétendue nullité.
Il ne peut pas dire qu’il ne connoissoit pas le testa
ment. Il dit lui-même, dans sa requête du 8 floréal, qu’il
en avoit la connoissance ; et on voit qu’il lui en avoit
été de nouveau justifié, puisqu’il dit : I l est constant
par le rapport du testament, etc.
Il excipe de la nullité ; et il fait , d’un autre côté ,
tous ses efforts pour prouver que les legs ont été payés.
Il assure que le prix de la vente a été employé à l’acquit
tement des legs. Il a fait interroger , principalement sur
ce fait , et le sieur Daudin , et la dame Daudin. Com
ment n’a-t-il pas vu qu’il étoit en opposition avec luimême : qu’il impliquoit de soutenir le testament n u l,
et d’argumenter en même temps de son exécution ?
Il faut donc écarter ce moyen , fruit tardif de son
imagination.
Passons aux autres objections qu*il ne propose, dans son
nouveau système , que subsidiairement.
SECONDE
OBJECTION.
Pouvoir donné à la mère par le testament.
Déjà elle n’a point fait usage de ce pouvoir. Ce n’est
point en vertu de ce pouvoir qu’elle a vendu. Elle a
vendu en son propre et privé nom ; et c’est sur ce qu’elle
�% o
( ‘-'U-'i
C46)
a vendu en son propre et prive nom , que le sieur
Capelle fonde la demande en garantie , qui ne pouvoit
avoir lieu, si elle avoit vendu en vertu du pouvoir.
Le testateur a donné pouvoir à la mère de vendre ;
mais ce pouvoir n’a pas été donné indéfiniment; il a été
grevé de la condition, de la charge de l’emploi en
acquittement des dettes et des legs.
Capelle se donne beaucoup de tourment pour prouver
que les dettes et les legs ont été acquittés. On l’accor
dera , s’il veut : mais l’ont-ils été dgs deniers de la vente ?
C’est ce qu’il est loin d’établir,
Qu’il n’attribue pas l’impuissance où il est de rapporter
cette preuve au peu de bonne foi de Daudin et de la
dame sa m ère, qui retiennent les quittances. On pourroit d’abord lui dire qu’il devoit veiller lui-même à
l’emploi , et se munir des actes qui pouvoient servir à
le constater. Mais ici, non-seulement il ne prouve pas
l’em ploi, mais il fi fourni lui-même la preuve de nonemploi. La lettre du 10 août 1783 , qu’il a produite ,
prouve que le prix a. été payé en billets , lesquels ont
été ensuite enlevés par le fils, et par une suite nécessaire
payés au fils.
Le testateur a donné pouvoir de vendre ; mais ce
pouvoir doit s’entendre civilement dans le cas où il y auroit
nécessité, dans lq cas où les créanciers et les légataires
feroiént des poursuites. Il y avoit si peu nécessité , que
le prix , comme on yient de le voir } $ été payé en
billets.
TtO testateur a donne pouvoir de vendre ; mais pour
l’acquittement des dettes et des legs ; e t, par conséquent,
�'( 47 )
jusqu’à la concurrence seulement de ce qui étoit néces
saire pour les acquitter. X,a mère ne pouvoit pas vendre
au delà. Elle avoit précédemment vendu le domaine de
Raulhac et autres héritages dont le prix avoit été em
ployé. Il faudroit donc prouver que ces premiers deniers
ont été insufïisans. Il faudroit prouver qu’il restoil encore
des dettes et des legs assez pour absorber l’entier prix
du domaine de Vernet , c’est-à-dire , que la succession
étoit plus onéreuse que profitable , puisqu’il n’y avoit
point d’autres immeubles.
Le testateur avoit donné pouvoir de vendre ; mais
avoit-il dispensé, avoit-il pu dispenser des formalités
nécessaires pour l’aliénation des biens des mineux-s ? S’il
s’agissoit d’entrer dans cette question , il ne seroit pas
difficile d’établir que les biens des mineurs sont sous
la surveillance des lois , et que nul ne peut déroger à
ce qu’elles prescrivent , suivant cette maxime : Nerno
potest cavere testamento ne leges valeant.
On ne manqueroit pas d’autorités à l’appui de ce
sentiment.
Louet, dans son Recueil d’arrêts, au mot Aliénation ,
tome i , page 19 , sommaire 5 , rapporte un arrêt qui
l’a jugé ainsi :
« Le bien , dit-il , que le père avoit ordonné de
« vendre par son testament, est aliéné par le fils même
« sans solennité. On a demandé si cette aliénation
« pouvoit subsister. Jugé au contraire; et que la volonté
« du testateur dispense seulement de discussion et de la
« vente du mobilier. V'ohmtas testatoris excusât à
« discussione mohilium,
�( 48 )
« Mais pour faire vendre l’héritage , il faut que ce
« soit au plus offrant et dernier enchérisseur, ut justo
« pretio cilienetur. Et le père ou autre, par son testa« ment, ne peut dispenser de cette solennité, ut illœsum
cc rninorum servetur patrirnonium } qui ne peut se
« vendre , spretâ juris solennitate.
Brodeau , son commentateur , ajoute : « C’est une
« règle et maxime certaine, que l’immeuble du mineur,
« qui est sous la protection de la loi et de la justice ,
« ne peut être vendu, soit en pays coutumier, soit en
« pays de droit é crit, que sous les formes et formalités
« publiques; et la disposition d’un particulier, par tesk tament, qui ordonne la vente et l’aliénation , ne peut
« déroger au droit public, et empêcher que les lois et
« ordonnances aient lie u , ce qui a été souvent jugé par
« les arrêts, On ne suit point les lois contraires au Code :
« Quandà décréta opus non sit. »
Meslé , Traité des minorités, chapitre 8 , pose éga
lement pour principe que le fonds que le testateur a
ordonné être vendu , ne peut l’être sans affiche ? estima
tion, publication et enchère,
Fromental, la Peyrère , page 5 i 8 , enseignent la mêrnù
doctrine. Ils disent que le bien dyi mineur ne peut être
vendu sans formalités , lesquelles, ce sont les expressions
du premier , doivent être observées , dans le cas même
où le testateur, qui a institué héritier un m ineur,
aurait ordonné la vente pour le payement de ses dettes,
et quoique le prix eût été employé au payement de ces
mêmes dettes, uivant lintention du testateur.
j\|ais cette question est même indifférente. Quel quo
fû t
�( 49 )
fût le pouvoir, il ne pouvoit être séparé de la condition
de l’emploi qui y étoit attachée , et il n’a pas été satis
fait à cette condition ; quel que fût le pouvoir, le testa
teur a entendu autoriser une vente dont le prix seroit
sincère, et non une vente dont le prix seroit simulé ,
une vente qui ne seroit que l’effet de la circonvention
et du dol.
T R O I S I È M E
OBJECTION.
Ratification du 21 mars 1788.
Le sieur Capelle a-t-il osé produire cette ratification ?
ose-t-il encore y insister? a -t-il pensé qu’il pouvoit
se faire un titre à lui-même en remplissant à son gré
la date ?
La ratification auroit-elle été consentie en majorité,
elle ne seroit pas moins sans effet.
Elle est triplement nulle : et comme n’ayant point
été faite double ; et comme ne contenant point de prix;
et comme vague et générale, ne s’appliquant pas plus à
la vente dont il s’agit qu’à tout autre acte.
C’est à la discussion de ces trois propositions qu’on
va se livrer. Ces trois propositions établies, il ne res
tera sans doute à l’adversaire aucune espérance.
Et d’abord, la ratification n’a pas été faite double.
Ici le sieur Capelle a crié à l’erreur. Où a-t-on v u ,
a-t-il d it, qu’il soit nécessaire qu’une ratification doive
être faite double ? est-il une loi qui l’exige ?
G
�( 5° )
C’est dans sa requête du 7 ventôse an 10, qu’il s’est
attaché h combattre cette proposition. Il n’est pas indif
férent de mettre sous les yeux du tribunal une partie
de ses raisonnemens.
« La première idée , d it-il, qui se présente naturel« lcment, est que la ratification n’est que l’approba« tion de ce qui a été fait ; o r , l’approbation peut être
« faite de toutes sortes de manières , même par une
« simple lettre, par une quittance........ Celui qui ratifie,
« qui consent que tel acte soit exécuté , ne consent
« pas cet acte déjà subsistant, il n’en change ni n’en
« altéré les clauses.........On ne peut appliquer ici les
« principes concernant les actes synallagmatiques. Il est
« évident qu’en ce cas il faut une preuve réciproque
« de ces obligations. Mais ici il y a un acte préexistant f
« une convention rédigée, qui contient les obligations
« du vendeur et de l’acquéreur. Si l’on vouloit y déroger,
« faire un nouvel acte, il est clair qu’il faudroit lui
« donner la forme du contrat de vente , et par consé« quertt la fa ir e double. Mais 011 n’a pas voulu cela;
« on a voulu seulement que le premier contrat fût
« exécuté : celui qui ratifioit n’a eu besoin que de
« renoncer au droit qu’il avoit d’attaquer l’acte, et
« l’autre, dont le droit et les obligations restoient les
« m êm es, a dû par conséquent ne rien faire , si ce
« n’est recevoir la ratification.............On 11e peut pas
« dire non plus que dans cet état de choses une partie
« ne puisse forcer l’autre à exécuter l’acte__ _ . Elle
« est liée par le précédent contrat........ On défie Daudin
« de rapporter lin seul préjugé qui ait la moindre ana-
�( 5 0
« logie avec l’espèce dans laquelle il se trouve. Dans
« toutes celles-là il n'y avoit pas de contrat, et ces
« actes informes ont dû être annullés. »
Il faut donc, suivant le sieur Capelle lui-même, que
la ratification soit faite double , lorsqu'il n y a pas de
contrat préexistant, parce qu’alors la ratification est
moins une ratification qu’une vente.
En avouant ces principes, enseignés d’ailleurs par
tous les auteurs, il s’est jugé lui-même.
Qu’entendons-nous, en disant, lorsqu'il n'y a pas de
contrat préexistant ? Toute ratification suppose néces
sairement un contrat antécédent.
Nous entendons un contrat qui ait pu produix-e quelque
engagement.
Nous entendons un contrat fait par celui même qui
ratifie , ou au moins au nom de celui qui ratifie. ’
Si le contrat est absolument n u l, s’il n’a pu produire
aucun engagement, s’il est nul dans le principe, et ah
initio , pour se servir de l’expression des auteurs, l’acte
par lequel on ratifie n’est point une ratification ; c’est
un nouveau contrat : il n’y a point deux contrats , il
n’y en a qu’un. Tune e s t , pour se servir des expres
sions énergiques de Dumoulin , nova et principalis
dispositio.
Si l’acte est étranger à celui qui ratifie , s’il n’a été
fait ni par lu i, ni en son nom , c’est encore impro
prement une ratification.
Il faut éclaircir ceci par des exemples.
Un mineur devenu majeur ratifie l’acte qu’il a sous
crit en minorité. Il y a un contrat préexistant. Avant
G 2
^
�r 52 )
la ratification, le mineur étoit déjà lié. On sait que
l’engagement du mineur subsiste tant qu’il ne se fait pas
restituer. L ’acte n’est pas n u l, il est seulement sujet à
être rescindé ; venit annullandus. Il n’est pas nul de nul
lité absolue, il n’est nul que d’une nullité relative. Il
n’est pas même besoin d’une ratification expresse, la
ratification tacite par le laps de dix ans , sans réclama
tion , suffit: et la ratification , soit expresse, soit tacite,
remonte pour l’hypotlièque, et a un effet rétroactif au
premier contrat.
Une femme en puissance de mari contracte une obli
gation sans le consentement de son m ari, ou vend
sans son autorisation, ou , si l’on veut, avec son autori
sation, une partie de ses biens dotaux. L ’obligation et la
vente sont absolument nulles , elles n’ont produit aucun
engagement. Si la femme, après la dissolution du mariage,
ratifie, c’est un contrat entièrement indépendant. C’est
un nouveau contrat dont l’effet ne remonte point au
premier contrat. "
Exemple du second cas. Un mineur, parvenu à la
m ajorité, ratifie un contrat qu’il a souscrit en mino
rité. Il ratifie un acte de son fait. Un commettant ratifie
ce qui a été fait par son mandataire, quoique hors des
bornes de son contrat. Un particulier dont on a fait l’affaire
à son insu , se portant fort pour l u i , ratifie ce qui a été
fait pour lui. L ’un et l’autre ratifient un acte fait en
leur nom. Dans tous ces cas, même dans les deux der
niers, il y a un contrat préexistant. Le commettant,
le particulier dont on a fait l’affaire à son insu , en rati
fiant ? sont censés avoir contracté eux-mêmes les enga-
�( 53 )
^4 1
gcmens qui ont été contractés en leur nom. C’est le cas
<le la maxime , Katihabilio mandato comparatur. La
ratification a alors un effet rétroactif, parce qu’elle n’est que
l’accessoire et le complément des actes qui ont été ratifiés.
Mais un tiers vend la propriété d’un particulier. Il
la vend non au nom de ce particulier, mais en son propre et
privé nom; le particulier ratifie ensuite : la ratification
n’aura effet que du jour même , et non du jour de la
vente faite par ce tiers. Il n’y a point dans celte espèce
de contrat préexistant. On ne peut pas appliquer la
maxime , Ralihabitio mandato comparatur. On ne
peut pas feindre un mandat, là où le mandataire a
contracté, non au nom de celui qui i*atifie, comme dans
l’espèce précédente, maison son nom propre et privé ;
non pour l’affaire de celui qui ratifie, mais pour sa
propre affaire : le contrat résiste dans ce cas à la fiction.
Ce que l’on vient de dire est la doctrine de tous les
auteurs.
C'est principalement à l’occasion du retrait féodal et
du retrait lignager, qu’ils ont traité la question de savoir
•de quel jour la ratification devoit avoir effet pour faire
courir l’an du retrait; et ils la décident par les distinctions
qu’on vient d’exposer.
Qu’on lise tous ceux qui ont écrit sur cette matière,
ils sont unanimes.
Pour ne pas s’étendre > on se bornera à citer Pothier,
traité des Retraits.
« Lorsqu’un m ineur, d i t - i l , part. i ere. chap. 4 ,
n. 124 , a vendu son héritage propre, et que devenu
« majeur il ratifie, c’est du jour du contrat de vente
« que le retrait lignager est ouvert ; car la nullité de
�«
«
«
«
«
«
te
«
«
cc
l’aliénation des mineurs n’est pas une nullité absolue,
mais relative , et en faveur du mineur seulement.
1,’acte n’est nul que dans le cas auquel le mineur, ou
ceux qui succèdent à ses droits, jugeroient à propos
de s’en plaindre. L ’acte par lequel il ratifie en majorite , est un acte par lequel il renonce à s’en plain
dre; mais ce n’est pas par cet acte, c’est par la vente
qu’il a faite de son héritage, qu’il l’a mis hors de
sa famille , et c’est cette vente qui donne ouverture
au retrait, et non sa ratification.
« 11 semble, ajoute-t-il, nombre 1 2 , qu’il en doit
« être autrement d’une vente qu’une femme sous puisk sance de mari auroit faite sans être autorisée , et
« qu’elle auroit ratifiée en viduité. L ’acte qu’elle a fait
«. en la puissance du mari est absolument nul. La rati« fication qu’elle a faite en viduité n’est pas proprement
« une ratification , ce qui est nul ne pouvant être con« jïrm é. C’est un vrai contrat de vente qu’elle a fait de
« nouveau , par lequel elle a mis son héritage propre
« hors de sa famille. La vente qu’elle en avoit faite
« sous la puissance du mari , ne l’en a pas fait sortir
« puisque cette vente étant un acte absolument n u l, ne
« pouvoit avoir aucun effet. »
Voilà pour la première distinction entre le cas où l’acte
est nul par lui-même , et le cas ou il est simplement
sujet à être rescindé ; ce que les auteurs expriment par
nullité absolue , et par nullité relative.
Voici pour la seconde distinction entre le cas où celui
qui ratifie , confirme un acte fait par lui , ou par un
tiers pour lui et. en son nom , et le cas où au contraire il
ratifie un acte qui lui est totalement étranger.
�( 55 )
« Lorsque la vente, dit le même auteur au même
« endroit, nombre 123, a été faite par un autre que
« par le propriétaire, quoique la tradition soit inter« venue ; ce n’est que du jour du consentement donné
« à la vente par ce propriétaire , qu’il y a ouverture
« au retrait ; car ce n’est que par ce consentement qu’il est
« censé vendre. »
C’est l’espèce dans laquelle se rencontre le sieur Daudin.
La vente a été consentie par la m ère, non comme
tutrice, non en qualité d’exécutrice testamentaire, non
pour les affaires du mineur , puisque l’acte ne constate
aucun emploi ; mais en son nom propre et privé , comme
de chose à elle appartenante. X>a ratification que le sieur
Daudin en a faite, n’est point une ratification : il n’y u
point de contrat préexistant, e t, de l’aveu même du
sieur Capelle, elle devoit alors être conçue en forme
de vente et être faite double.
Pour prouver qu’il n’y avoit pas de contrat préexis
tant, que la vente faite par la mèi’e, non en sa qualité
de tutrice, mais en son nom propre et privé , étoit
entièrement étrangère au mineur , on ne fera qu’une
question au sieur Capelle. La ratification tacite par le
laps de dix ans, s a n s réclamation, auroit elle dépouille
le sieur Daudin? Non , sans doute.
11 y a plus, il 11’y a de contrat préexistant, ni de la
part du fils, ni même de la part de la mère.
Il 11’y en a pas de la part du fils, puisqu’il 11’existe
aucun acte de sa p art, et que le sieur Capelle n’a pas
même voulu qu’il entrât dans la v e n t e , pour qu’on ne
pût lui dire qu’il avoit eu corinoissnnce du vice de l’acte.
�Et il n’y en a pas non plus de la part.de la mère.
C e c i , sieur Capelle, va vous surprendre ; mais écoutez :
Vous savez qu’il faut trois choses pour constituer la
vente ; la chose, le prix et le consentement : res , pretium et consensus. Il faut que le consentement porte
sur la chose et sur le p rix , sans quoi il n’y a point de
vente. C’est la disposition de plusieurs lois.
Si je compte vendre une chose, et que vous comp
tiez en acheter une autre ; il n’y a point de vente.
Si je compte vendre pour un p rix, et vous acheter
pour un autre moindre; il n’y a pas de vente.
Pour quel prix la mère a-t-elle entendu vendre ? Pour
la somme de 21600 f r ., puisque c’est le prix'porté au
contrat. Pour quel prix Capelle a-t-il entendu acheter?
Pour la somme de 13800 fr.; et il n’a effectivement payé
que ce prix. La lettre fatale du 10 août 1783 le prouve.
Sistrières, dit Daudin dans cette lettre, croit encore que
t o u s 71 avez f a i t de billets que pour 14000 f r . Quoi
qu'il en soit , je ne vous nuirai jamais, V ous nCavez,
payé ce que vous m avez promis.
Si la dame Daudin a entendu vendre pour 21600 f r .,
s’il est constant que Capelle n’a payé et n’a voulu payer
que 13800 f r ., il n’y a donc pas eu de vente. La vente
pèche par une de ses qualités constitutives, par le con
sentement.
IL n’y a donc pas de contrat préexistant, môme delà
part de la mère. C’est donc mal à propos qu’on veut
qualifier l’acte du 21 mars 1788 de ratification. On ne
peut confirmer ce qui est n u l, et non-seulement ce qui
est n u l, mais ce qui n’existe pas, puisque, par défaut de
consen lomei.it,
�•
3 JÏ
(
57 )
consentement, il n’y a pas de vente, même de la part de
la mère.
Ce seroit donc une vente, et non une ratification que
le sieur Daudin auroit souscrite , et elle devoit être faite
double.
Le sieur Capelle veut faire regarder la vente consen
tie par la mère comme un contrat préexistant. Ce contrat
porte 21600 f r ., et il n’a payé que 13800 fr. ; il devroit
donc offrir les 7800 fr. restans, puisqu’il demande l’exé
cution de ce contrat. M ais, non , il veut retenir, et cet
excédent de prix et le domaine.
La ratification est nulle en second lieu comme ne con
tenant pas de prix.
Le prix, dira l’adversaire, n’est-il pas dans le contrat?
O ui, s’il étoit sincère; maison a v u , et il est prouvé
qu’il étoit simulé.
Maintenant, quelle est la convention que le sieur
Daudin a ratifiée? Il a consenti, si l’on veut, que le
sieur Capelle demeurât propriétaire; mais est-ce moyen
nant le prix réel qu’il a donné, ou moyennant le prix
simulé? Est-ce moyennant la somme de 138006.*;, ou
moyennant celle de 21600 fr. ? C’est ce que la ratification
ne dit pas, et ce qu’elle devoit dire. Il y avoit d’autant
moins d’inconvénient, que la ratification ne devoit pas
paroître aux yeux de la mère, qu’elle devoit demeurer
entre les mains de Capelle.
1
1 Enfin la i*atification est nulle, comme étant vague et
générale. Il faut encore développer les principes à cet
II
t ' J;
�W*
II'-,' -
.
_ ( 58 )
égard. Ils sont consacrés dans la loi même, dans la loi
au Code, S i major fa ctu s alienationem factam ratant
habuerit, livre 5 , titre 74 : voici les termes de cette
loi.
S i sine decreto prœsidis prœdia tua à tutore tuo
alienata su n t, nec speciali corrfirmatione, vel ( si bonâ
Jide possessorfuisset) statuti temporis excursu id quod
perperàm est actum, fuerat stabilituni, prœses provinciçe possessionem in jus tuum retrahet.
La ratification doit donc être spéciale. Une ratifica
tion en termes vagues et généraux, qui ne désigne p¿is
même l’acte qu’on ratifie, ne suffit pas.
La ratification doit être expresse et faitznominatïm,
dit Pérésius, sur le titre 46 , au Code, livre 2 : S i major
ja ctu s ratum habuerit. Car si l’on confirme un acte
pu des actes en général, sans exprim er, ni leur objet,
ni leurs clauses principales, ni le temps où ils ont été
passés, la convention est radicalement nulle par la seule
indétermination des choses qui en font la matière , et
par l’impossibilité d’assigner, d’une manière fixe et cer
taine , l’objet sur lequel a porté le consentement des par
ties contractantes.
. L ’adversaire ne peut se dissimuler les termes de la loi;
il cherche à les intei’préter. Suivant lu i, si la loi exige
que la ratification soit spéciale, c’est en ce sens, qu’il faut
qu’il paroisse que celui qui a ratifié a eu connoissance
de l’acte ; mais en induire qu’il faut spécifier la nature,
les clauses, la date, le nom du notaire qui l’a reçu, c’est
une puérilité qui n’a été ni pu être dans l’esprit du
législateur.
�O r , ajoute-t-il, le sieur Daudin peut-il dire qu’il n’a
pas eu connoissance de l’acte, tandis que d’un autre côté
il soutient que c’est lui qui a traité, que c’est lui qui
a reçu le prix?
D ’abord , on pourroit répondre, en admettant la res
triction que l’adversaire veut donner aux termes de la
loi , qu’il ne sufïiroit pas qu’il fût constant d’ailleurs
que celui qui ratifie a eu connoissance de l’acte ; qu’il
faut que l’acte en renferme lui-même la preuve, probetionem probatam; qu’un acte doit contenir par lui-même
tout ce qui sert à en constituer la validité, toutes les
formes essentielles.
Mais l’adversaire interprète encore mal la loi. Lors
que la loi exige que la ratification soit spéciale , ce n’est
pas seulement afin qu’il soit établi que celui qui ratifie
a eu connoissance de l’acte', il faut non-seulement qu’il
soit établi qu’il a eu cette connoissance, mais encore qu’il
a eu intention de réparer le vice de l’acte. C’est prin
cipalement cette intention , et la manifestation de cette
intention , que la loi requiert.
Les interprètes ne l’ont jamais entendu différemment. >
On a déjà cité Péi’ésius ; on pourroit citer Dumoulin, •
l’Epine de Grainville mais une autorité plus remarqua
ble, est ce qu’on lit dans le Projet du Code civil, art.
229 du livre 2, qui n’est que la transcription de ce que
Dumoulin avoit enseigné. « L ’acte confirmatif, dit cet
« article, suppose un contrat antérieur, et un contrat
« valable. Si l’acte confirmé est radicalement nul, il n’est
« point validé par la simple confirmation, à moins qu’elle
« n’cuonce la connoissance de la nullité du premier, avec
lia
�( 60 )
cc Tintention de la réparer, qu’il n’en rapporte la sub« stance, et ne contienne la déclaration de la volonté de
« lui donner l’exécution, »
Le sieur Daudin ne désavoue pas avoir eu connoissance de la vente ; mais il fout que l’acte porte la ma
nifestation de l’intention de lui donner l’exécution.
Et comment supposer cette intention, si le vice n’est
pas énoncé, si l’acte n’est pas même rappelé? C’est pour
que cette intention ne pût être équivoque , que la loi
a- voulu que la ratification fût spéciale.
On ne peut pas même dire quel est l’acte que le sieur
Daudin a voulu ratifiei\ La ratification, pour s’étendre
à. tou t, ne s’applique à rien ; pour trop signifier, elle
est insignifiante.
On a vu comment elle est conçue : Je soussigné, est«. il d it, approuve et ratifie les actes que ma mèi'e a
« consentis en faveur de M . Capelle, conseiller, du do
te maine de Yernet et tout ce qui en dépend, et pro« mets de l’en faire jouir en vrai propi’iétaire. »
Quels sont ces actes qu’il.approuve et ratifie? Sont-ce
des contrats de vente , des baux emphytéotiques , des
échanges,. des donations même ?
On a cru écarter cette objection en disant que le sieur
Daudin l’a suffisamment expliqué en ajoutant, promets
Ten faire jou ir en vrai propriétaire. Mais c’est rentrer
dans la difficulté ; car tous les actes qu’on vient d’énon
cer sont translatifs de propriété.
Il n’es« pas dit Pacte , il est dit les actes ; ce qui em
brasse, par la généralité de l’expression, les actes au
thentiques , les actes sous signature privée, les contre-
�•
3
fS
(6 0
lettres, les quittances, les décharges et toutes les con
ventions quelconques qui pourroient être intervenues
entre la dame Daudin et le sieur Capelle.
Il est dit, les actes, et cependant il n’en paroît qu’un.
L e sieur Daudin convient bien avoir eu connoissance
de la vente; mais il ne convient pas avoir eu connoissance d’autres actes, et on ne prouvera pas qu’il en a eu
connoissance. La ratification s’étend à tous ; elle est done
nulle, de l’aveu même du sieur Capelle, et d’après l’in
terprétation qu’il donne lui-même aux termes de la lo i,
relativement à ces actes dont il n’a pas eu connoissance.
Si elle est nulle pour les uns, elle est nulle pour l’autre.
11 n’y a pas deux ratifications, il n’y en a qu’une: on ne
peut pas la diviser : on ne peut pas la déchirer en partie.
Mais toute ratification doit au moins être postérieure
à l’acte qui est ratifié. O r, qui ne voit qu’elle a précédé,
. . , . (
qu'elle a été remise à l’avance ?
Capelle, ainsi que nous l’avons dit, étoit incertain s’il
prendroit un bail à locaterie. perpétuelle pour éviter le
droit de lods, ou s’il prendroit une vente. Dans cette in
certitude, il se fit remettre une ratification en tenues gé
néraux et à toutes fins.
T el est l’acte qu’il oppose. T el est l’acte qu’il produit
avec confiance ^ dont il fait le principal moyen de sa
défense.
Il argumente des lettres à lui écrites par Daudin. Dans
l’une ; ce sont des renseignemens. suy la forme : dans
�( S
*
( 6 2 }
l’autre, celle du ro août 1783, Daudin dit qu’il ne lui
nuira jamais auprès de Sistrières: dans une autre, il parle
cl’une rente réclamée par le seigneur de Valadi ; il ter
mine par lui faire des complimens ; car l’adversaire a été
jusqu’à relever cette circonstance.
Que signifient ces lettres , écrites toutes en minoi'ité,
puisque Daudin n’a été majeur que le 2 septembre 1787?
Ces lettres seroient tout au plus une suite de la vente.
Mais qui sait mieux que le sieur Capelle que ce qui n’est
que la suite, l’exécution d’un acte, n’en est pas la ra
tification ?
Il faudroit un engagement formel, une intention bien
manifeste de ratifier; et quand les lettres contiendroientcet
engagement, il resteroit à opposer ce qu’on a opposé
contre la ratification du 1e1'. mars 1788, que l’acte devoit être fait double,
QUATRIÈME
OBJECTION.
Prescription de 10 a n s, avec titre.
On sait qu’en pays de droit écrit on prescrit nonseulement l’hypotlièque, mais encore, si l’on veut, la
propriété , avec titre et bonne foi, par dix ans entre pré
sens, et vingt ans entre absens. Le sieur Capelle a cru
pouvoir invoquer cette espèce de prescription , admiso
en pays de droit écrit, et rejetée par plusieurs Coutumes,
notamment par celle d’Auvergne. Il a soutenu que si la
vente consentie par la mère, en son propre et privé nom,
ne lui avoit pas transféré la propriété, elle étoit au moins
�a y
i
«3 )
un titre apparent, suffisant pour prescrire ; qu’au titre
il joignoit la possession pendant le temps requis par la
loi ; qu’ainsi, dans tous les cas, la réclamation du sieur
Daudin seroit tardive.
On prescrit par dix ans, avec titre; il faut ajouter,
et avec bonne f o i . Il ne suffit pas d’un titre apparent,
il faut encore la bonne foi. Qu’entend-on par bonne
foi? L ’opinion d’avoir acheté du véritable propriétaire,
opinio quœsiti dominii.
Le sieur Capelle avoit-il cette opinion? A - t - il cru
avoir acheté du véritable propriétaire? Il a pris soin
encore de fournir des armes contre lui. Qu’on lise sa
requête du 6 floi'éal an 9 , il y fait lui-même l’aveu du
contraire. On n’en rappellera que ces expressions qu’on
a déjà citées : « Rassuré , est-il dit, par le pouvoir que le
« testament, dont il avoit connoissance , avoit donné à
« la veuve Daudin, par l’emploi utile du p rix , il se
« croyoit propriétaire irrévocable. »
A voit-il la bonne foi lorsqu’il a pris la ratification ?
Est-ce pour prouver qu’il avoit acquis de bonne foi ,
qu’il a produit la lettre du 10 août 1783 ?
A u titre et à la bonne foi il faut joindre la posses
sion de dix ans utiles ; e t , d’après le calcul même de
l ’ adversaire, il ne s’est point écoulé ce temps.
Il convient qu’il ne faut compter que pour moitié le
temps de l’absence de Daudin ; et par absens 011 sait qu’il
faut entendre, en cette matière , non-seulement ceux
qui sont véritablement absens, qui sont hors du terri
toire français , mais même ceux qui sont domiciliés dans
des ressorts diiïérens ; non-seulement ceux qui ctoient
�( 6 4 }
alors domiciliés dans des parlemens , mais même dans
des bailliages diflércns. Il ne faut donc compter que pour
moitié le temps qui s’est écoulé depuis le 2 septembre
1787, date de la majorité de Daudin , jusqu’au 11 dé
cembre 1790 , date de la suppression du bailliage de
V ie , lieu du domicile de Daudin , et de l’installation
du tribunal de district d’Aurillac , au l’essort duquel il
a été réuni ; ce qui présente 1 an 7 mois et 24 jours
seulement de temps utile; à quoi ajoutant 8 ans 10
'mois et 24 jours écoulés depuis , jusqu’au 4 vendémiaire
an 8 , date de la réclamation de Daudin , correspondant
au 26 septembre 1799 , il s’est écoulé 10 ans 6 mois et
18 jours : mais on connoît la disposition de la loi du i5
germinal an 3 , qui a relevé de la prescription et de
tout autre délai emportant fin de non-recevoir tous lcâ
détenus à l’occasion de la révolution , pendant le temps
de leur détention , et même jusqità la publication du
décret. Le sieur Daudin a été reclus le 24 messidor an 2.
L ’arrêté du comité de sûreté générale qui l’a rendu à
la liberté , est du 17 pluviôse an 3. Si on déduit ce
temps de sa réclusion on verra qu’il ne s’est pas écoulé les
dix ans utiles. Ainsi disparoît cette quatrième objection.
Tels sont les moyens que le sieur Capelle a fait valoir
pour se maintenir dans son injuste possession. On croit
les avoir suiïisamment combattus. Oncroit avoir démontré
le bien jugé du jugement, en ce qu’il l’a condamné à
se désister d’un domaine aussi illégalement acquis.
L ’appel qu’il a interjeté ne porte pas seulement sur
cette disposition.
11 est appelant , en second lieu , en ce que le sieur
Daudin
�C 65 )
Daudin n’a pas été condamné, comme slellionataire, à
le faire jouir , sinon à lui rembourser l’entier prix porté
au contrat de vente , frais et loyaux coûts , et dommagesintérêts ; qu’il n’a été condamné qu’à lui payer la somme
de 13800 f r ., pour le prix de la vente. Cette seconde
disposition n’est qu’une 9uite de la précédente. Le bienjugé de l’une entraîne nécessairement le bien-jugé de
l’autre. Il est inutile de s’arrêter davantage sur ce se
cond clief.
On ne dii*a qu’un mot sur la qualification de stellio—
nataire. Qu’est-ce que le stellionat ? c’est le délit de celui
qui vend la même chose à d eux, qui * après avoir vendu
à un , vend à un autre. Pour qu’il y eût stellionat ,
il faudi'oit qu’il y eût une pi’emière vente consentie à
Capelle par Daudin ; il faudroit que Capelle eût acheté
valablement , ou de la mère, ou du fils. E s t-il dans
cette position ? On a vu comment il a surpris le consen
tement de l’ une , comment il a abusé du délire de l’autre.
Est - ce le sieur Capelle qui inculpe Daudin de fraude ?
Qia's lulerit Gracchos de sedîtione querentes!
Il est appelant , en troisième lieu , en ce que sur la
demande en garantie solidaire il a été ordonné une plus
ample contestation.
Ici le sieur Daudin est loin de s’opposer à l’infirmation
de cette partie du jugement. Il est lui-même appelant en
ce chef. Il a le même intérêt que le sieur Capelle, celui
d’éviter, et les- frais, et les longueurs d’un nouveau procès.
J^e tribunal n’hésitera sans doute point à accueillir leur
appel, a les sortir d’affaire par un seul et même jugement.
I
�( 66 )
; La loi qui veut que dans toute cause il y ait deux
degrés de juridiction , ne s’y oppose point. On connoît
le jugement du tribunal de cassation, d u ..........................
qui a jugé que lorsque le tribunal de première instance
a prononcé sur certains chefs' et ordonné une plus
ample contestation à l’égard des autres , le tribunal
supérieur , saisi par appel de la connoissance de ceux
sur lesquels il a été fait droit définitivement, peut statuer
sur le tout ; que ce n’est point là l’évocation défendue
par les nouvelles lois ; et cela, pour que les parties ne
soient pas exposées à subir autant d’appels qu’il y a de
chefs de demande.
Ceci nécessite d’entrer dans le mérite de la demande
même. Il sera facile d’établir qu’elle ne peut épouvanter
le sieur Daudin.
j ¡; • ,
- \
.
^
!
' ■
Garantie solidaire.
L ’adversaire commence par faire l’énumération des
actes préparés, médités, concertés entre le fils et la mère
et Desprats, pour lui enlever tout à la fois, et sa pro
priété et le gage de sa garantie.
7 octobre 1790, et 28 novembre 1792, actes par
lesquels la dame Daudin se reconnoît débitrice envers
son fils de 47660 f r ., inscrits le 3 messidor an 7.
7 , 8 , 9 et 11 nivôse an 6 , ventes par la dame
Daudin, à différens particuliers , pour plus de 40000 fr.,
toutes transcrites le 4 vendémiaire an 8.
6
complémentaire an 7 , inscription par Louise et
.Elizabeth Sobrier , sœurs de la dame Daudin, pour
�1200 fï\ , en vertu d’un testament du 30 septembre 1778.
Du même jo u r, inscription de 3000 fx*. dûs à AnneRose Abeil, belle-sœur de Daudin, sur la dame sa mère,
en vertu d’un acte du 2 complémentaire an 7.
7
brumaire an 8 , inscription de i 5ooo fr. par Gabriel
Chaunac, beau-frère de D audin, sur la dame Daudin ,
sa belle-mère, en vertu de deux testamens du i 5 février
1766, et 3 avril 1773.
2 vendémiaire an 8 , vente par Daudin audit Gabriel
Chaunac, de ses créances mobilières,moyennant 10000fr.
i 5 vendémiaix-e an 8 , transcription de la vente passée
entre Daudin etDesprats , sous la date du 2 vendémiaire,
même jour de la vente consentie à Chaunac.
Ne voit-on pas, s’écrie le sieur Capelle , le concert
de fraude ? Ne voit - on pas que l’on a cherché par
tous ces actes à mettre à couvert la foi'tune de la mère ;
qu’on a voulu la constituer en faillite frauduleuse ?
Or , ajoute - 1 - i l , ceux qui coopèrent à la fi-aude ,
ceux qui sont complices d’une faillite frauduleuse , sont
pei’sonnellement responsables , et i*esponsables par corps.
Ce n'est pas dans l’espoir du succès, c’est dans l’intention
de jeter de la défaveur sur le sièur Daudin, qu’on a élevé
une prétention aussi chimérique.
Il
n’y a point de complicité, là où il u’y a point de
fraude. Il 11’y a point de fraude: on n’a pas cherché,
comme il s’en plaint, à lui enlever le gage de la garantie,
s’il n’y a point de garantie, s’il n’a aucune action en ga
rantie à exercer, on ne dit pas contre le fils , mais même
contre la mère.
Il n’y a point de garantie , là où il n’existe point d’engaI 2
�( 6S )
gainent : or il n’en existe point. On a prouvé plus haut
que le contrat de vente ne peut produire aucun enga
gement , même de la part de la mère. E t , en effet ,
moyennant quel prix a-t-elle entendu vendre ? Elle a
entendu vendre moyennant la somme de 21600 francs.
Capelle n’a entendu acheter et n’a acheté que 13800 fr.
Les parties ont donc été divisées sur le prix. 11 n’y a
donc point eu de consentement. S’il n’y a point eu de
consentement, il n’y a point de vente. Il ne s’agit pas
ici de restitution , il ne s’agit pas de nullité : c’est plus.
L ’acte n’est pas seulement n u l, il n’a pas existé; il n’y a
point de vente. Le prix e$t de l’essence de la vente : il
n’y a point de vente , si les parties ne sont pas d’accord
du prix.
Secondement, il n’y a pas lieu à garantie, c’est-à-dire ,
à dommages-intérêts , lorsque l’acquéreur a connu le
vice de la vente l’acquérpur ne peut en ce cas prétendre
que la restitution du prix. La loi dernière, C. Emptor
communia de legatis, en q une disposition précise.
Emptor sciens rei gravanien, adçersus venditorem
actionem habeat tantum ad rcstitutionem p retii, nec
ex duplœ stipulatione locum habeat, ciim sujjiciat ei
pro pretio quod sciens dédit pro re alienâ satisjieri.
Onsait que ceux qui sont d’une opinion contraire,
qui pensent que la pleine garantie est due lorsqu’elle a
été stipulée , soit que l’acquéreur ait connu ou non le
vice de la vente, prétendent que cette loi Emptor est
une loi particulière pour les choses comprises au legs
et iidéicommis, par la grande faveur que les legs et les
fidéicommis, et généralement les dispositions des mou-
�,
( ‘6 9 )
rans, avoient chez les Romains. Mais , en admettant cette
interprétation, le sieur Capelle se rcncontreroit précisé
ment dans l’espèce de cette loi. Le fils avoit été institué
héritier, la mère avoit été nommée exécutrice testamen
taire. Elle devoit en conséquence veiller davantage à la
conservation de l’hérédité , à la conservation des biens
compris dans l’institution , au lieu de les aliéner. D ’uu
autre côté, l’adversaire n’a point dissimulé avoir connu
le testament ; il auroit donc sciemment concouru avec la
mère à l’inexécution de la volonté du testateur ; il seroit
doue dans le cas de la loi ; e t , aux termes de cette loi ,
quelque clause qu’il ait stipulée, nec ex duplœ stipulatione , il ne peut exiger que la restitution du prix.
Il
ne peut donc prétendre qu’on a cherché à frauder
la garantie quant aux dommages-intérets , et il ne peut
dire que les actes dont il a fait l’énumération ont été
consentis en fraude de la garantie , quant au p r ix , puis
que le sieur Daudin a toujours offert, et par conclusions
précises, de lui faire raison de la somme de 13800 f r .,
prix réel de la vente.
Ces offres prouvent sa franchise et sa loyauté.
Le sieur Capelle, qui a exercé pendant plusieurs années
les fonctions honorables de la magistrature, n’ignore pas
que le mineur n’est tenu de rendre les deniers qu’ il a
perçus, qu’autant qu’ il en a profité par un emploi utile
et avoué par les lois : Quatenùs in rem versum.
Daudin pouvoit donc se dispenser de faire ces offres;
il les a faites : il n’a donc point colludé pour faire perdre
le sieur Capelle !
Et le sieur Capelle, qui l’accuse de fraude , réclame ce
„>'&
�( 70 )
qu’il n’a même pas payé. Il réclame la somme de 21600 fr.
indépendamment de ses dommages-intérèts, tandis qu’il
est prouvé qu’il n’a payé que 13800 fr.
Et quels sont les actes sur lesquels il fonde la pi'euve
de collusion et de fraude ?
La vente consentie à Desprats ! Mais cette vente doit
lui être indifférente; il doit lui être indifférent d’être
condamné à se désister d’un domaine envers l’un ou
envers l’autre.
Les deux actes par lesquels la mère s’est reconnue
débitrice envers lui d’environ 48000 fr. ! Mais le sieur
Daudin lui a dit, dans son interrogatoire, que ces actes
avoient eu pour motif des arrangemens de famille ; que
lorsqu’ils avoient été souscrits, ils ne l’avoient point été
en vue de les lui opposer,
Les inscriptions faites par les créanciers, parens, sî
l’on veu t, ou alliés de Daudin ! Mais elles ont été faites
en vertu de titres anciens qui ne sont du fait, ni de la
dame Daudin, ni de son fils,
La vente faite par Daudin à Chaunac de ses ci’éances
mobilières ! Mais Daudin n’a-t-il pas pu disposer de sa
chose propre ? E st-il, a-tril jamais été le débiteur du
sieur Capelle ? Quel titre le sieur Capelle a-t-il pour
être le scrutateur des spéculations qu’il a pu faire ?
Enfin on va plus loin. Auroit-il colludé ; il aui’oit
colludé , non pour commettre une fraude , mais pour
§’en rédimer. Seroitril repréhensible?
Que voit-on dans cette cause ? D ’une p art, un jeune
homme sans expérience, livré à la fougue de l’âge, et
�( 71 )
emporté par une passion ardente ; de l’autre, un ju ge,
un ancien magistrat , faisant céder ses devoirs à son
ambition.
C’est entre eux que la cour a à prononcer. Est-ce le
sieur Daudin qui doit redouter le jugement?
P A G È S - M E I M A C , jurisconsulte.
M A L L E T , avoué,
A RIOM, de l’imprimerie de LANDRIOT, seul imprimeur de
la Cour d’appel. — An 12.
'Mfi
M
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Daudin, Eléazard-Rostang-Etienne. An 12]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Mallet
Subject
The topic of the resource
ventes
abus de confiance
abus de faiblesse
prescription
éviction
minorité
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Eléazard-Rostang-Etienne Daudin, propriétaire ; contre François Capelle, ci-devant conseiller au bailliage et siège présidial d'Aurillac ; en présence d'Antoine Desprats, et de dame Marguerite Sobrier, veuve de Jean Daudin.
Table Godemel : Dol : 1. Vente du 1er mars 1782 critiquée de nullité comme ayant été surprise, à une femme, par des manœuvres concertées entre l’acquéreur et le fils mineur de la venderesse. Eviction : 2. si la vente d’un immeuble et la ratification qui en a été faite par son héritier, devenu majeur, sont nulles, le vendeur qui a contracté en son propre et privé nom et reçu le prix, peut-il être dispensé de garantir l’éviction sur le fondement que le vice du contrat même en est la cause, et que l’acquéreur connaissait l’incapacité du vendeur ? Exécuteur testamentaire : autorisé à vendre pour payer des dettes, peut-il vendre sans aucune formalité pendant la minorité de l’héritier ?... L’acquéreur doit-il surveiller l’emploi des deniers ? Prescription : l’acquéreur, dont le titre est vicieux, peut-il se prévaloir de sa possession, et opposer, en pays de droit écrit, de l’action en nullité et en désistement, la prescription de dix ans entre présents et de vingt ans entre absents ? Ratification : 1. l’acte par lequel l’héritier devenu majeur ratifie les actes passés par l’exécuteur testamentaire, soit-il, pour être valable, énoncer expressément les actes ratifiés ? cet acte, s’il est sous signature privée, doit-il être fait double ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 12
1773-An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
71 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1512
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0532
BCU_Factums_G1513
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53252/BCU_Factums_G1512.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vic-sur-Cère (15258)
Vernet (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
abus de faiblesse
éviction
minorité
prescription
testaments
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53253/BCU_Factums_G1513.pdf
abddf4fe23abe7e076db5b3557e42cb1
PDF Text
Text
. i; > i ‘>. , ?
P RÉCI S EN RÉPONSE
PO U R
M. F r a n ç o i s
,
C A P E L L E , a n c ie n magistrat
in tim é e t a p p e l a n t
CONTRE
Sieur E
léazard
ROSTANG
ÉTIENNE
D A U D I N ,:appelans et intimés;
e n c o r e
A
ntoine
M
:11
D E S P R A T S , et co n tre dame M
S O B R IE R
guerite
D
c o n t r e
au d in
,
veuve
, appelans et intimés.
de
ar
Jean
T
:M)
, propriétaire d’un domaine qu’il a
acquis et payé depuis vingt-cinq ans, se voit obligé de
défendre à une demande en désistement formée par le
fils de sa venderesse. L e plan d’attaque, concerté avec
,
A
C a p e lle
�k
( 2 )
perfidie, présente des circonstances singulières. On voit
d’abord figurer D audin, bientôt après Desprats, qui
vient officieusement se substituer, sous le prétexte d’une
prétendue cession. Tous deux veulent détruire un acte
authentique, avec des assertions qui choquent la vrai
semblance et la vérité : mais au moins ni l’un ni l’autre
n’ont aucun risque ù courir. Daudin a toute sa fortune
en porte-feuille, Desprats n’a rien.à perdre s’il succombe
dans sa prétention; et enfin la dame D audin, venderesse,
a commencé à vendre tous ses biens pour rendi’e illusoire
la garantie qu’elle devroit à son acquéi-cur.
c T o u t ce que la calomnie peut inventer de plus absurde
a été mis en œuvre contre le sieur Capelle. La question
la plus simple est devenue monstrueuse dans ses détails;
et quand on a parcouru les volumes énormes de procé
dures , on est tout étonné de ne trouver autre chose qu’une
vente authentique exécutée pendant plus de vingt ans,
line ratification de cette même vente contre laquelle on
n’a réclamé que plus de dix ans après, et qu’on voudroit
détruire par le roman le plus1 grossier et le plus invi’aisemblable.
Il est cruel pour un homme d’honneur de se trouver
ainsi compromis avec- des fourbes ou avec des sots: mais
la cour fera justice de toutes ces allégations, et s’em
pressera d’ordonner l’exécution de deux actes solennels,
qui sont ù l’abri de toute critique.
FAITS.
• L e I er. mars 1 7 8 2 , 1a dam e So b rier, v e u v e D a u d i n ,
�(3 y
vendit à M . Cap elle un domaine appelé du Vernet. Elle a
consenti cette vente en son n o m , avec pleine et entière
garantie, et moyennant la somme de 21600 francs, dont
le contrat porte quittance.
' Ce domaine étoit alors en mauvais état ; les bâtimens
en ru in e , la plupart des héritages en jachère, nécessitoient les réparations les plus urgentes, ainsi que les soins
d'un maître vigilant.
O n a souvent répété dans le cours de la procédure
que ce domaine étoit à la convenance de M . Capelle,
qui le convoitoit depuis long-temps. Ce qu’il y a de vrai,
c’est que le sieur Capelle étoit déjà propriétaire dans le
môme lie u , mais qu’il étoit bien loin du désir d’aug
menter ses possessions dans un pays de montagnes, qui ne
présente qu’un terrain aride et difficile à exploiter ; il a
des propriétés plus agréables et plus utiles, et il ne se
détermina à acquérir qu’après les plus vives instances de
la dame Daudin.
M . Capelle ignoroit alors, q u o iq u ’on en dise, que
cette propriété résidoit sur la tête du sieur Daudin; il ne
connoissoit pas le testament d’Etienne DescafFres, grandoncle maternel de Daudin; il étoit au contraire tout simple
de penser que la dame Daudin avoit succédé à son oncle :
d’ailleurs , la garantie de la venderesse, qui ofïïoit une
solvabilité suffisante, devoit mettre l’acquéreur à l’abri
de toutes inquiétudes.
Depuis long-temps la dame Daudin disposoit des biens
de cette succession comme de sa chose propre. Elle avoit
ven d u , le 28 février 1775, à un sieur C o m b e , un do
maine situé u R olliac, moyennant la somme de 11000 fr. ;
A 2
�(4)
elle avoit également vendu, le n novembre 1780, en
qualité d'héritière de son oncle, une terre située au même
lieu de R o llia c, à un sieur Bertrand Greilh. Comment
dès-lors le sieur Capelle a u ro it-il hésité d’acquérir?
Daudin fils étoit le négociateur de la vente, et Daudin
avoit alors plus de vingt ans. Il devoit connoître les droits
qu’il avoit à ces im meubles, et il se gardoit bien d’en
faire part au sieur Capelle.
L ë sieur Capelle ne dissimulera pas qu’il ne paya point
la totalité du prix de la ven te, quoique le contrat porte
quittance. 11 ne compta que la somme de 6000 francs, et
souscrivit trois lettres de changes tirées sur l’Espinat et
D om ergue, négocians à Aurillac. Les deux premières
étoient payables à une époque très-rapprocliée, mais la
troisième avoit des termes plus reculés.
Cette vente une fois consommée, le sieur Daudin nous
apprend lui-même qu’il étoit alors fort épris des charmes
d’une jeune personne qu’il a associée à son sort. Sa mère
avoit sans doute des motifs püissaüs pour s’opposer ù ce
m ariage; et le sieur Daudin , dont la passion ne connoissoit pas de bornes, partit pour A v ig n o n , où il se crut
libre de se marier sans le consentement de sa mere: mais
il avoue qu’il employa des moyens bien extraordinaires,
et il confessé sa turpitude. Il enleva chez sa mère les
deniers qu’elle avoit i*eçus, ainsi que les lettres de
change souscrites par le sieur Capelle, dont la-première
n’étoit qu’à une échéance de quiznaine.
L a dame D audin , irritée contre un fils rebelle, se porta
à des extrém ités violentes ; elle rendit plainte contre lui :
cette plainte fut suivie d’informations dans lesquelles on
�3#
( 5)
pourroit découvrir des renseignemens utiles; mais les in
formations ont disparu du greffe.
Cependant la plainte a été suivie d’une sentence rendue
au bailliage de Vie,le 18 juillet 1782, et dont le sieur Capelle
est porteur. Cette sentence, rendue sur les conclusions du
ministère public , et sur le vu des charges et informations,
condamne Daudin fils à payer à sa mère la somme de
21000 francs; le condamne pareillement à lui remettre
trois signatures en blanc qu’elle lui avoit confiées*, faute
de ce, les déclare nulles, et défend à Daudin d’en faire
aucun usage, ainsi que des actes qui auroient été ou pourroient être écrits au-dessus d’icelles.
La dame Daudin est autorisée à faire sa'sir et arrêter
entre les mains de l’-Espinat et D om ergue, négocians à
A u rillac, et de Bordeaux , négociant à Paris , toutes les
sommes qu’ils doivent ou devront à D audin, tant à raison
des lettres de change par eux tirées, acceptées ou autre
m ent, avec défenses de s’en dessaisir en d’autres mains
que celles de la dame D au d in , à peine de payer deux fois.
Depuis cette aventure, qui eut une grande publicité,
Daudin a trouvé les moyens de se réconcilier avec sa
m è re , et de lui faire oublier ses torts.
A son retour, et parvenu à sa majorité , Daudin apprit
lui-m êm e au sieur Capelle le contenu du testament
d’Etienne Descafl'res, son grand-oncle ; et pour rassurer
entièrement l’acquéreur de sa m ère, il ratifia par acte sous
seing p riv é , d u 21 mars 1788, l’acte de vente du I er.
mars 1782.
L e sieur Cnpclle a joui paisiblement du domaine du
Vernet. 11 s’étoit élevé quelques discussions entre le sieur
ff*
�sn *
w *
...
( 6 )
Cnpelle et un sieur Sistrières, qui se prétendoit seigneur
du V e rn et, et vouloit, en cette qualité , exercer le retrait
féodal. M ais, par traité du 8 juin 1789, les parties transi
gèrent , et se départirent respectivement de toutes pré
tentions.
L e sieur Daudin fils paroît avoir voulu régler toutes
ses affaires avec la dame sa mère. O n voit q u e , par traité
du 7 octobre 1790, la dame Daudin reconnoît avoir reçu
de son fils une somme de 14100 francs ; celui-ci se charge
de payer à différçns créanciers de la mère une somme
de 6900 francs; et enfin la dame Daudin se reconnoît
débitrice envers son fils d’une somme de 27000 francs.
L e sieur Daudin fit quelques tentatives contre le sieur
v R ou pon , acquéreur de sa m ère, le 18 fructidor an 5 ; il
se pourvut en restitution, pour cause de lésion, contre
la vente que sa mère avoit consentie le 11 novembre 1780.
Ce genre de demande annonçoit que son fils reconnoissoit
à sa mère la capacité de vendre , puisque l’objet vendu
à Roupon provenoitde la succession de Descaffres. M ais,
comme toute demande en lésion étoit alors supprimée
par la loi du 14 fructidor an 3 , le sieur Daudin se vit
obligé d’abandonner une entreprise téméraire : il se dé
partit de sa demande, par traité du 2.5 brumaire an 6.
lies demandes en restitution ne pouvant faire fortune,
le sieur Daudin fit d’autres spéculations : il forma le projet
d’attaquer de nullité toutes les aliénations qui avoient été
faites par sa m ère, comme des biens Descaifres; mais sa
mère avoit contracté l’engagement personnel de le faire
v a lo ir , et il en résultoit contr’elle une pleine garantie.
Que lui en coûtoit-il pour rendre cette garantie illusoire ?
�(7)
Il avoit un empire absolu sur l’esprit de sa mère ; il la
détermina à vendi’e tout ce qu’elle possédoit, et il mit la
plus grande rapidité dans l’exécution de ce projet ; car
depuis le 7 nivôse an 6 , jusqu’au 11 du même m ois,
toutes les propriétés de sa mère furent aliénées. On voit
que Je 7 nivôse elle vend à.un nommé Geraud-Lavignè
^ une grange, jardin , et terres situés à T liié za c, moyen
nant 1910 francs; le lendemain 8 nivôse, autre vente à
Guillaume Vergne et consorts de difïerens immeubles
situés au même lie u , moyennant la somme de 18000 fr. ;
le même jo u r, autre vente à François B erger, pour là
somme de 3000 francs ; le lendemain 9 nivôse, elle vend
encore pour 6000 fr. d’immeubles a Antoine Delmas ; le
même jo u r, autre vente au sieur Rame , pour 5ooo f r . ;
le même jour , autre vente au sieur D elm as, moyennant
i 5oo francs; le même jo u r, autre vente à Jean A u rus j
moyennant 1000 francs; le même jo u r , autre vente à
Agnès R ig a l, moyennant 600 francs : enfin la dernière
vente qu’on connoisse, est du 11 nivôse an 6 ; elle est
faite encore à L avig n e, moyennant 800 francs. Toutes
ces ventes partielles excèdent la somme de 30000 francs ;
elles comprennent toutes les possessions de la dame veuve
Daudin ; elles ont toutes été soumises à la transcription ;
et le sieur C apelle, qui étoit bien loin de penser qu’on se
préparoit des moyens contre lu i, fut tranquille spectateur
de ces manœuvres perfides.
Daudin n’a rien voulu précipiter dans ces démarches,
pour les rendre plus utiles. Ce n’est que le 2 vendémiaire
an S , qu’il a consenti à un sieur Desprats une cession de
tous les droits successifs qu’il pouvoit amender comme
�(8)
-
héritier d’Etienne Descaffres ; et ce qui doit surtout
étonner, c’est que Daudin , qui prétend que le domaine
du V e rn e t, faisant partie de cette succession a été vendu
par sa mère à vil p rix , a cependant cédé tous ses droits
universels, même les rescindans et rescisoires immobiliers
moyennant une somme de 6000 francs.
Il est vrai que le sieur Desprats , son cédataire , n’est
qu’un personnage officieux et interposé , lié d’intérêts
avec Daudin , faisant la banque avec l u i , et connoissant parfaitement les valeurs et le taux de la place.
Quoi qu’il en soit, il est stipulé que l’officieux Desprats
pourra agir contre les tiers, au nom du cédant, et que
l ’acte vaudra procuration à cet effet.
D eux jours après , c’est-à-dire le 4 vendémiaire , le
sieur Daudin fait citer M . Capelle en désistement du
domaine du Vernet par lui acquis de la dame veuve
Daudin le I er. mars 1782; les parties comparoissent au
bureau de conciliation ; le sieur Capelle fils se pi’ésente
pour son père , et après avoir combattu victorieusement
une prétention aussi inconvenante , il argumente de la
ratification souscrite par le fils Daudin le 21 mars 1788.
Il est dressé procès verbal de non conciliation , et le
sieur Daudin n’alloit plus en avant. M . Capelle fut
obligé de le faire assigner le 8 brumaire an 8 , pour voir
dire que , sans s’arrêter à la demande en désistement par
lui formée , M . Capelle seroit gardé et maintenu dans
son acquisition.
L e ton d’assurance de M . Capelle déconcerta un ins
tant le sieur D audin; mais bientôt on fait paroître Des
prats , qui cite à son tour M . Capelle en désistement,
et
�Ô 74
( 9)
et qui déclare que quoiqu’il ait le d ro it, en vértu de sa
cession, de procéder sous le nom de son cédant, il doit
se mettre à découvert à raison de la ratification du 21 mars
1788 dont M . Capelle a excipé.
L e 17 brumaire an 8 , assignation de Desprats au sieur
Capelle, au tribunal civil de Saint-Flour. < 5 -■ 5
L e 1 5 floréal an 8, jugement contradictoire qui ordonne
que l’acte sous seing p riv é , portant ratification par Daudin,
sera déposé au greffe.
1
\
Bientôt après, le tribunal civil est! supprimé ; Daudin
traduit alors M . Capelle au tribunal d’Aurillac , par
exploit du 23 therm idor an 8 ; et le 7 fructidor su ivan t,
M . Capelle dépose au greffe du tribunal d’Aurillac l’acte
de ratification dont il s’a g it, conformément au jugement
du i 5 floréal précédent.
M . Capelle, à toutes fins, forma , le 9 frimaire an 9 ,
sa demande en recours et garantie contre la veuve Daudin,
sa venderesse.
L e 25 ventôse, M . Capelle présenta une requête pour
demander permission de faire interroger sur faits et arti
cles, le sieur D au d in , la dame Sobrier, sa m ère, et le
sieur Desprats. 11 obtint une ordonnance conforme , et
présenta les faits et articles sur lesquels il entendoit faire
interroger chacun de ces trois individus.
Il demandoit au sieur D au d in , i° . s’il avoit eu connoissance de la vente du domaine du V ern et, lorsqu’elle
fut consentie par sa mère ; 20. si depuis celte époque il
n avoit pas vu le sieur Capelle jouir constamment de ce
domaine , et y faire dos l’éparations considérables ; 3(\ s’il
connoissoit des dettes actuellement existantes de la sucB
�(: *9 )
cession d’Etienne Descaffres; 40. d’où provenoitla créance
d’environ 48000 francs qu’il avoit fait inscrire sur sa
mère ; 5 °. s’il éloit vrai qu’il eût vendu ses créances mobi
lières au sieur Chaimac des Chazeaux.
Pou r Ja dame Sobrier , il lui dem andoit, i° . si elle
avoit connoissance de quelques dettes qui fussent encore
dues par la succession d ’Etienne Descaffres; 2°. pourquoi,
à différentes époques, elle a souscrit des actes qui la cons
tituent débitrice envers son fils de sommes considérables,
et d’où provenoient ces sommes; 30. si elle savoit que
son fils, eut vendu au sieur Desprats la succession de Descaifres, de laquelle dépendoit le domaine du Vernet par
elle vendu au sieur Capelle le i er. mars 178 2; 40. si
elle avoit connoissance que çon fils eût vendu ses effets
mobiliers.
A l’égard du sieur Desprats, M . Capelle désiroit sayoir,
i ° . si à l’époque de la vente à lui consentie par le sieur
D a u d in , il ne savoit pas que depuis long-temps le sieur
Capelle étoit acquéreur et possesseur du domaine du
V ern et; 20. s’il connoissoit aucunes dettes passives de la
succession d’EtienneDescaifres ; 30. d’expliquer comment,
après avoir vendu ses biens patrim oniaux de Thiézac , il
avoit acheté un petit bien dans la commune de V i e ,
sujet à contestation , éloigné de son domicile et de ses
nouvelles acquisitions.
L ’interrogatoire a eu lieu le 2 germinal an 9. Daudin
fils a répondu affirmativement qu’il connoissoit la vente
consentie par sa m ère; il a également vu jouir le sieur
Capelle du domaine du V ern et, mais il ignore s’il a été
fait des réparations, parce qu’il n’est pas allé dans ce
�3 /6
C ii )
domaine depuis dix-neuf ans : il dit connoître des dettes
encore existantes sur la succession Descaffres, mais'il n’est
pas en état de déclarer à quelle somme elles peuvent se
monter.
Il convient avoir pour 48000 francs de créances contre
sa mère ; elles résultent de diiférens actes souscrits en sa
faveur, qui ont eu pour motifs des arrangemens de famille
étrangers au sieur Capelle, et dont il ne doit lui donner
aucune connoissance : au surplus, lorsqu’il a fait sous
crire ces actes à sa m ère, ce n’étoit pas dans l’intention
de les opposer au sieur Capelle.
Il déclare avoir vendu ses créances mobilières au sieur
Chaunac,son beau-frère. Lorsqu’il a cédé au sieur Désprats
les droits qu’il amendoit dans la succession Descaffres, il
ignoroit l’existence de la ratification dont il s’agit : le
sieur Capelle en étoit nanti, disoit-il, depuis dix-neuf ans.
S’il a donné à si bas p tix ses droits immobiliers, c’est
que l’acquisition dont se chargeoit Desprats étoit trèsincertaine , et dépendoit d’un événement litigieux envers
une personne très-entendue en procédure et de difficile
discussion. L e sieur Desprats, qui prenoit la vente à ses
périls, risques et fortune, n’avoit pas voulu donner une
plus forte somme ; et le sieur Daudin s’étoit vu obligé
d’accepter ses offres à cause des besoins où il étoit dans
ce moment.
O n demande à Daudin pourquoi., malgré toutes les
ventes que sa mère a consenties, il n’a pas été payé des
sommes qu’elle lui de voit.
Il repond que ces ventes n’avoient pour objet que des
arrangemens de fam ille, et qu’elles n’ont jamais été sousB a
�crites par sa mère dans l’intention de les opposer au sieur
Capelle. C’est encore par des motifs d’arrangemens de
famille étrangers au sieur Capelle, qu’il a donné ù Chaunac
ses créances mobilières pour une somme de ioooo francs,
quoique celles qu’il a contre sa mère se montent à 48000 fr.
Si le sieur Capelle a été cité en son nom , de lui D audin,
■'la vérité est néanmoins que le sieur Desprats étoit le pour
suivant sous le nom .de D audin, en vertu d’une clause
-insérée à cet effet dans la cession. IL convient avoir payé
les frais de la vente mobilière par lui consentie à Chaunac,
mais c’est une avance qu’il a faite pour son acquéreur.
A u surplus, il ne défend dans la cause que pour lu i; il
s’étoit d’abord adressé à M e. Guittard pour le défendre ,
.mais celui-ci se trouva chargé par le sieur Capelle : il
choisit alors M e. Courbaise; et comme ses intérêts étoient
différens de ceux de Desprats, Courbaise, chargé pour
Desprats , a remis le dossier de ce dernier.
- Interrogé s i , lors de la cession par lui consentie à
Desprats, il n’étoit pas créancier du même Desprats d’une
: somme considérable, il répond que depuis plus de dix
ans il a fait des affaires avec le sieur Desprats; que tantôt
ils ont été débiteurs et créanciers mutuels, mais il ne se
: rappelle pas dans: ce moment si u cette epoque il étoit*
, créancier ou débiteur.
La dame Sobrier, veuve D audin, a connoissance qu’il
, est encore du quelques sommes à la succession d’Etienne
;.Descaffres ; elle convient avoir souscrit des actes qui la
constituent débitrice de son fils de sommes considérables,
;mais c’est pour certains arrangemens et conventions de
-famille dont elle ne doit compte à personne; elle n’a
�/
( 13 )
aucune connoissance des ventes qu’a faites son fils à
Desprats ou à Chaunac; elle a payé des legs et des dettes
de la succession Descaff'res, elle en a également payé pour
la succession de son mari ; mais ces payemens ayant été
faits à. différentes époques, elle n’en a pas conservé la
m ém oire, et ne peut en dire le montant. Elle désavoue
que son fils ait reçu le montant des ventes qu’elle a faites
de ses propres biens ; c’est elle qui a reçu et fourni quit
tance : elle convient que Chaunac lui a fait notifier la
vente que son fils lui a consentie de ses créances mobi
lières. Il n’est pas étonnant qu’elle n’ait point payé ses
dettes, quoiqu’elle ait vendu ses propres biens : les cir
constances de la révolution lui ont occasionné des dé
penses et des sacrifices considérables, et ont absorbé ses
fonds, de sorte qu’elle a été dans l’impossibilité d’acquitter
ses dettes.
V ien t ensuite l’interrogatoire de Desprats. Lorsqu’il
a acquis les droits immobiliers du sieur D audin, il avoit
ouï dire que le sieur Capelle jouissoit du domaine du
Yernet en vertu d’un acte n u l, comme n’ayant pas
acquis du vrai propriétaire. Il a oui dire que la suc
cession DescafFres étoit grevée de quelques dettes, mais
personnellement il n’en avoit point de connoissance par
faite.
On lui demande par quel m otif il a vendu ses biens
patrimoniaux de T h iéza c, pour acquérir un petit bien
dans la commune de V i e , sujet à contestation, éloigné de
son domicile et de ses nouvelles acquisitions.
11 trouve fort plaisant qu’on lui fasse une pareille ques
tion , il n’a presque rien vendu de Thiézac en compa-
�C *4 )
raison de ce qui lui reste ; et en achetant ce bien du
V e r n e t, il étoit certain de l’acheter du vrai propriétaire:
cependant s’il n’en a pas donné davantage, c’est parce
qu’il sa voit qu’il y avoit un procès à soutenir contre le '
sieur Capelle , et qu’il y avoit quelque difficulté d’arra
cher d’entrer ses mains un bien qu’il avoit su se pro
curer. Il déclare d’ailleurs n’avoir jamais eu connoissance
de la ratification consentie par Daudin fils ; il ignoroit
même si elle étoit enregistrée ou n o n , et il n’a su que
long-temps après son acquisition qu’elle n’étoit pas enre
gistrée. Il convient que les frais de vente ont été avancés
par Daudin fils ; mais il les lui a remboursés. Il ne de voit
pas grand chose à Daudin à l’époque de la cession ; il
a des comptes courans avec Daudin depuis longues années,
et se trouvant tantôt débiteur, tantôt créancier, il ne
peut pas fixer le montant de ce qu’il devoit lorsqu’il a
acquis.
Si le sieur Capelle a été assigné sous le nom de D audin,
c’est parce que Desprats s’étoit réservé cette faculté lors
de la vente ; mais voyant qu’il s’élevoit des contestations
entre les sieurs Daudin et C apelle, il avoit agi en son
propre et privé nom ; enfin il a été libi*e de faire trans
crire sa vente quand il l’a jugé à propos.
V oilà tout ce qu’ont produit ces différons interrogatoires.
O n voit qu’il y avoit un plan de réponses concerté entre
trois individus qui ne font qu’un. Cependant il résulte
de ces interrogatoires que la dame Daudin a vendu tous
ses biens sans payer aucune dette ; et quoiqu’elle ne pos
sède plus rien , elle doit encore 48000 francs à son fils;
elle est également débitrice de sommes considérables
�2>zo
( i5 )
envers Elisabeth et Louise Sobrier , et différens autres
particuliers.
Desprats n’a pas honte de s’avouer cédataire de droits
litigieux -, il a fait la loi à Daudin , quoiqu’il fût son débi
teur ; il n’a voulu donner qu’un prix m odique, parce
qu’il avoit à soutenir un procès , et il a été assez maladroit
pour ne pas s’apercevoir qu’on pourroit l’écarter par une
subrogation d’action, si d’ailleurs le sieur Capelle avoit
quelques risques à courir.
L e 2Ô brumaire an u , Daudin a reconnu l’écriture
et signature mises et apposées'au bas de l’acte sous seing
privé , portant ratification ; mais il a désavoué avoir écrit
en chiffres la date du 21 mars 1788 : il a demandé que
cette date fût soumise à une vérification. Un jugement
du i er. pluviôse suivant l’a ainsi ordonné : mais le sieur
Capelle a formé opposition à ce jugem ent, qui étoit abso
lument inutile ; il est convenu au procès que cette date
n’est pas écrite de la main de D au d in , et cette circons
tance est fort indifférente dans la cause.
Bientôt après on a vu éclore un tissu d’absurdités. L e
sieur Daudin a prétendu qu’on ne pouvoit lui opposer
la vente consentie par sa mère ; que cet acte lui étoit
étranger. Sa mère à la vérité avoit le pouvoir de vendre,
par le testament d’Etienne Descaffres, mais elle ne pouvoit le faire qu’i\ la charge de l’emploi ; et le sieur Capelle
etoit hors d’état d’établir que la mère eût fait un emploi
utile des deniers de cette vente.
La ratification personnelle de Daudin n’étoit, suivant
lu i, qu’une chimère ; il convient qu’il étoit majeur le 2
mars 1788 : mais le sieur G»pelle avoit cette ratification
jtf;
�(16\
dans les mains depuis le premier moment dé la vente;
il avoit eu la précaution de faire laisser la date en blanc,
et il lui a été facile de remplir ce blanc comme il a voulu.
Cette date a été visiblement mise après coup ; les chif
fres et le mot mars étoient écrits d’une encre et d’une
main différentes. Pour affoiblir le contraste, on avoit eu
la précaution de repasser la plume sur les lettres du corps
de l’acte, et de leur donner la teinte de l’encre de la
date ; mais la plume avec laquelle on avoit écrit la date
s’est trouvée plus fine que celle qui avoit servi à écrire
le corps de l’acte , et a laissé à découvert une partie de
l’ancienne écriture. Il paroissoit donc deux encres, con
tinue Daudin , et cette circonstance doit annuller la rati
fication ; elle est d’ailleurs donnée en minorité ; elle est
yague et générale ; elle n’a pas été faite double.
Enfin le sieur Daudin a dit que le sieur Capelle n’avoit
jamais p a y é , sur le pi'ix de la ven te, qu’une somme de
13800 f r . , dont le sieur Daudin a offert de faire raison.
L e sieur Capelle s’étoit servi de blancs seings que Daudin
avoit dérobés à sa mère , pour se donner une quittance du
surplus du prix de la vente.
C’est ainsi que Daudin veut détruire des actes authen
tiques.
'
Desprats a soutenu la sincérité de sa cession ; il a dit
que le sieur Capelle étoit sans intérêt pour la contester,
parce que s’il étoit propriétaire légitime du domaine du
V ern et, Desprats ne pourroit pas le lui ôter en vertu de
sa cession; si, au contraire, l’acte de 1782 est n u l , peu
importe au sieur Capelle que ce soit Desprats ou Daudin
qui rentre dans le domaine du Vernet.
La
�( *7 )
La dame veuve Daudin , de sa p a rt, a soutenu qu’eTle
ne devoit aucune garantie au sieur Capelle , parce qu’il
avoit connu le vice de la.vvüte lorsqu’il se l’é'toit fuit
consentir’, et qu’il avoit lui-même coopéré à la fraude.
L e sieur Capelle s’est défendu* avec toute la dignité qui
lui convenoit; méprisant les injures et les calomnies , il
a dit qu’il étoit:-porteur d’une vente valable’,’ ratifiée par
le fils , vrai propriétaire, et en connoissance dé Caùse. Le
contrat de vente porte quittance de l’entier-pn^’ i'il tn a
payé le montant en deniers du en lettres dé cluhige:1Les
'blancs seings que le fils Daudin avoue1avoir' dérobés h
sa m ère, ne pouvoient être d’aucune utilité au sieur
Capelle; il n’avoit pas besoin d’autre quittance que de
celle qui étoit portée au contrat de vente : une quittancé
particulière de la mère ne l’auroit^aà dispensé de payer
ses lettres de change à leur échéancé; Le sieur'Daudin fils
devroit donc imaginer quelque chose de plusVraisemblable.
Sa ratification n’avoit été donnée-qu’à sa'majorité : il-est
vrai que la date n’etoit pas écrito de sà main } mais c'étoit
à lui à se reprocher cette^ omission du sn négligence; En
supposant que la ratification eût été faite par lui en mi
norité, il auroit dû au moins revenir, dans lcs dix ans de
sa m ajorité, contre un engagement téméraire , ou contre
la surprise qu’il disoit faite à sa bonne foi. Cependant'H
avoit atteint plus de trente-six ans lorsqu’il a attaqué’,
pour la première fois le sieur'Capelle : il étoit donc abso
lument non recevable , quelque différence ‘qù’il puisse y
'avoir dans l’écriture de là date ou de celle de la ratifica
tion. Cet acte sous seing;privé n’avoit rien de vague ni
d’indéterminé, puisqu’il së rupportoit au seul objet vendu,
C
�( 18 )
au domaine du Vernet exclusivement. La ratification
n’avoit pas besoin d’être faite double, puisqu’elle ne contenoit pas d’engagement réciproque. Ce n’est point avec
des assertions ridicules qu’on anéantit des actes solennels;
mais dès qu’au mépris de sa. ratification le sieur Daudin
s’étoit permis de vendre ses droits à Desprats, il devenoit
garant de sa propre demande et de celle' de Desprats ,
-comme^teillionataire ;,et le sieur. Çapelle conclut expres
sément à cette garantie.
)
!
MaisjComment le sieux* Daudin étoit-il assez maladroit,
contre la teneur des actes, de soutenir que le sieur Capdle
n’avoit payé qu’une somme de 13800 fr. pour le prix de
sa vente, lorsque la dame.Daudin elle-même avoit fait
condamner son fils à lui payer la somme de 21000 francs,
par la sentence du 18 juillet, 1782 ? Quelle contradiction
ne résultoit-il pas du système de défense embrassé par le
sieur Daudin?
, Enfin, lesieur Capejle jouisçoit du domaine du Vernet,
*
i
avec titre et bonne fo i, depyis plus de dix ans; dès-lors
,il avoit acquis la prescription, puisque ce domaine est
situé en pays de droit écrit de la Haute-Auvergne.
Desprats ne valoit pas la peine qu’on daignât jeter un
i;egai*d,1sur sa prétention. Ce n’étoit qu’un p rête-n om
¡ou un vil cessionnaire, vilis htiurn redernptor, pour
se servir des expressions de la loi ; et sa cession ne pouvoit avoir aucune préférence sur la vente consentie au
sieur Cnpçlle.,
v
La dame, Daudin avoit vcnc]u avec pleine et entière
garantie. On lui faisoit jpuer,un rôle bien ridicule, lors
qu’elle cojivenqit avoir frauduleusement.vendu; elle ne
�»
( r9 )
pou voit argumenter de sa propre turpitiide , pour* sè d'f>~
penser de la garantie subsidiaire à‘ laquelle le sieur
Capelle avoit conclu contre tillef.
^ i (’ :i
L e sieur Daudin senti t ' touië1 la'1force ' de l’argitinent
résultant de la prescription dé dix ans! Pour s’y soustraire
il voulut se faire considérer comme une victime de1 la
révolution ; il prétendit avoir été mis en réclusion , et
invoqua la disposition de la ‘loi du 16 germinal ari 3 '
qui suspend là;prescription en faveur des détenu^/depiiis
le mandat d’arrêt jusqu’à la mise en liberté.
1
En cet état, la cause portée à l’audience-du tribunal
d’A urillac, le 1 r germinal an 1 1 , intervint jugement'eontradictoire',! q u i, en déclarant ihiïïe l a ‘vente fdu r'ermars 1782 , ainsi que la ratification du J2i mars 1788,
ordonne que le testament d’Etienne Descaffres,-ainsi que
la cession1 consentie par Daudin à Desprats, le 2 vendé
miaire an 8, seront exécutés suivant leur forme et teneur.
Le- sieur Capelle est condamne àtsë désister en faveur de
Desprats , céd^taire/dii domaine du Vernét •'comme fai
sait partie de là succession’ d’Ëticnne Descaffres, dont
Daudin est héritier , avec restitution des fruits et intérêts
d’iceux, i\ compter de la demande judiciaire,' ainsi que
des dégradations , s’il y en a ; t2t l e 1sieur Capelle est
condamne aux dépens envers’ Daudin et Desprats.
Î
*
v*»
• ' ** *
^a veuve Daudin est condam née'à; garantir lé sieur
Capelle des condamnations contre lui prononcées, avec
înterets et dépens; en conséquence , à rendre et rem
bourser au sieur Capelle la somme de 21660 francs, prix
princivil de la vente, les frais e t ’loyaux coûts d’icelle ,
avec intérêts du tout ¿ compter d e'la'-demande ; elle
C 2
�( 20 )
est condamnée aux dommages-intérêts résultans de l’évic
tion et de la vente faite par Capelle de la maison qu’il
avoit à son domaine du V ernet; elle est aussi condamnée
à payer les dommages-intérêts dûs au fermier pour la
résiliation de son b a il, suivant l'estimation qui en sera
faite par experts, lesquels estimeront en même temps
les dégradations, réparations et améliorations qui peu
vent avoir été faites par le sieur Capelle.
j ,
Daudin est condamné, suivant ses offres, à rendreet rem
bourser à Capelle, sur et en tant moins du p rix delà vente ,
la somme de 13800 francs, ainsi que les réparations et
améliorations, suivant l’estimation qui en sera faite, sauf
à lui à se régler avec Desprats pour la valeur des amé
liorations dont ce dernier doit profiter, et dont il peut
être tenu.
Sur la demande en garantie formée parle sieur Capelle
contre le sieur D audin, stellionataire, il est ordonné que
les parties contesteront plus amplement; la dame Daudin
est condamnée aux dépens envers toutes les parties.
Il-est indispensable de connoître quelques-uns des.
motifs de ce jugem ent, du moins quant à la nullité de
la vente et de la ratification.
Les premiers juges disent, d’une.part, que les biens
des mineurs ne peuvent être vendus sans observer, les
formalités prescrites; et que, d’apres les arrêts de règle
m ent, un testateur ne peut autoriser l’exécuteur testa
mentaire à vendre : ce seroit ordonner que les lois ne
seront pas exécutées.
Relativement à la ratification, toute vérification est
iuutile, dès que le sieur Capelle convient que la date n’est
�pas écrite de la même encre ni de là même main; mais
cette ratification est nulle, parce que Daudin a seulement
ratifié les actes que sa 'mère avoit consentis en faveur
du sieur C ap elle, relativement au domaine du Y ern et,
et que, d’après l’avis de Perrézius , toute ratification doit
être expresse et nominative. Il semble qu’elle s’applique
à plusieurs actes , tandis qu’il n’y a qu’un seul contrat
de vente; et la circonstance que la date n’est pas écrité
de la même main peut faire présumer que cette ratifi
cation avoit été donnée par Daudin avant la vente con
sentie par sa mère.
La vente de la mère n’avoit pu opérer aucune trans
lation de propriété j mais une simple obligation de
garantie.
1
L a ratification n’étant p'as faite double est insuffisante,
dès qu’elle est sous seing privé.
La prescription avec titre et bonne foi ne s’acquiert
que par dix ans entre présens , et vingt entre absens.
O n regarde comme absens ceux qui habitent dans des
ressorts de tribunaux différens.
Jusqu’à l’installation du tribunal de district d’A u rillac,
Daudin habitoit dans le ressort du bailliage de V i e , et
Capelle dans celui d’Aurillac.
Daudin a été majeur le 24 septembre 1787: jusqu’au
n décembre 1790, époque de l’installation du tribunal
de district, il ne s’est écoulé que trois ans neuf mois et
neuf jours, qui, réduits à m oitié, font un an sept mois et
vingt jours.
Depuis le 11 décembre 1790 , jusqu’au 4 vendémiaire
an 8 , il ne s’est écoulé que huit ans neuf mois et quinze
�( 22 )
jours, ce qui feroit en tout dix ans cinq mois et cinq
jours. Mais Daudin a été reclu comme suspect le 24
messidor an 2 ; il n’est sorti qu’en vertu d’un arrêté dit
comité de sûreté générale , du 17 pluviôse un 3 : il faut
distraire du temps utile celui qui s’est écoulé, pendant si
détention jusqu’à la publication de la l o i , qui est du 4
floréal an 3 ; alors il n’a couru que neuf ans cinq mois
et vingt-cinq jou rs, et Daudin s’est pourvu en temps
utile.
.
- Tels sont les seuls motifs qui ont paru utiles à rappeler ;
les autres font un volume assez considérable : mais ce
seroit entrer dans des détails bien fastidieux , si on vouloit entreprendre de les analiser.
Toutes les parties se sont rendues appelantes de ce juge
m ent; la dame Sobrier,' véuve Daudin, par acte du 13
messidor an 1 1 , interjette a p p el, en ce qu’elle est con
damnée à rembourser le prix de la vente du i er. mars
1782, quoique ce prix n’ait pas été reçu par e lle , mais
par son fils ; 20. en ce qu’elle a été condamnée en des
dommages-intérêts résultans de l’inexécution d’une vente,
lors de laquelle elle fut victime de la surprise pratiquée
envers elle par le sieur Capelle, qui connoissoit le vice de
la vente.
'
, Daudin , par acte du i 5 du même mois de messidor
an 1 1 , a interjeté appel de ce jugement, en ce que ,
par une disposition subséquente, il est dit que les par
ties contesteront plus amplement sur une demande engarantie solidaire que le sieur Capelle avoit cru devoir
former contre lui.
* Il n’y a pas jusqu’à Desprats qui ne sdsoit rendu aussi
�S %7
( 23 ) ,
appelant, par acte du lendemain 16 messidor, en ce que
le sieur Capelle n’a été condamné à restituer les jouis
sances du domaine d u V ern et qu’à compter du jour de
la demande judiciaire, tandis que ces jouissances lui sont
dues depuis l’indue détention du sieur Capelle, qui re
monte au i er. mars 1782.
E n fin, le 27 du même mois de messidor, M . Capelle s’est
aussi rendu appelant de ce jugem ent, pour les torts et
griefs qu’il a reçus par icelui, et qu’il se propose de dé
duire devant la cour. •
r
T e l est l’état de la cause. Daudin a cru devoir donner
une grande publicité à ses moyens, dans un memoire
qu’il a fait notifier, et auquel on va s’occuper de répon
dre sommairement.
L e sieur Daudin a étrangement abusé du droit d’écrire;
il s’est livré à des personnalités injurieuses envers un
ancien magistrat qui jou it, à juste titre, de l’estime pu
blique. 11 voudroit l’associer à ses extravagances et à ses
folies. Suivant lu i, M . Capelle auroit été le premier à
favoriser les écarts d’un jeune insensé qui oublioit tous
ses devoirs, le respect qu’il de voit à sa mère , sacrifioit
sa fortune et toutes les convenances à une passion dé
sordonnée. 11 avoit besoin d’argent pour épouser la jeune
personne dont il étoit épris, et il voudroit faire croire
que M. Capelle a profité de cette circonstance pour ac
quérir à vil prix un domaine qui lui convenoit. Il a
surpris des blancs seings à sa m ère, destinés à faciliter
la libération de M. Capelle. Mais comment cela est-il
possible, lorsque le contrat de vente consenti par sa inère
�'( M ) .
contenoit quittance de la totalité du prix? et quelle pou voit
' être la destination* de ces blancs seings? ■>
'•'C ’est trop s’arrêter à de pâveilles abs'urdités. M . Capelle
est porteur'd'une vente authentique,'au ier. jnars iy b s ,
d’après'laquelle il résulte que le s '21600 francs ont été
payés comptant ; et rien ne peut détruire un acte de cette
nature.
.1 . .;
Si le sieur Daudin a enlevé les lettres de changes sous
crites' pariM .- Capelle' au .profit dé’sa mère , : ainsi que
l’argent qu’elle avoit reçu, le siëur :Daudin l’avoit déjà
destiné aux frais de son voyage et de son établissement.
La dame Daudin alors n’accusa que son fils; c’est contre
lui seul qu’elle rendit plainte ; et jamais M . Capelle ne
fut compromis ni nommé dans cette- accusation.
La vente: consentie à M. Capelle étoit tellement pu
b liq u e, la sincérité en étoit tellement reconnue, que le
sieur Sistrières, se prétendant seigneur du V ern et, voulut
exercer le retrait féodal : mais comme le p rix de la vente
paroissoit exagéré au sieur de Sistrières, il imagina qu’on
l’avoit enflé pour empêcher l’eXereice de son droit; et
c’est à ce sujet que fut écrite la lettre de Daudin ; lettre
qui n’avoit de rapport qu’à la prétention du sieur de
Sistrières; lettre dont il sera encore question, puisqu’on
veut en tirer des inductions contre M . Capelle.
Pour! répondre5à ‘toutes les allégations de D audin,
M . Capelle doit se 1borner à d ire, 1^. qu’il est nanti
d’une vente consentie par la dame veuve Daudin avec
pleine et entière garantie; que cette vente doit avoir son
exécution, puisqu’elle a été-suivie d’une ratification-de
Daudin
�( 25 )
Daudin fils, propriétaire de l’objet vendu. Cette ratifi
cation, donnée en majorité, écarte toutes les prétentions
du sieur Daudin. E û t-il été mineur lorsqu’il a ratifié,
il n’a voit que dix ans pour se pourvoir con tre son enga
gement , d’après l’article 134 de l’ordonnance de 1539.
11 a laissé écouler plus de dix ans de majorité sans ré
clamer ; d’un autre côté, M . Capelle a joui avec titre et
bonne foi pendant plus de dix ans; et la prescription de
dix ans entre présens est admise en pays de droit écrit
de la Haute-Auvergnc.
Quels sont les argumens de Daudin pour i*epousser
des moyens aussi victorieux ? Il prétend, en premier
lie u , que la vente consentie par la dame veuve Daudin
est infectée d’une nullité absolue et viscérale. L a dame
Daudin 11’étoit pas propriétaire ; elle a vendu tout à la
fois, et la chose d’autrui, et les biens d’un mineur; elle
les a aliénés sans observer aucune des formalités pres
crites pour la vente des biens de m ineur; et d ès-lors
cette vente ne peut produire aucun effet.
Cette objection est absolument frivole. D ’aboi’d ce
seroit une grande question que celle de savoir s’il est
vrai que la dame Daudin ait vendu la chose d’autrui.
L e testament du sieur Descaffres étoit évidemment nul :
le testateur étoit atteint d’une cécité com plète, ce qui
obligeoit d’appeler un témoin de plus pour la validité
du testament ; et cette formalité est expressément recom
mandée, à peine de nullité, par l’ordonnance de 173^*
Si ce testament est n u l, la dame D au d in , héritière de
son oncle, étoit propriétaire exclusive du domaine dont
il s’a git, et par conséquent elle a pu aliéner valableD
�( a« )
frient. M . Capelle ne donnera pus plus de développe
m ent, quant à présent, ù ce premier moyen de nullité;
mais il observe que par ce même acte la dame Daudin
âvoit le pouvoir de vendre les biens du testateur ; elLe
avoit la faculté de vendre ou de délaisser des biens en
payement des dettes de la succession. Cette faculté n’a
rien de contraire aux lois ni à l’ordre public. La dame
D au d in , en vendant, a acquitté toutes les dettes de la
succession de son oncle, et il ne reste plus aucun créan
cier : c’est en vertu de ce pouvoir qu’elle a vendu à
M . Capelle; et, d’après le principe qu’on est toujours
présumç agir aux qualités qui peuvent rendre un acte
valable, il faudrait décider que le contrat de 1782 doit
avoir son effet.
Si la dame Daudin a vendu en son nom personnel,
personne n’ignore qu’on peut vendre la chose d’autrui
avec pleine et entière garantie; et la dame D audin, en
vendant de cette m anière, n’a pas eu besoin d’observer
les règles prescrites pour les ventes des biens des mineurs.
Il est vrai que le propriétaire de la chose vendue peut
dans ce cas la réclam er, et que l’éviction de l’acquéreur
ne donne lieu qu’à une indemnité en deniers contre le
vendeur-: mais comme le sieur Daudin a ratifié la vente
Consentie par sa m èi'c, il est lui-meme non recevable ;
il a contracté l’engagement personnel de la faire valoir.
L e sieur Daudin , embarrassé de cette ratification ,
s’attache principalement à soutenir qu’elle est nulle. Il
■est forcé de convenir que cet acte est écrit en entier de
sa m ain, et que la signature est la sienne; il n’y a que
la date qui ait été mise d?une main étrangère. Mais est-ce
�( *7 )
au sieur Capelle que Daudin peut faire un reproche, ou
de l’omission de la date, ou de ce qu’elle a été écrite
d’une main étrangère? L e sieur Capelle a reçu cette rati
fication telle qu’elle lui a été donnée, et n’a besoin de
descendre à aucune justification, parce que c’est à Daudin
à se reprocher, ou de l’avoir omise, ou de l’avoir fait
écrire par un tiers. Les actes sous seing privé ont la même
force que les actes authentiques; ils obligent irrévocable
ment les personnes qui les ont signés, et la foi leur est
due jusqu’à l’inscription de faux.
Q u’importe qu’on ait repassé de l’encre plus ou moins
noire sur l'ancienne écriture, pourvu qu’on n’ait point
altéré ou changé les termes dont s’etoit servi le sieur
Daudin : ces détails minutieux ne doivent point occuper.
Ce n’est point au sieur Capelle qu’on peut reprocher
d’avoir repassé une plume plus line, ou une encre plus
noire; c’eût été un soin inutile ou une grossière mala
dresse de la part d’un homme que D audin, Desprats,
et la veuve Daudin s’accordent à représenter comme trèsadroit et très-délié dans,les affaires.
Dans tous les cas, cette encre, cette plume ne détruisent
pas la ratification, n’empêchent pas qu’elle ne soit écrite
et signée par le sieur Daudin : ce ne pourroit être que
lui qui auroit fait ces altérations, pour se ménager à
l’avance des moyens d’attaquer cet acte. L e sieur Capelle
a dû la prendre comme on la lui a donnée, et n’est pas
présumé s’être amusé à répandre de l’encre plus noire
avec une plume plus fine, dès que cette précaution étoit
inutile.
L e sieur Daudin n’est pas plus heureux en rapportant
D 2
�( î8 )
cette date au temps de sa minorité. 11 avoit vingt ans lors
de la vente; il étoit par conséquent émancipé : dès qu’il
est domicilié en pays de droit écrit, la vente, s’il l’avoit
lui-même consentie, n’eût pas été nulle; elle n’eût été
que rescindable dans les dix ans de sa majorité. Il a donc
pu ratifier, comme il auroit pu vendre ; et il a dû se
pourvoir contre sa ratification dans les dix ans à partir
de sa majorité.
Mais le sieur Daudin ne se tient pas pour battu ; il
prétend que sa ratification ne seroit pas moins sans effet,
quand on supposerait qu’elle a été consentie en majorité.
E lle n’a pas été faite double; elle ne contient point
de prix ; elle est vague et générale, et ne s’applique pas
plus à la vente de 1782 qu’à tout autre acte.
L a ratification n’est pas faite double. Il n’en étoit nul
lement besoin. Les actes sous seing privé ne doivent être
faits doubles qu’autant qu’ils contiennent des conventions
synallagmatiques ou des engagemens réciproques; e t, par
exemple , lorsqu’il s’agit d’une v en te , s’il est imposé
quelques conditions à l’acquéreur, si le prix n’est pas
payé comptant, il y a nécessité que l’acte soit fait double,
parce que le vendeur contracte l’obligation de garantir
la chose vendue, et l’acquéreur s’engage, ou à exécuter
la condition, ou à payer le prix.
Mais lorsque la vente est pure et simple, que le ven
deur reconnoît avoir reçu la totalité du prix , alors il
n’y a plus d’engagement réciproque, l’acquéreur a rem
pli fous les siens; et la vente sous seing p rivé, quoique
non faite double, n’en est pas moins valable. Tels sont
les principes biens constans à cet égard; principes adoptés
�* 9 *
( 29 )
par la jurisprudence de la cour d’appel, qui a admis cette
distinction par plusieurs arrets, et notamment dans la
cause du sieur Berthier, de Brioude, pour lequel plaidoit
M e. P ages, de Riom.
D ’un autre côté, l’acte eût-il contenu des conventions
synallagmatiques, que le sieur Daudin ne pourroit plus(
opposer ce vice, dès qu’il a exécuté la convention portée
dans l’acte de ratification dont il s’agit. C’est ce qui est
textuellement décidé par l’article 1325 du Code c iv il,
qui porte que le défaut de mention que les originaux
ont été faits doubles, triples, etc., ne peut être opposé
par celui qui a exécuté de sa part la convention portée
dans l’acte.
L e sieur Daudin se trouve dans ces deux hypothèses.
D ’une part, sa ratification ne contenoit qu’un engage
ment personnel, le sieur Capelle n’en contractoit aucun
envers lui ; l’acte n’étoit donc pas synallagmatique : de
l’autre, le sieur Daudin a exécuté cette ratification, en
gardant le silence pendant plus de dix ans de majorité :
il 11e pourroit donc plus opposer ce prétendu vice, quand
bien même l’acte eût renfermé des engagemens réci
proques.
Et qu’on ne dise pas que le Code civil ne doit point
s’appliquer à l’espèce particulière. D ’une part, le Code
ne fait que rappeler les anciens principes; et de l’autre,
l’action étant encore entière et indécise sur la question,
le Code civil est la seule loi qu’on doive invoquer.
I-a ratification ne contient point de prix. Mais une
ratification est un acte de bonne foi qui ne fait que
confirmer un autre qui précèd e, et dout le prix se
�C 30 )
trouve dans la loyauté de celui qui le souscrit. D ’un
autre côté, le sieur Daudin n’étoit-il pas héritier de
sa m ère? ne devoit-il pas savoir qu’une demande en
éviction par lui formée auroit reflué contre sa mère ;
qu’il en seroit résulté une garantie coûteuse qui en
traîne des dommages-intérôts? Il a dû pour son intérêt
personnel confirmer la vente consentie par sa mère; il
l’a dû par respect et déférence pour elle : c’est autant
de procédé que de devoir; et le sieur Daudin l’a dit
d’autunt mieux qu’il convient avoir profité du prix de
la vente : comment oseroit-il donc prétendre que sa rati
fication a été faite sans prix.
E lle est vague et générale; et sur ce point le sieur
Daudin se livre à de longues dissertations. Pour appré
cier le mérite de ce m oyen , il est bon d’analiser l’acte
portant ratification. Il approuve et ratifie les actes que
sa mère a consentis en faveur de M . Capelle, du domaine
du V e r n e t, et de tout ce qu i en dépend, et promet
le f a ir e jo u ir en vrai propriétaire.
On demande si un acte de cette nature a quelque chose
de vague ou d’incertain, et s’il avoit besoin d’une plus
grande spécialité. L a ratification s’applique au domaine
du Vernet exclusivement : le sieur Daudin promet d’en
faire jouir Je sieur Capelle en vi’ai propriétaire : n’y
a-t-il pas intention bien expresse de confirmer la vente
de ce domaine , et de lui donner tout son effet ? Cepen
dant elle paroît insuffisante au sieur Daudin. Il invoque
la loi au code S i major foetus ratum habite rit \la loi 74 ,
au code S i m ajor fa ctu s altenationem factarn sine
decreto ratam habuerit; l’autorité de Perrézius sur la
�( 31 )
première loi; Dumoulin , l’Epine de (3 rainville, et le Code
civil.
Ces autorités ne sont pas choisies avec discernement.
Si les lois citées exigent une confirmation spéciale, c’est
en ce sens que celui qui approuve ait vraiment intention
de ratifier et de se soumettre à exécuter l’acte qu’il ratifie;
mais il n’est pas nécessaire de spécifier la nature, les
clauses ni la date de l’acte ; il suffit que la ratification
en rappelle/« substance, et fasse connoître suffisamment
l’acte qu’on approuve. D um oulin, qui a traité cette ques
tion s u r i’ancienne Coutume de Paris, au mot dénom
brem ent, nombres 88 et 89, distingue deux sortes d actes
confirmatifs; le prem ier, fuit en pleine connoissance de
cause, cum causœ cognitione et ex certa conscientia confrm a n tis quando enarrato loto tenore conjìrmati approbatur , recogniscitur et conjìrmatur. Cet acte, d it-il,
prouve autant, et fait foi comme le premier titre cons
titutif; il dispense celui qui le rapporte de produire le titre
primordial.
L ’acte qui est simplement confirm atif, et sans connois
sance de cause , confirm atiofacta in form a com m uni
quando non exprim itur ad longum ténor conjìrm ati,
ne dispense pas de rapporter le titre prim itif, et il faut que
la ratification s’y trouve conforme : voici comment il
s’exprim e, nombre 8 9 , Jn primo casu instrumentum
confìrrnalionis in fo rm a com m uni nonprobat ncc fa c it
Jìdem d e donatione privilegio vel. alio quovis jure c o t i Jìrinato , sed necesse est de ilio docere per instrumen
tum originale ,• secundo vero casu sufficit producere
instrumentum confi rniationis ex certa scientia et piene
�( 32 )
probat etiam s i non aliter doceatur de origin ali conJirniato.
V o ici donc la seule différence qui se trouve entre la
ratification faite en connoisance de cause, et où l’acte
qu’on ratifie est confirmé dans toute sa teneur , d’avec
la ratification qui n’est faite qu’en forme commune , et
où le titre prim itif n’est pas rapporté. La première fait
foi en justice , seule et sans qu’il soit nécessaire de rap
porter le titre originaire ; l’autre ne prouve qu’autant
qu’elle est accompagnée du titre prim itif-, mais c’est aussi
la seule différence qui s’y rencontre.
Eu appliquant cette autorité que le sieur Daudin invoque
lui-m êm e, quelle conséquence faut-il en tirer ? La vente
consentie par la mère , n’est pas rapportée dans son con
texte , ni avec sa date , et alors pour se servir de sa
ratification , M . Capelle doit rapporter la vente qui a été
consentie par la dame veuve Daudin , afin d’établir que
la ratification s’y réfère, et ne peut avoir d’autre objet.
L ’arrêt rapporté dans l’Epine de Grainville est abso
lument étranger à la question. Il s’agissoit de savoir si
une donation qui ne pouvoit avoir lieu que par contrat
de mariage , et qui étoit faite par un frère comtne se
"portant ¿fort pour sa sœur, avoit pu être ratifiée vala
blement par la sœur dans un acte postérieur au contrat.
L ’arrêt intervenu après partage déclare la ratification
nulle , ainsi que la donation , par cela seul que la dona
tion ne pouvoit être faite sans une procuration spéciale,
et qu’elle ne pouvoit avoir lieu qu’en contrat de mariage :
ce n’est pas là ce qu’il s’agit d’exam iner, mais seulement de
savoir si celui qui ratifie une vente consentie par une
personno
�A y
’ ( 33^)
.
^ ...
.
personne qui n’avoit pas le droit de vendre peut revenir
contre sa ratification. Les tuteurs ont toujours décidé le
contraire. B rillon , dans’ sort Dic’tiorinairë des arrêts, au mot
rotißention, s’exprime ainsi : Une'pêirsonne vend le bien
Jd’autrui, la vente fa’est pas bônriëi; mais si le propriétaire
ratifie, le contrat prend sq force du jour de la ratification'.
Il cite un arrêt du 7 février i;6 n , qui l’a ainsi jugé. rr
L e sieur Daudin n’est‘ pds plus lïeureüxPeii citant le
Code c iv il, qu’il ne traite encore qiié^de projet. L ’ar
ticle 1338 du Code civil ( loi 'du -17 pluviôse an 12 )
porte : L ’acte de confirmation ou ratification contre laquelle
la loi admet l’action en nullité ou en rescision , n’est
valable que lorsqu’on y trouve 'la substance de cette obli
gation. O r , la ratification du i^.^mdrs 1788 ne con
tient-elle pas la substance de la vente de 1782 ? Daudin fils
ratifie les actes que sa mère à consentis en faveur de M .
Capelle, du domaine du Vernet et de tout ce qui en
dépend, et promet le faire jouir en vrai propriétaire. Cet
acte s’applique essentiellement et exclusivement à la vente
de ce domaine et dépendances; il contient l’intention de
l’exécuter; il renferme l’obligation qu’entraîne la vente,
qui est de faire jouir l’acquéreur ; et il est ridicule d’exiger
une plus grande spécialité , de vouloir trouver du vague
dans des expressions qui ne peuvent s’appliquer qu’au
seul objet vendu , au domaine du Vernet.
L e sieur D audin, d’ailleurs, peut-il dire qu’il ne connoissoit pas la vente consentie par sa mère ? Dans sa
lettre du 28 mars 1782, il prouve qu’il dirigeoit toutes
les affaires de sa maison , et il donne à M . Capelle des
détails sur le cheptel des bestiaux, qui font voir évidem»
E
�\;v*
.
( 34)
ment qu’il connoissoit toutes les clauses de la vente. Dans
.celle du 10 août 1783, il reconnoît encore que M . Gapelle
a payé le prix soutenu au contrat. Il est bien déloyal de
la paît de Dqudin de vouloir abùsçr, des expressions de
cette lettre; elle n ’est point relative/aux conventions qui
avoient été faites entre M . Capelle et la dame Daudinr,
mais bien à l’interrogat que lui avoit fait subir le sieur
^S'strières , qui prétendoit que le prix de la vente-avoit
été exagéré; et lorsqu’ il a affirmé en justice, sous‘la foi
du serment, que M . Gapelle avoit payé l’entier prix ex
primé au contrat de ven te, ne doit-on pas être indigné
de le voir aujourd’hui avouer un parjure, le déclarer sans
_pudeur, pour avoir le plaisir d’inculper M . Gapelle, et
_se faire uu moyen contre lü i?jL a lettre du 25 mare 1787
est une ratification nouvelle de la vente; il reconnoît que
M . Capelle est propriétaire ; il l’engage à contester au
seigneur de V aladis, pour se dispenser par là de payer
60 fr. d’arrérages échus avant la vente ; et lorsqu’à la
suite de toutes ces lettres le sieur D audin, m ajeur, ratifie
.cette vente de 1782 , fera-t-il croire qu’il ii’a pas su ce
qu’il ratifioit, ce qu’il approuvoit, parce qu’il s’est servi
d’un terme générique , qu’il a parlé des actes consentis
,par sa m ère, quoiqu’il n’y eût qu’une seule vente ?
M . Capelle ajoute encore un autre m oyen, qui se tire
de la prescription de :dix ans entre présens : cette pres
cription , admise en droit é crit, demandç juste titre et
bonne foi. M . Capelle a l un et l’autre ; il a le titre, c’est
la vente de 1782 et la ratification de 1788 ; il est aussi en
bonne f o i , puisque la daine Daudin lui a vendu en son
nom personnel , et sans faire çoïinoîlre le testament
�( 3 5 );.
_ . . . .
.
d’Etíenne Descaffres. Ici D audia se ré crie , et prétend
que M . Capelle n’étoit pas en bonne fo i, parce qu’il a
su le vice de la ven te, et qu’il avoit connoissancë du tes
tament; il rappelle un passage de l’écriture signifiée le 8
floréal an 9 , dans laquelle le défenseur avoue que M .
Capelle avoit cette connoissancë. M . Capelle est étonné
lui-mêm e de cette déclaration, qui émane de son défen
seur : on ne peut l’attribuer qu’à l’inadvertance, parce que,
dans la vérité, M . Capelle n’á'connú le testamènt que
depuis la demande qui a été formée contre lui. Mais
M . Capelle n’a pas besoin de se livrer à d’autres réflexions
sur ce p oint, parce qu’on ne peut pas disconvenir qu’au
moins M . Capelleseroit en bonne foi du jour de la: rati
fication du I e r . mars 1788. Dès ce m om ent , il a eu le
titre du* véritable propriétaire. O r , depuis le I e r . mars
1788 jusqu’au 4 vendémiaire an 8 , date de la demande,
qui représentele 26 septembre 1799, il s’ést écoulé dix ans
six mois et vingt-six jours. M . Capelle auroit donc un
temps plus que suffisant pour préscrire ; et le sieur D audin
l’a si bien reconnu 4 qu’il a voulu recourir à un moyen
extraordinaire, pour prouver qu’il ne s’étoit pas écoulé
un délai emportant la fin de non-recevoir. Il invoque la
disposition de la loi du 1 5 germinal an 3 , qui relève de
la prescription les personnes qui ont été détenues à l'oc
casion de la révolu tion , ou du moins suspend le cours de
la prescription depuis le mandat d’arrêt jusqu’à la publi
cation de la loi. L e sieur Daudin prétend avoir été détenu
depuis le 24 messidor an 2 , et n’avoir obtenu sa liberté
que par arrêté du 17 pluviôse an 3. M a is le sieur Daudin
seroit bien embarrassé de prouver sa réclusion ; il n’a
E 2
�C 36; >*
jamais été détenu. L ’arrêté du comité de sûreté générale
dont il parle est un arrêté qui s’applique généralement à
tous les réclus, sans en désigner aucun; et M . Capelle est
porteur d’un certificat du secrétaire général de la préfec
ture du Cantal, qui constate que parmi les papiers des
ci-devant comités révolutionnaires qui existent dans les
archives de la préfecture, il n’est aucun registre qui date
les époques pendant lesquelles les reclus ont été détenus,
soit dans les maisons de reclusion, soit d’arrêt.
L e sieur Daudin voudroit encore écarter cette pres
cription , sur la circonstance qu’il n’étoit pas domicilié
dans le même bailliage que M . C apelle, et que dès-lors il
doit être réputé absent au moins jusqu’au moment où le
bailliage de V ie a été réuni au district d’Aurillac. Mais
le sieur Daudin est encore dans l’erreur. Suivant le droit
rom ain, on ne répute absens que ceux qui sont domiciliés
en différentes provinces ; et ici les parties doivent se régir
par le droit romain. A la v érité, quelques coutumes réputent absens ceux qui demeurent en différens bailliages -,
mais le statut de ces coutumes est réel, et ne peut s’étendre
au delà de leur territoire. On ne doit point considérer ces
dispositions particulières comme une règle générale du
droit français ; il faut toujours en revenir à la disposition
de la l o i , et on défie le sieur Daudin de citer une seule
loi du droit romain qui contienne une semblable dispo
sition : on verra qu’elles ne parlent que de ceux qui étoient
domiciliés en différentes provinces. D ’ailleurs, dans l’es
p èce, le bailliage de V ie ressortissoit au bailliage d’A u
rillac ; le domaine est situé dans le ressort du bailliage de
V ie , où étoit domicilié le sieur Daudin. Il pouvoit tous
�i
( 37' ) ’
les jours, à chaque instant, être témoin de la possession
et de la jouissance du sieur C apelle, et l’exception dans
laquelle il voudroit se placer n’est que ridicule.
M . Capelle daignera-t-il jetter un regard sur l’officieux
Desprats , qui convient avoir acquis des droits litigieux ,
qui n’a donné un prix modique que parce qu’il savoit qu’il
avoit un procès à soutenir, qui prétend avoir acquis lors
qu’il étoit déjà débiteur du sieur Daudin , et qui a osé se
plaindre du jugement, parce que M . Capelle n’est pas con„ damné à lui restituer les jouissances dépuis la vente d e i 782.
Il faut convenir que si, pour la somme de 6000 fr. payée ou
n on , Desprats obtenoit le désistement du domaine du V e rnet, acquis 21600 francs, et les restitutions de jouissances de
ce domaine depuis 1782, c’est-àdire, depuis vingt-trois ans,
ce seroit certainement une spéculation très-avantageuse :
on n’en fait pas d’aussi bonnes sur la place. Mais une pré
tention de cette nature n’est digne que du mépris : c’est
le comble de l’impudence ; et M . Capelle se doit à luimême de ne pas entrer dans une plus longue discussion
sur ce point. Il suffit de renvoyer aux motifs du juge
ment dont est appel.
La dame Daudin est aussi appelante; elle refuse de
garantir M . Capelle de l’éviction : on ne lui répondra
qu’un seul m o t, c’est que celui qui vend la chose d’au
trui est tenu de garantir. Lorsque le vendeur connoît
les vices de la chose, il est ten u , outre la restitution
du prix qu'il en a reçu , de tous les dommages-intérêts
envers l’acheteur. L ’article 1645 du Code civil n’est en
cela que la confirmation des lois anciennes et de la doc
trine de tous les auteurs. L a dame Daudin savoit mieux
�( '3 8 )
que personne qu’elle n’étoit pas propriétaire du domaine
du Vernet. Peu importe que M . Capelle le sût ou
l’ignorât ; il a pu se contenter de la garantie personnelle
de la vendéresse ; et cette dernière est tenue de tous les
effets qu’entraîne avec elle la garantie qu’elle a promise.
Il ne reste plus que la demande en garantie solidaii^e.
que M. Capelle a formée contre D audin, sur la demande
en désistement de Desprats. D audin, stellionataire, puis
qu’il avoit déjà ratifié au profit de M . C apelle, est
nécessairement garant de l’action intentée par Desprats.
L e jugement dont est appel a ordonné que les parties
contesteroient plus amplement sur ce chef. D o it - o n
regarder cette disposition du jugement comme purement
d’instruction, ou bien e s t-c e un déni de justice? Si
la cour pense que l’appel est recevable dans ce ch ef,
M . Capelle s’en plaint également, et prouvera dans ce
cas que sa garantie ne peut lui être refusée. Mais aupara
vant il faut décider si cet appel peut être examiné en
la co u r, et M . Capelle s’en rapportera sur ce point à
la prudence des magistrats. 11 ose même se flatter qu’il
sera inutile d’en venir à cette discussion , parce que M.
Capelle étant porteur de deux titres authentiques qui
Jui assurent la propriété inçommutable du domaine du
V e rn et, toutes les allégations de Daudin viennent se
briser contre ces actes. Les magistrats s’empressent tou~
jours d’accueillir tous les moyens qui tendent h confir
m er, à maintenir des actes solennels, ut potiùs actus
va ka t quàm ut perecit ; et la coiïr repoussera avec
indiguation des assertions calomnieuses et mensongères
qui ne peuvent atteindre un ancien magistrat dont l’exis-
�( 39 )
tence, la fortune et la probité sont à l’abri de toute
atteinte.
D audin, réuni à sa mère et à Desprats, peut-il espérer
quelque faveu r, lorsqu’on jette un coup d’œil sur la
conduite qu’ il a tenue jusqu’ici.
Ces ventes successives qu’il a fait consentir à sa m ère,
dans l’intervalle de trois jours, pour rendre sa garantie
illusoire; la reconnoissance de. 48000 francs qu’il lui a
fait souscrire à son profit; la cession de Desprats ; celle
faite à Chaunac, son beau-frère : toutes ces machinations
perfides, ne conviennent point à un homme délicat; et
lorsqu’il ose se permettre d’inculper M . Capelle, de lui
reprocher d’avoir manqué aux lois de l’honneur et de
la probité, on peut lui répondre avec le fabuliste : M utato
nom ine fabula de te narratur.
M e. P A G E S ( d e R io m ) , ancien avocat.
M e, M A R I E , avoué licencié.
A R IO M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur d e la
Cour d ’a p p el.— Messidor an 13.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle, Fançois. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
ventes
abus de confiance
abus de faiblesse
prescription
éviction
minorité
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse pour M. François Capelle, ancien magistrat, intimé et appelant ; Contre sieur Eléazard Rostang, Etienne Daudin, appelans et intimés. Encore contre Antoine Desprats, et contre dame Marguerite Sobrier, veuve de Jean Daudin, appelans et intimés.
Table Godemel : Dol : 1. Vente du 1er mars 1782 critiquée de nullité comme ayant été surprise, à une femme, par des manœuvres concertées entre l’acquéreur et le fils mineur de la venderesse. Eviction : 2. si la vente d’un immeuble et la ratification qui en a été faite par son héritier, devenu majeur, sont nulles, le vendeur qui a contracté en son propre et privé nom et reçu le prix, peut-il être dispensé de garantir l’éviction sur le fondement que le vice du contrat même en est la cause, et que l’acquéreur connaissait l’incapacité du vendeur ? Exécuteur testamentaire : autorisé à vendre pour payer des dettes, peut-il vendre sans aucune formalité pendant la minorité de l’héritier ?... L’acquéreur doit-il surveiller l’emploi des deniers ? Prescription : l’acquéreur, dont le titre est vicieux, peut-il se prévaloir de sa possession, et opposer, en pays de droit écrit, de l’action en nullité et en désistement, la prescription de dix ans entre présents et de vingt ans entre absents ? Ratification : 1. l’acte par lequel l’héritier devenu majeur ratifie les actes passés par l’exécuteur testamentaire, soit-il, pour être valable, énoncer expressément les actes ratifiés ? cet acte, s’il est sous signature privée, doit-il être fait double ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1782-An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1513
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1512
BCU_Factums_M0404
BCU_Factums_G1514
BCU_Factums_G1515
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53253/BCU_Factums_G1513.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vic-sur-Cère (15258)
Vernet (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
abus de faiblesse
éviction
minorité
prescription
testaments
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53254/BCU_Factums_G1514.pdf
87153e440989417832b373d11d4de36c
PDF Text
Text
;
o í.
:
• i:
îm
q
___>
ii1
MEMOIRE
•Í.
!
P O U R
M a rg u e rite
*
'
•
SOBRIER, veuve
D a u d in ,
appelante;
r
,
"
C O N T
R E
,
t
Sieur F r a n ç o i s C A P E L L E f intimé et appelant;
E N
t
Présence
^
D ' A n t . D E S P R A T S , et d ' E l é a z a r d R O S T A N G D A U D I N , appelans et intimés,
La
_
, ;
ü
,
»•' ■(
. (i •••* <•„!.<(
< iO !j
.
(_■
i
dame D audin vouloit oublier tout ce qui tient à une ven te.
qu'e lle a signée en 1782. L e sieur C apelle, qui l’a trom pée, veut
obtenir contr’elle une garantie
en est dû aucune,
il faut lui démontrer qu’il ne lui
r.
L e sieur Descaffres ,p a r son testament d u 7 avril 1 7 7 3 , institua
Eléazard D audin , son petit-neveu , pour son héritier ; il légua à
M arguerite Sobrier, sa m ère, le mobilier et l’usufruit de ses biens
et la désigna exécutrice testamentaire, avec pouvoir de vendre pour
le payem ent de ses dettes. t. • :
•
E lle avoit vendu quelques objets avant 1782 , et ne voyoit pas de
nécessité d ’en aliéner encore, lorsque le sieur Capelle concerta avec
Daudin fils m in eu r , le projet de se fa ire vendre le domaine du
V e rn e t, dépendant de la succession D escaffres.
Daudin fils , épris d' une passion violente, avoit résolu d ’aller se
marier à Avignon ou en Italie ; e t pour c e la , il cherchoit de l'ar
gent : un négociateur du sieur Capelle lui proposa la vente de ce
domaine.
�i >r '
( a )
-
M in e u r, et n ’ayant pas le pouvoir de ven d re , Daudin fils y
décida sa m è re , qui fixa le prix à 21600 francs. En eut-elle voulu
demander le double, il n ’y avoit pas d ’obstacles, puisque le sieur
Capelle avoit déjà son plan.
Il feignit d’adopter le prix de 21600 francs , exigea que le contrat
portât quittance, au moyen des billets qu’il devoit faire ou céder.
En effet, par acte notarié du 1". mars 1782, la veuve Daudin lui
vendit avec garantie , moyennant 21600 francs , le domaine du
V e rn e t, tous les bestiaux et outils d ’agriculture, ensemble cin
quante seliers de blé à prendre s u r la récolte pendante, et le quart
du surplus de ladite récolte.
‘
1
Mais ce prix , bien sérieux pour la dame Daudin , n ’étoit que
fictif pour le sieur Capelle ; déjà il avoit arrêté, avec Daudin fils,
que le prix du domaine ne seroit que de i 38oo francs , sur lequel il
devoit compter à peu près 4000 francs pour le voyage d ’Italie, et
le surplus étoit délégué sur une maison dé commerce d’Aurillac.
L a prévoyance fut portée plus loin; D a u d in , mineur, pouvoit
réclamer un jo u r, el l(f siéur Capelle se munit d ’une ratification
générale, dont la date fut laissée en blanc. 11 paroit même qu ’elle
étoit fabriquée avant la vente; c a r , dans l’incertitude du mode de
mutation, le sieur Capelle y fit ratifier tous les actes passés à son
profit ( et il n'y en a qu’un seul ). Daudin fils écrivit tout cet
acte » excepté la date : le sieur Capelle avoue qu’elle est d ’une autre
main.
On comprend d ’avance que les articles secrets de cette capi
tulation éloient subordonnés à la reprise des billets signés le jour
de la vente. Daudin fils les enleva, et disparut.
L a dame D audin, justement irritée-, rendit plainte en soustrac
tion des billets de 21600 francs, et en o u tr e , de divers blancs
seings. Sur le vu îles informations, le bailliage de Vie rendit une
sentence, le 18 juillet 1782, qui condamna Daudin fils à restituer
à sa mère 21600 im u c s , permit de faire des saisies-arrêts , et
a n n u l l a les blancs seings q u i,
en e lie t, n'ont plus reparu. Ces
informa lions sont perdues, et 011 ignore qui a eu le crédit de les
�<?<
(
3
)
supprimer: la sentence seule existe, et le sieur Capelle d it , dans»
son m ém oire, qu’il en est porteur.
Il est à croire que ces informations secrètes , suivant l’usage ,
contenoient des révélations qui seroient aujourd’hui bien utiles;
car le lieutenant général de Vie ( le sieur Sistrières ) , qui se trouvoit seigneur féodal d’une partie du domaine du V e r n e t , exerçale retrait contre le sieur Capelle, et soutint que le prix réel n’éloit
pas de 21G00 francs.
- .
Alors Daudin fils étoit de retour ; le sieur Sistrières l’interrogea
ou le fit interroger; mais Daudin fils peu rassuré encore , et,
pudori suo parcens, fut fidèle à son m entor, et répondit de ma-,,
nière à mériter ses éloges : il se hâta de s’en glorifier par une
lettre du 10 août 1783 , que le sieur Capelle a la bonté de produire.
« J’ai subi interrogatoire pour savoir ce^quc j ’ai reçu de vous.
» Sistrières croit que vous n ’avez fait de billets que pour quatorze
v mille francs j j’ai dit que vous en aviez fait pour tout le con» tenu au contrat, ce qui l’interloqua fort. Quoi qu’il en s o it,y e
» ne vous nuirai jamais , parce que vous m’ avez payé ce que
» vous m’aviez promis. »
L e procès Sistrières dura quelques années encore , et fut terminé
par un traité du 5 mai 1789 , dans lequel les parties se contentent
de dire que, parfaitement instruites de leurs droits , elles se sont
respectivement départies de leurs prétentions.
T o u s ces résultats mystérieux étoient ignorés de la dame Daudin,
qui se consoloit de ses chagrins précédens par le retour de son fils.
L a révolution a amené pour elle d’autres terreurs et d ’autres sacri
fices : elle a été enfin obligée de faire plusieurs ventes ; et le sieur
Capelle, qui ne conçoit pas que les fortunes puissent diminuer, lui
en fait un crime. Elle a réglé ses affaires avec son fils pour la suc
cession Descaffres ; et n’ayant plus que le souvenir de son ancienne
aisance, elle étoit loin de s’attendre, sur la fin d e'sa carrière, à
¿tre accusée de collusion et de complots de la part de l ’homme à
qui elle pouvoit en reprocher si justement.
Daudin fils a
ses j roits ^ D e s p ra ls, qui a cité le sieur
A 2
�xc>*
(
4
)
Capelle en désistement du domaine du Verneten l’an 8. L e sieur
Capelle a produit la ratification, qu’il a datée de 1788; et alors
Daudin , mis en cause par D esprats, a commencé line procédure
en inscription de faux contré la date de cette ratification.
L e tribunal d’Aurillac en a ordonnéle dépôt au greffe; le procès
verbal mentionne que là date est d’une autre main, et d ’une encre
pins noire, qu’on a repassée sur plusieurs lettres du même acte. L e
sieur Capelle se défendoit d ’abord par des nullités contre cette
procédure; mais il a fini par la rendré sans objet, en déclarant
qu’il reconnoissoit la date de la ratification pour être d'une autre
main.
L e sieur C apelle, qui sentoit bien toute la difficulté.qu’il avoit
de faire usage désormais de cette ratification, a cherché à élaguer
tout à fait Daudin fils, s’il le pouvoit; d ’abord il lé reconnoissoit
pour héritier Descaffres ; ensuite il a attaqué le testament de nul
lité , et a prétendu que la mère étoit héritière
. -
Sa défense s’est basée principalement sur ce moyen ; il a , de.
p lu s , crié à la collusion, et s’est tourmenté, par un appareil d’in-t
terrogatoires, pour se donner l’apparenccd’une \ictime de la mau
vaise foi. En concluant à la garantie contre la dame Daudin , il
a affecté de dire qu'il n ’auroit pas cependant de ressources contre
elle, s’il perdoit son>procès. L e sieur Capelle, par jugement du i 5
germinal an 11 , a été débouté de sademande.en nullité du testa
ment de 1773. La vente du 1 " . mars 1782, et là ratification de
*788, ont été déclarées nulles. L e sieur Capelle.¿a, été condamné
à se désister du domaine du V ern et. L a dame Daudin a été con
damnée h le garantir et indemniser, et à lui payer non-seulement
31600 francs, mais encore ses dommages-intérêts. Daudin fils est
condamné à rembourser i 58oo fra n cs, et lés améliorations. Il
est ordonné q u e , sur une demande en garantie solidaire formée
par Capelle contre les sieur et dame Daudin , îles parties contca( * ) A u jo u r d ’h u i il se ju g e lu i-m e m e ; c a r , pendant l ’im pression de co m é m o ir e , il v ie n t do
con clu re c c n tre D esp rats A la su b rogation 1é g a lé . Est-ce un p ropriétaire q ui a ch è te sa p ro p rié té î
•s t-c e un a c q u é r e u r , p rêt à ê tre évin cé» q u i » chete le fo n d du procès i rem aïbi n ectsiariam .
�4
( 5 )
teront plus amplement. L a dame Daudin est condamnée aux dépens.
Toutes les parties ont interjeté appel de ce jugement.
M O Y E N S .
^
L a vente de 1782 est annullée; et cependant la dame Daudin
est condamnée à garantir le sieur C a p e lle , et même en des dommages-inlérêts considérables : n’y a-t-il pas. à cela de l’inconséquence?
Une telle décision se conçoit, si le sieur Capelle a acquis loya
le m e n t et de bonne foi ; car alors la garantie qu'il a fait stipuler
ne peut pas être illusoire.
]\lais s’il a voulu tromper celle qui lui vendoit, il répugneroit
à toute justice qu’elle seule fû t grevée, et qu’il profitât au con
traire de sa propre fraude.
• O r, il est indubitable que le sieur C apelle a trompé la dameDauin ,
et il doit en résulter non-seulement qu’il n ’y a pas lieu ¿1 garantie,
mais même qu’il n ’y a pas de vente.
i°. Il n’y a pas de vente ; car le consentement en fait le prin
cipal caractère , et il faut qu’il intervienne sur la chose et sur
le prix , sans cela il n ’y a pas de vente.
C e ne seroit qu’une subtilité de dire qu’il a dans la vente de
1782 un prix quelconque, parce que si ce prix n ’est pas réellement
celui dont les parties sont tombées d’accord , il n ’y a plus véritable
consentement, surtout quand c ’est l’acheteur qui veut donner une
somme moindre : tels sont les principes.
» L e consentement, dit Pothier, doit aussi intervenir sur le
» prix. C e consentement ne se trouve p o in t, si l’un compte vendre
» pour unesommeplusgrande quecellc pourlaquellel’autré compte
» acheter. Il n’ y a donc pas de contrat de vente, faute
4e consen-
ii tentent.» ( T r a i t é du contrat de v e n te , pag. 1” . , n?. 56. )
E t ce n'est là que la copie de la loi elle-même : S i in pretio vel
tn ne errent, v el dissenliant, contractus erit imperjectus. L . 9
f f ' D e conlr. empt.
A quoi la glose ajoute : Qubd si minus emptor } majhs venditor
putavit, impeditur contractus.
. L a loi a donc voulu pourvoir aux surprises, et il n ’importe que,
�\
( 6 }
clans l’espèce , la vente ait été exécutée, parce qu’il est évident
que la même erreur , qui présidoit au contrat, devoit en protéger
l’exécution.'
L e principe est général ; et si l’acheteur a le secret de persuader
au vendeur qu’il est d’accord sur le prix , il est certain q u ’iÎ y
aura le simulacre d ’une vente, jusqu’à ce que le vendeur soit certain
qu’il a été trompé ; alors , si par les circonstances on peut juger
qu'il s’est opéré une nouvelle convention , celle-là seule aura quel
que considération, plutôt que la première qui étoit vicieuse.
Si donc on pouvoit reprocher à la dame Daudin qu’elle n ’a pas
réclamé plu tôt, elle répondroit avec raison' que la collusion de son
fils et du sieur Capelle contre elle-même a entretenu son erreur ;
qu’elle a si bien cru le sieur Capelle innocent, quelle n'a accusé
que son fils, comme il l’observe lui-même : elle a si bien cru avoir
stipulé pour prix de vente 21G00 francs , qu’elle a fait condamner
son fils à i u i payer 21600 francs.
Quel intérêt auroit-elle eu d ’ailleurs à faire un procès pour ce
domaine ? il ne lui appartenoit pas. Le principal intéressé étoit
son fils; mais il colludoit, et il étoit condamné à son égard.
Les éclaircissemens d’ailleurs ne sont nés que du procès actuel,
des variations du sieur Capelle, et de la lettre de 1783 qu’il a
produite.
Ses variations étoient frappantes: i #. il disoit, quant au testament
Descafl’res, qu’il avoit été rassuré, en achetant, par le pouvoir que ce
testament, dont il avoit connoissance, donnoit ù la dame Daudin
de vendre. Ensuite, il a dit qu’on lui en avoit caché 1existence ;
il en a demandé la nullité , et il répète encore aujourd’hui qu’il l’a
méconnu.
2°. Quant au prix de la vente, le sieur Capelle disoit d’abord
que l’enlèvement des billets étoit un conte; que la vente faisoit foi;
que les 31600 francs avoient été payés comptant, ce qui exclu t
toute idée de soustraction d ’effets : et, aujourd’hui, il est obligéde
changer de langage, et de dire qu’il n’a payé que 6000 francs
com ptant, et fait des billets pour le surplus.
L a lettre de 1785 a rendu nécessaire çette esnèr.e de confe«*-
�r>
%
;
'
/s
sion forcée ; car , comment répéter qu’il n ’y avoit pas eti d’effets ,
lorsque Daudin fils écrivoit: 7 ’ai dit que vous en avez fa it pour tout
le contenu au contrat ; et le sieur Capelle avoit excipé de cette lettre* '
Mais , c ’est delà que naissoit la révélation essentielle pour la
dame Daudin : elle étoit forcée d ’y lire tout à la fois la surprise
qui lui avoit été faite, et la sujétion de son fils pour la tromper
encore après s o n retour. Vous m ’ a v e z payé ce que 'vous m’ avez
promis ; je ne 'vous nuirai jamais : donc il résultoit de ces deux
phrases qu’ il y avoit un prix autre que les 21600 francs : donc le
sieur Capelle a voit pzy è directement à Dsudin fils; vous m ’ a v e z payé.
E t dès-lors quelle poignante réflexion pour la dame Daudin !
Jusque-là elle avoit pu croire que son fils, ayant enlevé des billets,
avoit couru chez les banquiers pour a’irn faire payer avant sa fuite;
et il a fallu voir dans cette lettre que le sieur Capelle avoit payé à
un fils de famille rebelle, à un mineur, des billets enlevés, et après
une information d’un genre aussi peu ordinaire.
L a dame Daudin avoit bien aisément été trompée. Son erreur a
duré jusqu’à ce que son fils, détrompé lui-même sur le compte du
6ieur Capelle, a fait la cession qui a donné lieu au procès. Alors ,
attaquée elle-même, elle a eu intérêt d ’examiner ce qu’elle eût mieux
aimé ignorer toujours.
Il
n ’y a pas de vente, disons-nous , puisqu’il n’y a pas de consen
tement sur le prix , dès que le.sieur Capelle avoit machiné le projet
de n ’acheter que i 38oo fr. un domainequ’il feignoit payer 21600 fr.
Mais encore moins , y a-t-il lieu à garantie , et cette proposition
est fondée sur les principes les plus constans.
On peut vendre la chose d’a u tru i, dit le sieur C apelle, et par
conséquent on peut garantir une telle vente : cela est vrai ; mais
alors il y a au moins dans l’acheteur bonne foi dans la garantie qu’il
fait stipuler.
Dans 1 espèce, le sieur Capelle n ’étoit pas plus de bonne foi dans
cette garantie que dans la vente; caria g a r a n t i e é t o i t une condition
du prix de 21G00 francs; si donc il savoit qu’à sou égard le prix
étoit moindre , il y avoit dol dans la garantie qu’il exigeoit.
�m
v L e d o l , dit le Code civil , est une cause de nullité de la con» vcntion , lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties
>) sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre
w partie n’auroit pas contracté. » ( A r t . 1116. )
O r , personne ne doute que la dame Daudin n ’auroit pas vendu
€t encore moins garanti au sieur Capelle, s’il l’avoit prévenue qu’il
machinoitavec Daudin fils le projet de n ’acheter que pour i 58oo f r . ,
et même de fournir ce prix à un jeune homme qui fuyoit sa famille,
perituro.
, En général, l’acheteur qui sait le vice de la chose vendue sciens
reigravamen , ne peut pas demander de garantie; et à plus forte
jraison celui qui a coopéré à ce vice, et qui plutôt l’a créé lui m ê m e ,
en sous-entendant un prix que le vendeur ignoroit et n ’qdoptoit pas.
E t , à cet égard, il faut remarquer un double principe ; c’est que,
,i°. la garantie même de tout troubles et évictions ne peut s’entendre
que d’une cause d’évictîon qui existât avant la vente, et que le
vendeur pouvoit ou devoit savoir; 20. que si la cause d ’éviclion
résulte de la vente elle-même, quant à sa forme ou sa substance,
il faut que l’acheteur sefasse garantir expressément de ce vice connu,
, » L e débiteur, dit l’article u 5o du Code civil, n ’est tenu que
» desdommages-interêtsqui ont été prévus, ou q u ’on a pu prévoir
*) lors du contrat ; » et cet article s’applique à la garantie d ’évic
tion , d ’après l’article iG5c).
.. C ’est en vertu de ce principe que la cour d ’appel de Paris , par
arrêt du 27 messidor au j o , déchargeoit de la garantie un ven
deur qui s’y étoit soumis solidairement; mais à 1 égard de l’im
meuble d ’un interdit, qui ne pouvoit être vendu sans formes ;
» Considérant qu’on n’entend par garantie d’évictions et troubles,
» que ceux étrangers au contrat, et dont il y a une cause e x isj) lanle au temps du contrat....... Q u’on n ’entend point par cette
)) garantie l ’éviction dont les vices du contrat même sont la
« cause. » (J- palais, n°. 17 1.)
Dans l’espèce, la vente de 1782 a deux vices: l ’u n, que la chose
veudue ctoil à autrui : le sieur Capelle n’ignoroit paç le testament;
�/ f f £ •>
C 9 )
il l’a avoué, et sa précaution anticipée de prendre une ratifies lion
en blanc , le prouve d ’avantage.
L e second vice, radical en ce qu’il attaque la substance de l’acte,
étoit connu de l’acheteur seul, et cette circonstance est bien plus
décisive que celle de l’arrét de Paris. L e sieur Capelle savoit seul
que le prix exigé par la dame Daudin n ’étoit pas le prix qu'il vouloit payer, et la dame Daudin qui gnranlissoit ne le savoit pas.
A-t-elle donc donné un consentement valable à la garantie? N o n ,
car non 'videntur qui errant consentire.
» L e troisième c a s , d itP o th ie r, auquel il n ’y a pas lieu à la
» la garantie, est celui d’un acheteur qui, ayant connoissancede,
» la cause qui donne lieu à l’éviction , l ’a cachée au vendeur qui
» l’ignoroit, et de qui il a stipulé la garantie : comme en ce cas
w c’est l’acheteur qui a induit en erreur le ven d eu r, en stipulant
» de lui une garantie qu’ il n’auroit pas promise ....« le vendeur
n paroit fondé à l’exclure, de son action de garantie par l’excep» tion.du d o l, en lui offrant seulement de lui rendre le prix
» qu’il a reçu. » Contr. de vente, pag. i ,-n*. i g i .
O r, la dame Daudin n’a rien re ç u , et le sieur Capelle le sait
mieux que personne. Daudin fils avoue avoir reçu les 1 58oo francs ;
il en a offert le remboursement, et dès-lors la veuve Daudin doit "
rester aussi neutre dans cette malheureuse affaire, qu’elle l’eût
toujours été sans les manœuvres du sieur Capelle.
Répétera-t-il que tout est controuvé dans ce qu’il appelle une
perfide calomnie? la dame D audin, qui n ’a eu intérêt de s’informer
de la vérité que depuis qu’on l’ attaque, offre de prouver à la cour
que, par le dol du sieur Capelle, le prix exigé par elle fut fixé à une
somme beaucoup m o in d re, entre lui et Daudin , alors âgé de
dix-neuf ans; qu’il n ’y eut pas, comme il le dit, pour i 56oo fr.
d’efiets tirés sur la maison Lespinat et D om ergue, et que celte
•
maison n ’en a acquitté que pour 10000 francs aü plus.
Mais qu’est-il besoin d ’une preuve testimoniale , quand tout est
clair par des écrits, et qu’il y a plus de matériaux qu’il n’en est
nécessaire pour asseoir les présomptions que la loi cxi^e scules en
matière de fraude.
/ i#
�\ <s » i
( IO )
Que le sieur Capclle explique, s’il le peut, comment le prix réel
de sa vente étoit de 21600 francs, lorsque la lettre qu’il produit
porte : Vous m'avez payé ce que vous m’ avez promis, je ne vous
nuirai pas.
Q u ’il explique comment il a payé 6000 francs en argent, et le
surplus en effets, lorsque la lettre porte : Vous en avez fa it pour
tout le contenu au contrat ; lorsqu’après une plainte en soustrac
tion des billets, Daudin fils est condamné à payer à sa mère
vingt-un mille s ix cents livres.
Q u’il explique dans quel temps il a payé ces billets, faits à divers
termes; e st-ce au banquier? il avoit une saisie-arrêt; est-ce à
Daudin fils? Mais un magistrat pouvoit-il acquitter des billets
volés , à l'auteur du v o l, mineur, après l’éclat d ’une information?
Que sont devenus ces billets qu'aujourd’hui il avoue? Acquittés
par l u i , il doit les avoir.
N o n , ce ne sont pas là les signes de cette loyale franchise
qu’il faut toujours retrouver dans les transactions sociales.
L e sieur Capelle a obligé la dame Daudin à s’instruire de ce
qu’elle s’efforçoit d’ignorer, et à voir ses derniers momens em
poisonnés par la conviction d'une trame qu’elle eût été plus heu
reuse de ne pas aussi pleinement acquérir.
Cette conviction même ne l’eût engagée à aucune démarche ;
car leur éclat même eût rappelé des chagrins que le cœur d’une
mère sait dissimuler. Mais le sieur Capelle lui envie cette paix
et sa neutralité ; il ose demander à la dame Daudin une garantie
surprise par des manœuvres sans lesquelles il est evident qu'elle
n'auroit pas contractée. U ne telle demande n est donc que le pro
d uit de la turpitude; elle est proscrite par les principes : car nemini
fraus sua patrocinari debet.
Me
D E L A P CHIER,
M .
avocat.
F A Y E , avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de L a n ddrio t , seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Therm idor an 13.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Sobrier, Marguerite. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
ventes
abus de confiance
abus de faiblesse
prescription
éviction
minorité
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Marguerite Sobrier, veuve Daudin, appelante ; contre Sieur François Capelle, intimé et appelant ; en présence d'Ant. Desprats, et d'Eléazard Rostang-Daudin, appelans et intimés.
Table Godemel : Dol : 1. Vente du 1er mars 1782 critiquée de nullité comme ayant été surprise, à une femme, par des manœuvres concertées entre l’acquéreur et le fils mineur de la venderesse. Eviction : 2. si la vente d’un immeuble et la ratification qui en a été faite par son héritier, devenu majeur, sont nulles, le vendeur qui a contracté en son propre et privé nom et reçu le prix, peut-il être dispensé de garantir l’éviction sur le fondement que le vice du contrat même en est la cause, et que l’acquéreur connaissait l’incapacité du vendeur ? Exécuteur testamentaire : autorisé à vendre pour payer des dettes, peut-il vendre sans aucune formalité pendant la minorité de l’héritier ?... L’acquéreur doit-il surveiller l’emploi des deniers ? Prescription : l’acquéreur, dont le titre est vicieux, peut-il se prévaloir de sa possession, et opposer, en pays de droit écrit, de l’action en nullité et en désistement, la prescription de dix ans entre présents et de vingt ans entre absents ? Ratification : 1. l’acte par lequel l’héritier devenu majeur ratifie les actes passés par l’exécuteur testamentaire, soit-il, pour être valable, énoncer expressément les actes ratifiés ? cet acte, s’il est sous signature privée, doit-il être fait double ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1782-An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1514
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0404
BCU_Factums_G1512
BCU_Factums_G1513
BCU_Factums_M0715
BCU_Factums_G1515
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53254/BCU_Factums_G1514.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vic-sur-Cère (15258)
Vernet (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
abus de faiblesse
éviction
minorité
prescription
testaments
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53255/BCU_Factums_G1515.pdf
b5a701135185e70b0d3520dd56193d3e
PDF Text
Text
CONSULTATION,
L e s C O N S E IL S S O U S S IG N É S , qui ont v u le m ém oire
à consulter du citoyen D audin de la Fabrie; ensem ble,
1 °. copie du testament nuncupatif d’Etienne Descaffres, en
date du 3 avril 17 7 3 ; 20. copie d’ un contrat passé devant les
notaires publics à A u rilla c, le 1er. mars 1782 , contenant
vente par madame veu ve Daudin de la F a b rie , au
citoyen C a p e lle , d’un domaine appelé V e r n e t , appar
tenant à son fils , en qualité d’héritier d’Etienne D escaffres ; 30. copie d’un autre contrat passé devant les
notaires publics à V i c , département du C antal, le 2. ven
dém iaire an 8 , contenant vente et cession par le citoyen
D audin d e la F a b rie , au citoyen D esprats, de tous les
droits successifs, m obiliers et im m obiliers, fruits et reve
nus d’iceu x, appartenans audit citoyen D a u d in , en vertu
du testament d’Etienne Descaffres de la R iv iè re ; 40. copie
figurée d’un écrit portant la date du 21 mars 178 8 , au
bas duquel est apposée la signature D a u d in la F a b r ie ,
contenant une prétendue ratification des actes faits par
la veuve D a u d in ; 5°. la demande en revendication et
A
�i H’
( O
désistement de la propriété du domaine du V e r n e t,
form ée par le citoyen Desprats contre le citoyen Capelle;
6°. enfin la demande en garantie formée par le citoyen
Capelle contre le citoyen D audin la Fabrie.
qu’ indépendamment des fortes présom p
tions de faux qui s’élèvent contre l’écrit sous seing privé
que le citoyen Capelle fait servir de base à sa demande
en garan tie, deux moyens de nullité péremptoîres vien
nent so r é u n ir pour é c a r te r cet acte in form e, qui ne
peut être aux yeu x de la justice que l’ouvrage du dol et
E stim en t
de la su rprise, s’il n ’est pas celui d’un faux m atériel Lien
caractérisé.
L e prem ier de ces moyens résulte de ce que la pré
tendue ratification qu’il l’enferme n’est point une ratifi
cation spéciale, attendu que ni la n atu re, ni les causes,
ni même la date des actes qu’il ratifie ne s’y trouvent
énoncées..
L e second, de ce qu’il n’est pas fait double entre les
parties contractantes..
11 résulte des pièces que, par un testament nuncupatif,
en date du 3 avril 1 7 7 3 , E t i e n n e DescaiTres de la R i
vière a institué pour son h é r i t i e r universel le citoyen
Daudin de la F a b r ie , son petit-neveu, et que dans les
biens de l’hérédité se trouvoit un domaine nommé du
y ’ernety situé dans la commune de V i e , département du
Cantal.
Comme l’extreme jeunesse de l’heritier institué neluipermettoit l’aliénation d’aucun immeuble, quoiqu’il fût néces
saire d’en yendre une partie pour l’acquittement des dettes
�4 »/
( 3 )
et des legs, le testateur a voit donné pou voir à la citoyenne
D audin de la F ab rie, sa n ièce, m ère de cet héritier ins
titué, d’aliéner ce qui seroit nécessaire ; e t, en effet,p lu
sieurs immeubles ont été vendus par e lle , mais en qua
lité de m ère et tutrice de son fils mineur.
E n 178 2 , la m ère du citoyen D audin de la Fabrie
crut pouvoir vendre le domaine du V e r n e t , non plus
com m e mève et tutrice, m ais com m e propriétaire, et
«e fut au citoyen C a p elle, alors conseiller au présidial
. d’A urillac , qu’elle consentit de faire cette vente. L e p rix
énoncé au contrat paroît être de 2,1600 francs, payés
comptant ; mais on assui'c qu’il s’en faut de plus d’un
tiers que cette somme ait été payée, et on ajoute que
l’acquéreur employa d’ailleurs tous les moyens qui étoient
en son pou voir pour se rassurer contre la revendication
postérieure du citoyen D audin de la F a b rie , seul pro
priétaire du domaine vendu par la mère.
C e lu i-c i, m ineur en core, et dans la fougue des pas
sions, se prêta volontairem ent, sans p révo ir les consé
quences de ce qu’on exigeoit de lui , à tout ce que le
citoyen Capelle v o u lu t, m oyennant qu’on lui fît toucher
une partie de la somme portée au contrat.
Il commença d’abord par donner une ratification conçue
en ces termes: « Je soussigné approuve et ratifie les actes
«
«
«
«
que ma m ère a consentis en faveur de M . C a p e lle ,
conseiller, du domaine du V e r n e t, et tout ce qui en
dépend , et promets de l’en faire jouir en vrai propriétaire. Fait le.......... Signé Daudin de la Fabrie. »
Comme il n’avoit encore que dix-neuf an s, et qu’une
pareille ratification ne pouvoit produire aucun effet, à
A 2
�(
4
)
raison de la m inorité de celui qui l’avoit souscrite, on
lui lit laisser la date en blanc} pour la rem plir lorsqu’ il
seroit majeur.
D ’un autre c ô té , un procès crim inel s’étant élevé entre
le citoyen Capelle et la m ère du citoyen D a u d in ,(* ) le
citoyen Capelle eut encore l’adresse de se faire écrire par le
m ineur la lettre qui suit : « M . le curé de G iou m’a marqué
« que je ne m ’étois pas assez expliqué au sujet des affaires
« de Sistrières (c ’étoit le magistrat chargé de l’ instruc« l:on du procès crim inel ) 5voici plus clairement ce qui
« en est. L orsque je fus a rriv é , je subis un interrogatoire
« pour Ravoir ce que j’ai reçu de vous. Sistrières croyoit,
,« et cro it e n c o r e , que vous n’ayiez fait de billets
k que pour quatorze m ille francs ; j’ai répondu que
çf vous en aviez fait pour le contenu du contrat, ce qui
« l’interloqua fort dans le temps. Q u o i qu!il en s o it ,
« je ne vous n u ira i ja m a is , parce que vous ni avez bien
« p ayé ce que vous m 'avez prom is. Si Sistrières fait tra
ct vailler à R iom au nom de ma m è re , elle l’ignore. J e
« vous prie de m e m arquer ce q u i l f a u t que j e lu i f a s s e
« f a i r e , pour ne pas être com promise dans les discuscc sions qu’a Sistrières avec vous. Je les crojs très-m au« vaises. .Au prem ier jour j’aurai l’honneur de vous v o ir ,
cc et nous causerons plus amplement. »
Cependant cette affaire crim inelle n’eut pas d’autre
suite, et les choses en restèrent là pendant plusieurs années.
M ais lorsque le citoyen Daudin de la Fabrie , devenu
(*) Le procès crim inel etoit contre le fils, el non contre le §icur
Capelle.
�( 5 )
m ajeur, voulut réclam er contre la fausse quittance portee
au co n tra t, il éprou^pi de la part du citoyen Capelle
une telle î-ésistance, que , désespéi*ant d’obtenir de lui
ce que la bonne la foi seule et l’équité e x ig o ie n t, il
prit le parti de vendre au-citoyen Desprats tous ses droits
dans la succession du citoyen Descaffres , son gi'ando n cle, dont il étoit héritier institué. Cette vente eut lieu
par acte passé devant les notaires publics de V ie , dépar
tement du C a n ta l, le 2 vendém iaire an 8. ’
Aussitôt le citoyen Desprats form a contre le citoyen
Capelle une demande en revendication du domaine du
Vei'net ; et le citoyen Capelle , qui sentoit parfaitement
tout le vice de son titre d’acquisition, ne crut trouver
de l’essourcc que dans la prétendue ratification qu’il avoit
surprise au cit. D audin de la Fabrie pendant sa minorité.
11 forma donc une demande en garantie contre ce der
nier ; demande fondée sur les termes de cette prétendue
ratification , dont la date laisséer en blanc se trouva rem
plie par celle du 21 jnars 1788 qu’on y avoit mise après
coup. U n prem ier jugement ordonna, sur lu réquisition
du citoyen D audin de la F a b rie , qu’elle seroit déposée
au greffe du tribunal ; et là , suivant le m ém oire à con
sulter , il fut facile de voit*, i° . que les deux chiffres 21
étoient écrits d’ une autre main et avec une autre encre
que le corps de l’acte; 20. que le mot m ars avoit été
évidemment surchargé ; 30. que les quatre chiffres for
mant la date de 1788 étoient d’ une autre encre et d'une
autre plum e; 40. que l’encre dont'on s’étoit servi pour rem
plir cette date étant plus récente et beaucoup plus noire,
par conséquent, que celle de I’écritiire du corps de l’acte ,
�( 6 )
on a v o it, p o u r faire disparoître cette différence , repassé
la plum e sur plusieurs lettres, Notamment sur cinq ou
six de celles qui composoient la signature.
L e citoyen Daudin de la Fabrie auroit pu sans doute
s’inscrire en faux contre cette pièce , et c’étoit même la
voie qu’on lui conseilloit de prendre ; mais il a cru y vo ir
,des moyens de nullité si frappans et si décisifs, q u e, sans
„recourir à ce moyen auquel il est toujours libre de revenir,
il se borne-à la discuter en ce m om en t, comme s’il l’avoit
s o u s c r ite e n p le i n e m a j o r i t é .
E n conséquence, il propose aux conseils les deux ques
tions suivantes :
i° . L ’écrit sous seing p r iv é , portant la date du 21
mars 1788 , peut-il être regardé comme une véritable
ratification de la vente faite par madame D audin de la
Fabrie au citoyen Capelle?
2°. Ce même écrit n’est-il pas n u l, pour n’avoir pas
été fait double entre les parties contractantes?
PREMIÈRE
QUESTION.
L a prétendue ratification contenue en Técrit sous seing
p r iv é , portant la date du 21 m ars 178 8 , n est-elle
pas radicalem ent nulle^ f a u t e d énonciation des actes
ratifiés ?
Sur la prem ière de ces deux questions , les soussi
gnés estiment q u e , faute d’avoir exprim é dans l’acte
dont il s’a g it , la n atu re, les causes et la date de ceux
qu’on a voulu faire approuver au citoyen Daudin de
�( 7 )
la F a b rie , cet acte ne renferm e ni ratification ni appro
bation v a la b le , et qu’il est impossible par conséquent de
lui donner aucun effet.
Dans le sens le plus étendu qu’on puisse donner au
m ot de ratification , il présente l’idée générale d’une
approbation ou confii'mation de ce qui a été fait ou
promis antécédem m ent, soit par celui môme qui ap
prouve , soit par son m andataire, soit enfin par un liom m e
qui auroit agi en son nom , mais sans aucun p ou voir
de sa part.
rt r
A in s i, par exem ple, un m ajeur ratifie les actes par lui
souscrits en m inorité , lorsqu’il les approuve en pleine
conuoissance de cause, speciali conjirrnatione : sa rati
fication les rend obligatoires pour lui à com pter du jour
même qu’ils ont été passés. A i n s i, le commettant ratifie
ce qui a été fait par son mandataire , m êm e hors les
termes ou les bornes de son m an d at, lorsqu’il consent
de l’adopter. A i n s i, e n fin , celui dont on a fait l’affaire
à son insu , quoiqu’en son n'orn et se portant fort pour
l u i , se rend propres et personnelles toutes les obligations
qui en d ériven t, lorsqu’il se soumet à les exécuter. Dans
les deux derniers ca s, la ratification équipolle au mandat r
suivant la m axim e ratihabitio m andato cornparalur;
et dans tous elle a un effet rétroactif au moment où les
actes ratifiés ont été souscrits, parce qu’elle n’en est que
1 accessoire et le com plém ent.
Il est une autre espèce de contrat a u q u el, dans l ’usageT
on a très-mal à propos appliqué le nom de ratification T
dont il diilère essentiellement dans ses caractères p ro -
�^ ( 8 .)
près et dans ses effets ; c’est celui par lequel on approuve
un acte essentiellement n u l, te l, par exemple , que seroit
l ’obligation d’ une femme m ariée qui l’auroit consentie
sans l ’autorisation de son m ari ; tel encore que la vente
d’un héritage faite par celui qui n’en étoit pas p rop rié
taire , ou l’aliénation d’un bien de m ineur faite par son
tuteur sans le concours ou l’autorité de la justice. Cette
prétendue ratification ne peut pas avo ir d’effet rétroactif au
tfm ps du contrat, puisque ce contrat étant n u l, ah in it io ,
n’a pu produire aucun e ffe t, ni recevoir de com plém ent
par une approbation postérieure. C ’est une nouvelle obli
gation ou une nouvelle v e n te , q u i n?a d’exécution que
du jour môme qu’elle est consentie ; quippè ratum habens
et confirm ons ya ctu m , q u ia lià s vim non obtineret, ipsum
constituera videtur, ncc ratihabitio ejus retrotrahipotest.
Cette espèce d e conti'at , qui est. celle de la contesta
tion , et qui fera plus particulièrem ent l’objet de la seconde
des questions proposées , a. néanmoins cela de c o m m u n
avec la ratification ordinaire, qu’elle doit m êm e, à f o r
t io r i, énoncer de la manière la plus form elle et la j)lus
précise la nature, les causes et la date du contrat que l’on
entend approuver et confirmer ; a u t r e m e n t il seroit im
possible de se r e n d i’e certain que l’approbation a été
donnée en pleine: connoissance de cause , que le consen
tement a été libre et parfaitement é c la iré , qu’eniin celui
qui ratifie a eu tous les moyens possibles d’éviter l ’erreur
et la surprise sur l’objet de la convention.
Suivant les principes du droit rom ain, adoptés dans
notre jurisprudence française , celui qui ratifie en ma
jorité
�<9 5 .
jorité les actes qu’il a faïls étant m ineur, ne peut pas in vo
quer le bénéfice de la rescision. ( Leg. i et 2 , if. cod. S i
m ajor fa c t. rat. lmb. )
Mais il faut que cette ratification soit spéciale , c’està-dire , qu’elle soit exempte de tout soupçon de fraude
de la part de celui qui l’e x ig e , ou d’erreur et de surprise
de la part de celui qui la donne ; à bien plus forte raison
cette règle doit-elle être observée, lorsqu’il s’agit non pas
d’un acte fait par le m ineur lui-m êm e , mais d’un acte
fait sans le concours de sa volonté , soit pour disposer de
son b ie n , soit pour compromettre ses intéiêts.
A in s i,p a r exem ple, u n m ineur, devenu m ajeur, con
sent d’approuver et de ratifier les ventes faites par son
tu teu r, sans autorité de justice, pendant le cours de sa
m inorité. L a loi d écid e, en ce cas> qu’il ne peut troubler
les acquéreurs, ni revendiquer sur eux sa propriété; mais
elle décide en même temps que si la ratification n’a pasété sp écia le, ou si la prescription n’est pas acquise contre
l u i , il a le droit incontestable de faire anéantir les alié
nations. S i sine decreto prccsidis prœ dia tua à tutore
tuo a lh n a ta su r it, nec s p e c j a l i conjirm atione ; vel
( sibon a fid ep ossesso r fu iss e t) statuti temporis e x c u r s u ,
id (jitod perperam est a c tu m , fu e r a t sta b ilitu m , preeses
provm ciœ possessionem in ju s tuum retraJiet. L eg. 2 ,
eod. Si m ajor. Jxict. alien. sïn. decret. rat. hab.
O r ? quels caractères doit avoir cette ratification pour
^
ecre spéciale? L e prem ier de tous 7 sans doute ? est l’ononciation précise et form elle de la n atu re, des causes et
de la dale du contrat que l’on entend ratifier; elle doit
être faite expresse e t n o m i n a t i m , dit Perrézius, sur le
B
A«
�i
( 10 )
titre 4 6 , cod. S i m ajor ratam hab. , etc. ; ca r, si Ton
confirme un acte, ou des actes en gén éral, sans exprim er
ni leurs objets, ni leurs clauses principales, ni le temps
où ils ont été passés, la convention est radicalement nulle
par la seule indétermination des choses qui en font la
m atière, et par l’impossibilité d’assigner d’ une manière
fixe et certaine l’objet sur.lequel a porté le consentement
des parties contractantes.
U ne autre raison non moins évidente rend encore cette
énonciation absolument indispensable, savoir, la nécessité
de constater que celui qui ratifie a bien connu l’acte qu’ il
consentoit d’a p p ro u ver, qu’il l ’a lu en en tier, et qu’il ne
s’est déterm iné à le revêtir de son approbation qu’après
avo ir pris tous les éclaircissemens nécessaires pour éviter
l’erreur et la surprise. L a loi 5 , cod. P lu s ralere quod
agit, quàm quod sim ul. concip. , nous présente encore
un exem ple frappant de l’application de ce principe dans
l’espèce suivante :
a V o u s avez donné ordre de prendre pour vous le bail
« à ferme d’ un héritage ; mais le m a n d a ta ir e infidèle que
« vous en aviez chargé vous présente, au lieu d’un contrat
k de lo u age, le contrat de vente de ce même im m euble,
« et vous le signez ou vous l’approuvez sans le lire, »
Dans ce c a s, dit, la l o i , il n’y a ni vente ni contrat de
louage, faute du consentement des parties contractantes sur
le même objet : .Sifa lsu rn insirum entum einptionis conscriptum t i b i , relut locationis quant f i e r i tib i m andaver a s , suhscn bere n o n e e l i c e n t e m , sedjidctn haben—
teni f e c e n l , neutrum contractum ( iu utraque parte ,
déficiente consensu ) constitissc prucul dubio est.
�( “ )
Dans cette espèce,la loi suppose que celui qui approuve
ou ratifie le faux acte fait en son nom n’a pas eu l’attention
de le r e lir e , n o x r e l i g e n t e m \ et ce n’est pas sur sa
simple allégation qu’elle le suppose, car ce seroit une
grossière absurdité , mais elle l’induit nécessairement du
défaut d’énonciation , c’est-à-dire, de cela seul qu’il n’a
pas exprimé en signant ou approuvant l’a cte, qu’il l’avoit
lu en entier, et qu’il en connoissoit la nature et les causes.
V oilà donc le caractère propre et distinctif de cette con~
Jtrm àtion spéciale requise par la loi, parfaitement bien fixé ;
elle doit énoncer spécifiquement expresse et h om in a tim y
la nature , l’objet et la date de l’acte qu’on approuve ; elle
doit montrer que celui qui le ratifie a eu la plus entière
connoissance des stipulations qu’il renferme; elle doit
enfin présenter les preuves d’un consentement éclairé
dans tous les motifs de sa détermination : autrement, elle
est nulle ; elle n’oblige point celui qui la donne ; elle ne
produit aucun droit en faveur de celui qui l’obtient; et
comme la loi lui refuse toute espèce d’elfet ou d’exécu
tion , les tribunaux ne peuvent en prendre connoissance
'’que pour en prononcer la nullité.
Gela posé , que porte la prétendue ratification du ci
toyen Daudin de la Fabrie, o u , pour mieux dire, l’écrit
«w bas duquel se trouve sa signature? Il porte : « Je
«
K
«
«
ii
soussigné approuve et ratifie les actes que ma mère
a consentis en faveur de M . Capelle, conseiller, du
dom aine du T^ernet et totxt ce qui en d ép en d , et
promets de l’en faire jouir en vrai propriétaire. Fait
le 21 mars 1788. »
Mais quels sont les actes qu’il ratifie? S o n t- c e des
B 2
�• ♦•
( 12 )
contrats de ven te, des baux einphitéotiques ou à rente
fo n ciè re , des échanges, des donations m êm e? car ce
mot vague et indéterm iné exprim e tous les genres pos
sibles d’aliénation, soit ù titre o n é re u x , soit à titre
gratuit, sans laisser dans l’esprit aucune idée certaine de
l’espèce particulière d’aliénation qu’ils ont opérée , et
conséquemmcnt sans faire connoître quel est l’objet précis
de la ratification.
Si on dit qu’en s’obligeant de fa ire jo u ir le citoyen
Concile ci titre de p ropriétaire, le citoyen Daudin de la
Fabrie a suffisamment déterm iné la nature de l’engage
ment qu’il contractoit, on ne fera que rentrer dans la
difficulté qui restera toujours aussi insoluble qu’aupara
vant, puisque la propriété s’acquiert par toutes les espèces
d’aliénations qu’on vient d’énoncer, et qu’il faut néces
sairement en revenir à savoir quel est le genre particu
lier du titre que le citoyen Daudin a voulu revêtir de
son approbation.
L ’incertitude devient encore plus grande à raison de
ce mot tous les actes, qui embrasse dans sa généralité
non-seulement les actes authentiques, mais encore les
actes sous signatures privées, conséquemment les contrelettres , les quittances, les. décharges, et généralement
toutes les conventions, de quelque nature qu’elles puis
sent ê tre , qui ont pu intervenir entre la mère du cit.
Daudin de la Fabrie et le cit. Capelle. Pourquoi dire
tous les actes, s’il n’y a qu’un seul contrat de ve n te ,
et si ce coutrat porte quittance du p r ix ? Pourquoi nepas énoncer ce con trat? pourquoi ne pas faire mention.,
de sa nature, de sa d ate, de ses clauses, du prix m oyen-
�4 %i
*■13 ^
nant lequel l’héritage a été v e n d u , des différens objets
qui y sont en trés, du nom de l’officier public qui en
a rédigé la m inute, et du dépôt dans lequel on pourra
la trouver? Seroit-ce que le citoyen D audin de la Fa brie
ne le connoissoit pas, qu’il ne l’avoit jamais v u , et qu’il
l’approuvoit sur p a r o le , sans aucune espèce d’examen ?
M ais de cela même il résulte que sa ratification est n u lle ,
puisqu’ indépendamment de l’indétermination qu’elle p ré
sente dans son o b je t, elle n’a point ce caractère propre
et distinctif que la loi veut y tro u ver, celui d’un con
sentement donné en pleine connoissance de cause, expresse
et norninatim ; en un m o t, celui d’une confirm ation
spéciale , qui fait nécessairement supposer l’énoncialion
de l’acte ou des actes que l’on confirme et que l’on ratifie.
E t quand on considère que celui qui exige une pareille
ratification est un juge, un magistrat, un homme instruit
plus que tout autre des formes dans lesquelles un pareil
acte doit être r é d ig é , tandis que celui qui la donne est
un jeune homme sans expérience, sans lum ières, sans
moyens aucuns de s’éclairer sur ce qu’ il fait, combien la
présomption légale de fraude et de surprise qui résulte
•du seul défaut d’énoncialion n’acquiert-elle pas de force
et d’évidence, si l’on y ajoute surtout les présomptions
Particulières qui naissent en foule du seul rapprochement
des diverses parties de cet informe écrit!
Sous ce prem ier point de vue on doit donc nécessai
rement décider qu’il est n u l , et qu’on ne pourroit lui
donner d exécution ou d'effet sans renverser à la fois les
principes les plus certains du droit civil et les premières
notions du bon seus.
�(
S E C O N D E
x4 )
Q UE S T I ON.
L 'é c r it portant la date du 21 m ars 1788 n 'e s t - il pas
n u l, pour n avoir p a s été f a i t double entre les parties
contractantes ?
M ais ne l’e s t- il pas encore sous un autre aspect,
comme n’ayant pas été fait double entre les parties
contractantes? C ’est ce que l ’on demande par la seconde
des questions proposées, et ce qu’il s’agit d’examiner en
cet instant.
P o u r arriver à une solution satisfaisante et sûre , il
fout remonter d’abord à quelques maximes générales sur
l ’efTet de la vente du bien d?autrui, considéré , d’une
p a r t, dans ses rapports avec les parties contactantes ellesmêmes, de l’autre, avec les tiers dont on a vendu la pro
priété.
Relativem ent aux parties contractantes, il est certain
que la vente du bien d’autrui' est valable , en ce sens
qu’elle oblige le vendeur à faire a v o i r la chose vendue
à l’acquéreur, prœstare eirem habere licere, conséquemment à l’acheter de celui qui la p o s s è d e , o u , en cas d’im
possibilité, à lui payer des dom m ages-intérèts propor
tionnés î\ la perte qu’il éprouve et au gain qu’il manque
de faire, propter ipsarn rein non habitant.
M ais relativement h celui dont on a vendu la chose,
la vente est radicalement n ulle, puisque cette vente, faite
sans son consentem ent, ne peut pas plus avoir l’ellet de
le dépouiller de sa p ro p riété, que celui de la transférer
�4 ?°)
( 15 )
_ ^
entre les mains d’un autre. A cet égard la loi est fo r
m elle : id quod nostrum e s t, sine ja c t o nostro , ad
a li utn transferri non ■pot-est. L eg. 1 1 , if. D e regul. jur.
A in s i, par exem p le, le mari qui vend le Lien de sa
femme sans le consentement form el de celle-ci, ne donne
aucun droit à l’acquéreur; et la vente est l’adicalement
n u lle, quand même cette fem m e, induite en erreur par son
m ari, l’auroit tacitement ratifiée en apposant son cachet
ou sa signature sur l’acte ou l’instrument de la vente.
D istra hen te rnarito rem t u iju r is , s i consensum e i non
accornniodasii, licetsigillo tuo venditionis instrunienlum y
fr a u d e co n qu isitâ , signaveris, Jiujusrnodi tarnen cornfnentum em ptori usucapione non su b secu ta , vel longi
temporis prœ scriptione, m inim e m unito nullam prœ stitisse securitatem potest. L eg. 2 , cod. D e reb. aîien,
non aliénand.
P ar ex em p le , encore , la vente faite par une m ère
( Leg. 4 , H tit. ) , celle consentie par un père {L eg . 5.) ,
du bien de son fils ém ancipé, sont radicalement nulles, si
le fils n’est pas intervenu à l’acte de vente, ou s’il ne l’a
pas expressément ratifié; s i fu n d u m tuum pater, te non
consentiente renundedit, jieque ei su cce ssisti, rteqne
possidens longi teniporisprœscriptione t u unit us est. T ib i
ogenti rector provinciœ reddi ejficiet. L eg . 5 , cod. D e
reb. a/ien. non alienand.
La loi
au cod. D e rei v in d ica ty présente un autre
exemple d’autant plus frappant, qu’il est identiquement
celui de l’espèce proposée. « T^otre m ère, ou votre m ari,
« porte celte lo i, n’ont pu valablement vendre m algré
« vous, ou à voire in su , et par c o n s é q u e n t vous pouvez
�f iS )
revendiquer votre chose entre les mains de l’acquéreur,
même sans lui restituer le prix. M ais si postérieurement
vous avez consenti à cette vente ( on vient de vo ir
plus haut dans quelle form e devoit être donné ce consentement ou cette ratification ) , ou que vous ayez
perdu la propriété de toute autre manière ( putà par
la prescription ), vous n’avez plus aucune action contre
cet acheteur ; mais vous avez celle negotiorum gestoru m , en restitution du p r ix , contre celui ou celle qui
n vendu (*). »
D e ce principe incontestable et non contesté, que la
vente du bien d’autrui est radicalement n u lle, relative
ment au propriétaire lu i-m êm e, tous les jurisconsultes,
sans exception, tirent pour conséquence directe que l’acte
par lequel le propriétaire approuve l’aliénation, est moins
une ratification proprem ent dite, qu’une véritable vente
qu’il fait de sa chose; attendu que celui qui ratifie et qui
confirme un acte de cette nature, essentiellement nul par
rapport à lu i, doit être censé vendre lu i-m ê m e , et sa
prétendue ratification ne peut avoir en ce. cas d’eiïet ré
troactif , quippè ratura habens et co n jirm a n s, a ctu m ,
q u i aliàs vi.ni non obtineret, ipsum constituere videtur,
nec ra tiha b itio, retrotrahi potest.
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
(*) M ater tua, v e l maritus fundum tuum invito, v e l ignorante,
njcndere jure non potuit ; sed rem tuam a possessore vindicare
etiam non oblato pretio poteris. Sin autem posteà de ea ven ditione con sen sisti, v e l alto modo proprietatem ejus am isisti :
adversits emplorem quideni nullani habes actionem• adversiis
venditorem verb de pretio negotiorum gestorum actionem exer
cera non prohiberis .
L ’application
�4^1
( '7 )
Inapplication de cette conséquence avoit particulière
ment lieu autrefois dans la matière du retrait lignager et
du retrait fé o d a l, dont le délai ne commençoit à courii
que du jour de rensaisiuemcnt du contrat de vente.
M ais quand quelqu’un avoit vendu le bien d’ un autre,
sans que le jn’opriétaire y eû t.con sen ti, co m m e, par
exem p le, dit D uplessis, lorsqu’un m ari vendoit le bien
propre de sa femme , on distinguoit s’il l’avoit fait en
vertu d’une p ro cu ratio n , et alors le délai ne pouvoit
courir que du jour de la ratification de la femme (*).
Il n’en ¿toit pas de m êm e, suivant ce jurisconsulte,
du m ineur qui avoit vendu son héritage avec promesse
de ratifier en m ajo rité, ou du tuteur qui l’avoit vendu
par avis de parens. Dans ce dernier cas, le contrat n’étoit
pas nul de so i, sed veniebat tantum annullandits; la
ratification n’y ajoutoit r ie n , et conséquemment l’an du
retrait avoit dû courir du jour du contrat.
L a raison de cette différence, qui se présente d’elle*
m ême au prem ier coup d’œ il, est parfaitement bien dé
veloppée par les dçux sa vans annotateurs de D u p le ssis ,
de Laurière et Berroyer. « U n mari ven d, disent-ils, le
« propre de sa fem m e, et prom et de la faire ratifier.
« A p rès la mort du m ari, la femme ratifie le contrat-,
« scs enfans agissent en retrait dans l ’an de la ratifica« tion; savoir s’ ils y sont bien fondés, quoique le contrat
« ait été passé vingt ans auparavant. .
« L ’opinion commune est qu’ils sont bien fondés; la
« raison est que l’héritage étoit un propre de la femme;
(*) Duplessis, T ra ité du retrait, pag. 281 de I'édit. de 170g,
G
�'i
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
( 18 )
de sorte que son mari l’ayant vendu sans son consentem ent, la vente étoit n u lle , et elle pouvoit la faire
casser; c’est pou rquoi, quand la femme a ratifié, ç’a été
volontairem ent, et ii lui étoit libre de le faire ou dé
rie le pas faire : ainsi celte ratification n’a point d'effet
rétroactif à son égard ; elle n ’est présumée avoir vendu
q u ’ au m om ent de la ratification. L e fait d’ un tiers ne
peut préjudiciel’ i\ un pi’op riétaire, ni à ses lignagers;
ainsi l’an et jour ne court que du jour de la ratification.
« E t , en effet, la î-atification n’a un effet réti'oactif que
pour faire valider un contrat fait par une môme person n e, ou suivant sa procuration, ratijicatio ad hoc
« tantiim Jïfigitur ut q u a si continuatione duorum ac« tuum contractus validetur. »
Pocquet de L iv o n iè re , T raité des fiefs, liv. 5 , chap 6 ,
pag. 4 9 1 , dit absolument la même chose, relativem ent au
retrait féodal. « Si le contrat est nul de so i, dit ce p ro « fond jurisconsulte, et qu’il ne soit validé que par la ratir fication , comme si le mari a vendu le bien de sa femme
« sans sa participation, et que plusieurs années après la
« femme ratifie, le temps du reti'ait féodal ne court pas
« du jour du contrat, mais seulement du jour de l’exlii« bition de la ratification, qui n’a point d effet rétroactif
« au jour du contrat qui étoit nul : la Jnutation de pro« p riété, et la m utation de vassal ne s est f a it e que
a p a r la ratification et non p a r le contrat. »
L e célèbre P o th ie r , T raité des retraits, part. i re. ,
chap. 4 , n°. 12 3 , nous enseigne égalem ent, et en général,
que si la vente a été faite p a r un autre que par le pro
p rié ta ire , quoique la tradition soit intervenue, ce n’est
�( r9 )
que du jour du consentement donné à la vente par ce
pro p riétaire, qu’ il y a ouverture au retraiten faveur de
sa famille ; car, d it-il, ce ri est que p a r ce consentement
q u i l est censé avoir v en d u , et que Vhéritage est mis
hors de sa fa m ille.
Il seroil trop lo n g , et à coup sûr parfaitement inutile,
de m ultiplier davantage les citations sur un des prin
cipes les plus incontestables du droit com m un : on se con
tentera donc d’indiquer en note les autres jurisconsultes
qui ont traité la question, et qui Font décidée de la même
m anière et par les mêmes motifs , en observant qu’il n’en
est pas un seul qui ait osé soutenir l ’opinion contraire (i).
A cette foule d’autorités du plus grand poids, se réunit
la jurisprudence constante et invariable d.e tous les tribu
naux de la France.
L es annotateurs de Duplessis rapportent quatre arrêtsdu parlement de Paris;
(*) V o y ez, entr’autros, M ayn ard, liv. 7 , chap. 35.
C atelan , tom. 1, liv. 3 , chap. 12.
B oucheul, sur l’art. 219 de la Coutum e de P oitou, n*. 2.
V igier, sur celle d’Angoum ois, art. 76 et 77, n . 4 > aux additions.
L ap eyrère, lettre R , n°. i^ 5.
L ecam u s, Observations sur le titre du retrait, § . 4 , n°. g.
Ferrière, sur l’art. 129 de la Coutum e de Parjs, glose 6 , n°. i 3.
B e ra u lt, sur l’art.
4^53 de la Coutum e de Normandie.
V a s lin , sur l'art. 33 de la Coutum e de la Rochelle, tom. 3 ,
pag. i 35, n°. 146.
Œ uvres de Cochin , tom . 5 , mémoire 159.
Lítcom be, verbo h e t r a i t .
Répertoire universel de jurisprudence, verbo r e t r a i t
section 6 , § . 1 " . , n\ 3 et 5 .
C
a
l ig n ag er ,
�> r.
( âo )
L e p rem ier, du i er. avril i 65 o , cité aussi p a r P a p o n ,
li v. i i , tit. 7 , n°. 37 ; et par Garondas, en ses Réponses r
liv . 2 , cliap. 76.
L e second, du 4 décembre 1578, sur un appel d’A n jou j
il est également rapporté par C h o p in , liv . 1 , cliap. 81 ,
n°. 1 de son Com m entaire sur cette coutume.
L e troisièm e, du 21 avril iô p ô , q u’on trouve dans les.
notes sur Papon.
Enfin le quatrièm e, du 22 janvier 160 7, sur un appel
de Senlis, dont M orn ac fait mention , sur la loi 1 6 , fi’, dû
Pignoribus.
' A u parlement de R ouen il en a été rendu un , le 20
juin 1 6 1 9 , qui a décidé la même ch ose, et dans la m ême
espèce ; il est rapporté par B e ra u lt, sur l ’article 453 de
la Coutum e de Normandie.
Celui de D ijo n avoit également la m ême jurisprudence,,
qui se trouve consacrée par un arrêt du 7 février 1 6 1 1 ,
inséré dans le RecueU de B o u v o t, tom. 2 , art. retrait
conventionnel.
L es parlemens de d roit é c r it, notamment celui de T o u
louse , jugeoicnt constamment la même chose dans le
retrait conventionnel et dans le retrait féodal , com m e
on peut s’en assurer par le tém oignage de Catelan , de
Bretonnier sur H enrys •, de I* ip e y re re , de B o u v o t, et
d’ un grand nom bre d’autres jurisconsultes.
C ’est donc un principe certain , que si le véritable pro
priétaire ratifie la vente de son bien , faite par un outre
que l u i , sa ratification, qui dans ce cas n’a point d’effet
rétroactif, et ne peut en a v o ir, doit être cousidéréeconim e
une aliénation nouvelle qu’il fuit lui-m êm e , que c’eSt de
�( M )
cet instant seul qu’il est dessaisi de la propriété -, de cet
instant seul qu’il y a mutation ou transmission du domaine
de sa personne en celle de son acquéreur ; de cet instant
seul enfin que cet acquéreur dévient propriétaire, attendu
qu’il ne l’étoit pas auparavant, et qu’il n’avoit pas même
l’apparence d’un titre en sa faveur.
Ce principe une fois bien é ta b li, en voici un autre
qui n’est pas moins incontestable, sa v oir, que dans les
contrats sinallosjnatiques rédigés par é c r it , sous signa
tures p riv é e s, il fa u t, à peine de n u llité , que l ’acte soit fait
double entre les parties contractantes, parce qu’autrement
celle des deux q u i atirôît Vacte en sa -possession pou
vant le s u p p r i m e r sans qu’il en restât aucune tra çe , seroit
libre de se délier par là de ses obligations , si elle jugeoit
plus convenable'à ses intérêts de Les anéantir que de les
exécuter ; ce qui détruiroit absolument ce. lien civil , au
moyen duquel chacun des deux contractons est tenu
envers l’autre à l’exécution de ses engagemens/
S’a g it-il, en effet \ d’ un contrat de1vente ? Si l’écrit se
trouve entre les mains dç l’acqueTeur, et que la chose
vendue vienne à p é rir, ¿1 peut supprimer'cet»écrit p ou r
rejeter la perte sur'sOû v e n d e u r, et annuller par là ses
propres obligations. 1
'
V ic e v er sa , le vendeur lui-m êm e est-il possesseur de
cet écrit ? Si la chose vendue vient à augmenter de valeur
depuis l’aliénation , rien de plus facile p o u rilü i que de
rentrer dnns sa propriété en détruisant la seule preuve
qui existe de la vente.
Dans ces deux cas, et m ille autres semblables qu’on peut
im agin er, il n’y a réellem ent pas de co n trat, puisque
�i
\.
( 22^
les deux, confractans ne sont pasjréciproqucm ent et civi
lem ent tenus vinculo ju r is à l ’àccompLsscment de leurs
obligations.
Vainem ent diroit-on qu’il faut bien distinguer dans lin
acte ce qui appartient au contrat , et forme le vinculum
obligcitionis qui en est l’essence, d’avec ce qui n’est relatif
qu’à la preuve ; que le consentement seul forme l’obliga
tion et lui donne toute la perfection dont elle est suscep
tible ; que la rédaction par écrit n’est utile que pour la
preuve ; que le défaut de preuve ne peut pas en em porter
la n u llité; que si la preuve testimoniale n’est pas admise
dans les conventions au-dessus de 100 francs, l ’ordonnance
de 1667 a fait exception pou'r'le cas où il se trouve un
commencement de preuve par écrit;-d ’où il résulte que
la convention étant écrite daiis Un acte sim p le, cette
preuve littérale suffit pour en fairé,ordonner l’exécutjon
Cette objection , répétée m ille fois dans toutes les
contestations où la question s’est présentée, n’a jamais
réussi dans les tribunaux ^rparqç..qu’elle ne porte réelle
ment que sur une véritabIef!équivoque. Il est bien vrai
que le lien civil'se form e par le consentement des parties
contractantes ; mais ce lien civil seroit illusoire et n u l,
si chacune d’elles n’avoit pas un m oyen sur de con
traindre l’autre à’ l’exécution, de ses pngagemens , çu si
ce moyen SC' trouvoit seulement dans les mains de l’une,
sans que l’autre eût le pou voir ni même la possibilité de
s’en servir. L e lien civil ne consiste pas seulement dans
l’obligation consensuelle des contractans; il consiste de
plus dans le droit très-réel d’em ployer l’autorité de la
justice et des tribunaux pour le faire exécuter, vinculum
�4
&
( *3 )
ju ris quo n e c e s s i t a t e adstringimur ad dandum ali-
,
qu id velfaciendurn. O r , il n’astrcindroit pas également
les deux parties, et par conséquent il n’existeroit pas, si
l’ une d’elles avoit seule le pou voir de contraindre l’autre
à rem plir ses engagemens ; tout en conservant la liberté
de se soustraire h l’accomplissement des siens par la sup
pression de l’écrit qui les renferme.
Aussi voyons-nous que la jurisprudence du parlem ent
de Paris a constamment prononcé la nullité toutes les
fois que l’acte n’étoit pas fait double entre les parties
contractantes, et m êm e lorsqu’ayant été fait doub le,
les deux écrits n’en p o r t o i e n t pas la m e n t i o n form elle.
L ép in e de G r a i n v i l l e nous a conservé l’espèce d’un arrêt
du même parlem ent, en date du 30 août 1736 ?
ainsi
ju g é , et qu’on trouve dans le R ecueil des arrêts de la
quatrième chambre des enquêtes, auquel les soussignés
se contentent de re n v o y er, en observant que les motifs
de la décision s’y trouvent développés dans toute leur
étendue, avec une force de logique et de raison à laquelle
il est impossible de résister.
U n autre a rrê t, du 6 août 1740 , rapporté par D enîsart,
verbo double écrit , n°. 5 , a pareillement déclaré nulle
une promesse d’acquérir l ’hôtel de C o n ty, souscrite par
l’archevêque de R lieim s, au profit des héritiers de la
princesse de C o n ty, et cela sur le fondement que l’écrit
qui l«i contenoit n’avoit pas été fait double.
L e même arrêtiste en cite un troisième du 23 janvier
1767.
O n en trouve encore un quatrième dans le R éper
toire universel de jurisprudence, verbo eo d eru , qui a pro-
�( H )
nonce la m ême nullité dans le cas d’un écrit portant
promesse de ven d re, souscrite par le citoyen Forge l , au
profit du ( duc ) de Gram m ont : ce dernier est du 19
novem bre 1781.
\
<.. j'r
M aintenant, s’il est vrai quedans l’espèce où se présente
la contestation actuelle , on doit regarder comme une vé
ritable vente la prétendue ratification surpiùse au cit. D audin de la F a b rie, ver a venditio et a lie n a tio fu n d i, pour
em ployer ici les expressions de D u m o u lin , il s’ensuivra
nécessairement q u e l’écrit q u i la renferm e a dû être fait
double, sous peine DE n u l l i t é , e t , p a r une conséquence
ultérieure, que l’écrit inform e représenté aujourd’hui par
le citoyen Capelle ne peut servir de fondement à la de
m ande en garantie qu’il
fo rm é e , puisque non-seule
m ent il n’énonce pas que Pacte a étévrédigé en deux d o u
bles séparés, mais que de plus il est constant et reconnu
qu’il n e Fa pas été (*).
J
* --- 1.......— ---------
---- —
1•
(*) L e sieur Capelle, danè le1précis imprimé qu’il a fait distri
b u er, pag. 2 9 , prétend que le éieur Daudin n ’est point recevable
à arguer de cette nu llité, ayant exécuté la convention portée dans
l ’acte de ratification. 11 invoque l’article i3a5 du Code civ il, qui
porte que le défaut<de mention que les originaux ont été faits
doubles, triple«; ne peut être oppose par celui qui a exécuté de
sa part la convention portée dans 1 acte.
Com m ent le sieur Daudin a-t-il exécuté,? Sold patientid, jus
qu ’au moment où il a réclamé. Est-ce de ce genre d ’exécution dont
la loi a entendu parler ? Les législateurs ont entendu parler d’un
fuit extérieur d ’exécution , et non du simple silence.
L e sieur Capelle prétend, en sedond lieu, que les actes sous
seing privé ne doivent être faits doubles qu’autant qu’ils contiennent
�( 25)
L ’objection que le citoyen Capelle voudra probable
ment tirer de la lettre qu’ils ’çstfait é c rire ,le ioaoû t 1783,
des engagemens réciproques; mais qu’il n ’en est pas de même lors
que la vente est pure et simple, et què le contrat porté quittance.
Il cite un arrêt de la cour, dans la cause du sièur Bertier.
Sans entrer dans l’examen de l ’arrêt, rendu sans doute dans des
circonstances particulières, on répôndra que l’adyersaire, par une
pétition de principes , rattache l’acte de ratification à la vente,
tandis que ce sont deux actes absolument indépendans, absolument
distincts. O n voudroit faire perdre de vue que la vente a été ici
consentie par un tiers; que la m ère, ayant vendu en son n o m ,
doit être considérée comme tiers. L a ratification souscrite par
D audin ne peut être considérée comme une continuation de la
vente consentie par la mèrë en son nom t laquelle lui est étrangère.
Ensuite le sieur Capelle a pris soin de détruire lui - même la
quittance portée par la v e n te , en produisant, la lettre du 10 août
1783.
Veut-on regarder la ratification isolém ent, et abstraction faite
"de la’ vente? il n ’y a" ni prix ni quittance : on ne~peüt donc ap
p liq u e r ï ’arrêl dé lat dour. :i ; m n •>! ait»;! »..<• •»?> . q
:
Veut-on la rattacher à la vente', cqntreitous les 1principes? 'la
^vente’ porte quittance;,niais nne'quittancé fausse, une quittance
détruite par> le sieur Capelle lui-^rnumefi et c’est conime s’il n ’y
avoit point de quittance : l’arrêt de la cour ne'reçoit donc point
encore d ’application..: i<>i -urs! oii;ol
jrtoJ;.
¡loi
,
S i ônjréfere la'ratificatibn'-â la venté, le sieur<Daudin n ’a donc
enÎeriilu ratifier qua pour 121600 ^frànc6 y et le sieur. Gapelle n’a
payé'n i-vo u lu payer qùo r 38oo francs : ' i l n ’y a :donc poinl de
ven te, les parties n ’ayant point été consentantes sur le prix. Le
" sieur C apelle, qui veut rattacher la vente à la ratification, et qui
n a payé que i 38oo francs, ainsi qu’il en a fourni lui-même la
preuYC '.par la lettre du sieur. D ajidin .qu’il a produite, n ’offre
D
«
�' ( 26 )
par le citoyen Daudin d e là Fabrie (enregistrée au lon g,
à la requête dudit Capelle, le 8 brumaire an 8 ), ne mé
rite d’ailleurs aucune réponse sérieuse, parce q ue, d’une
p art, elle ne renferme aucune ratification; parce que, de
l’autre, elle a été écrite en m i n o r i t é , et que si on vouloit
en induire contre le citoyen Daudin de la Fabrie qu’il a
touché le prix de la v e n t e , il faudroit prouver en même
temps que ce prix a tourné à son avantage.
A u surplus , il ne faut que lire attentivement cette lettre
pour être bien convaincu que si le citoyen Daudin de. la
Fabrie a touché quelque chose, ce n’est très-certainement
p a s , et même à beaucoup p r è s , la somme entière portée
au contrat. •
'
i
A près avoir dit au citoyen Capelle que le magistrat
chargé de l’instruction de la plainte le soupçonne très-for
tement de n’avoir payé que 14000 fr. au lieu des 21600 fr.
dont le contrat porte quittance, il ajoute, q u o i Qu ’ i l
•
■,
■.
n'>
cependant pas de parfaire le prix ; ¡1 veut- retenir, et l’excédant
du p rix, elile domaine : proh / i d e s ! I
E t si on sépare la ratification de la vente, si on la regarde comme
ayant seule constitué un titre au sieur C a p e lle , comme étant
nova etprincipalis dispositio, les principes développés par la con
sultation subsistent dans toute leur force..
L e sieur Capelle y a donné lui-meme un nouveau poids par
l’arrêt qu’il cite, pag. 33 , du 7 février 1 6 1 1 , rapporté par Brillon.
m Une personne vend le bien d’autrui ; la. vente n'est pas bonne :
a mais si le propriétaire ratifie,'le contrat prend sa force du jour
» de la ratification. » ( E t non par conséquent du jour du premier
acte. )
1
P A G È S - M E Y I Y 1 A C , jurisconsulte.
�Ç27\
44!
EN s o i t , je ne vous n u ira i ja m a is,p a rce qtie vous m 'avez
bien payé ce que vous ni avez prom is. O r, qu’e s t - t e
que le citoyen Capelle lui avoit promis ? et quelle somme
lui a-t-il pnyée ? Voilà ce que la lettre ne dit pas; mais
à coup sûr ce n’étoit pas les 21600 francs énoncés au
«contrat, puisque dans ce cas il n’atiroit eu besoin^ pour
rassurer le citoyen Capelle sur les--craintes qu’il paro/ssojt
avoir conçues , d’après la manière de penser du juge
chargé de .l'instruction, que de rqcopïjoître franchement
avoir reçu la totalité du prix.
Cette lettre n’est d o n c, comme la prétendue ratifica
tion , que l’effet des manœuvres exercées sur l ’esprit d’un
ncfalheureu* m ineur qui > ne connaissant ni la valeur
des choses, ni même*celle cîé l ’argent qu’on lui donnoit
pour surprendre de lui Unë' apparence de consentement,
auroit certainement signé pour beaucoup moins toutes
les approbations qu’on lui auroit demandées.
A in si l’avantage que le citoyen Capelle voudroit tirer
de la lettre du 10 août 178 3, se réduit précisément à
rie n , d’après le fait certain que cette lettre a été écrite
en m in orité, et le principe qu’un m ineur ne peut pas
plus s’obliger par lettre que par acte authentique ou
sous signatures privées.
Il
ne reste donc absolument que l’écrit portant la
date du 21 mars 178 8 ; mais indépendamment de ce
qu’une foule de présomptions s’élèvent pour dém ontrer
que cette date est fausse, et que l’écrit, comme la lettre,
«■
1 été fait en m in orité, on vient de vo ir qu’il est radi(•{.ildnent u u l, même dans l’hypothèse où le cit. Daudin
de la Fubrie l ’auroit souscrit depuis sii, majorité acquise,
�\V«-( 2 8 )
parce que, d’un côté, il n’énonce ni la nature, ni les
clauses, ni la date des actes prétendus ratifiés, et que,
de l’autre, il n’a pas été fait double entre les parties con
tractantes; o •
1
l
"■ •'
'■
.*?
"i! o o
i-
?m
t.
par les soussignés anciens jurisconsultes,
Jà Paris, ce 29 ventôse an 8 de la rép. fr.
D é lib é r é
'•
"
•'
:i • I
P O IR IE R , T R O N C H E T , C O F F IN H A L .
-
.y'jq
-'•y
. ‘
'*"•
'*
-r-.i
.
.
; •1
f onnuo3 <•;:!')
•. .■}.:■)
. ’* ■ ‘
.,
’f f î :
?
- -v
••><» <; :
vfi.iv.L u i ; o q
■
-t
J»
i
J t ' ‘:
' •
;
ir. l i t ”
ir.l
.
« \ ’ w< :.
1.
'Î!-*!
. ; ■- .7
J • : f >¿■>'1*’ ' ¡ H
*): *-■
: 'il!
O !
'1
:
;
l;i'
'J
-I
T .
t/'t )
'
t;:)
:j!)
. ,q
1
j ! - r ; V i . i-iii»)
n : m ; b i r - '
v/iî^orrM j -tîjoq
î .f
J.
•,;>
!)•
’
i
<•
u < : ,'t
; c
Ji .Ml”: : ‘
' ) * ! ) ’• . •
’I .
■
i;I
j ' : :■
■
■:
• j
a
'!-■)•) Î ) ü j )
j
r
mi i î - ' h
••
-,
'l'.r- - '
' ? S,
- •
.
o l' .' ji
on
<s. ■ ■ :/'■
j »
>
.
•.
jj|_>
Ji
•
\
j-[- ; ' ‘ tq *j;> o ';:0 *>»-.;*,- ,
■- : ! ) t ) f
• I:
I-') <;i
A R IO M ; de l'imprimerie de L andri ot , seul imprimeur de la
C o ur d’ap p el.— T herm idor an 13.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Daudin de la Fabrie. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Poirier
Tronchet
Coffinhal
Subject
The topic of the resource
ventes
abus de confiance
abus de faiblesse
prescription
éviction
minorité
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation.
Table Godemel : Dol : 1. Vente du 1er mars 1782 critiquée de nullité comme ayant été surprise, à une femme, par des manœuvres concertées entre l’acquéreur et le fils mineur de la venderesse. Eviction : 2. si la vente d’un immeuble et la ratification qui en a été faite par son héritier, devenu majeur, sont nulles, le vendeur qui a contracté en son propre et privé nom et reçu le prix, peut-il être dispensé de garantir l’éviction sur le fondement que le vice du contrat même en est la cause, et que l’acquéreur connaissait l’incapacité du vendeur ? Exécuteur testamentaire : autorisé à vendre pour payer des dettes, peut-il vendre sans aucune formalité pendant la minorité de l’héritier ?... L’acquéreur doit-il surveiller l’emploi des deniers ? Prescription : l’acquéreur, dont le titre est vicieux, peut-il se prévaloir de sa possession, et opposer, en pays de droit écrit, de l’action en nullité et en désistement, la prescription de dix ans entre présents et de vingt ans entre absents ? Ratification : 1. l’acte par lequel l’héritier devenu majeur ratifie les actes passés par l’exécuteur testamentaire, soit-il, pour être valable, énoncer expressément les actes ratifiés ? cet acte, s’il est sous signature privée, doit-il être fait double ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1782-An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1515
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0715
BCU_Factums_M0404
BCU_Factums_G1512
BCU_Factums_G1513
BCU_Factums_G1514
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53255/BCU_Factums_G1515.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vic-sur-Cère (15258)
Vernet (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
abus de faiblesse
éviction
minorité
prescription
testaments
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53256/BCU_Factums_G1516.pdf
c98446121ba3771b3c3afc9f900d74e9
PDF Text
Text
CONSULTATIONS
P O U R
C H A R L E S , veuve A u d i f r e d , habitant à
Clermont, appelante du jugement du 7 fructidor an 7 ; ‘
G ilb e r te
C O N T R E
1
I
'
C H A R L E S , e i F r a n ç o i s M ICH EL O N ,s o n M a ri, propriétaires, habitans de la même,
ville , intimés,
M a g d e le in e
■i '
C e l u i qui a pris cession d’une créance non contestée, pendant
la dépréciation du papier-monnoie, a-t-il moins de droits que son
cédant? L e débiteur peut-il le forcer à recevoir son remboursement
au pied de l ’échelle de dépréciation du temps de la cession, et à
s’en contenter? En un m ot, le débiteur d o it-il moins qu’il ne
devoit, parce qu’il a changé de créancier? T elle est la question à
juger. L a raison, et le texte précis de la loi du 1 1 frimaire an 6 ,
article 1 1 , la décident en faveur du créancier subrogé. Cependant
le tribunal dont est appel l’a décidée en faveur du débiteur, qu’il
a admis à se libérer avec
francs en num éraire, d’un capital
de 6ooo francs, dû pour prix d’une vente d’immeubles faite par
contrat du 1 1 mai 1 7 9 1 , et des intérêts de quatre ans un m ois,
ainsi que des frais d’inscription ( qui montent à 9 francs ), moyen
nant 82 fran cs, sans l’obliger même à rembourser les coûts de
acte de subrogation. Un jugement si directement opposé à la
justice et
texte précis de la lo i, tro u ve ra -t-il grâce devant la
cour d' appel ? Ce seroit l’outrager que de le craindre.
398
l'
F A I T S .
Il
résulte d un acte du
9
prairial au 3 , que Gilberte Charles,
I
’
�H* •
1^
x
**
1
( 2 )
veuve A udifred* appelante, paya à M . César Champflour la somme
de 6000 fran cs, pour remboursement du capital à lu i dû par Magdeleine Charles, veuve D ons, remariée à François Miclielon, pour
prix d’ une partie de maison sise à Clerm ont, sur le fcoulevart des
Augustins, à elle vendue par contrat du 1 1 m ai 17 9 1. M . Champilou r, en recevant ce capital, en donna quittance, et subrogea la
veuve A u difred a son lieu et p la ce , pour exercer contre les propriétaires de la maison vendue tous ses droits à cet égard ; et
comme entièrement p ay é , il fit remise à la subrogée de son expé
dition de vente, pour s’en servir ain si qu’elle aviseroit.
Magdeleine Charles, et M iclielon, son second m ari, intervinrent
dans l’acte pour déclarer que d'après les arrangemens pris entre Iff
citoyen Champflour et la citoyenne A ud ifred , ils se tenoient l’ acte
pour sign ifié , et consentir à payer annuellem ent à ladite A udifrecl
le revenu de la somme de 6000 livres à son échéance, jusqu’au,
remboursement dudit capital.
Il fut ajouté, par convention exprèsse, que cr la somme de» 6000 livres dont il s'agit seroit remboursable à la volonté du dé» biteur, 1000 livres par 1000 liv ., et que l’intérêt y relatif seroit
» payé à la veuve A u d ifred , avec les retenues légales, jusqu’à
m l’entier payement : les partie» dérogeant, quant à c e , à la teneur
» du contrat de vente, d’après lequel le capital dû étoit rembour>
)> sable dam l'intervalle de dix ans à compter de sa date, et le
m revenu stipiMé payable sans retenue. »
L es sieur et dame Michelon ne profitèrent point des facilités
qui leur avoient été accordée» pour sc libérer, pendant que le
papior-monnole avoit cours • après le retirement, le législateur
«’occupa de déterminer la réduction en num éraire, des obligationsqui avoient été contractées pendant le cours du papier-m onnoie;
elles furent divisées en plusieurs' classes, et chacune reçut ses loiï
particulières, suivant sa nature et son origine.
L a loi du i
5
fructidor an
5 avoit réglé le sort des
obligations
antérieures à la dépréciation du papier-monnoie; celle du 1 1 fri
maire an 6 fixa le mode de remboursement des obligations conr
�4 4
S
(3)
tractées pendant cette dépréciation; et celles du 16 nivôse suivant
réglèrent spécialement le mode de payement des obligations con
tractées pour prix d’aliénations de biens immeubles faites depuis le
i " . janvier 1 7 9 1 , jusqu la publication de la loi du 29 messidor
’4
an 4.
Cette dernière loi s'applique évidemment à la liquidation du prix
de vente du 1 1 mai 1 7 9 1 , cédée par M . Cliampflour à la femme
M ichelon, puisqu’elle est postérieure au i*\ janvier 17 9 1 ; conséquemment si M . Cliampflour n’y avoit pas subrogé la veuve A u difred avant le retirement du papier-m onnoie, il auroit été eu
droit d ’en exiger le payement d'après les bases de liquidation éta
blies par les lois citées, du 16 nivôse an 6.
Il
y a deux lois de cette date, dont l ’une est le complément de
l’autre; et le résultat des deux est que i’acquéreur est obligé de
payer les immeubles acquis pendant la dépréciation du papierm onnoie, au prix d'estimation en numéraire , d’après la valeur
ordinaire des immeubles de môme nature dans la contrée, à l’é
poque de la vente, à moins que le vendeur ne préférât de subir la
réduction au pied de l’échelle de dépréciation à la même époque (*),
suit de là , que la veuve A udifred, ayant été subrogée au lieu
et place de M , Cham pflour, par l’acte du g prairial an 3 , pour
exercer tous ses droit«, le« ti«ur et dame Michelon ne pouvoient
se libérer valablement envers elle, après le retirement du papiermonnoie , qu’en lui payant la valeur de l ’immeuble vendu par
M . Cham pflour, au mois de mai 17 9 1 , sur lé pied de l’estimation
« 1 num éraire, à l’époque de la ven te, ou au cours des assignats
à la même époque, si la veuve Audifred avoit préféré ce dernier
mode de liquidation# Sur ce pied, le remboursement auroit dû
être de
o francs numéraire, pour 6000 francs, vu que l’assignat
ne perdoit que 7 francs par 100 contre numéraire, au mois de mai
* *, suivant l ’échelle de dépréciation du temps.
11
558
79
( ) Cest la ]a coq*é<juence des articles i*r, et 3 de la
jlp la seconde.
première
a
loi, et {
�558
( 4 )
A u lieu de ce capital de
o fr. numéraire, les sieur et dam«
Michelon crurent qu’ils pouvoient se libérer avec g francs, et
ils firent des offres réelles de cette dernière somme, par acte du
8- messidor an 7 , ainsi que de 82 francs pour intérêts, et frais
d’inscription. L a veuve Audifred refusa ces offres. L a contestation
s’engagea au tribunal civil du département, sur leur suffisance ou
insuffisance, et elles furent déclarées suffisantes par jugement du
7 fructidor an 7. Appel le i brumaire an 8 , de la part de la
veuve Audifred. Par le choix des tribunaux, qui avoit alors lieur
la connoissance de cet appel fut dévolue au tribunal civil d’Allier;;
m ais l’ établissement de la cour d’appel en la même année, l’en a
saisie, et il s’agit maintenant d’y faire droit.
L a veuve Audifred soutient son appel avec confiance ; et c’cst
avec raison, car ses moyens semblent victorieux : les voici.
58
5
M O Y EN S
D’ APPEL.-
L é jugement dont est appel paroît fondé sur l’article 10 de la
loi d u 1 1 frim aire an 1 1 , ainsi conçu : « Quand le débiteur aura
v emprunté une somme en papier-monnoie, pour se libérer envers
» un ancien créancier, le capital ainsi prêté sera soumis à l’échelle» de réduction du jour de la nouvelle obligation, sans que le nou» veau créancier, qui en a f o u r n i le m ontant, p u is s e s c prévaloir,.
y> quant à ce, de la subrogation aux droits, ainsi cju’ ù l'hypothèque
» ou au privilège de l’ancien créancier, qui a été remboursé de ses'
» deniers. » Mai6 l’analise que nous venons de faire de l’acte de
cession du 19 prairial an 3 , démontre à 1 évidence que 1 article
cité n’y a aucune application. Cet article en effet 11c parle que du
cas où un débiteur emprunte pour payer une dette ancienne, et
contracte une obligation principale nouvelle envers le second prê
teur. O r, les sieur et dame Michelon n’empruntèrent rien de la
veuve Audifred; ils ne contractèrent aucune obligation principale
et nouvelle envers e lle , par l ’acte du g prairial an . S ’ils inter
vin r e n t dans cet acte, ce fut uniquement pour rcconnoitre la veuve
3
Audifred pour leur créancière, à la place de M . Champflour, ac--
�cepter le transport, et le tenir pour signifié. Ce p ’est,paà ainsi
que l'on s’exprime quand on crée une nouvelle dette par un em
prunt avec lequel on éteint la première. Il n’y a point alors de
signification de transport à faire, parce qu’il ne s’en opère aucun
relativement au capital de la créance. Concluons que les débiteurs
M ichelon, en tenant Vacte duc) prairial an n pour sign ifié, ont
reconnu que cet acte étoit un 'véritable transport de Vancienne
dette au profit de la veuve A udifred, et qu’il n ’étoit que cela.
- O r, écoulons maintenant l ’article n de la même loi du n fri
maire an 6 ; il nous apprendra que « la réduction à l’échelle du
» jour du nouvel acte, n’ est pas applicable, i ’ . aux simples ces» sions et transports de dettes , 2°. aux endossemens d’effets né~
n gociables, 3°. aux délégations et indications de payemens, meme
» aux délégations acceptées.
» Dans tous ces cas, ajoute l'article, les ccssionnaires ou dele» gataires pourront fa ire va lo ir en entier les droits des cedans ou
» délégans, contre les débiteurs cédés ou délégués. »
Il
ne s'agit ici que d’une cession, d’un transport, d’une délé
gation de créance acceptée ; donc il ne s’agit point d ’une créance
à laquelle la réduction à l’éclielle du jour du nouvel acte, purement
récognitif de la dette ancienne, soit applicable; mais d’une créance
pour laquelle la veuve A udifred, cessionnaire ou délégataire, peut
fa ire valoir en en tie r les droits du sieur Cham pflour, c é d a n t ou
délégant, contre les sieur et dame Michelon. D o n c , encore une
fo is, les premiers juges ont fait une fausse application de la réduc
tion prescrite par l’article io de la loi citée, tandis qu’ils dévoient
appliquer l’article i i ; qu’au lieu de déclarer valables les offres
faites par les intimes, de g francs en capital, pour éteindre une
dette de 6ooo francs, créée à la date du 1 1 mai 1 7 9 1 , ils dévoient
déclarer les intimés débiteur de Ô o livres, et rejeter leurs offres
insuffisantes, et de plus de neuf fois trop foibles.
58
58
P remière objection.
JLa créance primitive fut modifiée par l ’acte de subrogation du
�N il
3
( 6 )
g prairial an ; il y eut novation convenue entre la veuve Audi
fred et les débiteurs, puisque les termes de payement furent chan
gés, et que l’intérêt stipulé par le premier acte fut réduit, en le
soumettant aux retenues légales dont il avoit été affranchi dans
l'acte de vente de 179 1 ; o r, s’il y a eu convention nouvelle entre
le créancier subrogé et le débiteur, il y a lieu d’appliquer à ce con
trat nouveau l ’article 10 de la loi du 1 1 frim aire, qui soumettoit
la créance à la réduction sur le pied de l’échelle de dépréciation
de-la date de ce nouveau contrat, et non à l ’application de l'articlq
j i , qui la ipaintenoit telle qu’elle étoit originairement»
R é p o n s e ,
Quelle misérable subtilité! Sans doute il fut apporté par l’acte
du 9 prairial an , de la part de la veuve A ud ifred , un adoucis
sement volontaire et généreux à la créance que M . Champflour
lui cédoit; mais cet adoucissement n ’en changea ni la nature, ni
l ’origine; il ne porte point sur le capital, mais seulement sur les
intérêts et sur les termes de payemens. Ce ne fut point un nouveau
capital en assignats que la fem m e Michelon et son m ari reçurent
à titre d’ emprunt des mains de la veuve A ud ifred , pour se libérer
envers leur undert vrzfunuicr d'un prf.rc de vente d*'immeubles : la
veuve Audifred ne leur fournit rien, ab so lu m e n t rien, à titre de
p rêt, ni num éraire, ni papier-monnoie, pour se libérer envers le
sieur Champflour ; elle paya directement ce créancier, qui la su
brogea à sa place et lui céda ses droits, pour les exercer comme il
l’auroit pu faire lui-même. 11 y eut donc encore une fois transla
tion de la créance ancienne du sieur Champflour sur la tête de la
veuve A udifred, et adoucissement de cette créance ancienne; mais
point de création d ’une nouvelle. Donc il n’y avoit pas lieu d’ap
pliquer l’article 10 de la loi, qui présuppose non-seulemçnt un con
trat npuveau, mais une créance nouvelle, par l’emprunt d’une
somme en papier-m onnoie : il n’y a lieu qu’à l’application de
l ’articlp 1 1 , relatif aux cessions, délégations et transports des de^leç
3
�(7 )
anciennes, acceptées ou non par les débiteurs, telles que la su
brogation qui s’opéra par l’acte du 9 prairial an .
3
D euxième objection.
S ’il en est ainsi, la veuve Audifred aura donc fait un bénéfice
énorme sur la créance du sieur Cham pflour, puisqu’elle aura
acquis un capital de
o francs numéraire, pour une modique
valeur de 398 francs.
558
R éponse.
Hé ! quelque bonne que soit devenue, par l’événement, la né
gociation que la veuve Audifred fit avec le sieur Cham pflour;
quelqu’heureux qu’ait été l’em ploi qu’elle fit d'une somme d’assi
gnats provenue de m arch an d ises vendues au maximum > qui re
présentent du numéraire en ses m ains, de quel droit les débiteurs
Michelon lui en enlèveroient-ils le bénéfice? C ’est leur faute s’ils
ne l’ont pas remboursée en papier-monnoie dans le temps ; s’ils
n ont pas mis à profit la facilite de rembourser ïooo francs par
jooo fran cs, dans un temps ou il en coùloit si peu pour se pro
curer de si médiocres sommes* Mais ils doivent savoir que le Code
civil n’a pas établi une réglé nouvelle, rjti’ il n ’ a fait que perpétuer
une règle de tous les temps, lorsqu'il a dit ( article 1 iG ), « Les
» conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes; elles
» ne nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent pas. » Rc$
inter alios actd, tertio nec nocet, nec prodest.
5
L a cession faite par M . Champflour de sa créance à la veuve
A udifred, sur la femme Michelon et son époux, n’a pas pu nuire
« ces débiteurs / mais elle ne doit pas leur profiter. Débiteurs de
o francs numéraire envers M . Champflour, pour prix de vente
d une maison qui vaut aujourd'hui Soooo francs, quoiqu’ils n’en
aient pas dépensé plus de cinq ou six mille à la réparer, ils ne
doivent ni regretter de payer cette dette sur son taux prim itif ,
à la veuve A u d ifre d , cessionnaire de M . Champflour, ni s’en
dispenser; leur sort n ’a pas été empiré par le changement de.
558
�*
.
( 8 )
créancier : c’est tout ce qu’ils doivent considérer, et imposer silence
à l ’envie.
D e si puissans moyens ne permettront pas à la cour d’hésiter à
infirmer le jugement dont est appel, et à rejeter les offres déri
soires qu’ont faites les intimés de
francs , pour se libérer d ’un
capital de
o fran cs; et il seroit bien superflu de relever l’in
suffisance de ces o ffres, dans leur propre systèm e, en faisant re
398
558
m arquer,
1 °. Que quand il seroit possible d’admettre la réduction du ca
pital de la créance à
fran cs, il ne le seroit pas de ne porter
qu’à 82 fr. quatre ans un mois d’intérêts de ce capital, et 9 fr.
de frais d’inscription ;
20. Que si le bénéfice de l’acte de cession, du prairial an ,
devoit tourner au profit des débiteurs M ichelon, la justice publie
que ce ne pourroit jamais être qu’à la charge par eux d’en sup
porter les frais et loyaux coûts, qu’ils n’ont cependant point of
fe rts, et qui resteroient en pure perte pour la veuve A udifred, si
le jugement dont est appel étoit confirmé.
M ais cette confirmation sur la question principale est impos
sible ; c’est donc perdre du temps que de s’arrêter aux moyens
secondaires.
398
3
D E L I B ÉRÉ à
5
Clerm ont-Ferrand, le 1 1 juillet 1 8 0 6 .
BERGIER.
BEILLE-BERGIER.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a vu la présente consultation, est
entièrement du même avis, et par les mêmes raisons. Les résolutions de cette consultation ne sont que le résultat et la juste ap
plication des lois rendues sur la matière.
D élibéré à R io m , le 14 juillet 1806.
A N D R AUD.
A RIOM, de l'imprimerie de Landriot, seul imprimeur de la Cour d'appel
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Charles, Gilberte. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Beille-Bergier
Andraud
Subject
The topic of the resource
créances
assignats
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour Gilberte Charles, Veuve Audifred, habitant à Clermont, appelante du jugement du 7 fructidor an 7 ; contre Magdelaine Charles, et François Michelon, son mari, propriétaires, habitans de la même ville, intimés.
Table Godemel : Assignats - bail en assignats : 5. le cédataire d’une créance non contestée, pendant la dépréciation du papier monnaie, a-t-il moins de droit que son cédant ? peut-il être forcé de recevoir, du débiteur, son remboursement sur le pied de l’échelle de dépréciation au temps de la cession, lorsqu’il s’agit du prix d’un immeuble que le cédant avait droit d’exiger en numéraire, aux termes de l’art. 11 de la loi du 11 frimaire an 6 ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1795-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1516
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0526
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53256/BCU_Factums_G1516.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
Créances
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53257/BCU_Factums_G1517.pdf
f01c67a0603ec296eebe7caae167a76c
PDF Text
Text
v
et
m -
CONSULTATION
TRIBUNAL
de l ’a rr o n d is s e m e n t
D E RIOM.
EMPLOYÉE
P O U R C A U S E S E T M O Y E N S D ’A P P E L ,
POUR
La dame D E P R A S L I N propriétaire de la terre
de Randan, appelante;
CONTRE
Le Corps commun des.habitans du bourg de Randan,
intimés.
i L
C O N SE IL SO U SSIG N E , qui a vu le jugement
E
du juge de paix du canton de Randan , du 29 brumaire
an 13 , entre la dame de Praslin , propriétaire de la terre
de R andan, et le Corps commun de la commune de
A
�Randan, procédant en la personne du sieur M artin , maire
de cette commune; les pièces sur lesquelles ce jugement
a été rendu, et l’appel qu’en a interjeté madame de Praslin
au tribunal d’arrondissement de Riom :
E s t i m e que le jugement du juge de paix du canton
de Randan a été mal rendu, et que l’appel en est bien
fondé.
Pour établir cette résolution , il est nécessaire de rap
peler la nature de l’action que madame de Praslin avoit
exercée contre le Corps commun de Randan , dans la
personne du maire, et la procédure qui a été tenue devant
ce juge.
Madame de Praslin se prétend propriétaire, et avoir
de tout temps, et par exprès d’avoir depuis plus d’an
et jour , la possession d’un terrain qu’elle dit avoir
formé anciennement un manège dépendant du château
de Randan : ce terrain est immédiatement co n tig u aux
autres dépendances du château.
Il vient à la suite d’un autre terrain qui faisoit autrefois
un jeu de paum e, et n-en est séparé que par une avenue
pour arriver du château à la chapelle qu’avoit autrefois
le seigneur dans l’église de R an d an •, et ce terrain du jeu*,
de paum e , qui n’est p a s contesté à madame de Praslin,
egt aussi immédiatement à la suite du jardin du château.
Enfin ce terrain du manège est b o rn é , au septentrion ,
par l’avenue qui conduit au château , et, ù l’occident, par
la voie publique.
Mais ce qu’ilfdut surtout rem arquer,c’est que ce même
terrain est et a toujours été environné de fossés cons
tamment et toujours faits et entretenus par les seigneurs
�( 3 .)
de Randan j.et bordé ,d u côté de l’avenue du château et
de celui de la voie publique, par des arbres qui ont tou-,
jours été taillés et émondés par les seigneurs de Randan,
qui ont toujours aussi profité du retail de ces arbres ,
enlevé les arbres morts, et remplacé ceux qui avoient péri.
Dans le temps seulement de la révolution, il s’est établi
quelques foires à Randan , qui n’y existoient pas aupa»ravant. Madame de Praslin a souffert, pendant le temps
de ces foires, que quelques marchands qui s’y rendoient
étalassent leurs marchandises sur le terrain dont il s’agit,
sans exiger d’eux aucune espèce de rétribution pour l’éta
lage : c’étoiLde sa part un acte de bienfaisance qui ne pouvoit nuire à sa propriété , ni à sa possession ; elle conservoit toujours l’une et l’autre par l’entretien des fossés
autour de ce terrain, par l’émondage qu’elle faisoit faire,
par l’enlèvement des arbres m orts, et par leur rempla
cement.
Il y a même sur cela un fait qu’il n’est pas inutile d’ob
server; c’est qu’en l’an 10 elle pria le sieur Martin de
faire faire pour elle quelques réparations aux fossés de
ce terrain , et de faire faire les creux nécessaires au rem
placement de quelques arbres qui avoient péri , et pour
établir une nouvelle allée, dont les arbres furent fournis
par elle, et plantés par ses préposés; et elle fit rembourser
au sieur Martin une somme de 12 liv. 16 s. pour la répa
ration des fossés, et une somme de 6 liv. 10 s. pour la
façon des creux d’arbres : ce remboursement lui fut fait
au mois de brumaire au 12.
T el étoit l’état des choses, lorsque, le 11 fructidor an i i ,
s’étant tenu une foire daus le bourg de Randan , et les marA 2
�( 4 )
chands ayant ¿talé leurs marchandises dans le terrain dont
il s’a g it, comme madame dePraslin l’avoit souffert depuis
que, pendant la révolution, il s’étoit établi des foires à Ran<lan,lesieurMartin,mairede Randan,s’avisa de se fa ire payer
des droits, soit sur les marchandises, soit pour l’étalage; et
il a prétendu dans la suite que ce n’étoitque pour l’étalage,
et non pour les marchandises, 'qu’il ayoit perçu ces droits^
ce qui est parfaitement indifférent, parce que , percevant
des droits pour l’étalage , c’ étoit s’arroger une possession
6ur le terrain : mais c’étoit comme maire qu’il agissoit, par
conséquent au nom de la commune.
Madame de Praslin a donc dû regarder cette entre
prise comme un trouble à sa possession, et par là se croire
fondée à exercer une action en complainte possessoire.
Madame de Praslin annonça son intention d’exercer
cette action, dans une pétition qu’elle présenta au préfet
du département, pour demander que le maire de Randan fût autorisé à y défendre ; et sur cette pétition fut
rendu un arrêté, le 6 prairial an 12, qui autorisa le con
seil municipal de Randan à s’assembler pour délibérer
s’il y ayoit lieu à défendre à la dem and e de madame de
Praslin, et qui chargea le maire de Randan de l’exécu
tion de cet arrêté ; et le 10 du même mois il fut fait une
notification et laissé copie de l’arrêté au maii*e de Randan.
D e suite, pour ne pas laisser passer le délai d’an et jour,
depuis le trouble, madame de Praslin, en vertu d’une
cédule du juge de paix, du 5 fructidor an 12, fit assi
gner le Corps commun des liabitans de Randan, dans la
personne du maire, "par-devant le juge de paix, pour la
Toir garder et maintenir dans la possession'où elle étoit
�'4Ü
( 5 )
d’an et jo u r, avant le trouble, du 'terrain dont il s’agit,
avec défenses de l’y troubler à l’avenir, aux peines de
d ro it, e t , pour l’avoir fa it, être condamné en 200 francs
de dommages-intérêts.
La cause une première fois portée à l’audience du juge
de p aix, le 19 fructidor, sur l’exposé fait par le maire,
qu’on ne pou voit pas l’assigner avant d’être autorisé à
défendre cette cause au nom de la commune , le juge de
p a ix , attendu que le maire de Randan n’étoit pas auto
risé à défendre au nom de la commune, et qu’il ignoroit
l’époque où il le seroit, ordonna que la cause demeureroit suspendue pendant deux m ois, sans que ce délai pût
nuire aux droits respectifs des parties, tous dépens, dommages-intérêts réservés.
Si l’on prend garde à l’époque de ce jugement du 19 fruc
tidor , on jugera aisément que depuis la signification qui
a voit été faite au maire de Randan de l’arrêté du préfet,
du 10 prairial, dans l’intervalle de plus de deux mois qui
s’étoient écoulés, il avoit bien eu le temps de se fah’e au
toriser à défendre à la demande de madame de Praslin ,
par une assemblée du Corps m unicipal, et d’en obtenir
l’homologation du préfet; et il est d’ailleurs certain qu’il
y a eu une homologation.
Quoi qu’il en soit, et après le délai de deux mois accordé
par le jugement du 19 fructidor, madame de Praslin, en
vertu d’une autre cédule du juge de p aix, assigna de nou
veau le maire de Randan à l’audience de ce même juge,
pour procéder sur la demande en complainte déjà fox*mée;
mais le maire de Randan n’ayant pas co m p aru à cette nou
velle assignation, il fut rendu un jugement par défaut,
A 3
�( 6 )
le 24 brumaire an 13, qui garde et maintient madame de
Pvaslin dans la possession du terrain dont il s’agit, fait dé
fenses de l’y troubler à l’aven ir, et prononce la condam
nation des dépens.
Sur la signification qui fut faite au maire de ce juge
m ent, il y forma opposition le 8 frim aire, avec assigna
tion devant le juge de paix , pour être fait droit sur l’op
position; et c’est en cet état que fut rendu le jugement
dont est appel, du 29 frim a ire , et duquel il est néces
saire de rendre un compte exact. •
O n y voit que le procureurfondédemadame dePrasliny
reproche au maire de ne s’être pas fait autoriser ¿défendre à
la demande par un arrêté du pi’éfet, et demande qu’il soit
débouté de son opposition. L e maire répond d’abord que
le terrain dont il s’agit est une place publique qui appar
tient à la commune, qui en jouit d’un temps im m ém orial,
et dont elle a disposé pour la tenue de scs foires ; il con
vient qu’il a perçu un droit pour la place qu’occupoient
les marchands, et non sur les marchandises qui y étoient
étalées ; il ajoute ensuite qu’il est autorisé à défendre à la
demande, par une délibération du Corps municipal, qu’il
a adressée à M . le Préfet pour en obtenir l’homologation,
qu’il n’a pas encore reçue; mais.qu’il est d’ailleurs de droit
naturel de se défendre; qu’enfin la demande de madame
de Praslin est vicieuse, attendu qu’elle n’est pas de la com
pétence du juge de paix , qui 11e doit connoître que des
affaires personnelles, et qu’elle attaque une commune
entière; en conséquence, il demande qu’elle soit dé
boutée de sa demande, cominc assigné devant un juge
incompétent.
�( 7 ) /.
C ’est surces dires respectifs que fut rendu le jugement
dont voici les motifs et le dispositif i teAttendu, y est-il
« d it , que la compétence des juges de paix se borne à la
« connoissance des affaires purement personnelles et mo« bilières;quela demande dont il s’agit embrassé en masse
« tous les habitans, pour avoir commis le trouble dont on
à se plaint; qu’il y a impossibilité que tous les habitans de la
« commune se soient concertés pour commettre le trouble
« énoncé eii la demande, qui n’auroit due êjre formée que
« contre les auteurs du trouble ", en conséquence, envoie la
« cause par-devant les autorités compétentes, tous moyens
« tant de fait que de droit respectivement réservés, ainsi
« que les dépens, pour être sur le tout statué ce qu’il'
« appartiendra. »
Pour justifier l’appel que madamç de Praslin a interjeté
de ce jugement, il faut en combattre les motifs et le
dispositif.
L e m otif principal qui a servi de prétexte au dispositif,
c’est l’incompétence du juge de paix ; mais rien n’est moing
vrai que cette incompétence. Quelle étoit la nature de la
demande ? G’étoit une action possessoire. L e juge de paix
a prétendu que sa compétence se bornoit aux actions pure
ment personnelles et mobilières, et qu’elle ne s’étendoit
pas aux actions possessoires : comment a-t—il pu méconnoitre la loi de 1790, sur l’organisation de l’ordre judi
ciaire, où, dans le titre 3 , la compétence des juges de
paix est si clairement déterminée, et où il a u ro it dû voir,
dans 1 article 10 , que le juge de paix est au torisé à connoitre, à la charge de l’appel, non-seulem ent des déplacemens de bornes, des usurpations de terres, arbres
�A( 8 r
haies, fossés et autres clôtures, commis dans l’année, et
de toutes autres actions- possessoires, du nombre des
quelles sont sanâ contredit les actions en complainte? Et
n’est-ce pas en effet dans les justices de paix de tous les départemens de l’empire français, que se portent chaque
jour toutes les actions en complainte possessoire? Il est
même très-vraisemblable que le juge de paix du canton
de Randan a lui-mêm e fait droit sur plusieurs actions de
cette nature ; çt c’est sans doute pour la pi’emière fois
qu’il a imaginé de se prétendre incompétent dans cette
matière.
Quant à cet autre motif de son jugement, que la demande
dont il s’agit embrasse en masse tous les habitans, pour
avoir commis le trouble ; qu’il y a impossibilité que tous
les habitans se soient concertés pour le commettre, et que
la demande n’auroit dû être formée que contre les auteurs
du trouble, ce m otif s’écarte encore facilement.
On peut commettre un trouble, n o n - s e u l e m e n t par soimême , mais encore par son mandataix-e, ou son procureur
constitué, ou tout autre représentant. O r, quel^est le repré
sentant d’une commune? C’est sans doute le maire de cette
commune , puisque c’est lui q u i est autorise à en exercer
toutes les actions, et que c’est contre lui que doivent être
dirigées toutes celles que l’on peut avoir contre la com
mune; et c’cst à ce titre de maire que le sieur Martin
convient lui-même avoir perçu des droits pour l’étalage
d e s marchandises dans le terrain dont il s’agit; ce qui a
formé le trouble à raison duquel la complainte possessoire
de madame de Praslin a été exercée : et une preuve de
plus que c’est au nom des habitans qu’il a commis le trouble,
�( 9)
c’est la délibération du conseil municipal qui l’a autorisé à
défendre à la demande en complainte.
A in s i, rien de plus frivole que les motifs qui ont servi
de prétexte au jugement par lequel le juge de paix s’est
déclaré incompétent, -et l’ont fait renvoyer les parties
devant les autorités compétentes, puisque lui seul étoit
juge compétent dans cette matière , et sa compétence
bien déterminée pour toutes actions possessoires dans
l’article 10 du titre 3 de la loi de 179 0 , sur l’organisa
tion de l’ordre judiciaire. Rien ne l’empêchoit par consé
quent de prononcer sur l’opposition formée à son precedeut jugement, et de juger si l’opposition étoit bien ou
mal fondée.
11 doit donc paroître évident que le jugement a été mal
rendu, et que l’appel en est bien fondé. Mais quedevoit
faire le juge dont est appel, dans une action en complainte
qu’il a voit déjà adjugée par un jugement par défaut, au
quel il avoit été formé opposition? La demande en com
plainte fondée sur la possession annale, cette possession
étant contestée, le juge de paix devoit, avant de faire droit
sur la demande de madame de Praslin, ordonner qu’elle
feroit preuve de la possession annale, avant le trouble ; et
c’est vraisemblablement ce qu’ordonnera le tribunal, sur
l’appel de ce jugement qui est porté devant lui.
O r , e’est cette preuve qu’il parôît que fera facilement
madame de Praslin, puisqu’elle a mis en fait que nonseulement, et de temps im m ém orial, les seigneurs de
Randan ont toujours joui paisiblement du terrain dont il
s’agit, en le faisant entourer de fossés, entretenant les fossés,
faisant émonder les arbres qui y étoient plantés, profitant
�C 10 )
eux seuls dés émôndages etdesarbresmorts, et faisant rem
placer ceux quiavoient p é r i, mais encore que madame de
Praslin en a continuellement usé de la même manière pen
dant toute l’année qui a précédé le trouble. Et comment
le sieur M artin oseroit-il contester ces faits, et exposeç la
communauté aux suites d’une enquête, tandis que luim êm e, sur l’invitation de madame de Praslin, a fait faire
les fossés, les creux des arbres, et s’est fait rembourser de
ses dépenses par la dame de Praslin, au lieu que ces frais
euesent été à la charge de la com m une, si le terrain eût
été une place publique qui lui eût appartenu.
D élibéré à R io m , le 4 messidor an 13.
A N D R A U D , VISSAC.
C O N C L U S I O N S .
A
ce q u e , attendu, i° . que le juge de paix du canton de
Randan étoit seul c o m p é te n t, aux termes de 1 article 10 du
titre 3 de la loi de 1790,. sur l’ordre judiciaire, pour connoîtrede l’action possessoire exercée par la dame dePraslin ;
attendu, 20. que le trouble qui a donné lieu à l’actiou possessoire a été commis par le sieur Martin , maire de la
commune de Randan , en exigeant des droits des mar
chands qui avoient étalé sur le terrain dont il s’agit , et
qu’il est le représentant de la commune, qui l’a autorisé par
une délibération du conseil municipal à défendre à la
�(11)
demande en complainte possessoire ; il plaise au tribunal,
par jugement en dernier ressort, dire qu’il a été mal jugé
par le jugement dont est appel, bien appelé ; émendant,
et faisant ce que le juge dont est appel auroit dû fa ire,
débouter le maire de la commune de Randan de son
opposition au jugement par défaut , du 22 brumaire
an 13 , qui sera exécuté selon sa forme et teneur, et
condamner le Corps commun des habitans de Randan en
la somme de 200 fr. de dommages-intérêts, applicables,
du consentement de la dame de Praslin , aux pauvres de
la commune de Randan, et a u x dépens; et ou le tribunal
y fe ro it, quant à présent, quelque difficulté , ordonner ,
avant faire d ro it, que la dame de Praslin fera preuve ,
tant par titres que par témoins, de sa possession du terrain
dont il s’agit, et notamment d’an et jour avant le trouble,
dans les délais de l’ordonnance, sauf la preuve contraire
dans les mêmes délais , p o u r, les enquêtes faites et rap
portées, être fait droit ainsi qu’il appartiendra , dépens
réservés.
M e. S 1 M O N N E T , avoué.
A. RIOM , de l’imprimerie de LANDRIOTt , seul imprimeur de la
Cour d'appel, — Messidor an 13.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Praslin. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Vissac
Simonnet
Subject
The topic of the resource
juge de paix
foires
espace public
espace seigneurial
châteaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation employée pour cause et moyens d'appel, pour la dame de Praslin, propriétaire de la terre de Randan, appelante ; contre le Corps commun des habitants du bourg de Randan, intimés.
Table Godemel : Action possessoire : 2. un juge de paix, saisi en complainte possessoire d’un tènement déterminé, contre le corps commun des habitants, a-t-il pu se déclarer incompétent d’après les termes de l’art. 10 du titre 3 de la loi de 1790 ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
Circa An 11-An 13
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1517
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Randan (63295)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53257/BCU_Factums_G1517.jpg
chateaux
espace public
espace seigneurial
foires
juge de Paix
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53258/BCU_Factums_G1518.pdf
6139e91a98c26870515655726bd5ebf6
PDF Text
Text
P O U R
Le sieur A L L E Y R A T ;
C O N T R E
La dame D O U H E T , sa soeur ; et le sieur
D O U H E T , son mari,
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a vu un testa
ment du 27 janvier 17 7 0 , portant donation d’un quart,
de tous ses biens par H enri-François A lle y r a t, au profit,
de Pierre A l l e y r a t , son fils ; une cession de droits con
sentie par M arie-G ilberte A lle y r a t , au profit du même
Pierre A lle y r a t, son frè re , le 20 février 1792 ; la de
mande formée par M arie-G ilberte A lleyrat contre son
fr è r e , le 9 nivôse an 1 2 ; et la procédure tenue au tri
bunal d arrondissement de R io m ;
demande de M a rie-G ilb er te Alleyrat
est une chimère qui ne sauroit éblouir la justice, et qui
A
E
stime
que
la
�( 2 )
sera infailliblement repoussée. Il est facile de démontrer
que Faction qh’elle dirige est mal fondée dans, tous les
points; mais pour rendre sensibles les résolutions que
l ’on va prendre) il est nécessaire de rendre compte suc
cinctement des faits , et de la généalogie de la famille
Alleyrat.
^
Pierre Alleyrat et Gilberte M aignol avoient eu trois
enfans , G ilb e r t, Henri-François , et Amable.
A m able fut mai'iée père et mère vivans , et forclose de
leurs successions, qui durent se diviser par égalité entre
les deux enfans mâles.
Henri-François épousa Gilberte M o m e t , dont il eut
aussi trois enfans ; M a rie -G ilb e rte , qui a épousé le sieur
D ou liet; P ierre, qui est le consultant, et une fille appelée
Am able.
Henri-François A lleyrat décéda le 29 janvier 1 7 7 0 ,
laissant ses trois enfans en bas âge; Pierre n’étoit né que
le 7 du même mois; A m able n’étoit âgée que d’un 1m ;
M arie-G ilberte étoit née en 1765 .
A m ab le décéda elle-meme sans postérité le 6 sep
tembre 1786, à peine âgée de dix-sept ans; le partage
dii'sa succession dut se faire par égalité entre Pierre et
Marife-Gilberte 'A lleyrat, son frère et sa sœur.
‘ Mais cette succession avoit resté confondue dans celle
du père com m un1, qui étoit encore indivise; en sorte
que lés deux enians survivans durent se considérer comme
ayant toujours été les seuls héritiers, et ne porter leurs
vues que sur la succession du p è re, sans en distraire fic
tivement celle de la sœur décédée pour la partager en
suite ; ce qui produisent absolument le môme résultat.
�(3 )
En effet, Pierre A lleyrat am endoit, dans la succession
du p è r e , un quart en qualité de légataire ; ce qui réduisoit la succession ab intestat aux trois quarts de's'bienâ.
O r , Pierre amendoit un quart comme légataire , et les
deux filles chacune un autre quart; maïs le quart d’Â m ab le
étant divisible par moitié entre les deu x autres, il devenoit indifférent pour eux de partager les: trois quarts’ en
deux portions égales, comme s’ils eussent !tout obtenu
de leur chef par le ¡décès du père. - rrn
- Pierre A lleyrat'se maria en 1791', à vin gt-un 'an s ;
G ilb e rt, son. on cle, à quOavoit du appartenir la moitié
des* biens des -auteurs çominuns par égalité;W e c Ilen riFrançois’ , son frère , parut au contrat de mariage , et
institua son rieveu son héritier , à la charge de payer
1200
à M arie-G iiberte, sa sœur, et sous la réserve de
quelques héritages qu’il avoit acquis. -jJJ fut stipulé que ,
faute de disposition de .cette'résservo',’ elle^ feroit' partie
de» l’institution, ¿y':). ‘ '* < , i • : ■¡0 <0 .1
i: Gilbert Alléyrat est lui-m êm e: décédé le 22 octobre
179 2 , avant l’émission des lois nouvelles, sans avoir dis
posé de sa réserve; en sorte que cette véserve* s’est-irréVoca’blem'eflt réuniè“ à rjîistitution.
. r!p ,'»!>1 ' Cependaht Mafic-Gilliei!te, A lle y ra t, l’aînée des enfans
de1«F ra n ço is, fut re c h e rc h é e 'é n ‘^riarioge p a t ” le sieur
Douhet : elle ne dédaigna pas»la proposition. Mais comme
il étoit question d’allee habiter- une ¡cohimune éloignée,
éllei proposa îi -6on ;früi?c de* lu i céder ses droitsfttidyennan t une somme- fixe ; :et 'Pierre A lleyrat ) qui cbtifioissoit
moins qu’elle les forces/de la succession', coïiÿeiitit à fcet
arrangement'. •'> ‘ ;
: ? : 1 r:! .• j- ■
' ••• >m•.
»
A 2
�(4 )
E u conséquence, les parties convinrent que M arieGilberte Alleyrat céderoit à son frère tous ses droits du
chef paternel, poyen n an t une somme de
oo tf~; qu’il
se chargeroit en outre de toutes les dettes de la succession,
et lui délivreroit divers objets mobiliers.
65
Les parties laissèrent mutuellement dans l’oubli Am able
A ile y ra t, leur sœur. L a succession é toit encore indivise:
celle de la fille décédée* s’étoit fictivement confondue dans
celle du père co m m u n , dont ell#. n’a voit jamais été réel
lement distraite; ensorte qu’en pensant,à partager la suc
cession paternelle , P ie rr e et Gilburte Aileyrat n’imagir
noient pas do faire une double opé ratio n , mais:bien.de
prendre'chacun la moitié des biens ; et c’étoit cette moitié
de; tous les biens qii’ils appeloient leur portion de lai suc
cession patei’nelle.
r
. GV-’st.en conséquence de: cette idée qu’il n e fut point
questjon, dans l’açte de cession, d’AcaaJjla ALleyivit ,mii
de sa succession. Quoi qu’il en s o it ,c ’est de cet:acte qub
sort la-.difficulté F:"if est dono-important d’en rapporter
lei^..propres iexp.r^ssions;
.• ,
i : ••• • .¿ v n t
*■&£ 'SQihgvé; et.’bonne, volonfét,' a ;yeudu^
« c é d é , quitté, remit».
com m e piü- ces
? ! p v é s e n t e & < ? U e i Y < ? n d : , r e m e t et, tr a n s p o s e ,
« sans-,iuituwjie-garantie de sa part que descvs faits et fn-ob
« messes * à
.-.îo,ua.^»{droits j -n o m s, raisons , p«f-f
«•,et ;pp^ion littwdi»tak« rojcindjaus et resci&m’pî jfestin
a iH>Ht)ii^[li»uissajK’és>, A t'llé éelHCs rpar ile(;décès ^ludifc
5
<f- f,u a r ,I f c i j A H e y n l t p è a o * «n. quw iquu
« »•le.'
y
vïvca^lion, nh
« réserve , et ou que le tout soit situé, et jponunémenfc
" i.
�(5)
« dans le canton de G ia t, iceux indivis avec ledit sieiir
« acceptant.
« L a présente cession ainsi faite , à la charge par ledit
«' sieur acceptant d’acquitter /¿\y dettes de la su ccessio n ,
« si aucunes y a , même de î-estituer à ladite Gilberte
« M o m e t ,' leur m è r e , ce que le père commun pourroit
« avoir reçu de la légitime de leur dite .mère, sans dim i« 'nution du prix ci-après stip u lé, et autres, et ce moyen« nant le prix et somme de six mille cinq cents livres, etc. »
Cet acte, consenti le 20 février 1 7 9 2 , a été mutuelle
ment exécuté par les parties. Pierre A lleyrat a payé le
p rix conv;enii.,.et en a reçu les quittances de sa sœur, sans
qu’elle ait pensé à se faire la moindre réserve. Cependant,
en vertu de. cet a cte , P ierre "Alleyrat a joui de l’ univer
salité des Liens ; il en a joui paisiblement et sans trouble
jusqu’au 9 nivôse an* i2 ,: c’est-à-dire, pendant plus de
douze ans;
. 1 .
•'
Concevroit-on que la dame Douhet eût souffert si long
temps cette jouissance , si elle n’avoit eu cédé tous ses
droits; qu’elle n’eût pas pensé à se réserver la portion de
droits qu’elle prétend n’avoir pas vendue , en donnant
quittanrc e rdu prii-stipulé dans l’acte de cession, et pen
dant la jouissance que son frère en faisoit librement sous
ses yeux ? 11 est difficile de le penser.
Gèpeàdant c’est après un silence de,douze ans que la dame
fie D o u liet, excitée sans doute par quelque génie inquiet,
p lormé contre son' frère une demande dont il est essen
tiel de.rendre compte.
Elle a pour objet", i° . le partage de la succession de
Gilbert A lleyrat, oncle commun; à l’effet de quoi, et pour
�.
( 6 )
déterminer celte succession à laquelle elle prétend m o itié,
elle conclut au partage de celles de Pierre A lle y r a t ,
et Gilberte M a ig n o l, aïeuls communs.
2°. Elle tend au partage de la succession d’Am able
A lle y r a t , sœur com m une, laquelle, dit-on, doit se com
poser d’ une portion égale dans les biens délaissés par
H en ri-F ra n ço is, c’est-à-dire, d’ un tiers.
- Ce second chef contient deux parties; d’abord la de
mande en e l l e - m ê m e , ensuite la quotité de la succes
sion, q u i, dans tous les cas, ne seroit que d’un quart
de celle du père, puisque son testament du 27 janvier
1-770 contient disposition du quart en prjécLput au profit
de Pierre Alleyrat.
E n cet état, il s’agit d’examiner le mérite de cette
réclamation;
Il seroit difficile d’opposer des moyens plus solides que
ceux qui se présentent contre la demande en partage du
ch ef de Gilbert A l l e y r a t , oncle commun : on n’a pas
sous les y e u x le contrat de mariage du consultant, qui
contient à son profit une institution universelle de la part
de son oncle; mais on trouve la certitude de cette dis
position dans une écriture signifiée de la part de la dame
D o u h e t; e t , dans tous les cas, il suflira de justifier du
contrat de mariage; ce que l’on va faire incessamment.
Dans l’écriture signifiée le 8 floréal an 12, la dame
D ouhet dit avoir pris connoissance de l’institution ; et^
sans se départir expressement de sa demande, en ce chef^
elle se rabat sur la réserve apposée à cette institution;
elle soutient que Gilbert A lleyrat 11’est décédé qu’après
La loi du brumaire au 2; conséqueminent, dit-elle , il
5
�C7 )
en résulte , d’après J ’article 2 de la loi du 18 pluviôse an
, que cette ré s e rv e , bien loin d’être réunie à l’institu
tion , a dû appartenir en son entier à la succession ab
intestat.
Mais ce raisonnement porte à faux dans toutes ses
parties.
D ’a b o rd , il pèclie dans sa base , parce que l’extrait
mortuaire de Gilbert A lleyrat, 'qu’on a sous les y e u x , et
qui remonte au 22 octobre 1 7 9 2 , établit qu’il est décédé
plus d’ un an avant la loi du brumaire an 2 ; que conséquemm ent, lors de l’émission de cette l o i , la i-éserve
étoit irrévocablement réunie à l’institution, et q u e d ’après
l’article icr. de la loi du 18 pluviôse an , cette disposi-"
tion est inattaquable.
En second lieu, puisque la dame Douliet reconnoît la
validité de l’institution faite par Gilbert A lleyrat en
5
5
5
faveur de son n eveu , c’est à tort qu’elle persiste dans
l ’action en partage qu’elle a exercée relativement à sa
succession ; tout au plus pourroit-elle demander la dé-^
livrance des objets qui font partie de la réserve : mais,
encore une fois, l’époque du décès de G ilbert Alleyrat
est une fin de non-recevoir irrésistible contre cette action.
Dailleurs , Gilberte Alleyrat a reçu bien sciemment la
somme de 1200 ^ , qui étoit la condition de cette insti
tution -, elle en a donné quittance sans réserve ; elle a
connu et dû connoître l’époque du décès de son oncle \
elle a donné copie de son extrait m ortuaire, par acte du
21 ventôse an 12, et ses répliques ne sont que du 8 floréal
suivant. Comment a-t-elle osé persister dans une demande
aussi indiscrètement form ée?
�c 8 }.
Il seroit inutile de s’appesantir davantage sur ce pre
mier ch ef; c'est, de la part de la dame D o u h e t, une de
mande inconsidérée, qu’elle s’empressera sans doute de
rétracter : on va s’occuper du second ch ef, relatif à la
succession d’A m able A lle y r a t, sœur commune, et q u i,
à l’examiner de bien p r è s , ne semble pas présenter de
difficultés sérieuses.
A v a n t d’examiner si la demande est fondée en ellemême , il n'est pas inutile d’observer que la dame Douhet
a mal ù propos prétendu que la succession d’Am able
A lleyrat a dû se composer du tiers des biens délaissés
par le père commun. Pierre A lleyrat a droit incontes
tablement de prélever, par forme de préciput, le quart
de ces biens ; le testament qui lui lègue ce quart est
rapporté : la succession d’A m able A lleyrat n’a donc pu
Qlre formée que du quart de celle de son père.
JVlais celte première considération devient inutile, si
la dame Douhet n’a aucun droit à la succession de sa
sœ ur, si déjà elle en a disposé, et l’a comprise dans la
cession de droits du 20 février 1792.
O r , si l’on veut ne pas s’arrêter aux termes de cette
cession , aux expressions qu’a employées le notaire pour
exprim er la v o l o n t é des parties; si l’on considère la po
sition de G ilbcrle A lle y r a t , et les circonstances qui ont
déterminé cet acte, il demeure pour constant que la dame
D ou het a code non-seulement ses droits personnels dans
ln succession de son p ère, mais bien tout ce qu’elle a voit
à espérer du chef paternel.
O n a deju pu pressentir ces considérations; elles res
sortent de la cession elle-même.
En
�* H
9
. Î .5
.
En général , ibest dans l’intention de celui qui cède
ses droits , d’éviter des partages, des 'liquidations , des
difficultés sans nombre ; de ne pas s’exposer à l’incerti
tude de l’événement, de se débarasser enfin de toutes
craintes et de tous embarras par une liquidation amiable,
par une fixation certaine de la valeur de ses d roits, dont
il rejette toute l’incertitude -sur le cédataire. Celui qui
cède doit donc naturellement céder tout ce qui lui est
é c h u ; il fait un acte dénégatif de tout partage; il aban
donne des droits inconnus pour une somme déterminée-,
qui le met à l’abri de tout événement.
Comment concevoir alors qu’en ¡codant ses droits dans
la succession principale , il conserve ceux qu’il peut
avoir dans une subdivision de cette succession ? qu’il
veuille s’éviter un partage facile et de l’exécution la plus
simple, et qu’ il s’expose à des partages en so u s-o rd r e ,
à une subdivision longue et difficile ? Comment ima
giner qu’ il a vendu le principal et réservé l’accessoire,
si on ne trouve dans la cession une réserve expresse et
formelle ? Croira-t-on que pour une succession considé
rable il ait répugné à un p artage, et que pour un
d ix ièm e, un douzième, un trentième de cette succes
sion , il ait pris plaisir à un partage dix fo is , trente fois
plus long et plus pénible ? Rien de tout cela ne peut
entrer dans l’ idée.
Mais si l’on examine la cession dont il s’agit , on sera
convaincu, indépendamment de ces considérations géné
rales , que l’intention de M aric-Gilberte A lleyrat a été
de vendre l’ une et l’autre succession.
B
A f»
�ItfX
|V
C IO )
M arie-G ilberte Alleyrat. s’é l o i g n o i t e l l e étoit sur le
point de: s’établir lo in .de la maison paternelle, elle ne
vouloit et ne pouvoit s’occuper des discussions inévita
bles d’un partage; elle n’a cédé) que .par ces motifs.
Mais elle a bien évidemment démontré cette inten
tion en chargeant Pierre Alleyrat du payement de toutes
les dettes de la succession.- Gomment Pierre Alleyrat se
seroit-il chargé de. l’universalité des dettes, s’il n’eût
acquis l’universalité de la succession ? Gomment concevoir
l’étrange contradiction de la daine D o u h e t, de vouloir
que la vente des droits ne porte que sur ce qui lui étoit
persopnel, et que lç payement des dettes . porte sur ia
totalité?i .car elle persiste encore dans cette contradiction.
C ’est une charge comme;toute autre, dit-elle dans son
écriture ; c’est, une partie du prix. ■ u
’r
p C ’est une charge , il est!>vrai; mais une, charge <qüi
explique suffisamment l’étendue de la vente: Celuirqiji
ne veut s’exposer à aucune charge, ni de iscin ch ef^ ïû
du chef de, ses .frères et sœurs , ne peut conserver, et
ne pense à conserver ni ses droits personnels, ni .ceux
qu’il tient de ses frères et sœurs. .
.!
. • Enfin, une dernière circonstance explique eneore,plus
clairemqnt., s’il étoit possible, l ’étendue de ,1a jcessiott.
On a vu que les biens, étoient; encore indivis entre les
trois cohéritiers, lors du décès d’Ainable A lleyrat; qu’ils
îivoient toujours rsesté indivis .depuis, celle ép o q u e;.q u e
des-lors Pierre et Gilberte Alleyrat se sont, regardés
cpmme seuls .héritiers du père c o m m u n q u ’ils n ’ont
eu d’autre idée que ,d’y confondre la portion d’Am.able,
�4 " »
( ” )
et de partager par m o itié , comme si elle n’avoit jamais
existé ; conséquemment les parties n’ont pas dû s’expli
quer autrement, et n’ont dû parler que dé la succession
du père , qui remplissoit siiflisammeut., dans leur idée,
tous les biens qu’il avoit délaissés.
Il pourroit y avoir en effet quelque doute sur l ’éten
due de la cession, si les droits,: tant de l’un que de l’autre
chef, n’avoicnt pas été réunis et confondus dans la même
succession ; mais cette confusion , et la circonstance qu’ils
émanoicnt tous du père commun, suffisent pour déter
miner l’étendue de la vente.
A in si, peu importe que les termes de la cession ne paroissent comprendre que les droits du chef du p e r e , dès
qu’il est démontré que ces expressions ( ou au moins le
sens qu’on veut leur d o n n e r), seroient directement contraires à l’intention, à la volonté des parties -, c’est à l’in
tention des parties, et non aux '¡termes de l’acte, qu’il
f a ut s’arrêter ; I d de quo cogitatum f a i t ; surtout si l’on
considère que les expressions ne sont pas du fait des
parties, et que le notaire peut avoir mal rendu leurs
volontés.
G’est un principe enseigné par les lois et par tous les
auteurs, que l’intention des parties doit toujours ôtre la
règle du juge, et que dans le doute elle doit toujours
fixer sa décision. I n ambignis orationibus , m a xim è
sententia spectanda est ejus qui eas protulisset. L . 96,
ff. D e reg. j Ur.
Mais fauto.de pouvoir contester ce principe, on en a
eonteste l application. Rien n’esL moins am bigu, a dit la
dame D ou het, que les termes dont on s’est servi; il est
B 2
�évident, d’après ces: expressions,Jque la cession ne porte
que sur les droits du chef du père.
A cet égard , on peut répondre avec succès,' que lors
même que les termes* ne paroissent pas am bigus, il suffit
qu’ils soient en opposition avec l’intention des parties,
pour qu’on ne s’y arrête pas; ils deviennent obscurs et
am bigus, dès qu’ils ne concourent pas avec ¿’intention;
à plus forte raison s’ils la contrarient. C ’est donc alors
l ’intention seule qu’il faut considérer. P o tiü s voluntci
tent quam verbci spectari.
C’est aussi ce que nous dit Dantoine , dans son excellent
traité sur le titre iï. D e reg. ju r . L . 96. « IL faut moins
« s’attacher aux termes qu’à l ’intention, q u i est Vessen« tieî du contrat, »
Mais l’intention est évidente, et si.elle l’étoit m oins,
on expliqueroit la clause par l’exécution qu’y ont donné
les parties. O r , lorsqu’à la suite d?un acte comme celui
de 179 2 , on voit jouir le cédataire pendant douze ans.;
au su du cédant , et sansiréclamation de sa part, des objets
dont il demande aujourd’hui le partage, il néjdoit plus
rester le moindre doute.
D ’ailletivs, la^damé Douhet est bien éloignée de> se
présenter favorablement; elle a iorme un chef de demanfde
d’une évidente mauvaise foi, relativement au partage de
la succession de G ilb ert, son oncle ; elle eonnoissoit l’ins
titution iaite en faveur de son frerc, et elle en avôit reçu
le p rix , c’est-à-dire, les 1200
que son vfrère avoit été
chiirgér de lui payer., comme condition de son institu
tion. Mais fei'On doit Considérer comme fdrmé de'm au
vaise lo i, ce chef de demande, il faut en dire autant do
�w
c 13 )
celui qui est relatif au partage des biens de sa sœ ur, et
proscrire sa demande comme elle mérite de l’être*
D
élibéré
à R io m , le 17 nivôse an 13.
ANDRAUD,
VISSAC.
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a v u une consulta
tion délibérée à R i o m , le 17 nivôse dern ier, relative
ment h une. demande en partage des successions de
G ilbert e iA m a b le A lleyrat, oncle et soeur du consultant,
dans laquelle se trouvent expliqués les faits et les points
de difficulté qu’il s’agit de résoud re,
que l’institution d’héritier, faite en 1 7 9 1 ,
de la part de Gilbert Alleyrat , au profit de Pierre
A lleyrat, son neveu , et la cession de droits successifs,
faite en 1792, par Marie - Gilberte A lle y r a t , femme
D o u h e t , en faveur dudit Pierre A lleyra t, son frère,
résistent aux demandes en partage formées récemment
par la dame Douhet : l’une et l’autre de ces demandes
sont destituées de toute espèce de fondement.
E
st d ’a v i s
L ’époque du décès de Gilbert Alleyrat étant aujourd’hui irrévocablement fixée au 22 octobre 1792, d’après
le rapport de son acte mortuaire , il est inutile de dis
cuter le chef de la demande en partage qui a trait à la
succession de cet oncle commun des parties.
L ’institution qu’il fit en faveur du consultant étant
'
�4
( i
)
universelle , assure'tout évidemment à ¡’héritier institué.
Les objets réservés sont tombés dans le bénéfice de l’insti
tution , faute par l’instituant d’avoir usé de la faculté
qu’il avoit d’en disposer et d’en priver son héritier.
L a clause du contrat de mariage étoit précise pour
attribuer à l’héritier institué , à défaut de disposition
contraire , les objets réservés ; et cette clause môme étoit
surrérogatoire, car les lois qui régissoieut alors la France
n’assuroient pas moins , et sans le secours de cette stipu
lation , les objets réservés à l’héritier par contrat de
mariage , qui avoit pour lui le titre universel. Ge ne
fut que par des lois postérieures au décès de Gilbert
A l l e y r a t , que les réserves furent déclarées appartenir à
la succession ab in testa t, et ne pouvoir plus faire partie
de l’institution contractuelle.
L a dame Douliet n’avoit à prétendre qu’une somme
de 1200
, dont l’héritier institué fut grevé envers elle.
Cette somme lui a été payée ; tout est donc consommé
sans retour , du chef de Gilbert A l l e y r a t , oncle com
mun ; et la déraison seule auroit pu enfanter , sur ce
point , une demande en partage , s’il étoit vrai qu’on
n’eût pas oublié , avant de la former , l’époque de la
mort de l’instituant.
S’il n’y a pas plus de solidité au fond dans la demande
en partage de la succession d Ainable Alleyrat , sœur
commune , décédée en 1786 , cette branche du procès
exige du moins plus de développement que la prem ière,
pour justifier la resolution prise en commençant.
O n 11e doit voir dans l’acte de cession qu’ une rédac
tion peu soignée qui a donné lieu à. l’ une de ces misé<
�■
,
(
1 5
}
râbles équivoques dont s’empare trop souvent la mau
vaise foi des plaideurs dès qu’elle s’en aperçoit. ^
A u lieu de rappeler dans l’acte le véritable état de la
famille , qui auroit conduit naturellement à faire men
tion spéciale de la succession de la sœur des parties, q u i,
morte en minorité , avoit survécu cependant au père
commun, et avoit par conséquent, et strictement parlant,
servi de canal intermédiaire , pour transmettre sur la tête
de son frère et celle de sa sœur une partie des biens de cet
auteur commun , les conlractans ne furent remplis que
de l’idée ou plutôt de l ’habitude où ils étoient de se vo ir,
depuis un certain nombre d’années, deux enfans seule
ment , vivans et capables de recueillir la totalité des
biens sujets à partage, et délaissés par leur père commun.
G’est à celte circonstance probablement , et à l’inatten
tion des contractans , qu’est due l’équivoque qui a fourni
matière au procès , si elle n’est pas due à une mauvaise
rédaction de notaire. Mais voulût-on admettre que ce
fût par réilexion et volontairement que Ton f î t , dans l’acte
de cession, abstraction d’une sœur qui n’éloit plus, d’ une
•^œur dont l ’oubli comme la mention formelle ne changeoient rien et ne pouvoient rien changer au quantum
■
de l’amendement de chacun, cette abstraction, loin qu’elle
lût propre à faire supposer qu’ il entrât dans l’ intention
.des parties de distinguer ce qui leur revenoit du chef de
cette sœur décédée , d’avec ce qui leur revenoit de leur
çhef personnel, prouveroit tout le contraire absolument.
]îille prouveroit qu’une seule masse , celle où tout se
trou voit r e u n i, a suiïi à leurs yeux pour se régler sur
, leurs; intérêts respectifs, et que la cession de droits, qui
�if l*
<<i
'• t
'
,
i l 6 )
iorinc ce règlement , frappe sur toute la masse pater
nelle, et enveloppe tout ce que la cédante avoit droit d’y
prendre.
On ne persuadera jamais que les parties aient entendu
terminer et composer sur ce qu’elles amendoient person
nellement seulement, et qu’elles aient voulu laisser à l’écart
ce qu’elles devoient prendre dans la masse paternelle par
représentation de leur sœur, et qu’elles aient v o u lu , en
un m o t, faire cesser l’indivision sous un ra p p o rt, et y
rester sous le rapport le moins conséquent pour elles.
Les circonstances où étoient les parties , les clauses de
la cession , et la manière dont cet acte a été exécuté pen
dant douze ans, tout concourt pour repousser la demande
tardive d’un partage des biens du père commun , du
chef de sa fille A m a b le , qui lui survécut quelques années.
Dans le f a it , il appartenoit au consultant, comme
héritier universel de G ilbert, son o n cle, la moitié des
biens des aïeuls communs ( Pierre A l l e y r a t et Gilberte
M aignol ) ; il lui appartenoit, dans l’autre moitié qui
devoit composer la succession de son p è re , un quart en
préciput comme légataire; plus, un quart et demi pour
sa portion héréditaire; ce qui donnoit au total, dans les
biens de la fam ille, très-anciennement restés indivis, treize
seizièmes au consultant, contre trois qui revenoient à sa
sœur. Il lai loi t , d’apres cette ancienne indivision, re
m onter aux aieux pour composer la succession du père,
puisque l’oncle G ilb ert, qui avoit tout donné au consul
tant , n’avoit point retiré ses droits. Les acquêts même
de G ilbert devoient être recherchés et distingués ; et de
tout cela résultoit des opérations infinies , et peuI-être
;
longues
�*7
(
) ,
longues et coûteuses, qu’ il étoit sage de prévenir. O n
tenoit d’ailleurs,dans les familles ep g é n é r a l, au non
morcellement des biens; on aimoit à y vo ir un,chef pos
sesseur de l ’ancien patrimoine des pères, et conservateur
de la maison; on voyoit, au contraire, à reg ret, porter
par les filles, dans des maisons étrangères, une portion
de ce patrimoine ancien. L ’intérêt des filles, et ie désir
des familles où elles entroient en se m aria n t, leur faisoit
souvent préférer des deniers comptant ou assurés h une
portion héréditaire en nature. Cela convenoit particu
lièrement aux filles q u i , comme la sœur du consultant,
quittoient le sol natal pour s’établir à quelque distance ;
et telle fille que la loi de la forclusion n ’atteignoit pas
par le décès anticipé de son pèi'e, prenoit le parti que
prit Marie-Gilberte A t le y r a t, et faisoit une cession de
ses droits moyennant un prix cprtain. C ’est à toutes ccs
considérations, et à l’ usagq ordinaire des filles en A u
vergn e, de porter des dots en a rge n t, en se m arian t,
qu’il faut attribuer la cession de droits dont il s’agit.
Les cessions de droit$ successifs ont pour objet toujours
de faire.çessçr un état.d’indivision , et d’éviter cependant
un partage : cela est incontestable ; et en appliquant ici
une règle constante en d ro it, que lorsqu’il y a du doute
sur le sens et l’étendue d’un acte, il faut prendre et en
tendre l’acte dans le sens qui convient le plus au but et
à la matière du contrat, on sera, convaincu aisément,
sous ce point de v u e , que la cession dont il s’agit em
brasse tout, et que la portion de biens paternels appar
tenant h la dame D o u h e t , du chef de sa sœur A m a b le ,
a e t e , conformément à l’intention commune des parties,
C
�M®
(* A t ( 1 8 1
enveloppée et comprise dans l’arrangement de famille.
Il répiigneroit trop^de syncoper un pareil arrangement;
et ce sei‘oit manquer son but évidem m ent, et admettre
deux choses5contradictoires, que de supposer l’abdication
et la conservation tout à la fois du droit de partage dans
la personne de la dame Douhet.
- ■
">
1
1 D e quoi s’es't-on occupé d’ailleurs dans Pacte qui 'fait
le sujet du procès ? A -t-o n réservé li^portron qui compétoit à la succession de la sœ ur, ou bien l’universalité
de la succession du père a-t-elle occupé les contrüctans ?
I j’acte lui-même fart foi q u ’on a agi et stipulé sous le
rapport d’universalité , puisqu’on chargeant nommément
le eédataire du payement des dettes, et de la restitution
de dot maternelle que pouvoit devoir la succession du
père , on l’a chargé de Vuniversalité dès dettes, do T ü n iVers a li lé de la restitution d e dot1',' tandis qu’il n’attroit dû
qu’une q u o tité, st'dans l’inteiltion des parties la portion
héréditaire üü-Amàble,' leur sœur communie , ' av'oit. du
êtr£ distraite
leur arrangement.
: !
Sans une cession de d r o i t s universelle, 011 concevroit
difficilementTuniversalité des- dettefe àpph’cjuée^ucéd;-’^
taire. Sans a ut ré explication ,’ et sans dire 'd'ans l’iitte 'la
raison de différence', et pourquoi on y trouve l ’obl/ga^
tion de toutes les dettes, et la non réunion cependiint'dc
toute la succession sur la môme tête, on ne p'eut se 1per
suader que l’intention dés parties ait été rAjlleinentid’éta
blir cette d ifférence, qui n’est point ordinaire, et qui
choque. On n’eût pas manqué de dire dans lWcte , si on
avoit entendu resCrver à lu cédante ce qui' pouvoit. 'lui
revenir du'ChCÎ dû1#» Sœur daiis la succession paternelle;
�r9
(
)
que nonobstant cette réserve , et par forme de supplé
ment de prix à la cession , l’acquéreur prenoit sur lui
toutes les dettes , et s’obligeoit à faire tenir quitte'et
franche la portion héréditaire réservée à la dame Douhet,
comme représentant sa sœur. Il étoit si naturel qu’on
s’expliquât ainsi , ou de toute autre manière équivalante,
si la dame Douhet 11’avoit pas tout cédé , que jamais elle
n’accréditera , dans l’état où se trouve l’acte de cession ,
la demande en partage qu’elle.a formée.
Non-seulement on ne trouve rien dans c e t . acte qui
réserve à la cédante quelque chose du chef de sa sœur ,
on y lit au contraire que sa cession est faite sans aucune
exception n i réserve. .On y- qualifie les biens et droits
cédés, de biens et droits indivis ; mais avec qui réputoiton indivis , ces mêmes biens cédés ? L ’acte le dit for
mellement : Indivis entre le cédataire et la cédante; et
cependant s’ il ne s’étoit agi dans la cession que des biens
paternels recueillis personnellement et de son chef par la
cédante , il y auroit eu indivision à. déclarer entre trois:
cela est évident , puisque A m a b le , sœur des parties ,
a voit succédé à son père , et que la maxime heredilas,
personam sustinet devoit la faire compter pour quelque
chose dans l’hoirie paternelle. En désignant sous le nom
de biens et droits compris dans la cession , les biens et
droits paternels indivis entre la cédante et le cédataire
seulement , c’est apprendre assez que la cédante faisoit
abstraction d'A m a b le , et qu’en définitif toute indivision
quelconque , et par conséquent tout droit de partage,
s ev.inouissoit pour jamais avec la cédante, sous quelque
prétexte que ce fût.
G 2
�^
O o )
T o u t vendeur au surplus est tenu de s’expliquer clai
rement. T o u t pacte obscur s?explique ets’interprèle contre
l u i , qui legem apertius dicere debuit ; telle est la dis
position précise de l’art. 1602 du Code civil. Cette règ le ,
dont la sagesse est garantie par cela même qu’elle a trouvé
place dans le code des Français, fut observée dans tous
les temps. Elle obligeoit autrefois comme elle oblige
aujourd’h u i , et l’eposoit sur le texte précis des lois 21
et 33 if. D e contrahend. ernpt. 39 D e p a c tis , et 172
D e regul. fur. Ainsi la dame D ouhet devrait s’imputer
de n’avoir pas fait préciser dans l’acte qu’il résidoit sur
sa tête deux sortes de droits , sa part personnelle dans
la succession du père , et une autre part distincte dans
cette même succession , du chef de sa sœur , et qu’elle
ne vendoit et n’entendoit vendre que ses droits per
sonnels , et se réservoit ceux qui lui revenoient du chef
de sa sœur. Ce défaut d’explication , l’absence d’une ré
serve des droits héréditaires à elle appartenans comme
représentant en partie sa sœur décédée après le père ,
surtout dès qu’elle chargeoit son frère de l’universalité
des dettes de celte même succession paternelle, doivent
nécessairement faire tourner contre elle le doute, s’il est
vrai qu’il puisse sérieusement y en avoir dans l’acte dont
il s’agit.
Ce doute , lors même qu’il eut pu exister le lendemain
de f a d e et avant que les parties eussent fourni , par la
manière de l’executer , la preuve de leurs véritables
intentions , ce doute n’a plus rien qui doive arrêter
aujourd’ h u i , ou plutôt il n’existe plus de doute, dès que
le consultant a joui seul et paisiblement de l’universalité
�(2 1)
des biens du père com m un , depuis la cession de 1 7 9 2 ,
sans contradiction ni réclamation de la part de sa sœur.
Cette manière d’entendre les actes par le fait de l’exé
cution , indépendamment de ce qu’elle seroit enseignée
par la seule raison , à défaut de lo is , l’est encore de la
manière la plus positive par la loi 1 ff. D e reb. d u b iis,
dont les termes sont précieux. Quœ dam s unt , dit cette
l o i , in quibus res dubia e s t , sed e x postfacto retrod u c itu r , et apparet q uid actum est.
Godefroy sur cette loi s’explique laconiquement, mais
très-énergiquement aussi. V o ilà ses termes : E x it u s acta
5
probat.
•
J
A in s i, soit q u ’o n considère les circonstances, les termes
de l’acte, la manière dont les parties l’ont exécuté , et
les règles enfin qui servent à expliquer les conventions
qui offrent quelque doute , la demande en partage de
la dame D ouhet , relative aux droits qu’elle prétend
exercer du chef de sa sœur, ne sauroit se soutenir.
D É L I B É R É à Paris , le 14 pluviôse an 13.
DE V A L ,
G R E N I E R ,
du Puy-de-Dôme.
ffu &
•Jjf
A R I O M , de l ’imprimerie de L AN DRIOT , seul imprimeur de la
C o u r d ’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Alleyrat. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Vissac
Deval
Grenier
Subject
The topic of the resource
testaments
successions
ventes de part d'héritage
créances
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultations pour le sieur Alleyrat ; contre la dame Douhet, sa sœur ; et le sieur Douhet, son mari.
Annotation manuscrite: « mai 1807, jugement confirmatif de celui du 31 juillet 1806 par lequel il avait été décidé que la cession comprenait aussi les droits à la succession du frère décédé. »
Table Godemel : Cession : 5. une cession de tous ses droits dans la succession du père commun, consentie le 20 février 1792, par une sœur, non mariée, comprend-elle ceux relatifs à la succession d’un frère prédécédé qui étaient confondus dans la succession paternelle ? Réserve : 3. la réserve faite par l’instituant dans un contrat de 1791 par lequel il avait institué le futur, son neveu, son héritier universel, avec stipulation qu’à défaut de disposition elle ferait partie de l’institution, appartient-elle à l’institué, si l’instituant est mort avant la loi du 18 pluviose an 5 ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1770-An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1518
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Giat (63165)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53258/BCU_Factums_G1518.jpg
Créances
Successions
testaments
ventes de part d'héritage
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53259/BCU_Factums_G1519.pdf
3ea8cbdfe97e6c9527cdc8c589650183
PDF Text
Text
\ *
P
R
É
P
C h a rle s
C
O
C O L L I N
D E
sainte-croix
U
I
S
R
et
c h a r l o t t e -d e -
B O U T E T ,
son é p o u s e ,
in tim é s .
C O N T R E
,
B ID O N veuve G i l b e r t T H E V E N E T M O N TGACH ER et consors appelans.
M a r ie
,
-------— —« s a B B » - ---------L
a
cause, actuellement en d é lib é ré , présente ces deux
questions.
L a transaction de la rescision de laquelle il s’agit contientelle le compte de gestion et administration?
E n l'absence de ce compte dans la transaction, les énoncia
tions qui y sont faites font-elles foi qu’il a été rendu, blâmé
et débatu séparément de l ’acte en décharge de compte?
.
Examen de la première question
E lle est purement de fait; et la preuve matérielle que la
transaction ne contient pas le com pte, sort de l ’acte lui-même.
�P ^ 'I T ____ ,
( 3)
"^O n y trouve l’analyse longue et fastidieuse des clauses du
c o n t r a t de mariage de la dame P ru g n o le, tutrice com ptable,
avec le sieur Dalexandre. D e sa conduite tenue après la mort
de son mari pour la renonciation à la communauté, de son em
pressement à faire saisir les biens de sa pupile, à lui faire nom
mer un curateur contre lequel elle dirigea une action en liqui
dation de ses reprises ; ( qui ne fut pas contestée ) il y est rappelé
qu’elle ne fit faire l’inventaire qui devoit précéder sa renoncia
tion à la communauté, et à la rigueur, être fait dans les quarante
jours du décès, que trois ans et plusieurs mois après; qu’elle
eut l’impudeur de n’en porter la valeur qu’à deux cent quatorze
liv. seize sous (i). Il y est fait mention des baux à ferme faits
par le sieur D a lex an d re, et de ceux renouvelés par elle et son
second m a ri, (2) on n’y en trouve pas pour raison du domaine
des É g u illo n s , de la locaterie de Naumont j ni pour la maison
et jardin de F le u riel, avec ses terres de la réserve.
Suivent le long détail de tous les faits, actes et procédures
qui constituent le mari et la femme tuteurs, créanciers de la
demoiselle Dalexandre, tenue en pupillarité ju sq u ’ après trentequatre ans.
Sur ce tableau effrayant pour une fille qui a vécu vingt-sept
à vingt-huit ans au couvent, tableau fait pour 1 aveugler, quand
on devoit l’éclairer, on lui fait demander g ra c e ; elle prie les
tuteurs de ne pas faire mettre en forme leur com pte, de lui en
éviter la signification, et les frais de blames et débats, en raison
sur-tout de la circonstance qu’ils ont obtenus une sentence
contr’elle. On lui fait la proposition de lui délaisser la propriété
de ses immeubles dès-à-présent, à la charge par elle d’acquiter
(1) Le mobilier n ’a pas été vendu et les deniers placé».
( 2 ) Ces baux n’ont pas été faits judiciairement.
�plusieurs rentes, s'élevant en masse à cent q u atre-vin gt-treize
liv. dix sous annuellement , et en créant , au profit de ses
tuteurs, une rente de cent soixante liv. sans retenue, au prin
cipal de quatre mille liv.
E t pour colorer la surprise faite à la fille, à laquelle on laisse
tout ign orer, on mentionne et répété J à satiété, que les parties
se sont choisies des conseils (i) auxquels le compte et toutes piè
ces justificatives ont été remises. (2) On dit dans l’acte que la
demoiselle
Dalexandre ayant communiqué à son conseil la
proposition faite par les tuteurs, il lui a répondu que la propo
sition lui étoit non seulement favorable, mais très-avantageuse,
eu égard aux circonstances, ce qui détermine la demoiselle
Dalexandre à prier ses tuteurs de vouloir l ’exécuter, ( leur
proposition ).
On fait demander cependant une nouvelle grace par la de
moiselle D alexandre; elle observe que ses tuteurs ont conti
nués leur jouissance depuis 1 7 6 6 , et que la valeur de cette
jouissance devroit être distraite de la somme de quatre mille
liv. On lui répond qu’elle a à s’imputer de n’avoir pas joui ; ou
refuse toute diminution , et l’on passé à la rédaction des clauses
du traité, de l'avis encore du conseil de la mineure, eu égard
aux circonstances.
Il porte délaissement des immeubles provenus du sieur
D alexan d re, avec la charge d’entretenir les baux à ferme pour
toute leur durée, de prendre les baux à cheptels tels qu’ils so n t,
et à ses périls, à l ’effet de quoi les tuteurs la subrogent.
(1) Si ces conseils ou arbitres eussent été nom m és,il y auroit un com
promis. Au moins les conseils eussent été nommés, et eussent présidés à
la rédaction de U transaction.
(2) Elles n ont pas été communiquée» à la pupile.
�( 4)
Il n’ y est aucunement fait mention du compte de la gestion
en recette et dépenses, pas un mot qui apprenne à combien
se porte la recette, et qui puisse même faciliter une opéra
tion donnant un simple apperçu.
L a demoiselle Dalexandre constitue la rente de cent soixante
liv. au principal de quatre mille liv., et décharge du com pte, des
jouissances et dégradations.
On a cependant plaidé que la transaction contenoit le compte
dans le plus grand détail ; que toutes les pièces justificatives ont
été communiquées et examinées par des conseils ; et on a telle
ment pris confiance dans cette assertion, ou plutôt dans la faci
lité d’en faire passer la persuasion aux auditeurs, qu’on est de
meuré d’accord du principe, que le mineur devenu m ajeur,
ne traite pas valablement avec son tuteur, s’il n’y a compte
rendu, visis tabulis dispunctis rationibus.
E n vain 011 eut contesté le principe: il est consacré pâr une
foule d’arrêts, et les journaux des audiences ne font pas mention
d’un seul qui ait jugé le contraire. C ’est l’opinion unanime des
auteurs : c ’est la jurisprudence des deux sections de la cour
d’appel.
Contre l'objection que le compte n’est pas con staté, que
tout indique qu’on a voulu éviter de le débattre, on a dit que
le rendant compte ne pouvoir pas contraindre l’oyant à dé
battre ce com pte; qu’il est contre la raison d exiger des débats
de compte pour la validité de la transaction.
E h bien nous aimons à rappeler notre déraison. O u ï, il faut
des débats de com pte, il faut des contredits au compte: ce
n ’est que par les débats qu’il s’apure; ce n’est que par le con
tredit qu’il se justifie que le mineur a été éclairé.
Il faut v isis tabulis dispunctis rationibus} tous les auteurs
�C5).
l ’enseignent, et il n’est pas admissible de proposer l’adoption
de confiance du compte rendu par le tuteur.
On ne peut pas contraindre le mineur à contredire le compte,
nous dit-on;
Mais s il ne le contredit p a s, il ne l’entend p a s , il ne
veut pas l’adopter, et ce refus forme sa protestation la plus
expresse contre l ’acte qu’on lui fait souscrire.
E n justice un compte peut être apuré sans débats, l’oyant
ayant été contumacé.
A l’amiable, il est impossible d’admettre le refus de débattre
le com pte, si ce n'est parce que l’oyant non éclairé, contraint,
veut se réserver le retour contre la décharge qu’il donne.
I I e.
Q U E S T I O N .
L e s énonciations faites dans une transaction qui ne contient
pas le compte de la gestion par une idée générale de la com
position des chapitres de re ce tte, de dépense, et de reprise,
le tableau de la balance desdits chapitres, et le résu ltat, sont
d es énonciations mensongères, auxquelles le* tribunaux ne se
sont jamais arrêtés.
M M . L o u e t, Brodeau son commentateur; d’ Argentré sur
la coutume de Bretagne; D ecu llan t, sur la coutume du Bourbonnois ; Rousseau-Lacom be, D enizart, etc. et tous les au
teurs qui ont traité cette m atière, enseignent que « ces men» tions sont des surprises et circonventions captieuses, pleines
» de fraude et de perfidie ; que les décharges générales données
» sans examen p ro u vé, sont regardées comme frauduleuses, et
» donnent ouverture à la restitution ».
« Il n y auroit, à la lo n g u e , dit M . L o u e t , aucun tuteur qui
» ’ ne força son mineur à transiger sur le compte. Bref, un tuteur
�(6)
» au lieu de rendre compte j mectroic sa partie en ténébres, et
» en lieu où lui seul verroit clair ».
L ’ a p p l i c a t i o n de cette idée se fai t dans la cause , à la lecture
de la transaction.
_
Si ce n’étoit pas là le but des tuteurs de la demoiselle
D-üexandre, pourquoi quarante pages d’écriture pour expliquer
leurs reprises, et pas deux lignes qui expliquent la recette et
dépense ?
Par ces détails assomans, on vérifie un compte de créance
contre la mineure , et le soin pris pour la mettre dans les
ténébres.
On cherche inutilement le compte d’instruction , les expli
cations propres à éclairer sur le compte d’administration.
Mais ce compte de gestion a-t-il été rendu séparément ? Il y
auroit contradiction avec le fait articulé et soutenu que la
transaction contient le compte.
E t dans cette supposition , pourquoi donc alonger la tran
saction par les détails du chapitre seul de reprise qui dévoie
être contenu dans le compte?
On ne peut pas s’en imposer sur la foi des mentions de la
transaction, quand on y voit tant d’effroi fait a la mineure,
tant de crainte exprimée de sa part, et des détails de créances
passives insérés exclusivement aux détails de 1 actif?
L a demoiselle Dalexandre se pourvut contre la transaction
dans Je second mois de son m ariage, et de sa sortie de la maison
de son vitric. Les officiers de la sénéchaussée de Moulins pro
noncèrent en 1 7 8 0 , après un mûr examen sur productions respectives; ils firent justice aux parties.
O n ne sauroit se persuader que la cour d’appel infirme cette
d écision > puisquelle esc conforme à sa jurisprudence, et qu’il
�( 7)
1 3 '
est de fait que les héritiers T hevenet ont été prévenus, par les
conseils nombreux qu’ils ont pris, que la transaction est rescin
dable.
L e compte demandé ne leur fera pas tort ; il est facile aujourd 'hui autant qu’en 1 7 8 0 , et même qu’en 1 769- N ous l’avons
dit à l ’audience en plaidant, nous tenons pour certain les actes
énoncés dans la transaction , nous consentons de discuter le
co m p te, d’après les énonciations rapportées du contenu auxdits actes.
* ;
N o tre réclamation a pour objet de conduire à réparer des
torts faits à la foiblesse et à l’ignorance d’ une fille qui a passésa vie dans un couvent. Nous voulons sauver notre fortune sans
nuire à celle de nos adversaires.
Sig n é C O L L I N .
f * , $& /***''
/ vmmia
uU.
^ IAAajU* {KAAyrJ
J Ui/ /f
f il
< 6 ^ ^ OV4—
t» ^
'
OviowM CA»^^« ,'Uvfcbj.
^
~
^
f
OK
,
p<^du
cir
r
CVMAu A \ t(^ > u Jv u ÎA o M A * Δ c/o>iT»*A ,
—
s/\i**r.rttr f
4 ---- ^ ------- 1
UJJtktuXX
J
e
^
z
A to w ^ rfr
1,1 ............. ...........1
U a CU
Cm^
b JiX h a cf*
1 ”... ..
>
^ t.
.
/
1/4
^
^
füw*F
Æ
L
M a r t in D É G O U T T E ; Imprimeur-Libraire, viss-à-vi#
/
y - - la Fontaine des Lignes, ( 1804 ).
u * u « f yy~
Chez
ait, y/*mcum
/
CxAaA
a i*-. ^
X
I
OU ^ ^
LAM
O U T ^ « » « . WwU
^
^C A
« ïG ït ^ c t Jc u ^ ^ k r
c* ts/S(vwt(. cmÏT COk»|uaJ^
»/ 0tO ^ A*^C
1UAVMAO C4~/u ^ui>dA^O
r5 «A'TltA.vy cccCî
eu .
0
�^o»4 -L Í
Cf/i*** ó*~fceJxi
r a f i ^ M A .
^
¿ i U w \ a x i C U t A
t * * r ß X J U M J L *.
4 A A A A
ft ZoIZT ¿uv,cwvü7óJüi
C A A ^ Í i
C Jk —
^ U «
ÍA J\ < ± j ( A 4 A 0
^
A
* ^ / íA íÚ k m ^ JT
*
¿ K
CUA,
~
^ oA a
^O M A uJtbU t/t^
¿ , /irTTT^ » . /!» . , .' ^ o ( 2 t r M*KU. £/tUr~
-------- --------- ' X
>
y
/
y
(u «u a l ^ iu a - c *—U u m u ^ < w |u u £ t' ^ > a 'o C^ ^ ° ^ * Ay * X
C4A~^AVl4AAAi
y
CACk ^OmXt
/ ^ M C U U im
o « J&
*
o ¿ /< JU M k q
* /
■4At\t~X. jK*.ya.
g f
<A^CL^M/. Guv / J ix Z , î>«
/^t < - i r ¿ a V w i c u M
¿ ¿r¿±cí g x Jb ú r
Aaju A /? V ^
c£ « a
^
O tAJ^e^ Ca^Ìc/ÌÀ^ujUA
r
^
u a
Í Í «
tí*
^ t u í*
A*
~ i^> (
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Collin, Charles. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Collin
Subject
The topic of the resource
transactions
rescision
tutelle
religieuses
fraudes
vitric
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Charles Collin et Charlotte de Sainte-Croix de Boutet, son épouse, intimés. Contre Marie Bidon, veuve Gilbert Thévenet-Montgacher et consors, appelans.
Table Godemel : Transaction : 3. les énonciations, contenues dans une transaction sur le compte de gestion et d’administration, que ce compte a été blâmé et débattu séparément de l’acte, font-elles foi si les pièces ne sont pas représentées ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
Circa 1766-1804
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1519
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Fleuriel (03115)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53259/BCU_Factums_G1519.jpg
fraudes
religieuses
rescision
transactions
tutelle
vitric
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53260/BCU_Factums_G1520.pdf
c34b746936c44384863b27d7702afef2
PDF Text
Text
M
E
M
O
I
R
E
COUR
D ’APPEL
C O N T E N A N T
DE RIOM.
C A U SE S E T M O Y E N S D ’A P P E L ,
POUR
Sieur
D E S A IN T -J U L I E N ,
appelant;
A le x a n d r e
C O N T R E
Sieur E
tienne
G R O S-L A M O T H E
,
intimé\
L E sieur de Saint-Julien poursuit le désistement d’un
bien p ropre à l u i , d’un b ien que le sieur G ros, abusant
des circonstances , a acheté à vil prix de la part de la
mère et tutrice du sieur de Saint-Julien ; et cela, sans
A
l re. SECTION.
�-('} ■i
c o
ywe lesfo rm a lités 'prescrites pour la vente des biens des
mineurs aient été légalement observées.
Que le sieur Gros se fût défendu en b ra v e , qu’il eût
employé des moyens de fait et de d ro it, rien de plus
légitim e; mais il est descendu jusqu’à l’injure ( le signe
si certain d’une mauvaise cause ). Dans ses écrits, au tri
bunal civil de R io m , il s’est permis d’imputer au sieur
de Saint-Julien des goûts pour la dissipation ; il s’est permis
de parler honneur, et de dire que la réclamation du sieur
de Saint-Julien est contre la délicatesse.
Sur l’article de la dissipation, le sieur de Saint-Julien
dédaignera toute espèce de justification.
Sur le point d’honneur, le sieur de Saint-Julien ne
cédera jamais le pas au sieur Gros. L a cour jugera lequel
des deux est plus délicat, ou de celui qui s’est prévalu
de la trop grande facilité de la mère du sieur de SaintJu lien , pour avoir ù très-grand marché des biens de
m ineurs, ou du mineur q u i, pour rentrer dans portion
de son patrimoine, se plaint justement de ce que toutes
les formalités ont été violées, et demande la nullité de
tout ce qui a été fait. T elle est la grande question sou
mise à la cour.
F A I T S .
L e 3 novembre 1767 décéda François de Saint-Julien,
laissant de son mariage avec dame Marie de Saint-Quentin
troisenfans mineurs; savoir, Claudine, qui en 1774 fut faite
religieuse au couvent des Notre-Dame de Gannat; Gabrielle, qui mourut en 1778; et l’appelant, qui, en 1766,
fut placé daus l’école militaire d\Ëiïiat; comme boursier»
�(3 )
nommée
D e la sorte, la dame de Saint-Julien, qui fut
tutrice à ses enfans, n’en fut pas chargée long-temps : leur
éducation lui coûta très-peu de chose. L e sieur de SaintJu lien , appelant, fut celui qui dépensa le moins. Sorti
de la maison d’Effiat, il fut fait officier dans un régiment :
par une économie bien raisonnée, ses appointemens suffisoient à tous ses besoins.
L e sieur de Saint-Julien père laissa à son décès, i° . un
domaine assez considérable au lieu des Bicards, 2°. un
autre bien à Lezat , 30. un autre bien à Randan. Les
revenus, bien administrés, auroient produit de l’aisance
dans la maison; mais la dame de Saint-Julien mère étoit
beaucoup plus généreuse que sa position ne le com portoit : de là du désordre dans ses affaires.
E n 1771 la dame de Saint-Julien mère , sans aucune
sorte de form alité, vendit le bien de Lezat moyennant
la somme de 6000 fr. ( il valoit plus que le d ou b le), au
6ieur Soalhat, marchand à Villeneuve-les-Cerfs. Portion
du prix a servi à payer des créanciers de la succession
Saint-Julien : mais la mère a touché la somme de 4000 f.
qjLi’clle s’est appropriée.
L a dame de Saint-Julien n’avoit à sa charge aucun de
ses enfans, puisque la fille aînée étoit religieuse à Gannat,
puisque la cadette étoit m orte, et que le fils étoit au ser
vice. Pour elle seule, elle a voit tous les revenus de la
maison : mais ils lui sembloient insuffisans.
*779 on lui suggéra l’idée de vendre des biens im
meubles de ses mineurs; elle n’avoit pas de quoi faire face
a la garantie que désiroit l’acquéreur ; sa dot étoit plus
qil épuisée par la yente faite en 1771 au sieur Soalhat.
A a
�V
r C4 )
En cct étaf, l’on imagine de feindre beaucoup de dettes
passives à là charge de la succession du sieur de SaintJulien père.
L e 16 mars 1779 l’on présente une requête en la séné-chaussée d’Auvergne f où l’on fait dire par la dame veuve
de Saint-Julien, i°. que pour ses conventions matrimo
niales elle est créancière de beaucoup de son mineur.
( Suivant son contrat de mariage , elle a porté en dot
10000 fi\ argent; elle a un douaire préfixe de 6000 fr. ;
elle a une pension viagère de 760 f r . , et l’usufruit du
mobilier jusqu’à la majorité de ses enfuns. )
20. Que le mobilier n’eât composé qiie de meubles
mëublans ;
3°. Que les immeubles ne sont que du revenu net de'
600 francs ;
4°. Q u’elle a payé pour 13044 . s. 9 d. de dettes;
5°. Q u’elle a fourni aux frais d’un procès au parlement
de Paris, à raison du domaine du Coliat, a obtenu en 1777
arrêt en faveur contre le sieur Boisson, etc., et a avancé
plus de ooO fr. pour frais ou faux frais;
6°. Que d’autres frais sont dûs à des procureurs et
15
5
huissiers ;
7 0. Q u’elle
est hors d’ état de faire liquider les dépens,
et que d ’ailleurs le sieur Boisson , etc. sont insolvables;
8°. Qu’avec un revenu de 600 fr ., étant dans l’impuis
sance de subvenir à ces déboursés , à l’éducation de ses4
enfaus, etc., elle a été obligée d’emprunter de divers
particuliers qu’elle dénomme 7096 1. 13 s. 9 d.
L ’on fait exposer par la dame veuve de Saint-Julien
qu’elle est assignée par les prêteurs ; que urget ces alie-
�(5)
n u m , qu’une saisie réelle va être établie sur les biens
de son m in eur, et que pour arrêter ce désastre il faut
vendre des héritages les moins précieux du domaine du
Cohat, jusqu’à concurrence de 8000 fr., pour remplir les
créances, et frayer aux moyens nécessaires pour opérer
la vente.
L e lieutenant général en la sénéchaussée d’A uvergne
permet d’assigner des parens en nombre suffisant pour
en délibérer.
L e 19 mars 1779 les parens s’assemblent devant ce
magistrat; ils disent, i°. qu’ils savent que la succession
du défunt est chargée de dettes, outre les droits , actions
et reprises que la remontrante , sa veuve , a à répéter
contre la succession ;
2°. Que le mobilier n’est composé que de meubles
meublans, etc. ;
3°. Que depuis la mort de son mari la dame veuve
de Saint-Julien a acquitté beaucoup de dettes, et q u il
en reste encore beaucoup à p a y er, pour raison de quoi
les créanciers fo n t contre la remontrante les poursuites
les plus rigoureuses ;
40. Que les revenus des biens sont insuffisans pour
remplir la veuve de son douaire et de sa pension viagère ;
°. Que jusque-là ses enfans ont été n ou rris, entre
tenus et élevés à ses dépens ;
6q. Que pour arrêter le cours des poursuites, il J a u i
Tendre et aliéner des immeuble^, pour les deniers en être
employés jusqu'il concurrence de la somme de üooo
clc.
L e lieutenant g énéral de la sénéchaussée d’Auvergne
autorise la vente jusqu’à la somme de 8000 fr. Comme
5
�C6 )
son ordonnance est importante à connoître, nous la rap
porterons mot pour mot (i).
Il est utile de remarquer ic i, i ° . que la dame veuve
de Saint-Julien demandoit expressément que l’on vendît
çles héritages les moins précieux h conserver du domaine
du Cohat; 2°. que les parens n’ont rien déterminé à cet
égard, et qu’ils ont dit seulement qu’il falloit vendre des
biens pour 8qoo francs ; 30. que le lieutenant général de
la sénéchaussée d’Auvergne autorise seulement à aliéner
pour 8000 fr. d’immeubles, sans désigner lesquels, et qu’il
renvoie à la visite et ci Vestimation de l’expert Soalliat,
avant de prendre aucun parti sur ce point.
( 1 ) D e s q u e ls avis et d é lib é ra tio n s a vo ns d o n n é acte à la remon-?
tr a n le e t au p r o c u r e u r d u r o i , e t qvons. ¿ceux homologués pour
sortir effet. E n
c o n s é q u e n c e n o u s , d u c o n s e n te m e n t du p rocu reu r
d u r o i , avons autorisé la remontrante, en sa qualité de tutrice,
à vendre e t aliéner des biens im meubles de son m ineur, ju sq u ’à
concurrence de la somme de 8000 fr a n c s , Arnfcs
visite e t esti
m a t i o n d e s d i t s b i e n s , f a i t e rAR F r a n ç o i s S o a l i i a t , m a r c h a n d ,
h a b ita n t d u d it b o u r g d e R a n d a n , q u e n o u s
a v o n s nommé
d of
fice a c e t e f f e t , e t après to u te s les publications e t a ffich e s
l ' AITES EN LA .MANIERE A C C O p T U M É E , p o u r lcsdits b i c i l S etre VENOUS
ET ADJUGÉS AU P L U S OF F R A N T ET DERNIER ENCHERISSEUR, EN L^.
MANlfcn e o r d i n a i r e , c l les deniers en p ro v e n o n s , etre em ployés tant
au p a y e m e n t c l a c q u it te m e n t des dettes et créances détaillées et
énon cées en la requ ête d u d it jo u r 16 du présent m o is , qui d e
m e u r e r a join te et a n n e x é e à la m in u te des présentes, p our en faire
p a r t i e , q u e p o u r les (rais q u il co n v ie n d ra faire p o u r p a rv en ir à
ladite v e n t e ; ordonnons que ledit François Soalliat sera assigné
à comparoir devant nous, en notre h ô te l, à jour certain et heure
f i x e t pour prêter le serment en la manière ordinaire.
�(7)
L ’on craignit la publicité qu’auroit eue la chose, si
elle eût été mise à fin en la sénéchaussée cl’Auvergne.
L e sieur Gros-Lamotlie étoit déjà d’accord avec la dame
de Saint-Julien sur le prix de la vente et les époques
de payement : mais on craignoit la concurrence. Pour
l’é v iter, l’on imagina de porter l’affaire en la duchépairie de M ontpensier, parce que les audiences de cette
juridiction étant peu suivies l’on étoit assuré d’y faire ce
qu’on vouloit.
L e 20 a v r il 17 7 9 , fut présentée une no u v e lle requête
au lieutenant g énéral de M o n t p e n s ie r , au n o m de la
dam e de Saint-Julien. P i ’ésentant l ’autorisation obtenue
en la sénéchaussée d’A u v e r g n e , elle demande permission
de vendre les héritages les m oins p r é c ie u x du dom aine
domaine
soient visités par un expert n o m m é d ’o f f i c e , à l'effet
d’indiquer ceux q u i sej'ont vendus comme étant les
?noins précieux et qu 'il est moins intéressant de con
server, et ê?en fa ir e Vestimation.
L e 2 7 , le lieutenant général de M ontpensier, 1°. permet
la vente (Faprès les publications, affiches et autres f o r
malités requises, etc, de partie des londs du domaine du
C o h a t, jusqu’à concurrence de la somme de 8000 francs;
2°. ordonne la visite de tout ce domaine par Jean Soalhat,
expert, qu’il nomme d’oilice; 30. charge cet expert d’in
diquer ceux q u i seront vendus co?nme les moins pré
cieux et les moins intéressons à conserver, et d’en faire
l’estimation.
du C o h a t;e lI e dem ande que tous ceux form ant ce
Cet expert prête serment, voit les lieux , et fait son
rapport qu’il uttirine en la duché-pairie de M ontpensier;
�$00
(8 )
x
il désigne quinze articles à vendre, qu’il estime 8667 fr. ;
il désigne tous les fonds à la convenance du sieur Gros.Lamothe.
L e 4 juillet 1779 une affiche est dressée. Gomme il
falloit se dérober aux regards des personnes qui pouvoient
prendre intérêt au sieur de Saint-Julien, l’on va cher
cher un huissier à la résidence de Vichy ( ressort de la
sénéchaussée de Bourbonnois ) , pour faire publier cette
affiche dans les paroisses de Sain t-A n dré, Saint-Dénis et
S a i n t - C l é m e n t , et en la v ille d’Aigueperse. Cette publi
cation a lieu le même jour 4 juillet 1779,
Dans cette affiche, le public est averti, i°. qu’à Tau^
dience du 6 du même m ois, et autres audiences suivantes,
de huitaine en huitaine, il sera procédé à la lecture du
placard et à la vente des biens ; 20. que l’adjudipataire
n’entrera en jouissance qu’après la récolte levée.
Les affiches de S a in t-A n d ré et de Saint-D enis sont
posées à l’issue des messes de paroisse ; celle de SaintClément l’est à l’issue des vêp res, et l’heure n’est point
marquée pour celle d’Aigueperse ( ï ).
(1) « 11 se ra , le mardi 6 juillet présent m ois, à 1 audience, e tc .,
» heures de n e u f du matin , et autres audiences suivantes, de liui» laine en huitaine, procédé à la lecture et publication du présent
» procès ve rb a l, réception des ench ères, vente et adjudication au
» plus haut m etteu r, etc.
» L ’ adjudicataire n'entrera qn jouissance q u ’après la récolte
» l e v é e , etc.
» L u , p ublic et afficha par m o i , e t c . , au-devant des principales
»> portes d’ entrée des églises paroissiales de S a in t-A n d ré et de
» à 'tiin t-D cn is, il l’ issue de l<,i m esse île paroisse; et en celle do
Plusieurs
1
�Jot
(( * \
Plusieurs publications ont lieu-au bailliage d’A igueperse; une première le 6 du même m ois, une deuxième
le 13 , une troisième le 20 , une quatrième le 3 août, une
cinquième le 1 7 , la sixième le 24, une septième le 16 no
vembre , une huitième le 2 3 , et une neuvième le 30.
Dans aucune n’est ouï le ministère p u b lic, quoiqu’il fût
question de biens de mineurs.
T o u t demeure suspendu jusqu’au 1er. février 1780 ,
c’est-à-dire, pendant deux mois.
',
L e i er, février 1780 l’on recommence : une dixième
.
'
‘. 1 v
i*
publication est faite. La dame de Saint-Julien demande;
e t, sur les conclusions du ministère public, l’on fait dis
traction de quatre héritages. On donne à l’adjudicataire
la récolte en b lé -fro m e n t, à la charge par lui de faire
à la dame de Saint-Quentin raison des semences.,.
L e i du même mois est faite une seconde publica
tion sans le concours de la partie publique.
Enfin, le 29 du même mois l’adjudication est faite
moyennant la somme de 8100 fr. à M e. M ancel, pro
cureur de la dame de S a in t-J u lien , pour lui ou -son
- ..mieux, qui est déclaré aussitôt en faveur du sieur GrosLamotlie.
L e 8 mars suivant, la dame veuve de Saint-Julien four_nit au sieur Gros-Lamotlie, i°. quittance de la somme de
5
»
Saint - Clément, ¿1 Vissue des vêpres qui y- ont été' dites et
>1
celtibnuis, le peuple sortant d’¿ceIIes églises en affluence, etc.
» E t ai laissé et affiché copie des présentes, tant aucr.dites
)> portes (fu’cfi ce //e j)aiafs tic ia y M 0 d ’st'iÿucperse , a mon
h retour, etc. n ,
‘
?»•
r' '
_
B
�40<*
r.
Ï t0 )
'8 roof. fir ïi de l’adjudîèation ; 2°. de dix setiers une quarte
trois cbtipès ïro'mént pour semences. Elle consent à ce que
le 'sieur Gros-Lamothe se mette de suite en possession ;
"elle renonce à exercer ses reprises matrimoniales sur les
•biens vendus, '6t se réserve seulement de les répéter sur
lds autres biens de son mari.
L e 9 du même m ois, le sieur Gros-Lamothe prend
du receveur des consignations d’A igueperse, une attesta
tion qu’il n’y a aucune opposition sur la succession SaintJu lien ; et le môme ,jour il se fait délivrer par le lieu
tenant général du bailliage une ordonnance que l’on
qualifie indûment décret.
L e 1 du même m ois, le sieur Gros-Lamothe prend
possession civile par le ministère du sieur M an cel, pro
cureur et notaire, assisté de six témoins des lieux et
justices des biens adjugés, pour faire courir le délai du
retrait ligrîager, parce qu’il avoit acheté à vil prix.
L e sieur de Saint-Julien a été porté sur la liste des
émigrés en 1792 ; il a été amnistié le 13 prairial an 10.
ten d an t lftJ riiort civile du sieur de Saint-Julien, la
darne sn mère est décédée le 23 floréal an , et la suc
cession de cette dernière a été a c c e p t é e par la dame de
Saint-Julien, ex-religieuse.
L e 13 messidor an 10, le sieur de Saint-Julien a répu
dié à la succession do sa mère.
Ett>l’«in 11 , le 6Îeur de Saint-Julien a actionné le sieur
G i’os-l-amothe devant le tribunal civil de l’arrondisse
ment de Riom, en désistement de la portion par lui acquise
du domaine du Coliat.
L e sieur Gros-Lamothe a opposé son adjudication de
5
5
l’année 1780.
�S o t?
( Iï )
L e sieur de Saint-Julien en a demandé la nullité par
divers moyens qu’il a développés.
En réplique, le sieur Gros-Larnothe a soutenu, i° . le
tribunal de Biom incompétent pour prononcer sur la
nullité de la procédure et de l’adjudication, parce que
ce tribunal représentant le bailliage de M ontpensier, ce
seroit se réformer lui - même ; 2°. le sieur de SaintJulien non recevable et mal fondé dans sa demande en
nullité.
L e sieur de Saint-Julien a dit qu’au besoin il appeloit
du tout en la cour.
Par jugement du 14 nivôse an 13 y le tribunal de R iom
s’est déclaré incompétent pour connoître de la validité ou
nullité de l’adjudication, et a sursis à faire droit sur la
demande du sieur de Saint-Julien jusqu’à ce que la cour
aura statué sur l’appel du sieur de Saint-Julien.
L e sieur de Saint-Julien a appelé de l’adjudication et
de tout ce qui a précédé et suivi.
T e l est l’état de l’affaire d’entre les parties.
D IS C U S S IO N .
Trois questions principales se présentent dans cette
cause.
i°. En 1779, y avoit-il nécessité de vendre des biens du
Bieuv de Saint-Julien, mineur? Æ s alienum urgebat ne ?
2 • La procédure tenue est-elle régulière?
• L e sieur de Saint-Julien est-il recevable dans son
flppel ?
3
T e l est 1 ordre de discussion que nous devons observer
B z
�'
s
( 12 )
•r ' * *ifr r
'* • y
poiii^niener l’esprit à ce point de conviction qui fut
toujours satisfaisant pour les magistrats.
Suivant Brodeau sur M . L oü et, . A , somm. , nous
n’observons pas en France la disposition de la loi i et 3 ,
Quod quahdô decreto opus non s it, ni la glose de la
l o i i , §. 21, vevho 'Cciverint de rebus eo?'um, qui disent
qu’en ce cas decreto opus non est.
1 Dans la suite oii se relâcha de l’ancienne rigueur, pour
empêcher la, ruine des mineurs par les frais considérables
qu’occasionnoit la saisie réelle de leurs biens : vinrent les
arrêts de règlement du parlement de P a ris, des 9 avril
1630 et, 28 février 1722, qui avoient force de loi dans
tout le ressort de ce parlement. Il fallut, i°. nécessité de
vendre, nécessité absolue et présente (1); 20. avis de pa
reils, qui constatât cette nécessité; 30. homologation de
cet avis par le juge; 4°. publication, affiches et retnises
ordinaires et accoutumées ( dit l’arrêt de règlement de
1
5
1722 ).
L ’usage, depuis nombre d’années, y a v o i t ajouté l’es
timation préalable par experts ; et l’on sait qu’en pareil
’
(1) Qnærcre ergo d é b e t , an preuniam pupdlus habcat, v e l in
numerato, v o l in nom inibus qiuv convcniri p ossent, v e l in j'ructibus conditis , v r l ctiarn in redituurn sp e, alquc obventiomun.
Item roqinr«\t n u r n alice res surit prœtcr prtvdta , quœ distrahi
possunt e x quorum pretio œri aheno satisjîrri possit. Si igitur
dcprelit’iidcrit, non posse aüunde cxsolvi quam ex prædiorurn dis—
Iractionc, tune perrnitlel distrahi : si modo urgeat creditor, aut
asurarutn modus parendum œri alieno suadoat. T l t . D e rcb. cor.
Q ui sub tut., vcl cur. sunt sine dccr. non alicn. L . 5 , §• 9.
�j> O j
( 13 )
cas l’usage devient loi. M . Chabrol, tome 2 , page i ,
dit que cette formalité est indispensable : la raison est que
par ce moyen l’on peut connoître la vraie valeur des
hiens, et empêcher que le mineur soit trompé.
55
§. Ie1’.
'
N écessité de vendre.
- Rien de moins certain que cette nécessité ; il suffit de
lire la requête de la dame v e u v e de S a in t-J u lie n , en la
sénéchaussée d’A u v e r g n e , p o u r en ju g e r , p o u r juger encox-e que ce que l ’on faisoit n ’étoit q u ’ un sim ulacre, afin
cette dame.
Dans cette requête on d it, i°. que dans la succession
du sieur de Saint-Julien père il n’y a eu que des meubles
meublans, tandis qu’outre ce mobilier estimé à 3300 fr.
à bas p r ix , il y avoit pour entour 2400 fr. de créances
actives à recouvrer; tandis qu’elle avoit retenu 4000 fr.
sur le prix de la vente du domaine de Leznt, au sieur
Soalhat, et qu’elle avoit aussi vendu un contrat de rente
au capital de 1000 fr. à la dame de Culan.
2°. Que les revenus de l’appelant n’étoient que de 900 f.
par an , tandis que le domaine de L e za t, celui des Bicards,
celui du Cohat, et le bien de l\andan, devoient produire
plus de 4000 fr. par chaque année.
°- Que la dame veuve de Saint-Julien avoit acquitté
pour 13044 liy. s. 9 d. de dettes à la charge de l’appe
lant, tandis que rien ne prouve ce fa it, et qu’il est du
de procurer de l ’argent à
3
5
�*4
(
)
au sicuv de S ain t-Ju lien un compte de tutelle dont le
reliquat s’élèvera à plus de 20000 fr.
40. Qu’elle a fourni à un procès au parlement de Paris,
contre le sieur Boisson et autres, y a obtenu, le 24 août
17 77 , arrêt qui a produit la rentrée du domaine de
L ezat, et a avancé plus de 6000 f r ., et que les parties
condamnées sont insolvables, tandis que les plus gros frais
de cette affaire avoient été faits et payés du vivant du
père du sieur de Saint-Julien ; que le sieur Boisson, etc,
ont dû acquitter dans le temps le montant des condam
nations prononcées contr’eu x , et que rien n’établit leur
insolvabilité en 1777 ( car si elle n’étoit survenue qu’a„
près, elle seroit aux risques de la dame veuve de Saint-?
J u lie n , faute par elle d’avoir fait à propos les diligences;
nécessaires ).
°. Qu’elle n’a pu fournir aux avances indispensables
pour faire liquider les dépens obtenus contre le sieur
Boisson, etc., tandis que cette dépense se seroit ù peine
portée à io o f r ., et que personne ne croira qu’elle fût
hors d’état d’y fournir une somme aussi modique.
6°. Qu’avec les revenus des biens laissés par son mari
elle n’a voit pu subvenir à l’éducation de ses trois enians,
tandis que cette éducation ne lui coûtoit rie n , puisque
ces trois enfans étoient placés , que les biens Saint-Julien
dévoient rapporter plus de 4000 fr. de rente, et qu’enfin,
en droit, un mineur ne peut dépenser au delà de scs re
5
venus.
70. Que pour la poursuite du procès au parlement,
et l’éducation de ses cnians, elle ayoit été obligée da
�fo r
• (l5)
faire des emprunts dé la part du sieur Brassier, avocat
à M aringues, et autres qu’elle nom m e, et qu’elle dit
l ’avoir fait assigner en payement. ( L ’on prend mcme la
peine de donner les dates des différentes assignations; on
les dit de novembre et décembre 17 78 , février et mars
17 7 9 ; l’on dit que le tout est de 7096 liv. 13 s. 9 d. )
Mais l'ien ne prouve que la dame veuve de Saint-Julien
ait pris cet argent à cause du procès au parlement : m ais,
si l’on en croit l’exposé en la requête, quelques articles
auroient eu pour objet des marchandises foux-nies, une
recherche de titres de noblesse, etc. D ’ailleurs, en don
nant confiance aux assertions de la daine veuve de SaintJ u lien , ces divers emprunts n’auroient eu d’autre efî’et
que celui de lui donner une action en répétition contre
son mineur ; elle devoit la diriger contre le curateur aux
actions contraires, q u i, en défenses, auroit dû lui dire
et lui auroit dit : « Vous êtes tutrice : vous devez un
« compte; rendez-le. Jusqu’à l’apurement vous êtes ré« putée débitrice; jusquà cet apurement toute action en
« payement vous est interdite. » A u total, la dame de
Saint-Julien ne seroit jamais que créancière de son pu
p ille; et, jusqu’à elle, il étoit inoui qu’un tuteur, pour
se faire payer de ses reprises, pût faire vendre des biens
de son m ineur, sans aucun compte préalable rendu ré
gulièrement.
8°. Que le sieur Brassier et autres ont fait assigner la
dame veuve de Saint-Julien ; que pour éviter les frais
d une saisie réelle sur les biens du mineur, il faut vendre
quelques héritages, et les moins précieux, <lu domaine
du Cohat, parce qu’il est naturel que les dettes soient
�( 16 )
remplies aux dépens du bien qui les a occasionnées; que
les créanciers qui ont fourni leurs deniers pour avoir
le désistement de ce domaine, ont un privilège sur ce
bien; et qu’à la vérité aujourd’hui ce ne sont plus les
créanciers originaires qui se présentent, mais que ce sont
ceux qu’elle a été obligée de subroger à leur -place.
Il faut trancher le .mot. T out ceci n’est ni v ra i, ni
vraisemblable, i Q. Cela n’est point v rai, parce que l’on
n’en produit aucune preuve : il ne faut pas s’en rapporter
aux assignations de 1779 et 1780, qui sans doute n’énonçoient aucun titre. 2°. Ce que l’on avance n’est pas vrai
semblable. L ’on parle de subrogation de nouveaux créan
ciers aux créanciers originaires : mais celui qui prête son
argent pour le profit d’un mineur, celui-là, disons-nous,
prend ordinairement toutes ses précautions ; il se fait
passer des actes devant notaire; il conserve ses anciens
privilèges et hypothèques; sous l’édit de 1 7 7 1 , il formoit
opposition au bureau des hypothèques : sans cela il cornpromettroit ses écus. L e sieur de Saint-Julien délie le sieur
Gros-Lamolhe de citer un seul acte qui en dise un mot.
Il y a plus, le sieur de Saint-Julien rapporte un certificat
du conservateur du bureau des h y p o th è q u es de R ioin , qui
constate que depuis le i cr. janvier 177^ jusquau ier<j.in_
vier 1781 il n’y a eu aucune opposition, ni sur le sieur
de Saint-Julien père, ni sur sa veuve, en qualité de tu
trice de leurs enfans. L e sieur Gros-Lamothe a dans son
dossier un certificat qu’il 11’y avoit aussi aucune o pp o si
tion entre les mains du receveur des consignations du
bailliage de Montpensier. Donc les prétendus créanciers
non urgebant.
Dira-l-on
�7
( i )
D ira-t-on que les parens assemblés ont attesté, i° . que
la succession du sieur de Saint-Julien père étoit chargée
de dettes ,* 2°. que le mobilier étoit insuffisant pour y faire
face; 30. que la dame de Saint-Julien a payé beaucoup
de créanciers, et qu’il y en a voit encore beaucoup d’au
tres qui faisaient contr’elle les poursuites les plus rigou
reuses ; 40. que les revenus des immeubles ne pou voient
fournir à son douaire, à sa pension viagère et à l’éduca
tion des enfans ; °. qu’il y avoit lieu à vendre pour
8000 fr. de biens, pour payer et éviter une saisie réelle?
Ajoutera-t-on que l’avis des parens a été homologué par
le lieutenant général de la sénéchaussée d’A uvergn e?
M ais, i°. un avis de parens, et son hom ologation, ne
sont pas un empêchement d’examiner la vérité des faits : le
m ineur, devenu majeur, est toujours à même d’appeler
à une vérification de l’assertion. A u Journal des audiences,
on trouve un arrêt du 28 août 1664, qui a annulle une
adjudication faite par suite d’un avis de parens, homo
logué par arrêt du 29 avril i
i
et cela parce que la
vente avoit été faite comme dans la cause actuelle, et sans
nécessité. 20. Dans notre espèce, les parens s’en sont rap
portés aveuglément à la relation faite au nom de la dame
veuve de Saint-Julien; relation totalement mensongère.
3°. L e sieur de Saint-Julien a appelé non-seulement de
l’adjudication, mais encore de tout ce q u i çi précédé et
suwi. Ainsi il a également appelé, et de l’avis des parens,
et de son homologation. Nous voilà en présence. Nous
disons que tout ce qui y a été exprimé n’est pas exact; il
faut que l’on -en administre la preuve : si on n’en produit
pas, il laut convenir que tout est faux. 4°« L ’on ne peut;
G
5
65
,
�( 18 )
pas argumenter des assignations de 17-79
I 7 ^ ° : d’une
part, elles ne sont pas représentées; d’autre part, suivant
la requête de 1779, elles auroient eu pour cause des dettes
personnelles à la dame veuve de Saint-Julien, des emprunts
qu’elle auroit faits elle-m êm e; et enfin, sur de simples
assignations non suivies de sentences , non étayées de
titres contre l’appelant, on ne pouvoit pas dire que creditores urgebant, vu surtout que parmi ces prétendus
créanciers on a présenté le sieur de Saint-Julien, prieur
de Champagnac, les religieuses de Notre-Dame de Gannat,
le sieur Sarrasin de L a v a l, le sieur C horus, et autres,
qui tous étoient parens et amis du sieur de Saint-Julien
p è re , et q u i, à coup sû r, auroient été incapables de
mettre le feu d’une saisie réelle dans les biens de l’enfant
de leur parent et am i, et cela pour des sommes de 600 f . ,
de 300 f r ., etc. L ’on ne peut pas dire que ces alienwn
urget, creditor urgel, quand toutes les diligences, dont
on fait un monstre en ce moment, se réduisent à de sim
ples assignations. Donc point de nécessité de vendre.
§. I I .
R égularité de la. -procédure.
T o u t est vicieux dans la procédure représentée par le
6Îcur Gros-Lamothe. Suivons-la pièce à pièce.
îîous ne reviendrons pas sur la requete et l’ordonnance
en la sénéchaussée d’Auvergne.
Dans l’ordonnance d’homologation de l’avis des parens,
il faut pourtant remarquer encore, \\ que le lieutenant
�9
( ï )
général permet seulement de vendre pour 8000 fr. <*
biens immeubles du mineur Saint-Julien ( sans dire les
quels ) , après visite et estimation fa ite s par François
S o a lh a t, qui est nommé d’office ( d’où l’on doit induire
que la désignation de ce qu’il faut vendre est subordonnée
au rapport que fera François Soalhat ), et après les pu
blications et affiches fa ites en la manière ordinaire •
2°. que le lieutenant général ordonne la prestation devant
lui du serment de cet expert nommé d’office ; 30. que le
lieutenant général et les parens signent le procès verbal ;
jd’où il suit que l’avis des parens et son homologation
.étant à la suite l’un de l’autre, ne forment qu’un seul
et même acte dont toutes les parties sont essentielles et
Jiées entr’elles de telle manière que l’une ôtée tout l'édi
fice s’écroule. Ainsi il n’y a de permission de vendre qu’au
tant que les biens du mineur seront visités par François
Soalhat, qui indiquera ceux qu’il convient d’aliéner; qu’au
tant que cet expert les estimera : lui seul a la confiance,
et des parens qui opinent pour la vente, et du juge qui
en entérine l’avis,
La clame de Saint-Julien avoit demandé que quel
ques héritages du domaine du Cohat fussent vendus:
■
c’étoit là son indication ; elle n’est pas adoptée par les
parens. Ceux-ci ne connoissent pas les biens les moins
précieux à conserver ; ils estiment qu’il y a lieu à vente.
L e lieutenant général de la sénéchaussée d’Auvergne dit
î *1
qu il y AUra vente . ma;s ¡1 ne ¿¡1- p as qUe ce
de por
3
tion du Cohat. Pour s’en expliquer, il attend le rapport
de François Soalhat: de là il résulte que ce dernier avoit
' commission de visiter tous les biens du m in eu r, et do
C 2
�( )
20
Résigner sur tous ces biens les héritages les moins intéressans à conserver pour l’avantagé du mineur. C’étoit sur
la relation de François Soalhat que le juge s’étoit réservé
de déterminer que tel ou tel autre bien seroit mis à l’en
chère; et à coup sûr ce n’eût pas été celui du Cohat, qui
étoit et fut toujours de la meilleure production , tandis
qu’à Randan il y avoit des fonds , des bâtimens sujets à
dégradations, dont on auroit tiré un prix plus avantageux
à cause de la plus grande population de ce bourg. 11 falloit
donc faire opérer François Soalhat.
Il y a plus; il ne suffisoit pas d’un simple rapport d’ex
pert , il falloit encore qu’il fût communiqué aux parens
assemblés de nouveau, à la requête de la tutrice , qu’ils
approuvassent ou improuvassent l’indication et l’estima
tion faites par l’expert. En cas d’approbation, l’avis des
parens devoit être entériné , pour passer ensuite aux affi
ches , publications, tenues et adjudication.
T elle étoit la marche suivie au châtelet de Paris, d’après
le témoignage de Pigeau en sa Procédure c i v i l e , tom. 2,
pages i o et 106; l’article 457 du Code civil dit même
que c’est à la famille d’indiquer les biens à vendi*e. La
marche du châtelet devoit être celle de tout le ressort du
parlement de Paris , suivant les arrêts de règlement de
1630 et 1722. Ces procédures ont pris naissance en ce
châtelet; elles ont ensuite été propagées dans tout le res
sort du parlement de Paris. Par cette raison , l’on a dû
suivre partout ce qui se pratiquoit en ce châtelet. Cette
procédure étoit fondee sur l’usage; il falloit donc se con
former à cet usage, faire visiter, estimer et indiquer les
fonds, et en revenir en la sénéchaussée d’Auvergne sur l’ho
5
mologation , a peine de nullité.
�fil*
Mais cette marche ne se serolt pas accordée avec les
Vues du sieur Gros-Lamothe ; elle n’auroit pas convenu au
marché arrêté entre lui et la dame veuve dé Saint-Julien :
on élude la difficulté. Pour cela , on met à l’écart là nomi
nation d’expert faite par le juge de la sénéchaussée d’A u vergne; on donne une requête au bailliage de M ontpensier ; on demande, et une nouvelle permission de
vendre partie du Cohat, et un autre expert d’office. L e
lieutenant général de cette autre juridiction permet la
vente et nomme un autre expert, qui est Jean Soalhat,
dont on étoit plus sûr.
Cet expert opère en vertu de l’ordonnance du bailliage
'de M ontpensier; il opère dans l’etendue de la paroisse
de Saint-Clém ent, qui étoit du ressort d’A igueperse, et
dans celles de Saint-André et de Saint-D enis de Barn azat, qui étoient du ressort de la sénéchaussée d’A u
vergne', et cela , sans que l’on eût pris parecitis ou du
juge des lieux ou en la sénéchaussée d’Auvergne : ceci
est très-remarquable.
Dans cette partie de la procédure il y a deux vices ;
le premier résulte de ce que la sénéchaussée de Riom
ayant nommé d’office pour visiter et estimer les biens à
ven d re, étant par là saisie de l’aiî'aire, on ne pouvoit plus
la porter à Montpensier.
E u vain le sieur Gros-Lamothe a-t-il dit au tribunal
civil de R iom , i° . que l’expert nommé à Aigueperse suffisoit, et qu’il devoit même être p référé, parce que le
domaine du Cohat étoit situé dans le ressort de ce bailliage;
2 . qu’aucune l o i , aucun arrêt n’exigeoit la formalité de
la visite et de l’estimation par experts.
�( 22 )
M ais, d’une p a rt, l’expert nommé à Riom étoit celui
des parens qui avoient délibéré la ven te, et du juge qui
l’avoit permise; d’autre p a rt, il y avoit des héritages situés
dans le ressort de Riom. E nfin, la vente n’étoit permise
qu’à conditiou que François Soalhat visiteroit et estime**
roit les biens ; sans cela , point de permission,
L e second vice qui se rencontre dans l’opération dp
Jean Soalhat, résulte de ce q u e, sans p a rea tis, l’on a
mis à exécution l’ordonnance du lieutenant général du
bailliage de Montpensier hors l’étendue de ce bailliage ,
c’est-à-dire, dans le ressort de la sénéchaussée d’A uvergn e}
pour la partie du domaine du G ohat, étant dans les pa
roisses de SaintrAndré et de Saint-Denis de Barnazat. Les
juridictions étant de droit public , il s’ensuit que l’ordonpance d’Aigueperse étoit sans force dans les paroisses dp
Saint-André et de Saint-Dpnis de Barnazat ; et c’est Ip
lieu de dire, q u i cadit à syllaba cadit à toto.
L e procès verbal d’appostion de l’affiche par le sieur
Pireyre , huissier, est nul par trois motifs.
V oici le premier rnoyen.
Les ventes des biens des mineurs , sans saisie ré e lle ,
n’étoient autorisées en France que par les arrêts de règle
ment de 1630 et 1722. Celui de 1722 porte : « Seront
« tenus les prévôt de Paris et tous autres ju g e s, en
« homologant les avis de parens des mineurs , d’or« donner que ladite vente ne sera faite qu'après ¡a pu« blication , affiches et remises ordinaires et accourc< tuniées. »
L e lieutenant général de la sénéchaussée d’Auvergne
dit dans son ordonnance ; après toutes les publiçatioi\s
�(
*3 )
et affiches fa ites e n l a m a n i è r e a c c o u t u m é e .
Le
lieutenant g én é ral au bailliage de M ontpensier dit
,
lu i-m ê m e au ssi dans son o r d o n n a n c e
,
,
d’après les publi
cations , affiches et autres form alités requises.
P our l’intérêt des m ineurs, l’on a diminué le nombre
des actes ; mais on a conservé les formalités prescrites
pour les actes demeurés nécessaires.
O r, i° . suivant l’article 2 de l’édit des criées, de i
i,
il devoit être posé une affiche à la porte de l’église parois
siale de la situation des biens saisis; s’il y avoit plusieurs
paroisses, il falloit observer cette formalité dans chacune ;
et si, porte la l o i , les héritages sont assis en diverses
55
paroisses
,
sera fa ite la semblable en chacune desdites
paroisses.
20. Suivant l’article 3, cette formalité devoit avoir lieu
le dimanche à l’issue delà messe de paroisse : A u x jo u rs de
dimanche et issues des grand'messes paroissiales, dit cet
article.
« M . C habrol, sur l’article 12 du titre 24 de la Coutume
d’A u v erg n e, dit aussi que les affiches devoient être faites
le dimanche à rissue de la messe de paroisse.
Pigeau , en sa Procédure civile du cliatelet, dit la mémo
chose.
Les praticiens ont constamment suivi-cette formalité,
soit en saisies réelles, soit en saisies sur simple placard,
soit en vente de biens de mineurs ; et l’inobservation a
toujours opéré la nullité de la procédure et de l’adjudi
cation.
La raison de ce principe et de cette jurisprudence, est
que tout est de rigueur ; que l’afiiclie est pour donner de
�24
(
)
la publicité à la vente ; qu’il ne sauroit y en avoir trop ,
surtout en vente de biens de mineurs; qu’il faut prendre
le lie u , le jour et l’instant où se rencontre cette publicité,
et qu’il ne sauroit y en avoir de plus favorable que la
messe de paroisse.
Dans la cause, l’affiche de Saint-Clément, paroisse dans
laquelle est situé le plus grand nombre des héritages en
question, cette affiche, d ison s-n ous, n’a été faite qu’à
l ’issue des vêpres ; ce qui est nne contravention à l’édit
de i
i , à l’usage et à la jurisprudence, qui vouloient que
ce fût à l’issue de la messe de paroisse : il y a donc nullité.
L a deuxième nullité de ce procès verbal se trouve dans
le fait q u e , sans p areatis, l’huissier a mis à exécution
l’ordonnance du lieutenant général de Montpensier dans
les paroisses de Saint-And ré et Saint^Denis deBarnazat,
qui étoient hors le ressort de M ontpensier, qui étoient
dans la juridiction de la sénéchaussée d’Auvergne,
L a troisième nullité contre le procès verbal d’niiiclic,
du 4 juillet 1779 , résulte de ce que l’huissier a indiqué,
pour la première publication , l’<iudience du 6 du même
mois. Pourquoi tant de précipitation ? Pourquoi seulcv
meut un intervalle de vingt-quatre heures ? Cependant
l’usage étoit de donner un délai de quinzaine , en C0117
foi'milé de l’art. 16 du tit. 24 de la Coutume d’Auvergne.
L ’article 1 défend d’abréger les délais : Sans que l'on
les puisse prolonger n i abréger, dit cette loi. L ’ordon
nance du lieutenant général de la sénéchaussée d’A u
vergne ne permettoit la vente qu’à condition que Je$
affiches seroi&nt fa ites en la manière, accoutum ée, la
manière accoutumée étoit le délai de cjuinzuine; il étoij;
55
5
�25
S O
(
)'
de rigueur : ou s’en est écarté ; il y a donc nullité.
Les différentes publications faites à l’audience du bail
liage de M ontpensier, quoiqu’au nombre de douze, sont
vicieuses, i ° . parce qu’elles n’ont pas été suivies dans
l’ordre indiqué par l’afliche. Dans l’affiche, l’huissier avoit
annoncé au public que les tenues d’audiences auroient
lieu de huitaine en huitaine. L e public devoit s’attendre
à l’observation exacte de cet ord re, et se présenter a u x 1
audiences de huitaine en huitaine. Pour le tromper, l’on
a affecté de mettre quinzaine entre la troisième et la qua
trièm e, et entre la quatrième et la cinquième; deux mois et
vingt-deux jours entre la sixième et la septième; deux mois
entre la neuvième et la dixième ; et quinzaine entre la
dixième et la onzième, et entre la onzième et l’adjudication.
L e but de ces interruptions étoit sans contredit d’éloigner
les enchérisseurs : il semble que l’on épioit l’instant où
personne ne seroit là, pour avoir le bien de l’appelant au
prix que l’on vouloit. Aussi voit-on quantité de tenues
eans enchères de la part de qui que ce soit.
2°. Sur douze tenues ou remises, il n’en est que deux
où le ministère public a été ouï. Cependant il s’agissoitde biens de mineurs, où l’intervention de la partie pu
blique étoit nécessaire , à peine de nullité. Cependant
trois tenues étoient de rig u eu r, avec l’audition de cette
partie publique, à peine de nullité; l’on ne pouvoit
adjuger qu’à la quatrième. Il y a donc ici un autre moyeu
certain d’irrégularité.
°* A audience du premier février 1780, des clwngemens sont faits au placard; 011 en distrait quatre héri
tages, Ln place, on donne à l'adjudicataire la récolte penD
3
1
t *
�U <
(
2
6
}
dante en froment. T out cela se pratique sans en avertir
le public par une nouvelle affiche. Cette nouvelle affiche
étoit pourtant nécessaire; elle est d’usage en pareil cas,
et son absence opère un autre moyen de nullité.
Une autre circonstance met le comble à la mesure ;
elle est un signe certain de ce qui se pratiquoit au détri
ment du sieur de Saint-Julien; elle découvre la collu
sion qui régnoit entre la dame de S ain t-J u lien et le
sieur Gros-Lamothe. L ’adjudication a lieu le 29 février
1780. Quels sont les enchérisseurs? Un seul, M e. M ancel,
procureur de la daine veuve de St.-Julien. Il n’en paroît
point d’autre, parce que sans doute il étoit répandu dans le
public que les causes qui donnoient lieu à la vente n’étoient pas sincères, et que l’on ne vouloit pas exposer
son argent. C’est probablement par la même raison que
l ’on ne voit plus reparoître M e. M agnin qui, à l’audience
du 23 novembre 1769, avoit fait enchère de 4000 francs,
et M e. Simonnet q u i, à la tenue du i février 1780,
avoit fait enchère de 8100 fr. Dans cette position, quel
est l’adjudicataire ? M e. Mancel , qui au même instant
déclare que c’est pour le compte du sieur Gros-Lamothe.
Qui ne voit que tout étoit concerté préalablement?
SuivanL l’ordonnance du lieutenant général au bailliage
de M ontpensier, il ne pou voit être vendu que les héri
tages les moins précieux et les moins mtéressans ¿1 con
server ; et cependant l’on vend les meilleurs fonds; des
prés qui sont d’un prix d autant plus grand, qu’il y en
a très-peu dans le village du Cohat, et qui étoient les seuls
du domaine. C’est ainsi que l’on enlève ce qu’il y a de
mieux dans le domaine du sieur de Saint-Julien, et qu’oa
le déprécie totalement.
5
�( *7 )
E n fin , suivant la permission accordée par le lieutenant
général en la sénéchaussée d’A uvergne, et l’avis des pa
ïen s, on ne peut indiquer, estimer et vendre que pour
8000 francs de fonds, et cependant Jean Soalhat, expert
nommé par le juge de M ontpensier, en indique pour
8667 fr. que l’on met de suite en vente. En cela il y a
excès de pou voir, et dès-lors nullité.
D ira-t-on qu’à l’audience du premier février 1780, il
en fut distrait quatre héritages qui sont portés dans
l ’estimation de cet expert pour la somme de 737 francs;
que cette somme ôtée de celle de 8667 fr. montant de
l ’estimation totale, il 11e reste que 7930 f r . , et qu’alors
les choses sont ramenées dans les termes de la permis
sion de vendre ?
M ais, i°, Jean Soalhat avoit désigné quinze héritages
pour être vendus ; il les avoit estimés 8667 fr. ; il avoit
excédé ses pouvoirs de 667 fr. C’en étoit assez pour vicier
son rapport, parce que toutes les fois qu’un délégué
sort des bornes de son mandat, son opération est nulle.
20. Suivant l’ordonnance du juge de M ontpensier, l’on
11e devoit vendre que les fonds les moins intércssans
à conserver. Par ou appert que les onze qui sont de
meurés compris dans le placard, et qui ont été vendus,
étoient moins précieux, moins intéresscins à conserver,
que les quatre que l’on en a distraits? C’étoit un fait qui,
ue pou voit etre vérifié que par un expert, et l’on n’a
pas usé de cet expédient; ce qui est un vice radical.
. Que l’on ne nous oppose pas que les onze héritages
estimes par l’expert Jean Soalhat à 70^0 fr. ont été ndju' ' G
i»
/-/<-'
.
m 10 Inmcs, et qu’ainsi il n’y a pas eu vililé de prix,
D 2
✓
�(*8 )
i°. Dans l’estimation de l’expert Jean Soaïhat n’entroit
pas la récolte pendante. Dans le placard cette récolte
étoit réservée, et elle valoit au moins iooo francs. ( L e
sieur G ros-Lam othe en a lui-même produit la preuve
au tribunal civil de l’arrondissement de Riom : plus bas
nous parlerons de la pièce qui contient cette preuve. )
Cette récolte a été ajoutée par le jugement du premier
Février 1780; ainsi en additionnant 7930 fr. et 1000 fr.,
le total est de 8930fr.; et le prix de l’adjudication n’étant
que de 8110 francs, la différence est de 620 francs : donc
l’adjudication est au-dessous de l’estimation. Dans le fait
ce bien valoit en 1780 au moins 24000 fr. ; il y avoit qua
rante-cinq septerées en terres ou prés de première classe:
il est révoltant que l’adjudication ait été faite pour 711 o fr .,
parce qu’il faut déduire 1000 fr. pour la récolte. La lésion
est énormissime.
§• I I I .
L'appel du sieur de Saint-Julien est-il recevabh ?
Sur ce point de la cause les faits sont constans. L'ad
judication a eu lieu en 1780, et n’est pas encore signifiée
ni à personne ni à domicile. Les choses sont encore en
tières à cet égard.
L ’appel du sieur de Saint-Julien n’a été interjeté qu’en
ventôse an 13; c’e s t-à -d ire , en i o . D ’où il suit qu’il
y a un intervalle de vingt-cinq ans entre l’adjudication
et l’appel.
85
Nous convenons que s’il suffisoit de la révolution de
�sst
ces vingt-cinq années pour opérer la fin de non-recevoir
décennale contre l’appel du sieur de Saint-Julien, celui-ci
n’auroit point assez de minox*ité pour l’écarter : né le 2
décembre 1759, il est devenu majeur le a décembre 1784,
et nous avouons que de là à l’appel il s’est écoulé plus de
dix années.
Mais ce n’est pas du moment de la majorité du sieur
de Saint-Julien qu’il faut partir pour faire courir les dix
années de l’appel, c’est de la signification de la sentence
d’adjudication ; et cette signification n’est point encore
faite.
Ce fait une fois constant, pour règle de décision, nous
avons l’article 17 du titre 27 de l’ordonnance de 1667,
portant : « Les sentences n’auront force de chose jugée
« qu’après d ix a n s , à compter du jo u r de leur signi« fication. »
5
5
Point de distinction entre les sentences ordinaires et
celles d’adjudication : la règle est générale. C ’est donc le
cas de dire : U bi lex non distinguit, nec nos distinguere
debemus.
Contre ce principe, devant le tribunal civil de R iom ,
on nous a renvoyé à M . Lemaître en son Traité des criées f
liv. 1 , pag. 133.
M ais, 1°. cet auteur, pag. 13 2 , d it: « Décret sur mi« ncurs fait sans discussion, cassé vingt-huit ans après,
*< et pour autres nullités; car la prescription de vingt ans
« pour le titre ne peut opérer, s i le titre n est bon et
« valable , d’autant que celui qui jouit sans titre est pos« sesseur de mauvaise fo i, par la disposition du droit
�3<? )
(
« canon qu e nous suivons
« table (i). »
en cela com m e très - é q u i-
1
2°. S i, en la page 133? ° môme auteur dit qu’après
dix ans l’on n’est pas recevable à appeler d’un décret,
d’une part, il fait allusion aux décrets sur saisie réelle
( et ici nous ne sommes pas dans ce cas ) ; d’autre p art,
il cite un arrêt de i582 , qui est antérieur à l’ordonnance
de 1667. Après cette ordonnance, l’on eut jugé et l’on
a jugé autrement.
L e sieur Gros-Lam otlie invoque encore l’opinion de
L o u e t, lettre D , som. 26 , qui dit qu’il a été jugé qu’ij
faut se pourvoir contre une adjudication par décret dans
les dix ans, et qu’après ce temps l’appel est non recevable
s’il n’y a minorité ; d’autant, dit cet auteur, que le décret
sert de titre et de bonne f o i pour prescrire par dix ans
entre présens ; et qiCinterjetant appel après les dix
a n s , ce seroit éluder la coutume q u i admet la pres
cription avec titre et bonne f o i entre présens par dix ans.
i° . Brodeau, qui a annoté M . Louet , assure que ce
principe n’est fait que pour les décrets volontaires inter
venus sur contrats de vente : il y en a une raison bien
sensible. Celui sur lequel on poursuivoit 1« décret volon
taire 11’avoit que dix ans pour so pourvoir en lésion
contre la vente; hors ce temps-la tout est consommé. X,e
décret volontaire étoit l’exéciiLion complète dit contrat,
(1) L ’arlialc 22G7 (lu C od e civil confirmo pc priucipp. U porlr;;
I.e. tilra m il /w d fja u i dc form e tie. pcut Seivir de base, u lit pros
cription dc d ix et virigt 'aris*.
..
1 '
>
�t e 2>
30
(
puisque par l'iles hypothèques étoient purgées: et, pour
l’attaquer, il ne falloit pas que l’on eût plus de temps
que pour attaquer le contrat lui-même. Par ce m otif, la
jurisprudence avoit restreint l’action d’appel à dix ans.
Mais il n’en étoit pas de même pour les décrets forcés:
l’on avoit trente ans pour les appeler. Brodcau cite nom
bre d’arrêts qui l’ont jugé ainsi.
2°. Louet écrivoit pour la Coutume de Paris et autres
semblables, qui admettoient la prescription de dix ans
entre présens , et de vingt ans entre absens , tandis que
nous nous trouvons en coutume d’A uvergne, dans laquelle
il n’y a qu’une prescription, qui est celle de trente ans.
D ’où il faut inférer qu’en jugeant par L o u e t, il y avoit
trente ans pour appeler d’un décret fait en Auvergne.
L e sieur Gros-Lamothe invoque l’autorité de Rousseau
de Lacom be, en son Recueil de jurisprudence civile, verbo
D é c r e t, n. i. Cet auteur dit : « I ,’appel d’un décret n’est
« recevable après dix ans. » Brodeau sur L ouet, D . 26.
Comme Rousseau de Lacombe s’étaye sur Louet , ce
que nous venons de dire est une réfutation suffisante de
l’argument qu’en lire le sieur Gros-Lamothe.
L e sieur Gros-Lamothe cite encore l’auteur du Traité
des m inorités, cliap. 8 , n. 23.
Mais que dit cet auteur? il dit : « Quand les formalités
« nécessaires pour la vente des biens de mineurs n’ont
« pas été gardées, la vente est nulle , et le mineur reven« dique son bien sans qu’il soit besoin de restitution. Loi 2,
« lois 9 , 10, 1 1 , i et 16 , JJe preediis et rebus eorum.
K Si les form alités ont été gardées, la vente est valable,
« sauf au mineur ù se faire restituer s’il est lésé. n
5
�3
( * >
Ces m ots, si les fo rm a lités ont été gardées, supposent
que les formalités ont été observées régulièrement; mais
si elles l’ont été nullem ent, c’est autre chose : c’est tout
comme s’il n’y en avoit pas e u , suivant la règle quod nul*
lum e s t, milium producit ejfectum,
M . d’Aguesseau, autre auteur cité par le sieur GrosLam othe, i e. plaidoyer, tome 2 , page 365, n’en dit pas
plus que l’auteur du Traité des minorités,
Dans l’espèce de l’arrêt du 19 février 17 0 4 , recueilli
par A u g e a rd , il s’agissoit d’une vente de biens de mi-?
neurs, faite par la tutrice , sans les formalités : elle fut
annullée. Des lettres de restitution prises par le mineur
furent jugées superflues,
Ce que dit BriU on, verbo D é cr e t, n’est pas pour la
sieur GrosrLamotlie. Sur l’arrêt du 28 février 1708 , il
d it: « Par arrêt du parlement de Paris, il a été jugé ,
« i° . que les religieux de l’abbaye de Saint-Paul de Corrr
« mery étoient non recevables à interjeter appel d’un
« décret vingt ans après qu’il est intervenu ; 2 . qu’un
« décret purge les rentes foncières dues ù l’église. » Notes
de M e. Regnard.
Qui ne voit qu’il s’agissoit ici do décret sur saisie réelle,
dès que Brillon dit que l’on a jugé qu’une rente foncièro
a été purgée par le décret ( chose qui n’étoit possible qu’en
décret sur saisie réelle ) , tandis que dans la cause il est
question seulement do vente sur simple publication?La
différence est immense sous tous les rapports, et la raison
ne veut pas qu’on nous applique ce qui n’étoit que pour
les saisies réelles.
D ’abord nous ne voyons pas si lo décret étoit ou non
signifié
5
�( 33')^
signifié K la partie saisie ;;Brillon n’eü parle pas : il est h
croire qu’il l’avoit été.
Mais n’y auroit-il pas eu de signification, il n’y auroit
là rien de concluant pour le sieur Gros-Lamotlie. En saisie
réelle, le saisi et les créanciers étoient appelés par des
assignations publiques; le saisi l’étoit en outi’e par des
notifications particulières : un bail judiciaire dépossédoit
le propriétaire. Par le congé d’adjuger, lui, tous les prélendans droit et les créanciers étoient déboutés de tous
moyens de nullité : l’on passoit ensuite à l’adjudication.
Tant de form alités, tant de solennité rendoient les ma
gistrats extrêmement rigoureux sur le pourvoi contre
l’adjudication ; il eût été inconvenant qu’après s’être laissé
débouter de ses moyens de nullité, lors du congé d’ad
juger , l ’on pût ensuite en proposer après l’adjudication.
V oilà sans doute le motif de l’arrêt de 1708 : mais notre
cas n’y ressemble aucunement.
L e sieur Gros-Lamotlie n’est pas heureux dans sa dé
couverte de l’arrêt du 31 août 17 6 1, rendu entre Richard,
Anglard , etc., qui a été recueilli par les auteurs du nou
veau Denizart. En l’endroit qu’il cite on lit': «Les délais
tr pour interjeter appel d’une sentence d’adjudication, sont
« les mêmes que ceux qui sont prescrits pour l’appel de
« tous les jugemens par l’ordonnance de 1667 , tit. 27,
c< art. i2 cl 17. L ors donc que la sentence a été signi« fié e au domicile de la partie s a is ie , l'appel n'en est
« plus recevable au delà des dix années écoulées depuis
Ja
jou r da cette signification , parce qu’une adjudica« tion laite sous les yeux de la justice, est un contrat aussi
a .puissant que celui qui est passé devant un notaire. Ainsi
�34
(
)
« jugé par arrêt du 31 août 17 6 1, en la troisième chambre
« des enquêtes, etc.
« Si la sentence d’adjudication n’avoit point été signifiée
« valablement, l’appel en seroit recevable pendant trente
« ans, nonobstant la disposition de l’article 164 de l’or« donnance du mois de janvier 1629 , qui interdit indis« linctement à tous majeurs la faculté de se pourvoir
« contre un décret, môme par voie d’a p p el, après l’es« pace de dix années. C'est l’avis de M . Potliier sur la
« Coutume d’Orléans, au titre des Criées, n. 148. »
L ’art. 164 de l’ordonnance de 1629 ( le code M ichaux,
qui n’étoit pas suivi au parlement de Paris) se rapporte uni
quement aux décrets sur saisie réelle. Cela résulte essen
tiellement de ses termes : « Nul ne pourra être reçu h
« appeler des décrets, ni les débattre par nullité ni autres
« voies, entre majeurs, dix ans après l’interposition des« dits décrets, etc.
« Et néanmoins voulons que les mineurs, sur les tuteurs
*c desquels les décrets auront été faits, puissent, dans les
« dix ans après leur majorité atteinte, être restitués pour
« lésion d’outre moitié de juste prix , etc. »
Nous ne voyons pas que la déclaration du 16 janvier
1736, dont s’est emparée le sieur Gros-Lamothe, ait aucun
rapport à la contestation actuelle. i°. Elle n’a été donnée
que pour le p a r l e m e n t de Languedoc; et, hors du ressort
de cette cour, elle n’étoit pas loi en France. 20. Cette loi est
relative au droit de rabattement de decret, qui a voit lieu
en Languedoc , cl étoit absolument inconnu dans le par
lement de Paris.
L e sieur Gros-Lam olhe rappelle mal à propos un arrêt
�S2Ï
35
(
)
rendu en la c o u r , le 6 frimaire an i l , entre Antoine et
M arie Courtial, appelans de sentence d’adjudication de la
châtellenie de M ontploux, le 12 juillet 177^, et défendus
par M e. D elapchier, d’une part; et Matthieu C ou rtial,
intim é, et défendu par M e. Gasclion, d’autre part. L ’appel
des parties de M e. Delapchier ne fut déclaré non i-ecevable que parce que, i°. depuis la signification de la sen
tence d’adjudication jusqu’à l’appel, il s’étoit écoulé plus
de dix ans ; 20. les appelans avoient acquiescé à l’adju
dication. Il suffit de lire les motifs de l’arrêt (1).
L a citation que le sieur Gros-Lamotlie fait d’un arrêt de
la cour de cassation, en date du 24 vendémiaire an 10, n’est
pas plus heureuse : i°. il s’agissoit d’adjudication sur saisie
réelle; 20. la question qui nous divise ne s’y présentoit
pas. Si l’une des parties pouvoit s’en servir , ce seroit
sans contredit le sieur de Saint-Julien ; car les juges de
la cour de cassation ne se sont point déterminés par la
(1) A tten d u qu ’aux termes de l’art. 17 du tit. 27 de l’ordonnance
de 166 7, les sentences passent en force de chose jugée après dix
a n s , à compter du jour de leur signification ;
A t t e n d u , dans le fa it , que l’appel des parties de Delapchier n ’a
été interjeté qu ’après les dix ans de la signification de la sentence
d ’ adjudication du 12 juillet 1 7 7 5 , distraction m êm e faite du temps
de la minorité des parties de D e lap ch ie r, et q u ’ainsi elles sont no n
rcccvahlcs en leur appel ;
A tten d u qu'indépendam m ent de la fin de non-recevoir résultante
d e 1o r d o n n a n c e , les parties de Delapchier ont approuvé la sen
tence d ’adjudication p a r , e t c . ,
I jc tribunal, par jugem ent en dernier ressort, déclare les partie*
île Delapchier non rccevab lcs, etc.
E 2
�3
( S )
iin de non-recevoir des dix ans, quoiqu’elle eût été op
posée: en sorte que la queslion demeurerait toute entière.
Enfin le sieur Gros-Eamothe a fait signifier une lettre
s;.ns date,que lui a écrite le sieur de Saint-Julien, pen
dant que la procédure sur la vente étoit au bailliage de
Montpensier. Il en tire l’argument, que la vente a été
faite du consentement du sieur de Saint-Julien , qu’il y
a participé, qu’il l’a approuvée , et que ne s’étant pas•pourvu, dans les dix ans de sa m ajorité, il y a fin de
n o n -re c e v o ir (i).
Cette lettre ne lie point le sieur de Saint-Julien : i°. il
étoit alors en minorité et en tutelle, et n’avoit pas de
( i ) M \ M a n ccl vient do nous instruire de la dernière m ise que
vous Tenez de mettre sur notre placard. N ous l ’acceptons dans'
les conditions du payem ent , s i toutefois vous voulez vous dé
partir de la récolte des blés v ifs. T o u t e s les terres qui vous ad -viennent sont ensemencées en from ent : c ’est toute notre récolte.
P ou r les blés de m a r s , vous serez le muilre d e les sem er, en con
servant cependant les labours du m étayer. V o u s voyez qu’ il ru?
seroit pas ju ste que nous perdissions notre récolte q u i vaut bien
1000 fra n cs. P o u r t a n t , pour que tout iinisse samedi p ro c h a in ,
et pour vous m ontrer l'envie que nous avons de faire affaire avec
v o u s, nous nous déparlons des intérêts des 2000 fra n cs reslans /
et m êm e nous vous payerons, s i vous aimez m ie u x , Vintérêt du
premier argent (pie nous toucherons. V o u s voyez, monsieur, l ’en
vie que nous avons de finir avec un honnête homm e com m e vous.
Je crois que nous sommes raisonnables. Finissons, je vous en p rie '
</a déjà trop traîné. J’cspcrc que c ’a nous procurera le plaisir de
vons voir , et de vivre en bons voisins.
Si cela vous c o n v ie n t , faites parvenir votre lettre demain &
INI. INIancel, notre procureur.
�j2 o )
37
(
J
..
volonté civile; par conséquent, il ne pouvoit pas con
tracter d’engagem ent, et tout ce qu’il auroit dit et écrit
seroit nul d’une nullité absolue, parce qu’un mineur en
tutelle ne peut parler et agir que par son tuteur. Contre
ce qui est nul de plein d r o it, il ne faut pas se pourvoir
en restitution : cela tombe de soi-même ah înitio. D e là il
suit qu’il faut toujours remonter à la source, à ce qui a
été fait par la dame de Saint-Julien , tutrice ; et l’on ne
•peut s’empêcher de juger que le sieur de Saint-Julien n'a
pu participer civilement à l’adjudication faite au sieur
'Gros-Lam othe.
2°. Voudroit-on considérer cette lettre comme une rati
fication d’adjudication ? Mais alors il faudroit que les
clauses de la vente judiciaire y fussent concordantes : or, ici
il n’y a rien de cela ; point de département de la récolte
par le sieur Gros-Lam othe, puisque celle récolte lui a
été adjugée avec les fonds. Sur ce poin t, nous le renver
rons à la loi 2 , tit. S i maj. fact. alieti. sir/, decret. rat.
hab. , qui exige une ratification spéciale , speciali confir
ma tione ; nous le renverrons à Perezius, sur le tit. 4 6 ,
cod. S i major ratum hab. ; nous le renverrons enfin à
l’arrêt rendu par la cour, entre les sieurs Capelle et Audin.
Cette lettre est un véritable chiffon , dont aucune des pro
positions n’a été adoptée, et qui ne sauroit valoir un acte
sous seing privé fait double entre les parties.
Mais si cette lettre ne signifie rien en faveur du sieur
G ios-Larn olh c, elle dit beaucoup contre lui ; elle dit que
lu i, qui ose accuser d’indélicatesse le sieur de Saint-Julien,
n a pas été infiniment délicat dans la circonstance, e f qu’il
a abusé de la positiou où se trouvoit alors la dame veuve
�V M ,
Cam
rlc Saint-Julien. A lors les choses en étoient au point que
le sieur G ros’- I/amothe étoit le seul assez hardi pour
acquérir sur une procédure vicieuse : il ne se présentoit
pas d’autre enchérisseur. Ainsi il faisoit la loi tout aussi
dure que bon lui sembloit ; ainsi, il vouloit a v o ir, et il
eut la récolte pendante, qui valoit iooo francs; ainsi, il
avoit l’éduit la dame veuve de Saint-Julien à lui proposer
de lui faire grâce des intérêts des 2000 fr . restans, et
même de lui payer ceux des sommes qu’elle toucheroit,
, Il y avoit donc des conventions secrètes entre lui et la
dame veuve de Saint-Julien. Dès qu’il y avoit au moins
un restant de 2000 fr. pour lequel on n’exigeoit pas d’in
térêts , la vente n’étoit donc pas nécessaire pour 8000 fr. ;
les prétendus créanciers n’étoient donc pas tellement inquiétans, qu’on eût à craindre une saisie réelle de leur
part. Nous ne concevons pas que le sieur Gros-Lamolhe
puisse résister à ces réflexions pressantes, et il nous semble
qu’il eût dû ne pas produire une lettre qui ne lait pqs
l’éloge de celui qui l’a reçue,
Des débats auxquels nous nous sommes livres , et que
peut-être nous avons portés trop lo in , il résulte que pour
faire courir la fin de non-recevoir des dix ans, il ne suJüf;
pns d’une simple sentence d’adjudication ; il f;iut qu’elle
soit suivie d'une signification à la partie intéressée.
Ira-t-011 jusqu’à répéter , comme au tribunal civil de
Rioin , que l’adjudication faite au sieur G ros-Lam othe
n’est pas une sentence ; que la dame veuve de Saint-Julien
étoit agctis et patie/is; qu’elle etoit tout à la fois la partie
poursuivante et la partie poursuivie, et qu’il n’étoil pî;s
nécessaire de lui faire signifier une adjudication rendue
5a diligence?
�39
■
C
5
i°. A en juger par les termes mêmes des requetes de
1779 en
sénéchaussée d’Auvergne et au bailliage de
M ontpensier, la dame veuve de Saint-Julien auroit agi
moins pour faire payer des créanciers de son m ineur, que
pour se faire rembourser des dettes par elle déjà acquit
tées , o u , si l’on veut encore, pour se mettre à même de
remplir ses propres emprunts. Sous ces deux rapports,
elle n’étoit que créancière ; alors elle eût dû agir contre
le curateur aux actions contraires, qui étoit son seul légi
time contradicteur. Dans ce sens , c’étoit à ce curateur
que l’on pouvoit et devoit signifier la sentence d’adjudi
cation , pour qu’il jugeât s’il devoit ou non en appeler.
On ne l’a pas fait; et pourquoi ? cela est évident. Ce
curateur avoit été de rassemblée des pareils ; il a voit
opiné pour la vente en la sénéchaussée d’A u vergn e, après
la visite et l’estimation préalables par François Soalhat.
Si 011 lui eût signifié l’adjudication faite à A igueperse,
il auroit vu que l’on avoit trompé scs vues et celles des
autres pareils; il auroit interjeté appel et fait annuller.
( Il l’auroit d’autant mieux fait, que plusieurs fois on lui
a proposé d’approuver ce qui avoit été fait, et que toujours
il s’y est refusé. ) Pour l’éviter, l’on a tout laissé ignorer
à ce curateur; et l’on vient dire aujourd’hui que c’est chose
jugée, quand on n’a pas fait ce qu’il faut pour acquérir
le bénéfice de la chose jugée. Ce plan ne produit que do
l’indignation.
20. L ’adjudication du sieur Gros-Lam ollie est ou un
pioces verbal ou une sentence : il ne peut pas récuser
lu n e et 1 autre de ces qualifications.
S il prend celle de procès verbal, alors l’action en appel
�4
C ° )
et nullité dure (rente ans : c’est une action ordinaire dont
la durée est soumise à la règle générale.
Si le sieur Gros-Lamothe demeure d’accord , comme
cela est très-vrai, que son adjudication est une sentence,
alors , suivant l’ordonnance de 1667 , il faut une signifi
cation, ou point de fin de non-recevoir.
L e sieur Gros-Lamothe veut-il encore qu’il ne fallût
point de signification de la sentence ? Mais alors encore
point de fin de non-recevoir décennale, parce qu’il n’y
en a d’écrites n u l l e part que dans l’ordonnance de 1667;
et que s’il veut sortir des termes d e c e t t e l o i , p o u r é l u d e r
la nécessité de la signification, il ne peut y rentrer pour
y trouver la fin de non-recevoir.
Enfin le sieur Gros-Lamothe oppose comme fin de nonrecevoir la quittance que lui a donnée du prix de son
adjudication la dame veuve de Saint-Julien, en qualité do
tutrice.
Mais la dame veuve de Saint-Julien ne p o u v o i t pas
acquiescer à cette sentence au détriment de sou mineur:
il 11e lui étoit pas donné de couvrir par quclqu’acte que
ce fût les vices de sa procédure. Nous avons démontré
qu’elle a fait vendre pour se payer à elle-même une somme
que rien ne prouve lui avoir été due. Sa vente dégénère
en vente volontaire, puisqu'elle a été laite sans nécessité,
et sans les formalités légalement observées. Sa quittance
au sieur Gros-Lamothe ne vaut pas plus que celle qui
auroit suivi une vente purement volontaire eL devant
notaire \ et dès-lors point de doute qui) la quittance est
nulle comme tous les autres actes.
Nous avons démontré1, i° . .qu’il n’v a voit pas nécessité
�9
C 41 )
de vendre ; 20. que le tout est irrégulier ; 30. qu’il n’y
a point de fin de non-recevoir contre l’appel du sieur de
Saint-Julien. C ’est donc le cas de prononcer par mal pro
cédé et adjugé par l’ordonnance de la sénéchaussée d’Au
vergn e, etc., et de tout annuller : mais il faut s’en tenir
là ; ce n’est pas encore le moment d’adjuger le désiste
ment des immeubles et les jouissances. L e tribunal civil
de Riom n’y a pas encore statué ; il en est encore saisi.
Il a seulement sursis à y faire droit après le jugement de
l’appel de l’adjudication , etc. Les parties retourneront
devant lu i, quand la cour aura consomme son droit.
M ais, en attendant, le sieur de Saint-Julien doit pu
blier ses véritables intentions.
Si dans une répudiation en forme il a consigné qu’il
ne .veut pas être et qu’il n’est pas héritier de sa m è re ,
cette volonté ne va pas jusqu’à fournir au sieur GrosLamothe l’occasion d’insulter à la mémoire de la dame
de Saint-Julien , par le reproche qu’elle a profité impu
nément de ses deniers. L e sieur de Saint-Julien, en per
sistant dans sa renonciation , sans y déroger ni directe
ment ni indirectement, et par hon n eur, déclare ( et le
sieur Gros-Lamothe peut dès à présent en prendre acte );
le sieur Julien déclare qu’il consent à ce que , sur les
jouissances et dégradations ducs depuis l’enlrée en pos
session du sieur G ros-Lainothe, celui-ci se retienne nonseulement son capital de 8110 francs, mais encore les
intérêts de ce capital à compter de la même époque, et
a condition q u e , i°. suivant le calcul qui sera fait, le
produit de chaque année servira d’abord à éteindre l'in
térêt de la même année, et l’excédant sera imputé sur
F
«V.
�,
\
( 4 2)
le principal ; 2°. après toutes déductions du principal de
8110 fr. et de ses intérêts an nuels,le sieur G ros-Lam othe
payera au sieur de Saint-Julien le reliquat dans un délai
raisonnable.
A u tribunal civil de R io m , le sieur G ros-L am oth e a
parlé beaucoup délicatesse : c’est le moment de m ontrer
qu’il en a. O n lui présente un tempérament qui le met
à l’abri de toute perte ; il en résultera seulement qu’il ne
sera plus enrichi aux dépens d’ un m ineur ; il en résultera
seulement que ce m ineur injustement dépouillé rentrera
dans un bien vendu à v il prix.
Si cette offre généreuse ne satisfait point le sieur G rosL am oth e ; s’il ne se contente pas du de damno vitan do,
qu’on lui assure très-loyalem ent, il apprendra au public
que certat de lucro conscrvando , si toutefois l’on pouv o it nomm er bénéfice la différence entre la valeur réelle
d’ un bien de m in e u r, et le p rix ostensible de la vente
qui en a été faite sans nécessité et sans form alités légales.
Q uelque parti que prenne le sieur G ros-L am oth e, le
sieur de Saint-Julien ne retirera pas sa proposition. P ou r
l u i , elle fut et sera toujours écrite en caractères ineff açables. L ’on ne revient pas contre cc que le cœur dicte et
que l’honneur approuve.
Signé S A I N T - J U L I E N .
G O U R B E Y R E .
A RIOM, de l'imprimerie de L à n d rio t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Janvier 1806.
v.a
,y. Cjy . _ «r
/W.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. De Saint-Julien, Alexandre. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
successions
dilapidation d'héritage
ressorts de juridictions
procédure d'affichage
assemblées de parents
créances
appel
écoles militaires
experts
sénéchaussée d'Auvergne
Montpensier (bailliage de)
placards
ventes
émigrés
mort civile
religieuses
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire contenant causes et moyens d'appel, pour sieur Alexandre de Saint-Julien, appelant ; contre Sieur Etienne Gros-Lamothe, intimé.
Table Godemel : Appel : 7. l’appel d’une sentence d’adjudication de biens immeubles du mineur, sans que la nécessité soit démontrée, et sans l’observation des formalités prescrites, a-t-il pu être interjeté plus de 25 ans après sa date, s’il n’y a pas eu de signification ? Vente : 10. la vente consentie, par la tutrice, des biens immeubles du mineur, sans que sa nécessité soit démontrée et sans que les formalités prescrites pour l’aliénation des biens des mineurs aient été observées, est-elle nulle ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1767-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
42 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1520
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1528
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53260/BCU_Factums_G1520.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Bas-et-Lezat (63030)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
appel
assemblées de parents
Créances
Dilapidation d'héritage
écoles militaires
émigrés
experts
Montpensier (bailliage de)
mort civile
placards
procédure d'affichage
religieuses
ressorts de juridictions
sénéchaussée d'Auvergne
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53261/BCU_Factums_G1521.pdf
a2194b78cc0aa4e1efdc1445178aa758
PDF Text
Text
J2>S
M E M O I R E
POUR
COUR
J E A N N E M A B R U , fille et héritière, par béné D ’A PPEL
fice d’inventaire, d ’ A n t o i n e , et J a c q u e s
A R F E U I L , son mari, appelans de sen tence
rendue en la c i - d e v a n t justice de la R o d d e ,
le 20 décembre 1 7 8 1 ;
C O N T R E
Les habitans et corps commun d 'Ousclaux et
Chanzelles, commune de la Rodde ,poursuites
et diligences de M i c h e l G E N E I X et de
J a c q u e s J U L I A R D , se disant leurs
syndics , intimés et demandeurs en reprise
d ’instance.
L
ES appelans jouissent depuis un temps im m ém o rial,
et a la suite de leurs ancêtres, d ’ un m oulin appelé du
G ay , situé dans la commune de la Rodde,
A
SÉANT
A RIOM.
�i<
.
»
( a )
Les habitans de Chanzelles, d’Ousclaux et de la R o d d e,
prétendent que ce moulin leur appartient et fait partie
de leurs communaux ; ils en demandent le désistement;
e t, ce qui est assez extraordinairey trois villages veulent
avoir droit aux mêmes com m un aux, dans un pays o ù
les biens de cette nature se divisent par mas et tén em e n t, sans qu’on puisse déroger à cette loi de policegénérale.
U n e prétention aussi choquante n’auroit eu rien d’e x
traordinaire en 17 9 3 , où les habitans ne rôvoient qu’usur
pation , et vouloient que toute la France ne fût qu’un
communal.
Mais aujourd’hui que chacun doit régler ses sensations
et ses idées., que tout rentre dans l’ordre n atu rel, que
les propriétés surtout sont essentiellement respectées et
protégées, il est au moins certain que deux villages ont
to rt; et il s’agit également de démontrer que le moulin
du Gay est une propriété particulière, que les appelans.
doivent être maintenus dans un héritage qui a été suc
cessivement transmis à, titre de succession à cinq ou. six.
générations..
F A I T S .
L e 3 novembre 1779? difierens particuliers, habitons
du village de Chanzelles, de l’ Ousclaux et de la R od d e,
firent assigner Antoine M abru au bailliage de la R od d e,
en désistement du moulin appelé du G ay. Ils exposèrent
que ce moulin appartenoit à la communauté des villages de
Chanzelles et d’Ousclaux; et, quoiqu’ils ne rapportassent
xjj n’iodiquiisseut aujçuo titre de p r o p rié té , ils pcétcn^
�(3 )
.•
dirent qu’Antoine M abru avoit pris ce mouliu à titre
de ferme verbale, depuis environ vingt ans; qu’il avoit
été chargé de l’entretenir et de faire moudre gratuite
ment leurs grains ; ils demandèrent que ce prétendu bail
verbal fût déclaré nul et résolu , et qu’il leur fût permis
de jouir du moulin 011 de l’affermer à d’au tres, ainsi
qu’iis aviseroient.
Cette dem ande, form ée par des habitans ut singuà' ,
ne paroissoit pas présenter des difficultés sérieuses. Ces
particuliers, qui étoient de trois villages différens, étoicnt
absolument sans qualité; aussi on t-ils pris dans la suite
la précaution de faire intervenir sur l’appel le corps com
mun des habitans des villages de Chancelles et l’O usclaux,
qui nommèrent pour leurs syndics A n n e t A rfe ü il et
Jacques Geneix: mais cette intervention tardive ne peut
avoir réparé le vice de la dem ande, ainsi qu’on l’éta
blira bientôt.
A près les défenses d’Antoine M ab rit, l'instance fut
appointée en droit; la discussion s’ établit d’une manière
plus sérieuse; les demandeurs produisirent une quittance
du 21 novembre 1769, fournie par A n toin e M eschin,
habitant du villnge de P é rig n a t, en faveur d’A ntoine
M abru , et causée pour le fermage du moulin dont le
b a il , est-il d it, avoit été consenti devant M o u lin , notaire
à la T o u r.
A n to in e M abru nia l’existence de cc prétendu bail
consenti devant M oulin ; il soutint que la quittance de
Meschin s’appliquoit à des objets tout différons et à des
affaires qu’ ils avoienteues entr'eux; il exposa que le moulin
lui avoit appartenu de toute ancienneté; qu’ûgé de plus
A 2
�(
4)
de quatre-vingts ans, il y étoit cependant ni'*; que e’ étoit
l’habitation de ses pères. Il ajouta que ce moulin avoit
essuyé un incendie en 1709, pendant sa minorité ; que ses
titres de propriété furent consumés par les flammes ;
qu’ayant été privé de toute sa fortune par. cet incendie,,
il avoit été obligé de mendier dans sa jeunesse; mais,
qu’enfin il étoit parvenu à rétablir les bâtimens, et en
avoit toujours demeuré en possession.
Il défia les demandeurs d’établir qu’il y eût aucun
bail verbal, ni par écrit, d u m o u lin dont il s’agit; et la
demande en désistement lui paroissoit d’autant pl us étrange,,
qu’elle étoit formée' par des habitans de trois villages,
différens , quoique ce moulin fût dans les appartenances
du village de Chanzelles; enfin, plusieurs des demandeurs
n'agissoient que comme maris, et ne pou voient être écou.-'
tés pour une action réelle qui auroit dû être form ée par
leurs femmes..
Les habitans fùrent obligés de convenir que le bail
prétendu consenti devant M oulin n’existoit pas; mais,
suivant e u x , Meschin faisoit les affaires d elà commune,,
et avoit affermé ce moulin au nom de la communauté
entière : l’appelant avoit payé le prix de la ferme par
deux quittances successives; enfin il n étoit qu’un étran
g e r , et non pas né, comme-il le disoit, dans le moulin ;
eux seuls l’avoient rétabli après l’incendie, et en avoient
disposé.. Mécontens d ’A ntoine iVJabru
ils avoient mis
son fils a sa place; ili> pretendoient même avoir afferméce moulin h un nommé jVlarquelles.
A ntoine M abru répondit ù toutes ces allégations d’ une
wqoière bien précise j il rapporta le contrat de m ariage
�(5)
-d e M a b ru , son fils, du 10 février 1761 , par lequel il
Puvoit institué son héritier universel, et lui avoit délaissé
en avancement d’hoirie la jouissance du moulin. C ’étoit
donc de lui seul q u e1son fils tenoit cette jouissance, et le
père-ne s’en étoit remis en possession q u ’après la m o r t du
fils. Il désavoua avoir jamais consenti aucun bail pour le
; m ou lin , ni qu’il eut été affermé à- d’autres, et n’oublia
pas de relever la contradiction des hahitaus'qui s u p p o soicnt, par leur exp loit, un bail v e r b a l, tandis qu’ils p ré-tendoient qu’A ntoine M abru avoit accepté deux quit
tances d’un bail reçu
devant notaire.
>
Xiesdemandeurs a voient également insinué qu’ils avoient
-usé g ra tu ite m e n t du droit de mouture. A n toin e M ab ru
nia le fait. Jam ais launouture 11’avoit été gratuite; et si
-par fois il lui étoit arrivé de réduire ses droits, il n’a voit
fait à cet égard que co q u e -fo n t tous les meuniers pour
conserver des pratiques.
Antoine M abru rapporta une reconnoissance de 1494,
pour établir que les habitans de l’Ousclaux et de la
Rodde ne pou voient avoir aucun intérêt dans la contes
tation, puisque leurs villages n’étoientpas même contigus
h celui de Chanzelles, d’après les confins de cette reconnoissanee.
Enfin , pour prouver que-ses auteurs avoient toujours
résidé au moulin dont il s’agit, il produisit les actes baptistaires et mortuaires de sa fnrrtille , et par exprès l’actc
mortuaire de Pierre M a b ru , son père, du 14 avril 1708;
la cté baptistairo d’ Antoine M abru , son fils , du 23 dé
cembre 1727 • l’acte mortuaire de ce même fils, du 25
avril 1759; l’acte de célébration de son second mariage;
�( 6 )
du 31 janvier 1763 : tous ces actes faisoient foi du do
micile d’Antoine M a b ru et de ses ancêtres, au moulin
de Gay.
M algré ces actes et ces m o yen s, il fut rendu le 20 avril
1 7 8 1 , au bailliage de la R o d d e , une sentence q u i , ayant
. égard à ce qui résulte des deux quittances des 30 novem
bre 1766 et 21 novembre 17 6 9 , déclara le bail à ferme
du moulin de G ay continué verbalem ent, et par tacite
réconduction, fini et résolu; ordonna que dans trois jours
A n to in e M abru seroit obligé de quitter les lieu x; auto
rise les particuliers habitans des trois villages, à jouir du
moulin comme ils aviseront ; en cas de relus de la part
d’Antoin e M a b r u , ces particuliers sont autorisés à l’expul
ser , et à mettre ses meubles sur le carreau ; il est con
damné à remettre le moulin en état de réparations locatives, garni de tous meubles et ustensiles nécessaires à
son exploitation ; à payer la valeur des ustensiles qui se
trouveront m anquer, de même que les dégradations qu’il
peut avoir commises, à dire d’experts, avec intérêts depuis
la demande.
An toine M abru est condamné à payer les arrérages
de la ferme prétendue du moulin , à raison de 10 livres
par an , depuis et compris 1769 , jusqu’a sa sortie, et les
intérêts depuis la demande , et en tous les dépens.
11 est cependant ajouté dans cette sentence une option
singulière. Il y est dit : « Si mieux toutefois A ntoine
a M abru n’aime faire p r e u v e , tant par titres que par
« tém oins, dans les délais de l’ordonnance , q u’après l’ in« cendie du moulin dont il s’a g it, arrivé en 1709, il a
« fait rétablir lu i-m ê m e , à ses fra is, le moulin en ques-
�(7 )
«
«
*
«
«
«
«
tion ; que depuis ce rétablissement il en a joui paisiblement, comme propriétaire, jusqu’à la demande contre
lui fo rm é e , et notamment q u e , pendant cette jouissance , il a constamment et continuellement perçu sur
tous les co-détenteurs des ténemens de Chanzelles et
l’Ousclaux le droit de- m outure en usage dans le pays,
sauf la preuve contraire. »
An toin e M abru se pourvut par appel contre celte
sentence, et l’appel fut porté en la sénéchaussée d e C le r m o n t, qui étoit alors juge naturel des parties. M eschi»
s’empressa de donner à An toine M abru une déclaration
devant notaire, le 20 janvier 178 2, par laquelle il attesta
que les deux quittances ne portoient pas sur le moulin
en question , qu’elles s’appliquoient seulement à deux terres
appelées , l’une le P u y -d u -M e u n ie r, et l’autre la T a c h e ,
situées aux appartenances de P a u g n a c, de la contenue de
trois septerées mais qu’il n’y avoit jamais eu de bail de
ferme du moulin de Gay passé entre lui et Antoine M abru.
Les particuliers qui avoient assigné An toin e M a b ru
s’aperçurent alors qu’on pouvoit leur opposer le défaut
de qualité ; ils sollicitèrent et obtinrent l’intervention des
lvabitans de Chanzelles et do l’O usclaux, qui présentèrent
leur requête le 24 novembre 178 4 , et prirent le fait et
cause des intim és, en vertu d’un délibéraloire du. premier
septembre 1783.
M algré cette in tervention, le procès fut abandonné ;
il ne reçut aucune décision en la sénéchaussée de Clermont;
il ne fut pas même repris devant le tribunal de district,
qui remplaça momentanément la sénéchaussée : ce n’est
qu’en l’an 11 que ces habitans ont fait de nouvelles ten-
�. C 8 ) .......................
tatives. L ’ un des premiers syndics étoit décédé, et l’autre
refusoit son ministère, à raison de son grand âge et de
ses infirmités : ces habitans se réunirent tumultuairement
et sans autorisation, pour nommer de nouveaux syndics.
I,e conseil de préfecture les avoit d’abord renvoyés devant
le conseil municipal qui seul avoit le droit de délibérer
sur cette matière, d’après la loi du 28 pluviôse an 8.
Mais b ientôt, sous le prétexte frivole que le conseil
municipal s’étoit assemblé vainement, sans donner d’avis,
ces habitans se réunirent de nouveau en l’étude de G u il
laum e, notaire public à la résidence de T a u v c s , et se
permirent de nommer deux syndics, ainsi qu’il résulte
d’un délibératoire du 2 nivôse an 11.
Ils ont eu le crédit de faire homologuer cet acte in
form e, par arrêté du conseil de préfecture, du 24 bru
maire an 1 2 , et ont en conséquence assigné en reprise
en la cour Jeanne M a b r u , fille d’A n to in e , et Jacques
A r fe n il, son m ari, pour voir statuer sur l'appel pendant
en la sénéchaussée de Clermont.
Il s’éleva un incident sur cette reprise : les appelans
sont porteurs d’une délibération du conseil municipal,
en date du 21 germinal an 11 , qui refuse 1 autorisation
par la raison que les habitons d Ousclaux et Ghanzellcs
n’avoient aucun intérêt A reprendre le procès qui exisloit
entr’eux et le meunier de Gay. Les appelans soutinrent
donc que les habitans n’étoient pas en règle : ce n’étoit
pas le cas, dans l’espèce ou se trouvoient les parties, de
nommer des syndics; le maire de la commune peut seul,
d’après la l o i , représenter le corps com m un, lorsqu’ il
s’agit des intérêts d’une section de commune contre un
particulier :
�(9 )
particulier : la nommination d’un syndic ne peut avoir,
lieu que lorsqu’une section de commune plaide contre,
une autre section.
,,
D ’un autre c ô t é ,‘il étoit évident que l’arrêté du con
seil de préfecture avoit ¿té surpris à sa religion , puis
qu’on lui avoit caché l’arrêté du conseil m u n icip a l, du
21 germinal an n , qui porte expressément que les ha
bitons sont sans intérêt. L e conseil de préfecture luimême n’avoit homologué le délibératoire informe des,
habitans, qu’à raison de ce qu’ils alléguoient que le con
seil municipal n’avoit pas voulu s’expliquer : dès-lois cet
arrêté étoit subreptice, et ne pouvoit subsister.
L a cause portée en la cour sur cet incid en t, il inter
vint arrêt le 29 germinal an 1 2 , qui sursit d’un mois
sur la demande en reprise, pendant lequel temps les
appelans se retireroient par-devant le conseil de préfec7
ture du département du P u y - d e - D ô m e , à M e t de se
p o u r v o ir , ainsi que de d r o it, contre l’homologation du
24 brumaire précédent.
Les parties se sont retirées de nouveau devant le con
seil de préfecture qui a persisté dans son a rrê té, sans
qu’on puisse approuver les m o tifs, puisqu’il avoit déj;i
reconnu qu’au seul conseil municipal il appartenoit do
pro n o n cer, et la reprise a ele ordonnée.
Mais au moins , indépendamment de l’irrégularité de
la procédure, le délibératoire du conseil municipal, du
21 germinal an 11 , est un m otif de considération bien
puissant pour les appelans , et il en résulte la plus grande
délaveur contre les intimés.
Q u ’est-ce que la sentence dpnt est appel ? elle pro-
B
�( IO )
nonce le désistement d’un moulin au profit des habitans
de trois villages. Cette disposition viole ouvertement les
principes, et la loi municipale : elle est nécessairement
injuste au moins pour deux villages.
E n effet, ces particuliers réclam en t, ut singuli , la
propriété du moulin , comme faisant partie de leurs ap
partenances, et même de leurs communaux.
O r , les communaux se limitent par mas et village ; et
si le moulin dont il s’agit dépendoit d’un com m un al, il
est impossible qu’il puisse appartenir à la fois à trois
villages : il y en auroit nécessairement deux qui n’auroient rien à y prétendre.
11 est vrai q u e , sur l’a p p e l, le corps commun des
habitans de la Rodde n’est pas intervenu ; on n’y voit
que les habitans de Chamelles et de l’Ousclaux : dès-lors
il faut écarter sans retour le village de la Rodde. Les
habitans de l’Ousclaux ne seroient pas mieux fondés ,
puisqu’on s’accorde à penser que le moulin dont il s’agit
est situé dans les appartenances de Chanzelles.
Il faut donc s’attacher principalement à combattre la
prétention des habitans de Chanzelles , et il est facile
d’établir qu’ils doivent être déclarés non-recevables.
Les appelans sont en possession de ce moulin de leinps
im m émorial; ils en ont joui par eux ou leurs auteurs de
tout temps et ancienneté , anirno du/nini. Cette preuve
littérale d’une possession de plus de quatre-vingts ans se
tire des registres de la païoissede la Rodde, qui prou
vent que les auteurs des appelans etoient habitans dans
le m oulin, lorsqu’ ils y sont décédés ; que d’autres y sont
nés et s’y sont mariés : ces actes remontent à. 1708.. L a
�première demande .n’a été form ée qu’en 1 7 7 9 : il y avoit
donc soixante-douze ans lors de l’assigmtion , et il en
faut bien moins pour acquérir la propriété.
Les intimés proposent plusieurs objections ; ils préten
dent d’abord que la jouissance des auteurs des appelans
n’est que précaire; qu’ils jouissoient ù titre de ferm e, et
q u ’un fermier 11e prescrit point.
P o u r établir cette jouissance p ré ca ire , ils justifient de
d eu x quittances, l’une du 30 novembre 176 6 , et l’autre
du 21 novembre 1769. Ces quittances émanent de Fran
çois M eschin, du village de P érig n a t, étranger par con
séquent au village de Chanzelles.
O11 va d’abord examiner si ces deux objections prin
cipales peuvent être de quelque poids dans la contes
tation.
Il est certain en p rin cip e , et on en conviendra avec
les intimés , que celui qui 11e jouit qu’à titre de fermier
ne sa uro it jamais acquérir la prescription. Mais la pos
session précaire 11e se présume poin t, et celui qui jouit
de fait est présumé posséder anim o d o m in i, à moins
que le contraire 11e soit prouvé.
U ne longue possession , dit Potliier dans son Traité
de la possession, chap. i ur. , art. 2 , est censée procéder
d ’un juste titre , sinon p r o d u it, au moins présumé par
le long-temps qu’elle a duré : elle est en conséquence ré
putée possession civile , possessio anim o dom inantis.
L a possession même sans titre acquiert toujours une
nouvelle fo rce , au lieu que le titre dépouillé de sa pos*
session perd insensiblement tous ses avantages.
Vainement diroit-on alors que les appelans ne rapB 2
�il*
( 12 )
portent 'point de fitre de propriété. Cette proposition
s’écarte dans les principes généraux et dans les circons
tances particulières :
E n point de d r o it , parce qu’une longue possession
suffit pour faire présumer une jouissance à titre de pro
priétaire ; dans les circonstances particulières , parce qûe
les papiers et les titres furent la proie des flammes, lors
de l’incendie de 1709.
M a is , après l’incendie, c’est le père des appelans qui
a ré ta b li les bâtimens et le moulin. Les auroit-il réta
blis , s’ il n’avoit eu qu’un titre précaire ? Il est vrai que
les habitans ont prétendu que la reconstruction avoit été
faite par eux ; mais ce n’est ici qu’une allégation dénuée
de toute vraisemblance et de preuves. Si ces trois vil
lages a voient contribué à la reconstruction du m o u lin ,
ils n’auroient pas laissé jouir aussi long-temps les appelans et leurs auteurs*, et cette longue jouissance, plus que
trentenaire y rejetôit toute espèce de preuve sur les in
timés : c’étoit h eux à tout prouver et à tout établir.
Ainsi ,• tant que les habitans ne rapportent point de
bail de ferm e, tant qu’ils n’établissent pas que la jouis
sance des appelans, ou de leurs auteurs , n’a ete que pré
caire, qu’ ils n’ont possédé que com m e fermiers, ils sont
réputés avoir joui anim a dom ini ; et il n’est plus ques
tion (pie d’examiner si les quittances dont argumentent
les intimés peuvent avoir quelque influence sur la dé
cision de la cause.
La première quittance , qui est de 1766 , est conçue
i*n ces termes: « François Meschin } m archand, habitant
* du'biUage de P é r ig n a t, paroisse de la R o d d e , a r e -
�M h
( 13 )
« connu avoir reçu avant ces présentes d’Antoine M a b r u ,
« m eun ier, habitant au moulin de G a y , même paroisse,
« la somme de 40 ***, et ce , pour les quatre armées der« nières qu’il lui doit, suivant le bail de ferme qu’ils ont
« passé entr’e u x , rapporté être reçu par M o u liu , notaire
« royal à la T o u r. »
O n ne voit rien dans cette quittance qui puisse avo ir
le moindre rapport avec le moulin de Gay.
. L a seconde quittance, du 21 novembre 176 9 , est en
termes plus précis. Ce François M e s cliin , de P érig n a t,
reconnoît avoir reçu d’Antoine M a b r u , m eunier, habi
tant au moulin de G a y , la somme de 2 0 ^ , et ce, pour
le montant de la ferme dudit moulin , pour les années
1767 et 176 8 ; le tout porté par bail à ferm e, rapporté
être reçu par feu M o u li n ,. notaire royal.
• L ’équivoque qui se trouve dans cette dernière quittin c e , est le seul argument que les parties adverses aient
en leur faveur. Mais comment François M escliin, habi
tant du village de P é r ig n a t, peut-il avoir quelque chose
de commun avec les habitons de Chanzelles et de l’Ousclaux ? Si cette quittance pouvoit fournir quelques in
ductions contre les appelans, ce scroit tout au plus en
faveur de François Mescliin , et non en faveur des habi
tons do deux villages qui lui sont étrangers. Il ne pou
voit être le syndic d’aucun de ces villages , puisqu’il
n’en étoit pas habitant ; il n’a point donné quittance
comme sy n d ic, il l’a donnée en son nom. A u profit
duquel des trois villages auroit-il donné cette quittance?
1 ourquoi a-t-il parlé d’ un bail de ferme reçu M oulin }
notaire à la T o u r , lorqite les intimés ont prétendu q u e
�c 14 )
le bail de ce moulin étoit verbal ? Il faudroit au moins
que les intimés rapportassent ce bail pour expliquer et
apprécier ces quittances. Ce n’est que par l’exhibition de
ce titre qu’on pourroit juger si le bail avoit effectivement
pour objet le moulin de G a y , si Meschin d’ailleurs l’avoit
affermé comme administrateur d’un des trois villa ges,
ou en son n o m , ou en toute autre qualité ; et tant que
ce bail ne paroit p a s, il n’est pas permis de supposer ni
que ce bail ait eu pour objet le moulin , et encore moins
que la propriété de ce moulin appartînt aux habitans de
Chanzelles, la Rodde ou l’Ousclaux.
Dans tous les cas , cette équivoque qui se trouve dans
la quittance de 1769, seroit détruite par une déclaration
que François Meschin a donnée devant n o ta ire, le 20
janvier 1782.
Par celte déclaration, François Meschin , toujours ha
bitant de P é rig n a t, a dit que c’étoit par erreur qu’il étoit
fait mention dans ces quittances du moulin de G a y ; que
ces deux quittances ne devoient avoir pour o b jet que la
ferme verbale de deux terres, l’une appelée la P iè c e
du M e u n ie r , et l’autre ht Tacha , situées dans les appar
tenances du village de P é r ig n a t, de la contenue toutes
deux d’environ trois septerées; qu’ il n’y a jamais eu de
bail de ferme du moulin de Gay entre lui Meschin et
ledit A ntoine M abni.
Celte déclaration est appuyée sur la vérité des faits qui
V sont énoncés. A ntoine M ab ru , pere et beau-père des
appelions , a joui long-temps, a titre de fermier, des deux
pièces de terre appartenantes a Meschin , énoncées clans
lu déclaration; il en jouissoit encore au inerne titre en
�S m
( iS )
1787 : ainsi ces quittances ne peuvent être d’aucune con
sidération. 11 répugne à la raison que M escliin, étranger
aux ti’ois villages , eût consenti un bail de ferme d’un
moulin qu’ils disent leur appartenir. Ils ne rapportent
point ce prétendu bail ; Mescliin n’a pu être ni le syndic,
ni l’administrateur de trois villages qu’il n’a jamais ha
bités. Sa déclaration de 1782 détruit l’énonciation des
quittances. L a longue possession des appelans et de leurs
auteurs ne peut s’accorder avec le titre précaire qu’on
suppose : dès-lors il est évidemment démontré que la
prétention des liabitans est déplorable.
Mais A ntoine M abru étoit allé plus loin lors de ses
contredits signifiés en 1787 ; il supposoit que quand il auroit reconnu en 1766 et en 1769 avoir joui pendant quatre
ou cinq ans en qualité de fermier ou de locataire du
m o u lin , il n’auroit pour cela perdu ni la p ro p rié té , ni
la possession qui lui étoient acquises. En 1 7 6 6 , lors de
la première quittance, A n toin e M abru avoit déjà soixante
ans de possession : son père en jouissoit, comme on l’a
v u , en 1708. lia possession de trente ans est un titre dans
la Coutume d’ A u v e rg n e ; elle en tient lie u ; elle y sup
plée ; elle détruit tout titre contraire , et s’élève à sa
place; elle a , dit l’article 4 du titre 17 de la C o u tu m e,
vigueur de temps immémorial en même temps que la
force de titre.
A n toin e M abru avoit donc un titre certain en 17 6 6 ,
lors de la première quittance, et 011 a déjà remarqué que
cette quittance ne s’appliquoit nullement au moulin :
1 énonciation ne s’en trouve que dans la quittance de
1769.
�( i6 ) ^
O r, c’est un principe certain, disoit A ntoine M ab ru , que
celui h qui unecliose appartient ne déroge en aucune ma
nière à sa pro p riété, pas même usa possession, en la prenant
à cens ou rente emphytéotique , encore moins en reconnoissant qu'il la possède à un de ces titres, s’il est établi
d’ailleurs qu’il a un titre de propriété ou une jouissance
de trente ans qui n’a point commencé par un titre p ié caire.
A n to in e M abru citoit la disposition expresse des lois,
l ’opinion de D um oulin , de M a z u e r , et de tous les juris
consultes. L a loi 20 , au Code L o c a ti et con d u cti, s’ex
prim e ainsi : Q u i rem propriam co iu lu xit existim ans
aliénant, dom inium non transfort, sed inejjicacem con
duct io?i is contractum J a c it.
L a loi 45 , au ff. D e reg. j u r i s , porte : N eque p i gnu s ,
veque d ep ositio n , neque precarium , neque emptio ,
neque locntio , rei suce consistera potest.
L e §. 1 0 , inst. D e kg. , en donne la raison en ces
termes : Q uod m eum e s t , am pliàs meuni f ie r i non
potest.
A ntoine M abru invoquoit également l’opinion de D u
moulin sur la Coutume de Paris , ait* 10 •> glose 5 ,
vevbo le fief, nombres 22 , 26 et suivans, qui dit: Tlœc
est concors om nium glosarum et doclorum sen ten tu i,
qitod error dom in i con ducen tts, rel precario , o u t in
ftiudum , censutn , r e l em phiteusim , recipientis rem
sunm quant putat aliénant , J a c it actum ipso jt/te nul
lum et nullum dom inium , nullam possessionem perdit.
Antoine M abru en tiroit la conséquence, que ces pré
tendues quittances étant contraires au titre qui naissoit
de
�J Îl .
(^ 7 y
de sa longue possession , n’auroient porté aucun, chan
gement à son droit. 11 éto it, après 1766 , le même qu’il
étoit la veille; et comme en i y 65 les habitons n’auroient
pu soutenir leur entreprise , ils n ’avoient pas plus de
moyens depuis les deux quittances, dans le sens même
qu’ ils vouloient leur donner.
Mais pourquoi raisonner par hypothèse , lorsqu’il est
certain , dans le fait comme dans le d r o i t , que les appelans sont propriétaires du moulin de G ay r et n’en ont
jamais joui à d’autre titre que celui de propriétaires.
O n peut d’autant moins tirer d’inductions contr’eux
des quittances de Meschin , que cet individu est habitant
de P érig n a t, qu’il l’habitoit en 17 6 6 , commc au moment
où il a donné sa déclaration. Il ne pou voit donc être ni
administrateur, ni syndic du village de Chanzelles , dès
qu’il n’en étoit pas habitant.
Les intimés ont proposé d’autres moyens subsidiaires,
dont on ne s’occupera que pour 11e rien laisser à négliger.
Ils soutiennent d’abord que le moulin dont il s’agit est
situé dans les appartenances de Chanzelles; qu’il joint un
ruisseau d’un côté , et un communal aux trois autres
aspects; que dès-lors il est à présumer qu’ il fait partie
du communal; d’où ils en tirent la conséquence que la
possession des appelans scroit inutile, et ne pourroit leur
acquérir aucun droit. O n lie prescrit pas ce qu’on ne
peut pas posséder.
O u ne doit p ns trouvcr étonnant qu'un moulin joigne
un ruisseau; s’il joint aussi un c o m m u n a l , il n'y auroit
que le village i\ qui appartient ce c o m m u n a l qui pour
voit réclamer. A l’égard des habitans de Chanzelles , à
c
*e< J
�-
(•'iS V
qui ce communal appartient, on pourrait demander s?
la bienséance est un titre de propriété : il faut bien
d’ailleurs que les propriétés particulières soient confinées
par un point plus ou moins reculé. A i n s i , quand bien
même le moulin joindrait le communal do Clianzelles
aux trois aspects, il en résulterait qu’il est confiné par
le com m unal, mais non qu’il en fait p a r tie , tant que ce
point n’est établi par aucune preuve.
D ’un autre cô té, les appelans pourraient aujourd’ hui
i n v o q u e r avec succès l’article 9 de la section 4 de la loi
du 10 juin 1 7 9 3 , qui veut q u ’on respecte les propriétés
paisibles et particulières, et que tout particulier qui pos
sède à autre titre qu’un seigneur de fief, puisse prescrire
la propriété par quarante ans de possession , antérieure
au 28 août 1 7 9 2 , même lorsqu’il s’agit de communaux.
Les intimés ont bien senti que la déclaration donnée
par Mescliin pouvoit nuire à leur prétention , puisque
la principale base de leur défense reposoit sur les deux
quittances qu’il a fournies; ils attaquent cette déclaration
de plusieurs manières, et i°. ils argumentent d ’1111 exploit
du 12 avril 1 7 5 5 , qui a été produit en cause d’appel sous
la cote 20 , par lequel il paraît que François Mescliin ,
et plusieurs autres particuliers , ont fait assigner A n to in e
Mnbru pour être condamné à se désister du m oulin , et
à payer v in g t-h u it setiers de b lé -se ig le avec intérêts
depuis la demande.
Cet exploit est assez inintelligible : ces particuliers y
exposent que M abru 11e peut ignorer que ce moulin 11’app'irtienne de droit à tous les demandeurs; que par co n
vention faite entr’eux verbalement, M abru a été chargé
�ss$
( 19 )
de leur payer chaque année un setier de blé-seigle, et
de moudre les grains de chacun des tenanciers ; ce qu’il
n ’a voulu faire pour la plupart d’enlr’e u x , ni même leur
payer le setier seigle tous les ans. En conséquence , ils
demandent le désistement du m oulin, et vingt-huit se tiers
seigle. O11 ne peut co n cilier, disent-ils , cet exploit avec
la déclaration faite par Meschin , puisque lui-m êm e est
en qualité dans la demande.
Que résultera - t - il de cet exp loit? il ne peut avoir
d’autre effet que d’augmenter la confusion ; et la demande
de 1755 est contradictoire avec celle de 177g.
E n 1755 , on demandoit un setier de seigle par année,
et un droit gratuit de mouture ; en 1779 , on a prétendu
qu’il existoit un bail verbal du m o u lin , moyennant 10
par année.
Mais déjà, en 1755 , ces particuliers se plaignent de ce
q u ’ Antoine M abru refusoit de payer le setier de b l é , et
de moudre les grains gratuitement ; et dès qu’ils deman
dent vingt-huit seliers de grains, il s’ensuivroit q u e , de
leur a v e u , A ntoine M abru n’avoit pas payé de vingthuit ans. Ce n’étoit plus alors un bail de ferme consenti
par Meschin ; il existoit, suivant e u x , des conventions
verbales entre le meunier et les demandeurs : dès-lors la
seule conséquence qu’on puisse tirer de cet exploit de
1 7 5 5 , c’est que la demande de 1779 avoit été précédée
d’ une; autre toutedilférenle; qu’en 1779 , au lieu de former
une nouvelle demande , il eût fallu reprendre celle qui
existoit déjà; et qu’enfin il faudroit juger l’une ou l ’autre
par les mêmes principes; e t , comme en 17^5, de même
q u ’en I 7 7 9 j
prescription étoit déjà acquise en fayeur
C a
�(
20
)
de M a b r u , qu’on ne peut même élever de doutes que
M abi’U alors ne prétendît jouir à titre de propriétaire,
puisqu’il refusoit la redevance du setîer et la mouture
gratuite : comme enfin les demandeurs n’avoient pas plus
de titres en i'jô o qu’en 1 7 7 9 , ils seroient également nonrecevables.
En effet, tout ce qu’ils peuvent espérer de plus heu
reux , c’est qu’on se place en 1^55 pour juger la contes
tation. O r , la possession des appelans remonte au moins
ù 170 8, d’après les titres qu’il a produits; et de 1708 à
1 7 5 5 il se seroit écoulé quai’ante-trois ans utiles pour la
prescription.
E11 second lie u , les intimés disent que Meschin a donné
une déclaration frauduleuse et intéressée, puisqu’il s’est
réservé par cette déclaration un droit de mouture gra
tuit. Mais s’il s’est réservé un droit de mouture gratuit ,
est-ce donc qu’il ne pourvoit pas avoir cette servitude sur
le moulin , sans que ce moulin appartînt aux intimés?
Un droit de mouture d’ailleurs exeluroit tout droit de
p ro p riété, puisque ce n’est qu’une servitude, et qu’on
ne peut imposer de servitude sur sa chose , d’après la
m a x im e , n em in i res sua servit. Le droit de Meschin
d’ailleurs ne peut pas déterminer un droit gén éra l; et
enfin Meschin n’étant nas même habitant du village de
.
**
Chanzclles, son exemption n’auroil rien de commun avec
celle des habitans.
Les habitans soutiendroient vainement que les appelans
ne sont pas propriétaires du m oulin; qu’ils n’en ont joui
qu’à litre précaire , et qu’on ne peut pas supposer d’erreur
iliuib deux ciuiUances consécutives.
�/*C
C 21 )
O n a déjà v u que la première quittance de 1766 ne
contenoit aucune énonciation qui eût trait au moulin ;
c’est une quittance pure et simple d’une somme de 40
qui n’explique pas mémo à quel objet s’applique la dette.
Il n’y a que celle de 1769 qui parle du m oulin , et l’équi
voque s’explique aisément par la déclaration. O11 voit
q u ’il s’agissoit de deux héritages contigus, dont l’un s’appeloit la Pièce du M eunier , et qui peut être regardé
comme une chose utile à l’exploitation du moulin , comme
un objet pris à titre de ferme en considération et à cause
du moulin , que M abru n’auroit pas pris s’il n’eût été
propriétaire du m oulin;et dès-lors on ne sera plus étonné
de cette énonciation vague et insignifiante à laquelle les
parties n’ont mis aucune im portance, et qui 11e pourra
jamais fonder un titre de propriété.
Un particulier paisible, qui depuis des siècles est en
possession d’un moulin dans lequel ses ancêtres ont pris
naissance, qui y a toujours résidé, y a marié ses enfans,
qui a disposé de ce moulin au profit de l’un d’eux par
son contrat de m ariage, pourroit-il être inquiété dans
sa possession ? Et n’y auroit-il donc jamais rien de certain
p.'inni les hommes ?
Quelle est donc la qualité et le titre de ceux qui veu
lent lui enlever le patrimoine de scs pères? Des parti
culiers, ut xitig n li, habitans de trois villages, viennent
réclamer ce moulin comme faisant partie d’ un communal.
Us sont absolument sans action pour une propriété com
m une, q u i , en principe, n’appartient à personne en par
ticulier. Plui'ibus ut u/tivers is , nullis ut singulis.
S i , en cause d’appel, ils ont fait intervenir les habitans,
�Ut
(
22
)
cette intervention tardive seroit aussi irrégulière qu’inutile : c’est le corps commun de deux villages différens ,
lorsque d’après la loi municipale un seul village pourroit
y avoir droit. Bientôt ces deux villages abandonnent leurs
prétentions; elle est ensuite reprise dans un moment d’ef
fervescence, malgré l’opposition du conseil m unicipal,
qui seul pouvoit autoriser la demande. On ne voit figurer
dans la cause que des syndics nommés dans une assemblée
tumultueuse et illicite. E h ! quel est donc leur in térêt?
Ces deux villages en seroient-ils plus riches ou plus heu
reux , quand ils auro ient dépouillé un père de famille
d’une propriété légitime qu’une si longue jouissance devoit assurer à sa postérité ? Ou ne craint pas de dire que
la raison s'offense d’ un pareil système; qu’ une réclamation
de ce genre doit être proscrite avec indignation par tous
ceux à qui il reste quelque principe de justice et d’équité;
que les propriétés sont aujourd’hui sous l’égide de la l o i ,
les tribunaux institués pour la faire respecter, comme le
seul moyen qui puisse attacher les citoyens à leur patrie,
et leur faire chérir le gouvernement qui les protège.
M . C O I N C H O N - L A F O N D , rapporteur.
M e. P A G È S ( de Riom ) , ancien avocat,
M e. B R U N , avoué.
A Riom de l'imprimerie de Landriot seul imprimeur de la cour d'appel
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Mabru, Jeanne. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Coinchon-Lafond
Pagès
Brun
Subject
The topic of the resource
communaux
preuves de possession sans titre et avec titre
moulins
bail verbal
droit de mouture
quittances
syndics
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jeanne Mabru, fille et héritière, par bénéfice d'inventaire, d'Antoine, et Jacques Arfeuil, son mari, appelans de sentence rendue en la ci-devant justice de la Rodde, le 20 décembre 1781 ; Contre les habitans et corps commun d'Ousclaux et Chanzelles, commune de la Rodde, poursuites et diligences de Michel Geneix, et de Jacques Juliard, se disant, leurs syndics, intimé et demandeurs en reprise d'instance.
Table Godemel : Désistement - Commune : 2. dans une instance en désistement, formée par les habitants d’une commune ut singuli, qui ont obtenu gain de cause devant les premiers juges, le corps commun des habitants a-t-il pu intervenir régulièrement après l’appel, pour soutenir le bien-jugé, lorsque la reprise d’instance avait été ordonnée du consentements des appelants, par un arrêt contradictoire ? le possesseur, obligé de se désister, a-t-il droit à être indemnisé des réparations et constructions par lui faites ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 13
Circa 1708-Circa An 13
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1521
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1522
BCU_Factums_G1523
BCU_Factums_G1524
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53261/BCU_Factums_G1521.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Larrode (63190)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail verbal
communaux
droit de mouture
moulins
preuves de possession sans titre et avec titre
quittances
syndics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53262/BCU_Factums_G1522.pdf
a1d7fff7ead293c975688217765464c2
PDF Text
Text
COUR
REPONSE A MEMOIRE
D ’A P P E L
POUR
A RIOM.
SÉANT
du lieu de
C h a n z e l l e s et Ousclaux, commune de la R odde,
poursuites et diligences de M i c h e l G E N E IX
et J a c q u e s J U L I A R D , leurs s yn d ic s, intimés
et demandeurs;
Les
H ab itan s
et
Corps comm un
C O N T R E
J e a n n e M A B R U , fille et héritière d’A n t o i n e
,
,
,
et J a c q u e s A R F E U I L son mari appelant
et défendeurs.
Le s moulins dont les parties se prétendent respective
ment propriétaires , sont établis sur les communaux du
village habité par les intimés, et en forment par là même
une dépendance. Des titres précis, du fait même d’Antoine
Mabru , p ère de Jeanne, et surtout la manière dont les
A
�appelans et leurs auteurs ont joui , ont déterminé une
première décision en faveur des intimés. Les appelans
n’ont invoqué et n’invoquent encore que la prescription :
mais ce moyen peut-il être employé par ceux-là qui n’ont
possédé qu’à titre de colons et pour les propriétaires ?
D ’ailleurs les iutimés rapportent aujourd’hui de nouveaux
titres qui démentent une partie des faits principaux , arti
culés par les. appelans , et ne laissent plus rien à désirer
sur l’existence du droit des intimés et la justice de leur
réclamation.
F A I T S .
Les habitans de Chanzelles et Ousclaux sont proprié
taires , depuis des siècles , d’ un moulin ù blé , d’ un à
faire l’huile et mailler le chanvre. Ces moulins sont connus
sous le nom de G a y : il en dépend un petit jardin , et un
pré contenant environ deux chars de foin. T ou s ces objets
sont placés sur les communaux de Chanzelles : les appelans,
ainsi qu’Antoine M a b ru , leur a ïeu l, en sont également
convenus.
Ces mômes habitans ont toujours joui de leur propriété
en l’aflerm ant, et chargeant le fermier de faire moudre
gratuitement tous les grains nécessaires a leur consom
mation.
Quelques-uns même se sont permis de vendre leurs
droits à ces m oulins, soit ¡\ d’autres habitans du villa ge ,
soit à des étrangers ; en voici un exemple :
I,e 11 juin 1664 , Antoine G a y , fils à feu Etienne, du
village de Chanzelles , vendit à Joseph Bonhomme , du
village de V crn in cs, même paroisse, tous les d ro its, part
�( 3)
et portion q u i pouvoient lu i com péter au m oulin appelé
de G a y . . . situ é dans les appartenances de Chanzetles ,
avec promesse de garantie de tous tro u b les, et m oyen
n ant la som m e de i z fra n cs.
Cette vente prouve donc que les moulins de G ay exis
taient bien a v a n t , et que les habitans de Chanzelles en
étoient propriétaires.
A u s s i , par un autre acte du 17 novembre de la m ême
année , les habitans de Chanzelles et O uscla u x affermè
rent ci Claude D elcroSjde C hanzelles, les m oulins de G a y ,
p our les jo u ir pendant d ix ans ci v en ir, à la charge pa r
JJelcros de les tenir en bon état. L e s habitans p rom irent
de f a i r e conduire deux m eules dans un m ois • et s i
d'autres devenoient nécessaires pendant la durée de la
fe r m e , le fe r m ie r demeura tenu de les acheter. O n pré
voit le cas d’incendie^ e t î on convient de ce q u i sera f a i t
par chacune des parties pour le rétablissem ent des
m oulins. O n suppose encore que le m eunier pourroit ne
pas ten ir toujours les m oulins en état de m oudre, et que
les habitans seroient contraints d'aller moudre ailleurs :
alors le fe r m ie r s’oblige ci leur rem bourser le droit de
mouture. Ce fe r m ie r s'oblige également de payer ci
Me. F ra n çois B a u d e v e ix , de C hanzelles , durant sept
a n n ées, un setier de blé ¿1 N o tre-D am e d'août de chacune
d 'icelle, et B a u d ev eix prom et ci son tour d'en rendre
compte au surplus de la co m m u n e} pour l'em ployer a u x
réparations des m oulins.
Il eut été difficile aux intimés d’établir d’ une m anijre
plus authentique leurs droits aux moulins de G ay; car, en
les aliermant exclusivement ; et pour l’intérêt de leur seule
A 2
�'( 4 )
com m une, c’étoit annoncer suffisamment qu’aucuns autres
pou voient y rien prétendre. Ce bail suppose aussi néces
sairement l’existence de bien d’autres qui sont devenus la
proie du temps : il apprénd en un mot que l’un des habitans a toujours été chargé des affaires de la com m un e, et
de veiller à ses intérêts.
S ’il falloit en croire les appelans, ils auroien t, à la suite
de leurs auteurs, possédé de tout temps les moulins en
• question. Mais l’inexactitude de cette assertion est établie
par le contrat de mariage de Pierre M a b r u , bisaïeul des
appelans , sous la date du 2 février 1 6 9 5 , puisqu’on y voit
que P ie r r e M a b ru , j i l s à défunt autre P ie rre et à
M ich e lle M cg em o n d , se dit laboureur et habitant du
village de L t y r i t , paroisse de T a u ves ; q u 'il se m arie
avec J ea n n e R o u g et, du même village ; que celle-ci se
constitue en une dot purem ent m obilière , et q u elle
donne à son fu t u r le pouvoir de s'en f a i r e p a y e r , pour
lu i so rtir nature de bien dotal.
Pierre M abru n’étoit donc pas alors m eunier, puisqu’il
prenoit la qualité de cultivateur; il ne jouissoit donc pas
des moulins de G a y , puisqu’il habitoit un village, et dans
une paroisse différente.
Il est vrai que les appelans ont justifié, sous la cote 16 de
la procédure principale, de l’acte mortuaire d’un Pierre
M ab ru , à la date du 17 avril 1708; et il sembleroit résulter
de la note du curé que ce particulier étoit mort au moulin
de Gay.
Mais ce fait ne suffiroit pas pour établir l’ habitation ;
car il est tant de personnes qui ont le malheur de mourir
hors de leurs domiciles ! et supposé qu’on regardât comme
�•
.
œ
■ ( 5 )
possible l’entrée en jouissance de Pierre M a b ru , du moulin
dont il s’agit, soit à titre de fermier, soit autrement, il est
certain que cette jouissance auroit été de bien courte durée ;
puisque, d’un cô té , les moulins furent incendiés dans le
même temps, et q u e, de l’autre, A n toin e M abru , fils de
P ie rre , n’y habitoit pas au 28 octobre 1 7 2 6 , époque de
son contrat de marige avec Jeanne B a b u t, puisque dans
ce contrat Antoine M abru s’y dit originaire du village
de h c r r i t , et dem eurant alors en q u a lité de valet-do
m estique au village de V ern in es.
O r , l a naissance d’ Antoine M abru au lieu de L e y r it ,
où Pierre habitoit, et où il s’étoit m arié, fait justement
présumer qu’ils avoient .toujours habité le lieu de L e y r it,
et que le décès de Pierre M abru n’arriva au moulin de
Gay que par l’effet d’un accident.
Toutefois l’incendie de ces moulins n’est pas une chi
mère ; mais ce qui en est véritablement une , c’est la
reconstruction de ces mêmes moulins de la part^d’A ntoine
Mabru ; car , au contraire, il est certain ( et les intimés ne
perdent pas encore l’espoir de l’établir) que cette recons
truction eut lieu parles soins et aux frais des habitons de
Ghanzellcs. O n sait aussi, par tradition, qu’après leur réta
blissement ces moulins furent possédés pendant un assez
grand nombre d’années par un nommé Antoine Meallet.
Il paroît cependant qu’Antoine M a b r u , père de Jeanne,
naquit aux moulins de Gay le 23 décembre 1 7 2 7 ; et ce
fait donncroit lieu de croire qu’Antoine M a b r u , son père,
seroit entré en jouissance de ces moulins dans l’intervalle
de son mnrmge à la n a i s s a n c e de son fils ; mais il est cer
tain qu’il n’y étoil entré que comme fermier, parce qu’ il
�*»<
( 6 )
fut assigné en cette qualité de la part des in tim és, par
exploit du 12 avril 1 7 6 5 ,pour être condamné à se désister
des m o u lin s, les rendre en bon état, et payer vingt-liuit
setiers b lé , ou la valeur d’ic e u x , d’après les pancartes du
marché de la T o u r , pour la jouissance de v i n g t - l m i t
années des mêmes moulins, non compris le droit qu’avoient
eu les habitons de faire moudre gratuitement leurs grains.
Sans doute qu’ Antoine Mabru rendit justice aux habitans, et que ces derniers alors firent avec lui de nouvelles
conventions pour la jouissance de ces moulins \ au lieu
d’un setier b lé , le prix de la ferme fut fixé dix francs
par an , avec la môme condition de faire moudre gra
tuitement les grains des habitans.
Il résulte de deux quittances des 30 novembre 1766
et 21 novembre 1769, reçues Julhiard, notaire, et dûment
enregistrées, que ce prix de ferme fut payé par Antoine
M abru à François Mescliin , l’un des habitans , pour les
années 1763 et suivantes , jusques et compris 1768 ; et
comme ces deux pièces sont très-intéressantes, on va les
transcrire.
«
«
v
«
«
«
«
« Par-devant,etc. a été présent François M cschin , marchand , habitant du village de Pérignat, paroisse de la
Rodde , ci-présent, lequel a reconnu et confessé avoir
reçu avant ces présentes, ainsi q u’il l’a déclaré, d’A n toine M abr u , meunier au moulin de G a y ? susdite pnroissc, ci-présent et acceptant, la somme de quarante
livres , et ce , pour les quatre années dernières qu’ il lui
doit , suivant le bail de ferme c|u’ils avoient passé
« entr’eux , rapporte cire reçu par Moulin , notaire royal
« à la T o u r ; de laquelle somme de quarante livres ledit
�( 7 )
« confessant a quitté et quitte ledit acceptant, et promet
« de le faire tenir quitte envers et contre tous. »
« Par-devant, etc. a été présent François Meschin fils,
« m archand, habitant du village de P é r ig n a t , paroisse
« de la R od d e, lequel a volontairement reconnu et con« fessé avoir ci-devant reçu d’A n to in e M a b ru , meunier,
« habitant au moulin de G a y , ci-présent et acceptant, la
« somme de vingt liv r e s, pour le m ontant de la f e r m e
« dudit m o u lin , et c e , pour les années 1767 et 1 7 6 8 ,
« dont quitte sans préjudice de la courante et autres à
« éch o ir, le tout porté par bail à fe rm e , rapporté être
« reçu par feu M o u lin , notaire royal; de laquelle somme
« de vingt l i v r e s ledit Meschin tient quitte ledit M a b r u ,
« et promet le faire tenir envers et contre tous,à peine,etc. «
On ne se seroit pas d o u té , d’après ces quittances, que
Mabru se fût de nouveau refusé à payer le prix de la
ferme , quoiqu’il n’eût pas cessé de faire moudre les
grains des habitons sans retirer aucune rétribution.
Ces habitans furent donc forcés d’assigner A ntoine
M a b r u , aïeul de Jeanne ( son père étoit décédé le. 23
avril 1759 ) , devant le bailli de la Rodde , par exploit
du 3 novembre 1 7 7 9 , pour vo ir déclarer le bail verbal
des moulins et dépendances fini et résolu -, voir dire qu’il
seroit tenu de vider les lieux dans trois jours , et à eux
permis d’en jouir comme ils aviseroient ; et pour être con
damné à payer les dégradations qui auroient été com
mises, de même que la valeur des ustensiles qui se trouveioient m anquer, le tout à dire d’experts convenus ou
pris d’ollice. O n observe que cette demande avoit été
dirigée par les habitans en nom singulier.
�( 8 }
Dans clé premières défenses, M abru crut devoir remar
quer que l’action étoit mal d irigée, avec u’auiûnt plus de
raison , ajouta-t-il, que les demandeursne sauroient établir
le bail verb:il qu’il leur plaisoit d’énoncer.
Les habitans ayant alors découvert la quittance du
21 novembre 1769 , s’empressèrent d’en justifier ; et
comme cette pièce leur apprit que M ab ru devoit une
somme de 10 fr. par chaque année pour le prix de sa
ferme , ils fo r c è r e n t la demande de cette somme pour les
années q u iavoien t couru depuis la quittance, par requête
du 18 avril 178 0 , et l’affaire fut appointée en droit par
jugemeut du 20 du môme mois.
Dans la suite , Antoine M abru , donnant plus de déve
loppement à sa défense, prétendit qu’il étoit âgé de plus
de quatre-vingts ans; qu’il étoit né dans les m oulins;
qu’il les lenoit de la succession de son père , qui en étoit
en possession, laquelle lui tenoit lieu de titres authenti
ques; que lesdits moulins furent incendiés en 1709; qu’il
étoit alors m in e u r , et sa mère dans un âge avancé ; que
tous leurs titres et effets avoient été consumés par les
flammes; que ces moulins avoient resté dix-hmt ans en
chezal; qu’ il avoit été d’abord forcé de m en d ier, niais
qu’ensuito il s’étoit loué chez différons maîtres; et qu’après
avoir ramassé quoiqu'argent, il avoit fait reconstruire les
moulins, desquels il s’étoit depuis maintenu en jouissance
paisible juseju’à la demande. P o u r justifier sa possession ,
A n t o i n e Miibru rapporta l’acte mortuaire de son p è re , les
actes de naissance et de décès de son fils, et l’acte de célé
bration d’uu second mariage par lui contracté le 31 jan
vier 1763.
A ntoine
�j e
A n toin e M ab ru convint que les moulins étoient
situés sur les com m un aux, et clans les dépendances du
village de Chanzelles : ce fait lui parut même si impor
tant, qu’il lit servir copie de la i’econnoissance du lieu de
Chanzelles, pour établir que ce lieu ne rappeloit point
celui d’O u s c l a u x e t conclure d e là que les habitons de
ce dernier lieu n’auroient au moins rien à prétendre dans
les moulins en question.
Quant à la quittance de 1769, M abru remarqua d’abord
que l’énoncé n’en étoit pas exact, puisque les habitans
ne pouvoient pas rapporter le bail qu’on y trouvoit rap
pelé ; il ajouta que cette pièce étant étrangère aux ha
bitans ne pouvoit leur être d’aucune utilité ; que cette
quittance pourroit servir tout au plus à M esch in, qui
l’avoit consentie; mais qu’indépendamment de ce que ce
particulier ne lui demandoit r i e n , c’est que la somme
payée portoit sur tous autres objets indifférons aux de
mandeurs.
Relativement au droit gratuit de mouture, invoqué par
les demandeurs , M abru n’osa pas le désavouer entière
ment -, mais il prélendit que les demandeurs avoienl tou
jours payé ce qu’ il avoit exigé , et que s’ il avoit modéré
ce droit à leur égard , c’étoit afin de conserver leurs
pratiques.
D e leur part, les demandeurs rép o n diren t, i° . qu’ ils
avoient pu diriger en nom singulier une action com
mune et p op ulaire, dont l’exercice appnrtenoit à chacun
d e u x ; 2,0. que Mabru n’établissoit pas sa naissance dans
les moulins de Gay , et que la reconstruction de ces
moulins après l’incendie avoit été l’ouvrage de la com-
�<*k
( 10 )
m u n e , et non pas le sien; 30. que la situation des moulins
formoit en leur faveur une présomption de propriété ,
présomption qui devenoit certitude, d’après lu quittance
de 1769, puisqu’il résultait de cette pièce que M abru avoit
payé sciemment la ferme des moulins pour deux ans , et
avoit ainsi reconnu n’en avoir joui qu’à titre de ferm ier;
que Mescliin, habitant de Pérignat, l’avoit été précédem
ment de Ghanzelles; qu’il avoit conservé ses propriétés dans
ce dernier v illa g e , et que c’étoit à ce titre de principal
propriétaire , et comme le plus versé dans les affaires,
q u’il avoit reçu la ferme due à la commune de Ghanzelles.
Enfin les demandeurs rapportèrent la quittance de 1766,
et offrirent de prouver que M abru avoit constamment
fait moudre leurs grains sans en retirer aucune rétribution.
D ’après cette discussion , le bailli de la H o d d e, après
avoir pris l’avis de jurisconsultes éclairés, rendit le 20
avril 1 7 8 1 , la sentence qui suit :
« N ous, ayant égard à ce qui résulte des deux quit« tances des 30 novembre 1766 et 21 novem bre 17 6 9 ,
«
«
«
et
«
«
«
avons le bail à ferme des moulins de Gay continué
verbalement ou par tacite réconduction , déclaré fini et
résolu; en conséquence, ordonnons que dans trois jours,
à compter de la signification denotre présente sentence,
le défendeur sera tenu de vider les lieux et sortir
desdits m oulin s, pour par les demandeurs en jouir
ainsi qu’ ils aviseront ; si non , et faute de ce faire
« dans ledit d éla i, permettons aux demandeurs de l’en
« expulser et mettre scs meubles sur le carreau ; le con« damnons à remettre lesdits moulins en état de répa« rations locatives, garnis de leurs meules et ustensiles
�( ir )
« nécessaires à l’exploitation d’ic e u x , et à compter d e %
« valeur de ceux desdits meubles qui se trouveront man« quer, ainsi que des dégradations qu’il pourroit avoir
« commises dans lesdits m oulins, à dire d’experts con« venus ou pris d’office, avec intéi'êts à compter du jour
« de la demande \ comme aussi à payer les ancrages de la
« . ferme desdits moulins, à l’aison de 10 francs par année,
« depuis et y compris 1769, avec les intérêts ; le condam« nons en outre aux dépens, si mieux toutes fois n’aime
« le défendeur faire p r e u v e , tant par titres que par té« m oins, qu’après l ’incendie des moulins de G a y , arrivée
« en 1709 , il a fait rétablir lui-même , et à ses frais ,
« lesdits moulins ; que depuis ledit rétablissement il en a
« joui paisiblement comme propriétaire jusqu’au jour
« de la demande contre lui formée; et notamment que,
« pendant cette jouissance, il a constamment perçu sur
« les codétenteurs des ténemens de Chanzelles et Ous
te claux le droit de mouture en usage dans le pays ;
« sauf aux demandeurs la preuve contraire. »
Sur l’appel de cette sentence interjeté par A ntoine
M a b ru , en la Sénéchaussée de Clerm ont, M abru fit no
tifier, le i5 juillet 17 8 2 , une déclaration que lui avoit
donnée François Meschin, devant B ru giè re, notaire, le
20 janvier précédent : celte pièce est trop intéressante
pour ne pas la faire connoître en son entier.
«
«
«
. «
•'
« P a r -d e v a n t...........a été présent François M eschin,
marchand , habitant du village de Pérignat , paroisse
de la R o d d e , lequel a volontairement reconnu, confessé et déclaré, au profit d’A ntoine M a b ru , m eunier,
habitant en ses moulius de G-ay, paroisse de la R o d d e,
B a
■
�\ o V . /
.
( 12 )
« ci-présent et acceptant, que c’est par eçrcur que les deux
«
a
te
a
«
«
«
«
«
«
«
quittances par lui consenties, au profit dudit M a b ru ,
devant M e. Ju lh ia rd , notaire à la R o d d e ,le s 30 no
vem bre 1766 et 2 in o v e m b r e 1769, ont pour cause, la
première de la somme de 40 francs,pour quatre années
alors échues, pour le p rix du bail de ferme desdits m oulins appelés de G a y , et la seconde delà somme de 20 fr.
pour le même bail des apnées 1767 et 1768 , puisqu’aucontraire ces deux quittances ne doivent avoir pour
objet que la ferme verbale de deux terres, l’une appelée
la Pièce-d u-M eu n ier, et l’autre la T â c h e , situées dans
les appartenances du village de Pérignat, delà contenue
« toutes çleux d’environ trois septerées; attendu même
«
«
et
et
qu’il n’y a jamaiseu de bail à ferme desdits moulins, entre
lui Meschin et ledit M a b ru ; et que lu i M esch in lî’a
d’autre droit su r lesdits m oulins apparten ais audit
M a bru , que celu i d’y f a i r e moudre ses g r a in s ,
a
«
«
«
«
<t
«
fo u le r son chanvre et y f a i r e son hu ile sans aucune
rétribu tion , en y conduisant son grain , tant pour
sa, m aison du lieu de C h a n z e lle s, que pour celle
dudit P é r ig n a ty q u i l u i a toujours été fo u r n ie et à
scs auteurs par ledit M a bru , a in si que ce dernier Va
a u ssi reconnu et co n fessé, et qiCil y demeure tenu
et obligé p our V a v en ir, etc. »
Les habitans de Chanzelles et Ousclaux intervinrent
collectivement sous le nom de deux syndics; et, pour
écarter sans retour lu déclaration qu’on vient de trans
crire, ils justifièrent de l'exploit du 12 avril 1 7 5 5 , conte
nant demande contre M abru , afin de désistement des
moulins de G ay et payem en t des arrérages de la ferme :
�( 13 )
exploit dans lequel François Mescliin se trouve précisé
ment le premier en qualité.
M abru étant alors décédé , les poursuites furent tenues
pour reprises par défaut avec Jeanne M abru , partie
adverse, par sentence du aoiaoût 1789. Jeanne M a b r u ,
sans daigner former opposition à cette sentence, justifia
bien de lettres de bénéfice d’inventaire et du procès verbal
d’entérinement d’icelles;mais.elle n’a rapporté dans aucun
temps l’inventaire qu’elle étoit tenue de faire dresser : de
manière que sa qualité d’héritière bénéficiaire n’étant point
suffisamment étab lie, elle doit être considérée comme
héritière pure et simple de son aïeul.
Quoi qu’il en soit, l'affaire n’ayant pas été terminée eu
la sénéchaussée d eC lerm o n t, a été reprise en la co u r, du
consentement des parties adverses, par arrêt contradic
toire du 14 messidor an 12. A i n s i , il sied mal à Jeanne
M abru de revenir sur les moyens qu’elle avoit proposés
avant cet a rrê t, qui a réglé les qualités et la procédure;
il lui sied plus mal encore d’accuser les liabitans de s’être
assemblés tumultueusement, puisque leur délibération ,
du 18 nivôse an 11 , atteste qu’elle fut prise sous la pré
sidence du plus ancien d’â g e , et la surveillance de Jean
L a c o u r , maire de la commune.
T e l est l’état exact des faits et de la procédure.
M O Y E N S .
Si 1 on se fixe d’abord sur la situation des moulins dont
il s’a g i t , il est certain q ue, placés sur les communaux de
Chanzelles ( et ce fait est reconnu au p r o c è s ), jls en for-
�(
)
ment nécessairement une dépendance, et sont présumés
par là même , et de droit co m m u n , appartenir aux propi’iétaires de ces communaux.
E n effet, les habitans de Chanzelles eurent seuls droit
et qualité pour établir ces moulins ; sans doute ils n’en
exécutèrent la construction que pour leurs commodités
et leurs intérêts : il n’est donc pas permis de penser qu’ils
aient jamais aliéné une propriété aussi précieuse pour eux.
Il n’est pas permis de penser non plus qu’ un particulier
étranger à leur commune soit venu faire, sur leurs biens
communaux , un établissement aussi considérable ; cela
n’auroit pu arriver qu’en vertu d’une concession valable
de la part des habitans , et M abru n ’en rapporte pas. Ce
pendant le droit et la faveur étant du côté des intim és,
c’est bien aux appelans à établir leur exception ; et s’ils
sont réduits à l’impossible de le fa ir e , on doit forcément
les considérer comme usurpateui’s , et les faire désister.
Dons leur m ém o ire, page 20, les appelans ont invoqué
l’article 9 de la section 4 de la loi du 10 juin i-793Mais la première ligne de cet article rappelle des pos
sessions particulières et paisibles ; e t , dans la cause, il s’agit
de moulins établis sur un com m un al, et en formant une
dépendance; de moulins dont lit jouissance n’a pas été
paisible, puisque les habitans demandèrent le désistement
par l’exploit de 1755 ; de m o ulin s, en un m o t , dont
A n to in e M abru paya la ierm e, suivant les quittances de
1766 et de 1769.
Quelques lignes plus bas, le législateur n’a excepté des
dispositions générales, que toutes co n cessio n s, v en tes,
(¡allocations fo r c é e s } partages} ou autres possessions
�\•
.
sv
( 15 )
depuis et au delci de quarante ans. O r , ici point de
titres; M a b r u , comme on l’a déjà dit, n’en rappoi’te aucun;
et quant à la possession , l’on verra bientôt qu’il ne peut
pas s’en prévaloir ; qu’ainsi cette disposition de la l o i ,
purem ent relative au partage des co m m u n a u x } ne reçoit
aucune application à l’espèce.
f
L es appelans s’étonnent de voir figurer parmi les de
mandeurs des particuliers étrangers au village de C h a n zelles, et ils invoquent à cet égard les dispositions du
titre 28 de la Coutume d’Auvergne.
M a is , i°. les particuliers qui se dirent liabitans de la
R o d d e , ou de tout autre lieu , étoient véritablement de
Clianzelles, et n’avoient ailleurs qu’une résidence momen
tanée à titre de fermiers ou métayers. O n trouve m ême
la preuve de ce fait dans la délibération de 1 7 8 3 , cote 19
de la procédure d’appel; on voit également, dans l’exploit
de dem ande, que tous les particuliers en qualité se qua
lifièrent de propriétaires et possesseurs du ténement de
Clianzelles.
20. Clianzelles et Ousclaux ne forment réellement que
le même villn ge, quoique divisé en deux parties , l’une
au m id i, et l’autre au nord , à tel point qu’il n’y eut jamais
de division entre ces deux parties, et qu’elles curent dans
tous les temps mêmes com m unaux, même fontaine, mêmes
habitudes.
3 °* S ’il est évident que les appelans ne peuvent pas se
maintenir dans la jouissance des moulins de G n y , il doit
peu leur importer qu’elle soit attribuée à tel plutôt qu’à
tel autre. Les appelans ne sont pas chargés de stipuler les
intérêts des habitans de Clianzelles; les appelans ne peu-
�i> n
•'<
.
( 16 )
vent rapporter de titres de la part d’aucune com m u n e,
conséquèmment il doit leur être indifférent que les mou
lins restent en entier aux habitons de Chanzelles , ou que
ces dèrniers en jouissent communément avec d’autres.
A i n s i , la. situation des moulins suffiroit seule pour établir
le droit des intimés à la propriété de ces mêmes moulins.
Mais les intimés n’en sont pas réduits à de simples
présomptions de propriété ; ils rapportent en core, pour
r é t a b l i r , des titres infiniment précis.
E n effet, les actes des >11 juin et 17 novembre 1664
démontrent invinciblement le droit des intimés, puisque,
par le p re m ie r, un habitant de Chanzelles vendit à un
étranger les droits qui lui compétoient dans les moulins,
et que , par le second, tous les liabitans de Chanzelles en
affermèrent l’intégralité.
D ’un autre côté , la demande du 12 avril 1755 , et les
quittances des 30 novembre 1766 et 21 novembre 1769,
offrent en faveur des intimés des conséquences également
puissantes, puisque la demande eut pour objet la propriété
des moulins , et que par les quittances Mnbru lui-même
la reconnut de la manière la plus formelle.
A i n s i , les derniers actes étant une suite toute naturelle,
et même l’exécution immédiate des premiers ; ain si, les
uns se rattachant aux autres, tous forment par leur en
semble un corps de preuve auquel il est impossible de
résister.
L es appelans conviennent bien que celui qui n’a joui
qu’à titre de fermier ne peut pas opposer la prescrip
tion au propriétaire ; mais ils prétendent qu’Antoine
Mubru ayant possédé les moulins en question pendant
plus
�i
/3
'( *7 )
plus de trente années antérieures aux quittances, ces quit
tances ne pourroient pas leur être opposées, paTce que
leur aïeul ne seroit pas présumé avoir entendu renoncer
a un droit acquis ; e t , à ce sujet, ils répètent qu’Antoine
M abru étoit né dans les m o u lin s, que son père y étoit
décédé , qu’ il les avoit trouvés dans la succession de ce
dernier, et les avoit fait rétablir après leur incendie.
M ais, si les intimés en avoient besoin, ils prouveroient
facilement que le principe invoqué par les appelans est
une erreur*, car on a toujours tenu pour constant que
celui qui avoit un droit acquis pouvoit y renoncer ; et
cette renonciation se présume encore davantage, quand
le renonçant n’a fait que rendre hommage à la vérité.
L e principe fût-il vrai ne recevroit aucune application
à l’espèce , puisqu’Antoine M abru n’avoit pas possédé
utilement un seul’ jour.
Déjà la situation des moulins sur les communaux de
Chanzelles a toujours formé un obstacle invincible à la
possession des M abru ; c a r, tout! de même qu’ils n’auroient pas pu acquérir, p a rla prescription la plus longue,
les biens communaux de Chanzelles , tout de même ils
n’ont pas pu posséder cinimo dom ini les-moulins de G a y ,
qui forment une dépendance de ces mêmes communaux.
2°. Les titres rapportés par les intimés établissent en
leur faveur le droit de propriété le plus évident : les'Mabru
n ont pu jouir et n’ont joui véritablement que comme
fermiers; par conséquent ils n’ont'possédé que pour les
habitans, seuls propriétaires.
3 °- Antoine Mabru n’étoit pas né dans les moulins ;
ut indépendamment de ce qu’il n’a pasi établi ce fait
im portant, c’est qu’il est formellement démenti par les
C
�rS L
(
1
8
)
contrats de mariage des 2 février 1695 et 28 octobre 1726,
puisque le premier apprend que Pierre M a b ru , père
d’A n t o in e , s’étoit marié au lieu du L e y r i t , paroisse de
Tauves ; et que, dans le second, A ntoine M abru déclara
qu’il étoit originaire du môme lieu de L e y r it, lieu qu’il
n ’avoit quitté que pour aller servir difîérens maîtres ;
dès-lors A ntoine M abru n’avoit eu de domicile légal
qu’au lieu de Leyrit.
4 0. Si le Pierre M abru qui décéda aux moulins de G a y ,
en 1708 , étoit le même que Pierre M a b ru , bisaïeul des
appelons, ce qui n’est pas à beaucoup près établi par
l’acte mortuaire rapporté , il est certain que ce décès ne
put arriver au moulin de G ay que par l’effet d’un acci
dent, puisque, encore une fois, le contrat de 1695 établit
que Pierre M abru étoit M arié au lieu du L e y rit; et que
dans le sien A ntoine M abru se déclara originaire du
même lieu : or , si cet Antoine M abru avoit eu pris
naissance dans les moulins de G a y ; si P ierre, son père, y
fût décédé , le premier auroit été originaire des moulins
de G a y , paroisse de la R o d d e, et non pas du lieu du
L e y r i t , paroisse de Tauves : donc les contrats produits
écartent absolument l’allégation des appelans.
5°. S’il est vrai qu’A ntoine M a b ru , père de Jeanne,
naquit dans les moulins en question, le 23 décembre Ï 7 2 7 ,
il est au moins certain qu’autre A n toin e, son p ère, n’avoit
pu entrer en jouissance do ces moulins qu’après le mois
d’octobre de l’année précédente, puisqu’alors il étoit
valet-domestique 'au village de Vernines , preuve son
contrat do mariage.
O r , de cette époque à celle de la demande du 12 avril
17 5 5 , on 11e trouve qu’une espace de vingt-huit aimées ;
�Sri
( '9 )
et supposant dès-lors avec A ntoine M abru qu’ il possédoit avec l ’intention de prescrire, au moins n’auroit-il
pas eu le temps d’atteindre ce but odieux.
6°. A ntoine Mabru ne pouvoit pas non plus avoir
fait rétablir les moulins après leur incendie, puisqu’au
mois d’octobre 1726 , il se disoit lui-même o r ig in a le du
lieu du L e y rit, et valet au village de V e rn in e s, étrangers
l’un et l’autre aux moulins de G a y ; d’ailleurs, leshabitans n’ont cessé d’articuler q u e , lors de l’ incendie, les
moulins étoient jouis par une famille différente de celle des
M abru; et l’on tient sur les lieux, comme fait constant
transmis par les anciens, que les moulins furent recons
truits aux frais de la com m une, représentée par les inti
m és; que même les liabitans de cette commune avoient
délaissé ces moulins à un nommé Antoine Meallet : on
est à la recherche de ce f a it , tout inutile qu’il est aux in
timés ; mais ils seroient infiniment jaloux de pouvoir
donner aux appelans un nouveau démenti.
Pourquoi au reste les appelans n’o n t-ils pas exécuté
la disposition de la sentence dont est a p p e l, par laquelle
ils étoient autorisés à prouver ces faits, au lieu d’attaquer
cette même sentence dans son intégralité. A les entendre,
cette disposition étoit ridicule, absurde, et les chargeoit
d’une preuve négative : mais l’erreur des appelans est
évidente; car la preuve étoit réellement directe ,e td e v o it
l ’etre par une raison qu’011 a déjà rappelée; c’est que
les intimés ayant en leur faveur la situation des moulins
et les titres produits, les appelans se trouvoient dans un
cas d’exception dont la preuve étoit indubitablement à
leur charge.
Ainsi l’objet, soit de la demande formée en 176 5, soit
C a
�CSC
C 20 )
des quittances fournies en 1766 et 17 6 9 , étant essentiel
lement v r a i , il en résulte que les appelons et leur aïeul
n ’ont joui des moulins de Gay que pour les intimés, et
doivent enfin leur restituer des objets dans lesquels ils
se sont trop long-temps maintenus.
Cependant les appelans, feignant de ne pas se tenir
pour battus, contestent, à l’exemple d’Antoine Mabru
leur aïeul, les conséquences qui Résultent en faveur des
intimés des quittances par eux produites; ils répètent que
Meschin 11’avoit pas le droit de les donner; que la cause
exprimée en ces quittances est une erreur, et que cette
cause encore ne se trouve pas rappelée dans la première:
les appelans finissent par invoquer la déclaration donnée
par JNJescliin , le 20 janvier 1782.
!
Mais les appelans savent bien que Meschin, quoique
habitant du lieu dé P é rig n a t, à l’époque des quittances,
l ’avoit été précédemment du lieu de Chanzelles; ils savent
bien que Meschin s’étoit marié à Chanzelles avec une
Défarges, qui étoit foncière; que Meschin s’ é t o i t retiré
sur les biens de sa femme , mais qu’il f a i s o i t cultiver en
même temps, et par une seule administration , tant les
biens de la Défarges que les siens propres. Les appelans
savent aussi que cette D éfarges, veuve Meschin, en use
de même aujourd’hui.
Aussi les habitans de Chanzelles avoient toujours con
sidéré Meschin comme leur concitoyen ; et, parce qu’il
«voit plus d’aptitude aux affaires, ils lui avoient confié
ln surveillance de leurs intérêts et la perception de lourt
revenus. Voil'i pourquoi il consentit et put consentir A
M abru les quittances de 1766 et de 1769 , tout comme
François Baudeveix avoit pu quittancer le prix du bail
de 1664.
�Sri
s
nr
2°. Si la première de ces quittances n’énonce pas la
cause du payem ent, la seconde la rappèlle; on
lit que
la som m e de 20 fr a n cs reçue a voit pour objet deux
armées de f e r m e dés m oulins en question, voilà, qui est
positif, et qui suifiroit, indépendamment'de la première.
Mais ce sont les mêmes p(aftiës qui figurent dans toutes
deux. Mais en 1766 , Mescliin reçoit 40 francs pour quatre
anrlées de ferme, comme ilrèçôit en 1769 moitié pour deux
années seulebieht; mais dans Tune comme dans l’autre on
rappelle un bail reÇû M o u lin ,. notaire à la T o u r : donc
il n’est pas perrins de douter que l’objet de la première ne
soit le même que celui de la seconde ; et d’ailleurs Mescliin
en convient dans sa déclaration de 1782.
j rr
■
}
O r , il ne pént pas exister pour les intimés de preuve
plus forte que celle qui résulte de ces quittances , puis
que cette preuve émane du fait même de M a b r u , et que
celui-ci en payant, comme fermier, a bien reconnu tout
à la fois qu’il n’a voit joui des moulins qu’à ce titre, et
que ceux à qui il en payoit la ferme étoient les vrais
propriétaires.
30. Il n’y a pas d’erreur dans la cause de ces quittances
les intimés viennent de le prouver par la situation des
lieux et par la production de plusieurs titres; d’ailleurs,
y
*
*
^
1
*
T i
1^
si deux personnes peuvent’ d é ro g e r, par un acte posté
rieur j à des conventions précédentes, cela leur est in
terdit toutes les fois qu’un tiers se trouve intéressé, car
alors le droit lui étant acquis 011 ne peut plus l’eu priver
hors sa présence et sans son consentement.
4°. La déclaration de Meschin, toute mensongère qu’elle
»est , prouve elle-même en faveur des intimés , surtout en
la rapprochant de la demande du 12 avril 1755.
�il»
u t
( 22 )
E n effet, si lors de la déclaration Mescliin habitoit le
lieu de P érign a t, l’exploit atteste qu’en i y 55 ce même
Meschin étoit habitant du lieu de Chanzelles.
Dans la déclai'ation, Meschin prétendoit que la cause
des quittances n’étoit pas exacte, et qu’il n’y avoit jamais
çu de sa part de bail à ferme des moulins de Gay.
Cependant en i y 55 il demandoit précisément , avec les
autres habitans de Chanzelles , à Antoine M a b r u , aïeul
de Jeanne, les arrérages de ferme des mêmes moulins,
pour vingt-huit années de jouissance.
•
Selon la déclaration, Meschin n’auroit eu sur les mou
lins d’autres droits que ceux par lui réservés, et dont on
.parlera bientôt; mais l’exploit atteste que Meschin se pré
tendoit copropriétaire des moulins, puisqu’il en réclamoit
le désistement.
D ’après la déclaration, la ferme auroit eu pour cause
la jouissance de deux terres situées à P é r ig n a t, appelées,
l’une la P i è c ç - d u - M e u n ie r , et l’autre la T â c h e ; mais
Meschin n’avoit jamais possédé, ni de son c h e f, ni de
celui de sa fem m e, aucunes terres qui p o r t a s s e n t ces noms ;
et les intimés défient même Jeanne M a b r u et son mari
de prouver qu’A ntoine M abru eût joui dans aucun temps,
à titre de ferme ou autrement, ni à Pérignat, ni à Chan
zelles , de propriétés appartenantes à Meschin : ainsi cette
déclaration n’est en général qu’un tissu de mensonge; et
loin de pouvoir profiter aux appelons, elle n’en démontre
que mieux leur mauvaise foi.
Les intimes ont tire un autre moyen de la manière dont
M abru avoit jôui des moulins dont il s’agit. Ils ont articulé
que Mabru avoit constamment fait moudre les grains né
cessaires à leur consommation; sans en retirer aucune rétri-
�(
23 )
bution ; et les intimés ont comparé ce mode de jouissance
à un véritable colonage.
M abru n’a pas osé désavouer ce fa it, mais il a cherché
à l’atténuer en prétendant que les intimés avoient payé
ce qu’ il avoit exigé ; et que s’il lui étoit arrivé de faire
des remises sur son droit , c’étoit pour conserver leurs
pratiques. Cette remise prétendue n’est ni vraie ni vrai
semblable ; et d’ailleurs les intimés ont oifert la preuve
du fait par eux articulé : ils l’offriroient même e n c o re ,
si elle pouvoit être de quelque nécessité.
Mais cette preuve est faite; elle résulte de la demande
du 12 avril i j 55 ; car loin par M abru de contester alors
aux habitans le droit de mouture gratuite, il s’empressa de
pi'endrcavec eux de nouveaux arrangemens. Cette preuve
résulte plus sûrement encore de la déclaration donnée par
Meschin, le 20 janvier 1782, puisque Meschin s’y réserva,
sur les moulins de Gay , son droit de m o u tu re, en même
temps que celui de faire son huile et fouler son chanvre ,
tant pour sa m aison de P érig n a t que pour celle de
Chanzelles. O r , il résulte de cette réserve , i ° . que
Meschin étoit propriétaire dans les deux endroits ; 20. que
Meschin n’avoit pu la faire que comme propriétaire à
Chanzelles; 3°. que M abru , en la souffrant et promettant
de l’exécuter à l’a ven ir, ne pouvoit pas avoir de raisons
pour refu ser, comme il a f a it , le même droit à chacun
des intimés.
C est en vain que les appelans prétendent que Meschin
pouvoit avoir un droit de servitude sur les moulins, et
qu’un pareil d ro it, en faveur des intimés, cxcluroit celui
de propriété.
D ’un côté / cette servitude, personnelle à M eschin, ne
�ft*
»
(2 4 )
seroit p as présumable, et l ’on défieroit les appelans comme
la famille Meschin , d’en établir les moindres traces.
Mais, l’idée même d ’une pareille, servitude,, exclusiv e à
M e s c h in , est formellement écartée par la demande de
1755 , où l ’on voit Meschin figurer le premier dans les
qualités, et par laquelle, il ne réclamoit ce droit de mouture
que confusément a v e c les autres h abitans de Chanzelles ,
et comme membre particulier de cette commune.
D e l’autre, ce droit de mouture n’est pas , dans l’espèce,
exclusif de la propriété, puisque les intimés ne le réclament
que contre un fermier infidèle , et comme partage en
quelque sorte du produit des moulins , ou , si l’on v e u t ,
comme réserve . ou bien augmentation du prix de la
ferme.
Ainsi la cause des intimés est extrêmement claire, et
n’offre l’aspect, ni de l’injustice, ni de la confusion. On ne
peut pas les taxer d’ usurpateurs ni d’ambitieux , puisqu’ils
ne réclament qu’une chose qui leur appartient évidem
ment par la situation des lie u x , par les titres produits, et
par la manière dont les appelans en ont joui. Les défen
deurs seuls sont donc inexcusables de vouloir s’arroger un
droit qu’ ils n’ont jamais, eu , un bien qui ne leur a jamais
appartenu ; et. dès-lors la sentence qui les a condamnés à
s’en désister est trop sage pour ne pas obtenir la sanction
de la cour.
M . CO I N C H O N - L A F ON T , rapporteur.
Me. D E V È Z E ,
A R IO M , de l ’imprimerie de Landrio t , seul im primeur de la ,
Cour d ’appel. — Messidor a n , 13.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Geneix, Michel. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Coinchon-Lafont
Devèze
Subject
The topic of the resource
communaux
preuves de possession sans titre et avec titre
moulins
bail verbal
droit de mouture
quittances
syndics
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse à mémoire pour les habitants et corps commun du lieu de Chanzelles et Ousclaux, commune de la Rodde, poursuites et diligences de Michel Geneix et Jacques Juliard, leurs syndics, intimés et demandeurs ; contre Jeanne Mabru, fille et héritière d'Antoine, et Jacques Arfeuil, son mari, appelans et défendeurs.
Table Godemel : Désistement - Commune : 2. dans une instance en désistement, formée par les habitants d’une commune ut singuli, qui ont obtenu gain de cause devant les premiers juges, le corps commun des habitants a-t-il pu intervenir régulièrement après l’appel, pour soutenir le bien-jugé, lorsque la reprise d’instance avait été ordonnée du consentements des appelants, par un arrêt contradictoire ? le possesseur, obligé de se désister, a-t-il droit à être indemnisé des réparations et constructions par lui faites ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
Circa 1708-Circa An 13
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1522
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1521
BCU_Factums_G1523
BCU_Factums_G1524
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53262/BCU_Factums_G1522.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Larrode (63190)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail verbal
communaux
droit de mouture
moulins
preuves de possession sans titre et avec titre
quittances
syndics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53263/BCU_Factums_G1523.pdf
ddcd8ade1b7e1b6d3363656cf537b5f5
PDF Text
Text
OBSERVATIONS
EN
RÉPO N SE
Au mémoire signifié le I er. therm idor,
POUR
Jeanne
MABRU e t J a c q u e s ARFEUIL,
mari, appelans;
son
f■
'
;
CONTRE
I
L e s H a b i t a n s e t C o r p s c o m m u n des lieux de
,
,
Chanzelles et Ousclaux commune de la Rodde
M i c h e l G E N E I X et J a c q u e s J U L I A R D ,
se disant leurs syndics , intimés.
L
moulin
E
de Gay ,dont les habitans de deux villages
veulent être propriétaires, ut universi, est possédé de
temps immémorial par les appelans ou leurs auteurs.
�C2 )
Si on en croit les intimés, cette longue possession n’est
qu’une chimère : les ancêtres des appelans sont nés ou
morts dans ce moulin par accident ; c’est-à-dire, que les
intimés, pour écarter les inductions d’une jouissance qui
se perd dans la nuit des temps, n’ont d’autre ressource
que de supposer des couches précipitées ou des attaques
d’apoplexie.
Est-ce bien sérieusement qu’ils ont eu le courage de
proposer de semblables moyens ? Quel est donc leur
intérêt ? D eux villages en corps commun veulent arra
cher à un individu la seule p ro p riété, le seul bien qu’il
ait sur la terre , l’unique ressource d’une .nombreuse
famille. L e plus haut prix de la prétendue ferm e, ou
location de ce m oulin, ne sejporte qu’à une somme de
dix fr a n c s par année , divisible entre environ douze
cents personnes.
>, i >
Suivant les intimés, ils sont propriétaires, et les appe
lans ne sont que des usurpateurs. Ils prétendent, i°. que
le moulin est bâti dansrles communaux de Chanzelles,
et que ce fait est reconnu entre les parties. C’est ici une
première erreur : le moulin est confiné par un ruisseau
( chose assez naturelle ). Il est limité d autre part par
les communaux; et il faut bien être confiné par un point
t
*
plus ou moins reculé. Mais de ce que les communaux
de Chanzelles servent de confin , la seule conséquence
raisonnable qu’on puisse-tiren de cette circonstance, c’est
qu’il ne fait pas partie des communaux ; parce que les
confins ne peuvent faire partie de la chose confinée.
Les habitans croient encore établir leur propriété par
plusieurs titres dont ils-argumentent.
�f c i ) .............................
L e prem ier1est un acte du n juin 1664 j p 3** lequel
Antoine Gaÿ^'fils à fe u ’Etienne1, du villageide Chanzelles, vendit à Joseph 1Bonhomme , du villagé de V e rnines1, tous les droits , part et portion qui *pôuvoient
lui compéter au moulin appelé de'. G a y , ¿ifcue dans les
appartenances de Chanzelles, avec promesse de garantir
de tous troubles , etc. '*> •'•••
‘r
Il semble qu’on doit plutôt conclure de cette vente,
que le moulinf contentieux;étoit une propriété particuculière, et non une propriété appartenante au corps
commun.
i°. L e nom- du vendeur ,:q u i-s’appelle G a y , déno
mination qui est celléi d u 'm o u lin , et qui n’a d’autre
origine que le nom du premier propriétaire, comme
011 en voit tant d’exemples.
■
> 1 > -,
(2°. L ’aliénation d’une part indivise dans ce m oulin ,
annonce le-droit d’un cohéritier, et jamais celui d’un
habitant, q u i, dans aucun cas, ne peut aliéner une pro
priété publique, encore moins avec garantie ; bien moins
encore à un étranger.
11 faut donc en conclure que cet immeuble appartenoit
à la famille Gay; plutôt qu’aux habitons de Chanzelles.
Le second acte dont justifient les ‘intimés, est un bail
de ferme de ce même objet, consenti par les liabitans
de Chanzelles et d’Ousclaux, le 17 novembre 1664, au
profit de Claude D elcros, moyennant un setier de blé
seigle, payable pendant sept années au profit d’un nommé
François Baudevoix, qui promet d’en rendre compte au
surplus de la commune, pour l’employer aux répara
tions du moulin.
2
�( 4 )
Ce b a il, si rapproché de la vente particulière d’A n
toine G a y , fait supposer que cette famille avoit aban- donné le m oulin, et que les liabitans à qui il pouvoit
11 être utile s’en étoient emparés : cela est d’autant plus
%vraisem blable, qu’il paroît résulter de ce titre que le
■^moulin avoit été incendié et détruit; car les bailleurs y
prévoient le cas d’incendie, et en même temps s’obli
gent d’y conduire des meules pour faciliter la jouissance
du preneur, qui doit moudre leurs grains gratuitement.
Mais bientôt la trace se perd, et on voit une jouissance
continuelle de la part des M ab ru , auteurs des appelans :
- l ’un y est mort le 1 7 'avril 1708; l’autre y est né le 23
septembre 1727; et depuis, jusqu’à ce jour, les Mabru y ont
vécu , s’y sont m ariés, et y sont m orts; ils en ont disposé
comme de leur chose propre : on voit même qu’Antoine
M ab ru , aïeul de Jeanne, appelante, a donné ce moulin en
avancement d’hoirie à son fils, par contrat de mariage du
10 février 1761.
;. .
Ce n’est pas là le caractère d’une jouissance précaire:
leshabitans, sans doute, auroient réclamé contre une dis
position qu’ils ne pouvoient ignorer, puisqu’elle étoit
contenue en un contrat de mariage publiquement fait
sous les yeux de tous les liabitans.
C’est alors que les intimés disent que si Pierre Mabru
est mort dans c e moulin, c’est qu’il y a péri par accident.
Ils auroient pu dire aussi que la mère d’Antoine Mabru
y est accouchée par hasard, et qu’Antoine M abru a
aussi e m p r u n t é le moulin, comme l’endroit le plus com
m ode, pour y célébrer les noces de sou fils.
Dans tous les cas, disent les intimés, si les auteurs
�( 5 )
des appelans sont entrés dans ce m oulin, ils n’y ont
demeuré que comme fermiers : n’ont-ils pas- été assignés
par exploit du 12 avril i y 5 5 ? et si cet exploit n’a pas
eu de suite, c’est que M abru s’est rendu justice. D eux
quittances, des 30 novembre 1766, et 21 novembre 1769,
prouvent que le prix de la ferme fut payé par A ntoine
M abru à François M escliin, l’un des liabitans, pour les
années 1763 et suivantes , jusques et compris 1768.
Ces deux quittances ne sont pas une production nou-.
velle ; elles ont toujours été la base du procès depuis sa
naissance ; et les appelans les ont discutées avec assez
d’étendue, soit dans leurs écritures, soit dans leur mé
moire. Ils ont dit qu’on ne voyoit rien dans la première
qui eût le plus léger rapport avec le moulin de G a y ,
dont elle ne fait aucune mentio'n.
Pour la seconde, ils s’étonnent que François M escliin,
habitant du village de P érïgnat , puisse avoir quelque
chose de commun avec les habitans de Chanzelles et
d’O usclaux, dont il ne pouvoit ê tr e , ni l’agent, ni le
Syndic.
D ’ailleurs, les quittances de François Mescliin rappel
lent un bail notarié, reçu M oulin , notaire; et les habitans de Chanzelles et d’Ousclaux ne parlent que d’un
bail verbal.
E n fin , Meschin lui-m ôm e a donné une déclaration
qui constate que ces quittances ne se rapportent pas au
moulin de Gay 7 mais bien à des héritages contigus, que
M abru avoit afiermés de lu i, pour la facilité de son ex
ploitation*; de sorte qu’il étoit impossible que les intimés
pussent tirer une induction favorable de ces quittances.
3
�Sm
( 6 )
Les appelons d’ailleurs ont prouvé en point cïe fait qu’ils
a voient un titre certain au moulin avant 1766, date de
la première quittance.
En point de droit, qu’ils n’avoient pu déroger à leur
propriété acquise, par une reconnoissance postérieure,
d’après la disposition des lois et la doctrine des auteurs.
Depuis, les appelansont x'ecouvré un titre ancien qui
établit que ce moulin est devenu une propriété particu
liè re , et que les intimés n’ont rien à y prétendre.
Ce titre est un acte du i 5 mai 1711 : on y voit que
sept villages se disputoient la propriété de ce moulin 7
et que ces sept villages se réunissent pour le concéder,
en toute propriété, à Antoine M eallet, habitant du bourg
de la Rodde.
lies premiers en qualité, sont lesliabitans de P érignat ;
viennent après lesliabitans d’Ousclaux ; ensuite les habi
tons de ChanzeUes , ceux du village de T c rrif, ceux du
village de V ern in es , du village de P r u n s , et enfin du
village de Chaux.
Ces sept villages vàums conjointement et solidairement
fo u r chacuns leurs villages , c o n c è d e n t à titre d’emphitéose, à Antoine M eallet, pour le temps de sa vie et
des siens , la propriété et jouissance d’un moulin farinier,
appelé moulin de G a y , avec 1111 jardin et un pré en
dépendaris, joignant de toutes parties leurs, communs
et propriété d e s d i t s , et la rivière de Burande.
• Ce moulin étoit assujéti à un cens envers le seigneur
de la llodde (il ne faisoit donc pas partie des communaux ).
M eallet, pren eur, est chargé de faire reconstruire et
relever le moulin de la chute causée par Vincendie arrivé
�\
( 1 )
sz/r icelui , d’y faire poser une meule : les bailleurs doi
vent fournir l’autre.
*
Après trois ans de jouissance, le preneur doit payer
chaque année une éminée de blé.seigle, etc. Ou donne
au preneur le pouvoir et liberté de bâtir et construire,
si bon lui semble, d’autres moulins à côté de celui emphitéosé. Les bailleurs se réservent le droit de moudre gra
tuitement; mais il est permis au preneur de racheter ce
droit. E nfin, ilp e u t céder son droit et mettre en sa
-place les personnes qu’il lui plaira.
Les bailleurs s’obligent d’âider le preneur pour la cons
truction du moulin concédé, et de ceux qu’il voudroit
édifier; de contribuer à l’achat des ferremens ou des
meules; et dans le cas où ils refuseroient, ils seront déchus
de tout droit de mouture.
Ce titre annonce que le moulin de G ay auroit eu bien
des maîtres dans l’origine : sept villages y a voient des
droits, mais ils les ont vendus, et cette aliénation remonte
à quatre-vingt-quatorze ans.
D u moment que le moulin a été vendu, les acquéreurs
ou possesseurs ont cessé de jouir à titre précaire, ils ont
possédé animo dom ini , et par conséquent ont pu pres
crire la propriété.
On ne peut pas même expliquer comment les villages
de Ghanzelles et d’Ousclaux voudroient avoir aujour
d’hui un droit exclusif au moulin , lorsqu’on voit que
dans l’origine il appartenoit à sept villages.
Que deviennent «lors les quittances de 1768 et 17^9*
Llles paroissent cinquante-huit ans après la vente authen-
�C8 }
tique de 1 7 1 1 ; et en supposant qu’elles s'appliquent à
l’objet en litige, elles ne pourvoient déroger à un droit
acquis , ni changer la nature de la possession : telle est la
doctrine de Dumoulin , qu’on a rappellée dans le précé
dent m ém oire, errordom ini recipientis rem suarn quam
putat aliejiam jhcit actum ipso jure nulium , et nuïlum
dominium , nullam possessionem perdit.
Les intimés , qui ne s’attendoient pas à la découverte
de l’acte de 1711 ,>proposeront des objections qu’il est aisé
de prévoir. Ils ne manqueront pas de reprocher auxappelans cle varier dans leur défense ; ils diront qu’on avoit
soutenu jusqu’ici que Pierre M abru avoit reconstruit
le m oulin, après l’incendie de 1709 , et que, d’après cette,
vente de 1 7 1 1 , il paroît que M eallet, pren eur, a seul fait
ces reconstructions,
Ils opposeront aux appellans qu’il n’est pas prouvé
qu’ils représentent le preneur de 17 11.
La réponse à ces objections est facile. i ° . Il n’est pas
étonnant que dans une vieille recherche de ce genre , on
fasse des découvertes qui obligent à des variations sur ce
qu’on a dit précédemment,
Cependant on ne peut pas dire que les appellans aient
jamais changé de langage; ils o n t argumenté de leur pos
session immémoriale, et, pour l’établir, ont justifié des actes
de naissance et de décès de leurs auteurs, q u i, depuis
près d’un siècle, habitoient le moulin dont il s’agit.
Ils ont soutenu avoir joui, anuno dornini, depuis plus
d’un siècle ; ils sont convenus que ce moulin fut aban
donné momentanément par Antoine M a b ru , q u i, mi-
�.
( 9 )
neur en 1709 , fuit ruiné par l’incendie du moulin , mais
y rentra quelques années après.
O r , c’est précisément dans cette intervalle, et lorsque
le moulin étoit encore dans cet état de destruction, que
les habitans le vendii'ent à Antoine Meallet en 1711.
T o u t annonce et tout prouve que M abru, revenu à
meilleure fortune , se fit subroger par Antoine M e allet,
et fit alors les réparations nécessaires. Cela est d’autant
plus vraisemblable que la concession faite à Meallet l’au
torise à céder cette propriété, et à mettre à sa place telle
personne qu’il lui plaira.
Mabru n’a pas besoin de prouver par des actes qu’il
a été subrogé à M eallet, ses titres ont sans doute été la
, proie du temps; il lui suffit d’établir qu’il a pu posséder
anitno domini. Dès que les habitans ont cessé d’être pro
priétaires, ce seroit aux intimés à prouver qu’ils ont dé
possédé M eallet, leur acquereur, et sont rentrés dans leur
droit ; parce que tout demandeur doit établir sa demande.
Les intimés répéteront-ils que les communes ne peuvent
aliéner ni prescrire ? L ’acte qu’on leur oppose est une
vente faite par chaque individu, conjointement et soli
dairement ; elle est consentie avec promesse de garantir
et faire valoir de tous troubles et hypothèques. L ’an
cienneté du titre fait présumer une concession légitime.
Mais il n’est pas vrai en principe que les biens des
villes et communautés sont imprescriptibles. D u n o d ,
dans son Traité des prescriptions , partie i re. , chapitre
12 , examine cette question, page 74 et suivantes. I-es
biens des villes et communautés, d it - il, sont de deux
3
�' '
( ïo )
espèces. Les uns produisent du revenir, et comme ils
peuvent être aliénés pour cause, et avec de certaines
formalités, ils sont prescriptibles par le temps ordinaire.
Les autres sont destinés à l’usage des personnes de la ville
ou de la communauté dont ils dépendent -, ils sont publics
à leur égard. Tels sont les rues, les places, les marchés,
les cours, les fontaines, les édifices publics, etc. : les biens
de cette nature ne sont pas dans le commerce, c’est pour
quoi ils ne peuvent être prescrits par le temps ordinaire;
mais ils le seroient par une jouissance immémoriale.
En appliquant ce principe à l’espèce particulière , de
quoi s’agit-il ici? d’un m oulin, objet modique , et qui ne
peut fructifier entre les mains d’une commune : elle doit
' l’aliéner, pour son avantage, et lorsqu’elle a cessé de jouir
pendant trente ans, la prescription est acquise au tiers
détenteur.
Les appelans ont encore invoqué la disposition de l’ar• ticle 9 de la section 4 de la loi du 10 juin 1793? qui
maintient en propriété celui qui a possédé pendant qua
rante ans avant la loi du 28 août 1792, même lorsqu’il
s’agit de communaux.
Enfin, ils rappelleront l’article 222 7 du Code civil q u i,
porte que la nation, les établissemens publics et les com• mimes sont soumis aux mêmes prescriptions que les par
ticuliers , et peuvent également les opposer.
Les intimés voudroient encore faire usage de leur
exploit de i j 55 ; mais, d’abord, depuis 1 7 1 1 , date de la
vente du m oulin, jusqu’en 1765, il s’est écoulé quarantequatre ans, laps plus que suffisant pour prescrire; en
�( 11 )
second lie u , cet exploit est en contradiction avec celui
de 177g. Dans le prem ier, les habitans supposent une
convention verbale faite entr’eux et M ab ru , et demandent
vingt-huit setiers blé seigle, pour vingt-huit ans d’arré
rages. Dans le second exploit, ils supposent un bail no
tarié , et demandent dix francs par année ; de sorte qu’on
ne voit que confusion et contradiction ¿ans leurs de
mandes. L a première doit détruire la seconde ; on ne
pourroit revenir par nouvelle action, il falloit reprendre
la première.
A u surplus, tout ce qui a été fait jusqu’ici de la part
des habitans est absolument irrégulier et nul. O u il s’agit,
dans la cause, d’une propriété particulière, alors les appelans ont évidemment prescrit, et le corps commun des
habitans est sans qualité pour réclamer.
Ou le moulin est une propriété commune à to u s, alors
la demande n’a pu être formée par des particuliers, nullis
ut singuiis , pluribus ut universis.
Cependant la demande n’a été formée que par des par
ticuliers; c’est contre eu x , ut singuli y que la cause a été
jugée en première instance : le corps commun n’est in
tervenu que sur l’appel, et contre le gré du conseil mu
nicipal. Cette intervention choque toutes les règles con
nues, et viole ouvertement la loi qui accorde deux degrés
de juridiction. Ce seroit priver les appelans du second
d e g ré,si la cause pouvoit être jugée en la cour d’appel,
avec la généralité des habitans. Les appelans ont l’avan
tage de pouvoir invoquer^ur ce point la jurisprudence
constante ; et quoiqu’ils n’aient point à redouter l’évé-
�>5
( 1 2 )
nement sur le fond du d roit, ils ont cependant intérêt
de procéder régulièrement, et avec des parties légitimes.
M . C O I N C H O N - L A F O N T , rapporteur.
t
y
M e. P A G E S ( d e R i o m ) , ancien avocat.
A
*
~
;
O;-
M e. B R U N , avoué.
\ ■ »
I
—
—
f
. . . .
i
^
A R IO M , de l ’imprimerie de L a n d rio t , seul imprimeur de la
Cour d'appel. — T herm id or an 13.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Mabru, Jeanne. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Coinchon-Lafont
Pagès
Brun
Subject
The topic of the resource
communaux
preuves de possession sans titre et avec titre
moulins
bail verbal
droit de mouture
quittances
syndics
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Observations en réponse au mémoire signifié le 1er thermidor, pour Jeanne Mabru et Jacques Arfeuil, son mari, appelans ; contre les habitants et corps commun des lieux de Chanzelles et Ousclaux, commune de la Rodde, Michel Geneix et Jacques Juliard, se disant leurs syndics, intimés.
Table Godemel : Désistement - Commune : 2. dans une instance en désistement, formée par les habitants d’une commune ut singuli, qui ont obtenu gain de cause devant les premiers juges, le corps commun des habitants a-t-il pu intervenir régulièrement après l’appel, pour soutenir le bien-jugé, lorsque la reprise d’instance avait été ordonnée du consentements des appelants, par un arrêt contradictoire ? le possesseur, obligé de se désister, a-t-il droit à être indemnisé des réparations et constructions par lui faites ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
Circa 1708-Circa An 13
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1523
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1521
BCU_Factums_G1522
BCU_Factums_G1524
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53263/BCU_Factums_G1523.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Larrode (63190)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail verbal
communaux
droit de mouture
moulins
preuves de possession sans titre et avec titre
quittances
syndics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53264/BCU_Factums_G1524.pdf
c6fce992d0072ef92f5bcf1d5be7a810
PDF Text
Text
REPONSE
'1
-E /i>t«Ît»iu'
A OBSERVATIONS!,
¿ j “^
/ « J L , n u c L * {t^
POUR
L
es
H
abita n s
de C h an ze lles e t Ousclaux
com m une de la R o d d e , M
et J a c q u e s
intimés
'
Jeanne
ic h e l
JU L IA R D ,
leurs
C O N T R E
■
'
i
M A B R U et J a c q u e s
,
G E N E I X ,« ^ .L ls iT
syndics > ¡ ^ ^ 2 ^ fyX^ / J ^ ,
A R F E U IL ,
son mari appelans.
I L est dans cette affaire, plusieurs faits constans qu’il ne
faut pas perdre de vue.
Le premier, c’est que les moulins de Gay sont situés
sur les communaux de Chanzelles, et que non-seulement
A
�( 2 )
Antoine Mabru l’a reconnu en première instance, par ses
défenses , comme par sa requête, cotes 6 et 10 de la pro
duction principale des intimés; mais qu’encore, pour le
prouver, et par là même écarter la demande des liabitans
d’Ousclaux, il a justifié de la reconnoissance du lieu de
Çhanzelles de l’année 1494.
Cet.âveu est extrêmement précieux, et les appelons ne
ÇeuYçnt.pasle révoquer en doute; encore moins prétendre
•^u&. c’est une erreur : ils ne peuvent pas détruire les
coméquences qui en. résultent, par une -plaisanterie , et
ën disant q u il est tout naturel qu'un moulin soit conjiné
* paY ttrî ruisseau.
'O u il le ruisseau qui procure le jeu des roues, peut
•êouler sur partie comme sur l’extrémité des communaux
* de Çhanzelles j mais il est positif que les moulins sont
entièrement placés sur ces communaux; qu’ils en forment
dès-lors une dépendance; que cette circonstance, qui
pourroit être justifiée dans tous les cas par une vérifi*cation d’experts, établit une présomption de droit en
faveur des intimés : car tout de même que les appelans
n’auroient pu acquérir par la prescription aucune partie
de ces communaux , tout de même ils n’ont pu devenir,
par cette v o ie , propriétaires des moulins de Gay.
Les appelans répondent que les biens des villes et
communautés peuvent être prescrits; et ils invoquent
l ’opinion de M e. Dunod, png. 74.
Mais l’erreur seroit évidente, si l’auteur avoit entendu
dire ce qu’il plaît aux appelans de lui prêter, puisque
Dunod lui-même convient que l’aliénation de ces biens
ne peut avoir lieu que pour causes, et avec des formalités;
�(3)
et qu’ainsi, c’est en reconnoître l’imprescribilité , toutes
les fois que la nécessité de l’aliénation n’a pas été recon
nue, ni les formalités remplies. D ’ailleurs il est impos
sible de posséder, animo dom ini, des biens d’une com
mune , toujours en état de minorité ; des biens qu’on
n’auroit pu acquérir qu’en observant des formes rigou
reusement exigées.
Les appelans invoquent encore l’art. 9 de la section 4
de la loi du 10 juin 1793 : mais les intimés ont prouvé
dans leur mémoire que cette loi ne pouvoit recevoir
d’application à l’espèce; ils n’y reviendront pas.
Quant à l’article 2227 du Code c iv i l, les dispositions
qu’il contient forment un droit nouveau, et ne peuvent
dès-lors avoir d’effet que pour l’avenir.
Point de titres, ni de possession utile, de la part des
M abru : donc la présomption de propriété résultante de
la situation des moulins, reste dans toute sa force.
Un second fait, c’est que les intimés rapportent des
titres précis pour justifier leur propriété ; e t , à cet égard ,
la vente et le bail à’ferme des 11 juin et 17 novembre 1664,
la demande de 1 7 5 5 ,les quittances des30 novembre 1766 ,
et 21 novembre 1769, la déclaration même'donnée par
Meschin le i 5 juillet 1782 , ne laissent rien à désirer.
Les appellans prétendent qué le premier de ces actes
indiqueroit plutôt une propriété particulière, qu’un objet
commun.
Mais indépendamment de ce que la vente n’offre pas
le premier résultat, c’est que le bail justifie le second,
puisque ce sont les seuls liabitans de Chanzelles et Ousclaux qui afferment de leur chef les moulins, comme à
A 2
�( 4 )
'
eux appartenans,et moyennant une redevancequi doit être
payéeà un'des habitans pour employer à l’utilité commune.
- Ce bail 3 loin de prouver que les moulins avaient été
incendiés, prévoit seulement que cet événement pourroit arriver, et les parties arrêtent dès-lors ce qui sera
fait par chacune d’elles pour le rétablissement de ces
moulins : il ne peut donc pas exister de titre plus positif.
L a demande de 1755 n’est sûrement pas contradic
toire avec celle de 1779, quoique l’une ait pour objet
du blé, et l’autre de l’argent *, puisque toutes deux tendent
au désistement des moulins en question, de même qu’au
payement de la ferme desdits moulins.
J Les habitans, en formant la dernière, n’ont pas dû
reprendre l’effet de la prem ière, puisque tout avoit été
consommé, respectivement à celle-ci, par les nouveaux
arrangemens que les parties prirent ensemble.
Les quittances de 1766 et de 1769 , sufliroient sans
doute pour établir le droit des habitans , puisqu’Antoine
M abru, en payant à Meschin la ferme des moulins de
G a y , reconnut forcément qu’il ne jouissoit de ces mou
lins qu’à titre de fermier, et pour le c o m p t e exclusif de
ceux dont Meschin stipuloit les intérêts : ce n’est pas la
faute des habitans si le bail énoncé dans ces quittances
n’a pu être rapporté ; mais les parties n’en n’ont pas moins
attesté de bonne foi l’existence de ce bail, et Mabru n’a
pas moins souffert qu’il fût rappelé dans les deux quit
tances , et à des époques différentes. D ’ailleurs les oppelans
ont prouvé que les deux payemens avoient entr’eux une
corrélation parfaite, et se rapporloient également au prix
de la ferme des' moulins tfc Gay.
�Jo> y
( 5)
Dans la déclaration même de 1782 , quoiqu’elle soit
une précaution maladroite , Meschin et Mabru qonvinrent que ces deux quittances avoient pour cause le prix*
de la même ferme : il est donc impossible de rétrograder
sur la certitude d’un fait établi par tant de preuves.
En troisième lieu , les. appelans n’avoient fondé leur
possessiou des moulins de G a y , que-sur des circonstances
particulières : ils prétendoient qu’Antoine M abru, leur
aïeul, y étoit né ; que Pierre , père de ce dèrnier, y étoit
décéd é, et* qu’après l’incendie des moulins, ce même
Antoine Mabru les avoit rétablis.
O r , il est p rouvé, i°. par le conti’at de mariage de
Pierre M abru, du 2 février 1695 , qu’il liabitoit au lieu
du Ley rit, et non pas dans les moulins de G a y : il n’en
étoit donc pas propriétaire; 20. par l’acte de naissance
d’ Antoine M abru, de l’année 1697 , qu’il étoit né au
même lieu du Leyrit, et non pas dans les moulins de G ay;
30. par le contrat de mariage de ce même Antoine M abru,
du 28 octobre 1726 , qu’alors encore il étoit originaire
du lieu du L e y rit,e t valqt domestique en celui de V e iv
nines: donc il n’a pu entrer, qu’après celte époque, en
jouissance des moulins de Gay. A u s s i, et par l’exploit
de 17 5 5 , les habitons ne demandoient-ils ¿1 Mabru que
vingt-huit années d’arrérages de la ferm e, ce q u i rap<*
portail précisément à 1727 le commencement de la
possession de Mabru.
Les appclans ont produit l’acte mortuaire d’un Pierre
M abru, decedé, à ce qu’il paroît, au moulin de Gay*
en 1708.
Mais cet acte n’indique pas autrement le défunt*, et
�( 6 )
c’est bien aux appelans à prouver que c’étoit leur bis
aïeul, puisqu’en i 6 g 5 , Pierre M abru, représenté par les
appelans, étoit habitant du village du L eyrit, et qu’en
1726, surtout, Antoine M abru, fils de Pierre, se qualifia
originaire du même village, ce qui n’auroit pu arriver,
si Antoine Mabru et son père avoient jamais habité dans
les moulins de.Gay.
Les intimés ont donc eu raison de dire que si Pierre
M ab ru , mort en 1708, dans les moulins de G a y, étoit .
le bisaïeul des appelans, ce décès n’avoit pu arriver que
par accident ; et soit attaque d’apoplexie , soit toute
autre cause, ces événemens, ne sont malheureusement
que trop fréquens.
Il est vrai encore qu’Antoine M abru, père de Jeanne,
paroît être né dans les mêmes moulins, le 23 décembre
1727. Mais lu plaisanterie des couches anticipées est
absolument de l’invention des appelans.; car les intimés
ne l’ont dit, ni supposé, et môme l’intervalle de quatorze
mois, qui s’écoula entre le mariage du père et la nais
sance du fils, ne permettoit, ni de le dire, ni de le
supposer.
'
Ce que les intimés ont dit, et avec raison, c’est qu’en
1726 Antoine Mabru se qunlifioit originaire du Heu du
L e y r it , et valet domestique en celui de Vernines ;
qu’ainsi il n’avoit pu entrer dans les moulins qu’après
cettte époque : et les intimes ont fait remarquer, encoro
une fois, la concordance qui existoit entre ce fait et l’objet
delà demande formée par l’exploit de i 755
La trace de la jouissance des Mabru 11e se perd donc
pas dans la nuit des temps, comme ils osent le prétendre',
.
�(7 )
puisque les intimés démontrent que l’originé n’en re
monte pas au delà de 1726.
Cela étant, la demande formée en 17 55 , auroit'inter
rompu la prescription , s’il n’étoit pas d’ailleurs prouvé ,
par la nature de cette demande, qu’Antoine JVlabru
n’avoit joui qu’à titre de fermier, et par conséquent pour
les demandeurs.
•
.
Les appelans viennent de produire deux moyens nou
veaux , l’un en la form e, et l’autre au fond.
En la form e, ils opposent que les habitans en noms
collectifs n’étant intervenus que sur l’a p p el, les deux
degrés de juridictions n’ont pas été épuisés à leur égard,
et qu’ainsi c’est le cas de renvoyer la cause en première
instance, pour être jugée avec eux.
Mais les appelans n’ont pas voulu faire attention que
les syndics ont été reçus parties intervenantes, en la
sénéchaussée de Glermont, qui, quoique saisie de l’appel
ne pouvoit cependant pas juger en dernier ressort.
L ’on sait en effet que dans les anciens tribunaux on
recevoit habituellement, et môme dans les causes d’appel,
des interventions comme des demandes incidentes ; que
le toutétoit joint, et qu’on y statuoit parla même sentence.
O r , l'affaire actuelle, ayant été dévolue en la cour,
doit être jugée en l’état où elle se trouve. La cour
l’a décidé plusieurs fois de cetle manière : aussi la re
prise des poursuites, de la part des nouveaux syndics,
' a-t-elle été-ordonnée sans difficulté par la cour, et du
consentement même des appelans, porte l’arrêt du 14
messidor an 12. Voilà donc un point jugé d’une manière
irrévocable et sans retour.
�( 8)
- A u fond, les nppelans ont découvert et produit un
bail emphitéotiquedes moulins de G ay, consenti parles
habitâns de sept villages voisins, en faveur d’Antoine
M eallet, par acte du i 5 mai 1711,; ils concluent du rap
port de cet acte , ou qu’ils sont présumés représenter le
preneur à rente, ou que du moins ils ont pu prescrire
utilement contre l u i , puisque par ce même acte les intimés
avoient cessé d’être propriétaires des mêmes moulins.
Mais la première réflexion qui se présente, c’est que
le bail de 1711 étoit absolument nul, comme renfermant
line aliénation de biens communaux, sans l’observation
des formes prescrites par les lois du temps.
En effet, cette nullité étoit littéralement prononcée
par les édits de février i 55 $, mars 1600, avril 1667, et
même mois 1683. L ’avant dernier, après avoir autorisé
les communautés d’habitans à rentrer, sans aucune forma
lité , dans les fonds et biens communs par elles aliénés,
leur f it défense d'aliéner à Cavenir leurs usages et biens
com m unaux, sans quelque cause ,1011 pour quelque pré
texte que ce pût être, nonobstant les permissions quelles
pourroient obtenir à cet effet, à peine de nullité des
contrats , de perte du prix contre les acquéreurs. . . .
L ’ordonnance des eaux et forêts défend encore l’aliéuation des biens c o m m u n au x ; elle ne’perrnet pas même
aux habitans de faire aucune coupe dans leurs bois, le
cas d’incendie excepté.
A u s s i, le commentateur de cette ordonnance nous d it ,
sur l’article 8 du titre 26 : L es habitans des paroisses
ne peuvent vendre leurs biens com m unaux; et il cite
L o i s c a u , truité des seigneuries,cliap. 12, n°. i 5 ,« m oins,
continue-t-il,
�( 9)
continue-t-il, qu'ils ri obtiennent du roi une permission
de les aliéner, e t , à î appui, il rappelle une déclaration
du 22 ju in i 65 c).
Et non-seulement les communes ne pouvoient pas
aliéner leurs biens communaux, mais elles n’avoient pas
même la liberté de les cultiver; encore moins de les par
tager. Voici ce que nous enseigne R icard , sur l’article g6
de la Coutume de Senlis : L ic e t judicium commune di~
çidendo, n’ait pas lieu, in rebus univers itatis ; néan
moins le seigneur peut demander le tiers des pâturages
communs ; mais les tenanciers ne peuvejit pas
en ti’ eux partager les deux autres tiers : c'est la con
solation de celui qu i n'a plus de biens, d'avoir sa part
dans les communes q u on ne peut lui ôter. S'il falloit de
nouvelles preuves , on les trouveroit surtout dans l’arrêt
duconseil du mois d’avril 17 74 , rendu pourlepartage des
communaux en Alsace ; on les trouveroit dans la loi du
10 juin 1793 , sans laquelle nous n’aurions pas été les
témoins de tant de partages de biens communaux , dont
au reste l’abus n’a pas tardé à se faire sentir : et encore
cette loi n’avoit-elle admis ces partages qu’avec des for
malités rigoureuses, et sans l’observation desquelles les
biens communaux partagés doivent être restitués à leur
première destination. Aujourd’hui même les communes
ne peuvent aliéner1, ni autrement disposer de leurs biens,
pour aucune cause, sans un décret im p éria l-, et dèslors, la législation ancienne et moderne étant uniformes
sur ce point, il en jésuite la conséquence forcée que le
bail de 1 7 1 1 , nul dans son principe, n’a pu produire
d’effet réel dans son exécution ? vis-à-vis d’habitans touB
�0%
( io )
jours incapables d’acquérir comme de perdre ; et que
dans tous les temps les La illeurs ont été en droit, comme
ils le seroient encore, de révoquer leurs-engagemens.
Un autre principe non moins certain, c’est que les
communaux n’appartiennent à aucun habitant, ut singuli,
mais à tous, ut univers'. O r , -e bail de 1 7 1 1 ne fut
consenti que par quelques habitans particuliers des vil
lages de Chanzelles, Ouseclaux, etc.; donc nouveaux mo
tifs pour que la commune intimée n’ait jamais dû res
pecter un acte qui n’émanoit pas de son fait.
2°. Quoique les habitans de plusieurs villages aient
figurés dans le bail de 1711 , cet acte ne prouve pas moins
que ceux de Chanzelles et Ousclaux faisoient la loi >
puisqu’ils s’opposèrent au délaissement du pré dépendant
des m o u l i n s e t qu’en effet le délaissement n’eut pas lieu ;
circonstance que les appelans ont pris le soin de taire
dans leurs obsejvatio?is.
Une autre omission, peut-être plus importante, c’est
que l’acte en question renferme la clause qui suit : A la
charge par le preneur de jo u ir et exploiter ledit moulin
avec toute Texactitude et fidélité possibles , autrement
icelui se trouverait convaincu d'infidélité, les bailleurs
se réservent la liberté de Vexpulser dudit moulin sans
a ucun dédo m m agewen t.
Voilà donc, indépendamment de la nullité du bail,
une clause résolutoire, dont l’exécution est présumée de
droit avoir eu lieu par la cessation de la jouissance du
preneur.
3°. Les appelans, fol. 6 de leurs observations, préten
dent avoir vu y dans Cacte de 1711 , que les habitans ■
�bailleurs , se dispvtoient la propriété du moult n ; mai s
précisément l’acte ne dit rien de semblable, et cela prouve
que les appelans ne voient guère avec les yeux de la
bonne foi.
Ils disent, môme folio, que le moulin étoit assujéti à un
cens, en faveur du seigneur delà Rodde, et que dès-lors
il ne faisoit pas partie des communaux; mais les bailleurs
s’obligèrent , en deux endroits différons, à garantir le
preneur de tous cens , renies, taille et hypothèques, tant
envers le seigneur de la R o d d e , que tous autres qu’il
appartiendrait; d’ailleurs, un cens dû sur les com m unaux
il auroit été qu une preuve efficace pour les habitons ,
contre le seigneur, s'il avoit demandé le triage de ces
mêmes communaux.
Les appelans ajoutent, fol. 7 , que le bail annonce que les
moulins auraient eu bien des maîtres dans l’origine; mais la
vente et le bail de 1664 prouvent précisément que leshabitansde Chanzelleset Ousclaux étoient exclusivement propriétaires de ces moulins, comme situés sur les dépendances
de leurs villages, ainsi qu’Antoine Mabru le reconnut en
première instance , et le prouva même par le rapport de
la reconnoissance de Chanzelles, de l’année 1494 : donc
les liabitans des autres villages ne purent figui’er dans le
bail de 1711 , que par un abus du droit des intimés.
4°. L e bail de 1711 au moins prouve la fausseté des
faits articulés par les appelans, relativement au rétablis
sement du moulin après son incendie ; et dès-lors ils
ne peuvent plus fonder sur ce fait' la preuve de leur
propriété : c’est ainsi que leur défense n’a eu pour base
que des allégations, toutes maintenant démenties.
B a
�( 12 )
5°. On doit s'étonner de voir que l’expédition de Pacte
de 1 7 1 1 ait été délivrée à Jacques A r j e u i l, m ari de
Jeanne M a b r u , comme représentant A n toin e M eallet,
preneur à bail - car c’est une nouvelle fausseté , et les
appelans ont évidemment trompé le notaire , en obte
nant, de son imprudence, une mention qu’on les délie
d’établir.
Mais quand les Mabru représenteroient M eallet, ils
n’en seraient pas plus avancés , car ils ne pourraient pas
avoir plus de droits que lui ; et s’il est certain que l’acte
étoit n u l, et que Meallet aurait pu être eu tout temps
dépossédé, la condition des Mabru ne pourrait pas être
plus favorable.
C’est donc envain que les appelans prétendent faire
présumer en leur faveur un titre de propriété par l’an
cienneté de leur possession , puisque la possession ne peut
avoir ce caractère qu’autant qu’elle a été utile. O r , on
yient de prouver que celle de Meallet lui-mème étoit
vicieuse, d’après son titre : donc les Mabru , qui n’ont
jamais eu de titra, n’ont pas pu posséder légitimement ce
qu’ils n’auroient pas pu acquérir ni prescrire.
Les intim és, au contraire, dont la propriété a com
mencé avec l’établissement des moulins; les intimés, qui
ne l’ont jamaiscédée ni pu perdre, sont,à plus jllS(0 titre,
présumésdedroit a voir repris la jouissance de lours moulins
au moment où Meallet les abandonna. Il ne faut pas oublier
que l’acte de 1 7 1 1 , nuldans son essence, renfermait encore
une clause résolutoire, et. des-lors les propriétaires avoient
deux raisons air .lieu d’uno pour chasser Meallet. Iliil'ectivemerçt* ce particulier ce&ia d’exploiter les moulins; le
�.4.
( i3 )
fait est certain, par la jouissance même des Mabru : donc
ceux-là seuls, qui étoient propriétaires, furent autorisés
à disposer de la chose à eux appartenante.
Il n’est donc pas douteux que toutes les présomptions
ne soient du côté des intimés ; et s’il est vrai que Pacte
même de 1711 n aurait pas pu leur nuire comme illégal,
et leur étant cCailleurs étranger, il f e s t , à p lu sjb r te
raison , qu à Vinstant même où M eallet cessa de jo u ir ,
les habitans rentrèrent dans la plénitude de leurs droits
sur les moulins de Gay.
Les Mabru , de leur p a r t , n’avoient pas de droit
préexistant à ces moulins : ils ne peuvent donc pas invo
quer les mêmes présomptions; il leur faudroit un titre,
et ils n’en ont aucun.
<
•
Mais il y a plus , et les intimés ont établi dans leur
m ém oire, que les Mabru n’avoient joui que comme fer
miers, preuve la demande du 12 avril 17 5 5 , qu’on ne
s’avisa pas de contester ; preuve , les quittances de 1766
et de 1769 , d’après lesquelles Mabru 11e paya qu’en cette
qualité ; preuve encore, la déclaration donnée par Meschiu le i 5 juillet 1782 , qui offre les mêmes résultats.
Les appelans ont beau dire, avec D um oulin, que l’erreur
de celui qui reçoit sa chose ne lui préjudicie pas. On ai
déjà répondu , d’un côté, que chacun est libre de renoncer
a un droit acquis; de l’autre , qu’ une erreur gém inée,
comme IViuroit été celle d’ Antoine M ab ru , ne se présume
pas; mais que ce,qui exclut foute idée d’erreur, c’est que
les quittances se r. ttachent , tant à la demande de 17^5
qu à la déclara (uni de 1782, et que ces pièces, par leur
ensemble , démontrent qu’Antoine Mabru ne fut autre
chose que le fermier des habitans.
�C m -)
' A In vérité, les appelans, dons leur mémoire, comme
dans les observations , n'ont pas craint ù'avancer que ,
par le contrat de mariage d’A ntoine M a bru , du 10
¿février i y 5 i , ses père et mère Va voient institué leur
héritier universel, et lu i avoient délaissé en avancement
d’hoirie la, jouissance des moulins.
Mais outre que ce fait auroit été très-insignifiant,puisque
Antoine Mabru n’auroit pas pu , de son propre m otif,
changer la nature de sa possession , ni devenir proprié
taire, deiermier qu’il éloit, c'est que le contrat de ma
riage ne contient p a s'd e clauses semblable. On y voit
bien une institution générale, mais rien de plus; on y
voit une pareille institution en faveur de la future, avec
un avancement d’hoirie de la somme de 400 francs, paya
bles à termes : on y voit bien que les père et mère de la
future promettent de venir habiter avec les Mabru , et
qu’en cas d’incompatibilité ces derniers s’obligent de leur
fournir un logement dans une autre maison ; mais voilà
tout , et les moulins de G a j ne.furent l’objet d’aucune
clause de cet acte.
K
Ainsi les habitans avoient eu raison de soutenir que
le fils Mabru avoit été, pendant plusieurs années, fermier
des moulins de G a y , et qu’après son décès seulement,
le père en avoit repris la jouissance.
,
O r , étant démontré que 'Mabru ne jouissoit des mou
lins que comme fermier, et que celle qualité n’avoit pu
lui être attribuée que par le fait des demandeurs, qu’ainsi
il n’avoit possédé que pour eux , il faut convenir que la
découverte des appelans n’est pas heureuse, et que ce qui
est le mieux prouvé par l’acte de 1711 , c'est que les
�( i5 )
M abru en ont imposé, lorsqu’ ils ont soutenu, dans tous
les actes de la procédure , que les moulins avoient été
rétablis par leurs soins et à leurs frais.
A u surplus, il seroit bien extraordinaire que les appelans , qui ne prétendent avoir possédé utilement qu’en
vertu de l’acte de 17 x 1, puissent cependant se placer dans
une position plus avantageuse que n’étoit celle de Meallet.
En effet, ce dernier ne jouissoit pas du pré dépendant
des moulins , et les Mabru- en jouissent. Meallet payoit
une redevance, et faisoit moudre gratuitement les grains
des liabitans, tandis que Mabru refuse l’une et l’autre :
fut-il jamais de prétention plus injuste, et même plus
ridicule !
Mais, quoi qu’en disent les appelans , ils o n t , comme
M eallet, payé la redevance, tantôt d’un setier blé, d’après
la demande de 1755, tantôt de 10 francs argent, suivant
les quittances de 1766 et de 1769. Ils ont aussi fait moudre
gratuitement les grains des habitans, comme cela résulte
de la déclaration de 1782, par laquelle Meschin se réserva
le droit de mouture pour l’avenir ; et d’ailleurs les intimés
sont en état de prouver ce fait, si la déclaration de 1782
ne paroît pas suffisante.
Voilà donc de nouvelles preuves que les Mabru n’ont
joui des moulins de Gay que pour les habitans, et comme
leurs colons.
.
Suivant les appelans, la ferm e des m oulins se diviseroit
en douze cents parties.
Mais l’objection s’écarte par les dispositions de la Cou
tume , qui limite les communaux par tenemens , et qui
ne permet pas aux habitans d’un mas de faire pacager
�( i 6 )
leurs 'bestiaux , et encore moins d'exercer des droits de
propriété sur Jes biens communs d’un village voisin ; aussi,
soit avant, soit après le bail de 1 7 1 1 , les hnbitans de
Chanzelles et Ousclaux ont-ils seuls exercé des droits de
propriété sur les moulins de Gay.
En résumant ces observations, il n’est vraiment pas de
cause plus claire, puisque les adversaires , malgré tous
leurs efforts, n’ont encore découvert que des titres étran
gers à eux. A in s i, les voilà réduits à exciper de la pos
session , puisqu’ils n’ont pas d’acles de propriété.
O r , leur possession n’est pas de nature à opérer la pres
cription , eussent-ils joui per mille annos , comme dit
Dumoulin. En effet, il suffit qu’ils aient joui comme fer
miers à une époque quelconque, pour qu’ils soient réputés
avoir un titre vicieux qui n’a pu changer par leur fait ;
car nemo potest sibi mutare causant possessionis.
Celui qui a été fermier n’a jamais joui pour son compte;
c’est, au contraire, celui à qui il a payé la fernîe qui a
possédé d’après les principes: V er colonum et inquilitium
possidemus nique usu capimus.
A in s i, c’est là où est toute la cause; les liabitans prou
vent que le moulin provient d’e u x, soit par les actes de
1664, soit même par l’acte de 1711 qu’on leur oppose.
L ’exploit de i j 55 prouve que les Mabru étoient fer
miers depuis 1727 ; ce qui s’adapte sans peine à l’acte de
1 7 1 1 , et aux actes de mariage et de décès de 17 26 et 1727.
Les.quittances de 1766 et 1769 impriment à Antoine
Mabru la qualité de fermier du moulin de Gay par son
propre fait; il ne peut donc la détruire que par un acte qui
l’ait rendu propriétaire : on n’en rapporte aucun.
A in s i,
�A in s i, il est évident que Mabru n’a voulu qu’abuser
de sa longue résidence au moulin de Gay ,pour se l’appro
prier ; et qu’au fait il est si loin d’être propriétaire, qu’il
n’a ni titre ni possession, tandis qu’il ose lutter contre de
vrais propriétaires, qui ont des titres et une possession
continuée depuis 1664 , tant par eux que par les fermiers
par lesquels ils possédoient.
Faut-il maintenant s’appitoyer sur le sort des appelans,
q u i , s’il faut les en cro ire, ne possèdent pas autre chose
, dans le monde ? Mais ne sont - ils pas propriétaires,
dans le village de la R o d d e, d’une maison en valeur au
moins de 300 francs? N ’est-il pas justifié, par le contrat
de mariage de
1751que la mère de Jeanne Mabru étoit
riche dans sa condition ? Sa fille ne peut donc pas être
si malheureuse : tant d’autres avant elle ont tenu le même
langage, et n’ont pas réussi ! les appelans, sans doute,
éprouveront le même s o rt, et la justice ne tolérera pas
plus long-temps leur injuste détention.
M. C O I N C H O N - L A F O N T , rapporteur.
M e. D E V È Z E , avoué.
A RIOM, de l’imprimerie de L andriot, seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Fructidor an 13.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Geneix, Michel. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Coinchon-Lafont
Devèze
Subject
The topic of the resource
communaux
preuves de possession sans titre et avec titre
moulins
bail verbal
droit de mouture
quittances
syndics
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse à observations pour les habitants de Chanzelles et Ousclaux, commune de la Rodde, Michel Geneix, et Jacques Juliard, leurs syndics, intimés ; contre Jeanne Mabru et Jacques Arfeuil, son mari, appelans.
Annotation manuscrite: « Le 4 fructidor an 13, 2éme section. Jugement déclare non avenue les dispositions interlocutoires de la sentence du 20 octobre 1781, et confirme quant au surplus, mais à la charge de rembourser aux appelants les montants des constructions et réparations faites au moulin depuis 1727 suivant estimations. »
Table Godemel : Désistement - Commune : 2. dans une instance en désistement, formée par les habitants d’une commune ut singuli, qui ont obtenu gain de cause devant les premiers juges, le corps commun des habitants a-t-il pu intervenir régulièrement après l’appel, pour soutenir le bien-jugé, lorsque la reprise d’instance avait été ordonnée du consentements des appelants, par un arrêt contradictoire ? le possesseur, obligé de se désister, a-t-il droit à être indemnisé des réparations et constructions par lui faites ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
Circa 1708-Circa An 13
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
17 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1524
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1521
BCU_Factums_G1522
BCU_Factums_G1523
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53264/BCU_Factums_G1524.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Larrode (63190)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail verbal
communaux
droit de mouture
moulins
preuves de possession sans titre et avec titre
quittances
syndics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53265/BCU_Factums_G1525.pdf
737828e292a07440196a88416b1c53c2
PDF Text
Text
¿>11
M E MO I R E
D ’A P P E L
P o u r M e. J e a n - F r a n c o i s G U E F F I E R - T A L E Y R A T ,
avocat, juge suppléant du tribunal d’arrondissement de
la ville, de B rioud e, appelant, d’un jugem ent re n du au
m ê m e tribunal,, ,Ie; 2 1 m essidor an12
Cont re G u i l l a u m e C H A Z E L E T e t J e a n n e V E R N I E R E S , sa fe m m e , de lu i a u to r is é e P i e r r e
G R E N I E R et M a r g u e r i t e V E R N I E R E S ; sa
f e m m e de lui autorisée ; F r a n ç o is L A M O T H E et
A n n e V E R N I E R E S s a f e mme d e l u i autorisée ;
les trois fem m es V E R N I E R E S héritières de
J e a n l e u r père ,
E t encore contre J e a n V E R N I E R E S négociant *
J a c q u e s V E R N I E R E S et M a r i e - A n n e V E R N I E R E S , autorisée en justice -• J e a n - B a p t i s t e J u l i e n B O R E L , son m ari ; A n n e V E R N I E
R E S , autorisée en justice ,F é r é o l R O U G I E R ,
so n m a ri tous héritiers de J a c q u e s. V E R N I E R E S
leur père et beau-père aussi intim és.E n présente de M e. J a cque s G U E F F IE R -L E S P I ' ,JiN A S S E a n c ie n a v o c a t , D é f e n d e u r et d e m a n deur
en 'recours et garantie.
L A plus, grande difficu lté d e ce tte cause est d'y trouver
une question à r é so u d re .e lle est si sim ple dans ses détails ,
si facile dans sa décision , le droit d e M ° Taleyrat est
A
séant
a r io m .
----- -
.U' :
�é
113
\
.
.
-
‘
*
si certain et si é y id e n t, qu’on a tout lieu de s’étonner de
le vo ir figurér comme appelant.
; .. < •1
. *. '
ï !
1
< '! fi
i •}
/vT-iï.f 'J
F a its
i'-*i*?s '
ni;
«
'*"T - T '-wofI
i
>
M e. G ueffier-L èspinasse , lors dé son "mariage avec la
demoiselle B oye t d u 2 6 s e p t e m b r e 1 7 8 1 f u t institué
,héritier universel 'par d é f u n t l \ G ueffier-Lo n g p r é ,s o n
p è re. ; e n c a s d 'in c o m patibilité >. le ' p ère .délaisse à. son
.fils la jo u issa n ce d'un domaine appelé de Saint-L aure n t,
situé da n s les appartenances de, Brioude.
L e c a s d'incom patibilité. prév u étant ar r i v é , M l e s
p in a sse ,s e m it en
possession d es\ objets, q u i .lui, avoient
été délaissés ; et le 17 avril 1 7 9 1 , i l v e n d i t l 'entier
ta n t d e la m ê m e v ille d e B rio ude
,,
C ette vente fut; consentie } indépendamment des con
ditions dont il est inutile de s 'occupér , moyennant la
somme principale de 16000 fr J, stipulée payable à diffe-
rens termes e t q u e l e s acquéreurs.'s’obligent de-payer
en l’açquit et ,décharge du vendeur, au sieur .L am othe,
négociant à Clermont , ou à. tous autres porteurs des
billels de change originairement^ consentis par le vendeur
au profit du sieur M aigne , marchand à Brioude.
L e s a c q u e r e u r s e n p a y a n t a i n s i so n su b ro g é s de
plein 'd r oit à l'h yp o th èq u e acquise au sieu r L a m o the ou1
à c e u x q u i le r e p r e s e n te r o n t
*
�( 3 )
M '. Queffier-l^onggré pèrp", instrUjit^cle,
5CQ,tjH.'Pai .fpp
iVA-ijS,‘»fîS
•1jveote.,cony' ji Ci J t J
il?
sapcie, (m a g in ^ .je u ^ e jo,u«. a p rfc , ^ l , l ç , a o m ê j n f t
mois d’avril ,.,sans autre réflçxion , de vendre le même
domaine ..de SaintrLauyent,à, J ean, Yj^ftièjffSfy pptre, que
J aqques[? m o^nnant jpar^e^çpnty^eyge i^opçi jfy^,, et
sauf la jouissance de son fils jusqu’au d é cèsjjj^ g èi^ ^ le
prix de cette ¡ventent ^dit-çp ^tipuly* ;pgygijjlç.^vqfppté.
L e 20 mai 1791 y Jaçques Vemiè.|',es( cpaçqu.é^eur
de la dame. ¡Tale^rat, sej peymetj
poster, un j:pité
avec M e. Gueflier-Le^pinàs.se, cjç jM*rj ^oyer ^spj^yqaijpère. Gomme cet; acte ^ a it . naît£e-,k c o n te s ta tio n ç g t|
important de l’analise^ ji;)
j; (_i.)- ,f(; f}(î0.,
. Ar
Jacques Vernières y expose d’abord q.u’jî.a.acqu isle
dorriaine de^S^int-Laurent,, conjointement ajvee la dame
T a leyrat, mais" que cçtt^ d ern i^ e’, ' f a f f j p f â & & Î W i
luu M e.; L.espinpsse déclarejÇnsuifpJqii’i| a.jplu .à ison.pèxp.
de
-vendre
ce ..m
êm e. domaine
à. J é tf^ y e rn>!iè
re s-,
diti>
«. *J V» . • •
■l ' *
;' y:
,
> i './ » j U l h J i ] W
,>
11 * . ‘
Grçsjarne , mais sous des conditioqs ¿qui. np lui sont. paSj
encore0connues.r)On y^dit.jCnsuite,iq^’op.^.jCon^uijt^ des
hommes de,, loi .sur,,1a $la;V f^ d u .cçi^trat^(j e . mariage ,
portant délaissement, dp, la jo^ipsftpeç(.d£,<;e ^omiiipe , q,t.
qu’^l a été décidé, ;qujç.( s.iç.^r1(^ ^ ^ .pè^ê^av.y^^pu
vendre .valablement la . propriété, de .ce ^pmain^. ^mais.
que cette vente pe pouvoit pas prévaloir à çelle f^ite par.
lçj.fils, aji moins quant à, la j^ui^saqcç, pendant la ‘vie du
pèCQ. ,,r
.
ij,
T
‘
'
• T
r
■ !
1 0 :) I U J
>ul
. .ue sieur .Les^inasse l’econnoît qu’il p ’a. conspntijcette
vente en laveur du sieur Vernières , que pour se libérer
A 2
;
�^ \l
C4 3 '
. ,.. • , r
..
- «t .
envers le' 'sièur'Lamothe , banquier à C lerm ont, 'd’une
éoinm e' d é r o b é 1fr.” q u ’il lu i d o it eri v e r tu d ’u n e sentence
côrisiuiairejfÀ’nÜëé & it lé ttreà -d e qHàÏÏ^e'/Le sied* V c m iè r é s ’
ph'idît 1 crnifïâré^dlé 1 se lilie r e r 'dû "j^riic de ' la M érité, 'prïrCe'
q u ’il ne 'p o u v a it à la- r ig u e tir esp'éréï- d e r é u n ir la p r o
p r ié té à lfi jdtlissancé^, et i l v ' ô i t lti 'd roit 1d ’e x ig e r d u sieu r
L e s p i r i a s s é 'l i l l d u ;l ’ex'ecutîion rdu fco iitra t, o u des d om -’
r n a g ^ t ë r ^ " :j' ; n;'],i! r,î «,a
J
' i :j‘)l
A f)[ rl
' P q tir'd v fteï^ ’ ^ é t discussions”; Jles parties* tràn sig eh t.
’
i
P a r ù n p i'e m ié f tfrticle il est c o n v e n u q u e V e r riiè re s
fe^a üsag'e Jde Sbn 'con trht d ’a cq u isitio n p o u r la jouissance
d u ’d ôn ^ ijae tfe- S a in i-L h ù r è n t ,llq u i a p p a rtie n t-a u ' siéui*
ïj^ s^ rt^ fô é' i i r h ^ ^ q û ’a u ^ d é c y 'd u p è r e .
rr
P a r le secon d a rticle il est d it tjtïe^ lo rsq iië V ein i^ re^
sera priVé’'dy Îa jouissaÜce de cé’domaine, le sieur Glifci^ ¿ r: iilJj;l s’6Îjlfgiéi:dti,lm,<dbrtr1ier’des’fonds jiisqu’ù concur-
rb'ncè dè fla'^aleütf’* d ^
'èh 'prés / tcrres'et
V'i^ne^” dcins^e^
de la 'ville de ‘Dri'oude,
¿ môifis c(iie Guèffidi^ j/èrè'rid' lèi>' eVit'Viüs aliè’nés. Dans
ée cas, V ernie rek’ h'd,r p e u t!'exigcr de Gueffier fils que
Te" prix prîncipdT ¿t loyaux coiits du contrat de vente
payriMb, le 'dlts^àiT.'iVc'jntj'daris' ilds Théines 'terrhds stipulés
rfii Goritrit /e ’t*Îepbndant lés intérêts^ J à'cqueè VeWiitrcs
s^obllg^ de^rèîidrd^C^ Tonds à dire d’experts, qili sei’dn't
t'enlik 'de faire leur estimation en proportion et sur le
îôme pied quô l'es héritages du domain’^ Saint-Laurent:
ièn V/nfdndu'¿jué> si’cèüx1 qui'^sbrtttti! délaissés’en' reinplacement du domaine sont de meilleure ou plus mau4
vüise’cjiiûliic* ,'le sf,cicifôÿts' ,iicttrôi’it i'go¿d', '&] ¡¿d referont
tôujoiiis au; m6mcnt i ctiïcl.‘
�.( • 5 )
Par l’article trois les rparties’'prévoiént qu’il est pos
sible que Guelïier fils vienne à décéder avant son père,
qu’alors ses enfans ne voulüssènt 'point accepter sa suc
cession. Dans ce cas, le sieur Vernières', q u i'a payé la
créance du sieur Lamotlie,''montant à i 5 ooo francs, et
qui payera au sieur Gueilier le surplus du- prix de la
vente1, se trouveroit en danger de perdre le prix (du
contrat; L e sieiir Boyer iütetvien tpou r le tranquilliser,
et corisënt c/ue^le sieurVernières 'pitisse, après son dé
cès et celui de'là dame son ^épouse, contraindre ses hé
ritiers à lui rembourser le prix entier du contrat, en
semble les loyaux' coûts et intérêts qui auroient lieir, à
compter de s o n désistement',Msauf à Boyër, ou A ses re
présen tans j:son recours sur la succession 'de Gueffier 'fils.
'E n fiii, par un dernier article, il est stipulé que dans
le cas où Jean V ernières, Gro.sjam e, se départirait de la
vente a lui. consentie par le sieur de Longpré p è re , ou
que même il ■voulût se contenter, de la moitié du domaine,
1
l
T
Jacques Vernières accueillera cette dernière proposition ;
et qu’alors , conservant la propriété de l’autrtí m oitié,
de l’aveu et consentement de V ern ières, G r o s j a m e les
trois articles précédens demeureront nuls et sans effet
vis-à-vis toutes les parties. !
,
1
T e l est le singulier traité souscrit par Jacques V er-1
nières, qui s’est permis de déclarer que la daine Taleyrat
4
n’avoit stipulé que pour lu i, lors de la vente du 17 avril
1791. Assertion mensongère, puisque la dame Taleyrat
n a jamais eu-aucune connoissance de ce traité, et qu’elle
avoit réellement acquis pour sou compte la moitié du
domaine de Suim-Laurent.
�( 6 )
- Indépendamment de ce que le contrat du 17 avril en
fait foi , il y a bien moins de doute, d’après les actes qui
ont eu lieu-successivemcnt entre Jacques Vei'nicres et
Ja dame. Taleyrat.
/ -m. ,
...
r
>
En effet, le i 5 janvier 1792, il a été passé un acte sous
seing privé entre la dame Taleyrat et Jacques Vernières,
« par lequel les rparties reconnoissent être .venues, à
« compte des sommes par elles respectivement payées,
« pour lç, prix de l’acquisition qu’elles ont faite en
a so ciété , par in d ivis, sauf à procéder ultérieurement
« au partage de l’entier domaine de S ain t- L au ren t,
« situé au territoire et appartenances delà ville deBrioude,
a età elle vendu par Antoine Guefïier-Lespinasse, par con« trat reçu Biffe et son confrère, notaires; ù Brioude, le 17
« avril 1791.» Ce sont les expiassions de l’acte. Il est ajouté
que les parties se sont réciproquement fait raison de ce que
l’une d’elles se trouvoit avoir avancé plus que l’autre,
dans les circonstances des différons payemens. IL demeure
pour"avoué qu’elles ont, de part et d’autre, fait égale et
môme dépense, soit pour la passation de l’enregistrement,
soit pour le payement des épingles, soit enfin relati
vement à l’acte reçu D em ay, notaire à Clerm ont,-le
2.mai 179 1, portant subrogation, au profit de Vernières,
du montant, de la créance acquittée au sieur Lam othe,
négociant à Clerm ont, en vertu de la délégation portée
par le contrat de vente, et du consentement exprès du
sieur LespiuasscYainsi que tous autres frais et faux frais,
tels que voyages, ports de lettres, etc. etc.
M ais, comme il résultait de l’acte du 2 mai 17 9 1, reçu
D em ay, notaire, (autre que celui du môme jo u r, sous
�(
?
)
seing p r iv é , et dont il n’est fait nulle-mention ) , que
Jacques Vernières iavoit payé seul, au;sieur Lamothe,
la somme de iôooo francs montant.de sa créance, suiyant
la liquidation faite entre les sieurs LespinasseetLamothe,
Vernières; déclare qu’il, est dans l’exacte vérité qu’il
-reçù ide>la'damé, Taleyratçune somme de. 6009 fi;ancs|,
•pour j satisfaire aux ; en^agemens particuliers, d’entvp
:Lamothé ,ét lu i; que -la t subrogation consentie ,comme
dessus;, doit profiter également à la dame T aleyrat, con
curremment avec lui. Vernières reconnoît de plus que,, la
dame T aleyrat, pour se. libérer, à'son égard des gommes
qii?ili a,)pâÿées oujpromis-ide payer au sieur Lam othe,
ien déduction-du [prix devl’flcqujsitipn commune, jusqu?à
concurrence’ de la somme totale de i 5ooo francs , la dame
Taleyrat ne devra plus qu’une somme de iôoo francs,
q u i, jointe à celle de 6000 francs par lui déjà reçue,
.forme laî juste Jnoitié du montant de la créance du sieur
Lam othe.r
<•,; .
'
^.
Vernières déclare encore qu’il a terme jusqu’à la Noël
lors prochaine, sans intérêts, pour solder au sieur Lainothe
les obligations personnelles qu’il lui a consenties. Il est
convenu, que la dame Taleyrat ne comptera la somme
de i 5oo ;francs qu’au i 5 décembre lors prochain, et la
dame Taleyrat s’y oblige expressément.
Jacyw eiVernièresprom et faire jouir la dame Taleyrat,
en tout c e (qui pourra le concerner , de l’effet de la su
brogation , de passer à la première réquisition toutes dé
clarations y relatives, et à-frais communs, pour,attester
en telle forme que de d roit, la vjérité et l’objet des payemens u lui faits par la dame T aleyrat, eu vertu des pré-
�r:
yf
'
(
8
)
'tfédentes conventions , pour-» le désintéresser desjobliga-tions fqu?il avoit 'contractées ’personnellement envers le
sieur Lamothe en l’absence de la dame Taleyrat.x.oEnfin , les parties déclarent réciproquement qti’elles
n’entendent déroger, ni innover en aucune manière h
•la teneui* du cônti'at de vente, et!aux actionsfquiien-résul
tent*; elles sé’ promettent respectivement dè<sùffirer<pnr
portion égale, soit au surplus du prix de l’acqùisitibn , qui
est la somme d e1 iooo f r . , soit à tous autres frais et faux
frais q u ’il conviendra faire, et dont elles demeureront
d’accord pour suivre l’effet de la vente; •
‘
>
*
L e i 5 juillet suivant, et p aru n autre acte fait double ,
Jacques Vernières reconnoît que la dame' Taleyrat lui
a compté et payé ce môme jo u r , pari anticipation, la
somme de i 5oo fr. pour parfaire la moitié de celle de
i 5ooo fr. qu’il s’étoit obligé de payer au sieur Lam othe,
ainsi qu’il est expliqué au traité’'qui-précède ; et , en con
séquence de ce payement anticipé, la dame Taleyrat
demeure définitivement quitte et libérée envers lui. V er
nières reconnoît qu’il est seul tenu de payer au sieur
Lrtmothe’ les 3000 fr. 'au terme du 24 décembre pror
cha’in , et que la dame Taleyrat a contribué, par portion
égale'avec lui,, à l’acquittement de l’entière créance du
sieur Lam othe, qui se portoit à 1Ô000 francs, ainsi qu’il
est énoncé au truité.
v .
" 'O n vô it, d’après-ces acteà successifs qui ont été enre
gistrés et déposés, quelle confiance mérite l’énorieiption
contenue au traité du 2 mai 17 9 1, que la dame Taleyrat
n’avoit stipulé que pour Vernières lors du contrat d’ac
quisition du 7 avril précédent.
Les
�Les clioses ont resté en cet état jusqu’au décès du sieur
Gueflier-Longpré pèi’e. A cette ép o q u e, et par exploit
du 14 nivôse an 1 2 , Jean V ernières, Gi'osjame , après
avoir épuisé les voies de la conciliation , fit assigner
Me. G uefïier-Taleyrat, fils et héritier de la dame Gueffier-Taleyrat, ainsi que les héritiers de Jacques V e r
nières , pour être condamnés au désistement du domaine
de Saint-Laurent , dont ils étaient en possession en vertu
de la vente consentie par Gueilier iils, le 17 avril 1791.
Mais Jean V ern ières, Grosjarne , étant décédé, il fut
passé un traité le 26 nivôse an 12 , entre Jean Vernières,
fils et héritier institué de Jemi , et le sieur GueffierLespinasse. Par ce traité , qu’il est important de conn o ître, les parties rendent compte des deux ventes qui
ont été consenties du domaine de Saint-Laurent, l’une
par le fils G uefïier, et l’autre par le père. On y expose
que Jean Vernières avoit fait assigner M \ GuefïierTaleyrat et les héritiers de Jacques Vernières en désis
tement; que M\ T aleyrat, et les héritiers de Jacques
V ern ières, avoient annoncé au bureau de conciliation
qu’ils jouissoient du domaine de Saint-Laurent en vertu
de la vente du 7 avril 1791 ; qu’ils se proposoient de
dénoncer la demande eu désistement au sieur GueflierLcspinasse, et que Jean Vernières se proposoit à son
tour de dénoncer ces exceptions au sieur Lespinasse ,
de demander qu’il fut tenu de garantir, fournir et faire
valoir la vente consentie par le sieur Gueilier père , et
a se desister ou faire désister les héritiers de Jacques
Vernières de ce même domaine.
L e sieur Gucllier-Lespinasse vouloit opposer que son
B
�0
r io
v
7
i
t
cj
'
^( i o )
père lui avoit donné, dans son contrat de m ariage, la
jouissance de ce domaine de Saint - Lauren t ; qu’ayant
institué son fils héritier universel, cette institution lui
assuroit la propriété de ce domaine après la mort de son
père. Ce dernier, suivant le sieur Lespinasse, n’avoit pas
pu l’aliéner : cette vente étoit faite sans m otif, sans né
cessité; le père n’avoit eu nul besoin de vendre, et n’avoit
pas même reçu le prix de la vente. Néanmoins les parties
trans'gent : il est arrêté que la vente consentie par le
sieur Gueflier père, au profit de défunt Jean Vernières,
ne sortira effet que pour moitié seulement, et qu’en con
séquence le domaine de S ain t-L au ren t, tel qu’il étoit
énoncé dans le contrat de vente, sera partagé par moitié
entre les parties, en l’état où il se trouve actuellement,
et avec les améliorations ou détériorations qu’il peut
avoir subies.
■Jean Vex*nières est dispensé de rien payer du prix de
la vente; le sieur Gueflier-Lespinasse le tient quitte et
promet l’en faire tenir quitte envers la succession de son
père : la moitié du domaine doit rester à Jean Vernières,
franche et quitte, et sans autre charge de sa part que de
ne pouvoir répéter les frais de vente et les droits de lods
qu’il peut avoir acquittés à raison de la vente du 20
avril 1791.
L e sieur G ueffier-Lespinasse s’oblige de faire désister
de la m oitié de ce dom aine M°. Taleyrat et les héritiers
de Jacques V ernières.
Jean Vernières consent que le sieur Gueffier-Lespinasse jouisse par lui ou ses acquéreurs de l’autre moitié
du domaine ; il s’en départ expressément, soit au profit
�6 z \
de Lespinasse, soit au profit de ses acquéreurs, ainsi que
le sieur Gueffier-Lespinasse avisera et jugera lui être le
plus avantageux.
. Il paroît qu’après ce traité J ean V ern ières, fils d’autre
Jea n , a transigé avec ses cohéritiers légitimaires, et leiir
a délaissé, pour leur tenir lieu de leur portion hérédi
taire, la moitié du domaine de Saint-Laurent, qu’il devoit
conserver d’après le traité du 26 nivôse, dont on vient
de rendre compte. C’est alors que ces enfans légitimaires
de défunt Jean Vernières, par exploit du 21 ventôse
an 12 , ont repris l’instance pendante, sur la demande
formée le 14 nivôse précédent, contre M V Taleyrat et
les héritiers de Jacques V ernières, et ont conclu à ce
que les uns et les autres fussent condamnés à se désister
de la moitié du domaine dont il s’agit, d’après la con
vention faite entre Jean Vernières, leur frère, et le sieur
Gueffier-Lespinasse; qu’en conséquence les parties fussent
tenues à venir à division et partage du domaine, pour
leur en être délaissé la moitié.
Les sœurs de Jean Vernières ont également assigné
le sieur Lespinasse pour faire effectuer le désistement de
cette moitié.
M e. T aleyrat, à son tour, ainsi que les héritiers de
Jacques Vernières, ont formé une demande en recours
et garantie contre le sieur Gueffier - Lespinasse ; et ce
dernier de son côté, qui ne peut contester la garantie de
M c. Taleyrat, a form é, contre les héritiers de Jacques
V ernières, une demande en contre-recours qu’il entend
iaire résulter du traité du 2 mai 1791 , dont il dit avoir
executé littéralement les dispositions.
B 2
�( 12 )
• Toutes ces demandes ont été jointes. Les héritiers de
Jacques Vernières ont déclaré que leur intention n’étoit
pas de contester formellement la demande formée par
les héritiers de Jean Vernières; mais ils ont dit que dans
le cas où cette demande seroit adjugée, et qu’on se décideroit à prononcer l’éviction partielle du domaine de
Saint-Laurent, cetfe éviction devoit être ordonnée tant
contre eux que contre M e. Taleyrat, et qu’alors M?. Guefiier-Lespinasse ne pouvoit leur refuser des dommagesintérêts. Les héritiers de Jacques Vernières ont cherché
à critiquer le tx’aité du 2 mai 1791 ; suivant eux cet acte
ctoit nul de nullité viscérale et absolue, il respiroit le
dol et la fraude, et le sieur Lespinasse ne pouvoit le leur
opposer.
Ce traité, d iso ien t-ils, a été fait le même jour où
Jacques Vernières avoit payé iôooo francs au sieur L amothe, en décharge du prix de son acquisition; s’il eût été
sincère, il pouvoit être exécuté le lendemain, Jacques
Vernières pouvoit être dépossédé de la moitié du domaine
qu’il avoit acquis, perdre la totalité des sommes qu’il
avoit payées : or, on ne peut supposer que Jacques V ernièx*es ait pu abandonner tout à la fois un domaine con
sidérable qu’il venoit d’acheter, et sacrifier gratuitement
i 56oo francs qu’il avoit déjà payés. D e tels sacrifices,
disent-ils, ne sont pas naturels, ils sont extraoxxlinaires,
et ne s’expliquent que par le dol dont on a usé envers
leur père.
Ils représentent leur père comme un cultivateur illitéré , qui savoit à peine mettre son nom en lettres majus
cules , sans liaisons, et d’une manière très-facile pour lc*9
contrefaçons.
j
�( *3 )
Suivant eux, et sur les quatre articles du traité, les
trois premiers sont extrêmement favorables à Jacques
Verni ères ; le quatrième lui est seul contraire, et annulle
tous les autres. Il est probable qu’en mettant sa signa
ture, il n’a entendu approuver que les trois premiers
articles; que le dernier ne lui a jamais été lu , et qu’il
a signé absolument de confiance.
Les héritiers de Jacques Vernières font à M e. Taleyrat
père l’injure de prétendre qu’il étoit présent à cet acte,
et qu’il a demeuré dépositaire du double qui revenoit
à Jacques V ernières, jusqu’en 1804.
trouvent éton
nant que dans le préambule de ce traité on ait fait
dire à Jacques Vernières qu’il traite pour lui seul, et
que bientôt 011 lui fait dire que la dame Taleyrat n’a
acquis que pour lui. Jacques Vernières, qui n’avoit
acquis que depuis onze jours, p o u vo it-il avoir oublié
que son contrat d’acquisition ne le désignoit que comme
acquéreur d’une m oitié, et la dame Taleyrat pour l’autre
moitié. S’il l’avoit o u b lié, le sieur Lespinasse ne devoitil pas s’en rappeler. Cet acte contient donc des faits faux,
dont la relation ne peut être attribuée à Jacques V e r
nières, pas plus que le surplus de l’acte.
Les héritiers de Jacques Vernières proposent ensuite
trois moyens de nullité contre cet acte ; i°. c’est un acte
sous seing privé qui détruit l’effet d’un acte notarié , une
véritable contre-lettre, nulle d’après les dispositions de
la loi du 22 frimaire an 7 ; 20. cet acte est n u l, d’après
les déclarations des 30 juillet 1730 et 22 juillet 1733?
qui exigent une approbation entière et écrite eu toutes
lettres de la main de celui qui a souscrit le billet ou la
L
�C *4 )
promesse; 30. cet acte ne-peut être considéré que comme
une vente ou département de v e n te ,'q u i n’a ni p r ix ,
ni consentement : enfin M e. T aleyrat, dans tous les cas,
ne pourroit pas se plaindre de cet acte, puisque par le
traité fait double, du i 5 janvier 1792 , il y est dit que
la dame Taleyrat étoit associée par indivis avec le sieur
Vernières pour cette acquisition ; et dès-lors l’associé
oblige sou associé pour tout ce qui est relatif à la société.
L a réponse de M \ Taleyrat a été simple; il a dit que
par l’acte du 17 avril 1791 le sieur Lespinasse avoit
vendu le domaine de Saint-Laurent à Jacques V ern ières,
et à la dame Taleyrat, avec promesse de garantir et faire
jou ir; que dès-lors chacun des acquéreurs devoit avoir
la propriété de la moitié du domaine. M e. Taleyrat a
ajouté que sa m ère, ni l u i , n’avoient dérogé par aucun
acte postérieur au droit qui leur étoit acquis ; qu’à la
vérité Jacques Vernières, par le traité du 2 mai 1791,
sembloit y avoir d éro gé, mais qu’il n’avoit stipulé que
pour lui ; que cet cet acte étoit étranger à M e. Taleyrat;
qu’il ne pouvoit lui nuire , ni lui être opposé ; et si
Jacques Vernières s’éloit permis d’énoncer dans cet acte
que la dame Taleyrat n’avoit stipulé que pour lui lors
de l’acquisition , cette é n o n c i a t i o n étoit fausse et sans
conséquence pour la dame Taleyrat, Il étoit d’autant plus
évident que Jacques Vernières n’avoit jamais entendu
rendre cet acte du 2 mai 1791 commun k la dame T a loyrat , que les parties en réglant définitivement leur
compte au sujet de cette acquisition, par acte du i5 jan
vier 1792 , Jacques Vernières n’avoit parlé en aucune
manière du traité du 2 mai précédent ; bien au cou*
�( 15 ) -
traire, l’acte du i 5 janvier 1792 porte une réserve ex
presse et réciproque de tous les droits qui étoient acquis
aux parties par le contrat d’acquisition, du 7 avril 1791 ;
elles y déclarent expressément qu’elles n’entendent dé
roger ni innover en aucune manière à ce contrat : dèslors le traité du 2 mai ne pouvoit être opposé à M '.
Taleyrat iils.
L ’assertion des héritiers d e 'J acques V ernières, de la
présence de M*. Taleyrat père à cet acte du 2 m ai, étoit
une calom nie, une injure gratuite, et M*. Taleyrat fils
le désavouoit expressément.
Il étoit au surplus ridicule de soutenir .que la dame
Taleyrat étoit engagée par le traité du 2 m a i, parce que
dans l’acte du i 5 janvier 1792 il y étoit dit que la dame
Taleyrat avoit acquis ce domaine en société par indivis.
On sait qu’entre deux acquéreurs qui achètent concur
remment et sans distinction de portion , ils sont censés
acquérir chacun pour moitié ; il n’y a d’autre société que
dans l’indivision , et jusqu’au partage ; et cette société 11e
peut engager les parties que pour ce qui concerne le
payement et les conditions de l ’acquisition : mais il seroit
absurde de prétendre que l’un d’eux pût se départir ou
déroger à l’acquisition au préjudice de l’autre.
Enfin, M e. T aleyrat, sans vouloir contester aux héri
tiers de Jea n Vernières la moitié du dom aine, soutenoit qu’au moins il devoit seul garder l’autre m oitié, et
que le désistement en faveur des héritiers de J can ne pou
voit porter que sur la portion des héritiers de Jacques.
I æ sieur Gueflier-Lespinasse a répondu, que d’après le
traite du 2 mai 1 7 9 1 , la demande en garantie formée
�( 16 )
pai’ les héritiers de Jacques Vernières ne pouvoitse sou
tenir ; que ce traitécontenoitdes conventions qui n’avoient
rien de contraire aux lois ni aux bonnes mœurs; que nonseulement il devoit avoir son exécution, mais qu’il entraînoit môme la garantie de la demande en recours formée
par M e. Taleyrat contre le sieur Guellier.
L e sieur Gueflier-Lespinasse, au surplus, n’a point con
testé , ou du moins n’a proposé aucun moyen contre la
demande en recours qui avoit été formée contre lui par
M e. Taleyrat.
C’est en cet état que la cause a été portée, entre toutes les
parties, au tribunal de Brioude, le 21 messidor an 12 , et il
y est intervenu un jugement contradictoire, qui condamne
les héritiers de Jacques Vernières et M e. Taleyrat à venir à
division et partagea vecles héritiers de Jean Vernières, du
domaine de Saint-Laurent, pour en être délaissé la moitié
ces derniers , avec restitution de jouissances, à compter
de la demande, jusqu’au réel désistement, à dire d'experts,
en la manière ordinaire, avec les intérêts de ces mêmes
jouissances , à compter de l’époque de leur perception
jusqu’au payement.
Il est ordonné que l’autre moitié du domaine restera
aux héritiers de Jacques Vernièresetde la dame Taleyrat,
pour être, ladite m oitié, partagée entre eux par égalité.
_L e sieur G uciIier-Lespiuasse est condamné à rembourser
aux héritiers de Jacques Vernières, et à M \ Talevrat,
la moitié du prix de la vente du 17 avril 1791 , ensemble
les intérêts de la som m e, à compter de la demande jus
qu’au payement.
Sur les demandes eu recours et contre-recours, les
parties
�'
fïV
( *7 )
. x
parties sont mises hors d’instance ; et comme le sieur
Lespinasse est en demeure de payer la moitié duprix.de
la vente, il est condamné aux dépens envers toutes les
parties.
. .
Les motifs de ce jugement sont, i °. que le sieur Gueffier
père n’avoit donné à son fils que la jouissance du domaine
de Saint-Laurent ; qu’ainsi la propriété a toujours résidé
sur la tête du père. Lespinasse fils , par le contrat de
vente du 17 avril 17 9 1, n ’a donc pu vendre que la jouis
sance de ce domaine.
l,e sieur Gueffier p è r e , qui étoit toujours demeuré
propriétaire, a transmis, par la vente du 20 avril, a Jean
Vernières, la propriété de ce môme domaine.
20. Par le traité qui a été passé entre Gueffier-Lespinasse et Jean Vernières , 1e 26 nivôse an 1 2 , la vente
faite à Jean Vernières père ne devoit sortir effet que
pour la moitié ; et Lespinasse s’obligeant à faire désister
de cette moitié les héritiers de Jacques Vernières , n’a
fait qu’user du droit qui lui étoit acquis par l’article. 4
du traité du 2 mai 179230. Par ce traité passé entre Vernières et Lespinasse,
ce dernier n’a disposé que de la moitié du domaine, et
l’autre moitié demeure aux parties qui ont acquis de lui.
4°. Dans le traité sous seing p r iv é , passé entre la dame
Taleyrat et Jacques Vernières le i 5 janvier 1792, Ja c
ques Vernières et la dame Taleyrat sont venus à compte
des sommes par eux respectivement payées pour solde de
l’acquisition qu’ils avoient faite en société et par indivis.
Il
résulte de cette énonciation , que Jacques Vernières
étoit associé de la dame Taleyrat. Cette qualité n’a point
C
�c ,i 8 )
été contestée, et par conséquent Jacques Vernières n’a
pu stipuler qu’en cette même qualité dans le traité du
2 mai 1791.
M*. Taleyrat a interjeté appel de ce jugement. Les
héritiers de Jacques Vernières s’en sont également rendus
appelans, et toutes les parties sont en présence.
Les héritiers de Jacques Vernières ont amèrement
critiqué le traité du 2 mai 1791 ; mais ils ne peuvent
adresser cette censure qu’à ceux qui sont partie en cet
acte, et notamment à M*. Gueflier - Lespinasse : il est
étranger à M ’. Taleyrat. C’est contre M*. Lespinasse qu’ils
feront ju g er, s’ils le peuvent, que la loi du 22 frimaire
an 7 peut annuller un acte du 2 mai 1791 , qui lui est
antérieur de huit ans ; qu’ilsferont juger aussi q u e, d’après
la déclaration de 1733 , un marchand qui sait à peine
signer doit mettre une approbation en toutes lettres au
bas d’un acte, malgré les exceptions nombreuses de cette
déclaration , qui s’appliquent particulièrement aux gens
illitérés. Mais comme le sort de cet acte est indifférent
pour M*. T aleyrat, il ne doit pas s’en occuper, si ce n’est
pour repousser par une dénégation formelle l’assertion
calomnieuse de la présence de son père à cet acte.
Comment seroit-il croyable que M°. Taleyrat père eût
autorisé par sa présence les conventions insérées dans cet
acte , lorsqu’elles blessoient aussi évidemment la vérité
et les intérêts de la dame son épouse ; lorsque surtout
on voit Jacques Vernières déclarer que la dame Taleyrat
■riavoit stipule quepour ha dans la vente du 8 avril 179 1,
tandis qu’il est prouve qu’à cette même époque la dame
Taleyrat avoit compté a Jacques Vernières la somme de
�( 19 ) '
6ùoo fr. faisantsa portion de la créance du sieur Lamotlie,
qu’elle avoit été déléguée à payer par le contrat de vente?
Gomment auroit-elle donné cette somme , si elle n’àvoit
stipulé que pour Jacques Vernières? Comment M e. T a
leyrat lui-même , qui devoit naturellement veiller aux
intérêts de son épouse , et à la sûreté de ses deniers,
auroit-il consenti à ce qu’elle versât une somme aussi
considérable sans avoir la certitude de la recou vrer, ou
de conserver l’immeuble qui en étôit le p rix ? T out est
absurde dans cette supposition ; et dès-lors les héritiers
de Jacques Vernières ne peuvent opposer à M e. Taleyrat
fils un acte auquel sa mère , ni lui , n’ont participé en
aucune manière.
Ce seroit d’ailleurs revenir contre le propre fait de
Jacques Vernières, qui, dans le traité du i 5 janvier 1792,
n’a pas dit un seul mot de cet acte sous seing privé , du
2 mai 1791 : au contraire, il a déclaré qu’il n’entendoit ni
déroger, ni innover à la vente du 17 avril; il a reconnu,
par cet acte, le droit de la dame Taleyrat sur les im
meubles vendus ; il déclare avoir reçu la portion de la
dame T aleyrat, moins une somme de i 5oo francs. Bientôt
après , et le i5 juillet suivant, il reconnoît avoir reçu
cette dernière somme par anticipation, quoique la dame
Taleyrat ne dût la payer qu’au mois de décembre sui
vant. V oilà donc un engagement bien précis de la part
de Jacques Vernières; il ne peut revenir contre son
propre f a it , et ses héritiers sont obligés de respecter ses
eugagernens. Il est donc maladroit de la part des héri
tiers de Jacques Vernières d’argumenter contre M \ T a
leyrat du traité du 2 mai 1791. Cet acte est pour lu i,
C a
�( 20 )
res inter alios acta ,* il ne peut lui nuire, ni lui pré
judiciel*, quand bien môme il n’üuroit pas en sa faveur
un titre subséquent qui détermine avec tant de précision
ses droits et sa portion dans le domaine dont il s’agit.
Comment donc concevoir le jugement dont est appel,
qui prive M e. Taleyrat de la moitié du domaine qui lui
. étoit acquise. A van t d’en examiner les motifs, il est essen
tiel de résumer en peu de mots la défense des parties.
O n remarque d’abord une singulière contradiction
dans les moyens des héritiers de Sacques Vernières ; ils
ne contestent pas la demande des h é r i t i e r s de J ea n , ten
dante à obtenir la moitié du domaine dont il s’ a g i t : c'est
approuver par là l’article 4 du traité du2m ai 1791 ; car ce
n’est qu’en vertu de l’article 4 de ce traité , que Jacques
Veruières devoit se contenter de la moitié du domaine,
si le sieur Lespinasse pou voit parvenir à faire désister
Jean Vernières de l’autre moitié. L e sieur Lespinasse y
est parvenu par le traité de nivôse an 12: l’héritier de
Jean Vernières a abandonné la moitié du domaine; donc
les héritiersde Jacques,en donnant les mainsà la demande
des héritiers de Jean, approuvent et exécutent l’acte du
2 mai 1791 , même dans la partie qu’ils ont le plus amè
rement critiquée. 11 faudroît être conséquent avec soimême; car, si l’acte du 2 mai 1791 est subrepiiee, s’il est
reflet de la fraude, du dol ou de la séduction, i l ne doit
pas en rester de traces, et dès-lors les héritiers de Jacques
ont une action certaine contre le sieur Lespinasse iils,
pour lui faire executer la vente du 17 avril 1791 , dans
sou intégralité, ou pour obtenir des doinmages-intérêts
en cas d’inexécution.
�0
C « )
Mais les héritiers de Jacques Vernières , toujours con
tradictoires dans leur système, reconnoissent encore que
la dame Taleyrat n’a pas stipulé pour Jacques dans cette
vente, et qu’elle a acquis pour elle et par moitié. En effet,
en même temps qu’ils donnent les mains à ce que les hé
ritiers de Jean Vernières prennent la moitié du domaine,
ils consentent aussi à ce que la dame Taleyrat partage
l’autre moitié avec eux. Cependant, si la dame Taleyrat
n’avoit stipulé que pour Jacques , elle n’y amenderoit
aucune portion ; la moitié délaissée par Jean Vernières
devroit appartenir toute entière aux héritiers de Jacques.
Combien d’inconséquences échappées à ces derniers! et
peuvent-ils être écoutés favorablement, lorsqu’ils viennent
ensuite attaquer le traité du 2 mai 1791, traité qu’ils exé
cutent de prime abord , sans s’apercevoir de leur erreur?
M e. Taleyrat, au contraire, s’est contenté de dire qu’il
n’entendoit élever aucune contestation contre les héritiers
de Jean , qu’il ne connoissoit pas, pourvu qu’il eût à lui
seul la moitié du dom aine, parce que cette portion devoit
lui appartenir exclusivement, d’après la vente du 17 avril
1 7 9 1 , dont il demandoit l’exécution. Il n’étoit lié par
aucun acte qui eût dérogé à cette yente ; au contraire,
les actes successifs et géminés que la mère avoit passés
avec Jacques Vernières ne tendoient qu’à la maintenir
et à la confirmer. Rien de plus simple que cette défense :
il ne pouvoit s’élever l’ombre d’un doute sur les droits
de M e. Taleyrat.
Maintenant quels motifs peuvent a v o ir déterm iné les
premiers juges à réduire la portion de M°. Taleyrat à un
quart de ce d o m a in e , lorsqu’il étoit si é v id e m m e n t'p ro -
�priétaire d’une moitié? Ils disent que Gueflier père n’avoit
donné à son fils que la jouissance de ce domaine ; que
son fils n’a pu vendre que cette jouissance, au lieu que
le père a transmis la propriété à Jean Vernières par la
vente postérieure qu’il a consentie.
O n ne voit pas trop quelle conséquence on peut tirer
de ce premier motif. En admettant que Gueffier fils n’eût
que la jouissance du domaine, il en avoit cependant aliéné
la pi’opriété, avec promesse de garantir et faire valoir:
il étoit donc bien au moins garant de l’éviction, et il étoit
tenu de faire jouir ses acquéreurs , ou au moins des doinmages-intérêts qu’auroit pu entraîner une éviction , si ses
acquéreurs avoient été dépossédés.
Cette garantie pleine et entière que devoit M e. Lespi
nasse fils , a été modifiée par le traité du 2 mai 1791 ;
mais vis-à-vis de qui ? vis-à-vis de Jacques .Vernières
seulement, l’un de ses acquéreurs, et non à l’égard de
la dame T aleyrat, avec laquelle il n’a pas traité.
Si dans la suite, et par l’acte du 26 nivôse an 12 , il
a été convenu que la vente du 20 avril 1 7 9 1 , consentie
par le p ère, ne sortiroit effet que pour m oitié, d’autre
m oitié,qui rentroit dans les mains de Lespinasse, devoit
nécessairement appartenir à M°. Taleyrat.
Mais le grand moyen, le m otif unique qui paroît avoir
déterminé les premiers juges, résulte, suivant eux , du
traité du i 5 janvier 1792. Par ce tra ité , disent-ils,
Jacques Vernières et la dame Taleyrat sont venus à
compte des sommes par eux respectivement payées pour
les frais de l’acquisition qu’ils avoient faite en société et
par indivis. Cette énonciation , est-il ajouté, prouve que
�( 23 )
Jacques Vernières étoit associé de la dame Taleyrat :
cette qualité n’a point été contestée ; il n’a donc pu
stipuler .qu'en cette même q u a lité , dans le traité du
2 mai 1791.
Ici les erreurs s’accumulent , les principes sont mé
connu?: on abuse évidemment des mots.
On distingue en droit plusieurs espèces de sociétés. La
société légale ou conventionnelle, la société générale ou
particulière. La société en effet peut se contracter d’une
seule chose, ou d’un certain trafic , ou de tous les biens;
des cohéritiers sont réputés associés entre eux pour les
choses qui composent l’hérédité com m une, tant qu’il y
a indivision; des coacquéreurs sont réputés associés pour
le fait de leur acquisition compiune , jusqu’à ce qu’il ait
été procédé au partage de la chose acquise : tels sont les
principes généraux qui ne seront sans doute pas con
testés.
C ’est dans la dernière classe , c’est-à-dire, dans celle de
deux acquéreurs en commun, qu’il faut placer M«. Talevrat
et les héritiers de Jacques Vernières : il ne peut y avoir
de doute sur ce point.
O r , quelle est la règle à cet égard ? quels sont les
principes en cette matière ? on les trouve dans la loi
M u ltu m , au Cod. 2 de commun, rerum alienatione. On
y voit que le coacquéreur peut vendre sa part indivise
a l’associé , même à un tiers ; mais aussi 011 y trouve que
celui qui vend une chose commune ne préjudicie pas à
son copropriétaire , et n’empêche pas qu’il ne puisse
revendiquer sa portion tamen portioni tu œ , dit la lo i,
ea venditio non yotest obsistere. Despeisses , toin. 1 ,
�)
tit. i , pag. 13 , édition in-40. , n°. 3 , dit que la venté
de la chose commune par indivis est valable pour la part
qui appartient au vendeur, bien qu’elle soit faite non en
faveur de Vassocié, mais d’un tiers; mais non pas pour
lit part de l’autre associé, bitu^jue la part de Y associé
ne soit qu’ une fort petite portion de la chose commune ,
et moindre que ne vaut la part du vendeur , comme il
a été jugé au parlement de Toulouse en l’an i y , arrêt
rapporté par Laroche-Flavin, liv. 6 , tit. 1. Despeisses
cite Ranchin en scs Décisions , partie 3 , et plusieurs
autres auteurs. En effet, il en est d’un coacquéreur comme
d’un cohéritier ; et a-t-on jamais entrepris de soutenir
qu’un cohéritier pouvoit vendre toute la succession, et
préjudiciel’ à ses autres cohéritiers? Si on a établi que le
cohéritier pouvoit , avant la demande en partage ante
motam controversiam , aliéner valablement jusqu’à concuri'ence de sa p a rt, ce n’a été que pour éviter le circuit
des actions. On fait dans ce cas échoir au lot du vendeur,
lors du partage, la portion par lui aliénée, mais ce n’est
jamais qu’autant qu’il n’a pas excédé cette part ; car s’il
a vendu au delà de ce qui lui x*evenoit, tous les jours
les acquéreurs se voient obligés de se désister de cet
excédent : telle est la jurisprudence constante qui est
fondée en raison.
(
2
4
5
8
M ais vouloi r prétendre q u ’ un coacquéreur qui a acheté
en com m un avec un ou plusieurs, parce q u ’il est associé
pendant l’ indivision , puisse aliéner au préju dice de ses
associés , et même vendre leur p o r t io n , ce seroit le com ble
de l’ a b s u r d i t é : c’est au moins le prem ier exem ple d ’ une
aussi singulière décision.
J acqitcs
�fo ;
( 25) Jacques V ernières, en achetant concurremment avec
la dame Taleyrat, et sans distinction de part, est devenu
propriétaire de la moitié des immeubles acquis jusqu’au
partage. Il a été associé avec la dame Taleyrat pour jouir
en commun, pour payer le montant d’une acquisition com
mune ; mais il n’a pu sans contredit vendre au delà de
sa portion ; il n’a pu retrancher ni préjudiciel* à son
associé. 11 n’a traité que pour lui ; il n’a pu stipuler comme
associé , engager son copropriétaire dans aucun cas , à
moins qu’il n’eût de sa part une procuration spéciale ,
un consentement exprès d’aliéner tout ou partie de la
portion revenant à son coacquéreur.
O n ne sauroit donc témoigner trop de surprise de
l’erreur grossière dans laquelle sont tombés les premiers
juges. Quelles conséquences funestes ne résulteroient pas
de leur système ! L e droit de propriété v io lé , les con
ventions incertaines, la méfiance et la crainte, en seroient
les moindres suites. O n le répète, il n’y avoit pas de
question dans la cause.
. Il peut se faire que Jacques Vernières se soit témérai
rement ou indiscrètement engagé par le traité qu’il a
passé avec le sieur I.espinasse et son beau -p ère; qu’il
n’ait pas senti la force de ces mêmes conventions; que ses
intérêts aient été compromis : cette discussion n’intéresse
pas M \ Taleyrat; elle reg'arde M e. Lespinasse. Jacques
Vernières n’a traité que pour lu i; la dame Taleyrat n’y
est pour rien, n’a rien autorisé , n’a rien connu. L e s actes
subséquens manifestent une constante volonté de sa part
de ne pas déroger à sa vente, d’en courir t o u s les évéuemens. Jacques Vernières y a souscrit lu i-m êm e; il a
D
•t è^
V
�(2 6 )
reçu les sommes nécessaires pour parvenir au payement
d es délégations. Que reste-t-il donc dans la cause ? Une
vente parfaite d’un domaine dans lequel M e. Taleyrat
amende moitié : cette moitié est libre ; le vendeur a au
jourd’hui titre suffisant pour cette moitié ; il est inutile de
remonter à l’origine pour savoir si, lorsque M Lespinasse
a vendu , il n’avoit que la jouissance, ou s’il avoit la pro
priété ; il l’a aujourd’hui ; elle est dans ses mains : M a.
Taleyrat qui l’a valablement acquise doit donc la conser
ver exclusivement.
D o it-o n , en cet état, s’occuper des demandes subsi
diaires en garantie, formées par M e. Taleyrat, tant contre
les héritiers de Jacques Vernières , que contre M .
Lespinasse ?
S’il est jugé q u e M e. Taleyrat doit avoir la moitié du
dom aine, les garanties n’ont plus d’objet ; on observera
seulement que M 0. Lespinasse n’a pas entrepris de con
tester celle qui a été formée contre lui par M . Taleyrat.
Cependant, sans autres motifs, les premiers juges ont mis
les parties hors d’instance , même sur cette garantie.
Quelle en est la raison? Il seroit difficile de l’expliquer:
tout est incompréhensible dans ce jugement; cependant
il n’y eut jamais de cause plus claire ni plus facile à
décider,
M , P A G E S (d e R iom ) , ancien avocat.
M°. C R O I Z I E R , avoué.
A R IO M , de l' im prim erie de L a n d r i o t , seul im prim eur de la
Cour d ’appel.
,
,
^ £|wu\tM4l (im
Q - ftdr-^ Ag/tsu.t~
"ài*. y cuuiJL
(Moi
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Gueffier-Taleyrat. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Croizier
Subject
The topic of the resource
sociétés
indivision
successions
créances
immeubles
ventes
nullité
conciliations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour maître Jean-François Gueffier-Taleyrat, avocat, juge suppléant du tribunal d'arrondissement de la ville de Brioude, appelant d'un jugement rendu au même tribunal, le 21 messidor an 12 ; Contre Guillaume Chazelet et Jeanne Vernières, sa femme, de lui autorisée ; Pierre Grenier et Marguerite Vernières, sa femme, de lui autorisée ; François Lamothe et Anne Vernières, sa femme, de lui autorisée ; les trois femmes Vernières, héritières de Jean, leur père, intimés ; Et encore contre Jean Vernières négociant ; Jeanne Vernières et Marie-Anne Vernières, autorisée en justice Jean-Baptiste-Julien Borel, son mari ; Anne Vernières, autorisée en justice ; Féréol Rougier, son mari ; tous héritiers de Jacques Vernières leur père et beau-père aussi intimés. En présence de maître Jacques Gueffier-Lespinasse, ancien avocat, défendeur et demandeur en recours et garantie.
Annotation manuscrite: « 2 germinal an 13, 2éme section, arrêt qui dit mal jugé, en ce que l'acquisition du 7 avril 1791 a été considérée comme établissant société et en ce que un quart du domaine, seulement, a été attribué à Taleyrat ; infirme quant à ceux, et confirme les autres dispositions. »
Table Godemel : Acquisition : 1. une acquisition, faites par deux individus, d’immeubles non divisés par l’acte, attribue à chacun des acquéreurs moitié des immeubles acquis, lorsque l’acte ne contient aucune stipulation à cet égard, et lorsque chacun des acquéreurs a payé moitié du prix de la vente. la réunion des deux individus pour faire cette acquisition constitue-t-elle entre eux une société qui donne à l’un d’eux le droit de vendre tout ou partie de l’objet acquis sans la participation de l’autre, et à son préjudice ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 13
1781-Circa An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1525
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1526
BCU_Factums_G1527
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53265/BCU_Factums_G1525.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conciliations
Créances
immeubles
indivision
nullité
sociétés
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53266/BCU_Factums_G1526.pdf
2191c6d88c97e9030bf8ec04edfa5020
PDF Text
Text
P O U R
D a m e M a r i e - A n n e V E R N I È R E , autorisée en ju s t ic e , et
M . J e a n -B a ptis te - J u lie n B O R E L
son m ari , p résid en t
du tribu n a l de commerce de l'arrondissem ent de B r io u d e , S ieu rs
J e a n et J a c q u e s V E R N I E R E , n égocians , D a m e A n n e
V E R N IÈ R E
, autorisée en ju s tic e , et le S ieu r
Ferrèol
R O N G I E R , son m a r i, a u ssi n ég o cia n t, tous habitons de la
v ille de B r io u d e , héritiers de Jacques V e rn ière , leu r p è r e et
b ea u -p ère, intim és et ap p elans d 'un ju g em en t rendu a u trib u n a l
c iv il de l ' arrondissem ent de B r io u d e le 21 m essidor an 12 ;
CONTRE
M.
A
ntoine
G U E Y F I E R - D E - L ' E S P I N A S S E , hom m e de l o i ,
habitant de la même ville de Brioude } aussi intimé et app elant;
E t encore contre M. J e a n - F rançois G U E Y F I E R - T A L E Y R A T ,
suppléant au même tribunal civil de l ’arrondissement de Brioude
appelant ;
E n p résen ce de G u illa u m e C h a z e lle t et Jea n n e V e r n iè r e , sa
f e m me , de lu i autorisée , P ie r r e G ren ier et M a rg u erite V e r 1
j
•
•
_
^
nière , sa f e m m e , de lu i a u torisée, F ra n ço is L am othe et A n n e
V e rnière, sa f e m me , de lu i autorisée , le s trois f emmes V e r -
n ié r e , h éritières de J e a n , dit G ros- J e a em e , leu r p è r e , tous
intim és.
Les héritiers de Jacques V ern iè re , et M. T aleyrat ont joui
paisiblement
et sans trouble , jusqu’en l’on
1 2 , d'un . domaine
qui avait été vendu à leurs auteurs par M. G ueyfier L e spinasse.
I
l
�Au jourd’hui celte vente ne peut sortir à effet que pour la moitié
de ce domaine , et une demande en désistement de l’autre m o itié ,
formée par les héritiers de Jean V ern ière-G ros-Jeacm e, paraît devoir
être accueillie. IVT. G u e yfie r-l’Espinasse doit-il des doinmages-inté»
rèts à l ’un et à l’autre de ses a cq u ére u rs, pour la moitié dont ils
seront évincés ? AI G u e y fie r-T a le y ra t peut-il profiter seul de l ’autre
moitié de ce domaine non sujette à Féviction , ou doit-elle , au con
traire , se diviser entre les héritiers de Jacques Vernière et lu i?
T e l l . s sont, les deux questions principales que la cause p ré se n te ,
et qui sont soumises à la décision de la Cour d ’appel.
FAITS.
/Dans son contrat de mariage avec la Demoiselle Boyer_, de Clerm o n t , en dale du 26 septembre 1781 , M. Antoine G u eyfier-d el ’ Espinasse , fut .institué héritier général et universel par le Sieur
G a e ) iie r - L o n g p r é , sorç p è r e , qui lui d é la issa , en outre , en cas
d ’incom patibilité, la jouissance de deux domaines
l ’un appelé de
S ain t-L au ren t , situé dans les appartenances de la ville de lîrioude ,
l ’autre appelé
la Ghauinette , situé dans les appartenances de la
paroisse de Saint-Beauzire.
L e cas prévu arriva j M. l’Espinasse quitta
^ '
\
son père et jo u it
en conséquence des objets dont la jouissance lui avait été cedée.
A p rès
cette séparation , il contracta des dettes , et se décida à
aliéner le domaine de Saint-Laurent pour les éteindre.
Cette vente fut consentie le 17 avril 17^)1 , par acte reçu Tîifle,
notaire royal à Brioude, en faveur de Jacques V ernière et de Dame
]\Iuric-G dm elle M^rie, épouse de M. Jean G u e yfie r-’P a le y ra t, père ,
alors juge au tribunal «le lirioude , moyennant la somme de seize millo
livres et six cents livres d épingles. ( >ette dernière somme fut payée do
suite et comptant à la i) nue l’ Espinasse ; les seize rnilleliv. restantes
furent stipulées p iyables en quatre paieineus égaux ,d o n t le premier
devait échoir au 2 t juin i7()i , le second au q!ï décembre de lu m êm e
annèo f |e troisième uu 2 i juin suivant , et le quatrième et dernier lo
2 j décembre 1792.
�(S )
L e s paiemens ainsi réglés , il fut convenu que les Sieur et Dam e
acquéreurs les feraient aux époques ci dessus indiquées , en l ’acquit
et décharge dudit Sieur l ’ Espinasse , à M. Lam othe, négociant à C lerm o n t , ou à tous autres porteurs de billets de change originairement
consentis par le vendeur au profit des Sieurs Maigne , marchands
drapiers à Bvioude. / 1\\
E n vertu de ces conventions , M . G u e yfie r-l’Espinasse conpentit
que ses acquéreurs fussent subrogés de plein droit à l ’hypothèque
acquise au Sieur Lam othe ou à ses autres créanciers , et il déclara
vendre le domaine de S a in t-L a u r e n t te l q u ’ i l lu i a va it été cédé
p a r M . G u e jJ ie r -L o n g p ré , son p ère } en avancem ent de son h oirie
fu tu r e .
T ro is jours après cette vente , c ’est-à-dire, le vingt du même mois
d ’avril , M . G ueyfier-Longpré , père , qui ne s’était dépouillé que de
la seule jouissance du domaine de S t.-L a u re n t , et s’en était au con
traire réservé la p ro p r ié té , cédant sans réflexion au ressentiment
que lui inspirait la conduite de son fils , vendit le même domaine à
Jean Vernière-Gros-Jeacme , moyennant le même p r ix de seize mille
livres , qui cependant n ’ont jamais été payées.
Cette seconde vente devait mettre le Sieur G u e y fie r- l’Espinasse
dans le plus grand embarras. D ’une p a r t , la ruse dont il s’était servi
envers ses acquéreurs se trouvait découverte , et il y avait à présumer
que
ceux-ci,
inquiets sur le sort de leur acquisition,ne se libéreraient
du prix qu’avec des sûretés convenables. D e l’autre, le Sieur I,amollie,
porteur contre lui de plusieurs lettres de change suivies de jugem ent
de la jurisdiction consulaire de Riom , le poursuivait à outrance , et
le menaçait même de la contrainte par corps.
C ’ est en cet état et pour aviser au meilleur parti qui était à prendre,
que les Sieurs V ern iè re et l’Espinassc se rendirent à C le r n io n t, avec
M . I a le y r a t , père , qui les y accompagna pour défendre les intérêts
de son épouse.
L à , Jacques V e rn iè re paya et remboursa à M. Lam othe l’ entière
créance qui lui était due p a r le
Sieur G u e y f i e i - l ’Espinafisc, et se
portait à quinze mille livres. Une quittance reçue Deiiiny } notaire^
�( "4 )
à C le r m o n t, le 2 mai T791 , constate ce paiement, au moyen du-,
q u e lle sieur Lam othe subrogea ledit V ern ière , comme b a illeu r d e
fonda , et ait, titre, d 'a cq u éreu r , à tous les droits , actions et p r iv i
lèges h yp othéca ires résultant de ses litres de créance. Cet acle , au*
surplus , n ’énonce pas les motifs qui décidèrent Jacques Vcrnière à
payer en un seul terme et par anticipation , une créance pour laquelle
il avait vingt mois de délai : cependant cette anticipation est trèsrcmai quable , puisque, à l’époque du 2 mai 1791 ; commençait rémis
sion du p apier-m onnaie, qui aurait pu devenir bien lavorable au
Sieur V en iière , p i, pour sa libération , il se fût strictement conformé
aux termes fixés par son contrai d ’acquisition.
Dans un acle sous seing privé ,qui eut lieu entre la Dame T a ley ra t
et le Sieur Ver ni ère le 15 janvier 17 iï2 ■
> les parties reconnaissent
q u ’elles sont venues à compte de tout ce qu’elles ont payé sur leur
acquisition\ fa ite de société et p a r in d iv is : V ernière déclare que
Madame T aley ra t lui a fait raison d e là moitié des quinze mille livres
portées par la quittance ci-dessus stipulée ; il s’oblige en consé
quence à faire jouir ladite D a m e , concurremment avec lui , de l ’effet
de la subrogation à la créance du Sieur L a m o th e , et promet de passer
p ar devant notaire et
à première réquisition, toute déclaration y
relative , à frais communs.. Cet arrêté de compte se termine par la
clause suivante : « Déclarons réciproquement que nous n ’entendons
déroger ni inno vtr en aucune manière à la teneur du susdit
» .co n tra t de vente ( * ) et aux! actions qui en dérivent., et nous
)) promettons réciproquement de suffire par portions égales au
» surplus du prix de l’acquisition , q»ii est la somme de mille livre s,
7> soit à tous autres frais et faux frais qu’il conviendra foire et dont
)> nous demeurerons d’accord , pour suivre l’eiTet de ladite vente )>.
Cette clause pourrait paraître énigmatique au prem ier coup-dYcil
mais elle s'éeluirciru bientôt par la série des fuits et le rapproche
m ent de tous les actes. •
{ Enfin , un dernier écrit sous seing privé en date du 11 juillet
1 7 9 3 , prouve que
la Dumc T aleyrat et le Sieur V ernière
( * ) Celui du 17 avril 1791.
sont
�( 5 )
totalement libérés l ’ un envers l’autre , et chacun pour ce qui lè co n
c e r n e , du p rix de l ’acquisition conuiiune. Depuis ce t e m s , ils ont
"conlimié de jouir ensemble et paisiblement du domaine de S a in tI.auvent , jusqu’aux premiers mois do l ’an 12. A
cette, époque;,
étaient décédés successivrm entM .et Madame T a îe y x a t , ISf. Cîueyiierd e * L o n g p ré , p c r e , Jacques V em ièrer, et' enfin Jean V e r n iè r e , (lit
Gros-Jeacme.
Ce fut immédiatement après la mort de ce dernier , que le Sieur
Giieyfier-l'Espinasse traita avec Jean Vernière,son fils et s e n héritiex
institué. Dans la transaction-, qui est du 2(> nivôse an 12 , 'les parties ,
après avoir rappelé les deux ventes qui ont été faites du. dçinaiuo
de Saint-Laurent , l ’une p a r l e Sieur PEspinasse le 17 avril 1791 ,
au profit de Jacques V ern ière et de_la Dam e T aleyra t
cl l’autre
par AI. de L on g p ré , père , en .faveur.de Je;in V e r n i^ e - G r o s Jeacm e, le 20 du même mois, reconnaissent que..la ■.jouissance de
ce dom aine, réseryée au Sieur G u e yfie r-l’JBspinas^e, a, c^si^.pajr
la mort de son p è r e , qui a opéré sur sa tete, l a . transmission-de
tous ses b ie n s; en conséquence elles demeurent d ’a c c o r d ,
i.° Que la vente consentie par le Sieur G u jïy fie r -L o n g p ré , père,au
profit de défunt Jean V e r n iè r e , n e sortira à eiTijti.que pour moitié
seulement
et qu’èn conséquence le domairie d é .S ain t-L au ren t, tel
qu’il est énoncé audit c o n t r a t , ¡sqra ¿partagé; par moitié, en l ’état
-où il se trouve et avec les améliorations ou dégradations qu’il peut
avoir subies.
.¡u.
u> •>
*' 2.0 Q ue ledit Jean Vernière sera dispensé de rien payer tlu p rix
do ladite v e n t e , ledit Siéur G u ^ y fier-l’Espinasse dîén tenant quitte
et promettant l’en faire‘tenir' qüillè enVers la suôceçsion. dudit:Si'eur
G u e ylie r-L o n gp ré , son père , ladite moitié de domaine restant
audit V ernière franche et quitte
sans-autres charges de sa.part
que de ne pouvoir .répéter lès fiais ^dè vente et droiteido luds qui
peuvent avoir été acquittés;
I r
o. Ledit G ue yfié r-i’ Kspinasse promet et s’oblige de foire tlesiélor
de la moitié dudit domaine le S ieu r G u p y fie r-T a le y 'rtil 'et les
héritiers de J a cq u es r é r n tù r e , qui eh jouissent en v e rtu 'de la
première vente , consentie par lui Espilia'Sse ;
•
•
1
�( 6 }
4 .® Jean V ern ière , de son côté , consent que le Sieur G ueyfierl ’Espinasse jouisse p a r lu i ou p a r ses acquéreurs , de l’autre
moitié dudit domaine , s'en départant e x p re ssém e n t, et. se con
tentant ledit Vernière de la moitié du domaine , ainsi qu’il est cidessus expliqué.
Cette transaction a été suivie d'une seconde, dans laquelle Jean
V ern iè re délaisse à ses trois soeurs, pour la part et portion légitiniaire qu’elles ¿mandaient dans la succession de leur père commun ,
la moitié du domaine de S ain t-L au re n t } telle qu’elle lui a été
cédée par le traité du 2Ü nivôse an 12.
L e s trois femmes V ern ière , devenues propriétaires , citent en
conciliation , par cédulle du 21 ventosean 12 , M . T a le y r a l et les
héritiers de Jacques Vernière : elles concluent à ce que ces derniers
soient condamnés à se désister , à leur profit , de la moitié du
domaine de S ain t-L au ren t, et qu’en conséquence il soit procédé au
partage
des objets qui le composent : elles comprennent le Sieur
l ’Espinasse dans la même c é d u lle , pour que de son côté il ait à
faire exécuter le désistement de cette moitié de d o m a in e , confor
mément à l ’obligation qu’il en a contractée. L a conciliation est
tentée vainem ent; les p artie se n viennent au tribunal c i v i l , où les
héritiers de V ern iè re -G ro s-J e a cm e renouvellent leurs conclusions.
D e leur c ô t é , les héritiers de Jacques V ernière et M. T alcyrat
forment une demande en recours et garantie contre le Sieur G u e y fier-l’Espinasse. Dans le tems que commençait l'instruction de ces
différentes p rocédures, AI. T aley ra t et les héritiers de V ern ièreGros-Joacine s’imaginent de procéder au partage du domaine de
S aint-Laurent , et lea' héritiers de Jacques Vernière apprennent
qub des experts en parcourent les héritages et foulent aux pieds
los récoltes. Indignés d ’un pareil procédé , ils se rendent d ’abord
sur lo*s He u s y. enjoignent à ces prétendus experts de cesser leur
opération , les menacent de les prendre ;ï partie et d ’intenter contro
•onx une action possessoire. Ces experts se retirent et ne donnent
plus suite ù leur truvuil. L es
héritiers de Jacques Vernière vont
trouver AI. T alcyrat j ils lui demandent la raison et les motifs
d’une conduite aussi injuste et aussi extraordinaire ; ils lui obscr-
�( 7 )
vent enfin, que leur auteur ayant acquis, de société avec la Paine,
sa m è re , le domaine de S ain t-L au re n t, on ne.pouvait légalement
s’occuper de ce partage , sans les y appeler et sans y procéder
conliadictoirement avec eux.
L a réponse de M. T alcyra t fut la même que celle q u ’il avait
faite au bureau de conciliation , et qu’il a depuis répétée dans son
mémoire. 11 avoua que sa mère avait acquis de société avec Jacques
V e r n iè r e ; que l’ hspinasse, leur ve n d e ù r , avait promis de garantir,
faire vaioir et jo u ir ; mais il prétendit que sa mère ni lui n ’avaient
dérogé par aucun acte p ostérieu r, au droit qui leur était acquis,
tandis que Jacques Vernière y avait au contraire dérogé par un
traité du a mai 1791 ; il ajouta qu'il avait trouvé un double de cet
écrit dans les papiers de la succession de sa m .r e , et leur remit
effectivement Pacte qu’on va lire , acte qui n ’avait jamais été connu
de Jacques V e r n iè r e , ni de ses héritiers , acte que M T aley ra t au
contraire ne pouvait ign o re r, puisqu’il l’avait en son pouvoir depuis
l’époque de son e x is te n c e , 2 mai 1791 , et Pavait retenu jusqu’au
mois de ventôse an 12 , c’e st-a -d ir e , près de treize ans.
« Nous soussignés, Jacques Vernière , habitant de la ville de
)) Brioude, fa is a n t p o u r m oi , d ’une p a r t ,
)) E t Antoine G u e y fie r -l’ Espinasse , hom m e de loi
avoué près
le tribunal du district de ladite v i l l e , et Pierre Boy.cr , lioinme de
? loi , avoué près du tribunal du district de cette ville de Clermont» Ferrand , d’autre part ;
•
» A été convenu entre nous ce qui s u i t , sa vo ir, que moi G ueyfier,
» ayant été institué par mon père son héritier universel dans 111011
» contrat de mariage avec la fille du Sieur B o y e r , cl mon père
» m ayant délaissé la jouissance, entre autres choses , du domaine
)) de Saint L a u r e n t , situé à Brioude , j ’ai cru , pour faire honneur a
)) mes affaires , pouvoir en disposer , en conséquence, par acte du 17
)) avril dernier passé devant n o ta ire, je l’ai vendu à Haine M arie)) Gabrielle M a rie, épouse de .M. Jeun G i/eyfier-T alcyrat , ju'ie
)> au tribunal du district de ladite ville de B n o u d e , ou quoique ce soit
» à moi V e r n iè r e , ladite D a m e n'ayant stip u lé que p o u r m o i,
�«
.
' ( 8 )
» m oyennant la somme de seizemille six cents livres ^payables dans
» les termes stipulés audit contrat passé devant B i ll e , notaire royal.
,) Postérieurement il a plu à mon père de vendre le même do)) maine à Jean V e r n iè r e , dit G r o s-J e a c m e , comme en ayant l a p r o - ’
)> p r i é t é , sous des conditions qui ne me sont pas encore connues.
» Q ue nous G ueyiier et V ern ière
ayant consulté des hommes
5) de loi sur la clause du contrat de mariage de moi G u e y fie r por)> tant délaissement de la jouissance dudit domaine de S t .- L a u r e n t ,
» il a été décidé que le Sieur G u e y f ie r , mon p è r e , avait bien pu
)> vendre la propriété du domaine de S a in t-L a u re n t, mais que cette
)) vente ne pouvait pas prévaloir à colle que j ’ai faite au Sieur Ver~
» n i é r e , au moins quant à la jouissance pendant le vivant de m ou
)> père.
)) Q ue cependant n ’aya n t consenti cette vente en faveur du Sieur
)) V e r n iè r e , que pour me libérer envers le Sieur L a m o t h e , ban» quier à C le r m o n t , d ’une somme de quinze mille livres, que je
)> lui
dois tant en
principal , intérêts que frais
en vertu d ’une
» sentence1 de la jurisdiction consulaire , fondée sur lettre de
» c h a n g e , le Sieur V ern iè re a paru craindre de se libérer du p rix
)) de la vente d’un domaine , dont i l ne p o u v a it p o in t à la rigueur
a espérer de réu n ir la propriété à la jo u is sa n c e ; que cependant
» il auraitété dans le cas d’exiger de la pai t du Sieur G u e y f i e r , ou
» l’exécution de son contrat de v e n te , ou des dommages-intérêts,
» ce qui aurait occasionné un procès entre les parties , pour lequel
» éviter , il a été convenu et arrêté ce qui suit :
» Art. 1.“ Moi V ern ière ferai usage de mon contrat d ’acquisition,
» pour la jouissance du domaine de S ain t-L au re n t , que je dois
» avoir jusqu’au décès du Sieur Gueyfier , père.
)) A r t . II. Il est convenu entre nous V ern ière et G u e y f i e r , que
» lorsque moi V ern ière serai privé de la jouissance du domaine de
» S ain t-L au re n t, moi G ueyfier , sans préjudice de l’usuiruiL stipulé
» en laveur de ma m è r e , par mon contrat de m ariage, m ’oblige
» de lui donner des fonds jusqu’à concurrence de la valeur dudit
» dom line, soit en p r é s , terres et vignes, dans les appartenances
» du lu ville' de Brioude , à moins que mdn père ne les eût tous
�( 9 )
» aliénés : dans ce cas , il ne pourrait exiger de moi que le p rix
)> principal et loyaux cousts du contrat de vente , payables , le cas
)> arrivant,dans les mêmes termes stipulés par ledit contrat de vente,
i> et cependant les intérêts. M ’oblige moi V e r n i è r e , de prendre
» lesdits
fonds à dire d ’e x p e r t s , lesquels seront tenus de faire
» leur estimation en proportion et sur le même pied que les liériî) tages composant ledit domaine de Saint-L au ren t ont été vendus ,
)) bien entendu que si ceux qui seront délaissés en remplacement
» sont de meilleure ou de plus mince qualité > les experts y auront
» égard en se référant toujours au moment actuel.
» Art. III. Étant possible que le Sieur G u e y f i e r , fils, vienne à
» décéder avant son p è re , et qu’alors ses enfans ne voulussent pas
» accepter sa succession , le Sieur V e r n iè r e , qui a p a y é la créance
» du S ieu r L a m o th e , montant à quinze mille livres, et qui payera
» audit Sieur Gueyfier le surplus du p rix de la vente , se trouverait
» en danger de perdre le p rix dudit contrat de vente : en co n sé y> quence ledit Sieur B o y e r , pour le tranquilliser , consent que le
» Sieur V ernière p uisse, après son décès et celui de la Dame son.
n épouse, contraindre ses héritiers à lui rembourser le p rix entier
» dudit contrat", ensemble les lo yaux cousts et intérêts qui auraient
» lieu , à compter de son désistement du domaine de S a in t -L a u r e n t ,
» sauf à moi Boyer ou à mes r e p r é s e n t a i } mon recours sur
» succession de moi Gueyfier.
» Art. I V et dernier. Dans le cas où V ern iére-G ros-Jeacm e se
)) départirait de lá y e n te à lui consenlie par M. de L o n g p r é , p ère,
)) ou que même il voulût se contenter de la moitié dudit domaine »
y> il est convenu que moi Vernière j'accueillerai
cette dernière
» proposition , et qu’alors conservant la propriété de l’autre moitié
)> de l’aveu et consentement dudit V ernière-G ros-Jeacm c, les arti» d e s précédens demeureront nuls et sans effet vis-à-vis toutes les
» parties, i o u t ce que dessus a été par nous accepté. F a it tripla
)> entre nous , d d e r in o n l, ce a m ai 1701 , sig n é Vernière.
•^approuvele contcmiau présent traité,;^çvic.'Guoyfier-l’Ivspinasse.
Ja p p io u y e le présent traité , quoique écrit
B o y e r ( * ).
(
d ’autre main , signé
) Cet ;iclc a été enregistre à }u fui tic prairial au 12.
�.Vv '
( l'o )
T e l est l ’acle bizarre sur lequel les adversaires de Jacques V e rn iè re
nppuyent leurs prétentions respectives ; M M G u e yfie r-rE sp ia asse
et T aley ra t l’invoquent tour-à-tour , avec un concert étonnant.
Selon le premier , c’est un traité qui ne contient rien de contraire
aux lois ni aux bonnes m œ u r s , qui doit avoir son exécution dans
tout son contenu , et qui entraîne même la garantie de la demande
en recours formée contre lui par M. G u e yfie r-T a le y ra t ; il en l'ait en
conséquence la base et le fondement
d ’une demande en contre-
recours couLre les. héritiers de Jacques Vernière.
Q u a n t a M. T alej'rat, il soutient q u e , sans vouloir disputer aux
héritiers de V ernière-G ros-Jeacm e la moitié du dom aine, il doit
lui seul conserver l’autre m o itié , et q u e , d'après l ’acte du 2 mai
1791 , le désistement 11e peut frapper que sur la portion des héritiers
de Jacques V e r n iè r e , forcés de respecter el exécuter les engagemens contractés par leur auteur.
D e leur côté , ceux-ci repoussent celte double a tta q u e , en soute
nant que ce prétendu traité du 2 mai 1791 , était nul de plusieurs
nullités radicales et absolues, qu'ainsi M. l’Espinasse ne pouvait le
leu r opposer pour se soustraire aux dommages et intérêts auxquels
il s’était soumis ; que M. T aleyra t 11e pouvait pas non plus s’auto
riser des
dispositions qu'il contenait , pour
s’approprier l ’autre
moitié du domaine, parce que cet acte est vis à*vis du Sieur T a l e y r a t ,
res inter a lio s a c ta } et qu’il 11e contient aucune garantie en sa
faveur.
T outes ces demandes ont été jointes, et l'affaire portée au tribu
nal civil de Brioude , il y est in te rv e n u ,'le 21 messidor an i 2 3
tin jugement par lequel ,
« Attendu que le Sieur G u e y fie r -L o n g p r é , p è r e , par le contrat
» de mariage de l’Esp in asse, ne lui a d o n n é , en cas d ’incompatibi» l i t é , que la jouissance du domaine de Saint-Laurent
et quo
« la propriété dudit domaine a toujours résidé sur la tête dudit
» L ongpré;
» Attendu que l ’Espinasse , fils , par le contrat de. vente dudit
)) j o u r , 17 avril 1 7 9 1 > n ’a pu vendre aux
parties de Iîorel et
\ AHOzurd ( les héritiers de Jacques V e r n ic re
et M . T a le y r a t ) ,
�( 11 )
» ou à leurs a u teu rs, que la jouissance quJil avait du domaine en
)) vertu de son contrat de mariage ;
V Attendu que le Sieur L o n g p ré , p è r e , qui était toujours d e -
» meure
propriétaire dudit domaine , par le
contrat de vente
» qu’il en a consenti le 20 avril 1791 audit Jean V ern ière , en
» a fait passer la propriété sur la lête de ce d ernier, et q u ’ello
» réside aujourd’hui sur celle de ses héritiers ;
)) Attendu que lesdits l’Espinasse et V e r n i è r e , par le traité qu’ils
» ont passé le 26 nivôse an i 2 j sont convenus que la vente dudit
» j o u r , 20 avril 1791 , ne sortira à eflet que pour la moitié seulement
)) du do m ain e, et qu’il sera partagé par moitié entre les p arties,
» en l ’état où il se trouvera , avec les améliorations ou détériorations
» qu ’il peut avoir subies , et que ledit l’Espinasse } en s’obligeant
» à faire désister de la moitié dudit domaine les héritiers
de
m Jacques Vernière et M. T aleyra t , n ’a fait qu’ user du droit qui
» lui était acquis par l ’art. I V du traité du 2 mai 1791 ;
)> Attendu que , par le traité passé entre lesdits Vernière et l ’Es)) pinasse , ce dernier n ’a disposé que de la moitié dudit dom ain e,
)> et que l ’autre moitié demeure aux parties qui ont acquis de lu i;
» Attendu q u e , dans le traité sous seing privé , passé entre ladito
)) Dam e Marie et ledit Jacques Vernière le 1 5 janvier 1 7 9 2 , Jacques
» V ern ière et ladite Dame Marie sont venus à compte des sommes
» par eux respectivement payées pour les frais de ^acquisition
)) qu’ils avaient faite en société et par indivis ; qu’il résulte de celte
)) énonciation , que ledit Jacques V ern ière était associé de la Dam e
» M a r ie ; que celte qualité n’a point été contestée, et q u ’il n ’a
)> pu stipuler qu ’en cette même qualité
dans le traité de 1791 ;
» P a r ces motifs , lo trib u n a l, jugeant en prem ier r e s s o r t , con)) damno les parties de B o r d
et d ’Allézard à venir à division et
» partage avec celle de B e lm o n t(lcs héritiers de Jean V e r n iè r e ) ,
» du
domaine do Saint-Laurent , pour leur en être délaissé la
*> m o itié , avec restitution de jouissances, à compter de la demande
)> ù dire d’experts dont les parties conviendront ; les condam ne,
» en outre , à leur payer les intérêts desdites jouissances , h com pter
» de l’époque do leur p e r c e p t i o n , jusqu’au réel paiement 5
�Vf j
( 1 2 )
)> O nlonne que l ’autre moitié dudit domaine restera aux h cri)> tiers dudit Jacques Vernière et de ladite Dame M a r ie , pour être
)> ladite moitié diyisée entr’eux par égalité ; condamne la partie
» «le l ’ ascon ( M. l ’Espinasse ) à rembourser aux parties do Borei
)) et Allézard la moitié du prix de la vente
dudit jour 17 avril
)) 1 7 9 1 , ensemble les intérêts de la somme , à compter depuis
» la demande jusqu’au réel p a ie m e n t , et sur toutes le* demande*
» en recours , met les parties hors d ’instance , attendu que la partie
» de Pascon est en demeure de p a y e r la moitié du prix de la v e n t e ,
» la condamne aux dépens envers toutes les parties ».
C ’est de ce jugement que M. G u e y fie r -T a le y ra t s’est rendu appe
lant : après lui , les héritiers de Jacques V ern ière et M. G ueyfier
l ’Espinasse en
ont également interjetlé appel. T outes les parties
sont en présence' devant la Cour d’appél et attendent sa décision.
L e s héritiers de Jacques Vernière se plaignent d’abord que le
tribunal de Brioude a mal j u g é , en ce qu’il n ’a pas statué sur
les différentes nullités reprochées à l ’acle du 2 mai 1791 , et en ce
qu’il n ’a pas condamné M . Gueyfier-TEspinasse à des dommages •
intérêts envers eux et M . T a l e y r a t , pour raison de l'éviction p ro
noncée pour la moitié du domaine de Saint-L au ren t. Ils soutien
nent , au contraire, le bien jugé du jugement dans toutes ses autres
dispositions , et notamment dans celle qui , ordonnant le partage
du domaine de S ain t-L au re n t , en adjuge la moitié aux héritiers
de Vernièro G ros-Jeacm e, un quart à ceux de Jacques V ern ière j
et un quart à M. T aleyrat.
L a cause se diyise donc naturellement en deux objets princi
p a u x , que l’on traitera
et discutera séparément ; le prem ier sera
relatif aux contestations qui existent entre les héritiers de Jacques
V ern iè re ; l ’autre aura trait aux prétentions exclusives de M. G u e y fier-1 a l e y r a t , e t à 1 interprétation judaïque qu’il fait des dispositions
de l ’article I V du fameux traité du 2 mai 179 1.
§. I . "
JII. G u c y f e r - V E s p i nassa doit d es dom m ages-intérêts
d ses d eu x acquòrours.
P arlo contrat de vente du 1 7 avril 1 7 9 1 , il a promis de garantir
�( i3 )
fournir et faire valoir envers et contre tous : cependant les acqué
reurs seront évincés de moitié : il ne peut pas écliapper à sa promesse
de garantir, il doit indemniser des acquéreurs qui lui ont payé le
p r i x entier de leur acquisition : voilà la règle et la loi générale.
L e Sieur l’Espinasse se prétend déchargé de celte garantie par le
traité du 2 mai 1791 : voilà l ’exception qu’il propose , et dans
laquelle il se méprend étrangement. Pour mieux démontrer celle
méprise , il est essentiel d’examiner particulièrement l’écrit du 2
mai 1791 , de le considérer sous !e rapport des personnes qui l ’ont
si " n é . de la situation où elles se tro u va ie n t, et des rapprochemens
avec les autres actes que les parties ont passés entr’elles.
C e t acte est subreptice et 11e respire que le dol et la fraude ;
il est passé entre Jacques V e r n ie r e , cu ltivateur, qui ne savait ni
lire ni é c r ire , et avait seulement appris à signer son nom en lettres
majuscules , et entre les Sieurs l’Espinasse et Bo yer , tous deux
hommes de loi, très-instruils dans les affaires. O n voit par la date
de cet acte , qu’il a eu lieu le même jour que Jacques V ern ière a
payé quinze mille livres à M. Lam othe. L ’article I V qui , dans
l ’acception des adversaires , le dépouillerait totalement de sa portion
du domaine de S a in t-L a u re n t, pouvait recevoir son exécution le
lendemain par la volonté de V ernière-G ros-Jcacm e. O r , comment
supposer que Jacques Vernière ait pu consentir librement à céder
gratuitement un objet pour lequel il venait de payer le même jour
une somme de quinze mille livres ?
T r o p de précaution annonce-la fraude: cette maxime triviale
s’applique parfaitement h la cause. C e u x qui ont surpris l’acte à
Jacques V e r n iè r e , ont voulu rendre leur sort trop favorable ; ils ont
cherché à le faire renoncer à ce qu’il avait acquis , et ils ont eu
l ’injustice de ne pas même stipuler le remboursement de ses avances.
L e Sieur l’Espinasse éteint une dette, prévient une contrainte
par corps par le paiement d ’une somme de quinze mille livres
que Vernière compte au Sieur L am othe le 2 mai 1 7 9 1 1 après-m idi 5
e t c est le même jour , immédiatement après cette libération , que
sansaucune compensation, sans aucune indemnité,il exige de Jacques
Vernière le sacrifice de la moitié du domaine qu’il a acquis. U n e
�» V f.' (
14 )
telle libéralité, disons m i e u x , une telle folie ne se conçoit pas. V e r nière n ’était pas un idiot ; c ’est a son travail et à son industrie qu’il
devait sa fortune ; il était trop bon administrateur pour avoir fait de3
calculs
aussi
étranges ; mais il était très-confiant et sur-tout très-
éloigné de croire qu’il put être trompé par des personnes distinguées
dans la société par leur nom et leur état.
I
U n e preuve qu’il a été réellement a b u s é , se tire de la forme
môme de cet acte. On remarquera qu’il est divisé en quatre articles ;
si l ’on supprime le dernier , l’acte ne se sentira pas de cette sup
pression ; on verra au contraire que le préambule et les trois p re
miers articles se lient ensemble d’ une manière naturelle , et qu’ils
serapp orten tp arfaitem ent à lasituationde toutes les parties. Jacques
V e r n i è r e , menacé d ’une éviction par la seconde vente de M. de
L o n g p ré , p è r e ,
devait d’autant moins
traiter imprudemment ,
que le même jour il avait payé quinze mille livres sur le p rix d ’une
vente qui lui fournissait les motifs d’une juste sollicitude. T o u t
cela explique les conventions qu’il a voulu co n se n tir, le rempla
cement de la moitié
du domaine de Saint-Laurent par d’autres
fonds situés à B rio u d e , l ’intervention de M. B o y e r pour lui assurer
la somme qu’il avait payée à compte de son acquisition, et enfin
l ’anticipation de ces mêmes paiem ens, à laquelle
il ne
s’était
probablement décidé qu’à raison des avantages dont le Sieur l ’E spinasse et le Sieur B o y e r , son b e a u -p è re, lui avaient oiTert
la
perspective.
Si l’on examine nu contraire l’article I V du même tra ité , on lo
trouve discordant avec 1e surplus de l ’acte. L a rédaction en est
o b s c u r e , et le style entortillé,* on y reconnaît le travail de la ru se,
et on n ’y distingue bien que l’intention et les désirs d ’une seule des
parties. L a prétem lnc convention renfermée dans cet article , est en
contradiction avec le bon sens et la raison j elle est en opposition
directe avec le surplus do l’e c r i t , avec la situation des p arties, avec
les mesures qu’elles devaient prendre réciproq uem en t, et enfin avec
tous les autres actes qui l’ont précédée et suivie. On ne peut sur-tuut
éloigner do soi l’idée do l ’extrême facilité avec laquelle les rédacteurs
do l’acto se sont jaué9 de l ’ignorante crédulité do Jacques Vernière, et
�(.5 )
toutes les circonstances se réunissent pour £-.1tester que, pour consom
m er la fraude , il a suffi de lui lire les trois premiers articles, et de
lui taire le quatrième. N ’ayant pas de raison pour douter de la p ro
bité des homm es avec qui il traitait, il a signé l’acte,sans soupçonner
mêm e que l’on pût y avoir ajouté des stipulations qui lui étaient con
traires. L es magistrats chargés spécialement de l'application des lois
ou des conventions , en veulent sans-doute la rigoureuse observation,
mais ils doivent vouloir sur-tout que cette observation produise tout
l ’eiTet que le législateur a cherché à oblenir. L e s lois tendent à r é p r i
m er le dol et la f r a u d e , et lorsqu’ils sont évidens , comme dans la
cause , l’acte qui les recèle ou qui les favorise , est nécessairement
frappé par ces mêmes lois.
Au-surplus,quelle que soit l’indulgence dont on voudrai! user envers
ce prétendu traité du 2 mai 1791 , il n’en peut résulter aucun effet,
parce que cet acte tel qu'on l ’a produit et tel qu’on voudrait l ’e m
ployer , renferm e plusieurs nu|lités radicales et absolues.
C ’est un acte sous seing privé qui déroge expressément à un acte
notarié, et qui anéantit même e n tiè r e m e n t, par rapport à Jacques
V e r n iè r e , la vente du 17 avril 1791 • il a donc tous les caractères
d’une contre-lettre. Pour donner une date certaine à cet é c r it, il
faudrait remonter à l ’époque où il a subi la formalité de l ’enregis
trement , ce qui mènerait
jusqu’aux derniers jours
de prairial
nn 1 2 , ou au décès de Jacques V ern ière , un des signataires, qui a
eu lieu le cinquième complémentaire an 11. O r l ’une et l ’autre de
ces époques est postérieure à la loi du
522 frimaire
an 7 ; c ’est
donc en contravention de celte loi que l’on v o u d ra it'a u jo u rd ’hui
tirer parti de cet é c r i t , dont 011 se convaincra bientôt que la nullité
est prononcée p ar les dispositions textuelles que voici : « T o u te
» contre-lettre sous signature p rivée, qui aurait pour objet une
» augmentation du prix stipulé dans un acte p u b lic , ou dans un
» acte sous signature privée précédemment enregistré , est déclarée
)> nulle et de nul effet ». Rien n'est plus clair et plus précis. Vainement
voudrait-on dire que la loi du 22 frimaire est une loi fiscale; que
par conséquent la nullité qu’elle
prononce
n ’est pas absolue
mais seulement rela tiv e aux intérêts du trésor public. L a ju risp ro-
�( i6 )
dcnce du tribunal de cassation fournirait une réponse péremptoire
à cette objection :en effet, par jugement du 11 fructidor an x 1 , rendu
entre les nommés Laurier et Clienon , il a décidé, sur les
clusions
de M. le
con
Commissaire P o n s , que la nullité prononcée
par l’article précité , est gén éra le , sans exception ni réserve d ’un
effet quelconque dans l ’intérêt privé des parties , et qu’il n’est point
permis aux juges de distinguer là où la loi ne distingue pas.
M. G u e y f i e r - ï a le y r a t , qui se rend volontiers le champion d e M .
l ’Espinasse toutes les fois que l’occasion se p ré se n te , glisse adroi
tement une autre objection contre cette nullité ; en parlant des
héritiers de Jacques Vernière , il s’exprim e ainsi, page 18 de son
m ém oire: (( C ’est contre M . 1 Espinasse qu’ils feront ju g e r , s’ils le
)) p eu ve n t, que la loi du 22 frimaire an 7 , peut annuller un acte
» du 2 mai n g 1 , qui lui est antérieur de 8 ans.» !Non, M. T a l e y
rat , les héritiers de Jacques V ernière ne prêteront pas à la loi un
vice de rétroactivité qu'elle n 'a point et qu ’elle ne peut avoir ;
ils vous prieront d'observer seu lem en t, que la date que vous donnez
à l ’acte du 2 mai 1 7 9 1 , n ’est pas la date certaine que lui accordent
les lois , mais q u e , comme on vous l ’a déjà d it, il faut la reporter
au cinquième
complémentaire an 1 1 , jour du décès de Jacques
V e r n iè r e , ou au moins à l’époque où le Sieur l’Espinasse et vous
avez été forcés de faire enregistrer celte contre-lettre.
U ne seconde nullité dont cet acte est v icié , résulte do ce qu 'il
n ’est revêtu que de la seule signature de défunt Jacques Vernière ;
il est contraire aux déclarations du roi des 5 o juillet 1700 et 22
septembre 1755. Ces deux ordonnances, qui ont toujours été eu
vigueur, el dont les dispositions sont impérieusement renouvellées
par l’art. M C C C X X I V de notre nouveau code c i v i l , exigent que
tous b ille ts , a u tres prom esses ou qu itta nces , sous signature p r i
vée , saint n u ls et de n u l effet et v a le u r , si h; corps de V écriture
n'est p a s de la m ain de ce lu i q u i a ura signé les b ille ts , prom esses
ou quittances , ou que l'approbation de la somme , ou la qu antité
des d e n r é e s , m a rchan dises ou autres effets , ne soit entièrem ent
écrite de la m ain de celu i q u i aura signé led it engagement.
Dans le p ro cè s, l’acte souscrit par Jacques Vernière n ’est point
�f f *
( 1 7 )
approuvé par l u i , ni ne pouvait pas l’être , puisqu’il n’a jamais su
éci'ire. Ce défaut d’approbation entraîne la nullité du sous seing
privé , avec d ’autant plus de raison qu’il ne s’agit pas ici d ’ un simple
b ille t, d’ une reconnaissance de devoir } mais qu’il s’agit au contraire
d ’ une aliénation d’immeubles précieux , et du sacrifice d’une somme
considérable qui en représente la valeur. Dans des actes de cette
im p o rta n c e , le consentement doit être f o r m e l, c-’est à-dire qu’il
doit intervenir sur la chose qui fait l’objet du contrat , sur le p rix
et sur la vente mêm e; il doit être clairement exprimé. Certes , dès
q u ’un homm e ne peut pas écrire les engagemens qu’il c o n tra cte ,
dès qu’ il 11e peut pas lire ceux que l ’on veut lui faire contracter, il
faut absolument qu’il ne
puisse
la nature et l’étendue de ¡son
s’élever aucun soupçon sur la liberté ,
consentem ènt
, sur la îegulaiite
et
l ’existence de son approbation ; d ’ou 1 on pourrait conclure hardi
ment q u e , relativement aux personnes illiterees , il ne peut y avoir
de vente valable , que celle reçue par les Rotaires , officiers publics à
qui la loi a expressément attribué ces fonctions.
L a jurisprudence de tous les tems et de tous les tribunaux a été *
conforme à ces principes. D e u x arrêts du parlement de Paris , l ’un
du
22
juillet 1 7 4 1 , et i ’autre du
29
juillet 1 7 7 5 , ont annullé des
billets , parce qu’ils ne contenaient pas l ’approbation de la somme ,
quoiqu’on y remarquât celle de l ’écriture.
U n autre plus r é c e n t , du
19
avril 1784 , a déclaré nul à l ’égard
d ’un coobligé qui n ’avait pas approuvé la so m m e , le billet entiè
rement écrit et signé par sa femme , et sur lequel l'autre coobligé
avait payé des à-com ptes. S’il pouvait cire permis de s ecarter de la
l o i , ce serait sans-doute dans des circonstances aussi favorables au
l i t r e , mais elles 11’ont pas empêché les tribunaux de
prononcer
conformém ent aux dispositions de la loi.
A ces autorités puissantes nous ajouterons les décisions de la Cour
de cassatiofî^ dans plusieurs procès célèbres , et n o t a m m e n t un juge
ment rendu le 1 7 thermidor an 1 0 , e n t r e les héritiers d e la Dame la
Vieuville et le Sieur Arrighi. Com me dans notre espèce , il ne s agis
sait point d ’un simple billet , mais d ’un acte synallagmalique portant
constitution d ’une rente viagère ;au bas de cet acte , étaient écrits ces
mots : approuvé l ’écriture ci-d e ssu s , signé B u t l e r , v eu v e B a n d e -.
rr
0
�(i8)
",la -V ie u v illc ; et cependant l ’approbation fut regardée comme insulK*
santé, l ’acte fut déclaré nul et de mil effet.
U n second jugement rendu le 12 brumaire an 12 , a annullé
une reconnaissance de dépôt de douze mille livres , souscrite par
]e citoyen Girard , au profit de la Demoiselle du Chalard. Cet acte
était signé de l u i , avec ces mots : approuvant Vécriture ci-dessus ,
et le contenu en y celle ; mais la somme n ’était pas reconnue par
une approbation écrite en toutes lettres de sa main. L a Cour de
cassation décida de plus, sur les conclusions du commissaire Arnaud,
qu’une reconnaissance de dépôt est contenue dans l ’expression de
la loi , billets ou prom esses sous seing privé.
L e s héritiers de Jacques V ernière termineront ces citations , en
rapportant l’opinion de M. Jourde, substitut de M. le Procureur
général impérial près le tribunal de cassation : voici comment s’ex
primait ce magistrat si recommandable par son intégrité et ses talens,
portant la parole le i 5 fructidor an 11
dans une cause pareille :
« Il y a un moyen infaillible de faire une juste application d e là
»•loi du 22 septembre 1 7 5 5 ; c ’est d ’examiner si l’écrit produit
» présente des caractères de d o l , ou s’il a été créé au contraire
)> sous les auspices de la bonne foi. Au prem ier c a s , il convient
» d’en prononcer la nullité , et d’appliquer à la rigueur la déclaration
» ci-dessus; dans le co n tra ire,il faut ordonner l’exécution de l’enga» gement ; bien que le corps de l’acte ne soit point écrit de la main
)> du d ébiteu r, et qu’il n ’ait point recon n u tn toutes lettres la
» somme prêtée ».
L a distinction de M. Jourde
est lumineuse ; elle
concilie les
dispositions de la loi avec la bonne foi et les règles de l’équitc.
Si l ’on en fait l ’application à -la ca u se , s’il est prouvé que l ’engngeinent souscrit par Jacques Vernière le 2 mai 17«) 1 , bien loin de
mériter aucune confiance, donne nu contraire matièro à de «»raves
soupçons dans la forme et la contexhire de l ’art. IV ;*Jes héritiers
peuvent être rassurés , les juges ne manqueront pas d’interroger
leur conscience sur le mérite de l ’acte et l’intention du législateur,
sur le sens de la déclaration de i 7 5 5 .
M. T aleyra t n'a pas voulu laisser passer ce second moyen do
n u llité, sans lui donner uno marque de son improbation ; il prétend
�j /
( f9)
que M. l ’Espinasse fera aisément juger que Jacques Vernière doit
etre compris dans les exceptions nombreuses de la loi qui s’appli
quent aux commerçans et aux gens illitérés. Pour se convaincre de
la futilité de cette objection , il suffira de jetter de nouveau les yeux
sur le fameux traité du 2 mai 1791 : assurément personne ne le
prendra pour un acte de commerce entre négocians , ni pour
un effet susceptible de négociation ; et tout le monde sait que c’est
seulement, sur cette sorte d’actes que frappent les exceptions de
la loi. Au-surplus l’objection de M. T aleyra t n ’est pas tout-à-fait
i n u t ile , elle contient l’aveu de sa part que Jacques V ernière était
0
,
illité ré , et par une conséquence forcée , que tout ce qui est con
traire à la vérité dans l ’acte qu’on lui a fait signer, ne peut etre
son ouvrage.
Enfin il existe dans cet acte une troisième nullité indépendante
des deux autres , non moins absolue , plus évidente et plus décisive.
S upp osons, en partageant, pour un mom ent, l’erreur des adver
saires , que la forme , le caractère et le style de l ’écrit sous seing
privé du 2 mai 1791 , en aient fait une transaction a d litem ou
propter litis m e tiu n , c ’est bien
certainement l ’interprétation la
plus favorable pour M. G u e y lie r-l’Espinasse.
Dans ce c a s , la dernière clause contenue dans l ’art. I V de cette
transaction , annullant toutes les a u tre s , et se trouvant la seule qui
puisse aujourd’hui recevoir son exécution , est la seule aussi qu’il
faut examiner. O r , en prenant cette clause dans son texte littéral,
011 est forcé de convenir qu’elle contient évidemment en faveur de
M. l ’Espinasse, ou une donation de la moitié du domaine de SaintL a u r e n t , ou une vente et cession de cette même moitié.
D a n s le cas où F er n ièr e -G r o s-J e a cm e se départirait de la vente
« lu i consentie p a r M . de Longpré , p ère , ou q u ’il voulut se
contenter de la m oitié du dom aine , i l est convenu que moi F c r nière j a ccu e ille ra i cette dernière proposition , et qu 'alors con
servant ht propriété de l'a u tre m oitié de l'a v e u et consentem ent
du dit F ern ière-G ro s-Jea cm e , les trois articles précédons dem eu
reront n uls et sans effet v is -à -v is toutes les p a rties.
Si c’est là une d o n a tion , elle est nulle : car aucune des for
malités nécessaires dans la rédaction de ces actes n ’a été remplie.
%
�( 20 )
"Si c’est une vente et cession, en avouant que , pour la re n d r e
valide , on n’a pas du s’astreindre à une rédaction spéciale et par
ticulière , toujours faut-il que ce contrat qui est de droit n a tu re l,
renferme loutes les choses qui sont nécessaires pour en constituer
l ’essence. D ’abord il doit être sinal'agmatique et com m utatif, c ’està-dire , suivant l'estimable Pothier , qu’il doit contenir un engage
ment réciproque de chacun des contractans l'un envers l’a u t r e ,
avec l’intention bien manifestée de chacun , de recevoir autant qu’il
donne. I n h is coritractibus., a lle r a lteri o b lig a h tr , de eu cjuod
alterim i a lt e r i, e x oequo pr'aestari oporlet. L , 2. if. de obi. et act.
-•
Dans l ’article I V ddnt il s’o g it , qui fait tout le traité, puisqu’il
supprime et annuité tous les autres a rticles, on y reconnaît bien
l ’engagement personnel de Jacques V ern ière , mais on n’y voit pas
celui de M. G u e y lie r - l’Lspinasse. Ce que donne Jacques V ernière
est désigné , mais on 11’apperçoit pas ce qu’il reçoit en dédomma
gement et compensation de la part de M. l’Espinasse , ou , pour
parler plus correctement , 011 apperçoit que celui-ci ne donne rien
et se coutente de recevoir
Cet acte pèche donc contre le droit
n a tu re l, contre le droit des gens ; il n'est pas com m utatif.
E n second lieu., il n ’y a pas d’aliénation , il n ' y a pas de vente
ou cession , sTdanâ le contrat 011 ne rencontre trois choses , l’objet
vendu , le consentement des parties , et le p rix convenu.
L a chose vendue : ici elle n ’est pas clairement désignée. L es
adversaires prétendent que c ’est la moitié de l’entier du domaine
de Saint-Laurent. lies héritiers de Jacques Vernière soutiennent,
au co n tra ile, que quand l’acte serait sin cè re , ce ne serait tout au
plus que la moitié de la portion à lui appartenant , et par consé
quent la moitié de la moitié : ce qui milite en faveur do cette
dernière interprétation, c’es.t l'intention bien manifestée par V e r
nière* de conserver l’autre moitié : c'est qu’il serait absurde d’ail
leurs de faire poi ter cette réserve et cette intention^conservatricc
sur la moitié qui ne lui appartenait p a s , mais bien à la Dame T a le y iü l. A u -stirplus, dans le d o u te , la clause s'interprète toujours
en faveur de celui qui a contracté l’obligation ( art. 1 1(>2 du code
civil ) et «outre celui qui a mis la clause.
Dans
l’ehp èce, c ’est
Jacques V ernière qui u contracté l'o b lig a tio n , et M. l’Etpi»1“ 860 a
�< ? !/
nécessairement niis la clause , puisque V ernière ne savait ni lire ni
écrire. L e célébré Dom at nous apprend que les obscurités et les incer
titudes des clauses qui o b lig e n t , s’interprètent en faveur de celui
qui est obligé , et il faut en restraindre l’obligation au sens qui la
diminue. I n stipulationibus , cum qu œ rilu r qu i cl a clum s i t , verba
contra stipulalorem inlerpretanda surit. L . 5 8 . if. de verb. obi.
L e consentem ent des p a r tie s : les héritiers de Jacques Vernière
ont prouve qu’il n’avait jamais donne le sien j ils 1 ont demontru
par la force des circonstances et leur rapprochement avec les autres
actes passés entre les parties. C ’est le cas d ’appliquer la maxime >
N on qu od scripturn , sed quod aclum est in sp ic itu r , avec d’autant
plus de raison , que lorsque les termes d^une convention paraissent
contraires à l’intention des contractons, d ’ailleurs évid e n te , il faut
suivre cette intention plutôt que les termes : I n conventionibus con trahenlium volim talem , p o tià s quam verba spectari p la ç a it. L .
219. fi’. de verb. sign.
L e p r ix de l'o b je t vendu. O h ! pour le coup , il n ’y en a aucun
de s t ip u lé , et rien ne peut suppléera cette omission : la loi n’admet
point de vente gratuite. Sinè p retio n u lla venditio est. Ce p rix
ne peut jamais être autre chose que de l’argent en monnaie publi
que , qui fait l’estimation de la chose vendue. P r e tiu m in num erata
pecuniA consisteve debet. M. l’ Espinasse ne soutiendra pas sans doute
qu’il y en a un de stipulé dans l’art. IV du traité portant vente du 2
mai 1791 , ou que dans tous les cas il se trouve implicitement ren
ferm é dans les articles précédens
et quo ce prix
est nécessaire
m ent le remboursement de la somme et des frais et loyaux cousts
avancés par Vernière sur sou acquisition du 17 avril. Cette réponse
ne serait pas
satisfaisante, puisque d’une part les trois premiers
articles du traité se trouvent annullés par lo quatrième , et quo
ce qui est nul ne peut produire aucun effet ; et de l’a utre, parce que co
prix doit être ce rta in , et quo la quantité ne peut pas en être mise
à la disposit¡011 de l’ucheteur ^ vide D o m a t et Lacom be). Ainsi
quand M l’Espinasse olfi irait aujourd’hui une somme pour tenir
lieu de p rix dans ce département de vente , cet acte n ’en serait
pas moins n u l , parce qu’il 11’y en a pas eu de stipulé dans le teins,
c l que rien ue peut couvrir co vice.
�(22)
Sous quelque rapport que l ’on envisage l ’acte du 2 mai 1791
M . G ueyfier-l’Espinasse n ’en peut retirer aucun avantage , c ’est un
titre frauduleux qui ne peut echapper a la rigueur des principes.
Q ue la cupidité et l’astuce fassent tous les calculs q u ’elles voudront r
il ne peut etre decent ni juste que j\I. l ’Espinasse sorte indemne du
p r o c è s , lui qui vendeur originaire le 17 avril 1791 , a trompé ses
deux acquéreurs , lui qui leur a cédé la propriété d’un domaine dont
il n’avait que la jouissance. Que les héritiers de V e r n iè r e -G r o s Jeacme retirent la moitié du domaine de S ain t-L au re n t, cela est
ju s t e , parce qu’ils ont restraint leurs droits à cette moitié et qu’ils
les tiennent d’ailleurs du véritable p ro priétaire, M. de L o n g p r é ,
père. Que M . T aley ra t et les héritiers de Jacques Vernière , soient
indemnisés de cette éviction qu’ils doivent souffrir, parce que M. l’E spinasse leur doit des dornmages-intérêls pour la non-exécution des
engagem ensqu’il a contractés envers e u x , et parce que le traité de
1791 , derrière lequel il se retranche, ne lie ni les uns ni les autres ;
qu’il p o r t e , en u n .m o t, la peine d’avoir induit toutes les parties dans
vin procès désagréable et ruineux , voilà ce qu’exigent à la fois la
raison et l ’équité , et ce qu’011 a tout lieu d ’espérer de la sévère im
partialité de la C ou r d ’appel.
I I.
D a n s tout état de c a u s e , M . G u e y fie r -T a le y r a t doit p a rta g er le
sort des héritiers d e Ja cq u e s V ern ière , souffrir comme e u x
l'év ictio n des héritiers de V ernière-G ros-Jeacm e , et conserver
seu lem en t le quart d u dom aine de S a in t-L a u re n t.
Jusqu’à présent les
héritiers de Jacques V ernière ont raisonné
comme s’ils n’avaient que M.Gueyfier-l’ Espinasse pour seul adversaire
au p ro cès; ils sont cependant forcés d ’en combattre un autre , M.
Gueyfier-Taleyrat, dont la mère a é t o l’associée de leur père, et qui par
conséquent aurait dû faire cause commune avec eux pour étouffer tous
ces germes de chicano inventes et. mis en usage par la mauvuisefoî.
Com m ent sc fuit*il qu ’on trouve en lui un défenseur ardent do
l ’acte du a mai 1791 , lui qui prétend en même tems que scs dis
positions ne lo concernent pas et nesauraient lui nuire ? Nous le disons
avec regret , mais avec vérité , c ’est que la rédaction de cet acte n ’a
pas été totalement étrangère à ses auteurs j c’est que s’ils 11’y ont pas
�( 23)
concouru directem en t, au moins ils ont connu cet a c t e , et l’ont
a p p r o u v é , qu’ils ont mérité le reproche d ’avoir perpétué par leur
silence obstiné , l’erreur dans laquelle ont resté pendant tre iie ans
Jacques Vernière et sa famille.
M . T aleyrat se croit-il doncsuiïisamment autorisé à agir de concert
avec M . l’Espinasse , en raison des liens de parenté et d ’amitié qui
existent entr^eux? N ous, nous conviendrons volontiers que ces liens
peuvent exiger quelques sacrifices , niais dans aucun cas et ja m a is,
ceux qui sont de nature à compromettre la loyauté et la délicatesse,
en blessant les intérêts d’un tiers.
Il dira tant qu’il voudra , que sa mère ni lui n ’ont point dérogé
à la vente du 1 7 avril 1 7 9 1 , et que la moitié du domaine de SaintL au ren t revient de droit à lui seul; c ’est uns grande erreur démon
trée par ce seul fait incontestable , que cette vente était un titre
vicieux , et que M. l’ Espinasse ayant vendu la propriété d’un objet
qui ne lui appartenait p a s, n ’a pas pu transmettre à ses acquéreurs
des droits qu’il n’avait pas lui-même.
Envain
INI. la lc y r a t désavouera expressément l ’assertion
des
héritiers de Jacques Vernière , relative à la présence de M. T a l e y r a t ,
p ère , à cet
actG
du 2 mai 1791 ; envain il s’écriera que c’est une
calomnie et une injure gratuite faite à sa mémoire; cette dénégation
sera a pp réciée ce qu’elle v a u t , lorsque l ’on saura i.° q u ’ elle a été
contredite lors de la plaidoierie devant les premiers ju g e s , p a r M .
l ’ Espinasse lui-même q u i , n ’étant pas préparé sur l ’ interpellation,
rendit un hommage solemnel à la vérité; 2.° que les héritiers de
Jacques Vernière sont en état et oilrent de prouver par témoins
le voyage et le séjour subséquent de M. T a le y r a t, père, à C lerm ont, à
1 époque du 2 mai 1791. 11 y a plus , ils sont en état de p ro u ver
que celui-ci,et après son décès, la dame Marie, son épouse , ont voulu
traiter avec V ernière-G ros-Jeacm e , et lui ont fait proposer de sc
départir d ’une portion du domaine de Saint L a u r e n t , à la charge
d’approuver et ratifier pour le surplus du domaine , la vente con
sentie par M. G ueylier-l’Espinasse ; d ’où résulte la conséquence irré
sistible que M. T a le y r a t , p è r e , et aprcs-lui la Dame , son épouse,
ont connu l ’un et l ’autre l’acfe du 2 mai , et qu’ils l’ont approuvé
puisqu’ils ont voulu l’exécuter dans la partie la plus délicate , source
�■4*1
»
( 24)
de toutes les contestations actuelles. O n ne doit pas considérer comme
propres et encore moins comme réduits à em ployer la calomnie et
le mensonge , ceux qui offrent la preuve des faits qu’ils ont avancés. Si
M . T aleyrat veut donner quelque poids à ses allégations , il acceptera
ces offres et l’interlocutoire proposé. L e résultat fera connaître si
les héritiers de Jacques V ern ière méritent le reproche
de calom
nie que M. T a ley ra t leur adresse si témérairement. Jusque-là , dès
q u ’ils ont articulé et mis en preuve des faits
la C o u r , eu les appré
ciant , les regardera comme décisifs.
U n autre fait dont on a déjà rendu c c m p t e , vient confirmer
toutes ces inductions.
On se rappelle que M. T aleyrat a trouvé ,
après le décès de sa mere et dans les papiers de sa succession, un
des doubles de l’acte du 2 mai 1791 ¡ et qu’il n ’a remis ce double
aux héritiers de Jacques V ernière , que postérieurement au 26 nivôse
an 1 2 , époque à laquelle M. G ueyfier-FEspinasse avait déjà traité
avec le fils de Jean Vernière-G ros-Jeacm e , et lui avait cédé en pur
don la moitié du domaine de Saint-Laurent. Pourquoi cette remise
si tardive à la famille de Jacques Vernière ? Pourquoi
celui-ci
a -l-il ignoré toute sa vie l Jexistence d ’un acte si essentiel? Pour
quoi le double qui lui revenait, se trouve-t-il entre les mains de
son associé , qui se prétend étranger à cette oeuvre d^iniquité ?
Il 11’y a qu'une seule raison plausible : après avoir rendu dupe
Jacques V ern ière , on a voulu lui enlever tout m oyen
de récla
mation. Sous le prétexte de la société , on a retenu une copie do
l ’a c t e , afin qu’il fût ignoré de la famille V e r n iè r e , et que les preu
ves de
la fraude fussent ensevelies dans le secret.
Enfin ,
on
attend le décès de toutes les personnes qui pouvaient donner des
éclaircissscmens , et l ’heure à laquelle 011 croit la fraude consommée ;
alois on icm l 1 ucte u la ftitmlLc Vcrnicre. ^1. T aleyrat croit être
quitte de tout par ceLte déclaration qu’il peut se faire que Jacques
V e rn iè re se soit témérairement ou indiscrcttement engagé p a r lo
traité q u ’il a passé ayec le Sieur l’Espinasse et son b e a u -p è r e ;
q u ’il peut se faire qu’il n’ait pas senti la force do ces conventions ,
et que ses intérêts aient été compromis , mais qu’enfin il a signó
cet acte , tout onéreux qu’il est , et qu ’il faut bien absolument
que scs héritiers remplissent les obligations qu’il a contractées.
�(f<3 {
X 25
)
Prenez gard e , M . T a ’ eyrat ; ce langage que voüs tenez dans votre
mémoire. ( page 25 ) , est un peu présomptueux. V ous parliéz âp e u -p r è s de mêm e devant les premiers j u g e s , et cependant vos
prétentions n ’ont pas été accueillies. Nous sommes aujourd’hui deyant
des magistrats aussi éclairés que justes.
verbis.
F a c ta p o ten tio ra sunt
Q u ’est-il besoin , ausurplus , d ’avoir recours à des interpella
tions et à des preuves testimoniales , lorsqu’on peut en trouver par
écrit ? O n lit dans l ’acte sous seing privé passé entre Jacques V e r niére et la Dame T a ley ra t le i 5 janvier 17 9 2 , une clause qui donne
la mesure et la clé des notions des parties relativement à l’acte du
2 mai 1 7 9 I. Elles reconnaissent qu’elles se sont fait respectivement
raison de toutes les sommes payées par chacune d’elles sur leur
acquisition , et notamment des quinze mille livres payées à M .
L am o th e le même jour 2 mai 1 79 1. Elles terminent ainsi cet arrêté
de compte : D écla ron s réciproquem ent que nous n ’ entendons déro
g e r n i innover en aucune m anière à la teneur du su sd it contrat
de vente ( celui du 17 avril 1 7 9 1 ) et a u x actions q u i en r ésu l
tent , & c . , & c . , & c. Quand on connaît l ’objet de cet é c r it, quand
on en a l u les dispositions qui p ré c è d e n t, on est tout étonné d ’y
rencontrer la clause qu’on vient de rapporter : car dans le sens et
dans l’esprit de l’acte , il n ’y avait aucune raison pour l’ajouter. C e lte
clause démontre jusqu’à l ’évidence , que Jacques V ern ière ne se
doutait même pas qu’il existât de sa part un département de la
moitié du domaine : s’il l ’eût s u , il n ’aurait pas souscrit la clause
qu ’on vient de l i r e q u i d’une part était inutile et in co h é re n te,
et qui de l’autre tendait à achever son dépouillement. U n m o tif
secret a donc pu seul déterminer cette insertion ; elle est néces
sairement l’ouvrage d'un hom m e qui, s’il n’a pas tracé personnel
lement 1 art. I V []e Pacte du 2 mai i 79 1 , en avait les dispositions
présentes à sa mémoire , et croyait préparer à la Damo Taleyrat
les moyens de conserver la moitié du domaine ,
en enlevant la
portion que son coacquéreur y amandait. Ces réflexions ont frappe
les premiers juges 5 elles ont déterminé le jugement dont M. T aleyrat
est a p p e la n t, et elles n’échapperont point à tout homm e impartial
qui lira ce mémoire.
�> ( 26 )
M. G u e y fie r-T a le y ra t n ’avait qu’un seul moyen pour atténuer
des impressions aussi justes et aussi naturelles. U n moyen seul
était digne de lui et pouvait honorer la mémoire de ses auteurs ;
il consistait à vouloir ce que la force des évènemens a a m e n é , à
se contenter de ce que la bonne foi et la justice lui accordaient,
à souffrir l’éviction des héritiers de V ernière Gros-Jeacme , à diviser
le surplus du domaine avec ses associés , les héritiers de Jacques
V ern ière , et enfin à se réunir à e u x , pour obtenir de M. G u e y fie r l ’Espinasse des dommages-intérêts bien dus et bien légitimes. A u lieu
d’avoir pris un parti aussi sa g e , M. T aleyra t veut injustement conser
ver à lui seul la moitié du domaine. Il ne nie pas sa société avec
Jacques V e r n iè r e , mais il en fait une société lé o n in e , prend tout
p our lui et veut dépouiller ses associés. L a défense des héritiers
de Jacques V ernière est de droit légitime , ils la dirigent contre M .
G ueyfier T a l e y r a t , parce qu’il se met lui7même dans les rangs de
leurs adversaires ; ils prouvent le dol et la fraude de l’acte qu’on
leur oppose, et sans désigner nominativement à l'opinion p u bli
que quels en sont les auteurs ou les complices , ils s’en tiennent à
l’induction contenue dans cette double maxime : I s fr a u d a to r c u i
fr a u s p ro d est j is fr a u d a tu s cu i noce t.
Abordons maintenant la question d’une manière plus d irec te ,
et prouvons le bien jugé
du jugem ent de première instance par
des moyens victorieux. Prenons l ’hypothèse la plus favorable à M.
T a l e y r a t , convenons pour un moment avec l u i , que le traité du
2 mai 1791
ne le concerne p a s , qu’il est à son égard r é s in ie r
a lio s acta quœ tertio nec nocet nec p r o d e s t , il ne lui restera
d ’autre tilre que la vente consentie par M. l’ Iispinasse le 17 avril
3791. Ce titre est commun aux héritiers V e r n iè r e ; mais ce titre
est vicieux. DJeliùs est non habere titulum quant habere vitiosum ,
G u e y f i e r , p è r e , n ’avait donné à son fils que la jpuissance , et il
a vendu ensuite la propriété a Verniéie-G ros-Jeacm e : voilà la
seule vente va la b le , et la précédente ne peut valoir quo pour les
dommages intérêts et la garantie que doit M. G ueyfier l’ Espinasse. C e
dernier traite ensuite avec l'acquéreur de 6011 père , dont il a recueilli
la succession. 11 est convenu dans celle transaction , que la seconde
vente du 20 avril ne sortira ù effet que pour moitié : en consé-
�(27 ) '
q u e n c e , V ernière-G rosJeacm e se départ de Fautrft moitié du d o maineiiiiijnn pas en faveur de M. T aleyrat s e u l , mais bien en faveur
de 'M.. l’Espinasse ou de, se? deux acquéreurs. C 'est ce département
qui seul a pu valider pour une moilie la première vente du 17 avril.
Si Al. T aleyra t prétend que celte moitié doit lui rester en se u l, il faut
qu’il prouve nécessairement, ou que Jacques V e r n iè r e , son associé
et son coacquéreur, lui a vendu ou cédé ses droits, ou que volon
tairement et sans prix il
s’en est départi en sa faveur. Quelque
extension que l’on donne à la c t é du 2 mai ^79* j on ne saurait
y puiser aucune preuve de ce genre , puisque AI. Taleyrat avoue
lui-même que cet écrit ne le concerne pas , et q u ’il est pour lui
res in le r aîios acta.
Il
faut considérer un acte qui nous est é tra n g e r, comme un acte
qui n ’existe pas : o r , si ce prétendu traJté Ju 2 mai 1 7 9 1 n 'e x is
tait p a s, M . T aleyrat n ’entreprendrait pas sans doute de contester
que les héritiers de Jacques Vernière auraient des droits égaux aux
6iens , et que ces droits se borneraient à la moitié du
domaine
de Saint-L au ren t, divisible entr’eux , sauf ensuite leur recours pour
obtenir de leur vendeur commun des dommages-intérêts : il faut
donc convenir par parité de ra iso n s, que , n ’existant dans aucun
acte , pas même dans celui du 2 mai 1 7 9 1 , aucune stipulation pareille
en faveur de M. T a ley ra t , de la part de Jacques Vernière , ce
dernier ou ses héritiers n ’ont point renoncé à leur droit , et p r o
fitent du département ou de la restriction consentie par V ern iè re Gros-Jeacme dans la chose commune. Convenons encore que si
J l t t e restriction n'avait pas eu lieu , et que Vernière-G ros-Jeacm c
eût demandé l’exécution en totalité de la vente faite par M. do
L o n g p r é , p è r e , M. T aley ra t n ’avait aucuns prétextes pour se refuser
à ce désistem ent, et n'aurait pu se prévaloir de l ’acte du 2 mai 1 79 1.
Nous pouvons donc raisonner pour la partie comme pour le to u t,
puisqu’il ne saurait y avoir d’analogie plus parfaite. Ainsi cet acte ,
soit qu on le regarde ou non comme obligatoire pour M. T a l e y r a t ,
ne porto aucune atteinte à ses intérêts , et lui est au contraire
devenu très-favorable ; car il a pu suggérer à M. l’Espinasse l ’idée
du traité qu’il a passé avec Jean V e r n iè r e ,e t lui fournir les moyens
d ’obtenir la réduction à moitié de scs droits bien clairs et bien
�lù à
déterminés. E n dernier résultat, M. T a l e y r a t , qui courait les ris
ques de tout perdre , conserve lu moitié de sa propriété , et il est
redevable.de cette conservation à l’acte qu’il regarde comme uni
quement personnel à Jacques Vernière.
1
V oilà le veritable m o tif qui a décidé les premiers juges à ordon
n er
le partage du domaine de S ain t-L au ren t et
en adjuger la
moitié aux héritiers V e r n iè r e -G ro s-J e a c m e , un quart à M. T a le y
rat et un quart aux héritiers de Jacques Vernière , m otif claire
m ent développé dans les attendu du jugement , m otif contre lequel
M . T aley ra t ne peut rien opposer qui soit juste et raisonnable.
Quant au m o tif que ces mêmes juges ont déduit de la société
et de l ’ in d iv ision stipulées entre la Dame T a le y r a t et Jacques
V ern iè re dans leur arrêté de compte du i 5 janvier 1 7 9 2 , ce nrest
qu ’un m otif secondaire , sur lequel les juges ont
refuser
a pp uyé
pour
à Monsieur G u eyfier-T aleyrat et à Jacques V ernière les
dommages et intérêts qui leur sont dus. M. T aleyrat a très-grand
tort d’en faire la base principale du jugement , et c’est en p u re
perte qu’il nous apprend que des coacquéreurs sont réputés asso
ciés pour le fait de leur acquisition commune , jusqu’à ce qu’il ait
été procédé' au partage de la chose acquise. C ’est aussi inutile
m ent qu’il
discute
la question de savoir si celui qui vend une
chose co m m u n e , peut préjudicier à son copropriétaire et l’em pê
cher de revendiquer
sa portion.
Personne n ’a jamais cherché à
enlever à M. T aleyra t la portion qui lui revient dans le domaine
de S a in t-L a u re n t, on s’oppose seulement à ce qu’il prenne celle
des autres, et malgré les autorités de Despeisses , L aro ch e-F Iavil^
et Ranchin , malgré les décisions de ces dilFérens auteurs , il est
établi que la seule question de droit qu’il discute n'appartient point
n la ca u se , et qu’il u c ré é un fantôme pour avoir le plaisir do le
combattre.
A u -snrp lus , les héritiers de Jacques Vernière sont très-éloignés
d ’approuver la décision des juges de première instance qui ont
cru ne pas devoir prononcer la nullité de la c t é du 2 mai 1 7 9 1 ,
et qui , le
regardant comme sincère et connu des
auteurs de
M . T a l e y r a t , ont dispensé M. l’ Cspinasse de payer uucuns dom
mages-intérêts à ses deux coacquéreurs. Q uelle que soit
lelciidufl
do leurs connaissances, l ’erreur est le lot de tous les h om m es, et
�&
(2g)
si les magistrats qui composent le tribunal deBrioude en ont adopté
une , ceux qui composent la
C o u r (l’appel s’empresseront de la
répa rer; ils annulleront sans ménagement un acte frauduleux qui
outrage à -la fois la justice
, la
raison et
la probité.
Si la loi
environne d ’un saint respect les actes revêtus des formalités qu’elle
a déterminées , elle frappe d’anatliêine tous ceux qui ne sont pas
le résultat des conventions réciproques des parties , et qui sont
arrachés par la subtilité de l’ une à la confiance et U la crédu
lité de l’autre.
M . Taleyrat , pour atténuer la critique am ère que les héritiers de
Jacques Vernière font de l’acle du 2 mai 1791 , leur reproche des
contradictions. N e pas co ntester, d i t - i l, la demande des héritiers
de V ern ière-G ro s-Jeacm e , tendant à obtenir la moitié du domaine ,
c ’est approuver l’art I V de l’acte du 2 mai qui ne contient pas d’au
tres dispositions. L ’inconséquence n ’est que dans l’ objection; les
héritiers de Jacques Vernière , en donnant les mains à la demande
de Jean, reconnaissent d’ une part la légitimité de la vente consentie
par M. de L ongp ré , p è r e , le 20 avril 179 1 , el ils s o n td ’accoril
eh cela avec M. T a l e y r a t , mais ils acceptent aussi le désistement
que Jean V ernière a fait par le traité de nivôse an 1 2 , parce qu ’il
leur est favorable. Ils savent que ce désistement doit également tour
ner au bénéfice de M. T a ley ra t } leur associé ; en conséquénce ils
demandent à partager avec lui l’autre moitié du domaine , tandis
que ce dernier voudrait la retenir pour lui seul, voilà la différence
des systèmes. Celui de AI. T aleyrat peut-il
paraître plus juste et
plus co nséqu en t, lorsqu’on le verra,réunissant ses intérêts avec ceux
de l’Esp in asse, chercher à rendre la famille de Jacques V ern ière
seule victime de tous les évènemens ?
N e peut-on pas reprocher à plus juste litre des contradictions à
celui qui interjette appel d’un ju g e m e n t , sous le prétexte qu’il n’a
pas fait droit sur la demande en recours qu’ il avait intentée contre
M. G u e yfie r-l’ Espinash'c , et qui dans la poursuite de ce même appel,
se contente d ’agir et de plaider , 11011 pas contre lui , mais en sa
présence ?
Quels que soient leurs efforts com m uns, ils ne parviendront pas
ù obtenir l ’entier dépouillement des héritiers de Jacques Vernière j
�Y
J l ù
( 3o )
la C ou r d'appel ne peut dans aucun cas scinder les dispositions de
l ’acte du 2 mai 1791 , il doit être rejette ou adopté dans son entier.
S ’il est rejetté , le procès est f i n i , M. l’ Espinasse doit des dommagesintérêts pour l’éviction soufferte par ses acquéreurs; s’il est adopté ,
on ne peut oublier que Jacques V ern iere n ’a promis d'accueillir
la proposition de Vernière-Gros-Jeacme , que sous la condition e x
presse de conserver en toute propriété l ’ autre m oitié d u dom aine.
L a Cour ne verra pas d’un œil également favorable les prétentions
de M. T aleyra t qui veut tout garder au préjudice de son associé,
q u i certat de lucro captando , et la défense des héritiers de Jacques
V ern ie re qu i, ayant payé des sommes égales pour une acquisition
com m une, demandent à conserver une faible portion de l’objet qu’ils
ont acquis , q u i certant de d a mno vitando.
A u r é s u m é , il est établi que le jugement
de Brioude doit être
confirmé dans tous ses chefs , et que la C ou r d ’appel , rendant la
justice entière, doit en outre condamner M. G u e y fie r -l’Espinasse
à des dommages-intérêts envers ses deux acquéreurs. C ’est dans
des procès de cette n a t u r e , que
les magistrats à qui l ’application
des lois est confiée , doivent suivre le conseil d ’un de nos grands
maîtres : I n ju r e opus est m agna œ quitate , in terdum rejectâ nim ia su b tilita te , res ip sa s esse con sid era n d a s.
M.
B O R E L -V E R N IÈ R E ,
M.
A
DE
C L
E
R
V E R N I È R E ,
M O N T -F E
L’ I M P R I M E R I E
DE
en sa cause.
avoué.
R R A
J.
N D,
V E Y S S E T ,
Im p r im e u r -L ib r a ir e , rue de la T reille.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Vernière Marie-Anne. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Vernière
Subject
The topic of the resource
sociétés
indivision
successions
créances
immeubles
ventes
nullité
conciliations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Dame Marie-Anne Vernière, autorisée en justice, et monsieur Jean-Baptiste-Julien Borel, son mari, président du tribunal de commerce de l'arrondissement de Brioude, sieurs Jean et Jacques Vernière, négocians, dame Anne Vernière, autorisée en justice, et le sieur Férréol Rongier, son mari, aussi négociant, tous habitans de la ville de Brioude, héritiers de Jacques Vernière, leur père et beau-père, intimés et appelans d'un jugement rendu au tribunal civil de l'arrondissement de Brioude le 21 messidor an 12 ; Contre monsieur Antoine Gueyfier-de-l'Espinasse, homme de loi, habitant de la même ville de Brioude, aussi intimé et appelant ; Et encore contre monsieur Jean-François Gueyfier-Taleyrat, suppléant au même tribunal civil de l'arrondissement de Brioude, appelant ; En présence de Guillaume Chazellet et Jeanne Vernière, sa femme, de lui autorisée, Pierre Grenier et Marguerite Vernière, sa femme, de lui autorisée, François Lamothe et Anne Vernière, sa femme, de lui autorisée, les trois femmes Vernière, héritière de Jean, dit Gros-Jeacme, leur père, tous intimés.
Table Godemel : Acquisition : 1. une acquisition, faites par deux individus, d’immeubles non divisés par l’acte, attribue à chacun des acquéreurs moitié des immeubles acquis, lorsque l’acte ne contient aucune stipulation à cet égard, et lorsque chacun des acquéreurs a payé moitié du prix de la vente. la réunion des deux individus pour faire cette acquisition constitue-t-elle entre eux une société qui donne à l’un d’eux le droit de vendre tout ou partie de l’objet acquis sans la participation de l’autre, et à son préjudice ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J. Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 13
1781-Circa An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1526
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1525
BCU_Factums_G1527
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53266/BCU_Factums_G1526.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conciliations
Créances
immeubles
indivision
nullité
sociétés
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53267/BCU_Factums_G1527.pdf
acfabbc5d0f7057bca7962cc9ad9b459
PDF Text
Text
CONCLUSIONS MOTIVÉES,
dame M a r i e - A n n e V E R N I È R E , autorisée en
justice, et M . J e a n - B a p t i s t e - J u l i e n B O R E L , son
m ari, président du tribunal de commerce de l’arrondis
sement de Brioude, sieurs J e a n et J a c q u e s V E R N I È R E , négocians, dame A n n e V E R N I È R E , autori
sée en justice, e t le sieur FERRÉOL R O N G IE R , son mari,
aussi négociant, tous h abitans de la ville de Brioude
héritiers de Ja cq u es V e r n iè r e , leur père et beau-père,
intimés et appelans d’un jugement rendu au tribunal
civil de l’arrondissement de Brioude le 21 messidor an 12;
Pour
7
C o n tre
M . A n to in e
G U E Y F IE R -D E -L 'E S P I -
homme de loi , habitant de la même ville
de Brioude, aussi intimé et appelant ;
N A S S E ,
E t encore c o n t r e M . J e a n - F r a n ç o i s G U E Y F I E R T A L E Y R A T , suppléant au même tribunal civ il de
l'arrondissem ent de B r io u d e , appelant ;
de G u i l l a u m e C H A Z E L L E T et
J e a n n e V E R N I E R E , sa f e m m e , de lu i autori
sée , P i e r r e G R E N I E R et M a r g u e r i t e V E R N I E R E , sa fem m e , de lu i autorisée , F r a n ç o i s
L A M O T H E et A n n e V E R N I E R E , sa fem m e ,
de lu i autorisée, les trois fem m es V e r n iè r e , héritières
E n
présence
de Jea n , dit G ro s-J ea cm e, leur p è r e , tous intim és.
A
,
Attendu que par l'article 3 d u traité dont s’agit on a pré
vu le cas ou le sieur G ueyfier fils décéderoit avant le p ère;
ce
qu’il
plaise
a
la
cour
A 2
�4
;
'
(
)
"
Que ce n’est également que du vivant du père qu’il
p ô u voit'être question d’arrangement, soit relativement
à Vernière Gros-Jeacmes, acquéreur du p ère, soit rela
tivement ù Jacques V e r n iè re , acquéreur du fils;
Que ce n’est que du vivant du père qu’on pouvoit
proposer à V ern ière Gros-Jeacme de se contenter de
la moitié du dom aine, à condition qu’il jouiroit de suite
de cette moitié , et à Jacques V ernière d’abandonner la
, jouissance de la moitié pour s’assurer la propriété de
l’auti’e moitié ; propriété qui j:>ouvoit lui échapper ,
dans le cas prévu par l’article précédent du prédécès
du fils ;
'
Q u ’il seroit absurde de penser que Jacques Vernière
se fût contenté gratuitement de la moitié du dom ain e,
même dans l ’hypothèse où le fils auroit survécu le p è re ,
et où i l n auroit plus eu Æévénement à c o u r ir ’,
Q u ’il ne seroit pas moins absurde de penser que V e r
nière, acquéreur du pè re, se fût contenté de la moitié
du d om ain e, à condition de jouir de suite de cette moitié;
puisque dans, l’hypothèse du décès du père , rien ne faisoit obstacle à ce qu’il jouît de la totalité; la jouissance
n’étant assurée à Gueyfier fils, dans son contrat de ma
ria g e , que jusqu’au décès du p è re ;
Que l’article 4 n’a donc été conçu que dans l’hypothèse .d’un arrangement lait du vivant du p è re;
Que c’est ce qui résulte des termes même de cet article ;
Que par cet article 4 , et au cas y p rév u , c’est-àd ire, dans le cas où Vernière Gros-Jeacm e, acquéreur
du père , se contenlcroit de la moitié du dom aine, il est
dit (jue les articles précédeus, sans exception, demeu-
�5
^
(
)
reront nuls et de nul effet, et par conséquent Varticle
f 'premier ,* .
Que par cet article premier il est dit et stipulé que
"Vernière, acquéreur du fils, fera valoir le droit qu’il
avoit de jouir ju s q u ’a u décès du père ; ce qui étoit
effectivement le seul moyen d’amener G r o s - Jeacme à
composition ;
Q u ’en annullant cet article, au cas prévu par l’article 4 ,
c’étoit comme s’il avoit été dit en d’autres termes : E t
en cas que V ern ière G ros-Jea cm e se contente de la
m oitié du d o m a in e, m o i, J a cq u es V e r n i è r e t promets
de ne point ¿faire usage de tnon droit de jouissan ce j
Mais que ce n’étoit que du vivant du père que l’ac
quéreur du fils pouvoit consentir à ne pas faire usage
de son droit de jouissance, puisque ce droit cessoit dès
le moment du décès du père*,
Que par l’article 2 on prévoit le cas où le fils survivroit le père ; qu’il est dit que lorsque Jacques V ernière
sera privé de la jouissance, ce q u i ne pouvoit avoir lieu
qu’après le décès du p ère, Gueyiier 'fils s’oblige de lui
donner d’autres fonds en rem placement, et jusqu’à concuri’ence de la valeur de la totalité du domaine*,
Q u ’il seroit absurde de penser q u e , quelques lignes
plus b a s, dans le même cas de la survie du fils, dans un
cas où il n’avoit plus de risque à co u rir, il eût entendu
se restreindre à la moitié du domaine, et renoncer pour
l ’autre moitié à l’indemnité q u 'il venoit de stipuler j
Que si on oppose que par l’article 4 , et au cas y
prévu , l’article 2 est annullé , d’où il suit qu’on s’est
occupé du cas où le fils su rvivroit, comme du cas où il
A 3
�prédccederoit, on répondra que ce n’est pâslà la consé
quence qu’il faut en tirer; qu’il faut au contraire dire
que l ’article 4 a été ajouté dans l’idée et dans la sup
position d’un arrangement a forfait avec toutes les parties;
traité à forfait qui ne pouvoit avoir lieu que du vivant
du père;
Que c’est le seul moyen de concilier l’article 2 avec
l ’article 4 ; que par là on explique en même temps com
m ent, par l’article 4 , et au cas y p r é v u , il est dit que
l’article 2 demeurera sans effet, parce qu’effectivement,
dans la supposition d’un traité à forfait avec toutes les
parties, traité q u i, encore une fo is , ne poüvoit avoir
lieu que du vivant du p è r e , l’article 2 ne pouvoit sub
sister ; autrement ce n’auroitplus été un traité à forfait;
Que c’est le seul sens raisonnable dans lequel l ’acte
puisse être entendu ;
Que le père décédé, il n’y avoit point de raison pour
Jacques Vern ière de faii-e de sacrifices , puisqu’il trouvoit une garantie assurée dans la personne de Gueyfier
iils, saisi de toute la succession du père ;
Q u ’il n’y avoit également point de raison pour Verni ère
G ro s-J e a cm e, puisqu’apres le décès du père rien ne
pouvoit faire obstacle à son entrée en jouissance;
Que personne n’est présumé abandonner son droit :
Nerno res suas ja cta re fa c ile prœ sitm ilur ,*
Que rien ne s’explique dans l’hypothèse du décès du
pèro , les droits des parties étant alors certains ;
Que tout, au contraire, engageoit les parties à se relâ
cher respectivement de leurs droits, du vivant du père;
Que Jacques Vernière 11’a évidemment consenti à se
�7
C
départir de la moitié du domaine, sans indemnité , qu’à
condition qu’on lui assurerait dès-lors l’autre moitié ; .
Que le cas prévu n’est point arrivé ;
.-Qu’ayant couru le risque-,- dans le cas où lefilsauroit
prédécédé , d’être évincé de la totalité du domaine, sans .
aucune indem nité, et sans aucun recours , excepté pour
Igl remboursement du prix, cautionné p a r le sieuy Boyér
par l’article 3, il seroit contre l’équité et contre le droit
d’j exiger de lui le sacrifice qu’il ne faisait q u e,p o u r ne
pas courir ce risque;
.Q u e la condition sous laquelle Jacques. Vernière. a
consenti à se contenter d e .la moitié, du domaine, sans
^ -■
■
-i
••
indemnité pour l’autre moitié., n’ayant pas eu lie u , cet _
article 4 doit ..être considéré comme s’il n’avoit point
été écrit^ . ;J
Que s’il doit être considéré comme non é c r it , le sieur
Gueyfier.ne peut se soustraire à son obligation prim i
tive , à la garantie résultante de la vente qu’il û consentie;
Q u’il doit donc, être condamné 4 faire cesser la demande des héritiers.de Vern ière G r o s -J e a c m e , û faire jouir
les représentais de Jacques V ern ièrç et le sieur Taleyrat
de la totalité du domaine, sinon en tous les dommages
et intérêts en raison de l’éviction qu’ ils pourront éprouver;
Que si 011 vouloit étendre la clause, même a u cas de
la survie du fils > au cas où le recours contre le sieur
Gueyiier-FEspinasse étoit assuré , ce seroit alors ou une
douation à titre gratuit que Jacques Vernière auroit
voulu faire de la moitié du dom aine, ou une v en te;
que Jans 1 un et l’autre cas la clause est nulle; au premier
cas, la donation n’étant point revêtue des formalités près-
�•
■
( 8 )
critcs par l’ordonnance de 1 7 3 1 ; au second cas, la vente
étant sans prix , puisque Gueyfier-l’Espinasse ne donne
rien , 11e promet rien en indemnité ;
Q u ’ainsi le sieur Gueyfier-l’ Espinasse ne pourroit éga
lement s’en prévaloir.
Attendu q u e , dans tous les cas, cet acte doit être dé
claré commun â 11 sieur Taleyrat ;
Attendu que la loi M ultum 2 , au Code D e com m uniurn rerum a lien a tio n e, invoquée par le sieur Taleyrat,
et la loi 68 au digeste P r o s o c io , qui décident que l’as
socié ne peut vendre la portion de son associé, ne reçoivent ici aucune application;
Que Jacques V ernière , au lieu d’alién er, a conservé,*
Q u ’il n’a fait que ce que tout père de famille prudent,
ce que le.sieur Taleyrat lui-même auroit fait;
Q u ’il faut se pénétrer de la position où étoient les
parties lors de l’acte du 2 mai 1 7 9 1;
Que Jacques V ernière avoit à craindre de tout perdre,
même le p r ix , si le fils venoit à prédécéder;
Que cette crainte est même exprimée dans l’acte;
Que le sieur Gueyfiér , dans ses conclusions données
sur l’a p p el, convient lui-même que s’ il éloit décédé avant
son père, il seroit décédé insolvable ;
Que c’est dans cette circonstance que Jacques Vernière
a cru devoir sacrifier une partie pour assurer l’autre;
Que si le cas qu’on craignoit d o it arrivé , le sieur
Taleyrat ne manqueroit pas d’exeiper de l’acte , de se
le rendre commun ;
Q u ’il ne cherche à l’écnrtcr que parce que le cas n’est
�cs>>
.
point arrivé , et qu’il n’y a plus de risque à courir.
Attendu que si l’associé, aux termes des lois ci-dessus,
ne peut vendre la part de son associé , le droit certain
de son associé, il peut traiter sur la chose commune lors
que l’intérêt commun l’exige; que c’est ce qui résulte de
la glose et des notes de Godefroi sur la loi 68 , au digeste
P r o socio. N em o , dit cette l o i , e x so ciis plus parte
suâ potest a lien a re, et s i totorum bonoriun so cii sint.
Sur quoi la glose dit : « N idlom odo p o te st, n is i pro« curatoris generalis exernplo, cu i tantum p erm ittitu r,
« res quoe servando servari non p o ssu n t, dim inuerez
« -ideoque, licet so cii inter se ¿1 légé tacitum manda« turn gerendi habere v id ea n tu r, hujusm odi tamen
« mandatum p o rn g itu r ad ea tantum Jxicienda quai
« societati expediunt, sunt que utilia. »
Que l’associé peut donc faire tout ce qui est avanta
geux à la société ;
Que pour juger si Jacques V ern ière a fait ce qui étoit
avantageux , il ne faut pas juger ex eventu ; qu’il faut se
reporter au temps de l’acte ;
Que c’est le cas d’appliquer la m ax im e, Q u id u tiliù s,
comme il se pratiquoit autrefois en pays de c o u tu m e ,
pour les droits acquis à un mineur décédé;
Attendu que si on considèi’e le désistement fait par
Jacques V ern ière , de la moitié du domaine, pour s’assurer
que Vernière Gros-Jeacme ne le recherchera point pour
l’autre m o itié, comme une vente qu’il auroit faite de
cette m oitié, la vente seroit n u lle , comme faite sans prix^
�puisque Gueyfier ne donne rien du sien , qu’il ne s’oblige
pas même à rembourser la moitié du prix; mais qu’alors
la vente étant n u lle , les choses sont revenues au même
point que si cet acte n’avoit point existé ; et alors le sieur
Gueyfier est tenu ù l’entière exécution de la vente, et le
sieur Taleyrat désintéressé ;
Que si on consière l’acte comme un forfait , comme
une transaction, pour ne pas courir le danger de tout
perdre , même le prix , ce n’est plus le cas d’opposer la
loi M u ltu m au co d e, ni loi 68 au digeste P ro s o c io ;
Que le sieur Taleyrat ne doit pas être reçu à venir
aujourd’h u i, q ua si ad parafas epulas j
Attendu que Jacques V ern ière n’a pas entendu évi
demment se départir de tout droit dans le domaine;
Q u ’il a entendu avoir au moins quelque chose, puis
qu’il ne s’est déterminé à sacrifier une partie, que pour
•assurer l’autre ;
Que dans le système du sieur T a le y r a t, il n’auroit rien ;
que c’est le cas d’appliquer la m axim e, q u i tiim is probatj n ïh il probat ;
Faisant droit sur les appels r e s p e c tifs ,
D ire qu’il a été mal jugé par le jugement du tribunal
de B rio u d e, en ce qu’il n’a pas condamné le sieur Gueyfierl’Espinasse à faire cesser la demande des héritiers de
V ernière G ros-Jeacm e, et à les rendre taisans; sinon,
et faute de ce , en tous les dom m age>et intérêts en raison
de l’éviction ; faisant ce que les juges dont est appel
auroient dû faire , sans s’arrêter ni avoir égard au traité
�du 2 m a i 1 7 9 1 , lequel sera déclaré nul, et subsidiairement comme non avenu def e c tu conditionis x condam». n er ledit sieur Gueyfier-l ’Espinasse à faire cesser la de
mande des héritiers de Vernière G ros-Jeac m e , et à faire
jouir les représentans de Jacques V ern ière et le sieur T â Ieyrat de l a totalité du dom aine, sinon ,e t f a u t e d e c e
en tous les dom m ages et interêts en raison.de l ’é v ic t io n
a d o n n e r par déclaration s in o n à dire d’ex pert e u égard
à la valeur actuelle du dom ain e,.aux intérêts à c o m p te r
du jour qu’ils auraient été condam nés à la r estitution
des jouissances envers les représentans V ern ière G rosJeacm et où la cou r .y fero it quelque difficulté dire
q u’il a été bien jugé par le. jugement dont est appel.,,
aux chefs auxquels lesdits Taleyrat et Gueyfier. sont appelans', mal et sans cause appelé ordonner que ce dont
e s t a p p e l sortir a s o n p lein et en tie r. effet ; condamner
^
les sieurs .Taleyrat et G ueyfier,
celui d'e ntre eux q ui
s u c c o m b e r a en to u s les dépens d e la cause d’appel.
M e. P A G È S - M E Y M A n
ciu
elso
rjC
t
•
M
••
„
V e r n i è r e ,
iiA ^ c v tî^
y uuv*
<«
av o u é •.
■
w u />u ^
ÿulî*~£<*** iaakùMz-s t>
A RlOM del'imprimerie de Landriot seul imprimeur de la
txuaÀ\oS‘
3« VtaXr
tv
;|cep
'u
la
d
ro
llÂ/Cwix
oit'- ^wi.'^UAÿ0
^ h w o O T O^IO(UAf t*- Mi
^uhif foi
,»>A
/ÿi(H¿m
y i UA»A»y|cM*à
» /a'ktajMujM
| |
(x^JLiÎxÂtf U>^iu yiM
3
< &*Aaj
4
�* * -•
a . A0 Í / í r
, A
£ t Jk^ , l Z
-x
5
^
^ o M ^ t ü .
<<i*íw*^€fcr^«iAxxA» d*
/p ****~;
^
„ „ t.
___
c^ c v ^ Í U ,
y -
cdtít • ^uuu ( ^t uj t cO1»^ ¿I ♦' ***. / } Cjt
- f ä d U j A cdk -
CM
Ci»*
ly b lA
*»■
,
A
* > * « M
y"“ « COwAOmA^ </ « » % ,
a if
^<aiù» à*
4
^Ul^ul« r/iv>
/ t ^
l M
V»tJ«^y<A.>t<. J y /
r
« > * M A
^ /U J l I w
o ^ iU i*« « ft
/ b ! p LkaX k a
*
»/y.
«
Ò*.
u>vw>j <a«/u 7m aj
«44
«*»■»»■
» • oÔfkjAJV
/ f c
->f ‘ --^ * * f ^ tA (jb U A ltw iu A k U t»»^ »
a it .
.
«wJÚuÜík ^ U M U M M x / b *■
*
9 ^ » J jy K * a
i u
t í "
jra*.yu*». eAA»¿¿^ UfMtXé-Jhi^ iiu r/u -
<MC>y4MAr>
^
^ * M A 4
^iu'
7
ÿ y*~Ar
.
< M < O U t
M
H i ^ A i* A fc»4~
‘^ A j
m '« « * !
^ t o y t fc tu J
^
'
a i> * A w f tW »
/ ^ «^jvU f t y * ;
cd t- fy** S'cu-x t ^ ** ( f y tk***jwL4j
^L*>U
(/tM^J/U.
/a <*u)m
4«
£
^ ÿ \o ÿ J b J fc
^
'h**
' 'í '**JJ r
¡T ^ y * '
1
^0>~
o y - p \ t i< ! fc / ¿ v .^
U M
6
/ m
ü
a
m
*
h
a
X
m
11
n i \ k, /*■
"à, ÿ ' f
- *^ r / A /A*^ r
^
/
C M
/?Cty!U
û * M * « W * * JrÙ ü
CAjk*
/
4AJ ' CM •l'M\AJM w
/
. !««»»>
* .Mk^tjuAA A' /«.
* » A>
f>»
•** £ ^ ¿ * * 0 ^ f-i-A
V
a il-
Ä «aacJ
« cu^ c^ ji^
ü Ua ^u t
A
y/tX AtJ^
%*>
s y * ^ î
y***
V€*~¿¿*f l> ¿ r y u n ft* A ~ „j
« » A jv il
k *
JtK
CU^Jt^jr^iA^Jr Î a ^ÍMyúfeí 1%Atil/Té
Ä
V "—
</«A*x* ^ 'iutitTy/oCfcU*
y i« —
U^
#» V
V.
<*^^«mI j ^ i r ^
^ u ^ i^ 'J ïà ', <ï>c----¿
«UL ^ U U Î V U L » * .
A .-
X» C^.
V w vu a a ayo**
^ ^ / '^ a r ^ y u v u . ///
^ U i J r y * —>- / 't 'J v u J ^
C ÿ ^ tli*
Ä V ^ u
t'yvw ¿ ¿U ci<W>4JO ¿
Ak«y
/&«*»!«
—>-«*4
^ A « i*u » -ry« t*JL ^
**
ticás-"*«« Â «~»*¿ A
y » u «
/
^
UA/UxM. y «A-
A.
ÍU
-CÄ
^ ta /
�f
^ A * n y *
« A « .
U iw .U ti' àc
/'#■"
/
. \^
o Aírj^ ¥tkl t+t£i
/
J’ .
/a ^« 44^/ui«i
•
C fy lM
y " < /* * - >
y ~ * t m
f M
~
¡M *- * - V <jJLL» ^
.(/
^
^
r / __i- j_
•
lfVV<r
C ^ 4 4 a* 4 u /« 4 .
.y
.
.
'
__ /(mmm
“ ' H‘ uu '
/*.
"~ V
- ._
</
y^M M
/u
t&L<rA+**- v
«^WÄCT SL. v^-tr *w./> — ^ n y , ^ y ^ y ~ V ~ ~
4
---- - «x
•***I^W» pKuX^
Ä» U Cnu^ItÜ lX
^
_
Oma
/ft^tA^iU^UuN« C>,_ /-< /, V >A/'/*>*jV -
3
0 "~
/ / < ^ , ¿ Ä = j^ V
7
V
<%U*úujr-f «^ fcr y—
*
*
7
w - f^ r r ^
fr
* .
i« uu>»/u. ft <<im u f oi“ JÍ» é^*«J«,‘ ^, ■ /**^J
Ä^C-
^
ny
°*
< ¡ r - /~
—
-j ^
/ w
A «U w u >
r
LrU<~uK
/
7
•
/
ci(~*-".
_ .
“
-V
^
«> .X
'
« -
-
t{f*J~
K,
/ * lu' il^
» t J-*-*
fttf . «/U [«
uM
^
.
^
v
' v J i
x
c Ä tu J “ ' Ä* l *’r’*-“ /
X
^
■>. Ä. v ^
--v -r ^
, . » -
f
. f l
I*
w ^
■Ur. ^
v
cu¿fáL* >. urtinzH ' U l¿k^j Jx
V iW «Li !»
*«J trStf-’ •
y
W
V
^
,
y— -
/ “ •*»■ ItÄZ^A
7
t
7
j r . “ f ^ '* - '
“
^ * ~ r ^ v ~ s r ~ f
.......„ : w
<^a
„
I
-TTT . ■. }u uv •***-,/•
ftft- «- «/*» «■••»* /«*»**»»
'
^
L ir ~
/yt<**»r qr*
/ <.,_•
^'
-----• * * T T -’ V
^
_
/
'
/Cui*_
.
- /^ » r*~ y "x ^ —
• /
7 7 1 ^
•
»
/*»,
4
__
b u v Æ
ï T
.
* *
f
l/ ‘—
^
f
----
V «— » *
*4-L
„ .J tl^ iA
fy
V « -tí^ “ ^
“ “T T
'
__ .«.y^
_;i-*/fc ÍM&K¿ti
r»°**
w » — «*~
>
¿nf— r
m jJ u .
�J
7
«
« r '~ '< f~
, ^
« « ,.^ ^
-'** A ~ i
4^
iL /*T< & ..« ., «-.
u ^ t ì= ^ v c ^ ;
o>^Cu 6 * í-»Jí__o «<^
^
j ‘ *~+
4
^ <'^>ôÆû * (a UmJm^ <ÿj!Ji / .-.fl....,' -y
a# ^
^
Ì.
 < ~ K ^ x -:
MU
'•■ * -
i< V t t « J l < A A
Uir inho*~*
ç f f ^
Y
«M O L .
fli>Ul*»i»
<»»«»iîr"i*» °
U ^ua ¿
oJtJjuZC «I
_?kZtyi«jr— ^
ç &. »¿f ctMkh1.. *» .^«CCuj *’**«^- ^
^ u te M r ^ ^ u y A
^
y^ « *
/6¿^uJr
/J <***•)
•■
“ *■aLu.*
- V (/
viuuM*
y it*| t *_i
f
*»•
X«*-,
** i»»>> ».*.. »g ■»/. i\ ■*•/"
u**»iui«jr—tv«j
í . . i*Um~
-^,U*^«»««M^ U—^u«u / ff— fr{ t» » l» ^ ^w<<
jL ~ *.
<L»ífch¿; /7'*^J §r“ *^r<Uj"
-
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Vernière, Marie-Anne. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Vernière
Subject
The topic of the resource
sociétés
indivision
successions
créances
immeubles
ventes
nullité
conciliations
Description
An account of the resource
Titre complet : Conclusions motivées, pour dame Marie-Anne Vernière, autorisée en justice, et monsieur Jean-Baptiste-Julien Borel, son mari, président du tribunal de commerce de l'arrondissement de Brioude, sieurs Jean et Jacques Vernière, négocians, dame Anne Vernière, autorisée en justice, et le sieur Férréol Rongier, son mari, aussi négociant, tous habitans de la ville de Brioude, héritiers de Jacques Vernière, leur père et leur beau-père, intimés et appelans d'un jugement rendu au tribunal civil de l'arrondissement de Brioude le 21 messidor an 12 ; Contre monsieur Antoine Gueyfier-de-l'Espinasse, homme de loi, habitant de la même ville de Brioude, aussi intimé et appelant ; Et encore contre monsieur Jean-François Gueyfier-Taleyrat, suppléant au même tribunal civil de l'arrondissement de Brioude, appelant ; En présence de Guillaume Chazellet et Jeanne Vernière, sa femme de lui autorisée, Pierre Grenier et Marguerite Vernière, sa femme, de lui autorisée, François Lamothe et Anne Vernière, sa femme de lui autorisée, les trois femmes Vernière, héritières de Jean, dit Gros-Jeacme, leur père, tous intimés.
Annotation manuscrite: texte intégral du jugement du 2 germinal an 13, 2éme section.
Table Godemel : Acquisition : 1. une acquisition, faites par deux individus, d’immeubles non divisés par l’acte, attribue à chacun des acquéreurs moitié des immeubles acquis, lorsque l’acte ne contient aucune stipulation à cet égard, et lorsque chacun des acquéreurs a payé moitié du prix de la vente. la réunion des deux individus pour faire cette acquisition constitue-t-elle entre eux une société qui donne à l’un d’eux le droit de vendre tout ou partie de l’objet acquis sans la participation de l’autre, et à son préjudice ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 13
1781-Circa An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1527
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1525
BCU_Factums_G1526
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53267/BCU_Factums_G1527.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conciliations
Créances
immeubles
indivision
nullité
sociétés
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53268/BCU_Factums_G1528.pdf
d655fe5f55fd5732d7515bcbb3de8d4c
PDF Text
Text
ADDITION
A u Mémoire imprimé pour le sieur de -SAIN TJU LIE N appelant}
C o n tre , le sieu r G R O S - L A M O T H E , in tim é,
D a n s une écriture en réponse au mémoire du sieur
de Saint-Julien, le sieur L am o the insiste de plus fort
sur sa fin de non - recevoir contre l’appel du sieur de
. Saint-Ju l i e n mais il fait un usage bien étrange des au
to r ité s
qu’il invoque. Par cette raison le sieur de Saint-
J ulien juge nécessaire de reprendre la plum e, pour lui
démontrer q u ’il est dans l’erreur.
L e sieur L am o th e se sert de l’art. 2 du tit, 13 de la
Coutume d’A u v e rg n e , portant : « E t par c e , doresnav vant , le mineur de vingt-cinq ans ne pourra , par
c ontrat ou a utrem en t, disposer de ses biens immeubles
�Y
t ù
CO
« sans a utorité de cu rateur et décret de ju g e , soit p a r
« convenance de succéder, ne autre. »
L e sieur Lam othe dit : « J ’ai décret de juge ; donc
« l’aliénation est bonne. » 11 cite l’annotateur de P ro h e t,
et M . Chabrol.
R éponse.
i° . A u temps d e là rédaction d elà Coutume (en i 5 i o ) ,
on ne connoissoit qu’ un d éc ret, celui sur saisie r é e lle ,
en vertu du tit. 24 ; et ici nous ne sommes pas dans
ce cas.
2°. La Coutume parlant de cu ra teu r, elle présuppose
un mineur ém ancipé, qui a une volonté c iv ile , qui peut
contracter au moins tm engagement naturel, qui passe
un acte volontaire; tandis que lors de la vente en ques
tio n , le sieur de Saint-Julien étoit en tutelle, et hors
d’état de consentir une obligation quelconque.
3 0. N ’importe l’opinion de l’annotateur de P r o h e t ,
p u isq u eP roh et lui-même donne en principe q ue, malgré
toutes les formalités, le mineur peut se pou rvoir contre
la vente.
40. M . Chabrol lui-mem e d i t , torn. 2 , page i 5y ,
qu’une adjudication nulle ne peut p “ s avoir plus d'effet
qiCune adjudication su r saisie réelle : o r , Tadjudica
tion des biens des m ineurs sa isis réellem ent, pourroit
être attaquée p a r appel pendant trente a n s , s i la sa isie
féelle étoit irrégulière. E n g é n é r a l, une sentence ne
passe en fo r c e de chose jugée qu'après ce temps : i l est
i r a i que p our las décrets, la jurisprudence a quelque
f o i s distingué les m oyens d e fo r m e de ceu x du f o n d , en
�6 m
( 3 )
restreignant ra p p el, dajis le prem ier c a s , à d ix ans. néanm oins s'agissant d’ une vente de bieiis de m in eu rs,
il y a. lieu de penser qu'on s'en tiendroit indistinctem ent
à la règle, suivant laquelle une sentence riacquiert la
f o r c e de chose jugée q u à l'exp ira tion des trente ans.
L e sieur Lam othe cite encore L o u e t, lett. D , chap. 26.
R
é p o n s e
.
M . L ouet fait lui-même la distinction des décrets v o
lontaires d’avec les décrets forcés.
. Quant aux premiers, point de difficulté ; ces décrets
étant hantés sur des contrats de vente qui ont dé
pouillé le v en d e u r, celui-ci n’a que dix ans pour ap
peler du décret : cela rentre dans la durée des actions
rescisoires, qui n ’étoit que de dix ans compter du con
trat lui-méme.
Mais à l’égard de la vente judiciaire, M . Louet est
pour les trente ans. « D e la q u elle, d it-il, com m e des
« autres ju g em en s, Von peut appeler dans les trente
« ans, »
Brodeau, son annotateur, d it : « Cette distinction est
« fort juridique; car le décret volontaire, qui ne se fait
«
«
«
a
k
({lie pour purger les hypothèques de l’horitage acquis*
ne change et n’altère point la nature des contrats, niJul novum arfjicit, et n’est point un nouveau titre : le
droit de propriété est acquis ù. i’^icquéreur par le contrat de v e n te ; le décret ne fait que confirmer et us-»
�(•4 )
V
'«
«
a
surer la possession. N on dat i sed co n firm â t, sive datum sig n ifica i, comme il est dit en la loi E t q u ia , 6,
JDe jui'isd. , et L . Hœredes -palimi, 21 , ff. i.j
iestam . fa c e r e poss. C ’est ce qui est remarqué par
«
«
«
«
te.
M . Ch. D u m o ulin , in Consuet. P a r is ., fl*. ¿ 4 , N . 21
et 22, que in sim p lici decreto con firm a torio, cm ptor
priiis gessit negotium cum privato venditore, im o ah
ilio ipso er n it, ju d ice tantàrn confirm ante contrae
tum ab aliis fa c tu m , et sic ju d e x n ih il d a t , etc. »
Cet auteur en induit son opinion pour la fin de non-
recevoir décennale; il en rapporte plusieurs arrêts du
parlement de Paris.
« Quant aux autres décrets , continue Brodeau , il
«
k
«
«
11e se trouve point d’arrêts précis q u i aient ouvertem ent ju g é qu'après d ix ans Vappel n'en soit plus re~
ceva b le, soit à l’égard du saisi et ses héritiers, soit des
appelons, etc.
« A u contraire on peut remarquer plusieurs arre tí
« par lesquels la cou r, après vingt-cinq ans, et jusqu’il
« trente a n s, a reçu l’appel d’un d é c r e t, et n’a poiní
« fait difficulté de le casser, quand elle y a reconnu des
« nullités essentielles. »
Brodeau en rappelle des arrêts de 1608, 1624, 1626,
1634; il assure qu’il y en a nombre d’autres, et q u e ,
G a llica enirn f o r i observai ione , provocandi ju s ad
tricentun usque ad annum porrigitur.
L e sieur Lamotlie cite Rousseau de Lncom be, en son
Recueil de jurisprudence c iv ile , verbo D écret.
�( 5 )
R
é p o n s e
.
Comme nous l ’avons d it , page 31 du mémoire im
primé , Rousseau partant de M . L o u e t , ce que nous
venons de dire répond suffisamment.
L e sieur Lamotlie cite d’H érico u rt, en son T ra ité de
la vente des immeubles par décret.
R é p o n s e .
Cet auteur, chap. 1 1 , art. 8 , dit : « Quand l’adjudi« cation a été faite dans un siège inférieur, on peut en
« interjeter ap p el, poùrvu qu’on soit encore dans le
« temps de se pou rvoir par cette voie ; et pour cela il
«
«
«
«
«
«
«
faut distinguer le cas où l’adjudication a été signifiée
à la partie dont le bien a été vendu par d écret, de
celui où cette signification n’a point été faite. S i Vadju d ica tio n a été sig n ifiée, on ne peut en interjeter
appel après Pexpiration des d ix années à com pter
depuis Padjudication ; et si P a d ju d ica ta ire, après
trois ans écoulés depuis la signification de Vadjudi-
« c a tio n , a som m é la partie saisie d'interjeter appel,
« et q u elle ne Pait point interjeté dans les s ix m ois
« du jo u r de la so m m a tio n , elle n e s t plus recevable
« en son a p p el, etc.
« L o rsq u e la sentence n'a point été sign ifiée, ou
« qu'elle ne Va point été avec toutes les jb rrn a lilés près« crites p o u r les a jo u rn em en s, la voie de f appel est
3
�(6}
te regardée com m e une action
-personnelle q u i dure
« trente années. »
D ’Héricourt dît que sur cela il y a voit controverse
entre les auteurs. Mais la jurisprudence a été fixée par
les arrêts rapportés par L o u e t, des années 1608, 1624,
1625 et 1634, nonobstant l’ordonnance de 1629, connue
sous le nom de Code M ichaux.
L e sieur Lamotlie cite un arrêt du parlement de Paris,
du 13 décembre 178 3, que l’on trouve dans le Nouveau
Denisart.
R é p o n s e .
L a découverte de cet arrêt n’est pas encore heureuse.
Si le sieur Lamotlie l’avoit lu avec attention, il auroit
jugé qu’ il s’y agissoit non de vente de biens de mineurs,
mais d’un décret volontaire intervenu sur une vente faite
par la m ère, tutrice des mineurs, et cela de ses propres
biens. P o u r preuve, nous allons transcrire mot pour mot
la relation que le sieur Lamotlie fait de l’espèce de cet
arrêt.
« La dam e......... tutrice de ses enfans, avoit vendu un
« immeuble au sieur......... q u i en avoit f a i t J a ir e le
« décret volontaire.
« L e s e n ja n s , q u i se trouvoîent créanciers de leu r
« mère , parvenus à leur m a jo r ité , av oient assigne
« Vacquéreur en déclaration d'hypothèque.
« Celui-ci leur opposa la sentence d’adjudication, et
« le laps de dix ans écoulés depuis.
* Les eufaDS objectèrent que les procédures du décret
�i r b 'i
(7 )
« n’y étoient pas visées ; qu’il devoit les rapporter pour
a
«
«
«
«
«
cc
«
«
«
«
cc
justifier si l’adjudication a voit été faite dans les règles,
et que la prescription n’avoit pas pu courir contre des
mineurs, parce qu’ils n’a voient pas alors d’autre personne qui pût les défendre que leur m è re , tutrice,
sur qui le décret avoit été fait.
« L ’acquéreur répondoit que dans pareil cas la prescription couroit contre tous; qu’en supposant qu’il se
pût trouver des vices dans la procédure du décret, il
est certain qu’au bout de dix ans il n’y avoit plus
d’action contre le p r o c u r e u r, pour le rendre garant
de ces nullités; et que p a r la même raison il d é ç o it,
après ce tem ps, cesser cfêtre responsable v is - à - v is
des tiers intéressés.
« Ces moyens déterminèrent l’arrêt par lequel les
cc parties de M es. D u verrier et A u jo let furent déclarées
« non recevables dans l’appel qu’elles avoient interjeté
« de la sentence ^ adjudica tion sur décret volontaire.
L e sieur Lamothe s’applique l’art. 164 de l’ordonnance
du mois de janvier 1629 ( le Code M ich aux ).
/
R é p o n s e .
Cet article se rapporte uniquement aux décrets forcés
et aux décrets volontaires.
Viennent avant lui sept autres articles, tous faits pour
les saisies réelles.
L ’art. 167 porte que l’adjudicataire du fonds saisi réel
lement n’eu aura pas les fru its, et que les deniers en
�(8)
seront distribués entre les créanciers, en même temps
que le p rix de l’adjudication de l’immeuble.
L ’art. i 58 déclare la saisie réelle périe, faute de pour
suites pendant trois ans.
L ’art. 1 6g se rapporte aux oppositions à fin de con
server, que peuvent former les créanciers.
L ’art. 160 détermine que les saisies réelles seront
portées devant les tribunaux de la situation des biens.
L ’art. 161 règle la forme des oppositions des créanciers
de la partie saisie.
L es art. 162 et 163 sont pour l’ordre et distribution
des deniers de la vente.
L ’art. 1 6 4 , invoqué par le sieur L a m o lh e , est ainsi
conçu : « N u l ne sera reçu à appeler des décrets, ni à
« les débattre par nullités ni autres voies, entre majeurs,
« dix ans après l’interposition desdils décrets ; et 11e
« courra néanmoins ledit temps de dix a n s, que du jour
« de la publication des présentes, et sans préjudice des
«
«
«
«
«
droits acquis aux parties par prescription ou autrem e n t, pour les décrets précédons , même pour les
décrets "volontaires q u i auroient été f a i t s en cojiséquence des contrats de v e n te , et pour purger les
hypothèques seulem ent. Et néanmoins voulons que les
« mineurs, sur les tuteurs desquels les décrets auront été
« faits, puissent, dans les dix ans après leur majorité
« atteinte, être restitués pour lésion d’outre moitié de
« juste p r ix , et rentrer en leurs biens décrétés, rendant
« le prix de l’adjudication, frais et loyaux coûts, impenses
« utiles et nécessaires, si 1’acquércur ne veut suppléer la .
« juste valeur du p r ix , avec l’intérêt à proportion , etc, »
�( 9 ).
Point d’équivoque. Cette loi ne fait allusion qu’aux;
décrets volontaires et aux décrets forcés ; mais elle sd
rapporte aux uns et aux autres : dans son esprit il n’y
auroit même pas de d ifféren ce, pai'ce que , suivant
d’Héricourt , cliap. d e r n ie r , art. i^r. } les ¿formalités
qu on observe -pour la validité du décret v o lo n ta ire,
p a r rapport à un tiers créancier du v en d eu r, sont les
m êmes que celles que Von suit pour les décrets ¿forcés.
P ig ea u , en sa Procédure civile du châtelet de Pai-is,
dit la môme chosC.
D e là il suit que les dispositions de l’ordonnance de
1629 ne sont point applicables aux ventes judiciaires de
biens de mineurs, faites en vertu des arrêts de règlement
du parlement de P a ris , de 1630 et 1722.
D ’ailleurs, ce qu’il plaît au sieur Lamotlie appeler
décret ( le procès verbal fait par le lieutenant général
de M ontpensier, le 9 mars 1780 ) n’est pas véritablement
un décret.
E n effet j avant l’édit de 1 7 7 1 , sur les h ypothèques,
il n*y avoit que deux espèces de décrets, le forcé et le
volontaire; le premier n’avoit lieu que sur saisie réelle,
le second n’étoit établi que pour les ventes volontaires.
En cet état, il faut que le.sieur Lamotlie choisisse
en Ire ces deux espèces.
S’il dit que c’est un décret forcé, alors on lui réplique
qu’ il n’avoit pas été précédé de saisie r é e lle , de bail
judiciaire, de congé d’adjuger, e(c. , et q u e , dans ce
sens, son prétendu décret est n u l, i n c a p a b l e de produire
aucun effet, et surtout celui de faire c o u r i r la prescrip
tion de d ix ans,
�Si le sieuv Lam othe veut que ce soit un décret volon
taire, on lui réplique, i°. qu’il u’y avoit pas une vente
préalable et volontaire de la part du vrai propriétaire
( le sieur de Sain t-Julien ); 2°. que par l’édit de juin
1771 , art. 3 7 , les décrets volontaires ont été abolis :
« Abrogeons pareillement l’usage des décrets volontaires,
« sans q u e , p o u r aucunes causes n i sous aucun pré« te x te , il puisse en être f a i t à ïa v e n ir , à peine de
k n u llité d’ic e u x , etc. » 11 y auroit donc encore nullité,
et point d’acte propre ¿1 faire courir la fin de non^reccv o ir de dix ans.
A u reste, nombre de fois a été élevée la question de
savoir s i, pour faire courir la fin de n o n -re c e v o ir des
dix a n s , une signification de la sentence d’adjudication
étoit nécessaire, m ême en saisie et vente sur simple pla
card, où la procédure étoit infiniment réduite. L a cour,
par arrêt du 13 mai dernier, entre Monis et Albessard ,
a jugé qu’il falloit absolument une signification, et que
«ans cela point de fin de non-recevoir (1 ).
( 1 ) E n c e q ui to u c h e la fin de n o n - r e c e v o ir proposée par
les p arties d e G iro n e t de D e la p c h ie r ;
Attendu qu'aux termes de l'art. 17 du titre ¡27 de l'ordon
nance de 1667, les sentences ne passent en force de chose
jugee qu'après dix a n s à compter d ’une signification régu
lière ;
,
Attendu qu’il n‘est pas justifié que la sentence il’adjudica
,
tion, dont est appel, ait etc signifiée et quainsi la fin dp
non - recevoir n'est pas établie
;
A t t e n d u , etc.
La c o u r d it q u ’il a été n u lle m e n t p r o c é d é , etc.
�(n u
( 11 )
L e sieur L a m o the ne peut pas faire que sa position
soit plus favorable que celle d’un adjudicataire sur simple
placard : il y a dans les deux cas ressemblance parfaite
pour la simplification d e la procédure, pour l’économie
des frais. O r , si l’adjudicataire sur simple placard a
besoin d’une signification pour acquérir la chose jugée,
un adjudicataire de biens de mineurs en a besoin aussi
pour opérer la même fin.
Que l’on ne dise pas que l ’ordonnance de 1667, tit. 27,
ne parle que des sentences portant condamnation à dé
laisser des immeubles.
U ne adjudication condamne aussi à délaisser les biens
adjugés : c’est ainsi qu’on l’a toujours entendu et jugé.
Il suffit que ce soit une sentence, pour qu’il y ait lieu
à l’application de l’ordonnance.
Nous terminons là nos observations, et nous prions la
cour de donner toute son attention au mémoire signifié.
S A I N T - J U L I E N .
G O U R B E Y R E .
A R IO M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul im prim eur de la
C o u r d ’appel. — Juillet 1 8 0 6
�/O
o w
a
t%
o 6 f
CA-iX ■ Cyi*A. ft* j
^
^
f* < r
^ 6 -
r** IV n . i
Im
¿U L ^ U < v\cJl
a
iW y U » « A ^ M ic l* i
*
w tu
C A r^ ^ ^ fcA A A .
c— r A L j j t ^ ^ ty^ L tz ^ jr ^ ^
^ «^uo«~
rb'O A A A jv*«^
V*1
tA^b’e^L. /*
/«
e(/^
/ “ •
Oift~
•
,
^ —
* -----
* ^
tV - ^ a !
C U U V ^I
/u u 4
«*-
i~ 4
cr
^ ■*-* 1_
ILXt
’ t^< «Utr- aukl«>^<
CL^f t
t<«^ 4j<**Jit
* ^U4 <1tffc ^
6 .«
y^ y
/< >
#•/*»*..—
«Jfc~ fik Uuc. //\**aX*jT~ ^
cc r ‘
’ < * y ~ * -.
f u iM
p u tr .----y
if c y - l te r
At*~r~7vs 7fctu*ry*O * « ^
O w y
/i
/t= a r r
.¿ T "
<
/«
‘ /it*—it
■
<T
^ U « .^ » » U
i t ^> >
/« » ^ U W m «
'< 4
O A jlJ jt
c m
JL X
{\_
e ^ » ¿% ^ 'a ju * i~ ¿Li o^ jjt q j Ss^a —
<4*Al&J>Jt~t^jl
J U M ^ vAmajoi
^ «_*- - ttk ir ~ .±
/ •
/*
/../ ■ /
.
.
< U r~
^/h*
.
-
/
t r ~
~
^
y ia alt< V <*-fc
a i*
.
yV*~{A**^ U A ^ ‘M A r
' J ^
/
' ?
o*L ^
w '"
A ^-
^M«i/<>
.
<M ¿3b
CfcJb4a^a(|u*J| <
M.CiM j 'h *4 A
<4
{U
rs
/ t_- • A .,'Sf __»--T
'
tUrt irvJkr- iuuJ4<. ^ -*1rC^
m U^uMuikJl
~~
<AJL
/I**
t e » » » j f c j r ' A e|ju ^ |u u ^«. fitj\jt>« * >
^ U U a A JC m U
«*'
f» « > j
<*f*v rvl
-
<^-»
^ * -
' U*/* ^<b<u /c> il m
p^~*
‘T T ^
r f c c « .- «
& a
¿»«. /► utAijt»
tdfc. f tM^M^
CfZLu^ «A* ">«*»< « / » »
k &*1v i S\j i
C4AAMAmUT
l
~
V
^
“r
A. M n t / v U ^ t jM u ) r /LvyyutttL*f**~*~^¿¿Z / a ^ . L.Y*»\.^*SJZT
U.^>aAiU (Ar^uu«
*
-v
4
d tt
Mm
f . —- , / . A.* /»¿fc
^ \U » < f t y A « A
A u«>n .r~ t V
*
m*o»iy>«/ti
'
�•
1.
S i-
» Í
,
• *
~
■
.<-J
; ‘
.
rt
*
*\«»'.
-, V’ *'
*,
'S
.
n . 4
+i
1
«
»
t
»
-
nA
r» i
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Saint-Julien. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
successions
dilapidation d'héritage
ressorts de juridictions
affichage
assemblées de parents
créances
appel
écoles militaires
experts
sénéchaussée d'Auvergne
Montpensier (bailliage de)
placards
ventes
émigrés
mort civile
religieuses
Description
An account of the resource
Titre complet : Addition au mémoire imprimé pour le sieur de Saint-Julien, appelant ; contre le sieur Gros-Lamothe, intimé.
Annotation manuscrite: texte intégral de l'arrêt du 13 août 1806, 1ére chambre.
Table Godemel : Appel : 7. l’appel d’une sentence d’adjudication de biens immeubles du mineur, sans que la nécessité soit démontrée, et sans l’observation des formalités prescrites, a-t-il pu être interjeté plus de 25 ans après sa date, s’il n’y a pas eu de signification ? Vente : 10. la vente consentie, par la tutrice, des biens immeubles du mineur, sans que sa nécessité soit démontrée et sans que les formalités prescrites pour l’aliénation des biens des mineurs aient été observées, est-elle nulle ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1767-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1528
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53268/BCU_Factums_G1528.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Bas-et-Lezat (63030)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
affichage
appel
assemblées de parents
Créances
Dilapidation d'héritage
écoles militaires
émigrés
experts
Montpensier (bailliage de)
mort civile
placards
religieuses
ressorts de juridictions
sénéchaussée d'Auvergne
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53271/BCU_Factums_G1531.pdf
679a15557b70d4645732c35344fdca7f
PDF Text
Text
M É M O I R E
ET
CONSULTATION,
,
P o ur M. C H A B R O L , ancien colonel;
En r é p o n s e à l ' im p r im é de M. NEIRONDESAULNATS , a n c ie n m a g i s t r a t , i n t i t u l é
Précis,
e t à sa c o n s u lta t io n s ig n é e
M e im a c .
L E ruisseau des Gros - Bouillons, ou Gargouilloux,
commence aux environs du village de Saint-Genestl’En fant, situé à une lieue de la ville de Riom. Plus
de trente sources forment son origine; un large et grand
aquéduc à ciel ouvert, revêtu en pierres de taille, et
dont la largeur varie depuis six pieds j u s q u ’à douze, sur
une longueur de quarante-deux toises, reçoit et contient
A
�( o
ces trente sources dès leur naissance môme. Cet aqueduc
existe de toute ancienneté; il a été construit par les pré
décesseurs de M M . Chabrol : son objet est de favoriser
l’arrosement des nombreuses prairies du canton, dont
une grande partie leur appartient. Cet aquéduc et les
trente sources du ruisseau des Gros-Bouillons ont été
renfermés dans l’enceinte de l’enclos de M . Neiron à
Saint-Genest, en 1683, par Jean et Antoine de Brion,
créateurs du bien actuel de Saint-Genest, que représente
aujourd’hui M . Neiron-Desaulnats.
Il fut laissé à cette époque, au propriétaire du Chancet,
une petite porte d’entrée dans l’intérieur de l’enclos de
Saint-Genest; elle étoit placée h son extrémité nordouest : on en voit encore la trace, et nombre de témoins
pourroient déposer de son ancienne existence. Mais
Imbert R e b o u l, propriétaire alors du Chancet, consentit,
en 17 3 5 , qu’elle restât m urée, à condition qu’il auroit
son droit d’entrée et de passage par les portes charre
tières , qui sont à soixante toises plus h l’ouest : c’est par
là que M M . Chabrol, et autres co-usagers, exercent leur
droit de prise d’eau et de surveillance sur les sources du
ruisseau des Gros-Bouillons.
L ’état habituel de ce ruisseau est de servir au jeu des
moulins inférieurs situés sur son cours ; mais les meuniers
sont obligés de suspendre leur action tous les jours de
m arché, et ioutes les nuits des six mois d’été : ces temps-là
sont destinés à l’arrosement des prairies.
Indépendamment du droit de diriger en entier le ruis
seau des Gros-Bouillons dans leurs nombreuses prairies
ies jours et les nuits qui leur sont dévolus, d’après le règle-
�73 .S
(3)
ment local relatif aux arrosemens , M M . Chabrol ont
encore celui de conduire journellement à la maison et aux
jardins du Chancet une prise des mêmes eaux, par un
aquéduc d’abord couvert, puis souterrain. A la vérité ,
depuis long-temps l’eau n’y parvenoit plus par suite du
défaut d’entretien de la conduite; mais nombre de témoins *
peuvent déposer avoir vu les fontaines et jets d’eau du
Chancet en activité.
• ■
..
.
L e grand aquéduc à ciel ouvert étoit dans un état de.
ruine qui exigeoit impérieusement sa restauration; une
grande partie des eaux éclaappoient à leur destination ; les
prairies arrosoient médiocrement, et les propriétés infé
rieures en étoient submergées ou endommagées. M. Cha
brol résolut de faire travailler à ces réparations. M. Neiron
lui-même l’en avoit sollicité, d’abord de vive v o ix , puis
par une lettre du 21 janvier i o ; et enfin trouvant de
l’inconvénient à ce que les matériaux que faisoit conduire
M r. Chabrol entrassent par ses portes charretières, il lui
fit proposer de vive voix de les introduire par une brèche y
et l’autorisa à la pratiquer près du grand aquéduc , par
une seconde lettre du 26 février i o . M . Neiron lui
demande, par cette missive, d'y mettre une claie de parc
ou bouchon m obile, contre Vinvasion des bestiaux pen
dant la durée du tra vail, et de la fa ir e murer après
85
85
les travaux terminés.
Dans les derniers jours de fructidor de l’an 13, époque
où les canaux d’arrosage se ferment, M . Chabrol com
mença ses travaux ; la brèche fut ouverte à l'endroit
indiqué : on y plaça temporairement des jambages en
pierres de taille, et cela pour plus de précaution. Un©
A 2
�(4)
porte en planches, mais mobile, et non scellée, ne tour
nant pas sur des gonds, mais se plaçant et se déplaçant à
volonté, y servoit de fermeture ; on l’assujétissoit avec des,
pierres et des Lois lors de l’interruption des travaux les
jours de fêtes et dimanches, ainsi que pendant les nuits.
L e mur de cet enclos n’étant bâti qu’avec de la terre, la
brèche se fût nécessairement agrandie, et son entrée de
venue facile aux malveillans et aux bestiaux ; cela auroit
donné lieu à des plaintes, et sans doute à des actions juri
diques de la part de M. Neiron : c’eût donc été un piège
contre M . Chabrol, s’il n’avoit pas eu la faculté de donner
une certaine solidité à cette porte-brèclie. Si on s’est
permis ces détails, qui sont en quelque sorte étrangers
à l’affaire, c’est afin de prouver la mauvaise foi de M. Nei
ro n , d’avoir converti en reproche grave, en inculpation
majeure, contre M. C h a b ro l, ce qui n’étoit qu’une sage
précaution de sa part. Cette solidité étoit donc passagère;
elle étoit tout en faveur et pour l’avantage de l’enclos
de Saint-Genest.
Mais ce qui prouve sans réplique que c’est une calom
nie de supposer à- M. Chabrol le projet d’usurper une
porte d’entrée dans cet enclos, c’est le droit de passage et
d’entrée qu’il exerce, lui, ses domestiques et scs fermiers,
par l’une' des portes- charretières , et cela concurrem
ment avec les autres usagers des e a u x des Gros-Bouillons-;
qu’enfin M . N e i r o n lu i-m êm e, page 2 , dernier alinéa
de son imprimé intitulé Précis, convient que l’ordon
nance du tribunal civil, du 2 complémentaire an 13, dissipoit ses soupçons sur Vérection d'une brèche éphémère,
en porte permanente. Si ces soupçons injurieux étoient
�7‘.2rf
( 5)
calmés le 2 complémentaire de l’an 13 ? comment M. Neiron peut-il en faire l’objet d’une inculpation g rav e, après
dix mois écoulés depuis cette ordonnance, et au moins
quinze jours après la fermeture et la maçonnerie de cette
porte-brèche ?
M . Neiron a donné par ses écrits, même au public et à
ses juges, la preuve de sa mauvaise f o i , et la mesure de
son c a r a c t è r e ; il s’est donc démasqué lui-même : ab uno
dice omnes.
Dès que M. Chabrol eut fait renverser de fond en comble
les anciens travaux relatifs à ses aquéducs et prises d’eau,
préalable indispensable à leur réédification, M .Neiron, qui
avoit feint de s’éloigner, mais qui avoit établi un surveillant
pour observer et l’instruire, arrive de sa montagne; il
envoie M. son fils faire une scène à M . Chabrol, le 17 de
septembre i o , le sommer de cesser tous ses travaux de
sortir sur le champ de son enclos, lui et ses ouvriers, et
de lui justifier des titres en vertu desquels il faisoit ces
entreprises. M . Chabrol répondit qu’il continueroit ses
travaux , et ne lui justifieroit d’aucun titre. L e 19 de sep
tembre , M . Neiron fils, profitant de l’absence momen
tanée de M . C h abro l, chassa violemment ses ouvriers,
et fit murer la porte-brèclie.
Comment concilier la scène scandaleuse et la violence
de M . Neiron fils, avec les lettres de M . Neiron père? Il
provoque les réparations des prises d’eau ; il demande
l’apport des matériaux par une porte-brèche ; il en auto
rise l’ouverture; et quand tous les anciens travaux de
l’art sont renversés, il veut s’opposer leur réédification.
M. Chabrol vit toute l’étendue du danger où vouloit le
85
7
�73b
C .6 }
mettre M . Neii’on , et du piège qu’il lui avoit tendu. Il
connut alors qu’il n’avoit feint de désirer ces restaurations
que pour lui intenter un procès, et l'entraîner dans lés
longueurs et les dépenses d’une action pétitoire.Les digues
renversées, les aquéducs disparoissoient, les prises d’eau
devenoient impossibles; les prairies d e ’M. Chabrol, le
principal objet de ses revenus, étoient frappées de stéri
lité ; ses fermiers obtenoient de grandes indemnités , et
les co-usagers de ces eaux d’énormes dommages-intérêts:
car enfin valoit mieux pour eux des aqueducs en mau
vais état qu’entièrement renversés , puisqu’à chaque prin
temps on les raccommodoit passagèrement à force de
gazons, de pierres et de pieux.
Les conseils de M. Chabrol lui recommandèrent la plus
grande célérité dans le remède qu’ils lui indiquèrent,
comme le seul qui pût prévenir un péril aussi éminent,
contre un adversaire vrai prodige en chicane, et qui
connoît si bien l’art d’éterniser les procès.
Il se pourvut devant le tribunal civil, en requête de
plainte du trouble qu’il essuyoit dans l’exercice de scs
droits à réparer ses aquéducs, digues et prises d'eau.
Il exposa « qu’il avoit droit à des prises d’eau aux sources
« mêmes du ruisseau des Gros-Bouillons; que la digue
« pratiquée pour la direction de ces eaux étant en état
c< de ruine.........etc.
« Qu’il en avoit commencé les réparations à Tinstiga« lion même do M. Neiron p è r e , ainsi qu’il étoit prouvé
« par scs deux lettres, et que cependant il avoit été troublé
« dans ses travaux par les voies de fait et les violences dé
« M. Neiron fils, qui avoit expulsé ses ouvriers. »
�4 D ’après cet exposé, M . Chabrol demande à être auto
risé à continuer ses réparations. Sur cette requête, il in
tervint une ordonnance du 2e. jour complémentaire de
l’an 13; elie est ainsi conçue:
« Nous autorisons provisoirement le remontrant à faire
a continuer sans délai.............................les réparations et
« ouvrages en maçonnerie nécessaires pour la conserva
it tion et entretien de la digue dont il s’agit......... ..
« Faisons défenses audit sieur Neiron-Desaulnats, ou tous
u autres, de troubler les ouvriers du pétitionnaire dans
« leur travail et réparation à ladite digue........................ »
M uni de cette ordonnance, M . Chabrol rétablit ses
ouvriers sur les travaux. En réédiiîant le grand aquéduc,
il a aussi voulu restaurer la portion de l’aquéduc couvert
qui gît au fond et dans le lit même du grand aquéduc,
afin de rendre au Chancet l’agrément dont il étoit privé
depuis long-temps. A mesure qu’on nettoyoit le grand
aquéduc , on déposoit les débris de l’aquéduc couvert sur
les bords ; il en fît conserver les dernières toises, sans les
déraciner, pour témoignage de l’ancienne existence de ce
commencement d’aquéduc. Mais les gelées du mois d’oc
tobre i o l’ayant forcé d’interrompre ses restaurations,
lorsqu’il les a reprises au printemps de l’an 1806 , ils ne
s’y sont plus trouvés.
M . Chabrol mettoit enfin la dernière main à ces répa
rations ; il venoit de remplacer en canaux de pierres de
taille les trente premières toises de 5on aquéduc couvert,
lorsque le 14 mai dernier il s’est vu actionne par M. Nei
ron-Desaulnats devant le juge de paix de l’Ouest, canton
de Riom.
85
�,c 8 }
' Les parties sont venues à l’audience du tribunal de paix,
le 19 mai 1806.
jVJ. Neiron , alors pour la première fois, a précisé ses
conclusions qui tendent « à ce qu’il soit dit en dernier res« sort, que M. Chabrol a eu tort d’usurper, dans l’enclos de
« Saint-Genest, le terrain sur lequel il a placé les tuyaux
« ci-dessus énoncés ; que M . Neiron-Desaulnats est auto« risé à reprendre la libre jouissance dudit terrain......et
« que pour réparation du dom mage, M . Chabrol soit
« condamné en 40 francs de dommages-intérêts , et aux
« dépens. »
M. Chabrol a répondu que « M. Desaulnats ne pouvoit
« pas ignorer que pour l’irrigation de ses prairies il exis« to it, de temps immémorial, un aquéduc qu’il avoit été
« autorisé à faire rétablir ; qu’il avoit même le droit par
« lui ou ses auteurs, depuis longues années, de prendre
« les eaux des sources des Gros-Bouillons ; que céto it un
« droit de pure fa c u lté dont il a p u user à volonté; que
« la conduite de ces eaux est dans le lit même de Vaqué« duc ; qu'ainsi les constructions par lu i fa ite s ne sont
« point une nouvelle œ uvre, mais bien une réêdifica« tio n , une réparation de ce q u i lui a appartenu et lui
k appartient encore. »
M . Chabrol a ajouté que « d’ailleurs, en agissant ainsi,
« il n’avoit fait qu’exécuter ce que l’ordonnance de M. le
« président du t r i b u n a l c i v i l , en date du 2e. jour complè
te inentairc de l’an 13 , lui permettait de faire. »
L e genre de défense de M. Chabrol annonçoit assez
à M . le juge de paix de l’Ouest que la contestation 11’étoit
pas de sa compétence ; cependant il ordonna sou transport
�(93
sur les lie u x , pour connoître l’objet de la demande en
complaintes possessoire et réintégrande de M . NeironDesaulnats.
On lit dans le procès verbal de ce transport, qui a eu
lieu le 19 mai 1806, que « M . Neiron a fait remarquer
« à M. le juge de paix de l’Ouest, auprès des rochers,
a une élévation faite en pierres etgazonnées, qui cachoit,
« a-t-il dit, une conduite d’eau nouvellement pratiquée
<c par M . Chabrol, à côté de la rase d’irrigation, ainsi
« qu’une ouverture faite à son mur de clôture, pour la
« sortie de l’eau venant de cette conduite. »
! Il ajoute que « M. Desaulnats l’ayant mené en cet
« endroit, il lui a été facile de reconnoître qu’il a été
« fait récemment dans cette partie une nouvelle conscr truction ou une réparation. »
Il rapporte ensuite que « M . Chabrol est convenu de
« l’existence de la rase qui n’est pas apparente, puis« qu’elle est couverte en gazonnées ; mais que M . Cha« brol a dit que ce n’étoit pas de sa part une nouvelle
« œuvre ; qu’il n’avoit fait que rétablir une ancienne
« conduite, pour faire arriver l’eau au Chancet, où il
« existoit dans ses jardins des bassins en pierres de taille;
« que l’on voyoit encore des vestiges de cette ancienne
« conduite, tels que des morceaux de tuyaux en pierres
« de taille auprès des rochers; qu’à l’endroit du mur
« où sortoit sa conduite d’eau , il existoit une ancienne
« ouverture qu’il n’avoit fait que réparer pour lui ser« vir, à l’exemj)le de ses prédécesseurs.
« M. Neiron alors a nié l’existence de cette ancienne
« conduite d’eau ; il a préteudu que rien 11e prouvoit
B
�«
«
«
a
«
«
k
«
tc
que les morceaux en pierres de taille et en brique,
que M . Chabrol présenloit comme des marques d’imciens vestiges, eussent été trouvés dans la partie ou
est actuellement sa nouvelle conduite; que tous ces
objets avoient pu être apportés avec les pierres dont
on s’étoit servi pour la construction de la digue ;
qu’au surplus il lui seroit facile d’en faire voir dans
d’autres parties de son enclos, où il y avoit anciennement des machines hydrauliques. »
« Effectivement, dit M . le juge de paix de l’O u e st, à
« quelque distance au-dessus de la digue nous avons trouvé
c des morceaux de tuyaux de brique qui nous ont paru
« semblables à ceux que M. Chabrol nous avoit montrés. »
M . Neiron suppose ici que M . Chabrol, voulant usur
per une conduite d’eau, a fait apporter sur le local des
débris de vieux tuyaux, pour les présenter à M . le juge
de paix comme débris d’un ancien canal dégradé; et,
pour preuve de cette assertion, il montre à M . le juge
de paix de l’Ouest des morceaux-de tuyaux absolument
semblables, dans une autre partie de son enclos..
Nous pouvons dire avec l’Ecriture : M entita est iniquitas sibu
Comment expliquer cette parfaite similitude entre lesdébris que M. Neiron suppose apportés frauduleusement
par ordre de jYI. Chabrol, et ceux q u ’ il montre à M. le
juge de paix à. d’autres endroits de son enclos? Comment
l’expliquer! rien de plus simple r les mêmes mains qui
ont été employées pendant l’hiver, que* les travaux étoient
interrompus, à déplacer une partie des débris laissés par
M . Chabrol sur le bord de son aqueduc, à mesure qu’on
�\
74\
( 11 )
les déracinoit, ont du nécessairement les déposer à d’autres
endroits de l’enclos. M . Neiron les y ayant rencontrés,
n’aura pu s’empêcher de les prendre pour des vestiges
de ses machines hydrauliques, qui se seroient déracinés
d’eux-m êm es ; et les montrant à M . le juge de paix,
celui-ci n’a pu s’empêcher de leur trouver une parfaite
similitude avec ceux que lui avoit montrés M. Chabrol
au bord de son aquéduc restauré. ( Voyez son procès
verbal du 19 mai 1806. )
A u reste M . Chabrol prouvera par témoins, et l’an
cienne éxistence de l’aquéduc dégradé, et qu’il en avoit
laissé sans déraciner une portion qui a disparu pendant
l’hiver dernier, et ne s’est plus trouvée au printemps;
ce qui détruira cette calomnie.
Quant au prétendu mystère supposé par M. Neiron
avoir été mis à la restauration de l’acquéduc couvert, la
sommation qu’il fit faire à M. Chabrol par son affidé
M ichel, assisté de quatre témoins, le 13 mai, et qu’il
relate dans sa requête au tribunal de paix, prouve sa
mauvaise foi.
On passera légèrement sur une seconde supposition,
que les gazons placés par M . Chabrol sur son aquéduc
couvert, étoient pour en dérober la vue; car si le fidèle
Michel et ses quatre témoins avoient vu ces travaux le
13 m ai, comment les auroit-on pu dérober aux yeux
le 19 m a i, six jours après.
O11 ne relevra point l’accusation chimérique de l’ins
cription lapidaire dont M. Neiron a fait tant de plaintes
et tant de bruit dans le monde; comme si d’inscrire son
uojn sur un immeuble donnoit droit u en dépouiller
B 2
�!
;:
......................
( ÏZ )
le propriétaire légitime. Pareille inculpation est trop
puérile ; car M . Chabrol a pu faire légitimement tout
ce qui tendoit à la conservation de ses droits : et si les
tribunaux jugeoient qu’il les a perdus, toute inscription
deviendroit inutile.
Nous nous arrêterons sur une autre calomnie présentée
par M. Neiron avec autant d’art que de perfidie ( page 4
du Précis pour Joseph Neiron ).
« A u jour indique pour la visite des lie u x , étant près
« d’arriver à Saint-Genest, j’aperçois M. Chabrol précédé
« d’une charrette chargée de vieux tuyaux de fontaine.
« Bientôt, vers un pont joignant la face extérieure démon
« enclos, cette voiture est arrêtée...... Je fais arrêter la
« mienne, et je vois qu’en faisant semblant de s’amuser
« auprès du pont, on y cache dessous les tuyaux voitu« rés......etc. Je ne pus me défendre du soupçon que si
« j’étois arrivé quelques momens plus tard, j’aurois trouvé
a ces tuyaux placés à côté de ceux qu'on avoit mis en évia dence dans mou enclos...... J ’invite IVJ. le juge de paix
« à ne terminer son opération que lorsqu’il aura visité le
« pont sus-énoncé....... Mon iils passant la main sous le
« pont, en retire deux tuyaux; il en auroit pu tirer davan« tage si cet échantillon n’eût été suffisant. »
Après avoir érigé en accusation aussi grave, le simple
soupçon dont M. Neiron. nous assure qu’il ne put se dé
fendre, il laisse avec pe rf id ie sous silence les dires de
M . le j"ge de paix et de M. Chabrol, sur la visite qu’il de
mande du pont. Il iaut donc les relater; les voici. Que
fuit M. le juge de paix à la vue des deux tuyaux sortis de
dessous le pont? il interroge M. Chabrol : « Ces tuyaux
�4
( 13 )
« proviennent-ils db l’ancienne conduite restaurée dans
« l’intérieur de l’enclos? »
M. Chabrol lui répond , « N o n , Monsieur, on vient de
« les apporter ici un instant avant votre arrivée; ils ont
« bien déjà s e r v i, mais ailleurs. »
M . le juge de paix fut si peu frappé de cette prétendue
découverte de M . Neiron, qu’il n’a pas même cru devoir
en faire mention dans son procès verbal.
Analisons maintenant cette prétendue, cette importante
découverte de M. Neiron.
D e sa voiture il voit cheminer u?ie charrette chargée
de vieux tuyaux.
’ Eh bien! il y avoit six tuyaux sur cette charrette relie
n’en ctoit donc pas chargée; car six tuyaux en brique ne
sont pas une charge de charrette.
I l voit cacher les tuyaux sous un pont.
On plaça sous le pont ces six tuyaux, pour les mettre
à l’abri d’êtrè brisés pur étourderie ou malveillance; en.
les cachant aux regards des passans, il n’y avoit rien qui ne
fût bien légitime..
J l ne -peut se défendre du soupçon que s'il étoit arrivé
un moment plus tard, il auroit trouvé ces tuyaux pla
cés à côté de ceux qu'on avoit mis en évidence dans son
enclos.
Si M . Chabrol eût pu concevoir un pareil dessein, sans
doute il n’eût pas pris l’heure et le jour auxquels le juge
de paix lui avoit donné rendez-vous pour voiries lieux.
Mais à quoi étoient donc destinés ces six tuyaux?
A s’emparer des eaux ,
les dévier pour opérer les.
vides nécessaires à l’entière confection du grand aquéduc
�C 14 )
dont il ne restoit plus à bâtir que les deux’dégorgcoirs. Ces
deux dégorgeoirs sont ce qui présentoit le plus dedilliculté;
celui s u r t o u t des sources près les rochers a coûté d-s peines
infinies. Les domestiques de M. Neiron, et le fidèle Michel
dont la surveillance u’n pas cessé un instant, ont bien vu
qu’on n’a réussi à dévier les enuX qu’à l’aide de iuyaux de
brique; les ouvriers, les passons peuvent le témoigner.
Que M . Neiron imagine une pareille supercherie, c’est
sans doute dans l’ordre des choses; mais qu’il ose en accuser
M . Chabrol au milieu de ses concitoyens, qui tous connoissent ses principes, ses idées libérales, sa générosité,
sa moralité enfin, c’est ce qui ne peut.se concevoir.
Après avoir démontré jusqu’il la dernière évidence la
fausseté des calomnies avancées contre M . Chabrol, nous
allons passer à la cause pour ne plus nous en écarter.
lies parties en sont venues contradictoirement à l’au
dience du juge de p aix , du 14 juin.
M. Chabrol a conclu à ce que, d’après la vérification
des lieux contentieux, M. le juge de paix se déclarât in
compétent, ou qu’il déclarât M . Neiron-Desaulnats nonrecevable dans sa demande en complainte possessoire, et
le condamnât en joo Francs de dominages-intérêts.
A la 6uite de vingt et un attendus, M. le juge de paix
de l’Oucst a prononcé son jugement en ces termes:
« L e tribunal, faisant droit sur la demande en comd plainte formée contre M . Chabrol, garde et maintient
« M . Desaulnats en la possession et jouissance du terrain
« dont il s’agit ; fait défenses à M. Chabrol de l’y troubler,
<x aux peines de droit; le condamne à remettre les clioses
</ dans leur ancien état,daai> huitaine à compter de la .si?; ni-
�10
(.
)
t.- fication du jugement faite à personne ou ¿1 domicile;
« faute de c e , permet à M. Desaulnats de le faire faire aux
« dépens de M. Chabrol, du montant desquels il sera rem« boursé suivant l’état qu’il en donnera , ou suivant le
« règlement qui en sera fait en la manière ordinaire', et
« pour dommages-intérêts, condamne M. Chabrol à tous
a les dépens. 55
M . Chabrol est appelant de ce jugement.
On lui oppose qu’il n’est pas recevable dans cet appel,
et cela, parce que, dit-on, le jugement est en dernier
vessor t.
Sans doute l’appel ne seroit pas recevable, si le juge
ment étoit en dernier ressort : mais M . Neiron part d’une
finisse supposition ; il n’est pas vrai que ce jugement soit
en dernier ressort, ni dans le fait, ni dans le d r o it , et
il ne peut pas l’être.
M . Chabrol avoit opposé l’incompétence du juge de
p a ix , en disant à la première audience qu’il 11’avoit fait
qu’user d’un droit de pure faculté, lorsqu’il avoit subs
titué des tuyaux neufs à des tuyaux dégradés, pour res
taurer un canal destiné de toute ancienneté à conduire
une prise d’eau du ruisseau des Gros-Bouillons au Chancet;
qu’en agissant ainsi, il n’avoit fait qu’exécuter ce que l’or
donnance de M. le président du tribunal c iv il, du 2 com
plémentaire , lui permettoit de faire.
avoit conclu d’une manière plus expresse, à la seconde
audience du juge de paix de l’O u est, du 14 juin , à ce
qu’ il se déclarât incompétent, ou déclarât IV . N e i r o n n o n
recevable dans sa demande en complainte possessoire,
appuyée sur les mêmes motifs déjà exprimés dans le juge
ment préparatoire.
11
1
�(
i <5 )
..........................................................................
Voilà donc un conflit de juridiction élevé , puisqu’il y
avoit un différent porté en deux tribunaux à la fois , de
vant la justice de paix et au tribunal d’arrondissement.
Cela donne donc matière à un règlement de juges. Ce
conflit a été vidé de fait par le juge de paix de l’Ouest.
En prononçant sur le fond sans statuer sur le déclinatoire, pouvoit-il lui-même trancher ainsi ce conflit inci
dent , et le décider en dernier ressort en faveur de sa juri
diction? Non, sans doute; s’il l’eût fait il eût commis un excès
de pouvoirs. C’est une conséquencede l’article 425 du Code
de la procédure, conforme en cela ù l’ancienne jurispru
dence, qui, en parlant des tribunaux de commerce, porte
que les dispositions sur la compétence pourront toujours
être attaquées par la voie de l’appel.
Les tribunaux de commerce jugent en dernier ressort
jusqu’à 1000 francs , les juges de paix jusqu’à o francs.
Il y a bien moins de raisons pour exempter de l’appel
les dispositions des jugemens de paix sur la compétence,
que celles des tribunaux de commerce.
Ce qui est fondé sur les mêmes principes doit donner
lieu aux mêmes résultats.
L e jugement dont est appel n’a donc pu être rendu en
dernier ressort, par cela seul que la compétence étoit
5
contestée.
Il n’a pu être rendu en dernier ressort sous un autre point
de vue ; celui de la d e m a n d e rcconvenlionnelle de M. Cha
brol en 100 francs de doinmagcs-intérêls, occasionnés par
l,i suspension de ses travaux , par la perte de temps de ses
ouvriers, par les vols et les avaries survenus à ses maté
riaux abandonnes sur un chemin au premier occupant.
On
�^
>47
C
1-7 ^
On n’exn minera pas jusqu'à quel point il faut considérer,
•comme constante et solidement établie, la prétendue juris
prudence de la cour de cassation , q u i, selon M. .Neiron ,
aUribueaux juges de paix la faculté de statuer en dernier
ressort sur les demandes possessoires, quelle que soit la
valeur de l’objet contesté, pourvu que le demandeur ait
restreint ses dommages-intérêts à o francs et au-dessous.
Si cette jurisprudence est telle qu’on la suppose, le temps
en fera justice ; mais elle n’est pas applicable à l’espèce dans
laquelle se trouvent les parties.
_ L e m axim um de la compétence des juges de paix est
fixé à o francs par les articles 9 et 10 de la loi du mois
.d’août 1790.
O r , il s’agit, dans l’espèce, d’une valeur bien supérieure
à cette somme de o francs , puisque M. Chabrol avoit
formé une action reconventionnelle de 100 fr. de dom
mages-intérêts.
. Vainement M . Neiron prétend-il que la compétence
devoit se régler par sa demande seule, et sans avoir égard
à la demande reconventionnelle de M. Chabrol.
La loi du mois d’août 1790 porte que les juges de paix
connoîtront en dernier ressort jusqu’à la valeur de o fr.
Les législateurs n’ont pas dit que les juges de paix con
noîtront en dernier ressort des demandes formées par le
demandeur seulement, jusqu’à concurrence de o fr. C’est
donc de la valeur de l’objet en litige dont la loi a voulu
parler, et non de la demande formée par celui qui intente
l’action. C’est une jurisprudence adoptée par l’universa
lité des tribunaux de l’empire, que la compétence du
premier pu dernier ressort ne doit pas,s’établir seulement
C
5
5
5
5
5
�I
* \ \
( 18 )
sur la demande , mais se composer encore de la défense,
quand elle est accompagnée de conclusions reconvention
nelles ; qu’il faut réunir les deux demandes, et non pas
se fixer sur une seule.
C’est ainsi que la cour de cassation l’a jugé par nombre
d’arrèts relatés dans les collections et les journaux de juris
prudence , et entr’autres par arrêts des 23 floréal an 8 ,
13 vendémiaire an 9 , 16 thermidor an 10, 18 vendémiaire
et
nivôse an 12. M . M erlin , dans ses Questions de
droit, tome 3, pag. 376 et suivantes, enseigne la même
doctrine, comme conforme aux vrais principes et à l’an
cienne jurisprudence.
Aussi l’auteur de la Jurisprudence de la cour de cassa
tion, au supplément de l’an 13 , page 116 , n’hésite point
à d ire , en parlant de la complainte possessoire dans la
quelle le demandeur s’est restreint à moins de o fr. pour
tous donimages-intérêts, que « si à cette première demande
« venoit se joindre une demande incidente ou reconven
ce tionnelle, q u i, réunie à la prem ière, excéderoit la
« somme de o francs, la décision de la cour ne seroit
« plus applicable, et il faudroit se guider par les règles
« ordinaires. »
M . Nciron prétend que cette demande rcconventionnelle de M. Chabrol, n’étoit qu’uiie tournure évasive,
imaginée lors du jugement définitif pour éluder le dernier
ressort.
Mais on a vu que cette demande avoit un objet aussi
sérieux que légitime, puisque M. Chabrol a souffert et
souffre encore un tort réel par l’interruption de ses tra
vaux; et qu’elle a été formée à temps, dès qu’elle l’a été
¿5
5
5
�'
r9
(
)
avant le jugement définitif dans nne justice de p a ix ,
puisqu’il est défendu d’écrire.
Les conclusions reconventionnelles de M . Chabrol
naissent d’ailleurs naturellement de l’objet de la demande
de M. Neiron.
se prétend troublé dans sa possession,
par les travaux de M . Chabrol; il demande contre lui
40 fr. de dommages-intérêts pour le prétendu tort qu’il
lui avoit occasionné; e tM . Chabrol, qui en avoit éprouvé
un bien plus grand par l’action de M . N eiron, h raison
de la suspension de ses travaux, du dégât et de la perte
de ses matériaux, avoit conclu contre lui en 100 francs
de dommages-intérêts.
Il n’y eut donc jamais reconvention plus régulière en
elle-même, qui eût plus de relation avec l’action princi
pale , et qui dût moins en être séparée.
L ’objet du litige, composé de ces deux actions réunies,
excédoit donc évidemment le pouvoir attribué au juge
de paix, pour prononcer en dernier ressort.
M . Neiron a demandé dans son premier exploit, d’une
manière expresse, que le juge de paix de l’Ouest jugeât
en dernier ressort; mais en prenant de nouvelles conclu
sions, à l’audience du 14 juin, il a cessé de conclure à
ce dernier ressort; et M . le juge de paix de l’Ouest, dont
M. Chabrol a attaqué la compétence, a tellement senti
qu’il ne pou voit ni ne devoit prononcer en dernier ressort,
qu’il n’a pas fait usage de cette formule, ce qui prouve
qu’ il n’a entendu juger qu’à la charge de l’appel.
M . Neiron oppose que si le juge paix n’a pas usé c!e
cette formulle, cette omniission 11e sauroit nuire à son ju
gement. Autrefois cependant les présidiaux étoient rigouC a
11
M
�C
20 )
reùsement astreint à déclarer s’ils jugeoient en premier ou
dernier ressort ; et toutes les fois que leurs jugemens ne
ifiisoient pas mention du dernier ressort , ils n’étoient
censés rendus qu’à la charge de l’appel. Pourquoi donc
les juges de paix seroient-ils affranchis de cette règle?
Enfin, quand cette ommission seroit indifférente en thèse
générale, elle n’a pu l’être dans l’espèce particulière, où
il s’agit d’incompétence, d’action reconventionnelle qui
excède le dernier ressort, et où M . Neiron, après avoir
conclu dans le principe à ce qu’ il fut statué en dernier
ressort, a cessé d’y conclure depuis que M. Chabrol a
opposé cette incompétence, et formé sa demande reconfV'entionnelle qui portoit à 100 fr. l’objet du litige..
À u reste, s'il y avoit du doute sur la question de savoir
si le juge de paix de TOuest a entendu juger en dernier
ressort, ou à la chai’ge de l’app el, il faudroit se décider
pour l’appel comme le plus favorable, la règle générale
étant que toute contestation doit subir deux degrés de
juridiction ; et la faculté de juger en dernier ressort n'étant
qu’une exception, elle doit être rigoureusement restreinte
aux cas clairement prévus par la loi.
Il faut donc regarder ce point comme démontré, que
l ’appel de Al. Cabrol est reccvablc.
Il reste à examiner s’il est fondé.
Cet appel doit être examiné d ’a b o r d sous le point de
vue de l'incompétence, et subsidiairement sous celui du
mal jugé.
L ’incompétence du juge do paix de l'Oucsl résulte de
l'ordonnance du président du tribunal civil , du 2 com• plemcnlaire de l’an 13 , Ct duconllit de juridiction qu’elle
�( ü )
établit, en la rapprochant de la cifation donnée devanï
l€ juge de paix.
M . Neiron père s'étoit permis des voies de fait contre
M . Chabrol, ayant fait interrompre ses travaux et chasser '
violemment ses ouvriers par Je ministère de M . son fils.
M . Chabrol obtient l’ordonnance du 2 complémentaire,
qui l’autorise dans l’accomplissement de ses restaurations,,
et cela provisoirement, contre les agressions de M M .
•Neiron-Dcsaulnats père et fils.
Mais M . Neiron prétend que cette ordonnance ne con
cerne que la digue, et que tout ce qui n’étoit pas digue
demeuroit prohibé à M. Chabrol/Cependant M. Chabrol,
par sa requête, avoit exposé « qu’il avoit droit à des prises
d’eau aux sources mêmes du ruisseau des Gros-Bouil« Ions. » Sa pétition avoit donc pour objet tout ce qui
•est relatif à ces prises d’eau. D ’ailleurs , les aquéducs, les
prises d’eau et la digue sont un ensemble de construction
qu’on ne peut séparer, et qui ne scroient rien les uns
sans les autres. Son aquéduc couvert gît au fond et dans
le lit même du grand aquéduc; il y est immergé : il falloit
donc profiter de l’absence momentanée des eaux qu’il
avoit déviées, pour compléter son entière restauration; et
ce n’est qu’après l’avoir terminée, qu’il a été possible dé
mettre la dernière main ¿\ la digue.
Si M . Chabrol eût négligé cette partie de sa restaura
tion, il eût commencé dès ce moment une espèce d’ab
dication de ses droits, dont M. Neiron n’eût pas manque
de se prévaloir un jour. Si cette ordonnance, du 2e. jour
complémentaire de l’an 13 >avoit mis des restrictions a la
faculté qu’elle accordoit ù M . Chabrol, au lieu d’une jus^-
1
�( 22 )
tice, c’eût été un mallieur pour lui ; c’eût été l’exposer â
de grandes dépenses sans espoir d’aucun fruit ; ce qu’on
ne peut présumer de la sagesse et de la justice de M . le
président du tribunal civil.
M . Chabrol n’auroiteu besoin de l’intervention d’aucun
tribunal pour être autorisé à la restauration de ses prises
d’eau, si M M . Neiron père et fils ne l’eussent troublé dans
l ’exercice de ses droits. L ’article 697 du Code civil veut
que « celui auquel il est dû une servitude ait droit de faire
« tous les ouvrages nécessaires pour en user et la con
te server. »
C ’est donc contre les agressions et les obstacles de
M M . Neiron père et fils, qu’il a invoqué l’autorité du
tribunal civil. L ’ordonnance du 2e. jour complémentaire
a donc saisi la juridiction de ce tribunal.
M . Chabrol supposera pour un moment que l’ordon
nance de M. le président du tribunal civil peut donner lieu
à interprétation , et présenter de l’incertitude sur le fait
de savoir s’il n’a pas entendu restreindre tous les travaux
à la digue seulement ; en ce cas à qui peut-il appartenir de
l’interpréter ou de la modifier ? Ce ne peut jamais être à
un juge inférieur. Il n’appartient qu’à la cour d’appel de
l’infirmer, comme au tribunal civil de l’expliquer. Que
cette ordonnance présentât ou non des équivoques, elle
n’en est pas moins 1111 exercice de la juridiction du tribunal
civil: à lui seul appartenoit d’interpréter sa volonté.
L e jugement dont est appel doit donc être annullé
comme incompétennnent rendu, subsidiairement il 11e peut
manquer d’être infirmé à raison du mal jugé.
Eu remo.itant à la demande originaire de M , Neiron-
�1 M
*3
#(
)
Desaulnats, on voit qu’il a conclu à ce qu’il fût dit « que
« M . Chabrol a eu tort d’usurper, dans l’enclos de Saint« Genest, le terrain sur lequel il a placé les tuyaux ci« dessus énoncés ; que M . Desaulnats soit autorisé à re« prendre la libre jouissance dudit terrain ; que défenses
« soient faites audit sieur Chabrol de l’y troubler à l’ave« nir...... et qu’il soit condamné envers lui à 40 francs de
« dommages-intérêts. »
Remarquons d’abord que ces conclusions en complainte
-possessoire de M . Neiron, et le jugement en maintenue
du juge de paix , ne portent pas sur les eaux des sources
des Gros-Bouillons. M . Neiron ne demande pas à être
maintenu dans la possession de toutes, ou partie de ces eaux;
il ne se plaint pas de ce que M. Chabrol en absorbe dans
.scs aquéducs : et pourquoi ne s’en plaint-il pas? parce que
ni lui ni ses prédécesseurs n’en ont jamais usé ; que l’état
naturel des lieux s’y opposoit, et qu’elles ont coulé de tout
temps en totalité et en toutes saisons hors des héritages de
l’enclos de Saint-Genest sans leur être d’aucune utilité, si
ce n’est depuis quelques m o is, que M . Neiron a pu en
diriger dans son pré-verger la portion méridionale , eu
profitant des travaux de M . Chabrol ; entreprise et nova
tion contre laquelle M . Chabrol fait toutes réserves, tant
pour lui que pour ses co-interessés.
Toutes les prétentions possessoires de M. Neiron se ré
duisent donc î\ être maintenu dans la possession du terrain
sur lequel sont gissans les canaux de M. Crabrol, terrain,
dit M. Neiron, qu'il a eu. tort d'usur-fier; et le juge de paix,
par son jugement, maintient uniquement M. NcironDesauluats dans la possession et jouissance du terrain
n
9
J ‘
�\\
Cm )
dont il s'agit, et fa it défense tï M . Chabrol de Py
troubler.
O r , ce terrain prétendu usurpé est le lit même du grand
aqueduc de M. Chabrol; il est et a toujours été submergé
par les eaux. On ne voit pas comment l\J. Neiron uuroit pu
en jouir, comment il auroit pu en avoir la possession
annale avant sa demande, lui qui convient n’avoir jamais
eu la propriété de cet aquéduc-digue ou agage , puisqu’il
invite M. C h ab ro l, par ses lettres, à le réparer.
C ’en seroit assez pour faire sentir le ridicule d’une pa
reille demande , ayant pour objet la maintenue dans la
jouissance d’un terrain qui est sous les eaux , sans qu’ il soit
jamais dans l’ordre des choses possibles que ce terrain sub
mergé, puisse servira autre chose qu’à soutenir les eaux.
Mais ce qui écarte toute idée de complainte possessoire dans l’espèce, c’est qu’il n’y a pas de nouvelle œuvre
de la part de M . Chabrol ; il n’a fait que réparer un
ancien canal existant de toute ancienneté , et destiné à
coiuluirc une prise d’eau du ruisseau des Gros-Bouillons
à sa maison du Chancet. M . Neiron à la vérité conteste
jce fait; il nie qu’il ait jamais existé de conduite d’eau
au Chancet. « Si cet aquéduc couvert eût existé, dit-il,
« M. Chabrol n’eût pas manqué d’en faire dresser procès
« verbal contradictoirement avec moi , avant de le res« taurer. » Mais M . Chabrol est aussi étranger aux af
faires co n t e n t ie u se s que son adversaire y est familier;
pouvoit-il se douter qu'un pareil fait pût être contesté,
que les débris des canaux et des tuyaux gissant sur le
lieu même rie sufliroient pas en cas d’opposition? IJouvoit-ril penser que partie de ces débris disparoîtroit de
ce
�\
C
25 )
ce local, que ceux qui n’avoicnt pas été déracines à
l’extrémité septentrionale seroient enlevés? Si M . Cha
brol a commis une négligeance, en ne demandant pas
à être autorisé à faire dresser procès verbal, il lui reste
la ressource de la preuve testimoniale. Quoique M . le
juge de paix de l’Oitest, dans son dix-septième attendu y
dise qu’ il ne l’ait point offerte, il n’est pas moins vrai
que, d’après l’avis de ses conseils, il recueillit les noms
des témoins , lui en proposa l’audition, et que M. le
juge de paix la jugea inutile; ce qui persuada à M. Cha
brol qu’il étoit décidé à se déclarer incompétent. Si la
mémoire de M. le juge de paix l’a mal servi, M. Cha
brol y a rérnédié depuis ; ce qu’il ne crut pas devoir
faire alors, d’une manière expresse et juridique, en
vers M . le juge de paix, il le fait aujourd’hui; il a
pris des conclusions formelles tendantes à être admis
à faire preuve par témoins, qu’il existoit dans le lit même
de l’aquéduc destiné à conduire les eaux du ruisseau des
Gros-Bouillons, une ancienne conduite, partie en ca
naux de pierres, partie construite en maçonnerie, et
partie en tuyaux de brique; et cela jusqu’à l’extrémité
septentrionale de l’enclos de Saint-Genest.
Ce fait une fois p ro u vé, il sera démontré que M . Cha
brol n’a point fait une .nouvelle œuvre; qu’il a seulement
restauré son ancienne conduite, en substituant des canaux
neufs aux anciens, obstrués ou dégradés par le temps et
le défaut d’entretien.
La réparation de cette ancienne conduite n’a pu donner
lieu à une action posscssoire de la part de M . Neiron,
parce que, comme on l’a déjà dit, aux ternies de l’art. 697
du Code civil:
D
�¡ ¡ il
>»'£ 26 )
' Celui à q u i il est dû une servitude a droit d e fa ir e
tous les ouvrages nécessaires pour en user et pour la
conserver. Cette disposition est tirée de la loi x i , au di
geste, livre 8, titre 4.
ü
I l résulte d’un droit de prise d’eau la faculté tacite de
la restaureryden approcher en conséquence le plus près
p ossible, so i et ses ouvriers.
S i ju s est m ihi aquam rivo ducere tacita hœc ju ra
sequuntur , ut reficere m ihi rivurn lic e a t, ut adiré
quinn proxim è possim y ad reficienduni euni , ego f a
brique mei. ( Loi 1 1 , §. 1 . titre 4 , au digeste. )
Si l’usage de cette conduite a été suspendu pendant
nombre d’années par suite de la non habitation des pro
priétaires du Chancet, ou par leur impossibilité de sub
venir aux dépenses de sa restauration, cette suspension
n’a pu nuire aux droits de M . Chabrol, qui ont toujours
été conservés par les vestiges et les restes de cet aquéduc ;
c’est un droit de pure faculté imprescriptible de sa na
ture , jusqu’à contradiction..
C ’est ce qui résulte également et des anciens principes
et des nouvelles lois. ( Voyez l’article 2232 du Code civil,
sur les droits de pure faculté, et l'article 688, sur la pres
cription des servitudes. )
D ’Argentré, qui a traité la question da ns son Commen
taire sur l’article 266 de la Coutume île Bretagne, prend
pour exemple des moulins et des colombiers dont il neresteroit que des vestiges.
_
Il dit, l’égard des m oulins, qu’il est toujours permis
de les rétablir, pourvu qu’il en subaste quelque portion.
Quandià qucvdam de priora maleriœ supersunt p a li,
cubiccv trabes , parietinœ quev symbolo. et notœ esse
�(*?)
possurit p rion s cònstructionis hœc 'enim sig/ta cum
sint temporis successivi, et permanentis signatum 'reti
ren t in possessione juris.
,n
Jsta inquam et superstantia fundam enta ( dit-il plus
bas ) possessionis interruptionem impediimt. Il en est de
môme , d it-il, des colombiers détruits ou dégradés par le
temps ; quand il n'y auroit pas eu de pigeons depuis un
siècle, il est pex*mis de les rétablir.
Q uandiù parietinœ et vestigia restabunt^etiamsi antè
'centurn annos in eo nulla columha résid en t, eoque
jure utiniur ; qnod nemo rectè prohibere possitT quia
!vestigia possessionem retinent..
'
On trouve les mêmes principes dans Mornac sur là
loi 34 au digeste Dì? servitutibus rusticorian prœdiorium*
S i colum barii, vel inolindini J la tilis, vel stagni ves
tigia restant, etiam post centum annos, possessio in
ipsis vestigiis retineri semper censeatur, ita ut restituì
instaurarique possint à domino.
C ’est toujours en raisonnant d’après ces principes, que1
Papon dans son Commentaire sur l’article 29 de la Cou
tume de Bourbonnois , dit que « ces sortes de droits
« que les docteurs appellent de pure faculté , sont con« servés parla simple possession civile, et 11e se perdent
« point par le non usage. »
Tlorum en ini jurium quæ facultatis doctores vocant r
sola possessio civilis prescriptionem im pedii, ncque non
utendo pereunt.
« D ’où il suit (dit A uroux des P o m m i e r s ) qu’il ne*
« peut se rencontrer de possession formée de liberté de:
« tels droits, que par un fait contraire. »
A u surplus, ces principes viennent d’être consacrés g a r
�c
2
8
}
le Code civil de manière à ne pas même laisser de prise
à la contradiction.
On lit dans l’article 688, que les servitudes continues
sont celles dont l'usage est uu peut être continuel sans
avoir besoin du f a i t actuel de l'homme ; telles sont les
conduites d 'ea u , les égouts, les vues, et autres de cette
espèce.
On voit dans l’article 707, q u e , lorsqu'il s’ agit de servi
tudes continues , les trente ans pour acquérir l'extinction
de la servitude ne commencent à courrir que du jo u r
où il a été fa it un acte contraire à la servitude.
D ’où il résulte que jusqu’à cet acte contraire M. Chabrol
a conservé la possession de la conduite d’eau dont il s’agit;
qu’il a été en droit de la faire réparer quand il l’a jugé à
propos, sans que cette restauration ait pu être prise pour
nouvelle œ uvre, ni donner lieu à une action en complainte
possessoire de la part de M . Neiron, surtout dans la cir
constance où il n’a jamais eu ni pu avoir la possession du
terrain sur lequel est le grand aquéduc, lequel forme son
lit, qui est immergé par les eaux , et dont il lui est im
possible de faire aucun usage,
La prétention de M. Neiron-Desaulnats est donc sans
intérêt comme sans fondement; elle doit être p r o s c r i t e ,
et le jugement dont est appel par M, C h a b r o l doit être
infirmé , si le tribunal civil ne croit pas devoir se décider
pour l'incompétence qui résulte de l'ordonnance du 2e,
jour complémentaire; de l’an 13.
P a r conseil,
B E R G I ER.
BOIROT.
A R I O M , de l'im p r im e r ie d e L a n d r i o t , seul im p r im e u r de la
C o u r d ’appel. — A o û t
1806 .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chabrol. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Boirot
Subject
The topic of the resource
jouissance des eaux
aqueducs
destruction de canalisations souterraines
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire et consultation, pour M. Chabrol, ancien colonel ; en réponse à l'imprimé de M. Neiron-Desaulnats, ancien magistrat, intitulé Précis, et à sa consultation signée Meimac.
Table Godemel : Complainte : 4. le juge de paix est-il compétent pour statuer sur la complainte possessoire de Désaulnat relative à la construction faite par le colonel Chabrol, d’une conduite d’eau dans son enclos de Saint Genest ? L’article 10 de la loi du 24 août 1790 est-il absolu ou limitatif ? Le juge de paix pouvait-il statuer sur les conséquences des réparations faites en vertu d’une ordonnance du président du tribunal ? 5. le jugement qui a maintenu Désaulnat en possession de son terrain, et ordonne la destruction des ouvrages, est-il un dernier ressort, dès que le demandeur avait restreint la valeur de ses dommages-intérêts à 40 francs seulement ? n’est-il pas, au contraire, en premier ressort par la nature même des conclusions du colonel Chabrol, qui, d’une part, en opposant l’incompétence du juge de paix, avait élevé un conflit de juridiction entre le tribunal et le juge de paix, et, d’autre part, avait formé une demande reconventionnelle de 100 francs de dommages-intérêts ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1683-1806
1661-1715: Règne de Louis XIV
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1531
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0529
BCU_Factums_M0530
BCU_Factums_M0540
BCU_Factums_M0713
BCU_Factums_M0525
BCU_Factums_G1530
BCU_Factums_G1532
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53271/BCU_Factums_G1531.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Malauzat (63203)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
aqueducs
destruction de canalisations souterraines
Jouissance des eaux
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53272/BCU_Factums_G1532.pdf
07ab8eb10260ecde58c0b15731c86280
PDF Text
Text
OBSERVATIONS
SU R
LE
M É M O IR E
'
DE M N E I R O N - D E S A ULNATS.
�AVERTISSEMENT.
\
M . Neiron ayant eu l’attention de ne distribuer son
mémoire contre M . le procureur im périal, par le titre,
mais contre moi par le fa it, que le 18 au so ir, et n’ayant
pu m’en procurer un exemplaire que le 19 au matin , car
j’étois à Clermont le 18 , j’ai eu à peine deux heures
pour répondre à ses inculpations. Il m’a été impossible
d’être aussi laconique que je l’aurois dû , et encore plus
impossible d’avoir recours aux talens d’un défenseur. Je
réclame donc l’indulgence des lecteurs sur ma réponse; ils
me pardonneront, je l’espère. Ce n’est pas dans la vie active
et le tumulte de la carrière m ilitaire, qu’on s’exerce à bien
écrire ; mais on y apprend à bien penser et à bien agir :
c’est à la pratique de ces vertus que s’est toujours bornée
mon ambition.
�OBSERVATIONS
De M. C H A B R O L , ancien militaire ,
,
Sur le mémoire signé N E I R O N - D E S A U L N A T S
intitulé : Mémoire justificatif, pour Joseph N e i r o n -
habitant de la ville de R iom , accusé
à la police correctionnelle; contre M. le Procureur
impérial.
D esaulnats,
S i M .N eiro n -D esau ln a ts, dans son mémoire contre M . le pro
cureur impérial, n e cherchoit qu’à égarer l'opinion publique et celle
de ses juges, en dénaturant l’affaire qui a provoqué sa dénoncia
tion au tribunal de police correctionnelle ; si ses efforts ne tendoient qu’à surprendre un jugement favorable à sa cause , je ne
prendrois pas la peine de répondre à son mémoire.
Mais M . N eiron, en se plaignant de ce que je suis son adver
saire, m ’accuse d’un système de vexation contre lu i, et de cons
piration contre sa propriété, sa santé et celle de sa famille. ( V oyez
page 1" . et page 5 , à la note qui appartient à la page 4 de son
mémoire. )
Je dois donc au public l’exposé de cette a ffa ire , et à l’honneur
de repousser une assertion aussi injurieuse que dénuée de fondement.
M . Neiron a réduit le meunier Jean D ebas , et toute sa fam ille,
A
�(o
à la misère la plus profonde, et cela, sans b u t , sans m o tif comme
sans intérêt, en m ettant à sec un m oulin, leur unique patrimoine.
Pour diminuer aux yeux du public l’pdieux d ’une pareille entre
prise, M . Neiron s’est permis de dire, qvec un ton de m ystère, qu’il
n’en agissoit ainsi que pour mes intérêts, parce que ce moulin me
devoit jadis une prestation en blé , supprimée par les lois révolu
tionnaires : c’étoit pour me la faire payer qu’il en agissoit ainsi.
J1 disoit à d’autres que son but étoit de me venger des torts de cet
homme.
Je vis donc ce pauvre meunier , accompagné de sa fam ille, venir
implorer ma clém ence, et me prier d’accepter une renie sur ce
m o u lin , pour désarmer ce qu’il appeloit nia colère. J’ignorois abso
lum ent alors l’entreprise de M . Neiron : le meunier m ’expliqua son
infortune. Je consolai ce m alheureux, et refusai ses offres. Je lui
assurai que s’il n ’y avoit pas un an révolu depuis cette dernière
entreprise, il seroit infailliblement maintenu au possessoire: je nie
trompois. Com m e M . N eiron avoit déjà usurpé, depuis an et jour,
une porte d ’entrée et de surveillance dans son enclos, appartenant
à ce moulin , le tribunal faisant céder le principal, qui étoit l’eau,
à l’accessoire, qui étoit la porte, cumula les deux a ctio n s, et ren
voya le malheureux meunier au pétitoirc , quoiqu’il n ’y eût pas
quinze jours que son moulin eut cessé de moudre.
Pour atténuer encore, dans L’opinion publique, la dureté de son
procédé, M . Neiron publia dans tous les cercles que c’étoit pour
rétablir la salubrité dans son e n clo s, qu’il avoit vidé son étang ,
et qu’il ne devoit point d ’eau à ce moulin.
E t parce que j’ai tendu une main secourablc à cette fam ille, que
je l’ai consolée dans son désespoir, que je l’ai n o u r r i e de mon pain ,
il plaît h M . Neiron de me q u a lifie r « de persécuteur contre sa
« personne, et de conspirateur contre ses propriétés, sa sa n té , et
» celle de sa fam ille. »
M ais M . Neiron , qui attribue l’insalubrité de son enclos à cet
amas d ’eau qui form oitson étang, a sans doute rempli son objet ;
car non-seulement il n’a plus d 'é ta n g , mais quoiqu’il affecte de
�ï 6/ i
C3)
répondre que le m eunier vouloit le rétablissement de son étan g ,
afin d ’exciter l’opinion contre ce malheureux, Usait bien que Jean
D ebas n ’a pas la prétention d'exiger qu’il rétablisse son étang ; il
lui a dit et répété dans différentes écritures dont M . Redon lui a
donné communication. Jean Debas ne demande autre cliose à
M . Neiron que le rétablissement du cours d ’eau dans la direction
et la hauteur de ses rouages, au lieu de le diriger par le nouveau
lit qu’il a fait creuser en l’an 12 , à une quinzaine de toises plus
loin. C ’est donc dans le lit ancien et habituel que demande Jean
D ebas qu’on fasse couler l’eau, au lieu du lit nouveau; et quand
M . Neiron allègue l’impossibilité de remettre les eaux dans leur
ancienne direction sans remplir de nouveau son étang, il n ’est pas
de bonne foi , il sait bien le contraire. Il sait bien que toutes les
fois qu’il faisoit pêcher son étang, le moulin de Jean D ebas continuoit son m ouvem ent, et que les eaux lui étoienl transmises alord
par le béai de précaution , appelé vulgairement la rase de la V e rgnière. M . David de M allet laissa une fois son étang à sec pendant
trois mois: de suite , et cependant l’action du moulin ne lu t pas
discontinuée un seul jour. D ernièrem ent, en messidor an i 5 , lors
de l?enlèvement des foins de l’enclos, il fu t nécessaire, pOur faci
liter l e u r exploitation, de rétablir les eaux dans l’ancien béai de
précaution ; l’eau se rendit si abondamment au m oulin, qu’il tourna
une matinée entière.
La jo ie 'd e cette misérable' fam ille, ce jo u r - là , fut si v iv e ,
qu’elle 11e peut se dépeindre. Ils crurent M .. Neiron.ram ené enfin!
à des sentimens de'justice envers eux.; ils crurenl que des jours
de bonheur alioient enfin succéder h tant de larmes. H élas! cet
espoir cessa l’apre6-midi. Les foins enlevé»; l’eau fut sur le champ,
rétablie dans le nouveau lit, et alla, comme auparavant, inonder
le chem in, q u i, pondant le changement de scene, fut praticable.
Jean D ebas offre de prouver ce fait par témoins. IVI. Neiron ose
cependant nier l’existence de ce béai, canal ou rase de précaution,
et accuser INT. le sous-préfet d ’avoir créé idéalement ce canal : ce
sont ses termes. H suppose encore que ce magistrat, « après avoir
2
11
�(4 )
» approuvé le dessèchement de son étang, ordonne cependant des
» mesures qui tendent à le remplir d ’eau ; » ce qui seroit une dé
rision, si cela étoit véritable. M ais M . le sous-préfet a dû voir par
le rapport de l’expert - géom ètre, M . M anneville , que le canal
existe. Jean Debas offre d’en faire la preuve, que telle étoit sa
destination et son usage constant, et il conjure M M . les juges de
nommer des commissaires pour vérifier son assertion : ils verront
qui de lui ou de M . Neiron en impose au public et 5 la justice.
»
»
»
»
L e mémoire de M . N éron, page 8 , assure qu e, « si je n’ai pas
dicté l’arrêté de M . le so u s -p ré fe t, je l’ai au moins sollicité
éloquemment et d ’une manière imposante; et qu’à cause de son
désir général d ’obliger, et du peu de régularité des formes en
administration, il se laissa aller à des erreurs. »
M ais la plainte des maire et adjoint a été formée en ventôse de
l ’an 12 , et ce n ’est que quatorze mois après, qu’il a plu à M . le
sous-préfet d ’y répondre, en prairial de l’an i 3 . M . Neiron con
viendra qu’il fa u t, ou que mes manières imposantes et mon élo
quence aient été long-temps infructueuses, ou mises en usage bien
tard. En vérité, quand l ’amour de la justice ne seroit pas aussi
naturel à M . le so u s -p ré fe t, cette circonstance, dans le délai de
quatorze m o is, suffiroit pour démentir pareille accusation.
Je défie à qui que ce soit de prouver que j ’aie jamais provoqué
cet arrêté de l’administration , relatif à l’inondation du chemin ,
qui fait l’objet de l’attention de M M . les juges de la police correc
tionnelle. Quoique j’eusse, autant que personne, le droit de me
plaindre, je m ’en suis reposé sur le zèle et le ministère des maire
et adjoint, qui sont chargés de la police des chemins vicinaux. Quant
A M . le sous-préfet, j’ai toujours imaginé que sa lenteur à prononcer
dérivoit «le son désir et de son éspoir de voir terminer, par l’ar
b itra g e , l’affaire du moulin , ce qui mettoit fin à tout.
« C ’est pour défendre sa propriété, sa santé et celle de sa fa» mille contre m oi, que M . Neiron se vante d ’avoir employé des
» moyens aussi pacifiques qu’honnêtes. » ( Voyez p. i r\ de son
mémoire. )
�(5 )
' Je demanderois d’abord en q u o i'j’a ilp u vî°îeir sa propriété, at-taquer sa santé et celle de sa fam ille. N e semble-t-il pas entendre
un ravisseur, qui , se voyant aperçu, se met à crier au voleur,
afin de détourner sur un tiers l'attention du public, et pouvoir se
soustraire à la peine?
'■
M . Neiron dépouille un meunier de son unique patrimoine , le
rédu it, et sa fam ille, à la misère la plus profonde : et c ’est pour
se défendre contre moi qu’il emploie des moyens honnêtes et
pacifiques.
Voyons quels sont ces m oyens; c ’est sans doute d’avoir con
senti à se soumettre à un arbitrage, mais les parties adverses y
ont concouru comme lui.
« M . C h abrol, dit M . N eiron, présida au compromis (vo yez
» p. 7 ) avec intérêt, avec chaleur. »
Il est très-certain qu’après avoir amené ces gens à compromettre,
je leur couseillai de passer l’acte par-devant notaire, au lieu de le
passer sous seing privé, comme le désiroit M . N eiron , qui avoit
déjà commencé à le libeller; c’est moi qui insistai, d ’après la con
fiance que ces sept malheureux in’avoient tém oignée, pour que
tout m oyen de révoquer l’arbitre fû t ôté à chaque partie. Cela
donna lieu à des plaintes sévères de la part de M . Neiron contre
moi. Je laisse au public à juger de quel côté étoit le piège.
» Je ne reconnois pas la loyauté de M . Chabrol ( s’écrie
» M . Neiron , p. 7 ) , qui sollicite l’administration pour faire
» rendre provisoirement l’eau à son moulin. »
Je proteste que je n’ai ni hâté ni retardé l’arrêté de ^administra
tion , et je défie qu’on m ’ait entendu en provoquer l'exécution ;
mais quand j’aurois sollicité l’administration de prononcer, ¡1 n’y
auroit là rien de déloyal ; et certes , ce n ’est pas à l’école de
M . Neiron que j’irai prendre des leçons de loyauté î J’ai ru une
peine sincère de l’avoir vu dénoncer à la police c o r r c c tio n e lle : j ’en
ai bien des témoins ; et quand M . Neiron met dans ma bouche
» que je conviens que j’ai sollicité l’administration contre lui sans
» prévoir les mesures sévères qu’elle pouvoit prendre, » il sait bien
�(-6 )
que je ne L’ai pas dit , et que c'est un rêve de son cerveau bizarre
et fertile en inventions. Je proteste encore que je n ’ai sollicité, ni
directement ni indirectem ent, cette rigueur auprès de l’adminis
tration. M . Neiron m ’accuse encore, page 2 , « d e cacher mon intc» rêt particulier sous le masque d ’un intérêt public supposé. »
O n verra-plus loin le .fru it de cette m échanceté, en attendant
que INI. Neiron nous explique, s’il le p e u t, de quel intérêt public
il entend parler. Il s’agit d un moulin et d’une prairie ; certes, c ’est
un intérêt bien privé que celui de ces malheureux ! Si le public y
est pour quelque chose, ce n ’est que par l’intérêt que nous devons
tous au malheur ,<?t à l'oppression.
Venons maintenant à la note de la page 4 *
A près avoir d it, page 4 > <ïue M . de Nocase avoit cédé sans ga
rantie , en 17^ 6, aux périls, risques et fortune, ce moulin en ruine;
ce qui est un faux exposé et une manière astucieuse de rendre, les
termes de cet a cte , parce que les m o ts, périls, risques etfortuné,
et sans garantie, s’appliquent aux héritiers du meunier déguerpis
sant , afin quç lu i, ou les siens venant à rentrer dans le'm o u lin ,
M . de N ocase, qui Iedonnoit à nouveau b a il, n ’eût rien à démêler
avec les meuniers. M . Neiron ajoute :
» M . C h a b ro l, devenu acquéreur, ne suivit pas les erremens
» de M . de Nocase ; il fit faire une nouvelle reconnoissance au
» meunier , dans laquelle il lui assure la prise d ’eau à mon étang
m
dans mon parc. Je n’ai pu voir cet acte
mais la véracité de ceux
» qui m ’en ont instruit estasses justifiée par U co n d u ited e M . Cha<» b ro l, ancien colonel. M . Chabrol père eut pour o b je t, dans cette
» innovation, de ne pas laisser son moulin , ou la rente qu’il pro» il ui s o it, à la merci des propriétaires de le ta n g ......D e cette nou» vqlle r e c o n n a i s s a n c e es t r é s u l t é uu d r o i t d e garantie....... . d e la
» part du meunier contre INT. C h a b ro l, ex-colon el, depuis que je
u lia is mon étang en vidange......Au, lieu de la subir généreuso» m e n t, M . Cliubrol subsistuc sa protection en faveur du m eunier,
et un système de vexation .contre moi. »
C ’est là le fruit du germe jeté avec p iifilie , page a , par
M , Neiron : en voilà le poison distillé à sa manier«:.
�/'¿V,
J
,
Quand on veut remplacer des moyens d’attaque ou de défense
par la calom nie, au moins faut-il en imaginer de vraisemblables ,
et surtout on ne doit pas en machiner d'absurdeS. Quoi ! M . Chabrol
p è re , qui avoit sur ce moulin des titres des quinzième et seizième
siècles , auroit préféré de se procurer un titre nouveau par lequel
il auroit mis sans nécessité le soft de son moulin à la merci de la
fantaisie ou de l'avidité d’un voisin, tandis qu’il en étoit à l’àbri
par ses anciens titres? une pareille absurdité tombe d’elle-méme.
M . Neiron qui , en toute occasion , se montre détracteur de
M . C h a b ro l, mais qui cependant lui fait la grâce de lui accorder
quelques lumières et du ta le n t, comment persuadera-t-il au public
et à ses juges cé chef-d’oeuvre d ’imposture? M ais M . Neiron vouloit me donner l’odieux d ’être injuste envers Jean D ebas, corrime
le privant de son recours en garantie contre moi. C ertes, si Jean
Debas avoit eu un pareil titre , ses conseils auroient été coupables
de ne pas l ’en instruire , et moi bien plus encore d e substituer,
comme ose m'en accuser M . N e iro n , Une vaine protection aux
indemnités que je lui aurois dues.
Q uelVL Neiron nomme les personnes officieuses dont la véracité
lui est si'co n n u e, qui l’ont instruit de l’existence de ce contrat
nouveau ; qu’il nomme le successeur du notaire qui lui offroit
expédition de titres; qu’il justifie de Id n o te , qui sans doute indi
quera la date de ¡’inféodation de 1756 : sans cela, son échafaudage
de calomnie croulera de lui-m ém e.
Page i 3 du mémoire :
(f M . Neiron est fâché de me voir prendre confiance aux arti« fices de la chican e, etc. »
Sans doute il est juste qu’il se réserve à lui seul un patrimoine
qui lui appartient à tant de
dont il se fait une aussi
solide gloire : je lui en laisse la possession, sans la plus légère eh vie.
Je ne m ’occuperai point ici des moyens de Jean D e b a s, Jean
Julien et consoris ; ils seroient surabondans , puisque la question
soumise au tribunal de police correctionnelle ne regarde aujour
d ’hui que l’inondation et la dégradation de la voie publique. Je me
contenterai d’observer que le Code civil, article C3 3 , prononce que le
�770
( 8)
possesseur du fonds supérieur ne peut rien faire qui aggrave la ser
vitude du fonds inférieur. O r , Jean Debas ne doit passage sur
son héritage inférieur qu’à un filet d ’eau plus ou moins considé
rable, selon les temps secs ou pluvieux, découlant de l’enclos SaintGenest. Je ne discuterai pas la loi Prceses de servitutibus etaquas,
et ne distinguerai pas les exceptions auxquelles elle est assujétie. Je
n ’examinerai point si les arrêts dont se prévaut M . Neiron s’ap
pliquent ou non à l’espèce dont il s’a g it, entre lui et Jean D ebas.
Je laisserai aussi sans réponse le système de diffam ation ourdi
contre le juge de paix de l’Ouest et son huissier, quelque fabuleux
qu’il soit ; car tout cela est étranger à la question qui doit être
jugée par le tribunal correctionnel; mais je donnerai à l’impression
la version fidèle de ma lettre, du i 4 messidor, à M . T eillard ,
puisque M . Desaulnats s’est permis de la dénaturer en la tron
q u an t, ainsi que la copie de la transaction surprise par lui à Jean
Julien , par laquelle il a la loyauté de le faire renoncer au bénéfice
du jugement obtenu , au provisoire, contre lu i, pour l’arrosement
des prairies environnantes.
Perm ettez-m oi une dernière observation, monsieur Neiron.
A u lieu de distiller ce fiel surabondant qui vous dom in e, au lieu
de vous répandre en injures qui, fussent-elles fondées, ne changent,
rien à la question dont le tribunal est sa isi, cédez p lu tô t, tout
vous y invite, cédez aux sentimens de justice et d ’humanité que ré
clam ent, depuis quinze m ois, le malheureux Jean Debas c l ses corn*
pagnons d ’infortune.
Quoi ! cette fam ille entière que vous précipitez dans un abîme de
misère , n’est donc rien à vos yeux ! Calculez les suites de son dé
sespoir ; vous, son plus près voisin , la verrez-vous, sans remords ,
tendant aux Aines charitables des mains desséchées par la soif et la
faim , et réduite
implorer un morceau de pain pour conserver
une existence que vous lui aurez rendue insupportable ?
A h ! faites cesser un spectacle aussi cruel pour votre respectable
et digne épouse; ne la réduisez pas , elle, le modèle de toutes les
vertu s, à gémir en silence d'un malheur dont
coupable.
youî yous
êtes rendu
�(9 )
E t vous, jeunes Beautés, vous, les dignes filles d'une telle m ère,
qui embellissez nos cercles, qui en faites l'ornem ent, et par votre
modestie , et par vos charm es, implorez la justice de votre père
envers ces malheureux ; obtenez-leur la restitution de leur patri
m oine; et que les roses de l’innocence et de la pudeur, qui colorent
vos teints de lis , ne soient plus exposées à la confusion, devant le
spectacle déchirant d ’une famille malheureuse par la persécution de
celui qui vous donna le jour.
Pour vous , organes vivans de la lo i , appelés à prononcer sur
les intérêts les plus chers de vos concitoyens; ah ! ne souffrez pas
que le temple auguste de la justice soit infecté par l’haleine empestée
de l’hydre sans cesse renaissant de la chicane ; fermez pour jamais
à ce monstre l’entrée du palais de T hém is ; et que le timide orphelin,
que la veuve éplorée, fassent entendre à jamais des cris de joie et
de bénédiction sur les oracles que vous aurez prononcés.
C H A B R O L , ancien m ilita ire .
��( »
PIÈCES
«)
JUSTIFICATIVES
A rappui des observations de M . C h a b r o l au mémoire
de M
. JSEl
dénaturée par
M. N e ib o n .
V ersion
L e citoyen Jean D ebas, propriétaire du mou
lin , les citoyens Jean
Julien , et autres proprié
taires du pré voisin du
m oulin, consentent à ce
que les pouvoirs donnés
par le compromis soient
transférés à M . Touttée,
et qu’on écrive à M . R e
don d’envoyer l’ordre à
son secrétaire de délivrer
a u x parties respectives
les pièces déposées par
elles à l’appui de leurs
prétentions réciproques.
ron- D e sa ü l n a t s.
C o fte de ma lettre du 14 messidor,
à M . T e illa r d .
M.
L e citoyen Jean D ebas, propriétaire
du moulin du Breuil ; les citoyens Jean
Julien, M ichel D o m as, Jean V a le ix ,
Pierre Souslefour, Vincent Longcham-
b o n , possesseurs de prés environnant
ledit m oulin, consentent au désir que
vous avez manifesté de la part de M .
Desaulnats , vu l ’absence indéfinie de
M . Redon , d ’engager ce dernier à se
départir de sa qualité d’arb itre, qu’il
avoit bien voulu accepter en vertu du
compromis passé le 28 prairial an 12.
Ils consentent aussi à ce que les pou
voirs donnés à M . R edon, par ce com
prom is, soient confiés à M . T ou ttée ,
comme vous avez dit que le désiroit
M . Desaulnats ; mais ils demandent
qu’au préalable il soit passé un acte au
thentique, pour transférer les pouvoirs
donnés à M . Redon dans les mains de
M . T o u ttée, dans le cas où le premier,
B
�( 12 )
ne devant pas revenir de quelque temps
de P a r is , consentirait à se désister de
6a qualité d’arbitre dans cette affaire;
et qu’on écrive ensuite à M . R edon, en
com m un, pour lui soumettre ce nouvel
acte conditionnel, et lui demander son
départem ent, dans le cas d’un séjour
encore prolongé, et, s’il y consent, d’en
voyer l’ordre de délivrer aux parties res
pectives les pièces déposées par elles , à
l’appui de leurs prétentions réciproques.
V o ilà , m onsieur, ce qu’ils m ’ont
chargé de vous transmettre en réponse
à votre dém arche..........
Q uant à la lettre que vous me faites
l ’honneur de m ’écrire , monsieur , où
vous me dites « que je dois voir M . Fay» d it, pour qu’il fasse connoltre de suite
») son agrément à M . le procureur im» périal, de suspendre les mesures ul» térieures qui concernent son minis» tère, » vous avez sans doute confon
du les deux affaires que s’est attirées
M . Dnsaulnats, etc...........
Vous voyez, monsieur, que Jean D eb a s, Jean Julien et consorts, n ’ont au
cun caractère pour suspendre ou arrêter
le ministère de la justice de police cor
rectionnelle. S ’il appartient à quelqu’un
d ’arrêter le cours de la justice dans cette
seconde a ffa ire , ce ne pourrait être que
M . le préfet : mais il me semble que
c ’est bien plutôt aux magistrats euxmêmes qu’il appartient (le com biner
entr’eux ce que le devoir leur permet ou
�( 13 )
leur défend dans la distribution de la
justice.
J e s u i s , é tc .
E x tra it de la transaction surprise à Jean Julien par M . Neircn.
Jean Julien, Hypolite Julien , Jean V a le ix , Pierre Souslefour,
Michel D o sm as, Vincent Longch am bon, plus heureux que Jean
D e b a s, furent maintenus dans le droit d ’arroscr leurs prairies ,
par un premier jugement du 21 germinal an 12 , et finalement par
un second jugem ent, portant débouté d ’opposilion , rendu par
défaut devant le même juge de paix, le G floréal an 12.
Après tous les délais et les chicanes possibles de la part de
M . Neiron , pour éluder et ne point obéir à ce jugement , il
feignit enfin de se rendre. Pressé par l’huissier C o la s, qui déjà
instrumentoit avec m enace, il fit insérer dans le procès verbal de
l’huissier,. « que ce jugement ne pouvoit recevoir d’autre applica» tion qu’aux eaux du Guargoulloux , et qu’il consent à ce qu’elles
)> soient dirigées dans les prés de Julien et consorts, et que s’ils
» éprouvent quelques obstacles , ils ne proviennent pas de son f a it ,
» mais de celui du citoyen Chabrol, propriétaire du C h a n c e t, et
» autres, ayant avec lu i, par titres com m uns, le droit d’user de
» cette eau du Guargoulloux pendant quelques nuits d’é té , parce
» qu’ils avoient, dans le contour de ladite source, une digue et
» ouvrage de l’art à leur utilité com m une, et à leur charge , la» quelle ils avoient laissé détruire de manière que, faute de répa» ration s, les ruines de cette digue , et ses décombres , avoient
» rendu impraticable, ou réduit à un petit volum e, le cours que
» le répondant ( le sieur Neiron ) , pour son propre avantage, et
» avant l’instance possessoirc mue par les requérans, laissoit
» prendre auxdites eaux dans une direction qui se trouve favorable
)> aux prés des requérans, sans que le répondant s’y croie obligé....
» qu’il n'empêchoit pas les requérans de se pourvoir contre le
>j citoyen Chabrol et consorts sus-énoncés, pour les contraindre à
�( H )
» la réparation de la d ig u e , qui form e le seul obstacle à l’exécu» tion des offres du répondant pour le cours des eaux........... E t
» attendu qu’il y a urgence, et que l’exécution est due à l’autorité
» de la chose ju g é e , avo n s, pour et au nom des requérans , pris
» la réponse du citoyen Desaulnats pour refus de satisfaire audit
» jugem ent.... E t avant la confection du présent procès verb al , ledit
» citoyen Neiron Desaulnats, et les requérans, sont tombée d ’accord
» que le citoyen Desaulnats promet et consent q u e , par arran» gem ent, son moulin soit arrêté depuis m id i, au choix des requé» ran s, et par eu x, à compter de cejourd’hui, jusqu’à Notre-Dame
» de septembre prochain, pour conduire l’eau par voie exlraordi» naire au gré des requérans, pendant lequel temps les parties
» feront des diligences pour faire interpréter le jugement dont il
» s’agit, et terminer définitivement toutes leurs contestations mues
» et à m o u vo ir, tant sur le possessoire que sur le p étitoire, qui
» seront cumulés de leur présent consentement. E t ont signé
w N e ir o n -D e s a u ln a ts , Juj-ien. » L e 24 floréal an 12.
A in s i, tout le fruit des jugemens obtenus en dernier resso rt,
le 21 germinal et le f) floréal, leur échappa par le piège dans lequel
M . Neiron entraîna ce cultivateur. C e malheureux 11e comprit pas
qu’en consentant à cumuler ainsi Je possessoire avec le pétitoire ,
il se mettoit dans la dépendance du sieur Neiron.
On lit dans le mémoire
V oici la vérité dissimulée par M .
de M . N eiron, p. 5 , second alinéa.
N eiro n , quoiqu’il sache parfaitement le
contraire de ce qu’il ose avancer ici avec
„
im pudeur, puisqu’il a une copie du titre
Il n’y a pas encore cin■ qu’il a collationnée lui-mèine sur les tiquante ans qu'un meu- très authentiques de Jean D ebas , en
nier, représente aujourprésence et chez M . Redon.
(Vhui par Jean D eù a s,
s ’ é t a b l i t dans un p r i que
En 175G , nu i 5 juin , l’emphiléote
le chemin précité sépare du moulin du B reu il, Jean Iîarge , étant
•ht parc de S t.-G e n e st,
m o rt, 6cs enfans mineurs négligèrent
�7? r
( i5 )
sous Vétang. Ce meunier,
sans faire aucune con
vention avec le proprietaire du p a rc, fix a la
téte du béai ou biez de
de son m oulin, au bord
dudit chemin , du côté
de son pré , de manière
à prendre les eaucc dans
ce chemin , selon leur
cours fo r c é , par le dé
gorgeoir de l’étang.
ce moulin au point de le laisser aller en
ruine. Ses héritiers, actionnés par M . de
N ocase, seigneur de Tournoeles , dont
la justice et la censive s’étendoient sur
ce m oulin , préférèrent de le déguerpir,
n ’étant en état ni d ’en payer les arrérages,
ni d’en rétablir les dégradations. M . de
Nocase leur fit grâce du tout. Cela est
prouvé par le titre de déguerpissement.
L e 25 juin 17 5 6 , M . de N o case, en
conséquence de cet abandon et déguer
pissement , concéda à Jean Barge ce
moulin du B reuil, à la charge des rede
vances , etc.
Voilà l ’historique de ce moulin , q u eM . Neiron présente au public
et aux tribunaux comme d ’une création m oderne, et de 1 y 5 6 , tandis
que des actes dont il a les copies lui disent le conlraire.M ais, au reste,
c ’est la tactique ordinaire de M . Neiron. Si on lui oppose des titres,
il les dénature ; s’il a besoin de s’appuyer sur des fa its , il sait en
créer, et de m ensongers, et de calom nieux, ainsi qu’on l’a vu
par ce mémoire.
N ote de la page 3 du mé
R
éponse
.
moire de M . Neiron.
Jean D ebas ne sVst jamais fait prier
decom m uniquersestitresjetM . Neiron,
Jean D ebas , après
s’en •être fa it p rier, a dans un de scs mémoires en date du 20
produit , ès - mains de août 1804, communiqué à Jean Debas
M . Redon, un titre q u i , par M . Redon , parle des litres de Jean
m ’étant ci-devant connu, Debas comme les ayant lus avant l’ar
n ’a pu être caché ; du bitrage. En effet, dès le commencement
quel litre il résulte qu’au des entreprises de M . Neiron , Jean
Debas ayant eu recours à lui-même pour
mois de juin i j 5 G,
-&X*.
�7 T t>
' V
x
Nocàse , seigneur de
Tourttoeles, céd a , etc.
C i6 )
en obtenir justice, et en ayant été ac~
cueilli avec des dehors de bonté qui
le séduisirent, lui montra ses titres chez
un jurisconsulte.
Il est vrai qu'ensuite il n'en a voulu
donner lecture à M . Neiron qu’en pré
sence de M . Redon ; il lui en fit faire
des copies, que M . Desaulnats collationna sur les titres eux m êm es, et dont
il a des copies.
Cette mesure et ces précautions furent
inspirées à Jean D ebas , parce que M .
N eiron s'étoit permis de d ire, même en
public : « Si Jean Debas s'étaye de titres
» fé o d a u x , Jean demanderai le brule-
» m ent. » On peut croire qu'une per
sonne capable de dénaturer les titres
seroitbien plus satisfaite de les anéantir.
S u i t e de la note,
C éda, sans garantie
de sa part, a u x p érils,
risques et fortune de Bar •
ges , preneur , et auteur
de Jean D ebas, un pré
dans lequel étoit un moulin en ruine, etc.
R
é t o n s i
.
C ’est surtout de ces mots que M .
Neiron veut tirer un grand avantage ,
pour établir que le bailleur à nouvel emphitéosc n'avoit qu’un usage précaire de
l’eau, et n'en jouissoit que par tolérance;
e t/ p o u r mieux égarer l'opinion, il ne
rapporte pas la copie de ce titre, qu'il a
c e p e n d a n t entre ses mains, et qu'il a collationnée lui-m ênic de Tant M . R edon,
chez ce magistrat : mais il prend un dé
tour perfide pour jeter du b liin e su r moi.
Nous allons en développer la noirceur.
En attendant, nous répondrons, ainsi
�ftp
( >7 )
que nous l’ayons déjà fa it, que les mots
a u x périls, risques et fortune, s’appli
quent à la circonstance du déguerpis
sement par les mineurs , et aux actions
en réintégrande auxquelles ne vouloit
pas rester exposé M . de Nocase. C V s
ce que le titre copié tout au long auroit
établi ; mais il a convenu aux intérêts
de M . Neiron de le tronquer selon sa
tactique ordinaire.
S u i t e et fin de la note
R é t o s s e .
de la page 3.
Ce titre ( c’est le titre
de Jean D ebas) étant en
gagé dans le cabinet de
M . Redon, f en ai été
demander une nouvelle
expédition chez le suc
cesseur du notaire qui
avoit reçu la minute; elle
ne s’y est pas trouvée : il
y a seulement sur son ré
pertoire une note qui
prouve qne cette minute
est entre les mains de
M . Chabrol. S ’il en est
Nous voici arrivés à la double perfidie
de M . Neiron contre m o i, et contre
M . * * * , notaire.
M . Neiron a été chez le successeur du
notaire, commissaire à terrier , chargé
par M . de Nocase du renouvellement
du terrier de Tournoeles : il lui a de
mandé une expédition des titres de Jean
D eb a s, fondé sur ce que ces titres étant
dans le cabinet de M . R ed o n , absent,
il ne pou voit s’en a id er, et que cepen
dant le succès de son affaire de police
correctionnelle en dépendoit.
C e successeur du notaire, commissaire
à terrier , que M . Neiron dit qu’il noms^iUfrt^cst besoin, avec une céti-
/2o£wY<fb
«.»»w*««Sccnic btèrv'iniÎWte,
répôndu :s
\ Cette mfcfrftè a 1 ét£'armex<*tî»'an*.
» autres minutes du terrier de T o u r» noelcs par mon prédécesseur, lequel
m terrier avoit élé fini postérieurement k
'V jV
�7
( 18 )
»
»
))
»
cette réinféodation. Quant à m oi, je l’ai portée à la municipalité
de Riom en 1793, ainsi que toutes les minutes des actes féodaux
qui se trouvoient chez m oi, conformém ent à l’ordre qui en avoit
été donné lors du brùlement des titres. »
C e notaire chercha ensuite le répertoire de son prédécésseur ; il
y a trouvé ces mots à l’an 17 5 6 , à la marge de la mention de cette
m inute: « à la minute du terrier de Tournoeles. »
;M
.N eiron n ’a donc pas v u , sur ce répertoire, que cette minute
est entre mes mains. C ’est donc une imposture dont la preuve sera
facile à démontrer; mais c’étoit une jouissance pour M . Neiron de
m ’inculper, ainsi que le successeur du commissaire à terrier. Ce
notaire ne m ’a pas donné ce titre ; il auroit en cela manqué aux
devoirs de son m inistère, et je n’aurois pas eu l’indiscrétion de lui
faire une pareille dem ande, quand même j ’y aurois eu le plus
grand intérêt, Si ce notaire avoit conservé par hasard des minutes
d ’actes féodaux , comme il n ’est plus
expéditions depuis la loi du 8 pluviôse
sidor même année, Jean Debas et ses
aise d ’en faire donner une expédition à
défendu d ’en délivrer des
an 2 , et celle du 11 mes
conseils auraient été fort
M . N eiron , puisqu’il croit
que cet acte doit lui donner gain de cause devant le tribunal de
police correctionnelle,
Mais le sieur Neiron s’abuse étrangement : qu’il lise la copie
de cet acte qu’il a entre ses m ains, et il y lira sa condamnation ; car
il établit le cours habituel de l’eau dans la direction des rouages du
m o u lin , et par conséquent par le pont com m unal, et prouve vic
torieusement qu’il n’a pu changer cette direction , et qu’il doit être *
condamné à rétablir le cours de l’eau dans son ancienne situation;
ce qu’il peut faire facilem ent, et sans rétablir son étang, quoiqu’il
ait avancé le contraire,
FIN
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chabrol. 1806?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
jouissance des eaux
aqueducs
destruction de canalisations souterraines
étangs
Description
An account of the resource
Titre complet : Observations de M. Chabrol, ancien militaire, sur le mémoire signé Neiron-Desaulnats, intitulé : Mémoire justificatif, pour Joseph Neiron-Desaulnats, habitant de la ville de Riom, accusé à la police correctionnelle ; contre M. le Procureur impérial.
Table Godemel : Complainte : 4. le juge de paix est-il compétent pour statuer sur la complainte possessoire de Désaulnat relative à la construction faite par le colonel Chabrol, d’une conduite d’eau dans son enclos de Saint Genest ? L’article 10 de la loi du 24 août 1790 est-il absolu ou limitatif ? Le juge de paix pouvait-il statuer sur les conséquences des réparations faites en vertu d’une ordonnance du président du tribunal ? 5. le jugement qui a maintenu Désaulnat en possession de son terrain, et ordonne la destruction des ouvrages, est-il un dernier ressort, dès que le demandeur avait restreint la valeur de ses dommages-intérêts à 40 francs seulement ? n’est-il pas, au contraire, en premier ressort par la nature même des conclusions du colonel Chabrol, qui, d’une part, en opposant l’incompétence du juge de paix, avait élevé un conflit de juridiction entre le tribunal et le juge de paix, et, d’autre part, avait formé une demande reconventionnelle de 100 francs de dommages-intérêts ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1806
1683-1806
1661-1715: Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1532
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0529
BCU_Factums_M0530
BCU_Factums_M0540
BCU_Factums_M0713
BCU_Factums_M0525
BCU_Factums_G1530
BCU_Factums_G1531
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53272/BCU_Factums_G1532.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Malauzat (63203)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
aqueducs
destruction de canalisations souterraines
étangs
Jouissance des eaux
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53273/BCU_Factums_G1533.pdf
2f280337304ecd53a82e0a549a80092a
PDF Text
Text
/z\
M
É
M
O
I
R
Y 'i I
E
P O U R
v=$r
COUR
D’APPEL
DE RIOM.
M e. P i e r r e - C l a u d e P A P O N , de R i o u x , ancien
a v o c a t , habi t ant du li eu de V i c q , i n t i m é ;
C O N T R E
L e s ie u r J e a n - J a c q u e s P A P O N - B E A U R E P A I R E, a n cie n of f i c i e r d e c a v a le r ie , a p pela n t d e
deu x ju g e m e n s ren d u s a u trib u n a l de Gan n a t , les
29 th e r m id o r et 5 fr u c t i d o r a n 1 3.
vingt ans que le père commun est décédé, Me. Papon
n’a pu jouir d’un instant de repos : tous les jours de nouvelles
discussions lui ont été suscitées par ses frères et sœurs. Les
sacrifices ne lui ont rien coûté ; il a fait tous ses efforts pour
D
e p u is
entretenir la paix dans sa famille.
Son frère , appelant, associé avec lui aux libéralités des auteurs
com m uns, après avoir partagé tous les débats qui s’étoient élevés
dans la fam ille, l’a abandonné ayec perfidie ; et bientôt Mc. Papon
A
:
ii
«
«
�ΠO
n ’a eu que son associé à combattre. Mais c e lu i- c i, fertile en
in cid en s, a su les m ultiplier ; il a employé des ressources que
la loyauté et la bonne foi ne connurent jamais. Les volumes de
procédures sont devenus effrayans ; et les faits se trouvent tel
lement enveloppés par une foule d’actes frauduleux, qu’il de
vient indispensable de donner une grande publicité à ces débats
scandaleux.
Ce n’est qu’avec effroi que M e. Papon pénètre dans ce laby
rinthe. Mais sou frère est toujours si fastidieux dans ses détails,
tellement obscur dans ses dém arches, et toujours si loin de la
v é rité , qu’il faut bien aborder ce m ystère d’in iq u ité, et le dé
voiler à la justice.
3M°. Papon s’attachera surtout à être sincère et vrai ; il ne
dira rien qui ne soit prouvé par des écrits ; il ne laissera pas
enfin l’ombre d ’un doute dans sa défense.
S ’il est cruel de divulguer les affaires de fa m ille , on ne fera
pas le reproche à Me. Papon de s’étre légèrement déterminé
dans sa dém arche ; et son frère au moins lui saura gré de sa
modération et de sa véracité.
F A I T S .
D u mariage de M. Pierre Papon avec Louise B ertran d, sont
issus n euf enfans; savoir, Pierrc-Claude, in tim é; Louis-Bonnet;
Jea n - Jacq u es , appelant; G ilb e rt, Ja c q u e s , Lou is-A m able ,
M a rie , Françoise et Marguerite.
Gilbert a fait ses vœ ux dans l’ordre de M alte; Marguerite a
également fait profession religieuse au couvent Notre-Dame de
Gannat.
L e t2 décembre 17 8 4 , M r. P ap o n , intim é, a épousé dame
Pétronille I\ollat. Ses père et mère l’instituèrent leur héritier
imiversel de tous les biens meubles et immeubles dont ils
mourroient vêtus et sa isis, à la charge par lui , comme con
dition exp resse, d'associer à cette institution le sieur Jean -
�H 2
( 3 )
Jacques Papon-Beaurepaire, appelant, et pour une portion égale.
Il fut dit que cette association auroit lieu sur l’indication et
attribution qui seroient faites avec connoissance de cause et
détails des biens faisant alors partie de l’institution, et encore
à la charge par l'héritier et l'associé de payer à chacun de leurs
frères et sœurs non engagés la somme de 6000 fr. , pour leur
tenir lieu de leur portion héréditaire dans les successions pa
ternelle et maternelle. Il est stipulé des termes pour le paye
ment de ces légitimes.
Bonnet P ap o n , alors clerc to n su ré, est réduit à une
pension viagère et annuelle de 3 oo francs.
L o u is
L e religieux maltais doit avoir une pension de 5oo fr. jusqu’à
ce qu’il ait obtenu une commanderie , bénéfice, 011 pension
qui en tienne lieu.
L a fille religieuse doit recevoir une pension de 2,5 fr. , et les
héritiers sont tenus de payer une somme de 125 fr. de rente
annuelle aux religieuses de G a n n a t, jusqu’au remboursement
de la dot moniale de dame Marguerite Papon.
Les père et mère s'occupent ensuite , pour éviter la plus
légère discussion entre les deux h éritiers, de diviser les biens
qui leur appartiennent. Ils attribuent à l’aîné la maison pater
nelle d’ancienneté , avec toutes ses aisances et attributs, telle
qu’elle se trouvera garnie de meubles et am eublem ent, et ils
promettent de porter leur attention à ce que les logemens des
deux institués soient meublée et ornés dans la même valeur.
L a moitié de l’argenterie, vaisselle, arm es, chevaux, harnois,
vo itu res, vaisseaux vin aires, et meubles qui sont h Gannat ;
les denrées que les père et mère laisseront à leur décès ; toute
la bibliothèque , les jardins et parterres, les prés vergers , enclos
qui entourent la maison , un pré de réserve appelé L a d o u x ,
le lieu et domaine de R ioux , autrement Servières , avec les
jonctions et améliorations qui y ont été faites , les dîmes et
autres droits qui en dépendent, les bestiaux qui le garnissent,
sont attribués à l’ainé.
A 2
�( 4 )
On lui donne ¿gaiem ent le lieu et domaine des M orissards,
nvec tous les droits qui en dépendent, les bestiaux qui le gar
nissent, sans aucune réserve. On y ajoute la charge d’élu à
G an n at, dont l’intimé étoit alors p ou rvu , mais sans aucun re
tour pour frais de provision, réception, que les père et more
pouvoient avoir fournis.
Ces objets et biens ne lui sont délaissés qu’à la charge par lui
de payer en corps héréd itaire, à dire d’e x p e r t, ou en argen t,
à son c h o ix, les sommes fixées pour les légitimes des dames
Marie et Françoise Papon , ses sœ urs, la pension de LouisBonnet , et les deux tiers des légitim es de Jacques et LouisAmable P apo n ; p lu s, la rente de i s 5 fr. aux dames religieuses
de G an n at, la pension viagère de 25 francs à dame Marguerite
P a p o n , religieuse ; celle de 533 fr. par an n ée, sur la pension
viagère attribuée au religieux maltais ; et enfin d’une rente de
îs o fr. aux dames religieuses de Charroux.
L es père et mère attribuent ensuite au sieur Je a n -Ja c q u e s
Papon , associé à l ’institution , le lieu et château de Beaurep a ire , avec ses aisances et dépendances, les meubles qui s’ y
trouveront, la moitié de la vaisselle et meubles qui ont été cidessus d é crits; le domaine dépendant du lieu de Beaurepaire,
nvec tous ses attributs et les bestiaux qui le garnissent; et pour
éviter toute d iffic u lté , on fait une ligne de démarcation rela
tivement aux vignes qui doivent séparer les propriétés. On lui
donne encore le pré de réserve appelé P ré-G a ra u d , et on le
charge de payer une somme de 4000 fr. pour le tiers des légi
tim es des deux fils précédemment nommés. I l est également
tenu d’acquitter la somme de 167 fr. par an n ée, pour le tiers
de la pension attribuée au sieur Gilbert P a p o n , religieux m al
tais. Enfin l’héritier et l’associé doivent contribuer par égalité h
form er le trousseau de leurs s a u r s , qui ne pouira être moindre
<le 400 fr. pour chacune. Ils doivent donner un ameublement
ü leurs frères, de 200 fr. pour ch acu n , comme aussi ils sont
chargés de p a y e r p a r m oitié les dettes des auteurs com m uns,
�w
( 5 )
et e t , sans aucune exceptio n , soit les dettes existan tes, soit
celles qui pourroient avoir lieu à l’avenir.
Les père et mère poussent la sollicitude jusqu’au scrupule,
et exigent même qu’après leur décès l’institué et l’associé se
lassent réciproquement raison, si le cas y éch et, de la moitié
du montant de la valeur de ce dont les biens auroient pu être
diminués , de toute altération qui surviendroit par le fait du
père ou de la m ère, et de celle que les biens pourroient souffrir
par toute autre cause.
L es père et mère prévoient encore qu’une habitation commune
pourroit ne pas convenir ; et pour donner à leurs enfans une
preuve d’amitié et de tendresse im partiale, ils délaissent dès à
présent à leur fils aîné la jouissance des biens qui lui sont at
tribués , à la charge par lui de payer les pensions de ses frères
et sœ u rs,'d e faciliter tous arrangem ens, même d’avancer les
payem ens de légitim es, s’ils venoient à s’établir.
Ce pacte de fam ille, fait avec tant de soin, et lors duquel
les père et mère ont manifesté leur intention d’arrêter dans
leurs sources les incidens et les p rocès, méritoit d’être respecté,
surtout de l’héritier a sso cié , qui recevoit tant de preuves de
tendresse et d’affection.
Mais tel est le sort de tout ce qui est l’ouvrage des hommes :
les actes les plus sages ne sauroient être un frein , ni pour l’in
térêt , ni pour les passions.
.C e monument de bienfaisance et de paix a été le signal d’une
guerre intestine qui afflige M°. Papon depuis que ses père et
m ère ont cessé de vivre; et malgré ses efforts et ses sacrifices,
il a été continuellement le jo u et, soit des légitim âm es, soit de
l’associé. Il est nécessaire d’entrer dans le détail de toutes ces
iniquités.
M. Pierre Papon, père com m un, est décédé le 5 janvier 178 5; le
22 février suivant, Louis-Bonnet, Françoise et Marie Papon , tous
trois légitim aires, cédèrent leurs droits successifs à Me. Pierre-
�C 6 )
Claude Papon , moyennant la somme fixée par son contrat de
mariage pour leur légitime conventionnelle.
Mais deux ans a p rès, c ’est-à-dire, en 17 8 7 , Marie et Fran
çoise Papon form èrent , nonobstant leur tra ité , une demande
en partage des biens délaissés par le père comnn;n.
Cette demande fut portée en la sénéchaussée de Moulins ,
après qu’elles eurent obtenu des lettres de rescision.
Dans la su ite, et par deux transactions, l’une du 26 janvier
et l’autre du 22 février 178 9 , Marie et Françoise Papon se dé
partirent de leur demande en partage, ainsi que de l’effet des
lettres de rescision qu’elles avoient obtenues. Ce département
est fait en présence de Jean-Jacqu es Papon , associé à l’insti
tution ; il est consenti moyennant la somme de 6200 fr. .pour
chacune. Bientôt cet exemple est suivi par Louis-Bonnet Papon,
q u i, par acte du 27 juillet su iva n t, cède également ses droits à
Me. Papon ; il abandonne même ceu x qui pouvoient lui revenir
dans la succession future de la dame sa m ère , du consentement
de cette dernière , et reçoit de M e. Papon , son frère , la somme
pour laquelle ce dernier devoit contribuer au payem ent de sa
légitim e; c ’est-à-dire, que M e. Papon paye à Louis-Bonnet une
légitim e semblable aux autres , quoique , dans son contrat de
m ariage, il ne dût lui payer qu’ une pension viagère de 3 oo fr.
L e 10 février 1 7 9 1 , Jacq u es Papon, autre légitim aire, reçut
encore de M°. Papon la portion de légitime que celui-ci di.voit
payer conformément à son contrat de mariage. Jacques Papon,
par cet a c t e , déclare accepter la légitim e paternelle et mater
nelle ; il se contente de sa constitution, et c è d e , en tant que
de besoin , ses droits à son frère a în é , moyennant une aug
mentation de 2000 fr. , augmentation qui fut accordée par un
acte séparé du mémo jour.
Il n’est pas inutile d’njouter encore que Louis-Am able Papon ,
autre légitim aire, qui depuis est mort sans postérité, avoit aussi
cédé ses droits à M c. Papon, son frè re , par acte du 27 juillet
�H l
(7 )
17 8 9 , qui contient quittance de sa légitime paternelle et ma- ^
tern elle, en présence et du consentement de sa m ère, en ce
qui concerne M \ Papon ainé.
L e 4 août 17 9 2 , la dame Bertrand, mère commune, a cessé
de vivre. Ce décès réveilla l’activité et l’ambition des légiti
mâmes , qui se prétendirent lésés par les arrangemens qu’ils
avoient faits avec leur frère ainé. Louis-Bonnet, Marie et Fran
çoise Papon se pourvurent devant un tribunal de fam ille; mais
M arie Papon ne voulut pas aller plus a v a n t, et lit une nou
velle cession à son frère. Cet acte est du 27 août 179 3 : le
tribunal de fam ille avoit été composé le 2 du même mois.
L e 28 octobre su ivan t, mourut Louis-Ainable P ap o n , sans
postérité.
Les tribunaux de famille ayant été supprimés , survint un
nouvel ordre de choses. L a dame Papon , mère commune ,
n ’étoit décédée que le 4 août 17 9 2 ; son institution par consé
quent se trouvoit annullée par les effets rétroactifs de la loi
du 17 nivôse; en conséquence, tous les légitimaires se réu
nissent avec G ilb e rt, religieux maltais , et ¡M arguerite, reli
gieuse , et tous citent les deux héritiers en conciliation, pour
form er la demande en partage par égalité de la succession m a
ternelle. Les légitimaires forment aussi la demande en partage
de la succession du père ; et ces prétentions respectives firent
l ’objet d’une instance qui fut portée au tribunal civil de l’AUier.
L e 17 thermidor an 5 , intervint un jugement par lequel il
fu t ordonné, en ce qui concernoit Louis-Bonnet Papon, et de
son consentem ent, que la cession par lui faite seroit exécutée ;
mais il lui fut accordé , sans autre examen , un supplément
de légitime. Quant à Françoise Papon , il est ordonné que les
traités des 2a février 1786 et 25 janvier 178 9 , seront exécu tés:
seulement les héritiers sont tenus de lui payer ce qui lui reste
dû de sa légitime ; mais elle est autorisée à la prendre en
corps héréditaire, conformément à la loi du 18 pluviôse an f>.
Jacques Papon obtient sa légitime de d roit; Gilbert Papon,
�s*l
(S )
religieux maltais., est réduit à la pension viagère qui avoit été
fixée par ses père et m ère, et qu’on ne lui contestoir pas. Il
est tenu de restituer les sommes qu’il avoit reçues d’après l’é
chelle de dépréciation.
Il est donné acte à Marie Papon, l ’une des légitim âm es, de
ce qu’elle se départ de sa demande.
L a religieuse avoit abandonné ses prétentions avant le juge
ment. Enfin le partage de Louis Am able Papon, décédé sans
postérité , est ordonné avec tous les héritiers. Ce jugement
fait aussi une provision à Fran çoise, Louis B o n n et, Marie et
Jacques , chacun dans la proportion de son amendement.
I.es deux héritiers interjetèrent appel de ce jugement. Il
étoit en effet fort singulier qu’on eût adjugé un supplém ent
à Louis-Bonnet, sans antre exam en , et avant d’ordonner une
estimation préalable. Il étoit encore plus extraordinaire qu’on
n ’eût assujetti des légitim ants qu’à un simple rapport des sommes
qu’ils avoient reçues , tandis qu’ils devoient les restituer aux
héritiers qui les avoient payées de leurs deniers.
Cet appel fut porté au tribunal civil de la C reuze, où il fut
rendu un jugem ent, le 14 prairial an 6 , qui ordonna, avant
faire droit sur la demande en supplém ent, une estimation
préalable ; condamna Jacqu es Papon à restituer les sommes
qu’il avoit reçu es, suivant sa quittance; ordonna que les hé
ritiers institués seroient tenus de payer la pension du m altais,
à la charge par lui de tenir à compte les sommes qu’il avoit
reçues ou rccevroit ensuite de la république. Au résidu, il
fut ordonné que le jugement de Moulins sortiroit son effet.
L es parties exécutèrent respectivem ent le jugement de la
Creuze ; elles nommèrent des experts pour y parvenir. L e sieur
Bechonnet fut choisi par les légitim aires, et le sieur Chambroty par les héritiers institués.
Mais il étoit difficile de faire concorder la disposition des
doux jugenieiis ; e t, pour ne pas prolonger les discussions, les
parties se léuniient et passèrent un compromis le »4 messidor
au
�it o ) ■
( ? )
an 7 , par lequel ils nommèrent trois arbitres qui furent chargés
d ’interpréter les deux jugemens dans les chefs qui auraient be
soin d’étre exp liq u és, de régler les comptes que les parties se
devoient respectivem ent, ainsi que de terminer tout différent
qui pourroit s’élever sur l’exécution de ces mêmes jugemens.
Les 8 et g frimaire an 8 , jugem ent arbitral q u i, entr’ autres
dispositions, déclare la somme de 4000 fr. que Jacques Papon.
devoit restituer, réductible suivant l’échelle de dépréciation ,
à partir du 10 février 179 1» date de la quittance, à la charge
par Jacques Papon d’affirm er qu’il 11’a reçu aucun à-compte
avant la date de sa quittance; d’un autre cô té, les légitimâmes
qui doivent prendre leurs légitimes en corps héréditaire , sont
tenus de rembourser à P ierre- Claude Papon leurs parts et por
tions des impenses et améliorations nécessaires et utiles, faites
par ce dernier dans les biens communs.
L e i er. ventôse an 8 , Me. Papon a fait signifier un acte par
lequel il déclare qu’il est prêt à délivrer des biens héréditaires
jusqu’à concurrence de ce qui pouvoit être dû sur la légitime
conventionnelle que quelques-uns avoient approuvée; il donne
au ssi, par le même acte , un état détaillé et circonstancié de
tout le mobilier des successions com m unes, ainsi que de toutes
les dettes passives et actives.
Le 18 du même mois de ventôse, traité définitif avec LouisBonnet P a p o n , qui termine tous différens avec lui.
Marie et Françoise sont également mises hors d’intérêt pour
les successions des père et mère ; elles ne figurent plus au
procès que pour la succession de Louis-Am able , frère commun.
Reste donc Jacques Papon , qui devoit prendre sa portion légitimaire dans les successions des père et m è r e , et qui amendoit aussi sa portion dans celle de Louis-Amable.
Les experts se mettent alors en devoir d’opérer, et leur opé
ration devenoit facile. Ils font la description et l’état du m o
bilier : tout est conforme à l’état qu’avoit fourni Me. Papon.
On estime le mobilier attribué à l’aîné, à la somme de 3 aoo f r . ,
D
�( 10 )
et celui attribué à Jean -Jacq u es Papon , ap p elan t, à 2200 fr.
L es experts sont parfaitem ent d’accord sur ce point : mais ils
interrom pent leur opération relativem ent aux immeubles ; en
e ffe t, elle étoit plus longue et plus difficile. Dans l’in tervalle,
Jacqu es Papon , celui avec lequel le partage devoit être fa it,
céda , par acte du 19 floréal an g , à Gilbert Papon, son frère,
religieux m altais, tous ses droits successifs paternels et mater
nels , ainsi que ceu x qu’il amendoit dans la succession de sou
frère : cet acte est reçu devant C o lin , notaire à Gannat. Mais
Gilbert Papon garde son s e c r e t, et veut le laisser ignorer à
son frère aîné. Il prend alors une procuration de la part du
c é d a n t, il en prend m êm e une de ses sœurs , e t , en cette
qualité de fondé de p o u vo irs, il écrit le 22 floréal an 9 à son
f r è r e , pour lui proposer des arrangemens ; il dissimule sa ces
sion, il se propose seulem ent comme médiateur.
M e. Papon lui fait réponse qu’il seroit besoin d’en venir à
quelques exp lication s, et l’engage à se rendre chez lui ; mais
cette invitation n’est pas acceptée.
Gilbert Papon se fait encore céder les droits de ses deux sœurs,
qui ne figuroient plus au procès que pour la succession de LouisAm able. Ces dernières cessions ne sont faites que sous seing
privé ; elles sont sous la date du 26 nivôse an 10.
Gilbert Papon se lassa bientôt de son titre de cédataire ; il
craignit de ne pouvoir pas toujours cacher ces a ctes; il savoit
que n’étant pas successible il pouvoit être écarté par la subro
gation d’action.
Il prend alors le parti de rétrocéder les droits qu’il avoit a c
quis , à Jean -Jacq u es Papon , appelant, et associé à l’institution.
D eu x actes du inèm e jour 14 germinal an 1 0 , faits sous seing
privé , contiennent, le prem ier , la rétrocession des droits de
Ja c q u e s, et le d euxièm e, celle de M arie et Françoise.
Je a n -Ja c q u e s P a p o n , rétrocédataii e , prend toutes ses pré
cautions pour que son frère aîné ignore l’existence de ces a c te s ,
et fait agir ses frères et soeurs com m e s’ils u’avoient pas vendu
leurs droits.,
�C1 1 )
C ’est sous leurs noms que le 18 floréal an lo Jean-Jacques se
signifie à lu i-m ém e, et fait signifier à son frère et aux exp erts,
une sommation de procéder dans vingt jours au partage des
immeubles des successions dont il s’agit.
M e. Papon , qui désiroit surtout de term iner, répond à cette
sommation par un acte du i er. prairial an 10 ; il déclare qu’ il
a des observations importantes à faire aux experts , et demande
qu’avant de faire leurs rapports sur la formation des lots , ils
soient tenus de recevoir les dires respectifs des parties ; il ob
serve que c ’est le seul moyen d’éviter toutes difficultés et toute
suspension dans les rapports.
Jean-Jacqu es Papon , toujours sous les noms de ses frères et
sœurs dont il avoit les d roits, fait une sommation à son fr è r e ,
aux experts et à lui-m ém e, de se trouver en la maison d’un
sieur Bontem s, demeurant à G an n at, à l’effet par les experts
de recevoir et dresser procès verbal des dires que chacune des
parties jugera à propos d’insérer.
Cette réquisition avoit quelque chose d’inusité : ce n’étoit pas
chez un tiers inconnu des parties qu’elles devoient se rendre.
U n rapport contenant partage devoit être fait sur les lieux :
c ’étoit là que les parties devoient s’expliquer ; et Me. Papon
crut devoir l’observer à ses frères et sœ u rs, par un acte du
29 prairial an 1 0 , notifié avant la réunion.
Malgré cette rem ontrance, les experts ne dressèrent pas
moins leur procès verbal. On passe, pour ab rég er, sur les incidens qui s’élevèrent à ce sujet. Les experts reçurent enfin les
dires de Me. Papon ; mais bientôt ils furent divisés sur l’esti
mation des im m eubles, et se séparèrent pour dresser chacun
leur rapport.
Celui de l’expert Bechonnet a été déposé le 18 nivôse an 1 1 ;
il est assez volum ineux;, puisqu’il contient deux cent trente-huit
rôles de grosse. Cependant l’expert Bechonnet n’a fait que deux
lots d’attribution, quoique les lots .dussent être tirés au so rt,
d’après les jugemens précédons.
�fi
\
( 12 )
Bechonnet ne fait pas m ême mention des dires de M*. P apon;
il a cru inutile de les y insérer ; et il est notoire , dans le pays ,
que son rapport est l ’ouvrage de Gilbert Papon, religieu x, q u i,
de concert avec Jean-Jacques , son fr è r e , a rédigé et écrit luimém e le p ro jet, et s’est fa it, d it-o n , payer 600 fr. pour ses
peines. La suite prouvera la vérité de cette assertion.
L e sieur C h am b ro ty, de son côté , a rem is son rapport le
22 nivôse an 1 1 . S ’il s’agissoit de l’analiser ic i , on prouveroit
aisément qu’il est fait avec autant d’ordre que de c la rté , et
qu’il règle avec im partialité les intérêts de chacun.
Q u o iq u ’il en soit, les deux experts sont divisés; et l’ordre de
la procédure exigeoit la nomination d’un tiers e x p e rt, pour dé
partager les deux premiers.
On s’empresse de faire signifier ces rapports sous le nom des
légitim aires ; on y fait m êm e figurer Louis-Bonnet Papou , ijui
depuis long-temps étoit hors d’intérêt; on conclut à ce qu’il soit
nommé un tiers exp ert; et la cause est portée, sur cet in cident,
à l’audience du tribunal de G a n n a t, le 2 floréal an 1 1 . M e. J u g e ,
avoué, est entendu pour les légitim aires; et Jean-Jacques P ap o n ,
par l’organe de M e. B assin , son a v o u é , déclare ¿1 l’audience q u 'il
e n ten d exécu ter dans tout son contenu le rapport de B ech o n n et,
e x p ert ; i l conclut à l'hom ologation d e ce ra p p o rt, et demande
acte de ce q u ’i l n ’en ten d p lu s f a ir e cause com m une avec
A I 0. P a p o n , n i e n t r e r a i aucune m a n ière dans les fr a is d ’une
tierce e x p é rie n c e , ni autres qui pourroient se faire dans la
suite.
M e. Ju g e bien vite demande acte pour ses p a rtie s, de ce
qu elles acceptaient les offres fa it e s p a r Je a n -Ja c q u e s P a p o n ,
d ’exécuter le rapport de B ech o n n et, et de ce qu’ellea consentent
à l’homologation.
Comment expliquer une conduite aussi étrange ! Jean-Jacques
Papon, cédataire de tous les droits des légitim aires, par acte
du 14 germinal an 1 0 , étoit tout à la fois agent et patient, de
mandeur et défendeur ; c’est lui qui est le m oteur de toutes
�( ï3 )
ces m anœuvres; et il étoit difficile que M e. Papon ne fût pas
étonné d’une déclaration aussi singulière ; il prend le parti de
demander préalablement la nullité du rapport de Bechonnet.
L e tribunal se contente d’ordonner, par son jugem ent, que
les parties continueront de procéder devant lui en la manière
ordinaire.
L e 10 du même m ois, signification des légitimaires à PierreCîaude et à Jean-Jacques Papon , avec requête et assignation
à comparoître le 16 floréal, n e u f heures du m atin , en l ’hôtel
du président, pour être présens à la nomination du tiers expert.
On observe que dans cette assignation comme dans les actes
précédens, on n’énonce que le jugement du tribunal d’A llie r,
du 17 thermidor an 6 , et qu’on ne fait aucune mention * ni
du jugem ent du tribunal de la Creuze , ni du jugement a rb itra l,
qui tous les deux réformoient celui de l’A llier dans plusieurs
chefs.
L e jour capté , les parties com parassent avec leurs avoués.
Me. Papon, intim é, y déclare de nouveau qu’il persiste en sa
demande de nullité du rapport de B ech on n et, et que jusque-là
il ne doit pas être procédé à la nomination d’un tiers expert.
Jean -Jacqu es Papon , par l’organe de Bassin , son avoué , y
expose que d’après une signification qu’il a fait fa ire , et qu’il
date du 28 germinal an 1 1 , quoique cet acte soit inconnu de
M e. P ap o n , il ne doit plus se trouver en cause avec les légitimaires. Les propositions qu’il a faites ont été, dit-il, acceptées
par eux : la tierce expérience ne doit plus le co n cern er, et ne
regarde que Pierre-Claude Papon. Il réitère sa déclaration qu’il
n’entend plus faire cause commune avec l’h éritier, ni entrer
dans aucuns frais ; il demande de nouveau qu’il lui soit donné
acte de ce qu’il consent à exécuter dans tout son contenu le
rapport de Bechonnet.
Après plusieurs dires des p arties, qu’il est inutile de rappeler,
le président du tribunal, surpris d’un langage aussi exiraordi-
�<; i
( 14 }
ra ire et dont il ignoroit la véritable cause, croit devoir renvoyer
les parties à l’audience.
Les légitim ants font expédier et signifier ce procès verbal.
Jean -Jacq u es P a p o n , par une requête, renouvelle ses offres et
sa déclaration; il prend m êm e des conclusions tendantes à ce
que le rapport de Cham broty soit écarté, et à ce que celui de
Bechonnet soit homologué. Ori ne peut considérer sans effroi ce
volume de procédure, qui est encore compendieusement expliqué
par une seconde é critu re , puis par une troisième signifiée aux
légitimaires , par laquelle Jean -Jacqu es Papon leur réitère en
core son consentement. E t enfin, le 28 prairial an 1 1 , intervint
au tribunal de Gannat un jugement par lequel, sans s’arrêter ni
avoir égard aux demandes de Jean -Jacqu es Papon , ni à son con
sentement donné d’exécuter envers les légitimaires le rapport
de B ech o n n et, ni à l’acceptation de ce consentement par les
légitim aires, il est ordonné qu’il sera p ro cé d é , en la manière
ordinaire , à la nomination d’un tiers expert, pour être procédé
aux opérations ordonnées : les dépens sont réservés en définitif.
L e 19 messidor an 1 1 , signification de ce jugem ent par les
légitim aires ; et cette signification est accompagnée d’une longue
requête tendante à être autorisés à faire assigner les deux hé
ritiers pour être présens à la nomination d’un tiers expert.
L e 2G messidor an 1 1 , ordonnance qui nomme le sieur M aignol,
d’A rto n n e, pour tiers expert.
Cette ordonnance , qui sembloit mettre fin h tous débats ,
n’em pêche pas que le 27 brumaire an 1 2 , on ne fasse signifier
encore une longue écriture , dans laquelle on répète pour la
cinquièm e fois tous les faits qui donnent lieu à la contestation ;
et on soutient que le rapport de Bechonnet doit être homologué.
Ecriture en réponse, de Jean -Jacq ues P apo n , pour convenir
que les légitimaires ont raison, et que le rapport de Bechozinet
doit seul être suivi.
C ’est alors que le h a sa rd , ou la mauvaise fortune de l’in
�W
( i5 )
tim é , amène au pays un sieur Guillaum e Bertrand de FontV io le n t, directeur de la poste aux lettres de la ville du P u y ,
et parent commun des parties.
Ce sieur Bertrand est bientôt instruit des contestations qui
divisent la famille : on l’excite à se rendre médiateur de tous
les différens ; et celui-ci sollicite M e. Papon de passer un com
promis. M e. Papon , toujours disposé à terminer amiablement
un procès devenu si long et si c o û te u x , se laisse gagner , et
souscrit un compromis avec ses frères et sœ urs, par lequel ce
sieur Bertrand est nommé seul arbitre, avec pouvoir de décider
en dernier ressort toutes les contestations ci-après expliquées.
i°. Il est d it , en ce qui concerne l’instance pendante au tri
bunal de Gannat, relative à la transaction du 1 1 pluviôse an 1 0 ,
passée entre Pierre-Claude et Jean-Jacques Papon, que Jean Jacques Papon se départ de l’appel par lui interjeté d’une sen
tence rendue le 24 thermidor an 1 1 ; il consent à ce que cette
sentence soit pleinement exécutée, tant pour son contenu que
pour les réserves y mentionnées ; il consent à payer tous les
frais faits jusqu’à ce jour ; et le sieur Bertrand a le pouvoir
de décider et term in er, par jugement irrévocable, toutes les
contestations qui pourroient s’élever au sujet des réserves énon
cées en ce jugement.
20. L ’arbitre est chargé de décider les contestations qui pour
roient s’élever au sujet de l’estimation ordonnée par la transaçtio n , des biens que Jean-Jacques et Pierre-Claude ont acquis
de la nation, comme provenans de leur belle-mère commune.
5 °. En ce qui regarde le partage ordonné entre les légitimaires et les héritiers institués , il est dit que l’arbitre détermi
nera définitivement ce point de discussion, conformément au
jugement de G u éret, du 14 prairial an 6 , au jugement aibitral du 25 frimaire an 8 , interprétatif de ceux de Guéret et
M oulins, du 17 thermidor an 5.
4°. L e même arbitre prononcera, ainsi qu’auroit pu le faire
les tribunaux, sur toutes contestations relatives aux partages
M'
�(i6)
des successions des père et m ère , qüi n’auroient pas été ter
minées par les jugemens su sd atés, ou qui pourroient s’élever
entre les parties.
5°. L ’arbitre est autorisé à fixer le partage des successions,
les rapports et prélèvemens déterminés par contrats de mariage
ou autres a c te s , et généralement les rapports et prélèvem ens
tels que de droit, suivant l’amendement d’un ch acu n ; comme
aussi de fixer et liquider toutes charges, dettes ou créan ces,
généralement quelconques, ainsi que toutes contestations qui
pourroient s’élever, si toutefois elles n’ont pas été terminées
par jugemens ou transactions.
G0. L ’arbitre est aussi autorisé à diviser entre les parties le
lot revenant à la succession de Louis-Amable P apon; et c e , à
raison de l’amendement de chacun. Il est aussi chargé de li
quider et fixer irrévocablem ent entre les parties , toutes les
sommes qui pourroient être dues , et qui proviendroient des
père et mère.
L ’arbitre est le maître de prononcer sur to u t, par un ou
plusieurs jugem ens, ainsi qu’il avisera. Les parties s’obligent
à rem ettre entre ses mains , et dans l’espace de deux m ois, tous
titres et documens : elles consentent que le compromis tienne
pendant dix mois , sans pouvoir être révoqué ; et dans le cas
où après la décision définitive il surviendroit quelques diffi
cultés sur l’exécution du jugement arbitral , on donne encore
pouvoir au sieur Bertrand de prononcer sur ces in cid en s, à
l’effet de quoi on p roroge, dans ce c a s , le délai fixé à huit
mois de p lu s, à compter du jugem ent définitif.
A près ce com prom is, dans lequel L o u is-B o n n et Papon n’a
pas fig u ré , quoiqu’il fut en qualité dans toutes les procédures
qui ont eu lieu sur les rapports , procédures qu’il ignoioit
com plètem ent, le sieur Bertrand partit pour la ville du P u y ,
et ne revint que huit mois après.
A son re to u r, M 1’. Papon lui remit des observations sur le
partage qui devoit être fait entre les légitim âm es; il lui rem it
îIUj j L
�% '\\
( T7 )
des mémoires en réponse à ceux de Jean - Jacques Papon ,
qui se plaignoit des omissions qui avoient été laites dans la
transaction du 1 1 pluviôse an 10. II remit aussi à l’arbitre
ses quittances et ses pièces , en offrant de lui fournir tous
éclaircissemens qui pourrôient lui être nécessaires dans ses
opérations.
Il étoit aisé de pressentir que cet arbitre pourroit être em
barrassé sur plusieurs questions. Toutes les parties en consé
quence l’autorisèrent, mais verbalement et exclu sivem en t, à
avoir recours aux lumières et à l’avis d’un magistrat de la cour,
en qui elles avoient confiance.
Ce m agistrat, effrayé du volume de toutes les procédures
qu’on lui rapportoit, refusa de s’occuper du jugem ent; il désiroit que les parties pussent se réunir pour faire un arrange
ment à l’amiable et à forfait. Dans le cas où elles ne pourroient
se ré u n ir, il conseilla de s’adresser à un homme in stru it, qui
fût calculateur, qui connût la valeur des fonds et leur produit,
et qui eût en m êm e temps le lo isir, la patience et les talens
n écessaires, pour prononcer sur toutes les questions ; et si on
ne vouloit pas prendre cc p a r ti, il n ’y avoit d’autre ressource
que de recourir aux tribunaux.
L ’arbitre Bertrand, d’après la réponse de ce m agistrat, refusoit
de prononcer sur des questions qui étoient au-dessus de ses
fo rces; et lorsqu’il eut manifesté son intention, M°. Papon lui
demanda la remise de tous les papiers qu’il lui aroit confiés.
L e sieur Bertrand lui répondit que ces papiers étoient entre
les mains d’un sieur Hua , directeur de la poste aux lettres
à G annat, qui les rem ettrait à la première réquisition.
Bertrand repartit bientôt pour la ville du Puy.
Me. Papon étant allé à Gannat, chez le sieur H u a , réclamer
ses titres , celui-ci répondit qu’il ne lui en avoit jamais été re
mis aucuns. M®. P apon, in qu iet, en écrit au sieur Bertrand,
le 6 vendémiaire an i 3 , et le prie de lui m arquer, poste par
p o ste, où il pourroit trouver ses papiers. Ne recevant aucune
C
.
:
Il
�V V* ■
C ^a)
réponse, il fait dem ander ses pièces au magistrat auquel on
s’étoit ad ressé, lequel répond qu’il a laissé tous les papiers à
l ’arbitre Bertrand, attendu qu’il a refusé de s’en charger.
,
L e 5o vendém iaire an i 3 , M e. Papon reçoit une lettre du
sieur Bertrand , par laquelle il lui m arque qu’il a laissé ses
papiers et ceu x de son frère dans les mains du magistrat au
quel les parties avoient confiance. Comment concilier cette
lettre avec c e qu’avoit dit l’arb itre, qu’il avoit déposé ces pa
piers chez le sieur Hua , et encore avec ce qu’avoit dit ce
magistrat , qu’il n avoit aucuns papiers , Bertrand ne lui en
ayant laissé aucun? M e. P apo n , plus inquiet que jamais sur
le sort de ses titre s, reçoit enfin une lettre du magistrat auquel
on s’étoit adressé; elle est datée du 5 brumaire an i 3 . E lle çst
concue
» en ces termes :
oc J ’ai su que vous avez ressenti quelques inquiétudes sur le
» sort des pièces de votre procès avec vos frères et sœurs ; je
» m’empresse de les ca lm er, parce que je le peux aujourd’hui.
>,> J e sais où sont vos p iè c e s , elles sont aussi en sûreté que
» si elles étoient entre m es m ain s, et je les ai quand je veux.
» Assurez-vous que la justice ni vos intérêts ne seront blessés.
» Cette assurance qu’il me fut impossible de donner le jour
» que je pariai à M. Cham broty, je vous la donne m aintenant,
et vous pouvez y compter. J e su is, etc. >»
Q uelle que soit la confiance de M e. Papon dans l’intégrité et
les lum ières de ce magistrat , il convient que sa le ttre , au
lieu de calm er ses inquiétudes , ne fit que les augmenter. Il
prit son parti sur le champ : il part le lendemain pour la ville
du P u y ,. où il arriva le 8 b ru m aire, chez le sieur Bertrand.
L ’nrbitre fut embarrassé de sa présence; et Me. Papon demeura
quatre jours en la ville du P u y , sans avoir obtenu aucun éclair
cissement ni do renseignement certain sur le sort de ses pa
piers. Il part de la ville du P u y le 12 brum aire, et à son re
tour dans son domicile , il y trouve une lettre de ce m êm e
B ertrand, datée du G brum aire, conçue en ces te rm e s:
�( 19 )
« J e viens de sig n e r, mon cher Papon , les jugemens quî
« doivent, j’esp ère, fixer dans vos familles la paix et le bonheur.
« Il est possible que vous ne soyiez pas content, mais je n’ai
« rien à me reprocher. J ’ai pu commettre quelques erreurs ,
« mais elles seront moins funestes que celles des tribunaux ,
« qui portent toujours d’ une m anière terrible, et sur la fortune ,
« et sur la réputation ; vous ne perdrez rien au moins sous ce
« rapport, et les salles n’auront point retenti de vos divisions.
« Al. H u a, mon confrère de Gannat, est chargé de vous faire
fc connoitre nos décisions, etc. «
Quelle fut la surprise de Me. P apon, en apprenant une sem
blable nouvelle ! Le sieur Bertrand ne lui avoit pas dit un m ot.
de ce jugem ent, lorsqu’il l’avoit vu en la ville du P u y : la lettre
qu’il avoit reçue le 5 brum aire, dont on a parlé précédem m ent,
sembloit lui annoncer qu’il n ’y avoit encore aucun jugement de
re n d u , et ce m ystère lui faisoit présager quelque chose de fu
neste. Il apprit bientôt que ce jugement n’étoit l’ouvrage , ni du
magistrat à qui 011 s’étoit adressé, ni de Bertrand , arbitre choisi ;
il fut même instruit que Bertrand avoit seulement donné sa
signature en blanc. Indigné de ces m anœ uvres, il écrit une
lettre de reproches à Bertrand qui l ’avoit trompé. Enfin il est
résigné h attendre qu’on lui donne connoissance de ce prétendu
jugem ent, lorsque le i 5 frim aire an i 3 le sieur Gilbert Papon,
avec lequel il n’avoit depuis long-temps aucuns rapports , lui
é c rit, sous la date du jeudi 6 décembre 1804, qu’il a quelque
chose de très-pressé à lui dire, et qui l’intéresse essentiellement;
il l’exhorte à venir de suite, en ajoutant que si ce jour ou le
lendemain sans faute il n’est pas ren d u , il sera peut-être trop
tard le sam edi, et la lettre étoit du jeu d i; il lûi recommande
expressément de lui rapporter la présente. M e. Papon se rend
sur le ch am p , et son frère lui raconte qu’il a vu le jugement
arbitral ; il lui annonce qu’il a été sacrifié sans ressource ; que
cependant lui Gilbert avoit un moyen sûr de le sortir de cet
em barras, mais que ce moyen n’étoit connu que de lu i, et il
C a
�H>O0 ;V *, *'
( 20 )
ne veut pas le lui apprendre gratuitement ; il exige un sacrifice,
M e. P ap o n , trop curieux et trop in q u iet, cède : on est d’aCcord.
Alors Gilbert Papon lui apprend que Ja c q u e s, son frè re , lui
avoit cédé tous ses droits , par acte reçu C o lin , notaire à Gannat,
du 19 iloréal an 9 ; que M*. Papon pouvoit se subroger à cette
cession , dès que lui Gilbert étoit religieux et non successible;
que par ce moyen il évitoit tout l’effet du jugem ent a rb itra l,
dont G ilbert Papon étoit révolté. En con séquence, et d’après
cette déclaration, Gilbert Papon fait lui-méme le projet de cédule en conciliation sur cette demande en subrogation d’action ;
M e. Papou la cop ia, et la fit signer, le 17 frim aire an i 3 , par
le juge de paix de Gannat. Dans le même tem ps, M e. Papon
souscrivit une prom esse de 1200 fr. au profit de G ilb e rt, son
fr è r e , sous la condition néanmoins que cette somme ne seroit
exigible qu’autant qu’il réussiroit dans sa demande ; e t , en cas
de su c c è s, il s’oblige de la payer dans un a n , et en deux term es,
après le jugem ent du procès : mais quoique la promesse ait été
souscrite le même jo u r , elle a cependant été mise sous une
date postérieure.
C ’est ce même jour 17 frim aire, que Jean -Jacq u es Papon se
trouvant à G annat, inform é des démarches de son frère ainé,
qu’il avoit même obtenu une c é d u le , s’empressa d’aller déposer
chez B eauvais, notaire à G annat, les rétrocessions que Gilbert
Papon lui avoit faites sous seing p r iv é , tant de la cession de
Ja c q u e s , consentie par acte p u b lic , que des cessions de M arie
et F ran ço ise, qui n’avoient été faites que sous seing privé.
L ’acte de dépôt est dressé ; et Jean-Jacques Papon fait encore
comparoltre chez le notaire, Ja c q u e s, M arie et Françoise Papon,
qui rati(ien t, en tant que de besoin , les cessions , rétrocessions
et transports, et consentent à l’exécution de ces actes comme
s’ils avoient cédé directem ent leurs droits à Jean-Jacqu es ; ils
consentent même à ce que ce dernier se mette en possession
des lots qui leur étoient adjugés par le jugem ent arbitral de
iiertran d , en date du (5 brumaire.
�H>o\ cte#
( 21 )
Il ne fut pas difficile alors à M e. Papon d’expliquer pourquoi
Jean-Jacques demandoit avec tant d'empressement l'homologa
tion du rapport de Bechonnet; il ne put pas douter de la véra
cité du récit de Gilbert Papon. Il étoit aisé de voir que ses in
térêts avoient été sacrifiés; et les manœuvres perfides de JeanJacques Papon étoient à découvert.
Quoi ! le sieur Jean-Jacqu es Papon étoit depuis long-temps
xnaltre des droits de ses cohéritiers légitimaires ! ceux-ci étoient
hors d’intérêt ! Jean-Jacques P ap o n , en demandant à son frère
ainé fe remboursement des sommes qu’il avoit payées aux lé
gitim aires, terminoit toutes ces discussions intestines, devenues
si coûteuses. Tout étoit consommé entre les parties ; il n’y avoit
plus rien â exam iner; il n ’étoit nullement besoin d’arbitres : et
cependant, en laissant ignorer à Me. Papon tout ce qui s’étoit
passé dans la fam ille, on lui propose frauduleusement un ar
bitrage , lorsqu’il n’y avoit point de questions à juger. Partout
Me. Papon est dupe de son honnêteté et de sa confiance.
M c. Papon ignoroit encore l’acte de dépôt du 17 frim aire, et
n’avoit aucune connoissance du jugem ent arbitral. Il devoit coinparoitre le 29 frimaire au bureau de p a ix , sur la demande en
conciliation tendante à subrogation, qu’il avoit formée contre
G ilbert, son frè re , re lig ieu x ; Jean-Jacques Papon le p révient,
et lui fait signifier, le 28 du même m ois, le jugement arbitral,
avec déclaration qu’il est aux droits de ses frères et sœurs lé
gitim aires, au moyen de la rétrocession qui lui étoit faite par
Gilbert Papon , mais sans lui notifier cette rétrocession ; et
Gilbert P ap o n , averti de cette signification, se voit obligé de
d é clarer, le lendemain 29 frim aire , au bureau de paix , que
la demande en subrogation devient sans objet, dès que sa ré
trocession est connue : en conséquence , il est dressé un procès
verbal de non-conciliation.
L e même jour 29 frimaire , M c. Papon fit faire une saisie entre
les mains de B eauvais, notaire, pour l’empécher de se dessaisir,
en faveur de qui que ce s o it, des actes sous seing privé dont
�( 2 2 ).
le dépôt avoît été Tait entre ses mains le 17 du même mois.
L e 5 nivôse an i 5 , Me. Papon, par deux actes séparés, fait
d’abord signifier une déclaration à son frère , par laquelle il
révo q u e, en tant que de besoin , le compromis portant nom i
nation du sieur Bertrand pour arbitre; et en m êm e temps il le
fait citer en conciliation sur la demande qu'il entend form er en
communication du bénéfice de la rétrocession litigieuse que
s’étoit fait consentir Jean -Jacq u es Papon.
Cette cédule n’empécha pas Jean -Jacq u es Papon de faire pro
céder , deux jours après , par saisie exécution sur toutes les
denrées de son frè re , en vertu du jugem ent arbitral rendu par
le sieur Bertrand le 6 brum aire , et rendu exécutoire le 12.
Dans cet a c te , Jean-Jacques Papon déclare y procéder tant en
son nom que comme étant aux droits de Gilbert Papon , son
frère , qui étoit lui-m êm e aux droits de Jac q u e s, Marie et Fran
çoise
»
7, frère et sœurs communs.
Me. Papon répond , par même a c t e , qu’il a.lieu d’être surpris
de ce procédé, d’après la cédule qu’il a fait donner dès le 5 du
m êm e m ois; il s’oppose en conséquence à toute saisie-exécution,
com me de ses biens ; et on observe que par cet acte recordé
il n’est nullement fait mention de la vacation des témoins.
L e 12 nivôse il fut rédigé un procès verbal de non-concilia
tion. Jean-Jacqu es Papon , lors de ce procès verbal, veut excuser
ses procédés dont il est honteux; il dit que ce 11’est qu’à défaut
par Me. Papon d’avojr voulu prendre des arrangem ens avec les
frères légitim aires, que lui Jean - Jacqu es s’est déterminé à se
faire rétrocéder leurs droits; mais que son frère n’est pas recevable à vouloir profiter de ce bénéfice, et qu’ il entend seul le
conserver. Il se présonteroit fans doute «le grandes réflexions
sur une réponse aussi inconvenante, mais il faut ménager l’e x
pression.
Jean-Jacques Papon n’en poursuit pas moins son frère. L e 14
du même mois de niv6se, il fait itérative sommation de paye
m ent, et somme le gardien volontaire do représenter les objets
�( 23 )
saisis, pour être vendus le 27 nivôse; il fait aussi notifier un
congé à deux métayers de P ierre-C laud e Papon , pour qu’ils
aient à abandonner la culture des immeubles attribués aux lots
des légitiinaires.
L e 26 nivôse, M e. Papon fait notifier le procès verbal de nonconciliation , du 1 2 , avec assignation à son frère au tribunal
de G annat, pour être condamné à lui communiquer le béné
fice des rétrocessions ; il fait a u ssi, par un acte séparé, notifier,
soit à son frè re , soit au gardien, une opposition à la continua
tion des poursuites. Mais dans cette journée il devoit y avoir
beaucoup d’actes judiciaires ; c a r, dans la soirée, Jean Jacques
Papon fit faire une nouvelle som m ation, tant à son frère qu’au
gardien , et cette sommation fut suivie d’un nouveau procès
verbal de saisie-exécution , dans lequel il constitue pour son
avoué Me. Ju g e , qui occupoit d’abord pour les légitimâmes; il
déclare en même temps qu’il n’entend donner aucune suite à
la première saisie-exécution du 26 nivôse : mais ce n’est pas
pour faire grâce à son frère ; c a r , lors du premier procès verb al,
l ’huissier a voit eu au moins l’attention de ne pas comprendre
dans sa saisie les denrées et le vin nécessaires à la consomma
tion de Me. Papon et de sa famille , au lieu que dans cette
dernière il ne fait grâce de rien ; il y comprend tout ce qu’il
tro u ve , nomme le même gardien , et lui fait sommation de
représenter les objets saisis pour le 18 pluviôse. On remarque
encore que dans ce procès verbal l’huissier ne donne d ’autres
vacations à ses recors, que celles de propriétaires.
L e 16 pluviôse, opposition de la part de Me. Papon à cette
saisie-exécution; citation au bureau de paix, à Jean -Jacqu es,
sur la demande en nullité de toute cette p rocéd u re, ainsi que
des rapports des e x p e rts, du com prom is, et du jugement ar
bitral.
Mais le 18 pluviôse il est dressé contre le gardien un procès
v e rb a l, faute par lui d’avoir représenté les objets saisis, quoi
que le gardien eût exhibé de l’opposition foim ée entre ses mains.
�( 24 )
L e 19 , ce procès verbal est signifié au domicile du gardien,
qui est en m êm e temps cité au bureau de conciliation sur la
demande tendante à ce qu’il soit tenu par corps de représenter
les objets saisis. L e 24 p lu viôse, deux procès verbaux de nonconciliation sont dressés , l’un contre le gardien , et l’autre entre
M e. Papon et son fr è r e , sur la demande en nullité que le pre
m ier avoit formée.
L e 3 o pluviôse, Jean -Jacqu es Papon est assigné à la requête
de son frère , au tribunal de G a n n a t, sur cette demande en
nullité. L e 3 ventôse an i 5 , longue écriture de Je a n -Ja c q u e s
Papon , pour prouver que le jugem ent arbitral du 6 brumaire
est e x é c u to ire , et n’est pas susceptible d’opposition.
L e a germ inal, jugem ent par défaut contre M°. P ap o n , au
tribunal de G an n at, mais contradictoire avec le gardien ; et JeanJacqu es Papon est déclaré non recevable dans sa demande formée
contre le gardien ; il est condamné aux dépens envers lui.
Appel de Jean -Jacq u es Papon de ce jugem en t, vis-à-vis du
gardien ; mais il n’a donné aucune suite à cet appel : il paroit
m êm e qu’il a satisfait aux condamnations prononcées contre lui.
Opposition de M*. Papon à ce jugem ent qui avoit été rendu
par défaut contre lui. Jugem ent du 23 germ inal, qui le reçoit
opposant, et renvoie les parties au principal. Longue écriture
de Je a n -Ja c q u e s Papon , dans laq uelle, se jouant «le tous les
procédés, il compare agréablement son frère à un malade à
l’agonie , qui use de tous les remèdes contraires à la médecine.
Ce n’est que le 17 floréal qu’il donne enfin connoissance à son
frère des rétrocessions qui lui avoient été consenties; et il a c
com pagne cette notification d’ une autre écriture, dans laquelle ,
opiès avoir rendu pour la dixièm e fois compte des fa its, il ap
prend que son but est de s’opposer à la jonction des différentes
demandes pendantes entre son frère et lui.
U11 succès éplit'tnère semble IVncouniger à grossir encore ce
volume. Un jugement du 19 prairial an i 3 rujela la jonction
demandée par M r. Papou : mais le ü9 thermidor nu i 3 , un
autre
�( 25 )
autre jugement contradictoire , et certes très-équitable , annulla
tous les com m andem ens, saisies-exécu tion s, et autres pour
suites de Je a n -Ja c q u e s Papon , et fît pleine et entière main
levée au frère aîné de toutes ces saisies vexatoires. Ce jugement
en m êm e tem ps, en exprimant le regret des premiers juges de
n ’avoir pas ordonné la jonction précédemment , renvoie les
parties à plaider sur le principal, c ’est-à-dire, sur la demande
en nullité du compromis et du jugem ent arbitral, ainsi que sur
la demande en communication du bénéfice des rétrocessions,
à l’audience du 5 fructidor lors prochain.
Mais Je a n -Ja c q u e s P a p o n , craignant que le moment de la
justice ne fût arrivé , ne daigna pas comparoitre au jour capté;
çn conséquence, il fut rendu deux jugemens par défaut, l’un
qui adjuge la com m unication du bénéfice des rétrocessions,
l’autre qui annulle le compromis et le jugem ent arbitral.
Jean-Jacques Papon s’est rendu appelant, et par deux actes
séparés , tant du jugem ent contradictoire qui fait main-levée des
saisies-exécutions, que des deux jugem ens, dont l’un ordonne
la communication du bénéfice des rétrocessions , et l’autre pro
nonce la nullité du compromis et du jugement arbitral de Bertrand.
Mais il est à remarquer que la cour n’est pas saisie de la connoissiince du jugement qui ordonne la communication du bénéfice ;
Jean Jacques Papon n’ayant interjeté appel que par un simple
acte de ce dernier jugem ent, n'est point encore anticipé. Il ne
s’agira donc que d’examiner la validité ou nullité des saisiesexécutions , ainsi que les questions qui s’élèvent sur le com
promis et le jugement arbitral. On observera, au surplus, que
la cour a déjà eu connoissance de cette discussion; car le pre
m ier incident qui s’est élevé entre les parties a été de savoir si
la cour devoit joindre les deux appels dont elle est saisie ; et
la cause portée sur cet in cid en t, le 1 1 janvier est intervenu
arrêt contradictoire qui a joint les deux instances d’appel , et
renvoyé les parties à une audience captée, pour être fait droit
sur le tout par un seul et même arrêt.
D
�_ ( *6 )
C'est en cet état qu*il s’agit de prononcer ; mais il est bon ,
avant to u t, de rappeler qu’à l’audience de la co u r, Jean-Jacqnes
Papon voulut insinuer que le jugem ent arbitral étoit l’ouvrage
du m agistrat, en qui les parties avoient témoigné une si juste
confiance. MaisM*. Papon est autorisé à désavouer publiquement
que ce magistrat en soit le ré d a cte u r, et la déclaration indis
crète de son frère n’est qu’une suite de sa perfidie.
Maintenant qu’on a analisé , avec l’exactitude la plus scru
puleuse , une procédure m onstrueuse, et qu’on n’a dépouillée
qu’avec dégoût, on va discuter les moyens de Me. Papon contre
toutes les demandes , com prom is, ju g em en s,q u i depuis vingt
ans ont empoisonné sa vie et altéré sa fortune.
Il divisera sa défense en trois propositions ; dans la p rem ière,
il établira que le compromis est absolument n u l, qu’il n’est que
la suite de l’e rr e u r, puisqu’il a été passé avec des personnes
sans qualité comme sans intérêt ; dans la deuxièm e , il prou
vera que le jugem ent arbitral n’est pas même conform e au com
prom is, qu’il y a e xcè s de p o u v o ir, des erreurs grossières , et
qu’enfin il n’est pas l’ouvrage de l’arbitre que les parties avoient
choisi ; dans la troisième et dernière , il démontrera que les
saisies-exécutions faites à la requête de Jean -Jacq u es Papon ne
peuvent subsister , qu’elles sont tout à la fois nulles , irrégu
lières et vexatoires , qu’ainsi il en a dû obtenir la main-levée
pleine et entière.
I er.
L e com prom is est évidem m ent nul.
Un compromis ne peut subsister qu’autant que toutes les par
ties qui l’ont souscrit seroient également obligées ; il est nul lors
qu’il est l’effet de l’erreu r, qu’il n’a pas été nécessaire , ou qu’il
n’nuroit pas eu d’o b je t, si l’une des parties avoit connu les actes
qu’on lui a cachés.
�fo r
( 27 )
Ces principes sans doute n e seront pas contestés ; ils sont
consignés dans le titre des lois , au ff. D e recept. arbitr.
L ’article 110 9 du Code civil porte également qu’il n’y a point
de consentement valable, si le consentement n’a été donné que
par erreu r; et l’article 1 1 1 0 dit que l’erreur est une cause de
nullité de la convention , lorsqu’elle tombe sur la substance
même de la chose qui en est l’objet.
En appliquant ces principes à l’espèce , on v o it, i°. que lors
du compromis toutes les parties n’étoient pas également obli
gées. En e ff e t , les trois légitimaires qui y sont portés étoient
hors d’intérét ; ils avoient cédé leurs droits à un frère non successible ; et celui c i , dans la crainte d’étre écarté par la subro
gation d’a c tio n , avoit rétrocédé ces mêmes droits à l’héritier
associé. Dès-lors ces légitimaires n’étoient pas de bonne foi >
lorsqu’ils se sont mis en qualité ; ils ne contractoient aucune
obligation, puisqu’ils n’avoient rien à gagner ni à p erd re, et que
l ’événement du partage leur étoit indifférent.
Lors de leur cession, les légitimaires avoient vendu sans ga
rantie ; ils ne s’étoient point soumis à rester en cause ; ils n’a
voient donné aucune procuration pour autoris r à plaider en
leur nom. Ils étoient donc absolument hors d’intérét; ils n’é
toient plus parties : leur cédataire devoit seul figurer.
Ils étoient'cependant la cause unique et exclusive du com
promis ; ce n’étoit que contr’eux et pour eux que Me. Papon
se soumettoit à la juridiction d’un arbitre ; il n’auroit pas com
prom is, s’il< avoit su que les légitimaires n’avoient plus rien à
dém êler ni à;prétendre dans les successions. En e ffe t, cédalaire lui-même des droits de plusieurs de ces légitimaires , il
n’avoit pas réclamé de son associé ni le partage , ni leurs por
tions en corps héréditaire ; et s’il avoit été informé que son
associé fût aux droits des trois autres , il auroit espéré de lui
la même faveur , ou il l’auroit c o n t r a i n t à la communication du
bénéfice , ou au moins il auroit exigé les mêmes droits pour les
cessions qui lui étoient personnelles. Tout se, seroit naturelle-
D 2
/
�( *8 )
ment compensé entre l’héritier et l’associé , sans qu’il fût besoin
de porter atteinte au partage fait par les auteurs communs ,• et
qui fut l’ouvrage de leur impartiale tendresse pour les deux
héritiers.
Il est donc évident que toutes les parties n’étoient pas égale
ment obligées ; il est également démontré que le compromis est
le résultat de l’erreu r, puisque M°. Papon ignoroit les cessions
et rétrocessions des légitimaires. Il étoit dans cet état d’igno
rance par le f a it , soit des légitimaires , soit de son associé : tous
s’étoient réunis pour le tromper et l’abuser. Cet état d’ignorance
détruit la volonté , fa c it om nino involuntarium , comme le dit le
savant Dum oulin ; et il n’est pas de moyens dont la loi soit plus
to u ch ée, que cet état d’erreur ou d’ignorance invincible dans
lequel se trouvoit Me. Papon par le fait ou la mauvaise foi de
ceu x avec lesquels il a contracté.
Il est encore certain que l’erreur de M e. Papon tombe sur la
6ubstance de la chose qui étoit l’objet du com prom is, puisqu’il
s’agissoit de régler un partage , des rapports et des prélèvem ens
en faveur des légitim aires qui étoient alors sans intérêt , et qui
n ’avoient plus de partage à demander. C ’est depuis le 14 ger
m inal an 10 que Jea n - Jacq u es Papon avoit les droits de ses
frères et sœurs légitim aires, par des actes sous seing privé ; et ce
n’est que le 14 nivôse an 12 que ces légitimaires ont eux-m êm es
com prom is, com m e s’ils étoient encore dans tous leurs droits.
Il y a plus qu’ erreur dans l’espèce ; il y a évidem m ent dol dans
le procédé , puisque les légitimaires ne contractoient aucuns
engageinens. C ’est une machination perfide pour tromper , dé
pouiller l’un des héritiers au profit de l’autre , son associé , qui
jusqu ’alors avoit pris part h toutes les discussions , et avoit con
fondu ses intérêts avec ceu x de l’héritier.
L a justice ne peut envisager qu’avec indignation un acte qui
a été le fruit du d o l, de l’erreur et de la surprise ; et le com
promis une fois é c a r té , le prétendu jugement arbitral ne porte
sur aucune base.
�'•
t
-
( 29 )
§. I I .
L e prétendu ju g e m e n t a rb itra l n 'e st p o in t conforme au com
prom is ; i l y a excès de p o u v o ir; i l n ’est p a s l ’ouvrage d e
l'a rb itre que les p arties avaient choisi.
Quelle confiance pourroit-on avoir dans un arbitre qui s’avoue
incapable de prononcer su r des contestations qu’on lui a sou
mises , n’en prend aucune connoissance, et livre tous les intérêts
d’une famille à une inain obscure et mercenaire , à qui les par
ties , et surtout M e. Papon , n’auroient jamais accordé aucune
confiance ; d’un arbitre qui ne prend d’autre peine que de donner
sa signature, et encore de la laisser en blanc , et qui n’a vu a i
lu le jugement au bas duquel se trouve son nom?
Si les moyens de M e. Papon contre ce jugement pouvoient ne
pas paroitre suffisans , la voie du faux incident lui est ouverte ,
et il se la réserve expressément.
M e. Papon convient que l’arbitre étoit autorisé verbalement
à s’entourer des lumières d’un magistrat éclairé , choisi respecti
vement par les parties : mais il met en fa it, i°. que l’arbitre quitta
le pays dans les derniers jours de fructidor an 1 2 , et qu’alors
il ne s’étoit nullement occupé de l’objet de sa mission ;
2 Que cet arbitre , lors de son départ, montra à M c. Papon
une note du magistrat auquel il s’étoit adressé , et que par cette
note ce magistrat expliquoit très-disertement son refus de connoître et de prononcer sur les contestations de cette famille ;
5 °. Que l’arbitre avoit lui-même déclaré qu’il n’étoit plus dans
l’intention de juger les parties, et qu’il avoit déposé tous les pa
piers de M*'. Papon chez le sieur H u a , directeur de la poste aux
lettres à G an n at, où il pourroit les prendre quand il voudroit, et
que Me. Papon étant allé chez Hua pour retirer ses papiers, ce
dernier lui déclara qu’il ne les avoit jamais vus;
4°. Que AT'. Papon ayant prié le sieur Bertrand , arbitre , de
�k
4 W
Ç A ï'ç
C 3° )
lui donner quelques détails sur une pension de la ville du P u y ,•
où il vouloit placer son fils , cet arbitre lui écrit le i rr. vendé
miaire an i 3 , pour lui donner ces détails, mais ne lui parle
nullement des affaires de fam ille dont la décision lui avoit été
soumise. Me. P ap o n , dans sa réponse , lui repioclie son sile n ce ,
se plaint surtout de ce qu’il est parti sans lui remettre ses pa
p iers, et de ce qu’il l’a trompé en lui disant qu’il les trouveroit
chez le sieur H u a , qui ne les avoit jam ais vus ;
5°. Que M°. Papon ne recevant point de réponse de Bertrand ,
et inquiet surtout de ses papiers , pria le sieur Cham broty de
s’inform er auprès <lu magistrat désigné par les parties s’ il savoit
où pouvoient être ses papiers ; que le 20 vendém iaire an i 3 le
sieur Cham broty écrivit à M e. P a p o n , et lui marqua que ce
magistrat lui avoit dit que les longs mémoires l’avoient enir
péché de prendre connoissance de l ’a ffa ir e , mais qu’il n’avoit
aucuns papiers , et les avoit laissés à l’arbitre ;
6°. Que le 3 o vendém iaire an j 3 , M e. Papon a reçu une lettre
de Bertrand , par laquelle il lui marquoit qu’il avoit laissé ses
papiers dans les mains de ce m êm e magistrat ;
7°. Que Me. P a p o u , dans cet état de p erp lexité, reçoit une
lettre de ce m agistrat, en date du 5 brumaire an i 3 , par la
quelle il lui marque qu’il peut actuellem ent lui donner des nou
velles de ses papiers, qu’il sait où ils sont, qu’ils.sont aussi en
sûreté que s’ils étoient entre ses m a in s, qu’il les a quand il
v e u t , et lui assure que ni la justice ni ses intérêts ne seront
blessés ;
8°. Que M r. Papon , plus inquiet que jam a is, parce que cettq
lettre lui faisoit craindre qu’ un étranger qu’il ne conrioissoit pas
voulût s’ingérer dans la connoissance de ses affaires , partit pour
la ville du Puy le 5 b ru m aire, où il arriva le 8 ; qu’il y resta
jusqu'au 1 2 , et qu’ il ne put tirer autre chose du sieur Bertrand
sur le sort de ses papiers, sinon qu’il les avoit remis
un des
amis du m agistrat, en qui les paities avoient confiance , et quu
les papiers lui seroient remis à son a rriv é e ;
�t 3' )
9°i Qu’éthnt arrivé du P u y , il trouva à son domicile une lettre
de Bertrand , en date du 6 brumaire an i 3 , par laquelle il lui
annonce qu’il a signé ce même jour 6 brumaire les jugem cns
( il n’y en a qu’un , et cet arbitre ne Jui en avoit rien d it, quoi
qu’il ne l’eût quitté que le 12 b ru m a ire ); et qu’il n'a rien à
se rep roch er, etc. : cependant le 5o vendémiaire an i 3 , six
jours aup aravan t, ce ménie arbitre écrivoit qu’il avoit laissé
dans les mains du magistrat désigné tous les papiers de RJe. Papon,
ainsi que ceux de ses frères ; trois jours a p rè s, ce même ma
gistrat écrivoit qu’il n’avoit pas ses p ap iers, mais qu’il savoit où
ils étoient, etc.
i°. E t enfin Me. Papon met encore en fait que l’arbitre n’a
jam ais eu connoissance de ce jugem ent, qu’il ne l ’a vu ni lu ;
que cet arbitre fut suivi jusqu’à Glermont par l’un des frères
P ap o n , lors de son départ dans les derniers jours de fructidor
an 12 , et que là on obtint de la facilité de cet arbitre sa signa
ture en blanc ; que la preuve de cette circonstance résulte de
ce que la minute de ce jugem ent, contenant près de cent cin
quante pages , est entièrement écrite de la main du fils de Ju g e ,
avoué de Jean -Jacq u es Papon, à l’exception néanmoins des der
nières pages , qui sont écrites de la main de M e. Juge lui-inèine ;
que ces dernières pages sont resserrées, et que ce resserrement
n’a eu lieu que pour faire cadrer la clôture du jugement avec
la signature de l’arbitre ; que sans cette circonstance le resser
rem ent eût été inutile , puisque la signature de l’arbitre se
trouve placée aux deux tiers de la première page du dernier
rô le , et par conséquent il restoit encore un dem i-rôle et le
tiers d’un demi-rôle de papier blanc à remplir : donc ce res
serrement n’a eu lieu que parce que la signature étoit posée.
Cette signature d’ailleurs se trouve au bas de la décision sans
aucune approbation, et cet arbitre n’a paraphé aucuns des
feuillets de ce jugem ent, qui comprend plus de cent cinquante
pages en plusieurs petits cahiers.
C ’est ce dont on pourra se con vain cre, si la cour juge à
�( 32 )
propos de faire rapporter la minute. M é. Papon mot également
en fait que la minute de ce jugement a resté long temps entre
les mains de Jean -Jacqu es P ap o n , avant le dépôt qui en a été
fait au greffe ; et ce qui achève de prouver que cette décision
n ’est pas l’ouvrage de l’arbitre, c ’est qu’indépendamment de ce
que le tout a été écrit de la main du fils de l’avoué ou de l’avoué
lu i - même , on remarque à la clôture les mots qui suivent :
« F a it, arbitré et délibéré successivem ent à Y ic q , à Clerm ont;
cc et après avis en conseil , définitivement arrêté et jugé an
« P u y , chef-lieu du d épa rtem en t de la H au te-L o ire , le G b/u~
« m a ire an i 3. Seront au surplus les présens partages et juger
« mens déposés au greffe du tribunal de Gannat, pour y rece« voir la forme e xé cu to ire , et en être délivré expédition à qui
« de droit. »
Que de m aladresse et de sottises qui dévoilent la fraude et
le dol qu’on a si grossièm ent employés ! M e. Papon offre la
preuve de tous les faits qu’il vient de mettre en avan t, si la
cour ne se croyoit pas suffisamment éclairée par les lettres et
les écrits qu’il vient d’én on cer, et qui ont été notifiés à JeanJacques Papon dans le cours de l’instance.
Comment cette œuvre de ténèbres, qu’on ose qualifier du
nom de ju gem en t, pourroit-elle soutenir les regards de la jus
tice? Vainem ent voudroit-on prétendre qu’ un jugem ent arbitral
ne peut être attaqué par aucune voie , pas même d’appel ou
du cassation , lorsque les parties ne se sont ¡»as expressém ent
rtservé ce d ro it; ce seroit une erreur de l'appelant, dont le
systèm e ne porte que sur cette fausse base. La voie de la
nullité est toujours ouverte contre un jugement arbitral, toutes
les fois que les arbitres ont ju g é , ou sur un compromis n u l,
on sur toute autre chose que ce qui étoit soumis à leur dé
cision. y on c.rgù qu od liüet statucrc a rb iter p o te r it , ncc in
tjuà re lib et n i si de fpui rc com prom ission est et tptatenùs com
prom ission est. L. 5 2 , §. 1 5 , au ff. D e rccept. arbit.
La cour d'J cassation s’est conform ée aux dispositions d<-‘
eu lie
�( 33 )
cette lo i, et a souvent décidé que les jugemens d’arbitres pouvoient être attaqués par la voie de nullité. Un arrêt du 12 prai
rial an 10 l’a disertement jugé dans la cause de la dame Bény.
D euxièm e arrêt du 23 nivôse an 10. Troisièm e arrêt du 2 1 mes
sidor an 12. On pourroit même invoquer plusieurs préjugés de
la cour d’appel sur ce point, puisqu’elle a annullé un jngement
arbitral rendu contre des mineurs , quoique le tuteur fût obligé
en son nom.
O r, si on veut aborder cette oeuvre de ténèbres , et sans
qu’il soit besoin de faire un volume pour analiser un procès
verbal fastid ieu x, on y remarque d’abord que le premier objet
du compromis étoit une transaction du 1 1 pluviôse an 10 ,
passée entre l’héritier et l’associé. Il s’étoit élevé quelques incidens sur ce traité; et un jugement du tribunal de Gannat,
en date du 28 thermidor an 1 1 , en avoit ordonné l’exécution.
Mais Jean-Jacques Papon , suivant son habitude, avoit inter
jeté appel de ce jugem ent; et par le premier article du com
promis , Jean-Jacques Papon se départ de l’appel par lui inter
jeté , il consent à payer les frais ; mais on donne pouvoir à
l ’arbitre de statuer sur l ’ejfet des réserves respectivement fa it e s
par les parties lors de ce traité , ainsi que sur les contestations
qui pourroient s’élever au sujet de l’estimation des biens qui
provenoient d e là belle-mère commune des deux héritiers, et
dont ils s’étoient rendus adjudicataires de la nation, qui avoit
lait m ainm ise sur ces mêmes biens.
Les réserves énoncées dans le jugem ent de Cannat, du 24
thermidor an î x , au sujet de cette transaction, étoient ainsi
conçues : « Sauf h Je a n -Ja c q u e s Papon à se p om vo ir, ainsi
» qu’il avisera, pour obtenir la réparation des erreurs de cal» cid , faux emplois de sommes et omissions par lui soutenues
« exister dans la transaction du 10 pluviôse an 10. A cet effet
» lui donne acte des réserves qu’il s’est faites relativement
» ¡celles ; et donne pareillement acte à Pierre-C laude Papou
w de toutes réserves û ce contraires. »
E
�( 3 4 )
L es pouvoirs de 1arbitre étoient donc bornés à ce seul objer,
de v é r ifie r les erreurs (h c a lc u l, les omissiotis ou le f a u x em
p lo i. Mais sans doute que le sieur Bertrand étoit trop pressé
pour faire cette vérification ; il a trouvé plus commode d ’or
donner un nouveau compte entre les parties, c ’e s t - à - d ir e ,
d ’anéantir une transaction homologuée par ju g em e n t, et que
Jean -Jacq u es Papon ainsi que son frère avoient déclaré sim ul
tanément vouloir exécuter. L ’arbitre a remis en question la
chose ju g ée, l’exam en de tous les articles de cette transaction,
lorsqu’il ne pouvoit exam iner que les erreurs de calcul ou les
omissions qui pouvoient s’étre glissées dans cet acte.
V oilà donc un objet sur lequel les parties n'avoient pas com
promis , et qui caractérise un prem ier excès de pouvoir de
l ’arbitre.
2°. Les parties avoient déclaré par le com prom is vouloir e xé
cuter la sentence arbitrale du 9 frim aire an 8 ; et par cette
sentence il étoit expressém ent ordonné que les légitiinaires qui
voudroient prendre leur légitim e de d r o it, seroient tenus de
rem bourser à M e. Papon , dans la proportion de leur am en
dement , les impenses et améliorations nécessaires et u tile s ,
que'M ®. Papon avoit faites dans les biens communs.
Il sembloit que l’arbitre auroit dû ordonner préalablem ent
une estimation de ces objets. Mais il croit pouvoir éluder la
qu estion , et l ’obligation précise qui lui étoit imposée de faire
estimer ces objets, en disant qu’il attribue aux légitimaires des
im m eubles sur lesquels il n’y a pas eu de réparations ou am é
liorations.
Cependant , dans ces mêmes héritages attribués aux légiti
in aires, M e. Papon y a fait des plantations considérables qui
sont aujourd’ hui en ra p p o rt, et en augmentent sensiblement la
valeur. Il a fait abattre dans les vignes des rochers énorm es, en
a fait extraire plus de trois mille toises de cailloux , et a fait
planter des ceps de la plus belle venue , dans un terrain qui
naguères ne présentoit qu’une surface aride et desséchée ; il a
�( 35)
fait combler et dessécher à grands frais des parties de terrain,
où l’eau étoit en stagnation ; il y a construit un pont pour la
facilité de l’exploitation. Pourquoi donc l’arbitre a-t-il jugé à
propos de se dispenser de l’exécution des jngemens précédens,
ou en éluder les dispositions , lorsqu’il ne p o u vo it, d’après le
compromis , statuer sur cet objet qu’après une estimation préa
lable , conformément au jugem ent en dernier ressort de G uéret,
du 14 prairial an 6 , et au jugem ent arbitral du 25 friam ire
an 8? C ’est donc un nouvel excès de pouvoir commis par le
sieur Bertrand.
L ’arbitre devoit également ordonner l ’estimation des biens
sujets à partage. L e jugement de G u é re t, et la sentence arbi
trale , avoient ordonné que cette estimation des jouissances seroit
faite par e xp erts, et qu’en cas de discordance les parties 110111-.
meroient un tiers expert : c ’étoit un point arrété et jugé ; e t ,
d’après le com prom is, l’arbitre ne pouvoit s’écarter de ce qui
étoit définitivement jugé. Au lieu de nommer un tiers e x p e rt,
ou de s’en rapporter à celui qui avoit été nommé , il s’avise , sans
aucune connoissance locale , et sans aucune expérience, de faire
lui-m ém e cette opération; de là des injustices et des inconsé
quences révoltantes. L ’objet n’étoit pas de sa compétence ; le
compromis ne lui en donnoit pas le pouvoir ; il 11’a pu juger
d'après la lo i, n i s i de qud rc compromissum e s t , et çuatcnùs
compromissum est.
Ce méine arbitre ne devoit encore s’occuper que des biens
délaissés par les père et mère communs , et cependant il a com
pris , dans la masse à diviser , une propriété particulière de
JVle. Papou , que celui-ci avoit acquise depuis plus de dix ans ,
et il a bien voulu la délaisser à Me. Papon , pour le rem plir eu
partie de ce qu’il amendoit dans la succession de Louis-Am able,
son frère ; ce qui constitue un autre excès de pouvoir.
Cet arbitre s’est encore permis d’examiner le partage qui avoit
été fait par les père et mère. Cet acte sans doute devoit être
E 2
�( 3^ )
re sp ecté , et n’avoit donné lieu à aucune controverse entre les
parties ; on se rappelle inéme du soin rpi’ avoient mis les auteurs
comm uns «à rendre les deux lots parfaitement égaux : l’arbitre
en a pensé tout autrement. Quoiqu’il ne dût pas l ’exam iner par
le compromis , il a cru devoir attribuer un retour de lot à Jean Jacques P a p o n , d’ une somme de 2 2 1 fr. C ’est bien sans doute
un nouvel excès de pouvoir.
P a r la sentence arbitrale du g frim aire an 8 , Jacqu es P a p o n ,
légitim aire , ne pouvoit venir au partage qu’en restituant préa
lablem ent à M®. Papon une somme de 4000 fr. par lui reçue ,
et dont Jacqu es Papon avoit donné quittance le 10 février 17 9 1.
L a date de cette quittance autorisoit Jacq u es Papon à de
m ander la réduction à l’échelle ; mais M®. Papon avoit soutenu
qu’il n 'y avoit pas lieu à réduire , parce que cette somme , du
moins en très-grande partie , avoit été reçue long-temps avant
la quittance.
L es arbitres avoient cependant admis la réduction à l’échelle ,
m ais à la charge par Jacq u es Papon d’afiirm er qu’il n’avoit reçu
cette somme qu'au moment de la quittance. L ’arbitre Bertrand
ne pouvoit pas s’écarter de cette disposition ; il a cru néan
moins pouvoir ordonner cette réduction purem ent et simple
ment , et dispenser Jacq u es de son affirmation ; ce qui est encore
un excès de pouvoir.
L e contrat de mariage de M e. Papon fixe le mode et la por
tion des légitim es conventionnelles que chaque héritier doit
p ayer , en les réglant à Gooo fr. pour chacun. Il est dit en su ite,
par une clause subséquente , que toutes les dettes seront p ayées
p a r m oitié entre les d e u x héritiers. C ’est une charge de l’ins
titution dont Jean Jacqu es Pnpon ne pouvoit s ’écarter ; et dèslors il étoit tenu de payer la moitié des supplémens de légitim e
qu’avoient obtenus certains des légitim aires. Il n’ y avoit pas le
plus léger doute , d’après les dispositions du contrat de mariage.
I.arb itre ne pouyoît en exam in er, encore moins en éluder les
�h t
( 37 )
clauses. Me. Papon avoit formé la demande devant l u i , contre
Juan Ja c q u e s , son fr è r e , à ce qu’il fût tenu de payer cette
moitié des supplémens , que Me. Papon avoit lui-méme payée
à ses frères. L ’arbitre a jugé à propos de mettre les parties bois
de cour sur ce point ; de sorte qu’il en résulte que Jean Jacq u es
Papon profite de toutes les cessions qui ont été faites à son
frère ; il en a tout le bénéfice ; et au moyen des rétrocessions
qu’il s’est fait consentir par les autres légitim aires, il en a
aussi toute la portion qui diminue d’autant le lot de son frère
ainé sans toucher au sien. Il faut convenir que c’est là -une
injustice révoltante , une contradiction qui choque ; c ’est un
excès de p o u vo ir, d’ignorance ou de partialité.
L ’arbitre devoit aussi faire estimer les dégradations commises
dans les biens. Jean-Jacques Papon avoit fait un abattis d’arbres
de toute espèce ; ce qui diminuoit singulièrement la valeur des
immeubles : l’arbitre n’a pas daigné seulement s’en occuper.
Il est bien extraordinaire encore que dans les prétendus lots
d’attribution que l’arbitre a faits aux légitim aires, il n’y ait mis
aucuns bâtimens , q u ’i l a it môme p articu larisé les jouissances
p o u r les lots d'attribu tion , sans ordonner une estimation géné
rale. Cette manière d’opérer blesse évidemment les intérêts de
l ’héritier : la jouissance des maisons , bâtim ens, cours , etc.
sont souvent à charge aux propriétaires, tandis que les fonds
rapportent toutes les années. Il en résulte que les légitim aires,
qui n’ont que des im m eubles, ne supportent aucunes charges,
reçoivent le produit net de leurs lots, tandis que les bâtimens
deviennent plus onéreux à mesure que l’exploitation diminue.
jVr. Papon avoit aussi demandé q u e , dans le cas où il seroit fait
un partage par attribution pour les légitimaires , il fût aussi fait
trois lots pour M arie, Françoise et Louis-Bonnet, dontM®. Papon
est cédataire. L ’aibitre répond qu’à l’égard de Marie et Fran
ç o is e , Me. Papon ayant traité avec elles pour leurs légitimes
conventionnelles et supplémens d’icelles , n’a fait que remplir
�........................................C 3 8 )
les obligations qui lui étoient imposées par son contrat de m a
riage ; et en ce qui concerne Louis-Bonnet, l’arbitre trouve ridi
cule que M e. Papon prenne une-légitim e en corps héréditaire
sur lu i-m ém e, et en conséquence il le déclare non recevable.
Ce raisonnement est vicieux , et l’arbitre n’est pas conséquent
avec lui-méme. E n e f f e t , M e. Papon , cédataire des droits de
ses sœ urs, peut faire tout ce qu’elles avoient le droit de faire
elles-mêmes ; et c e r te s , si les sœurs étoient encore créancières
de leurs légitimes ou du supplém ent, elles auroient la facu lté,
d’après l’article 16 de la loi du 18 pluviôse an 5 , de l’exiger
en biens héréditaires. Pourquoi donc M \ Papon n’auroit-il pas
la m êm e faculté? pourquoi également ne pourroit-il pas d e
m ander la portion de Louis-Bonnet? Si les biens qu’il possède
étoient seuls sujets à la légitim e, le m otif de l’arbitre pourroit
avoir quelque fondement. Mais les biens de Jean -Jacqu es Papou
sont également affectés aux légitimes ; et dès-lors ce ne seroit
pas sur lui-m ém e que M e. Papon la prendroit.
Mais si la demande de M e. Papon est si ridicule , pourquoi
celle de Jean -Jacq u es est-elle m ieux fondée? car l’arbitre a
bien accordé à Jean -Jacq u es Papon , cédataire com m e son frère ,
le droit de prendre des biens pour la portion de ceux qu’il re
présente. Il y avoit cependant parité de raison : il devoit donc
y avoir semblable jugement.
On n’a relevé cette circonstance que pour donner un échan
tillon des motifs et îles injustices qu’on rem arque dans ce fas
tidieux procès v e rb a l, si improprement qualifié de jugement.
Ou feroit des volum es, si on vouloit entrer dans le détail de
toutes les inconséquences , ainsi que des erreurs grossières qu’ü
renferm e. O11 ne poussera pas plus loin les recherches , parce
que si cetto absurde décision n’étoit qu’injuste , et s’il n’ y avoit
pas d'autres vices , il ne seroit peut-être pas permis de l’exa
miner. La fâche de IV1". Papou doit se borner à en démontrer
la nullité , parce que la voie de nullité est ouverte contre un
�c 39 y
jugem ent arbitral. O r, M B. Papon croit avoir démontré que celte
.m onstrueuse production est absolument vicieuse et n u lle, soit
parce qu’elle part d’un compromis qui est infecté du même v ic e ,
et qui n’a été que le fruit du dol et de l ’erreur , soit par les excès
de pouvoir qui y fourm illent; et dés-lors Jea n Jacques Papon
n ’a plus aucun titre à opposer à son frère. L e jugement de
Gannat a bien jugé en mettant au néant cette masse in form e,
e t dont les conséquences seroient si funestes.
On passe maintenant à l’exam en des saisies-exécutions aux
quelles Jean-Jacques Papon s’est permis de faire procéder sur
les biens de son frère aîné.
$. 111.
L e s saisies-exécutions sont n u lle s, tortionnaires et injurieuses.
L e jugement du tribunal de Gannat, du 29 thermidor an i 5 ,
a fait justice de ces poursuites vexatoires ; il a annullé les commandemens et saisies mobilières , en a fait pleine et entière
m ain-levée à M e. P a p o n , et a ordonné que le gardien seroit
tenu de restituer les objets saisis. Les dispositions de ce juge
ment sont principalement motivées , i°. sur ce que Jean-Jacques
Papon ne s'étoit pas conform é à l’article 1690 du Code c iv il,
et avoit fait saisir et exécuter à sa req u ête, avant d’avoir no
tifié à son frère le transport fait à son-profit par les légitimâmes ;
2 0. sur ce que l’huissier, ministre de la saisie-exécution , n’avoit
donné à ses recors aucune vacation, si ce n’est la qualité de
p ro p rié ta ire s ; qualification insuffisante, d’après l’article 2 du
titre 2 de l’ordonnance de 1667 : et l’article de l’ordonnance
a paru d’autant plus applicable, qu’il est reconnu par l’une des
parties que l’un des recors étoit garde champêtre de la com
mune où réside l’huissier.
�1M .Û
.
( 4° )
Ces motifs sont p érem ptoires, surtout dans une matière de
rigueur. E n e f f e t , ce n’est que le 17 floréal an i 3 que Jean Jacqu es Papon a fait notifier les rétrocessions qui lui avoient
été consenties par Gilbert ; et depuis le 28 frim aire précédent
il s’étoit permis de faire un commandement à M e. P a p o n , ten
dant au payement des sommes adjugées par le jugement arbitral
du 6 brumaire an i 5 , ainsi que de celle de 221 fr. 88 cent, qui
étoit adjugée à Jean -Jacq u e?, pour retour de lot du partage fait
par les père et m ère communs.
Les deux saisies-exécutions sont également antérieures à la
notification du transport.
O r, l’article 1690 du Code civil porte expressém ent que le
cessionnaire n ’est saisi à l’égard des tiers que par la significa
tion du transport faite au débiteur. En e ff e t , ce débiteur 11e
peut faire cesser les poursuites qu’autant qu’il est instruit qu’j.1
a changé de créan cier; jusque-là il ne connoit ni ne peut connoitre le cédataire , et celui-ci à son tour ne peut exercer aucune
poursuite en son nom. L e commandement et les saisies étoient
donc faits à la requête d’un homme sans qu alité, et c ’est sans
contredit le plus grand vice qu’on puisse opposer.
M a is, en la fo rm e , il est cu rieu x de voir qualifier des recors
du titre de propriétaire. L ’article 2 du titre 2 de l’ordonnance
de 1GO7, veut que les huissiers et sergens déclarent, par leurs
exploits , les juridictions où ils sont immatriculés , leur domi
cile , ainsi que celui de leurs recors , avec leurs //oms , sur
noms et va ca tio n s : 011 ne peut entendre , sous le nom de
vacation, que le métier de celui qui assiste l’huissier. La qua
lification de propriétaire est dénégative de toute espèce de pro
fession : on ne désigne a in s i, dans la société ou dans les a c te s,
que les hommes marquans par leur fortune, par des propriétés
considér*iMes 1 el encore n’emploie-t-on cette qualification que
dans des actes indifiérens : c a r , en matière de rigueur, comme
dans une expropriation fo rc é e , on ne manque pas d ’ajo u ter,
lo i:.q u ü
�( 4 I, ]
lorsque le poursuivant n’a pas d é ta t, qu’il est sans profession,
•quoiqu’on lui donne égalem ent la qualité de propriétaire.
Un recors seroit-il suffisamment désigné par cette qualifica
tion générale? Il existe une foule de p réju gés, notamment de
la cour d’a p p e l, qui ont annullé plusieurs procès verbaux de
saisies , sur le seul m otif que l’huissier s’étoit contenté de dé
signer ses recors sous le titre de citoyens. Cependant ce titre
a quelque chose de plus apparent que le terme générique de
propriétaire : ce mot n’amène à sa suite aucune idée ; il est
dénégatif de toute vacation , de toute profession. Un proprié
taire proprement dit est celui qui vit de ses revenus , et n’a
aucun^état dans la société ; £t il faut convenir que ce seroit
bien dégrader c'efte qualification f si on pouvojt la.ilpnneKá des
• -re ^ rs jfe J.e but de l’ordonnance ne seroit pas rempli ^ ce seroit
• yn abus iju i entrafneroît les plus^grav-ee- iuçonvéjiiens.* »•
if do«£ nullité ¿ ’çrdonnance dans les saisies-exécutions.
JYJai$ on doit observer encore que’ Jean-iacqués T apón*n*avoit
à répéter au& íW ^l^ancní-liquide donlrô
Papón * son frère :
fttant tl’e n ’« venir.»aç^a ypie {le la saisie, il ,s’a£issoit de faire
un compte des rapports et prélèvemens que pouvoient devoir
les légitimaires. Quant à Jean-Jn ôifrt^1Î*ap<Jrif quoique ce ju
gement lui adjugeât personnellement une somme de 221 fr.
pour retour de lo t , ce jugement ordonnoit aussi un nouveau
compte entre les parties, sur la transaction de pluviôse an 10.
Jean-Jacques étoit par là comptable de son frère , puisqu’il
étoit son mandataire, et par cela même étoit réputé débiteur
jusqu’à l’apurement du compte.
P ar quel étrange procédé a-t-il donc osé se permettre d’en
Venir à des voies aussi rigoureuses avec son fvere aîné , son
associé , avec lequel il avoit été jusque-là d’accord , avec le
quel il étoit réuni pour repousser les demandes des légitimaires?
Cette conduite est odieuse et révoltante; on 11e pourroit l’ex
cuser dans l'homme le plus indifférent : mais elle excite l’inF
�( 42 )
dignation, lorsqu’elle part d’ un fr è r e , d’un associé, si étroite
ment uni par les liens du s a n g , les mêmes espérances et les
mêm es bienfaits. F ra tres e x eodem p â t r e , et eadem m atre
u a t i, consortes ejusdem f i d e i , e t spei cohœredes.
•
Signé P. Cl. P A P O N , de Rioux.
M c. P A G E S ( d e Riom ) , a n cien avocat.
»
M e. T A R D I F , avoué licen cié.
%%
fv o t
\êts / r i — j 'aJl U
9? f a t r
ft n jjr ik iw / t t v u
y
lu . e u à r 'à * L . o a * > T î^ u l-
/
û c^ ;
A.
.
U*4*~
fliCAtr
y
^
«**
A x iJte u
o jJL ifc t *
Cl ¡r it K+tlMUMt .
A R IO M , de l'im primer ie de L
andriot,
seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Février 1806.
«*-4 **? 1
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Papon, Pierre-Claude. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Tardif
Subject
The topic of the resource
arbitrages
successions
dot
religieuses
Ordre de Malte
pensions viagères
légitime
rétroactivité de la loi
experts
partage
saisie exécution
compromis
vie monastique
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Maître Pierre-Claude Papon, de Rioux, ancien avocat, habitant du lieu de Vicq, intimé ; contre le sieur Jean-Jacques Papon-Beaupaire, ancien officier de cavalerie, appelant de deux jugemens rendus au tribunal de Gannat, les 29 thermidor et 5 fructidor an 13.
Annotation manuscrite: « 22 février 1806, 2éme section, jugement contradictoire qui, en appréciant , par des motifs approfondis, tous les actes des auteurs communs et du cohéritier associé, ainsi que des légitimaires, prononce la nullité du compromis, et, par suite de la sentence arbitrale et des saisies exécutions. »
Table Godemel : Compromis : passé, par erreur, avec ses personnes sans qualité comme sans intérêt, puisqu’elles avaient cédé leurs droits à l’insu du compromettant à une des parties en cause, qui, dans le procès avait un intérêt identique avec ce dernier, son associé, en combattant les prétentions des cédants ; et figurait, néanmoins, dans le compromis sans faire connaître sa nouvelle qualité, est-il nul, comme étant le résultat du dol ? Cette nullité frappe-t-elle, par voie de conséquence, la sentence arbitrale rendue en vertu du compromis, ainsi que les saisies exécutoires qui ont suivi ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1784-1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
42 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1533
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Beaurepaire (château de)
Vicq (03311)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53273/BCU_Factums_G1533.jpg
arbitrages
compromis
dot
experts
légitime
ordre de Malte
partage
pensions viagères
religieuses
rétroactivité de la loi
saisie exécution
Successions
vie monastique
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53277/BCU_Factums_G1603.pdf
dbc8525fe9fbb08694164f53f67f527a
PDF Text
Text
PRECIS
COUR
D ’A P P E L
P O U R
SÉANTE
Sieur V i t a l D E D I E N N E , et dame J e a n n e - M a r i e
D E D O U H E T son épouse, appelans
C O N T R E
F
C
,
V E S C HA M B E S
veuve de Jacques
V a l a r c h e r , J e a n n e V A L A R C H E R , et A n
t o i n e F A U C O N son mari, intimés et incidemment
appelons.
rançoise
ette
contestation est la suite d ’une précédente, jugée par arrêt
de cette c o u r , du 2 thermidor an 8. Elle est tellem ent hérissée
d ’actes, q u ’on a cru ne pouvoir se dispenser d ’en présenter, avant
l ’audience, un aperçu.
François V esch a m b e s , bisaïeul des p a r t ie s , étoit propriétaire
d un domaine appelé de la B u tg e , de valeur aujourd’hui de plus
de 60000 francs.
A
A RIOM.
�'iV
f i )
II s’est m arié en prem ières noces avec M arie Jarrigo.
D e ce mariage sont issus quatre e n fa n s, Jacques, représenté
par les appelans, Jean, M arguerite i " . , et M arguerite 2'. du nom.
D e ces quatre enfans il en est décédé un avant le père, qui n ’en
rappelle en effet que trois dans le testament.
11 a contracté un second mariage avec Catherine C om bard.
D a n s ce contrat de mariage il com m ence par reconnoître à sa fu
ture épouse la som m e de 2700 francs; il réglé ensuite la légitimé
des enfans <ju premier lit. Il destine à Jacques Vescham bes une
som m e de 1000 f r . , à M arguerite 1” . du n o m , pareille somme
de 1000 f r a n c s , à M arguerite 2'. une somme de 700 fr a n c s , et
à Jean celle de 600 francs. 11 prévoit le cas où il décéderoit avant
son épouse; audit cas il lui assure et donne la jouissance d ’une
cham bre dans la m a i s o n , garnie de meubles nécessaires, et la
jouissance de la moitié de ses biens , tant qu ’elle demeurera en
•viduité. P ar une autre c la u s e , il donne par preciput et avantage
a u x enfa ns, est-il d i t , q u i proviendront du présent mariage, au
premier, soit f i l l e ou garçon, de son c h e f la somme deSooofrancs,
et a u x autres la somme de 1000 fra n cs. Il est enfin stipulé un gain
de survie réciproque de 100 francs.
D e ce mariage sont issus cinq enfans^ C ath erin e mariée au
sieur N a u f a r i, A n t o in e , P ierre , tf.onc*ww e , et M arguerite 5 '. du
nom mariée au sieur Roche.
L e 4 m ars 169G , testam ent par lequel il rappelle et confirm e
les destinations déjà faites aux enfans du prem ier lit dans son
second co n trat de m ariage.
Il lègue à A n to in e et C atherin e
•Veschambes , deux, des enfans du second lit , une som m e
de 1000 fr a n c s , et aux autres Irois 700 irancs seulem ent. V en an t
ensuite à l ’institution d ’h éritier, il déclare q u ’il nom m e pour son
héritière générale et universelle Catherine C om bard son épouse;
«V eut et entend que son héritière générale et uni verselle, C atherine
aC o m b a rd
son épouse, n o m m é e , soit privée de l’hérédité en cas
; m ais bien
sem b lera , sans
» q u ’elle vienne à convoler à de secondes noces
rendre
» l ’héréditc à tel de scs enfans que bon lui
qu ’elle
�YS
(3)
n soit tenue à aucune reddition de com pte; et quand la demoiselle
» Com bard viendroit à décéder sans avoir nom m é tel de leurs en» fans pour h éritier, veut et entend que ledit A n to in e Vescliam bes
» soit son vrai héritier qu ’il nom m e pour héritier des à présent
» audit cas et non autrement ; mais au choix et option de ladite
» C om b a rd d ’en nom m er un autre tel que bon lui s e m b le r a , ainsi
» que dit est. »
O n voit q u ’A n toin e n ’étoit no m m é qu’ à défaut d ’d c c tio n ; et la
veuve elle - mêm e n ’étoit tenue de remettre 1 hérédité, et d é lir e
entre les e n f a n s , q u ’en cas de convoi.
L e cas prévu n ’est point arrivé; Catherine C o m b a rd a demeuré
en viduité.
L ’institution faite en faveur de la veuve étoit susceptible d ’une
double réduction,
i°. L e s biens étant situés en pays de co u tu m e , elle ne pouvoit
avoir effet que pour le q u a r t, d ’après la disposition de la C o u tu m e ;
elle étoit de plus réductible à la portion d u moins prenant des
e n f a n s , d ’après l’édit des secondes noces.
F r ançois
cscham bes. est m o r j ^ I ç ^ f é v r i e g 1700.
Jacques V escfîam bes, enfant du premier li t , s’est marié en 1707
avec Geneviève la Vaissière.
En 1710 Catherine V esclia m b e s, une des filles du second l i t ,
a contracté mariage avec Jean N au fari, P ar leur contrat de mariage,
ladite C atherine C om b a rd l’a instituée son héritière générale et.
universelle, à la charge de payer aux autres enfans du second l i t ,
savoir, à A n to in e et Pierre V escliam bes, la somme de 200 fr a n c s ,
et aux autres la somme de 5 oo francs.
En 1738 Jacques V escliam bes, fils du premier li t , m arié avec
Geneviève la V a is s iè r e , fut prévenu d ’un homicide. Il fut obligé
de se réfugier en Espagne. 11 paroît qu ’il y eut une procédure cri
minelle instruite par contum ace, qui n ’existe plus. Il n ’en reste de
traces que dans un acte du 10 janvier 1757 , produit par les ad
versaires, par lequel le sieur de M o n t - Boissier, seigneur hautjusticier de la terre de C h e y la d e , fait remise et abandon à F ran A 2
�«
(4)
çoise Vescham bes et à Jacques V alarclier, du droit qu'il avoit aux
biens de Jacques V e s c h a m b e s , en conséquence du jugement de
m ort rendu par contum ace en la justice de C h e y la d e ; jugement
dont la date est en blanc.
1
Jacques Vescliam bes m ourut peu de temps après, dans les cinq
années de la contumace.
Il avoit eu de son mariage avec Geneviève la Vaissière six enf a n s , cinq filles, et un m â le , François 2*. du nom , qui n’ a pas
survécu long-temps à ses père et mère.
D e s cinq fille s, d e u x , Michelle et C a th e rin e, ont été mariées
du vivant du père avant le fatal.événem ent dont on vient de parler ;
par conséquent forcloses.
D e s autres trois fille s, l ’a în é e , Françoise V e s c lia m b e s , s’est
mariée avec Jacques V alarcher. C e sont les auteurs des intimés*
L a seconde, M arguerite , s’est m ariée en 1744 avec D a u sa t,
après la m o rt du père.
L a troisième, A n n e V e s c h a m b e s , s’est mariée avec D o uh et.
L e contrat de m ariage d ’A n n e V escham bes est du 16 juillet 1 7 4 4 :
elle étoit majeure.:.P.ar..ce contrat, de m j n a g n e l l e çlgnnajiouvoir
au mari de traiter, transiger, de ses biens d o ta u x , les partager,
mais non de vendre.
L e 20 du m êm e môis de juillet 1 7 4 4 > -^nnc V esch a m b es, sous
l ’autorisation de D o u h e t, son m a r i, et celui-ci en vertu dù pou
v o ir , est-il d i t , à lui donné par son contrat de m a riag e, cédèrent
et transportèrent à Françoise V e s ch a m b e s, et V alarcher son m a ri,
tous les droits que ladite Anfte V escham bes pouvoit avoir tant en
son nom que com m e héritière en partie de François 2”. du nom ,
son frère, dans les successions desdils Jacques V escliam bes et G e
neviève V aissières, et encore dans celle de François Vescham bes
1 " . du n o m , m oyenn an t la som m e de i 5 oo francs.
Peu après ce traité mourut A n to in e V escham bes, fils du second
lit de François.
A v a n t son décès il avoit fait deux dispositions en faveur de la
m êm e Françoise V esch a m bes, fem m e V alarch e r, qui s’etoit mise
à la tête de la maison.
�*
*î
( 5)
r P a r un premier acte du 14 ma* 1 7 4 4 > ^ lui fit donation de'tous
les droits, est-il d i t , à lui acquis tant par le testament de défunt
F ran çois VeScham bes, son père, qui l ’y n o m m a pour son héritier,
que par le décès de Catherine C o m b a r d , sa m è r e , et par s,es dis
positions portées dans le contrat de mariage de Catherine V e s •chambes, sœur du do nateur, avec d é fu n t N a u fa r i, nom s, raisons
«t actions rescindantes et rescisoires, sous la réserve d ’une somme
de io o o fr. à disposer.
P a r un second acte du 50 octobre 1 7
il disposa de cette
com m e d e 1000 fr . eneore en sa faveur.
A n n e V es clia m b e s, et D o u h e t son m a r i, qui avaient cédé leurs
droits par l’acte du s 5 juillet 1744> o n t eu f^e
mariage une
fille, Jeanne-M arie D o u h et , qui s’est m ariée avec V it a l de D ienne.
C e sont les appelans.
!
C e tte cession du 23 juillet 1744 ¿toit évidem m ent nulle. D o u h e t ,
par le contrat de m a riag e, avoit pouvoir de transiger, p artager,
m ais non de vendre.
En l’an 6 , ladite D o u h et et ledit V it a l de D ienne ont fait citer
au tribunal civil du C a n ta l ladite Françoise V esclia m b e s, et V a larcher son m a r i , en nullité de ladite cession, en partage de la
succession de Jacques V escliam bes et Geneviève la Vüi&sière, et
encore en partage de la succession d ’A n to in e V escliam bes 1 " . du
n o m , pour leur en être délaissé la portion qu ’A n n e V e s clia m b e s,
leur mère et b e lle -m è re , am endoit dans lesdites successions, soit
de son c h e t , soit du ch e f de François 2*. du n o m , son f r è r e ,
décédé ab intestat .
C o n tre la demande en partage des successions de Jacques V e s cham bes et Geneviève V aissiè re, les adversaires ont opposé la ces
sion. Ils ont soutenu que ce lle cession ne p o m o it être raisonnable
m ent attaquée, s o it d ’dprès le pouvoir donné par A n n e Vescliam bes,
alors m ajeure, à D ouhet son m a r i , dans son contrat de m ariage,
de traiter et transiger, soit d ’après le laps de temps qui s ’éloit
écoulé depuis la cession. Ils ont ajouté q u ’ils ne tenoient point
d ailleurs les biens co m m e héritiers de Jacques Vescliambes ; qu’ils
�H
C 6 )
r e jouissoient point à tilre d ’héritiers, q u ’ils jouissoient en vertu
île l’abandon fait en leur faveur, par le seigneur haut-justicier, de
l ’effet de la confiscation résultante du jugement rendu par contu~mace.
'•
Ces moyens ont été facilem ent écartés.
1
C on tre la demande en partage de la succession d ’A n to in e V e s ch am bes, ils ont rappelé le testament de François. Ils ont dit que
François par son testament avoit institué Catherine C o m b a rd
pour son héritière, et destiné à A n to in e une somme de 1000 francs;
q u ’A n to in e avoit ensuite disposé en leur fa v e u r , par les deux
donations ci-dessus, du m ontant de ladite destin ation, ensemble
de tous les droits à lui échus par le décès de Catherine C o m b a r d ,
desquels droits faisoit partie l’institution testamentaire faite en.
faveur de ladite C o m b a rd par François ; qu’A ntoine n ’avoit pas
d ’autres biens.
L e s sieur et dam e de D ien n e ont répondu que l’institution faite
en faveur de Catherine C o m b a rd étoit doublement réductible; que
la donation des droits échus par le décès de Catherine C o m b a rd
ne pouvoit dès-lors porter sur tous les biens de François.
A
quoi il a été répliqué par V escham bes et V alarch e r q u ’A n
toine leur ayant fait donation du m ontant de la destination à lui
faite par le testament du pcre , il étoit non-recevable, et les sieur
et dame de Dienne de son c h e f , à s’aider de la réduction, soit de
la C o u lu m e au quart, soit du retranchement de 1 edit des secondes
noces ; que si on prétcndoit q u ’ Antoine eût d ’autres biens on devoit
l ’établir. C e sont les propres termes de leur défense consignée dans
le jugement.
En cet état, jugement est intervenu au tribunal civil du Cantal
le iG ventôse an 8 , q u i , en ce qui concerne la demande en partage
de la succession de Jacques V escham bes et Geneviève la Vaissière,
a déclaré la cession du 35 juillet 1744 'm ile; a ordonné le partage
des biens dépendans de la succession de Jacques V escham bes et
Geneviève la V aissière, avec restitution des jouissances depuis lo
d é c è i , à l'exception des années pendant lesquelles avoit duré lo
�C i)
mariage dudit D oülict arec ladite A n n e V escliam bes, à la charge
de rapporter la som m e de i 5oo fr a n c s, prix du traité, perçue par
ledit Douliet.
- E t en ce qui concerne la succession d ’A n t o in e ;
»
A tten d u qu’ A n to in e ayant approuvé le testament de François
Vescfïam bes i*r. du n o m , en disposant de la destination à lu i
faite en faveur des défendeurs , les sieur et dame de D ten n e
ne pouvant s ’aider de son c h e f, n i de la réduction au quart>
d’ après la Coutum e, n i de la réduction a la part du\moins
prenant des en fa n s , d’ après l ’ édit des secondes noces ; que^ les
demandeurs n ’ont p oin t établi que ledit A n to in e eût d’ autres
b ie n s, que le montant de la destination à lu i fa ite par son p ère ,
e t les droits à lu i échus du c h e f de sa m ère , de tout quoi il a
d isp osé en faveur des défendeurs ; a débouté les sieur et dam e
de D ie n n e de leur demande.
: ,
Françoise V escham bes et V alarch er ont appelé de la première
partie du ju g e m e n t, qui ordonnoit le partage des successions des
dits Y esch am bes et la Vaissière.
y.
L e s sieur et dam e de D i e n n e , de leur c ô t é , se sont rendus in
cidem m ent a p p e la n s, en ce q u ’ils avoient été condamnés à rap
porter et faire compte de l ’entier prix du traité de 1744» prix
perçu par ledit D o u h e t , à la succession duquel ils avoient renoncé.
Ils auroient pu aussi interjeter a p p e l, en ce q u ’ils avoient été in
définiment déboutés de la demande en partage de la succession
d ’A n to in e à défaut d ’indication de biens , tandis qu ’ils auroient
d u etre déboutés seulement quant à présent. Ils crurent cet appel
sans objet. Ils étoient loin de prévoir la contestation qui leur a
été suscitée depuis.
Sur les appels re sp e ctifs, arrêt est intervenu le 2 thermidor
an 8 en cette c o u r , par l e q u e l,
E n ce qui louche l ’appel incident des sieur et dame de D ie n n e ,
attendu l’articulation fai le par 1rs adversaires , que lcsdits de
D ienne avoient fait acte d ’ héritier dudit D ouh et en s’emparant
du m o b ilie r , a o r d o n n é , avant faire d r o i t , la preuve de l'im
mixtion.
�X s )
Faisant droit sur l’appel principal de Françoise Vescham bes et
V a la r c h e r , a dit avoir été bien jugé.
Vescham bes et V alarch er se sont pourvus en la cour de cassa
tion contre la disposition de Jarret qui les blessoit, mais inuti
lem ent. *
N ’ayant pu réussir de ce c ô t é , ils ont cherché à venir à leur
bu t d ’une autre manière.
»
« Ils ont p r o d u it ,
i°. U n e r e n o n c ia tio n , ou actes énonciatifs d ’une renonciation
faite après la m ort de François Vescham bes par Catherine C o m b a r d , tant pour ses enfans que pour ceux du premier lit , à la
succession dudit V e s c h a m b e s , par acte reçu au greffe de la jus
tice de C h e y la d e , le 2 mars 1700;
20. U n bail à fe rm e consenti par Jacques V esch a m b e s, n onob
stant ladite renonciation du dom aine de la B u t g e , dépendant de
ladite succession, le i 5 avril 1700;
5% U n e ordonnance sur requête du juge de C h eylad e , du 10
avril 170 0 , qui autorise Jacques V escham bes à jouir des b i e n s ,
sans qu'on puisse en induire aucune qualité préjudiciable ;
4“. U n e vente d u 19 avril -1708, faite par ledit Jacques V e s
c h a m b e s, de trois septerées de terre dépendantes de la succession,
m o yenn an t la som m e de 560 fr. ;
5 °. U n acte du 22 décem bre 17 12 , reçu au g reffe de la m êm e
justice de C h e y la d e , par lequel Jacques V escham bes déclare ap
prouver la renonciation faite par Cath erin e C o m b a rd le 2 mars
170 0, pour, et en son nom ;
6°. U n e sentence du 14 m ars 1721 , rendue contre un créan
cier q u i , en conséquence desdites renonciations , congédie V e s
chambes des poursuites faites contre lui , s a u f au créancier scs
actions contre le curateur nom m é à la succession va ca n te , nomination qui est rappelée dans le vu de la sentence;
7 9. U n acte de ch eptel, du i ,r. octobre 1758, par lequel, après
la disparition de Jacques V escham bes , ses e n fa n s , et A n to in e
et Pierre V e s c h a m b e s , scs f r è r e s , fils du second U t, déclarent
avoir
�r 9 )
nvoir pris à li Ire de cheptel vingt-quatre va ch e s, et autres lêtes
de bestiaux pour garnir le d o m a in e;
8°. D es reçus de re n ie s , et extraits des rôles d'impositions
jusqu'en 1 7 ^ 7 ;
'
1
9°. U n e requête présentée par A n lo iiic Vcscîiàm bes a 1 éjection
de S a in t-F lo u r , le i 5 février 1 7 4 3 , ’daris laquelle il a exposé que
les percepteurs des années 1758 , 1759 et 174° »voient lait saisir
sur Jacques Y escham bes , faute de’ payement des impositions-,- les1
ir.uils pendans par r a c in e , desquels fruits ils s étoîent' rendus ad
judicataires co m m e des biens dudit Jacqües V e s c h a m b e s , ignôrant’
le testament de François Vescham bes , par lequel il avoit été ins-i
titué héritier ; q u ’il venoit de découvrir ce testament ; qu’étànt
héritier il ne pouvoit être adjudicataire de sa propre chose ; qu ’e n 1
¿onséquence il demandoit à être déchargé du prix de l ’ adjudica»-;
lion ; requête suivie de sentence adjudicative des coirclliSiohs, dû
22 du m êm e m o i s , rendue par d é f a u t , tant contre les consuls
que contre Jacques V escham bes.
De
tous ces actes
ils ont
.
conclu que Jacques
V esch a m
bes n^avoit absolument aucun droit sur les biens d e . Françoi'Sj
i ' \ du nom ; que , par s i renonciation et par lèi tèstament
de François , testament qui
avoit été- confirmé
par la sen
tence de l’élection de S a i n t - F l o u r , tous les biens etoient sur
la tête d 'A n to in e , dans la succession duquel A n to in e les sieur
et daine
de D ienne n ’avoienl rien
à réclamer , puisque , par
le m êm e jugement dont ils poursuivoient l’ex é cu tio n , ils avòient
été déboutés de leur deniimde en partage à cet égard ; que dèslors il ne d e v o i t e n t r e r dans le partage ordonné de la succes
sion de Jacques^STilnn>l w
que ses biens personnels , c ’est - à -
d ir e , les biens par lui a c q u is , consistant en un petit domaine
appelé de la C o s t e , et aucun de ceux ayant appartenu à F ran
çois. A insi
les biens
qui d ’abord ,
pouvoir s ’aider de la cession du
et
tant q u ’on
22 juillet
avoit
cru
1 7 4 4 , éloient sur
la tête de Jacques V e s c h a m b e s , se sont trouves (oui à coup
snr la tête d ’Antoine.
B
�i l
( 10 )
D e ces mêmes actes ils ont inféré de plus, i°. que Jacques V e s chambes ayant constam m ent joui, et n ’ayant joui que com m e créan
cier , sa succession étoit comptable de toutes les jouissances par
lui perçues jusqu’en 1738 , s a u f à lui faire raison de ses créances;
2°. Que la succession étoit pareillement comptable de la valeur
des fonds q u ’il avoit aliénés;
5 °* Q u ’elle étoit également com ptable du m o b ilie r , et notam
m ent du cheptel qu ’il avoit dissipé ; que le cheptel avoit été
tellement dissipé, qu ’après sa fuite ses enfans et ses frères avoient
été obligés de prendre d ’autres bestiaux à cheptel pour garnir
le dom aine.
L e s sieur et dam e de D ien n e
ont rép o n d u que la renon
ciation avoit été sans e f fe t , puisqu’il résultoit des pièces m êm es
produites ' par les adversaires q u e , nonobstant la renon ciation,
il avoit v e p d u , a f f e r m é , et constam ment joui.
Ils ont dit que quand on donneroit à la renonciation tout
son e f f e t , il auroit acquis un nouveau droit par les cessions ou
par
le décès ab intestat de presque tous les enfans
tant du
premier que du second lit.
Ils ont produit un acte du 21 octobre 1714» par lequel
M arguerite ,y e s c h a m b e s , autre fille du second l i t , en approu
vant , est-il d i t , tous actes c i - d e v a n t fa its.e t règlemens de ses
d r o its , cède et transporte audit Jacques V escham bes tous sesdits droits , parts et portions èsdites successions de ses défunts
père et mère et autres q u elco n q u e s, m o ye n n an t la somme de
750 fr. et une bourète de ¡vache; a u ( m oyen de quoi elle quitte
et renonce auxdites
successions > et ià toutes
autres
directes
et collatérales échues et à échoir g é y ^ ’alerrrrrtt quelconques.
E n cet é t a t , Jacques Y a la r ch e r est décédé. Françoise Vescham bes , sa femme , a repris l’instance. Jeanne V alarchcr et
A n to in e F a u c o n , ses gendre et fille , sont interven us, et ont
adhéré aux conclusions prises par leur beau-père et belle-mère.
Ils ont répondu à
l’acte du 21
octobre
1714 , produit par
les sieur et dam e de D i e n n e , que cet acte étoit nul
com m e
�<*>£■
( «
/
)
contenant une renonciation à des successions échues et à é c h o ir ,
uniquo pretio.
L a cause portée à l ’audience , jugement est intervenu le 8
prairial an 1 1 , contradictoire entre les p a rtie s, doht voici les1
principaux motifs et le dispositif.
‘
« A tten d u , est-il dit , enlr’autrés motifs , que Jacques Y e s » cliambes ayant renoncé à la succession de son père, ses en'ans
» ne peuvent pas prendre sa place et succéder à leur aïeul.
» ï°. Jacques V esch a m bes n ’étoit pas marie a 1 époque de la
» m o rt de son père ; il ne s’est m arié q u ’en 1 7 0 7 , et son père
» étoit m o rt avant le 2 mars 17 0 0 ; ses enfans n ’étoient à cette
» époque ni nés ni c o n ç u s , et la renonciation de Jacques V e s » chambes ayant un effet rétroactif au m om ent de la m ort de son
» père , ses enfans ne pouvoient pas venir à la succession de
» leur aieuli 20. L e s enfans de Jacques ne pourroient venir à
» la succession de leur aïeul que par représentation de leur
» père : il est de principe consacré par une jurisprudence irrévo» cable , qu ’on ne représente pas une personne vivante.
» A tten d u que par l ’acte du 21
octobre 1 7 1 4 » passé entre
» Jacques Vescham bes et Marguerite sa sœur , du second l i t ,
» par lequel ladite Marguerite a renoncé aux successions de ses
» père et mère , et autres collatérales échues et à échoir , au
» profit
de
Jacques ,
m o yenn an t 760 fr . et
une
bo u rète,
>> ladite M arguerite a déclaré q u ’elle avoit fait des actes , par
» lesquels elle avoit réglé ses droits successifs dans lesdites suc» cessions; que la
som m e de y 5 o fr,
» légitime portion dans
les biens de
étoit sa
juste part
sesdits père
et
et
mère ;
» pour avoir une parfaite connoissance de leur co n sista n ce , et
» qu ’en subrogant par le m êm e
acte sondit frère à tous ses
» droits , pour par lui en avoir son recours sur lesdites succcs» sions , ainsi qu’il aviseroit, elle ne lui a point cédé scs droits
» rescindans et rescisoires, d ’où il résulte q u ’il n ’a e u , en vertu
* de cet acte de 1 7 1 4 » d ’autres droits que celui de demander
B 2
�(' «
)) à la succession de son
père la
)
somme
de 7 5o
fr. , et la
» bourète.
» A tten d u
q u ’ayant renoncé à la succession de son père ,
v Jacquçs Vescham bes s.eroit aujourd’hui non-recevable à criti—
» quer le testament dè son p ère ; et que cette fin de non-rece» voir ne peut être valablement opposée à un héritier repré;> sentant ledit Jacques.
» L e tribunal déboute les sieur et dame de D ien n e de leur de» m ande tendante à .ce que la.succession de Jacques V escham bes
» soit composée d ’une portion des biens de François Y escham bes :
» ordonne que la succession de Jacques Y escham bes sera com posée,
» 1°. du quart des biens de M arie la Jarrige sa m è r e , et des inté-
» rets à compter de 1 7 5 8 , époque à laquelle Jacques V escham bes
« s’est absenté, et a cessé de jouir en com m un des biens de F ra n » cois son, père; 20. des biens par lui acquis,, des jouissances telles
» q u ’elles sont fixées par le jugement du C a n tal , du iG ventôse
» an 8 ; 5°. de la somme de 7^0 fr. et de la valeur d ’une bou» r è t e , pour le prix de la subrogation à lui faite par M arguerite
» V e s c h a m b e s , sa sœur du second l i t , par l’acte du 21 octobre
» 171/f, avec intérêts à. compter de 17 3 8 ; 4 “. des créances que
» les parties de D u bois établiront avoir été payées par Jacques
» en l’acquit de la succession de François V escham bes , avec les
» intérêts à compter de 1 7 5 8 , si mieux n ’aiment les parties de
» D u bois rendre compte des jouissances du domaine de la B u lg e ,
» à compter de 1701 , jour du bail fait par Jacques Vescham bes
a des bienç.fje spn( p è r e , à la. déduction des nourriture et entre» tien des frères et sœur dudit Jacques; auquel c a s , le tribunal
)i ordonne que les intérêts des créances ci-dessus entreront dans
» 1.) tuasse de la succession de Jacques V es ch a m b e s, à com pter
» de l’époque où elles ont été pavées par ceux de la créance de
» 760 fr. et dç la valeur de la bom ète , et entreront dans la
» n ia s s e , de ladite successiot) à çpmptv«’ du 21 octobre 1714 , et
» ceux de la portion de la dot do Marie la Jarrige revenant à
» Jacquts V e s c h a m b e s , à compter de la m ort de François V e s -
�» c h a m b c s , sa u f aux demandeurs à lenir compte aux défendeurs
» des créances que ceux-ci prétendent et justifieront avoir payées
» en l’acquit de Jacques V e s c h a m b e s, suivant la liquidation qui
» en sera faite par les experts qui seront nom m és , et c e , sur les
» pièces que les défendeurs leur remettront : sur le surplus des
» d e m a n d e s, m et les parties hors de c o u r , dépens compensés. »
L e s sieur et dam e de D ienne ont interjeté appel de ce juge
m ent par acte du 6 germinal. L a veuve V alarcher s ’est rendue
aussi appelante par acte du 14 du m êm e mois , en ce que toutes
les conclusions par elle prises ne lui avoient pas été adjugées.
P endant que les parties étoient ainsi en instance au tribunal
de M u r â t , pour fixer la consistance de la succession de Jacques
V e s c h a m b e s , dont le partage a été ordonné par l’arrêt de celle
c o u r , du 2 thermidor an 8 , confirm atif à cet égard du jugement
de S a in t-F lo u r,
elles exécutoient l’autre disposition du même
a rrê t, q u i , avant faire droit sur l'appel incident interjeté p a r le s
sieur et dam e de D ien n e du jugement de S a in t-F lo u r, en ce que
par ce jugement ils avoient été condamnés à rembourser la somme
de i 5 oo f r . , prix du tra ité , nonobstant la renonciation faite à
la succession de D o u h e t , avoit ordonné une enquête sur le fait
d ’imm ixtion. 11 a été procédé de part et d ’autre devant le tri
bunal de M u r â t , com m is à cet e f f e t , à l’enquête et contreenquête.
L a cour a ainsi à statuer sur trois appels:
i°. Sur cet appel in cid e n t;
2°. Sur le nouvel appel interjeté par les sieur et dame de D ienne
du jugement de M u r â t , dont on vient de rendre co m p te;
E l sur l’appel incident de ce m êm e ju g e m e n t, interjeté par la
veuve V alarcher.
L e lout a été joint par arrêt du oo germinal dernier.
On ne s’occupera point ici du premier de ces trois appels; il
suffira de discuter à l’audience le mérite des enquêtes.
O n ne s’occupera que de l’appel respectivement interjeté par les
pnrlies du jugement de M urut , cl on ne proposera m êm e que
quelques réflexions.
�■ l*
( H
)
Depuis leur appel, les sieur et dame de D ie n n e , par la com
munication q u ’ils ont prise des pièces des adversaires, et par la
recherche des actes énoncés dans ces pièces , ont eu connoissance,
i°. D ’un acte passé entre Jacques V escham bes et Catherine
C o m b a rd le 3 mars 1710. Par cet acte , Catherine C o m b a r d ,
tant en son nom propre et privé que com m e m ère pieuse de ses
e n fa n s, et dudit François V e s c h a m b e s , a subrogé ledit Jacques
Vescham bes aux droits et hypothèques, part et portion que sesdits
enfans pouvoient prétendre sur la succession de leurdit défunt
p ère, soit par la destination portée au contrat de mariage de leur
feu père avec ladite C o m b a r d , qu’ autrem ent ; sa vo ir, pour C a th e
rine V e s c h a m b e s , fille a în é e, la som m e de 800 f r a n c s , et en.
p ayem ent d ’ic e lle , la maison , jardin et hérial , quatre brebis
et quelques m eub les; pour M arguerite et Françoise V e s ch a m b e s,
la somme de 600 fr. ch a cu n e ; et pour A n to in e et P ie r re , celle
de 55 o fr. chacun. L ad ite C o m b a rd , traitant ensuite de ses
droits personnels, cède et transporte audit Vescham bes tous ses
d ro its, est-il d i t , actions e t prétentions qu*elle a par préférence
sur les biens de Vescham bes son m ari, en quoi qu'ils consis
tent ou puissent co n sister, e t , par e x p r è s , le m ontan t de ses
conventions matrimoniales rappelées dans l’ acte , m o yen n an t la
som m e de 2700 fr. , dont partie est payée co m p ta n t, et le surplus
stipulé payable à terme. C e t acte a été découvert depuis l’appel'.
20. D u contrat de C atherine V esch a m bes l’alnée des enfans
du second l i t , du 14 mars 1 7 1 0 , par lequel elle se constitue par
exprès la maison , jardin et hérial à elle délaissés par le précédent
acte ; ce qui est de sa part une approbation dudit acte.
5°. D ’ un acte du 4 juin 1744* P ar lequel ladite Catherine V e s
chambes , fem m e N a u fa r y , alors v e u v e , cède et transporte à
Jacques V a la r c h e r , mari de Françoise Veschambes , c e qui pouvoit
lui rester du com m e héritière contractuelle de ladite Catherine
C o m b a r d , des causes du traité dudit jour 5 mars 1 7 1 0 , en ca-?
pilai ou intérêts , m oyenn an t la somme de 2000 fr,
�t)
( i5 )
4°. D ’un acte du i 5 février 1745 en Ire M arguerite Y e sclia m b e s,
qui avoit cédé ses droits à Jacques V e s ch a m b e s, par l ’acte du 21
octobre 1 714 rappelé ci-dessus, d ’une p a r t , et Valarclier d ’autre
p a r t , par lequel les parties , est-il d i t , étant venues à compte des
causes dudit tra ité , il s’est trouvé resté dû à ladite Y e s c lia m b e s ,
en capital ou intérêts, la somme de 749 fr* sur laquelle M arguerite
Vescham bes fait remise de celle de 124 f r . , et Y alarclier paye ou
s ’oblige de payer le surplus.
T e l est l’état de la cause.
Si le jugem ent de Saint - F l o u r , qui n ’ a point été attaqué
en cette p a r tie , avoit déclaré les sieur et dame de D i e n n e , à
défaut
d ’indication d ’autres b i e n s , no n -re ce va b le s
seulement
quant à présent dans leur demande en partage de la succes
sion d 'A n to in e , la question desavoir si les biens é to ien tsu rla tête de
Jacques ou d ’A n to in e seroit oiseuse ; ce qu ’ils n ’auroient pris dans
la succession de Jacques, ils l’auroient pris dans celle d ’A n t o in e ,
sa u f le prélèvement en faveur de V escham bes et V alarcher des
deux donations, de la destination paternelle, et des droits échus
de la m è r e , consistant pareillement dans la destination faite par
celle-ci.
Mais] le jugement les a déclarés indéfiniment non-recevables ,
et les adversaires se prévalent de cette disposition.
A v a n t , tout étoit à Ja cq u e s, et rien à A n t o i n e ; aujourd’hui
tout est à A n t o in e , et rien à Jacques.
L e s sieur et dame de D ien n e ont été exclus du partage de
la succession d ’Antoine. Il a été jugé e ffe c tiv e m e n t, et cette
disposition qui n ’a point été attaquée a acquis l ’autorité de la
chose jugée , q u ’ils n ’avoient rien à y réclamer.
M ais il a été jugé aussi que la succession consistoit unique
m ent dans la som m e de 1000 fr. destinée par le p è r e , et dans
les droits échus par le décès de la m è r e , droits qui se réduisoient pareillement à la destination faite
par lu mère dans le
�V!
( iS
co n lra l de mariage de
)
Callierine V cscham bes avec N a u f a r y ,
par lequel co n lra l de mariage la mère avoil institué ladite C a
therine Vcscham bes pour son héritière.
Les
adversaires ne peuvent pas scinder les dispositions du
jugement.
S ’ils ve u le n t,’ en vertu
du
ju g e m e n t , exclure
les
siéur et dame de D ien n e de la succession , il fa u t q u ’ils reconnoisscnt en même temps que cette succession se réduisoil aux
deux objets ci-dessus , à la destination à lui faite par le p ère ,
et à celle faite par la mère.
S ’il en étoit au tre m e n t, ils profiteroient de leur dol contre
la m a x im e , Nernini sua Jraus 'patrocinan debet.
L orsque pour parer au partage de la succession d ’A n t o i n e ,
ils ont borné la succession au m ontant de la destination pater
nelle
et
maternelle , lorsqu’ils ont
déclaré qu’ il n’ avait pas
drautres biens , ils ont volontairement renoncé à l’ effet de la
sentence de l ’élection de S a i n t - F lo u r , à l ’effet de la renoncia
tion de J a c q u e s , et de tous les autres actes q u ’ils opposent au
jourd'hui.
C e lle observation seule dispenseroit d ’entrer dans une plus
grande discussion ; mais allons plus loin.
P o n r r o i t - o n scinder le ju g e m e n t ; v o u d r o i t - o n
décision du
m o t if ,
faire abstraction
de
la
séparer
déclaration
la
des
adversaires ; il seroit facile d ’établir q u ’A n toin e n ’ avoit effec-*
tivement pas d ’autres biens.
C ’est une erreur d ’avancer qu'il étoit héritier institué du pèrer
il n ’avo it, par le testament du père , qu'une som m e de io o o fr,
A la vérité il est dit q u ’à défaut d ’élection de la part de la
mère , le père le no m m e dès à présent pour son héritier. Maid
ce n ’est q u ’à défaut d ’élection ; et la mère
elle-même n ’ étoit!
tenue d ’élire, e i d e remettre l’hérédité, q u ’en cas de convoi, L a
v o c a t i o n d ’ Antoine à l'hérédité, dependoit d ’une double condi
tion , du défaut d ’élection , et encore du cas de convoi ; et de
ces deux 'conditions subordonnées elle-mémcs l’une à l’autre , la
p rincipale, le cas du co n v o i, n ’est point arrivée. L a sentence de
l ’élecliou
�( *7 )
l'élection de Saint-FIour n ’a pu lui donner un droit qu’il n ’avoit
pas. Cette sentence porte sur un fait inexact. A u surplus , elle
a été rendue par défaut , et elle est susceptible, et d ’opposition,
et d ’appel ; les sieur et dame de D ienne sont encore en temps
utile pour l’attaquer. En e f f e t , par l ’arrêt du 2 thermidor an 8 ,
confirm atif à cet égard du jugement de Saint-FIour , la cession
faite par A n n e V escham bes et son mari de leurs droits dans la suc
cession de Jacques V escham bes , a été an n u llée, et les parties
remises au m êm e et semblable état q u ’elles étoient avant ladite
cession. L a cession est du a 3 juillet 1744*
sentence de l ’élec
tion de S a in t-F Io u r est de 1743. Il ne s’étoit écoulé entre la
sentence et la cession qu ’un an. À
l ’époque de la cession , les
sieur et dame de D ienne étoient donc en temps utile pour atta
quer la sentence, soit par la voie de l ’op p osition , soit par la
voie de l’appel ; et par l’arrêt de la cour ils ont été remis au
m êm e état q u ’ils étoient alors. O11 ne pense pas que les adver
saires insistent sur une sentence évidem m ent surprise à la reli
gion du tribunal qui l ’a rendue. D a n s tous les c a s , les sieur
e t dam e de D ie n n e déclarent subsidiairement s’en rendre inci
d e m m e n t appelans.
A n to in e n ’avoit donc , par le testament du
père , que la
som m e de 1000 fr.
P a r le décès de Catherine C om b a rd , il n ’a eu
également
q u ’une destination en argent. O n a vu que Catherine C o m b a rd
a institué pour son héritière Catherine V escham bes sa fdle aîn ée,
fem m e N a u fa r y .
Q u e les adversaires ne disent pas qu’ils sont également aux
droits de Catherine Vescham bes , au m oyen de la cession et subro
gation que celle-ci leur a consentie par acte du 4 juin 1744; car il
fa u t bien remarquer que cette cession n ’est que particulière. Par
cette cession , Catherine Vescham bes n ’a pas cédé la généralité
de ses droits ; elle n ’a pas cédé l’effet de l’institution contrac
tuelle faite en sa faveur par ladite Catherine Com bard : elle n ’a
cédé que le restant des sommes ù elle dues des causes du traité
C
�( i8
)
ilu S mars 1 7 1 0 , passé entre Jacques Vescham bes et Catherine
C om b a rd .
(¿u'on ne dise pas encore q u ’alors les biens aurolent appartenu
à ladite Catlierine V esch a m b e s, en vertu de l’institution faite en
sa f a v e u r , et que les sieur et dame de D ienne seroient également
sans dro it; c a r , indépendamment de l ’acte du 3 mars 1710 , par
lequel la mère, avant de marier sa fille, avoit déjà cédé et transporté
à Jacques Vescham bes tous les droits, actions et prétentions qu’elle
avoit sur les biens de son m a r i, lesquels n e pouvoient , par con
sé q u en t, faire partie de l’institution, on opposeroit la prescription
.de près d ’un siècle ; prescription que Catherine Vescham bes ne
pourroit écarter sous prétexte de co h a b itatio n , ayant été m a riée ,
et hors de la m a iso n , dès 1710.
E t cette prescription n ’a point p ro fité , m êm e en partie , à
A n to in e . Ici on com battra les adversaires par leurs propres armes.
-Leur défense contre la demande form ée par les sieur et dame de
D i e n n e , du c h e f d ’A n to in e , en réduction de l’institution faite par
François en faveur de Catherine C om b a rd , soit au quart d ’après
la C o u tu m e , soit à la portion de moins prenant d ’après l ’édit des
secondes n o c e s , défense consignée dans l ’attendu du jugement de
S a in t-F lo u r , a été q u ’A n to in e ayant approuvé la destination de lé
gitime à lui faite par le p è r e , il ne p ou v oit, ni les sieur et dame de
D ie n n e de son ch ef, demander laréduction. On va tourner contr’eux
le mêm e m oyen. L e légitimaire qui approuve la destination devient
étranger aux événemens de la succession ; il y est aussi étranger
que la fille forclose : il n ’a pas m êm e droit aux réserves coiiîuniières. C ’e s t , en effet , un principe constant , que le légitimaire
ne peut cumuler la destination et les réserves coutumières. A n
toine ayant approuvé la légitime n ’a donc pu p ro fiter, mêm e en
p a r t i e , de la proscription qui s’est acquise contre Catlierine V e s charnbes.
C V s t donc sans fondement , et contre la teneur des a ctes, que
les adversaires, changeant de langage, ont soutenu an tribunal de
M urât que la propriété résidoit sur la tête d ’A n toin e V escham bes.
�y
c 19 )
L e seul titre apparent à l ’appui de celte prétention in ju s te , est
la sentence obtenue en l ’éleclion de Saint-Flour. M ais cette sen
ten ce , contraire aux termes du te s ta m e n t, susceptible d ’être atta
q u é e , et attaquée en effet par l’appel incident qu ’on a déclaré in
terjeter , ne sauroit être d ’aucune considération.
V oudroit-on donner à cette sentence tout son effet ? elle a con
firmé le testam ent; elle a jugé que l'institution testamentaire devoit profiler à A n to in e : mais elle n ’a , ni p u , ni entendu donner au
testament plus d ’effet q u ’il 11c pouvoit en avoir. O r le testament,
s’il ne pouvoit êlre s u j e t , à l’égard d ’ A .n lo in e , au retranchement
de l ’édit des secondes noces , éloit toujours sujet à la réduction
au quart de la Coutum e. C ette sentence n ’auroil jamais opéré
contre Jacques Vescham bes une forclusion tolale.
E t qu ’on ne dise pas que Yattendu du jugement de Saint-Flour
a jugé que les sieur et d a m e de D ien n e ne pouvoient s’aider de
la réduction j car c ’est du ch e f d 'A n to in e , com m e A n toin e a ya n t
approuvé le testa m e n t, et non du ch e f de Ja cqu es, qui n ’a jamais
rien approuvé , et de la consistance de la succession duquel on ne
s’est m êm e pas occu p é, parce q u ’il falloit avant tout savoir si on
seroit admis au partage de sa succession, si le traité seroit annullé.
Sur qui résidoit la propriété du domaine ? non , encore une. fo is ,
sur la tête d ’A n t o in e , q u i, au contraire , étoit réduit à une légitime
en deniers , tant du c h e f du père que du ch e f de la mère , mais sur
la tête de Jacques , qui à sa portion directe réunissoit, ou à litre
successif par le décès ab intestat * ou par cession et tra n sp o rt, la
portion de presque tous les autres frères et sœurs.
N ous disons à titre successif: les deux enfans du prem ier l i t ,
Jean et Marguerite 1” . du n o m , sont décédés ab intestat cl sans
enfans.
P ar cession : Catherine C o m b a r d , par l ’acte m êm e du 5 mars
1710 , a cédé et les droits q u ’elle am endoit, et les droits et portions
héréditaires de chacun des enfans du second l i t , à la charge par
Jacques V esch a m bes de payer tant à chacun.
�( 20 )
Catherine Vescham bes a ratifié cet acte le le n d e m a in , en se
constituant dans son contrat de mariage ce qui lui avoit été assuré
par ce traité. Elle l ’a ratifié plus expressément encore , en cédant
depuis à V alarch er ce qui lui restoit du des causes dudit traité;
et V alarch er l’a approuvé lui-m êm e en prenant celte cession.
C o m m e aux droits de cette Catherine V escham bes Jacques V e s
cham bes a eu d r o it , non-seulement à la portion héréditaire qu ’elle
a m e n d o it, mais encore à la somme de 5 ooo fr. donnée par préciput au premier des e n f a n s , filles ou m â le s, à naître du mariage.
M arguerite 3*. du nom , veuve R o ch e , l ’a approuvé, el expres
sément par l’acte du 21 octobre 1 7 1 4 > e t ta citem en t, en ne reve
nant point dans les dix ans ni dans les trente.
V en on s au m o t i f qui paroit seul avoir déterminé les juges de
M u r â t à la renonciation de Jacques.
Quelle que soit cette renonciation , le jugement contient d ’abord
une erreur : A tte n d u , porte un des motifs , qu’ ayant renoncé à
la succession de son pcre , Jacques Vescham bes seroit aujour
d’ h u i non-recevable à critiquer le testament de son père. C ’est
en quoi les juges ont erré. Sans d o u te , pour demander la réduc
tion au quart portée par la C o u t u m e , il faut être héritier: mais
il n ’en est pas de mêm e pour le retranchement de l’édit des se
condes noces ; il n ’est pas nécessaire d ’être héritier pour demander
la réduction portée par l ’édit. Q u ’on lise P o t h ie r , L e b r u n , traité
des Successions; R i c a r d , nom bre
i
3 o i ; R e n u s s o n , t ra ité jie la
C o m m u n au té . L a raison e st, qu ’ils tiennent ce bénéfice d e l à lo i,
non com m e héritiers, mais co m m e enfans. L'institution faite par
le testament de François en faveur de Catherine C o m b a r d , n ’étoit
pas seulement réductible au quart d ’après la C ou tu m e ; elle étoit
encore réductible à la portion du
moins prenant par l ’édit des
secondes noces ; et quelque effet qu ’on veuille donner à la renon
ciation de Jacques V e s c h a m b e s , il auroit toujours eu droit au
retranchement. Pour l ’en exclure, il faudroit q u e lle comprit expres
sément le retranchement.
�- M ais quelle est c e lle renonciation ? D e quel poids peut être
une renonciation , qui n ’a été opposée q u ’aux créanciers pour sus
pendre leurs poursuites!, qui a demeuré sans effet dansila fa m ille ;
nonobstant laquelle il a j o u i , et non-seulement jo u i , mais -vendu,
et fait tous les actes de propriétaire.
' E t qui oppose cette renonciation ? une fille du r e n o n ç a n t , F ra n
çoise Vescham bes , qui seroit elle-même exclu e, si la cour s’y
arrètoit.
C e lt e renon ciation, dans aucun cas , ne pourroit com prendre
que la portion directe ; elle ne pourroil comprendre les portions
q u ’il a acquises des frères et sœurs , ou par cession et transport,
ou par leur décès ab intestat , com m e on vient de l’expliquer.
E t dans ces portions des frères et sœurs il auroit r e p r is , en
p a r tie , m êm e la portion directe qui par la renonciation se trou
verait avoir accru à tous les frères.
L e bu t q u ’on se propose dans ce m om ent n ’étant que de don
n er une idée de la c a u s e , on ne s’étendra pas davantage. O n se
réserve de développer à l ’audience les m o yens qui se présentent
pour écarter cette renonciation.
O n ne dira également q u ’un m ot sur le m o t i f que les juges ont
inséré dans le ju g e m e n t, relativement à la cession faite par M a r
guerite V escham bes 3*. du nom , par l ’acte du 21 octobre 1 7 1 4 .
Ils ont décidé que cet acte n ’assuroit à Jacques V escham bes qu ’une
reprise de 750 i r . , et non le droit de réclam er la portion héré
ditaire de ladite M arguerite V es c h a m b e s; parce q u e , d ise n t-ils
elle a annoncé dans cet acte que ses droits avoient été précédem
m e n t réglés , et qu ’elle n ’a pas cédé les actions rescindantes et
rescisoires.
E t quel besoin avoit-elle de céder les actions rescindantes et
rescisoires, puisque c ’est avec Jacques V escham bes lu i-m êm e que
les droits avoient été précédemment réglés par l ’acte du 3 mars
1790?
Q u importe q u ’elle n ’ ait point cédé le« actions rescindantes et
�rescisoires , puisqu’elle n 'a point réclam é ; et que non-seulem ent
elle n ’a point r é c la m é , m ais que soit e lle , soit Jacques V a la r c h e r , on t tout a p p ro u v é , tout ratifié par l ’acte portant arrêté d e;
co m p te , du 15 février
M ' . P A G E S - M E I M A C , jurisconsulte»
M*. C R O I Z I E R , avoué.
o
"
■
: :!
..i
!
'
-i
-
• rc
.
.
*T’ ' i:
.
‘
• i:
A R io m
de l’im p rim erie de L a n d r i o t , seul im prim eur de
1
la C o u r d ’appel. '
-;
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. De Dienne, Vital. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac
Croizier
Subject
The topic of the resource
renonciation à succession
successions
gain de survie
secondes noces
contumace
généalogie
biens dotaux
droit coutumier
homicides
testaments
confiscations
élevage bovins
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Sieur Vital de Dienne, et dame Jeanne-Marie de Douhet son épouse, appelans ; contre Françoise Veschambes, veuve de Jacques Valarcher, Jeanne Valarcher, et Antoine Faucon son mari, intimés et incidemment appelans.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1685-Circa An 13
1661-1715: Règne de Louis XIV
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1603
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1604
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53277/BCU_Factums_G1603.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Cheylade (15049)
Le Buge (domaine de)
Espagne
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
confiscations
contumace
Droit coutumier
élevage bovins
gain de survie
généalogie
homicides
renonciation à succession
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53278/BCU_Factums_G1604.pdf
f702618a802fe521ab0e4208200b6974
PDF Text
Text
m em oire
.
�Sí
G E N E A L O G I E
DES
PARTIES.
F ra n ço is V e s c lia m b e s,. m arié d eu x fois.
E n secondes noces
a
C a th erin e C o m b a rt.
E n p rem ières noces
M a rie la J a rrig e.
JeanJacq ues,
a
C la u d e .
G e n e v iè v e
la
V a is s iè r e .
M a rg u e rite . M a rg u e rite .
fo rclo se ,
à
F ran ço is
S am son .
C a th e rin e ,
idc n i
à
F ra n ço is
V escham bes.
,
M a rg u e rite , F ra n ç o ise ,
a
Ja cq u es
A n to in e
V a la rc h e r.
D a u z a t.
I
Jeanne,
à A n to in e
F au co n ;
intimés
et
appelan$.
A
¡E n grem y.
!---M ich elle ,
F ra n ço ise
F ra n ç o is ,
m ort sans
p o sté rité
après
le père.
M arg u e rite
à
N . R och e.
A n to in e ,
a in stitu é
Jacques
V a la rc h e r.
C a th e rin e ,
P ie r r e ,
à
m ort sans
Jean
p o s té rité ,
N au fa ri.
a in stitu é
M a rg u e rite
fpm m e
P ierre.
D a u za t.
I
A nue,
à
Jacq u es
de D o u e t.
I
Jeann e,
v îta l
de D ien n e;
appelons..
=JÎ
�P RECI S
E N
R E P O N S E ,
POUR
F r a n ç o i s e V E S C H A M B E S , veuve de Jacques
V a la rch er
; J e a n n e V A L A R C H E R , et
A n t o i n e F A U C O N , son mari , intimés et
incidemment appelans ;
CONTRE
Sieur
D E D I E N N E , et dame J e a n n e M a r i e D E D O U E T , son épouse, appelans
d'un jugement rendu au tribunal civil de M urat,
le II prairial an I I .
L A
V ita l
dam e de D i e n n e o c cu p e dep u is
lon g -tem p s les
t r i b u n a u x , d ’u ne v ie ille r e c h e r c h e sans i n t é r ê t , q u i jus
q u ’ici n ’a e u d ’au tre o b je t q u e d e d iv u lg u e r les m alh eu rs
d e sa fa m ille.
A
�H
( O
Un succès éphémère l’a enhardie dans ses prétentions ?
mais sa proie lui échappe au moment de la saisir ; et si
les intimés avoient été assez heureux pour avoir dans
les mains les titres, dont ils justifient maintenant T l’arrêt
de la cour, du 2 thermidor an 8 , auroit décidé dans un
sens tout contraire.
Mais aujourd’hui les suites de cet arrêt ne sont plus
effrayantes. La dame de Dienne a attaqué, contre ses inté
rêts , un traité de famille qu’elle devoit respecter. Il est
prouvé qu’elle a. plus à rendre qu’elle ne doit espérer
de recouvrer ; elle essaie de lasser la patience de ses cohé
ritiers par des discussions sans nombre ; elle ne viendra
pas à to u t de ses desseins ", elle succombera dans ses.
prétentions..
O n va présenter l’aperçu de cette cause * on élaguera
tous les détails inutiles. La généalogie jointe au mémoire
apprend l’état et les qualités des parties. On analisera
rapidement les titres qui ont donné lieu à la contes^
tation.
F A I T
S.
O n voit que François Veschambes, auteur commun
des parties , a été marié deux fois; qu’il a eu quatre
enfans d’un premier mariage, et cinq du second.
Far son second contrat de mariage avec CatherineCômbart, du février i
, sa seconde épouse se cons
titue une somme de 2700 fr. dont 300 pour meubles.
François Veschambes légitime ensuite ses enfans du pre
5
685
mier lit¿ et ceux (l u* pourront naître du nouveau mariage..
�JS
f
>
3)
Il constitue à Marguerite Yeschambes, sa fille aînée , une
somme de iooo fr. ; à autre Marguerite, 700 f r . , et à Jac
ques Veschambes, 1000 fr. ; et donne, par préciput et
avantage , aux enfans qui proviendront de son second
mariage, et au premier qui naîtra , soit fille o u garçon,
la somme de 3000 fr» de son clief, et aux autres, une
somme de 1000 fr.
L e 24 mars 1696, F r a n ç o is V e s c h a m b e s fit son tes
tament; il légua à A n t o i n e et Catherine Veschambes,
ses enfans du second l i t , et à chacun, une somme de
1000 f r . , et aux autres trois enfans la somme de 700 fr.
chacun.
Il institue pour son héritière générale et universelle
Catherine Com bart, son épouse, à la charge de payer
les légitimes , tant des enfans du premier que du second
lit. Il veut qu’en cas de convoi, sa femme soit privée de
l ’hérédité; qu’elle la rende à un de ses enfans, et du tes
tateur , que bon lui semblera , sans qu’elle soit tenue à
aucune reddition de compte ni payement de reliquat.
Si sa femme vient à décéder sans avoir fait son choix,
il veut et entend qu’Antoine Veschambes soit son héri
tier; mais cette disposition est toujours subordonnée à
l’élection de Catherine Combart.
François Veschambes, testateur, est mort le 23 février
*1700. L e 21 mars suivant, sa veuve prenant la qualité de
tutrice des enfans, tant du premier lit que du second, répu
dia a la succession de son m ari, par acte mis ou greffe de
la justice de Cheylades : il fut nommé un curateur à la
succession vacante ; mais , dans la même année, Jacques
Veschambes, fils aîné du premier l i t , représenté par
A 2
�4
(
).
toutes les parties , et se disant créancier de la succes
sion de son père, obtint une ordonnance du lieutenant
général de Saint-Flour , qui lui permit de jouir des
biens de la succession répudiée, sans qu’on pût en induire
aucune qualité préjudiciable.
Jacques Veschambes s’empara commodément de l’uni
versalité des biens; il afferma, le 13 avril 1700, à un
nommé Hugues Chevalier, un domaine appelé de la Buge.
Cette ferme fut consentie pour six années, moyennant 26
quintaux de fromage pour chacune d’elles : une partie
du prix de la ferme est déléguée à un sieur Dusaillant,
créancier personnel de Jacques Veschambes.
En 1706, un sieur D a n ty , ci’éaneier du père, trouvant
Jacques en possession des biens, le fit assigner en paye
ment de ses créances. En défenses, il oppose la répu
diation du 21 mars 1700, et soutient qu’il ne jouit
des biens que par permission de justice , et comme /
créancier.
L e 19 avril 1708, Jacques Veschambes vendit deux
prés de celte succession, moyennant 360 francs, au sieur
de Cheylades.
L e 31 mai 1708, Jacques Veschambes prit à titre de
bail emphitéotique, du sieur Dusaillant, un petit domaine
situé à la Buge, et voisin de celui de son père, moyen
nant la rente annuelle de 60 francs remboursable en deux
payemens.
Ce premier contrat fut résolu faute de payement5 mais
il lui fut consenti un second bail le 17 septembre 1729.
Il fut procédé à Pifrpcntement des héritages vendus; et
il résulte, du procès verbal des experts, que ce bien est
�(5)
d’une contenue de 12 journaux de p r é , et une septerée
et demie de terre en champ ou jardin.
On voit, d’après tous ces actes, que Jacques Veschnmbes- n’avoit d’auLres propriétés que le petit domaine qui
lui fut concédé à titre de bail emphitéotique. Il ne jouissoit que précairement des biens de son p è r e , et sous le
prétexte qu’il en étoit créancier. Cependant les appelans
veulent faire usage d’un-acte en date du 3 mars 1 7 1 0 ,
par lequel Catherine Combart avoit subrogé Jacques
Veschambes à tous ses droits et hypothèques sur la
succession de son mari. On verra bientôt qu’ils ne peuvent
tirer aucun avantage de cette prétendue subrogation qui
n’a jamais eu aucun effet.
Jacques Veschambes étoit lui-même si convaincu que
la succession de son père étoit absorbée par les dettes,
que, par acte mis au greffe de Cheylades en 1 7 1 2 , il
vient déclarer qu’il a connoissance de la répudiation
faite en son nom, le 21 mars 1700, par Catherine Com
bart, sa belle-mère : il adopte cette répudiation, et la
ratifie, et répudie de nouveau, en tant que de besoin.
Il fait un usage continuel de cette répudiation contre
les créanciers de son père. Une sentence du i mars
1 7 2 1, rendue au bailliage de Cheylades, le renvoie d’une
demande formée contre lui par un nommé M e y, mar
chand ù Billom, attendu la répudiation par lui rapportée,
et sauf aux créanciers à se pourvoir contre le c u r a t e u r
& la succession vacante. Dans cette sentence est visée
l’ordonnance rendue par le lieutenant général de SaintFlour, qui lui permet de jouir des biens de son père
sans se porter héritier.
5
�(6)
Le 21 mars 1729, Jacques Veschambes maria Michelle,
sa iille, avec François Samson ; il lui constitua une
somme de iôoo francs qui dans la suite a été payée
par Jacques Valarcher, représenté par les intimés.
L e 23 novembre 1735 , mariage de Catherine Ves
chambes , autre fille de Jacques , avec François Ves
chambes. L e père lui constitue une somme de 1400 fr.
qui a encore été acquittée par Jacques Valarcher.
Ici commencent les malheurs de la famille. En 1738 ,
Jean Naufary fut tué par Jacques Veschambes, son beaufrère. Ce dernier prit la fuite , et il fut rendu contre lui
un jugement par contumace, qui le condamna à la peine
de mort. Cette sentence fut suivie de la confiscation de
ses biens ; elle fut même exécutée par effigie; mais on ne
rapporte pas le procès verbal d’exécution.
Jacques Veschambes, en fuyant, vendit tout le mo
bilier mort et v if de la succession de son père, et laissa les
biens dégarnis de bestiaux.
L e premier octobre 1738, Antoine et Pierre Vescham
bes, frères, Marguerite, Françoise et Anne Veschambes,
nièces d’Antoineet Pierre, se virent obligés de prendre
à cheptel , d’un sieur Teillard , marchand ù M u r â t ,
vingt-quatre vaches suivies de dix ve a u x , quatre bourrets et deux doublons, m o y e n n a n t 868 francs ; ils ache
tèrent les meubles et outils d’agriculture nécessaires h
l’exploitation des biens : le prix de ce cheptel a encore
été remboursé par Jacques Valarcher.
Ces précautions n’empechèrent pas la saisie de tous les
fruits, de la part des collecteurs, pour les années 1738,
1739 et 1740. Antoine et Pierre Veschambes s’eu ren
dirent adjudicataires.
�f
7)
.
Antoine Veschambes ayant pris connoissance des pa~
piers de la famille , découvrit le testament de son père,
¿le 1696. Il apprit, par cet acte, qu’à défaut d’élection
faite par Catherine Com bart, sa m ère, le titre universel
reposoit sur sa tête. Il fit contrôler ce testament le premier
décembre 1741, se porta héritier de François Veschambes,
son p è re , et obtint, le 22 février 1743* ^ l’élection de
S ain t-F lour, une sentence qui déclara toutes les saisiesde fruits nulles, en fit main-levee à A ntoine Vesehambes,
comme propriétaii’e des biens. Cette sentence fut signifiée
le 23 février 1743, tant aux saisissans qu’à Pierre et
Jacques Veschambes, au dernier domicile de ce dernier,
en parlant à son fils. Cette sentence n’a jamais été atta
qu ée, et a acquis l’autorité de la chose jugée.
L e premier février 1 7 4 1 , Françoise Veschambes con
tracta mariage avec Jacques V alarcher; elle se constitua
tous ses biens , sans entendre néanmois^/àm? aucun acte
préjudiciable.
L e 14 mars 1744, Antoine Veschambes, qm étoit en
possession de tous les biens de Jacques, son père, en vertu
de son testament, fit donation au profit de Jacques Valarclier, de tous les droits par lui acquis, tant par le tes
tament de François Vescham bes, son père , que p a rle
deces de Catherine Com bart, sa mère. Cette donation
comprend même les droits rescindans et rescisoires ; elle
contient tradition actuelle et réelle; elle a été insinuée et
revêtue de toutes les formalités prescrites. Jacques V a îa relier s’est mis en possession de tous les biens de François
Vescham bes, a payé tous les créanciers qui se sont
présentés, et a joui de tous les biens sans trouble de^
puis, le moment de celle donation»
�(8 )
L e 31 mai 1744, mariage de Marguerite Veschambes,
autre fille de Jacques, avec Antoine Dauzat. Pierre Ves
chambes , son oncle consanguin, l’institue son héritière
universelle.
L e 4 juin 1744, traité entre Catherine Veschambes ,
veuve de Jean N aufary, et Pierre Naufary, son fils et
son héritier, et Jacques Valarcher, par lequel la veuve
Naufary et son fils cèdent à Valarcher tous leurs droits,
et tout ce qui peut leur rester dû sur la succession de
Françoise et Jacques Veschambes, en vertu du traité
passé entre Jacques Veschambes et Catherine Combart,
le 3 mars 1710.
L e 16 juillet 1744, mariage d’Anne Veschambes, mère
et belle-mère des appelans, avec Jacques de Douet. Par
ce contrat, Anne Veschambes, majeure, donne pouvoir
à son mari de rechercherions ses biens, traiter et tran
siger d’iceux , et en donner quittance.
L e 23 juillet, même année, cession de Jacques de Douet
au profit de Jacques V alarch er, de tous les droits suc
cessifs paternels et maternels d’Anne Veschambes , même
de ceux qui pouvoient lui revenir du chef de François
Vescham bes, frère et beau-frère commun: cette cession
fut consentie moyennant i 5 oo francs et quelques meubles,
le tout payé par Jacques Valarcher.
La condamnation de mort prononcée contre Jacques
Veschambes avoit entraîné la confiscation de ses biens.
M . de Montboissier, seigneur haut-justicier les réclamoit :
le 10 janvier 17 6 7, il se départit de tous scs droits eu
faveur de Jacques Valarcher et de Françoise Veschambes,
moyennant 60 francs de rente annuelle, et sans retenue;
plus,
�fo j
plus, 300 francs pour frais faits au bailliage de Saint-Flour,
et à Cheylades. Cet acte prouve que tousses biens du fu
gitif consistoient dans le petit domaine qu’il avoit pris
en empliitéose du sieur Dusaillant. L a confiscation ne
frappoit que sur cet objet.
L e 4 juillet 1757 , traité portant cession entre Fran
çois Vescliambes , mari de Catherine, à Jacques Valarc h e r , moyennant une somme de 2200 francs, payée par
ce dernier.
L e p r e m i e r février 1780, mariage de Jeanne V a la r-'
cher, fille de Jacques, avec Antoine Faucon ; elle est
instituée lieritière universelle de ses père et mère, et de
Marg uerite Vescliambes, femme Dauzat, sa tante.
La paix de la famille n’avoit plus été troublée jusqu’au
30 brumaire an 6, que la dame de Dienne et sou mari
imaginèrent d’attaquer les intimés en partage des succes
sions de Jacques Vescliambes et Geneviève la Vaissière^
leurs aïeux communs, pour leur en être délaissé leurs
portions afférentes, ainsi que ce qui devoit leur revenir
par le décès des deux mâles qui avoient profité du droit
d’accroissement d’Anne ? Michelle et Marguerite Vescliambes.
. ..
Les intimés opposèrent à cette demande le traité du 16
juillet 1744; mais les appelons demandèrent la nullité
de ce traité, sur le fondement que Jacques de Douet
n’avoit pas eu la faculté de vendre par son contrat de
mariage; que des-lors il qvoit aliéné des biens dotaux,
contre la prohibition de la coutum e; et ils c h e r c h è r e n t à
prouver que la demande en nullité 11’étoit pas éteinte
par la prescription.
B
-M
�Ils voulurent encore écarter le traité fait avec M . de
Montboissier, et soutinrent que la confiscation n’âvoit
pu avoir lieu, dès qu’on étoit hors d’état de rapporter le
procès verbal d’exécution du jugement de mort.
Toutes les prétentions, les défenses et les explications
données par les parties, n’avoient pour objet que les biens
2?ersonnels de Jacquds Vescliambes ; et sur ces contestations
il intervint au tribunal de S a in t-F lo u r , le 13 ventôse
an 8, un jugement qui déclare nul le traité du 23 juillet
1744, passé entre Valarcher et Jacques de Douet ; con
damne Valarcher et sa femme à venir à partage des biens
de Ja cques Veseham bes et Geneviève la V a issièr e ,
pour en etre délaissé aux appelans un sixième de leur
chef, un tiers dans le sixième que François Veseliamhes,
frère , décédé ab intestat, amendoit de son chef; un tiers
dans les deuxf autres sixièmes que ce même frère amendoit dans les successions du chef des deux filles forcloses ,
avec restitution des jouissances et dégradations depuis le
décès de Jacques Vesehambes et Geneviève la Vaissière.
On excepte de la restitution des jouissances toutes les
a n n é e s qu’a duré le 'mariage de Jacques de Douet avec
A nne Vesehambes. La dame de Dienne est tenue de rap
porter la somme de i oo francs, prix du traité de 1744 ,
et elle est également chargée de conférer proportionnel
lement 'les deux dots des iilles foi’doses ; elle est débou
tée dé sa» demande relative au partage de la succession
cl’Antoine Vesehambes; il est ordonné que les parties
conviendront d’experts, pour procéder au partage; les
dépens sont compensés pour etre employés en frais de
5
partage.
�Appel de ce jugement de la part du sieur Valarchev
et de Françoise Veschambes. La dame de Dienne et son
mari interjettent aussi appel incident de ce jugement, en
ce qu’ils avoient été condamnés au rapport de la somme
de i oo francs reçue par leur père; ils prétendent devoir
être déchargés du rapport de cette somme, parce qu’ils
ne sont pas héritiers de Jacques de D o u e t, leur père et
beau-père.
Il est bon de remarquer que l’appel de Valarcher et
sa femme étoit restreint au seul chef du jugement qui '
avoit prononcé la nullité du traité de 1744, et que, de
leur côté, les sieur et dame de Dienne ont respecté ce
.jugement, quant au chef qui les déboutoit de leur de
mande en partage de la succession d’Antoine Veschambes,
ainsi que de celui qui rejetoit également leur demande
en réduction du testament de 1693, à. raison de ce que
les biens étoient situés en coutume, et que le testateur
n’avoit pu donner que le quart. On ne s’est pas occupé
de ces deux objets , parce que tout est jugé entre les
parties sur ces deux points, et qu’il est inutile de grossir
le volume de la procédure qui n’est déjà que trop con
sidérable.
5
Sur les appels respectifs, arrêt de la cour,, du 22 ther
midor an 8, qui confirme le jugement du tribunal de
Saint-Flour, respectivement à la nullité du traité, et or
donne, avant faire droit sur l’appel incident, que Valar
cher et sa femme feront preuve, tant par titre que par
témoins , que la dame de Dienne a fait acte d’héritier
de Jacques de Douet, son père, en s’em p aran t de tout
B a
�m
( 12 )
ou de partie de sa succession, sauf la preuve contraire:
la moitié des dépens est réservée.
>
? En-vertu de cet arrêt, les experts ont été nommés
pour procéder au parLage. Valarelier et sa femme de
leur côté ont fait procéder à l’enquête sur l’appel incident.
La dame de Dienne a fait aussi une enquête contraire.
Les experts nommés se transportèrent pour vaquer
à leurs opérations ; il fallut établir la consistance de la
succession de Jacques Veschainbes, auteur commun; il
n’avoit laissé autre chose que le petit domaine qu’il avoit
pris à titre d’emphitéose du sieur Dusaillant; et encore
falloit-il en distraire le principal de la rente empliitéotique, qui avoit été remboursé par Jacques Vala relier.
La modicité de cette succession fait disparoître le
prestige. La dame de Dienne voit évanouir ses préten
tions chimériques, ses calculs exagérés, et alors elle veut
soutenir que les biens de François Veschambes, père de
Jacques, doivent entrer dans le partage; elle veut qu’on
y comprenne le grand domaine de la Buge qui avoit
appartenu à François.
Elle feignoit sans doute d’ignorer les répudiations
réitérées de Jacques Veschambes, son aïeul, l’institution
de François, son bisaïeul, au profit d’Antoine; elle vou■
loit mettre également de coté la disposition du jugement
de Saint-Flour qui la déboutoit de sa demande, soit en
réduction du testament de François, soit en partage de
la succession d’Antoine. Les opérations des experts furent
arrêtées; et, le i cr. messidor an 9 , nouvelle demande
des appelanSj tendant ù ce que la succession de Jacques
�3
( ï )
Vcschambcs fût composée, non-sculcmcnt des b'ens pr.r
lui acquis, mais encore cl’un dixième dans la succession
mobilière et immobilière de François Vcschambcs, son
p ore, eu égard au nombre de neuf enfans , Catherine
Combart comptant pour un ; d’un quart dans ceux de
sa mère, eu égard au nombre de quatre enfans; et qu’en
suite les jugemens des 16 ventôse et 22 thermidor an 8
fussent exécutés suivant leur forme et teneur.
C’étoit évidemment revenir contre la chose jugée.
I-e sieur Valareher et sa femme soutinrent qu’ils
étoient non-recevables dans leur demande ; ils récla
mèrent différons prélèvemens sur les biens personnels
de Jacques et sur ceux de François, son fils. Jeanne
"Valarclier, femme F au con , en sa qualité d’héritière
instituée de Marguerite Veschambes, femme Dauzat,
sa tante, demanda à être reçue partie intervenante pour
assister au partage. Toutes les parties ainsi réunies, les
intimés opposèrent que le testamént avoit été approuvé,
et que 'toutes demandes en réduction, comme toutes
réclamations contre la qualité d’Antoine , héritier ins
titué, scroieut évidemment prescrites, si déjà la question
n’étoit jugée, soit par le jugement de Saint - Flour et
1 arrêt de la cour d’appel, soit par la sentence de l’élec
tion de Saint-Flour , signifiée en 1743 , et qui n’étoit pas
attaquée. E11 conséquence les intimés conclurent que sans
s’arrêter à toutes ces demandes, il fût expédié à Jeanne
Valareher , intervenante dans les biens p e r so n n e ls de
Jacques, du chef de Marguerite Veschambcs , femme
D auzat, sa taule, un sixième qui étoit sa p o rtio n affé
rente; que la nia: se de la succession de J a c q u e s suroit
�^14^
seulement composée des biens désignés au bail ernpliitéotique de 1729 ; que cette succession seroit respon
sable, envers Valarclier et Françoise Veschambes, de
l’entier mobilier mort et v if , provenu de la succession
de François Vescliambes , dont Jacques s’étoit emparé et
qu’il avoit vendu lors de son évasion ; qu’elle seroit éga
lement responsable des jouissances par lui faites des biens
de François, depuis 1706 jusqu’en 1738, ainsi que des
intérêts des jouissances et du mobilier; que ces divers
objets seroient imputés et précomptés sur la portion
qu’amendoient les appelans ; que la dame de Dienne fût
condamnée à rembourser préalablement, et avant toute
mise en possession, et toujours dans la proportion de son
amendement, les dots de Miclielle et Catherine Vescliambes , les dettes de la succession de Jacques acquittées par
Valarclier, avec les intérêts ; que de cette succession seroit
distraite la somme de 300 francs que Jacques avoit donnée
à titre de préciput h M iclielle, sa fille, femme Samson,
et qui avoit été payée par Valarclier.
Les intimés firent en même temps donner copie de
tous les titres qu’on a analisés jusqu’ic i, notamment du
bail du 13 avril 1700, consenti par Jacques Vescliambes,
du domaine de la Buge, appartenant à François, son père;
de la répudiation de Jacques Veschambes, du 22 no
vembre 1712; de la sentence du i mars 172 1, rendue
entre Jacques Veschambes, et M e y , marchand à Billom ,
qui décharge Jacques Veschambes des condamnations,
attendu sa répudiation; des extraits des rôles de contri
bution , qui prou voient la jouissance précaire de Jacques
Veschambes.
5
�4
( i5 )
V oici le détail des prélèvemens demandés par lesr
intimés.
D ’abord, comme on l’a d it, la restitution du mobi
lier et des jouissances, les dots de Miclielle et de Cathe
rine Veschambes, le remboursement de la valeur actuelle
des biens immeubles de François Veschambes, vendus
par Jacques au sieur d’Estaing, seigneur de Cheylades,
le 19 avril 1708, la c o m p e n s a tio n jusqu’a due concur
rence avec les jouissances adjugées aux appelans, d u
capital de cheptel du 24 octobre 173^*
Plus, le remboursement des dettes de la succession de
Jacques Veschambes, payées par Jacques Vala relier; les
quelles dettes consistent, i ° . en la somme de 1200 f r . ,
prix principal de la rente empliitéotique de 1729, ainsi
que les arrérages d’icelle, suivant la quittance; 20. la
somme de 261 fr. 90 cent, due i\ René Teillard par
défunt Jacques Veschambes, en vertu de jugemens qu’on
rapporte, tout quoi a été payé par Jacques Valarelier ,
suivant un traité du 26 mai 1744; 30. la somme de 398 fr.
payée pour frais de la procédure criminelle, ainsi qu’il
résulte du traité du 10 janvier 1767; 40. une somme de
63 fr. due par Jacques Veschambes ¿1 défunt GuyonD a u ty , par obligation du 29 décembre 1708, et dont la
condamnation fut prononcée avec les intérêts contre V alarelier, par jngement du
décembre 1761 ; ». en une
somme de 329 fr. avec les intérêts, due par Jacques Vcschambes à sieur Jean-Baptiste Teillard, par obligation
du 19 juin 1736; 6°. une somme de 162 fr. pour arré
rages du bail à rente de 1729, ou blé prêté à défunt
Jacques Veschambes par un sieur llaynal de Tissonuières,
5
5
5
�( x6 )
fermier de Cheylades, et dont la condamnation avoit été
prononcée par sentences des 20 avril 1736 et 23 février
17 3 7 , signifiées le 10 septembre 1758; suivies d’autre
sentence contre Yalarcher et sa femme, du 17 octobre
1758; 7U. une somme de 169 fr. provenant d’arrérages
de la rente de o fr. portée au bail de 1729, et dont la
condamnation avoit été prononcée en faveur de Gilbert
Lagravières, par sentence du
août 1752; 8°. une
somme de 36 fr. pour reste de celle de 80 fr. due
par défunt Jacques Veschainbes à Catherine, sa sœur,
suivant une reconnoissance par lui souscrite, et suivie
d’une sentence de condamnation.
Les intimés se réservèrent tous autres droits.
I-es sieur et dame de Dienne, à leur tour, en persistant
à demander que la succession de Jacques fût composée
de sa portion dans les biens de François, demandèrent
la réduction des avantages faits par défunt François
Vcschambes, au profit de sa seconde femme. Ils pré
t e n d ir e n t que Jacques Vcschambes étoit aux droits de
Marguerite, enfant du second l it , suivant une cession
du 21 octobre 17 14 ; ils demandèrent la portion de
cette Marguerite ; ils conclurent encore à ce que la succes
sion de Jacques fût composée du quart des biens délaissés
par Marie Jarrige, sa mère, d’un tiers de sixième qu’amendoit François V e s c h a in b e s , frère d’A n n e, et décédé
ab in testa t, sans postérité, le tiers de l’accroissement
revenant à François Vcschambes dans les deux sixièmes
qu’amendoit les filles forcloses.
5
5
Cet acte du 21 octobre 1714? ne contenoit pis une
cession de droits successifs de la part de Marguerite Vescluiinbes,
�( *7 )
cbambes , mais seulement un transport d’une -somme ue^
y o fr. que Marguerite Vescbambes prétendoit avoir a
répéter. Il étoit donc ridicule que les sieur et dame de
Piçnne voulussent prétendre que ce transport faisoit cesser
M e t de la répudiation de 1712. C’est ce que repondi-^
rent Jacques Valarclier et sa,femme, et c?cst le,dernier
acte de Jacques Valai’é h e r, qui décéda bientôt après
Jeanne Valarclier, qui ne figuroit d’abord que comme,
partie intervenante, s’est subrogée au lieu et place de son
père; et en cet état, la cause portée eq. l’audience du 11
prairial an x 1 , jugement contradictoire au tribunal civil
de M urât, qui , faisant droit sur toutes les demandes,
déboute les sieur et dame de Dienne de leur demande
tendant à ce que la succession de Jacques Vescbambes
fûteomposée d’une portion des biens deFrançois; ordonne
que cette succession de Jacques sera composée, i°. du
quart des biens de Marie la Jarrige , sa ,mère et des
intérêts à compter de 1738 , époque de l’absence de Jac
ques ; 20. des biens par lui acquis , et des jouissances telles
qu’elles sont fixées par le jugement du tribunal civil du
Cantal , du 16 nivôse an 8 ; 30. de la somme de 760 f r . ,
et de la valeur d’ une bourrète pour le pr,ix de la subro
gation faite à Jacques par Marguerite Vesclnambes, sa
sœur du second lit , le 20 octobre 1 7 1 4 , avec intérêts
h compter de 1738 ; 4«. des créances que la dame de
Dienne et son mari établiront avoir été payées par Jacques
en l’acquit de la succession deFrançois , avec les intérêts
à compter de 1738 , si mieux n’aime la dame de Dienne
rendre compte des jouissances du domaine de la Buge ,
appartenant à François Vescbambes, depuis 1701 ? jour
C
5
�c« Ÿ
du bail fait par Jacques Veschambes, des biens de son
p è r e , sous la déduction de la nourriture et entretien
fournis aux frères et sœurs de Jacques ; auquel cas le
tribunal ordonne que les intérêts des créances ci-dessus
courront à compter de l’époque où elles ont été payées ;
que ceux de la créance de yôo fr. entreront dans la
masse, à compter du premier octobre 17 14 , et ceux de
la portion de la dot de Marie la Jarrige revenant à
Jacques Veschambes , à compter de la mort de Fran
çois , sauf aux sieur et dame de Dienne à tenir compte
aux Valarcher des créances dont ils justifient le paye
ment , suivant la liquidation qui en sera faite par les
experts nommés par les parties, et qui continueront de
procéder au pai’tage. Sur le surplus des demandes, les
parties sont mises hors de cause , les dépens sont com
pensés pour être employés en frais de partage.
Ce jugement est m otivé, i°. sur la répudiation faite
par Catherine Combart, comme tutrice des enfans du
premier et du deuxième l i t , le 2 mars 1700; 2°. sur
l’ordonnance du lieutenant général de Saint-Flour, du
10 avril 1701 , qui permit à Jacques Veschambes de
jouir sans qu’il puisse être réputé héritier; 30. sur la
répudiation de Jacques Veschambes, du 22 décembre
1712 ; 40. sur la sentence du 14 mars 1721 , qui renvoie
Jacques Veschambes de la demande d’un créancier du
père ; renvoi motivé sur sa répudiation ; °. sur le bail
de ferme du i avril 1700 , et sur tous les actes de Jac
ques Veschambes qui prouvoient qu’ il n’avoit jamais
voulu prendre la qualité d’héritier de son père.
Les premiers juges se fondent encore sur le principe
5
5
�Hf
( '9 )
qu’il faut être né et c o n ç u pour succéder ; et que Jacques
Vesehambes n’étant pas encore marié loi’s de sa répudia:- ,
tino, ses enfans ne pouvoient se dire héritiers de leur aïeul.
Par un autre motif du jugement, il est dit que le
transport de Marguerite Vesehambes ne peut donner
aucun droit d’hérédité, parce qu’elle n’avoit vendu qu’une
créance , et n’avoit pas même pris cette qualité.
L e tribunal civil a encore pense que Jacques Vescliambes , a ya n t r e n o n c e a la succession de son p e r e ,
n’étoit pas recevable à critiquer son testament; mais sur
la demande en rapport des jouissances faite par Jacques,
des biens de son père, il a paru aux premiers juges que
tous les enfans avoient joui en commun, et qu’il n’étoit
pas même établi que Jacques Vesehambes eût vendu et
dissipé le mobilier de son père.
Ce jugement ne faisoit pas le compte de la dame de
Dienne qui voyoit évanouir toutes ses espérances , et
elle s’est déterminée à en interjeter appel purement et
simplement; et Françoise Vesehambes et la dame Valar
cher, sa fille, se sont elles-mêmes rendues incidemment
appelantes, en ce que la dame de Dienne n’avoit pas été
condamnée à rendre compte des jouissances perçues par
Jacques Vesehambes dans les biens de François, à res
tituer le mobilier mort et v if qu’il a voit vendu ou dis
sipé ; en ce que ce jugement avoit ordonné que la somme
de 750 f r . , prix du traité du premier octobre 17 14 ,
seroit portée dans la succession de Jacques Vesehambes;
et en ce que les dépens avoient été compensés, pour être
employés en frais de partage. Les intimés ont conclu à
ce que, en émendant quant ù ce le jugement, la dame
C 2
S
�v»;
(
20 \
de D ie n n e fût Condamnée à restituer ces jouissances avec
intérêts, le mobiliër mort et v if iiussi avec intérêts; qu’elle
fût déboutée de sa demiinde relativement au second chef.
f 1‘
I
If-'
f
et qu’enfin elle fût condamnée au x dépens.
Il
fulloit bidri aussi faire statuer sur l’appel incident
interjeté par la dame de D ien n e, du jugement du 16 ven
tôse, an’ Ô, en ce qu’elle avoit été condamnée au rapport
de la somme de i 5 oo fr. , prix de la cession consentie
par Jacques de D ou et, son p è re , en 1744. On se rap•pelle que la cour avoit interloqué les parties sur ce
point ; elles ont enquêté respectivement : les enquêtes
ont été signifiées ; là dame Faucon s’est fait subroger
au lieu et placé de son Jpère; les deux appels ont été
joints par arrêt de la c o u r, et les parties en viennent
aujourd’hui sur le tout. ‘
On sent qu e, d’après l’analise de tous les actes dont
les parties argumentent respectivement, cette cause né
cessite un grand détail auquel on 11e veut pas se livrei*
dans ce moment. On se Contentera de présenter les prin
cipaux moyens des intimés, pour ¿lire confirmer le ju
gement dont est appel dans la partie qui réduit la suc
cession de Jacques Véschambes à sa juste valeur, et pros
crit les prétentions exagérées des appelans.
L e jugement de Saint-Flour , en date du 16 ventôse
an 8 , a débouté les sieur et daine de Dienne de leur de
mande en partage de la succession d’Antoine Vescliambes. Cette disposition’du jugement est indéfinie; aucune
des parties iieTa attaquée dans ce chef : il y a donc chose
irrévocablement jugée, et tftut ce que proposent les appelans à cet égard est 'plus que subtilité.
�in
#
*
c
)
Ils prétendent que, dans le motif de ce jugement, il
y est dit que les sieur et dame de Dienne n’ont pas établi
qu’Antoine Veschambes eût d’autres biens que le mon
tant de la destination à lui faite par son p è r e , et les droits
à lui échus du chef de sa mère.
Aujourd’hui on prétend qu’Antoine est héritier uni
versel de François, son p ère, en vertu du testament de
1696 : il a donc plus que la d e stin atio n qui lui avoit etc
faite ; dès-lors le dispositif doit être subordonné aux
motifs -, ot comme les sieur et dame de Dienne n’ont été
déboutés qu’à raison de ce qu’Antoine n’avoit alors que
sa légitime, ils rentrent dans leurs droits, dès qu’il en
avoit davantage.
Vouloir subordonner le dispositif du jugement aux
motifs qui précèdent, ce seroitun système nouveau. Tous
les jours on rend des jugeinens sages et justes dans leurs
dispositions, quoique les motifs puissent être critiqués :
mais ce n’est que le dispositif qui juge , qui règle les
droits des parties ; et ici la disposition est indéfinie : tout
est terminé pour la succession d’Antoine.
D ’ailleurs, les premiers juges 11’ont-ils pas dit égale
ment qu’Antoine avoit approuvé le testament de son père;
que les sieur et dame de Dienne ne pouvoient s’aider de
son chef, ni de la réduction au quart, d’après la coutume,
ni de la réduction à une portion d’enfunt moins pre
nant , d’après l’édit des secondes noces. Voilà donc d’au
tres motifs qui sufïisoient bien pour faire débouter les
sieur et dame de Dienne. Ce qu’on a dit de plus , quoique
indifférent dans la cause , n’étoit que pour fortifier davan
tage la proposition qui étoit adoptée; c ’ e s t - à - d i r e , quo
/
�les sieur et dame de Dienne étoient étrangers h la suc
cession d’Antoine Vescliambes.
Mais quand on admettroit que le motif n’est pas judi
cieux , tous les jours on confirme les dispositions d’un
jugement sans s’arrêter aux motifs ; et si la chose n’étoit
pas irrévocablement jugée , les intimés n’auroient-ils pas
un moyen plus puissant encore à opposer aujourd’hui ;
le titre universel d’Antoine Vescliambes , son appréhen
sion des biens en vertu de l’institution portée au testament
de son père , la sentence de l’élection de Saint-Flour
q u i , en cette qualité , lui a fait main-levée des saisies de
fruits, sa longue possession depuis cette époque, et enfin
la donation qu’il a faite au profit de Jacques Valarcher.
Mais les sieur et dame de Dienne prétendent que c’est
une erreur d’avancer qu’Antoine étoit héritier institué .
de son j)ère ; qu’il n’avoit qu’une somme de iooo fr. par
ce testament. A la vérité ils conviennent qu’il étoit ins
titué à défaut d’élection de la part de sa mère ; mais ils
soutiennent que la mère ne devoit élire qu’en cas de
convoi ; que le cas prévu n’est pas arrivé , puisque Cathe
rine Combart est restée veuve.
C ’est étrangement raisonner, et commenter singulière
ment un testament qui n’a rien de louche ni d’équivoque.
On voit clairement que François Vcschambcs n’a voulu
faire , au profit de sa femme , qu’une institution fidu
ciaire. A la vérité il veut qu’elle soit privée de l’hérédité
en cas de convoi ; mais, dans un cas contraire, elle doit
également rendre l’hérédité à tel de ses enfansque bon lui
semblera , sans qu’elle soit tenue à aucune reddition de
compte. Dès-lors le convoi Pobligeoit d’abandonner l’hé-
�( 23 )
l'éclîté et de rendre compte ; la viduité l’astreignoit seu
lement à la rendre sans aucun compte de gestion. Aussi
le testateur ajoute-t-il, que dans le cas où sa femme
viendroit à décéder sans avoir nommé tel de leurs enfans
pour h éritier, il veut et entend qu’Antoine Veschambes soit son héritier ; il le nomme dès à présent audit
cas et non autrement ; c’est-à-dire , en cas de décès de
sa femme sans élection. O r, Gathex-ine Combai*t est mox*te
sans élire : c’est donc Antoine qui seul a été valablement
saisi de l’institution ; et en supposant que les sieur et dame
de Dienne n’eussent été déboutés de leur demande en
partage de cette succession que parce qu’Antoine n’avoit
qu’une simple légitim e, ilfaudroit aujourd’hui les déclarer
non-recevables, dès qu’Antoine étoit héritier universel.
Les sieur et dame de Dienne, tournant toujours autour
d’un cex’cle v ic ie u x , disent qu’au moins Antoine n’a eu
de Catherine Combart, sa mèx’e , qu’une destination en
argent. C’étoit Cathexùne Veschambes , sa fille aînée ,
femme Naufaiù, qui avoit été instituée son héritière.
Si Catherine Yesclxambes a fait une cession au pi’oiit
de Jacques Valax-clier , cette cession ne comprend que
des créances des sommes elle l’estées dues -, mais qu’ im
porte au sieur et dame de D ien n e, et que peuvent-ils
avoir de commun avec Catherine Combart? d’une p a r t ,
cette dernière n’avoit porté qu’une dot m obilière, et de
l’autre, les sieur et dame de D ie n n e , qui représentent
un enfant du premier lit , ne pourroient avoir x*ien à
prétendre sur les biens Combart , qui appartiennent
exclusivement aux enfans dxx second lit.
Antoine Veschambes étoit donc le seul px’opriétaxrc des
�( M )
Liens de François. Jacques avoit répudié à la succession
de son père ; s’il a joui des biens , ce n’est point à titre
d’héritier ; il n’en a joui qu’en vertu de l’ordonnance
du lieutenant général de Saint-Flour : sa répudiation a
été produite en jugement , et lui a servi à écarter les
demandes des créaciers de son père. Depuis 1738 , c’està-dire, depuis soixante-quatre ans , Antoine Veschambes
a joui de tous les biens comme héritier : la sentence de
l’élection de Saint-Flour lui a donné cette qualité.
L a dame de Dienne a bien senti que cette sentence
étoit un obstacle invincible à sa prétention ; mais elle
prétend que cette sentence est susceptible d’être attaquée,
et elle déclare en interjeter incidemment appel. Il faut
convenir que cet appel incident est d’un grand poids
contre une sentence qui a été signifiée à Jacques Ves
chambes en 1743 , et qui n’a jamais été attaquée par lui
ni ses descendans.
On a vu également que Jacques Valarcher réunissoit tous les droits de ses beaux-frères et belles-sœurs ,
par les différentes cessions dont on a fait le détail. Les
sieur et dame de Dienne veulent écarter ces différentes
cessions par un acte du 3 mars 1710 , qui émane de
Catherine Combart ; et 011 lui fait dire qu’elle cède ses
droits personnels , ainsi que les droits et portions héré
ditaires de chacun de ses enfans, à Jacques Veschambes ,
à la charge par lui de payer une somme à chacun , sui
vant le règlement fixé par cet acte.
Mais Catherine Combart n’avoit pas qualité pour traiter
valablement des biens doses enfans; elle n’en étoit pas
même la tutrice ; elle ne prend d’autre titre que celui
de
�'
.
(
2 5
)
'
âe mère pieuse. D ’ailleurs cet acte n’a point eu d’exécu
tion ; Jacques Veschambes n’a jamais rien payé du prix ;
les sieur et dame de Dienne n’en rapportent point de
quittances, et sont dans l’impossibilité d’en rapporter;
enfin cet acte n’est qu’un simple transport de créances
que lesenfans pouvoient avoir en vertu du testament de
leur père. Jacques Veschambes n’y pi’end point la qualité
d’héritier de son pèi*e ; Catherine Combart n’y a que celle
de créancière : cet acte n’auroit donc jamais eu l’effet de
faire c o n s id é r e r Jacques Veschambes comme héritier de
François ; et la preuve qu’il n’a jamais voulu l’être, résulte
de sa répudiation et de la sentence rendue contre M e y ;
tous ces actes bien postérieurs ù la prétendue cession
de 1710.
Les sieur et dame de Dienne dissertent longuement
sur la question de savoir si Jacques Veschambes seroit
aujourd’hui non-recevable à critiquer le testament de
son père. Ils savent bien que le jugement de Saint-Flour
a encore rejeté cette prétention ; mais ils croient pou
voir revenir sur cet objet : ils soutiennent qu’il n’est pas
nécessaire d’être héritier pour demander la réduction
portée par l’édit des secondes noces. Suivant e u x , un
fils du premier lit qui a répudié à la succession de son
p è r e , peut tout de même demander le retranchement
de l’é d it, parce qu’il tient ce bénéfice de la l o i , non
comme héritier , mais comme enfant.
En lisant cette dissertation, on peut douter que la dame
de Dienne ait bien compris ce qu’elle vouloit dire. : En
effet, où pourroit la conduire cette réduction ? elle ne
conccraeroit que Catherine Combart qui scroit réduite à
D
0,
�( *6 )
#
une portion d’enfant moins prenant, et q u i , par le tes
tament de son m a ri, n’étoit elle-même qu’héritière fidu
ciaire ; mais alors cette réduction ne profiteroit qu’à l’hé
ritier institué, et cet héritier , c’est Antoine Veschambes.
Jacques qui avoit répudié à la succession de son père,
ne pou voity rien prétendre ; la dame de Dienne n’amendoit rien du chef d’Antoine : c’est encore une chose jugée.
L a cession de Marguerite Veschambes , troisième du
nom , ne oontenoit qu’un transport d’une créance de
y o fr.; ainsi tout ce qu’a dit la dame de Dienne sur ce
point, est une énigme dont on attend la solution ou h
m o t, lorsqu’elle donnera plus de développement à ses
moyens.
Vient l’appel incident de la dame Valarcher et de sa
fille. L e jugement dont est appel a dispensé la dame de
Dienne de restituer les jouissances que son père avoit
perçues dans la succession d’Antôine Veschambes. Elle
est également dispensée de la restitution du mobilier
mort et v if, ainsi que des intérêts du tout. Cependant
il est reconnu par toutes les: parties que Jacques Ves
chambes a joui de tous les biens de son père; qu’il a
vendu et dissipé une portion des immeubles ; qu’il a
également dilapidé le mobilier mort.et vif, et qu’il s’en
fit une ressource , lors de son é v a s io n .
La dame de Dienne même se fait un moyen de la
jouissance de son père, pour soutenir qu’il étoit héritier.
Les intimés prouvent au contraire, soit par la répu
d i a t i o n personnelle de Jacques Veschambes, soit par
l’ordonnance du lieutenant général de Saint-Flour, soit
enfin par la sentence rendue contre M e y , créancier de
5
�«1-2&
\
'
( 27 )
la succession de François Veschambes, que la jouissance
de Jacques n’étoit que précaire ; qu^il n’a possédé ces
biens que sous le prétexte qu’il étoit créancier; et dèslors il en doit nécessairement la restitution, sauf la comr
}
pensation jusqu’à due concurrence , avec les créances
qu’il pourrait avoir acquittées; et il est prouvé qu’il n’en
avoit payé aucune.
' P a r quelle fatalité les juges dont est appel n’ont-ils
donc pas adjugé cette restitution de jouissance, ainsi
que celle du m obilier?
'
1
Ils ont donné pour motif qu’il paroissoit que tous les
enfans avoient joui en commun. Mais, i°. rien n’établit*
cette jouissance commune; il n’y avoit pas même de;icrt-fT
habitation entre les parties. 20. Eli Vdmett.-ùnt 'cette co
habitation , tous les enfans étoient d’un fige à gagner
leur nourriture et entretien , surtout dans la condition
des parties. Il est d’ailleurs établi que Jacques V es
chambes seul avoit ailcrmé‘les'biens ; que le •prix de la
ferme étoit délégué à ses créanciers'personnels , notam
ment au sieur Dusaillant. Le'prix des ventés par lui con
senties a également tourné ù son profit. Ce bail à cheptel
de 1738 prouve encore que Jacques Veséhîimbes avoit
vendu tous les bestiaux. :L a disposition du j u g e m e n t est
donc erronée et injuste en cette partie. E t certes ! si
quelqu’un peut invoquer1 là faveur dans iine cause' de
ce genre , elle serait toute pour ce cohéritier soigneux
et diligent qui a payé les dettes, traité' avec le père de
la dame de Dienne, sur la foi de s;6h 'c o n tr a t de ma•
•
'
f*
n a g e , et qui, quarante ans après, se voit assailli d'une
! ’
*
*
•
•
|
�[ 28 )
demande qui a tout l’odieux d’une vieille recherche ,
absolument sans intérêt.
Les intimés n’ont-ils pas à se plaindre aussi de ce que,
sur une demande exagérée qui tend à revenir contre
la chose irrévocablement jugée, qui a occasionné des
frais aussi considérables, les dépens aient été compensés
pour être employés en frais de partage.
Cette-espèce de compensation fait que chacun supporte
les dépens dans la proportion de son amendement, et
il en résulte que la dame de Dienne n’ayant qu’une
portion très-exigu ë à réclamer dans la succession de
Jacques Yeschainbes, son aïeul, succession qui par ellemême est déjà très-modique, feroit supporter aux intimés
la,presque totalité des dépens qui au moins doivent être
la peine du plaideur téméraire.
, Reste l’appel incident interjeté par la dame de Dienne,
du jugement de Saint-Flour, du 16 ventôse an 8 , qui
l’obligeoit au rapport de la somme de i oo francs,
reçue par son pèi*e. Cet appel ne fait pas honneur à
la délicatesse de la dame de Dienne ; elle ne pouvoit
se soustraire à ce rapport qu’en répudiant à la succession
de son père. En même temps qu’elle attaque la répu -'
diation de son aïeul, et qu’elle veut prouver qu’il est
héritier, elle n’honore pas assez la mémoire de son père,
pour accepter sa succession ; elle veut qu’il soit mort
ir. solvable. Cependant elle s’est emparée de son mobi
lier , de ses armes ; on a vu son mari revêtu de l’habit
écarlate qu’avoit porté défunt son père. O r , d’après
Duplcssis , il n’en faudroit pas autant pour la faire
répu ter
5
�4 «.
U )
( 29 )
réputer héritière. A u surplus, la discussion des enquêtes
respectives apprendra à la dame de Dienne qu’elle auroit
dû au moins s’éviter ce désagrément, et qu’elle ne peut
se dispenser du rapport qu’on lui demande? auquel elle
a été si justement condamnée.
M e. P A G E S ( de R io m ) , ancien avocat
Me. B R U N ,
avoué.
//fcfc f^ r ,-----<*■
S w
Ÿ/~~JtOfc
A R IO M , de l'im primerie d e L a n d r i o t , seul im prim eur de l a
C our d ’appel.
_
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Veschambes, Françoise. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Brun
Subject
The topic of the resource
renonciation à succession
successions
gain de survie
secondes noces
contumace
généalogie
biens dotaux
droit coutumier
homicides
testaments
confiscations
élevage bovins
experts
longues procédures
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Françoise Veschambes, veuve de Jacques Valarcher ; Jeanne Valarcher, et Antoine Faucon, son mari, intimés et incidemment appelans ; contre sieur Vital de Dienne et dame Jeanne-Marie de Douhet, son épouse, appelans d'un jugement rendu au tribunal civil de Murat, le 11 prairial an 11.
Arbre généalogique
Notation manuscrite : 3 ventôse an 13, 1ére section, jugement, après délibéré, statue sur infinité de questions soulevées dans les plaidoiries, et même pendant le délibéré, après production d'une grande quantité de titres et pièces, fixe les droits des parties dans diverses successions et détermine les bases du partage, rapports et prélèvements. »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1685-Circa An 13
1661-1715: Règne de Louis XIV
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1604
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1603
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53278/BCU_Factums_G1604.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Espagne
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
confiscations
contumace
Droit coutumier
élevage bovins
experts
gain de survie
généalogie
homicides
longues procédures
renonciation à succession
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53279/BCU_Factums_G1605.pdf
e4d56e6d23cac17b422750a75801fe59
PDF Text
Text
4M
U
M
E
M
O
I
R
7
E
POUR
M AIGNOL
fils, habitant à Bon/
lieu, canton d’E vaux, appelant;
G uillaume
CONTRE
A n to in e
G U I L L A U M E , maréchal
taumur, intimé ;
E T
a
P on -
C O N T R E
G i l b e r t e M A I G N O L , P i e r r e L E G A Y , son
mari , A n t o i n e M A I G N O L , G i l b e r t e
M A I G N O L , veuve Paneveyre , et autres, héri
tiers de Pierre M a i g n o l , de Landogne, intimés;
EN
PRÉSENCE
M A I G N O L père , habitant au
lieu du Cheval-Blanc , commune de Condat , a p
peléen assistance de cause.
G
D eu
illa u m e
U
n acte sous seing p r i v é , synalla g m a tiq u e , est-il nul
s’il n’a pas été fait d o u b le ? P eut-il être opposé à un dona
taire contractuel s’ il n’a de date certaine que postérieure
m ent à sa d o n a tio n ? E nfin quels caractères d’exécution
A
�rr
\
XlS
N
v
j
(2)_
faut-il à cet acte p o u r q u ’il soit obligatoire m algré les
.
nullités qui le vicient ?
i jj.
T elles sont les questions que présente celte cause, en
supposant q u ’ un acte sous seing p r i v é , p roduit par les h é -
‘ '
ritiers M a i g n o l , soit une vente. C a r , en point de fait,
' !
l ’appelant dém ontrera que cet acte n ’est q u ’ un titre de
■f
possession.
'
F A I T S .
:
'■
:1
P a r acte du 16 mai 1 7 5 5 , M ic h e l L en o L le donna à bail
em p ylitéotiqu e à des nom m és C h e fd e v ille , un p ré situé
*
près de L a n d o g n e , m oyennant 90 francs de rente annuelle.
C ’est ce p ré qu i fait l ’objet de la contestation.
L e m êm e j o u r , L e n o b le ven dit ladite rente de 90 fr.
à G u illa u m e M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , p o u r le p ayer
de 1800 francs q u ’il lui devoit.
L e 16 juin 1 7 7 7 , C h e fd eville subrogea ledit G u illa u m e
M a i g n o l , du C h e v a l- B la n c , audit bail e m p y lité o tiq u e ;
1
de sorte q u ’il lui céda la p ro p riété du pré.
Ce p ré étant situé près de L a n d o g n e , étoit désiré beau
cou p par le sieur P ie rre M a ig n o l, notaire audit lieu ; et il
paroît q u ’il chercha les m oyens d ’en devenir propriétaire.
1
II étoit créancier dessieurs L a rfe u il d ’une rente de
.1
56 f . ,
au principal de 2800 fra n c s , créée en 1 7 2 0 , due p o u r
m oitié par les héritiers de Jean-Franoois L a rfeu il.
L e s L arfeu il ayant vendu en rente un petit dom aine à
Jean G astier, P ierre M a i g n o l , de L a n d o g n e , avoit obtenu
i
contre lui une sentence h yp o th écaire en 1 7 6 6 , portant
permission de se mettre en possession ou faire vendre.
s
.
?
f
D e son c ô t é ,' G u illa u m e M a ig n o l , du C h e v a l- B la n c ,
�m
seigneur féodal dudit d o m a in e , et ayant acheté de l ’un des
L a rfe u il la m oitié de la rente due par Jean G a s t ie r , le
p ou rsu ivoit p o u r être payé des cens , lods et arrérages de
ren te, et se trou vo it em pêché par ladite sentence de 1 7 6 6 ,
en ce que sou ven d eu r l ’a vo it chargé de payer à P ie r r e
M a ig n o l la p ortion de la rente de 1720.
Cette p rocédu re fournit à ce dernier l ’occasion de faire
des propositions à G u illa u m e M a ig n o l , du C h e v a lB lanc , et de profiter de son ascendan t, en lui faisant
entendre que rien n’étoit plus aisé p o u r lui que de d e
v e n ir p ropriétaire de ce petit dom aine ven d u à G a s tie r,
lequ el étoit parfaitem ent à sa bienséance, puisqu’il jo i—
gn oit ses p ropriétés du C h eval-B lan c.
Il paroît que P ie rre M a ig n o l proposa à G u illa u m e de
faire par ce m oyen un échange de ses droits à ce d o
m aine , avec le p ré ven u de L e n o b le , assurant sans doute
q u ’ il n’y a vo it plus qu’à se mettre en possession dudit d o
m aine , au m oyen de sa sentence de 1766.
Cependant le sieur M a ig n o l, du
C h e v a l - B l a n c , ne
donna pas pleinem ent dans le piège. Il fut passé un acte
entre les parties, le 2 octobre 1779. M ais cet acte ne
contient pas de vente ; sa contexture m êm e p ro u v e que
le sieur M a ig n o l, du C h e v a l - B l a n c , entendoit stipuler
toute autre chose q u ’une vente , et
ne v o u lo it que
laisser le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , jo u ir du p ré
L e n o b l e , jusqu’à ce q u ’il y eut qu elqu e chose de certain
p o u r lu i-m êm e au sujet du dom aine Gastier.
E n e f f e t , on lit dans cet a c t e , du 2 octobre 1779 , que
P ierre M a i g n o l , de L a n d o g n e , cède à G u illa u m e M a i
g n o l la rente de 28 fra n cs, au principal de 1400 francs,
A
2
�( 4 }
faisant m oitié (le celle de 1 7 2 0 , due par les héritiers de
Jean - François L a r f e u i l , ensemble les arrérages échus
depuis 1 7 5 8 ; p lu s , il cède audit G uillaum e M a i g n o l ,
du C h e v a l- B la n c , l ’effet d e l à sentence de i 7 6 6 , p a r l u i
obtenue contre Gastier.
Le
p r ix dudit transport est fixé entre
les parties
h 2000 fran cs, p o u r l'acquit de laquelle somme M a ig n o l,
du C h e v a l - B l a n c ( p rop riétaire cependant du p ré L e n o b l e ) , cède seulement à M a ig n o l, de L a n d o g n e , le co n
tr a t de rente de 90 francs à lui du p ar les héritiers de
P ie rre L e n o b le , suivant l ’acte du 16 m ai 1 7 5 5 ; la q uelle
ren te est p a y a b le , est-il d i t , p a r les jo u is s o n s du p ré
appelé P r é - G r a n d , s u r le q u e l elle e st sp écia lem en t
affectée.
E n c o n s é q u e n c e , au m oyen de la remise que fera
G u illa u m e M a ig n o l des titres c o n stitu tifs de ladite rente
de 90 fra n cs , ensemble des titres de créances y énoncés ,
il demeurera quitte de la somme de 1800 francs: et quant
à la somme de 200 fra n c s, P ierre M a ig n o l rcconnoît
l ’avoir reçue en délivrance de promesse de ladite somm e.
D e sa p a r t , P ierre M a ig n o l remet à G uillau m e la sen
tence de 1 7 6 6 , obtenue contre G astier; et néanmoins il
se réserve le contrat de rente de 1 7 2 0 , p o u r p ou rsu ivre
le payement de la m oitié qui lui reste, et m ê m e , d it - il,
les arrérages de la m oitié v e n d u e , antérieurs à J
;
758
enfin les parties se cèdent respectivement les droits rescindans et rescisoires qui p eu ven t résulter des contrats cidessus énoncés.
Il paroît aujourd’hui un acte sous seing p r i v é , de la
m êm e date que le transport ci - dessus, assez difficile à
�|2i
( 5 )
accorder avec les clauses dont on vient de rendre com p te,
du moins dans le sens que les adversaires lui d o n n e n t ,
mais qui p ro u ve ro it assez, s’ il étoit réellem ent de cette
date, que le sieur M a ig n o l ,d e L a n d o gn e, n’avoit cherché
à extorqu er un écrit quelconque du sieur M a i g n o l , du
C h e v a l-B la n c , que p o u r tirer parti un jo u r de son obscu
rité. Il est néanmoins évident q u ’il ne s’agissoit alors que
de lui laisser les jouissances du p ré I g n o b l e p o u r 90 fr.
p ar a n , afin de le payer de l ’intérêt des 1800 francs cidessus stipulés, jusqu’à ce que l’occupation réelle du d o
maine Gastier perm ît de faire un échange définitif.
Q u o i q u ’ il en soit, et en attendant que cet écrit jus
q u ’à présent inconnu soit mis sous les ye u x d e là c o u r , et
d is c u té , il s’agit de continuer l ’ordre des faits. L e sieur
M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , eut bientôt à s’applaudir de
n ’avoir pas entièrement cédé aux assurances du sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e ; car huit jours après l ’acte du 2
octobre 1779 , ayant pris possession notariée du dom aine
G astier, en vertu de la sentence de 1 7 6 6 , qui venoit de
lui être c é d é e , ledit Gastier loin de se rendre à une
expropriation v o lo n ta ire , com m e l’avoit prom is le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , alla au contraii'e t r ai t e r avec l’un
des L a r f e u i l , ses ve n d eu rs, qui offrit de payer le sieur
M a i g n o l , et conclut à ce qu ’il fût déchu de scs demandes.
E n e f f e t , par une sentence de la sénéchaussée d’ A u
vergne , au rapport de M . F a y d it , G u illa u m e M a ig n o l
fut d é b o u t é , à la ch arge d’être payé des cens à lui dûs per
so n n ellem en t, et seulement de la m oitié des arrérages
de rente par lui acquise de L a u re n t L a r f e u il.
Cette sentence ne dit rien de la moitié de rente cédée
par Pierre M a ig n o l à G uillau m e 7 qu oiqu ’elle fût de
�(
6
)
m a n d ée, et que la sentence de 1766 en portât condam
nation; de sorte que par le fa it, G uillaum e M a ig n o l, du
C h eva l-B la n c, n’a pas t o u c h é ,à ce qu’il p a ro ît, un denier
de ce qui lui a été vendu par M a ig n o l , d e L a n d o g n e ,
le 2 octobre 177 9 ; tandis q u ’on élève la prétention de
s’a p p r o p r ie r , sans bourse d élier, un p ré q u ’il n’a pas
vendu.
Cependant P ierre M a ig n o l, de L a n d o g n e , s’ éto itm is en
possession dudit p r é , et les fruits devoient lui en rester
p o u r la rente de 90 fra n cs, suivant la clause du traité, tant
que le sieur M a ig n o l , du C h e v a l-B la n c , ne p référeroit pas
jo u ir lui-m êm e en payant ladite rente.
O n pense bien que le sieur M a ig n o l , de L a n d o g n e ,
s’arrangea p o u r faire d u rer cet état de choses encore lo n g
temps , et q u ’il 11e manqua pas de réveiller de loin en
lo in l ’espoir de son cousin de devenir p ropriétaire du
petit dom aine G a s tie r , qui étoit si fort à sa bienséance.
Le
sieur M a ig n o l, du C h e va l - B la n c , éloigné du p ré
L e n o b le , ne mettoit pas un grand p r ix à en jouir lu im êm e , et peut-être lui eu exagéroit-on les in convénien s;
peu t-être aussi le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , savoit-il
tirer parti d ’ une espèce de dépendance dans laquelle il
a v o it su tenir son parent.
L e s choses restèrent en cet état jusqu’en l ’an 7 , que
le sieur M a i g n o l , fils de G u illa u m e , donataire universel
de son p ère par son contrat de m ariage, se m it en pos
session de ses biens en celte q u a li t é , et demanda à son
p ère des rcnseigneinens sur le résultat de l’acte de 1 7 7 9 ,
et d e là prise de possession du dom aine G a stier, que son
p ère lui rem eltoit avec d’autres titres. C ’est alors que le
sieur M a ig n o l p ère expliqua à son fils que si, à la y é r ilé ,
�lö s
(7
)
il ne jouissoit pas du dom aine G a s t ie r , il resloit maître
du p ré L e n o b l e , q u ’il rep rendrait quand il v o u d r a it, et
que lu i , M a i g n o l p è r e , n’a vo itp a s encore récla m é, parce
q u ’on l’avoit toujours bercé d ’ un vain e s p o i r , et parce
q u ’il devoit au sieur M aign o l, de L a n d o g n e ,p o u r un procès
de fam ille; ce qu i l’avoit em pêché de le contrarier.
M a ig n o l fils vo u lu t a vo ir une e x p lic a tio n avec le sieur
M a i g n o l , de L a n d o g n e , qui lui refusa toute com m unica
tion sur ce p oint, et n e lui répondit qu ’en pressant le paye
m ent d ’une cré a n ce étrangère au procès actuel. M a ig n o l
iils paya le z
5 nivôse
an 9 , et se crut dès-lors autorisé à
rec o u v re r ses droits.
L ’acte de 1779 qui lu i nvoit été remis n’énonçoit que
l ’acte de 1 7 5 5 , lequel ne donnoit la p rop riété du pré qu ’à
C h efd eville : il s’agissoit donc de rechercher la vente que
C h efd eville a vo it dû faire au sieur M a ig n o l, du C h e v a lBlanc. M ais l ’acte en avoit été reçu par le sieur M a ig n o l,
de L a n d o g n e , et il étoit difficile de se le p rocu rer -, il l’a vo it
refusé plusieui-s fois. E nfin M a ig n o l fils , étant parven u
à tro u ver la date de l’enregistrem ent, étoit p rêt à p o u r
suivre le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , lorsqu’il décéda.
A lo r s il demanda une exp éd ition au notaire , son suc
cesseur , q u i , en cherchant avec l u i , ne trouva pas la
m inute de l’acte dans la liasse de 1 7 7 7 , ni au répertoire.
A l o r s , p o u r éviter toutes difficultés, M a ig n o l fils p rit le
parti d’acheter du m eine C h e fd eville , lé 14 fructidor an 1 r ,
une ratification de la vente q u ’ il avoit consentie en 1777*
M u n i de celle p ièce, M a ig n o l fils inform é que le pos
sesseur du p ré L en o b le élo it A n to in e G u illa u m e , de P o n ta u m u r, le fit citer en désistem ent, par cédule du 3 v e n
dém iaire an 12.
�( 8 )
G uillau m e ne vo u lu t pas plus donner d ’explications que
le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , et ne com parut au bureau
de p aix que p o u r o b éir à la loi. Ensuite il se défendit
p ar des réquisitoires de qualités et de titres; et après c e la ,
il demanda la nullité de l’e x p lo it , sous prétexte que les
confins du p ré n’y étoient pas énoncés , qu oiqu ’ ils le fus
sent dans la cédule.
11 succomba justement sur cette c h ic a n e , par jugement
du 4 pluviôse an 12 , lequel néanmoins réserva les dépens
p o u r y être fait d r o it, en statuant au fond.
E n fin il plut à G uillau m e de rév éler q u ’ il étoit acqué
reu r du sieur M a i g u o l , de L a n d o g n e , par acte du 29 ven
tôse an 6 , et il assigna son vendeu r en garantie.
L e sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , étoit décédé dans l ’in
tervalle ; ses enfans in te rv in re n t, et en rendant compte
des faits, ils se contentaient d ’abord de dire que leur père
étoit p ropriétaire en vertu d ’ un acte , sans l ’indiquer. C e
pendant il falloit ne pas s’en tenir à des mots ; et les h é r i
tiers M a ig n o l produisirent enfin un acte sous seing p r iv é ,
sous la date du 2 octobre 1 7 7 9 , enregistré seulement depuis
le p r o c è s , et ainsi conçu :
« J e so u ssig n é, subroge M e. P ierre M a i g n o l , bailli
« de L a n d o g n e , à l’effet de la vente du bail em phytéo« tique , appelé P r é - G r a n d , que M e. A n n o t C h cfd ev ille
« m ’a co n sen tie d e v a n t M a ig n o l, n o ta ire, le six juin mil
« sept cent so ixa n te-d ix-sep t, p o u r p a r lu i jo u ir dudit
« p ré ainsi q u ’il avisera bon être , m oyennant la somme
« de deu x cent quatre-vingts liv r e s , dont deux cents livres
« dem eurent compensées avec pareille somme de d e u x
« cents livrescoinprise en la cession que ledit sieur M a ig n o l
« m ’a faite devant A lle y r a t cejourd’h u i , d ’ un contrat de
« rente
�9
(
)
« rente sur les sieurs de L a r f e u i l , et les quatre-vingts livres
« restantes me seront déduites sur les arrérages réservés
« par l’acte ci-dessus daté. Fait ce deux octobre m il sept
« cent soixante-dix-neuf; et sig n é M a ig n a l.
« Enregistré à R i o m , le 24 nivôse an 13 : reçu
5
fr.
« 60 cent. , etc. »
L es héritiers M a ig n o l com priren t bien q u ’ils ne p o u voien t pas opposer cet acte à M a ig n o l fils , com m e ayant
une date certaine antérieure au procès. E n conséquence,
p o u r a v o ir plus de droits vis-à-vis M a ig n o l p è r e , ils de
m andèrent sa misé en cause , qu i fut ordon née par juge
m ent du 6 therm idor an 12.
L e sieur M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , ainsi assigné en
garantie par les adversaires, dit en défenses q u ’il reconnoissoit sa signature , mais que l ’ écrit qu ’on lui représentoit ne contenoit de sa part aucune con vention synallagm atique qui l’eût p riv é de la p ro p riété de son pré.
L a cause en cet état portée à l ’audience du tribunal
d ’arrondissement de R i o m , le 23 ventôse an 1 3 , les h éri
tiers M a ig n o l s’efforcèrent de jeter de la d éfa veu r sur
G uillau m e M a ig n o l p è r e ; et le sieur L e g a y , l ’un d ’e u x ,
q u i avoit écrit com m e scribe la m inute de l’acte du 2 oc
tobre 177 9 > u^ a jusqu’à d ire , en désespoir de cause, q u ’il
avoit écrit aussi un double du sous-seing p riv é p o u r être
remis au sieur M a i g n o l , du C heval-B lanc.
Q u e lq u e défiance que dût inspirer au tribunal une mise
en fait de cette im p o rtan ce , venant d’ une partie intéressée
a la fin d’ une seconde p la id o ir ie , elle r é u s s it, et le tr i
bunal ordonna la comparoissance des parties en personne
p o u r être questionnées sur ce fait.
B
�*
t i '
( 10 )
A l ’audicnce du 6 floréal an 1 3 , tout le m onde com
parut ; le tribunal fit p lu sie u rs questions à M aign o l père
et à M a ig n o l fils. L e sieur I.egay lui-même fut admis à
rép o n d re sur le fait par lui a llégu é , et le tout fut consigné
dans le jugem ent en form e d’interrogatoires.
M . le p rocu reu r im périal fut pleinem ent d ’avis que
l ’acte sous seing p r iv é n’avoit pas eu p ou r objet une vente
q u ’ il n’énonçoit p as, et q u ’il étoit d’ailleurs nul com m e
n ’étant pas double. Cependant le tribunal y vit une ven te,
et qui plus e s t , une vente valable ; en c o n s é q u e n c e, ii
d é b o u ta ‘ M a ig n o l fils de ses demandes (1).
( 1 )
J
u g e m e n t
d o n t
e s t
a p p e l
.
Entre Guillaume Maignol fils..........Antoine Guillaume............
Marie-Gilberte M aignol, et sieur Pierre L e g a y , son mari ; A n
toine M aignol, Gilberte M aignol, veuve Paneveyre, et autres.. . .
et Guillaume Maignol père.
Interrogatoire de Guillaum e M aign ol père.
A lui demandé si à l’époque de l’acte notarié, du 2 octobre
j 7 79 , il a été fait le même jo u r, entre les mêmes parties , un
acte sous signature privée. — Répond qu’il y a eu en effet un acte
sous seing privé. — Dem . Par qui les doubles ont été é c rits , et
s’il reconnolt le double sous seing privé qui lui est représenté
et rapporté par les parties de M°. Mayet. — Rép. que ledit acte
avoit été écrit de sa main. — Dem. Qui est-ce q u ia dicté les con
ventions. — Rép. que c ’étoit le sieur Pierre Maignol. — Dem . Si
ledit sieur Pierre Maignol avoit écrit quelque chose. — Rép. que
non , et qu’il est très-mémoratif qu’il n'y a pas eu d’autre double
écrit du sous-seing privé, que celui qui lui est représenté —
Dem . Quel a été le but de cet acte sous seing privé? — Rép.
�( 11 )
L e sieur M a ig n o l fils à interjeté appel de ce ju gem ent,
et ses m o y e n s , p o u r le faire accueillir , sont fondés sur
les principes les plus constans et sur la plus exacte justice.
que c’étoit pour céder au sieur Pierre Maignol la jouissance du
pré dont est question , jusqii à d&ïfômêauæ arrangemens entre
eux. — Dem. Le sieur Pierre Maignol ne devoit donc pas avoir
cette jouissance par l’acte notarié ? — Rép. que non ; qu il n’y
a que l’acte sous seing privé qui la lui délaisse. — A lui demandé
s’il ne fut pas question entr’eux de chercher à éviter les droits
de lods. — Rép. qu’il ne sait pas ce que le sieur Pierre Maignol
pensoit ; que pour lui ce m otif n’est entré pour rien dans cet
acte. — Dem . S’il a été question de la propriété du pré. — Rép.
que n o n , que ce n’étoit pas son intention, et que ce ne pouvoit
être non plus celle du sieur Maignol. — Dem. Pourquoi, n’ayant
été question que de la jouissance, l’acte sous seing privé ne fait
aucune mention de cette jouissance. — Rép. qu’il a écrit sous
la dictée de M. Maignol. — Dem . Si son fils étoit présent à cet
acte, — Rép. que non ; mais qu’en ayant eu connoissance peu
de temps après , il lui en avoit témoigné son mécontentement.
— Dem . Quel Age avoit alors votre fils ? — Rép. environ seize
ans. — A lui demandé si le sieur M aignol, ayant intention de
se soustraire aux droits de lods , n’avoit pas aussi l’intention de
devenir propriétaire au lieu de simple jouissant du pré. — A
répondu que M. Maignol a bien pu avoir cette intention ; mais
qu’il n’a pas été question de la propriété entre les parties. _
Dem . Lorsque vous avez fait donation de tous vos biens à votre
fils , aviez-vous alors la jouissance du pré? — Rép. que M. Mai
gnol en jouissoit alors. — Dem . Avez-vous donné le pré dont il
s agit? — Rép. qu’il a donné en général tous les biens qu’il avoit.
— Dem . Avez-vous eu connoissance de la vente du p r é , faite
le
ventôse an 6 par M. Maignol à Guillaum e? — Rép. que
ce t. objet pouvant se rendru ? il ne s’est pas mis en peine do
2
13
�-,
t
(
>2
)
/
M O Y E N S .
L e s premiers juges se sont occupés de l ’acte sous seing
s’informer de ce que le sieur Maignol feroit relativement à cette
affaire. — D em . S’il a su la vente. — Rep. qu’il en a eu connoissance quelque temps après ; et ensuite a ajouté affirmati
vem ent qu’il l’avoit sue quatre à cinq mois après. — Dem . S’il
avoit d’autres éclaircissemens à donner. — Rép. qu’ayant appris
la vente du pré par Pierre Maignol à Antoine Guillaum e, il a
voulu se procurer l’acte de vente de 1777, dont la minute étoit
chez ledit sieur Pierre Maignol ; il n’avoit pu se le procurer
d’abord. — Dem . Si le sieur L eg a y, notaire, a écrit un autre
double de l’acte sous seing privé. — Fiép. que non.
Interrogatoire du sieur M aig n ol f ils .
Dem . S ’il avoit eu connoissance des affaires faites par son père
avec le sieur Pierre Maignol, en 1779* — Rép. qu’il n’en a eu con
noissance que depuis qu’il a été à la téte de la maison ; qu’a
vant , son père lui avoit parlé des arrangemens faits avec le sieur
Pierre M aignol, en lui disant qu’il espéroit rentrer dans le pré.
— Dem . Rappelez-vous ce que vous a dit M. votre père à l’égard
de l’acte notarié et du sous-seing privé. —* Rép. qu’il lui a dit
avoir consulté MM. P a g è s, Andraud et Grenier sur l’acte sous
seing privé, et qu’on lui avoit dit qu’il étoit nul , pour n avoir
pas été fait double. — Dem . M. votre père avoit donc cet acte
alors? _ Rép. qu’il ne l’avoit pas, mais qu’il se rappeloit de son
contenu ; que son père lui a toujours dit qu’il n’y avoit pas eu
de double de cet acte. — M. Maignol père interpelé s’il est
vrai qu’il a consulté les trois jurisconsultes sus-nommés. — Rép.
qu’ou i, qu’il n’avoit pas l’a cte; mais que sur ce qu’il en a voie
rapporté, M. Andraud lui avoit assuré que l’acte étoit nuU —
�C 13 )
p riv é dont les adversaires font leur titre , comme si cet
acte ctoit souscrit par le dem andeur lui-môme ; ils ont
Dem. à M. Maignol fils, s’il a vu entre les mains de son pere
un écrit sous seing privé. — Rép. n’en avoir pas v u , et que
son père lui a toujours assuré qu’il n’avoit pas été fait de double.
— Dem. Si lors de la donation à lui faite par son p ère, celuici lui avoit aussi donné le pré. — Rép. que son père disoit tou
jours qu’il avoit droit de se remettre en possession dudit pré,
mais qu’il lui donnoit pour prétexte qu’il n’avoit pas le titre
qui établissoit la propriété de ce p ré , la minute de ce titre étant
entre les mains de Pierre Maignol. — D em . Avez-vous eu con
noissance que M. L e g a y , notaire, eût fait un des doubles du
sous-seing privé de 1779? — Hép. qu’il a ouï dire par son père
que le sieur Legay avoit été le scribe de l’acte notarié, et non
du sous seing privé.
Interrogatoire de M e. A n toin e Bouyon.
Dem . A vez-vou s eu connoissance qu’il eut été fait un acte
double sous seing privé ? — Rép. n’avoir eu connoissance et
11’avoir entendu parler de cet acte que depuis l’affaire dont
s’agit.
Interrogatoire de M e. P ierre Legay.
Dem . A vez-vou s eu connoissance qu’il eût été fait un acte
double sous seing privé? — Rép. que se trouvant à L andogne,
M. M aignol, de Landogne, qui étoit dans son cabinet avec
M. M aignol, du Cheval-Blanc , l’appela, et l’invita à écrire un
double sous seing p riv é , contenant subrogation de r e n te , et
notamment contenant aussi cession tl’un-pré de la part du sieur
M aignol, du Cheval-Blanc, au profit du sieur Pierre Maignol,
de Landogne. — Dem . Etes-vous mémoratif si l ’acte que vous
écrivîtes étoit sur papier timbré ou sur papier libre? — Rép.
�C H )
confondules moyens de M a ig n o l fils avec ceux de M a ig n o l
p è r e , sans donner de motifs de cette résolution p rin ci-
qu’il ne se rappelle pas sur quel papier il écrivit. — Dem. Q uel
qu’un écrivoit il avec v o u s? — Rép. qu’il ne s’en rappelle pas
t r è s - positivement ; que néanmoins, sans pouvoir Lien le cer
tifier, il croit que M. M aignol, du Cheval-Blanc , écrivoit avec
lu i , et que M. M aignol, de Landogne, leur dictoit. — jD< m. Lors
que vous eûtes fini d’écrire , qui est ce qui signa? — Rép. qu’il
ne s’en rappelle pas. — Dem . S’il n’écrivit qu’un acte , et s’il
n’en écrivit pas deux. — Rép. qu’il est mémoratif d’en avoir
écrit un seulement. — D em . M. M aignol, de Landogne, écri
vit il en même temps que yous? Rép. que non; que c ’est lui
qui dictoit.
Après ces différens interrogatoires, M. le procureur impérial
a porté la parole ; et après un résumé de l’affaire , il a été d’avis
de déclarer nul l ’acte sous seing p rivé, du 2 octobre 1779 ,
parce qu’il n’avoit pas été fait double ; a conclu à ce qu’Antoine Guillaume fût condamné à se désister du pré dont il s’a g it,
en faveur du sieur Guillaume Maignol père , ou quoi que ce soit
Guillaume M aignol, son fils et donataire, avec restitution de
jouissances, et aux dépens. Il a pareillement conclu à ce que
les parties de M ayet fussent tenues de garantir ledit Antoine
Guillaume des condamnations contre lui prononcées.
Les débats terminés , le tribunal a ordonné que les pièces
seroient mises sur le bureau, pour en être délibéré en la chambre
du conseil.
La cause de nouveau appelée en cette au d ien ce, il en est
résulté les questions suivantes à résoudre.
Q uestions.
Quels effets doivent avoir les actes des 16 mai 1755, 6 juin
1777 > l ’acte notarié, du 2 octobre 1779, et l’acte sous seing
�«
( i
5
I
)
p a le ; et cependant ce n’étoit pas une m édiocre difficulté
que celle de savoir jusqu’à quel point un fils, donataire
p rivé, du même jour deux octobre 1779» intervenus dans la
i'amille des Maignol?
L ’acte sous seing privé, du 2 octobre 1779, n’énonçant pas
qu’il a été lait double , cette irrégularité doit-elle le faire dé
clarer n u l, lorsque cet acte a reçu , du consentement de celui
qui veut l’attaquer, uns exécution complète pendant plus de
vingt-cinq ans?
E n ce qui touche la demande en désistement, formée contre
le nommé Antoine G u illaum e, du pré dont il s’agit ;
Attendu que cette demande est subordonnée à l’effet que
doivent avoir différens actes qui ont été consentis entre les
M aign ol, relativement au pré en question.
En ce qui touche la validité de ces actes ;
Attendu qu’il est établi que par le contrat du 16 mai iy 5 5 ,
Guillaume Maignol père a acquis la propriété de la rente fon
cière de go francs , assise sur le pré dont il s’agit;
• Attendu que par contrat du 6 juin 1777, le même Guillaume
Maignol père étant devenu propriétaire de ce pré , a réuni par con
séquent dans sa main la rente , et le pré qui étoit asservi à cette
rente ; que dès-lors il y a eu en sa personne confusion des qua
lités de créancier et de débiteur, ce qui a opéré nécessairement
l’extinction de ladite rente ;
Attendu que le contrat du 2 octobre 1779, consenti par G uil
laume Maignol père à Pierre M aignol, son parent, n’a pu avoir
réellement pour objet la cession de la rente qui n’existoit plus,
et ne peut se référer qu’à la cession de la propriété du pré;
Attendu que l’acte sous seing privé du môme jour 2 octobre
» intervenu entre les mêmes Guillaume Maignol p è r e ,
et Pierre M aignol, a subrogé ledit Pierre Maignol à la cession
co n sen tie à Guillaume Maignol p a r le contrat du G juin 1777;
J779
�( 16 )
par acte authentique , p o u v o it être tenu de l ’effet d ’ un
acte sous seing p r i v é , n ’ayant de date certaine q u ’après sa
donation.
,
que cette subrogation générale des effets de l’acte de 1 7 7 7
ne peut s’entendre que de la propriété du pré dont il s’a g it,
puisque cet acte de 1777 étoit uniquement translatif de la pro
priété du même pré ;
Attendu que quoique cet acte sous seing privé , du 2 octobre
177g, ne fasse aucune mention qu’il a été fait double entre les
parties, Guillaume Maignol p è r e , ni Guillaume M aign o lfils,
ne peuvent, dans les circonstances où se trouvent les parties-,
exciper de cette omission , parce qu’il résulte des réponses
faites par lesdits Maignol père et fds, lors de leur comparution
à l’audience, qu’ils ont connu la possession publique de Pierre
Maignol, et après lu i, du mommé Antoine Guillaume , tiers dé
tenteur ; qu’ils ne se sont pas mis en devoir de réclam er cofitre
cette possession ; qu’ils ne se sont pas mis en devoir non plus
de réclamer contre l’acte du 2 octobre 1779, quoique cet acte
fût présent à leur e sp rit, et du fait personnel de Guillaume
Maignol père ;
Attendu que cette exécution donnée à cet acte sous seing
p rivé, du 2 octobre 1779, forme une fin de non-recevoir contre
Guillaum e M aignol, d’après l’article 1Z2Ü du Code civil ;
Par ces m otifs,
L e trib u n a l, par jugem ent en premier ressort, ayant au
cunement égard à ce <jui résulte des réponses faites par lesdits Maignol père et fils, lors de leur comparution à l’audience
dudit jour G du présent mois de floréal, déclare Guillaume et
autre Guillaume Maignol , père et fils , non recevables dans
leur demande en désistement du pré dont il s’agit. Sur le sur
plus de toutes les demandes en recours et contre recou rs, et
autres dem andes, met les parties hors de cause ; compense les
Une
�( 17 )
U n e donation contractuelle ne peut subir aucune dim i
nution ; car c’est sous la foi de cette promesse que deux
familles se sont unies. Q uand la donation contient tous les
biens p rése n s, elle doit se composer de toutes les actions
qui résultent des titres remis par le donateur au donataix*e; caries actions sont aussi des meubles ou des im m eu
b le s, suivant l’objet q u ’elles tendent à recouvrer. ,
Com m ent donc admettre que les droits assurés à des
futurs et à leurs d escen d an s , par leur co n tra t de m ariage,
puissent être d im in u és sous aucun prétexte par des sousseing privés , d’ une date à la v é rité a n térieu re, mais non
constatée par l’enregistrem ent? Il en résulteroit souvent
que deu x fam illes, après avp ir com pté sur une fortune
conséquen te et p ro p o rtio n n é e , sur le v u de plusieurs titres,
n ’auroient cependant fait q u ’ un calcul in u t ile , et que l ’ un
des ép o u x se t r o u v e r a it , après ses n o c e s , n ’avoir que la
moitié de la fortune qu ’il avoit établie et justifiée en se
mariant.
C ’est p ou r p rév e n ir de tels m écom ptes que les lois pros
crivent les contre-lettres aux contrats de m a ria ge, et q u e ,
dépens entre ledit Antoine G uillaum e, ledit Antoine Maignol
et consorts ; et condamne lesdits Guillaume et autre Guillaume
M aignol, père et fils , en tous les dépens faits tant à l’égard
dudit Antoine Maignol et consorts ès-dits noms , q u en ceux
qui ont été compensés entre lesdits Antoine G uillaum e, A n
toine Maignol et consorts; et aux co û t, expédition et significa
tion du présent jugement.
Fait et prononcé publiquem ent, à l’audiencc du tribunal civil
de première instance , séant à R io n i, par MM. P a r a d e s , prési
dent; D a n i e l , A s t ie h et M a n d o s s e , juges , le 18 flo réa l
i 3,
C
�I^K
M
( i 8 )
dans les donations de biens présens et à v e n i r , il est permis
aux ép o u x de s’en tenir aux biens présens, p o u r que leur
contrat ne souffre aucune dim inution dans la fortune alors
p rom ise, et qu ’ils demeurent entièrement hors de la dé
pendance du donateur.
Certes le sieur M a ig n o l fils n’entend en cette cause élever
aucune sorte de soupçon contre la sincérité de l ’écrit de
son p è r e ; mais il n ’est ici que le ch ef de sa fam ille, et
il plaide p o u r le maintien d’ une donation qui a saisi aussi
ses descendans. Son contrat de mariage a été compté p o u r
r ie n , et c’étoit l’acte qui devoit l ’em porter sur toutes les
autres considérations. D e vagues recherches sur l ’inten
tion des parties, et sur la connoissance que M a ig n o l fils
avoit pu avoir à seize ans de l ’existence d’ un sous-seing
p riv é , ne pou vo ien t conduire les premiers juges que des
hypothèses à l’abstraction , et de l ’abstraction à l ’erreur.
A quoi p ou vo ien t tendre en effet les questions faites au
sieur M a ig n o l fils, s’il avoit eu connoissance de l’écrit sous
seing p r iv é en 1779 > ^ un “ ge ° ù 011 n,° °lue ^a^re de s’oc
cuper des petits détails d’une fortune dont on ne jouit pas ?
I-e sieur M a ig n o l père avoit dit à son fils qu ’il avoit signé
un acte nul et n on d o u b le, p o u r céder au sieur M a ig n o l,
de L a n d o g n e , les jo u issa n ce s d ’ un pré. U n e consultation
d’avocats en porta le môme ju gem en t; et dès-lors on pense
bien que cette d écision q u i sans d ou te tran q u illisa le p e re ,
n ’occupa bientôt plus le fils. 11 a fallu ensuite l’im por
tance et les débats d ’un procès p our lui rappeler uu fait
presque effacé de son souvenir.
T o u tes les précautions qu ’ont prises les premiers juges
�ki5
( 19 )
p o u r chercher la pensée des sieurs M a ig n o l père et fils dans
leurs réponses , et les mettre en défaut par des questions
inattendues, ne pou vo ien t donc changer l ’état de la cause.
Il y avoit un point de vu e c e rta in , qu i conduisoit à une
simple question de d ro it, et dispensoit de se perdre dans
le vague des conjectures.
P o u v o it-o n opposer à M a ig n o l fils , donataire contrac
tuel en l ’an 7, demandeur en désistement en l ’an 1 1 , un acte
sous seing p r iv é , en registré en l ’an 1 3 ? Ce_spus-seing p riv é
étoit-il une vente et une vente valable du p ré conten
tie u x ? L a jouissance dudit p r é , qu ’a vo it eue le sieur M a i
g n o l , de L a n d o g n e , s u p p o so it-e lle nécessairement une
vente , com m e l ’ont décidé les premiers juges ?
Q uand m êm e il auroit été possible de dim inuer par
une vente sous seing p riv é l ’efFet d’ une donation con
tractuelle , au moins au roit-il fallu que cette vente fût
p a rfa ite , et que l’acte duquel on v e u t la faire résulter en
eût tous les caractères et toutes les formes.
A u con traire, on ne vo it dans le sous-seing p r iv é , du 2
octobre 1 7 7 9 , et en
supposant à. celte d a te , q u ’ un
acte obscur et é q u iv o q u e , dont l’intention n ’a pas m êm e
p u etre bien exp liqu ée par ceu x qui s’en font un titre.
Si l’on se reporte aux circonstances qui ont p récéd é et
accom pagné cet a c t e , on est bientôt convaincu que le
sieur M a ig n o l, du Cheval-B lanc, n’entendoit céder son pré
L en o b le , que dans l ’expectative du dom aine Gastier ; et
q u e , jusqu’à ce q u ’ il pût etre p ropriétaire lui-meme ,
il n’entendoit pas vendre.
Sans cela , com m ent exp liq u e r cet am algam e d'aclcs
C 2
>|}»j
�Vai
( 2° )
inu tiles, et"en quelque sorte inintelligibles et incom pa
tibles ?
M a ig n o l père étoit prop riéta ire du p ré L e n o b le , di
sent les adversaires , puisqu’il a vo it acquis la rente en
55 , et l’effet du bail em phytéotique en 17 7 7 , par acte
passé devant M a ig n o l, de L a n d o g n e , lui-même.
Cela est certain ; et c’est précisément parce que M a ig n o l,
i j
de L a n d o g n e , étoit le rédacteur de l’acte de 17 7 7 , q u ’il
ne pou vo it pas ignorer que le sieur M a i g n o l , du ChevalBlanc , propriétaire du domaine utile et direct du pré
L e n o b le , 11’avoit q u ’un mot à dire p o u r le vendre , sans
user d ’autant de détours et de circonlocutions.
Si son intention eût été de vendre , p ou rq u oi donc
auroit-il vendu une î-ente de 1 7 5 5 , qui n’existoit plus ,
et q u ’il créoit sur lui-m êm e en d’autres te rm e s, en do n
nant une plus ancienne h yp othèqu e ?
P o u rq u o i auroit-il fait deux actes au lieu d’ un seul ?
p o u rq u o i a u r o it-il pris des précautions p o u r valider un
acte absolument inutile, et n’en auroit-il pris aucune p o u r
la rédaction du seul acte qui eût un sens et un résultat ?
A qu i persuadera-t-on que le sieur M a ig n o l, de L a n
dogne , bailli de sa justice , et notaire in telligen t, se fût
contenté de tels a ctes, s’il eût voulu devenir réellem ent
et solidement p rop riéta ire? ou p lu tô t, qui ne sera pas per
suadé , à la le ctu re de ces d e u x actes d u m êm e jour ,
que le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , a vo ulu enlacer le
sieur M a ig n o l , du C h e v a l-B la n c , par des clauses entor
tillées et peu intelligibles , qui présentassent au besoin
un sens favorable à l’intention de ce d e r n ie r , lequel dût
en effet s y laisser prendre.
�147
( 21 )
Car ne perdons pas de v u e que le sieur M a i g n o l , de
L a n d o g n e , a d icté ( on l’avoue ) l’acte sous seing p r iv é ,
du 2 octobre 1779. Il ctoit donc bien le maître de d icter
une ven te, si telle étoit l ’intention de M aign o l père. D èslors s’il n ’en a pas dicté une claire et non é q u iv o q u e , il
est clair que l’acte doit être interprété contra eum in
ci/jus potestata e ra t legem apertiiis dicere.
O r , le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e, s’est fait subroger
à l’effet d’ une vente de bail em phytéotique d’ un p r é , p o u r
p a r lu i jo u ir d u d it p ré ainsi qu’ il avisera bon ê tr e ,
moyennant 280 francs \ et cela ne ressemble nullem ent
à la vente franche et simple dudit pré.
Il
est bien plus clair q u ’il ne s’agissoit que de jouis
sances , et l’acte notarié le p ro u v e ; car la rente de 90 fr.
créée ou renouvelée par M a i g n o l , du C h e v a l - Blanc ,
étoit payable par les jo u is s a n s du pré. O r , peut-on à.
présent se m épren dre à l’intention des parties ? L ’acte
notarié étoit un prem ier pas vers une convention plus
importante. L es parties p révo yo ien t que M a ig n o l , du
C h e v a l-B la n c , auroit le domaine Gastier , et alors tout
auroit été consommé. Jusque-là il devo it une rente ; et
cependant il stipuloit q u ’elle seroit payée par ceux qu i
jouiroient du pré.
S’il eût jo u i, il devoit payer lui-m em e ; mais le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , devoit jo u ir , et alors il se payoit
par ses m ains, d’après la clause, com m e jo u is s a n t ; il lui
ialloit donc un nouveau titre p o u r jo u ir du p ré : voilA
donc le m o tif exact et visible du sous-seing p rivé.
Cette interprétation si facile 11’a point échappé aux
4SI
�(
22
)
héritiers M a ig n o l, à qui il auroit peut-être été nécessaire
de demander aussi à quoi avoit pu être utile de faire deux
actes p o u r un. Il est vrai q u ’ils avoient p ré v u l ’objec
tio n , et y avoient rép on du d ’avance; c’é to it, dirent-ils
d ’abord , p o u r év iter les droits d’cnregisti'ement.
M ais , d’après le tarif de 1722 , qui étoit suivi en 1 7 7 7 ,
une vente d ’immeubles payoit un droit de 1 fr. p o u r
les premiers 100 f r . , et 10 sous p ou r chaque 100 francs
suivans. A in s i , c’étoit 35 sous p ou r 280 francs ; et à
supposer , com m e l’entendent les adversaires , que le p r ix
eût été de 2000 fran cs, c’eût été 10 liv. 10 sous ; tandis
que l ’acte notarié , du 2 octobre 1 7 7 9 , a payé un droit
de contrôle de 14 liv, 12 sous; ce qui encore ne dispensoit pas du contrôle du sous-seing p r i v é , quand il y au
roit lieu de le produire.
A ussi n ’est-ce plus là la cause q u ’ont donnée depuis
les adversaires; c’é to it, ont-ils d i t , p o u r éviter le paye
ment des droits de lods.
Singulière raison p o u r le bailli de la justice, qui ne
pou vo it pas être traité bien rigoureusem ent en fiscalité*.
A u reste, le droit le plus ordinaire étoit de 2 sous 6 de
niers p ou r livre. Ce q u ’ il appelle son contrat de vente
portait un p rix de 280 fr. ; c’étoit donc 35 fr.
q u ’ il
s’ agissoit d’éviter.
D ira -t-o n cn c o rc q u e celte som m e n’ étoit pas le p r ix
réel ? Mais , si le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , ne faisoit
un sous-seing p riv é que p o u r 11e pas payer des lods , ce
n ’étoit donc pas la crainte de ce droit qui lui faisoit dis
sim uler le p rix : convenons plutôt que si au lieu du p rix
im aginaire q u ’il a fait écrire dans ce sous-seing p riv é , il
�avoit inséré un p rix ap pro xim atif de la valeur de l ’ im
m e u b le , il auroit excité la défiance du sieur M a ig n o l, du
C h eval-B lan c ; et c’est ce qu ’il vo u lo it éviter. R e m a r
quons encore q u ’avec cette version, les adversaires sont
forcés de donner p our prétexte de l’illégalité d’un a c t e ,
line fraude que leu r père vo uloit c o m m e ttre , et dont
cependant ils veulent s’adjuger le profit.
C om m ent donc v o ir une vente de p r o p rié té dans ce
sous-seing p riv é ? C o m m e n t c o n c e v o ir q u ’il ait une exis
tence com patible avec l’acte notarié du m em e jour ? A u
contraire , en ne vo ya n t dans le sous-seing p riv é q u ’un
p o u v o ir de jo u ir du p ré p ou r la rente de 90 fra n c s, et le
lé g e r supplément c o n v e n u , on entend alors parfaitement
l ’existence simultanée des deux actes: et on concoit c o m m ent le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , créancier d’une
rente payable par les jo u is s a n s du pré , eut besoin d’un
second titre qui le rendît jo u is s a n t lu i-m e m e ?
D e cette m a n ière, il n’ étoit plus nécessaire que l ’acte
sous seing p riv é fût double ; car si le sieur M a ig n o l, du
C h eva l-B la n c , avoit v o u lu demander les jouissances du
p r é , le sieur M aign o l, de L a n d o g n e, lui auroit exh ibé son
é c rit, portant q u ’il avoit eu le droit d’en jouir. Si à son
tour ce dernier avoit demandé les arrérages de rente ,
l ’autre auroit répondu q u e , com m e jo u is s a n t du p r é , il
se les devoit à lui-m em e.
L a cause est donc claire dans ce sens ; mais si on ve u t
v o ir une vente dans ce sous-seing p r i v é , alors non-seu
lement tout est in e xp lica b le, com m e on vient de l ’o b
server , mais encore les principes s’opposent a bsolu m en t
a ce que cet acte puisse contenir une vente vala b le.
�( 24 ?,
Les actes translatifs de p rop riété sont des notes trop im-
portans à la société, p o u r q u ’on puisse les dispenser avec
trop de légèreté de la rigu eu r des formes légales. Ce que
la loi a v o u l u , a dû être la règle com m une ; et si quelques
exceptions tolèrent par fois l’arbitraire, dont il faut tou
jours se tenir en défiance, ce 11e peut être que p o u r venir
au secours de l ’ ignorance qui a traité avec bonne fo i, et
qu i ne doit pas en demeurer victime.
M ais un notaire éclairé com m e le sieur M a i g n o l , de
L a n d o g n e , p o u v o it-il ignorer que tous les actes synallagmatiques doivent porter m in u te , s’ ils sont notariés, et
doivent être faits doubles, s’ils sont faits sous seing p r iv é ?
L a raison le d i r o i t , si les premiers élémens du droit ne
l ’enseignoient com m e un principe.
C ’est m êm e la plus usuelle des maximes ; car tous les
jours on fait de pareils actes, et les moins expérim entés
n’oublient pas de v o u lo ir en retenir une copie. Cela arrive
p o u r les actes les plus simples ; et com m ent un notaire
qui eût dicté une vente Pauroit-il oublié p o u r lui-m êm e ?
L a nécessité de réd iger en double écrit les actes synallngmatiques d é riv e évidem m ent de la nature m êm e de
ces actes ; car si p ou r la validité d’ un acte de ce genre
il est requis que chacune des parties soit obligée envers
l'autre; si p ou r la validité d’ une vente il est nécessaire que
l’un consente à ven d re, et que l’autre consente à acheter,
il faut dès-lors, par une conséquence fo rc é e , que chacun
puisse avo ir dans ses mains la p reu ve que l’autre a co n
s e n ti j sans cela , il seroit au p o u v o ir de l’ une des parties
de détruire l’a c t e , ou de contester son existence.
T o u s les auteurs enseignent ces principes, et prou ven t
par
�WiSl
*5
(
)
par une foule d’arrêts, qu’ils ont été consacrés p a rla juris
prudence la plus constante.
U n arrêt du 6 août 1740 déclara nul un acte par lequel
l'archevêque de Reim s s’étoit soumis à acheter l’hôtel de
Conti m oyennant 460000 fr. L ’acte n’étoit pas fait do u b le;
mais les héritiers du prince de Conti opposoient que l’acte
11’avoit pas dû être d o u b le , parce q u ’il n’étoit obligatoire
que p ou r l’archevêque qui l ’a v o i t signé. L a m êm e chose
fut jugée par a r r ê t du 2 9 no vem bre 178 1 , entre le sieur
F o rg et et le duc de G ram m o n t : il y avoit mêm e eu m en
tion de l’acte et réparations commencées ; néanmoins le
sieur F orget obtint que les lie u x seroient remis en leur
prem ier é t a t , ou des dom m ages-intérêts en cas qu’ils ne
pussent se rétablir.
U n autre arrêt du 23 juin 176 7 a jugé la rigueur du
principe dans des termes plus forts encore. D e u x co h éri
tiers a voien t fait un partage sous seing p r iv é , et l’ un d ’e u x
devoit payer p ou r retour de lot à l’autre 240 fr. L ’acte
fut déposé chez le curé du lie u ; chacun jouit de son lo t;
et dans un contrat de mariage postérieur, un des copartageans se constitua, en présence des autres, le lot à lui échu.
L ’ un des coh éritiers, après plusieurs an nées, demanda
un partage , et soutint que l’acte q u ’on lui présentoit étoit
nul p ou r n’a vo ir pas été fait double. O n lui opposoit le
dépôt en main tierce , sa p rop re exécution pendant six
an s, et des coupes d’arbres dans son l o t , sa présence m êm e
au contrat de mariage ci-dessus, et l’adhésion de tous les
autres héritiers.
Ces moyens avoient réussi en première instance en 1764;
mais sur l’appel à A m ien s , la force des principes p ré-
D
�(
2°
)
Valut. U n e sentence de 1766 pronoflça la nullité de l’acte,
et ordonna un nouveau partage. Su r appel au parle
m en t, cette sentence fut con firm ée, après une plaidoirie
très-d éb a ttu e, dit l’arrêtiste, et l’appel fut mis au néant.
Enfin on connoît l ’arrêt cité par I,ép ine de G rain ville.
U n e vente avoit été faite en deux doubles; mais il n ’étoit
pas fait m ention dans les deux écrits qu’ils eussent été faits
doubles : ils étoient représentés tous deux , et cependant
l ’acte fut déclaré nul.
C e u x qu i ne veu len t v o ir dans les procès que des cir
constances toujours variables, et ces apparences fugitives
de bon ou mauvais d r o it, qui s’évanouiroient souvent le
le n d e m a in , si on les exam inoit sous un autre point de
v u e , ceux-là , disons-nous , pou rroien t s’étonner d ’ une
telle jurisprudence, sans songer que si le su m m u m ju s a
p a rfo is ses inconvénien s, l’arbitraire en a m ille fois davan
tage. Ils p eu ven t lire dans L é p in e de G ra in ville les motifs
qu i engagèrent le parlement à se décider p o u r la nullité
dans l ’espèce ci-dessus, et peut-être cesseront-ils de penser
que le juge doit rester le maître de son o p in io n ,q u a n d il
en voit le d a n g e r , et quand il peut se gu ider par les
principes.
L ’article 1325 du Code civil les rappelle , et devoit
em pêcher les prem iers juges de faire autant d ’efforts p ou r
rechercher s’ il avoit été lait un double du sous-seing p rive
du 2 octobre 1 7 7 9 , q u i , par son slyle et son c o n te x te ,
p ro u v o it cependant assez par lui-m êm e q u ’il n ’avoit pas
du être fait double.
a L es actes sous seing p riv é , dit le C o d e , qui contien« nent des conventions syuallagnialiques, ne su n i valables
�7
(*
)
« q u ’autant q u ’ils ont été faits en autant d’originaux q u ’il
« y a de parties ayant un intérêt distinct.
« C h a q u e o rig in a là o it contenir la m en tion du nom bre
« des originaux qu i en ont été faits.
« N éanm oins le défaut de m en tion que les o rigin aux
« ont été faits doubles, ne peut être opposé par celui qu i
« a exécuté de sa part la convention portée en l ’acte. »
A i n s i , quand il eût été vrai que le sieur L e g a y eut
écrit un double sous la dictée du sieur M a i g n o l , de L a n dogne \ q u a n d il seroit aise de concevoir que celui-ci eut
de sa part signé un écrit par lequel il auroit dit : J e
sig n é
so u s
, subroge M e. P ie r r e M a ig n o l ( c’est-à-dire, lui-
m êm e ) , (i Veffet, etc.; quand celte rédaction insensée
seroit vraisem blable, un tel acte n’en vau dro it pas m ie u x ,
parce que ch a q u e o rig in a l ne contieudroit pas la m en
tion qu ’il a été fait double.
■ M a is , s’écrient les héritiers M a ig n o l , au moins êtesvous dans l’exception du Code que vous citez vous-m êm e;
Car vous avez la issé jo u ir le sieur M a ig n o l, de L a n d o gn e :
donc vous avez e x é c u té la vente.
O n pourvoit d ’abord rép on dre que le Code civ il peut
etre in v o q u é p o u r le passé , quand il est conform e aux
anciens p rin c ip e s , s i neiupè declaret ju s a n tiq u u n i n ova
co n stitu tio , mais qu ’il ne faut pas le suivre lorsqu’il s’en
écarte ; que d ’après cela il y avoit lieu de le citer poul
ie défaut de mention du m ot f a i t double , parce que les
arrêts y étoient conformes ; mais que les arrêts n’attaelioient aucune im portance à l ’exécution d ’ un acte nul
dans son p rin c ip e , com m e on le v o it notamment par l'arrêt
D
2
�•
«
C i
I
i . ( *8 )
de 1767 ; car ce seroit donner un effet rétroactif à la lo i,
ce qui n’est pas dans l ’intention du Gode.
M ais passons encore légèrem ent sur ce m oyen, et voyons
s’ il y a réellem ent une e x é cu tio n de l’acte sous seing p riv é
dans le sens de l’art. 1 3 2 6 , c’est-à-dire, si le sieur M a ig n o l,
du C h eva l-B la n c , en la issa n t jo u ir le sieur M a ig n o l, de
L a n d o g n c , a nécessairement entendu ex é cu te r un acte
de vente.
Sans doute , si j’acliète un p ré et que je paye le p r ix
co n v e n u , j’exécute la c o n v en tio n ; de m ê m e , si je vends
un p ré dont j’étois en possession h i e r , et q u ’après en
a vo ir touché le p rix je le liv re dem ain, sans autre cause
de tradition , et sans éq u iv oq u e , j’exécute encore le
m arché. V o ilà bien ce qu ’a vo u lu dire le Code : pas de
difficulté sur ce point.
M a i s , si l ’acheteur s’empare de l ’objet vendu , ou s’ il
a un autre titre de possession que la v e n t e , alors l’équ i
v o q u e du m ode de possession p rod uit l ’éq u iv oq u e du titre,
et le vice du titre renaît dès l’instant q u ’il n’est plus pos
sible d’être convaincu que l’occupation de la chose vendue
soit l’effet n écessa ire de l’acte de v e n te , com m e la p reu ve
certaine de son exécution.
O r , revenons à la position des parties en 1779. Sans
doute , s’ il n’existoit d ’autre acte que le sous-seing p r i v é ,
et si le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n c , n ’é to it en posses
sion q u e « vertu de cet acte , il sero it difficile de p ré
tendre qu ’ il n’a eu aucune exécution.
M a i s , i° . q u ’on supprime tout à fait le sous-seing p r i v é ,
et on concevra encore d ’après l’acte notarié du 2 octobre
1 7 7 9 , que le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n c , a eu qualité
p o u r jouir.
�^
»
9
( 2 )
E u effet, com m e le disent les adversaires, il fit créer
en sa faveur une rente qui n ’existoit plus. L e sieur M a i
g n o l , du C h e v a l-B la n c , ne stipuloit pas qu ’il la payeroit,
mais il disoit q u ’elle seroit payée p a r les jou issa /is du
pré. D o n c le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , clierchoit un
titre de jouissance, p o u r em pêcher de transporter cette
jouissance à d’autres : donc s’il a joui ensuite, c’est d’après
sa prop re convention p o u r le payem ent de sa rente. Sa
\ jo u is s a n c e n’est donc pas la p reu ve certaine de V ex écu tio n
d ’ un contrat de vente.
t
2°. Cette prétendue vente est encore si obscure, que ce
. n’est en vérité pas la peine de v io le r une loi p o u r elle.
U n notaire qui veut acheter p o u r être p r o p r ié ta ire , ne
se fait pas subroger à un bail em phytéotique p o u r jo u ir .
U n notaire qui dicte une vente p o u r lu i-m êm e, la dicte
com m e celles q u ’il rédige p o u r les a u tr e s , et ne fait pas
écrire un ba rb o u illa g e, ou astucieux, ou vide de sens.
M ais enfin les adversaires qui ne veulent v o ir que l’e x
ception du Code c i v i l , parce qu ’elle leur est fav o ra b le,
et que rien n’a plus de latitude au g ré des plaideurs que
les exceptions des l o is ; les adversaires, disons-nous, ne
rem arquent pas qu ’il faut cependant entendre la loi dans
un sens raisonnable ; car c’est bien là au moins l’inten
tion du législateur.
L a nullité ne peut pas être opposée par celui qui a
e x é c u té de sa pa rt la convention : voilà l’exception du
Code.
P o u r appliquer cette e x c e p tio n , fa u t - il une exécution
a c t iv e ? laut-il une exécution e n tiè re ?
J e vends aujourd’hu i un im m euble par acte non clou-
m
�33
(
)
b lc , et je le livre. Si au terme on ne me paye p a s , je
ne puis m e servir de ma vente , car je n’en ai pas. J ’aurai
bien une action eu désistement qui forcera l ’acheteur à
s’exp liq u e r : mais si la vente lui est onéreuse , il se
désistera ; s’il la tro u ve avantageuse, il la produira ; et
je ne pourrai l’em pêcher d’être maître de sa cause , parce
qu e j’aurai e x é c u té de m a p a rt la convention. A in si
une convention synallagm at/que m ’aura obligé s e u l:
voilà l’abus des interprétations forcées d’une loi qui n’a
rien vo ulu de pareil.
L es différentes parties de l ’article 1 3 2 5 , doivent s’ex
p liq u er l’une par l’autre , de m anière à être entendues
en s e m b le , et sans s’entredétruire. L e Code a vo u lu que
V exécu tion fût un m oyen contre le défaut de m en tion
que l’acte ait été fait double : mais si chacune des parties
est obligée envers l ’a u t r e , il est bien toujours néces
saire que celle qui a encore un in térêt distinct à l ’e x é
cu tio n de l ’a c t e , ait pardevers elle le double qui force
l ’autre à l'e x é c u te r de sa part.
Sans d o u te , quand le Code civil ôte toute action à
celui qui a e x é c u té de sa p a r t , c’est lorsque par cette
pleine exécution il n’a plus un in térêt à l’exécution qui
reste à faire de la part des autres : voilà sans contredit
l ’ unique sens que la loi puisse présenter, en l’expliquant
par ses propres expressions.
A cela les adversaires répondent que le sieur M a i g n o l ,
du C h e v a l-B la n c , étoit p a y é , et 11’avoit plus d’intérêt à
a vo ir un double.
D ’abord c’est une erreur de fait. L e sous-seing p riv é
�15/
( 31 )
p ro u v e lui-m em e le contraire; car si le p rix supposé à la
vcnteest de 280fra n cs, ile n resteroit dû plus du tiers, dès
que 80 francs demeuroient à im puter sur des arrérages de
rente , dont le prétendu vendeur ne p o u vo it pas de
m ander la compensation sans un double.
20. Les adversaires supposent que le vra i p r ix de la
cession étoit les 2000 francs cédés par la rente des Iiarfeuil ; mais le sieur M aig u ol père , q u i a remis les titres
de cette rente à son d on ataire , lui a atteste n’en a vo ir
jamais touché un denier ; celui-ci n’en a x’ien reçu non
plus : il fa llo it donc un double p o u r réclam er en rem
placement un p r ix de v e n t e , ou p o u r en demander la
résolution.
3°. Une circonstance non moins sensible p ro u v e encore
la nécessité d’a vo ir un double de vente, si c’en étoit une.
L e sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , p o u v o it être é v i n c é , ou
perdre son pré par force m ajeu re; alors en supprimant
son double il retrouvoit l’acte notarié du m êm e jo u r , et
demaudoit au sieur M aigrîo l, du C h e v a l-B la n c , le paye
ment d’une rente de 90 francs.
V o i là quelle étoit la position du prétendu v e n d e u r;
et voilà précisément les motifs de cette jurisprudence sé
vère q u i , en sacrifiant quelques intérêts particuliers , faisoit la leçon au x citoyens, et les préservoit de l’abus de
ces actes privés q u i , à l’économ ie près , sont le plus sou
ven t une occasion de surprises et une source de procès.
L a cou r doit juger ici la valeu r d ’un acte équ ivoqu e et
suspect. Si donc la rigueur de la loi fut jamais appli
cable , c’est sans doute dans une circonstance où il s’agit
�32
(
)
d ’ une prétendue v e n te , q u i , qu oique dictée par un no
taire, ne contient aucune des clauses d’ usage, aucune des
formes extrinsèques les plus com m u n es, et à l ’égard de
laquelle on n e donne aucune de ces excuses que la bonne
foi fait a d m ettre, ou que l’ignorance fait tolérer.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. V E R N I È R E , avoué.
A R IO M ,
de
l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Juin 1806.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Maignol, Guillaume. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Vernière
Subject
The topic of the resource
actes sous seing privé
bail emphytéotique
créances
cens
rentes foncières
interrogatoires
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Guillaume Maignol fils, habitant à Bonlieu, canton d'Évaux, appelant ; contre Antoine Guillaume, maréchal à Pontaumur, intimé ; et contre Gilberte Maignol, Pierre Legay, son mari, Antoine Maignol, Gilberte Maignol, veuve Paneveyre, et autres héritiers de Pierre Maignol, de Landogne, intimés ; en présence de Guillaume Maignol père, habitant au lieu du Cheval-Blanc, commune de Condat, appelé, en assistance de cause.
Table Godemel : Acte sous seing privé : 1. un acte sous seing privé synallagmatique, contenant vente et subrogation, est-il nul s’il n’a pas été fait double ? peut-il être opposé à un donataire contractuel, s’il n’a de date certaine que postérieurement à sa donation ? enfin quels caractères d’exécution faut-il à cet acte pour qu’il soit obligatoire, malgré les nullités qui le vicient ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1755-1806
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1605
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0328
BCU_Factums_G1606
BCU_Factums_M0710
BCU_Factums_M0527
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53279/BCU_Factums_G1605.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Landogne (63186)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes sous seing privé
bail
Bail emphytéotique
cens
Créances
interrogatoires
rentes foncières
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53280/BCU_Factums_G1606.pdf
b1d02b22e6bd1a0ba5bc1b5d3869deac
PDF Text
Text
Ba^aam asm sumjassaamammmmmam b —
—
— esaww i w »■■ }
MEMOIRE
E
N
R
É
P
O
N
S
E
,
P o u r dame G i l b e r t e D U C O U R T I A L , v eu ve
de Joseph M a i g n o l , tutrice de leurs enfans
mineurs ; dame M a r i e - G i l b e r t e M A I G N O L ,
veu ve de Michel d e P a n n e v e r t ; dame M a r i e
M A I G N O L , et sieur A n t o i n e B O U Y O N ,
son mari ; dame M a r i e - G i l b e r t e M A I G N O L ,
et le sieur P i e r r e L E G A Y , son é p o u x ,e t sieur
A n t o i n e M A I G N O L , tous intimés ;
C
ontre
G
sieur G
u illau m e
u illau m e
M A I G N O L , autre
M A I G N O L , son f i l s , appelans
d ’un jugement rendu au tribunal d 'arrondisse
ment de R i o m , le 18 flo réal an 1 3 ;
E
t encore en présence
L A U M E , maréchal
d ’A n t o i n e G U I L
habitant de la commune
de P o n t a um u r , aussi intimé.
L E sieur Guillaume M aignol fils demande le désiste
ment d’ un pré vendu par Pierre M a ig n o l de Landogne
A
�S 2),
à Antoine Guillaume : il a osé revenir contre des engagemens contractés par Guillaume M a ig n o l, son père ; il
veut être tout à la fois créancier et débiteur de lui-même •,
et c’est après vingt-cinq ans d’exécution, après que Pierre
M a ig n o l, et son fils, héritier institué, sont décédés , que
Guillaume M aign ol fils a cru trouver les circonstances
favorables, pour arracher à la famille M a ig n o l, de L a n d o g n e ,u n héritage dont leur père avoitpayé le prix.
Cette tentative qui blesse la délicatesse et les conve
nances, a été rejetée par le tribunal d’arrondissement; et
la cour s’empressera de confirmer un jugement conforme
en tous points aux lois et à l ’équité.
F A I T S .
L e i6 m a i i y
55 ,
un sieur M ichel L e n o b le , habitant
du lieu de V a u r y , concéda aux dames C hefdeville, à titre
de rente foncière et non rachetable, un pré appelé
P ré -G ra n d , de la contenue d’entour sept journaux, situé
dans les appartenances de Vaury.
Cette concession fut faite moyennant la rente annuelle
de 90 francs.
P a r une transaction du même jo u r, le sieur Lenoble
se reconnut débiteur d’une somme de 1800 francs envers
le sieur G u i l l a u m e M a i g n o l , du Cheval - B la n c, père
d’au Ire Guillaum e M a ig n o l, qui est aujourd’hui la partie
principale.
P o u r le payement de cette somme de 1800 francs,
L enoble délégua à M aign ol, du Cheval-Blanc, la rente
qui avoit été créée le même jour par les dames Chefdeville.
�lit
(3 )
M aign ol,d u Cheval-Blanc, a joui de cette rente jusqu’au
6 juin 1777 , qu’il se fit subroger par A n n et Chefdeville,
héritier des preneuses, en i j ô ô , à la propriété du pré
concédé , à la charge par lui d’acquitter la rente de 90 fr.
A u moyen de cet arrangement, M aign o l, du ChevalBlanc , dcvenoit tout à la fois créancier et débiteur de
la rente de 90 fr. ; de manière que cette x’ente s’éteignit
par la confusion.
O n sait que 1’efTet de la confusion est d’anéantir les
deux qualités incompatibles qui se trouvent réunies dans
une même personne -, ce qui est fondé sur ce qu’il est
impossible d’être à la fois créancier et débiteur de soimême.
L e pré dont il s’agit n’étoit point à la convenance du
sieur M aign ol, du Cheval-Blanc; il étoit peut-être plus
rapproché du sieur M a ig n o l, de Landogne; mais point
assez ù sa portée, pour qu’il désirât de l’acquérir.
M a ig n o l, du Cheval - B la n c , avoit d’autres vu es; il
convoitoit depuis long-temps un domaine qui joignoit
ses p ro p rié té s, et qui avoit été vendu par lin sieur
de Larfeuil au nommé Jean Gastier.
M a ig n o l, du Cheval-Blanc, savoit que M a ig n o l, de
L an do gn e, etoit créancier du sieur de L a rfe u il, d’ une
rente foncière au principal de 1400 francs, de plusieurs
années d’arrérages, et qu’ il avoit fait déclarer le domaine
vendu à Gastier, affecté et hypothéqué au payement de
sa créance.
M aign o l, du Cheval-Blanc, n’ignoroit pas que le paye
ment de cette créance étoit au-dessus des forces du ven
deur comme de l’acquéreur; et il lui sembloit facile de
A 2
tji
�•¿ïüt
( 4 )
devenir propriétaire du domaine, s’il étoit acquéreur de
la créance.
Il va solliciter Pierre M aign ol, de L a n d o gn e, de lui
céder l’effet de celte créance, offrant de lui donner en
échange ce P ré -G ra n d , dont le sieur M aign ol, de L an
dogne , n’avoit nullement besoin, qu’il n’a pas même
conservé.
M a i g n o l, de L a n d o g n e , par obligeance pour son
parent, accepta la proposition; mais il ne vouloit pas
payer de droits de lods : il falloit prendre une tournure
pour les éviter; et en conséquence, le même jour 2 oc
tobre 177 9 , il fut passé deux actes entre les parties, l’ un
par-devant n o ta ire , et l’autre sous seing privé. Comme
ces deux actes font la matière du procès, il est im por
tant de les analiser.
P a r le premier acte notarié, Pierre M a ig n o l, de L a n
dogne , cède et transporte à Guillaume M a ig n o l, du
C h eval-B lan c, un contrat de rente de la somme de 28 fr.
par a n , au principal de 1400 francs, faisant moitié de
2800 francs, consentie par dame Marie L a c o u r , veuve
de Henri de I^arfeuil, au profit de dame G aum et, grandtante du cédant, le 23 octobre 1720.
Il cède pareillement les arrérages de cette rente de
puis l’année 176 8, jusques et compris 1779.
Il cède encore l’eilct de la sentence qu’il avoit ob
tenue en la sénéchaussée d’A u v e rg n e , le 14 août 1 7 ,
56
contre Jean Gastier, acquéreur de L arfeuil, d’un do
maine situé au Cheval-Blanc, et sur lequel il avoit exercé
une action en matière hypothécaire.
M a ig n o l, du Cheval-Blanc, est subrogé à l’exécution
�l(y$
(5 )
de cette sentence, et aux procès verbaux de nomina
tion d’experts, sans néanmoins aucune garantie, ni res
titution de deniers pour cet objet.
L e jjrix de cette cession est fixé ù la somme de 2000 f r . ,
pour payement de partie de laquelle M a ign o l, du ChevalB la n c, cède et transporte, avec toute promesse de ga
ra n tir, un contrat de rente de la somme de 90 f r . , au
principal de 1800 f r . , à lui due par les héritiers de Pierre
Lenoble , suivant le traité du 16 mai i j 55 ; laquelle
r e n te , est-il d it, est -payable p a r les jou issa n s du pré
appelé P r é - G r a n d , su r lequel elle est spécialem ent
qjfectée.
A u moyen de cette cession , M a i g n o l , du ChevalB lanc, demeure quitte de la somme de 1800 francs, en
déduction de celle de 2000 francs , prix' du transport
consenti par M a ig n o l, de Landogne.
A l’égard de la somme de 200 francs restante, Pierre
M a ign o l, de Landogne, reconnoît l’avoir reçue de G u il
laume M a ig n o l, du Cheval-Blanc, en délivrance de pro
messe de pareille so m m e, dont quittance.
A la suite de cet acte, M a ig n o l, du Cheval - B la n c ,
donne la déclaration suivante, écrite en entier de sa main:
« J e soussigné, subroge M e. Pierre M aign o l, bailli de
« Landogne, à Veffet de la vente du b a il em phytéotique
« du pré appelé P r é - G r a n d , que sieu r A n n e t C h ef«
«
«
«
«
devüh m ’ a consentie devant M a ig n o l, n o ta ir e , le 6
ju in 1777 , pour par lui jouir dudit pré ainsi qu’il
avisera bon être, moyennant la somme de 280 livres,
dont 200 livres demeurent compensées avec pareille
somme de 200 l i v . , comprise en la cessiou que ledit
iê )
�V*n
( 6 }
« sieur M aignol m ’a faite devant A lle y ra t, cejourd’h u i,
« d’un contrat de rente sur les sieurs de L a rfe u il, et les
« 80 livres restantes me seront déduites sur les arrê
te rages réservés par l’acte ci-dessus daté. Fait ce 2 oc« tobre 1779- »
P o u r entendre cette dernière clause, relativement à la
somme de 80 francs, il est bon d’observer que par l’acte
n o ta rié , et par une clause finale, Pierre M a i g n o l , de
L a n d o g n e, s’étoit réservé les arrérages dûs antérieure
ment à 1758 , dont il devoit être fait compte entre le
cédataire et le cédant, sans que M a ig n o l, de L an d ogn e,
pût exercer aucune action contre Larfeuil de Lncour;
« attendu, est-il d i t , que Guillaume M aign o l, du Clieval« B lan c, s’est obligé de rapporter quittance au sieur de
« Larfeuil de ces mômes arrérages de rente. »
Cette dernière énonciation démontre assez que M a i
g n o l, du C h eval-B lan c, avoit déjà pris des arrangemens
avec le sieur de L arfeu il, et que tout étoit d’accord pour
que Guillaum e M aignol devînt propriétaire du domaine
vendu à Gastier.
Q uoiqu’on ait voulu à dessein répandre de l’obscurité
dans ces conventions, l’intention des parties n’en est pas
moins clairement manifestée. Il est évident que M aign ol,
du C h eval-B lan c, a voulu transmettre la propriété du
pré dont il s’agît il M a ign o l, de Tjnndognc. Il ne pouvoit
pas vendre une rente qui n’existoit plus, qui s’étoit éteinte
par la confusion : il vouloit vendre le pré ; et l’acte sous
seing p r iv é , qui a suivi l’acte public, 11’étoit autre cliose
que la promesse de 200 francs énoncée dans la cession
du méinc jour; promesse qui développoit les intentions
�(7 )
des parties, mais qui n’a voit pas besoin d’être faite double,
puisqu’elle ne contenoit point d’engagemens synallagmatiques, qu’il n’y avoit d’obligation que de la part de
M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c, attendu que le prix de la
vente étoit payé jusqu’à concurrence de 200 francs, au
m o yen de la cession consentie le même jour.
Aussi n’y a-t-il pas eu de difficulté entre les parties
pendant tout le temps q u ’a vécu Pierre M a i g n o l, ainsi
que Joseph M a i g n o l , son fils et son héritier. Tous deux
ont joui du pré vendu en 1779 : mais l’exploitation étoit
pénible p o u r e u x ; et Pierre M a ig n o l, de L an dogn e, se
détermina
à le v e n d re , par contrat du 29 ventôse an 6 ,
à A n toine Guillaum e, m aréchal, du lieu de Pontauniur,
L es M a ig n o l, du C h eva l-B la n c, ont souffert, sans se
plaindre, et les jouissances de M a i g n o l , et la vente qu’il
a consentie.
Ce n’est que six ans après, et le 29 vendémaire an 1 2 ,
que Guillaume M aignol iils , se disant donataire de son
p è r e , a fait assigner A ntoine G u illau m e, acquéreur de
M a i g n o l , de L a n d o g n e , en désistement du pré dont il
s’a git, avec restitution de jouissances.
A n toin e G uillaum e, ¿\ son to u r , a fait dénoncer cette
demande aux héritiers de son ven d eu r, et a pris contre
eux des conclusions en garantie et dommages-intérêts.
U n premier jugement du tribunal de R iom , en date
du 6 thermidor an 1 2 , a ordonné la mise en cause de
Guillaume M aignol père , à la requête des intimés; ceuxci ont pris contre M aignol père des conclusions en contre
recours, h ce qu’ il fût tenu de faire valoir la vente par
lui consentie i\ Pierre M aignol ; de Landogne.
�(8 )
U n second jugement, du 23 ventôse an 1 3 , a ordonne
la comparution des parties eu personne ; elles ont satisfait
à ce jugement, et .ont été interrogées le 6 floréal an 13.
L es interrogatoires respectifs sont transcrits clans le
m émoire de l’appelant, pages 10 et suivantes, aux notes.
Il résulte de l’interrogatoire de Maignnl père , du
C h eva l-B la n c, i°. que le même jo u r de Cavte n o ta rié,
du 2 octobre 1779 , il y a eu un acte sous seing privé
entre les mômes parties ; 2°. que cet acte sous seing privé
a été écrit en entier de la m ain de M a ig n ol p è r e , du
C h eva l-B la n c ; 30. que M aig n o l, de L andogne, a dicté
les conditions ; 40. qu’il n’y a pas eu d’autre double sous
5
seing privé que celui qui lui est représenté; °. que cet
acte a eu pour but de céder à Pierre M a i g n o l la jouis
sance du pré dont est question , jusqu’à de nouveaux
arrangernens entr’e u x ; 6°. que l’acte notarié ne lui délaissoit pas cette jouissance, q u’elle ne lui est délaissée que
par l'acte sous seing privé; 7 °. que le m otif d’éviter les droits
de lods n’est pas entré dans sa pensée ; 8°. qu’il n’a pas
été question de la propriété du p r é ; que ce 11’étoit ni
son intention, ni celle de M a ig n o l, de Landogne. Si
l ’acte ne fait aucune mention de la jouissance, il a écrit
sous la dictée de Pierre Maignol.
L e fils M a ig n o l, du Cheval-Blanc, n’étoit pas présent
à cet acte. Il en a eu connoissance bientôt après, et a osé
en témoigner son mécontentement ù son père : le fils
avoit alors seize ans.
M aignol père convient que M a ig n o l, de L a n d o g n e,
a bien pu avoir l’intention de se soustraire aux droits de
lods, de devenir propriétaire du p r é ; mais il n’a pas été
question de la propriété entr’eux,
�f<6
(9)
A u surplus M a ig n o l, du Clieval-Blanc , ne jouissoit
p i s de ce pré -lorsqu’il a fait une donation à son üls ; il
ne lui a pas donné nominativement le pré , mais il lui a
donné en général tous ses biens. Il a eu connoissance de
la vente consentie par M a ig n o l, d e L a n d o g n e , à An toin e
G uillaum e; il l’a sue quatre à cinq mois après, et ne s’en
est pas mis en peine : cependant il a voulu , après ceLte
vente , se procurer l’acle de vente de 1777 » ma,s comme
la minute se t r o u v o i t chez M a i g n o l , de L and ogne, il n’a
pu se la procurer d’abord : enlin il désavoue que le sieur
Z.egay ait écrit un autre double de l’acte sous seing privé.
Il est important de s’arrêter sur ce premier interro
gatoire. O n voit que quelque soin qu’ait mis M aignol
p è r e , du Cheval - Blanc , à s’envelopper d’une certaine
obscurité, et d’être très-réservé sur ses confidences, il n’en
est pas moins constant que l’acte sous seing privé est du
même jo u r que l’acte notarié ; qu’il est écrit en entier de
la main de M a ig n o l, du Cheval-Blanc ; que son iils a eu
connoissance de cet acte dans le même temps, lorsqu’il
n’avoit que seize ans; qu’ainsi la date de l’acte est cer
taine , et que Maignol lils en imposoit à la justice, lors
qu’il disoit qu’il n’avoit connu cet acte qu’après sa do
nation.
M aignol fils, dans son interrogatoire, prétend n’avoir
eu connoissance de cet acte que depuis q u ’il est à la tête
de la m aison. A v a n t , son père lui a voit parlé des arrangemens faits avec M a ig n o l, de Landogne , mais lui disoit
qu’il espéroit rentrer dans le pré ; il a la maladresse de
dire que son père avoit consulté trois jurisconsultes qu’il
nom m e, sur l’acte sous seing p r i v é , et on lui avoit dit
B
�( 1° )
que cet acte étoit nul pour n’avoir pas été fait double ;
mais s’ il a consulté sur cet a cte , il l ’avoit donc dans les
mains : il répond que n o n , mais il en savoit le contenu.
L e père, interpellé sur ce f a it, répond affirmativement
que sur ce qu’il avoit rapporté de cet acte, M e. A ndrau d
lui avoit assuré qu’il étoit nul.
M aign ol fils n’a vu dans aucun temps un écrit sous
seing privé entre les mains de son père; ce dernier lui
a toujours dit qu’il n’y avoit pas eu de double ; son père
ne lui a pas donné nominativement le p r é , mais lui disoit
toujours qu’il avoit le droit de s’en mettre en possession,
et lui donnoit pour prétexte qu’il n’avoit pas le titre qui
établissoit la propriété de ce pré , la minute de ce titre
étant entre les mains de Pierre M aignol.
Mais si son père prenoit un prétexte pour se dispenser
de lui donner ce p r é , M aignol fils ne.peut donc pas s’en
dire donataire, et seroit sans qualité pour en demander
le désistement : lorsqu’on est de mauvaise f o i , on n’est
pas toujoui’s conséquent.
Enfin M aignol fils a ouï dire que le sieur L e g n y ,
gendre de M a ig n o l, de L a n d o g n e , avoit été le scribe de
l ’acte notarié , et non du sous-seing privé.
L e sieur B o u y o n , l’un des gendres de Pierre M aign ol,
de Landogne , a déclaré qu’il n’avoit eu connoissance, et
n’avoit entendu parler de cet a c t e , que depuis l’afïaire
dont il s’agit.
L e sieur L e g a y , autre gendre, se trouvoit à Landogne;
le sieur M aignol l’appela dans son cabinet, où il étoit
avec M aignol p è r e , d u Cheval-Blanc; il l’invita à écrire
un double sous seing p r i v é , contenant subrogation do
�t 6 c]
( 11 )
— s
rente , et notamment contenant aussi cession d’ un pré de.
la part de M a ig n o l, du Cheval - B la n c , au profit de
M a ig n o l, de Landogne ; il ne se rappelle pas sur quel
papier il écrivoit ; il croit, sans pouvoir le certifier , que
M a ig n o l, du C h eval-B la n c, écrivoit avec l u i , et que
M a i g n o l , de L a n d o g n e , leur dictoit ; il n’a écrit qu’un
acte, ne se rappelle pas qui signa ; M aignol père n’écrivit *
p o i n t , c’étoit lui qui dictoit.
Après ces interi’o g a t o i r e s , il a été rendu, le 18 floréal,
an 1 3 , un j ugement qui déclare M aignol père et fils non
recevables dans la demande en désistement du pré dont
il s’a g i t , met les parties hors de cause sur les demandes
en recours et contre reco u rs, compense les dépens entre
A n toin e Guillaume et les M a ig n o l, de Landogne ; conr
damne les M a ig n o l, du Cheval-Blanc , en tous les dépen s,
même en ceux com pensés, et aux coût , expédition et
signification du jugement.
Les premiers juges remarquent avec sagacité que G u il
laume M aignol père ayant réuni dans sa main la rente,
et le pré qui y étoit asservi, cette confusion de la qualié
de débiteur et de créancier a opéré nécessairement l ’ex
tinction de la rente.
n,£1 11
Dcs-lors le contrat de 1779
P avoir pour objet
la cession d’une rente qui n’existoit plus , et ne peut se
référer qu’à la propriété du pré.
Les premiers juges ont aussi très-bien observé que
par l’acte sous seing privé , M a i g n o l, du Cheval-Blanc ,
subrogeoit Pierre M aignol à la vente qui lui avoit été
consentie le
juin 1777 , et que celte subrogation ne
pouvoit s’entendre que de la p r o p rié té , puisque l’acte
B 2
6
�( 12 )
de 1777 étoit exclusivement translatif de la propriété
du pré.
L e tribunal dont est appel , répondant à l’objection
résultante du défaut de mention que l’acte a été fait
double, décide que les M aign o l, du Cheval-Blanc, dans
les circonstances où se trouvent les parties, ne peuvent
exciper de cette omission ; car il résulte des interroga
toires de M aignol père et fils, qu’ils ont connu la pos
session publique de M aign o l, de Landogne, et après lui
d’Antoine Guillaum e, tiers détenteur. Ils ne se sont pas
mis en devoir de réclamer contre cette possession ; ils
n’ont pas également réclamé contre l’acte sous seing,
p rivé du 2 octobre 1779, quoique cet acte f û t présent
à leur esp rit, quoiqu’il soit du f a it personnel de Maignol
p è re , qui l’avoit écrit en entier.
L e tribunal en tire la juste conséquence que l’exécu
tion donnée à cet acte sous seing p r i v é , du 2 octobre
17 7 9 , forme une fin de non-recevoir contre Guillaume
M a ig n o l, d’après l’article 1325 du Code c iv il; et c’est
sans contredit rendre bonne justice.
Guillaume M aignol père a été convaincu que ce ju
gement étoit le résultat d’une discussion éclairée; il a
gardé le silence, et ne s’est point rendu appelant. Son
fils a été plus courageux; il n’a pas même craint de rendre
sa défense p u b liq u e, comme si sa prétention pouvoit
faire honneur à sa délicatesse.
O n se flatte d’écartcr péremptoirement toutes les ob
jections qu’il a proposées : ou établira, i ° . que Guillaume
M aignol père n’a voulu et pu vendre que la propriété
du p ré , attendu que la rente étoit éteinte par l ’acqui
sition du 6 ju ia 1777
5
�I V
!3
(
)
2°. Que l ’acte sous seing p r iv é , du 2 octobre 1 7 7 9 ,
n’a voit pas besoin d’être fait double;
30. Que cette omission, dans tous les c a s , seroit ré
parée par l’exécution de l’acte pendant vingt-cinq années.
§. 1er.
L a rente de 90 fr a n cs était anéantie p a r Tacte de
vente du 6 ju in 1777*
L a conf usi on, disent les auteurs, est'l’union et le m é
lange de plusieurs choses ou de plusieurs droits, qui en
opèrent le changement ou l’anéantissement. Cette con
fusion s’opère principalement par la réunion de la pro
priété directe et de la propriété utile.
L ’effet de cette confusion est d’anéantir les deux qua
lités incompatibles qui se trouvent réunies dans une
même personne ; ce qui est fondé sur ce qu’il est im
possible d’être à la fois créancier et débiteur de soi-même.
Voici comment s’exprime à cet égard Boutaric, Des fiefs,
pag. 92.
« Je suis seigneur direct d’un fonds assujéti par le
« bail à une rente annuelle d’un setier de blé ; ce
« fonds revient en ma main par déguerpissement, prê
te lation, ou autrement ; je l’aliène ensuite sans réser« ver la rente : ce défaut de réserve rendra-t-il le fonds
«
«
«
«
allodial? O u i, sans doute; car, quoi qu’en dise Brodeau sur L o u e t, tel est l’effet de la confusion ou de
la réunion du domaine utile au domaine direct, d'é"
teindre absolument la rente. »
�C 14 )
Il cite la loi dernière, S i g u is, ff. D e serv. in b . P rœ àia œdes quœ suis œdibus servirent, cum ennsset, traditas sib i a ccep erit, corifusa sublataque servit as e s t ,
et s i rursùs vendere v u lt, imponenda servitus est alioquin libère veneunt.
L e même auteur ajoute que les deux qualités de sei- gneur et d’emphytéote ne peuvent subsister sur la même
t ê t e , qui ne peut servir à soi-m êm e, et être soi-même
son emphytéote et son seigneur; que cette réunion s’o
père incontinent et sans délai, quand bien même la vente
ne seroit faite qu’à faculté de rachat.
B r illo n , dans ses arrêts, enseigne que l’obligation est
absolument éteinte, toutes les fois qu’il y a concours de
la dette et de la créance dans la même personne; il cite
la loi y , if. D e solut.
Despeisses, tom. I er. , pag. 803, édit. in -4°., dit que
5
toutes obligations prennent fin par confusion; qu ia nem opotest apudeitndem pro ipso obligatusesse. L . Hœres,
2 1 , §. Q uod s i , 3 , ff. F id e jussoribu s.
O n ne voudra pas sans doute établir une différence
entre le seigneur et le bailleur à titre de rente foncière.
Personne n’ignore que la rente foncière étoit considérée
comme un immeuble réel : le propriétaire de la rente
conserve la propriété directe; il a l’espérance de rentrer
dans le fonds, faute de payem ent, et la rente représenté
le fonds.
D ’après ces principes fondés sur les assertions les plus
positives des docteurs du d ro it, comment seroit-il pos
sible de penser que Guillaume M a ign o l, par l’acte no
tarié du 2 septembre 1 7 7 9 , a voulu ou pu vendre sim-
�tr &
5
C i )
plement à M a ig n o l, de L a n d o gn e , la rente de 90 f r . ,
dont il étoit acquéreur en i y 55 ?
Cette rente n’existoit plus ; elle étoit éteinte par la
réunion du domaine u t ile , lorsque Guillaume M aignol
eut acquis le pré asservi. Il ne pouvoit donc pas vendre
une c h im è r e , une chose anéantie : il a donc entendu
vendre la propriété du pré. Cela est d’autant plus évi
den t, qu’il énonce dans cet acte notarié que la rente
dont il s’agit étoit due p a r les jo u isso n s du pré. O r ,
c’ étoit lui qui jouissoit du p r é , qui l’avoit acquis ; il ne
pouvoit pas vendre une rente sur lu i- m ê m e , puisqu’il
ne pouvoit être débiteur et créan cier, puisqu’enfin la
rente étoit éteinte absolument dès le moment de la réu
nion , et sans pouvoir revivre.
Il est donc démontré que la convention arrêtée entre
les parties étoit de vendre la propriété du p r é ; que la
rédaction de l’acte notarié n’a eu d’autre objet que d’éviter
des droits de lods ; et quoiqu’on dise que ces lods eussent
été peu considérables ; que M a i g n o l, acquéreur , étant
b a illi, auroit obtenu des remises, etc. etc.
Il ne s’agit pas d’examiner ou de savoir à quoi se portoient ces lod s; on sait qu’en général ce droit paroissoit
odieux autant qu’onéreux aux acquéreurs : il y avoit un
certain amour-propre à les éluder. Combien n’y a-t-il pas
d’exemples que des droits de lods très-modiques ont em
p ê ch é des ventes, soit parce qu’on ne vouloit pas solli
citer des grâces, ni payer rigoureusement le droit ! Enfin
les lods étoient en pure perte pour l ’acquéreur ; ils
l’étoient d’autant m ieux dans l’espèce, que l’objet cédé
*
�( i 6 )
à M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , n’en devoit pas, tandis
que M a ig n o l, de L an d ogn e, auroit dû le tiers denier
en ascendant sur le prix du pré dont il s’agit; et dans
ce cas la chance n’étoit pas égale.
Si l’acte notarié a quelqu’obscurité dans sa rédaction,
toute équivoque est levée par la déclaration sous seing
p rivée du même jour : il n’y a plus de doute sur la pro
p r ié té , puisque M a ig n o l, du Cheval - Blanc , subroge
M a ig n o l, de L an d o gn e, à l’acte du 6 juin 1777. On sait
que ce dernier acte est celui qui trausière la propriété
du pré à Guillaume M aignol.
Dans tous les cas, toute clause obscure s’interpréteroit
contre M a ig n o l, ven d eu r, qui pouvoit dicter la lo i, et
qui le pouvoit d’autant m ieu x , qu’il ne cesse de répéter1
que M a ig n o l, de L a n d o g n e , c o n v o i t o i t , désiroit le pré
dont il s’agit. S’il avoit un désir si violent de cet objet,
il se seroit rendu moins difficile sur les conditions, et
auroit subi la loi de son vendeur.
A insi le pré en question est nécessairement vendu par
l ’acte notarié, du 2 octobre 1779 : M a ig n o l, du ChevalBlanc, ne pouvoit vendre autre chose; et, sous ce rapport,
son fils seroit non recevable dans sa prétention.
S- IIL 'a c te sous seing-privé, du 2 octobre 1 7 7 9 , iia v o it pas
besoin cCétre fa it double.
Guillaum e M aign ol fils, qui sent toute la force de cet
acte,
�17
C
)
a c te , réunit tous ses moyens pour l ’écarter : en conve
nant qu’ il contient la vente du p r é , il soutient qu’il est
n u l , faute d’avoir été fait double, ou du moins faute
d ’en contenir la mention.
Po u r apprécier le mérite de cette objection principale,
il est bon d’examiner la nature de cet acte.
E n matière d’actes sous seing p r iv é , on distingue les
contrats bilatéraux ou synal lagmat iques , d’avec lps con
trats unilatéraux ; les premiei's sont ceux dans lesquels
chacun des contractans s’oblige envers l’autre; les seconds
sont ceux où il n’y a qu’une seule partie obligée.
On convient que les premiers doivent être faits doubles,
sauf l’exception dont il sera bientôt parlé, parce qu’il faut
bien que chaque partie ait son acte dans les mains pour
forcer l’autre à l’exécuter.
>
A l’égard des seconds, on n’a jamais prétendu qu’un
contrat unilatéral, comme une déclaration, une promesse
ou un b il l e t , dussent être faits doubles.
L e sieur M a ig n o l, appelant, à moins de s’a veu gler,
ne peut placer l’acte sous seing p riv é, du 2 octobre 1779,
parmi les contrats bilatéraux: la contexture de l’acte s’y
oppose absolument. G uillaume M aignol père y parle tout
seul : -/a. soussigné, d éclare, e t c lui seul contracte des
engagemens ; il a reçu le prix de la vente par le contrat
notarié. C ’est au contraire lui qui se trouve débiteur
d’ une somme de 200 francs ; il eu consent une promesse
au profit du sieur M a ig n o l, de Landogne : cette promesse
est même énoncée, son existence est exp rim ée, par l’acte
devant notaire, du même jour; lui seul s’oblige. M aignol,
C
�( 18 )
de L a n d o g n e, ne contracte aucuns engagemens envers
son parent; il ne dit mot : c’est toujours Guillaume Maignol qui parle exclusivement , qui se reconnoît débiteur.
Il n’y a rien de réciproque, tout est du fait de M aign o l,
du Cheval-Blanc. Ce n’est donc li\ qu’ un contrat unila
t é r a l, une simple déclaration, une simple promesse; et
comment pourroit-il y avoir nécessité, dans ce cas, de
faire un acte double ?
M a is, d i t - o n , cet acte est une vente, et toute vente
doit être faite double.
D ’abord, c’est mettre en fait ce qui est en question:
la vente se trouve dans l’acte notarié. Il faut bien donner
un sens quelconque à ce premier acte ; et on a vu qu’il
seroit absurde que M aign ol, du Cheval-Blanc, n’eût voulu
vendre qu’ une rente anéantie.
Mais est-il bien vrai, dans tous les cas, qu’ une vente
doit être faite d o ub le? On le conçoit, lorsque l’acqué
reur ne paye pas le p r i x , parce qu’il faut bien qu’il s’oblige
à le payer , et que le vendeur ait des moyens pour l’y
contraindre ; mais lorsque l’acquéreur paye entièrement
le prix , qu’il ne contracte aucune obligation , comment
seroit - i 1 essentiel que l’acte fût double? il devient alors
unilatéral ; il ne reste que l’obligation du vendeur de faire
jouir de la chose vendue, de garantir de l’éviction , etc. ;
•et dans ce cas, certes , il su (lit que l’acquéreur soit nanti
de l’acte qui lui transmet la propriété. C ’est la distinc
tion qu’on a toujours faite en jurisprudence; et la cour
l ’a consacrée par plusieurs arrêts , notamment par un
rendit sur la plaidoirie de M e. P a g è s, dans la cause de
\
�/ ï>
'
*9
(
)
M e. Bertier, avocat à Brioudc. L a c o u r , par cet arrêtr
ordonna l'exécution d’une vente sous seing privé non
faite double, par cela seul que l’acquéreur avoit payé
l’entier p r ix , que l ’acte en portoit quittance, et que l’ac
quéreur n’avoit contracté aucun engagement.
O p p o s e r a - t- o n que l’acte sous seing prive n’est pas
unilatéral, parce que M a ig n o l, du Cheval-Blanc, devoit
déduire une somme de 80 francs sur les arrérages
réservés ?
Ce seroit une erreur; le contrat ne change point de
nature par cette circonstance. Il en est de cette m ention,
comme si un débiteur, en souscrivant la promesse d’une
som m e, y mettoit pour condition de déduire tous acquits
bons et valables qu’il pourroit avoir faits antérieurement :
la promesse pour cela n’auroit pas besoin d’être faite double,
pa rce que le créancier ne pourroit se faire payer sans re
présenter la promesse, et sans souscrire à la condition.
D e même ic i, M a ig n o l, de Lan dogn e, n ’auroit pu
exiger de M aign o l, du Cheval-Blanc, la somme de 280fr.
sans représenter la promesse ; et alors il auroit bien
fallu déduire sur les arrérages la somme de 80 francs,
avec d’autant plus de raison, que l’acte notarié n’énonçoit qu’une promesse de 200 francs.
Ainsi diparoît le moyen principal de Guillaume M ai
gnol. L ’acte sous seing privé est unilatéral; il ne con
tient pas d’engagemens réciproques; dès-lors il est fort
indifférent qu’il ait été ou non fait double.
C 2
�/
* ■
*
C 20 )
§. I I I .
D ü 72S tous les c a s , cette om ission serait réparée p a r
l'exécution de l'acte.
’
Il est constaté par l ’interrogatoire des deux M a ig n o l,
du C h eval-Blanc, que cet acte sous s e in g ‘privé est du
même jour que l’acte notarié; il est écrit par le père;
il a été connu par le fils dès le moment môme , et lors
qu’il n’a voit qtie seize ans : le père comme le fils ont
connu et souffert la possession publique de l’acquéreur;
ils n’ont réclam é, ni contre M aign o l, de Landogne 3
ni contre Antoine Guillaume , tiers détenteur , quoiqu’ils
aient été instruits de la vente consentie par Maignol à
Guillaume.
L ’article 1325 du Code civil porte : « Les actes sous
«
«
a
cc
seing p r iv é , q u i contiennent des conventions synallagm atiques y ne sont valables qu’autant qu’ils ontété
faits en autant d’originaux qu’il y a de parties ayant
un intérêt distinct.
ce II suffit d’un original pour toutes les personnes ayant
« le même intérêt.
« Chaque original doit contenir la mention du nombre
« des originaux qui en ont été faits.
« N é a n m o in s, le défaut de m ention que les origi« n a u x ont été J'aits doubles, triples , etc. , ne peut être
a opposé p a r celu i q u i a exécuté de sa part la c o u « çention portée dans Pacte, »
�( 21 )
M . M a lle v ille , sur cet article, s’exprime ainsi : « S i
« l’une des parties avoit déjà exécuté l’acte , elle ne
« doit pas être reçue à opposer qu’il n’a pas été fait
« double; mais il y aura souvent de l’embarras à prouver
« cette exécution.» ( Il n’y en a pas dans l’espèce parti
cu lière, puisque les deux M aignols, père et fils, en con
viennent dans leur interrogatoire.)« On admettoit une.
« autre exception à la règle posée dans l’article, c’est
« lorsque l’une des parties n ’a voit pas d intérêt a avoir
« un douille : par e x e m p le , je f a i s une venta sous
« seing p rivé, et f e n reçois le p rix ; on jugeoit que la
« vente étoit v a la ble, quoiqu'elle ne f û t pas f a i t e dou« ble ; mais on l’auroit jugée nulle s’il étoit resté quelque
« partie du prix à payer. »
Cette doctrine d’ un magistrat écla iré, l ’un des rédac
teurs du Code c i v i l , confirme ce que l’on a déjà dit dans
le §. précédent, et prouve que l’exception admise par
l’article c ité , n’est pas nouvelle, comme a voulu le pré
tendre l’appelant. En effet, la rigueur du d ro it, le sum
mum ju s , ne peut etre invoqué avec succès qu’autant
qu’ il pai-oîtroit qu’on a pu ignorer l’existence de l’acte
qui vous est opposé ; mais lorsque tout annonce que cet
acte a été con n u , qu’on en a souffert l’exécution sans se
plaindre, aujourd’hui surtout que la justice se rappro
che de l’équité, qu’on a senti la nécessité d’écarter toutes
les subtilités du d ro it, Guillaum e M aignol ne peut espé
rer aucun succès.
Il aura beau se battre les flancs, reproduire une ob
jection mille fois détruite, que le Code civil n ’a pas
�(22)
d’effet rétroactif, q u’il ne peut régler une convention
antérieure à sa publication.
Foible et petite ressource! L e Code civil est aujour
d’hui la loi de l ’e m p ir e , et doit régler tout ce qui est
encore indécis.
D e même qu’on juge que la subrogation d’action peut
être admise pour une cession de droits successifs anté
rieure à la publication du Code , lorsqu’il y a eucore
indécision , de même on doit décider que l’omissiou que
l ’acte a été fait double n’est d’aucune conséquence, lors-,
que cet acte a été long-temps et pleinement exécuté,
avec d’autant plus de raison q u e , d’après l’opinion de
M . M alleville, cette exception n’est pas nouvelle, eta été
admise dans l’ancien droit.
E t s’il en étoit autrement, si le Code civil pouvoit être
mis de côté pour tous les actes antérieurs sur lesquels il
n ’a pas été p ro n o n cé , il vaudroit autant décider que ce
Code si long-temps attendu, que cette loi uniforme pour
tout l’empire , si souvent désirée, que l’immortel Daguesseau trouvoit si nécessaire, ne pourroit être exécutée
que dans trente ans, ou n’auroit été promulguée que
pour la génération future ; ce qui est une absurdité.
L e Code des Français est aujourd’hui leur unique loi.
S i , comme tout ce qui sort de la main des hommes, il a
quelque im perfection, on est au moins obligé de convenir
qu’on y retrouve toute la pureté du droit romain , tout
ce que l’expérience et la raison avoient remarqué de plus
îv'igc dans le droit coutumier; qu’ il n’a nullement besoin
de commentaire pour le jurisconsulte; que les pandectes
�*3
.(
)
ne servent qu’à l’obscurcir ; qu’enfin il a paru sous l’inilucnce d’un héros législateur, et qu’il suflit d’un rayon
de sa gloire pour que ce Code devienne bientôt la loi
de l’Europe entière.
Guillaume M aignol fils ne se tirera jamais de l’ar
ticle 1325; l’exécution de l’acte est pour lui la pierre
d’achoppement : sa mauvaise foi est à découvert; la loi
et l’équité repoussent une prétention ambitieuse et tardive,
qui n’auroit pas vu le jour si Pierre M aignol existoit
-encore.
Il ne s’agit plus que de parcourir rapidement quel
ques misérables objections proposées en désespoir de
cause.
L ’appelant reproche
aux premiers juges de s’ètre
occupé de l’acte sous seing privé , comme si cet acte
étoit souscrit par lui-même. On a confondu , d it - il, les
moyens du fils avec ceux du père ; cependant un fils
donataire ne pouvoit être tenu de l'effet d’un acte sous
seing privé, n’ayant de date certaine qu’après sa donation.
Ce paquet^ne peut aller à aucune adresse, et ne séduiroit. pas môme le praticien le plus formaliste.
Il est constant, d’après le père et le iils, que l’acte sous
seing prive est du même jour que l’acte notarié. Il est
constant que l’acte a été connu du iils et du p è re , et que
ce fils rebelle s’avisoit à seize ans d’en témoigner son
mécontentement au père.
Ce
faire
qu’il
resté
fils précoce n’a rien ignoré ; il a n)ême voulu se
donner ce pré ; mais le père a pris pour prétexte
11’avoit pas l’acte de 1 7 7 9 , et (lue
minute avoit
entre les mains de M a ig n o l, de Landogne.
�24
(
)
'D ’après ces a v e u x , il est assez maladroit d’équivoquer
sur les dûtes. Il est vrai qu’en général les actes sous seing
privé n’ont de date certaine q u’avec la formalité de l'en
registrem ent, ou par le décès de l’un des signataires ; mais
pourquoi ? c’est qu’il seroit facile de dater un acte sous
seing privé du temps que l’on v o u d r o it, et que par ce
moyen on anéantiroit des conventions postérieures.
Mais lorsque la date est avouée et reconnue ; lorsque
ce fils , qui parle si souvent de sa donation , a connu
auparavant un acte qui transmeltoit à un tiers la pro
priété d’un immeuble particulier ; lorsque surtout cet
immeuble n’est pas nominativement compris dans la dis
position qu’il in v o q u e , il n’a pas dû y com pter; il n’a
pas dû calculer la valeur de cet objet dans la donation
qui lui a été faite; il auroit même trompé la famille avec
laquelle il contractait, s’ il leur avoit fait entendre que
cet héritage faisoit partie de sa donation : dans tous les
cas, il n’auroit pu nuire au tiers détenteur.
On ne voit pas quelle analogie il peut y avoir entre
cet acte et une contre-lettre à un contrat de mariage.
Les lois ne proscrivent les contre-lettres aux contrats
de mariage qu’autant qu’elles seroient isolées, qu’elles
émaneroient de l’époux sans les avoir communiquées à
la famille avec laquelle il contracte.
■Mais si les contre-lettres otoient signées par toutes les
parties qui ont assisté au contrat, elles seroient très-vala
bles*, et auroiqnt tout leur eiïet. Il n’y a d’ailleurs aucune
comparaison à faire entre cet acte et une contre-lettre :
jYlaignol , de Landogrie , seroit propriétaire en verdi de
l ’acte notarié. L ’acte subséquent n’est qu’un acte iso lé ,
explicatif,
�( 25 )
explicatif, interprétatif, si l’on veu t, du précédent, mais
qui n’ajoute rien au droit des parties.
Q u ’on ne dise pas que cet acte sous seing privé est
obscur et équivoque ; l’appelant doit se rappeler q u 'il
subroge M a ign o l, de L a n d o g n e, a u x effets de Pacte du
6 ju in 1 7 7 7 , et que ce contrat transmet la propriété du
pré à M a ig n o l, du Cheval-Blanc.
M aignol fils tourne toujours autour de ce cercle vicieux;
il en revient ù dire qu’un acte sous seing p riv é , qui con^
lient des engagement synallagmatiques,doit être fait double;
il a recueilli quelques arrêts rapportés dans la dernière
collection de jurisprudence, en faveur de l’archevêque
de Reims , contre le prince de Conti ; entre le sieur Forget
et le duc de G ra m m o n t, etc. ,Qn»ne Uy^coptestQi pas le
principe's orF 11’est dirigé, que. sm-.J’appl ¡cation*
Il prétçnd prouver la nécessité que £<<£j;clje. fvtt^Jfait
double j dans le bai où'1b tfixiur Maignol «m-oi* été évincé
dq^son pré , ou qu’il l’eût perdu par .force -majeure*
Mais^si M a ig n o l, de L an d o gn e,eû t éte'évincu«^ il avoit
^sqiijtcte ]oou^ demander une gài'flntie ; il n’-uifroi-t pas pu
, e supprimer pour Yen feiiii' à' Pacte" notarié , et demander
la rente, parce qu’on lui ¡fiuVoitr répnfidu que-la renie et oit
^anéantie, et qu’il
voit acheté que'le pré\lont il jouissoit |niÎ)liqûerï^e'il'f; I f n ’aùroit jamais été' assez malavisé
1
pour ie c,onfenter d’une raîle,M orsqu’ i f po^ vôte obfbriîr
»'A».■,-1.
..C
,
*1. , *'
une indemnité gmvant la valeur actuelle du pré. •
E t s’il l’a voit perd vi par une force m ajeure, 'si ta ri
vière le lu i eut en lev é, comme 011 l’a dit plaisamment
en première instance, le pré auroit été perdu pour lui :
�( 26 )
Mais pour cela il faut supposer des accidens bien graves;
une révolution dans le globe, le contact d’une comète, etc.
C ’est prévoir les choses de loin : la pauvre humanité ne
va pas jusque-là.
A ntoine Guillaume attendra d’ailleurs l ’événement; et
il est à croire que sa postérité la plus reculée jouira pai
siblement du pré dont est question, malgré M aignol fils,
et malgré la rivière de Sioulet qui le fertilise et ne peut
lui nuire.
_
*
M e. P A G E S ( d e R i o m ) , ancien avocat.
M e. M A N D E T , avoué licencié.
v
l'if
ûukaX- t
%
^
¿A
'
c/a. Çun*rf
tAr-y tuéU t^r'.'
^ il &
ê
.
a
t '
t^
^
r *
/» « ,, —
ètyur- t*
**+ e^
a y ,« - ,.' » •' —
'W .Î T
^
W -U A t^ U *
^
<ur ' /T r
« r^ ~ U
if ___(u. V<*JZ
^
^
t . — ...'.'f / Q k «
c v -tu « A .
y«. ’ #
. t1-lr
,
<jf^W
K * »V
u « lr
a > w \ C i» w
u/wCi t a£j i
c*»*j*X» V u àu * .
i p '“«
A R I O M , de l'im prim erie d e
im u
*
L a n d rio t ,
*
seul im prim eur de la
C o u r d ’appel. — Juillet 1 8 0 6
f l»
« **» *
U < it W T
<î
C**v
^t» U / v J ÿ \ ^ v lÛ » M t
t« * -» ..
a«s Am <î ~î >
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilberte. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Mandet
Subject
The topic of the resource
actes sous seing privé
bail emphytéotique
créances
cens
rentes foncières
interrogatoires
longues procédures
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour dame Gilberte Ducourtial, veuve de Joseph Maignol, tutrice de leurs enfans mineurs ; dame Marie-Gilberte Maignol, veuve de Michel de Pannevert ; dame Marie Maignol, et sieur Antoine Bouyon, son mari ; dame Marie-Gilberte Maignol, et le sieur Pierre Legay, son époux, et sieur Antoine Maignol, tous intimés ; contre sieur Guillaume Maignol, autre Guillaume Maignol, son fils, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Riom, le 18 floréal an 13 ; et encore en présence d'Antoine Guillaume, maréchal, habitant de la commune de Pontaumur, aussi intimé.
Annotations manuscrites : extrait de l'arrêt de la Cour d'appel, 1er août 1806, 1ére chambre. Met hors de cause Guillaume Maignol qui n'a aucun intérêt à la concertation.
Table Godemel : Acte sous seing privé : 1. un acte sous seing privé synallagmatique, contenant vente et subrogation, est-il nul s’il n’a pas été fait double ? peut-il être opposé à un donataire contractuel, s’il n’a de date certaine que postérieurement à sa donation ? enfin quels caractères d’exécution faut-il à cet acte pour qu’il soit obligatoire, malgré les nullités qui le vicient ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1755-1806
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1606
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0127
BCU_Factums_G1605
BCU_Factums_M0710
BCU_Factums_M0527
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53280/BCU_Factums_G1606.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes sous seing privé
bail
Bail emphytéotique
cens
Créances
interrogatoires
longues procédures
rentes foncières
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53281/BCU_Factums_G1607.pdf
c9b02b8f1e75e428ab232ebb0ab51c95
PDF Text
Text
M E M O I R E
A CONSULTER.
E n l’an 1 2 , le sieur Blanchard, mon beau-frère, teinturier
à Riom , voulut s’associer avec le sieur Castillon , propriétaire
de cette ville, pour l’exploitation d’un cylindre à indiennes,
qu’ils achetèrent en commun au sieur Dufour , serrurier, de
meurant à Paris.
Domicilié moi-même à Paris, je consentis, pour obliger mon
beau-frère , a cautionner le payement de sa moitié, vis-à-vis du
ven d eu r et ce vendeur exigea encore que le sieur Castillon
vînt certifier ma caution.
L ’acte, passé à P aris, sous signatures privées, le 18 prairial
an 1 1 , est ainsi conçu
« Nous soussignés, M ichel D ufour, serrurier m a c h in is te , rue
de la Ju iv erie, n° 27 , à P a r is ,
« Pierre Blanchard, teinturier, habitant de la ville de Riom ,
département du Puy-de-Dôm e, autorisé par le sieur Castillon,
de présent à R io m , qui a promis de trouver bon e t de ratifier
les conventions suivantes,
A
�( 3 )
*
Etienne Castillon, propriétaire de la ville de R io m , dépar
tement idem ,
« E t Jean-Baptiste Assollant, rue de la Vieille-Draperie, n°4<7,
« Sommes convenus de ce qui suit; savoir: que moj M ichel
Dufour promets et m’oblige de construire, faire conduire et
mettre en place }m cylindre suivi de tous les agrès nécessaires à
icelui, bon à cylindrer les toiles de coton, fil, laine et soie, de
puis la petite largeur jusqu’à celle d’une aune -, les trois rouleaux
seront, savoir, celui du milieu en cuivre, de quarante-cinq
pouces, v. s., les deux autres en papier, à la façon anglaise; le
tout bien conditionné, et dans toutes ses proportions, afin qu’il
puisse cylindrer de la première qualité : de faire aller ledit cy
lindre par eau avec la môme roue d’un moi}lin farinier ou maillerie à chanvre, qui me sera fournie par lesdits Castillon et Blan
chard: de fournir tout ce qui sera nécessaire pour ladite méca
nique, le tout conduit et placé dans l’espace de quatre mois, h
compter de ce jour: lequel cylindre je garantis pendant un an
entier*, d’après lequel temps, étant bien conditionné dans toutes
ses parties, je n’aurai plus aucune responsabilité; et en ce qui
concerne la conduite, elle sera aux frais des acquéreurs, qu’ils
payeront aussitôt reçu; il sera conforme à celui que j’ai, à pro
portion de sa grandeur.
« L e prix dudit cylindre sera de la somme de huit mille six
cent soixante-seize livres dix sous argen t, tournois , de laquelle
somme moi Castillon prom ets et m ’oblige de faire passer, par
lettres de change ou autrement, en la demeure du sieur Dufour,
à P aris, savoir, la somme de quatre mille trois cent trente-huit
livres cinq sous, savoir, celle de deux mille cent soixante-neuf
livres deux sous six deniers, dans un an , à compter du jour
que le cylindre sera en état de (ravailler, et celle de deux mille
cent soixante-neuf livres deux sous six deniers , un an après,
avec l’iutér.el à raisou de six pour cent, sans aucune retenue.
�IÜ>7
( 3 )
« Â l’égard des quatre mille trois cent trente-huit livres cinq
sous, restans, pour parfaire celle de huit mille six cent soixanteseize livres dix sous,
- « M oi Blanchard m’oblige et promets de payer ladite somme
audit sieur Dufour, audit domicile, mêmes espèces, payemens
et intérêts, et jour fixe, que dessüs, afin qu’audit terme de deux
ans il ne soit rien dû audit DufoUr.
’
« E t moi Je a n - B a p tis te A ssollànt, promets et m’oblige qu’ en
cas que ledit Blanchard ne pût payer la totalité ou partie des
quatre m ille tro is cent trente-huit livres cinq sous, aux termes
ci-dessu s, après toutes poursuites faites , dans ce cas seule
ment, je promets et m’oblige de payer audit Dufour les sommes
qui pOürroientlui être dues par ledit Blanchard, que je cautionne.
« Enfin, moi Castillon, en outre, dans le cas où ledit Dufour
ne pût être payé en tout ou en partie par le sieur Blanchard, et le
sieur Assollànt, sa caution, aux échéances dites ci-dessus, après
toutes poursuites fa ite s , dans ce cas seulem ent, je m’engage et
promets d’acquitter au sieur Dufour le restant du prix ou la tota
lité, avec les intérêts, au même prix; alors ledit cylindre lui ap
partiendra en son entier, sauf à lui de rendre néanmoins ce qui
auroit été payé par ledit Blanchard en principal et intérêts, les
dommages-intérêts qui pourroient être dûs audit Castillon à cause
de non-payement, déduits; en ce cas seulement, ledit Castillon
sera libre de faire vendre ledit cylindre, pour le prix en pro
venant être payé au sieur D ufour, jusqu’à concurrence de ce
qui lui seroit d û , le surplus seroit payé et remboursé à celui qui
auroit le plutôt satisfait à ses engagemens, et le restant, s’il y en
avoit, a celui qui, par sa faute, y auroit donné lieu. Néanmoins,
ce qui pourroit rester du au sieur D ufour, de la part du sieur
Blanchard ou sa caution, ne pourra être exigible contre ledit
Castillon, qu’un an après les deux ans expirés, qui s’oblige de la
présente époque.
.
À 2
i*i
�VAl
C. 4 ) ■
r
« INous Pierre Blanchard et Etienne Castillon, fournirons et
payerons les maçons et matériaux, chaux, sable et pierres qui se* ;
ront nécessaires audit D u fo u r, pour le placement dudit cylin- •
dre. 11 est convenu entre les parties qu’en cas que lesdiis Castillon et Blanchard veuillent avancer le terme de leur payement, ,
ledit Dufour s’oblige à leur faire une remise de douze pour cent, j
« Lesdits Castillon et Blanchard s’interdisent la faculté, jusqu’à
parfait payement dudit cylindre, d’en exiger la vente, même en
cas de mésintelligence entr’eux; mais une fois p ayé, ils se réser-.,
vent respectivement le droit, en cas d’incompatibilité, de de-;
mander etfaire effectuer la vente dudit cylindre, et d’en partager >
le prix , à l’exception néanmoins, qu’en cas de défaut de paye-,
ment dudit Blanchard, il sera libre audit Castillon de le faire ven-,
dre , pour , du prix en provenant, finir de p a ye r ledit Dufour
de ce qui pourroit lui être resté dû.
« Fait triple entre nous, sous nos signatures privées, présens
à Paris les sieurs Dufour, Assollant et Blanchard, ledit.Castillon
devant signer en son domicile, le 18 prairial an 1 1 .
Signé, Dufour, Assollant et Blanchard. »
Rien de plus clair que la nature de l’obligation que j’ai con
tractée; rien de mieux désigné que la personne envers laquelle
je me suis obligé, et de mieux précisé que l’événement et la1
condition de mon obligation.
C ’ est à P a ris q u e j ’a i c a u tio n n é le p a y e m e n t d’ u n objet mo
bilier.
C’est envers le sieur Dufour, domicilié à Paris, que je me suis
obligé.
C ’étoit faute de payement aux termes convenus, et après
toutes poursuites faites, dans ce cas seulement, dit l’acte, que
j’étois obligé de payer au sieur Dufour les sommes qui pourroieut lui être dues par le sieur Blanchard.
•
�L ’obligation du sieur Castillon envers le sieur Duiour étoit
d’abord de payer sa moitié du prix du cylindre, et quant à l’au
tre moitié, l’obligation dépendoit de deux événemens.
L e premier, du non-payement aux échéances.
L e second, de poursuites faites contre Blanchard, et contre
m oi, sa caution.
On examinera bientôt si le sieur Castillon n’a pas changé
volontairement la position des choses, et s il n a pas amené 1 im
possibilité de réaliser les conventions. Il fout remarquer d’abord
que le premier terme de payement étoit fixé au dix-huit prai
rial an 12 , et que le trente frim aire an 1 2 , a été passé entre le
sieur Dufour, le sieur Castillon et un sieur A lb ert, qui n’est
point en cause, un acte dont je me suis procuré la connoissance.
Cet acte, sous signatures privées, est ainsi conçu :
« Nous soussignés, M ichel D u fo u r, serrurier, et Etienne
Castillon, propriétaire, et Claude A lbert, négociant, tous deux
habitans de cette ville de R io m , sommes convenus de ce qui
suit :
« M oi Dufour, reconnois avoir reçu de M . Castillon seul, et
de ses deniers , la somme de huit mille six cent soixante seize
livres dix sous, pour le payement par anticipation du prix du
cylindre par moi vendu au sieur Castillon et à Pierre Blanchard,
teinturier à Riom. En conséquence, je tiens quitte ledit Castil
lon de ladite somme, et le subroge , sans néanmoins aucune
priorité à la subrogation ci-après, en tous mes droits contre le
citoyen Blanchard et Jean-Baptiste Assollant, sa caution -, je lui
donne pouvoir de se servir de mon nom pour la répétition de
la moitié de ladite somme de 8,676 Livres 10 sous et intérêts j et
attendu néanmoins que dans cette somme il y est entré celle de
7,000 livres, prêtée audit Castillon par le citoyen A lbert, moi
Duiour, du consentement dudit Castillon, su b ro g e ledit citoyen
Albert eu tous mes droits sur ledit cylindre, jusqu’à lu libération
�c vl
( 6 )
entière dudit Castillon envers le citoyen A lb ert, des effets de
commerce jusqu’à la concurrence de la somme de 7,000 livres,
qu’il a tires cejourd’hui au profit de ce dernier. De mon côté ,
moi A lbert, en acceptant la subrogation faite à mon profit, dé
clare que sans cette condition je n’aurois pas prêté ladite somme
audit Castillon-, et reconnois que pour le plein et entier effet
d’icelle, j’ai demeuré dépositaire tant du double du citoyen Dufour, que de celui dudit Castillon. Fait triple entre nous à Riom ,
sous nos signatures, le 3 o frimaire an 12 de la republique fran
çaise. Signé, A lbert, Dufour et Castillon. »
Cette convention sembloit mettre le sieur Castillon aux droits
du sieur Dufour ; et en ne supposant pas, ce qui paroîtroit dé
montré, que le sieur Blancliard a paru sous le nom du sieur A l
bert pour prêter les fonds, ou que depuis, au moins, il a rem
boursé sur les produits du cylindre l’avance faite par le sieur
Castillon, dans le désir de profiter du bénéfice de la remise de
douze pour cent, il est établi du moins que les conditions du
traité de l’an 11 devoient toujours s’accomplir.
C’est ce qui n’eut point lieu, et le 18 prairial an 1 2 , terme du
premier payement, et le 18 prairial an i 3 , terme du second
pajem ent, s’écoulèrent successivement sans aucune réclamation
contre le sieur Blanchard, ni de la part du sieur Dufour, désin
téressé par l’acte de frimaire an 12 , ni de la part du sieur Castillon} qui paroissoit à ses droits.
O n n ’a p o in t con staté q u e le s ie u r B la n c h a r d ne vouloit point
payer au x tenues convenus.
11
n’a été exercé aucunes poursuites aux diverses époques de
p a y e m e n t , pour constater l’insolvaijilité actuelle du débiteur.
,1e me suis procuré la connoissance d’un autre acte sous seing
privé, en date du i 3 brumaire an 1 3 , fait entre le sieur Dufour,
le sieur Castillon et le sieur Blancliard} cet acte est ainsi'conçu :
« Par-devant, etc. ont été présent Pierro-Micliel Dufour, ser-
�(
7 )
rurier-machiniste, habitant à Paris, rue de la Ju iverie, n°. 27,
d’une part ;
Et Etienne Castillon et Pierre Blanchard, propriétaires, liabitans de la ville de R io m , d’autre part.
Lesquelles parties ont dit que par acte sous seing privé, du
18 prairial an 1 1 , le sieur Dufour avoit vendu auxdits sieurs Cas
tillon et Blanchard un cylindre suivi de tous ses agrès, bien
conditionné dans toutes ses p r o p o r t io n s , ainsi qu’il est plus au
long expliqué audit acte, que ledit sieur Dufour devoit garantir
pendant une a n n é e entière, à compter du jour de sa mise en ac
tivité que peu de temps après que le cylindre eut été posé, l’un
des rouleaux éprouva quelque défectuosité, et que le second
avoit cassé, ce qui avoit donné lieu à une réclamation judiciaire
de la part des sieurs Castillon et Blanchard, contre le sieur D u
four, qui avoit été portée au tribunal de commerce de Riom ,
par exploit du rj vendémiaire an 1 3 ; que ledit sieur Dufour ayant
réparé le premier rouleau, et remplacé le second, il ne restoit
plus qu’à faire prononcer sur la garantie promise et sur les dommages-intérets que lesdits sieurs Castillon et Blanchard prétendoient leur être dus, Comme ces contestations auroient donné
lieu à des frais considérables et à des voyages dispendieux, sur
tout par l’éloignement du sieur D ufour, les parties, pour les évi
ter , et pour leur tranquillité réciproque, ont, de l’avis de leurs
conseil , trçùté et transigé par transaction sur procès, ainsi qu’il
suit :
Anr. i<*.—
sieur Dufour s’oblige de délivrer, dans son ma
gasin à Paris, dans cinq m ois, compter de ce jo u r, auxdits
sieurs Castillon et Blanchard, un rouleau en papier, bien conditiopné , et conforme au dernier reçu, qui a été posé le i 3 du
courant, et qui a trois boulons.
Anr. 2 .— A u moyen de laquelle délivrance ledit sieur Dufour
(J.emeurera entièrement dégagé envois les sieurs Castillon et
�( 8 )
Blanchard, à compter de ce jour, tant de la garantie promise par
l’acte dudit jour 18 prairial an u , que par celle de rouleau à
recevoir.
En conséquence, les parties promettent de ne plus' le recher
cher directement ni indirôctement pour raison de ladite garan
tie, ni pour le passé, ni pour l’avenir.
A r t . 3. — A u moyen dés conventions ci-dessus, et en faisant
par le sieur D ufour la délivrance du rouleau dont il s’agit, aux
termes ci-dessus stipulés, tous procès intentés et à intenter entre
les parties, pour raison tant de ladite garantie que pour dommages-intérêts, demeui*ent éteints et assoupis, sans autres dépens de
part ni d’autre.
Nous soussignés, dénommés en l’acte ci-dessus et de l’autre
part, après en avoir pris connoissance, l’approuvons dans tout
son contenu, et promettons l’exécuter selon sa forme et teneur.
Fait triple entre nous, sous nos signatures, à R io m , ce i 3
brumaire an 1 3 .
Signé, B lanch ard, Castillon et Dufour. »
Cet acte donne lieu nécessairement à plusieurs observations ,
et le conseil examinera quelles sont les conséquences qui en dé
rivent.
' On remarque, d’abord, que je ne suis point partie dans cette
transaction, où les sieurs Castillon et Blanchard renoncent envers
Dufour à la garantie promise par l’acte du 18 prairial an 1 1 , et
y dé rogent en ce point.
On voit qu’ il n’est question dans cet acte d’aucune réclamation
possible de la part du sieur Dufour, contre le sieur Blanchard ,
et qu’il est payé intégralement du prix du cylindre.
Si, au contraire, il existe une action possible à celte époque ,
c’est: contre le sieur Dufour j elle est reconnue, par ce dernier ,
appartenir à Blanchard comme à Caslillon, et il transige sur cette
action intentée par l’exploit du 7 vendémiaire an i 3 , qui contient
�-
(
| 0y3
9 )
la demande au tribunal de commerce, de dommages-intérêts, et
l’exécution de la garantie promise par Dufour , en l’an onze.
Ainsi, Dufour est bien payé, Blanchard est bien libéré envers
lui, et on ne lui demande rien, pas plus qu’à sa caution.
A lb e rt, lui-même , qui, dans l’acte du 3 o frimaire an 12 , paroît subrogé aux droits du sieur D u fo u r, pour le cas de nonpayement de la somme qui paroît prêtée à Castillon, pour eteindre
à l’avance la dette de B lan ch ard et la sienne, n’est point appelé
à cette transaction. Il semble impossible de ne pas tirer de ces
faits Jh conséquence que Castillon et Blanchard ont concouru â
exécuter, à son égard, les conventions que Castillon semble
avoir faites avec Albert : comme il faut nécessairement en con
clure qu’à l’époque du i 3 brumaire an i3 , A lb e rt, 11’ayant au
cune réclamation à faire contre Castillon, ce dernier, en fait
comme en droit, avoit acquitté envers Dufour la dette de Blan
chard, principal obligé avec lui.
Ce fut par une lettre du sieur Castillon, datée de R iom , le 17
frimaire an i 3 , c’est-à-dire long-temps après l’échéance du pre
mier terme indiqué par l’acte de l’an onze, le seul qui fût alors
à ma connoissance, que j’entrevis le plan combiné entre mon
beau-frère et Castillon de me forcer à les aider de ma bourse, et
en saisissant, comme prétexte, le cautionnement que j’avois
contracté envers Blanchard, et en alléguant qu’il n’avoit point
acquitté la première portion de sa dette, ce qu’on n’a eu garde
de faire constater, aux termes convenus, par aucune voie légale.
Cette lettre est ainsi conçue :
« M onsieur, voilà la troisième que j’ai l’honneur de vous
» écrire; il me semble que vous ne pouvez faire autrement que
» me faire réponse, attendu que vous êtes obligé, ainsi que m oi,
» a payer, faute par M . Blanchard , voire beau-frère , d’avoir
» le moyen de le faire. C’est donc avec moi qu’il faudroit trou* ver quelques moyens pour éviter la perte totale de votre
13
�< •
(
1 0
)
" sœur et de sa famille. Si je suis obligé de poursuivre son inari
» par corps, les frais augmenteront la somme ; ils seront en pure
» perte pour celui de nous qui se” trouvera à môme de payer :
» l’espérance de bien faire leurs affaires se trouve éteinte par ce
'» moyen. Combien il'm e répugne d’etre obligé à pour-juivre
-» un ami qu’y a deux ans qu’il habite1'ma maison, et qui est à
>» mêmé’de faire dé bonnes affaires, si notre fabrique va en aug. » mentant ! Une faut pas's’attendre que nous puissions mettre le
» cylindre en vente, parce qu’il est dit, qu’aucune des parties ne
» pourra en demander la vente qu*il ne soit totalementQpayé
v par chacune d’elles: vous n’avez qu’à voir votre double} vous
» y trouverez cette clause expresse ; ainsi nous n’avons que le
» droit de faifé des" poursuites d’usage. Il p a r o lt q u e vous n’avez
» pas enténdii obliger votre beau-frère jusqu’au point de payer
» pour lui. Ce service est bien considérable ; mais si vous ne
•» l’aviez pas cautionné, je n’aurois pas entré dans la vente, et
» nous ne serions ni l’un ni {l’autre dans ces embarras. L e terme
» est échu, ainsi que des effets que j’ai contractés , qu’il m’est
» impossible de satisfaire , si vous ne venez de bon cœur sous» crire à vos erigagemens, ce que vous pouvez faire par d’autres
» effets sur Paris. C’est le plus grand service que vous puissiez
» rendre à votre sœur et à sa famille, qui peuvent bien vous con» server le principal et le revenu, et le bien payer par le moyen
» de leur travail et du p ro d u it du c y lin d r e , et surtout si noire
» indiennerie se soutient. Veuillez me iaire réponse de suite. J ’ai
» été dans cette affaire de bonne foi: vous ne pouvez vous obli» ger en m’écrivant vos intentions \ car je ne saurois soupçon» ner que tout ce qui est écrit dans nos doubles n’ait pas été fait
» de votre aveu et consentement, puisqu’ il paroît que le double
» que j’ai entre mains , est écrit en entier de votre main , et ap» prouvé de votre signature. En ne recevant pas de réponse, je
« ne sais à quoi m’attendre. 'Vous connoisçez plus que moi que
�( 11 )
» les poursuites vont vite en fait dç marchai^dises, et que si je
» suis forcé d’y v e n ir, ce ne sera pas long,,, que nous nous ver» rons de près à Paris. Suivant la le.ttrÇjde moii frère , que j’ai
» reçue ces jours derniers, il paro'ît que sa,femme vous parla, et
» que vous lui répondîtes que vous n’aviez pas de, réponse à me
» faire j attendu que vous aviejz écrit au sieur Blanchard , et, que
» vous lui aviez écrit vos intentions sxjr mes, deux lettres. Votre
» beau-frère m’a s o u t e n u n’avoir^eçu aucune le tire de votre part,
» mais qu’il en attendoit de jour en joi\r. Çelle-ci, restant sans
» réponse, de suite je prendrai mon,parti à ne rien ména» g e r , il en arrivera ce qui pourra. Si vou^ppuviez m’éviter de
» faire contrôler no&^loubles et toutes poursuites , notre fabri» que en vaudroit bien m ieu x, et que vous devenez bien inté» ressânt pour votre beau-frère et sa famille, qui n’ont pas d’au» tre ressource; et en acquittant chacun nos,obligations il se
» trouve un fonds que chacun a intérêt de ménager , les uns
» pour soutenir leur maison , et les autres pour trouver leurs
» ionds. Pensez-y sérieusement, je n’entends pas.vous surpren» dre ; je vous écris ce que je pense, et je suis en attendant
» réponse , avec une parfaite considération et confiance, M011» sieur , votre très-humble et obéissant serviteur.
» Signé, Castillon jeune. R io m , le 17 frimaire an i 3 .
« P . S. M . Blanchard m’a dit qu’il étoit sur le point de faire le
>» voyage de Paris, s’il ne recevoit bonne réponse de votre part.
» Répondez donc de suite, bien ou mal; qu’on sache c o m m e n t
» il faut s’y prendre. » ‘
11
}
. Il faut s’arrêter surtout, dans cette lettre, au point de fait
qu’ elle constate; que le cylindre avoit servi à élever une fabrique
d’indiennerie, et que ces m ots, notre fabrique , notre indicnn erie, établissent sans réplique le fait d’une société entre (Castillon et Blanchard ; société qui a dû produire des résultats c^ii
132
�»
V
\
( G a -) >
onl 'pii' et diV'servît a'liquider Blanchard, soit envers Düfour,
soit envers Castillon, soit envers Albert; ’
,ru^
^
" 1
r j
*
'
'' ' *
£N Vn doït-ôn pas tirëiHla conséquence’ que Castillon a Acquitté,
le i 3 frimaire an r 3 ,u n e dette de la société,Jpoür laquelle il est
aorr-rèccvàljle à me rechercher comme garant ?
r
"jV d o is encore ne pas1 omettre un fait qui démontrera lis nianègë employé constamment, et d’accord, poui*më forcer à payer •
un engagement que je tegardois comme anéanti.
' ' ’*i
■'Le onze germinal an r 3 , je reçus une assignation à compa-11
roître, le treize floréal an 1 3 , » à l’audience du’ tribunaldecom» irrièreé d eR iom , pour me voir condamner, solidairement avec J
» le sieiif Blanchard, comme caution d e’ ce dernier, « t^ ê m e r‘
»'par corps,'à payer la somme de deux mille cent soiximte-six °
» livres dix soüs,javec lès intérêts au taux de six pour cent par 0
» an, pour le quart du cylindre vendu aux sieurs Castillon et i
» Blanchard ^iftoyennant huit mille six cent soixante-seize liv.
» dix souè ,'comme’ m’étant porté caution pour le sieur B îa n ^
» -chard pour la ihoitiéj dont ladite moitié étoit exigible le cinq
» nivôse dernier, et à faute par le sieur Blanchard d’avoir eiTee^-01
» tué le payement de sa moitié dans la moitié du prix dtl cylin« dre, à l’époque du cinq nivôse, époque indiquée'comuieCônJ- '
» venue entre les parties, et aux dépens. »
y '
1
Cet exploit me fut signifié à Paris, h mon domicile, par BelIaguet jeune1, huissier, «Via requête du sieur D u fo m y qui élisoit
domicile a Paris p o u r vingt-quatre heures sèulement, et à Rioin
chez un sieur Gomot.
>; i 1cm
- / i ..
?
J e fus instruit aussitôt, par le sieur Dufour, que1cette assigna
tion avoit été faite sans son aveu*, et son but étoit facile ¡Vdeviner.
J e c r u s devoir prendre cette déclaration en forme anthentiqtie ^ et le douze germinal elle fût rédigée «iinsi qu’il suit i
11
« Aujourd'hui est comparu devant T a rd if et ^on collègue, naJ J
talréa ii Paris, soussignés,
' f ’ r,!
,J {!i
�( I.? )
» Sienr jVJ ichel Dufour,; serrurier-maçhinjste.demeurant à \
Paris, rue de la Ju iv e rie , n . 37. ^ vlSf} jj.),, . ll0f.
3 rM(f,., t .
» Lequel a, par ces présentes r ^ c la r é i>g u ^ lc,,est à tort et ù^son
insu que, par exploit de Bellaguet jeune* huissier près lps,tribu
naux de Paris, en date du onze gerniinaJ?çourant, enregistré, il
a été donné-à sa requête assignation au sieur Jean - Baptiste
Assollnnt, demeurant rue des Marmouzets , n°> 4 2 > pour côm- (
paroir, le i3 floréal prochain, à l'audience du tribunal de com-,,
merc.erde R io m ; que son intention n’est pas et n’a jamais été de
donner aucune suite à ladite assignation, ni d’exercer aucune ,
poursuite contre ledit sieur Àssollant, vis-à-vis duquel il n’a
aucune réclamation à élever; qu’il n’éntend nullement;non plus
en ¡exercer aucune pour les causés mentionnées audit .exploit,
dont il se désiste purement et simplement, en consentant ,sa
pleine, et entière nullité.
u!. H jJT J ^.i( .
», L e présent désistement, donné en faveur.dudit sieur Assoi
ent,ne pourra, dans aucun cas ni d’aucune manière, nuire, soit
auxr,droits du sieur Castillon, soit du sieür Blanchard, ou de
toute autre, personne que ce soit.
»-Dont acte fait et passé en la demeure du sieur Dufour , le
12 germinal an i 3 . »
^
En »’arrêtant seulement au fait établi par cette déclaration,
que le sieur Dufour n a aucune réclamation à élever contre
m oi, n’en résulte-t-il pas une fin de non-recevoir bien impérative , contre toute action intentée ou à intenter, et ne peut-on
pas employer un raisonnement bien décisif?
J ’ai contracté un engagement envers le sieur D ufour: le sieur
Dufour est payé; il n’a aucune réclamation ¡\ élever contre moi,
il n’en a aucune à élever contre B la n c h a r d ? E n su p p o san t qu’un
nouveau créancier ait été substitué à l’ancien, envers lequel le
débiteur s’est trouvé déchargé, la noyafiou n? s’est-elle pas
opérée complètement ? et ne suis-je pas déchargé de toute ga-
�(, *4 >
ranlie par ce seul fait? J e livre ces réflexions aux lumières de
mon conseiî. . ;
; ■
J e restai dans l’inaction avec l’acte rapporté , et le sieur Castillon, qui fut sans doute prévenu de son existence, renonça
pour le moment à ses projets*, car ce ne fut qu’en vendémiaire
an i4 seulement qu’il'fit constater l’insolvabilité de son associé ,
et qu’il me fit citer devant le tribunal de commerce de llio m ,
pour me voir condamner, et par corps, à lui payer la somme due
par Blanchard, après m’avoir dénoncé le jugement de, condam
nation, rendu antéiùeurement contre ce dernier.
,, , i
«y ?
/
■
' — ,
t r
Sur lé déclinatoiré présenté au tribunal de commerce, il a été
ordonné de plaider au fond5 et l’article 8,titi’e 8 de l’ordonnance
cti^iGG^paroît avoir fondé l’opinion des premiers juges.
,
t L a cour d’appél se trouve saisie par m oi} et tels sont en
abrégé les faits et moyens que j’ai cru devoir communiquer à
mes conseils, qui sont priés de les peser et de résoudre les ques
tions suivantes :
i°. Les juges de Riom sont-ils incompétens ratione loci et ra
tion e materiœ ?
.. 2°» L e sieur Castillon doit-il être déclaré non-recevable dans
sa demande ?
y
3 °i L e sieur Gastillon a-t-il un recours quelconque à exercer
contre moi ?
t
■' , U V111
' 3>i3i 7' -•' *' ;!U*Î
• t-’ 1"i
j ’>: 11 .¡¡'Jl 1 • '-/*!)
A SSO LLA N T.
. ‘ I’ '
�r___u i
J
:
<•
■
'■
Jl
CONSULTATIONS.
ooVi- n. i»DJ
----
T
■- an*-:
"
,
U;i
'n ,
,
.
JL j E C O N S E I L S O U S S I G N E , qui a vu le mémoire à
consulter poux* le sieur, Assollant .
P re xd
l a
r é s o l u t io n
s u iv a n t e
:
. t j ï ‘. ’ > iu :'i:
•i:- >»
.
’i
ut &£«
L e s Ju g es de Riom sont incompétens\ CJ[l
jg
; ■£=
aeK.
L e s ie u r Castillon est non-recevablé1 dans lsa demande ^ et
ducun recoürs ne lui est ouvert c o n tr e ^ s ie u r Assollant^ pour
le remboursement de la dette qu’il a acquittée volontairement
i\ titre de sociétaire et de co-obligé avecfle sièur Bianchard. J
i; ..
\& ■ -q
*•' •
j-
P r e m iè r e
Q u e s t io n .
»• - i*;i ¿‘ * *
L a question de compétence proposée doit être résolut?en faveur
du sieur Assollant sous le prem ier rapport, ratione lôci. *
M ¿t
I m c o m p é t e n c e ratione loci.
On ne peut s’cmpecher de penser que les juges du tribunal
de commerce de R io m , qui se sont déclarés compétens, ont fait
une fausse application des lois, et ont violé les règles de compé
tence.
Ils ont violé l’article 1 7 , titre 12 de l’ordonnance de com
m erce, et faussement appliqué l’article 8 , titre 8 , de l’ ordounance de 16G7.
L ’article 1 7 , titre 1 2 , de l’ordonnance du commerce, est
ainsi conçu :
«
«
«
«
« Dans les matières attribuées aux juges et consuls, le créancier pourra donner l’assignation , à son ch oix, ou au lieu du
domicile du débiteur, ou au lieu auquel la promesse a été
faite et la marchandise fournie, ou au lieu auquel le payem ent
doit être lait. »
�( i6 )
On voit que le créancier ne peut assigner que dans trois
lieux;, et sous des conditions exprimées:
L e prem ier, est le lieu du domicile du débiteur ;
L e deuxième, est le lieu où la promesse a été faite et la mar
chandise fournie ;
L e troisième, est le lieu auquel le payement doit être fait.
L ’application du droit au fait, est facile.
L e sieur Assollant est domicilié à Paris: sous ce rapport, on ne
pouvoit et on ne devoit l’assigner que devant les juges de Paris.
C’est à Paris que l’acte du 18 prairial an 1 1 , contenant la
promesse des sieurs Dufour et Assollant, a été fait et signé, et
si la marchandise devoit être fournie à Riom , la double condi
tion exigée p a r l ’ o rd o n n a n c e p o u r c o m p é te r la ju r id ic tio n ne se
trouvant pas réunie, la compétence ne peut se décider en faveur
du juge du lieu où la marchandise a été fournie ; car les deux
conditions requises par l’ordonnance pour fixer la compétence,
ne se trouvant pas jointes, ce point ne peut la déterminer.
L ’ordonnance, ne compète point et le juge du lieu où la pro
messe a été faite , et celui du lieu où la marchandise a été
fournie; elle ne reconnoît comme compétent, que le juge de
l’endroit où à la fois la promesse a été faite et la marchandise
fournie; autrement, il faut en revenir à la règle générale,
d’après laquelle 011 dit ordinairement, Jid em ejus secutus e s ,
ergo domicilium sc<jui debes.
L ’avis du commentateur Bornier se rattache au nôtre. Il
énonce l’opinion que cette disposition et la marchandise fournie
n’a été ajoutée que relativement aux marchands forains, et
encore pense-t-il que trois circonstances doivent y concourir ;
la première, que la marchandise soit livrée au lieu de rétablis
sement deà consuls ; la seconde, que la cédille ou obligation y
soit passée; la troisième, que le payement y soit destiné.
Il n’excepte que le cas où la marchandise a du être payée
promptement,
�2 a\
(" .1 7
.)
promptement, parce que le marchand peut s’en aller .d’heure en
heure j mais si l’on a vendu à crédit, dit-il, habita jid e de pretio,
en ce cas le marchand ne peut être convenu hors de la juridic
tion de son domicile.
L e commentateur Jousse est aussi d’avis que le concours des
trois circonstances doit avoir lieu pour distraire le débiteur de sa
juridiction naturelle.
Ainsi, en considérant e n c o re que le payement devoit être fait,
à. Paris au sieur Dufour, d’après lacté cité, cette troisième cir
constance vient démontrer que les Juges de Riom ont violé les
dispositions de l’ordonnance, en retenant une cause dont les
juges de Paris devoient seuls connoître.
C ’est vainement qu’ils s’appuyent du vœit de l’ordonnance de
1667 : la fausse application en est aussi évidente que la violation
de celle de 167 3 est démontrée.
L ’article 8 , titre 8 de l’ordonnance de 1677 est ainsi conçu :
« Ceux qui seront assignés en garantie formelle ou simple ,
»> seront ténus de procéder en la juridiction ou la demande ori» ginaire sera pendante, encore qu’ils dénient être garans, si ce
» n’est que le garant soit privilégié, et qu’il demande son renvoi
» par-devant le juge de son privilège. Mais s’il paroît, par écrit
» ou par 1 évidence du fait, que la demande originaire 11’ait été
« formée que pour traduire le garant hors sa juridiction, enjoi» gnons aux juges de renvoyer la cause par-devant ceux qui en
» doivent connoître} et en cas de contravention, pourront les
»> juges être intimés, et pris à partie en leur nom. »
L e principe consacré par l’ordonnance ne peut être appli
cable à l’espèce.
D ’abord il ne s’agissoit: point, de la part du sieur Assollant,
de procéder en la juridiction où la demande originaire étoit
pendante.
lo u t étoit jugé avec le sieur Blanchard, assigné au lieu de son
aojr
�domicile. Il s’agissoiL de faire exécuter une obligation devenue
personnelle aù sieur Assollant, par l’insolvabilité de Blanchard,
après toutes poursuites faites; et cette poui’suite engendi*oit une
action distincte et séparée. L a demande nouvelle à intenter ne
pouvôit être portée devant le juge de la demande originaire,
pu isq u elle n y étoit plus pendante, et que l’ordonnance impose
cette condition. L a raison de la loi est évidente -, elle suppose
que l’action en garantie peut et doit être formée dans le même
temps que la demande originaire 5 et pour abréger les procé
dures , elle veut faire décider par un seul ju gem en t, ce qui
autrement entraîneroit deux procédures et deux jugemens.
I>es conditions de la loi sont contraires à celle du cas particulier
où la demande contre Blanchard dut être formée , et où toutes
les poursuites durent être faites avant de s’adresser à sa caution.
L e principe enfin qu’on doit rechercher dans les conventions,
quelle a été la commune intention des parties contractantes,
doit recevoir ici sa juste application.
Il est évident que le sieur Assollant, s’engageant
Paris en
vers le sieur Dufour, demeurant à Paris, n’a jamais entendu être
distrait de ses juges naturels, pour aller plaider à Riom . L e sieur
D ufour, avec lequel il a contracté, et envers lequel seul il s’est
obligé, ainsi qu’on le démontrera bientôt, 11’a jamais eu non plus
l’intention d’aller former à R iom une demande contre le sieur
Assollant.
On ne peut donc s’em pêelier de conclure q u e , sous CCS divers
rapports, l’ incompétcuce des juges de R io m , rationc loci, 11e
peut être raisonnablement contestée.
Im co m p é te n ce rulionepersonœ et materiœ.
Ce double m oyen d’incompétence peut être invoqué avec
succès par le sieur Assollant. Il est fondé sur sa qualité person
nelle et sur la nature de l’obligation qu’il a contractée.
�ÂO&
( r9 )
Blanchard, négociant, a pu être traduit devant les jjuges du tri
bunal de commerce, relativement aux difierens intervenus sur
! . 1 ' ' r ■ * ’ ? ’ ’ ‘ ' • ■•.
)ri . IO I"■'
la vente d’un obiet mobilier servant à travailler de sa pro„
.
’
I-MJ »
,
tession.
Sa qualité personnelle et la matière compétoient également la.
juridiction.
A u contraire, le sieur Assollant, employé à la comptabilité, et
n’adoptant point d’autre qualité dans l’acte de prairial an 1 1, devoit être considéré comme justiciable des tribunaux civils, ra
tion e personœ.
Sous un autre rapport, il ne pouvoit être traduit devant les
juges du commerce, incompétens ratione materiœ. On a'du re
marquer que l’obligation de la caution est distincte et séparée de
celle du débiteur principal, avec lequel il n’y a point d’engage
ment solidaire. Assollant a cautionné le payement du prix d’un
objet mobilier, après la discussion de Blanchard, aux termes
convenus, et on voit qu'il n’a point contracté en qualité de com
merçant ni de sociétaire, comme il n’a point renoncé à sa juri
diction ordinaire, pour en adopter une autre.
L ’obligation consentie par le sieur Assollant avoit-elle ouvert
une action contre lui? Elle étoit personnelle à lu i; elle étoit sé
parée de celle à diriger contre Blanchard : on n’a pu former de
demande, a raison de cette obligation purement civile, que de
vant des juges ordinaires.
S’être adressé aux juges du commerce, c’est, de la part de l’ad
versaire, avoir méconnu les règles de compétence.
A voir retenu cette cause pour la juger, c’est, de la part des
juges du tribunal de commerce, avoir violé le droit et la loi.
Ils sont incompétens à l’égard du sieur Assollant, ratione per
sonan et ratione materiœ.
L ’on ne doit pas clouter que les juges d’appel s’empresseront
d.e venger les principes méconnus par les premiers jilees.
'
ii
- r : » ■>' ‘ y ' ¡ V,
;,
C i
�D-- xirr ¿> 7 C ifo a r,ia S * G 0 * B k f, q u e s p
o s ..,m
n[
r}.
t>e, si^\ir-Castillon \doit-ihyêtre.idéclaré non-recevable dans sa
5b .arrr.or-t
dem ande?
‘Q!
JiEes fins clé non:recevôir s’élèvent en foule contre la demandé!
dii sieur Gastillon, dirigée contre le sieur Assollant *, elles se
puisent et dans les actes et dans les faits exposés, et dans l’appli-'
cation la plus juste du droit.
6
L ’acte du 18 prairial an i i /établissant que le sieur Àssollant
n’a contracté id’obligation qu’envers D u four , et que le sieur^
Castillon ne s’est pointtréservé de recours contre le sieur A'ssol- '■
larity lorsque, pour le cas prévu de non-payement de la part dü 'l
Blanchard et de sa caution, il est stipulé dans l’acte que le cyliri- *
dre appartiendra en son entier au sieur Gastillon ; il en résulte une
première fin de non-recevoir contre l’action q u ’il intente.
ü
Par l ’effet de l’acte du 3 o frimaire de l’an 1 2 , Dufour se troùv^
vant sans action, et'le sieur Assollant ne pouvant plus être sü1- ^
brogé par lui en des droits et privilèges qu’il n’a plus, l e 1sieur
Castillon lui-m^me ne pouvant faire usage de la subrogation,
pour la transmettre, en cas de payement, nu sieur Assollant, sansn
ouvrir une action contre le débiteur cautionné, qui reflueroit
sur le créancier, il en résulte que le sieur Assollant se trou ve!V
déchargé de son cautionnement, et que le sieur Castillon est nonrecevable à le poursuivre comme caution du sieur Blanchard.
Une autre fin de non-recevoir résulte encore do la novation
établie par cet acte de frim a ire a n 1 2 , où un nouveau créancier
se trouve substitué à l’ancien, envers lequel le débiteur s’est
trouvé déchargé.
A ucunes poursuites n ’ayant été faites aux termes convenu^
contre B lanch ard, par qui que ce soit, toute action contre le
sieur A sso llan t, qui ne s’ étoit soumis k payer pour son beaufrère, qu’après* tontes poursuites faites, aux termes convenus, et
dans ce cas seulem ent, est non-recevable. " Hl
Ui- 1 *
j-
> uoq
�ilo j
( 21 )
Enfin la preuve du payement de la p a rf de Blanchard, qui ré
sulte d’une foule de circonstances, forme un'dernier mfcÿen, tjui,;
appuyé de tous les autres, qui se prêtent un mutuel secours, dé
montre avec eux qu’il ne peut exercer aucun Recours contre]le
sieur Assollant ; point que la troisième question, présente à,déri
^ &>> aucb J9 891»!' ■-*- i;i98rua
§. I.er jio-iî:
¿u'-Cf Rl'noile:Pour bien a p p r é c i e r les m oyens do fait et de droit qui fon
dent les fins de n o n -recevo ir indiquées * il faut s’arrêter d’aborda
à l’examen de l’acte du 18 prairial an n , qui contient en luimôme la solution d’une partie des questions que la demande d u i
sieur Gastillon présente a decider.
■ ; ijbo b? ‘»b ■ta oifui , \ft
Blanchard et Gastillon sont constitués débiteurs principaux b
envers le sieur Dufour ; Assollant y est déclaré la caution du
sieur Blanchard envers le sieur D ufour; Gastillon est encore
certifiçateur de caution envers le sieur Dufour.) tnoitoc tcia?, ■ :rrr
X«e$^obligations et des débiteurs principaux ,.j et de là caution,
et du certificatcur de caution, sont toutes, consignées dans le
même contrat.
i ,m
i
Gastillon s’oblige au payement de la moitié du cylindre, en
vers Dufour..
Blanchard prend le même engagement pour l’autre moitié h
envers le même vendeur,: et le sieur Assollant s’oblige de payer i
au sieur Dufour la totalité ou partie de la dette de Blanchard ^
si elle existe encore aux termes convenus, après toutes pour
suites faites, et dans ce cas seulement ; ce sont les expressions de ’
l’acte.
cider. :
*»¿007.9
On ne voit pas que le sieur Assollant contracte aucun enga*
gement envers le sieur Gastillon ; il ne s’oblige q u ’ e n v e r s Dufour, :>
Castillon vient cautionner la caution e lle -m ê m e envers D u
four , et il promet.deipayer, si Blanchard et sa cautionne payent
point , après toutes poursuites faites.',.,
<vj
�%o(ï
:. c* *» '
'
( 22 )
Dans. ce cas prévu de non-payement de la part de Blanchard
et du sieur Assollant, il est. stipulé que. le( cylindre appar
tiendra, en son entier à Castillon , et qu’il sera libre de le faire
vendre. •
,
On prévoit même le cas d’un déficit qui^doit être à la charge,
de celui des deux associés, q u i, par le défaut de payement, y
auroit donné lieu \ et l’on ne peut s’empêcher de remarquer que
Castillon ne se réserve pas d’action en répétition contre le sieur
Assollant.
Telle est en abrégé l’économie de l’acte du 18 prairial, trans-j.
crit en entier,dans le mémoire à consulter: la, première lin de
non-recevoir indiquée en découle nécessairement, ,
,
■,
•Point d’obligation, point .de droit.
lJje .'sieur. Assollant n’a point contracté d’obligation envers le
siçpr Castillon^ce dernier n’a donc personnellement aucun droitj
contre lui.
-,
¿ob
On peut dire plus encore-, c’est que la lettre, comme l’esprit
du contrat, prouve que jamais les parties n’ont entendu créer
u n e obligation d’Assollant envers Castillon.
11 étoit dans la nature des choses que le sieur Dufour exigeât
que Blanchard fut cautionné, et que la caution le lut elle-mêmej
c’étoit une sûreté personnelle pour le vendeur. Mais Castillon,
qui devoit participera la propriété, comme à l’exploitation du
cylindre, ne pouvoit et ne devoit exiger qu’ une chose, dans le
cas o ù il p a y e r o it le c y lin d r e , c’ eLoit le d ro it d’en disposer} ja
mais il ne p o u v o it prétendre, en acquittant sa dette (puisque
tout associé est tenu indéfiniment des dettes de l’autre), à répéter
le p a y e m c n l contre un tiers étranger ù, sa propriété comme à scs
produits.
Il est vrai cependant que dans le droit commun la caution
s’est obligée, envers le certiiicateur, de la même manière quç le
débiteur principal csl obligé cnyei^la çautionjmais dans l’éspèce
�2.01
(
¿3
)
particulière,'il y a dérogation tacite à cc droit, et Ton voit clai
rement que telle a été la volonté des parties.
Castillon ne s’est point engagé pour Assollant, mais pour son
associé Blanchard, et il s ’ e s t engagé, sous la seule condition d’un
recours, soit sur la personne de cet associé, soit sur lé cylindre
appartenant à la société.
En vain Castillon opposeroit-il à cette fin de non-rccevoir le
droit qu’il préténdroit faire résulter de la subrogation qui lui a
été consentie par D u io u r, dans 1 acte du 3 o frimaire an I 2 ; c’est
dans le fait même du payement constaté par cet acte, que se
puise une autre fin de non-recevoir qui va etre développée. J
La subrogation n’a pas pu détruire la loi que les parties s’étoicnt créée à elle-meme le 18 prairial an 1 1 , et il n’a pas pu dé
pendre du sieur Castillon de changer la position du sieur Assôllant, par des conventions particulières, qui n’ont point altéré
l’effet des conventions générales.
'
;i
S- I I .
.
’ .
En droit, la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux
droits, privilèges et hypothèques du créancier, ne peut plus, par
le fait de ce créancier, s’opérer en faveur de sa caution.
Ce principe a été consacré par le Code civil des Français,
art. 2037 j ct ^ ^loit
adopté par notre ancienne jurisprudence.
Dans l’excellent article Caution, fait par M . M erlin , et rap
porté au Répertoire de jurisprudence, oii lit, au chapitre intitulé,
la manière dontfinissent les cautionnemens, que le caution
nement, en thèse générale, finit, lorsque les obligations pour
lesquelles il est donné s’éteignenl, et que ces obligations peu
vent s eteindre de différentes manières, notamment,
» 7 . Lorsque le créancier s’ est mis hors d’état de faire h la
caution une cession ou une subrogation utile de ses droits
et de ses hypothèques , comme lorsqu’il a pris dès arrange-
�t
*■' \ •
'
( 2 4 )
mens avec son débiteur ou avec des personnes tierces, de
façon qu’en recherchant la caution, celle-ci ne puisse agir
fcontre le débiteur cautionné , que l’action ne reflue contre
le créancier. A qtioi bon seroit-il, ajoute-t-on, qu’un créancier
pût exercer un cautionnement dont il ne pourroit plus tirer
aucune utilité ? »
D e l’application de ce principe , aux faits de la cause , résulte
un second moyen de repousser la demande du sieur Castillon.
En fait, il est établi, par l’acte du 3 o frimaire de l’an 12 , que
le sieur Dufour a été payé du sieur Blanchard par le sieur Cas
tillon , associé de ce dernier. En cet état de choses, comment
le sieur Dufour créancier subrogeroit-il le sieur Assollant à des
droits qu’il n’a plus ? et comment le sieur Castillon lui-même,
en supposant que la subrogation contenue en l’acte cité ouvriroit quelque droit en sa faveur, pourroit-il en conférer un qui
s’exerceroit contre lui-même, puisqu’associé de Blanchard et
tenu indéfiniment des dettes de la société, la subrogation qu’il
feroit au sieur Assollant de tous ses droits , donneroit lieu des
poursuites contre lui ; et qu’ainsi l’action contre le débiteur
cautionné , reflueroit sur le créancier.
Il est évident que le créancier du sieur Assollant, caution de
Blanchard, soit qu’on doive le voir dans le sieur D u fo u r, soit
qu’on puisse le trouver dans le sieur Castillon , s’est mis hors
d’état de faire à la caution une subrogation utile de scs dx-oits. Il
a donc ouvert par son fait une lin de non-vccevoir contre l’action
qu’il intente.
S- IIICctte fin de non-recevoir résulte de la novation opérée par
l’acle déjà cité du 3 o frimaire an 12.
On ne peut pas contester que le cautionnement finit lorsqu’il
y a une novation.
C ’est
�( 35 3
C’est l’avis de M . M erlin, consigné clans le Répertoire, verbo
Caution , §. 3. — C’est celui de tous les jurisconsultes.
C’est le vœu de la loi, consigné dans l’article 1281 du Code
civil,' ainsi concu
» :
Art. 128 1. « Par la novation faite entre le créancier et l’un
des débiteurs solidaires, les co-débiteurs sont libérés.
« L a novation opérée à l’égard du débiteur principal, libère
les cautions. »
Prouver la n o v a tio n , c’est établir la libération du sieur Assollantj c’est ju s tifie r que l’action intentée contre lui n’est pas recevable.
Pour y parvenir, il faut rappeler en peu de mots les carac
tères de la novation , qui peuvent s’appliquer au cas particulier.
L a novation est le changement d’une obligation en une autre.
Garan de Coulon, verbo Novation, Répert. de jurisp.
Lorsque la novation se fait avec l’intervention d’un nouveau
débiteur, ou d’un nouveau créancier, la différence de créancier
ou de débiteur est une différence suffisante pour rendre la nova
tion utile, sans qu’il soit nécessaire qu’il en intervienne d’autres.
Potliier, Traité des obligations, part. 3 , cliap. 2 , §. 4 , n°. 56 1.
Lorsque par l’effet d’un nouvel arrangement, un nouveau
créancier est substitué à l’ancien, envers lequel le débiteur se
trouve déchargé , il y a novation. Art. 12 7 1 du Code civil.
Ces principes, adoptés par les meilleurs jurisconsultes, et con
sacrés par la l o i , sont incontestables.
11 est question d’examiner s’ ils peuvent être appliqués au fait.
On voit dans l’acte du 3 o frimaire an 12 , que l'obligation
contenue en l’acte du 18 prairial an 11 est changée en une autre.
O11 remarque qu’un co-obligé paye une dette non-exigible ,
et qu’au moyen de ce payement, fait avec l'intervention de deux
nouveaux créanciers,savoir,le; sieur Castillon et le sieur Albert,
le débiteur principal est libéré envers l’ancien créancier.
D
�( .2 6 )
^ . p a s évident, ^clpn l’avis de Potliiej.’ , que la. différence
'est suffisante ponrprepdre la .novation utile, sans.qu’il soit né
cessaire qu’il en intervienne d’autres ?
On voit enfin que par l’effet d’un nouvel engagement, de
nouveaux créanciers sont substitués à l’ancien, envers lequel
le débiteur principal, et même le codébiteur, se trouvent libérés.
L a novation est parfaite...
Sans doute on pourroit objecter, si la dette avoit été exigible
le 3 o frimaire an 12 , et si le sieur Castillon avoit payé comme
certificateur de caution, que la caution tient lieu d’un débiteur
principal ^vis-à-vis de ses certificateurs , et dans ce cas, on
pourroit conclure que le certificateur ayant payé doit avoir
un recours contre la caution qu’il a certifiée ; mais dans, l’es
p èce, les deux conditions d’exigibilité de la dette et de payejrJw'nt à titre de certificateur de caution n’existant point, le
payement fait le 3 o frimaire de l’an 12 n’est plus qu’un paye
ment volontaire et libératif, fait par un codébiteur pour le
compte du débiteur principal, qui se trouve libéré envers le
créancier.
L a qualité de codébiteur rend illusoire la subrogation qu’il
s’est fait consentir par l’ancien créancier 5 elle n’empêclie point
la novation, qui se trouve parfaite par l’extinction de la dette de
la part du débiteur, et parla substitution de nouveaux créanciers
à la place de l’ancien , envers lequel le principal débiteur se
trouve libéré. E l l e est b ie n p lu s illu s o ire e n c o r e , lorsqu’on
considère que c’est unassocié qui a payé là dette delà société, et
qui l’a fait dans son intérêt, c’est-à-dire pour jouir de la remise
de douze pour cent accordée par l’acte de prairial an 1 1 . E t une
dernière considération vient militer en faveur de la caution, et
nécessite la rigoureuse application du droit5 c’est que la nova
tion opérée a préjudicié à cette caution. En effet, informée de la
libération , et ne voyant point exercer de poursuites aux épo*
�O
Ofr
ri
«
cesser de veiller à la solvabilité du débiteur principal. ;
;c|
• 'V
'
§. i y .
■ >vt,-on
L a loi du contrat, qu’on ne peut violer impunément, loi, ac
ceptée par toutes les parties le 18 prairial an 1 1 , commandoit, à
.défaut de payem ent de la part de Blanchard , de faire des pour
suites contre lui aux tei’ines convenus ; et après toutes poursui
tes faites, dans ce cas seulement, l’obligation du sieur Assoliant
existait-, l’exécution de la clause exprimée ouvroit seule un droit
contre le sieur Assoliant, caution de Blanchard ,r droit sans le
quel il ne pouvoit y avoir d’action.
O
r,.
A voir violé la loi du contrat, en négligeant d’exécuter
une clause désignée de rigueur par ces mots^ dans ce cas seule
ment , clause inexécutable après les termès convenus, c’est
avoir ouvert la fin de non-recevoir la plus forte contre toute ac
tion en recours contre ie sieur Assoliant.
Ce n’a point été sans dessein que la condition impérative de
poursuites aux termes convenus contre Blanchard, a été insérée
dans l’acte dont est question , et que le droit résultant de l’obli
gation du sieur Assoliant n’étoit réputé ouvert qu’après toutes
poursuites faites, et dans ce cas seulement.
A
L e sieur Assolant n’avoit pas voulu prendre sur lui les risques
qu’il pouvoit courir parla négligence du créancier-, il avoit li
mité son obligation à un temps déterminé, passé lequel, elle devroit s’éteindre. Si le sieur Blanchard étoit insolvable à l’époqué
désignée, le sieur Assoliant devoit payer pour lui : mais il devoit
être prévenu de l'insolvabilité, elle devoit être a c tu e lle et prou
vée a u i tenues convenus. Le silence des créanciers a prouvé
que le sieur Blanchard n’éloil pas insolvable alors.
S’il l’est devenu depuis, le tort'irréparable lait ¿1 la càüt’idü cil
D 2
�*s t ;
( 28 )
yiph»t)la'loi.du <ion|ratf, justifie; pleinepienUa fin,de nonr^ece, voir ii|5foquée.riildBi^*rt edoneianoono aoo « ^ ^
j . 'y-no:
-jilozs'iioib nu
■m§v-^rtoq ro'b < t1b88' o* n no.:: vmIü
^9^Uh!dernier moyen vient sé'ratta'clier^à tous ceux indiqués 5
il ¿ë tire de la preuve que'Blànehard s]est libéré personnellement.
C'est cé q u i résulte d’une foule de circonstances qui formeroient
au moins des présomptions de la nature descelles que la loi aban- dônne aux lum ièréset à la prudence du magistrat; Ces présomp
tions peuvent guider sa: décision , lorsqu’elles sont, ainsi que
dan& le'cas particulier jl gravés, précises et concordantes.'jb uoii
Elles résultent«0^ ^ »
0
■ ob ;;oiîonrt
'fPr^D^ià^qualité des parties adverses, qui, étantqde société
pour l’exploitation du cylindre, ont nécessairement-appliqué
fces premiers produits à l’extinction de la dette contractée pour
en a c q u é r i r là propriété et en user en société, ai :>h
. h ub
s: Elles résultent/ 'T3X'° ,l
V J aun p jgo'n
20. D u payement anticipé , fait par Castillon, qui démontre
la confiance qu’il avoit dans son associé, et la certitude qû’il
avoit d’être remboursé.
ni)
-dElles naissent du silence du sieur Albert dans la contestation ,
quoique subrogé aux droits du sieur Dufour sur le cylindre/y
par lacté du 3 o frimaire.
-'i
3 °. La transaction du i 3 brumaire an r 3 , entre D ufour, Cas*
tillou et Blanchard, oifre encore une présomption p lu s lorte de
libération. Dans cette transaction y Dufour reconnoît, avec Cas
tillon , q u e Blanchard est libéré envers lui. Blanchard paroît
d a n s Pacte comme copropriétaire ;
et transige sur une action
intentée ù sa requête comme ù celle de son associé, contre Dufour , en exécution de l’acte de prairial an 1 1 .
,i,;
• C’est à une époque bien postérieure aux termes de paye->
ment convenus, et à la date de l’acte de frimaire an 1 2 , que.
BUmchurd truusigo en commun avec Custilloo ? sur l’action en*
�garantie' de ïa*borité;thi cylindre j' qué •l?actôi3 e 1'l^an',1i r'duvtoit
contre D ufourj et si ces circonstances n’ établissoiént^pâiJ Unë
libération nécessaire, d’où pouvoit seule résulter un droit exclu
sif poui* Blancliard et'Gastillonide sacrifier comme. d’apiéliorer
la chose, de quel œil la justiçejverroit^lle un açcoi’dfait au pré
judice de la caution -, à laquelle on ne peut contester le droit
d’être subrogé en toutes les actionsi.ouvertes au débiteur princi
pal, pour contester le.payem ent de la dette.envers le creançieriï
9 C et1acte ouvriroit encore une fin de npn-reçevoir, contre l’ao-t
tion du sieur Gastillon, s’il n’établissoit pas implicitement l’ex
tinction de la dette de Blanchard envers Dufoui\;9j r: 3r <rrv}
è»J 4 ?v L ’exploit abandonné du 1 1 germinal an 13 , fait évidem
ment de concert entre Castillon et Blancharçl ,,sous le,nom de
Du four, qui l’a désavoué en démontrant l’artiiicedes adversaires
du sieur Assollant, prouve que la demande intentées ¡contre lui
n’est qu’une ruse employée pour le forcer à pay,ep une dette
acquittée, rvr
tn ina^nq i
.°c
L ’acte du 12 germinal an i 3 , souscrit par DufQur,* établit
encore la libération de Blanchard, puisque;dans cet acte leiseul
créancier envers lequel Assollant s’est obligé, sousj;des conditions'cxpiimées ,■déclare q u il n’a aucune réclamation à élever.
6°. Enfin,la lettre du 17 frimaire , écrite par le sieur Gastillon
au sieur Assollant, établit que la fabrique d’indienneriq, montée
avec le cylindre, est,exploitée en commun} qu’elle est en plein
rapport-, et au milieu des réclamations exercées par Castillon, on
devine aisément, par les conseils qu’ il adresse à la caution, et les
espérances qu’il lui donne d’être remboursée sur le revenu de la
fabrique, qu’il n’a rien à prétendre, et qu’il cherche ¿\ forcer le
sieur Assollant à faire une mise de fonds pour son beau-frère,
dans la société : but vers lequel tendoit, l’acte d u , 3 o frimaire
an. 1.2, et qu’on aurai vainement tenté d’atteindre par la demande:
du- sieur Gastillon ^ que -le. -sicur Albert .eût dû Ioitoqï
n’eûti
�%\k
tJv
i
3o )
jpas été,payé pai4la société de commerce, dont l’existence est in
contestable.
,l?i8
agitai libération de Blanchard se présume par tous ces faits; et si
la-justice en doutoit encore, elle voudroit jetër un regard, et sur
l?acto de èociété (i) que devroit produire Castillon, et sur les
fègistres qui doivent contenir l’emploi du produit du cylindre
et la mise de fonds de chacun des sociétaires : il est certain que
la*preuve de la libération s'y trôuveroit matériellement établie,
-r ’En dernière analyse, et à côté de tous les moyens qui sont indi•quésfcn faveur du sieur Assollant, viendra se placer encore la con
sidération plus puissante peut-être, que le sieur Castillon nepoui*roit s’imputer qu’à lui-même d’avoir mal choisi son associé, et
d’avoir imprudemment payé pour lui une dette non-exigible. ^
On n ’oubliera point en effet que si le sieur Castillon devoit
payer la dette de Blanchard, que le sieur Assollant avoit cau
tionné vis-à-vis du sieur Dufour, c’étoit alors que ce dernier n’au«
roit point été payé, ni de Blanchard, ni du sieur Assollant, aux
fermes convenus, après toutes poursuites faites, et dans ce cas
seulement; mais que cette faculté étant personnelle ù Dufour,
elle n’a ouvert aucun droit à Castillon, puisque les coüditions
sous lesquelles il devoit s’ouvrir n’ont pas reçu leur accomplis
sement, par la seule volonté de Castillon, qui ne peut se venger
que sur le cylindre.
On verra que Castillon avoit un intérêt à se conduire ainsi
qu’il l’a fait : c’étoit celui de jouir de la remise de douze pour
cent, et que c’est ce qui l’a porté à suivre la foi de Blanchard,
et à acquitter sa dette , devenue depuis la dette de la société.
O n sentir^'qu’il n’a pas dû poursuivre son assôcié aux termes
con ven u s, puisque ces poursuites nuroient tourné contre la
sociétéj et qite l’événement d’une déconfiture,-si elle est réelle,
m rpdut fkire' rü v ivre ’fcri '^ f a v e u r un droit qu’il a laissé pres( i) On devra le provoquer form ellem ent par exceptions.
�Z\i
( 5i )
crire, faute de remplir les conditions sous lesquelles- il-pouvoit
seul exister.
:
On sera convaincu qu’il a.pu se faire rembourser, aux termes
convenus, par son associé , puisqu’il n’a point exercé de pourr
suites contre lui. On pensera que, si depuis Blançliard est devenu
insolvable, le tort que Castillon peut en épi’ouver, n’est dû
qu’à son impimdence, et que l’imprudence comme la cupidité
ne peuvent jamais se rvir de titres contre.un tiers de bonne fo i..
L e sieur A sso lla n tarén d u un service.d’a m i;iln ’a dû se croire
obligé que jusqu’au x termes des payemens indiqués. Dans le
silence des parties, intéressées qui s’étoient soumises à lui justi
fier l’insolvabilité du débiteur à cette époque, il a dû croire
Blanchard libéré totalement, et il n’a pas dû s’inquiéter de sa
position ultérieure.
Il a dû bien moins encore se persuader qu’un codébiteur,
qui avoit acquitté volontairement une dette non-exigible* vien*
droit s’adresser après longues années à un homme qui ne fut
jamais obligé envers lui-, et qu i, on le répète, car ç’est le mot
le plus important de la défense du sieur Assollant, ne devoit
payer qu après des poursuites à. ternies fix e s , qui n o n t point
été effectuées, qui ne peuvent plus Vêtre f et qui seules ouvroient
une action contre la caution qu o]i poursuit.
L e droit et 1 équité se ré u n is s a n t d o n c en faveur du sieur
Assollant pour proscrire l’action que le sieur Castillon a formée
contre lui.
E t en résumant toute la discussion ci-dessus j
Considérant sur la première question,
1 • Que l’ucte du 18 prairial au 1 1 , a été fait et signé à Paris ;
Que le sieur Assollant réputé débiteur à défaut: de puyement
par Blanchard qu’il a cautionné, a indiqué dans l’acte son domi
cile a Paris; et encore,.que le payement devoit être fait à Paris ;
2 . Que l’obligation contractée, par Assollant, l’a été en sa
�I
V
•
,
qualité de citoyen non-commerçant, et qu’il n’a point renoncé
A'sa'juridiction 5
^ 3 °. Que le cautionnement du sieür Assollant constitue une
^obligation distincte et divisible de celle de Blanchard, en ce que,
i°. Elle n’ est point sôlidaire avec celle du débiteur principal*,
2°. En ce qu’elle ne pouvoit exister qu’après une discussion
'"préalable ;
3°. Qu’il ne s’agissoit point de procéder sur une assignation
* cri garantie form elle'ou simple e n la juridiction commerciale
dè Riom , ou la !demande originaire auroit été pendante -, _puià* qüe tTabord la demandé originaire formée contre Blanchard,
*devoit être jugée, aux termes de l’acté-de prairial an 1 1 , lorsqüe
* le sieür Assollant devoit être assigné ;
^ Qù’il étoît question, au contraire, de juger une-demandé dis
tincte et formée séparément contre le sieür Assollant, à fin de
fipaÿemëht*dé la somme dont Blanchard étoit réputé débiteur
1 par jugement, demande formée contre le sieur Assollant, cornnie
'Vêtant obligé à payer pour Blanchard, sous des conditions ex
prim ées énTàctè. ' • v
Par ces motifs, le conseil estime qu’il y a lieu de réformer
’’îà' ’décision des juges du tribunal de commerce deR iom , comme
: avant violé les ïèglés de compétence', ratione lo c i, personœ'et
.•
. .
...
- II': . i
Inàteride.
i y;r ,
Sur la seconde question,
' 1 Attendu qu’il est étai)li en fait, ét prouvé par pièces ,
i°. Que Ifcé sieurs B la n c h a r d et Ciistilltfii se sont associés pour
élevcr et exploiter eh commun une ^îanüfa'dlüre d’indiennes ;
Qu'ils ont acheté pour l’exercicie de leur profession, un cylin
dre muni de tous ses agrès, au sieur Dufôur, serrurier-machi
niste ;
Qu'ils ècirit(i Anvenus d’en payer le prix à des époques déter
minées , chacun par jnoitié ,
1
Que
�( 33\
■
fÿ
Que le sieur Assollant, en cautionnant le sieur Blanchard,
s’ est obligé envers le sieur Dufour, seulement, alors que le dé
biteur principal ne pourroit pas payer la totalité ou partie de sa
dette, de l’acquitter, après toutes poursuites faites aux termes
convenus, et dans ce cas seulement ;
Que le vendeur a exigé, pour sa sûreté personnelle, que le
sieur Castillon certifiât la caution de son associé, et se soumit à
payer, dans le cas où elle ne seroit point acquittée aux termes
fixés , après toutes poursuites faites , et dans ce cas seulement ;
Que dans cette hypothèse, le sieur Castillon s’est réservé la
propriété exclusive du cylindre, comme le droit de déduire, sur
les sommes payées par Blanchard, les dommages-intérèts qu’il
auroit droit de prétendre} mais qu’il ne s’est réservé aucun droit
de réclamation contre le sieur Assollant-,
Que le 3 o ventôse an 1 2 , Castillon a payé volontairement la
dette de Blanchard, qui n’étoit point exigible, et qu’il s’est fait
substituer avec un sieur Albert, comme nouveaux créanciers, au
sieur D ufour, ancien créancier, envers lequel Blanchard, débi
teur principal, s’est trouvé libéré;
Que le 18 prairial an 12 , terme du premier payement indi
qué , s’est écoulé sans réclamations judiciaires contre Blanchard
ni sa caution, soit de la part de D ufour, soit de celle de Castillon,
soit enfin de celle d’Albert -,
Que le 7 vendémiaire an i 3 , Castillon et Blanchard ont tra
duit le sieur Dufour devant le tribunal de commerce de R io m ,
pour obtenir contre lui des dommages-intérèts, à raison de la
mauvaise qualité du cylindre qu’il avoit garanti p e n d a n t un an;
Que le i 3 brumaire an 1 3 , ils ont transigé sur cette réclama
tion, et se sont reconnus respectivement quittes et libérés, au
moyen de la livraison d’un rouleau que D ufour s’obligeoit d’ef
fectuer }
Qu’il est prouvé, par un acte du douze germinal an i 3 , passé
E
�( 3 4 )
devant Tardif et son confrère, notaires à Paris, que le sieur Dufour n’avoit à cette époque aucune réclamation à former contre
Blanchard et sa caution; et qu’une assignation, donnée le onze
germinal an i 3 au sieur Assolant, avoit été mal à propos signi
fiée à la requête du sieur D ufour, qui l’a désavouée ;
Que cette assignation, évidemment nulle, et d’ailleurs tardi
vement donnée, n’a point été renouvelée le dix-huit prairial an
treize, à la seconde époque fixée pour la libération de Blanchard,
.qui s’est écoulée comme la première, sans aucune réclamation
de qui que ce fût ;
Que les poursuites de Castillon contre Blanchard n’ont eu lieu
.qu’en vendémiaire an quatorze, c’est-à-dire, deux ans après le
premier terme fixé pour toutes poursuites à d éfau t de payement,
contre les débiteurs de D ufour;
Que c’est en cet état de choses que le sieur Assollant a été cité
devant les juges du commerce à Riom , à la requête de Castillon,
en sa qualité de nouveau créancier de Blanchard, comme étant
aux droits du sieur Dufour, ancien créancier.
Attendu qu’il résulte de tous ces faits ,
i°. Que Castillon, associé de Blanchard , n’a point acquitté la
dette de Blanchard et d’Assollant envers Dufour, après des pour
suites judiciaires contre ces derniers , faites en sa qualité de certificateur de caution, mais qu’il a acquitté volontairement une
dette de la société , n o n e n c o r e e x ig ib le , et dont on sa qualité
d’associé il pouvoit être tenu ;
2°, Que l’acte du trente frimaire an douze a opéré une nova
tion, puisqu’un nouveau créancier a été substitué à l’ancien, en
vers lequel le débiteur principal s’est trouvé libéré ;
3 °. Que par l’effet de l’acte susdaté de frimaire an treize, A s
solant, caution envers Dufour, n’a pu être subrogé parce dernier
en des droits et privilèges contre Blanchard, qu’il a reconnu ne
•plus avoir, dans les actes des i 3 brumaire et i i germinal au i 3 j
�'( 3 5 5
Qu’il ne pourroit point' l’être également par Castillon d’une
manière utile, puisque l’action qui en résulteroit contre Blan
chard pourroit refluer contre lu i, à raison de la société de com
merce qui a subsiste etparoît subsister encore entr’eux;
Que dans son intérêt personnel Castillon n’a pas voulu pour
suivre son associé aux époques fixées par l’acte de prairial an
onze, et que l’acte n ’ o u v r o it une action à Dufour, ou ses ayanscause, contre les co-obligés, qu’après toutes poursuites faites, aux
termes convenus, contre le principal débiteur -,
4 °. Que le sieur Assollant n’a souscrit aucun engagement qnvers Castillon, qui a prévu le cas où Blanchard et sa caution ne
payeroient pas le sieur Dufour, en se réservant la propriété du
Cylindre et un droit de recours en dommages et intérêts contre
son associé, sans en retenir aucun contre sa caution.
Considérant que toutes ces conséquences forcées des faits éta
blissent autant de fins de non-recevoir contre la demande de
Castillon, en ce q u e ,
i°. Tout associé étant indéfiniment tenu des dettes de la so
ciété, est non-recevable à répéter, contre la caution de son asso
cié, le payement volontaire d’une dette de la société, et qu’ un
cerlificateur de caution n’a de droit contre la caution que lors
qu’il a payé pour elle une dette exigible, et après toutes pour
suites faites \
‘
2°. En ce que le cautionnement finissant par la novation,
Castillon n’a point d’action contre Assollant ;
3 . En ce que l’obligation s’éteignant lorsque le créancier s’est
mis hors d’état de faire à la caution une cession ou une subroga
tion utile de ses droits, et le cautionnement cessant avec l’obli
gation, Duiour et Castillon n’ont plus aucun droit contre Asso
lant, caution de Blanchard envers Dul'our qui est payé \
4 • En ce que la loi du contrat a établi, dans l’espèce, une fin
de non-recevoir expresse contre l’action exercée maintenant
E 2
�cçptyg U ^ p tip n j, pu presçxivantau créancier Dufour de discuter?
l^ .^ ^ jte^ r principal aiix termes convenus, et d’épuiser dès-lors
l ^ ?jp q ^ u it^ s? pour pouvoir s’adresser, dans ce cas seulement, à
Ii‘up > * ia»li*t ^ sin o h « * «*»> ». ' a
~
>.Qu’àQdéfaut, dewpoursuites aux termes convenus, le sieurs
Assollant a pu se croire déchargé des causes de son caution'-b
nement^et ne plusjveiller à la solvabilité du débiteur principal;
et conséquemment que Castillon est lui-même non-recevablej
dans son action, personne ne pouvant avoir plus de droits que
DI^fQt^,,gjii,iJevi’pit lui^même être déclaré non-recevable , s’il
s’ad re^^jtàla caution; sans avoir fait toutes poursuites aux teripes.convenus^ 9VJiG, .
.
3
Entin ^tea^ce^que toute action doit dériver d’un droit, et
que Castillon n’a plus de droit contre Assollant,
c .»: • r ..
g£uisqjie cjl’abqrd il ne peut user de celui qui est ouvert à tout
certificajcur, de caution, n’ayant pas payé Dufour en cette qua
lité, et après desipoursuites judiciaires;
Puisqu’il^ acquitté volontairement une dette de la société, et
qu’il a ainsi libéré Blanchard envers le sieur Dufour , et opéré,
une novation, dont l’effet a été de décharger sa caution de toute
garantie;
1
Qu’il ne tient aucun droit de la subrogation consentie en l’acte
de frimaire an 1 2 , parce que ces dispositions, qui sont «\ l’égard
du sieur Assollant, rcs intcr alios acta , ne peuvent lui être
opposées en ce qu’elles ont de dérogatoire à l’acte de prairial an
1 1 , et que cette subrogation ouvrant à Castillon le droit de
Dufour contre Blanchard, lui a ôté en même temps celui qui
pouvoit s’ouvrir un jour en sa faveur contre Assollant, s’il étoit
contraint d’acquitter sa dette ;
Qu’il suit donc de là, que Castillon a eu un droit hypothéti
que contre Assollant, mais que l’événement possible n’est point
arrivé par son fait ; que le droit qui en dérivoit s’est anéanti, et
�se trouve remplacé par celui de propriété du cylindre1 eé’ dé
poursuite contre Blanchard, que CastiUon s’ est réservé eü'ibùC
événement dans l’acte de prairial an"1! iv, droit qu’il^peüt puiser1*
encore dans l’acte de frimaire an 1 2 , s’il est vrai qu’il n’ait point
été remboursé par son associéy et qii’il ait bénévolement payé
d’abord le sieur Dufour et ensuite le sieurA lbert.1*! ~ la*
:IEt en tous cas et eniun m ot, sans droit Contre Assollant, Càs^1
tillon n’est pas recevable dans son action. uP iaoraraau pàanoD is
r Sur !ku troisième question; "
f)nno?/nq , aonafi nos m e b
li Atténdu que les faits, moyens et considérations exposés1c i?
dessus, et notamment dans le § 5 , attestent la libération de Blan-2
cliard, envers Dufour, et que la caution se trouve ainsi déchargée’
de 1’engagement qu’elle avoit contracté envers lui , le 18 prairial
an 1 1 ;
sb euiq r,'n nolitls'. 5 oup
ii'Leuconseil, en persistant dans ses précédentes ''résblütibns,
estime que le sieur Assollant est déchargé dè son'cautionnement?
et qu’à cet égard on n’a aucun recours à exërcèr contre'lui. )lJ
3‘ Délibéré à Paris,■le ’ i 4 août 1806, par les v jurisconsulte*
soussignés.
1* •
^
-s
n\"\ ...
lin p
jJiioj
non;:
A'■v- \'ï
-iuin j0o* uoiMjv^a Onu
p e t i t -d a u t e r i v e , g a i r a t , JU L L I E N N E , m3
d?
fia ^noeaorj n :■ ?*P R I E U R ( de la M arne).
îif' K ■- .
,
-,
>• . -, =..
I . Si
fijj It inviq )if Jc'i è jiiCi ^ rr :
;
■
f . i. • /; -r'
Oï> î:> •ib yi uollitgiiO £ Jniîi . i;:, ;:o i" ;
1joj»
Jk>‘ >Σ2
¿qrmi ïmiAm n-p 6 Uï r
%J n c I l q ^ A
u iïiio c
à ■D
Qi I*'
■;
iu ! î
u ju v e î
n-*- -ifi
. ‘
;
»;>
■
pu .'[■
*JJ > l i . I V i t t i o i b
nu
XIO B n c jili» ?r ,t )
J u ; n f j i r / > 'u M Î - J i g i j o q j a o m o c ü V / u ' l
fo t iit u y ju n U v 'd J i o v h ù b
. .1-!
-srp
u u i u p li*
it:
1.'
t»
iürTT , ) t n > I J o .
t
< -1 ^ 4
'M jp
h
.j,q o v m f c
�U i
(
38)
L ’A N C iE N A V O C A T S O U S S IG N E , qui a pris lecture du
mémoire et de la consultation à la suite,
et par les mêmes motifs, sur tous les points.
Il observp que le sieur Assollant doit insister sur un moyen de
nullité qtii paroît décisif. L ’exploit introductif de l’instance est
donné à une fem m e qui n a voulu dire son nom. L ’huissier n’a
pas rempli le vœu de l’ordonnance de 1667, article 3 du titre 2,
qui veut, à peine de nullité, qu’il soit fait mention, en l’original
et en la copie, des personnes auxquelles les exploits ont été
laissés. L e sieur Assollant peut invoquer avec succès la jurispru
dence constante de la Cour d’appel et de la Cour de cassation.
L ’irrégularité de cet exploit est évidente*, et ce moyen 11’a pas
été couvert par les défenses au fond-, il a été opposé in lim int
E
st dit m ê m e a v i s ,
lUis.
Sur l’incompétence des juges de commerce, le soussigné re
marque, d’après Jousse, sur l’art. 4 du titre 1 1 de l’ordonnance
de 16 73, que la vente d'un cylindre ne peut être de Ja compé
tence des tribunaux de commerce. Il faut bien distinguer les
ventes faites par des marchands et artisans des choses qui doivent
être converties en ouvrages de la profession de l’acheteur, d’avec
celles qui ne doivent point être employées ou converties en
ouvrages de la profession. Ces dernières 11e sont point de la
compétence des tribunaux de com m erce. Jousse prend pour
exemple la vente d’un métier >'i bas laite à un bonnetier. Il décide
q u e la vente de ce métier est une vente ordinaire, faite pour
l’usage de l’ouvrier seulement, et non afin de revendre ; et dèslors, dit-il, les juges de commerce ne peuvent en eonnoître.
Cette doctrine s’applique parfaitement à l’espèce particulière;
la vente d’un cylindre pour calandrcr est à plus forte raison une
-vente ordinaire, laite pour l’usage de l’artisan seulement , et non
pour être revendu.
�Relativement aux moyens du fond, le soussigné n’a rien à
ajouter, les moyens sont développés avec autant de force que de
clarté, et la libération du sieur Assollant est évidente.
Délibéré à Riom
le 22 août 1806.
P A G È S ( de Riom ).
o ^ a » Ifc'« « «
«■
« a » <1^
^ « 7 — -;
—
*• x
7*^ )^ ’
/ iy -;7 ‘ ^
_ Ufc» ^ /(
- vu*. ' /
®m R__
^ K ^ tt« ^ ô r
(t \
/« y
#y
* ÇÎ>' * r
J.
A v /Ê w y •k /vU W ^ b fw *
\. /*.
K
%
i/aaJt'
* /- /
C A r O jV U L
^
“ t r
/^fAj+jÜx
O u / ilL ^ Û w « .
T '“
fcU %^u»wU
* % •**-
/ /
¿Wv*M—
A RIOM, de l'imprimerie de Landriot seul imprimeur de la Cour d’appel.
j
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Castillon, Etienne. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Petit-Dauterive
Prieur (de la Marne)
Pagès
Subject
The topic of the resource
créances
cautions
compétence de juridiction
tribunal de commerce
cylindre à indiennes
teinturier
serrurier machiniste
moulins
fabriques
textile
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter.
Annotation manuscrite : « 7 janvier 1807, 1ére section. Dit bien jugé ce qui touche le jugement du 28 mars 1806.
Table Godemel : Caution : - est-elle déchargée lorsque la subrogation aux droits, privilèges et hypothèques du créancier ne peut plus, par le fait de créancier, s’opérer en faveur de sa caution. Compétence - voir action possessoire : 4. y a-t-il incompétence ratione loci, personae et materiae du tribunal de commerce de Riom, lorsque l’acte qui fait l’objet du litige a été fait à paris, le paiement stipulé devait être fait à Paris, par la caution non commerçante et domiciliée à paris, le cautionnement distinct et divisible de l’obligation principale ; et, enfin, l’assignation directe à la caution, après condamnation complète de l’obligé principal ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1803-1806
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1607
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0310
BCU_Factums_M0502
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53281/BCU_Factums_G1607.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cautions
compétence de juridiction
Créances
cylindre à indiennes
fabriques
moulins
serrurier machiniste
teinturier
textile
tribunal de commerce
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53282/BCU_Factums_G1608.pdf
e83f27dc0386da799ab4beee9e4b0c82
PDF Text
Text
â frU -O a M U —
/ I ¿¿¿f > + * 4 - 'a t * - / &
z% j
M
E
M
O
I
R
E
-
C 0 U R
D ’A P P E L
SEANTE
S I G N I F I É ,
A RI OM.
POUR
~
('
.-
Sieur J e a n - A
Î
n t o in e
• Ir». SECTION.
F A Y O N , notaire public,
habitant du bourg des M a r tr es-d e-V a y r e, appe
lant de jugem ent rendu au tribunal civil de
l’arrondissement de C lerm ont-Ferrand, le
et demandeur en opposition
à arrêt par défaut \
CONTRE
ii
f
,
I
•I
I
,
,
,,
Sieur M i c h e l D U C H E S N E propriétaire
habitant de la ville de P a ris, et sieur E t i e n n e J e a n - L o u i s N A T H E Y , négociant suisse
habitant de la ville de Nyon, canton de Léman
propriétaire de la terre de Chadieu canton de
Monton arrondissement de Clermont intimés
et défendeurs.
,,
J ' A vois la confiance de la famille de Tanne, propriétaire de la terre de Chadieu. Cette terre est s or ti e de ses
mams en 1789, et passée successivement dans celles de
A
�).
quatre particuliers : elle est aujourd’hui sur la tête du sieur
Nathey. L ’on a èu besoin de m oi, et j’ai été assez heu
reux pour rendre des services au véritable* propriétaire
de Ghadieu. A Dieu ne plaise que j’aie la pensée de les
détailler ic i, (on les nieroit); mais au moins n’auroit-on
pas dû chercher à ternir ma réputation, à dénaturer les
faits, et à répandre sur moi l’amertume et la calomnie.
Dans la cause, j’ai sur mon adversaire, le très-grand
avantage de m’en être rapporté à trois jurisconsultes de la
ville de Riom , également recommandables, et par leur
intégrité inaltérable, et par leursconnoissances profondes.
Ils avoient tout entendu, ils alloient prononcer, lorsque
par un trait, qui heureusement a peu d’exemples, il a
rompu l’arbitrage. Il est très-ombi'ageux -, il leur à fait l’ou
trage de leur notifier une révocation, comme si envers
des hommes délicats, la manifestation du moindre doute
ne sufiïsoit pas pour faire rejeter avec mépris une con
fiance qui n’est pas entière.
Ainsi donc nous voilà rendus à la cour ; j’en dois peutêtre des reinercîmensà celui qui n’a plus voulu d’arbitres.
J ’avois eu l’aveugle bonté de passer un compromis avec un
fondé de pouvoir qui n’avoit pas montré sa procuration,
auquel je n’avois pas songé à en faire la demande, et qui
probablement n’en avoit pas une suiïisante. Si c’est là
une fies circonstances qu’il sous-cntcncl clans sa révoca
tion du 26 thermidor dernier, je ne puisque louer sou
procédé : il eût été déloyal de sa part de laisser juger
arbitralernent, pour passer ensuite à un désaveu.
■
(
=
�>?27
(3)
F A I T S .
Je n’exposerai que les faits très-essentiels à ma cause.
X<e véritable propriétaire de Chadieu n’en sera point fâclié.
Le premier nivôse an 7 , le sieur Ducliesne, comme
fondé de pouvoir du sieur Natliey, me v e n d i t , avec ga
rantie, i° . quatre cents setiers conseigle, et quinze setiers orge, à p r e n d r e le 5 du même mois au grenier de
Chadieu, d elà part de nombre de redevables, en vertu
de baux emphitéotiques ; 2°. quatre quintaux et quatrevingt-cinq livres huile de n o ix , moyennant la somme de
4499 francs.
L e sieur Ducliesneme céda encore, avec garantie, quel
ques restes d’obligations , quelques arrérages de fermages
et de rentes, montant à 2555 fr. 5o cent.; il me passa
pour droit de perception une remise de 255 fr. 5o cent.
Ces objets me demeurèrent donc pour 2300 francs.
Ainsi tout le prix de la vente fut de 6799 francs.
IL fut dit que j’avois tout payé, i°. en 1609 fr. argent;
20. en deux billets au porteur que je souscrivis, et qui
devoient échoir, savoir, le premier de 4740 fr. le 20 pluviose.suivant, et le second de 460 fr. le 10 messidor.
L e même jour il fut ajouté ù nos conventions, i ° . que
quoique les rentes et obligations m’eussent été cédées pour
des sommes déterminées, j’en ferois la recette , pour
ensuite en faire le compte avec le propriétaire de Chadieu,
parce que nous n’étions pas sûrs de leurs données : nous
traitions ù Paris, et les . papiers étoient à Riom ; 20. que
dans la vérité je n’avois payé en argent que la somme
A 2
£>
�( 4 )'
de 750 fr. et que le restant, pour parfaire celle de 1609 fr.,
seroit employé par moi à acquitter quelques dettes de
Chadieu envers le boucher, envers les domestiques, etc.
J ’ai plus que rempli mes engagemens : j’en ai les
pièces justificatives.
T o u t le département sait qu’en l’an 7 le propriétaire
de Chadieu, porté sur la liste des émigrés, fut incarcéré
à Clermont. Tout le monde sait aussi quelle auroit été
la fin de cet événement, si certains hommes, et bien plus
encore la providence, n’étoient venus à son secours.
Ce malheur alarma tous les amis du propiétaire de
Chadieu. Aujourd’hui qu’il en est h ors, il travestit tout
le bien qu’on a pu et qu’on a eu la sinîère intention
de lui faire : mais, quoi qu’il puisse dire, il ne sauroit
détruire des faits dont plusieurs personnes honnêtes ont
été témoins.
Quand le propriétaire de Chadieu étoit dans la peine,
il rangeoit parmi ses amis le sieur M azin , expert à R iom ,
dont la bonne réputation est au-dessus de l’attaque des
méchans. L e propriétaire de Chadieu me faisoit l’honneur
de me considérer aussi comme son .ami.
L e sieur Mazin et moi agissons de tout notre pouvoir;
nous faisons agir bien davantage par des tiers , parce
qu’alors notre renommée étoit telle qu’en nous mettant
trop en évidence, nous pouvions c o m p r o m e t t r e , et nousmêmes, et bien plus encore la personne que nous vou
lions sauver.
Dans cette occurrence il falloit de l’argent ( il étoit
alors et bien rare et bien c h e r ) , et le propriétaire de
Chadieu 11’ea «voit point.
�(5)
L e sieur Mazin et moi nous mettons en quête. Nous
trouvons et nous empruntons, sous lettre de change ,
3000 fr. à deux pour cent par mois, en sorte que cela
faisoit un intérêt de. 720 fr. par an. Les 3000 fr. sont
employés par le sieur Mazin à tous les moyens que l’on
juge utiles au salut du propriétaire de Cliadicu.
Un comité des amis du propriétaire de Chadieu est forme
et réuni. On délibère qu’il est nécessaire que faille à Paris.
Je ne compte pour rien les dangers d’alors. Aussitôt
j’abandonne mon épouse, mes enfans et mes affaires, pour
faire tout ce que je pourrai par moi ou autrui en faveur
du propriétaire de Chadieu. Si je n’étois pas celui qui
disoit le plus , au moins avois-je la très-bonne Volonté
de réussir.
A cette epoque on ne savoit pas trop ce que deviendroit le propriétaire de Chadieu.
L e sieur Mazin avoit procuration pour administrer
et vendre tout ou partie de Cliadieu.il étoit engagé envers
le prêteur des 3000 fr. ; je l’étois aussi. L u i et moi pen
sions qu’au moins falloit-il ne pas perdre une somme
aussi considérable.
Le sieur Mazin me propose d’acheter en payement
quelques héritages de la terre de Chadieu : j’accepte.
L ’un et l’autre n’avions que la volonté d’assurer la ren
trée de l’emprunt que nous avions fait pour le proprié
taire de Chadieu. Notre unique but étoit de n’avoir pas sur
notre com pte, et les 3000 fr. de principal, et l’intérêt
annuel de 720 fr. L e propriétaire de Chadieu s’étoit
livré absolument à la discrétion du sieur Mazin , et ;\
coup sur il n’aventuroit pas sa confiance. La pièce jus-
�¿V*'
.
( 6 )
tilica ti ve (i) en dit assez : elle dispense de toute réflexion.
L ’on n’a pas usé de cet abandon entier de la part du
( i ) L e propriétaire de Chadieu écrivoit de sa prison : « Songez
» bien qu ’il n ’y a pas un m om ent à perdre pour prévenir et dis» poser Parades. ParleZ-lui v o u s -m ê m e , en le mandant com m e
» pour chose qui l’intéresse : \ous lui ferez entendre q u ’il sera ,1e
» maître de telle reconnoissance qu’il désirera; et il en peut être
» bien sûr.
>i E t d’ abord les services actuels étant sans p r ix , je dois au
» moins en marquer une reconnoissance : ainsi, sans compter
» le comptant que j ’ attends, t e n e z - v o u s t o u r a u t o r i s é a v e n d r e ,
» DÈS CE . M O M E N T , T E L L E r O R T I O N QU E VOUS J U C E R E Z C A P A B L E DE
»
F A I R E , A VOUS 6 0 0 F R A N C S DE R E N T E , E T A V O T R E r R E C I E U X A M I
» 1200 F
rancs de re n te ,
et
choisissez u n
p rête-n o m
s u r , sous
V ous auriez
la fa cilité d}antidater, à cause de mes blancs seings
et d’ insérer une inscription ou il seroit nécessaire,
cette f o r m e i l y a quelque difficulté, imaginez telle
vous voudrez. Pour la form e, le lieu, le temps, t o u t
» l e nom d e qui vous puissiez j o u i r d ès c e m o m e n t.
» peut-être
» de N a t.,
« S i , sous
)> autre que
»
r e s t e d è s cf. m o m e n t a v o t r e d i s p o s i t i o n , ET NUL ENGAGEMENT
»
n ’e s t
»
D i E l ’.
tlu s
sacré
: G A R D E Z - E N C E T T E TROMESSE F A I T E D E V A N T
» V o u s savez que si j’échappe tout rosie entier, et q u e , relati» vem ent à la terre, 1rs affaires seroient bientôt rétablies, à sup» posjr q u ’elles fussent été gAlces.
« T en ez -m o i donc au courant. Con sultez, et priez pour obtenir
« des délais : tout dépend du G r.
» L es détails que je d em an de, faites - les - moi écrire par mon
» voyageur. L e plus pressé en ce qui vous regarde, c ’est de vous
» assurer des Parad, et de trouver des témoins pour la dissem» blance.
» Si ceci d ure, vous serez interrogé de nouveau.
» m ettre bien d ’accord. »
Í
11 faudra
nous
�( 7 )
propriétaire de Cliadieu. Point de rente de 600 fr. nu
sieur Mazin ; point de rente de 11200 ir. au précieux
am i du sieur Mazin. L ’on n’avoit d’autre ambition que
celle de sauver le proprié taii*e de Cliadieu.
Mais restoit toujours le souci que donnoient, et 1 em
prunt des 3000 f r . , et le gros intérêt de 720 ir. par an.
Pour nous tranquilliser, le sieur Mazin et moi convenons
que j’en serai chargé, et que le sieur M azin, en vertu de la
procuration du sieur N alliey, me vendia , sous faculté
de réméré , quelques vignes dépendantes de la terre de
Chadieu, quelques vignes engagées à perpétuité par des
baux à moitié fruits.
, Dans la circonstance , en l’an 7 , il eût pu être dan
gereux d’exprimer cette faculté dans le contrat même ,
parce qu’en l’an 7 on ne prévoyoit pas encore où nous
menoit la révolution , et qu’un réméré consigné dans
une vente eût pu être contre nous une cause de persé
cution. L e sieur Mazin et moi arrêtons d’en faire un acle
séparé.
Ainsi résolus, le sieur Mazin et moi rédigeons d’abord
un contrat de vente pour êlre passé devant le sieur
Bertlionnet, notaire à la Sauvetat, et puis une contrelettre le 9 thermidor an 7 (1). L a contre-lettre énonce
une vente faite devant le sieur Bertlionnet.
(1) « Je soussigné déclare que la vente de ccjourd’liui ( reçue par
» B c rth o n n c t, notaire à la Sauvetat ) , consentie a mon profit par
» le citoyen M a z in , g éom ètre, habitant de R i o m , com m e fonde
» de pouvoir du citoyen N a l l i e y , propriétaire de C lia d ie u , de
»> plusieurs vignes dépendantes dudit domaine de C lia d ie u , moyen» nant trois mille francs ; néanmoins la vérité est qu ’elle est sous
�C8)
E a cet instant nous ne sommes animés que par l’in
térêt du propriétaire de Chadieu. Nous pensons que s’il
devient libre et s’il veut racheter ses vignes, il lui seroit
désagréable d’avoir à rembourser les frais d’enregistre
ment et de passation. Il nous semble qu’un acte sous
signature privée suiîiroit quant à présent , sauf à user
de précaution au besoin ; nous prenons ce dernier parti :
le sieur Mazin s’oblige seulement h ratifier par-devant
notaire à réquisition. La contre-lettre déjà faite demeure
telle quelle , à la différence qu’après les mots J e sous
signé déclare que quoique la ven te, je place un renvoi
dans lequel j’écris « sous signature privée , » et après
le mot cejou rd lia i, j’efface ceux reçue par Berl/ionnet,
notaire à la Sauvetat.
.
» faculté de rém éré, pour êtro exercée clans l ’a n n é e , à la charge
» par ledit N athey de rembourser audit F a yo n le prix principal et
» accessoire de ladite vente.
» E t dans le cas où ledit F a yo n se trouveroit reliquataire sur le
» prix de la vente de la récolte de l’an 7 , qui lui a été faite par le» dit iVatliey ( C ’est la vente du 1 " . nivôse an 7. ) ; en ce cas tout
» le relit¡iuit sera passe' en compte et à due concurrence sur le
» prix de ladite 'vente et loyaux coûts, d’ après le compte f/vi
» sera fa it entre lësdits Nathey et F a y on , et auquel compte ce
» dernier emploîra tout ce qui peut lui dire dû par ledit Nathey
» tant en frais de procédure qu’autres ftturnitttres.
» D éclare tic plus »¡ne les trois mille i’rancs qui ont servi en
» l ’acquit de la vente sus relatée, ont été empruntés par lesdits
» Mazin et I'ayon , par lettre de change du citoyen D om ergue fils,
» à raison de deux pour cent par mois d,escompte* et que dans le
h
cas que ladite vente 011 remboursement ait lieu , moi F a y o n
» promets faire tenir quitte ledit M azin de ladite lettre de change.»
Le
�teZ • *
...
^9 ^
Le propriétaire de Chadieu s’échappe des mains de la
gendarmerie qui le conduisoit à Lyon. Les suites de cet
événement sont grossies par la renommée. Il me paroît
utile de faire donner une date certaine à la vente du
9 thermidor : la faire enregistrer au bureau de SaintAmant, qui est celui de la situation de la terre de Chadieu,
semble présenter encore quelques inconvéniens. Je pensois que, pour l’intérêt du propriétaire de Chadieu, elle
devoit être encore ignorée par les liabitans du canton.
Je vais donc au bureau de Yic-le-Comte pour faire rem
plir cette formalité : elle l’est le g vendémiaire an 8.
De retour chez moi, le même jour, le sieur Mazin
m’informe qu’il est essentiel que nous passions acte
devant notaire, à raison de la position d’alors du pro
priétaire de Chadieu. Le même jour une ratification est
faite devant le sieur Bertlionnet , notaire; et le sieur
Mazin hypothèque le surplus de la teri'e de Chadieu
i\ la garantie de la vente.
Le 23 frimaire, je fais transcrire mon contrat au bureau
des hypothèques de Clermont.
L e I er. nivôse suivant, j’y fais une inscription pour
acquérir hypothèque, et dès-lors conserver ma garantie:
celte inscription est , i°. pour prix principal de la
v e n t e .........................................................................3000 fr.
2°.Poiirdommages-intérêts en cas d’éviction . iôoo
3°. Pour loyaux coûts........................................ a 5o
T
o t a l
................. 4 7 5 0 ir .
Je jouis paisiblement. Le propriétaire de Chadieu ne
paroît pas songer au réméré : le temps en est passé.
B
�C 10 )
Mais comme il n’a jamais etc clans mon intention do
m’en prévaloir, comme j’ai toujours eu celle de lui rendre
ses vignes à quelque époque qu’il se présentât et me
rendit prix principal et loyaux coûts , j’en donne l’assu*
rance au sieur M axin, son fondé de pouvoir.
L e propriétaire de la terre de Chadieu y reparoîl. Les
premières clioses qu’il oublie sont les services rendus.
Sans égards pour qui ce s o it, il veut dominer partout.
Pour ravoir ses vignes , il s’y prend de telle manière
qu’il ne m’inspire.que de l’indisposition. Je lais ici l’aveu,
qu’indigné contre lui, mon premier mouvement eût été
de les lui refuser.
Le 6 frimaire an 9 , le propriétaire de Chadieu me
fait citer en conciliation sur la demande qu’il veut former
contre moi pour venir, dans trois jours, à compte avec lui,
et faute de ce , être condamné au dcsUtement des vignes,
avec restitution des jouissances et dommages - intérêts.
Il est important que sa citation soit connue en son
entier (1).
( 1)
S u r
taire,
Foxposc
d e m e u ra n t
qui
aiix
n o u s
a
été
fa it,
M a r t r e s - d e - V a y r e ,
faire a r e c E t i e n n e - J e a n - J ^ o u i s N a t h e y ,
«le
L é m a n
en
H o lv é lic r
pouvoir dudit Nathe.y, a v e c
le
d'une
résultat
râleur
fut
bien
une
le
cito yen
ayant
'A u lioil
SON
irri
E I'IE T
lequ el
prétendue
supérieure
n i o c é d e
ET
a
n o
comptes
liaJjitan t d e N y o n
à
d ’a p r è s
‘v e n t e
la s o m m e
¡1 f i t d e s
de
, ca n to n
au
COMME NON
u n
e n t r e
conventions,
plusieurs
que
D E MK e n Eli
c o m p t e
h
la ville d e f i i o n i , f o n d e d e
te.ndoit Itu ê t r e d u e p a r l e d i t J S a t h e y ; l a q u f . m . e
n '.w o m
des
F a y o n ,
do nt .i l. se disoit c r é a n c i e r s ^ a d r e s s a
c i t o y e n / M a z i n , cjr.pert, h a b i t a n t d e
dont
q u e
héritages
ledit l ù i y o n
pré-
v e n t e
doi t cesseii
A V 1' \ ( E ,
A l ’ K i S o u ’ lt.
i .e s d i t s
F
a y o n
i .t
ÎN
a t i i e y
�334
( « )
L e propriétaire de Chadieu dissimule, dans cette cita
tion, toute la colère qu’il a, et contre le sieur M azin, et
contre moi. jVJais dans le public il répand contre nous
les propos les plus outrageaiis, les plus calomnieux: à
l’entendre, nous avons été infidèles , etc.
Des affaires de celte nature ne s’arrangent jamais,
parce qu’on ne transige pas sur l’article de l’honneur.
Ainsi donc point de conciliation.
. '
- L e 26 frimaire an 10, le propriétaire de Chadieu m’as
signe au tribunal civil de l’arrondissement de Clermont;
il me demande purement et simplement le désistement
des vignes, et les jouissances, à dire d’experts, depuis mon
indue détention. Il importe que l’on connoisse ses con
clusions (1).
j,
;
L e 26 nivôse an 10, une autre assignatiôn m’est donnée
de la part du propriétaire de Chadieu. En augmentant
scs conclusions, il me demande, i°. compte des revenus
ii
OU SON F O N D É
i/ÉVENEMENT
cr éa n c ier
;
DE POUVOI R ,
PU
COMPTE
E T Q Ù ’l t
ÀUIIOIT E T E P A Y E ,
A F A I R E . EN T r '
e
UX ,
IL ¿ T O IT
SX,
TAl l
DÉCLARÉ
que ledit Natliey ayant intérêt de ne pas laisser jouir
plus lo ng-tem ps ledit F a y o n en vertu de sa prétendue vente, est
dans l’intention de le faire actionner pour qu’ il ait h venir à
compte, dans le délai de trois jours , avec ledit Natliey ; faute
de ce faire dans ledit d éla i, être poursuivi pour ctre condamné
à délaisser lesdits immeubles, à la restitution des jouissances
d ’i c e u x , cl à tels autres dommages-intérêts.
(x) Pour être condamné à se désister, au profit dudit instant,
de trois parcelles de vig n e s, e t c . , desquelles ledit Fayon s’ est
empare
m idor
e t
an
en
jo u it sans a u cu n
t i t r e
v a la b le
dep uis l e
7 , etc.
B 3
9
t h e r
�*.? •
|Vy A
( 12 )
de la terre de Chadieu pour l’an 7 , et autres qu’il suppose
que j’ai perçus; 20. le payement du reliquat; 30. le dé
sistement des vignes, ainsi que les jouissances, dans le cas
o ù , à l'époque de ma prétendue acquisition, j’aurois eu
en main des sommes équivalentes au prix de cette vente.
Dans l’hypotlièse où, par l’événement du compte, il ss
trouverait mon redevable, il offre de m’en payer le
montant (1).
L e 28 du m ê m e mois (nivôse an 10 ), le propriétaire
de Chadieu me fait assigner au tribunal civil de l’arron
dissement de Clermont , en payement de la somme de
5190 fr. montant de mes deux billets du premier nivôse
an 7. Cette assignation est au nom du sieur Duchesne,
quoique les billets fussent au pouvoir du p r o p r i é t a i r e de
Chadieu , qu’ils lui appartinssent réellement, et qu’ils
fussent payables au jjorteur.
(1) A cc que ledit F a yo n soit condamné à lui rendre com pte,
ou à son fonde de pouvoir, dans trois jo u rs, desdites récoltes,
fruits et revenus de l’an 7 ,
et autres qu'il peut avoir p erçus,
devant le citoyen juge du trib unal, co m m issaire, en m o i s , à lui
en payer le reliquat ; et dans le cas que par l ’événement dudit
compte il arriveroit q u ’à l’époque où ledit citoyen F ayon a com
m ence à jouir des vignes dont il s ’agit, il avoit entre ses mains des
sommes équivalentes à celles du prix de la prétendue vente desdiles vignes, en ce cas se voir condamner à s’en désister au profit
dudit instant, et lui en restituer les jouissances depuis ladite année
7 jusqu’à l’actuel désistem ent, suivant l’estimation par experts,
aux inlcrcts du tout; et au cas <jue ledit instant, par l}événement
du compte, se. trouverait redevable, dudit Fayon, il offre, comme
il n’ a c e s s e d’ offrir, de lui payer le montant du 1cliquât.
�\
( 13 )
Par requête du 12 fructidor an 10, le propriétaire de
Chadieu demande, i° . la jonction de l’affaire en désiste
ment des vignes, à celle relative au payement' de mes
deux billets; 20. la nullité de la vente que m’a consentie
le sieur Mazin ; 30. subsidiairement, que je rende les
vignes, en vertu de là stipulation du réméré.
Le 27 du même mois, le propriétaire de Chadieu donne
une seconde requête , au nom du sieur Ducliesne , ou il
lui fait déclarer que le montant de mes billets appartientau propriétaire de Chadieu, et consentir a la subroga
tion de ce dernier.
Les deux affaires sont jointes par jugement contradic
toire du 14 nivôse an 11 -, et, sur le fond, l’on en vient
à l’audience des premiers juges, le 9 fructidor suivant.
J ’avois chargé mon avoué et mon avocat, i°. de dé
montrer, en point de droit,que le propriétaire de Chadieu
étoit non-rrecevable à réclamer les vignes en question ,
parce que la vente étoit valable, et que le temps du réméré
étoit passé-, 20. d’offrir pourtant de les remettre au pro
priétaire de Chadieu , en par lui me renvoyant indemne.
Le propriétaire de Chadieu fait mettre dans sa plaidoi
rie, fiel, calomnie,etc., et à dose si forte, que mon avoué
et mon avocat en sont révoltés, et jugent qu’il est indigne
de la faveur que je veux lui faire, en renonçant à la fin
de non-recevoir. Ils plaident là question de droit pure
ment et simplement.
En cet état, je suis condamné, i°. à faire au proprié
taire de Chadieu raison du montant de mes deux billets
au porteur, sous la déduction d'une somme de 1477
payée par l’intermédiaire du sieur Bûche, d’une par!, et
�( '4 )
de celle de 3000 fr ., prix de la vente versé dans les mains
du sieur Mazin -, 20. à payer au propriétaire de Chadieu
la somme de 713 IV. restée due sur les deux billets, avec
intérêts, à la charge néanmoins, par le propriétaire de
Chadieu, de rapporter main-levée d’une saisie-arrêt faite
en mes mains , comme des biens du propriétaire de Cha
dieu , de la part d’un sieur Reboul.
La vente des vignes est déclarée nulle et non avenue.
Il est dit que je m'en désisterai, et que je rendrai compte
des jouissances et dégradations, depuis mon indue déten
tion, sauf à moi à me pourvoir pour les sommes que je
prétends urètre dues (1).
fi)
A ttendu que
1rs
deux billets dont est question ont été
souscrits par F ayon , pour être nom m ém ent payés à Ducliesnc
ou au porteur ;
A ttendu
q u ’à ce titre Duclicsne avoit droit et qualité pour
form er cette demande personnelle, et que dès-lors la m axime
invoquée par F a yo n ne peut avoir d ’application;
A tte n d u que la vente dont est question n ’ayant été notifiée
que dans le cours de l’instance, ÏVathey 11’a pu en connoilrc les
vices plutôt, dès-lors il a pu en dem ander la nullité par m oyen
d ’exception ;
A tten d u q u ’il est constan t, cl nit'ine avoué par les parties, que
les deux Lillois dont est question avoient pour ccuse le prix de
la vente de partie des récoltes, fermages et deniers de C h ad ieu,
en l’an y , lai le à F ayon p-ir I^ik licsnc , com m e londe de pou
voir de Pinthoy, et que le m ontant desdits billets devoit revenir
c l appartenir audit IVitliey ;
A t t e n d u l>i déclaration
faite par Duclicsne , que le montant
des deux billets ftppartonoit audit Natliey , et do son consente
ment à ce que ledit IValliey liU subroge à s.i demande en paye
m ent des ileux promesses;
�2-b% ’
5 )
J ’ai appelé de ce jugement.
L'on m’a proposé 1111 arbitrage-, je l'ai accepté , sans e.va( i
‘A U e n d u l’acceptation dudit N atliey de la déclaration et con
sentement dudit D uchesne;
Atten du que sur les 5 i q o francs portés par les deux promesses,
il n ’a été payé par F a yo n à N atliey que la somme de 1477 l r*>
et qu ’il restoit encore avant là vente 5 y i 5 irancs qui n ont pas
élé payés ;
; •_ <■
A tten d u que F a yo n devant encore ¿1 N atliey les sommes de
571 3 fran cs, restant des deux p rom esses, le prix q u ’il déclara
avoir fourni pour la vente ne peut être regardé que com m e une
libéralité à compte de sa dette personnelle;
A tte n d u que F a yo n étant débiteur lors de la vente , au lieu
d'être c r é a n c ie r , il s!en suit que la vente a été faite sans prix;
Attendu d ’ ailleurs que toutes les circonstances font présumer
la iraude et la. collusion, en ce q u e , i°. la procuration donnée par
N atliey à M a z in , le 7 ventôse an
5,
imposoit la condition ex
presse à M azin de vendre au meilleur prix ;
2°. En ce que la vilité du prix est notoirement connue , puis
que l’œuvre de vigne ne.seroit vendue q u ’à raison de
56
liv. 10 s .,
et dans le vignoble de Coran ;
5°.
En ce q u e , d ’après les conditions imposées dans la procu
ration, M azin devoit se transporter chez tout notaire pour passer
acte de vente ;
4°.
En ce que, d ’après cette condition, la vente dont
est question
ne pouvoit pas être sous seing p rivé , et qu ’elle n’ a pu être passée
que devant notaire;
5°.
En ce que la révocation de la procuration a été notifiée par
N atliey le i/f vendémiaire an 8 , et enregistrée le mêm e jo u r ;
6°. En ce que l'enregistrement de la vente dont est question,
qui est du 2 ü du mêtne mois , est postérieur de n e u f jours à la
révocation de procuration ;
7 • Ln ce que l’ aveu fait à l’ audience par F a y o n , que le délais-
�.......................( i6 )
miner si celui avec qui j’ai compromis, le 21 messidor
dernier, avoit ou non pouvoir suffisant pour cela. Il s’est
sement de quatre-vingt-cinq œuvres de -vigne ne lui a été fait
que pour lui servir de gage et de nantissement de la somme
de 5ooo fran cs, dont ¡1 est établi q u ’il étoit lui-m ême débiteur;
8*. En ce qu ’il a été aussi avoué par les parties que la con
dition de cette vente étoit la faculté de ré m é ré ;
f)°. En ce que cette condition de réméré est reconnue être du
mêm e jour de la vente notariée;
io°. En ce que l’aveu aussi fait à l ’audience par F a y o n , que
la somme portée en la vente avoit été par lui avancée pour le
cit. de Iîalz, pour le compte du cit. N a th e y ;
11*. Enfin en ce que cette déclaration détruit la mention faite
dans l ’a c t e , que le prix avoit été présentement payé comptant
audit Maziri ;
E n ce qui touche les saisies - arrêts faites entre les mains de
F ayon ;
A tten d u q u ’à l’époque de la vente il n ’avoit été fait aucune
saisie entre ses mains:
L e tribunal , sans s’arrêter ni avoir égard aux demandes efl
nullité formées par la partie de Rousseau , dans lesquelles il la
déclare non-recevnbîe ;
Faisant droit au fon d , donne d é fa u t, faute de plaider, contre
M ichel D u ch esn e, e t , pour le p ro fit, donne acte à la partie de
Jeudy de la déclaration faite par ledit D u ch e sn e , par sa requête
du i5 fructidor an 10, à son p rofit, de la propriété des sommes
portées aux deux billets, et de ce qu ’elle se subroge à la demande
dudit D u c h e sn e ; en conséquence, reçoit ladite partie (le Jeudy
intervenante sur la demande entre lesdils Duchesne et F a y o n , et
m et ledit Duchesne hors de cause:
E t , faisant droit sur ladite intervention, condamne la partie de
Rousseau à faire raison à celle de Jeudy du montant disdits
billets, sous la déduction de la somme de 1477 francs payée par
r e ti r é
�«»
24<?
(17)
retiré d’une manière peu lionnète , lorsque le jugement
alloit être rendu. L e 26 thermidor il a Fait sign'fbr une
révocation aux trois arbitres : de suite il a poursuivi Tau
le cit. B û ch e , et celle de 3ooo francs énoncée en la "vente avoir
été remise au cil. Mazin ;
E n conséquence , condamne la partie de Rousseau a payer a
celle de Jeudy la somme de 713 francs restée due sur les deux
b ille ts, ensemble les intérêts depuis q u ’ils ont eu lieu;
A la charge néanm oins, par la partie de Jeu d y, de rapporter
à celle de Rousseau la main-levée de la saisie-arrêt faite entre scs
mains à la requête du cit. Reboul ;
E t , faisant droit sur la demande en remise des quatre-vingtcinq œuvres de v ig n e ,
L e tribunal, sans avoir égard à la vente du C) vendémiaire an 8,
laquelle il déclaré n u lle, com m e non faite et avenue,
C on d a m n e la partie de Rousseau à remettre et délaisser à celle
de Jeudy les quatre-vingt-cinq œuvres de vigne énoncées dans la
d em an de, et à en cesser la jouissance; permet à la
Y> arlie
de Jeudy
de s'en mettre en possession com m e de sa chose propre ; fait
défense à la partie de Rousseau de troubler celle de Jeudy, aux
peines de droit ;
C o m m e aussi, condamne ladite partie de Rousseau à rapporter
et restituer à celle de Jeudy le m ontant des jouissances par elle
touchées et jK’rçues depuis son indue détention , ensemble des
dégradations et détériorations q u ’elle peut y avoir com m ises, et
ce a dire d experts dont les parties conviendront, sinon qui seront
pris et nommés d ’office en la manière ordinaire, ensemble avec
les intérêts de droit ; et condamne la partie de Rousseau en tous
les d é p e n s, m êm e en ceux faits par D uchcsnc ;
Saui à la partie de Rousseau de se pourvoir contre q u i , et ainsi
q u e lle avisera, à raison de ce q u ’elle a prétendu à l ’audience lui
être dû.
�9^*
( 18 )
dienee, pour ne pas me donner le temps de me défendre;
comme si je ne désiroispas plus que lui la fin de l’affaire.
Le 9 fructidor il a pris arrêt par défaut, et j’y ai formé
opposition le 27.
M O Y E N S .
Je l'ai déjà dit devant les arbitres, et je le répète ici,
je ne veux pas garder les vignes en question; mais je veux
que le propriétaire de Cliadieu sache bien que je les lui
abandonne proprio m o tit, à la charge par lui de me rem
bourser préalablement tout ce qu’il me doit.
I c i , par honneur plus que par intérêt, j’ai besoin de
traiter ma cause tout comme si je contestais simplement
au propriétaire de Cliadieu la remise de ces vignes. Pour
cela, je lui prouverai que j’ai surpayé le montant des
deux billets au porteur que j’ai souscrits à lui , sous le
nom du sieur Duchesne.
11 11e faut pas oublier que l’affaire de la récolte de
l'an 7 , d’où proviennent mes deux billets au porlcur , et
l'affaire de la vente des vignes, sont aujourd'hui tellement
liées entre elles, qu'elles sont comme confondues. Celte
union résulte principalement de ma contre-lettre du 9
thermidor an 7.
En effet, dans cette contre-lettre , (qu’en poinl de droit
011 ne peut pasdiviscr, ctqii’011 doit prendre dans son toul,
tant à charge qu’à décharge, ) il est convenu que dans le
cas où je serois reliquataire de quelque chose sur le prix
de la vente de la récolle de l’an 7, c’est-à-dire, sur le
iiH/iitaiil de mes deux billets au porteur; il est convenu,
�24»
( 19 )
dis-je, que lors du rém éré, le reliquat de mon débet sera
imput à ijusqit à due concurrence9sur h prix de lad. vente
et loyaux coûts, rZ’après le compte qu isera ja it entre lesdits
N athey et Fayon. Il est ajouté que, lors de ce compte ,
j’emploîrai tout ce qui peut m’être du par ledit JSatâey,
tant en fr a is de procédure quautres fournitures.
Cela posé , il faut donc connoître notx*e état de situa
tion générale; il faut connoître tous mes objets de ré
pétition et de compensation, pour savoir comment je rem
plis , et au delà , le montant de mes deux billets , et pour
vérifier ce qui m’est encore dû.
Il me semble utile de diviser en deux paragraphes l’ar
ticle des billets et celui de la vente. I jC premier portera
sur les billets, et le second sur la vente.
§. 1 - .
B
i l l e t s
.
Comme par la contre-lettre je suis autorisé à porter
en compte tous mes f r a is de procédure et autres fo u r
nitures , je cotnmencenii par là, et je viendrai ensuite
aux payemens que j’ai faits; je les présenterai par ordre
de dates.
i°. J ’ai à répéter contre le propriétaire
de Chadieu la somme de i 52 fr. 20 cent,
pour déficit sur les fermages , rentes et obli
gations cédés avec garantie de quotité, le
i or. nivôse an 7 , c i .....................................
2°. Le propriétaire de Chadieu me doit la
i'5 a F. 20 c.
IÔ2 f. 20 c.
C 2
W
�a *
( 20 )
.
D e Vautre f a r t ........................... 1 5a f. 20 c.
somme de 739 fr. 65 cent, ou pour frais do
procédure, procès verbal notarié et exploits
contre Besson et nombre d’autres, ou pour
déboursés et démarches, relatifs au règle
ment de l’emprunt forcé, ou pour quantité
d’inscriptions aux hypothèques , c i ............. 739 65
30. L e 27 pluviôse an 7 , M . Buclie ,
ex-procureur au parlement de Paris, a payé
pour moi à mademoiselle T ilo r ie r , ( pour
le compte du véritable propriétaire de
»
Cliadieu'), la somme de 14 7 7 ,
............. 1477
4°. Le i er. messidor an 7 , j’ai payé la
somme de 63 fr. h Poupon , bacholier ,
pour raccommodages des bacholes et cuvettes
de Cliadieu, en l’an 6 , par ordre du sieur
63
»
Mazin , ci...........................................................
5 °. Le 20 messidor an 7 , j’ai payé au
sieur Mazin une somme de 600 fr. à valoir
sur les billets Duchesne , ci. . . . .............
6°. Eu messidor an 7 , j’ai fait un voyage
ci Paris pour l’intérêt du véritable pro
priétaire de Cliadieu. J ’y ai été incité par
scs conseils cl ses amis. Comme notaire, j’ai
(ait des pertes dans.mon état; j’ai en outre
fait des d é p e n s e s j’ai couru les dangers du
temps : 600 fr. 11e me dédommageront pas
Miiïisanimeul. Néanmoins devant les arbitres
je me suis réduit à cette somme, et aujour-
600
a
�24»
( 21 )
C i- c o n tr e ........................................ 3 ° 3 I £ 85 c.
d’hui je veux bien m’en contenter, ci............. 6oo
»
7°. En messidor an 7 , j’ai payé à made
moiselle Tilorier 216 i'r. dont je n’ai point
de quittance ; mais devant les arbitres le
propriétaire de Chadieu a alloué l’article, ci. 216
»
8°. Les impositions de Chadieu , pour
les ans 5 et 6 , 11’étoient point payées. Le
sieur B e r t h o n n e t , p e r c e p t e u r de fa it, sous
le nom du sieur Pialle , e n écrivoit , en
style très-pressant, au sieur Mazin, le 22 fri
maire an 7. L e sieur Mazin en référoit à
M . Pages , conseil et ami du propriétaire
de Chadieu. L e 11 messidor suivant , le
sieur Berthonnet écrit encore au sieur
M azin , et annonce sa venue à R io m , afin
de prendre des arraugemens à ce sujet (1).
( Ces deux lettres m?ont été prêtées par le
sieur Mazin : aussitôt je les ai produites
aux arbitres, et leur état matériel dépose
pour la sincérité de leurs dates ).
L e sieur Berthonnet et moi venons à
Riom. A vec le sieur Mazin nous nous ren3847
85
(1) « Je m e rendrai, au désir de votre lettre, à R i o m , pour
» prendre des arrangemens à cet égard avec le ciloy'en P a g e s,
» charge des affaires de celle maison conjointement arec vous.
» V o u s pouvez être persuadé cpie si j’ai tant attendu ¿1 poursuivre
» 1 impôt de cette m a iso n , c ’cst à votre considération, etc.»
�* I»*
D e î autre part
3847 f. 85 c.
dons dans le cabinet de M . Pages : celui-ci,
après nous avoir entendu , dit que je payerai
au sieur Berthonnet une somme de i 5oo f r .,
savoir , celle de 1428 fr. sur les contribu
tions en question , et celle de 72 fr. pour
honoraires dûs au sieur Berthonnet, en qua
lité de notaire , par le propriétaire de
Chadieu.
L e 1 5 thermidor an 7 , j’ai payé cette
somme au sieur Berthonnet , qui m’en a
fourni quittance , c i ........................................ i 5oo
g°. L e 21 fructidor an 8 , le sieur Mazin
m’écrivit pour me charger de faire l’em
plette de quelques terrai lies nécessaires pour
les vendanges, lors prochaines, de la terre
de Chadieu; j’en ai acheté pour la somme
de vingt livres, c i ........................................
T
o t a l
20
5 3 6 7 f.
85 e.
L e montant de mes deux billets est de 5190 f. «
Partant, j’ai surpayé de
0177 f. 85 c.
Et il n’y a pas un centime à appliquer üi la vente
sous faculté de réméré.
L e propriétaire de Chadieu me conteste la somme
de (*oo fr. que j’ai comptée au sieur Mazin, le 20 mes
sidor an 7. Ü récuse le reçu que j’en rapporte de la part
du sieur Mazin, parce que ce reçu est écrit sur 1111 ea-
�.2 fi
( 23 )
hier où d’autres articles étrangers au propriétaire de Chadieu, et antérieurs en dates, sont couchés après celui des
600 francs.
i°. Dans le fait, cette quittance est écrite sur un cahier
portatif que je trouvai dans ma poche au moment où
je comptai les 600 fr. ; un Liane tomba sous la main
du sieur M azin , il y mit la quittance des 600 f r . , sans
donner, sans songera. donner la moindre attention a c e
qui précédoit et à ce qui suivoit, parce que, entre lui et
m o i, ceci n’étoit que provisoire, et que j’étois toujours
ù môme de prendre de lui une quittance en règle.
2°. Le propriétaire de Chadieu a commis une indiscré
tion en promenant ses regards sur toutes les parties de
mon cahier. Il 11e lui étoit pas permis de voir ce qui ne
le concernoit pas ; il ne lui étoit pas permis de porter
un œil curieux sur mes affaires. Dans tout ce cahier est
une seule partie le concernant, la quittance des 600 (r.
Je n’ai pas produit ce cahier, pour, à l’aide des autres
articles qu’il contient, donner une date certaine à la quit
tance-, je n’ai produit que la quittance. Est-elle du fait
du sieur Mazin ? Oui. On en convient, et cela suflit.
3°. Enfin, les dates des articles postérieurs à cette quit
tance étant antérieures, il s’en suit de notre part une
preuve de sincérité et non de collusion; car, si nous
avions voulu nous concerter contre le propriétaire
de Chadieu, nous en savions assez pour nous mettre ù
couvert de sa critique.
L e propriétaire de Chadieu veut rejeter l’article des
i j o o ir.
q u e j’ai payés au percepleur des impositions,
\
< *'
�(24)
le i5 thermidor an 7 , parce que, dit-il, i° . je n’avois
pas qualité et autorisation pour payer en son acquit;
2°. parce qu’il a payé lui-même au sieur Berthonnet;
3°. enfin, parce que cet article est postérieur ù la vente
sous réméré , du 9 thermidor an 7.
i° Je devois au propriétaire de Chadieu. I.e sieur
Berthonnet vouloit saisir et arrêter ès-mainsde ceux qui
me devoient par suite de la vente de récolte, du premier
nivôse an 7. Le propriétaire de Chadieu étoit obligé de
me faire jouir. J ’ai doue pu faire cesser la cause qui auroit
produit une saisie-arrêt, et auroit empêché ma jouissance.
20. J ’y ai été autorisé par l'arrangement fait dans le
cabinet de j\l\ P ages, après la lettre du sieur Berlhonnet, du 11 messidor an 7.
30. A u tribunal civil de Clermont, j’ai dit en défenses
que j’avois payé des contributions en l’acquit du pro¡n-iétairc de Chadieu ; que mes deux billets faits à D u cliesne apparlenoient au propriétaire de Chadieu, et que
celui-ci devoit en faire déduction sur le montant des
billets. Par écrit du premier germinal an 10 , l’on me
répond , au nom du sieur Duchesne : « I l ( Layon ) dit
« at'eir payé des contributions ; q u 'il ju s l’fte d u p a je « ment q u i! dit avoir f a i t , et qu'il établisse que k s
« impôts parés n'étaient point ¿1 sa charge, il est assuré
« qu’ il en obtiendra la déduction. » ( J ’en prends acte,
sans faire aucune approbation préjudiciable.)
De là deux conséquences sûres : la première, que si
j’ai payé des con!ributions' en décharge du propriétaire
de Chadieu, il ni en sera fait déduction; la .seconde, que
celle déduction portera sur mes billets : fou ne peut pas
l’entendre
�»24^
25 )
l’entendre autrement. X>e montant des billets m’est de
mandé au nom de Duchesne; c’est au nom de ce der
nier que l’on consent à la déduction.
Or*, par le reçu du i5 thermidor an 7 , j’établis que
j’ai payé au sieur Berthonnet en l’acquit du proprié
taire de Chadieu.
L ’on ne peut pas dire que ces impositions fussent à
ma charge : d’une part, par la vente du I er. nivôse an 7 ,
l’on m’a cédé des objets certains, certaines portions des
revenus de la terre de Chadieu; ce n’est pas unc'ferme
que l’on m’a consentie : d’un autre côté, l’on ne m’a pas
imposé la condition de payer les contributions assises sur
Chadieu ; ces contributions demeuroient donc pour le
compte du propriétaire.
l/’on excipe d’une lettre que j’ai écrite au propriétaire
de Chadieu le 7 vendémiaire an
elle porte: « Pour
« la récolte de l’an 8 , on offre de prendre le vin sur
« le prpmier prix qui sera fait, le grain sur la pancarte
« de la Noël, à vingt sous de rabais par setier, à cause
« qu’on payera comptant , étant nanti des objets, et
« comme devenant caution et responsable de plusieurs
« débiteurs insolvables qui feront des obligations au
« terme.
f
«
«
«
«
« Que cette récolte monte à cinq cents louis et p lu s ,
cela est indifférent.; on acquittera sa v a le u r, pourvu
qu’on l’ait dans les mains.
K Quant à la levée de la récolte en vin , je ne puis
m’en m ê le r , étant surchargé d’affaircs ; ainsi vous
pouvez l’affermer-en nature, ainsi qu’il est d’usage.
D
�O } i^
V
(¡> 6 -)
« Sur la récolte que vous me vendrez, je désire nie
« retenir les 2.000 f r . et plus que je vous ai avancés.
« Sans m o tif vousfaites compensation de ces ayaneçs
« avec le retard que Nal/iey a éprouvé de ce q u i lui
« était dû sur la vepte de la récolte de f année dernière,*
« il ne tenoit qiûà JSathey d’envoyer plutôt toutes mes
« signatures, ilrfauroit dans ce cas essuyé aucun retard:
.« le cit. Pages- justifiera ma conduite à cet. égard. L e
« débiteur veut payer ; il demande ses signatures oh li
ts. gato.ires; on met.de la lenteur ci c,et envoi: certaine« 7nent on ne peut blâmer le débiteur de ce qiCil iia c« quitte pas.
« E11 deux mots, on achètera la récolte de l’an 8 çompk tan t, sur laquelle on veut se retenir les avances déjiï
« fa ite s j on offre de payer le surplus comptant, lors« qu’on sera nanti des denrées, soit en espèces, soit en
« obligations : voilà le dernier mot.
• c< L ’année»-dernière on fit à peu près le même mar•« ebé ; on a payé, et 011 n’a pu finir (Je,.faire la levée à
« cause des entraves de la saisie Reboul. Me voilà en
« échec , sans pouvoir finir de percevoir.
« Sur mes principes de d ro it, je désire, à cause des
« intérêts de Nathey, être dans l'erreur-, mais en atten« dant, voilà des entraves : qu’on, les fasse donc; lever.
« Je sais que Nathey a disque jç devois 12000,francs
« sur la récolte de l’année dernière, et que j'avais men
ti die la saisie Berthonnet pqur ne pas payer. ( Lelong
« a porté cet.écrit.) Ce mensonge î^’a. affecté beaucoup
« joint au peu de reconnaissance qu’on a eu (les peines
�24*
• '
(>7 ) #
« et tic ma bonne volonté à obliger l'c cii\ Jean ( î) , dans
« son dernier accident; ce qui m e - fait désirer davan« tage ma retraite.
« Franchise.
"5
Puisqu’on ne recônnoit ni les services, ùi le Senti« ment d’attachement, je désire'mô‘ rétircr. »
, 1- .
D e cette lettre l’on i n d u i t que l e 7 vendémiaire an 8 ,
reconnoissant d e v o i r encore, demandant" rnés billets, il
n’est pas v r a i s e m b l a b l e que j’aÿe payé ail sieur Berthon
net, etc., et qu’ainsi j’étois ençôre débiteur du montant de
mes deux billets : l’on va plus loin , l’on en tire un ar
gument contre la sincérité de la vente dû 9 thermidor
an 7.
"!'
•
J 1’
î '* i
Je vais répondre a ce qui'a rapport* Jaux billets, et je
renvoie en son lieu la partie relative à la vente.
1°. Le 7 vendémiaire an 8 je réclamois mes signatui’e s , et je parlois encore de payement pour les avoir,
parce qu’il m’importôit de les faire rentrer dans mes
mains.; pour cela j’aurois même payé une seconde fois,
s’il Tavoit fallu : le propriétaire de Chadieu en sait mieux
que irtoi la raison principale. Mais au reste tout ce que
j’ai écrit ne détruit pas les faits certains Je payement
qui existaient auparavant ; il n’en demeure pas moins
démontré que j’ai surpayé les causes de mes deux billets
et cela sullit.
20. Mes deux billets étoient payables au porteur ; ils
(1) L e véritable propriétaire de Chadieu.
D 2
�-<• -
# jv
( 2
8
.}
,
pouvoîcnt etre remis de la main à la main, comme pièce
(le monnoie. En payant sans qu’on me rendît mes écrits,
celui qui se seroit trouvé nanti, m’auroit forcé au paye
m ent, malgré ma libération première. Une quittance du
propriétaire de Cliadieu ne m’auroit rien signifié contre
le porteur de mes effets.
3°. Vis-à-vis d’un tiers saisi de mes billets, je n’aurois
pu opposer mes objets de répétition et de compensation,
pas même les payemens faits à mademoiselle Tilorier et
au sieur Mazin.; mon intérêt, celui d’une libération so
lide, vouloit donc que mes écrits me fussent présentés
par le propriétaire de Cliadieu, afin que je fusse à même
de faire valoir mes répétitions, compensations et paye
mens. Voilà une des raisons déterminantes de ce que j’ai
écrit dans ma lettre du 7 vendémiaire an 8.
§. i r.
V
e n t e
.
La vente que m’a faite le sieur Mazin , le g thermi
dor an 7 , est très-valable. La date en est sincère ; il n’y
a point de vilité dans le prix. Au surplus, il y avoit fa
culté de rachat que le propriétaire de Cliadieu pouvoit
exercer dans l’année de la vente.
Devant les premiers juges , le propriétaire de Cliadieu
a osé soutenir cette vente nulle, parce que, dit-il, la pro
curation en vertu de laquelle elle a été faite, cioit alors
furannee. Cette objection est de mauvaise foi.
�( 29 )
En effet, i°. cette procuration est du 7 mars 1797;
elle porte la clause de non-surannation. Il y est dit
qu’elle vaudra jusqu’à révocation expresse.
20. Que l’on se rappelle l’écrit adressé en l’an 7 par le
propriétaire de Chadieu, écrit rapporté en son entier,
page 6 , note i re. du présent mémoire.
Ainsi donc les pouvoirs du sieur Mazin subsistoienl
encore, lors de la vente sous seing privé, du 9 thermi
dor an 7.
Mais, dit-on, la procuration du propriétaire de Cha
dieu donnoit au sieur Mazin seulement le pouvoir de
vendre par-devant notaire, et non par acte sous signature
privée.
i°. Il est certain que, dans cette procuration, sont les
termes , pour cet effet, se transporter par-devant tous
notaires sur ce requis : mais cette clause n’étoit pas exclu
sive de la vente sous seing privé.
20. Le 9 vendémiaire an 8, le sieur Mazin m’a fuit une
ratification par-devant notaire , par-devant le sieur Berthonnet, notaire à la Sauvetat.
Il est vrai que l’on dit avoir notifié le 14 vendémiaire
an 8, une révocation au sieur Mazin de la part du pro
priétaire de Chadieu.
M ais, i°. cette révocation ne m’étoit pas connue', je
l’ignorois absolument.
S i , par-l'article 2004 du Code c iv i l , le mandant peut
révoquer sa procuration , par l’article 2005 il est obligé
d’exécuter ce que le mandataire a fait après la révoca
tion. Tant que le mandataire est muni de la procura
tion , les tiers peuvent traiter valablement a v e c lui. « La
1
�.•w,.
( 3° )
révocation notifiée au seul mandataire , porte le Code
c iv i l , ne peut être opposée au x tiers qui ont traité
dans l’ignorance de cette révocation, sauf au mandant
son recours contre le mandataire. »
11 ne serviroit à rien que l’on m’opposât que le fait en
question est antérieur au Code civil.
Cette disposition du Code n’est pas un principe nou
veau ; auparavant il étoit enseigné par M. Domat et autres
auteurs recommandables par leur savoir prolond. L a
jurisprudence des tribunaux étoit bien déterminée.
2 ° . A u 1 4 vendémiaire an 8 , les c h o s e s n’étoient plus
entières. Il y avoit vente sous seing privé, du 9 thermi
dor an 7 ; elle étoit enregistrée du 9 vendémiaire; il y
avoit ratification par-devant notaire, du 9 vendémiaire :
tout cela étoit antérieur à la révocation.
Répétera-t-on avec le propriétaire de Chadicu et les
premiers juges, que l’acte devant notaire n'a été enre
gistré que le 23 vendémiaire an 8, c’est-à-dire, neuf
jours après la révocation de la procuration ?
i° . La révocation de procuration ne m’a.pas été no
tifiée. Je suis un tiers. La vente et la ratification seroîentelles postérieures à la révocation , cela me seroit par
faitement égal , parce que j'aurois vu la procuration
dans les mains du sieur jNlazin , et que j’aurois traité en
bonne foi avec lui,
2°. Foi est due aux acles par-devant notaire. Ces acles
plaident puissamment pour eux-mêmes. Ce n’est pas la
f o r m a l i t é de l'enregistrement qui leur donne une date
certaine; c’est le notaire lui-même. D’après cela la vraie
date est le 9 vendémiaire an 8 : elle a précédé la ré
«
«
«
«
vocation.
�2SZ
( 3 I )
3°. Dans le fa it, le propriétaire de Chadieu avoit en
son pouvoir ma contre-lettre du 9 thermidor an 7 , avant
de signifier une révocation au sieur Mazin. Ce fait a été
expliqué , et le résultat est la preuve de mon assertion.
A cette époque je-n’avois encore rien pris dans les vignes
en question. Les vendanges n’ont été faites qu environ
quinze jpurs après : elles, ne l’ont été qu’après la signi
fication de la révocation. Alors il étoit au pouvoir du
propriétaire de Chadieu de me renvoyer indemne , de
m’empêcher de recueillir une grappe de raisin : que ne
l’a—t-iL fait ? Aujourd’hui je n’aurois pas à l’accuser d’une
perfidie qui saute aux yeux.
40. Le propriétaire de Chadieu apprend lui-même à
la cour que dès le principe il a connu la vente -, que dès
le principe il ne pensoit pas ù en révoquer en doute la
sincérité, mais seulement à rentrer dans les vignes par
la voie du réméré.
En premier lieu, dans sa citation du 6 frimaire an 9 ,
le propriétaire de Chadieu parle de la"vente , et il dit :
L/ VQ UE L LE
ET
VENTE
DEMEURER
AUROIT ÉTÉ
E
à
D O I T CESSER. D ’ A V O I R
COMME
PROCÉDÉ
Y O N E T IS A'I H E Y o y
QU’ I L
MENT
( Fayon)
DU
DÉCLARÉ
NON
A UN
AVENUE ,
SON E F F E T
APRES
COMPTE E N T R E
SON F O N D É
Q ü ’lL
LESDITS
DE POUVOIR , E T
A U R O IT ÉTÉ. PA Y É , S I, PAR L’ÉVENE^
COMPTE
A
FAIRE
E N T R ’ e UX ,
IL
ETOIT
CRÉANCIER.
Ces mois apr.\<i q u 'il 17e laissent aucun doute. Le
piopiietaiie de Chadieu fait entendre bien clairement
que d’abord un compte doit être fait entre lui et m oi,
�( 3 0
qu’il doit m’en payer le reliquat, si je suis créancier, et
que la vente ne doit cesser d’avoir efl'ct qu’après ces deux
préalables ( compte et payement ). Ces expressions et cette
conclusion manifestent une demande en réméré de sa part.
M e jugeant sans doute d’après lui , il craignoit que je
lui opposasse la prétérition de l’cction pour ne l’avoir pas
exercée dans l’année. Pour éviter cet écueil, il a com
pliqué sa demande par des conclusions en compte, pour
avoir à me dire : « Vous me devez telle somme; elle
« se compense tout naturellement avec les 3000 f r . , prix
« de la vente. Vous aviez en main de quoi vous payer
« vous-même ; par conséquent vous n’ètes pas fondé à user
« de la fin de non-recevoir » : tournure superflue. Sans
descendre , le propriétaire de Chadieu pouvoit venir
jusqu’à m o i, me demander honnêtement la remise de
ses vignes. Il l’auroit eue aussitôt, en me renvoyant in
demne, parce q u e , je 11e cesserai de le publier, je n’ai
jamais eu la volouté de les garder. Mais il y a mis cet
antique ton de hauteur; et quand on est exigeant , c’est
alors qu’on obtient moins.
En second lieu , dans son assignation du 26 frimaire
an 10 , le propriétaire de Chadieu dit que je jouis
depuis le 9 thermidor an 7. Pourquoi préciser ainsi
l’époque du conimehcemenl de ma jouissance? Parce qu’il
a eu dès le principe ma contre-lettre , et son double de
la vente du 9 thermidor an 7. Dès que , suivant luimême , j’ai joui depuis le 9 thermidor an 7 , ce ne pouvoil être que comme acquéreur, comme propriétaire.
Je n’avois pas d’autre titre , je ne pouvois pas en avoir
d’autre,
�ZS4
( 33 )
d’autre , parce que e’étoit le sieur Mazin qui administroit
toute la terre de Cliadieu, en vertu de la procuration du
propriétaire.
En troisième lieu enfin , dans le cours de l’affaire , le
propriétaire de Chadieu a conclu subsidiairement a être
admis à exercer la faculté de réméré , en demandant
toujours un com pte, en m’offrant t o u j o u r s de m’en payer
le reliquat. Pourquoi cela encoi'e ? Pai*ce que la vente
est sincère , et q u ’ il visoit seulement à se soustraire à la
fin de non-recevoir.
T out ce que je viens de dire suffit pour repousser ces
reproches de fraude , de collusion et d’abus de pou
voir, que l’on prodigue tant au sieur Mazin qu’à moi ;
ce reproche, surtout au sieur M azin, de m’avoir vendu ,
et à moi d’avoir acheté, moyennant 3000 fr., des vignes
qui produisent plus de 3000 fr. par an.
I<a réputation du sieur Mazin est tellement établie , il
est connu de la cour sous des rapports tels, que les in
jures du propriétaire de Chadieu ne font que glisser.
Quant à m oi, je juge le propriétaire de Chadieu inca
pable d’offenser qui que ce soit.
Pour ce qui est de la valeur de ses vignes, qu'il porte
d’abord à plus de 3000 fr. de revenu , et puis à 30000 fr.
de principal, et puis encore à 6ocoo fr. , et enfin dans
les rues de lliom ù 80000 f r . , il s’est bien gardé de dire
qu’elles sont emphilhéosées moyennant une portion de
fruits, et que dès-lors elles sont en mauvais é ta t; il s’est
bien gardé de dire que la quantité en est beaucoup moin
dre que celle qu'il publie : enfin la vraie mesure de celte
valeur est dans mon inscription aux hypothèques, en date
E
�i^S*
( 34 )
du premier nivôse an 8 , ou je demande pour prix prin
cipal, loyaux coûts et dommages-intérôts, en cas d’évicii >n t seulement une somme de 4y5o fr.
Je termine ce mémoire par discuter les motifs exprimés
au jugement dont est appel -, ils sont au nombre de dix.
Certains sont indifférons, d’après ce que j’ai dit plus haut.
Par cette raison , je les abandonne à eux-mêmes.
J ’ai bien de la peine à concevoir où les premiers juges
ont trouvé que la vente des vignes en question a été faite
sans prix.
Il est pourtant vrai qu’ils me jugent débiteurs de 3713 f . ,
au temps de la vente, sur les billets Duchesne.
Mais, i°. j’ai prouvé jusqu’à l’évidence que j’ai surpayé
le montant de mes deux billets.
2°. D ’après ma contre-lettre du 9 thermidor an 7 , tout
étoit lié ; les deux affaires n'en étoient plus qu’une. Un
compte devoit être fait pour vérifier si j’étois ou non
créancier: ce compte devoit comprendre tous mes frais
de procédure, toutes mes fournitures, tout l’argent que
j’avoisdonné. Ilfalloit donc faire préalablement cecompte.
Jusque-là j’étois acquéreur. Tous nos anciens auteurs
ont di t , et tous les tribunaux ont constamment jugé,
qu’une action en réméré est une affaire d’argent ; que le
vendeur doit commencer par des offres réelles, et que sans
cela il est non-rccevable. Le nouveau Code civil, art. 1673,
porte : « Le vendeur qui use du pacte de rachat, doit retn« bourser, non-seulement le prix principal, mais encore
« les f r a is et loyaux coûts de la vente , les réparations
« nécessaires, et celles qui ont augmenté la valeur du
cc fonds, jusqu’à concurrence de cette augmentation. I l
�C 35 )
v ne peut entrer en possession qu après avoir satisfait
« à toutes ces obligations. »
Eu cet état, outre la fin de non-recevoir, qui est cer
taine, il suffisent que le propriétaire de Chadieu n’eût pas
satisfait à ces obligations, il suflisoit qu’il y eût doute si
j’étois ou non rempli, pour éconduire le propriétaire de
Chadieu, pour l’empêcher d’entrer en possession de ses
vignes. Jusqu’à un compte fait, suivant ma contre-lettre,
la vente a un prix; ce prix est la somme de 3000 fr. , et
le motif des premiers juges porte à faux.
Dans un autre motif, les premiers juges me font faire
l’aveu que le délaissement des vignes en question 11e m’a
été fait que pour me servir de gage et de nantissement
pour la somme de 3000 fr.
Je n’étois pas à l’audience; je n’ai pas fait dire cela:
mais, l’eussé-je d it, cela n’autorisoit pas les premiers
juges à me condamner au désistement, sans rembourse
ment préalable de tout ce qui m’est d û ; cela les autorisoit encore moins à me condamner à rendre compte
des jouissances et dégradations.
Pour ce qui est des dégradations, je n’en ai point com
mis, ni pu en commettre; les vignes en question sont
cultivées par les baillistes à perpétuité, et je n’y ai paru
que pour prendre la portion de fruit revenant au pro
priétaire.
Quant aux jouissances, je n’en devois pas même, dans
le cas où le propriétaire de Chadieu auroit été à temps
pour réclamer ses vignes.
■»1
•
Ji.n p re m ie r lieu , q u a n d j’aurois dit q u e j’ai pris ces
v ig u e s en ga g e o u antichrèse p o u r les 3000 fra n c s, cela
E 2
�•
cttV
. . ( . 3 6 )
ne seroit pas en opposition avec mon contrat d’acquisi
tion. A proprement parler, une vente sous faculté de ra
chat, n’est qu’un contrat d’antichrèse ; pendant sa durée
l’acquéreur fait les fruits siens pour lui tenir lieu des
intérêts de son argent, et le vendeur peut, comme dans
l’antichrèse, rentrer dans son fonds, en rendant le prix
de la vente et les loyaux coûts : les effets de l’un et
l ’autre contrat sont A peu près les mêmes. Voilà dans
quel sens j’aurois parlé devant les premiers juges : mais
cela ne change pas l’état de la question ; elle est toujours
la même.
En second lieu , en considérant comme anticlirèse la
vente que m’a faite le sieur Mazin, il ne s’en suivroit
pas que je fusse comptable des jouissances.
L ’article 2089 du nouveau Code civil porte : « Lors« que les parties ont stipulé que ¡es fr u its se compen« seront avec les intérêts ou totalem ent, ou jusqu’à
« une certaine concurrence, cette convention s'exécute
« comme toute autre qui n’est point prohibée par les
« lois. »
Dans l’ancien droit il y avoit même disposition.
Cujas, sur la loi 17, au tit. de usuris, observe : « quœ
* conventio licita est, etia/nsi pluris domus locari so« leat , quàm cjjîciat legitimarum usuranun ratio ,
« VF,T. U T F U N D I O P P I G N E U A T I F 1U JC T US O M N E S V J C E
a U S U R A R U J I C R E D I T O R F E R C 1 P I A T , QU Æ C O N V E x V H O
«
J’ R O P T E R
« SA E S T . . .
«
TI U- V.
INCERTUM
ET
EVENTUM
FRUCTUUM
TROTTER INCERTUM
ADMIS-
FRUMENTI
I>RE-
»
Dans la cause il faudroit donner à la vente en question
�( 37
)
au moins l’effet de l’antichrèse, avec la stipulation que
les fruits des vignes balanceroient les intérêts des 3000 f r .,
, puisque ces intérêts étoient exorbitans, puisque ces inté
rêts étoient de 720 francs par an, et que dans les années
communes, ces vignes ( données à perpétuité à moitié
j r u i t s , passibles de la retenue du cin quièm e), sont d’un
revenu au-dessous de la médiocrité. En réduisant une
vente sous faculté de rachat, à la valeur d’ unç ant’. clirese,
avec la condition que les fruits seraient absorbés par les
intérêts du prix, je 11e ferois pas de tort au propriétaire
de Chadieu ; mais alors point de jouissances avec de
mandes. Mais, au reste, la vente que m’a faite le sieur
Mazin n’est pas un contrat d’anticlirèse, c’est une vente
simple, suivie de faculté de rachat.
Ce seroit en pure perte que l’on m’opposeroit ici ma
lettre du 7 vendémiaire an 8 au propriétaire de Chadieu,
où je lui parle d’avances de deux mille francs et p lu s ,
où je lui dis que je veux m’en faire la retenue sur la
vente de la récolte de Chadieu pour l’an 8.
i°. D e u x mille fran cs et plus ne disent pas qu’il no
me fût dû qu’en tout 2000 francs; le plus est indéfuii,
et il faut toujours en venir à la réalité du débet.
2°. Je l’ai déjà dit, et je ne saurois trop le répéter,
au 7 venderniaiie an 8 , je navois encore rien perçu
dans les vignes vendues; je ne devois y prendre qu’aux
vendanges qui approchoient. Alors le propriétaire de
Chadieu étoit dans le temps du réméré; il pouvoit
1 exercer ; il pouvoit 111’empêcher d’entrer en jouissance
coiporelle; pour cela il n’avoit qu’a inc rembourser; en cet
instant ce qui m’étoit dû n’étoit véritablement qu’avance:
ainsi tout se concilie.
�C 3« )
3°. L e propriétaire de Chadieu ne m’auroit-il dû que
2000 ir. et plus, la vente des vignes auroit toujours eu
un p rix ; c’est-à-dire, 2000 fr. et plus. Suivant le Code
c iv il, suivant l’ancien droit, et suivant la jurisprudence
de tous les tribunaux de France, l’acquéreur sous fa
culté de réméré , ne peut être désisté avant qu’il ait
été remboursé intégralement : falloit-il au moins que l’on
me rendît tout ce qui m’étoit dû ; jusque-là je pouvois
et devois garder les vignes.
40. Enfin, je porte tout au pis aller : j’admets pour un
moment que par un compte il fût vérifié qii’il ne m’est
pas dû tout à fait 3000 fr. : mais qu’en résulteroit-il ? Il
en résulteroit que je devrois seulement l’intérêt du déficit
des 3000 fr* 5 mais je n’en serois pas moin s acquéreur
jusqu’à l’apurement du compte ; et après cet apurement,
si j’étois débiteur, je 11’en serois pas moins toujours
acquéreur , sauf à payer : mais je n’en suis pas réduit à
cette extrémité.
Il
ne sert à rien que les premiers juges , dans certaine
partie de leur jugem ent, me fassent dire que je suis
convenu que le prix exprimé en la vente est une avance
que j’ai faite pour le .sieur de B a t z , pour le compte du
sieur JSal/tay. Il est étrange d’en conclure que cette dé
claration détruit la mention fa ite dans l'a cte, que te prix
avoit été présentement payé comptant audit M azin .
i°. Lors de la vente du 9 thermidor an 7 , j’en ;ii pnvé
le prix présentement au sieur IVIa/.in , en me chargeant
de la dette des 3000 IV. et des intérêts envers le sieur
D om crgu e, prêteur.
2°, C^uü lesicu r Mazin ait employé ces 3000 fr. ou
�( 3 9 )
pont le sicuv de Bat/, ou pour le sieur N atliey, cela est
parfaitement égal , puisque l’on est obligé de convenir
que cette somme a été touchée parle sieur M azin , puisque
l’on alloue la somme en soi , puisque l’on en iail la dé
duction sur ce que l?on prétend que je dois.
3°. Qu’est le sieur Natliey dans l’affaire ? Qu’est le sieur
de Batz ? Tout le monde ne sait-il pas que le véritable
propriétaire de CUudieu est le sieur de Batz , qui pro
mène cette terre sur plusieurs têtes étrangères pour la
mettre à couvert de la prise de ses propres créanciers.
L e sieur Natliey n’est qu’un propriétaire postiche , qui
n’a jamais rien su et qui ne saura jamais rien exactement,
ni du passé, ni du présent, ni de l’avenir, sur son appa
rente propriété.
A u reste, il m’est très-égal de voir le sieur Natliey
ou le sieur de Batz jouir impunément de la terre de
Chadieuen face des créanciers du sieur de B:ttz : cela ne
me concerne pas. Il me tarde seulement de n'avoir plus
rien à démêler avec le propriétaire de Chadieu. Pour
cela je fais le sacrifice des moyens par lesquels je pourrois l’empêcher de rentrer dans les vignes en question.
Je lui abandonne ces vignes à la charge par lui de me
renvoyer indemne; c’est-à-dire, à la charge par lui de
me payer , i° . la somme de 177 fr. 85 cent, qu’il me
doit , ainsi que je la i établi dans la partie de la cause
sur les billets Duchesne ( et par - dessus tout de me
rendre mes billets, car je liens beaucoup à ce point ) ,
c* .................... ..................................................... 177 f. 85 c.
2°. Celle de’3000 f r . , prix de la ven te, ci 3000
»
3T77 f. 85 c.
�( 40)
D e l'autre -part.............................. 3 177 f 8 5 c
3°. Celle de 235 fr 7 5 cent, pour loyaux
coûts de la vente, ci........................................ 235 75
40. Celle de 9 fr. pour frais d’une ins
cription aux hypothèques , c i ....................
9
»
5 °. Celle de 12 fr. 25 cent, pour notifi
cation de ma vente aux colons à perpé
tuité , ci . . . . . .
........................................
T o t a l .............................
12 25_
343 4 f - 85
c-
A ce consentement j’ajoute que je donne au proprié
taire de Chadieu un délai de deux mois pour me rembourser : mais j’y impose la condition qu’avant de mettre
le pied dans les vignes en question , il me désintéressera
entièrement. S’il ne le fait pas dans cet intervalle, je
conclus à ce qu’il soit dès à présent déchu de tout espoir
de retour.
FA Y O N .
g
o
u r b e y r e
.
A RIOM; de l’imprimerie de L andriot , seul imprimeur de la
Cour d'appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Fayon, Jean-Antoine. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Fayon
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
ventes
immeubles
émigrés
faux
créances
vin
billets au porteur
Batz (Jean-Pierre « baron » de)
arbitrages
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire signifié, pour Sieur Jean-Antoine Fayon, notaire public, habitant du bourg des Martres-de-Vayre, appelant de jugement rendu au tribunal civil de l'arrondissement de Clermont-Ferrand, le et demandeur en opposition à arrêt par défaut ; contre Sieur Michel Duchesne, propriétaire, habitant de la ville de Paris, et sieur Etienne-Jean-Louis Nathey, négociant suisse, habitant de la ville de Nyon, canton du Léman, propriétaire de la terre de Chadieu, canton de Monton, arrondissement de Clermont, intimés et défendeurs.
Annotation manuscrite.
Table Godemel : Vente : 8. la vente d’immeubles consentie, le 9 thermidor an 7, à Fayou, par Mazin agissant comme fondé de pouvoir de Nathey est-elle nulle pour cause de surannation et de révocation de la procuration, comme faite sans prix, et enfin comme acte purement pignoratif ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1798-Circa An 12
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1608
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0413
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0423
BCU_Factums_M0412
BCU_Factums_G1414
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_G1609
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53282/BCU_Factums_G1608.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Corent (63120)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
Batz (Jean-Pierre « baron » de)
billets au porteur
Créances
émigrés
Faux
immeubles
ventes
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53283/BCU_Factums_G1609.pdf
b019c70e9e462f4329640db1a61a089d
PDF Text
Text
•
''o L f
S£2K33I
COUR
MEMOIRE SIGNIFIE,
SERVANT
DE
D ’A P P E L
RÉPONSE,
SÉANT
A R I O M.
POUR
Sieur M
i c h e l
DUCHESNE,
/
propriétaire,
habitant de la ville de Paris, et sieur E t i E N N E J e a n - L o u i s N A T T H E Y , négociant suisse,
habitant de la ville de N y o n , canton du Lém an,
propriétaire de la terre-de Chadieu, canton de
M onton, arrondissement de Clermont, intimés
et défendeurs;
C O N T R E
Je
a n
- A
n t
oin
e
F A Y O N , notaire public,
habitant du bourg des M artres - de - Vayre ,
appelant de jugem ent rendu au tribunal civil
de l'arrondissement de Clermont - Ferrand ,
le 9 fructidor an 1 1 , et demandeur en oppo
sition.
SIon n’avoit a repo ndr e au m ém oire du sieur F a yon
que po u r le p u b l i c , un m o t , un seul mot suffiroit :•
N atthey plaide- N a tthe y a le malheur de plaider c o n tre
le sieur F a y o n .
A
'
■
•» h
V *
�Mais Natthey et le sieur Fayon sont en présence de
la cour cl’appel séant à R i o m , et les tribunaux ne jugent
point les réputations, mais les faits, et par les lois.
L es faits? le sieur Fayon les a défigurés dans son m é
moire*, il faut les rétablir. Les lois? elles le condamnent;
il sera facile de le démontrer.
Suivons le sieur F a yo n , dès son début. J 'a v o is (d iti l , parlant de sa personne,) la confiance de la f a milia
de T an ne , propriétaire de Chadieu. ( pag. i re. ).
L e public sait ce qui en est résulté, et pour le sieur
F a yo n , et pour cette malheui’cuse famille.
C hadieu est a ujou rd'hui su r la téie du sieur N a tthey
( pag. 2 ) ; m ais le véritable propriétaire est le sieu r de
B a t z ( pag. 39 ).
L e véritable propriétaire de Chadieu est Natthey. S ’il
subsiste entre Natthey et le sieur de Batz des transactions
p rivée s, la loi qui est devant tous, pour maintenir la
liberté civile et la libre disposition des propriétés, et qui
prescrit les formes de ces sortes de transactions, entend
par conséquent qu’on les respecte : déjà elle a su les faire
respecter à l’égard du sieur Natthey m êm e, et à la par
faite connoissance du sieur Fayon dépositaire infidèle
des jugemens qui le constatent. Toutefois les sieurs de
But/, et Natthey réunis déclarent (pie, jusqu’à présent, il
n ’existe entr’e u x aucune convention qui n’établisse le
sieur Natthey véritable propriétaire de Chadieu. L e sieur
F ayo n , qui sait, sans doute mieux qu’eux-mêmes, leurs
r e l a t i o n s , se traîne sur les traces aujourd’hui si décriées
de ceux dont il emprunte trop tard les manières et le
langage ; et q u i , au temps de la te rreu r, parvinrent
�C3 )
ainsi à faire séquestrer Chadieu. M ais, dès-lors, l’admi
nistration , et ensuite les tribunaux , ont reconnu et
déclaré le sieur Nattliey véritable -propriétaire de L ha dieu. Vainement le sieur Fayon clierche-t-il à commetti-e
de nouveau les sieurs de Batz et Natthey avec les agens
du fisc.
V o n a eu besoin de m oi ( c’est encore le sieur Fayon
qui parle de lu i-m ê m e ), et j ai ele assez hein eu x pour
rendre des services au véritable propriétaire de Chadieu :
à D ie u n e plaise que f a j e la pensée de les détailler i c i ;
on les nierait ( pag. 2 ).
E t pourquoi les nieroit-on ? A près le bonlieur d’obli
g e r , quoi de plus d o u x , quoi de plus satisfaisant, que
d’avouer des services reçus? N ’e s t- c e pas se glorifier
d’avoir inspiré la bienveillance et mérité des sacrifices?
Ce que l’on voudroit pouvoir dissimuler et aux autres
et à s o i-m e m e , ce sont les mauvais procédés qu’on
éprouve; mais ce langage peut-il etre entendu du sieur
F a yo n ? Q u ’au surplus il fasse connoître au sieur de Batz
les services qu’il prétend lui avoir rendus, et le sieur de
Batz se fera un devoir de les proclamer. En attendant
cette révélation, le sieur de Batz déclare ne connoître
encore du sieur F ayon, à son égard , que les plus détes
tables procédés; à moins que le sieur Fayon ne mette
en ligne de compte des services qu’il sous-entend, toutes
les calomnies qu’il n’a pas répandues , et tout le mal
qu’il auroit pu faire, et qu’il n’a pas fait au sieur de Batz.
y iu moins ( ajoute le sieur Fayon ) n \n n o it-o n pas dû
chercher ù ternir ma réputation , à dénaturer les fa its
et à répandre su r rugi t amertume et la calom nie. ( p. 2. ).
A 2
�1
/
C4 )
C alom nier le sieur Fayon ? tern ir sa réputation ? Les
sieurs de Balz et Natthey ne l’ont pas entrepris; et le
sieur Fayon ne cherclieroit-il pas à se vanter quelque
p e u ? Quant à Vam ertum e, c’est le sieur Fayon qui en
regorge, et q u i, en imprimant son m ém oire, en a voulu
prendre le public à témoin.
D a n s la cause (c o n tin u e -t-il, ibid. ) , f a i su r mon
adversaire le très-grand avantage de in en être rap
porté à trois juriscojisu ltes de la ville de R io m , éga
lem ent recom m andables, et p a r leur intégrité inaltéra
ble , et p a r leurs comzoissances profondes.
A v an t d’aller plus loin , il faut savoir que c’est le
sieur de Balz q u i , au nom du sieur Nattliey , et p o u r
éviter le triste éclat d’une plaidoirie sur des faits aussi
scandaleux que ceux sur lesquels repose cette contesta
tion , avoit précédemment, aux premières audiences de
Clerm ont, fait proposer au sieur Fayon d’en finir par
un arbitrage, et dans le silence du cabinet, chez M . Boirot.
L e sieur Fayon préféra de tenter la fortune et il suc
comba. A R io m , c’est encore le sieur de Batz qui renou
vela par écrit les mêmes propositions ( le sieur Fayon
en convient dans son m ém oire, p. 1 5 ) , et qui les déposa
entre les mains d’un juge très-estimable. Mais pendant
le cours de quatre mois , le sieur F a y o n ne daigna répon
dre qu’au moment où ¡1 ne pouvoiL plus luir un arrêt
défin itif, dont le jour étoit déjà fixé par la cour d’appel.
Ces arbitres ( poursuit le sieur Fayon ) avaient tout
ent indu ; ils allaient p r o n o n c e r, lorsque p a r un tra it
q u i heureusem ent a peu d'exem ples , il a rompu l'arbilrage : il est très-om brageux j il ( le sieur de Balz )
�( 5 )
leur a J'ait Voutrage de leur notifier une révocation ,
com m e s i y envers des hom m es délicats , la m an ifesta
tion du moindre doute ne suffisait pas pour J'aire
rejeter avec mépris une confiance qui n'est pas en
tière ( ibid. ).
L ’on voit avec quel travail le sieur Fayon clierclie a
flatter des hommes qui n’ont que faire (le son suffrage.
V ou s croiriez, à l’en te n d r e, qu’ils avoient tout v u ; mais
ils en auroient eu pour plusieurs mois en core, puisqu’à
l ’égard des comptes, il s’agissoit, suivant le sieur F a y o n ,
de voir toute sa comptabilité avec le sieur M azin ; com p
tabilité étrangère au procès actuel, et dont le résultat
sera exposé ci-après.
E t , à l’égard de la vente qui est l ’objet réel et prin
cipal de la cause, dès la première séance les arbitres en
avoient démêlé le vice et les antidates, et l’avoient fran
chement annoncé au sieur Fayon.
Il est vrai qu’alors il prit le généreux parti de renoncer
au point insoutenable de sa cause, la validité de sa v e n te ,
et de demander seulement à être renvoyé indemne.
Il ne sagissoit plus que de régler avec le sieur Fayon
un co m pte; mais le seul compte qui lut lié à la cause,
et qui eut été soumis au tribunal de première instance
k C lerm ont; savoir, le payement en deniers ou quittances
des deux billets au porteur souscrits par le sieur Fayon
au profit du sieur Duchesne, fondé de pouvoirs du sieur
Nalthey-, et l’emploi d’une somme de 873 francs, laissée
entre les mains du sieur Fayon , pour acquitter des gages
de domestiques, el autres menus objets exprimés et
�(6 )
limités dans le traite du premier nivôse an 7. Mais on
va voir que le sieur F a y o n , sous l’apparence de faire
l ’abandon libéral de la vente dont on p a r le , n’avoit en
vue que de se faire adjuger les jouissances qu’il avoit si
indûment perçues depuis six années , et de prolonger
les débats, de manière à atteindre et surprendre encore
les jouissances, alors prochaines, de la septième année.
E n conséquence, il prolongea jusqu’à trois semaines,
des débats qu’ une seule séance auroit dû terminer.
Dès qu’ il eut gagné l’époque où il éloit devenu impos
sible de faire juger avant les vacances, il se p e rm it, et
alors sans mesure, un genre d’argumentation digne d’un
genre de réponse incompatible avec le respect dû à soim e m e , et à des arbitres tels que ceux devant lesquels on
étoit. L e sieur de Batz en prévint pour lui seul le sieur
Fayon , qui en fit éclat ; au même instant l’arbitrage
dut cesser. Mais le sieur Fayon avoit rempli ses vues;
011 revint à l’audience, il se garda d’y faire défendre, et
laissa prendre contre lui un arrêt par défaut. Cet arrêt
renvoyoit la cause à trois m ois; et comme dans cet inter
v a lle , survenoient les vendanges, il a perçu, selon ses
désirs, la septième année des jouissances.
Quant à Yoittrage qu’il prétend avoir été lait aux
arbitres, en leur signifiant un acte do révocation, c’est
là une véritable dérision. O11 11e sait vraiment à quels
sots ou à quels ignorans le sieur Fayon adresse de sem
blables paroles; mais ceux h qui cet acte fut notifié savent
qu’ une instance suspendue par un acte public 11e.peut être
reprise sans une révocation préalable, et sa notification.
�(7 )
D ’ailleurs ils n’ont pu se dissimuler que ce n’a été que
par respect pour eux que le sieur de Balz a fait cesser
leur arbitrage. Passons aux faits de la cause.
•
F A I T S .
P a r acte sous signature p riv é e , du premier nivose an 7 ,
M ichel D u ch esn e, muni des pouvoirs de Nattliey, pro
priétaire de Chadieu , vendit au sieui F a jo n quelques
arrérages d’anciens revenus de C h ad ieu , et une paitie
de revenus à échoir en l’an 7 , pour 6799 fr.
A u prix des denrées, et d’après les pancartes de cette
même é p o q u e, il lui étoit fait remise ou alloué pour in
demnité de l e v é e , plus de 900 francs.
Il lui fut également fait une remise plus considérable
sur le prix des vins de Chadieu. Il les eut à 2 liv. 1 sou
le p o t , tandis que le sieur Mazin avoit pu les vendre au
prix de 3 livres à de simples marchands. O n a sur ce
fait une lettre du sieur Mazin.
Pourquoi ces sacrifices? Parce qu’au milieu des circons
tances publiques d’alors, tout se réunissoit pour les con
seiller. L a Suisse étoit devenue le théâtre de la g u e rre,
le sieur Nalthey devoit être inquiet; et le sieur de Batz,
proscrit en France, ne pouvoit plus surveiller ni défendre
Chadieu. A v e c des sacrifices considérables, il étoit du moins
permis d’en espérer exactitude et fidélité; mais, à aucun
p r ix , le sieur Fayon ne devoit avoir ni l’une ni l’autre,
ainsi qu’on va l’exposer. ,
Sur les 6799 francs, le sieur Fayon 11c paya comptant
que 760 francs; il fit du surplus deux billets au porteur,
�(8)
l’un de 4740 francs, payable au 20 pluviôse suivant, et
l'autre de 460 francs, payable au 10 messidor; et on laissa
entre ses mains la somme de 873 francs.
Jusque-là, de part et d’autre, on est d’accord sur les
faits.
L e sieur Fayon ne paya point aux échéances. L e 27
joluviôse il se contenta de donner un à-compte de 1477 f. ;
et au 10 messidor, il ne paya ni le billet précédent,
ni celui qui venoit d’écheoir.
Comm e il s’annoncoit sans cesse à Paris ( on a ses
lettres sur ce fait essentiel ) , on y conservoit ses billets
pour les lui remettre. Il les désira en A u v erg n e ; on
les adressa à M . Pages : mais le sieur Fayon 11e les paya
pas plus en A u vergn e qu’ù Paris.
L e sieur de Batz tenta vin voyage pour savoir s i , en
person n e, il scroit plus heureux vis-à-vis de M . Fayon.
Mais à la première entrevue il fut arrêté en dînant à
Clcrmont avec ledit sieur Fayon.
Quelle étoit alors la situation du sieur Fayon à l’égard
du sieur N a lth ey?
L e sieur Fayon devoit par scs billets nu por
teur la somme d e .................................................... 5190 f.
Il avoit payé chez le sieur Busclie . . . . 1477
Il restoit débiteur d e ......................................... 3 7 x3 iE t ces billots étoient à la disposition du sieur de Balz.
L e sieur Fayon rem it, le 9 thermidor an 7 , 3000 f.
et restoit encore débiteur de 7 13 francs; cependant, et
comme si cette somme de 3000 francs étoit une avance
de sa part, il se fit passer en payement, ( mais bien pos
térieurement ),
�.< Z Ï (
(9)
térieu rem en t),p ar le sieur M a z in , une vente de quatrev in g t-c in q œuvres et demie de vigne dépendantes do
C hadieu, et situées à Corent.
Ici tout devient remarquable. Cette vente fut faite
entr’eux , sous signature p r i v é e , et porta quittance des
3000 francs qui en étoient le prix. Mais par contre-lettre
du même j o u r , le sieur Fayon déclara que cette somme
a voit été empruntée par Mazin et lu i, sur lettre de change,
à raison de deux pour cent par mois d’escompte.
Il ajouta que, dans le cas où le remboursement aurait
lieu , Mazin seroit par lui garanti du montant de la lettre
de change.
D e là suit :
i° . Que le sieur Fayon q u i, à l’époque delà prétendue
vente ,étoit débiteur incontestable, par billets au porteur,
de la même somme de 3000 francs, et en outre de 713 f.
s’érigeoit de son chef en créancier;
20. Que pour se payer de sa fausse créance , il se faisoit
vendre quatre-vingt-cinq œuvres de v ig n e , ù 36 francs
l ’œ u v r e , tandis qu’elles valoient à Corent de 4 ù 5 oo f.
l’œ uvre; et acquérait, avec 3000 francs de ca p ital, des
fonds qui ont d o n n é , en certaines années de sa jouis
sance, plus de cent louis de revenu;
30. Q u’ il s’affrauchissoit même de payer, et ce vil p r ix ,
et le restant de ses propres b illets, dont cette même vente
le supposoit libéré.
V o ilà d’habiles combinaisons!
A d i r é vrai , la contre-lettre du sieur Fayon exprinioit
une iaculté de rém éré , mais seulement pour l’espace
B
�v w ..
( 10 )
d’une année, et toujours à la condition de lui payer
3000 francs.
Ici nouvelles combinaisons.
L e sieur Fayon ne pou voit pas supposer que dans un an
la position fâcheuse des sieurs de Batz et Natthey pût
ch a n g er, et alors ils seroient encore à la merci du sieur
Fayon!
E n recevant 3000 francs qu’il n’avoit pas déboursés,
et en touchant une année de revenu, non-seulement le
sieur Fayon se seroit débarrassé de payer les 3713 fr.
de ces billets au p o r te u r , mais encore il se les seroit fait
p a y e r , comme si au lieu d’en être déb iteu r, il en eût
été créancier ; ce qui donneroit une différence en sa fa
veur de 9 à 10000 francs; e tj dans sa pensée, telle devoit
être sa moindre chance et le plus bas prix de ses heu
reuses conceptions!
Q uel parti prendre dans de pareilles circonstances,
et contre un pareil homme ? Ecouter la pruden ce, ne
rien demander , et espérer de meilleurs temps.
En e ffe t, on pouvoit présumer à l’égard des malheu
reux proscrits quelque retour de cette éternelle justice
dont on voit qu’il ne faut jamais abandonner l’id é e , et
q u ’alors on pourroit tout espérer d’elle et des tribunaux;
q u e , môme cil laissant s’écouler le terme du ré m é ré ,
on jiuroif;\ répondre qu’il nuroit été d’avance opéré par
le fait, puisque d’avance le prix en ¿toit dans les mains
du sieur Fnyon , acquéreur.
O11 observoit aussi q u e , par la même raison , la vente
clle-mème auroit été fuite sans prix ; q u e , sous deux
�( 11 )
autres rapports, elle seroit également frappée de nullité,
i°. parce qu’en vendant les meilleures parties du-vignoble
de Corent au prix de 36 fr. l’œ u v re , lorsqu’elles se vendoient à 400 et à 5oo fr. l’œ u v r e , le sieur Mazin avoit
excédé ses pouvoirs, puisqu’ils étoient soumis a la con
dition expresse de ne vendre qu 'a u m eilleur p rix pos
sib lej et 20. que Nattliey ne ratifiant point pareille vente,
elle auroit, dans tous les sens, ete faite sans le consente1ment du propriétaire.
C ’est, en eiTet, après sept années de patience fo rc é e ,
ce qui enfin a été jugé et prononcé contre le sieur Fayon
par le tribunal de Clermont.
Ajou tez-y que le même tribunal, après avoir reconnu
les antidates de cette v e n t e , l’a même qualifiée def r a u
duleuse j et vous v e r r e z , chose rai’e , la réunion sur un
seul acte de tous les vices par lesquels on peut attaquer
ces sortes d’actes; et vices, dont un seul sulïit pour faire
anéantir tout contrat qui en est entaché.
Il est donc arrivé qu’au premier instant où le sieur
de Batz a pu paroître sans courir le risque de la vie ou
de la lib erté, et sans faire courir au sieur Nattliey celui
des confiscations arbitraires , Nattliey et Ducliesne se sont
présentés devant les tribunaux ; N attliey, pour rede
mander ses vignes , et Ducliesne le payement des billets
au porteur. Suivons la procédure.
Après avoir vainement épuisé les voies de conciliation
devant le juge de paix pendant tout l’un 9 , Nattliey
demanda au sieur Fayon , par exploit du 26 frimaire
an 1 0 , lo désistement des vignes, cl la restitution des
jouissances.
B 2
�n i* ,
«*•>
( 12 )
Par autre assignation du 26 nivôse an 10 , le sieur
N a tth ey, en exécution des deux traités du 1 e1'. nivôse
an 7 , demanda au sieur F a y o n , i°. le compte des re
venus de l’an 7 , que le sieur Fayon s’étoit chargé de
percevo ir, et dont il devoit com pter, soit en p lu s j soit
en m oins ( ce sont les termes du traité ) ; 20. le paye
m ent du reliqu at de la somme de 873 .fr. laissée dans
les mains du sieur Fayon par le même tr a ité , et dont
le sieur Natthey sa v o it, et a aujourd’hui la preuve que
le sieur Fayon n’avoit fait ni pu faire l’emploi total ;
offrant toutefois dans le cas o ù , p a r tévénem ènt du
compte y il se trouçeroit redevable dudit F a y o n , de le
p ayer su r le cham p.
Par autre assignation du 28 nivôse an 10 , le sieur
Duchesne demanda au sieur Fayon le solde des billets
de 5190 fr. souscrits à son profit par le sieur F a y o n , le
Ier. nivôse an 7.
L e sieur Fayon répondit, dans une écriture en défense,
signifiée le 16 ventôse au 10 ( par inadvertance sans
doute, car il a bien changé de langage depuis ) , qu’il
n’avoit rien à d ém ê ler, ni aucun compte à faire avdc le
sieur Natthey; qu’il n’avoit pas été son homme d’a lia ires,
ni régisseur de Chadicu ; q u e , d’un autre côté, les vignes
lui avoient été vendues , et qu’il 11’enteudoit pas s’en
désister.
A Duchesne , le sieur Fayon répondoit que les billets
appartenoient non h lui D u ch esn e, mais ¿\ Natthey , à
qui lui Fayon en avoit payé le montant.
A lo r s , et comme tous effets de cette nature d o iv en t,
faute du payement définitif, remonter à leur .source, les
�m
(* 3 )
billets du sieur Fayon , faute par lui de vouloir les acquit
ter , durent revenir au sieur N atth ey, de q u i , ou de son
fondé de p o u v o ir , ils étoient originairement émanés.
Cependant, comme les mêmes 3000 fr. ne pouvoient pas
Être une avance du sieur F a y o n , pour'laquelle) on eut
dû lui donner des vignes en payem en t, ainsi qu’il le dit
dans son mémoire ( page 5 ) , ni en même temps la libé
ration des billets au porteur par lui souscrits au profit
du sieur D u c h e sn e , la connexité des deux causes étoit
évidente. L e sieur Nattliey demanda leur jonction', et
d’être subrogé
D uchesne, qui-, lui aussi, le requéroit.
Cette jonction et la subrogation furent prononcées
par jugement contradictoire du tribunal de Clerm ont,
le 14 nivôse an 11.
•« ’ '*
*
<t
< Enfin , le sieur Fayon fut condamné sur touk les
points en première instance, le 9 fructidor an 1 1 , par
le jugement dont il a fait a p p el, et dont voici les prin
cipaux motifs et les dispositions :
: « Attendu que Fayon étoit débiteur lors de la vente,
« au lieu d’être créancier, il s’en suit que la vente a
« été faite sans prix ;
« Attendu d’ailleurs que toutes les circonstances font
« présumer la fraude, en ce que, 1°. la procuration
« donnée par Natthey à M azin , le 7 ventôse an 5 ,
« imposoit la condition expresse à Mazin de vendre
« au meilleur p r ix ; en ce que la vilité du prix
«
«
«
«
est
notoirement connue....; en ce q u e , 2°. d’après les conditions imposées dans la procuration, Mazin devoit
se transporter chez tout notaire pour passer acte de
vente; et q u e , d’après cette condition, la vente dont
»
�( 14 )
« il est question ne pouvoit pas être sous seing p rivé;
« en ce que la révocation de la procuration a été noti
ce fiée parNatthey le 14 vendémiaire an 8, et enregistrée
a le même j o u r , et que l’enregistrement de la v e n te ,
« qui est du 23 du même m o is, est postérieur de neuf
« jours à la révocation de la procuration ; 30. en ce que
« l’aveu fait à l’audience par F a yo n , que le délaissement
« des quatre-vingt-cinq œuvres de vigne ne lui a été fait
« que pour lui servir de gnge et de nantissement de la
« somme de .3000 francs, et qu’il est établi que lui-même
« en étoit débiteur ; 40. en ce qu’il a été aussi avoué par
« les parties que la condition de celte vente étoit la
« faculté de rém éré, et que la condition du réméré est
« reconnue être du même jour que la vente notariée ;
« 5 ?. en ce que l’aveu aussi fait à l’audience par F ayon ,
cc que la somme portée en la vente a voit été par lui
« avancée pour le citoyen de B a tz, pour le compte de
« Nutthey, et que cette déclaration détruit la mentior*
« dans l ’acte que le prix avoit été présentement payé
k comptant audit Mazin.
« En ce qui touche les saisies-arrêts faites entre les
« mains de Fayon ;
« Attendu qu’à l’époque de la vente il n’ayoit été fait
« aucune saisie entre ses mains, le tribunal , sans s’ar« rêter , e tc ., condamne la partie de Rousseau ( Fayon )
« à faire raison à celle de Jeudi ( N a ü h e y ) du montant
« desdits billets, sous la déduction de la somme do 1477 fr.
« payée par le cit. Busche, de celle de 3000 f r . , énoncée
« en la vente avoir été remise au cit. M azin ; en con« séquence popdanmç la partie de Rousseau à payer à
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
( i 5 )
celle de Jeudi la somme de 713 francs, restée due sur
les deux billets , ensemble les intérêts depuis qu’ils
ont eu lieu ;
« E t faisant droit sur la demande en remise de quatrevingt-cinq œuvres de vign es, le tribun al, sans avoir
égard à la vente, laquelle il déclare nulle , comme non
faite et avenue, condamne la partie de Rousseau à les
remettre et délaisser à celle de J e u d i , et à en cesser
la jouissance ; comme aussi condamne ladite partie de
Rousseau à rapporter et restituer à celle de Jeudi le
«
»
«
«
«
«
montant des jouissances par elle touchées et perçues
depuis son indue détention, ensemble les dégradations
et détériorations qu’elle peut y avoir commises, et c e ,
à dire d’experts, ensemble avec les intérêts de droit;
et condamne la partie de Rousseau en tous les dépens,
même en ceux faits par Duchesne;
« Sauf à la partie de Rousseau à se pourvoir contre
« q u i, et ainsi qu’elle avisera , à raison de ce qu’elle a
« prétendu à l’audience lui être dû. »
Passons maintenant aux allégations absurdes et con
tradictoires autant que téméraires, par lesquelles le sieur
Fayon a voulu donner h ses défenses, devant la cour
d’appel , un aspect plus favorable , et s’est efforcé de
compliquer la cause la plus simple , d’obscurcir la plus
cla ire , et de rendre intéressant ce qui soulève d’indi
gnation.
M O Y E N S .
L e sieur Fayon soutient,
i ° . Que lui contester la validité de son acquisition ?
�(
t6
)
est une ingratitude ; vu les services qu’il a rendus au
propriétaire de Chadieu ;
2<\ Que cette vente a eu un prix r é e l , et qu’à l’épo- >
que du 9 thermidor an 7 , il étoit créancier et non
débiteur du sieur Nattliey ;
>
3°. Q u ’il n ’y a pas eu de fraude ni d’antidates dans
cette vçntçi;*
»
■4°. Que le fondé de pouvoir du sieur Nattliey qui l’a
consentie , n’ a nullement excédé ses pouvoirs;
E t que par ces raisons cette vente est bonne et va
lable.
Il sera facile de déconcerter ce plcfjn de défense du
sieur l a y o n ; mais nous sommes ramenés, malgré nous, à
parler du sieur de Batz , qui cependant n’est point dans la
cause , et que le sieur Fayon auroit peut-être plus sage- ■
>
ment fait de ne pas p ro vo q u er, puisqu’il n’y figure par
aucun acte quelconque. Mais le sieur Fayon n’a pu
résister à l’envie , au besoin d’épancher le fiel qui le
dévore , et le chagrin qu’il ressent d’avoir été arrêté
dans sa marche ordinaire par la surveillance du sieur de
Batz q u i , à dire v r a i , l’a empêché de disposer de Cha
dieu comme dans le bon temps où il avoit la confiance
de M M . de Tanne , et de rendre au sieur Nattliey les
services qu’il rendit à ces messieurs.
- l i e sieur Fayon a donc voulu la digression qui suit,
qui est relative au sieur de Batz, et q u i , au f o n d , ne
sera pas inutile au procès du sieur Natthey.
Quels
�C *7 )
Quels services ont été rendus au sieur de B a t^ et
au sieur Natthey par le sieur Fayon ?
Observons en premier lieu que les billets au porteur ,
de 5190 IV. souscrits p:ir le sieur F a yo n , 11’ont clé ni
une libéralité ni un service de sa part, mais bien envers
lui-même. Ils ont été le prix de quelques portions des
revenus de Chadieu ; et il y eut, à cette occasion , une
forte libéralité faite au sieur Fayon, ainsi qu’on l’a rap
porté cirtlessus.
On a dit également, que près de quatre mois étoientécoulés depuis l’échéance du premier billet ; que le second
venoit d’écheoir , et qu’on n’avoit pu obtenir du sieur
Fayon qu’ un à-compte de 1477 fi\ Que le sieur de Batz ,
à la disposition de qui étoient alors ces billets , se rendit
au département du Puy-de-D ôm e pour y joindre enfin
le sieur Fayon , et tenter de les faire acquitter; mais qu’il
fut arrêté à son premier rendez-vous, et en dînant avecledit sieur Fayon.
L e sieur de Batz n’a jamais accusé le sieur Fayon de
l’avoir fait arrêter ; il a même repoussé à cet égard la
vo ix publique : mais, lorsqu’il admet que le sieur Fayon
ait été parfaitement étranger à cet événement , il n’en
est pas moins certain que le sieur Fayon en a été l’oc
casion. C a r , si les billets du sieur Fayon eussent été
acquittés à leur échéance , le sieur de Baiz n’en seroit
p:is venu demander le payem ent, ni se faire arrêter par
cet acte d’ imprudence et de témérité.
J u s q u e -là , très - certainement, le sieur de Batz n’a
C
�( i 8)
encore ni remercîmens à faire au sieur F a y o n , ni reconnoissance à lui témoigner.
E t cette arrestation n’étoit pas alors de peu de consé
quence ! L e sieur de Batz étoit sur la liste fatale des émi
gré s; et n’ayant point obéi à la fameuse loi de fructidor,
cette loi prononçoit contre lui l’arrêt de mort.
D e la prison de Clermont où il fut d ép o sé, et dans
laquelle on lui fit son procès, on venoit, pour même
cause, d’envoyer fusiller à L y o n d’intéressantes victimes.
Bientôt on fit prendre au sieur de Batz le môme chemin;
et certes nul espoir de grâce ne pouvoit luire devant
ses y e u x , car il étoit l’un des objets les plus signalés de
la haine du directoire qui gouvernoit alors.
Toutefois , et comme dans les circonstances périlleuses
il importe de ne se point abandonner soi-même, le sieur
de Batz imagina quelques moyens de salut.
D e sa prison, et quoique au secret, il put dès le pre
mier instant dresser à ce sujet une instruction , et la
faire passer au dehors. Il étoit pressant, de la faire par
venir à Paris, et il ind iqu oit, pour ce rapide voyage
faire , un jeune homme de la ville de Rioin , en qui il
avoit toute confiance, et par qui cette mission fut rem
plie avec zèle et fidélité.
T o u t ce q u i , dans cette circonstance, importoit au sieur
de Batz dans P a ris , étoit réglé par ce message. Cependant
le sieur Fayon alla chercher un ami non équivoque du
sieur de B a tz, et lui confia q ue, lui F a yo n , s’ ila llo ità
P..ris, y rendroit un grand service au sieur de Batz. Il ne
s’expliquoit point sur la nature de ce grand service, et
néanmoins demandoit conseil!
�( *9 )
Quel conseil pouvoit être donné sur des projets in
connus? On ne put que s’étonner de ce que celui qui portoit dans sa pensée un secret aussi important, et qui témoignoit un v i f intérêt pour le sieur de B a tz , liésitât un
seul m om ent, et s’arrêtât à demander conseil !
V oilà toute l’histoire de ce prétendu com ité d ’a m is ,
qui se j'o r m e , qui se ré u n it, et q u i délibère qu il est né
cessaire que le sieur Fayon , aille à P a n s , (p . 5. ) F o u t
se borne à une conversation que le sieur F a yo n , qu’on
n’étoit pas allé chercher, voulut avoir avec M e. Pages,
chez qui il s’étoit fait conduire par le sieur Mazin.
Cependant, le sieur de Batz n’étoit-il pas la première
personne que le sieur Fayon dût consulter en pareil cas?
P o u r lui, du m oins, les projets du sieur Fayon ne devoient
pas être des mystères; et, communiquer avec le sieur de
B atz, étoit chose facile chaque jour et presqu’à tout
instant.
Mais le sieur Fayon étoit d’avance bien sur que son
projet seroit rejeté par le sieur de Batz; car ce merveil
leux projet consistoit à faire passer dans les mains, et sur
la tête de l u i , sieur Fayon , la terre de Chadieu !
T elle est en effet la proposition que le sieur Fayon fit
à quelques amis du sieur de B a tz, à P aris; et le sieur
Desherbiers, connu par de grandes circonstances publi
ques , et qu’ il suffit de nommer pour rappeler toutes les
idées d’honneur et de v e rtu , de franchise et de pro bité,
.e n adressa le détail aux arbitres, lorsque l’arbitrage subsistoit, sous la date du 14 thermidor dernier.
, Les amis du sieur de Batz ne concevoient pas quelle
C 2
�W -
VfS
(
20
)
relation il y a voit entre son salut et la proposition du
sieur Fayon ; elle leur paroissoit inutile et absurde.
X^e projet.de conquérir Cliadieu, au milieu de cet orage,
et, sous le prétexte de sauver cette propriété, se la faire
confier , s’en saisir, n’étoit pas de la part du sieur Fayon
un projet absurde; on en appelle à tous ceux qui le eonnoissent. Mais ceu x, à Paris, qui ne le connoissoient pas,
et à qui il ne cessoit de répéter qu’il falloit sauver la
terre de Chadieu , finirent par lui répondre qu’il ne s’agissoit pas de la terre de C h a d ie u , m ais de la téte du
sieur de B a tz . Ce sont les propres expressions de l ’at
testation du 14 thermidor dernier.
La spéculation du sieur Fayon ( car c’en ctoit une sur
C h a d ie u ) , valoit bien sans doute le voyage de P a ris,
surtout à une époque où depuis long-temps il y étoit
attendu pour ses alla ires personnelles. Le sieur Busclie
étoit alors agent principal du commerce que le sieur
Fayon faisoit à Paris sur les vins d’Auvergne.
X/on a sur ce fait une lettre du sieur Fayon au même
sieur Busclie , et cette lettre n’est môme pas la seule
preuve des raisons très-étrangères au sieur de Batz , qui
exigeoient à Paris la présence du sieur Fayon. C a r , s’étant
offert pour accompagner une personne, que l’empresse
ment de rendre au sieur de Bnlz tous les services de
l’amitié, décidoit à partir sans délai ; ce lut par la raison
des affaires personnelles que lui , sieur Fayon , 'disoit
avoir dans P a ris, qu’on consentit à l’attendre quelques
jours. 11 falloit assurément que les affaires du sieur Fayon
ù Paris fussent d’ une haute importance; car, la position
�( 21 )
affreuse du sieur de Batz exigeoit les plus prompts secour,1?.
P a r ce d é la i, cette personne n’arriva que l’instant d’après
où le sort du sieur de Balz venoit d’être décidé, et pour
le voir traîner à la commission militaire de Lyon.
Ce n’est pas sans doute par ce retard que le sieur Fayon
pourra prétendre à la reconnoissance du sieur de Batz ;
mais voici des services d’ une autre espèce, auxquels il
prétend qu’elle est due.
I l J a llo it alors de Vargent ( d it - il , page 4 ) , et le pro
priétaire de Chadieu il en a voit point. L e sieur M a z in
et m oi nous mettons en quête ( L e sieur Fayon en quête
pour trouver 3000 francs, et il doit 3713 francs! ). N ous
trouvons et nous em pruntons sous lettre de change ,
A d e u x p o u r c e n t p a r m o i s , 3000J'rancs ; en sorte
que cela fa is o it un intérêt de 720 fr a n c s par an. E t
les 3000 fr a n cs sont em p loyés, pa r le sieur M a zin ,
à tous les m oyens que l'on juge utile au salut ( du
prisonnier ).
Il faut dire tout de suite ce qui arriva de ces 3000 fr.
Cette somme fut en effet remise par le sieur Fayon au
sieur Mazin , et par celui-ci au même jeune liomrne qui
a voit été chargé ( et non pas le sieur Fayon ) d’aller à
P a ris , et qui en étoit de retour.
Ce jeune homme se trouvoit à Tarare au moment o ù ,
par le contre-temps le plus imprévu , tout espoir paroissoit perJu pour le sieur de Batz. Menacé lui-même , ce
jeune homme se rendit h. Lyon. Il ne prétfoyoit point
que ce seroiL dans ce moment désespéré , qu’en plein
jour et du milieu de ses nombreux gardiens, le sieur
�( 22 )
de Batz leur éehapperolt. Ne supposant rien d’urgent ,
il confia cette somme au sieur Jarrin , pnr qui depuis
elle a été remise au sieur de Batz.
Certes , si le sieur Fayon avoit espéré d’un pareil trésor
( 3000 francs ) le salut du sieur de Batz , il faut lui savoir
gré de ses bonnes intentions ; mais du moins qu’il con
vienne à son tour que cet argent n’a servi nullement au
salut du sieur de B atz, puisqu’il ne l’a reçu qu’après son
évasion. Q u ’il permette en môme-temps qu’on lui de
mande o ù , dans les eii’constances d’alors , il eût pu trou
ver une raison qui ne fût pas une infamie, pour se dis
penser de payer une somme de 3000 francs, lorsqu’elle
n’étoit qu’ un à-compte sur celle de 3713 francs par lui
due encore sur ses billets au porteur.
Il est vrai qu’ici le sieur Fayon élève la voix et nous
crie qu’il ne devoit pas cette somme ! Mais pour toute
réponse nous lui présentons ce qui parle plus haut et
plus vrai que lui , ses billets au porteur non encore
acquittés.
Arrêtons un instant. Examinons où sont jusqu’à pré
sent ces immenses services rendus par le sieur F a yo n ,
et à raison desquels les sieurs de Batz et Natthey lui
devroiont tant de reconnoissance.
Ce n’est pas sans doute pour avoir acheté , sous la
déduction ou remise de près de 3000 francs, les récoltes
' de Chadieu de l’an 6 ?
Ce n’est pas pour n’avoir point payé à leur terme ses
billets au porteur ?
Ce 11’est pas pour avoir cherché à excuser ce non paye
ment, par de prétendues saisies qui môme n’eurent pas
�( 23 )
lieu ; et q u i , clans aucun cas , ne devoient arrêter le
payement de billets au porteur ?
Ce n’est pas pour avoir lorcé le sieur de Batz à. venir
en personne lui demander ce payem en t, ni parce qu’à
cette occasion le sieur de Batz a été arrêté en dînant
avec lui ?
Ce n’est pas sans doute parce que le sieur Fayon en
allant à Paris pour ses affaires personnelles, en prit occa
sion de tenter de se faire confier Chadieu ; ou tout au
moins de faire payer et surpayer ce voyage au sieur de
Batz ; ni parce qu’il demande aujourd’hui 600 francs de
gratification pour prix de cette généreuse pensée ?
Ce n’est pas, non plus, pour n’avoir payé qu’ un es
compte de 3000 francs, lorsqu’il devoit 3713 francs, et
lorsqu’il convenoit lui-même que Targent étoit néces
saire au salut du sieur de B a tz ( p. 4. ) ?
Ce n’est pas enfin pour l’utilité dont fut au sieur de
Batz cette somme de 3000 francs, lors des périls qu’il
couroit; puisque cet argent ne lui parvint q u ’après qu’il
s’y fut soustrait sans aucune participation du sieur F ayon ?
Ce n’est pas enfin parce que le sieur Fayon a répandu
de tout son pouvoir , ce que toutefois il a eu lu pru
dence de ne pas imprimer; savoir que c’étoit à ce mémo
argent et aux soins de l u i , sieur F ayon , que le sieur de
Batz avoit dû son salut ?
O u b ien , seroit-ce des services qu’il auroit entendu
rendre, soit au sieur de Batz, soit au'sieur N atlliey,
lorsqu’ il h’est fait l’agent de quiconque a voulu plaider
contre e u x ? et lorsqu’ il n’a pas cru manquer de délica
tesse ni de fidélité eu violant un dépôt d'uclés à lui con-
�( h )
fiés par le régisseur de Chadieu; en expédiant à d’autres
qu’a N althey, ou de son aveu, des copies de ces mêmes
actes? E t à qui encore? A u x sieurs Heboul et M ndier,
et aux agens de la commune de Vic-le-Com te -, c’est-àd ire, aux personnes avec qui Natthey plaidoit le plus
vivement. L e sieur Fayon leur a voit persuadé ( ce qui
cependant 11’étoit pas vrai ) que ces papiers leur seroient
très-utiles contre le sieur Natthey; et c’est ainsi qu’il
s’est procuré, à leurs dépens, le triple plaisir de les trom
p e r, de les mettre à contribution, et de nuire à Chadieu!
O r , pourquoi cette conduite ? pourquoi- cet acharne
ment contre Chadieu? C ’est q u e , par bassesse et ven
geance , le sieur Fayon a voulu se faire le ll'éau de cette
p r o p rié té , du moment où elle a cessé d’être sa proie :
voilà son secret révélé.
E t , eu effet , n’est-ce pas lui qui a fait attribuer à
l ’hospice de Lyon une rente de 46 setiers de blé ,
jadis due par le propriététaire de Chadieu au chapitre
du P o n t - d u - C h â t e a u ? Ne savoit-il pas mieux qu’ un
autre, nous eu avons la preuve dans des notes écrites de
sa main , que cette rente à prélever sur une directe de 80
setiers , avoit été supprimée avec cette même directe
p a rle s premières lois de la révolution sur la féodalité?
.Cependant , et par l’entremise de son ami , le sieur
Tabariez, agent national à C lerjn on t, il a fait reprendre
l ’instance depuis long-temps abandonnée ; demander au
propriétaire de Chadieu les arrérages de cette rente, et
fait lui-même , à cette occasion , arrêter les revenus dç
Chadieu par plus de quatre-vingts saisies! Et dans quel
moment ? dans celui où il venoit d’être arrêté entre le
sieur
�( ^5 )
sieur de Batz et le sieur Tabariez, en présence du s'eur
Tourna d r e , inspecteur général des domaines«,■que nulle
poursuite n’auroit lieu de part-ni d’autre pendant.une
absence du sieur de Batz..Cette absence devoit durer au»
moins trois m o is , et ce fut dès le lendemaiii)!de souj
départ que les quatre-vingts' saisifc9 furent faites par le
sieur Fayou. 11 est vrai qu’au retour du sieur de. Batz y;
ces extravagantes saisies, faites sans droit’ j sans titre ni
l>on sens , furent levées :par le tribunal de Clermont.
Mais il étoit dû une rente de n setiers de b l é ; o r , ï
du moment des saisies , qui étoit précisément celui de
l’échéance des b au x, à celui de laperception, après les
saisies levée s, la différence du prix des blés donna en
p e rte, pour Chadieu , une somme de 6 ù 7000 fr. Il
faudra bien en définitif que le sieur Fayon ou le sieur
Tabariez supportent celte porte , toute dé leur fait. Mais
en attendant , quelle reconnoissance ■
est due au sieur
Fayon ?
N ’e s t- c e pas lui encore, q u i , pou r servir les sieurs
B eboul et Madier contre les sieurs« de Batz et N a tth e y ,
lit des saisies de même gènre et même nombre sur Ghadieu ? L ’époque en est remarquable ; elle est du 12 t h e r
m i d o r an 7 , du jour même où le sieur de Batz étoit
envoyé à. la commission militaire sous une escorte telle
qu’il paroissoit n’y avoir plus d?espoir quelconque pour
sa vie. T e l est le moment des saisies ;.telle est l’époque
de la prétendue ventej,i<et tels sont'les-services que ren
dait alors le sieur Fayon.
- 1
Certes , il no peut nier d’avoir été, dès-lors et depuis,
l’agent de l’iniàme procès suscité par le sieur Madier
D
�W v
c 26 )
contre le sieur N atth ey, puisqu’à l’audience on a v u ,
écrit de la propre main de lui, sieur F a y o n , le jugement
rendu à Versailles, entre W a llie r et Natthey, et qu’on
opposoit à ce dei*nier, lors de l’arrêt de la cour rendu
contre le neveu de ce Madier.
N ’est-ce pas encore l u i , sieur F a y o n , q u i , il y a deux
années, engagea des colons de Chadieu à retenir soixantedouze œuvres de vignes comme étant grevées de cens?
L e titre a été jugé contr’eux : mais le sieur Fayon le
leur avoi.t fourni.
N ’est-ce pas lui encore qui a fait à Chadieu , pendant
le temps de l’absence forcée des sieurs de Batz et Natthey,
des enlèvemens de toute espèce , et dont, tout à l’heure,
il va être tenu de rendre compte en justice?
N ’est-ce pas lui q u i, en abusant de la malheureuse fa
cilité du sieur Mazin à son é g a r d , et sous le nom de
celu i-ci, a -fait des recettes dont il a indûment retenu de
fortes parties , et dont tout à l’heure également il faudra
qu’il compte devant la justice ?
N ’est-ce pas lui enfin qui vient d’imprimer dans son
m é m o ire , tout imprégné de sa bassesse, que le sieur de
Batz possède Chadieu sous le nom d’a u tru i, afin de le
soustraire aux prises de ses créanciers?
O ù sont donc ces créanciers du sieur de Batz ? Il a des
propriétés personnelles et patrimoniales. Quelle hypo
thèque les frapp e? une seule de iôooo francs : c’est à
raison de la garantie d’un d é p ô t, par lui donnée en 1790.
Mais ce dépôt a voit sa destination ; elle a été fidè
lement remplie ; le sieur de Batz en a l’acquit , et
l ’inscription l’inquiète p e u , lui-même en poursuit la ra/
�( 27 )
diation ; elle sera prononcée, et malgré un arrêt par
défaut obtenu à un domicile qui n’est pas celui du sieur
de B a tz, et malgré les regrets et les huissiers du sieur
Fayon ; car il 11e s’est pas rendu étranger à ce procès ,
d’ailleurs bien digne de ses soins !
Si le sieur de Batz a d’autres créanciers, il déclare
hautem ent, non pas au sieur F a y o n , mais aux honnêtes
gens, et au public qu’il respecte , qu’il n’èn a que de
v olon ta ires, et pour des raisons ou de pure délicatesse
ou de générosité de sa part.
L ’on voit, dans tous les sens, quels remercîmens le
sieur de Batz doit au sieur Fayon ! Encore une fo is, il
ne peut devoir d’autre reconnoissance au sieur Fayon, que
pour ses bienfaits négatifs ; c’est-à-dire , pour le mal qu’il
auroit pu lui fa ir e ,' et qu’il ne lui a pas fait.
Rentrons dans la cause, et ramenons-y le sieur F¿iyon.
L a vente fa ite au sieur Fayon a-t-elle eu un p r ix ?
É to it-il au 9 thermidor an 7 créancier ou débi
teur du sieur N atthey?
Si l’on ne s’arrête qu’aux titres authentiques, aux objets
incontestables et liquides, le sieur Fayon étoit débiteur
et non pas créancier du sieur Natthey le 9 thermidor
an 7; et la vente dont il s’agit reste sans prix.
Mais le sieur Fayon présente des comptes, appelle
Natthey à les ré g le r, et prétend prouver, par ces mêmes
com ptes, qu’à l’époque de la vente il étoit créancier et
non pas débiteur du sieur Natthey; qu’ainsi elle a eu
réellement le prix qui s’y trouve porté,
D 3
�.. Ce* système-liardi nous place devant le-nœ ud d e 'la
.cause^ e t , si l’on pei}t s’exprimer ainsi, devant,la forte
resse .dans laquelle le sieur Favou se croit inexpugnable.
t
Demandons avant t o u t , au sieur F a y o n , s’il a jamais
ouï dire que l’on soit reçu à se faire à soi-même des!titres
et des créances; et'si), contre un tiers quel qu’il soit, une
déclaration signée de lui seul seroit un titre suffisant
devant un tribunal quelconque?.
Non sans, doute, il ne l’a pas ouï dire , ni ne le ci’oit.
A -t-il quelque reconnoissance du siéur Natthey?
1 I I ‘n’en a point!
•
<
•
Q u’existe-t-il entre Natthey et lui ?
'
Les deux traités du icv. nivôse an 7 , et les billets au
porteur souscrits par ledit sieur Fayon,
'
J
Que portent les deux traités?
*' L e premier p o r t e , qu’ une portion des revenus de
Chadieu est vendue au sieur Fa^ypu p.our la somme de
;• i r
L e second porte, que quelques articles ( de-peu de
valeur ) n’ont pu être fixés que par approxim ation à
Paris , et qa’ /l-e/i sera J'ait com pte, soit en p lu s , soit- en
m o in s, entre lesdits sieurs Natthey et Fayon.
6 7 9 9 fr .
(
--^ V n 7 ..
-h.. •■
ut
••
L e sieur Fayon'-est-il créancier du sieur Natthey, à raison
de ce compte , en plus ou en moins ?
Non , il ne l’est point , et le sîeur Natthey en a la
preuve. Aussi le sieur F a y o n , qui le sait parfaitement,
se garde-t-il de s’en tenir à ce seul compte qu’ il y ait à
régler entre lui et Natthey; niais il en présente d’autres
faits, dit-il, par ordre du sieur Mazin.
�2o ) l
( 29 )
Q u ’alors le sieur Fayon règle ses comptes, comme il
l ’entendra, avec le sieur Mazin. Comme ce n’est pas à
lui , sieur Nattlieÿ, à se mettre entr’e u x , qu’ il n’a point
qualité à cet eiï'et, par la même raison le sieur Fayon
n’en a poin t,p ou r demandera régler avec le sieur Natthey
des comptes que lui-, sieur Fayon , peut avoir à régler
avec le sieur Mazin.
Il y a plus; ni ces comptes n’ont été présentés en pre
mière instance, ni le sièur Mazin n’a été un seul instant
mis en cause !
Pourquoi donc entreprendre en cause d’appel une pro
cédure aussi monstrueuse que celle par laquelle on pré
tend faire régler avec une personne, les comptes à faire
avec un tiers; et lorsque, ni ces comptes n’ont été signî^
fiés en première instance, ni le tiers mis en cause et
dans les qualités ?
Faut-il apprendre à un praticien de la force du sieur
F a y o n , que celui à qui on présente des objets liquidas,
tels que le sont des billets au porteur, n’est jamais reçu
h leur opposer des comptes à régler; et que l’on ne peut
compenser que de liquide à liquide?
>
En proposant au sieur Fayon la fin de n o n -recevo ir
résultante de cette maxime de droit consacrée par l’ar
ticle 1291 du Code civ il, on le peut, sans qu’on puisse
supposer qu’il entre dans la pensée ou dans les projets
du sieur Natthey, de vouloir opposer les formes au fond,
ni d’abuser de cet avantage.
L e sieur Natthey et sa propriété sont là pour répondre
a toutes les prétentions, à tous les comptes dont il plaira
4 «U-
�( 30 )
nu sieur Fayon de faire le sujet d’une contestation régu
lière; le jugement du tribunal de Clermont lui en a ex
pressément réservé la faculté. Mais le sieur Natthey ne
peut souffrir qu’une contestation qui dure depuis près de
huit années, s’ éternise par d’aussi grossières et ridicules
chicanes; et q ue, par de nouvelles astuces, par des comptes
toujours nouveaux, tous différens les uns des autres, tan
dis que la vérité n’est qu’une et toujours la m ê m e , le
sieur Fayon parvienne à prolonger les débats jusqu’au
moment où il pourroit surprendre une huitième année
de jouissance.
A u fond, n’est-il pas permis au sieur Natthey de céder
un instant à la plus juste indignation, et de la manifester
devant ses juges et devant le p u b lic , qui la partageront
peut-être ?
D e quoi s’a g i t - i l ? de quels comptes le sieur Fayon
vient-il demander le payement au sieur Natthey?
D ’avances pour les impôts de Chadieu; de démarches
et déboursés pour l’emprunt forcé; pour des inscriptions
hypothécaires; dépenses pour lesquelles il présente même
des prix différens les uns des autres , quoique sur les
mêmes objets; pour des fr a is de procédures contre des
redevables de Chadieu ; pour des raccommodages de
hcicholes e id e cuvettes, etc.; 600 francs donnés au sieur
M azin , à compte su r des billets, qui cependant n’appartenoient qu’au porteur , et qui 11’étoient pas entre les
m a in s, ni à la disposition du sieur Mazin , e tc ., etc.
( V o y e z le mémoire du sieur F ayon, png. 19 et 20).
Mais à qui appartenoit-il de faire nommément ces du-
�( 31 )
penses ? A u sieur M a zin , seul administrateur de Chadieu,
et non pâs au sieur Fayon , à qui le sieur Natthey se
donnoit garde de confier pareille administration.
E t sur quoi le sieur M azin étoit-il chargé de payer
ces dépenses administratives? Ce n’étoit pas avec des em
prunts ; car il n’a eu nul pouvoir du sieur Nattliey pour
en faire d’aucune espèce ; il devoit y subvenir sur les
recettes seulement.
O r , quel est l’état de situation du sieur M azin envers
le sieur Nattliey ? Quelle est la balance entre ses recettes
et ses dépenses ? E n y comprenant quelques parties d’ar
riéré concernant un précédent régisseur qui a dû en
compter avec le sieur M azin, d’après la mission donnée
par le sieur N attliey, et acceptée p a r l e sieur M azin,
suivant ses propres écrits; dans leur ensemble ces recettes
dont le sieur Mazin doit compte s’élèvent dans les années
5 , 6 et 7 , à la somme de . . . . 74645
7^ 6 ^
Les dépenses à la somme de . . 49813
n
9
Ce qui laisse un arriéré de
.
. 24831
i 5^ 9 ^
L e tout sans y comprendre plus de 4000 francs de
doubles emplois et d’indues retenues portées aux articles
de compte qui intéressent le sieur F ayon , à raison des
quels il a été fait réserve expresse v i s - à - v i s du sieur
îizin, le 23 germinal an 6 , et des enlèvemens faits à
Ciiadieu par le sieur F ayo n , pendant l’administration du
sieur Mazin.
La fixation de l’arriéré à la somme de 24831 ^
ne peut varier qu’en plus. 11 repose sur des données incon
testables ; car la dépense est établie sur un compte géné-
�( 32 )
rai, dont les articles ont tous etc donnés et paraphés par
le sieur M a zin , ou résident dans ses lettres.
Quant aux recettes, rien deplusévident, puisque toutes
les parties du territoire de Cliadieu sont, eu fermage, et
qu’il n’y a qu’à rapprocher des .baux,le prix des denrées,
à l’époque des recettes ou de leur vente, ü r , l’on a tous
ces prix écrits de la inain du sieur Mazin. Ce compte et
ses élémens lui ont été représentés en présence de deux
de ses.amis , au mois de thermidor dernier, çle la part
du sieur Natthey.
•]
_Ce s'eroit donc dans un pareil état dechoges, et m algré
un tel arriéré, qu’il seroit permis au sieur Fayon d’aller
détacher des parties de dépenses, évidemment à la charge
du.sieur Mazin , et qui appartiennent le plus essentielle
ment à ses fonctions de régisseur, pour s’ériger-, soit de
sou chef, soit par tolérance du sjeur M a z in , en créan
cier du sieur Natthey ? #
# .
>
Quoi ! le sieur N aüliçy auroit eu malgré lui le sieur
Fayon pour régisseur?
r , ..
• ■
Si le sieur Fayon veiit s’approprier des articles de dé
penses, quoique jamais il n’ait été autorisé à les faire,
que du moins il se charge également de compter.des re
cettes; alors le sieur Nalthey pourra l’écouter.
Mais,, comme ce n’est pas là ce qu’il, v e u t, son secret
n’en peut plus être un pour la cour d’appel; ce n’est plus
devant
sera reçu àt dire,:,
..>• V
'
‘ ■ tielle qu’il
J
«>♦
« Q u’imporle au propriétaire de Cliadieu, s’ il allque
« J es articles .de dépense que. je présente (il ne les alloue
«„pas ) ; d’en tenir compte à upepci^onntv.plulôl qu’à unç,
«_autrc; et au sieur Mazin plutOLqu’au,sieur Fayon? »
Ne
�c33 y p
N e seroit-ce pas dire qu’il est indifférent d’acquitter
une dépense par des emprunts, ou de la faire payer par
celui qui en a reçu les fonds?
D ’ailleurs, comment le sieur F;iyon pouri'oit-il tenir ce
langage en la cou r? lui q u i, par ses défenses en cause
principale, du 16 ventôse an 10, a formellement déclaré
qu’il n’avoit aucun compte à faire avec le sieur Naithey,
mais seulement avec le sieur Mazin.
Des.emprunts? et au sieur F ayo n ? Encore une fo is,
le sieur Mazin n’avoit pouvoir d’emprunter ni du sieur
F a yo n , ni de qui que ce soit; ni surtout, quand les re
cettes dépassent aussi fortement les dépenses.
L e sieur F a yo n , à dire v ra i, n’avoit que cette déplo
rable ressource pour se transformer, au 9 thermidor an 7 ,
de débiteur en créancier, et pour donner un prix à une
vente qui n’en a eu aucun.
L e voilà donc ramené uniquement en face des seuls
titres qui appartiennent à la contestation soumise à la
cour d’appel; savoir, les billets au porteur du I er. ni
vô se, et la vente datée du 9 thermidor an 7. P eu de
m o ts, maintenant, vont fixer la cause.
L e 9 thermidor an 7 , le sieùr Fayon devoit incontes
tablement , sur ses billets au p o rteu r, 3713 francs; il
remit 3000 francs, et resta débiteur de 713 francs.
" A paru depuis une vente datée du même jo u r, et du
môme prix de 3000 francs.
L e môme jour e n co re, le sieur Fayon , acquéreur,
déclara que le' sieur Nattliey étoit son débiteur ( avant la
vente qui l’avoit libéré;); et qud, si à l’examen des comptes
E
�( 34 )
il revenoit un reliquat audit sieur N atthey, lui sieur
F a y o n , le lui payeroit.
M a is , dans le mémoire ( p. 5 . ) , le sieur Fayon s’expli
que tout autrement. Il ne s’agit plus comme dans la contre-,
lettre du 9 thermidor an 7 , d’un compte à faire, ni d’un
reliquat à payer au sieur N atthey, sur le prix de la
vente ; il s’agit purement et simplement de 3000 francs
que le sieur Fayon a empruntés pour le compte du sieur
N atth ey, et dont le sieur M azin lui a proposé le paye
m ent par la vente dont il s’agit.
A llo n s plus loin.
Lettre du sieur F a y o n , du 7 vendémiaire an 8 , par
laquelle il reconnoît qu’il n’a pas encore acquitté les bil
lets au porteur : q u e , d’un autre c ô té , il est en avance
de 2000fr a n c s et plus. Rapportons , sur ce second objet,
les propres termes de cette lettre :
. . . . S u r la récolte que vous me v en d rez, je désire
me retenir les 2000 f r a n c s et p lu s , que je vous a i
avancés.
D ès-lors, la prétendue vente du 9 thermidor précé
dent n’avoit pas eu lieu. Si elle avoit eu lieu ; si con
formément à la teneur de la contre-lettre du même
jo u r, le sieur Fayon se supposoit reliquataire envers le
sieur N atth ey, comment au 7 vendémiaire suivant, se
sero it-il prétendu en avance de 2.000 fr a n c s et p lu s?
o u , ce qui revient au m êm e, de quelque chose de moins
que les 3000 francs, prix de la prétendue vente ?
S i, d’autre part, le sieur Fayon veut par préférence à
sa lettre du 7 vendémiaire an 8 , et à sa contre - lettre
�( 35 )
du 9 thermidor précédent, s’en tenir à ce qu’il a dcrifc
dans son mémoire (pag. 8 . ) , savoir:
TjC sieur M a zin avoit pj'ocuration pour vendre tout
ou partie de Chadieu • il était engagé envers le prêteur
des 3000 jfr. : je Vétois a u ssi.. . . 'I l me PROPOSE à ache
ter e n p a y e m e n t quelques héritages de la terre de
Chadieu ,• j'a c c e p te , etc., etc.
Des - lors , encore nouvelles contradictions du sieur
Fayon; car, si conformément à ces paroles du m ém oire,
les 3000 francs ont été le prix de la v e n te , cette somme
alors ne peut plus être applicable aux billets au porteur;
elle ne sauroit être ensemble le prix d’une vente et la
libération d’une dette.
T o u t est donc fausseté ou contradiction, et on ne sait
plus où on en est quand on sort des titres de la cause ;
tandis qu’elle est si claire et. si éviden te, quand on se
renferme dans eux seuls!
O n y voit des billets au porteur de 5190 francs, un
à-compte payé de 1477 francs, et un reliquat à payer
de 3713 francs, encore dû le 9 thermidor an 7.
A cette dernière époque, les parties s’accordent sur
un versement de 3000 francs; le sieur Fayon s’efforce de
prouver que cette somme a été le prix de sa vente : dèslors elle n’est plus applicable à la libération des billets
sur lesquels il restoit devoir 3 7ï 3 francs. Mais comme
il faut être tout au moins libéré, avant de pouvoir <e
dire créancier, les 3000 francs remis par le sieur Fayon,
sont applicables avant tout à la libération du sieur Fayon;
et sa vente demeure sans p r i x , d’après la maxime : JScmo liberalis , n isi liberatus.
E 2
�( 3* )
L e sieur Fayon prétend, dans son m ém oire, q u 'il ne
transige pas sur F honneur: ildevroit bien moins transi
ger sur l’évidence qu’il outrage. C ’est l’o utrager, c’est
la v i o le r , qu’entreprendre de faire illusion sur lu véri
table application des 3000 francs qu’il paya le 9 thermi
dor an 7 ; ce fut un à-compte sur ses b illets, et non pas
le prix d’une vente q u i, le 7 vendémiaire an 8 , n ’a voit pas
encore existé. Ce ne fut pas surtout l’acquit des comptes
absurdes qu’il a grossièremeut ébauchés : comptes où
plusieurs articles appartiennent au dépôt à lui fait des
873 francs, où le plus considérable des autres articles,
celui de iôoo francs, n’auroit eu lieu, suivant lui-même,
que posténeui’eineut à la ven te, et prouveroit par cela
encore, qu’elle ri’a pas eu de pi’ix! Comptes enfin, que
le sieur Fayon a déclaré lui-même n’avoir pas droit de
présenter au sieur Natthey !
O n lui fait grâce, quant à présent, des détails de quatre
comptes de sa façon, par lesquelles il a tenté de prouver
qu’au 9 thermidor an 7 , il étoit plus que libéré de ses
billets. Ils sont, on le r é p è te , tous différons les uns des
autres, et tous démentis par la lettre dans laquelle il
avouoit, le 7 vendémiaire an 8 , n’êti'e pas encore libéré
de ces mêmes billets. Heureux de n’avoir besoin pour
confondre à tous xnomens le sieur F a y o n , que de l’op
poser ù lui-rnême, et ses écrits à ses écrits, nous allons
lui rappeler et transcrire ce qu’il écrivoit le 7 vendémiaire
an 8
I l ne tenoit qu'à N a tthey d'envoyer plutôt toutes w es
signatures (o n les a voit envoyées à M c. Pages), N a t
they ¡l'aurait dans cq cas essuyé aucun reta rd .. ,. L e
.
�(37 ^
DÉBITEUR. VEUT p a y e r ; il demande ses signatures
o b lig a to ir e s 0/2 met de la lenteur à cet envoi , certaine
ment on ne peut blâmer le DÉBITEUR de ce qu'il n'ac
quitte pas.
Que devient donc tout ce tissu de faussetés et de con
tradictions, tout ce fatras de comptes démentis les uns
par les autres, et entassés pour prouver que le sieur
Fayon étoit libéi’é de ses billets avant le 9 thermidor
an 7 ? C ’est lui-meme qui nous déclare, le 7 vendémiaire
an 8 , qu’il en est encore d é b i t e u r . ; lui qui affirme qu ’ i7
veut payer, et qu il demande ses signatures obligatoires !
lui qui se plaint de ce qu’orc met de la lenteur à cet
envoi , et qui en conclut qu 'on ne peut le blâmer de ce
qu'il n'acquitte pas !
Ne revenez p lu s , sieur Fayon , à nous parler de votre
libération avant le 9 thermidor an 7 ; ne laissez plus
échapper de votre souvenir cette lettre du 7 vendémiaire
an 8.
Comment le sieur Fayon se d éfen d -il de cette lettre?
P o u r faire rentrer ses billets, il préférait de payer deux
fois. L e sieur F a y o n . . . . payer deux fois!
Mais où prend - i l , ce sieur F a y o n , ce qu’il avance
(png. 1 9 ) , que, par la contre-lettre , il est autorisé à
porter en compte tous les fr a is de procédures et autres
fou rn itu res ? et comment ose-t-il en conclure qu’il a le
droit de présenter au sieur Natthey des comptes de toute
espèce ?
Il y a deux contre-lettres. L ’une datée du 9 thermidor
an 7 , 11’est qu’ une déclaration du sieur Fayon écrite de
sa main et signée de lui seul; prétendroit-il avoir pu se
�( 38 )
donner à lui-même l’étrange autorisation dont il parle?
Une autre contre-lettre existe, celle du I er. nivôse
an y ; elle contient un traité avec le sieur F ayon, une
règle de conduite pour lui; enfin une autorisation trèssoigneusement circonscrite, très-prudemment lim itée, et
nullement arbitraire. Aussi le sieur Fayon s’en plaint-il
dans une lettre où l’on trouve ce qui suit : « J e ne suis
« pas content du changement fait à la contre-letti*e; elle
« auro.it dû rester conforme au projet ( qu’il avoit eu
d ’obtenir de Nattliey le droit de faire des fo u r n itu r e s );
« au surplus, quand le dépôt ( de 873 francs ) sera épuisé,
« on dira les grâces . . . . au lieu que je prenois cet ar« ticle à ma charge. » ( Il s’agissoit des dépenses locales
h Chadieu. ) Dans cette môme lettre datée de C h a d ieu ,
Je 25 nivôse an 7 , il ajoute : « Ici résident Chariot ( c’est
« le jardinier), Austrem oine, la Jeanncton et la Jean« nette (c e sont les domestiques); j’attends l’arrivée du
« sieur Mazin pour arrêter et solder leur compte, »
V ou s voyez que le sieur F a y o n , q u i , par la contrelettre du i er. nivôse an 7 , étoit chargé de payer les
gages des dom estiques, 11e se croyoit pas même le droit
d'arrêter leur com pte; il attendoit le régisseur, le sieur
M a z i n , chargé (d it-il plus bas) des ordres d ir e c ts;
n o y a n t pas (p oursuit-il) c a r a c t è r e pour mettre ordre
¿1 rien , je me garderai bien de me mettre en avant. I l
f a u t que chacun remplisse sa tâche ; d'ailleurs on pourroit crier su r Tétat des f r a i s .
Su ivant lui-même , le sieur Fayon n’avoit donc pas
caractère pour faire aucune avance ni pour présenter
aucun état de frais ?
�'.
.
( 39 ^
. J
Il avoit uniquem ent, pour subvenir à certaines dé
penses désignées dans la contre-lettre , notamment pour
le payement des gages et de la nourriture des domes
tiques , un dépôt de 873 fr. Il ne pouvoit rien fournir
au delà de ce dépôt, et c’est pourquoi il disoit : Q uand il
sera épuisé Von dira les g râ ces, parce q u o n n’a pas
voulu que je prisse cet article à ma charge.
Accablons i c i , accablons encore le sieur Fayon sous le
poids de lui-même et de ses perpétuelles contradictions.
Celles-ci, décisives dans la cause, renversent le fondement
ruineux sur lequel le sieur Fayon l ’a hasardée, ainsi que
son opiniâtre prétention d’être en droit de présenter des
comptes et de les opposer au sieur Natthey. C ’est l à ,
en effet, le but unique de son mémoire , comme l’uni
que moyen qu’il puisse avoir de se défendre contre l’im
portune présence de ses billets non soldés.
Lorsqu’au début on lui en demanda le payement ; lors
qu’à cette dem ande, se joignoit la sommation au sieur
Fayon de rendre compte de la perception par lui faite
d’une portion des revenus de l’an 7 , ce qui n’étoit qu’une
suite et l’exécution des deux traités du i cr. nivôse même
année , puisque ces revenus lui avoient été vendus à l a f
charge d’en fa ire ra iso n , soit en p lu s, soit en m oins ; quel
parti prit le sieur Fayon ? D e garder le silence devant
le bureau de paix.
M a is , devant le tribunal de C le rm o n t, il s’alarma sans
doute d’un compte qui occupoil davantage sa pensée, et
contre lequel il se pi’émunit de la déclaration suivante
qu’il fit signifier au sieur N althey, le 16 ventôse an 10.
Il s’écrioit alors, le sieur Fayon :
�•*«>4
( 4° )
« Q u’il ne dcvoit aucun compte à Nattliey. P o u r qu’il
« dût ce co m p te, il faudroit ( ajoutoit-il) qu’il eût g éré,
« A U MOINS QUE CE F U T POUR LE COMPTE DE N A T T H E Y . '
« Il est d’autant plus étonnant ( pousuivoit-il ) que ce der« nier demande un compte à Fayon , qu’il ne peut pas
« dire qu’il n’a pas donné sa procuration au sieur Mazin
« pour gérer et administrer; qu’il n’ignore pas que
« Mazin , en vertu de cette procuration, a'effectivement
k géré et administré. 11 est vrai que F a y o n , dans cette
« partie, R E N D I T QUELQUES SERVICES A M a z i N ( n’ou
blions pas que c’est dans l’an 10 que le sieur Fayon
parle ainsi ) , qui , à raison de son éloignement de
« C liadieu, ne pouvoit porter à son administration une
« surveillance aussi active que le sieur Fayon qui étoit
« présent. M a i s a q u i l e s i e u r F a y o n a - t - i l d u
« C OM rTE DE SA C O N D U I T E ? C ’EST SANS C O N T R E D I T
« a u s i e u r M a z i n q u ’i l l e d e v o i t ; e t l e c o m p t e
cc QU’I L A DU , IL L’ A R E N D U A M A Z I N A QUI I L LE
« DEVOIT. L e
CITOYEN
NATTHEY
EST
DONC N O N -
« R E C E V A B L E A LE D E M A N D E R ? »
. L e sieur Fayon avoit-il donc oublié , ou espéroit-il
nous faire oublier cette déclaration si précise, si formelle,
si authentique? S’il l’a oubliée, nous avons dû lui rappe
ler les propres termes dans lesquels il l’avoit faite et signi
fiée le 16 ventôse an 10.
. S’ il ne l’a pas oubliée, s’ il a également gardé quelque
mémoire de sa lettre du ¿5 nivôse an 7 , comment a-t-il
le front de venir présenter des mémoires et des comptes
de fournitures au sieur N attliey?
Comment
p e u t - i l exiger un compte avec le sieur
Nalthcv,
«/
�S o i'
( 41 ) .
Nattliey, et offrir des compensations, après.avoir signifié
q u ’il ne veut en aucune manière reconnoître Nattliey ;
qu’il n’a connu que Mazin ; qu’il a compté avec M azin ;
qu’ il ne veut avoir affaire qu’à M azin?
Comment pourroit-il se p r é v a lo ir, soit de la contre^
lettre du 9 thermidor an 7., soit de la demande formée
contre lui en cause principale ?
X/a contre-lettre? elle est démentie par la lettie du 7
vendémiaire an 8.
'
.
L a demande ? elle n’avoit pour objet que les fruits
perçus en l’an 7 par le sieur Fayori , et la somme de 873 fr.
dont il étoit dépositaire.
j M a is , môme sous ce rap p o rt, il s’est refusé à toute
espèce de compte avec le sieur Nattliey. Il ne veut connoître que,le sieur M azin; il prétend même avoir compté
avec lui.
D on c il n’a aucun compte à demander au sieur Nattliey.
D o n c , pour être conséquent avec lu i-m êm e, il ne pourroit s’adresser qu’au sieur Mazin..’Et comme celui-ci n’a
jamais été mis en cause, les premières règles de l ’ordre
judiciaire s’opposent à ce qu’il en soit question en la cour.
Mais nous n’aurons sans doute rien appris au sieur
F ayon ; il n’avoit oublié, quand il a bâti son m ém oire, ni
les faits , ni ses lettres, ni ses écritures. C ’est sans doute
pour en détourner nos yeux , et faire illusion d’abord aux
arbitres, et maintenant à la cour, qu’il s’est m is en quêta
de toutes parts pour se procurer des autorisations à
faire des avances, h présenter des comptes au sieur Nattliey.
Telle a été certainement sa pensée secrète , lorsque sur
certain article cCim positions il s’est tant étudié à mettre en
* F
�( 4 0
jeu M e. Pages. Jusque - là qu’il a voulu le présenter
comme chargé des affaires de la m aison de C-hadieu, con
join tem ent avec lesieu r M a z in { M é m .p . 2 1), et prétendu
ensuite qu’il en avoit reçu Tautorisation de payer pour
le compte du sieur 'Nattliey i 5oo j'r . sur les im positions
de C h a d ie u , même d’après un compte réglé avec le sieur
Bertlionet, percepteur, en présence également de M e.
Pages.
M e. Pagès est ami réel du sieur de’ B a tz, son conseil
et celui du sieur Nattliey; mais n’est pas, n’a jamais été
chargé des affaires de la m aison de C h a d ie u , conjoin
tem ent avec le sieur M a z in , comme on l’avance indé
cemment dans le mémoire. Il est assez plaisant qu’à la
dénégation formelle de M e. Pagès, lors de l’arbitrage,
sur ce fait si absurde et fa u x , d elà prétendue autorisa
tion qu’on lui faisoit donner, et qu’il n’a pas donnée au
sieur Fayon, celui-ci ait imaginé d’opposer une sorte d’in
duction contraire; et q ue, dans sa complaisance, le sieur
Bertlionet ait écrit la ridicule lettre dans laquelle il con
sidère M e. Pagès comme chargé des affaires de Chadieu
conjointem ent avec le sieur M a zin .
N o n , M e. Pagès n’a réglé ni assisté à aucun règlement de
comptes avec le sieur Bertlionet. Il n’a point donné au
sieur Fayon F autorisation de payer i 5oo francs, à raison
de ces prétendus comptes, et la preu ve en est évidente;
c a r , si M c. Pagès en avoit eu l’ intention, il auroit eu
le moyen de la réaliser sur le champ; il étoit alors dé
positaire des billets au porteur du sieur Fayon, et iJ *‘\iroit
suffi d’y porter ce nouvel à-compte.
Mais il y a plus. Cette somme de iôoo francs que le
�( .4 3 )
sieur Fayon prétend avoir payée au sieur Bertlionct pour
les impositions de Chadieu , le 12 thermidor an 7 , et
sur la prétendue autorisation de M e. P a g e s, n’est compa
tible , ni avec les quittances que le sieur Nalthey a de la
main du sieur Berthonnet m êm e, ni avec certain compte
écrit de la main du sieur F a y o n , réglé par lui avec le
sieur Mazin ; ni avec un autre compte du sieur Fayon
encore, où il a porté jusqu’à 3086 francs le payement
par lui fait au sieur Berthonet. On opposera ces écrits
en temps et lie u , et à qui de droit.
Il y a encore une autre contradiction du sieur F ayo n ,
avec lui-meme. Il p rétendoit, devant les arbitres, avoir
été payé de cette avance de iô o o francs, par la vente du
9 thermidor an 7 ; et, dans un compte qu’il présentoit
alors, compte un peu différent de celui q u’il a présenté à
la cour d’a p p e l, il prétendoit avoir payé cette somme
le 12 thermidor an sept, c’e s t - à - d i r e , trois jours avant
d’en avoir fait l’avance!
Tous les replis et les détours du sieur Fayon sont dé
sormais inutiles. Ses comptes , ses allégations sont un tissu
de contradictions grossières. 11 n’y a de constant, d’évi
dent , de liquide dans la cause, que les traités du premier
nivôse an sept, les billets au porteur non encore acquittés,
et une vente faite sans prix.
L a vente du 9 thermidor an 7 a-t-elle été fa ite
en vertu de pouvoirs suffi s ans , et avec le con
sentement du propriétaire ?
L a vente , datée du 9 thermidor an 7 , n’a pas été faite
F 2
�~
( 44 ) .
r
en vertu de pouvoirs suffisons ; car le sieur M a z i n ,
qui l’a consentie, ne pouvoit vendre q u a u meilleur p rix
possible. O n a déjà rapporté cette condition expresse de
sa procuration.
A quel prix a-t-il vendu? O n répète ici qu’il a vendu
quatre - vingt - cinq œuvres et demie , des plus belles
vignes de C orent, au prix de 36 francs l ’œuvre ; et que
le prix courant est de 4 i>l 5 oo francs l’œuvi*e. L e sieur
Mazin a donc excédé ses pouvoirs, et la vente est n ulle,
encore sous ce rapport.
L e sieur Natthey auroit p u , sans d o u te , la consolider
en la ratifiant. L ’a-t-il fa it? N o n , assurément; car au
lieu de la ratifier, il l’a attaquée.
Défaut de consentement de la part du propriétaire;
autre nullité.
P o u r affoiblir le reproche qui ressort de la vileté du
p r ix , le sieur Fayon d i t , qu’il s’en faut de beaucoup que
la vente comprenne quatre-vingt-cinq œuvres et demie
de vignes ; que, dans sa déclaration aux hypoth équés, il
n’a porté la valeur totale de ces vignes qu’à 3434 francs;
q u’ainsi elles ne valent pas davantage.
V o u s voyez que le sieur Fayon ne sauroit se désha
bituer de se faire des titres à lu i- m ê m e , et de vouloir,
en toutes choses, faire autorité.
Malheureusement on a cette fois encore contre lui un
écrit qui le d é m e n t, qui fut présenté aux arbitres, et qui
est écrit de sa main. C ’est là qu’on a puisé l’indication
des quatre-vingt-cinq œuvres et demie de vignes. O r ,
au p r ix courant de 4000 francs la septerée, dans de moin
dres vignobles que celui de Corent, la valeur des quatre-
�( 45 ?
vingt-cinq œuvres dont il s’agit seroit plus que décuple
de l’évaluation présentée par le sieur F a y o n , puisqu’elle
s’élèveroit à 42.500 francs, au lieu de 3434 fr* Comment
se feroit-il, d’ailleurs, que des vignes du prix de 3434 f r . ,
eussent en deux années donné de 5 à 6000 fr. de reven u ?
D u Réméré.
O n pourroit se borner à répéter ici qu il étoit opere
d’avance , puisque le prix en existoit, et au delà , dans
les mains du sieur Fayon. Mais on doit ajouter qu’entre
les sieurs Mazin et F a y o n , il avoit été convenu que le
terme en demeureroit illimité ; et que le sieur Mazin
affirma devant les arbitres, qu’il avoit , sur ce f a i t , un
écrit du sieur Fayon. Seroit-ce donc pour ménager au
sieur Fayon l’apparence de la générosité lorsqu’il offre
l ’abandon de cette vente , que cet écrit du sieur Fayon
n’a pas été remis au sieur de Batz , à qui cependant il
a été souvent promis?
O u bien, seroit-ce parce qu’alors la vente dont il s’agit
ne seroit qu’ une anticlircse , un simple contrat pignoratif,
à raison duquel il ne seroit dû au sieur Fayon que l’argent
prêté sur ce gage et l’intérêt de cet a rgen t, et la compen
sation avec les jouissances.
L e sieur Fayon a effectivement déclaré à l’audience,
par l’organe de M e. Rousseau , son défenseur , qu’il n’y
avoit au fond qu’une antichrèse. L e tribunal a retenu et
déclare cet aveu dans le jugement dont est a p p e l, et le
sieur Fayon se défend seulement d’avoir personnellement
prononcé cet aveu : J e il'étois p a s , dit-il, à Vaudience.
�C 46 )
Q u ’il se l’assure ; ce n’est pas là le moyen de la cause
pour le sieur Natthey. Sous quelque nom que l’on pré
sente la vente, le sieur Natthey la soutient nulle.
On est, au reste , fort à portée d’apprécier maintenant
la libéralité du sieur Fayon dans l ’abandon qu’il offre de
cette vente. Il y met la condition tout à fait généreuse,
qu’on lui laissera sept années de jouissances -, qu’on renon
cera au solde qu’il doit de ses billets; qu’en.outre on lui
donnera une somme de 3 43 4 francs 85 centimes , pour
le payement de laquelle il veut bien accorder au sieur
Nattliey- un délai de deux mois.
A in si d o n c , le sieur Fayon doit encore sur ses billets
713 francs ; il doit de plus compte du dépôt de 873 fr. ;
il doit sept années de la plus indue jouissance, et il faut
lui remettre toutes ces sommes ! Il faut même lui payer
sous deux mois 3434 francs 85 centimes !
O l’admirable générosité ! _
D e s Antidates.
Ce chapitre est très-délicat. L e sieur Nattliey a dans ses
mains un écrit décisif : par des égards particuliers , il 11’en
fera aucun usage, quant à présent.
Il pourroit également anéantir d’un mot les fables du
sieur Fayon , lorsqu’il parle des ménagemens de pur
intérêt pour le propriétaire do Chndieu , qui le portèrent
à ne pas vouloir faire enregistrer la vente sous signature
privée , au bureau de Saint-Amant. N ’y iit-il pas enregis
trer à la même époque la ratification de la même vente?
La prétendue vente du 9 thermidor an 7 , n’étoit pas
�'b o m
C 47 )
encore faite le 7 vendémiaire an 8 , puisque le 7 ven
démiaire , le sieur Fayon , en pi-oposant ci’acheter les ré
coltes de C h a d ieu , demandoit à se retenir les 2000 J)\
et plus .dont il se prétendoit en avances. 11 avouoit toute
fois qu’il n’étoit pas libéré de ses billets au porteur , mais
ne vouloit pas de compensation.
O r donc, il ne pouvoitpas avoir été payé , le 9 ther
midor an 7 , de ces 2.000f . et plus par la vente des vignes,
et demander une deuxième fois à en elre payé su r le
p r ix des récoltes prochaines. La vente et lu contre-lettre
faussement datées du 9 thermidor an 7 , n’existoient
donc pas encore le 7 vendémiaire an 8 ? C ’est en effet
ce qui frappa les arbitres dès le premier moment. C ’est
également ce qui avoit déterminé le tribunal de Clermont à qualifier de fra u d u leu se cette vente dans son
jugement.
D ison s, puisqu’on l’a voulu , disons tous les faits. Par
la lettre du 7 vendémiaire an 8, le sieur F ayon, en de
mandant d’acheter les récoltes, ofï’roit de les payer comp
tant après qu 'il, seroit n an ti des denrées. Si donc un
débiteur demeuroit en retard, et le retard pouvoit durer
à la volonté du sieur F a y o n , il se trouveroit dispensé de
payer , comme n’étant pas encore nanti des denrées !
c’étoit annoncer qu’il ne payeroit pas de l o n g -te m p s ,
d ’autant mieux qu’ il ajoutoit n’avoir pu term iner encore
la levée de l’année précédente.
D ’auti'es personnes su rvinren t, et donnèrent d’avance
le prix total des récoltes. Les circonstances d’alors firent
prélerer ceux-ci au sieur Fayon.
Mais en l’apprenant, sa colère s’alluma ; il se rendit
�à Riom pour y traiter de la vente dont il s’agit ; et le
sieur de Batz en fut instruit sur le champ , parce que le
sieur Fayon voulut faire autoriser sa vente p a r la signa
ture d’ un homme trop honnête pour la donner.
L e sieur de Batz vit à cette occasion le sieur M azin ,
fut satisfait de cette entrevue, et ils convinrent ensemble
q u e , dès le lendemain, 14 vendémiaire an 8 , la révo
cation des pouvoirs du sieur M azin auroit lieu , afin que
l ’acte de vente, qui n’auroit pas dû avoir lieu , mais qui
venoit d’être fait sous seing, p r i v é , n’eût p o in t, par l’en
registrement , une date antérieure à cette révocation ;
q u’enfin, et par cela se u l, il se trouvât anéanti.
V aine précaution. L ’acte sous signature privée a eu ,
non pas à Saint-Amant ( et pour cause qu’on veut bien
s’abstenir de publier ) , mais à V ic-le-C om te, une date
d’enregistrement antérieure, mais de cinq jours seulement
à la révocation.
A u surplus cet a c te , ainsi que l ’a observé le tribunal
d e C le r m o n t, n’est pas conforme à la procuration; elle
prescrivoit des actes par-devant notaire. Il y e u t , non pas
v en te, mais ratification par-devant B e rth o n e t, notaire.
Elle est bien datée aussi du 9 vendémiaire, c’est-à-dire,
de cinq jours avant la révocation signifiée et enregistrée
le 1 4 : mais l’enregistrement de cette ratification suflit
pour dévoiler tout le mystère; car il est du 23 vendé
miaire , c’est-à-dire , de neuf jours après celui de la révo
cation des pouvoirs.
Vainement a dit le sieur Fayon , pour parer au moyen
qui résulte de la révocation des pouvoirs, que, dans tous
les cas, cette révocation n’é to itq u e d o Nattliey à Mazin ;
qu’elle
�( 49 )
qu’elle lui étoit étrangère, et qu’ainsi il auroit valable
ment traité avec Mazin tant qu’il n’auroit pas connu la
révocation. ( Mém. p. 29. )
Cette objection est assez indifférente dans la cause, dès
qu’on a prouvé la nullité et la fraude de la vente qu’il
avoit surprise au sieur Mazin : mais elle n’est pas môme
fondée en principe.
Il
est certain, en point de d r o it , que la cliarge de pro
cureur fondé prend fin toutes les fois qu il y a change
ment de volonté du constituant. L e choix du mandant
est lib r e , et il peut révoquer son ordre lorsque bon lui ..
semble : il n’a besoin de faire connoître sa révocation qu’à
celui qu’il révoque. T elle est la doctrine de D o m at, lois
civiles, tit. i 5 , sect. 4 , n°. i er. Son opinion est fondée
sur la disposition de la loi 1 2 , §. 16 , ff. M and. et ait
M arcellus cessare mandati actionem quia extinclum
est mandatum , fin ita voluntate.
L a révocation fait cesser le mandat. Si le mandataire
infidèle se permet d’agir après la révocation , le tiers qui
a traité avec le mandataire a bien une action contre lui,
mais il ne peut conserver la chose du mandant.
A la v é r it é ,le sieur Fayon argumente des dispositions
des articles 2004 et 2005 du Code c iv il, qui semble avoir
introduit un droit nouveau dans celte partie. M ais, sans
vouloir examiner si le sieur Fayon a bien entendu les dis
positions du Code civil, on se contentera de lui répondre
que la vente est antérieure à la publication de ce Codé;
que dès-lors il ne peut avoir aucun effet rétroactif, ni
régler les intérêts des parties.
Nous avons glissé légèrement sur les antidates, parce
G
�( 5o )
qu’on se doit à soi-même de ne fpire que le moindre m al,
même à des adversaires. Par cette raison en core, on voudroit se pouvoir taire sur la nature et les conséquences
d’une lettre qu’on est bien étonné de trouver imprimée
dans le mémoire du. sieur F a y o n , page 6. Elle avoit été
écrite, sous.le sceau du secret, au sieur Mazin par le
sieur de B a t z , alors arrê té, et au moment où la mort
planoit sur sa tête,
O n y lit ces mots :
Songez qu’ il n ’y a pas un moment ¿1perdre pour pré
venir et disposer Parades . ( Il faut savoir qu’il s’agissoit
alors de fairç reconnoître le sieur de B atz; reconnu, la
loi le condamnoit : on voit qu’il étoit urgent de prévenir
et disposer le sieur Parades déjà assigné. ) P a rlez-lu i
%'QUS-rneme,en le m andant , compte pour chose quiTin
téresse. Vous lui fe r e z entendre qu'il sera le maître de
telle reconnaissance qu'il désirera , et il peut en être
bien sûr.
Quelle prière pouvoit être plus sacrée, plus urgente,
plus facile à accomplir? L e sieur Parades a déclaré que
jamais il n’en a été informé que par la lecture du mé
moire du sieur Fayon. Confronté au sieur de Batz , et
n’étant nullement prévenu, son embarras parut extrêm e;
mais l’honnêteté lui servit de guide. Suivons :
lies services actuels étant sans p r ix , je dois au moins
« en marquer ma l'econnoissance. Ainsi , sans parler du
« comptant que j’attends, tenez-vous pour autorisé à
« vendre dès .ce moment telle portion que vous jugerez
« à propos pour fa ire , à vous 600 fr. de re n te , et à
« v o t r e PRÉCIEUX AMI 1200 fr. de rente....... V ous
�( 5 0
a auriez peut-être la facilité d ’ANTIDATER.... et d’ in« sérer une inscription où il seroit nécessaire..... Gardez
« cette promesse faite devant Dieu. »
' •
E n lisant cette lettre dans le mémoire du sieur Fayon ,
qui ne croiroit que c’est lui qui est le précieux am i du
sieur Mazin , et à qui il s’agit d’assurer une rente dé'
1200 fi\? C ’est en effet, dans ce sens que la lettre est’
présentée dans son mémoire ( pag. 6 , 7 et 29. ) Si bien
que l’on se demande : D e quelles antidates peut se plaindre
le sieur de Batz , lorsque c’est lui-même qui les sollicite?
Ce n’est pas de son côté , mais bien de celui des sieurs
Mazin et F a y o n , que se montre la générosité : ils étoient
autorisés à se faire 1800 francs de rente , indépendam
ment de l’argent comptant que le sieur de Batz attendoit
pour le leur partager sans doute. Cependant, ils ne pren
nent ni argent , ni rentes ! A u lieu de se pla in d re, le
sieur de Batz ne devroit-il pas les remercier ?
C o m m e, sous ces apparences, est cachée la plus témé
raire imposture , il faut bien expliquer l’énigme
pré
cieu x am i.
Ce précieux ami du sieur Mazin n’étoit pas cette fois
le-sieur Fayon ; mais c’étoit un officier de santé , attaché
aux prisons de Clermont. Il soignoit le sieur de Batz
alors malade , et paroissoit même pouvoir rendre des
services que le sieur de Batz aimeroit à publier1s’ils avoient
été rendus ,'é t dont l’argent et les rentes dont la lettre
parle , n’eussent été que le plus foible prix.
Mais ce précieux ami du sieur Mazin changea d’avis,
. et a tel p o in t, que le sieur de Batz dût renoncer à la moin
dre assistance de sa part. Il fallut même chercher une
G 2'
�S 'K *
( 5. )
autre voie pour la simple correspondance au dehors. D es
cet instant, l’a rg e n t, les rentes , la lettre , tout ce qui
tenoit à une pareille négociation rom pue, devoit s’éva
nouir à jamais comme elle.
E li bien ! cette lettre qui ne concernoit que le sieur Bl.
et la négociation reposée sur lui s e u l, est celle que l’on
vient de lire, et que le sieur Fayon a osé publier, pour
en faire la plus fausse, la plus criminelle application ù sa
personne, et l’arme de sa basse cupidité !
Ce que l ’on nous a contraint d’expliquer ici pour le
jîub lic, et pour pulvériser le vil moyen par lequel le sieur
Fayon a tenté d’intéresser à sa cause, et de calomnier le
sieur de Batz, avoit été expliqué de la même manière,
et avoué comme vérité constante par le sieur Mazin, en
présence des arbitres devant lesquels la môme lettre avoit
été lue par l’avoué du sieur Fayon. Il avoit cru sans doute
que le sieur Fayon étoit le personnage qu’elle désignoit
sous le nom de p récieux a n d du sieur Mazin. Mais ,
comment se f a it - il que le sieur Fayon qui , lui du
m oins, a toujours su la vérité, qui de plus fut présent à
cette explication, ait aujourd’hui l’inconccvable audace
de publier cette même lettre, et de se présenter effron
tément au public comme celui qu’elle regardoit, lorsque
personne au monde n’y étoit et n’y devoit demeurer
plus étranger que lui?
Mais cette lettre écrite devant D ieu , dans la solitude
d’ une prison où le sieur de Batz redoutoit à chaque mo
ment une fatale condamnation, et où déjà il ne tenoit
plus à la société que par un fil secret, à l’aide duquel il
pouvoit encore traiter de son salut et de sa v ie î
�W
' •
( 53 )
Mais cette lettre, qui contient plus d’un mystère dont
le voile ne pouvoit être levé que par le plus sacrilège
mépris de toutes les lois de la probité, de toutes les règles
de l’honneur !
Comment se fait-il qu’elle ait survécu, cette lettre, aux
circonstances auxquelles elle appartenoit uniquement, et
avec lesquelles elle devoit s’anéantir ?
Par quelle infidélité voit-elle à présent le jo u r ? E t ,
par - dessus t o u t , comment a-t-on pu concevoir le scé
lérat projet d’en faire un abus aussi crim inel, une appli
cation aussi étrangère à la véi'ité, et encore à la vérité
déjà connue et constatée?
S i , à l’instant où cette même lettre fut lue devant les
arbitres, par l’avoué du sieur F a yo n , et présentée dans
le sens où le sieur Fayon la donne au p u b lic, la vérité,
telle qu’on vient de la dévoiler, n’avoit pas été sur le
champ éclaircie par les aveux du sieur Mazin , par le
silence stupide du sieur Fayon, et en présence d’hommes
qu’il suffit de nommer pour attester l’honneur et la pro
bité ( M M . F a v a rt, Touttée et P a g è s ); il se pourrait
qu’aujourd’hui l’on hésitât sur le moyen, sur l’espoir de
confondre l’imposture , tant l’infamie dépasseroit la vrai
semblance . . . . si le sieur Fayon n’étoit pas dans la cause!
Mais ce dernier tr.ait m anquoit, et restera attaché à la
„
hideuse ideé de sa moralité*,' 'diftis l’opinion de ses con
citoyens. ”
A
C ’est maintenant au sieur Mazin qu’il im porte, et ntan
pas à la cause, car il n’en fut jamais de plus évidente,
d’éclaircr , s’il le juge à propos , le public ; d’expliquer
comment et pourquoi cette lettre, si étrangère au procès
�' 1
( 54 )
„ actuel, et qui n’y a été liée que par une abomination
a passé une première fois dans les mains du sieur Fayon ;
Si c’est de son aveu que le sieur Fayon vient de la
publier dans son mémoire ;
Si c’est également de son aveu qu’il a été appelé par
le sieur Fayon au partage de tant d’exécrables procédés;
car , dans son m ém o ire, le sieur Fayon déclare n’avoir
rien f a it, rien d i t , rien voulu que par le sieur M a z in ,
qui lui a tout offert et tout proposé.
Il
n' y a plus à tergiverser. Il faut que le sieur M azin
se lie inséparablement au sieur F a y o n , ou qu’il le laisse
seul dans la fange de tant d’infam ies !
Les moyens du sieur M azin restent entiers dans ses
mains ; et les sieurs de Batz et Natth e y , qui ne l’accu
sent p o in t, ne désirent que de pouvoir l’excuser.
L a cause est éclairée sur tous les points ; nulle obscurité
ne peut plus y être je té e , et le sieur N a tthey attend avec
sécurité l’arrêt de la cour.
J. D E
B A T Z , fo n d é de pouvoir
du sieur N
a t t h e y
.
D E V È Z E , avoué.
<XA\
à. /a
(A / U C U r
A,
c O S J ^ flÀ * ~ A
&
— J'aJvCJixr Ck>k
A RIO M , de l ’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Duchesne, Michel. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Batz
Devèze
Subject
The topic of the resource
ventes
immeubles
émigrés
faux
créances
vin
billets au porteur
Batz (Jean-Pierre « baron » de)
arbitrages
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire signifié, servant de réponse, pour Sieur Michel Duchesne, propriétaire, habitant de la ville de Paris, et sieur Etienne-Jean-Louis Natthey, négociant suisse, habitant de la ville de Nyon, canton du Léman, propriétaire de la terre de Chadieu, canton de Monton, arrondissement de Clermont, intimés et défendeurs ; contre Jean-Antoine Fayon, notaire public, habitant du bourg des Martres-de-Vayre, appelant de jugement rendu au tribunal civil de l'arrondissement de Clermont-Ferrand, le 9 fructidor an 11, et demandeur en opposition.
Table Godemel : Vente : 8. la vente d’immeubles consentie, le 9 thermidor an 7, à Fayou, par Mazin agissant comme fondé de pouvoir de Nathey est-elle nulle pour cause de surannation et de révocation de la procuration, comme faite sans prix, et enfin comme acte purement pignoratif ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1798-Circa An 12
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
54 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1609
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0423
BCU_Factums_M0412
BCU_Factums_M0413
BCU_Factums_G1608
BCU_Factums_G1414
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53283/BCU_Factums_G1609.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Corent (63120)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
Batz (Jean-Pierre « baron » de)
billets au porteur
Créances
émigrés
Faux
immeubles
ventes
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53284/BCU_Factums_G1610.pdf
0cf8548632bcdfb2c879c9e747290589
PDF Text
Text
/Vî? / ft/- /fsi^/v/^cy
- -»
A JUGER,
D ’A P R È S
CINQ
A U D IE N C E S ,
COUR
d ’a p p e l
SÉANT
A RIOM.
POUR
l ere. SECTION.
J e a n , et autre J e a n C H O U V E N C , père et fils,
appelans, demandeurs en tierce-opposition ;
CONTRE
C a t h e r i n e M O L I N , et les mariés VEND R I È S et B O R N E intimés, défendeurs.
S i les appelans peuvent être évincés de tout ou de
partie de la métairie du Villars , acquise par Chouvenc,
père, de Marie M o lin , le 14 août 1778?
Cette question principale amène celles-ci :
E n l a f o r m e , l’appel est-il périmé ? Dans ce cas,
la péremption n’a-t-elle pas été couverte ?
A u f o n d , l ’ac ti on des i nt im és n e d o i t - e l l e pas être
A
�écartée par la prescription de dix ans entre présens?
Ne peut-on pas opposer utilement la prescription de
trente ans à Catherine Molin ?
Respectivement à la femme Vendriès, la tierce-oppo
sition a - 1 - elle été portéç, régulièrement en la cour ?
a-t-elle été formée dans un délai utile ? a-t-elle dû être
précédée de la voie de conciliation? Les Chouvenc peu
vent-ils être considérés comme ayans cause de la Croizière ; e t , dans ce cas, sont-ils non-recevables dans cette
tierce - opposition ? S’ils sont recevables , cette tierceopposition est-elle fondée ? Mais la femme Vendriès
n’est-elle pas irrécevable à réclamer contre la cession
qu’elle a faite de tous ses droits ?
Subsidiairement, sous le rappo.it de l’une et de l’autre
des intimées , d’un côté , ne sont-elles pas garantes de
leur demande? d’un autre, le testament de Catherine
Ferrapie est-il n u l? Cette nullité, fût-elle réelle, peu (elle etre valablement opposée ? Que ce testament ren
ferme une substitution fiduciaire ou iidéicommissaire,
Marie M o lin , venderesse, n’en a - t - e l l e pas recueilli
l’effet ?
Encore subsidiairement, bien qu’on restreignit Marie
Molin , ou Chouvenc , son acquéreur , au tiers des biens ,
n’est-il pas évident que Chouvenc ne seroit pas rempli
de ce tiers ? Dans ce doute, ne seroit-il pas indispen
sable d’ordonner une estimation préalable de tous les
biens, et d’accorder compulsoire , afin d’obtenir tous
extraits d’actes propres à établir les prélèvemens dûs à
Marie Molin ?
Toutes ces questions vont composer cinq parties.
�(3)
-"
P
r
e
m
i
è
r
e
p
a
Péremption.
r
t
;t ■■j
i
e
.
L e jugement dont est appel, rendu par forclusion le
19 prairial an 2 , ne comprend que Chouvenc pèi’e avec
quelques autres cocondamnés qui ont transigé sur l’appel.
L ’acte de signification de c e jugement à domicile , du
27 messidor a n 2, a etc fait seulement à la requête de
Vendriès comme mari, quoique Jeanne Borne, sa femme,
et Catherine M olin, fussent en qualité dans ce jugement.
Jusqu’au 9 vendémiaire an 8 , on ne voit pas qu’il y ait
eu aucun tribunal saisi de l’appel, avec toutes les parties
qui figuroient dans le jugement: Jeanne Borne et Cathe
rine Molin n’ont jamais été en qualité dans les différens
actes sur l’appel. Chouvenc fils, étranger au jugement,
n’a été en qualité que pour la première fois dans l’assi
gnation du 9 vendémiaire an 8. L es.céd ulc, procès
verbal de non conciliation et assignation , des 6 pluviôse,
21 ventôse et 13 germinal an 9 , qui ont eu lieu à la
requête de Catherine Molin et de Jeanne Borne , sans
accession de Vendriès, d’avec qui sa femme se dit séparée
quant aux biens, prouvent qu’il n’y a pas eu, jusqu’à cette
époque, de péremption, et que même plusieurs des par
ties qui avoient fait appel s’étoient désunies et avoient
fait des traités. Il 11’y a pas eu péremption, parce que la
péremption n’atteint que les parties qui sont en instance,
et lorsqu’il 11’y a ni mutation dans les personnes, ni chan
gement dans l’état de l’aflaire. O r , i°. Catherine Molin
A 2
�(4)
et Jeanne Borne n’ont jamais été en qualité sur l’appel
avant le 9 Vendémiaire an $ ; n°. d’un c ô té , le iils Cliouvenc , donataire de son père, est devenu un nouveau per
sonnage dans l’instance; d’un autre, u supposer que l’ins
tance fût liée avec toutes les parties , comme elle l’étoit
par l’intérêt réciproque émanant du jugement dont est
appel, puisque l’éviction n’étoit que conditionnelle, si
les objets des dernières ventes ne suflisoient pas pour
remplir les intimées, cette liaison,et de personnes,et d’in
térêts, a cessé par des arrangemens partiels avec plusieurs
des condamnés, ainsi qu’il est constaté par les cédule,
procès verbal et assignation, des 6 pluviôse, 21 ventôsô
et 13 germinal an 9. Outre que ce changement appor-4
toit une novation dans l’état de la procédure, il s’agissoit
de prendre de nouvelles conclusions à raison de la dis-*
jonction de diverses parties colitigantes: il n’y avoitdonc
pas, de l’aveu même des intimées, péremption en l’an 9.
A u reste , cette péremption n’eût pas été encouruede
plein droit. Il est vrai que le parlement de Toulouse différoit,danssa jurisprudence, decelui deParis. Danscelui-ci,
il falloit demander cette péremption , au lieu q u e , dans
celui-là , le seul laps de temps couru suilisoit pour asseoir
cette espèce de prescription : cependant, c’étoit contrairé
à l’esprit de la loi Properandurn, et à la doctrine des
plus célèbres jurisconsultes. La péremption , sans doute,
est une peine résultant d’une négligence. Pour avoir en
couru cette peine, il faut bien que la négligence soitconstmte , et elle ne peut l’être que par une déclaration judi
ciaire. C’est ce qui résulte des expressions de la loi P o st
liteni contastatarh j d’où conclut M . Bonnament, nou
�(5)
vel auteur provençal, maxim. 27, que la péremption
n’a pas lieu pour les sentences par défaut ou forcluclusion : c’est de cette nature qu’est le jugement dont est
appel. Ce môme jurisconsulte, tom. 1 , max. 24 , n°. 8,
enseigne que la prescription ne peut être suppléée par le
ju g e , qu’elle doit être proposée par la partie qui veut
fe’en aider, vu que la prescription n’étant pas meri j u n s ,
sed con trà , partim juris , partim f a c t i f \e juge, en la
suppléant, suppléeroit au fait qui doit toujours être avoué
par les parties.
D ic i potest, enseigne Faber, nullam reo imputandam
négligentiam, quamdiii nullam acior diligentiam adhib u it.........actorum enirn est lites perseqni , reoruni
fu g e r e . . . . potuerint milita accidere quœ ju e r in t ne
hodiè Us tractari passif.
Ici, nulle poursuite avant l’an 9 , sur l’appel de Cliouv e n c , de la part des intimées ; et il est a rr iv é , entre
toutes les parties comprises dans le jugement, des con
ventions qui ont changé l’état du litige.
M . D u v a l, 1). reb. dub. , tract. 1 5 , veut que le juge
prononce sur le.fait; et Mornac , qui pense comme le
précédent, dont il fait l’éloge, rapporte un arrêt du 3 mai
1618 , lors duquel M. le président dit qu’il n’y avoit pas
de péremption si personcirum mutatro intercesserit.
Dans l’espèce, il y a eu nécessairement changement de
personnes par les traités faits entre plusieurs des con
damnés et les intimées sur les objets corrélatifs avec les
Chnn venc.
Il laut conclure que le parlement de Paris avoit mieux
„.saisi le véritable sens de la loi Properandum , en subor
�C6 )
donnant la peine de la prescription à la vérification et à la
prononciation du fait de négligence, s u p e r l i t e m c o n T E S T A T A M ; et on doit regarder comme déclaration d’un
droit ancien dans la diversité de jurisprudence des deux
parlemens de Pax*is et de Toulouse, la disposition du
Code c iv i l , qui porte, art. 2223, « que les juges ne peu« vent pas suppléer d’office le moyen résultant de la
« prescription. »
Il n’y a donc jamais e u , ni de fait, ni de droit, aucune
péremption; mais existât-elle, elle a été couverte par
la cédule du 6 pluviôse an 9 , par le procès verbal de non
conciliation, du 21 ventôse, et par l’assignation du 13 ger
minal de la même année ; par l’acte de bail de copie du
jugement dont est appel, contenant sommation , de la
part des intimées , de signifier causes et griefs ; par leur
réponse à ces griefs ; par les conclusions au fon d , prises
par Vendriès dans sa requête d’intervention, et par-le
jugement qui a reçu cette intervention. L ’exception de
péremption n’a jamais été considérée comme étant de
droit public; il est libre aux parties d’y renoncer. C’est ce
qu’enseignent M . de la Moignon , pag. 58 , raax. 224;
Despeysses, tom. 2, pag. 538; Graverol sur LarocheF la v in , pag. 234 ; L a n g e , tom. 1, pag. 626, 627 ; le jour
naliste du palais de Toulouse, qui rapporte un arrêt de
cette cour, du 20 févi’ier 1727 ; Rodier, pag. 259; enfin
Vodel sur Catclan, tom. 2, 'pag; 197 , d’après un arrêt
du 13 septembre 1691.
:
...
-
�*bzs>
(7 )
D e u x i è m e
p a r t i e
.
Prescription de d ix ans entre présens.
~ '« Celai qui acquiert de bonne fo i, et par juste titre,
« un immeuble, en prescrit la propriété par clix ans. »
( Art. 2265 du Code civil. )
« La bonne foi est toujours présumée ; et c’est à celui
« qui allègue la mauvaise loi à la prouver. » ( Art. 2268. )
« Il suffit que la bonne foi ait existé au moment de
« l’acquisition. » ( Art. 2269. )
« Les prescriptions commencée^ à l’époque de la pu« blication du présent titre, seront, réglées conformément
« aux lois anciennes. » (A rt. 2281.)
^Ce dernier article n’est cité que pour rappeler que la
loi nouvelle se réfère aux anciennes sur les difficultés
résultantes de la prescription.
Les trois autres articles ne peuvent pas présenter de
question de rétroactivité, parce qu’ils ne sont qu’une
déclaration du droit ancien, établi et expliqué par les
lois romaines ; mais ils prémunissent contre tout ce qui
pouvoit contrarier le caractère de bonne foi.
Ces articles ne sont que la répétition des articles 46 ,
49 et 5o du projet du Code. 11 n’est point de tribunal,
ni d’autorité, qui ait proposé la moindre observation ;
et après que M . le conseiller d’état Bigot-Préameneu
et M . l’orateur tribun Goupil-Préfeln, se sont réunis,
comme l’avoient fait les empereurs romains, pour dis
tinguer les possesseurs avec litre et bonnç foi, de ceux
�(8 )
qui manquoîent des d eu x, ou de l’un ou de l’autre, se
sont accordés, autant pour la paix des familles que pour
l’intérêt de l’agriculture , à poser pour principe que
l’acquéreur de bonne fojL et par juste titre ne doit pas
être exposé à l’ester dans une longue incertitude, pour
se livrer avec confiance aux constructions, et aux amélio
rations, par défrichement ou dessèchement.
« Le titre est juste, dit l’orateur tribun, à l’égard de
« l’acquéreur, quoiqu’il puisse ne l’être pas de la part
« du vendeur; et la bonne ou mauvaise foi de celui-ci
cc ne peut être d’aucune considération relativement à
« l’acquéreur de bonne foi ; et c’est à celui qui revendique
« à prouver la mauvaise foi. »
Chouvenc a eu juste titre et bonne foi, le 14 août 1778,
par l’acquisition qu’il a faite de Marie M olin , qui étoijt
notoirement reconnue comme possédant l’universalité des
biens délaissés par Pierre Molin et Catherine Ferrapie,
ses père et mère.
Mais, d it - o n , i°. Marie Molin ne pouvoit vendre
que sa portion, et nullement celle de ses cohéritiers ;
20. d’après la Novelle 119 , chap. 7 , ses cohéritiers ayant
ignoré Ja vente, ont eu trente ans pour revendiquer ;
30. le droit romain n’est qu’une raison écrite; 40. la
jurisprudence constante du parlement de Toulouse, at
testée par Boutaric et par Serres, n’admettent pas cette
prescription de dix ans ; 5°. aujourd’hui cette jurispru
dence doit tenir lieu de loi.
RÉrONSE.
�(9 )
RÉPONSE.
Premièrement, Marie Molin ne pouvoit pas sans
doute vendre la portion de ses cohéritiers ; et il est éga
lement certain que ces cohéritiers avoient trente ans utiles,
du jour de l’ouverture de la succession, pour l’éclaincr
contre toute vente faite par l’un d’eux : mais la question
concerne l’acquéreur. O r , que Marie Molin fut consi
dérée comme possesseur ou vendeur de mauvaise foi, res
pectivement à la vente des portions d’autrui, Chouvenc,
second possesseur, seroit dans le cas de la Novelle :
habens titulum et bonam fidem à malœ fîdei possessore
prœscribit inter pressentes spatio decem annorum.
Si Chouvenc étoit lui-même en mauvaise foi, ce seroit
aux intimées à le prouver; mais il étoit dans un bonne
foi évidente ; il avoit vu constamment Marie M o lin ,
'Chambarlhac et Dejoux, ses deux premiers maris, jouix-,
au su et en présence des sœurs et frère, de l’universa
lité des biens laissés par les père et mère communs, de
puis 1745, c’est-à-dire, depuis trente-trois ans : le 14 août
1778 , il avoit lieu de croire que Marie Molin étoit
libérée par quittance ou par prescription de la part de
ses cohéritiers. Cette croyance, qui constitue la bonne foi
de cet acquéreur, n’est-elle pas pleinement justifiée par
le seul fait de la possession paisible de Marie Molin ,
pendant plus de trente ans avant le contrat de vente
du 14 août 1778 ?
Catherine Ferrapie, mère des enfans Molin , décédée
le 28 mars 1735, avoit laissé le domaine du Villars, des
B
�t’
>4
( 10 )
biitimens et jardin à Tence, et divers héritages détachés.
Pierre M olin, leur père, décédé le 20 mars 1745, a voit
en copropriété, alors indivise avec ses frères et ses oncle
et tante , le domaine de la Bruirette, et une maison et
jardin à Tence.
D u mariage desdits Molin etFerrapie, étoient nés six
enfans : i° . Marie M olin , venderesse, née le 2 février
1718, pubère en 1730, majeure à l’époque du décès de
son p è re , jouissant h cette époque de cette métairie par
elle vendue en 17 78 , et mariée pour la première fois,
en février 175 3, à Chambarlliac ; 20. Catherine, Tune
des intimées, née le 24 janvier 1720, pubère en 1732, et
majeure avant la mort de son père, décédé le 20 mars
1746 : elle avoit laissé jouir paisiblement sa sœur aînée et
ses deux maris pendant trente-trois ans; 30. M a r g u e r i t e ,
décédée le 17 décembre 1740, conséquemment avant le
père , et dont personne n’avoit réclamé la portion ;
40. Jeanne, née le 7 février 1725, décédée le 10 juin
1778, et qui n’avoit aucunement réclamé; 5°. Pierre, né
le 2 mai 17 3 1, mort le 3 novembre 1748 ; 6°. Thérèse,
née le 5 avril 1733, mariée le 5 avril iy 55 avec Borne,
mère de la femme Vendriès, autre intimée : Thérèse
Molin étoit veuve depuis le 13 mai 1768, et domiciliée,
depuis cette époque, à Tence, lieu de sa naissance.
Si Chouvenc avoit pu concevoir quelque inquiétude
respectivement à ces trois derniers enfans , n’é toi t-il pas
parfaitement rassuré relativement aux trois autres, d’au
tant que l’objet de son acquisition ne formoit pas le tiers
des biens des père et mère ?
En falloit-il donc autant pour établir la sécurité , la
bonne foi de cet acquéreur ?
�2> Z 1
( 11 )
Secondement, peut-on raisonnablement supposer dans
Catherine et Thérèse Molin l’ignorance de la vente faite
par leur sœur ainée , en 1778 , à Chouvenc ? S i vcrus
dominus hune possiderc sciait et ipsum non inquietavit.
Sin autern ignoravit, tum non prœscribit n isi spaiio
trigenta annorinn.
Admettons, contre la vérité , que Chouvenc eût cru
acheter seulement une partie du domaine du Villars, d’un
possesseur de mauvaise f o i , Catherine Molin et ses sœurs,
majeures depuis long-temps, et cohabitant , selon ellesmêmes , avec leur sœur aînée et leur beau-frère , q u i ,
l’une majeure et l’autre pubère , au décès de leur p è r e ,
a voient vu Chambarlhac et Dejoux , maris de Marie
Molin , jouir de ce domaine , pourroient-elles être pré
sumées , vivant dans la môme commune , bien p lu s ,
sous le même toit , n’avoir pas su que la jouissance de
ce domaine avoit passé de la veuve Dejoux à Chouvenc
en 1778 ? L e contrat de vente authentique n’a-t-il pas
reçu sa publicité par le contrôle et l’insinuation ? Peuton croire qu’elles ne s’étoient pas aperçues qu’il ne venoit
plus dans la maison, de métayer du Villars, qu’il n’y avoit
plus de ce domaine, ni quart, ni pittance, ni volailles,
ni corvées? Si elles se fussent crues copropriétaires ,
n'auroient-elles pas inquiété cet acquéreur. Ce silence
ne p r o u v e - t-il pas qu’elles ont sanctionné la venle ;
qu’en tout événement elles ont adopté ce que la règle , en
matière de partage , fait pratiquer , de faire entrer dans
le lot du cohéritier vendeur ce qu’il a aliéné.
En troisième lieu , de quelle utilité peut être dans la
cause ce qu’ont opoose les intimés sur l’eiïet du droit
D 2
�I
(12)
romain en France? Tout ce qu’on pourroit répondre
équivaudroit-il aux dispositions de lu cour de cassation ,
qui a souvent jms pour base d’annullation de jugemens,
diverses contraventions aux lois romaines ?
4°. C’est bien juger légèrement de la jurisprudence
d’une c o u r, de ne pas saisir l’ensemble des opinions de
ses jurisconsultes. A la vérité , Serres, d’après Boutaric ,
qui n’a fait à ce dernier que quelqu’augmenlation , atteste
que dans les pays de droit écrit on ne peut acquérir les
immeubles , non plus que les meubles , que par une
prescription de trente ans , qui est appelée , en d r o it,
longissimî te/nporis. Boutaric se demande par quelle
bizarrerie la prescription de dix ans se trouve adoptée
dans les pays coutuiniers , et l’ejetée dans les pays de
droit écrit : mais , continue-t-il, « c’est chose dont il est
a assez difficile de rendre raison, si on rie veut dire qu’en
« cela les pays coutumiers et les pays du droit écrit ont
« cherché à se conformer aux principes du droit romain ,
« quoiqu’ils s’en soient également éloignés les uns et les
« autres. » 11 accuse les auteurs de la coutume de Paris
de n’avoir pas réiléchi que la Novelle 119 exige que
celui qui allègue la prescription, ait acquis d’un autre qui
fût aussi dans la bonne f o i , du moins dans le cas où le
véritable propriétaire a ignoré l’aliénation et le droit
qu’il avoit en la chose aliénée ; et il accuse encore les
jurisconsultes des pays de droit écrit cc de n’avoir pas
« réiléchi que la Novelle ne fait d elà connoissance du
« propriétaire une condition pour la prescription de dix
« ou de vingt ans, que lorsque celui qui veut prescrire
c ou qui allégué la prescription a acquis d’un possesseur
�)
( *3 )
de mauvaise foi-, que l’esprit de la Novelle est celui-là,
que l’ignorance où est le propriétaire et de l’aliénation
et de son droit, est un obstacle à la prescription de dix
ou de vingt ans, lors seulement que celui qui allègue
ou qui oppose la prescription n’a pas acquis d’un possesseur de bonne foi , et que la mauvaise foi de celui
qui a aliéné n’est aussi un obstacle à la même prescription, que lorsque le propriétaire n’a pas eu connoissance de l’aliénation et de son droit sur la chose
aliénée. »
...
Maintenant, dans tous les systèmes, quelle application
eût faite Boutaric dans cette espèce , où Catherine et
Thérèse M olin, copropriétaires du domaine du Villars,
majeures depuis long-temps, habitant dans ila même com
mune, bien plus, réputées, selon elles-mêmes, jouissant
par indivis, par une cohabitation avec f Marie M o lin ,
n’ont pu ignorer la vente? Bouta i’ic n’eût-il pas pensé
que dans celte position où étoient l’acquéreur et la venderesse, ni l’un ni l’autre n’ont pu avoir de mauvaise foi ?
A in s i, d’après ces deux jurisconsultes, Boutaric et
Serres, il seroit contraire à leur doctrine, et ce seroit
faire injure à la loi romaine et à la raison qui en est la
base, de confondre les deux prescriptions langi et longissim i iem poris, le possesseur avec titre et bonne foi,
d’avec celui qui n’a ni l’un ni l’autre.
A u surplus, ces deux professeurs ne rapportent aucun
arrêt de Toulouse, parce que sans doute il ne s’est point
présenté d’espèce semblable à celle-ci, ou, s’il y en a eu,
le premier propriétaire ou l'acquéreur éloit de m a u v a i s e
foi, ou le propriétaire évincé n’avoit pas, ou pouvoit
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
�C
!4 )
être présumé n’avoir pas connoissance de l’aliénation.
Enfin, ces deux professeurs, dont l’avis ne pourroit
équivaloir à une jurisprudence constante, sont contrariés
par la majorité des auteurs qui ont traité cette question
pour le droit écrit.
L ’auteur des Remarques du droit français, un des plus
anciens du parlement de Toulouse, qui vivoit en i5oo,
et dont l’ouvrage a été imprimé en 1 5 14, établit, pag. 457,
pour dix-liuitième maxime, qu’en la prescription de dix
ans inter prœsentes.... Ju re ciçili suffîcere bonam jîdem
Jouisse in initio contractas ; ou bien : Tempore traditio n is, s i post contractum res empta aut permulata
tradita fiie r it.
Guypape, du parlement du Dauphiné, cité par Serres,
Guypape, auteur plus ancien que le précédent, d it,
qu. 416, que « la prescription de dix ans entre présens....
« pour les immeubles possédés avec titre et avec bonne
« foi, est en partie favorable et en partie odieuse : par
« cette considération, on prend un milieu pour elle. La
« contestation en cause l’interrompt, et non le simple
« exploit libellé. »
D u perrier, du parlement de P roven ce, admet celte
espèce de prescription; mais deux choses l’ont, d i t - i l ,
rendu presqu’inutile, i°. dans le cas de la nullité de la
vente; 20. lorsque la mauvaise foi du vendeur passe à la
p er s o nne de l’uclieteur, si ce n'est que le propriétaire
sache la vente et ne s'en plaigne pas. Il ajoute que p r e s
q u e J A M A I S la prescription de dix ou de vingt ans 11e
suffit au possesseur contre la revendication.
Son annotateur en induit que cette prescription est de-
�I
( '5 )
venue pi’esqu’inutile, et que, d’après le cardinal Luca ,
elle n’est plus que pour les écoles, parce qu’il y a dans
le palais bien des remèdes pour s’en garantir.
Ces autorités militent pour Cliouvenc. L u i, ainsi que
Marie M olin, ont été chacun de bonne foi, et Catherine
et Thérèse Molin ont connu la vente, et ont laisse jouir
l’acquéreur, paisiblement plus de dix ans. Si presque
jam ais la prescription de dix ans ne suffit, si elle est
devenue presqitinutile parce qu’il y a dans le palais
bien des remèdes pour s'en garantir, il s’ensuit néces
sairement qu’elle suffit quelquefois et qu’elle est utile,
lorsque, comme dans l’espèce, il n’y a pas de remèdes
pour s’en garantir.
Bonnainent, du même pnys, maxime 42, qui cite mal
a propos sur cette question l’article 134 de l’ordonnance
de 1539, rapporte l’opinion de Duperrier; il atteste que
Buisson, autre auteur provençal, certifie que l’on donne
pour Tordinaire trente ans, et que cependant de Bczieux
rapporte un arrêt contraire intervenu sur des circons
tances différentes.
Papon , dans ses Arrêts, liv. 12, n°. 7 , des prescrip
tions , certifie qu’en pays de droit écrit les prescriptions
décennales et vicennales sont pratiquées.
Mais revenons aux arrêtistes du parlement de T o u
louse.
Voici ce qu’a éçrit M . Mainnrd , conseiller en cette
cour , tom. 2 , pag. 107 : ce II s’est élevé des disputes et
« questions dans des cas occ.urrens, au sujet de telles et
« semblables prescriptions , sur ce qui peut être estimé
« juste et valable titre avec bonne fo i.... Ces questions
�( iG )
« f o r t brouillées ont fait qu’on ne s’arrête pas fo r t ordi« nairement et précisément à la prescription de dix et de
« vingt ans ; la prescription de trente ans , dite d’un
« long temps par les empereurs , étant celle qu’on tient
« et garde exactement. »
Cet ajouté est contraire aux expressions précédentes :
On ne s'arrête pas f o r t ordinairement.
Despeysses a éludé cette question, en distinguant néan
moins , tom. i , part. 4 , titre 4 , par deux articles différen s, la prescription de dix ans pour les immeubles,
d’après Guypape et la loi romaine, au Cod. D e prœscript, long, te/np, , d’avec celle pour l’hypothèque.
Aussi , d’un côté , ne v o it-o n rien dans Albert ,
Cambolas , Dolive , Laroche et le Journal du palais ;
d’un autre , les jurisconsultes des autres parlemens de
droit écrit attestent le contraire de Serres et de Boutaric.
D u n o d , que Serres n’invoque que sur la prescription
de trente ans, page 19 4 , au lieu de s’être porté sur ce
qu’il dit de la prescription de dix ans, page 17 5 , Dunod,
disons-nous , atteste que cette prescription de dix ans
s’observe dans les pays de di’oit écrit.
Bretonnier, dans ses Questions alphab,, tom. 2 , p. 74,
rapporte que tous les parlemens de droit écrit admettent
cette prescription de dix ans , et il n’excepte que celui
de Grenoble , non pas selon G uypap e, mais d’après
Çliorier,
Ilenrys , auquel Boutaric renvoie , tom. 2 , liv. 4 ,
çhap. 6 , quest. 19 , pag. 240 et 241 , explique disertement la Novelle , et rapporte un arrêt du parlement
de P a p s , du 6 mai 1637 , approbatif d’une sentence de
la
�( 17 )
la sénéchaussée de Lyon , qui avoit confirmé la décision
du bailliage de Forez , pays de droit écrit, dans la cause
des nommés Maison-Neuve et F a u re , bien moins favo
rable que dans l’espèce présente , puisque Faure , tiersacquéreur , avoit su le droit du demandeur. Il persiste ,
sur la question 42 , n°. 7. Ses observateurs tiennent la
même opinion ; et le dernier, page go 5 , donnant, a
l’aide de Salvain, usage des iiefs , chap. i er. , un démenti
à Ghorier , assure « qu’il n’y a point de maxime plus
« certaine dans tout le droit que celle qui établit la près« cription de dix ans entre présens, et vingt ans entre
« absens ; et cette maxime a paru si juste et si utile ,
« qu’elle a été embrassée par toutes les nations : elle est
« devenue le droit commun de toute l’Europe. »
Cependant il convient d’usages différens , et il désire la
cessation de ce schisme dans la jurisprudence.
Enfin nos auteurs élémentaires en ont fait des prin
cipes de notre ancien droit ; Pocquct de Livonnière ,
chap. 9 , max. 34 , pag. 530 ; A rgou , pag. 235 : et le
Code civil est p lu tô t, dans cette partie , déclaratif de ce
droit ancien que constitutif d’un droit nouveau , en éta
blissant l’uniformité qui doit dorénavant avoir lieu dans
toute l’étendue de l’empire, sur cette incertitude ou sur
cette vacillation de jurisprudence ; mais , selon tout ce
qui vient d’être rapporté du parlement de Toulouse ,
d’après même Boutaric et Serres, et les autorités qu’ils
rappellent, rien n’est plus incertain que la jurisprudence
de cette cour sur l’inadmission de la loi romaine , dans
tous les cas du concours de la bonne foi et du juste titre,
C
�( i8 )
avec la connoissance de la vente de la part du coproprié
taire présumé , sans nulle inquiétation.
Cinquièmement , des novateurs ont porté atteinte à
cette ancienne maxime JNo7i exemplis sed legibus judicandum. Il paroît même que dans quelques circonstances
la cour de cassation a préféré la jurisprudence d’une cour
à la disposition textuelle de la loi romaine. Nulle loi
humaine n’a pu tout prévoir. Certainement l’autorité
établie pour la sauve-garde des lois ne reproduira pas
les enquêtes par turbes , et ne mettra pas les répertoires
de jurisprudence en opposition avec le Code c iv i l , dont
le principal bienfait tend à ramener tous les tribunaux
à l’unité de pratique , comme il a établi l’unité de prin
cipe ; mais , dans cette conjoncture , nulle jurisprudence
déterminée qui ait atténué le résultat des longues mé
ditations des législateurs romains, par la Novelle 119 ,
qui est devenue le type des trois articles de notre Code.
Il n’y a pas eu seulement présomption d’entière pro
priété sur la tête de Marie M olin , venderesse, comme
dans l’espèce de l’arrêt rapporté par Henrys ; il y a eu
à la fois certitude de cette propriété , et connoissance de
la vente, de la part de Catherine et de Thérèse Molin.
A u surplus, autant les certitude et connoissance, que
la nécessité d’adopter cette espèce de prescription, acquer
ront plus de force par le surplus de cette discussion.
�3î j
( I9 )
T r o i s i è m e
p a r t i e
.
Prescription de trente ans.
Cette prescription est relative à Catherine Molin. Née
le 24 janvier 1720, elle étoit pubère le 28 mars 173^,
jour du décès de sa mère ; elle étoit majeure lors de celui
de son père, du 20 mars 1745. Elle a successivement hé
rité , i°. de Marguerite , sa sœur, morte le 17 septembre
1740; 20. de Jeanne, autre sœur, q u i, née le 7 février
1725, est décédée le 10 juin 1778 ; 30. de Pierre M olin,
son frère , q u i, né le 2 mai 17 3 1, est mort le 3 novem
bre 1748.
Pendant tout le temps qu’a vécu Marie M olin, décé
dée en 1788, Catherine , sa sœ ur, l’une des intimées , n’a
rien réclamé. Il y avoit donc prescription trentenaire
depuis 176 5, respectivement à la succession de la mère,
dont la métairie dont il s’agit, faisoit partie; depuis 1775,
pour celle du p ère, et depuis 1770, pour celle de M ar
guerite M o lin , sa sœur. A l’égard de Jeanne Molin , autre
sœur , décédée en 1778 , elle n’avoit rien réclamé depuis
les décès de ses père et mère, de Marguerite, sa sœur, et
de Pierre, son frère; en sorte que Marie Molin , venderesse , avoit prescrit contre toute prétention de Catherine
M olin , sa sœur, l’une des intimées, soit de son chef, soit
comme représentant Marguerite, Jeanne et Pierre Molin,
ses sœurs et frère, décédés en 1740, 1746 et 1778.
Mais, dit-on , pour Catherine Molin , sa cohabitation
et celle de Jeanne avec Marie Molin ont i n t e r r o m p u
cette prescription.
C 2
�( 20 )
D ’abord, si ces cohabitations sont réelles, l’acquéreur
de Marie Molin en induit, ainsi qu’on l’a remarqué ,
la preuve que les deux sœurs ont eu connoissance de
la vente faite par leur sœur aînée, du domaine du Villars,
à Chouvenc, le père, en 1778, et dès-lors, nulle diffi
culté d’adopter la prescription de dix ans entre présens.
Secondement, cette prétendue cohabitation n’est point
établie contradictoirement avec Chouvenc qui la désavoue.
En troisième lie u , fût-elle certaine , elle ne seroit interruptible de prescription qu’au regard des cohéritiers ,
et nullement envers Chouvenc, tiers acquéreur.
Quatrièmement, ce moyen ne poürroit être opposé,
et mériter quelque considération , que respectivement
aux portions de Catherine et de Jeanne, nullement sous
le rapport de Marguei'ite et de Pierre, décédés en 1740
et 1745.
Enfin, cette cohabitation avec des beaux-frères, maris
et usufruitiers des biens de Marie M olin , n’équivaudroit
pas à une possession indivise, capable d’opérer celte in
terruption naturelle, exigée par les lois, et qui n’a lieu que
per corporalem et realem detmtionem rei. C’est ce qu’en
seignent d’Argentré, sur l’article 276 de la coutume de
Bretagne, cap. 4 , n°. i er.; Domat, liv. 3, tit- 7; Pothier,
sur les pandectes, liv. 4 1 , tit. 3 ; D u val, tract. i 5. C’est
d’après cette doctrinç que le parlement de Bordeaux,
par arrêt du 21 mars 1673, i*apporté par Lapeyrere, a
jugé que le légitimaire étoit non-recevable, pour n’avoir
pas formé sa demande dans les trente ans, quoiqu’il eût
été nourri dans la maison de son frère. Cet arrêt, contraire
à ceux cités par D o liv e , et à son opinion, a relevé la
�( 21 )
fausse interprétation que cet auteur et divei*s juriscon
sultes ont donnée à la loi 7 , au cod. Carn n otissin ù ,
§. 5 , imo et illu d , parce que par les expressions per
hanc detentionem, on ne peut entendre qu’une posses
sion réelle, corporelle, ou d’intention ; et c'est ainsi que
l’a expliqué le Code civil, art. 2243, qui doit à cet égard
être déclaratif du §. imo et illud.
Les intimés se sont abusés en invoquant, à cet égard,
les lois F a m iliœ erciscundœ , commuai dwidundo.
Ces lois n’ont aucune application.
Sous le rapport de Marie M o lin , venderesse, elle- a
dû réclamer contre la ven te, et contre la promesse de
ratifier dans le délai de dix ans depuis sa majorité ; et
c’est ce qu’elle n’a pas fait.
Sous le rapport de l’acquéreur, il n’est pas cohéritier;
c’est un tiers détenteur : on n’ordonne, et on ne fait de
partage avec l u i , que lorsqu’il s’agit de le réaliser avec
des cohéritiers dont l’acquéreur a acheté. I c i, il n’y a
dans les intimés que des cohéritiers qui représentent le
vendeur.
,
Les appelans pourroient borner là la discussion ; les in
timées doivent être repoussées, l’une et l’autre, par la
prescription de dix ans entre présens; subsidiairement,
Catherine M o lin , par celle de trente ans. Mais pour
suivons sur les autres subsidiaires.
�( «
Q u a t r i è m e
)
p a r t i e .
Tierce-opposition.
%
Ce subsidiaire n’a lieu que parce que la femme V en d riès, fille de Thérèse Molin , a opposé un jugement
en dernier ressort, qu’elle a fait rendre le 26 janvier
1 793 5 avec
Croisière, troisième mai*i et héritier tes, ^y^i^taire de Marie Molin.
D ’abord la cour- est-elle compétente pour connoître
de cette tierce-opposition? Les intimés ont soutenu la
négative dans leur réponse à griefs , et aux premières
audiences; mais ils n’ont pu répliquer ni au moyen résultant du fait que la cour a remplacé le tribunal du
P u y , qui a jugé comme cour dappel,, ni au moyen du
droit ; de ce q u e , d’un côté, d’après la loi du 11 février
1791 , en assimilant la tierce - opposition à la requête
civile, par induction de l’art. 2 tit. 35 de l’ordonnance
de 1667, elle devoit être portée à un tribunal d’appel;
de l’autre, s’agissant de tierce-opposition à un jugement
en dernier ressort, il eût fallu nécessairement se pour
voir devant le même tribunal qui l’avoit rendu, ou devant
celui qui lui est substitué, parce que la tierce-opposition
n’est qu’une intervention qui ne peut etre portée à
d’autre tribunal q u ’à celui qui a l’endu le jugement contre
lequel réclame cet intervenant qui n’y a pas été partie.
Enfin, les intimés se sont départis de ce moyen ù la der
nière audience.
�( 23 )
Les Chouvenc ont-ils renoncé à cette tierce-opposi
tion , et ont-ils été astreints à la former dans les dix ans?
i°. Il faut une déclaration expresse pour renoncer à
un droit acquis. L e silence, surtout dans une cause que
les appelans ont dû laisser juger par défaut, ne peut pas
tenir lieu de cette déclaration. »
2°. S’il y a diversité d’opinion sur le délai de dix ou
de trente ans pour former opposition , il n'en a jamais
existé sur la tierce-opposition. Rodiei’ , sur l’article 10 ,
titre 27, et sur l’article 2 , titre 35 de l’ordonnance de
1667 , distingue non-seulement l’opposition de la tierceopposition, mais encore la tierce-opposition de la part
d’un tiers qui n’a pas été du tout appelé , d’avec la tierceopposition de celui qui a été indûment appelé. Tout
tiers-opposant a trente ans pour réclamer , pai’ce que
l’ordonnance ne fixe pas de délai, qui dès-lors est celui
de trente ans, que le droit commun a fixé pour acquérir
la prescription.
A u reste, disent les intimés, cette tierce-opposition
est nulle, parce qu’elle n’a pas été précédée de tentative
de conciliation.
Cette tierce-opposition n’a eu lieu, que parce que les
intimés ont voulu exécuter, contre les appelans, le juge
ment en dernier ressort, qui ne les concerne pas. Ce
n’est pas par action principale, mais seulement par excep
tion nécessairement incidente au procès , qu’ils l’ont
formée. La loi n’assujettit à cette voie préalable, que les
demandes principales ; et c’est ce qui a été jugé p a r la cour
de cassation, p a r divers arrêts des 29 p r a i r i a l an 9 ,
5 pluviôse, 24 prairial an 1 1 , 2 6 vendémiaire an 12.
�( H )
A u surplus, insistent les adversaires, cette tierceopposition n’est ni recevable, parce que Cliouvenc est
l’ayant cause de la Croisière, ayant été entendu dans sa
personne , lors du jugement du 26 janvier 1793 ; ni fon
dée , parce qu’il a été bien jugé en prononçant la nul
lité du testament de Catherine Ferrapie; qu’en tout cas
Marie IVlolin n’avoit pu recueillir la succession de sa
m ère, Catherine Ferrapie.
Premièrement, Jousse n’entend par ayans cause, que
les créanciers qui exercent les droits de leur débiteur,
èt non ceux qui succèdent à titre particulier de dona
tion ou de vente.
Comment Chouvenc, acquéreur de Marie Molin pen
dant qu’elle étoit veuve D e jo u x , en 1778 , pourroit-il
être l’ayant cause de la Croisière , qui n’est devenu mari
de cette venderesse, et son héritier testamentaire , que
long-temps après ce contrat de vente ? Si cet héritier n’a
pu disposer par contrat en faveur d’un autre , de ce
que Marie Molin avoit vendu à Chouvenc , a-t-il pu
nuire judiciairement à cet acquéreur ? N ’est-il pas éga
lement certain , par la loi 2, au code, liv. 7 , tit. 3 6 , par
celle du digeste 1 , liv. 41 , tit. 2 , et 74, liv. 5o, tit. 17,
que pas plus la chose jugée qu’un contrat ne peuvent nuire
à un tiers.^
L ’ancienne, comme la nouvelle jurisprudence, se sont
conformées à cette règle , souvent même lorsqu’il a été
ques ti on de créanciers , en expliquant les cas susceptibles
de l’application de l’article je*-, ou de l’article 2 du titre 35
de l'ordonnance de 1667.
Avant cette ordonnance, un arrêt du parlement de
Paris,
�c 2 5 }
Paris , du 20 mai 1599, rapporté par Papou , avoit reçu
la tierce-opposition de Claude de Tourn on , tiers-posses
seur des biens d’un débiteur insolvable, et contre lequel
il y avoit présomption de collusion.
Celui du 28 mars 1702, au Journal des audiences, est
étranger à l’espèce, ainsi que celui du conseil, en 1704,
l’apporté par Brillon.
Quant aux deux rapportés par Cocliin , du 31 mai
1726, tome 6 , page 527, et du 8 mai 1744 , tome 5 ,
page 349; le premier n’a pas de rapport à notre espèce,
parce qu’il paroît que les immeubles jouis par le tierspossesseur étoient aiï'eclés antérieurement à la vente; et
l’autre seroit d’autant plus concluant pour cette cause ,
que la tierce-opposition du marquis de R ey n e l, contre le
duc d’Orléans, n’avoit pour objet que des créances.
Pa rmi les arrêts recueillis par Denisart et par G u y o t,
ceux de 1743 , 1760, 1761, 17 6 1, février et juillet 1777,
,ainsi que ceux de la cour d’appel de Paris, des 29 prai
rial an 9 et 18 ventôse an 11 , et celui de la cour de
cassation, du 22 fructidor an 9 , sont étrangers à l’es
pèce. Mais ceux des 17 janvier et 30 mai 1767 , et fé
vrier 1778 , 21 brumaire an 5 , de la cour de cassation,
de celle de Bordeaux, du 9 thermidor an 9 , et de celle
de Rouen , ont admis des tierces - oppositions dans des
espèces ou semblables ou moins favorables. Il seroit aussi
inutile que fastidieux d’analiser ces décisions; il suffit de
l’appeler l’observation des rédacteurs du Répertoire, au
mot opposition, page 4 1 9 , « qu’on a vu les tribunaux
« préférer , ù la rigueur , la voix de l’équité qui leur
« parloil en faveur des parties condamnées injustement. »
!D
�o 6)
Mais ne perdons pas de v u e , dans cette affaire , que
Chouvenc n’est nullement créancier ni tiers-détenteur de
Lacroisière; il étoit acquéreur de sa femme long-temps
avant que Lacroisière l’épousât, et qu’il en devînt l’hé
ritier..
Ce scroit une erreur de soutenir que ce jugement a
eonfirmé la sentence de Tence. Par celte sentence, lafemme Borne a été déboutée de sa demande en nullité
du testament, et en ouverture de substitution en faveur
de Pierre Molin. Ce n’a été que sous la réserve' de tous,
les moyens de Marie M o lin , contre les lettres de resci
sion, que l’estimation par experts a été ordonnée.
■Sur l’appel respectif porté au tribunal du P u y , la
femme Borne se plaignoit du débouté , et Lacroisière,,
de ce que les lettres de rescision n’avoient pas été rejetées..
D ’un autre côté, Catherine Molin avoit demandé par
quatre différentes requêtes contre Lacroisière, héritier
de sa femme, en la justice de T e n c e , un douzième du
chef de la Ferrapie, sa mère , et un dixième du chef de
son père, et avoit obtenu sentence conforme à ses con
clusions, le 17 août 1790 : mais il existoit un appel de
la part de Lacroisière.
C’est en cet état, que fut rendu le jugement du 26 jan
vier 1793 , qui,infirmant la sentence du 2 novembre 17O4,
nnnulle le testament de la Ferrapie-: non-seulement Laeroisière' négligea d e s m o y e n s péremptoircs, mais encore
il consentit que le mot remis fût changé en celui de re
cueilli • que l’on donnât la femme Vendriès quinze ans,
lors de son contrat de mariage ; tandis qu’elle en avoit
•vingt-deux..
�•7I 27 )■
>
^
Ge fut dix-huit jours après, le 14 février 1793., que
la femme Borne et Catherine Molin se réunirent avec
Lacroisière, chez un notaire. Lacroisière ne se contenta
pas de stipuler au gré de l’une et .de l’autre, il aban
donna tout ce qu’il possédoit, même tout ce qu’il pouvoit posséder ; il ne se borna pas à déclarer une pré
tendue insuffisance, il alla jusqu’à indiquer des tiers-acqué
reurs , malgré qu’il en fût le garant , et à stipuler les
intérêts d’un sieur Molin , véritable partie secrete , et de
cet acte, et du procès, quoiqu’il ..ne fût pas en qualité
dans cet acte.
L e payement de tant de complaisances fut 1200 francs,
et quelques meubles délivrés à Lacroisière, ou qu’il s’est
retenus. Les appelans en ont offert la preuve ; mais cette
preuve de collusion, à la différence de celle d’une con
vention , ne résulte-t-elle pas de la réunion des diverses
circonstances, de la différence des prétentions de Cathe
rine et de Thérèse Molin , de leur réunion au même
résultat, de s’être fait substituer par Lacroisière à tout
ce qu’il pouvoit posséder provenant de Marie Molin ?
M ais, quelques foibles qu’elles fussent, ces circonstances,
ne seroit-il pas révoltant, ce système, de .prétendre que
Lacroisière eût p u , en 17 9 3 , détruire l’acte de vente
que Marie Molin a voit consenti irrévocablement en 1778 ?
S’il 11e l’a pas p u , il seroit sans doute par trop ridicule
de considérer cet acquéreur, de 1778 , comme l’ayant
cause de Lacroisière , qui étoit bien éloigné d’avoir
aucun droit, aucune prétention en i778:idonc cet acqué
reur a dû être appelé ; d on c, ne l’ayant pas été , il a la
faculté d'user du droit de la tierce-opposition que lui
D 2
�( 28 )
donne l’article 2 du titre 35 de l’ordonnance de 1667.
Secondement, jamais tierce-opposition ne fut mieux
fondée , et ne mérita autant de faveur.
D ’abord,Thérèse M o lin , mère de la femme Vendriès,
n’étoit pas recevable. Par son contrat de mariage du 5
mai 1755 , elle céda à Marie Molin, sa sœur, en la per
sonne de Chnmbarlhac, son m ari, tous les droits qu’elle
a voit dans les sucessions de ses père et mère, et dans celles
de Marguerite et Pierre Molin , ses frère et sœur, moyen
nant 1900 IV. A g é e alors de vingt-deux ans , devenue
majeure en 1758, elle a reçu le prix de cette cession par
quittance du 21 mars 1761. Elle s’étoit constituée pour
dot le prix de cette renonciation ; elle avoit promis de
ratifiera sa majorité; et quoique l’action rescisoire fût
paraphernale, quoique Marie Molin fût en outre par
faitement devenue maîtresse de tous ses droits par le décès,
de son mari , Antoine Borne , du 13 mai 1768 , elle a
laissé écouler les dix ans fixés par l’article 134 de l’ordon
nance de 1539, sans réclamer, puisqu’elle ne s’est pourvue
que le 22 janvier 1783.
M ais, dit la femme Vendriès , i°. cette cession de
droits ne peut être considérée que comme un partage
provisionnel, puisque la ratification à la majorité a été
convenue ; 20. Marie Molin avoit été établie protutrice
ou administratrice des biens de Pierre et de Thérèse
M olin; elle devoit un compte; ne l ’a y a n t point rendu,
toute convention faite non l'isis inhuüs , ?>cc (üspoitctis
rationibits, est radicalement mille par l’article 131 de
la môme ordonnance de i5;39 , constamment suivie au
parlement de Toulouse; et l’action pour faire prononcer
cette nullité dure trente ans.
�( 29 )
D ’abord, c’cst une absurdité de présenter comme par
tage , sans que rien puisse le caractériser, une véritable
cession de droits successifs, Reproduiroit-on encore ici
les lois Familiœ erciscundœ, comtnuni Aividwido ? on
renverrait à la réponse qui y a été faite. Mais il est in
différent, dans l’espèce, si la convention portée par le
contrat de mariage est une vente ou ün partage, puisque,
dans l’un comme dans l’autre cas, l’action de rescision
n’a duré que dix ans. Thérèse Molin n’a jamais pu ignorer
l’obligation qu’elle a contractée personnellement ; e t , dans
le fait, elle a ratifié, en ne réclamant pas contre cette
obligation, non-seulement depuis 1768 qu’elle a été ma
jeure et maîtresse de ses biens parapliernaux, mais encore
depuis sa viduité. T e l a été l’avis du célèbre Cocliin
73e. consultation, tome 3 , page 775.
En second lieu, dans le fait, la prière de Pierre M o lin ,
dans son testament de 1743 , à Marie M o lin , de gérer
l’hérédité, dans laquelle il avoit institué autre Pierre
M olin, son fils, ne peut pas être considérée comme opé
rant une protutelle. -Au surplus , cette prière d’abord
adressée à Ignace Molin , irère du testateur, et seule
ment subsidiairement à Marie Molin , est devenue cadu
que , pavee que ce testateur n’étant décédé que le 20 mars
17^5, Thérèse Molin éloit pubère à cette époque. Pierre
n’a resté que six semaines à le devenir; et il est prouvé,
pu- une procuration donnée par lu i, devant Roubin ,
nntaiiv , du 20 janvier 1748 , visée dans la sentence de
Tence, du 17 août 1790, qu’il administrait, à cette époque,
ses biens.
Mais , d’ un cûté , les intimées soutiennent, et la femme
�( 30 )
"Vendriès l’a fait juger , que ce testament est nul, parce
que les légitimaires n’ont pas été honorés du titre d’ins
titution ; et ce qui est nul ne peut produire aucun effet.
D ’un autre côté , s’il y a eu une administration tutélaire,
c’est Ignace Molin qui en a -été chargé, ainsi que l’a
reconnu Catherine Molin par divers actes émanés de
son fait, après le décès d’Ignace M olin, notamment par
celui notarié qu’elle fit conjointement avec Marie Molin,
le 2 décembre 1763.
Dans le droit , quand on envisagerait Marie Molin
comme administratrice comptable, elle n’avoit que dix
ans, et non trente ans, pour réclamer utilement. La
controverse qui existoit à ce sujet dans les tribunaux ,
comme parmi les jurisconsultes, a dû être terminée par
l ’article 476 du Code c iv il, qui doit être regardé comme
déclaratif ou explicatif du droit ancien. L e projet de ce
Code portoit la même disposition , articles 103 et 104.
La cour de cassation , dans ses observations , a adopté
cette partie de l’article 104. Des vingt-six cours d’appel
qui ont donné leur avis sur le projet j trois seulement,
celles de Liège et d’Orléans pour les dix ans, et celle
de Paris pour les trente ans ; les vingt-trois autres cours
ont , par leur silence , adhéré au projet. Les tribuns
M M . Iluguet de la Seine, et L e r o i, l’ont admis, ainsi
que M. le conseiller d’état Berlier. Procès verbal de-dis
cussion du projet de code c iv il, tome 2 , page 620. Ce
commissaire rappelle les diverses mesures de prescription ,
selon les pays, pendant la monarchie. Cette discordance
n’eût-elle pas sufii pour provoquer une déclaration du
r o i , explicative. C’est ainsi qu’il faut considérer le Code
�Ml
C 3i )
civil, q u i, pariàm êm e, ne présente aucun effet rétroactif.
Une autre fin de non recevoir enveloppe à la fois les.
deux intimées ; elles sont garantes de. leur, propre de
mande. Par l’acte du 14 février 17930. elles, sont devernues successeurs universels de-Marie. Molin , et par là
obligées de maintenir la vente qu'elle a consentie le 14
août 1778, d’après la maxime,, Qutm de evictionc te n d
actiu eumdem ogentem repellit excepiio.
En acceptant de Lacroislère-, héritier testamentaire
de Marie M olin , non - seulement les maison et jardin
qu’il occupoit, et le domaine de la Bruirette , mais encore
tous autres objets , s’il y en a , les intimées, ont pris la
place de Lacroisière; c’e s t - à - d ir e ,, de son chef, elles
doivent maintenir la vente qu’à faite Marie M olin;. et
elles ont si bien manifesté leur conviction qu’elles sont
tenues des faits de. Marie M o lin , que, de leur propre
a ve u , elles ont traité avec les autres qu’elles avoient
aussi fait assigner en désistement, et contre la plupart,
desquels elles ont obtenu la même condamnation que
contre, les. appelons. Qui dit to u t, n’excepte rien. Par
l’expression générale, tous autres objets , s'il y en a ,,
on doit nécessairement entendre le mobilier et les papiers..
En prenant tout à forfait, elles.se sont chargées des obli
gations de garantir de la part de Lacroisière , dont
elles ont constitué l’insolvabilité, en acceptant de lui,,
sans compte, ni mesure, ni inventaire, tout ce qui provenoit de la succession de Marie Molin.
Parmi ces papiers étoient les quittances de ce qui*
a<voit été payé par.Marie M olin, et par ses trois-maris „.
�( 32 )
A la décharge des successions des auteurs communs.
Les intimés soutinrent , ù la dernière audience, qu’il
ne falloit pas faire remonter la généalogie plus haut qu’aux
père et mère communs, et que c’étoit Cliouvenc qui
retenoit les papiers pi’ovenus de Marie M o lin , puisqu’il
en existoit dans leur dossier.
t'
R É P O N S E .
En premier lie u , par le premier contrat de mariage
de Marie Molin avec Chambarlhac , en 1763, son mari
eut pouvoir de vendre pour désintéresser deux oncles,
Mai’celin, et Ignace Molin , présens au contrat. Mais
ces oncles n’étoient pas les seuls ; il existoit encore Biaise
et Jean : ce Biaise étoit légataire de Marie Molin , grandtante de Marie Molin. Cette Marie M o lin , première,
par son testament, du 22 juillet 1769, avoit encore légué
à Geneviève Périer, sa nièce, fille d’une Jeanne, femme
Périer , et elle avoit fait héritier Ignace Molin , curé du
Chambon , son neveu, qui par son testament du 7 no
vembre 1763 , après avoir dit que Marie Molin , sa nièce,
jouissoit des biens affectés à ses droits, lui légua 800 fr.,
et les intérêts de tout ce qu’il avoit à prétendre ; en sorte
que cette recherche nécessi toit divers partages, que Marie
Molin , deuxième , ou ses trois m a r i s , ont écarté , en
désintéressant les héritiers et légataires de la grand’tante
Marie Molin, première. Lorsque Marie Molin, deuxième
du nom , eut consenti la vente de 1778, au père Chouvenc,
celui-ci acquitta diverses créances à la décharge de sa
venderesse , envers l’une de ses sœurs , envers les sieurs
de
�( 33 )
de Reynaud, et Olivier de T e n c e , et envers le curé de ce
lieu. Chouvenc n’exigea pas de subrogation , ni men tip n
que le prix de son acquisition eût été payé de ses deniers
à ces créanciers, tant il croyoit à la sûreté de la vente ,
et à l’obtention, sans opposition, des lettres de ratifica
tion-qui furent expédiées sur cette acquisition.
En second lieu, de tous les titres qui sont dans le dossier .
des appelans, le premier contrat de mariage de Marie
Molin est le seul qu’il tienne d’elle. £1 paroît quelle en
a voit fait usage le 3 février 1773, cinq ans avant la vente
de 1778, dans un procès qu’elle avoit contre Catherine
de Chambai'lhac, veuve Boulhot.
Cette fin de non-recevoir, évidemment démontrée, et
qui ajoute à la nécessité d’adopter la prescription de
dix ans, devroit dispenser de s’occuper des droits suc
cessifs de Marie M olin , venderesse ; mais ne laissons
rien à désirer contre le jugement du 26 janvier 1793.
L e testament de Catherine Ferrapie, du 24 mars 1735,
régulier dans la formé , a transmis, par l’effet de la subs
titution qu’il contient, la succession à Marie Molin.
L ’extrait vidimé de ce testament, en vertu de l’arrêt
de la cour , et le procès verbal qui a eu lieu à ce sujet, ne
laissent aucun doute que le mot abrégé ilî° , précédé des
mots la testatrice, et suivi de ceux-ci, enquise et re
quise , ne peut signifier autre chose qvCi/litérée, enquise
et requise ; c’est-à-dire , qu’elle nç-sait pas écrire , et que
la demande et la réquisition lui ont été faite de cette
déclaration. L e mot illitéré, d’après Cambolas, p. 362
et 363, et l’usage constant du pays de Languedoc, qui
résulte de tous les registres des notaires de cette contrée,
E
�C 34 )
est synonyme avec ceux-ci, ne sait écrire. Suétone en
donne la même explication, d’après les expressions de
Néx*on , à qui on deinandoit une signature : Utinam
litteras nescirem.
Ce procès verbal a été contradictoire seulement entre
des femmes; d’un côté, celle Chouvenc, assistée de son
parent, le notaire Gire , d’Yssingeaux ; de l’autre , les
femmes adverses, assistées du même sieur Molin , pour
qui l’acte du 14 février 1793 contient des réserves, quoi
qu’il n’y soit pas en qualité. Pourquoi dans ce procès
verbal fait-on dire que la femme Vendriès n’a point eu
de constitution de dot? Pourquoi avoir empêché que le
notaire commis par la cour ne constatât l’uniformité de
la même abréviation usitée par ce môme notaire, dans
d’autres teslamens contenus dans le même registre, depuis
1732 jusqu’en 1738, si ce n’est dans quelques actes écrits
d’une autre main que la sienne?
« Parmi nous, dit Ferrières dans son Dictionnaire de
« d ro it, les abréviations sont reçues ou réprouvées,
« par rapport à la facilité ou à la difficulté de les en« tendre. A in si, on admet celles qui ont une signiiica« tion certaine dans l’usage , et pour les autres on n’y
« auroit pas d’égards. » L e même , dans son ouvrage
intitulé Science parfaite des notaires, leur recommande
de ne point se servir d’abréviations , à moins qu’elles
n’aient une signification certaine dans l’usage.
Si la cour estimoit , dans sa sagesse , qu’il finit éclaircir
davantage ce fait , il s’agiroit d’ordonner l’apport du
regis Ire.
jVluis, en d r o it , il n’en est aucunement besoin.
�S/l
.
( 35)
L ’ordonnance du mois d’août 1735 n’est que postérieure
au testament du 24 mars précédent. Celles d’Orléans et
de Blois n’ont pas été enregistrées au parlement de T o u
louse, et n’y étoient point observées. Cambolas rapporte
un arrêt de cette c o u r , du 21 juin 1624 > en la deuxième
des enquêtes , qui déclara valable le testament de Giraud
Martin , que ses frères arguoient de nullité, parce qu’il
n’y avoit pas de.signature. M . D olive, pages 408 et 4 ° 9 î
a recueilli deux arrêts, des i 5 mars 1631 et 22Tiiai 1632,
et a attesté que l’ordonnance, sur ce point, n’est point
en usage dans cette cour , « q u i, ajoute-t-il, par le mou« vement de l’utilité publique qui s’intéresse dans la sub« sistance des dernières volontés des mourans, se porte
« plus volontiers à suivre la disposition d’une des nou« velles constitutions de l’empereur Léon , qui veut que
« le nombre suffisant des témoins fasse valoir un tes
te tament, quoique destitué des seings , des sceaux et des
« suscriptions du testateur et des témoins. »
C’est ce qu’atteste encore M . Sallé,dans son ouvrage
sur l’Esprit des ordonnances, art. 5 de celle de 1735,
tome 1 , pag. 25 î. IL ajoute à la citation de Dolive et
de Cambolas, celle d’un arrêt du parlement d’A ix , re
cueilli par Boniface , qui prouve que ce parlement n’a
pas été plus exact observateur de cette ordonnance à cet
égard. Les lois romaines avoient toujours prévalu. Les
dernières volontés d’un père ou d’une mère envers leurs
enfans lenoient lieu de toutes les formes , et ces lois vouloient que ces volontés fussent gardées par tous les moyens.
Maynard, tome 1 , page 698.
E a
�K C 36 )
A u reste, s’il y avoit nullité dans ce testament, la fa
culté de la demander, cette nullité, seroit prescrite au
moins depuis 1738» ci116 ce testament a été contesté; elle
seroit encore écartée par la loi du 28 septembre 17 9 1,
qui maintient les testamens auxquels on opposerait ces
nullités. Cette l o i , quoique désignant quelques provin
ces, notamment le Vivarais , d o it, pour l’honneur même
de la législation, s’étendre dans les pays soumis à la même
juridiction des parlemens de Paris et de Toulouse, suitout dans l’étendue de ce dernier parlement, où les or
donnances d’Orléans et de Blois n’étoient pas observées.
Cette nullité étant aussi puissamment écartée, tant par
le fait que par le d ro it, il est aussi facile d’établir que
Marie Molin a recueilli l’effet de la substitution établie
par le testament.
- En voici les clauses.
« La testatrice a institué , et de sa propre bouche
« nommé pour ses héritiers universels, Ignace Molin ,
« curé du Chambon, et sieur Pierre Boyer, son oncle,
« à la charge de remettre, lorsque bon leur semblera,
a ladite hérédité audit P ierre, iils de ladite testatrice;
« et au cas ledit Pierre Molin , son fils, vînt à mourir
« sans pouvoir disposer, ou sans avoir remis ou recueilli
« ladite hérédité, elle lui substitue ladite Marie. Ladite
« testatrice a fait cependant ladite institution d'héritier
« sans distraction de quarte, et sans qu’ils soient obligés
« de rendre aucun compte des fruits ou revenus de ladite
« hérédité; et au cas où ils fussent recherchés, elle leur
« en fait un prélegs, et à la charge d’entretenir les
« enfans. »
�3Sî>
( 37 )
Pierre B o y e r, l’un des héritiers , est décédé le 2 5 juin
1740. A cette époque, Pierre M olin, né le 2 mai 1731,
étoit pupille , et il est décédé le 3 novembre 1748.
Ignace Molin , l’un des deux héritiers institués, est de
venu le seul, par l’accroissement résultant du décès de
Pierre Boyer. D ornat, liv. 3 , tit. 1 , sect. 9 ; Brillon ,
V . accroissement, nos. 26, 2 7 , 28, 29, 30; Maynard,
liv. 5 , chap. 1 0 ; Code civ il, art. 1044, 1045.
Cette substitution est-elle fiduciaire, ou fideicommissaire? Cette question est absolument indifférente. Dans
l’un comme dans l’autre cas , la volonté de la testatrice
n’est pas conjecturale , elle est clairement exprimée. Il est
constant que Catherine Ferra pie a voulu que son entière
succession advînt à son fils, o u , à son défaut, à sa fille
aînée ; mais elle a voulu que le fiduciaire ou le fideicommissaire ne fît la transmission que quand bon lui
sembleroit, et qu’au cas le fils vînt à mourir sans pou
voir disposer , ou sans que l’héritier eût remis, et, si l’on
veut encore, sans qu’il eût recueilli. Il est évident, dans
tous les cas, que lors du décès de Pierre M o lin , il ne
pouvoit point disposer; qu’il ne lui avoit été rien remis;
qu’il n’avoit rien recueilli. Lors de son décès, Pierre
Molin étoit pubère et pouvoit tester; mais il étoit mi
neur, et il lui étoit interdit de disposer par acte entre v ifs ,
soit à titre onéreux, soit à titre gratuit. Si Pierre Molin
eût atteint sa majorité, il s’agiroit de discutersi la parti
cule ou devroit s’entendre disjonctivement ou copulativement. Mais Pierre Molin est décédé en minorité , dans
les liens de la prohibition de disposer entre vifs, et il de-
�(38)
vient indifférent de savoir s’ilavoit recueilli un objet dont
l’époque de la remise avoit été laissée à la volonté d’Ignace
Molin , et dont il est certain que la remise n’avoit pas
été effectuée. La testatrice n’a point entendu limiter la
faculté de disposer ; les expressions, sa?is pouvoir dis
poser , comprennent toute la latitude dont ce pouvoir
est susceptible. Il suffit donc que Pierre Molin ne pût
disposer entre vifs , pour que cette vocation soit devenue
caduque , et dès-lors nécessairement la seconde appelle
Marie Molin à recueillir. Telle a été l’intention de la
testatrice. Catherine Ferrapie a vo u lu , sans doute, pré
férer son fils ; mais, dans la prévoyance ou d’indignité
ou d’incapacité, elle a laissé â l’arbitrage du curé du
Chambon le temps de la remise , et, dans le cas de la réa
lisation de cette remise, elle a entendu que le fils pût
disposer ; en sorte que par l’effet de cette clause, si la re
mise eût été faite à Pierre Molin , et que lors de son
décès, eu majorité, il eût été interdit, d’après cette clause
impérative , la substitution eût été ouverte en faveur de
Marie Molin. Si donc Pierre M o lin , lors de son décès,
n’a pu disposer, soit parce qu’il étoit dans les liens delà
m inorité, soit parce qu’il ne lui avoit été fait aucune
remise, ou encore parce qu’il n’avoit recueilli ni par
le fa it, ni par le droit ; c’est incontestablement Marie
M o lin , seconde appelée , qui a recueilli la substitution
de Catherine Ferrapie. C’est donc en pure perte que les
intimées ont compulsé la loi Generaliter, puisque les
deux conditions sont arrivées, incapacité de disposer,
et n’avoir pas recueilli. Si les expressions du testameut
�M
i
( 39 )
étoient douteuses, il suiliroit que la volonté de la testa
trice fût évidente. In conditionibus testamentorum ,
voluntatem pottùs quant verba considerari opporteat.
Et cette volonté a expliqué et dirigé clairement les con
ditions. In conditionibus , pritnum locuni voluntas
d.ifuncti obtinet eaque régit conditiones. Lois 19 et
101, if. de cond. Ricard, chap. 1 , n°. 16.
Enfin, cette substitution n’a jamais été ouverte, de droit,
en faveur de Pierre Molin ; il ne l’a jamais recueillie de
fait ; i ° . il ne seroit point censé remplir un degré.
M . Daguesseau, 1 1 e. question.
Tout se réduisoit dans lui à une espérance. A b ire à
nobis dominium speratur, si conditio legati extitcrit,
L . 66. if. de reivindic. Le substitué conditionnel est sem
blable au créancier conditionnel, qui n’a aucun droit,
tant que la condition n’est pas arrivée. Gonditionales
dicuntur h i quibus nondùrn conipetit actio. L . 54, if.
de verb. signif.
2°. Il n’y a jamais eu plus de doute dans la famille, que
dans la notoriété publique, que Marie Molin a recuilli.
S’il y a eu acte de remise de la part d’Ignace M o lin , il
est entre les mains des intimées , ainsi que tous les papiers
de la famille, comme il a déjà été prouvé ; mais il en
existe au procès d’autres preuves écrites et équipollentes.
i°. Dans le contrat de mariage de Marie Molin avec
Chambarlhac, son premier mari , du 13 février 1763,
la future, en présence d’Ignace Molin , se constitua dans
ses biens , dont elle autorisa son futur à faire vente, pour
le payement des L É G I T I M E S et droits SUCCESSIFS com-
�C 40 )
pétens aux sœurs de ladite Juture épouse j qu’il sera
libre audit futur époux de liquider en argent, ainsi que
ledit'sieurfutur époux avisera , de même que les droits
appartenans à sieur M arcelin M olin , son oncle.
2°. Dans le testament d’Ignace M o lin , du 7 novembre
1763 , il lègue à Marie Molin , sa nièce, la somme de
800 francs ; laquelle, est-il d it, se retiendra sur les biens
de feu ses père et mère que jo u it ladite M o lin , à laquelle
il veut et entend que tous les intérêts à lui dûs jusqu’à
ce jour de ses droits légitimantes, lui appartiennent.
30. Dans les requêtes de Catherine M o lin , au nombre
de quatre, visées dans la sentence de 1790 , elle y a in
connu qu’elle n’avoit à prétendre qu’un douzième dans
la succession maternelle, et un dixième dans la succession
paternelle, Cette sentence jugea conformément à ses de
mandes.
O r , si Marie Molin a été reconnue, parla famille,
héritière, possédant l’universalité des biens paternels et
maternels, Chouvenc a-t-il pu douter du contraire, lors
qu’il a acquis d’elle en 1778? et par cette conséquence
forcée, n’étoit-il pas certain de la bonne foi de la venderesse ? de là même n’avoit-il pas prescrit par dix ans?
C
i n q u i è m e
p a r t i e
.
Estim ation et compulsoire.
En écartant hypothétiquement les prescriptions, les
fins de non^recevoir, et le testament de Catherine Fer^
rapie,
�âS7
t 40 _
ra p ie , et en supposant que Marie Molin , venderesse,
n’eût qu’un tiers à prétendre dans les successions des père
et mère, il faudroit bien lui accorder les prélèvcmens
qu'elle auroit à faire. Il en est qui sont établis par les
pièces du procès; i ° . 1900 fr. payés à Thérèse Moliu
pour le prix de la vente par elle consentie par son contrat
de mariage, suivant la quittance notariée du 21 mars
1761 ; 2°. celle de 900 fr. payée à Catherine Molin , sui
vant l’acte du 14 février 1793 ’■
> 3°* ^es ^°° francs légués
à Marie Molin par Ignace M o lin , son on cle, ensemble
les intérêts de tout ce qu’il avoit à prétendre, tant de
son chef sur les successions de ses père et mère , que1
comme représentant Marie M o lin , sa tante, sur les suc
cessions de ses aïeul et aïeule. Ce dernier objet nécessiteroit des partages préalables ; mais il est à présumer,
d’après le contrat de mariage de Marie Molin , venderesse, avec Chambarlliac, de 17^3, qu’elle ou ses maris
ont acquitté des légitimes envers Biaise, Jean et M ar
celin , dont elle préleveroit ou le montant ou les portions
en nature. Si les quittances ont été données par actes
publics , un compulsoire seroit indispensable pour en
recouvrer des extraits , en laissant à la religion de la cour
d’apprécier dans sa sagesse tout ce qui a été dit sur les
titres de famille, parmi lesquels étoient sans doute beau
coup de quittances sous seing privé. A toutes ces don
nées , soit certaines, soit conjecturales, ajoutant l’estima
tion de tous les biens des père et mère, à l’époque du
14 août 1778 , 011 croit pouvoir assurer que l’objet de
l’acquisition faite par Chouvcnc étoit bien loin de rcinF
�( 42 )
plir tous ?les droits de sa venderesse , M arie M olin.
A ce sujet, les intimés opposent que le jugement dont
est appel ne grève pas les appelans, parce que le désis
tement n’est ordonné qu’autant qu’il y auroit insuffisance
pour remplir les lots des intimés.
Combien est misérable cette objection , d’après tous
les moyens qui viennent d’être développés ! Mais ce qui
est le plus péremptoire sans doute, c’est que les intimés,
en se subrogeant aux droits de Lacroisière, héritier de
M arie M o lin , l’ont déchargé de toute restitution, sous
quelque dénomination que ce puisse ê tre , et ont encore
ajouté au titre et à la bonne foi de l’acquéreur de cette
M arie M olin.
C ’est à ce point principal que doit se réduire cette
immense affaire. Plus il y auroit du doute sur les ques
tions secondaires, plus il seroit équitable de se décider
par la prescription de dix ans entre présens. Il suffit
de comparer les sentences et jugemens de 178 4 , 1790 ,
1793 , avec l’acte du 14 février 1793 ? les cédule et procès
verbal de pluviôse et ventôse an 9 , et les moyens qui
viennent d’être détaillés , pour demeurer convaincu,
d’après la disposition du Code c iv il, d’accord avec la loi
romaine, d’après même Boutaric , Serres et de Bezieux,
que jamais il n’y a eu cause où cette prescription fût aussi
favorable que décisive. A u surplus, les subsidiaires ne
laissent rien A désirer , pour repousser une ténacité d’au
tant plus injuste, d’autant plus tém éraire, que les intimés
ne sont réellement rien dans cette affaire. C’est un sieur
M o lin , leur paren t, auteur et partie secrète, tant de
�( 43}
la procédure dont il a écrit et dirigé presque toutes les
pièces , que de l’acte du 14 février 1793, où il n’est pas
en qualité, quoiqu’il soit la principale partie qui a été
ensuite souvent rappelée, pour son profit, dans les actes
de procédure.
Me. C O U H E R T - D U V E R N E T , avocat.
Me. C O S T E S , avoué .
A R I O M , de l ’imprimerie de L a n drio t , seul imprimeur de la
C o u r d ’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chouvenc, Jean. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Couhert-Duvernet
Costes
Subject
The topic of the resource
tutelle
successions
testaments
jurisprudence
prétérition
prescription
coutume de Paris
Parlement de Toulouse
Description
An account of the resource
Titre complet : A juger, d'après cinq audiences, pour Jean, et autre Jean Chouvenc, père et fils, appelans, demandeurs en tierce-opposition ; contre Catherine Molin, et les mariés Vendriès et Borne, intimés, défendeurs.
Table Godemel : Renonciation : 8. la fille a-t-elle dix ans ou trente ans pour se pourvoir contre une renonciation surprise en minorité par des protuteurs, dans l’ignorance de ses droits et sans être informée que les testaments de ses père et mère étaient nuls ? Substitution : 3. substitution fidéicommissaire ou fiduciaire. substitution pupillaire. - validité. - transmission. Testament : 6. un testament sans signature ou déclaration négative du testateur est-il valable ? que résulte-t-il, pour ou contre sa validité, de ce qu’il est antérieur à l’ordonnance de 1735 ? Tierce-opposition : 3. des tiers, en qualité d’acquéreurs d’un cohéritier, sont-ils recevables à former tierce-opposition à des jugements en dernier ressort, rendus sur appointement, entre leur vendeur et ses cohéritiers, pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession commune ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1778-Circa An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
43 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1610
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0624
BCU_Factums_M0729
BCU_Factums_G1611
BCU_Factums_M0326
BCU_Factums_G1612
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53284/BCU_Factums_G1610.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume de Paris
jurisprudence
Parlement de Toulouse
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53285/BCU_Factums_G1611.pdf
1bd132b9f0abfe7d69085439c1166eb3
PDF Text
Text
( s v i i l iw
w k t i .»J8J J m 1.» M a a « « .i K m i E m m m a j ç j g u M f c M m i w a
M E M O I R E EN R É P O N S E ,
POUR
C
a th er in e
MOLIN, et les S.r et dame VENDRIEZ
et BORNE, intimés;
c o n t r e
J e a n et autre J e a n
CHOUVENC,
appelans.
Q U E S T I O N S .
1 L a procédure des appelans a-t-elle été périmée de plein,
droit dans le ressort du parlement de Toulouse ?
2. 0 S i elle n'est pas périm ée, p euve n t-ils, comme tiers acqué
reurs, repousser l'action des intim és par la prescription de
d ix a n s , dans le même parlement ?
.° S 'il n'y a pas prescription , les appelons sont-ils rece-
3
vables en ladite qua lité d'acquéreurs d'un cohéritier, à form er
tierce opposition à des jugem ens en dernier resso rt, rendus
sur appointements entre leur vendeur et ses autres cohéritiers
pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession
com m une ?
4. 0 Thérèse M olin a-t-elle eu 10 ou
3o ans pour se pourvoir
contre une renonciation surprise en m inorité par des protuteurs,
dans l'ignorance de ses droits et sans être inform ée que les testamens de ses père et mère étaient nuls ?
C elte question doit-elle être décidée par une jurisprudence
autre que celle du parlement de Toulouse ?
.° Catherine M olin a-t-elle perdu , p a r la prescription de
A
5
30
�ans, le droit de demander le partage, pendant sa cohabitation
dans la maison paternelle ?
6.° L e testament de Catherine F er r a p ie, sans signature ,
ou déclaration négative de la testatrice, et sans lecture à ladite
testatrice , est-il valable? Que résulte-t-il pour ou contre sa
validité de ce qu’il est antérieur à la publication de Vordon
nance de 1735 ?
7.° L a première substitution qu'il co n tie n t, est-elle Jidéicom missaire ou fid u cia ire? L a seconde est-elle une substitution
pupillaire ? Est elle valable? ¿4 -t-elle transmis la succession à
M arie Mo Un , dernière appelée ?
8.° L e testament de Pierre Mo lin , qui a simplement légué
une légitim e à ses enfa n s puînés , est-il n u l pour vice de prér
térition ?
EL L E S sont les questions importantes et nombreuses qui
divisent les pallies el qui ont occupé \a Cour pendant plusieurs
audiences. Une expédition infidelle du testament de Catheriue
Ferrapie, rapportée par les Chouvenc , contenait deux expres
sions, dont ils abusaient en faveur de leur cause. La Cour s’est
vue forcée d’ordonner une collation vidimée d elà minute de cet
acte; aujourd’hui la nouvelle expédition est lapporlée, et les
intimés se verront enfin en possession de leurs droits successifs,
après avoir plaidé 22 ans, el subi, pour faire juger un simple
p a ita g e, quatre degrés de juridiction.
F A I T S .
Pierre Molin fivnit, dit-on, pour frères Marcelin, Biaise et
Ignace Molin. Tous , excepté le dernier , s«nt inutiles à la
cause; et pour ne pas l'embrouiller, les intimés se contentent
d’en rappeler les noms , pour passer à la descendance de Pierre,
marié à Catherine Ferrapie. Ils ont eu six eufans.
�*3(è?
3
(
)
Pierre Molin , mort eri 1743.
Catherine Ferrapie, morie en 1735.
2.
JL
____ !____
Marie Molin.
Marguerite ,
Pierre ,
1 e r m ari,
N .. Clxambarliac.
morte s. p.
né le 2 mai
en 1741.
1731 ;
,
2.e m a r i
N .. . Dejoux.
3 .e mari ,
C la u d e -L a m b e rt
Lacroisière.
L e 20 mars i y
.
6
5.
3.
Catherine , J e a n n e ,
intimée.
m. s. p.
en 1770-
Thérèse.
Louis Borne.
I
.
,------- '------- «.
m ort s. p.
Jeanne Bo rn e,
le 3 novemb.
Louis Vendriez ,
174S.
35 , Catherine F en ap ie
intimés.
fit son testament. Elle
légua à ses six enfans leur légitime de droit, à titre d’institution.
.Voici les dispositions et la forme de ce testament:
Catherine Ferrapie institue pour ses héritiers universels Ign ace
M olin , curé de Chambon, son beau-frère, et Pierre Boyer, son
oncle, « à la charge de remettre, quand bon leur semblera, ladite
« hérédité à P ierre, fils de la testatrice, et au cas que ledit Pierre
« Molin vînt à mourir sans pouvoir disposer, ou sans avoir
« recueilli ladite hérédité, elle lui substitue Marie. Ladite testa
it trice fait ladite institution sans distaction de quarte et sans
« qu’ils soient obligés de rendre aucun com pte des f ruits de
« ladite hérédité, et à la charge de faire entretenir et élever ses
« e n fa n s .... Fait et récité audit T e n c e , dans la maison d’autre
« sieur Pierre Molin, en présence d e ............. témoins soussignés.
« Ladite testatrice ille de ce enquise et requise.............»
L e 20 mai 1743 , Pierre Molin père, lit son testament : « il
«
«
«
«
«.
institue pour son héritier Pierre Molin son lils. . . . Il donne
et lègue ¿1 ses cinq autres enfans leur légitime de droit;
et attendu le bas ¿ïge de son héritier, il j^rie Ign ace M olin ,
curé de Chambon , son frère, et M a rie, sa iille , de régir et
administrer ses biens , jusqu’à ce que son héritier soit en état
A a
�,
*
«•*
'
,( 4 )
« de le faire......... Fait et récité à Tence , maison du testateur».
Pierre Molin. mourut le 21 du même mois de mai 1743. Alors
Marie Molin , majeure, et mariée dans la maison paternelle ,
s’empara des deux successions. Ignace Molin était curé de ChamL o n , Pierre Boyer était mort en 1740; et Pierre Molin , appelé
aux deux suc cessions > s’engagea aussitôt qu’il eu eut l’âge. Il
mourut à Lille le novembre 1748, et on fut long-tems dans la
famille à douter de sa mort.
3
Quelques années après, on trouva l'occasion de marier la plus •
jeune sœur, Thérèse Molin, avec le sieur Borne , d’ une province
étrangère, moins capable par conséquent d’avoir l’œil aux a Ha ires
5
de la maison, et par le contrat de mariage du
juin 1705 , le
sieur Chambarliac lui constitua 1,900 fr. de dot, en bien expri
mant que c’était pour les successions du p è r e , de la m ère, de
la sœur décédée , et même on ajouta celle du frère , quoiqu’on
n eut pas de nouvelles de la mort. Thérèse Molin, m ineure, re
nonça à toutes successions , et s’obligea de la confirmer et ratiJ îer à sa majorité. On ne s’ est jaimis avisé de lui demander cette
ratification. Mais , indépendamment de cela , malgré son éloi
gnement, elle aurait cherché à se pourvoir, sans l’apathie du sieur
Borne son mari, et si encore sa famille, flattée de l’alliance du
sieur Chambarliac, n’eût toujours persuadé que Marie Molin
était l’héritière de ses père et ri ère. Quand le sieur Chambar
liac décéda, elle passa en de secondes noces avec le sieur Dejoux,
puis en de troisièmes, avec le sieur Lambert-Lacroisière, qu’elle
institua héritier universel , et qui acheva , à peu de chose près,
de dissiper la succession.
Thérèse M o lin , veuve, revint habiter près de sa famille, et
ne connut qu’alors l ’étendue du sac rifice qu’on .avait extorqué
de son inexpérience. L e 2.2 janvier 1783, elle assigna Marie Molin
et Lacroisière, son troisième mari, en partage des successions
de ses père, mère, frère et sœurs, pour lui être délaissé sa por
tion all’éranle.
Après cette demande, elle Ht donation de ses biens à la dame
�Vendriez, sa fille, qui intervint. L e procès fut appointé à T e n c e ,
et le 2 novembre 1784, il intervint sentence qui ordonna le par
tage du ch ef de Jeanne seulement ; et avant faire droit sur le surplus , ordonna une estimation préalable des biens des père et
■mère communs.
L es deux parties interjetèrent appel de celle sentence ; les pro
cédures se continuèrent en procès par écrit jusqu’a la révolution.
L e tribunal du district du J?uy fut choisi pour connaître de cet
nppe1.
Ce tribunal rendit son jugement le 26 janvier 179^ 5 sur pro
ductions respectives, et jugea dans ses motifs :
1.° Que le te.-ta ment du père était nul par prétention; 2.0 que
la substitution, portée dans celui de la u ère, avait saisi Pierre
Molin de la success’on , et que ledit M o l¡11 'étant mort après
quatorze ans, les substitutions s’étaient alors éteintes ; 3.° que
la renonciation de Thérèse Molin était nulle , comme n’étant
dirigée au profit de personne , comme faite par une mineure ,
avec convention de ratification non effectuée, et comme dirigée
âu profil d’une protutiice , et que l’action avait dure trente ans.
En conséquence, ce tribunal ordonna le partage desdites suc
cessions, pour être délaissé à la dame Vendriez sa portion, expli
quée et calc ulcc audit jugement.
De son côté, Catherine M olin, sortie de la maison paternelle
à la mort de sa sœur, en 1788 , avait assigné Lam bert'Lacroisière, son héritier, le 27 novembre de la même année pour venir
à partage, et lui expédier un cinquième du chef de son père, et
seulement un douzième, du chef de sa mère, parce qu’elle avait
aussi vécu dans la croyance, que Marie Molin était héritière
par des testamens qu’elle 11’avail jamais vus ; elle demanda éga
lement les successions collatérales.
Une sentence du 17 août 1790 ordonna ce partage , pour êlre
expedie un douzième des biens de la m ère, un dixième des biens
du père , et dans les mêmes proportions pour les successions col
latérales.
�'
‘
( 6 )
^ e s ueux parties interjetèrent encore appel ; Catherine Molfu
alors ayant eu connaissance du testament de sa mère, rectifia
ses conclusions, et demanda un seizième du chef maternel.
L e Puy était aussi saisi de cet appel qui s’instruisit en
procès par écrit par plusieurs écritures, et il était sur le point
de recevoir sa décision, lorsque lut rendu le jugement ci dessus,
du 26 janvier 1793.
Ou présume sans peine que Lacroisière, succombant vis-à-vis
Marie - Thérèse Molin , en dernier ressort, n’avait garde de
plaider plus, long-tems contre Catherine, devant le même tri
bunal. Il demanda accommodement ; les parties traitèrent , le
19 février 17 9 3, et comme on le voit , en grande connaissance
de cause,
Lacroisière, par cet acte , dit qu’il adhère au jugement , en
dernier ressort, du 26 janvier , et consent que des experts fassent
le partage des portions revenant à Thérèze Molin.
Il y consent aussi vis-à-vis Catherine Molin , mais avec con
vention qu’elle ne réclamera les jouissances que depuis 1788.
II est convenu que les experts expédieront d’abord la maison
q u ’ il occupe , un domaine et un jard in, et déduiront les créances
q u ’il a acquittées en vers Jean-Antoine Molin, à la décharge de tous.
Et comme évidemment ces biens 11e suffisaient pas, il apprend
qu’il a vendu aux nommés Chouvenc , V raisse, C u o q , I io y c r ,
D e lc a g e , et laisse à Catherine et Thérèse M olin, à se pourvoir
contre eux , ainsi qu’elles aviseront.
Enfin , celles-ci font le sacrifice de tous leurs dépens, tant des
causes principales que d’appel.
L e 26 février 1793 , les intimés signifient à ces tiers acquéreurs,
uon-seulement ce traité, mais encore le jugement du 26 janvier,
pour qu’ils l’attaquent s’ils s’y croient fondés.
L e 11 a v ril, ils les assignent tous en désistement et jugement
commun; la plupart acquiescent à la demande. L e moyen des
Chouvenc n’était pas alors d’attaquer le jugement du 26 janvier
1790 , amis de dire qu’ils avaient des lettres de ratification.
�7
C )
L e 19 prairial an 2 , un jugement ordonne le désistement en
expliquant que les intimés épuiseront, x.° les biens libres, 2 ° ceux
abandonnés par les acquéreurs , qui ont acquiesces avant d ’en
venir aux Chouvenc. Ils sont condamnés à rapporter les jouis
sances , seulement depuis la demande comme acquéreurs de
bonne foi.
Depuis celte époque le tems d elà péremption s’accomplit: ce
n’ esf que le 9 vendémiaire an 8, que \e* Chouvenc signifient l’ex
ploit de l’an 4 à Catherine Molin se u le , pour assister en la cause.
L e 16 g e r m i n a l a u 9 , les i nti mé* ont a ss i gné les C l i o u v e n c e n
la c o u r , p o u r se v o i r d ém e t t r e de l e u r a p p e l .
C ’est en la cour , seulement pour la première fois , que les
Chouvencont imaginé d ’attaquer le jugement du 26 janvier 179,3,
par tierce opposition. Leur résistance soutenue est fondée sur
leur prétendue bonne foi : cependant ils ont acquis d’ une cohé
ritière qui avait une sœur dans la maison; ils ont fait plus, ils lui
ont paye le prix de la vente, quand elle était séparée de biens.
M O Y E N S .
Si, quand les intimés ont plaidé avec le sieur Lacroisière, ils
avaient eu le m o i n d r e soupçon de la vente faite aux Chouvenc,
le même procès aurait tout terminé: et certes, en voyant toute
la résistance du sieur Lacroisière , et combien le tribunal du Pu y
a approfondi les questions de ce procès , il est aisé de voir que les
moyens des Chouvenc n’auraient rien c hangé à sa déc ision. Quand
ils ont été appelés devant les tribunaux de la Haute-Loire et de
L ’Arilêche, l’idée 11e leur est pas même venue d’attaquer le; ju
gement du 26 janvier 17 9 3 , et de faite rejuger 1111 procès qui
leur était étranger , et dont l’issue eut indubitablement été la
même; mais à R io m , une diversité, ou plutôt une innovation
de jurisprudence a changé leur plan. Les Chouvenc veulent au
jourd’hui ftiire tout remettre en question; mais avant d’aborder
le ionds , ils sont arrêtés par des questions préalables qu’il
s’agit d’examiner.
�C 80
PR E
il 1 È R E
Q U E S T I O N .
L a procédure des appelons est-elle périmée ?
L a loi Properatiduni et l’ordonnance de Roussillon veulent
que tous les procès soient promptement jugés ou entretenus par
des procédures, sinon l’instance est déclarée périe.
L e parlement de Paris avait modifié ces lois par un arrêt de
règlement de 1692 , qui voulait que la péremption n’eût lieu
qu’après une demande ; mais cet arrjt n’a eu d’eiï'et que dans son
ressort. A u parlement de Toulouse, au contraire, l’ordonnance
de Roussillon'était suivie à la rigueur; la question de savoir si la
procédure avait été entretenue sans discontinuation , était même
devenue un formulaire dans le dispositif des sentences; la pé
remption y a toujours eu lieu de plein droit, et le juge la suppléait
si on ne la demandait pas.
Cette jurisprudence a dû se maintenir, et s’est maintenue en
effet en la Cour. Quand des questions de péremption se sont pré
sentées pour l'ancien ressort de Toulouse, lu Cour a jugé, notam
ment les 18 pluviôse an 11 et 12 nivose an 12 , que la péremption
avait eu lieu de plein droit, même ^pendant la révolution , et la
suppression des avoués.
On objecte que les intimés ont couvert la péremption en anti
cipant le 16 germinal an 9.
Mais i.° cet exploit assigne les Chouvenc pour se voir démettre
de leur appel, et cette expression générale et indéterminée com
prenait toutes les voies légales qui pouvaient conduire à celto
démission d’appel; il serait donc bizarre de dire q u e celui-là ap
prouve un appel , qui assigne l’appelant aux. fuis de s’en voir
démettre. Il faut bien q u e lu péremption même soit prononcée
en justice, et personne n’osera exiger que celui qui la prétend
acquise, soit oblige' de s’en tenir à ce moyen seul ; car en Cour
d’appel il n’y a pas d’exceptions sur lesquelles il faut statuer préa
lablem ent, comme l’exige, en première instance, l’ordonnance
de
�de 1667.. On sait assez qu’il faut, en Cour souveraine, proposer
tons ses moyens à la fois.
2.0
Cette question a été discutée par M .r le procureur géné
ral M erlin , en ses nouvelles questions de droit , v.° a p p e l, §. 9,
avec sa profondeur prdinaire, et il décide que d’après le système
de l’ancienne et de la nouvelle législation, la péremption est un
moyen de droit public tendant à l’abréviation des parties , et
qui ne se couvre pas. Les ordonnances , dit-il, le veulent ainsi,
les anciens arrêts y sont conformes, et la loi du 14 octobre 1790»
qui s’est occupée de la procédure des justices de paix, dit qu’a
près quatre m ois, Vinstance sera périmée de droit et Vaction
éteinte ; donc , a jou te-t-il, le juge doit déclarer la péremption
acquise, lors même que la partie intéressée n’y conclurait pas.
M .r Merlin , en sa discussion, ne s’occupe p a s , comme on
pourrait le croire , des péremptions de quatre m ois, qu’il ne cite
que pour comparaison. L ’ordonnance de Roussillon lui semble
aussi claire, toutes instances discontinuées pendant trois ans
sont éteintes et péries. Avant son arrêt de 1692 , le parlement
de Paris le jugeait ainsi. On trouve deux arrêts précis des 27
juillet 1604, et 27 août 1610. Menelet et Bouchel enseignent les
mêmes principes.
« L a péremption, dit B o u c h e l, une fois acquise, ne se couvre
« point par une procédure volontaire , depuis faite en l’instance
«
«
a
«
périe, ensorte que nonobstant qiüon ail repris cette instance\
on peut faire juger la péremption............... L ’ordonnance de
Roussillon porte que toutes instances sont éteintes et péries.
C ’est un droit public auquel on ne peut déroger».
Par une fatalité attachée aux lois humaines , les auteurs con
temporains les trouvent ordinairement très-décisives et sur-tout
très - respectables ; mais à la longue ce respect s'affaiblit singu
lièrement. De là vient que les auteurs du 16.c siècle voyaient, dans
1 ordonnance de 1493 , ce que nous 11e voulons pas y voir; tandis
que par une inconséquence bizarre, nous trouvons la loi du 14
octobre très-impérative, quoique ces deux lois disent positive
ment la même chose.
B
�£70
u
,
C i° )
A u reste, il s’agit ici de suivre la jurisprudence du parlement
de Toulouse; la péremption y était jugée de plein d roit, et c’est
dire assez qu’elle y était un moyen de droit public.
Les Chouvenc ont cru trouver une interruption dans le chan
gement de personnes; mais c’est un rêve de dire que Jeanne
Borne n’ait pas été en cause avant l’an 8; elle était en qualité dans
le jugement de 1793. Quant à Chouvenc fils, il lui a plu d’inter
venir comme donataire, sur l’appel, mais son père est toujours
en cause, et s’il a laissé accomplir la péremption, elle n’en est
pas moins bien acquise contre le légitime contradicteur.
DEUXIÈME
QUESTION.
L e s appel an s , tiers acquéreurs , peuvent-ils invoquer, à T ou
lo u se, la prescription de d ix ans ?
Les Chouvenc font des efforts incroyables pour l’établir, et
pour lorcer à être de leur avis les auteurs même du parlement
de Toulouse qui, sans exception, sont d’un avis contraire.
Cependant les Chouvenc débutent par convenir (pag. 9 de leur
m ém oire), que Marie M olin ne pouvait pas vendre la portion
de ses cohéritiers, qu’ il est CERTAIN que ces cohéritiers avaient
t r e n t e ans UTILES pour réclamer contre ¿o h /é v e n te J a itc par
l'u n d'eux.
Mais y continuent-ils, la question concerne t acquéreur ; on
leur demandera d’abord comment il est possible d’avoir trente
ans pour se pourvoir contre les ven tes, et de ne pas les avoir
contre l'acquéreur ; comme ce serait inexplicable , il vaut mieux
dire que les Chouvenc ont élé forcés de r e c o n n a î t r e l ’évidence
du princ ipe.
A u reste, en examinant la question en elle-m êm e, ce n’est
pas dans le Code civil qu’il faut la chercher, cardans une grande
partie de ses articles, et notamment sur les prescriptions, il a
adopté tantôt le pur droit romain , et tantôt la Coutume de Paris.
Mais pour ne pas faire de confusion à l’avenir, et respecter le
�passé, l ’art. 2281 termine le Code par dire que les prescriptions
commencées seront réglées conformément aux lois anciennes.
Il faut donc chercher ailleurs que dans le Code, s’il y a lieu
à la prescription d e d ix ans; et même si nous trouvions de l’obs
curité dans les lois romaines qui régissaient les parties , il fau
drait dire avec la Cour de cassation que '‘ usage est l'interprète
le plus sûr des l o i s , et s’en référer à ce qui a été jugé de tout
tems sur ce point par le parlement de Toulouse.
Mais la loi n’est nullement obscure, et si on trouve au
Code une loi qui établit la prescription de dix ans en laveur
du tiers possesseur, on voit aussitôt après 1 authentique malœ
Jidei qui l’explique et la commente, en déclarant que les dix
ans n’ont lieu que quand le vendeur a été de bonne foi. Malœ
Jid ei possessore a lién a n te, cessât longi temporis prescriptio ,
1
si verus dominus ignoret ju s suum et alienationem faectam.
Si ce commentaire de la loi elle-même ne paraît pas assez clair,
si comme les Chouvenc le disent, il y avait moyen d’en torturer
le sens en présumant que les intimés ont connu la vente, nous
trouverons la suite de l’authentique dans la novelle d’où elle est
tirée, et il sera très-clair alors que ce 11’est que la bonne foi du
vendeur qu’il faut considérer. S i autem ignorât verus alienalarum rerum dom inus, non aliter hune exclu d i n isi per triennalem prescriptionern : non valente dicere eo qui res hoc modo
possidet quia ipse bond fide possidet, quandb ipse à ma/dJide
possidente hoc accepit. Novell. 119 , ch. 7.
Puisque la loi est si claire et si positive, il faudrait donc s’é
tonner que le parlement de Paris jugeât pour la prescription de
dix ans, en faveur de l ’acquéreur, si nous ne savions que la Cou
tume de Paris en a une disposition expresse, et que dans les moin
dres doutes, elle était la règle pour ce parlement.
Quant au parlement de Toulouse, tous les auteurs de son res
sort a tt e s te nt, sans exception , que la prescription de dix ans n’y
est admise que p o u r l’hypothèque, et que le tiers p o s s es s eu r 11e
prescrit que par trente ans.
B a
�Boutaric, page 182, a , sur ce sujet, une discussion très-ap
profondie. Serres, page 167 annonce la seule prescription de
trente ans comme un principe non contesté. Graverai et Larocheilavin, p. io; Catelan, p. ÎS07, disent « que le parlement
« de Toulouse n ’a pas reçu cette usueapion de dix ans, que
« Justinien même avait transformée en prescription de trente
« ans; qu’ainsi le tiers acquéreur purge l ’action hypothécaire
« par dix ans , et non le droit de propriété pour lequel il faut
« trente ans ».
5
Furgole , en son traité des testamens, tom.
3 , pag. 4 17, s’ex
plique ainsi : « A u parlement de Toulouse , on ne connaît d’autre
« prescription pour l ’acquisition ou la perte des droits person« nels ou réels que celle de trente ans. Ainsi un héritier pourra
« demander pendant trente ans, même à celui qui possède avec
« vin titre, lequel n ’est pas capable de lui attribuer la propriété,
« comme ayant été consenti à non domino.
Ces principes sont élémentaires dans les parlemens de T o u
louse, A ix , Bordeaux et Grenoble. On peut consulter là dessus
encore Catelan, livre 7 , chap. a i ; Lapeyrère , lettre P , n.°
;
5
83
58g ; Bretonier ,
hypothèque, §. i 3 , et la
Montvalon , page i o ; Decormis , tom. 2 , col.
v.° prescription ; M .r M erlin, v.°
maxime est tellement devenue triviale dans les parlemens du*
droit écrit, que suivant Dupérier , » la prescription de dix a n s ,
« en ce cas, n’est plus maintenant que pour les écoles».
Cela peut paraître étrange dans 1111 parlement qui ne s’y con
formait pas ; le docte Doinat y avait réfléchi lui-m êm e, et ne
s’en étonnait pas : « Les lois, disait-il, qui marquent le tems des
« prescriptions ne sont que des lois arbitraires, car la nature ne
« fixe pas quel tems il faut pour prescrire. . . . Il se règle difïé« remment en diverses provinces , et il y a même de celles qui
« sc régissent par le droit écrit où l’on n’observe pas les divers
« tems de prescription du droit romain. Il y en a où elles ont été
« réduites à une seule prescription de trente ans. »
Nous verrons sur la 4.e question, que la Cour de cassation a
�3*2
'3
(
)
consacré, par trois arrêts, la nécessité de suivre la jurisprudence
du parlement de T o u lo u se , et expressément sur la matière des
prescriptions.
Concluons donc que les Chouvenc ne peuvent invoquer la pres
cription de dix a n s , dans un ressort où on ne citerait pas un seul
arrêt ou jugement q u i , en semblable cas , l ’ait jamais admise.
Dans leur propre système , il faudrait les supposer de bonne fo i,
et il est impossible qu’ils le fussent.
L a lo i, au reste, n’est nullement en leur faveur, et ce n’est
que surabondamment qu’il y a lieu d’invoquer l’invariabilité
de la jurisprudence.
T R O I S I È M E
Q U E S T I O N .
f
L a tierce opposition des appelons est-elle recevable ?
« Pour être reçu tiers opposant, disent les auteurs, il ne suffît
« pas d’avoir intérêt de l’attaquer, il faut avoir été partie néces« saire dans le procès jugé. »
y
Les Chouvenc étaient - ils donc parties nécessaires dans le
procès d ’entre les intimés et le sieur Lacroisière, de quoi s’a
gissait-il ? d’un partage.
Mais un partage de succession ne pouvait être fait qu’entre
cohéritiers. A c t io fam iliœ erciscundœ solis liœredibus com
patit.
Les questions d’un partage sont tellement étrangères à tous
autres, que qnand un tiers achète la portion d’un cohéritier ,
les autres peuvent l’expulser en le remboursant , pour l’empê
cher de pénétrer les secrets de la famille. Aussi en droit, l’ac
tion en ’partage est-elle , par sa seule définition , exclusive de
toule admission étrangère : A c t io fam iliœ erciscundœ est actio
a v ilis qiuî cohccredes i il T E R s e agunt de com m uai hœreditate
dii>idundd.
Jusque-la un acquéreur n’est pas partie nécessaire dans un
partage ; il a suivi la foi de son vendeur, et quand la novelle
119 le répute acquéreur de mauvaise
�( h )
cepit à ma/cz Jide possidente, il est bien plus difficile encore de
supposer que deux cohéritiers ont nullement et inutilement
procédé pour avoir omis d’appeler un tiers possesseur, quand
toutes les affaires de la maison leur étaient inconnues.
Les Chouvenc n’ont pas dû être assignés nécessairement•
L ’ordonnance de 1667 d’ailleurs ne donne pas la faculté de
tierce opposition à ceux qui ont été condamnés par eux-mêmes,
011 leurs ayant-cause.
O r comment expliquer l’étendue de ce mot ayant c a u s e , ce
sont, disent les auteurs, ceux qui représentent le condamné à
titre universel ou à titre singulier, pour la chose litigieuse. A insi,
dit Rodier, un créancier, un acquéreur sont des ayant cause.
Nons allons voir encore que le Droit romain les place sur la
même ligne.
A u ff. des appels et au code des évictions , les lois entendent
si bien que le créancier et l’acquéreur soient des ayant cause du
propriétaire ou vendeur, et qu’il a pu être condamné hors leur
présence, qu’elles lui acccordent le droit d’interjeter appel, comme
condamnés eux-mêmes en sa personne
S i emptor de proprietale victus e s t , eo cessa n te, auctor ejus
appellare poterit y item si auctor egerit et rictus s i t , non est
deneganda emptori appellandi fa cilita s. . . . I d que ità con stitulum est in personâ créditons. L . 4. ff. de appellat.
L ’acquéreur et le créancier sont donc identifiés avec le procès
du vendeur; et quand celui-ci a lui- même interjeté a p p e l, la loi,
toujouis juste , permet encore à l’acquéreur d’intervenir au
procès , si le vendeur paraissait suspect dans les moyens qu’il
propose. Qui/i etiam si auctor appellauerit , deindà in causai
dejénsionc suspectas visus e st, pennde defensio causa; emptori
committenda est, atquc si ipse appellassel. I j . ead.
L e Code civil s’est conformé ¿1 ces principes, sur-tout en ma
tière de partage, et bien loin de vouloir que des cohéritiers soient
passibles d’aucune résistance étrangère, après le partage con
sommé', il n’admet les créanc iers qu’à inlcrvcnirà leurs fr a is ,
�y > j(
)
sans pouvoir ensuite attaquer le partage autrement que s’il y avait
été statué au préjudice d’une opposition par eux formée (art. 882).
II y a plus ; car si , par l’efl’et du partage , un seul cohéritier
avait obtenu tout l’immeuble commun , à titre de licitation ,
envahi tous acquéreurs ou créanciers des autres cosuccesibles
tenteraient de l’évincer, l ’art.
lui répondrait « que chaque
'5
883
« cohéritier est censé avoir succédé seul et immédiatement a tous
ce les effets compris en son lut, ou à lui échus par licitation. »
Ainsi Thérèse et Catherine Molin ont, dans la portion qui
leur est attribuée par un jugement en dernier ressort, une pro
priété qui leur est transmise ex causa antiquâ, et qui est réputée
leur appartenir depuis l'ouverture des successions. Ainsi les
Chouvenc, qui n’étaient pas parties ne'cessaires au procès relatif
au partage, mais qui pouvaient seulement y intervenir, trouvent
aujourd’hui un mur d’airain dans la chose ju gée, et 11e peuvent
plus faire juger avec eux seuls une demande en p artage, de
successions qui leur sont étrangères.
Si, après s’être pénétré de toute la puissance de ces principes,
il fallait en venir à la jurisprudence, les arrêts abondent en faveur
des intimées, et 011 n’eu citerait pas un seul qui fût favorable
aux Chouvenc.
Parmi le grand nombre d ’arrêts qui se trouvent dans tons les
livres, nous 11e puiserons que dans des sources indubitables,
pour qu’on ne puisse pas même présumer que l’espèce de ladécicision n’a pas bien é*é s:iisie.
i.° M .r Cochin , en ses notes alphabétiques, tom.
dit ; « jugé par arrêt du
5, pag, 627,
3 i mai 1726, en faveur des sieur et dame
« Massol contre M .r le président Amelot et le comte de Tavanes,
« que le tiers détenteur, assigné en déclaration d’hypothèque
« par ceux qui ont obtenu des arrêts contradictoires contre son
« vendeur , ne peut y former tierce opposition, quoique son
« acquisition y soit antérieure. »
2.0
M .r Merlin , au répertoire, v.° tierce opposition , cite
deux arrêts. Par le premier, « la dame de Gonflans était en procès
�\\*
«
«
«
«
«
«
«
avec un seigneur voisin pour mouvance de
. . tuie venait
sa terre. . . . on continua de plaider avec elle. . . . elle perdit
son procès par arrêt de 1728 . . . son acquéreur ayant réclamé
des droits seigneuriaux, l ’autre seigneur lui opposa cet arrêt. . .
l’acquéreur y forma tierce opposition , on lui répondit qu’il
devait s’imputer de n’être pas intervenu : par arrêt du 3 i
mai j 742, il fut déclaré non recevable dans sa tierce opposition. »
Par le z .e arrêt, « le marquis de Lusignan vendit, en 1720,
« des terres au sieur Dauriac. . . . Les héritiers de la dame de
« Monriquet firent, en 1727, confirmer , sur appel, une sentence
« de 1718 , contre le marquis de Lusignan seul. M .r Dauriac
« soutint qu’on aurait dû l’appeler, et forma tierce opposition....
« On lui répondit qu’il devait intervenir. . . . qu’il était censé
« avoir été partie dans l ’arrêt par son vendeur , qu’en cette
« partie il était l ’ayant cause du marquis de Lusignan. Par arrêt
« du 6 septembre 1760 , il fut déclaré non recevable. »
.° L e B u lletin officiel de cassation rapporte un a rr êt du 12
fructidor an g , dans lequel , pendant un bail à ferme , de
forges, moyennant 122,400 f . , le s.r Forestier se fit envoyer en
3
possession de ces forges, par jugement en dernier ressort et par
3
défaut du janvier 1792. . . Godet, créancier, forma tierce oppo
sition, et dit que cette dépossession était le fruit d’une collusion.
Néanmoins l’arrêt, « vu les art.
5 et
11 du titre 27 de l ’ordon-
35
« nance de 1667, ct
1>er
•*tre
. . . . Attendu que la
« reserve du droit des tierces personnes, ne concerne que celles
« qui n’ont pas été parties appelées ni représentées.. .. que le
« sieur G o d e t, comme créancier de L essa rt, était à cet égird
« son ayant cause. . . . que Lessart a été appelé. . . . q u e Godet,
« en qualité de son ayant cause , n ' a ur a it p û être recevable à
« attaquer ce j u g e m e n t , q u ’a ut a n t qu’il eût élé juslilié que Les
te sart aurait été lui-même admissible à se pourvoir. . . . q u e les
« juges de C an, ei \ admettant la tierce opposiliondu cit. Godet,
« ont violé l ’art.
5 de
l ’ordonnance concernant l'autorité de la
« Chose ju g é e , et ont contrevenu formellement à l ’art. i . cr du
titre
�2>7Y
C *7 )
a titre 35, quï ne permet de rétracter, autrement que par requête
« civile , les jugemens rendus en dernier ressort , avec ceux
a qui y ont été parties, ou leurs ayant cause.................. Casse
« et annulle etc. »
V oilà donc la pleine confirmation de la loi 4 ff. de appellationibus et du code civil. L ’acquéreur ou le créancier peuvent
intervenir s’ils suspectent ; ils peuvent même attaquer la chose
jugée, par la voie de l’appel,.aux risques et périls du vendeur ,
si le jugement est en premier l'essortj par la requete civile , s îl
est en dernier ressort.
Tout cela encore ne serait pas accordé contre un partage , s’il
n’y avait eu fraude évidente. Aucuns de ces arrêts ne sont dans
l’espèce d’un procès de succession. Solis hœredibus cornpelit.
D eux autres moyens résistent à l’admission de la tierce oppo
sition des appelans. i°. Les tierces personnes ne sont admises in
définiment à s’opposer, d’après l ’ordonnance, que par la raison
bien naturelle qu’ils ne connaissent pas le jugement. Mais il a
été signifié aux Chouvenc en 1793 ; et ils n’ont formé tierce op
position qu’après dix ans. 2°. Dans les circonstances d elà cause,
c’était de leur part une action principale, et ils devaient épuiser
les voies de conciliation.
Les Chouvenc objectent qu’ils ignoraient le procès. Cepen
dant ils veulent que les intimés aient connu leur vente, bien plus
occulte sans doute qu’un procès , qui a duré depuis 1783 à 1793,
dans une petite commune. Quand ils voyaient Catherine Molin
dans la maison paternelle, pouvaient-ils bien acheter de bonne
foi sans sa participation ? quand ils l’en ont vu sortir ; quand
Thérèse est revenue de l’Ardèche dans son pays natal, 11’ont-ils
pas dû présumer qu’elles allaient intenter un procès, ont-ils pu
se défendre de l’inquiétude naturelle à celui qui a acquis une
chose indivise, et qui sur-tout en a payé le prix capital à une
femme séparée de biens.
A u reste , s’il y a de l’inconvénient pour un acquéreur d etre
condamné sans être en cause, n’y en aurait-il pas un plus grand
C
�A "
!
C 18)
encore, d’exiger en règle générale, que tout'cohéritier d6Î sa
voir s’il y a des acquéreurs, avant derecheicher ses droits , cVstà-dirè fût leiiü de connaître les forces de la succession , lors
qu’au contraire il a le droit de les puiser dans un inventaire, ou
dans une preuve de commune renommée.
Si les acquéreurs étaient parties nécessaires dans une action de
partage , serait-ce donc pour en discuter toutes les questions èt
tous les actes de la famille? Une telle prétention résiste à toutes
les notions reçues?
•■
Q U A T R I È M E
QUESTION.
Thérèse M olin avait-elle d ix ans ou trente ans pour se pour?
voir contre sa renonciation ?
Cette question doit-elle être décidée par une jurisprudençe
autre que celle du parlement de Toulouse ?
L a nécessité de discuter ces deux points ne marque que plus
fortement tout le danger qu’il y aurait d’admettre les Chouveric
à pénétrer, par une voie d’intrusion , dans une famille étrangère,
pour dire à des cohéritiers : vous avez péniblement obtenu un
règlement de vos droits, on a annuité deux testamens : J e rn'y
op p o se; je veux faire rejuger tout cela; je veux scruter vos»
testainens, vos conttats de mariage, tout ce qui s’est pa^sé dans
votre maison depuis 1735 jusqu’en 1793. Vos cohéritiers n’y
seront pas même appelés, car il y a chose jugée avec eux , et
c’est moi seul qui veux faire r é g le r, avec vous tous , vos droits
successifs, je suis à présent} dans la succession de vos ancêtres,
la seule partie légitime.
Si ce système des Chouvcnc, qui cependant est toute la base
du procès a c tu e l, 11e révolte pas au premier aperçu ; s’il faut
trouver en eux le seul légitim e contradicteur, voyons donc par
quelle jurisprudence la chose ju g ée et remise en litige doit êtro
rejugée.
Théièse Molin s’e'tait pourvue en 1783, contre une renoncià-
�75
C *9 )
tîon de i o i Elle y a été recevable, parce que dans tout le par
lement de Toulouse , et pendant plusieurs siècles, on n’a pas un
seul exemple que les actions en nullité aient été prescriptibles par
moins de o ans. Nous avons vu sur la 2.e question que toutes les
actions y étaient réglées à cette durée, à la seule exception de.
3
L’action hypothécaire.
- L e s Chouvenc ayant leur procès en cette C o u r, ont été séduits,
par une innovation de jurisprudence , qui n’a même pris quelque
consistance que depuis le Code civil et par induction de l un de
$es articles; jusques là , la Cour d’appel ne s’était pas prononcéef
eton trouverait même dans l’un deses arrêts que les anciens prin
cipes en celte matière n’étaient pas oublies.
Mais quand cela serait autrement, n’est-ce pas une folie des
Chouvenc de penser que la Cour d’appel, par un nivellement
désastreux, ramènera à sa jurisprudence , même la chose ju g é e ,
même des questions nées en 1783 , dans un parlement étranger f
et à une époque où la Cour d’appel aurait indubitablement jugé
comme lui.
Qui donc ne verrait pas le danger incalculable qui en serait I4
suite, et non-seulement dans le cas de la chose déjà ju gée, mai^
encore quand elle serait pleinement en litige? Soumettre brusr
quement un vaste pays à une jurisprudence qui jusqu’alors lui
était inconnue, serait sans doute porter le trouble dans de§
familles, dérouter tous les gens d’affaires qui n’auraient plus désor
mais que des conseils vagues à donner aux autres, et une marchq
incertaine à tenir pour eux mêmes.
Les lois ne sont pas un ordre donné au peuple ; elles sont
réputées être émanées de/lui, par le pouvoir que lege rcgid
il en a donné au prince. En les exécutant, il les explique, et la
manière d’expliquer les lois par l’usage , dit V in n iu s ,
d'après un auteur latin , vaut mieux que cc qu’on lit dans la loi
elle-même. P lu s valere loges quee moribus comprobalœ surit,
(¡nam quœ scripto co n sta n t, v ér i té bien plus m a r q u é e encore
par la maxime si connue, que la jurisdrudence est le meilleur
C a
�\
,
(
20
)
interprète des lois. Consuetudo est legum optima interpres.
L a jurisprudence en effet qui n’est p is seulement un mode de
juger, mais d’après la définition de Vinnius , Justitice habitus
practicus , n’a pas cessé d’être une espèce de législation impérative, depuis que les anciens ressorts des Cours sont confondus.
Quand Rome n’avait pour règle que la loi des 12 tables. les dé
cisions des jurisconsultes responsa prudentum fixaient la ma
nière de les interpréter, et cette jurisprudence devint une législa
tion additionnelle; et lorsque des Proconsuls et des Préfets furent
envoyés dans les provinces, il leur était prescrit de soumettre les lois
-à la jurisprudence et de respecter les usages. Præses provinciæ ,
probatis his quæ in oppido, frequenter in eodem controversice
g eh ere, servata surit, causa cognilâ statuit. L . 1. cod. quæ s.
long. cons.
L a Cour d’appel donne tous les jours cet exemple, en décla
rant dans ses arrêts qu’elle est déterminée par la jurisprudence
du parlement de Toulouse.
L a Cour de cassation que l’on pourrait croire, par le but de
son institution , plus attachée à la lettre de la loi qu’aux diverses
jurisprudences, s’est souvent prononcée de la manière la plus for
melle sur la question qui nous occupe.
« Considérant (porte un i . er arrêt du 2 messidor an 11 ), que
« les dispositions du droit romain ne font loi dans les pays même
« qu’elles régissent, que dans les points et selon le sens qui ont
« été adoptés par la jurisprudence ; qu’il est constant que, par
« une longue suite d’arrêts sem blables, le parlement de Tou« louse a ju g é y etc.» (Sirey , page 809).
2.0
Dans une autre cause, du floréal nn 12, la Cour de cas
sation n dit:« Considérant que quoique en général on puisse par
« le droit romain acquérir les servitudes par 10 ans entre prê
te sens, et 20 ans entre absens ; cependant, d'après la furispru-
5
« dence du parlement de Toulouse constatée par divers arrêts ,
« les servitudes discontinues ne pouvaient s’acquérir que par la
« possession immémoriale, et que c'est ainsi q u 'il a entendu la,
« lo i , etc. casse et aimulie, etc. * (Bulletin, n.° 52).
�M
( \
( 21 ) ' 7
3.° Un arrêt du
du même mois a jugé de m êm e, « que la
« jurisprudence des arrêts rendus par une Cour souveraine, non
« étrangère au pouvoir législatif, pouvait être considérée comme
« fixant le sens des dispositions législatives. » ( S ir e y , p. 267).
■Si donc la Cour admet les Chouvenc à discuter les questions
qui ont été agitées au Puy avec Lacroisière, elle ne les jugera
évidemment que par la jurisprudence du parlement de Toulouse.
Thérèse Molin a renoncé en 1755, cela est vrai; mais, 1.0 elle
était mineure , et la convention porte qu’elle sera tenue de con
firm er et ratifier à sa majorité. Elle n’en à rien fait.
n’y a donc
11
pas de partage final là où il y a lieu de le confirmer en majorité j
ce n’est jamais qu’ une mesure provisionnelle.
2.0 On fit renoncer Thérèse Molin à tous droits et supplément.
I l est évident qu’on lui fit entendre en minorité qu’elle n’avait
qu’une légitime de rigueur. Donc on la trompait. Sa renoncia
tion d’ailleurs n’est dirigée au profit de personne.
3
- .° Si on suppose qu’elle a approuvé les testamens, une appro
bation tacite ne suffisait pas; car il fallait les connaître. Celui-là
seul prescrit le droit de réclamer contre une destination de légi
time , qui agnovit ju d iciu m de/uncti. Tels sont les principes
invariables comme la Cour l’a souvent ju gé, et notamment les
a i thermidor an 8 , et 4 pluviôse an 10.
4.0 L e testament de 1735 a été expédié par le notaire, avec
des expressions qui en changeaient le sens. C était donc induire en
erreur les parties intéressées. Thérèse Molin pouvait croire Marie
Molin substituée, puisque la condition du décès de Pierre, sans
avoir rem is, était remplie , tandis que celle de son décès, sans
avoir r ecu eilli, 11e l’était pas. O r, non videntur qui errant consentire , et la prescription 11e court que du jour de la découverte
de la vérité.
5
.° Thérèse M olin, née en 1733, avait d e u x a n s nu décès de sa
mere , et dix ans au décès de son père en 1743. Marie Molin
alors avait vingt-cinq ans j car elle était née au mois de février
�*
-
(«)f
1.718. L e père levait chargée de r^zV <r/ administrer conjointetementavec Ignace Molin, curé de Chambon; et les Chouvenc.
qui connaissent plus d’actes de la famille que les intimés n’en ont,
jamais connus, nous apprennent que ledit Ignace Molin parle,
dans son testament de ses droits légitimaires sur les biens de ses
père et inère, dont jo u issa it Marie M olin,
,
L a voilà donc évidemment protutrice , ou au moins compta->
ble depuis 174.3, envers une sœur de dix ans, qui naturellement
ne pouvait se mêler des affaires de la maison, Le frère n’avait
que douze a n s, et s’absenta quand il put s’enrôler. L a chance
était donc bien inégale, lorsqu’il fat traité en 17^5 , entre Marie
Molin qui, pendant douze ans, avait connu toutes les forces de
la succession et le vice des testamens, et Thérèse Molin qui
ignorait tout.;
•
,
Q r, le parlement de-Toulouse n’a jamais hésité d’admettrea i
pareil cas le. renonçant non visis tiibnlis, à se pourvoir pen-j
dant trente ans. Q u ’on consulte May nard , liv. 2 j chap, 99 et
100^ DoJive , liv. 4 , chap. 16; Catelan, liv...<8 ; Bretonnier, v.°
restitution ; ou plutôt qu’on parcoure tous les auteurs de c i
parlement , ou ceux qui mentionnent sa jurisprudence , on ne
trouvera nulle part q u e .l’art. i
de l ’ordonnance de i539 ait
34
qté jamais appliqué à cette espèce.
L e parlement de Pari^, après l ’ordonnance de i539 , jugea
long-teins, comme le parlement de Toulouse a toujours jugé
Les auteurs du tems même de cette ordonnance , notamment
M .r D u v a l, de reùus dubiis , enseignaient qu’il ju’y a contre les
qctions^en nullité que l ’action trentenaire. Quarante ans après
le parlement de Paris changea sa jurisprudence?, mais enfin ilia
changea de nouveau après l’ordonuance de 1667 ; et il a inva«
riablement jugé depuis que l’art. 1ÎJ4 de l’qvdonnanee de 1089
ne s ’ap p l i quai t q u’aux actions rescisoires.
Cette jurisprudence constante s’est maintenue jusqu’au Code
civil. On a vu encore, dans les discussions sur ce Code, les ellbrts
des sections réunies de la Coi^r d ’appel de Paris, pom luire muin-
�-b it
■'
• .... . • : .
tenir l ’action de trente a n s , et on n ’y voit d’opposition que dans
les deux Cours d’Orléans et de Liège.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme commença par suivre les
anciens principes. Il jugea le 28 pluviôse an 4 , entré les
Champoinier et Sezel, que l ’action en nullité avait duré trente
ans, en floréal an 5 , à la vérité il changea de .jurisprudence.
Cependant la Cour de cassation ne lui donnait pas cet exemple;
elle avait jugé en thèse le 3 messidor an 4 , que Gilberte Laporte
avait'élé recevable pendant trente ans a se pourvoir contre sa
renonciation faite par son contrat de mariage, en faveur de son
beau-frère, et voici les motifs bien précis de son arrêt.
« Attendu que l ’art. i i de l ’ordonnance de i g , de'clare
« nulles toutes dispositions en faveur des tuteurs ou administra
it teurs. etc. directement ou indirectement, avant le compte
3
53
•« rendu, et qu’une vente , faite par une mineure en faveur d’une
.« personne qui administrait ses biens, présente un avantage
« indirect :7
«
« Attendu qu’en pareil cas l ’action subsiste pendant trente ans,
« parce que suivant l’art. i . er, tit. 29 de l’ordonnance de 1667,
« le comptable ne cessant de l ’être que par la reddition de son
•« compte, c’est le compte seul qui peut éclairer le mineur sur
« ses intérêts ;
34
« Attendu que l ’art. i
de l ’ordonnance de 1ÎS39 qui restreint
« le.délai à dix ans , n’est relatif qu’aux actions rescisoires,
« qui n’ont rien de commun avec celles en nullité qui durent
« trente a n s , et pour lesquelles il n’était pas besoin de lettres t
« casse et annulle , etc. »
Il est même remarquable que le Bulletin officiel ju sq u 'à ce
jo u r 11e mentionne aucun arrêt qui contrarie le précédent.
L a Cour d ’appel de Riom ne s’est prononcée, pour les dix
ans , pour la première fois, que le 18 prairial an 11 , c ’est-àdire, depuis le Code c iv il, et par induction de l ’article 47λ. On
verrait même , dans un arrêt du 25 nivôse an 10 , que la pre
mière section avait admis une femme pendant trente ans, et jug^
�( H >
encore que l ’action n’avait couru qu’après le décès du père, qui
avait constitué la dot maternelle par le contrat attaqué. Mais si
cet arrêt ne juge pas la question isolément et en thèse , il paraît
au moins certain que la Cour n’a jamais jugé en faveur de dix
a n s , avant le Code civil.
Comment donc concevoir que la Cour pût infirmer le juge
ment du Puy qui a admis Thérèse M olin, après dix ans , lors
que ce tribunal a jugé comme son parlement , comme le par
lement de P a r is , comme la Cour de casation elle-même.
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N .
L ’action de Catherine M olin est-elle ’p rescrite par trente ans ,
quoiqu’elle ait cohabité la maison paternelle ?
"
Les Chouvenc se sont attachés singulièrement à établir cette
prescription par des citations qui n’ont pas la moindre analogie.
i.° Dargentré qu’ils invoquent sur l’art. 276 de Bretagne , ne
s’occupe pas de la question. D o m a t, au tit. 7 du liv.
ne s’en
occupe pas davantage. L e Code c iv il, art. 2243 se contente de
3
dire qu’il y a interruption naturelle, quand ce possesseur est
privé pendant un an de la jouissance de la chose. E n fin , L apeyrère , bien loin de vouloir la presci’iption, dit expressément
ce qui suit : « Tant que les enfa'ns sont nourris sur les biens de
« l ’hérédité, la prescription de la légitime ne court point contre
« eux ». Son annotateur ajoute « idem , en matière départage»;
25
tet il se fonde sur Coquille , en la question
9.
M ais, outre Lapeyrère, on ne voit pas d’auteurs qui aient
traité la question , s’être expliqués autrement, et si on en cite
plusieurs antres, c’est seulement pour convaincre les Chouvenc
q u ’ils n’ont pas voulu chercher la question où ils l ’auraient
trouvée.
•
r
Dolive en fait une question expresse au chap. i du liv.
3
5,
et décide que « si les enfans vivent en commun sur les biens de
a l’hérédité, cette prescription ne court pas contre e u x , en cette
« rencontre,
�3
5
% $
( ï )
« rencontre, depuis la mort de leur père , mais depuis seule« ment qu’ils ont cessé d’être nourris sur ses biens , parce que
« recevant journellement leur nourriture sur le patrimoine du
« d éfu n t, ils sont censés être en possession. »
Dolive cite deux arrêts des 10 janvier i o et 26 août i
.
Cette opinion est encore enseignée par V e d e l, liv. 2 , cliap.
;Serres, pag. 294; Dunod , p. ¡101; Despeisses, tom. 2, p. i ;
et L ebru n, liv. , des successions. C ’est aujourd’hui un principe
incontestable, dont la raison et la justice presci’iraient 1 observa
63
3
636
36
33
tion, si les auteurs ne l’enseignaient pas.
,
L a Cour d’appel vient très-récemment de prononcer, dans
3
un arrêt du i3 ventôse an i , le motif suivant :
« Attendu que l’habitation d’Antoine et Pierre Veschambe ,
a dans la maison paternelle , a constamment réclamé la con« servation de leurs droits. »
Ainsi Catherine Molin qui a habité la maison paternelle jus
qu’en 1788; qui n’en est sortie que pour former la demande,
n’a pas un instant de prescription à redouter. Ce fait a été éclairci
dans le procès contre Lacroisière, qui soutenait alors, comme les
Chouvenc le font aujourd’h u i , que la cohabitation n’avait pas
empêché de prescrire.
Les Chouvenc veulent que cette prescription ait couru à
leur égard , quand elle n’aurait pas couru contre Lacroisière ,
il est difficile de concevoir sous quel prétexte, à moins que ce ne
soit pour en revenir à la prescription de dix ans , qui a déjà été
démontrée être sans application dans la cause.
Il est plus difficile de concevoir encore sur quoi serait fondée
la différence q u ’ils veulent établir entre les portions de Catherine
et J ea n n e , et celles de Marguerite et de Pierre Molin ; car l’ac
tion d’un cohéritier se compose de tous les droits partiels , qui
ad hœreditatem veniunt ; et comme les portions advenues à
Calherlne Molin par le décès de scs sœurs , se sont accrues à
la-sienne, aussitôt leurs décès, en vertu de la règle, le. mort
jd is it le v if y Catherine Molin a été, dès cette époque, proD
�T
.
-
C 26)
.
priétaire d’une quotité plus con sid érable, et n’en a pas plu*
perdu une fraction que la totalité.
S
i x i è m e
Q
u e s t i o n
.
l e testameut de Catherine Ferrapie est-il valable?
« U n testament, dit R ic a r d , est un acte dont tonte la valeur
k
est dans sa solennité, et dont toute la solennité est dans ses
« fermes. »
E n e l l e t , dans cet acte si im p o r ta n t, il faut que toutes les
formalités aient été ostensiblement remplies : elles sont toutes
de rigueur d ’après les ordonnances.
L e testament de 1735 est vicié par deux nullités textuelles : 1.®
il est dit fa it et récité en la maison de Pierre M alin ; maià rien
ne constate que la lecture ait élé faite à la testatrice.Cependant
la loi l’exige impérieusement; et il est bien indispensable q u ’ un
testament soit lu à celui qui l’a dicté , pour q u ’il soit certaia
que ce sont là ses véritables intentions;
2.° Il n ’e6t fait aucune mention de la signature de la testa
trice ou de sa déclaration de n’avoir su ou pu signer , car on y
lit seulement : « L adite testatrice
ille
de ce enquise. »
O r , l’ordonnance de 173 5 dit que « les notaires écriront les
« dernières volontés du testateur, et lu i en feront ensuite lec« t u r e , de laquelle il sera fait une mention expresse.... Après
« quoi le testament sera signé par le testateur , le notaire et les
« témoins ; et en cas que le testateur déclare q u ’ il ne sait ou ne
« peut sig n e r, il en sera fait mention ( a r t . 2 3 ) à peine de
« nullité ( art. 47 ). »
M i i s , disent les C h ouvenc , le
testament de Catherine
Ferrapie est antérieur à l’ordoninnee de 1735 : cela est vrai.
Mais cette ordonnance ne fait que répéter en cette partie les
dispositions des ordonnances d’Orléans et de Blois.
« E t en cas que les parties ou témoins ne sauront point
« s i g n e r , les notaires fe r o n t mention de la réquisition par eux
�b i> 1 '
7
( 2 ) _
a faite aux parties ou témoins de sig n e r, et de leur réponse
« qu’ils ne savent signer. » Ordonnance d’Orléans , art. 84 ;
65
ordonnance de Blois , art. i .
Ces ordonnances exigent donc du testament une réponse
d ’une manière plus expresse encore que celle de i y .
E t les auteurs qui ont écrit avant l’ordonnance de 1735 ,
enseignent que cette réponse ne peut être suppléée par ce que
dit le notaire en son nom. ( L e Maitre , sur Paris , article 14 ,
chapitre i . e r ; R a v io t, question 164; Maillart , sur A rto is ,
35
art. 74 ).
On cile souvent R i c a r d , comme ayant rapporté un arrêt de i a
validant un testament où i l était dit : « Lequel n’a pu signer ,
65
« interpellé de le faire. » Mais on pourrait voir que Ricard le
désapprouve, en disant que cela est un peu subtil , et qu’il y a
grande apparence^que la faveur des dispositions dont il s’agissait
contribua à faire rendre cet arrêt.
5
Aussi Ricard , n.° i 26 , citant un arrêt qui validait un testa
ment où le testateur a déclaré ne savoir signer , sans que le
notaire eût dit l’avoir interpellé, ajoute : « Il en serait toute« fois autrement , si le notaire déclarait de son nom que le
« testateur n’a pu signer , parce qu’encore le testament ne fait
« foi , ni de l’interpellation du notaire , ni de la réponse du
« testateur.... Car le notaii’e , dit Ricard , au n.° i
, ne doit
« contribuer d’autre chose que de son oreille et de sa main ,
« dans la rédaction du testament. »
568
L a jurisprudence s’est conformée à cette rigueur; et on trouve
dans Denizart. un arrêt du 3 septembre 1768, qui a annullé uu
testament du Bourbonnais , dans lequel il était dit que le tes
tateur n'avait pu signer à cause de sa faiblesse, de ce eticjuis.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme a jugé deux fois de la
même manière , le 17 ventôse an 6 , sur appel du Cantal , et
le a pluviôse an 7 , entre les héritiers V a c h i e r , d’Arlanc.
L a question ne paraît pas s’être encore présentée en la Cour»
mais l’art. 973 du Code civil veut aussi que si le testateur déD 2
3
�î
( 28 )
clare ne savoir signer, il soit fait mention expresse de sa décla
ration ; ainsi la loi n’a pas change', et la cause actuelle fixera
sur ce point la jurisprudence.
Les Chouvenc se sont imaginé que les ordonnances d’Orléans
et de Blois n’avaient pas été enregistrées au parlement de T o u
louse ; mais on leur demanderait comment il se fait que tous
les auteurs de ce parlement s’y réfèrent et les citent comme lois,
sans dire nulle part que leur parlement ne les adopte pas.
A la vérité Dolive dit que de son tems on n’était pas rigou
reux sur les signatures de testamens , et que môme on n’exan iuait pas si le testateur avait signé ; mais Serres, Boutaric
et Furgole ne disent rien de pareil. Furgole dit au contraire
que les form alités que les lois prescrivent, pour la validité des
testamens , sont de droit p u b lic , et qu’un testament doit porter
la preuve avec lui-même; que toutes les formalités de la loi ont
été religieusement observées.
Dans le testament de Catherine Ferrapie , il n’y a pas même
la preuve que le notaire ait parlé des causes de la non signature
de la testatrice ; car le mot ille ne signifie rien. Les Chouvenc
se sont efforcés de persuader qu'ille veut dire illitéré , puis
illitéré veut dire ne sait écrire, puis enfin que les mots ne
sait écrire équivalent à la réponse ou déclaration voulue par
les ordonnances.
Mais d’abord quand cette pénible graduation pourrait mener
à quelque chose , il y aurait toujours ime autre irrégularité ,
en ce qu’une formalité rigoureuse aurait été substituée par une
simple abréviation.
Un arrêt de règlement de i
défend aux notaires d user
d’aucune abréviation ou interligne dans toute espèce d’actes. Si
elles ne touchent pus à l’essence de l’acte , elles sont seulement
elles-mêmes considérées comme nulles.
685
Yinnius et la loi nous apprennent que dans les testamens sur
to u t, qui sont testatio m en tis, il faut écrire en toutes lettres
et d’une manière intelligible sans user de simples notes ou abré-
�9
.
( a )
viations. Cœlerum litteris iisque usilatis et legîbilibus scribendum esse p la c u it, non sig n is, obscurisve n o tis, I. 6 , g. ult.
de bon. poss.
L e mot illité r é , au reste , ne se trouve , ni dans le diction
naire de l’Académie, ni dans le dictionnaire de pratique de Ferrière, ni dans le glossaire de Delaurière ; on trouve au diction
naire de Trévoux le mot M étré, signifiant celui qui ne connaît
pas les belles lettres. A u reste quand ce mot signifierait quelque
chose , il n’y a pas dans le testament illité r é , il y a M e , et par
conséquent ce serait mépriser évidemment la loi que de trouver ,
dans ce mot bizarre, une déclaration de la testatrice, qu’elle n’a
pu ou su signer. Allons plus loin même , le mot illitéré ne la
remplacerait pas.
S E P T I È M E
Q U E S T I ON .
Q u elle est la nature de la substitution,du testament de iy35 ?
a-t-elle transmis la succession à Marie M olin ?
Quand ce testament serait valable en la forme , il ne produi
rait pas encore l’eíFet de réduire Thérèse et Catherine Molin à
une légitime de rigueur.
Car le système des Chouvenc à cet égard , est fondé unique
ment sur une erreur de principes, qu’ils accréditaient encore plus
par une expression inlidelle de l ’expédition, qu’ils a vaient d’abord
produite, de ce testament.
Les héritiers institués, disaient ils, étaient Ignace Molin et
pierre Boyer. Ils étaient chargés de rendre la succession à Pierre
Molin quand bon leur semblerait. Pierre Molin est mort en 1748,
et Marie Molin était appelée à la substitution , dans le cas où
ledit Pierre Molin décéderait sans avoir remis la succession ; or
il est décédé sans l’avoir remise , donc , en vertu de la maxime
sub stitu tu s su b stituto est substitutus in stitu to , Marie M o l i n a
recueilli l’hérédité directement des doux héritiers institués.
D ’abord il est prouvé par l ’extrait vidimé du testament de
�3
( o )
Ï735 , fait en exécution de l’arrêt de la C o u r , qu’au lieu du
mot remis il y a recueilli. Cela p osé, voyons maintenant quel
est le sens de la substitution ?
. L e testament d’une mère qui , ayant des enfans , instituerait
des étrangers , serait évidemment inofficieux et susceptible de
contradiction ; mais les principes y ont pourvu en faisant une dif
férence entre la substitution fidéicommissaire et la substitution
fiduciaire.
L a première fait passer réellement la succession sur la tête du
grevé : l’autre ne lui transmet qu’un dépôt à titre de confiance,
et le grevé d’un fiduce ne compte pour rien dans les degrés de
la substitution.
Pérégrinus, qui a fait un traité sur les fîdéicornmis, le définit
ainsi. Fiduciarius est hœres q u i, non sut contem platione sed
aherius gratid institutus , eidem restituere hereditatem ,p o st
diem certain vel incertain , rogatus proponitur.
c< Ces substitutions, disent Henrys et Brelonier, sont corn
et munes dans les pays de droit é c rit, sur-tout en faveur du sur
et vivant des époux , pour maintenir les enfans dans le respect
« et l ’obéissance hoc consilio ut parenti obsequerentur.........
« Quoique le tems de la restitution, continuent-ils , ne soit pas
« marqué dans le testament, néanmoins on doit présumer que
« son intention a été que le survivant ferait bon usage de cette
« liberté, et n’attendrait pas jusqu’à sa mort pour en faire la res« titulion. . . .
« O11 doit penser, dit ailleurs le même auteur, qu’un père
« chérit plus ses enfans que leur mère ; qu’il vise plutôt à leur
« utilité, et ne l’avantage qu’à leur considération ; qu’ainsi il ne
a l’a instituée que par In nécessité de leur bas Age, non ut filiis
jninoribus obesset , sed poilus ut eis consuleret. » ( henr. t.
X.er } p.
, t. , p. 69 ).
736 3
Tous les auteurs ont adopté cette distinction , et donnent
d’autres signes du liduce, qu’on retrouve tous dans le testament
de 1735.
�& (h \
( 8 0
1.° Catherine Ferrapie avait tin fils et des filles; cependant
elle paraissait instituer deux oncles ;
2.° Ferrapie chargeait ces oncles de remettre l ’hérédilé ù son
fils, sans distraction de quarte. Ces prétendus héritiers n’avaient
donc l’espoir d’aucun droit , de leur c h e f , à la succession ; car
tout héritier grévé de fidéicommis a le droit de retenir la quarte
§.5
trébellianique ( 1. i . er
, ad treb. ) ;
°. En remettant l’hérédité à Pierre , ils étaient dispensés par
la testatrice de rendre aucun compte des fruits. Si donc ils eussent
été de véritables héritiers , jouissant pro suo , les fruits leur
eussent appartenu de plein droit , sur leur propre chose , sans
3
aucune stipulation ;
4.0 Enfin ils étaient institués à la charge d’élever les enfans :
le but de la testatrice était donc de maintenir seulement ses
enfans dans l’obéissance envers deux oncles , ut pa\entibus
obsequerentur. A cela p rès, elle exigeait les mêmes soins pour
eux, que si elle eut été vivante , sed potius ut eis consuleret.
A insi disparaissent Pierre Boyer et Ignace Molin , simples
dépositaires, pour faire place à Pierre Molin , impubère , véri
table héritier en premier degré de la succession de Catherine
Ferrapie.
Pierre Molin , propriétaire de la succession, l’ayant recueillie
dès 1735, était à la vérité grévé lui-mèine de substitution envers
Marie Molin , mais seulement au cas q u 'il vînt à mourir sans
pouvoir disposer, ou sans avoir recu eilli ladite hérédité.
On voit dans cette clause tous les caractères de la substitution
pupillaire , qui consistent comme on sait à faire soi-même le
testament de l’enfant impubère , s i non exliterit hceres J iliu s ,
aut si impubes decesserit ( instit. ).
Pierre Molin n’est pis mort sans pouvoir disposer ; car
en pays de dro't écrit le mineur avait testamenti fa ctio n cm
aussilot qu’il avait atteint sa puberté. Or , Pierre Molin , ne
cil 1731 , eta;t pu ère en *74^ > et il n ’est décédé qu’en * ®Si ce moyeu n’était pas péremptoire , on opposerait aux
74
/
�52
C
)
Chonvcnc que la mère ne pouvait pas faire une substitution
pupillaire ; car il faut pour cela avoir la puissance paternelle ,
comme l’enseignent les institutes , is subslituere potest liberis
impuberibus q u o s i n p o t e s t a t e h a b e t , cùm ejus cetatis sint
in quâ ip si testam entum facere non possunt.
Il ne reste donc que l ’institution de Pierre Molin , sans charge
de substitution envers Marie. A u surplus elle serait éloignée
encore par le principe enseigné par Cujas sur cette matière ;
c’est que la règle substilulus substituto n’a pas lieu en la subs
titution pupillaire , et le substitué au pupille n’est pas censé
l ’héritier du testateur. (C u ja s, ad 1. 41. de vul. et pup. sub.)
Ainsi le testament de 1735 , valable ou non , a transmis la
succession maternelle toute entière à Pierre Molin. Il est mort
pubère ; il est mort ab intestat-, donc ses soeurs lui ont succédé
par égalité , et ont de son chef recueilli cette succession.
H U I T I È M E
Q U E S T I O N .
L e teslament de 1743 e st-il n u l ?
s
Il
est évidemment-nul, mais cette nullité ne change rien à
l’ordre de succéder dans les biens paternels ; el on ne s’en occupe
que parce qu’elle a été agitée lors du jugement de 1793.
Pierre Molin père a institué son fils héritier , et a seulement
légué une légitime à ses filles ; or les institutes nous disent que le
père de famille doit instituer tous ses eufans héritiers, ou les
exhe'réder nominativement, aut hceredem in stitu â t, aut exhœ. redem nominatim fa c ia t , alioquin inutiliter testabitur.
Cette disposition a été répétée dans l’art. o de l’ordonnance
de 1735 , qui dit que, dans les pays de droit écrit, ceux qui ont
droit de légitime , seront institués héritiers, au moins eu ce que
le leslateur leur donnera.
5
Mais l’héritier, institué par le testament de 1743 , étant décédé
ab in testa t, il importe peu que ses sœurs viennent de son chef
ou
�33
C
)
^
ou ju r e s u o , à la succession de leur père, il n’est pas moins vrai
de dire qu’elle doit être partagée entr’elles par égalité.
Les Chouvenc terminent l e u r mémoire par demander, i.o
q u ’on estime les biens de la succession M olin; 2.0 qu’on accorde
à Marie Molin leur venderesse , les pi*élèvemens qurelle aurait a
faire, notamment trois qu’ils indiquent ; B.° qu’ils leur soit ac
cordé un compulsoire pour chercher des quittances, s il en existe.
A l’égard des deux premiers articles, le jugement dont est
appel, y a fait droit , en ordonnant que tous les bienS seraient
épuisés pour former le lot des intimés, avant d’en venir aux
Chouvenc.
Ainsi les Chouvenc assisteront à la formation des lots pour
veiller à leurs intérêts; c’était tout ce que les premiers juges
devaient et pouvaient faire, pour conserver l ’intérêt de toutes
les parties ; ce que demandent les Chouvenc appartient donc à
à l ’exécution du jugement dont est appel.
A lo r s , seulement ils pourront s’occuper des prélèvemens et de
l ’estimation des biens, sans laquelle le partage serait impossible.
Quant au compulsoire , c’est encore a cette époque qu’ils au„ ront droit et intérêt d’en requérir, s’il y a lie u , et il ne leur
sera pas refusé ; mais leur réclamation actuelle n’est qu’une
inquiétude tracassière , fondée sur une simple possibilité de
fraude qu’ils n’ont pas le droit de soupçonner sans motif; car
la fraude ne se présume pas.
Tout prouve dans celte cause que c’est Lacroisière qui souille
encore un troisième procès, après en avoir perdu deux , et les
exclamations des Chouvenc, pour crier à la collusion , ne sont
q u ’une finesse de plus ; ils sont venus à l ’audience avec une
Joule de papiers de la famille Molin , qu’ ils ne^pouvaient tenir
que*de lui. Tout ce qu’ils ont expliqué sur celle famille avec
ta ni de détails, 11e peut être de leur science personnelle, et il
st remarquable qu’ils n’ont jamais demandé en cornmunicat ion
E
�34
(
)
les pièces du procès par écrit jugé en 1793 , quoiqu’il soit le
siége principal des difficultés qu’ils élèvent.
Mais tel est le résultat fréquent des tierces oppositions for
mées par les ayant cause; elles ne sont qu’un piège tendu aux
tribunaux et une voie tortueuse de la chicane pour éprouver la
variation- des jurisprudences. A u reste , si la Cour veut statuer
sur les questions d’un partage, avec l’acquéreur d’un cohéritier;
si elle veut examiner le bien jugé du jugement en dernier res
sort de 1793 , elle reconnaîtra que les dispositions de ce juge
ment étaient sages et légales, et n’y trouvera rien qui mérite
censure et reformation.
M .e D E L A P C H I E R , avocat.
M .e D A U D E ? avoué .
)WA^V'^VW 1 V W V \,W W \W \A ^ ,V W V \'W W ^
A RIOM,
De l ’imprimerie du Palais, chez J . C . S A L L E S . ( A n X I I I ) .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Molin, Catherine. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
tutelle
successions
testaments
jurisprudence
prétérition
prescription
coutume de Paris
Parlement de Toulouse
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Catherine Molin, et les Sieur et dame Vendriez et Borne, intimés ; contre Jean et autre Jean Chouvenc, appelans.
Arbre généalogique.
Table Godemel : Renonciation : 8. la fille a-t-elle dix ans ou trente ans pour se pourvoir contre une renonciation surprise en minorité par des protuteurs, dans l’ignorance de ses droits et sans être informée que les testaments de ses père et mère étaient nuls ? Substitution : 3. substitution fidéicommissaire ou fiduciaire. substitution pupillaire. - validité. - transmission. Testament : 6. un testament sans signature ou déclaration négative du testateur est-il valable ? que résulte-t-il, pour ou contre sa validité, de ce qu’il est antérieur à l’ordonnance de 1735 ? Tierce-opposition : 3. des tiers, en qualité d’acquéreurs d’un cohéritier, sont-ils recevables à former tierce-opposition à des jugements en dernier ressort, rendus sur appointement, entre leur vendeur et ses cohéritiers, pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession commune ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1778-An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1611
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0624
BCU_Factums_M0729
BCU_Factums_M0326
BCU_Factums_G1610
BCU_Factums_G1612
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53285/BCU_Factums_G1611.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume de Paris
jurisprudence
Parlement de Toulouse
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53286/BCU_Factums_G1612.pdf
0e4ad46cb2e11637c4ee170badb30836
PDF Text
Text
GENEALOGIE,
M arie MOLIN.
P
i e r r e
J
M O L IN .
E lle a testé le 2 juillet 1759 ; a institué
Ignace Molin , son neveu , et fait un legs
à Geneviève P é rie r, sa nièce , et à Mar
celin M olin , son neveu.
M O LIN ,
Femme P É R I E R .
e a n n e
G
I
e n e v iè v e
,
Légataire de M arie M o lin , sa tante.
»■ — " i
I
B
laise
I
.
gnace
P ierre M O L I N ,
A testé, et est décédé Je 20 mai 1743.
Catherine F e R R A P I E ,
A testé le 24 mars 17 3 6 ; morte le 28 dudit
mois.
,
Curé du Chambon , héritier testamentaire
de Marie Molin , » tante , fidéicommissaire ou fiduciaire de Catherine Ferrapie,
sa b e lle -s œ u r, a assisté au contrat de
mariage de M arie lïo liQ» sa nièce, du i
février 1763. Par son testam ent, du 7 no
vembre 17 6 3 , il a iustitue Jean M olin,
sou frère , et fait un ®SS * Marie M o lin ,
sa uièce.
3
M arcelin M O L IN ,
Créancier dénommé dans le contrat de ma
riage do Marie M o lin , sa nièce , et léga
taire de Marie M o lin , sa tante.
J e an M O L I N ,
Héritier testameitaire d’Ignace, son frè re ,
représenté par . Jean-Antoine Molin, juge
au tribunal d’Vssengeaux, partie secrète
en la cause, d’après l’acte du 14 février
1
, et les pièces de la procédure.
11
793
1
r
2
Ma
r i e
,
3
N ée le 2 février 1 71 8, mariée le i février
17 Î3 , avec Claude de Chainbarlhac, puis
à D ejou x, puis à Lambert Lacroisière;
appelée par le testament de la mère à lui
succéder ; légataire d’ Ignace Molin , son
oncle; a vendu à C houvenc, appelant, et
demandeur en tierce opposition , le do
maine du V illars, le 14 ao it 1778; décé
dée en 178O, après avoir fait Lacroisière
ton héritier testamentaire.
C
a t h e r in e
,
N ée le 24 janvier 1720; demanderesse en
1793 ; intimée
défenderesse en tierceopposition.
M
3
a r g u e r it e ,
Morte a i intestat , le 1 7 septembre 1740.
J
4
e a n n e
6
5
,
N és le 7 février 17 2 5 , décédée le 10 juin
I77g.
3
P
i e r r e
,
3
N é le
mai 1731 , décédé le
novembre
! 7/(8 ; appelé par le testament de la mère
à lui succéder.
T H É RÈ S E ,
Nén le b avril 1 733 ; mariée à Antoine
Borne le 6 mai 17 6 5 ; devenue sa veuve
le i mai 1768.
3
I
J E ANNE B O R N E ,
Femme du sieur V endriez , in tim és, défendeurs.
3
Pages 2 et
du Mémoire des intimés, — E clairer la justice , n ’est pas embrouiller la cause. Pierre Molin , père des six enfans , avoit quatre
frè re s , au lieu de trois : tous étoient légitimaires ou copartageans de Pierre M o l in , premier du nom. Ignace et M arce lin représentoient leur
tante, Marie M olin. I l est à présumer qu’ils ont été désintéressés par M arie M o l in , leur nièce , ou par ses trois maris. I l y a lieu de croire
que M . M o l i n , d ’après l ’acte du i/t février 1 7 9 3 , passé avec L a c ro is iè re , et comme ayant succédé, à Ignace M o l i n , a tous les papiers do la
famille en son pouvoir. Comment supposer qu’un acquéreur puisse les avoir autrement que par les dépôts p u b lic s ? Cette circonstance ne suffitelle pas pour accueillir la prescription de dix ans entre présens ?
�3 o )7
CONCLUSIONS MOTIVE E S
D 'A P P E L
£ T
N O T E S EN R E P L I Q U E ,
SÉANT
A R IO M.
P O U R
J e a n et autre J e a n
CHOUVENC, appelans ;
CONTRE
,
M O L I N et les sieur et dame
V E N D R IE Z et B O R N E intimés
C a t h e r in e
A
c e
q u 'i l p l a i s e
à
la
.
c o u r
En la fo r m e ,
E n ce qui touche la péremption de l ’appel, demandée par les
intimés ;
A ttend u qu’iln 'y a pas eu instance sur l’appel régulièrement for
mée et entretenue entre toutes les parties dénommées dans le juge
ment dont est a p p e l, avant le 16 germinal an 9 , que la cour a été
saisie de cet appel ( 1 ) ;
(1)
c o u r
7
4 dans
Page
du M é m oire des intim és; l'exploit du 7 pluviôse an
leur dossier. I l n'a é té donné q u ’à la requête du sieur Ven d riez, seule
A
�.
(
2
)
Attendu qu’il y auroil eu interruption de cette péremption,
par le changement d’ état de l ’affaire (2);
Attendu que le jugement dont est appel a été rendu par for
clusion , et que l'appel d ’un pareil jugement n ’est sujet à péremp
tion qu’ autant qu’il y a eu contestation en cause ;
Attendu que quand la péremption auroit été acquise, elle a
été couverte ( ).
3
m e n t , et encore seulement à Cliouvenc fils , qui n’est pas partie
le jugement
dont est appel.
Lors du
an a , le sieur Vendriez , s e u l ,
procès verbal
dans
du 9 thermidor
fut représenté par le sieur Lagrevol ,
sans pouvoir dans la forme exigée par la loi de 1790.
Ce ne fut point
Jean Chouvenc du Villars , mais Pierre Cliouvenc de T en ce , qui co m
3
parut ; et l ’exploit de signification, du i thermidor an a , avec assigna
tion pour l ’exclusion des tribunaux , n ’a été donné qu’à t a requête du
sieur V e n d rie z , et à C h o u venc de la R o c h e , fils , en laissant à l'écart
Chou venc père , du Villars. Pareilles insuffisances dans le procès verbal
et dans l’assignation d e s 8 et 28 fru ctid or an 2. I l n ’a été suppléé à ces
omissions que par les exploits des 9 vendémiaire an 8 et 1 6 germinal an 9.
(2) Pag. 3 et 4 de V A ju g e r ; pag. 10 de la Réponse. Jeanne B orne étoit
en qualité dans le jugement de 179^ ; mais elle ne l ’a été ni dans l ’ex
ploit de signification , ni dans les actes de 1 an z , ni dans celui du 7 plu
viôse an 4. Chouvenc fils , donataire e n t r e - v if s , avoit un droit acquis au
moment de son intervention , et son père n auroit pu nuire à ce droit
particulier , indépendant du titre successif.
3
( ) Pag. 4 ,
5
et 6 de V A ju g e r-, pag. 8 , 9 et 10 de la Réponse. Ces
deux questions sont oiseuses, parce qu ’il vient detre prouvé qu ’il n ’y a
pas de péremption ; que l ’on n ’adopte pas sur la première l’opinion de
Bonnam ent : il est certain que la seconde
n ’est pas seulement prouvée
par tous les actes rappelés p.'ige 6 , que les intimés , page 8 , réduisent au seul
exploit du 16 germinal an 9 , tnnis encore par la ju risprudence de T o u
louse. Cette preuve acquiert une nouvelle force , i ° . par extension que
Ifs intimés p r ê t e n t aux mots .te v o i r d é m e ttre d e le u r a p p e l , qu'ils re
gardent généraux et indéterminé* , tandis qu ’il est notoire que ces expres
sions , dans les tribunaux de l’ancien ressort de Toulouse , ont la même si
1
gnification que c e lle -c i, d éb o u ter, et que l ’ une et l'autre s’adaptent au fond :
lorsqu’on entend employer ou ajouter les moyens de forme , on se sert
de ces m o t s , se v o i r d é c la r e r non rece va b lo , ou de ce u x-ci, se v o ir
�f 3 )
E n ce qui touche la nullité de la procédure sur l ’ap p e l, deman
dée par les appelons, de ce que la dame Vendriez ri’ avoit pas
été autorisée ;
Attendu que le sieur Vendriez est intervenu pour l’autoriser ,
et qu’en recevant l’intervention, il a été donné acte de ladite
autorisation :
A l ’égard du fond ,
A tte n d u , en d ro it, le principe consacré par l’ancienne comme
par la nouvelle lo i, que celui qui acquiert de bonne fo i, et par
juste titre, un im m eu ble, en prescrit la propriété par dix a n s ,
et q u ’il suffit que la bonne foi ait existé au moment de l'acquisition;
A t t e n d u q u e s’ il s’est élevé quelques doutes, quelques incertitudes
parmi certains jurisconsultes, d ’après la Novelle 1 1 9 , ces doutes
et ces incertitudes doivent cesser par le Code civil, surtout lorsqu'il
y a réunion de ces deux circonstances; l’u ne, que non-seulement
l ’acquéreur, mais encore le vendeur, sont de bonne foi; l’autre,
que les prétendus copropriétaires n ’ont point ignoré la vente, et
ont laissé jouir paisiblement l’acquéreur pendant plus de quatorze
a n s , au lieu de dix qui suffisent pour prescrire (4 ) ;
d é m e ttre p a r fin s d e n o n -re c e v o ir e t d e n o n -v tilo tr ; a . par la juris*
prudence constante de T o u lo u se , qu'il étoit libre aux parties de renoncer
à la péremption , en rétorquant aux intimés leur assertion sur la néces
sité J e suivre cette jurisp udfnce. Pag. 1 2 , i et 20 de leur Réponse.
(4
3
3
Pag. 7 , suivan tes, et 18 de \ 'A j u g e r \ pag. l0 , 1 1 , 12 et i d e l à
Réponse. C h a cu n e dr-s assertions est appuyée sur ces autorités , la Novelle
l i ( ) , c l i a p . 7 , et la jurisprudence de Toulouse. La question n’est-elle que
pou r les écoles , lorsque , d ’après les expressions de M aynard , de Du peiier et du cardinal Luca , elle n ’est pas fort b r o u illé e , qu ’on s’arrête
q u e lq u e fo is k cette p re scrip tion , quand il n ’ y a pas d e r e m è d e s p o u r
s 'e n g a r a n t ir ? Deux points n décider. Existe t-il un usage à Toulouse de
rejet de lrt prescription de dix ans entre présens , tel que cet usage puisse
résisterait Code c i v i l , plus déclaratif que constitutif en cette partie?
Y a-t il eu mauvaise fui dans Marie Molin , dans sa v e n te ; et , en la lui
supposant , Catherine et _ Thérèse M o lin ont-elles ignoré cette vent e?
1 . Les citations invoquées par its oppeluns ne sont ]'< int nffoibIi«s par
A a
�Encore relativement à Catherine Molin ;
A tte n d u , en d r o it , que toute action prescrit par le laps de trente
celles des intimés , et il ne résulteroit de la différe n ce , qu ’ une contrariété
qui rendroit indispensable d ’admettre comme loi déclarative la disposi
tion du Code c i v i l , qui se contente de la bonne foi de l ’a cq u ére u r, qui
Veut que cette bonne foi soit toujours 'présumée , que c ’est à celui qui
allègue la mauvaise foi à la prou ver , et qu’il suffit que la bonne foi ait
existé au moment de l’acquisition. Si les intim és
la demande en désistement, qui est
n’eussent pas confondu
la seule qui existe, avec celle en
partage , qui ne peut a vo ir lieu , d ’après leur traité avec L a c ro is iè re , ils
n ’auroient pas rétorqué l’aveu du principe fait par les appelans , que le
cohéritier peut réclam er contre son cohéritier pendant trente a n s , sur
les aliénations qu’il a faites , mais nullement contre le tiers , ainsi que
l'observe Furgole d ’aprés M ornac , dans le passage même dont les intimés
ont transcrit une partie. Sur l ’usage de Toulouse , classons Furgole avec
Boutaric et Serres. I l se trouve également réfuté pag. 1 2 , i , 14 * * ,
1 6 et 17 de Y A ju g e r . Les appelans ne sont pas démentis sur le fait , qu’il
n ’est point d ’arrêt de Toulouse qui ait jugé la question ; mais ils le sont
sur ce qu’ils ont assuré que l’arrestographe Laroche - F la v in n’en faisoit
aucune mention. E n e f f e t , pag. i o , il ne parle que de la prescription
3
5
5
pour les biens substitues. Graverol , son annotateur , ne fait mention que
de la prescription par dix ans de l ’hypothèque ; et lorsqu'il ajoute que
le tiers possesseur prescrit dans trente ans un droit de propriété , il a
raison en thèse générale ; mais il n’a pas étendu cette opinion au tiers posses
seur avec juste titre et bonne foi. Catelan n’a pour objet que l ’hypothèque
pour cette prescription de dix a n s ; et si ce qu’il rapporte de l’ usage de ne
pas recevoir cette u s u c a p io n , est fondé sur ce qu’il ajoute q u ’elle a été
transform ée, même par Justinien , en prescription de trente a n s , il est
évidem m ent dans l’erreur sur la N o v e lle 1 1 9 , qui établit la distinction
de la prescription de trente ans avec celle de dix a n s, avec justo titre et
bonne foi. I l est inutile de vérifier Lapeyrère , par le peu de confiance
q u ’ il a au palais , d ’après Bretonnier , qui , dans la préface de ses Ques
tions alphabétiques , dit que cet ouvrage est mal digère , q u ’on l’a aug
menté d ’environ la moitié , en sorte que l'o n a fait un volume in -folioyôr#
m in c e d e tou tes le s m a n ières.
M on tvallon n ’est pas plus recusable que Bonr.ament et de Bezieux. C et
auteur se fonde sur Uuperifer comme Bonnament ; mais bien loin de con
trarier l'urrèt r.ipporté par de B e z ie u x , in terven u s u r d e s c irc o n s ta n c e s
�zfoi
( 5 )
ans, et que la cohabitation, d ’un c ô t é , ne peut l’interrompre
5
533
d iffé re n te s , il se réunit à D u p e r ie r , d’après un a*rèt du i février i
,
pour supposer la nécessité de la part du légitimaire de discu ter, p o u r , en
cas d ’insuffisance, être colloqué pour le surplus sur les biens médiocre*
de la même hoirie , aliénés;. par l ’héritier. Mais le même Montvallon ter
m ine , d ’après de Bezieux , et , d it-il , tous les a u t r e s , par donner pour
certain que nonobstant que l’action pour demander la légitime dure trente
ans , celui qui a confessé par acte l’avoir reçue , n’a que dix ans pour
dem ander la rescision de cet acte.
A l'égard de Bretonnier , il suffit d ’y renvoyer , tom‘. a , pag. 74. L e
docte Domat , en attestant la diversité des provinces , n ’ajoute pas que
celle de Languedoc soit une de celles où l'on n'observe pas les divers
temps de prescription du droit romain. Les intim és croiroient-ils avoir
tout dit en alléguant que le Code civ il a adopté tantôt le p u r droit romain ,
tantôt la Coutume de Paris , et que ce parlement la prenoit pour règle
dans les moindres doutes ? Mais ce parlem ent de Paris , par son arrêt
du
6 mai
1G07 , recueilli par H enrys , n ’a-t-il pas jugé pour le pays de
droit é c r it ? N ’est-ce pas d ’après le démenti donné à Chorier par la dernier observateur , sur les œuvres de ce magistrat de M ontbrison , pays de
d ro it écrit ; n’est-ce pas surtout d ’après son attestation que cette maxim e ,
qui établit cette prescription , est devenue le droit commun de toute
l ’Europe ; que la jurisprudence de la cour d'appel de lliom , qui va p r o
non cer , est invariablement fixée sur ce point , par un premier arrêt en la
première s e c tio n , du 16 ventôse an 1 2 , au rapport de M . T h u r r a u l t , sur
les conclusions dé M . Touttée , substitut de M , le procureur général ,
entre Pierre Beschatnbes et Marguerite Cros , a p p e la n s , et Marianne Cas ,
intimée ; par un second rendu en pluviôse dernier , en la seconde section ?
31 est
à remarquer q u e , dans l ’espèce du p r e m ie r , il étoit mis en avant
que le vendeur n ’étoit pas propriétaire ; mais il a suffi q u ’il eût vendu
en son nQin propre et privé , et q u ’il ne fût pas établi par aucun fait , par
aucune c irc o n s ta n c e , que V i d a l , a c q u é re u r, eût connu le vice de la vente.
Cet acquéreur a été regardé comme présumé en droit acquéreur de bonne
foi. L e second de ces arrêts a été rendu pour l’ancien ressort de Toulouse ,
entre le sieur Porrat du Clufcel et la veuve Beyzaguet. D o n c ne seroit-il pas
rid icu le d ’applifj uer cette jurisprudence de la cour de cassation contre la
disposition du Code civ il d ’accord avec la loi ro m a in e , non pas à une juris
prudence constante de Toulouse , mais à une controverse sur laquelle il n’est
rapporte aucun ¿rret qui ait rejeté celte p re scrip tion , lorsqu'il y a eu réunion
de titre et de bonne foi.
�/
*
\
(«)
qu’autant "qu’on peut la considérer comme possession indivise,
a 0. L a preuve de la bonne foi il« la venderesse Marie M olin , et de la
connoissance qu’ont eue ses sœurs Catherine et M argu erite, de cette vente
de 1 7 7 8 , suffisamment établie pag^s 10 et 1 1 de V A j u g e r , et nullement
contredite par les intimés , est renforcée d ’abord par le contrat de mariaga
de Marie M o lin , de 17 5 3 , par lequel elle donne à C h a m b a rlh a c, son m a ri,
le
s es
pouvoir de vendre pour acquitter les légitimes et les droits successifs da
sœurs et d ’un o n c le ; p u is , par l’acte de propriété que fit Cham barlhac
en tnai 1 7 5 5 , en quittant Claude Chouvenc , père et aieul des appelans ,
qualifié d ’ancien fermier d e s o n domaine du V i l l a r s , d e tout le temps da
sa jouissance; d ’où il résulte que Catherine et Thérèse M o l i n , cohabitant
la
maison maternelle , n'ont pu ignorer le changement du fermier en pro
priétaire. Ensuite , une circonstance particulière a chacune des soeurs M o lin ,
si elle ne démontre pas complètement cette connoissance , contribue à !es
repousser ; c ’est q u ’il y a tout lieu de croire que Catherine Molin avoit
tr,iité de ses droits envers sa sœur ainée , M arie M olin , ou envers ses
trois maris , moyennant une somme fixe. On remarque dans le vu des
pièces de la sentence qu'elle a obtenue en 1790 , une saisie-arrét faite à
sa requête entre les mains de l'acquéreur F r a i s e , du 14 janvier 1 7 8 9 : par
acte du 14 février 179^ , passé avec Lacroisière , elle s’est obligée d ’allouer
900 fr. ; et par sa quittance notariée, du
25 mars
1784 , on voit que l'im
putation doit être faite sur le capital. Ces inductions ne doivent - elles
pas nécessiter l'admission de cette prescription ?
A l'égard de Thérèse , elle a cédé , à la vérité en m in o rité , ses droits
à sa sœur , femme C hambarlhac , en
1755-
L ’action rescisoire lui ètoit
p.iraphernale , elle a pu et dû l’exerrer dans les dix ans de sa majorité ,
arrivée le
5
avril 1758. Non-seulement elle n’a pas réclamé avant le décèi
de son mari , arrivé le 2Z mai 1768 , mais encore ayant habité le lieu de sa
naissance depuis cette époque , elle a vu successivement jo u i r , d'abord sa
s œu r , puis «on a c q u ére u r, depuis 1 7 7 8 , sans réclamation ni contre cet
acqu éreu r, ni contre Marie Molin à qui elle a vo il cédé ses d r o its , plus d®
dix ans avant. Kiifin les intimés se sont eux-mêmes exclus de leur recherche
Contra c< t a c q u é r e u r , en optant le moyen de discussion qui a été opposé par
l e s C h o u v e n c a u bureau de conciliation , le j thermidor an 2 , comme grief
contre le jugement dont est appel. Celte option résulte, et de l’acte passé avec
3
L.tcr .isière , du I j. février 179^ , et de tous les arrangemrns qu’ils ont pris
avec les autres acquéreurs postérieurs à Cliouvenc , antérieurement et ulté
rieurement au jugement dont est a p p e l, et à l’appel. Si la réunion de tous
�4< *2
5
(7)
réelle ét corporelle ( ) ; et q u e, d e l’ a u tre , elle ne peut être op
posée utilement à un tiers détenteur ;
ces moyens n ’achève pas de confondre les intimés , même subsidiairement ,
dans l’esprit de la dernière partie de la Novelle , pour ¡faire adopter cette
prescription , et même encore dans le système de Boutaric , Serres et F urgole , la cour se déteriuineroit encore par la disposition de la loi n , ff. D e
j u d i c i i s et ubiquisqu e agere , et par la 7 5 e. du dernier titre du digeste
Q uolies œ quitatem d e s id e r ii n a tu ra lis ratio , aut d u b ita tio ju r is mor a t u r , ju s t is d e cretis res tem peranda est. Règles du droit civ il par D an toine , pages 246 et 247. Comment , en effet , se refuser à maintenir en paix
l ’acquéreur du 1 7 7 8 , lorsqu'il n'a p is été inquiété pendant dix ans par ceuxlà mèine qui ont connu son titre , et qui sont parvenus , par toutes sortes de
voies insidieuses , contre l ’héritier de la venderesse et d ’autres acquéreurs ,
jusqu'à les dépouiller et priver ce premier acquéreur , non-seulement de tout
recours en déchargeant indéfiniment Lacroisière , mais encore des moyens
de se défendre , en s’emparant de tous les papiers de la famille.
5
( ) Pages 1 9 , 20 , 21 de l 'A ju g e r ; 24 ,
25 ,
a(j de la R é pon se. S i les
intim és eussent approfondi la question, ils n ’eussent pas aventuré que les
appelans n'ont p a s vou lu la ch erch er où ils
1‘ au roien t trouvée , et ils se
seroient convaincus de l ’im portance des citations de d ’Argentré , de D o m a t,
et de l'arrêt de Bordeaux , en opposition à ceux dont parle Dolive. L ’in
terruption de la prescription est naturelle ou civile. Il ne peut être ques
tion ici que de la première. E ll e est fondée sur la loi cum nottssirni , §. ,
dont voici le texte : Im o et illn d p ro cu l d u b io est q u o d s i q u is eonim
q u ibu s a liq it id debetu r , b es s ib i s u t f o s i t a s sine v io le n tia ten uerit ;
î’ k r HA.NC j i e t ; n t i » m e » in te m ip tio fit prceteriti tem poris , s i m inus
e fflu x it trig in ta v e l q u a d ra g in ta annis. Le commentateur de la loi prend
5
le mot su ppositas pour o b lig a ta s . , Les arrêts cités par D o l i v e , et celui
rapporté par Lapeyrère , ont jugé d ’une manière contraire , les premiers ,
en adoptant l ’interruption par la cohabitation et la nourriture du
légi-
timaire , l ’autre , en la rejetant. Cependant ces deux parlemens se sont
décidés par ces expressions de la loi , p e r hanc deten tionem ; en sorte
que ce n ’est que par induction et non virtuellement que Toulouse a puisé
son opinion
dans ces mots. E n cherchant la méprise de l'une de ces
deux cours , il a convenu d’aller ju sq u ’à la définition qui peut ca racté
riser interruption civile. Or , la détention dérivant de la loi unde v i f
doit etri. réelle , corporelle , d ’intention ; et c ’est afin de 11e laisser aucun
doute sur ce prem ier point , que les appelans ont invoqué le* auteurs
1
�.V
(
8
)
A tte n d u , dans le fa ît , que Catherine Molin , née le 24 janvier
1 7 2 0 , pubère à l’époque du décès de sa m è r e , du 28 mars i y
,
n ’a réclamé contre Chouvenc qu’en 1 7g3 , et contre Lacroisière
q u ’en 17.88, et qu’il s’est écoulé beaucoup plus de temps qu’il ne
faut pour prescrire par trente ans utiles (6).
55
dénommés , page 20 , d ’où ils ont conclu que le parlement de Bordeaux
avoit mieux saisi l'esprit de la loi que celui de Toulouse , et que l’ar
ticle 2 2 | 3 du Code étoit à cet égard déclaratif du §. im o e t illn d . Ce
n ’est donc q u ’en torturant le sens de ces mois v e r h a n c d e te n tio n e m ,
que l’on peut comparer une cohabitation avec nourriture à une possession
r é e l le , capable seule d'opérer l ’interruption naturelle. Ma i s , d un c ô t é ,
les Chouvenc désavouent la nourriture de Catherine Molin sur les biens
de l'hérédité , d ’un autre , cette nourriture lui auroit été fournie, non
par sa sœur , mais bien par ses maris , maîtres de tous les biens dotaux
de M arie M olin ; et on vient de démontrer au moins la forte présomption
par le long silence de Catherine M olin , par ses q u itta n ces, p a r sa saisiearrèt , et par l'interception de tous les papiers de M arie M olin , qua
cette fil le avoit terminé , en acceptant une somme une fois payee ou en
rente viagère. En un mot , cette nourriture , fîit-elle établie , ne pourroit
équivaloir à une jouissance par indivis avec les maris de Marie M o l i n ,
jouissance qui d è s - lo r s feroit croire à un traité définitif avec l’ un dej
beaux-frères. Les appelans pourroient encore s’aider d’Aiiroux-des-Poinmierg ,
*ur l ’art. z 6 , tit.
3 de
la Coutume de Bourbonnois ; de C h a b r o l , sur l’art, 7,
tit. 27 de la Coutume d'Auvergne. Ils distinguent la simple dem eure, de
la jouissance. Ce dernier donne pour certain que des cohéritiers et autres
communs qui ont joui séparément d'objets distincts de la succession, et
depuis plus de trente ans utiles , ont prescrit l’action en partage; qu^ la
pnssesjion trentenaire en tient lieu , comme elle tient lieu de vente ou de
tout titre translatif de propriété. Il n’y a pas eu de possession indivise ,
1755
puisque Cliambarlliac appeloit , en
, sien, le domaine vendu p«r sa
Veuve en 1 7 7 8 ; et à cette époque Catherine Molin nvoit prescrit depuis sa
•puberté du 51 j j.mvier 17^2. Combien plus de force a cet argument pour
l ’arrjuAreur ! l.’.irrèt d " la c o u r , du i 3 ventôse an 1 est étranger n l ’espèce :
les Vesdiiimhes nvoient sans doute une jouissance réelle.
(fi Tout concourt à prouver qu'elle connois^oit le testament de sa trière,
puisqu'elle ne pouvoit ignorer la sentence de T e n re , en 1 7 ^ , qui a main
tenu ce testament respectivement à Tliérèso , sa sœ ur, puisque nicore elle
«'est restreinte .par quatre requêtes à un douzièm e, sn légitime d f rigueur.
âubsidiüircmc'iit,
�£o$
Su] s'dia’rem en t, en ce qui touche la tierce-opposition.
E n la fo r m e , attendu que cette tierce-opposition a dû être
nécessairement portée en la c o u r , parce que c’est une interven
tion autorisée par l’art. 28 , tit. 1 1 de l ’ordonnance de 1667 ,
parce que la cour a remplacé le tribunal du P u y , qui a juge
en dernier ressort, et qu’elle est saisie de la contestation prin
cipale (7) ;
Attendu que cette tierce-opposilion a pu être formée dans les
trente ans , s’agissant de jugement rendu contre des tiers qui
n ’ont point été appelés, ni qui ne sont pas partie dans le juge
ment (8) ;
Attendu que cette tierce-opposition n ’est qu’ accessoire à l ’ins
tance , et que par là même elle n ’étoit pas susceptible de la voie
préalable de conciliation (g) ;
A u f o n d , attendu que les appelans n ’étant parties ni dans le
jugement obtenu par la dame Vendriez , du 26 janvier 179 3 ,
ni dans l’acte passé entre les intimés et Lacroisière , du 14 février
suivant ; que n ’ayant pas été appelés, ils ne peuvent être consi
dérés comme les ayans-cause de Lacroisière ; que conséquemmcnt
ils sont recevables dans cette tierce-opposition ( 1 0 ) , et peuvent
(7I P.ige 22 de V A ju g e r .
(8) Page 2 a île V A ju g e r .
(i))
de I ’ Y
Les intimés ont insisté sur
ce moyen clans leur
réponse A griefs, à toutes les nmlienres , même d.ins le pro» is verbal de
l'extr.iit viiliu .é , du o thermidor ail 1 2 , page 47 de leur Réponse.
23
5
5
(101 Piges 2{ ,
. zG , 27 de V A ju g e r - l î , 1 4 , i . i f i , 17 , 18 d e l à
Réponse. Les intimés ronloiident le p*
ave0 |e
désistement,
l ’rtrlion en subrogation de la part du coliéiiticr qui ¡1 nHuté la portion
liérédiu ire de l'un
(1 eux ,
<ivt!C
L vente particulière de quelques immeubles,
CVst clan« re dernier cas que sont les appel,ms. L»*s ¡111 ¡niés confondent
<ii' nie , <|.i*ii« |,i riüition des iirri’ ts , « eux concert) ml îles né;m< i> rs , avec
ceux <]ni inu'-revspht d is tiers détenteurs à titie particulier. Pour f.iire mit ux
ressortir 1.1 <lif(Hrvnre f| 11 il v a entre les arttts ré ¡|iroqui'mMit invoqué*,
Supposons (pie Mmie Moljn exi'.t.'it 1 nror» , et q u ’elle e{u f.,ii uni* ilnii.iiinn
eiitie Wfï u in vtiic llü u son inaii L a c r o U iir t ', puuuuil-«.n dite qu'tlU: eût
li
�( 1° )
faire valoir tous les moyens qu’auroit pu opposer leur venderesse,
Marie Molin.
D ’un côté, attendu que par l ’effet de l'acte du
février 1 7 9 3 ,
les intimés, en acceptant de Lacroisière , à compte de leurs pré
tendus d ro its, sans liquidation préalablé , non - seulement les
immeubles qui lui restoient d ’après ceux qu’il avoit expédiés au
sieur Jean-Antoine Molin , mais encore tous autres objets , s’il
y en a ( 1 1 ) , sont devenus garans de leur demande envers les
acquéreurs de Marie Molin (12 ).
D ’un autre côté, attendu que Thérèse Molin , mère de la dame
V endriez, étoit non recevable pour n ’ avoir pas réclamé dans les
dix ans du jour de sa m ajorité, arrivée le
5 avril i y 58 ,
contre
la vente qu’elle avoit faite de tous ses droits successifs par son
contrat de mariage de l'jS S ( i ).
5
compris dans la donation ce qu’elle avoit Vendu dix ans avant ; qu’elle se
fut par là dégagée de la garantie qu ’elle avoit contractée envers l’acquéreur
C lio u v e n c ; qu a force de sophismes , la collusion de Lacroisière «ût enve»
lpppé à la fois la garante et les garantis ? E h ! admettons un instant qu’il
ne s'agit que de pa rtag e; tout ne seroit-il pas consommé avec une fraude
évidente ? Lei intimés ne sont-ils pas parvenus à s’emparer contre L a cro ii i é r e , et tous les antres a cq u ére u rs, de tout ce qui composoit les entières
hérédités en mobilier et im m o b ilie r? Ne l’ont-ils pas fait sans appeler les
Cliouvenc ? ¡S’ont-ils pas em ployé l'astuce et la perfidie, d ’après leurs actes
de pluviôse et ventôse an g ? ;
(11') L\croîsière devoit tout le mobilier , e t, selon les intimés , des dégra*
dations et des jouissances. Il étoit encore nanti de tous les papiers, des quittunces'sur les légitimes des belles-sœurs , et de celles des ODcles et grandtante.
(la'i PagfS 27 et i de V A ju g e r. Ce moyen est demeuré sans réponse.
(10) Pages 2 8 , 29 et o de XA j u g e r ; 18 , ig , 20 , 21 , 22 ,
, 2 \ de la
Réponse. C ’e»t par erreur que , p><g« 29 , l’époquo du décès de Pierre M olin
père a été portée au 20 mars 174^ , tandis qu’il est , d ’après l ’extrait ra p
porté par les intimés , du ao mai 17 4 ^ : mais c ’est Ignace Molin qui a géré
3
3
pendant la puberté de Pierre et de Thérèse M olin. Ln preuve en est dans
le dossier des appelans , par l’acte du 2 décembre 17G3 ; et c ’est M . Molin ,
partie secrète du p ro c cj , q u i , comme héritier d 'I g n a c e , son o n c l e , seroit
�/
( n
>
)
'
4 oJ
.
Encore subsidiairement,
'
E n ce qui touche le testament de Catherine Ferrapic;
Attendu qu’il résulte de l’extrait vidirné en vertu de l’arrêt
de la c o u r , que l’abréviation i ,ié, précédée des mots (a testa
tr ic e , et suivie de ceux-ci, enquise et req u ise, ne peut signifier
autre chose qu’illitérée ou ne sachant écrire ; et que les mots en
quise et requise supposent nécessairement qu’elle a lait la réponse
de ne savoir signer; qu’ainsi le testament est régulier dans la
forme ( 1 4 ) ;
1
garant <le celle administration. On applaudit à la profondeur et à rrudii on
de la discussion , sur la prescription qui résulte de l'ordonnance de i y :
V a i n s e f f o r t s ! L e défaut de réclamation des cours d'appel du L a n g u e d o c ,
53
ressort de T o u lo u se , dans leurs observations sur le projet du C o d e , n'atteste
j>as que l'usage étoit d ’admettre l’art. i i , tt prouve en tout cas que ces
3
cours ont reçu , comme l'a fait la cour de cassation , cette partie de l’art- io4
du projet du Code , érigé en loi par l’art. 47 > du Code. La cour de R io m
l'a adoptée , et il y a lieu de croire qu ’ elle ne changera avec la loi qu ■ lors
que , dans une révision , on aura pesé l'avantage d ’un mineur , et l'embarras
et le trouble, pendant un si long intervalle, de temps , des familles des
tuteurs ou autres administrateurs.
(l/j) Pages
,
,
de I A. j u g e r ; 26 . 27 , 28 et- 29 de la Réponse. Les
intimés proposent une autre nullité q u ’ils (ont résulter du défaut de lecture
du testament , quoiqu’ils se c o n t r e d i s e n t e n faisant mention du mot r é c it é ,
qui n’est autre chose qu'une lecture , dans le sens constant et général de tous
53 3 35
les notaires du Languedoc. Raviot qu ils invoquent, question 1 6 \ , n". 8 ,
dit. précisément que l'interpellation suppose la réponse , comme quand le
notaire , en exprimant la cause de la non signature, d i t , ne sait ligner e n q u is .
L e testament d o n t il s'agit renferme les deux mots e n q u is e Pt r e q u is e ; ce
qui prouve que le mot i l l i t è 'è n’est pas le discours du notaire lui seul : cVst
ainsi que l’a jugé l’arrêt rapporté par Ricard. L ’argument liré de l’arréîiste
Dpnisart , est rétorqué sans réplique. Apiès avoir rapporté , n°. 87 , un arrêt
du ift décembre 1 7 5 7 , validant le testament de U -dam e d'F.guilles, qui
n avoit pu signer , quoique enquise , il s’explique ainsi , ri®, rjo , sur celui du
û
»
»
»
septembre 17(18 : « O n sontenoit , même, d e l.i part de l’appelant , que ces
trois mots cl,, Cl! e n q n is avoient été ajoutés après c o up, tant dans la mi*
n t ' <l' e d.ins la grosse , raison pourquoi il y avr il <u inseripui'u de
taux. » Ce moyeu éioii Ucs-considcTuble. Ce n ’est p«s du mot M e tte dont
13 3
�Attendu que le testament du 24 mars 1 7 3 5 est antérieur à
l ’ordonnance du mois d ’août suivant ; que les ordonnances d’Or
léans et de Blois n’ étoient pas observées à Toulouse ni à A ix ( i ) ;
qu’au su rplus, d’un côté , l’ action pour en demander la nullité
seroit prescrite ( 1 6) ; que, de l ’autre, ce moyén seroit anéanti par
la loi du
septembre 17 9 1 (17)*
E n ce qui touche la substitution établie par ce testament;
Attendu q u e, tant par les expressions que par l’intention de la
5
8
testatrice, M arie Molin en a recueilli l’e ffe t , soit parce que Pierre
Molin , son f r è r e , n ’a pas recueilli , soit parce qu’il n ’auroit pu
disposer par acte entre-vifs, étant décédé en minorité (18).
il s’a g i t , mais bien de celui à 'illit é r é ce n’est pas le Dictionnaire de T r é
voux qu ’il faut con su lter, mais bien Cambolas , magistrat de T o u lo u s e ,
36
565
35 36
pages
a et
.
( i ) Pdges
,
de V A j u g e r ; 28 de la Réponse. Cambolas, Dolive, S a l l e ,
M a y nard , Soëfve , art. , ch. i . Denisart , mot te sta m e n t , à la suite de
l ’arrêt n°. 87 , fait mention des actes de notoriété , qui altestoient qu’en
P roven ce les notaires n ’ étoient pas dans l'usage de faire mention , ni d’inter
pellation , ni de déclaration des testateurs relativement à la signature.
5
3
( 1 61 F u r g o le , des testamens, tom. 2 , pag. j 65 . Marie a fait acte solennel
de propriété de l ’h é ré d ité , par son contrat de mariage de 1 753. Le testament
a été rendu p u b lic par le contrôle en 17 3 8 . Voyez ci-devant notes
5 et 12.
(1 71 L a loi de 17 9 1 n ’est qu’ une déclaration de l ’usage du parlement de
Toulouse. Quoique le V ela y n'y soit pas ajouté au V iv a ra is , l’ un et l’autre
pays , également dans le ressort de T oulouse, é to ie n t, avant i
558 , d e
la d é
pendance de la sénéchaussée de Beaucaire et Nimes , en V ivarais , dont
celle du Puy fut démembrée ¡1 la sollicitation de l ’évêque Martin de Piéthune,
cli.inrelier de la reine Catherine de M édicis. Sans doute on ne doit pas
donner de l’extension aux lois ; mais lorsqu’ il est évident , en droit public ,
q'i'ellr n’est que déclarative d ’un usage qui est c o m m u n à d ’autres , pou r
quoi n’en étendroit-on pas le bénéfice aux pay* qui pouvoiciit faire la même
de ma n de ?
36
33 3
3 3 3
(i S) Pages
, 37 ,
, g , /,o de V A j u g e r -, 29 , o, i , a de la Réponse.
L 'e rreu r du notaire , d ’avoir écrit sur une expédition re m is au lieu de r e
c u e i ll i y no produit aucun ch a n g em en t, puisque Pierre Mo l i n , p rn n ier
substitué , n’a pu recu eillir que quand il plairoit aux héritiers non pas grevés ,
car n em o on era tu s n is i h o n o r a tu s , mais chargés de rendre. Une mère ne
�•
(13 )
^Ô
C)
T oujours subsidiairement,
A t t e n d u , d ’un côté, qu’il y a eu collusion entre les intimés,
L a c ro isiè re , M . Molin et autres tiers détenteurs des biens pro
venus des successions dont il s’a g it , et avec lesquels ils ont traité,
soit avant, soit depuis le jugement dont est appel, sans le concours
des appelans ; et que , de l’autre , les intimes sont au delà désin
téressés de tout ce qu’ils auroient pu prétendre dans les hérédités
des père et mère.
doit à ses enfans qu'une lé g itim e , et elle peut instituer des, étrangers, en
instituant particulièrement chaque enfant pour sa légitime ; et c est ce qu a
fait Catherine Ferrapiu. Les définitions de Peregrinus , d Henrys et de B re tonnier sont indifférentes , puisque les vocations de Pierre et de M arie
M o lin ont été conditionnelles , et qu’elle ne leur a donné qu ’ un espoir.
A u c u n d ’eux n’a été saisi de droit ; et Pierre , premier appelé , n’auroit pu
recueillir que par l’expression de la volonté du curé du Chambon. N ’ayant
pas r e c u e i l l i , il n ’a pu disposer d 'u n simple espoir par le testament q u ’il
avoit la capacité de faire en p u b e r t é , et il le pouvoit encore moins par acte
entre-vifs. Ainsi , jamais Ignace M o lin n ’a disparu tant qu ’il n’a pas remis
à Pierre M olin , dont l’état d ’impuberté ou de puberté est absolument in
différent , puisqu'il n ’en est fait aucune mention dans le testament. I l est
d'autant plus ridicule de nommer cette substitution pupillaire , que , d ’un
côté , elle n’est point d ire c te , mais seulement oblique ; et , de 1 autre , les
intimés sont forcés de convenir du p r i n c i p e , que la inere ne peut faire une
pareille substitution. O r , d ’après Cujas , si la substitution n ’est pas p u p il
laire , rien ne s’oppose à l'application de la règle S u b s t itu a is su b stitu to e s t
su b s iitu tu s in s titu to . T ra ité des substitutions , par M . Th evcnot d ’Essaule
33 36
3
de S a v i g n y , pages
,
, 3 7 , i o , 104 : « Le caractère le plus notable du
» fidéicommis conditionnel , est de ne s’ouvrir qu ’au moment où la condi» tion sans laquelle il a été f a i t , vient à échoir , tellement q u ’il nVst point
» transmissible aux héritiers du substitué , si
»
l
'
é c h é a n c e
d e
c e t t e
c e l u i
-
c i
u é c k d b
a v a n t
5 , 1 0 6 , i 56 , 1 5 7 , 1 7 0 , 1 7 1 ,
» 58a , 383 , 4°9 1 4 1 0 i 4 1 *- Quoique ce
c o n d i t i o n
.
» io
n°. 5 2 6 , 17 S , i g i , 24.3 , 244 t
sou assez in d ifférent, i l est certain qu’il s'agit de fidéicommis , et nullement
de fiduce , i°. parce que Pierre , ainsi que M arie , ont été institués particu
lièrement J ans ieur lé g iti„le . 2°. parce que l’époque de la remise n ’a pas
été bornée à un jour certain. L ’exclusion de la quarte ne fait q u ’ajouter au
caractère du fidéicommis , qui l ’eût assuré aux héritiers chargés de rendre ,
£ il n y avoit pas eu clause prohibitive.
�( H )
Par tous ces m o t i fs ,
■
r
Sans avoir égard à la péremption d ’appel , demandée par les
intim és, et mettant hors de cour sur la demande en nullité formée
par les appelans , à raison de ce que la dame Vendriez n ’a pas été
autorisée dans l’exploit d ’assignation sur l ’appel, dire qu’ il a été
mal jugé par le jugement rendu par forclusion au tribunal d ’arron
dissement d ’Y ssen geau x, dudit jour ig prairial an 2 , bien appelé,
émendant, débouter purement et simplement les intimés de leur
demande , subsidiairement, recevant les appelans tiers-opposans
envers le jugement rendu en dernier ressort par le ci-devant tri
bunal du district du Pu y , du 26 janvier >79^, sans avoir égard
audit jugement non plus qu’ audit acte du i/| février 179 $ , qui
seront déclarés nuls et de nul e ffe t , respectivement aux appelans ;
déclarer les intimés et intervenant non recevables et mal fondés
dans leur demande , les en débouter , les condamner en tous les
dépens de cause principale et d ’appel , et ordonner que l ’amende
sera rendue; enjtore très-subsidiairement, o r d o n n e r que M . M olin,
lesdits Lambert Lacroisièrc , lîoyer , Deléage , Cuoq , Fraise et
tous autres détenteurs des biens provenus desdits Pierre Molin et
Catherine F errap ie , seront assignés en assistance de cause, rap
porteront les actes passés entre eux et les intimés, et pour répondre
et procéder comme de raison ; ordonner que par experts convenus
ou pris d ’office , il sera procédé aux description , estimation de
tous les immeubles provenus desdites successions , et feront men
tion des époques des mutations ; autoriser les appelans à com
pulser tous registres et actes publics , afin d ’en obtenir expédi
tion ou extrait, de tous dépositaires, afin d ’établir tout ce que
M arie Molin et ses trois maris ont acquitté à la décharge dos
successions desdits Molin et Ferrapie, et de leurs ailleurs; ordonner
que lors des opérations des e x p e r t s , les p a r t i e s pourront faire tels
d ires, observations et réquisitions qu ’elles aviseront, par elles ou
par leur conseil , pour, ce fait ou ;’t défaut de c e , être pris par
les appelons telles conclusions qu ’ils aviseront, audit cas, réserver
les dépens; ordonner néanmoins que le coût de l’a r r ê t , ensemble
�¿fil
5
( i
)
les frais d’expertise, de rapport et d ’affirmation, seront avancés
par les intimés (19).
43
33 54
(19) Pages 40 , /f t , 42 ,
de V A j v g e r ;
et
de la Réponse. L e juge
ment dont est appel n’ordonne pas un partage , mais seulement un désis
tement qui ne pouvoit avoir lieu qu'après avoir épuisé tous les moyens , pour
être convaincu s’ il devoit être accueilli ou non. A vec qui le partage auroit il
pu se faire? avec Lacroisière. E li bien ! les intimés a voient tout termine
avec lui par l’acte du 14 février 1 7 9 3 , qui a rendu inutile le recours que le
jugement accorde contre lui. D u reste , l ’état «les parties et de affaire a
changé , puisque les intimés ont tout consommé envers les autres cocondamnés par lé même jugement. N ’est-il pas évidemment injuste d ’avoir accordé
aux intimés le tiers afférant à Marie Molin , par droit d'hypothèque , nonobs
tant les lettres de ratification des appelans, et l’acte passé avec Lacroisière ?
1
Les réponses des appelés en cause apprendront comment Lacroisière a ter
mina avec M . M olin , en lui relâchant des immeubles des successions, pou r
quoi Lacroisière a déclaré avoir reçu 1200 fr. pour consentir l ’acte du 14 fé
vrier 17 9 3 , de quelle manière les tiers acquéreurs avoient payé le prix de
leur acquisition , notamment Fraise , en suite de la saisie-arrêt de Catherine
M olin , et quelles ont été les conventions entre les .intimés et ces tiers. A
l ’égard des prélèvemens , surtout de ceux qui ne sont pas connus , et p ro
venant des payeuiens faits aux oncles et grand’tantes , il ne seroit utile de
s’en occuper qu ’autant que Marie M olin ie trouveroit moins avoir que ce
qu ’elle a vendu aux appelans. Mais le compulsoire ne pourroit etre refusé
dès ce moment ; et bien loin d ’étre l’effet d ’une in q u ié tu d e tr a c a s s iè r e ,
ce n ’est qu’ un moyen pour mettre entièrement à découvert la fraude qu i
résulte déjà de la conduite des intimés. 11 est sans doute révoltant de pré
tendre que Lacroisière, dont les intimés ont fait un m a n n eq u in , souffle
ce procès , dont la cupidité et l ’injustice des intimés sont la seule cause.
Il n’y a pas eu d ’autres papiers portés à l ’audience que ceux joints au dossier
des appelans : les testainens de Pierre Molin et de Catherine Ferrapie , le
contrat de mariage de Thérèse M o lin , leur ont été expédiés, ainsi que les
actes des 20 août 17 6 1 , 2 décembre 1 7 6 3 , et
25 mars
1784. Ils n’ont eu de
Marie Mo l i n , que son premier contrat de mariage , et le testament d'autre
M arie Molin , sa grand’tante , du 2 juillet 1 7 6 9 , qui a été expédié à M ar
celin Molin 11 n’est pas exact de dire que les appelans n’ont jamais demandé
en Communication les pièces du procès par écrit , jugé en 17 9 5 . Il y a eu
trois communications , la première par la voie des ayoués ; l'avocat des appe-
t
�'h '\
( 16 )
lans en a fait l’extrait avant la première plaidoirie. Dan« l'intervalle de la
troisième à la quatrième , il prit com munication seulement de la sentence
de 1790 , des mains de l’avocat des intimés ; et la troisième par le même
c a n a l , en recevant l ’exemplaire de la réponse. Lors de cette troisième , il a
remarqué une erreur, page 9 de l'A ju g e r , sur la consistance des biens de C a
therine F e rra p ie , que les appelans n’ont fait consister que dans le domaine
du Villars, des bàtimens et jardin à T e n ce , et divers héritages détachés, tandis
que Catherine M olin , par la requête du 1 juillet 1790 , 8e. p a g e , ajoute
une prairie et bois au terroir de S alettes , et une autre maison à T en ce , et
3
elle n ’articule pour biens provenans du père que le domaine de la Bruirette.
M ais tel est le résultat des menées des intimés , d ’avoir tout dénaturé ,
d'avoir présenté comme partage une demande en désistement, soutenue
avec autant d ’astuce que de mauvaise foi , pour évincer le premier acqué
reur de l'héritière de Catherine F erra p ie , au préjudice d ’un juste titre
et d ’ une bonne foi évidente , soit de la part de l’acquéreur , soit de la part
de la venderesse ; et malgré que tout concoure à écarter une prétention a
laquelle ces deux soeurs avoient renoncé , par un silence soutenu d'une connoissance , d'une approbation du testament de la mère.
jf
avocat,
avoué.
COUHERT-DUVERNET,
/
c ft k
Me. C O S T E S ,
C K lL x » .
(* ’ t~ y
a -**-»
IÎa
tw*-
0- *
A R IO M
U y fa
'
.
de l’imprimerie de L
a n d riot
, seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Ventôse an 13.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chouvenc, Jean. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
tutelle
successions
testaments
jurisprudence
prétérition
prescription
coutume de Paris
Parlement de Toulouse
Description
An account of the resource
Titre complet : Concusions motivées, et notes en réplique, pour Jean Chouvenc, appelans ; contre Catherine Molin, et les sieur et dame Vendriez et Borne, intimés.
Table Godemel : Renonciation : 8. la fille a-t-elle dix ans ou trente ans pour se pourvoir contre une renonciation surprise en minorité par des protuteurs, dans l’ignorance de ses droits et sans être informée que les testaments de ses père et mère étaient nuls ? Substitution : 3. substitution fidéicommissaire ou fiduciaire. substitution pupillaire. - validité. - transmission. Testament : 6. un testament sans signature ou déclaration négative du testateur est-il valable ? que résulte-t-il, pour ou contre sa validité, de ce qu’il est antérieur à l’ordonnance de 1735 ? Tierce-opposition : 3. des tiers, en qualité d’acquéreurs d’un cohéritier, sont-ils recevables à former tierce-opposition à des jugements en dernier ressort, rendus sur appointement, entre leur vendeur et ses cohéritiers, pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession commune ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1778-An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1612
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0624
BCU_Factums_M0729
BCU_Factums_M0326
BCU_Factums_G1611
BCU_Factums_G1610
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53286/BCU_Factums_G1612.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume de Paris
jurisprudence
Parlement de Toulouse
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53287/BCU_Factums_G1613.pdf
04378519ca7d1ff63a9914141eb8453d
PDF Text
Text
MÉMOIRE
POUR
Sieur
A n to in e
C H A L I E R , propriétaire, habi
tant du lieu de Brassac, appelant et intimé ;
CONTRE
S ie u r J e a
n
F E U I L L A N T
a î n é , n é g o c ia n t ,
h a b ita n t du lieu de B r a s s a g e t , in tim é et appe
la n t.
L E sieur Chalier a été employé par le sieur Feuillant
pendant six années, en qualité de ch ef-d irecteur des
mines de h ouille ou charbon de terre; il a veillé exclu
sivement à l’exploitation de ces m ines, depuis le 16 plu
viôse an 2 jusqu’au 7 fructidor an 7 : il a employé toute
sa jeunesse ù ce travail pénible ; et consultant plus son
zele que ses fo rce s, il ne s’occupoit que des i n t é r ê t s de
son commettant, qu’il rcgardoit comme son a mi , e t qui
A
%
�lui témoignoit la plus intime confiance. Chargé de tous
les détails , il faisoit de continuelles avances ; et aujour
d’hui que les affaires du sieur Feuillant ont cessé de pros
pérer , qu’il n’a plus besoin de directeur , puisqu’il n ’a
plus de mines à exploiter , il oublie les services, et ne
témoigne que de l’ingratitude à celui qui l’a si généreu
sement obligé.
L e sieur Chalier est contraint de plaider pour le paye
ment de ses'gages. L e sieur Feuillant, après avoir reconnu
sa dette , après avoir présenté à ses créanciers l’état de
ses affaires, porte lui-même la créance du sieur Chalier
à la somme de 14000 francs, dans un état où on ne doit
point grossir les objets. Il ose prétendre aujourd’hui que
ce n’est qu’un jeu , qu’il ne doit rien au sieur Chalier;
ou du m o in s, s’il est obligé de convenir qu’il a employé
le sieur Chalier
la direction de ses m in es, il voudroit
le réduire au-dessous de ses derniei's ouvriers.
Il ne s’agit que de savoir si le sieur Chalier doit être
convenablement payé de ses peines et de ses soins, quels
seront ses appointem ens, et si le sieur Chalier sera rem
boursé de ses avances. Une question aussi simple a donné
lieu ù une longue discussion. Des arbitres ont été nom
més ; quatre jugemens ou arrêts sont in terven u s, et
n’ont rien terminé : à la suite, une procédure énorme
qu’ il est indispensable d’exam in er, el qui d o n n e r a lieu
à d’assez grands détails; mais on sera au moins convaincu
que la demande du sieur Chalier est juste, que le sieur
Feuillant 11’a opposé jusqu’ici rien de plausible, et qu’il
a souvent substitué le mensonge à la vérité.
L e sieur F euillan t, fort connu dans ce département,
�( 3 },
possédoit des mines de liouille très-considérables, à. Brassac.
Ne pouvant suffii’e aux travaux immenses qu’exigeoit
l’exploitation de ses mines , il fît choix du sieur C h a lie r,
pour l’employer comme chef-directeur. Les appointemens
du sieur Chalier furent fixés à une somme de 2000 fr.
par an : ces appointemens ne paraîtront pas considérables
à ceux qui connoissent les difficultés, le danger, et 1 éten
due des travaux du chef-directeur.
Ils ne paroîtront point exagérés , lorsqu’on saura qu’en
1763 et 1764 , la compagnie qui exploitoit alors , et
q u’on connoissoit sous le nom de compagnie de P a r i s ,
«voit fixé les appointemens du sieur R o u x , directeur,
à une somme de 800 francs par année ; plus , 72 francs
pour son lo yer, 3 francs par jour en voyage , et en outre
les frais de bureau. Cependant alors les mines n’étoient
pas en pleine activité ; et indépendamment du directeur
il y avoit encore à résidence sur les lieux un associé de
la com pagnie, qui veilloit à l’exploitalion.
I/exactitude et l’intelligence du sieur Chalier lui m é
ritèrent la plus intime confiance du sieur Feuillant. Il
s’ identifia tellement avec son commettant, qu’il se chargea
de toutes les affaires : l’exploitation des mines , les biens
ruraux, les commissions, les voj'ages, la discussion des affai
res contenticuscs , rien ne fut étranger au sieur Chalier. Il
poussa la complaisance jusqu’à compromettre sa personne,
emprunta ou cautionna sous lettre de change , et fut
souvent poursuivi dans les tribunaux de com m erce, pour
le compte du sieur Feuillant.
C ’est depuis le 16 pluviôse an 2 que le sieur Chalier
a commencé son exploitation ; il l’a continuée jusqu’en
A a
�V
fructidor an 7 , et n’a rien touché sur ses appointe
nt ens.
Les affaires du sieur Feuillant se dérangèrent bientôt ;
et quoiqu’il eût de grands moyens pour les faire pros
p é r e r , il se vit cependant obligé de prendre des arrangeniens avec ses créanciers. Il convoqua une assemblée,
gén érale, et présenta l’état de son actif et de son passif,
le 10 messidor an 7 ; suivant cet état, le passif excédoit
l’actif d’ une somme de 98711 francs 75 centimes.
L e sieur Chalier figure dans cet état ; il est porté par le
sieur Feuillant au rang des dettes chirograpliaires éclmcs,
comme créancier d’ une somme de 14000 francs.
Il paroît cependant qu’ il fut proposé des nrrangemens
avec les créanciers. L e sieur Feuillant fils aîné vint au
secours de son père ; on ne donna alors aucunes suites
au contrat d’union qui étoit proposé : de sorte que l’état
des biens, présenté par le sieur Feuillant, fut mis à l’écart,
et déposé secrètement entre les mains d’un tiers, fondé
de pouvoir du sieur Etienne Feuillant fils.
L e sieur C halier, dans ces circonstances, voyant qu’on
ne s'occupoit pas de l u i , mais ayant grand besoin des som
mes qui lui étoient dues, épuisa sans succès tous les procé
dés pourles obtenir, lise vit dans la nécessité de traduire le
sieur Feuillant devant les tribunaux; et s'il a voit eu dans les
m ain s, ou s’il avoit pu découvrir le bilan du sieur
Feuilkml père , il auroit eu 1111 litre qui constituoit sa
créance, et n’avoit pns besoin d’autre explication. Mais
dépourvu de ce m o y e n , le sieur Chalier fit assigner, par
exploit du 26 ventôse an 10 , le sieur Feuillant devant
le tribunal de commerce d’Issoirc : il conclut à ce que
�41
(5),
îe sieur Feuillant fût condam né, par prise de sa personne
et biens, à lui p a y e r, i ° . la somme de m i 6 francs
65 centimes, pour les appôintemens qui lui étoient dûs
en qualité de ch ef-d irecteu r des m in es, depuis le 16
pluviôse an 2 jusqu’au 7 fructidor an 7 , à raison de
2000 francs par a n , ainsi qu’ il en étoit convenu.
2°. A lui rembourser la somme de 1284 fr.
cent.,
pour avances par lui faites en numéraire, depuis le mois
de nivôse an 4 jusqu’au 1e1'. irucLidor an 7 , déduction
faite des sommes reçues pour cet emploi du sieur Feuillant,
ainsi q u ’il étoit contenu aux registres qui sont au pouvoir
du sieur Feuillant, et qu’il seroit tenu de représenter en
cas de désaveu de ces avances.
30. A u payement de la somme de 300 fr. que le sieur
Clialier a voit acquittée, au mois de germinal an 8 , à la
dame G renier, veuve V issac, de Brioude, en déduction
de plus forte somme due par le sieur Feuillant.
4°. A u remboursement de 2 fr. 5o cent., pour la valeur
d’ un livre journal servant à transcrire les ventes sur le
carreau de la m in e, pendant l’an 7.
5°. A u payement de 407 fr. 90 cent, avancés par le
sicnr C lia lier, pour le compte deF eu illan t, dans l’exploi
tation de la mine de la Pénidrc.
6°. L e sieur Clialier conclut encore au remboursement
d’ une somme de 302 fr. 36 cent, qu’ il avoit été contraint
de payer pour Feuillant à la dame T h o n a t , de Brioude,
pour vente et délivrance d’avoine qu’ il avoit reçue pour
le compte du sieur F euillan t, et qu’ il avoit fait consommer
p<>r les chevaux de la mine des Barthes , depuis le mois
de nivôse an 7 } y compris les frais de poursuites de la
dame Tlionat.
°*-
�m
L e sieur Chalier demanda les intérêts de toutes ces
sommes réunies, à compter du jour de la demande; il
conclut aussi à ce que le sieur Feuillant fût tenu de le
garantir et indemniser des poursuites dirigées contre lui
par Pierre P o u g e o n , ainsi que par différens autres crénnciers. Mais ce chef de conclusions n’a plus d’objet ; le sieur
Feuillant s’est rendu justice , et a payé les créanciers. L e
sieur Chalier a obtenu sa décharge; et le sieur Feuillant,
en acquittant ces différentes som m es, a déjà reconnu la
légitimité des demandes du sieur Chalier.
U n premier jugement par d éfau t, du 2 germinal an 10,
adjugea les conclusions du sieur Chalier. Sur l’opposition,
le sieur Feuillant déclina la juridiction des juges du tri
bunal de commerce ; mais ne comptant pas infiniment sur
ce déclinatoire, il soutint au fond qu’il n’avoit été rien
réglé relativement au traitement du sieur Chalier , tout
en reconnoissant que ce lu i-ci avait eu la direction de
ces m ines. Il prétendit que le traitement ne pourroit pas
aller au quart de la somme demandée. Il ajouta que le
sieur Chalier avoit reçu différentes sommes à compte de
ses appointemens ; que celui-ci lui devoit compte de sa
régie et administration des mines; qu’il avoit été fait des
ventes et délivrances de charbon , dont le sieur Chalier
avoit touché le prix sans en avoir compté ; et alors le sieur
Feuillant conclut à ce qu’il fût procédé à u n compte
entre les parties, devant les arbitres qui scroient nommes
par elles 11 cet effet.
11 conclut encore à ce qu’ il fût nommé d’autres arbi
tres , pour régler les appointemens du sieur Chalier pen
dant son administration.
�(7 )
L e sieur Feuillant déclare en même temps qu’il nomm o it, sa v o ir, pour la fixation du traitement, le sieur
B u rea u , instituteur à Nonette ; et pour le compte de la
régie, le sieur L o u y r e tte , propriétaire , de Clermont.
Si le sieur Chalier avoit eu dans les mains le bilan p ré
senté par le sieur F e u illa n t, il auroit eu un titre qui
iixoit sa créance, sans qu’il fût besoin d’autre examen. Mais
ne pouvant se le procurer, et d’ailleurs ne l’edoutant point
un co m p te, il déclara qu’il nommoit pour son arbitre ,
sur le premier objet, le sieur J u g e , aujourd’hui maire
de Clerm ont; et pour recevoir le com pte, le sieur Jansenet, notaire, de Brassac.
U n jugement du 27 floréal an 10 donna acte aux par
ties de ces nominations ; ordonna qu’il seroit procédé au
compte au plus tard dans le courant du mois de prairial
suivant, et qu’à cet effet tous livres journaux , registres
et documens, seroient remis aux arbitres, p o u r, le compte
présenté, rapporté , être fait droit aux parties à la pre
mière audience du mois de messidor.
L es sieurs Louyrette et Juge refusèrent la commission.
U n nouveau jugement du 23 thermidor an 10 confirma
la nomination faite par le sieur Chalier du sieur R eynard,
et celle du sieur B orel-Y ern iè re, faite par lesieur Feuillant.
Ces arbitres réunis, le sie u r Feuillant leur remit différens journaux et registres de dépense et de recette ; p lu s ,
deux tableaux de com pte, avec les pièces justificatives,
lequel compte embrassoit jusqu’à l’époque du 5 com plé
mentaire an 6. Les arbitres constatent, par leur procès
v e r b a l, que ce premier compte fut approuvé par toutes
les parties. Suivant ce compte , le sieur Chalier devoit
�(
8)
faire raison de 2000 fr. assignats, q u i, réduits à l’éclielle,
présentent la somme de 108 fr.
Mais pour les opérations subséquentes, depuis le 5 com
plémentaire an 6 , les arbitres, qui n’étoient chargés que
du compte de la régie et de l’administration des m ines,
s’expriment ain si, pages 98 et suivantes de leur rapport:
k Dépouillem ent fait des registres, soit de recette, soit
« de dépense, énoncés dans le compte du sieur Chalier,
« lions en avons trouvé le résultat ex a ct , quant au
« ca lc u l, et avons paraphé ledit compte 11e v a rietu r, pour
cc demeurer joint à la minute du présent ra p p o rt, y avoir
« recours au besoin, et être mis sous les yeux du tribunal.
« Il résulte de cc compte, que le sieur Chalier se p ré« tend créancier du sieur Feuillant d’une somme de 1661.
cc 18 s. 8 d. assignats ; et pour avances en a r g e n t, d’une
cc somme de 1995 1. 2 s. 11 d . , sous la réserve des I10110cc raires qui peuvent lui être dûs, et que le sieur Feuillant
cc lui conteste. »
Il paroît bien extraordinaire que les arbitres , après
avoir reconnu l’exactitude des calculs et du résultat, et
l'avoir vérifié sur les livres de l’ccctlc et de dépense , se
contentent de dire que lesieur Chalier se prétend créancier.
C ’étoit un f a it , et non une question ; mais ce 11’est pas
la première preuve de partialité des arbitres envers le sieur
Feuillant; et leur manière de s’exprimer 11’est pas cc qui
établit le doute , dès que l'exactitude du résultat est re
connue et appro uvée; , et 11’a pas été contredite par le
sieur Feuillant. V o ilà le sieur Chalier établi créancier
d’une somme de 199^ ^ 2 s* 11
>110,1 compris la somme
de 300 fr. à lui due pour le payement fait ù l ’acquit du
sieur
�(?)
sieui’ Feuillant h. la clame Vissac , de B r io u d c , et que le
sieur Chalier a également réclamée lors du compte.
L e rapport des arbitres fut déposé au greffe; mais ceux
nommés pour fixer le traitement du sieur Glialier n’ayant
pas voulu s’occuper de leur mission, le sieur Chalier fut assez
heureux pour découvrir dans cet intervalle le bilan que le
sieur Feuillant avoit présenté à ses créanciei*s. Il apprit
que ce bilan étoit entre les mains du sieur Etienne B ayle,
marchand orfèvre de Clermont, et en requit le dépôt chez
Chassaigne, notaire.
L ’acte de dépôt est du 14 nivôse an 12. C ’est alors que
le sieur Chalier vit de nouveau qu’il étoit porté au rang
des dettes chirographaires échues, comme créancier de
la somme de 14000 francs, et c e , sans observations, ni
aucune note qui donnât lieu à des doutes ou à une dis
cussion. Cette somme cadroit parfaitement avec celle due
au sieur Chalier pour ses appoinlemens, d’après la con
ven tio n , ainsi que pour les avances par lui réclamées,
sauf quelque petite différence qui sera bientôt expliquée.
E n conséquence, et par nouvel exploit du 19 floréal
an 1 2 , le sieur Chalier fit assigner le sieur Feuillant
devant le tribunal de commerce. Il exposa qu’au moyen
de sa découverte , le jugement préparatoire du tribunal
devenoit inutile; q u’il n’auroit même jamais été rendu
si le sieur Chalier eût pu mettre sous les yeux du tri
bunal , lors de la plaidoirie , la reconnoissance formelle
de la dette, faite par le sieur Feuillant lui-m em e, dans
un état où on ne pouvoit rien dissimuler ; et que la plus
légère omission, ou la plus petite augmentation du passif,
�,
►
V .
( IO )
feroit déclarer frauduleux. 11 renouvela ses conclusions
au p rin cip a l, et en demanda l’adjudication,
v L e sieur Feuillant, fort embarrassé de répondre, sou
tint que le bilan du 10 messidor an 7 n’avoit été suivi
d’aucun acte avec Chalier ; il prétendit qu’il ne pouvoit
en exeiper; que rien ne pouvoit arrêter l’exécution d’ un
jugement préparatoire auquel les parties avoient ac
quiescé ; et que dès qu’il avoit été jugé que le sieur
Chalier devoit un c o m p te , il étoit toujours tenu de le
rendre.
C ’étoit assez mal raisonner de la part du sieur Feuillant.
D ’après la loi du 3 brumaire an 2 , aucune des parties
ne pouvoit se pourvoir contre un jugement préparatoire;
il falloit nécessairement l’exécuter. Mais aussi il ne pouvo it en résulter aucun acquiescement ni approbation
préjudiciables.
Sur ces moyens respectifs, in tervin t, le 13 messidor
an 12 , un jugement qui condamne Jean Feuillant à payer
au sieur Chalier la somme de 2297 francs 5o centimes,
pour le remboursement des avances, et celle de i 65o fr.,
pour le montant des gages de cinq années six m ois, à
raison de 300 francs par années ; aux intérêts de ces
sommes depuis la demande, et en tous les dépens. Les
juges de commerce ont pensé , i°. qu’il ne résultoit du
rapport des arbitres aucun renseignement satisfaisant;
2°. que le traité ou bilan , du 10 thermidor an 7 f donnoit au moins ¿1 Chalier la qualité de créancier, et que
cette qualité ne pouvoit pas être méconnue. Cependant,
suivant e u x , ce traité ne forme pas titre, parce que
�( 11 )
Feuillant ne l’a signe que sauf erreur ou omission; d’ail
leurs Je dépôt de cet acte a été fait à l’insçu de Feuillant,
et sans son aveu.
A in si les juges de commerce reconnoissent bien que la
qualité de créancier est certaine, mais ils disent que la
qualité de sa créance est incertaine. Ils trouvent que le
sieur Chalier exagère sa prétention sur sou traitement;
mais ils sont convaincus que les avances réclamees sont
suffisamment justifiées par le relevé des livres journaux
produits aux arbitres. T elle est l’analise des motifs qui ont
déterminé les premiers juges.
Mais vouloir fixer les appointemens d’ un directeur des
mines ù une modique somme de 300 francs par année,
sans nourriture ni logem en t, c’est avilir des fonctions aussi
utiles que pénibles, et qui exigent des soins continuels et
exclusifs ; c’est enfin rabaisser le directeur au-dessous des
derniers ouvriers, puisque le maître m in e u r a v o it7 2 0 fr.
d’appointemens par année, et le maître charbonnier une
somme de 600 francs aussi par année.
L e sieur Chalier ne balança donc pas à se pourvoir par
appel contre ce jugem ent, en ce qu’il fixoit scs appointe
mens à cette modique somme de 300 francs. D e son côté ,
le sieur Feuillant se rendit appelant du même jugement;
et sur ces appels respectifs intervint, le 29 frimaire an 14 ,
arrêt contradictoire en la cou r, dont il est important de
connoître les motifs et le dispositif.
« E11 ce qui touche- le com pte, attendu que de son aveu
« le sieur Chalier doit compte de sa régie nu sicui*
« Feuillant, et que pour les opérations de ce compte
« les parLies ont été renvoyées, de leur consentement-,
13 2
�sur la demande expresse de C h alier, p a r-d e v a n t des
arbitres, par le jugement du 4 prairial an 10 ;
« Attendu qu’en exécution de ce jugement les parties
ont en effet nommé des arbitres à qui les comptes ont
été présentés ; que les arbitres ont vérifié, sur les pièces
justificatives, le compte de l’an 2 , jusques et compris
le 5 complémentaire an 6; que ce compte a même été
reconnu et accordé par les parties, en présence des
arbitres; mais qu’il a été impossible à ces derniers de
procéder de môme à la vérification du co m p te, depuis
le 5 jour complémentaire an 6 , jusqu’à la cessation de
la régie de C h alier, à défaut de représentation des
pièces justificatives ;
« Attendu cependant que les pièces justificatives doivent
etre entre les mains de Chalier, à l’exception des regis
tres représentés par Feuillant, qui déclare n’avoir reçu de
Chalier que les registres dont son fils a donné récépissé ;
« Attendu q u’il est avoué par Chalier qu’il a effecti
vement pris un x*écépissé des pièces remises aux sieurs
Feuillant père et fils, et qu’il ne rapporte ni n’offre
aucunes preuves de son allégation, que ce récépissé lui
a été retenu par les Feuillant, lorsqu’il est venu leur en
demander un plus régulier, sans qu’ ils aient voulu ni
le lui rendre, ni lui en donner un autre ;
« Attendu que s'il en cuL été ain si, il est peu vraisem
blable que Chalier n’en eut pas rendu plainte, ou encore
mieux lait dresser procès verbal d’ un lait de cette
nature , qu’ il dit s’être passé en présence de plusieurs
personnes, et du juge de paix de Brassac, que luimème a voit fait appeler ;
�( ï3 )
« Attendu cependant qu’ il n’est pas possible d’apurer
« le compte, jusqu’à la production des pièces justificatives ;
» « Attendu aussi que tout comptable étant présumé
« débiteur-jusqu’à la présentation de son com pte, et le
« rapport des pièces justificatives, il y a lieu de suspendre
« la liquidation des créances personnelles du sieur Chalier;
« Attendu enfin qu’il est articulé par Chalier, que
« Feuillant tenoit un livre de raison qui pourroit ser« vir à l’éclaircissement du com pte, et tenir lieu des
« pièces justificatives ; ce qui a été désavoué par Feuil« faut, q u i a déclaré 11 avoir tenu en son p articulier
« d'autres livres que celu i des ventes et recettes q u i l
« fa is a it lu i-m êm e, des charbons conduits au port, et
« em barqués su r la rivière.
« En ce qui touche la demande en fixation des gages
« ou salaires;
« Attendu que par le jugement du 4 p ram al an 10,
0 les parties avoient été, de leur consentement, renvoyées
« par-devant des arbitres;
« Attendu qu’en exécution de ce jugement, les parties
« ont fait choix de ces arbitres;
« Attendu que ce jugement n’a pas été exécuté d’après
« l’idée que s’étoit formée Chalier, de trouver dans l’état
« des dettes de Feuillant la fixation d’une somme déter« minée qui le constituoit créancier;
« E t attendu que le jugement du 4 prairial an 10 sub« siste dans toute sa force,
« La cour ordonne avant faire droit, et sans préju« dice des fin s, qui demeurent respectivement réservées,
« que dans le délai d’ un m ois, à compter de cc jo u r,
« les parties se retireront par-devant Janseuet et Borel-
�( 14)
« V ernière, arbitres par elles précédemment choisis pour
«
cc
«
«
«
«
«
le com pte, à l’elïct d’y faire procéder à lu vérification
et ù l’apurement du compte de la régie de Clu lier,
depuis le 5 complémentaire an 6 jusqu’à la fin de sa
r é g ie ; lors duquel com pte, Feuillant rapportera les
registres qu’il a reçus de Chalier, et ce dernier rapportera aux arbitres toutes autres pièces justificatives de
son compte. Ordonne aussi que Feuillant rapportera le
« livre journal q u i l a avoué avoir tenu pour les ventes
« et recettes des charbons conduits au port.
« La cour ordonne également que par Bureau et Rey«
«
«
«
«
«
nard, arbitres choisis par les parties, il sera procédé dans les mêmes délais d’un mois, à compter de ce jour,
à la fixation et règlement des gages et salaires revenant
à Chalier , dans la proportion de ses services, de sa
capacité, et de l'usage pratiqué p a r rapport à ce genre
de-tra va il; p o u r, après le compte et fixation de sa-
« laircs, ou faute de ce faire, être fait droit aux parties,
« ainsi qu’ il appartiendra , dépens réservés. »
Cet a rrê t, comme on le v o it, est rendu sans préju
dice des f in s ; mais il faisoit une grande leçon aux ar
bitres, et leur recommandoit surtout d’être justes.
E t comment espérer un examen im partial, lorsqu’il
est notoire que le sieur Borel est le conseil habituel du
sieur Feuillant ; lorsqu’ il est prouvé que Borel a été le
défenseur de Feuillant, devant le tribunal de première
instance de B rioude, dans une demande formée par ce
dernier, contre le sieur Chalier, à l’eliet d’obtenir la main
levée des inscriptions de celui-ci?
L e sieur Chalier l’observa au sieur B o r e l; il lui re
présenta qu’il étoit le conseil habituel du sieur Feuillure,
.
�( *5 )
qu’il y avoit intimité et fréquentation continuelle entre
eux. Feuillant ne logeoit point ailleui’s que chez B o r e l,
lorsqu’il alloit i\ Brioude. Enfin l’indiscret Feuillant s’étoit
vanté q u 'il auroit toujours raison avec B o r e l, et q u 'il
était sûr d'une décision fa v o ra b le.
L ors même de la discussion, et du procès verbal fait
en exécution de l’arrêt de la cou r, le 23 janvier 1806,
Borel avoit eu assez peu de pudeur pour rédiger ou
corriger les dires et réponses de Feuillant.
L e sieur Chalier fit ses représentations; et il en avoit
le droit. Malheureusement il arrive tons les jours que
les arbitres sont plutôt des défenseurs que des juges. Il
y a tant d’exemples funestes d’intérêts sacrifiés par l’igno
rance ou la prévention , qu’on doit espérer qu’une loi
bienfaisante, ou supprimera les arbitrages, ou au moins
les assujétira ù une révision rigoureuse des juges supé
rieurs. Une clameur universelle réclame ce grand acte
de justice, depuis que tant de gens se croient faits pour
être arbitres.
Quoi qu’il en soit, les remontrances du sieur Chalier
furent accueillies avec la plus cruelle animosité. Borel
se permit de consigner dans son procès verbal que la
sieur C ha lier avoit m is tant de grossièreté dans ses
in ju re s, tant d'absurdités dans ses im putation s, tant
à'indécence dans sa co n d u ite, qu’il se récusoit.
Est-ce là le langage de l’ impartialité; ou plutôt n’estce pas l’expression de la colère et de la passion ?
Son exemple entraîne son collègue Janscnet : au moins
ce dernier n’iiüribue pas tous les torts à Chalier; il s’en
nuie des inc idc ns perpétuels q u i s'élèvent dans la cause f
�i , 6 )
des longueurs et des inutilités des titres anciens et nou
veaux des p a r tie s, des vociférations et des injures ca
pitales et de tout genre qu'elfes débitent. Il voit que cette
opération ne pourra se traiter que dans le tumulte des
passions; il renvoie les parties à des experts désœuvrés,
et déclare qu’il est dans l'intention de s’abstenir.
Ce procès verbal si singulier est sous la date du 23
janvier 1806; il suspendoit, comme on v o it, toutes les
opérations : et Chalier se pourvoit en la cour, pour de
mander qu’il fût nommé de nouveaux arbitres. Feuillant
s’y refuse'; il insiste pour que les mêmes individus qui
avoient reconnu eux-mêmes qu’ il leur étoit impossible
d’être juges, continuassent cependant de prononcer sur
leurs intérêts.
Cette prétention paroissoit inconvenante. Comment
laisser à des hommes qui s’expriment avec tant de véh é
m ence, qui ont donné de si fortes preuves de préven
tio n , le droit de remplir le premier comme le plus beau
ministère? U ne jurisprudence constante a voit appris que
les plus légers motifs suflisoient pour faire admettre la
récusation des experts ou des arbitres : ce ne sont jamais
que des juges volontaires, qui 11e tiennent leur mission
que de la confiance des parties.
Cependant la co u r, par son arrêt du 3 février 1806,
n’a eu aucun égard à la récusation du sieur C halier, et
a ordonné l’exécution de son premier arrêt du -2g fri
maire an 14.
Il faut avoir le courage d’en convenir. Quelque défé
rence q u ’on doive aux arrêts de la co u r, celle dernière
décision auroit alarmé le sieur Chalier, s’ il n’avoit autant
de
�4
^
. C 17 )
de respect et de confiance dans l’intégrité et les lumières
des magistrats de la cour.
E n exécution de cet a ri'ê t, Borel et Jansenet ont été
assignés pour procéder à leur opération , et se sont réunis
le 20 février 1806 au lieu de Brassac. Les sieurs Feuillant
et Chalier se sont rendus auprès d’e u x , et Feuillant a
représenté, i° . un registre intitulé de dépense, com
mençant le 4 vendémiaire an 7 , et finissant au mois de
fructidor de la même année : les experts vérifient que
cent dix pages de ce registre sont écrites de la main du
sieur Chalier.
2°. Feuillant a exhibé d’un autre registre intitulé des
voituriers , commençant à la page 5 , mois de vendé
miaire an 7 , contenant vingt-trois pages écrites aussi de
la main de Chalier.
1
3 0. U n autre registre intitulé des journ ées e t p r i x ja it s ,
commençant aussi en vendémiaire an 7 , et contenant
cinquante-une pages.
4 0. A u tre registre intitulé recette des charbons vendus
su r le carreau de la m ine , commençant en vendé
miaire an 7 , et contenant trente-un feuillets.
5 °. A u tre journal de recette, commençant en l’an 3 ,
et finissant en thermidor an 7 , sans aucune désignation
de numéro sur les pages.
Borel-Vernière ne manque pas de remarquer que cc
journal est le même sur lequel à lui tout seul il avoit cru
trouver de l’altération , à partir du feuillet où l’on trouve
m ois de pluviôse ail 7.
Feuillant au surplus déclare que ces registres sont
les seuls qu’il a en son p o u v o i r , et qu’ils lui ont été remis
C
�( , 18
?
par le sieur'Chalier sur récépissé, lors de la présenta
tion de son compte.
L es arbitres demandent ¿1 Feuillant la remise du livre
des ventes et recettes des charbons provenus de la mine
des Barthes , et conduits sur le port pour être embarqués
sur la rivière d’A llier.
Feuillant est obligé de convenir qu’il a tenu cc regis
tre en son particulier ; qu’il croyoitm êm e en être encore
nanti lors de l'arrêt de la co u r, du 29 frimaire an 14.
D e retour chez lui , il s’empressa d’en faire la recherche,
mais il ne l’a point t r o u v é e t il est très-probable qu’il
lui a été en levé; d’ailleurs, il ajoute que ce registre no
pouvoit donner aucuns renseignemens sur la régie du
sieur Chalier , parce que la vente des chai'bons sur le
port étoit indépendante des travaux de ceux q u i , ainsi
que le sieur C h alier, étoient chargés de l’exploitation
et extraction de la mine.
P o u r appuyer cette observation , Feuillant justifie de
pareils livres par lui tenus pour les charbons venant des
mines de la Taup e et Combelle. Les arbitres s’empres
sent de parcourir ces livres, et s’aperçoivent que toutes
les ventes y indiquées ont été faites par le sieur Feuil
lant , et non par ses commis.
Mais si les arbitres s’aperçoivent si vile de ces détails,
Fouillant ne s’aperçoit pas q u’il est en contradiction avec
lui-même ■
, car si ce registre étoit aussi indiderent qu’il
veut bien le d i r e , il étoit fort inutile de l’enlever, quelle
que soit la personne qu’ il soupçonne de cet enlèvement.
V ien t le tour du sieur Chalier ; et les arbitres lui
demandent la représentation de toutes les pièces justili-
�4 M
( *9 )
calîves qu’ !l peut avoir à l’appui du compte qu’il a pré
senté au sieur Feuillan t, depuis le premier vendémiaire
an 7. lies arbitres disent que lors de leur premier rapport,
ils avoient déjà sous les yeux les registres qu’ ils viennent
d’énoncer, et que cependant ils n’avoient pas pu procéder
à l’apurement, attendu qu’aucun article de la l’ecette et
de la dépense n’étoit établi ni justifié.
C h alier, à cette époque, étoit à peine convalescent d’ une
maladie grave qu’il venoit d’essuyer. Il déclare aux arbi
tres qu’il a été hors d’état de se rendre à Riom chez son
a vou é, où étoient déposées les pièces de son procès avec
le sieur Feuillant, ainsi que la correspondance de ce der
nier , qui étoit d’ une grande im portance, et prouveroit la
fidélité de son- compte.
lies arbitres ne manquent pas de remontrer qu’une cor
respondance ne peut suppléer à des pièces justificatives.
Ils ne pouvoient pas supposer d’ailleurs raisonnable
ment que le sieur Chalier se trouvant à Riom lors de
l ’arrêt de la co u r, eut quitte cette ville sans prendre avec
lui les pièces qui pouvoient lui être nécessaires.
I.es arbitres prennent ensuite la peine de démontrer
quelles sont les pièces justificatives, ce qu’011 entend par
pièces justificatives; et après quelques démonstrations assez
inutiles , et qu’on savoit bien sans e u x , ils passent au re
gistre de la vente des charbons de province. Ils observent
ou sieur Chalier que pendant sa régie il avoit sous ses
ordres un commis nommé Louis A r v e u f, qui étoit chargé
de la vente de ces charbons, en tenoit un état journalier,
et en coinpioil toutes les sommes au sieur C h a l i e r ; de
sorte que pour justifier son compte dans cette partie,
C 2
�( 20 )
Chalier devoit rapporter les registres tenus par Louis
A r v e u f , à l’eflet d’examiner si ses ventes et leur prix
étoient concoi’d an s, et s’il n’y avoit dans le c.omple du
sieur Chalier aucune e r r e u r , omission ou double emploi.
Dans tous les articles, est-il d it , Chalier relate les états
de Louis A r v e u f ; ce qui prouve infailliblement que le
registre à eux présenté n’est qu’un registre de r e p o r t , et
qu’on ne peut y ajoute*’ foi sans voir et examiner les pièces
qu’il mentionne, et qui lui servent de contrôle.
Les arbitres trouvent convenable et juste , intéressant
pour les parties, et utile pour éclairer la religion de la
cour, de faire appeler et d’entendre Louis A r v e u f, dont en
effet ils ont inséré la déclaration à la suite de leur rapport.
P ar cette déclaration , A r v e u f dit avoir été employé
par les. sieurs Feuillant père et fils , pour surveiller à la
vente de province des cliax-bons existans sur le carreau ,
et extraits de la mine des Barthes. Ses fonctions consistoient à tenir registre de toutes les ventes qui s’opéraient
journellement des charbons des Barthes.
Pendant tout le temps qu’A r v e u f a eu la confiance des
F euillant, il a tenu un compte exact de ses ventes, et les
inscrivoit journellement sur un registre destiné à cet effet,
où il inentionnoit le nom des acquéreurs , leur domicile,
la quantité de charbon qui leur étoit délivrée , le prix
qu’ils payoient en solde ou en i\-coinpte des livraisons.
Indépendamment du registre qu’il tenoit, il rendoit compte
au sieur C h alier, com m is principal de Feuillant, à chaque
vente qui avoit lieu ; celui-ci les inscrivoit ;\ son tour, ou
devoit les inscrire pour en rendre compte ¿\ Feuillant. A
l’époque où les affaires de Feuillant se trouvèrent dénar-
�433 ( 21 )
g é e s , Chàlier proposa un jour au déclarant de monter h
la machine d’extraction, où il avoit quelque chose d’es
sentiel à lui proposer : il se rendit à son invitation, et ils
montèi’ent ensemble. A peine y furent-ils rendus et assis,
que Chalier le quitta sous quelque prétexte*, et ne le voyantpas reven ir, lui A r v e u f , se rendit à l’habitation des B artlies, où son registre sus-cité, ensemble les états de vo i
tures , étoient déposés et rassemblés sous une ficelle. Il
s’empressa de demander où étoient des pièces si im por
tantes; et sur l’inquiétude qu’il manifesta au sieur R ou gier
de C o u h ad e, autre employé aux gages du sieur Feuillant,
celui-ci lui fit l’aveu que Chalier venoit de sortir de l ’ha
bitation, emportant avec lui les pièces et registres attachés
ensemble.
A r v e u f déclare en outre qu’à compter de cette époque
il ne travailla plus à la mine des Barthes, dont l ’exploi
tation fut confiée au sieur Lesecq ; et c’est la seule raison
pour laquelle il n’a pu remettre au sieur Feuillant le re
gistre dont il s’agit, qui devoit servir de contrôle à la ges
tion du sieur Chalier dans cette partie.
Il est assez extraordinaire que des arbitres , uniquement
chargés de procéder au co m p te, se soient permis de faire
entendre un individu aux gages du sieur F eu illa n t, et sur
un fait étranger à leur mission ; c’est procéder à une en
quête à fu tu r, ce qui est prohibé par l’ordonnance; c’est
enfin excéder les pouvoirs que la cour et les parties leur
avoient donnés.
Mais au m o i n s , dès que ces arbitres étoient si soigneux
po u r éclairer la religion de la cou r , lui apprendre ce
qu’elle ne leur demandait pas, et ne lui rien dire sur ce
�i 'b k
(
22
)
qu’elle leur ‘d emandent, ils auroierit dû au moins avoir
le soin de faire appeler ce R ougier de C o u h a d e , qui
avoit appris tant de choses à A rveu f. L e sieur Chalier
réclama en vain; on ne lui a pns même fait la faveur de
consigner dans le procès verbal cette réclamation : on
savoit que R ougier de Couhade démentiroit ce qu’a voit
dit A r v e u f , et ce n’étoit pas le compte des arbitres.
A u surplus, C halier, pour répondre à l’interpellation
qui lui étoit faite, déclara qu’à la vérité il avoit été nanti des.
pièces justificatives de son compte, et notamment de celles,
qu’on venoit d’indiquer; mais qu’il avoit remis le tout
au sieur Feuillant ; ce que Feuillant a expressément désa
voué , en faisant remarquer qu’il n’étoit pas présumable
qu’ un comptable pût se défaire, sans décharge ou récé
pissé , de pièces aussi essentielles pour lui.
Chalier vouloit rép ondre que Feuillant étant nanti de
ccs registres , il étoit bien moins présumable qu’il n’eut
pas reçu tonies les pièces, qu’il eût voulu se contenter de
prendre les registres en cet é t a t , et qu’il n’eût pas fait
constater que le sieur Chalier 71e lui avoit pas remis autre
chose, qu’il 11’ait pas même fait dresser procès verbal de
l ’état des registres. C ’étoitune marche assez simple, comme
il étoit juste d’insérer les observations du sieur Chalier;
mais les arbitres ne jugèrent pns à propos de lui donner
cette satisfaction.
Les arbitres seulement nous apprennent que le sieur
B o r c l , l’un d’eux , avoit a flaire à Jssoire ; en conséquence,
ils remettent leur séance au 22 février, et invitent le sieur
CI) a lier à faire de nouvelles recherches pendant /es vingt?
quatre heures qu’on lui donnoit de répit.
i
�( 23 )
A u jour ind iqu é, ils se plaignent de ce que Chalier
les a fait attendre jusqu’à six heures ; ils apprennent que
Chalier s’est présenté assisté d’un con seil, et a remis les
observations écrites de lui.
Ces observations consistent à dire que le compte du
sieur Chalier a été rendu; que toutes les pièces justifi
catives ont été remises entre les mains des sieurs Feuillant
père et fils; qu’ils lui en avoiunt d’abord remis un récé
pissé , le 5 prairial an 9 , mais qu’ils l’ont ensuite retenu,
le 16 du même mois de prairial, sous prétexte d’en don
ner un plus régulier au sieur Chalier; ce qui n’a point
eu lieu.
Chalier observe qu’ il pourroit être facilement suppléé
à ce récépissé, 011 aux pièces justificatives elles-mêmes,
par le rapport des registres de v e n t e , d’achats , de dé
pense et de recette de l’administration de la m in e , néces
sairement tenus, d’après la loi et l’ordonnance du com
merce , par le sieur Feuillant, pendant l ’espace de temps
dont le nouveau compte est ordonne.
Si le sieur Feuillant refuse de représenter ces registres ,
il ne peut avoir d'autre but, i ° . que de rendre impossible
le nouveau compte ordonné entre les parties, et qui déjà
est sullisarnmcnt suppléé par le bilan du sieur Feuillant,
en date du 10 messidor au 7 ; 20. de se mettre à l’abri de
la demande du sieur C h a lie r, relative à ses avances et à
scs appointemens.
L e sieur Chalier ajoute que dans cet état de choses, 011
no peut pas se dissimuler que le nouveau compte d e m a n d é
par le sieur Feuillant est une sorte de récrimination, ou
d exception dilatoire contre celle demande.
�C 24 )
L e sieur Clialier consent volontiers à établir de nou
veau son compte, comme il a déjà été fait entre les parties;
mais le sieur Feuillant doit nécessairement pour c e la , ou
rapporter les pièces justificatives qu’on lui a remises, ou
les registres qui s’y réfèrent évidemment.
A u défaut de ce r a p p o r t, Chalier soutient que le
compte demandé de rechef étant rendu impossible par
le fait du sieur Feuillant, ce dernier ne peut s’en préva
loir contre lui. L e compte de Chalier est réputé rendu
par le rapport du bilan de Feuillant , dans lequel il
reconnoît Chalier pour son créancier de la somme de
14000 francs.
Cette créance insérée au bilan , sans modification , sans
réflexions , ne peut être que le résultat d’un compte
rendu sur pièces justificatives.
Il est si vrai que Chalier a r e n d u son com pte, et re
mis toutes pièces qui l’établissent, qu’après le premier
compte fait entre les p arties, de la gestion du sieur
C h alier, jusques et compris le 5 complémentaire an 6 ,
les scellés furent apposés par le juge de paix de G im eaux,
sur la liasse contenant les pièces justificatives du compte;
elles devoient être déposées au grelï’e du tribunal de com
merce d’Issoirc, jusqu’au moment où l’on auroit besoin
d’y avoir recours. Ce dépôt n’a sans doute p o i n t eu lieu,
puisque les scellés apposés sur cette liasse o n t été brises,
probablement p a r le sieur F e u i l l a n t , ent re les mains
duquel ont resté déposées les pièces, au lieu de l’être au
g relie du tribunal de commerce.
Ces scellés, continue C h alier, ont ete brisés sans procès
v e r b a l, ni inventaire contenant l’état, le nombre et la
nature
�l 25 )
nature des p iè ce s, dont le sieur Feuillant a pu facile
ment faire disparoître toutes celles qui pourroient servir
aujourd’hui à établir le compte»
-i
L e sieur Chalier fait ensuite la nomenclature des pièces
et registres que Feuillant ne peut se refuser de rap
porter pour suppléer aux pièces qui manquent. Ces re
gistres consistent, i° . en un journal tenu jour par jo u r ;
2°. en un journal de raison ; 30. en un livre de caisse ;
4 0. en une liasse des lettres écrites par Chalier à Feuillant;
h°. en un registre de copies de lettres du sieur Feuillant :
le tout d’après l’ordonnance de 1673.
j
6°. Dans les bulletins remis ou envoyés chaque jour
par Chalier à F euillant, et .qui rendoient compte de la
recette et de la dépense faites dans la m in e , de l’extrac
tion des charbons, et de la voiture.
L a cour se rappellera qu’à une de ses audiences, il
fut représenté quelques-uns de ces b ulletin s, jour par
j o u r ; que Feuillant n’en désavoue pas l’usage constant:
ce qui étoit en efl'et le meilleur ordre qu’on pût mettre
dans les détails d’une vente de cette nature.
7 0. Dans les états remis chaque mois à Feuillan t, et
contenant le résultat de tous les bulletins et des journaux.
8°. L ’état particulier, portant compte rendu au sieur
Feuillant dans les premiers jours de messidor an 7 , peu
de jours avant son bilan ; lequel compte fut transcrit sur
le journal tenu jour par jour par Feuillant.
9°. Les journaux de recette et dépense, tenus par la
dame F eu illan t, et le sieur Feuillant fils jeu n e , lorsque
son père étoit en voyage.
D
1
�...................... ( * 6 ')
io ° . Les livres et pièces qui ont basé le bilan pré
senté par le sieur Feuillant le 10 messidor an 7.
ï i °. L es livres te n u s. par B u re a u , commis en sousordre pour la mine de la C o m b elle, en l’an 5.
12°. Les livres de recette et dépense, tenus en l’an 8
par Chalier pour Etienne Feuillant \ lesquels livres ont
commencé le 8 fructidor an 7.
Ces observations furent communiquées de suite au sieur
Feuillant : fort embarrassé de rép o n d re, il se contente de
dire que toutes ces allégations ne pouvoient équivaloir
aux pièces demandées au sieur Chalier pour la vérification
de son compte , telles que les différens marchés ,. p rix
faits, polices, conventions, quittances, billets ou lettres de
change acquittés, registres de Louis A i'v e u f, etc. *, qu’au
surplus il se réservoit tous ses droits et protestations contre
cet écrit, lors de la plaidoirie dèvant la cour d’appel.
L es arbitres, à leur to u r , croient devoir rappeler que
lorsque dans leur premier rapport ils ont parlé de pièces
justificatives produites par C h a lie r, ces pièces avoient
trait seulement au compte antérieur au premier vendé
m iaire an 7 , rédigé par le sieur Bureau , approuvé et
apuré par toutes les parties*, mais en ce qui concerne
le compte postérieur à cette é p o q u e , et dont il s’agit
aujourd’h u i , il est très-certain q u e , soit à Tépo que du
premier fructidor an 1 0 , date du rapport , soit aujour
d’hui , le sieur Chal ie r n’en a prod ui t d’aucune espèce,
et que le sieur Feuillant a représenté les mêmes regis
tres qui avoient été inventoriés, sans aucune espèce d’al
tération , qui d’ailleurs auroit été impossible de sa p a rt,
�c 27 )
« y
t
puisque toutes les écritures «ont de la m a in vdu sieur
Chalier , et q u e lle s arbitres les avoient paraphées et
signées.
O n voit avec quel soin les arbitres cherchent à favo
riser le sieur Feuillant. Ils terminent par dire que du
défaut absolu de titre justificatif, de renseignemens qui
•
puissent y su p p lé e r, il ¡résulte que malgré l’importance
du com pte, tel : que la recette se porte à 14 1916 francs,
et la dépense à 143201 francs, il n ’existe pas un seul
•article qui soit établi ou ne soit contesté ; en consé
quence , il leur est impossible de remplir le vœ u de la cour
■d’appel , et de s’occuper de la vérification et apurement
d’un compte qui n’en est pas un dans l’état où il a été
présenté , et n’est, à proprement parler, qu’um sim plebor
dereau , dont rien n’annonce et ne p r o u v e la justesse et
la fidélité.
T e l est le procès v e r b a l, ctb ircito., q u’ont lancé les
arbitres.
Restoit encore une opération. D e u x autres arbitres, les
sieurs Reynard et Bureau, devoient fixer et régler les aprpointemens du sieur C h a lie r, pour chacune des années
-qu’il a été em ployé par le sieur Feuillant.
. L ’ un de ces arbitres, le sieur Bureau,, ;avoit été récusé
par le 'sieur Chalier : ce sieur Bureau avoit été sous les
•ordres de C h a lier, ce qui est établi par la correspon
dance, et ne sera sûrement pas désavoué. L e sieur Bureau
•étoit entièrement dévoué au sieur F e u illa n t, et l’a même
manifesté de telle m an ière, que le sieur Chalier se crût
bien fondé à le récuser. L e sieur B u reau, qui s’étoitluîr
même départi de la connoissance 'de cette affaire , ainsi
V 2
�( 28')
' q u’il résulte d’un procès verbal du 24 janvier dernier , a
-cru que d’après l’arrêt de la co u r, du;3 février suivant,
il étoit obligé d’en connoître; et cependant on doit re
m arquer que l’arrêt de la cour n’avoit prononcé que
sur la récusation des pi’emiers arbitres, respectivement
,
au compte.
Q uoi qu’il en s o i t , Bureau et Reynard se réunissent.
Un premier procès verbal, du 20 février d ern ier, ap
prend que le sieur Reynard vouloit allouer au sieur
Chalier une'som m e de 900 francs pour chaque année;
mais Bureau représente que cette somme de 900 francs
est exorbitante, et qu’il ne doit être alloué que celle
de 55o francs pour chaque année. Reynard dit que cette
somme est trop m o d iq u e, non-seulement par rapport aux
embarras qu’avoit eus Chalier dans les derniers temps,
7?iais encore p a r rapport à î im portance de la place q u i î
o ccu p o it, et de Rentière coiifiance que F eu illa n t avoit
alors en lui.
Les arbitres sont donc divisés, et donnent leur avis
séparément. Bureau persiste dans son opinion , et donne
po u r m otif que lorsque Chalier est entré chez Feuillant,
il n’avoit aucune connoissance de l’état de commis aux
mines , où il fut placé à la sollicitation de la dame Seguin,
pour surveiller aux ouvriers. Il faut au moins deux
années pour acquérir le talent d’être commis h une ex
ploitation d’aussi grande importance.
D ’ailleurs le sieur C h a l i e r , ajoute B u r e a u , etoit la ma
jeure partie du temps n o u r r i , soit dans la maison , soit
en campagne. Il étoit chauffé , dans son m énage, du
charbon des mines du sieur Feuillant.
�G29 )
' Il termine par dire : Les sieurs F lo ry et A rn a u d , commis
instruits dans cette p a r tie , qui avoient précédé le sieur
Chalier dans les mêmes exploitations, n’étoient payés les
premières années ; savoir, le premier, qu’à raison de trois
à quatre cents francs, et le second, à raison de 4Ô0 fr. ?
et ce, sans nourriture ni l’un ni l’autre.
Il semble que Feuillant est le rédacteur de cet avis; car
c’est précisément le langage qu’il a tenu lors de sa défense
en la cour. O n voit cependant que Bureau n’étoit pas bien
sûr de la somme à laquelle s’élevoient les traitemens des
sieurs F lo ry et A rnau d ; mais au moins il devoit être sûr
de celui q u ’il avoit lu i-m êm e, lorsqu’il étoit employé par
le sieur Feuillant sous les ordres du sieur Clialier ; et s’il
a bonne m é m o ire , il se rappellera que son traitement
s’élevoit à 1400 fr. par année. Pourquoi donc voudroit-il
réduire le sieur Chalier à la modique somme de 55o fr. ?
Cependant le sieur Bureau , indépendamment de son trai
tement , avoit encore son appartement meublé ; il étoit
chauffé et éclairé, et par fois invité à manger chez le sieur
F euillan t, comme cela est arrive aussi au sieur Chalier ; et
si parce qu’il étoit invité quelquefois à manger chez le sieur
Feuillan t, on croit devoir réduire ses appointemens à
55o f r . , il faut convenir que c’est lui faire payer fort cher
son écot.
L e sieur Reynard a donné son avis séparém ent,le 18
mars 1806. O n a vu que par le premier procès verbal il
vouloit porter le traitement à 900 fr. par année, à raison
de î im portance de la p la c e , et surtout de rentière con~
fiance qu’avoit le sieur Feuillant en Chalier.
Maintenant ce 11’est plus la même chose. Reynard a
�( 3° )
connu Chalier dès son enfance ; il l’a suivi dans sa m arche
p o litiqu e, et ses progrès. Il assure avec confiance qu’avant
d’avoir été chargé des intérêts de Jean Feuillant dans ses
m in es, Chalier étoit absolument nouveau dans ce genre
de travail ; il n’avoit que l’écriture d’un écolier ; et les
salaires qu’ il pouvoit exiger alors devoient se borner à
peu de ch o se, jusqu’à ce qu’il eût acquis de l’expérience.
Chalier avoit cependant vingt-trois ans lorsqu’il est
entré chez le sieur Feuillant. Il est de Brassac ; il avoifc
toute sa vie v u exploiter des in in es, et par conséquent
devoit avoir des connoissances suffisantes pour être utile
ment em ployé dans ce genre de travail. L 'en tière con
fia n c e que lui accordoit le sieur Feuillant en seroit déjà
une preuve.
Reynard , bientôt a p rè s, dit que l’âge et Thabitude du
travail ont fait acquérir des connoissances à Chalier. Jean
Feuillant lui a donné sa confiance p o u r toutes les affaires
extérieures ; il le chargeoit des achats, des payemens des
ouvriers 5 il a voyagé souvent dans des places de com
merce p o u r l’échange des papiers et effets de son commet
tant; ce qui a dû lui procurer un salaii’e plus considérable,
mais toujours dans la proportion de ceux que donnoient
les autres exploitans pour de pareils travaux.
Par une transition singulière, Reynard invite la cour à
ne pas se laisser séduire p a r le titre fastueux de directeur
général, dont Chalier rapporte la note. C ’est un titre illu
soire qui n’a été do nn é à aucun commis dans les mines du
p a y s , et qui a eu pour m o ti f des considérations particu
lières qui paraissent avoir leur source dans la conscrip
tion militaire dont Chalier faisoit partie, et qui-lui eu a
�44">
( 31 )
procuré l’exemption. (N otez bien que la conscription mi-,
litaire n’a été décrétée que bien postérieurement à cette
époque, et que Chalier n’en a jamais fait partie. ) L a co u r,
ajoute R e y n a rd , doit le considérer, pendant les trois der
nières années de sa r é g i e , comme premier commis de
confiance , ou autre titre à peu près semblable, et laisser
dorm ir celu i de d irecteu r, qui n’a été créé que pour lui
seul.
Chalier a e u , pendant tout le temps de sa régie , le
chauffage en charbon pour la maison de sa mère , ainsi
qu’il a toujours été d’usage. 11 a été d é fra y é , dans tous,
ses voyages, pour sa dépense de bouche; ce qui lui procuroit une occasion de ménager ses salaires dans les dif
férentes opérations qu’il a faites pour Jean F eu illa n t, et
surtout dans les temps du papier-monnoie.
Il a travaillé pour son compte particulier, ainsi qu’il
en est co n v en u , et Feuillant ne s’en est pas plaint; il a
fait quelques commerces particuliers, tels que de grains
avec T r io lie r , de Brioude , de savon à Issoire : il a pu,
en faire d’autres que Feuillant ne lui a pas interdits. Cette,
considération, et l’agrément de faire des affaires à lui.
p ro p res, doivent être calculés dans la fixation de ses gages,
quelque succès qu’aient pu avoir pour lui ses négociations.
Reynard certifie avoir été associé à l ’exploitation de la,
mine de la T a u p e , qui est la meilleure du pays. Il étoit
en même temps c h a r g é , avec son père , de la régie d u
dehors et du dedans; et la société ne leur passoit qu’ un
prélèvement de 5oq fr. entr’eux deux par année. G uil
laume Grimnrdias, commis comptable de Feuillant, avoit
par an 300 f r . , la table et le logement. Plusieurs commis
�( 32 )
se sont succédés dans les mines de F e u illa n t, sans qu’ils
aient eu des appointemens de 2000 fr. ; il n’y a que le
sieur Ramel dont le traitement ait été porté à ce taux.
Mais ce sieur Ramel étoit favorisé par le conseil des
mines, et avoit fait ses preuves dans les mines de Bretagne;
et encore le sieur Lamotlie s’est-il lassé d’un pareil trai
tement, et l’a renvoyé. Reynard nous apprend encore qu’il
y a actuellement un sieur Richard à la tête de l’exploi
tation de la mine du G ro sm en il, dont on ne connoît pas
le traitement : on le croit associé pour une partie. Mais
ses opérations et ses connoissances sont d’un autre genre,
et 11e peuvent recevoir d’application avec les affaires dont
a été chargé le sieur Chalier. Richard est maître absolu
au Grosm enil, dirige le dehors et le dedans, fait toutes
les ven tes, au lieu que Chalier ne faisoit rien dans l’inté
r ie u r ; il rendait journellem ent compte de scs opérations
extérieures à son com m ettan t, et ne faisoit aucune vente.
Si Feuillant avoit eu un commis à 2000 fr. pour l’inté
rieur , un autre de pareille somme pour l’extérieur r et
un autre pour les ventes sur le p o r t, il n’auroit pas assez
gagné pour payer ses commis ou les autres dépenses.
Il reste encore à observer, ajoute Reynard , que le temps
du pnpier-monnoie a fait éprouver tant de variations dans
ses valeurs, qu’il faudrait chaque mois une évaluation
nouvelle pour ne léser aucune partie; et comme il fau
drait une seconde opération pour convertir le tout en
num éraire, il a supputé qu’à compter du jour que Chalier
a commencé à travailler aux mines de Feuillant, jusqu’au
7 thermidor an 4 , 01.1 20 juillet 179^5 époque de la ces
sation du pap ier-m on n oic, ses salaires doivent être fixés
«
u
�4AS
( 33 )
l la somme de 5oo fr. en numéraire po u r chacun an , et
que cette somme est suffisante pour tout ce qu’a fait ou
pu faire Chalier pour le compte de Feuillant; qu’ensuite,
à compter du 25 juillet 1 7 9 6 , jusqu’au jour où il a cessé
ses travaux à la m in e , ses salaires doivent être portés à
la somme de 900 fr. par année.
.C om b ien de contradictions n’a - t - i l pas échappé k
Reynard dans ce singulier avis ? D éjà il est constate
par un procès verbal juridique que Reynard allouoit
à Chalier sans distinction une somme de 900 francs par
an n ée; mais dans l’intervalle, sans doute, le sieur Feuil
lant ou ses agens ont su lui faire changer d’opinion. On.
sait que c’est chez Jansenet qu’il s’est rendu pour donner
son avis ; que ce dernier en a été le rédacteur ; et
Reynard , dont la profession est d’être tailleur d’habits
pour les charbonniers, avoit besoin d’un secours étran
ger pour rédiger une opinion. Les expressions dont ii
s’est servi ne sont pas même à sa portée ; il n’a jamais
su ce que c’étoit q u 'u n titre ¿ fa stu e u x , et on ne pouvoit pas trop l’appliquer à un directeur des mines , dont
les fonctions ont plus de péril que de gloire , et plus
de peine que de bénéfice. A u surplus , ce titre n’est
pas étranger à ceux qui exercent le même emploi que
lo sieur C h alier, puisqu’on le donne à tou s, et qu’on
voit traiter ainsi un sieur B a illy, dans un exploit du 14
floréal an 10 , quoique ce sieur Bailly fût d’abord aux
ordres du sieur Chalier , et l’a ensuite remplacé lors
que le sieur Lesecq est devenu acquéreur de la mine
des Barthes.
A u surplus , le sieur Etienne Feuillant avoit lu iE
�(.3 4 ) , ,
inême donné une procuration générale au sieur Clialier ,
.soit pour toutes^affaires civiles, soit pour toutes celles
relatives à l’exploitation des mines. Cette procuration gé
nérale est en date du 2 complémentaire an 7 , et a été
reçue par Jansenet, notaire , qui auroit dû s’en souvenir
lorsqu’il a rédigé l’avis de Reynard. Jansenet a bien reçu
d’autres actes de cette nature ; car en l’an 5 , il donnoit
au sieur Chalier le titre de préposé et de fondé de po u
v o ir général du sieur Feuillant fils.
O n sera encore étonné que Jansenet n’ait pas été plus
juste lorsqu’il a été question des com ptes, puisqu’il fait
dire à Reynard que C ha lier rendoit journellem ent compte
de ses opérations à F eu illa n t.
*■- E n fin , comment se fait-il qu’on ne se soit pas aperçu que
Reynard , dans un .premier avis , avoit porté les appoin•temens de Chalier à 9 0 0 'francs par ann ée , sans distinc
tion , et q u’ensuite on lui fasse diminuer les premières
•années de 400 francs chacune?
-
Il est impossible d’être ballotté d’une manière plus
cruelle. Il faut que Feuillant ait encore bien de la pré
pondérance, pour qu’il soit parvenu à écraser d’une ma
nière aussi criante celui dont il a reçu des services aussi
'longs et aussi signalés.
M ais ces petites intrigues locales , ces petites rivalités,
vont disparoître en la c o u r, maintenant q u ’elle a counoissnnce de tous les détails.
L o i’sqii’elle a prononcé , jusqu’ici c’est toujours sans
(préjudice des f m s et m oyens des parties. Si la cour
a pensé que dans la rigueur des principes on ne pouvoft
révoqu er les arbitres qu’on avoit nommés ? ou
qui
�( s s . ) ;■
aboient commencé l e u r opération , la co u r n’en a pasr
moins été pénétrée des motifs qu’on avoit fuit valoir r
et s’est réservé de prononcer, dans sa sagesse-, nonobs
tant toute décision , ou sauf ù y avoir tel égard que de
raison.
.}
,
Comme il est surtout urgent de tirer les parties d af
faire , que jusqu’ici les arbitres n’ont fait que donner des
preuves de partialité ou de prévention, sans rien detei’’m iu e r , le sieur Chalier çonserye la plénitude de ses
m oyens, et va les développer. / ; 's ■
t.
IL établira, i° . qu’il ne doit pas de compte au sieur
Feuillant; que sa qualité de créancier n’est pas douteuse,
et a été reconnue par Feuillant lui-même.
2°. Q u ’en supposant qu’il fût astreint à un co m p te,
cette reddition de compte est devenue impossibiç-'par le
fait du sieur Feuillant.
3°. Que sa demande n’a rien d’exagéré relativement
à ses appointemenç, et que l’avis des arbitres en ce point
est absolument injuste, ou n’est que le résultat de la plus
basse jalousie.
1
,
t
,
...
§• Ier.
L e sieur C k a lier est créancier de F e u illa n t, et ne doit
pas de compte.
L e sieur Feuillant a termoyé avec ses créanciers; il a
présenté son bilan le 10 messidor an 7 : le passif excédoit
l’aclif d’une somme de 9 8 71 1 fr. 7 5 cent. Dans ce bilan,
le sieur Chalier y est porté par Feuillant au rang des dettes
^ cliirograpliaires échues; il est reconnu créancier pour
E 2
�I k
Ï 3« ' ) '
une somme de 14000 fr. L a déclaration de Feuillant à:
cet égard est faite sans lim itation, sans m odification, et
sans aucune observation, tandis que sur beaucoup d’autres
créances il fait des observations particulières, pour cause
d’omission , ou d’erreurs de calculs, ou de payemens
dont il n’h pas la certitude.
U ne déclaration dans un acte de cette nature est le
titre le plus certain en faveur du créancier. L e débiteur ,
en effet, doit présenter un état exact de sa situation tant
active que passive; s’il déguise la v é r ité , s’il met au rang
des créanciers des gens qui ne le sont pas, il est réputébanqueroutier frauduleux : telle est la disposition del’article 10 du titre r i de l’ordonnance de 1673. Si eneffet il étoit permis de présenter des créanciers simulésou exagérés, il seroit facile de réunir les trois quarts en:
som m es, d’obtenir toutes les remises ou les termes q u ’ oni
désirerait.
O n est bien éloigné de faire ces imputations au sieur
Feuillant ; on pense au contraire qu’il a fait tout ce qufc
dépendoit de lui pour être exa ct, qu’il n’a rien exagéré,,
et qu’ il a surtout voulu être juste. Il n’a pas songé com
bien il s’avilirait en changeant de langage ; quels soupçons'
il ferait naître contre sa conduite, s’il avoit porté dans son
bilan des créances fictives. E s t- i l possible de présumer
q u ’il eût porté Chalier comme son créancier d ’une somme*
de 14000 francs, si Chalier eût été sron comptable et son
débiteur? A i n s i , par cela seul que le sieur Chalier est
aujourd’hui porteur du bilan qui le constitue créancier,,
il a en sa faveur un titre qui ne peut etre critiqué,- el>
q u i termine toutes discussions..
�4 Aô\
C 37 D
'
L e sieur F eu illa n t, pour répondre à un moyen aussipuissant, a divagué dans sa défense, et a proposé plu
sieurs objections. Il a dit en premier lieu que ce bilan
n ’a voit pas eu de suites; qu’il avoit arrangé ses affaires,
terminé avec ses créanciers, que dès-lors le sieur Chalier
ne pouvoit plus se prévaloir de ce même bilan.
Cette objection est frivole. Ce n’est pas lui qui a ter
miné avec ses créanciers, c’est le sieur Etienne Feuillant,
son fils; c’est ce dernier qui a pris des termes. Mais le
bilan n’a point été rendu ; à la vérité les créanciers,,
par condescendance, permirent que le bilan ne fût pas
déposé au greffe du tribunal de commerce, suivant l’usage;
mais il fut convenu qu’il resteroit, par forme de dépôt,
entre les mains d’un tiers , pour y avoir recours dansle cas où les engagemens ne seroient pas remplis.
Feuillant oppose en second lieu q u e , nonobstant ce
b ilan , Chalier s’est néanmoins reconnu comptable, puis
qu’il a nommé des arbitres,, en exécution d’un premier
jugement du 27 du floréal an 10.
M ais ce bilan avoit été fait et présenté hors la pré
sence de Chalier.. Lorsque ce dernier a consenti à nom
mer des arbitres, il ignoroit l’existence du bilan. Si
Chalier l’eût eu alors- dans les mains, il n’y auroit pas.
eu de procès : Feuillant eût été dans l’impossibilité de
réc rim in e r, de revenir contre son propre fait; il n’eût
pas évité la condamnation des sommes qu’il reconnoissoit
devoir. Ce n’est que le 14 nivôse an 12 que ce bilan a*
été déposé chez Chassaigne, notaire; jusque-là, F e u i l l a n t
avoit étrangement abusé de l’état d’ignox*ance dans lrquelse tvouvoit Chalier. Mais lorsque ce dernier se fut p r o -
�*" \
( 3 8 )
curé une expédition de cet a c tc , alors, prenant de nou
velles conclusions, il demanda le payement des sommes
reconnues. O n ne voit pas comment il pourvoit résulter
des faits antérieurs une dérogation à un droit qui émane
d’un titre nouvellement d é c o u v e rt, qui jusque-là avoit
été retenu par le fait de F eu illan t, et qu’il îi’avoit pas
été au pouvoir de Chalier de produire.
A insi disparoissent les moyens de Feuillant ; il ne peut
plus désavouer une créance légitime, reconnue par un
titre formel dont l’exactitude est la base, dont l’exagé
ration auroit compromis son auteur.
L e sieur Feuillant veut encore se faire un moyen de
ce que les objets compris dans la demande du sieur
Ghalier, par exploit du 26 ventôse an 10 , ne s’élèvent
pas à la somme de 14000 francs : comment se fait-il dèslors, ajoute le sieur Feuillaut-, que le sieur Chalier puisse
se prévaloir du bilan , dès qu’avant de le connoître ses
prétentions n’alloient pas jusqu’à cette somme contenue
au bilan?
L e sieur Chalier a donné sur ce point une réponse bien
simple. T o u s scs chefs de demande réunis se portent à
la somme de 13413 livres 12 sous 1 denier; ils auroient
excédé la somme de 14000 fr., si le sieur Chalier n’avoit
déduit une somme de i 65 o liv. 19 sous , que le sieur
Feuillant lui devoit à cette époque, mais qui ne lui ap
partient plus depuis. Ceci a besoin d’une explication par
ticulière.
L e sieur Chalier avoit acquis de la dame Seguin ,
le 6 thermidor an 4 , un pré appelé de R a va li-fe-H a u t,
et une grange située à Brussoget : ces objets étaient af-
�■
4s î
( 39 )
fermés au sieur Feuillant ; le prix de la ferme du pré
étoit de 421 liv. 14 sous p a r 'a n n é e , et le loyer de la
grange étoit de 5o francs. La dame Seguin, lors de la
v e n te , se réserva la moitié des fermages pour l ’an 4:
de sorte que Feuillant n’a dû au sieur Chalier que la
moitié des fermages de cette année 4 >
l es fermages
entiers des années 5 , 6 et 7 ; ce qui fait en tout, pour
le pré et la gran ge, la somme de i 65 o liv. 19 sous.
- L e sieur R o c h e f o r t , gendre de la dame Segu in , ayant
désiré r e nt re r dans cette propriété aliénée par sa bellem ère, le sieur Chalier a rétrocédé le tout au sieur Roche,fort, par acte du 25 nivôse an 9 , reçu Jansenet, notaire,
et l’a subrogé aux arrérages de ferme qui lui étoient dûs
par le sieur Feuillant. E t quoique le sieur Feuillant, dans
la déclaration portée en son b ila n , eût compris ces arré
rages, le sieur Chalier devoit en faire la distraction : et
il en a résulté alors que ses créances ne se sont pas portées
à la somme de 14000 francs , tandis qu’elles l’auroient
excédée, s’ il n ’a v o i t fait cette déduction.
Cette explication porte sur un fait qu’il est impossi
ble de révoquer en doute, et qui n’a pas même été dé
savoué par le sieur Feuillant, lors de la plaidoirie de la
cause.
Il eât donc démontré que le sieur Chalier a cessé
d’être comptable envers F eu illa n t, et que sa qualité de
créancier est établie d’ une manière incontestable.
�D a n s le cas où le sieu r C h a lier p o u rro 't être assujéti
à un co m p te, cette reddition de compte est aujour
d 'hu i devenue impossible p a r le f a i t du sieur Feuillant.
L e sieur Ghalier a rendu un compte qui embrassoit
depuis le commencement de sa régie jusqu’au 5 complé
mentaire an 4. Il résulte du premier procès verbal des
arbitres B orel-V ernière et Jansenet, que le compte .avoit
été approuvé par toutes les parties, et que les arbitres en
ont trouvé le calcul exact. L e sieur Chalier étoit créan
cier de Feuillant d’une somme de 166 liv. 18 sous 8 d e n .,
d’une part ; et de 1995 liv. 2, sous 11 d e n ., d’autre , non
compris la somme de 30 0 francs p o u r payement fait à la
dame V is s a c , et sous la réserve de tous les appointemens qui lui étoient dûs.
;
Restoit le compte de la gestion depuis le I er. ven
démiaire an 7 jusqu’au 30 prairial de la même aimée -;
c’est-à-dire, neuf mois.
L e sieur Chalier avoit rapporté toutes les pièces jus
tificatives , ainsi que les registres nécessaires pour l’apu
rement. Il en avoit pris un récépissé du sieur Feuillant
iils; mais ce récépissé fut remis par le sieur C h a lie r, qui
en vouloit un plus régulier, et qui n’a pu l’obtenir. L e
sieur Feuillant voudroit étrangement abuser de ce défaut
de récépissé , et de l’impossibilité où se trouve Chalier de
rapporter aujourd’hui des pièces justificatives qui sont
entre les mains de Feuillant. Comm ent présum er, dit
Feuillant,
�4 s$
f 4' )
Feuillant, si j’avois refusé de donner ce récépissé, que
Chalier n ’en eût pas rendu plainte , ou n’eût pas fait
dresser procès verbal d’un fait de cette nature ?
O n ne doit pas môme dissimuler que cette observation de¡
Feuillant a été mise au nombre des motifs de l’arret de la
cour, du 29 février dernier ; mais cet arrêt est rendu sans
préjudice des fa is, et n’est que provisoire; et le sieur Chalier
a droit de faire valoir tous ses moyens. O r , comment
seroit-il possible d’exiger que le sieur C h alier, dans un
temps où il n’étoit point en procès, où les parties n’avoient
point manifesté d’intentions hostiles , dût prendre des
voiesaussi rigoureuses contre un négociant dont il avoit eu
toute la confiance ? Ne devoit-il pas espérer que le sieur
Feuillant q u i, dans un moment d’hum eur, et parce qu’il
éto ita igrip a rl’état de ses affaires, lui refusoit un récépissé,
seroit bientôt ramené à des sentimens plus h onnêtes, et
rendroit justice à un homme dont il s’étoit reconnu le
débiteur ? Quel intérêt auroit donc le sieur Chalier de
garder ces pièces justificatives , s’il en etoit n a n ti, s’il ne
les avoit pas remises au sieur Feuillant ? Comment les
registres seroient-ils au pouvoir de Feuillant, si on ne
lui avoit pas remis en même temps les pièces justificati
ves ? Croira-t-on que Feuillant, tr è s-e x e rcé dans celte
m a tiè r e , se fût contenté de la simple remise des regis
tres; qu’il n’auroit pas exigé les pièces justificatives ? C om
ment auroit-il reçu les pièces justificatives, jusqu’au der
nier complémentaire an 6 , sans exiger toutes celles qui
dévoient établir l’entière comptabilité ? et si Chalier
eut refusé de les rem ettre, Feuillant n’eut - il p«s fait
F
�( 42 )
dresser procès verbal de ce refus? n’au roi t-il pns fait cons
tater l’état de tout ce que lui remeltoit C h a lie r?
Il est prouvé par le premier procès verbal des arbitres 7
que Feuillant a eu toutes les pièces justificatives, jusqu’au
I er. vendémiaire an 7. L e compte en cette partie est re
connu ex-ict et apuré; dès-lors toutes les présomptions
sont en faveur de Chalier. D ’un autre c ô t é , l’arrêt de la
cour ordonne que Feuillant rapportera aux arbitres le
livre journal qu’ il a avoué avoir tenu pour les ventes et
recettes de charbon conduit au port. O r , Feuillant ne
rapporte pas ce registre. Cependant l’article I er, du tit. 3
de l’ordonnance de 1673 astreint les négocians et mar
chands, tant en gros qu’en d é t a il, à avoir un livre qui
contienne tout leur négoce, leurs lettres de change, leurs
dettes actives et passives , et les deniers employés à la dé
pense de leur maison. L ’article 3 du titre r i de la même
ordonnance veut aussi que les marchanda, lors de leuir
b ila n , soient tenus de représenter tous leurs livres et
registres cotés et paraphés en la forme prescrite au tit. 3,
L ’article 11 du même titre exige cette représentation, sous
peine d’être réputé banqueroutier frauduleux. Feuillant
a donc dû avoir ces registres, et il avoue les avoir tenus.
A v e c ces registres, 011 nuroit eu toutes les instructions
nécessaires pour le compte ; pu y auroit trouvé toutes les
négociations, toutes les recettes comme les dépenses du
sieur Chalier ; toutes les ventes qui étoient inscrites joui'
par jour sur un bulletin envoyé à Feuillant chaque jo u r ,
et avec lequel il connoissoit sans cesse son état de situa
tion : ordre nécessaire et bien entendu pour simplifier les
détails.
�( 43 )
Feuillant a été obligé de reconnoître devant les arbi
tres qu’il n’avoit point ce livre de raison ; il n’a voulu
donner aucun renseignement; il a *abusé de la situation
de Chalier par des refus injustes; il n’a point satisfait à
l’arret de la c o u r, qui ordonnoit ce rapport; il ne peut
donc se plaindre d’ un obstacle qu’il pouvoit faire disparoître , et il est démontre que c’est par son fait que le
compte n’a pas été rendu.
Il semble que les arbitres se sont réunis avec le sieur
Feuillant pour accabler le sieur Chalier; ils ont demandé
à ce dernier le rapport d’une police passée entre lui et le
sieur V illa re t, pour vente de foin faite par le sieur V i llaret au compte du sieur Feuillant. Cette police éloit une
pièce de l’an 6; le sieur Chalier l’avoit remise , comme
toutes les autres, au sieur Feuillant. P o u r prouver cette
remise, il rapporloit une note sans date du sieur Feuillant
jeune , qui lui demande cette police. Les arbitres n’ont
voulu avoir aucun égai’d à cette note.
L e sieur Chalier portoit dans son compte une somme
de 617 fr. payée par lui pour le compte du sieur Feuillant.
Celte créance dérivoit d’une lettre de change qu’avoit t :rée
Feuillant père au profit du sieur M a ig n e , marchand de
fer à B riou d e, sur le sieur Feuillant fils , à Paris , d’une
somme de 600 fr. La lettre de change fut protestée à son
échéance, faute de payem en t, et le sieur M aigne pou rsnivoit Feuillant père. L e sieur Chalier , toujours empressé
de Venir au secours de son commettant, souscrit au profit
de Maigne une lettre de change de la somme de 617 f r . ,
pour k; montant, est-il d i t , d’ une lettre de change de la
somme de 600 f r . , et celle de 17 fr. pour frais , qui est
F a
�( '44. >
due à Maigne,par le sieur Jean Feuillant aîné. Cette lettre
de change est en date du 28 floréal an 7. L ’acquit mis au
dos par M aigne , et comme des deniers de Chalier , est du
7 prairial môme année. Chalier a porté ce payement en
son registre , pag. 93 recto , art. 7 , et avoit remis la lettre
de change de Feuillant père ; mais il est nanti de celle par
lui souscrite et acquittée au profit de Maigne. Les arbitres
ont encore prétendu que ce rapport n’étoit pas suffisant,
et que Chalier devroit avoir la lettre de change de Feuillant
père.
O n pourroit citer une foule d’autres exemples de
leur partialité ; mais ces détails deviendroient fasti
dieux , avec d’autant plus de raison que le rapport des
arbitres a déjà été analisé dans la discussion , et qu’il est
facile de l’apprécier. Il suffit de dire que Feuillant ne
fait ici que récriminer-, que c’est par son fait seul que
le compte n’est pas rendu -, mais qu’ il ne peut plus abuser
de l’état du sieur C h alier, et que le moment d e là jus
tice est enfin arrivé.
§. I I I .
L e s appointemens du sieur C ha lier doivent être f i x é s
au m oins à 2000 f r a n c s par année.
Il
est avoué et reconnu par les arbitres, et notamment
par Roy n ard , que le sieur Chalier a eu , pendant sa gestion,
la plus entière confiance du sieur Feuillant; que nonseulement il dirigeoit les travaux des mines, avoit les
>lvtails de tous les ouvriers, mais qu’il étoit aussi cm-
�( 45)
ployé à toutes les autres affaires -, qu’ il étoit sans cesse en
vo yag e ; qu’en un mot il étoit chargé des soins les plus
importans.
Il
est bien extraordinaire qu’on ne vante les soin s im+
portans que po.ur les avilir , et qu’on veuille réduire le
sieur Chalier à des appointemens aussi médiocres. L ’es
prit de rivalité et de jalousie peut seul avoir dicté cette
décision. P o u r donner a la cour la facilite d a p p ie c ie r
des services de ce g e n r e , on ne peut s’appuyer que sur
des exemples.
S u i v a n t les journaux de 1763 et de 1 7 6 4 , le sieur
R o u x , directeur de la compagnie de Paris , avoit à cette
époque 800 fr. fixes par année ; p l u s , 72 fr. pour son
loyer , 3 fr. par jour lorsqu’il étoit en v o y a g e , et ses
frais de bureau. Si on juge par comparaison, ces appoin
temens , il y a quarante an s, valoient mieux que 2400 fr.
aujourd’hui ; et cependant le sieur R o u x n’étoit qu’en
sous-ordre. Il y avoit un associé de la compagnie qui
résidoit sur les lie u x , et faisoit toutes les recettes.
Grim ardias, qui étoit employé en 1781 , ne peut pas
etre pris pour exemple. Il étoit associé à l’exploitation
de la mine des Barthes, dans la commune de SainteFleurine : il avoit aussi le logement et la table; il étoit
éclairé , chauffé et blanchi.
Bureau , l’un des arbitres, commis inférieur à C halier,
avoit en l’an 5 , 1400 fr. par année; il étoit l o g é , éclairé
et chauffé , et avoit encore l’avantage d’avoir auprès de
lui son fils, employé comme charpentier de la mine.
E u l’an 8 , le sieur Bailly , aux ordres de C h a l i e r pour
le compte d’Élieune F e u illa n t, avoit 1200 fr. par année;
�( 46 )
de plus son lo gem en t, celui de sa femme et de sa n iè c e ,
son chauffage et sa lumière.
L e même Bailly , en l’an 9 devenu directeur de la
mine des Barthes , pour le compte du sieur L e s e c q ,
acquéreur de cette mine , avoit 2400 fr. d’nppointemens;
p lu s, 400 fr. pour ses voyages à Brioudc ; ainsi que son
logement pour lu i, sa femme et sa nièce j plus, son feu
et sa lumière.
L e sieur V a lb le t, commis en l’an 1 1 ,
aux ordres
du sieur Lesecq fils, avoit 1200 fr. et la table : il étoit
logé à la m ine; il avoit à Frugère , près de la mine des
B arth es, un logement aux frais du sieur Lesecq , pour
sa fem m e, sa cousine et quatre enfans , ainsi que le chauf
fage de sa famille. L e sieur Chalier rapporte à cet égard
le certificat du sieur V a l b l e t , et ne craint pas d’être
démenti pour les autres.
«■
P o u r donner une idée des travaux de la direction ,
qu’on se figure un directeur occupé sans cesse à l’examen
des mines , à régler et vérifier le mode d’exploitation,
visiter les dégradations, soigner les réparations, veiller
sans cesse pour empêcher les inondations ou les incen
dies , descendre chaque jour à soixante brasses ou trois
cents pieds de profon deur, au péril de sa v ie , sacrifier
sa santé, craindre î\ chaque instant l’asphyxie-: telles sont
les fonctions pour lesquelles on voudroit donner un mo
dique salaire de 5oo ou 900 f r . , lorsque le maître mineur,
accoutumé depuis l’enfance à ce genre de travail à
exister pour ainsi dire dans les entrailles de la terre ,
enfin un simple o u v r ie r , avoit 720 fr. d’appointemens
par année j lorsque le maître charbonnier gagnoit un
�( 47 )
salaire de 600 fr. aussi par année. La proposition révolte
par son injustice. Il seroit bien cruel pour le sieur C h alier qui est sans fortune , qui a contracté des dettes pour
obliger son commettant, d’avoir aussi mal employé les
plus belles années de sa vie. La cour ne verra pas sans
indignation la partialité des arbitres, la parcimonie et l’in
gratitude du sieur F eu illa n t, qui revient contre son
propre fait ; et le sieur Chalier met toute sa confiance
dans l ’équité des magistrats.
Signé C H A L I E R .
M e. P A G E S ( d e R i o m ) , ancien avocat.
,
M e. V E R N I È R E , avoué licencié.
/
u À a/\c*jiA -*- o m
/ tA iK fA A Jiuub*.
a xK t-A
<*** a i w j r f r ' ^ ia ( u J r
^ufc:
%
-A. R lO M , de l'im prim erie de L
a n d rio t
, seul imprimeur de la
C our d ’appel, — Juin 1 8 0 6
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chalier, Antoine. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Vernière
Subject
The topic of the resource
mines
exploitation du sol
arbitrages
Compagnie de Paris
créances
créanciers chirographaires
tribunal de commerce
salaires
registres de recettes
livres de comptes
charbon
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour sieur Antoine Chalier, propriétaire, habitant du lieu de Brassac, appelant et intimé ; contre sieur Jean Feuillant aîné, négociant, habitant du lieu de Brassaget, intimé et appelant.
Annotation manuscrite: « 29 frimaire an 14, arrêt de la 1ére section. Ordonne qu'il sera procédé aux comptes devant les arbitres nommés et que toute pièces seront rapportées à cet effet. »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1794-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
47 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1613
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brassac-les-Mines (63050)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53287/BCU_Factums_G1613.jpg
arbitrages
charbon
Compagnie de Paris
Créances
créanciers chirographaires
exploitation du sol
livres de comptes
Mines
registres de recettes
salaires
tribunal de commerce
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53288/BCU_Factums_G1614.pdf
ece1b0ecaa2d58f81a9c5109da11e064
PDF Text
Text
1 I*
M É M O I R E
P O U R N i c o l a s B E A U C L A I R , Cordonnier, c o u r
habitant du lieu de T e il , commune de Saint- de^o^m
Cernin, arrondissement d’Aurillac Appelant;
C O N T R E P i e r r e - P a u l V A N E L et Dame
M a r g u e r i t e C A L O N N E , son Epouse,
habitans du lieu de R ageaud 3 même commune de
Saint-Cernin 3 intimes
.
D es actes authentiques, cimentés de plusieurs
titres muets, et de la destination du père de fa
mille, sollicitent en faveur de l’Appelant le par
tage des eaux de la prairie de la Rivière.
En l'an 9 , les intimés ont donné les mains à ce
partage, et tout étoit consommé. Aujourd’hui plus
ambitieux qu' alors, ils veulent avoir la propriété
exclusive de ces e a u x , et le jugement dont est
appel la leur attribue. Ce jugement sappe sous tous
�les rapports les principes les plus familiers de notre
législation tant ancienne que moderne, et l’équité
seule le réprouve.
Les Juges d’Aurillac, ont mal interprêté les articles
C C X V et C C X V I de la coutume de Paris, et cette
coutume ne régit pas même les parties ; pourroitelle d’ailleurs paralyser des titres positifs^ et rendre
sans effet l'aveu des intimés \
F A I T S :
En pluviôse an 6 , un expert s e u l, du consen
tement de toutes les parties intéressées, procéda au
partage de la succession de M. de Calonne.
De cette succession dépendoit une prairie consi
dérable appelée de la Rivière, qui fut divisée en
plusieurs lots ; l'estimation fut la même pou r tous.
L e premier lot échut aux intimés, et le troisième
à la demoiselle Jeanne-Françoise de Calonne; il est
inutile de parler des autres. Le partage ne fait aucune
mention des eaux de cette prairie, ensorte que pour
le moment elles restèrent indivises,, ainsi que nous
l'apprend l’expert par une déclaration dont on ne
contestera pas la sincérité : nous en parlerons dans
les moyens.
Avant le partage, et lorsque la prairie de la R i
vière ne formoit qu’un tout, elle étoit arrosée, i ° .
par les eaux qui naissent dans le premier lot; i ° .
par un réservoir qu’un chemin public sépare de la
Prairie: ce reservoir est situé dans un pâcher qui
appartient à un sieur Devèze.
i
�C3 )
Postérieurement au partage , cette prairie a été
arrosée comme' elle i ’étoit du temps de M. de
CaLonne; c’est-à-dire, que toutes les eaux qui nais
sent dans la partie échue aux intimés, tout comme
celles du réservoir, ont servi à son entière irrigation;
plusieurs rases anciennes traversent- la prairie, pour
conduire les eaux d’un bout à l’autre.
L e 13 vendémiaire an 9 , Jeanne-Françoise de
C alonne, vendit à l’Appelant le troisième lot de
la prairie, et la vente fut faite avec les servitudes ac
tives et passives, prises et perceptions d ’eau dues et
accoutumées.
Les intimés qui par des arrangemens de famille
sont aujourd’hui propriétaires des deux tiers de la
prairie et d’une grande partie des biens de JV1. de
Calonne, virent avec peine que Beauclair avoit ac
quis ce qu’ils convoitaient depuis long-temps; aussi
ne tardèrent-ils pas à le vexer, en détournant les eaux
lorsqu’il éroit absent, pour en profiter au delà du
temps qu’ils pouvoient les retenir, eu égard à
l ’étendue de leur terrein. L ’intention des sieur et
dame Vanel étoit de forcer Beauclair à leur vendre
ce qu^il avoit acquis; celui-ci voulut conserver sa
propriété.
Cependant les intimés se rendirent justice; ils con
vinrent que l’Appelant avoit droit au partage des
eaux, et il ne fut plus question entre les parties que
de nommer des experts pour procéder au règlement:.
En conséquence, le 2 1 thermidor an
le sieur
.Vanel, l’Appelant et une Toinette Bouiges qui a
A 2
�(4)
acquis un journal de la prairie de la Rivière, passèrent
un compromis, par lequel ils donnèrent pouvoir aux
sieurs Rames et V id al, géomètres, de procéder à la
division des eaux qui servent ,à l’arrosement de la
totalité de la prairie, et ce par jours et heures, ( escil dit ) conformément au partage.
D'après cet acte, il ne pou voit plus y avoir de
difficulté sur le d»roit de l’Appelant, et tout sembloit
consommé; mais bientôt celui-ci. crut s’appercevoir
qu’il existoit de grandes relations entre les intimés
et les experts; et par prudence, il révoqua le com
promis le 1 7 messidor an 10 . D ’ailleurs, il y fut forcé
par le retard des experts , puisque déjà il s’étoic
écoulé environ un an depuis leur nomination.
Plusieurs mois se passent, et les parties jouissent
alternativement des eaux; mais bientôt les intimés
s’en emparent exclusivement en l’absence de Beau
clair, qui, suivant l’usage du pays, fait de longues
campagnes pour travailler de son état.
Ces voies de faits mirent i’Appelant dans la néces
sité de recourir à la justice; en conséquence, il assi
gna les intimés, le 2$ fructidor an 1 1 , au tribunal
d’Aurillac, pour voir ordonner le partage des eaux
de la prairie de la Rivière^ eu égard à la portion
d’un chacun.
Quelle fut la défense des sieurs et dame V a n el?
Ils prétendirent que i ’Appelant n’avoit ni titre ni
possession, et que d’ailleurs le partage de l ’an 6
repoussoir sa demande, parce qu’il avoit été fait sous
1empire des articles GC.X V et OCJXVidela coutume de
�(s\
Paris, qui n’admettent de servitudes entre cohéritiers
que celles qui sont établies par le partage, et que dans
l ’espèce, le partage de Tan 6 ne taisant aucune men
tion des eaux de la Prairie, chaque cohéritier avoit
dû prendre les lots avec leurs avantages et leurs
inconvéniens.
Quelque extraordinaire que soit ce système, les
premiers juges l’ont adopté le 1 7 frimaire an 1 3 .
L e 19 germinal suivant, Beauclair a interjeté
appel de leur jugement, et c est sur cet appel que
la Cour doit prononcer.
M O Y E N S .
Il est de principe que la destination du père de
famille vaut titre à l’égard des servitudes continues
et apparentes; et il y a destination du père de famille,
lorsqu’il est prouvé que le ionds actuellement divisé
.appartenoit au même p r o p r i é t a i r e , et que c’est par
lui que les choses ont été mises dans l’état duquel
résulte la servitude. Cette maxime n’a jamais éprouvé
de controverse en pays de droit écrit, fli dans la
plupart des coutumes.
Cela est si vrai, que, même entre é tra n g e rslo rs
q u ’il étoit question de savoir si un particulier avoit
acquis un droit de servitude par la possession de
30 ans, l’on examinoit le genre de servitude; et
lorsqu’elle étoit continue et apparente, l’on admettoit la prescription.
P e r s o n n e n’ignore que les servitudes co n t in u e s
et apparentes sont celles dont l’usage est ou peut
�••
.
être continuel, sans avoir besoin du fait actuel de
l’homme; comme, par exemple, des conduites d’eau,
et qui s’annoncent par des ouvrages extérieurs , tels
que des rases propres à faciliter leurs écoulemens.
Un petit nombre de coutumes, comme celle de
Paris, qui est étrangère à ce procès, sembloienc
n’admettre la destination du père de famille, qu’au
tant qu’elle étoit rédigée par écrit; mais aussi quel
ques commentateurs, et particulièrement l’auteur de
l'architecture moderne, sur l’article 1 1 6 , ont pensé
que le titre n’est pas toujours nécessaire, lorsque
la destination a été forcée. D ’ailleurs, en fait de ser
vitudes continues et apparentes, le titre prend son
origine dans la servitude elle-même , parcequ’à
défaut de titres authentiques, il existe des titres
muets qui attestent le droit de servitude : c’est le
vœu de l’article 692 du code civil.
Cela posé, quelle est l’espèce de servitude dont
il s’agit? C ’est une servitude continue et apparente;
elle est continue, puisqu’il s’agit de prise d’eau dont
l ’usage est ou peut être perpétuel; elle est apparente,
puisqu’il existe des grandes rases , qui conduisent
dans toute la prairie les eaux qui l’arrosent.
Les intimés ne contestent point que du vivant de
M de Calonne, père, les eaux dont il s’agit servoient
à l’irrigation de l'entière prairie: c’est ainsi qu’il en
a disposé jusqu’à son décès; or, sa destination équi
valant à un titre, l’Appelant qui a acquis le troi
sième lot de la prairie, n’a-t-il pas le droit de de
mander le partage des eaux/
�c
7
)
.
_
4
M ais, qu'avons nous besoin de la destination du
père de famille pour faire ordonner ce partage \ Les
lois Romaines qui régissent les parties ne sont-elles
pas positives? La loi 3 3 , § l -e\
de servitutïbus preedium rusticorum, après avoir établi que
les servitudes étant attachées aux fonds et non aux
personnes, ne peuvent passer d^une personne à
i^autre, si le fonds n’y passe, nous dit que si le fonds
pour lequel la servitude étoit établie, se divise entre
plusieurs propriétaires, comme entre héritiers léga
taires , acquéreurs ou autrement, chaque portion
conservera l'usage de la servitude, à proportion de
son étendue.
Pe r plurium prœdia aquam duels quoquo modo imposita servitute nisi partum vel stipulatio etiam de
hoc subsccuto est ncque eomm cuivis ne que alii vïciiLs poteris haustum ex vivo cedere.
Ecoutons encore ce que nous dit la loi 2 4 , au
digeste de servit, præd. Rust. ex mco oquœ duc tu
labeo seribit caïlibet posse me vic'mo commodare, pro
duits contra ut ne in meam partem fu n d i, aliam quam
ad quam servitus acquisita s it , uti ea possit, Proculi
sententia verior est.
Ces lois ne sont point équivoques, elles vont
même jusquJà ordonner le partage des e a u x ,
quoique quelques portions de terrein divisés en
eussent moins de besoin, ou que l’usage en fut moins
utile.
Plusieurs auteurs nous enseignent le même prin
cipe, et particulièrement celui que lJillustre d’Agnes-
,
,
,
�(S )
seau, appelle avec raison le jurisconsulte des juris
consultes.
Voudroit-on nous opposer encore ce qu’on a dit
en première instance, que lors du partage de la suc
cession de M . de Calonne, les parties se sont sou
mises à prendre les lots tels qu'ils seroient formés,
avec leurs avantages et leurs inconvéniens, et qu’il
n’a été établi de prise d’eau en faveur d’aucun lot /
Mais outre que l’objection se réfute par les principes
que l’on vient de rappeler, elle ne peut naître que
de l’oubli d’une maxime également certaine, qui
nous apprend que l’égalité doit être l ’ame et la base
des partages; or cette égalité ne seroit-elle pas rom
pue, si les intimés étoient propriétaires exclusifs des
eaux de la prairie ?
Q u o i, les eaux couleroient dans la portion des
sieur et dame V an el, et le lot de l’Appelant ne
seroit point arrosé; l’herbe croîtroit en abondance
dans une partie du pré dont on nous assure que l’es
timation a été la même pour tous les journaux, et le
surplus seroit stérile? Loin de nous un pareil système,
les lois le condamnent, la justice ne peut le tolérer,
l ’égalité le proscrit. S’il en étoit autrement, le lot de
Beauclair ne lui rapporteroit pas de quoi payer les im
pôts, tandis que celui des intimés leur donneroit
un produit considérable ; la portion de l’Appelanc
seroit totalement à sec, sans les eaux qu’il réclame ;
or, les prés ne produisent, qu’autant qu’ils sontarrosés.
Mais q u oi, tous les successeurs de M . de Calonne
n ont-ils pas un droit égal à la division de ces eaux l
�Cp )
f
ce droit ne leur est-il pas acquis par la seule qualité
de cohéritiers? Les eaux de laprairie de la Rivière font
partie de la succession, et forment une propriété
comme le fonds lui-même; or l’Appelant qui a ac
quis le troisième lot de la prairie ,- doit avoir les
mêmes privilèges que sa venderesse.
Si les intimés eussent consulté Despeisse, cet au
teur si célèbre pour le droit écrit, partie première,
section 4 , n°. 5 , ils auroient vu que dans le partage
d’une succession 3 l ’on ne doit rien laisser d indivis.
Ce jurisconsulte ne fait que répéter ce que dit la loi
heredes, § 2 j , ff. fam iliœ ercïscundœ.
Plusieurs lois romaines, notamment la loi Pomponlus
ont porté ce principe si loin, qu’elles veulent qu s i ,
lors d’un partage, les pigeons dJun colombier n’y
sont point, ils soient divisés quand ils y retournent,
tant on doit observer l’égalité entre copartageans.
Pour que la servitude fut éteinte, il faudroit que
le partage en fit une mention expresse ; c’est-à-dire,
que l’experc eût délaissé au troisième lot une plus
grande quantité de terrein, à raison de ce qu’il étoit
privé des eaux; il faudroit en un mot qu’il y eut com
pensation , mais cela n’a point eu lieu.
Ce qui tranche la difficulté, c’est que les actes s’in
terprètent par leur exécution; or, depuis le commen
cement de l’an 6 , époque du partage, les eaux ont
arrosé toute la prairie. La demoiselle de Calonne
n a jamais éprouvé de contradiction ; et si après
qu elle eut vendu son lot, les intimés se sont par lois
empares des eaux au delà du temps qu’ils dévoient
�les percevoir, ce n’est qu^en l’absence de Beauclair *
et presque toujours pendant la nuit.
Une autre règle pour l ’interprétation des actes y
c’est que si l’intention ne se découvre pas par l’ex
pression , et qu’on puisse l ’interpréter par quelque
usage des lieux ou des personnes qui ont fait la con
vention, ou par d’autres voies, il faut s’en tenir à
ce qu’il y a de plus vraisemblable. S i non appareat
quid action e st, erït consequens ut id sequamur quod
in regione in qua actum est frequentatur.
D ’abord , interprétons le partage de l’an 6 par
l ’usage des lieux, et nous demanderons aux intimés,
dans quel autre partage les experts ont oublié de
faire mention des eaux ] Qu’ils en rapportent un seul
ou les eaux d’une prairie de laquelle l’on a fait plu
sieurs lots soient restés indivises. N on, les experts
ne sont pas accoutumés à de pareils oublis.
Interprétons ce partage par la personne qui a fait
la convention, c’est-à-dire, par fexpert qui a procédé.
Eli bien! écoutons sur ce point le sieur Rames dans
sa déclaration du 1 7 messidor dernisr.
Je n’ai pas divisé, dit-il, les eaux des prés du do
maine de Rajeaud, ainsi que du domaine de la Moi
n e, par la raison que la famille Calonne étoit pressée,
et qu’il fallut abréger le procès-verbal de partage des
immeubles, et cette division fut renvoyée après le
partage.
« Je déclare aussi que M. Franiatte et moi avons
y) été chargés de procéder à la division des eaux
» de la prairie de Rajeaud, mais une des demoiselles
�( i l )
« de Calonne ayant vendu sa portion a Beauclair,
» il y eût entre celui-ci et M Vanel des conven» tions notariées pour procéder au partage des eaux.
L ’expert continue en ces termes : « Si Beauclair
« est privé des eaux dont la portion par lui acquise
» étoit arrosée lors de l’estimation que j’ai faite de
» ce pré en totalité, il n’aura plus la même valeur
» que je lui donnai lors de ma visite sur les lieux ;
» et n’ayant plus la même valeur, légalité qui est
» l’ame des partages sera rompue, et il n’y aura plus
l’équilibre que je cherchai alors y>.
Que les intimés lisent cette déclaration, et qu’ils se
taisent.
Enfin, interprétons le partage de P an6, par ce qu’il
y a de plus vraisemblable. E st-il à présumer que
lors du partage les parties aient entendu consentir à
ce qu une portion du pré fût arrosée et que l ’autre
ne le fût point ? N o n , cela ne peut entrer dans l ’idée
de tout être raisonnable.
%
Mais pourquoi nous appesantir sur cette partie de
la discussion ; les intimés n’ont-ils pas formellement
démandé le partage des eaux? oui sans doute ils y
ont consenti, ils l ’ont sollicité; ils ont reconnu le
droit de l’Appelant. Delà résulte une fin de non
recevoir contre leurs prétentions.
L ’on n’a pas perdu de vue le compromis du 2 1
thermidor an 9 , par lequel les différens propriétaires
de U prairie, donnèrent pouvoir à des arbitres de
procéder à la division des eaux. Ce compromis ex
plique le partage, il nous apprend que tous les coJ3 a.
c '^
�>
C 12 )
héritiers ont avoué que ies eaux de la prairie avoient
resté dans ^indivision.
Il est vrai que ce compromis a été révoqué; mais
que résulte-t-il de cette révocation? Il en résulte que
les arbitres ont été dessaisis du droit qu’on leur avoit
attribué de procéder au partage des eaux, mais elle
ne détruit pas le fait essentiel que les copropriétaires
de la prairie dont il s’agit ont reconnu que ies eaux
de cette prairie devoient se partager. Par cet acte,
l ’on n’avoit pas dit aux experts, vous jugerez s’il y
a lieu à la distribution des eaux, mais vous en ferez
la division pro rata ingerum. Ainsi ce compromis,
quoique révo q ué, n’emporte pas moins Paveu que
tous ies propriétaires du pré ont droit aux eaux qui
naissent dans une partie seulement, tout comme à
celles qui découlent du réservoir; et un droit re
connu par toutes les parties, ne peut plus être mis
en doute, ni etre révoqué, puisque toutes les parties
en étant convenues, elles sont censées avoir accepté
l ’aveu les unes des autres, et le contrat s est formé
entre tous, ensorte que quand bien m êm e, ce qui
n’est pas, l’Appelant n’auroit eu aucun droit au par
tage des eaux, il lui seroit acquis par cet acte.
C'est en conformité de ces principes, que, le 2 7
messidor dernier, la Cour vient d'accorder un neu
vième à un cohéritier j quoique par sa seule qualité,
il n’eût droit qu’à un douzième.
C ’est encore pour conserver l’unité de cette juris
prudence, que, par arrêt du 29 du même mois, la
C o u r, dans l’affaire des Fontalard contre R o c h e ,
�( 13 )
vu leurs aveux et approbations géminés, en infir
mant un jugement du Tribunal de Mauriac, a admis
ce dernier au partage des biens de Fontalard père ,
quoique dans l’origine il ne parut pas y avoir de
droit.
Concluons donc a v e c raison, que tout est con
sommé entre les parties par le compromis du 21^ ther
midor an 9 , et que ^obstination des intimes est
vraiment singulière.
L e sieur Vanel semble avoir redouté lui-même
l ’effet du compromis; aussi dans le procès-verbal de
non conciliation, on le voit glisser adroitement que
ce compromis n’a pu lier sa lemme, et qu’il est per
sonnellement étranger à la contestation.
Deux réponses à ce moyen. La première, c’est que
postérieurement au partage, le sieur Vanel a acquis
en son nom de différens cohéritiers plusieursjots de
la prairie; or, en sa qualité d'acquéreur, n’a-t-il pas
pu valablement compromettre
L a seconde, c’est que l’objection ne seroit fondée,
qu'autant qu’il s’agiroit d’aliénation. O r, qu’est ce
que le compromis de l’an 9 ? C est une explication
du partage , un acte d’administration que le sieur
Vanel a pu faire en sa qualité de mari. Dans tous
les c a s , comme le mari a la jouissance des biens
•dotaux de son épouse, et que l’Appelant a un titre
qui émane du sieur V a n e l, il devroit toujours per
cevoir les eaux jusqu’à la dissolution du mariage
¿les intimés.
Que reste-t-il maintenant pour établir le mal jugé
�•
- ,
.
^
1
4
)
du jugement d’Aurillac? Il ne nous reste qu'à en
refuter les principaux motifs.
Les premiers juges ont d’abord mis en principe
que le partage de Tan 6 avoit été fait sous l’empire
de la coutume de Paris; et partant delà, ils ont jugé
én point de droit qu’aux termes de l’article C C X V de
cette coutume, il n’y a de servitudes établies sur les
différents lots que celles qui sont énoncées dans lepartage; et que ce partage de l’an 6 étant muet sur
les eaux de la prairie, ^Appelant n’avoit aucun
droit de servitude sur le lot des intimés.
Ce moyen renferme une double erreur. D*abord,,
la coutume de Paris n’a jamais été suivie dans l’ar
rondissement d’Auriiiac pour les servitudes rustiques.
En second lieu, l ’article C C X V de cette coutumelie dit pas ce qu’on a voulu lui faire dire.
Aurillac est situé en pays de droit écrit; o r, per
sonne n’ignore que ce pays-là se régie par les lois,
romaines.
A Rom e, les maisons formoîent des îles, chaque
propriétaire avoit pour ainsi dire à lui seul une petite
cité qui ne communiquoit point avec ses voisins..
Delà le silence des lois de ce peuple sur les servi
tudes urbaines, elles fussent devenues sans objet.
’ Dans la suite les hommes sentirent la nécessité
d’avoir entr’eux des rapports plus particuliers , et
bientôt les villes ne formèrent plus qu’un amas de
maisons que l’on joignit les unes aux autres.
A lors, il fallut créer des servitudes urbaines, et
faire des lois sur cette matière. L a ville de Paris
�'( r; )
par son grand nombre d’édifices et sa nombreuse
population, fut la première qui en sentit la nécessité.
Plusieurs jurisconsultes s’en occupèrent, et lorsque
leur ouvrage eût paru, il fut adopté par quelques
provinces, vu le silence des lois romaines. Mais la
coutume de Paris n’a jamais reçu d5exécution en pays
de droit écrit, pour les servitudes rustiques; et pour
quoi? C e s t parce que les lois romaines se sont assez
expliquées sur ce point. Eclairons encore cette vérité
par un exemple.
La coutume de Paris veut qu’aucune servitude ne
puisse s'acquérir sans titre; et cependant en pays de
droit écrit, comme dans la plupart des coutum es,
n’attribue-t-on pas tous les jours la servitude à
celui qui a une possession paisible et continuelle dç
3 0 ans ?
C est donc mal-à-propos que les premiers juges
ont prétendu que le partage de la succession de M.
de Calonne avoit été fait sous l ’empire de la cou
tume de Paris.
Non seulement la coutume de Paris est étrangère
au procès, mais encore les juges d’Aurillac en ont
mal interprêté le sens. Que porte l’article C C X V l
Que « Quand un père de famille met hors ses
» mains partie .de sa maison, il faut spécialement
déclarer quelles servitudes il retient sur l’héritage
» qu’il met hors ses mains, ou qu’il constitue .dans
w le sien; il les faut nommément et spécialement
» declarer , tant pour l’ endroit, hauteur, m e s u r e ,
.» qu espèce de servitude, autrement toutes cons-
�o o
)) titutions générales de servitudes, sans les déclarer
» comme dessus ,^ne valent ».
Nous le demandons à l ’homme le plus subtil ;
quel rapport a cet article à la contestation qui nous
divise ? D ’abord , il paroît évident quJil n’a trait
qu’aux servitudes urbaines, puisqu'il ne parle que
du cas où le père de famille met hors ses mains partie
de sa m aison, et qu’ensuite il s^exprime par ces
mots ; hauteur, mesure, expressions étrangères aux
servitudes rustiques.
Mais fût-il vrai que cet article étendit scs dispo
sitions jusqu’aux servitudes rustiques, au moins fautil convenir qu’il n’est point applicable entre c o h é
ritiers: ses termes font assez sentir qu’il doit se res
treindre aux ventes faites par le père de famille. Si
celui-ci vend un h ér it ag e à quelqu’un, il est naturel
que cet héritage soit libre, à moins que la servitude
soit formellement réservée. Les servitudes étant o n é
reuses pour le propriétaire qui en est greve, Io n
présume que les propriétés en sont exemptes, jus
qu’à la preuve du contraire. Ici M. de Calonne n*a
rien mis hors ses mains, pour nous servir des expres
sions de la coutume; tout, au cortraire, y est resté.
Quoique la prairie de la Kiviè.'e ait passé dans les
mains de plusieurs copartageans, n é a n m o i n s ceuxci représentent le père de l a m i l l e , il ne fo nt qu un
avec le défunt! C ’est d o n c avec raison, que nous
avons dit que le principal motif du jugement donc
est appel, contient une double erreur.
Les premiers juges, par une suite de leur système,
on c
�^ :y '
. 4 ry
ont prétendu que la destination du père de famille
devoir être rédigée par écrit, conformément à la cou
tume de Paris; l’ensemble de la discussion détruit
ce moyen..
Il
ne nous reste plus qu’à faire une observation
subsidiaire.
L ’on a vu que les eaux qui arrosent la prairie sont
de deux espèces. Les premières naissent dans le lot des
intimés; les secondes s’écoulent d’un réservoir et
traversent un chemin public avant d^arroser la prairie.
O r, en point de droit, les eaux qui traversent un che
min public deviennent publiques comme le chemin
lui-même, et par conséquent tous les riverains ont
droit au partage; sous ce point de vu e, les intimés
ne peuvent pas conserver la propriété exclusive de
toutes les eaux.
Notre tacne est maintenant remplie; nous avons
prouve que le jugement dont est appel doit être in
firmé, les raisons en sont simples.
Que les intimés ouvrent donc les y eu x, il en est
temps; une plus longue obstination les rendroit in
justes. Mais q u o i, ne s’ aveuglent-ils pas sur leurs
propres intérêts? Ne doivent-ils pas desirer eux-mêmes
l ’infirmation du jugement dont est appel? Si ce ju
gement pou voit être confirmé, alors, sans doute,
l ’Appelant formeroit une demande en garantie ou
dommages, intérêts contre Jeanne-Françoise de Ga
lonné, qui lui a vendu son lo t, avec ses prises d ’eau
dues et accoutumées, et celle-ci à son tour n attaC
�queroît-elle pas le partage de l’an 6 pour cause de
lésion
Ai nsi , que les intimés se consolent; leur fortune
seule auroit dû les rendre plus justes, sur-tout envers
un cordonnier qui n’a pour toute ressource que son
travail et quelques journaux de prés dont on lui
conteste l ’irrigation. Mais plus on est riche, dit un
auteur moderne, plus le désir s' irrite et croît avec
les moyens de s’enrichir davantage. L ’ambition,
comme un exacteur cruel, nous prescrit sans cesse
une nouvelle tâche, les travaux se succèdent sans
fin, et le terme ou l’on veut se reposer, s’éloigne
à mesure qu’on croit en approcher.
£ Y
,
M e D E V E Z E , d 'A urillac, Homme d e loi
«***
/t^ tXp±('6v%^ yfî'jtxtrv**'
M e*********A vo u é
J
'à * giM i'jùbtxr
à*
/KAAH.W 7/ ^
UM U
UflW/UW
X d tf« .
/ a /AAüUUUa
tlÀ
t iA /U
/ UAAA* . ^« K
---
/
f
#l
ait-, ÿ *x
!, ,
6
U>uajaui
..»|ii «i vvkl4M^ *
O A i*
Tl. /«- û jfck k l
f i *
/t w J L ,
/u
t'u^uu^ /te--- ûA . ^Vük (iuV
Ia' u^VU.
*tb
Zip- Q*aja
^
0 lff* * n b lA A fc A A u t
VWMWM
i« A / ^ u ^
(^ UVV
A R I O M , D E L’I M P R I M E R I E D E M R. D É G O U T T E ;
(^Js ^Owlr^bi^“ KV\«Jyx»!*,
k
c^K ^yc
(<» fcp£X<
*^)<Afc6w<M ¿uti.**tt**
<ytJu5 li,
^u^uW 0«*~a A. p/l****
OuV.
----- y .o ^ ‘ifa
"Ïa ¿M fc«j
t/*kUVI' ^
)
^
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Beauclair, Nicolas. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Devèze
Subject
The topic of the resource
partage des eaux
experts-géomètres
servitude
pays de droit coutumier
experts
pays de droit écrit
jouissance des eaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Nicolas Beauclair, cordonnier, habitant du lieu de Teil, commune de Saint-Cernin, arrondissement d'Aurillac, appelant ; contre Pierre-Paul Vanel et Dame Marguerite Calonne, son épouse, habitans du lieu de Rageaud, même commune de Saint-Cernin, intimés.
Annotation manuscrite : « 28 frimaire an 14, 19 décembre 1805, 2nde section. La cour dit mal jugé, ordonne que les parties viendront à division et partage de la totalité des eaux, pour être distribuées entre elles eu égard à l'étendue de terrain que chacune d'elles possèdent dans la prairie. »
Table Godemel : Destination du père de famille : 2. - vaut-elle titre à l’égard des servitudes continues et apparentes, en pays de droit écrit, si le fonds divisé appartenait au même propriétaire et si c’est par lui que les choses ont été mises dans l’état duquel résulte la servitude ? peut-on, au contraire, décider que la destination du père de famille doit être établie par écrit et non autrement ? surtout, lorsque le partage des immeubles a été muet sur la servitude elle-même ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de M. Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 13
1798-Circa An 13
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1614
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0701
BCU_Factums_G1615
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53288/BCU_Factums_G1614.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
experts
experts-géomètres
Jouissance des eaux
partage des eaux
pays de droit coutumier
pays de droit écrit
servitude
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53289/BCU_Factums_G1615.pdf
810b9dd2ffb867fd7d4c47879b42613b
PDF Text
Text
MEMOIRE
COUR
•D’APPEL
EN
R É P O N SE,
I
SÉANTE
ARIOM.
•POUR
P i e r r e - P a u l - F r a n ç o i s V A N E L , propriétaire,
' et dame M a r g u e r i t e C A L O N N E , son épouse,
habitans du lieu de Rageaud, commune de SaintC erni n intimés;.
CONTRE
B E A U C L A I R , cordonnier, habitant
du lieu du Theil même commune de St.-Cernin,
appelant d'un jugement rendu au tribunal d’arrondissement d’A urillac, le 1 7 frimaire an 1 ..
N ic o la s
3
- N I C O L A S B E A U C L A I R , acqu éreu r particulier d’ une
portion de pré dépendante de la succession C alonne , veut
imposer une servitude sur la propriété des intimés.
A
�Cette servitude qui n’a jamais existé , qui n’a pas été
prévue par le partage de fam ille, est aussi inutile pour
l’appelant qu’elle seroit onéreuse pour les intimés.
L e jugement dont est appel a fait justice de cette pré
tention exagérée ; mais Beauclair persiste dans sa demande,
et ce n’est qu’en dénaturant les faits qu’il a créé des griefs
contre le jugement.
Il s’agit de démontrer que sa prétention est contraire
aux principes, qu’elle porte atteinte aux droits sacrés de
p r o p r ié té , qu’ainsi il ne peut espérer aucuns succès.
F A I T S .
Philippe-Joseph-François Colonne, et M arie-Julienne
Ilod d es, son épouse, ont donné le jour h onze enfans ;
deux sont morts sans postérité, deux autres ont été ins
crits sur la liste des émigrés.
Celle dernière circonstance nécessita une demande en
partage des cohéritiers Calonne , pour empêcher le
séquestre et la vente de leurs portions. Ils obtinrent le
12 germinal an 3 , de l’administration du déparlement du
C antal, un arrêté qui autorisoit le partage. Il y fut en
effet procédé ; mais l’opération des experts n’ayant pas
satisfait l’un des cohéritiei’s qui se prétendoit lésé, un
second arrêté du même déparlem ent, du 13 floréal an 4 ,
renvoya les parties devant le tribunal civil sur cette de
mande ; et un jugement définitif, du 25 frim aire'an 5 ,
ordonna qu’ il seroit procédé à un nouveau partage.
L ’administration dedépartement nomma lesieurllam es,
exp ert, pour faire ce partage; cl tous les cohéritiers, salis-
�(
3
)
faits de cette nomination, déclarèrent simultanément qu’ils
se contentoient de cet e x p e r t , qu’ils s’en rapportoient à
lui seul ; et en conséquence cet expert fut autorisé à y
procéder.
Son opération fut terminée en pluviôse an 6 ; le tirage
des lots eut lieu au département le 27 du même mois ;
chacun des héritiers fut envoyé en possession de son lot.
Il dépendoit de cette succession deux prairies, toutes
deux appelées de la R iv iè r e , mais dont l’une est située
au lieu de L am ou rie, et l’autre est située à Rageaud. C ’est
la prairie de Rageaud qui donne lieu à la contestation.
Il est bon d’observer que tous les biens de la succession
furent estimés en masse : il n’y a pas eu d'estimation par
ticulière pour le pré dont il s’agit.
L a prairie de Rageaud a fait quatre lots , un de cinq
journaux deux tie rs, un second de neuf journaux , un
troisième de cinq journaux , un quatrième d’un journal
trois quarts.
Cette différence dans la division prouve que Beauclair
n’a pas dit la vérité , lorsqu’il a exposé dans son mémoire
que l’estimation de ce pré fut la même pour chaque lot.
S ’il n’avoit pas existé une différence dans la qualité et la
valeur de telle ou telle partie du pré , chaque lot parti
culier de la même prairie n’auroit fait qu’ un tout ; l’e x
pert n’auroit pas divisé et placé en deux endroits diffé
rons le premier l o t , composé de cinq journaux deux
tiers, Cependant deux journaux de ce lot ont été placés
au bout de la p r a ir ie , le surplus a été séparé des deux
premiers journaux par le lot de la dame V a n e l , qui est
de neuf journaux ; ce qui prouve évidemment que toutes
A a
�. . . . . . . . .
( 4 )
les portions de ce pré ne sont pas de la même qualité, et
n’ont pas été estimées le même prix.
L e premier l o t , composé cle neuf journaux, est échu
A l’intimé j le troisièm e, de cinq journaux , est échu à
demoiselle Jeanne-Françoise de Galonné, représentée par
l’appelant, son acquéreur.
’
Dans le rapport de R a m e s, e x p e rt, il est parlé des
servitudes qui doivent exister. O n ne voit autre chose
à ce chapitre, sinon que « chacun des parts prenant sera
, «
a
«
«
«
«
«
tenu des réparations et de l’entretien des bâtimens échus
à son lo t; il est ajouté que chacun se servira par son
propre fonds autant que possible ; dans le cas con traire,
il passera sur la nature de terrain le moins dommageable
en temps et saisons convenables ; et quant aux eaux
il n’y est dit autre chose, sinon que celui auquel échoira
le quatrième lot aura la faculté, pour son usage ordi-
« n aire, de venir puiser de l'eau à la fontaine qui jaillit
dans la cou r, au-devant de la grande maison, à la charge
« par lui de contribuer aux réparations et entretien, tant
« de la fontaine que de la porte d’entrée de la cour.
« Et celui auquel échoira le deuxième lo t, aura aussi
« la liberté de mener boire ses bestiaux à la fontaine qui
« jaillit dans la cour située au midi de la grange des
« vaches, à la charge par lui de contribuer pareillement
« aux réparations et entretien de cette dite fontaine. »
Il n’est fuit en aucune manière mention cle l’ irrigation
de la p r a irie , ni du mode d’ irrigation. S’ il y avoit eu quel
ques difficultés entre les coparlageans pour un objet de
cette im portance, l’expert qui est'entré dans des détails
uussi minutieux , même sur la faculté de puiser ou de
�( 5 )
mener boire les bestiaux à telle ou telle fon tain e, n’auroit
certes pas manqué de régler le m ode d’irrigation de la
prairie.
Mais comment l ’expert se seroit-il occupé de cet objet?
O n voit sourdre des sources de toutes parts dans cette
p r a irie , de manière que chaque partie peut être arrosée
sans qu’il soit utile d’imposer aucunes servitudes sur les
portions divisées ; et aussi n’en a-t-il ete impose aucune:
chaque partie s’est contentée de son l o t , et en a joui sans
réclamation.
Il y a même eu plusieurs sujets de discussion entre les
cohéritiers. L e sieur Rames avoit fait différentes omis
sions dans son rapport; il n’avoit pas procédé à la liq ui
dation des reprises respectives des cohéritiers. Il fut nommé
des arbitres par l’administration du département ; et de tous
les cohéritiers qui réglèrent ces nombreuses répétitions ,
ainsi qu’il résulte des procès verbaux contenant avis arbi
tral , des 9 prairial et 8 messidor an 6, et quoique chaque
héritier n’ait rien n égligé, qu il soit entre dans les détails
les plus m inutieux, aucun n’a réclamé sur le partage de
la prairie de la R ivière ; aucun ne s’est plaint de la diffi
culté de l’irrigation, ou d’un obstacle à sa jouissance.
Ce n’est que le 13 vendémiaire an 9 , trois ans après
cet arrangement de famille , que Beauclair est devenu
acquéreur du lot de Jeannc-Françoise de Calonne.
Ce nouveau propriétaire eut bientôt des prétentions;
il se plaignit de la difficulté qu’il éprouvoit dans l’irri
gation du pré qu’ il venoit d’acquérir; il avoit a c h e t é ,
disoil-il , cet héritage avec ses aisances , servitudes ,
prises et perceptions d’eau dues et accoutum ées. Il sou-
�( 6 ) . ,
tenoit n’avoir pas la même quantité d’eau destinée à arroser
cette partie, que pendant que l’entière prairie étoit possédée
par le sieur de Galonné, père et beau-père des intim és’,
il vouloit faire procéder à un règlement d’eau, tant avec
les intimés qu’avec Antoinette Boignes, veuve de Nicolas
Mollet , qui avoit aussi acquis le second lot de cette
prairie.
,
: Les sieur et dame V a n e l , qui vouloient éviter toute
contestation , convinrent de s’en rapporter a des arbitres.
Les sieurs Rames et V id a l furent nommés par un com
promis du 21 thermidor an 9 ^¡mais, par acte du 17
messidor an 11 , Beauclair révoqua le compromis , et
deux jours après il fit citer au bureau de paix les sieur
et dame V a n e l , ainsi qu’Antoinette B o ign es, pour se con
cilier sur la demande en partage des eaux vives et casuelles
servant à l’irrigation de la p ra irie , et en doinmages-intérêts par lui soufferts, résullans de la privation des eau*
dont il n ’a voit pas joui, dit-il, depuis son contrat de vent$.
Les parties comparurent au bureau de paix le a 5 du
même mois.
Les sieur et dame V a n el répondirent que le partage
de famille ne donnoit aucun droit à Beauclair dans la por
tion qui leur étoit attribuée ; qu’ ils avoient toujours joui
exclusivement des eaux qui y naissent, et que Beauclair
éloit forcé d ’en convenir. L e sieur V an el ajouta que le
compromis par lui passé ne pouvoit lier son épouse, qui
s’étoit réservée la moitié de ses biens comme paraphernaux. S’il étoit question du partage des eaux dans ce com
prom is , c’étoit une erreur de fait ? et il ne pouvoit y
être assujéti.
�(
7
)
Antoinette Boignes , veuve M a lle t, qui avoit acquis la
portion de M arie G a lo n n é, répondit qu’elle avoit pris
plus ample connoissance du partage du domaine de R a geaud; elle s’est convaincue que le pré appartenant au
sieur Y a n e l et à son épouse n’étoit pas assujéti à fournir
aux autres parties du pré aucune portion de l’eau dont il
s’agit, ni par conséquent les rases nécessaires pour la con
duire : aussi reconnoît-elle qu’elle n’a pas joui de ces eaux
depuis son acquisition ; elle déclare qu’elle n’entend pas
entrer dans la contestation, voulant s’en tenir à cet égard
à l’exécution littérale du partage.
Cependant cette Antoinette Boignes n’est pas encore
aussi-bien traitée pour l’irrigation de son héritage que
l'exigeant Beauclair ; et la demande de ce dernier ne
tendroit a rien moins qu’a etre autorisé à s’introduire
sans cesse dans la propriété des in tim és, à y pratiquer
des rases ou nquéducs pour conduire dans son pré les
eaux qui naissent dans celui de la dame Y an el. O n sent
qu’une servitude aussi onéreuse diminuerait infiniment la
valeur de cette propriété , et on ne peut en imposer de
semblables sans un titre exprès.
Beauclair auroit donc dû se rendre justice comme a fait
la femme Boignes; mais un nouveau propriétaire, peu
accoutume a l’étrc, ne se rend pas aussi facilement. Il fit
assigner les sieur et dame Vanel au tribunal d’A u rilla c ,
par exploit du 20 fructidor an n , pour v o ir ordonner
le partage des eaux de la prairie, eu égard ù la portion
de chacun.
Les sieur et dame V a n e l, dans leurs défenses, soutin
rent qu'en priucipc 011 ne pouvoit admettre d’autres ser-
�■ \.
(S )
vitudes entre cohéritiers que celles établies par le partage
de famille. L e partage de l’an 6 n’ayant imposé aucunes
servitudes à cet é g a r d , ce partage d’ailleurs devant être
interprété d’après l’exécution qu’il avoit e u e , la demande
de Beauclair étoit sans fondement.
a Beauclair exposa de sa part que le sieur de C alon n e,
ancien propriétaire, avoit établi pour tout le pré de la
R ivière un réservoir' et des rases servant à son arrose
ment : c’é f o it , suivant l u i , la destination du père de
j a m i l l e , et il en résultait une servitude continue et appa:
rente. D è s -lo rs, dans son système, il n’étoit pas besoin
que le partage fit une mention particulière et expresse
de cette servitude, pour la conserver aux parties infé-r
rieures du pré. Il invoqua l’article-693 du Code civil J
qui porte que la destination du père de famille vaut
titre ; e t , dans tous les c a s , il ne pouvoit y avoir de dif
ficulté pour les eaux du réservoir , « q u i , d i t - i l , est
ce placé’ diins un chemin p u b lic, et qui n’étant donné à
a personne par le partage , doit être encore indivis. » .
Les sieur et dame V an el répondirent qu’il 11e falloit
pas considérer la manière dont l’ancien propriétaire jouissoit des eaux dont il s’agit; il ne pouvoit avoir de ser
vitudes sur lui-inêm e, d’après la maxime n en iin l res sua
servit. L e partage dont il s’agit avoit été fait en l’an 6 ,
sous l’empire des anciennes lois ; et la destination du père
de iamille ne valoit Litre que par écrit. Ils invoquèrent
les dispositions des articles 2 1 5 et 216 de la Coutume de
P aris, la disposition de la loi 7 au il’. Com m unia prœ dioruin rustic. > etc. Ils observèreut que le portage avoit
un chapitre particulier de servitudes, et u ’ayoit fait nulle
mention
�4^7
(
9
)'
mention de celle réclamée par Beauclair ; ils en tirèrent
la conséquence qu’ils étoient propriétaires des eaux qui
naissent dans leur pré , comme Beauclair l’étoit de celles
qui naissent dans le sien, et qu’il retient exclusivem ent,
quoiqu’autrefois elles servissent à l’arrosement du surplus.
• Les lois citées n ’établissoient aucune différence entre
les servitudes continues et apparentes , ou les servitudes
discontinues et non apparentes; et si le Code civil établit
un droit nouveau, il ne peut avoir d’effet rétroactif, ni
régler la contestation dont il s’agit.
• L a cause portée à l’audience du tribunal d’A u rillac ,
le 17 frimaire an 13 , est intervenu jugement contradic
toire qui déboute Beauclair de sa d em an d e, et le con
damne à tous les dépens.
• Ce jugement est m o tiv é , i ° . « sur ce que le partage
« de l ’an 6 a été fait sous l ’empire des anciennes lo is , et
cc^que dès-lors il n’y a eu de servitudes établies sur les
« différons lots que celles énoncées dans le partage. »
O n rem arq ue, z°. « que le chapitre des servitudes ,
« inséré dans ce partage, n’assujétit pas les portions du
«
«
«
«
«
pré de la R iv iè r e , jouies par les sieur et dame Y a n e l,
à faire part à la portion possédée par Beauclair des
eaux qui naissent chez e u x , ni de celles du réservoir,
ni à livrer passage dans leur propriété pour aller cliercher ces mêmes e a u x , ni ù laisser pratiquer des rases
« pour les conduire ; que dès-lors cette servitude n’a pas
« été établie, et 11e pourroit l’être sans blesser l ’ é g a l i t é
« du p a rta ge, lors duquel on a eu égard aux s e r v i t u d e s
« et charges imposées à chaque héritage. »
E n f in , il résulte du procès verbal de non conciliaB
�C 10 )
tion , « que-le;partage a été ainsi entendu et exécuté par
« toutes les parties. »
Beauclair a.interjeté appel de ce jugement. Pendant que
les parties étoient en instance à A urillac , Beauclair avoit
vainement sollicité une déclaration du sieur R am es,
e x p e r t , qui pût s’accorder avec ses intérêts. Beauclair ne
devoit pas même l ’espérer, puisqu’il a exprimé dans son
m é m o ire , page 4 , qu’il n’avoit révoqué le compromis
que parce qu’il crut s’apercevoir qiC il exista it de grandes
relations entre les intim és et les experts.
' Il a été plus heureux en la cour ; il a obtenu du sieur
Rames une reconnoissance ainsi conçue :
« Nicolas Beauclair , de la commune de Saint-Cernin,
« m’ invite à lui dire ce qui s’est passé lors du partage
cc des biens immeubles de la maison de Calonne , de
« Rageaud. Je déclare que dans le temps j’ai arpenté et
« estimé ces biens ; que je les ai estimés d’après leur état
« et valeur, au moment de ma visite sur les lieu x; qu’après
« avoir pris toutes les notes locales, je m e suis retire pour
« m ’occuper de la formation des l o t s , et que le grand
« pré du domaine de Rageaud f u t , autant que je m ’en
« souviens, divisé en quatre.
a Que les eaux servant à l’irrigation des prés du do
te
«
«
«
maine de Rageaud , et de celui de L.amourie , ne furent
pas divisées , p a r la raison que la fa m ille Calonne
étant très-pressée , il falloit abréger le procès verbal de
partage des immeubles , et qu’en s’occupant de la divi-
« sion deseaux, l’ouvrage devenoit d’autant.pluslong qu’il
« y avoit un plus.grand nombre de lots, et que cette (li
ft vision fut renvoyée après le, tirage au sort.des.lots.
�4 &)
k
«
«
«
«
«
(■il )
« Je déclare aussi que M . Franiatte et moi àvions été
chargés de procéder à la division des eaux de la prairie
deR ageaud; mais une demoiselle Galonné ayant vendu
sa portion de la prairie à B eauclair, il y eut entre
celui-ci et M . V a n él des conventions notariées pour
procéder au partage des eaux. M . V id a l et moi fumes
nommés , et M . V a n el révoqua les pouvoii’s portes au
« compromis.
« Mais si Beauclair est privé des eaux dont la por« tion de pré par lui acquise étoit arrosée lors de l’esti« ma tion que j’ai faite de ce pré en totalité de ces quatre
cc parties, cette portion de pré n’aura plus la même valeur
« que je lui donnai lors de ma visite sur les lieux ; e t ,
« n’ayant plus la même v a l e u r , l’égalité , qui est l’âme
« des partages, sera rompue ; il n’y aura plus l’équilibre
« que je chercliois alors. Beauclair, qui représente une
« des demoiselles Calonne , doit-il être traité comme le
« seroit la d e m o i s e l l e Calonne? voilà là question. E n foi
« de quoi je lui ai délivré la présente déclaration , le 17
cc messidor an 13. »
V o ilà sans contredit un acte bien extraordinaire. C om
ment un expert jaloux de sa réputation ose-t-il se per
mettre une indiscrétion de ce g e n r e , et en imposer si
grossièrement au public et à la justice?
L a famille Calonne étoit pressée, dit-il! mais comment
cette famille éloit-elle pressée , lorsqu’elle avoit deux
cohéritiers inscrits sur la liste fatale des ém igrés, et q u ’ il
lui importoit surtout de gagner du temps? N ’a v o i e n t - ils
pas plus à espérer en partageant entr’e u i plutôt quaveô
la nation? S’ils avoient demandé le partage à l’adminisB 2
�tration, ce n’étoit que pour éviter le séquestre et la vente
île leurs biens. O n sait q u e , d’après la loi du 28 mars 179 3 ,
les administrations étoient autorisées à procéder à la vente
de l’universalité des b ien s, quoique l’émigré n’amendât
qu’une p o r tio n , à moins que ses cohéritiers ne deman
dassent le partage.
,
L ’intérêt des héritiers étoit donc d’éviter la v e n te , mais
de prolonger le partage.
L a famille Galonné étoit pressée ! mais il y a eu un pre
mier partage de fait ; les héritiers ont réclam é, et un nou
veau partage a été ordonné. Dans ce premier partage il
n’existoit pas de servitudes sur le pré dont il s’agit.
L a famille Galonné étoit pressée! cependant l ’opération
de Rames a commencé dans les premiers jours de bru
maire an 6 , et n’a été terminée que sur la fin de pluviôse 5
c’est-à-dire, a duré quatre mois. 11 ne s’agissoit pas d’flne
succession considérable; la consistance des immeubles ne
s’élève pas h une somme de 90000 fr. Rames a donc eu
plus de temps q u’il n’en falloit pour terminer une opé
ration aussi simple que facile dans ses détails.
L a famille Calonne étoit pressée ! cependant Rames
a consncré un chapitre entier aux servitudes *, il s’est occupé
des eaux ; il a autorisé le quatrième lot à puiser de
l’eau à la fontaine qui jaillit dans la cour de la grande
maison ; il a autorisé le deuxième lot A mener boire
les bestiaux à la fontaine de la cour , située au midi
de la grange des vaches. E t croira-t-on que R a m e s ,
qui a eu le temps de se livrer h ces minuties, n ’ait pas
eu
celui
de s’occuper d’ un objet
plus
important ,
d’ un objet que les experts n’ont jamais o u b lié, le par-
�( 13 )
tage des eaux. C ’est l’appelant qui nous l ’apprend liiîmeme , page 10 de son mémoire *, il défie m êm e les
intimés de rapporter un seul partage où les eaux d’une
prairie de laquelle on a fait plusieurs lots soient res
tées indivises.
L e prétexte de l’omission de l’expert est donc bien
futile et bien ridicule ; et le sieur Rames ne s’est pas
aperçu qu’en déclarant que la famille Calonne était trop
pressée pour lui donner le loisir de s’occuper du par
tage des eaux , il manquoit à son premier d e v o i r , en
laissant son opération imparfaite ; il blesse enfin la déli
catesse de sa profession , en se permettant d’interpréter"
de commenter un rapport qui ne lui appartient p l u s , et
en donnant un avis que la justice ne lui demandoit pas.
. L e sieur R a m es, étranger à cette discussion, s’avise
encore de demander si Beauclair ne doit pas être
traité comme la demoiselle Galonné. Mais celle - ci a
joui de son pré pendant trois ans après le partage, et
n’a pas réclamé les eaux que Beauclair veut s’approprier
aujourd’hui. La fam ille, après le p artage, a encore été
divisée sur une foule d’objets , et leurs intérêts ont été
discutés avec beaucoup d’étendue et de chaleur : pas un
seul mot sur l’omission ou la prétendue négligence
dont Rames vient bénévolement s’accuser. Beauclair luimême n’a pas joui de ces eaux depuis sa vente ; il le
déclare dans sa citation ; il le répète lors du procès verbal
fuit au bureau de paix ; il demande des dommages-intorêts résultans de cette non jouissance : voilà bien des
années ecoulées depuis l’opération de Rames. 11 faut
être bien sûr de sa mémoire , ou avoir bien peu d’af-
�\
■ A
•
( 14 >
foires à ti’aiter dans sa j n ’ofessiqn, pour se rappeler ces
circonstances, e t 1 en rendre un compte* aussi détaille.
C ’est cependant'sept ans ¡et demi après le-rapport du
sieur Rames , lorsque l’état des“ lieux'a changé , lorsque
deux étrangers sont devenus acquéreurs de deux por
tions d’un pré qui ne fait lui-même qu’une partie trèsexiguë de la succession , qu’il veut bien nous apprendre
ce q u’il devoit dire ou faire lors de ce partage.
* U n e semblable déclaration est une enquête à fu tu r,
abrogée par l’ordonnance de 1667 , qui ne peut être
regardée que comme le fruit de la séduction ou de la foiblesse , et bien plus nuisible qu’utile aux iùtérêts de celui
qui l’a sollicitée.
>•
• Il est encore u tile, avant de passer à la discussion
des m o y e n s, de donner une idée du local et de la dis
tribution des eaux qui se trouvent dans la prairie de la
Rivière.
jo. Les intimés mettent en fait que l’eau prove
nant du réservoir n’a-servi dans aucun temps à l’arrosement de la partie de pré possédée par Beauclair. Ces
eaux arrosoient seulement la partie du même pré la plus
voisine du réservo ir, par le moyen de deux rases con
nues sous le nom (Vanciennes rases.
y
2°. Les eaux de la première fontaine étoient distri
buées par deux rases du côté de jour du même pré. Ces
deux rases ne portoient point les eaux dans la partie
occidentale où est située la portion acquise par Beauclair;
elles étoient dirigées oui midi , et destinées à arroser
environ douzé à treize1 journaux. Cependant il existoit
•une troisième rase dirigée du coté du nord', parlaquellb
�G i 5 )'
s'écouloit une légère portion des eaux de cette même,
fontaine ,,dans le haut d u 1 pré d e , l’ap p elan t, et qui ne
pouvoit servir qu’à une très-petite portion de cette môme
partie supérieure du pré.
3°. Les eaux, de la seconde source-, étaient distribuées
par deux ,rases 5) dont l?une seulement étoit dirigée du
coté du pré Beauclair ces deux sources sont peu utiles;,
elles tarissent à la première chaleui\
A u contraire , dans le. haut du pré Beauclair il y naît
deux sources qui ne tarissent jamais , et dont les eaux,,
pendant la vie du sieur Galonné p è r e , étoient dirigées
du côté de la partie de pré qui appartient aujourd’hui
à la dame; V anel, B eauclair, depuis son acquisition, jouit
exclusivement de ces deux sources ; Beauclair en jouit
même au préjudice de la femme Boignes , fdont le p r ç
profitait autrefois de ces mêmes e a u x , et qui en est au
jourd'hui privé, j •
j
Il existe encore dans le b a s . du pré Beauclair deux
au Ires sources que Beauclair retient également sans en
faire part ; enfin , tous les égoûts,dc la prairie entière se
déchargent inatureUcm(e nt ¡dans Lv partie possédée par
Beauclair;
.
.
)
Les intimés, articulent encore que la partie de pré
possédée par Beauclair et la femine Boignes , ne dépendoit pas autrefois du pré de la R ivière. Ces deux por
tions avoient été réunies p a r le sieur Calonne p è r e , peu
d’«innées avant son décès. T o u t le haut du pré Beauclair
étoit en nature de bois , qui n’a été coupé que q u e l q u e
temps après l’acquisition. Depuis , cette partie a servi de
pacher et n’a jamais été fauchée ; le terrain est de mau-
�( i 6 \
yaise qualité; on n’y voyoit croître que des ronces et des
genêts. Beauclair ne l’a défrichée que depuis son acqui
sition. Comment seroit-il possible, d’après ces faits dont
on offre la p reu ve, que cette portion ait été estimée
sur le même pied que le surplus de la prairie, qui est
de première qualité. C ’est cependant ce qu’a voulu faire
entendre le sieur B.ames, et ce qu’a attesté Beauclair dans
son mémoire.
Enfin , d’après le partage, on voit qu’il revenoit à
chaque cohéritier pour 9694 francs 40 centimes d’imm eubles; total, 87246 francs.
Chaque Iota été distribué de manière que ceux qui ont
eu une plus grande portion de la prairie ont eu beaucoup
moins dans les avitres immeubles ; tout comme ceux qui
ont eu moins dans la prairie ont eu davantage dans le
surplus des biens. Il s’est fait une compensation du plus
ou moins dans une juste proportion. O n a pris en
considération la facilité ou les avantages de chaque pro
priété ; et de deux choses l’ une , ou l’expert est un igno
rant , s’il n’a pas mis dans une balance égale les avan
tages ou les inconvéniens de chaque l o t , ou on ne peut
déranger les opérations sans porter atteinte à l’égalité
du p artage, et sans blesser les intérêts de chaque cohé
ritier.
Etoit-il donc si indifférent de savoir ou de connoitrc
les servitudes qui dévoient être établies ? Chaque cohé
ritie r, avant de connoître son so rt, 11’auroit-il pas ex igé
q u’on eût expliqué les servitudes? A u r a i t - o n o u b lié ,
par exem p le, de faire remarquer que si le propriétaire
des cinq journaux obteuoit le droit de s’introduire sans
cesse
�*■»
.
&
qesse*dans la partie que le sort a depuis attribuée.à la
dame V a n e l , qu’il pourroit venir y pratiquer des rases
ou aquéducs , les nettoyer ou les creuser de nouveau ;
qu’enfin le propriétaire ne seroit jamais maître chez lu i,
tandis que celui qui auroit les cinq journaux seroit affran
chi de toute servitude ? N ’auroit-on pas représenté que
le lot de neuf journaux ne valoit pas le lot des cinq ; et
que cependant ce lot des cinq journaux avoit une plus
grande partie des autres immeubles.
Ces réflexions si simples se présentoient naturellement
à l’esprit le moins exercé ; personne n’auroit vo u lu d’un
lot si onéreusement grevé , et l’opération de l’expert
eût été complètement ridicule.
O n peut maintenant apprécier le mérite de la décla
ration du sieur Rames ; elle ne peut avoir été arrachée
que par l’importunité et dans un moment d’oubli : on
ne veut pas fairejsoupçonner d’autres motifs.
Uiie dernière explication également nécessaire, est
d’apprendre que toute la succession du sieur de Calonne
père est située en pays de coutume. Cette vérité a été
reconnue par toutes les parties et par l ’expert lui-m êm e;
il y avoit d’autant plus d’intérêt à le constater , que la
dame Roddes , mère commune , auroit amendé une por
tion virile dans la succession de ses deux enfans.prédécédés,
pour les biens situés en paysdedroit écrit. l i a été reconnu,
lors du partage et du procès verbal des arbitres , que la
mère ne devoit rien obtenir à ce titre , parce que tous
les biens., et notamment le domaine du Rageaud, étoiçnt
situés en pays de coutume,
-..O u fuit cette réflexion , parce que personne u ignoie
�. ( 1 8 )
qu’en matière de servitude les principes ne sont pas
les mêmes dans le pays coutumier que dans le pays de
droit écrit.
O n passe maintenant à la discussion des moyen s de droit
qui s’élèvent en faveur des intimés : on répondra ensuitetrès-brièvement aux objections proposées par l ’appelant.
M O Y E N S .
En pays cou tum ier, nulles servitudes sans titré ; elles
sont en général imprescriptibles , notamment dans les
Coutumes de P a r is , de Bourbonnois et d’une foule d’au
tres. L a Coutume d’A u ve rgiie faisoit exception à cette
règle ; elle se rapprochoit davantage de la disposition
des lois romaines, qui déclarent les servitudes prescrip
tibles. L ’article 2 du titre 17 porte expressément que
les servitudes peuvent s’acquérir et se perdre par le laps
de trente années continuelles et accomplies : mais il ne
s’agit pas ici de prescription ; et Beauclair n’a pas p ré
tendu avoir joui pendant trente ans, puisqu’au contraire
il se plaint d’avoir été toujours troublé dans sa jouis
sance : il soutient seulement q u’il y a ici destination du
père de fa m ille ; que les eaux éloient distribuées de
manière que la portion de pré par lui acquise devoit etre
arrosée par celle qui a été attribuée aux intimés. Suivant
lu i, la servitude est continue et apparente ; e t , s’appuyant
de la disposition nouvelle du Code c i v i l , il prétend que
dans ce cas la destination du père de famille vaut titre
en sa faveur. Cette proposition n’avoit jamais été admise
parmi nous : si nous ne suivions pas la disposition de l’or-
�ticle .186 de la Coutume de Paris , et de l’article 5ig de
la Coutume du Bourbonnois , qui portent que le droit dè
servitude nes’acquiert par longue jouissance, quelle qu’elle
soit, sans titre, au moins nous admettions la disposilion
de l’article 2 1 6 , qui décide que la destination du père
de famille ne vaut titre qu’autant qu’elle est par écrit et
non autrement. En matière de servitude , ces destinations
générales sont nulles ; il faut spécialement les exprim er
pour qu’elles subsistent: Species servitutis exprim endaest:
ne si generaliter servire d ictu m erit. A u t n ih il v a le a t,
qu ia incertum sit quœ servitus excepta s i t , a u t om nis
servitus im poni d e b e a t, L . 7. I n tradendis , au ff. D e
servitut. prœdior. rustic. A in s i, lorsqu’un père de famille
met hors de ses mains une portion de sa p r o p r ié té , il
doit spécialement déclarer quelle servitude il retient sur
l’héritage par lui v e n d u , ou bien quelle servitude il cons
titue sur la propriété qui lui reste ; et s’il ne fait aucune
déclaration il ne peut exister de servitudes. En e f f e t,
toutes propriétés doivent être libres ; il importe a l’ordre
public, à la sûreté de tous, que les héritages soient affranchis
de toutes les entraves qui pourroient gêner la jouissance
ou diminuer la valeur de la propriété.
E t qu’on ne dise-pas que les articles 2 1 5 et 216 de la
Coutume de Paris ne s’appliquent qu’aux servitudes ur
baines; ce seroit une erreur relevée avec force p arT ron çon ,
sur l’article 2 i5. Il enseigne que cet article, coptime la plu
part de ceux du même t i t . , sont tirés du droit romain
en la loi I n tradendis , au ff. Com m una p r œ d io r u tn
rustic. , et en la loi Q u id q u id , au même tit. O11 a
pelé la disposition de la prem ière, et la deuxième s e x C 2
�prime ainsi : Quidqirid vendilor servitutis nom ine sïb i
recipere vult nom inaùm recipi oportct.
Il seroit difficile de savoir dans quelle source Beauclair
a puisé l’assertion , qu’il faut faire une différence entre
les servitudes continues et appai-entes, et les servitudes
discontinues et non apparentes ; non-seulement les auteurs
n’ont pas fait cette distinction , mais le dernier commen1
tateur de la Coutume d’A u v e r g n e , sur l’art. 2 du tit. 1 7 ,
nous enseigne que la Coutume ne fait aucune différence
entre les servitudes continues et les servitudes disconti
nues, entre les urbaines ou les rustiques. Les lois, dit-il,
en portent le même jugement; et les auteurs les plus ins
truits des principes du d ro it, conviennent qu’elles ont les
mêmes règles ; que les unes et les autres se pi’escrivent
par trente ans : il cite à l’appui de son opinion Facliin ,
I l c n r y s , etc.
L e partage de l ’an 6 étant muet sur un objet de cette
im portance, lorsqu’on pourrait lui reprocher de la pro
lixité sur tant d’autres, on ne doit plus considérer l’état
où se trouvoit la prairie lorsqu’elle appartenoit au même
propriétaire. T elle est la doctrine de Ferrières sur l’ar
ticle 2 1 5 de la Coutume de P a r is , t. 2, p. 176 0 , qui dit que
la destination du père de famille ne vaut que lorsque la servi
tude est imposée par écrit, et spécialement exprimée même
entre les enfans. Lorsque l’héritage a appartenu nu même
propriétaire, d it-il, ou lorsqu’il a réuni deux ou plusieurs
portions dans sa m ain, bien que l’ un des héritages, avant
qu’ il fût venu en la possession du vendeur, fut chargé
envers l’autre d’ un droit de servitude, néanmoins se trou
v a n t appartenir au même propriétaire, les servitudes ont
�( 2? )
4 ^ 0)
été éteintes p erco jifu sio n em , et ne peuvent revivre sans
une nouvelle explication. Il cite la loi 36,, au IF. I ) ç servit*
preedior. rustic.
L ’état ancien des lieux ne seroit donc d’aucune consé
quence du moment qu’il y a division entre les cohéritiers,
sans qu’aucune servitude ait été retenue par le partage.
Il faut en revenir a u x grands principes du droit naturel^
que chacun est maître chez soi.<
Maintenant personne n’ignore que celui qui est proprié
taire d’ un héritage est également propriétaire de la source
qui s’y trouve ; qu’il peut en user à son g r é , même contre
l ’usage accoutumé : Contrà statutam consuetudinis'J'or-?
7/iam, comme le dit la loi P rœ sesj au code D e servitutibuset a q u â ; principe consacré parla jurisprudence constante,
et qui n’a éprouvé qu’une seule modification, lorsque ler
voisin avoit la possession exclusive et trenténaire, d’aller
prendre les eaux dans l’héritage où naissoit la source, er\
pratiquant des rases ou aquéducs, ou autres ouvrages de
main d’homme. Ce principe et la modification qu’on vient
d’énoncer se trouvent exprimés dans les art. 641 et 642
tûu Code civil;
O r , comme Beauclair ne va pas jusqu’à prétendre qu’il
ait cette possession , qu’au contraire il se plaint de n’avoir
jamais joui des eaux qui naissent dans le pré de la dame
V an el , il en résulte la conséquence toute simple qu’il
est mal fondé dans sa demande.
O n ne sait trop commeDt Beauclair est allé chercher
la loi P o m p o n iu s, et quel argument il en veut en tirer.
Celle l o i , qui est la loi 8 au il'. Fît m il. e r c is ç ., §• 1 ? *s’ex"
prime ainsi : P o m p o n iu s a it colum bas qnca enntu soient
de colum bario venire in J a tn iln v crciscundcc ju d ic iu tu ,
•'"><
�( 22 )
cu m nostrœ sin t tam diù quam diù consuetudincm
habeant ad nos revertendi ; ce qui ne veut dire autre
' chose, sinon que les pigeons qui partent et reviennent
doivent entrer dans le partage de la succession tant qu’ils
ont l’habitude de revenir au colombier commun. On ne
vo it pas quelle similitude il peut y avoir entre les pigeons
qui vont et reviennent, et les sources qui naissent dans un
pré. Si Beauclair a voulu-dire par là que l’égalité devoit
être la base du partage, et que tous les objets commun doi
vent être divisés, on lui répondra que , dans son système,
il blesseroit lui-même l’égalité , parce que s’il prenoit l’eau,
des sources qui naissent dans le p r é 'd e la dame V a n e l ,
il lui ôteroit un avantage qu’elle est censée avoir acquis,
ou qu’elle n’a obtenu qu’en prenant moins dans le sur
plus , tandis que lui ou l’héritier qu’il représente, qui a
été dédommagé par d’autres objets, n’aurüit offert aucune
compensation,
Les actes, d it-il, s’interprètent par leur exécution : où
veut-il en venir avec cette maxime que les intimés ont
toujours invoquée ? On n’a cessé de dire que depuis le
partage de l’an 6 , la demoiselle Galonné, qu’il représente,
s’étoit bien gardée de s’introduire dans la propriété des
intimés ; qu’elle n’étoit jamais venue prendre les eaux dont
il s’agit, et cependant ce n’est que trois ans après le paiv
tnge qu’elle a vendu. Beauclair lui-meme est obligé de
co n v e n ir, dans sa cé d u le, qu’il n’a jamais joui de ces
eaux : d o n c, s’ il faut interpréter le partage par son exé
cution , tout est à l’avantage des intimés.
L e compromis dont il voudroit se faire un titre a été
révoqu é par lui-m êm e; il l’a été également par V a n e l,
qui ne pouvoit lier la dame son épouse. Ce compromis
�do\
( *3 )
est censé n’avoir jamais existé; d’ailleurs, il u’étoit fondé
que sur une erreur de fait. L e sieur V an el n’avoit jamais
consenti à nommer des experts pour le règlement des
eaux ; il ne vouloit qu’ une simple interprétation ; et ces
mots conform ém ent au p a rtag e, insérés expressément
pour rassurer le sieur V a n el, étoient un piège qu’on avoit
voulu tendre à sa bonne foi. Beauclair heureusement s’est
méfié des arbitres, et a révoqué le compromis. Gomment
pourroit-il aujourd’hui excip erd’un acte qu’il a lui-mêm e
anéanti ?
<
Il est encore plus difficile d’expliquer à quelle fin Beau
clair invoque un arrêt de la cour rendu le 29 messidor
an 1 3 , dans la cause du sieur R o c h e , contre les sieurs
Fontalard. Cet arrêt a décidé que les Fontalard ne pouvoient être admis à la subrogation d’action contre R o ch e,
cédataire d’un de leurs coh éritiers, parce que les F on
talard , par des actes g ém in és, avoient admis Roche au
partage déjà com m encé, lui avoient donné communica
tion de tous les titres de leur famille ; que dès-lors ils ne
pouvoient plus Pécartcr par une subrogation légale. Il
est impossible de deviner quel rapport cet arrêt peut avoir
avec la demande de Beauclair.
Sa digression sur les articles de la Coutume de P a r is ,
qu’on a invoquée dans le cours de cette instance, n’est
pas plus lumineuse. Il prétend que la Coutume de Paris
ne reçoit point d’application en pays de droit écrit ; mais
c’est une erreur, parce que la Coutume de Paris régloit
l’ usage des servitudes dans toute la France lorsqu’elle
n’avoit rien de contraire aux lois; et on a p r o u v e , dans
le cours do ccttc discussion , que ces deux articles étoient
puises dans les lois romaines. Enfin , il est reconnu que
�(2 4 )
le pré contentieux est situé en pays de coutume : dès-lors
l’objection tombe d’elle-m ê
m
e
O n a prouvé aussi qu’il n’y avoit aucune distinction
entre les servitudes urbaines et les servitudes rustiques
Quoique l’article 2 15 parle de hauteur et de m esure et
paroisse plus spécialement s’appliquer aux maisons et
bâtimens , l’article n’en est pas moins tiré du ff. au titre
des servitudes rustiques.
L a disposition nouvelle du Code civil ne peut régler
un partage fait en l’an 6 , et ce n’est pas aujourd’hui qu’on
voud roit essayer de donner un effet rétroactif aux lois. Il
seroit d’ailleurs aisé de prouver que la disposition de l’ar
ticle 693 du C o d e est étrangère à l’espèce particulière,
attendu qu’il ne résulte aucune servitude de l’état dans
lequel les choses avoient été mises par le sieur Calonne
père ; au con traire, lorsque le sieur Calonne possédoit la
prairie dont il s’a g it , le pré d’Antoinette Boignes étoit
arrosé p a r les sources qui naissent dans la portion attribuée
a Beauclair , qui aujourd’hui trouve fort commode de se
les approprier exclusivement.
O n se hâte d’en venir à la péroraison de l’appelant, qui
prétend que plus on est r ic h e , plus le désir s'irrite et croît
avec les m oyens de s'en richir davantage ; il dit que l'a mb ition est un ex acteur c r u e l, etc. etc. Ce l a n g a g e empha
tique est aussi ridicule que déplacé dans la bouche du cor
donnier Beauclair : N e su tor ultra crepidam .
M c. P A G E S ( de R io m ) , ancien a v o ca t
M °. D E V È Z E ,
•
;
avoué licencié.
>
.
À RlOM, de l'imprimerie de L andriot, seul imprimeur de la
Cour d'appel. — Frimaire an 14.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Vanel, Pierre-Paul-François. An 14]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
partage des eaux
experts-géomètres
servitude
pays de droit coutumier
experts
pays de droit écrit
jouissance des eaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Pierre-Paul-François Vanel, propriétaire, et dame Marguerite Calonne, son épouse, habitans du lieu de Rageaud, commune de Saint-Cernin, intimés ; contre Nicolas Beauclair, cordonnier, habitant du lieu du theil, même commune de Saint-Cernin, appelant d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement d'Aurillac, le 17 frimaire an 13.
Table Godemel : Destination du père de famille : 2. - vaut-elle titre à l’égard des servitudes continues et apparentes, en pays de droit écrit, si le fonds divisé appartenait au même propriétaire et si c’est par lui que les choses ont été mises dans l’état duquel résulte la servitude ? peut-on, au contraire, décider que la destination du père de famille doit être établie par écrit et non autrement ? surtout, lorsque le partage des immeubles a été muet sur la servitude elle-même ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 14
1798-Circa An 13
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1615
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0701
BCU_Factums_G1614
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53289/BCU_Factums_G1615.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
experts
experts-géomètres
Jouissance des eaux
partage des eaux
pays de droit coutumier
pays de droit écrit
servitude
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53290/BCU_Factums_G1616.pdf
9b65a4938b7ca05028ed3105773ab519
PDF Text
Text
3
PRECIS
COUR
D ’APPEL
P O U R
DE RIOM.
La dame D E M A R I O L , e t les sieurs D E
V É N Y et D E R I B E Y R E , enfans et
héritiers de la d am e
de
V
illem o n t,
appelans
í%o6f (y (í-
C O N T R E
d/csuV
L e sieur R I X A I N } intimé.
L e sieur R ixain , fermier de la dame de V illem on t, lui avoit
fait souscrire, en l’an 2 , une obligation de 26000 fr. Légitime
ou n o n , cet engagement auroit été respecté par les appelans,
si le sieur Rixain se fut borné à suivre le sort de son propre
titre : mais l’obligation étant en assignats, le sieur Rixain a prétcndu qu' elle avoit une cause antérieure à leur é mission; e t,
pour le p rouver, il a fallu q u’il reproduisit tous ses payemens
�r 2 )
et objets de répétition. Ce nouveau compte établit c^airrmrnt
aujourd’hui que le sieur Rixain n’a payé que quatre années de
ferme au lieu de six ; et les héritiers de Villem ont réclament les
deux années qu’il doit. Voilà ce qui semble au sieur Rixain extrémement injuste. Il ne prouve pas cependant qu’il ait payé; mais
il se retranche sur l ’acte de l’an 2 , qui n’expliquoit rien , et qui r
expliqué et dénaturé par son fait, n’est plus un titre pour lui-méine.
F A IT S .
L e 26 mai 1787, la dame de Villem ont donna à ferme ait
sieur R ixain , pour n eu f ans
^ m p ter du 1e1'. mars 1788,.
les trois terres de Villem or
T eix et M ontrodés, moyennant
17600 francs.
L e même jour il fut d it , par une contre-lettre , que la dame
de Villem ont résilieroit le Sail de la terre de Villemont si ses
enfans lui payoient ses reprises, et que l’indemnité seroit de
1 200 fr. par chaque année à courir.
Le i 5 avril 1789, le bail fut résilié pour la terre de T e ix , et
*4 -. il. fu tx litq u e Villem ont resterait afferm é 8000 fr. et Montrodés
• -« pour 4000 francs.
Le 2G février 179 3 , la dame de V illem on t, remboursée par
ses en fan s, signifia un congé au sieur Rixain , et lui offrit
4800 fr. pour l’indemnité de quatre ans.
Les parties compromirent; et par jugement du 7 juin 1790,
les arbitres , jugeant le congé venu à ta rd , déclarèrent le hait
résilié au 1^. mars 1794» et condamnèrent la dame de Ville
mont à payer 56oo fr. pour trois années de non-jouissance ; ils
ordonnèrent une plus ample contestation sur des demandes contre
le sieur Rixain , pour dîmes , dégradations , etc. , dues il la dame
de Mariol et au sieur de Teix.
Ce jugement fut signifié au sieur Rixain , avec commande
ment de payer à la dame de Mariol et au sieur de Theix.
Le
ventùse an
2,
le sieur Jlixain iit u la dunie
ycuyo
de
�3^
Villem ont sommation de payer la somme de 36oo fr. , et ré
clama de plus a8632 liv. 2 sous 5 den. par lui surpayés, dit-il,
après avoir payé les six années de sa ferme ; to ta l, 32262 liv.
2 sous 5 deniers.
Le 4 messidor an 2 , il fut fait arrêté de compte dans lequel
on fait dire à la dame de Villem ont qu’après avoir examiné le
dit compte , et discuté tant à raison du dédommagement par
elle dû des objets supprimés par les décrets quautrem ent, elle
a trouvé un. excédant de 6262 liv. 2 sous 5 deniers.
F.n conséquence de quoi la dame de Villem ont se reconnut
débitrice de 26000 fr. pour solde de tout compte.
Il fut ajouté qu’elle avoit fait compte à Rixain de la nonjouissance de Montrodès pour trois ans , et q u e , comme ses
sous-fermiers refusoient, dit-il, de payer, à cause des suppres
sions féodales, il étoit autorisé à faire avec eux des ventilations,
après quoi il se payeroit par ses mains de sa cré a n ce , en rece
vant de ces sous-fermiers ce qu’ils devroient.
Cette dernière clause annoncoit
assez combien la dame de
»
Villem ont se mêloit peu elle-même des comptes du sieur R ixain ,
et le laissoit maître de tout régler lui-méme. Quoi qu il en soit,
le sieur Rixain dit avoir traité avec ces sous-ferm iers, et reçu
4972 francs.
La dame de Villem ont étant décédée en l’an 4 , le sieur Rixain
assigna, en l’an 6, ses héritiers en payem ent des 26000 francs,
montant de l’obligation , et des arbitres furent nommés. Ils ren
dirent un jugement arbitral le 21 pluviôse an 6. Comme il esc
la base du procès actuel , il est important d’en connoltro les
détails et les dispositions.
Les héritiers de Villem ont, voyant un règlement fait par leur
m ère, contenant obligation, à la date de l’an 2 , en demandoient
la réduction.
Le sieur Rixain répondit que tout ce qu’il avoit p a y é étolt
anterieur aux assignats, et qu’il étoit prêt à l’éiablii Fal
anciens comptes et pièces qui étoient en son p o u v o i r .
A 2
�Ç 4 3.
En conséquence , et d’npvés sa réclam ation , les arbitres re
viennent à un com pte général sur le vu de trois comptes de»
i er. ju illet, 20 décembre 1790, et 2 janvier 1791; et le nouveau
compte donna le résultat suivant :
i°. Le sieur Rixain a payé, d’apriès ces trois états, 622G 3f.46c.
Sur quoi il devoit, pour quatre ans de ferm e
alors échus. . . . ......................................................... 48000
35
D onc il étoit alors créancier de.........................14263
46
20. li a payé, depuis ladite époque de janvier 1791
jusques au mois de mai 1793, 804$ fr.
Ces 8045 fr. sont réductibles, et valent................5982
»
5 °. Il reste, pour atteindre l’obligation , 3691 fr.
Cette somme est réd u ctib le, et v a u t . ..................
1110
T o t a l de ce qui est dû. au sieur R ix a in ...............21555
55
81
■ H M A M U tO I
1t ?
Sur quoi il a reçu des fermiers 4972 fr. , et il a payé 268 fr.
au notaire, pour frais de l’obligation de l’an 2.
Et d'après ce compte n ouveau, les arbitres, n’ayant à juger
que l’obligation , condamnent les héritiers Villemont à payer
cette somme de 2i555 fr. 81 c e n t ., et néanmoins à déduire
«
4972 lr. imputables sur les intérêts et sur les 268 fr. payés au
notaire.
Le sieur Rixain interjeta appel de ce jugem ent ; mais , sur
l’a p p e l, le jugement arbitral fut confirmé le i5 pluviôse an 8.
L e 29 ventôse suivant , les héritiers de Villem ont firent si
gnifier ces jugemens , et , en se reconnoissant débiteurs do
21555 f r . , ils dirent que cette somme étoit compensée et au
delà, i°. avec les 497^ fr. reçus par R ixain; a", avec «4000 lr*
par lui dûs pour deux années de sa ferme , non comprises au
com pte; et lui firent sommation de payer l’excédant.
Néanmoins le sieur Rixain jugea h propos, le 6 nivôse an 10,
de faire aux héritiers Villem ont un commandement d'expro
priation. Ils en demandèrent la n u llité , de même que la main-
.9
�levée d u n e inscription par lui laite ea-l’nn 7 , ¿le 04200 franc?.Par jugement du tribunal de R iom , du 6 floréal au 12, con
tradictoire seulement avec d e u x d’entr’e u x , ils lurent déboutés
de leur demande. '
M O Y E N
S.
Le sieur Rixain n’en a qu’un s e u l, et il le reproduit sous
toutes les faces possibles : c ’e^t aussi sa réponse a foutes les
objections.
J’a i, d it-il, une quittance finale du 4 messidor an 2.
' Cela est v ra i, ou plutôt cela étoit vrai. Mais il l’a lui-m êm e
nnnullée en exigeant un nouveau compte.
Sans doute il pouvoit s’en prévaloir ; et quoique ce fût un
acte d’aveuglem ent, né de l’aspérité des tem ps, il auroit eu
le droit de se prévaloir de son obscurité même , et de réclam er
2G000 fr. , s’il se fût borné à les vouloir à l’échelle.
Mais le désir d avoir davantage l!a forcé à représenter toutes
ses pièces comptables pour vérifier les époques de tous ses payemens et objets de répétition quelconques : et alors les arbitres,
mentionnant ce qu’ils ont vu , transcrivant le résultat de ses
propres com ptes, ont écrit qu’il n’avoit payé en total que 622GJ fr.
dans tout le temps de sa ferme.
D ’après cela il est aisé de savoir si les six années de cette ferme
ont été payées. Les arbitres ont très-clairement porté en compte
quatre années , et s’ils en avoient porté deux au tres, on les trouveroit également,
11
faudroit sans difficulté que ces deux années fussent com
prises dans les 804^ francs ou dans les 3691 francs; mais cela
est impossible. Dans la première somme sont les 36 oo francs
portés par le jugement arbitral du 7 janvier 1793 : le sieur Rixain
1 avoue ; il dit avoir payé le surplus.
Quand il l’auroit p a y é , ce ne pouvoit être qu’à c o m p t e des
deux années de sa ferme. C a r } t^uoi qu’il puisse d ire , il faut
�/ 6}
bien , dans un compte où il porte tout ce qu’il a p a y é , tout
ce qu’il a à répéter , à quelque titre que ce soit, qu’on trouve
tout ce qu’il devoit.
O r, on voit que la masse de ses payemens et autres objets,
est composée de trois articles ; et on ne voit sur le total qu’une
seule déduction de 48000 francs pour quatre années de ferme *
donc deux années sont oubliées.
M ais, dit le sieur R ixa in , si les arbitres n'ont pas dit que ces
deux ans sont p a y é s , ils n’ont pas dit non plus qu?ils ne sont
pas payés.
Ce n’est là qu’ un jeu de mots ; car un ferm ier qui devoit six
ans de ferme , et qui porte en compte tout ce qu’il a payé en
six ans, tout ce qu’il prétendoit réclam er d’ailleurs, devoit dé
duire les six ans de sa ferme avant de se dire créancier. S’il
n’en a déduit que quatre, il n’en a payé que quatre ; et par con
séquent c ’est avoir dit suffisamment qu?il en doit deux.
A cette démonstration le sieur Rixain objecte que les arbitres,
en déduisant les 48000 fra n c s , n’ont parlé que des quatre ans
¿chus en 1791.
Biais qu’importe l’échéance, lorsque les deux années suivantes
ne se trouvent pas mentionnées. C a r , encore une fo is , si elles
ne sont pas comprises au com pte, le sieur Rixain les doit.
Le sieur Rixain , qui ne s’est pas dissimulé la nécessité de
retrouver ces deux années, veut les laisser apercevoir dans une
prétendue indemnité dont le compte des arbitres ne parle pas,
et avec raison.
J’a i, dit-il, acquité ces deux années par compensation avec
les indemnités qui m ’étoient dues pour 1791, 1792 et 1793. E t,
pour établir quelques données sur ce moyen , le sieur Rixain
calcule quelques produits des terres de Villem ont et Montrodès.
En un seul mot l’obscurité qu’il a voulu jeter sur cette partie
se dissipe • il devoit 12000 fr. par an ; qu’il suive son propre
ca lcu l, et il verra qu’il est encore lo in 'd ’avoir payó d cilx «us
par com pensation.
�r , ,
.
é?
' An fait, cette indemnité n étoit presque rien. Villem ont dcvovt
beaucoup de cens , et le sieur Rixain les a gagnés. En l'jgx il
n’a perdu que les banalités s’il y en a v o it, car les autres droits
féodaux n’ont été supprimés qu’en 1792. Il avoit même été
formé contre lu i, en 1795, une demande en indemnité de la
dim e, fondée sur la loi du 14 avril 1791En l’an 2 il a déclaré avoir été payé de l’indemnité pour
ÎVlontrodés ; et il est de principe que les déclarations contenues
en un acte annullé subsistent.
A u lieu de prendre tant de peine pour persuader que les
deux années omises sont dans le compte arbitral, sans qu’on
les y ap erçoive, le sieur Rixain n’a voit qu’une chose à fa ire,
c ’étoit de reproduire ses acquits de 1791 à 1795. Car il a tout
exhibé aux arbitres , et il est encore nanti de ce qui peut
prouver qu’il a payé. Un galant homme doit toujours être prêt
à revenir à compte.
Forcé d’avouer que le jugement arbitral de l’an 6 est au
jourd’hui le seul titre de la c a u s e , le sieur Rixain y cherche (
encore une objection; il dit aux héritiers de Villem ont : Si vous
étiez créan ciers, pourquoi vous borniez-vous à demander une
réduction à l’échelle?
Mais ce n’est-là qu’un cercle vicieu x pour remonter à l ’acte
de l’an 2. O r, on le répète an sieur Rixain , c ’étoit à lui h
adopter cette restriction ; et s’il a couru le hasard de vouloir
un nouveau compte , il ne peut s’emparer de deux chances ,
et revenir à ce qu’il a détruit.
Quand les arbitres ont lu ses pièces et refait un compte ,
les sieurs de Villem ont ne pouvoient qu’en attendre le résultat,
et n’avoient pas le droit de se m êler à la délibération des ar
bitres, pour prendre des conclusions sur le résultat même de
leur jugement.
Mais aussitôt qu’ils ont vu , par ce jugem ent, q u e le compte
nouveau ne portoit en compte que quatre ans de ferm e, ils
�■
m
ont réclamé les deux ans restans, par la signification même du
jugement confirmatif.
R ien n’est donc m ieux établi que leur droit de s’opposer à
une expropriation commencée pro non debito. Il est de prin
cipe qu’après un compte les omissions donnent droit à une ré
clamation postérieure, sans qu’il soit besoin d’attaquer le pre
mier compte qui contient l’omission. ( V . la loi 1‘e. ff. quai
sent, sine appell, , et l’article 21 du titre 29 de l'ordonnance
de 1667. )
La compensation s’est opérée de plein droit avec la créance
du sieur Rixain. Son bail est exécutoire contre lu i, et il n’a pas
fallu former une demande judiciaire.
Quant au com m andem ent, il est nul en la forme contre la
dame de M ariol, qui n’avoit de domicile de droit que celui de
son mari, à M ariol, et q u i, assignée à C lerm o n t, ne l ’a été
à personne ou domicile.
L ’arrêt de cassation in voqu é pour éluder cette nullité , ne s’y
applique pas. Un cohéritier, poursuivi seul, ne pouvoit exciper
du droit d’autrui ; et c' est pour cela que l’expropriation faite
contre lui fut jugée valable. Mais ici on a mis en cause la
dame de Mariol ; et dès-lors elle a droit de se prévaloir des
nullités qui la concernent.
M e. D E L A P C H I E R ,
M e. G O U R B E Y R E ,
avocat.
avoué.
A R 10M, de l ’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Janvier 1806.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Mariol. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
assignats
ferme
bail
arbitrages
jugement arbitral
cens
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour la dame de Mariol, et les sieurs de Vény et de Ribeyre, enfans et héritiers de la dame de Villemont, appelans ; contre le sieur Rixain, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1787-1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1616
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0742
BCU_Factums_M0327
BCU_Factums_G1617
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53290/BCU_Factums_G1616.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Villemont (terre de)
Teix (terre de)
Montrodeix (terre de)
Clermont-Ferrand (63113)
Saint-Genès-Champanelle (63345)
Orcines (63263)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
assignats
bail
cens
ferme
jugement arbitral
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53291/BCU_Factums_G1617.pdf
fb367bcce0452f8b93fd6725c95f3452
PDF Text
Text
^—
M
E
M
.
O
- ....
1
I
R
=üü=ü.
;
E
, :
•
niiü il •
P O U R
L e sieur R IX A IN , propriétaire, habitant de la
ville de C lerm ont-Ferrand, intimé
'
C
O
N
T
R
E
V E N I D E V IL L E M O N T
veuve de sieur A n t o i n e S I C A U D D E
M A R I O L sieur P a u l de R I B E Y R E aîné;
F r a n ç o i s - Gaspard- M e l c h i o r - B a l t h a Z A R V E N I D U T H E I X , appelans;
Dame F r a n ç o i s e
ET C ON TRE
V E N I D E V IL L E M O N T , épouse du sieur D U N O Y E R D U
S A U V A G E , autorisée en justice ;
Le sieur D U N O Y E R D U S A U V A G E , le sieur
D E V I L L E M O N T aîné, habitant du lieu
de Jayet, communè de Saint-Genest, assignés
en déclaration de jugement commun.
Dame A n n e - F r a n ç o i s e
U n jugement arbitral, du 21 pluviôse an 6 , qui a acquis
l’autorité de la chose jugée, déclare le sieur-Rixain creanA
�: .
( 2 )
•
cier des adversaires d’une somme de 21363 francs 81 cent,
en numéraire, sauf à déduire la somme de 4972 francs
45 centimes, qu’il est convenu avoir reçue,du temps du
papier, des sous-fermiers de la terre de Montrodès. Les
adversaires soutiennent ne rien devoir -, et, ce qu’il y a de
plus s'nguliér, c’est dans ce môme jugement qui les cons
titue débiteurs,., qui, les condamne personnellement pour
leur p art, et hypothécairement pour le tout, qu’ils pré
tendent trouver leur libération. Il faut convenir que la
découverte est heureuse ; elle l’auroit été davantage s’ils
a voient pu parvenir a faire adopter leur système*
Non-seulement ils soutiennent ne rien devoir, mais
en.co,v? < S(î prétendent créanciers. Ils.n’ont cependant
point formé .demande, devant les premiers juges, des
sommes qu’ils ^disent leur être dues. On ne peut pas être
plus modéré, F A I T S.
*
-' '
!
1
■ »*:
; Par acte du 26 mai 1787, le sîeur Rixaîn afferma de
la dame Dauphin, veuve V én î de Yillem ont, les teiTes
de T h e ix , Montrodès et Villem ont, pour neuf années
consécutives, qui'devoient commencer à prendre cours
au premier mars 1788.
:
. . L e prix du bail fut fixé par an , pour la terre de Mont
rodès, à 4000. frajics*, pour la terredeTheix,à 56oofr.; et
pour la terre de Villem ont, à 8006 fr. ; en tout 17600 fr*
Il fut dit que le payement seroit fait en deux termes
égaux, savoir, moitié à la Saint-Jean prochaine, et l’autre
moitié à la Noël de chaque année. A partir des exprès-
�•(
3)
sions du b ail, il semblerait que le premier terme devoit
échoir à la Saint-Jean 1 7 8 7 , quoique le bail ne dût com
mencer qu’au mois de mars 1788. La Saint-Jean 1787
étoit en effet la Saint-Jean prochaine, à partir de la con.
* T
ception du bail : cependant la vérité étoit que par ce mot
-prochaine on avoit éntendu la Saint-Jean qui suivrait
l’entrée en jouissance, c’est-à-dire, la Saint-Jean 1788;
seulement, le sieur Rixain devoit accepter, par antici
pation, les mandats qui seraient tirés par latíame de V il
lemont, ainsi qu’il est expliqué plus bas dans lebail; Cette
erreur qui s’étoit glissée sur l’échéance du premier terme,
et par suite, des termes subséquens, a été reconnue et répa
rée, par écrit, lors du compte fait entre parties, le premier
juillet 1790.
'
¡r
Il fut convenu qu’attendu que>la dame ide Villemont
avoit fait des sous-baux particuliers dans les différentes
terres affermées, le sieur Rixain seroit tenu de les entre
tenir , sauf à les résiliera ses périls, risques et fortunes.
L e bail fait m e n t i o n q u ’a t t e n d u 'qué les terres y outre
l e bien rural, étoiént composées de cens, rentes, dîmes,
percières et autres droits seigneuriaux, la dame de Villemont en avoit donné un état par elle certifié sincère et
véritable.
Enfin il fut dit quelé-sieui? Rixain seroit tenu d’accep
ter , même par anticipation, les mandats qu’elle pourrait
tirer sur lui.
Par u n e contre-lettre du même jo u r, il fut stipulé
qu’au caá ou la dame de Villemont seroit remboursée
par ses enfans du montant de ses reprises, le sieur R i x a m
seroit ténu de consentir ou résilimént du bail pour- la
A z
�T 4 )
terre de Villemont* moyennant une indemnité pour cha
cune dès années restant à courir, de 1200 francs.
La dame dé Villemont n’attendit point l’échéance des
termes; elle n’attendit même point l’époque de rentrée
en jouissance, poui: demander des fonds; il lui falloit,
disoit-elle, 40000 francs pour mettre ordre à ses affaires.
L e sieur Rixain s’exécuta ; il donna de l’argent, et accepta
des. mandats.
'
,
Mais quelle fut sa surprise, lorsqu’à l’époque de l’en trée
en jouissance il voulut se mettre en possession des objets
affermés!
:
'!
A Villemont, il trouva Paîné (le marquis), qui.jouissoit des jardins, garennes, colombiers, et qui ne v o u l u t
point se désister.
J. A
r iK i i x , le,sieu r R o c h e f o t -t refusa d e r e m e ttr e les sous-
ibiiux à f e r m é , soüs p r é t e x t e q u ’i l a v o i t u n b a i l -d e r é g i e
•tfnférieuL’ V^pour1 l i e u f a n s *
.
A M o n tro d ès*
la
d a m e d e V jlle m o n t ve n d it une c o u p e
sdd :;bo js'taillisrqu ’e lle jjJréaiatttra, 1200 francs,
çî: .¡L e îrefufc!surtout:du sieu r rRocljtefoxt a l l o it e n g a g e r les
p d r tié s d ans u n e c o n té statio û jsé rieu se . A f i n d ’é v i t e r à la
tfatfië d e V i l l é m o n t u n e discussion d é s a g r é a b le , le. s i e u r
R i x a i n c o n s e n t i t , p a r acte d u i
5 a v r i l 1 7 8 9 , à se d é p a r t i r
lUV b ail pcitlrla* t e r r e d u T h e i x . I l f u t c o n v e n u q u e le b a i l
« e sübsjstéi‘o itJ p l'u s ':q iie tp o !u r les.tçrres d e V i l l e m o n t et
de M o n t r o d è s , a u
p r i x d é jà stip u lé .
; Cèpendhiit la dame de. Villemont étoit toujours atten
tive à demander) de: F-argent „ et;le^iei^r Rixain toujours
*complyîsaiifc jfour en donner., . ■.ïi;î •
-I t o ptéidier^jüiliet UtyÿP
pr^nierj,arrêté.¿e -compte
�(5 )
des payemens faits par le sieur Rixain , montant à
52021 livres 6 sous.
L e 24 décembre de la même année, second arrêté de
compte, par lequel le sieur Rixain se trouve avoir payé
une autre somme de 5j 85 livres.
L e 2 janvier 1791, troisième arrêté de compte , cons
tatant que le sieur Rixain a payé, tant en marchandises ,
mandemens acceptés, qu’argent donné, une somme de
3957 livres 3 sous 4 deniers.
L e sieur Rixain a encore donné d’autres sommes qui
ont été portées dans le compte final.
L e 19 février 1793, la dame de Villemont fit signifier
au sieur Rixain un acte par lequel elle lui déclara qu’elle
venoit de se départir, en faveur de ses enfans, de la jouis
sance de la terre de Villemont.
L e 26 du même m ois, second acte instrumentai«;,
par lequel elle fait offres de la somme de 4800 l i v r e s pour
l’indemnité convenue parla c o n t r e - le t tr e dont on a parlé,
pour les q u a tr e a n n ées x'estajit à c o u r i r du bail de la
terre de Villemont., à raison de 1200 liv. par an.
L e sieur Rixain refusa ces offres.
Ce refus donna lieu à une contestation qui fut terminée
parun jugement arbitral en dernier ressort, du 7 juin 1793;
ce jugement, attendu que .le congé avoit été donné ¿1
tard, déclara que le bail., pour la partie de Villem ont, ne
demeureroit résilié fqu’à compter du premier mars 1794,.
et condamna, de son consentement, la dame de V illemont à payer à ladite époque , en indemnité , pour
trois années restantes, la somme de 3600 francs,
�iv
(6 )
.
La dame de Villemont fit signifier ce jugement le pre
mier ventôse an 2 , mais sans offrir les 3600 fr.
L e 23 du même mois, Rixain, après avoir épuisé la
conciliation, traduisit la dame de Villemont au tribunal
de district de Clerm ont, pour se voir condamner à lui
payer et rembourser la somme de 28662 liv. 2 s. 5 d.
qu’il avoit surpayée, et après avoir, est-il d i t , payé les
terres de Villem ont et de Montrodès pendant les six
années qiûil avoit j o u i , à raison de 12000 fr. par ant
Remarquons bien ces mots , et après avoir payé les
terres de Vaillemont et de Montrodès pendant les six
années. Rixain déduisoit donc dans son compte, et dans
l’assignation donnée, Ventier prix des six ànnées, et
c’étoît d é d u c t io n faite du prix de ces six années, qu’il se
prétendoit créancier, et formoit demande de la somme
de 28662 liv. 2 s. 5 d.
Le mcme jour il fit sommation à la dame de Villemont
de lui payer en outre la somme de 3600 f r ., à laquelle
elle avoit été condamnée par le jugement arbitral.
Ces deux sommes réunies faisoient la somme totale de
32262 liv. 2 s. 5 d ., toujours déduction faite, ainsi qu’on
l’a observé, de l’entier prix des six années du bail des
terres de Villemont et de Montrodès.
'
Le 4 messidor an 2 il est passé un acte entre les par
ties. Dans cet acte, on rappelle les faits que l’on'vient
d’exposer, la citation donnée par le sieur Rixain à la
dame de Villemont en payement de la somme de 28662 1.
2 s. 5 d. par lui surpayée , et après avoir, est-il répété,
payé le prix des six années du bail, et la sommation en
�(? )
payement de la somme de 3600 fr. portée par le jugement
arbitral, et indépendante de la précédente.
Il est dit ensuite : « De telle manière qu’au moyen de
« la somme de 28662 liv. 2 s. 5 d. que Rixain prétend
« avoir surpayée ladite Dauphin , veuve V én i, et de celle
« de 3600 fr. adjugée audit Rixain par sentence du 7
« juin 1793 ; ce qui forme un total de 32262 1. 2 s. 5 d .,
« ensemble les intérêts depuis la demande que ledit
« Rixain réclame ;
c< Tout vu et considéré , les parties sont venues en
« compte, et ont réglé ainsi qu’il suit; savoir, ladite
« Dauphin , veuve V é n i, après avoir examiné et f a i t
« examiner le mémoire du compte dudit R ix a in , mon
te tant en totalité à ladite somme de 32262 1. 2 s. 5 d . ,
« et les intérêts depuis la demande j et après avoir dis« eu té article par article ,, tant en raison du dédom« magement des objets supprimés par différons décrets
« qiü autrement, elle a trouvé un excedant de la somme
« de 6262 liv. 2 s. 5 d ., et des intérêts qu’elle n’a pas
« voulu passer en compte audit Rixain. En conséquence,
« les parties sont convenues q u e , pour solde de tout
« compte jusqu'à ce jour y ladite somme de 32262 liv.
« 2 s. 5 d ., ensemble les intérêts d’icelle, se trouvent dès
« aujourd’hui réglés et fixés à la somme de 26000 liv.
« que ladite Dauphin, veuve V éni , reconnoît devoir;
« laquelle elle promet et s’oblige de payer aux termes
« qui sont stipulés,, avec l’intérêt à cinq pour cent sans
* retenue. »
Par
cet acte, ladite dame de Véni reconnoît avoir été
�(8)
payée du prix des six années du bail, et non-seulement
payée, mais surpayée, puisque c’èst, déduction fa ite du
prix des s ix années, et pour solde de tout compte jus
qu'au jo u r , qu’elle se reconnoît débitrice de la somme
de 26000 f r ., et s’oblige de payer cette somme.
L ’acte contient, après la clause qu’on vient de lire,
la clause suivante :
« De plus, il est convenu entre les parties que la dame
« veuve Yéni a fait raison d’une indemnité audit Rixain
« pour la non jouissance de la terre de Montrodès , et
« c e , pour les trois dernières années ; laquelle terre ledit
« Rixain a sous-fermée à Antoine Barfhomeuf et autres,
« lesquels n’ont pas voulu payer audit Rixain le prix de
« la ferme, sous prétexte que lespercières, moulin banal,
« cens , rentes, et autres o b j e t s , sont supprimés. En con« séquence, la dame veuve Y én i au torise ledit Rixain a
« faire procéder, soit amiablement, soit en justice , à la
« ventilation des objets supprimés d’avec ceux qui ne
« le sont pas, avec ledit Rartliomeuf et autres sous-fer« miers*, et d’après ladite ventilation, tout ce que ledit
« Barthomeuf et autres se trouveront devoir d’arrérages,
a ladite Y én i consent et est d’accord que Rixain garde de« vers lui le montant desdits arrérages, lequel sera imputé,
« i°. sur les intérêts de ladite somme de 26000 fr. qu’elle
« doit audit R ixain , et subsidiairement sur le capital. »
L e sieur Rixain a"reçu effectivement depuis, des sousfermiers de M ontrodès, une somme de 4972 f r . , partie
en assignats, partie en numéraire , qui a été imputée sur
sa créance, comme on le verra dans un moment.
La
�(9 )
La dame Véni de VillerfiOnt est déeëdée lë 8 frimàiré
an 4, sans s’être misé en peiné d’acqüittët là somme dont
elle s’étoit i‘ecoiiriuô débitriéé.
'ï: Après sün décès , le sieur Rixain a fait ciler devant le
juge de p a ix , par cédule du 18 frimaire ati 6 , ses héri
tiers, potit* être conciliés sur la demande qu’il entendoit
former contr’eux , à l’effet dé voir déclarer l’acte exécu
toire , et se voir condamner chacun personnellement pour
sa part et portion , et hypothécairement pour le tout, à
payer le montant dé l’obligation en capital et accessoire.
A u bureau de paix les parties convinrent d’arbitres.'
. Quelle fu t, devant les arbitres, la défense des héritiers
Villemont? Il est essentiel de transcrire leurs dires, con
signés dans le jugement arbitral.
« A quoi, est-il d it, Gaspard-Melchioi'-Balthozar Véni
« a réportdu, faisant tant pour lui que pour ses autres
« cohéritiers , i°. que sur lés sommes r é clam ée s p a r lé
« sieur Rixain , déduction doit être faite de la somme dé
« 4 9 7 2 fr. 4 5 cent, p a r lui reçue postérieurement à l’acte
« des sous-ferm iers de Montrodès; 20. que le surplus de
« la créance du sieur Rixain n’est dû qu’en assignats ;
« qu’en conséquence il ne pouvoit en réclamer le mon« tant que sur la valéur réduite d’après le tableau de
« dépréciation du papier-monnaie, à l’époque du 4 mes« sidot an 2 y date de l’obligation. A u reste, après toute
« déduction faite, tant du principal que des intérêts, a
« requis terine et délai pour le payement. »
Rixain répond, « que l’obligation n'étoit point sus« ceptible de réduction, quoique consentie seulement io
« 4 ûiessidor an 2 , parce qu’elle avoit pour cause difB
�« férentes avances, fournitures, indemnités, argent donné,
« ou dettes acquittées à la libération de la dame veuve
® Véni avant l’émission du papier-monnoie.
Suivent les motifs et le dispositif du jugement, qu’il
est également essentiel de mettre sous les yeux de la cour.
« Considérant que le sieur Véni ne d é s a v o u e point les
« trois arrêtés de compte des I er. juillet 1790 , 24 dé« cernbre même année, et 2 janvier 1791 , s’élevant
« ensemble à la somme de 62263
4^ cei,t» j cIue ces
« paycmens paroissent avoir une origine antérieure à
« l’émission du papier-monnoie , dont l’époque remonte
« au i er. janvier 17 9 1, c’est-à-dire, à la veille du troisième
.« arrêté seulement.
« Considérant, 20. q u e, déduction faite sur la somme
« ci-dessus de celle de 48000 fr. due par le sieur Rixain
« pour quatre années de f e r m e , à raison de 12000 francs
« par an , échues (i cette époque , ledit R i x a i n se trou« voit encore créancier de 14263 fr. 46 centimes ; que
« cette dernière somme étant présumée évidemment
« faire partie de l’obligation dudit jour 4 messidor an 2.,
« et pax’oissant due en numéraire, doit être remboursée
« en mêmes espèces.
« Considérant, 30. que les différentes sommes payées
« d’après le mémoire du sieur Rixain à ladite défunte
« veuve V éni, ou à sa décharge, depuis le 4 janvier 1791,
« jusques et compris le mois de mai 1793, se montent à
« 8045 fr. qui sont pré&umés faire partie de la même
« obligation , et ne sont censés avoir été payés qu’en
« assignats, et se montent, d’après le tableau de dépré« ciation du papier-monnoie, aux époques des différentes
�( ii )
et fournitures ou payemens, à 5982 fr. numéraire, ne
« doivent etre comptés que pour leur valeur.
- « Considérant, 40. que la somme de 3691 fr. 54 cent.
k restant pour parfaire celle de 26000 fr. montant de
« ladite obligation, n’a d’autre date apparente que celle
« de ladite obligation, qui est du 4 messidor an 2 ; que
« conséquemment cette dernière somme supposée due
« en assignats, et repi’ésentant seulement 1110 f. 3^ cent.
« numéraire, d’après le tableau de dépréciation du papier« monnoie, ne doit etre allouée que pour sa valeur.
« C o n s id é r a n t , 5°. qu’il n’est point désavoué par Rixain
« qu’il ait reçu des sous-fermiers de Montrodès , à la
« décharge de ladite dame de Y é n i, la somme de 4972 f.
cc 45 cent, qui doit etre imputée sur ladite obligation ,
« quoique comptée en assignats audit Rixain par les sous« fermiers.
« Considérant, 6°. que le sieur Rixain est fondé en
« titre; que néanmoins la loi du 1$ fructidor dernier
« autorise les ju g es h accorder en pareille occasion terme
« et délai d’un an.
« Considérant, 70. que la somme de 258 fr. payée en
« assignats au notaire pour coût et expédition de ladite
« obligation *11’étant point contestée, doit etre remboursée
« et déduite sur celle reçue par ledit Rixain des sous« fermiers de Montrodès.
a N o u sarb itres susdits, déclarons l’acte du 4 més« sidor an 2 exécutoire contre tous les défendeurs ; les
« condamnons personnellement pour leur part, et hypo« thécairement pour le tout,
payer et porter audit
« Rixaia la somme de 14263 fr. 46 cent, en numéraire,
33 2
�\
C
)
« et sans réduction, d’unç parti 2 çellç de 598* francs
« aussi en nuniéraire, à laquelle se trouve réduite, d’après
« le tableau de dépréciation ; celle de 8000 fr. 46 cent.
« montant de différentes sommes payées d’après le mé-r
« moire dudit Rixain soit à ladite défunte Véni ,. soit
« pour elle et; à ga décharge, depuis le 4 janvier 1791 ,
« jusque^ et compris le 8 mai 1793,; 3°. celle de, ï i i q f*
« 3 5 ç.en.t> >à laquelle se trouve réduite, d’après le tableau
« de dépréciation , celle de 3691 fr, 54 cent, restant pour
k parfaire les 26000.fr.,. montant dç l'obligation énoncée
au susdit a.çte; revenant toutes les susdites sommes en« semble à celle de 2,1363^» 8i\ cent. , à la ejiarge néan->
v moins par lçdit Rixaip de déduire la s.omme de 4972 fr.
? 45 cent, qu’il, est- convenu avoir reçue à compte des
« sous-fevn\iers ç\o Montrodès; &ayoir , 33QQ franco en
« assignats le i5 prairial an 3 , et le surplus en numé^
<a. raire le 23 brumaire dernier, à. imputer, ï ° . sur les
« intérêts échus, lqrg desdits payement ; 2°. sur ç e lle d e
« 238 fr. assignats payée par ledit Rixain au notaire pour
« coût dudit acte, et le surplus sur.le principal.. Con-r
<r damnons les défendeurs: aux intérêts .de la somme rescç tant après les susdites déductions, tels qu’ils sont stipulés
« audit acte, jusqu’au payement, et aux dépens. , ;
«. Disons qu’il sera sursis à l’exécution et expédition du:
« jugement jusqu’au 27 fructidor prochain. »
T el est le jugement que les arbitres ont x*endu;.
Sur l’appel interjeté pau\ le sieur Rixain la décision
arbitrale a été confirméei par jugement du tribunal civil
du Puy-de-Dôme , du 13 pluviôse an 8.
;Il faut encore, pour donner sutisfuctioiii aux adyei>-
�5 2 3
( *3 )
saires, metti'e sous les yeux de la cour les griefs qui furent
proposés par le sieur Rixain : ils sont consignés dans le
jugement.
On y lit que l’appel du sieur Rixain a porté,
« 1°. Sur ce que la somme de 26000 fr. portée par
« l’obligation n’étoit point réductible, comme contenant
« accord, suivant l’article 5 de la loi du 1 5 fructidor an 5.
« 20. Sur ce que les juges arbitres ont dit, daus leur
« premier considérant, qu’au i cr. janvier 1791 Rixain
« avait payé à la daine veuve de Villemont la somme
cle 62263 fr. en numéraire f mais qu’il falloit en dis« traire 48000 fr. pour quatre années de fermage , et
a qu’à cette époque Rixain étoit en avance seulement de
« 14263 fr ., tandis qu’au i?r. janvier 1791 Rixain avoit
« joui seulement pendant trois ans ; que la différence
« étoit de 12000 fr ., q u i, joints aux 14263 francs, don« noient un total de 26263 fr« 30. Sur ce que les juges arbitres ont dit que Rixain,
« d’après son mémoire, avoit payé depuis le Ier. jan« vier 1791 , jusqu’en mai 1793, une somme de 8045 fr.
« présumée, fournie en assignats , laquelle se trouvoît
« réduite en numéraire à 5982 f r ., tandis que tous ces
«• objets; d’entre ces deux époques se portoient à 12054 f.
« qui auroient donné un excédant de 898.2 fr.
«- 4°. Sur ce que les sommes d’entre le
janvier 1791
' « et le mois de mai 1793 n’étoient pas susceptibles de
« réduction >parce qu’elles déri voient de causes anciennes
« ou d’objets acquittés et dus en numéraire , et surtout
« lu s o m m e de 3600 fr. formant l’indemnité due à raison
« du résiluaauent du. Imil pain: la. terre' de Viitemout,.
�C *4 )
« 5°. Sur ce que les arbitres ayant réduit l’obligation
« du 4 messidor an 2 , auraient dû au moins réduire la
« somme perçue des sous-fermiers de Montrodès. »
Le sieur Rixain auroit pu pi’oposer un autre grief. On
a vu, dans l’énoncé de l’obligation, qu’il se portoit créan
cier, déduction faite du prix des six années du ba il,
d’une somme de 32262 liv. 2 s. 6 d. ; que cette somme,
sur l’instance de la dame de Villemont , fut réduite à
celle de 26000 fr. Mais dès que les héritiers Villemont
demandoient la réduction de cette dernière somme, comme
fournie partie en assignats, ne falloit-il pas commencer
par imputer la différence dans les valeurs sur la somme
dont il avoit fait remise ? n’étoit-ce pas lui faire sup
porter une double réduction ?
Les h é ritie rs V i l l e m o n t ne se sont pas même empressés
de faire signiiier le jugement.
Jusque-là ils s’étoient bornés à demander la r é d u c t io n
de l’obligation : ils ne portoient pas plus loin leurs vœux ;
e t, en demadant la réduction, ils reconnoissoient par là
même qu’ils étoient débiteurs. Bientôt leurs vues se sont
étendues; l’obligation, quoique réduite, les fatiguoit: ils
ont trouvé plus simple de dire qu’ils ne devoient rien;
il y a plus, ils se sont transformés subitement de débi
teurs en créanciers.
. Dans l’acte de signification du jugement, du 29 ven
tôse an 8 , ils déclarèrent qu’ils avoient été condamnés
par le jugement à p a y e r au sieur Rixain la somme de
21363 fr. 81 cent., mais que cette somme étoit absorbée
et au delà,
10. Par la somme de 4972 fr. 41 cent, reçue par lui des
sous-fermiers de Montrodès;
�( i5 )
5^$
2°. Par le prix de deux armées de ferme des terres de
Villemont et de Montrodès, Rixain ayant joui six ans,
et les arbitres n’en ayant déduit, par erreur de fait et
de calcul, que quatre, lesdites deux^mnées montant en
semble à 24000 fr. ; ils ont en même temps fait somma
tion de payer l’excédant : c’est celte prétention extraor
dinaire qui fait l’objet de la contestation actuelle. — ■
Le sieur Rixain étoit loin de s’attendre à une sembla
ble déclaration. Dès le mois de germinal an 7 , il avoit
fait une in scription conservatoire au bureau des hypothè
ques, soit de R iom , soit de Clermont. Le 6 nivôse an 10,
il a fait un commandement de payer. Les héritiers V il
lemont y ont formé opposition; ils ont demandé la nullité
du commandement, et des inscriptions comme injurieuses
et sans fondement.
Ils ont soutenu que loin de devoir ils étoient créan
ciers. Ils n’ont cependant point formé demande des
sommes dont, suivant eux, le sieur Rixain étoit encore
redevable \ ils se sont con te n té s d e la réserve générale et
de style , de tous leurs droits.
Le sieur Rixain n’a point eu de peine à combattre
cette nouvelle prétention.
La cause portée à l’audience du 6 floréal an 12, juge
ment est intervenu par défaut contre le sieur de Villemont
aîné , le sieur de Ribeyre jeune, le sieur du Noyer du
Sauvage, et la dame de Villem ont, son épouse, et contra
dictoire avec le sieur Véni d u T h eix, la dame de M ariol,
et le sieur de Ribeyre aîné, qui a débouté de la demande
en nullité du commandement, et eh main levée des inscrip
tions ; a ordonné que les poursuites eucominencées seroieut
�' >'
( *6 )
continuées, et a condamné les uns et les autres aux dépens.
La dame de M ariol, le sieur Véni d u T h eix, et le sieur
deRibeyre aîné, ont interjeté appel; les autres cohéritiers
conti’e lesquels le jugement a été rendu par défaut, gar
dant le silence , le sieur Rixain , pour n’être pas exposé
à des appels successifs, les a assignés en déclaratio^d^hypothècfHe.
C’est en cet état qu’est la cause.
»
M O Y E N S .
Comment les adversaires établissent-ils leur système?
Il est constant, disent-ils, que le sieur Rixain a joui
pendant six ans des terres de Villemont et de Montrodés.
IL est constant que lo r s du jugement arbitral, les arbi
tres n’ont déduit que quatre années du prix du bail ; c’est
ce qui résulte du second considérant du jugement. Lé
sieur Rixain doit donc faire raison des deux années qui ont
été omises.
Ces deux années, à raison de 12000 francs par an,
montent à 24000 francs; il est donc reliquataire, sous ce
seul rapport, d’une somme de 24000 francs. Le jugement
ne lui adjuge que 21363 francs 81 centimes; il est donc
:non-seuîement payé , mais Surpayé.
Pour donner plus de développement et de force à l’ob
jection , ils la repi'oduiscnt d’une autre manière.
Le sieur Rixain a joui six ans : ces' six ans, 5 raisofi
de 12000 francs par an, montent à 72000 francs.
: Il est constant, par le jugement arbitral, que toutes les
avances
�( 17 )
S xy
avances et payemens par lui faits , en calculant même
valeur nominale , consistent,
i u. En une somme de 5z z5 i livres 6 sous, d’une part;
celle de 5rj 85 francs, d’autre, et 39^7 livres3 sous, encore
d’autre, portées par trois arrêtés de compte des premier
juillet et 25 décembre 1790, et 2 janvier 1791, montant
ensemble à 62263 livres 9 sous, ci . . . 622631. 9s.
20. En une somme de 8045 francs portée
par un mémoire présenté aux arbitres , ainsi
qu’il résulte du troisième considérant du ju
gement, ci .
.......................................... 8045 CC
T o t a l.....................................................70308I. 9 s.
Sur cette somme il faut déduire celle de 4992 1. «
par lui reçue des sous-fermiers de Montrodès,
et dont il doit faire compte,
Reste ................................................
65336I. «
Déduisant cette somme de celle de 72000 francs,
montant des six années du bail, Rixain est évidemment
débiteur de la somme de 6664 francs.
Sur l’appel du jugement arbitral, le sieur Rixain s’est
plaint de ce que les juges arbitres avoient dit que R ix a in ,
d'après son mémoire, avoit payé depuis le premier jan
vier 1791 ? jusqu'en mai 1793 , une somme de 8045 f r . ,
présumée fou rnie en assignats , laquelle se trouvait
réduite en numéraire à 5982f r a n c s , tandis que tous
ces objets entre ces deux époques se montaient à
12054 livres i5 sous i l deniers ,* ce seroit donc u n e dif
férence, au préjudice du sieur Rixain, d’une som m e
C
■J.
�V
( 18 )
de 4009 livres i 5 sous 11 deniers. En faisant raison de
cotte différence, en allouant cette somme meme.valeur
Eomiüale , il seroit encore débiteur d’une somme de
2664 livres 4 sans 1 denier , d’après son propre dire.
Il ne peut pas, poursuivent-ils , alléguer avoir fait
d’autres payemens ; il 11e peut pas dire avoir fourni
d’autres sommes; il a déclaré- que- tous les objets compris
au mémoire , et on doit croire qu’il n’a rien omis, se portoient à 12054 1. i 5 s. 11 d.; il ne peut pas revenir contre,
sa déclaration.
Jusqu’ici on a calculé valeur nominale; si- on calcule
valeur réduite , au lieu de 2654livres i 5 sous n deniers 7
il devrait 7608 francs 84 centimes.
A quoi il faut ajouter les dégradations commises , soit
dans la terre de V illem ont, soit dans celle de Montrodès;
dégradations qui s’élèvent à plus de i 5ooo francs.
T el est le'calcul et le raisonnement des. adversaires..
On a rapporté l’objection : voici la réponse; elle est
infiniment simple; elle est dans l’acte du 4 messidor an 2,
et dans le jugement arbitral que les adversaires invoquent
et que le sieur Rixain opposera à son tour.
Elle est dans l’acte du 4 messidor an 2. Par cct acte , la
dame de Villemont a reconnu expressément avoir été
payée des six années du bail;
•
^
Indépendamment qu’on ne présumera jamais que celui:
qui d o it, mais a qui il est dû , se reconnoissè débiteur,,
sans ' avoir préalablement déduit ce qui peut lui être dû,
les termes de l’acte ne laissent aucun équivoque. Rixain
expose qu’après avoir payé les six années du b a il, il a
surpayé et est créancier d’une somme de 32262*francs,,
�( 19 )
qu’îl consent ensuite à réduire ù celle de 26000 francs, et
la daine de Villemont s’oblige à payer cette somme de
26000 francs, pour solde, est-il d it, de tout compte ju s
qu'à céjoctr.'
?■ En faut-il d’avantage ?
- Elle est également dans le jugement arbitral. Par ce
jugement, les adversaires ont été condamnés à payer la
somme de 21363 francs 81 centimes. Il y a loin de là. a être
réputés créanciei’s !
J C’est cependant sur ce jugement que les adversaires
fondent leur prétention.
Ils n’excipent point du dispositif du jugement *, ce dis
positif au contraire les condamne, puisqu’il les répute
débiteurs d’une somme de 21363 francs-, ils se retranchent
dans les motifs.
On pourroit d’abord répondre que peu importe quels
soient les motifs ; que les considérans d’un jugement ne
sont pas un jugement; que c’est au dispositif, et non aux
motifs, qu’il fau t s’arrêter : mais de plus on va démontrer
qu’il n’y a qu’erreur et sophisme de leur part.
Reprenons ces motifs.
Dans le premier considérant, les arbitres rappellent les
trois arrêtés de compte faits entre la dame de Villemont
et Rixain, en date des premier juillet 1790, 25 décembre
même année, et 2 janvier 1791; tous les trois constituant
le sieur Rixain toujours en avance. Il est dit ensuite :
« Considérant, en second lieu, que déduction faite sur
« les sommes ci-dessus , de celle de 48000 francs due par
« le sieur R ixain, pour quatre années de ferme, à raison
« de 12000 francs par an, échues à cette époque, le sieur
�( 20 ')
- « Rixain se trouveroit encore créancier de 14263 f. 46 c. »
. Il ne faut pas perdre de vue ces mots, échues à cette
époque, ■
.
.... .
r,
n
;
Les arbitres n’ont fait qu’expliquer quelle étoit la po
sition des parties à cette époque, à l’époque du troisième
arrêté de compte du 2 janvier 1791 ; ils décident qu’à cette
époque, déduction faite des quatre années du bail lors
échues, Rixain se trouvoit alors créancier de 14000 fx*. ;
et sans doute à cette époque Rixain: ne pouvoit être en
retard pour les autres deux années, puisqu’elles n’étoient
pas échues. Mais les arbitres ont-ils décidé que Rixain
étoit débiteur de ces deux années ? On ne peut pas l’in
duire de ce considérant, puisqu’il n e . fait que fixer la
position des parties à l’époque du 2 janvier 1791, date
du ti’oisième arrêté de compte; et dans tout le surplus du
jugement, soit dans les faits, soit dans les questions, soit
dans le dispositif, on ne trouvera pas u n m o t qui tende
à favoriser la prétention des adversaires, dont on puisse
inférer que le sieur Rixain n’étoit pas entièrement libéré ;
qu’il n’étoit point libéré des deux autres années du bail,
ou par payemens effectifs, ou par compensation avec
les indemnités qui lui étoient dues, ainsi quon le dé
veloppera dans un moment.
.:
-, Ils ne pou voient même le juger : il n’étoit pas q u e s
tion de cela.
De quoi s’agissoit-il devant les arbitres?
Par l’actc d u 4 m essido r an 2, la dame de Villemont
s’est reconnue débitrice d’une somme de 26000 francs.
Mais comment s’est-elle reconnue débitrice? Tout
compte f a i t , toute déduction et compensation faite.
�(2l)
Cet acte contient, comme on vo it, deux choses, quit
tance et obligation. Quittance des six années du b ail,
et obligation de la, somme de 26000 francs y déduction
faite du prix des six années du bail.
C’est ce que la cour est suppliée de ne pas perdre de vue.
Maintenant, qu’ont demandé les héritiers Villemoat
devant les arbitres? Ont-ils demandé à revenir contre la
partie de l’acte contenant quittance finale du bail? Ont-ils
prétendu que cette quittance eût été surprise, à, .la dame
de Villemont ? Ont-ils demandé à être restitués contre
toutes les dispositions de l’acte, à revenir à un compte
général? Non; ils ont demandé seulement la réduction
de l’obligation. En demandant la réduction , ils ont donc
reconnu la légitimitéde l’obligiition; etl’obligation n’ayant
été consentie, que déduction faite du prix des six années
du bail, la demande en réduction étoit un nouvel aveu
de leur part qu’il n,’étoit rien du du prix du bail.
Toute la contestation ayant porté uniquement.sur la ré
duction, il est évident q u e le jugement arbitral n’a porté
et n’a pu porter que sur la réduction ; qu’il n’a po,rté ni pu
porter atteinte à la partie de l’acte contenant quittance :et
décharge générale de la ferme.
Il ne faut pas confondre la demande en réduction avec
l’action appelée en droit restitutio in integruin. L ’action
en restitution tend à faire anéantir l’acte dans toutes ses
parties, à remettre les contractans au même et semblable
état que si l’acte n’avoit jamais existé : la demande en
réduction emporte au contraire, par sa nature, la conlirmation de l’acte, s a u f la réduction de la spmrne.
M ais, dira-t-on, il n’est pas ditq^uele sieur JRi’xain ait
�( 22 9
pavé ces deux 'années du bail : mais il n’est pas dit qiPil
ne les a pas payées. Les arbitres n’avoient pas à s’oc
cuper 'de’celai Les héritiers Villemont n’avoierit pas de
mandé à revenir à un compte général ; ils ne critiqüoient
^oirit la partie de l’acte qui déclaroit le sieur Rixain entiè
rement libéré; ils ne contestoient môme point l’obligation
de la dame de Villemont : ils se bornoient à en demander
la réduction.
Le jugement est au moins muet à cet égard : c’èstlà sup
position la plus favorable qu’on puisse faire pour les ad
versaires. Le jugement ne dit pas, si l’on veut, que le
sieur Rixain a payé; mais il ne dit pas qu’il n’a pas payé.*
Et maintenant que'répondra-t-on à l’acte du 4 messidor
an 2 ? 11P a r eût acte , Tà; dame de Villemont a reconnu
expressément avoir
entièrement payée.
L e sieur Rixain doit sans doute établir qu’il a fait raison
du prix des six années du bail; il doit l’établir en deniers
‘ou quittances. La quittance, la voilà ; elle est dans l’acte
du 4 messidor an 2. Cette quittance a-t-elle été annullée?
On a vu que les héritiers Villemont n’ont pas même ré
clamé contre.
D ans le troisième considérant, les arbitres mettent en
fait que le sieur R ixain, d’après son mémoire, a payé
depuis le premier janvier 1791, jusqu’en mai 1793? unc
somme de 8045 francs , qu’ils décident devoir être présu
mée avoir été fournie en assignats ; et les héritiers Villeniont s’écrient : il est donc p r o u v é que le sieur Rixain n’a
payé ? postérieurement au troisième arrêté de compte,
que 8045 francs; lui-même, dans les griefs qu’il a pro
posés au'tribunal civil du Puy-de-Dôme, dans l’instance
�(¿3)
sur Fappel, n’a porté les objets compris dans le mémoire
qu’à 12054 francs. Et de là calculs sur calculs pour prouver
que le sieur Rixain est débiteur.
Avec plus de réflexion ils se seroient épargné tant de
peine; ils n’auroient pas dû surtout, dès qu’ils vouloient
argumenter des griefs proposés par le sieur Rixain sur
Fappel par lui interjeté , les diviser, n’en rapporter qu’une
partie ; ils n’auroient pas du omettre le grief qui suit im
médiatement.
Dans le second grief, le sieur Rixain se plaint de ce que
les arbitres ont déclaré que les objets portés dans le mémoire ne s’élevoient qu’à 8046 francs, tandis qu’ils monfoientà 120.54 francs.
Dans le troisième, il se plaint de la réduction. Troisièbiem ent, est-il d it, sur ce que les sommes d'entre le
premier janvier 1791 et le mois de mai 1793, n étaient
pas susceptibles de réduction, parce quelles dérivoient
de causes anciennes, ou d’objets acquittés et dus en nu
méraire , et surtout la somme'de 3600 fra n cs, form ant
Tindemnité due à raison de la terre de V illem ont, doht
Voriginé remontait au bail à ferm e de 1787.
Ce troisième grief explique tout. On voit qu’il ne
s’agissoit que des sommes fournies par le sieur Rixain
en numéraire, ou qu’il croyoit devoir être allouées en
numéraire. Les arbitre^ ne 'parlent eux-mêmes que des
sommes payées par le steür Rixain.
Il ne s’agissoit point de ce qu’il pouvoit avoir à ré
clamer d’ailleurs; des indemnités à lui dues, liant à raison
des droits supprimés par les décrets, que,pour troublefait à sa jouissance.
�( H )
Les adversaires ont prévu cette réponse; ils cherchent
à l’écarter.
Qu’on n’objecte pas, disent-ils, qu’indépendamment
des-sommes fournies e n . deniers par le sieur Rixain ,
il lui éÇpit dû une indemnité pour .la non: jouissance
des droits qui avoient été supprimés -, tels que les droits
féodaux et autres ; qu’on ne cherche pas à couvrir par
cette indemnité la somme de 24000 francs dont il est
débiteur pour les deux années du bail; car cette défense
seroit repoussée par l’acte même du 4 messidor an 2 , où
il est,dit: Q u'il est convenu entre les parties que la dama
D auphin-V en i a J'ait raison d’une indemnité due au
sieur R ixain pour la non jouissance de la terre de
$1 un trodés, et ce, pour les trois dernières années ; laquelle
terre Ledit Rixain a sous-fermée à Antoine Bai'thovieuf^ et autres , lesquels n ont pas voulu payer audit
R ixa in le prix de lajbrm c , sous prétexte que les perçières, moulin banal, cens, rentes et autres objets sont
supprimés. La dame de Villemont a donc indemnisé le
çieur Rixain de la suppression des droits féodaux pour
la terre de Montrodés ■
et,s’il n’est pas question d’indem
nité pour la terre de Villemont, c’est que le sieur Rixain
ji’avoit point à en exiger ; d’une part, parce qu’il avoit
été assez diligent pour se faire payer; et d’,autre part,
parce que les cens passif?, les cens à ,sn charge, balançoient ceux qu’il pouvait avoir à recouvrer.
C'est encoi’e une équivoque. Il est dit que la dame de
Véni a fait raison de l’indemnité duc au sieur Rixain
pour la flpn jouissance des droits attachés à la terre de
Montrodés.
�J V
(
25 )
Montrodès. Les héritiers Villemont interprètent cette
clause, comme si la dame de Véni en avoit fait raison
en deniers comptans , et bourse déliée, tandis que la
clause doit être entendue uniquement en ce sens, que
dans le compte est entrée Tindemnité que le sieur K ixain
pouvait réclamer pour cause de cette non-jouissance,'ce
qui est bien différent.
Et en effet, l’acte ne dit pas que la dame de Villemont
ait déboursé aucuns deniers. 11 e&t bien évident qu’elle n’en
a pas déboursé, tant qu’il lui a été dû sur le prix du bail,
tant qu’elle a pu compenser avec le prix du bail : on pense
bien qu’elle a préféré de compenser, à sortir des deniers
de sa poche; et sur Vexcédant, montant à 32262 francs,
elle s’est fait consentir une remise de 6000 francs, ainsi
que de tous les interets, et a souscrit une obligation
pour le restant. Elle n’a donc sorti aucuns deniers.
Elle n’en a fait raison que parce qu’elle s’en est cons
tituée débitrice , q u ’elle l’a comprise dans son débet.
L ’acte l u i -même l’exprime assez: Après avoir t e s t-il
dit, discuté article par article, tant en raison du dé
dommagement des objets supprimés par les décrets
qiiautrement.
Le sieur Rixain portoit donc dans le compte présenté
à la dame de V éni ce dédommagement comme un des
articles les plus considérables; et la dame de V éni ne
contestoit pas qù’il fût dû. E t, suivant lés adversaires, il
n’en auroit pas été dû. Le sieur Rixaiii n’auroit pu en
prétendre pour la terre(de V illem ont, parce qu’à leur
dire les cens passifs balançoient les cens actifs ; et il n’auD
�V \<
'
'
^
(26)
-roit pu en prétendre pour la terre de Montrodès, comme
la dame de V éni lui en ayant fait raison.
Ils se mettent ainsi, comme l’on voit, fort à leur aise.
D ’un trait de plume ils se libèrent de cette indemnité.
La directe de la terre de Villem ont, d’après l’état donné
par la damé de Villemont et certifié d’elle véritable ,
s’élevoit à , savoir,
Villem ont, froment, 71 setiers.
avoine y 2 setiers 3 quartes.
Saint-Allire, froment, 2 setiers.
Lafon ,
froment, 23 setiers 3 quartes 4 coupes.
avoine,
8 setiers 1 quarte 3 coupes.
Malmouche, froment, 7 setiers 3 quartes,
avoine, 16 setiers.
P lu s, environ 2.76 francs en argent où suites.
La dîme infeodée étoit de c e n t soixante setiers, et
environ dieux cents pots de vin.
La dame de Villemont a affermé en conséquence; et
les adversaires viennent dire tranquillement que les cens
passifs balânçoient les cens actifs. Elle auroit donc affermé
une chimère !
Elle auroit dû donner du moins un état de ces cens
passifs ; les déclarer au sieur Rixain ; le charger de les
acquitter.
Y a*t-il eu compensation pour la dîme inféodée, avec
celle que la dame de Villemont payoit ? Celle-ci n’étoit
que de vingt à vingt-cinq setiers, et trente dans les années
les plus abondantes : la compensation n’auroit pas été
entière.
1
�( 27 )
Mais, de pins, il s’est écoulé U’oià années, les années
i 79i , 1792 et 1793.
Il n’y a pas eu de compensation pour l’année 1791 ;
le sieur Rixain a fait raison en particulier à la dame de
Villemont de la dîme qui lui révenoit, amiablement
fixée à vingt - quatre setiers : il est porteur de la
quittance.
Il n’y a pas eu de compensation pour l’année 1793;
la dame de Mariol et le sieur V éni du Theix l’ont
perçue sur le champ meme.
Reste l’année 1792. Cette année, dans le compte qui
fut fuit avec la dame de Villem ont, il fut distrait, sur
cent soixante sétiersde dîme inféodée dont le sieur Rixain
réclamoit l’indemnité , trente setiers.
On voit donc combien les adversaires se piquent peu
d’exactitude.
Mais puisqu’ils argumentent si bien de l’acte du 4
messidor an 2, pour en i n d u i r e q u ’ ils ne doivent point
d ’in d e m n i té , ils n e devroient pas le diviser; prendre
la partie qu’ils croient leur être favorable, et rejeter
celle qui leur est contraire. Ils y auroient trouvé aussi
écrite la quittance des six années du bail.
Indépendamment de l’indemnité, à raison des droits
supprimés, le sieur Rixain avoit encore d’autres chefs
de réclamation.
Il d ev o it, par le b a il, prendre tous les ans, sur les
domaines de Chancet et de la Com be, une somme
de 400 francs : ces domaines ont été vendus, et il n ’a
rien perçu pendant trois ans; il lui étoit dû, à raison de
oe , une somme de 12 0 0 francs.
D a
�'
.
( *8 )
Il devoit jouir à Villemont des jardins, colombiers,
grange, écurie............ il en a été privé par la résistance
de l’aîné des M M . de Villem ont, quelque sommation
qu’il lui ait faite, et malgré des assignations.
A Montrodès, la dame de Villemont a prématuré une
coupe de bois taillis qu’elle a vendue 1200 francs.
Dans l’état par elle certifié véritable des vignes de
Villem ont, elle a déclaré cent vingt œuvres de vigne:
il n’en existoit que quatre-vingt-dix-neuf.
Les arbitres ne se sont point occupés de ces diverses
indemnités ; on en a donné la raison.
Il ne s’agissoit pas, comme on ne sauroit trop l’obser
ver , de revenir à un compte général ; il s’agissoit uni
quement de savoir quelles étoient les sommes fournies
par le sieur Rixain, non sujettes à réduction.
Les arbitres disent q u e les sommes payées par le sieur
Rixain , d entie le piemiex* janvier iyçji et le mois de
mai 1793, se portoient à 8045 francs, et devoient être
réduites à 5982 francs, comme présumées fournies en
assignats-, ce qui n’a rien de commun avec les indemnités
que l’on vient d’expliquer, et dont la dame de Villemont
ne pouvoit se dispenser de lui faire raison.
Les adversaires ne peuvent donc tirer aucun avantagé
de ce troisième considérant.
Par le dispositif ils ont été condamnés à payer la
somme de 21363 francs; et d’après les motifs ils seroient
créanciers ! Conçoit-on un pareil système ?
Dans les causes et moyens d’appel ils font lin troisième
raisonnement auquel il faut encore répondre.
Il est certain, disent-ils, cjuc les arbitres ont omis les
''
�( *9 )
.
- "5 ?
deux dernières années du bail. Il est certain que l’erreur
de compte ne se couvre point; qu’on a trente ans pour
la proposer: c’est la décison de plusieurs lois. L ’art. 21
du titre 29 de l’Ordonnance de 1667 en a une dispo
sition précise ; cet article est ainsi conçu : « Ne sera ci« après procédé à la révision d’aucun compte ; mais s’il
« y a des erreurs, omissions de recette, ou faux emplois,
<t les parties pourront en former leur demande, ou in« terjeter appel de la clôture du compte. » Ils peuvent
donc encore aujourd’hui demander que le sieur Rixain
leur fasse raison de ces deux années du bail. Il n’est pas
besoin pour cela , continuent-ils, d’attaquer le jugement
arbitral ; on ne revient môme pas contre ce jugement.
L e jugement subsistera, quant à ce qu’il prononce, quant
à la condamnation de la somme de 21363 francs, et ils
demanderont de leur côté le montant des deux années
du bail omises par les arbitres.
On peut toujours revenir contre une omission! quand
il y a omission. O n p e u t toujours revenir contre un
arrêté de compte! quand il y a erreur de compte. Ici, y
a-t-il omission ? les adversaires peuvent-ils assurer avec
bonne foi que le sieur Rixain n’a fait compte que de
quatre années du bail ? Si le jugement présente une équi
voque, l’acte du 4 messidor an 2 n’en présente pas. Cet
acte n’a point été annullé par le jugement; le jugement
au contraire le confirme, puisqu’il ordonne seulement la
réduction de l’obligation : on a vu que lqs adversaires
n’ont pas même demandé à être restitués contre. Q u ’on
lise, on y trouvera que les six années ont été expressé-
�( 30 }
ment déduites; après avoir, est-il d it, payé les six
années du bjail.
C’est déduction faite des six années, déduction encore
faite d’une somme de 6000 fr. dont le sieur Rixain avoit
fait remise, que la dame de Villemont s’est reconnue dé
bitrice d’une somme de 26000 francs.
L e sieur Rixain n’a pas seulement en sa faveur le juge
ment , il a encore l’acte du 4 messidor an 2 ; il a une
double arme à opposer.
Les arbitres n’avoient pas à s’occuper de ce qui n’étoit
pas contesté : lès adversaires ne contestoient pas la libé
ration du sieur Rixain ; ils ne demandoient que la réduc
t i o n de l’obligation. Ils ne pouvoient même demander
la r é d u c t io n de la quittance; les articles i 5 et dernier de
la loi du 9 f r u c tid o r an 5 s’y opposoient.
L ’article i 5 porte : L e s fe rm ie rs qui ont payé la tota
lité de leurs fermages, soit dans l’an 4 , soit dans l ’an 3 et
années antérieures, conformément aux lois existantes aux
époques des payemens, en sont valablement libérés ,
quelques réserves qui aient pu etre insérées aux quittances
de revenir ultérieurement à compte, d’après les lois
qui pourroient survenir.
L ’article 29 et dernier porte : A l’égard des fermages
antérieurs à l’an 3 , et qui ne sei'oient pas déiinitivëment soldés, les à-comptes payés en assignats , antérieu
rement à la publication de la loi du i 5 germinal a n ^
et en mandats , entre la publication de ladite loi et celle
de la loi du 18 fructidor suivant, seront imputés francs
pour francs, et valeur nominale.
\
�(3 0
. S’il y avoit omission et erreur de la part des arbitres ?
en ce qu’ils n’ont point porté les deux années du b a il,
il y auroit aussi erreur et omission en ce qu’ils n’ont point
compris les indemnités, dont il n’est point également
fait mention.
On ne prétendra sans doute pas que le sieur Rixain
doive faire raison de î’entier prix du bail et n’être pas
indemnisé de la non-jouissance ; qu’il doive être privé de
la chose et du prix : on ne dira pas non plus qu’il ne les
ait pas demandés , qu’il en ait fait grâce. L ’acte du 4
messidor prouve le contraire ; E t aprè^ avoir, est-il dit^
discuté article par article, tant en raison du dédom
magement des objets supprimés par les décrets qu’au
trement.
Et ces indemnités ne sont pas un objet modique.
A Montrodès, les percières seules, au payement des
quelles les particuliers se sont constamment refusés et se
refusent encore, d’après l’état donné par la dame de Villemont , et signé d’elle, se portoient à deux cents setiers seigle
et cent setiers avoine, sans parler des autres droits féo
daux. On a vu en quoi consistoient les droits de la terre
de Villemont en directe ou en dîme inféodée.
Il faudroit donc au moins revenir à un compte généralj
mais ce n’est pas ce que les héritiers Villemont demandent.
En revenant à un compte gén éral, il ne seroit plus
question de la remise que le sieur Rixain a faite,par l’acte
du 4 messidor, de la somme de 6000 francs; et ils enten
dent bien profiter de cette remise.
En revenant à un compte général, il faudroit remettre
les parties au même et semblable état qu’elles etoient
�( 32 )
avant le jugement arbitral, avant l’acte du 4 messidor;
et ils veulent bien profiter des dispositions du jugement
qui leur sont avantageuses.
Ils n’entendent pas mal leurs intérêts.
S’ils réussissoient dans leur prétention, ils feroient
payer deux fois au sieur Rixain la somme de 24000 fi-ancs,
montant du prix des deux années du bail;
Une première fois, par la déduction qui en a été faite
lors de l’acte du 4 messidor an 2; sans laquelle déduction
la dame de Villemont auroit été obligée de se reconnoître
débitrice d’une somme de 5oooo francs , au lieu d’une
somme de 26000 francs :
Une seconde fois, s’ils parvenoient à absorber, et au
delà, par cette même somme, celle de 21363 francs à
laquelle a été r é d u it e l ’ o b l ig a t io n de 26000 francs; obli
gation qui n a été elle-même contractée que déduction
faite du prix des six années du bail.
Ils ne bénéficieroient pas peu.
Ils bénéficieroient,
i° . De la somme de 24000 fr. par le double emploi;
2°. De la somme de 6000 francs par la remise que le
sieur Rixain a faite ;
\ 30. De la réduction faite par les arbitres des payemens
et avances en deniers faits par le sieur R ixain , d’entre
le 4 janvier 1791 et le mois de mai 1793» conformém ent au troisièm e considérant j réduction qui n’auroit pas dû a v o i r lieu ; si le sieur Rixain avoit été d’un
autre côté débiteur de partie du prix du bail , d’après
les articles ci-dessus cités de la loi du 9 fructidor an 5 ,
tous les payemens par lui faits devant etre, d’après ces
articles,
�( 33 ).
articles , principalement d’après l’article 29 , impùtés
valeür nominale ;
40. D ’une autre somme de 3000 francs, par l’imputa
tion faite par les mêmes arbitres des sommes reçues des
sous-fermiers de Montrodès, en assignats presqu’entièrement discrédités , non sur la valeur prim itive, mais sur
la valeur réduite de l’obligation.
On ne peut faire qu’un vœu pour eux; c’est de leur
désirer beaucoup de baux h. ferme de ce genre.
En déduisant la somme de 24000 francs, montant des
deux années du bail, sur celle de 21363 francs, montant
de la condamnation prononcée en faveur du sieur Rixain
par le jugement arbitral, celui-ci se trouveroit débi
teur d’une somme de 2637 francs; et ils n’en ont
point formé demande; ce qui doit donner la mesure de
la confiance qu’ils ont eux-mêmes dans leur cause.
Relativement aux prétendus mésus, il n’y a qu’un
mot ; on désavoue.
Si le sieur Rixain avoit été repréliensible à cet égard;
s’il avoit c o m m is les dégradations dont 011 se plaint,
qu’on évalue modestement à i 5ooo francs, la dame de
Villemont ne les auroit-elle pas fait estimer? n’enauroitelle pas déduit le montant lors de l’obligation du 4 mes
sidor an 2? ne s’en seroit-elle pas du moins fait réserve ?
Les adversaires eux-mêmes, lorsqu’ils ont plaidé sur la
réduction de l’obligation, n’en auroicnt-ils pas demandé la
déduction sur la valeur réduite? en auroient-ils fait grâce ?
Il n’y a au surplus qu’ une créance liquide qui puisse
suspendre l’exécution d’un titre paré, d’un titre exécutoire.
JÎd dernière ressource, les adversaires attaquent de n u llité
E
�( 34 )
le commandement ; et voici sur quoi ils fondent la nullité
Le commandement, disent-ils, a été fait le 6 nivôse
an 10 ; il a été fait à la dame de M ario l, comme ha
bitante de la ville de Clermont, parlant à sa personne,
et non à sa domestique. A cette époque, la dame de
M ariol étoit en puissance de mari : le sieur de Mariol
n’est décédé que postérieurement à ce commandement;
il étoit domicilié à M ariol, département de l’A llie r ,
et non à Clermont. En droit, la femme, même séparée
de biens , n’a d’autre domicile que celui de son mari.
M ais, sans entrer dans aucune discussion à ce sujet,
le commandement n’a pas été fait seulement à la dame
de Mariol ; il a été fait aussi aux autres cohéritiers. On ne
l’attaque point de nullité à l’égard de ceux-ci, et cela suffit.
Par jugement de la cour de cassation, du 18 prairial
an I I , rapporté au jo u r n a l de Denevers, an 12, pag. 49,
il a été jugé qu’il n’etoit pas nécessaire que la poursuite fût
dirigée pour une dette du défunt contre to u s les cohé
ritiers ; qu’elle pouvoit être dirigée contre un seul pour
le tout par la foce de l’hypothèque, surtout pendant
l’indivision. C’est par le même principe que le Code civil
décide , n°. 2207, que la discussion du mobilier n’est pas
requise avant l’expropriation des immeubles possédés par
indivis entre un majeur et un mineur ou interdit, si la
dette leur est commune.
P A G È S - M E I M A C , jurisconsulte.
M A L L E T , avoué.
A RIOM .
de l’imprimerie de L a n d rio t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. - Thermidor an 1 3
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rixain. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac
Mallet
Subject
The topic of the resource
assignats
ferme
bail
arbitrages
jugement arbitral
cens
compensation
droits féodaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Rixain, propriétaire, habitant de la ville de Clermont-Ferrand, intimé ; Contre dame Françoise Véni de Villemont, veuve de sieur Antoine Sicaud de Mariol ; sieur Paul de Ribeyre aîné ; François-Gaspard-Melchior-Balthazar Véni du Theix, appelans ; Et contre dame Anne-Françoise Véni de Villemont, épouse du sieur Dunoyer du Sauvage, autorisée en justice ; Le sieur Dunoyer du Sauvage, le sieur de Villemont aîné, habitant du lieu de Jayet, commune de Saint-Genest, assignés en déclaration de jugement commun.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1787-1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1617
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1616
BCU_Factums_M0742
BCU_Factums_M0327
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53291/BCU_Factums_G1617.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Villemont (terre de)
Teix (terre de)
Montrodeix (terre de)
Clermont-Ferrand (63113)
Saint-Genès-Champanelle (63345)
Orcines (63263)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
assignats
bail
cens
compensation
droits féodaux
ferme
jugement arbitral
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53292/BCU_Factums_G1618.pdf
46ea1a9ff5727376af9fc9610fafe33d
PDF Text
Text
P
R
E
C
I
S
P O U R
Mademoiselle D ’ A L B I A T .
S ’ i l est vrai que la gloire d’une femme soit d’être
ignorée, et que celle dont on a parlé le moins ait le mieux
vécu , combien cette o b scu rité d e v o it surtout être chère
à u n e jeu n e p erso n n e qui n’etoit jamais sortie , pour
ainsi dire, de l’ombre des ailes de sa mère!
Q u’il lui en a coûté d’attirer tous les yeux sur elle par
une démarche publique, et de paroître tout à coup au
grand jo u r, sans s’être préparée à en soutenir l’éclat!
Pourquoi un père qu’elle a toujours ch éri, ne lui a-t-il
pas épargné cette douleur? Faut-il qu’il s’oppose seul à
un mariage qu’une mère éclairée approuve, que toutes
les convenances autorisent?
Sa fille ( ne fît-elle même que céder aux m o u v e m e n s
d e son cœ ur) peut-elle craindre la censure publique,
lorsqu’elle m arche? sous la conduite de sa m ère, à un
i
�▼
\
\ <;
( 2 }
établissement légitime? et n’est-elle pas assurée de la pro
tection de la justice, quand elle suit la route que les lois
mêmes lui ont tracée ?
Mademoiselle d’A lbiat sort d’une famille ancienne, et
distinguée dans la magistrature. Son père occupoit, avant
178 9 , la place de procureur du roi pi-ès de la séné
chaussée de Clermont. Il avoit plus de 200000 francs de
bien lorsqu’il épousa mademoiselle D u p u y, qui lui ap
porta une dot de 67000 francs argent com ptant, somme
alors considérable. Ce mariage a donné le jour à trois
enfans, deux fils et une fille.
L a nature et la fortune sembloient promettre un heu
r e u x avenir à cette jeune personne...........A u jo u r d ’h u i la
dot de sa mère est la seule ressource de ses frères et la
sienne ; il faut que sa mère la nourrisse , et que la justice
décide de son établissement.
Mademoiselle d’A lbiat eût supporté les re v e rs de la
fortune sans murmure : mais elle étoit réservée à des
-coups plus cruels et plus sensibles.
Depuis la révolution , M . d’A lbiat a presque toujours
vécu à Paris. Sa fille habitoit Clermont avec sa m ère;
elle ne l’a jamais quittée. C ’est sa mère qui a dirigé son
éducation : elle doit tout à sa tendresse ; et au milieu de
ses peines il lui est doux de pouvoir lui oifrir ce témoi
gnage public de reconnoissance.
Madame d’Albiat a cru devoir demander à être séparée
de biens d’avec son mari. La séparation a été prononcée
il y a trois ans par un arrêt de la cour de Riom.
11 a suffi que cette décision ait été pénible à M. d’A lbiat,
pour affliger le cœur de ses enfans. Mais un chagrin plus
�(3 )
v if les aftendoit : madame d’A lbiat a depuis jugé à propos,
malgré leurs instances réitérées, de demander à. être sé
parée de corps d’avec leur père. Cette demande est au
jourd’hui pendante en la cour de R iom ; et déjà un arrêt
provisoire y a été rendu, qui remet les tristes victimes
de la désunion de leurs parens à la garde de leur m ère,
et ordonne que M . d’A lbiat ne pourra se présenter chez
son épouse que de son consentement.
Cependant mademoiselle d’A lbiat touchoit à sa vingtunième année, et sa famille s’occupoit de son établisse
ment.
C’est dans ces circonstances, que M . Dufraisse de V e rnines, fils du dernier avocat général à la cour des aides,
et lieutenant avant 1789 dans le régiment d’Austrasie ,
a demandé la main de mademoiselle d’A lb iat, dont le père
étoit alors à Paris.
M . de Vernines n’est point riche, mais sa fortune est
à peu près é g a le à c e lle de m ad em o iselle d ’A lb ia t ; et peutêtre d e v o it-o n lu i s a v o ir quelque g r é de chercher à s’allier
à u n e fa m ille malheureuse.
Séparée de ses fils, qui tous deux sont éloignés d’e lle ,
madame d’A lbiat a cru avoir besoin d’un appui, plus
encore pour sa fille que pour elle. E lle a agréé la de
mande de M . de Vernines; et mademoiselle d’A lb ia t,
encouragée par l’aveu de sa m ère, n’a pas été insensible
à ses soins.
Assuré du consentement de madame d’A lb ia t, M . de
Vernines s’est occupé d’obtenir celui de M . d ’A lb ia t. II
lui a fait écrire par M . T ron et, son ami. Que de dé
marches 11’a-t-il pas faites, que de respectueuses sollicita-
�C 4: )
fions n’a-t-il pas employées à son retour! Il a fait agir
sa famille entière, aussi estimée qu’estimable ; il eu re
cours à des parens communs; il a eu différentes entre
vues avec M . d’A lb ia t , chez lui et chez M . Tronet.
Ces démarches avoient lieu au mois d’octobre dernier.
M . d’A lbiat n’avoit point alors de prévention contre
M . de Vernines; il ne s’opposoit point à son m ariage,
et n’y mettoit qu’une seule co n d itio n ... que madame
d'A Ibiat jeter oit au f e u Us pièces du m alheureux procès
en séparation de corps, qui afïïigeoit également, et ses
enfans, et celui qui aspiroit à le devenir.
’ Ce fait, qui est de la plus haute importance, puisqu’il
justifie à la fois M . de Vernines des reproches qui lui
ont été faits depuis, et mademoiselle d’A lbiat de sa perseverance dans un choix dTabord approuvé par son père,
M. de Vernines le prouvera, si la cour de Riom l’or
donne ,
i° . P ar des lettres des parens com m uns;
2.°. Par la déclaration que feront M M . M artillat de
Chabanes , et V ig ie r , de Clermont , que M . d’A lbiat
les a chargés de faire cette proposition à M . de Yernines,
T o u t ce que pouvoit faire un homme délicat, pour
y répondre, M . de Vernines l’a fait. Mais mademoiselle
d’A lbiat et lu in ’avoient que le droit de prier : ils en ont
bien fait usage; de si doux motifs les animoient! Et si
leur malheur a voulu qu’ils n’aient pu encore ménager
une réconciliation qu’ils désirent également, c’est que
le succès ne couronne pas toujours les plus tendres et
les plus justes projets des enfans.
L e cœur d’un bon père çst un asile où il ne faut
�( 5)
jamais désespérer de pénétrer. A u moment même où
M . de Vernines tentoit mille moyens respectueux pour
toucher le cœur de M . d’A lb ia t, dans le temps où sa
fille, qui en connoissoit tous les chemins, y faisoit chaque
jour de nouveaux progrès, tout à cou p , par une fatalité
inexplicable, M . d’A lbiat s’a ig rit, s’irrite , et bannit sa
fille de sa présence; il déclare ( qu’il en coûte à made
moiselle d’A lbiat de te répéter! ) il déclare à M . Escot,
son on cle, que si elle reparoît chez lui il la -mettra de
hors à coups de pied.
On avoit fait entendre à M . d’A lbiat qu’il ne convenoit
point qu’il donnât sa fille à un émigré ; on lui avoit in
sinué que M . de Vernines aigrissoit madame d’A lb ia t,
loin de chercher à l’adoucir.
Trom pé par ces faux rapports, M . d’A lbiat a refusé
son consentement à M . de Vernines de la manière la
plus absolue, et avec des emportemens sans doute étran
gers à son caractère.
L e s recherches de M . de Vernines étoient publiques :
toute la famille de mademoiselle d’A lbiat les approuvoit
et les encourageoit. T o u t étoit convenable dans cette
alliance; la naissance, la fortune et les conditions étoient
à peu près les mêmes : il étoit évident que M . d’A lbiat
n’avoit contre M . de Vernines que des préventions que
le temps devoit dissiper. Mademoiselle d’A lbiat a cru
pouvoir suivre les inouvemens de son cœur, et user da
droit que lui donnoit sa majorité. Madame d ’A lb ia t a
déclaré par écrit ( l’acte est produit au procès ) qu’elle
approuvoit et autorisoit le mariage; et avec son autori
sation sa fille s’est décidée à présenter à son père des
actes de respect.
3
�c o
Mais en vain le Gode civil, en vain le rédacteur du
nouveau Code de procédure, dont elle a une consulta
tion, la dispensoient de présenter elle-m êm e ses actes
respectueux. . . . Mademoiselle d’A lbiat n’a consulté que
son c œ u r .. . . elle a voulu accompagner le notaire chez;
son père : elle a cru que sa v o ix , jusqu’alors si agréable
à son oreille, donneroit plus de force à ses prières. Dans
cette id é e , elle s’est rendue présente aux trois actes res
pectueux . . . . mais inutilement.
Mademoiselle d’A lbiat le déclare ici ; elle ne sait pas
ce qu?elle n’auroit point f a it , pour éviter de commencer
contre son père le pénible apprentissage des procès.
M algré ses amis, malgré sa fam ille, après son dernier
acte de respect d u 4 mars, elle étoit déterminée à at
tendre que le temps ramenât son père à l’avis de madame
d’Albiat. E lle respiroit ces mêmes sentimens q u i, deux
mois après, ont dicté la lettre qu’elle joint à ce p récis,
lorsque son père l’a conduite lui-m êm e aux pieds des
tribunaux, et a appris à leurs ministres le chemin de la
maison de sa fille , par un acte d’opposition à son mariage,
signifié par huissier le 3 avril dernier.
Mademoiselle d’Albiat a été forcée d’en demander la
mainlevée, et le tribunal de Glermont a rejeté sa d em an d e
par un jugement du I er. m ai, qui déclare n u ls et irres
pectueux les actes de respect p résen tés par la fille ; et
Statuant ensuite su r le fond, m a in tie n t l’opposition formée
par le père. Mademoiselle d’A lbiat a interjeté appel de
ce jugement par exploit du 30 mai dernier; e t, confor
mément à l’article 178 du Code c iv il, portant « qu’en
« cas d’a p p el, il y sera statué dans les dix jours de la
�( 7 )
& citation , » une audience extraordinaire a été fixée ,
pour la plaidoirie de la cause, au lundi 9 juin prochain. "
Mademoiselle d’A lbiat n’ayant destiné ce précis qu’à
détruire les préventions qui pourroient s’élever contre sa
cause, elle se bornera à de courtes observations qui seront
développées dans la plaidoirie.
Il est certain qu’il est un, âge où la raison , affranchie
des liens de l’enfance et mûrie par les feux même de
la jeunesse, devient capable de nous guider dans le choix:
d’un état, et dans celui d’une compagne qui embellisse nos
plaisirs et console nos peines. Cette époque a été fixée
par le Code civil à vingt-cinq ans pour les hommes ; à
l’égard des filles, chez qui la nature suit d’aulres lo is , et
qui hors du mariage ont rarement un état, la majorité
a été justement rapprochée à vingt - un ans. Institué par
la nature meme comme premier magistrat dans sa fam ille,
c’est le père surtout que la société interroge pour qu’il
lui réponde que son fils ou sa illle mineure apporte
au co n tra t solen n el du mariage un consentement vrai,
solide et éclairé; mais à la majorité , l’autorité des pères
f i n i t , leur consentement n’est plus indispensable , et leurs
enfans ne leur doivent plus qu’un témoignage aussi légi
time que doux de respect et de déférence.
Telles sont presque les expressions de l’orateur qui a
fait le rapport de la loi sur le mariage. L ’article 148 du
Code civil en est le résumé. Cet article porte que « la
« iille qui n’a pas atteint l’âge de vingt et 1111 ans accoin« plis ne peut se marier sans le consentement de son père
K et de sa mère. » D ’où il su it , p a r un raison n em en t
contraire, que passé cet âge le consentement des parens
n’est plus nécessaire.
,
4
�r* .
(S y
. Ce principe -souffre deux exceptions , toutes deux dé
terminées par le Code civil (articles i 5 i 3 iÔ 2 ); l’une
que les enfans aient présenté trois actes respectueux et
formels à leurs père et m ère; l’autre que ces derniers
n’aient point formé opposition au mariage ( art. 17 3 ),
o u , ce qui est la même chose, que cette opposition ne
soit pas fondées
O r , mademoiselle d’A lbiat a présenté des actes de res
pect à son père ; et l’opposition qu’il a mise à son mariage
est sans fondement.
Il est certain qu’il y a eu des actes respectueux présentés
par mademoiselle d’A lbiat les 26 décembre , 29 janvier y
et 4 mars dernier.
Quel reproche leur fait-on ? On a jugé qu’ils n’étoient
pas l’espectueux. S’ ils ne le sont pas, l’intention de made
moiselle d A lbiat auroit donc lucn: été. trompée ! !M.ais il
suffit de les lire pour se convaincre du co n tra ire : l'af
fection et la douleur respirent dans chaque ligne.
On a critiqué les mots sommé et interpellé, par les
quels le notaire les termine : mais la cour de Rouen a pré
cisément ju g é , le 6 mars d ernier, que ce mot sommé
n’étoit point prohibé par la loi , et qu’il n’avoit rien de
choquant, puisqu’il se trouvoitaccompagné desplus hum
bles supplications.
On prétend que dans les deux premiers actes , made
moiselle d’A lbiat demande seulement le consentement et
non le conseil de son père. On dit que le Code civil exige
e x p r e s s é m e n t la demande du conseil; que ses termes sont
s a c r a m e n t e ls ' en cette matière ; et par ces raisons on annulle les trois actes.
�( 9 )
Cependant le troisième renferme expressément ce mot
conseil, comme le jugement le reconnoît; et il semble que
l’omission faite dans les deux premiers soit ainsi réparée ;
il semble ensuite qu’il est bien plus respectueux de deman
der le consentement d’une personne que son conseil, car on
peut suivre ou mépriser l’avis qu’elle donne : mais deman
der son co n se n te m en t, c’est annoncer qu’on en a besoin ,
que du m oins 011 y attache le plus grand prix. L ’une de ces
démarches est un témoignage d’estime, la seconde est une
preuve de respect et de soumission. Il est même évident que
le législateur a choisi le mo l conseil pour les majeurs, com me
plus foible et opposé à celui de consentement pour les
mineurs : c’est ce qui résulte du rapprochement de l’ar
ticle 148 avec l’article i 5 i , et des procès verbaux du con
seil d’état. D ’ailleurs, si l’article i 5 i renferme le conseil,
l ’article suivant dit expressément que s’il
a pas de
consentement sur le premier acte, 011 passera à un se
cond, etc. Donc ce n’est pas une nullité dans l’acte d’y avoir
employé le terme de consentement dont fait usage la loi.
Et qu’importe qu’on ait demandé à M . d’A lbiat son con
sentement plutôt que ses conseils, puisqu’il a refusé le pre
mier et donné les seconds avec toute l’étendue qu’il a jugé
a propos d’y mettre. Enfin le Code civil 11’a point donné
de formule qui puisse servir de modèle aux actes de res
pect qu’il exige. Dans ces circonstances , il semble qu’il
faut suivre les anciennes formes : c’est précisément ce q u i
a été observé ; et les actes respectueux présentés par made
moiselle d’A lbiat ont été copiés mot pour mot sur Ie-modèle donné il y a trente ans par l’aulcur delà Procédure
du cliatelet, chargé aujourd’hui de lu rédaction du nou
�veau Code de procédui’e. M . Pigeau sans doute écrivoit
dans un temps où l’autorité paternelle étoit au moins aussi
respectée qu’aujourd’hui.
Si les actes présentés par mademoiselle d’A lbiat sont
réguliers, il ne reste plus qu’à prouver que l’opposition
de son père n’est point fondée.
On peut dire en général que les pères n^ont point le
droit de s’opposer au mariage de leurs enfans majeurs.
Ce principe se prouve par raison et par autorité. Par
raison, parce qu’il vient un temps où l’homme est ou
doit être en état de marcher seul dans la route de la
vie ; parce que la nature l’a rendu lib re , et que la société
seule lui ayant imposé des liens dans le plus naturel comme
le plus donx de tous les actes, la société peut l’en affran
chir quand elle le iuge propos, et n’a pas- le droit de
le retenir dans une éternelle dépendance.
L ’autorité vient ici à l’appui de la raison. Tous lèspeuples ont proclamé la liberté absolue des mariages après
k majorité. « A cette époque, dit l’éloquent Portalis,
« les enfans, soit naturels, soit légitim es, deviennent
« eux-mêmes les arbitres de leur propre destinée; leur
« volonté suffit à leur mariage, ils n’ont besoin du con« cours d’aucune autre volonté. »
« Q u’entend - on , se demande M. de M alleville( sur
« l’article i 58 du Code civil ) , par ces mois : Etre,?'ehr-
« twemeut
a
«
«
«
au mariage
,
sous la puissance d cti/trui?
Des auteurs récens, d it-il, sont partagés sur celte question ; les uns pensent que les descendans y sont à tout
â g e , et tant que leurs père et mère vivent; Jes autres
pensent au contraire que cette puissance cesse lorsque
�SSJ
( n )
« les garçons ont vingt-cinq ans, et les filles vingt-un.
« Je suis de l’avis de ces derniers. Après cet Age, les
« enfans peuvent se marier sans le consentement et
« contre le gré de leurs parens. Ils ne sont donc plus
« sous leur puissance à cet égard, seulement ils sont
« obligés de requérir ce consentement : mais ce n’est
« qu’une déférence, qu’ une marque de respect que la loi
« leur impose ; et après l’avoir rem plie, «ils peuvent se
,« marier malgré leurs parens. »
Enfin M . P o th ier,d an s son Traité du contrat de ma
riage, art. 3 4 1, décide que le père n’est pas même fondé
à s’opposer au mariage de son fils majeur. C’est ce qui a
«été ju gé, d it-il, par un arrêt du 12 février 1 7 1 8 , rap
porté au 7e. tome du Journal des audiences, qui donne
congé de l’opposition formée par un père au mariage de
-son fils, âgé de vingt-six ans. ( Il faut observer que le fils
n’avoit pas même présenté d’actes respectueux. )
M ais, d ir a - t - o n , si les enfans majeurs sont les maîtres
.absolus de leur destinée, pourquoi l’article 173 du Code
autorise-t-il les pères et mères à form er opposition à leur«
^mariages? Pour plusieurs raisons; pour forcer les enfanG
à présenter des actes de respect, quand ils ont manqué
-à ce devoir ; pour empêcher les mariages prém aturés, ou
dans les degrés prohibés ; enfin, si l’on veu t, pour re
tarder , mais retarder seulement., lesmariagesdéshonorans
et honteux.
Car ni les pères , ni les tribunaux qui les r e p r é s e n t e n t ,
ne sont les maîtres d’empêcher l’établissement d’un ma
jeur.; on ne peut qu’y faire naître des obstacles , qu’y
.apporter des délais. L a loi ne peut contrarier la natiuyü
�( 12 )
que jusqu’à un certain point, et la nature veut que les
mariages soient libres.
k L e législateur , disoit M . Bigot de Préameneu au
« conseil d’état, a voulu concilier ce qui est dû aux parens
« avec les droits de la nature. C’est déjà assez d’un délai
cc de quatre mois apporté au mariage par les trois actes
cc de respect. Il pourroit résulter d’un plus long retar« dement des désordres scandaleux qu’il faut prévenir.
« Il est difficile d’imaginer que quelques mois de plus
« suffisent pour calmer les passions, soit qu’il s’agisse de
« faire revenir des parens de préventions mal fondées, ou
« de ramener des enfans.
« D ’a ille u r s , il importe de ne pas perdre de vue, continue
k M . B i g o t , q u e l ’ une des familles est dans une position
cc désagréable, et que le vcius de consentement ne doit
cc pas ctvc un obstacle de tiop lo n g u e d u ré e au mariage
« que la loi autorise. »
V oilà sans doute des motifs qui ont dicté les art. 177
et 178 du Code civ il, qui veulent que les premiers juges
statuent dans les dix jo u rs, et les magistrats supérieurs
dans le môme délai, sur la demande en mainlevée d’op
position.
Cependant le tribunal de Clermont a pris sur lui d’empôcher à jamais le mariage de mademoiselle d’Albin t avec
M . de V ernin cs; car il a m ain ten u p u re m e n t et simple
ment l’opposition d e M . d ’A lb ia t .
C ’est déjà un grand abus de pouvoir que les magistrats
supérieurs doivent réprimer pour l’avenir. Mais encore,
sur quel motii est-il fondé ? Sur un fait iaux, et sur une
conséquence absurde tirée de ce fait.
�' S iï
( *3 )
* O n a prétendu qu’il résultait de la discussion de la
cause, que le mariage avoit été projeté, il y a tro is ans,
entre mademoiselle d’A lb ia t, sa mère et M . de Vernines,
de l’agrément de madame de Vernines m ère, et à l’insçu
du sieur d’Albiat. D e là on conclut que le consentement
de. la jeune personne ne peut être que Veffet de la cap
tation , et que cette captation s est dévoilée à la pre
mière heure de la m a jo rité, par les actes de respect
signifiés ci M . à?JLlbiat.
M a d e m o ise lle d’A lbiat déclare que le fait sur lequel
est fondé ce raisonnement est faux. Il n’est point v r a i,
et on n’a jamais dit pour elle, que son mariage fut projeté
il y a trois arts à Vinsçu de son père.
Mais le fait fût-il vrai, depuis quand est-il défendu à
une mere de faire des projets d’établissement pour sa fille,
lorsque son père est absent ? Et par q u e l éti’ange ren
versement de tous les p rin c ip e s p e u t-o n traiter de capta
tion de sem b lables p r o je t s , et soutenir que cette capta
tion en minorité détruit un consentement donné en ma
jorité ? N ’importe que le mineur ait été trompé en
minorité (ce qui n’a été ni projeté ni exécuté ic i) , lorsque
devenu majeur il ratifie les traités qu’il a passés.
Si le seul m otif d’opposition adopté par le tribunal de
Clennont entre tous ceux que M . d’Albiat propose, est si
foible et si déplorable, que penser de ceux qui n’ont
pas été accueillis, et qui sont des objections relatives h
lage ,à la fortune, et memeMa santé de M . de V e r n in e s ,
et du nombre de ces exagérations que tout h o m m e peut
se permettre dans le monde en p a rla n t d’un établissement
qu il désaprouve , mais qui ne peuvent faire aucunc im
pression sur des magistrats?
�C *4 )
Sans doute on a trompé M . d’A lbiat sur le compte de
M . de Vernines : des inspirations étrangères l’animent ;
il sait bien , et on prouvera qu’il avoit d’abord consenti à
la demande de M . de Vernine3.
On l’a déjà dit, il n’y mettoit qu’une seule condition dont
il fit part à M M . de Martillat et V ig ie r , c’est que madame
d’A lbiat anéantirait sa procédure en séparation de corps.
A - t - i l dépendu de M . de Vernines de satisfaire M .
d’A lbiat ? Ses désirs étoient les siens. 11 se compte déjà
au nombre de ses enfans; il gémit d’une désunion qui les
afilige tous : mais il ne peut que gém ir..... Il souffre des
préventions de M . d’A lbiat ; mais , d it-il, c’est en faisant
un jour le bonheur de sa fille qu’il espère de les dissiper.
Quant à mademoiselle d’A lb ia t, assurée de la protec
tion de la justice, sans inquiétude sur l’opinion publique,
p u i s q u ’ e l l e est conduite comme p a r la m a in p a r sa m èrej
par sa mère qui a fait son éducation , par sa mère de qui
désormais elle attend toute sa fortune, par sa mère aux
soins de laquelle de sages magistrats l’ont confiée, par sa
inère enfin qui a tant d’intérêt à veiller à l’établissement
d’une fille avec laquelle elle est destinée à vivre ; qu’at-elle à d ésirer, que de vo ir son père se rapprocher de
celte mère chérie, et pour son mariage, et pour toujours ?
C ’est sans doute quand les fortunes sont se m b la b le s , les
conditions égales , les principes sûrs, l’estime x’cciproque,
le caractère éprouvé •, quand une longue persévérance est
devenue pour celle q u i met le plus dans la société le gage
d’un attachement solide ; quand le cœur respire sans gêne
dans le plus doux des engngemens; quand une mère ten
dre et prudente a parlé , c’est alors qu’il est permis à une
�ïille soumise et respectueuse de presser, de solliciter, d’es
pérer le consentement d’un bon père !
D u m oins, mademoiselle d’A lbiat a la consolation de
penser qu’elle n’a rien négligé pour l’obtenir. Que pouvoit-elle faire que de supplier ? et quelles supplications
plus touchantes que celles qu’elle a adressées à M . d’A l
biat, dans sa lettre écrite la veille de l’audience de Clerm ont, où elle a été lu e , et dont voici la copie :
L
A CJermont, ce 27 avril 1806.
M
ON CIIEÏl T A P A ,'
n’est-elle plus votre sang , n’est-elle plus votre fille ?
qu’a-t-elle fait pour mériter votre courroux? sa tendresse , son
respect ne furent-ils pas toujours les m êm es à votre égard ?
Mon papa, laissez-vous fléch ir; c ’est à g e n o u x , et les larmes
aux y e u x , que je vous en s u p p lie : a c c o r d e z un consentement
dont dépendent mon b o n h e u r e t ma tranquillité ; bénissez une
u n io n à l a q u e l l e vous ne répugnâtes pas toujours , et que les
circonstances présentes nécessitent ; car vous savez bien quelle
est la perspective d’ une demoiselle demandée publiquem ent,
et dont le mariage ne se fait pas. Bénissez une union qu’il me
seroit bien plus doux de devoir à votre tendress^^pi’à l’auto
rité des lois. Les mœurs et la probité de M. de Vernines sont
connues : vous lui avez rendu justice dans un tem ps; pourquoi
ne la lui rendez-vous plus? qu’a - t - i l fait pour mériter votre
haine ? Sa fortune n’est-elle pas à peu près égale à la m ienn e,
et son alliance est-elle clans le cas de me déshonorer ? Mais je
vous rends ju stice, mon cher papa, cette haine n’est p a s de
v o u s, des m é d i a n s l’ont suggérée ; ils ont noirci à v o s yeux
un homme d honneur, et ont voulu m ’enlever yotre tendresse»
J u lie
�( 16 )
Oh ! o u i, vous vous laisserez attendrir, et arrêterez le déses
poir d' une fille respectueuse , que le concours des circonstances
force de plaider avec un père q u 'e lle chérit. Pardonnez-m oi,
si j’ai pu vous déplaire en quelque chose ; e t , de grâce , ne
me donnez pas en spectacle au palais, mardi prochain. Par
donnez a u ssi, si j ’ai cessé de venir vous rendre mes devoirs
chez vous ; les menaces de me b attre, si j’y revenois jamais ,
et dont mon oncle Escot chargé par vous fut le porteur, m’ont
seules épouvantée, et arrêté mes visites: mais je n’ai pas pour
cela cessé de vous chérir et respecter. Encore une fois je suis
à vos genoux , et les mains jointes. Mon cher papa, vous n’étes
pas méchant ; vous ne voudrez pas la perte et la honte de
votre fille. Bénissez et consentez à une union qui fait mon
bonheur, et qui un jo u r, je l’esp ère, fera votre consolation;
bénissez une union que les plus mûres réflexions me font dé
sirer , et auxquelles les temps les plus longs ne peuvent rien
changer. É v i t e z - m o i le chagrin de passer dans l’esprit public
pour une fille révoltée c o n t r e l ’a u t o r i t é paternelle; et à vousm ê me, un jour, la douleur d ’ y avoir forcé v o t r e pauvre fille J u l i e .
Puisse cette lettre, dictée par la piété filiale suppliante,
devenir un témoignage durable des efforts qu’a tentés
une fille respectueuse, pour éviter un procès qui lui a
coûté tant de pleurs!
' jJuu l l ii ee
/e
D ’A L B IA T .
L. J U L H E , avocat.
A. R IO M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
C our d ’appel. — Juin 1806.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Albiat, Julie d'. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Julhe
Subject
The topic of the resource
séparation de biens
séparation de corps
actes respectueux
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Mademoiselle d'Albiat.
Table Godemel : acte respectueux : lorsque dans les actes respectueux prescrits par l’art. 151 du Code civil, un enfant requiert le consentement se son père au lieu de lui demander son conseil, y a-t-il nullité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1805-1806
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1618
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0612
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53292/BCU_Factums_G1618.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes respectueux
séparation de biens
séparation de corps
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53293/BCU_Factums_G1619.pdf
2b0d78b520529aeae18dea072df8c85a
PDF Text
Text
cck
IlL~
^ '^ S S S S S S S S S S S S S S S S S ^ S S S S S S ÎS S S S S S k
M
É
'
M
O
;
- .1
I
>
R
E
POUR
G a s p a r d - R o c h M O M E T , propriétaire à P a ris,
intimé
CONTRE
^
J e a n - J o s e p h C R O Z E , sous-préfet de Brioude,
appelant ;
EN
d
’I g n a c e
P R É S E N C E
B E A U F O R T -M O N T B O IS S IE R
D E C A N I L L A C , appelant.
1
A c h e t e r un bien et le payer, s’obliger et remplir
ses engagemens, sont des opérations tellement vulgaires
qu’il n’y a nul mérite à les concevoir ; mais garder en
ses mains pendant dix ans la moitié du p rix de son ac
quisition , susciter à son vendeur procès sur procès, le
forcer à payer 65 ooo francs le domaine qu’on a acheté
de lui 36000 francs, et cependant lui soutenir qu’il a
vendu un second domaine sans l’avoir su , et sans en avoir
jamais été propriétaire; enfin répondre à u n e somma
tion de payement par dix chefs de demandes incidentes
�voilà une conception grande et instructive, un coup de
maître qui décèle le génie et les grandes inspirations.
Il en coûte singulièrement au sieur Momet de désigner
le sieur Croze comme coupable d’une telle conduite ;
mais réduit lui-même par le sieur Croze à se justifier de
n’avoir pas vendu le bien d’autrui, le sieur M omet est
dans"la dure nécessité de dire la vérité à la cou r, pour
sa propre défense.
F A I T S .
Par acte passé devant D eloch e, notaire à Paris, le 30
vendémiaire an 4 , le sieur de Canillac vendit au sieur
M omet le domaine dit de Chassaigne,
« C o n s is ta n t e n maison de ch ef, c o u r, jardin et dépen« dances, ensemble le s b â tim e n s nécessaires à l’exploitact tio n , le tout contenant c in q se p te ré e s deux quarte—
« ro n n é e ;
« Plus soixante septerées trois quarteronnées de terres
« labourables ;
« Plus vingt-une septerées de prés ;
« Plus cent vingt septerées de bois;
« Plus deux septerées deux quarteronnées de vigne ;
« Plus cinq septerées une coupée de terres incultes;
ce C e qui forme au total deux cent dix septerées une
« quarteronnée de terrain, ainsi que le tout se poursuit
« et c o m p o r t e , sans r é s e r v e , môme le mobilier v if et
« mort qui se trouvera d a n s ledit domaine appartenant
« a u d it vendeur, qui entend vendre audit acquéreur tout
« ce qu’il possède, et les droits (ju’il a et peut avoir dans
�(
3)
« ledit domaine et dépendances, à dix arpens près, en
« dehors ou en dedans. »
L a vente est faite moyennant 600000 francs de prix
apparent} dont l’acte porte quittance.
11 est dit que le domaine vendu appartient audit sieur
de Canillac, comme lui étant échu par le partage des
biens du sieur Pierre de Canillac, son oncle, et que le
vendeur s’oblige de remettre à l’acquéreur un extrait
dudit partage, de l’inventaire fait après son décès, du
contrat de mariage de lui Canillac, et du contrat de vente
de la terre de Beaumont.
Il est dit enfin que l’acquéreur se réserve les fermages et
produits de l’année 1794, et que l’acquéreur sera tenu
d’entretenir le bail ou traité fait avec le fermier dudit
dom aine, pour l ’année courante seulement (1 7 9 6 ).
L e sieur Croze, domicilié à B rioude, habitant a lo r s Paris
comme membre du conseil des cinq cents, ayant eu connoissance de cette a c q u is it io n , proposa au sieur M omet
de lu i v e n d i’c c e même dom aine, dit de Chassaigne,
a v a n t que ce dernier sût même en quoi il consistoit. L ’ac
cord eut lieu moyennant 36000 francs. Mais le sieur Croze
n’ayant pas la moitié du prix qu’il étoit convenu de payer
comptant lors de la signature de l’acte de vente, demanda
six semaines pour se le procurer, ainsi qu’une vente sous
signature p riv é e , laquelle lui fut consentie pour le se«/
domaine de Chassaigne. L e sieur Croze ne désavouera
cextainement pas ce fait.
L e sieur Croze alla à Brioude chercher ses fonds, et bien
probablement visiter l’objet qu’il avoit a c q u i s ; dès-lors il
A s
�(4 )
conçut le projet Refaire englober dans sa vente devant
notaire le petit domaine de la V éd rin e, qui étoit voisin de
celui de Chassaigne. D e retour, il convint de passer la
vente devant notaire, le 27 prairial an 4; mais il pria le
sieur Momet de lui donner en même temps une procura
tion générale pour gérer, administrer, même vendre ce
domaine de Chassaigne, sous prétexte qu’il ne vouloit pas
encore faire connoître sur les lieux son acquisition; ce que
le sieur Momet ne crut pas devoir lui refuser.
En conséquence le sieur M omet remit à M e. D eloche,
notaire du sieur C roze, le double du sous-seing privé, et
une expédition du contratàlui passé parle sieur de Ganillac,
pour qu’il rédigeât la vente et la procurationconformément
aux actes qu’il remettait. Ils le furent en effet; et le 27 prai
rial, jo u r p r is avec le sieur Croze, M e. Deloche vint chez
le sieur M om et, m u n i d e ces deux actes rédigés, et littéra
lement conformes au contrat d e v e n te que lui avoit passé
M . de Canillac. L e sieur Croze fit dire q u ’ i l n e p o u v o i t
venir ce jo u r-là , mais qu’il viendroit le 29. Néanmoins
comme il n’étoit nullement nécessaire de la présence du
sieur Croze pour signer la procuration convenue, le sieur
M om et en signa ce môme jour, 27 prairial, la m inute,
qui ne faisoit mention queduseul domaine de Chassaigne,
ne contenoit aucun ren voi, et l’approbation ne constatoit
que trois mots rayés.
L e 29 , M<\ Deloche et le sieur Croze se ren d iren t en
semble chez le sieur M omet pour la signature du con
trat de vente. Du 27 nu 29 , la minute n’avoit éprouvé
aucun changement , 11e contenoit aucun ren v o i, et ne
faisoit toujours mention que du seul domaine de Chas-
�( 5 )
5
saigne. Ce fut à la lecture de cet acte, que le sieur
Croze parvint à faire mutiler la première l'édaction , et
à faire ajouter quatorze renvois, tous plus insidieux les
uns que les autres. Bientôt la cour en reconnoîtra par
elle-même toute l’astuce et la perfidie.
D ’abord ce ne furent que de simples corrections de
quelques m ots, puis quelques changement de sens ;
enfin , des phrases entières vl rectifier. Il étoit d it,. par
exemple, que les fruits lui appartiendraient depuis les
dernières échéances : il prétendit que cela étoit vagu e,
quoique c o r r e s p o n d a n t à la première vente , et s’expli
quant par elle ; il voulut faire substituer 179^ et 1796.
IL n’avoit par sa vente qu’une quittance sans numération,,
et il voulut faire ajouter la, numération d’espèces. L e no»
taire eut la complaisance d’ajouter cette numération ; et il
est constant aujourd’hui qu’il ne paya alors effectivement
que moitié de soo prix.
Il prétendit n’être pas assez sûr de la propriété de
M . de Canillac ; il v o u lu t une rem ise de titres : que ne
vouloit-il pas ? E nfin , le sieur Croze aborda une clause
plus épineuse. Il prétendit que le domaine de Chassaigne,
quoique ne portant que ce nom , comprenoit un petit
domaine ou locaterie, appelé de la V é d rin e , qui en
étoit une dépendance; qu’autrefois ces domaines étoient
distincts et séparés; mais que depuis long-temps ils n’en
faisoient plus qu’u n , parce que dans l’un des deux do
maines les Mtimens d’exploitation étoient écroulés. (L e
domaine de la V éd rin e, dit-on, contient seul cent trente
septerées de. terre. )
C^e lait pouvoit être exact. L e sieur Momct n’en avoit
&
�(6 >.
aucune connoissance, et disoit seulement : « Je ne puis
« vous vendre que ce que j’ai acheté : puisqu’il n’est
« pas question de ce domaine dans mon contrat, je ne
cc puis en parler dans le mien ; s’il fait partie de mon
« acquisition, il fera partie de la vôtre. » Alors le sieur
Croze se retrancha à demander que , pour éviter
toute difficulté, et ne pas compromettre le sieur M om et,
il fut fait mention du domaine de la V édrine , comme
désigné seulement dans le contrat fait par le sieur de
Canillac au sieur M om et, sous le seul nom du domaine
de C/iassaigne. L e notaire fut d’avis de cette rédaction de
clause; parcë que, disoit-il, vous référant en tout à votre
contrat, si l’assertion du sieur Croze est vraie, vous ne
vous engagez à rien ; si elle est fausse, vous ne vous
engagez pas davantage. Vaincu par ce raisonnement
v r a i, le sieur M omet voulant en finir et toucher l’àcompte que le sieur Croze lui don n oit, consentit à cette
rédaction.
Il en fut de même de la clause par laquelle, après
celle de la garantie formelle qui est la même que celle
portée au contrat du 30 vendém iaire, le sieur Croze
exigea que le sieur Momet renonçât à tout excédant de
mesure, à quelque quantité qu'il puisse monter. L e sieur
Croze et son notaire dirent au sieur Momet : N ’entendezvous pas vendre tout ce que vous avez acquis ? Il en
convint : don c, dirent-ils, cette clause ne vous engage
ù x'ien.
Ainsi successivement furent vaincues les répugnances
du sieur M om et, q u i, habitant de Paris , ne connoissoit
pas ce qu’il ven doit, traitoit a^ec le sieur C ro ze, do-
�(7 )
J jfy
micilié de Brioude, qui connoissoit parfaitement ce qu’il
achetait, et toute l’étendue du cpntrat de veutè faite au
sieur M om et, dont il avoit sous lesyeux une expédition,
et depuis long-temps une copiée, 1 ^
La prévoyance du sieur Croze fut telle , qu’en deman
dant successivement les corrections ci-dessus , il étonnoit
d’autant moins le sieur ¡ M om et ,'q u e, s’il lui eût pré
senté à la fois, quatorze renvois à ajouter ; ce qui lui
' ôtoit toute idée d’exiger1,■comme alors il l’auroit fa itjhic>
sans doute, une refonte entière de l’acte , pour dévelop
per les additions faites , et expliquer des clauses- équivo
ques qui n’étoient ainsi écrites que pour s’identifier ù la
première rédaction.
Il fut inséré dans ce contrat quittance des 36000 fr.
et le sieur M om et, qui n’a rien dissimulé dans cette cause,
s’est empresse de convenir qu’il n’avoitreçu q u ’ une partie
de ce p r ix ; et qu’après le con trat, il fut fait un billet
de dépôt de 19650 f r . , souscrit par le sieur Croze au profit
du sieur M o m e t, dattî du i 5 praii'ial an 4* ( G etoit alors
le seul mode valable pour stipuler en numéraire. )
Quoi qu’il en s o it, pour que la cour ait sous les
yeux le résultat de ce qui vient de lui être d it , et voie
par quel art on peut surprendre un citoyen sans défiance,
voici l’image de la minute de la vente du 29 prairial
an 4 , d’après le vidimé oi’donné :
N o ta . T o u t ce qui se trouve entre deux crochets dans l’acte ciaprès, ainsi que dans la procuration, a été rayé dans les minutes.
orx
�N 1
(8)
t j Prairial 4.
PAh-D EvAN T i,es n o t Atres publics au déparlem ent
'Ct à la résidence de P aris, soussignés,
F ut présent Gaspard-Roch M om et, citoyen fran
çais, demeurant à P aris, place des Y ictoires-N ationa]es, section de la H alle au b lé , n . 5 ,
Lequel a par ces présentes, vend u, cédé, quitté
et délaissé, dès maintenant et à toujours, et a promis
de garantir de tous troubles, dons, douaires, dettes,
x et autres
f domaines de C h a s s a i
gne et de la V éd rin e, dé
signés seulem ent, dans le
contrat q u i sera ci-a p rès
hypothèques, évictions, substitutions, aliénations, x
empêchemens généralement quelconques,
A u citoyen Jean-Joseph C ro ze, homme de lo i,
demeurant à P a ris, rue des Saussayes, rr*. 1245,
section d e j [R ou] Cham ps-Elysées , à ce présent et
acceptant, acquéreur pour lu i, ses héritiers et ayans
ca u se,
L es -{■ domaine dit de Chassaigne, district de
B rio u d e , d é p a r te m e n t de H au te-L o ire, consistant
en une m aiso n de c h e f , b â tie à la m oderne, co u r,
jardin et dépendances, e n sem b le les b iitim ens néces
saires à l’exploitation, le tout contenant cinq septerées
énoncé, sous le seu l nom
du
trois quarteronnées [de terre labourable] ;
Plus soixante septerées trois quarteronnées de terre
labourable ;
Plus vingt-une septerées de prés;
Plus cent vingt septerées de b o is, tant taillis que
haute futaie, situées dans la commune de Chassaigne
et dans celle de Sansac ;
Plus deux septerées deux quarteronnées de vigne ;
et enfin cinq septerées une coupe de terrain inculte:
ce qui forme au total deux cent dix septerées une
quarteronnée de terrain, ainsi que le tout se poursuit
et comporte, sans aucune exception ni réserve, même
le mobilier v if et m c r l, de quelque nature qu’il so it,
qui se trouvera dans ledit domaine et'dépendances :
g« lu 11 lissa lit
�'» 3
k
garantissant en outre audit acquéreur les deux cent
+[ parleditvendeurrépeter ^*x septerées une quarteronnée, à dix arpons près,
contre Vacquéreur V é x cé- t cn dehors ou en dedans,] sans pouvoir +1 [répéter
dant desdites terres, h quel- 1 excédant.]
que quantité qu’ il puisse
Pour Par ledit C roze, ses héritiers et ayans cause,
monter.
jo u ir, faire et disposer dudit domaine en pleine pro
jet«
à®»
x notaires h P a ris
*^7$*
p rié té , et comme de chose leur appartenante , à
compter de ce jour, et en commencer la jouissance-4[ à compter des dernières échéances, de manière que
la totalité de la récolte des fermages et autres produits
dudit domaine appartiendra audit acquéreur;] ledit
-4- par les revenus et fe r - vendeur se réservant seulement les fermages de l ’année
mages des années m il sept mil sept cent quatre-vingt-quatorze ( vieux style ).
cent quatre-vingt-quinze e t
L e domaine présentement vendu appartient audit
m il sept cent quatre-vingt- cit. M o m et, comme Vayant acquis du cit. Ignace
se iz e , v ie u x s ty le ;
Beaufort-Canillac, par contrat passé devant D eloche,
iIu‘ en a ^a m inute, et son confrère, x le trente ven
démiaire dernier, enregistré à Paris le même jour.
A à la charge
L a présente vente est faite A par ledit acquéreur,
(IU* s’oblige, i°. de payer et acquitter les droits d’enMr'
registrement et frais de contrat auxquels la présente
y en te p ourra donner lieu; 2°. la contribution foncière
l’ an trois et l’ an quatre, à laquelle ledit domaine peut être imposé pour / [la
gs®’?
présente année] et les années suivantes; 3°. d’entre
tenir le bail ou traité fait [pour la présente année seu
lem ent] avec le citoyen ferm ier dudit dom aine, si
aucun il y a.
£$§3
E t en outre cette vente est faite m oyennant la somme
de tre n te -six m ille livres de prix principal, francs
deniers audit vendeur; laquelle somme ledit acquéreur
T nombrées et réellem ent a Prés™ lcm ent PaJ<* audit citoyen M o m e t, qui le
délivrées à la v u e des no- reconn oit> cn esPëces sonnantes 0 et monno.e ayant
taires soussignés,
cours ' comPtées + * dont
csl content, en quitte et
fi d’ or e t d’ argent,
�(
)
décharge ledit citoyen Croze , et de toutes choses re
latives au prix de ladite vente.
A u moyen de quoi ledit citoyen M om et a présente
m ent cédé et transporté, sous la garantie ci-d evant
exprim ée, tous droits de propriété qu’il a et peut avoir
sur ledit dom aine, de quelque nature qu’ils soient,
m ême tous droits rescindans et rescisoires, mais sans
aucune garantie à l’égard de ces derniers, voulant qu’il
en soit saisi et mis en possession par qui et ainsi qu’il
appartiendra, constituant à cet e ffe t, pour son pro-+- d ’opposition à Ventrée cureur, le porteur donnant pouvoir.
en possession dudit doIl sera loisible audit acquéreur d obtenir à ses frais,
m aine, +|
sur
P o sen t contrat, dans le délai de quatre m ois,
eSF-a
toutes lettres de ratification nécessaires; et si, au
sceau desdites lettres, il y a ou se trouve des oppo+1 ou de trouble fondé dans sitîons procédant du lait dudit vendeur ou de ses
la possession et jouissance auteurs, ledit citoyen M om et s’oblige de les faire
dudit domaine présente- lcvcr et cesser, et d’en rapporter audit acquéreur
m ent vendu, le cit. Mo??iet^QS ™ainie^ cs e<- radiations nécessaires, quinzaine
prom et et s ’ oblig e d’ en in- aPriiS la denonciatlon qui lui en aura été faite h son
demniser ledit cit. Croze, dom icile’ le lout auX ÎraiS dudit vcndei,r>de m a" ière
a i lu i fo u rn issa n t, dans <lue ledit »«juéreur ne soit tenu que du coût des
/’arrondissement des dé- simPles lettres de ratlf]cat|0n'
partemens de la H auteEn ca3 d’éviction, h - [dudit domaine présentement
L oire et du P uy-de-D ôm e, ventlu > lc cit* M om et promet de rendre audit cit.
des terresform ant corps de C roze, dans les départemens circonvoisins, des terres
fe r m e , et c e , à dire d’ e x - Pour la ™£-mc valeur, et ce, à dire d’experts, et non
perts, sans pouvoir par led it 'vendeur o ffrir, pour
l’ indem nité, le remboursem e n t du p r ix de lad. vente,
e t contraindre le cit. Croze
Ia somme (Iu’iI ™ nt dc recevoir.]
Reconnolt ledit cit. Croze que ledit e t . M om et lui
a présentement remis une expédition en papier du
contrat de vente susdaté et énoncé, fait audit cit.
M om cl i Plus l’expédition en papier de la transac-
ü Vaccepter.
11 “
^
tl0n Cn forn,e de PartaSe > faite entre ledit citoyen
Canillac et [la dame] sa sœur, passée devant M ony,
®
qui en a gardé m inute, et son confrère, notaires ù
•HH*
�fï(
( IT )
x incessamment
tfSfca
-ïüV4| et Varrêt d’ enregistrenient, qui ont été obtenus
sur la transaction dudit
jo u r sept juin m il sept cent
quatre-vingt-quatre.
Paris, le sept juin mil sept cent quatre-vingt-quatre,
dont décharge.
A l'égard d’un extrait de l’inventaire fait après le
décès du père du cit. Pierre B eau fo rt-C an illac, de
celui du contrat de mariage dudit vendeur Canillac
avec la citoyenne son épouse, en ce qui concerne le
douaire; de celui du contrat de vente de la terre de
Beaum ont, en ce qui concerne ce même d ouaire,
je cjtf ]\jom et s’oblige de les remettre x audit cit.
C roze, avec toutes autres pièces au soutien de ladite
propriété, que pourroit lui remettre ledit cit. C an illac,
aussitôt que ce dernier les lui aura rem ises, et notamment les lettres patentes +| [les lettres.]
Enfin le citoyen M om et s’oblige, au beso in , d’aider
l’acquéreur, 5 sa première réquisition , des diverses
quittances des payemens par lui faits pour le citoyen
- i- e t de lu i justifier des su- Canillac à différons de ses créanciers privilégiés ou
brogationsportées ès-dites hypothécaires sur les biens présentement vendus, -+quittances , jusq u’ à due le tout à peine de tous dépens, dommages-intérêts. A
concurrence de la somme
Pour l’exécution des présentes , les parties élisent
de quatre cent m ille livres domicile en leurs demeures à P aris, ci-devant déa ssi"n a ts;
signées, auxquels lie u x , nonobstant, prom ettant,
A E n f i 11 le citoyen M om et obligeant, renonçant.
s’ oblige de remettre aussi
Fait et passé à P a ris, en la demeure du vendeur,
incessam m entaud.acqué- l>an quatre de la republique française, une et indireur toutes les p ièces qui "visible, le vingt-neuf prairial , après m id i, et ont
lu i seront nécessaires pour signé ces présentes, où quatre-vingt-quatre mots sont
se faire mettre en p osses- rayés comme nuls, ( i) Ainsi signé M om et, Croze,
sion réelle dudit domaine, F leury et D eloche, ces deux derniers notaires, avec
d’ ici au p r e m i e r fructidor paraphes. Au-dessous est écrit : Enregistré à P a r is ,
prochain, et obtenir celles bureau du Contrat-Social, le 6 messidor an 4 »F0* TI 7>
qui pourroient lu i man- v°l. io ; R . quatorze cent quarante livres, valeur fixe
quer.
en m andats, sur 5 6 ooo liv. Signé G ro u .
’MN'
G
uulaum e.
^
(i) Ce sont les mots rayés à la plume dans le cours de l’acte.
D » o o n ,#
�V, %
( 12 )
A près cet a cte, il restoit encore à retoucher à la pro
curation à laquelle on n’avoit pas pensé ; mais pour cela
on n’eut pas besoin du sieur Momet : et au lieu de porter
le renvoi ( et de la Védrine ) , en marge , on en fut
quitte pour le placer au has de la première page, en le
faisant aboutir au paraphe du sieur M omet ; ce qui est
prohibé par la loi du n ventôse sur le notariat, et par
les lois précédentes ( i ) . Il paroît nécessaire de mettre
aussi cette procuration sous les yeux de la cour.
27 Prairial 4.
P a u - d e v a n t l e s n o t a i r e s p u b l i c s au département de la Seine
et à la résidence de P a ris, soussignés,
F ut présent G aspard-R ocli M o m et, citoyen français, demeu
rant à l ’ a n s, p la ce des Victoires-Nationales, n°. 3 , section de la
H alle au blé ;
Lequel a fait et constitue p o u r son p r o cu r e u r général et spécial
le citoyen Jean-Josepli C roze, homme de lo i, d e m e u r a n t à P a r i s ,
rue des Saussayes, n*. 1243, section des Cham ps-Elysées, auque l
il donne pouvoir d e , pour lui et en son n o m , régir, gouverner et
(j) Le notaire a dit, au procès verbal du vidimé, que le renvoi avoit ¿té
approuvé dans cette procuration par Jes paraphes du sieur M om et, du notaire
en second, et de l’enregistreur. Le sieur Momet désavoue ce fait, et il vient
de se pourvoir extraordinairement à Paris, contre le sieur Deloche.
Mais ce qui prouve que le renvoi n’a été mis qu’après l’enregistrement,
et liors la présence du sieur M om et, c’est que la copie 1/gale de l’enregistre
ment de cette procuration, levée par le sieur M om et, ne porte mention que .
de la gestion du seu l dom aine d e Chassaignp. , et ne constate aucun renvoi,
quoique la formule des registres l’exige, s’il y en a; et au contraire on vo it,
dans l’extrait de l’enregistrement de la vente, que la minute y est dite avoir
quatorze renvois-, enfin la cour verra par des j ajoutés, par les ratures non
approuvées des mots cl<i Chassaigne, qu il n ¿toit question que d’un domain©
seulement.
�( 13 )
administrer les domaines de Chassaigne -4 - , situés dans le ci-devant
district de Brioude, département d e là H au te-L oire, consistant en
terres, m aison, bâtim ens et vignes; recevoir de tous locataires,
fermiers et autres personnes qu’il appartiendra, soit en nature ou
autrem ent, les loyers échus et à échoir; compter avec tous débi
teurs , débattre, clore et arrêter lesdits comptes, en fixer et recevoir
le reliquat; de tous reçus donner bonnes et valables quittances et
décharges ; accepter tous transports et délégations pour le payem ent
de toutes sommes dues par quelques débiteurs; louer ou vendre, soit
en totalité ou en partie, le domaine dont il s’a g it, à quelques per
sonnes que procureur constitué jugera à propos; faire lesdits baux
ou ventes aux p rix , charges, clauses et conditions qui lui paroltront le plus convenables; faire faire même toutes dém olitions,
[reconstructions] et augmentations qu’il jugera nécessaires ; nom
mer et convenir de tous architectes, entrepreneurs el autres gens
de bâtim ens; com pter avec tous fournisseurs, les payer, s’en faire
rem ettre quittances; toucher m êm e, en totalité ou autrem ent, le
prix des ventes qu il pourroit faire dans ledit domaine ; de tous
reçus donner bonnes et valables quittances et décharges; faire régir
m ême lc jd itr domaines [de Chassaigne] par qui bon lui sem blera;
lui d o n n e r p o u r c e l a , à celui q ui acceptera ladite charge, tous
p o u v o irs nécessaires. Dans le cas où quelques débiteurs se refuseroient à payer au constituant les sommes qu’ils lui doivent, et qu’il
surviendroit quelques difficultés avec qui que ce so it, faire contre
qui il appartiendra toutes poursuites, contraintes [et diligences] et
diligences nécessaires; comparoitre devant tous juges de paix , soit
en demandant ou défendant, s’y concilier, si faire se peut; à défaut
d ’arrangem ens, comparoitre devant tous tribunaux com pétens, y
plaider, ou bien nommer et convenir de tou6 défenseurs officieux
en causes; les révoquer, en substituer d’autres; obtenir tous jugem ens, les faire mettre à exécution ou bien en appeler; faire toutes
-+- et de la Védrine
�C
*4 )
exclusions de tribunaux, form er toutes oppositions, donner toutes
m ainlevées, consentir radiation , tra ittr, transiger, com poser,
substituer ès-dits pouvoirs, et généralement faire tout ce qui sera
nécessaire, promettant l’avoir pour agréable.
F ait et passé à P aris, en la demeure dudil citoyen M om et, Pan
quatre de la république française, une et indivisible, le vingtrsept
prairial; et a signé.
R a yé trois mots nuls.
Signé M o m et, avec Fleury et D eloclie, ces deux d e rn ie rs no
taires, avec paraphes. A u bas est écrit : Enregistré à P aris, bu
reau C on trat-Social, le 5 messidor an 4 ; R* vingt sous assignats,
Signé Grou.
G
ui l l aume .
D
i loci i e.
^
Cependant le sieur M omet se croyoit tranquille, et
assure s u r to u t d e t o u c h e r au temps convenu les 19660 fr.
qui lui étoient dûs ; m a is il en étoit encore bien loin.
Quand il fut question de p a y e r, le s ie u r Croze parla
des créanciers du sieur de Canillac, et voulut des lettres
de ratification. Quoiqu’il eût été convenu que ce seroit
son contrat qu’il feroit pu rger, et non celui du sieur
M o m et, il pria ce dernier de souffrir que ce fût la pre
mière ven te, par la raison qu’elle présentoit un prix
inférieur, et qu’il lui en coûteroit moins, s’en chargeant
pour son propre compte , et promettant d’indemniser
de tout le sieur M omet qui , cette fois e n c o r e , s’en
rapporta an sieur Croze, dont le caractère de député étoit
fait pour m é r ite r sa c o n fia n c e ,
L e contrat du 30 vendémiaire an 4 fut donc mis ,
par lés soins du sieur Croze , au bureau des hypothè
ques du Puy. P ar les soins encore du sieur C ro ze, il y
�(15)
eut des enchères qui portèrent ce domaine de Chassaigne
à 65ooo francs numéraire.
Il n’y ayoit pas à balancer; le sieur M omet s’étoit obligé à
faire jo u ir, il fut obligé de retenir le domaine en parfournissant les enchères; et la mère du sieur Croze fu t,
à l’insçu du sieur M om et, caution du parfournissement.
Les lettres de ratification furent scellées, à la diligence
du sieur Croze , pour 65oôo francs au profit du sieur
M omet , le 14 brumaire an 7.
A insi , voilà déjà le sieur Momet obligé de payer un
domaine 65ooo francs en num éraire, outre les frais mon
tant à 3600 francs, après l’avoir vendu 36000 francs, et
n’en avoir touché que 18000 francs.
Par l’inspection de ces lettres de ratification , si sa
correspondance ne le prouvoit pas , 011 reconnoîtroit
que tout est l’ouvrage du sieur Croze ; on veri'oit q u ’il
s’est torturé pour arriver à y fa ir e c o m p r e n d r e indirec
tement , il est vrai, t o u t c e q u i se t r o u v o i t à Chassaigne,
en y fa isa n t q u a lifie r ce d o m a in e de terre—domaine quoi
q u ’il se f ît expédier des lettres sur le contrat du 30 ven
démiaire, qui ne porte que le nom de domaine.
Ces lettres furent frappées des oppositions de quatre
créanciers de M . de C anillac, quoique le sieur M omet
n’eût cessé de prier le sieur Croze de les désintéresser avant
les lettres ; mais cela eût évité les sur-enchères , et le
sieur Croze n’auroit pas eu un prétexte pour ne pas payer.
Enfin , quatre ans se passèrent : le sieur M omet réclama
de nouveau son payement.
A lors il lui fut signifié, le 11 floréal an 1 1 , une de
mande en ouverture d’ordre, à la requête du sieur Labas-
S
�^
( 16 )
tide , de Brioude , l’un des créanciers Canillac. L e sieur
Croze signifia cette demande au sieur Momet.
Pour lever cet obstacle, le sieur Momet chargea le
sieur Fabre de payer au sieur Labastide .2700 francs,
montant de sa réclam ation, ce qu’il lit ; et le sieur
Labastide donna quittance le 12 messidor an 11. Cepen
dant le sieur C roze, débiteur déplus de 18000 francs,
avoit mis le sieur Momet dans le cas de payer le triple de
son acquisition , et laissé faire pour plus de 3600 francs de
frais, nonobstant toutes les remontrances des créanciers,
notamment du sieur Labastide, l’un d’eu x , poursuivant,
q u i, indigné, en écrivit au sieur Momet.
Il ne devoit donc plus y avoir de prétexte pour le
sieur Croze -, mais bientôt 1111 autre incident le mit plus
à son aise.
Par exploit du 13 fructidor an 1 1 , il paroît que le
sieur de Canillac ht assigner le sieur C roze en désistement
du domaine de la V éd rin e, comme ayant été p ar lu i
usurpé.
Aussitôt le' sieur Croze saisit et arrêta en ses propres
mains, sans aucune permission de justice, ce qu’il devoit
au sieur M om et, et lui dénonça cette saisie arbitraire.
L e sieur Momet fut forcé alors de prendre les voies ju
diciaires, et il fit citer, le 13 nivôse an 12 , le sieur Croze,
en payement en deniers ou quittances du billet de i g 65o f.
et en mainlevée des inscriptions qu’avoit faites ledit sieur
Croze pour sa garantie; il le somma de faire transcrire sa
vente.
A u bureau de paix on rem arque, de la part du sieur
M om çt, une longue explication de tous ses moyens. Quant
�C 17 )
au sieur C roze, il reconnut son écriture du b illet, offrit
de payer sans intérêts, à la charge des demandes ci-après.
Sur le surplus, il refusa toute explication, et dit que sans
se nuire ni se préjudicier sur ce qu’il peut avoir d ît , il
pense qu’au m o in s, quant à présent, il n’j a heu a con
ciliation.
Assigné le 30 pluviôse en payement, il forma à son
tour dix chefs de demande contre le sieur M ornet, par
exploit du 8 floréal an 12.
io. A ce que le sieur Momet fût tenu de faire cesser la
demande du sieur Labastidc.
20. A ce qu’il fût tenu de faire cesser aussi la demande
formée p a rle sieur de Canillac, en désistement.
30. A ce que la saisie-arrêt faite par lui-même en ses
mains fût confirmée.
40. A ce que le sieur M om ct fût condamné à lui payer
les fermages de la terre de la Chassaigne, échus depuis 1795
jusqu’au jour de la d e m a n d e .
5o. A c e q u e le s ie u r M om et fût condamné à rapporter
m ainlevée de toutes oppositions et inscriptions existantes
sur les biens vendus.
60. A ce qu’il fût tenu de lui remettre tous les titres de
propriété des biens vendus.
70. A ce qu’il fût tenu de pi’ouver avoir payé pour
400000 francs de dettes à la décharge du sieur de Canillac,
suivant les contrats de vente, et justifier des quittances.
8°. A ce que le sieur Momet fût condamné à payeraudit
sieur Croze 2873 francs pour voyages et dépenses qu’il a
faits pour ledit sieur M om et, en vertu de sa procura
tion du 27 prairial an 4.
G
�9°. A ce qu’il fut tenu de lui représenter et remettre
les titres de créance qu’il dit avoir contre ledit sieur Groze.
io °. A ce q u e, faute de justifier de quittance avec su
brogation pour 45oooo francs, le sieur Momet fût con
damné à lui fournir, à dire d’experts, des terres de même
nature et valeur que celle de la Chassaigne, et à lui rem
bourser ce qu’il a touché du prix.
L e sieur Croze n’oublia pas ensuite de demander la
jonction de ses conclusions à celles du sieur M om et, et la
jonction fut ordonnée par jugement du 23 prairial an 13.
En réponse aux demandes du sieur C ro ze , le sieur
Momet ne dissimula pas que le billet de 19660 francs par
lui réclamé comprenoit i 65o francs d’intérêts; aussi se
borna-t-il à r é c la m e r seulement les intérêtsde 18000 francs;
il offrit de remettre, a u d ie n c e tenante, tous les titres de
propriété du sieur de Ganillac, c o m m e il s’y étoit obligé par
la dixième clause de la vente ; il justifia d ’u n c e rtific a t de
non-inscription sur lui et son vendeur; et d’abondant, offrit
encore de rapporter la mainlevée de toutes inscriptions,
aussitôt que le sieur Croze auroit fait transcrire et les lui
auroit notifiées ; et il soutint que le surplus des demandes
du sieur Ci'oze n’étoient pas fondées, et que notamment,
à l’égard de sa garantie, il étoit évident que le sieur Momet
n’avoit pas vendu ni entendu vendre plus qu’il n ’a v o it
acquis lui-même.
L e sieur Groze répondit à la demande du sieur de
Canillac, en le sommant de justifier s’il étoit réintégré dans
son état c iv il, attendu qu’il avoit été émigré ; puis il lui
opposa qu’il étoit insolvable, et demanda caution judicatuni sofyi. A l’égard du sieur M om et, il lui objecta que
�C \9 )
si le sieur de Canillac faisoit juger que la Védrine étoit un
domaine séparé de la Chassaigne, le sieur M omet devoit
lui remplacer cette éviction en un autre corps de dom aine,
d’après leur convention, parce que le sieur M om etlui avoit
vendu et garanti distinctement les domaines de la Chas
saigne et de la Védrine.
Sur ces moyens respectifs, le tribunal deBrioude rendit,
le 21 messidor an 13 , entre toutes les parties, un juge
ment dont il importe de faire connoître littéralement les
motifs et les dispositions.
Jugement dont est appel.
Entre le sieur de C a n illa c ................le sieur M o m e t...................
et le sieur C r o z e ..............
E n ce qui touche la demande récursoire dirigée contre le sieur
M om et par le sieur Croze , au sujet de la d e m a n d e du sieur L a bastide ;
A ttend u qu’il est prouvé par acte reçu Grenier , notaire, le i 5
messidor an 11 , cjuece dernier a ete desinteresse; qu il avoit cte
justifié de cet acte audit sieur Croze , lors du procès verbal de nonconciliation , du 29 nivôse an 12; que ce ch ef de demande devenoit
dès - lors in u tile, et que d’ailleurs il a été justifié de cet acte à
l ’avoué dudit sieur C roze, par acte du 22 prairial dernier; qu’ainsi
ce chef de demande ne présente plus de difficulté.
E n ce qu i touche la demande principale formée de la part du
sieur Canillac, au désistement du domaine de la V éd rin e;
Attendu que les terres de Chassaigne, Cusse et Lacougeat sont
échues au sieur Canillac par le partage, et qu’il n ’y est nullement
fait mention du domaine de la V éd rin e, dont il a cependant tou
jours jo u i, ou par lu i, ou par ses représentans, comme étant an
n exé, et form ant une dépendance du domaine de Chassaigne ,
dont 1 exploitation étoit au lieu de la V éd rin e, et non à Chassaigne;
*
C 2
�■. V
C 20 )
Attendu que lors de la -vente du 3o vendémiaire an 4 , les do
maines de Cliassaigne et de la Védrine étoient affermés à un seul
ferm ier, et sans distinction du prix; que par ladite ven te, ledit
sieur Canillac autorisa son acquéreur à toucher en totalité le prix
du ferm age, ce qu’il n’auroit pas fa it, s’il avoit entendu ne vendre
que le domaine de Cliassaigne seulement;
A ttendu que lors de la procuration du sieur C a n illa c, dudit
jour îg germinal an 6 , il n’est nullement fait mention de faire
aucune réclamation au sujet du domaine de la V é d rin e , et s’il
n ’eût pas été dans son intention de vendre la V éd rin e, comme
une dépendance de Cliassaigne, il n ’auroit pas négligé de s’en occu
per lors de cette procuration.
E n ce qu i touche la demande récursoire formée contre le sieur
M o m et, au sujet de cette même demande en désistement;
A t t e n d u que, dès que d’après les motifs précédens la demande du
sieur C a n illa c doit être rejetée, il devient dès-lors inutile d ’exa
miner si cette d e m a n d e récu soirc est bien ou mal fondée.
E n ce qu i touche la saisie-arrêt faite par le sieur Croze entre
ses m ains, c o m m e des biens du sieur M om et;
Attendu que le sieur Croze est lui-même débiteur du sieur
M om et; qu’il n’a pas pu faire saisir en ses mains sans un titre
contre celui-ci ; que le prétendu péril d ’éviction résultant de la
demande en désistement formée contre lui n ’étoit pas un m o tif
suffisant pour autoriser cette saisie; que d ’ailleurs le sieur M om et
a offert de donner caution pour sûreté du payement qu’il réclam e,
conformément aux dispositions de l’article 1623 du Code c iv il, et
que dès-lors cette saisie ne sauroit être confirmée.
E n ce qui Louche la demande en payement des fermages de 1795,
formée par ledit sieur Croze contre ledit sieur MonieL ;
Attendu que ce dernier, en autorisant le sieur C ro ze , par la sus
dite vente, à percevoir lesdits ferrn âgés, ne s'est pas lui-même chargé
de faire des poursuites pour le recouvrement d’iceux; qu'il n’a fait
que mettre à cet égard le sieur Croze à son lieu, droit et place,
et que c ’est au sieur Croze à les réclamer contre ceux qui les doivent
�J« l
( 21 )
ou qui les ont perçus ; qu’il est de fait que le sieur M om et n’a rien
touché , et qu’il ne sauroit être garant de ce que lesdits fermages
sont retenus par le fait d’une force majeure; que d’ailleurs le sieur
Croze ne fait apparoir d ’aucunes diligences faites de sa part pour
la répétition de ces mêmes fermages.
E n ce qui concerne la demande en mainlevée des inscriptions
subsistantes sur les b i e n s vendus au sieur Crozepar le sieur M om et ;
Attendu que celui-ci a obtenu des lettres de ratification sur
son contrat de vente, le 14 brumaire an 7 , scellées, à la charge
des oppositions ;
Attendu c/u’il a établi par le rapport des actes énoncés au procès
■verbal de n on -con ciliation , du 29 nivôse an 1 1 , que le sieur
M om et a désintéressé la dame Censat, le sieur Labastide, et les
autres créanciers opposans au sceau desdites lettres; qu’il a justifié
à l’audience qu’il n’existoitque deux inscriptions contre lu i, à l’épo
que du 27 pluviôse an ia ; qu’il n’en est point survenu d’autre jus
qu’au 27 du présent, et que ces inscriptions ont été radiées par
le conservateur des hypothèques de cejourd’hui ; ce qui est prouvé
par trois certificats de ce dernier, des dates sus-énoncées ;
Attendu d ’ailleurs que le sieur C r o z e n ’a p oint lui-meme obtenu
des lettres de r a t ific a tio n , ni fait transcrire son contrat, et qu’aux
term es de la vente sus-énoncée, il ne peut forcer le sieur M om et
à lui justifier d ’aucune mainlevée, avant d ’avoir fait transcrire
son titre et d ’avoir dénoncé les inscriptions qui peuvent subsister
contre lui ; qu’ainsi ce chef de demande doit être rejeté.
E n ce qui touche la remise des titres réclamés par le sieur
C ro ze, en vertu de la neuvième clause dudit contrat de vente;
Attendu qu’il n’a pas désavoué avoir reçu les lettres patentes et
l’arrêt du 7 juin 1784, et que le sieur Momet lui a o ffe rt, audience
tenante, la remise des autres actes énoncés en ladite clause;
qu’ainsi ce chef de demande devient dès-lors sans objet.
E n ce qui touche la demande en remise de titres et quittances,
avec subrogation constatant que le sieur Momet a payé en dé
charge du sieur de C anillac, pour 400000 francs de créances hy
pothécaires ;
�(
2
2
)
Attendu que cette clause du contrat n ’est point impérative ;
que le sieur Momet ne s’est obligé que d’aider au besoin ledit
sieur Croze des titres et quittances; que ce besoin n'est point
constaté; qu’il ne pourroit l’être qu’autant que le sieur Croze feroit
transcrire son titre , et qu’il existeroit des inscriptions procédantes
du fait dudit Momet ou de ses auteurs; et que dès que le sieur
M om et se soumet de rapporter la mainlevée de toutes les ins
criptions qui pourroient exister, le sieur Croze n ’est point fondé
sur ce chef de demande , puisqu’il y est dès-lors sans intérêt.
E n ce qu i touche le payement de la somme de 2893 francs
réclamé par le sieur C ro ze, pour voyages, dépenses par lui faits
en vertu de la procuration du 27 prairial an 4 ;
Attendu qu’il a été soutenu par le sieur M om et que cette procu
ration n ’avoit été donnée que le jour même de la vente, quoique
datée de deux jours a van t, et pour servir de titre apparent au
sieur C ro z e ;
Attendu que cette p r o c u r a t io n , relative à la gestion et à l’admi
nistration , au louage et à la vente d u bien y énoncé, a d’ailleurs
été révoquée par la vente qui est s urvenue d eu x jours a p rè s ; que le
sieur C roze, à l’époque de cette vente, ne pouvoit avoir rien fait
en vertu de cette procuration, et que s’il a agi postérieurement,
ce n’a pu être que pour son compte et son intérêt personnel; qu’il
n ’établit pas d’ailleurs ce qu’il a fait pour le compte du sieur M om et,
en vertu de cette procuration, et que dès-lors ce chef de demande
doit être rejeté.
E n ce qui touche la demande en rapport du prix de ladite vente,
touché par le sieur M om et, et le remplacement en i m m e u b l e s ,
faute de justification desdits titres de créances et quittances ;
Attendu que le sieur Croze est en possession el jouit paisible
m ent desjjiens à lui vendus; qu’il n'a point éprouvé d’obstacles à
son entrée en possession ; <[u’il n’est point troublé dans sa jouissance,
et que ce n ’auroit été que dans ces cas qu’il auroit pu réclamer
l ’exécution de la clause du contrat de vente; qu’ainsi il est encore
mal fondé dans ce ch ef de demande,
�^ 5 0
( 23' )
E n ce qui touche la demande en payement de la somm ede ig 65o f.
montant du billet daté du i 5 prairial an 4> quoique fait réellement
le 39 dudit mois, etdes intérêts du montant delà sommede 18000 f . ,
depuis ledit jour 29 prairial an 4> sous la déduction de tous payem ens, et sous la déduction sur les intérêts, depuis ladite époque,
de la somme de 1620 fra n cs, compris pour intérêts dans ledit
billet ;
Attendu que quoique lors du procès verbal de non-concilia
tion le sieur Croze n ’eût pas voulu s’expliquer sur la vraie cause
dudit b ille t, il est cependant convenu, lors du jugement contra
dictoire du 23 prairial dernier, qu’il avoit eu pour cause réelle
le restant du prix de la vente dudit jour 29 prairial an 4 ;
Attendu que quoique fait sous la forme d ’un dépôt, ce billet
11e dérive pas moins du restant du prix d’une vente d’im m eubles,
pour la som m ede 18000 fran cs, et que sous ce rapport les inté
rêts de cette somme sont dûs de droit, depuis la date de la ve n te ,
d’après les dispositions de l ’article i 652 du Code c iv il, qui ne
sont que confirmatives du droit ancien, fondé sur les dispositions
de la loi au code D e aclione empti e t v en d iti;
A ttendu que quoiqu’il ait été soute nu par le sieur M om et que
dans ledit billet de i q 65o fra n c s il avoit été compris les intérêts
de ladite somme de 18000 fra n c s, jusqu’à une époque fixée entre
les parties, ce fait n’a point été formellement désavoué par le sieur
Croze ;
Attendu qu'il est prouvé par une lettre du sieur C ro ze, du 7
fructidor an 6 , en réponse à une autre que le sieur M om et lui
avoit écrite peu de jours avan t, dans laquelle celui-ci se plaignoit
du retard que le sieur Croze mettoit à se lib érer, que celui-ci
convint qu’il n’est en arrière de payer que depuis d eu x m ois huit
jo u r s , et qu’ il ne souffrira pas que ledit sieur M om et soit en
perte ; d ’où il suit la preuve non équivoque qu’il y avoit réelle
m ent un terme convenu entre les parties pour le payement dudit
billet, et que le sieur Croze a promis de ne pas s o u ffrir que le
sieur M om et fût en perle j qu’ainsi, sous tous lès ra p p o r ts , les in-
�( 24)
térêts de la somme de 18000 francs sont dûs depuis l'époque de
leur vente.
E n ce qu i touche la demande en ratification d’inscriptions faites
par le sieur Croze contre le sieur M om et;
A ttendu que le sieur Croze a la faculté, par son titre d’acqui
sition , de purger les privilèges et hypothèques dont les biens à lui
vendus peuvent être grevés ; que le mode de purger lesdites hypo
thèques et privilèges, est établi par l'article 2181 et suivant du Code
civ il, et q u ’il ne dépend que du sieur Croze d’en user ;
Attendu qu’aux termes de son contrat d’acquisition les frais de
la transcription d’icelui sont à sa charge, et que s’il ne veut pas
faire transcrire son titre , il ne peut pas le dispenser d ’accorder
la mainlevée des inscriptions subsistantes de sa part contre ledit
sieur M om et ;
Attendu qu’aux termes de l’article 2160 du C o d e , la radia
tion d’inscription doit être ordonnée, lorsque les droits de privi
lèges et hypothéqués sont effacés par les voies légales, et que si le
sieur Croze ne veut pas profiter du bénéfice de la loi dans un délai
fixe, le sieur M om et doit obtenir la radiation des inscriptions
que ce dernier a faite? contre lu i, ne pouvant pas être, p arle fait
du sieur C roze, privé du droit d’exercer ses actions contre les ac
quéreurs de ses biens.
Par tous ces m o tifs, le tribunal, jugeant en premier ressort,
Déclare le sieur de Canillac non recevable dans sa demande en
désistement de la partie de domaine dit de la V éd rin e, garde et
maintient ledit sieur Croze dans la possession et jouissance de ladite
partie de dom aine, comme annexée et form ant dépendance du do
maine dit de la Chassaigne ; et faisant droit sur tous les autres
chefs de demande formés réciproquement de la part desdits sieurs
M om et et C r o z e , le trib u n a l donne acte a ud it sieur Momet de
ce que ce d ernier rcconnoit a voir reçu l ’arrêt d’enregistrement
et les lettres patentes sus - énon cés , et de ce que ledit sieur
M om et lui a o ffe r t, audience tenante, et a mis sur le bureau de
l’audience les autres titres réclames par ledit sieur Croze, en vertu
de
�( *5 )
de la dixième clause dudit contrat de vente; lui donne pareillement
acte de ce qu’il offre de rapporter la mainlevée de toutes les
inscriptions procédantes de son fait ou de celui de ses auteurs, sur
les biens ven d u s, dès que ledit sieur Croze aura fait transcrire
6on titre de propriété, et dénoncé audit sieur Momet lesdites inscrip
tions ; et ayant égard auxdites o ffre s , faisant droit sur les con
clusions prises par ledit sieur M o m et, condamne le sieur Croze à
payer audit sieur M om et, en deniers ou quittances valables, la
somme de i q 65 o francs, montant dudit b ille t, avec les interets
de la somme de 18000 francs , depuis la date de ladite vente
jusqu’au payem ent, sous la déduction néanmoins de la somme
de i 65o francs comprise dans ledit b ille t, pour intérêt de ladite
so m m e, lesquels payemens qui ont pu être faits seront imputés
d ’abord sur les intérêts, et subsidiairement sur le principal ; et
ordonne que ledit sieur Croze sera tenu, dans le délai de deux
m ois, à compter de ce jo u r, de faire transcrire son litre d’acquisi
tion ; faute de ce faire, et icelui passé, sans qu’il soit besoin d’autre
jugem ent, le tribunal fait pleine et entière m ain le vé e en faveur
dudit sieur M o m e t, des inscriptions faites contre lui de la part dudit
sieur C ro ze, et n o ta m m e n t de celles faites au bureau de P aris,
vol. 18, n". 6 7 4 ; en celu i de Corbeil, vol. 3 , n°. 3o3 ; en celui
de D i e p p e , vol. 1 1 , n°. 583 j ordonne que sur la remise qui sera
faite par ledit sieur M om et, à chacun des conservateurs desdits bu
reaux des hypothèques, de l’expédition par extrait du présent juge
ment , ils seront tenus de radier lesdites inscriptions ; quoi faisant
ils en demeureront bien et valablement déchargés; fa it pareille
ment mainlevée audit sieur M om et de toutes autres inscriptions
faites contre lui de la part dudit sieur C ro z e , et ordonne qu’elles
seront radiées par tous conservateurs qui pourroient les avoir faites,
ainsi qu’il est dit ci-dessus; et enfin fait mainlevée de toutes
saisies et oppositions faites par ledit sieur C roze, contre ledit sieur
M o m e t, et ordonne qu’à la remise ou payement de tous les ob
jets ou sommes saisis, tous gardiens seront c o n tra in ts, sur la re
présentation du présent jugem ent, par les voies de droit ; quoi
D
�( 26 )
faisant ils demeureront bien et valablement déchargés envers ledit
sieur Crose ; sur le surplus des autres fins et conclusions prises
respectivement par les parties, le tribunal les met hors de cour et
de procès ; condamne ledit sieur Croze en tous les dépens faits par
ledit sieur M om et sur ladite demande en payement du susdit billet,
lesquels ont été taxés et liquidés, d’apres l’avis du commissaire
taxateur d e là chambre des avoués, à la somme de 56 a fr. 5 5 cent.;
le condamne pareillement en tous les autres dépens faits par ledit
sieur M o m e t, tant en défendant que dem andant, sur les autres de
m andes, lesquels ont été taxes et liquidés comme dessus, à la
somme de 299 francs 11 centimes, et condamne ledit sieur Canillac
aux deux tiers des dépens faits par ledit sieur Croze, suivantla taxe qui
en sera faite, et même aux deux tiers des derniers dépens adjugés
ci-dessus audit sieur M o m e t, le tout non compris l’expédition et
signification du présent jugem ent, qui seront supportées par ledit
sieur C r o z e , s a u f à lui à en répéter les deux tiers contre ledit sieur
de C anillac, auxquels d e u x tiers celui-ci est pareillement condamné ;
et quant à la condamnation prononcée co n tre ledit sieur Croze en
payement dudit b ille t, le tribunal ordonne q u e cette p artie du pré
sent jugement sera exécutee nonobstant tout appel, et audit cas
à la charge de donner caution, attendu que ledit sieur M om et est
fondé en titre à cet égard.
F ait et ju g é , le 21 messidor an i 3 *
L e sieur Croze ayant interjeté appel de ce jugem ent,
le sieur Momet voulut , d’après ses dernières dispositions■
,
le faire payer, en donnant caution ; mais le s ie u r Croze
demanda des défenses à la cour, et insista pour en obtenir,
malgré l’article 5652, du Code civil. Cependant, par arrêt
¿u
il fut débouté de sa demande, mais à l'a
charge par le sieur Momet de donner caution jusqu’à
concurrence de 3 6 °°° francs»
�( *7 )
C’est en cet état qu’il s’agit de répondre aux moyens que
le sieur Croze propose sur l’appel.
M O Y E N S .
L ’objet principal de la cause est de savoir si le sieur
Croze peut être fondé à retenir ce qui reste à payer du
prix de la vente du 29 prairial an 4 , soit à cause du trou
ble qu’il éprouve par une demande en désistement, soit
sur le fondement de ses propres inscriptions, soit enfin
sous prétexte que le sieur Momet n’a pas achevé de rem
pli r les conditions auxquelles il s’étoit soumis.
Pour abréger beaucoup la discussion de tous les chefs
de conclusions respectives, le sieur M omet passera rapi
dement sur ceux qui présentent peu d’intérêt, afin de ne
demander l’attention de la cour que sur les points les plus
importans de la contestation.
L e I e r . chef des c o n c l u s i o n s du sieur Croze formoit
double e m p l o i et n’a plus aujourd’hui d’intérêt ; il demandoit que le sieur Momet fît cesser les-poursuites du sieur
de Labastide; mais personne ne savoit mieux que le
sieur Croze que ces poursuites étoient éteintes par un
acte antérieur au procès. L e sieur Momet avoit payé la
créance du sieur Labastide.
L e 3e. chef des mêmes conclusions est décidé par les
premiers juges, conformément aux principes. L e sieur
Croze n’ayant pas de titre , ne pouvoit faire une saisiearrêt sans autorité de justice. A u reste le p a y e m e n t du
billet du sieur Croze est l’objet d’ une demande, et ses
moyens sur ce point seront examines ci-après.
D 3
�(28)
L e 4e. chef a pour objet les fermages de 179^ et années
suivantes. A cet égard c’est la clause du contrat qu’il faut
consulter. « P o u r r a , le sieur Croze, disposer du domaine
« comme de sa chose propre, à compter de ce jou r, à
« commencer la jouissance et fermages parles années 179$
« et 1796, le vendeur se réservant seulement les fer« mages de 1794? qu’il n’a pas môme touchés. »
A in si, faculté pour le sieur Croze, réserve pour le sieur
Momet.
Il faudroit donc que le sieur Croze offrît de prouver
que le sieur Momet a reçu au delà de sa réserve ; et il
ne l’articule pas même. C’est donc à lui à se pourvoir
p o u r ce t objet; car le sieur M omet lui a seulement dit à
cet é g a r d q u ’ i l se départoit des fermages passés, et renoncoit à les r e c e v o ir .
L e 6e. chef est sans objet. L e sieur M^omet auroit
pu objecter au sieur Croze qu’il devoit seulement lui
fournir les titres de p ro p riété, aussitôt que le sieur de
Canillac les lui auroit remis ; néanmoins il a déjà donné
les titres les plus importans au sieur C roze, qui les a
dans son dossier ; il a offert le surplus à Brioude , en
jugement.
Les 5e. et 7e. chefs n’ont de même plus d’intérêt. L e
sieur Momet s’étoit obligé à justifier des quittances des
créanciers de Canillac pour 400000 francs ( assignats ) ;
mais il potirroit dire encore que cette clause étoit liée à
la faculté qu’avoit le sieur Croze de purger son contrat, et
de demander mainlevée des oppositions du fait du sieur
Momet ou de ses auteurs. Mais le sieur Momet rapporte
des quittances excédant de beaucoup la somme promise;
�( 29 ) '
il rapporte aussi la mainlevée de toutes les inscriptions.
L e 9e. chef des conclusions du sieur Croze est encore sans
objet; c’est même une demande extraordinaire. Il veut que
le sieur Momet soit tenu de lui représenter et remettre
les titres de créance qu’il peut avoir contre lui. Mais
ces titres de créances sont le billet de dépôt. L e sieur
Croze n’en désavoue pas l’existence ; il en a même saisi le
montant en ses mains. Ainsi le titre de créance du sieur
M omet lui sera remis sans difficulté aussitôt qu’il l’aura
payé.
Maintenant il est aisé de réduire le surplus delà cause.
L e sieur Momet a formé deux chefs de demande, qui sont
le payement du billet de ig 65 o francs avec intérêts, et la
mainlevée des inscriptions du sieur Croze. L e sieur Croze
répond à cette demande : Je vous payerai quand vous
aurez fait cesser la demande du sieur C anillac, ou que
vous m’aurez fourni des immeubles d’égale valeur au do
maine de la Védrine (2°. et 10°. chefs de demandes. ) ;
quand vous m ’aurez payé 2873 francs pour le temps que
j’ai employé au sujet de votre procuration (8 e. chef. );
enfin je ne puis vous donner mainlevée de mes propres
inscriptions , parce que vous me devez une garantie.
Ainsi ce qui reste à discuter présente les questions sui
vantes : i°. Que doit le sieur Croze au sieur M om et?
2°. L e sieur Croze est-il fondé à retenir ce qu’il doit,
comme prétendant à une garantie de la demande formée
par le sieur de Canillac? 30. Est-il dû au sieur Croze 2873 f.
pour dépenses faites comme fondé de pouvoir? 40. A -t-il
droit de maintenir les inscriptions par lui faites sur le
sieur Momet ?
�( 30 )
§• Ier.
Que doit le sieur Croze au sieur M om et?
Il lui doit le montant du billet de 19650 francs, causé
pour dépôt, sous la date du i 5 prairial an 4 ; il le doit
en deniers ou quittances. A in si, au cas qu’il représente,
comme il le d it , des preuves de payemens faits pour près
de moitié de la somme, il n’y aura pas de difficulté à cet
égard, sauf que les imputations se feront d’abord sur les
intérêts.
Mais , dit le sieur Croze, je ne dois pas d’intérêt, parce
qu’un dépôt n’en produit pas ; le billet d’ailleurs n’est que
de 18000 francs en principal et i 65 o francs pour intérêts
de deux ans. Si vous vo u lez que ce soit un simple billet,
alors, comme c étoit un temps d’assignats ou mandats,
votre capital sera réduit à l’échelle de dépréciation, et je
vous payerai des intérêts.
A l’éclielle de dépréciation ! L e sieur Croze a-t-il osé
sérieusement le proposer, quand les lois de l’an 6 sont
form elles, et quand déjà il a acheté à si vil prix ?
Il prétend que 600000 francs, de vendémiaire an 4 , ne
valoient que 8000 francs numéraire. Que vaudroient donc
19650 francs en prairial suivant ?
Il veut persuader que le sieur Momet a gagné beaucoup
sur lu i, tandis que le domaine acquis en apparence en assi
gnats , a coûté au sieur Momet 68600 francs, malgré lu i,
quoiqu’il ne l’eût vendu au sieur Croze que 36000 francs.
L e sieur Croze confond ses propres idées, quand il dit
que le billet du 1 5 prairial est un dépôt, pour en refuser
�C 31 )
l’intérêt; car précisément il en a fait une saisie-arrêt,
comme d’un prix de vente. A u reste le fait est aujourd’hui
reconnu.
L e billet cependant n’a en capital que 18000 francs;
le sieur M omet se fait un devoir d’en convenir : mais
l’intérêt de cette somme sera dû après le terme fixé entre
les parties; et les principes à cet égard sont assez certains
pour ne pas exiger de discussion.
On sait que tout prix de vente porte intérêt de sa
nature, s’il n’y a stipulation contraire; car le capital
représente un fonds qui produit des fruits annuels. L ’ar
ticle i 6Ô2 du Gode civil n’a rien changé sur ce point aux
lois précédentes.
§. I I .
Z/e sieur
Croze est-il fondé à retenir ce qu’il doit, comme
'prétendant à une garantie de la demande form ée
par le sieur de Canîllac? e s t - ü Jbndê a demander un
r e m p la c e m e n t 7 en immeubles , du domaine de la
T^édrine ?
Sur cette question , le sieur M omet ne disputera pas
contre les principes ; car , si réellement il est garant du
désistement, il n’auroit pas d’action jusqu’à ce qu’il l’eût
fait cesser, ou fourni une caution.
Ce n’est pas que le sieur Croze ne lui ait contesté,
même en ce cas, le droit de réclamer son p a y e m e n t ,
moyennant caution. Cependant l’article 1653 du Code
civil en a la disposition expresse , et les lois romaines y
étoient conformes. DominUquœstione inotâ ernptorpre-
/
�iv .ï\
( 32 )
tiurn soïçere non cogitur, nisijîdejussores idonei prœstentur.
Mais le sieur Croze a-t-il prouvé que le sieur Momet fût son garant ?
Souvenons-nous que le sieur de Canillac demande le
désistement d’un domaine appelé de la Védrine, qu’il pré
tend distinct et séparé de celui de la Chassaigne , d’après
des baux et d’autres actes. L e sieur de Canillac a arti
culé que le domaine seul de la Chassaigne contient en
terres, prés et bois , les mêmes surfaces qu’il a vendues
pour deux cent dix septerées.
Si le sieur de Canillac le prouve , et s’il obtient le dé
sistement qu’il demande, comment le sieur Croze pourr o it - il assurer avec pudeur que le sieur Momet lui a
Vendu un second domaine?
A van t de repetei cette coupable prétention, que le sieur
Croze jette donc lesyeux sur la forme de l ’ acte q u ’ il a si fort
dépecé et dénaturé, mais dont la vérité sort malgré lui.
S’il a eu le projet d’enlacer un citoyen sans défiance,
en méditant de si loin les moyens qu’il emploie aujour
d’hui , il n’en est pas encore à Veçentus fraudis ; car il
est singulièrement resserré dans les clauses qui restent,
et qu’il ne peut effacer.
Dans une v e n te , il ne faut pas chercher l’intention
dans des équivoques, surtout pour ce qui regarde la
chose vendue ; car c’est là la substance principale de l’acte;
et dès-lors les mots ne sont plus rien pour désigner l’objet
vendu , quand il est matériellement exprimé.
En effet, que je vende un terrain d’une surface donnée
ou avec des confins constaus, sans difficulté l’erreur sur
la
�( 33 )
la dénomination ne prévaudra pas > parce que la cliose
vendue sera constante.
O r , ici est-il possible de se méprendre ? et par quelles
équivoques le sieur Croze voudroit-il persuader que le
sieur Momet lui a vendu deux domaines, quand môme
il n’en auroit acheté qu’un?
L e sieur de Canillac vend à Momet des bâtimens et
jardins ayant cinq septerées cinq quarteronnées ; et le sieur
M omet vend à son tour au sieur Croze des bâtimens et
jardins de la môme surface , avec les mêmes expressions
copiées mot pour mot.
En terres, en p rés, en bois , en vignes, en terrains in
cultes , on voit encore dans les deux ventes les mêmes
détails de contenue, sans la plus légère différence.
L e sieur de Canillac termine par énoncer que le tout
se porte à deux cent dix septerées une quarterounée ; et
le sieur M omet ne manque pas de recopier aussi la même
redondance, comme s’il eût voulu mieux avertir qu’il
avoit le projet marqué de s’asservir à transcrire en toutes
lettres tout ce qui concernoit l’étendue et les surfaces de la
chose vendue.
Enfin , le sieur de Canillac garantit les deux cent dix
septerées une quarteronnée, à dix arpens près; le sieur
M omet encore garantit la même étendue, et ne garantit
pas un pouce au delà.
Il avoit le droit de limiter sa garantie : il en a
sagement usé. O r , tant que le sieur Croze ne sera pas
fondé à dire au sieur Momet : Je n’ai pas les deux
cents septerées que vous m’avez garanties , il n’a à cet
égard aucune demande à former contre lui ; car ce ne
E
�C 34 )
peut etre qu’après avoir prouvé ce déficit, et si dans le.
seul domaine de Cliassaigne il ne trouve pas les deux cents
septerées, mesure du lie u , qu’il pourra former une de
mande en supplément contre le sieur Momet. Mais le
sieur Croze qui a fait arpenter Cliassaigne, sait bien que
les deux cent dix septerées s’y trouvent.
Quel seroit donc l’interprète astucieux q u i, trouvant
ainsi la chose vendue désignée avec tant de détails ,
s’obstineroit à la chercher plutôt dans des mots et dans
des circonlocutions ?
En elfet, sortons de cette partie claire et précise du
con trat, nous ne trouvons plus que de l’obscurité ou des
pièges.
Ces ra tu re s nombreuses , ces quatorze renvois , ces
laborieuses cow eeu ons fo n t naître tant d’idées pénibles,
qti il vaut mieux ne pas se je te r d an s le détail des obser
vations qu’il y auroit lieu de faire ¿\ c h a q u e ligne.
Une seule réflexion juge cette vente. Si le sieur Croze
n’a pas prévu et préparé sa défense du procès actu el,
alors le deuxième renvoi n’est de sa part qu’une précau
tion contre le sieur de Canillac , et il n’a pas d’action
contre le sieur Momet.
Si au contraire il veut trouver dans le deuxième renvoi
une action et une précaution contre le sieur M o m e t ,
alors il sera clair pour tout le monde que le troisième
renvoi est une précaution en faveur du sieur Croze; et
nul homme de bonne foi ne se défendra d’y voir le
consilium fr a u d is le plus é v id e n t , et le motif radical
de toutes les autres corrections.
Que cependant le sieur Croze ne suppose pas que cette
�( 35)
option lui soit laissée ; car il ne s’agit pas d’interpréter
ce qu’il a voulu fa ire, mais ce qui a été fait. Les règles
d’interprétation des actes, sont, d’après les lo is, toutes
favorables à la bonne f o i, sans jamais se prêter à pré
férer même le sens littéral à l’intention connue. Conirohentium voluntatem potiùs quàm verba spectari
plocuit : principe rappelé par l’article 1 1 56 du Code civil.
Que le sieur Croze cesse donc de placer sa confiance
dans son troisième ren vo i, où il a cru insérer un do
maine ; car des paroles vagues ne créent pas une vente;
et il verra encore dans l’article 1163 du Code que les
termes généraux doivent toujours sc restreindre à l’objet
positif de la convention.
Si ces principes ne jugent pas toute la question , si
déjà l’intention de la vente n’est pas assez claire par le
détail minutieux de la cliose ven d u e, on peut suivre
encore le sieur M omet dans la tradition qu’il effectue.
Q u’abandonn e-t-i 1 au sicui' C roze ? tout droit de pro
priété qu 'il ci et peut avoir sur ledit domaine. Comment
déclare-t-il en être propriétaire ? comme îa y a n t acquis
du sieur C anillac, par acte du 30 vendémiaire an 4.
Quels actes lui demande le sieur .Croze pour ses titres
de propriété ? les titres de la fam ille de Canillac.
A in s i, le sieur M omet ne vend évidemment que ce
qu’il a acheté par Vacte du 30 vendémiaire an 4; il en
fournit une expédition notariée au sieur Croze : conséquemment il n’emploie le mot vente au lieu de subro
gation , que pour ajouter sa garantie à celle du sieur de
Canillac.
Enfin , les articles 1617 et 1618 du Code civil fourE 2
�( 36 )
nissent au sieur M o met un moyen de droit qui le fait
s’applaudir d’avoir été assez soigneux pour détailler toutes
les mesures de la chose vendue.
Car le m axim um de l’excédant seroit d’un vingtième
en sus ( ce qui se rapporte aux dix arpens en plus ou en
moins ). Mais cent trente septerées à englober de plus,
ne sont pas le vingtième de deux cent dix (i).
(i) Pendant l’impression de ce mémoire, deux actes ont été déposés au greffe
«le la cour, à la diligence du sieur de Canillac, et leur existence est très-im*
portante pour la cause.
Il paroit que le sieur Croze avoit des craintes sur sa propriété, à cause de
l’émigration du sieur de Canillac; et sous prétexte de lui être utile dans les
diligences à faire pour les séquestres, ou même peut-être de lui demander une
ratification de la vente du 3o vendémiaire an 4 , il conçut le projet d’arranger
les choses de manière à é v it e r le s difficultés. En conséquence, au lieu de de
mander directement une ratification a u s ie u r de Canillac, le sieur Croze ne
voulut qu’une procuration : le plus a d r o it étoit d e ao l a faire adresser par le
Sieur M omet, pour pouvoir dire, à tout événement, que c ’ «Stoit son ouvrage;
et il en vint à bout, soit par ses instigations, soit par le canal d’un des commis
du sieur M omet, avec lesquels il étoit en rapport, ainsi qu’il ri'sulte des lettres
du sieur Croze, des 8 brumaire an 5 , 27 prairial et 11 messidor an 6, fort
curieuses, et qui montrent avec quel art le sieur Croze enlaçoit le sieur
M om et, tantôt par des prières, tantôt par des menaces.
P a r - d e v a n t ...........a é té présen t le c it. Ig n a ce B e a u fo r t - C a n illa e , le q u el donne p o u v o ir
à ......... de ré c la m e r le m o b ilie r saisi sur lu i p a r ............e t le p r ix de ce lu i ven d u par l ’adm i
nistration ......... de lé c la m e r les ferm ag es éch u s depuis 178 9 , e t q u ’il n ’a pas céd és au sieu r
M o m e t, dont en tant que de besoin il ratifie la vente -f-; d onner q u itta n c e , e tc. F a it lo 19 g e r
m inal an 6.
+ portée en c e lle de C h a s s a ig n e , q u ’il donne p o u v o ir de r a tifie r , si besoin est.
Le sieur Croze, muni de cette procuration qui n’expliquoit rien , voulut
la faire expliquer plus clairement; en conséquence, après l’avoir remplit» du
nom du sieur Cailhe, il se fit donner par lui l’acte suivant :
P a r - d e v a n t ......... a é té p résen t le c it. J e a n - R e n é C a i l h e ........... fondé de p o u v o ir du sieur
de C a n illa c , par acte du 19 germ in al an 6 ......... le q u e l, en lad ite q u a lit é , ra tifie , confirm e
et approuve, et m êm e renouvelle, si besoin e s t , la vente fai\e par le c it. d e C a n illa c .........
�)3
(
37
)
§. I I L
E s t-il dû au sieur Croze 2873 fra n cs pour dépenses
¿faites en vertu de la procuration du sieur M om et ?
Il est étrange que le sieur Croze ait osé former une
demande de cette nature, sous prétexte qu’il y a eu un
intervalle du 27 prairial au 29 , et qu’il a été fondé de
pouvoir avant d’être acquéreur.
Mais s’il est clair que le sieur Croze n’a jamais pu
des domaines de Chassaigne et dépendances, SOUS l e XOM d e
dénomination........par contrat reçu D e lo ch e , du
cation acceptée
pou r
3o vendémiaire
1*4 V iiD R iX F ,
ou toute autre
an 4 ......... L a présente ratifi
le cit. Momet P^tR le cit. Jean Croze , hom m e de l o i , demeurant à
B riou d o, présent ot accep tan t, tant pour ledit cit. M om et, et comm e fondé de procuration
gé n érale , que personnellement pour lui-même, comm e acquéreur des m êm es b ien s, suivant
le contrat du 29 prairial an 4 . etc. F a it le 16 prairial an 6.
Ainsi peut-on être surpris que le sieur Croze ait abusé de la confiance du
jieur Momet avec qui il traitoit, lorsqu’il abuse de la bonté d’un honnête
homme qui n’a aucune raison d’être en ¿¿fiance contre lu i, au point de lui
faire exprimer des clauses q u i sont Iiors de sa procuration ?
C e r t a in e m e n t le fondé de pouvoir n’a pas deviné si le domaine de la Védrine
étoit compris dans la vente du 3o vendémiaire an 4; il falloit que l’auteur de
cette divination y eût plus d’intérêt que le fondé de pouvoir : I s f e c i t , cu i
p rodes t.
Le sieur Croze a encore très-justement calculé qu’il falloit faire trouver la
vente de la V édrin e dans la vente du 3o vendémiaire an 4 , pour la faire
résulter de la vente du 29 prairial ; et voilà pourquoi la ratification ou vente
renouvelée de la Chassaigne et la V éd rin e est acceptée par lui pour le sieur
Momet; voilà pourquoi encore, dans les lettres de ratification prises l’année
suivante sur la vente du 3o vendémiaire, qui comprenoit le dom aine de la
Chassaigne, le sieur Croze ne put s’empêcher de faire mettre la terre-domainc. C e nim ia precautio juge tout à la fois ses intentions ou ses c a lc u ls ;
et personne ne se défendra de dire qu’en achetant loyalement et f r a n c h e m e n t
une propriété qu’on connoît, o n la f û t désigner sans équivoque, au lieu d em
ployer autant de détours.
i
�( 33 )
user de cette procuration avant la ven te, il en résultera
qu’alors la ¡procuration donnée par le propriétaire du
domaine de la Chassaigne, pour le régir , gouverner ,
administrer et vendre, sera annullée de plein droit par
la vente. Car alors le sieur Croze n’a pUis eu à régir,
administrer ni vendre pour le compte du sieur M om et,
ce qui lui appartenoit à lui-même.
O r , la procuration n’a été enregistrée à Paris que le 5
messidor an 4 , par conséquent après la vente du 29 prai
rial. Il n’a donc pas été au pouvoir du sieur Croze de faire
usage de cette procuration avant d’être acquéreur.
Dira-t-il que la procuration portoit aussi autorisation
d e r é g le r les loyers échus et à échoir, débattre et arrêter
les c o m p te s ? M a is par sa vente du 29 prairial, il a eu soin
de faite d é la isse r au sie u r Momet son droit aux fermages
antérieurs : consequemment, si le s ie u r Croze a fait des
poursuites, c’est pour lui ; s’il a r é g lé des c o m p t e s , c’est
pour lui. Il seroit donc bien commode qu’il eût une ré
pétition de 2873 francs contre un autre, pour avoir fait
sps propres affaires.
§. IV .
L e sieur Croze a -t-il droit de maintenir les inscriptions
qiCil a fa ites sur le sieur M om et ?
X'C sieur Croze avec des inscriptions aura des procès;
avec une transcription il n’en aura pas. Cependant depuis
dix ans il ne veut pas transcrire.
Mais si le sieur Croze aime mieux des procès que sa
tranquillité, le sieur Momet aime mieux sa tranquillité que
�( 39 )
des procès ; et il ne doit pas etre victime de ce goût par
ticulier au sieur Croze. On ne vend pas pour être gêné
perpétuellement dans ses affaires, et pour être toute sa
vie esclave de son acquéreur. Cette gêne a été, et est te lle ,
qu’elle a opéré successivement la ruine du sieur M o m et,
qui ayant fait, depuis l’an 7, nombre de ventes, n’en peut
toucher la totalité du prix; et d’après des reventes faites
par plusieurs de ses acquéreurs, il a été exposé aux pour
suites les plus ruineuses pour le rapport de la seule main
levée du sieur Croze, ou des sommes qui lui avoient été
payées. Les plus honnêtes se sont contentés, ne pouvant
toucher eux-mêmes leur prix déposé, de toucher du sieur
M omet les intérêts de ces sommes ; intérêts qui depuis
long-temps montent à 7496 francs par au. L e sieur Momet
peut donc avec raison dire qu’il eût été bien heureux
pour lui de n’avoir jamais connu le sieur Croze.
A la vérité un acquéreur a une hypothèque sur les
Liens de son vendeur p o u r la sû re té d e sa garantie ; mais
il a en m ê m e te m p s une voie ouverte pour éviter les re
c h e r c h e s des créanciers qui ont aussi hypothèque sur l’im
meuble ; c’est de faire transcrire.
Aussi les lois sur les hypothèques parlent des oppositions
ou inscriptions faites en vertu de créances, et ne disent
rien de celles qui n’ont pour but qu’une garantie; ce qui
prouve que le législateur a entendu que la voie de la trans
cription y suppléeroit; car l’acquéreur n’est pas un créan
cier. La loi a voulu une inscription d’office pour le ven
deur , s’il lui restoit dû quelque chose; mais elle n’a pas eu
la même précaution pour l’acquéreur, quoique la garantie
soit une clause tellement d’usage, que la loi la supplée
�C 4° )
si elle n’est pas exprimée, et s’il n’y a clause contraire.
Les acquéreurs qui s’obstinent à vouloir faire des ins
criptions disent ordinairement que s’ils ne craignent pas
les créances, au moins ils peuvent craindre les demandes
en éviction, qui souvent peuvent survenir au bout d’un
très-long-temps, à cause des minorités qui se succèdent.
Mais , sous ce prétexte, on seroit forcé de maintenir des
inscriptions pendant des siècles; et avec cette terreur pa
nique , celui qui vendroit une seule propriété auroit le
reste de ses biens en séquestre, sans pouvoir en disposer.
Aussi la jurisprudence a-t-elle restreint sur ce point les
prétentions des acquéreurs, en les obligeant à purger leur
vente , pour forcer leur vendeur à faire radier les inscrip
tions , sans qu’ils pussent eux - mêmes en conserver une
apiès la m a in le v é e d e toutes les autres.
C est ce qu enseigne M . Grenier, tribun, en son Com
mentaire de l’édit de 1 7 7 1 , page
de la seconde édi
tion. Il cite à cet égard un arrêt conforme, rendu au parle
ment de Paris, entre le sieur de Mâcon et la dame Gironde,
le 3 mai 1785. Le parlement de Rouen avoit jugé de même
le 18 mars 1779 , et le parlement de Toulouse le 31 août
1784.
‘ C ’est encore ce qu’ a jugé la seconde section de la
cour , le 25 prairial an 11 , -entre les sieurs Choussy et
Gardelle. Ce dernier vouloit maintenir une opposition
laite par lui pour sa garantie , et prétendoit que le sieur
Choussy n’ayant plus d’hnmeubles, il avoit intérêt de con
server ses droits sur celui qu’il avoit vendu le dernier.
Mais le sieur Choussy vint à l’audience avec la mainlevée
des oppositions qui a voient frappé les lettres obtenues sur
�éo\
( 4 0
•sa vente, et la cour lui accorda la mainlevée de l’oppo
sition de gai-antie formée par le sieur Gardelle.
Ainsi le sieur Momet répète au sieur Crose : Faites
transcrire à vos frais votre contrat, comme vous en avez
la faculté ; notifiez-moi les inscriptions, s’il en existe : tant
que je seraien demeure d’en avoir mainlevée, vous aurez
droit de maintenir vos inscriptions ; sinon vous n’êtes
pas le maître de la faire durer éternellement, en ne faisant
jamais transcrire.
C’est là ce qu’a jugé le tribunal de Brioude, et il est
clair dès-lors qu’il s’est parfaitement conformé à la juris' »^prtidençè : ce -'n'est pas ^seulement eir point de iîroit -qu’il,
""a- bién-jugé
-parle fait, ie-sieui’ Momet-« -établiqu’il,
—■
¿-’existort plus d’inscriptionà sut1 le. bien de GhaSsaigne ;.
!À.insi le sieur1Crofce n’ïivdl; motifs d©précaution qu o dans
son désir de'lie pas payer , et fraris son' prbjet bien con- '
duit de consommer fo* rüine dn siemr-'Momet.
'
v-* \ ^
*v •
j
/*• ''*»%
«,
*-
> ■ t.
Si la justice ci atteint le ;s?bur Crozedaus.^qprcVprQviJle,
^ srtes<?on«toyen^lïi6me» ont été indignés des horribles,
.chicanés. Cy.ril1i'ènouvelle■
s<nas,çe&se depui<; tant ^’apnéps *
pour ^a^pVô^rîer ; îitrphîs vil- -pris.,-.une belle propriété
qu^il voudrôit* accroître encore:, à* Combien plu§ fqrt^
raison doit-il s'attendre k ne pas.se jouer de l’intégiyté <,1q»
la cour. Le sieur Momet pourroit mériter quclqu’inttti^t,
par li\ dure position à laquelle le sieuv Croze, en gênant
toutes ses affaires, est parvenu h le réduire; mais il sê
contente de gémir en lui-même du malheur de l’avoir
connu, et.il n’osera solliciter de la cour que la plus rigou
reuse justice. Il ne plaide ici que de damno ritando ,*
F
�( 42 )
et loin de rien dissimuler, il se présente avec des pièces
originales qui doivent seules éclairer et convaincre -, car
ses intérêts ne seront jamais mieux défendus que lors
que la cour sera à portée de tout v o ir, et de prononcer
en plus grande connoissance de cause.
Signé M O M E T .
M e. D E L A P C H I E R , avocat
C
/ai*
^
\
^
t
ft,/o> .,
, .
R O I Z I E R , avoué.
a1" / ^ =
/>
^
. 4 «juvOtïi
f t , ZO>
i
r'uuM W iX .
.'
v
» >>
„v
f_ u
iUU
o*»
u/
«*>** W,* V
^titiz z i^
i -* -—
.
r ±
^
’
t
.(HT
y«**** V”
/«
. F-
» J E w r i- ^
¿ fa r* « *
- W
A R IO M
,fr/ r *
«- * - «■ ^
•—
“T
' _____
'-t£ D ^ Q- y u
u *i-'-w
^ AV
i £r
«—
_
i
ttA .
. /i Lt ti
/*. Ûa.
_ A,
w ^
^
“
M ü iU ,
^
t
a
* * * £ '
ifU / .
de l ’im prim erie d e L a n d r i o t , seul im prim eur de la
*
C o u r d'appel. — M a i 1806.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Momet, Gaspard-Roch. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Croizier
Subject
The topic of the resource
fraudes
notaires
abus de confiance
députés
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Gaspard-Roch Momet, propriétaire à Paris, intimé ; contre Jean-Joseph Croze, sous-préfet de Brioude, appelant ; en présence d'Ignace Beaufort-Monboissier de Canillac, appelant.
Extrait de minutes du contrat de vente. Extrait de jugements.
Table Godemel : Paiement : 5. un acquéreur est-il fondé à retenir la partie du prix non payé au vendeur, soit à cause du trouble qu’il éprouve, par une demande en désistement, soit sur l’existence de ses propres inscriptions ? le vendeur est-il garant de la demande en désistement, si cette garantie résulte d’une surprise faite par l’acquéreur ? l’acquéreur peut-il se prévaloir de ses propres inscriptions conservatoires, lorsqu’il refuse de transcrire et de purger ? Acquéreur : 5. un acquéreur est-il fondé à retenir la partie du prix non payée au vendeur, soit à cause du trouble qu’il éprouve par une demande en désistement, soit par l’existence de ses propres inscriptions ? le vendeur est-il garant de la demande en désistement, si cette garantie résulte d’une surprise faite par l’acquéreur ? l’acquéreur peut-il se prévaloir de ses propres inscriptions conservatoires, lorsqu’il refuse de transcrire et de purger ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1791-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
42 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1619
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0411
BCU_Factums_G1620
BCU_Factums_M0523
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53293/BCU_Factums_G1619.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paulhaguet (43148)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
députés
fraudes
notaires
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53294/BCU_Factums_G1620.pdf
dec5fd618dadae2ab6323757c00c4625
PDF Text
Text
MEMOIRE
E N
R
É
P
O
N
S
E
,
POUR
M e.
J
e a n
-J
o se ph
C R O Z E , ancien a v o c a t, ex
législateur , sous-préfet de l’arrondissement de
Brioude, appelant et intim é;
C O N T R E
,
M O M E T homme
de loi habitant de la ville de P aris intimé ;
L e sieur G a s p a r d - R o c h
,
,
E t encore contre le sieur I g n a c e M O N T B O IS S IE R -B E A U F O R T -C A N IL L A C habitant
de P a ris, appelant.
,
L e s grandes conceptions, en matière d’agiotage et de
calcul, sont dans le domaine de la haute finance de Paris.
Quelques hommes obscur s , par fois nécessaires , désignés
A?
�( a J
sous une dénomination très - vulgaire , voudroient se
donner de l’importance, et ne cherchent qu’à faire des
dupes.
L e -provincial timide évite rarement de tomber dans
leurs filets ; et s’il est assez heureux pour échapper à leurs
pièges, on le signale alors comme un homme de génie
qui a f a i t un coup de maître.
T elle est la marotte de cette horde de vam pires, plus
dangereux qu’utiles, dont les gains sont souvent mons
trueux , et le luxe toujours un scandale.
Habitués dans les antichambres, ils pénètrent rarement
dans l’intérieur ; mais ils laissent à la porte des pamphlets,
des écrits calom nieux, et croient inspirer de l’intérêt,
ou donner prise à la malignité.
Leur ton est d’être à. pîed , et de faire payer des voi
tures, ce 11 est qu en piovince qu’ils se distinguent, en
se faisant porter en chaise; et jouant ainsi les im portons,
ils ne veulent pas s’apercevoir qu’ils lie sont que ridicules.
M c. Croze , ancien avocat, ex-législateur , sous-préfet
de B rioud e, est aux prises avec le sieur M om et, faiseur
d’affaires à Paris.
L e sieur Momet voudroit s’identifier dans celte cause
avec un nom illustre, chéri et respecté dans ce dépar
tement , et dont les malheurs doivent toucher les cœurs
généreu x.
Mais pourquoi M . de Canillac scroit-il le plastron do
M om et? Ce n’est pas sérieusement qu’il voudroit l’Cvônix
contre un acte authentique, par lequel il a irrévocable
ment transmis l’objet exigu qu’il réclame. M. de Canillac
est homme d’honneur , incapable de revenir contre ses,
�¿ ^ l/
( 3 )
engagemens; il rougira du rôle qu’on lui fait jouer, lors
qu’il sera plus éclairé sur ses intérêts.
O n s’occupera p e u , dans ce mémoire , de sa récla
mation ; le seu l, le véritable adversaire de M e. C ro ze,
est le sieur Momet. On ne s’attachera qu’à ce dern ier,
et on lui prouvera que sa défense est un tissu d’impostures.
f a i t s
.
M . Ignace Montboissier-Beaufort-Canillac étoit pro
priétaire d’une terre appelée de Chassaigne , située dans
le département de la H aute-L oire, près Paulliaguet.
Cette terre est d’ancienne origine ; elle a été premiè
rement possédée par la maison de P o lign ac, d’où elle
a passé à celle de Montboissier-Ganillac.
Parmi les immeubles qui composent cette te r r e , il s’en
trouve qui ont des dénominations différentes, notamment
quelques parcelles de ferres et de p rés, connues sous le
n om de la V é d r in e .
Cette propriété a toujours été une dépendance, une
annexe de la terre principale , affermée cumulativement
avec Chassaigne à l’époque de la vente dont il va être
question.
L e 2 septembre 1791 , cette terre de Chassaigne fut
saisie réellement sur M . de Canillac, à la requête de
Gaspard Rousseau, homme de loi à Paris. La saisie
réelle, dont on a sous les yeux une copie écrite par le
clerc du sieur M om et, comprend Chassaigne et la V'édrine. On ne trouve, sous cette dernière dénomination,
que cent trente-trois quartonnées de terre, c’est-à-dire,
A a
�L op j
(4 ) ,
dix-scpt septerées, quelques p rés, et trente-trois septe
rées de Lois.
Ce n’est qu’à la Védrine qu’on trouve des bâtimens
d’exploitation pour les fermiers ; le château n’offre, dans
Ses dépendances, d’autres bâtimens de cette nature que
des écuries pour les chevaux, et des greniers pour re
cevoir les redevances qui autrefois étoient assez consi
dérables.
Ce lieu de la Védrine est une dépendance absolue de
la terre ou domaine de Chassaigne , comme on veut
l’appeler aujourd’hui. Il n’y a point de village de ce
nom ; il n’existe d’autres bâtimens que ceux employés
à l’exploitation de l’entière propriété.
L e 30 vendémiaire an 4 , avant d’avoir obtenu la ra
diation de U saisie réelle, M . de Canillac vendit, ou du
moins fit rédiger par-devant notaire une vente précédem
ment faite sous seing privé de cette terre de C h assaign e,
au profit du sieur Momet.
Il est dit que M . de Canillac vend le domaine dit de
Chassaigne, consistant en une maison de c h e f, bâtie à la
moderne , cour , jardin et dépendances, ensemble les batimens nécessaires à Texploitation ; le tout contenant cinq
septerées trois quartonnées. (Il n’y a de bâtimens d’exploi
tation qu’à la V éd rin e, et ceux de Chassaigne ne sont
compris en la saisie réelle quç pour trois septerées. )
L e 7 juin 1 7 8 4 , il a été fait un partage par-devant
notaires , de tous les biens de famille : la terre de Chas
saigne est échue au lot du sieur de Canillac ; la V é d rin e
n’est pas désignée dans la composition du lot; et le sieur
de Canillac ne jouit de cet objet qu ¿1 raison de ce nue la
�<JO Ï
( 5 ) .
terre de Chassaigne lui est délaissée en termes généraux
par ce partage.
Suit l’indication de tous les immeubles qui composent
cette terre de Chassaigne , et auxquels on ne donne aucun
nom particulier.
M . de Canillac déclare soixante septerées trois quarton. nées de terres labourables, vingt-une septerées de pré ;
Cent vingt septerées de bois , tant taillis que haute futaie ,
situées dans la commune de Chassaigne et celle de Sansac ;
Deux septerées deux quartonnées de vigne;
Cinq septerées une coupée de terrain inculte.
Ce qui form e, est-il d it, un total de deux cent dix
septerées une quartonnée de terrain (1), ainsi que le
tout se poursuit et com porte, sans aucune exception
ni réserve; même le mobilier v if et m ort, de quelque
nature qu’il soit, qui se trouvera dans le domaine, ap
partenant au vendeur, qui entend vendre à Tacquéreur
tout ce qiCil p o s s è d e , e t tous les droits qu’il a et peut
av o ir dans le domaine et dépendances : garantissant en
outre à l’acquéreur les deux cent dix septerées, h dix
arpens près en dehors ou en dedans.
M . de Canillac déclare que le domaine présentement
vendu lui appartient comme lui étant échu par le pai'tage des biens de la succession de M . Pierre Beau for tCanillac, son oncle, dont il étoit héritier pour un .tiers,
et encore son donataire ; et il ajoute que M . Beaufort-Ca-
( 0 11 y a erreur dans l ’addition : le détail donne deux
septerées sept quartonnées et une coupée.
cent
treize
�( 6)
nillac, oncle, en étoit propriétaire, comme seul héritier
de M. Ignace Canillac, son père.
Cette vente est faite moyennant 600000 livres assignats
( 8622 francs, écus ).
En exécution de cette vente, le sieur Momet a pleine
ment joui du domaine de Chassaigne et de la V édrine,
son annexe, qui en est une dépendance , le joint sans
moyen , et pour lequel M. de Canillac n’avoit d’autre titre
que le partage de 1784.
M®. Croze, législateur, membre du conseil des cinq cents,
étoit à P aris, et avoit eu occasion de connoître le sieur
Momet. M 8. Croze ignoroit absolument la consistance de
la propriété de Chassaigne ; il ne connoissoit en aucune
manière m la localité , ni l e produit : ce lieu est distant de
Brioude de trois miryamèu-es, et il étoit aussi étranger à
MX Croze, que s il eut été à. une d is t a n c e de cent lieues.
L e sieur Momet lui propose d’en faire l ’a cqu isitio n , et
ne doutoit pas alors que la Védrine ne fit partie de sa vente.
M e. Croze s’informe sur les lieux ; les renseignemens qu’il
obtient lui appi’ennent que celte propriété peut lui
convenir ; mais il étoit bien loin de savoir ou de penser
qu’il pouvoit y avoir do l’équivoque sur le point de savoir
si la Védrine faisoit partie du domaine de Chassaigne : on
se rapproche, on est d’accord sur le prix.
T-e 24 floréal an 4 , il est passé un acte sous seing privé,
fait double cnlv’eu x, par lequel Momet y prend la qua
lité de propriétaire du domaine de Chassaigne , la
drine ) circonstances et dépendances.
L e sieur Momet vend en conséquence les domaines de
Chassaigne et de la Védrine , circonstances et dépou-
�(7)
dances, ainsi et de la même manière qu’il est énoncé
au contrat de vente qui lui a été fait par M . de Canillac,
par acte passé devant D elo ch e, notaire, le 30 vendé
miaire an 4.
Les domaines de Chassaigne et la V éd rin e, deux fois
répétés dans cet acte, sont écrits de suite, sans rature,
de la main du clerc de M om et, et signé par lui.
Cette vente est faite moyennant 36000 fr. écus.
M e. Croze est porteur de cet acte sous seing p r iv é ,
à la vérité cancellé comme nul après l’acte authentique,
mais subsistant dans son entier avec les signatures des
parties.
Comment M omet a-t-il eu l’impudence d’im prim er,
page 3 de son m ém oire, que cette vente sous signature
privée fut consentie -pour le seul domaine de Chassaigne?
Il faut convenir qu’il est heureux pour M e. C roze de
pouvoir donner un démenti formel à Momet ; il est
toujours im portant de conserver les actes : malheureuse
ment p o u r l ’h u m a n it é , il est rare de trouver des hommes
qui traitent de bonne foi.
Momet n’est pas plus véridique, lorsqu’il d it, à la suite
de cette fausse assertion , que M c. Croze alla à Brioude
chercher ses fonds, et probablement visiter l’objet qu’il
avoit acquis.
11 est de notoriété que M e. Croze ne quitta point Paris,
et ne pouvoit pas le quitter; que les fonds lui furent
portés par la dame sa sœur , et qu’il désira de suite une
vente par-devant notaire.
M°. Croze ne laissa pas écouler un long délai pour
se mettre en règle : la vente notariée est du 29 prairial
�(8)
suivant. Le sieui M ôm ct en fit le projet sans le commu
niquer, et le notaire Deloclie le mit en forme : on croit
même que la minute de l’acte est écrite par le clerc de
Momet.
M ais, dans cette m inute, M e. Croze s’aperçut que
M om et, q u i, par l’acte sous seing p r iv é , avoit venduChassaigne et la V éd rin e , avoit affecté de ne mettre
dans l’acte notarié que le domaine de Chassaigne.
Étonné de cette affectation, M e. Croze l’observe à
M omet ; il trouve d’autres négligences ou omissions dans
la rédaction de l’acte authentique ; il exige que tout soit
conforme à la première vente ; il note les additions ou
corrections dont l’acte lui paroît susceptible.
Momet ne regarde pas comme essentielle la mention
de la V éd rin e; c’étoit une annexe, une accession , une
dépendance absolue du domaine de Chassaigne. M e. Croze
insiste; et alors on ajoute à la vente notariée un ren vo i qu i
paroît satisfaire toutes les parties. Il est ainsi conçu : « Les
« domaines de Chassaigne et de la V é d r in e, désignés seu« lement dans le contrat qui sera ci-après énoncé sous
« le seul nom du domaine dit de Chassaigne, etc. »
Certes cette addition, ainsi que les autres, n’ont rien
de ridicule ; et quelqu’affectation qu’ait mise Momet à
transcrire dans son mémoire la copie figurée de cette
m in u t e , il ne parviendra pas à justifier les î-eproches qu’il
s’est permis contre M e. C roze : on n’aperçoit rien de
m inu tieu x ni d’inutile dans ces cliangemens.
Ces additions sont signées des parties, du notaire et du
receveur de l’enregistrement. M omet, dans la suite , a cru
devoir obtenir un arrêt de la cou r, pour demander une
expédition
�6 \\(9)
expédition vidimée ; demande que le notafre Deloche a
regardé comme une injure, et avec fondement. A u ssi,
par la communication qu’on a prise,et de l’expédition der
la vente, et de celle de la procuration, on a vu que le
notaire Deloche a fait toutes réserves et -protestations
contre la prétention de M o m et, fo n d a n t le m o tif de
Varrêt, et a?inonçant que sur les minutes des actes y
énoncés , il existe des changemens , des renvois et des
ratures qui ont été fa ites après coup , et à son inscu.
L e notaire Deloche observe et atteste que les quatorze
renvois portés au contrat, et ainsifigurés dans la présente expédition, sont tous paraphés, tant par lesdits
sieurs M om êt et C roze, que par le sieur G ro u , receveur
de l’enregistrement, et par les deux n otaires, etc.
Momet glisse assez légèrement dans son mémoire, et
dans une note, page 12, au bas, qu’il vient de se pour
voir extraordinairement h P a r i s c o n t r e le sieur Deloche.
M o m e t sans doute administrera la preuve de cette pour-*
iiuite extraordinaire, qui n’est pas plus vraie qu’il l’est
que le sieur Deloche étoit le notaire de confiance de
M ° . Croze.
Ce dernier n’a jamais eu aucune relation avec le no
taire ; mais il est au moins prouvé que Deloche étoit le
notaire de M o m et, puisqu’il a reçu la vente qui a été
consentie par M . de Canillac.
>
Quoi qu’il en soit, la consistance de ce domaine est la
môme que celle insérée en l’acte sous seing p riv é , a v e c
la clause spéciale que le vendeur ne pourra r é p é t e r l’excodant des contenues désignées, à quelle q u a n t i t é qu’il
puisse monter.
13
-»
�-o o
C 10 )
L e sieur Momet vend avec toute garantie.
Il est convenu que l’acquéreur entrera en jouissance à
dater du jour du contrat, qu’il percevi’a les jouissances
des années 1795 et 1796.
L e vendeur ne se réserve que les jouissances de 1794.
L a vente est faite moyennant la somme de 36000 fr .,
dont le contrat porte quittance.
M e. Croze convient q u e , malgré la quittance, il n’avoit
payé que la somme de 18000 fr. sur le prix principal,,
et 600 francs de pot de v in , dont il n’est point mention
en l’acte authentique, mais dont l’énonciation se trouve
dans la vente sous seing privé.
A l’égard du prix resté dû, suivant le môme acte sous
seing p riv é , M>. C roze devoit payer 3000 fr. dans trois
m ois, s il le jugeoit à propos; et, pour les 1Ô000 francs,
il etoit convenu qu il seioit accordé t e r m e , qui ne pour—
roit être moindre de deux ans, et on devoit prendi-e la
forme d’un acte de dépôt.
Cette convention fut exécutée : la forme de dépôt
paroissoit essentielle, pour donner la certitude au ven
deur de toucher du numéraire. Mais le sieur M oinct
voulut comprendre dans le billet les intérêts de deux
années ; on disputa sur les retenues : enfin on convint
d’une déduction de i 5o fr. pour cet ob jet, de s o r te que
le billet de dépôt fut de 19660 fr.
Parmi les conventions de la vente notariée, q u ’il est
inutile de rappeler en entier, puisque Momet a mis tant
de soin à les tran scrire, il étoit dit nommément qu ’ il seroit
loisible à l ’acquéreur d ’obtenir ù scs frais des lettres de
ratification.
�t
( II )
S’il y avoifc des oppositions de la part des créanciers du
vendeur ou de ses auteurs, il devoit les faire cesser, et en
rapporter m ainlevée, ainsi que toutes radiations néces
saires , dans la quinzaine, à compter de la signification
qui seroit faite.
En cas d’éviction, de trouble ou d’opposition à la jouiasance de l’acquéreur , Momet s’obligeoit d’indemniser
M e. Croze, en lui fournissant dans l’arrondissement des’
départemens de la Haute-Loire et du Puy-de-Dôm e, des
terres formant corps de ferm e, et c e , à dire d’experts ,
sans pouvoir par le vendeur offrir , pour l’indemnité,
le remboursement du prix de la ven te, et contraindre
M e. Croze à l’accepter.
L e sieur Momet remet à M e. Croze le contrat de vente
souscrit à son profit p arle sieur de Ganillac, l’expédition
du partage de famille de 1784, dont on a déjà parlé.
L e sieur Momet s’oblige de remettre incessamment à
M e. C roze toutes les autres pièces relatives à la propriété'
du domaine vendu, aussitôt que le sieur de Canillac les
lui auroit remises, et notamment les lettres .patentes et
l’arrêt d’enregistrement qui avoient été obtenus sur cette'
transaction portant partage.
L e sieur Momet est tenu d’aider au besoin M®. Croze,
à sa première réquisition, des diverses quittances de payemens par lui faits pour le sieur de Canillac, à différens
créanciers privilégiés ou hypothécaires , sur les biens
vendus, et de lui justifier des subrogations portées par des
quittances, jusqu’ù concurrence de la somme de 400000 f.
Enfin Momet promet de 'remettre incessamment à
M<% Croze toutes les pièces qui seroient nécessaires pour
B 2
�•'A *Y '
( 12 )
se faire mettre en possession réelle du domaine vendu, ¿\
peine, etc.
•
C’est ici le cas d e>remarquer que M omet ayant sans
doute conçu quelques craintes relativement à M . de Can illac, crut qu’il étoit utile d’obtenir des lettres de rati
fication sur la vente qui lui avoit été consentie.
. Son contratlui étoit nécessaire; il l’avoit remis à M c. Croze,
en exécution de l’acte du 29 prairial an 4. Il écrit le 13 prai
rial an 5 à M e. Croze, pour l’inviter à lui confier ce pre
mier acte. Me. Croze s’en fit un plaisir et un devoir.
Momet lui en donne un récépissé le 22 du môme mois.
Il agit en conséquence, et a correspondu directement,
pour cet objet, avec le conservateur : M e. Croze en a la
preuve dans les mains. r
Parmi les créanciers de M . de Canillac, étoit le sieur
Labastide, ancien avocat, juge de p aix à Brioude, créan
cier légitime d’une somme de 1300 fr. en p r in c ip a l: il
avoit vainençient sollicité du sieur Momet le payement de
cet objet modique.
, Il prit de l’humeur : L e dépôt fait par Momet au bureau
des hypothèques lui parut un moyen sûr d’être payé ; il
fit un enchère : le domaine de Chassaigne, acheté par
M omet 8622 fr.,'v a le u r réelle, fut porté à 65 ooo fr.
L e sieur M omet sç vit obligé do parfournir.
M a is, quoiqu’ il ait voulu effrayer ou intéresser sur
cette augmentation de prix , il no faut pas croire qu’il lui
en ait coûté fort cher. i«. Les créances du sieur Labastide,
ep principal intérêts ou frais, se sont montées à 2700 fr.;
2°. il a payé aux damçs de Sansac io 5o fr. ; 30. aux frères
G allice, 2000 franco; 4°* *l Magdeleiiic Ravier , une rente
�( i3 )
viagère de 200 fr.; 5°. à la nation, un capital de 5oo fr.
d’une rente de 25 francs due aux religieuses de la V audieu; total, 8200 francs, en comptant pour 2000 francs
le principal de la r e n t e viagère que Momet paye à M agdeleine Ravier.
E n core, si on en croit une lettre du sieur Fahre, sou
fondé de p o u vo ir, en date du 29 prairial an 11 , il auroit
transigé à une somme bien moindre; il en seroit quitte
pour 5ooo francs.
Encore a-t-il pris sa revanche, et a-t-il eu tous les moyens
pour m e t t r e à contribution d’autres acquéreurs de M , Ca
nillac, qui n’avoientpas obtenu de lettres de ratification,
contre lesquels il avoit formé sa demande hypothécaire.
L e sieur Momet a osé dire que le dépôt de son contrat,
au bureau des hypothèques étoit du fait de M e. Croze,
qui l’avoit ainsi désiré ; mais c’est encore un m ensonge
maladroit. Qu’importoit à M e. Croze que Momet déposât
son contrat? il étoit plus simple pour l’acquéreur de dé
poser le sien: les créanciers du premier vendeur n’auroient
pu former opposition qu’en sous - o rd re , et M®. Croze
n’avoit rien à craindre de leur part.
M°. Croze fit au contraire tout ce qui étoit en son pou
voir pour éviter les démarches du sieur Labastide, et ce
fut un sujet de discussion qui les a divisés.
M e. Croze, pour lever tous les obstacles relatifs au parfournissement, fit présenter la dame sa mère comme cau
tion du sieur Momet ; et M°. Croze est encore obligé
relativement à ce cautionnement, puisque la dame Croze
a été assignée, en sa qualité de caution , en rapport et
distribution de la somme de 65 000 francs, montant des
enchères.
�I V- ;•
C r4 )
Bientôt vient un changement de scène. L e 13 fructidor
an 1 1 , M . de Canillac imagine de prétendre qu’en ven
dant le domaine de Chassaigne , il n’a pas vendu la pro
priété de la Védrine ; il cite M e. Croze en désistement
de cet objet. Comment s’adresse-t-il à M e. C roze, qu’il ne
connoissoit pas? pourquoi n’assigne-t-il pas directement
M om et, son vendeur?
Ce n’étoit pas le compte de M om et, qui le faisoit agir,
ou plutôt qui agissoit sous son nom.
Mais M e. Croze se trouvant, par cette demande, en péril
d’éviction, prend le parti de faire saisir et arrêter entre
ses mains les sommes qu’il pouvoit devoir à. Momet.
II étoit également dans l’intention de dénoncer à Momet
la demande en désistement formée par le sieur de Canillac,
lorsqu il est prévenu par M o m e t , qui, le 13 nivôse an 12,
le cite en conciliation sur la demande cju’il entendoit
former en payement du montant du billet de dépôt.
M e. C roze, en réponse, lui fait notifier, le 16 du
môme mois, i°. les titres de créances hypothéquées sur
le bien de Chassaigne, dont Momet s’étoit obligé de
rapporter la mainlevée. ,
2°. Un jugement du tribunal du P u y , du 8 fructidor
an 7 , portant réception de caution de la dame Croze,
pour le parfournissement de l’enchère, ensemble l’acte
de soumission de caution.
30. L e certificat du conservateur des hypothèques, sur
l’obtention des lettres de ratification de M om et, avec
l’extrait des oppositions subsistantes sur M . de Canillac.
L e 18 du môme mois de nivôse, Me. Croze dénonce
A Momet la demande formée .par M . de Canillac, en dé-
'
�é>Û
( ,5 )
sistement du domaine de la V éd rin e, le procès verbal de
non - conciliation, et la saisie-arrêt qu’il avoit fait faire
en ses mains.
L e 27 nivôse, les parties comparoissent au bureau de
paix. M>. Croze proteste qu’il est prêt à remettre le
d ép ô t, sous la déduction des payemens considérables
par lui faits à compte de cette somme ; mais il déclare
qu’il doit aussi déduire les fermages de 1795, à lui vendus,
dont il n’a pas touché le montant, puisque le fermier
s’étoit libéré antérieurement entre les mains de la régie,
et en rapportoit la quittance.
M e. Croze conclut encore à une indemnité pour les
courses, voyages et avances par lui faits en vertu de la
procuration de Momet.
M e. Croze cite encore Momet pour se concilier, i«. sur
la demande en garantie du désistement réclamé par M . de
Canillac; 20. en validité et confirmation de ses saisiesarrêts; 30. en payem ent des fermages de 1796; 40. en
ra p p o r t, mainlevée et radiation des oppositions et ins
criptions hypothécaires prises sur les domaines vendus,
tant du chef du sieur Momet que de ses auteurs ; 5°. en
remise des titres de propriété que Momet s’étoit obligé,
par l’acte de vente, à délivrer à M e. Croze; 6 °. en justi
fication des quittances, avec subrogation des créanciers
hypothécaires, jusqu’à concurrence de 400000 fr .; 7 0. en
payement d’une somme de 2883 francs 93 centimes, pour
indemnité, faux frais, voyages, déboursés, par suite de
la procuration du 27 prairial an 4 ; 8°. en représentation
du titre que Momet prétendoit avoir contre M®. Croze,
aün d’y émarger les payemens faits sur icclui, et l’annuller
�(
16?
s’ il étoit soldé; 9°. à ce qu’il fût tenu,' en cas d’éviction,
et à défaut cl’exécution des clauses du contrat, de fournir
et délivrer des immeubles de môme nature, conformément
au contrat de vente.
L e 23 prairial an 12 , jugement qui joint toutes les
demandes. 11 n’est pas inutile d’observer ici que M°. Croze
avoit toujours été franc et généreux ; il avoit souscrit
un billet de dépôt; et au moyen de ce qu’on avoit com
pris dans ce billet deux années d’intérêt, il étoit expres-’
sèment convenu que les intérêts n’auroient pas cours,
s’il y avoit des obstacles pour la libération. Quelqu’inquiétude que pût concevoir M®. Croze sur la solvabilité
de son vendeur, il n’avoit cependant pas refusé de donner
des à-comptes ii esf- en
¿g justifier, par des quit
tances appiouvées de M o m e t , qu’en l’an 6 et en l’an 7
il a paye a compte de la somme restée entre scs mains,
celle de 8076 francs ; que depuis il a encore payé celie
de 7600 francs ; total, 15676. Et comme il est inévitable
que le sieur Momet sera tenu de rembourser à M e. Croze
le prix des fermages de 1795 , qui sont expressément
vendus par l’acte du 29 prairial an 4 , il en résulte que
M®. Croze, à très-peu de chose près, est entièrement
quitte envers le sieur Momet.
ü n ne conçoit donc pas l’acharnement, les vexations
de ce vendeur inquiet, dont les prétentions sont sans
fondement comme sans intérêt, et qui plaide pour l’unique
plaisir de calomnier un fonctionnaire public irrépro
chable.
Quoi qu’il en s o it, la cause portée au tribunal de
Briondo le 21 messidor an 13? sur toutes les demandes,
il
�il fut rendu un jugement dont le sieur M omet a transcrit
les motifs et le dispositif dans son mémoire.
Il suffira de rappeler q u e , par ce jugem ent, M . de
Canillac est déclaré non recevable dans sa demande en
désistement de la partie du domaine dit de la Védrine.
M e. Groze est gardé et maintenu dans la possession et
jouissance de cette môme partie, comme annexée et fo r
mant une dépendance du domaine de Chassaigne.
En ce qui touche les demandes respectives des sieurs
Momet et C ro ze, le jugement donne acte à Momet de
ce que M e. Groze a reconnu avoir reçu l’arrêt d’enregis
trement et les lettres patentes de 1786, et de ce que Momet
a offert audience tenante, et a mis sur le bureau de l’au
dience, les autres titres réclamés par M e. Croze, en vertu
de la dixième clause du contrat de vente du 29 prairial
an 4; lui donne pareillement acte de ce qu’il offre de rap
porter la mainlevée de toutes les inscriptions procé
dantes de son f a i t , ou de celui de ses auteurs , su r les
Liens vendus, dès que M°. Croze aura fait transcrire son
c o n t r a t de propriété , et dénoncé au sieur Momet les ins
criptions. A yan t égard aux offres , faisant droit sur les
conclusions prises par le sieur M o m e t, condamne M e.
Croze ù payer à ce dernier, en deniers ou quittances vala
bles , la somme de 19660 francs, montant du billet de
d ép ô t, avec les intérêts de la somme depuis la date de
la vente , sous la déduction de la somme de i 65 o francs
comprise dans le billet pour intérêts du principal, sur
laquelle les payemens qui ont pu être faits seront imputés
d’abord sur les intérêts, subsidiaircment sur le principal.
M e. Groze est tenu, dans le délai de trois mois à compter
G
�(i8?
du jugem ent, de faire transcrire son titre d’acquisition.
( M e. Croze n’est pas tenu de le faire par son contrat •, il
s’en est réservé la simple faculté : Sera loisible audit
acquéreur d’obtenir des lettres de ratification. )
Faute de ce faire dans le d é la i, et sans qu’il soit besoin
d’autre jugement, il est fait pleine et entière mainlevée à
M omet des inscriptions de M e. C roze, et notamment de
celle faite au bureau de Paris, volume 18 , n°. 674-, en
celui de C o rb cil, volume 3 , n°. 303; en celui de Dieppe,
volume 1 1 , n°. 683.
Il est également ordonne que sur la remise qui sera
faite par le sieur M om et, à chacun des conservateurs des
bureaux des hypothèques,de l’expédition par extrait du
jugem ent, iis seront tenus de radier les inscriptions.
11 est fait mainlevée à Momet de toutes autres inscrip
tions de M°. Cioze : tout conservateur est tenu de les
radier.
L e jugement prononce encore mainlevée de toutes
saisies-arrêts ou oppositions, à la requête de M e. Croze :
tout gardien ou dépositaire est contraint de verser.
lies parties sont mises hors de cour sur le surplus des
demandes ; M e. Croze est condamné en tous les dépens
faits par M om et, tant en demandant que défendant.
M . de Cariillac est condamné au tiers des dépens adjugés
à M om et; M e. Croze est condamné au coût de l’expédi
tion et signification du jugement, sauf à hti à en répéter
les deux tiers contre M . de Canillac. ( Disposition bien
' singulière', lorsque Momet étoit évidemment garant de
M °. Croze sur la demande en désistement. )
Enfin ce jugement doit être executé par provision, et
�-\
(
r9
)
nonobstant l’appel, quant à la condamnation du montant
du billet.
M«. C roze ne pouvoit laisser subsiste^ ce jugement visà-vis de Momet ; et sans s’embarrasser de ce que feroit
M . de Canillac, qui avoit succombé sur la demande prin
cipale, il présenta , le 6 thermidor an 13 , requête en la,
cou r, pour demander des défenses ; et par exploit du 10 du
même mois , il fit signifier son acte d’appel, ensemble
l’arrêt qui permettoit d’assigner sur la demande en dé
fenses.
Sur cette demande , intervint arrêt le i 5 thermidor. L a
cour peut se rappeler que, touchée des motifs,que M e.
Croze avoit proposés, elle avoit prononcé des défenses
de mettre le jugement à exécution , et que l’arrêt ne fut
rétracté qu’à raison de ce que M o m et, ou. son avou é,
offrit de donner bonne et suffisante caution pour la tota
lité du prix de la vente, c o n f o r m é m e n t à l’article 1653
du Code civil.
L a cour ayant égard à ses offres, se détermina à joindre
la demande en défenses au fond, à la charge par Momet
de donner bonne et suffisante caution pour la totalité du
p r ix , et de faire recevoir cette caution en la cour. Les
dépens furent réservés.
L e sieur Momet eût été fort embarrassé d’exécuter cette
partie de l’arrêt : une caution n’est pas pour lui si facile
à trouver ; aussi a-t-il gardé le plus profond silence.
Mais depuis, le sieur Momet a cru qu’il étoit utile à
ses intérêts de faire paroître de n o u v e a u M . d e C a n illa c
su r_la scène; il lui'a fait interjetor appel, par acte du
29 thermidor an 13, du jugement de Brioude , qui le déC 2
�( 20 )
clnroit non recevable dans sa demande en désistement
de la portion dite de la V éd n n e : les deux appels ont
été joints pour être statué sur le tout par un seul et
même arrêt.
M e. Croze va développer ses moyens de défenses : il
commencera par examiner la demande principale en
désistement, mais aux risques, périls et fortunes du sieur
M om et, et sauf sa garantie.
Il présentera ensuite ses griefs contre le jugem ent,
dans la partie relative au sieur Momet. Il se flatte de
démontrer que ce jugement blesse en ce point tous les
principes du droit et de l’éq u ité, et que Momet n’a
jusqu’ici proposé que des objections frivoles.
P
r e m i è r e
q u e s t i o n
.
L e sieur de C a nilla c, en vendant C h a ssa ign e a u sie u r
M o m e t y a-t-il compris dans cette vente la portion dite
de la Védrine ?
O n a déjà vu que la portion de la Védrine étoit une
dépendance, une annexe de Chassaigne; que M . de Canillac
ne possédoit la Védrine qu’à raison de ce que Chassaigne
étoit avenu à son lot par le partage de 1784.
Ce partage ne désigne point particulièrement la V é
drine; cependant M . de Canillac en a toujours joui.
La saisie réelle de 1 7 9 1 , q u i porte sur Chassaigne,
c o m p r e n d aussi la Védrine. Ce dernier objet étoit affermé
cùmulativeinent avec Chassaigne, lors de la vente qu’en
a consentie M. de Canillac.
�¿> Z2>
( 21 )
Ghassaigne étoit une terre assez considérable, qui de
puis long-temps étoit dans la famille Canillac. La V é
drine est de la justice et de la directe, et n’en a jamais
été séparée.
Les deux objets étoient unis par la nature du domaine
ou fief dom inant, et par l’extinction ou la destruction
des batimens d’exploitation à Chassaigne; par la confu
sion des revenus, et la réunion des impositions; par la
destination du père de famille, et par l’accession à per
pétuelle demeure.
Les états de section de la commune de Ghassaigne,
dressés en 1790, et subsistant encore pour la répartition
de la contribution foncière, comprennent Chassaigne et
la Védrine comme faisant partie de la même propriété;
et les contenues désignées par M . de Canillac dans sa
ven te, concordent parfaitement avec les contenues des
états de section.
L e sieur de Canillac charge son acquéreur de payer
le montant de toutes les contributions : celles de Chas
saigne et la Védrine sont réunies.
L e sieur de Canillac vend les bâtimens d’exploitation :
il n’y en a qu’à la Védrine.
L e sieur de Canillac vend les bestiaux : il n’y en avoit
qu’à la V édrine; ils avoient été, comme l’exploitation,
fixés à la Védrine.
L e sieur de Canillac vend le domaine de Chassaigne,
comme lui étant échu par le partage de 1784; il r e m e t
cet acte de partage à l’acquéreur; il ne jouit de la V é
drine qu’en vertu de ce,partage, et n’a pas d’autre titre.
�- L e sieur de Canillac charge l’acquéreur d’entretenir
le bail de ferme, le subroge à ce même bail; et ce bail
comprend cumulativement Chassaigne et la V édrine, qui
sont affermés sous un seul p r ix , n’ayant que le même
fermier.
Il cède les fermages échus pour l’année 1795 , sans
aucune ventilation ni réserve : son acquéreur se met en
possession de la totalité des immeubles.
L e sieur de Canillac donne ensuite une procuration
pour retirer des meubles, réclamer des arrérages qui
ne sont pas de la comprise de sa vente ; il ne fait men
tion en aucune manière du lieu de la V édrin e, quoiqu’il
ait s o in de i*éclamer tous les objets non vendus. Cette
p r o c u r a t i o n est du 19 germinal an 6.
L e sieur de CamUac laisse jouir son acquéreur et les
siens pendant dix ans sans réclamer.
D ’après toutes ces circonstances, p o u r v o it - il s’élever
un doute sur la question de savoir si la Védrine est
comprise dans la vente de Chassaigne ?
Les conventions s’interprètent par l’exécution qu’elles
ont eue. La loi 91 , ff. P r œ d iis, §. 3 , parle des fonds
séjans et des fonds sabiniens , q u i, quoique conservant
des noms différens, n’en sont pas moins unis et compris
dans la même disposition, s’ils ont été confondus dans
la même gestion, si les revenus en ont été réunis dans
les mêmes comptes. Titio sejana prccd ici , sicuti com
para ti sunt do , lego : curu essent gabiniana quoque sim ul uno pretio comparato non sujjicere, sohun argumentum emptionis j'espondi, sed inspiciendiwi} an
�Ij j Z Î
( *3 )
lit tô ris et rationibus appellatione seianarum gabinia
quoque continentur, et utriusque possessionis confusi
reditus, tîtulo seianarum accepta loti essent.
Henrys, tom. 4 , consultation 5e. , png. 93, pense qu’il
ne peut y avoir de plus forte preuve d’union que lors
que les revenus ou les produits sont payables et por
tables au lieu principal.
D um oulin, Des fiefs, tit. I er. § . I er. glos. 5 , nos. i 5
et 16 , D e pertinentes quœ accedunt feu d o iiniuntur
ut fundo patrimonalii ex destinatione patris fa m .
N°. 16, il pense qu’un fonds nouvellement acquis, est
réuni à l’ancien , toutes les fois que le père de famille
a manifesté l’intention de n’en faire qu’un seul. R e q u iritur ergo aliquis actus fa c ti per quem appareat quod
j'undus noviter acquisitus unilur veteri, ju re perpetuum
access/oms et pertinentice ex quo colligitur animus
eundeni fundam constituendi.
D ’Argentré
O
', sur l’article 2.65 de la Coutume de Bretagne , u°. 2.5 , dit que l’union de deux terres se fuit par
la destination du père de famille ; et il place parmi les
preuves de l’union la différence du p rix , étant vraisem
blable que celle d’un moindre prix a été unie à celle
d’un plus grand : Validœ conjectura; sœpè petnntnr à
pretii magnitudine. 11 est en ce point d’accord avec D u
moulin.
M ornac, sur la loi P a tro n u s, 34, if. D e legatis , dit
que les fonds placés sous le même bail sont tous censés
faire partie de la même terre; et sur le §. 3. de la loi
P rœ d i/s, il enseigne que la possession explique le
titre r
�(
24
)
Ces autorités sont précises. La Védrine étoit réunie à
Chassaigne , et en faisoit essentiellement partie ; c’étoit
le même fief, la même terre, la même exploitation, la
destination du père de famille : il n’y a pas eu besoin de
distinction ni de désignation particulière pour en trans
mettre la propriété au sieur de Canillac, par le partage
de 1784. Il a entendu et voulu vendre tout ce qu’il
possédoit à Chassaigne; il a remis le bail général qui corn*
prenoit la V éd rin e, l’état des sections, et l’extrait des
rôles matrices qui englobent la Védrine. C’est la même
contenue que celle qu’il a vendue. Est - ce sérieusement
qu’il voudroit aujourd’hui revenir contre des conventions
aussi claires, qui ne peuvent présenter rien d’équivoque ,
et qui j d a n s le casd’am biguité, s’interpréteroient contre le
vendeur? P o tu u legem apertiùs conscribere.
L oin de nous cette m i s é r a b l e o b j e c t i o n , qu’il n’a vendu
que le domaine de Chassaigne. Ne sait-o n p a s q u ’à l’épo
que de la vente on ne pouvoit ou on n’osoit rappeler des
dénominations féodales? ne voit-on pas même que le sieur
de Canillac n’a pas osé se servir du nom de château, et
qu’on a cherché un terme équivalant, en disant maison de
ch ef ? pourroit-il aussi dire qu’il n’a pas vendu le château ?
Enfin il a tout cédé : le domaine est vendu avec ses cir
constances et dépendances. La Védrine n’a ja m a is été
qu’une dépendance de la terre de C h a s s a i g n e : cette terre
est d a n s la m a i s o n de Canillac depuis long-tem ps; elle a
toujours eu la Védrine pour annexe; les anciens monumens de la province l’attestent. A vant comme après la
vente, le sieur de Canillac, dans ses écrits particuliers, dé
signe cette propriété sous le nom de terre; c’est encore sous
celte
�(
2 5
)
cette dénomination que Momet a fait faire ses affiches pour’
la vendre : une de ses affiches est dans les pièces.
En un m ot, M o m et, acquéreur de M . Canillac, a vendu
nominativement à M®. Groze, Chassaigne et la Védrine ;
il a vendu comme il avoit acquis , comme il avoit joui ; il
seroit garant envers M e. Groze de cette demande , et c’est
assez s’en occuper: la prétention du sieur Canillac n exigeoit
pas une discussion sérieuse.
• Q
u e s t i o n s
r e l a t i v e s
a u
s i e u r
M o m e t.
§. 1er.
M e. Croze doit-il être autorisé à maintenir ses Inscrip
tions sur les biens du sieur M om et ?
L e sieur Momet traite assez légèrement cette ques
tion i m p o r t a n t e qu’il a m is e a u d e r n i e r rang dans son mé
m o i r e . O f f r i r o i t - i l donc.une si grande sûreté, lui qui se
trouve dans un état d’insolvabilité notoire, qui est séparé
de biens avec son épouse, et cherche à vendre ses proprié
tés? 11 a persécuté tous ceux avec qui il a eu affaire; il a
fait éprouver toute sorte de désagrémens au sieur Girot
de Pouzol, à qui il avoit vendu le bien de Meudon.
' L ’état de ses affaires doit effrayer tous ceux qui ont quelqu’intéret à démêler avec lui; et cette inquiétude augmente
précisément, parce qu’il fait plus d’efforts pour rassurer.
■Mais par son contrat de vente, du 29 prairial an 4 , il
a promis une pleine et entière garantie à M a. Croze ; il
a hvpothéqué ses biens à cette garantie ; il a con-
D
�V "•
tracté des obligations très - étendues avec son acqué
reur ; il est tenu de rapporter la mainlevée de toutes les
oppositions ou inscriptions hypothécaires, soit de son
chef personnel, soit du chef du sieur Canillac; il est tenu
de justifier avec subrogation de quittances, jusqu’à con
currence de 400000 francs de créances hypothécaires.
M e. Croze est en péril d’éviction, dès que le sieur Canillac
a interjeté appel du jugement de Brioude.
En cas d’éviction, le sieur Momet doit fournir d’autres
fonds en corps de ferm e, sans pouvoir jamais offrir aucune
restitution de deniers : la clause est de rigueur.
M e. C ro ze , comme héritier de la dame sa m è re , est
encore engagé pour le cautionnement par elle prêté à
raison du parfournissement des enchères.
M e. Croze n’a d’autre moyen que son inscription, pour
assurer et maintenir 1 e x e c u tio n , de so n contrat. Quel seroit
donc le m otif qui feroit prononcer la mainlevée de cette
inscription ? et comment pourroit-on priver M e. Croze
de la faculté que lui donne la loi ?
Momet prétend qu’il rapporte la mainlevée des inscrip
tions existantes. Il est vrai que par acte du 7 mai 1806,
c’est-à-dire, en cause d’appel, Momet a fait signifier la
mainlevée de quelques-unes des inscriptions : celle des
dames de Sansac, qu’il a payée lors du parfournissement
des enchères, est pure et simple; mais celle des frères
Gallice , il ne présente qu’un jugement par défaut ; et on
sait que les conservateurs ne peuvent radier que sur un
acte authentique, ou sur un jugement qui a passé en force
de chose jugée ; celle du sieur Labastide n’est radiée qu’en
ce qui concerne le domaine de Chassaigne; celle des enfans
�(
*7
)
de Pierre Moutte est donnée par une tutrice qui n’en a
pas le droit ; d’autres ne sont que conditionnelles, sans
expliquer sur quoi porte la condition, et en quoi elle
consiste.
.
D ’un autre cô té, il en existe encore une foule d’autres,
telles que celle de M . la Fayette ; celles du sieur Thom as, du
sieur André H oudieu, du sieur Denis-Joseph H ibon, du
sieur Robert-Michel le Normand, du sieur Jacques M arie,
et une foule d’autres : Momet lui-même en a fait une sur
le domaine de la Védrine qu’il a nominativement vendu.
L ’inscription de sa femme sur tous les biens personnels
du mari subsiste égalem ent, et est en concurrence avec
celle du sieur Croze. C’est au milieu de tous ces obstacles
que Momet se permet de demander la mainlevée de l’inscriptionde M e. C roze;et, chose plus étrange encore, c’est
que le jugement dont est appel donne acte à M omet de
ses offres de rapporter la radiation des inscriptions qui
peuvent exister, et q u e , sous la foi de ses offres, on oblige
M°. Croze à donner mainlevée de l’inscription par lui faite,
qui est sa seule sûreté , l’unique moyen de maintenir l’exé
cution de son contrat.
Momet convient, page 28 de son m ém oire, qu’il est
obligé de justifier des quittances des créanciers de Canillac,
pour 400000 f, (assignats), mais il ne dit pas que c’est avec
subrogation des créanciers ; ce q u i, aux termes de la loi
du 11 frimaire an 6 , leur donne la même valeur ou lé
même effet qu’en numéraire.
A la suite , Momet prétend rapporter des quittances
excedant de beaucoup la somme promise. On lui deman
dera où sont ces quittances, s’il les a déposées ou comD 2
�C*8)
muniquées ? mais tant qu’il ne les aura-pas fait connoitre, on lui donne le démenti le plus formel. Ce n’est
là qu’ un mensonge im pudent, comme s’il avoit espéré
que la cour s’en rapportât à sa parole.
Il est également curieux d’entendre Momet soutenir à
la même page, qu’il n’a pas vendu à M e. Croze les fer
mages de 1795. V oici comment s’exprime le contrat de
vente du 29 prairial an 4 , après la clause générale portant
ven te, où il est expressément stipulé que le vendeur ne
pourra répéter contre l’acquéreur l’excédant de la con
tenue, à quelque quantité qu’il puisse se monter. Il est
ajouté, ce pour par ledit sieur Croze, ses héritiers et ayans« cause, jouir, faire et disposer du domaine en pleine pro« p n e te , et conime de chose leur appartenante, à compter
« de ce jo u r, et en commencer la jouissance par les re~
k venus etfermages des annees i y ^5 et 1796, vieux style;
« le vendeur se réservant seulement les fermages de l’an« née 1794. »
Telles sont les expressions littérales du contrat, nonseulement dans l’expédition délivrée à M e. Croze , mais
encore dans l’expédition vidim éequi a été imprimée dans
le mémoire.
Il paroît alors bien étrange que M o m e t, toujours A la
page 28 , ait transformé cette clause en une simple fa
culté , et trouve qu’il y est d it, Pourra le sieur Croze
jou ir, etc. ; de sorte que, suivant lu i, simple faculté pour
le sieur Croze , réserve pour Momet ; e t , suivant son
s y s tè m e , Momet n’ayant pas reçu au delà de sa réserve,
M e. Croze doit se pourvoir ainsi qu’il avisera pour cet
objet : Momet n’a rien à faire à tout cela.
�( 29 )
• Si ce n’est p&s une jonglerie de M om et, une indécente
plaisanterie, il faut croire qu’il extravague. Q uoi! Momet
vend le domaine avec les fermages de 1795; il vend tout
avec pleine et entière garantie, et il ne doit s’inquiéter
en aucune manière si son acquéreur a joui ou non de
l ’objet vendu avec garantie! il ne lui a cédé qu’une simple
faculté de jouir ou de ne pas jouir ! M omet en sera quitte
pour dire qu’il n’a rien touché au delà de sa réserve!
M ais, en matière de vente, toutes les conventions sont
de droit étroit, toutes les conditions font partie du prix :
M e. Croze n’eût pas acheté aussi ch er, s’il n’eût pas eu
le droit de percevoir les fermages de 1796, qui font un
objet considérable.
* 11 y a même p lu s, ces fermages devoient essentielle
ment faire partie de la vente ; le sieur Canillac les avoit
cédés à M om et; et dans l’afliche que ce dernier a fait
poser, affiche dont M°. Croze est porteur, qui est écrite
de la main du c l e r c de IVÆomet, il y est dit expressement
que la récolte de 1 7 g 5 f a i t partie de la vente.
Dans l’acte sous seing privé qui a précédé la vente
authentique, Momet a vendu expressément cette récolte
de 1795. Peut-on en imposer ainsi à la justice, et se jouer
de ses obligations ?
Momet n’a donc rempli aucun de ses engagemens; il
ne rapporte aucunes quittances ; il ne justifie point des
radiations; son acquéreur n’a pas joui des objets vendus;
la dame Croze n’est pas libérée de son cautionnement;
Momet a affiché son insolvabilité par une sépai’ation
de biens avec sa femme; ses propriétés sont vendues ou
hypothéquées ; il y a péril d’éviction : donc M®. Croze *
�w
- ,
^ 30 *
à été dans la nécessité la plus urgente de prendre ses
précautions ; donc son inscription doit être maintenue.
M ais, oppose M om et, je ne puis pas être continuel
lement dans les liens d’une inscription : transcrivez votre
contrat ; et s i, après la transcription, il existe encore des
inscriptions sur moi ou sur le premier vendeur, j’en rap
porterai la mainlevée.
Transcrivez votre contrat! Pourquoi le sieur Momet
veut-il exiger que M°. Croze s’assujettisse à une formalité
coûteuse et inutile? D ’abord sa vente est antérieure à la
loi du 11 brumaire an 7 : on purgeoit alors les hypo
thèques par des lettres de ratification ; mais ce n’étoit là
qu’une simple faculté qu’avoit l’acquéreur; il avoit le
droit de se contenter d’une simple opposition à fin de
conserver.
-■ ; .
Telle est aussi la convention d e la vente; M e. Croze
n’a pas voulu y être assujetti.
■•
« Sera loisible audit Croze d’obtenir des lettres de rati« fication, etc. » M om et, qui n’y voit pas plus lo in ,
semble vouloir prendre le contre-pied de toutes les con
ventions ; tantôt il transforme un droit évident en simple
fa c u lté , tantôt une simple faculté en un droit coactif.
On ne peut pas plus complètement déraisonner. En gé
néral tout acquéreur a le droit de faire une inscription
conservatoire pour sa garantie : l’édit de 1771 l’y autorisoit, la loi du 11 brumaii-e an 7 en a une disposition
précise.
' : ' ‘ 'i : ; s ■
Il y a cette différence entre les deux lois, c’est q u e,
dans la prem ière, l’obtention des lettres de ratification
étoit toujours facultative; tandis que, d’après la loi du
�(3 0
11 brum aire, la transcription étoit le complément de la
vente, en faisoit partie essentielle : on ne pouvoit opposer
le contrat à des tiers qu’autant qu’il étoit transcrit.
Cependant on n’a jamais dit que le vendeur pût forcer
son acquéreur à transcrire ; et Momet a bien mal choisi,
en citant à l’appui de son système l’arrêt rendu en la cour,
le 2 5 prairial an i r , dans la cause du sieur Choussi contre
le sieur Gardelle.
Cet arrêt, rendu sur la plaidoirie de M M . Vissac, et
Pagès ( de Riom ), a jugé tout le contraire de ce qu’on
lui fait dire. L e sieur Choussi avoit vendu une propriété
au père du sieur Gardelle : le vendeur offroit une grande
solvabilité ; cependant Gardelle s’avisa , par contrariété,
et sans aucun but utile, de faire une inscription conser*
vatoire contre le sieur Choussi.
Cette inscription arrêtoit toutes les transactions com
merciales du sieur Choussi ; il demanda et obtint la ra
diation des juges d ’A m b e r t .
Sur l ’appel interjeté par Gardelle, M e. Pagès, conseil
de Choussi, s’aperçut qu’il existoit des inscriptions bien ou
mal fondées sur le sieur Choussi ; il conseilla à celui-ci
d’en obtenir la mainlevée , et de la rapporter avant que
la cause fût plaidée.
L e sieur Choussi l’obtint en effet ; et sur le rapport de
la radiation de toutes inscriptions , la cour confirma le
jugement d’Ambert. Mais comme le sieur Choussi ne
s’étoit pas mis en règle en cause principale, qu’il ne rapportoit la mainlevée qu’en cause d’ap p el, la cour jugea
que Gardelle avoit pu refuser la mainlevée jusqu’au rap
port de la radiation. En conséquence, quoique le sieur
�( 32 )
Choussi gagnât son procès, il fut condamné en tous les
dépens.
Gomment Momet est-il assez imprudent pour citer un
préjugé directement contraire à sa prétention ? M e. Croze
comptoit aussi tirer de grandes inductions de cet a rrê t,
qui juge solennellement que tant qu’il existe des inscrip
tions sur le vendeur, l'acquéreur a le droit de maintenir
un acte conservatoire.
Il est donc démontré jusqu’à l’évidence , que l’inscrip
tion de M e. Croze doit être maintenue. Si Momet trouve
qu’elle est exagérée, qu’il en demande la réduction , et
alors on examinera si sa proposition est raisonnable; mais
jusque-là tout ce qu’il a dit et écrit choque trop ouver
tement les pvincipes et la raison, pour que la cour puisse
balancer un seul instant.
.
Ce qu on vient de diie pour l’inscription s’applique par-«
faitement à la saisie-arrêt ; aussi Momet s’est-il contenté
d’attaquer cette saisie comme irrégulière, sur le fonde
ment que M°. Croze n’avoit pas de titre authentique , et
qu’on ne pouvoit faire procéder à une saisie sans titre.
Quoi ! M e. Croze n’a point de titre qui l’autorise à faire
une saisie-arrêt! Qu’est-ce donc alors que son contrat de
vente, par lequel Momet s’oblige de rapporter les main
levées de toutes inscriptions, de justifier d’un payement
de 400000 fr. avec subrogation, de garantir sa vente, de
faire jou ir, e tc., etc., etc. ?
•< L e c a u t i o n n e m e n t d e la d a m e C r o z e , l ’a c te d e s o u m i s
s io n d e c a u t i o n , n e s o n t d o n c pas e n c o r e u n titre suilisant.
L e sieur M om et, il faut en convenir, est dans un gnintl
cm barras, une grande pénurie de moyens, puisqu’il est
réduit
�(
33
)
'
réduit à parler contre l’évidence , et rappelle à chaque
instant cet ancien adage , « qu’il vaut encore mieux dire
« une sottise que de ne rien dire du tout. »
§. I L
M e. Croze d o it-il se libérer dans Vinstant même de
ce qu il reste devoir du billet de 19650 f r . ? D o it-il
les intérêts du montant de ce billet depuis la vente
du 29 prairial an 4 ?
La libération du sieur Croze de ce qu’il reste devoir
sur le billet dont il s’agit, n’offre pas de difficulté. M e. Croze
a toujours offert de compter avec le sieur Momet ; il a
demandé le rapport du billet, pour y émarger les quit
tances de toutes les sommes qu’il a payées à compte; et
on a déjà vu que le résultat p ro u vero it q u ’ il s’est à peu
près libéré par anticipation. Mais M®. Croze e x ig e , con
form ém ent à l’article 1653 du Code c iv i l , que le sieur
Momet donne préalablement une caution suffisante pour
la totalité du p rix , et ne fera aucune autre réflexion ; il
n’a pas besoin d’ajouter que, dans l’état où il en est avec le
sieur M om et, la caution doit porter sur la totalité du p rix,
ainsi que la cour l’a jugé par son arrêt rendu au provisoire.
Relativement aux intérêts de la somme déposée, le sieur
Momet n’avoit pas observé que le billet comprenoit les
intérêts de deux ans ; il avoit cru devoir réclamer les
intérêts de la somme totale du jour de la vente. Si Me. Croze
etoit capabled’équivoquer sur l’objet ou la cause du billet,
il diroit qu’alors le sieur Momet ne vouloit pas qu’011
E
�( 34 )
pût penser que cet acte avoit quelque connexité avec le
prix de la vente ; car il exigea que le billet ne fût pas sous
la même date. La vente est du 29 prairial, le billet est du
i 5 du même mois ; il y a bien évidemment novation , et
le sieur Mornct sciemment a renoncé au privilège du
vendeur, en dénaturant sa créance.
Il a même renoncé aux intérêts de droit; et ccttc abdi
cation a fait partie des conventions, et déterminé les par
ties sur la nature et la forme d’un billet qui avoit pour
objet, d’une p art, d’assurer le payement en num éraire, de
l’autre , de laisser entre les mains de l’acquéreur un gage
qui put le rassurer sur le maintien de l’exécution de la
vente.
qui, comme on l’a d it, avoit demandé
les intérêts de la somme totale ; q u i, pendant deux ans,
avoit tenu le même langage, est enfin c o n v e n u , à la veille
du jugement, qu’il avoit compris deux années d’intérêts
qu’il consentoit de déduire ou allouer sur la somme prin
cipale, qu’il réduisoit alors à 18000 francs.
Cet aveu du sieur Momet est précieux dans la cause.
- Il ne faut pas perdre de vue que le terme de la libération
de M e. Croze étoit au moins de deux ans. O r , il est
de principe que tant que le terme de la libération n’est
pas échu , le débiteur même d’ un prix de vente ne doit
pas d’intérêt. Pothier le décide ainsi dans son Traité du
contrat de vente, toin. i c,‘. , pag. 297. « On décide coin« munément, d it-il, que l’acheteur ne doit pns d’inté« rêts pendant le temps du terme qui lui est accordé
« pour le payement du prix , quoiqu’il jouisse pendant
« ce temps de l’héritage; et quand il y auroit du doute,
L e sieuv M o m c t ,
�d& j
( 35 )
« il doit s’interpréter contre le vendeur. » Potliier cite
Fachin , Covarruvias, etc.
En faisant l’application de ce principe à l’espèce p a r
ticulière, il y a voit entre les parties un billet de dépôt;
et on ne contestera pas sans doute que le dépôt valoit terme
jusqu’à la demande. L e même auteur Potliier, Traité du
d ép ô t, chap. 2, sect. i re. pag> 39, m . 4 5 , art. 2, enseigne
qu’une somme d’argent déposée ou donnee a titre de
dépôt, ne produit pas d’intérêts; le dépositaire, tant qu’il
n’a pas été mis en demeure de la rendre, ne doit aucun
intérêt : Usurœ in depositi actione sicut in cœteris bonœ
Jidci jitd iciis, ex mora venire soient. L oi 2, cod. Depos.
L e titre du sieur Momet est un billet de dépôt : la
procuration qu’il a donnée, la demande qui a été formée
en vertu de cette procuration , ont pour objet un billet de
dépôt, et la réclamation de la somme déposée. Ce n’est
pas l’origine, c’est le titre qu’il faut examiner: le titre
est le résultat de la convention, et la convention doit
s’exécuter.
L e sieur Momet a reconnu la convention, en prenant
pour titre un billet de dépôt; il l’a reconnue en y com
prenant deux années d’intérêts.
Si la somme eût dû produire des intérêts de sa nature,
il n’y auroit pas compris ces deux années; et s’il s’y est
déterminé , s’il a clioisi cette form e, il a senti, il a su
qu’après les deux années, il seroit nécessaire de f o r m e r
une demande pour faire produire légalement des intérêts.
L e sieur Momet n’a pas môme élevé de doute à cet
égard. Par une lettre en date du 27 thermidor an
adressée à M°. Croze il le prie de lui faire passer de
E 2
�( 3* )
l'argent, en lui observant que l’argent est à Paris au meil
leur marché, à deux pour cent par mois; et il ne voudroit pas payer des intérêts , lorsque M ‘ . Croze ne lui
en paye pas ; il remet tout cela à sa justice.
E t M e. Croze dans ce temps-là payoit des à-eomptes :
M e. Croze ne pouvoit divertir les deniers ; il devoit tou
jours avoir la somme prête; car le dépositaire est néces
sairement astreint à se lib érer, du moment qu’on veut
exiger la somme.
Ce n’est point ici un dépôt irrégulier, c’est-à-dire, un
acte qui autorise le dépositaire à se servir des deniers ;
c’est un dépôt pur et simple : l’argent n’est pas censé sorti
des mains du dépositaire pour en tirer p a rti, il faut qu’il
le conserve , et qu’il soit toujours prêt à le rendre ; donc
il ne doit d interets qu’aUtant qu’il seroit en retard de
verser à la première sommation.
§. I I I .
M*. Croze a -t-il le droit de demander une indemnité
à raison des avances qiCil a fa ite s pour le sieur
M om et ?
L e sieur Momet ne peut pas disconvenir qu’il avoit
une entière et juste confiance en M®. Croze; qu’il lui.
donna une procuration , à la suite de la vente, pour régir
et administrer, et qu’il abusa souvent de la complai
sance de son mandataire, qui n’a épargné ni sa bourse
ni ses peines pour obliger son mandant.
L e sieur Momet prétend n’avoir donaé cette procu
�ration à M e. Croze que pour l’obliger; il ajoute que cette
procuration étoit môme inutile, dès qu’il y avoit une vente
authentique.
Si la procuration n’a voit d’autre objet que l’exécution
de la vente, le sieur Momet auroit raison , et M V Croze
seroit le premier à le reconnoitre.
Mais c’est encore une petite inexactitude de Momet.
1°. La procuration est antérieure à la vente. 2°. Par l’acte
sous seing privé , il s’étoit obligé de fournir cette procu
ration, pour faire remplir à ses fr a is les objets qui étoient
h sa charge. 30. Elle étoit indispensable pour toutes les
affaires que Momet avoit encore avec les créanciers de
M. de Canillac; et M e. Croze, pour les term iner, a fait
deux voyages de Paris dans son département, vingt voyages
au moins au P u y , pour s’occuper exclusivement d’affaires
personnelles au sieur Momet.
C ’est ce que ce dernier a reconnu souvent par une cor
respondance suivie et multipliée. « Que de peines infinies
« cela ne vous donne-t-il pas ( écrivoit-il à M e. Croze
« le 16 messidor an 6 ) ; je suis bien heureux de vous
« avoir là ; sans vous , que serois-je devenu avec celte
« bande d’archers et de filoux ! Mais vous ôtes là , je suis
« tranquille à cet égard; vous en viendrez à bout. »
Dans une foule d’autres lettres, il remercie M°. Croze
de tous ses soins; et la meilleure preuve qu’ il n’a pas cru
donner une procuration inutile , c’est que le 29 brumaire
an 9 il a révoqué la procuration qu’il avoit donnée à
M°. Croze, pour la remettre au sieur Fabre : donc il sentoit la nécessité d’avoir un mandataire sur les lieux.
Qu’oq lise d’ailleurs cette procuration, imprimée au
�C
33
)
memoire ; on y verra M e. Croze autorisé à poursuivre
tous les débiteurs de M o m et, faire toutes diligences ,
former demandes, comparaître au bureau de paix, etc.
Ce mandat général ne pouvoit avoir pour objet la jouis
sance de la terre de Chassaigne. Enfin le sieur Momet a
si souvent répété ce mandat dans toutes ses letti-es, qu’il
n’est pas permis d’équivoquer.
E t sans doute , quelque juste que soit cet objet de de
mande, quoique la procuration soit dirigée sur une mul
titude d’objets, M e. Croze se serait peut-être déterminé
à en faire le sacrifice, s’il ne s’étoit aperçu que le sieur
Momet vouloit qu’il fût sa dupe.
Quoi! contre la foi prom ise, contre la nature de son
titre , le sieur M o m e t s’avise de demander les intérêts du
dépôt depuis la vente! L e sieur Momet arrive, prend des
actes de vo yage, en fait prendre par le sieur de Canillac,
et veut ainsi mettre à contribution M°. C r o z e , qui jus
qu’ici avoit fait pour lui des voyages coûteux, sans en
répéter le montant.
Pourquoi M e. Croze s e ra it-il ainsi dupe du sieur
Momet ? En quoi sa délicatesse seroit-elle blessée, lors
qu’il réclame le remboursement de ses avances? Celui qui
fait les affaires des autres doit être indemnisé; l’équité ne
permet pas qu’on profite des dépenses d’autrui, et l’équité
l’emporte sur toutes les subtilités. T el est encore le langage
de Pothier , du quasi contract. negotiorum gestorum ,
sect. I , pag. 335.
M e. Croze n’a pas besoin d’insister sur le chef de de
mande qui a pour objet la remise des titres de propriété;1
Momet s’y est expressément obligé par son contrat : celte
�( 39 )
obligation est même de droit. Momet prétend les avoir
offerts à l’audience ; M e. Croze ne les a ni vus, ni retirés.
Ce n’est pas à l’audience qu'on peut accepter des titres;
ils doivent être communiqués et déposés, soit au greffe ,
soit chez un notaire.
Momet s’est aussi permis de reprocher à M e. Croze
d’avoir excédé la procuration du sieur Canillac; procu
ration donnée par lui pour ratifier la vente de Chassaigne, qui a été remplie par le sieur Cailhe, et qui a
compris dans cette ratification le lieu de la V éd rine, quoi
qu’il ne fût pas exprimé dans la procuration.
L e sieur Momet a donc oublié ce qu’il mandoit à
M e. Croze par sa lettre du 5 messidor an 6. « La ratifi
ée cation contenue en la procuration, et la ratification
« qu’on peut faire d’abondant, en vertu de cette procu« x’ation , pareroit au vice qui pourroit exister dans la
« vente, à cause de Immigration.
r « S i t o u s il avez, p a s f î u t f a i r e la ratification dotit
« est q u estio n , en rertu de la procuration, je pense qu'il
« est instant de la fa ir e bien motivée , parce quêtant
a postérieure ci la loi sur les lésions, elle pourra parer
a aux friponneries de * * * * * à ce sujet. Il est à propos
« qu’elle soit d’une date antérieure à tout ce que pourroit
« faire Canillac à ce sujet. Je vous engage à lui donner
« la date la plus ancienne que vous pourrez. »
M e. Croze pouvoit-il avoir dans l’idée qu’il y eût du
doute sur la Védrine? Il lui étoit nominativement vendu:
le sieur Canillac n’avoit pas réclamé. Ce n’est que plus de
trois ans après qu’il s’est pourvu; et ce n’étoit pas excéder
la procuration, que défaire concorder la ratification avec
�( 40 )
la vente consentie à M e. Croze , d’employer les m êm es
termes du contrat.
M e. Croze terminera ici la discussion d’une cause de
venue fastidieuse, mais nullement embarrassante dans sa
décision.
L e sieur Momet auroit dû se renfermer dans les moyens
de fait et de droit, et surtout se défendre toutes person
nalités.
Cependant il a eu l’audace de répandre un pamphlet,,
de colporter chez les magistrats un écrit injurieux, où
il accuse M e. Crozè de prévariquer dans sesfon ction s.
C ’est l’injure la plus grav e, la plus atroce, qu’on puisse
faire à un fonctionnaire public. Jusqu’ici M°. Croze a
mérité la confiance et l’estime de ses concitoyens : appelé
par eux aux premières, aux plus honorables fonctions,
sa conduite fut toujours digne d’éloges.
Comme tous ceux qui ont obtenu des su c c è s , il a fait
des ingrats et des jaloux : mais ses ennemis même ont au
moins reconnu son intégrité, et ne lui ont jamais re
proché de manquer à ses devoirs, ni de prévariquer.
M°. Croze doit obtenir une réparation éclatante de
cette injure ; il se propose de la demander lors de la
plaidoirie de la cause.
Il avoue que l’inculpalion de Momet lui a paru si
extraordinaire, qu’il ne sauroit comment e xp liq u er cette
incartade , dont un homme de cette sorte ne connoît
pas la force.
Momet n’est entré dans aucun détail. Quelques par
ticuliers ont appris h M°. Croze que M om et s’étoit plaint
d’avo ir é p ro u v é un
retard dans la liquidation d ’ une
créance
�( 41 ).
c réance nationale , et ne manquoit pas de l’attribuer à
M e. Croze, sous-préfet.
C ’est une grossière imposture lancée par M o m e t,
contre sa propre connoissance ; il veut parler sans doute
de la rente due aux dames de la Vaudieu, et qui forme
en principal un objet de 5oo francs.
Il s’est adressé directement, ’pour la liquidation , à
M . le préfet de la Haute-Loire ; il l’a obtenue de lu i,
sans que cette opération ait été communiquée à la souspréfecture de Brioude.
Ces sortes de liquidations ne passent point par le canal
de la sous-préfecture. M e. Croze a ignoré les: démarches
de M om et, et n’en a été informé que long-temps après
que la liquidation a été terminée.
M e. Croze fait ici sa déclaration, non pour se justi
fier; il ne doit compte de sa conduite en administration
qu’à ses supérieurs : mais il n’a voulu laisser aucun louche
dans sa défense, et finira par rappeler ce que dit Tacite :
C a lu m n ia to r e s , genus hominium nunquam partis satis
coercitum.
Signé C R O Z E .
M e. P A G E S
( d e Riom ), ancien avocat»
M e. V E R N I È R E ,
—
avoué licencié.
--
A RIOM f de l ’imprimerie de LANDRIOT, seul. imprimeur de l a
■\
•
C our d'appel, — J u in 1 8 0 6 .
�* ¿ûi>c*. Y«aa. Tu * iX * / 'o y L ^ x l
^liiK'ii\
C jcm » A ^ t> \* '- t u a ^ Ü ^
(4^WwuX\
î
m
h
6vV- e^»«/ W-y (yünÎfc*J *.
1^*1 tu-^W»*MA|J4)
((a, oxfïi J 1 W^Ak^v^k^JTjj\t*»j
Ua^v&aAua cuwXÎuiTa^Jm &ao/ Oht^ O vuua ûjfr. ^uü OO-tÜUAfe^
/u V«JUThM *VO ViÂ^CA^XKAM cw
cu^cjtù
^UIM^WU ^kJT^i
<UV»M^ CX>iA/^(V^AWi^
î l ^A«^t
acft. ^u4-
'w
^ (MJÜVUl*~<m ÇVojvj üu«ryi,“ */ ^ W**^'"**
/feuùJ^C^Vl^0
X# X<Müc^Vum
îf
ti* /•«J\mAt-iu /*.
AA.Mv
w\«vw»<. "à* r/iv^ <~\yla C*-A< ^
Ai*ÿù**M ctr ^ frÀ A A flIM **“ COw^uwbvl) «M(UtlrAv U^tyfcfey^*** ^ J \~ d \^ .
^MM>VMMAhtüiwi ft_» ft/MÜ'b* p£*/rt&*y%UL
** ^<^»U^»»L
^W_
^ovjr «J / f <K% \jr J u1«Silt (/h*l—v\Au*Îui\i^i-M <j£ £ \
r r r
üviahmu <~bô~ A»
^A«^vtAÿw
m{
,J îaA- i>Stho^X' ^
,.
aJC c/yi^lvu,
^ÜU***r t*J'*i*r
■
^
« X o v \ ^ l U n o U ih ÿ
(AA Krk*. ^ u i ^ ( m J O jlA T a k * <AAM>2teÂK,
^ | ' « ^ ï‘ <*V/u.~
^ &r-e>*, cajv^ x^ ^
Atvctr
"bc^jTb O W M M U y o ^ * y 0lV <1, fAvJïU+jv, y '
U.v^tfv*4j L j r
^ ^
—I
^
--_
û iJ t .
u tb
c u w y m «. i l . Æ / U
W lÎ Î M Î ( ( M \u ^ ir - ^ tU M
^ / .. I (aaaawJt ^*- f ^
/<
ft+jiis u/\aa/\\ £a* J efcr "3b
(/ tV fc À
(M iu u . ^
îa' ikJK7
U C^wf A» V f c s i r
¿ ï
CXnKyO VvtA
r^M ^ i w f s y t
pO*- C^ />V $ c v  6j*
/<*■
Jp\+r&* iL>. 1*Aa / v U ^ urta.^
t..
y.., , t /¿Jb-jy+lUs
À« Îwwiu cAAJc^Ay'Ovv*.
OiUUA.fcMMj. ràowJt~’J /'•.ylx
t ‘,ta*f*
^ Ïïvu« ÏU
, ^«*fiTÿ/2>o«ji~ /'enf&'Ài** <* U r '
tiAWAA^yttju» Ua^ J uju à. /é>
£6ù fll> sAAJï^j'lKmAb' ~
<n3&T, ^/'*JL
y/vouwwu^y^*
9
*A*“LU'V*
fI« /'iw. felH» CXJUJk^lU^AI»^bowV- i ^< A i[y |A « 1 r Î u U
C ^ b tJ ^ A r fltO fÿ * S h \ k \A *s
UAcKaj«^ ^Uîiw m.
U*
A»A
-
.
&. p^A^+^jL.
CMk
/i t f / k ^ l X i
A.
^ iO v i^ A ^ ^ l ^ u
<*A tA d ü vvM
pJJyw •¿Jt* <&*■«
A rv ^
" iv c / w u u x f
« *uw ^
.
�^ « arü
//ettiii
C 11 cuuy
^
u r ^ tu i , / i . ^
"k
a<» e u W l t t A t ^ A ,
-/. /
-1
'T r *'
' ^ v'» i ' ’
ci*J^
Jo
^
o\yo»a—
°^°vrr ^ ^
^
-,
*’
cu^/e=r—àc ün^fi r^^l
. CL^ ‘ ‘¡/** ^ »«y T '01* ' ^
«J'Vií/LJtt¿»
((J /Vu¿u\ ÍV*>S^ /tAAlU** h««HA /i“¿» i« ---
tOW' t 2 ^ 7 * ^ 'ff****
'
-- - ^ ’‘‘^
A*
fr“ ’* ’ o^> Ä iw *«
Í*J^* ¿«Jwmu^u '^uiSw^.C^UM um^uj ^«"fc«»» tWCiMbwu. à ufli
¿ «.vüfcs^l- î>. V ^ tZ
,v ^
^ ' ^ , Vfc_/Cr
^ • u jtd i' A. io i «»»*»»» ft** u ivA d r
.....f r
<0>M^|aC</ ^ '(u^ lU M JIr- ,»WJlA*m X^^/iÁLU«'y^<k4/^¡. ^UU
"^«-
V«i> VVv^Jl^
fc.
t
I
• C*^vii
/fc AlOAitu- A* •»*»**» fty«..u
Um«' <Úu/l«JU\ «X
ü j l^UI j^. v>(uX<^V.1»»- Cf^ ’t».y\A
*-¿X~y\**lCtJ ***A»k4u t i ^ ^ *4A*<w' Cuuiu i>»A (fc^JOU'
Í¿H
A ’! -
c^ A ^ - i. ^ /y, «-ÿ—
--- °
ls*v
ß * « *A
& .» /-*« *“ — *»
O K ^ tiü O .
£m4*—~i\* Cut I
^it
p ^ 1A
~ ‘^ T
4*4^%(
\
A. p ~ r *y coufc
«/t^fitAs.JUL»,
aiA . ^
A.
TJUVJl il* ft* Äiuvxw^jfc». ^ * V c«kl /«
”—
l
i/
. . ^
/
« V U « - ----- M y * ; * <*' A*— (M/M
a ^ t.^ a
-w
¿ ¿ v ^ r f e '* ^ x * -
HÄ* L îu * ^ ^
'
a i* • V,**» ^
m w
t i .
/-.\**£ ^
a.
Â- o
* /
tc ^ u u v /i
V u ^ A ^ /o ^ c^Jiu ^ *^* Ç/t“ r* cj*.
., r
.'
*'« ¿**6 ^ « - è*
f
1.
.
^ - V uiufilM
°
i*«»fe» /fc-Mu*tr lit /Nttjf«* ;
o it • t U k w w ^ L
r/^ w ^ 'lv« /L A « o ^ d L ^ W ^ X —
u»ll^ *w '^ ,
«WWW
�(
^ 4*'«í ^
U U ^IÎU>U
(MuAU /«. ^11
/o^fr 'U i^ tu A u a. c*_t~ c^Ùa ÌV,
«v» a ^uiî 'T oüiii
C^v^ttKvfch» r)k».yK
t v ' y X p - , flSylyM ft Ä ^ m £j il» H S
^ «^ «¿O kc «~ y *A — £*
u/fc£«»»
^
tU ^T^r*
1 ^ ^Ov^i^ir
àZifutuu ^ L ^ a / ü k r ^
gui
*w hW J
lAiA» U j i u j t A i O i ' - ^ y 16 ô i -
fX^ivt^U\/f-‘ -- "-- *~* ^^T^Ow\a*rtJ Ai' (^ÆiAl^W«« ---- <
-ftki. \
.\
V
UAfciy'»»^* ^vw r /«Tkl^»/ll»/u«
a.
& ^ ÎL u ^ / w t f c
a ^ A u
cOv-._.....
cHàu«~M.
^i*« '
^^
»fcÿ^OMÆSi.
«A***-
O u 2
ou^ *
«
Vy
^ l*«*«■»,»
/« AbXV
•AHHjÙfT'1
O W -*
C*K.
CM^UmaH*^Ua. ¿^/cXw* *
’1
fV ... > »
*
V.,
°
- -
V.
/.
^ I - — *~ ~
/•
co/u «£*—
Jo/A***:
Ä tafia
U am jh m sIu m
^\J^M-f
f>
jj lux»»
Ü'^ U
_\
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Croze, Jean-Joseph. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Croze
Pagès
Vernière
Subject
The topic of the resource
actes frauduleux
fraudes
Polignac (famille de)
domaines agricoles
ventes
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour maître Jean-Joseph Croze, ancien avocat, ex-législateur, sous-préfet de l'arrondissement de Brioude, appelant et intimé ; contre le sieur Gaspard-Roch Momet, homme de loi, habitant de la ville de paris, intimé ; et encore contre le sieur Ignace Montboissier-Beaufort-Canillac, habitant de Paris, appelant.
Annotations manuscrites.
Table Godemel : Paiement : 5. un acquéreur est-il fondé à retenir la partie du prix non payé au vendeur, soit à cause du trouble qu’il éprouve, par une demande en désistement, soit sur l’existence de ses propres inscriptions ? le vendeur est-il garant de la demande en désistement, si cette garantie résulte d’une surprise faite par l’acquéreur ? l’acquéreur peut-il se prévaloir de ses propres inscriptions conservatoires, lorsqu’il refuse de transcrire et de purger ? Acquéreur : 5. un acquéreur est-il fondé à retenir la partie du prix non payée au vendeur, soit à cause du trouble qu’il éprouve par une demande en désistement, soit par l’existence de ses propres inscriptions ? le vendeur est-il garant de la demande en désistement, si cette garantie résulte d’une surprise faite par l’acquéreur ? l’acquéreur peut-il se prévaloir de ses propres inscriptions conservatoires, lorsqu’il refuse de transcrire et de purger ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1791-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
41 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1620
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0523
BCU_Factums_G1619
BCU_Factums_M0411
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53294/BCU_Factums_G1620.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paulhaguet (43148)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes frauduleux
domaines agricoles
fraudes
Polignac (famille de)
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53295/BCU_Factums_G1621.pdf
c5db4894e96d0eda159a31da8ed8a1e5
PDF Text
Text
OBSERVATIONS
S O M M A I R E S .
�5
G e n e a l o g i e
des
R IB A U D .
G é n é a l o g i e
d e s
Sébastien Ri baud
à
A n n e Ferrand.
Gîfoert
.-'Là
Gilberto R a y n a u d .
G ilb e rt R ib au d
à
C laudin e D egane.
Jacques
Marguerite D agonneau. *
F ran ço ise M ay e t.
J. B. D u b o is
à
Françoise V e rn a iso n .
Joseph Ribaud
à
M ich elle C ou ch ard,
A n u b le-¡}Iargu erite,
di tu ja s ,
Jacques R ib au d
à
Elizabeth C h o u v ign y.
r
J .B . Ribaud,
appthnt,
I
2
Ignace-H yacinlhe.
DAGONNEAU.
E tie n n e D agonneau
à
M a rie B ibrian t.
!
A n to in e tte
à
G ab riel de Sam pigny.
F ra n ço it-C h a rles.
d es
2
Pierre.
A m a b le .
G ilb e rt
à
C atherin e F iltastre.
Pierrq D u b o is
AmjblftSoubrany.
G é n é a lo g ie
P ie rr e V ern aison.
1
Anne R ib a u d
à
François D u b o is.
SAMPIGNY.
Jean n e-A n to in etto
à
M ich el-A m able F e rra n d .
-Françoise
à
J.B . D u b o is.
M argu erite *
à
P ie r r e D ubois.
I
I
J . B . D ub ois
Amab Ie- M a rgua ri te
F ra n ço ise V e rn a iso n .
A ’ bl S b
de cujus.
.
A m a b le -M a rg u e rite
à
A m a b le S o u b ra n y ,
de cujus.
E tien n s
à
M argu erite G ira rd .
A n to in e
à
A n to in e tte Pélissier.
G ilb e rte -A n to in ette ,
femme M ach eco,
intimée,
N ..... R ib au d
à
N ......L o n g u e il,
-S
y—
�â /û
' , ,<•,
OBSERVATIONS SOMMAIRES
t r ib u n a l
S E R V A N T
DE
R É P O N S E
D 'a p p e l,
séant á Riom.'
A CAU SES E T
M O Y E N S D ’A P P E L
ET D’ OPPOSITION;
P O U R dame G i l b e r t e - A n t o i n e t t e
D A G O N N E A U , épouse de J e a n - C h r é t i e n
M A C H E C O , autorisée en justice , habitante
de cette ville de Riom , intimée
C O N T R E J e a n - B a p t i s t e R I B A U D -L A C H A P E L L E , habitant du lieu de la Chapelled’A ndelot, appelant d’un jugement rendu au
tribunal d'arrondissement de cette ville , le 1 1
nivôse an 10.
L ' a p p e l a n t élève une prétention déjà proscrite
par trois jugemens successifs de la première a u to r ité judi
ciaire il se croit appelé à la succession de la dame veuve
A
�\
( a )
Soubrany, decédée en cette ville, le 2 j prairial an y j il
convient qu’il ne descend que du quadris aïeul de la dame
Soubrany ; il ne conteste pas à la branche Sampigny la
moitié affectée ù la ligne maternelle ; mais il réclame une
portion dans la moitié affectée à la ligne paternelle, et
veut concourir avec la dame de Machcco , cousine issue
de germaine de la dame Soubrany, comme descendante
du bisaïeul de la défunte.
L e citoyen Ribaud fait donc renaître la question connue
sous le nom de refente ; il se félicite que cette question
soit enfin soumise à la décision du tribunal d’appel, et
ne doute pas qu’avec le système de représentation à l’in
fini, établi par la loi du 17 nivôse an 2 , il ne parvienne
h ses fins.
Il reclame encore subskiiulrcment la dot qui fut consti
tuée à Anne Ribaud, femme de François Duliois, bisaïeul de
la dame Soubrany, sous le prétexte que Gilberte Rcynuud,
en mariant Anne Ribaud, sa fille, le 16 février 1640,
avoit stipulé la reversion de cette dot à son profit.
La dame de Macheco ne devoit pas s’attendre h éprouver
des contestations de ce genre. L ’appelû.'t est sans qualité,
sans droit comme sans intérêt : il sera facile de l’établir.
O11 voit par l’extrait de la généalogie ci-jointe, qu’en
effet la dame de Macheco est cousine issue de germaine
de la dame veuve Soubrany de euju s ; que la dame de
Macheco descend du même bisaïeul, tandis que JeaïiB iptiste Ribaud ne descend que du quadrisaïeul : c’est
un fait convenu.
Une foule d’autres parens au menae degré que le citoyen
Ribaud, notamment la dame de Longueuil, sa sœur,
'
�( 3
)
’
s’ étoient présentas lors de l’ouverture de la succession ;
depuis, ils ont fait notifier leur département à la dame
de Maclieco. O n n’a pas cru devoir les rappeler d an s la
généalogie ; mais en supposant que la refente eût lie u ,
ces prétendans étoient en si grand nom bre, que d’après
le calcul le plus exact, et en admettant, comme le sou
tient le c ito y e n Ribaud , que la succession fût en valeur
de 300,000 francs, il ne reviendroit pas 300 francs à l’ap
pelant.
Il est vrai qu’il fait sa portion plus grande ; car il s’est
imaginé, dès que tous ces prétendans s’étoient départis ,
que toutes leurs portions devoient lui accroître, et alors
il s’attribue le quart de toute la succession.
•Ce n’est pas la seule extravagance du citoyen Ribaud ;
ses prétentions choquent évidemment la disposition de
la loi du 17 nivôse, et bientôt le tribunal d’appel fera
disparoître ce rêve a m b it ie u x , en proscrivant sans retour
toutes ses d em an d es.
IL est difficile de concevoir comment a pu s’élever la
question de la refa ite, d’après la lettre de la loi du 17
nivôse an 2.
L ’article L X X V I I porte : « La représentation a lieu
» jusqu’à l’iniiui en ligne collatérale; ceux qui descendent
» des ascendans les plus proches du défunt, excluent ceux
» qui descendent des ascendans plus éloignés dans la
» môme ligne. »
Certes, il n’y a pas d’équivoque dans cette disposition
de la loi. L a représentation a. lieu ju sq u ’à Tinfini en
ligne collatérale • voilà le principe général : il est ensuite
modifié par. la seconde partie de l’article. Cette repré-
A a
�4
(
)
sentation n’a lieu qu’entre ceux qui descendent de l’as
cendant le plus proche. La loi l’explique bien clairement
dans les articles suivans : « A in si, est-il d it, les descen» dans du père excluent tous les descendans des aïeul
» et aïeule paternels ; les descendans de la mère excluent
» tous les autres descendans des aïeul et aïeule maternels. »
Cette première explication ne paroît pas encoi’e suffi
sante ; la loi ne veut laisser aucun doute. Elle d it , ar
ticle L X X I X : « A défaut de descendans du père, les des« cendans des aïeul et aïeule paternels excluent tous les
» autres descendans des bisaïeul et bisaïeule de la même
» ligne ; de même à défaut de descendans de la mère. » Et
enfin l ’a rt. L X X X I porte : « L a môme exclusion a lieu en
» faveur des descendans des bisaïeux et bisaïeules , ou
» ascendans supérieurs contre ceux des ascendans d’un
» degré plus éloigné dans la m ê m e iïgne. »
Sans contredit, les argumens les plus sim p les so n t le s
meilleurs. Gomment se fait-il cependant que l’ambition
ou l’avidité aient pu faire naître des difficultés contre la
teneur de ces articles? Quelque clairs qu’ils soient, des
descendans d’ascendans supérieurs ont voulu concourir
avec des descendans d’ascendans plus proches. Ce système
a eu des partisans éclairés, et le tribunal de cassation a
été bientôt investi de la question.
V oici l’espèce du premier jugement qui a été rendu.
M arie-Pliilippe W aghenart étoit décédée sans posté
rité le l 5 nivôse an 5 ; la moitié de sa succession, suivant
la loi du 17 nivôse an 2 , fut dévolue u sa ligne pater
nelle , et l’autre moitié à sa ligne maternelle.
La portion affectée à la ligne maternelle fut recueillie
»ans difficulté par un parent de cette ligne.
�C5)
La défunte avoit laisse pour parenô, dans la ligne paternalle,' Jean-Baptiste-François; et Catherine Chauvet,
épouse cl’Adrien-Louis Boui'la.
Jean-Baptiste-François descendoit de l’aïeul maternel
de Françoise D utelot, qui étoit grand’mère paternelle de
la défunte de cujus. Catherine Chauvet descendoit, au
contraire, du.père de L éon .W agh en art, , qui étoit aïeul
paternel de la défunte de eujus. Dès-lors Jean-BaptisteFrançois descendoit, d’un ascendant de la défunte, plus
éloigné d’un degré que l’ascendant dont descendoit Cathe
rine Chauvet ; et ces deux ascendans, quoique tous deux
dans la ligne paternelle de la défunte , étoient de deux
lignes'ou de deux branches étrangères l’une à l’autre, w
Jean-Baptiste-François prétendit, comme R ibaud , qu’il
étoit appelé par la loi à recueillir moitié de la portion
affectée à la ligne paternelle. Catherine C h a u v e t soutint,
de, son côté, qu’en sa qualité de d e scen d a n te d’un ascen
dant plus proche, elle devoit recueillir toute cette por
tio n , à l’exclusion de Jean-Baptiste-François, descendant
d’un ascendant plus éloigné dans la même ligne.
. Un jugement du tribunal civil de Jemmapes , du s 5
thermidor an 5 , accueillit la prétention de Jean-BaptisteFrançois. Sur l’appel, le tribunal civil de la Lys infirma
celui de première instance , et attribua exclusivement à
Catherine Chauvet la portion affectée à la ligne paternelle.
Demande en cassation de la part de Jean-BaptisteFrançois : requête admise ; mais par jugement du 12 bru
maire an 9 , Jean-Baptiste-François fut débouté de sa
demande en cassation.
Cette décision solennelle est entre les mains de tout 1q
A 3.
�^
' j
monde : il est inutile d’en rappeler les motifs déjà fort
connus ; on se contentera de rappeler qu’il y est dit que
l’art. L X X V H , en établissant la représentation à l’infini 'ÿ
en détermine à l’instant même l’effet, en posant pour règle
générale que ceux qui descendent des ascendans les plusproches du défunt, excluent ceux qui descendent des
ascendans plus éloignés de la même ligne.
)
“ On y observe que le mot ligne appliqué à la succession
collatérale, ne désignant que là manière dont ^ collatéral
est lié au défunt, et tout collatéral n’étant jamais lié à un
défunt que de deux manières, ou par le père ou par la
mère de ce d éfu n t, il s’ensuit' quie le sens propre diîi mot1
ligne en cette matière, est d’indiquer uniquemenPle lierr
paternel où c e lu i maternel! »J ' ' ■' v ri/
’ ¡ 1!~,r
Ce seroit forcer, ajoute-t-on , le ’sens naturelrdutèrm éy
que de vouloir comprendre d an s ce tte expi*cssionjprise au
singulier, non seulement les lignes p a te rn e lle s e t mater—-'
nelles, mais encore les branches dé chacune de ces lignes;1
branches qui ne font que des l’amifications ou divisions du
lien patei’nel ou m aternel, auxquelles on est obligé de
donner les dénominations arbitraires de lignes seconAaires , par opposition à la dénomination dé lignes prin
cipales que l’on donne aux deux premières, •
Et d’ailleurs, la transmission des biens par succession,,
quoique subordonnée aux lois positives, a toujours eu
pour règle fondamentale la présomption naturelle de
l’aiTection du défunt en faveur de ses parens "les plus
proches ; et la loi du 17 nivôse'elle-m êm e a pris en
considération cette présomption naturelle , dans ses dis
positions sur les différentes espèces de successions.
�( 7 ) .
Depuis ce jugem ent, la question a été encore de nou
veau agitée au tribunal de cassation, section des requêtes",
dans l’aliai Fie relative aux successions des'frères Trudaine,
jugée à Paris-le Ï3 fructidor an 7 , et à Versailles, sur
l’appel, le 18 ventôse an 8 , toujours contre le système de
la refente. L e p o u r v o i en cassation contre le jugement*
en dernier fessort a été rejetér
\v.
Enfin uni troisième jugement du- môme tribunal, dre
Î3 'floréal an io ;‘,’ à-cassé et annullé un jugement dut
tribunal civil d elà Seine-Inférieure, qui avoit admis te
système de la refénte dans l’espèce qui suit.
- i
Il Vagissoit de la succession dè la fille Calais, décédé©
au Havre le 5 floréal an 3 , sans héritiers eh ligne directe- Elle avoit [làissé dans la ligne maternelle, pour parens1’
collatéraux , les filles Lecacheu x, et A n n e - ThérèseHérouard.
• )
- • <•
-..-t •■
!
c Les filles Lecacheux d e sc e n d o ie n t d’un, bisaïeul ma»
ternel, .
: 1•
:
'T : ' u
A n n e -T h é rè se Hérouard descendoit d’un trisaïeul
maternel*
A n n e-T h érèse Hérouard v o u lo it, comme Ribaud ,
concourir avec les filles Lecacheux, et réclamoit la moitié
de la portion affectée à la ligne maternelle : les parties’
compromirent devant des arbitres r à la charge de l’appel.
Anne - Thérèse Hérouard réussit dans sa prétention ;
et sur l’appel, le jugement arbitral fut confirmé par
le tribunal civil' de là Seine-Inférieure,nie 3 thermidoran 7 : pourvoi en cassation par les; filles L e c a c h e u x .
Jugement du 13 floréal an 1 0 , qui casse et annullc
celui de la Seine-Inférieure , comme ayant violé l’article
L X X V II de la loi du 17 nivôse an
�V '
( y
8
- O n peut en voir les motifs développés plus au long
dans, le journal du tribunal de.,cassation 3 où,;les faits
etiles’ moyens ■
sont «rappelés; îivec: exactitude. \
, ;;
Ces-décisions ne, sont pns ignorées du citoyen R/ibaud;
•nais, il n’est pas effrayé par dès exemples. Suivant lu i,
‘es jugemens ne sont bons que- pour ceux q u i les
obtiennent ; ce sont les expressions qu’il emploie;, « Tous
»jles liomme 9 sont sujets à des vicissitudes ; f et si; or| a
35 Ijugé hier de telle manière, on peut juger demain d’une
» autre. »
•i
‘
,
L e citoyen Ribaud compare la loi à1une source.claire
et'lim pide, qui bientôt obscurcie par le limon lorsqu’elle
forme un ^ruisseau , est encore plus :,mççonnpissîable
lorsqu’elle se jette dans une riv iè re , et on!ne la reconnoit plus lorsqu’elle est dans l’Océan.
.! . ylt ,<v 1
T o u t le m onde, d i t - i l , croit la comprendre; mais
quand ¡elle a passé par les mains des commenutem-s, les
interprétations, les difficultés, la rendent inintelligible.
V oilà ce que le citoyen Ribaud appelle des moyens :
la jurisprudence m êm e, toujours versatile, n’est qu’un
commentaire plus obscur.
On poürroit lui répondre que la loi la plus sage n’est
jamais sans inconvéniens ; tel est le sort de l’humanité ,
que tout ce qu’elle touche est empreint de ce caractère
d’imperfection qui lui est propre.
Cependant, une des lois les plus sag e s q u i soit sortie
de la convention., est celle q u i règle l’ordre des succes
sions. En ne considérant plus l’origine des biens, p o u r,
en régler la transmission, on a évite des difficultés inex
tricables, soit pour remonter aux estocs, soit pour régler
le payement des dettes.
; ,
t
�( 9 )
En transmettant lès biens aux parens les plus proches,
on a suivi la loi de la nature, l’affection présumée d’un
parent pour ceux qui lui appartiennent de plus près.
Comme cette loi n’a pas eu jusqu’ici de commenta
teur , que toutes les explications ont été données par
les législateurs eux-m êm es, elle n’a pu être obscurcie
dans ses dispositions.
Une jurisprudence constante est le complément de la
législation, et c’est faire injure aux tribunaux, que de
les accuser de versatilité dans leurs décisions sur un point
de droit aussi certain.
Aussi le jugement du tribunal c iv il, dont se plaint
le citoyen R ib a u d , n’a-t-il pas varié ; il a proscrit une
prétention choquante, et il y a lieu de croire que le
tribunal d’appel confirmera une disposition qui est basée
sur l’évidence, sur la lettre et l’esprit de la l o i, et sur
les exemples que le tribunal de première instance a eu
sous les yeux.
L e citoyen Ribaud ne doit pas être plus heureux dans
sa demande relative à la revendication de la dot cons
tituée à Anne R ibaud, bisaïeule de la dame Soubrany.
D ’abord, le citoyen Ribaud est sans qualité pour reven
diquer cet objet. La dot fut constituée en 1640 par Gilberte Reynaud, mère d’Anne Ribaud. La mère qui étoit
alors veu ve, stipula la réversion à son profit dans le cas>
où sa fille décéderoit sans enfans, et ses enfans sans
descendans. L ’appelant ne représente pas Gilberte Rey
naud; dès-lors il ne pourroit pas réclamer ce tte co n sti
tution \ le plus grand vice qu’on puisse opposer, c est,
sans contredit, le défaut de qualité.
�C 10 )
En point de d ro it, d’après la loi V I , nu ff. de jure
dotium , jure succursurn est patri, il faudroit distinguer
la .réversion légale de la réversion conventionnelle. L a
première , d’après Lebrun et Ricard , n’a lieu qu’en
faveur des ascendans ^.donateurs et non en faveur des
héritiers collatéraux.
A l ’égard de là réversion conventionnelle, la question
a été fortement controversée. Plusieurs auteurs ont pensé
qu’à l’imitation de la loi,/wr<? sïiccursum , elle ne pouvoit
avoir lieu qu’en cas de prédécès du donataire ; d’autres
estiment qu’elle a lieu aussi en faveur des héritiers du
donateur, namplerurnque, tam hœ redibusnostris quàtn
nobismetipsis cavemus. L o i I X , de probat.
M a is un point sur lequel tous les jurisconsultes sont
d accord, c est q u e ia r é v e r s io n conventionnelle dépend
entièrement de la stipulation des p a rtie s ; qu’ainsi il faut
la restreindre à ce qui est exprimé. A i n s i , par e x e m p le ,
s’il est dit qu’elle aura lieu dans le cas que le donataire
décéderoit sans ervfans , plus de réversion,. si un enfant
survit; s’il est exprimé sans enfans, ou. le s enfans sans
descendans, plus de réversion, lorsqu’il y a des petitsenfans qui survivent ; et, dans tous les cas le retour ne
peut s’étendre au delà. On peut consulter, à cet égard,
L ebrun, R ica rd , d’O live, liv. III, cliap. X X V II , et le
dernier commentateur, sur l’art. X X I V du tit. X I V de
la coutum e, tom. 2 , pag. 3 1 7 .
Dans l ’e sp è c e p a r tic u liè r e , Anne R ibaud, fille de la
constituante, a eu un fils, P i e r r e Dubois qui lui a survécu ;
de Pierre Dubois est issu Jcan-Baptiste, père de la dame
veuve Soubrany, de cujus j d ès-lo rs il y a eu enfant,
�é > jy
( ii
)
petit-enfant et arrière-petit-enfant ; par conséquent, plus
de retour.
• Un motif également puissant pourr ¿carter toute idée'
de réversion, c’est qu’il est de règle encore dans notre
coutum e, que la dot niobiliaii’e estoque et se1-confond
in secundo gradu dans la personne du petit-fils : voir
le dernier commentateur, art; X-V du tit. X I I , tom. i ,
pag. 269. Ici la confusion s’ast opéréç sur Jean-Baptiste
D ubois, petit-iils d’Arjne .Ribaud, et père de la dame
veuve Soubrany ; que vient cfonc réclamer le citoyen
Ribaud ? Sa prétention seroit une chim ère, en admet
tant môme qu’il eût qualité.
On se gardera bien de suivre le citoyen Ribaud dans
sa longue dissertation, relativement aux dépens. Il nous
apprend son secret ; il voudrait éviter l’amende ; il se
jîlaint surtout de ce qu’il n’est pas le seul qui ait fait
apposer les scellés, qui se so it o p p o s é à la rémotion; il
n’a pas fait plus de fra is qu’un autre ; il ti'ouve injuste
de payer tous les dépens.
Cette discussion intéresse peu la dame de Maclieco ;
elle se contentera d’observer que le jugement dont est
ap pel, prononce une condamnation pure et simple des
dépens personnels au citoyen Ribaud; et que dans l'exé
cutoire du i 5 ventôse an 10, qui comprend les dépens
généralement faits par tous les prétendans droit qui avoient
formé opposition à la rémotion des scellés , 011 a distin
gué la portion de chacun ; que sur la somme totale
de 1,877 &’• 52 cent. î\ laquelle sont calculés et arrêtés
ces dépens, Jean-Baptiste Ribaud,'appelant, n'y est com
pris que pour celle de 390 fr. 6 cent.
�( 12 )
D e quoi le citoyen Ribaud peut-il donc se plaindre?
Ses réclamations, sous tous les rapports, sont sans intérêt
comme sans objet; partout il est sans droit et sans qualité.
P a r c o n s e i l P A G E S , ancien jurisconsulte.
•
.
D E V È Z E , avoué.
<•' •
•». .
A
R I O M ,
De l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du tribunal
d’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Dagonneau, Gilberte-Antoinette. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Devèze
Subject
The topic of the resource
successions
successions collatérales
coutume d'Auvergne
généalogie
Description
An account of the resource
Titre complet : Observations sommaires servant de réponse à causes et moyens d'appel et d'opposition ; pour dame Gilberte-Antoinette Dagonneau, épouse de Jean-Chrétien Macheco, autorisée en justice, habitante de cette ville de Riom, intimée ; contre Jean-Baptiste Ribaud-La-Chapelle, habitant du lieu de la Chapelle-d'Andelot, appelant d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de cette ville, le 11 nivôse an 10.
arbre généalogique.
Table Godemel : Retour : 2. en matière de retour ou de réversion, il faut distinguer la réversion légale de la réversion conventionnelle, parce que la dernière est restreinte aux cas exprimés. Ligne : l’article 77 de la loi du 17 nivôse an 2 n’emploie le mot ligne que respectivement au défunt ; il n’admet pas la refente dans les successions collatérales. entre descendants de diverses souches, celui qui est le plus proche dans la ligne considérée respectivement au défunt ; succède : ainsi, le descendant d’un quadrisayeul paternel du défunt est exclu par le descendant d’un bisaïeul de la même ligne.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 10
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1621
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0235
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53295/BCU_Factums_G1621.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Vensat (63446)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume d'Auvergne
généalogie
Successions
successions collatérales
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53297/BCU_Factums_G1623.pdf
5eb393156c7ae40667eb887f427c39d5
PDF Text
Text
P R É C I S
POU R
Jean -A n d re B R U N E L ,
prêtre, vicaire de
C h au d e s-A igu e s, en qualité d’héritier bénéfi
ciaire de J ea n , son p ère, appelant d 'un juge
ment rendu au tribunal civil du P u y , le 22,
ventôse an 1 2
CONTRE
E X P E R T O N fille majeure,
habitante de la ville du Puy intimée.
T o u ssa in te
L
,
’ o r d r e social et les mœurs sont intéressés dans cette
cause ; cette circonstance la rend importante et digne de
l’attention de la justice.
Une fille qui n’a point respecté l’honnêteté publique
qui a eu une même demeure, une cohabitation scandaA
�leuse avec un homme marié ; qui a passé avec lui un
contrat de mariage avant qu’il eût fait rompre ses pre
miers nœuds ; qui l’a épousé quatre heures après la pro
nonciation de son divorce avec sa femme légitime : cette
fille étoit-elle de bonne foi en l’épousant? doit-on lui
restituer la dot qu’elle s’est fait reconnoître ?
L e tribunal civil du Puy a jugé l’affirmative. L ’appelant
demande que le jugement soit infirm é, que la cour annulle
la quittance de dot et la reconnoissance postérieure, comme
simulées et frauduleuses, épuisant tout le patrimoine de
son père pour le faire passer à sa concubine.
Un exposé sincère de la conduite de l’intim ée, et les
principes qu’on y appliquera, lui enleveront la libéralité
dont elle est indigne, et qui n’est due qu’à la vertu.
F A I T
S.
Toussainte E xperton, intim ée, est fille d’un pauvre
charpentier de la ville du Puy. Des idées de plaisir et
de liberté lui firent abandonner de bonne heure la maison
paternelle. D e ce moment, elle n’eut que des affections
malhonnêtes; toute la ville du Puy a retenti de ses avantures galantes, de sa débauche avec un nommé D ****,
perruquier, dont elle a eu un enfant.
L e hasard ayant conduit chez elle Jean Brunei, père
de l’appelant, cette fille, consommée dans l’art de séduire,
l’attira par ses caresses, et lui inspira une passion dont
il ne put se défendre.
Aveuglé par cette passion , Jean Brunei réalise une
partie de sa fortune, quitte le séjour de M onlet, lieu de
�( 3)
70/
son origine, abandonne son épouse, et va au Puy faire
un mêrae ménage avec Toussainte Experton. .
Alarmée de cette connoissance, sa famille emploie
inutilement les remontrances, les sollicitations pour l’en
détacher; il n’écoute rien. On conseille à son épouse de
provoquer une demande en divorce, pour cause d’incom
patibilité d’humeur : elle l’entame et ne la suit point.
Toussainte Experton, s’apercevant des suites qui ré
sultaient de sa cohabitation avec Jean Brunei, conçoit le
projet de le faire divorcer pour l’épouser après.
Elle commence par lui faire signer un contrat de ma
riage dans lequel il reconnoît avoir reçu d’elle, ci-devant,
et à son contentement, une somme de douze mille liv.
Après cette clause, vient une donation réciproque de
tous leurs biens, pour le dernier mourant en jo u ir en
toute propriété et fr u its .
Ce contrat est du 27 vendémiaii’e an 3.
L a publication de mariage, du lendemain 28.
Le 29, on appelle chez un notaire quatre citoyens de
la ville du P u y , pour déclarer que Jean B runei, leur
voisin, habite cette ville depuis environ trois ans, et qu’il
y a vécu seul et sans fem m e.
A vec cette déclaration, Jean Brunei se présente à la
municipalité, le 2 brumaire suivant, et requiert l’officier
civil de prononcer son divorce , sur le motif cinq dé
terminé dans l’article 4 du §. i^r. de la loi du 20 sep
tembre 1792 , qui est l’abandon de la femme par le mari,
ou du mari par la femme.
Pour obtenir le divorce sur ce m otif, l’article 18 du
g. 2 de la même loi prescrit de se pourvoir devant d o s
A 2
�( 4)
arbitres de fam ille, en la forme indiquée dans le code de l’or
dre judiciaire, pour les contestations d’entre mari et femme.
Jean Brunei n’avoit pas rempli cette form alité; mais
l’officier civil ne s’arrête point à ce défaut, il prononce
le divorce de Jean Brunei avec Marie-Jeanne Reboul
à onze heures du matin ; à trois heures après m id i, il
l’unit en mariage avec Toussainte E xperton, qui accoucha
quatre ou cinq mois après.
Cette fille s’est fait consentir pendant le mariage deux
reconnoissances ; l’une de la somme de 300 liv ., l’autre
du mobilier et des ustensiles qui garnissoient sa chambx*e.
Jean Brunei est décédé le 14 pluviôse an 9. Toussainte
Experton a commencé par expolier sa succession ; ensuite
elle a formé demande en restitution de la dot qui lui a
été reconnue.
,
L ’appelant lui a opposé son indignité résultante du
concubinage dans lequel elle a vécu avec son p è r e , la
simulation de la reconnoissance de 12000livres, prouvée
par les termes dont on s’est servi pour en exprimer le
prétendu payement ; il en a demandé la n u llité, ainsi
que du d ivorce, du second m ariage, du don mutuel
stipulé dans leur contrat, et des deux reconnoissances
postérieures.
Sur ces demandes respectives, le tribunal civil du Puy
a rendu un jugement qui déclare nuls le divorce de Jenn
Brunei avec Marie-Jeanne R eboul, son second mariage
avec Toussainte E xperton, le don mutuel et la reconnois
sance des meubles.
M iis attendu ce qui résulte tant du contrat de mariage
de l’intimée que de la reconnoissance de 300 livres en
�ï o S
(S >
numéraire ; condamne l’appelant, eiÿ.sa qualité, d’héritier
bénéficiaire.de sou père, à rendre et rembourser à Toussainte.) Experton la somme'de 12000. livres d’une part,
suivant la réduction d’après l’échelle, celle de 300 livres
d’autre , sans réduction, à la charge par elle de rendre
le mobilier énoncé dans l’inventaire qui en a été fait,
ou d’en compenser le montant jusqu’à due concurrence, etc.
Les premiers juges ont motive cette condamnation sur ce
que le père de l’appelant paroissoit avoir abusé de k
crédulité de l’intim ée, en s’annonçant r dans leur con
trat de mariage, comme libre et majeur j
Sur ce qu’il l’avoit trompée en lui laissant ignorer les
empêchemens qui devoient rendre nulle l’union qu’il se
proposoit de contracter avec elle;;).
• .v
Sur ce qu’elle a voit été induite en erreur sur lj£tat dù
Jean Brunei , par une note écrite au dos de la citation
que lui avoit fait donner Marie-Jeanne R eb ou l, sa pre
mière femme.
Cette noie est ainsi conçue ; . .
« L e citoyen Brunei, depuis’plus de trots~âns~fiaTn tà111
» de cette commune du Puy , a paru suivant la citation
» ci-dessus, et a déclaré n’avoir ni titre , ni avoir passé
» aucun acte qui puisse prouver qu'il a été m atic
»"devant aucun notaire. La citoyejnne Reboul a paru
« le 29 ventôse,.et a déclaré de même n’avoir passé an» cun acte devantaucun notaire, qui puisse prouver qu’elle
» étoit mariée avec .le citoyen Brunei : les parties ren» voyées libres , et le divorce n’ayant pas lieu ,.en pré« sence de Matthieu Bertrand., maire , du citoyen M ich e,
« et de Berlioux , oilicier municipal j ainsi ù;Toi’iginul. »
A 3
�:p 4
* .< & •
(« )
* L e fils de’ Jean -Brunei ést appelant rde ce jugement \
quant au ‘chef qui le condamne à rembourser à l’intimée
la dot qu’elle s’est fait reconnoitre avant et après son
mariage.c
:u Jouir'î
iui;v 1:
' ^ ol.
t
i-v
;w ¡ l ’J
•
M-'i -
. t/ i'n n
M O Y E N S. •*»•. ' v/hu--
<
(
Trois questions se présentent, et doivent être discutées
séparém ent.':!r,7,; 1
:rtrn '> »crqi. i
> mûr ol
‘ ■i®. L ’intimée à-t-elle vécu en concubinage avec Jean
Brunei?
■
: ^2 °. A v o it - e lle , avant de l’épouser, connoissance de
son premier m ariage?
;l
1 f‘
3°. D oit-on considérer comme simulées et’frauduleuses
la quittance de dot et lai reconnoissance postérieure ?
Il I
P
r e m i è r e
q u k s t i o
N:
L e concubinage est certain. ' M *' ■
' 11
^',n
^
Il est de notoriété dans la ville du Puy que Toussainte Ekperton et Jean Brunei ont i habité ensemble
avant' leur mariage : ce >fait, articulé devant les premiers
juges, n’a pas été désavoué ; et c’est la raison qui en a
Jfait faire mention dans l’exposé des faits q u i précèdent
“les m o t i f s du jugement dont est appel. ' '
Ü n e cohabitation aussi publique , et qui avoit causé
du scandale , mérite sans doute le nom odieux de con
cubinage.
IJné dernière preuve1,ts’il en falloit* encore, c’est la
'grosséàsè 'de Toussàinte Experton ;>avant son mariage.
�( 7)
Après cela , on ne doit plus doüter du ' mauvais àoifc+‘
merce que l’appelant lui oppose.- '1 ! - : : 1
ru, J.
:u. :
•
:'.r
f ,
Si E
^ «rj ) • • i r n r m Ji i r. vy’; . i M ' - v
vIj •'
C O N D E/<Î Q' t f - ErS T I O NT. 01'1 Hi’ ‘ j i , ‘ c a q
. Jdi;.ioq : ,10;:
Toussainte Experton conn8'iss6it le, premier mariage
de Jean B ru n ei, avant qu’elle l’é p o u s â t . 11
Jean Brunei et Marie-Jeaiine< Reboùl étoiërit: connu.«,,
dans la ville d u P u y -pour mari çt fémmô'v ité y ‘H^enoient assez; fréquemment poTur un- coïnmêi'CeJ'dé ttën-*
telles que faisoit la femm e, ou'pour y voir'sa'>sϟir qu i
y est'établie. Leur uiiion h’a;pu!être ignoi'ée de iT ous
sainte E xpertoh.:)' f.'.vi: -:3£>0‘m : ■!•(;!' . . ■
. 1 i
Diroit-elle , comme les! premiers juges^ qu’eHé')a été
trompée par la noter 'écrite au dos ü e 'la 'citatîdi* domi
née à Jean Brunei à la'requête de’ Marie-Jéànnë Réboûl ?
On lui répondroit que cette note devoit plutôt l’éclairer que : l’induire en -erreu r, puisqu’elle lui'apprenoit:
que si M arie-JeanneoReboul n’étoit pas l’épouse'de Jean
B ru n ei, du moins elle prétendoit,l’être;-G’dil’ éfoif :a'ssez
pourVqùé Toussainte- Experton dût prendre:des infor
mations ¿urr l’état de celui qu’elle’devoit époüsCr; elle
pouvoit s’en procurer facilement,:en s’adressant à ia sœiii*
de Marie-Jeânne R eb o ü l, à la •,rimnicip:a litéy ou au jugé
de paix du canton de M onlet $‘¡qui' in’est éloigné de1 làville du Puy que de quatre petites lieSufcs. pt ;r - v eiljr
Que Toussainte E xperton :eût été trompée par <iette
note , quoiqu'elle *n’eût aucun c a r a c t è r e d’authenticité ,
et qu’elle né .présentât qu’une déclaration ridicule ; quoi-J’
A 4
�. ( 8 )
q.u on ue put ciïr induire autre chose , si ce n’est què
Jean Brunei et Marie-Jeanne Rëboul n’a voien t point
passé cîe contrat par-devant notaire ( ce qui n’empêclioit
pas qu’ils ne, fussent unis en légitime mariage ) , la chose
seroit possible.
o'Mais que les juges du Puy s’en soient servis pour en
Taire un des"motifs de leur jugem ent, cela ne se conçoit
pa&;/d’iiiUant qu’ils '«avoient, £our se garantir de cette
faute y Jd certitude que Toussainte Exportons avant, dé
slit nfy b ;-Jpai%rBrunei r*;p.v.oi t . e u con noissance, de.,son d iMpree; avec Mârie-JeanneiJReboul.
- Cer'divorce détruisoit tout-l’effet de la>.note ; d’ailleurs»
l’absence des signatures nécessaires pour la faire ^présu
mer véritabj^ en dém oritiwtj la fausseté.
iioi^
_{Xia qualification,de.//¿re donnée à Jeun ‘B ru n ei, étant»
insolite dans les contrats' de m ariage, devoit inspirer à
Toussainte Experton plus de défiance que de sécurité •
ellç^a^di^vpir ,;dans ,çétte mention /extraordinaire , .unepryoautipajpy.udtmmçiit' ménagée pour mettre' le ,Notaire.
à ;.çq^vp)*t, de/tputq rpçpôn&abilité; '¡if-. , ,:ii ;,o , >
■
t.;Mais quand, on supposeroit que' cette fille d'été réelle-ment induite en erreur, y et fondée croire que Jean Bnrnql ,étoit'libre , sron crvcuii‘a,,dû .cëssciri& l’instant où l’oir,
ficipv civil .lui a;;ii|itileptui^j de l’acte 'de dissolution du
mariage de pet hpmmejayeciMàrierJeîmnc R e b o u l, de
puis quelques heures seiil.ejn.ient. i:
>
Apri\s la lecture de cet
, une fille qui auroit eu
de l’honnctç.té et des moeurs^ devoit renoncer à ;s’unir à
Jean Brunei',.et provoquer confi e lui lu sévérité des lo is,
�69 0 :
pour s’être permis de faire publier leur mariage ? de lui
en faire passer le contrat, quand il étoit encore retenu
dans les liens d’un premier engagement.
Il n’appartenoit qu’à une fille débauchée de prendre
pour ép o u x, au mépris des lois et de toutes les bienséances ,•
un homme q u i, quatre heures auparavant, étoit le mari,
légitime de Marie-Jeanne R eboul, avec lequel par consé
quent il ne pouvoit y avoir de mariage valable. En pas-)
sant dans ses bras, malgré ces considérations, Toussainte
Experton a fait preuve de mauvaise conduite. C’est le cas
de dire que, dans son union avec Jean Brunei', il n’y a
pas eu mariage, mais continuation du commerce adultérin
qu’ils avoient auparavant.
Q u’on.ne fasse donc plus valoir qu’elle a été induite en
erreur, qu’on lui a caché les empôchemens■
qui s’opposoientà ce qu’elle contractât un mariage valable. 11 est
évident que les moyens qu’on reproche à Jean Brunei
d’avoir e m p l o y é s pour tromper cette fille, ont été inven
tés par elle, ou d’accord avec elle, pour parvenir au ma
riage qu’elle désiroit.
;
T
r o i s i è m e
q u e s t i o n
.
L a quittance de dot est une donation en ofraude de
la loi.
Une quittance de dot n’est pas toujours un acte qu’on ne
puisse attaquer avec succès; son maintien dépend de la qua->
lité des personnes \ qui elle a été donnée. Si c’est à une con
cubine , on exige la preuve qu’elle a fourni les deniers.
�V?\
( 10 )
Cette .jurisprudence est fondée sur la défense de don
ner aux concubines, à quelque titre que cc soit. D e quel
que voile qu’on couvre les dons, sous quelque forme qu’on
lesidéguise, ils sont réputés simulés et frauduleux : la loi
les rejette et les anéantit, si on n’étabit pas qu’ils ont eu
une cause juste et légitime.
L a défense est écrite textuellement dans l’ordonnance
de 1629 •, l’article. 132 déclare toutes donations fa ites à
concubines nulles et de nul effet. = t
e: Cette ordonnance a été enregistrée librement au parle
ment de Toulouse , dans le ressort duquel étoit la ville
du Puy. L a sagesse et la pureté des motifs qui avoient
dicté l’article 132, le firent adopter dans tous les parle
m ent Nous pourrions en citer une foule d’arrêts , qui ont
déclaré nuls des actes de toute espèce, passés au profit de
concubines; nous nous bornerons à ceux qui ont annuité
des quittances de dot.
-¡L e 16 mars 1723 , Le parlement de Paris déclara nulle
une quittance de dot de 60000 livres , consentie îui profit
d’Elizabetli Tricot par le ci-devant marquis deSàintp-Eoy,
dont elle avoit été la concubine.
La quittance portoit que le sieiir de Sainte-Foy avoit
reçu les 60000 livres, tant en effets mobiliei's qu’en im
meubles : elle ne pouvoit indiquer un seul contrat, ni un
seul bien-fonds dont elle eût jamais été propriétaire.
Un second arrêt, du 24 janvier 1767 , au rapport de
M .l’akbé Tudert, et rapporté par Deni^ard au mot dot, a.
débouté Marguerite Massuet de sa demande en -restitua
tion d’une dot de 3000 livres, dont le sieur Borton luii
nvaitidonné quittance.
(j ' -i-_'
flr .. .i
�C h )
11 résultait des circonstances particulières de l’affaire,
que la dot n’avoit été ni pu être fournie au sieur Borton.
L e grand conseil a voit adopté la même jurisprudence.
Par arrêt du 13 mars 1743, la demoiselle Payen fut dé
boutée de sa demande en payement d’une dot de 5 ooooliv.
que le ci-devant marquis de Vieux-Bourg lui avoit
reconnue.
L e m otif de l’arrêt fut que la demoiselle Payen n’avoit
pas été en état de fournir une pareille d o t, et qu’elle avoit
varié sur les effets qui avoient, selon e lle , servi à la former.
En 1778 , un contrat de mariage sous seing privé fut
passé entre la demoiselle Leprêtre et le sieur Toutesmesnil, qui reconnut avoir reçu d’elle une somme de
, i 5 ooo livres. Toutesmesnil mourut avant le jour indiqué
pour la célébration du mariage.
Demande en restitution de la dot de lôooo livres.
L ’héritier de Toutesmesnil répondit à cette demande
que la reconnoissance portée au contrat de mariage n’étoit
qu’une donation déguisée, faite à une concubine qui n’avoit
aucun bien ; il demanda à faire preuve que depuis plusieurs
années elle vivoit en concubinage avec son futur.
La demoiselle Leprêtre soutint l’héritier non recevable
dans la preuve qu’il demandoit à faire , i°. faute de com
mencement de preuve par écrit ; 20. faute de’ circons
tanciel' suffisamment les faits, et de leur donner des épo
ques fixes, etc.
Ces raisons ne firent point impression ; et la sentence
qui avoit admis la preuve des faits de concubinage , fut
confirmée par arrêt du parlement de Normandie.
Dans l’espèce de tous ces ai’rêts, il n’y. avoit que con-
�'-
.
( 12 )
cubinage , et les concubines n’établissoient pas d’où leur
ctoit venue la dot dont elles demandoient la restitution.
Dans la nôtre, il y a concubinage et adultère, et nulle
preuve que l’intimée ait apporté les 12000 livres dont
elle s’est fait donner quittance.
La manière dont la quittance est conçue suffiroit pour
en prouver la simulation.
« La future s’est constituée en dot la somme de 12000 1.
» que Jean Brunei a déclaré avoir ci-devant reçue et à
» contentement. »
Ce langage n’est pas enigmatique ; il annonce claire
ment que Jean Brunei n’avoit rien touclié, et qu’il en
a été content.
Toussainte Experton étoit hors d’état de fournir les
12000 livres, valant en numéraire 4380 livres.
Son frère et clic n’a voient recueilli de la succession de
leurs pere et mère qu’ un champ qui fut vendu , en
l’an 2 , moyennant 600 livres.
C ’est apparemment cette vente quia servi de prétexte
à la reconnoissance de la somme de 300 livres en nu
méraire, au payement de laquelle l’appelant a été aussi
condamné.
lia reconnoissance porte que Toussainte Experton a
“'délivré , du vu du n otaire, à Jean B runei, la somme de
"'300 livres, provenant dé deux actes de ratification de
vente par elle consentis , les 5 ventôse an 2 , et 1 i nivôse
an 6.
Comment les premiers juges ont-ils p u , sur la simple
déclaration d’une fille , au moins suspecte, se déterminer
" à lui adjuger ces 300 livres ? 110 devoient-ils pas l’obliger
�( 13 )
à rapporter et les ventes et les ratifications ? leiir rapport
auroit pu prouver la fausseté de la déclaration, et ré
pandre quelque lumière sur les 12000 livresque l’inti
mée prétend avoir apportées en dot. L ’appelant demande
que tous ces actes soient produits ; il a le droit de l’exiger.
.
C O N'CLUSION.
Les trois questions que l ’appelant a proposées pour sa
défense, se décident en sa faveur.
i°. Toussainte Experton a* été la concubine de Jean
Brunei, et n’a été que cela, malgré leur prétendu mariage.
L e concubinage est prouvé par la notoriété publique,
par son silence au reproche qui lui en a été fa it, par la
mention insérée dans l’exposé des faits qui précèdent les
motifs du jugement dont est appel ; et sa grossesse avant
son mariage en est une preuve démonstrative.
L ’appelant offre de prouver, s’il en est besoin, tous les
faits qui constatent la débauche et le concubinage de
Toussainte Experton.
20. Cette concubine savoit que Jean Brunei étoit ma
rié à Marie - Jeanne Reboul ; c’est elle qui a forcé cet
homme à divorcer; c’est elle seule qui a tout dirigé pour
faire prononcer le d ivo rce, parce qu’il n’y avoit qu’elle
qui y fut intéressée; et la connoissance qu’on lui a don
née de ce divorce, avant de l’unir à Jean Brunei, répond
à tout ce qu’on pourroit dire pour excuser le désordre
de sa conduite.
3°. La preuve de la simulation de la quittance de dot
résulte du concubinage qui a existé entre Jean Brunei
�( 14 )
et Toussainte Experton. D e là la conséquence que cette
fille, pour obtenir la restitution des sommes qu’elle dit
avoir apportées en se m ariant, doit établir d’où elles lui
étoient venues.
j
. T elle a été la jurisprudence de tous les temps. L ’ordre
public, le repos des familles se réunissent ici pour deman
der que la cour la confirme par son arrêt.
M e , G I S C L O N , avocat.
M e M A R I E , avoué licencié.
t
» ni ‘ • ' ! ' ' l<) '< ! •'
■
:' i 1I-; èi l. f
*■ **'-r' t: t’*■
jn.i
•
yr: ■
• •;
■■"
:
a
'
.
J
'•
’ 1
if
-r.;n )• ’ • ;
j' ’ r •
\
1
1i
n ü;
■ 1 r 11
A R IO M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Fructidor an 1
5
�/fi06^
t** a. ^
//.
fc Z tl*
^ Qo y o o T Ud » H ^
y** <*>i¿áaAA*«u A yiftA/u
^
f f L
Guidon k tXA^JjUlAArk<xr ^ /e^^ioAtà:-
/3 oUU y- *tuioLKMT uiu*Î7 ■¡U.lc[j^y% fitÁLñtíx
lktk~ • y»M. ^C. ttiu^icJf i«- ♦«*
^ / ta lr / t^ u l
/ il ^ a i / i
'¡ k >
VcQletM*. f„, ÿ
Ç ^ llu iit^
U i/ tu w u / ^
01
/••A* ~ T yUtuwj Ou «ujf ^ ^ iaiuuX ^ ^O/Ktf Uu«|ir&,&^‘u^«M
1\A
y (M mm- twhnù
o JS ç .
A /ai
fc* /y%At€ B
^ lu iu
A M W t^ fc "
«*■
ÍA» u Í a * 4 ^ ^
,. f
/
^
7
# y* .
o y 6uuuxür ^7*** ^ <<t44 nlu*u^ d&M' olXIU.^
IjfiAutoj* ^ u í r e lle i«û..<«
A ~ôa~( u - /«
JM « A \ fty ù
, ,0
'f** JT**
■'
« *và ^ -
&A.
uttr
cuiuu <*»»»■ ^
ailVlM/bMX ^U( AaJ« |\T^U«IUX< ^yiM tuiuu Ä il Îu^fcjA, Cma O
CL 0«Ht /(uM ir^u u»*Ju«^ A tt¡L~ <MU»UI ¿I
*1 ^
éi M—
f'CJitjL
tt/tj6\i»iuM
V h “ *-^ ■«--»
4MU(Mb^O
UtU4‘ /b pJtùJtü
^
“ » UA' ^ ‘ J^** / y 6 * b ' \
y m
.
ftit •
uiL ^UtUA^IvibiulU yc«c»0>cj
O +JtdU¿Ar
«lur/t eu u.Uiu/t\
/<**»>«Ii^Üjm
yJJtcïU+M.
'itlunr W¿Í(o¿ÜU4 ««
^UH& *“* CMfcter^5 c .
a** O .
^
*A~ * ÿuA
CH|JtyYUfu4 À«/ <aÂT
MMluAM4AÍ^-g^ .
/üu».«»^ /ÄOOU
< u i< a ^,04 tu '’_il1« 'i«A»»->-^
***“*
#
/ '
Y V
a
I
//«
yovPhUc- <yvuLj**~*
'
UAXhaT /l€*A&C C^b /)« 0)>Jè^ ^ "* —■
■
*.
.//_//•*_
y
/
¡/¿iLr»'*— o«.uLu
*& ■*r* l r ~ * * * ' j ~ f ‘" ,' =* ' Y
K ' ,.
'
uî
^
C A **jfc« *4
fjtuuuXtér
(Ia
?Z *~
1m
-
—
O M m *j
/»«a. /«.
- '3 “ ,
^
V
a
^
C o v » ^ 1-1
^ *^A*
^ ^
�Π.U - .^
\
y '« *
i^ *
0«.
jA»»
/aaO^U4A> fU*4* ^
1/
7
I
•
“ ' ‘t *
-*. / . /o— • * •
^
w xa« vu J» « — A j
'
\
\ j ,
,
* J-.ÀZajl*
1 ‘ .^ i— *
‘r ~
.
y
v
*
(/
¿
*•
»» *»-■
>» -•*
\
*>
A-*** r
•
*
<
i
A
iuijîv
-
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Brunel, Jean-André. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gisclon
Marie
Subject
The topic of the resource
divorces
remariage hâtif
nullité du mariage
restitution de dot
concubinage
contrats de mariage
donations à concubine
fraudes
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Jean-André Brunel, prêtre, vicaire de Claudes-Aigues, en qualité d'héritier bénéficiaire de Jean, son père, appelant d'un jugement rendu au tribunal civil du Puy, le 22 ventôse an 12 ; Contre Toussainte Experton, fille majeure, habitante de la ville du Puy, intimée.
Table Godemel : Dot : 2. la dot reconnue dans un contrat de mariage, du 27 ventôse an trois, en faveur de la future qui était en état de concubinage avec le futur, et lorsque le mariage civil n’a été célébré que le 2 brumaire suivant, quelques heures après la prononciation du divorce du futur avec sa première femme, et par le même officier public, doit-elle, ainsi qu’une reconnaissance postérieure au mariage, faire titre contre l’héritier du mari, ou n’être considérées, l’une et l’autre, que comme un avantage déguisé, frauduleux et prohibé par la loi contre la concubine, surtout si le divorce et le second mariage sont déclarés nuls ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
An 3-An 13
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1623
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53297/BCU_Factums_G1623.jpg
concubinage
contrats de mariage
divorces
donations
donations à concubine
fraudes
nullité du mariage
remariage hâtif
restitution de dot
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53300/BCU_Factums_G1626.pdf
ddfdedea61255b2a5f329cad9ad2ec4b
PDF Text
Text
CONSULTATION
Pour Antoine N I C O L A S , Boulanger , habitant
d e S. t - A m a n t -
Tallende , appe l a n t
Contre le Citoyen C ommiss a ir e du Gouvernement, Accusateur
public près le tribunal criminel
E t contre les' Citoyens T O U R R E , plaignans et intervenans,
d’un jugement rendu au tribunal
correctionnelle de Clermont ,
Antoine Nicolas
mois
de prison , à rembourser aux frères
T o u rre la somme de 100 # prétendue
5
police
convaincu d ' escroquerie , le condamne à 300#
d ’amende , à trois
père le 1
de
le 27 ventôse an 1 1 , qui déclare
escroquée à
leur défunt
nivô se , et aux dépens ; qui ordonne enfin l ’impres
sion et l’affiche au nombre de cent exemplaires.
Pourquoi des peines si g rav e s, pourquoi une flétrissure si écla
t a n te , pour un délit qui n ’est qu’une vision et un rêve?
L ’appelant est prévenu , « d’a v o ir , le 1
5 nivose
dernier, été dans
» la maison du citoyen Pierre T o u r r e , notaire à St-Amant (mort
» depuis cette é p o q u e ), et d ’a v o i r , par dol , et sous l’espérance
» donnée au citoyen T o u rre d’acquitter un billet de 96# , souscrit
» par la mère du prévenu , fait écrire sur le billet l’acquit en sa
» faveur, et d'avoir par ce moyen escroqué partie de la fortune du
» défunt Pierre T ourre ».
Voilà l’inculpation ; voici la vérité.
P ierre T o u r r e , tombé dans un état de cécité presque complette
sur la fin de ses jours, n ’était plus employé comme notaire. Ceux
qui avaient des actes en brevet chez lui , s’empressaient de les
retirer. Nicolas se présenta en conséquence plusieurs fois dans son
étude pour réclamer six obligations, les unes au nom
de Jeanne
T ixier , sa m è r e , les autres au s ie n , que ce notaire avait reçues.
�H i\o u
T o u rre
prorr.ir
de les faire chercher , el
p our demander à Nicolas
pvofifa do l’occMsion
lu paiement d’ un billet de io o fr, qu'il
disait avoir de la m è r e , et d ’une autre petite somme de
prétendait
, qu’il
lui être également dae. Nicolas promet d’en parler à
sa mère : on prend jour pour tout terminer. Ce jour prisfuL le i
5
nivôse : Nicolas revient : T o u rre était à promener dans son jardin :
Nicolas y entre. Mes obligations sont-elles prêtes , et le Lillet de
ma mère aussi , demande-t-il à T o u r r e ?
O u i , je vais vous tout
remettre. Auiïitôt Nicolas tire» 17 écus de six francs et un écude trois
livres de sa bourse
et les remet à T o u rre
5
; voilà i o ff
,
lui
dit- il ; T o u rre prend celte somme , la met dans sa poche , et p ro
pose à Nicolas d’entrer dans son salon , où il va faire endosser le
billet et lui remettre ses obligations. Chem in
faisant , T o u rre
a
un souvenir : votre mère me doit bien autre chose ; j ’ai écrit pour
elle plus de quarante lettres ; n ’en mettez que trente , à So-1' la
le t t r e , c ’est
45 ^".
Vous vous arrangerez avec ma mère , répond
Nicolas ; et l’on arrive au salon. T o u rre appelle la dame Ussel ,
et la prie d ’écrire au bas du billet qu’il lui remet , ce qu^il va
dicter. Il dicte une quittance du montant et d’une somme de
5^
en sus, avec subrogation à ses droits en faveur de Nicolas , afin que
celu i-c i
p u iss e répéter contre sa mère la somme qu’il payait
elle ; la dame Ussel écrit ce que T ou rre
pour
dicte ; celui-ci se fait
lire l’écrit et signe : puis il tire de sa poche deux obligations qu’il
prciente ù Nicolas1, voilà vos obligations , lui dit-il ; donnez-vous de
l ’argent ? Nicolas , sans répondre à la question , observe que tou
tes
ses
obligations 11e
sont pas là ; qu’il
en manque quatre.
Je ferai chercher les autres, quand mon fils qui est a b se n t, sera de
retour. Nicolas in siste , et veut tout ou rien; on s’échauffe ,Nicolas
propose d’aller
inviter Chalard pour rechercher ses obligations ;
T o u r r e y consent. Nicolas s o r t , revient quelques instans après 5 on
vérifie le répertoire qui se trouve chargé de six obligations : mais
T o u r r e persiste à n ’en représenter que deux ; Nicolas persiste
de son cô té , à vouloir tout ou rien.
T ou rre renouvelle sa
mande ; de l'argent , répète*t-il , sans
Nicolas croit qu’il veut parler des
45 ^
s’expliquer
de
autrement.
qu’il avait réclamées pour
uvoir écrit des lettres j il répond par un sourire , [que les témoins
appellent
moqueur.
T o u r r e paraît nier alors
le
paiement do
�>03
j o b* qu’il venait d» recevoir dans son jardin , et reproche à Nicolus de lui avoir fuit endosser un billet qu’il refuse de solder.
On
s’injurie et on se sépare sans rien terminer : niais obseivons bien que
Nicolas
sort sans rien emporter , ni le billet quittancé , ni les
obligations que T ourre devait lui rendre. T o u t reste an pouvoir
de ce dernier. T ourre jette les hauts cris , il rend plainte du fait
qu’il peint comme une escroquerie du montant du billet quittancé.
Mais n ’est-ce pas là un vertige ? Quand le paiement reçu dans son
jardin aurait été supposé , comme il l ’a prétendu après la scène,
quel tort aurait-il
souffert pour rendre plainte ?
L e billet supposé anéanti parce qu’il y a une quittance avec subro
gation au bas , a été déposé au greffe par T ouri’e. L e tribunal vei’ra ,
en le faisant mettre sous ses y e u x , qu’il est en tête d’une demifeuille de papier ;q ue la quittance de sa subrogation est au bas de la
même demi-feuille ; que ces
deux actes
sont séparés
intervalle de plus de deux doigts. E n cet état ,
par
un
qu’avait à faire
T o u rre pour conserver son titre de créance sain et e n t ie r , s’il
était déterminé à méconnaître le paiement qu’il avait reçu sans
témoins ? Ce n ’était pas une plainte qu’ il fallait rendre, c était
1 oui simplement la quittance de subrogation qu’il fallait ou faire
bâtonner par la dame Ussel qui venait de l ’écrire , ou détacher du
billet , dont elle était séparée de deux doigts, pour la déchirer.
Tous les jours on bûtonne sur les effets de commerce les acquits
mis au dos dans l’espoir qu’ils seront payés à présentation, lors
que le paiement espéré ne s'est point réalisé.
Tous les jours on bâtonne de même
les ordres mis
au dos
des eiTets négociables , lorsque la négociation proposée ne
consomme pas.
s’en
Bâtonner un acquit , ou un ordre , au dos d ’un effet, est bien
plus fort que bâtonner ou détacher une quittance de subrogation
écrite au bas ; puisque le bâtonnement écrit au d o s, laisse après
soi
des traces ' ineffaçables , tandis que la quittance mise au bas
d'un e
demi-feuille qui porte un billet en tête., peut disparaître
sans laisser de traces.
Mais l’un est aussi légitime que l ’autre. L ’acquit , l ’ordre, ou
l ’acte de subrogation qu’écrit le créancier sur un billet dont il
n ’est qiCun projet , tant que le montant n ’en est pas
r e ç u , et que la délivrance du titre de créance n’est p a s fa ite.
est muni ,
�*
\
L e créancier qui détruit
ce projet d’acte de libération
ou
de
transmission , ne fuit qu’user d’un droit trop légitime pour lui
être contesté; s’il n ’en use p a s , c’est donc sa faute.
y a plus : une cession pareille à celle qui est au pied
Il
billet de la veuve Nicolas , tant que
la pièce reste au pouvoir du
cédant, tant qu’il n’y a eu de tradition , ni du b ille t, ni de l'acte
< de cession, n'est rien.
E lle n ’é teint pas la créance y puisqu’elle n ' a pour but que de
la transporter à un
nouveau créancier ; et elle n ’ opère pas ce
transport , puisqu’aucun titre n ’est mis au pouvoir du subrogé.
C 'e st donc évidemment une vision , que d’imaginer dans un pareil
fait
l ' escroquerie d’une partie de la fortune de Pierre
T ou rre.
O n ne lui a rien escroq ué, puisqu’il a tout re te n u , tout conservé ,
son titre etsa créance.
P ou r qu’il y eût escroquerie , il faudrait que Nicolas eût reçu
de confiance , ou enlevé par adresse , le billet quittancé dont il
s 'ag i t , sans en payer le montant : or c ’est ce qu ’ on ne lui impute
m ême pas. Le titre et la créance ont resté à Pierre T o u r r e , on
le répète. Il ne lui a été rien enlevé , il n ’a rien perdu ; donc il
a évidemment armé la justice contre un délit chimérique.
Le
tribunal correctionnel n ’a pas réfléchi, lorsqu’il a puni ce délit comme
r é e l , et la fausse application qu’il a faite des lois rendues sur
l'escroquerie , est si frappante , que ce serait faire injure au
tribunal d ’appel , de craindre qu’il pût
consacrer
une pareille
méprise.
T e lle est l’opinion du Jurisconsulte soussigné.
A Clerm ont-F errand f le 29 floréal an 1 1 .
B E R G I E R.
A C le r m o n t , chez
V E Y S S E T , Imprimeur de la Préfecture
du P u y -d e -D ô m e .
du
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Nicolas, Antoine. An 11]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Subject
The topic of the resource
créances
escroqueries
billets
notaires
quittances
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour Antoine Nicolas, boulanger, habitant de Saint-Amant-Tallende, appelant ; Contre le citoyen commissaire du gouvernement, accusateur public près le tribunal criminel ; Et contre les citoyens Tourre, plaignans et intervenans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Veysset (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
An 10-An 11
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1626
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Amant-Tallende (63315)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53300/BCU_Factums_G1626.jpg
billets
Créances
escroqueries
notaires
quittances
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53301/BCU_Factums_G1627.pdf
8ec5684976c6f4993c9bc00962bb4597
PDF Text
Text
w
/;w w w m > w w î ^ w w w « / m / m <w w w w * w ^ î î * Î Î J « / w m ><
P R É C
I S
TRIBUNAL
P O U R
C ôme- D amien
•
.
F A Y O L L E ,
S P E C I A L
Accusé;
c o n t r e
Jacques
D E F F A R G E S , P la ig n a n t.
l.’ iji.'
',
’Ja i
t '1
/ I-
' ''l
•..
des e n n e m i s , ils se cachent : un m a n n e q u i n est l ’instrument de le u r
anim osité. L e s la ches n ’attaqueraient pas m a vi e mais ils cherchent à m ’ôter
l ’ h o n n e u r , parce q u e dans c e genre d ’a g r essio n , toute représaille l e ur est
m oin s sensible
et q u e s u r tout ils sont plus à c o u v e r t ..I l l e u r a été
aisé
d e supposer quelques motifs d ’i ntérét personnel à un h o m m e totalement nul
et sans resso u rc es, in c a p a b le d e .m é d it e r lui-m ê m e ce q ui a été fait sous son
nom .
Q u i donc se défendra du soupçon d ’im p r o b i t é , q u a n d a v ec une fortune
au-dessus de mes b e so in s, et aprè s soixante-deu x ans d’ une v ie sans reproche»
; j ’ai la douleur de m e vo ir accusé d ’a v o ir v o l é 2 0 0 0 francs ; et à qui?
farges ! qui
v o l , a laissé
D ef-
vit dans la p é n u r ie la plus extrê m e ? A D e ffar ges q u i , depujs le
passer sept a n s , q u ato rze ans m ê m e sans s’ en appereevoir.
Ceux_ qui connaissent l’accusateur et l ’ a ccusé rougiront de penser que
•c’e st,m o i qui suis a c c usé par D e f f a r g e s , ils croiront q u ’ une transposition
- d e noms les abuse e t l e u r indignation justificative sera l e seul ex a m e n q u ’ils
feront des détails relatifs à la m isérable c a lo m n i e d o n t j e suis un,instant la
v ic tim e .
. ‘ .
,!
A u s s i n’ est-ce p a s po u r e u x que j’ écris.
; i
Je n’ écris pas m ê m e
•
p our mes juges ;
car en leur dem and ant la prison et v enant m e justifier a v e c des pièces a u t h e n -
tiq u e s , si
j 'osais douter de leur j u g e m e n t, ce serait douter de l e u r couscience.
J ’ écris pour c e u x q u i , n e m e c o nnaissant p a s , n ’ont pu que r ece v o i r l'impres
sion d ésavantageuse qui résulte n aturellem ent
d ’u n e
accusation de fa ux. L a
c a lo m n ie est e x p é d itiv e et laconique ; ; une justification est c o m p liq u ée et
e n n u y e u s e mais ceux qui m éritent que leur opinion soit com ptée pour quelA
�(2
)
q u e c h o s e , se défient de l’ exagération du v u l g a i r e , sont en garde contre leur
prop re j u g e m e n t , et se font un d e v o ir de lire ce qui peut les désabuser.
C ’est d on c à ceux-ci q u e je va is d on ner l’ explication d e ce qui a d on né lieu
ou plutôt de c e qui a fourni m atière à la dén on ciation signée Deffarges. J e ne
ch erch e ra i pas des m o y e n s dans les'Iois fet les auteurs. J e m e coutenterai de
laisser parler les fa its ; eu x seuls m e justifieront.
'
F A I T S .
A n n e et M a r ie T isseron s œ u r s , a v a ie n t é p o u s é , l ’ une le sieur C h a l u s ,
l ’autre le sieur L a r o c h e qui ava it des enfans d’ un prem ier lit.
D e M a r i e T isseron issurent M a r g u e r i t t e , J e a n - J o s e p h et A m a b l e L a r o c h e j
c ’est cette dernière qui a ép o u sé le sieur D effarges.
E n 1787., J e a n - J o s e p h L a r o c h e m e ve n d it d ive rs héritages venant dp
M a r ie T i s s e r o n , sa m è r e , parce q ue ces héritages se trouvaient voisins d e
m es propriétés de S t.- A m a n t ; il ne lui en r evenait q u ’ un tie r s, et voilà c e qui
a a m e n é d’autres actes.
A u m ois d ’ avril 178g , ■
j’ acqtiis les droits de M argueritte L a r o c h e , dans les
m ô m e s biens provenant de M a r ie T issero n .
C o m m e J e a n - J o s e p h L a r o c h e avait v e n d u plus qu*il ne lui r evenait dans
les im m eu b les de l’ acte de 1 7 8 7 , il y eut un traité entre l u i , D effarges et m o i ,
c o m m e représentant M argu eritte L a r o c h e . J ea n -J o se p h nous c éd a en i n d e m
n ité une terre et d e u x prés sis à G o n d in a n g u e.
C o m m e en core la succession T isse r o n devait au sieur L a d e v t e u n e rente au
principal de 2,5oo fr .’/ q u i d è v a itê tr e rem b o u rsé e par nous tr o is , L a r o c h e et
D e ffa rg è sm e v e n d ir e n tu n e m oitié d e terre et un petit jardin,plus quatre rentes
et l’effet d’ une sentence de 1 7 7 9 , à condition de rèm bourser M . L a d e y t e .
C e s biens de G o n d in a n g u e étaient si peu de c h o s e , si peu à ma b ie n s é a n c e ,
que je c h erch a i aussitôt à m ’en d éfa ire ; un n o m m é A n t o i n e B o y les d em a n d a
en rente ; l’acte allait en être p a s s é , et D effarges était venu d ’A u b u sso n à cet
e f f e t , à la fin de 1790. M a is qui eût voulu D effarges pour caution? on ne vo u
lait a cheter q ue d e m oi. L ’acte n’eut pas lieu.
E n 179 1 , un autre a cq u é r e u r se présenta a v e c les tuCmes propositions j
vo u lan t en finir , j ’achetai alors de D effarges sa m oitié desdits héritages , par
acte du 4 m ai 1 7 9 1 , reçu R o c h e et P i o l e t , notaires , m oy en n a n t une rente de
‘ cinquante f r . , po ur ne pas perdre le capital en cas d’ éviction ; et presqn’au ssi,ôt je ve n d is le tout par acte n o t a r i é sieur T a r d i f , juge do paix à St.-Am ant,
a v e c m a seule garantie.
L e sieur C h a l u s , époux de M a r i e T isseron avait retiré des héritages d ’un
n o m m é G r o l e t , eu 1 7 7 7 , pour l’ acquit d ’une c ré an ce c o m m u n e a u x deux
�C
3
)
sœurs T issero n . D ’autres créances étaient h y p o th é q u é e s sur un dom aine
a p p e lé d e L o b é n i c h e , acquis par m o i j j’a vois donc intérêt d e d égager mon
Lien de ces hy p o th èq u es.
C e fut le sujet d ’ un traité du 21 therm id or an
5,
acte si peu destiné à être
c a c h é q u ’il fut fait à O l m e t , en présence de plusieurs persounes.
O n conçoit aisém en t q u ’en traitant a v e c Deffarges , je ne devais pas faire
un acte p a r tiel , et laisser encore mes intérêts en c om m un a v e c un h o m m e .qui
m ’entravait dans tout c e que j ’avais à f a i r e , et q u i , toujours aux e x p é d i e n s ,
m ’e n n u y a it en core plus.
£î.
I l fut d on c conven u q ue Deffarges m e céd erait sa portion dans plusieurs
c r é a n c e s , plus son tiers dans les im m eu b les retirés par C h a l u s e n 17775 plus
enfin le capital de la rente à lui due par l ’acte de 1 7 9 1 . L e prix en était con
v e n u à z , 5oo francs.
M ais cet acte devait naturellement être d iv isé en d eu x parties ; car je vo u
lais distinguer les créances qui m ’ intéressaient personnellem ent j et Deffarges
m it en core cette circon stance à profit.
C o m m e l’acte se r é d i g e a i t , et que j ’allais écrire
5oo
francs po ur le prix de
ces c ré a n ce s, Deffarges éle v a des d ifficu ltés, voulut une augm entation ; cette
so m m e de
5oo
francs fut laissée en blanc , et l ’a cte fut c ontinu é. L e second
p rix , fixé à 2,000 fr a n cs , n’ eut pas de d iffic u lté , dès qu’ il y avait un article
en blanc.
Q u a n d l’acte fut te rm in é
et bien l u , quand il 11’y m auqua que cette
s o m m e et l’a p p r o b a t io n , nous traiiàines sur le prix en b la n c : il fut porté à
600 francs. L e blanc fut donc rem pli après coup. L ’approbation le fut dans
la m ê m e m i n u t e , et cette approbation est ainsi c o n ç u e :
N o u s soussignés . . . . approuvons les présentes et les fe u ille ts d e *
a u t r e s p a r t s . F a it dou b le, etc ..............
F a ï o l l e ............ Bon po u r ce que
d e s s u s , D e i'F a r g e s .
A u m oy en de cet a c t e , le sieur Deffarges ne devant plus rien de la créance
L ad eyte,
il
fut écrit aussitôt q u ’il en était tenu q u it te , sur la quitauce
m ê m e du rem bo ursem en t.
C o m m e je ne cachais pas celle acquisition , j ’en fis usage aussitôt.
L e i 3 floréal an
Je
n om m ai
5,
j’ assignai le sieur C halus eu partage.
pour m ou
expert le sieur M a g n i n ,
beaufrère
du sieur
D effarges.
L e 2 i the rm id or an
L e 9 fructidor an
5,
5,
par acte
notarié , ce
n o ta rié ,
p a r .c u ir e acte
partage fut fait.
je vendis mon lot au sieur
G rolei.
V o i l à tout ce qui s’ est passe.
A
2
�r - x
( 4 )
D É N O N C I A T I O N 1,
M O T I F S ;
C H A R G E S .
5
J ’étais d on c prop riétaire d epüis 1 7 9 1 , et d epuis l ’an 5.
J ’ava is r e v e n d u en 1791 , et en Part
5.
1
D e p u i s ces divdrSes é p o q u e s , DefFarges n’a va it r é c l a m é d e p e rs o n n e n i
c r é a n c e s , ni r e n t e s , ni im m eu b les.
' S o n en fant tnéurt en l ’an 1 0 , et les co lla té ra u x r écla m en t la succession.
DefTarges la r e v e n d i q u e c o m m e ascend ant. I l y a procès.
L e sieur M a g n in ,
l ’a n 5 ,
un
d es collatéraux ,
Le m êm e q u i f u t expert en
se souvenarit que ¡’avilis fait dès actes a v e c D e f fa r g e s , m ’ écrit le
x6 rriéssidor an xo , po ur d em a n d e r des r enseign em en s sur ce qui s’ est passé.
J ’a vais perd u
de v u e tous ces actes auxq u els je 11’avüis ou 11e' c ro y a is
plus a v o ir d ’intérêt. J e les c h e r c h e pour en e n v o y e r fcopie au sieur M a gn in ,
¿ ’a y a n t en v u ë q u e de l ’ obliger.
J e réfléch is que ces débats p e u v e n t m e susciter un procès à m o i - m ê m e 5
'
et j ’ewvoie au contrôle d e m a r ésid en ce l ’acte sous seing p r i v é de Pau-
5*
E n P a n .1 1 , le sieur M a g n i n paraît désirer une ex p éd itio n de cet acte
d e Pan
5,
et pour cela il fallait le d ép o ser c h e z un notaire. J e l e d é p o s e ,
et qui cliois is-je pour ce dépôt de son d o u b le ?
C ’est le sieur C r o s m a r i e , notaire à A m b e r t , h o m m e de confiance du sieur
D effarges,
son d éfen seu r fans
le procès contre le siéur M a g n in et autres
c o lla té ra u x .
C e t acte et celui de 17 9 1 allaient être funestes au sieur D effa rg es ; car
s’ attendant à être ex clu de la succession
d e son fils par les co lla té ra u x }
i l d em a nd a it au m oin s l’ usufruit coutum ier.
C e s d e u x ventes en faisaient pron on cer la privation.
I l n ’a plus q u ’ un parti v io le n t à pren d re. I l e x a m i n e à tant de reprises
Pacte de Pan
5,
q u ’il croit a v o ir saisi un trait de l u m i è r e ; il v a a u x en
quêtes et se perd en r e c h e r c h e s ; il d em a n d e des conseils à tout le m o n d e ,
et tout le m o n d e ne lui donne pas c eu x de la pruden ce ; il part pour R i o i n ;
il d én o n ce .
I l eût bien v o u lu ne d én o n ce r q ue Paçte de Pan
sa cause exigeait Panuullation des d eu x.
lin
5;
m ais le besoin de
c o n s éq u e n c e il se prétend
tro m p é , « i.° pa r L’acte de 1791 ; . . . il est faux , il n’a
« Si la signature e x i s t e , e lle est du fait de l’ au teu r du
« L'acte de L'an 5 ; . . . il n’ est pas d ouble ; . . . il est dit
jam ais v e n d u . . . .
faux ; . . . 2 .0 p a r
600 francs c o m p -
*< ta n t , q u o iq u e cette so m m e fût c o m p e n sé e en partie a v e c la c ré an ce du
« sieur L a d e y t e .
J ’ai interca lé
u n e feu ille nu m ilieu , Pacte n’ en ayant
« d’a bord q u ’ u n e . . . . C e la se p ro u v e par un extrait de P e n r e g i s tr e m e n t,
�CS )
« où on vo it q u e le r e c e v e u r n’ a perçu q u e 12 f r . , ce qui n’ est le droit
« proportionnel q ue d ’ une v e n te de 600 francs ».
V o i l à sa dénonciation ; il y joint u n e liste de quatorze t é m o i n s , et écrit
au b a s , « que les trois d erniers d éclareront q u e le 21 th e rm id o r an 5 , il
« n’a va it que 6 francs d a ns sa poche (après l’acte ) , et qu’il n ’ eut pas de q uoi
« p a y e r l 5 fr. q u e je lui
gagnai
à la bête o m b ré e ; ce qui prouv e que je
« ne lui avais pas co m p té 600 f r a n c s , et c epend ant l ’acte avait été passé
« d e v a n t eux ».
indiqués particulièrem ent p a r Deffargr.s , ont en
/ a u x , c ’e s t . . . .
da n s la dénonciation.
D e u x de ces témoins ( l e ^ . e et le 4.® de l ’ i n f o r m a t i o n ) , ont vu faire
l'a cte d e l’an 5 ; . . . il a été fait en d e u x f e u i l l e s ; . . . le prix a été c on
ve n u d ev an t e u x à d e u x m ille et qu elqu e s l i v r e s . . . . I l lut souscrit des
effets par moi ; . . . . il fut fait d e u x d o u b l e s . . . .
L ’autre tém oin in d iq u é ( le 3.“ de l ’information
frère de Dejfarges ,
n ’ a pas été tém oin de l’a c t e ; . . . . i! n’a assisté q u ’au jeu , où j e p a y a i ,
dit-il , p o u r D ejfarges. . . . Son frère lui dit n ’a v o ir vend u q u ’ un petit o b j e t ,
m o y e n n a n t cinq cents fra n cs.
C e s trois témoins.,
effet d é p o s é , mais d e m anière à p ro u v er q u e s’il y a un
L e s d eu x notaires de l’acte de 1 7 9 1 o n ^
entendus ; l’ un d ’ e u x , notaire
en second , n’ était pas à l’ acte , c ’est l’ usage. M a is R o c h e , notaire re c e v a n t,
( l e 10.* d e l’ i n f o r m a t i o n ) , d éc la r e se rappeler très-bien que
Dejfarges
est
ve n u c h e z lui en 179 1 , faire cette vente.
T o u te s les autres dépositions sont a bsolum ent insignifiantes.
V o i l à les c h a r g e s ; où p lu tô t, v o ilà la plus claire des justifications.
R É F L E X I O N S .
Il ne s’agit plus de la partie de la dénonciation qui concernait l ’acte du
4 m ai 1791.
L e sieur D efïa rg es qui accusait cet acte de f a u x , qui prétendait que sa
signature et c e lle du notaire étaient fa u s s e s , est reconnu avoir signé. L e
notaire est aussi reconnu a v o ir signé.
L ’acte a été contrôlé à Cunlliat en 179 1. L e s registres du contrôle ont
été produits.
A u s s i l ’ acte d’accusation ne porte pas sur cette vente.
C e llo prem ière dénonciation est d on c prou v ée calomnieuse.
N ’aidc-l-elle pas à juger la seconde ?
Duflarges m ’a fait interroger. A mon tour je l'interroge.
�w
(6)
P o u rq u o i a -t-il m en ti en disant q u ’ il n ’ ajam ais v e n d u ? I l a v e n d u . II est
fo rcé de ne plus le nier.
P ourq uoi DefTarges a-t-il dit q ue l’acte n’a va it pas été fait d o u b le ? I l a
signé q u ’il l’ était. I l a m on tré son d oub le ,à A m b e r t .
P o u rq u o i D effa rg es a-t-il dit à son f r è r e , le m ê m e jour de l ’a c t e , n’ a vo ir
v e n d u que pour Soo fr. Il dit a u jo u rd ’ hui que c’ était 600 fr. I l reconnaît
la partie de l’acte où est écrit le prix d e
s ix cents fra n c s.
compensés
P o u rq u o i D effarges a-t-il dit que ces 600 fr. étaient
a v e c sa
portion d e l à c ré a n ce L a d e y t e ? E t pourquoi a-t-il dit au procès q u ’ il lui fut
fait un
billet
d e Soo f r a n c s , q u ’ il a c é d é à
Gatetjrias
?.... V o i l à d on c au
m oin s i j i o o fr. reconnus.... L e prix n’ était d on c pas seu le m en t de 600 fr.
^L’acte avait donc plus q ue la prem ière feuille.
P o u rq u o i D effa rg es a p p r o u v a i t - i l les feuillets
des autres p a rts?
Il /
a va it d o n c plus d 'un f e u i l l e t , autre q u e c elu i d e l’ approbalion.
P o u rq u o i D e f fa r g e s , propriétaire d ’ i m m e u b l e s , n ’a-t-il jam ais r é c la m é
n i ses p r o p r ié t é s , ni les jo u is s a n c e s , ni aucuns ferm ages d epuis l’an
5?
P ou rq u oi m ê m e a-t-il laissé le sieur T a r d i f en possession paisible depuis.
179 1 jusqu’à 1 8 0 4 , d ’i m m e u b le s dont auparavant lui D effarges était si soi
g n e u x à p ercevoir les fruits ?
P o u rq u o i D effarges ne s’ est-il jam ais m is en pe in e d e p u i s , de savoir qu i
p a y ait les i m p ô t s , ni de se faire cotiser s’ il était propriétaire.
P o u r q u o i n’a-t-il jam a is assigné ni averti les débiteurs de toutes ses rentes,
et m ’ en a -t - il laissé rem bo urse r p lu s i e u r s , sans se m ettre sur les rangs pour
to u c h e r .
P o u rq u o i m ’ a-t-il laissé partager a v e c C h a l u s , e n l ’an
5,
des i m m e u b le s
q u ’ il ne m ’aurait pas v e u d u s ? C o m m e n t ce partage s’ est-il fait a v e c
/
D effarg es par
le beau-frère de
L’oncle
do
Deffarges, sans que D effarges l'ait su?.. Il habite
à trois lieu es des biens partagés. J ’ habite à plus de d ix lieues de distance.
S i le sieur D effarges s’était fait toutes ces questions, ou si on les lui eût
f a i t e s , il n ’y
aurait pas de d é n o n c ia tio n ..
S ’ il a v a it réfléc h i q ue rien ne m ’obligeait à d é l i v r e r un acte c o n s o m m é ,
et sur-tout à le d é p o s e r e z
m in u te
c h e z son d é fe n s e u r , dans le procès par
leq u el l’acte était p r o d u i t , il n’y aurait pas de dénonciation.
Si Deffnrge avait consulté les trois témoins q u ’il indiquait c o m m e d e v a n t
me
co n d a m n er,
en rappelant une partie de c a r t e s , il aurait appris d ’e u x
q u ’ils a v a ie n t une m é m o ir e moins f u t i l e , ils l’ auraient dissuadé j et il n’y
aurait pas d e d én on ciation .
S i , pour pa rle r plus j u s t e , il n’y avait pas eu de d e m a n d e en p riva tio n
d'usufruit f o n d é e 's u r ces deux a c t e s , il n’y aurait pas do dénonciation.
Si le sieur DefTarge-li’ eùt pas été a v e u g lé par l’im pu lsion d'autrui et par
�y/f
~
(
7
)
son i n t é r ê t , il aurait ré flé c h i q ue je n’ ai eu nul intérêt à être son acq u é
r e u r , ou à ne l’ être pas ; puisque je suis exposé aux évictions des héritiers
d e son fils , et que je n ’ai contre lui aucune g a r a n t i e , au cun e ressource.
N o n , a u c u n e , pas m ê m e p o u r la v e n g e a n c e ; pas m ê m e p o u r la r é p a
ration d u tort q u ’ il m e cause.
J e sens bien q u ’ un
Deffarges
ne portera a u cu n e atteinte durable à m a
r é p u t a tio n , m ais je ne trouve pas m oins bien d u r , à m on â g e , d e c o n
naître
p a r Lu i
le séjour des prisons.
Q u a n d un h o m m e nul entreprend de louer ou de rendre s e r v i c e , per
sonne ne s’aperçoit de sa tentative. I l est triste d e penser qu’il est plus
h e u r e u x quand il veu t nuire.
F A Y O L L E.
A
R I O M , D E L ’I M P R I M E R I E D U P A L A I S , C H E Z J .- C . S A L L E S .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Fayolle, Côme-Damien. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Fayolle
Subject
The topic of the resource
successions
rentes
usufruit
jeux de cartes
faux
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Côme-Damien Fayolle, Accusé ; contre Jacques Deffarges, Plaignant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1787-1804?
1774-1789
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1627
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0225
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53301/BCU_Factums_G1627.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Monestier (63230)
Saint-Amant-Roche-Savine (63314)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Faux
jeux de cartes
rentes
Successions
usufruit
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53304/BCU_Factums_G1701.pdf
5aae3cb50f3f89e7b1742d8f81ceb3ac
PDF Text
Text
RÉPLIQUE.
�r é p l i q u e
POUR
Sieur
ROLLAND , T o in e t t e G a b r i e l l e R O L L A N D , et le sieur G R O S ,
son mari, appelans ;
P
ier r e
-I
srael
C O N T R E
A n to in e V A R A G N E S
L
et a u tres, intim és.
E S adversaires n’ é p ar gne nt ni les allégations, ni les
sophismes.
C ’étoit d’abord par violence, de voie de fait, que le
sieur Rolland père s’étoit mis en possession du domaine ;
maintenant c’est par artifice, en séduisant le jeune V a ragnes, en lui. présentant, pour prix de sa complaisance
à abandonner le dom aine, une somme de 200 francs,
non en deniers qui auroient pu l’éblouir, mais en un
billet qui n’a été acquitté qu’à, l’époque de la transacA
�CO
tio n , par compensation avec une partie du prix de la
vente. Mais si telle a été la cause du billet, Antoine
Varagnes, reprenant le domaine, devoit donc le remettre,
ne pas en retenir le montant. Par quelles autorités éta
b lira -t-o n qu’il a pu a vo ir, et la chose, et une partie
du p rix ?
L e sieur Rolland n’a pas seulement séduit le jeune
homm e; il a séduit le tuteur! il a séduit les parens! il
a fallu qu’il ait aussi séduit le juge qui a homologué
l’avis de parens.
Antoine Varagnes a demandé à être autorisé non-seu
lement à abandonner le domaine, mais encore à renoncer
à la succession; il a exposé que Géraud Varagnes avoit
laissé beaucoup de dettes. On reconnoît le souffleur.
Ce souffleur a donc dicté aussi l’acte de 17 7 3 , par le
quel Antoine Varagnes a acquis les droits de Sébastien
Varagnes ; dans lequel acte il expose que le père com
m un.avoit acquis un domaine appelé de Fleurac, mais
qu’il n’en avoit pas payé le p r ix ; qu’il avoit laissé aussi
ses droits légitim aires, ou partie d’iceu x, à rechercher
et réclam er, et qu i étoient absorbés par les dettes : en
conséquence, Sébastien Varagnes cède à son frère, aux
hasards, périls et risques de ce dernier, ses droits suc
cessifs, moyennant 4Ôo francs une f o i s payés ; à compte
de laquelle somme Antoine paye comptant y 5 francs, et
le surplus est stipulé payable à 5o francs par a n , sans
intérêt qu’à défaut de payement aux termes.
Loin d’ambitionner de rentrer dans le dom aine, le
sieur Rolland père n’a cédé qu’à la nécessité.
Il a repris le dom aine, parce qu’il étoit abandonné;
�(
3
)
il l’a repris, parce que les enfans Varagncs ont refusé
de continuer l’exploitation, et de servir la rente.
Ne pouvant le faire valoir lui-m êm e, il l’a affermé,
A r g e n t . . . . . . ....................................................... 440 fr.
Soixante quartes, ou quinze setiers blé-seigle,
à 6 fr. le setier.........................................................
90
V in gt quartes blé noir, ou cinq setiers, il 4 fr.
le se tie r....................................................................... 20
Trente livres chanvre, à 10 sous la livre . . .
i5
Huit ch a p o n s........................................................
8
T
o t a l
.........................................
5 7 3 fr.
Sur ce produit, il faut déduire les charges.
Pour taille, dixième et vingtièmes. . . 200 fr.
Pour la rente due au seigneur de Chabancs, vingt setiers.................................... 120
Pour la dîme au curé d’ides, ou pour
rente au lieu de d îm e ...............................
5o
Pour les réparations, entretiens, ou
cas fortuits, un dixième du prix du b ail. .
T o t a l à déduire............................ 4 27 fr*
Il ne restoit donc de revenu n et, q u e ...........
14 6 fr.
Il s’en falloit donc de 354 fr. que le produit du do
maine égalât le revenu du prix de la vente.
Et qu’on ne pense pas que c’est un calcul fait à plaisir,
et pour le besoin de la cause.
O n offre, et les adversaires peuvent demander acte de
ces offres, de rendre compte des jouissances à dire d’ex
perts , sous la déduction des charges, depuis le 27 avril
A 2
�(
4
)
I 7 ^3 > époque où le sieur Rolland père s’est mis en pos
session , jusqu’au 25 mai’s 17 7 4 , époque où Antoine
Varagnes est rentré en jouissance, à la charge par les
adversaires de rendre com pte, de leur côté, de la rente
annuelle de 5oo francs, franche et quitte de toute retenue,
et à la charge -encore par chacune des parties de faire
sa soumission au greffe de la cour, de payer à celle qui
se trouvera créancière ce qui lui sera dû par l’événement
du compte, n’entendant les appelans, par les présentes
offres, se nuire ni préjudiciel' quant au fond du procès.
L e sieur Rolland père a présenté une requête en 1767,
pour être cotisé d’office ; et dans cette requête il porte
le produit du domaine à 55o francs ; mais il n’a point
déduit les charges, parce qu’effectivement, pour régler
les im positions, on ne déduisoit point les charges ; de
même qu’encore aujourd’h ui, pour le droit pour ouver
ture de succession, on ne déduit point les dettes; on
prend sur la valeur des biens, quelles que soient les dettes.
Dans cette req u ête, le sieur Rolland expose « qu’il
« avoit vendu le bien à Géraud Varagnes; que ce V a « ragnes est décédé en novembre 1752 ; que dans le peu
te de temps qu’il a jo u i, il a laissé dépérir les bâtimens,
« par exprès une grange; qu’il a resté débiteur, non« seulement d’arrérages de la ren te, mais des imposi« tions, et de reste de droit de lods ; que ses enfans n’ont
« voulu entretenir l’exécution de cette vente, et aban« donnèrent ce domaine; que même le plus âgé d’entre
« eux a répudié la succession du père ; que dans ces cir« constances il a été dans la nécessité d'affermer ce
« dom aine........... »
�(
5
)
Mais c’est ce que les adversaires , dans leur mémoire ,
n’ont eu garde d’ajouter.
L e sieur Rolland père étoit donc loin de chercher à
rentrer dans le domaine ; il n’en a repris la possession
que pour ne pas laisser tout à l’abandon.
Les mineurs Varagnes ont-ils pu déguerpir? Question
inutile relativement à Marianne Varagnes, qui a tout
a p p ro u v é ; inutile relativement à Sébastien, dont on ne
conteste point la portion; inutile même à discuter rela
tivement à Antoine. A ntoine Varagnes avoit renoncé,
autorisé par avis de parens, à la succession ; il est ensuite
revenu contre la répudiation : mais on sait^que celui qui
a renoncé, et qui revient ensuite contre la renonciation,
est obligé de prendre les choses en l’état où elles sont
au moment où il se porte héritier.
Ont-ils pu déguerpir? O n oppose que le déguerpis
sement n’a lieu qu’en matière de rente foncière; qu’ici
ce n’étoit point une rente foncière, mais une simple rente
constituée, affectée seulement sur un fonds. On s’est livré
à cei égard à une longue discussion : on pouvoit s’éviter
tant de peine. On conviendra que c’éto it une rente cons
tituée, mais provenant de vente de fonds.
L e déguerpissement n’a lieu qu’en matière de rente
foncière; itivito creditore / c’est-à-dire, que si les enfans
Varagnes avoient eu d’autres biens, le sieur Rolland auroit pu insister sur le payement de la rente, et faire vendre
tant le domaine que les autres biens , pour assurer le
payement.
Dans le bail à rente foncière, le preneur peut déguer
p ir , que le créancier le veuille ou ne le veuille pas, en
�(
6
)
payant les arrérages échus du temps de la jouissance :
pourquoi? parce que c’est le fonds plutôt que lu per
sonne qui doit.
Il n’en est pas de même en matière de vente, ni même
en matière de bail à rente, lorsque l’obligation person
nelle est join te, comme lorsque le preneur s’est soumis
à garantir, fournir et faire valoir. En ce cas on n’est pas
reçu à déguerpir, parce que c’est la personne qui est
obligée : mais cela s’entend toujours, invita creditore,
et non lorsque le créancier consent à reprendre la chose.
Mais si les mineurs Varagnes ne pouvoient déguerpir,
autorisés même par avis de parens, le sieur Rolland pouvoit bien demander le résiliment. L e privilège des mi
neurs ne s’étend pas à ne pas payer. La rente est cons
tituée , mais provenant de vente de fonds ; elle dérive
du prix de la vente. L e sieur Rolland avoit bien le droit
qu’a tout vendeur de demander le résilim ent, faute de
payement du prix : c’est ce qu’il a fait ; le résiliment a
été prononcé par la sentence de 1 7 56.
Les advei'saires cherchent à écarter cette sentence de
1756 -, ils soutiennent d’abord qu’elle a été évidemment
l ’effet de la surprise : rien ne le prouve m ieu x, disentils, que la condamnation des arrérages, pendant le temps
même que le sieur Rolland avoit joui. V oici les termes
de la sentence * elle condamne à -payer les arrérages de
la rente ju sq u 'il ce que le sieur R olland sera rentré
dans la pleine propriété. Que renferme cette disposition
d’injuste? La sentence a jugé que jusqu’au résiliment la
propxùété avoit continué de demeurer sur la tcte des hé
ritiers de Géraud V aragn es, et par conséquent la charge
�(
7
)
du payement de la rente, sauf à faire compte des jouis
sances; que jusque-là le sieur Rolland n’avoit eu qu’une
jouissance d’administration. Y a-t-il rien là d’extraordi
naire ?
Que les adversaires s’accordent avec eux-mêmes. Ils
soutiennent que l’abandon par eux fait du domaine n’a
pas été une cause suffisante, un titre suffisant pour au
toriser le sieur Rolland à se mettre en possession, encore
moins pour lui transférer la propriété. S’ils ont retenu
la p ro p riété, ils ont donc pendant ce temps continué
de demeurer débiteurs du prix , et par conséquent des
arrérages de la rente, sauf, encore une fois, à leur faire
compte des jouissances.
Les adversaires ajoutent ensuite que cette sentence étoit
susceptible d’appel; qu’elle pouvoit être attaquée encore
par la voie de l’appel en 1773, suivant la jurisprudence
d’alors d’admettre l’appel pendant trente ans ; et qu’il
sufïisoit qu’elle fût susceptible d’appel, pour motiver la
transaction.
Antoine Varagnes, disent-ils, avoit bien interjeté appel
de la sentence de 1768, appel qui avoit été déclaré pé
rim é; mais cette senicncc do 1768 n’avoit rien de com
mun avec celle de 1756. La sentence de 1768 n’avoit pas
pour objet de faire déclarer les précédentes exécutoires
contre les Varagnes, puisqu’elles étoient rendues contre
eux-mêmes ; le but très-clair de la demande étoit d’ob
tenir le payement de la somme de 1246 francs, montant
du bail à rabais des réparations de la grange. (1) L ’appel
(1) Si le sieur Rolland n’avoit eu en vue que d’obtenir la
�. ( 8 )
interjeté par Varagnes, delà sentence de 1768, ne touclioit
en rien au bien ou mal jugé de la sentence de 17 56. L a
péremption de cet appel pouvoit bien donner à la sen
tence de 1768 la force de la chose jugée, mais non à la
sentence de 1756, qu’Antoine Varagnes étoit toujours à
temps d’attaquer.
O n a déjà répondu que l’appel de l ’une emportoit
nécessairement et virtuellement l’appel de l’autre : ou, si
l’on veut, la sentence de 1768 déclarant exécutoire sans
restriction la sentence de 1706, c’est comme si, longiori
enarratione, elle en avoit rappelé toutes les dispositions.
E t maintenant de deux choses l’une ;
O u l’appel n’avoit trait qu’aux condamnations pécu
niaires prononcées par cette sentence, ou il étoit indé
fini. A u premier cas, la sentence acquéroit nécessaire
ment , quant au surplus, l’autorité de la chose jugée ;
condamnation de la somme cle 1246 fran cs, pour le prix du
bail à rabais, il se seroit borné à demander la condamnation de
cette somme; il n’avoit pas besoin de demander que la sentence
de 1766 et la sentence de 1763 fussent déclarées exécutoires.
Il est à observer que la sentence de 1766 ne porte point la con
damnation de la somme de 1246 francs.
La demande est générale, suivant l’usage abusif où étoient
alors et où sont encore quelques praticiens, de faire déclarer
exécutoires contre le mineur parvenu à la majorité, les sentences
obtenues contre le tuteur et le curateur.
Le but principal n’étoit pas d’obtenir la condamnation des
sommes, puisqu’il n’a fait ensuite aucunes poursuites, pas même
fait signifier un commandement ; mais de faire prononcer irré
vocablement la résolution.
on
�( 9
)
on sait que l’appel en un clief emporte acquiescement
aux autres chefs : au second cas , l’appel a été déclaré
péri, (i) Dans tous les cas, la sentence de 1 7 55 n’étoit
plus susceptible d’appel.
Nous avons dit qu’Antoine Varagnes eut été encore
non recevable dans son appel, i°. parce que celui qui a
renoncé à une succession, et qui ensuite se porte h é r itie r ,
est ob ligé de prendre les choses en l’état qu’elles sont ;
-2°. parce que la résiliation une fois prononcée, il u’auroit pas été reçu à vouloir rentrer dans la propriété,
même en faisant des offres, suivant la jurisprudence at
testée par Chabrol.
Les adversaires observent que Chabrol ne parle que
de rentes foncières ; qu’ici il s’agit d’ une rente constituée;
que s’agissant d’une rente constituée, il auroit fallu cinq
années d’arrérages, au moins trois ans, en l’assimilant même
à une rente foncière; qu’ici il n’y avoit que six mois d’arré
rages ; que pour que la résolution soit légale, il faut que
(1) La note par laquelle on prétend prouver que la copie de
la demande e n péremption n’a pas été re m ise , d où on veut
inférer la nullité de la sentence de péremption, ne prouve pas
cela. Ces mots , Je ne dois retenir que cinq sous , prouvent
tout au plus que l’huissier n’a pas reçu le salaire ordinaire pour
son transport, comme il arrive très-souvent, lorsque les huissiers
ont occasion de poser plusieurs exploits dans le même endroit;
ils ne font point payer un transport pour chaque exploit. L ’huis
sier peut encore n’avoir voulu prendre que 5 sous pour quel
que motif de considération. Et ce qui doit écarter la consé
quence que les.Varagnes veulent en tirer, c’est l’enlèvement
de la troisième ligne, la coupure du papier.
B
�( 10 )
la sentence porte un délai; que ce n’est qu’après ce délai
que la demeure peut être purgée; qu’ici la sentence ne
portait aucun délai ; que le sieur Rolland père a mis
par son propre fait les mineurs Varagnes dans l’impossi
bilité de payer.
N ’est-ce donc qu’en matière de bail à rente que le résiliment, faute de payem ent, peut être demandé? L e ven
deur n’a-t-il pas ce droit comme le bailleur à rente ?
L e résiliment n’a pas été prononcé seulement à défaut'
de payement des arrérages échus de la renie, mais bien
plus par le refus de la continuer à l’aven ir, par l’aban
don absolu du domaine; et c’est ce que les adversaires dis
simulent perpétuellement.
Antoine Varagnes a même renoncé à la succession.
L e domaine étant abandonné , il n’y avoit pas lieu à
accorder un délai pour le payement.
Mais la sentence avoit passé incontestablement en force
de chose jugée, et étoit inattaquable relativement à M a
rianne Varagnes qui y avoit acquiescé (i).
Venons maintenant à la transaction de 1773*
Les droits des mineurs Rolland eussent-ils été incer
tains, le tuteur p o u vo it-il transiger sur des droits im
mobiliers ?
Les adversaires présentent un compte dans leur mé
moire , d’après lequel ils soutiennent que la transaction
a été avantageuse aux mineurs Rolland ; qu’ils y ont gagné >
(1) On ne s'occupe point de la demande en subrogation dont
Antoine Varagnes menaçoit le tuteur ; demande trop évidem
ment ridicule.
�( 11 )
une somme de 9000 francs par la compensation des
jouissances.
O n pourroit d’abord répondre que le mineur est pré
sumé de droit lésé, par cela seul qu’il aliène : M inor
alienando lœditur. Mais de plus les intérêts des appel a11s
ont été même sacriliés dans cette compensation de jouis
sances.
On a vu en quoi consistait le prix du bail; on n’a
pas prétendu qu’il fût frauduleux; il a été consenti par
acte public , en présence du curateur et du mineur éman
cipé; il n’a point été augmenté pendant la durée de la
jouissance du sieur Rolland père; on a vu qu’il s’en falloifc
annuellement de 364 francs, que le prix du b a il, déduc
tion faite des charges, égalât le revenu du prix delà vente.
La jouissance du sieur Rolland père a duré vingt-un
ans.
Produit du bail pendant toutes ces années,
3066f.
Montant de la rente pour les mêmes années, i o 5oo
Différence au préjudice du sieur R olland,
7434f.
A jo u to n s à cette somme celle de 1737 fra n c s , montant
des condamnations pécun iaires prononcées par les sen
tences de 1753, 1756 et 1768, en principal, et les intérêts
de ces sommes montant ensemble h plus de 2300 francs,
On verra que les appelans, loin de gagner 9000 fr.
sur les jouissances, sont en perte de plus de 9734 francs.
Et qu’on ne dise pas que c’est un calcul fait à plaisir.
O11 a offert, et on oirre de nouveau, de faire compte
des jouissances sous la déduction des charges, à la charge
B 2
�( 12 )
par les adversaires de faire compte de la renie. Qu’ils
acceptent ces offres!
Ils prétendent que la compensation des jouissances a
été si avantageuse aux mineurs Rolland. Les mineurs
Rolland renoncent à cette compensation.
C’est ainsi que le tuteur et les conseillers de tutelle
se sont acquittés du devoir que la loi leur imposoit!
Si on ajoute toutes les autres circonstances qui décè
lent le dol et la fraude qui ont présidé à cette transac
tio n , la cour p o u rra-t-elle se défendre d’un sentiment
d’indignation?
Les appelans se sont-ils pourvus en temps utile ? R é
sulte-t-il conire le sieur Rolland une fin de non-recevoir
des quittances de 1778 et 1782? Telles sont les deux
questions qu’il reste à examiner.
Sur la prem ière, on a ramené les adversaires à la dis
tinction entre le cas où le mineur vend assisté de son
tuteur ou curateur, et le cas où c’est le tuteur seul qui
vend. A u premier cas, le mineur ayant contracté luim êm e, n’a que dix ans pour x-evenir contre l’acte qu’il
a consenti : au second cas, le mineur a trente ans, à
compter de sa majorité. Il n’a pas en ce cas besoin de
se faire restituer. L ’acte est n u l , -parce q u ’il n’y a pas
de plus grand vice que d’être consenti par celui qui n’a
pas p ou voir, à non habente poiestatem. O r , le tuteur,
en ce qui excède les bornes d’une administration, n’a
pas de pouvoir.
Les adversaires conviennent de la distinction à faire
entre les actes des m ineurs, et ceux de leur tuteur ; ils
�\
( 13 )
conviennent qu’il seroit souvent injuste de déclarer les
mineurs non recevables après dix ans, à l’égard des actes
faits par leur tu teu r, parce qu’il se pourroit qu’ils en
eussent ignoré l’existence ; mais ils ajoutent que toutes
les fois qu’il est certain que le mineur a connu l ’acte,
toutes les fois surtout qu’il l’a adopté , en quittançant
partie du p r ix , il n’a qu e dix ans.
Dans ce système même, les dix ans ne pourraient courir
que du jour qu’il seroit prouvé que le mineur a eu connoissance de l’acte. Rien ne prouve que le sieur Rolland
ait eu connoissance de l’acte avant la première quittance
qu’il a consentie. La quittance est du 27 juillet 1788, et
la demande est du 25 février 1788 : il s’est donc pourvu
dans les dix ans qu’il peut être présumé avoir été ins
truit de l’acte, et par conséquent dans un temps utile,
d’après les adversaires eux-mêmes.
Il est de principe que la prescription ne court point
contre celui qui ne peut agir : Contra non valentem agere
non currit prœscriptio. Les appelans ont opposé q u e ,
dans tous les cas, le délai n’avoit pu courir que à die detectœ frciu d is, du jour où ils ont pu avoir connoissance
des pièces qu’on a affecté infidèlement de ne pas mention
ner dans la transaction, remises plus infidèlement encore
p a rle tuteur à Antoine Varagnes.
Suivant les adversaires, on n’a riencaché, rien dissimulé.
L ’omission supposée de la sentence de septem bre 176 6 ,
n’est qu’une misérable équivoque ; elle est d’ailleurs visée
et énoncée dans celle de 1768 , laquelle est rappelée dans
la transaction.
Mais les appelans n’avoient pas plus la sentence de 1768
que celle de 1756.
�( *4 )
L a sentence de 1768 est rappelée dans la transaction!
mais comment est-elle rappelée ?
Remettons sous les yeux cette partie de la transaction,
cc 30. Que dès l’année 1756 ledit Rolland a fait pro« céder au bail à rabais des réparations à faire audit do« maine de Fleurac...........
« Que le 23 décembre 1767 ledit feu sieur Rolland a
« demandé , tant l’adjudication de ladite sentence que les
« frais et dépens à lui adjugés, ensemble le montant du
« bail à rabais, et obtenu sentence au bailliage de celle
« ville le 20 février 1768 , de laquelle ledit Varagnes
« s’étoit rendu appelant, et la sentence passée en force
« de chose jugée, comme ledit Varagnes n’ayant pour« su iv i, ni fait diligence sur son appel pendant trois ans
« consécutifs. »
A v e c quel art on a affecté, en parlant de la sentence de
175 6 , de ne rappeler la date ni du m ois, ni du jour!
Quand môme les appelans auroient eu sous les yeux la
sentence de 1768, que leur auroit-elle appris? elle leur
auroit appris qu’il existoit une sentence du 29 septembre
175 6 . Ils auroient cru nécessairement que c’étoit celle rap
pelée dans la transaction, adjudicaiive du bail à rabais.
Ils n’auroient pas pu soupçon n er q u ’il en existoit deux de
la même année, puisque la transaction et la sentence de
1768, n’en rappeloient qu’une.
O n parle du bail à rabais ; on ne dit pas un mot de la
résolution de la vente; on rapporte la sentence de 1768,
uniquement au bail à rabais, et aux autres sommes dues
au sieur Rolland.
A la vérilé, à la fin des dires de Varagnes, on voit
�( i5 )
qu’il étoit recevable à tenir les engngemens de son père,
dans la circonstance surtout où la sentence q u i ordonne
la résolution de la vente rienlève cette fa cu lté qu après
trente ans.
On ne rappelle ni l’époque de cette sentence, ni par
quel juge elle a été rendue : on ne dit pas même qu’elle
ait été obtenue ; il semble que c’est plutôt un principe
qu’on pose. On ne dit pas surtout que cette sentence,
renouvelée par celle de 1768 , avoit passé en force de
cliose jugée par celle de 1772.
On parle de l’appel de la sentence de 1768, delà péremp
tion de cet appel ; mais on fait rapporter, et la sentence
de 1768, et la pérem ption, aux réparations seulement.
L e traité avec Marianne Varagnes est rappelé. Mais
comme on évite de parler de la résolution de la vente,
de l’acquiescement de Marianne Varagnes ! on se con
tente de dire vaguement que le sieur Rolland a réglé avec
elle.
La circonstance seule de la remise des pièces annonce
le projet formé de dérober aux mineurs la connoissanco
de tout ce qui pouvoit les instruire de leurs droits.
En même temps elle écarte la fin de non-rccçvoir ( en
supposant même qu’il eût fallu se pourvoir dans les dix
ans) résultante du laps de temps.
La seconde fin de non-recevoir résultante des quittances
de 1778 et 1782 n’est pas plus plausible.
O11 ne reviendra point sur la discussion à laquelle 011
s’est livré à. cet égard.
O u a cité la loi 7 , paragraphe S c io , au digeste D û
�( i 6 )
minoribus. C ’est dans cette loi que sont ces mots initio
inspecta , qui ont tant exercé les commentateurs.
Cujas distingue entre le cas où l’acte passé en minorité
est complet et parfait, et le cas où il n’est que commencé
en minorité , et parachevé, et rendu parfait en majorité;
auquel dernier cas il est considéré comme s’il avoit été
entièrement fait en majorité.
Lebrun fait la même distinction. « J ’estime , ce sont ses
a propres paroles , qu’il faut distinguer entre une affaire
« q u i, ayant commencé pendant la minorité , s’achève
« depuis la m ajorité, et une qui s’est accomplie sous la
a m inorité, et qui a été ratifiée en majorité. »
Il cite ensuite l’exemple rapporté par Bartliole, et les
expressions de Bartliole : Ciim ergo habeat necessariam
consequentiam ad principium , inspicimus principium.
Les adversaires prétendent que c’est à ces derniers ter-^
mes qu’il faut s’attacher, à cette seule distinction, si le se
cond acte est une suite nécessaire du premier.
Mais on le demande : des quittances qui sont consenties
en exécution d’un acte, ne sont-elles pas une suite et une
conséquence de l’acte ? ne se réfèrent-elles pas nécessaire
ment à l’acte ?
Ils observent, com m e une rem arqu e importante , que
les appelans en adoptant la distinction entre le cas où l’acte
passé en minorité est complet, ou ne l’est pas, s’appro
prient la transaction de 1777.
Pourquoi cela ?
Est-ce qu’ un mineur devenu majeur, qui aura consenti
un second acte relatif à celui de son tuteur , n’aura pas
le
'
�( *7 )
le même droit qu’il auroit lui-m êm e, s’il l’avoit passépersonnellement en minorité ? Il est bien plus favorable
sans doute , lorsque cet acte n’est pas de son fa it, et il ne
suit pas de là qu’il se l’approprie.
Mais toute cette discussion est inutile. A cette lo i, quelle
qu’elle soit, a succédé la loi au code S i sine décréta , qui
form e le dernier droit. Cette loi exige une ratification ex
presse , et en comioissance de cause.
Telle' est également la doctrine de D um oulin , qui en
rend la raison en ces termes énergiques : R a tio quia liujusntodi conjirrnatio n ihil d a t, n ih il novi ju ris co n fe r t,
nec invaliduni validai ; non enim Jit ad fmern disponendi , sed soliitn approbandi confirmabile taie quale
e s t, et non aliter.
Les adversaires répondent singulièrement ù cette loi.
A u lieu de citer la loi S i sine décréta, disent-ils, qui ne
peut s’appliquer que par argument à contrario, on auroit
du voir la loi 10, au digeste D e rebus eorum qui sub
tutehî sunt sine décréta alienandis. Comment une loi
précise, rendue expressément sur la question, ne peut-elle
être prise que par argument à contrario? C ’est cc que les
adversaires auroient dû exp liq u er.
Ils laissent là cette loi pour venir à la loi D e rebus
eorum , qu’ils ne rapportent qu’en partie.
I.a voici littéralement :
Illicite post senatusconsullum p u p illivcl adolescentis
prœdio venurn data s i eo nomme apud judicem tu telce,
vcl utilis actionis œstimatio facta est, eaque so lu ta ,
vindicatio pretii ex œ quilate inhibetur.
Ce n’est point la glose, c’est la note de Godefroi q u ir'
C
�Ci8>
dit : N o 7i tam asperè tractandum ju s prohibítœ aliénationis prœdiorum pupillarium , ut et solutâ œstirnatione
à tutore in emptorem pupillus siumno jure experiatur.
On voit combien Godefroi étoit lui-m êm e embarrassé
sur le sens de cette l o i , par les questions qu’il se fait.
Dans l’espèce de cette loi, dit-il, est-ce le tuteur qui vend
en son nom propre et privé, ou comme tuteur? Et plus
bas : C u i inhibetur, an p u p ü lo , an tutori? utique tutori. Cur inhibetur ? an quia sine solernniiatibus ven
d í dit ? an quia pi'otinùs recepit ?
L a glose donne le vrai sens.
Illicite, ( casus ) prœtori f u i t mentitum per tutorem
T itii pupilli : dictum pupillem esse in magnis debitis;
et sic prœtor perm isit alienationem prœ dii prœdicti
pupilli. Undè potest pupillus vindicare prœdium ? A b
emptore, vel contra tutorem actione tutelœ agere.......
P o n e ergo quôd egit una de illis actionibus , et ille
contra quem egit f u i t condemnatus in œstimationem
p rœ d ii, et ipse eam solçit p up illo, certè non poterit
amare pupillus vindicare prœdium.
L a glose, en interprétant cette lo i, décide qu’elle ne
s’applique que dans le cas o ù , après une vente illicite
faile par le tuteur, il surviendi-oit un procès entre le
pupille et l’acquéreur; mais que si l’acquéreur a été con
damné à payer le prix de l’estimation, et que le pupille
l’ait reçu, alors il ne peut plus revendiquer l’héritage.
Quelle analogie peut-on trouver entre cette espèce et
l’espèce actuelle ?
Dans l’espèce de cette loi, la vente manquoit seulement
par le défaut de formalités j on ne l’inculpoit point de
dol.
�Dans l’espèce de cette lo i, les deniers avoient été reçus
après un procès, après une estimation, et par conséquent
en connoissance de cause; et ici peut-on dire que le sieur
Rolland a reçu en connoissance de cause ? connoissoit-il
le dol qui avoit été pratiqué? connoissoit-il les pièces
qui n’avoient point été mentionnées dans l’acte qualifié
transaction, et qu’on avoit remises à Antoine Varagnes?
Les adversaires ne répondent pas moins singulièrement
ù l’autorité de Dum oulin : ce passage, suivant eu x, ne
s’applique qu’aux^ actes radicalement nuls, et non à ceux
simplement sujets à restitution.
La transaction dont il s’agit n’est-elle donc qu’un acte
sujet à restitution ? l’acte n’est-il pas nul de nullité radicale?
L e tuteur qui vend les immeubles du m ineur, sans obser
ver les formalités prescrites par les lois, est sans pouvoir :
l’acte est radicalement nul, comme consenti à non habente
potestatem.
On voit l ’embarras des adversaires.
Dans tous les cas, cette fin de non-recevoir ne peut
être opposée à la dame Gros qui n’est point partie dans
ces quittances, ni au sieur Rolland pour les portions de
ses frères, dont il a acquis depuis les droits.
L ’arrèt de la cour de cassation, du 4 thermidor an 9 ,
rendu dans la cause de Marie Bordenave, dont les adver
saires ont fait soigneusement la recherche , ne reçoit abso
lument aucune application.
Les parties étoient en pays de droit écrit. L e testament
par lequel M arie Bordenave avoit été instituée héritière
lui donnoit la totalité des biens. Ici, au contraire, le tes
tament ne valoit que pour le quart.
�(
20
)
L ’institution en pays de droit écrit étant universelle,
toutes lés actions actives et passives résidoient sur la tête
de l’héritier institué. La légitime devoit à la vérité être
laissée à titre d’héritier; mais c’étoit un titre particulier,
un titre d’honneur : toutes les actions ne résidoient pas
moins sur la tête de l’héritier universel; lui seul étoit
l’homme de la succession : principes qui n’avoient pas
lieu en pays de coutume, où le testament ne valoit que
pour le q u a r t, où l’héritier institué par le testament n’est
qu’un véritable légataire, où l’on ne reconnoît d’héritiers
que ceux que la loi appelle comme tels.
Dans l’espèce de l’arrêt, Marie Bordenave avoit vendu
elle-même; elle avoit vendu seule : les sœurs n’avoient
point été parties dans la vente. On étoit parti du principe
d’après lequel, lorsqu’un des cohéritiers aliène un héri
tage de la succession, on impute ù son lot l’héritage
aliéné : l’acquéreur lui-même peut demander cette im
putation ; et tant qii’il reste dans la succession assez
d’autres biens pour remplir les autres cohéritiers de
leurs portions, ceux-ci ne peuvent élever aucune que
relle. Mais ici la vente n’a pas été consentie par le sieur
R olland, elle a été consentie par le tuteur, par consé
quent pour tous les mineurs.
, ,
Lorsqu’un cohéritier a vendu seul un héritage de la
succession, s’il l’a mal vendu, il n’est pas moins tenu de
rapporter l’héritage à la succession, du moins fictive
m ent; c’est-à-dire, de rapporter la valeur : la perte du
mauvais marché tombe sur lui. Mais ici tous ont vendu :
tous ayant vendu, la perte est com mune; tous ont un
intérêt commua à attaquer la vente. On ne peut pas im
�(
21
)
puter l’objet vendu au lot d’un, puisque tous ont vendu.
Dans les motifs de l’arrêt de cassation il est dit : A t
tendu que M arie Bordenave, héritière universelle, a
ratifié ladite vente par la quittance qu’elle a donnée. D ’où
il résulte que la quittance contenoit une ratification ; et
les quittances du sieur Rolland n’en contiennent pas :
troisième différence.
L e domaine de Fleurac , disent les adversaires, est
situé en pays de droit écrit. Cela n’est point. L e domaine
est situé au village du même n o m , paroisse d’Ydes ; et
toute la paroisse d’Ydes est régie par la coutume. 11 n’y
a qu’à consulter à cet égard M . Chabrol, et le procès
verbal de la coutume.
En coutume, comme en droit écrit, les légataires sont
les maîtres d’accepter le legs porté par le testament! L e
sieur Rolland est encore en demeure d’établir que ses
frères et sœurs aient répudié le legs pour réclamer leur
légitime ou les réserves coutumières ! Ce n’est point au
sieur Rolland à prouver que ses frères et sœurs ont ré
pudié le legs ; c’est aux adversaires au contraire à prou
ver l’acceptation, s’ils veulent en exciper.
Les frères et sœurs n’avoient pas besoin de répudier
le legs; ils le répudioient par cela même qu’ils ne l’acceptoient point.
Il n’y a eu ni répudiation ni acceptation de leur part;
il n’y a eu ni payement de destination, ni partage. Ils ont
vécu dans la m aison, comme du vivant du p è re , aux
dépens de la succession commune.
Les quittances de 1778 et 1782 ne peuvent donc pas
nuire aux droits que le sieur Rolland a acquis posté-
�( 22 )
rieurement du chef de ses frères} comme représentant
ses frères, novam personam sustinet; novum ju s habuit:
encore moins peuvent-elles être opposées à la dame Gros,
q u i, comme on l’a déjà observé, n’y est point partie.
M e. P A G È S - M E I M A C ,
M e. D E V È Z E ,
avocat.
avoué licencié.
À RIOM, de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de
Cour d’appel. — Juin 1806.
la
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rolland, Pierre-Israel. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac
Devèze
Subject
The topic of the resource
déguerpissement
ferme
bail à rentes
minorité
tutelle
droit écrit
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Réplique pour sieur Pierre-Israël Rolland, Toinette-Gabrielle Rolland, et le sieur Gros, son mari, appelans ; contre Antoine Varagnes, et autres, intimés.
Table Godemel : Bail à rente : 1. la vente d’un domaine moyennant un prix déterminé pour lequel l’acquéreur constitue une rente, est-elle un bail à rente foncière qui laisse le domaine direct au vendeur, et qui, par suite, est susceptible de résolution et de déguerpissement ? Déguerpissement : 3. le preneur à vente qui, après plusieurs sentences prouvant la résolution du bail pour cause de non-paiement des arrérages, avait déguerpi les immeubles, a-t-il pu obtenir ensuite du tuteur des héritiers du possesseur actuel, sous l’apparence d’une transaction, l’abandon volontaire de ces mêmes immeubles et des droits des mineurs, moyennent un prix, sans aucune des formalités prescrites par les règlements ? Ratification : 3. en quels cas les quittances données par un mineur devenu majeur, constituent-elles approbation ou ratification de l’aliénation consentie par son tuteur ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1756-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1701
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1702
BCU_Factums_G1703
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53304/BCU_Factums_G1701.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ydes (15265)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail à rentes
Déguerpissement
droit écrit
ferme
minorité
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53305/BCU_Factums_G1702.pdf
8e3ddf41c2fc46b7b7938bd731370296
PDF Text
Text
MÉMOIRE EN RÉPONSE
POUR
sr
A ntoine
V A R A G N E , «et autres, intimés;
CONTRE
RO LA N D , T oi n e t t e -G A B R IE L L E
R O LA N D 3 et Le sieur GROS son m a ri , appelans.
P lE R R E -ISRA EL
- L e père du sieur Roland avait trompé les mineurs
Varagne et les avait dépouillés de tout leur patrimoine;
le sieur Roland et la dame Gros se plaignent aujourd’hui
de ce qu’ un Varagne les a trompés à son tour pendant
qu’ils étaient mineurs, et a repris ses biens. Si cela était
vra i, il faudrait remonter à la source et ne tromper
personne;mais ce n’est pas ainsi que les adversaires l’en
tendent; ils veulent bien rétrograder jusques avant la 2.®
époque, mais non jusqu’à la première, c’est-à-dire,qu’ils
v eulent retenir ce que leur père avait pris. A la vérité
ils sont obligés de convenir que son usurpation n’était
A
�' *
r
'
( 2 }
.
.
pas la cliose du monde la plus solide; mais au moyen
de quelques prescriptions et péremptions ils espèrent la
légitimer. 11 faut croire au contraire qu’une œuvre d’ini
quité et de ténèbres ne prévaudra pas cônlreuuetransaclion sage et prudente qui en efïaçait la turpitude; et la
publicité même que les héritiers Roland ont voulu
met Ire à cette cause, ne prouvera que mieux h la Cour
qu’ils n’avaient pas mûrement réfléchi, quand ils ont
voulu blâmer ce qu’avait délibéré leur famille, pour cou
vrir le passé et leur rendre justice.
F A I T S ,
L e 18 septembre 1 7 4 7 , le sieur Pierre Roland avait
vendu à Géraud Varagne un domaine appelé de Fleurac, mo}rennant 12,000 francs. Il fut dit que Varagne
.demeurait quitte du prix, au moyen de ce qu’il créait
et constituait au profit du sieur Roland une rente de
5oo fr. par année, payable en deux termes, jusquesau
remboursement des 12,000 fr.
Géraud Varagne mourut en 1762 , laissant trois enfans
mineurs, Antoine, Marianne et Sébastien.
J 1avait payé la rente de 5 oo fr. avec la plus grande
exactitude', et on serait hors d’état d’établir qu’il eût
laissé pour un sou de dettes. Ses enfans devaient donc
CMre'à l’abri de riuquiétude.
Mais Je"sieur Roland icgrettait singulièrement le
domaine de Fleurac qu’il avait vendu, disait-il, à trop
bas prix , et que le bon étal où l'avait mis l’acquéreur
�lui faisait encore envier davantage. L a mort de cet ac
quéreur- lui fournil le prélexte de se remettre en pos
session en expulsant ses enfans. Abandonnés de tout le
monde, ils ne pouvaient l’en empêcher, et d’ailleurs ils
n'ont jamais été informés des diligences"cju’il pouvait
faire; c'est seulement après sa mort et par la remise
qu’on leur a faile de ses procédures, qu’ils ont connu
celles dont ils vont rendre compte.
L e sieur Roland fit nommer un tuteur aux deux
puinés; et comme Antoine Varagne avait déjà 16 ans,
il le fit émanciper, c’est-à-dire, on présenta sous son
nom une requête au juge de Fleurac , le 20 décembre
1 7 0 2 , pour demander son émancipation (1).
Après cela, le 16 février 1 7 5 3 , le sieur Roland as
signa ledit Antoine Varagne et le tuteur de ses frère et
sœur, pour lui payer s 5o fr ., la seule somme à lui due
pour le terme d’une demi-année de sa rente, échue
depuis La mort de Géraud Varagne.
Une sentence par défaut, obtenue le i .er mars 17^3,
adjugea ces conclusions, el condamna les mineurs à dé
clarer de suite s’ils entendaient ou non être héritiers
de leur père.
Celte sentence était sans doute bien inutile pour mo
tiver l’ usurpalion du domaine , et le sieur Roland le
sentit bien. Il chercha à persuader Antoine Varagne
( 1 ) Ainsi il n’était pas marié avant la mort de son père , et
émancipé par le m a ria g e , comme le disent les adversaires à la
iin de la page 1 7 de leur mémoire.
A 2
�( 4 )
qu’il n’avait pas d’intérêt à conserver un bien où il pas
serait sa jeunesse pour partager ensuite son industrie
avec deux enfans en bas âge; un jeune homme de
dix-sepl ans n’est pas bien difficile à séduire. Deux cents
francs que le sieur Holand lui promit, achevèrent de lui
tourner la tête: il promit tout ce qu’on voulut.
En conséquence' le 24 mars 1 7 6 3 , le sieur Roland
assembla cinq cullivateurssous le litre d’une assemblée
de païens, auxquels le jeune Varagne représenta, à ce
qui y esl dit, que le domaine de Fleurac lui serait plus
onéreux que profitable, que sou père l’avait acheté
Irop cher, n’avait pas même pu payer les droits de lods ,
qu’à la vérité il avait acquitté la ren ie, mais que c’élait
en contractant plusieurs dettes passives, et que son père
en avait conçu un v if c h a g ru i , qu’il croyait avoir été
cause de sa mort, que même , en m ou rant , lL Lui avait
conseillé de supplier le sieur R o la n d de reprendre son
dom aine ,\ d’après quoi il voulait suivre ce conseil, et
renoncer à la succession de sondit père.
Après cet acle de piété filiale, dans lequel le souf
fleur se fait assez remarquer, il élait question de pren
dre l’avis de trois païens paternels et trois maternels
qui avaient clé assignés la veille 5 leur délibéralion ne
doit pas êlre passée sous silence.
Les trois pareils maternels volent pour tout ce qui
est demandé, c’est-à-dire, l’abandon et la répudiation,
quoique l'un lût l’opposé de l’autre; mais le sieur
.ilolaud avait voulu loul prévoir.
Des trois parens paternels, l’un ne vint pas, parce
�que, dit-on , il était malade; les autres deux,, indignés
de ce qui se passait, et ne voulant pas participer à
l’expoliation de leur neveu , déclarèrent q u iis n e n
tendaient pas qu’il abandonnât Le dom aine , n i q u il
répudiât. Cette réponse est consignée en l’acte.
Cependant le juge, considérant que les parens ma
ternels étaient en plus grand nombre, homologua la
délibération desdils trois parens maternels, et homo
logua même celle du curateur qui n’avait rien dit.
Comme Antoine Varagne avait bien rempli son
rôle , le sieur Roland lui donna le lendemain , non
pas précisément la somme promise, mais un billet de
200 fiancs, payable dans huit ans seulement, c’està-dire , à sa majorité , aiin que si alors il voulait
se pourvoir, le sieur Roland pût au moins sauver
l ’argent.
Muni de cette homologation, le sieur Roland crut
en avoir assez fait pour mettre son usurpation en évi
dence , et par acte du 27 avril 1 7 5 3 , il donna à ferme
à un é t r a n g e r le domaine de Fleurac ; et, s’il faut en
croire les adversaires, il poussa le nim ia p reca u iio ) usqu’à faire signer comme tém oins , le curateur et le
mineur de dix-sepl ans.
Cependant le sieur Roland ne pouvait se dissimu
ler qu'il avait fait une mauvaise procédure, et que
les pupilles Varagne, n’étant pas même nommés dans
l’avis des trois parens , auraient un jour à réclamer
conlre lui des restitutions de jouissances; il s’agissait
donc de porter remède à ce danger. Depuis plus de
�trois ans il était en possession du domaine, et avait
Irouvé tout en bon état ; mais une vieille grange
lui sembla un prétexte suffisant pour ce qu’il avait à
faire.
L e tuteur étant mort,, le sieur Roland en fit nom
mer un second le 24 mars 1 7 56 , et présenta une re
quête dans laquelle il exposa que les enfans Varagne,
ayant déserté le domaine , avaient laissé le tout en
très-mauvais élat ; qu'il avait été forcé de préposer
des gens pour la culture, afin d’éviter le dépérisse
ment ; que le nouveau tuteur ne prenait non plu s' aucun
soin pour jouir du domaine.
En conséquence il demanda permission d’assigner
Antoine Varagne et le tuteur, savoir au provisoire
pour faire constater Yétat de la g ra n g e, procéder au
bail à rabais des réparations, et au fonds , pour voir
dire que la vente de 1747 serait résiliée, et qu’il serait
autorisé à reprendre la propriété d u d it dom aine , et
aussi pour être condamnés à payer la rente de 5 oo f .
j u s q u à ce. qu’il sera rentré en ladite propriété.
L e 5 mai il obtint une sentence provisoire qui lui
permit de faire c o n s t a t e r les r é p a r a t i o n s • et aussi pro
digue de formalités p o u r cette inutile précaution, qu’il
en avait été avare en s’emparant de tout, on compte
dix-neuf pièces de procédure, ailiclies 011 exploits entre
sa requête, et une sentence du i .cr juin qui adjugea
le rabais à 1,246 fr.
#
Ces réparations, comme on le vo it, n’avaient été
nécessaires que pour un seul des bditimens, et il était
�(?)
8
>
V
singulier qu’après trois ans d’usurpa(ion, le sieur Roland
s’avisât de s’en prendre aux Varagne qui n’avaient joui
que de 17 4 7 à 1752.
Quoiqu’il en soit, après cette sentence provisoire,
le sieur Roland en obtint une seconde le 29 septem
bre 17 5 6 , qui, adjugeant les singulières conclusions
de sa requête, déclara la vente de *747 résolue, lui
permit de rentrer dans la propriété, et condamna les
Varagne au paien^nt des arrérages ju s q u ii six rentrée.
Cependant les collecteurs, plus justes que lu i, s’obs
tinaient à ne pas vouloir changer la cote d’impositions,
malgré son bail à ferme et sa nouvelle procédure ; en
conséquence, avant de laisser terminer le répartement
de 1767 ^ le sieur Boland présenta une requête à l’in
tendance pour se plaindre de cette insubordination ;
et comme il avait une charge à privilèges, il demanda
une cote d’oüice, modérée suivant le produit du bien,
qui à peine s’élevait, disait-il, d'après son b a il, à cinq
cent cinquante francs : aveu , qui, en matière de sur
taux, où on n’exagère pas, fuit assez voir combien
peu Varagne, cultivant par ses mains, avait dû être
grévé en payant 5 co fr.
Sans doute, Antoine Varagne , devenu majeur, no
voulut pas accéder aux propositions qui lui furent
faites ; car le 23 décembre de la môme an n ée, le
sieur Roland le lit assigner, ainsi que le tuteur, pour
voir déclarer les sentences du i . er mars 17 6 3 et 29
septembre 1756 rendues contre eux-m êm es, en con
séquence, est - il dit, se voir condamner à payer,
�( 8 )
1.° 2 5 o fr. portés parla première, et 33 fr. de dixième;
2.° 1,246 fr. pour le montant du bail à rabais. L e 20
février 1768 , il surprit une sentence adjudicative.
Varagne en interjeta appel.
Cet acte imprévu dut déconcerter le sieur Roland,
qui sans doute chercha à renouer l’accommodement,
et à gagner du teins. Ce qui le prouve, c’est que na
turellement le plus pressé, parce qu’il était créancier
et demandeur, il se contenta de se présenter le 19
avril 17 6 8 , et garda le silence pendant trois ans.
Après celle époque, il dressa le 18 juin 1 7 7 1 un
exploit de demande en péremption , et il est démontré
par écrit qu’il n’y eut pas de copie remise, 011 si on
veut que l’huissier ne la donna pas. Aussi ne fut-il
pas difficile au sieur Roland , de surprendre , le 28
août 1 7 7 2 , une sentence par défaut qui déclara l’ap
pel périmé. Mais cette péremption, comme on voit,
était peu importante, puisque la sentence de 1768
ne portait que des condamnations pécuniaires, et
ne disait rien de la résolution, déjà prononcée en
17 5 6 . '
A peine Marguerite Varîigne fut-elle majeure , que
le si eu r Roland , toujours inquiet sur sa procédure,
chercha à obtenir d’elle un acquiescement aux sen
tences, et par acte du 16 février 1 7 7 3 , il paraît qu’il
lui extorqua cet acquiescement, sans prix.
L e sieur Roland mourut le 3 i juillet de la mémo
année, et toute la peine qu'il avait prise pour être
richo
�riclie ne l’empêcha, p a s, à ce que disent les adver
saires, de laisser des dettes. Il avait lait un testament
par lequel il instituait celui de ses en fans qui serait
élu par un conseil de famille.
Antoine Varagne ne redoutant plus le sieur Roland
mort, avait déjà annoncé qu’il allait interjeter appel
de la' sentence de 1756 , s’inscrire en faux contre
l’exploit de 1 7 7 1 , et réclamer les restitutions de jouis
sances de vingt-un ans, tant de son chef que comme
céda taire de Sébastien son frère, et même du chef
de Marianne sa sœur , en se faisant subroger.
Cette réclamation était si peu difficullueuse , que
le conseil de famille, composé des hommes les plus
éclairés, 11e trouva rien plus expédient que de rendre
le domaine , et de tâcher d’obtenir la remise des
jouissances.
En conséquence, Antoine Varagne traita le 3 o oc
tobre 17 7 3 avec le tuteur des enfans Roland, auto
risé du conseil de famille. Après l’exposé de ses pré
tentions , l’acte porte qu’il r e p r e n d r a le domaine
vendu en 17 4 7 , et que le p r ix pr in c ip al delà vente ( 1)
demeure fixé comme alors à 12,000 francs et 72 fr.
d’étrennes, Varagne paya de suite 2,472 fr. , et le
surplus fut dit payable à termes annuels de 1,600 fr.
et de 1,000 fr. sauf l’intérêt jusqu’au paiement. Au
moyen de quoi le tuteur remit à Varagne les pro( 1 ) L e s nppelans avalent dit renie, pag. 8 de leur mémoire:
erreur qui influerait sur les moyens de résolution.
B
�cédures et sentences , et le subrogea à l’acte passé le
16 lévrier précédent avec Marianne Varagne, à ses
risques et périls. Et comme le sieur Roland pouvait
avoir déjà démembré le domaine, le conseil de famille,
toujours prévoyant, fit stipuler, pour éviter les recours,
que s’il y avait des ventes au-dessous de 3 oo francs,
Varagne n’aurait rien à demander; mais que si elles
excédaient cette somme , il répéterait le surplus du
prix seulement.
En vertu de cet acte, Antoine Varagne se mit in
continent en possession de son domaine , et paya ré
gulièrement deux à-comptes au tuteur; dès la pre
mière quittance, on vérifia quelles ventes le sieur
Roland avaient passées, et elles se trouvèrent d’un
pré de trois journaux, et de partie d’un autre pré.
Comme les deux actes ne portaient de prix que 778 f.
Antoine V aragne, suivant sa convention, n’eut qne
478 fr. à déduire.
Bientôt le sieur Pierre-Israël Roland devint ma
jeur, et (ce qu’il ne disait pas jusqu’à ce que les V a
ragne l’aient découvert) le même conseil de famille
s’assembla le 4 décembre 17 7 7 pour l’élire héritier
universel de son père, à la charge de payer les légiiimes portées par son testament.
Ledit sieur Roland prit des arrangemens avec ses
frères et sœurs, en se mettant en possession de toute
la succession ; il s’obligea vraisemblablement à payer
leur légitime qui était assez considérable, et il avouo
aujourd'hui q u ’il les représente tous à l’exception do
la dame Gros.
�33
( n )
En 1 7 7 7 , il était échu un terme de 1,000 fr. sur
le traité de 1 7 7 3 ; et le sieur Roland, aussitôt qu’il fut
héritier, n’avait pas manqué, à ce qu’il paraît, de
prendre connaissance de cel acte. Car non-seulement
il demanda à Varagne le terme échu , mais il l’en
gagea même à avancer le terme suivant, pressé sans
doute d’acquitter les légitimes.
En effet on voit par quittance du 27 juillet 1 7 7 8 ,
que le sieur Pierre-Israël Roland , avocat en parle
ment , reçut d’Antoine Varagne 2,000 francs, savoir
1,000 fr. pour le terme échu à la Toussaint de 1777»
et 1,000 f r . par anticipation pour le terme a échoir
à la Toussaint de 17 8 8 , porté au traité passé devant
Le notaire soussigné, entre son tuteur, les conseillers à
la tutelle et ledit Varagne.
Dira-t-on que c’était Varagne qui s’empressait d’a
voir une ratification d’un majeur; mais elle 11’est pas
la seule ?
Quatre ans après, et lorsque le sieur Roland eut eu
le loisir de méditer l’actif et le passif de la succession
de son père, le surplus des 12,000 fr. était échu et
Varagne paya par quittance du 1 1 juin 17 8 2 , au d it
sieur R o la n d , avocat, la somme de 4,000 fr a n c s pour
tout reste et fin a l paiement du p r ix de la vente et
délaissement du domaine de Fleurac ayant appartenu
a u x auteurs d u d it sieur R o la n d , et délaissé audit
Varagne par traité reçu par le notaire soussigné, de
laquelle dite somme de 4,000 fr. ensemble d u p r ix
entier de ladite vente , ledit sieur R o la n d a promis le
fa ir e tenir quitte envers et contre tous.
�C 12 )
Antoine Varagne mourut, après avoir ainsi liquidé
sa fortune; il laissait sa veuve tutrice; et l’un de ses
fils, ayant clé marié , laissait aussi une veuve tutrice,
le sieur Roland trouvait là une bien belle occasion
pour marcher sur les traces de son père, et repren
dre ce qui ne lui appartenait plus. T.a crainte de trouver
de l'obslacle en son nom seul lui fit emprunter le
nom de ses frères et sœurs pour former sa demande,
et cacher soigneusement la qualité d’héritier universel)
dont il,avait cependant usé en prenant tout.le> prix
de la vente.
En conséquence, par requête du 2 5 février 17 8 8 ,
il fut formé demande devant le juge de Salers, en
nullité du traité de 17 7 3 , et désistement, à la requête
des sieurs Pierre-Israël Roland , avo cat/Jean -M arie
Roland , curé de Salers , Guy Roland , prêtre communalisle, Louis-Isiaël Roland, prêtre, et ToinelteGabrielle Roland , contre Catherine Lapeyre , en
q u a l i t é de tutrice des enfans d’Antoine Varagne père
son mari, Marguerite Chaumeil, aussi tutrice des enfans d’Antoine Varagne fils son mari, et Jean V a
ragne lils.
••
. Les Varagne qui ne voulaient pas plaidera Salers,
se laissèrent condamner par défaut le 10 juin 17 8 8 ,
et interjetèrent appel en la sénéchaussée d’Auvergre.
La cause fut appointée au conseil, et le sieur R o
land comprenant assez que sou système .d’envahisse
ment n’y ferait pas fortune , voulut se rendre un
peu moins défavorable. 11 reconnut qu’il avail mal
�( 13 )
à propos demandé le désistement total , et que Se
bastien Varagne aurait eu droit de rentrer dans le
domaine; en conséquence il se départit de sa demande _
pour un tiers. A l’égard des deux autres, il soutint
que son tuteur avait été trompé, et qu’après le traité
de février 1 7 7 3 , e lle s sentences de 1768 et 1 7 7 2 ,
Marianne et Antoine Varagne avaient perdu toute
p r o p r i é t é , de sorte que le traité de novembre 17 7 3
contenait une aliénation de biens de mineurs contre
laquelle .ces frères et lui pouvaient réclamer pendant
trente ans.
Mais les tutrices Varagne, pourrepousserces moyens,
firent des recherches dans les études de notaires , et
trouvèrent les quittances de 1778 et 178 2 , le testa
ment du sieur Roland père, et l’élection de 1777.
Ces pièces, jointes aux circonstances de l’acte do
1 7 7 3 , étaient si décisives que la sénéchaussée d’A u
vergne, par sentence rendue au rapport d e M .r Bidon,
le 3 septembre 17 9 0 , n’hésita pas à infirmer celle par
défaut de Snlers , et à débouter les sieurs Roland de
leur demande.
A leur tour les sieurs Roland ont interjeté appel
de celle sentence au parlement de Paris; ce n’est
qu’en l’an 10 qu’ils en ont repris les poursuites deVanl la Cour. 11 ne reste plus qu’à rendre compte
des moyens respectifs et à répondre à ceux proposés
pur les appelans dans leurs écritures et leur mémoire.
�( i4 )
MOYENS
.
L e système des appelons est, comme on le prévoit
sans peine , fondé tout entier sur l ’état des choses
subsistant avant la transaction de 17785 alors disentils aux Varagne , votre expropriation était légalement
consommée , vous deviez une rente foncière que vous
ne payez pas, ainsi il y avait lieu à résolution ; vous
avez déguerpi les biens, et vous le pouviez, quoique
mineurs , avec le décret du juge. Ainsi rien n’était
plus légitime que les sentences de 1 7 5 3 , 1756 jet
17 6 8 ; d’ailleurs c'était chose jugée h cause de la pé
remption prononcée en 17 7 2 contre Antoine Varagne,
et quant à Marianne elle avait tout approuvé par un
traité contre lequel il n’y avait pas lieu à retrait, dès
qu’il ne s’agissait que de résolution5 ni à subrogation
légale, puisque ce traité acquérait au sieur Roland
rem sibi necessarîam.
Si donc, disent les adversaires, nous étions proprié
taires incommulables en 1 7 7 3 , notre tuleur n’a pu
aliéner notre propriété sans formes et sans nécessité.
Nous nous sommes pourvus dans le lems, et les quit
tances du prix ne sont pas une approbation.
Quoique cet ordre de moyens soit une inversion de
questions, et que naturellement la première chose à
examiner dût être la fin de non recevoir , cependant
les intimés suivront cette série des moyens présentés
parles adversaires, puisque leur but est d’y répondre.
Ils examineront donc i.° si le sieur Roland avait re-
�2T
( i5 )
couvré la propriété du domaine de Fleurac, lorsqu’il
s’en empara en 17 5 3 ; 2.0 si au cas qu’il ne fut pas alors
propriétaire, il Test devenu par les sentences de 1 7 5 3 ,
1 7 5 6 , 1768 et 17 7 3 , et si elles étaient chose jugée
en 1 7 7 3 , tant contre Antoine que contre Marie V aragne; 3 .° si la transaction du 3 o octobre 17 7 3 était
une aliénation des biens des mineurs Roland; 4.0 si,
en ce c as, les adversaires se sont pourvus en tems utile;
5.° enfin si les quittances de 1778 et 178 2 produisent
une fin de non recevoir.
P r e m i è r e
q u e s t i o n
.
L e sieur R o/and pere avait-il recouvré la propriété
du domaine de Fleurac, lorsqu’il s’en empara en 17 5 3 ?
L e sieur Roland avait vendu ce domaine en 17 4 7 ;
ainsi sans difficulté Geraud Varagne en était proprié
taire à son décès en 1762.
Mais quelle était la nature de cet acte de 1747 ?car
de cet examen préaUible dépend la discussion relative
aux moyens proposés de déguerpissement et de réso
lution.
Souvenons-nous qu’en 1747 le sieur Roland avait
vendu un domaine moyennant 12,000 fr ., pour laquelle
somme l’acquéreur avait constitué une rente de 5oo fr.
Ainsi d’après les principes cet te rente n’était pas pure
ment foncière; c’était une simple rente constituée,
assise sur un immeuble avec privilège spécial.
�( 16 )
Par conséquent le bailleur n’avait pas retenu le do
maine direcl ;dèslors c’était une aliénation pure et simple
de sa part, ce qui changeait totalement le droit qu’il
s’est arrogé de s’emparer du'fonds, comme s’il 11’eût
délaissé que la propriété utile.
Cette différence à faire entre les ventes à charge de
rente constituée, ouïes baux à rente foncière, nous
est enseignée par les auteurs du nouveau Denizart au
mot arrérages: «-Unhéritage, disent-ils,peut être vendu
« moyennant une rente de telle somme, ou bien le prix
« de l’héritage peut être fixé d’abord à telle somme,
« et ensuite les parties convenir par le même acte que
« la somme formera le capital d’une rente constituée
« entre les mains de l’acquéreur. Dans le premier cas
« nuldouteque la rentenesoit foncière ; mais au second,
« la rente renferme une véritable constitution de rente
k à prix d’argent >3.
Sans doute cette opinion ne sera pas taxée d’innovalion; car on la retrouve dans Loyseau en son traité du
f
déguerpissement. «Toutefois,dit-il, en toutes ces renies
«• foncières, il y a une signalée précaution; et une re*• marque de grande importance , c’est quesi le contrat
« est fait en forme de vente , auquel le prix soit parti—
« cularisé et spécifié, pour lequel prix soit constitué
<r rente à lü suite du même contrat, alors, à bien en
te tendre, telle rente ne doit pas être estimée foncière,
« mais simple renteconstituée. (f. i. ch. 5 . n.° 14 e ! 17).
lie même principe est enseigné par Basnage sur l'ar
ticle 5^5 de Normandie, par I^othier au traité du contrat
�( i7 )
irat cîe consliluiion de rente, n.° 1 3 3 , par divers arrêts
de cassa lion de Fan 9 et l’an 1 1 , et par un arrêt de
la Cour de l’an i 3.
Cela posé, on ne voit plus où s’appuient les deux
moyens des adversaires, fondés sui\ ce que les enfans
Varagne avaient pu déguerpir le domaine, pour ne pas
payer la renie, et sur ce que, n e payant pas la rente,
la résolution était de plein droit après trois ans.
L e premier moyen ne semblait pas trop raisonnable,
parce que dans les faits ci-dessus rapportés, on ne voit
rien qui ail beaucoup d’analogie avec un déguerpisse
ment. Mais les adversaires prétendent que le simple
iait d’abandon du domaine équivaut dans l’espèce à
un déguerpissement , par la raison, disent-ils, que d'a
près L o y se a u , les mineurs peuvent aussi déguerpir
pourvu qu’il intervienne décret du juge pour le leur
permettre, après un avis de parens. Or, ajoutent-ils,
celle autorisation judiciaire se trouve dans la délibé
ration des parens qui avaient autorisé les mineurs à
abandonner le domaine et même à r é p u d i e r la suc
cession.
Erreur dans le fait et dans le droit.
Dans le fait ; car celte délibération n’autorisait pas
les m ineurs, mais l’émancipé seul; et loin d’être completle, on voil que les parens paternels eurent l’énergie
de s’ind igner hautement de ce qu’on méditait contre
un enfant, et que les parens maternels accédèrent seuls
à ce qui élait demandé.
Dans le droil ; car ce n’est pas celte délibération
C
�qui aurait produit un déguerpissement, elle y auto
risait seulement Témancipé, et cependant il s’en est
tenu h cette démarche, déjà même le sieur Roland
s’élait emparé du domaine; et quand il sollicitait une
répudiation, il est clair qu’il exigeait deux choses con
tradictoires, parce qu’ un déguerpissement était une
adition d’hérédité.
Un déguerpissement n’est pas un acte tellement sans
conséquence qu’il puisse avoir lieu par accord verbal,
car il est une aliénation, et non n udis pactis do min ici
trans/eruntur.
D ’abord il n’est pas très-cerlain qu’un tel acte soit
permis à des tuteurs, même avec le décret du ju ge;
la loi s’y oppose formellement; prœ dia vendu, v e l
i p s i s ca r b r e perm itti non dcbet , et si pcrm issuni s it ,
nulla est vend ¿tco, nullum que decretum. (L . si æs. fï.
de reb. eor. etc.)
Cependant admettons qu’ un tuteur puisse déguerpir
avec le décret du ju g e ; au moins faut-il, quand le
décret est intervenu , qu’il y ait un déguerpissement
formel.
Loyseau , invoqué par les adversaires, dit que le
déguerpissement doit être fait en ju gem en t, et pour
qu’on ne confonde pas celte expression, il ajoute,
cest-a-dire en L'audience de ju s t ic e , les p la id s tenant ;
a car, continue cet auteur, le respect ,1 a majesté du
« lieu où la justice est exercée, la présence des rna« gislrats, la fréquence des assislans donne à cet acte
« plus d'uutorité, parce que le déguerpissement est
«• un acte d'importance. ( Liv. 5.)
�( T9 )
Si donc il y avait cil lieu à déguerpissement, les
adversaires ne pourraient en invoquer aucun , car il
n’y en a d’aucune espèce. Mais ce n’élait pas le cas
dès que la renie n’élait pas foncière. Car, comme dit
Chopin sur l'art. 109 de la coutume de Paris, « en
« rente raclietable sous un principal exprim é, n’y a
« lieu à déguerpissement, cutn sit poliàs emptor, quàm
« conductor prelil vectigaiis ».
Opposera-t-on qne ces principes sont en faveur du
bailleur et non contre lui : mais dès que le déguer
pissement est une aliénation, il faut que le contrat
soit bilatéral ou synallagmatique, et jamais il ne sera
possible de penser que des mineurs sur-tout aient fait
un déguerpissement valable, sans aucun a c te , même
hors jugement, et par le seul fait de leur dépossession.
Quant à la résolution, faute de paiement par trois
ans, elle n’avait pas lieu en rente constituée; mais
ce serait devancer les adversaires que d’examiner
ici celte question, car ils ont élé forcés de recon
naître qu e, d’après leur propre système, il n’y avait
pas lieu ¡1 résolution quand leur père s’empara du
domaine en i y 5 3 , parce que la sentence du i . ermars
de ladite année ne portait condamnation que d’ uu
demi-terme de la rente de 5 oo francs, échu encore
depuis la mort de Géraud Varagne.
Ainsi, sur celle première question , il est constant
que sous aucun poinl de vue , le sieur Roland n’é
tait propriétaire du domaine de Flenrac lorsqu’il s’en
empara, et le donna à ferme le a 5 avril 1753.
G a
�L e sieur R o la n d est-il devenu propriétaire du do
maine de Fleurac par Les sentences de 1 7 5 3 , 1 7 56 ,
1768 et 17 7 2 ?
' Ces sentences étaient-elles passées en force de chose
jugée en 17 7 3 , tant contre Antoine Varagne que
contre M arianne sa sœur?
L a senlence de 17 5 3 ne signifie rien pour la pro
priété, cela est convenu; elle n’était qu’un achemi
nement aux autres, et eût été elle-même irrégulière,
puisque le sieur Roland a dit Géraud Varagne mort
en novembre 1 7 5 2 , et que depuis celle époque jus
qu’après les trois mois et quarante jours il n’avait pas
d’action, d'après l'ordonnance de 1667 , renouvelée
•par le Code civil.
En 17 5 6 , il y eut deux sentences, mais la première
ne parle que de bail à rabais et non de propriété 5
c’est la seconde seulement, du 29 septembre, qui pro
nonce la résolution de l’acte de 1747On ne peut pas douter que le juge n’ait été sur
pris lors de celle sentence , puisque l’exposé de la
requête, sur laquelle elle est rendue, suppose que le
sieur Roland n’était pas encore en possession du do
maine de Fleurac. Il demandait ju squ es-là les arré
rages de la renie de 5 oo f r . e t certes c’élait abuser
étrangement du silence forcé des mineurs Varagne ;
car s’il eût confessé au juge, que depuis plus de trois
�( 21 )
ans il percevait les fruits du domaine, sur lequel la
dite rente était assise, le juge au lieu de lui adjuger
sa demande, l'aurait éconduit, quoique par défaut.
Cette sentence, il est vrai, quelque mauvaise qu’elle
lût, disposait de la propriété du domaine; mais elle
était susceptible d’appel pendant trente ans d après la
jurisprudence; et dès-lors en 1 7 7 3 , elle pouvait etre
attaquée.
Ce n’est pas ainsi, à la vérité, que les adversaires le
supposent. Ils soutiennent, au contraire, qu’il y avait
chose jugée en 1 7 7 3 , et que tout espoir de retour était
ôté contre la procédure précédente, sauf néanmoins
les droits de Sébastien Varagne qu’ils reconnaissent
entiers. A l’égard des deux autres, ils séparent Antoine
Varagne de Marianne sa sœur.
Antoine Varagne, d iren t-ils, avait bien interjeté
appel de la sentence de 1768,* mais cet appel avait
été déclaré péri, et la péremption emportait le bien
jugé de cette sentence, et dès-lors de celle du 29
septembre 1766.
Mais les sieurs Roland confondent aujourd’hui ces
sentences, qui avaient un objet très-distinct en 1772.
L a sentence de 1768 n’avait pas pour objet de
faire déclarer les précédentes exécutoires contre les
Varagne , puisqu’elles étaient rendues contre eux-mêmes ; si le mot y fut employé ce n’était que par un
vice de style; car le but très-clair de la demande était
d’obtenir le paiement de 1,246 fr. prix apparent du
�.
bail y rabais, dont le S.r Roland n'avait pas encore obtenu
de condamnations. On voit en effet parla lecture de la
sentence de 17 6 8 , qu’elle ne porte que des condamna
tions pécuniaires, et ne dit pas un mot de la résolutiou.
L a sentence de 17 7 2 prononce la péremption de
l’appel de celle de 1768, et est encore plus étrangère que
toutes les autres à la propriété du domaine de Fleurac;
car, quand la péremption serait irrévocable, l’effet de
la sentence de 1768 ne s’étendrait pas au -d elà des
condamnations qu’elle prononce.
Ainsi, quand les sentences de 1768 et 1772 auraient
passé eu force de chose jugée en 1 7 7 3 , au moins la
sentence du 29 septembre 17 5 6 , la seule qui pronon
çât la résolution de la vente de 17 4 7 , était-elle évidem
ment susceptible d’appel en 17 7 3 .
Mais si, par impossible, la Cour pouvait considérer
d a n s la sentence de 1768 , une résolution que cettesentence ne prononce pas , comme alors celle de 17 7 2 au
rait une plus grande influence, c’est alors le eus d’exa
miner la validité de l'exploit de 1 7 7 1 , sur lequel cettô
sentence a été surprise.
, Il est démontré que la copie de cet exploit a été souf
flée. La lecture de l’original le prouve. Et en vain les
adversaires ont-ils ouvert une longue discussion sur des
mots écrits 011 ajoutés , on voit clairement que leur
père , ou le rédacteur de l’exploit a eu deux pensées
lu n e après l’autre, et que la deuxieme a corrigé la
première 5 mais ce n'est là disputer que sur le genre
d’iniidélité; car les adversaires sonl obligés d avouer qu’il
�( 23 )
y en a une. L ’huissier au moins n’a pas porté la copie ;
l ’assigné, qui ne l’a pas reçue, soutient l’exploit nul, et il
l’est sans difficulté. Si donc il n’y avait pas de demande
en péremption, il n’y avait pas de péremption; alors
l’appel était recevable en 17 7 3. Toute la laveur eut été
pour cet appel, et toute la défaveur pour.une péremp
tion extorquée par un faux évident.
Du chef de Marianne Varagne, Antoine eût été, disentils, moins reccvable encore, puisqu’elle avait tout ap
prouvé parle traité du 16 février 17 7 3 , ainsi personne
ne pouvait réclamer pour elle.
! Pourquoi donc ses frères n’auraient-ils pas eu d’action
en subrogation légale , si Marianne avait cédé un droit
litigieux et universel ? Cette prétention paraît choquer
les adversaires; mais c’est qu’ils partent toujours de cet te
idée fausse, que leur père avait conservé la propriété
directe du domaine, et alors ils se croient dans l ’e x ceplion de la loi eœcepUs cessionibus quas is qui, possidet pro tuilioae suâ accipit.
Cela est très-bien quand , avec un titre légitime pour
une partie , on possède tout, et q u e , pour confirmer sa
possession , on achelte rem necessariam.
Mais quand on n’a que la portion d’un cohéritier par
usurpation, il est clair qu’on ne cherche pas ¿1 y rester
pour éviter un procès; mais qu’on1 se prépare à en sou
tenir un contre les cohéritiers.
Suivant le système des adversaires, et en interprétant
judaïquemenl l’exception de la loi, rien ne serait plus
�i 1
( 24 )
facile que de l’éluder. L ’acquéreur d’un droit de copro
priété ou d’ un droit successif se mettrait d’avance en
possession d’ un objet, et ensuite il en serait quitte pour
dire qu’il est dans l’exception de la loi, parce que
p o ssiden s, pro tuitione accepit.
■ Pourquoi encore les frères de Marianne Varagne
n ’auraient-ils pas eu une action en retrait; car s’il est
certain que le domaine de Fleurac a resté dans la famille
V a r a g n e i l est clair que Marianne Varagne était pro
priétaire d’une portion , par la règle le mort saisit le v if%
Mais, disent-ils, un retrait n’a lieu qu’en matière de
vente ou d’acte équipolent à vente.
L ’objection même les condamne; car dès que l’acte
de 1747 était une vente, Marianne Varagne, propriétaire,
n ’a pu s’en départir que par unacteéquipolent à vente.
En vain oppose-t-on qu’elle a cédé son droit par une
transaction. Une transaction n’est qu’ un acte indéfini
qui admet toutes les espèces de conventions, et qui
dèslors retient elle-même le nom le plus analogue à
son objet principal. Ainsi quand , par l’effet d’une
transaction , rimmeuble d’ un contractant passe h un
autre, l’acte est toujours une vente, puisqu’ il en a les
caractères; car la qualité des actes 11e doit pas se juger
par les noms qu’on leur donne, mais parleur substance.
Si Marianne Varagne n’avait eu que J u s a d rem , il
est possible que la transaction ne fût pas considérée
comme une vente, dès qu’elle n’aurait cédé qu’ une
simple prétention litigieuse ; mais il est clair qu’elle
avait j u s in re, et qu’élant propriétaire au décès do
son
�?
4
..
( 25 )
son père, aucun acte ne lui avait ôté celle propriété.
Son abandon était donc une vente pure et simple.
Or, sans se jeter dans un long examen sur les cas
ou le retrait était admissible , les adversaires ne nie
ront pas qu’en vente d’immeubles il ne fût admissible
au profit d’ un frère.
Ils ne n ie r o n t pas encore qu’il n’eût été même ad
missible quand Marianne n’aurait abandonné que j u s
a d rem - car il est de principe enseigné par Potliier
d’après Dumoulin, Duplessis et autres auteurs, que la
vente d ’un, droit réputé pour héritage suffit pour
donner ouverture au retrait.
* L e même auteur dit plus clairement à la page pré
cédente , que la créance qu’on a pour se faire livrer
un héritage, est sujette à retrait si elle est cédée: et
cette doctrine n’ est qu’une conséquence du principe
que actio, quœ tendit a d a liq u id im m obile , est in imobilis.
Dans la circonstance sur-tout, et après la conduite
du sieur Roland père , lorsqu’il venait d’y mettre la
dernière main en ôtant le patrimoine d’une jeune fille
sous prétexte des dangers d’ un procès, il n’est pas
de tribunal qui eût refusé d’admettre un retrait qu’au
rait exercé Antoine ou Sébastien Varagne ; parce que
c’était la voie la plus légitime pour tout rétablir en
son premier état, et qu’il .ne s’agissait que d’arrêter
une usurpation.
Mais, objectent encore les adversaires, qu’aurait pu
faire Antoine Varagne, tant pour lui que pour sa
D
>
�( 26 )
sœur, quand il aurait pu exercer les droits dé l ’un
et de l'autre, et interjeter appel de la sentence de
17 6 6 ? cet appel aurait été non recevable au fonds,
parce qu’une résolution prononcée est inattaquable.
Sans doute, une résolution ¿égale est inattaquable,
et il était inutile de rappeler tout ce que dit sur celte
question M.r Chabrol : car ce n’est pas le principe que
contesteront les Varagne , mais bien l’application, qui
est véritablement choquante sous toutes les faces.
D ’abord M.r Chabrol parle des renies foncières j et
ici il ne s’agit que de rente constituée.
11 aurait fallu cinq ans d’arrérages dans ce dernier
cas; il eût fallu trois ans, si c’eût été une rente fon
cière. Or , ici il n’y avait que six mois d’arrérages.
Pour que la résolution soit légale , il faut que la
sentence, qui condamne au paiement, porte un délai,
sinon la demeure peut toujours être purgée. L a sen
tence de 1756 n’en portait aucun.
Ce n’est qu’après la sentence et le délai que le
bailleur peut se mettre en possession; ici, le vendeur
usurpait depuis trois ans. L e motif de résolution em
ployé par le sieur Roland élaiL même mal-honnele:
loin d’y parler d’un-abandon inutile fait par des pu
pilles chassés du domaine, il prenait pour prétexte le
défaut de paiement des arrérages. Il trompait donc
la justice, car il demandait ces arrérages, et cepen
dant il jouissait : il avait ôté par son propre fait aux
mineurs Varagne toute possibilité de les payer.
�( 27 )'
t r o i s i è m e
q u e s t i o n
L a transaction du 3 o octobre 1 7 7 3
.
é ta it-e lle une
aliénation cles biens des mineurs Iio la rid ?
L
citations des adversaires, pour montrer qu ’on
ne peut vendre sans formalités le bien des mineurs ,
es
11e sont pas plus applicables, que n’est fondé le re
proche fait à la sénéchaussée d’Auvergne de les avoir
méconnues.
I l est très-vrai que le tuteur ne peut de gré à gré
et sans nécessité vendre les immeubles de ses mineurs.
Mais ic i, ce que cédait le tuteur n’était pas un i m
meuble de ses mineurs; et il y avait nécessité.
Ce n’était pas un immeuble des mineurs Roland,
puisque leur père l’avait vendu ; que l’acte de 174 7
n’étant pas un bail à rente, il s’ était départi de la
propriété utile et directe , puisqu’enfin il n’y avait
eu ni pu y avoir de résolution valable.
Il y avait nécessité, puisque les pa rties allaient en
trer en procès, et que ce procès ne pouvait pas etre
d’ une solution difficile.
Car des mineurs dont un seul avait trente-cinq ans,
se plaignant d’un mode d’usurpation qui eût crié ven
geance, n'avaient pas à craindre une résistance bien
sérieuse.
Quand le faux de l’exploit de 1 7 7 1 n’eût pas fait
tomber la péremption, elle ne se fût rapportée qu’à
lu sentence de 17 6 8 , et le pis-aller eût été de payer
D 2
�( 2 8 }
mal à propos 1,246 fr., si les liériliers Roland avaient
établi avoir employé celte somme. Mais de sa part,
Antoine Varagne aurait eu à répéter les jouissances
de vingt-un ans à dire d’experts.
O r , les adversaires ont prétendu que le domaine
valait 3 o,ooo fr. ; et en ne fixant les fruits qu’à 1,000 fr.
par an, ils eussent été débiteurs de 2-1,000 fr.
A . la vérité, il eût; fallu déduire moitié pour la
rente de 5 oo fr. plus les 283 fr. de la sentence do
1 7 5 3 , et si on veut les 1,246 francs; mais, comme
on v o it, les mineurs Roland auraient toujours été re
liquat aires de 9,000 fr.
Ils avaient donc plus d’intérêt à traiter que Varagne,
puisqu’ils obtenaient le sacrifice de cette somme, au
lieu de faire eux-mêmes celui des réparations, comme
ils essayent de le persuader. . . • • j
Leur tuteur avait sans difficulté le droit de transiger,
puisqu’il ne s’agissait que de terminer un procès. En
vain dirait-on que ce procès n’était pas commencé;
car il est de principe que trcuisactio f i t de Lite m otâ,
aut niovendâ.
I/exposé de la transaction prouve les difficultés qui
allaient naître : au lieu d’assigner et de plaider, 011
transigea.
Si quelque chose devait ajouter à la faveur due à
un acte aussi respectable qu’ une transaction, ce serait
de connaître les personnes qui composaient le conseil
de famille et qui en ont été les auteurs. Car que
Maigue, tuteur, fût ou non un chapelier et unhoinmo
�J*
( 29 )
peu intelligent,¡’acte n’était pas purement de son fait,
il était le résullat des réflexions d’une famille distin
guée, à laquelle les adversaires devaient plutôt d elà
reconnaissance que des reproches ; reproches d’ailleurs
d’autant plus aisés à multiplier, que les intimés n’ont
aucun intérêt d’en vérifier la sincérité.
QUATRIEME QUESTION.
5
L e s appelans se sont-ils pourvus en tems utile contre
la transaction de 1 7 7 3 ?
O ui, disent-ils, par deux motifs ; le premier c’est
qu’elle n’a été passée que par notre tuteur; le second
c’est que vous avez retenu les pièces, et que le délai
pour nous pourvoir ne court que de leur remise.
L a réponse à ce premier motif pourrait être ren
voyée à la queslion suivante, parce qu’au moins les
quittances de 1778 et 178 2 ne sont pas du fait du
tuteur; mais pour suivre exactement les moyens des
adversaires, il suffit quant à présent de leur rappeler
ces quittances.
,
Il est aisé de voir le but de la distinction à faire entre
les actes des mineurs, et ceux de leur tuteur.
Souvent il serait injuste de les déclarer non recevables
après 10 ans, à l’égard de ces derniers actes, parce que
peut-être ils en auraient ignoré l’existence; et la pres
cription n’est qu’une peine imposée par la loi à celui
qui néglige d’agir.
Mais toutes les lois qu’il est certain que le mineur a
�H,
( ,3 ° }
connu Facle , toutes les ibis sur-ion ( qu’il l’a adopté,
c ’est alors que le fait du tuteur étant le sien, le mi
neur a à s’imputer de ne pas se pourvoir.
Or, par cela seul que le sieur Israël Roland, héri
tier de son père, a connu et adopié en 1778 l’acte de
1 7 7 8 , et sans examiner l’eflet de son approbation, il
a dû se pourvoir.
Comme, dès 17 7 8 , il connaissait la date de ce traité
de 1 7 7 3 , il devait savoir qu'à supposer qu’il eût droit
de l’al laquer, il ne le pouvait que jusqu’en 17 8 3 , parce
qu’il se l’était approprié; cependant il n’a formé de
mande qu'en 1788.
Alors non-seulement il y avait plus de dix ans de
puis le traité de 1 7 7 3 , mais le sieur Israël Roland avait
plus de trente-cinq ans.
L e deuxième moyen des adversaires sur celte ques
tio n annonce l’embarras d’en proposer de meilleurs.
C a r, contre quel acte devaient-ils se pourvoir?
Est-ce contre la transaction? Est-ce contre les pièces
y visées ?
Sans doule ce n’est pasconlre les sentences y énon
cées, puisqu'ils en excipent. C ’est doncconlre la transac
tion; mais ils n'articulent pas sans doule que Varagno
lait retenue.
Avec un système comme celui qu’ils hasardent , il
faudrait dire que tout traité d’après lequel 011 aura
remis des pièces à une parlie (ce qui arrive tous les
jours) sera allaquable à perpétuité; et, comme dit Du
moulin pour les choses précaires, elia n ip er m illeannos.
�( 3i )
*
D ’abord les adversaires pouvaient très-bien voir dans
la transaction , que leur père avait vendu un domaine,
et l’avait ôté ensuite à des mineurs par abus de leur
faiblesse, mais que ces mineurs l’avaient repris ; c’était
là tout le secret des pièces remises à Varagne.
Or, comme la transaction n’était pas retenue, si
les adversaires voulaient se pourvoir, rien ne les en
e m p ê c h a i t ; et alors, comme aujourd’hui, ils auraient
redemandé toutes ces pièces, qu’on ne leur cache pas.
Outre la faiblesse de ce m oyen, il n’a de prétexte
que la mauvaise foi; car les adversaires ont prétendu
que les sentences de novembre 17 56 et de 17 7 2 11’élaient pas énoncées dans le traité de 1 7 7 3 , de même
que le traité du 16 février, pour leur en cacher l’exis
tence. Cette allégation leur a même paru si impor
tante qu’ils y ont employé les pages 7 , 8 , 49, 5 o, 53
et 54 de leur mémoire.
Xi’omii-'sion supposée de la sentence de novembre
1 7 5 6 n est qu’ une misérable équivoque. L a sentence
de novembre 1766 était au moins visée et énoncée
dans celle de 1 7 6 8 , puisque les adversaires préten
dent que cette dernière renouvelait en entier celle
de 1756.
En second lieu , on voit à la fin des dires de V a
ragne ou traité, que parmi ses moyens contre la pro
cédure il disait qu’il était recevable à tenir les engagemens de son père dans La, circonstance su r-to u t
que LA S E N T E N C E QUI ORDONNE LA RÉSOLUTION D E
�LA v e n t e ri enlève celte faculté qu’après 3 o ans, etc.
O r , où est donc celle sentence, si ce n’est celle
du 2 9 novembre 17 5 6 ?
O11 n’a donc pas caché aux mineurs qu’il existait
une sentence prononçant une résolution.
Quant à la sentence de 1 7 7 2 , l’équivoque est en
core plus sensible ; on nous a caché , disent les adver
saires, qu’il y eût une senlence prononçant la péremp
tion (pag. 8 et 9).
M ais, en parlant de la sentence de 17 6 8 , on ajoute
que Varagne s’était rendu appelant, mais que la sen
tence avait passé en force de chose ju g ée comme n ayan t
pas fa it diligence sur son appel pendant trois ans con
sécutifs.
N ’est-ce donc pas se faire des moyens de tout que
de ne pas voir là le synonime d’une péremption 5 et
que les expressions ci-dessus expliquaient même mieux
le droit des mineurs: dès-lors on ne voulait pas écarter
ce qui leur aurait donné trop de lumières.
Enfin à l’égard du trailé avec Marianne Varagne,
comment les adversaires ont-ils encore osé dire qu’on
le leur avait caché.
•
La transaction porte que le sieur R o la n d , par acte
reçu Valette y notaire, le 16 février dernier, contrôlé
le 2 5 , a réglé avec M arianne V a ra gn e, sœur dudit
Antoine.
Plus loin , Antoine dit qu’à l’égard de l’ucle passé
avec
�Marianne Varagne, il était dans le cas de demander
La subrogation.
■ L ’acte est donc énoncé, visé et daté. L e règlement
avec la sœur ne peut supposer qu’ une cession de sa
part, puisque le frère veut s’y faire subroger.
Ainsi les adversaires sont obligés d en imposer à la
Cour pour se rendre favorables, et il est de la plus
grande évidence que -rien ne s’opposait à ce qu'ils ré
clamassent dans les dix ans contre le traité de 1 7 7 3 ,
s’ils croyaient y être recevables, ce qui va être enfin,
examiné.
CINQUIÈME
QUESTION.
L es quittances de 1778 et 1782 produisent-elles une,
¿fin de non recevoir contre la dem ande?
venait d’être élu héritier
universel de son père en 1 7 7 7 , lorsqu’il reçut le prix de
la venle de 17 4 7 , en vertu de la transaction de 1778.
Si l’ouverlure de la succession n ’ était pas en droit
écrit, au moins le domaine d e E le u ra c y était-il situé;
Israël Roland était donc seul maître du procès y re
latif. D ’ailleurs, en coutume comme en droit écrit,
les légataires sont les maîtres d’accepter le legs porté
parle testament; or, le sieur Roland ne s’est pas mis
en peine d’établir que ses frères et sœurs aient répudié
leur legs pour réclamer leur légitime, quoiqu’on lui
ait fait souvent celte interpellation.
P ie r r e -Isr a e l R o land
Antoine Varagne ne pouvait donc s’adresser qu’à
E
�"(<■
( 34 )
lui seul pour pa}7er, et la Cour a bien remarqué que
le sieur Israël Roland agissait aussi comme seul héritier
puisqu’il reçut la première fois tout le terme échu, et
la seconde fois la totalité aussi des quatre termes reslans.
M ais, dit le sieur Roland, forcé parla conséquence
de son propre fait , l’approbation d’un acte nul ne le
valide pas, parce que q u i confirm ât n ih il dat d’après
I) umoulin , en second lieu je serais relevé comme
mineur initio inspeclo , puisque, l’acle étant commencé
pendant ma minorité, ce que j ’ai fait en majorité n'en
est qu’ une suite.
La première objection n’est fondée que sur des prin
cipes absolument inapplicables. L e passage de Dumou
lin ne s’applique qu’aux actes radicalement nuls, et
lion à ceux simplement sujets à restitution.
Or, ce serait pour la première fois qu’on soutien
drait que la transaction faite par un tuteur, même avec
aliénation, fûl nulle d’une nullité rad icale , et ne fût
pas susceptible d’une simple ratification de la part du
mineur devenu majeur.
- Au lieu de citer la loi si sine décréta qui ne peut
s’appliquer que par argument à contrario , les adver
saires eussent dû voir la loi 10 au ff. de rebus eorum
qui sub tutela sunt sine decreto non alienandis , dont
la disposition expresse décide la difficulté dans les plus
forts termes. Car après avoir prohibé les ventes'du bien
des pupilles, failes sans décret du juge, celte loi dit
que si néanmoins le tuteur en a employé le prix dans
�jr
( 35 )
son compte, et que le mineur l’ait reçu en majorité, il
ne peut plus revendiquer l'héritage vendu. Prœ dio pup ili illicite venundato , œstimatione solutâ , vindicatio
prœ dii ex œquitate inhibetur. A quoi la glose ajoute non
tanïasperb tractandum est ju s prohibitce alienationis
prœdioruni pupilanorum , ut et solutâ œstimatione à
tutore in eniptorem pupilus sutnmo ju re experiatur.
A plus forte raison quand le mineur reçoit directe
ment le prix du débiteur lui-même , e t , comme le dit
le profond Voétius sur la même loi, le paiement, même
la demande, même encore la simple approbation du
prix après la majorité empêchent la réclamation. S i
sine decreto aliéna ta ponerentur m inoris botia , tune
cnim subsecuta post majorennitateni impletam solutio,
vcl ex a ctio , vel petitio , vcl acceptatio œ stim alionis ,
necessariatn tacitæ ratihabitionis inducit conjecturant.
Userait difficile de rien ajouter à des autorités aussi
claires, et cJest d’ailleurs un principe universellement
reconnu que l’on approuve une vente quand on eu
reçoit le prix.
D ’après cela il est inutile de peser les expressions
employées dans les quittances de 1778 et 17 8 2 , puis
qu’il ne s’agissait pas de confirmer un acte radicale
ment nul. D ’ailleurs, en lisant les quittances, on ne
peut pas douter que le sieur Roland ne connût la
transaction aussi bien que Varagne, puisqu'il savait le
montant de chaque lerrne, leur échéance, et ce qui
restait à payer. Il savait que c’était pour le domaine
de Fleurac, et il savait encore que ce domaine prove-
�(
3
6
}
naît de ses auteurs. Son consentement à recevoir le
prix d’un domaine transmis par ses auteurs à Varagne
aurait donc valu seul une vente nouvelle, car 011 y
trouve res, consensus et pretium. Ajoutons que c’était
un avocat qui traitait avec un cultivateur.
Le second moyen des adversaires est tiré du para
graphe scio q u i, comme le dit L eb ru n , a fait errer
plus de jurisconsultes que la mer n’a égaré de pilotes.
Mais cette loi a aujourd’hui un sens bien déterminé,
et n’égare que ceux qui veulent lutter contre la ju
risprudence.
L e mineur, qui a imprudemment accepté une suc
cession à la veille de sa majorité, ne renonce pas tou
jours aussitôt qu’il est majeur; et comme chaque jour en
ce cas il continue de faire acte d’héritier , la loi examine
si ces actes ne sont qu’une suite de .ce qu’il a com
mencé en minorité, et alors elle l ’en relève.
L a difficulté de distinguer la nature de ces actes
donne lieu à tous les majeurs, qui se trouvent dans
ce cas , de prétendre que ce qu’ils ont fait est une
suite de la première immixtion. Mais 011 examine tou
jours si le mineur était obligé de faire l’acte nouveau,
o u s ’ i l pouvait s’en empêcher.
' « Car, si le mineur, dit Lebrun, pouvait s'exempter
* de mettre la dernière main ¿1 l’aflaire ; en ce cas,
« après l’avoir achevée en majorité, il 11e pourra pas
« être relevé. »
- Les adversaires s’emparent d’une partie de ce pas
�sage, et disent aussitôt que la transaction était com
plète pendant leur minorité, et que Lebrun a été mal
appliqué.
Mais un peu plus loin ils eussent trouvé que L e
brun lui môme enseigne que le cas seul où le nouvel
acle ne produit pas une fin de non recevoir, est seu
lement quand ce nouvel acte a une conséquence n é
cessaire avec ce qui s’est fait en minorité , et préci
sément Lebrun prend pour exemple q u a n d ¿’a ffa ir e
a ya n t été a c c o m p l i e en m in o rité se con firm e en m a
j o r i t é p a r quelque nouvel acte.
Remarquons que pour employer ce moyen , les
adversaires s’approprient la transaction de 17 7 3 , comme
étant de leur fait par le moyen de leur tuteur, et c’est
de leur part une inconséquence qui marque assez leur
embarras.
D ’ailleurs, en quelque position qu’ils se placent, ils
ne peuvent invoquer Y in itio in sp ecto , puisque les quit
tances ne sont certes pas une suite nécessaire d’un acte
qu ils disent nul, et sur-tout d’un acle qui n’était pas
de leur propre fait.
ISec s Lient io p rœ terni itten d ci n i , dit encore Voetius sur
le même litre du digesle, alienationes illa s ,q u æ i n i t i o
in s p e c t o
nulles e ra n t, ta n q u a m contra senatuscon~
su ltu m fa c t œ , su b in d è est post ja c t o c o n firm a ri p o sse ,
prœ sertïtn s i m itior j a m
m a jo r f a c t u s a lien atio nem
ra ta m h a b u e n t , sive expresse s i v e t a c i t è .
.
. L a question cle Yinitio inspecto s’est présentée de-
�vanl la Cour dans une espèce bien plus favorable pour
lé réclamant. Un mineur ayant fait acte d'héritier
était poursuivi pour une rente ; à peine majeur (de
2 1 ans seulement) le créancier lui fit faire une rati
fication. Il se pourvut presqu’aussitôt après, et fit va^
loir son ignorance absolue des forces de la succession,ayant eu un tuteur encore comptable, et il exposa que
l’adilion d’hérédité emportait nécessairement le devoir
de payer les rentes; mais par arrêt du 4 floréal an 10 ,
la Cour proscrivit sa prétention, attendu que sa rati
fication n’était pas une suite nécessaire de l’adition
d’hérédité.
Les adversaires ne se dissimulent pas la faiblesse de
leurs moyens contre la fin de non recevoir, et en
désespoir de cause ils observent que la dame Gros ne
peut en être victime, n’ayant pas donné ces quiltances,
Déjà les Varagne ont répondu à ce moyen par le
défi d’établir qu’aucun des puînés Roland ait répudié
le legs du testament de leur père pour demander leur
légitime. Une autre réponse va se trouver dans un
arrêt de la Cour dé cassation.
En 17 9 1 , Marie Bordenave fille aînée, avait été
instituée héritière par le testament de sa mère.
Elle vendit un domaine en minorité en 1 7 9 3 , en
vertu d’autorisation; et après des oilres réelles, elle
reçut partie du prix en majorité.
Elle demanda la nullité en l’an 4 , et ses sœurs se
�( 39 )
joignirent à elle. L e tribunal de Pau avait adjugé la
demande; mais, sur l’appel, celui des Hautes-Pyrénées
avait déclaré Marie Bordenave non recevable à cause
de sa quittance, et ses sœurs aussi non recevables parce
qu’elles pouvaient réclamer leurs droits sur les autres
biens.
Sur le pourvoi des trois sœurs, la Cour de cassation
a rejeté la demande par arrêt du 4 thermidor an 9,
par ce seul motif qui embrasse tout : « Attendu que
« Marie Bordenave, héritier e universelle, a ratifié la« dite vente par la quittance qu’elle a donnée en ma« jouté, de la portion qui reslait à payer à l’époque à
« laquelle elle est devenue majeure.-»
Il semble que ce motif soit fait exprès pour la cause;
la fin de non recevoir des deux adversaires y est écrite,
sans qu’il soit besoin d’y changer un seul mot.
Les fins de non recevoir sont souvent odieuses parce
qu elles tendent à priver une partie d’user de son droit.
Mais ici, il est difficile d’en proposer une plus favorable ;
car elle n’a pas pour but de priver le sieur Roland de
ses moyens au fonds, mais bien de l’empêcher lui-même
d’opposer d’autres lins de non recevoir plus odieuses.
Ce n’est pas que tous ses arrière-moyens fussent 1res
à craindre , parce que son père , trop pressé d’usurper
n’a rien fait de bon ; mais il est toujours agréable de
vaincre un adversaire avec ses propres armes, et de
neutraliser une injuste attaque. Au reste le moyen pria-
�( 40 )
cipal de la cause n’est pas une simple fin de non re
cevoir et n’en a que le nom. Car le procès a été éteint
par une transaction; le sieur Roland en l’adoptant a
voulu aussi éteindre le procès, et a véritablement fait
une transaction nouvelle, contre laquelle il ne doit pas
être admis à se pourvoir.
M .r T I O L I E R , Rapporteur.
M.e D E L A P C H I E R . ' Avocat.
M .e T A R D I F , Licencié-Avoué.
A RIOM,
De Imprimerie du P alais, chez J . - C. S
a l l e s
.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Varagne, Antoine. 1806?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tiolier
Delapchier
Tardif
Subject
The topic of the resource
déguerpissement
ferme
bail à rentes
minorité
tutelle
droit écrit
assemblées de parents
prescription
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Antoine Varagne, et autres, intimés ; Contre Pierre-Israel Rolland, Toinette-Gabrielle Rolland, et le sieur Gros son mari, appelans.
Table Godemel : Bail à rente : 1. la vente d’un domaine moyennant un prix déterminé pour lequel l’acquéreur constitue une rente, est-elle un bail à rente foncière qui laisse le domaine direct au vendeur, et qui, par suite, est susceptible de résolution et de déguerpissement ? Déguerpissement : 3. le preneur à vente qui, après plusieurs sentences prouvant la résolution du bail pour cause de non-paiement des arrérages, avait déguerpi les immeubles, a-t-il pu obtenir ensuite du tuteur des héritiers du possesseur actuel, sous l’apparence d’une transaction, l’abandon volontaire de ces mêmes immeubles et des droits des mineurs, moyennent un prix, sans aucune des formalités prescrites par les règlements ? Ratification : 3. en quels cas les quittances données par un mineur devenu majeur, constituent-elles approbation ou ratification de l’aliénation consentie par son tuteur ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1806
1756-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1702
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1701
BCU_Factums_G1703
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53305/BCU_Factums_G1702.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ydes (15265)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assemblées de parents
bail
bail à rentes
Déguerpissement
droit écrit
ferme
minorité
prescription
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53306/BCU_Factums_G1703.pdf
29c406fe78ae2a3236c63332f8abd5a3
PDF Text
Text
MEMOIRE
POUR
P i e r r e - I s r a e l R O L L A N D , homme de lo i ,
procédant tant en son nom qu’en qualité de do
nataire contractuel de Jean -M arie G u y , L ouis
et Pierre R o l l a n d , ses frères;
ET
POUR
R O L L A N D , e t le sieu r
G R O S , son m ari, juge au tribunal de Mauriac ,
appelans ;
T o in e tte -G a b r ie lle
CONT RE
A n t o i n e V A R A G N E S et consorts
, intimés.
U n acte consenti par un tuteur, contenant aliénation
volontaire d’immeubles et autres droits du m in e u r, sans
aucune des formalités prescrites par les règlem en s, est-il
valable ? le jugement qui en a prononcé la validité p eutA
�;
'
.
'
:
( 2 ).
il se soutenir? T elle est la question principale sur laquelle
la cour a à faire droit.
*
F A I T S.
i
r
Pierre R o lla n d , père et beau-père des appelans , étoit
propriétaire d’un domaine appelé de Fleurac.
P ar acte du 18 septembre 1747 , il en consentit vente
à G érand V a ra g n e s, père et b e a u -p è re des intimés ,
moyennant la somme de 12000 francs , pour laquelle
V aragnes créa et constitua une rente annuelle, perpé
tuelle , de 5oo fran cs, et néanmoins l’achetable, franche
et quitte de toute retenue. :
« -V aragn es, acq u éreu r, m ourût en 1752 - sans avoir fait
de dispositions, laissant trois enfans m ineurs, A n to in e ,
JVlarianne, et Sébastien.
A n to in e , qui étoit déjà marié à l’époque du décès du
père , et qui étoit émancipé de droit par le m ariage, fut
p o u r v u d’un, curateur , et il fut nommé un tuteur aux
deux autres.
E n 1753 , le père des appelans fit assigner les enfans
V aragn es, savoir, l’aîné ém ancipé, et son curateur, et le
tuteur des deux autres enfans, en la ci-devant justice de
F l e u r a c ,' pour voir déclarer exécutoire contre eu x , ainsi
qu’il l’étoit contre leur p è re, le contrat de vente de 1747 ;
se vo ir en conséquence condamner à payer la somme de
25o francs pour le terme de la rente constituée, échu à
la Saint-André précédente ; comme aussi pour se voir con
damner à lui rembourser la somme de 33 fr. qu’il a voit
.été obligé de payer pour eux pour vingtièm es, avec in-
�( 3 )
térêt de ladite som m e, à com pter du jour de la demande;
vo ir dire en même temps qu’ils seroient tenus de conti
nuer à l’avenir le payement de ladite rente, jusqu’au rem
boursement du capital; et se voir condamner aux dépens.
L e I er. mars 1 7 5 3 , sentence par défaut contre les assi
gnés ; c’est-à-dire , tant contre le mineur émancipé , et
son curateur, que contre le tu teu r, adjudicative des con
clusions.
L e 24 mars 1763, procès verbal d’avis de parens, hom o
logué par le môme juge de la justice de Fleurac , qui déli
bèrent qu’il étoit de l’intérêt des mineurs d’abandonner
le domaine , autorisant même le m ineur émancipé à re
noncer à la succession de son père.
En conséquence de cette délibération, le m ineur éman
cipé et le' tuteur abandonnent le domaine ; le m ineur
émancipé renonce de plus à la succession.
L e domaine ainsi abandonné, le père des appelans prit
le parti de l’affermer1, par acte du 27 avril su ivan t, pour
quatre années.
.
11 est à remarquer que le bail fut fait en présence même
du curateur, et du m ineur émancipé qui non-seulement
ne réclama p o in t, mais encore signa l’acte.
Il est à rem arquer encore qu’à cette même é p o q u e ,
A ntoine Varagnes , m ineur émancipé , prêta au sieur
Rolland la somme de 200 fran cs, dont le sieur Rolland
lui fit un billet.
Ces deux circonstances écartent bien toute idée de vio
lence et de voie de fa it, et prouvent que le sieur Rolland
ne reprit le domaine que par suite de l’abandon volon
taire des enfans Varagnes.
A 2
�C 4 )
L e tuteur des deux enfans mineurs non émancipés étant
d é c é d é , il leur fut nommé un autre tuteur par procès
verbal d’avis de paren s, du 24 mars i j 56 , également
hom ologué par le juge.
' Cependant les bâtimens du domaine se dégradoient
entièrem ent; la grange notamment étoit tombée en ruine.
L e père des appelans présenta requête au juge des
lieux , le 3 mai i j 56 , dans laquelle il exposa , qu’ après
la m ort de V aragnes p è r e, tous ses enfans avaient dé
serté le dom a in e, et laissé le tout en très-m auvais état ;
qu A n to in e Varasp.es a în é , et son cu ra teu r, avaient
même renoncé à la succession j q u i! avoit été f o r c é de
préposer gens pour la culture du d o m a in e, e t d ’en payer
les charges , afin d'éviter le dépérissement de tout ; que
le nouveau tuteur nom m é a u x enfans m ineurs non
ém ancipés ne prenoit non plus aucun soin pour jo u ir
du dom aine ; que dans ces circo n sta n ces, et dans la
nécessité pressante de réparer la grange , il étoit fo r c é de
recourir ¿1 la justice • en conséquence, il demanda per
m ission de fa ir e assigner le m ineur ém a n cip é, son cu
r a teu r , et le nouveau tuteur des autres m in eu rs, à ta
prem ière audience p rovisoire, pour être autorisé ¿1f a i r e
visiter les lieu x , tï fa ir e constater V é ta t de la grange,
et procéder ensuite au b a il <7 rabais des réparations
q u isero ien t jugées nécessaires; et, a u x délais ordinaires,
pour voir dire que la vente sei'oit résilice , et q u ’il serait
autorisé ti reprendre la propriété dudit domaine.
Ordonnance du juge, portant permission d’assigner;
citation.
Jugem ent par défaut sur le provisoire, du 5 mai 176 6,
�(5)
qui autorise fa illie s réparations par bail à rabais jlesdi tes
répara tions préalablement constatées parexperts-ouvriers.
Signification clu jugem ent; nomination d’un expert de
la part du père des appelans, et nomination d’un expert
d’oilice pour les défaillans ; rapport contenant devis esti
m atif; hom ologation dudit rapport; affiches pour procé
der au bail à rabais, et citation aux mineurs pour y être
présens ; sentence de remise ; et enfin bail judiciaire à
rabais, du I e r . ju in , à la somme de 1246 francs, et
signification aux mineurs dudit bail judiciaire. Cette
somme a été acquittée par le père des appelans.
L e 29 septembre de la même année 1 7 5 6 , sentence
également par défaut sur le fo n d , qui ordonne que la
vente demeurera résolue, perm et à Rolland père de
rentrer dans la pleine propriété dudit domaine , con
damne les mineurs au payement des arrérages de la rente
jusqu’a lo rs, au remboursement de la somme de 33 francs
pour les vingtièm es, conform ém ent à la sentence de 17 5 3 ,
au payement de la somme de 108 livres 5 sous, pour les
depens taxés par la sentence de bail à rabais, et en tous
les autres dépens.
Varagnes aîné est devenu m ajeur en 1761.
E n 1767 , R olland p è re, par surabondance de précau
tion , fit assigner ledit Varagnes au bailliage de Salers,
pour voir déclarer exécutoires les sentences des i er.
mars 1763 et 29 septembre 1756. Il fit aussi assigner
aux mêmes fins le tuteur des enfans mineurs.
Sentence par d éfau t, du 20 février 1768 , tant contre
Varagnes m ajeur, que contre le tuteur des enfans m ineurs,
qui déclare les précédentes sentences exécutoires.
�( <\)
Varagnes aîné interjeta seul appel : mais il ne fil aucunes
diligences pour faire statuer sur cet appel \ il se borna à
une simple constitution de procureur.
Faute de diligences, le père des appelans demanda, par
exploit signifié à dom icile, la pérem ption. L e 28 août 1772,
il o b tin t, en la ci-devant sénéchaussée de JRiom , sentence
par défaut, qui déclara l’appel périm é.
M arianne Varagnes , sœur d’Antoine , et coliéritièi’e
comme l u i , étoit cependant parvenue à sa majorité.
L e 16 février 1773 , elle passa un acte par lequel elle
déclara qu’après avoir pris connoissance de la sentence
qui prononçoit le résiliment de la vente et de tout ce qui
avoit précédé et s u iv i, elle y acquiesçoit, et consentoit
que le tout sortît son plein et entier effet ; ce qui fut accepté
par le père des appelans , le q u e l, de son côté , fit remise
de la portion des condamnations qui la concernoit.
L e père des appelans m ourut le 31 juillet de la même
année , laissant plusieurs enfans tous en m inorité. T rois
joui’s avant son décès, il avoit fait un testament par lequel
i l avoit institué pour son héritier général et universel,
^
de ses enfans qui seroit choisi par cinq des plus p ro
ches parens. Il est à observer que ce testament ne valoit
que pour le qu«îrt, les biens étant situés et le testateur
dom icilié en pays de coutume.
A p rès son décès, il fut nommé aux mineurs Rolland
un tuteur et des conseillers de tutelle.
Ici commence un autre ordre de choses. Varagnes aîné
pensa qu’il pouvoit tirer avantage de la circonstance pour
Celui
•
rentrer dans la propriété du domaine ; que le tuteur seroit
de meilleure composition.
�(7 )
Dans cette v u e , il commença par se faire céder par
Sébastien, son frè re , par acte du 24 octobi-e 1 7 7 3 , tous
ses droits.
• L e 30 du môme m o is, six jours après la cession, il est
passé entre le tuteur et les conseillers de tu telle, d’une
part , et Varagnes d’a u tre , un acte auquel on donne la
forme d’ une transaction.
Dans cet acte on rappelle d’abord en substance la pro
cédure qui avoit été tenue, la sentence de 1 7 5 3 , la sen
tence de 1766, le bail à rabais; mais il y avoit deux sen
tences de 175 6 , l’une qui adjugeoit le bail à rabais, l’autre
qui prononçoit le résiliment : on n’énonce en aucune ma
nière la dernière. V o ici les propres expressions : Que dès
Vannée 1766 , ledit R olland a f a i t procéder au b a il à
rabais des reparutions à f a i r e au domaine de F le u ra c,
et dont Vadjudication a été f a i t e au nom m é P o m e jr o l ,
fe r m ie r , et duquel dom aine on est encore en possession.
N ulle m ention, comme on v o it, de la seconde sentence
de 17 5 6 , qui prononçoit le résilim ent’
Il est dit après , que le 27 décembre 1767 , ledit f e u
R olla n d a dem andé, tant la co n frm atio n de ladite sen
tence que les fr a is et dépens ¿1lu i adjugés, ensemble le mon
tant du bail à rabais, et obtenu sentence au bailliage de
cette ville, le 20 fé v r ie r 176 8 , de laquelle, ledit Varagnes
seroit rendu appelant , et la sentence passée en fo r c e
de chose ju g ée, com m e ledit Varagnes n ’ayant pas suivi
n i f a i t diligence su r son appel pendant trois ans con
sécutifs.
CTétoit là le cas de rappeler la sentence de 17 7 2 , qui
avoit déclaré l ’appel péri et périm é. O n devoit d’autant
�plus la rap p eler, que la cessation seule des poursuites ,
dans le ressort du ci-devant parlement de Paris , n’établissoit pas la péremption ; qu’il falloit qu’elle fût demandée
et prononcée : on n’en dit pas un mot. O n vouloit écarter
tout ce qui auroit pu donner trop de lum ières aux mineurs.
On se contente de dire : E t ladite sentence de 1768 passée
enf o r c e de chose ju g é e , com m e ledit V aragnes r i ayant
pas p oursuivi n i f a i t diligence su r Y appel pendant trois
ans consécutifs. . . . . .
1
. O n fait dire ensuite à Varagnes qu’il entendoit se rendre
appelant de toutes les sentences qu’on avoit obtenues, tant
contre lui que contre ses frères et sœurs, et par exprès
celle qui adjugeoit le bail à rabais, soit parce qu’il étoit
notoire qu’il n’avoit été fait que très-peu de réparations
qui ne pou voient s’élever au delà de 400 fran cs, soit
parce que la restitution des fruits, déduction faite de la
rente de 5oo francs, m ontoit à une somme bien plus con
sidérable , soit parce que ledit feu Rolland étoit débi
teur lui-m êm e d’un billet du 26 mars 17 5 3 , de 200 francs,
avec lequel la compensation avoit dû s’opérer de plein
d ro it; qu’on n e p o u v o itlu i opposer la répudiation par
lu i faite à la succession de son p ère, pai’ce qu’il étoit en
m in orité; qu’à l’égard du traité passé avec M arianne V a
ragnes , par lequel celle-ci avoit acquiescé à la sentence,
il étoit toujours dans le cas de demander la subrogation.
. O n ne vise pas non plus ce traité fait avec M arianne
„Varagnes ; point d’énonciation du notaire qui l’a reçu.
A p rès cet exposé, les parties traitent et transigent ainsi
qu’il suit : Savoir est, que le prix principal de la rente
deineureifixé, comme i l l ’é to it, à la somme de is o o o fr .
et
�•C 9 )
et 72 francs d’étrennes, en déduction de laquelle ledit
Varagnes a présentement p;iyé celle de 2400 francs; ladite
somme reçue et retirée par V a le tte , l’un des notaires
soussignés, qui avoit été nommé régisseur des biens des
m ineurs, dont quittance ; et le su rplus, ledit Varagnes
promet et s’oblige le p ayer, savoir, 1600 francs le 8 juin
suivant, sans intérêts cependant jusqu’au mois de m ars,
et le re sta n t à raison de 1000 francs par term e, le prem ier
à échoir dans deux a n s, le second à pareil jour l’année
d’après, et ainsi continuer d’année en année jusqu’à fin
de payem ent, à la charge de l’in térêt, sans reten ue, sur
le même pied de 5 oo francs pour les 12000 francs ; et
à l’égard des 72 francs d’étrennes , le contrat en porte
quittance: il est dit qu’elles ont été données de la main à la
m ain aux mineurs, pour subvenir à leurs besoins.
Il est dit après cela , clause que la cour est suppliée
de ne pas perdre de vue : E t a ledit M (ligne ( c’est le
nom du tu teu r) rem is audit V aragnes lesdites procé
dures et sen ten ces, et t a subrogé à ses -périls et f o r
tu n e, au heu et place de ladite M a rian n e V a r a g n e s,
à t effet dudit acte du 16 fév rier précédent.
L ’acte se termine ainsi : E t lesdites parties se sont tenues
respectivement quilles de touslesdits objets, demandes et
prétentions, sans dépens, dominages-intérêls, sans s’en rien
réserver , ni retenir ; demeure convenu , qu’en cas où
défunt Rolland auroit vendu certains héritages dépendans
dudit dom aine, depuis le contrat de 17 4 7 , et que le p rix
des ventes n’excéderoit la somme de 300 francs, en ce cas
ladite somme demeurera compensée avec les autres objets
contenus au présent règlem ent; et en cas qu’ils excédeB
�roient ladite somme de 300 fra n cs, le surplus excédant
sera tenu à compte audit V ara g n e s, sur les causes du p ré
sent traité.
,
. ,
,
A cet acte qui porte avec l u i , comme nous l’établi
rons d an s un m om en t, tous les caractères de la fraude
et de la collusion , il n’est pas indifférent d’ajouter la
vente d’un pré considérable , situé dans les appartenances
d e S a le rs, qui fut consentie dans le même temps par le
tu teu r, de l’avis des mêmes conseillers de tutelle, moyen
nant la somme de 7000 francs, quoiqu’on soit en état de
p rou ver que le même acquéreur en avoit offert l’année
p récéd en te, au père des mineurs , la somme de 9000 fr.
Q u ’est devenu le p rix du dom aine, et le p rix du pré ?
O n a vu que V a le tte , receveu r, perçut le jour même
du délaissement du domaine la somme de 2400 francs ; il
lui étoit dû une rente constituée au capital de 1000 francs,
il se retint la somme sur le capital.
11 étoit dû au sieu r....... conseiller de tu telle, une somme
de 1 5o 6 francs ; à un autre conseiller de tu telle, une
rente constituée au capital de 1000 francs; à un autre
conseiller une somme de 1000 francs portée par b illet,
et une rente constituée au capital de 400 francs ; ils se
sont payés par leurs m ains, n o n -seulement des sommes
exigib les, mais encore des capitaux non exigibles.
L a distribution s’est étendue aux parens mêmes des
conseillers de tutelle j le parent d’un deux a été rem
boursé d’ une somme de 1000 francs.
, Les dettes ne s’élevoient pas au delà de 5 à 6000 fr.j
et on a vendu pour 30000 francs de fonds.
E t ona vendu, tandis qu’il étoit dû par le sieur D u ran d ,
�( * o
autre conseiller de tutelle , une somme exigible de 5ooo fr.
E n exécution de ces conventions, A n toin e Varngnes
s’est mis en possession du domaine, et en a joui jusqu’à
son décès, et après lui sa veuve et ses enfans.
L e 4 d é c e m b r e 17 7 7 , P ie r r e - I s r a e l R o l l a n d , l ’a în é d es
enfans R o lla n d , f u t c h o is i p o u r r e c u e illir l ’e fle t d e l ’in s
titu tio n te sta m e n ta ire fa ite p a r le p è r e .
L e 27 juillet 1778 , il reçut d’A n toin e Varagnes un
prem ier payement de 2000 francs, en tant m o in s,’ est-il
d it , du traité reçu p a r le notaire soussigné.
'
L e 11 juin 1782, il reçut autre somme de 4000 francs,
pour reste et final payement du traité reçu p a r le notaire
soussigné.
L a date du traité n’est rappelée ni dans l ’une ni dans
l ’autre de ces quittances ; ce qui prouve qu’il ne l’avoit pas
sous les yeux ; et quand il l’auroit eue sous les y e u x , il
n’auroit pu y vo ir ce qui n’y étoit pas.
Ce n’est que postérieurem ent, et long-tem ps a p rès,
que les enfans Rolland sont parvenus à avoir connoissance
des actes et sentences dont on avoit affecté de ne pas faire
mention dans le traité ; ils ont v u que leurs droits avoient
été sacrifiés.
L e 25 février 1788, ils ont présenté requête au ci-devant
bailliage de Salers, par laquelle ils ont demandé permis
sion de faire assigner les enfans V aragn es, iceux liéritiei's
dudit A n toin e , pour vo ir dire et ordonner que le traité
du 30 octobre 1773 seroit déclaré nul et de nul effet;
se vo ir condamner au désistement dudit domaine , avec
restitution des fru its, jouissances et dégradations, depuis
le 25 mars 1 7 7 4 , époque à laquelle leur père étoit rentré
'
B 2
�( 12 )
en possession aux-offres de rem bourser ou tenir à compte
sur le montant desdites jouissances et dégradations, les
sommes valablement payées, et intérêts d’icelles, depuis le
payement; comme aussi pour se voir condamner à remettre
les titres et pièces de procédure délivrés lors dudit traité;
sinon et faute de ce , v o ir dire qu’ ils demeureroient garans,
en leur propre nom , de tous troubles qui pourraient être
faits à la propriété des demandeurs ; et se voir condamner
aux dépens.■
'
■ • ~\oî- .. ' •>L es enfans Varagnes ont suivi la m ômemarclic que leur
père , celle de se laisser condamner par défaut.
-■
>:
L e 10 juin 1788, sentence est intervenue au ci-devant
bailliage de Salers, par défaut faute de com paroir, qui
a adjugé les conclusions contre eux prisés.
Ils en ont interjeté appel en la ci-devant sénéchaussée
de R io m , par<acte du 28 du môme mois : autre juge
m ent par défaut, faute de plaider.
; Sur l’opposition, les parties ont été appointées au conseil.
E n exécution de cet appointem ent, il a été respecti
vem ent écrit et produit.
;
•
• Les enfans R o lla n d , pour éviter tout ce qui pouvoit
présenter l’apparence d’une difficulté , ont resti’eint leurs
conclusions. Ils avoient conclu en prem ière instance au
désistement du dom aine,' ils se sont restreint au désiste
m ent des deux tiers : ils ont fait le sacrifice de la portion
revenant au troisième enfant, Sébastien Varagnes ; portion
qu’ils n’avoient pas moins droit de réclam er, faute par
Sébastien de s’être fait restituer dans les dix ans de la
majorité contre l’abandon fait par le tu teu r, et d’avoir
attaqué la sentence de 1755.'
�/
vf
C *3 )
Ils n’en ont pas été plus heureux.
P ar sentence rendue au rapport de M . Bidon , le 3 sep
tembre 1790 , le jugement du bailliage de S a lers, qui
avoit prononcé la nullité de l’acte, a été infirmé.
I,es enfans R olland ont interjeté appel à leur tour de
ce jugem ent, par acte du 2 juin 1792.
Cet appel est demeuré im poursuivi pendant les orages
de la x*évolution.
L e 17 vendém iaire an 1 0 , 1a dame R olland et son m ari,
et Pierre-lsraël R o lla n d , ce dernier tant en son nom que
comme donataire de tous ses autres frères , ont repris
l’instance. Ils ont fait citer les représentans V a i’agnes en la
co u r, pour vo ir statuer sur l’appel, v o ir infirm er le juge
ment rendu en la ci-devant sénéchaussée, et v o ir adjuger
les conclusions contre eux prises en ladite sénéchaussée i
en désistement des deux tiers du dom aine , restitution
des jouissances et dégradations , et en remise des titres et
procédures qui leur avoient été d é liv ré s, lors dudit acte
de 1 7 7 3 , par le tuteur.
C ’est en cet état que la cour a à faire droit.
, Autant les appelans se sont attachés à dém ontrer le m al
ju g é , autant les adversaires ont fait leurs efforts p ou r jus
tifier , et le traité , et le jugement.
Suivant e u x , le traité n’a été que la réparation de l’in
justice que R olland père avoit lui-m êm e commise envers
A n to in e , M arianne, et Sébastien Varagnes.
Ils se sont reportés au décès de V aragn es, prem ier du
n o m , preneur à rente.
Ils ont exposé que R olland père avoit profité de la m i
norité des enfans dudit V aragnes, pour se m ettre de voie
é
�C h )
de fait en possession du domaine ; qu’il résultait de la
sentence même par lui obtenue en 1763 , qu’il n’étoit dû
à cette époque qu’un demi-terme d’arrérages ; qu’il avoit
cherché à colorer son usurpation , en obtenant en 1756
une sentence qui prononçoit le résiliaient; que cette sen
tence, rendue en 1 7 5 6 , ne pouvoit valider la voie de fait
antérieure , et légitim er la mise en possession , q u i , de
l ’aveu des appelans , rem ontoit à 1763 ; que cette sentence
é to it'd ’ailleurs évidem m ent in ju ste; qu’elle n’avoit pu
prononcer le résiliment faute de payement des arrérages
échus depuis 1763 , puisque pendant ce temps c’étoit
R olland père qui avoit joui ; et qu’à l’égard des arrérages
a n t é r i e u r s i l étoit p r o u v é , par la sentence de 1 7 6 3 ,
qu’il n’étoit dû qu’un demi-terme d’arrérages, montant
à 25 o fr. ; que cette somme étoit même presque acquittée
par la compensation qui avoit dû s’opérer naturellement
avec le billet de 200 francs dont il étoit débiteur ; que
la sentence de i j 56 avoit été rendue dans un temps où
A n toin e , M arianne et Sébastien Varagnes étaient encore
m in eurs; que la sentence de i y 5^ avoit été attaquée par
la voie de l’ap p el; que la sentence de 1772 , rendue en
la sénéchaussée d’A u v e rg n e , qui déclaroit l’appel p érim é,
étoit elle-m êm e susceptible d’appel ; que cette sentence
avoit d’ailleurs été rendue sur un exploit non légalem ent
s i g n i f ié , sur un exploit n u l, et par conséquent étoit nulle
elle-m êm e. .
A l’égard de l ’acte du 16 février 1773 , par lequel
M arianne Varagnes avoit déclaré qu’elle acquiesçoit à la
sentencede 1766, au m o yen d e quoi Rolland père lui faisoit
remise de la portion à sa charge des condamnations pro-
�; ft
C *5 )
noncées par îa sentence , ils ont répété ce qu’on avoit fait
dire à A n toine Varagnes dans la transaction , qu’il entendoit demander la subrogation à cet acte , soit com m e con
tenant cession de droits litigieux , soit à titre de retrait
lignager.
Ils ont inféré de tous ces moyens que les mineurs R olland
n’avo ien t, à l’époque de la transaction , aucun droit à la
p r o p r ié t é du domaine ; que le tuteur et les conseillers de
tutelle n’avoient fait que se départir d’une possession in
juste ; que les mineurs Rolland ne pouvoient prétendre
que cette transaction contenoit une aliénation de leurs
d ro its, puisqu’ ils n’en avoient aucuns ; ils ont ajouté que
Pierre-Israël Rolland étoit d’ailleurs,non l’ecevable, ayant
approuvé l’acte en majorité et en pleine connoissance de
cause , en recevant une prem ière fois 2000 francs , et une
seconde fois 4000 fr. pour reste et final payement du p rix.
O n va se convaincre que ces moyens n’ont rien que de
spécieux.
Q uel étoit le droit des parties à l’époque du traité ? c’est
ce qu’il s’agit d’abord d’exam iner. Il ne sera pas difficile
ensuite d’établir la nullité d’un acte où tous les principes
conservateurs des biens des mineurs ont été si évidem m ent
v io lé s , où le tuteur et les conseillers de tutelle ont si étran
gement excédé leurs pouvoirs.
P
r e m i è r e
p a r t i e
.
D r o it des m ineurs R o lla n d ¿1 Vépoque de la transaction.
A cette ép oqu e, le père des appelans étoit rentré en
�h
\ \ .<
>
( 16 )
possession du domaine ; il y étoit rentré par l’abandon
volontaire des enfans V a ra gn es, et par l’effet des sentences
de 1 7 5 6 , 1768 et 1772. Ce déguerpissement et ces sen
tences avoient transporté de nouveau la propriété sur sa
tête : ils form oient un nouveau titre.
M ais ce n’est pas là le système des adversaires.
Suivant eu x , la possession des appelans n’a eu au contraire d’autre principe que la violence. S’il faut les en croire,
R olland p è r e , aussitôt après la m ort de V aragn es, pre
neur à ren te, a profité de la m inorité des enfans pour les
d é p o u ille r, pour s’emparer de voie de fait du domaine.
L es sentences de 1756 et 1772 , n’ont été qu’une injustice
de plus de sa p a r t, une surprise par lui faite à la religion
des juges. Ecartons d’abord ces inculpations. Justifions la
m ém oire du défunt ; m ém oire que les appelans d o iv e n t,
et c h é r ir , et défendre.
Ju stifica tio n de la conduite de R o lla n d p è r e , et des
sentences de 1^56 et 1772.
P R É T E N D U
F A I T
DE
V I O L E N C E .
Est-ce Rolland père qui a expulsé les enfans V aragnes?
Ce sont les enfans Varagnes qui se sont expulsés euxmêmes. Ce sont eux qui ont abandonné le domaine en
vertu d'açis de p a ren s, homologué par le ju g e , comme
le produit ne suffisant pas pour acquitter la rente et les
autres charges.
Cet abandon est constaté, i°. par l’avis de parens, du
24 mars 17 5 3 , qui porte que les enfans V aragnes doi
vent
!
�t *7 )
vent abandonner le dom aine, et que V a în é , m ineur
ém an cipé, c/oîî renoncer ci la succession \ 20. par la re
nonciation faite par A n to in e Varagnes aîn é, à la succes
sion de son père.
Rolland ne pou voit exploiter par luiHnême le domaine,
il prit le parti de l’affermer. Il l’afferma en présence de
Varagnes m ôm e, et de son curateur, qui ne réclam è
rent point. C ’est ce qui est constaté par le bail»
Il usa si peu de vio le n c e , que dans |e même temps
Varagnes aîné lui prêta une somme de 200 francs, dont
il lui fit un b illet; lequel billet a été compensé p a r la
transaction.
Ce billet prouve de plus en plus que si les enfans,
et principalement Varagnes aîné, abandonnèrent le do
m aine, ce n’étoit pas par la difficulté de payer la rente,
puisque, d’ un autre côté, il p rêto it; mais parce que le
produit n’égaloit effectivement pas les charges, et qu’il
ne vouloit pas être en perte.
Varagnes aîné 11’abandonna pas seulement le dom aine,
îl renonça -même à la succession.
Ecoutons les adversaires. Si le tuteur et le m ineur
émancipé abandonnèrent le dom aine, ce fut Rolland qui
les y força : l’avis de parens, l’homologation du ju ge,
furent l’ouvrage de Rolland ; c e tî\it lui aussi qui solli
cita l’émancipation de'l'aîné. O n ne répondra qu’à cc der
nier fait, qui donnera une idée de la véracité des adver
saires. Varagnes aîné n’a point été émancipé par lettres
du prince et l’ofiice du juge; il a élé émancipé par-ma
riage; il a été marié du vivant du père.
c
�( 18 )
Ce n’est point encore en vertu de la sentence du
i er. mars
, que le père des appelons s’est mis
en possession, puisque cette sentence ne l’y autorisoitpas,
et qu’il n’y avoit pas conclu; c’est en conséquence, et
par suite de l’abandon fait par les enfans V aragn es: il
~a repris le dom aine, parce qu’il a été forcé de le reprendre.
L es adversaires ont été jusqu’à dire que la mise en
possession avoit précédé le déguerpissement. Les dates
.des actes constatent, le ; contraire. L ’avis de parens est
du 24emars 1753^ et l’époque de la mise en possession,
.ju s t ifié e par le b a il, est du 27 avril. Varagnes aîné n’a
pas été dépossédé par violen ce, puisqu’il avoit renoncé
f à la succession, et que par cette renonciation il étoit de-venu étranger à. l’hérédité ; et à l’égard des deux autres
. enfans, peu im porterait ce qui se seroit passé : M arianne
Varagnes a depuis tout approuvé et tout ratifié; et quant
à S é b a s tie n , il ne peut y avoir de litig e, puisque les appelans ne réclament point sa portion.
L ’abandon constaté, cet abandon avoit-il u n e cause
légitim e? E lle étoit non-seulem ent'légitim e, mais néces
saire : le bailleur à rente devoit-il laisser le domaine in
culte , et ne percevoir ni la rente, ni les fruits?
Rolland père a fait ce qu’il étoit îion-sculement en droit,
mais ce q u ’ il : ne ¡pouvoit sc dispenser de faire. Vaincus
-dans le fa it, les adversaires se retranchent dans le droit.
Ces movens de droit sont ceux-ci.
1°. Les mineurs ne,pou voient abandonner le domaine.
; 1: 20. R o lla n d père ne pouvoit de son autorité s’enmettreen possession.jiildevoit obtenir une sentence.
J
�«jl
( *9 )
3°. L a sentence de 17 6 6 , postérieure de trois ans, ne
p o u v o it, quelqu’efï’et qu’on veuille lui donner, légitim er la mise en possession.
Réponse. Les mineurs ne pouvoient sans d o u te, par
leur seule vo lo n té, et sans form alités, abandonner le do
maine. Mais ils le pouvoient, autorisés par avis de parens
et par décret du juge. C ’est ce qui se pratique tous
les jours.
' Cette autorisation, suivie du décret du ju g e , suffit.
Il ne faut trouver étrange, dit L o ise a u , au T raité du
déguerpuissem ent, liv. 4 , chap. 6 , n °. 7 , que les solen
nités des criées et subhastations ne soient observées au
déguerpissement, comme en la vente qui se fait par décret.
Car ce que le droit requiert, que les héritages des m i
neurs soient seulement vendus par décret, cela ne signifie
pas qu’il y faille toujours observer les form alités dont
nous usons en France en nos criées et décrets; m ais,
c’est-à-dire, seulement qu’il faut demander au juge per
mission de ven d re, et cette permission est appelée en
droit décret; decretum. C’est pourquoi il faut tenir qu’il
y a cette cérém onie particulière au déguerpissement de
l ’héritage du m ineur; qu’il doit être fait par permission
et ordonnance du ju g e , et après avoir reçu par lui l’avis
des parens du mineur.
A u r o u x , sur l ’article 399 de la Coutume de B ourb o n n o is, dit la même chose.
Les mineurs ne pouvoient d’eux-m êm es, et par leur
seule im pulsion, abandonner légalement le domaine : mais
aucune loi ne pouvoit les em pêcher de l’abandonner de
fait. Personne ne pouvoit les forcer, s’ils ne le vo u lo ien t,
C 2
#
�à exploiter le domaine; et cet abandon de j c i i t auroit
sulli pou r légitim er la mise en possession, pour qu’on
ne puisse imprimer à la mise en possession le caractère
de la violence..
Les m in e u rs . déguerpissant volontairem ent, l’obtention;
d’une sentence devenoit inutile.
I l ne faut pas confondre le cas où le preneur à rente
déguerpit pour se décharger du payement de la rente, et
dit au créancier :: voilà l’h éritage, et le cas où il persisteà jo u ir, et cependant demeure en retard de payer la rente,,
et où, à défaut de payem ent, il s’agit de le déposséder.
E n fin , s’il falloit une autorisation judiciaire, elle étoit
dans la sentence du juge qui avoit hom ologué la déli
bération de parens, par laquelle les mineurs avoient été
autorisés à abandonner le dom aine, et même à renoncera
la succession. E lle étoit dans la sentence de i y 56 , qui a
prononcé le résilim ent; sentencequele sieur Rolland pou.—
vo it même se dispenser drobtenm
E n supposant que la possession eût été vicieuse dans le*
principe , le vice auroit été couvert -, du moins par cette
sentence de iy 56 : dès le moment de cette sentence, la:
propriété auroit incontestablement cessé d’être sur la tête?
des enfàns Varagnes..
M a is l’ in c u lp a tio n des a d v e rsa ire s n e se- borne pas là..
Ils font également, un crim e au père des appelons de la
sentence de 17 56 et de celle de 1 7 7 2 , qu’ils soutiennent
avoir été illégalem ent obtenues. Justifions encore à. cefc
égard sa mémoire;.
�( «
)
Sentence du 29 septembre 1756.
Cette sentence , au dire des adversaires, est souveraine
ment injuste. E lle prononce le résiliment du bail faute de
payement des arrérages, quoiqu’il fût constant et établi
par la sentence de 17 5 3 , qu’il n’étoit dû a l’époque de la
mise en possession de Rolland qu’un demi-terme d’arré
rages, et que ceux échus depuis fussent à la charge de
ce dern ier, comme ayant joui.
Est-ce donc seulement à défaut de payement des arré-,
rages échus? N ’e st-ce - pas surtout à raison du refus de
continuer l’exploitation du dom ain e, et de servir la
rente à l’avenir? Ce refus seul n’étoit-il pas suffisant p o u r
faire prononcer le résiliment ?
O n ne parle que d’un dem i-term e d^arrérages; on ne
parle point de l’état de dégradations où l’on avoit laisse
tomber le domaine.; dégradations que Rolland avoit eu
soin , avant de reprendre le domaine , de faire constater*,
dégradations qui se sont trouvées m onter , par bail à
rabais, a 1246 francs»
Rolland devoit-il attendre que les bâtimens fussent
totalement en ru in e ? o u , s’il se déterm inoit à faire les
avances des deniers nécessaires pour les réparations les
plus urgentes, devoit-il rester perpétuellem ent en souf
frances de ses avances, et n’avoir la disposition libre,,
ni du domaine,, ni des deniers? Dira-ton qu’il devoit pro
céder par saisie réelle, et observer rigoureusement toutes
l<*s formalités prescrites alors pour les ventes par décret r
c’est-à-dire,, épuiser en frais la majeure partie de son g'ïgtr*
f
�sans aucune utilité pour les m ineurs,-et au contraire à
leur détrim ent“ ;puisque ces frais seroient -retombés- sur
eux en pure perte?
On a vu ce que dit Loiseau à cet égard.
• L e sierir Rolland s'étoit dessaisi, par le bail à ren te,
de la propriété du domaine ; mais il ne s’en étoit dessaisi
q u e 'sous la condition expresse du payement de la rente,
et de-l’entretien des héritages et bâtimens au même état
qu’ils étoient avant le b a il.-A : défaut d’exécution de cette
double convention , il a été bien fondé à demander le
résiliaient.
Ce n’est donc pas une surprise qu’il a faite à la religion
du juge.
•. ¡,->u
:
« .
Sentence de 1772*
O n a vu / dans l ’exposé des faits, qu’après qu’A ntoine
Varagnes fut parvenu à sa m ajorité, Rolland père obtint
contre l u i , en! 176 8 , une sentence qui déclaroit celle de
1756 exécutoire ; qu’A n toine .Varagnes interjeta appel
en la sénéchaussée de R iom de cette sentence ; que faute
de poursuites pendant trois ans, le père des appelans le
lit cite r, par exploit à dom icile, en la même sénéchaussée,
pour voir, ordonner la pérem ption. Sur cet exploit , il
obtint en 17 7 2 ^ 1^ sentence, à la vérité par défaut, mais
contre laquelle A n toine Varagnes ne se pourvut ni par
opposition ni par appel , qui déclara l’appel périm é.
C ’est contre cette sentence surtout que les adversaires
s’élèvent y comme obtenue sur un exploit n u l , sur un
exploit dont rien ne constate, que la copie a été exacte
ment remise.
�h ï
'
0 3 )
A u bas de l’exploit de demande eu pérem ption, le père
des appelans, trop probe pour prendre ce qui ne lui auroit
pas été d û , a voit écrit qu’il ne pouvoit prendre que cinq
sous. O n lit encore, ces mots : J e ne puis exiger que cinq
s o ls , attendu q u e j e j i s passer la copie. O n ne lit pas
le surplus de la n o te, par la'raison qu’on va dire.
O n se: rappelle q u e , lors de la'transaction , le tuteur
vet les conseillers de tutelle remirent à Antoine Varagnes
les sentences et pièces de procédure. D u nombre de ces
<procédures étoit l’exp loit de la! demande en pérem ption,
q u i, par ce m o yen , s’est trouvé entre les mains des ad
versaires. ,
>
-, P ou r échapper à la conséquence qui résultoit contre
eux de la pérem ption.de l’a p p e l, ils n’ont pas craint de
reproduire un moyen qu’ils au roi ent dû etisevelirl dans
l’o u b li, un m oyen flétrissant pour leur père : ils n’ontipas
craint d’excipen d’une altération et d’un* faux commis.
U ne altération ! on a coupé avec des ciseaux le surplus
de la note. O n ne s’est pas contenté de cela , on a encore
défiguré et effacé le-dernier mot de la seconde ligne qui
suivoit: immédiatement le mot copie.
•
U n faux ! on n’a pas cru avoir'assez fait d’avoir enl'eVé
avec des ciseaux la partie de la note qui pouvoit contra
rier le système qu’on s’étoit formé , on a encore inter
lign é d’ une autre maiii les mots ne et donner ,* en sorte
qu’au lieu des m o t s attendu que j e j i s p a s s e r , on lit je
ne Jis donner ,* ce qui change entièrement le sens de la
. phrase. L e m ol passer, a été surchargé -, il paroit même
qu’on a ftüt le mot pas', :pou'r luire cadrer lei termes avec
le sens qu’on vouloit donner a la plirasciÿietltandis qu’il
j*
�( 24 )
y a v o it, attendu que je f i s passer la copie , ce qui prouveroit au,m oins que la copie n’avoit.pas été retenue, on
j lit aujourd’Jiui, attendu que je ne lu i f is pas donner copie.
V'
y ta donc tout à la >fois altération et faux ; et c’est
r cette’ altération et ce faux que les représentans Varagnes
produisent;com m e un moyen e n .le u r fa v e u r..11 suffit,
pour se convaincre de l’altération et du faux , de jeter les
; ye u x sur la pièce! O n voit clairement qu’il y avoit, attendu
, que je ¡fis.p a sser la .copie:'On.' lit »encore trè s- distinc. tement le m ot passer ,• le mot la a été égalem ent effacé,
de m anière cependant qu’il se lit encore très-facilement;
et aux mois passer la , on a substitué par interligne, et
-au-dessus, donner de.: on a également ajouté par inter
l i g n e la négative, «e qui précède. ; :
. • 'M ais, ont dit les adversaires;, qu’im porte qu’il y ait
l’une ou l’autre version ; qu’il y a it, je f i s passer la cop ie,
ou je ne lu i fis pas donner copie. Dans l’un et l’autre
cas l’exploit ne.seroit pas moins nul; dans le dernier cas,
sans difficulté; un exploit dont il n’a-pas. été donné copie,
étant considéré comme .s’i l n’existoit pas; dans le prem ie r , parce que c’est par l’iiuissier m êm e, qui a seul carac- itère pour cet effet, que la copie doit être remise j à peine
„ne nullité. j.,Lj j
,:c •■■
! - i;■ '.;u
: ,I/a réponse;étoit facile.';Il;ne peut etre question de la
dernière nullité résultante du défaut de remise de copie,
. puisque la note, telle qu’elle étoit originairem ent, prouve
;le contraire, et prouve tellement le contraire , que pour
changer,le sens on a commis l’altération et le faux qu’on
•vient d'expliquer. Quant à la:prem ière on dira ce qui a
îcLé' dit eu;lo sénéchaussée,
; r,S.
L ’exp loit
�4>ï
{*5 )
.
L ’ exploit fait foi que la copie a été remise par l'huis
sier : la note prouve-t-elle le contraire ? Q uelle induc
tion peut-on tirer de cette n o te , loi'squ’on voit qu’une
partie de la note a été enlevée avec des ciseaux ? Cette
altération, cet enlèvem ent n’ont pas été faits sans dessein
et sans objet. O n voit que l’on a encore effacé et dénaturé
le dernier m ot de la seconde lign e, qu’il n’étoit pas pos
sible d’enlever , parce q u ’ il auroit fallu enlever la seconde
ligne. Ce dernier m ot, ainsi que le sens d elà p h rase, prouvent que la note ne finissoit pas aux deux premières lignes
qu’ on a laissé exister. O n voit plus ; on voit encore la
tête des lettres de la troisième ligne qui a été enlevée.
O r , on le dem ande, auroit-il enlevé cette suite de la
ligne , auroit-il commis un faux , si la suite de la note
avoit été insignifiante, si la dernière partie n’avoit pas
combattu les inductions qu’on pouvoit tirer de la p re
mière ? O n ne commet point un faux sans intérêt. Si la
dernière partie avoit été enlevée par l’injure du tem ps,
ou par quelqu’accid en t, les Varagnes pourroient peutêtre être reçus à tirer avantagé de la partie existante. M ais
ici on voit qu’elle a été enlevée à dessein, et de dessein
prémédité ; on voit qu’elle a été coupée avec des ciseaux ;
on remarque la trace des divers coups de ciseaux ; et dèslors tout l’argument que les parties adverses peuvent tirer
de cette note se rétorque contr’eux. '
L a partie existante prouveroit peu contre les appela n stla partie enlevée prouve tout en leur faveur ; car
«nfin on ne persuadera jamais qu’on commette un faux
sans intérêt. L a partie enlevée détruit toutes les asser
tions , toutes les inductions que les adversaires voudroient
D
'■ *
�( 2 6 }
tirer de la partie existante : ils ont détruit eu x-m êm es
leur objection.
Ils argumentent de cette note pour avoir occasion d’in
culper la mémoire de défunt Rolland , et ils produisent
leur propre turpitude, o u ,p o u r m ieux dire , celle de leur
père.
A u reste , et pour donner à cette note tout le sens dont
elle peut être susceptible, il est plus que vraisemblable
que l’huissier chargé de faire signifier cet exploit de voit
aller en même temps pour d’autres significations ou
affaires, et que n’y étant pas envoyé exp rès, il ne prit
que cinq sous pour sa signatui’e. V o ilà pourquoi Rolland
a,vo.it écrit qu’il ne pou voit exiger que cinq sous.
, Cette n o te, loin de prouver l’infidélité et la mauvaise
fo i du père des appelans, prouve.au contraire sa déli
catesse.
Les adversaires ont fait valoir un autre moyen ; ils ont
dit que la demande en pérem ption devoit être form ée
d’avoué à avo u é, et non à dom icile. Ce m oyen, encore
de form e, ne touchant point à l’honneur du sieur R o llan d ,
on ne s’y arrêtera pas : on se contentera d ’observer que
cette objection tom be par deux raisons; la p rem ière,
parce que la demande en péremption est une demande
principale; et la seconde, parce q u e la loi su p p o se le
p o u v o i r de l’avoué tombé en surannation , et étein t,
ainsi que la p ro céd u re, faute de poursuites pendant
trois ans.
C H O S E
J U G É E ,
>
Mais quelque Illégales qu’on veuille supposer, et la
�( 27 )
sentence de 1756 , el la sentence dé 17 7 2 , soit Marianne*,
soit Antoine Varagnes, étoient-ils recevables à les atta
q u e r? O n va dém ontrer la négative.Nous disons-, A n to in e et M arianne'^ car ilt ne s’agit
pas de la portion de Sébastien. L'es'appelons en ont fait
le sacrifice, non par ignorance d e leur d r o it, mais pour
éviter tout ce qui pourroit donner prétexte à litige; et
ils ne rescindront point contre ce sacrifice, quoiqu’il n’ait
pas été accepté. Il ne s’a g it, encore une fois', que de la
portion des deux premiers.
S
‘
i.
r
P o r tio n de M arian n e Varagnes.
E t d’abord il ne poüVoit y’ avoir de difficulté relative
m ent à la portion de M arianne Varagnes. L a sentence de
1 7 5 6 , qui avoit prononcé le résilim en t, avoit incon
testablement acquis à son égard toute l’autorité de la chose
jugée ; non-seulement elle ne s’étoit point pourvue contre
cette sentence, mais encore elle y avoit acquiescé form el
lem ent, en m ajorité, par Pacte de 1773", acte conti’e lequel1
elle n’avoit point réclam é, et contre le q u e l elle ne pouvo it réclamer.
Q u’a-t-on fuit dire à A ntoine Varagnes dans la transac
tion ? on lui fait dire qu’il se proposoit de demander la
subrogation.
Grâces soient rendues au! tuteur et aux conseillers de
tutelle! Il falloit donner une couleur à cette partie de la
transaction, et ils ont imaginé celle-là ; car on ne se per
suadera pas que celte idée soit née dans la tête d’A ntoin e
V aragn es, simple cultivateur.
D 2
�(28)
Les adversaires se sont estimés heureux de trouver dans
la transaction même le moyen d’écarter Peffet de l’acte
du 16 février 1773 : ils l’ont reproduit avec complaisanceIls soutiennent qu’A n toine Varagnes étoit doublement
fondé à demander la subrogation , et par retrait lign agerr
et comme l ’acte contenant cession de droits litigieux.
M ais jamais prétention n’a été plus chim érique et plus,
absurde.
Com m e contenant cession de droits litigieux l U n
acte par lequel une partie acquiesce à un jugement rendu
eontr’elle, un acte par lequel on met fin à un procès,,
peut-il être assimilé à une cession de droits litigieux , qui
est au contraire le commencement et la source d’une in
finité de procès? Celui qui transige pour ne pas p laid err
peut-il être assimilé à celui qui paye au contraire p o u r
plaider ?
C ’est bien m éconnoître le sens et le but des lois jlb .
anastasio et. P e r diversas. Ces lois ont en haine ceux,
q u i, par une injustecupidité, cherchent à porter le trouble,
dans les fam illes, qui achètent des droits contre des tiers ;
mais ceux qui achètent des droits qu’on peut avoir à.
exercer contre eux-m êm es, qui achètent non pour avoir
des p ro cès, mais pour les é v ite r, n’ont jamais été compris,
dans ces lois.
•
1:
Rolland père aohetoit-il des droits contre des tiers ?
aclietoit-il pour troubler des tiers ? il acheloit pour n’êtrepas troublé lui-même. Il y a p lu s, il n’avoit pas même:
besoin d’acte : il n’avoit qu’à laisser expirer le délai derappel.
La loi P e r diversas consacre* par une disposition p r é -
�( 29 )
S
cise , celte distinction fondée sur la raison , entre ceux
qui achètent des droits contre des tiers, et ceux qui achè
tent des droits sur eux-mêmes.
Elle excepte notamment le cas où le possesseur d’un
héritage se fait céder quelque droit litigieux qui lui est
nécessaire pour s’assurer la jouissance libre de l’héritage,
et ne pas courir le danger d ’être évincé.
E xcep tis scilicet cessionibus quas %'d cr e d ito r , v eï
is q u ir es aliquas p o ssid et, pro débita, vol rérum apud
se constitutarum m unim ine ac tuitione accepit.
Rolland père étoit précisém ent dans cette espèce ; il
avoit obtenu une sentence qui résilioit la vente ; il jouisso it, en vertu de cette sentence, du domaine ; il achetoit
pro m unim ine ac tuitione rerürn apud se constitutarum .
P a r retrait lignager ! L e retrait lign ager, ainsi que le
retrait féodal, n’a voient lieu qu’en matière de ven te, ou
acte équipollant à vente.
U ne transaction sur un procès sérieux , sur un procès
existant, a-t-elle jamais été assimilée à vente ?
Un acte par lequel le propriétaire de la chose venduerentre dans sa propriété à. défaut de payement du p r ix ,
a - t - i l jamais été mis au rang des actes donnant ouver
ture , soit au retrait, soit au droit de lo d s?
Quelle que fût autrefois l'a puissance des seigneurs T
jamais on n’a décidé qu’un pareil acte fût sujet aux droits,
de lods. Q u’on lise tous les auteurs ; la raison qu’ils en
donnent est que c’est plutôt un distract qu’ un contrat T
ma gis distractus quam contractus*
Il faut tenir pour certain, dit Pocquet de L ivon ière r
que lorsque le vendeur rentre dans son h éritage, q u oiq u e
�. * fTf.
-,
g% '
| j
^
vendu à terme , Faute de paiem ent du.prix , il n’est point
dû de nouveaux droits féo d au x/p arce que ce n’est pastant- un contrat qu’un d istra ct, pourvu que cela se fasse
par. forme de résolution du prem ier contrat ; ce que
Dum oulin {ippelle contractas rétro sim ilis.
Il enseigne qu’il en est de méine dans le cas de Vexponce,
ou déguerpissement de la part du preneur à rente, i.° parce
que cela se fuit sans bourse d éliée; 2°. parce que l’exponce n’est pas tant une translation de propriété qu’une
extinction et une résolution du droit' de celui qui l’a
faite. Il> ajoute que cela a lieu non-seùlémént lorsqu’elle
est faite entre les mains du bailleur à rente, mais encore
lorsqu’elle est faite entre les mains d’un tiers-acquéreur
de la rente.
•
•
Ce qu’il dit pour le droit de Îods, il le dit pour le retrait.
P o th ie r, dans son T raité des l’etraits , où il parle du
retrait féodal et du retrait lignagèr / s’explique de même.
Les advèrsaii’es opposent C h ab ro l.; mais au passage qu’ils
citent., Chabrol parle-t-il du cas ou le preneur à rente,
pour n’être plus tenu du payement dé la rente ; déguerpit
l ’héritage ? Il parle d’un cas bien différent, de celui où le
débiteur de la rente vend l’héritage ; il décide que les
lignagers du vendeur peuvent retraire l’héritage , q u a n d
meine il n’v, a u r o it d ’a u tre piûx d an s la vente q u e celui
de payer la rente. M ais est-ce là notre esp èce?"'"
Ils ont cru trouver une autorité plus directe dans
P oth ier même , qu’on leur a opp osé, au même T raité
des retraits, nombre 3 7 , o ù , en paiiant de l’action en
rém éré, et généralement de toute action qui tend à la
délivrance d’un im m euble, et par conséquent im m obi-
�'( 3 0
lière comme l’immeuble même , il s’exprim e ainsi :
« Quoique la vente de ces actions ne donne lieu au
« profit de vente et au retirait féodal que lorsque ces
.« actions, par l’exercice que le cessionaire en a l'ait, ont
« été converties dans l'héritage m êm e; néanmoins il y a
« lieu au retrait lignager de ces actions, m êm e avant
« quelles aient été exercées par celui à qui ces.actions ont
« été vendues. L a raison de.diiTércnce est qu’il n’y a que
« la vente „du fief, même qui donne ouverture au profit
« et au retrait féodal , et que l’action pour avoir ou pour
« recouvrer le fief n’est pas le fie f, jusqu’à ce q u e, par
« l’exercice de cette a ctio n , elle ait été convertie dans
« le fief même. A u contraire, la veille d’un droit réputé
.« pour l’héritage, et qui est p ro p re, suffit pour donner
« ouverture au retrait lignager. »
lM
Quelle analogie y a-t-il entre cette espèce et l'espèce
actuelle ; entre un acte par lequel on cède un droit qü’on
.croit avoir , pt^up act£ par .lequel on reconnojt au con
traire n’avoir aucun d ro it; un. acte par lequel j’acquiesce
à un jugement qui déclare que je n’ai jamais e u , ou que
je n’ai plus droit à la chose ?
1
U ne subrogation doit être à un droit utile, à vin droit
qu’on puisse, exercer,. G g n ço it-o n une subrogation au
péjjnt, à un,acte par lçquel pn^s’est départi de tout droit?
Q u’on ne dise pas qu’elle pou voit interjeter appel de
la spntence de i 'j ô ô , et , en interjetant d p p el, la rendre
snns effet. Ce seroit une erreu r, ce seroit m cconnoître
lexepption que la jurisprudence , par des raisons qu’il est
inutile de développer , apportée en ce c;is à la ma.ximc
générale» O ij .citer» aux-,a^yçrsaires.un aufètir qu’ il .ne
�' C V )
peuvent récuser, puisqu’ils l’ont invoqué eux-m cm cs,
Chabrol.
Ce com m entateur, tome 3 , png. 7 3 , commence par
établir qu*à défaut de payement de la rente , le bailleur
ne peut de son autorité expulser le preneur ; qu’il doit
obtenir une sentence qui déclare le bail A rente résilié ;
que dans l’usage on accorde un délai; que la sentence
ordonne que le débiteur de la rente payera dans tel délai,
faute de ce, déclai-e dés le moment le bail ¿\ rente résilié;
q u ’autrefois l’usage étoit,après l ’expiration du délai, d’ob
tenir une seconde sentence, mais que cela ne se pi-atique
plu s ; mais qu’aussi, lorsqu’il est intervenu une sentence con
tradictoire ou par défaut, qui a prononcé la résolution de
la rente, après l’expiration du d é la i, il n’y a plus lieu à
aucun retour en faveur du débiteur, et le créancier de
la rente devient propriétaire incommutable.
Il rapporte un arrêt du parlement de R o u en , du 4
avril 1748, cité aussi par Denizard , qui a jugé que le
créancier d’ une rente fieflee s’étant remis en possession du
fonds, en vertu d’une sentence, le preneur ù rente n’étoit
plus recevable à en ap p eler, q u o iq itü offrit d'en payer
les arrérages et les dépens.
L ’ usage de la sénéchaussée, ajoute-t-il, est conforme.
J_,e débiteur qui a laissé p r o n o n c e r c o n tr e lui la résolu
tion est décjm pour toujours.
L e parlem ent, continue-t-il, a ju g é , par un arrêt rap
porté par L ou et pour la Coutume de Nivernois , qu’un
mari ayant discontinué de payer pendant neuf ans, et
le se ig n e u r ayant demandé la com m ise, la femme qui
oilroit tous les arrérages n’étoit plus recevable à l’einpêcher.
�C 33 5
pêcher. E lle représenta inutilem ent que c’étoit une alié
nation que son mari n’avoit pu faire ; et que ne pouvant
aliéner malgré e lle , il ne pouvoit confisquer non plus. Mais
la commise prenant sa so.urce; dans ime convention., il
fut jugé qu’elle obligeoit les femmes mariées comme toute
autre personne libre.
C o q u ille, poursuit C h ab ro l, est néanmoins: d’avis que
la commise n ’a v o it pas lieu contre le m ineur ; m ais /’’opi
nion contraire yfondée su r Varrêt de L o u et rest plus sûre.
L e m ineur et la ■femme m ariée ont (îailleurs leur recours
contre le tuteur et le mari*
A la vérité , Chabrol parle: du cas où le débiteur de la
rente n’a pas payé dans le délai accordé par la sentence;
et on ne manquera pas de dire que la sentence de i j 56
n’a point accordé de d é la i; qu’elle a prononcé de suite,
le résiliment ; que dès-lors les préjugés qu’on vient de
citer ne reçoivent point d’application» M ais pourquoi la
sentence n’a-t-elle point accordé de délai ? c’est à raison
de l’abandon volontaire fait par les enfans Vacagnes. Les
détenteurs a y a n t, par cet abandon fait en vertu d’avis
de parcos, manifesté l ’in te n tio n de ne plus c o n tin u e r
l’exploitation du dom aine, il n’étoit pas question de leur
accorder un délai. M arianne Varagnes auroit été dans
cette espèce bien moins favorable encore que dans toute
autre à interjeter appel.
Il étoit au moins douteux si elle y auroit été reçue ;
l’acte du 16 février 1773 auroit été au moins une tran
saction sur ce doute. O r , qu’on lise encore Pothier au
m ême tra ité, n°. 110. Il examine si-la transaction par
laquelle le possesseur d’un héritage l ’abandonne , m oyenE
�(34)
nant une certaine som m e, est un acte donnant ouver
ture au retrait. Il décide la n é g a tiv e , à moins que la
transaction n’ait été im aginée pour déguiser une v é ri- ;
table vente ; et il cite D um oulin à l’appui de son sen
timent. La raison qu’il en donne , est que la transac-;
tion étant de lite incerta et dubiâ , il demeure incer
tain si celui qui s’est départi d’un droit qu’il prétendoit
a v o ir , avoit efFectiment ce droit.
M arianne Varagnes p o u v o it, si l’on v e u t, reven ir, se
faire restituer contre l’abandon fait par le tuteur , quoi
q u’en vertu d’avis de parens : c’étoit une action en res
titution. M ais on sait que les actions en restitution, les
actions rescisoires , sont entièrement personnelles ; et
jamais on n’a prétendu qu’un acte par lequel celui qui
ayant une action rescisoire s’en d ép a rt, pudori suo parcens , soit sujet à retrait.
Cette demande en subrogation , soit en vertu des lois
ab A n a sta sio et per D iç e r sa s, soit par retrait lignager,
étoit donc une vraie chim ère ; on peut d ire , le comble
du ridicule.
:
p o r t io n
d
’A
n t o in e
V
a r a g n e s
.
A n toin e Varagnes avoit interjeté a p p e l, mais cet appel
a été déclaré péri et périm é.
O n sait quel est l’effet de la pérem ption d’appel : on
sait la différence qu’il y a à faire à cet égard entre la
pérem ption de l’instance d’a p p e l, et la pérem ption de
l’instance principale.
L a pérem ption de l’instance principale n’éteint point
�y
( 3S )
le droit du dem andeur, n’éteint que l’exploit ; et ne se
rencontrant point d’autre obstacle à ce que le deman
deur reproduise sa dem ande, ’il peut agir par nouvelle
action. M ais il n’en est pas de même pour la pérem p
tion d’appel. L ’appel étant périm é , la sentence acquiert
de plein droit l’autorité de la chose jugée , parce qu’il ne
peut pas y avoir deux appels de la même sentence. L a
pérem ption de l’appel donnant à la sentence l’auto
rité de la chose jugée, entraîne nécessairement l’extinc
tion du droit de l’app elant, à supposer qu’il en eût.
Cette distinction n’est pas im aginée pour le besoin de
la cause. Indépendamment qu’elle est dictée par la raison,
elle est fondée sur la disposition précise de l’article a du
règlem ent du 28 mars 1692.
A la vérité la sentence de 1772 qui a prononcé lai
pérem ption a été rendue par d é fa u t, et de plus n’étoit
point en dernier ressort : elle pouvoit être attaquée , ou
par la voie de l’opposition , ou par celle de l’appel. M ais
qu’im p o rte?cette circonstance ne changeoit rien au sort
d’A n toine Varagnes. E n effet, de quoi auroit-il été ques
tion sur cette opposition, ou sur cet appel ? Il eût été
question uniquement de savoir s’il y a voit pérem ption
ou non. T o u t se seroit réduit à ce seul point de fa it, s’il
y avoit eu discontinuation de procédure pendant le temps
requis pour l ’opérer; il n’eût point été question du m érite
de l’appel en lui-m êm e ; il ne se seroit agi que de la
pérem ption ; e t , à cet égard , la pérem ption portant
sur un fait qui ne pouvoit v a r ie r , le tuteur et les con
seillers de tutelle n’avoient point à craindre que la sen
tence fût infirmée.
E 2
�\*
•\ *•?\
( 3« )
A n toin e Varagnes n’a pu se dissim uler, et que la dis
continuation de poursuites pendant trois ans em portoit
la pérem ption, et que la pérem ption de l’appel em por
toit de plein droit la confirmation de la sentence : qu’at-il im aginé? Il a im aginé de dire que son appel ne portoit
que sur la sentence de 1768 , et non sur celle de 1756.
V o ic i comme il s’explique dans le m ém oire im prim é,
distribué en la sénéchaussée.
« Quand môme la pérem ption contre l’appel de la
« sentence de 1768 auroit été régulièrem ent prononcée j
« elle n’auroit em porté que la confirmation de la sen« tence de 1768 seulem en t, et non la confirmation de
« celle de 1 7 5 6 , dont l’appel auroit toujours été rececc vable ; et c e la , parce q u e'F appel ne portoit que sur
« la sentence de 1768 , et non sur celle de 1 7 6 6 , la
« seule q u i prononce le résilim ent du ha il à rente. Il
« est .bien vrai que la sentence de 1768 déclaroit exé« cutoire celle de 1756. M ais la demande, à ce que cette
cc sentence de i j 56 fût déclarée exécu to ire, n’étoit pas
« pas défin ie; elle étoit lim itée aux chefs de cette senk tence qui prononçoit la condamnation des arrérages de
« rente et de quelques dépens. »
E n la c o u r, A n toine Vîii\ngnes a répété le même lan
gage ; et il n’a pas vu qu’il se condàmhoit lui-même. Sui
v a n t son dire , la sentence de 1768 déclaroit exécutoire
celle de 1755 uniquement pour la condamnation des
arrérages et de quelques dépens : elle la déclaroit exé
cutoire au moins en cette partie. L ’appel portoit donc
au moins sur cette partie de la senteùce de 1706; mais
par là m êm e, la sentence acquéroit l’autorité de la chose
�O fA \
( 37 )
jugée dans tout <le surplus. Q ui ne sa it, en èfFet , que
l’appel, en un c h e f , en une partie de la sentence, em
porte l’acquiescement le plus form el hux autres disposi
tion s? A n toine Varagnes en se défendant seulement sur
la condamnation des arréragés , adhéroit de plus en plus
au résiliment : i l ï i ’aui'oit plu contester que les arrérages.'
M ais supposons qu’A n toine Varagnes eut pu parvenu*
à faire annuller la sentence dé' 1772 , qui déclaroit l’appel
de celle de 1768 p é rim é , il n’auroit pas été plus avancé.
A u fon d, il eût été également déclaré non recevable dans
son appel.
Il eût été déclare non receviiï>le, d’aptes la jurispru
dence particulière en matière de bail i\ rente qui n’admettoit point le preneur , môme m in e u r, après la sen
tence de résiliation, à purger la dem eu re, et à éviter par
un appel le résilim ent,'m ôm e en offrant de payer les arré
rages , sauf le recours du m ineur contre le tuteur.
Il eût été déclaré non recev a b le, d’après le principe
constant, que celui q u i , après avoir répudié , reprend,
les choses étant encore entières , l’hérédité , ne peut la
reprendre qu’en l'état où les ch o se s so n t.
E t si, comme il l’a prétendu dans l’idée de rendre sa
cause m eilleure, son appel ne pertoit que sur la sentence
de 1768 , et non sur celle de 1 7 5 6 ; e t si la sentence de
1768 n’avoit trait qu’à la condamnation des arrérages,
il n’auroit donc point attaqué la sentence de 17 56 quant
à la disposition qui prononçoit lé réàîliment; et alors on
étoit encore bien plus fondé à opposer la fin de nonrecevoir résultante de l’autorite de la chose jugée.
L e droit à la portion d’Antoine Varagnes , n’étoit donc
\
�pas m oins irré vocablemen t acquisque le droit relativem ent
à la portion de Marianne.
Les mineurs Rolland avoient donc incontestablement
droit au moins à la propriété des deux tiers du domaine.
Que p e n s e r maintenant de la transaction par laquelle leurs
intérêts ont été si légèrem ent sacrifiés ?
S E C O N D E
P A R T I E ,
N u ll i t é de la transaction.
L e tuteur et les conseillers de tutelle ont-ils pu aliéner
les droits immobiliers des mineurs , sans form alité, sans
nécessité ?
Les appelans se sont-ils pourvus en temps utile ?
Résulte-t-il contre Pierre-Israè ‘1 Rolland , l’un d’eux ,
une fin de non-recevoir des quittances par luj..souscrites,
en m ajo rité, de partie du p rix ?
C ’est à la solution de ces trois questions que se réduit
cette seconde partie de la discussion,
P R E M I È R E
QUESTI ON.
L e tuteur e t le s c o n s e ille r s de tu te lle ont-ils pu aliéner
les droits des m ineurs ?
E n se fixant sur le jugement dont est a p p e l, on aura
peine à concevoir qu’il émane d’un tribunal aussi éclairé
que la ci-devant sénéchaussée d’A u vergn e : on aura peine
à concevoir que des magistrats aussi distingués aient validé
�( 39 )
un acte où la fraude et la collusion sont aussi manifestées,
un acte où le tuteur a aussi étrangement excédé son
pouvoir.
N ulle observation de toutes les formalités prescrites
pour l’aliénation des biens des mineurs ; point d’avis de
parens ; point de décret du juge ; point d’estimation préa
lable d’experts ; point d’affiches ; point de publications ; et
ce qui est e n c o r e plus im portant, nulle nécessité de vendx-e.
C o m m e n t , en effe t, pourroit-on dire qu’il y avoit néces
sité de v e n d r e , tandis qu’il existait dans la succession
des effets actifs suffisons pour faire face même aux capi
taux non exigibles y tandis qu’il étoit dû , par un des con
seillers de tutelle , uue somme,de 5ooo francs, e x ig ib le ,
produisant intérêt ?
Comment' supposer'là nécessité de v e n d re , lorsqu’on
voit que le payement des deux tiers du p rix a été ater
m oyé à io o o francs parr a n , dont le prem ier terme ne
devoit échoir que dans deux ans?
' ' "
Ce n’est pas tant : l ’acte cpntient remise gratuite des
sommes les plus incontestablement dues aux m ineurs; on
compense les a r r é r a g e s de la renie constituée de 5oo fr.
avec les jouissances, quoique les jouissances, déduction
faite des im positions, ne s’élevassent pas, à beaucoup près,
à la somme de 5 oo francs. Il étoit du aux mineurs des
réparations considérables, constatées par procès v e rb a l/
et portées par bail à rabais à la somme de 1246 francs.'
Il étoit dû s 5o francs d’un autre côté, 108 francs d’autre,
33 fr. d’au Ire ; ce qui portoit les sommes dues à la somme
de 1637 francs en prin cipal, 'et les intérêts depuis vin gt
ans y sauf à déduire la somme de 200 francs pour le billet
�*01
C 4° )
dû par Pierre Rolland père. O n a fait départir les mineurs
de la répétition de toutes ces sommes.; c’est-à-dire qu’on
en a fait un pur don à A n toine Varagnes ( 1 ).
L e tu teu r, ou plutôt ¡les ¡conseillers'de,.-tutelle-, usant
de la chose .des m ineurs,-comme de leur propre chos,e (2) ,
ont aliéné; dans le m ême tem ps, avec aussi peu de;formalité s, urï pré infinim ent précieux , près la ville de Salers ;
et- les.premiers d e n ie r , soit, de , cette .v e n le , soit de la
vente düi domaine,, ont été employés à payer aux conseillers,
(1) Tutoribus, concessum est, à debitoribus p upilli pecuniam
exigere , ut ipso jure liberentur, non etiam donare , v e l etiam
dim/nuendicausd'cifm iis transigere, et ideo eum qu i m inus tutori
solvit à pupilio in reiiquum conveniriposs L . 40 parag. ult. alig.
de cidm. a>el per. tut.
*
.
(2) Si nous remontons à la .tutelle, nous verrons que lesp arens,
conseillers, de tu telle, se sont ménagés le droit et le pouvoir de
disposer arbitrairement,des b i p s des, mineurs, comme tuteurs, sans
c e p e n d a n t être tenus ' d ’auçunes des obligations inhérentes à cette
charge...
O n
nom m a
pour tuteur aux mineurs R o lla n d , Jean M aigne,
chapelier , voisin des ihineurs, entièrement étranger à la fam ille,
sans aucune fortune.
- C e tuteur 11’avoit pouvoir qu’autant qu’il seroit autorisé par
lçs conseillers de .tutelle
il^ n ’étoit ,, com m e.il devoit être ,
q u ’ü n simple figurant: les conseillers de-tutelle éloient donc les
véritables tuteurs : ce sont eux qui ont vendu et administré les biens,
et Jean M aigne, insolvable, ëtoit le tuteur garant et responsable.
•
On
nom m a
en même temps le sieur V alette régisseur des biens,
auquel on fixa un traitement annuel d elà somme de i 5o francs,
et cela pour tenir un registre de dépenses d’un revenu de 2000 fr.
tout au p l u s c e qui formoit la for lune des m meurs dont le
nombre étoit de huit epfiiiis» <,.-,
,
de
�|q £
t ^ï : )'
.
.
de tu te lle , et à Valette , cégisseur > non ^ seulement
les sommes exigibles qui leur étoient dues , et pou r1
lesquelles, on pou voit craindre, :à toute r ig u e u l- q u ’ils
fissent des poursuites niais encore dés èlomiiiës u d n e x i-1
gib lesjd es capitaux aliénés à rente Constituée.
1 1 ;‘<t
R épondra-t-on que ce n’est pas ici une Vente , que'
c’est une transaction ; que la transaction n’est pas interdite
au tu teu r?
• 1! .
‘
Ce n’est pas par 4 a côüleür et la dénomination tjù’oa
donne à un acte qu’il faut juger du m érite de l’acte.
Il ne faut pas croire d’ailleurs que la1 transaction soit
plus permise au tuteur que tout autre acte em portant
aliénation des immeubles.
t
'>
A ^
L ’ordonnance d e i 56o confirme toute transaction passée
entre majeurs, et choses qui sont en leur disposition,‘sans
dol et fraude.
Il suit de là qu’il n’en est pas de même des transac
tions passées avec des mineurs , ou dans lesquelles l’on
traite dos droits des mineurs ; c’est l’observation que fait
M . Chabrol sur l’article 3 du titre 14 , tome 2 , page 204.'
Cet auteur ajoute ensuite que si le m ineur peut réclam er
contre une transanction , il doit établir qu’il a été lé s é ,
à m o in s, d it- il, que la transaction ne contienne une alié
nation d’immeubles, auquel cas il n’a pas besoin de prouve?
la lésion.
A u surplus, M . Chabrol n’entend parler que d’une
transaction passée par le m ineur lui-même ; mais la tran
saction qui emporte aliénation d’im m eubles, et qui est
passée par un tu teu r, est nulle de plein droit.
La loi du 24 août 1790 , n’autorise les compromis
F
«Qt
�tok
4 o|
t 4a.-)'
qu’entre les personnes majeures et jouissant de leurs
d r o its .
,:
:-
;, S ’il en étoit a ig re m e n t, on ne m anquerait jamais de
inoyens pour- éluder les lois protectrices des Liens , des
mineurs; ce qu’on n e,pou rrait faire par une vente , ;on
le feroit par une transaction; ce qu’on ne pourrait faire
directem ent, ; on ¡ le feroit indirectement.
O n a qualifié de transaction l’acte du 30 octobre 1773..
ce, n’est pasr,par la dénomination de l’aqte qu’il
faut juger du mérite, l’acte.
¡r. ;¡ ¡ ; u
,... y>-M ,
Q u ’est-ce qu’une transaction ? . . . . . . .
;.
C ’est une convention , c’est ; un traité de lite d u b ia ,
vel m o ta , vel movenda , sur procès à ju g er; c’est un
accord , sur., un.,droit incertain,et-litigieux. :
i
g-Ici le_ tuteur a. transigé sur un droit) acquis, sur un
procès irrévocablem ent terminé par . des actes volon
taires et par ,des,sentences passées en force de chose
jugée.
;!
. : •.
L a transaction se fa it, nous dit L acom b e, de lite dubia ,
non de valida et indubitata , et ju d ica ta nam res ju d i
cata p roverita teexçip itur. ,
•
U n pareil acte , quelque dénomination q u ’o n lui ait
dqnnée , nç.peut, jamais être mis au ¡rang çle.s actes permis
v
à .u n
^ u lé u r ..
.,. ;
; ; ¿ .- j :
1
—
;
L e délaissement étoit convenu et promis ¿.A n toin e
Yaragnes^un-m ois ayant la;,tr»nsnction.
. ;
j- .) ■
fi;; ;!■
>t
.,
( ■
: i"f ) !
I ’, ) I ' :
. v î i ' i !. :
U
' '
>1'
> ‘ ;i ! 1JI i ir i .
*u • o.-*’ :
'!
t::’) É' ’■
I
:
'
�lo j
C 43 )
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
'(
L e s appelons se sont-ils pourvus en temps utile ? ;
L a transaction est du 30 octobre 1773 > et
demande
en nullité est du 2.5 février 1788. Mais il est une pre
m ière observation : par qui a été consentie la transac
tion ? par le tuteur seul ; les mineurs n’y ont point été
parties : c’est le tuteur seul qui a contracté. O r , à cet
é g a rd , il y a une grande distinction ; distinction qui n’a
point échappé au dernier commentateur de la Coutume*
Chabrol agite la question de savoir s i , lorsque les
héritages du m ineur ont été aliénés pendant sa m ajorité
sans aucune nécesité et sans form alités, le m ineur devenu
majeur a dix ans ou trente ans pour y ren trer, et il décide
que si le mineur a vendu lui-m êm e , il n’a que dix ans,
sans même distinguer s’il a été assisté de son curateur.
Lorsque c’est le tu teu r, au contraire, qui a alién é, alors
le m ineur a trente ans. L e m ineur n’a même pas. besoin
de prendre des lettres de rescision ; c’est le cas de la maxime :
L o c u s est nullitati non restitutioni. L a l o i , dit C h ab rol,
ne permet au tuteur de vendre que dans certains cas,
et en observant certaines formalités. S’il n’y satisfait pas,
l ’acte est nul par défaut de pou voir ; et une vente nulle,
comme faite à non habente potestatem , n’acquiert pas
plus d’autorité après dix ans que le premier jour. Il n’y
a que la prescription de trente ans.
On ne peut pas se prévaloir de la maxime que le fait
du tuteur est le fait du mineur. Cette maxime est vraie
r
a
J(**
�U 't
( 44
)
pour les actes qui sont de pure administration , mais non
pou r ceux qui excèdent les bonnes de l’adm inistration,
et par conséquent le pou voir du tuteur.
Grenier >dans son Commentaii-e s u rl’édit des hypothè
ques , fait cette môme distinction. U n autre p rin cip e,
c’est que le d é la i, quel qu’il s o it, lorsque la restitution
est fondée sur le dol ou sur la violence , ne court que
du jour où la violence a cessé, et où la fraude a été
découverte. L ’ordonnance de 1667 en a :une disposition
précise; Cette ordonnance a mis au nombre des ouver
tures des requêtes civiles le d o l; et parmi les circons
tances qui caractérisent le d o l, la rétention des pièces par
Ja partie ; 'et elle ajoute que les dix ans ne courront que
du jour de la découverte. O r , i c i , d’une,part, on a aflect^
de ne faire mention dans la transaction d^aucune des pièces
qui pottvoient éclairer les mineurs sur leurs i n t é r ê t s ,
principalem ent de la sentence du 29 septembre 1756
qui p r o n o n ç o it le résilim ent; e t , d’autre p art, le tuteur
s’en dessaisit , et les reinet ; à qui ? au père des adver
saires qui les ont encore en leur pouvoir. L e fait de la
détention est prouvé par la transaction même. A i n s i,
l(e délai n’auroit jamais pu utilement courir.
•
T R O I S I È M
E
Q U E S T I O N .
R é su lte -t-il contre P ie r re -lsr a ë l R olland une f in de nonrecevoir des deux quittances , des 30 ju in 1778 et 11
ju in 1782 , p a r lu i consenties en m ajorité ?
>
Sans doute il ne peut.pas ;ÿ avoir de -plus grande fin
i
�107
( 45)
de non-recevoîr que l’approbation faite par le mineur lu im em e , parvenu i\ sa majorité.
Mais que faut-il pour que le m ineur , devenu- ma
je u r, soit censé avoir approuve et ratifié ?
Si l’acte , qui a été passé en majorité , n’est qu’une
suite et une conséquence de ce qui a été fait en m ino
rité , alors cet acte n’est point regai'dé comme une rati
fication qui doive exclure la réclamation du mineur.
C ’est la disposition du fam eux1 paragraphe Scio au
digeste, loi 3 , titre D e m inorïbus.
V o ic i les ternies de cette loi.
Scio etiam illud aliqiiando incidisse ; m inor viginti
quinque annis m iscaerat se paternes hœ redilati m a jor
q u efa ctu s exegerat a liq u ià à dtbitoribus p a tem is : in o x
desiderabat restitui in integrum quo magis abstinuerat
paterna hccreditate, Contradicebatur ei , q u a si m ajor
J a ctu s comprobasset quod sibi m in o ri placuit j putavimus restituendum in integrum initio inspecta j idem
pulo , et si aliénant adiit hœreditalem.
L e b r u u , livre 4 , ch. 2., section 2 , en e x p liq u a n t ce
paragraphe , rapporte cet exemple tiré de Barthole. 11
suppose qu’un m ineur ait vendu , et que la tradition et
la délivrance de la chose n’aient été faites qu’en m ajorité
( ic i la tradition et la délivrance ont été faites par les
tuteurs, môme pendant la m in orité) ; alors il décide que
la tradition de la chose, quoique faite en majorité , n’est
pas un obstacle à la restitution , parce que cette tradition
est une suite et une conséquence nécessaire de la vente ;
quia i si a traditin fit ex neci-ssitate p rio n s con.tr a ctu s,
eu/n habi'Ot ncressariant nonsequentuwi ad prim um
a d u in inspicium s priacipium .
*•'
�O n connoît l ’arrêt rapporté au journal du Palais qui
a jugé conformément à ces principes.
Gujas a fait une distinction entre le cas où l’acte passé
en m inorité est com plet et parfait , et le cas où il n’est
que commencé en m in o rité, et parachevé et rendu par
fait en majorité. O n p e u t, d it - il, donner pour exem ple
de ce dernier cas un acte passé en m inorité sous une
condition potestative , sous une condition dont l’évé
nement dépende de la volonté du m ineur lorsqu’il sera
majeur.
v
■ •
Lorsque l’acte passé en m inorité est pariait et absolu,
Cujas enseigne que le second acte passé en m ajorité, qui
n’est que la suite du prem ier , n’est pas un obstacle à la
institution ; et cela, par la raison qu’en donne la lo i, In itia
inspecto. Ce second acte prend dans ce cas sa source dans
le prem ier; il prend son vice dans le. vice de l’o rigin e,
incepit unde incipere non potuit,
«•• Si l’acte, au contraire, n’a été que commencé en m ino
rité ; sil n’a reçu sa perfection que par l’acte passé en
m ajorité, il enseigne qu’il n’y a pas lieu à la restitution:
pourquoi ? parce qu?un acte, tant qu’il n’est pas parfait,
est comme s’il n’existoit pas ; parce qu’il n’est censé
exister, et avoir véritablem ent c o m m e n c é , que du jour
où il a été p a r fa it •, p a r c e que sa perfection en majo
rité produit le même effet que si l’acte avoit été passé
entièrement en m inorité; et alors on peut dire : incepit
unde incipere debuit.
Cette distinction n’a pas échappé aux adversaires;
mais
ils l’ont prise en sens inverse pour l’adapter à
leur'systèm e, v ■k
�C 47 D
Il faut distinguer , disent-ils , dans leur seconde écri
ture si l’acte étoit com plet en m in o rité, ou s’il n’a été
que commencé en m in o rité1, ensorte que l’acte fait en
majorité n’en soit que le complément. A u prem ier cas,
c’est-à-dirè , lorsque l’acte a été complet en m inorité , le
second acte passé eu majorité est un acte séparé, qui ne
m érite pas la restitution ; dans le second cas, au contraire,
c’est un acte néccssaii-e auquel la restitution profite,
s L ’on a vu que c’est absolument l’opposé ; les' adver
saires font dire à cujas précisém ent le contraire de ce
qu’il a dit. •
'
< L a loi S i sine decreto 2 , au co d e , livre 5 , titre 7 4 ,
S i m ajor fa ctu s alienationem fa c ta m ratam h a b iie rit,
est encore plus précise.
■E lle est conçue en ces termes:
S i sine decreto prœ sidis prœdia tua à tutore tuo
alienata s im t, nec speciali confîrm atione, vel, s ib o n â
Jide possessor J u is s e t, sta tuti temporis excursu id quod
perperam est a ctiu n fu era t sta bilitu m , prœ sit provïncicc
possessionern in ju s tuum retrahet.
L a disposition de cette loi est g é n é r a le ; elle a retran
ché tout l’arbitraire ; elle a voulu q u e 'la ratification
fût expresse et faite en connoissance de cause ; elle n’a
plus voulu qu’on pût induire une. ratification par de
simples présom ption, par induction d’actes qui ne parois-'
soient pas avoir été faits dans l’intention form elle de
ratifier; elle n’admet point de plus de ratification tacite, si
ce n’est celle résultante du silence pendant le temps utile
pour la prescription et Sa disposition com prend toutes
les aliénations laites par les tuteurs sans formalités de
justice.
�( 48 )
'I l faut donc que la ratification soit expresse, et que le
m in eu r,, devenu m a je u r, déclare expressément qu’il
ratifie l’acte, et qu’il entend qu’il ait son exécution. ,
L a simple continuation de ce qui a été fait t, ne peut
équivaloir à cette ratification expresse que la loi désire,)
et D um oulin en expi’ime la raison avec son énergie ordi
naire.
R a tio q u ia hujusm oài corifirm atio, n ih il d a t, nihil,
wQvi ju r is c o n fe r t, nec invalidum validai.j non enim
Jit) ad jin è m disponendi, sed solùm a djin em approbandi
conjirm abile taie quale e s t , et non aliter.
L a . ratification ne doit pas être seulement expresse,
çlle doit être faite encore en connoissance de cause.
C ’est encore ce qu’enseigne D um oulin.
L a confirmation d’une disposition n u lle , dit ce pro
fond jurisconsulte, n’est point validée par une simple
ratification qui n’énonce point la connoissance de la
nullité a v e c l ’intention de la réparer. T o u te approbation
sim ple, d it - il encore, renferm e toujours la condition
tacite que le titre originaire est valable. L a seule rati
fication , avec connoissance de la nullité que l ’acte ren
fe rm e , et avec l’intention de là réparer, valide cet acte.«
I n tantum r, ce sont ses expressions, quod etiam si
conjirm atum esset n u llu m , vel invalidum , vahdaretur
p'er conjirm ationem potestatem liabeatis , scientis nullitatem et vitium co n jirm a ti; secùs in conjirm ationibus
quœ fierent sine causœ cognitione.
I/E p in e de G rainville atteste les mêmes principes. Si
l ’acte confirmé est nul, d it-il, il n’est point valide par la sim
ple con firm rtion , ¿1 m oins qu’il n énonce la conm ssance
de
�u»
C 49 )
de la nullité du p rem ier, avec Vintcntion d elà réparer;
q u ’il n’en rapporte la substance, et ne contienne la décla
ration de l’intention de vouloir liii donner l’exécution.
A ppliquons maintenant ces princiqes. L e sieur Rolland
t—il déclaré dans ces quittances qu’ il cnlcndoit que
l ’acte du 30 octobre 1773 eût son exécution ? A - l- il
consenti ces quittances, pour se servir de l’expression
de D um oulin , ad fin e m disponendi ? Il s’est borné à
recevoir.
Faudroit-il se reporter à la distinction faite par Cujas ?
les adversaires n’en seroient pas plus avancés.
Suivant C u jas, lorsque l’acte a été com plet en m ino
rité , les actes faits en majorité , qui n’en sont que la
su ite , ne sont pas un obtacle à la restitution.
Ici 1’acte n’a pas été seulement com plet en m inorité , il
a été exécuté. Varagnes s’est mis aussitôt en possession
du domaine qui lui a été abandonné.
Mais le sieur Rolland a-t-il surtout approuvé en connoissance de cau se, curn causas cognitione?
Connoissoit-t-il la sentence de 1 7 5 6 , qui prononçoit
le résiliaient ? Connoissoit-il l ’acte p a r lequel M arianne
Varagnes avoit déclaré acquiescera cette même sentence
et adhérer au résilim ent? A v o it - il connoissanee de la,
sentence de la sénéchaussée d’A uvergne, de i772 ,q u id éclaroit l’appel interjeté par Varagnes péri et périm é.
Il connoissoit bien , a-t-on d i t , la transaction, puis
qu’elle est rappelée dans les quittances.
L a transaction est à la vérité relatée , mais elle n’est
point datée , ce qu’on n’auroit certainement pas manqué
de fa ire , s’il l’avoit eue effectivement sous les yeux,
G
«%
�C 5o )
M ais supposons qu’elle a été v u e , lu e et tenue. Q uelque
communication qu’il en ait p rise , il n’a pu y vo ir que
ce qui y étoit ; il n’a pu y vo ir ce qui n’y étoit pas.
L a transaction ne l’a in stru it, ni de la sentence de 1756
qui a prononcé le résilim en t, ni de l’acte d’acquiesce
ment de M arianne V aragn es, ni de la sentence de pérem p
tion obtenue contre Antoine.
L a preuve qu’il n’en a v o it, et ne pouvoit en avoir
aucune connoissance , résulte non-seulement de ce que
. ces pièces ne sont ni visées ni datées, soit dans la tran
saction , soit dans les deux quittances ; mais encore de
ce qui est dit dans le tra ité , que le tuteur a remis audit
V aragnes toutes pièces , actes et procédure.
O n ne pourroit du moins lui refuser le bénéfice de
la restitution contre ces quittances. Les actes consentis,
par les majeurs ne sont pas moins sujets à restitution
que ceux consentis par les. mineurs , lorsqu’ils sont évi
demment le fruit du dol et de l’erreur.
L e sieur R olland s’est pourvu en temps utile ; il s’est
pou rvu dans les d ix ans. L a prem ière quittance est en
effet du 30 juin 17 7 8 , et la demande en nullité d e la tran
saction , sous laquelle demande sont nécessairement com
prises Louies les conclusions qui tendent à la faire pro
noncer , est du 2.5- février 1788. X e délai d'ailleurs nyau-•
ro it pu co u rir tant que les pièces ont démeuré au
p o u v o ir de Tadversaire. O n a v u q u e, parla transaction*
le tuteur et les conseillers de tutelle ont remis à V avag n e s les pièces et sentences qui auroient pu donner quelque
connoissance aux mineure.
Quel est reflet de la restitution ? c’est d’anéantir l’acte 5
�113C 51 }
«'est de remettre les parties au même et semblable état
qu’elles étoient avant l’acte.
Si d’après toutes les circonstances de frau d e, si d’après
la preuve écrite que le sieur Rolland l’apporte de l’igno
rance de son d r o it , on ne peut lui refuser la restitution ;
si par la restitution les quittances doivent etre considé
rées comme non avenues, que restera-t-il ? la transac
tion ; et quelle transaction ? E st-il un acte où le tuteur
ait autant méconnu ses devoirs?
O n ne peut donc induire, contre le sieur R olland, aucune
fin de non-recevoir des deux quittances de 1778 et 1782.
D ’une p a r t , elles ne sont que la suite de ce qui a été
fuit en m in orité; et ce qui n’est que la su ite, l’exécu
tion d’un acte, n’en n’est pas la confirmation. D ’autre
p a r t, elles sont infectées du m ême vice de dol que la
transaction.
Dans tous les ca s, elles ne pourroient être opposées
à la dame R o lla n d , épouse du sieur G r o s , qui n’y a
point été partie.
Elles ne pouri’oient môme être opposées au sieur R olland
que pour la portion qu’il amendoit à l’époque de ces
quittances , et non pour les portions qu’il a acquises
depuis de ses quatre frères. O n ne Contestera sans doute
pas cette dernière proposition. O n a voulu réduire la por
tion de ces quatre frères à un douzième cliacun : on n’a
pas fait attention que les biens étant situés en pays de
cou tum e, le testament du père ne valoit que pour le
quart.
P A G È S - M E I M A C , ancien ju risco n su lte.
D E V E Z E , avoué.
G 2
�C O P I E
D e la transaction passée entre A n to in e V a ra g n e s,
d ’une p a r t , et le tuteur et conseillers de tutelle des
m ineurs R o lla n d , d'autre.
«
«
«
«
« Par-devant les notaires soussignés , en cette ville de
Salers , ont été présens Jean M aigne , tuteur des
enfans de feu P ierre Rolland , v iv a n t, seigneur de
la G u illa u m ie, officier en la chancellerie près le conseil supérieur de Clerm ont-Ferrand, demeurant en cette
« v i l l e , d’ une part ;
« A n toin e V a ra gn e s, laboureu r, demeurant au village:
« de M o n fouilh ou x,paroisse d’id e s , de présent en cette
« v ille y d’autre part ;
«. Lesquelles parties ont ra p p o rté, i 0". q u e , par acte
« en form e du 18 décem bre 1 7 4 7 , ledit sieur Rolland a
« vendu à G éraud V aragn es, père dudit V aragn es, son
v domaine situé au lieu de F leu rât, moyennant douze
« m ille liv re s, et quelques étrennes, p ou r raison de« laquelle somme ledit Varagnes a créé une rente cons« tituée de cinq cents livres, non su je tte à retenue d’im—
« positions, avec mention que ledit sieur G éraud V arar gnes pourroit rembourser les douze mille livres à
« pnyemens m orcelés, dont le moindre seroit de sept.
« cents livres.
« 2°^ Q u e ledit Géraud Varagnes est déeédé débiteur
« d’une somme de deux c e n t cinquante livres pour d er« nier terme de ladite re n te , échu au 30 novembre;
�Jl>
( 53 )
« 1752 , et de trente-trois livres trois sous pour dixièmes
« payés par ledit feu sieur Rolland ;
« L e q u e l, dès le 25 mars 17^3 , s’est mis en possession
« dudit dom aine, après avoir obtenu sentence qui condamne ledit Yaragnes , et ses frères et sœurs, au paye« ment desdites sommes. »
O n ne parle point de l’abandon du dom aine; de la renoncia
tion faite par Antoine Yaragnes à la succession de son père ; de
l ’avis de parens qui a autorisé les mineurs et le tu te u r, nonseulement à abandonner le dom aine, mais encore à renoncer à
la succession ; de la sentence du juge des lieux , qui a homologué
cet avis de parens ; de la nécessité où a été Rolland père de
reprendre ledit dom aine, pour n ’être pas privé tout à la fois et du
domaine et de la rente ; de la signature de B a rjo u , curateur
d ’Antoine V aragnes, au bas du bail consenti par R o lla n d , ce
qui écarte toute idée de violence. On affecte de rapporter la prise
de possession à la sentence du 25 mars 1753 , tandis que la mise
en possession n ’a été que la suite et l’effet de l’abandon.
«
«
«
«
« 3°. Q u e , dès l’année 1 7 5 6 , ledit Rolland a fait p ro céder au bailàrabaisdesrépara’tionsàfaireauditdom aine
de Fleurât , dont l ’a d ju d ic a tio n a été fa ite au nommé
Pom eyrat „ lors ferm ier, et duquel domaine on est
encore en possession, a
L a sentence dont il est fait mention , est du 5 mai 1766. On
passe sous silence celle du 29 septembre 176 6 , qui prononce la
résiliation du bail.
,
« 40. Que le 23 décembre 17 6 7 , ledit feu sieur Rolland
« a dem andé, tant l’adjudication de ladite sentence que
« les frais et dépens à lui adjugés, ensemble le m on«$ tant du bail à l’ubais *, et obtenu sentence au buillui<£e
O
*
�• "
a
«
et
«
«
■ ri
( ,% )
de celle . v ille , le 20 février 17 6 8 , de laquelle ledit
\ aragnes s’étoit rendu appelant ; et la sentence passée
en force de chose ju g é e , comme ledit Varagnes n’ayant
poursuivi ni fait diligence sur son appel pendant trois
ans consécutifs. »
On ne parle p o in t, encore une fo is , de la sentence de i j 5 6 ;
on. référé la sentence obtenue en 1768 à la sentence du 5 mai
1756 relative seulement aux réparations. On écarte tout ce qui
a Irait à la sentence de 17 5 6 , relative à la propriété : on n’a garde
de parler de cette sentence, et encore mpins de dire qu’cljp a
passé en force de chose jugée.
cc 5 °. Que précédemm ent ledit V ard g n es, en état de
«
et
«
«
«
m inorité , répudia à la succession dudit feu Varagnes
son père; et ledit sieur R o lla n d , par acte reçu V alette ,
l ’un des notaires soussignés, le 16 février d ern ier,
contrôlé le 2 5 , a réglé avec M arianne Varagnes , sœur
dudit Varagnes. » ’ ,
Pourquoi le mot vague reg/e ? pourquoi ne pas dire qu’elle
avoit acquiescé h la résolution du contrat? Pourquoi surtout ne
pas rappeler l'a cte, la dat e, le nom du notaire qui l ’avoit reçu?
Qui ne voit qu’on a voulu cacher au mineur les deux faits les plus
im portans, savoir , que le bail avoit été résolu par la sentence du
39 septembre 175G, et que Marianne Varagnes avoit acquiescé
formellement à cette sentence.
.•■ •;
' ' 1.
1' *
-
j 11‘ ’ »*:
‘ •1
-'
<
« 6°. Q u’en vertu du billet du 26 mars 1 7 6 3 , ledit
« feu sieur Rolland étoit débiteur dudit Varagnes d’une
« somme de deux dents l iv ., pour le payement de laquelle
« il avoit fait assigner , au présidial de R iom , ledit
« feu sieur ' R o lla n d , dès le 14 mars 1768.
« Que c’est dans ces circonstances que ledit V a ra g n e s,
�( 55 )
« tant de son chef que de celui de Sébastien V aragnes,
« son fr è r e , est dans le dessein d’exécuter les engage« mens contractés par son dit feu p è re , de rentrer en la
« possession dudit dom aine, et demander la restitution des
« fru its, jouissances, depuis 1763 , et le montant des
« dégradations de toute nature faites audit domaine :
« qu’en outre il entendoit se rendre appelant de toutes
« sentences rendues, tant contre lui que contre ^es frères
« et sœ urs, et, en exp rès, de ce}}e qui pdjugeoit le bail
« à rabais ; soit parce qu’il étoit notoire que ledit feu
« sieur R o lla n d , ou quoi que ce soit P o m e y ra t, n’avoient
« fait que très-peu de réparations, dont l’objet ne pou voit
« s’élever à quatre cents livres ; soit parce que la ’résti* tion des fruits, compensation faite de cinq cents livres
« de rente an n u elle, s’élevoît à une sommé bien plus
« considérable; soit enfin parce que le billet de deux cents
« liv. avoit donné lieu à une com pensation, et qu’au sur« plus on ne pou voit lui opposer la répudiation faite à
« la succession de son p è re , par la raison , i° . qu’il étoît
« encore en l’état de m inorité ; 20. qu’un enfant est
« toujours recevable à accepter l ’iiérédité d’un p è re, en
« remplissant ses engageinens, ( * ) dans la ciiVonstâncé,
( * ) C ela est vr a i , à le g a r c i des créanciers , p a r ce q ue cVst l ’FhVérêt m êm e
de cenx - c i qu i trouvent une d oub le garantie , une d oub le sûreté dans les
biens d e l à succession et dans les biens particu liers de l ’héritier ; mais i l
i r e h est pas de m êm e à l ’égard des autres cohéritiers. D e méine que c e l u i
q ui a a ccep té la succession
ne petit tesser d etré héritier ; de m êm e c e l u i
q u i'a r e n o n c é ne pe u t p l u ite p r e r id r e fe'titre d ’h é r i ti e r , tant q u ’rl y a d ’aiitre* héritiers venant à la succession r c ’est la disposition éxpresse de la lo’i
4
au c o d . d e R e p . yel. AbstînendA liicridaie. S i t u t m a jo r v ig e n t i qu ù iÿ u et
�b
_«
,«
«
«
«
( 56)
surtout, qne la sentence qui ordonne la résolution de ladite vente u’eulève la faculté d’exécutercetto même vente
q u ’après trente,,ans utiles , à l’exem ple du retrait conventionnel ; et qu’à l’égard de l’acte passé avec M arianne
V a ra g n e s, il étoit toujours dans le cas de demander la
subrogation. »
•
.
On u c‘ peut ici qu'admirer le génie du conseiller de tutelle, rédac‘ teur dé la transaction', pour colorer le désistement de la portion
de'M arianne V aragnes,irrévocablem ent acquise.
« L ed it maigne , de son c ô té , étoit dans le dessein de
« soutenir au contraire;, mais les parties s’exposant A des
« frais considérables, désirant les éviter , elles ont sur le
« tou t, circonstances et dépendances, après avoir l ’avis des
k conseillers de tutelle des enfans dudit feu sieur R o lla n d ,
« tra ité , tan sigé, et accordé irrévocablem ent, ainsi que
« s’ensuit , savoir , que le p rix principal de ladite rente
« demeure fixé , comme il é to it, à la même somme de
« douze m ille livres , et soixante et douze livres pour
« étrennes , en déduction de laquelle ledit yaragn es en a
cc présentement payé celle de deux m ille quatre cents
« livres : ladite somme reçue et retirée par V a le tte , l’un
artnis , dit c ette loi , a n te q iia m a d e a t , d e la t c m r e p u d ia n s su ccesio n e.tn ,
p o s t q u eerere n on p o t e s t : it a qnep sita m ren u n cia n d o n i h i l tig it.
A n t o i n e V a r a g n e s , ayant rñpudié , á la vérité en m inorité , mais ne s étant
pas fait restitu e r dans les d is.a n s de sa iiujorité , é i o i t d ev en u
étranger
à la succession. I-a succession avoit été alors d ivisib lç entre M arian ne et
Sébastien Varagnes. M arian ne V arag n e s ainendoit incontest.iblfm ent la m o i
tié ; cependant les a p p e lla n s , pour éviter toute om bre de lit ig.» t se son t res
t r a i n t s , p o u r la portion de M a r ia n n a Varagnes , à un tiers,
«. des
�( 57 )
« des notaires soussignés , dont quittance ; e t, à l’égard
« du surplus , ledit Vax-agnes promet et s’oblige de payer
« seize cents livres au 8 juin p roch ain , sans in térêt,
« jusqu’au 2 5 mars p ro ch ain , et le x'estant, à raison de
« mille livres par termes: le prem ier, à échoir d’au joxir« d’hui eu deux ans ; le second, à pareil jour de l’année
« d’après , et ainsi continuer d’année en année jusqu’à
« iiu de payem ent, à la cliax’ge de l’intérêt de l’entière
« somme restante , à raison de cinq cents livres pour les
« douze mille liv re s; ledit intérêt non sujet à aucune
« retenue de dixièm e et autres impositions prévues et
« à prévoir. E t , à l’égard desdites éti’ennes , ledit V ai’a« gnes les a présentement payées com ptan t, lesquelles
« ont été délivrées de la main à la main aux enfans dudit
« leu sieur R ollan d , pour servir à leurs petits besoins,
« suivant l’avis desdits sieurs conseillers de tutelle. »
Il n’y avoit donc pas nécessité de vendre.
« Et , au inoyeu de c e , ledit Varagnes demeure autoi'isé
« a se mettre en possession dudit domaine au 2.5 mars
« prochain, et en jouir comme de c h o se à lui p r o p r e ; e t
« ledit M aigne a délivré audit Varagnes lesdites pro« cêdures, sentences ; le subroge 11 ses périls et fo r tu n e s,
« au lieu et place de ladite M arianne V a ra g n es, pour
« raison de l ’eifet de l’acte dudit jour 16 février dernier,
« vers laquelle, et vex*s ledit Sébastien Varagnes, ses frères
« et sœurs , il prom et garantir et indemniser les enfans
« dudit feu sieur Rolland.
« E t lesdites parties sesonti’espectivement tenues quittes
« de tous lesdits o b jets, demandes et répétitions, sans
H
�« dépens dommages et intérêts , sans se rien réserver ni
« retenir (* ).
« E t , en ou tre, promet ledit Varagnes de délivrer , à
« ses frais et dépens, audit t u t e u r , expédition en par« chemin du présent acte ; demeure convenu que si au
« cas ledit feu sieur Rolland avoit vendu certains héritages
« dépendans dudit dom aine, depuis le contrat de 174 7, et
« que le p rix desdites ventes n’excédât la somme de trois
« cent six l i v . , en ce cas cette somme demeure compensée
« comme les autres objets contenus au présent règle( * ) II étoit d û , aux m ineurs R o lla n d , la somm e de î 5o l i v r e s , d ’un côté ;
33 livres 10 s. , d ’autre ; 108 livres , d ’autre ; et 12/fi livres , po u r la
r e c o n stru c tio n de la grange , ce qui fait au total la som me de 1537 livret
en p r i n c i p a l , avec intérêts depuis dix-sept ou vin g t ans.
A n to in e V arag n e s exigea q u ’on lu i en fit la remise-, et elle l u i fut a c
c o rd é e sans difficulté.
C ’est i c i le cas de faire une rem arque essen tielle, q u i prouvera le p eu
d e b onne f o i e t d e d é lic a t e s s e d 'A n t o in e V a r a g n e s .
.D a n s l ’acte du 24 octobre 1773 , par lequel Sébastien , son frère , lui
céd a tous ses d r o i t s , m oy en n a n t la som m e de 400 l i v r e s , Antoine V a
ragnes y rapporte que le
père
des appellans avoit fait des réparations
très - considérables au domaine.
E t dans la transaction du
3o
octobre 1773 , il est d i t , au contraire , que
le père des appellans a fait très-peu de réparations , d o n t la valeur peut
s'élever tout au plus à la som m e de 400 livres.
V o i l à deux actes authentiques q u i constatent le fait des réparations d'u ne
m anière bien différente , parce que les intérêts étoient différens.
C'est dans la transaction du 5o oc tob re 1 7 7 3 , où se trouve le vé ritab le
dol , puisque les som m es dues aux mineurs étoient constatées par les sen
tences d ’ad jud icatio n et la quittance des ouvriers : on ne p o u v o it donc
inéconn oître une dette aussi l é g it im e , et qui s ' é l e v o i t , com m e on l ’a déjà
dit à la som m e de 1 6^7 livres en p r i n c i p a l , avec laquelle il d e\oit être Tiit
com pensation de celle de 200 livres p o u r le billet du père des appellans;
de manière qu’il est résulté
pour les mineurs une perte de 1 ¿.07 livres
en p rin c ij> al, a vec intérêt depuis dix-sept ou vingt ans.
�m
«
«
«
«
«
( 59 )
ment ; et au cas où le prix des ventes excéderoit trois
cents-livres e n ce ca s, le surplus excédant sera tenu
à Compte audit VaragnesJ, sur l es causes des présentes ,
sans autres dom m ages intérêts. A l’exécution des pré~
sentes, les parties»,«--etc. x»
>V
• -
».ju./'b «MtWsA
•* .. , uJJr ^
.
^
* ••
>
/*?*
/ 4 f c ÏUA 4 *
‘
.
y t < £
• /u**^. /'oui/ina «u
*
/ -ï-
,
s*.
,,
7+r'
t.. . .
V<J^ C ^
w
v
'
*• •'v i/
o.
■
V * --"- •¿AA;
C W , *1r
-- ÎU
L
*-* I f
Ç'
v
Cw^vVV
« 2 ^ > ^ Y«x<+y~* W
«lt «mkumt-/«*“ ' ulvi*ih ~rrMvu> |Là M r / ^
«*•
fy f »
t
J .»
t e ™ '' ‘
ti/usxirÿ j f o fi'* * / * /7yu'^r o~»Cu
W
{/
'“ r v z p - ' ' * - .
T
f f
i‘_«. -1 _
^« / W i .
c*^*A*4V£Ê hK±Uf,\*£ïx^
oJuÿt (J lv y w ^ ^ i w / ivü*» ^ <m <ma
ufu/jtoA* i J
^ ^ aajUajt *U*^Î>Ûa* (/ftA jf
ftju 'u w w v ^ u ^ / o i, ^ t
^
ua y u»\/u m eAi -
^^
<-C/JyjjJ\tJ\*Urin, «&« ûjïtA t**Zà ^ t ,
A R I O M , de l ’im p rim e rie de L a n d r i o t , seul im p r im e u r d e la
»1Ä-
/
*
C o ur d ’appel. — F r u c tid o r an 1 3.
y
tlftA u . flo^'ù'uiur /
^
,
.
*
<CS*a-a?>3 9^U. €jJ{aa. ± ^ co^-—f. / '« ffx J
l\’ U M ^ u /
O i f iu^cjy du«
ft*) f**X~~ßMAJ u m, qji A
i^ v ù i
jr«u rtx/tf îwaIu^
(
(AA. /cv l l r \ v J v j f u r v x ^ M j# iW )iU u
KvU
ÄSU «MuO
�/I t
O a /OaM T
^
^*a
AJU/CC' ? ‘*a ’/
^
^Ul i u r ^ U u - ^ ^ O O K Â Î ^ ^ Î M
ti *«! «w(ur-yüM ^ ú r cutM^fijp 7 'cfel"
t-LâjU (M A V v O t— i t
y
(M
cw vo
j^ ayo-^ ucr ^«. / A ¿ £
¿UM€~¿b ^ t**~ ^ J * > W
« b U lÚ Y J^ 0 u *< < » < *J(
« Ä i>
• tyu«. t W - *\ ^
y j^ h r V - t«y^ü^wi^x* «aA»
COuì>a^vKM.<jfàr«^ OWAtb»!t^VIMj
¿í«»dí«wik
«V
/'z CLk^uM^CPvwtvX «W iAAMAji-* I W l Í ^ A |y»*A. C\ ^ e w v
^ * '
^
CUW ^
IM.
¿UAwkACAI.
aJj^ iyhtjL ^ i - y ^ í .v '^ i t u n í r
^
djTvvVV)
ciA > *¿W f t l'*f**Ar\ ÚMbU^
lA 1ö . -o*», y » ! u ^ u . J< ~ JT Z m >
^ ìà
/#
C o v v ilC u v m V> - V v
a«ay< ^ /SÁ Í|/‘“ **^ tV^ICA*- «ÌìÌMjLt Ciupx-Á UUU«4A«> ^ / V tJlJ>U*xt+r
,
.
^
a i - .
O
^ u
? c u
,
X ÿ v ^ c <v
, ^ i / s r
¿ i í n
s i ^
>
^
OK»
r
/
W
«
V
^
"
'
^
'A , -,
^w.r m*a /«A<r* wiovvM J L /Vyjú^MJL ^ ' I f e i l C^W,
^
d r^ M L y / (u M
^ U )u M «M M U
</dtk~~*
u . fifc jfc
i/|
U ^ ^ , (| Ä fe w U i
^ iu 'u v .
M a m a (u aU Ì
£ j
M >-
fcWtCwL j '
^ OuU
, ç ù £
/u v h
V
CuA
u lü /À iu A C
6a
;
£ u £ u M '1 ^ 9 a *•'■ «-».k ..«V
U ta ^ c ^ u «
*v *a
! • " ‘v r'« t íh u u i> u / h ^ a ^ u ^ / u M
^
’* "
• « , .A
< A *2 ^ *A
j
'
oL f i k i í r uÁ«</»¿i|r-c4fc
,
V
áit'>ku^<Mi.^u^ /ú<m*Í6"- y CjíwAi (Lu£ft*»2i)
1 ‘ “’/ v ¿ ' í j U u , s<~r¿x¿Ji
^
^
^ M iU la c ^ v í Í T W * « )iA
^
*'
u>«viÀ<A<ùkX
C x / M ^ {A«Am > w
'* "
fc**..
f j *M K
\ ) lu «
‘ >tA~ï~* tJ jK jù ^
!
J
íu
* ^ w'
«i*
*'*
» X - • ; -.u t / M o . * , ^ J » T ^ y ^ . t
^
íC. *v<v\
.:
,
A
•
,
.
'
•*>
%■
. •' ' í«*. x \ ■
>» S
"X
'
r
' —■>* • •
........ ' >**í
. -»'.Ji Ai.ÿ
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rolland, Pierre-Israel. 1806?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac
Devèze
Subject
The topic of the resource
déguerpissement
ferme
bail à rentes
minorité
tutelle
droit écrit
assemblées de parents
prescription
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Pierre-Israël Rolland, homme de loi, procédant tant en son nom qu'en qualité de donataire contractuel de Jean-Marie Guy, Louis et Pierre Rolland, ses frères ; Et pour Toinette-Gabrielle Rolland, et le sieur Gros, son mari, juge au tribunal de Mauriac, appelans ; Contre Antoine Varagnes et consorts, intimés.
Particularités : notation manuscrite : texte complet de l'arrêt du 13 août 1806, 1ére chambre.
Table Godemel : Bail à rente : 1. la vente d’un domaine moyennant un prix déterminé pour lequel l’acquéreur constitue une rente, est-elle un bail à rente foncière qui laisse le domaine direct au vendeur, et qui, par suite, est susceptible de résolution et de déguerpissement ? Déguerpissement : 3. le preneur à vente qui, après plusieurs sentences prouvant la résolution du bail pour cause de non-paiement des arrérages, avait déguerpi les immeubles, a-t-il pu obtenir ensuite du tuteur des héritiers du possesseur actuel, sous l’apparence d’une transaction, l’abandon volontaire de ces mêmes immeubles et des droits des mineurs, moyennent un prix, sans aucune des formalités prescrites par les règlements ? Ratification : 3. en quels cas les quittances données par un mineur devenu majeur, constituent-elles approbation ou ratification de l’aliénation consentie par son tuteur ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1806
1756-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
59 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1703
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1701
BCU_Factums_G1702
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53306/BCU_Factums_G1703.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ydes (15265)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assemblées de parents
bail
bail à rentes
Déguerpissement
droit écrit
ferme
minorité
prescription
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53307/BCU_Factums_G1704.pdf
e5bf57299cbdeb3f55775dcb7de8fb8f
PDF Text
Text
PRÉCIS
EN R É P O N S E ,
POUR
Dame
F
r an çoise
R U P H Y , et le sieur
C
laude
B O U T A R E L , son m ari, intim és, et défen
deurs en opposition ;
C O N T R E
L e sieur L a u r e n t - L o u i s - A m a b l e
DELORT
appelant d'un jugement rendu au tribunal d ’A u rillac le 9 mai 1806, et demandeur en oppo
sition.
Auri sacra famés. Hor.
L
A dame Boutarel est héritière testamentaire du sieur
L o uis-Isaac D e lo r t, frère de l’appelant.
Elle a reçu cette dernière preuve de tendresse d’un
A
�oncle qui lui avoit tenu lieu de père, et qui l’a com
blée de ses bienfaits.
L e sieur Laurent-Louis-A m able Delort n’approuve
point le testament, et auroit bien voulu ajouter à son
opulence, la fortune de'son frère.
Q u’a-t-il fait pour la mériter ? Ennemi implacable du
défunt, il n’a cessé de l’outrager pendant sa vie. On ne
doit pas s’étonner qu’il attaque encore ses dernières vo
lontés.
L e testament est olographe ; il n’est assujéti à aucunes
formes. L ’appelant est obligé de convenir qu’il est écrit
en entier, signé et daté de la main du testateur; il n’étoit
donc pas possible de le faire annuler.
L ’appelant a imaginé d’attaquer sa nièce d?indignité.
Il l’accuse d’une indiscrétion qui n’est pas de son fait, et
croit avoir trouvé un moyen infaillible de s’approprier
les biens de son frère.
Les jurisconsultes auxquels il s’est adressé n’ont pas
été de son avis; les magistrats, le public, n’ont pas pensé
comme lui. Il en a été réduit à plaider lui-même sa cause
devant les premiers juges; il a,succombé dans sa pré
tention.
Il veut essayer s’il sera plus heureux en la cour; et
les intimés s’attendent bien que ce ne sera pas encore le
dernier degré qu’ils auront h parcourir.
F A I T S .
L e sieur Louis-Isaac D elo rt, ancien officier de cava
lerie , s’étoit fixé à Aurillac , auprès d’un sieur Isaac
D e lo r t s o n gjraad-oncle et son bienfaiteur.
�t
. ( 3 ) .
Il épousa dame Gabrielle Serieys; il n’en a pas eu d’enfans. L a 24 juin 178 7, il fit un testament au profit de
la dame son épouse. Ce testament contient un legs assez
considérable en faveur de la dame R u p h y , sa nièce ,
femme Boutarel, et fille de dame Louise D elo rt, sa sœur.
On remarque dans ce premier testament, que le sieur
D elort désire être enterré sans pom pe, dans le cime
tière de sa paroisse, à côté du tombeau où son grandoncle a été enterré ; il veut que son testament soit ou
vert Tinstant après son décès, pour prévenir et éviter
toute apposition de scellés, et toutes formalités de jus
tice.
L e testateur fait encore un legs à la dame Louise D e
lo rt, sa sœur, épouse du sieur de R uphy, mais il ne fait
aucune mention de son frère.
L e 27 pluviôse an 3 , il marie la demoiselle de R up hy,
sa nièce, avec le sieur Boutarel. Il est dit dans ce contrat,
que la demoiselle de Ruphy est originaire de T h o n o n ,
département du M ont-Blanc; mais qu’elle demeure de
puis plusieurs années auprès de son oncle. Il repré
sente les père et mère de la demoiselle de R u p h y , et
lui constitue de son chef une dot de 12000 fr.
L e 10 germinal an 7, la dame Serieys , épouse du sieur
D elort, a fait aussi son testament olographe-, elle a dis
posé de tous ses biens au profit de son mari : mais elle
n’oublie pas une nièce qui lui étoit chère; elle fait à la
dame Boutarel un legs de 2000 fr, et de six couverts
d’argent.
Après la mort de la dame Serieys, les sieur et dame
Boutarel ont habité avec leur oncle; il possédoit à BouA 2
�la i
v>
(
4
)
dieu, commune d’Y olet, une maison de campagne qu’il
se plaisoit à embellir.
Il y faisoit des réparations coûteuses, et souvent il avoit
recours à la bourse du sieur Boutarel, qui se faisoit un
devoir d’obliger son oncle, et de xie pas contrarier ses
goûts.
L e sieur D elort, d’ailleurs, ne cessoit de donner à sa
nièce et à son époux des preuves de tendresse et.d’affec
tion, et disoit à . ses amis que tout ce qu’il faisoit étoit
pour sa nièce.
.............
Il a effectué ses promesses. Un testament olographe,
fait à Boudieu, daté des I er. messidor et i er. thermidor
an
contient, après plusieurs.legs, une disposition
universelle au profit de la dame Boutarel.
Ce testament est surtout honorable,pour la dame Bou
tarel : son oncle, en lui donnant, contente les affections
de son cœur. Il répète ce qu’il avoit déjà dit dans son
premier testament pour ses funérailles; il ordonne qu’on
le fasse enterrer près de feu Isaac D d o r t , . son grandoncle et son bieiifaiteur, etc.
O n observe que ce testament est écrit sur une feuille
entière : le sieur Boutarel en produit une copie figurée.
Les dispositions ne contiennent que trois rôles, et quel
ques lignes sur le verso .de la seconde page.: il restoit
encore beaucoup de place, si le.testateur avoit eu l ’in
tention de faire d’autres legs.
Un mois après, le sieur D elort est attaqué d’une ma
ladie à laquelle il a succombé; il est décédé le samedi
28 fructidor, à cinq heures du matin.
D u premier moment qu’il -s’étoit alité, il avoit remis
y
�12?
C 5 }
toutes ses clefs à son neveu Boutarel. L a dame Boutarel
ne quittoit pas le chevet de son oncle; elle avoit pour
lui ces attentions touchantes, ces tendres soins qui con
solent des maux de la vie.
E lle fut témoin des derniers momens de son oncle ;
elle ne put résister à ce choc cruel; elle perdoit un père,
un bienfaiteur, un am i; elle fut atteinte d’une attaque
qui a fait long-temps craindre pour ses jours; elle étoit
Lien loin de s’occuper de ses intérêts.
L e m ari, alarmé de l’état de son épouse, ne songeoit
à autre chose ; mais sur les trois heures après m id i, une
ancienne domestique du défunt apprit au sieur Boutarel
que le sieur Delort avoit sans cesse manifesté le désir
d’être enterré auprès de son gran d-oncle; qu’il seroit
peut-être nécessaire de donner des ordres à ce sujet, et
de les donner promptement; qu’en cherchant dans les
papiers du défunt, on pourroit trouver quelqu’écrit re
latif à ce point.
L e sieur Boutarel fit alors des recherches, de l’avis et
en présence du .sieur abbé Usse, confesseur du défunt :
on trouva dans son secrétaire un paquet cacheté , avec
ces mots sur l’enveloppe : P o u r remettre à madame
Boutarel.
•Le mari en fait l’ouverture, sans y voir d’autre con
séquence : c’étoit le testament du défunt, contenant une
disposition universelle au profit de la dame Boutarel ;
mais en même temps l’ordre de le faire enterrer à A u rillac, près de son grand-oncle.
Pour exécuter cet ordre, il falloit bien connoître le
testament. L ’intention du testateur étoit donc qu’il fût
�( 6 )
ouvert aussitôt après son décès *, et on n’en peut plus
douter, lorsqu’on voit la même volonté dans le premier
testament de 1787.
L e sieur Boutarel remit le tout au sieur Boudier, juge
de paix du canton, en le priant de s’occuper des for
malités nécessaires pour la présentation du testament.
Ce testament, en effet, a été présenté au président du
tribunal, qui en a dressé procès verbal, et ordonné le
dépôt chez un notaire, conformément à l’article 1007 du
Code civil.
Ce procès verbal est du 30 fructidor-, il ne pouvoit
avoir lieu plutôt, quoi qu’en dise l’appelant, puisque le
testateur n’est décédé que le 28 : le 29 étoit un dimanche.
Lors de la présentation, on ne joignit pas l’enveloppe,
à laquelle on n’attachoit aucune importance.
Les sieur et dame Boutarel ont également présenté
requête pour se faire envoyer en possession des biens ;
ce qui a été ordonné, conformément aux articles 1008
et suivans du Code civil.
Survient, dix-sept mois après, le sieur D elort, frère
du défunt, qui prend une cédule du juge de paix d’Aurillac, dans laquelle il expose que les sieur et dame Bou
tarel se sont emparés de toute la succession de LouisIsaac Delort ; qu’il est habile à lui succéder pour moitié,
et qu’il entend demander à la dame Boutarel la restitu
tion du m obilier, les intérêts et les fruits : il n’entre dans
qucune autre explication.
A u bureau de paix, les sieur et dame Boutarel justi
fient du testament de leur oncle ; ils en déposent une
expédition sur le bureau. L e sieur Delort répond qu’il
�(
7
)
ne reconnoît pas le testament, et qu’il persiste dans sa
demande.
Dans son exploit du 22, février 1806, le sieur Delort
expose enfin que les dispositions faites par son frère étoient
caclietées ; que sur l’enveloppe étoient des caractères écrits
et signés par le testateur; que le prétendu testament que
lui ont opposé les sieur et dame Boutarel au bureau de
p a ix , ne fut pas présenté en cet état devant le président
du tribunal; qu’il lui fut porté sans enveloppe et sans
cachet : d’où il suit qu’il n’y a eu de la part de l’auto
rité légale r ni ouverture du testament, ni description de
son véritable état : conditions sans lesquelles il n’a pu
être mis à exécution.
Il en conclut que ce testament étant altéré, doit être
déclaré nul et comme non avenu ; que la succession de
Louis-Isaac Delort est ouverte ab intestat ; qu’ainsi il
doit avoir la moitié des biensSur cette demande, et le 9 mai 1806, jugement con
tradictoire du tribunal d’A urillac, dont suivent les motifs
et le dispositif ;
« V u les articles 970, 1 0 0 1 et 1 0 0 7 du Code civil r
« Considérant qu’en fait il est reconnu et avoué par
« les parties que le testament de Louis-Isaac Delort est
« écrit en entier, daté et signé de sa main ;
« Considérant que d’après l’article 970 du Code c iv il,
« le testament olographe n’est assujéti à aucune autre
« formalité ; que les dispositions de l’art. 1007, i re» par
ti tie , sont uniquement relatives aux précautions ordon« nées pour rendre public le testament olographe, et.
« que leur oubli ou leux défaut ne peut produire une-
�i
( 8 }
« nullité non prononcée par la lo i, et formellement
« rejetée par l’article 970 ;
« Considérant que la preuve offerte par le sieur Delort
« ne tend pas à établir, dans le testament dont il s’agit,
« le défaut de l’une des trois formalités exigées par l’ar« ticle 970, ni la suppression d’un testament postérieur,
et révocatoire de l’autre, mais seulement à prouver qu’il
« y avoit une enveloppe cachetée, avec des caractères
¿c écrits, qui a été ouverte avant la présentation au ma« gistrat; ce qui est absolument insignifiant, soit d’après
cr les faits avoués par le sieur Boiltarel et sa femme, soit
« paçce qu’il n’en résulterait pas la nullité du testament;
« d’où il suit que cette preuve est inutile et non recetr vab le, et que, par suite, le testament étant valable,
« la demande du sîfeur Delort est mal fondée ;
« L e tribunal, sans s’arrêter ni avoir égard à la preuve
« offerte par le sieur D elort, le déboute de ses demandes,
« et cependant lui donne acte de la déclaration faite par
« les sieur et dame Boutarel, qu'après le décès du sieur
« L o u is-Isa a c D e lo r t, le sieur B o u ta r e l, assisté du
et sieur li s s e , prêtre, cherchant dans les papiers du
« défunt une recommandation relative à son enterre« m ent, a trouvé un papier ca ch eté, sur lequel étaient
« écrits ces mots : Pour remettre à madame Boutarel ;
« que l’ayant ou vert, il a trouvé le testament dont il
« s’agit ; que le testament et l’enveloppe ont été confiés
« à M . B oudier, juge de p a ix , q u i, le jour de la pré« sentation du testament, n’a remis que celui-ci, regar« dant l’enveloppe comme inutile. »
Cette dernière disposition du jugement indiquoit asse£
au
�'( 9 )
au sieur D elort ce qu’il avoit à faire. En effet, s’il persistoit à prétendre que cette enveloppe renfermoit quelqu’autre chose que le testament produit ; qu’il y avoit
un testament révocatoire ou un codicille; prenant acte
de la déclaration des intim és, il pouvoit se pourvoir en
suppression de testament ou de codicille ; mais il n’avoit
pas pour cela une action en nullité contre un testament
régulier.
E t comme il étoit vraisemblable, sans doute, que le
sieur D elort auroit mis dans la même enveloppe deux
testamens contraires^ dont l’un auroit révoqué l’autre,
le sieur D elort, appelant, eût peut-être été admis à faire
cette preuve.
Système bizarre qui n’a pu sortir que d’un cerveau
mal organisé, ou d’un homme aveuglé par la colère et
la cupidité.
Quoi qu’il en soit, vivre sans -plaider rCest pas con
tentement : le sieur D elort a cette passion. Il a interjeté
appel du jugement d’Aurillac ; et à la veille de l’audience,
il a cru devoir donner au public une nouvelle preuve
de sa bizarrerie et de son ambition.
Ce qu’il y a de plus difficile, c’est de trouver dans
sa défense quelque chose de raisonnable ou de plausible,
un moyen qui mérite d’être réfuté.
Il cherche dans les lois romaines des argumens ou des
moyens d’indignité : et le moment est bien choisi.
L e testament est postérieur à la promulgation du Code.
L a loi du 30 ventôse an 12 , qui réunit les lois civiles en
un seul corps, sous le titre de Code civil des Français,
s’exprime en ces term es, article 7 :
3
[
�«
«
«
«
( 10 )
« A compter du jour où ces lois sont exécutoires,
les lois romaines, les ordonnances, les coutumes généraies ou locales, les statuts, les règlemens, cessent d’avoir
force de loi générale ou particulière, dans les matières
qui sont l’objet des lois composant le présent Gode. »
Indignités prévues p a rle Code c iv il, article 727.
« Sont indignes de succéder, et comme tels exclus
« des successions,
« ci°. Celui qui seroit condamné pour avoir donné ou
« tenté de donner la mort au défunt ;
« 20. Celui qui a porté contre le défunt une accusa« tion capitale, jugée calomnieuse;
« 30. L ’héritier majeur, qui, instruit du meurtre du
« défunt, ne l’aura pas dénoncé à la justice.»
Les orateurs du gouvernem ent, en présentant ce titre
du Code au eorps législatif, M . Treilhard portant la
p aro le, ont dit :
« Nous n’avons pas cru convenable d’étendre davan« tage les causes d’indignité; il ne faut pas, sous le pré« texte spécieux de remplir la volonté présumée du dék fu n t, autoriser des inquisitions qui pourroient être
« également funestes et odieuses. C ’est par ce m otif que
« nous n’avons pas cru devoir admettre quelques causes,
« reçues cependant dans le droit rom ain, com m e, par
« exem ple, celles qui seroient fondées sur des habitudes
« criminelles entre le défunt et l’héritier, ou sur la dis« position qu’on prétendroit avoir été fuite d’un bien
« du défunt avant son décès, ou sur l’allégation que l’héc< ritier auroit empêché lé défunt de faire son testament,
« ou de le changer. »
�1^3
( n
)
L e sieur Delort nous apprendra sans doute à l’audience
comment il peut y avoir dans l’espèce indignité de suc
céder , parce que le sieur Boutarel a ouvert un testament
olographe, contenant des dispositions au profit de sa
femme.
Maintenant y a-t-il nullité du testament, à raison de ce
que l’enveloppe n’a pas été produite devant le juge ?
A rticle 970 du Gode.
« L e testament olographe ne sera point valable , s’il
« n’est écrit en entier, daté et signé de la main du testa« teur ; il n’est assujéti à aucune autre forme. »
A rticle 1007.
« Tout testament olographe sera , avant d’être mis à
« exécution, présenté au président du tribunal civil de
« l’arrondissement dans lequel la succession est ouverte.
« Ce testament sera ouvert, s'il est cacheté ; le prési« dent dressera procès verbal de la présentation, de l’ou« verture et de l’état du testament, dont il ordonnera
« le dépôt entre les mains du notaire par lui commis. »
Il n’en est pas du testament olographe comme du tes
tament mystique, qui de sa nature est secret. D ’après
le même article, l’ouverture ne peut en être faite qu’en
présence des notaires et témoins qui ont signé l’acte de
suscription.
M . M aleville, sur la première partie de cet article,
dit que la loi suppose qu’on peut cacheter et tenir secret
son testament olographe ; mais qu’ il ne faut pas pour
cela lè confondre avec le testament m ystique, dont parle
la seconde partie.
Bernardi, ex-législateur, aujourd’hui chef de la division
civile du ministère du grand - ju ge, dans son commen-
�1
( 12 )
taire sur la loi du 13 floréal an 1 1 , des donations et
testamens, prévoit la question qui nous occupe, et s’ex
prime ainsi, page 187, sur l’article 1007:
On peut demander si un testament clos et cacheté
avoit été ouvert avant d’être présenté au président du
tribunal, cette circonstance le rendroit nul.
Il faut distinguer d’abord le testament olographe et le
testament mystique, et ensuite si c’est le testateur luimême ou un autre dépositaire qui en a fait l’ouverture.
L e premier n’est pas secret de sa nature ; ainsi, qu’il
soit ouvert ou fermé , il doit être exécuté, à moinsqu’on
ne prouve que le testateur l’a révoqué.
Annales du notariat, i 5e, question.
En parlant de l’ouverture du testament olographe avant
sa présentation au magistrat :
L e notaire qui feroit l’ouve rture .d’un testament olo
graphe, avant sa présentation , en opéreroit-il la nullité,
sous le prétexte qu’il n’avoit pas caractère pour cette
opération ?
Rép. Il n’y a pas de nullité là où la loi ne l’a pas
prononcée; ainsi, quand un notaire, ou tout autre dé
positaire d’un testament olographe cacheté, auroit l’im
prudence de l’ouvrir avant de le présenter au président
du tribunal, cela n’en opéreroit pas la nullité. Cette question ne peut former de doute à l’égard du
testament olographe, qui de sa nature peut rester ouvert,
et que la loi n’exige pas être secret. Si le testateur le
renferme sous une enveloppe cachetée, ce n’est de sa part
qu’une précaution qui ne tient pas à l’essence de l’acte
qui auroit pu exister sans elle : ainsi, quand on viendroit
h le décacheter avant de le présenter au président du
�,
C T3
.
/■>/
tribunal, ses dispositions ne seroient pas altérées par là ,
puisqu’il n’étoit pas de sa nature destiné à être secret, et que
même le dépositaire pourroit prétendre avoir été chargé
de l’ouvrir aussitôt après la mort du testateur, ou nier
qu’il eût été cacheté, etc.
En effet, comment le cachet seroit-il de quelque im
portance pour un testament olographe? Par cela seul que
le défunt a lesté en cette form e, il n’a pas voulu que
ses dispositions fussent secrètes. Lorsqu’il veut les laisser
ign o rer, la loi lui indique la forme du testament mys
tiqu e, dont la validité dépend des formalités attachées
à l’enveloppe et à la suscription qu’elle contient.
Aussi l’article cité du Gode, fait-il une grande différence
entre ces deux testamens. Celui qui est olographe, ca
cheté ou n on , doit etre présenté au président, qui en
dresse procès verb al, dans l’état où il est, sans avoir
besoin d’appeler personne-, au contraire, si c’est un tes
tament m ystique, il ne peut en faire l’ouverture sans
appeler les notaires ou les témoins qui ont signé la sus
cription de l’enveloppe.
Preuve certaine que le testament ologra p h e , cacheté
ou non , peut etre ouvert sans conséquence ; et pourvu
qu’il soit écrit, signé et daté du testateur, il ri est assujé ti à aucune autre fo rm e.
O n ne peut ajouter à la loi, ni suppléer des nullités
qu’elle ne prononce pas.
L ’indignité est restreinte aux cas prévus ; et la loi n’a
pas voulu l’étendre au-delà.
D ’ailleurs, l’indignité est personnelle. Ici ce n’est pas
même la dame Boutarel qui a été téméraire ou indis-
�( H )
crête •, et on ne peut qualifier ainsi l’acte le plus simple et
le plus naturel, dans la position où se trouvoient les
parties.
L e mari pourroit-il nuire aux droits de sa femme ?
Ce système seroit dangereux et inconvenant. Un époux
qui rie vivroit pas avec sa femme dans l’union que sup
pose le m ariage, pourroit donc la priver d’une succes
sion , parce qu'il auroit la témérité d’ouvrir un testament
qui la concerne?
Ce n’est pas raisonner sagement que de prétendre que
la femme devient responsable de la faute du m ari, quand
elle s’est présentée pour recueillir l’effet des dispositions
faites à son profit.
L a femme ne pouvoit-elle pas ignorer que le testament
avoit été ouvert, et ne pas savoir qu’il étoit cacheté?
L e mari étoit bien maître de son. secret : la femme nd
s’occupe que des dispositions faites à son profil.
L e sieur D elort n’est pas plus conséquent, lorsqu’il
dit que le testament n’a pas de véritable date : il est en
effet daté au commencement, du ier. messidor, et à la
fin, du I er. thermidor.
Mais de deux choses l’une : ou le testateur a employé
un mois pour rédiger son testament, ou la dernière date
est une erreur.
S’il a employé un m ois, ce qui est probable, parce
qu’on peut réfléchir sur ces dispositions, les deux dates
prouvent son exactitude.
Si au contraire ce n’est qu’une erreur, elle ne peut être
d’aucune importance. En effet, pourquoi la loi a-t-elle
voulu que le testateur datât son testament ? ce n’est que
�m
( 15 )
pour, s'assurer plus positivement de son intention et de
sa volonté.
Qu’importe que ce soit tel jour ou tel autre, si on ne
rapporte pas un autre testament fait dans l’intervalle.
Aussi le sieur D elort semble - t - il vouloir faire grâce
de ce m oyen, et ne le proposer que légèrem ent, pour
ne rien négliger.
Que le sieur Delort cesse donc d’y insister. E t pour
quoi vien t-il ambitionner la fortune de son frère, lu i,
héritier contractuel de ses père et m ère, et qui a fait
plaider si long-temps ses frère et sœur, pour obtenir leur
légitime ;
L u i qui depuis long-tem ps est séparé de sa fem m e,
qui n’a pas d’enfans, et jouit de plus de 12000 francs
de rente ;
L u i, enfin, qui n’a vu ou écrit à son frère que pour
l’outrager ou lui proposer des cartels ?
C’est à lui seul qu’on proposeroit des moyens d’indi
gnité , s’il étoit appelé à succéder au défunt ; et qu’il
sache qu’on peut p rouver, par ses écrits, tout ce qu’on
vient d’avancer.
Signé B O U T A R E L .
Me. P A G E S ( de Riom ) , ancien avocat.
M e. M A R I E , avoué licencié.
A. RIOM , de l’imprimerie de Landriot, seul imprimeur de la
Cour d'appel. — Mars 1807.
eül
-
�9^ J y
ty fUOAl> (160y^ awudh
/ a ^ iiu w t ,
í/ft¿rr e
c ^ w t
/
i
r
a » *v|^ u u > ^ «*A
Ç & * io \ * ^ y i o M * y * * >
^
a
<
w
*
t ~ A r // u f Y ,ù ' <^ r '
» /c. tA~Jl>*ï ^'*-'
fpjtrr.— -~X »/bjrlYÍÚ> 3 «
^ »*1
æjuiiù. 6t-Mo /rt««^ u/tfc*^> ^»' «• f « y V r y ,w * » ' ^ m,‘
€X*Jbu
/¿■—
-Iil^
ou a i i u i i o ^ ra « M i« v io H i J «*
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Ruphy, Françoise. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
testament olographe
legs
nullité du testament
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour dame Françoise Ruphy, et le sieur Claude Boutarel, son mari, intimés, et défenseurs en opposition ; Contre le sieur Laurent-Louis-Amable Delort, appelant d'un jugement rendu au tribunal d'Aurillac, le 9 mai 1806, et demandeur en opposition.
Particularités : notation manuscrite : 17 mars 1807, arrêt 2nde section. Confirme en rejetant la preuve offerte par Delort, parce qu'en la supposant faite, elle serait insignifiante quant à la nullité du testament olographe de Louis Delort, fait objet du procès, et ne serait relative qu'à la suppression d'un autre testament ou codicille postérieur, dont il ne s'agit pas.
Table Godemel : Testament : 7. le fait, par le mari de la légataire universelle, d’avoir ouvert l’enveloppe cachetée qui renfermait le testament olographe, écrit, daté et signé par le défunt, et de l’avoir présenté sans cette enveloppe considérée comme insignifiante, au président du tribunal qui en ordonna le dépôt chez un notaire, après constatation de l’état de la pièce, doit-il avoir pour effet d’admettre qu’il y a eu infidélité, violation du sceau et du secret du testateur, suppression d’un autre testament ou codicille révocatoire , et par suite nécessité d’annuler le testament comme ne présentant pas les caractères propres à assurer sa sincérité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1787-1807
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1704
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1705
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53307/BCU_Factums_G1704.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Yolet (15266)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
legs
nullité du testament
Testament olographe
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53308/BCU_Factums_G1705.pdf
c27003776d341e537ddde2ba77032af7
PDF Text
Text
M
É
M
O
I
R
E
POUR
Sieur L aurent - L ouis - A mable D E L O R T ,
propriétaire, habitant de la ville de Thonon,
département du L ém an , appelant ;
C O N T R E
.
Sieur C l a u
d e
B O U T A R E L et dame F
r a n
R U P H Y , son épouse habitans de la
ville d’Aurillac intimés.
ço ise
E N perm ettant à l’ho m m e de disposer après lui de ses
biens , en lu i accordant le plus beau des privilèges , la
faculté de tester, la lo i a v o u lu sans doute que ses d e r
nières volontés fussent religieusement exécutées
aussi
vo it-o n que la seule mais r ig o u reuse condition à laquelle
est attachée la validité du testament f c’est la certitude de
A
�la vo lo n té du testateur, lorsque d’ailleurs sa capacité n’est
pas contestée.
T o u tes les précautions dont la loi s’e n to u r e , n’ont
d ’autre objet que d ’acquérir cette certitude.
A in s i, le testament public est assujéti à une multitude
de formes intrinsèques , q u i , toutes minutieuses qu’elles
peuvent p a ro ître , doivent être o b serv ées, î\ peine de
nullité , parce q u ’ayant toutes p o u r but d’im prim er à la
disposition le caractère d’ une vo lon té parfaitement lib re ,
elles ne sont plus de simples fo rm u le s , mais bien autant
de conditions attachées à la faculté de tester.
A in s i , le testament m ystique, qui laisse au testateur la
liberté de tenir scs dispositions secrètes, est rigoureusement
soumis à des formes e x té rie u re s , sans lesquelles la loi ne
l’autorise plus.
A in si enfin, le testament olographe étant dispensé de
toutes ces formes , parce qu ’il est l ’ouvrage immédiat du
testateur, la loi a dû prendre des précautions rigoureuses
p o u r s’assurer q u ’il contiendrait sa dernière vo lon té, p our
a vo ir la certitude que ce testam ent, laissé le plus souvent
parm i les papiers du d é fu n t, et à la merci des héritiers,
seroit l’apporté à la justice, intact et sans altération. P o u r
cela , elle a établi certaines fo rm e s , sans lesquelles elle ne
le reconnoît plus.
S i - p a r e x e m p le , le secret du testateur a été v io lé ; si
avant de rem p lir ces formes le testament a été d ’abord
soustrait, puis o u v e r t , lorsqu’ il étoit cacheté ; si on n’en
présente q u ’une partie, ou si on a pu même le supprimer
p ou r en substituer un a u tre ; si tous ces faits sont établis,
la loi refuse toute confiance à la disposition , et à celui
�m
(3 )
qu i la présente ; elle défend, aux magistrats d’en perm ettre
l ’exécution.
V o i là précisément l’espèce de la cause ; elle est digne
de fixer l’attention de la c o u r , soit parce que la question
est im p o rtan te, soit parce que l’intérêt en est m a je u r ,
puisqu’il s’agit d ’ une succession opulente ; soit enfin parce
qu ’elle tient à la m orale et à l’ordre public.
F A I T S .
Louis-Isaac D e lo rt est décédé à B o u d ie u , près A u rilla c ,
le 28 fructidor an 12 , à cinq heures du m a t in , laissant
p o u r héritiers naturels L a u re n t-L o u is-A m a b le D e l o r t ,
son f r è r e , et la dame R u p h y , sa sœur.
Sou frère étoit alors dans le département du L ém an ,
où il habite ; la dame R u p h y étoit ù A u r illa c : il n’y a voit
auprès de lui que la dame B o u ta re l, fille de la dame
R u p h y , et son mari.
A peine le sieur D e lo r t eut-il ferm é les yeu x , que le
sieur Boutarel prit sous son chevet les clefs de son b u r e a u ,
l’o u v r i t , fouilla les t ir o ir s , et y p rit un paquet sous en
v e lo p p e , cacheté de cinq cachets : l ’enveloppe portoit une
suscription annonçant qu ’elle contenoit les dernières dis
positions du défunt.
L e sieur B o u ta rel, com m e on peut le p en ser, ne s’assista de personne p o u r faire cette r e c h e r c h e , ou p ou r
m ieux d i r e , cet en lèvem ent; il déchira l ’en v e lo p p e , en
tira les papiers qu i y é to ie n t, et laissa passer deux jours
entiers sans prendre aucune mesure.
Ce ne fut que dans la journée du 30 fructidor q u ’il
parut avec la dame R u p h y , son é p o u s e , devant le présiA
2
o
�( 4
?
dent du tribunal civil d’A u r illa c , à qui ils présentèrent
ensemble un testament d’Isaac D e lo r t, écrit sur une feuille
v o la n te, sans cachet ni en veloppe , et qui portoit un legs
universel au profit de la dame Boutarel.
Ce papier é t o i t - i l celui que le sieur Boutarel avoit
trouvé sous l ’enveloppe dont il avoit v io lé le sceau ?
e t , à le supposer a in s i, étoit-il le seul qui fût sous cette
e n v e lo p p e ? contenoit-il enfin l ’unique , la dernière v o
lonté du testateur? C ’est une question que n’avoit pas à
décider le président du tribunal d’ A u rilla c -, il n’eut qu ’à
constater l’état de la p iè c e , et
en ordonner le d é p ô t ,
telle q u ’elle é to it, chez un notaire : c’est ce qu ’il fit par
son procès verbal du m êm e jour 30 fructidor an 12.
L e 2 vendém iaire su iv a n t, les sieur et dame Boutarel
obtinrent une ordonnance qui les envoya en possession
des biens , conform ém ent à l’art. 1008 du Code civil.
Pendant cet intervalle tout resta au p o u v o ir des sieur
et dame B o u ta rel; personne ne pensa à réclam er ou à
ordonner une apposition de scellés. L e sieur D elo rt éloit
absent ; et le magistrat spécialement chargé par la loi de
veiller à ses intérêts, et d’apposer les scellés d ’office, le juge
de paix , négligea ou ne vo u lu t pas prendre ceLte précau
tion , qu oiqu ’ il fût venu à B oudicu dans la matinée du 28.
L e sieur D e lo rt , frère et h éritier légitim e du défun t,
instruit de ce qui s’étoit passé , vin t ¿1 A u r illa c ; et le 13
fé v rie r 1806 il fit citer en conciliation les sieur et dame
B o u ta re l, sur sa demande en délaissement de la moitié
des biens de son frère.
A p r è s un procès verbal de non-conciliation , et la de
mande judiciaire qui en fut la suite, les parties se présen-
�142
( 5 ).
tarent à l ’audience du tribunal civ il d’ A u r i l l a c , où il s’en
gagea une discussion sérieuse.
L e sieur D e lo rt y mit en avant que le testament de
son frère n’avoit pas été présenté au juge in tégra lem en t, ni
com m e il devoit l ’être ; q u ’il y avoit de la part du sieur
Boutarel une double in fid élité, i° . en s’emparant sans
autorité ni q u a lité, et en l’absence de l’heritier naturel,
de la clef des tiroii’s du d é f u n t , et des papiers qu ’ il avoit
pu y tro u v e r; 2 °. en se permettant de ro m pre les cachets
du testam ent, et de vio ler tout à la fois le sceau et le
secret du testateur.
T o u t cela , disoit le sieur D eloivt, a été fait sciemment;
car le testament avoit sur l’enveloppe une suscription
signée du testateur; et tout cela ne peut a vo ir été fait
sans intérêts : rien ne le p ro u ve m ieux que la suppression
de l ’enveloppe.
D ’où il faut c o n c lu re , ajoutoit-il, que rien ne garantit
à la justice que le testament qu ’on rapporte soit réelle
ment celui qui a été tro u vé dans les papiers du testa
teur ; q u ’on n ’ait pas supprim é celui-là p o u r en substi
tuer un autre q u ’on a'ui'oit obtenu par obsession ; o r , le
légataire étant constitué en mauvaise f o i , la présom ption
est contre lui ; et que quand bien m êm e il n ’y auroit pas
de preuve précise de suppression du testament, dès que
la justice n’a plus de certitude sur la dernière vo lon té du
testateur, le légataire doit être puni par le x’ejet du tes
tament , de la violation qu ’il s’est permise.
Ces moyens étoient faits p o u r embarrasser les sieur et
dame Boutarel. S’ils avouoient les faits qui en étoient la
b ase, ils étoient constitués en mauvaise fo i; s’ils prenoient
4
�le parti de les n ie r, la p reu v e en étoit facile : et c’eût été
bien pis. Ils s’en tirèrent assez adroitement. J e conviens,
dit le sieur B o u ta re l, a vo ir ro m p u le cachet, et ouvert
l ’enveloppe; mais je l ’ai fait et j’ai dû le faire, parce que
l ’enveloppe portoit uniquem ent ces mots : P o u i' rem ettre
à m adam e B o u ta re l. Si je ne la rapporte pas aujourd’h u i,
c’est que le juge de paix q u i vint à B o u d ie u , dans la mati
née du d é c è s , et ù qui je iis la remise du p a q u e t , jugea
l ’en velop p e in u tile , et n’a x'emis que le testament le jour
de sa présentation : d ’ailleurs j’ai dû o u v rir les tiroirs et
chercher le testament, parce que j’étois instruit que m on
oncle avoit laissé des ordres de le faire inhum er à A u r i l lac ; ce qui ne p o u vo it pas se retarder.
T o u t e captieuse q u ’étoit cette défense , le sieur D e lo rt
la rétorqua vivem ent. V o u s croyez a vo ir b esoin , dit-il
au sieur B o u t a r e l, de prétendre p o u r votre justification
que le paquet vous étoit adressé. E h bien ! j’offre de
p ro u v e r q u ’au lieu de ces mots : P o u r rem ettre à m adam e
B o u ta r e l, il y avoit plusieurs lignes écrites, signées du
sièur D e lo r t , annonçant que le paquet contenoit ses der
nières dispositions : ce que devoit d ’ailleurs facilement
faire présum er l’apposition de cinq cachets ; ainsi je vous
constitue en mauvaise foi d e deu x manières :
1°. E n p r o u v a n t que r ie n sur l ’e n v e l o p p e , ni dans la
su scrip tion , n’a pu vous autoriser à o u vrir le paquet ;
q u ’au contraire tout vous com m andoit une respectueuse
discrétion ;
2 ° .,Parce q u e , dans ce ré c it, je démontre que vous en
imposez à la justice.
Q u a n ta la remise du testament au juge de p a ix , le sieur
�C 7 )
D e lo rt rép ondit que c’ étoit une fable d é m o n t r é e , soit
parce qu ’ il n’y avoit pas de procès v e rb a l, soit parce que
le testament avoit été présenté par les sieur et dame B o u tarel seuls , et non par le juge de paix.
T e l étoit L’état de la cause, lo r s q u e , le 9 mai 18 0 6, il
intervint au tribunal d’A u rilla c un jugement par leq u el,
sans a vo ir égai’d à la p reu ve offerte par le sieur D e l o r t ,
dans laquelle il fut déclaré non rece va b le, il fut débou lé
de sa d e m a n d e, et condam né aux dépens.
Ce jugement porte dans scs m otifs, q u ’il est avoué par
les parties que le testament p rod uit par le sieur B ou ta rel,
est en entier é c r it, daté et signé de la main du testateur,
et que la loi n’exige pas d’autres formalités ;
Q u e toutes celles voulues par l ’article 1007 du G o d e ,
ne sont relatives qu ’au m ode prescrit p o u r rendre public
le testament; mais que leur oubli ne peut en o p érer
n u l l i t é , puisqu’elle n’est pas pronon cée par loi ; que la
p reu ve est inadmissible, parce qu ’elle ne tend, ni à établir
l’absence de l’une des trois formalités voulues par l ’ar
ticle 970 , ni à p ro u ve r la suppression d ’un testament réVocatoire de l’autre, mais seulement la suppresion d’une
enveloppe absolument indifférente : qu ’ainsi on doit y ap
pliquer la m axim e frustrcL p r o b a tu r , etc.
E n f i n , le jugement « donne acte au sieur D e lo rt de la
« déclaration faite par les sieur et dame B outarel, q u ’après
« le décès de Louis-Isaac D e l o r t , le sieur B ou ta rel, as« sisté du sieur Usse, p rê tre , cherchant dans scs papiers
« une recommandation relative à son enterrem ent, tro uva
« un paquet cacheté ? sur lequel étoit écrit : P o u r r c -
�f { *'h
C8 )
« m ettre à m adam e B o u ta r e l j que l ’ayant o u v e r t , il a
« tro u v é le testament dont il s’agit ; que le testament et
cc l ’enveloppe ont été confiés à M . B o u d ie r, juge de p a ix ,
« q u i , le jour de la représentation du testament, n’a remis
« que celu i-ci, regardant l ’enveloppe com m e inutile. »
L e sieur D e lo rt a interjeté appel de ce ju gem en t; et
qu oique les circonstances et les faits articulés devant les
premiers ju ges, fussent suffisans p o u r le faire in firm e r,
au moins en ce q u ’il a déclaré la p reu ve non rece va b le,
le sieur D e lo rt n’en est pas m êm e réduit à ces termes.
Il a eu connoissance depuis l’appel de quelques faits plus
précis encore que ceux dont il a offert la p reu ve en pre
m ière instance, et au m oyen desquels il ne pourra y avoir
de doute sur la fausse application de la m axim e ¿fustrà
p r o b a tu r, e tc ., et sur le m al-jugé du jugement.
C ’est ce q u ’il s’agit de dém ontrer : la tâche ne pai’oît
pas difficile ; il suffit de com parer avec les principes et la
disposition des l o i s , la défense des sieur et dame B o u ta re l, et les motifs du jugem ent dont est appel.
L ’art. 1007 du Code civ il veut que tout testament olo’ g r a p h e , a va n t (îêtre m is à e x é c u tio n , soit présenté au
président du tribunal c i v i l , qui l ’o uvrira s’il est cacheté,
dressera procès verbal de la p résen tation, de Vouverture
et de Vétat du testament, etc.
E t les principes de tous les temps et de tous les lieux
veulent que celui qui est constitué en mauvaise f o i , qui a
com m is m ie in fidélité, en soit puni au moins par la perte
de tous les avantages qu i p ou vo ien t en l’ésulter p ou r lui.
Q ue l’on accorde la disposition de la loi avec les p rin
cipes ,
�14^
# (9 )
cip es, et on sera convaincu que les faits articulés par le
sieur D e l o r t , suffisent p ou r faire rejeter le testament.
P o u rq u o i la loi a-t-elle vo ulu une présentation du tes
tament olographe au président du trib u n a l? P o u rq u o i
a-t-elle exigé qu’ il fût dressé un procès verbal de r o u
verture et de Vétat du testament?
P o u r que personne ne puisse se rendre maître des dis
positions du défunt ; p o u r que le testament laissé le plus
souvent parm i les papiers de la succession, reçoive un
caractère authentique de v é ra cité ; p ou r que les héritiers
légitimes soient à m êm e de critiquer Vétat de ce testa
m en t, s’ils croyent p o u v o ir le faire avec avantage; p o u r
conserver enfin les droits de tous les intéressés, et assurer
autant que possible à la justice, que ce testam ent, exem pt
de toutes formalités intrinsèques, a été rapporté intact,
sans dol ni fraude, sans infidélité d’aucune espèce. A qu oi
serviroit autrement d ’en constater Vétat ?
E n veut-on une p reu ve plus positive en co re? O n la
trouvera dans les précautions dont s’entourent les arti
cles 9 1 6 , 9 17 et 918 du Gode de procédure.
L ’art. 916 veut que s’il se trouve un testam ent ou a u tres
papiers ca c h e té s, lors d’une apposition des scellés, le juge
de p aix en constate la f o r m e e x té r ie u r e , le scea u et la
s u s c r ip tio n , s’il y en a , paraphe Tenveloppe avec les
parties intéressées........... et fasse mention du tout sur son
procès verbal.
L ’article 9 1 7 , que le juge de p aix fasse, avant l ’appo
sition des s c e llé s , perquisition de tout testament dont
l ’existence seroit annoncée.
E t l’art. 9 1 8 , que les paquets trouvés ca ch etés, soient
B
�ito
( i° )
présentés p a r le juge de p a ix au p résid en t, le q u e l, estil d i t , en fera l ’o u v e rtu re , en constatera V éta t, etc.
P o u rq u o i ces excessives précautions de la l o i , si la
f o r m e e x té r ie u r e , le s c e a u , la s u sc r ip tio n , Venveloppe
du testament o lo g ra p h e, étoient si indifférens à ses y e u x ?
E t p o u r q u o i, si on est obligé de con venir que rien de
tout cela n’est indifférent, veut-on que la p reu ve de l ’in
fidélité, de la violation du sceau, de la suppression de
l’enveloppe et de la suscription, peut être du testament
lu i- m ê m e , soit une p reu ve indifférente et sans objet ?
O r , il étoit établi devant les premiers ju g e s,
Q ue le sieur Boutarel s’étoit permis de s’emparer des
clefs du d é fu n t , d ’o u v rir ses tiro irs, de fou iller dans ses
papiers ( et qu i sait où! ) , qu oiqu ’il ne fût pas héritier
n a t u r e l, et que l ’un de ses héritiers fût ù deux cents lieues
d’A u rilla c ;
Q u e s’étant emparé du testament du sieur D e l o r t , il
en a v o it rom pu les sceaux et soustrait l’en velop p e, quoique
chargée d’ une suscription ;
E nfin que le troisième jour seulement il avoit présenté
au président du tribunal civil un testament sur une feuille
de papier v o l a n t , sans enveloppe..
L e sieur Boutarel avoit donc contrevenu au x diverses
dispositions du Gode : il devoit donc être p u n i , en n ’ob
tenant pas îe x é c u tio n d’ un testament qui ne p ou voit pas
être reconnu p o u r être celui du sieur Delort..
Q u ’a-t-il répondu ?
E n prem ier lieu , q u ’ il avoit été obligé de faire p er
quisition p ou r trouver les ordres du sieur-Delort sur ses
obsèques..
�( II )
Mais ces ordres ne pou vo ien t se tro u v e r que dans son
testament; et l’article 9 17 du Gode de p rocédu re permettoit au juge de p aix seul de faire cette perquisition.
D ira-t-on que le Code de procédure 11’existoit pas alors?
M ais on sait que ce Code n’est que le com plém ent du
Code c i v i l , le développem ent de ses dispositions. O r ,
ces mesures conservatoires étoient suffisamment indiquées
par les articles 821 et 1007 du Code c i v i l , et par l’ar
ticle 8 1 9 , où l’on vo it que le juge de p aix doit apposer les
scellés, mêm e d’o flic e , partout où les héritiers sont absens
au moment du décès. Il falloit donc le faire ainsi ; et il
n’ étoit pas besoin alors du Code de p rocédure p o u r re
q u érir le juge de paix de faire perquisition préalable du
testament, ni p ou r savoir que le président du tribunal
p ou vo it seul faire V ouçerture du testament , ou autre
papier cacheté.
L e sieur Boutarel ne trouvera d’ailleurs dans aucune
loi qu ’ il soit permis à un h é r it ie r , lorsque tous n’y sont
p a s , encore moins à un étra n g e r, de s’ériger en m aître,
et de s’em parer et d’o u v rir les papiers de la succession :
ainsi, il est inexcusable sur ce prem ier fait.
E n second lieu , il prétend a vo ir ouvert le p a q u e t,
parce qu’il étoit à l’adresse de sa femme.
•Mais le sieur D e lo r t a offert la p reu ve du contraire ;
d’où il résultoit une n ouvelle p reu ve de mauvaise f o i ,
puisque les sieur et dame Boutarel ont v o u lu s’excuser
par un mensonge.
E n f i n , il prétendoit se justifier de ne pas rapporter
l’e n v e lo p p e , en disant qu ’il avoit présenté le tout au juge
de p a i x , qui avoit jugé l ’enveloppe inutile,
B 2
�t
$•>< ;
C Ï2 )
M ais où est le procès verbal du ju ge de paix ? Si le
fait étoit v ra i, y auroit-il une autre manière de le cons
tater ? E t com m ent présum er qu’un juge de paix se per
mette de retrancher une pai’tie essentielle d’ un testament,
de s’en charger mêm e , sans le constater, sans dresser un
procès v e r b a l? Com bien ne seroit-il pas rep réh en sib le,
s’il le faisoit ? Ce n’est donc chez les sieur et dame B o u
tarel qu’ une misérable défaite.
Ils sont donc convaincus d’infidélité , de mauvaise foi:
ils ont donc encouru la peine de celte in fid élité, parce
q u ’ ils l’ont commise sciemment et à mauvais dessein.
V o y o n s à présent ce q u ’ont dit les premiers juges dans
leurs motifs : on les a déjà rappelés eu substance.
Ils disent d’abord que le testament est é c r i t , daté et
signé par le testateur, et que la loi n’impose pas d ’autres
formalités.
M ais c’est s’écarter de la question. O n ne contesle pas
à ce testament les. formes auxquelles il est assujéti ; mais
on met en question ,, et il s’agit de savoir si le testament
qu ’on rapporte est celui qui a été laissé par le sieur
D e lo rt et enlevé par le sieur B o u ta re l, revêtu d ’une en
v e lo p p e , et scellé de cinq cachets.
Q u ’on dise, si L’on ve u t, q u ’il ne suffit pas de le mettre en
question, et qu’il faut des preuves;.le sieur D elo rt répondra,
avec avantage, q u ’ il lui suffit de p rou ver la mauvaise foi*,,
la soustraction, p o u r que par cela même la suppression,
du testament soit présumée jusqu’à preuve contraire.
lies premiers juges disent ensuite que les formalités
voulues par l’article 1007 du Code civil ne sont relatives
qu’au m ode prescrit p o u r rendre le testament public ;
�I}0
( 13 )
qu ’ainsi leur omission ne peut en opérer la n u llité, parce
qu ’elle n’est pas prononcée.
E n f i n , que la preuve est inadm issible, parce qu’elle
ne porte que sur la suppression d’une enveloppe indiffé
rente à la cause, mais non sur celle d’un testament révocatoire de l’autre.
L e prem ier argument est faux dans toutes ses parties.
Si l ’article 1007 du Gode civil n’a pas dit en termes
précis que le testament olographe qui 11e seroit pas p ré
senté dans les formes qu’il p re sc rit, seroit déclaré n u l ,
il l ’a plus que donné à entendre ; il l’a positivement
v o u l u , en ne permettant pas q ii’U so it m is ci e x é cu tio n
avant que ces formalités soient remplies.
N e l’eût-elle pas d it , elle a suffisamment appris qu’elle
exigeoit ces formes comme les seules qui pussent lui faire
rcconnoitre un testament olographe v a la b le , et q u e , hors
de l à , elle refuseroit sa confiance et sa sanction à tous
ceux qui lui seroient présentés.
Ces principes ne tiennent-ils pas d’ailleurs à.la m o ra le ,
à l’honnêteté publique ? Sera-t-il donc permis à u n étran
g e r , à un cohéritier m ê m e , d ’o u v r i r , de fouiller les
tiroirs et les papiers d’un défunt au m om ent où il vient
d’e x p i r e r , et en l’absence de la famille ; de s’em parer de
ce qui lui conviendra ; d’o u v r i r , de garder en son p ou
v o ir ce qu’il trouvera à son avantage , et de supprimer
ce qu’ il voudra soustraire? lia l o i , la justice , poui'rontelles rcconnoitre après cela un testament olographe qui
sort des mains de cet étranger, et à son profit bien entendu ,
par cela seul q u ’ il est écrit, signé et daté de la main du tes
tateur; et lorsqu’il est constant qu’il n ’en étoit.pas le dé-
ré
�(I4).
p o sita ire, q u ’il l ’a enlevé parm i les papiers du d é fu n t,
et qu’après l ’avoir retenu deux jours il ne le présente pas
dans l ’état où il l’a pris ?
E h ! où en serions-nous, si, dans de telles circonstan
ces, il n ’étoit pas perm is à l ’héritier légitim e de faire
entendre sa v o i x , d ’accuser ce prétendu légataire d’infi
d é lité , de soustraction, s’il falloit poser en principe que
la pi’euve de cette infidélité n ’est pas admissible, parce
que la loi n’a pas p rononcé la punition du cou p able, et
que bien loin de le punir elle veut qu ’on le récom pense?
Q uant au dernier raisonnement des premiers ju ges, il
n ’est pas plus exact.
L ’enveloppe ne peut être considérée com m e in u t ile ,
parce que la loi ne l’a pas jugée te lle , parce que sa suscription peut être im p ortante, parce q u ’enfin si on l ’avoit
rap p o rtée, on a u r o it p u la com parer avec le papier p ré
senté , et savoir s’ils étoient faits l’un p ou r l’autre.
E t p o u r q u o i, encore une f o i s , si elle eût pu être in
différente , le Code civil auroit-il exigé que l ’ouverture
eu fût faite par le président du tribunal ? P o u rq u o i l ’auroitil chargé d ’en constater l ’ouverture et l ’état ?
P o u r q u o i , en expliquant plus positivement cet article,
le Gode judiciaire exigero it-il que le juge de p aix chargé
de faire la perquisition du testament, si on le lui annonce
avant l’apposition des scellés, en constate la fo r m e e x té
r ie u r e , te s c e a u , la su scrip tion ; qu ’il le présente lui-,
m êm e au président du tribunal; que ce dernier en cons
tate encore l ’état? P o u rq u o i tout cela, on le répète , si ce
n’est pour p réve n ir les violations? P o u rq u o i tant de p ré
cautions contre l’infidélité, si elle doit rester im punie ?
�( i 5 )•
Ces formes ne sont ni puériles, ni plus minutieuses que
celles qui sont attachées au testament p u b lic ; elles ne
sont pas non plus moins im portantes, parce q u ’elles ne
sont pas des formes intrinsèques du testament: car elles
ont p ou r objet d’en conserver la substance; et plus le lé
gislateur a donné de latitude au p o u v o ir de l’hom m e en
dispensant les testamens olographes de toutes form alités,
plus elle doit se mettre en garde contre une infidélité
f a c ile , et s’arm er de précaution p o u r la p réven ir.
Les formalités relatives à la remise du testament olo
graphe n’ont donc fait que i*emplacer, dans l’esprit et
l ’intention de la lo i, les foi-mes exigées pour le testament
public ; et ne l’eût-elle pas d i t , en ne permettant de le
ynettre ci e x écu tio n q u ’après ces formalités rem plies, qui
auroit le droit de s’étonner qu ’après de semblables omis
sions, de si repréhensibles in fid é lité s, la justice pût reje
ter un testament olographe qu ’elle ne sauroit valider q u ’en
trem blant, lorsqu’elle est o bligée de déclarer n ul un tes
tament p u b lic , si le notaire qui l ’a écrit lui-m êm e a oublié
d en faire m en tio n , q u o i q u e le fait soit si facile à v é r i f i e r ?
Q ue l’on cesse donc de d ire , avec les juges d ’A u r i l l a c ,
que les faits articulés par le sieur D e lo rt sont indifférens,
et ne peuvent o pérer la nullité du testament; que l ’o n n e
fasse plus à la pudeur publique cette insulte de dire que
la plus grave infidélité dans cette matière ne puisse pas:
produire autant d’effet que le plus petit oubli d’ un no
taire dans la rédaction d’un testament public! T o u t ce que
la loi a placé sous sa sauve-garde, sous la protection im
médiate des'/magistrats, ne sauroit y être en vain. L a loi a
d it:S i vous voulez faille exécuter un testament olographe,
�C 16)
je vous impose ces formalités ; si vous y m anquez, s i , plus
encore , vous les violez ; si vous êtes en mauvaise f o i , je
ne reconnois ni v o u s , ni vo tre testament : je ne ve u x pas
q u ’on l’exécute.
L a p reu ve étoit donc admissible, puisque les faits arti
culés tendoient à faire rejeter le testament : les premiers
juges ont donc mal ju g é ; le sieur D e lo rt pou rro it donc
s’en tenir à ces termes , et soutenir avec fondement que la
p reu ve doit être ordonnée.
M ais v e u t - o n , avec les premiers ju g e s ,q u ’il faille p ro u
v e r la suppression d’ une manière plus positive ? L e sieur
D e lo rt peut satisfaire les plus difficiles.
Il offre de p r o u v e r ,
i ° . Q u ’au lieu des expressions P o u r rem ettre à m adam e
B o u t a r e l, il y avoit sur l ’en veloppe : T esta m en t de
T jo u is -Is a a c D e l o r t , et sa signature ;
2°. Q u ’il y avoit sous cette enveloppe deu x feuilles
de papier , et non pas une seule.
O ù est donc l’autre? Q u ’en a fait le sieur B ou tarel?
Si cette p reu ve est fa ite , il faudra dire q u ’il y a suppres
sion de testament ou de codicile ; il sera constant aloi’s ,
. Q u e le sieur Boutarel a commis une infidélité qui le rend
suspect, en s’emparant des clefs du d é f u n t , en ouvrant
son bureau , en y prenant des papiers , particulièrement
u n testament ;
Q u ’il l’a aggravée en ouvrant ce testam ent, qu oiqu ’il
fût scellé de cinq cachets , et qu ’il ne pût pas d o u t e r ,
d ’après la su scrip tio n , que ce fût un testament;
Q u ’il a s u p p r im é , et conséquemment eu intérêt de sup
prim er cette enveloppe qu i a disparu ;
Q u ’enfin
�1Ü
( *7 )
Q u ’enfin il a supprim é encore une partie des disposi
tions , puisqu’au lieu de deu x feuilles de papier qui
étoient sous l’enveloppe , il n’en a p roduit qu ’une. O r , tout
dém ontre q u ’ une seconde feuille de p a p ie r, sous la m êm e
e n v e lo p p e , n e p o u v o it etre qu ’un second testament, ou un
codicile : il ne p o u vo it a vo ir d’autre but que de modifier
les dispositions du p re m ie r, et d ’en faire de n ouvelles; et
le sieur Boutarel ne peut l’avoir supprimé que p o u r cela.
T o u t cela sera constant : la seule chose qui ne le sera
pas, c’est que le testament rapporté par le sieur Boutarel
soit un des deux papiers qui étoient sous enveloppe ; et
en effet, ne p ou voit-il pas l’avo ir obtenu du sieur D e lo i’t ,
par obsession ou autrem ent, et l ’a vo ir en sa possession?
N ’a-t-il pas été en son p o u v o ir de supprim er le v é r i
table testament, dont il auroit soupçonné l ’existence, p o u r
y substituer le s i e n , puisqu’ il a gardé le paquet pen
dant deux jours entiers? E t la présom ption n’est-elle pas
de d ro it, s’il est une fois établi qu ’il est coupable d ’une
soustraction ?
E t dans ces circonstances, la justice pourroit-elle sanc
tionner un testament qui ne peut être reconnu p o u r la
dernière vo lon té du testateur, lorsque.le légataire u n iver
sel est convaincu d’avoir soustrait une partie des disposi
tions?
N e faisons pas cette injure à la lo i; disons plutôt avec
elle que celui qu i supprime tout ou partie des disposi
tions , est indigne de conserver celles qui sont faites en sa
faveur. N o?i
a c c ip ie t
fr u c tu m suce cà llid ita tis q u i ro~
lu it hceredem hœ reditalc sua d efrau da re ,• sed Jiujusm odi legation illi relictum au f e r at u r , rnaneat a u tem
G
«
�4V
( 18 )
q u a s i non sc r ip tu m ,
y«* «/¿ï nocendum esse e x îs tim a v e r it,
suarn sen tiet ja c tu r a m . L o i 2 5 , D e
legalis.
Q u ’on ne dise pas que les faits de soustraction sont
imputés au m a r i, et ne peuvent nuire à la fe m m e , au
profit de qui la disposition est faite.
D ’une p a rt, la fem m e a participé à la présentation du
testament; conséquem ment à la fraude.
D ’un autre côte , la soustraction faite par le m ari ne
p ou rro it profiter à la fem m e ; et ce seroit m ieu x que
jamais le cas de dire : is fe c it c u i prodest.
Enfin il n ’en résulterait pas moins que la justice ne
peut rcconnoître ,. dans ce testament r a p p o rté , la d e r
nière vo lon té du testateur.
A in s i d o n c , d ’après les lois, soit anciennes, soit n ou
v e lle s , les sieur et dame Boutarel auraient encouru la
déchéance de tous les avantages qui p ou voient leur être
faits par le testam ent, à supposer môme qu ’il eût fait
partie du paquet décacheté; à plus forte raison si la justice
ne peut être certaine qu ’il y fût ren ferm é, parce q u e , dans
ce cas, elle ne reconnoît pas de testament.
C ’en est assez; tout ce q u ’on p ourroit ajouter ne seroit
-que fastidieux et superflu. L e sieur D e lo rt ne s’occupera
m êm e que légèrem ent d ’ un m o y e n de nnllité résultant
de ce que le testament rapporté par les intimés n’a point
de date réelle , et n’est pas conséquem ment dans les
termes de l’article 970 du Code civil. Ce m o y e n , quoi
q u ’il ne l’abandonne pas, bien au contraire , lui est inutile
dès qu ’ il n’y a pas de testament ; il n’en aurait besoin ,
et il ne pou rro it le faire v a lo ir ,.q u e dans le cas ou le tes-
�UÉ
( 19 )
tam ent seroit reconnu p o u r etre celui d’Isaac D e lo rt : mais
c’est ce qu ’on ne saurait craindre , ni m êm e p résu m er,
d’après la gravité des faits articulés contre les sieur et
dame B outare l, le peu de confiance que m érite leur testa
m en t, et qu ’ils méritent eu x-m êm es, et l ’indignité dont
ils se sont couverts par les plus rep réh ensibles et les plus
coupables infidélités.
D E L O R
M e. V I S S A C
T.
, a v o ca t.
M ° . D E V È Z E , avoué licen cié.
A. R I O M , de l’ im prim erie de L
andrio t ,
seul im prim eur de la
C o u r d ’appel. — M ars 1807.
*
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Delort, Laurent-Louis-Amable. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Vissac
Devèze
Subject
The topic of the resource
testament olographe
legs
nullité du testament
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour sieur Laurent-Louis-Amable Delort, propriétaire, habitant de la ville de Thonon, département du Léman, appelant ; Contre sieur Claude Boutarel, et dame Françoise Ruphy, son épouse, habitans de la ville d'Aurillac, intimés.
Table Godemel : Testament : 7. le fait, par le mari de la légataire universelle, d’avoir ouvert l’enveloppe cachetée qui renfermait le testament olographe, écrit, daté et signé par le défunt, et de l’avoir présenté sans cette enveloppe considérée comme insignifiante, au président du tribunal qui en ordonna le dépôt chez un notaire, après constatation de l’état de la pièce, doit-il avoir pour effet d’admettre qu’il y a eu infidélité, violation du sceau et du secret du testateur, suppression d’un autre testament ou codicille révocatoire , et par suite nécessité d’annuler le testament comme ne présentant pas les caractères propres à assurer sa sincérité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1787-1807
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1705
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1704
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53308/BCU_Factums_G1705.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Yolet (15266)
Thonon-les-Bains (74281)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
legs
nullité du testament
Testament olographe
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53309/BCU_Factums_G1706.pdf
9703132916a291d3c967012d4e6350f3
PDF Text
Text
P R É C I S
POUR
Sieur J e a n G E R L E , avocat, et juge de paix
du canton de Sauxillanges, intimé ;
CONTRE
F r a n ç o is
r in e
et
GERLE} p rêtre, P i e r r e
M a r i e G E R L E , frè re s
,
i
C a th e
et s œ u r s ,
a p p e la n s .
U n e acquisition d’immeuble particulier, faite par un
père, en qualité de légitime administrateur d’ un de ses
enfans en bas âge, le prix payé des deniers du père ,
auquel des deux d o it-elle profiter? La translation de
propriété qui s’est opérée par l’effet de l’acte de vente,
n’a-t-elle pas résidé, ab initio, sur la tête de l’enfant,
au nom duquel l’acquisition a été faite? où l’objet ainsi
A
�acquis fa it-il partie des biens et de la succession du
père ?
L ’enfant doit-il être tenu de rapporter l’objet en na
ture, à -la succession de son père ? ou n’est-il tenu qu’au
rapport des deniers employés par le père au payement
du prix de cette acquisition, des frais et loyaux coûts,
et aux améliorations du fait de ce dernier?
Telle est la principale contestation sur neuf chefs de
demande, qui seront développés lors de la plaidoirie.
F A I T S.
En 17 5 9 , Pierre G erle, père commun des parties,
en qualité de légitime administrateur du sieur Gerle, in
timé, donna sa procui’ation pour acheter six journaux
d’un pré appelé la Périchonne, situé à Sauxillanges.
L ’acquisition fut faite par le fondé de pouvoir du sieur
Gerle père, en cette qualité, pour et au nom du sieur
Gerle fils.
, .
En 17 8 6 , le sieur Gerle fils contracta mariage. Son
père l’institua son héritier, et lé chargea de payer, à
chacun de ses autres enfans, une légitime déterminée.
A l’époque du contrat de mariage du sieur Gerle fils
(sa mère étoit décédée ab intestat'), Pierre Gerle, son
père, jouissoit alors des biens de ses enfans, provenans
du chef de leur m ère, en vertu de l’usufruit légal, effet
de la puissance paternelle alors en vigueur. Les parties
yivoient sous l’empire des lois des pays du droit écrit.
Après le mariagç du sieur G erle, intimé, son père a
également continué de jouir de ses biens, par suite du
�( 3 ) A
même usufruit, jusqu’au 19 août 18 0 4 , époque de son
décès.
A l’ouverture de la succession du sieur Gei’le p è re ,
le sieur Gerle aîné, son héritier contractuel, a réclamé
les six journaux de pré comme à lui appartenons, ayant
été acquis pour lui et en son nom par son père ; il a
offert de rapporter à la succession paternelle les deniers
fournis et avancés par son père, et employés au payement
du prix de cette acquisition , les frais et loyaux coûts
d’icelle, et le montant des améliorations du fait de ce
dernier, s’il en existe, qui aient rendu l’objet acquis de
plus grande valeur.
M O Y E N S .
C’est un principe généralement reconnu et avoué dans
le droit, qu’un père peut acquérir pour un de ses enfans;
et que l’objet acquis par le père, comme administrateur
légitime d’un d’eux, appartient irrévocablement à l’enfant
sous le nom duquel l’acquisition est faite, exclusivement
au père. G est cc qui nous est enseigné par tous les ju
risconsultes qui ont écrit sur cette matière.
Ils ont assimilé le cas de l’acquisition faite par le pèrft,
agissant en qualité d’administrateur ou de curateur d’un
de ses enfans, au cas d’un retrait lignager exercé par
l’ascendant, agissant en la même qualité, sous le nom
d’ un d’eux. Ils enseignent que les effets' et lfeà consé
quences sont les mômes dans l’un comme dans l’autré5
cas, et décident que de même' que le pèrëyou un deg
ascendans , ne peut disposer de l-héritage ainsi retrait^
A 2
�iJrt
\
( 4 ) _
de même il ne peut aliéner l’héritage par lui acquis sous
le nom d’un de ses enfans.
Gri maudet, en ses œuvres, liv. 2 , ch. 12 , agite d’abord
la question de savoir si un père peut valablement retraire'
sous le nom d’un de ses enfans , n’ayant aucun bien ,,
l’objet par lui vendu : après avoir décidé pour l’affir
mative, il ajoute que lors du partage des biens du père,,
l ’objet acquis appartient et reste à l’enfant comme propre;,
qu’ il en est l’incommutable propriétaire; et que, quoique
le père ait payé le prix de ses deniers, il ne sauroit pré
tendre à la propriété de la chose ainsi acquise. Voici
comment s’exprime Grimaudet :
« La conséquence suit de ce que l’enfant de fa mi lie y
« ou son père, comme curateur, peut retirer ce qui a
« été vendu par son père; lequel.acquêt demeure propre
v à l’enfant, et le père, après, ne le pourra retenir, par la
« raison commune que ce qui est acquis de mes deniers
« n’est pas fait mien, mais à celui qui a fait l’acquisition.>3
. Cet auteur fonde son opinion sur la loi S i ex câ
pecujiiâ, au cod. de re venditâ,* et les raisons qu’il en
.donne sont, ainsi qu’il les rapporte, fondées sur l’autorité
de Godefroy. Quia empium pecuniâ alicu ju s, ejus
non f i t , sed ejus cujus nomine emplio facta est ,• et
quando pater d o n a tjilio , velut pecu niam in retractur
ilia donatio non reddit ad cornmodum p a tris.
L e même auteur ajoute ensuite :
« Entre les enfans ès lieux où les père et mère ne
« peuvent pas avantager les uns plus que les autres, celui
« sous le nom duquel l’acquêt est fait, doit rapporter
a les deniers de V acquêt avec l e s f r a i s , si mieux il n’aime:
�( 5 )
ef-la chose retirée, demeurer en l’hérédité, pour les de« niers en être partagés; et pour Cacquêt être fa it p a r
« le p è re , comme curateur de son e n fa n t, il ne fa u t
« dire qu'il fasse sa condition meilleure que Vun de
« ses autres ci {fans : car il ne lui donne rien de son
« b ien , et tout ce qui part du père ( qui sont les dé
fi 7iiej's') , il fa u t que Yenfant les rapporte; le nom du
cc curateur ne doit f a ir e que la chose appartienne au
« père et aux autres enfans,
« Ce que nous disons que le père ne peut avantager
« l’un de ses enfans plus que l’autre, se doit entendre,
« comme nous disons en droit, que l’homme et femme
« ne se peuvent faire don l’un à l’autre, dont l’un soit
« plus pauvre, et l’autre enrichi : o r, au cas présent,
« par Yacquêt le père ri est appauvri ; car il ne perd
« rien du sien, et débourse seulement des deniers pour
« lesquels il se peut pourvoir; et quant à la cq u êt, le
« fils ne lef a i t de son père, mais de Yétranger", partant
« les autres enfans ne peuvent prétendre part audit
« acquêt, ou dire que p a r icelui le père ait avantagé
a leur fr è r e . »
.
Brodeau, sur l’article 139 de la coutume de Paris, qui
étoit une coutume qui astreignoit à une parfaite égalité,
a consacré les mêmes principes que Grimaudet ; il en
seigne que « les autres enfans, après le décès du père,
a ne peuvent rien prétendre à l’héritage retiré ou acquis
« par le père, sous le nom de l’un d’e u x; que le fils
« n’est tenu qu’au remboursement des deniers avancés
« par le père; que dès-lors nihü abest à fa r m liâ r et
«■ qu’on ne peut pas dire que la gratification et le choix
M
�.
( 6 }
« que le père a J'a it de la personne d’un de ses eiifans
« soit un avantage indirect et réprouvé. »
Lebrun, en son Traité des successions, liv. 3 , chap. 6,
sect. 3 , traite la question de l’acquisition faite par un
père au nom d’un de ses enfans, et celle du retrait exercé
par le père sous le nom de l’un d’e u x; et dans l’un
comme dans l’autre cas, il enseigne et décide que le fils ne
doit rapporter que le prix de l’acquisition ou du retrait,
et non l’héritage acquis ou retrait.
A u nombre i 5 , il dit :
« S i le.père a acheté au nom de son J l l s , l e p r i x
« DE L’ ACQUISITION EST SUJET A RAPPORT. »
A u nombre 16 , il ajoute:
« • Il en est de même quand un père a exercé et exé« cuté un retrait lignager au nom de son fils; car le
« fils rapporte le prix du retrait à la succession de son
a. p ère, e t n o n l ’ h é r i t a g e m ê m e , q u i n ’ a j a m a i s
a APPARTENU AU p è r e , et qui ne l’auroit pu prétendre
« en la succession de son fils, ni comme acquêt, ni à
« titre de réversion; en sorte que, quoique le retrait
« lignager soit très-avantageux, c’est un cas où le père
a peut avantager son fils d’un projit qu i nest point
a sujetià rapport. » I l J'a u t dire de même dans le cas
du nombre précédent, et « si l e p è r e a f a i t p o u r
SON F I L S U N A C H A T A V A N T A G E U X . »
Bourjon, en:sonTraité du droit commun de la France,;
chap. 7 , sect. iFe; , intitulée : Du rapport de ce que le
père achète pour son fils, pag. 729, s’ëxprime ainsi.
A u nombre 1er., il d it:
cvTout avantage d’ascendans à descendans fonde le rap-
�( 7 )
'
' ' &
« port. Si les pore et mère ont exercé un retrait lignager
« sous le nom de leur fils, il doit les deniers employés
« pour l’exécution d’un tel retrait , mais Vhéritage
« retiré lui appartient. »
A u nombre 2 , il ajoute:
« D e m êm e, s ils ont acheté et payé pour lu i an
« immeuble, ce q u i résulte évidemment de la proposi« tion précédente. »
A u nombre 3, le même auteur ajoute encore:
« D ans Tun et Vautre cas, c’est-à-dire, du retrait ¡et
« de rachat d'un immeuble de la part d’un père pour
« son fils y ce dernier ne doit pas le rapport de la
« CHOSE, qui ne vient pas de la substance du père j
« mais LE r a p p o r t DES DENIERS PAYÉS p a r Vascen« dant à ce sujet. Mais il ne doit plus les deniers en aban*
« donnant la chose , s’il se trouvoit lésé par le retrait
« ou l’acquisition, et qu’il eût été restitué contre l’eifet
« d’iceux. »
Enfin, au nombre 4 , Bourjon s’exprime-ainsi :
« Soit dans le cas du retrait exercé paï le père pour
« son fils, soit dans le cas de Vacquisition fa it e p a r le
« père sous le nom du m êm ejils, c e s s o r t e s d ’ a c t e s
« SONT DES ACTES DE COMMERCE ET NON DE LIBÉ« R ALITÉ. »
'
Ferrière, sur l’article 3 0 4 'de la coutume de Paris,
glose 2 ,n °. 1e1'., torn. 3 , enseigne une semblable doctrine.
« Ce qui est acqu is, dit-il, par le père, de ses denier&}
« au nom de son fils, est sujet à rapport, suivant le
« sentiment de Gharondas, ce qui est sans doute*, et en
« . ce cas, C’ EST LA SOMME QUI ESTçSUJETTE A^APPOUÏ*,
**
�ET NON L'HERITAGE ACQUIS , D’ AUTANT Q ü’ iL N’ A
« JAMAIS ÉTÉ DANS LES BIENS DU I>Èl\E. »
Boucheul, ou son Traiié des conventions de succéder,
chap. 6 , n°. 2 i et suivant, pag. 66 et suivantes, Irai le,
ex professa, lu même question, que la cour a à juger.
Après avoir fait rémunération des coutumes, telles que
celles de Normandie, Bretagne et Touraine, dont les
dispositions sont contraires aux principes généraux,
Boucheul ajoute.aussitôt;
« Mais l’on renterme ces coutumes dans leur détroit;
« et où la coutume n’en parle pas, la jurisprudence y
« est certaine que l’héritage ainsi retiré et acquis parle
« p è re , sous le nom d’un de ses enfans , q u o i q u e
« M INEUR, EN BAS A G E , ET MEME SANS AUCUN BIEN,
« A P PA RTIEN T,
NON AU
PERE
QUI A FOURNI LES
, mais à Venfant sous le nom duquel
r l ’ a c q u ê t o u le retrait sont faits. »
Cet auteur a fondé son opinion sur les dispositions
de la loi 8 , au çod. S i quis alteri vel sib i emerit.
A u nombre 26 , Boucheul ajoute :
. « Quand le père ou la mère a c q u i è r e n t un héri« tage sous le nom de l’un de leurs enfans, ce rtest pas
« DENIERS
« UN
AVANTAGE QUE CETTE
PRÉDILECTION Q u’iLS
« ONT POUR L U I , et en remboursant le p r ix , l ’ i i é r i « t a g e e s t a u E iL S, san s qu?il soit besoin à?en fa ire
« rapport à ses cohéritiers, parce que c’est un bien
« qui ne vient pas jde s u b s t a n t i a p a t r i s »
Denizart, au mot Rapport, n°. 4 ^ d.it :
« S i le père achète , au nom de son J i l s , ou exerce
* un retrait lignager, LE p r i x d e l ’ a c q u i s i t i o n o u du
« retrait
.
�« retrait est sujet à rapport ;
m a is
non
pas
l ’h é -
en
« sorte qu e, supposé que Vachat ou Je retrait soit
« avantageux au J ï l s , LE PROFIT QUE FA IT l e f i l s
« R IT A G E , QUI N’ A JAMAIS APPARTENU AU PE R E ’,
« N’ EST PAS SUJET A RAPPORT. »
Pothier, en son Traité des successions, cliap. 4 , §.
page 18 0 , édit. in-40. , enseigne la même doctrine.
« Lorsqu'un père ( dit - il) a acheté, au nom et
« pour le compte de s o iijils , un héritage, et en a payé
« le p rix de ses deniers , c e n ’ e s t p a s l ’ h é r i t a g e
« QUI EST SUJET A R A P P O R T ; I L N’ A J A M A I S
« P A S S É D U P È R E A U F I L S , P U IS Q U ’IL N’A
« JA M A IS A P P A R T E N U AU P È R E , A Y A N T
« É T É A C H E T É A U NO M DU F I L S ; L E F I L S
« sera donc seulement tenu, en ce ca s, AU RAPPORT
« DU p r i x que le père a fo u r n i pour Vacquisition. »
On trouve la même décision dans le répertoire de
jurisprudence, par Guyot. Les articles que nous allons
rapporter sont d’un célèbre magistrat, vivant au temps
actuel, collaborateur de ce répertoire ( 1 ).
A u mot légitim e, tom. 10 , pag. 386 , on lit :
« L e PRIX d ’ u n e ACQUISITION que le père fait au
« nom de son fils, et qu’il paye de ses propres deniers,
« est, sans contredit, sujet k l’imputation : 011 a déjà
« vu que le parlement de Flandres l’a ainsi jugé, par
« arrêt du 14 février 1775. »
Mais il est essentiel de remarquer ici que c’cst du
p r ix , et non de l’héritage acquis , dont il est fait men(1) M. Merl... procureur général à la cour de cassation,
B
�tion , lorsqu’il s’agit de l’imputation de légitime. On va
voix* qu’il n’est également question que du p rix , et non
de l’héritage, lorsqu’il s’agit du rapport»
ün lit encore, dans le même répertoire de jurispru
dence de G uyot, page 4 1 3 , au mot rapport, nomb. 7 :
« Nous avons établi, à l’article légitime, qu’on doit
« imputer, dans la portion légitimaire, l e p r i x d e l ’ a c « QUISITION QUE LE PERE A FAITE DE SES PROPRES.
d e n ie r s
cc
veut que LE PRIX SOIT SUJET A RAPPORT. »
E n fin , à la même page il est ajouté :
« Nous ne parlons ici que d u r a p p o r t d u p r i x , .
parce qu’en effet il n\y a que LE pB.ix q u i y p a -
«
, AU NOM DE SON
; la même raison
«
k ROISSE SUJET ,
« FAITE
f il s
DANS LE CAS D’ UNE ACQUISITION
PAR LE PERE ,
AU NOM D’ UN DE SES EN—
« FANS , L’ HÉRITAGE MEME SEMBLE NE DEVOIR PAS« Y
ÊTRE
« PÈRE
SOUMIS : JAMAIS IL N’ A APPARTENU AU
IL N’ A POINT PASSÉ DU PÈRE AU FILS
« CONSÉQUEMMENT
« LE METTRE
LE FILS N’ EST
POINT
, et
TENU DE
DANS LA MASSE DES BIENS DU PÈRE
tf APRÈS SA MORT. »
Telle est la doctrine universellement enseignée par les
jurisconsultes qui ont écrit sur la question élevée au
jourd’hui dans la famille Gerle t tous ont decide que le
fils, au nom duquel lTacquisition ou un retrait sont faits
par lep èi'e, ou autre ascendant, est propriétaire seul et
incommutable de l’immeuble- acquis ou retrait ; que le
fils est seulement tenu au rapport des deniers déboursés
par le père, et non au rapport de l’héritage acquis,
sur lequel le père n’a jamais eu aucun droit de propriété-
�De ces principes, il résulte que les six journaux de
p r é , que le sieur Gerle père a acquis au nom de son
fils aîné, en 1769, ont appartenu à ce dernier , dès l’ins
tant même que la translation s’en est opérée par l’effet
de l’acte de vente qui a eu lieu ; il résulte enfin , et il
est démontré, que cette propriété a résidé sans cesse sur
la tête du sieur Gerle, intimé, à l’exclusion de son père,
et q u e , soit le sieur Gerle p ère, soit sa succession ou
ses héritiers, n’ont à réclamer que le p r ix , les frais et
loyaux coûts, et les améliorations du fait du p è re , s’il
en existe du fait du père.
Quoique le père ait fourni les deniers pour le paye
ment de cette acquisition , cette circonstance ne sauroit
donner aux enfans légitimaires du sieur G erle, aucun
droit de propriété sur le pré dont il s’agit. C’est ce qui
nous est enseigné par Godefroy, en ses notes sur la loi i re.
au cod. S i quis alteri vcl s ib i, sub alterius 11 aminé vel
alienâ pecunià em erit, tit. 5 o , liv. 4. Il décide que la
chose acquise n’appartient pas à celui qui en a payé le
prix de ses deniers, mais & celui au nom duquel la chose
est achetée.
R e s , dit-il, ejus esse imm videtur, non euju s pecunia,
sed cujus nomine empta est.
Et sur la loi 8 , du même tit., le même annotateur
.ajoute ; A lien â pecuniâ , quod com paralur , J i t comparantis , non ejus cujus fu it pecunia.
La circonstance de l’existence de l’institution contrac
tuelle faite en 1786 , en faveur de l ’intim é, de la part
de son père, ne sauroit changer son état, ni porter at
teinte à son droit exclusif de propriété sur le pré de ]La
B %
�Périchonne ; droit dont il a été irrévocablement investi
dès le 7 avril i'jôc), c’est-à-dire, dès le moment même
de la perfection de l’acte d’acquisition faite pour lui et en
son nom par son père.
En devenant l’unique propriétaire de ce pré, au même
instant il est devenu débiteur envers son père des deniers
par lui avancés et fournis pour parvenir à cette acqui
sition. O r, par cet état de chose, il est démontré que
jamais le père n’a pu être considéré comme propriétaire
du pré en question, et que cette propriété a nécessai
rement résidé dans la personne du fils.
L e père, en instituant son fils aîné héritier universel,
ne l’a institué que dans l’action qu’il avoit pour répéter
les deniers par lui déboursés, et non dans la propriété
du pré acquis pour son fils. Car, encore une fois, le père
n’en a jamais été ni pu devenir propriétaire, tant que
le fils n’a pas manifesté l’intention de renoncer à la
propriété de cet objet.
Ce seroit renouveller une absurdité qu’on a mise au
jou r, en cause principale, si les appelans prétendoient
que l’acquisition faite au nom du fils, par le père, est
un avantage indirect; que jointe à l’institution contrac
tuelle, le père auroit alors excédé la quotité disponible;
que leur légitime de rigueur seroit blessée; le pré dont
il s’agit ayant, depuis 17 5 9 , considérablement accru de
valeur.
Toutes ces idées systématiques se trouvent détruites
d’avance par les autorités ci-dessus rapportées. Grimaudet,
Brodeau, Lebrun et Bouclieul enseignent que la prédi
lection que donne un père à un de ses enfans, en achetant
�( 13 )
sous son nom un immeuble, n’est point un avantage
indirect fait à cet enfant. Bourjon, au n°. 4 déjà rap
porté, dit que ces sortes d’acquisitions sont des actes de
commerce et non de libéralité.
Il est impossible de concevoir que de telles acquisitions
présentent l’ombre la plus légère d’ un avantage indirect,
lorsque le fils rapporte les deniers fournis par le père;
par ce rapport, le fils réintègre dans la fortune du père
tout ce qui en est sorti : et tous les auteurs ci-dessus
cités enseignent que le fils n’est tenu qu’au jrapport de
ces mêmes deniers, qui ont constitué la substance sortie
de la fortune du père, et qu’il n’est point tenu au rapport
de l’immeuble acquis, lequel, ab in itio , a appartenu au
iils exclusivement au père : c’est ce rapport du prix
qui a fait dire à ces jurisconsultes que la prédilection ,
ou le choix d’un des eirfans, fa it p a r le p è r e , ji’étoit
point un avantage indirect.
L e p è re , en achetant pour son fils , n’a sorti de la
substance de ses biens et de sa fortune, que des deniers;
le iils ne doit remettre à la succession du père que les
memes objets qui en ont été distraits ; .c’est-à-dire , qu’il
ne doit remettre que des deniers. Cette vérité nous est
encore enseignée par Potliier, en son Traité des succes
sions, tome 6 , chap. 4 , § . 2 , page 17 7 , édition zrc-40,
Voici comme il s’exprime :
K Tous les actes d’un père ou d’une m ère, dont
« quelqu’ un de leurs enfans ressent quelqii avantage ,
« 72e sont pas des avantages indirects sujets à rapport,*
K il n’y a que ceux par lesquels les père et inère font
K passer quelque chose de leurs biens à quelqu’un de
�( 14 )
« leurs enfans, par une voie couverte et indirecte; c’est
« ce qui résulte de l’idée que renferme le terme rapport;
« car rapporter signifie remettre à la masse des biens du
« donateur, quelque chose q u i en est sorti. On ne peut
« pas y remettre , y rapporter ce qui n’en est pas sorti:
« donc il ne peut y avoir lieu au rapport,! que lorsqu’un
« père ou une mère ont fait sortir quelque chose de
« leurs biens, qu’ils ont fait passer à quelqu’un de leurs
« enfans. »
En faisant l’application de ce principe lumineux en
seigné par Potliier, il est donc clairement démontré que
les légitimaires Gerle ne sont fondés à réclamer que le
rapport des deniers employés par le père commun, à
payer l’acquisition faite pour son fils aîné , parce qu’il
n’est sorti du patrimoine du père que des deniers. Leur
système de rapport de l’objet acquis est une eri’eur : cet
objet n’a jamais fait partie des biens du p ère, puisque
tous le^wrc jurisconsultes décident qu’il appartient au fils
€t non au père. L e pré de la Périchonne n’a donc pas
pu sortir de la fortune du p ère, n’y étant jamais entré,
iC’est vouloir se révolter contre les principes du droit,
que de soutenir le rapport, en nature, du pré dont il
s’agit.:
1 .-La propriété du pré de la Périchonne ayant résidé
ab initio , c’e s t-à -d ire , dès le moment même de la
.confection ; de l’acte de vente par l’effet duquel la trans*
,lation de propriété a passé de la personne des vendeurs
.en celle du'siéur Gerle fils, acquéreur, il est ridicule de
prétendre que . les appelans aient jamais pu concevoir
l ’espoir d’un droit de légitime sur ce pré. On ne cessera
�( i5 )
»
l
.
.
de le répéter, ce pré n’a jampis fait partie du patrimoine
du sieur Gerle père ; il n’a eu sur cet objet qu’un droit
d’hypotlièque pour sûreté des deniers par lui avancés
pour son fils. L e sieur Gerle fils aîné, débiteur envers
la succession de son père de ces deniers , ne profitera
d’aucun de ceux que le père a sortis de son patrimoine,
en rapportant le prix »de l’acquisition dont il s’agit j les
frhis et 4oyat*x
d’icelle M et la valeur des amélio
rations du' fait de son p ère, s’il en existe. C’est sur ces
deniers , que n’a cessé d’offrir l’intimé dès 'le moment de
l’ouverture de la succession de son père, que doit frapper
en partie la légitime des appelons, et non sur le pré de
la Périchonne qui n’est jamais entré dans le patrimoine
du père, et n’en a jamais fait partie.
Par le rapport offert par l’intimé, la succession du
père ne reçoit aucune atteinte, et l’intimé lui-même ne
reçoit aucun avantage. Cette succession recouvre tout ce
qui a été distrait par le père, de la substance de sa for
tune et de ses biens.
** *
Lesappelans nesauroient être fondés à réclamer aucune
espèce de droit de légitime sur l’accroissement de valeur
qu’a pu acquérir le pré de la Périclionue, depuis iyô p ,
étant démontré qu’il n’a jamais fait partie des biens du
père commun. Cet accroissement de valeur n’a rien coûté
au père ; sa fortune n’en a souffert aucune espèce de
distraction; c’est une augmentation inopinée, qui est un
accessoire du p ré, produite par la chance des temps, et
indépendante du fait de l’homme. O r, dès qu’il est dé
montré que le père commun n’a jamais .eu tvn
*11! 'iD r,i • '
�( 1 6 )
tant aucun droit de propriété sur cet héritage, c’est une
absurdité de prétendre que les appelans ont des droits
à ses accessoires.
r
f
•'
'• * .
•[_■
' :• '
i% 0 %
■3 J ^
c*- t* a j / u « 4 - a
Pour-pouvoir, G E R L E .
■ r’"
; ;
OJ^ k °
i
i
y)
^
À R I OM; de l'imprimerie de T h ib a u d - L a n d r i o t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Mai 1808.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Gerle, Jean. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gerle
Subject
The topic of the resource
successions
acquisitions
fils avantagé
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour sieur Jean Gerle, avocat et juge de paix du canton de Sauxillanges, intimé ; contre François Gerle, prêtre, Pierre, Catherine et Marie Gerle, frères et sœurs, appelans.
Particularités : notation manuscrite : » 28 mai 1808, 1ére section. Arrêt confirmatif du jugement qui avait attribué la propriété à l'usufruitier. »
Table Godemel : Mineur : 18. une acquisition d’immeuble particulier, faite par un père, en qualité de légitime administrateur d’un de ses enfants en bas âge, le prix payé des deniers du père, aux quels des deux doit-elle profiter ? la translation de propriété qui s’est opérée par l’effet de l’acte de vente, n’a-t-elle pas résidé ab initio sur la tête de l’enfant au nom duquel l’acquisition a été faite ? ou, l’objet ainsi acquis, fait-il partie des biens et de la succession du père ? l’enfant n’est-il tenu qu’au rapport du prix et des frais et loyaux coûts ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1759-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1706
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0549OCR
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53309/BCU_Factums_G1706.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Sauxillanges (63415)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
acquisitions
fils avantagé
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53310/BCU_Factums_G1707.pdf
977df0f4095e52151eeadb6e7f880902
PDF Text
Text
CONCLUSIONS
POUR
La dame DE V È N Y - V ILLE M O N T
d e M a r i o l , appelante;
veuve
CO NT RE ,
Le sieur BRECHET, intimé
ET CONTRE
*
L a v e u v e e t h é r itie r s d u s ie u r d e V é n y
de
T h e i x , intimés.
A Q U ’ IL P L A I S E A L A C O U R dire qu’il a été mal
CE
jugé par le Jugement rendu au tribunal de Clermont, le 13 août
1807, bien appelé; émendant, et faisant ce que les premiers juges
auroient dû. faire; statuant au principal sur la demande du, sieur
Bréchet formée par exploit; d u 16 pluviôse a n 1 2
�Attendu que le sieur Brechet n’a pas pu arrêter l’effet
d’une enchère légale et rég u lière, sous prétexte d’offres
labiales qu’il a trouvé le secret d’éluder jusqu’à présent;
Attendu qu’avant de faire à la dame de M ariol l’offre
de payer la totalité de ses créa n ces, le sieur Brechet a
dû réfléchir aux conséquences d’ un engagement aussi
exprès , s’inform er de la nature de ces créances déjà
énoncées dans les inscriptions, et chercher les renseignemens qu’il a pu prendre depuis;
A ttendu que des offres judiciaires ne peuvent pas être
un vain m ot, et que le sieur Brechet ayant ôté à la dame
de M a rio l, par le moyen desdites offres, le droit d’en
chérir et se faire adjuger un immeuble de sa fa m ille ,
ne peut pas aujourd’hui la priver d’un payement qu’il
lui a offert en indemnité de son action ;
Attendu que tout créancier inscrit a le droit d’enchérir,
sans que son titre puisse être mis en litige jusqu’à l’ordre
ouvert avec les créanciers ;
A ttendu que d ès-lors le sieur Brechet ne pou v o it ,
comme il l’a jugé lui-m êm e, se substituer aux légitimes
contradicteurs, qu’en offrant un payement qui évitât un
litige auquel il auroit été étranger;
Subsidiairement, statuant sur le règlement des créances de
la dame de Mariol ;
En ce qui touche, i°- la créance de 3oooo francs ;
Attendu que par le contrat de mariage de la dame de
M a rio l, du 9 février 1 7 7 1 , la dame de V ille m o n t, sa
m ère, lui a constitué une somme de 30000 francs, sans
forclusion, ni renonciatipn à sa suçcession fu tu re , avec
�(3)
la clause expresse et explicative ainsi concue : E ïi sorte
que venant à m ourir sans avoir f a i t d’autres disposé
tio n s, la fu tu re épouse viendra ¿1 partage,. sans même
être obligée de rapporter ladite somme de 30000 francs;
Attendu que si la dame de V illem ont s’est réservé en
suite, par le même contrat, de faire des dispositions p ar
lesquelles elle réduiroit la future à la dot de 30000 f r .,
ou l’institueroit héritière à la charge du l'apport de ladite
d o t, il ne peut s’ensuivre de ladite clause aucun chan
gement à la précédente;
Attendu que la dame de V illem ont est décédée sans
avoir fait de dispositions contraires ; qu’ainsi la clause
de préciput reste pure et sim ple;
A tte n d u que la condition résolutoire n’ayant pas eu
d’eflet, est réputée n’avoir jamais existé, et que la con
dition de la première clause se trouvant seule accom plie,
a un effet rétroactif au temps de l’acte, suivant l’art. 1179
du Code civil;.
Attendu qu’on ne peut assimiler cette clause de pré
ciput à une réserve de 30000 francs, puisque la dame
de V illem o n t, dans le cas m êm e des dispositions q u ’elle
se réservo it, stipuloit expressément qu’elle ne pourroit
ôter à sa fille ladite somme de 30000 francs;
Attendu que d’après la même clause il n’y auroit donc
eu de réserve que pour l’institution ; et qu’il seroit ridi
cule de dire qu’une institution est tombée dans la suc
cession ab intestat, pour être attribuée aux légitimaires
à l'exclusion de l’institué, d’après l’article 2 de la loi du
18 pluviôse, opposé par le sieur;B rechet;
-
Attendu q u e , dans les deux sens deila clause, le p r é -
�ciput de 30000 francs ¿toit irrévocable de sa nature, et
q u ’il a été maintenu par l’article I er. de la même lo i;
Attendu que la loi du 17 nivôse an a , sons l ’cmpii'e
de laquelle s’est ouverte la succession de la dame de V illem ont, n’oi'donnoit le rapport des dons en préciput faits
antérieurem ent, que par suite de son effet rétroactif, et
que cet effet rétroactif a été rapporté par les lois des 9
fructidor an 3 , et 3 vendém iaire an 4 ;
A tte n d u que l’objection du sieur Brechet , tirée
du partage du 18 p luviôse an 7 , est non recevab le,
1°. parce qu’ün étranger ne peut empêcher un cohéritier
d ’exercer toutes les actions supplémentaires ou rescisoires
qu’il auroit à form er contre ses cohéritiers, ni lui con
tester lës actes conservatoires qu’il a jugé à propos de
faire ; 2°. parce que la dame de M ariol a réclamé et
inscrit sa créance de 30000 francs avant l’acquisition
du siehr Brechet, lequel dès-lors a dû savoir en achetant
qu’il se soumettoit aux inscriptions ou à une enchère;'
A ttendu que la même objection porte sur une suppo
sition inexacte, parce que le partage du 18 pluviôse an y
ne comprend que la terre de T h e ix , et non la totalité
des biens de la dame de V illem ont ; r
A ttendu que ce fait est p ro u vé par la vente d’une
portion du ^domaine de Saint-G enest-Cham panel, con
sentie par la dame du S au vage , à la dame de M a rio l,
le 4 floréal an 9 , où il est dit que ledit domaine étoit
à ladite époque encore indivis entre lesdites dames et
les autres cohéritiers de leur mère;
Attendu que ce fait est prouvé encore par la vente
m ême du sieur Brechet ? ou il s’est faijt donner en h y -
�( 5 )
V 7
potlièque spéciale de garantie le quart dudit domaine,
de Saint-Genest, indivis entre la .danic ihi Sauvage et
ses cohéritiers ;
Attendu que le môme fait est prouvé par la demande
formée par le sieur Balthazard V e n y de T lie ix , contre
la dame de M ariol et la dame du Sauvage, en supplé
ment de partage de la succession de la dame de V ille m o n t, et en compte resp ectif de créances.
En ce qui touche la créance de 10000 francs,
Attendu que ce n’est point la loi du décès qui doit
régler l’efTet d’un acte entre-vifs , comme l’ont encore
pensé les premiers juges ;
Attendu que la loi du 17 nivôse an 2 ne s’appliqueroit
à une obligation du 23 février 179 3 , que par suite de
son effet rétroactif;
A ttendu qu’avant le 7 mars 1793 , aucune loi ne
défendoit à la dame de V illem on t de s’obliger envers
sa fille, puisqu’elle auroit pu disposer directement à son
profit de la moitié de ses biens en préciput ;
Attendu d’ailleurs que l’ obligation de 10000 fr. a une
cause lég itim e, en ce qu’elle proven oit, pour 8000 f r .,
d’une créance beaucoup plus ancienne, cédée par la dame
de M ariol à sa m è re , e t , pour 2000 f r . , d’une donation
de la dame de M on trodès, son aïeule;
Attendu que la dame de M ariol ne pouvoit pas ré
clamer le montant de ladite obligation , lors de l’acte du
20 mars 17 9 3 , puisqu’il ne s’agissoit que de régler ce
qu’elle avoit à payer à des tiersj par suite d’un acte de
fam ille, du 23 février 1778 ;
�(6 )
A tten d u que la dame de M ariol a pu encore moins
réclam er cette obligation , soit en l’an 7 ,. soit même par
sa notification du 14 nivôse an 1 2 , parce qu’elle avoit
cédé ladite obligation au sieur L ab et, par acte du s 5 flo
réal an 2 , et que ce titre n’est rentré en ses mains q u e
par le-payement qu’elle a été obligée de faire audit sieur
L a b et, suivant sa quittance du 24 prairial an 12 ;
Attendu que ledit sieur L abel , comme créancier d e
la dame de V ille m o n t, au moyen de ladite obligation^
de 1793? avo it fcdt inscription sur ses biens; que la dame'
de M ariol en ayant vendu une partie au sieur L evet et
au sieur Dalmas , ledit sieur Labet est venu à l’ordre du:
p rix desdites ventes, et s’y est fait colloquer;
A ttendu que par l’effet de ladite collocation la damede M ariol a été forcée de payer le montant de l’obli
gation qu’elle avoit cédée, et par conséquent d’acquitter
sur son lot particulier-la portion de ladite obligation due
par la venderesse du sieur: B rech et, et par ses autres,
cohéritiers.
En ce qui touche la créance de 6000 francs
Attendu qu’ il est notoire que la dame de M ariol a fait
pour la dame du Sauvage, sa sœur, des avances infini
ment supérieures à ladite somm e ;
v.
A ttendu que suivant lîart. 26 de la première loi du
i l brum aire an 7 , un acquéreur ne peut point opposer
sa ven te, tant qu’elle n’est pas transcrite, à un créancier
porteur d’obligation, lorsqu’il a inscrit sonrtitre avant la
transcription;
Attendu que les formalités exigées pour, la spécialité do
�l’hypothèque, par l’article 2129 du Code c iv il, n’étoient
point spécifiées dans la loi du 11 brum aire an y , et
q u e , suivant l’article 4 de ladite l o i , il suffisent d’indi
quer la nature et la situation des immeubles hypothé
qués , sans les désigner chacun expressément ;
A ttendu que la dame du S au vage, en indiquant des
bâtim ens, p r é s , terres, et vignes, situés dans les nrrondissemens des villes de R iorn et de Clerrnont, a suffisam
ment indiqué la nature et situation des immeubles hypo
théqués; qu’ainsi elle s’est conform ée à la loi qui existoit
lors de son titre;
A ttendu que l’indication de payement faite par laditeobligation n’a point eu son effet, et que la dame du
Sauvage a touché elle-m ême ce qui lui étoit dû ;
Attendu que le défaut d’autorisation de la dame du
Sauvage n’est point un moyen de n u llité , parce qu’elle
étoit femme d’ém ig ré, et obligeoit d’ailleurs ses paraphernaux ;
A ttendu que si le sieur du Sauvage a été rayé de
la liste d’émigration en l’an 1 1 , cette radiation n’a point
ete connue dans le départem ent du P u y -d e -D ô m e , q u i
n’étoit pas celui de son dom icile, et n’a pu empêcher
de traiter de bonne foi avec la dame du Sauvage, qui
n’a point quitté son domicile à Glerm ont, après ladite
élimination ;
>
Attendu d’ailleurs que la nullité fondée sur le défaut
d’autorisation ne peut être opposée par des tie rs, au
terme de l’article 225 du Code civil ;
Attendu que s i, comme le prétend le sieur B recliet,
il est injuste de lu i faire payeu une somme non recon
�nue à l’époque de de sa vente, il seroit bien plus injuste
encore que la dame de Mar iol, perdît des avances lé
gitim es, en laissant au sieur Brechet le gage desdites
créances pour le tiers de sa valeur.
Ayant égard aux offres faites par le sieur B rechet, en son
exploit du 14 nivôse an 12 , acceptées par exploit du même
jour, condamner ledit sieur Brechet, de son consentement, à
payer à la dame de Mariol, 1°. la somme de 225o0 francs,
faisant les trois quarts de celle de 3 oooo francs portée par son
contrat de mar i ag e du 9 février 1 7 7 1 , avec l’intérêt de ladite
somme depuis l’époque du décès de la dame de Villemont;
2°. la somme de 7500 francs, faisant les trois quarts de celle
de 10000 francs portée par l’obligation du 23 février 1793 ,
avec l’intérét de ladite somme depuis la date de ladite obliga
tion ; 5°. la somme de 6000 francs portée par l’obligation du 7
prairial an 1 1 , avec l’intérét à compter du 9 brumaire an 12 ,
époque de la demande, formée contre la dame du Sauvage:
Ordonner que l’amende sera rendue ; condamner le sieur
Brechet envers toutes les parties aux dépens tant des causes
principales que d’appel.
M e. G A R R O N jeune
■
<■■■>
i ~ mi
1
, avoué licencié.
1
X i , m ................ . ¿ L
.
A R I O M de l'imprimerie de T hidaud-LANDRIOT, imprimeur
de la Cour d’appel Mai 1808
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Véni-Villemont. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Garron
Subject
The topic of the resource
successions
surenchère
émigrés
dot
Description
An account of the resource
Titre complet : Conclusions pour la dame de Vény-Villemont, veuve de Mariol, appelante ; contre le sieur Brechet, intimé ; et contre la veuve et héritiers du sieur de Vény de Theix, intimés.
Table Godemel : Contrat judiciaire : y a-t-il contrat judiciaire entre l’acquéreur et le créancier surenchérisseur, lorsque le premier, pour arrêter l’effet de la surenchère et conserver l’immeuble par lui acquis pour le prix porté au contrat, a fait offre au surenchérisseur de le mettre hors de tout intérêt, et de lui payer la totalité de ses créances tant en principal, intérêts que ? , que ces offres ont été formellement acceptées ? l’acquéreur peut-il prétendre ensuite qu’il ne doit payer qu’après discussion préalable des créances avec les débiteurs, lorsqu’il n’a stipulé ni condition, ni délai ? Obligation : 2. une femme a-t-elle pu s’obliger valablement, par acte publié du 7 prairial an 11, sans autorisation, pendant l’émigration de son mari ? son acquéreur a-t-il qualité pour opposer la nullité ? Préciput : 1. par le contrat de mariage de la dame de Mariol, du 9 février 1771, la dame de Villemont, sa mère, lui constitua une dot de 30 000 francs à titre de préciput, stipulée payable seulement après son décès, sans intérêts jusqu’alors ; laquelle constitution n’emportera ni forclusion ni renonciation à l’égard de la future qui ne sera pas obligée de rapporter la dot, s’il n’y a pas de disposition contraire par testament de la constituante. la condition résolutoire ne s’étant pas effectuée, le préciput doit-il avoir effet, lorsque la mère est décédée sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2 ? Surenchère : 1. y a-t-il contrat judiciaire entre l’acquéreur et le créancier surenchérisseur, lorsque le premier, pour arrêter l’effet de la surenchère et conserver l’immeuble par lui acquis pour le prix porté au contrat, a fait offre au surenchérisseur de le mettre hors de tout intérêt, et de lui payer la totalité de ses créances, tant en principal, intérêts, que de frais, et que ces offres ont été formellement acceptées ? l’acquéreur peut-il prétendre ensuite qu’il ne doit payer qu’après discussion préalable des créances avec ses débiteurs, lorsqu’il n’a stipulé ni condition ni délai ? Transcription : 5. le majeur qui a traité avec des mineurs sur des intérêts respectifs et sur un partage, est-il recevable à demander la nullité de l’acte, pour vice de forme résultant de leur propre incapacité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1771-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1707
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0504
BCU_Factums_G1708
BCU_Factums_G1709
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53310/BCU_Factums_G1707.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Genès-Champanelle (63345)
Theix (village de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
dot
émigrés
Successions
surenchère
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53311/BCU_Factums_G1708.pdf
9ea57f52ebc620e9f0d4414172130d6e
PDF Text
Text
MEMOIRE
EN RÉPONSE,
sieur A n t o i n e B R E C H E T , ancien chef
d’escadron, habitant de la ville de Clermont,
intimé ;
P our
dame J e a n n e - F r a n ç o i s e D E
V E N Y , veuve du sieur S ic a u d d e M a r i o l ,
habitante de la même ville, appelante d’un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de
C lermont, le 1 5 août 1 8 0 7 ;
C o ntre
f
de dame M a r i e A V E L I N ,
veuve du sieur V ény D e T h eix , tutrice légale
de demoiselle Anne-Françoise-Jeanne d e V ény,
sa fille;
E n p r é s e n c e
i
‘
E t de dame F r a n ç o i s e V É T H I Z O N - V É N Y ,
fille adoptive du sieur V én y d e T h e i x , et du
sieur J e a N - B a p t i s t e D E V E Z E , son mari:
tous intimés.
L A dame veuve de Mariol a présente comme trèsurgente une cause fort compliquée. Pour prouver cette
A
�urgence, elle a fait publier sur l’appel un mémoire im
prim é, de quarante-sept pages petit caractère, dans le
quel 011 est obligé de chercher péniblement les questions
qu’elle fait naître.
On a cru d’abord qu’elle avoit voulu donner une
édition nouvelle du Mémorial de la cour de cassation ;
et sans doute le soin qu’elle a eu de faire réimprimer
cette collection d’arrêts, avoit pour objet de donner des
leçons à ses juges.
Elle ajoute, d it-o n , qu’elle a des protections puis
santes : c’est vraisemblablement pour intimider le sieur
Brechet. Insensée! la dame de Mariol ne peut pas ignorer
qu’en la cour les protections et les manœuvres sont plus
dangereuses qu’utiles ; que les magistrats savent tenir
d’une main ferme la balance de Thém is, et que les per
sonnes n’y sont d’aucune considération.
L a dame veuve de Mariol pourroit-elle etre protégée
lorsqu’elle ose attaquer des règlemens de famille qu’elle
doit respecter , réclamer contre sa propre conscience
l’exécution des titres dont la fraude et la simulation sont
évidentes, et qu’elle n’a pas osé mettre au jour quand
elle étoit en présence de ses cohéritiers; lorsqu’elle vient
s’en prendre à un ancien militaire, créancier originaire
de sa famille, et qui n’a cessé de donner des preuves de
sa'franchise et de sa loyauté?
Il est rare, au surplus, de voir figurer la dame Mariol
comme créancière ; il n’en sera que plus facile de prouvér
qu’elle est tout à la fois défavorable et mal fondée dans
ses prétentions.
�lï)
( 3 )
i. .
F A I T
S.
L e 3 brumaire an 7 , le sieur Brechet, ancien chef
d’escadron, couvert de blessures, ayant obtenu une re
traite honorable, a épousé la demoiselle Anne Giron.
Les père et mère de son épouse lui constituèrent en
avancement d’hoirie une somme de 12000 fr., à prendre
sur celle de 15466 liv. 13 s. 4 d. qui leur étoit due par
les héritiers de défunte Marguerite Dauphin , veuve
Vény de Villemont.
Comme il étoit notoire que les créances sur cette maison
n’étoient pas de l’argent comptant, on a soin d’annoncer
que cette créance étoit due par acte sous seing p rivé, du
25 mars 1788; que cet acte est reconnu, vérifié, et déposé
chez Chastelut, notaire; qu’il est suivi de sentence obtenue
contre la dame Dauphin; plus, d’un jugement arbitral;
plus, d’un jugement du tribunal civil du Puy-de-Dôme,
du 23 floréal an 5 , qui déclare le tout exécutoire contre
les héritiers de la veuve Villemont.
Ces jugemens, ces titres ne rendoient pas les payemens
plus faciles ; il auroit fallu user de voies rigoureuses,
d’expropriation, par exemple. Une occasion se présente,
et le sieur Brechet la saisit, quelques sacrifices qu’on exige.
Le 30 germinal an 9 , il achète de la dame V én y,
épouse séparée , quant aux biens, de Jean - Charles
Dunoyer du Sauvage, ou plutôt d’un sieur Guinez, son
fondé de pouvoir, la portion qui étoit avenue à la dame
du Sauvage dans le domaine de T h e ix , par le partage
de famille, du 18 pluviôse an 7*
A 2
�( 4 }
Cette vente est faite, i ° . sous la réserve des arbres qui
avoient été précédemment vendus , et dont l’acquéreur
est tenu de souffrir l’exploitation, dégradation immense,
très-ordinaire dans cette fam ille, qui a toujours com
mencé par là avant d’aliéner le fonds.
2.0. L ’acquéreur ne peut entrer en jouissance qu’après
la levée de la récolte de l’année, qui est expressément
réservée dans son entier.
3 °. L e prix est fixé à la somme de 29300 francs,
en déduction de laquelle le sieur Brecliet paye celle
de 2100 francs.
Quant à la somme de 27200 fr. parfaisant le p rix ,
l’acquéreur est tenu de la payer en l’acquit de la dame
du Sauvage, aux créanciers de feue Marguerite DauphinMontrodès, sa mère. Il est dit que ces créanciers sont
dénommés en l’acte passé entre la dame D auphin, le
sieur Vény de T lie ix , et la dame M ariol, devant Coste,
notaire à Beaumont, le 20 mars 17 9 3 , notamment à
J , B . Giron , ou à Pacquéreur , en qualité de mari
de dame Anne G iro n , à Julien Peyrend, etc.
A l’égard du surplus , l’acquéreur sera tenu de le
payer aux autres créanciers de la dame Dauphin, jusqu’à
concurrence de la portion pour laquelle la dame du
Sauvage doit contribuer dans le payement des dettes de
la. dame sa mère.
Il n’est pas inutile d’observer que la dame du Sauvage
affecte et hypothèque spécialement à la garantie de cette
vente, le quart à elle appartenant du' domaine de St.Genest-Champanelle, dont la totalité a été depuis vendue
au sieur D alm as, et qui étoit alors indivis. !r'
�Le sieur Brechet étoit bien éloigné de penser alors
à cette acquisition ; il en eut l’obligation ù la dame
M ariol, qui le sollicita et le détermina p;ir ces manières
engageantes, ces formes aimables qu’on lui connoît ; et
bientôt la dame Mariol a affecté de publier que le
sieur Brecliet avoit fait une grande affaire, quand il a
acquis cette portion du bien de Tlieix : cependant une
portion égale a été vendue au sieur L e v e t, moyennant
une somme de 26000 francs ; la portion du sieur de
Theix , plus considérable, et en fort bon état, n’a été
vendue que 36000 francs : cependant la portion acquise
n’otoit affermée que 800 francs, par bail du 2 5 vendé
miaire an 9 , pour neuf ans, sur quoi 200 francs d’im
position. Les arbres vendus valoient plus de 2000 fr. :
la réserve de la récolte de l’année étoit encore une di
minution ; et le sieur Brechet a été obligé de faire
pour 7854 fr. de réparations. E n fin , pour sauver des
débris les arbres qui restoient à couper, il lui en a coûté
1800 francs. V oilà le grand marché qu’a fait le sieur
Brechet.
Il devoit , sans difficulté , se mettre en règle, faire
transcrire et notifier son contrat; il cède aux sollicitations
de la dame M ariol, qui le conjure de ne pas faire des
frais inutiles : il paye les créanciers délégués ; il en
rapporte les quittances; il se contente ensuite de prendre
une inscription sur les biens hypothéqués à la sûreté de
la vente, une à R io m , l’autre à Clermont. Elles sont
sous la date des y et 8 floréal an 9.
L e sieur Brechet reste trois ans dans la plus entière
sécurité : bientôt on lui fait parvenir des propos ou des
�menaces de la dame Mariol ; il se détermine à faire
transcrire son contrat. Cette transcription est du 27 ven
démiaire an 12.
L e 13 brumaire suivant, la dame veuve Mariol lui
fait notifier une mise aux enchères. Il est à propos d’analiser cet acte fort important au procès.
L a dame veuve Mariol fait cette enchère comme
créancière de la dame Vény du Sauvage , tant en
ver'tu de son contrat de m ariage , en date du 9 février
1 7 7 1 , que à?obligation clu 7 prairial an 1 1 ; elle ne
dit mot sur une certaine obligation de 10000 fr. qu’elle
a fait éclore depuis, et dont elle n’a pas sans doute osé
parler dans son acte d’enchère.
Elle s’exprime au surplus assez disertement sur la
portion des biens vendue au sieur Brecliet. Elle y dé
clare que ces immeubles appartenoient à la dame sa
sœur, et lui étoient avenus par le partage qii’elle a
passé avec ses cohéritiers , devant Coste , notaire,
le 18 pluviôse an 7 : elle n’avoit pas imaginé alors que
ce partage n’étoit que provisionnel, comme elle menace
de le dire aujourd’h u i, quoiqu’elle n’en ait pas même
parlé dans son mémoire.
Elle n’enchérit d’ailleurs que d’un vingtième ; il est
vrai que sa réquisition est antérieure à la promulgation
du Code Napoléon en cette partie, qui exige que l’en
chère soit d’un dixième. Elle ne l’auroit peut-être pas
fait trois mois plus tard, même trois mois plutôt : mais
elle savoit que ce bien avoit passé en d’autres mains ;
que le sieur Brechet l’avoit échangé avec un individu
qu’autrefois la dame de Mariol n’auroit pas voulu
�blesser : elle a cru pouvoir mettre le sieur Brechet ou
son acquéreur à contribution; et si elle en a été quitte
à meilleur marché pour son enchère , elle n’eu sera
pas plus heureuse.
L e sieur Brechet ne fut pas fort effrayé de cette dé
marche , qui tendoit tout au plus à la ruine de la dame
du Sauvage ; ce qui n’étoit pas infiniment délicat de la
part de sa sœur, évidemment alors sa débitrice.
Le 6 frimaire an 1 2 , le sieur Brechet commença par
faire une saisie-arrêt entre les mains de la dame Mariol
et du sieur Vény de T h e ix , de tout ce qu’ils devoient
à la dame du Sauvage , notamment la restitution des
jouissances de la succession du sieur V ény d’A r b o u z e ,
frère commun, et la somme de 10000 francs provenante
de la vente de Saint-Genest-Champanelle ; cette somme
faisant le quart revenant ;\ la dame du Sauvage dans
cette vente.
Cette saisie-arrêt est faite pour la garantie du prix
porté au contrat de vente du 30 germinal an 9.
L e même jour , cette saisie-arrêt, ainsi que la mise
aux enchères de la dame M ariol, sont dénoncées ù la
dame du Sauvage.
L e 14 nivôse an 1 2 , le sieur Brechet prend le parti
de faire signifier à la dame Mariol un acte extraju
diciaire , par lequel il lui déclare que pour la mettre
hors d’intérêt, il lui offre de lui p a yer la totalité de
ses créances contre la dame V é n y , femme séparée,
quant aux biens, du sieur du Sauvage, tant en prin
cipal , intérêts que f r a i s : il lui fait en conséquence
sommation de déclarer ■>dans vingt-quatre heures y le
�(8 )
montant de ses créances , afin que le payement en puisse
être fait de suite. Il offre de plus de lui éviter et la ga
rantir de toutes poursuites de la part des autres créan
ciers , relativement à cette enchère ; à la charge aussi,
par la dame M ariol, de le subroger à son lieu et place,
avec toute garantie, protestant de nullité et de tous
dépens, dommages-intérêts, etc.
L a dame Mariol s’empresse de répondre ; et le même
jour elle fait notifier au sieur Brochet qu’elle accepte
ses offres, pou r quelles ne puissent plus être révoquées
à Vaçenirj en conséquence, et donnant pour le moment
le détail, autant que possible, de ses créances, elle dé
clare qu’il lui est dû la som me de 30000 fr a n c s pour
la dot en préciput et avantage à elle faits par la dame
Dauphin, sa m ère, suivant son contrat de mariage du 9
févrie r 17 7 1 *, les intérêts de cette somme, depuis le
décès de la dame D aupliin ; p lu s, la somme de 6000 fr.
montant d’ une obligation consentie par la dame Y én y
du Sauvage , à son profit, le. 7 prairial an 1 1 ; plus,
les frais de mise à exécution, dans lesquels doivent né
cessairement entrer l’acte de mise aux enchères , les
poursuites ultérieures; et là-dessus une longue histoire
sur les affiches qu’elle avoit déjà fait imprimer, dont
quelques-unes sont tim brées, d’autres ne le sont pas, etc.
Pas encore un mot de cette obligation de 10000 fr.
de la dame Dauphin, faite-en 179 3, moment sans doute
fort opportun. Il est cependant extraordinaire que la
dame M ariol, si fertile en détails, qui n’oublie pas même
la façon et l’impression de ses affiches, garde le silence
sur un objet aussi important, et qu’elle ne devoit pas
ignorer.
La
�. ( 9 )
La dame M ario l, bien contente d’elle-m êm e après
cette notification , appelle cela un contrat judiciaire ;
et voilà que les contrats judiciaires sont des actes irré
vocables; et voilà que la cour de cassation l’a jugé ainsi
par une foule d’arrêts. Sirey et Denevers , qui se dis
putent sur tant de choses, sont d’accord sur ce point;
chacun cite les siens, etc.
Un contrat judiciaire ! lorsqu’on n’a aucune connoissance de ce qui est demandé, lorsque la dame Mariol
elle - même , en notifiant son enchère, ne donne copie
d’aucun titre, n’énonce aucune somme; mais si au lieu
de demander 36000 francs en principal, et le payement
de l’imprimeur des affiches, elle eût demandé cent mille
écus, un million, par exemple, il auroit donc fallu que
le sieur Brechet payât tout sans réflexion, sans examen,
par la force du contrat judiciaire ?
L e sieur Brechet n’a pas été de cet avis ; il a raison
nablement pensé qu’avant de payer, il falloit savoir
ce qui étoit légitimement dû; en conséquence, il a cru
devoir consulter les cohéritiers de la dame Mariol, pou r
savoir leur opinion sur ce point. L e 1 8 nivôse an 1 3
il a fait citer devant le bureau de paix , la dame du
Sauvage et son m ari; les sieurs Ribeyre, le sieur Vény
de T h e ix , et la dame veuve Mariol.
Il a exposé qu’il avoit fait transcrire son contrat de
vente d’une partie du domaine de Theix ; qu’il l’a fait
notifier; que la dame Mariol a fait une enchère; que
pour la faire cesser, il a offert de lui payer le montant
de scs créances ; que la dame Mariol a bien vite ac
cepté : mais le sieur Brechet croit qu’avant de payer
B
,
�il faut que les créances de la dame Mariol soient liquidées
tant en présence de la dame du Sauvage, qu’en celle des
autres cohéritiers, afin de fixer la portion que chacun
doit p ayer, parce qu’entre cohéritiers , la dame de
Mariol ne peut prétendre à une action solidaire, mais
seulement à une action personnelle pour la portion de
chacun ; que la dame veuve Mariol doit môme faire '
confusion de ses créances , dans la proportion de son
amendement : en conséquence, le sieur Brechet demande
que tous les cohéritiers s’accordent entr’eux pour fixer,
liquider ou compenser les créances prétendues par la
dame d.e Mariol.
Les gens éclairés que le sieur Brechet a instruits de
ses démarches, ont pensé qu’il agissoit sagement, qu’il
ne.proposoit que des choses justes, et que la dame M ariol
ne pouvoit exiger que des créances légitimement établies,
dans, la proportion et d’après les bases expliquées par le
sieur Brechet.
M ais il, est si difficile d’accorder tout le monde ! Les
parties se présentent au bureau de paix ; le sieur du
Sauvage se fâche de ce qu’on a dit qu’il étoit habitant de
Clermont; il veut être habitant du Monasticr, et ne veut
plus parler.
L a dame du Sauvage, maîtresse de ses biens aventifs,
approuve les réclamations de sa sœur, mais jusqu’à con
currence de 75oo fr. seulement, pour sa portion conr-,
tributive dans le préciput de 30000 francs.
Elle reconnoît devoir la,somme de 6000 fr. portée parson, obligation du, 16 prairial- an l i ; ebloiu d’être>créann
cière de sa sœur pour restitution de jouissanccs.de la suç-
�C 11 )
cession d’Arbouze, elle est au contraire débitrice de dif
férentes sommes payées par la dame de Mariol à la dame
Dauphin, mère commune. En dernier résultat, elle n’en
tend prendre aucune part aux contestations qui s’élèvent.
L e sieur Baltliazard de Theix n’est pas si complaisant;
il déclare avec assez de rudesse qu’il entend contester
les prétentions de la dame Mariol ; il observe qu’elle a
laissé écouler huit ans sans réclamer ses prétendus droits;
qu'elle a laissé consormner les partages , a signé les
com prom is , nom ination lïe x p e rts , et a accepté son lot
sans se rien réserver’ qu’elle a laissé vendre la totalité
des biejis de la successiœi de la mère com m u n e, et a
souffert les partages du m obilier sans encore aucune
réclam ation.
On craindroit d’affoiblir les observatioüs du sieur de
Theix si on ne les transcrivoit littéruléttiènt.
Il ajoute que « la demande que fait la dame’dë Mariol
« à ses cohéritiers , par l’incident qu’ëllë fait aü sieur
« Brechet, est plutôt une vexation qu’une justice; que
« cette demande est inconsidérée, d’après les actes qui
« se sont passés dans la famille, et-dont'elle a parfaite
« connoissance ; que sa demandé est absorbée par lés lois
« anciennes ; que c’est un avantage prohibé par- les lois
« existantes lors du décès de;la mère. »
11 observe en outre « que la! dame DàupKin fit, dans'
« l’intervalle du 28 brumaire à son décès, dëux; testa-“
« mens, codiciles, lidéicommis, etc. Il requiert lâ(màiü« levée de toutes inscriptioüs faites par la dame M ariol,
« et finit par toutes protestations et réserves.-»
Survient la) dame Mariol > qui ne saitTpas ce queVest
B 2
�-*fl
( Ï2 )
que confusion, compensation, fins de non-recevoir, etc.;
cçs mots barbares n’ont jamais retenti à son oreille; elle
suppose que c’est pour faire diversion à sa demande : elle
veut de l’argent, rien que de l’argent-, le sieur.Brecliet
a promis, s’est engagé; elle veut qu’il paye, et le somme
de se concilier sur sa demande, dont elle n’entend point
rabattre une obole.
A l’égard de son frère , il ne sait ce qu’ il dit ; elle
n’a renoncé à r i e n : quand il fera apparoir de ses pré
tentions, on saura bien lui répondre; et s’ il veut exèiper
des testamens de sa mère, c’est à lui à les produire, etc.
L e 10 pluviôse an 1 2 , requête du sieur Brecliet. 11
demande permission de faire assigner la dame de M ariol,
pour lui voir donner acte de la réitéi’ation des offres
qu’il fait de lui payer ce qui lui sera d û , après qu’elle
aura fait liquider ses créances ; il demande qu’elle soit
tenue de justifier de ses titi-es , tant en présence de la
dame du Sauvage que de ses autres cohéritiers.
C’est alors que la dame M a rio l, par une requête du
13 thermidor an 1 2 , fait éclore une obligation de la
somme de 10000 f r ., en date du 25 février 17 9 3, sous
crite à son profit par la dame sa m ère, et payable daris
dix ans. Elle n’avoit point assez demandé au sieur Brecliet,
par légèreté ou par oubli : elle form e la demande inci
dente de cette somme ; et comme le sieur Brecliet avoit
offert de tout payer, il payera bien encore cette somme
de 10000 francs.
¡Bientôt après elle donne copie de cette obligation, de
celle qui lui a été consentie par la dame du Sauvage,
Je 7 prairial an 1 1 , et pour la sûreté de laquelle elle est
�C !3 )
déléguée par sa sœur, à prendre sur une rente et les
arrérages échus; le tout dû par la dame Dalngmu et la
dame Cormeret, sa sœur. E t ce que la dame M ono! ne
dit pas , c’est qu’elle a été remboursée par les dames
Dalagnat et Cormeret. On la croit trop délicate et trop
honnête pour ne pas convenir de ce remboursement :
dans tous les cas, on lui en administi’croit la preuve.
U n e grande discussion s’élève entre les parties, sur la
légitimité des créances réclamées.
L a dame Mariol entend répéter à ses oreilles qu’elle
n’a ni disposition ni préciput ; qu’elle n’étoit pas saisie
irrévocablement des 30000 fr. portés en son contrat de
mariage ; qu’elle n’a pas ignoré qu’en ligne directe il
falloit rapporter ce qu’on avoit reçu , lorsqu’on venoit
à partage. Aussi s’étoit-elle rendu justice; elle a partagé
avec ses cohéritiers le seul immeuble ( la terre de Theix )
qui provenoit de la succession de sa mère ; elle n’a de
mandé ni préciput ni obligation : tout s’est bien passé.
A l’égard de l’obligation de la dame du S a u v a g e , on
lui a représenté qu’elle avoit oublié la précaution la plus
essentielle; qu’elle n’avoit pas demandé l’autorisation du
m ari, si évidemment nécessaire. On ajoute aujourd’hui
qu’elle en est même payée.
On a fini par lui dire qu’elle n’avoit pas d’hypothèque
pour cette prétendue obligation : à la vérité elle avoit
bien fait hypothéquer, par une clause générale, tous
les biens que sa sœur pouvoit avoir dans l’arrondissement
du bureau de Clermont, et dans celui de Riom ; mais on
a supposé qu’une hypothèque de ce genre étoit trop vague
pour qu’elle fCit valable, d’après la loi du 1 1 brumaire
�( M )
an 7 , et le Code Napoléon, qui exigent une désignation
plus précise.
On a remontré qu’il étoit assez difficile de penser que
la dame du Sauvage, pour la sûreté d’une obligation en
date du 7 prairial an 1 1 , eût eu l’intention d’hvpothéquer des biens vendus depuis le 30 germinal an 9, plus
de deux ans auparavant : on a dû croire que la vente
avoit opéré une tradition en faveur de son acquéreur,
et que la dame du Sauvage n’avoit pas voulu commettre
un délit grave ( un stellionat ) •, que sa sœur même ne
l’auroit pas exigé.
Les premiers juges ont été de cet avis; ils ont pensé,
« i°. que la dame de Yillemont étant morte en l’an 4,
« sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2 , cette loi
« ne lui permettoit de faire aucun avantage en faveur
« de ses successibles;
« 2°. Que la loi du 18 pluviôse an 5 n’avoit confirmé
a que les avantages faits irrévocablement avant la publi« cation de la première;
« 3 0. Que la dot de 30000 fr., stipulée par le contrat
« de mariage de la dame M ariol, étoit plutôt une expec« tative qu’ un avantage irrévocable, puisque la dame
« Villemont s’éloit réservée la faculté d’appeler sa lille
« à sa succession, en rapportant les 3000 0 fr. ; ce qui
« fait disparoîire toute idée d’irrévocabilité. »
Les premiers juges ont d it, en quatrième lieu, que
v d’après l’allégation des parties, la dame de Yillemont
« a fait un testament explicatif de ses volontés ( 1) ; que
(1) Ce testament est du a5 brumaire an 4 - La dame de Vil-
�« la dame de Mariol est venue au partage de la succes« sion de sa mère avec ses autres frères et sœurs, eu l’an 7
« et n'a point réclamé en préciput la dut de 30000J'r .
5 °. Quant à l’obligation de 10000 fr. souscrite par la
mère, les premiers juges ont encore décidé que, « d’après
« les présomptions, cet acte étoit un avantage indirect;
« que ces présomptions se cliangeoient en certitude,
« quand on voit la dame Mariol ven ir, en l’an y , au
« partage de la succession de sa m ère, avec ses frères et
« sœurs, sans réclamer le prélèvement du montant de
« celte obligation. » N ’auroient-ils pas pu ajouter que
la dame Mariol avoit au moins manqué de mémoire,
lorsque demandant au sieur Breehet tout ce qui lui étoit
dû, même les frais d’impression de ses affiches, elle ne
parloit pas de son obligation de 10000 f r ., et qu’elle l’a
passée sous silence au bureau de p a ix , etc. ?
Quoi qu’il en soit, le tribunal dont est appel est assez
malavisé pour décider que ni la somme de 30000 fr.,
ni l’obligation de 10000 f r ., ne peuvent être regardées
comme dettes de la succession de la dame de Villemont;
qu’ainsi le sieur ÜBrechet, acquéreur d’ une portion. du
bien de T h e ix, ne peut être chargé de les acquitter.
Quant à l’obligation de la dame du Sauvage, elle n’est
lemont, par cet acte qui n’a pas été enregistré , mais que la
dame Mariol ne désavouera pas, institue sa fille son héritière,
conjointement avec le sieur de Theix , son frère, et la dame
du Sauvage, sa sœur. La testatrice explique que les droits de
son fils aîné sont fixés sur la terre de Montrodès , et qu’elle
entend qu’ils ne s’étendent pas au delà.
�point autorisée ni par son mari, ni par la justice; et cette
obligation est consentie sous l’empire du Code Napoléon :
elle est donc nulle, d’après l’article 217 de ce Code.
E t si cette nullité peut être opposée par la femme ,
d’après l’article 22Ô du même Code, il est assez raison
nable d’en conclure qu’elle peut l’être aussi par ceux
que la femme, en pareil cas, seroit tenue de garantir :
c’est être assez conséquent.
L e tribunal ajoute que cette obligation est postérieure
de deux ans à la vente consentie par la dame du Sau
vage au sieur Brechet. Les biens vendus au sieur Brecliet
étoient entre ses mains lors de cette obligation. La sti
pulation d’hypothèque n’a pu comprendre que les biens
nppartenans à la dame du Sauvage lors de l’obligation.
La dame de Mariol n’ignoroit pas la vente con
sentie par sa sœur; il n’a pu être dans son intention de
lui faire commettre un stellionat ; de même qu’il n’a
pu être dans l’intention de la dame du Sauvage de s’en
rendre coupable.
On s’étonne pour la dame de Mariol, et, par égard,
on 11e fera aucune autre réflexion, qu’elle ait osé cri
tiquer de pareils motifs.
Il est dit encore que cette obligation ne contient aucune
affectation spéciale de la portion de la terre de T heix,
acquise par le sieur Brechet; qu’il n’y a qu’une aiïcctation
générale des biens à elle appartenais dans les arrondissemens de Rioin et de Clermont : de semblables ex
pressions ne peuvent se rapporter en aucun cas aux biens
qui ne lui appartenoient plus à cette époque.
On remarque aussi qu’aux termes du même article 4
de
�< )
'? ?
de la loi du n brumaire on 7 , il uuroit fallu , pour
une hypothèque spéciale, indiquer la nature, la situation
des immeubles, et préciser la commune où ils sont situés,
(i,a cour d’appel l’a jugé in term in is , par arrêt du 17
mars 1808.)
O11 observe également que le sieur Vény de Theix
oppose à la dame Mariol une fin de non-recevoir résul
tante de ce qu’au partage de la succession de la mère
commune, en l’an 7 , la dame Mariol s’est fait justice
à elle-meme, en ne demandant pas à prélever sa dot
de 30000 francs, et a préféré de venir au partage aver
ses frères et sœurs.
Quant aux autres créances réclamées par la dame M a
riol , on ne peut y statuer qu’après un compte préalable.
Il en résulte que la dame Mariol est déclarée non
recevable dans sa demande en payement, tant de la somme
de 30000 f r . , que de celle de 10000 fr. ; elle n’est pas
plus heureuse pour le montant de l’obligation de sa
sœur , sauf h elle à se pourvoir contre la dame du
Sauvage.
Il est ordonné que les sieurs de V é n y et la daine de
M ariol, sa sœur, viendront ù compte devant Chassaigne,
notaire commis, sur le payement des dettes qu’ils pré
tendent avoir respectivement fait à la décharge de la
succession de la mère commune.
Il est fait, dès à présent, main-levée au sieur de Vény,
de l’inscription de la dame Mariol ayant pour objet
les 30000 francs, ainsi que l’obligation des 10 0 00 fr.
Le sieur Brechet obtient également la main-levée des
inscriptions de la dame de Mariol*
G
�'Le
(1
8
.
tribunal maintient les inscriptions de la dame
M ariol, sur le sieur Y én y de T lie ix , ayant tout autre
objet que les deux premiers ; il est ordonné que les
parties contestei'ont plus amplement sur le mérite de ces
inscriptions conservées. La dame de Mariol est con
damnée aux dépens envers le sieur Brechet ; les autres
sont réservés.
C’est de ce jugement que la dame Mariol a eu le
courage d’interjeter appel; et, si on veut l’en croire,
il est très-ui'gent de la faire payer de toutes ces sommes,
car elle a grand besoin d’argent.
C’est elle qui fait expédier et signifier le jugement,
à la vérité sous toutes réservés : sa signification est
du 29 janvier 1808 , près de six mois après sa date.
Elle a eu le temps de mettre au jour un long mémoire
qui a accompagné sa requête d’urgence et son appel, en
date des i i et 17 février dernier; et comme elle est
préparée dans sa défense, elle entend que tout le monde
le soit; elle demande à être jugée sans délai.
L e sieur Brechet se prête volontiers à ce caprice ; il
vient soutenir,
i° . Qu’il n’y a point de conti’at judiciaire entre les
parties ;
2°. Que la dame Mariol n’a aucun préciput sur la
succession maternelle;
30. Que les créances prétendues de la dame Mariol
sont frauduleuses et simulées;
>
40. Que l’obligation de la darne du Sauvage est nulle;
5°. Qu’en la supposant valable , elle n’a ; aucune hy
pothèque sur le sieur Brcchet pour le montant de cette
obligation.
�On va essayer de prouver ces cinq propositions : 011
présentera ensuite quelques moyens de considération en
faveur du sieur Brechet; il promet d’avance de ne pas
abuser de ses avantages, par ménagement pour la-daine
de Mariol.
§.
1er.
I l n’y a point de contrat judiciaire entre les parties.
Qu’est-ce qu’un contrat judiciaire? Suivant la définition
que nous en donnent les auteurs élémentaires, c’est celui
par lequel le demandeur, après avoir formé une de
mande , s’en départ en justice ; c’est celui par lequel le
défendeur, après avoir contesté la prétention, y acquiesce
et l’approuve en jugement.
Ces contrats ont une grande fo rce, parce qu’ils ont
une grande solennité ; ils sont au-dessus des contrats
ordinaires : c’est en face même de la justice, que cette
espèce de contrat reçoit sa perfection ; de ses juges on
en fait ses témoins. D e sorte que ces engagemens qui ont
ete ordinairement préparés par de mûres réflexions, par
l’avis de ses conseils, sont bien supérieurs aux transac
tions qui se font hors la présence de la justice.
De tels contrats ne sont pas susceptibles d’examen; les
jugemens qui interviennent ne peuvent être attaqués par
aucune voie : tout est irrévocablement consommé.
O r, pourroit-on reconnoître à cette définition les actes
qui ont eu lieu entre les parties; et où a-t-on trouvé
qu’il y avoit entr’elles un contrat judiciaire? la justice
a-t-elle sanctionné des actes extrajudiciaires et fugitifs?
C 2
�La dame do Mariol fait une enchère ; elle en a le
droit dès qu’elle se suppose créancière : mais cette dé
marche entraîne des conséquences bien graves; elle tend
à la ruine du vendeur, qui doit une gai’antie pleine et
entière à l’acquéreur.
Une expropriation auroit encore des suites plus fu
nestes. Que fait le sieur Brechet? il offre de désintéresser
la dame M ariol; de lui payer le montant de ses créances
lorsqu’elle les aura fait connoître : mais le sieur Brechet
ne doit pas les payer à l’aveugle ; il ne peut contracter
hors la présence de son vendeur, à qui il a déjà dénoncé
cette enchère un mois auparavant.
Il faut que'la dame de Mariol justifie de ses titres; il
le demande; il l’exige : il faut qu’elle établisse la légi
timité de scs créances; rien de plus juste.
Qu’importe, si l’on veut, que la dame Mariol ait pi’is
une inscription ; qu’elle ait énoncé dans cet acte purement
conservatoire, des créances réelles ou imaginaires! elle
a été maîtresse de sa cause, de lâ fixation : il n’y a rien
de contradictoire avec les parties intéressées; et ce seroit
se compromettre bien gauchement, que d’aller payer
sans aucune discussion, tout ce qu’il plairoit à la dame
de Mariol de demander.
r
Il esL extraordinaire d’entendre dire à la dame de
M a rio l, que le sieur Brechet avoit connoissance du re
levé des inscriptions de la dame de M ariol, contre la
dame du Sauvage , et que ce relevé se portoit à une
somme de 160407 francs, r
Ou 11e voit pas trop où elle veut en venir, lorsqu’elle
énonce cette proposition; voudroit-elle prétendre que le
�sieur Brochet, d’après cette connoissance, a dû compter
bien vite cette somme de 160407 francs? Cependant elle
ne lui demande que 30000 fr. d’une part, et 6000 fr.
de l’autre; plus, les frais d’impression de ses affiches.
Ce 11’est que long-temps après, que par une demande
incidente , et par un agréable souvenir, elle réclame
encore une somme de 10 0 00 fr., montant de l’obligation
souscrite par sa mère.
C om m en t, avec de semblables variantes, pour roi t-elle
supposer qu’il y a un contrat''judiciaire? Il faut lui rendre
justice : quoique la dame Mari'ol ait fait un paragraphe
particulier sur ce contrat, elle n’insiste que foiblement;
il lui paroît-seulement qüe le contrat judiciaire étoit
fo rm é; et un arrêt de la cour suprême, du 23 avril
18 0 7, l’a'^ suivant elle, formèllèméiit décidé. Cependant
quand on examine bien cet arrêt, on voit qu’il a jugé
tout autre chose : d’abord, c’est un arrêt de rejet', qui
dès-lors ne juge rien ; mais il confirme un arrêtfde la
cour de Toulouse , qui a décidé que'la dame Gayral,
creanciere inscrite, pouvoit aller en avant sur son en
chère, malgré les olires postérieures de d’ Aiihernad, de
payer les créances inscrites., s a u f discussion.
O r, ce n’est pas là du tout'la question qui nous oc
cupe. En effet, si la dame Mar.iol, nor\obstant . les-piTres
du sieur Brechet, avoit refusé de se dé,partir de son
enchère, qu’elle eût demandé la continuation de ses
poursuites , et qu’ il fût procédé à l’expropriation1, elle
nüroifr'eu ‘ mi‘>prétext(3! ÿdur soütènir*1 qüXv«utf:refti1tifcè
notification cotnmè crétocièvèy'ellefavoif lë idtJ6ït cl’en^
chérir, et ne vouloitjp 'M 'üüu’e-’auS;'' 'aùfrès'&ré&iîléiétà *
�qu’on examineroit à l’ordre si ses créances étoient légi
t i m e s , etC.
.
-
;
.
Voilà peut-être ce qu’elle auroit pu d ire; c’est alors
qu’elle .auroit argumenté de l’arrêt du 23 avril 18 0 7 ,
non pour prouver que la cour de Toulouse avoit bien
jugé, mais pour établir qu’elle n’avoit violé aucunes lois.
Mais à présent que la dame Mario! s’est départie dç
son enchère; qu’ il ne s’agit plus .que de discuter sur le
mérite de ses créances., ;out,sur leur légitimité, l’airêt
de Toulouse, comme l’arrêt' de cassation;;! deviennent
absolument étrangers à l’espèce.
. En un m ot, le sieur Brechet, qui a une garantie h
exercer'contre sa yenderesse, n’a pu ni dû payer sans
examen , .sans le faire dire contradictoirement avec les
parties intéressées; s’il l’avoit fait sans aucune précaution,
on lui répondroit avec raison qu’il a pris sur son compte
de, payer ce qui n’étoit pas d û , et qu’il n’a dès-lors
aucun recours.
Cette proposition est d’une telle évidence, qu’il semble
que toute la question se réduit à examiner le mérite des
créances réclamées par la dame Mariol.
*
§.
X I.
L a dame de M arioI ne peut prétendre à aucun préciput
sur la succession maternelle.
✓
Par son contrat du. 9 février 1 7 7 1 , la dame de V illemont, sa m èrp„lui constitue une somme de 30000 fr.
Cette somme n’est payable qu’après le décès de la cons
tituante, et.sans intérêts jusqu’à ce,
�C 23 )
Cette constitution n’emporte ni forclusion, ni renon
ciation. Si la mère vient à mourir sans avoir fait d’autres
dispositions, la dame Mariol viendra à partage de ‘sa
succession, sans même être obligée de rapporter la somme
de 30000 francs •, mais il sera libre à la dame de V illemont de faire telles dispositions que bon lui semblera,
môme par testament, et de réduire la demoiselle future
à la dot de 30000 francs ci-dessus constituée , ou de
l’instituer héritière , à la charge du rapport de cette
dot.
La succession de la dame de Villemont est ouverte
en l’an 4 , sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2.
L ’article 8 de cette.loi veut que les enfans, descendans
et collatéraux, ne puissent.preudre part aux successions
de leurs :pères et mères, ascenda’ns ou autres parens, sans
rapporter les donations qui leur ont été faites antérieu
rement,, sans préjudice de l’exécution des coutumes qui
nssujétissent les donations à rapport', même dans le cas
où les donataires renoncent à<la succession du donateur ;
et la loi ajoute que cet article sera observé, nonobstant
toute dispense de rapport.
L a disposition de cette loi n’a pas été méconnue de
la dame de Mariol. Elle sait aussi qu’en principe gé
néral toutes donations en ligne directe sont ¡'sujettes à
rapport, à moins qu’elles .n’aient été 'faites en préciput. *
Mais la dame de Mariol prétend que la disposition
rigoureuse de cette loi a été modifiée ou rétractée par
l’article viev.
.]_a;
du 18 pluviôse an' 5 ; et que
d’ailleurs, sa donatiotirde 30000 ifr. est faite en précipùt.
J-Que porte* cet article i « rJ de lu ld i’ d il‘ i 8 ; p lù yiô se
�an 5? il maintient tous prélèvemens, préciputs, et autres
dispositions irrévocables de leur nature , stipulées en ligne
diîecte avant la publication de la loi du 7 mars 1793.
O r, coûtaient la dame Mariol prouvera-t-elle qu’il
existe dans son contrat un prélèvement de 30000 francs
irrévocable de sa nature ? Il 11’y a pas une expression
qui ne prouve ciu contraire la révocabilité. La dame de
Villemont uêl. manifeste aucune volonté 'certaine ; tout
dépend.de sa fantaisie, de son caprice ou de son ait’ecf ion:
elle peut laisser sa lille avec cette somme, sans qu’elle
puisse prétendre autre cliose ; elle se réserve le droit de
lui-donner cette .somme'en préciput, si bon lui semble,
de l’instituer héi’itière, s’il lui plaît, avec ou sans rapport
de sa dot: C’est Jbien là , sans contredit , ¡ ’finalise exacte
de cette stipulation, aussi mobile que le papillon diurne.
L a dame Mariol espère, et 11e >tient rien; on peut tout
lui ôter,; comme on peut tout lui laisser ; eti elle vient
dire»qu'elle est irrévocablement saisie, lorsque son sort
dépend-d’un.seul m o t; lorsque sa mère se réserve une
pleine et;enlïère liberté de faire tout le- contraire de ce
qu’elle laisse espérer.
:N’est-il pas au contraire évident que jamais clause ne
fut «plus incertaine; que tout dépendoit, non pas d’un évé
nement,- non pas jd ’ùne simple condition, mais du'plus
léger changement de volonté.r .
'• 1 i. , ;.
Elle prétend qu’il s’est élevé une très-grande contro
verse sur ce point : mais c’est une bien grande erreur.
L a .squle question qui ait divisé les jurisconsultes ^étoit
celle de savoir si, lorsqu’une disposition universelle étoit
faite,à la charge d’associer un tie r s la portion revenante
à
�20 7
( 25)
à ce tiers devoit faire partie de la succession ab intestat;
on soutenoit d’un côté qu’elle tomboit dans la succession.
ab intestat, parce que la charge d’associer étoit révocable
à volonté; d’autres, avec plus de raison, pensoient que
la révocabilité de l’association ne pouvoit avoir lieu
qu’au profit du donataire déjà saisi du bien universel;
que cette charge d’associer étoit une simple condition, et
non une disposition; que dès-lors l’associé étoit saisi; et
ce dernier système a prévalu. L a cour d’appel l’a ainsi
décidé par ses arrêts.
Mais autrement, toutes les fois que le disposant ne
s’est pas dépouillé toutes les fois qu’il a pu donner à
un autre ce qu’il promettoit au premier conditionnel
lement , on a décidé avec raison qu’il n’y avoit aucune
disposition irrévocable.
L a dame Mariol n’est pas heureuse dans l’application
de ses arrêts de la cour de cassation ; les trois arrêts
qu’elle rappelle n’ont pas empêché que la cour n’ait
jugé tout le contraire dans la cause du sieur Gardet de
V ayre.
Mais l’appelante ne veut pas faire attention , ou se
dissimule à elle-même, que dans l’espèce de ces trois
arrêts, il s’agissoit seulement d’un droit d’élection confié
à un tiers ; et que, dans ces trois cas, la succession du
disposant étoit ouverte antérieurement à la loi du 17
nivôse, et même à la loi du 7 mars 17 9 3 , qui défendoit
toute disposition en ligne directe.
Alors on a dû dire que la loi du 17 nivôse ne pouvoit
avoir d’effet qu’à compter de sa publication ; que tout
ce qui étoit antérieur étoit hors de son domaine; qu’elle
D
�( 26)
ne pouvoit régler les successions ouvertes avant qu’elle
fût promulguée; et voilà le principe consacré par la loi
clu 18 pluviôse an 5 .
Aussi on po u rrait écouter la dame Mariol, si la dame
sa mère étoit morte avant le 7 mars 1793 ; il seroit
raisonnable alors de soutenir que la' dame Villemont
étant décédée sans faire d’autres dispositions, la dame sa
fille peut user de la disposition contenue en son contrat
dé m ariage. ■
Mais vouloir lé soutenir ainsi pour une succession
ouverte en l’an 4 , sous l’empire d’une loi prohibitive
et rigoureuse, il faut absolument effacer l’article 8 de la
loi du 17 nivôse an 2 ; il faut vouloir contester l’évi
dence, et aller jusqu’à prétendre que cette loi n’a aucun
effet, pas même à compter de sa publication.
Il faudroit encore effacer la loi du 9 fructidor an 3 ,
celle du 3 vendémiaire an 4, et même celle du 18 plu
viôse an 5 , art. 9 , 10 et 1 1 , qui veulent impérativement
que la loi du 8 avril 17 9 1, celles des 4 janvier et 7 mars
17 9 3 , celles des 5 brumaire et 17 nivôse an 2 , soient
exécutées h compter de leur publication.
E t ne peut-on pas observer encore à la dame Mariol
qu’elle passe bien légèrement sur l’article 2 de la loi du 18
pluviôse? Il est singulier qu’elle n’ait parlé que de l’article
i^r, • le 2e. est cependant assez essentiel : il veut que les
réserves dont il n’a pas été irrévocablement disposé,
fassent partie de la succession ab intestat , et appar
tiennent aux héritiers, autres que les donataires ou hé
ritiers institués.
•
•
O r, on ne contestera pas sans doute qu’il n’y ait dans
�( 27 )
^
le contrat de 17 7 1 une'réserve de la dame de Villemont,
de disposer de tout le surplus de sa succession ; et dans
ce cas, la dame Mai’iol est bien au moins donataire de
la somme de 30000 francs. Qu’elle nous explique main
tenant , comment, avec cette qualité de donataire, elle
pourroit prendre part à la réserve, sans rapporter sa
donation !
Ce n’est pas avec plus d’adresse que la dame de Mariol
veut argumenter de l’arrêt rendu en faveur des enfans
de sa sœur : elle feint d’ignorer la différence qui se trouve
entre sa sœur et elle. La dame Ribeyre n’étoit pas hé
ritière; elle ne venoit pas à la succession de sa mère;
elle réclamoit un supplément de dot éventuel, et il falloit
bien le lui donner : mais si elle fût venue à la succession
de la dame de Villemont, point de doute qu’elle auroit
rapporté 25ooo francs, et qu’elle n’auroit pas eu les
10000 francs de supplément; il n’y a donc aucune parité
entre les deux causes.
Si on considère enfin que la dame Mariol s’est jugée
elle-m êm e; qu’elle a resté huit ans sans réclamer ce
prelendu prélèvement; qu’elle est venue à partage de la
succession de sa mère, sans rien demander et sans se faire
aucune réserve, il demeurera pour constant qu’elle est
absolument non recevable.
O sera-t-elle dire que ce partage n’est pas définitif?
elle ne le montre pas; elle n’en a qu’un extrait dans ses
pièces. Mais peut-on concevoir un partage provisionnel
entre majeurs ? Il peut y avoir quelques objets omis ; ce
qui ne donneroit pas lieu à un nouveau partage : mais
quand il ne seroit que provisionnel ; la dame Mariol
D a
�SA*
.if?
( *8 )
peut-elle se flatter de faire croire que lorsqu’elle partage
l’objet le plus important, le seul immeuble de la suc
cession , elle auroit négligé de faire connoître ses pré
tentions ou ses droits à un prélèvement considérable ?
N o n ; on doit même penser que la dame de Mariol a
trop de délicatesse pour insister davantage sur une de
mande exagérée : elle se lassera de courir après une ombre
qu’elle ne pourroit jamais saisir.
O n terminera par rappeler à la dame de Mariol qu’il
existe un testament et un eodicile de la dame de V illem ont, reçu Coste, notaire ù Benumont; que dans ces
actes la dame Villemont a manifesté ses volontés; qu’elle
a ordonné que ses enfans fussent héritiers par égalité ; et
si ces actes, qui contiennent d’autres legs, ne sont pas1
légalement obligatoires, ils le sont au moins dans le for
intérieur : la dame de Mariol ne devroit-elle pas surtout
respecter les dernières volontés de sa mère ?
§. I I I .
Les créances réclamées par la dame M ariol sontfrau
duleuse# et nulles.
lies titres de la dame M ariol consistent,
i° . En une obligation de la somme de ioooo francs,
souscrite par la dame sa mère le 23 février 17 9 3;
2°. Eu une obligation de 6000 fr., en date du 7 prai
rial an 1 1 , souscrite par la dame Vény, femme séparée,quant aux biens, du sieur du-Sauvage.
On va discuter le mérite de chacune dans son ordre.
�( *9 )
' Pour i’obligation de la mère, on suspecte aisément des
titres de ce genre, et de simples présomptions suffisent
pour les anéantir. Il en coûte si peu d’arracher à la facilité
ou à la foiblesse une obligation payable dans d ix ans :
le terme est un peu lon g, et le bon Lafontaine l’avoit
remarqué dans une ingénieuse allégorie. Mais la justice
doit empêcher les fraudes et les donations déguisées; parce
que, comme le dit judicieusement Lebrun, il faut défendre
le plus ce qui arriveroit le plus souvent.
O r, quand on considère que cette obligation est causée
pour prêts f a i ts en divers temps par la dame de M ariol,
sans autre explication, sans préciser en aucune manière
ni le3 époques, ni les sommes, il est difficile de se per
suader qu’on ait fait un compte bien exact, et que la
dame de Mariol ait prêté jusqu’à concurrence de 8000 fr.
sans billets, sans notes et sans précaution.
On doit s’étonner davantage que par traité du 20 mars
1 793 > dame Mariol et son frère se reconnoissent dé
biteurs d’une somme de 62000 francs envers la dame de
Villemont ; qu’en payement de cette somme le frère et
la sœur se chargent de 56ooo francs de dettes envers les
créanciers de la mère, s’obligent de lui payer le surplus;
et que la dame de Mariol n’ait proposé aucune déduction
du montant de l’obligation, qui étoit cependant de fraîche
date.
Ce n’est pas tout encore ; la dame de Mariol traite avec
ses cohéritiers, fait avec eux le partage des biens : c’étoit
encore le moment de parler de cette obligation; elle n’en
dit rien ; elle ne parle pas même de la somme de 2000 fr.
promise par la dame de Montrodès.
�2»V^
<,/.
( 3° )
I-ors qu’elle veut former un contrat judiciaire avec le
sieur Brechet, qu’elle lui donne le montant de ses créances
avec tant de détails, elle garde encore ce titre pour une
meilleure occasion.
Elle croit trouver le moment opportun ; elle forme
une demande incidente pour cet objet, dont elle n’avoit
rien dit au bureau de paix en présence de son frère, de
sa sœur, de ses neveux.
L a dame de Mariol peut-elle espérer quelque succès
dans cette démarche ta rd iv e ? O n a relevé toutes ces cir
constances sans vouloir la blesser : mais le sieur Brochet
n’a pas besoin de s’appesantir davantage sur ce point. Les
héritiers du sieur V ény de T h e ix , neveux de la dame
M ario l, sont en cause ; ils viennent demander justice :
ils diront à leur tante que sans doute elle n’auroit pas
la cruauté d’arracher à des orphelins le dernier morceau
de pain qui leu r re ste ; qu’ils lui appartiennent d’assez
près pour qu’elle dût avoir quelques ménagemens ; et
/la discussion de cette partie de la cause leur est exclu
sivement attribuée, Ce qui reste à dire au sieur Brechet,
c’est que la dame du Sauvage, donl il est acquéreur, ne
devroit elle-mêm e qu’ une très-petite partie de cette
som m e , en supposant l’obligation sincère ; elle n’en seroit tenue que dans la proportion de son amendement,
et entre cohéritiers ils ne sont tenus que personnelle
ment, pour leur part : l’action hypothécaire n’appartient
qu’aux ci’éanciers, non aux cohéritiers,
On en vient à l’obligation de 6000 francs, consentie
par la dame de V ény, femme séparée, quant aux biens,
de Jean-Charles Dunoyer du Sauvage, et sans autori
sation de son mari,
�( 3T )
Pleuvcnt tout à coup les arrêts de la cour de cassation.
i° . Les obligations consenties parles femmes d’émigrés,
sans autorisation, sont valables. Il n’y a ici qu’une diffi
culté qu’il sera impossible de vaincre, c’est que l’obli-.
gation est de l’an 1 1 ; que le sieur du Sauvage, rentré
depuis l’an 8 , a été réintégré dans tous ses droits par
le sénatus-consulte de l’an 10 ; que dès-lors il n’y a plus
d’émigrés.
L ’article 217 du Code prononce la nullité des obliga
tions souscrites par les femmes sans autorisation de leurs
maris.
L ’article 226 dit que cette nullité peut otre'relevée
par la femme ; mais il n’y a que la femme seule, et ex
clusivement , qui ait le droit de relever cette nullité ,
dit la dame de Mariol. Les créanciers de la femme, qui
ont une garantie à exercer contr’elle, qui par conséquent
peuvent exercer tous les droits de leur débitrice n’ont
pas le droit d’exciper de cette nullité : donc la femme
sans autorisation, peut avec impunité, et en fraude de
ses créanciers, consentir des obligations de toutes parts,
conférer des hypothèques au préjudice de ceux qui auroient des droits antérieurs, ruiner des pères de famille,
se jouer de leurs engagemens, etc. Voilà les conséquences
qui résultent de ce système; et ce n’est pas sérieusement
sans doute que la dame de Mariol l’a proposé. Les lois
Quœ in fraudent creditorum , dont les dispositions sont
répétées dans le Code Napoléon, seroient donc vaines
et illusoires.
<•
.•j
r '■ >
Mais lors de cette obligation , la lo i, ou-la partie du
Code relative aux hypothèques, n’étoit pus promulguée5
�( 32 )
o r , d’après la loi du n brumaire an 7 , on ne connoisgoit point de vente sans transcription; la transmission
de la propriété ne s’opéroit que par la transcription ;
elle étoit le complément de la vente qui jusque-là ne
pouvoit être opposée à des tiers : plusieurs arrêts de
la cour d-e cassation Font ainsi jugé.
On çn convient; on ne trou voit peut-être pas dans la
loi, que la transmission de la propriété ne s’opéroit que
par la transcription ; il étoit peut-être raisonnable de
penser que la transcription n’avoit d’autre objet que de
purger les hypothèques; la loi n’entendoit vraisembla
blement par les tie r s , que les créanciers qui venoient
par ordre d’hypothèque. L e Gode Napoléon l’a dit bientôt
$près : cependant on jugeoit tout autrement. Et qu’ im
porte le défaut de transcription , si l’obligation est nulle.
ILa dame M ariol, en proposant cette objection , auroit
peut-êtr-e bien quelques petits reproches à se faire ; car
si le sieur Brechet a acquis, c’est elle qui l’a sollicité ;
s’il n’a pas transcrit, c’est encore pour l’obliger, et éviter
des frais de notification qui auroient réveillé bien du
monde : mais enfin, qu’a de commun le défaut de trans
cription avec la nullité de l’obligation ? c’est ce qu’on
cherche à deviner.
On demandera encore à la dame de Mariol pourquoi,
dans son mémoire, elle glisse si légèrement sur la dé
légation contenue en cette obligation, et ne dénomme
pas les débiteurs délégués; ils sont cependant bien connus:
c’étoit la dame Dalagnat, et la dame de Cormeret, sa
sœur. O r, le sieur Breohet a la certitude que ces dames
ont fait acquitter toutes les dettes de la dame de Freydefon,
leur
�C 33 )
leur mère : la dame de Mariol a donc été payée de s i
créance; et que signifièrent alors le défaut de transcription?
E t quand le sieur Brochet n’auroit pas transcrit la
dame Mariol persuadera-t-elle à qui que ce soit, qu’une
obligation de l’an 1 1 lui donne des droits sur une vente
faite en l’an 9; que sa sœur a voulu hypothéquer un bien
qui ne lui appartenoit plus, et dont elle avoit reçu le
prix ? La dame du Sauvage n’a pas fait mention de cette
propriété; elle ne l’a point affectée à la sûreté du payement
de l’obligation; si elle l’eût fait, elle eût commis un stellioncit : la dame Mariol, sa sœur, qui connoissoit la vente,
ne l’auroit pas exigé. Et quelle est donc aujourd’hui son
inconséquence ( l’expression est modeste ) , d’oser venir
demander au sieur Bréchet , acquéreur de l’an 9 , le
payement d’une obligation souscrite par sa venderesse en
l’an 1 1 , parce que le sieur Brechet n’a pas fait transcrire
son contrat?
L a dame Mariol n’a pas senti l’inconvenance de sa
demande; un seul instant de réflexion l’en fera départir;
et ses amis doivent lui en donner le conseil.
§.
I v.
L a dame M ariol , dans tous les cas, n'a point d"1hypo
thèque sur le bien vendu en Pan 9 au sieur Brechet.
Pour démontrer cette proposition , il est essentiel de
rappeler la clause qui termine l’obligation de la darne
du Sauvage.
« Au payem ent du p rêt ci-dessus, la dam e du Sau vage
E
�i 'K
C 34 )
a obligé et affecté la portion qui peut lui revenir des
biens des successions de la dame de Montrodès, et du
sieur Vény de Villem ont, son m ari, situés tant dans
l’arrondissement du bureau des hypothèques de cette
ville (Clerm ont), que dans celui de Riom , consistans
en bâtimens , p ré s, terres et vignes. »
A rt. 4 de la loi du n brumaire an 7. « Toute sti—
« pulation volontaire d’hypothèque doit indiquer la
« nature et la situation des immeubles hypothéqués ;
« elle ne peut com prendre que des biens appartenans
« au débiteur loj's de la stipulation. »
A rt. 2129 du Gode Napoléon. « Il n’y a d’hypothèque
« conventionnelle valable que celle qui, soit dans le titre
« authentique constitutif de la créance, soit dans un acte
« authentique postérieur, déclare spécialement la nature
« et la situation de chacun des immeubles actuellement
« appartenons au débiteur, sur lesquels il consent l’hyv potlièque de la créance. »
Avec deux lois aussi précises, on ne trouvera point
dans l’obligation d’hypothèque valable : une désignation
vague et générale ne remplit pas le but de la loi. Comment
le créancier pourroit-il connoître les immeubles qui lui
sont affectés, lorsqu’on se contente de lui donner des
biens situés dans les arrondisseitiens de Clermont et de
Riom ? n’est-ce pas un inconnu qu’il faut chercher dans
un espace indéfini?
L a loi ne reconnoît pins d’hypothèque générale ,
qu’autant qu’elle résulte d’un jugement; et lorsqu’il s’agit
d’une hypothèque conventionnelle, il faut qu’elle soitspéciale, c’est-à-dire, circonscrite, déterminée, avec la
«
«
«
«
«
«
�désignation de chaque objet, de sa nature "tet de sa si
tuation.
Il faut que l’objet hypothéqué appartienne actuellement
au débiteur : or, la dame du Sauvage étoit dépouillée
depuis deux ans de l’immeuble vendu par elle au sieur
Brechet.
La transcription n’étoit pas nécessaire relativement à
la venderesse; il y avoit de sa part tradition réelle; elle
ne pouvoit donc plus l’hypothéquer sans se rendre cou
pable d’un délit grave, sans s’exposer à la contrainte par
corps.
E t croira-t-on jamais qu’une loi ait voulu, on ne
dit pas tolérer, mais organiser, créer, autoriser un stellionat? Comment voudroit-on abuser d’une affectation
générale, lorsque la loi exige une désignation plus ex
presse ?
La cour, par un arrêt récent, du 17 mars 18 0 8 , a
jugé en thèse qu’il n’y avoit d’hypothèque spéciale qu’au
tant qu’on avoit désigné d’une manière précise les im
meubles , leur n a tu re , et le lieu de leur situation. Cet
arrêt, rendu en très-gran de connoissance de cau se, est
d’autant plus remarquable que, dans l’espèce de la cause,
on avoit affecté les immeubles appartenans au débiteur
dans une commune dénommée ; ce qui faisoit incliner à
penser que l’hypothèque étoit spéciale, parce que le dé
biteur pouvoit avoir des propriétés dans toute autre com
mune.
Mais la loi est tellement expresse, tellement limitative,
que les magistrats ne crurent pas devoir s’en écarter,
�malgré les circonstances qui se présento ient en faveur
du créancier.
Ici rien de favorable à la dame de Mariol : elle connoissoit la vente faite au sieur Brechet; elle savoit que
sa sœur s’étoit dépouillée de cette propriété ; elle n’a
donc pas entendu la comprendre dans la stipulation d’hy
pothèque insérée en son obligation.
E h ! on ne doit pas le dissimuler, la dame de Mariol
est aveuglée dans sa propre cause ; ce ne peut pas être
une ressource pour elle : ses démarches sont inconsi
dérées , ses prétentions téméraires ; son insistance ne
feroit point honneur à sa délicatesse; et l’opinion publique
qui dans son pays proscrivoit, condamnoit sa prétention,
a dû influer sur ses juges naturels, et la suivra jusqu’en
la cour.
M e. P A G E S (de R iom ), ancien avocat.
M c. T A R D I F , avoué licencié.
A R I O M , de l’imprimerie de T h ibaud - L a n d rio t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Avril 1808.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bréchet, Antoine. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Tardif
Subject
The topic of the resource
successions
avancement d'hoirie
créances
émigrés
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour sieur Antoine Bréchet ancien chef d'escadron, habitant de la ville de Clermont, intimé ; Contre dame Jeanne-Françoise de Vény, veuve du sieur Sicaud de Mariol, habitante de la même ville, appelante d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Clermont, le 15 août 1807 ; en présence de dame Marie Avelin, veuve du sieur Vény de Theix, tutrice légale de demoiselle Anne-Françoise-Jeanne de Vény, sa fille ; et de dame Françoise Véthizon-Vény, fille adoptive du sieur Veny de Theix, et du sieur Jean-Baptiste Devèze, son mari : tous intimés.
Table Godemel : Contrat judiciaire : y a-t-il contrat judiciaire entre l’acquéreur et le créancier surenchérisseur, lorsque le premier, pour arrêter l’effet de la surenchère et conserver l’immeuble par lui acquis pour le prix porté au contrat, a fait offre au surenchérisseur de le mettre hors de tout intérêt, et de lui payer la totalité de ses créances tant en principal, intérêts que ? , que ces offres ont été formellement acceptées ? l’acquéreur peut-il prétendre ensuite qu’il ne doit payer qu’après discussion préalable des créances avec les débiteurs, lorsqu’il n’a stipulé ni condition, ni délai ? Obligation : 2. une femme a-t-elle pu s’obliger valablement, par acte publié du 7 prairial an 11, sans autorisation, pendant l’émigration de son mari ? son acquéreur a-t-il qualité pour opposer la nullité ? Préciput : 1. par le contrat de mariage de la dame de Mariol, du 9 février 1771, la dame de Villemont, sa mère, lui constitua une dot de 30 000 francs à titre de préciput, stipulée payable seulement après son décès, sans intérêts jusqu’alors ; laquelle constitution n’emportera ni forclusion ni renonciation à l’égard de la future qui ne sera pas obligée de rapporter la dot, s’il n’y a pas de disposition contraire par testament de la constituante. la condition résolutoire ne s’étant pas effectuée, le préciput doit-il avoir effet, lorsque la mère est décédée sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2 ? Surenchère : 1. y a-t-il contrat judiciaire entre l’acquéreur et le créancier surenchérisseur, lorsque le premier, pour arrêter l’effet de la surenchère et conserver l’immeuble par lui acquis pour le prix porté au contrat, a fait offre au surenchérisseur de le mettre hors de tout intérêt, et de lui payer la totalité de ses créances, tant en principal, intérêts, que de frais, et que ces offres ont été formellement acceptées ? l’acquéreur peut-il prétendre ensuite qu’il ne doit payer qu’après discussion préalable des créances avec ses débiteurs, lorsqu’il n’a stipulé ni condition ni délai ? Transcription : 5. le majeur qui a traité avec des mineurs sur des intérêts respectifs et sur un partage, est-il recevable à demander la nullité de l’acte, pour vice de forme résultant de leur propre incapacité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1771-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1708
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0504
BCU_Factums_G1707
BCU_Factums_G1709
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53311/BCU_Factums_G1708.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Genès-Champanelle (63345)
Theix (village de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avancement d'hoirie
Créances
émigrés
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53312/BCU_Factums_G1709.pdf
5adf8976e8986e7a9905fc817dec44ff
PDF Text
Text
MÉMOIRE
P O U R
Dame Jeanne-Françoise D E VEYNY , veuve du Sieur
SICAUD D E MARIOL , propriétaire , habitant à
Clerm ont, demanderesse et appelante ;
C O N T R E
Sieur A n t o i n e BR EC H ET, ancien ch e f d’ escadron, demeu
rant en la même ville, et autres, défendeurs et intimes.
�MÉMOIRE
COUR
d ’a p p
e
DE r i o m .
P O U R
A n 1808.
Dame J eanne - F r a n ç o is e D E VEY NY , veuve du Sieur »
S1CAUD D E MARIOL , p r o p r ié ta ir e , habitant à
C le r m o n t , demanderesse et appelante ;
C O N T R E
Sieur
A
BRECH ET, ancien ch e f d’escadron, demeu
rant en la même v ille , d é fe n d e u r et in tim é ;
n t o in e
E t contre Dame Marie A V E L IN , veuve du Sieur VEYNY
D E T H E IX , en qualité de tutrice légale de Dem oi
selle Anne-Françoise-Jeanne D E VEYNY , sa fille ,
héritière de son défunt père , habitant au lieu de
V illem o n t, commune de Vensat ;
E t contre Dame F r a n ç o i s e V É T H I S O N , fille adoptive
dudit Sieur de V eyny de T hei x , et son héritière béné
ficiaire , et le Sieur J e a n -B a p tis te D E V È Z E , son mari,
propriétaire , demeurant en la même commune, défen
deurs et intimés.
j
L
e
contrat judiciaire a toujours été considèré comme le lien
le plus puissant et le plus capable de forcer les parties contrac«
tantes à l’exécution de leurs engagemens ; néanmoins le Sieur
Brech et a trouvé le moyen de rendre illusoire un contrat de cette
nature et de faire perdre à la Dame de Mariol des créances consi
l
T
�dérables , qu’il s’était formellement soumis à lui payer sans aucun
retard ; et quoiqu’il n ’eût mis ni condition ni réserve à ses offres,
il est parvenu , sous le prétexte de discuter le mérite des créances de
la Dame de M a r io l, à élever quantité de questions importantes, dont
la solution a eu lieu au préjudice de cette D a m e ;
ensorte que le
Sieur Brechet conserve dans ses mains le bénéfice d ’une s u r e n c h è r e
faite par la Dam e de Mariol , qui se présente aujourd’hui avec
confiance devant la Cour pour obtenir la réformation d’ un jugement
qui viole ouveitement plusieurs lois bien positives , e t les principes
les plus constans d.e la jurisprudence.
F A I T S .
L e 3o germinal an g , Charles G u i n e z , fondé d e là procuration
de D am e Anne-Françoise V e y n y , épouse de l ’émigré du N oyer
du S auvage,
vendit au Sieur
B ro c h e t, par acte p u b lic , toutes
les propriétés qu’avait ladite Dame dans la terre d e T h e i x , moyen
nant 2g,5oo fr. , dont 2,100 lr. furent payés com p tant; et il fut
stipulé que les 27,200 fr. restans seraient payés, en l’acquit de la
Daine du Sauvage , aux créanciers de la Dam e D auphin-M ontrodés , sa défunte mère ; lesquels créanciers sont dénommés dans un
acte reçu Costes , notaire à B e a u m o n t, le 20 mars 1795, et notam
m ent au Sieur Brechet, acquéreur, en qualilé de mari de Dame Anne
G i r o n , et à Julien P e y r e n d , notaire à Maringues , v e u f d’Anno
Am ou roux , le montant de leurs créances en p rin cip a l, intérêts
et frais , et que le surplus serait payé aux autres créanciers de la
D a m e Montrodès , jusqu’en concurrence de la portion contributive
de la Dam e du Sauvage dans le paiement des deltes de la succes
sion de sadite
mère. A la garantie de cette vente , le quart du
domaine de S.- G enest-Cham panelle, appartenant à la D am e du
Sauvage et encore in d ivis, fut spécialement h yp o th é q u é , ensemble
ses paraphernaux situés à Villemonl et au M é c h in , commune do
V e n s a t , provenant de la su c c e s s io n du Sieur V c y n y d’Arbouze , son
f r è r e , décédé en 1790, aussi indivis avec ses cohéritiers.
Ce contrat 11’u été transcrit que le G complémentaire an 11.
A cette époque s e u l e m e n t l e Sieur B ie ch et voulut se mettre
�22 &
5 )
à l’abri des poursuites que les créanciers privilégiés et h y p o th é
caires de la Dame du Sauvage pouvaient diriger contre lui. A cet
effet, il se conforma à l’art. 5 o de la loi du 11 brumaire an 7 ,
en notifiant aux créanciers inscrits son contrat , et no tan. ment à
la Dame de Mariol.
L e relevé des inscriptions lui avait fait connaître celles prises par
la Daine de Mariol sur la Dame du Sauvage , sa sœur. Ces ins
criptions étaient au nombre de six ; la première du 2G prairial
an 7 , contre ses frères et soeurs, pour sûreté d’une créance de
io4,8oo fr. , résultant d’ un tiaité passé devant E a r tlie le m i, notaire ,
le 17 juin 17755 la 2.' du même j o u r , contre la succession de
la
Dame
de
Yillemont , sa mère , pour sûreté
d’uno créance
de 2,587 fr. 80 c . , résultant d’ une sentence du 21 janvier 17QO ;
la o.° du même jour , contre la succession de sadite m è r e , pour
sûreté d'une créance de 9,612 fr. , résultant d’une obligation du
20 février
1 79 0 ; la 4 .° du 2 vendémiaire an g , contre la Dam e
sa mère , pour sûreté d’une créance de
42,800 fr.
résultant de
son contrat de mariage du 19 février 1771 , et d'une obligalion
du 23 février 1795 ; la 5 ." du 24 prairial an 7 , contre le commis
saire du Directoire exécutif près l ’administration centrale du P u y de-Dôme , comme représentant Paul-Augustin V e y n y , aîn é, et
contre les Sieurs V e y n y de T lie ix , feu V e y n y - d ’A ib o u z e , et la
Dame du S a u v a g e , p o u r sûreté d’une créance de 4 , 100 f r . , résul
tant de sentences des 22 mai et lo j u i l l e l 1780 ; la G." du 5 com plé
mentaire an 1 1 , contre la Dam e du Sauvage , pour sûreté d’une
créance de 6,120 fr. , résultant d’ un acte du 7 prairial an 1 1.
L e Sieur B r e c h e t , connaissant donc toutes
ces inscriptions ,
fit signifier le 27 vendémiaire an 12 à la Dam e de Mariol son
contrat, a v ec déclaration d 'a cq u itter ju s q u 'à concurrence .seule
ment du p r ix de son a cq u isitio n , a in si et de la m anière q u 'il
est stip u lé en son acte. L e 9 brumaire
suivant , la Dam e
do
Mariol fit commandement aux Sieur et Dame du Sauvage de lui
payer l.° la somme de G,000 f r , , montant d’une obligation que ladite
Dame lui avait consentie le 7 prairial an 11 ; 2.° la somme de 7,600
fr pour le quart de celle de 5 o,ooo fr. de dot non sujette à ra p p o rt,
que la Dam e sa mère
lui ayait
constituée par son
contrat do
M ï
�mariage du 9 février 1771 ; 3 .° les intérêts de ces deux sommes
■depuis leur encouru , ensemble les frais d'inscription et de mise
à exécution , sans préjudice à ses droits contre la Dame du Sau-*
vage , pour le paiement de la totalité de ladite constitution par
la force de la solidarité hypothécaire.
L e i 5 du même mois , la Dame de Mariol fit notifier aux Sieur
et. Dame du Sauvage et au Sieur Brechet , q u ’ en vertu de l’art.
5 l de la loi du 11 brumaire an 7 , et comme créancière inscrite
de la Dame du Sauvage en vertu de son contrat de mariage et de
son obligation , elle requérait la mise aux enchères et la vente et
adjudication publique par la voie de l’expropriation de toutes les
propriétés vendues audit Sieur Brechet par la Dame du Sauvage,
suivant l ’acte du 00 germinal an 9 ; se soumettant d ’en p o r te r ie
p rix à un vingtième au moins en sus de ceux fixés audit a c t e ,
de rem plir au surplus toutes les autres obligations que l’acquéreur
y a stipulées , et de se conformer aux dispositions de l ’art. 54
de la loi du 11 brumaire an
L e 4 frimaire su iv a n t , la
Sieur et Dam e du Sauvage
forcée des objets compris en
7.
Dame de Mariol fit signifier aux
le commandement d ’ expropriation
la vente faite au Sieur Brechet par
la Dame du S au va ge, dans les formes
voulues par l ’article I.":
de la loi du 11 brumaire an 7 , sur les expropriations.
L e Sieur B r e c h e t , voyant que la Dame do Mariol était décidée
à suivre son enchère , et à remettre en adjudication publique les
biens qu’il avait achetés de la Dame du Sauvage ; considérant que
cette voie allait lui faire perdre le bénéfice considérable que son
acquisition lui avait procuré , puisqu’il était notoire qu’ils valaient
près du double du p rix pour lequel il les avait achetés , se décida
à étouffer de suite une poursuite aussi dangereuse pour ses inté
rêts ; et dans cette intention , il fit notifier à la Dame de Mariol
le 1 4 nivôse an 1 2 , un acte signé de ! u i , et conçu dans ces p ro
pres termes :
J’ai déclaré que le roquera nt , p ° ur éviter leu suites de l'enchèrc fai le par
la
Dam e
veuve
M a rio l,
par actc
mettre hors de t o u t intérêt, il lui
rera eu
tout teins , c l
à réquisition
de lu i payer Ut totalité de
*3
frim aire d e r n i e r ,
c.1 pour la
ciTro par les présentas offres , qu’ il réité
de
la part
ses créances contre
de
la D am e
Mariol ,
la D am e V c y n y , fcmtno
�22 j
( 7 )
séparée «le biens du C. n «1u ^ f A < i du Saunage , tnnf rri principal , i n t é
rêts
que
Irai*;
l’ai sommée en leiuséqui ncc
h tm es le m niant üe&dites c r iâ m e s ,
de t 'é c la u r flans vingt-quatre
afin tjUe le
/ a im a n t en puisse être
fia it de suite , et offre do plus de lui év iter et la garantir de toutes poursr.'tes de la part des autres
cl arge
aussi par
créanciers relatives
la D am e de M a iio l de
à ladile
subroger
rnchtie ,
le requérant
en
à la
son
lieu et place , avec toute garantie ; protestant de nullité et de tous deper/s ,
dum m agi's-m térèts, au cas q u ’ i l fiû tjc iit quelques poursuites au prejudice du
présent acte.
L a Dame «le M a i i o l fit notifier au Sieur B r e c h e l la réponse
suivante des le même jour :
J’ai déclaré que la requérante accepte les ofifres fa ite s p ar ledit Brechet
p a r acte de ccjourd’liui , signées de l u i et
de G u e r rie r , h u issie r, p ou r
q u ’ elles ne puissent être révoquées à l ’ avenir , de payer les ciéances dues à
la D am e v e u v e Mariol , par Anne-Françoise V e y n y ,
épouse du N o y e r du
Sauvage , tant personnellement que comme héritière de le D am e D a u p h in V illc m o n t -, e n conséquence et donnant pour le moment le détail , autant
que possible , desdites créances , la D am e v e u v e Mariol déclare qu’il
est dû la somme de
3o,ooo
liv .
pour la dot eu
de
lu i
principal et avantage à
elle fait par la D am e
D au p h in
Montrodès , v e u v e V e y n y , par son
contrat de mariage du
9 fév rie r 1771 , et les intérêts de
cette
somme
depuis le décès de ladite D am e Montrodès ; p lu s , larsomnie de 6,000 l i v . ,
m ontant d’une obligation consentie par ladite V e y n y du Sauvage au
profit de la r e q u é r a n te , le 7 prairial an 1 1 , reçu T a c h é , n o t a i r e ,
ensemble les f r a i s de m i s e à exécution , c la n s lesquels seront nécessairement
compris c e u x de la déclaration d’eiiclitic faite sur la vente consentie au
C . ca lircch ct , c eu x du commandement tendant à expropriation forcée des
mêmes biens , et ceu x des extraits d ’inscriptions retirés du
conservateur
des h y p o th èq u es, la dresse du placard et procès-verbaux d’affiches qui sont
i m p r i m é s , et qui annonçaient
la
vente
pour le
24
pluviôse prochain •
placard et affiches qui ne seront point posés par l ’effet de l ’acte signifié
par
le C .cn Brochet ; et pour par le C .cn B rechet s’assurer de la dresse
et impression du placard dont il s’agit , il est sommé de se transporter
sur-le-cham p dans l ’im prim erie des C ct,s T'roin et G r a n i e r , imprimeurs
liabitans de Clerm ont , n i e de Balainvilliers , chez lesquels sont encore
lesdits placards , dont
la majeure partie sont
timbrés , déclarant au sur
plus que ladite requérante a , du moment de la notification du C .CQ Brechet
fa it cesser toute opération relative
à l’expiopriation , lesquels sont dès ce
moment a u x risques , périls et fortune du C.*“ Brechet ; lequel la D am e
v e u v e Mariol
offre de subroger à tous ses d roits, privilèges et hypothè
ques, lors du paiement qui lui sera f a i t , c l de répéter conlrc lui tous lw>
�V
a
■
:xv
(8)
dommages-intérêts qui pourraient l u i rev e n ir clans le cas Je l ’inexécution
de scs offres;
ajoutant , au su rplu s, que Brecliet doit p ayer tous les i r a i s ,
mêm e c eu x de dresse , impression
et papier du
placard d’expropriation ,
suivant le règlement qui en sera amiablement fait , ou par les voies q u ’ in
dique la loi , se faisant au surplus toutes réserves.
C elte réponse contenant une acceptation formelle des offres <1u
S i e u r Brecliet , il est bien sensible que la Dame de Mariol devait
s’attendre à recevoir de suite le p a iem en t de la totalité de ses
créances sur Ici D a m e du S a u v a g e , sa soeut y mais on va voir
comment il s’y est pris pour éluder l’acceptation de ses offres ,
et comment il a. réussi à les rendre illusoires.
L e 18 du même mois , le Sieur Brecliet fit signifier à la Dame
de Mariol une cédule du juge de p a i x , o ù , rendant compte de
tous les actes ci-dessus r a p p e lé s , il déclare :
Q u ’ il accepte les consentement et département de la D am e M a rio l ; mais
que pour p a y e r ce q u ’il a offert , i l faut que les créances de ladite D am e
oontre sa sœur soient liquidées , tant en présence de la D am e du Sauvage
qu’en celle des autres h éritiers,
afin de fixer la portion que
cliacuu doit
p a y er , parce qu’enlre c o h é r itie r s, il n’y a point d’action solidaire , mais
seulement contre chacun une action en contribution pour la part dont il
est
héritier , et q u ’ elle doit faire confusion sur elle-même de la portion
dont elle est personnellement tenue ; comme a u s s i , il faut que la D am e de
M ario l compte de ce qu’elle peut d evoir , afin d’operer de justes compen
sations , et é v ite r par la suite d ’autres contestations. -----circonstances
( est-il
dit ) que
C ’est dans ces
l’exposant voulant form er
sa demande
en liquidations et compensations , doit auparavant cpuiseï les voies conci—
liatoires ; il demande donc cédule pour citer la D am e do M a r io l,
d u Sauvage et son mari , les frère3
H ibeyrc et le Sieur V c y n y de T h e i x .
L e 27 dudit m ois, toutes les parties
juge de p a i x , qui
la D am e
comparurent devant le
dressa le procès-verbal de non conciliation,
dont voici l ’analyse :
L a Dame du S au va ge , se qualifiant de maîtresse de ses biens
adventifset parapliernaux , dit par l ’organe de son fondé de pouvoir ,
qu’elle approuvait les r é c l a m a t i o n s de la Dame de M a r io l, sa sœ u r,
pour son préciput et son obligation ; que loin d’être créancière de
la Dam e de Mariol pour la jouissance qu’elle peut avoir faite des
biens
de
Villemont ,
et dont
parle le C .en Brecliet
dans sa
céd u le, elle craint au contraire d'être sa d é b itr ice , à cause des
�(9 )
différentes sommes que la Dame de Mariol a payées n la Dame sa
mère ou aux créanciers V c y n y , de manière que
la
D a m e du
Sauvage n ’ entend prendre aucune p a r t dans les prétentions
que semble vouloir é lev er le Sieur B rech e t.
L e Sieur V e y n y
de 'J'heix dit que la Dame de Mariol avait
consommé les partages , el laissé vendre la totalité dçs biens de
la succession de la mère com m u ne, sans aucune réclamation ; que
sa demande était inconsidérée, d'après les aclcs passes dans la
fam ille; que la mère commune avait fait deux teslamens ; q u ’il
réservait tous ses droits, et requérait la Dame de Mmiol de lui
donner main-levée de toutes inscriptions hypothécables et con
servatoires sur ses Liens à raison de son contrat de mariage , protes
tant de tous dommages-intérêts et frais qu’il pourrait supporter
par reflet desdites inscriptions.
L a Dam e de M a r i o l dit que la demande du Sieur I3rechet ten
dant à des compensations
de prétendue*
jouissances
créances à elles dues par la Dame du Sauvage , a été
avec
les
imaginée
pour faire diversion à ses droits; que les créances qu’elle i éclamait
étaient établies par des actes authentiques , el à l’abii de
toutes contestations ; qu’il ne pouvait y avoir lieu à des compen
sations imaginaires, ou tout au moins litigieuses , avec ses créan
ces qui étaient claires el liquides ; q u e lle requérait le Sieur
Tirechet de se c o n c i l i e r avec elle , sur ce q n 'elle entendait le Jorcar
au paiem ent des sommes portées en l'a cte du a4 nivôse der
nier ,
el q u / l avait ojfert p a r acte du
même jo u r ; — Que
touchanl les objections du Sieur de T h c i x , elle sou tenait que son
préciput de 5 o,ooo fr. était fondé sur une disposition contrac
tuelle que sa mère p o u v ait, à la vérité , anéantir
mais qu’elle a
conservée par le plus grand silence à cet égard ; que si le Sieur
de'J'heix prétend qu’il y a eu dérogation à scs dispositions,
cV if
à lu i à rapporter les ieslam cus ou c o d ic ille s , si aucun existequ’on ne trouvera ni dans les acles de fam ille, ni dans aucun fait
de la Dame de Mariol , aucune renonciation à son préciput ; que
les partages n ’opèrent aucune libération des héritiers , et q u ’au
cune loi n’a pu détruire une disposition faite en 1771.
Les Irères ll ib e y i e ont déclaré ne comparaître que pour obéir
à justice.
2
�( 10 )
Le
10 pluviôse suivant , le Sieur Brechet présenta requête nu
tribm nl , et demanda permission de faire assigner à la preinièro
audience provisoire la Dame veuve Mariol , pour voir donner acte
au Si.'?tir B rech et de la réitération des offres q u 'il f a i t de lu i
p a y e r ce qu i lu i sera du après liquidation faite de ses créances ;
voir dire qu'elle sera tenue de justifier de ses titres en présence
de tous ses cohéritiers , afin de fixer la portion que chacun doit
p a y e r , et qu’elle fera confusion dè la portion dont elle est per
sonnellement tenue; q u e l l e fera compte de c e q u ’elle peut devoir,
afin »l'opérer la compensation ; comme aussi de faire assigner les
Sieur et Dame du Sauvage, pour le garantir et indemniser de ton
tes les pertes qu’il pourrait éprouver relativement à l'enchère de
la Dame de Mariol ; en conséquence être condamnés à lui resti
tuer les sommes qu’il sera tenu de payer
en son contrat ,
en sus du prix porté
et tous ses dommages-intérets ; comme aussi
de faire assigner le Sieur V e y n y de T h e ix , et les frères R ib e y re ,
pour débattre les titres de créances de la Dame Mariol et les li
quider , enfin , pour être tous condamnés en scs dépens.
Cette requête ayant été répondue d’une ordonnance de M. le
Président , portant permission d’assigner à la première audience
p ro v iso ire , le Sieur Brechet fit donner assignation le 16 du même
mois à la Dam e de Mariol.
L e Sieur Brechet ne s’empressait pas de faire juger ses demandes ,
et déjà il s’était écoulé
six mois depuis son assignation , lorsque la
Dam e de Mariol crut devoir activer la décision de cette affaire.
L e 1 5 thermidor an 1 2 , e l l e présenta donc requête et demanda
permission d’assigner à jour fixe le Sieur Brechet , pour lui voir
donner acte de la demande incidente qu’elle formait contre lui
en paiement i.° de 22,5oo f r . , formant les trois quarts de son préciput constitué dans sou contrat de mariage, et dont la D am e du
Sauvage était tenue , soit personnellement, soit hypothécairement ;
2.0 do 7 ,5 o o f r . , formant les trois quarts du principal porté en une
obligation à „elle consentie par la Dame sa mère le 25 février 1793 ;
5.” les intérêts de ces d e u x sommes , savoir , pour la p rem ière, à
compter du décès de la Dame Dauphin , et p our la seconde , d e là
date do l'obligation $ 4 ,“ do 6,000 fr. pour le montant de l’obligation
�( i l )
il elle consentie par la Dame du Sauvage le 7 prairial a n ' n ;
5.° Iss frais tant de mise à execution (]ue ceux faits pour parve
nir à l’expropriation forcée, suivant le règlement amiable , sinon
selon la taxe ; 6.° les intérêts du tout et les dépens , avec exécu
tion provisoire, comme fondée en titres. E u vertu d’ordonnance,
elle fit notifier le tout au Sieur Brechet.
L e 28 frimaire an i 4 , le Sieur V c y n y de T l i e i x , après avoir
épuisé les voies de conciliation , fit assigner la Dame de Mariol ,
les Sieur et Dame du Sauvage, et les frcres R i b e y r e , s e s cohérit
i e r s , pour voir «lire j.° qu’ils seraient tenus de venir à division
et partage de différens objets omis lors du partage
déjà fait de
la succession de la Dame D a u p h in -M o n fro d è s, mère commune
consistant dans le trousseau de la Dame de Mariol évalué 4,ooo fr.
dans les pensions d’elle , ses enfans et ses gens , nourris et en
tretenus par la mère commune depuis le mariage de ladile Dame
de Mariol jusqu’au décès de sadite mère , le trousseau de la Dame
Ribeyre , les diverses sommes qu’elle avait reçues et qui étaient
sujettes à ra p p o r t, divers objets mobiliers détaillés, b e r lin e , voi
t u r e , cariole , charriot, chaise-à-porteur , service de porcelaine ,
ta b le a u x , a rgen terie, b i j o u x , etc. ; 2.“ Q u ’ils seraient tenus aussi
de rapporter les titres des créances appartenantes à la succession de
lu mère com m une, baux à ferme de T l i e i x , Montrodès , Saint(jenès-Glianipanelle , pour en faire payer les reliquats avec inté
rêts , etc.5 5 .° Q u ’ils seraient tenus, dans la huitaine, de procéder
définitivement à un règlement de compte , et de rembourser au
Sieur de T lieix tout ce qu’il aura avancé pour chacun de ses co
héritiers , avec intérêts 3 ou bien la somme de 10,000 fr. à laquelle
il se restreignait.
D é j à , le 16 du même m ois, le Sieur V e y n y de T lie ix
avait fait
assigner la Dame M a r io l, pour voir dire que toutes les inscrip
tions qu’elle avait prises sur l u i , soit en son nom , soit en qualité
d■
’héritier des père et mère communs , seraient déclarees nulles
et rayées , avec dominages-interets et dépens.
E n f in , le i 3 août 1807 , après plusieurs audiences, le tribu
nal a rendu son ju g em e n t, dont voici le dispositif:
L e tribunal déclare la partie de Rousseau ( la Dame de Mariol ) ,
�( 12 )
non-recevable clans sa demande en p a ie m e n t, tant delà somme do
5 0.000 fr. qu’en celle de 10,000 fr. ; à l’égard du Sieur V ey n y
de 'J lieix , son frère , la déclare également non-iecevable dans sa
demande; à l ’égard du Sieur Brechet , pour les mêmes créances,
même pour celle de G,000 fr. , sauf à elle à se pourvoir , ainsi qu’elle
avisi.ia , contre la Dame du Sauvage , ordonne que le Sieur de T h e ix
et la pnilic de Rousseau viendront a co m p te devant M. Chassaigne,
notaire , que le tribunal commet à cet effet , sur le paiement des
dettes qu’ils prétendent avoir respectivement fait à la décharge do
la succession de la n iè r e com m une, pour ledit compte fait et rap
porté être discuté plus amplement sur ce que lesdites parties pour
ront se devoir , el y être statué ce que de d r o i t , et néanmoins le tri
bunal fait main-levée des-à-présent , savoir, au Sieur V e y n y de
T h e i x , de i’inscriplion de la partie de Rousseau ayant pour objet les
5 0.000 f r . , ainsi que l’obligation de 10,000 fr. , et au Sieur Brechet
des inscriptions faites sur lui par la partie de Rousseau, ordonne
qu’elles seront rayées. L e tribunal maintient les inscriptions faites
sur le Sieur V e y n y de T h e ix par la partie de Rousseau , ayant tout
autre objet que ceux des 5 o,ooo fr. d’une p art, et des 10,000 fr.
de l'autre,ci-devant exprim ées; sur le mérite desquelles inscriptions
il sera discuté plus amplement ; condamne la partie de Rousseau aux
dépens à l’égard du Sieur B r e c h e t , le surplus des dépens demeu
rant réservé.
L a Dame de.AIarioI a interjeté appel de ce jugement., et c’est dans
cet état que la cause se présente.
M O
Y E N S.
L e jugement dont la Dame de Mariol s’est rendue appelante lui
fait perdre évidemment 56,000 fr. , et les intérêts de cette somme :
cependant elle est tellement convaincue de l’injustice d’une telle dé
cision , qu’elle va démontrer à la Cour non-seulement l ’erreur que
conliennent les motifs des premiers juges , niais encore le peu do
fonde tuent des-autres argumens par lesquels le Sieur Brechet el lo
Sieui
V e y n y da T h e ix ont cherché à faire prévaloir leur cause,
d’autant qu’il est présumable qu’ils les reproduiront pour sou tenir leurs
�( i3 )
prétentions. Mais , comme la Dame de Mariol sJest attachée à mettre
dans la narration des faits toute la précision et l ’exactitude p ossible,
elle emploiera la discussion la plus méthodique peur p o ite r dans
tous les esprits la conviction de la bonté et de la force des m oj t u £ qUj
doivent enfin la faire triomp lier , et lui procurer le paiement des
sommes qu’elle se croit très-recevable et bien fondée à réclamer.
A cet effet, chaque
demande aura son paragraphe p articulier,
avec le sommaire de ses propositions.
§. I.er
D o t de 5 o,ooo liç , en p r c c ip u t, constituée en 1 7 7 1 , est irrévocable
de sa nature , quoique subordonnée à une condition résolu
toire , du moment que la condition ne s ’ est p a s ejjcctuée.
U n cohéritier q u i, lors du p a rta g e , cniet de réclan er ses
p r élè v e m en s, est recevable à les réclam er postérieurem ent.
Sous la loi du
17 nivôse an 2 , le cum ul a v a it lieu qu a n d le
p récip u t était stipulé dans la donation.
L e légitim aire seu l a le
droit d ’exam iner si les
dispositions
n ’excèdent p a s la p ortion disponible.
L ’ acquéreur p e u t être p o u rsu iv i p o u r la totalité d ’une créance
h ypothécaire.
Dans le contrat de mariage de la Dame de M ariol, sous la
•* . »
*
date du 9 février 1771 , se trouve la clause suivante:
)) La Dame veuve
de V ille m o n t, en faveur
)) constitue à la Demoiselle sa fille la somme
dudit in a iia g e ,
de
5o,oco liv. ;
)> laquelle ne sera néanmoins payable qu’après le décès de ladite
}) D am e de V ille m o n t, sans intérêts jusqu^à c e ; laquelle cons» titntion de dot n ’emportera ni forclusion ni renonciation à la
)) future succession de ladite Dame de "Ville-ni o n t , en sorte que
» venant à mourir sans avoir fait d’autres dispositions , la Dem oi» selle future épouse viendra à partage de sa succession , sans
)) même être obligée de rapporter ladite somme de 5 o,ooo liv. •
» m ais il sera libre à la
D am e de
V illem o n t de fa ir e telles
)> dispositions que bon lu i s e m b le r a , même p a r testa m en t, ci
�( 4
)
« do réduira la Tito Demoiselle future épouse à la dot de 5 o,ooo
)) liv. à elle ci-dessus constituée , ou de 1 instituer lieritière
à la
u charge du rapport de ladite dot ».
T e lle est la clause en vertu de laquelle la Dame de Mariol se
prétend créancière de
la
succession de la Dame sa mère pour
une somme de 5 o,ooo liv. } avec
arrivé en l’an 4 .
O r , voici les motifs pour
les intérêts depuis son' décès
lesquels le tribunal civil de
Cler-
jnont a déclaré la Dame de Mariol non-recevable dans la demande
des trois quarts de cette somme de 5 o,ooo liv. avec les intérêts.
« A ttendu que la D am e do V ille m o n t est morte en l’an 4 , sous l ’euw
« pire de la loi du 17 nivôse
« aucun avantage cil
laveur
| «
loi
Attendit
que
la
du
<c rétroa ctif de la loi du
17
rr faits avant la loi du i j
an 2 ,
qui 11e
permettait
pas de laisser
de ses successibles ;
18 pluviôse an 5 ,
qui
nivôse an 2 , a statué
nivôse
a rapporté
que les
an 2 , auraient leur
effet
l'effet
avantages
il 3
quand
« seraient p a r leur nature irrévocables;
« Atten d u que la dot de 3 o,ooo l iv . portée au contrat de mariage de
« la partie de Rousseau , était plutôt une expectative qu’ un avantage irrc_
<c vocable par sa nature , puisque la mère de la partie de Rousseau s’était
« réservé , dans son contrat de mariage en date du y février 1771 } Ja
d’appeler sa fille à sa succession , en rapportant les 3 o,ooo l i v .
« faculté
« ce qui fait disparaître toute idée d’irrévocabilité ;
« A tten d u que , d’après l ’allégation des parties, la D am e de V illem o nt
« a fait
un
« Rousseau
e x p lic a tif de ses v o lo n t é s ,
et
que
est venue au partage de la succession
testament
de
sa mère
« autres frères et sœurs en l’an 7 ,
« la
dot de
3o,ooo
partie de
avec ses
qu’elle n’a point réclamé en préciput
liv. ;
que la dot de 3 o,ooo liv . n’étant point
« A tten d u
la
« sion de la Dam e de V illem o n t , le
dette de la succcs-
Sieur lîrechet , comme acquéreur
« d’ une portion du bien de T l i e i x , ne peut être chargé do les a c q u itte r ;
« A tten d u que le Sieur V e y n y Je T lie ix
« seau une fin
« cession
de la mère
« fait justice
« 3 o,odo
oppose à la partie de Rous-
de n on-recevoir , résultant de eu qu’au partage de la succommune
en
l ’an 7 ,
]a partie de Rousseau
s’est
à elle-m êm e , eu ne demandant pas A prélever sa dot de
liv . ,
et
a
préféré
de ve n ir en
partage avec
scs frères
et
« soeurs «.
Ces motifs sont-ils
solides ? . . . Nous soutenons la négative»
�____
( i5 )
et nous allons démontrer qu’ils sont
contraires aux vrais p rin
cipes.
Rappelons-nous d’abord que la loi du 7 mars 1700 a t,boli la
faculté de disposer en ligne direcle ; que les lois des 5 bium aire
et 17 nivôse an
2 ont établi les parlages d ’égalité, non-obstant
toutes dispositions; que la loi du 9 fructidor 011 5 a borné l'ellct
des deux lois précitées en faisant p a it ir le u r execulion seulement
du jour même de leur promulgation ; que ia loi du o vendémiaire
an 4 a maintenu ce principe do non-ictroactivite ( et 3 p ie s c jit
le mode de restitution à faire aux personnes rappelées et réta
blies dans leurs droits par la présente loi ; qu’enfin la loi du 18
pluviôse an 5 a été rendue dans le but de lever les
difficultés
que les changem ens survenus dans les précédentes lois rela tives
a ux successiojis avaient f a i t n a îtr e y qu'en conséquence, c’est à
cette dernière loi particulièrement qu’il faut faire attention pour
décider les questions qui ont pu s’élever en matière de successions
jusqu'à la publication du code Napoléon.
L ’article I.cr de cette loi porte que » les avantages , prélève)> m en s, préciputs ^ donations e n t r e - v i f s , institutions c c n li a c » tuelles , et autres dispositions
irrévocables de
leur nature ,
)) légitim em ent stipulées en ligne direcle avant la pitblicalioiL
»
))
»
»
de la loi du 7 mars 1 7 9 5 , et en ligne collatérale, ou autres
individus non parens , antérieurement à ia publication de la loi
du 5 brumaire an 2 , a u r o n t le u r p l e i n et e n t ie r e f f e t , c o n form ém ent a u x anciennes lois , tant sur les successions ouver-
» les ju s q u ’ à
ce jo u r
que
sur
celles
qui
s ’ ouvriraient à
» V aven ir )>.
Sur cet article „ il s’est élevé une grande controverse entre les
jurisconsultes ; les uns soutenant qu’une disposition irrévocable de
6a nature perdait son caractère d’irrévocabilité ^ si
le donateur
ou l’instituant y avait joint une clause conditionnelle et résolu
toire ; les autres soutenant que la disposition conservait son carac
tère d ’irrévocabilité, non obstant la clau se, pourvu que la condi
tion ou la résolution n 'eu t pas été elïectuee ; et telle elait la divi
sion d’opinions sur ce point de droit , que chaque système était
appuyé d’un grand nombre de partisans } en çprte qu’ on attendait
�( i6 )
avec Impatience quo la Cour suprême eût l’occasion de fixer tou
tes les opinions.
Cette occasion se présenta le 23 fructidor an 8 ( 1 ^, dans la
cause d’Antoine Pouch , dont le pourvoi contre un jugement du
tribunal civil du L o t fut r e je lé , sur les conclusions de M. .lourde,
substitut du procureur général , et au rapport de M. P o rriq u e t, par
la section des requêtes, qui jugea qu’une institution subordonnée
au simple choix d’un tiers , qui
publication
confirma les
de
la loi du
n ’a pas fait ce choix avant la
17 nivô se , était annullée.
partisans du prem ier
Cet
arrêt
système dans leur opinion ;
mais les autres furent loin d’y a d h é r e r , et attendirent une nou
velle occasion de soutenir le principe de l’irrévocabilité.
L e 17 pluviôse an i 3 , la même section des requêtes , sur les con
clusions de M. le Coutour , substitut du procureur-gém-ral, et au rap
port de M. D outrepont, rejeta le pourvoi des enfans Grailhe, contre
un arrêt de la Cour d ’appel de Montpellier du j8 messidor an 12 , et
décida qu’une institution nominative .l’héritier,faite parle père de l’ins
titué , et subordonnée au cas où la mère n’ instituerait pas elle-même
d ’autre h éritie r, était devenue irrévocable par l’eifet de l’abolition
de la faculté de disposer de ses biens eu ligne directe , abolition
formellement prononcée par la loi du 7 mars 3795 ( 2 ) .
Il était évident que cet arrêt était contraire au précédent; néan
moins l ’arrêtiste avait cherché à les concilier , en distinguant Félectio:i réservée à une mère d’avec celle conférée à un tiers ; comme si
l ’institution était moins subordonnée dans un cas que dans l’a u tre ,
circonstance q u i , seule , donnait lieu d ’agiter la question d ’irrévoca
bilité.
Enfin,tout doute a cessé par un autre arrêt de la section des requêtes
du i 5 thermidor an i 3 , rendu sur les conclusions de M. M e r lin ,
pro cureur-général, au rapport de M. Chasles, qui a rejeté le pourvoi
des enfans G rim a i, contre un arrêt de la Cour d’appel d’Agen du 25
germinal an 1 2 , et qui a jugé qu’une institution nominative d ’h éri(1) D c u c v c r s, an i 3 , p.<= g 5 , s . ------ S ire y , arrêts antérieurs à l ’an 1 0 ,
1>c n i.
a) ü o n e v e r s , au i 3 ,
p .c s'il« ------ S i r c y , au i 3 ; p.c 173.
�( 17 )
tiers , subordonnée à un droit d'élection conféré à une mère , et
non-exercé avant la’ publication cle la loi du 17 nivôse an 2 était
devenue irrévocable , soit par le décès du testateur arrivé en 1 7 9 2 ,
soit par la force de la loi du 7 mars 17Ç)3 , qui a enlevé à la mère sur
vivante la faculté d'élire un héritier (1).
lin rapportant cet. arrêt , M. Donevers observa que le con
traire avait été jugé par 1■
’arrêt du 20 fructidor an 8 , mais q u ’ après
un n ou v el exam en préparé p a r un p la id o y e r , lu m in eu x de M .
le procureur-général M e rlin , la Cour a va it adopté la ju r is p r u
dence du présent arrêt.
D ’après de pareilles autorités , il n'est donc pas permis de douter
qu’une constitution dolale en p ré c ip u t, faite par une mère à sa fille
en 1771 , 11e doive avoir son plein et entier effet, non-obstant les
cbangemens que 1 lu m è re ' s’était réservé de faire à celle consti
tu tio n ,-si de fait elle n 'a point usé de
la faculté qu’elle s’était
ré se rv é e , 011 qu’elle en ait été empêchée par la force de la loi
du 7 mars 1793.
Appliquons maintenant ces principes et ces autorités à notre
espèce , eL il sera facile de reconnaître l ’erreur des motifs de
nos premiers juges,
■On a déjà vu que la mère de la Dame de ^Mariol lui avait constitué
une dot de 00,000 fr. non sujette à r a p p o r t , niais paj'able seu
lement après son décès. U n e pareille constitution était sans con
tredit irrévocable de sa nature ; cependant le tribunal dont est appel
a décidé qu’elle était plutôt une expectative qu’un avantage irrévo
cable, et pourquoi ?... C ’ est (/ue la mère s ’ était réservé la fa c u lt é
d ’ appeler sa f i lle A sa succession , en rapportant tes 5 o,ooo f r . , ce
cjui f a i t disparaître toute idée d'irrévocabilité. Nous disons , au
contraire, avec plus de fondem ent, que celle faculté réservée par la
nière n 'a porté nulle atteinte à l’irrévocabililé de cette constitu
tion dotale, parce qu'il est de l'essence des donations entre-vifs
ou avantages contractuels d’être irrévocables, et qu ils ne perdent
ce caractère substantiel que dans le cas où le donateur use valable
ment de la faculté qu’il s'est réservée d’y apporter des cliangeiuens
(1) Dcnevcr« , an i 4 , p.c 80. ------ S ir cy , au 1806, p.e n 4 .
�( 18)
qui en n n l i i ï n t , " altèrent
ou détruisent la nature
primitive.
TjI question se réduit donc à savoir si la Dame de Villemont a
usé 'le la faculté q u ’elle s’était réservée de réduire
la Dame de
M irio l , sa fille, à sa dot de 00,000 fr. , ou de l’instituer son
h éritiè re , à la charge du rapport de cette dot.
A cet égard , on ne rapporte aucun acte qui prouve que la Dame de
V illem aui ait changé de volonté , et encore quand on pourrait en
r a p p o r t e r , i! faudrait deux ch oses, i.° que cet acte fut valable;
2.0 que la Dame de Villemont eût formellement soumis la Dame de
Mariol aa rapport de sa d o t, en venant à sa succession.
A la vérité , le jugement, dont est appel dit dans
un da ses
molifs , que, d ’après l’allégation des parties , la D am e de Villemont a
fait un Lestament explicatif de ses volontés , et qu'au partage de sa
succession en l’an 7 , la Daine de Mariol n’a point réclamé cette dot.
Nous expliquerons bientôt le silence de la Dame de Mariol lou
chant sa dot en préciput lors du partage ; mais dans ce m om ent-ci,
il ne s’agit que de ce prétendu testament allégué par les parties
comme explicatif des volontés de la Dame sa mère. Or quant à ce
tes ta m e n t, il n’a été allégué par les parties, lors des plaidoiries,autre
chose,sinon qu ele S ie u r V eyn y d e T h e i x prétendait que , peu de tems
avant sa m o r t, la Dame de Villemont avait fait un acte de der
nière vo lo n té, où elle appelait pour ses héritiers lui Sieur de T h e ix ,
et la D u n î
de M irio l. A. quoi
celle-ci répondait q u ’il eût d ’a
bord à pro luire ce testam ent, ce qu’il n ’a pas fait 5 en sorte1" que
ne pouvant voir ce
testament , la Dame de Mariol ajoutait que
s’ il était postérieur au 7 mars 17<)o , il ne pouvait contenir aucune
disposition valable , puisqueJa loi dudit jour avait aboli la faculté de
dispisiir d un
la lig^u d ir e c te : voila tout ce qui a été dit à ce
s u j e t , en sorte que rieu ne s’opposait à ce que la clause du con
trat de mariage de la Dame
de
Mariol lut jugée en thèse , et
qu’elle fût déclarée irrévocable de sa nature , et devant produire
son plein et entier effet , conformément aux anciennes lois, puis
que la D.ime sa mère n’avait point usé, avant la loi du 7 mars 17J)3,
«le li f.iculté qu’elle s’était réservée d'altérer l’irrévocabilité de sa
do viiiou , et que èette loi lui en avait enlevé la faculté pour l’avenir.
Assuréuuiit , quand ou compare la clause dont s’agit avec les
�—
----------
i
institutions faites par des p e r e s , et subordonnées n i choix des
mères ou des tiers , il est impossible de la regarder comme
moins irrévocable que ces dernières, maintenues par
précités.
les arrêts
Et ne disait-on pas aussi dans les espèces (le ces arrêts, que
le fils nominativement institué par son p è r e , mais avec condition
que la mère pourrait choisir lin aulre de ses en fans, avait en sa.
faveur plutôt une expectative qu’une disposition
irrévocable do
sa nature ? Cependant de pareilles dispositions ont été declarées
irrévocables , parce que la mère n’avait point usé de la faculté
que son mari lui avait d o n n ée, ou qu’elle en avait été empêchée
par la loi du 7 mars 1790.
Mais que penser de la décision des premiers juges
question, lorsque le même tribunal l ’a jugée
sur cette
en sens contraire
dans une espèce toute semblable en faveur du Sieur R i b e y r e ,
aîn é, neveu de la D am e de M a rio l, exerçant les droits de la
Dam e sa mère , sœur de ladite Dam e de Mariol ?
P a r son contrat de mariage
du 22 février 1767,, Dame M ar
guerite d e ' V e j n y de V illem o n t, épouse du Sieur R i b e y r e , fut
constituée par ses père et mère en une somme de 5 o,ooo l i v . ,
moitié du ch ef p ate rn e l, moitié du ch e f maternel. Il est à rem ar
quer que la Dame Dauphin-Montrodês , sa mère , s’était réservé
dans ce contrat l’entiere disposition de ses biens p ara p h e rn a u x,
consistant en lu terre de T h e ix et dépendances, avec déclaration
néanmoins q u 'a u cas q u ’ei sa mort elle n ’ en eût p a s disposé
a u trem en t, i l en reviendrait 10,000 liv . à la fu tu r e sa f i lle .
Question de savoir si la mère n ’ayant pas disposé , cet avantage
de 10,000 liv. était irrévocable.
Par jugement du
12 ventôse an 12 , le tribunal (le Clermont
le déclara irrévocable , et en ordonna le prélèvement.
V o ici le m o tif:
« A ttendu que la D am e D au p h in n’ayant, pas autrem ent dispose du bien
« de T h e i x .,
l ’a ugment de dot de 10,000 liv . qu’elle avait fait en ce cas
« à Marguerite V e y n y , sa fille , doit avoir son cITet, non du jo u r de
« l ’avènement de la c o n d itio n , mais du jo u r même de l'acte q u i contenait
%£}*?
�« la disposition , parc*
« bhm ?nt a c q u is , si la
(jue ce (boit lu i était
> <Wt ce
m om ent
,
irreroca—
D am e D a u p h in ne disposait p a s autrement
«.
A p p e l , et par suilc, arrêt de la Cour de R iom rendu en la
prem iéie seclion le a i nivôse an i 5 , qui confirme le jugement
de Clerniont par les mêmes motifs , et y
« A ttendu que
les 10,000 l iv . ont etc promises
« que le droit à lacliIc somme
« soumis
ajouie :
une condition
à l ’instant
n’a clé éventuel que
parce
m ê m e , et
qu’ il
a
été
résolutoire ;
« A ttendu que la condition lésolutoire n’ayant pas eu lieu , la somme
« de io,ooo l i v . est restée promise dès l ’origine par le contrat de mariage
« même ;
« Attendu que
cette somme
« tionnées en la loi
ne ressemble
du 18 pluviôse an
5,
point a u x reserves
etc.
înen-
«.
Comparons maintenant les deux affaires, et nous reconnaîtrons
qu’elles ne pouvaient recevoir que la même décision!
i.°
Le contrat de mariage de la Dame de R ib e y re est de 1767 ,
et celui de la Dame de M a r io l, sa sœur , est de J771 , tems où
les lois autorisaient les avantages stipulés par ces contrats ; 2.0 c est
la m ir e commune qui a constitué les deux dots, en les sou
mettant toutes deux à une condition résolutoire ; 5 .° cette condi
tion résolutoire n ’a eu lieu ni à l’égard de la Dame de Mariol ,
ni a* l’égard de la Dame de Ribeyre ; en sorte que les deux dots
sont restées promises dès leur origine , et que celle de la Daine
de Mariol , stipulée en p ré c ip u t , a conservé sa nature et son
irrévocabilité,
tout comme celle de
la D am e de R ib e y re ;
et
qu’a in s i, d’après l’article I.cr de la loi du 18 pluviôse an 5 , elles
ont dû avoir également leur plein et entier effet , conformément
aux anciennes lois. C ’était donc le cas de la m a x im e , idem j u s ,
ecidem ratio.
Cependant on voit qnc le tribunal de Clermont a maintenu la
constitution dotale de la
Darne de R ib e y r e , et n ’a point voulu
maintenir celle de la Dame de
Mariol , quoique
conditionnée
de la même manière. C o m m e n t comprendre un résultat si diffé
rent sur la môme question ? ï ' t ce qui est encore plus incom
préhensible , c ’est que la question lut décidée en faveur de l ’avan-
�tngp fail à la D am e de Uibeyre
en l ’an 12 , tems où la contro
verse était grande sur cette question , et où la jurisprudence ne
présentait encore que l'arrêt de cassation du 520 fructidor an 8 , trèsdéfavorable à la Dame de I’ ib e y t e , lundis que rette même ques
tion est d é cid é e , en 1806, contre la dame de M a r io l, dans lin
tems où la jurisprudence est assise en sa iavcur et dans un accoicl
p a r fa it , puisque
les mêmes piincipes se retrouvent
co n sa crés,
et par le. jugeme.nl de d e r il io n i du 12 ventose an 1 2 , et par
l ’arrêt de llio m du 21
nivôse an i 5 , et par les arrêts de cas
sation des 17 pluviôse et l 5 theim idor an io.
Assurément , la C o u r d’appel ne peut qu’improuver une déci
sion
aussi choquante; et pour conserver l'harmonie de la ju ris
prudence , elle rétablira
sans doute la Dame de
un droit qu’elle 11e devait
même tribunal qui avait si
pas s’attendre à voir
M ariol
dans
violer par le
bien su faire respecter celui de la
Dame de R ibeyre , sa soeur.
Après avoir démontré jusqu’à l’évidence l ’erreur du premier
m otif du jugement dont est appel , en ce qui touche la nature
de la dot
en préciput constituée à la Dame de Mariol , nous
allons réfuter le second m otif qui a déterminé la fin de 11011recevoir prononcée contre elle.
Ce m otif est pris du silence de la Dame de Mariol lors du partage
de la succession de la mère commune ; d’ où l’on tire contre elle
deux conséquences ; la première qu’elle a fait un abandon tacite
de ses prolêvemens ; la deuxième quj elle a entendu respecter à cet
égard les dernières volontés de la Dame sa m è r e , en sorte que par
cette présupposition , on est parvenu à écarter non-seulement sa
demande en paiement de ses 5o,ooo fr. de dot en p r é c i p u t , mais
encore celle en paiement de l’obligation de io ,o o o fr . à elle consentie
par la Dame sa mère le 23 février 179^ j avec les intérêts ; ce qui
lui fait perdre toul-à-coup une somme de plus de 45 ,o o o fr.
Voyons donc si ce m o tif a quelque fondement.
E n examinant les principes établis en matière de fins de n o n recevoir , on doit reconnaître pour vérités certaines , qu’il n ’y a que
deux espèces de fins de non-recevoir , celles qui sont prescrites
par la loi m ê m e , et celles qui découlent naturellement d ’un acte
�5
antérieur à la demanda , incom patible a vec e lle , et qui lu i f a i t un
obstacle fo r m e l ; car les fins de non-recevoir , comme les nullités,
ne sont jamais «arbitraires. Celles de la première espèce se rencontrent
dans les cas où , comme pour les appels , oppositions , prescriptions ,
la loi a fixé un délai après lequel on est non-recevable, ou encore
dans les cas où une partie n ’a pas la qualité requise pour soutenir son
action. Celles de la seconde espèce se rencontrent
dans les cas
d ’actes contenant des renonciations , ratifications , ou des acquies”
ceinsns formels : car il est à remarquer que jamais les renonciations
tacites n’opèrent de fins de non-recevoir à l'égard de droits certains.
Cette doctrine est établie sur quantité d’arrêts de cassation , dont
nous citerons celui qui a le plus de rapport à notre question.
Par «acte notarié du 24 mars 1758 , Anne Bonniol , autorisée de
son m a r i , céda à son frère tous les biens et droits qui lui étaient
échus au d é c è s de leurs père , m ère, soeurs et tan te, moyennant
2,5oo fr. , dont 1,500 fr. com ptant, et une rente de 5 o fr. pour le
surplus.
A près la mort de son m a ri, An ne Bonniol attaque de nullité
sa cession comme
prohibée par l ’art. III
du chapitre
i 4 de la
coutume d’Auvergne.
L e i . cr septembre 1777 , sentence de la sénéchaussée d 'A u v e rg n e ,
qui déclare nulle cette cession.
'
A p p e la i! parlement de Paris , et ensuite, après sa suppression,
au tribunal du district d ’Isso ire , qui par jugement du i5 prairial
an 5 , a infirmé la sentence, et ordonné l’exécution de l’acte du
2 4 mars 1 7 6 8 , sur le fondement qu’Anne Bonniol en avait couvert
la nullité par la perception q u ’elle avait fa ite , pendant plusieurs
années de viduité , des arrérages de la rente de 5 o lr. qui restait due
sur le prix principal de sa cession.
Pourvoi en cassation , et le a 5 messidor an 4 , au rapport de
M. S chw en d , arrêt qui casse le jugement
« A tten d u
que
l ’cxccution , pendant
« 1758 ne peut va lid e r un
d'Issoirc :
plusieurs années ,
du traité
de
acte n u l dans son principe , et qui 11’a point
« été valablem ent confirmé depuis la viduité d’Anno Bonniol «.
Cet arrêt a donc jugé très-positivement ( comme son titre le
�24 \
( a 3 )'
porte ) , que la nullilé de la vente du Lien dotal ne p e u t être ratifiée
tacitem ent et sans un acte f o n n e l ( i ).
Ceci posé , on ne- peut se dissimuler que s i , dans les partages , un
cohéritier oublie d’eyercer un p rélèv em en t, aucune loi ne lui p ro h ibe
d ’en réclamer la restitution on revendication , si c’est un c c ip s
c e r ta in , ou Lien le p aiem en t, si ce sont des deniers, et dès-lers
il est impossible de puiser dans la loi aucune fin de n o n -re ce vo ir
contre sa demande. K estedonc à tirer la fin de non-recevo ir d’un
acte assez puissant pour résister à sa propre demande. O r qu’op
pose-t-on à la Dame de Mariol ? .. . son silence lors du partage de
la succession de la Dame sa mère... Mais son silence n ’esl point
un acte.
A li ! si la Dam e de Mariol eût renoncé ou abdiqué ses prélèvemens par l ’acte de p artag e, on pourrait lui opposer une volonté
incompatible avec sa volonté actuelle; et alors il se serait élevé la
question de savoir si pendant son ma liage elJe avait pu abdiquer des
droits certains et dotaux , sans même le concours de sen mari :
car il est à observer qu’il ne l’a point assistée dans ce partage. Mais
rien de sembluLle ne peut lui être opposé; et il est évident que tout
ce qui résulte de son silence, c ’est une omission dont on veut
tirer contre elle deux conséquences fausses, pour parvenir à une
iin de non-recevoir purement arbitraire.
Nous disons d eux conséquences fa u ss e s • car sur quoi a -t-o n
supposé qu’elle a voulu respecter les dernières volontés de la
Dame sa mère ? I-e IriLimal dent est appel n’a jamais vu le testament
de la Dame de Villemont ; il n ’a point été produit par les adver
saires qui en alléguaient l’existence. Donc ne sachant pas même si
la Dame de V illemont avait voulu ou désiré que sa fille, la Dam e de
Mariol, abandonnât ses prélèvemens, il n 'y avait pas la moindre pré
somption que ce fût la cause de son silence lors du partage. E l quant
à l’abdication tacite et volontaire de ces prélèvemens , c ’est encore
une conséquence très-équivoque tiree de ton silence ; car il n ’esl pas
probable qu’ une mère de quatre enfans lasse volontiers cadeau à
ses cohéritiers de somme aussi considérable que celle-ci.
U ne donation de cette importance méritait Lien la peine d ’être
(i) S i r c y , aiicts antérieurs à l ’an Io ; p.e go.
�( 24 )
e x p r im é e , et d’ailleurs n Jétait point "au pouvoir de la Damo de
M a r i o l , ’ dont tous les Liens étaient dotaux.
Cependant on veut donner à son silence le même effet qu’à
une renonciation formelle équivalente à une donation. O11 ne peut
rien voir de plus violent. C ’est le 18 pluviôse an 7 que le partage a
eu lieu : or à cette é p o q u e , la Dame de
Mario] trouve à propos
de ne pas exercer ses prélèvem ens, parce que la clause de son
contrat de mariage ayant été
consultée,
tant par elle que
par
son frère , le Sieur V e y n y de T h e ix , ils eurent tous deux des
consultations si opposées, qu’ils convinrent d’ajourner l’article des
prélèvemens.
On ne peut lui reprocher cette prudence , quand on voit que,'
même en l ’an 8 , la jurisprudence n ’était point favorable à l’ irréyocabilité de sa dot en préciput , et que ce n ’esl qu’en 1 an 12
et en l’an i 5 qu’on a su à quoi s'en tenir sur celte question ,
décidée alors par trois
O n a objecté qu’ elle
qu’elle n’eu a pas fait ,
d r o its, pas plus qu’ un
arrêts en sa faveur.
'aurait dû faire ses réserves ; mais parce
il ne s’ensuit pas qu’elle ait perdu ses
créancier de diverses sommes ne perd ses
créances fondées en titres , lorsqu'il donne
quittance au même
débiteur de quelques-unes, sans faire réserve des autres. On a encore
objecté que
la Dame de Mariol ayant acheté en l’an
9 de la
Dame du Sauvage , sa sœur , sa portion du domaine de S t.- G e n e s t ,
sans parler de prélèvemens , elle avait bien assez manifesté par
la sa renonciation aux sommes qu’elle réclame aujourd hui. C ’est
encore une induction très-équivoque ; car la Dame de Mariol a
acheté de sa sœur sa portion de ce domaine , dans un tems ou
elle voyait encore à sa sœur des moyens suffisans pour lui faire
acquitter un jour sa portion de ses prélèvemens; et la p re u v e ,
c’est que dans le moment a ctu el, elle doit trouver dans le résul
tat de sa sur-enchère au-delà de c e t t e portion.
En dernière a n a ly s e , le silence de la Dame de Mariol lors du
partag« de l’an 7 , ne peut f o u r n i r contre elle une fin de n o n r ecevoir capable de lui faire perdre ses droits, du moment que la
légitimité en ost reconnue.
Il iie pouvait résulter de son silence
d’autre3 conséquences fâcheuses pour elle , que de s’exposer à
�perdre ses créances, nu cas où elle eût laissé ses cohéritiers vendre
tous leurs biens sans prendre ses sûretés ; or elle a pris à cet égard
les précautions convenables, en couvrant la succession d e là mèro
commune
d ’une inscription de 9>fiî2 fr. ,
le 2G prairial an 7 ,
et d’une antre inscription de 42,800 fr. , à la date du 17 vendé
miaire an 9 , tant pour son préciput que pour son obligation,
ce qui fait assez voir qu’elle n'avait point entendu abandonner
ses prélèyemens.
Il est donc évident que la fin de non-recevoir prononcée contre
la Dame de Mariol , repose sur deux motifs également erionnos , et
qu’en disant que la dot de 5 o,ooo liv. n ’est pas dette de la suc
cession de la Dame de V illem ont. et que le Sieur Brecliet , comme
acquéreur d’une portion du bien de T h e i x , ne peut être chargé de
les acquitter, le tribunal dont est appel a fait une fausse conclusion
dont l’appelante a tout lieu de se plaindre.
Ce n ’est point assez pour la Dame de Mariol de discuter le mérite
des motifs adoptés pour lui faire perdre ses créances ; elle répondra
avec le même avantage aux autres objections qui lui furent faites
et que les adversaires pourront reproduire.
L e s Sieurs V e y n y de T h e ix et Brecliet ont prétendu que la suc
cession de la Dame de Villemont ayant été ouverte en Tan 4 , sous
l’empire de la loi du 17 nivôse , devait être réglée d’après les
principes de cette loi , et sans égard à la loi du 18 pluviôse an
5 , qui n ’est venue que postérieurement ; que dès-lors cette succes
sion a dû être partagée entre tous les suceessibles avec égalité e fc
sans aucun avantage , tout cu m u l étant prohibé.
Cette prétention renferme deux erreurs; la p re m iè r e , c?est que
le partage de la Dam e de Villemont n ’ayant été commencé que
le 18 pluviôse an 7 , les cohéritiers ne pouvaient se soustraire à l’au
torité de la loi du 18 pluviôse an 5 , dont l’art. 1 . " dit qu’il s'applique
aux successions ouvertes avant cette loi comme après ; la 2.', c ’est que
quand le partage se serait fait en l’an 4 , la Dame de Mariol aurait
pu cumuler les deux qualités de donataire en préciput et d’héri
tière. L a raison est qu'’il faut distinguer entre le cumul qui dérivait
des lois sur les successions, et le cumul autorise p a r la volonté des
instiluans ét des donateurs , qui est une véritable émanation de
la donation. Au premier cas , le cumul ne pouvait avoir lieu , parce
�%ÿm
'
^ )
que l’article 8 (le la loi du 17 nivôse ayant exigé le rapport des
dom tious eu
cessions
venant a la succession , les lois relatives aux suc
se trouvaient changées , en sorte que
le donataire ne
pouvait plus invoquer les lois des successions existantes au moment
de la donation ; lois qui
seules
autorisaient le cumul.
A u s s i,
dans cette hypothèse , la Cour suprême a rendu trois arrêts remar
quables.
Le
messidor an () ( 1 ) , la section civile, au rapport de RI.
Maleville, rejela le pourvoi de G arcem ant, et décida qu’un dona
taire était sujet à r a p p o r t , s’il se portait héritier , bien qu’à l’époque
de la donation, il eût pu se dispenser du rapport , suiva n t les
lois d ’ alors , p a rce que la fa c u lté du cu m u l n ’ était p a s une
ém anation de la, donation , m ais q u ’ elle dérivait des lois su r les
successions..
L e $ messidor an 11 ( 2 ) , la section des requêtes, au rapport
de M. Lombard-Quincieux , rejeta le pourvoi des frères Marotte >
et décida qu’une iille religieuse pouvait contraindre ses frères à
rapporter et partager les biens dont le père leur avait fait sa démis
sion sous Vempire des lois qu i les eussent dispensés du rapport
envers une religieuse.
Enfin , le 16 brumaire an i j ( 5 ) , la, section des requêtes, au
^apport de M. V a llé e , et par le même p rin c ip e , rejela le pourvoi
de la Dame Pigenat contre un jugement du tribunal d ’appel de
Dijon du 20 messidor an 1 0 , et décida que l a ’loi du 18 pluviôse aa
5 n’avait point dérogé à l ’obligation du rapport prescrit: par l ’art.
8
d e l à loi du t7 nivôse an 2 , même des donations à charge.
]\I. Arnaud , procureur-général-sub stitut, avait conclu au rejet, et
disait : « qu’à la vérité le p rècip u t est un don hors part-, qu’il peut
« être cum ulé avec la portion héréditaire ; qu’il 11’est pas sujet à
» rapport. M a is , pour qu’il y ait prècip ut établi par la donation
w înêtne, ¡1 faut que le donateur ait déclaré positivement ces deux
)) choses : tpi il
(1) S i r c y ,
au
Jail 11,1 d o n , et cjiio ce don sera hors p art ^
J2 , p.e 1GG.
(a) Idem.
3 ) Sircy, an i 3 , p. 84. — Dcncvcrs, au i 3 , p.
�( 27 )
» comme dans l'art. 919 du code civil : en ce
cas, la donation
» renferme à la fois i:n don p a rticu lie r et une institution pour
» une portion de successible.
)> Il ne suffît pas que la donation soit faite a une époque où la
» loi du moment porte qu’on peul être liériLier sans rapporter.
)) Cette disposition statutaire, vaiiable de sa nature, ne donne
)> qu’ une e x p e c ta tiv e , laquelle peut être ravie par des lois ulté)) rieures. »
L a Dame de Mariol n’est point dans cette llypollicse , mais bien
dans celle d’une stipulation foi nielle , émanée de la pleine volonté
de la Dame sa m ère, qui lui a constitué 5 o,ooofr. de dot non sujette d
rapport. O r , dans sa position , la même Cour a rendu un airêt qui
justifie son droit vie cumul , même sous la loi du 17 nivô se , et
dans l ’absence de la loi du j 8 pluviôse.
L e 1 8 pluviôse an 5 , jour même où a été rendue la loi inter
prétative des piécédentes lois fur les successions , le In b u ra l civil
de l ’Isère décida que le donataire par préciput était dispensé ,
comme héritier , du rapp oit
ordonné
par
la loi du 17 nivôse
an 2.
Pourvoi en cassation des frères R iv o ir e , et le 22 messidor an
5 , au 1 apport de M. Aressi , arrêt qui rejette ( 1 ):
» A tten d u
que le préciput de T.ouîs Hivoire ayant été stipulé dans son
» contrat de mariage du 8 a v r il 1 7 9 2 , antérieurement à la loi du 7 mars
» 1793 , était irrévocable de sa nature ;
» Attendu que les art. 8 et 9 de la loi du 17 nivôse an 2 , en o b lig e a n t
» les enfans à rappoiter les donations qui leu r avaient été laites a v t c dis» pense de
rapport ,
dans le cas
ou
ils v o u d ra ie n t
pren dre ] art à la
» succession de l’ascendant dont ils tenaient ces libéralités , contiennent ch
» ce point des
d i s p o s i t i o n s
rétroactives
,
puisqu’elles privent le donataiie d’un
» droit qui l u i était acquis irrévocablement avant
» qui est la
prennfcre qui ait établi de nouvelles
la loi du 7 m ais I79JÎ ,
règles en m a tiè ic
de
» succession ;
» Considérant que ces dispositions rétroactives ont etc nom mément abrogées
» par l'art. 2 de la loi du l 5 pluviôse au
5.
«
(1) S ire y , airêls antérieurs à l ’an 1 0 , p. 110.
�( 28 )
II est donc clair que la Dame de Mariol pouvait en l ’an 4 ,
époque de l’ouverlure de la succession , tout comme en l’an 7 ,
époque du partage , réclamer son préciput , parce que la faculté
du cumul élait pour elle une émanation de la donation , et ne
dérivait pas des lois sur les successions.
L e s Sieurs V e y n y de T lie ix et Brecliet ont encore objecté que
la D am e de Mariol pouvait d’autant mois réclamer son préciput,
que la Dam e sa mère avait épuisé la portion disponible , en donnant
à son fils aîné la lerre de Mon (rodés , en sorte qu’ils voulaient
évidemment embarrasser la cause d'une nouvelle difficulté, en e x i
geant l’estimation préalable des b ie n s, pour connaître la portion
disponible : mais la Dame de Mariol a dans les mains l’état estimatif
de tous les biens de la Dame sa m è re , qui ne permet pas de
douter que la terre de Montrodès et les 5 o,ooo fr. en préciput
11’épuisent pas à beaucoup près la portion disponible.
En effet, le i 5 messidor an 5 , la Dame Dauphin de V ille m o n t ,
obligée de faire ses partages avec la République , à cause de l’ém i
grât ion de son fils aîné , présenta au département du P uy-deDô ine l ’état de 6on actif et de son passif ; d’où il résultait qu’elle
avait 409,947 fr. de biens. C et état est signé d’elle ; chaque meuble
et immeuble est estimé particulièrement en valeur fixe ; 011 y voit
la terre de M ontrodès, donnée au Sieur de V e y n y , son fils a în é,
évaluée 1 ¿>0,000 liv. O r , c o m m e , suivant les anciennes lo is , la
Dam e de Villemont pouvait se donner un héritier ou
un dona
taire universel parmi ses enfans , et que cet héritier ou donataire
aurait eu la moitié de tous les b ie n s , et un cinquième de l'a u tre ,
attendu qu’il y avait cinq enfans ; il est évident que la por
tion disponible
élait d’environ 2c>5,ooo liv. , somme supérieure
u celles dont elle a disposé ; car si 1 on retranche de 4oq.ooo liv.
la terre de Montrodès évaluée i5o,ooo liv. et
et les 00,000
donnée à l’aîné,
Iiv. de dot constituée en préciput
à la Dame de
M a r io l, cela ne fait que 180,000 liv. de dispositions, dans les
quelles encore est comprise la portion successible du fils aîné ,
qui s’en est tenu ¿1 sa donation.
L a D iiub >!o Villemont est décédée peu après ; ainsi sa fortune
11 avait pas oh:i ig6 £\ s* mort , ut 11’avait pas été exagérée dans
son état fourni ù lu nation.
�( 29 )
Celte objection d’ailleurs n ’était pas prcposable dons la l e u d i e
du Sieur de V e y n y de T lie ix , qui
a fail acte
d'héritier de sa
m è r e , cl encore moins dans celle cki Sieur E i e c h e t ,
acquéicur
de la Dame du S auvage, autre h é r it iè r e , qui par cciuéqucnt ont
préféré.la succession à lu légitime. Or il est de principe que le
légitimaire seul peut examiner
si la portion
disponible
a été
épuisée et au-delà , parce qu’il a seul droit au retranchement des
libéralités.
L e Sieur Brecliet soutenait encore
pouvait jamais et dans aucun c a s ,
clans son i n t c i ê t , qu^il lie
être passible du j ai( ment des
trois quaits des 5 o,ooo liv. réclan.ées par la Dam e de Mariol , en
la supposant fondée dans sa demande , parce qu’entre cohéritiers
il n ’y a point de solidarité pour les dettes, chacun devant payer
6a portion personnelle.
lia Dame de Mariol répondait qu’en eiTet l ’aclion personnelle
n ’allait pas plus loin que la portion contributive; q u e , sous ce
r a p p o r t, n ’y ayant que quatre h éritiers,
elle 11e lui demandait
que 7,ñoo liv. pour la portion de la Dame du Sauvage , mais qu’elle
avait le droit de lui demander les 22,600 liv. dues par le Sieur
de V e y n y de T lie ix , la Dame du Sauvage et les frères de R i b e y r e ,
par la force de l’action hypothécaire , comme acquéreur d’un bien
de la succession grevé de l ’hypothèque résultant de son conliat
de mariage de 1771 , inscrit avant même son acquisition ; et à
cet égard , on ne peut raisonnablement lui contester le principe
et l ’application à l’espèce, sans vouloir attaquer les notions élé
mentaires en cette m a tière; car ¡'’hypothèque est indivisible, et
la m a x im e , aut s o lv a t , aut cecial , est incontestable. C e lle dis
cussion doit convaincre la Cour de la légitimité de la
demando
de la Dame de Mariol touchant sa dot de 3 o.,ooo liv. en préciput.
§.
H -
Obligation de io_,ooo liv . ne p e u t être réputée avantage in d ir e c t,
qu a nd son origine est ancienne , sincère et connue.
I-e tribunal dont est appel a rejeté la demande formée par la
Dame de Mariol pour le paiement de l’obligation de i o ;ooo liv.
�(
3°
)
t
que la Dame de V illem ont, sa m è re , lui a consentie (levant Costcs,
notaire le 23 février 1793.
Voici la teneur de celte obligation :
L a Daine D auphin-M ontrodès , veuve de V e y n y -V illc m o n t , a
reconnu devoir à la Dirna fie Mariol la somme de 10,000 liv. , pro
venant , savoir , 8,000 liv. de prêts qu’elle lui a faits en divers lt*ms ,
et 2,000 liv. que la Daine Vinzelles-Monlrodés, mère et grandmère des p a r tie s , avait chargé la
Dam e Daupliin-M onii o d è s ,
sa fille , de payer à la Dame de Alariol , sa petite-fille ; laquelle
somme totale de 10,000 l i v . , la Dame Dauphin-M onlrodès s’oblige
de payer dans d ix ans , à compter de ce j o u r , délai que la Daiuc
de Mariol lui accorde en considération de la réduction que la Dame
sa mère éprouve en ce moment dans ses biens et revenus; et
cependant l ’intérêt
de ladite somme de j 0,000
liv.
compter de ce jo u r , pour être p aye chaque année au
courra , à
lems que
la Dame D aup bin-M ontrodès pourra le fa ir e , sans pouvoir y être
contrainte pendant ledit intervalle ; et au cas de non p aiem en t,
lesdits intérêts s'accu m uleront, pour être payés en même lems que
le principal ; et au moyen de la présente convention , il 11e pourra
y avoir lieu à la prescription de cinq ans , la Dame D auphinMontrodès renonçant pour ce regard au bénéfice îles lois actuelles
et de celles qui pourraient survenir. Au in ojen de la présente
obligation, tout b i l l e t , m andat ou autres effets que la Dame de
V illem ont peut avoir souscrits pour raison de ladite somme , ainsi
que toute obligation et
stipulation testam entaire
de la Dame
V in zslles-M on trod ès, demeureront comme non avenus.
Voyons maintenant par quels motifs le tribunal dont est appel
a cru pouvoir faire perdre a la Dame de Mariol cette créance
aussi légitime qu’autlientique.
« A tten d u que
la D am e V illem o n t est morte en l ’an
4
, sous l’enipire
« île la loi du 17 nivêsc ail 2 , qui 11c permettait pas de laisser aucun
« avantage
en fa veu r de scs succcssibles ;
11 A ttendu que le lems auquel cette obligation a été passée par la m ère
« au profit de sa iillc , fait présumer que cette obligation est un avantage
” in d irec t; mais que cette
présomption su change en certitude, quand on
« voit ta partie de Housscau v e n ir eu l ’a» 7 au partage de la succession
« de sa mfcic avec
scs frères et sœurs , sans réclamer le prélèvem ent du
« montant «le cette obligation }
�« Attendu
« srau
une
( 31
que le Sieur V e y n y
lin de
) .
de T l :c i x oppose à la partie de
îion-rcccvoir
résultant
de
ce
B o u s-
qu’au partage de la
« succession de la mère communc eu l ’ail 7 , la partie de Rousseau s’est
« fait juslicc à ellc-nu'ine , en 110 demandant pas à prélever sa dot , non
« pins que l ’oLligation de 10,000 liv . de la D am e sa m è r e , et a préféré de
« v e n ir au
partage avec scs frères et sœurs
Pour décider
indirect
que l ’obligation dont il
«.
s'agit est un avantage
fait à la Dame de Mariol par sa m è r e , il faudrait une
réunion de circonstances
et de présomptions d’une
telle force ,
qu’il n’y eut pas moyen d’en douter; car pour changer une dette
bien reconnue en un don su p p o sé, il est indispensable de trouver
des raisons palpables qui excluent tous les doutes , sans quoi
décision est purement arbitraire.
la
I c i , si l’on eût voulu examiner toutes les circonstances , loin
clc présumer un pur don , il était manifeste que cette obligation
11’avait rien de suspect. Néanmoins le tribunal s’est arrêté à deux
circonstances , savoir , le tems où l ’obligation a été faite , et le
silence de la Dame de Mariol lors du partage de Pan 7 : d’où il a
pensé que cette obligation n ’était autre chose qu’un avantage indi
rect. Cependant la circonstance de l’époque de l’obligation , loin
de faire présumer la simulation de l'acte , était plulôt une p ré
somption de sa sincérité.
C ’est le 20 février 1790 , que la Dame de Villemont a fait à sa
fille cette reconnaissance; et à ce sujet , on a dit qu’avertie par
l e s journaux d’une loi qui allait paraître bientôt, et qui ne p er
mettrait plus de disposer dans la ligne directe , la Dame de V illem o n t s’était empressée de faire à sa fille un avantage de 10,000 liv.
A ssurém ent, si l’on suppose à la mère l’intention d ’avantager sa
f il le , il faut convenir aussi que rien ne l ’en e m p ê c h a i t p u i s q u e
la loi prohibitive n ’a été rendue que le 7 mars suivant ; que si
la Dame de Villemont a pu donner et qu’elle ne l ’ait pas fait , la
conséquence naturelle est q u ’ elle n ’a pas voulu donner. Mais , a-t on
d i t , c’est bien aussi un véritable don qu’elle a fait à sa fille, si
ce n ’est qu’elle a simulé son
don sous le titre d ’une dette, au
lieu de faire une donation authentique, et cela vraisemblablement
p ar égard pour ses autres enfans. Nous répondrons toujours qu’avec
îles présomptions
aussi hasardées , il n ’y a rien qu’on ne puisse
J
�détruire ; que s’il est dans l ’esprit des lois d’anéantir les actes fraudu
leux , on ne doit point s’exposer par des soupçons équivoques à
renverser injustement la fortune des particuliers, en détruisant
leurs titres de créances à volonté , et
ne pouvant
Dame
fille
justifier q u e, par égard
que rien
ne justifiant ni
pour ses autres enfans, la
de V illem ont eût voulu faire un avantage indirect à sa
il n’y a aucune raison déterminante pour se prononcer contre
la valeur de cette obligation.
À la v é r i t é , les motifs fie cette décision nous font voir que le
tribunal n’avait à cet égard qu’une simple suspicion , mais quelle
s’est changée en c e rtitu d e , en considérant q u e , lors du partage
de l’an 7 , la Dame de Alariol n ’a iéclauié
ni sa dot ,
ni sa
créance.
Nous avons déjà réfuté les motifs pris de son silence louchant
la dot de 3o,ooo l i v . , et comme nous avons alors démontré qu’on
ne pouvait lui opposer ce silence comme une fin de non-recev o i r , ce serait nous répéter que de ramener cette discussion qui
n ’aura point échappé à l’attention de la Cour.
Allons maintenant plus avant , et disons avec confiance que tou
tes les fois qu’il y a preuve évidente et matérielle de la réalité
d’une créance , il n’est pas tolérable de soutenir qu’elle n ’est qu’un
don simulé. O r la Dame de Mariol a produit des pièces justifi. catives de la réalité et de la sincérité de sa créance.
P a r acte reçu L e v e t , n o ta ir e , le 21 novembre 1 7 8 2 , la Dame
Cisterne de V in zelles, veuve Dauphin de Montrodès , sagrand’ mère,
reconnut lui devoir 8,000 liv. pour cause de p r ê l , et lui délégua
à prendre celte somme sur 31. Leroi de Pioullet, conseiller au
parlement de Paris , sur les arrérages d’une rente qu’il deyait à
ladite Dame de Vinzelles.
L e 25 août 1780, M. L ero i de Roullet étant dans sa terre do
Semier , invita la Dam e de ¡Mariol , ainsi que la Dame de Villemont , sa mère
à s y r e n d r e , cl là il acquitta l’obligation de 8,000 1.
que la D itn e de V i n z e l l e s avait faite à sa petite-fille, la Dame de
M a r io l,
qui lui en passa quittance;
mais comme la D am e
de
V ille m o n t , sa m è r e , avait besoin de cette so m m e , la D a m e de
Alariol la lui prêta à l ’ instant munie , en sorte que ce fut bien
�réellement
la. Dame
de Villeniont qui
prît cette
somme des
mains de M. de Houllet ; aussi la Dame de Villemont a fait à sa fi[le le
l o septembre 1 7 8 5 ,
conçue :
sa reconnaissance de cette s o m m e , ainsi
Je reconnais devoir à Madame de M a r io l, ma fille , la somme de
8.000 liv. pour pareille somme qu’elle m ’a prêtée, p roven a n t d'un e
obligation de 8,000 liv. que M ada m e JlJontrodès, ma mère , lu i
a v a it consentie devant
M . L e v c t , notaire , le
21
novem bre
1 7 8 2 , et qui m ’ a été p a y e s p a r 31. L e r o i de Jiou llet ; laquelle
somme je promets lui payer à sa volonté. Fait à 'F lieix , ce
septembre 1780. Signé Dauphin
mille livres.
de Villemont. Bon
io
pour huit
Voilà la cause de l ’obligation que la Dame de Villemont a faite
à sa fille le 25 février 1795 ; et comme cette obligation est de
10.000 f r . , au lieu de 8,000 fr. , la Dame de Villemont a encore
expliqué la cause des deux mille livres d ’excédant , en déclarant
que c’était une charge qui lui avait été imposée par la D am e de
Vinzelles , sa mère. Aussi remarque-t-on , à la lin de l’oblioalion
ces 10,000 li v . , tous billets ou
dont il s’a g it , qu ’au moyen de
effets ( c e qui se rapporte au billet de 1780 )
Villemont peut avoir souscrits pour raison
que la Dame de
d ’icelle , ainsi que
toute obligation et stipulation testam entaire de la Dam e Vinzelles
( ce qui se rapporte à i’obljgation de t 7 82 et au codicille de
Madame de \in ze lle s ) , demeureront comme non avenus.
Des pièces de cette e s p è c e , qui portent avec elles les caraclères
de la sincérité de la créance actuellement réclamée par la Dame
de Mariol , 11e devaient-elles pas détruire toutes les présomptions
que l'obligation
du 20 février
ï
79-* ^
un avantage indirect ?
N e voyait-on pas que le paiement à long terme de celte obligation
avait pour objet son acquittement en n um éraire, comme la Dame
de Villemont l ’avait reçue ? Etait-il possible de dire que la p ré
somption se changeait en certitude,
en considérant
le
silence
que la Dame de Mariol avait gardé lors du partage du 17 pluviôse
an 7 , lorsque , outre toutes les raisons que nous avons données à ce
s u je t, touchant la dot de 00,000 liv., il est encore a noter que
la Dame de Mariol a pris son
inscription sur la succession de
�( 34 >
la
D am e
sa
mère
pour cette o b lig a tio n , le 2G prairial an j
quatre mois après ce partage , preuve bien manifeste qu’elle n’en
tendait pas abandonner ses prélèvemens , comme l ’a pensé le tri
bunal dont est
a p p e l , en supposant gratuitement qu’elle s’était
fait justice à elle-m êm e, en n& les réclamant pas..
Il est donc encore vrai de dire que le Sieur Brecliet est pas
sible du paiement des trois quarts de cette somme et des inté
rêts , tout de m .m e que de la dot , et par les mêmes motifs que
nous avons déjà déduits eu traitant celte partie de la cause.
§.
I I I .
O bligation de 6,000 f r . de la D a m e du S au vage , femme, d'ém igré',
est v a la b le , quoique fa it e sans autorisation ; sim óm e le m ari
avait, été réintégré dans ses droits civ ils avant l ’ obligation ,
la D a m e du S au va ge , ou son m a r i, p ourraien t seu ls arguer
de n u llité Vobligation p a r d éfa u t d ’autorisation.
Sous V E m p ire de la lo i du 11 brum aire an 7 , le vendeur était'
tunjours réputé propriétaire d e l ’ u b jel v e n d u , à l ’ égard des.
tiers , j u s q u ’ à la transcription.
P a r acte du 7 prairial an 1 1 , reçu T a c h é , n o ta ir e , la DameAn ne Françoise V e y n y , se qualifiant épouse séparée, quant aux
b i e n s , de Jean-CJiarles du N o y e r du Sauvage , a reconnu devoir
a la Dame de JMariol , sa s œ u r ,
la somme de G,000 IV. pour
cause de prêt fuit avant la présente obligation en différentes fo is ,
et payable à sa volonté, l’ our sûreté du paiement , elle Im a délé
gué à prendre celle somme sur divers particuliers dénommes, et
notamment elle a uXeoté la portion qui peut lui 1 evenir des biens
de-* s icces^io is des Sieur et D u n e V ille m o n t, ses père et m è r e ,
sil'iés tant duis l'arrondissement, du bureau des hypothèques de
C le rm o n t, que dans celui de lliom , consistant en bâliinens
teric < et vignes.
I<:\ denunde dirigée par. la
Dame de Mariol contre
, p rés,
le Sieur
•Brech 't , en paiement de cotte so m m e , a été iejeleo_, comme lesprece;l(;.it(;.s , par les motifs suivans :
»■Atiunju <juq lu ,Dju(c du Sauviiÿo ,
quoique ililo ftmnic si'j>aicc-,;
�<
5> quant a u x
35
)
biens , d 'a vec son mnri , et par conséquent sous sa
« saucc , n ’a pas t*t(î autorisée pour passer c cllc
» m ari,
puis-
obligation , ni par son
ni par ju stic e , et que ce délaut d’autorisation, d'après l ’art. 217
i) du code c iv il , entraine la nullité de l ’obligation';
» A tten d u que ccllc n u llité , qui peut être relevée par la femme , en ve rtn
)> de l’article
225 ,
peut aussi par une conséquence nécessaire V itre par c eu x
}> que la femme en pareil cas serait tenue de garantir de l ’effet de son obli» galion ;
» A ttendu q ueladite obligation, souscrite deu x ans après la vente faite au S r
« B r o c h e t , n’a pu affecter les biens compris en ladite vente , lorsqu'ils n’appar3) tenaient plus à la Dame, du Sauvage , puisqu’a u x termes de l’art. !l de la loi
» du 11 brumaire an 7 , tonte stipulation volontaire d’hypollièque 11c peut
» comprendre que des biens apparten ais au débiteur lors de la stipulation ;
» que la v ente laite au S ieu r lîrecliet était parfaitement connue de la D am e de
j> M a r i o l , et qu’il n’a pu être dans son intention de faire stipuler un slellior.at
» par sa srrur , de même qu’il 11’a pu c l i c dans l ’intention de la D am e du
« Sauvage de le commettre ;
« A ttendu qu’on 11e trouve dans ccllc obligation aucune affectation spéciale
t> de la portion do la
terre de
T b e i x possédée alors par le S ieu r Hrccliet
» en v e rt u de l’acquisition qu’ il eu avait faite ; que la D am e du Sauvage y a.
» seulement exp rim é l ’affectation générale des biens à elle appartenans dans les
•» arrondissemens de llioin et de C lerm o n l ; que de pareils termes ne peuvent
» se, rapporter en aucuns cas a u x biens qui ne lu i appartenaient plus à c cllc
» époque ;
» A tte n d u , d’ailleurs, q u ’a u x t o m e s du même article 4 de la loi du 11 b run maire an 7 , il aurait fallu, pour stipuler une hypothèque spéciale , indiquer
» la situation des immeubles hypothéqués , en précisant la commune où ils
» sont situés, »
Ces motifs paraissent spécieux ; mais, quand on est pénétré des
principes du régime hypothécaire établi par la joi du 11 b i i m a i i e
im 7 , ou en reconnaît bien vîle toute 1 erreur ; et quant au dé
faut d’autorisation de la D am e du Sauvage pour souscrire l’obli
gation dont s ’a g i t , il suffit d’un peu d attention pour être convaincu
qu’elle n ’en avait nulle besoin.
En effet, lorsqu’elle a vendu ses biens au Sieur Brechet le 00
germinal an 9 , elle n ’a pas dissimulé, et s ’est qualifiée épouse
séparée , quant aux biens , de l’émigré du Sauvage. C e lle qualité
de femme d\Unigré était la seule cliose à examiner pour vérifier
sa cap acité, et c ’est bien aussi à cause de cetlc qualité que le
Sieur JJrcchet a acheté d’elle , sans nulle auloiisalion j au tim s
�( 56 )
d e l ’obligatiorij comme au 1ems d e là venfe, le Sieur du Sauvage était
encore en état de mort civile ; et la Dame de Mariol le croit
d ’autant plus que , malgré toutes ses provocations , les adversaires
n ’ont jamais pu justifier du contraire.
Si donc le Sieur Brechet n’a pas craint d’acheter les biens d’une
femme d ’émigré , sans nulle autorisation, il n ’est pas étonnant que
la Dame de Mariol n’ait pas craint non plus de lui prêter 6,000 f r . ,
et de s^en faire souscrire une obligation avec h y p o th è q u e , sans plus
de précautions.
A u surplus , la Dame du Sauvage pouvait valablement vendre
et hypothéquer en vertu du seul état d ’indépendance dont elle
jouissait pendant la mort civile de son mari.
Ce principe est consacré par la C our suprême.
L e s * floréal an i ? ( i ) , cette C our a décidé, au rapport do
M . Liger V erdigny, et sur les conclusions de M. le procureur-général
M e r l i n , qu’une femme d ’émigré a pu contracter , sans autorisa
tion , dès le moment, que son mari fut inscrit sur la liste des éni’grés ;
en conséquence le pourvoi du Sieur Joubert contre un arrêt do
la Cour d’appol de Caen du îtt nivôse an 1 2 , a été r e je t é , et
il a été tenu de payer à la Dame Sail’rey le prix de la terre de
T ourville , qu’elle avait vendue sans autorisation, ni de son m a ri,
ni de la justice , après l'inscription du Sieur Saflrey sur la liste
des émigrés.
» Attendu que la loi du 38 mars 17<)3 a prononcé la mort c iv ile contre
» le» émigrés , et que reflet de la mort c iv ile du S ieur SulIYry a été de dis*
» soiulre la puissance maritale , et de rendre lu D a m e
SaJJïey
a sa liberté
p n a tu relle, etc. »
Inutile donc do consulter le code civil pour savoir si la Dame
du Sauvage a pu valablement vendre et h ypothéquer sans auto
risation , puisque sa capacité d é r i v a i t de l émigration do so n mari.
AI iis ,
quind
ou aurait
pu
in v o q u er
le code
pour
établir la
nullité de l’obliiptioii , il aurait fallu du moins s’y c o n fo r m e r,
et ne pas étendre à 11:1 a c q u é r e u r la faculté de demander la nullité
fondée sur le
défau t
l ’article 225 , qu 'à
d’autorisation, faculté qui n ’est accordée par
la fem m e , au m ari ou à leurs h éritiers.
(0 Sircy , an i 3 , p.c 3 io.
�Z ii
Car M. le Sénateur M a le v ille , clans son Analyse du C o d e , a eu
l ’attention de remarquer sur ce a r tic le , que les p a r tie s avec le s
quelles la femme a contracté sans autorisation, ni des tiers } ne
peuvent faire valoir cette nullité ;
que si la femme et le mari
veulent exécuter l’acte , les autres ne peuvent s’en dispen ser, sous
prétexte que cet acte est nul. Il ajoute que cette question était
autrefois très-controversée , mais que cet article p embrassé 1 opinion
la plus favorable à la femme. M. P ig e a u , dans son E xp ose M étho
dique du même code , dit q u 1aucun autre que la femme , le mari }
leurs héritiers et successeurs , ne peuvent invoquer la nullité du
défaut d’autorisation, parce que c'est une nullité relative à e u x seuls.
Joignez à tout cela
la déclaration précise de la Dame du Sau
vage , consignée au procès-verbal du bureau N
de paix du 27 nivôse
an 1 2 , qu’elle approuvait les réclamations de la Dame de M ariol,
sa sœur , pour son préciput et son obligation , et qu’ elle n’en
tendait prendre aucune part dans les prétentions que voulait élever
le Sieur Brecliet , et alors s’évanouiraient les deux motifs relatifs
à la nullité de l ’obligation par défaut d’autorisalion , lors-m êm e
que le code Napoléon serait applicable à l ’espèce.
Reste à examiner les autres prétendus vices reprochés à cette
obligation, à supposer que le Sieur Urechet ait le d io il de la
critiq u e r, quand la Dam e du Sauvage l’a approuvée.
Suivant le jugement d o n t es t nppel , l ’o b li g a ti o n s o u s c r it e deux
ans après la vente faite au Sieur B r e c l ie t , n ’a pu affecter le6 biens
compris en sa vente , parce qu’ils n ’appartenaient plus à la Dame
du Sauvage , et qu’aux ternies de l ’art. 4 de la loi du 11 brumaire
an 7 , toute stipulation volontaire d’h yp othèqu e ne peut com piendre
que des biens appartenans au débiteur lors de la stipulation j
que la vente f a i t e au S ie u r V rech et i1lait p arfaitem en t connue de
la I)a m e de M a r io l ; qu’il n’a pu être dans son intention de faiie
stipuler un stellionat par sa soeur, ni dans l’intention de celle-ci
de
le commettre.
D ’abord , c o m m e n t le tribunal
a-t-il su que
la Dam e de Mariol avait une pleine connaissance de cette vente?
il 11e l’a cru (pie parce que le Sieur Biccliet a tiouve de son in lc iê t
de le prétendre.
Celte allégation n ’est d'aucune conséquence, parce que le Sieur
w
�Brecliot n ’avait pas
.
( 3 8 )
transcrit- son contrat avant l’obligation faite
à la D.uno do Mariol par sa soeur. O r le défaut de transcription
renverse tout ce raisonnem ent, p a r l a raison q u e , suivant l’art.
25 do la loi du i l brumaire an 7 , jusqu’à la transcription des
actes translatifs de biens , ces actes ne peuvent être opposés aux
tiers qui auraient contracté avec le vendeur , et qui se seraient
conformés aux dispositions de ladile loi.
L ’sxécution de cet article a toujours été scrupuleusement main
te n u e , et il en est résulté que les tribunaux se sont vus obligés
do donner effet à une seconde vente transcrite sur une première
non transcrite , lors même que le second acquéreur avait acheté
en conniissancs parfaite de la première vente.
On n ’en peut
pas trouver un exemple plus frappant que ce
lu i-ci :
Par acte du 8 floréal an g j Pierre
Girard vend des biens à
Michel G i r a r d , son frère.
L e lendemain , Pierre G irard vend les mêmes biens à Guillaume
G ir a r d , et à François et P i e r r e Mosnier.
Celte seconde vente est transcrite le jour même ; la première
vente n’est transcrite que plusieurs mois après.
Q îestion s’élève sur la préférence des deux ventes devant
lo
tribunal d ’Issoire.
Michel G ira rd , prem ier acquéreur
fait valoir la priorité de
son acte, enregistré le 9 floréal ; subsidiaireinent il offre de prouver
qua les seconds acquéreurs avaient connaissance de son contrat
lorsqu’ils avaient eux-mêmes acheté.
lie
1 t prairial an to , jugement qui
l ’autorise
à faire celte
preuve. •— Fiiiquête qui prouve qu’ un des seconds acquéreurs avait
eu cette connaissance
eu achetant. —
Jugement définitif du
11
therm idor an 10 , qui sur cette preuve , déclare frauduleux et
nul le second contrat do vente.
A p p el , et 1e 5 prairial an n , arrot de la Cour de R io m , qui
dit m il jugé , et valide la s e c o n d e ve n te a u préjudice de la première.
« A tlcm lu ((no 1rs seconds a cq u éreu rsavaient les premiers fait transcrire leur
» couii -ti . (jluî |a 1(); <1n 1 1 brumaire au 7 attache l ¡/'révocabilité de la propriété
» uin-a-via i/; : tiers, ù lu J'omitllUé dil lu transcription ; que dans les Icriiics
�2i f
( 3g )
te absolus de celte loi , il est indiffèrent que les nouveaux, acquéreurs aient
« su ou non, lors de leur vente , qu’ il en ex ista it une pi éccdcn.nient, et que c’ est
« assez q u ’ils aient su que cette première vente n ’a vait pas été soumise à la
« formalité do la transcription «.
Pourvoi en cassation de M ichel Girard , prem ier acquéreur. '
A rrê t du 5 thermidor an i 5 ( i ) , au rapport de M. E rillal-Sa
varin , sur les conclusions de M. L e c o u lo u r , substitut du pi ccnrcurg é n é r a l, qui rejette le pourvoi.
« A tten d u qu'on
ne peu t p a s accuser de
fr a u d e
«■immeuble qu’ i l avait p u savoir déjà vendu à
celui q u i
un outre , tant
achète un
que
cette
« première vente n ’est pas transcrite , et conséqucmmcnt qu’il n ’y a pas
« eu translation
de propriété ; car
<c avantage’ offert par la loi ,
« puter
à lui - même
il
u’y a
pas fraude à profiter d’un
et que c ’est au prem ier acquéreur
s’ il n ’ a pas
usé d ’ une égale
diligence
à s'im -
pour faire
'< transcrire son acte ; q u ’ainsi le jugement attaqué n ’ a pas vio lé Ja l o i , ’
« en donnant la préférence à la vente
« la seconde dans
l’ordre du
transcrite la
p u m ic re ,
quoique
teins
D é j à , le 25 thermidor an 10 ( 2 ) , la même C o u r , au ra p p o it
de M. V e r m e il, et sur les conclusions de M. M a l i n , alois com
missaire, avait rejeté le pourvoi de Signol c c n t i e u n jugement du.
tribunal d ’appel de Ilouen , sur le m o tif qu’il 11’y a que la trans
cription qui transm et à V acquéreur
les droits
que le v e n d e u r
a v a it sur la propriété de Vim m euble y qu’ainsi , l ’acte de vente
faite à Charpentier ayant clé le prem ier t r a n s c iit , la propriété
de la chose vendue lui a par conséquent clé assurée.
D u moment qu ’il est reconnu que la transcription feule Iransniet la piopriété vis-à-vis des tiers , il en icsnlie que jiiKju’à la
transcription , le propriétaire qui a vendu un bien c11 t u .jc u is
réputé propriétaire de ce b i e n , au point que s’il le u v c r .d à un
a n t re , e l (pie celui-ci transcrive avant le prem ier acqu éieur, co
sera le dernier acquéreur
qui deviendra
le
véritable proprié-
t a i i e , e t 11011 le premier : d’où découle une seconde le m é q iu n cc .
forcée , c'est que celui qui peut v e n d re , peut à f o i liât i h y p o
théquer.
(1) D enevers , an i 3 ,
p. 5 Gi. ------
S ir c y , an i 4 , p. Co.
(3) S ir c y , an 11 , p. 3 i .
I
**
�Appliquons la règle à notre e s p è c e , et supposons qu’au lieu de
faire uno obligition à sa sœur , la D atne du Sauvage lui eût vendu la
inêmo propriété que le Sieur Brecliet avait ach etée, n ’est-il pas cer
tain que la Dame de M a r io l, transcrivant la première , serait devenue
la seule et véritable propriétaire ? . . . . Il est donc constant que
si, d ’après la l o i , elle aurait pu revendre valablement, elle a bien
pu au moins h ypothéqu er l’objet vendu ; car qui peut le plus peut le
m o in s, et en toutes choses , il faut être conséquent.
Vainem ent dit-on que l ’article 4 de la loi du 11 brumaire an 7 ,
ne perm et de stipuler l’hypothèque que des biens appartenans au
débiteur lors de la stipulation : car dans l’esprit de cette l o i , c’est le
vendeur qui est toujours propriétaire vis-à-vis les tiers , jusqu’à la
transcription , et lorsqu’ il hypothèque le bien vendu , il n ’h yp othèque réellement q u ’un bien à lui appartenant dans le sens de
cette loi , puisque c ’est de ce même principe qu’une seconde vente
transcrite l’emporte sur la première qui
n ’avait pas encore été
soumise à celte formalité.
Quelques-uns avaient pensé , il est v r a i , que l ’acquéreur qui
transcrivait tardivement n’était passible que des hypothèques créées
avant son acquisition ; mais l ’inconséquence de ce système a été
bientôt relevée , et nous trouvons même dans le recueil de M. S ire y ,
an i 3 , page 161 du s u p p l., une dissertation assez étendue sur ce
sujet.
O u a reproché à l’obligation dont s’a g i t , de ne pas contenir une
hypothèque spéciale, telle que le veut l ’article 4 de la loi du 11 bru
maire an 7 , parce que la Dam e du Sauvage n ’a point indiqué la
commune où sont situés les immeubles h yp o th é q u é s; de 11 avoir
pas même nommé la portion de la terre de T h c ix possédée alors
par le Sieur B r e c h e t , mais de s’être contentée d ’une affectation
générale d e biens à aile a p p a rten a n s dans les arrondissemens de
Riotn et C le r in o n t , termes qui ne peuvent se rapporter en aucun
cas aux biens qui ne lui a p p a r t e n a i e n t plus à cette époque.
Nous avons déjà fait voir que , dans le sens de la loi du 1 1 bru
maire an 7 , tout vendeur est réputé propriétaire du bien vendu,
jusqu’à la transcription de son a cqu éreur, qu’ ainsi l ’hypothêquo
consentie par la Dame du Sauvage en faveur de sa soeur , la Dame do
�( 41 )
M a r io l, sur les Liens à elle appaitenans dans les arrondissemens de
Riom et C le r m o n t, frappait sur les biens vendus au Sieur B ie ch et
qui n ’avait point transcrit.
Cette 'hypothèque était suffisamment exprimée: car, suivant l’art 4
d e là loi du u brumaire an 7 , il faut indiquer la nature et la situation
des immeubles h ypothéqués; mais il n ’est pas dit qu’011 précisera
les communes où les biens so n t situés, encore moins qu’il y aura
nullité , à défaut de les nommer. L a Dame du Sauvage a indiqué
la nature des biens qu’elle hypothéquait ; ce sont des b d lirn en s,
p r é s , terres et vig/ies. Elle s’est contentée de déclarer qu’ils étaient
situés dans les arrondissemens deR iom et C le r m o n t, parce que- tout
ce qu’elle h yp o th é q u ait, provenant de la succession de ses père et
r o e r e , la Dam e de M ariol,
sa sœ u r, en connaissait la situation
aussi bien qu’e lle , puisque chacune d ’elles y avait sa poition.
U n e hypothèque générale s’entend des expressions indéfinies em
p loyées dans les actes faits sous l ’édit de 1 7 7 1 , où l’on déclarait
h yp othéqu er ses biens présens et a v e n ir. M a is, ici , la nature des
biens hypothéqués étant indiquée, et la circonscription des lieux
de la situation des biens étant faite suffisamment à l’égard d ’une
sœur cohéritière , 011 ne peut appeler cela une hyp othèqu e géné
rale ; et comme il n’y en a que de deux espèces, elle ne peut être
considérée que comme spéciale.
A près avoir réfuté tous les motifs adoptés par le trilninal dont
est a p p e l, il nous reste à examiner tiois objections qui furent
proposées par le Sieur B r e c lie t , et qu'il pourra reproduire.
L a première consistait a soutenir que la Dame de Mariol ayant
acheté de sa sœur la portion du domaine de S.t-Genesl-Champan e lle , que la Dame du Sauvage avait hypothéquée à lui Brechet dans
sa vente , la D am e de Mariol était par cela même garante de son
acquisition.
Nous détruisîmes cette objection, en lui rappelant que la Dame
de Mariol , après avoir acheté la portion
de la Dame du Sau
vage dans le domaine de S a in t-G en est-C h a m p an elle, avait revendu
et cette portion et la sienne propre au Sieur Dalmas ; sur lequel
un
ordre s ’étant
ouvert de la part des ciéanciers de la Dniiie
de V ille m o n t, le p rix des deux portions ne put suffire à l’acquit-
�temonf des anciennes créances, et que par jugement du tribunal
civil de C le r m o n t, la radiation de l’inscription du Sieur^ Brechet
fut ordonnée , sans qu’il ait pu s’en p lain dre, parce q u ’elle deve
nait sans eifet sur ce domaine.
La seconde consistait à soutenir q u e , par un traité, reçuCostes ,
n o ta ir e , le 20 mars 1 7 j)5 , le Sieur V ey n y de T h e i x et la Dame
tle jVIariol s'étaient obligés de p ay e r , en l ’acquit de la Dame de
V ille jn o n f , leur m è r e , plusieurs d ettes, du nombre
desquelles
était une rente de 77.5 liv. 6 s. g den. , au principal de 1 5,466
liv. i 5 s. 8 d e n ., due au Sieur Giron , beau-père du Sieur Bre
chet ; que la D a m e du Sauvage
devant supporter son quart de
toutes ces d e tte s, n ’avait fait que remplir le vœu de
ce t ra ité ,
en vendant au Sieur B r e c h e t , pour acquitter sa portion des dettes
de la Dame sa mère ; ce qui devait mettre son acquisition hors
d ’a lle in te , parce que la Dam e du Sauvage ayant surpayé sa p o r
tion , pouvait répéter contre la Dame de Mariol des sommes assez
considéra b lé s, pour éteindre par voie de compensation ses créances
personnelles.
C elte objection est détruite par le traité même dont le Sieur
Brechet argumente , où l’on voit que par un traité antérieur du
20 février 1778 , les reprises de la Dame de Villemout sur la
succession de son défunt mari , avaient été fixées à 160,000 liv. ;
que su r c e tle s o m m e , la Dame de Mariol avait payé seule 78,650
liv .; quVlle s’était encore chargée d ’acquitter 28,060 liv. de capi
taux en contrats de r e n t e , sauf son recours contre ses cohéri
tiers ; qu’a in s i, au lieu de io ,o o o liv. qui formaient sa portion
contributive dans les delles de la succession de son père envejs la
Dam e sa mère , elle avait a v m c é en o u tre , pour le compte de ses
cohéritiers , 68,7*20 liv. q u i , jointes aux 25,000 liv. qu’a produit
la vente de la moitié du domaine de Saint-Genesl Champnnelle,
forment un capilal do 9.3,720 liv ., (1"' ne permet pas de douter
de l'illusion dvs prétendues compensations de la
Dame du Sau
vage , qui , au surplus , a déclaré au bureau de paix ne pouvoir
se dissimuler <[ue la Damer de M i r i o l , sa s œ u r , était sa créancière.
I-.ii troisième objection du Sieur Brechet était de prétendre q u e 3
dans tous les cas, il ne pourrait etie tenu que des deux créances
�de 3 o,oor> liv. et 6,000 liv. , en vertu desquelles la Dam e de Mariol
avait enchéri.
■
Il a été répondu à celle objection, que le créancier Je diverses
créances hypothécaires , qui fait une sur-enchère en vertu de quel
ques unes , n ’est pas p r iv é , quand on vient à l ’ordre, de se faire
colloquer pour toutes ses créances dans le rang de leur h yp o th è
que ; q u ’ainsi, lorsque , comme le Sieur B re ch e t, 011 lui offre ,
p o u r le d ésin téresser, la totalité de ses créances,
on doit. les
acquitter toutes , sans quoi il ne serait pas hors d 'in té r ê t, et il
ne tirerait pas du bénéfice
de la sur-enchère
tout ce q u il en
peut et doit attendre.
Ici
finissent toutes les discussions touchant les motifs adoptés
p ar le jugement dont est a p p e l , et touchant les diverses objections
du Sieur Brechet.
5. I V .
Compte à f a i r e avec le S ieu r F 'ey n y de T h e ix .
L e tribunal a ordonné la radiation des inscriptions prises par
la Dame de Mariol pour sûreté des trois créances que nous venons
de discuter, et il a maintenu toutes les autres inscriptions d e l à
Dame de Mariol sur le Sieur V e y n y
de T h e ix ; sur le
mérite
desquelles inscriptions il serait discuté plus amplement après un
compte qui serait fait entre la Dame do Mariol et le Sieur
V e y n y de T h e i x , devant M.c Cliassaigne , notaire : la Dame de
Mariol a été condamnée aux dépens à l ’égard du Sieur B re ch e t,
le surplus des dépens demeurant réservé.
Cette partie du jugement est relative aux demandes particulières
du Sieur V e y n y de T h e i x en règlement de compte et en main
levée des inscriptions que la Dame de Mariol a prises sur lui
pour diverses autres créances. L a nécessité d Jun compte préalable
n ’était pas équivoque,
puisque le Sieur V e y n y
de T h e ix p ré
tendait avoir payé autant et plus de dettes de la succession que
la Dame do Mariol
contraire j
qui n’aura
pas de peine à lui prouver lç
mais comme elle a été condamnée aux depens envers
le Sieur B r e ch e t, elle
croit avoir assez prouvé qu’au contraire
�c’eçt in Sîe’ir Brechef q\n doit être condamné aurr dépens envers
e lle ; néanmoins, la D am e de Mariol va p ré se n te ra la Cour do
nouvelles réflexions qui
méritent toute son attention.
§. V.
M OYEN
GÉNÉRAL CONTRE
Xîîî çon h cit j¿¿ciici cii/ e étant fo r m e
LE
SIE U R
BRECHET.
sans réservas 711 conciliions
doit être exécuté avec fid é lité .
Pou r
conserver
à la discussion des
toule la clarté possible, et
précédentes propositions
encore pour éviter les jép étitio n s,
nous avons réservé , pour former un paragraphe particulier, un
moyen général, en ce qu’il se reproduit à chaque partie de la
cause. Co moyen est tiré des offres réitérées faites par le Sieur
Brech et à la Dam e de Mariol , de lui payer la totalité de ses
créances dans les vingt-quatre heures , pour éviter les suites do
sou enchère ; offres toujours acceptées par la Dame de M a r io l,
mais sans aucun effet.
Cependant on ne peut disconvenir que quand des offres'ont
élé notifiées et acceptées par un consentement foimel aussi signifié,
le contrat judiciaire 11e soit formé ; et de même que la Dame de
Mariol , après son acceptation , ne pouvait plus suivre son e n c h è r e ,
de
même le
Sieur Brochet ne pouvait se dispenser de payer.
Remarquez la substance des offres du Siem- Brechet du i 4 nivôse
an
1 2 ; elles ont pour but d 'év iter
la Dame de M ariol,
et de la
les suites de l'enchère de
mettre hors de tout intérêt.
Elles ont pour objet de lui payer la totalité de ses créances
contre la D am e du
fr a is .
Sauvage , tant
en p r in c ip a l, intérêts que
Il lui deman le dans les vingt-quatre heures de déclarer le mon
tant de ses créances , afm de la payer de suite.
Il se soumet à la garantir des poursuites des autres ciénnciers
relatives n son en cliè ro , à la charge de la subroger en son lieu
et place.
Il proteste de nullité et de dépens , dommages-iiUéiéts , si eUo
fait aucuuuo poursuites ultérieures. L e Sieur Lhcchel fuit ces olfies
�( 45 )
en grande connaissance de cause. Il avait dans les mains nn reTevé
d ’inscriptiolis , portant à 160,407 liv.
les
cita n te s c:e la J rme
de Mariol contre la Darne du Sauvage e t scs autres eobéi itiers.
Il notifie ses offres sans 'réserves , sans conditions et spontanément.
E u réponse et le même jour , la Dame de Mariol lui fait noti
fier qu’elle accepte scs offres, pour qu’elles no puissent être r é v o
quées à l’avenir. — E lle lui indique pour le moment sa dot de
3 o,ooo liv. et son obligation de la Dam e du Sauvage de G,coo
liv- , avec les intérêts des deux sommes et les frais de l ’ex p ro
priation commencée. — Elle lui annonce qu elle lait cesser l ’e x
propriation.
—
E lle
offre
de le subroger à ses
droits
en la
payant. — Elle proteste de répéter contre lui tous dommagesin té rè ts, eu cas d’inexécution de ses offres.
11
nous paraît q u e ,
dès ce m o m e n t, le contrat judiciaire était
f o r m é , et que le Sieur Brechet ne pouvait se dispenser de payer
la Dame de Mariol , et qu’il était non-recevable à discuter, ni
faire discuter des créances établies par actes a u t h e n t i f i e s , en
appelant à son secours le Sieur V e y n y de T lie ix , par la raison
toute simple que cette condition n ’existait point dans scs offits.
Vainem ent
disait - il
qu’il
n ’avait
entendu payer
que
des
créances légitimes , et que la vérification de celles de la Dame
de Mariol était un préliminaire indispensable.
En principe , l'enchère d ’un créancier ne peut être suspendue
par des oifies conditionnelles, telles que «le discuter préalablement
ses créances , pour ensuite le payer.
C-’est ce qui a été décidé par la Cour suprême lout récemment.
L e 20 avril 1807 ( 1 ) , cette C o u r, au rapport de M. Lasandade,
a rejeté le pourvoi du
Situr D abcm ad contre
un a n et de la
Cour d ’appel de Toulouse du 2.» avril 1806:
» Attendu qu’aux termes de l’article 2 i 85 du code c iv il, lors» que l’acquéreur a fait notifier son c o n t r a t , avec offre d ’acquit» ter sur-le champ les dettes et charges hypothécaires jusqu’à con» currence du prix porté au co n tra t, tout créancier dont le titre
)) est inscrit peut requérir la mise de 1 immeuble aux enchères }
)> eu donnant caution ;
(1) D cn ev crs , S i r c y , au 1807 , p.c
�,< 4 6 ).
» Attendu q u e , dans l ’e s p è c e , le titre de la Dam e G ayral était
» encore inscrit , et que ce titre apparent , quel qu’il fut , lui
» donnait droit do sur-enchérir , d ’autant plus que Dabernad lui
» avait fait signifier son contrat comme créancière.,
avec décla-
ration qu’il n’entendait rien payer au-delà du prix convenu;
» Attendu que les offres postérieures dudit Dabernad de paver la
)) totalité des créances inscrites , sauf la discussion préalable de la
» validité ou invalidité desdites créances, n'offrait aux créanciers
» que la perspective d ’autant de procès , pendant lesquels ledit
)) Dabernad aurait joui de l’immeuble , sans en payer le prix. »
L a Dam e de Mariol est dans une position encore plus avan
tageuse que celle de la- Dame Gayral. Celle-ci avait donné main
levée de son inscription sur l’immeuble vendu dans le contrat même
de v e n t e ,
mais comme
son inscription n ’était pas r a y é e , l’ac
quéreur lui avait notifié son contrat, sur lequel elle fit une enchère.
On voit que cette enchère profitant à tous les autres créanciers,
ce fut en vain que Dabernad offrit de
payer toutes les créances
inscrites , dès qu’il entendait les discuter préalablement.
Appliquons cet arrêt à notre espèce.
L a Dame de Mariol était inscrite pour toutes ses créances , lors
de la transcription du Sieur Brecliet, il lui a notifié son contrat.—
E lle avait le droit d’e n ch é rir, et elle l’a fait.— Il a offert de
la p a y e r , elle y a consenti , et il ne l’a pas fait.— Il a voulu
discuter ses créances et les faire discuter par les cohéritiers de
la D îm e de M ariol, et il n’en avait pas le droit. — Au lieu d’ex é
cuter le contrat judiciaire , il s’en est jo u é , et n ’a réellement pro*
curé à la Dame de Mariol qu’ un procès considérable , pendant
lequel il a joui de l’immeuble , sans en payer le prix , sauf 6,000 fr.
q u ’il dit avoir payés à un créancier indiqué dans son contrat. Il a fait
plus , il a acheté les biens de la Dame du Sauvage 29,000 f r . , et il
les a échangés avec le Sieur L evet, avec un bénéfice d'environ 24,000
fr. , et la D u n e de Mariol entendait les porter à fio,ooo fr.
L a C ou r ne peut donc hésiter à forcer le Sieur Brecliet d ’exé
cuter ses offres, en payant à la Dame de Mariol le montant de toutes
ses
créances en c a p ita u x , intérêts et fr a is , puisqu il a su faire
tourner à son profit le b e n e fi^ de la sur-enchere.
�( 47 )
'
z é s
**■
Que la Cour veuille bien examiner attentivement la p osition res
pective des parties , elle reconnaîtra que la D a m e de M ariol ne
plaide que pour retirer le montant de ses créances sur sa soeur,
la D a me du Sauvage,et ses autres cohéritiers,par la v oie h y pothécaire,
et q u ’en dernière analyse , le Sienr B rechet n e p e u t r i e n p e r d r e ,
mais peut-être manquer de g a g n e r, tandis que !e Sieur B re chet
plaide pour conserver impunément un bénéfice considérable., au pré
judice de la Dame de Mariol qui avait droit à la ch ose avant lui.
Que la C ou r veuille encore bien remarquer qu ' il n ’est pas une de
mande , pas une proposition de la Dam e de Mariol qui ne repose
sur la doctrine de ses propres arrêts, ou de ceux de la Cour suprêm e,
tandis que les prétentions des adversaires n ’ont pour appui que leurs
opinions personnelles , à ce point que dans une cause aussi étendue,
ils n ’ont pu citer la moindre autorité qui puisse donner quelque
poids à leurs moyens. Alors la C our sentira combien la Dame de
Mariol a éprouvé d'amertumes en perdant un procès où sa défense
était puisée toute entière dans les règles du droit les plus certaines :
mais ce qui la console ,
c ’est qu’ell e parle le langage des p rin
cipes à une C our qui doit particulièrement la grande considération
dont elle j o u i t , à sa fidélité et à sa constance
pour
maintenir
la pureté des principes.
V E Y N Y ,
M. e C.
L.
icaud-
RO U SSEAU,
M. e
M
V.e S
¡U U lu r / m ,
G A R ON,
« *« *-» ■
M
a r i o l.
avocat.
avoué.
A
u
' ÿ ‘k~ ~
^
tu . /W » -
Vi/lÀr /ua> la
U tu n fû l^
tWivdt /K lU
■H9 E S 8 B
A
c l e r m o n t
-f
e r r a n d
,
C hez J.VEYSSE T , Imprimeur de la Mairie et du Lycée , rue de la T reille,
A n 1808.
�ÏAA Í A Ç/U A
fô ù ^ z
t
V
utA ' ^
—
^
<*~v
f r u
^
4 6 / .^
*>'
ftí ^ r
u
L
Â
t lr - ^
J L
£ÆtA C ) <í*/
^
^.v^caIîzx ip u ^ /t^
4 ,* ^ ‘ * U r'
/A y * ' lx\oj¿it>t^ ía íí—lÍ^aa*.
tùjkr ¿ y V M ÿ l \ *
A lu iU l^ ¿
-•«-, fit#,
*,<>
¿Vu4¿i«^ i . Ai V^ í*Attoxo(
« ¿ . _____/ *
<Ub
,
Ú\M^Í^K €+
< p * i‘ p
^
f . Ç
fU^ A' ^
A ~ -* ( r ^ /
/a u u tk í
‘ ‘ J * s ** ^
ÎU W V u Ju . ^ | « r i a t ’ ^ ÎM ^ lA * .
'■
•
T
'^
A^y ~Ua.€*aLiA
CAÍt----
.k
i - —i — i n - «Y r / <_
»
~
tJ
y»* p * * , A* ‘ ‘ ¡/p** / ' ' “‘fc\
^7''* 7 <j
Ái,xa cí»
/A
«V
/>
a
ju
y
x t ¡z h
¿ ¿ -
p *
^
¿
í.
il *
'j/ í~
*
*
/
'd
¿r
/'™
V y <**ttA¿u{ ^ Um ÍU*-É*^r ' ^uí fU. ».«M «Jtov^»fc*£*'* •**^*»~-4'
bn^'(
^ ^ o ' v <
<WM»u.^yV^cííl^i
-
^aA " i n
#
^U «. ^
<*£J\+SXi.
cu r
^ 4m « M » U u ^Ifcu |w
t 4r^*,«MT
fa v u & u t
fi^ÜUAj«» ^jovÉl
COMA V M L^
(u« UnJKctp^L< /c*—>
t««0««t ' Ä- /fU v l^ ^ t ( fi 4|u r í /t*mX j A l <(í / i t^UAJ(^tviAA
y
'
<«e«a^
>.
S
tvu>v»i<Ujr cO /«\ «a' i «»»tAjo
«t¡l ' "
>»j
»- o»-"* ^ W* Y
w*>J *<t
‘
/•» ^iiAfcJl»*
/
t\*kj&í' M»y>UL^iM^ PuíXaj^
aík~. <jyM a u ju ^ iJ r t M - (JbjoL*
■
^>!ii *»*«
«
ti¡ ^ tt^ i/îuw » ^
/Í/úA*4>Í^ «♦
^ t u J i K t "ÍU* cjú lu a u ) < /£» ^
Q.-*rJ+ « ií^ v u « ^ « /^ K w iry o
A
/j ^
«Ï«
^*'<4^0'^
^ * - i- c u u in x ' «ukJt *t* ^/o\
a ft-. Op*
ti ft*A
/o_
tí*
y^Y>^iu>«j-
A la Jk w ^ u iv t
*1
fi^u Uiw^TaM
(•
^
^»A.» / o u ^ ,
ett ,'^ t n t ^ t iir ^ i / . . H
/ i .......... r
il.
txjr < ...» « 4 , «/» A
V. (u » A * » f
^ik'céíi ¿4« ^uiftAx»
JT ^
^
t ï iÿK
€'*%f*' / ^
ioCÍ<
Ir-
eúaw M
oL l<. r . (m w Úi J
f tiij!^ > S n Í))tfl< * « « > ..„y------ U > M 4 ^ < > ^ < ¿ > / i ü L u y
^«34 * * * - - tRjL.,
-
[ / , -------------------------------
,
Cu/u^A. CQU4*«4 uii^
»
• - /
m jíajuh ' u
jju .
ÍW K kJ«^« /b.
^(AM>M<J ***
(<L- {rn*¿ÍXí^ a
ft/| ,
/t* « « ¿ t * ’
/^ *
/*
^ y
t
ItÜ ju ^ ^ tdfc **kU*ú^/ oftK 'ü r
v
«u a /
Âèu^A'lna.
U Ju^ r ¿ l y w
¡^
A
¿¿w i
UMICI
A. Mu » t
y
*' *■'«<♦"•
u
; W ^ v \ , /«X
^
m.rft*¿óx
^
r t t f c v C
<{•) ,/74 V » w » i ^ í < ! * «A* 0^y<U)I™ t ¿ I
/¿ ^ tu > U b lv ¡jM
^
y
// £ v ^
¿ « u . ^ e ^ /„ * ~ l l ^
î ^ f ! Ü1' ^
j^
***
Ai fí^ M ^ '/H*jfZX u+ jvJs^ L rhi l*»añdki~ d **^-3
,
�«*■—
', 4 s ' v
cJltOÎA
3 « ^»iy?
ÎU/ ° * V 'M ^*^ V V ÎO £Ua U w w J Îu .V l tJUOMU^
îiC A
.
oÂ*Î
^/fcu\A>
6l
^omaU
J
«
Ai
S V
.
■U
C«Zfc" 44
/\i*xr /^ {^* ^UùA/Ùa^ :
À U tA yvitr ^
coÎjl
«
^
J
b
r ¿ u
Íaj^
,
a /m -
vu^ lx
" f t / ftA*r ' 1
^
«*^vc£«r
¿¿U
'
,
^
pv*
ÍM *^f¿Utt ’
u L 'll t
V,
l
----- H
( t e ¿ L r / v - f- *<—
« .J G ' l
/
¿
f
“ i “ '"
,
/ f “^**-
v‘" r *■ ***"?, “ -v “ ’
’ ’;■' ‘ • w « ¿ u / V / « - . ¿ a À 1? “ ' ? ' a £ J ' ' ^ ' î r * 4 ^ iT
y n tTA k
'6 r>
. . i* < f\
« , « ^ ~ s r . c"í£
« .
— h ../,
-
_/ / ^ ¿ fu y
*1“ ■
»' “ “'
« -h <- v: \ V J » — ^ / ‘ '----- ,
i'W
“V ,
äA
, / ’.
i L ~ ¿ '¿ s f c u * w i - A - c >4 -<i ~
¿¿¿J
'
O S */« — ^
/
A
/„ V
%
/,<i r
L.
0^ 1% J
■- *# -.
^ <**a4#/
t*~<'
fiv*w*A
yf a J
«
”
*•>*'■••>-» »i'0
a M r .^ x t^Jld: w i(u ¿(u *L cAo^~~ U
/üüU^Aúl»»^. <^.*1 Vo>l/ UAAAj
," c a i ^ L .
^
6
/ O o o o f ‘}A,^r-L <i/^jU,tcá, * ^
‘ f*
cAX&uAiA,
V*'??*?-/ €~ * .tS> %u'^ ^ x "d4^ XtAuo^>
■.
___ *-- à .
<k
-M~ï-
(y u > w ü J ^ í a Í/W ^>
¿ t-n .a p x t'c z k r U jjt à i
>
f i *
^
t ^
"
'"
“ /‘
f /h * .
,
tol**^j
îa'c/c^Ji ..Ali* M[íAvi%/ ¿£*a
á
'
IJ*ULâi Mjà~*r{* ^
//{ t e M i u t ^ «■».» /i{ ^
‘'W it « u J to ^ ^ .y i £ jl /JÍCi +j Íx. n\ Im/
I
^CW Uà^f / / ^
u i t j fi«« out^-Jnj^ lu * ' d u iu w u
j
Uirt W a^/u)^» 'c/ Uf6^iu /& iU4t 4i(M«cu¿V4.
*4àJ ^
, ,
»t i C i* ,
U l* j ¿ Á Í a j/ íé t m
t ‘v : i h '
¿V '
' ”
**~ lïx *u & u ^ L t * /
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. De Veyny, Françoise. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Rousseau
Garon
Subject
The topic of the resource
successions
avancement d'hoirie
créances
hypothéques
émigrés
préciput
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour dame Jeanne-Françoise de Veyny, veuve du sieur Sicaud de Mariol, propriétaire, habitant à Clermont, demanderesse et appelante ; Contre sieur Antoine Brechet, ancien chef d'escadron, demeurant en la même ville, et autres, défendeurs et intimés.
Particularités : notation manuscrite : texte complet de l'arrêt de la 1ére section du 25 juillet 1808. Infirme et décide qu'il y a eu contrat judiciaire. Voir sur la 2éme question (préciput), un arrêt 1ére chambre, 10 août 1810, journal des audiences p. 398.
Table Godemel : Contrat judiciaire : y a-t-il contrat judiciaire entre l’acquéreur et le créancier surenchérisseur, lorsque le premier, pour arrêter l’effet de la surenchère et conserver l’immeuble par lui acquis pour le prix porté au contrat, a fait offre au surenchérisseur de le mettre hors de tout intérêt, et de lui payer la totalité de ses créances tant en principal, intérêts que ? , que ces offres ont été formellement acceptées ? l’acquéreur peut-il prétendre ensuite qu’il ne doit payer qu’après discussion préalable des créances avec les débiteurs, lorsqu’il n’a stipulé ni condition, ni délai ? Obligation : 2. une femme a-t-elle pu s’obliger valablement, par acte publié du 7 prairial an 11, sans autorisation, pendant l’émigration de son mari ? son acquéreur a-t-il qualité pour opposer la nullité ? Préciput : 1. par le contrat de mariage de la dame de Mariol, du 9 février 1771, la dame de Villemont, sa mère, lui constitua une dot de 30 000 francs à titre de préciput, stipulée payable seulement après son décès, sans intérêts jusqu’alors ; laquelle constitution n’emportera ni forclusion ni renonciation à l’égard de la future qui ne sera pas obligée de rapporter la dot, s’il n’y a pas de disposition contraire par testament de la constituante. la condition résolutoire ne s’étant pas effectuée, le préciput doit-il avoir effet, lorsque la mère est décédée sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2 ? Surenchère : 1. y a-t-il contrat judiciaire entre l’acquéreur et le créancier surenchérisseur, lorsque le premier, pour arrêter l’effet de la surenchère et conserver l’immeuble par lui acquis pour le prix porté au contrat, a fait offre au surenchérisseur de le mettre hors de tout intérêt, et de lui payer la totalité de ses créances, tant en principal, intérêts, que de frais, et que ces offres ont été formellement acceptées ? l’acquéreur peut-il prétendre ensuite qu’il ne doit payer qu’après discussion préalable des créances avec ses débiteurs, lorsqu’il n’a stipulé ni condition ni délai ? Transcription : 5. le majeur qui a traité avec des mineurs sur des intérêts respectifs et sur un partage, est-il recevable à demander la nullité de l’acte, pour vice de forme résultant de leur propre incapacité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J. Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1771-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
47 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1709
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0504
BCU_Factums_G1707
BCU_Factums_G1708
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53312/BCU_Factums_G1709.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Genès-Champanelle (63345)
Theix (village de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avancement d'hoirie
Créances
émigrés
hypothèques
préciput
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53313/BCU_Factums_G1710.pdf
f105fcaecea604ac10c30c2f4bd1c14b
PDF Text
Text
Z
OBSERVATIONS SOMMAIRES
En réponse au Pamphlet de M. JUGE.
D a n s la discussion plaidée , com m e dans le s mémoires res
pectifs de l'affaire V ény-V illem ont et cocréanciers P it a t , e tc .,
les défenseurs se renferm ant dans la ca u se, et dans l’intérét d e
leurs cliens , en ont développé les moyens avec talent et avec
force. Ils ont repoussé loin d ’eux tout c e qui pouvoit tenir au x
passions : leur dignité perso n n elle, et le respect d u à la c o u r ,
ont dirigé leu r conduite.
'
Me Juge-Solagniat, l’un des créa n ciers, a eu d’autres règles
de co n d u ite; et se u l, en son privé nom , il a fait paroitre contre
les enfans V é n y un pamphlet d’un langage peu m esuré , e t qui
contient des assertions peu réfléchies.
. tPar une habitude de toute ma vie , dont la qualité d’adm inis
trateur des biens de mon fils m 'a uroit fait un d e vo ir, j’inscris
chaque jour sur un grand registre d ’o rd re , tout ce qui a trait
à mes affaires ; je cote les lettres que je re ço is, et je prends
copie de celles que j’écris. C ’est ainsi que je p eu x fournir la
preuve de l’exactitude de la citation de toutes les dém arches
e t de toutes les dates que je vais ra p p e le r, en .répondant à
M . Juge.
1
. L a notification de l’en chère de M. Juge nous fu t faite. le 21
nivôse an 1 1 .
P e u après cette notification, je m e rendis à C le rmont pour
faire proposer un arrangem ent à M. Juge.
C e t a rran gem en t, et c ’est co n v e n u , d evoit term iner tou tes
affaires avec les créanciers ; donc l'arrangem ent avec M. .Juge
devoit coïncider a vec ceu x que je proposois en .mêm e t e m ps à
la maison V ille m o n t, au x cohéritiers P ita t, e tc ., e t étoit subor-.
A
OCa
�C
2)
donné à leur acceptation ; ils tendoient à satisfaire M. Juge ayee
20000 f r . , les cohéritiers P itat avec 40000 fr. ; e t , pour y par
venir , nous aurions reçu des héritiers V ény-V illem on t les qua
ra n te-q u a tre septerées qu’ils ont distraites de Jayet. Par ce
m o y e n , et par nos sa c rific e s, nous aurions éteint toutes les
dettes de M. de Y é n y .
Il est évident que tout devoit m archer de fro n t, les traités être
faits sim ultaném ent ; que nul ne pouvoit être terminé isolément.
Mais les cohéritiers Pitat n’acceptaien t point ; M. Juge exigeoit 28000 fr. ; m adam e de M ariol auroit consenti a rendre les
quatorze septerées de son lot sur les quarante-quatre : mais elle
fu t la seule qui accepta.
Cependant depuis cette époque jusqu’au 24 floréal, que je tom
bai dangereusem ent m alade , je iis h u it voyages à C le rm o n t,
et plusieurs à G an n at, ayant l’ unique et constant objet de faire
agréer ces traités ; et je le désirois trop ardem m ent pour ne pas
en conserver l’espérance.
Pendant c e temps nous acquîm es deux créan ces postérieures
aux nôtres.
Nous distribuâm es vers la fin de germ inal , aux premiers
créan ciers, une instruction où nous établissions nos droits, et dé
duisions les m oyens dont nous ferions usage devant les tribu
naux.
P o u r term iner avec M , Juge d’ une m anière qui sembloit
devoir lui être plus convenable , nous offrîm es de lu i céder la
terre de M ontrodès, à la charge d’un modique retour de 20000 fr.
L e 19 ventôse ( 1 0 m a r s ), au retour d’ un voyage encore
inutile à C le rm o n t, j’écrivis à madame de M ariol ;
« . . • • Venons aux propositions que j ai faites, et dont j’ai
« eu l’honneur de vous entretenir, ma chère tante : les Pitat
«c auroient 40000 fr. et M. Juge 20000 1r. Par cet arrangem ent,
« et au m oyen de la ratification de la vente de S a in t-G en est, de
« la rentrée des terres de J a y e t, et des sacrifices que mon beau« frère et moi sommes décidés à faire , je m e ferois fort d’étein« dre toutes les dettes de M. de Y é n y .........Si ces mesures pou-
�C3 )
« voient avoir lieu , M. de V é n y renonceroit h tout recours en
« partage, et vous ne seriez plus que trois pour cet o b j e t ......... »
Je pouvois m ’exprim er ainsi, ayant alors la procuration de
M . de V én y.
L e m êm e jour j'écrivis à un ami de M. J u g e , pour lu i faire
part de l'entrevue que je venois d’avoir avec un autre ami de
M. Juge. Je leur avois parlé avec u n e grande confiance, et tous
les deux m ’ont tém oigné dans cette affaire un véritable in térêt:
je les prie d’en agréer mes sincères rem erchnens et ma reconnoissance. Je disois au prem ier :
« ...............J’écris à madame de M a rio l, je lu i renouvelle mes
cc propositions ; j’écris aussi à M. B ergier, en le priant de s’oc« cu p er de l’exposition de notre a ffa ir e , que je vois ayec dou-*
« leur aller droit aux tribunaux : mais le temps , l’état des
cc choses, celu i de ma santé, tout enfin me presse de prendre
cc un parti qui conduise à une fin.............. »
L e m êm e jour j’écrivis à M . Bergier que c e t ami de M. J u g e ,
interm édiaire b ien v eilla n t, sortoit d’avoir une co n féren ce a vec
son avoué , et qu’il en résultoit, mais sans que cette ouvertui^
fû t obligatoire ‘ pour M. J u g e , qu’on ne pouvoit nous tenir
com pte que de 12000 francs au lieu de 20000 francs , en pre
nant Montrodès. J’ajoutois :
c c ......................La proposition n'est point admissible sans le
cc secours ou la rentrée des quarante-quatre septerées ; d ’a ille u rs,
cc Montrodès est porté trop bas...................... »
A cette époque, M. J u g e , qui sans doute se soucioit peu de
M o n tro d ès, réduisit ses prétentions de 28000 fr. à 24000 fr.
L e 4 ve n tô se , l’ un des cohéritiers P itat me répondit :
ce P ar votre lettre du 11 pluviôse d ern ier, vous m ’annonciez
« que nous ne pouvions pas nous réunir à Clerm ont qu’au préacc lable madame de Mariol n’eût vu son fr è r e , et conféré a ye c
cc
l u i ...................... »
L e 27 germinal an n , j’écrivis à M. Balthazard de V é n y -V ille -
mont :
« Je joins i c i , m o n sie u r, une instruction destinée particuliè-
�( 4 )
»< rem ent pour M. Juge , auprès duquel j’ai tenté jusqu’i c i , et
«
ii
«
«
«
assez in utilem en t, des voies d’accom m odem ent. Sachant quels
sont à peu près les m oyens d’attaque des créanciers de M. de
V én y contre nous, nous avons pensé qu’il étoit loyal de notre
part d’exposer à leurs ye u x ceu x de notre d é fe n se , et les
droits que nous ferons valoir.
« Si la discussion s’en gage, je ne doute pas du su c c è s; mais
« c e seroit contre notre gré , et nous préférons de faite de grands
« sacrifices.
cc V ous v e rre z , m onsieur, par la lectu re de nos m oyens de
f( défense et d’attaqu e, si nous sortons victorieux de cette lu tte ,
« com m e je l'espère , que le sort des créanciers de M. de V é n y
« sera désespérant. E ncore une fo is, nous voulons l’éviter: mais
cc les enfans de votre frère-ne peuvent pas seuls faire tous les
« sacrifices ; et s’ils n ’ont rien à espérer sur V illem o n t, leur seul
« chem in est celu i des .ti’jbun aux........................ Coupons court à
« tant et à d e 's i’longs procès : je terminerois to u t, si j’ayois les
te terres que je /vous ai dem andées............................... »
V o ilà un exposé v r a i, et les p ièces qui le prouvent. Q n y voit
Tnn bonne foi , m on extrêm e désir d’opérer un rapprochement
entre nous. O n y voit aussi que toutes les propositions étoient
subordonnées les unes aux autres; que nul traité ne pouvoit être
term iné isolém ent aveciu n créan cier seul.
■'La maladie grave.dont je fus attaqué le 24 floréal fut longue;
je la dus en grande partie au x courses répétées que nécessitoit
-cette a ffa ire , et elle m e conduisit aux eau x de Saint-Albans.
L e 3o brum aire an 12 ,. après mon retour des e a u x , M. Bergier
m e montra une lettre xle.M . J u g e , q u i, en parlant de nos dis
cussions , disoit que nous avions m auvaise grâce à m archander
l'h o n n eu r de notre beau*père. Ces expressions me parurent au
•moins in con ven an tes, et me firent rompre les voies de co n ci
liation.
lk cette é p o q u e , M. Juge persistoit à exiger les 24000 fr. qu’il
avoit demandés.
'L e >a6 frim aire , je fis partir pour Paris la notification de l’en
chère de M. Juge.
�m
zit
A raison de quelques re ta rd s, elle ne p ut être notifiée queïe 12 nivùs
L e 6 de ce m êm e mois de n ivôse, je reçus de mon b e a u -frè re
Ignace de Sam pigny , qui avoit vu à Clerm ont M. Bergier , la
lettre ci-jointe :
« N ous allons d o n c , m on clier Vandègre , term iner une affairé
« qui nous auroit occasionné beaucoup de dépense et de désacc grém ent. La proposition de M. Juge est acceptable ; il retire
« son enchère : les autres créanciers ne p euven t plus en fa ire ;
cc et il demande 30000 fran cs, dont un tiers dans quelques m ois,
«c et pour le reste nous prendrions du tem p s, etc.
C ’est la prem ière fois que j’entendois dire que M. Juge se fixoit
à 20000 fra n c s , et q u e , sous c e rapport, ma proposition étoit
acceptée.
J ’avois conservé le d é s ir , le besoin cfe renouer un accom m o
dem ent dans cette affaire : j ’en sentis renaître l’espoir.
J ’écrivis sans perte de te m p s,à P aris, pour suspendre, s’il étoie
p o ssib le, la notification de l’enchère de M. Juge.
C e fut en vain *, M. de V é n y se trouvoit m a la d e , et à quarante
lieues de Paris.
L e 24 nivôse , je reçus de Paris l’acte de notification de l ’en
chère.
D ès-lors , et c e nonobstant, je .tentai bien des fois de faire
réussir un accom m odem ent; je maintenois les m êm es erremerts
proposés. Mais l’enchère étant p u b liq u e , et les créanciers pou
vant s’en saisir, je demandai que M. J u g e , qui avoit tant d ’in
fluence sur e u x , me garantit qu’ils ne reprendroient pas son
enchère. Je demandai aussi qu’il me garantit la validité de son
inscription h ypoth écaire, dont j avois pressenti la nullité dans
l’instruction du 23 germ inal, mise pendant plus de quinze jours
sous les y e u x de M. Juge. Un de ses amis avec qui je m ’en e x
pliquai , m ’assura qu’il n ’y accéderoit point.
Mes dém arches auprès des créanciers ne ralentissoient pas
celles auprès des héritiers Vény* V illem ont. Je trouvai m adam e
de M ariol bien d isposée; mais elle s e u l e . . . . . . . . . . e t .c ’étoit
insuffisant.
�V
( 6 )
V ers ce tem ps, on m ’offrit 40000 fr. de M ontrodès.
L e 12 février 1804, j’écrivis à m adam e de Mario! :
« ...................D ans une de vos dernières lettres vous m ’ engagiez
cc à vous faire part de nos démarches. F orcé d’en faire de décicc siv e s , je vais vous soum ettre les principales.
« N ous avons toujours attendu que M. Juge fit ou accep tât
cc des propositions convenables ; et nous devions d’autant plus
cc espérer de condescendance de sa p a r t, q u ’il a touché sur sa
cc créance 12000 ou 14000 francs , et peut-être plus. Il parolt
cependant que M. Juge accepteroit m aintenant les 20000 fr.
cc que j’avois proposés conditionnellem ent; c ’est-â-dire , autant
cc que faisant un arrangem ent avec MM. Pitat , je retrouverois
« sur les cohéritiers de M. de V é n y , ou les terres du marais ,
« venant de J a y e t , ou leur valeur ; car c ’est a in si, et non autrecc
« m e n t, que j’ai fait des propositions; et je vous prie de relire
cc
la lettre que j’eus l’honneur de vous écrire à ce sujet le 10
cc
mars dernier. . . . . . . . . .
cc D ans l’état actu el des c h o s e s , nous ne pouvons faire d’arrangem ent avec ces deux premiers créa n ciers, que dans le
cas e x p r è s où nous trouverions des secours dans Villem ont.
A lors M. Juge prendroit Montrodès , et rendroit 20000 francs
qui passeroient aux héritiers P itat ; et au m oyen de ce que
cc
cc
cc
cc
cc les cohéritiers de M . de V é n y nous fourniroîent, nous ferions
« le r e s t e , et m êm e éteindrions toutes ses dettes..................... »
Je m ultipliai encore pendant quelque tem ps mes tentatives
auprès des héritiers V ille m o n t, mais sans presser la médiation
auprès de M. J u g e , et autres créanciers , tout devant être mené
de front et se term iner ensemble.
C ’est alors que je reçus de Paris , le 17 m ars, à mon retour
d'un voyage à C le rm o n t, u n e lettre de M. de V én y-V illem o n t, en
date du 9 , par laquelle il me réitéroit de ne point faire , pour
traiter avec sa fam ille , usage de la procuration qu’il m ’avoit
donnée.
V o y a n t que mes dém arches et_ mes efforts pour am ener un
acco rd si désirable étoient en pure p erte, et ne m’obtenoient en
�z l s
C7 )
retour , au lieu de sentimens a ffe c tu e u x , que de nouveaux em
barras et des dehors acerbes de plusieurs c ô té s , j’abandonnai
une tâche si p én ib le, et je partis pour ma m ontagne. Mais v o u
lant faire cesser l’incertitude qui m e tourm entoit depuis trop
lo n g-tem ps, je n’en revins qu’avec l’autorisation du conseil de
fa m ille; et d è s -lo r s , et à mon prem ier voyage à Clerm ont,.
j’écrivis à M. Juge la lettre du 24 prairial , dont il parle com m e
lui étant d’ un grand avantage. — Les hommes sans passion n ’y
verront que mon désir de parvenir à un a cco m m o d em en t, et
mon v if regret d’étre forcé d’y renoncer.
En repassant à Riom , j’obtins l’ homologation de l’autorisation^
O n trouvera m a position pénible et douloureuse , quand on
réfléch ira qu’adm inistrateur temporaire des biens d’un orphelin ,
et pour em pêcher qu’il n’en fût totalem ent d ép o u illé, j’avois à
en retirer les déhris du ch aos de la succession V ille m o n t, où r
d ’une part, les droits de M. de V é n y , de l’a u tre , beaucoup de
prétentions sur les biens qui lui ont été d o n n és, présentent une
confusion éton n an te, et qui est le produit de quarante ans écoulés
sans que nul règlem ent stable ait pu être fait jusqu’ic i entre lea
cohéritiers seulem ent t il faut joindre à ces causes de boulever
sement et de désordre les effets- de la révolution.
V oilà les circonstances difficiles où n o u sétio n s p la cés, et la
conduite que nous avons tenue- C ’est d’elle que M. Juge a dit •.
Ces actes sc com binaient sous le v o ile m êm e des négociations.
M. Juge-Solagn iat y ajoute son éloge personnel, célu i de sa
fam ille, et essaye des inductions injurieuses contre nous. Com m e
elles tom bent d’elles-mémes , et que pour des ye u x clairvoyans
ce rapprochem ent est loin de nous n u ire, je m e contenterai de
faire observer à M. Juge que ma co n d u ite, nettem ent exposée
dans ce t é c r it, a pu d’autant moins varier dans cette circons
ta n c e , que je n’ai jamais eu qu’un régu lateu r, le dictam en in
térieur d’une vie consacrée pendant vingt-quatre ans au servicede mon p a ys, vouée ensuite trop peu de temps aux douces af
fections d ’une union h eu reu se, et depuis n e u f ans em ployée
uniquem ent dans ma solitude au x so in s, au x sollicitudes pater-
�)
(8
n elles; m ais, je dois le d ire , entourée dans ces derniers temps
de nombreuses tracasseries. C ’est dans une juste confiance , que
seulem ent tuteur et adm inistrateur des biens de mon e n fa n t,
j ’ai proposé des sacrifices pénibles pour ses in té rê ts, et hors de
m on p o u v o ir, suivant les lois c iv ile s , mais q u ’une loi plus an
c ie n n e , et souveraine pour m on fils, l’honn eur, lui auroit fait
•consacrer un jour. C ’est ce que j ’apprends à M. Juge ; et je lui
rappellerai que p è re , j ’ai le devoir de préserver, de prém unir
m on fils contre les pro cès, les affaires, les gens à affaires, pour
éviter à son inexpérience les catastrophes d ’une jeunesse trop
confiante.
N o u s avons répondu au pam phlet de M. Juge de la seule m a
nière digne de nous, en opposant des dates certaines à ses rapprochem ens in e x a c ts , en détruisant par la vérité ses allégations
hasardées. Il n’est pas présum able qu’il s’en trouve offensé; il
n e le sera pas d u ton de c e t écrit : nous ne saurions ni im iter
c e lu i du sien , ni nous en plaindre il nous est trop étranger.
M ais la voix publique lu i révélera qu’il auroit été convenable
qu’il se fût abstenu de parler procès après un défenseur aussi
justem ent considéré qu e le sien. Les occupations habituelles
d e M. J u ge-S o la g n iat l'ayant tenu pe ndant trop lo n g - temps
éloigné des études d u ju riscon sulte, la m êm e observation s’ap
plique à c e q u ’il dit des p ro céd é s, quand il s’adresse à M . de
S am pigny et à m oi.
- Il est démontré par les faits rétab lis, que nous avon s, pour
parvenir à un arrangem ens, fait plus qu’il ne nous étoit perm is
par les lois, et tout c e qu'il nous a été possible d ’entreprendre
da n s n o tre p o sitio n .
Ignace-Hyacinte SAMPIGNY. 'G F. MALET-VANDÈGRE.
A R IO M
t
1
fi
r, n ) i > w i )
- - *
'
'*
de l'im prim erie de L a n d r io t , seul im prim eur de la
C our d'appel. — M ai 1807.
--------
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Juge. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Sampigny
Malet-Vandègre
Subject
The topic of the resource
adjudications
créances
ventes
enchères
nullité
affichage
Description
An account of the resource
Titre complet : Observations sommaires en réponse au Pamphlet de M. Juge.
Table Godemel : Revendication : 1. lorsque dans le cours d’une procédure en expropriation, une demande en revendication a été formée, si la saisie est annulée pour vices de forme, il n’y a pas lieu à statuer sur la revendication demandée. Enchère : 4. le créancier qui, après enchère d’un autre créancier, a poursuivi la revente des objets compris au contrat de vente, est-il, par cela même, non recevable à demander la nullité de cette enchère, surtout, si la majorité des créanciers inscrits y a adhéré ; y a-t-il, dès lors, contrat judiciaire ? 5. dans le cas de revente, sur enchère d’un créancier inscrit, y a-t-il nullité dans la procédure, lorsque l’affiche n’a pas été posée au domicile du débiteur ; lorsqu’elle n’a pas été posée sur les bâtiments d’exploitation du domaine soumis à l’enchère ; lorsque l’étendue superficielle de ces bâtiments d’exploitation n’a pas été spécifiée dans l’affiche ; enfin, lorsque l’affiche énonce vaguement une moitié de domaine, pour déterminer si cette moitié refermera, ou non, tout ou partie des bâtiments, ou seulement des héritages exploitables ? Contrat de mariage : 3. le contractant mariage, en état de minorité, a-t-il pu, sous l’empire de la coutume d’Auvergne, disposer valablement, à titre de donation entre vifs, de la moitié de ses biens, au profit de l’un des enfants à naître du mariage non désigné dans l’acte ? Si la donation s’était ouverte par la mort civile, résultant de l’émigration, du constituant, son amnistie n’a-t-elle pas suspendu ou annulé la saisine ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1803-1807
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1710
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1711
BCU_Factums_G1712
BCU_Factums_G1713
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53313/BCU_Factums_G1710.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Clermont-Ferrand (63113)
Jayet (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
adjudications
affichage
Créances
enchères
nullité
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53314/BCU_Factums_G1711.pdf
a0f8e8560bde3158fbb54f50786c92c4
PDF Text
Text
CONCLUSIONS MOTIVÉES
POUR
Dame
A n n e - F rançoise
MARIOLES ; sieur
V É N Y , veuve DE
G a sp a r d - M elchior-
V E N Y , et sieur
M ILANGES intimés;
B althazard
b le
C la u d e -A m a -
CONTRE
Sieur G
GRE
il b e r t
-F r
a n ç o is
M A L E T -V A N D E
tuteur légitime de son enfant d’avec la
défunte dame V é n y ,
et les sieur et dame
S A M P I G N Y , appelans.
L
intimés concluent à ce qu’il plaise à la cour;
En ce qui touche la demande formée judiciairement,
seulement par les appelans, en nullité de l’inscription
es
�.r
...
c o
et de la réquisition de revente par lu dame veuve Juge ?
faute de mention de l’époque de l’exigibilité de la créance
de la dame Juge;
Attendu que la réquisition d’enchère faite par la dame
Juge est commune à tous les créanciers inscrits, si bien
que suivant l’article 2190 du Gode civ il, la dame veuve
Juge ne pou voit m êm e, en payant le montant de sa sou
mission , em p ê c h e r T a d ju d ic a tio n p u b liq u e , s i ce rûest
d u co n sen te m en t e x p rè s de to u s 1es a u tre s c r é a n c ie rs
h y p o th é c a ir e s , et qu’il en étoit ainsi sous la loi du 11
brumaire an sep t, comme il a été jugé par arrêt de la
cour de cassation, du 22 prairial an 1 3 ;
.. Attendu que la notification du contrat et de la trans
cription à tous les créanciers inscrits a pour objet la fixa
tion du prix du contrat de vente \
Attendu que les appelans, en provoquant sur la réqui
sition de la dame veuve Juge , la revente sur enchère de
la terre Jayet, tant contre la dame veuve J u g e , que
contre les autres créanciers inscrits, ont par là provoqué
la formation d’un nouveau contrat en justice, et qu’en
suite ils n’ont pas pu revenir en arrière ;
Attendu que ladite provocation a commencé contre
les créanciers inscrits, par l’exploit du 10 messidor an 12 ,
contenant, contre lesdits créanciers, notification des af
fiches, et assignation au tribunal civil de Riom ;
Attendu qu’à cette époque le titre 18 du Code civil
étoit obligatoire dans toute lu France, puisqu’il avoitété
promulgué par le gouvernement le 8 germinal précédent;
Attendu que dès l’instant de la publication de ladite
�lo i, le bénéfice de ses dispositions a été acquis aux
intimés ;
Que l’article 21 go du Code civil est devenu applicable
à la cause actuelle ;
E t que la réquisition de la dame veuve J u g e , rendue
publique par les poursuites en revente faites par les appelan s, est devenue de plus fort commune à tous les créan
ciers inscrits, au point qu e, suivant l’article 2190 du
Gode c iv il, la dame veuve Juge étoit liée irrévocable
ment envers lesdits créanciers ;
Attendu que les inscriptions des intimés sont parfai
tement régulières ;
Attendu que les appelans, en notifiant aux créanciers
inscrits, i° . les contrats dont il s’agit, ainsi que leurs
transcriptions, le 24 frimaire an 1 1 ; 20. les affiches, le
10 messidor an 1 2 , ont fait donner aux intimés copie
d’une inscription faite au nom de la dame veuve Ju ge,
le 13 floréal an 7 , portant : « P o u r sûreté d'une créance
« de la somme de quarante-huit mille quatre-vingts
«.¿francs; sa voir, celle de trcnie-un mille cin q cents
« fran cs principal d?obligation, et le surplus pour in~
a téréts échus ; »
Q u e les intimés, créanciers inscrits appelés en justice
par les appelans, pour voir procéder à la revente requise,
n’ont dû voir que ce qui leur a été signifié de la part
des appelans, et agir en conséquence ;
Que dans ladite copie d’inscription ils ont lu que ladite
inscription a été faite pour 3 i 5oo francs en principal,
et pour i 658o francs intérêts;
Que le capital et les intérêts étant liés par la conjoncA 2
�tion et, le mot échus au p lu riel, se sapportoit aux d eu xr
et qu’ainsi l’exigibilité étoit suffisamment exprim ée;
Qu’en cet état l’inscription et la réquisition de la dame
veuve Juge ont semblé régulières aux intimés ÿ
Qu’enfin ,. dans le cas où cette copie qui tient aux inti
més lieu d’original, contiendroit quelque erreur, elle procéderoit du fait des appelans, et ceu x-ci auroient tou
jours à se reprocher de les avoir appelés dans une af
faire dont la base se trouveroit erronée ;
Attendu que par l’avis de parens, du 9 prairial an 1 2 ,
le sieur V andègre, comme tuteur de son enfant, s’est
fait autoriser à poursuivre judiciairement deux choses,
i° . la revendication de la moitié des biens immeubles
du sieur V én y; 2°. la vente de l’autre moitié ; le tout
par suite de la réquisition de la dame veuve Juge ;
Que le conseil de famille ne l’a pas autorisé à pro
poser des moyens de forme , mais seulement à suivre le
fond de l’affaire -y
Qu’au moyen de cette autorisation homologuée en
justice, et de laquelle il n’y a point d’appel, le sieur
V andègre, tuteur, a p u , en se conformant à l’avia de pa
rens, agir tout comme l’auroit pu le mineur devenu
jna jeur ;
Que cette autorisation doit avoir autant d’effet que celle
voulue par l’art.
du Code civil pour les partages avec
les mineurs, laquelle les rend définitifs (d ’où il suit que
le sieur Vandègre, en se c o n f o r m a n t ;\ l’avis du conseil de
fam ille, du 9 prairial an 12, a pu couvrir tous moyens de
nullité et opérer toutes fins de non-recevoir contre iceux);
Attendu que l’article 5 du titre 5 de l’ordonnanw) de
�(5)
1667, et la jurisprudence constante de tous les tribunaux ,
n’ont, sur cette fin de non-recevoir, jamais admis aucune
distinction entre les majeurs et les mineurs, et que le prin
cipe leur a été toujours également appliqué;
Attendu que s i , en principe , le ministère public
est établi pour surveiller l’intérêt des mineurs, et sup
pléer à leurs moyens de défenses, en cas de négligence
de la part des tuteurs, c’est uniquement pour empêcher
qu’ils ne soient trompés, et non jamais pour leur faciliter
les moyens de tromper (dernier cas qui arriveroit, si le
système des appelans étoit accueilli, puisque les créan
ciers légitimes du sieur V é n y , débiteur, seroient privés
du bénéfice de la soumission faite par la réquisition de
la dame veuve Juge ) ;
Attendu que les sieur et dame Sampigny n’ont pas
pour eux l’exception de minorité ;
Attendu le principe nomina ipso ju re dividuntur;
Que l’action en nullité contre l’inscription de la dame
Ju ge, n’est point indivisible de sa nature, puisque l’effet
de la vente de 1792 est partageable, et que ladite vente
pourroit exister respectivement au mineur V an d ègre,
pour sa part, et être anéantie pour celle de la dame
Sampigny ;
A tten d u , en fa it, que les appelans ont connu l’ins
cription de la dame veuve J u g e , puisqu’ils l’ont fait
signifier à tous les créanciers inscrits, en leur notifiant
leur contrat et sa transcription ;
Attendu que la nullité opposée à ladite inscription ne
sa roi t jamais qu’un vice de forme qui a pu être couvert
par la défense au fond ;
A 3
�( 6)
Attendu que les appelans ont couvert ledit v ice , en
concluant au fond par leur exploit d’appel ;
Attendu les motifs exprimés à cet égard dans les con
clusions signifiées cejourd’hui par le sieur Juge à l’avoué
des appelans.
En ce qui touche le moyen des appelans, tiré du fait
qu’en cause principale les intimés ont proposé des moyens
à la forme et au fond ;
Attendu que les appelans procèdent en des qualités
difféi-entes ;
Que le sieur Vandègre et la dame Sampigny, comme
héritiers de la défunte dame de V é n y , figurent comme
acquéreurs de 1792, et que c’est en cette qualité qu’ils
poursuivent la revente sur enchère;
Que le sieur Vandègre se dit seul donataire, en vertu
de la donation de 1773;
Que ces deux qualités sont totalement distinctes et
séparées •,
Que contre le sieur Vandègre et la dame Sampigny,
comme acquéreurs de 1792 , les intimés ont pu et dû
proposer des moyens de nullité, parce qu’il y en avoit;
Mais que contre la demande en revendication , ils
n’ont pu proposer que des moyens au fo n d , pai’ce que
la procédure est conforme à la loi du 11 brumaire an 7.
En ce qui touche la forme de la procédure des ap
pelans;
P ar les motifs exprimés à cet égard au jugement dont
est appel.
'
En ce qui touche le fond ;
�( 7 )
&t\
. Par les motifs exprimés au jugement dont est appel f
et sans néanmoins s’arrêter à ceux desquels on pourroit
induire que la disposition de 1773 est maintenue par
ledit jugement, et iceux réform ant;
Attendu que le contrat de mariage du 12 décembre
17 7 3 , contient pour disposition principale une substitu
tion graduelle et fïdéicommissaire;
Que ladite disposition commence et finit par les termes
consacrés auxdites substitutions ;
Que la donation y contenue n’est que comme encas
trée dans la substitution;
Que la substitution est la disposition principale dans
les vues du disposant;
Q ue, comme le dit Sallé, sur l’art. 11 du titre I er. de
l’ordonnance de 174 7, au moins la s u b s titu tio n é ta n t
la co n d itio n SINE QUA NON, so u s laqu elle la d o n a tio n
e st f a i t e , il n e p e u t , d a n s cette h y p o th è s e , y a v o ir de
d o n a tio n sa n s s u b s titu tio n , c o m m e ï l n e p e u t y a v o ir
de s u b s titu tio n sa n s d o n a tio n ;
Attendu que ladite substitution n’a point été publiée
et enregistrée ;
Attendu les dispositions des articles 18 , 1 9 , 2 7 , 2 8 ,
29, 32 et 33 du titre 2 de l’ordonnance de 1747, et des
articles 1069, 1070 et 1071 du Code civil;
Attendu qu’au moyen du défaut de publication et enre
gistrement, les créanciers et acquéreurs ont pu acquérir
hypothèque et propriété valablement ;
Attendu que la loi de novembre 1792, en anéantissant
�la substitution, a aussi anéanti la donation, parce que
les deux étoient inséparables l’une de l’autre ;
Attendu que l’art. 2 de ladite loi abolit les substitutions
faites auparavant, et non encore ouvertes, et que celle
en question n’étoit point ouverte lors de la publication
de ladite loi ;
Attendu que l’art. 42 du titre 2 de l’ordonnance de
1747 défendoit la restitution du fidéicommis avant le
temps fixé par le contrat, et autorisoit les créanciers à
se pourvoir contre cette remise anticipée ;
Attendu la disposition de l’art. 3 de la section 2 de la
loi du 28 mars 1793 , par laquelle la nation conserve pen
dant cinquante ans l’effet des substitutions dont étoient
grevés les émigrés ;
Que la nation n’a accepté que sous bénéfice d’inven
taire les biens des ém igrés, pour les ve n d re, et avec le
montant payer les créanciers , et que la nation n’étoit que
la mandataire desdits créanciers ;
Attendu qu’aucune élection n’a été faite au profit de
la dame Vandègre dans le temps utile ;
Attendu la disposition de la loi du 7 mars 1793, proliiN tive de toute disposition en ligne directe;
Attendu que la dame de M arioles, pour la partie de
ses créances du chef de la dame D auph in , sa m ère, et
leshéritiersPitat, pour plusieurs articles de leurs créances,
sont antérieurs à la disposition de 1773 ;
Attendu que les héritiers Pitat o n t , par un acte pos
térieur à leur requête d ’o p p o s i t i o n , rétracté to u t consen
tement que l’on auroit pu en induire ; que lors de ladite
i
�(9)
rétractation il n’y avoit aucune acceptation de la part des
appelans, et qu’ainsi toutes choses sont rétablies dans leur
premier état ;
Attendu que de tout cela il résulte qu’indûment le sieur
de Vandègre â demandé et obtenu par l’arrêté de l’an 4 ,
et le partage de l’an 7 , moitié des biens du disposant ;
Attendu enfin, et subsidiairement, qu’il y a pourvoi
devant l’autorité administrative contre lesdits arrêté et
partage ;
Que le conseil de préfecture du Puy-de-Dôm e en est
saisi, ainsi qu’il résulte de son arrêté du
par lequel il a donné acte de la tierce-opposition du sieur
Juge et des héritiers Pitat auxdits ai’rêté et partage
( tierce-opposition à laquelle les intimés adhèrent ) , et arenvoyé à la séance du I er. juin pour y faire droit.
Recevoir les intimés opposans à l’arrêt par défaut di&
17 mars dernier, lequel demeurera sans effet.A u principal, sans s’arrêter à la demande en nullité des
inscriptions et réquisitions de la damé Juge, dans laquelle
les appelans seront déclarés non recevables, ou dont en
tout cas ils seront déboutes;
Sans s’arrêter pareillement à la disposition de 1773
laquelle sera déclarée nulle respectivement aux intimés;
D ire qu’il a été bien jugé par le jugement dont est
ap p el, mal et sans cause appelé, et condamner les appe
lans en Pàmende et aux dépens.
En cas de diiiiculté , surseoir à■faire droit sur la con
testation actuelle, jusqu’à ce qu’il aura été statué sur tierce*opposition pendante au conseil de la préfecture du P u y-
\
�jAk
( 10 )
de-D ôm e; tous moyens et dépens réservés en définitif,
sans préjudice à autres actions et conclusions que les intimés
se réservent expressément.
G O U R B E Y R E père.
A R I O M , de l'imprimerie deLANDRIOT, seul imprimeur de
la Cour d’appel. — Mai 1807.
I
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Vény, Anne-Françoise. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
adjudications
créances
ventes
enchères
nullité
affichage
minorité
conseils de famille
Description
An account of the resource
Titre complet : Conclusions motivées pour dame Anne-Françoise Vény, veuve De Marioles ; sieur Gaspard-Melchior-Balthazard Veny, et sieur Claude-Amable Milanges, intimés ; Contre sieur Gilbert-François Malet-Vandégre, tuteur légitime de son enfant d'avec la défunte dame Vény, et les sieur et dame Sampigny, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1792-1807
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1711
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1710
BCU_Factums_G1712
BCU_Factums_G1713
BCU_Factums_G1714
BCU_Factums_G1715
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53314/BCU_Factums_G1711.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Clermont-Ferrand (63113)
Jayet (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
adjudications
affichage
conseils de famille
Créances
enchères
minorité
nullité
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53315/BCU_Factums_G1712.pdf
8fe9dc5c04d2d0e626cc8a4504a62590
PDF Text
Text
CONCLUSIONS
POUR
Sieur J U G E -S O L A G N IA T , maire de la ville
de Clermont;
CONTRE
L e sieur M A L E T D E V A N D È G R E , au nom
de tuteur et administrateur légal de son f ils
mineur impubère; et les sieur et dame de S A M P I G N Y , appelans ;
EN P RÉS EN CE
D es autres créanciers de Paul-Augustin V é n y ,
E t dudit Paul-Augustin V é n y .
A
CE
q u
’il
p l a i s e
a
l a
c o u r
,
Attendu , quant à la nullité de l’inscription de la
dame Q ueriau, comme ne contenant point l'e xigibilité
A
�. .(o
que la mention de l’exigibilité n’est nécessaire que dans le
cas où la créance n’est point exigible ; que ce n’est que
dans ce cas que l’inscription doit mentionner l’époque de
l’exigibilité;
Que c’est ce qui résulte des termes même de la l o i ,
qui d it, Vépoque de Vexigibilité ; ce qui suppose une
créance à termes;
Que toute créance est présumée,de droit exigible, et
que l’acquéreur est suffisamment averti qu’elle est exi
gib le, par cela même qu’il n’est pas dit le contraire;
Attendu que le certificat d’inscription de la dame
Q ueriau, du 13 floréal an 7 , en tête de l’acte de notifi
cation de la transcription, et en tête de l’affiche, porte :
« D roit d’hypothèque au profit de dame Q ueriau, pour
c< sûreté d’une créance de 48080 francs; savoir, celle de
« 3i5oo francs, principal d’obligation, et le surplus
« ( i
o fr. ) pour intérêts échus » ;
Que l’inscription est donc valable, au moins pour les
intérêts; que ne fût-elle valable que pour un denier, la
dame Queriau auroit eu incontestablement droit d’en
chérir (1) ;
658
(1) Les adversaires se sont fait d on ner, par le receveur de
l ’enregistrement, une copie du bordereau déposé en ses m ains,
dans lequel il est dit : « Pour 48080 francs, savoir, 3 i 5oo francs,
principal d’obligation. r> Et ensuite : « Douze années d’intéréts,
i 658 o francs » ; sans ajouter échus. Effectivem ent il n’y est point
ajouté échus. Mais qu’importe que ce mot ne se trouve point
dans le double du bordereau destiné à demeurer dans les dépôts
du conservateur j il suffit qu’il soit sur le registre. Ce n’est pn$
�" 'w
(3 )
<
• Attendu , quant à l’objection qu’il ne peut pas y avoir
d’intérêts sans principal, que cette objection seroit fondée,
si dans le fait iln ’existoit pas d’obligation; mais qu’ici l’ob
ligation, bien ou mal inscrite, n’existe pas moins; qu’un
créancier peut ne faire inscrire que pour partie de sa
créance ; qu’il peut ne faire inscrire que pour les intérêts,
sauf à prendre ensuite inscription pour le capital;
Attendu qu’il s’agit ici d’une vente du 14 avril 1792,
bien antérieure à la loi de brumaire an 7 ; que l’acquéreur
ne peut pas dire que s’il avoit connu l’époque de l’exigibi
lité il n’auroit point acquis, puisqu’il étoit déjà lié par un
acte antérieur ; qu’il ne peut donc pas exciper du défaut
de mention d’exigibilité, puisque cette mention lui étoit
indifférente, et qu’à l’égard des créanciers ils ont adhéré
à la déclaration d’enchère;
Attendu d’ailleurs que les adversaires auroient couvert
le vice de l’inscription , et ne pourraient s’en prévaloir
pour écarter la déclaration d’enchère,
i° . Par la notification de la transcription;
2°. En poursuivant eux-mêmes sur la déclaration d’en
chère la revente;
Attendu que le jugement dont est appel, en déclarant
le double du bordereau enseveli dans les papiers du conservateur,
qu’on va consulter ; c ’est le registre.
Le bordereau porte : Pour douze années d ‘intérêts, i 658of r .
Il n'étoit pas besoin d’ajouter exigibles. On sait assez que les
intérêts sont exigibles à l’échéance ; et s’il y avoit pu avoir du
doute, le certificat d’inscription auroit averti assez.
A 2
v
�(4 )
les affiches nulles, a ordonné que sur nouvelles affiches,
et à la diligence des mêmes parties, il seroit procédé à
la revente de la totalité de la terre de Jayet ;
Que les adversaires ne se plaignent point de ce qu’il
a été ordonné qu’il seroit procédé à la revente, mais
seulement de ce que les premières affiches ont été dé
clarées nulles, et qu’il a été ordonné qu’il en seroit posé
de nouvelles, et de ce qu’il a été ordonné qu’il seroit
procédé à la revente de la totalité de la ten*e;
Que par l’exploit même d’appel en la cour , ils ont
conclu à ce qu’il fût dit avoir été mal jugé par le juge
ment dont étoit a p p el, bien appelé ; émendant, sans
s arrêter à la demande en nullité de Vaffiche et adjudi
cation , dans laquelle demande la dame Queriau et les
autres créanciers seroient déclarés non receçables , ou
dont en tout cas déboutés, il f û t passé outre à Vadjudication des biens immeubles dont il s'agit voir dire
en même temps q u e, faisant droit sur la demande en
revendication...............
Que l’arrêt par défaut est conforme aux conclusions;
Que leur appel est donc restreint à ces deux chefs, à
ce que les affiches ont été déclarées nulles, et à ce qu’on
a ordonné la revente de la totalité ; que la sentence a
donc acquis, à l’égard du surplus de ses dispositions,
l’autorité de la chose jugée, et qu’il n’est pas au pouvoir
de la cour d’y porter atteinte; ce qu’elle fero it, si elle
déclaroit l’inscription, et par suite la déclaration d’en
chère, nulles;
Que le sieur de Vandègre a été autorisé par le conseil
�H'bÜ)
( 5 )
Ï
4
y
de Famille, conformément à l’article 464 du Code civ il,
à poursuivre la revente, et à former la demande en revendication de la moitié (1) ;
Que cette délibération du conseil de fam ille, du g prai
rial an 12 , a été homologuée par jugement du tribunal
d’arrondissement de cette v ille , du 26 prairial an 12
(pages 12 et 13 du mémoire des adversaires);
Qu’il n’y a point d’appel de ce jugement ;
Que la loi vient au secours des m ineurs, lorsqu’ils
sont trom pés, lorsqu’ils sont en perte ; mais non lors
qu’ils cherchent à s’enrichir indûment : deceptis, non
àecipientibus
Que si la cour admettoit le tuteur Vandègre à revenir
contre la procédure par lui faite en vertu de délibéra
tion du conseil de famille, dûment homologuée, et maintenoit, en rejetant la déclaration dûenchère, le mineur
Vandègre et la dame de Sampigny dans la propriété
de la terre de Jayet, au prix porté par l’acte du 29 bru
maire an n , c’est-à-dire, au prix de 94567 livres tour
n ois, qui sont les offres portées par l’acte de notifica
tion de la transcription, quoique le prix prim itif de la
vente, acquis aux créanciers, fut de 130000 francs, le
(1) « Le conseil de famille autorise ledit citoyen Gilbert-François Malet de V andègre, tuteur légal dudit Delphini-GilbertAntoine Malet de V andègre, son fils, d e , pour et au nom du
dit mineur, former la demande en revendication de la moitié
desdits biens compris auxdits actes de vente et modification de
vente, consentis par le citoyenPaul-Augustin V én y, les 1 4 avril
i7'J2 > et 29 brumaire an 1 1 , comme aussi de faire procéder à
la vente par expropriation forcée du surplus desdits biens. »
A
3
^
f
�( 6 )
mineur s'enrichjroit aux dépens de ces derniers ; ce que
le conseil de fam ille, en autorisant le tuteur à poursuivre
la revente, n’a même pas vou lu ;
Que la déclaration d’enchère conserve les intérêts de
tous ; l’intérêt des créanciers, et l’intérêt du mineur luimême , qui se trouvera d’autant plus lib éré, et d’autant
plus acquitté des reprises de la dame M alet de Vandègre de Y é n y , sa m ère;
Que la dame de Sam pigny, héritière pour moitié de
la dame Malet de V an d ègre-V én y, sa m ère, qui a acquis
en 179 2, étoit majeure, et auroit couvert irrévocable
ment le vice ;
Attendu que l’art. 31 de la première loi de brumaire
an 7 porte : « Lorsque l’acquéreur a fait la notification
« de la transcription dans le délai prescrit, tout créancier
« dont les titres ont été inscrits peut requérir la mise aux
« enchères et l’adjudication publique. » L a loi ne dit point,
légalement inscrits ; elle dit, tout créancier dont les titres
ont été inscrits. Il suffit, pour pouvoir requérir la mise
aux enchères, que le créancier se soit mis en mesux-e d’o
béir à la l o i, sauf à rejeter lors de l’ordre son inscription ;
et la raison est sensible. Parce que la déclaration d’en
chère est à l’avantage de tous les créanciers; parce qu’elle
prévient les fraudes; parce qu’un créancier non valable
ment inscrit n’a pas moins intérêt que les objets vendus
soient portés au plus haut p r ix , pour libérer d’autant les
autres biens;
Attendu que les adversaires cri tiquent sans utilité la
déclaration d’enchère du sieur Juge : que les autres créan
ciers dont l’inscription ne peut être attaquée, ont adhéré
�(7 )
a la déclaration d’enchère, et sont par là eux-m êm es
devenus demandeurs en déclaration d’enchère ;
Attendu que la déclaration d’enchère profite d’ailleurs,
de d roit, à tous, au point que le surenchérisseur ne peut
s’en désister ( A rt. 2190 du Code civil ) ; ce qui avoit
également lieu sous la loi de brumaire an 7 , ainsi qu’il
a été jugé par arrêt de la cour de cassation, du 22 prai
rial an 1 3 , rapporté au journal de Sirey, page 286 (1);
(1) A tten d u , porte cet arrêt, que l’article 32 de la loi du 11
brumaire an 7 , auquel on prétend que l'arrêt a contrevenu, dé
clare bien que, faute de soumission d’enchère dans le délai
prescrit, le prix de l’immeuble demeure définitivement fixé à
celui énoncé au contrat d’acquisition; mais que dans l’espèce,
il y a eu discord et soumission ; et que l’article cité et nul autre
de la loi de brumaire an 7 , ne p orte, que la soumission une fois
fa ite , ne profitera pas aux autres créanciers ; et que chacun
d ’eux sera obligé de faire une soumission personnelle.
Que dès qu’il y a eu discord et soumission d’enchère dans
le délai de la lo i, on doit raisonnablement co n clu re, par argu
ment même de l’article 3a , que le prix n’est pas définitif, aussibien envers les créanciers inscrits qu’envers celui qui a fait sa
soumission.
Q ue la cour d’appel, en professant que l’enchère des créan
ciers est un acte, passé avec la justice, qui profite à tous les
autres créanciers , n’a fait que rappeler les anciens principes
et la doctrine des auteurs les plus estimés, auxquels la loi de
brumaire n’a aucunement dérogé, et que le Code civil a for
mellement consacrés.
Q u’il suit même de l’article 18 de la 2e. loi du 11 brumaire
sn 7 , sur les expropriations, que tout n est pas consommé par
le désistement du créancier qui a fait l’enchère ; puisque, s’il
�( 8
)
~ Attendu qu’on n’objecte point que la déclaration d’cnclïère ne soit revêtue de toutes les formalités intrinsèques
et substantielles de l’acte ;
Attendu que le sieur de Vandègre et la dame de
Sampigny ont fait transcrire tant l’acte de vente de 1792,
que l’acte du 29 brumaire an 11 ; qu’ils ont fait notifier
la transcription de l’une et de l’autre vente ;
Attendu que la cour auroit dès-lors à juger en vertu
de laquelle vente le mineur Vandègre et la dame de
Sampigny doivent demeurer propriétaires;
Attendu que la dame Queriau , dans la déclaration
d’enchère, s’est réservé d’attaquer de nullité l’acte du
29 brumaire an 11 ;
Attendu que cet acte est évidemment nul et immoral;
Que par cet acte on fait diminuer le prix porté au
contrat de vente de 1792, même distraction faite des
quarante-quatre septerées, sous prétexte d’une prétendue
éviction future; que Paul-A ugustin V én y n’a pu évi
demment consentir à cette diminution de p rix , au pré
judice des créanciers ;
Q u’on fait vendre au sieur V én y le droit éventuel qu’il
auroit de demeurer propriétaire incommutable des biens
donnés, dans le cas où il survivroit à sa descendance,
conformément à l’art. 747 du Gode c iv il, qui appelle
ne se présente p a s, ce n’est qu’après l’extinction des trois feux
consécutifs, sans autre enchère, que 1 acquéreur continue de
demeurer propriétaire , moyennant le prix stipulé dans son
contrat,.
�( 9 }
les ascenclans i\ succéder, à l’exclusion de tous autres, aux
choses par eux données; et qu’on le fait traiter ainsi sur
la succession lugubre de ses enfans;
Que la justice ne peut consacrer cet acte ;
Que la dame Queriau, fût-elle même simple créancière
chirographaire, a droit d’attaquer cet acte, comme elle
se l’est réservé par ,1a déclaration d’enchère ;
Q u’elle a ce droit de son ch ef;
Q u’elle l’a encore, comme exerçant les droits de PaulAugustin V é n y , qui n’a pu traiter à son préjudice, et
traiter sur des successions futures, sur la succession de
personnes vivantes;
Attendu que par l’acte du 29 brum aire an 1 1 , le sieur
de Vandègre s’est réservé de revenir contre cet acte, et
de faire valoir sa qualité de donataire, dans le cas ou
il y auroit des déclarations d’enchères de la part des*
créanciers;
Qu’il a effectivement usé de cette résetfve, et demandé,,
en qualité de donataire, la distraction de la m oitié;
Q u ’il s’est ainsi lu i-m ê m e d é p a rti de cet acte;.
Attendu que l’article 30 de la première loi de bru
maire an 7, porte que si le prix exprimé au contrat est
insuilisant pour acquitter toutes les charges et hypo
thèques, racquéreur doit notifier, i°. son contrat d’ac
quisition ; 2°. le certificat de transcription; 30. l’état des
charges, avec déclaration qu’ il acquittera celles échues
et à éch o ir, ju sq u ’il concurrence du -prix stipulé dans
son acte j
Que faisant notifier la transcription de l’un et de l’autreacte, ils devoient offrir de payer le prix porté eu lruû
�(1 0 )
ou en l’au tre, suivant qu’il seroit dit et ordonné en
justice; de même que la dame Queriau a eu la précau
tion d’enchérir sur l’un et sur l’autre ;
Attendu que la notification de la transcription de l’acte
de 1792 est dès-lors nulle, faute d’avoir offert de payer
jusqu’à concurrence du prix porté audit acte;
Attendu que la loi accorde aux créanciers le délai d’un
m ois, à compter d’une notification régulière, pour faire
leur déclaration d’enchère
Attendu que quand même l’inscription de la dame
Queriau, et la déclaration d’enchère, seraient nulles, la
dame Q ueriau, et tout créancier même chirographaire , a
droit de s’opposer à la demande en revendication, de
s’opposer à ce que le sieur de Vandègre se dise saisi,
dès à présent, d’une donation de biens présens et à
v e n ir, et prive les créanciers tant chirographaires qu’hypothécaires, du droit de se venger sur l’usufruit, la vie
durant du donateur.
E t par les autres motifs exprimés au jugement dont
est a p p e l,
A djuger les conclusions prises, avec dépens.
M e. P A G E S - M E I M A C ,
avocat.
M e. D E V È Z E , avoué licencié.
A R I O M , de l’imprimerie de L à n d r i o t , seul imprimeur de
la Cour d’appel. — Mai 1807.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Juge-Solagniat. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac
Devèze
Subject
The topic of the resource
adjudications
créances
ventes
enchères
nullité
affichage
minorité
conseils de famille
Description
An account of the resource
Titre complet : Conclusions pour sieur Juge-Solagniat, maire de la ville de Clermont ; Contre le sieur Malet de Vandègre, au nom de tuteur et administrateur légal de son fils mineur impubère ; et les sieur et dame de Sampigny, appelans ; En présence des autres créanciers de Paul-Augustin Vény, et dudit Paul-Augustin Vény.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1792-1807
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1712
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1711
BCU_Factums_G1712
BCU_Factums_G1713
BCU_Factums_G1714
BCU_Factums_G1715
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53315/BCU_Factums_G1712.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Clermont-Ferrand (63113)
Jayet (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
adjudications
affichage
conseils de famille
Créances
enchères
minorité
nullité
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53316/BCU_Factums_G1713.pdf
50bc09d60416083c1e7fce90049c323e
PDF Text
Text
77
MEMOIRE
'
.
I
:
P O U R
Sieur G i l b e r t -Fr a n c o i s M A L E T D E V A N D È G R E ,.
propriétaire, m em bre du conseil gén éral d u départem ent
du Puy-de-D ôm e, habitant au lieu d’Englard, commune
du Q u a rtie r, en qualité de père et légitim e administra
teur , et tuteur légal de D e lphini - G ilb er t-A n to in e
M a l e t d e V a n d e g r e son fils, et de feue dame M arieM arguerite V É N Y , son épouse; dame M a r i e - A n n e
V E N Y , épouse du sieur Ignace-H yacinthe S a m p i g n y ,
de lui autorisée, p ro p riétaire, habitant de cette ville
de R iom , appelans d’un jugement rendu au tribunal
d’arrondissement de cette v i l l e le 8 therm idor an 1 2 ;
C O N T R E •
L e sieur J U G E , propriétaire , f ils et héritier de la
dame Q u e y r i a u x , veuve J u g e , h abitant de la ville
de Clerm o n t, et autres créanciers inscrits su r sieu r
P a u l-A u g u stin V é n y , intim és ;
ET
E N C O R E
L e sieur P a u l - A
C O N T R E
V E N Y , propriétaire ,
aussi intim é.
u g u s t in
L a dame Q ueyriaux, veuve J u g e sans réflexion comme
sans in té r ê t, a jugé à propos d’enchérir sur une vente
consentie par le sieur de V é n y , au profit de la dame de
A
�( 2 )
V andègre , son épouse. L a darne veuve Juge n’a pas
calculé les suites d’une démarche inconsidérée. Q uel qu’en
soit l’événem ent, elle n’a pu concevoir l’espérance d’être
colloquée : les créances des appelans, indépendamment
de leurs droits aux immeubles vendus , absorbent et au
delà toute la fortune du sieur V é n y .
M ais cette enchère n’a pas moins fait naître des incidens
sérieux et m ultipliés. L ’expropriation forcée est devenue
indispensable. U ne revendication a été nécessaire. O n a
créé des chimères et des m oyens de form e contre la pro
cédure des appelans : les premiers juges ont tout annullé
sans examen. Prononçant tout à la fois sur la form e et
sur le fond , ils annullent la procédure et rejettent la
demande. C ’est un labyrinthe où il est impossible de
trouver une issue ; et c’est ainsi que les causes les plus
simples deviennent monstrueuses dans leurs détails. Les
appelans vont réunir leurs efforts pour ramener la cause
à son véritable point de vue ; ils vont parcourir succes
sivement les motifs qui ont déterm iné la décision des
premiers ju g e s, et ils se flattent de dém ontrer que les
créanciers sont sans droit comme sans q u a lité , pour con
tester une demande à l’abri de toute critiq u e, et dont
ils auroieut d û , pour leur in té rê t, préven ir l’événement.
F A I T S .
L e i l octobre 1 7 7 3 , le sieur P aul-A ugustin V é n y ;
père , beau-père et aïeul des appelans, contracta mariage
avec dame M arie-G en eviève M alet de Vandègre. Il étoit
déjà v e u f en premières noces de dame M arie-Jean n e
�( 3 )
G oh ier de L iv r o n , et cependant il n’avoit pas encore
atteint sa majorité.
Il n’avoit pas d’enfans de ce prem ier m ariage; e t , par
le secon d , il fit donation de la moitié de ses biens pré*•
_
sens et à v e n ir, en p ré c ip u t, à celui de ses enfans mâles
à naître, qui seroit choisi et nommé par lui ; à défaut de
c h o ix , à celui des mâles qui se trouveroit l’aîné lors du
décès de son p è re , pourvu qu’il ne fût engagé , ni dans
l’état ecclésiastique , ni dans l’ordre de M alte ; auquel
cas la donation profiteroit à celui des mâles qui suivroit
l’engagé.
Dans le cas où il n’y auroitpas d’enfant m âle, la dona
tion devoit sortir effet au profit de celle des filles à naître,
qui seroit choisie et nommée par le donateur • et, à défaut
de nom ination, à celle des filles qui se trouveroit l’aînée
au décès de son père.
Ce mariage a donné le jour à deux filles ; l’u n e , M arieM arguerite de V é n y , épouse du sieur de V andègre ; et
l’autre, dame M arie-A n n e V é n y , épouse du sieur Sumpigny.
' L a dame de V a n d ègre, épouse de sieur Paul-A ugustin
V é n y , se vit obligée, quelques années après son m ariage,
de form er contre son m ari une demande en séparation
de biens. Cette séparation fut prononcée en la sénéchaussée
de iM oulins, par sentence du 3 septembre 1784. B entot
a p rès, elle fit procéder à la liquidation de ses droits. U ne
sentence de la même sénéchaussée, du 14 décembre 178 5,
confirmée par un arrôt du parlement de P a ris, du 5 mai
1787 , liquida les créances de la dame de V é n y à la somme
de 86667
*7 s’ >
condamna le sieur de V é n y au
A 2
�\{St
( '4 )
.payem ent de cette som m e, avec les intérêts depuis 178 3 ,
époque do la demande.
Il étoit difficile au sieur de Y é n y de critiquer ces
condamnations , et plus encore d’en payer le montant
sans aliéner ses biens immeubles. ,En conséquence, et
m algré la donation portée en son contrat de m ariage, au
profit de l’un de ses enfans, il vendit à la dame son épouse,
le 14 avril 1792 , la terre de Ju yet, qui fonnoit la prin
cipale partie de ses biens. .
Cette vente fut consentie m oyennant la somme de
1 2 0 C 0 0 f r . , sur laquelle il en fut délégué 1 2 0 0 0 francs à
plusieurs créanciers antérieurs en hypothèque à la dame
de V én y.
E lle devoit se retenir le surplus sur ses créances , qui
se port.ûient d’abord , comme on l’a v u ,e n p rin cip a l, à
une somme de 86667 liv. 17 s. Les intérêts, depuis 178 3,
sont liquidés par cette vente jusqu’au jo u r , déduction
des retenues, à la somme de 29143 f r . , et les frais que la
dame de V é n y avoit été obligée de fa ire , à la somme
de 4600 fr.
Bientôt après cette vente, le sieur P aul-A ugustin Y é n y
fut inscrit sur la liste des émigrés. Ses biens furent séques
trés le 1 9 mars 179 3; et le départem ent, par un arrêté
du 5 messidor an 2 , prononça la nullité de la vente que
le sieur de V é n y avoit consentie au profit de. la dame son
, le 1 4 avril 1 7 9 2 .
L ’arrêté du département fut m otivé sur la disposition
épouse
de la loi du 28 mars 1793 , q u i annulloit toutes les ventes
faites par des ém igrés, ou réputés tels, lorsque ces ventes
étoient postérieures a u '9 février I 7 9 2,
�( S ,
Les frères et sœurs du sieur de V é n y prétendirent alors
qu’ ils étoient propriétaires de quarante-quatre septerées
de terre dépendantes de la terre de Jayet ; ils se pourvu
rent au département pour obtenir la distraction de ces
quarante-quatre septerées , et obtinrent, le 24 prairial
an 3 , un arrêté provisoire qui les leur adjuge.
Les appehins, de leur cô té, se présentèrent à l’adminis
tration pour réclamer l’exécution de la donation portée
par le contrat de m ariage de 1773. Ils avoient une pre
m ière fois succombé dans leur prétention , sur le fonde
ment que la donation portée au contrat de mariage du
11 octobre 1 7 7 3 , n’étoit point une donation en tre-vifs,
mais bien une donation éven tu elle, qui étoit annullée
par la loi du 17 nivôse et autres subséquentes.
Les dames V é n y furent plus heureuses dans une se
conde tentative. Les administrateurs reconnurent, par un
arrêté du prem ier com plém entaire an 4 , qu’ils avoient fait
une fausse application des lois précédem m ent citées; que la
donation du 11 octobre 1773 étoit expressément qualifiée
donation entre-vifs de la m oitié des biens présens du do
nateur ; que dès l’instant de cet acte, la fille aînée avoit
été saisie : en conséquence ils rapportent leur prem ier ar
rê té , et décident que la donation entre-vifs sortira son
plein et entier effet; qu’il sera d é liv ré .à la fille aînée
la m oitié des terres de Jayet et M ontrodés, et de tout ce
que le sieur V é n y , ém igré, avoit droit de prétendre dans
la succession indivise de son père.
est ordonné q u ’ i l sera nomm é des experts pour pro
céder au partage ; e t , en effet, ce partage a été consommé
par un arrêté p o stérieu r, du 11 iloréal an 7.
Il
/
\
�Les choses ont resté en cet état jusqu’au sénatus-consulte relatif aux émigrés. Ce sénatus-consulte est du 6 flo
réal an 1 0 , et c’est dans le courant du même m ois, que
le sieur Paul-A ugustin V é n y ,r a y é de la liste, obtint la
m ain-levée du séquestre de ses biens. Il rentroit dès-lors
dans tous ses droits de citoyen, et devoit reprendre la
m oitié de tous ses biens qui n’auroient pas été vendus;
mais il ne pouvoit porter atteinte ¿\ l’arrêté du départe
m en t, qui avoit ordonné l’exécution de la donation. Les
é m ig ré s, par ce sénatus-consulte, sont obligés de respec
ter tout ce qui a été fait pendant qu’ils étoient inscrits
sur la lis te , et dès-lors les arrêtés du département dé
voient continuer d’avoir leur exécution.
M ais le sieur V é n y avoit à traiter avec ses enfans.
C eux-ci, par des motifs de déférence et de resp ect, ne
vouloient point entrer avec leur père dans une discus
sion rigoureuse. L e 29 brum aire an 11 , il fut passé un
traité entre e u x , traité qu’il est indispensable d’analiser.
Dans cet a c te , Paul-A ugustin V é n y expose qu’il a
vendu la terre de Jayet à la dame son é p o u se, m oyen
nant la somme de 120000 fran cs, dont 12000 francs
environ furent délégués à divers créanciers, com m e an
térieurs en hypothèques à la dame de V én y . Il rappelle
les diiférentes liquidations que la dame de V é n y avoit
fait régler. Il en résultoit qu’elle restoit créancière d’une
somme de 120409 livres 17 sous. Ce principal s’étoit
accru de tous les intérêts échus depuis, à raison de l’inexé
cution de la vente qui devoit en opérer le payem ent, et
sans préjudice encore des articles de créance qui furent
omis et réservés dans cette liquidation.
�$o\
(7 0
O n rend compte ensuite de ce qui s’est passé depuis
l’inrcription du sieur de Y é n y , des démarches m ulti
pliées et sans succès, soit de la dame de V é n y , soit de
ses enfans, pour obtenir la m ain-levée du séquestre, et
l ’exécution de la vente de 1792. O n rappelle l’arrêtéd u
d épartem ent, qui fait distraction de quarante - quatre
septerées des m eilleures terres , et qu’oü a regardées
comme dépendantes de la terre de V illem on t ; l’arrêté qui
ordonne l’exécution de la donation, et en vertu duquel
les sieurs de V andègre et Sam pigny jouissoient ensemble
de la moitié de J a y et, tandis que l ’autre m oitié avoit
demeuré sous le séquestre.
L e sieur de V é n y reconnoît que sa radiation de la liste
des émigrés fait revivre la vente du 14 avril 1 7 9 2 , q u i ,
n’ayant été annullée que pour l’intérêt n atio n al, a dû
reprendre sa prem ière existence lorsque l’intérêt de la
nation a cessé. Cette vente , d’après le sieur de V é n y
lui-m êm e, est devenue un titi*epour ses enfans, qui les
investit de la propriété actuelle de la terre de Jayet, dont
la m oitié leu r avoit déjà été attribuée par l ’arrêté du
ier. com plém entaire an 4.
M ais le sieur V é n y pense qu’il pourroit soutenir que
ce droit de ses enfans sur la m oitié , comme donataires,
n’est point encore ouvert ; qu’il ne s’ouvrira que par sa
m ort naturelle ; et que jusque là ils n’ont point d’autre
titre que la vente de 1792.
L e sieur de V é n y cependant est obligé de convenir
que ce d r o it , comme donataires, doit s’ouvrir un jo u r,
et que c’est un juste m otif de réduire ce p rix de la vente
de 1792 , puisqu’elle ne pourvoit leur transmettre que
�....................(
8 )
la propriété de m oitié , dès que la donation leur assuroit
déjà l’autre m oitié. Cette circonstance étoit de nature à
entraîner, ou la résiliation de la v e n te , ou une dim inu
tion dans le p r ix , au choix de l’acquéreur.
U n second m otif de réduction également reconnu par
le sieur de V é n y , étoit l’éviction de quarante - quatre
septerées de terre, que ses frères a voient fait prononcer
par le département.
Sur cet exposé, les parties transigent. Par l’article i er. , la
vente demeure résiliée et comme non avenue en ce qui
touche les quarante-quatre septerées de terre évincées,
sauf au sieur de V é n y à les revendiquer contre ses frères
et sœurs , s’il s’y croit fondé , et ainsi qu’il avisera.
P ar l’article 2 , il est dit qu’en ce qui touche la m oitié
de la terre de J a y e t, dont la propriété est assurée aux
enfans de Paul-A ugustin de V é n y , qui lu i su rvivron t,
par la donation du n octobre 1773 , la vente du 14 avril
1792 n’aura d’efiet que pour transmettre aux ayans-cause
de G eneviève M aletdeV andègre, acquéreurs, i° . l’usufruit
que conservoit P au l-A u g u stin V é n y , ven d eu r, sur la
m oitié donnée ; 20. la perspective éventuelle qu’il avoit
aussi d’en rester p ro p riétaire, au cas où il survivroit à
tous ses enfans et descendans ; 30. pour consolider sur
la tèle de G ilbert-A n toine-D elphini de V an d ègre, repré
sentant sa mère , et de dame M arie-A n n e V é n y , épouse
du sieur S am p ign y, par égalité entr’eux , la pleine pro
priété et la jouissance dès à p résen t, et incommutablement , de la moitié de la terre de Jayet dont il s’a g it,
quels que puissent être les événemens , et soit que la
propriété Leur en J'ût acquise à tout autre titre , ou
q u elle
�C9 ) ]
qu elle ne le f û t p a s , sans aucunem ent déroger à leurs
droits acquis p a r tous autres titres que ladite ven te,
n i y p r é ju d icie r , ensorte qu'ils pourront exercer les
droits qu*ils peuvent a v o ir , indépendamment de ladite
vente , sans novation n i dérogation, contre les acqué
reurs q u i seroient subrogés à la v en te, dans le cas
où , su r la transcription q u i en sera f a i t e au bureau
des hypothèques , et sa n o tifica tio n , il surviendroit des
enchères de la part des créanciers intéressés et in sc r its,
sans qu’il en résu lte, dans aucun c a s , de recours et
garantie contre le v en d eu r, de q u o i il est déchargé.
P ar l’article 3 , en ce qui touche la seconde m oitié de
la même te rre, dont la propriété étoit libre sur la tête
du ven d eu r, lors de la vente du 14 avril 179 2 , cette
vente doit sortir son plein et entier effet, sans novation
ni dérogation , sauf la distraction du terrain évincé.
L ’article 4 réduit définitivem ent le p rix de la vente à
la somme de 94567 livres tournois.
t
L ’article 5 ne fait que régler ou anéantir des déléga
tions de quelques créanciers qui se trouvoient postérieurs
en hypothèque à la dame de V é n y .
L ’article 6 oblige les enfans V é n y d’acquitter le mon
tant des autres délégations portées au coutrat de ven te,
en déduction de la somme à laquelle le p rix en est réduit.
Ils sont autorisés , par l’article 7 , à se retenir le surplus
à compte et en dim inution de leur créance du ch ef de
la dame de V é n y , leurs actions leur demeurant réservées
pour l’excédant.
E n fin , par le dernier a rticle, il est reconnu que les
enfaus V é n y ne sont pas rem plis, ni à beaucoup p rès, de
B
�( 10 )
la totalité de leurs créances par cette com pensation, et ils
sont autorisés à retenir et im puter sur ce qui leur restera
d û , la somme de 4217 livres 2 sous, montant d’une créance
déléguée au sieur R oze Beauvais, qui avoit été payée par
la dame de V é n y , et ce , dans le cas où les créanciers
inscrits demanderoient le rapport de cette som m e, comme
payée à un créancier moins ancien q u ’eux.
Ce tra ité, lors duquel le sieur M alet de V andègre n’a
agi qu’en qualité de père et légitim e administrateur du
sieur V an d ègre, son fils, a été transcrit au bureau d esh y230lhèques de R io m , le prem ier frim aire an 11. L a noti
fication en a été faite à tous les créanciers inscrits, le 24
du m ême m ois; et le 21 nivôse an 11 , trois jours avant
l ’écliéance du d é la i, dame Claudine Q u eyriau x, veuve
et héritici-e testamentaire de François J u g e , négociant
à C le rm o n t, a fait notifier une enchère au dom icile
des appelans; e t , pou r ne pas se trom per, elle déclare,
par cet a c te , qu’ayant intérêt que les biens de son dé
biteur soient portés à leur juste valeur, pour obtenir sur
iceux le payement de sa créance , elle se soum et, confor
mément à l’article 31 de la loi du 11 brum aire an 7 , de
porter ou faire porter le p rix du prem ier contrat de vente
de 179 2 , dans le cas que son exécution soit o rd o n n ée,
à u n vingtièm e en sus de celui qui y est stipulé; et dans
le cas que l’acte p o stérieu r, portant l’atification et m odi
fication du p rem ier, passé entre son débiteur et les sieurs
V an d ègre et Sam pign y, le 29 brum aire an 1 1 , soit seul
exécuté, ce que la dame veu ve Juge se propose d éfaire
ju g e r, elle déclare qu’en attendant que cette contesta
tion soit entamée et v id é e , et parce qu’elle est pressée par
�soi
j«a?
( ii )
le délai que lui donne la l o i , qui est sur le point d’e x p ire r,
elle se soumet de porter ou faire porter le p rix exprim é
par ce dernier acte aussi à un vingtièm e en sus de celui '
porté au traité ; en conséquence , elle requiert la misé
aux enchères et adjudication publique des immeubles
vendus.
Q uel a donc pu être l’objet de la dame veu ve J u g e ,
lors de cette en ch ère? Il existe vingt-deux inscriptions
antérieures à la sienne , son hypothèque est postérieure
au contrat de mariage du i l octobre 17 7 3 , par consé
quent elle est prim ée par la dame de V é n y ; d’ailleurs
l’hypothèque ne peut frapper que sur la m oitié de la
terre de J a y e t, dès que l’autre m oitié en a été retran
chée par la donation faite au profit des enfans à n aître,
par le même contrat. L e p rix de la vente seroit plus
que tr ip lé , que la dame veuve Juge ne pourroit espérer
une collocation utile : elle en est convaincue ; elle ne l’a
jamais ignoré : cette dém arche étoit donc sans objet, mais
le coup étoit porté , et dès-lors il étoit nécessaire d’en
ven ir à une expropriation forcée.
L a dame veuve Juge, après avoir lancé son enchère, garda
le plus profond silence. Les appelans , après avoir fait de
vains e f f o r t s pour prendre desarrangem ens avec les prin ci
paux créanciers, notammentavec. le sieur Juge, ne pouvant
dem eurer dans cet état d’incertitude et d’anxiété!, se déter
m inèrent à aller en avant. L e 12 nivôse an 1 2 , ils firent
notifier à sieur P a u l - Augustin V é n y l ’enchère de la dame
veuve J u g e , du 21 nivôse an 1 1 , et lui firent sommation
de rapporter, dans d ix jours pour tout d é la i, main-levée
des inscriptions excédant la somme de 94567 1. tournois
B 2
'
�( 12 )
|
p rix de la confirmation et modification de la prem ière
vente du bien de Jayet, portée par le traité du 29 bru
maire an 1 1 , sinon ils protestèrent de poursuivre la mise
aux enchères et revente des droits à eux transmis par cet
a cte , en la form e et dans les délais prescrits par la l o i ,
m a is sans entendre se p réju d icier aucunem ent a u x
droits à eu x a cquis cdailleurs, et pa r tous autres titres,
su r le bien de J a y e t , circonstances et dépendances '
titres qu’ils se réservèrent au contraire expressément de
faire valo ir sans novation n i dérogation.
E u e ffe t, le sieur M alet de V a n d è g re , qui jusque-là
n’avoit agi qu’en qualité de tuteur légal de son fils, prit
le parti de rev e n d iq u er, au même n o m , la m oitié des
biens com pris dans les actes de vente des 14 avril 1792
et 29 brum aire an 1 1 , en vertu de la donation portée au
contrat de m ariage de 17 7 3 , et de l’arrêté du départem ent,
du prem ier com plém entaire an 4 , qui avoit ordonné l’exé
cution de cette donation , et l’avoit mis en possession des
biens. 11 se pourvut devant un conseil de fam ille pour faire
nom m er un subrogé tuteur à son fils, et en m ême temps
së faire autoriser à exercer la revendication , conform é
ment au Code c i v i l , dès qu’il s’agissoit d’une action im
m obilière.
L e conseil de fam ille , par une délibération du 9 prai
rial an 1 2 , autorisa la revendication de la m oitié des biens,
et autorisa pareillement le sieur de Vandègre à faire pro
céder à la vente par expropriation forcée du surplus des
mêmes biens; enfin le sieur D e z a ix , parent paternel du
m in eur, fut nomm é son subrogé tuteur.
Cette délibération du conseil de fam ille a été hom o-
�ù o 'i
( *3 )
loguée par jugement du tribunal d’arrondissement de Cette
v ille , du 26 prairial an 12.
, Il a été procédé aux affiches, pour aller en avant sur
l’expropriation forcée ; il en fut déposé un exem plaire au
greffe du tribunal d’arrondissem ent, le 8 messidor an 12 ,
avec indication pour la ven teau 6 thei’m idor suivant. L e
27 du même mois de messidor, le sieur de V an d ègre, agis
sant en qualité de tuteur légal de son fils , fit notifier un
acte à la dame de S am p ign y, à sieur P au l-A u gu stin V é n y -,
et à la dame veu ve J u g e , en leurs domiciles élus , par
lequel il exposa q u e , sur la réquisition de mise aux en
chères de la dame J u g e , il a v o it, en qualité de tuteur de
son fils, conjointem ent avec les sieur et dame de Sam
p ig n y , poursuivi la revente des biens par eu x acquis, et
que les affiches avoieiit été posées à cette fin. 11 observe
que les biens vendus par l’acte du 29 brum aire an 1 1 ,
n ’appartenoient à P a u l-A u g u stin V é n y , ven d e u r, que
p o u r m oitié ; que l’autre m oitié étoit la propriété parti
culière de D e lp h i n i - G i lb e r t - A n t o i n e M a le t de V a n d è g r e ,
son fils m in eu r, en vertu de la donation qui en avoit été
faite à sa mère par le contrat de m ariage du 11 octobre
1773 , et de l’arrêté du département du P u y-d e-D ô m e,
du prem ier com plém entaire an 4 , qui en avoit fait déli
vrance à la dame de V an d ègre, son épouse, à raison de
l’inscription du père sur la liste des ém igrés, et ordonna
le partage des biens, qui fut exécuté le 11 floréal an [7 ;
en fin , qu’en vertu du sén atu s-con su lte, du 16 floréal
an 1 0 , cet arrêté devoit avoir son entière exécution.
L e sieur de V andègre ajoutoit que pour faire le bien
des créanciers du sieur de V é n y , il avoit con sen ti, en
�( 14 )
sa qualité de tuteur , que les droits d’ u su fru it, et tous
autres que son beau-père auroit pu prétendre sur la m oitié
des biens de Jayet,, entrassent dans la vente n ou velle,
comme ils étoient entrés dans la p rem ière, mais sous la
condition expresse que dans le cas où il surviendrait
des enchères su r la nouvelle vente , et que la revente en
seroit poursuivie p a r expropriation f o r c é e , le requérant
pourroit exercer tous ses droits sans novation n i dérogation.
L e cas p révu étant arrivé , le m ineur V andègre ren
trait dans ses premiers droits ; de sorte que la m oitié du
bien de J a yet, échue à la dame sa m ère par le partage fait
avec la n atio n , devoit être distraite de la vente poursuivie
sur l’enchère de la dame J u g e , et l’autre m oitié seule
pou voit être soumise aux enchères.
P ar cette considération , les affiches annonçoient déjà
que l’adjudicataire ne pourroit devenir propriétaire que
de la m oitié seulement du bien dont il s’a g it, telle qu’elle
est déterm inée par le partage fait avec la république.
P o u r ne laisser aucun d o u te, le sieur de V a n d èg re, en
sa qualité de tu te u r , annonce qu’il veut faire légitim er
et confirm er, par un jugement p réalab le, la revendication
et distraction de la m oitié de la terre de Ja yet; e t, dans
cette v u e , il donne assignation à la dame de S am p ign y,
au sieur de V é n y , et à la dame veuve Juge , pour vo ir
reconnoîtrc son fils , m in e u r, propriétaire de la m oitié
échue à la dame de V an d ègre, par le partage du 11 floréal
an 7 , v o ir ordonner l’exécution de ce partage , con
firmer la revendication et distraction déjà faite par les
allich çs, et qu’ il ne sera passé à l’adjudication que de
�(i5 )
l’autre m oitié seulem ent, telle qu’elle est déterm inée par
le partage.
L e sieur de V an d ègre annonce enfin qu’il a déposé au
greffe tous les titres de propriété de son f ils , p ou r que
les parties intéressées puissent en prendre com m unication,
conform ém ent à l’article 27 de la loi du 11 brum aire an 7.
C’est en cet état que la cause fut portée à l’audience du
6 therm idor an 12 , jour indiqué pour procéder à l’adju
dication. L a dame Q u eyriau x, veu ve J u g e , entreprit de
contester la revendication et l’affiche, et proposa plusieurs
moyens de nullité en la form e et au fond.
L e prem ier moyen consistoit à d ir e , i° . qu’il n’a voit
pas été mis d’affiche à l’extérieur du dom icile du débi
te u r, qui fait d éfau t, et que les créanciers avoient intérêt
d’avoir en présence ;
2°. Q u ’il n’avoit été mis d’affiche qu’à la porte d’un
seul des bâtimens à vendre ;
3°. Q ue les affiches avoient été faites un jour ordinaire,
au lieu de l’être un jour férié , suivant la loi et l’usage ,
pour avoir une plus grande concurrence.
A u fo n d , la dame veu ve Juge prétendit qu’il étoit né
cessaire de réform er les affiches, soit à cause de leur rédac
tio n , soit parce que le sieur de V an dègre n’avoit pas mis
en vente tout ce qui devoit être vendu.
Suivant la dame veuve J u g e , le poursuivant avoit com
pris dans les immeubles à vendre toute la terre de J a y e t,
et cependant ensuite il demandoit deux distractions diffé
rentes ( la distraction des quarante-quatre septerées de
terre, adjugées aux héritiers V é n y , et la m oitié com prise
en la donation de 1 7 7 3 ) , ce qui engageroit l’adjudicataire
' acheter un tout inconnu ^ grevé de deux procès.
�(i6)
Cependant le sieur de V an dègre prétend que ces dis
tractions ont été effectuées par des actes administratifs,
et des partages qu’il veut faire m aintenir ; d ès-lo rs, dans
son propre systèm e, il ne devoit com prendre dans les
affiches que les immeubles qu’il prétend libres et sujets
à être v e n d u s, sauf contestation pour le surplus.
L a dame veu ve J u ge soutient que le sieur de V a n Sègre a eu intérêt à l’exécution pleine et entière de la
vente de 1792 ; qu’il n’a pas p u , en une qualité , faire
d im in u e r, en u n e a u tr e , l’efl’et d’une vente dont le ven
deur ne pouvoit pas lui-m êm e contester l’exécu tio n , et
q u ’il ne pou voit pas réd u ire, sous prétexte de droits éven
tuels qu’il avoit aussi aliénés.
E lle prétend que le sieur de V an dègre n’a pas eu
d ’action en garantie lors du traité de l’an 1 1 , parce que
J’exTet de la donation de 1773 , en la supposant valable ,
n ’étoit pas o u ve rt, et le sieur de V é n y , étant relevé de la
mort, c iv ile , conserve encore le droit d’élire;en fin , d’après
la dame veuve Juge , il restoit encore assez de biens
non vendus pour assurer la m oitié promise.
L a ré p u b liq u e , en faisant en l ’an 7 un partage avec
les prétendus successeurs du sieur de V é n y , leur a laissé
une portion com m e héritiers présomptifs , et en a gardé
une qu’elle n’a pas a lién ée, et qui auroit été seule à l’abri
des réclamations du sieur de V é n y , si elle avoit été vendue
à des tiers : il y a d’ailleurs eu dans ce partage une lésion
é n o rm e , et les créanciers ont le droit de le faire res
cinder pour lésion du tiers au q u a rt, parce que l’éga
lité est l’àme des partages. Il n’a été irrévocablem ent
distrait de la terre de Jayet que les objets donnés aux
frè re g
�£11
( r7 )
frères V e n y , qui sont sous ce rapport des tiers-détenteurs
non successibles.
L a dame Juge ajoutoit encore qu’on ne pouvoit con
cevoir de donation ouverte, tant que le donataire conservoit la capacité d’opter pour les biens à venir. L a dona
tion de 1773 , au profit des enfans à naître , étoit n u lle,
parce que le donateur étoit m ineur à cette époque , et
que cette donation n’a été ni insinuée ni publiée.
Par le traité de l’an 1 1 , les parties ont voulu donner
à la vente de 1792 tout son effet , puisqu’une m oitié
libre est donnée en l’article 3 , et l ’autre m oitié en l’ar
ticle 2.
L a dame Juge en conclut qu’il y a lieu de remettre en
vente la totalité de la terre de J a y e t, sauf la distraction
des quarante-quatre septerées de terre aliénées adminis
trativement , et sauf une ventilation pour dim inuer le
p rix auquel se soumettra l’adjudicataire pour la totalité.
L a daine veu ve Juge observe subsidiairement que quand
il y auroit lieu de baser la revente sur le traité de l ’a n .'i1,
il faudroit ajouter à la m oitié offerte par le pou rsu ivan t,
1°. l’usufruit qui appartient au vendeur ; 20. le cas de
survie éventuelle du v e n d e u r, mentionné en l’article 2
du tra ité , parce que ces deux objets font partie de la
chose vendue ; et dans le cas où la revente auroit lieu
d ’après les affiches , les enchères ne devroient pas être
faites sur 94600 francs, puisque dans la réduction du
prix convenu on n’a pas déduit la m oitié du p rix an cien ,
et qile cependant le poursuivant ne présente à revendre
que la moitié des objets vendus en 1792 , sous la déduc
tion encore des quarante-quatre septerées de terre dont
G
**
�«♦*,
(
18 ?
le sieur de V éu y a souffert l’éviction. C ’est d’après ces
m otifs, qui pourraient être plus clairement énoncés, que
la dame veuve .Juge demande la nullité des itfïiclies du
8 messidor an 12 , des procès verbau x, notification, et de
toute la procédure; qu’il soit ordonné que dans le mois
le poursuivant sera tenu de faire p o s e r, dans la forme
de la lo i, de nouvelles affiches qui contiendront, i° . la
mise en vente de la totalité de la terre de Jayet ; 20. la
distraction des quarante-quatre septerées de terre adju
gées par l’administration départementale aux sieur et
dame de V illem o n t; 30. la condition que l’adjudicataire
fera procéder dans le mois à la ventilation de la terre
de J a ye t, pour connoître la dim inution opérée par la
distraction des objets ci-dessus énoncés, et c e , contra
dictoirement avec le poursuivant et le prem ier créan
cier inscrit.
Subsidiairem ent, elle conclut à ce qu’il soit ordonné
qu’à la prem ière audience, et après de nouvelles affiches,
il sera procédé à la revente offerte par le sieur de V a n dègre de la m oitié de la terre de Jayet, sous la déduction
de la m oitié du terrain adjugé au sieur de V ille m o n t, lors
de laquelle revente la somme de 68200 francs, p rix du
contrat de vente de 1 7 9 2 , pour m o itié, servira de pre
m ière eu ch ère, sauf la ventilation ci-dessus requise.
T ou s les autres créanciers présens se référèrent aux
mêmes conclusions.
E n réponse à ces moyens , les poursuivons soutinrent,
i° . quant aux moyens de n ullité, que l’habitation momen
tanée du sieur de V é n y à Paris ne constituoit pas son do
m icile de d ro it, que son véritable dom icile étoit au lieu
j
�0 &
( r9 )
de J a y e t, et qu’il a été appose une affiche sur les bâtimens de Jayet.
Ces bâtimens font partie des objets compris dans la vente
de 1792. Ces bâtimens appartenoient au sieur de V é n y ,
et n’ont jamais été distraits au profit des frères et sœurs:
ils sont aujourd’hui les seuls existans; ils servent à la de
meure du propriétaire, comme à l’exploitation des biens.
L a loi du 11 brum aire an 7 , en prescrivant l’affiche
au domicile du débiteur, a nécessairement et évidemment
supposé que ce débiteur étoit dom icilié dans l’arrondis
sement du tribunal où se poursuit l’expropriation. Il y
auroit souvent impossibilité de poser une affiche à un
liôtel g a r n i, ou à une maison étran gère, et dans un lieu
où le tribunal n’auroit aucune autorité. L ’affiche n’est
nécessaire qu’autant que la maison habitée par le débiteur
seroit comprise dans les objets saisis. Cette affiche n’a d’autre
objet que de donner de la publicité à la v e n te , afin que
les créanciers inscrits et tous autres n’en prétendent cause
d’ignorance.' L e débiteur n’est-il pas suffisamment averti
par la notification de l’afïiche faite au dom icile par lui élu ?
La partie saisie seroit d’ailleurs seule fondée à se plaindre
de cette omission , et le créancier in scrit, comme le pour
su ivan t, n’ont ni qualité ni intérêt pour proposer ce
moyen.
L e véritable poursuivant dans la cause étoit la dame
veu ve Juge rc’est son enchère qui a détruit la vente volon
taire , et nécessité l’expi'opriation judiciaire. Dans ce cas,
l’acquéreur ne poursuit qu’à raison du silence de l’enché
risseur , et comme subrogé ou substitué à ses poursuites,
puisque l’enchère tient lieu de comnjaudement.
C 2
*£
�Ce créancier enchérisseur ne peut espérer le payement
du montant de ses créances qu’au moyen de la revente : il
n ’a donc aucune qualité pour s’y opposer , ou proposer
aucun moyen de nullité contre l’expropriation.
L a dame veuve ju g e a voit elle-m êm e nullement et irré
gulièrem ent inscrit : son inscription ne frappoit que sur
V é riy, ém igré. L a loi du 28 mars 1793 prononce la mort
civile contre les ém igrés, et la confiscation de leurs biens.
L a loi du I e r . iloréal an 3 prohiboit tous actes conserva
toires sur les biens nationaux , et n’indiquoit aux créan
ciers des émigrés d’autres moyens que la liquidation de
leurs créances dans les formes et les délais qu’elle prescrit.
Si la loi du 16 ventôse an 9 a accordé aux créanciers
inscrits le droit de faire inscription sur les ém igrés rayés,
la dame Juge devoit réparer les omissions ou les irrégu
larités de l ’inscription précédente par une n ou velle; elle
a môme négligé cette form e : elle étoit donc déchue de
tous d ro its, et les autres créanciers ne pouvoient se su
broger à une enchère nulle , et qui est censée ne pas
exister.
L es poursuivans crurent devoir négliger le moyen de
form e qu’on faisoit résulter de ce que les affiches n’avoient
pas été posées un jour de fête. O n ne trouve nulle p a r t,
dans la loi du 11 brum aire an 7 , que cette form alité doive
être observée , et on ne peut pas suppléer à la loi.
M ais sur la demande en revendication formée par le
sieur de V an d ègre, en sa qualité de tuteur, revendication
contre laquelle on avoit réuni tous ses efforts , le sieur de
.Vandègre observa que par l’arrêté du prem ier com plé
mentaire an 4 l’exécution de cette donation avoit été
�an
(•21 )
ordonnée ; qu’il résultait de cet arrêté que la dame’ de
V a n d èg re, ainsi qu’elle enm voitle d ro it, avoitab diq ué les
tien s à v e n ir , pour s’en tenir aux biens présens à l’époque
de la donation: elle avoit été en conséquence ’renvoyée ;en
possession actuelle et réelle de la moitié des biens ayant'appartenu au sieur de V én y . Cet arrêté était irrévocable^, et
ne pouvoit être attaqué devant.les tribunaux. L ’article 1 6
du sénatus-consulte,de floréal an ,10, interditaux ém igrés
toutes réclamations contre,ce ■
qui a été fait administra
tivem ent pour les.partnges de pré-successions, successions
ou autres actes généralement quelconques. Il résulte des
arrêtés du gouvernem ent, et d’une lettre officielle adressée
aux préfets, le 7 brum aire an 11 , par le conseiller d’état
ayant le département des domaines n ationau x, que l’ar
ticle 16 du sénatus-consulte s’applique.aux émigrés rayés,
élim inés, comme aux amnistiés.
n
L e sieur de V é n y , ém igré ra y é , ne pou voit donc re
ven ir contre cet a rrê té, et tout était consommé à cet
égard. L ’effet de la donation a été ti'ansmis par la dame
de V an d ègre à son fils, de sorte qu’il y avoit une v é ri
table novation dans l’état des choses.
'•
;
Les poursuivans n’a voient-ils pas été forcés de com
prendre dans les affiches tous les objets én on cés, soit dans
la vente du 14 août 179 2 , soit ceux compris au traité du
29 brum aire an 11 , dès que l’enchère de la dame veuve
Juge frappoit sur tous ces objets ? Mais ce dernier traité
n’étoit relatif q u ’a u sieur V é n y , et avoit été dicté par des
motifs de déférence et de respect desenfuns envers leurs
pères ; motifs étrangers aux tiers-intéressés. Aussi l’inten
tion des parties est-elle suifisamment manifestée par l ’ar-
�( * o
ticle 2 de cet a cte , qui réserve expressément lès droits
et actions des parties pour le cas particulier où elles se
trouvent. L e sieur V an dègre réunissant la double qualité
de poursuivant et de p ro p riétaire, a donc eu incontesta
blem ent le droit de revendiquer les biens qui appartien
nent à son fils, conform ém ent à la loi du 11 bx-umaire an 7.
L es affiches expliquoient suffisamment, soit les objets
revéndiqués, soit ceux qui doivent être distraits au profit
d u sieur de V ille m o n t: il étoit môme difficile de l’expliquér autrem ent, d’après l’enchère qui frappoit sur l’uni
versalité de la terre de Jayet.
Relativem ent à là validité de la donation de 1 7 7 3 , en
supposant que cette question put être discutée devant
les tribunaux , au préjudice de l ’arrêté administratif qui
la confirme,, personne n’ignore que le p è re, môme m i
neur , a toujours le droit de faire une donation au
profit des enfans à naître. U ne telle donation met le père
dans l’heureuse impuissance d’aliéner ses biens; les lois
consacroient la validité de ces dispositions, particulière
ment dans les familles nobles, et pour conserver le lustre
de leur maison. Dans tous les cas , la m inorité ne seroit
qu’un moyen de restitution, et il auroit fallu au moins
que le sieur V é n y se fût pou rvu dans les d ix ans de
m ajorité.
L ’ordonnance de 1731 dispense de l’insinuation toutes
donations faites en ligne directe par contrat de mariage.
O n ne pouvoit pas dire que la substitution portée par le
même acte n’eut pas été publiée. Comment le vérifier lors
que les registres ont été la proie des flammes? D ’ailleurs,
la substitution étoit indépendante de la donation; c’étoit
�041
( *3 )
une disposition distincte et séparée y qui ne pouvoit
préjudicier à la p rem ière, n i en atténuer les effets : d’un
autre c ô t é , à l’époque de la réclamation du sieur de.Y an t
dègre auprès des corps administratifs, toute substitution
étoit ab ro g ée, il ne restoit que la donation.
Les poursuivons conclurent en conséquence à ce que^
sans s’arrêter aux moyens de nullité proposés par la dame
J u g e , et tous autres qui seroient déclarés inadmissibles j
il seroit passé outre h la lecture de l’affiche ; subsidiàii’em e n t, ils demandèrent que l’inscription de la dame Juge
fût déclarée nulle et de nul effet, ainsi que tout ce qui
s’en étoit ensuivi.
Dans le cas où il seroit passé ou tre, il fut conclu à ce
q u e , faisant droit sur la demande en revendication du
sieur de V a n d è g re , aux qualités qu’il p ro cèd e, et pro
nonçant par jugement sé p a ré, la m oitié de la terre de
Jayet seroit distraite au profit du sieur de V a n d èg re,
conform ém ent à l’arrêté du départem ent, du 11 floréal
an 7 ; qu’il seroit pareillem ent fait distraction du terrain
délaissé aux frères et sœurs V é n y ; et que par autre juge*
ment il seroit ordonné de procéder à la vente des autres
objets non revendiqués, pour être adjugés à la chaleur
des enchères au profit du dernier enchérisseur, confor
mément à la loi : sauf au tribunal, d’après la revendis
ca tio n , à expliquer et régler le p rix tenant lieu d e là
mise aux en ch ères, sur lequel règlement les poursuivons
déclarèrent qu’ ils s’en rapportoient à droit.
A u milieu de ces débats, et après une discussion so
lennelle pendant deux audiences, il a été rendu un juge
ment contradictoire, q u i, faisant droit sur le to u t, sla-
�C 24 )
tiiant sur' les moyens de form e comme sur les moyens du
fon d , sans s’arrêter à la demande en revendication de la
; m oitiéî de la i terre de î Jayet soumise à la revente y de
laquelle le sieur de V andègre est débouté; sans s’arrêter
pareillem et à l’affiche / actes et autres-poursuites faites
à la* diligence des sieurs de V andègre et de Sam pigny,
et tendantes à la revente du domaine ou de partie du
domaine de Jayet,-lesquelles procédures sont déclarées
nulles et de nul effét ; il est ordonné que dans la form e
et dans les délais prescrits par la loi du ï 1 brum aire an 7 ,
sur les expropriations forcées, il sera procéd é, à 1la dili
gence des poursuivans, h de nouvelles affiches et poursuites
pour parvenir, à la revente du domaine entier de Jayet,
ainsi et de «même qu’il est porté dans le contrat de vente
du 14 avril-179 2 , soumis à la transcription par les sieurs
de V andègre et Sam pign y, lors de laquelle revente la
fixation et évaluation déjà faite par les mêmes parties à
la somme de 94567 francs,'ainsi que l’enchère de la dame
Q ueyriaux, veuve J u g e , de la somme de 4728 francs, tien
dront lieu de mise à p rix et de prem ière enchère.
Il est ordonné néanm oins, du consentement de toutes
lesp a rties,q u e,su r le domaine de Jayet, il sera fait distrac
tion du terrain délaissé aux sieurs de V ille m o n t, comme
n’ayant pas été originairem ent compris dans le domaine
d e'Jayet j sous la réserve faite par la dame veuve J u g e ,
de ses autres droits et hypothèques sur le terrain distrait,
en vertu de ses titres de créances.
;
Sur le surplus des demandes fins et conclusions , ' les
parties sont mises hors de cause; le sieur dé Vandègre et
la dame Sam pigny sont condamnés en tous les dépens; il
est
�( 25)
est donné défaut contre les créanciers noü com parans; e t,
p ou r le profit, le jugement est déclaré com m un entr’eux.
Il est indispensable de connoîtr'e les motifs nom breux
sur lesquels se sont appuyés lés premiers juges. Ils ont fait
résulter plusieurs questions des débats.
.La prem ière est de sa y o ir, i°. si l’acquéreur ou sou
représentant peut revendiquer la m oitié d’ un dom aine
v en d u , lorsque le contrat de vente renferm e la totalité du
domaine 'sans restriction , et lorsque c’est ce même contrat
qui est soumis à la transcription sans réserve. ;•
2°. Lorsque le titre qui fonde la revendication hypothé
caire est étranger aux créanciers inscrits; lorsque les droits
de ce créancier sur l’immeuble sont entiers , et que ce
créancier a été provoqué par l’acquéreur à faire son en
chère sur la totalité sans exception , la revendication peutelle être adoptée ?
3 °; Dans le cas de revente sur enchère d’un créancier
inscrit, y a-t-il nullité dans la procédure, lorsque l’affiche
n’a pas été posée au dom icile du déb iteur; lorsqu’elle n'a
pas été posée sur les bâtimens d’exploitation du dom aine
soumis à l’enchère; que l’étendue superficielle de ces bâti
mens d’exploitation n’a pas été spécifiée dans l'affiche ; et
enfin , lorsque l’affiche énonce vaguem ent une m oitié de
d om ain e, sans déterm iner si celte m oitié renfermera ou
non tout ou partie des bâtim ens, ou seulement des h éri
tages exploitables?
T elles sont les questions posées. O n verra bientôt que
la plupart d’entr’elles ne s’accorden t, ni avec le titr e , ni
avec l’alfichc.
D
�( *6 )
, Les premiers juges exam inant ensuite les différentes
objections des parties,
« i° . E n ce qui touche le moyen tiré de ce que l’ins« cription de la dame Q ueyriaux a été faite pendant l’émi« gration du sieur.de V é n y , et de ce qu’elle n’a pas été
« re n o u v e lé e après sa radiation, ils ont pensé que l’art. 17
« de la loi du 11 b ru m a ire , valide l ’inscription sur une
« personne décédée ; qu’elle peüt même être faite sur la
« simple dénom ination d’un défunt , et que la dame
« Queyriaux-, en réputant le sieur V é n y comme m o rt,
« s’est conform é à la loi.
;
« Cette loi étant gén érale, embrassant toute espèce de
«
«
«
«
a
créanciers et de débiteurs , la dame veuve J u g e , pour
conserver ses droits , ainsi que le rang et ordre de son
hypothèque , a dû prendre les précautions ordonnées
par elle. Les mesures prescrites par la loi ne devant
jamais rester sans ë ffe t, la dame veu ve Juge est fondée
« à en réclam er le bénéfice.
ce
et
cc
«
cc
«
«
«
« L a loi de prairial an 3 , qui ordonnoit aux créan
ciers d’ém igrés de faire liquider leurs créances pour en
toucher le m ontant, n’étoit qu’ une loi de circonstance ;
elle ne concernoit que les créanciers jaloux de réclam er
leurs créances sur la république , com m e étant à la
place de l’ém igré ; mais la dame Q ueyriaux ne demandant rien à la ré p u b liq u e , n’a pas eu raison de se faire
liq u id e r, les lois d’exception devant se renfermer strictement dans leur cas particulier.
« Cette loi de l’an 3 , antérieure à celle de l’an 7 sur
« les h yp o th èq u es, n’a pu en détruire les effets, surtout
�2>Z\
( . 27 ï
« lorsque la dame Q ueyriaux les invoque , non contre
« la rép u b liq u e, mais bien contre son débiteur rentré
« dans ses droits éventuels , ou contre ses representans.
« O n ne peut puiser dans la loi du 1 6 ventôse an 9 ,
« qui a prorogé le délai de faire inscription en faveur
« des créanciers d’ém igrés, un m otif pour faire rejeter
« l’inscription déjà faite par la dame veuve Ju ge, i° . parce
« qu’une loi de faveur et de bienfait ne peut jamais devenir
« un titre de réprobation ; 20. parce que la lo i, en auto« risant sur les ém igrés rétablis l’inscription avec tous
-«
«
«
«
ses droits et privilèges", a entendu nécessairement que
les inscriptions déjà faites par prévoyance eussent le
même effet sur ces mêmes ém ig rés, la raison étant
la m ême pour un cas comme pour l’autre. »
Sur le défaut d’intérêt qu’on a reproché à la dame
Q ueyriaux , on dit « qu’on ne peut raisonnablement
« opposer à la dame Queyriaux qu’elle ne pourra être
«
«
«
«
«
payée sur la m oitié comme sur la totalité du bien
de J a y e t, puisque là dém arche des poursuivans , dans
l’instance , ayant pour objet de soustraire à la prise des
créanciers la m oitié de ce dom aine, la dame Q ueyriaux
est fondée à craindre d’être prim ée par des créanciers
« an térieurs, et que par là l’autre m oitié de l’im m euble
« ne suffise pas pour rem plir sa créance. A in s i, non« s e u l e m e n t elle p e u t, mais elle doit même , sous le rap« port de son in té rê t, s’opposer à ce qui peut affoiblir
« son gage et sa sûreté.
• ; « D ’a illeu rs, tous les créanciers en général appelés
« à l’expropriation de leur débiteur , ont droit et intérêt
« de critiquer les diligences des poursuivans , soit sur le
D 2
éift
�4V ^
. ( *8 )
« fond des dem andes, soit sur la régularité des poursuites,
« parce que le bien de leur débiteur fait leur g a g e , et parce
« que les vices et les irrégularités retardent leur payement. E n m atière d’exp rop riatio n , toutes les préten« tio n s , ainsi que tous les actes, sont directs et per
ce sonnels à chacun des créanciers, qui y trouvent tous
* un avantage à prendre ou un m al à éviter.
« L a dame veu ve J u ge ayant été appelée , soit p ou r
« e n c h é rir, soit pour l’audience d’expropriation, en vertu
« de son inscription de l’an 7 , les poursuivans ont p u b li« quemertt reconnu par là qu’elle avoit intérêt et qua« lité suffisante dans la contestation. »
Sur la demande en revendication de la m oitié du do
maine de Jayet, « cette demande a paru aux premiers juges
« être en contradiction avec la dém arche faite par les pour*
« sui vans , lorsqu’ils ont soumis à la transcription le contrat
« de vente de 1792. Cet arrangement de fam ille embras« soit le domaine de J a y e t, sans d iv isio n , et a dû être
« valable pou r la totalité, ou nul pour le tout ; les pour« suivans, par leur transcription, l’ayant adopté et ratifié
«
«
et
«
«
pour le to u t, ne peuvent prétendre aujourd’hui que cet
acte doit être scin d é, puisque ce sont les actes qui
font connoître les véritables intentions des p arties, et
non les réserves faites après c o u p , suivant la m axim e :
P lu s valere quod a g itu r , quàrn quod sim ulatè
« concipitur.
« La transcription est lin acte par lequel l’acquéreur
« vient demander h la justice d’être rendu propriétaire
« incom m utable; il n’obtient ce bienfait que sous laco n « dition que les d r o i t s des créanciers inscrits seront con-
�«
«
«
«
o
«
«
v(
serves : il en résulte vunë espèce de contrat judiciaire
dont l’acquéreur ne peut plus se départir. L a dame
Q u e yria u x , en faisant une en ch ère, a spécialement a c - -»
cepté ce contrat : la transcription des poursuivons se lie
et se rattache au contrat de vente de 17 9 2 , et par conséquent. à la totalité du domaine de J a y e t, dont la revente sans restriction est inévitable.
« L es autres créanciers ont été aussi provoqués à en« ch érir j ils ont aussi reçu des poursuivans l ’assurance
« d’être p ayés, jusq u’à concurrence du p rix de la tota«
«
«
«
lité du Lien de Jayet; ils ont été également saisis de
cette promesse : ce contrat est également form é avec
e u x , puisqu’ ils,ont. ad héré.au x demandes de la dame
Q ueyriaux j et pris les mêmes conclusions qu’elle.
« L e contrat de vente de 1792 a été consenti à la
« dame de Y a n d è g re , m ère et belle-m ère des poursuivans.
« L a transcription par eu x requise a im plicitem ent
« annoncé aux créanciers inscrits que c’étoit en qualité
« d’héritiers de la dame de V an dègre qu’ils se rendoient
« propriétaires incommutables de cet immeuble. L es
« créanciers pouvoient librem ent faire valoir les droits
« q u’ils pouvoient avoir sur tous les biens de J a y e t,
« com m e venant en dernier lieu de la dame de V a n
te dègre : les créanciers ayant suivi cette im pu lsion , ne
« peuvent appréhender l'effet d’une revendication qui
« n’auroit pu être réclamée contre la dame V andègre.
« L a transcription ducontrat de 179 2 , renferm e aussi,
« de la part des poursuivans, une volonté form elle de
« renoncer à tous autres actes qui auroient pu porter
« atteinte à cette ven te, une intention m arquée d’adopter
�.......... . •
( 3° )
«
«
«
et
«
«
«
ce règlem ent de p référen ce, de s’y tenir plus particulièrement qu’à tout autre, et de fixer sur lui seul l’attention et les poursuites des créanciers. Sans cette in
tention spéciale dans les poursuivons, là transcription
de la vente de 1792 devient inexplicable; elle ne p résente aucun objet vis-à-vis des créanciers : la notification qui leur.en a été faite seroit illu so ire , ce qu’on
'
'H.
» ne peut admettre.
« L ’objection tirée de ce què le traité de l’an 1 1 , passé
« entre le sieur de V é n y et ses enfans, est soumis à la
« transcription, que dès-lors il a dérogé à la vente de
« 1792 , paroît être sans fondem ent, parce que cet acte
« ne peut concerner que les parties qui y sont contrack tantes; il étoit étranger aux créanciers dont les ^droits
« étoient antérieurs et légalem ent conservés. D e p lu s ,
« il paroît que cet acte n’a eu pour objet que de donner
« plus d’effet et d’étendue au contrat de mariage des père
« et m ère, du mois d’ôctçbré 1773 , de prendre des me« sures contre les prétentions du père, et d’assurer l’éga« lité entre les enfans ; ce qui n’a pii lier les créanciers,
« ni préjudicier à leurs droits.
« L a revendication dont il s’agit, étant appuyée sur la
« donation de biens présens et à venir portée en ce con« trat, ne devient pas plus favorable ; elle n’est pas encore
« ouverte vis-à-vis des tiers , tels que des créanciers : il
« faut attendre , pour lui donner e ife t, la m ort naturelle
« du sieur de V én y . L a m ort c iv ile , par lui encourue
« m om entaném ent, a pris fin, relativem ent aux suites de
« la donation de biens présens et à v e n ir, par sa radia
it' tion. Les droits éventuels attachés à sa' personne , et
�»
(■ 30
«'
a
«
«
«
«’
«
«
subordonnés seulement à sa m ort n atu relle, ont rep ris,
vis-à-vis des tiers, toute leur force et leur effet prim ordial. Sans d o u te, au décès du sieur de V ille m o n t, ses
enfans donataires auront le c h o ix , oü de s’en tenir aux
biens présens seu ls, en payant à proportion les dettes
existantes lors de la d onation, ou de prendre les biens
présens et à v e n ir , à la charge de payer les dettes au
moment du décès. D e même i que les créanciers ou
« autres ne pourroient un jour obliger les 'enfans à se
«
«
«
«
restreindre aux seuls biens présens , et à abandonner
tous les biens à ven ir;' de m ême ceux-ci ne p eu ven t,
dès à p résen t, forcer les créanciers à reconnoître l’option prém aturée des biens présens. M a is , par la raison
« que les enfans ne peuvent être dépouillés de l’espérance
« des biens à v e n ir , ils ne peuvent aussi se d ir e , à l ’égard
« des créanciers, saisis et vêtus des biens présens. L e sieur
« de V é n y ne peut être en m êm e temps réputé m ort et
« v iv a n t, pou r donner aux enfans le p rivilège actuel de
« prendre les biens.
« A la v é r ité , le sénatus-consulte de l ’an 10 n’a rétabli
« les ém igrés dans leurs droits c iv ils , que sous condition
« de ne p o u vo ir attaquer les actes faits par la nation ; mais
« cette disposition ne concerne que les émigrés person« nellem ent, pour les empêcher de pôrter le trou b le, soit
« dans leur fam ille, soit dans les arrangemens qui peu« vent intéresser des tiers, et cette défense n’a trait qu’aux
« seuls ém igrés : elle n’a pas pour but de frustrer des
« créanciers légitim es. Dans la circonstance', les enfans
« du sieur de V é n y ne peuvent pas être considérés, vis« à-vis des créan ciers, comme des tiers ayant un droit
�C'32 )
« acquis par la m ort civile de leur p è fe , puisqu’il n’est
« pas question d’un droit déterm iné et constant, comme
« seroit un fidéicom mis sur des biens désignés , lequel
« s e r o it o u vé rt, d’après l’article 24 de l’ordonnance des
« substitutions. M ais il s’agit d’une donation de biens
« présens et à venir. L es effets de cette donation , quant
et aux biens présens, sont encore liés et inséparables de
« celle des biens à v e n ir, dont l’option et le droit sont
« attachés à la m ort naturelle du sieur de V e n y . Jusque-là
« rien n’est encore dû aux donataires de cette espèce, et
« les enfans ne peuvent opposer à des créanciers incrits
« des actes non transcrits, et qui ne peuvent être opposés
« à des tiers.
a Indépendamment de ces prin cipes, il se présente en
« faveur de la dame veu ve Ju ge des motifs d’équité qui
» déterminent. Ses droits sont constans" et légalem ent con« servés;sbn hypothèque, assurée sur tous les biens du père
a tant qu’il étoit viva n t, étoit incontestable : elle retrouve
«
«
«¿
a
a
aujourd’hui ces mêmes biens dans les mains de son d é biteur ou de sès enfans, qui n’ont pu les prendre qu’à
titre d’enfans, et par anticipation sur la succession de
leur père encore vivant. O r , com m ent dans une telle
position* la punition infligée par la loi au père s e u l,
« profitable aux enfans à l’égard du père seu l, pourroitcc
«
«
«
elle rejaillir sur un créancier lé g itim e ? Com m ent des
actes qui n’ont été que des ai'rarigemens de fam ille ou
de circonstance, q u i, par leu r'to u rn u re , leurs précautions et leur o b scu rité, annoncent les circonstances qui
« les ont fait n aître; com m ent de tels actes pourroient-ils
« fonder Une revendication qui suppose des titres précis
a et
�M
l
C 33 3
« et des droits ouverts ? JDe tels actes ne peuvent être
« regardés d’un œil favorable.
Sur la nullité de la procédure , les premiers juges
soutiennent que « les parties ont respectivement confondu
« avec les moyens de la revendication, ceux de la nullité
« de la.procédure. Il a fallu en même temps faire droit sur
c les uns et sur les autres, pour ne pas laisser la perspec« tive d’une contestation assurée au m oment de la revente.
« A p rès avoir présenté aux enchères la totalité de
«
«
«
«
«
Jayet, après avoir induit à faire des offres sur cette iotalité , la l’evendication de la m oitié du domaine , faite
par les poursuivans , tend à laisser sans enchère réelle
l’objet proposé à la revente. En effet, la dame Q ueyriaux
se trouve avoir fa it, sur une m oitié de dom ain e, une
« enchère qu’elle n’auroit pas faite , oü qui aliroit été
« beaucoup moindre ; et, d’un autre côté, les pouvsuivans
«
«
«
«
«
«
ont été obligés de consentir à l’audience que cette enchère fût restreinte, ou qu’il en fût fait une nouvelle.
A in si , il est vrai de dire que l’a/ficlie a été présentée
au public sans véritable enchère, puisque celle qui est
mentionnée n’est pas de l’aveu même des poursuivons,
l’enchère véritable et sérieuse qui doit être la prem ière
« mise, et qu’ainsi l’article 5 de la loi du 11 brum aire a été
« violé à cet égard. »
Sur la nullité résultante de ce qu’il n’a pas été mis
d’ailiche au domicile du débiteur , le tribunal dont est
appel décide «
« dom icile réel
« T e m p le , n°.
« dans son acte
qu’on ne peut révoquer en doute que le
du sieur V é n y étoit.à Paris, vieille rue du
j8 o ; le sieur V e n y le déclare lui-m êm e
d’élection : les poursuivons l’ont reconnu
E
�k
«
«
«
«
«
ce
«
«
«
( 34 )
en lui signifiant, à ce dom icile de P a ris, l’enchère de la
dame veuve Juge. 11 est aussi aisé d’apposer une affiche
à Paris que d’y signifier une enchère ; l’un et l’autre de
ces actes sont également du ministère de l’huissier, également prescrits par la lo i; et l’exécution de l’un de ces
actes devient un titre de condamnation pour celui qui a
été omis ou négligé.
a L ’article 5 de la loi du n brum aire commandoit impérieusement cette form alité, Cette loi paroît avoir eu
deux objets dans sa disposition ; le prem ier, d’apprendre
au débiteur qu’il est réellem ent exproprié , ou que le
«
«
«
«
«
«
a
bien par lui vendu est à l’enchère; le second, de faire
connoître au public le degré de sûreté et de confiance
présenté par celui sur les biens duquel il y a des poursuites légales ; enfin , la loi a toujours à cœur que les
actes importans soient faits au dom icile réel et de droit
du débiteur , comme partie la plus intéressée à les connoître.
« L ’élection de dom icile faite par le sieur V é n y chez
«
«
a
cc
et
«
M e. L ougn on , son a v o u é , ne pouvoit dispenser de
faire l’affiche au dom icile de droit. Les élections de
dom icile chez une personne désignée, n’ont lieu que
pour les significations des actes ordinaires ou des copies
de pro céd u re, et non pour une apposition d’afliche qui
doit être faite au dom icile réel et de droit : d’ailleurs,
« l’affiche n’a pas même été apposée au domicile élu du
« sieur de V én y.
« Si le sieur de V é n y néglige de relever ce m oyen, la
« dame veuve Juge a le droit de se l’approprier.
« L ’apposition d’affiche n’a pas même eu lieu aux bâti-
�«
«
cc
«
«
mens du domaine de Jayet. Cette form alité est cependant rigoureusement prescrite par l’article 5 de la loi
déjà citée. L ’affiche énonçoit Vexistence de ces bâtimens
avec leur couverture : ils étoient donc présentés comme
étant en état d’exploitation.
« Il ne suffit pas d’alléguer que ces bâtimens n’existent
« plus, et qu’ils sont tombés en ruine. O u ils sont écroulés,
« comme on le prétend, disent les premiers juges, et alors
« il ne falloit pas en faire mention dans l’affiche, ni pré-
« senter aux enchérisseurs un appât trom peur et m en« songer ; ou ils existent en tout ou en partie, et il falloit
« une apposition d’affiches, même sur les masures, comme
« restes de bâtimens saisis. » D e là les premiers juges font
résulter un vice radical dans la puocédure.
O n avoit fait également usage d’ un m oyen résultant
de ce que la contenue des bâtimens du domaine n’avoit pas
été spécifiée. Les premiers juges ne veulent pas faire grâce
de cette objection , et ont pensé qu’une telle omission
étoit encore un manquement essentiel à la loi.
Ils sont plus généreux sur l’objection tirée de ce que
les affiches n’ont pas été posées un jour férié. L a loi du 11
brum aire n’exige pas cette form alité : les dispositions ri
goureuses doivent être plutôt restreintes qu’étendues, et
on ne peut pas ajouter à la loi.
Ils ne sont pas plus difficiles sur la revendication du
terrain adjugé aux frères V é n y : toutes les parties y ont
consenti -, la dame Queyriaux ne s’y est pas même opp osée,
elle s’est seulement réservé ses moyens de droit sur cet objet.
O n voit c[ue les premiers juges ont porté le plus grand
soin dans la rédaction de leurs m otifs; tout prouve même
E 2
�¡v»vt«
«
(s6)
qu’ils y ont mis de la prétention : mais en sont-ils m ieux
fondés? L e sieur de V a n d èg re, aux qualités qu’il p ro
cè d e, a-t-il eu le droit de revendiquer lu m oitié du do
maine de J a yet? Y a-t-il des nullités dans la procédure ,
qui puissent faire la plus légère impression ? Telles sont
les questions principales que les poursuivans soumettent
à la cour par leur app el; questions qui exigent un exa
men ap p ro fo n d i, et d’assez longs détails : mais la cause
d’ailleurs est assez importante pour ne rien négliger dans
la discussion.
P R E M I È R E
QUESTION.
L e sieur' de V a n d ogre est bien f o n d é à revendiquer au
nom de s o n jïls la m oitié de la terre de J a y e t.
Ce n’est pas sérieusement, sans doute, qu’on a voulu
attaquer la donation portée au contrat de m ariage du 1 i
octobre 1773* La m inorité de M . de Y é n y 11’étoit pas
un obstacle à la validité de cette donation. Si la Coutume
d’A u v e rg n e , article 2 du titre 1 3 , défend au m ineur de
disposer de ses biens im m eubles, par contrat ou autre
m en t, cet article, qui est de droit com m un, rccevoit
une restriction en cas de donation faite par le m ineur,
en faveur de ses enfans à naître, par contrat de mariage.
Des dispositions de cette nature, dit le dernier commen
tateur, ne causent aucun préjudice à celui qui les fait;
elles le mettent dans l’heureuse impuissance de dissiper scs
biens, en les assurant à scs enfans a qui ils doivent natu
rellement revenir par ordre de succession. D eu x arrêts,
�C 37 )
l’u n , du 13 mars 1 7 4 1 , rendu en faveur de M . le duc
d’O lonne; l’au tre, du 7 mars 17 6 8 , rendu en faveur du
sieur de Strada, ont consacré ce principe.
L a clame de V é n y , épouse du sieur de V an dègre , a
donc été irrévocablem ent saisie de la moitié des biens
dé son p è r e , au moyen de la donation portée au contrat
de mariage de 17 7 3 , avec d’autant plus de raison que le
sieur de V é n y ne s’est pas pourvu en restitution contre la do
nation par lui faite dans les dix ans de sa majoi’ité.
T o u t est consommé aujourd’hui au moyen de l’arrêté
du département qui a investi la dame de V andègre de
la m oitié de J a yet, ainsi que du surplus des biens de son
père. La succession de ce dernier étoit alors ouverte par
la m ort civile qu’ il avoit encourue, et qui a les mêmes
effets que la m ort naturelle. La dame de. V an dègre a fait
son option pour les biens présens, en répudiant les biens
à venir ; et si le sieur V é n y , son p è re , est depuis rentré
dans'tous scs droits de citoyen, il ne peut plus jeter un
regard sur le passé , il est obligé de respecter tout ce qui
a été ¡fait par les corps administratifs pendant son absence;
etses créanciers, qui n’ont pas plus de droit qu’il ne pourroi t en avoir lui-m êm e, attaqueroient vainement l’arrêté
qui a investi la dame de Vandègre de sa propriété.
L a dame de V andègre., par son d écès, a transmis la
m oitié des biens de son père à l’enfant qu’elle a eu de
son mariage avec le sieur de V a n d è g re : cet enfant l’a
recueillie à litre de succession. L ’état des choses a changé;
il y a novation en faveur du iils, qui est aussi irrévo
cablement saisi.
E u cct état de choses, com m ent seroit-il possible de
�contester la demande en revendication qui a été form ée
par le sieur de V a n d èg re, comme tuteur d e , son fils?
Il s’est conform é, en tous points à la disposition de la
loi du i i brum aire an 7. Cette l o i , article 25 , pose en
principe que l’adjudication définitive ne transmet à l’ad
judicataire d’autres droits à la propriété que ceux qu’avoit
le saisi. E lle accorde dix ans aux parties intéressées pour
revendiquer la propriété des objets qu’on auroit mal à
propos compris dans les affiches, ou même dans l’adju
dication. O n n’a opposé au sieur de V andègre aucune
omission dans les formes pour régulariser sa demande ; il a
suivi toutes les formes prescrites par l’article 27 de la
même l o i , et il n’est pas inutile d’ajouter q u e , d’après
l ’article 2 9 ,1a revendication antérieure à l’adjudication
n’em pêche pas que le tribunal ne puisse ordonner l’ad
judication de tout ou partie des objets non revendiqués. Cette observation trouvera sa place dans la suite de la dis
cussion.
L e traité du 29 brum aire an 1 1 , qu’on présente sans
cesse comme une pierre d’achoppem ent, ne peut cepen
dant faire obstacle à la demande en revendication. En
supposant, comme on a voulu le prétendre , que ce traité
contînt une renonciation aux droits déjà acquis au m ineur
V an dègre , il seroit absolument nul sous ce rapport. O n
rem arque en effet que le sieur de V andègre p è r e , n’a
agi ,.11’a contracté qu’en qualité de père et légitim e admi
nistrateur de son fils mineur. Il n’a pris aucun engage
ment personnel ; et personne n’ignore qu’on ne peut
déroger aux droits d’un m ineur impubère., que le tuteur ;
n’a ni qualité ni capacité, pour aliéner les biens de sou
�*
(39 )
p u pille: le sieur de Vandègre d’ailleurs n’a été autorisé par
aucun conseil de famille ; il n’a été observé aucune des
formalités prescrites pour l’aliénation des biens du m ineur :
dès-lors ce traité seroit illusoire et n u l, et seroit opposé
sans succès.
M ais le sieur de V andègre lui-mêm e a-t-il voulu dé
roger aux droits acquis de son fils ? Cet a c te , dont on
veu t tirer d’aussi grandes inductions , n’est qu’un arran
gement de famille qui ne peut nullem ent concerner de3
tiers; un acte dicté par des motifs de déférence ou de
respect pour un père m alheureux que des enfans ne veu
lent pas entièrement dépouiller.
Mais le sieur de V a n d è g re , comme la dame de Samp ig n y , ont senti le danger que pourroit avoir une défé
rence absolue ; aussi ont-ils expressément stipulé qu’ils
accédoient au désir de leur p è r e , sans aucunem ent dé
roger ¿1 leurs droits acquis par tout autre titre que la
vente y n i y préjudicier. Ils se sont réservés la faculté
d’exercer les droits qu’ils peuvent avoir indépendamment
de la ven te, sans novation ni dérogation contre lés acqué
reurs qui y seroient su brogés, dans le cas où , su r la
transcription q u i sera fa ite de cette len te au bureau
des hypothèques , et la n otifica tion , il surviendroit des
enchères de la p a it des créanciers intéressés et inscrits.
Ce n’est pas ici une simple réserve, une protestation
générale et indéfinie , c’est une condition expresse et sine
qua n o n , une condition tellement inhérente au tra ité,
que l’une ne peut exister sans l’autre : c’est le m otif unique
et absolu qui les a déterminés à prendre des nrrangemens.
Ils ont bicu voulu se prêter à ce qui pouvoit convenir au
�U ° )
sieur de V é n y , mais ils n’ont pas voulu être en butte à
ses créanciers; ils ont cherche à l’obliger personnellement,
mais sans com prom ettre leurs droits ou leurs intérêts visà-vis des tiers. Ce n’est que par cette, considération , et
au moyen de leur réserve , qu’ils ont traité ; et comment
des tiers ou des créanciers pourroient-ils s’emparer d’un
pacte de fam ille, d’un acte dans lequel le sieur de V é n y
n’a point cherché des avantages pour lui personnelle
m e n t, ni pour ses enfans, où il ne s’est au contraire
occupé que de l’intérêt de ses créanciers , en leur assu
rant sans reto u r, par les stipulations du traité, le p rix de
la vente de l’an 11 , nonobstant tout événem ent dont il
a mis les risques à la charge de ses enfans acquéreurs,
autant qu’il n’y auroit pas d’enchères.
L:\ dame veuve J u g e , loi’s de la plaidoirie de la cause,
ji’étoit pas allé si loin que les premiers juges ; elle sembloit reconnoitre la validité des titres du m ineur V a n d ègre; elle accédoit à la revendication; elle exigeoit seu
lement qu’on réduisît la mise à p rix ou le taux de son
enchère.
M ais les premiers ju g e s , dans leurs m otifs, pensent
que la revendication est en contradiction avec la dé
m arche faite par les poursuivans , lorsqu’ ils ont soumis
à la transcription le contrat de vente de 1792.
Il faut être bien ingénieux pour trouver une contra
diction dans cette demande. E n e ffe t, lors du traité de
l’an 11 , le sieur de Y an dègre , tuteur , et la dame de
Sampigny , n’ont accédé aux propositions du sieur de
V é n y , qu’autant qu’ ils feroient transcrire la vente de
1792 et le traité lui-m êm e; et dans le cas..où sur la
transcription
�( 41 )
transcription il y auroit des enchères, alors ils se sont ré
servé tous leurs droits. Cette démarche est sans doute trèsconséquente , au lieu d’être contradictoire. Us ont dit :
O n veut que la vente de 1792 sorte son effet avec les
modifications ou réductions que nécessitoient les circons
tances. Nous acceptons cette proposition , pou rvu que
nous puissions devenir propriétaires incom nm tables, et
qu’il n’y ait pas d’enchères -, mais s’il y a des en chères, il
n’y a plus ni vente ni traité ; nous rentrons dans tous
nos droits : et certes , un tel arrangement est facile à
concevoir. Pourra-t-on jamais supposer que les appelans , créanciers de sommes considérables , comme h éri
tiers de la dame de V é n y , leur m ère, dont les créances
étoient antérieures à toutes autres , puisqu’elles rem ontoient au contrat de mariage de 1 7 7 3 ; que le sieur de
V andègre , dont le fils étoit p ro p rié ta ire incomm utable
de la m oitié de Jayet ; que les appelans réunis aient
voulu sacrifier tous leurs droits, tous leurs intérêts au
profit des créanciers qu i leu r étoient postérieurs ? U n
tel abandon ne pourroit s’exp liq u er; et les principes les
plus rigoureux de délicatesse ou d’honneur ne com m an
dent pas de pareils sacrifices.
O n oppose que les actes font connoîlre les véritables
intentions des parties, et non les réserves faites après
coup , suivant la m a x im e , plus valere quod agitur ,
quàrn quod sim ulatà concipitur.
Cette maxime ne sauroit être plus étrangement appli
quée. Ce n’est point ici une protestation ou réserve géné
rale , qui souvent sont inutiles, comme le dit L e b ru n ,
lorsqu’elles sont form ellem ent contraires à la substance
F
�C 42 )
<3e l’acte ; mais c’est une condition expresse, q u i, loin
d ’être contraire à la substance de l’acte, explique et ma
nifeste suffisamment l’intention des parties ; condition
in d ivisib le, sans laquelle le traité n’auroit pas eu lie u ,
de laquelle l’acte tire sa force et son existence , au point
q u ’il ne peut pas subsister sans la con dition, puisque les
parties n’ont transigé que dans cette confiance. Ce n’est
pas une réserve faite après coup , puisqu’elle est con
tenue dans l ’article 2 de ce traité qui en renferm e sept
autres; elle e s t, au co n traire, le prélim in aire, la cause
essentielle : elle doit donc avoir tout son effet.
Dans l’espèce, le sieur de V andègre particulièrem ent
avoit deux qualités. Comm e tuteur de son fils , il étoit
propriétaire de la m oitié des biens du sieur de V é n y ; il
a bien voulu ensuite se prêter à devenir acquéreur, mais
6 OUS la condition qu’ il n’y auroit pas d’enchères ; et dès
q u’ il y a eu des enchères, il n’y a pas de doute qu’il a pu ,
p o u r s’exprim er com m e les premiers juges, scinder l’acte
de vente , abandonner aux créanciers la m oitié qui apparlenoit i\ leur débiteur, et revendiquer l’autre, dont son fils
étoit propriétaire : moitié qui n’a jamais pu être soumise
aux créanciers, qui n’ont d’hypothèque que depuis le con
trat de mariage de 1773.
En vain opposeroit-on que la transcription, suivie d’en
chères , saisit les créanciers ; q u ’ il y a un contrat judiciaire
avec e u x , et qu’ils ont été saisis de la totalité du bien de
Jayet par la transcription qui en a été faite.
Ce raisonnement , qui n’a pas même le m érite d’être
spécieux, conduiroit ¿\ de singulières conséquences. Il faudroit retrancher de la lo i du 1 x brum aire an 7 , le titre des
�0 3 7
N
C 43 )
revendications, parce qu’il ne pourroit jamais y avoir lieu
à revendiquer. E n effet, souvent un vendeur com prend
dans sa vente des objets qui ne lui appartiennent p a s, ou
pour lesquels il est en p éril d’éviction; souvent un créan
cier poursuivant com prend dans son affiche des biens qui
n’appartiennent pas au saisi. Dans l’un comme dans l’autre
cas , les créanciers sont investis de la totalité des biens
compris dans la transcription ou dans l’affiche. L ’enchère
frappe sur la totalité des objets; il y a, comme dans l ’espèce,
un contrat judiciaire, suivant le dire des premiers juges : et
cependant, dira-t-on qu’alors le propriétaire des objets
mal à propos confondus dans la transcription ou dans
l ’affiche , ne peut pas les revendiquer ? Non-seulem ent il
le peut d’après la loi antérieurement à l’adjudication, mais
encore d’après la même lo i, qui établit en ce point un droit
nouveau, il peut exercer cette revendication pendant d ix
ans, à com pter de l’adjudication.
Quelle différence y a-t-il donc entre ce propriétaire qui
revendique dans ce cas , et le sieur de V andègre qui exerce
aujourd’ hui la même action ? N ’a - t - i l pas les mômes
droits? la loi l’auroit-elle privé de cette faculté ?
M ais on dit qu’il réunit les deux qualités d’acquéreur
et de p ro p riéta ire, et qu’ il a renoncé à cette dernière
qualité en acceptant celle d’acquéreur ; et où a-t-on trouvé
qu’il ait fait une pareille renonciation? T o u te renoncia
tion doit être expresse ; les lois n’en admettent pas de
tacites. Ici le sieur de V a n d è g re , loin d’abandonner son
droit de p ro p rié té , l’a réservé expressément : il a donc
pu revendiquer. N ’a r r iv e - 1 - il pas tous les jours , par
e x em p le, qu’ un acquéreur achète des objets sur lesquels
F 2
�C 44 )
il avoit cîes d roits, ou pour lesquels il avoit form é une
demande en désistement ? Il acquiert pour éviter un
procès ; il transcrit son contrat, et éprouve des enchères.
V oudroit-on soutenir que, parce qu’il a acquis, il n’a pas
le .d ro it de revendiquer les objets dont il avoit demandé
le désistem ent? L ’article 2177 du Code civil décide bien
positivem ent le con traire, puisqu’il v e u t, avec la liaison,
que les servitudes et droits réels que le tiers-détenteur
avoit sur l’im m eu b le, avant sa possession, renaissent
après le délaissement, ou après l’adjudication faite sur lui.
A in si , les raisonnemens des premiers juges tombent
d ’eux-mêmes : ils sont inconséquens, et en contradiction
avec la loi. L e sieur de V an dègre n’est plus acquéreur,
dès qu’il y a une en chère; il rentre dans tousses droits,
du moment que les biens sont sous la main de la justice:
il a donc pu les exercer dans toute leur étendue ; il a donc
pu revendiquer la m oitié qui appartient à son iils.
Les premiers jnges en reviennent à dire que la reven
dication n’étant appuyée que sur la donation des biens
présens et à venir de 1773 , cette donation n’est pas ou
verte vis-à-vis des tiers tels que des créanciers,: il faut
attendre, pour lui donner effet, la m ort naturelle du sieur
de V én y .
Celte assertion est contraire à tous les principes. L a
m ort c iv ile , dit R ic b e r , page 2 7 3 , est une fiction qui
doit se conform er en tout à la nature. Quand un hom m e
est frappé de la m ort naturelle , sa succession est ouverte
au profil de ceux à qui elle app artien t, soit par le sang,
soit par la disposition de la loi,soit, enfin par la disposition
testamentaire du défunt lui-même. 11 en est ainsi de la
�( 45
m ort civile ; elle dépouille celui qui l’a encourue de tous
les biens qu’ il possédoit. S’il renaît à la vie civile par quelqu’événement que ce s o it, il ne rentre dans la plénitude
de ses droits que p our Tavenir $ mais les pertes qu’il a
faites par sa m ort c iv ile , et dans l’intervalle , sont sans
retour. lie Gode civ il le déclare positivem ent, articles 25
et 30 ; et les lois de la ré v o lu tio n , qui ont rappelé les
religieux à la vie c iv ile , consacrent le même principe.
Les religieux succèdent, en e ffe t, depuis la loi du 5 b ru
maire an 2 ; mais ils ne sont réintégrés ni dans leur patri
m oine qu’ils a voient perdu par leur profession religieuse,
ni dans les successions écliues dans l’intervalle de leur pro
fession à la loi du 5 brumaire.
O r , si le sieur d e V é n y avoit été d é c é d é , sans contredit
le sieur de V an dègre , son petit-fils , eût été propriétaire
incomm utable de la m oitié de ses biens-, les tiers n’auroient
eu rien à récla m er, à l’exception des créanciers antérieurs
a la donation. Il en est de m êm e de fa m o rt civile ; elle
a eu les mêmes efi'els. L e sieur de V é n y ne peut pas re
v iv re pour l’espace de temps qu’il a été enveloppé dans
la proscription : il ne peut plus revenir sur le passé; et
lorsque les premiers juges ont soutenu que la disposition
de la loi ne concernoit que les émigrés personnellem ent,
n’a voit trait q u’à eux seuls , et ne pou voit regarder les
créanciers, c’est m éconnoître tous les principes, c’est vo u
lo ir qu’ un homme soit tout à la fois m ort et vivant ; ce
qui l’épugne aux lois d elà nature comme aux règles de la
m ort c iv ile , qui imite la m ort naturelle dans tousses effets.
Q u’ on ne dise pas que cette donation contenant tout à
la fois des biens présens et à v e n ir, les biens présens sont
�inséparables des biens à v e n ir, et que l’option est attachée
à la m ort naturelle du sieur de V é n y . Ce n’est là qu’une
pétition de p rin cip e, un cercle vicieux. Ün a déjà dit que
la séparation des biens à venir avoit été faite, que l’op
tion des biens présens avoit été consommée par l’arrêté
des corps adm inistratifs; et il n’appartient pas aux tri
bunaux d’annuller des actes .administratifs qui ont déjà eu
le u r pleine exécution , auxquels les créanciers se seroient
vainement opposés, puisqu’ils .n’avoient aucun droit sur
les biens com pris en la donation de 1773.
L es premiers juges n’ont pas ignoré que leur système
étoit contraire aux principes du droit*, ils s’appesantissent
principalem ent sur des m otifs de considération , et c’est
s’o u vrir un cham p bien vaste; mais lorsqu’ils disent que
la revendication tendroit à laisser sans enchères réelles
'l’objet proposé à la rev en te, ils ont encore erré en point
de d roit, comme en point de fait.
En point de d r o it, parce que la mise à p rix sur la tota
lité des objets ne peut pas em pêcher la revendication , elle
ne peut pas m ême m ettre obstacle à l’adjudication de
tout ou de partie des objets non revendiqués. L ’article 29
de la loi du 11 brum aire an 7 en a une disposition pré
cise, et tous les jours on en vo it des exemples dans les
tribunaux. A la v é r it é , la loi ne s'explique pas sur les
en c h è re s , et ne déterm ine pas de mode de réduction ; mais
il est raisonnable de penser qu’alors le créancier enché
risseur peut retirer son enchère, parce qu’il peut dire
que la revendication a dérangé ses projets, et qu’il n’auroit
pas enchéri, s'il n’a voit com pté sur la totalité des objets.
llicn n’em pêchoit la dame Juge de retirer son enchère :
�«3 *1
( 47 )
les appelans y donnoient les mains; ils ont m êm e déclaré,
et à cet égard leur consentement est consigné dans les
motifs du jugement , qu’ ils consentoient à ce que la mise
à prix de la dame veu ve Juge fût réduite h la m oitié, dèslors les intérêts de la créancière étoient à co u v e rt, et,
comme on le v o it, il y a erreur en point de f a it, d’après
le consentement des sieurs de V a n d ègreet Sam pigny.
On ne peut dissimuler son étonnement d’ailleurs de
cc que les premiers ju g e s, en déclarant la procédure
n ulle, ont ^tatué en même temps sur la demande en reven
dication. C ’est au moins le prem ier exem ple d’un juge
ment qui statue tout à la fois sur la form e et sur le fo n d ,
lorsque la procédure est déclarée nulle. S i , en effet,
ralliche et Pexpropration sont annullées, tout disparoît,
même la demande en revendication qui n’en est que
l ’accessoire. Il n’y a lieu a revendication qu’autant qu’il
y a expropriation. L es premiers juges se sont bienaperçu de cette inconséquence; e t, p o u r s’en tirer, ils ont
prétendu que les parties avoient respectivement confondu
avec les moyens de la revendication ceux de la nullité
de la p ro céd u re; dès-lors, disent-ils, il a fallu en même
temps faire droit sur les uns et sur les autres, pour ne pas
laisser la perspective d’une contestation assurée au m oment
de la revente.
Etonnante prévoyance dont il est peu d’exem ples, et
qui ne trouvera pas d’ imitateurs! M ais comment peut-on
dire que les moyens de la revendication ont été confondus
avec ceux de la procédure? Ce n’étoit pas les mêmes par
ties; le véritable poursuivant dans la cause étoit la dame
J u gc, puisque son enchère avoit fait cesser la vente volofi-
�J fk
(48)
taire de 1792 ou de l’an 2. L a dame veuve Juge gardoit le
plus profond silence après son en ch ère, et les acquéreurs
ne vouloient pas rester dans cet état d’incertitude. E n fai
sant procéder à l’affich e, le sieur de V an dègre et la dame
de Sam pigny ne faisoient que se subroger aux poursuites
qu’auroit dû faire la dame veuve Juge ; ils figurent comme
acquéreurs pour l’affiche et l’expropriation , mais .c’est le
sieur de V an dègre seul q u i, comme tuteur de son fils , et
après y avoir été autorisé par un .conseil de fam ille, a form é
la demande en revendication : demande^qui est une action
im m o b ilière, distraite et séparée de l’expropriation , qui
ne concernoit que le fils du sieur de V andègre seul, et qui
étoit étrangère à la dame de Sam pigny.
Il ne pouvoit donc pas y avoir de confusion. Les pre
miers juges, suivant toutes les règles observées jusqu’ici,
devoient préalablem ent exam iner les moyens de nullité
qu’on opposoit contre la procédure ; et dès qu’ils leur
paroissoient assez graves pour les déterm iner, ils devoient
se contenter de déclarer l’affiche n u lle , sans q u’il leur fût
permis d’exam in er, ni les moyens du fo n d , ni le m érite
de la revendication , qui n’existoit plus dès qu’il n’y avoit
plus d’affiches valables.
A in s i, sous tous les points de vue , la demande en re
vendication du sieur de V a n d è g re , en qualité de tuteur
de son fils , ne peut faire la m atière d’un doute sérieux.
Son fils est irrévocablem ent propriétaire de la m oitié des
biens du sieur V é n y , son aïeul ; la donation de 1773 est
valable en la form e : dans tous les cas, la restitution ne
seroit ]>1us adm issible, dès que le sieur de V é n y , donateur,
ne l’a point attaquée dans les dix ans de sa majorité.
La
�( 49 )'
L a m ort civile qu’il a eucourue momentanément a
donné lieu à. l’ouverture de sa succession ; l’arrêté du
département a investi la dame de V én y-V a n d ègre de tous
les droits qui lui étoieut attribués par la donation : cet
arrêté n’est pas soumis à la censure des tribunaux; il doit
être exécuté. L e sieur de V ény , quoique rétabli dans
l’exercice de ses d ro its, ne peut revenir sur le passé : il
doit prendre les choses dans l’état où il les trouve.
L e traité de l’an 11 est viscéralement nul par rapport
au fils de M . de V a n d è g re , puisque ce dernier n’a agi
qu’en qualité de tuteur de son fils, et qu’il n’a p u , d’après
les principes les plus certains en cette m atière, déroger
aux droits de son pupille. F û t-il valable, il n’a été fait que
sous la condition expresse qu’il n’y auroit point d’enchères
des créanciers, ou qu’en cas d’enchères il rentrex*oit dans
tous ses droits; condition très-licite qui fait partie essen
tielle de l’acte , et qui prouve l’intention des parties.
lie jugement qui a rejeté cette revendication est donc
évidem ment injuste; il est également prém aturé , puisqu’en déclarant la procédure nulle il ne pouvoit exam iner
le m érite du fond : dès-lors l’appel ne sauroit êti’e m ieux
fondé.
S e c o n d e
q u e s t i o n
.
I l n y a point de nullité dans la procédure q u i a été tenue
par les sieurs de Vandègre et de Sampigny.
Les moyens de nullité qu’on oppose consistent à d ir e ,
i Q. qu’il n’avoit point été apposé d’affiches à P a ris, où
réside le sieur de V é n y , partie saisie; 2°. que l ’apposition
d’affiches n’a pas eu lieu aux bâtimens du domaine de
a
�( 5° )
Jaj^et ; 30. que la contenue des M tim ens du domaine n’a
pas été spécifiée dans l’afficlie 40. que les affiches ont été
apposées un joui* ordinaire, et devoient l’être un jour férié.
Relativem ent au p rem ier, il n’est d’aucune importance.
A la vérité , l’article 5 de la loi veut qu’il y ait une affiche
ù l ’extérieur du dom icile du débiteur et des édifices saisis;
mais la loi a entendu parler du dom icile de droit, et non
d’un dom icile momentané. L e sieur de V é n y a résidé pen
dant quelque temps à P aris; mais ce n’est pas dans cette
ville qu’il est dom icilié. D ’après la loi 7 , au code D e in
colis , le véritable dom icile est le lieu où une personne
jouissant de ses droits établit sa demeure et le siège de sa
fortune. In eodetn luco singulos habere dom icilium ,
72 0 71 am bigitur ubiquis lareni rerum que ac fortu n a ru m
suarum summarn co n stitu it, undè l'ursùs non sit discessurus , s i n ih il civocet ; undè cùtn profèctus est
peregrinari videtur , quod s i rediit peregrinari ja m
destitit. L e dom icile ne peut s’acquérir que par la rési
dence effective, et l’intention manifeste de fixer son dom i
cile en un lieu ; de là il suit que la résidence la plus lon
g u e , séparée de la vo lo n té, ne suffit pas pour constituer
un dom icile ; qu’il faut nécessairement l’intention de s’y
fixer. L e Code civil s’est conform é en tout point à ce prin
cipe , article 102 et suivons. D ’après ces articles, le dom i
cile est au lieu où le citoyen a son principal établissement,
avec l’intention de s’y fixer. L a preuve de cette intention
résulte d’une déclaration expresse faite, tant à la m uni
cipalité du lieu que l ’on quitte qu’à celle du lieu où l’on
va h ab iter, et à défaut de déclaration de ce g en re, l’iutention dépend des circonstances.
�( 5. )
Ici le sieur de V é n y a pour dom icile d’origine le lieu
de Jayet. S’il a habité pendant quelque temps ù Paris il
n’y a jamais eu son principal établissement -, il n’y tient
point de m énage; il n’y est appelé par aucune fon ction ,
par aucunes affaires; il n’a fait aucune déclaration à la
m unicipalité de son ancien d o m icile, ni à celle de Paris.
Rien ne constate son intention de se fixer dans cette capi- ■
taie : dès-lors les appelans n’ont pas dû faire poser d’af- ,
fiches en la ville de Paris ; il suffit qu’il y en ait une au
lieu de Jayet.
>
L es premiers juges ont donné une grande importance
à ce moyen. Ils ont prétendu que le dom icile réel du
sieur de Y é n y étoit à P a ris, sans aucun doute. Dans
l’acte d’élection qu’a fait le sieur de V é n y en la maison
de son avoué près le trib u n a l, il a dit qu’il dem euroit à
P a ris, vieille rue du T em p le, n°. 180 , et c’est à ce d o
m icile que les appelans lui ont fait notifier l’enchère de
la dame veuve J u g e ; mais de ce que le sieur de V é n y
a désigné le n°. ou il logeoit à P a ris, on ne peut tirer
d’autre conséquence, si non qu’il a fait une indication
ordinaire pour tous ceux qui logent à Paris, m ein em o
mentanément : il a plutôt donné son adresse qu’il n’a indi
qué un domicile d’intention et de f a it , comme le font tous
ceux qui sont logés à Paris, qui veulent avoir des nou
velles de leur fam ille; et on n’a jamais prétendu que
cette désignation, si nécessaire dans les grandes villes, pût
entraîner un domicile réel de droit et de fait.
Il seroit souvent impraticable d’apposer une affiche
au dom icile réel du débiteur ; il peut se trouver en
A m ériqu e comme à P a ris, en Italie ou en Espagne, et
G 2
*
�u * ,
( 52 )
ira-f-on jusqu’à penser qu’il faut une affiche dans ces
contrées lointaines , ou hors de l’em pire? 11 faut avouer
que cette interprétation si rigoureuse de la loi deviendroit rid icu le, et que ce n’est pas là ce qu’elle a entendu
prescrire.
L es appelans ne se sont pas contentés de faire mettre une
affiche au lieu de J a y e t, dom icile de fait et de droit du
sieur de V é n y , ils en ont encore fait signifier une à son
dom icile é lu , de sorte qu’ils ont satisfait en tout point
à l’esprit comme à la lettre de l’article 5 de la loi qu’on
voud roit leur opposer.
L e second moyen n’a pas plus de fondement. Ces p ré
tendus bâtimens d’exploitation de la terre de Jayet n’exis
tent plus ; il ne subsiste que les bâtimens principaux qui
servent tout à la fois au logem ent du m aître, et à l’exp loi
tation des biens : il seroit trop rigoux*eux d’exiger qu’on
m ît des affiches sur des décombres ; ces détails m inutieux
n ’auroient pas même dû occuper les premiers juges. Ils
disent à la vérité que ces bâtimens d’exploitation sont
compris dans les affiches ; mais il falloit bien les mettre
dans les affiches, puisqu’ils étoient dans la vente de 1792,
et si depuis ils se sont écroulés, il étoit impossible d’y
mettre des affiches : la loi ne l’exige, sur les édifices saisis,
qu autant q i i i l y en a . D ès-lors, dès qu’on a apposé des
affiches à l’extérieur des bâtimens principaux, ainsi que
cela est constaté par le procès verbal, le tiers saisi n’a
pas pu l’ignorer, et le public a eu plutôt connoissance des
affiches en les voyant sur les bâtimens qui existent, qu’il
n’auroit été les chercher dans ces décombres.
D ’ailleurs, la loi ne dit pas qu’il sera mis des affiches en
�^4 ï
C 53 )
général sur tous les édifices; on n’cn m et pas à toutes les
portes des bâtimens; il n’en est apposé qu’à la porte prin
cipale , et on n’en a jamais exigé davantage.
L e troisième moyen se tire de ce qu’on n’a pas spé
cifié la contenue des bâtimens du domaine. M ais cette
objection ne pouvoit être d’aucun poids : d’une p a r t ,
il n’a jamais été d’usage de désigner l ’étendüe super
ficielle des bâtim ens, et ce seroit souvent impossible.
Com m ent , en e ffe t, connoître l ’étendue superficielle
d’une maison divisée en plusieurs appartemens ? 11 suffit
de la confiner : c’est ce qui a été solennellement jugé
par un ari-êt de la cour de cassation rendu, en l’an 9 ,
dans la cause du sieur V ersepuy , négociant à Paris. L e
sieur Versepuy s’étoit rendu adjudicataire d’une maison
sise rue de Richelieu ; le tiers-saisi atlaquoit l’expropria
tion sur le fondement qu’il n’avoit pas été fait mention
de l ’étendue superficielle de cette maison. L e tribunal
de prem ière instance n’eut aucun égard à ce m oyen :
la cour d’appel à Paris confirma le jugem ent ; et le p ourvoi
en cassation du tiers-saisi fut rejeté.
M ais il est encore une circonstance en faveur des appelans ; car leur affiche contient la désignation de l’étendue
superficielle de ces bâtimens. E n e ffe t, on voit , dans
leur affiche, qu’ils énoncent en titre l’étendue superfi
cielle et la situation des biens à vendre ; ils y com pren
nent en prem ier lieu le corps des bâtimens avec ce qui
le compose , cour jardin et p a rterre, un p r é - v e r g e r ,
une terre en p é p in iè re , et un petit p ré; le to u t, est-il d it,
f o r m a n t un e n clo s, ce qui peut composer environ un
kiluire cin q u a n te -n e u f a r e s , ou v in g t-h u it seyterées.
�•
(
54 }
E n comprenant ainsi les bâtimens avec les héritages qui
form ent l’enclos, les appelans ont nécessairement donné
l ’étendue superficielle du tout ; et le m oyen tom be de
lui-m êm e.
..
Les premiers juges n’ont pas eu égard au moyen pro
posé relativem ent aux affiches qui n’avoient pas été mises
un jour férié. Ils conviennent que la loi du 11 brum aire
n’a pas exigé cette form alité ; que les dispositions rigou
reuses de la loi. doivent être plutôt restreintes qu’éten
dues , et qu’on ne peut résister ù la loi. O n n’ajoutera rien
à cette dissertation , c’est la seule chose raisonnable
q u’aient dit les premiers juges.
Us auroient pu se dispenser de discuter avec autant
d’étendue une objection proposée par les appelans, et
qui n’étoit qu’un m otif de considération. Ils s’étoient
p la in t, avec fondem ent, que la dame juge ctoit sans
intérêt dans son enchère. Ils disent qu’ils pourroient
écarter cette enchère par une fin de n o n -re c e v o ir à
laquelle la dame juge nuroit difficilement résisté. L a
faculté de requérir la mise aux enchères d’un im m euble
vendu par contrat volontaire , n’appartient qu’aux créan
ciers du vendeur légalem ent inscrits. Ils demandoient à
la dame Juge si elle pouvoit prétendre être de ce nombre :
elle avoit inscrit en l’an 7 su r V é n y , e x -m a r q in s, sans
autre explication. L a loi du i cr. floréal an 3 défendoit
aux créancier« d’émigrés tout acte conservatoire de ce
genre, et ne leur donnoit d’autre m oyen, pour être rem
boursés , que de faire liquider leurs créances dans les
formes et les délais q u’elle prescrit. La nation se char
geait alors de toutes les dettes des ém igrés, et vendoit
�(*5 5 )
leurs biens francs et quittes de toutes dettes et hypo
thèques. T o u t créancier d’ cm igrés devoit justifier de
Ses titres, et poursuivre la liquidation ; faute de justifier
dans le délai des actes qui établissoient ses créan ces, il
étoit déchu.
T e l a été l’état de la législation jusqu’au 1 6 vensôse
an 9 , qu’une loi nouvelle a accordé aux créanciers d’émi
grés le droit d’inscrire sur les émigrés qui ayoient obtenu
leur radiation. L a dame Juge avoit négligé de profiter du
bienfait de cette loi ; et sans contredit les appelans pouvoient soutenir que l’omission de la dame veuve Juge
entraînoit sa déchéance ; q u’ainsi les antres créanciers ne
pouvoient se subroger à une enchère nulle dans le prin
cipe, et qui étoit censée ne pas exister. M ais la dame veuve
Juge rendra cette justice aux appelans, qu’ils n’insistèrent
pas sur ce moyen ; qu’ils déclarèrent au contraire qu’ils rie
vouloient pas l’em ployer pour écarter la mise aux enchères
de la dame J u g e , et qu’ils ne se défendoient pas par des
fins de non-recevoir. Ils peuvent donc dès-lors se dispenser
de suivre les premiers juges dans leur dissertation sur un
moyen n égligé, et dont ils n’avoient fait mention que pour
prouver à la dame Juge qu’elle étoit aussi défavorable
que mal fondée dans une entreprise tém éraire et inutile.
Il ne reste plus aux appelans qu’à justifier la conduite
qu’ils ont tenue avec les créanciers du sieur de V é n y . T o u s
les reproches qu’on voudroit se permette sur leurs pro
cédés sont absolument injustes. Ils ont cherché dans tous
les temps , et ont saisi toutes les occasions de term iner
amiablement avec tous. Ils ont offert des sacrifices au-dessus
de leurs forces; ils ont donné aux créanciers l’état des
�( 56 )
biens du sieur de V é n y et des dettes qui existoient : on ne
pouvoit pas exiger d’eux qu’il abandonnassent la fortune
de leur m è re , qui étoit encore insuffisante pour rem plir
le déficit. L a dame veuve Juge ou son fils, ne désavoue
ront pas qu’on leur avoit proposé en payement le bien de
M ontrodès, à la charge d’ un retour de 20000 francs; qu’ils
ont également voulu désintéresser les héritiers Pitat, ainsi
que les autres créanciers , pour éteindre toutes dettes
hypothécaires.
M ais toutes leurs propositions ont été constamment
refusées; les créances se sont accrues, les intérêts se sont
accum ulés, les frais ont grossi. Il est un terme où le père
et l’époux doivent s’a rrêter, où il est perm is, sans blesser
les lois de l’honneur et de la p ro b ité , d’user rigoureuse
ment de ses droits ; et les appelans sont parvenus à ce
point qu’ils ne doivent plus entendre à aucune composi
tion , où les vaines clameurs ne doivent plus les arrêter.
Ils invoquent la plus rigoureuse justice, et ils ont tout à
espérer de l’impartialité de la cour d’appel : elle sera con
vaincue que les moyens de nullité qu’on oppose sont m inu
tieux et chim ériques ; que la demande en revendication
form ée par le sieur de V andègre doit être accueillie : et
les appelans trouveront enfin un terme aux persécutions
qu’ils ont ép ro u vées, aux vexations contre lesquelles ils
sont obligés de lutter depuis quinze ans.
M e. P A G E S ( d e R iom ) , ancien avocat,
V E R N I È R E S , avoué licencié,
A R IO M , de l’imprimerie de L andriot , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Messidor an 13.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Malet de Vandègre, Gilbert-François. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Vernières
Subject
The topic of the resource
adjudications
créances
ventes
enchères
nullité
affichage
minorité
conseils de famille
séparation de biens
contrats de mariage de mineurs
émigrés
donations entre vifs
experts
séquestre
coutume d'Auvergne
mort civile
minorité
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour sieur Gilbert-François Malet de Vandègre, propriétaire, membre du conseil général du département du Puy-De-Dôme, habitant au lieu d'Englard, commune du Quartier, en qualité de père et légitime administrateur, et tuteur légal de Delphini-Gilbert-Antoine Malet de Vandègre, son fils, et de feue dame Marie-Marguerite Vény, son épouse ; dame Marie-Anne Vény, épouse du sieur Ignace-Hayacinthe Sampigny, de lui autorisée, propriétaire, habitant de cette cille de Riom, appelans d'un jegement rendu au tribunal d'arrondissement de cette ville, le 8 thermidor an 12 ; Contre le sieur Juge, propriétaire, fils et héritier de la dame Queyriaux, veuve Juge, habitant de la ville de Clermont, et autres créanciers inscrits sur sieur Paul-Augustin Vény, intimés ; Et encore contre le sieur Paul-Augustin Vény, propriétaire, aussi intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1792-An 13
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
56 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1713
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1711
BCU_Factums_G1710
BCU_Factums_G1713
BCU_Factums_G1714
BCU_Factums_G1715
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53316/BCU_Factums_G1713.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Clermont-Ferrand (63113)
Jayet (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
adjudications
affichage
conseils de famille
contrats de mariage de mineurs
coutume d'Auvergne
Créances
donations entre vifs
émigrés
enchères
experts
minorité
mort civile
nullité
séparation de biens
séquestre
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53317/BCU_Factums_G1714.pdf
5671c63c7b8c7445ab8cfac1f1b9ce2a
PDF Text
Text
MEMOIRE
P O U R sieur M a r t i a l J U G E - S O L A G N I A T , maire
de la ville de Clerm ont-Ferrand, tant en son nom que
comme héritier de la dame Q u e r i a u , sa m è r e ,
intim é ;
C O N T R E sieu r G i l b e r t - F r a n ç o i s M A L E T
D E V A N D È G R E , m embre du con seil général du
département du P u y - d e - D ô m e , habitant au lieu
d ’E n g la r d , com m une du Q u a r tie r , en q ua lité de père
et légitime adm inistrateur, et tuteur légal de D elphiniG ilb ert-A n toin e M a l e t d e V a n d è g r e , son f ils, et
de défunte dame M arie-M arguerite V É N Y , son épouse;
et contre dame M
a r i e
- A
nne
V E N Y
, épouse du
sieur Ignace-H yacinth e S a m p ig n y , de lu i autorisée f
habitante de la ville de R io m , appelans ;
E n
p résen ce
d es a u tr e s c r é a n c ie r s de
V É N Y , a u s s i in tim é s
E t
en
présence
P a u l-A u g u stin
*
dudit Paul-A ugustin V é n y , p a r e il
lement intim é.
L e
sieur Juge-Solagniat, tant en son nom qu’en qua
lité d’héritier de la dame Q ueriau, sa m ère , et les autres
créanciers de P a u l-A u g u stin V é n y , com battent. pou r
conserver le gage de leur créance, p o u r ne pas perdre des
sommes qu’ils ont légitim em ent prêtées.
A
�MX
. (2)
F A I T
S.
. L e sieur P aul-A ugustin V é n y a contracté un prem ier
mariage avec demoiselle M arie-Jeanne G oyet de L ivro n .
A cette époque, P ierre-G ilb ert de V é n y , son p è re , étoit
décédé.
P ar le contrat de m ariage, du 23 décembre 17 7 0 , la
dame D auphin de M on trod ès, sa m è re , lui donna en
avancement d’hoirie la terre de M on trodès, sous la ré
serve de l’ usufruit, et à condition qu’elle demeureroit
grevée d’une substitution graduelle et perpétuelle en fa
veu r des descendans du m ariage, des mâles d’a b o rd , et
à défaut des m âles, en faveur des filles, l’ordre de p rim ogéniture toujours observé.
Il n’y a point eu d’enfans de ce mariage,
v L a demoiselle de L iv ro n ne vécut que peu de temps.
L e 11 octobre 1 7 7 3 , le sieur P a u l-A u g u stin V é n y ,
encore m in eur, contracta un second mariage avec demoi
selle M arie-G en eviève M alet de V andègre.
P ar le contrat de m ariage, la future se constitue, i° . en
tous les biens meubles et immeubles à elle échus par le
décès de ses père et mère ;
2°. E n une somme de 4000 fr. d’une p a rt; 1380 fr.
d’autre; et en une somme de 9000 francs, à laquelle sont
estimés la récolte ameublée de la terre d’E n g la rd , les
meubles meublans du château, et quelques bestiaux;
30. E n fin , en tous les biens qui pourroient lui échoir.
est ajouté : E t ou il seroit ven d u , pendant et constant
11
le futur m ariage, des biens propres de la demoiselle
�(
3
)
fu tu re, le futur sera te n u , ainsi qu’il s’y o b lig e , d’ea
faire l’em p lo i, soit en achat d’im m eubles, ou en acquit
tement des légitimes de ses frères et sœurs.
L e futur époux lui donne des bijou x et dorures jus
qu’à concurrence de la' somme de 6000 francs.
P a r ce m ême contrat de m ariage, le futu r, pour m aintenir le lustre de la m a iso n , fait donation entre-vifs, pair
préciput, de la moitié de tous ses biens présens et à ven ir,
à celui des enfans mâles à n aître, qui sera choisi ; et à
défaut de ch o ix , à celui qui se trouvera l’aîné à l’époque
du décès;
A la charge et condition que les biens donnés seront
substitués graduellement et perpétuellem ent en faveur de
celui des enfans mâles du donataire qui sera choisi ; et
à défaut de c h o ix , à l’aîné.
O n prévoit le cas où P a u l-A u g u s tin V é n y n’auroit
point d’enfans mâles du mariage qu’il contractoit. L a
donation est répétée en ce cas en faveur de celle des
filles qui sera choisie; et à défaut de c h o ix , en faveur
de celle qui sera l’ainée à l’époque du décès, avec même
charge de substitution en faveur de sa postérité mascu
lin e, dans le même ordre établi pour la postérité des èhfans mâles.
Cette donation grevée de substitution n’a é té , ni insi
n u é e , ni publiée.
A la fin de l’acte, la m ère réitère les réserves et con
ditions portées par le prem ier contrat de m ariage, rela
tivem ent à la terre de M ontrodès.
•
<:■
' " D e ce m ariage sont issues d eu x fille s 'M a r ie - M a r g ù e A 2
:.i w i
�rite V é n y i qui a contracté m ariage avec le sieur de V a n d è g r e , l’un des appelons, et M a r ie -A n n e V é n y , qui
s’est mariée avec le sieur de Sam pigny, et qui est aussi
appelante.
Il paroît qu’en 1784 la dame de V andègre demanda et
obtint sa séparation de biens ; qu’elle poursuivit ensuite
la liquidation de ses reprises et conventions m atrimo
niales, qu’on a portées à 86666 liv. 17 sous, quoiqu’on
ait v u que sa dot m obiliaire, y com pris les 6000 francs
pou r bagues et jo y a u x , ne s’élevoit qu’à la somme de
20380 francs.
L e 14 avril 179 2 , P a u l-A u g u s tin V é n y vend à son
épouse la terre de Jayet, qu’il tenoit à titre de donation
entre-vifs de demoiselle Elizabeth-Françoise V é n y -d ’A r b o u ze, sa tan te; i° . à la charge de payer trois rentes
viagères de o, 30 et 20 francs, dont il avoit été chargé
par ladite donation du 26 novem bre 176 7; et en outre,
moyennant la somme de 130000 fr ., sur laquelle somme
il fut délégué à payer aux Sœurs religieuses de Saint-
5
5
Joseph de V en sa t, une rente de oo francs, au capital
de 10000 francs, dont il avoit été égalem ent chargé par
la d o n atio n , et 10921 liv. 2 sous à divers particuliers,
p o u r créances toutes antérieures au contrat de m ariage,
à l’exception de celle de 4217 liv. 2 sous, due au sieur
Rose Beauvais, qui paroît postérieure; et le surplus, il
fut dit que la dame de V andègre le retiendroit en ses
m ains, à compte des sommes dont ellç avoit obtenu la
condamnation.
O n fait ensuite, et dans le même a cte, le calcul de
ces sommes.
�C S )
C a p i t a l .........................
86.666 liv, 17 s.,
^43
Intérêts jusqu’au jour
F ra is..............................
T
4600
»
»
J
120409 liv . 1 7 s.’
o t a l
Peu de temps après cette v en te, Paul-A ugustin Y é n y
a été compris sur la liste des ém igrés, le séquestre ap
posé sur ses biens.
P ar arrêté du départem ent, du
messidor an 2 $ la
ven te, comme postérieure au 9 février 179 2 , a été dé
clarée nulle ; mais on convient que la nullité n’a été
prononcée que dans l’intérêt national.
L es 24 prairial an 3 , et 19 therm idor an 4 , arrêtas
qui font distraction en faveur des frères et sœurs de Paul-
5
A ugustin V é n y , sur la terre de Jayet, de quarante-quatre
septerées.
E n même tem ps, M arie-M arguerite V é n y , et M arieA n n e V é n y , ses deux filles, se réunirent pour réclam er
l’effet de la donation de m oitié b ien s, portée au contrat
de m ariage, et la distraction de cette m o itié, quant aux
biens présens. L e u r réclamation fut rejetée par arrêté
du 5 messidor an 2 , sur le fondement qu’elle étoit annullée par la lo i du 17 nivôse an 2.
L a lo i du 17 nivôse an 2 ayant été rapportée, elles
•se pourvurent de nouveau.
L e I er. com plém entaire an
4,
second arrêté qui rap
porte le précédent; brdonne qu’il sera délivré à M arieM arguerite V é n y , l’aînée, la moitié de la terre de Jayet,
ainsi que de la terre de M ontrodès, déclarée aussi faire
partie des biens présens \ qu’il lui sera également délivré
�(
6
)
la moitié de ce que l’ém igré avoit à prétendre dans la
succession indivise de P ierre-G ilb ert V é n y , son père.
Ce second arrêté a été rendu , sans que la dame Q ueriau et les autres créanciers, qui avoient déposé leurs titres
à l’adm inistration, aient été appelés.
Il a en conséquence été procédé au partage. La terre
de Jayet a été divisée en deux lots. Quant à la terre de
M o n tro d ès, et aux biens provenus de P ie rre -G ilb e r t
V é n y , les experts ont déclaré ne pou voir encore y pro
céd er, n’ayant point les renseîgnemens nécessaires.
L e rapport contenant partage de la terre de Jayet a
été hom ologué par arrêté du n floréal an 7 . L e prem ier
lot est é e h u , par le tirage, à la réclamante. L e second
lot est demeuré sous le séquestre, com m e appartenant à
la nation.
M arie-G eneviève Malet de V an dègre, épouse de PaulAugustin V é n y , est décédée en l ’an 6.
Ses deux filles, M arie-M arguerite de V é n y , épouse du
sieur de V an d ègre, et M arie-A n n e de V é n y , épouse du
sieur de Sam pigny, lui ont succédé conjointement.
M arie-M arguerite de V é n y , épouse du sieur de V a n
dègre, est elle-m êm e décédée bientôt après, en l’an 7 ,
laissant de son mariage un fils, D elp liin i-G ilbert-A n toin e
M alet de V a n d è g re , au nom duquel G ilbert-François
M alet de V andègre , son père , agit comme son tuteur
légal.
t
P a u l-A u g u stin V é n y , en vertu de l’amnistie et du
sénatus-consulte du 6 floréal an 1 0 , a obtenu la main
levée du séquestre de ses biens. Il est rentré'en propriété
et en possession des biens qui n’avoient pas été vendus.
�C ’est,ainsi qu’il jouit de la m oitié de la terre de M on t- rodés.
• Quant à celle de Jayet, il n’en jouit point, parce q u’il
Pavoitvendue en 1792. Cette terre est jouie conjointem ent
par le tuteur du m ineur V an d ègre, et par la dame de
Sam pigny, comme héritiers de M arie-G eneviève M alet de
V a n d èg re , m ère et aïeule, qui l’avoit acquise en paye
ment de partie de ses reprises.
L e 29 brum aire an 1 1 , il a été passé entre le père et
tuteur du m ineur V an d ègre, et la dame de Sam pigny,
d’une p art, et P aul-A ugustin V é n y , d’autre p art, un traité
dont il faut donner connoissance.
Dans cet acte, on commence par rappeler les faits que
l’on vient d’exp liq u er; la vente de 179 2 , consentie par
P aul-A ugustin V é n y à la m ère; l’arrêté du i.er. com plé
mentaire an 4, qui avoit investi la fille aînée de l’effet de
la donation de m oitié biens, quant aux biens présens;
la radiation de P a u l-A u g u s tin V é n y de la -liste des
émigrés.
« Cet événem ent, d isen t-ils, a fait revivre la vente du 14
et avril 1792, qui n’ayant été annullée que pour l’intérét national,
« a dû reprendre sa première existen ce, lorsque l’intérét de la
« nation a cessé.
« Dés-lors cette vente est devenue pour madame de Sampigny,
«
«
«
«
et pour l’ enfant de M. de V andègre, héritiers de Geneviève
Malet deVandègre-Vény, leur mère et aïeule, un titre qui les investit de la propriété actuelle de la terre de Jayet, dont moitié
leur avoit déjà été attribuée par l’arrêté du. département, du
« i cr. complémentaire an 4, en vertu de la donation éventuelle
« portée par le contrat de mariage de Paul-Augustin Y é n y , leur
« père et a ïe u l, du 11 octobre 1773.
�j^ K ,
( S )
« Cependant la mort civile présumée de Paul-Augustin V én y,
« qui avoit autorisé leur réclamation de la moitié de la terre
« de Jayet, comme donataires éventuels, étant aujourd’hui efcc facée par sa radiation, on pourroit soutenir que leur droit ‘
« sur cette m o itié, comme donataires de leur p c r e, n est point
cc encore ouvert; qu ’i l ne s ’ouvrira que par la mort naturelle
« dudit P a u l de V é n y , et que jusque-là ils n ’ont point d ’autre
cc titre que la vente de 1792, pour se regarder comme proprié
té taires de cette terre : mais il n’en est pas moins vrai que leur
« .d ro it, comme donataires, doit s’ouvrir un jo u r , et que c ’est
g un juste m otif de réduire le p rix de la vente de 1792, en
cc proportion de ce qu’un immeuble dont l’acquéreur n’aura
cc obtenu la transmission de propriété incommutable que pour
cc m oitié, et le simple usufruit pendant la vie du vendeur pour
cc l’autre m oitié, dans le cas où les enfans du vendeur lui sur« v iv e n t, vaut de moins dans le com m erce qu’il ne vaudroit
« si la transmission de propriété étoit imperturbable et indépentc dante de tous événemens. C ’est un vice de la chose vendue,
cc en un m o t, de nature à entraîner, ou la résiliation de la v en te,
cc ou une .diminution dans le p rix, au choix de l’acquéreur.
cc Indépendamment de ce premier m otif de réduire le prix
cc de la vente de 1 7 9 2 , l’éviction de prés de cinquante septerées
cc'de terrain compris dans cette ven te, qui résulte des arrêtés
« du département, des 2 4 prairial an , et 1 9 thermidor an 4 ,
cc est une seconde cause de réduction également incontestable,
te et d’autant plus conséquente, q u e , d’après le rsipport du
cc commissaire Couchonat, nommé par l’administration d’Aiguecc perse pour se transporter sur les lieux et reconnoltre le terrain
cc dont s’agit avant d’en ordonner la distraction, rapport inséré
cc dans l’arrété du 19 thermidor an 4* ces terrains formoient le
« cinquième de la totalité de la terre de Jayet.
cc Sur q u o i , les parties voulant prévenir la contestation prête
cc à s’engager entr’elles sur ces divers objets de discussion, elles
« ont traité et transigé sur le tout de la manière qui suit.
3
�(9 ^
E n prem ier lie u , la vente demeure résiliée et comme
non avenue en ce qui touche lesdites quarante-qu atre
septerées de terrain évincées, sauf à Patil-Augustin V é n y
à les revendiquer contre ses frères et sœurs, s’il s’y croit
fondé.
E n second lie u , en ce qui touche la moitié de la terre
de Jayet , dont la propriété est assurée aux enfans de
P aul-A ugustin V é n y , q u i lui survivron t, par la dona
tion éventuelle portée en son contrat de m ariage, il est
dit que la vente du 14 avril 1792 n’aura effet que pour
transmettre aux ayans cause de G eneviève M alet de Vandègre, et aux acquéreurs, i ° . l’usufruit que conservoit
Paul-A ugustin V é n y , ven d eur, sur la m oitié d on n ée;
2°. la perspective éventuelle qu’il avoit aussi d’en rester
propriétaire , au cas où il survivroit à tous ses enfans
et descendans ; 30. pour consolider enfin sur la téte dudit
G ilb ert-A n to in e-D elp h in i M alet de Y a n d è g re , repré
sentant sa m è re , et de M a rie -A n n e V é n y , épouse de
M . de Sam pigny, par égalité entr’e u x , la pleine p ro
priété et jouissance dès à p r é s e n t, et in c o m m u ta b le m e n t,
de la m oitié de la terre de Jayet dont il s’a g it, quels
que "puissent être les événem ens, et soit que la propriété
leur en fût acquise à tout autre titre, ou qu’elle ne le fût
pas, sans aucunem ent déroger à leurs droits a cquis p a r
tout autre titre que ladite vente, n i y p réju d iç ier ; en sorte
qü’ils pourront exercer les droits qu’ils peuvent a v o ir ,
indépendamment de ladite vente, sans novation ni déro
gation contre les acquéreurs qui seroient subrogés à la
ven te, dans le cas oie sur la transcription q u i en sera
f a i t e au bureau des hypothèques, il surviendroit des
B
�enchères de la part des créanciers intéressés et in scrits,
sans qu’il en résulte en aucun cas de recours en garantie
contre le vendeur.
E n ce qui touche l ’autre moitié de ladite terre de J a y e t,
la vente de 1792 doit sortir son entier effet, sauf la dis
traction des quarante-quatre septerées.
A r t. 4* L a réduction du p r ix de ladite vente de 179 2 ,
q u i est la suite f o r c é e , soit de Téviction des quarantequatre septerées, soit de la décharge de la garantie de
Téviction q u i pourroit résulter de la donation éventuelle
de la m oitié des biens vendus , est J ix é e et réglée par ven
tilation à la som m e de 35000 j f r . j de sorte que le p rix
de la vente yq u i étoit de 130000 f r . , y compris le capital
de la rente q u i étoit due a u x Sœ urs de S a in t-Josep h
de J^ensat, ne sera plus que de la somme de 94567 livtournois.
P a r les articles
et 6 , le mineur V an dègre et la dame
de Sam pigny sont déchargés d’une partie des délégations
portées au contrat de vente de 17 9 2 , et tenus de payer
5
les autres délégations.
P a r l’article 7 , il est convenu que le surplus de ladite
somme de 94567 francs demeurera entre leurs m ains, à
compte et en dim inution de leurs reprises, telles qu’elles
sont fixées par ledit acte de 1 7 9 2 , et 011 leur réserve tous
leurs droits pour l’excédant.
Dans cet acte , le sieur de V andègre et la dame de
Sam pigny ont reconnu e u x -m ê m e s que la donation de
biens présens et à ven ir, portée au contrat de m ariage, ne
pouvoit avoir effet qu’après le décès.
Ils rcconnoissent qu’il est incertain qui en sera saisi,
�( II )
même s’ ils en seront saisis, puisqu’ ils achètent la pers
pective éventuelle que pou voit avoir P aul - A ugustin
V é n y de rester propriétaire incom m utable, dans le cas
où il survivroit à toute sa descendance.
Ils reconnoissent que la mort civile du père étant
effacée, il avoit le droit de jouir sa vie durant des biens
présens, c’est-à-dire, des biens à lui appartenans à l’époque
de son contrat de m ariage, et de cenx acquis depuis.
Ils reconnoissent qu’ils n’ont dans ce moment d’autre
titre pour jouir d’ une partie quelconque de la terre de
el
J a y c t, que la vente de 1792.
A la vérité ils prétendent que , quant à la moitié
d o n n ée, la vente ne peut porter que sur l’ usufruit ; e t ,
en conséquence, ils soutiennent qu’il y a lieu à réduc
tion du p rix de la vente. O n ne conçoit pas trop com
ment il peut y avoir lieu à une réduction actuelle du
p rix de la v e n te , sur le fondement d’une donation dont
il est incertain s’ils seront jamais saisis, le père pouvant
survivre à toute sa descendance; comment il peut y avoir
lieu a une réduction a c tu e lle , lorsqu’il est incertain, en
supposant qu’ils en soient saisis, s’ils renonceront ou non
aux biens à ven ir; comment il peut y avoir lieu à réduc
tion , lorsqu’il y a dans leur personne, comme on l’établira
dans un m o m en t, confusion de qualités.
M a is , sans entrer dans cette question, ils conviennent
qu’ils n’ont dans ce moment d’autre droit que celui résul
tant de la vente.
A p rès avoir reconnu qu’ils n’ont dans ce moment
d’autre titre que la vente > ils se réservent de faire valoir
la donation, dans le cas o ù , su r la notification de la
B 2
�(
1 2 }
tra n scrip tion , il surçiendroit des enchères de la -pari
des créanciers inscrits.
L e pi'emier frim aire an 1 1 , on soumet cet acte à la
transcription. On. fait transcrire en même temps la vente)
de 1792.
L e 24 du même m ois, on dénonce la transcription de
l’un et de l’autre aux créanciers inscrits, avec déclara
tion que les requérans en acquitteront ou compense
ront dans l’ordre de d ro it, les charges et hypothèques
légalem ent inscrites, mais seulement jusqu’à concurrence
du p rix-stip u lé dans le traité du 29 brum aire an 1 1 ,
qui confirme et modifie le prem ier contrat de 1 7 9 2 ,
se réservant expressément l’excédant de leurs créances.
Dans la notification de la transcription , le sieur de
V an d ègre a agi tant en son nom qu’en qualité de tuteur
et administrateur des biens de son fils.
L a dame Queriau , en qualité d’héritière testamentaire
de défunt sieur J u g e , étoit créancière d’une somme de
plus de 35000 francs : sa créance rem ontoit à 1775. E lle
a fait-notifier la déclaration d’enchère; elle s’est soumise
à porter ou faire porter à un vingtièm e en sus, soit le
p rix du prem ier contrat de ven te, dans le cas où l ’exé
cution en seroit o rd o n n ée, soit celui du second acte,
dans le cas où l’on ordonneroit l’exécution seulement de
ce second acte ; ce q u’elle se proposoit de faire juger.
L e 12 nivôse an 1 2 , le sieur d e V a n d è g r e e t la dame
de Sam pigny ont fait notifier à Paul-Augustin V é n y , eu.
son dom icile à P a r is , la déclaration d’enchère de la dame
veuve J u g e , avec sommation de rapporter dans dix jours
m ain-levée des iuscriptiQus excédant la somme de 94667 1.
�3
( J )'
tournois, et protestation de requérir' après le délai là
mise aux enchères.
L e 8 messidor an 1 2 , faute par P a u l-A u g u stin V é n y
d’avoir satisfait à cette som m ation, affiches à la requête
du sieur de V a n d è g re, au nom et comme tuteur de son
fils, se disant autorisé de délibération de fam ille, h o
m ologuée par jugement du 26 prairial précédent, et à
la requête de la dame de Sam pigny, pour procéder à la
revente et adjudication, avec indication à l’audience du 6
thermidorD ans l’affiche on comprend la totalité delà terre. Tous
les héritages sont d ésignés, form ant v in g t - s ix articles,
sous la distraction des quarante-quatre septerées adju
gées aux frères et sœurs de Paul-A ugustin V é n y , faisant
partie du second et du troisièm e article.
Suivent les conditions de l’adjudication.
Dans l’article prem ier il est dit : a E t attendu que la
propriété de la m oitié des biens ci-dessus est irrévo ca - *
blement acquise au m ineur V a n d è g re , soit p arla donation
éven tu elle, soit par l’arrctd du départem ent, soft par"
l’article 16 du sénatus-consulte de floréal an 10 , et qu’ils
s’étoient expressément réservé par le traité de brum aire
an i i , d’exercer tous leurs d ro its, dans le cas où sur la
transcription dudit traité il surviendroit des enchères,
f adjudicataire C en trera en jo u is s a n c e , et ne devien
dra propriétaire des le moment de V adjudication , que
de Vautre m oitié des biens de J a j e t seulem ent, telle
q u elle a voit été J ix é e p a r le partage J a i t avec la ré
publique. »
E t on ne transcrit point le partage; en sorte que
!
�( H )
l ’affiche désigne, et ne désigne point les objets à vendre.
M ais il falloit faire ordonner cette revendication contra
dictoirem ent.
■Il a en conséquence fait assigner à cette fin , soit la f
dame veuve J u g e , et les autres créanciers inscrits, soit
la dame de S am p ign y, soit Paul-A ugustin V én y .
A in si le sieur de V andègre est en même temps poursui
vant et demandeur en revendication.
L a dame de Sam pigny, de son côté, s’est trouvée figurer
dans la cause comme demanderesse, poursuivant conjoin
tement avec le sieur.de V an dègre la revente, et comme
défenderesse sur la demande en revendication.
L a cause en cet état a été portée en l’audience du 6
therm idor an n .
L a dame veuve Juge a combattu la demande en re
vendication , et soutenu la nullité de l ’afïiche.
• Les autres créanciers inscrits ont adhéré à ses moyens,
et aux conclusions par elle prises.
Sur la plaidoirie respective , jugement est intervenu
ledit jour 6 th erm idor, qui déboute le sieur de V a n
dègre de sa demande en revendication, et déclare d’un
autre côté l ’alïiclie nulle.
L e sieur de V andègre et la dame de Sam pigny .ont
interjeté appel de ce jugem ent, et c’est sur cet appel qu’il
s’agit de prononcer.
�( Ifi >
P
r e m i è r e
q u e s t i o n
.
L e sieur de Vandègre est-il ¿fondé dans la demande
q u ’il a fo r m é e au nom et comme tuteur du m ineur
V a n d èg re, en revendication de la m oitié de la terre
de J a y e t ?
•
*
L e sieur de V an d ègre se fonde principalem ent sur
l ’arrêté du départem ent, du I er. complémentaire an 4 ,
et sur l’article 16 du sénatus-consulte de floréal jm 10.
Mais cet arrêté et le sénatus-consulte p e u v en t-ils être
sérieusement opposés?
L ’arrêté n’a été évidem ment rendu que dans l ’intérêt
national : la nation a pu m éconnoître ou abandonner
ses droits , mais cette erreur ou cet abandon ne peut
nuire aux créanciers. Il en est de cet arrêté comme de
5
celui du messidor an 2 , que les appelans conviennent,
png. 7 de leur mémoire , ne devoir être exécuté que
dans rintévêt de la nation.
L e sénatus-consulte du 6 floréal an 10 , q u i, en rendant
aux ém igrés les biens non vendus, maintient tout ce qui
a été fait pendant l’ém igration , n’a lieu également qu’à
l’égard de l’ém igré lui-m êm e, mais non à l’égard des tiersintéressés, qui ne peuvent être victimes de l’ém igration 7
et qui peuvent toujours se pou rvoir contre les actes et
les arrêtés auxquels ils n’ont point été appelés, et qui ont
été faits à leur préjudice.
L ’art. 16 ne dit pas généralement que les actes ne pour
ront être attaquésj il dit : L e s individus am nistiés ne
�• ry t
( 16 )
pourront attaquer. L a lo i, en leur faisant grâce, n’a pas
voulu effacer la peine pour le passé : elle n’a pas voulu
admettre la fiction, ju s post lim in ii, établie chez les R o
mains. M ais cette disposition leur est personnelle comme
la peine elle-même.
L e sénatus-consulte ne parle que des individus amnistiés ;
il ne parle point des tiers-intéressés. O n ne peut pas ajou
ter aux termes de la loi ; on ne peut y ajouter surtout ce
qui seroit une injustice évidente.
Vainem ent opposcroit-on que les créanciers ne peuvent
pas avoir plus de droits que leurs débiteurs; ce seroit
faire une fausse application de la m axim e, vraie en gé
néral. Sans doute les créanciers ne pourroient pas exer
cer un droit que le débiteur n ’a uroit ja m a is eu : mais
ce n’est pas ici la question. Les créanciers exei’cent le droit
originaire de leur d éb iteu r, dont celui-ci n’a pu les priver,
nec alienando nec delinquendo.
Xæ sénatus-consu lte a in tei’d it de revenir contre ce qui
auroit été fait pendant l ’ém igration , pour éviter tout
recours contre le gouvernem ent. M ais ici il ne peut y avoir
lieu à aucun recours. L a n ation , par arrêté du i er. com
plém entaire an 4 , n’a contracté aucun engagement ; elle a
renoncé simplement à user de la rigueur de son droit.
L ’art, i l de l’arrêto du gouvernem ent, du 3 floréal
an 1 1 , porte : « T o u t créancier d’ém igré ra y é , élim iné
a ou am nistié, qui voudra exercer ses droits contre son
a d éb iteu r, pourra réclamer ses titres; s’il les avoit dé« p o sés, il lui seront ren d u s, à moins qu’il n’ait donné
« quittance ou reçu son titre de liquidation définitive. »
L es créanciers sont donc autorisés à exercer leurs droits
contre
�C 17 )
contre leur débiteur ; à se venger sur les biens qui n’ont
pas été vendus, et par conséquent à faire la recherche
de leurs b ien s, à faire rentrer ce qui auroit été mal à
propos distrait.
L a loi de floréal an 3 , déclaroit créanciers directs de
la république, tous les créanciers qui déposeroient leurs
titres. L a dame veuve J u g e , et les autres créanciers qui
figurent dans la contestation, étoient de ce nombre. Etant
créanciers directs, ils n’avoient pas intérêt d’a g ir; mais
les choses ont changé. L a nation, en rendant les biens non
vendus, s’est affranchie des dettes. Dès ce moment il leur
im porte de conserver le gage de leur créance. Ils ont le
plus grand intérêt de s’opposer à un arrêté évidem m ent
surpris à l’administration. S’il en étoit autrem ent, ils ne
seroient payés, ni par la nation qui en rendant les biens
ne peut plus être tenue des dettes, ni par P aul-A ugustin
Y é n y , ni par le tuteur du m ineur Y a n d è g re , qui veut
retenir l’effet d’une donation dont il est même incertain
si le m ineur sera jamais saisi (1).
L a question est donc encore entière.
Paul-Augustin V é n y étoit m ineur àl’époque desonsecond
contrat de mariage. O n sait que par les lois les mineurs
sont dans la prohibition d’aliéner leurs biens ; et si les
aliénations à titre onéreux leur sont interdites, à plus
forte raison celles à titre gratuit. Cette sage interdiction
n’est pas seulement établie par les lois romaines; l’ar(1) Les créanciers se sont d’ailleurs pourvus, en tant que de
besoin, à l'adm inistration, contre cet arrêté.
G
�tid e 2 chi titré 13 de la coutume d’A u v e rg n e , qui régissoit le dom icile et les parties, en a une disposition p ré
cise et irritante.
a E t par ce doresnavant, dit cet article, m ineur de
« vingt-cinq ans ne p o u rra , par contrat ou autrem ent,
a disposer de ses biens im m eubles, sans autorité de cura¿ teur et décret du juge , soit par convenance de suc
ée céd er, ne autre. »
Q u ’on ne dise pas qu’ il faut faire exception pour les
dispositions portées par contrat de mariage ; que les con
trats de mariage sont susceptibles parmi nous de toutes
sortes de clauses, pourvu qu’elles ne soient pas contraires
à l’ordre public.
L es contrats de mariage sont susceptibles de toutes
sortes de clauses. Entre m ajeurs; on l’accorde.
A in s i, on a admis parmi nous les institutions contrac
tu elles, inconnues chez les Romains.
A in s i, on a admis la donation des biens présens et à
v e n ir , contraire à la nature des'donations e n tr e -v ifs ;
le caractère des donations entre-vifs étant que le donateur
se dépouille lu i-m ê m e , ma gis vult âonatarium habere
qua?n j<?,etle donateur ne pouvant se dépouiller des biens
à v e n ir, des biens qu’ il n’a pas encore en son pouvoir.
A in s i, on a admis les donations aux enfans à naître,
qui j étant encore dans le néant, ne seraient susceptibles
d’aucune libéralité entre-vifs.
M ais tout cela entre majeurs.
L ’article 26 du titre 14 de la m ême coutum e porte :
« T o u s pactes, avantages, donations entre-vifs ou à cause
« de m o rt, convenances de succéder, soient m utuelles,
�*9
(
)
égales ou non , et autres conventions quelconques faites
et passées en traité de m ariage, et en faveur d’ic e lu i, par
personnes capables à co n tra cter, sains ou malades , valent et tiennent au profit des mariés et leurs descendans. »
L ’article 219 de la coutume de Bourbonnais, rédigée
après celle d’ A uvergn e , contient la même disposition.
« Toutes donations, conventions, institutions d’héritier,
« et autres choses faites en contrat de m ariage, et en
« faveur d’icelu i, au profit et utilité des m ariés, de l’un
« d’e u x , ou des descendans dudit m a riag e, sont bonnes
« et valables.........et saisissent telles dispositi ons , les cas
«
«
«
«
« a ven u s, quand lesdites donations et dispositions sont
« faites p a r personnes habiles 11 contracter. »
Sur ces m ots, personnes habiles à contracter, A u rou x
observe : N o n intelligas hoc de habilitate ad nuptias
quœ requerit tantum 'annum 12 in J œ m in is , et quatuor
decim in m a sc u lis , ju re canonico quod in hoc sequim u r , sed de habilitate ad dispositionem b o n o ru m ,
pi/ta de m ajoritate a annis. Ita q u e si m inor 25 annis
5
in f a v o r e m
m a tr im o n ii a liq u id lib er ciliter d o n c t , rôm itta t, hccredem in s titu â t , societatem o m n iu m bo—
norum co n trah at, restituetur, utp lu ries ju d ic a r i vidissè
testatur dictus Joan n es D ecu lla n t. Il cite ces termes de
d’A rgen tré : N o n enim à capacitate m a trim on ii quœ
natures et ju r is e s t , capacitas d o n a n d iy quœ est actus
civilis debet co llig i, et q u i ( actus cw ihs ) non n isi à
consensu p roficisci p o te st, coTisensus , non m si ab
h a bili.
Il ajoute toujours, d’après l’autorité de D ecullant: Q u i
tamen habilis est ad nup tias, licet m inor
25
G 2
a n n is ,
�( 20 )
potest inire et contrahere ea quœ sunt ex statuto in
troducta , puta societatem , aut m a ri tus cum u x o r e ,
item doarïum et cœ tera om nia quœ veniunt citra dispositionem hom inis.
A in si, d itM . C h a b ro l, le douaire, dans cette province,
étant simplement viager , un m ineur ne pourroit pas
prom ettre un douaire propre à la fem m e, quand même
il seroit stipulé également propre aux enfans, comme il
se pratique à P a ris; de m ême la stipulation ordinaire
étant que le douaire n’aura lieu que pendant la viduité,
le m ineur ne pourroit pas prom ettre qu’il contimievoit
m algré le convoi et en secondes noces.
n
Un arrêt du I er. septembre 1640 , confirm atif d’une
sentence de la sénéchaussée de R iom , rapporté par
M . C h ab ro l, a annullé une institution d’héritier que les
deux conjoints s’étoient faite m utuellem ent, quoiqu’ils
fussent à peu près de même â g e , et leurs biens d’ une
valeur égale.
L e m êm e, M . C h abrol, rappelle un autre arrêt, du
18 août 173 5, qui a déclaré nulle une donation m utuelle,
dans une espèce bien plus forte. La future avoit contracté,
du consentement de toute sa fam ille, sous l’autorisation
de la m ère, qui étoit sa tutrice. La donation ne devoit
avoir lieu qu’à défaut d’enfans, et pour les biens qui se
trouveroient appartenir aux conjoints lors de leur décès.
L a disposition fut attaquée par une parente qui avoit
assisté au contrat de mariage. O11 lui opposoit son ap
probation , la réciprocité de la disposition, la faveur du
m ariage, le défaut de^réclamation de la fem m e, avant
l ’âge de trente-cinq ans, le consentement de la fam ille,
�la circonstance que, si elle eût survécu, elle auroit recueilli
la donation de son m ari, qui étoit majeur.
O n ne dissimulera pas qu’à la suite de ces décisions,
M . Chabrol ajoute que l’article de la coutume doit re
cevoir cependant une restriction en cas de donation ou
de substitution en faveur des descendans qui naîtront du
m ariage, principalem ent dans les fa m ille s n obles, dont
il est im portant de so u ten ir la dignité et Vétat ^ et il rap
porte trois arrêts, tous pour des familles n o b les, qui
l’ont ainsi jugé. M ais ces arrêts, qui ne sont qu’un abus
de l’autorité que les parlemens s’étoient attribuée ; ces
arrêts, entièrement contraires au texte et à l’esprit de la
coutum e, peuvent-ils être opposés?
L a coutume ne distingue point ; elle interdit géné
ralement aux mineurs de disposer de leurs biens im
meubles sans autorité de curateur et décret du juge :
et là où la loi ne distingue p o in t, il ne faut point dis
tinguer.
O n doit d’autant moins d istin gu er, qu’on a vu que
dans article 26 du titre 1 4 , elle s’occupe des conven
tions qui peuvent être faites par contrat de m ariage,
convenances de succéder, et autres, qu’elle ne valide
qu’autant qu’elles sont faites par personnes habiles à
1
contracter.
L ’article 219 de la coutume de Bourbonnais , qui
n’est que la répétition et le commentaire de c e lu i- c i,
comprend en termes exprès les donations aux enfans à
naître; et il est ajouté également : Q uand elles sont fa ite s
par personnes habiles « contracter ; et qui dicit de uno
negat de altero.
�Nous appliquerons ici la maxime : L eg ib u s, ?ion exem p lis , ju d ica n d u m .
D ép en d oit-il des parlemens d’établir une jurisprudence
contraire à la l o i , une jurisprudence particulière pour
une classe de citoyens?
L es motifs d’ailleurs qui ont déterm iné ces arrêts ne
subsistent plus.
A u x arrêts rapportés par M . C h a b ro l, on opposera
un jugement émané du tribunal civil de cette v ille , pré
sidant M . V e r n y , du 28 fructidor an 4 , qui a consacré
le retour aux vrais principes, dans la cause de la dame
Brossinliac, veuve Sarret-Fabrègues.
C lém en ce-G en eviève Brossinhac avoit contracté ma
riage en 17 4 5 , avec Joseph Sarret-Fabrègues. E lle étôit
à cette époque mineure. P ar le contrat de m ariage, elle,
du consentement de sa m ère, et le fu tu r, du consente
m ent de son p è re , firent donation de la m oitié de tous
leurs biens présens et à ven ir, h celui des enfans à naître,
q ui seroit choisi par eu x , ou par le survivant d’eux.
E n 1 7 9 1, ils firent conjointement une élection en faveur
de Sarret-Saint-Mancet. Sarret-Fabrègues père est décédé
en 1792. Sai’ret-Saint-M ancet ayant é m ig ré , la nation a
mis le séquestre sur les biens. L a dame de Brossinhac,
devenue v e u v e , a demandé la nullité de la donation,
comme ayant été faite par elle en m inorité. P ar arrêté
du départem ent, elle fut autorisée à se pou rvoir contre
le procureur général du départem ent, et renvoyée aux
trib u n au x, suivant les lois d’alors. L a cause portée au
tribunal civil de S a in t- F lo u r , la donation fut déclarée
n u lle; et sur l’appel le jugement fut confirmé.
�«
«
( 23 )
V o ici les motifs littéralem ent transcrite
« A ttendu que Clém ence-G eneviève Brossinîiac étoit
m ineure au moment du contrat de m ariage, du 28 fê
vrier 1740*,
« A tten du que le m in eu r, par la disposition précise
de la lo i, est mis dans l’heureuse impuissance d’aliéner
a titre o n é re u x , ou disposer h titre gratuit;
« A ttendu que le principe de l’inaliénabilité des biens
des m ineurs, frappe, et a dû dans tous les temps frapper
indistinctement tous les citoyens, sans aucune exception ;
•
«
«
«
«
« Attendu que l’action appartenante à G eneviève-C lémence Brossinîiac pour se p ou rvoir contre la donation du 28 février 17 4 5 , a été suspendue par l’existence
de son m ari, qui avoit intérêt à ce qu’elle ne l’exerçât p a s , et n’a été ouverte qu’au moment de sa v i-
•
«
te
«
et
« d u ité , suivant la m axim e : Contra non valentem agere
« non currit prœ scriptio. »
D ira-t-on qu’ici il n’y a point eu de cause qui ait fait
obstacle 8. la prescription? que le sieur de V é n y devoit
se pou rvoir dans le délai accordé aux m ineurs, dans les
d ix ans; et que ne s’étant point p o u rv u , ni lui ni ses
créanciers ne sont recevables à attaquer la donation ?
L e sieur de V é n y n’avoit pas besoin de se pou rvoir
judiciairem ent, des l’instant que les enfans, par l’acte du
29 brum aire an 11 , ont reconnu eux-mêmes la n u llité ,
et se sont fait consentir une vente.
L e sieur de V é n y n’avoit pas seulement dix ans; il
«voit trente ans pour réclam er, s’agissant de nullité de
coutum e; et c’est ce qui a été jugé par un arrêt d e là
co u r, de la prem ière section, du 14 nivôse an 13.
�( H )
« A tte n d u , porte l’a rrê t, que la demande a été fo r
ce m ée dans le délai de dix ans ;
« Attendu d’ailleurs que les parties étant soumises aux
« lois de la ci-devant coutume , l’article 2 du titre 13
« porte contre les mineurs non émancipés un statut nécc gatif et p ro h ib itif;
« A ttendu qu’A n toin e B o je r n’étoit pas ém ancipé ;
« qu’ainsi la disposition irritante de la coutum e rendant
« nulle l’aliénation qu’il a faite de ses droits successifs,
« il lui a été inutile de se pou rvoir par lettres de rescision. »
L e rédacteur du journal ou nous avons puisé cet arrêt,
renvoie à un arrêt de cassation , du 13 pluviôse an 10,
qui a jugé que quand la nullité étoit d’ordonnance ou
de coutume , on a voit trente a n s, et au journal de Sag u ie r, tom. 2 , pag. 294.
O n dira peut-être que dans l’espèce de l’arrêt de la
cour , le m ineur n’étoit point ém ancipé; qu’ici le sieur
de V é n y étoit émancipé et assisté d’ un curateur. M ais
cette circonstance ne change rien. L a coutume ne distin
gue point entre les mineurs émancipés et non ém ancipés;
elle suppose au contraire le cas d’émancipation , puis
q u’elle parle de curateur. 11 ne suffit pas non plus qu’il
ait été assisté du curateur; la coutum e exige non-seule
ment l’assistance du cu rateu r, mais encore le décret du
juge.
L ’émancipation donne le droit au m ineur de disposer
du m o b ilier, d’administrer et percevoir le revenu des
im m eubles, mais ne lui donne pas le droit de les aliéner.
A in si la raison est toujours la même.
L ’art. 2 du titre 13 ne distingue pas, et l’art. 26 du
titre
�( 2 5 }
titre 14 d it, sans restriction , p a r personnes hiibilas à
contracter.
L e sieur V é n y étoit ém ancipé, et assisté de curateur;
mais il n’y a point eu de décret du ju ge, ce que la coutum e
exige im périeusement; et l’article étant conçu en termes
irrilans et prohibitifs, la nullité peut être opposée pen
dant trente ans. C ’est le cas de la maxime : L o c u s est nullita ti, non tantùm restitutioni.
Q u ’on ne dise pas que le Code civil a borné toutes les
actions en nullité à dix ans; car le Code civil ne peut
avoir d’effet rétroactif. E t le traité, et la déclaration d’en
chère de la veuve J u g e , qui est du 21 nivôse an i r ,
sont antérieurs à la publication du Code.
• L e second contrat de mariage du jsieur de V é n y est du
11 octobre 1773. Depuis cette époque jusques audit traité,
et à ladite déclaration d’e n c h è re , il ne s’est pas écoulé
trente an s, abstraction m ême du temps qu’a duré encore
sa m inorité.
P o u vo it-il d’ailleurs par son silence nuire aux créan
ciers , à ceux qui ont prêté lors même qu’il étoit encore
dans le délai de dix ans ?
U n autre moyen de nullité résulte du défaut d’insinua
tion.
L ’art. 19 de l’ordonnance de 1731 exem pte de cette for
malité les donations en ligne directe. M ais cet article doitil s’entendre, non-seulement des donations faites par les
ascendans aux contractons m ariage, mais encore de celles
faites par les contractons aux enfans ù naître? A utant les
unes sont ordin aires, et ont pu paroître au législateur
D
�~
.
( 26 3
devoir être dispensées de l’insinuation , autant les autres
sont extraordinaires et inusitées. C ’est sur quoi il y a eu
grande diversité d’opinions.
U n arrêt rapporté par D en isard, au mot in sin u a tio n ,
du
juin 1 7 3 4 , en la prem ière chambre des enquêtes,*^a jugé que l’article 11e devoit s’entendre que des donations
faites aux contractans par les ascendans, dans la cause des
enfans mineurs du comte de Jum ilhard, contre M . B ertin,
de S ain t-G eran . L a question a voit été partagée en la
grand’ch am b re, le 27 juin 173 3 , au rapport de M . L o renchet. M . Pucelle étoit com parateur.
L e m ême auteur rapporte un autre arrêt rendu en la
5
grand’cham bre, sur les conclusions de M . Jo ly de F leu ri,
le 9 mars 174 2 , qui a jugé le contraire.
Dans l’espèce de cet a r r ê t, le conjoint donateur étoit
m ajeur : on pouvoit dire aux créanciers qu’un majeur
étant capable de toutes sortes de dispositions, ils avoient
à s’im puter de n’avoir pas pris connoissance du contrat
de mariage. Ici P aul-A ugustin V é n y étoit m in eu r, in
capable par là même : les créanciers n’ont pas dû croire
que le contrat de mariage contînt des dispositions que la
loi lui interdisoit.
. Mais de plus la donation étoit faite à la charge d’une
substitution graduelle et perpétuelle, à la charge par con
séquent de la faire publier et insinuer.
L e décret qui a aboli les substitutions, n’a pas pu dé
charger pour le passé de cette condition.
N ’ayant point rem pli la condition sous laquelle la do
tatio n a été faite, peut-on s’en p réva lo ir?
Peut-on demander l’exécution d’un acte, à la condition
duquel on n’a point satisfait?
�•
.
.
( »
7
) ..
.
™
Si on avoit satisfait à la condition qui étoit imposée*,
les créanciers auroient été avertis, et ils n’auroient pas
prêté : on ne pouvoit publier et insinuer la substitution,
sans publier et insinuer la donation.
• Mais quand on supposeront la donation valable, quand
on supposeroit qu’elle n’a pas dû être insinuée, M arieM arguerite V é n y en a-t-elle été saisie?
L a donation n’est pas faite nominativement à elle : elle
est faite d’abord aux milles ; à défaut de m âles, à celle
des filles qui sera choisie; et à défaut de ch oix seulement,
à celle qui se trouvera l’aînée à l’époque du décès.
L a donation est d’ailleurs de biens présens et à ven ir,
qui par sa nature autant que par les termes de l’a cte,
ne saisit qu’après le décès.
Paul-A ugustin V é n y est encore vivant.
L a loi du 28 mars 1793 a déclaré les ém igrés morts
civilem ent. Mais cette m ort civile qui a cessé par l’am
nistie , qui n’a été que temporaire , ne peut être consideree comme une véritable m ort; elle ne peut être con
sidérée que comme une suspension de l’état c i v i l , per
sonne ne pouvant m ourir pour un temps.
Cette m ort c iv ile , prononcée par une loi qui a été rap
p o rtée, ne dure qu’autant que la loi même. Ce n’est point
m ême une véritable mort.
Comme la m ort c iv ile , dit l’auteur du R épertoire de
jurisprudence au mot m ort civile en quoi il n’a fait
que suivre la doctrine de tous les auteurs qui ont écrit
sur ce sujet, est comparée à la m ort n atu relle, et qu’on
ne meurt point pour un temps, il faut que la condam D 2
�yrt
•'
08
. .
)
nation soit perpétuelle. C ’est en partie, par suite de cette
conséquence, que l’exil ou la captivité par lettres du
p r in c e , ne peut attribuer la mort civile. L e s c u 'c o j i s tances peuvent déterm iner le souverain à révoquer ses
ord res, c l ¿1 rendre la liberté au sujet à q u i il avait résolu
de Voter. I l 11j a que les décrets de la ju stice q u i soient
irrévocables et voilà p o u rq u oi nous a von s, continuet-il, posé en principe que la m ort c iv ile , véritablem ent
m ort civile , ne peut naître que d'une condam nation
ju d icia ire.
E t c’est ce qui est arrivé ; le souverain à f a i t grâce.
Il n’a point fait grâce pour îe passé : le sénatus-consulte n’a point d’effet rétroactif. Que résulte-t-il de là ?
que pendant tout ce temps les émigrés sont demeurés en
é ta t de mort civile; qu’ils n’ont p u , pendant ce temps,
faire aucun acte civil ^ et que ces actes civils n’ont pu
devenir valables, suivant la m axim e: Q u o d ab in itia vi~
tio su m est tr a c tu te/nporis co n v a lesce re n o n p o tes t. Mais
on ne peut en induire une véritable m ort, quant au droit
de succéder ; il en résulteroit qu’un homme laisseroit deux
successions, ce qui est absurde, nul ne pouvant m ourir
deux f o is , comme on ne peut m ourir pour un temps.
Il faut donc distinguer les actes civils du droit de suc
céder. Les actes civils faits jusqu’à l’amnistie sont n u ls,
et ils ne peuvent devenir valables , parce que la loi ne
rétroagit p o in t, parce que ce qui est nul dans le prin
cipe ne peut valider par le temps; ce qui est conforme
aux principes. Mais il n’en est pas de même du droit de
succéder; ce scroit étendre la peine après môme que la loi
pénale n’existe plus ; ce seroit donner un. effet perpétuel
« une peine temporaire.
�( 29 )
2>i <a
CJne m ort temporaire ne p e u t , en un m o t , donner
droit de succéder irrévocablem ent.
O n sait que les term es, dans le9 actes en tre-vifs, ne
reçoivent point d’extension , tantùm valent quantum
sonant. O n ne peut d’ailleurs les interpréter contre l’au
teur de la libéralité.
A qui la donation est-elle faite ? à celle qui se trouvera
l’aînée à l’époque du décès; ce qui ne peut s’entendre que
de la m ort naturelle. On ne peut pas supposer que le
donateur ait entendu parler du cas de la m ort c iv ile , et
se dépouiller lui-m êm e.
Ce n’est pas à celle qui seroit l’aînée, à l’époque de la
mort civile , qu’il a donné et entendu donner , mais à
celle qui seroit l’aînée à l’époque de la m ort naturelle.
A in si, quand on considéreroit P a u l-A u g u s tin V é n y
comme m ort civilem en t, le cas exprim é dans la donation
»’est point arrivé.
Non-seulem ent le m ineur V an dègre n’est point saisi 7
mais il est incertain même s’il le sera.
D é jà M a r ié -M a r g u e r ite V é n y , sa m è r e , a p r é d é c é d é
le donateur*: i l p e u t lu i-m ê m e m o u r ir é g a le m eu t a v a n t
le d on ateu r.
La donation n’est faite à celle qui sera l’aînée à l ’époque
du décès, qu’à défaut de choix.
Paul-A ugustin V é n y étant revenu à la vie c iv ile , peut
faire une élection au moins jusqu’à concurrence de la
quotité disponible.
11 peut faire une élection pour les biens à v e n ir , etchoisir la fille puînée. Il y auroit donc alors deux dona
taires , l’un des biens présens, l’autre des biens à ven ir.
�c 30 >
.
Cependant l’intention du donateur a été de n’avoir qu’un
seul d on ataire, et de ne faire qu’une seule donation de
biens pi-ésens et à venir.
L ’ordonnance permet de diviser les biens présens et à
v e n ir , mais après le décès.
Il est inouï qu’on puisse diviser la donation de biens
présens et à venir du vivant.
P o u r la d iviser, il faut renoncer aux biens à venir ; et
comment ren on cer, du v iv a n t, à des biens à v e n ir, à ded
biens qu’on ne connoît pas.
Si P aul-A ugustin V é n y acquéroit une fortune consi-*
dérable , pourroit-on opposer au m ineur V an dègre sa
renonciation? N e diroit—il pas qu’il n’a p u , ni M arieM arguerite V é n y , sa m è re , ren o n cer, du vivant du
d o n ateu r, à des biens à venir.
11 n’y a pas même de renonciation.
A utant l’administration , lors de l’arrêté du
messidor
an 2 , s’est m ontrée sévère, autant, lors de celui du pre
m ier com plém entaire an 4 , elle a été indulgente et gé
5
néreuse. Dans l’exposé des m otifs, on voit qu’elle pensoit que la pétitionnaire avoit également droit à la m oitié
des biens acquis depuis le mariage ; mais on ajoute qu’il
parnît que la pétitionnaire se borne aux biens présens.
E lle n’a demandé effectivement que la m oitié des biens
présens; mais il n’y a pas de renonciation aux biens à venix\
M ais il se p résen te, pour écarter la réclamation du
m ineur V a n d è g re , un autre m oyen, soit qu’on se réfère
à la m ort naturelle, soit qu’on se réfère à la m ort civile
du sieur de V én y . Ce moyen résulte de la loi du 18 plu
viôse an
5.
�3
C 1 )
L ’article I er. de cette lo i maintient les avantages, p récip u ts, donations, institutions conti’actuelles, et autres
dispositions irrévocables de leur n a tu r e , légitim em ent
stipulées en ligne directe avant la publication de la loi
du 7 mars 1 7 9 3 , et en ligne collatérale avant la pu bli
cation de la loi du 5 brum aire an 2 , tant, est-il d it, sur
les successions ouvertes ju s q u ’à ce jo u r , que sur celles
qui s’ouvriront à l’avenir. L a loi ne maintient que les
dispositions dont ceux au profit desquels elles ont été
faites ont été saisis irrévocablem en t, sav oir, quant à la
ligne d irecte, avant la publication de la loi du 7 mars
1793.
M arie-M arguerite V é n y a-t-elle été saisie irrévocable
m ent avant la publication de la loi du 7 mars 179 3?
L a peine de la m ort civile a été prononcée contre lés
ém igrés, par la loi du 28 mars 1793. Cette loi porte : Les
émigrés sont bannis à perpétuité du territoire français; ils
sont morts civilem ent ; leurs biens sont acquis à la répu
blique.
L a m o rt civile n’a d o n c été e n co u ru e q u e p a r cette loi.
E n se référant d on c à la m ort c iv ile , la d am e V é n y -V a n dègre n’avoit aucun droit irrévocablem ent acquis avant
la loi du 7 mars. T an t que le sieur V é n y n’a point été
frappé de la m ort c iv ile , il a pu faire une élection ; et
tant qu’il a pu faire une électio n , la dame V é n y -V a n dègre n’a eu qu’un droit incertain ; elle n’en a même eu
aucun; elle n’en a point eu en vertu de la prem ière partie
de la clause, ni même en vertu de la seconde, qui ne
l'appeloit qu’à défaut d’élection; élection qu’il a été libre
au sieur V é n y de faire jusqu’à la loi du 7 mars.
�Cette loi a aboli la faculté de disposer; et ou voudra
en conclure que dès ce m om ent le défaut d’élection étant
devenu certain, le droit a été acquis en vertu de la voca
tion subsidiaire.
M ais la loi veut que le droit soit acquis antérieurement.
Il ne pourroit réclam er l’effet de la donation après le
décès, et il le réclam e du vivan t!
Comm ent peut-on dire qu’il a été saisi, par la m ort
civ ile, d’une donation dont il ne sera même pas saisi par
la m ort naturelle ?
Q u ’on n’oppose pas que la loi maintient les dispositions
irrévocables de leur n atu re, et que la disposition dont
il s’agit étoit irrévocable, surtout d’après la faculté don
née par l’ordonnance de s’en tenir aux biens présens.
O u i , elle étoit irrévocable quant au titre , mais non quant
à la personne qui devoit recueillir ce titre. L a qualité
d’h éritier , de donataire , ne peut pas exister par ellemême ; il faut un sujet à qui elle s’applique. La qualité
d’héritier e s t, si l’on peut parler en termes de gram
m aire, l’adjectif qui ne peut exister sans le sujet à qui
elle s’applique. La qualité, le titre de donataire étoit irré
vo cable; mais la personne qui devoit recevoir ce titre
étoit incertaine. Paul-A ugustin V é n y , jusqu’à la publi
cation de la loi du 7 mars 1793* pouvoit é lir e ; il pouvoit appeler à recueillir l’effet de la donation celle de
ses deux filles que bon lui seinbloit : aucune d’elles n’étoit
donc saisie irrévocablem ent.
U n arrêt d elà cour de cassation, du 13 therm idor an 1 3 ,
rapporté au journal de D en evers, pag. 8 0 , contraire à
un arrêt du 23 fructidor au 8 , qui avoit jusque-là fixé
la
�( 33 )
la jurisprudence, a jugé qu’une institution nom inative
d ’h éritier, subordonnée à un droit d’élection conféré à
un tiers, et non exercé avant la publication de la loi
du 17 nivôse, étoit devenue irrévocable; mais dans cette
espèce, le testateur étoit décédé en 179?*, antérieure
ment à la loi du 7 mars 1793.
Dans l’espèce de cet arrêt, l’institué nominativement
à défaut d’élection , avoit pour lui la volonté constante
du testateur , q u i , étant décédé en 1782 , n’avoit pu en
changer. Mais ici M arie - M arguerite de V é n y n’a pas
eu une volonté constante du d o n ateu r, antérieure à la
lo i du 7 mars 179 3 , puisqu’il a pu jusqu’à cette époque
faire une élection , et par cette élection la p river de
l ’effet de la seconde partie de la clause, qui ne l’appeloit
que subsidiairernent.
Comment le mineur Y an d ègre s’ap p liq u eroit-il, à Vexclusion de la dame de Sampigny yl’effet de cette donation ?
E t la dame de Sam pigny ne révendique point. E lle a
au contraire appelé tous les créanciers à enchérir sur
la totalité de la terre.
O n a tellement rendu homm age aux principes qu’on
vient d’établir, on a tellement reconnu que M arie-M arguerite Y é n y n’ayant point été saisie irrévocablem ent
avant la publication de la loi du 7 mars 17 9 3 ,1a dona
tion étoit sans effet, que dans l’acte du 29 brum aire an 11
on attribue la m oitié donnée, p a r égalité, au m ineur
V an d ègre et à la dame Sampigny : T roisièm em en t, est-il "
d i t , pour consolider enfin su r la tête du m ineur et de
la dame Sa m p ig n y, par égalité entre e u x , la pleine
propriété et jo u issa n ce , dès à p résen t, et m com m utaE
�**
( 34 )
blem ent.de la m o itié de la terre de J a y e t dont s’a g it,
quels que soient les événeniens ; ce qui seroit intolérable,
si le m ineur seul avo it dû recueillir l’effet de ladonation.
E t la dame de S a m p ig u y, encore une fois ne reven
dique point.
O n a dém ontré que la donation étoit nulle. O n a établi
que la donation ayant été faite à la charge d’une subs
titution graduelle et p erpétuelle, et par conséquent de
Ja faire publier et in sin u er, les créanciers qui ont con
tracté à la bonne foi ne doivent point être victimes de la
juste opinion qu’ils ont dû avoir que les biens étoient
libres sur la tête de leur débiteur. Subsidiairement on a
jétabli que le m ineur V andègre n’étoit point saisi de la
donation ; et du moins ne doit-on pas envier aux créan
ciers la ressource de se venger sur l’usufruit, la vie durant
de Paul-A ugustin V é n y .
R evien dra-t-on sur l’arrêté du départem ent? D irat-on qu’il n’y a plus lieu à agiter toutes ces questions?
O n a déjà répondu que cet arrêté ne pou voit être opposé.
M ais voici une autre réponse.
O n pourroit s’en faire un m oyen, si les choses étoient
encore dans le m ême état.
M ais depuis, cet arrêté est devenu sans effet, par la
réunion de la qualité d’acquéreur, par le contrat judi
ciaire résultant de la notification de la transcription.
P a r la réunion de la qualité d’acquéreur ! M ai'ieG en eviève M alet de V a n d è g re , à qui a été consentie
la vente de 1 7 9 2 , est décédée en l’an 6 ; M a rie-M a rguerite V é n y lu i a succédé conjointement avec Marie-
�C 35 )
M S
A n n e V é n y , sa sœ ur; elle n’a point fait faire d’inventaire',
elle s’est portée héritièi’e pure et simple.
Si elle entendoit ne pas confondre sa qualité de do
nataire, elle de voit n’accepter la succession que sous b é
néfice d’inventaire.
Ce n’est pas le m ineur V an dègre qui a succédé et qui
pourroit se jouer de ses qualités; c’est M arie-M argueritè
V é n y , qui étoit majeure.
D epuis elle est décédée elle-m êm e; elle a transmis sa
succession au m ineur V andègre ; mais celui-ci ne peut
pas avoir plus de droit que M arie-M arguerite V én y.
D ès le m oment de l’acceptation de la succession, M arieM arguerite V é n y a été aux droits de Ma rie-G en ev iè v e
M alet de Vandègre.
/
P aul-A ugustin V é n y a pu vendre. Il a pu vendre dès
qu’il ne portoit point atteinte à la m oitié des biens donnés:
car il n’avoit pas promis la m oitié de chaque nature de
bien s, mais généralem ent la m oitié de ses biens. O r ,
à l’époque de la vente, la terre de Jayet n’excédoit pas
la m oitié des biens libres. Il a pu vendre pour payer des
dettes toutes antérieures, et qui frappoient sur les biens
présens.
M ais en supposant qu’il lui eût été interdit de vendre
au préjudice de la donation , M arie-M arguerite V é n y ne
peut attaquer un acte qui est devenu son propre titre.
P aul-A ugustin V é n y ne peut l’attaquer: le retour de
l ’ém igration ne lui donne pas le droit de revenir contre
les actes qu’ il a souscrits auparavant. L ’adversaire con
vient lui-m êm e que l’arrêté du messidor an 2 , qui l’a
5
déclaré n u l , n’est que dans l’intérêt national, et c’est
E 2
�36
(
)
ce qui a etc encore jugé par un arrêt de la cour de cas
sation, du 28 frim aire an 13.
M arie-M arguerite V é n y est également tenue de l’exé
cuter. E lle étoit majeure à l’époque de l’ouverture de
la succession de M arie-G eneviève M alet de V a n d èg re;
elle a accepté la succession purem ent et simplement ; elle
est tenue de tous ses engagemens.
E t c’est l’équivoque à laquelle il faut prendre garde.
O n se référera toujours à l’arrêté du prem ier com plé
mentaire an 4. Cet arrêté donnoit la m oitié de la terre
de J ayet; mais depuis la donataire a succédé à celle qui
a acquis. Comme ayant succédé à celle qui a acquis, elle
est bien tenue de tous ses engagem ens, et par consé
quent de tenir le p rix de la vente à la somme de 130000 fr.
à laquelle il a été p o rté, en y com prenant les 10000 f.
capital de la rente de oo fr. due aux Sœurs religieuses
de Saint-Joseph de Vensat.
O n n’op p osera sans doute point l’acte du 29 brum aire
an 11. Sans faire d’autres réflexions sur cet acte, P aul-
5
A ugustin V é n y n’a pu évidem m ent dim inuer le p rix de
la prem ière vente, au préjudice des créanciers.
L a dame veuve Juge et les autres créanciers auroient
pu demander la nullité de cet acte, comme fait à leur
préjudice. M ais la déclaration d’enchère opéroit le même
effet; elle a enchéri également sur cet acte.
‘ M arie-M arguerite V é n y ayant succédé à M arie-G eneviè ve M alet de V an d ègre, a succédé à l’engagement que
celle-ci a contracté par la vente de 179 2; elle doit faire
compte en deniers, délégations, ou reprises valables, de
la somme de 130000 fr.
�(
37
)
Mais si elle est liée par la ven te, les créanciers ne sont
pas liés envers elle ; elle doit faire com pte de la somme
de 130000 f r ., sauf à déduire ses reprises, a d legitim u m
m od um . M ais rien n’empêche que les créanciers ne puis
sent enchérir.
Cette surenchère n’a rien que de favorable ; elle con
serve les intérêts de tous ; les intérêts du m ineur qui sera
libéré d’autant plu s, et les intérêts des créanciers, m êm e
des créanciers qui ont contracté postérieurement au ma
riage, parce qu’ils ont intérêt que les créanciers antérieurs
soient payés sur les biens présens, pour dégager les biens
à venir.
L e sieur de V an dègre ne s’est pas dissimulé l’objection.
Il répond que la confusion a cessé p arla mise aux enchères;
que la mise aux enchères a effacé la qualité d’acquéreur,
et ne laisse plus subsister que celle de donataire.
M ais c’est une erreur. Il ne faut pas confondre la mise
aux enchères, en cas de vente volo n taire, avec l’expro
priation forcée. Dans l’expropriation forcée , l’enchère
est effacée de plein droit par la surenchère , au point
qu’à défaut de p a y e m en t de la p a rt du s u ren ch érisse u r,
on ne peut revenir sur celui qui a enchéri le p rem ier,
sauf à poursuivre la revente à la folle enchère sur le
surenchérisseur.
Il n’en est pas de même , dans la mise aux enchères,
en cas de vente volontaire. L ’acquéreur , nonobstant la
mise aux en chères, n’est pas moins acquéreur. La mise
aux enchères suppose toujours une vente préexistante, et
une vente valable. 11 y a toujours ven te; il n’y a que la
personne de l’acquéreur de changée, si le prem ier acqué
reur ne veut pas enchérir à son tour. C ’est ce qui résulte
�de l’article 18 de la lo i du n brum aire , sur le régime
hypothécaire.
w « Si au jour annoncé pour l’adjudication, il se pré« sente des enchérisseurs, l’im m euble est adjugé à celui
« qui fait l’offre la plus avantageuse.
« Dans le cas contraire , elle est faite au profit du
« créancier p r o v o c a n t, pourvu qu’il la requière. S’il
« ne se présente p o in t, ni personne pour l u i , à l’effet
a de la re q u é rir, le tribunal d éclare, après l’extinction
« des trois feux consécutifs, que ce créancier demeure
« déchu du bénéfice de son enchère, et que Vacquéreur
« continue de dem eurer p ro p riéta ire, m oyennant le
« p r ix stipulé dans son contrat. Il condamne celui qui
« aura provoqué la vente aux frais de la poursuite , et
« en outre à payer , com m e excédant du prix , la somme
« à laquelle il s’étoit obligé de porter ou faire porter
a l’immeuble en sus du p rix conventionnel. »
C e seroit donner un singulier effet à la mise aux en
chères , de donner à cette mise aux en chères, com m e
des biens de P a u l-A u g u stin V é n y , l’effet de distraire
au contraire des biens dudit V é n y l’objet soumis à la
déclaration d’enchère, de faire revivre le droit que Marie-.
M arguerite V é n y auroit pu avoir de reven diquer; droit
éteint par la confusion!
Cette mise aux enchères détruit-elle la qualité pure et
sim ple d’héritière de celle qui a acquis?
L a réserve portée, par l’acte du 29 brum aire an 1 1 ,
de faire valoir les droits résultans de la donation , dans
le cas où su r la transcription et la notification de la
transcription il surviendrait des enchères de la part
des c r é a n c ie r s, est insignifiante. Cette réserve ne peut
�( 39
s% o\
)
pas plus que la mise aux enchères faire revivre la qualité
de donataire étein te, non dans la personne du m ineur
V an d ègre, q u i, à raison de sa m inorité ,.auroit pu se faire
restitu er, mais.dans la personne de M a rie-M a rg u erite
V é n y , par la confusion.
I/arrêté du départem ent est encore anéanti par le
contrat judiciaire résultant de la notification de la trans
cription.
Q u ’est-ce quela transcription? C’est la soumission de rap
porter aux créanciers inscrits le p rix du contrat. Q u’estce que la notification de la transcription? C ’est la sou
mission de rapporter l’immeuble m êm e, si les créanciers
prétendent qu’il a été vendu à trop bas prix \ c’est une
invitation faite aux créanciers d’enchérir pour l’avantage
de tous ; c’est une form alité introduite par la lo i pou r
préven ir toute fraude de la part du débiteur.
L e sieur de V an dègre s’est fait autoriser par avis de pare n s,p o u r revenir contre cette notification de transcrip
tion , contre son propre ouvrage. M a i s tout ce qui est fait
au nom des mineurs est-il nul par cela seul ? Si le m i
n e u r , ou le tuteur pour le m in eu r, ne fait que ce que
le majeur le plus prudent auroit fa it, sera-t-il reçu à de
mander à être restitué ?
L a transcription , et la notification de la transcription,
ne sont qu’une suite de la vente, de (1792. L e tuteur n’a
fait que ce qu’ une sage,.une vigilante administration lui
prescrivoit.
Il ne faut pas perdre de vije que le m ineur V an d ègre
n’a pas succédé directement à l’aïeule. S ’il avoit succédé
*4
�( 40 )
directem ent, il pourroit se faire restituer contre l’accep
tation pure et simple de sa succession :mais c’est MarieM arguerite V é n y qui a succédé, qui étoit alors majeure.
Il faut faire abstraction du m ineur V an d ègre, et ne con
sidérer que M arie-M arguerite V én y.
P a r la notification de la transcription il s’est form é
un contrat judiciaire.
L a prétention qu’on élève au nom du m ineur V a n
dègre ne tend pas seulement à enlever aux créanciers
la m oitié de la terre de J a y e t, mais encore la moitié
de la terre de M o n tro d ès, que l’arrêté déclare aussi
faire partie des biens présens, ainsi que la m oitié de tous
les biens avenus à P a u l-A u g u s tin V é n y par le décès
de son père. O n voit donc combien les créanciers seroient
constitués en perte.
S
e c o n d e
q u e s t i o n
.
N u llité de Vaffiche.
Cette seconde question est commune au sieur de V a n
dègre et à la dame de Sampigny.
Les appelans trouvent extraordinaire que les premiers
juges aient accueilli les moyens de form e , et en môme
temps statué au fond; qu’ils aient prononcé la nullité de
l ’afRclie, et qu’ ils aient fait droit au fond sur la revendi
cation. C ’est suivant eux la prem ière fois qu’on a cumulé
les moyens de form e'avec ceux de fond.'M ais la nullité
et le jugement au fond ne portent pas sur la même de
m ande:
�monde : la nullité porte sur l’affiche, et le jugem ent au
fond porte sur la demande en revendication. Sans d ou te/
si la nullité avoit porté sur la demande en revendication,
si on avoit soutenu que cetle demande étoit nullem ent
et irrégulièrem ent fo rm é e , on n’auroit pu la déclarer
n u lle , et en même temps faire droit au fond, juger si
elle étoit bien ou mal fondée; mais ici la nullité n’avoit
trait qu’à l’affiche; et en déclarant l’affiche n u lle, le juge
n’avoit-il pas le p o u v o ir , disons m ie u x , n’étoit-il pas
indispensable, de faire droit sur la revendication, pour
déterm iner ce qui pouvoit être compris dans la nouvelle
affiche.
Les appelans prétendent que mal à propos les premiers
juges ont pensé que le dom icile réel de P a u l-A u g u s tin
V é n y étoit à Paris, et eux-mêmes l’ont reconnu dom i
cilié à Paris , par l’acte de notification de l’enchère de
ladite veuve Juge. O n sait que tout acte doit être signifié
à personne ou à domicile. Cet acte de notification, pres
crit par l’article . . . de la loi de brum aire an y , n’a pas
été signifié à personne; et si le dom icile n’est pas à Paris,
l’acte de notification seroit n u l, et par conséquent tout
ce qui a suivi.
Dans l’affiche même on le déclare dom icilié à P a r is .
Indépendamment des nullités accueillies par le juge
ment dont est a p p e l, il en seroit une autre bien sensible
dans le système du sieur de V andègre.
Dans l’affiche on comprend la totalité de la terre de
Jayet; ensuite il est dit que Vadjudicataire rfentrera en
jou issa n ce y et ne deviendra propriétaire dès le m om ent
de l'a d ju d ica tio n , que de Vautre m oitié des biens de
F
�( 43
J
J a y e t, seulement telle q u ’elle avoit été f ix é e p a r le par
tage f a it avec la république.
E t on ne transcrit point le partage; en so rte, comme
on l’a déjà o b serv é , que l’affiche désigne et ne désigne
point les objets à vendre.
O n conçoit que ce moyen n’est que subsidiaire, dans
le cas o ù , ce qu’on est loin de penser, les intimés succom beroient sur la revendication.
U n autre m oyen, qui n’est pas subsidiaire, est l ’omis
sion dans l’affiche du droit éventuel de P a u l-A u g u stin
V é n y de rentrer dans ses biens, en cas où il viendroit à
survivre à tous ses enfans ou descendans. Ce n’est pas ici
une expropriation forcée. Dans une expropi’iation forcée
on com prend ce que l ’on veut; mais c’est ici une revente,
et la revente doit com prendre tout ce qui est dans la
vente. Il faut bien se fixer sur la nature de la réclamation
du sieur de V a n d èg re; il ne demande pas, au nom du
m in eu r, la nullité de l’acte du 29 brum aire an n ; il ne
réclame que la distraction de la m oitié des biens donnée,
en vertu de la réserve qu’il s’est faite par ce même acte,
de faire valoir la donation et tous autres titres, dans le
cas o ù , sur la notification de la transcription , il surviendroit des enchères; en sorte qu’il entend bien que
l ’acte subsiste en tout ce qui ne porte pas atteinte à la dona
tion , et par conséquent quant à la vente du droit éven
tuel. Q uelque fo ib le , quelqu’incertain que soit ce droit
éventuel, car il n’est pas à présumer que Paul-A ugustin
V é n y ait le m alheur de survivre à toute sa descendance, il
est compris dans la vente. Il devoit donc être compris dans
l’affiche pour parvenir à la revente.
�^
C 43 )
Les appelans a voient opposé contre la déclaration même
d’enchère de la veuve J u g e , une fin de n on -recevoir,
i ° . comme la veuve Juge étant sans intérêt; 20. comme
n’étant point légalem ent inscrite. O n ne conçoit pas com
ment la veuve J u g e , à qui il est dû plus de 36000 francs,
auroit été sans intérêt. Ils déclarent au surplus, dans le
m ém oire im prim é, qu’ils n’y insistent poin t; et ils tachent
même de s’en faire un mérite.
Il ne reste plus qu’à ajouter k tout ce qu’on vient de
d ir e , les motifs du jugement où l’on trouvera encore
de nouvelles considérations.
M o t if s du ju g em en t.
• « En c e qui concerne le reproche fait à la dame Queriau ,
d’être sans qualité et sans intérêt pour procéder en l’instance ;
« Et d’abord, en ce qui touche le moyen tiré de ce que l’ins
cription de la dame Queriau a été faite dans un temps où le sieur
de Villem ont, comme réputé ém igré, étoit mort civilem ent,
et qu elle ne l ’a pas renouvelée après la radiation du sieur de
Villem ont;
' « Attendu que l’article 17 de la loi du 11 brum aire, a réglé
que l’inscription sur une personne décédée peut être faite sur la
simple dénomination du défunt ; que la dame Q u eria u , en réputant le sieur de Villem ont comme m ort, s’est conformée à
la loi;
et Attendu que cette loi étant générale , embrassant toute
espèce de créanciers et débiteurs, la dame Queriau, pour con
server ses droits ainsi que le rang et ordre de son hypothèque,
a dû prendre les précautions ordonnées ; que les mesures pres
crites par la loi ne devant jamais rester sans efiet, la dame Q u e
riau est fondée à en réclamer le bénéfice ;
F 2
�(
44
)
3
« Attendu que la loi du . . . . prairial an , qui ordonnoit aux
créanciers d’émigré de faire liquider leurs créances pour en tou
cher le m ontant, étoit une loi de circonstances, qui ne concernoit que les créanciers jaloux de réclamer leurs créances sur
la république , comme étant à la place de l'émigré ; mais que la
dame Q u eriau , ne demandant rien à la république, n’a pas eu
besoin de se faire liqu id er, les lois d’exception devant se ren
ferm er strictement dans leur cas particulier;
« Attendu que la loi de l’an , antérieure à celle de l’an 7 T
sur les hypothèques, n’a pu en détruire les effets , surtout lors
que la dame Queriau les invoque, non contre la république, mais
bien contre son débiteur, rentré dans ses droits éventuels, ou
contre ses représentans;
« Attendu qu’on ne peut puiser dans la loi du 16 ventôse
an 10, qui a prorogé le délai de faire inscription en faveur des
créanciers d’émigré, un m otif pour faire rejeter l’inscription déjà
faite par la dame Queriau , i°. parce qu’une loi de faveur et
de bienfait ne peut jamais devenir un titre de réprobation
20. parce que la loi en autorisant * sur les émigrés rétablis, l’ins
cription avec tous ses droits et privilèges, a entendu nécessai
rement que les inscriptions déjà faites par prévoyance eussent
le même effet sur ces mêmes ém igrés, la raison étant la même
pour un cas comme pour l’autre.
« En ce qui touche le défaut d’in térêt, reproché à la dame
Queriau ;
« Attendu qu’on n e peut raisonnablement opposer à la dame
Queriau qu’elle pourra être payée sur la m oitié, c< mme sur la
totalité du bien de J a y e t, puisque la démarche des poursuivans
dans l’instance , ayant pour objet de soustraire à la prise des
créanciers la moitié de ce domaine, la dame Queriau est fondée
à craindre d’être primée par des créanciers antérieurs , et que par
là l’autre moitié de l'immeuble ne sufiise pas pour remplir sa
créan ce; qu’a in si , n o n - s e u l e m e n t elle peut, mais qu’elle doit
m êm e, sous le rapport de son intérêt, s’opposer à ce qui peut
affaiblir son gage et sa sûreté;
3
�C
45
)
^
cc Attendu qu’en général tous les créanciers appelés à une exprô^
priation de leur débiteur , ont droit et intérêt de critiquer les dili
gences des poursuivans , soit sur le fond de la dem ande, soit sur
la régularité des poursuites , parce que le bien de leur débiteur
fait leur g a g e , et parce que les vices et les irrégularités retar
dent leur payement, et que si en d’autres circonstances les ac
tions sont seulement relatives, en matière d’expropriation toutes
les prétentions ainsi que tous les actes sont directs et person
nels à chacun des créanciers qui y trouve, ou un avantage à
prendre, ou un mal à éviter ;
cc Attendu que la dame Queriau ayant été appelée, soit pour
enchérir, soit pour l’audience d’expropriation , en vertu de son
inscription de l’an 7 , les poursuivans ont publiquement reconnu
par là qu’elle avoit intérêt et qualité suffisante dans la con
testation.
cc En ce q u i touche la revendication demandée par les pour
suivans , de la moitié du domaine de Jayet;
<c Attendu que cette demande se trouve en contradiction avec
la démarche faite parles demandeurs, lorsqu’ils ont soumis à la
transcription le contrat de vente de 1792 ; que cet arrangement
de famille ayant embrassé le domaine de Jayet sans division,
a dû être valable pour la totalité, ou nul pour le tout ; que les
poursuivans par leur transcription l ’ayant adopté et ratifié pour
le tout, ne peuvent prétendre aujourd’hui que cet acte doit être
scindé , puisque ce sont les actes qui font connoitre les véri
tables intentions des parties, et non les réserves faites après coup,
suivant la maxime '.P lusvalere quodagiturquam quod simultaùe
concipitur;
cc Attendu que la transcription étant un acte par lequel l’ac
quéreur vient demander à-la justice d’étre rendu propriétaire
incominutable, et n’obtenant ce bienfait que sous la condition
que les droits des créanciers inscrits seront conservés, il résulte
une espèce de contrat judiciaire, dont l’acquéreur ne peut plusw départir ; que la dame Q ueriau, en faisant une en ch èrer a
/
�•‘ a t
4
C ^> )
spécialement accepté le contrat ; que son enchère, la transcrip
tion des poursuivans, se lient et se rattachent au contrat de
vente de 1792, et par conséquent à la totalité du domaine de
J a y e t, dont la revente sans restriction est inévitable ;
« Attendu que les autres créanciers ayant aussi été provo
qués à enchérir , ayant aussi reçu des poursuivans l’assurance
d’étre payés jusqu’à concurrence du prix de la totalité du bien
de Jayet, ont également été saisis de cette promesse; que le
contrat est également formé avec e u x , puisqu’ils ont adhéré
aux demandes de la dame Q u eriau , et pris les mêmes conclu
sions qu’elle ;
« Attendu que le contrat de vente de 1792 ayant été con
senti à la dame de Vandègre, mère et belle-m ère des poursui
vans , la transcription par eux requise a implicitement annoncé
aux créanciers inscrits que c ’étoit en qualité d’héritiers de la
dite dame de Vandègre, qu’ils se rendoient propriétaires incommutables de cet im m euble, et que les créanciers pouvoient li
brement faire valoir les droits qu’ils pouvoient avoir sur tous les
biens de Jayet, comme venant en dernier lieu de la dame de
"Vandègre ; que les créanciers ayant suivi cette impulsion , ne
peuvent appréhender l’effet d’une revendication qui n’auroit pu
être reconnue contre la dame de Vandègre ;
« Attendu que la transcription du contrat de 1792 renferme
aussi, de la part des poursuivans, une volonté formelle de re
noncer à tous autres actes qui auroient pu porter atteinte à cette
v e n te , une intention marquée d’adopter ce règlement de préfé
rence , de s’y tenir plus particulièrement qu’à tout autre, et de
fixer sur lui seul l’attention et les poursuites des créanciers ;
« Attendu que sans cette intention spéciale dans les pour
suivans, la transcription de la vente de 1792 devient inexpli
cable ; elle ne présente aucun objet vis-à-vis des créanciers : la
notification qui leur a été faite seroit illusoire ; ce que l’on ne
peut admettre ;
« Attendu que l ’objection du traité de l’an 1 1 , passé entre
�le sieur de Villem ont et ses enfans, et soumis à la transcription’,
comme ayant dérogé à la vente de 1792, seroit sans fondem ent,
puisque cet acte ne peut concerner que les parties qui y sont
contractantes; qu’il est étranger aux créanciers dont les droits
étoient antérieurs et légalement conservés ; que de plus il parolt
que cet acte n’a eu pour objet que de donner plus d’effet et d’éten
,
due au contrat de mariage des père et m ère, d u ............ 1
de prendre des mesurés contre les prétentions du père, et d’as
surer l’egalité entre les enfans ; tous objets qui n’ont pu lier les
créanciers, et préjudicier à leurs droits;
« Attendu qu’en basant sur la donation de biens présens et à
venir, de 1775 , la revendication dont il s’agit, elle ne devient
pas plus favorable , puisque vis-à-vis des tiers tels que les créan
ciers, la donation n’est pas encore ouverte; qu’il faut attendre,
pour lui donner e ffe t, la mort naturelle du sieur de Villem ont;
que la mort civile par lui encourue m omentanément, a pris fin ,
relativement aux suites de la donation des biens présens et à
ven ir, par sa radiation de la liste des ém igrés; que les droits
éventuels attachés à sa personne, et subordonnés seulement à
sa mort n atu relle, ont repris vis-à-vis des tiers toute leur force
et effet primordial ; que sans doute au décès du sieur de Ville*
m ont, ses enfans donataires auront le choix de s’en tenir aux
biens présens seuls , en payant les dettes existantes lors de sa
donation , ou de prendre les biens présens et à venir, à la charge
de payer les dettes au temps du décès ; de même que les créan
ciers ou autres ne pourroient un jour obliger les enfans à se res
treindre aux seuls biens présens, et abandonner tous les biens'
à venir, de même ceux-ci ne peuvent dès à présent forcer les
créanciers à reconnoltre l’option prématurée des biens présens;
que par la raison que les enfans ne peuvent être dépouillés d e '
l’espérance des biens à venir,, ils ne peuvent aussi se d ire , h
l’égard des créanciers, saisis et revêtus des biens présens; que
le sieur de Villemont ne peut être en même temps réputé m ort,
pour donner aux enfans le privilège actuel de prendre les biens ;
773
�! « Attendu que si le s^natus-consulte de l’an 10 n’a rétabli
les émigrés dans leurs droits c iv ils , que sous condition de ne
pouvoir attaquer les actes faits par la nation, cette disposition
ne concerne que les émigrés personnellem ent, pour qu’ils ne
viennent pas porter le trouble, soit dans leur fam ille, soit dans
les arrangemens qui peuvent intéresser des tiers ; mais cette
défense n’a trait qu’aux seuls ém igrés, et n’a pas pour but de
frustrer des créanciers légitimes ; que dans la circonstance les
enfans du sieur de Villem ont ne peuvent pas être considérés,
vis-à-vis des créanciers, comme des tiers, ayant un droit acquis
par la ci-devant mort civile de leur p ère , puisqu’il n’est pas ques
tion , dans la circon stan ce, d ’un droit déterminé et con stan t,
comme seroit un fidéicommis sur des biens désignés, lequel seroit ouvert d’après l’article 24 de l’ordonnance des substitutions,
mais qu’il s’agit d’une donation de biens présens et à venir ; que
les effets de cette donation , quant aux biens présens, sont en
core liés, et inséparables de celle des biens à ven ir, dont l’op
tion est de droit attachée à la mort naturelle du sieur de V il
lem ont; que jusque-là rien n’est encore dû au donataire de cette
espèce, et que les enfans ne peuvent opposer à des créanciers
inscrits des actes qui n’ont pas été transcrits , et qui ne peuvent
être opposés à des tier6 ;
cc Attendu qu’indépendamment des principes , il se présente
en faveur de la dame Queriaux des motifs d’équité qui déter
minent , puisque ses droits sont constans et légalement con
servés ; que son hypothèque, assise sur tous les biens du père
tant qu’il étoit vivan t, étoit incontestable ; qu’elle retrouve au
jourd’hui les mêmes biens dans les mains de son débiteur ou de
ses enfans , qui n’ont pu les prendre qu’à titre d’enfans, et par
anticipation sur la succession de leur père encore vivant. Com
m en t, dans une telle position, la punition infligée par la loi au
père s e u l, profitable aux enfans à l’égard du père s e u l, pourroit-elle rejaillir sur un créancier légitime V Corpment des actes
qui n’ont été réellement que des arrangemens de famille et
de
�( 49 )
^
de circonstances, qui par leur tourn ure, leurs précautions et
leur obscurité , annoncent les circonstances qui les ont fait
naître ; comment de tels actes pourroient-ils fonder une reven
dication qui suppose des titres précis et des droits ouverts? D e
tels actes ne peuvent être regardés d’un oeil favorable.
« En ce qui touche les nullités de la procédure ;
a Attendu que les parties ont respectivement confondu avec
les moyens de la revendication, ceux de la nullité de la procé
dure , et qu’il a fallu en temps faire droit sur les uns et sur lea
autres, pour ne pas laisser la perspective d’une contestation
assurée au moment de la revente ;
« Attendu qu’après avoir présenté aux enchères la totalité de
J a y e t, après avoir induit à faire des offres sur cette totalité , la
revendication de la moitié du domaine, faite par les poursuiv a n s, tend à laisser sans enchère réelle l’objet proposé à la
revente, puisque, d’un côté, la dame Queriau se trouve avoir
fait sur une moitié de domaine une enchère qu’elle n’auroit pas
fa ite , ou qui auroit été beaucoup m oindre, et d’autre c ô té , les
poursuivans ont été obligés de consentir à l ’audience que cette
enchèrefut restreinte, ou q u 'il en f û t f a i t une nouvelle; qu’ainsï
il est vrai de dire que l’affiche a été présentée au public san6
véritable enchère , puisque celle qui est mentionnée n’est pas,
de l’aveu même des poursuivans , l ’e n c h è r e véritable et sérieuse,
qui doit être la première mise , et qu’ainsi l’article 5 de la loi
du 11 brumaire a été violé à cet égard.
« En ce qui touche la nullité résultante de ce qu’il n’a pae
été mis d’affiche au domicile du débiteur ;
« Attendu qu’on ne peut révoquer en doute que le dom icile
réel du sieur de Villemont ne fût à P a ris, vieille rue du Tem ple
( n°. 180 ) ; que le sieur. Villemont le déclare lui-méme dans son
acte d’élection de dom icile; que les poursuivans l’ont eux-mémes
reconnu, en signifiant au sieur de V illem o n t, à ce domicile de
Paris , com m a le seul domicile lé g a l, l'enchère de la dame
Queriau ;
G
�(
5o
)
« Attendu qu’il n’a pas été plus difficile d’apposer une affiche
au domicile de droit du sieur de Villem ont, que de lui signifier
une enchère ; que l’un et l’autre de ces actes étoient également
du ministère de l’huissier , également prescrits par la l o i , et que
l’exécution exacte de l’un de ces actes devient un titre de con
damnation pour celui qui a été omis et négligé ;
« Attendu que l’article
de la loi du 11 brumaire commandoit impérieusement cette formalité ; que la loi paroît avoir eu
deux objets dans cette disposition ; i°. d’apprendre au débiteur
qu’il est réellement exproprié, ou que le bien par lui vendu est
à l’enchère; 2°. de faire connoitre au public le degré de sûreté
et de confiance présenté par celui sur les biens duquel il y a des
poursuites légales; °. que la loi a toujours h cœur que les actes
importans soient faits au domicile réel et de droit du débiteur,
comme partie la plus intéressée à les connoitre ;
« Attendu que l’élection de dom icile, faite par le sieur de V il
lemont , chez M. Lougnon , son avoué , ne pouvoit dispenser de
faire l'affiche au domicile de d ro it, les élections de domicile
chez une personne désignée n'ayant lieu que pour les significa
tions des actes ordinaires et des copies de procédure , et non
pour une apposition d’affiche, qui doit être faite au domicile réel
et de droit ;
5
3
a Attendu que l’affiche n’a même pas été apposée au domicile
élu du sieur de V illem on t, et qu’ainsi la loi a été froissée dans
une de ses plus essentielles dispositions ;
« Attendu qu’à défaut du sieur V illem o n t, pour relever le
vice de la procédure, la dame Queriau et les autres créanciers
sont autorisés à s’approprier ce moyen ; qu’ils sont au droit de
leur débiteur, et qu’ils ont le même intérêt que lui à l’exécu
tion des formalités prescrites par la loi.
« En ce qui touche le moyen tiré de ce qu’il n’a pas été posé
d’affiche aux bâtimens du domaine de Jayet ;
« Attendu que cette formalité est aussi rigoureusement pres
crite par l’article de la loi du 11 brumaire ; qu’ainsi elle a dû
5
�( 51 )
être exécu tée, puisque l'affiche énonçoit l ’existence de ces bàtimens du domaine avec leur couvfcrture, et que par lù ils étoient
présentés comme étant en état d’exploitation.
« Attendu qu’il ne suffit pas d’alléguer que ces bâtimens
n'existent plus, et qu’ils sont tombés en ruine; car ou ils sont
écroulés, comme on le prétend, et alors il falloit n’en pas faire
mention dans l’affich e, au lieu de présenter aux enchérisseurs
un appât trompeur et mensonger, ou ils existent en tout ou en
partie, et il falloit une apposition d’affiche, même sur les ma
sures, comme restes des bâtimens saisis; qu’ainsi le vœu de la
loi a été m anqué, et la procédure infectée d’un vice radical.
« En ce qui touche le moyen tiré de ce que la contenue des
bâtimens du domaine n’est pas spécifiée ;
« Attendu que le même article
de la loi du 11 brumaire
exige aussi cette mention de contenue; qu’il importe à ceux
qui se présentent pour enchérir, de connoître l’étendue des bâ
timens d’un domaine, ainsi que leur existence et bon état; que
l’énonciation de l’étendue des bâtimens de m aitre, faite par les
poursuivans , leur apprenoit qu’il falloit pareille énonciation
pour les bâtimens d’exploitation, et qu’une telle omission est
encore un manquement essentiel de la loi.
« En ce qui touche la nullité fondée sur ce que les affiches
ont été posées un jour’ non ferlé, au lieu do l’avoir été u n jour
de dimanche ;
« Attendu que la loi du n brumaire ayant spécifié en détail
les formalités les plus importantes pour la régularité dçs af
fiches , n’a pas exigé qu’elles fussent posées un jour férié ou
non férié; qu’on ne peut à cet égard ajouter à sa disposition,
et créer une nullité qu’elle n’a pas voulu prononcer; qu’enfin
les dispositions de rigueur doivent être restreintes plutôt qu'é
tendues.
« En ce qui touche la distraction des quarante-quatre septerées de terre délaissées aux frères et sœurs du sieur de Villeinont, comme n’étant pas de la comprise du domaine de Jayet,
et par eux revendiquées ;
5
�(5 2 )
« Attendu que les motifs de la revendication sont Fondés;
que les poursuivans y ont consenti à l’audience ; que la dame
Queriau ne s’y est pas opposée non plus , seulement qu’elle
s’est réservé ses moyens de droit sur ces quarante-quatre septerées de terres, et que les autres créanciers comparans ne s’y
sont pas opposés. »
'
T els sont les motifs qui ont déterm iné les premiers
juges , et qui entraîneront sans doute la décision des
magistrats supérieurs.
M e. P A G È S - M E I M A C , ancien avocat.
M e. D E V È Z E , avoué licencié.
A R IO M , de l’imprimerie de L a n d r io t , seul imprimeur de
la Cour d’appel. — Mai 1807.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Juge-Solagniat. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Devèze
Subject
The topic of the resource
émigrés
successions
avancement d'hoirie
adjudications
créances
ventes
enchères
nullité
affichage
minorité
conseils de famille
séparation de biens
contrats de mariage de mineurs
donations entre vifs
experts
séquestre
coutume d'Auvergne
mort civile
expropriations
minorité
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour sieur Martial Juge-Solagniat, maire de la ville de Clermont-Ferrand, tant en son nom que comme héritier de la dame Queriau, sa mère, intimé ; Contre sieur Gilbert-François Malet de Vandègre, membre du conseil général du département du Puy-De-Dôme, habitant au lieu d'Englard, commune du quartier, en qualité de père et légitime administrateur, et tuteur légal de Delphini-Gilbert-Antoine Malet de Vandègre, son fils, et de défunte dame Marie-Marguerite Vény, son épouse ; et contre dame Marie-Anne Vény, épouse du sieur Ignace-Hyacinthe Sampigny, de lui autorisée, habitante de la ville de Riom, appelans ; En présence des autres créanciers de Paul-Augustin Vény, aussi intimés ; Et en présence dudit Paul-Augustin Vény, pareillement intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1792-1807
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
52 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1714
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1711
BCU_Factums_G1712
BCU_Factums_G1713
BCU_Factums_G1710
BCU_Factums_G1715
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53317/BCU_Factums_G1714.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Clermont-Ferrand (63113)
Jayet (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
adjudications
affichage
avancement d'hoirie
conseils de famille
contrats de mariage de mineurs
coutume d'Auvergne
Créances
donations entre vifs
émigrés
enchères
experts
expropriations
minorité
mort civile
nullité
séparation de biens
séquestre
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53318/BCU_Factums_G1715.pdf
159ba7df6bfbbed86919b72492b39817
PDF Text
Text
REPONSE
A
ce qui m est objecté personnellem entt
d 'a voir refusé toute espèce de médiation.
J E suis loin d’avoir la prétention d’ajouter aux moyens
de défense qu’a produits M . P . M . ; je veux traiter seulement la partie morale de mon procès avec M M . MaletVandègre et Ignace Sampigny, q u i, en m’accusant d’avoir
rejeté leurs offres, pag. I I ,
et
de leur m ém oire,
se donnent un air de candeur et de loyauté propre à. les
entourer du plus grand intérêt. Peut-être en seront-ils
55
56
dépouillés par le récit simple et fidèle de tout ce qui s'est
passé entre eux et m o i, par l’intermédiaire de M . Bergier,
leur conseil.
Peu après la notification de m on en chère, faite à ces
messieurs le 21 nivôse an I I , je vis venir chez moi
M . B ergier, pour me proposer un accommodement.
Je souris toujours aux voies de conciliation, et je
m ’annonçai pour être bien disposé.
M . B e rgier, après avoir traité au long de toutes les
difficultés de cette affaire, m’apprit qu’il étoit chargé de
m ’offrir 20000 francs comptant.
V o u s me demandez, lui dis-je, un sacrifice trop fo rt,
p u isq u e, outre les frais et les in té rêts, vous me faites
•perdre considérablement sur le capital; cependant je suis
A
�4ûU
2
«' ’ *
(
)
prêt à vous donner une preuve de ma m odération, et
surtout de la déférence que je porte à votre caractère de
conciliateur; je me borne à 24000 francs : ce n’est que
2000 francs de plus qu’il en conte à chacun de ces mes
sieurs, pour sauver l’honneur de leur beau-p ère et de
leurs en fans.
M . Bergier prétendit que c’étoit trop exiger de ces
messieurs, qui déjà s’étoient exécutés de tout leur pou
voir. Com m e j’insistois, il se retira en me disant qu’il
alloit rendre compte de sa mission, dont il m ’apprendroit
bientôt le résultat.
Quelques jours s’écoulèrent sans aucune nouvelle de
M . Bergier : mais le service qui eut lieu dans l’église de
l’O ra to ire , pour M . T ix ie r p è r e , avocat, nous ayant
attirés dans le môme lie u , je fus abordé par M . B . . . .
qui me dit c»- sortant : L ’aiFaire est finie au prix que
vous le v o u lez; vous pouvez la regarder comme telle,
,et so u s m o i n s de q u i n z e j o u r s n o u s p a y e r o n s : ce délai
est nécessaire h ces messieurs, pour leur donner le temps
de terminer entr’eux quelques arrangemens qui n’ont
.plus rien de commun avec vous. Il suffit, répliquai-je;
je ne suis jamais pressant, quand on me donne d’aussi
bonnes raisons.
Plein de confiance dans cette promesse et dans la loyauté
de M M . Malet et Sam pign y, je suis au moins quatre
m o is à m’apercevoir qu’il se perd bien du temps. Je
prends encore patience; et rien ne m ’annonçant une fin,
j’écrivis de ma campagne ù M . B . . . pour lui rappeler
les propositions convenues.
J e ne reçois pas de réponse: je prie un am i d ’aller
�(3 )
la demander ; on la promet sous quelques jours. E nfla
M . Bergier dit verbalement de me mander que je peux
être tranquille; que les intentions sont toujours les mômes;
que leur exécution tient à la santé de M . V n n d è g r e ,q u i
est allé la rétablir aux bains d e . . . et que tout se ter
minera à son retour.
A u bout de quelques m o is , j’écris de nouveau à
M . B . . . qui me fait rendre, par le porteur de ma lettre,
de nouvelles raisons tirées de la santé et dés affaires de
M . V an d ègre; mais il doit arriver bientôt, et tout va
se terminer.
Par caractère, je suis confiant. J ’avoue cependant qu’il
s’éleva dans mes idées de l’inquiétude, et je me p r o p o s a i ,
lorsque la saison me forceroit de quitter la campagne,
d’avoir un éclaircissement avec M . Bergier. J ’arrive enfin
à C le rm o n t, et je vais lui témoigner toute ma surprise.
V ou s avez raison, me dit-il avec embarras, m a is .. . vous
tenez toujours aux 24000 francs?. . . V o y e z . . . toutseroit
bientôt term in é, si vous vouliez reprendre les premières
p r o p o s i t i o n s , v o u s c o n t e n t e r d e s 2 0 0 0 0 francs. — Q u o i ' !
" ces messieurs mettent l ’honneur de leur beau-père et de
leurs enfans en balance avec 2000 fr. pour chacun d’e u x ;
et l’intérêt encouru depuis ce temps les compose à peu
près! — M . Bergier se retranche sur beaucoup d’autres
dettes. — E h b ien , monsieur, j’accepte les 20000 f r . , mais
à condition que nous allons terminer sur le champ. Si
ces messieurs n’ont pas tout leur argent, qu’ils me donnent
une garantie suffisante; je me prêterai encore à des faci
lités pour le payement. — M o n sieu r, me dit M. B e rgie r,
A 2
�(4 )
je vous donne ma parole d’honneur pour ces messieurs;
je vais écrire à M . de Vandègre qui partira aussitôt ma
lettre reçue, pour venir terminer comme vous le désirez.
Ennuyerai -je mon lecteur à lui faire lire mes autres
courses chez M. Bergier, qui finit un jour par me dire
qu’il avoit bien une autre proposition à me faire; mais
qu’il ne se permettroit pas de la mettre au jour ? J e ne
lui en donnai pas la facilité ; j’ignore encore ce qu’elle
pouvoit être. Je me retirai en me disant à moi-même,
que si j’avois l’honneur d’être avocat, il y auroit à ma
porte une rigoureuse consigne pour gens qui auroient
compromis à ce point ma parole.
A cette ép oqu e, les négociations furent suspendues:
des amis communs cherchèrent à les renouer. On me vit
toujours dans les mêmes dispositions. L e bien de M ontrodès me fut offert à la chai’ge d’un retour de 20000 fr.
Je refusai ; l’objet étoit trop cher en lui-m êm e; les frais
de toute espèce alloient encore le renchérir : il pouvoit
y avoir du danger à débourser 20000 francs de plus; et
je n’avois qu’une am bition, celle de n’entendre plus parler
d'une maison qui avoit coûté tant de soupirs à ma famille.
Les 20000 fr. furent encore remis en proposition ; ils
ne tenoient qu’à un abandon de madame de Muriolles,
sur quelque portion de J a y e t, si je me le l'appelle bien.
C elle-ci, habituée aux sacrifices pour l’honneur de sa
maison, y consentit. J ’étois dans l’espoir de toucher mes
20000 fr. , lorsque je reçus, le 24 prairial an 1 2 , de
M . M a let-V a n d èg re, la lettre dont voici la copie litté
rale :
�(5 )
4of
C lerm on t.
M
on sieu r
'
,
Ayant échoué jusqu’à présent dans les tentatives d’accommo
dement favorable à nos intérêts respectifs, c’est avec regret que
j’ai l’honneur de vous prévenir que toute suspension à faire va
loir les droits de chacun doit être censée levée.
Je vous prie, monsieur, de me rendre la justice de croire
qu’il n’y a nullement de ma faute dans la lenteur qu’a éprouvée
cette affaire aussi majeure pour nous tous, et dont les discus
sions judiciaires seront aussi épineuses que coûteuses.
J’ai l’honneur d’étre très-parfaitement,
M o n s i b -u a ,
Votre très-humble et très-obéissant
serviteur,
VANDÈGRE.
J e m’en rapporte à l’ impression que fera naître la lec
ture de cette le ttre, et je demande si elle ne paroîtra pas
la preuve la plus complète que j’ai épuisé tous les pro
cédés puisqu’ ils ont été de nature à déterminer M . MaletVnndègre à cette démarche.
M_ M a lety qui se disculpe dans sa lettre de la lenteur
q ita éprouvée une affaire aussi m a jeu re, a-t-il été fondé
ù faire autant de bruit au tribunal d’arrondissement de
Riom } de la longue inactivité dans laquelle je suis resté
après avoir lancé mon enchère, et de rejeter sur moi la
n é c e s sité où ils se sont trouvés de changer leur système
de défense en un système d’attaque?
Cette inactivité est-elle de leur fait ou du m ien ?
�(6 )
Ces messieurs ont-ils le droit de dire, page n de leur
m ém oire, « que les appelons, après avoir fait de vains
« efforts pour prendre des arrangemens avec les princi« paux créanciers, notamment avec le sieur Juge , ne
« pouvant demeurer danscet état d’incertitudeetd’anxiété,
« se déterminèrent à aller en avant. »
Q ui d’eux ou de moi a fait de vains efforts ? Les
leurs ont-ils été bien sincères? Je crois , sans forcer la
supposition, que tous leurs efforts ont tendu à se procurer
la faveur de l’opinion ; et c’étoit pour eux un coup de
partie de pouvoir imprimer qu'ils ont cherché dans tous
les temps , et ont sa isi toutes les occasioiis de term iner
am iablem ent avec tous.
L a p r e u v e , messieurs ! L a p re u v e ? vos offres ont été
acceptées, et vous avez reculé.
Ces messieurs n’ont pas de perte de temps à se repro
cher , puisque, lors même qu’il s’agissoit de renouer , ils
faisoient notifier , le 12. nivôse an 1 2 , à leur beau-père ,
mon enchère du 21 nivôse an 11 ; puisque , le 9 prairial
an 1 2 , le conseil de famille autorisoit, page 12 , la reven
dication de la moitié des biens , et que le 26 pra irial,
deux jours après la lettre de M . V a n d èg re, la délibération
put être homologuée par jugement du tribunal d’arron
dissement de Riom.
T o u s ces actes se combinoient sous le voile même des
négociations ; et le 24 prairial l’on m ’écrit : C ’est avec
regret que f a i Thonneur de vous prévenir que toute sus
pension à ,fa ir e valoir les droits de chacun doit ctre
censée levée.
E lle l’étoit pour ces messieurs depuis long-temps.
�/ 7^
Dans le silence, ils préparent leur attaque; et soigneux
d’éviter la faute que j’avois commise en les laissant res
p ir e r , ils précipitent leur marche. L e 26 p ra irip l, ils
obtiennent un jugement d’homologation.
Les jours suivans ils procèdent aux affiches , pour aller
en avant sur l’expropriation forcée ; et le 8 messidor, ils
en déposent un exemplaire au greffe du tribunal, avec
indication pour la vente au 6 thermidor suivant. D e cette
manière le temps perdu est bien vite réparé»
L ’affaire s’engage ; je gagne , après deux audiences,
grâces à la bonté de ma cause et à la logique de M . P e
la pcliier.
Q u ’i f me soit permis de lui demander p a r quelle fata
lité il a été entraîné à m’abandonner, au moment de l’au-r
dience, lorsqu’il s’agissoit de me défendre au tribunal
d’appel! Sa défection a étonné le barreau des deux villes.
J ’avois triomphé avec modestie. J ’espérois que le temps
feroit éclore des propositions de paix ; je persistois à croire
que M M . M alet et Sampigny calculeroient mieux les
conséquences de constituer leur b eau-p ère en étaj: de
faillite. Je les jugeois d’après mon cœ ur, et d’après un
exemple qui m’est personnel.
Gendre de M. d’ÏIaumières, ses affaires tout à coup pri
rent la plus fâcheuse tournure, et une fortune d’un million
parut absorbée par la nuée de créanciers qui réclam è
rent tous la fois.
La fortune entière appnrtenoit à madame d’Haumières,
et étoit dotale : tout s’ unissoit donc pour la conserver aux
enfans. Il n’y eut qu’jun cri dans la famille, cp fut pour
l’honneur du chef. TcOUiuse jeJÀHveot a«* pi^ds de la mère,
�(
8
)
et refusèrent un bien qui les couvriroit de confusion,
en imprimant sur eux l’infamie de la banqueroute.
Madame d’Haumières, chez qui l’honneur parloit aussi
haut qu’à ses enfans, consentit à la vente de ses biens :
elle fut ratifiée par eux ; et capital, intérêts et frais, tout
fut remboursé en peu d’années.
V o ilà la prérogative superbe que je lègue à mes enfans;
personne ne peut se vanter d’avoir une inscription sur
leur honneur. Ils marcheront la tête h aute, et la con
tenance assurée ; ils n’auront à rougir devant personne ,
ni à se reprocher de dévorer la substance de qui que ce
soit.
J ’attends avec calme la décision de la cour. Aussi sévère
qu’elle soit, je n’y peux perdre qu’une portion de ma for
tune. M M . Malet-Vandègre et Ignace Sampigny en serontils quittes à aussi bon m arché?
:
JU GE-SOLAGN IAT.
r
t A A Ca
tK ttjL
^
/
^
R
A I O M , de l’imprimerie de L andr i ot , seul imprimeur de
la Cour d’appel. —. Mai 1807.
.
�>\b
vtA o i
' ^ í^ U
^
3 +/U&-.
(K o }
V
a u A.
“ ' “
« » « M
X
p t*t r 4** U -ttíA -dm.
‘U ^ / íT iíV lA U .y tt^ ^
J \+ X l
.
lA A i/ L «_ t t
t< 6 l,
íu ^ tíV U ^ U U ltlA
M
1M
U
fa »
Akk t »
} > m
» » .. . . . r ^ / i B lo W
<á*
c ^ t f r
4
/«.--i
^
/ ^ « * ^ * « -V / ,
/faUwfaUk JUa. eíyiír fi>u^vL /Zi*-'"b.__6
'J'-ti 'i** //***,¿A , ¡ ^
/o¿t" "^*^AA 6 ^íoÍT ^m (\á ^lU^%^CuAi Cm» //^
^
« f h . OA-: ' ^ c V ^ < ~ L ~ ~ ~ s
,f y - ;
A.
y~
T
> _
.
_ y
^
_ a jb r
¿i*
^fuw UXIaiu^uT^^«^
^
CAA.
^
/¿U
*A
A
^
UA«^Oli
' ^
"
(o.
oniuwí
*«*^oi*tt '
r¿UA 1U)M IüjUJfic6^u OAUllO
lu ^ L X i a•y ¿ y > / J p i.
£íft/ V A
CAX O jM JA IA x, ^ 4\ J CkJU\X **
l ^ % - J //,..Älf. : ^ " a
AJ«
y * ! W ^ U UMM lu , f 't m J f l M I M A * ^ « M U A j j t i o
w *
X. r t
f A
I cAaJ
- ^ 4 a>
oJtk. *(~ jl CC tM~bc*¡x~ j%á¿j-KtK*y^^
Wm
O tfcW
O ^ A»-. Í4.- «JA-» /* . ^ «*—. « - ^ - « •' '* ~ M * ÎÏ~
í t i l >A»U> <M
i*lO
,
1
,
«
V
----------------.^ v ,
----- - f|-'
« f T jC
ritu
o uȧju
* ^L _ _ ¿Áíw^S
f A / ' O'
¿U j U U U*T
£--_ /'
^juwvtwJ(<\ ^u ^
« I ua ¿t
w' ttXy/w'
t y v “<aJS*
ntojavL*
tu.
y '/ (0*/
***
'““'
y
>w >
\
*
JÛÙ
l
-fcüiU A. uJsÚT'
i
^r \V_ / ^/ J^Jr***
r /t^JlJ'ß
Ja.^ JS S } ^ <y^ oo^yA^ov Ctlí.
e^ íx
j
j xm
^ 1* 4» W»
C4L^>UAAAjtA
CAA C* ^ * 4 / o i * < ^ 4 / u
Cm I t u
*
« û
* . t * r -/ / « M
/'te*
,
*• I ^ a Á a a a j^ ^
a J u n * ^ fc./ f e t u - A»W U Ö T ^ ÍA M o J ik .»
^
o^. «w á J ü u A jb ' ' V -
„»yo. bMiutúu t* UMlJbiAUÚM ^ c~^£i~~Jr J«* U
kM
. . «A. /««Û
/ a m u UjfW«^
I j/I^W MJ A' *A ^
# ,
a
WuiÍT (A
V •w
^ u a €aA < O
fa
tJu
C U vu» ^ÄAÄjU*
d i t . b v j t yw*A»A *
^ a-[<A*-^v
C* ‘
i.~ ,:y.--I*m Æ ~1
O Ä -.
m‘7 «
* [ /'* * “ .
«4-«U»JL /tKAfWA.
" “**’ “ // /
/
/t* ^ < W U ^ >
CU
Ü A > U > ^ U < JlUM
ü
/ U . ^ —
fa» ^ « * ii» j f
w [fcM »>»«ji ,
*y
.
*
*
1
. > __
' A
A la JL .
/foJUïr «~Y> A #fy ^Ua*A- Ò4A/OM4
^ ç r J Ç } .u
/^
/
/ „
i w ^
í . ^
ia-— 1/-7V “ “ r
í^'y Uy«u*^ a m
te
<y_____ —
uíLj^y
L
,
7
/
«*:■
/uÁ^íÁ^A*
^V>b^t ÍÚm tVUiwvt « lit (AUÄWI <H+JA~ <*~JÍ,
UÍtjT íaaJUjJ C T Cuuu c>vJCï*ß^bJLr
7 ****1 '
< u < * iu
O
>^.. fr. /í&»</l*A
.
Uu> ItUXM-t^
^-^>- ^ . ' • Ä
ti*-° r ( f.
tú & z .
t.
xfcf" ¡SH
�' fe'
'r
lilo it ù ïio u f
c^/¿¿)fc/c> i/ (Á t y % ¿ / < < n a / r/é c o m > n e icr,
y
4
0~)u| OHt j isáé*ollsilcHieu i ^ e'-J<f/cn/
■/’ « n a / c t 'i « Y , .y /
6r
.y /
6 m‘ 0
~)u| 0 i n c - l l i ) í c l l c t l 6 ' f o f t /
1
9
'r - r r r v j Q <^
> ¥1^
,r"*'
Á ,fif /tat/ rÁ<. <^áa/rVapie di’ ts&S/t
^X
/J~ g I
'fJ 'r*frV
_^Z^A'lcrJ/~*Trn* ,<t hrniyvw/
^
Cf f>—*C>rn'i_
c rr*inoncu , /{«r/m Jr’/tr?//e //¿¿lin i
s. , t.. ,jJ-.... i
•/
Vkorrw o wWnvivH V-r» /v^J/Ty r+v\jfryli'V
rvwi srw-rVfXV y/'
K’( bc y^JUrïloU , 'Srfé'ocrr/, ty'of-/c</>< en £¡óta//
4
^
“
f,
'ryy«^»v»l
*
’V ~
^ -¿ T
v
/^ v— ^
•”
J»ïj^»y ' f O 'nrvv
™
-rrm» nrrurvvî y . , /
y 4 ^ y ^ r»
TJf^ryf
° ’2 / w r / y - * r t/o / w n ^ .n ^ i v » » i j « y »p t r z t f n y
er.,le7
W
-:-*T=g^jy '«np^vyrv/ y w
j> r ™ ' T T ™ "
L - - ‘ — — -r — ~ <• »p Av* ^>r>
*7
^rr^yy
vf^,/
y *
ft
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Juge-Solagniat. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Juge-Solagniat
Subject
The topic of the resource
émigrés
successions
avancement d'hoirie
adjudications
créances
ventes
enchères
affichage
minorité
conseils de famille
séparation de biens
contrats de mariage de mineurs
donations entre vifs
experts
séquestre
coutume d'Auvergne
mort civile
expropriations
minorité
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse à ce qui m'est objecté personnellement, d'avoir refusé toute espèce de médiation.
Particularités : Notation manuscrite : 23 mai 1807, arrêt de la 2nde sectionb, mal jugé en ce qu'il a été statué prématurément sur la demande en revendication et confirme quant aux surplus.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1792-1807
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1715
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1711
BCU_Factums_G1712
BCU_Factums_G1713
BCU_Factums_G1710
BCU_Factums_G1714
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53318/BCU_Factums_G1715.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Clermont-Ferrand (63113)
Jayet (terre de)
Montrodeix (terre de)
Orcines (63263)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
adjudications
affichage
avancement d'hoirie
conseils de famille
contrats de mariage de mineurs
coutume d'Auvergne
Créances
donations entre vifs
émigrés
enchères
experts
expropriations
minorité
mort civile
séparation de biens
séquestre
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53319/BCU_Factums_G1716.pdf
e2b3f297474a8cf93a11d182d53174be
PDF Text
Text
NOTICE
DES PRINCIPAUX MOYENS D'APPEL,
fV o '6 /* (f-
POUR
L
es sie u r s
F
•
l e u r ie
,
d a m e et d e m o ise l l e s
, M
G R E N I E R
a r ie
,
, et au tre M
é p o u x
de
G
a r ie
ladite
_
il b e r t
, F
_
r a n ç o is
V A Y R O N
Louise ;
F A L C I M A G N E - V A I L L A N T ,
Fleurie
L
j
et
ép o u x
, L
a»u-T //££»!
o u ise
aurent
F ran ço is
de
ladite
a p p elan s;
Le sieur B A L T H A Z A R D
intimé.
ny
CONTRE
V A Y R O N , leur frère et beau-frère ,
I L est à propos que pour faire mieux ressortir nos m oyens, nous
donnions d' abord un court aperçu des faits qui ont donné lieu à
la cause.
F A IT S .
L e sieur Jean-Louis V a y ro n -L a m o u re y re , du lieu de L astiq ,
est décédé nonagénaire dans le courant d’août 1807 , laissant sept
enfans, de son mariage avec feue Jeanne Delaroche, prédécédée ,
savoir : Balthazard, François , M arie , autre M arie , habitans
la maison paternelle; G ilb ert , établi à St.-Satu rn in -T alen d e ;
Louise, épouse du sieur Grenier de Rilhac ; et Fleurie , épouse
de M . François Falcim agne-Vaillant, juge criminel à St.-Flour.
Il etoit perclus de tout le corps, depuis deux ans et d em i, par
les suites d’une chute, qui lui avoit meurtri l’os de la sciatique, et
qui lui occasionna, dans cette partie des douleurs horribles jusA
» —
�ques à sa mort. II se trouva donc, depuis cette .chute, dans une im
possibilité absolue de gérer ses affaires ; et la dame son épouse
étant décédée peu après cet accident, il fut forcé d’abandonner
l’administration de ses biens à Balthazard , son fils aîné.
Ce fut à cette époque, et dans la première semaine de ce décès,
au moment où ce vieillard décrépit éloit accablé de chagrin et de
souffran ce, qu’on en obtint un testament, dont on avoit dressé
par avance, dans le secret, un projet qui cependant ne fut pas
ponctuellement suivi.
Ce testament, daté du 28 prairial an i ( 17 juin i o ) , con
tient, i° un legs de deux annuels de messes à célébrer dans l’année
du décès , pour le repos de l’âme du testateur et de sa défunte
épouse ; 2* le legs du quart disponible de tous les biens, en faveur
du sieur Balthazard , fils aîné , par préciput et avantage.
L e sieur Lamoureyre survécut à ceci durant plus de deux ans ,
toujours dans des souffrances inouies : et Balthazard pendant cet
intervalle se hâtoit, à l’ombre de sa qualité de régisseur, de pour
voir de toute manière à ses intérêts. Il dévastent surtout les bois
de haute futaie, dont il vendit à l’insçu du père tout ce qu’il put.
Cependant les autres enfans n’osoient dévoiler cette inconduite,
pour ménager la paix de la maison et ne pas exposer à des secous
3
85
ses l’affligeante situation de leur père, dont le cœur étoit plus que
bon, mais le caractère très-vif.
Mais enfin, quelque chose en transpira aux oreilles du père, et
il alloit révoquer son testament, lorsqu’une dernière crise termina
ses douleurs avec sa vie.
D es scellés furent apposés sur le m obilier, quoiqu’un peu lard
et d’une manière peu exacte: mais, au surplus, le procès verbal d’ap
position qui est joint à la procédure, en dit assez.pour constater une
mauvaise foi révoltante de la part de Balthazard.
Cette mauvaise foi ne résulte pas moins du procès verbal de
levée de scellés, qui constate que Balthazard n’a pas craint même
de violer l’autorité du procès verbal de mise de scellés , ni de dis
poser, desa propre autorité, des choses y comprises, et notamment
�4'»
(3)
qu’il s’est emparé, sans compte ni mesure, de toute la récolte de
18 0 7 , etc.
Dans cet état de choses, les six autres cohéritiers ont dirigé con
tre lui deux actions; l’une, afin d’établir un régisseur provisoire
jusqu’au partage; et l’autre, afin de parvenir à division et partage
des successions , tant paternelle que maternelle.
L a première de ces actions a été terminée et rejetée par a rr ê t,
obtenu sur faux exposé.
L a deuxième est celle sur laquelle il s’agit de statuer; elle tend
au partage par égales portions, à la nullité du susdit testament, au
rapport de toutes sommes reçues ou soustraites, dégradations #
jouissances, etc., même des coupes de bois insolites, antérieures au
décès; et enfin à ce qu’il soit fait provision à trois des cohéritiers
non pourvus, d’une somme de x200 fr. chacun, avec dépens et dom»
mages-intérèts.
M O YEN S.
.>
L e principal chef de la cause est la nullité du 'testament. M ais
avant d’en déduire les m oyens, nous croyons devoir rappeler quel
ques principes fondamentaux qui ramènent aux vraies sources de
décision.
P r i n c i p e I". Un testament ne vaut que par les formes. En
quoi cet acte diffère des actes ordinaires, où les formes ne sont
employées que pour la preuve et pour assurer l’exéculion envers
quiconque manqueroit de bonne foi. ( Ita vulgb , et nominat. R ir
card, part. 1 , r i' 1284» ia ). E t même au for de la conscience.
(V. Continuât. Tournelf., tom. 1 , deultim. volunt. conclusio 2.)
_ P r i n c i p e II*. Dans le droit romain t les formes ri étaient ex i
gées que pour la preuve , au moins dans les codicilles ; de sorte
que si la volonté paroissoit constante, on s’embarrassoit peu des
formes. ( Instit. lib, 2 , tit.
, defideicommissis , § 12 ). A in si,
en France on ne doit pas en invoquer indistinctement les maximes.
Certes les Romains validoient le testament fait par simple lecture,
85
23
A a
�'( 4 )
ou sans notaire, ou dont la rédaction étoit mutilée, ou même dont
les témoins ignoroienl la langue du testateur, (/ . 2 0 , § 9 , f f .l i b .
2 8 , tit. 1 , qui testant. I. 8 , cocl. lib. 6 , tit. 2 2 , qui testam. I. 7 ,
/. 2 1 , ibid. tit.
). Maximes qui aujourd’hui seroient étranges.
P h 1n c 1r e
*. L a preuve des formalités ne se tire que du tes
tament même , lequel doit en attester et mentionner l’observation.
L ’on ne peut donc recourir à aucune preuve extrinsèque, ni à au
cune présomption ni conjecture: certes les testamens ne valent
que par écrit. [CodeNapoléon, g , 9 7 2 , 1001 ; Ordonn. 1 7 3 5 ,
art. 1 , 4 , , 2 2 , a 5 , 4 7 ; Ricard, n iS i'] ; S a lle , surVordonn.
1 7 5 5 , art. ; Aurouoc , art. 2 8 g , rf a , etc. etc.)
P r i n c i p e IV*. Un testament ne peut se faire ou se valider , en
tout ou en partie , par forme de ratification. Dans cet acte rigou
reux tout doit être présent et actuel, durant l’assistance du notaire
et des témoins réunis; tout doit se passer dans le même temps et le
même ordre qu’on l’écrit. ( Code Napoléon, 9 7 2 , ordonn. 17 5 5 ,
art. 5 et ; liicard, part. 1 " , n ’ i i , i i ; Sallé, A ym ar, etc.)
P r i n c i p e Y '. Dans un testament, les mentions prépostères
ou anticipées sont oiseuses et ne prouvent pas. Ce principe ré
sulte du précédent. Aussi la loi du notariat exige-t-elle que la men
tion de signature soit placée à la firç de l’acte, à peine de nullité.
L o i du notariat, art. i et 68 ; Ricard, part 1 " , n i io , 1 1 ,
i5o2 ; Basnage sur Norm ., art. 4 12 ; Chabrol , tom. 2 , pag. 80.
Pr. i n c i t e VI*. L a rigueur des formes est générale et ne dé
pend point des circonstances. L a règle doit cire unique et fixe. Il
n ’est pas à l’arbitrage du juge de la recevoir ou rejeter selon les cas
et selon la force des présomptions de véracité de l’acte. ( Domat t
des testamens, tit. 1 , sec. , îi 9 , not. )
P n 1 n c 1 r e V II*. I l vaut mieux s’exposer à annuller un testament v a lid e, qu’à valider un testament nul. Car la validation
erronnée viole, et la justice, et l’ordre naturel qui appelle les plus
proches : mais l’annullation a au moins cet avantage, qu’elle remet
les choses dans l’ordre naturel de la société. D ’ailleurs, pourquoi ne
6e conforme-t-on pas exactement à la loi ? ( Dom at, des 'lesta -
25
111
83
5
5
5
53 54
4
5
5
55
�mens, ht. i , sect.
5,
n 1 6 , not. ) À in sî, dans le doute, il faut
prononcer contre le testament : certes, le testament est une preuve;
o r, toute preuve qui est douteuse n’en est pas une (i).
Ces principes ainsi rappelés, revenons aux moyens de nullité du
testament (2). Il y en a se p t, savoir : i°. la captation et sugges( 1) Ceci ne contrarie pas la m axim e, que la présomption est en faveur de
l ’acte ; car cette maxime ne s'entend point de l'existence même des actes, ni
par consée/uent des form es qui s'identifient avec cette existence , puisqu’au
contraire l'existence d ’un acte ne se présume point, mais doit être prouvée.
(2 ) Il est ainsi conçu : PARDEVANT, etc................est comparu, etc...................
le q u e l............nous a dit nous avoirfa it appeler pour recevoir son testament,
qu’il nous a dicté de sa propre bouche, et que nous, notaire susdit, avons écrit
sous sa dictée ; le tout de mot à mot, et ainsi qu’il suit.
J e m’en rapporte, pour mes honneurs funèbres, à la piété de mes enfans.
J'entends qu'il soit d it , dans l ’année de mon décès, deux annuels de messes
basses, l'un pour le repos de mon dme , et l’autre pour le repos de l'dme de
Jeanne de la Roche, ma défunte épouse, dans telle église qu'il plaira à mon
héritier général de choisir et désigner, mais aux jr a is cl dépens de ma suc
cession.
J e f a is et institue pour mon héritier ou légataire général et universel du
quart disponible, en préciput et avantage, d'après le Code c iv il, Bahhazard
ayron, mon fils aîné . pour, par mon dit fils aîné, recueillir, en vertu de la
présente disposition, le quart de tous les biens quelconques, tant meubles qu'im~
meubles, dont je mourrai saisi et vêtu, en quoi qu’ils consistent et puissent con
sister, en préciput et avantage hors p a r t , et sans aucune imputation sur la
part et portion que la loi lui déférera dans ma succession.
C e fu t ainsi f a it , dicté et prononcé par ledit sieur Vayron - Lam ourejre
p ère, testateur, A nous dit notaire, et par nous dit notaire, écrit sous la dictée
dudit testateur; le tout en présence de M M . G eraud-Rachet, prêtre desser
vant la succursale de Lastiq, etc...........Après quoi le présent testament a été
lu et relu par nous dit notaire audit sieur V ayron, testateur, qui a déclaré
icelui bien comprendre et y persévérer ; le tout en présence desdits témoins,
audit lieu, etc...........E t ledit sieur Vayron-Lam oureyre, testatàur, interpelé
par nous dit notaire de signer, ayant déclaré ne pouvoir le fa ir e à cause de sa
faiblesse occasionnée par la maladie, le tout en présence desdits témoins, cet
derniers ont signé avec nous notaire susdit, le tout suivant la loi.
A
3
�(6)
tio n ; 2°. le défaut de mention précise que le testament ait été écrit
tel qu’il a été d icté ; °. le testament ne constate pas qu'il ait été
signé par le notaire en présence des témoins , et par les uns et
3
4
par les au tres, en présence du testateur ; °- il n>a Pas été fait uno
contextu ; °. il n’ a pas été lu en entier ; 6°. un des témoins est
légataire; 7*. un autre est serviteur.
i°. L a captation et suggestion. Su r ce m o yen , nous nous con
tentons d'observer que nous nous référons aux faits qui ont été
5
déjà précisés et articulés par écrit devant les prem iers ju ges, et qui
seront rappelés en plaidant. M ais au su rp lu s, ce n'est point en
isolant ces faits les uns des au tres, et en les disséquant un à u n ,
comme l ’ont fait les premiers ju g e s, que l ’on peut en apprécier
bien juste le mérite : ces genres de preuves tirent leur force de leur
concours et de leur ensemble. A jou ton s que ce seroit une erreur
grossière de confondre la suggestion avec la violence ou la con
trainte : certes , l ’ordonnance de 1 7 3 5 , art. 47» n'eût pas dit qu’on
y auroit tel égard que de raiso n , puisque la violence et la con
trainte ont toujours été même un crim e. / / y t suggestion, lors
7
que le testateur a été 'vivement sollicite , soit p a r le légataire t
soit par d ’autres, dans le temps ou peu avant la confection de
son testament. ( Pothier, Cout. d’ O rl. , tit. 1 6 , Introd. , n° 29 ).
A insi ce vice de l’acte ne suppose pas même de mauvaise intention
dans celui qui influence; il suffit que le testateur ait suivi l’impul
sion d ’a u tru i, quelle qu’elle fû t. E t voilà pourquoi la loi annulle
les legs faits au m éd ecin , au d irecteu r, e tc ., quoiqu’assurément
elle ne présume pas que la plupart d ’entr’eux soient des fripons.
2’ . L e défaut de mention précise que le testament ait été écrit
t e l qu’i l a ¿ t é d ic té . 11 fout ici se rem ettre sous les yeux l ’article
972 d u 'C od e Napoléon. Cet article exig e , entr’aulrcs form alités,
deux choses bien différentes et bien distinctes, quoiqu’au prem ier
abord elles puissent paroltre se con fondre: sa v o ir, i°. que le tes
tament soit écrit sous la dictée du testateur ; 20. qu’il «oit écrit tel
qu’il est dicté.
Par la première de ces dispositions, la loi veut dire que le testa-
�4lï
( 7)
ment parte delà bouche du testateur, que le testateur en prononce
intelligiblem ent toutes les dispositions , ( Ordonn.
, art. 5 , )
non pas mot à m ot, car cela seroit généralement impossible, mais
en substance, et sauf la rédaction du notaire, qui doit le rédiger
en termes usités et coulans. ( Ja cq u et, sur T o u r., art. $ 2 2 ,
11 1 o ).
> Par la seconde, la loi veut dire que chaque disposition ou clause
de l’acte s’écrive à mesure qu’elle est prononcée , et avant que
Ton passe à une autre, ( Ordonn. i r/ 5 5 , art. ; ) de telle sorte
que le testateur ne prononce pas ses dispositions tout d’un trait et
en masse, mais attende la rédaction d’une première disposition
avant de passer à une seconde. L e testateur ne doit pas s'çn tenir
à déclarer .son intention au notaire ; il doit lu i dicter ses dispo
sitions l ’une après Vautre , à mesure qu’ il écrit. ( Jacquet, ibid. )
Elle veut dire encore que le notaire écrira de suite, sans influencer,
sans proposer au testateur aucun changement dans ses volontés.
C 'est ce qu’en d'autres termes on appelle, sans divertir à autres
a ctes, sans induction, etc. ( Ordonn. 1^55 e t c . , etc. )
5
E n un m ot, la loi prescrit, et que le testateur prononce luimôme, et qu'il le fasse sans désordre, sans précipitation, sans in
terruption, sans influence. Aussi après avoir dit que l’acte est dicté
p a rle testateur et écrit par le notaire , elle ajoute à l ’instant qu’il
est écrit tel qu’il est dicté : addition qui n’est pas oiseuse sans
doute.
Or , ce même article 973 ordonne rigoureusement qu’il soit fa it
mention expresse de toutes les formalités y énoncées, et l'article
1001 prononce la nullité absolue pour toute omission de formes
testamentaires. Donc l’omission de la mention expresse que le tes
tament ait été écrit tel qu’il a été dicté ou prononcé, le rend essen
tiellement nul.
E t certes le notaire a eu scs vues en omettant cette mention ; il
a craint l’inscription en faux. En e ffet, le testament a été d icté,
mais par un simple oui. L e notaire a donc pu attester absolument
avoir écrit l’acte sous la dictée, puisqu'on dicte ses volontés mèmç
A 4
‘
�par un oui ; mois ¡1 n'a pu attester l ’avoir écrit tel qu'il a été dicté ,
puisque cela n’étoit point. L a loi a donc sagement prévu qu’écrire
l ’acte dicté, ou l’écrire tel qu’il est dicté, ne sont pas la même
chose.
L ’adversaire, pour réfuter ce moyen , répond que la mention
dont il s’agit, est assez exprimée par ces mots du préambule de
Yac\.c,avoiis écrit sous sa dictée, le tout de mot à mot, et ainsi
qu’il suit; lesquels termes, d it-il, sont encore corroborés par ceuxci qui ensuivent les dispositions. Ce fu t ainsi fa it , dicté et pro
noncé, etc.
M*ais premièrement, la mention insérée dans le préambule est
prématurée , prépostère : elle est donc nulle. ( V. le principe ”. )
Cette nullité se prouve, et par la seule raison et par la lo i, et par la
jurisprudence. Par la raison, puisqu’on n’a pu attester d’abord avec
Yérité ce qui n’existoit point encore, ni valider ensuite cette attes
tation par une approbation subséquente. ( V. le principe 4". ) Par
la loi, puisque la loi déclare nulle la mention de signature, pour le
seul manque d’être à sa place , qui est à la fin de l ’acte. ( l.o i du no
tariat, art. i etG ). Par la jurisprudence, puisque toujours on a
cru insuffisante pour constater les signatures, cette expression
5
4
8
qui est en tète de tous les actes : Pardeva.nl les notaires et témoins
soussignés.
Cette jurisprudence dfe ne point admettre de mention anticipée
dans un testament, fut jadis solennellement consacrée par un arrêt
du i mars 16 6 4 , cité par Basnage, et rendu sur sa plaidoierie.
Voici comme il rend compte de l’espèce.
« S u r l’appel, je remontrai à la cou r. . . Quant à la form e, que
» la nullité en éloit apparente. On avoit commencé ce testament
)) par où il devoit finir; on avoit employé qu’il avoit été lu au tes» tateur et signé de lu i, avant même qu’on eût commencé de l ’é» crire. O r, il étoit impossible qu’on lui eut fait lecture, et qu’il eût
» signé un testament qu’on n’avoit pas encore commencé de rédiger
» par écrit. Pour excuser une nullité si grossière et si palpable, on
y> tàchoit de persuader que l'on n’avoit mis ces paroles au haut du
3
�(9)
» testament qu’après avoir été écrit ; mais l’inspection de l’original
» faisoit connoltre qu’il avoit été écrit tout d ’une suite, qu’on l’a» voit véritablement commencé de cette m anière, et qu’on n ’y
» avoit point laissé de place en blan c, pour y ajouter les clauses
« ci-dessus, e t c ... . Il n’en est pas des testamens comme des cou» trats. Dans ces derniers, la seule volonté des contractans leur
h donne l’être , elle en fait toute l’essence et la force ; et c’est pour» quoi un contrat qui seroit conçu en la même manière que ce tes» tament seroit valable. 11 n ’y auroit point d’absurdité pour avoir
» dit que les parties ont signé et contracté de la manière qui en» suit, » (Basnage , cout. de Norm. A rt. 4 12 ) .
Il faut donc que toute mention dans un testament soit posté
rieure au fait qu’elle atteste, à peine de nullité; que si la mention
qu’on a signe', quoiqu’antérieure au fait de la signature, ne laisse
pas d’être valide, pourvu qu’elle se trouve à la fin de l’acte, c’est
qu’il seroit impossible de la faire autrement. D ’ailleurs, elle tou
che de si près au fait attesté, qu’il n’y a pas d’inconvénient à crain
dre de ce léger renversement.
Secondement, et quant à l’efficacité des m ots, ce fu t ain sifa it ,
dicte' et prononcé, etc., il faut dire que toute mention expresse,
exigée par la loi, ne se présume point d’après le contexte général de
l’acte, et doit s’exprimer en termes, ou form els, ou identiques.
( Arrêt de cassation, du 19 frimaire an 14. ) O r, le sens des mots
que nous discutons est vague et général ; il ne prouveroit qu’à l ’aide
de la contexlure générale de l’acte le point contesté; il n’a rien de
précis à cet égard. Ces mots attestent bien que le testateur a dicté
ce que le notaire a écrit ; mais non que le notaire l’ait écrit tel
qu’on l’a dicté; ni que le testateur n’ait pas dicté par le simple mo
nosyllabe o u i , et sur l’interrogat d 'autrui, etc., etc. En un m ot,
celte clause remplit la première partie du vœu de la loi ; elle atteste
la dictée : mais non la seconde partie, qui est d’attester l'exactitude
de la rédaction. Ajoutons qu’il ne suffit pas que le sens qu'on veut
y trouver pût y convenir; il faudroit qu’il fût évident et irrésisti
ble; il faudroit, selon la pensée de M erlin, ( arrêt de cassation ,
A
5
�4**
iifi
5
(
10
io thermidor an i , ) qu'on pût y baser une condam nation de
fa u x , dans le cas où l’on prouvât quelque différence entre la ré
daction et la véritable et première dictée: o r , ici le notaire se défendroit victorieusement du fau x en observant qu’il atteste bien que
l ’acte lui a été dicté, mais non pas qu’il ait été écrit tel qu’ il a été
dicté ; n i , par exem ple, qu’il n ’ait pas été dicté par un simple oui.
E n un m o t , écrire sous la dictée , n’équivaut pas à , écrire e x a c
sous la dictée.
5° L,e testament ne constate pas qu’il ait été signé par le no
taire en présence des témoins, et par les uns et les autres en
présence du testateur. L ’art. 9 7 1 du Gode Napoléon est form el à
tem en t
cet égard, puisqu’il exige que le testament soit reçu par le notaire
en présence des témoins , et que la réception consiste principale
m ent dans la signature : car l’ acte avant la signature n ’est qu’un
projet inutile.
E t c’étoit également la disposition fo rm e lle , soit des lois ro
m ain es, ( leg. 9 , leg. 12 , cod. de testamentis , ) soit des ordon
nances, ( Ordonn. de 1 7 3 5 , art. ......... S e r a s i g n é d e s u i t e e t
5
SANS
D IV ERTIR
, C tC . )
O r , tout testament doit contenir la preuve des formalités que la
( Voy. ci-devant, principe ).
loi y prescrit.
4°.
3
Il ría pas été fa it uno c o n te x t u . En e ffe t , un ou deux
des témoins n'ont pu y vaquer sans interruption, depuis le com
mencement jusqu’à la fin, puisqu’ils ont été vus hors de la m aison,
livres à d'autres occupations, entre l’époque du commencement
et celle de la clôture du testament. O r , nous laissons à penser si
un testament se compose ainsi de pièces d ’assemblage. ( V , Basnage ,
ibid.
) L ’article 97G
du Code N apoléon, fournit un argument pé-
rem ptoire, que l'esprit de celte loi n’a pas été d ’abolir à cet égard
la sage disposition de l’ordonnance de 1 7 3 5 , art.
, qui n ’étoit
5
elle-même que la répétition des lois plus anciennes.
5°.
Il n a pas été lu en entier. C erte s, la lecture a précédé la
mention de la déclaration du testateur, de ne pouvoir signer : donc,
cotte mention n ’a pas été lue : donc ; le testament n'a pas été lu tout
entier.
�(
11
4z I
)
O r, le Code Napoléon, art. 9 72, prescrit disertemenl la lecture
du testament entier : car après avoir réglé par qui le testament sera
dicté, écrit et reçu , ( ce qui assurément embrasse la confection
entière de l’acte, ) il ajoute qu’il doit en être donné lecture au tes
tateur. L a loi nepouvoit marquer plus clairement, qu’elle entend
parler de la lecture de tout l’acte entier. En quoi elle se conforme
aux lois antérieures. ( Voy. Ordonn. i'JùSj art. . ........S e r a f a i t
5
L E C T U R E DU T E S T A M E N T E N T I E R ) .
E t en e ffet, quel est le but de cette lecture , si ce n’est de pré
venir les méprises ou les fraudes, et d’assurer de plus en plus la
véracité de l’acte. O r, à cet égard , la déclaration de ne pouvoir
signer, est une partie des plus essentielles du testament, puisqu’elle
prouve, et que le testateur a persisté dans son intention jusqu’à la
fin , et que son esprit a toujours conservé le sens et la raison. Aussi
faut-il que le testateur le déclare de sa bouche, et en précise la
cause. ( Code Napol. 975 ; Répertoire de jurisprudence, S i g n a
t u r e , § 2 . ) Aussi la loi attache-t-elle une extrême rigueur à l’ob
servation de celte formalité. ( V. Code Napoléon , 9 7 5 , 1001 ; loi
du notariat, art. i/j. et 68 ).
P o u r ébranler ce m o yen , on a prétendu que la nécessité de la lec
ture ne concerne que les dispositions, et non les form alités de l’acte;
q u ’autrement l a loi e x i g e r o i t l ’ i m p o s s i b l e , si e l l e exigeoit la lecture
de l à totalité du testam en t, puisqu’il est bien impossible de donner
lecture de la mention m êm e qui constate celle le ctu re ; à moins
d’ adm ettre la validité des mentions anticipées, que nous soutenons
être nulles.
M ais la réponse est facile ; et d’abord il est étonnanl qu’on veuille
particulariser la disposition des lois , lorsqu’elle n ’est pas seulement
générale , mais qu’elle ordonne en termes formels la lecture entière
du testament : Sera fait lecture du testament entier. Si la loi n’eût
parlé que des dispositions, le mot entier eût été plus qu’inutile.
E t d’ailleurs, il y auroit de la bizarrerie et du caprice d’exiger la
lecture d’une partie de l’acte, et non de l’autre partie, qui n ’est ni
moins délicate, ni moins importante.
�Quant à la prétendue im possibilité, à l’égard de la mention de
lecture, elle est chimérique, même dans notre systèm e, puisque
nous admettons l’efficacité d’une mention prepostere, sous deux
conditions ; savo ir, qu’ il soit impossible de faire cette mention
d’autre m anière, et que le fait mentionné suive de près la men
tion. M ais y eût-il impossibilité de mentionner la lecture de cette
mention de lecture, il ne s’ensuit pas que, ni cette mention, ni
au moins les autres mentions de formalités ne doivent pas être
lues. Il faudroit avoir une singulière logique pour tirer pareille con
séquence.
6°. Un des témoins est légataire. Ce témoin est le curé. L e
legs est deux annuels de messes à célébrer dans l’an du décès; l'un ,
pour l’âme du défunt ; l’autre, pour celle de sa défunte épouse. Nonseulement l’intention évidente du défunt a été que ce legs échût, au
tant que possible, au curé, son directeur, son pasteur et son am i;
mais par le fait le curé en a réellement profité, en célébrant plu
sieurs de ces messes.
Il est vrai que le curé n’est pas nominativement appelé à ce legs,
et que la d i s p o s i t i o n porte même que les messes seront d i t e s dans
telles églises qu’il plaira au légataire général de choisir : d ’où l’ad
versaire n’a pas manqué de vouloir induire que le curé n 'y est point
compris et n’est point légataire.
Mais d’abord un mot suffit pour démontrer la futilité de cette
induction. Ce m o t, nous l’avons déjà dit : c’est que réellement le
curé a pris sa part du legs et célébré plusieurs messes. Il ne s’agit
plus de disputer s’il y a des présomptions, lorsqu’on a en preuve
le fait lui-même qu’on cherchoit à prouver.
E t ensuite rappelons, d'un côté, que les deux annuels dévoient
être célébrés dans l’année du décès; et observons, d’autre côté ,
que le curé, témoin , étoit le seul prêtre exerçant dans la paroisse;
ce qui le m eltoil alors dans l’impossibilitc évidente de célébrer tou
tes ces messes; ou même il pouvoit arriver que, empêché par ses
autres devoirs curiaux , il n’en célébrAt aucune. Il falloit donc, ou
que le défunt permît indéfiniment de les faire dire ailleurs, ou que
�^ 2 .2
C 13 )
Théritler fût exposé à faire venir à Lastiq des célébrans étrangers:
car lorsque, dans un legs de prières ou d’aumônes, le l i e u est in
déterminé, la loi veut qu’elles se fassent dans la paroisse. {Leg.
26, Cod. lib. 1 , tit. 2 , de Sacrosanct. eccles-; leg. [), §. 3 ,
7 , Cod. lib. 1 , tit. , de episcopis ; Novell. i i , cap. IX . ).
■L’intention du pieux testateur n’a donc pas été d’ôter à ses enfans
la consolation d’assister aux messes qu’il ordonnoit' pour sa mé
moire , en les faisant célébrer ailleurs sans m otif, mais de faciliter
et alléger l’exécution de sa volonté.
'Enfin il y a plus, et quand le testateur n’eût pas eu plus de pré
férence pour son curé ou son église paroissiale , que pour aucune
autre, toujours est-il que le curé a été autant appelé que tout autre;
qu’il étoit dans le nombre de ceux en Ire qui l’héritier a du choisir ( 1 ) ;
qu’en un. m ot, il a été au moins légataire conditionnel : toujours
est-il que le curé avoif. rspoin do profiter directement du legs, et
qu’on a violé cette règle éternelle : Ç W nul r.e'soit témoin en af
3
3
4
faire ou il a intérêt. ( Voyez Co'quille, sur l’ordonnance de B lois ,
art. 65 ; et Domat, des rF estaniens, ’tit. 1 , sect. 3 , n 9. )
E t certes si le testateur eut légué une somme à celui des liabitans
du village qu’ il plairoit à l'héritier de choisir, assurément tous ces
habitons devenoient incapables d'être t é m o i n s ; et cependant ilseussent eu moins d'espoir que le curé, qui étoit le pasteur, et qui
n’avoit ù concourir qu’avec cinq ou six prêtres voisins; car natu
rellement on ne va pas distribuer des messes dans le lointain; or
c ’est par la pratique naturelle et commune que s’interprètent les
volontés. ( Code Napol. i i G. )
INoiis ne pouvons nous empêcher de rappeler ici un arrêt de la
cour de Cordeaux, du i4 juillet 18 0 7 , qui est entièrement dans
les principes que nous invoquons. Marie Moreau, testatrice, charge
l’institué de donner et payer dans les huit jours de son décès, au
5
( 1) Pour soutenir que le curé n'est pas légataire, parce qu'il eût dépendu de>
l'héritier de le fru strer, ilfaudroit mettre en principe que le droit d’élire dé
fé r é à autrui par le testateur efface la qualité do légataire, héritier, etc.
/*«*,
�prêtre qui exercera dans la commune de N ie u il, la somme de
160 J r . , pour être employée en prières pour le repos de son âme.
Un des témoins étoit desservant à Nieuil. L a cour a annullé le tes
tam ent, sur Je m otif que, pour répuîer une personne légataire, il
n’est pas nécessaire que le legs lui soit fait nommément, et que la
loi n’exclut pas moins le légataire éventuel que le pur et simple.
A u reste, nous ne pensons pas que ce soit sérieusement qu'on a
osé nous objecter que des sommes pour messes ne sauroient être la
matière d’un legs , et qu’on en donne pour m otif que ce ne soit
qu’un salaire compensatif de l’acte de célébration. L a fausseté d’une
telle objection est trop grossière. En e ffe t, qui ignore qu’un prêtre
qui ne célébreroit qu’en vue de la rétribution seroit un horrible
profanateur ! A insi, que la messe doive ou non être payée, le prêtre
n ’est pas ni plus ni moins dispensé ou tenu d’aller à l’autel. L ’hono
raire n’a pour objet que de l’obliger à appliquer le principal mérite
du sacrifice à celui qui paye. C ’est donc un pur d o n , un pur bien
fait qui n'aggrave en rien les fonctions du célébrant.
Mais , au surplus, quand un pareil legs ne seroit pas gratuit ,
mais onéreux, comme le sont tous autres legs de prières , que nous
importe? L a loi n ’atteint pas moins les dispositions onéreuses que les
gratuites ( i) ; elle est générale; elle exclut tous légataires, à quelque
titre qu’ils le soient. ( 975 ).
H é ! si le testateur eut ainsi donné en messes la majeure partie
de sa fortune, et n’eût point fait de préciput à l’adversaire, assu
rément celui-ci changcroit bien de langage, et ne regarderoit pas le
curé comme témoin valable, ou la disposition comme non réduc
tible.
7*. Un autre témoin étoit serviteur du testateur, et m êm e, en
quelque façon , du légataire du. quart. C ’est Jacques C halvet, qui
( 1) Tout le monde sait qu'on peut fa ir e la matière d ’un legs de ce qui est
censé purement onéreux, et même déjà du au légataire ; comme, léguer ù un
ouvrier la confection d'un ouvrage, à un créancier la somme qu’on lui doit : il
est inutile de citer des autorités.
�(
>5
)
m angeoit, b u vo it, habitoit et couchoit dans la maison avec les
autres domestiques, partageant avec eux les travaux d ’exploitation
du domaine, et cela sous la direction de l’adversaire : et ce n’étoit
point par circonstance; car telle a toujours été, telle est encore sa
profession notoire, de gagner sa vie à la journée, à faucher, mois
sonner , battre , labourer, ou raccommoder les instrumens d’agri
culture. Il n ’habite chez lui que dans le manque d'emploi. Il étoit
un des journaliers habitués et affidés chez le testateur, et à l’époque
même du testament il y a passé presque l'été ; il y a fauché ,
b attu , etc. O r, la loi du notariat irroge en termes formels la nul
lité d'un tel témoignage, art. 14 et
.
**
On a cherché à éluder ce moyen par deux évasions ; l'une, que la
loi ne s’entend point des serviteurs à la journée ; l’autre, que cette
loi a cessé pour les testamens ; puisque, dit-on , l’art. 975 du Code
N apoléon, faisant l ’énumération des qualités des témoins testa
mentaires, ne parle pas des serviteurs.
Quant au premier de ces deux subterfuges, on nous feroit plaisir
d'indiquer la preuve d’une telle assertion. E n attendant qu'on la
cherche, contentons-nous de dire que la loi est générale, et em
brasse tous les serviteurs, et surtout les vrais domestiques, tels
qu'étoit Chalvet. A in si, peu importe que le gage de Chalvet fû t, ou
à la journée, ou à plus long terme. 11 en est du serviteur comme du
clerc: mais assurément, à l’égard du c le rc , il suffit d’être scribe
actuel du notaire, et le terme ou le salaire ne font rien (1).
68
( 1 ) Nous avons dit que Chalvet étoit un v ra i domestique: précisons l'idée de
ce mot. Parmi ceux qui travaillent des mains, ceux (/ni s'appliquent à des occu~
palions libérales sont appelés artistes j mais ceux qui s'adonnent à des fonc
tions p m relevées, à des œuvres serviles, se nomment ouvriers ,
domestiques, etc.
serviteurs,
U n o u v r i e r , simplement d i t , est celui qui n’est nullement sous la dépen~
dance de celui qui le fait travailler. T e l est le menuisier à qui je commande
xme table, un coffre , etc. qu’il fabrique à volonté dans sa boutique, sans que
je puisse gêner ni inspecter l\emploi de son temps ou la célérité du travail. E n
�(
16
)
Quant au second subterfuge, il est faux que l’article 975 fasse l'énumdration complète des qualités des témoins , puisque l'article
un m ot, c’est celui qui prom et, non des œuvres ( opéras ) , mais un ouvrage
( opus ).
U n s e r v i t e u r , est celui à qui l’on a droit de commander, et qui est comp
table de tous les momens de sa journée, ou autre temps convenu, soit que l'on
fix e ce temps à un terme connu, soit qu’on le limite à tel ou tel travail, soit
qu’on en laisse la durée à la discrétion de quelqu'une des parties. De ce genre
sont les faucheurs, moissonneurs , vendangeurs, etç. quand morne ils travaille
raient à p rix fa it ; car le p rix fa it n’ote pas l'inspection.
Un d o m estiq u e , est un serviteur qui est mis au nombre des gens du mé
nage , c'est-à-dire, qui habite, boit et ’m ange avec e u x , quel que soit du reste
le terme ou le genre cCœuvre servile dont on est convenu. V oilà des notions
qui nous semblent exactes.
Aussi nos lois et nos auteurs n'ont eu garde de restreindre les mots de ser
viteur ou domestiquo à ceux qui .se louent à l’année, pas plus qu’à tel ou tel
genre d'œuvres serviles.
. « L es serviteurs qui ont accoutumé se louer à temps « certain p r ix > servi» ront'l’art en tier, s i, etc.......... Pareillement ceux qui seront loués pour un
» ouvrage, qtc. ( Ordonn. iSGy , 15 7 7 )•
» On
ri admet guère les dépositions des serviteurs
, surtout
lorsqu'ils sont
i> aussi domestiques, c'est-à-dire, lorsqu'ils logent chez nous, etc.... » ( l ’othier,
procédure civile )
Item merccnarii et commensales rcpelluntur à lestim onio, etc.... ( M a zuer,
de testibus, n° 8 , etc. )
Qui conventâ mcrcedo alicui opéras suas lo cû ru n t, quos quandôque laborato re s , quandûque salariatos appeliam u s...........à testimonio repellu n tu r. . . .
( Farinacius, quæst.
, n° 14 ).
55
Aussi pareillement, et de tout temps, on s’est arrêté au fa it de l ’habitation
et nourriture pour déterminer si un vol est domestique , suivant celte loi ro
maine :D om cstica furta vocantur, fjuæ servi dominis v c l . . . . merccnarii upud
quos degunt, subripiunt. ( Lcg. 1 1 , § 1 , ff. lib. 48 , tit. jg , do pœnis ). E t
suivant ce passage îles établissemens de S . Louis : « Hom , quand il emble à
» son saignour, et il est à son pain et à son v in , il ett pendable. *
Aussi enfin la loi du 3.4 brumaire an G , réputant complice de désertion qui
conque se trouve avoir admis chez s o i , pour serviteur à gngos , un déserteur
qu'il n'a pas préalablement présenté au maire; la cour de cassation a prononcé
y ue cette loi entend p a r serviteur même le simple journalier. ( A r r ê t do cas
sation, du 18 juillet 180Î), etc. )
�( ll )
980 en ajoute plusieurs autres. C 'est donc le cas d’observer combien
sont périlleux les argumens négatifs.
E t certes, outre que la loi du notariat, discutée durant cinq ou
six ans, et émise en même temps que cel'edes testamens , ne sera
pas facilement présumée abolie par celle dernière, il s’ensuivroit
de trop grandes absurdités de cette abolition : il s ’ensuivroit que
les clercs du notaire étant incapables , ses domestiques les plus ab
jects ne le seroient pas; qu'on seroit dispensé d’exprimer les nom s,
qualités et demeures des témoins testamentaires ; que le notaire
pourroit recevoir un testament hors de son ressort, avec scs pro
ches, pour ses proches, pour son intérêt, sans connoitre le testa
teur , etc., etc., puisque rien de tout cela n’a été réglé par la loi
des testamens. On est donc forcé d ’avouer que la loi du notariat
n ’a point perdu sa vigueur. ( V. Grenier , Traité des donations
et testamens , tom. 2 , page
et 47 ).
Aussi le Code Napoléon n ’abolit-il que les lois rom aines, les
ordonnances, les coutumes, etc., mais non les lois nouvelles. ( L o i
sur la réunion des lois civ. en un seul corps , art. 7 ).
L a nullité du testament ainsi débattue et démontrée, nous ne
ferons que glisser sur les autres chefs ; ils seront suffisamment dé
veloppés par la plaidoirie.
Il s’agit donc de savoir de plus dans cette cause, si l'intim é a pu
impunément dévaster les bois de haute futaie, encore qu’il l’ait
fait du vivant, mais à l’insçu du père; et s’il n'est pas tenu de rap
porter les prix des ventes qu’il en a faites , et qui dans tous les cas
seroient un moyen d’excéder le quart disponible. ( V . Code Nap.
829, 843,
1 , 8 52,
,
).
11 s’agit de savoir s i , sous prétexte de gestion confidentielle, l ’in
timé a pu, du vivant du père, s’approprier tout l’actif du produit
des biens, et laisser en arriéré tout le passif, même les gages des
domestiques; s’il doit en êlrecru à sa simple parole, quand il dit
ne rien retenir de celle geslion ; ou bien , au contraire, s’il est tenu
85
853 854
�à rendre com pte, surtout quand on lui prouveroit n ’en avoir ja
mais rendu au père commun.
Il s’agit d e savoir, si l’intimé peut s’approprier, soit la toison,
soit le prix du troupeau de moutons qui garnissoit le domaine de
L a s tiq au décès, et qui n’a été livré à l’acheteur et payé que de
puis le décès; si l’intimé n’a besoin d’autre titre que de dire l’avoir
acheté, quand il l’a fait durant sa gestion , quand de tout temps il
y a eu un troupeau dans ce domaine, quand enfin l’on peut lui
prouver qu’il l’avoit payé avec du blé de la récolte, et n ’avoit
d’ailleurs jamais fait aucun commerce personnel.
Il s’agit d e savoir, si l’intimé rapportera, soit les récoltes, soit
divers autres objets, qui étoient sous la sauve-garde du procès-verbal
de mise de scellés, et dont il s’est emparé sans compte ni mesure,
par voie de fait ; 0u s’il en sera quitte en disant en avoir eu besoin
pour les dépenses de la succession, desquelles il ne justifie pas, et
n ’a jamais été chargé, ni volontairement, ni p a r les formes coactives légales.
II s’agit de savoir, s’il ne sera point privé de prendre part dans
tout ce qu’il a recelé ou tenté de recéler et soustraire, soit en dégui
sant , soit en niant, soit en revendiquant ce qui ne lui appartient pas.
Il s'agit de savoir, si la succession maternelle, ouverte ab intes
tat, et consistant en reprises contre la paternelle, se compose de
trente ou de quarante mille francs.
IL s’agit de savoir, si trois des cohéritiers, à qui l'intimé refuse
le nécessaire , doivent obtenir une provision qui n’est contestée
que par le seul intimé.
E n fin , il s’agit de savoir, si l'intimé ne doit pas supporter les
dépens et dommages-intérèts qu'il occasionne par sa mauvaise foi
révoltante.
F O L C I M A G N E - V t , juge crim.
époux de Fleurie V ayron.
A C L E R M O N T, de l'imprimerie do L an d r io t , Imprimeur de la Préfecture,
rue Saint-Genès.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Veyron, Gilbert. 1808?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Falcimagne
Subject
The topic of the resource
nullité du testament
captation d'héritage
doctrine
testaments
abus de faiblesse
Description
An account of the resource
Titre complet : Notice des principaux moyens d'appel, pour les sieurs et dames et demoiselles Gilbert, François, Louise, Fleurie, Marie et autre Marie Vayron ; Laurent Grenier , époux de ladite Louise ; et François Falcimagne-Vaillant, époux de ladite Fleurie, appelans ; Contre le sieur Balthazard Vayron, leur frère et beau-frère, intimé.
Particularités : notation manuscrite : 27 juillet 1808, 1ére chambre, arrêt statue sur toutes les difficultés
Table Godemel : Testament : 8. testament attaqué 1° pour captation et suggestion ; 2° défaut de mention précise que le testament été écrit tel qu’il a été dicté ; 3° ne constate pas qu’il ait été signé par le notaire en présence des témoins, et par les uns et par les autres, en présence du testateur ; 4° n’a pas été fait uno contextu ; 5° n’a pas été lu en entier ; 6° un des témoins est légataire ; 7° un autre témoin est serviteur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1808
1805-1808
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1716
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Saturnin (63396)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53319/BCU_Factums_G1716.jpg
abus de faiblesse
captation d'héritage
doctrine
nullité du testament
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53320/BCU_Factums_G1717.pdf
e429b4c68902ee12d7a53df33baddf51
PDF Text
Text
CONCLUSIONS MOTIVÉES
POUR
Dame
V E R N Y , et le sieur
P i e r r e V E R N IÈ R E , son m ari, propriétai
res , habitans de la ville de Riom ; le sieur
C l a u d e - A m a b l e JU S S E R A U D , fils et héri
tier de défunte Françoise V e r n y , imprimeur,
habitant de la ville de Paris, appelans;
M a r ie -S u z a n n e
CONTRE
M . G a s p a r d - A n t o i n e V E R N Y , président
de la cour d'appel de Riom; P i e r r e - P a u l
V E R N Y , propriétaire ; P i e r r e - A m a b l e
G A U B E R T , greffier en chef du tribunal de
première instance de la ville de Riom; G a s p a r d A ntoine
GAUBERT
commis - greffier ;
C la u d e -A m a b le G A U B É R T , et P i e r r e
G A U B E R T père, tous habitans de la ville de
Riom, intimés.
A T T E N D U que d’après la loi du 8 avril 1791 , la for
clusion prononcée par la ci-devant coutume d’Auvergne
contre les filles mariées, père et mère vivans, a été abolie,
et que cette même loi à ordonné le partage par égalité
des successions ab intestat, entre héritiers à égal degré;
Attendu que d’après les principes constans en droit,
le partage des biens d’une succession se règle suivant la
�•I
(
2
)
loi existante lors de son ouverture, et que celle de
Clatide-^nifible V e rn y , p ère, beau-père et aïeul commu'ü cfes pbrties /de laquelle il s’agît , a été ouverte pos
térieurement à la promulgation du décret du 8 avril 1791 ;
Attendu que l’exception portée en l’article
de cette
lo i, ne fait que- rappeler et se réfère entièrement à celle
portée en la deuxième partie de l’article 11 de la loi du i
rnaf? 1790, seulement relative à l’abolition de l’inégalité
des partages, qui résultoit du régime féodal, et ne peut
dès-lors s’appliquer à. üne succession dont tous les biens
sont en roture ;
r Attendu que cette exception n’a évidemment pour
objet que les droits antérieurement acquis, et ne com
prend d’aucune manière les dons statutaires, qui restent
dans le domaine de la lo i, jusqu’à l’époque ou ils sont dé
volus par le décès de celui delà succession duquel il s’agit;
Attendu que dans la ci-devant coutume d’A uvergn e,
le bénéfice de la forclusion, qui étoit un privilège de la
masculinité, tîtoit un don purement statutaire, puisque
cette loi municipale le dirigeoit au profit des seuls mâles,
sans qu’il fût nécessaire de stipulation , et sans même que
les ûlles lissent a u c u n e e spèce de r en on c i a t i o n a u x suc
cessions h échoir, soit en ligne directe, soit en ligne col
latérale, et que les renonciations qu’elles auroient pu
faire eussent été absolument surérogatoires, la loi re
nonçant formellement pour elles ;
Attendu que ce bénéfice n’o lfro it, jusqu’au décès du
p ère, qu’une expectatiye infiniment incertaine, fondée
sur une coutume qui ayant perdu toute sa force par la
publication du décret du 8 avril 1 7 9 1, ne peut plus au
jourd’hui disposer de biens arrachés de sou dom aine, e*
rendus à leur destination naturelle ;
Attendu que la forclusion des dames Vernière et Jusscraud doit si peu être considérée comme un droit acquis
à M. V<;rny aîn é, qu’il a été marié long-teuips avant ses
sœurs, et cju’à cette époque il ¿toit fort incertain qu’eltea
5
5
�(3
)
fussent frappées de l’exil prononcé par la coutume contre
les filles mariées, père et mère vivans, d’autant mieux que
le père avoit eu la précaution de reteñirla dame Gaubert
dans sa famille, et que l’on devoit naturellement pré
sumer qu’il suivroit la même conduite à l’égard de sea
autres filles ;
Attendu qu’on ne peut considérer le mariage des dames
V ernière et Jusseraud sans retenue dans la famille, comme
une disposition écrite de la part du père, du bénéfice de
la forclusion en faveur de M. Verny , puisque, d’après
l’article 9 de la loi du 18 pluviôse an
, interprétative
de celle du 8 avril 17 9 1, les filles exclues par les statuts
sont rappelées au partage, quoiqu’elles eussent été mariées"
avant ce décret, et qu’elles eussent fait une renonciation
surérogatoire;
Attendu que la loi n’a évidemment excepté de l’égalité,
des partages, et réservé aux personnes m ariées, ou veuves
avec enfans, que les préciputs accordés par quelques cou
tumes, tels que le droit d’aînesse, ainsi qu’il est facile
de s’en convaincre par la loi du 4 janvier 1793 , qui a*
aboli les exception», portées par celle du 8 avril 1791 i
Attendu dès-lors que la seule exception que puisse
invoquer M . V erny est celle contenue en l’article 4 dq
cette lo i, qui lui conserve le bénéfice de son institution
contractuelle , et que , d’entree de cquîjç , les appelans on£
consenti à ce qu’il en fît le prélèvement.
Subsidinirement, et dans le cas seulement où la cour
d’appel penseroit que les exceptions invoquées par M-,
V erny aîné pussent lui être appliquées;
Attendu que le sieur Pierre-Paul V e rn y , qui étoit céli-,
bataire lors du décès de. son p ère, ne peut de sa part se
refuser à la demande dirigée contre lu i, et que, bien loin
de le faire, il y a donné les m ains, e t sollicite lui-même
un nouveau partage;
Attendu.que par.l’effet de la loi du 8 avril 1 7 9 1 , les
dàmea Vernière et Jusseraud ayant été ^établies dans leur
5
�..................................
( 4 )
qualité d’héritières, et relevées de l’incapacité lie succéder,
à laquelle les réduisoit la ci-devant coutume d’A uvergne,
ont évidemment droit à une certaine quotité de biens,
et que, quelque modique qu’elle soit, elle ne peut leur
être expédiée que par la voie du partage , et non par
celle du supplément de légitime ;
' Attendu que le tribunal d’arrondissement n’avoit pas
le droit de convertir, de son autorité p rivée, et sans con
clusions précises d’aucune des parties , la demande en
partage en une demande en simple supplément de légi
time ;
Attendu que la qualité d’héritiers donne aux appelans
ju s in to to , et qu’ils ont le droit de prendre leur por
tion dans chaque espèce de biens ; ce qu’ils ne pourraient
cependant faire, s’ils étoient obligés de se contenter d’un
supplément de légitime qui leur seroit expédié sur les
biens de la succession , qui se trouvent actuellement entre
les mains de Pierre-Paul V ern y ;
Attendu qu’on ne peut opposer aux appelans aucune
espèce de partage qui auroitpu être fait entre M M . V ern y
et (r-'ib e rt, parce qu’un acte ùe cette nature étant uour
eux
res in te r a lto s e ic tn , ne p e u t
avoir aucune force
à leur égard , d’autant mieux que l’acte de partage dont
on argumente a été fait sous seing p rivé , et n’a dès-lors
aucune date certaine;
Attendu qu’un partage fait hors la présence d’un ayant
droit, ne peut jamais lui être opposé, et produire aucun
effet à son égard, suivant la loi 1 7 , au cod. Fa-milice
erciscundce. Coheredibus divisionem inter se fa cien tibus ju r i absent's , et ignorantis minimè derogari, ac
pro indiviso portionern eatn quce im tio ip s iu s fu it, in
omnibus communibus rebus euni reltnere, certissimum
est. Unde portionern tuam cum reditibus arbitrio f a milice erciscundce percipere potes, ex fa cta inter cokercdes divisione nullum prœjudiciurn timens.
Attendu que quand bieu'iuém e il existerait un acte
�( 5 )
4^
régu lier, et ayant date certaine, contenant partage de
la succession de Claude-Amable Y ern y, on ne pourroit
l’opposer aux appelans, pour les exclure d’un partage
gén éral, lors duquel ils seroient appelés pour prendre
la portion qui leur seroit attribuée par la cour;
Attendu que le partage qui auroit pu être fait l’aui*oit
été en contravention de la loi du 8 avxnl 1791 , dont
M . V erny avoit une parfaite corïnoissance, et devroit
dès-lors être considéré comme n’ayant d’autre but que
de diminuer en apparence les droits des appelans;
Attendu que dans le cas même où il existeroit un
partage sous seing privé , il ne pourroit prendre de date
certaine que par l’enregistrement, et qu’il n’a été soumis
à cette formalité que fort long-temps après la demande
formée par les appelans ;
Attendu que si on n’ordonnoit pas un partage général
il en résulteroit le plus grand préjudice pour les appelans,
soit relativement à ce qui leur revient sur les biens de la
succession, soit relativement aux restitutions de jouissances,
et intérêts du montant d’icelles;
Attendu que dans l’hypothèse où M . V erny setrouveroit
rangé dans la classe des exceptions portées en l’art. 5 de
la loi du 8 avril 179-1, il ne pourroit prendre la moitié
du bénéfice de la forclusion de ses sœurs, que par la voie
du prélèvement; ce qui n’empêclieroit pas qu’il fût sou
mis au rapport des biens dépendans de la succession dont
il s’est mis en possession ;
Attendu qu’un partage doit toujours être général, et
fait en présence de tous les cohéritiers, parce que chacun
d’eux ayant une portion à prendre sur le tout, par la voie
du tirage des lots au sort, il est indispensable que la masse
des biens soit formée de tous ceux qui composent la suc
cession.
En ce qui touche la demande formée par M . V e rn y ,
en restitution des jouissances çlu domaine de Pleinchamp,
pour l’année 1794;
‘
'
�(6)
Attendu que par l’article 2 de la loi du 3 vendémiaire
an 4 , qui a rapporté l’effet rétroactif porté par la loi du
17 nivôse an 2, les légitimaires déchus ne sont pas comp
tables des fruits ni intérêts perçus avant la loi du flo
réal précédent;
Attendu que la disposition du jugement qui ordonne
cette restitution de fruits, porte, en cette partie, atteinte
à la chose jugée, puisque par un jugement arbitral, des
7 et 16 brumaire an 3 , les appelans avoient été autorisée
à se mettre en possession du domaine de Pleincliamp, à
faire écosser les grains qui en étoient provenus, et à se
les diviser, en appelant M . V ern y au partage qui en
seroil fait;
Attendu que M . Verny a été inutilement appelé par
plusieurs sommations extra judiciaires, pour venir prendre
sa p o rtio n , et que s’il ne l’a pas recueillie il doit s’en
imputer la faute ;
Attendu que les appelans ne se sont pas mis, de voie
de fait, en possession du domaine de Pleincliam p, mais
ne l’ont fait au contraire qu’après un jugement qui avoit
ordonné le partage, et adjugé à M . V erny le prélève
ment des semailles d e l ’a n n é e p r é c é d e n t e ;
Attendu que dès l’instant où M . V ern y se faisoit rem
bourser les semailles par lui fournies, il ne pouvoit avoir
lin droit exclusif à la récolte; car il seroit impossible de
présumer que l’on pût obliger à payer des semailles, ceux
qui n’auroienl aucun droit à la récolte; et la conséquence
la plus naturelle qu’on puisse en induire, est une reconnoissance formelle aux droits des appelans à cette époque;
Attendu , dans tous les cas , que cette disposition du.
jugement seroit évidemment injuste, en cè qu’il a con
damné les appelans à payer seuls cette récolte , tandis
qu’il est de fait reconnu par M. Verny lui-mêm e, qu’ils
l’ont prise concurremment avec les'sieurs V ern y puîné,
et G aubert, et n’ont re(uir chacun qu’un quart de cette
même récolte ;
5
�C7 )
Attendu au surplus que M . V erny a perçu à lui seul
plus des deux cinquièmes des revenus des biens dépendans de la succession de Claude-Amable V ern y, quoique
d’après la loi du 17 nivôse an 2 il ne dût en prendre qu’un
cinquième.
D ire qu’il a été mal ju g é , bien appelé ; émendant, et
faisant ce que les premiers jugés auroient dû fa ire, sans
vous arrêter à la demande en restitution des jouissances
du domaine de Pleinchamp , pour l’année 1794 , dans
laquelle M . Verny sera purement et simplement déclaré
non recevable , ordonner que les parties viendront à di
vision et partige des biens dépendans de la succession de
Claude-Amable V e rn y , p è re , beau-père et aïeul commun,
lors duquel chacun des cohéritiers fera tous rapports et
prélèvemens de d roit; que M M . V ern y et Gaubert rap
porteront le m obilier, suivant l’inventaire qui en a été ou
dû être fa it, sinon suivant la preuve par commune re
nommée , avec intérêts à compter de l’ouverture de la
succession, ensemble les restitutions de jouissants par eux
respectiverAelifplAtués, à compter de la même époque’,avec intérêts du montant d’icelle, à compter de la demande^
pour celles perçues antérieurement, et à compter de chaque*
perception, pour celles échues pôstérieuremeiït, pôur la
masse de» biens ainsi com posée, être expédié un -dixième
de la t ot al it é à c h a c u n des appelans.
.
Subsidîairement y et-seulement.dans le cas où la cour
penseroit que les exceptions portées en l’article de'la toï
du 8 avril 1791 s’appliqueroient à M . Verny aîné , or
donner également que les parties viendront ¿Lpartage des
biens com posés,comm e est dit ci-de§sug, pou*- être expé
diée aux appelans la moitié des biens formant le bénéfice
qui résulteroit de la forclusion prononcée par la ci-devant
coutume d’A u v erg n e , el l’autre^rtlôitié à M*. V ern y aîné.
Ordonner que M M . Verny et Gaubert seront tenus de
payer, lors des p p é r a t i o D S du pai’tage , les sommes qui
seront par eux dues pou ï restitution de jouissances et in-
5
�,
( 8 )
térêts, sinon permettre aux appelans de se faire expédier
des biens immeubles de la succession, jusques et à concurence des sommes qui leur seront dues, suivant l’esti
mation qui sera faite pour parvenir au partage, laquelle
option ils seront tenus de faire dans la huitaine, à compter
de l’arrêt à intervenir, sinon qu’elle demeurera référée
aux appelans.
Ordonner que tous les dépens déjà faits, et ceux à faire
pour parvenir aux opérations du partage, seront com
pensés entre les parties, comme frais de partage, et pré
levés par celle qui les aura avancés.
A u surplus, dire qu’il a été bien jugé , et que le juge
ment sortira son plein et entier effet dans ses autres dis
positions; et en adjugeant le profit du défaut de jonction
obtenu par les appelans contre les sieurs Gaubert, déclarer
l ’arrêt à intervenir commun et exécutoire avec eux.
la r
fü L
à
C*A
i
fH i t l
^
f
a
.
rc a * * a j t A y t i l »
dk.
nf ,
/?
y u w
Ot-
^
^
u / tû ~ y fc " V
¿^¿.^vuwAvvi
'j
.
L ÿ x o u J ïY< y c J CkU**}
a»
¿SXtAiMo^X «-
^oUy, W o c \ - t - &(>•*;
*7
^
/ÎTO^
•
<Vi,ü'
A RIOM , de l’imprimerie.de L a n dr io t , seul imprimeur de la
Cour d’appel.
Juin 1807.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Verny, Marie-Suzanne. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
successions
partage
forclusion
coutume d'Auvergne
droit intermédiaire
légitime
droit à la récolte
Description
An account of the resource
Titre complet : Conclusions motivées pour dame Marie-Suzanne Verny, et le sieur Pierre Vernière, son mari, propriétaires, habitans de la ville de Riom ; le sieur Claude-Amable Jusseraud, fils et héritier de défunte Françoise Verny, imprimeur, habitant de la ville de Paris, appelans ; Contre monsieur Gaspard-Antoine Verny, président de la Cour d'appel de Riom ; Pierre-Paul Verny, propriétaire ; Pierre-Amable Gaubert, greffier en chef du tribunal de première instance de la ville de Riom ; Gaspard-Antoine Gaubert, commis-greffier ; Claude-Amable Gaubert, et Pierre Gaubert père, tous habitans de la ville de Riom, intimés.
Particularités : notation manuscrite : arrêt du 19 juin 1807 qui rejette la demande. Pourvoi en cassation. Arrêt du 19 juin 1809 qui modifie. « Il est intéressant à lire » écrit Godemeil. Sirez 1809-1-407. Devernoi, 1809-1-300
Table Godemel : Exclusion : - coutumière. Les lois des 8 avril 1791 et 18 pluviôse an 5 ont-elles réputées surérogatoires, et, comme telles, annulé les renonciations faites par des filles, sous l’empire d’une coutume d’exclusion non absolue ? 2. les mâles, qui lors de la publication de la première de ces lois, étaient mariés, doivent-ils conserver les avantages résultant des exclusions coutumières, lors même que leurs sœurs exclues ne s’étaient mariées qu’après eux ? 3. le légitimaire ou cohéritier rappelé au partage d’une succession dont il avait d’abord été exclu, doit-il prendre pour base du règlement de ses droits, le partage conventionnel déjà fait, s’il l’a été de bonne foi ? ou bien, le premier partage, doit-il, en ce cas, être considéré comme non avenu, même à l’égard des héritiers qui y ont figuré ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1794-1807
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1717
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Pleinchamp (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53320/BCU_Factums_G1717.jpg
coutume d'Auvergne
droit à la récolte
droit intermédiaire
forclusion
légitime
partage
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53321/BCU_Factums_G1718.pdf
7831d9a727a1255798fa6d44dfca73f7
PDF Text
Text
4 SI
CONSULTATION
P O U R le Sieur DE SEV IN , Tuteur légal
de ses Enfans Héritiers de la Dame leur
Mère ;
S
L'Appel
ur
e t
pa r
interjeté
le Sieur B A C H E L I E R
pa r
la Dame D ' H O U D E T O T ,
D ’un Jugement d’Ordre rendu par le Tribunal Civil
d e l ’A rro n d issem e n t C o m m u n a l de M
Plu v iô se
C
an
ollet de
10 ,
entre
les
S a in t -J am es.
or t a i n
le 2 9
Créanciers du Sieur
�*'-*
'
•!
• •'*•!
"
i
lit
.'
.
CONSULTATION.
•*l> 'il
-
M|l'!
: ■ ! • : <:•■
»;> tï I ■
• •;>• :
. •!
_
"1 ■• t
. •»
- , .,1
r - <■
'
:
\ i - j'■
,;.l
„
f
^
J L e C O N S E IL SO U S S IG N É , qui Ja pris le ctu re, t ° . d ’un
Jugement d’ordre rendu pa r le T rib u n a l civil de M o rta in , le
29 pluviôse an 1 0 , entre lès: créanciers du sieur Çollet-St.James ; 2°. d ’un M ém oire, intitulé ; Gri ef s et moyens d’ appel y
pour le sieur B achelier, suivi de deux consultations délibérées ,
l ’une à P a ris, le 20 fructidor an 11 , et l’autre à Caen t) Je
24 brumaire an 1 2 ; 3 °. d ’un Mémoire en réponse, pour la
dame de Sevin ; 4 ° . d’Observations servant de griefs et moyens
d ’appel , pour la dame d’IIoudetot j 5 °. d ’Observations pour
le sieur de S e vin , en qualité de tuteur de ses enfans , héri
tiers de la dame leur m ère; 6°. enfin , de deux autres Con
sultations , délibérées à Caen , les 3 i décembre 1806 et 7 janvier
1807;
'
. u »<
E S T I M E qu’en reconnaissant k la dame, de Sevin le droit
de prendre inscription sur les biens du sieur Collet-St.-James,
le T r ib u n a l de première instance de Mortain a rendu une
décision parfaitement conforme aux principes , et qu’il n ’y a
pas lieu de douter que son jugement soit confirmé en ce p o in t,
le seul qui intéresse les héritiers de la dame de Sevin.
Par acte authentique du a 3 novembre 1767 , le tuteur de
la demoiselle Collet de Beauvais ( la dame de S e v in ) vendit
au sieur Pont-Châlons un office de secrétaire du roi , pour
la somme de 110,000 liv.
L ’acquéreur affecta l’office par privilège, et tous ses biens
par hypothèque, au paiement du principal et des intérêts ,
fixés à quatre pour cent.
A
�P a r autre acte authentique, du i 3 février 178 3 , les héri
tiers du sieur JPpnt-Ch|ilons .revendirent cet office au sieur
ColIqJt-jSt.-Jinnes pour 12g,000 Jivres, .dont io,oco liv. furent
payés comptant. L e surplus fut d é l é g u é à la dame de Sevin.
La clause est conçue en ces termes:
« A l ’égard des 110,000 liv. restantes, ledit Pigeron (fo n d é
» de pouvoir des héritiers Pont-Chàlons),audit n o m , les délègue
» par ces présentes, à la dame épouse du sieur S e v in , pour
'» confô'rmémerit au contrat passé devant les notaires au ci>> devant Chàtelef de P a r is , le 2:3 novembre 1767 , par lequel
»> ledit feu de Pont-Châlons avait acquis ledit office de secré» taire du r o i , promettant ledit acquéreur exécuter et accom-
» plir rles conditions portées^audit contrat
, relativement a(i
» paiement'de ladite rente et au remboursement de son, capital
» ci-dessus désigné, ¿ a n s le s té n u e s e t de l a manière s ti» PULÎE EN ICELUI. »
« A u paiement de laquelle somme de 110,000 liv. et intérêts
» d ’icelle d a n s l e t e m p s e t c o m m e i l e s t d i t c i - d e s s u s , l ’office
>> sus-vendu est' et dem eure, par privilège, expressément réservé,
» obligé*, affecté et hypothéqué; et en O utre," sans
q u ’une
» obligation et affectation déroge à l’autre , ■
ledit Collet - de» S t.-James y oblige, affecte et hypothèque tous ses autres
» l/iens , meubles et immeubles, présens et à venir. »
En exécution de cet acte , la dame de Sevin a reçu, du sieur
Collet-Saint-James , les arrérages de la rente q u ’il s’était
chargé de lui payer.
‘ Le 2 décembre 1791 , il a été passé, entre cette dame et son
nouveau débiteur, un acte où elle a consenti que le terme
auquel il était tenu de lui rembourser le capital, et qui devait
expirer l’année' suivante, lut prorogé au i cr janvier 1799.
■ Cet acte est sous seing-privé; mais il a acquis une date
�c eitâm e, ayant pas«? âu''poiivoir),t'le il,afutorit0j'a<ÎaiiiH%fir^ÿv.Ç)
avec les1 autres' titr'es-de créance .dô la''dam e;1<de Sevify »i^qtfi,
avàit été insdrlte-, sud : lal>liste'des énfyigrés, 11 a ‘ été dépecé»
par la régie de.ii’éftrégistremcnt , au greffé du T rib u n a l >civü
dé Mortain* .*
v<\ «:•* * " ‘
• ) ....... l
,
, :
L e 26 prairial an 7 , en vertu de Vacte du 2.a novembre 1767
et ¡de celui du i 3>fév rier »7&i jM a: damé Atte ;3evia, a üpjris
une inscfiptiôit hypothécaire sur 1les ljiensi. du' siquijj Collet-,
de-St.-Jamés. •
l
.’
■
:î •>[>
1
. . Ji* - *'Jli . . . !. î' . ■
^
On lui a contesté le droit de prendre cette instfr.iption. ; ;
• 11 a été prétendu qu’elle li’avait point de titre! hypothécaire
sur les .biens du sieur Collet-St.-James.
; '.'.1 . I>
" j
On a refusé de lui en reconnaître urt dans Ifacte du i 3 fé-*
vrier 17 8 3 , sous le prétexte unique q u ’e lle 'n ’y avait p a s'¿ té
présente pour accepter la délégation qu’il porte en sa faveur.
i
.
..
■
X e l 'est y. eui peu de m o ts, le système du; sieur Bachelier
et de la d a m e ’ d ’IIoudétot’ , créanciers, du sieur Collet - St,»*
J a m e s, depuis le 1 5 messidor an 6 seulement.
Présenté par ces deux créanciers seuls , quoique tous les
autres créanciers hypothécaires du sieur Collet soient égale
ment ; primés par la dame de S c v in , cc système doit pa
raître d ’autant moins favorable qu ’il - tendrait Ui dépouiller1
entièrement ses héritiers de la créance la plus légitime.
E t , pour l’admettre, il faudrait anéantir uue deîc'gcition for
mellement stipulée , une délégation d’ailleurs acccpléo ; il £au- drait^supposer nulles des conventions expresses , insérées dans
un contrat authentique et formant les conditions d’une v e n te ou bien même eu les reconnaissant valable^ y i ! 'faudrait^ par
une manifeste contradiction * les em pêcher'de produire' Jour >
effet propre et direct. ••;« '
. . >.
,
, 'i-r.
'
C a r , incontestablement, il .existe iule de'ltigatipn ,.çn 'faSxiif i
�de la dame de Sevin , dans l’acte du i 3 février 1783 j >il y existe,
én 'sa faveur, une obligation personnelle de. la part du sieur
Collet-Saint-Jânies, et Yaffectation de tous ses biens par hy
pothèque , à l’acquittement de cette obligation.
C ’est bien là un titre, un titre hypothécaire en faveur de
la dame de Sevin.
L e sieur Bachelier et la dame d’Houdetot ont fait observer
q u e p o u r rendre une délégation parfaite , il falloit le concours
de trois personnes, le déléguant , le délégué , celui enfin au
profit duquel est stipulée la délégation ,
et
qu’on pourrait
appeler le délégataîre.
D e cette définition ils ont conclu que la délégation, portée
par l ’acte du i 3 février 1783 , n ’était point parfaite à l’ ins
tant où elle fut stipulée.
Mais , de ce qu’elle n ’était pas encore parfaite , en résulleVa-t-il donc qu’il n ’était permis de lui attribuer aucun e ffe t?
E n résultera-t-il qu’elle ne pouvait être acceptée ultérieurement
et rendue parfaite? En résultera t - il que l’engagement , si
expressément contracté par le sieur Collet-Saint-James au profit
de la deme Sevin, doit être considéré comme non-avenu, ainsi
que la stipulation d'hypolhèque qui accompagne cet engage
m e n t?
L e sieur Bachelier et la dame d ’IIoudetot ne se sont;point
hasardés ü résoudre toutes ces questions d’une manière po
sitive.
1
■
.-•■
■
■
Après avoir très-vaguement cité la doctrine des auteurs sur
les conditions nécessaires pour opérer une délégation parfaite,
ils ont invoqué cette maxime de l’ancien droit» romain , qii^l■
.
•
!
■
ïi’est pas permis de stipuler pour autrui.
Vainement d o n c , suivant eux ; il a été stipulé , ilnns l’acte •
de 1783, une: délégation , une obligation pcrsotinélln , une 1
hypothèque enfin , au profit de la dame db Sevin , puisqu'elle 1
n ’y était pas partie contractante. L e' sieurl.de Pont-Cliálons
�5
n ’a pu Jui acquérir aucun, droit personnel ou reel contre Ie^
sieur Collet-Saint-James,, et par conséquent elle ne pouvait
requérir une inscription sur les biens de ce dernier , ni se
présenter comme sa créancière à la distribution du prix pro
venu de leur aliénation.
î
<"
"• ■a ■
, ; v..
WfAMlv. * \\\ '
~
•• y-.
S*
• L a maxime invoquée par le
y...
.
sieur Bachelier et
la dame
58 , §*,17 >
de verborum obli&ationibus.
1
,
Elle fut également écrite dans les Institutes(au titre , de inud ’Houdetot avait sa source dans la loi
tilibus stipulatlonibus , §; 4 et. 18.
■
. 'v w i
\
D ans la première de ces lois, Ulpien s’exprime ainsi :
A l t e r i stip u la iu nemo potest .
'
Le même jurisconsulte en donne aussitôt pour raison, que les
obligations de cetle espèce ont été introduites , afin que chacun
acquiert ce ,qu’il est de son intérêt d’acquérir. Inventée sunt
enrm hujus modi obligationes ad hoc , ut unusquisque sibi adquirat^uo sud interest. ;i
Ainsi la règle enseignée par U lp ie n , ne concernait que les
stipulations proprement dites : obligationes hujus m odi, selon
ses propres termes.
O r , on sait que les stipidations, chez les R o m a in s, consis
taient en certaines solemnités youlues par la loi pour la perfec
tion d’un,/;acte ou d ’une convention., \}ne telle règle.est donc
inapplicable dans nos mœurs ; puisque»£;lp,s simples convêntions
produisent d a n s.le droit français les mêmes e ffe ts , que les
stipulations dans, le,,droit romain.
. Aussi n’est*il pas permis de douter que cette règle d ’abord mo
difiée par une foule d'exceptions, é t a it , en quelque sorte , tom
bée en, désij}':ttu}e,j elle n’était professée que dans 1rs écoles.
,F.llc souffrait unç première exception, lorsque celui qui sti
pulait poyr a u t r u i, avait intérêt ù la stipulation ; une seconde ,
«jlfjk
�f
°
' G oâejtoï, da'ÂS scîs notdi ¿nr le § . 4/au* IrrstiftitéS de iniitilib*
stipulât . , y met les mêmes restrictions tlattfr les ternies sUivaiWi
N isim ed intersit , nisi juraveris , nisi sub pcena promiser/s ,
nisi consuetudo o b sle t, nisl'p\is -lotis et procuratori stipulants
sim. (
n
îhCé's iiom^Veiùs^S e±cdpli:<iiTS au prirfeipc gèlerai, qù’ori rie jxiit
stipülcr' pour autrui ont donné ïiet\ K Virinius àc remarqué^’
que cette rigueur du droit avait été fort adoucie par les derinèrés%hsHiratiîfhVJd bé'fettip^ u rs t Rigàfqüè jü ïis posteriorum
imperatorum constitutionibics honnihil rnrtrgaius est. '
Vm nnâ'cXè ^ô'tfï’e'xcihiiîc, à f’apptli dé sa' rem arque, la loi 5
au code de Donationibus quog sub rtiod}"y' " ' ■r - ■
P a r ‘cette lof, én effet, les empereurs Dioctétien et xMaximien
avaient déclaré valable la stipulation faite en faveur d’ un tiers
dans un acte de dotation y comrtie condition de la libéralité.
Godé/roi oljsèrvû s'ür le' § 17' de là loi 58 , au ff.' de verboruni obligationibus , q ue ce p aragraph e ne p e u t ¿tre ailjifur'd'hui 1
d ’uné grande utilité': qiio hddie,’ d It-il, quia pàisim u tim u r n o n
ita erit magnee utililatis hic paragtaphus.
Cujas avait également observé que la règle enseignée p a r ’
Ulpicn , était une maximé1 de l ’ancien droit, de jure veteri-èsse.
V o 'èt, sur le titre de tierbi oblig. n. 3 , 'n ’hésite pas de p ro -1
fesser q u e , dans la jurispi-ucÎéricô act'üellejI!il est reçu qu'on peut
stipuler pour autrui com m e'pour soi-mêrhb : M oribui hodiernis
obtinuit unumquemque altcrisque , ac s ib i , posse stipulari.
Vo'èt cite Groenewegen, célèbre jurisconsulte hollandais,
qui lui-m im e appuie sa dottrine d ’un grand nombre de cita.•
•;
: .ni
••• .
•*»
lions.
tS'trykius\ disp. 25 , ch. 5 V n* 4 2 > examinée la question de
savoir‘ si un aïeul peut stipuler pour son jiétit-fils ; et ce pro
fesseur allemand après avoir fait plusieurs distinctions très-
�4M
7
subtiles, les détruit toutes, en disant q u ’il est oiseux aujour
d ’hui d'examiner ces difficultés ; car il est certain , ajoute-t-il,
que dans l ’usage, o n ne suit pas la maxime q u i interdit
de stipuler pour les autres , ainsi que l ’atteste M erlus f S e d
hisce ilifficidtatibus hodie se intricare pariim post se reûnquil
Utilitatis; hodiernd enim consuetudine , e x qud non quœrenda ,
• / • • • * >><•
*>
alteri per alterum obligatione , in jure prodito repèriuntur , sub
lata esse testatur M en u s , part. 4 , decis. 112 , n. 5 .
Serres , dans ses institutions , liv .3 , tit. 20 , s’exprime ainsi :
ti«f Régulièrement on ne peut stipuler nlaçquérir pour autrui,
« parce que les stipulations et obligations n ’ont été introduites
» q u ’afin que chacun puisse faire son profit ou son avantage, et
» que celui qui. stipule pour un tie r s , n ’a souvent aucun inté» rêt que la chose stipulée ^oit acquise à ce tiers : ccetçrum , si
» alii d elu r , nihil interest slijiulatori. ¡.Cela, n’cmpê.che pas
» néanmoins , suivant la remarque de M ornac , sur la loi 6 , C .
» si quis alteri , <vel s ib i, q u ’on ne puisse valablenlent en France
» ^stipuler et acquérir pour autrui, ,ç.o.en qualité de procureur
»„ fondé , soit même sans cette q u a lité , si celui pour qui on a
» traité , accepte ensuite et ratifie le contrat ; ce qui est encore
« conforme h. l’art.
5 .de
l’ordonnance de 1731. »
M ornac , . citc par Sçjr/vf.,, est de tous les aut.eyrs celui, qui
s’est élevé avec le plus de £qrcc contre la -maxime , A lfçri sti~
pulari nerno potes t. > . . . . ' . . .
,
.
Après avoir présenté diverses hypothèses, où elle s’applique ,
et diverses autres ou elle ne s’applique pas , cet habile commen
tateur du droit romain déclare que toutes ces hypothèses sont
tirées du-texte. ou dp,1a ftlose,. -ayant pru, dev.oiy passqr entière
m e n t , sous 6Îlenc^el’opinion des interprètes , qui
d i t - i l , loti-
gioribys paginis .adçyiant qupd it\ pagina. contraJio.
J’ai parcouru les ouvrages de to u s , ajoute-t-il , mais je n ’ai
rien trouvé de satisfaisant : Fercucurri scripta omnium } sed
nihil profeci.
11 annonce qu’il a cru à-propos de présenter quelques idees
�sur cette matière /dP peur que ceux , qui fréquentent les écoles,'
ne s’im aginent, par Lazard , que, dans la profession d 'a vo cat,
il ne soit point permis d ’entreprendre , après eux , l’explication
des subtilités du droit VPaucula hœc denique delibando esse
cen su i , ne qui in scholis'vërsantur , eam sibi fortassis de ne -
gotiosd , verèque scholasticd f ùt loquitur constant , ï n l i 'i d e
lucris , adv. lib. 12. J advocatione parisiensi opinionem induc a n t , an prœ illis manum admoveri discutiendis 1subtilitatibus
juris non liceat. '
* V
,
' Il leur demande s’il s’est trompé en interprétant telle et telle
loi q u ’il spécifie, et beaucoup d ’autres sur lesquelles il a été forcé,
par sa méthode même , de se dégager de la routine du barreau
et dé s’exprimer comme il l’eût1 fait dans un cours public. V i*
deant an cœcutierim , seu ad. U transig. de transa ct ..............
aliasque complûtes cjulbus per instituti mei necessiiatem egredi
coactus sum metas J o r i} et quasi 'è pulpitis 'academicis rem
traderè.
Pour donner à sa doctrine un nouveau poids il rend compte
q u ’il n ’a pris la 1plume qu’après avoir exercé la plaidoierie pen
d a n t trente-quatre ans ( i ) ; q u e son ouvrage est donc le fruit
de nombreuses veilles et d’une longue expérience : Scribo hodie
solutis causiPòrandis, quîbüs occupation mehabuerunt anni'à,\,
et quee per plùres vigilias domi fo ñ sq u e ad forensia experi
menta didi , chartis hisce publicis mando.
■ Ce long préambule, à l’occasion d ’une règle de d r o it , prouve
combien M ornac avait à cœur de la combattre , et de déraci
ner en quelque sorte une vieille erreur scliolastique.
Revenu h son s u j e t , qui est la l o i ’ 6 au C .
s i quis alteri;
niel s ib i, cet auteur donne de grands éloges à cette loi , form ée,
ainsi que celle citée par Vinnius d’une constitution des crnpe. .li
.
. ^
;;
( i ) Tout le monde sait que Mornac cicrça la profession d’avocat au bar
rent <Jc l’aris, avec beaucoup de distinction et pendant très-long-tcmps.
�9
4w
reurs Dioctétien et M axim ien , et dans laquelle ces législateurs
n'avaient pas eu davantage égard à la maxime attaquée par
Mortiac , qui exprime son admiration en ces termes : eximium
quidem Diocletiani Maximianique nostrum Rescriptum , meris-
que e x jurisprudentia romana regulis pétition.
Cet excellent commentateur ajoute que les professeurs de
droit se bornent h enseigner les principes ge'néraux de la science,
tandis que l’avocat , au contraire, s’attache principalement aux
cas particuliers; qu’il arrive, de-là, que ces docteurs, si érudits sur
les hypothèses de la loi ou de la glose , ont tellement peu con
naissance dubarreau et de la manièredont se traitentles affaires,
que le plus mince avocat , ou même un clerc du Palais , serait
en état de leur démontrer , par l'autorité du bon sens et do la
jurisprudence, la subtilité de cette règle de droit , qu}on ne
peut stipuler pour autrui.
S e d ut sola universalia docent interprétés , pàtroni auiem
sese potissimùm ad specialia applicant , et hjpothesis legis , et
ea quarn glosa subjicit , tam àj'o r o , rebusque agendis absunt;
ut non tribacissimus ( quod apud Sidonium ) id est tristissimus
patronus , sed fe r è velformularius nemo qui optim è , atque e x
ratb jugique judiciorum ordine, non explosent subtilitatem illam
regulœ qudalterum altcri stipulari non posse , tradunt leges.
IMornac term ine enfin par ces m ots d igues d e la plus g ra n d e
attention :
« 11 est donc reçu parmi nous, et avec beaucoup de raison;que
Von peut stipuler , acheter pour un autre , ou lui faire une do
nation, soit en sa présence , soit en son a b s e n c e . ......... déci
sion qui est fondée sur le droit même et sur lè s ’arrêts : admit-
limus enitn et rectissirnd ratione , ut quis seu presen ti , seu ab~
senti possit qiucrere, entera , donare ; valetque totum id quidq u id e st, durnrnodb acceplo J'erat , is in cujus gratiam libéra
it tas ipsa fuerit : ita e x jure ipso. L . absenti de donat. I. u lt.d e
leg. I. peu. § si f’ir. If. sol. mat'r. et si milia, ita ntiarn e x senalusconsultis »».
B
’
�:*v
D e ces imposantes autorités , il résulte évidemment que l’an
cienne maxime, sur laquelle était principalement basé le système
d u sieur Bachelier et de la dame d’Houdetot , a toujours été
de fort peu d’usage , ou même considérée comme n ’étant plus
en -vigueur , non-seulement parmi nous , mais encore dans les
autres nations soumises à l’autorité du D roit romain.
Comm ent dès-lors fonder, sur cette maxime, et la nullité d elà
délégation que renferme l’acte du i 3 février 1785 , et la nullité
des engagemens que le sieur Collet-de-S.-James y a contractés au
profit d e là dame de Sevin directem ent, et la nullité de l’inscrip
tion qu ’elle a prise?
V'\' '
■'
;;
§
n .
On a dû remarquer que la principale exception à celte règle
était pour le cas où l’auteur de la stipulation , en faveur d’ un
autre, avait lui-même intérêt à ce q u ’elle fût remplie.
D ans le § . 20 de la loi précitée, au ff. de 'verborum obligatio-
nibus , Ulpien s’était exprimé ainsi :
S i stipuler a lii, cùm med interesset, 'videamus an stipulatio
committetur ; et ait M arcellus stipulationem njalere in specie
lmjusmodi.
Dans le même § et dans Je suivant, Ulpien cite plusieurs
exemples, auxquels s'applique cette exception.
T o u tes les fois donc q u ’une personne , en stipulant au profit
d ’une autre , aura intérêt h le faire , la stipulation sera valable.
S i (juis ergo stipulatus fu e r it, cùm sud interesset ci duri : in
en crit causa , ut valeal stipulatio.
D ’où il suit que , si j’ai stipulé pour celui qui m ’a fondé de scs
pouvoirs , la stipulation sera valable.
Elle sera de même valable, ci j ’ai stipulé pour mon créancier;
parce que f a i intérêt à n ’étre pas poursuivi pour ce (jue j e lui
dois .
JJndè , et si procuratori meo dari stipulatus sum , stipulatio
-vires habebit , et si creditori meo ; quia interest med ne Tel
�11
4
$
pæna committatur , <vel prœdia distrahantur, quce pignori
data erant.
Le titre aux Institutes, de inutilibus stipulationibus , contient
les mûmes principes et U-peu-près dans les mêmes termes. .
A i n s i , selon le propre texte du D roit rom ain, on pouvait
stipuler pour autrui, lorsqu’ on avait intérêt à l ’ accomplisse
ment de la stipulation.
,u
O r , il n’est pas besoin de grands efforts pour prouver qu’i l
f u t de Vintérêt des héritiers Pont-Châlons de stipuler la délégation
portée par l’acte de 1785 ; qu’il ne leur importait pas moins que
l’obligation personnelle , contractée dans cet acte au profit de
la dame de Sevin par le sieur Collet-St.-Jam es, fût remplie
ponctuellement ; et que l’hypothèque, ajoutée k cette obligation
personnelle , en assurât pleinement l ’exécution.
C a r il est évident que la délégation, stipulée par les héritiers
Pont-Chàlons, tendait à les libérer eux-mêmes, et q u ’ils devaient
espérer, en soumettant l’acquéreur à des engagemens directs
vis-à-vis de la dame de S e v i n , de se délier des leurs propres
envers elle.
Voilîi bien le cas particulier prévu par la disposition tex
tuelle du § 23 de la loi 38 7 f f . de nierb. obligationibus: s i
stipulatus sum creditori rneo , quia interest m ed , ne prœdia
distrahantur, quæ pignori data erant.
Les dispositions du Code civil , sur cette m a tiè re , sont
conformes au Droit romain.
L ’art. 1119 porte : « On ne peut e n g é n é r a l s’engager ni
» stipuler en son propre nom que pour soi-même ».
Mais plusieurs
exceptions à cette
déclaration d ’un prin
cipe g é n éra l, suivent immédiatement.
Par l ’art. 1120 , il est dit que néanmoins on peut se porter
fo r t pour un tiers.
Et l’art, n a i est ainsi conçu :
« On peut pareillement stipuler au profit d ’un tiers, lors» que t e l l e e s t la. CONDITION d’ une stipulation que l ’on j a i t
�»
, ou d’une donation que l’on fait à un autre. *>
Or il est évident que la délégation et les autres stipulations
pour
s o i -m ê m e
faites au profit de la dame de Sevin , dans l’acfe de 178 3 ,
étaient de véritables conditions de la vente consentie au sieur
Collet-Saint-James par les héritiers du sieur Pont-Châlons.
Il est donc certain que les deux législations s’accordent, et
concourrent ensem ble, pour déclarer valables toutes ces sti
pulations.
Si elles sont démontrées va la b les, comment r e fu s e r, aux
héritiers d e là damede Sevin , la qualité de créanciers hypothé
caires du sieur C o llet-S a in t-Ja m es? Incontestablement celle
qualité leur appartient d ’après l’acte de 1783.- elle dérive im
médiatement des clauses qu’il contient.
On objecte vainement, que ces clauses, supposées valables
pour les héritiers du sieur de Pont-Chàlons , ne l ’étaient pas
à l ’égard de la dame de Sevin.
Mais pourquoi ne l’étaient-elles pas îi l’égard de madame
de
S evin ?
O n est obligé de répondre encore : parce qu’ il n'est permis
de stipuler que pour soi-méme.
C ’est toujours la même objection reproduite sous une forme
nouvelle.
§.
III.
C ’est un principe incontestable , une règle élémentaire que
la délégation portée dans un acte de
vente , au profit d'un
créancier , oblige l'acquéreur envers ce créancier ,
quoiqu’il
11’ait pas été partie au contrai.
Brillon , Denisard , le Répertoire de
Jurisprudence , le
Dictionnaire raisonné des Dom aines , le Dictionnaire por
ta tif de Jurisprudence et de pratique ont unanimement pro
fessé cette doctrine.
Voici encore comment s’exprime M. Boucher d ’sirgis, dans
�io
¡’Encyclopédie, au mot délégation : «Quoique le créancier n'ait
» pas été partie dans la délégation , elle ne laisse pas d’ obliger
» le débiteur délégué qui y a co n sen ti , tant envers le déléguant
» qu’ envers le créancier ; lequel v e u t s e s e r v i r de ce q u i a
x> É T É S T I P U L É P O U R LU X , quoiqu’il F Û T A B S E N T . »
Ce point de droit a été formellement consacre par plusieurs
arrêts.
On en trouve deux dans le Journal des Audiences : un à
la date du i er août 16 8 6 , qui est cité par Denisard ; un
autre du 11 juin 1692 , qui est rapporté dans le Dictionnaire
de B rillo n , en ces termes :
« Jugé en la cinquième chambre des enquêtes, qu’un contrat
» de ven te, qui portait une délégation de partie du p r i x , au
» profit d’un créancier du vendeur, sans que ce créancier en
» eût eu connaissance, o b l i g e a i t t e l l e m e n t l ’ a c q u é r e u r en» v e r s c e c r é a n c i e r , que l ’acquéreur n’ avait pas pu payer
« le prix au vendeur, au préjudice de la délégation ,
»
non -acckptée;
»
p euxièm e fo is .
q u o iq u e
l ’acquéreur a été condamné à payer
une
Arrêt du 11 juin 1692 , au rapport de M . D u -
» bois ».
JVauteur,après diverses réflexions sur cet arrêt, qui, dit-il, est
contraire h la maxime alten stipulari neino potest, ajoute aussi
tôt , qu’il est fondé sur le § 20. fnstit. de inutilib. stipulationib.
J^es auteurs du Répertoire de Jurisprudence rapportent un
troisième arrêt.
« C ’est d’après ce principe, disent-ils, q u ’est intervenue la
» décision du Conseil, du 22 avril 174 7 , sur la vente que
» la veuve Barouse! avait faite aux bénédictins de Saiute» Livrade , qui s’étaient chargés de payer une partie du prix
» de leur acquisition aux religieuses de l’Annonciade de Ville-*
» neuve-d’Agénois, pour la dotation d ’une fille de la V cnde» resse: il a été jugé qu ’/7 était dû un second droit de contrôle
» pour la délégation , quoique les religieuses tic l ’eussent point
n acceptée ».
�A i n s i , les autorités et la jurisprudence prouvent incontesta
blement q u ’une délégation, quoiqu’imparfaite;, forme un titre au
créancier en faveur de qui elle a été stipulée. K u l doute que
le débiteur délégué soit obligé envers ce créancier , comme si ce
dernier eut concouru à la délégation, qui n ’est imparfaite
qu’entre lui et son premier débiteur.
D o n c , celle portée par l ’acte de 178 5, en faveur de la
dame de Sevin , a eu pour elle et ses héritiers l ’effet d ’une délé
gation parfaite.
D onc il est indifférent que cette délégation ait été , ou non ,
acceptée.
§
I v.
Elle a été acceptée de deux manières par la dame de Sevin :
d ’abord, en recevant du sieur Collet-Saint-James, depuis 1785,
les arrérages de la rente
ensuite, par l’acte du a décembre 1791.
V o i c i , en effet, comment le sieur Bachelier et la dame d ’Houdetot se sont exprimés dans un soutien fa it, en leur n o m , au
procès-verbal d ’ordre, le premier pluviôse an 10.
cc Dans les pièces p ro d u ites p a r la lieg ie , qui représenle
» la dame de Sevin, 011 voit bien un acte sous seing-privé , passé
» double entre le citoyen Sevin et sa fem m e et le citoyen C ollet,
»
»
»
»
en date du 2 décembre • 1 7 91 , par lequel les citoyen et citoyenne de Sevin
o n t accep té
le citoyen Collet pour leur seul
débiteur des 110,000 liv. en question, e n o n t d é c i i a k g é la
Succession P o n t-ChdIons , et ont prorogé le délai pour le paie-
>1 ment de ladite somme. « .........
« En vain la citoyenne Sevin voudrait-elle argumenter aussi
» des quittances d’arrérages produites par la llégie et données
» par la darne Sevin à Collet en 178 5 ». . . .
A in s i, d o n c , il est constant que la daine de Sevin
avait
accepté virtuellement dès 17t>5, et formei.i.emcnt par l ’acte
de 1791 , la délégation faite à son profit en 1785.
�,5
C elle double acceptation d e l à délégation Fa rendue'paifa-te
.entre toutes les parties qu'elle intéressait. Il n’est donc plus
d’objcction raisonnable à proposer contre les héritiers de la dame
de Sevin.
Car l'effet propre de la délégation est de mettre le délégué
à la place du déléguant. Tüelegare est r i e z su a ahum reum dare.
A in si, les héritiers d e là daine de Sevin, (¡tant aux droits de
ceux du sieur Pont-CIu\lons, par suite de la délégation renfermée
dans l’acte du i3 février 17 8 5 , ont nécessairement, sur les
biens du sieur Collet-Saint-James, en vertu de cet acte, la
même hypothèque qu’il eût produite en faveur des héritiers
Pont-Châlons eux-mêmes, s'il n ’y avait pas eu de délégation.
I)ès-lors , il est ridicule d’objecter que l ’acte du 2 décem
bre 1791 n’avait point conféré d ’hypothèque à la dame de
Sevin Ses héritiers ont rappelé cet acte el les quittances de 1785,
dans l’unique vue d ’établir, s’il en était besoin , qu’elle avait
accepte' la délégation faite en sa faveur ; mais nul dou^e <me
son hypothèque sur les biens du sieur Collet-Saint-James ait
seulement résulté du contrat de vente du 1 3 février 1 7 8 ^ con
tenant cette délégation.
*4
. r Pour prouver que ce contrat est entièrement étranger a Ja
dame, Se vin , malgré les stipulations form elles qu’iT coritîeiU
à son profit, le sieur Bachelier et la dame d ’Houcîètôt l è
fait un grand moyen de ce qu’il laissait subsister les tngagémens*
du sieu»* de Pont-Châlons ;
Comme si la délégation opérait toujours novation!
' •
Il est certain, au contraire, que la d é lé g a t io n m ê m e par
faite , n'a point
par elle - même un tel effet ; il faut que
la novation résulte clairement des termes de l’acte, ainsi que
le décide l’art. 1276 du Code C i v i l , conformcMi la loiderhïère*
au Code de Novationibus et Delegationib.^ Ce^le loi. fut portée
par Justinien, pour faire cesser les ambiguités de l’ancien droit
sur cette matière.
�T
16
7
Ce n ’est pas une objection plus sérieuse, celle qu'on fait
résulter de ce qu’ il n'avait pas été formé d’ opposition au
sceau par la dame de Sevin, pour la conservation de son
privilège sur le prix de l’office vendu par les héritiers du sieur
1
Pont-Châlons.
Il ne s’agit pas de ce privilège, mais bien de l’hypo
thèque qui appartenait aussi à la dame de Sevin , sur les
biens du sieur Collet-St.-James. Elle avait l’option entre l’ un
et l ’autre genres de sûreté ; on ne peut dire q u e , pour avoir né
gligé le premier , elle ait renoncé au second.
Il
ne reste donc aucun prétexte au sieur Bachelier et à la
dame d ’Houdetot pour exclure les héritiers de la dame de Sevin
de la distribution du prix provenu de la vente des biens du
sieur Collet-St.-James.
D élibéré à P a r is , le
fCl.
û « ÇCkMAA,
4 avril 1807.
ri.
GODARD,
G R E N IE R
(d u P u y - d e - D ô m e ) ,
DESEZE, BERRYER, GASCHON. / 1 « £ ^
iti» ,
J e s u i s du même avis. D E L A M A L L E .
Je pense que la dame Sevin fu t adfecta solutionis gratid ;
que son inscription a été légitime, parce que 1°. la somme lui
était destinée, 2 , elle était autorisée de plein droit à conserver
les actions de ses débiteurs.
Vfrû«
!~
.
A P a r i s , de l ' i m p r i m e r i e de L A N G L O I S
ch abroud.
r u e d u P e tit -P o n t , n *
25 .
1807.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. De Sevin.1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Godard
Grenier
Desèze
Berryer
Gaschon
Delamaille
Chabroud
Subject
The topic of the resource
ventes
offices
créanciers
hypothèques
émigrés
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour le sieur de Sevin, tuteur légal de ses enfants, héritiers de la dame leur mère ; sur l'appel interjeté par le sieur Bachelier, et par la Dame d'Houdetot, d'un jugement d'ordre rendu par le Tribunal Civil de l'arrondissement communal de Mortain, le 29 Pluviôse an 10, entre les créanciers du sieur Collet de Saint-James.
Particularités : notation manuscrite : 9 juin 1808, arrêt de la cour de Caen, infirme et déclare l'inscription non valable. 21 février 1810, arrêt de rejet de la section civile. Voir Sirey, 1810-1-209, doctrine sur la matière
Table Godemel : Délégation : 2. le créancier au profit duquel une délégation a été faite dans un acte, où il n’a point été partie, peut-elle, en vertu de cet acte prendre inscription pour les biens du débiteur délégué, s’il n’a préalablement accepté la délégation formellement et authentiquement ? l’inscription hypothécaire prise pour lui est-elle réputée acceptation de la délégation ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Langlois (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1767-1807
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1718
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Mortain (50359)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53321/BCU_Factums_G1718.jpg
créanciers
doctrine
émigrés
hypothèques
offices
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53322/BCU_Factums_G1719.pdf
10688ffc65801875bbe2e6b7c36fa6ff
PDF Text
Text
MÉMOIRE
A
C O N S U L T E R
ET
CONSULTATION
Sur le Pourvoi formé p a r les Sieur et Dame
L A N G L O I S ,
C
o n t r e
un Arrêt rendu, par la Cour d'Appel
de Caen, le 25 Juin 1806 7 en faveur du Sieur
DURAND.
�.■:.t r,o
I
",'r-/o"' T sb
. '
'
, v.-?' ;>r' . r-'l i g M a
- o h
•.
: ......... 5 J 9
«
M E M O IR E
A
C O N S U L T E R .
P a r acte public du 2 brumaire an 14 » Guillaume - Olivier
D urand a déclaré ses dispositions de dernière volonté. Il a
donné tous ses biens à Pierre D urand son frère , à la charge
de legs particuliers assez considérables, au profit de Je a n
Durand son neveu et de M arie - M adeleine D u ra n d , sa
nièce.
Son Testam ent est ainsi concu :
L ’an 14 de la République française , le deuxième jour de
brum aire, au lieu L a m b e r t............. où Jean-François M a r tin t
notaire public............. a été mandé................. assisté d e ............
» appelés po u r tém o in s au présent a c te , et aussi soussignés.
A comparu devant ledit Martin , notaire, et les témoins
sus-nommés , à environ deux heures d’après-midi , le sieur
Guillaume-Olivier Durand, propriétaire , né à V alsem ey , âgé
de trente-neuf ans................ malade de corps , et néanmoins
sain d’e sp rit, mémoire, entendement et jugement, ainsi qu’il
est apparu audit notaire et au x quatre témoins............
x Lequeldit sieur D u ra n d , voulant disposer de la quotité
de biens dont la loi lui permet le libre exercice, et considérant qu’il n’a ni ascendans ni descendans, a requis ledit
n
»
»
»
»
»
«
A
�2
» M artin , notaire ; de recevoir en ce moment son Testam ent
» et Ordonnance de dernière volonté ; en conséquence de quoi
» il lui a d ic t é ainsi qu’il s u it, e t e n p r é s e n c e d e s d it s
m t é m o in s
:
» J e donne et lègue à Pierre D u ra n d , mon fr è r e , ete. »
a L e présent Testam ent ainsi dicté par le testateur , au no» taire soussigné, et ayant été par celui-ci écrit de sa main ;
» l e s d it s t é m o in s t r é s e n s , le même notaire en a ensuite fait
a la lecture à haute et intelligible voix : laquelle lecture ledit
m testateur a déclaré bien entendre, et y persister, comme
» étant entièrement conforme à ses volontés; en conséquence
» de q u o i, il l’a , avec lesdits témoins et le susdit notaire,
î) signé sur la minute de la présente, après lecture derechef
» faite. A la Chapelle -H a in fr e y , dans la salle sus-désignée,
» lesdits jour et an. »
Guillaum e-O livier D urand étant décédé, Marie-Madeleine
D urand sa nièce, et le sieur L an glo is, mari de cette dernière,
ont soutenu que son testament était nul ; ils ont prétendu
qu’il n’y était pas fait mention expresse , conformément à
l’article 972, que la lecture en eût été donnée au testateur
en présence d es , tcjnoins.
Cet étrange système a été accueilli par le tribunal de première
instance de Pont-FEvèque.
. Dans. les m otif?'de sa décision, ce T rib u n al, après avoir
énoncé les termes du testament et ceux de l’article 972 du Code
Civil, continue ainsi:
>1 Considérant q u ’ il y
a bien lieu ,dg présumer que le tes-
n tament a été dicté par le testateur, écrit par le notaire, et lu
» en présence des té m o in s, puisque, au commencement roimne
» à la fui du
l i g a m e n t , il e#t .question de témoins
on peut
n mi'ine pencher à croire que ce notaire en a voulu faire
n mention. M a is a-t-il fait mention oxpresse, aux termes de
�t
»» la loi, de la lecture du testament donnée au testateur
» en présence des témoins? c’est ce qu’ on ne 'voit p a s, quelque
> >> facile que fût la chose à exprimer.
» Considérant, en e ffe t, que dans la strophe du testament
» .ci-dessus copiée, il est évident que ces mots lesdits témoins
» présens , se rapportent nécessairement à ceux-ci qui précèdent :
» L e présent testament ainsi dicté par le testateur au N otaire
» soussigné, et ayant été par celui-ci écrit de sa main; qu’ici
» le sens de la phrase paraît suspendu d’après la manière
» dont le notaire reprend la suite , en disant: Lie même notaire
» en a ensuite fa it lecture à haute et intelligible voix ; laquelle
» lecture le testateur a déclaré bien entendre et y persister
» comme étant entièrement conforme à ses 'volontés.
» Considérant que ce. qui suit dans le testam ent, savo ir,
» les mots : E n conséquence de quoi il a , avec lesdits témoins
» et le susdit notaire , signé sur la minute de la présente ,
» après lecture d e r e c h e jfa it e , indique;, à ne 'pouvoir s’y
» trom per, que le notaire lui-mème regarda n ’avoir.pas satisfait
» à la loi par la première mention qu’il avait/aiie de la pré» âcnce des» témoins, et que cette mention ne pouvait altester
*> leur présence à la lecture de l’acte. H é b ie n ! il ne fait pas
** plus mention expresse de la préseuce de ces témoins à la lecture
» qu’il dit avoir fait de rechef. li a , sân^jdoute, eu intentjonde
» faire cetteim ention; mais il nQ,résultc point, de la tournure
»•d e sa phrase, qui nç dit p a ^ p lu s^ à j^ e n d ç p it qu’à l ’aiitre,
» queues témoins fussent presens aux.lectures dpnuées au'tesù» teur.
•i
»..Çonsidéranl ;\raÂmejpt qu’i ^ n ’e^t p a s , prJsuma^lc que les
.témoins::atenh vfë'
absens
, quand
lflt testament
;a .été lu au ^
•
t
** i
i ,,J ■>< )
>• tesutour }./n^is.\au moins,
fne;.peqt"méconnaître,', que la'
»x chose est possible,; que ç e la ^ u fiit pour que le testament
» soit inficié de nullité,,(parce que la Ip i, claire daps ses
» e x p r e s s e s , ne veut point d’équivoques dans les actes pour
�»
»
»
»
»
»
lesquels elle établit des formes particulières: o r, le notaire
n'ayant pas dit expressément que les témoins étaient présens,
soit à la première, soit à la seconde lecture du testament
du a bru m aire, cet acte est nul : la jurisprudence du T r ibunal de Cassation et l’avis du Conseil d’E tat, du 3 i janvier
dernier, sont conformés aux principes;
» L e T rib u n a l, par ces motifs , jugeant en premier ressort,
» déclare le testament du 2 brumaire dernier, reçu par M artin,
« notaire à Bonnesbosq, nul et de nul effet. »
Mais ce jugement a été infirmé par arrêt de la Cour d’Appel
de Caen , du 25 juin 1806.
Cet arrêt, comme le jugement de première instance, énonce
d’abord les expressions du testament,
il est ensuite ajouté :
« L e premier T rib un al a décidé que les expressions ci-dessus
» ne renferment point la mention expresse, exigée par la lo i,
33 sous peine de nullité, que ce testament a été lu en présence
» de témoins. . . . .
L a question est donc do savoir si le testament dont il s’agit
» doit être déclaré n u l, sous le prétexte qu’il ne contient
» point ladite mention expresse.
» Sur quoi , considérant que cette question est purement
» d é f a i t , puisqu’il s'agit uniquement de savoir si le testament
» en question contient ou ne contient pas la mention expresse,
» qu’il a été lu au testateur, en présence des témoins appelés
j» à ^a confection j
w Considérant qu’en prenant la phrase ci - dessus copiée,
» telle que la présentent Langlois e t son épouse, c’est-à-dire
» e n plaçant l’ablatif absolu1, lesdits témoins présens, entre
» deux virgules, on ne peut paé le faire rapporter exclusive» ment*à ce qui le précède, pas plus qu’on ne pourrait le
« f a i r e rapporter exclusivement h ce qui le su it; mais il se rap~
�46 °
s
» porte évidemment à ce qui le précède comme h ce qui le
» su it, c’est-à-dire qu’il se rapporte à la phrase entière : d’où
n il faut conclure que, si le notaire a dit que le testament a été
» dicté et écrit de sa main en présence des tém oins, il a dit
» aussi que la lecture qu’il en a faite ensuite, a eu lieu égale« ment en présence des témoins. Le notaire a donc rempli le vœu
» de l’art. 972 du Code,
*> P ar ces motifs ;
» Parties ouies ensem ble, le procureur-général-impérial en
» ses conclusions, et conformément à icelles ,
1 ;■
, » L a C our a dit q u e , par le T rib u n al dont est a p p e l, ¡]
» a été m al ju g é , bien appelé ; corrigeant......... ordonne que
r> le testament dont il s’agit sera exécuté selon sa forme et
» teneur. »
.. .
1
L e sieur et la dame Langlois se sont pourvus en cassation
contre cet arrêt.
i .
-
Leur pourvoi est-il fondé?
■ !
•
, ‘
.
�6
CONSULTATION.
JL/E C O N SE IL SO U SSIG N É , qui a pris lecture , i ° . du
testament de Guillaume-Olivier D ui’and , du 2 brumaire an 1 4 ;
2 0. du jugement du T rib u n al de première Instance de Pontl'Evêque , du 4 mars 1806 -, 3°. de l’arrêt de la Cour d ’Appel
de Caen , du 25 juin de la même année ; 4°* enfin d’un mémoire
à consulter j
ii.
E S T D ’A V IS qu’il y a lieu de penser, sous deux rap p o rts,,
que le pourvoi en cassation form é contre l'arrêt de la Cour
d’Appel de C a e n , sera infailliblement rejeté.,
, ..
D ’abord , l’arrêt n’a pas décidé une question de droit , mais
bien une simple question de f a it , ou si l’on v e u t, une question
grammaticale ;
E n su ite , sa décision renferme une explication aussi juste que
raisonnable des termes du testament , dont l’annullation était
demandée.
§
Ier-
Il ne s’agissait pas de savoir , en thèse générale , s’il faut
pour -la validité d’ un testament par acte public , qu’il contienne
la mention expresse que la locture en a été faite au testateur
en présence des témoins.
On reconnaissait le principe.
11 s’agissait uniquement d’ex.uniner, en point de fa it, si cette
�7
règle avait été o b serv ée , ou non , dans l’acte de
dernière
vo
lonté de Guillaum e-Olivier D u r a n d .
L e s mots nécessaires pour form er la mention expresse de la
lecture de cet acte ,
en présence des témoins , étaient écrits en
toutes lettres. On y lisait :
« L e présent testament ainsi dicté
» par le testateur au notaire soussigné , et ayant été par celui-ci
n écrit de sa main j l e s o i t s tém oins présens , le m êm e n o * taire en a ensuite f a i t la lecture , h haute et intelligible voix. »
M a is il a été prétendu que ces expressions ,
lesdits témoins
prJsens , ne prouvaient pas q u ’ils eussent assisté à la lecture d u
testament ; q u ’elles avaient p ou r'objet de constater qu'ils furent
p ré s e n s , lorsque le testateur dicta ses dernières volontés , et lors
que le notaire les mit par écrit.
»
l Jour justifier ce système , on avait dit que ces mots les té
moins présens se rapportaient exclusivement à ceu x-ci : Leprésent
testament ainsi dicté par le testateur au notaire soussigné , et
ayant été par celui-ci écrit de sa main.
Il avait été répondu que ces mêmes expressions d evaient, au
contraire, se rapporter à celles-ci:
le même notaire en a ensuite
fa it la lecture.
L a mention de la présence des témoins se référait-elle donc
aux premières formalités prescrites par l’art. 972 du Code Civil
ou à la dernière ?
»•
• -• ;
.
Indubitablement les mots qui
forment celte mention ,' a p
partenaient au m em bre de phrase , où elle était nécessaire pour
la validité du testament , s’ils étaient séparés de l’ autre ou p ar
un point , ou par un point et une virgule.
On voulait bien avouer qu'ils en étaient, au moins , séparés
par une virgule.
m,
, •; •'
•'
-!
M a is cette virgule était-elle surmontée d ’un p o in t?
'
E t en supposant la négative , ces mêmes expressions se rap
portaient-elles
exclusivement à celles qui les p r é c è d e n t,
ou
�plutôt à celles' qui les suivent y ou bien tout à la Fois, aux
unes et aux autres ?
T elles étaient les difficultés à résoudre.'
' On voit 1 combien elles étaient vétilleuses, et s’il pourrait
ê tre -p e rm is'd e les discuter de n ouveau , devant! la Cour
suprême : '
:
L e testament élait valable, s’il y avait un p oin t, ou simple
ment un point et une virgule avant ces mots : lesdits témoins
présens .
'•
'
■
L e testament était également v a la b le , encore même que
ces mots eussent été simplement placés entre deux virgules ,
s’ils appartenaient, malgré cette circonstance , au deuxième
membre de la phrase , plutôt qu’au premier.
E n fin , le testament était encore valable, ‘ s’ils se rappor
taient en même temps à ceux qui les précèdent et à ceux qui
les su iven t , comme l’a décidé la Cour d’Appel.
Ce tableau de la discussion à laquelle a donné lieu le testa
ment du 2 brum aire an 14 , prouve incontestablement qu’elle
ne présentait à juger aucune question de droit.
Comme on l’a annoncé , comme l’ont d it , d’ailleurs , les
juges de la Cour d’Appel dans leur a rrê t, ils n ’avaient à déci
der qu’un point de f a i t , celui de savoir si le testament de
Guillaume-Olivier D urand contenait. la mention expresse
que la lecture qui lui en fut faite , l ’avait été en présence des
témoins.
L ’éclaircissement de ce point de fait appartenait à la Cour
d’A p p e l, qui pouvait se déterm iner, ou par un examen scru
puleux de la ponctuation du testam ent, ou par une appré
ciation réfléchie des mots dans lesquels il est conçu.
M ais le sieur et la dame Langlois ne peuvent évidemment
critiquer sa décision .1•
�' 4 6 $
9
La Cour suprêm e, attentive à se renfeim er -dans ses hautes
attributions, interdit toujours les discussions de f a i t ; à plus
forte raison , elle ne permettra point d’en renouveller une
purement grammaticale.
.
;
Que lui proposerait-on en effet ? D ’examiner, par elle-mêm e,
si le testam ent, du 2 brumaire an 14 > contient la mention
expresse de la présence des témoins à la lecture qui en a
été faite au testateur ; d’y vérifier, avec m inutie, les points
et les virgules qui peuvent servir à marquer le sens de ses
clauses; de déterminer celui qu’elles devaient avoir pour les
juges; enfin, de s’assurer s’ils ont bien ou mal lu cet a c te ,
s’ ils se sont reposés , dans cette lecture, à l’endroit où était
le repos de la phrase. On dénoncerait, en quelque so rte ,
leur arrêt comme un thème à corriger.
Une telle censure est aussi peu conforme k la dignité des
fonctions du T rib u n al suprême , qu’elle serait fâcheu se, et
l ’on peut dire humiliante pour les juges souverains.
« Des juges supérieurs, e st-il dit dans l ’avis du Conseil
» d ’E tat, du 3 i janvier 1806 , sont établis: pour réparer les
» erreurs d’une première décision. S’il était encore permis
» de remettre en question cc qui aurait été jugé par les
»> C o u rs, où faudrait-il arrêter ses examens ultérieurs, et
» quelle plus forte garantie la ‘ société aurait-elle contre les
» erreurs de troisièmes ou de quatrièmes juges? »
E n vain les sieur et dame Langlois invoqueraient-ils l’arrêt
de la Cour de Cassation, du 19 frim aire an 1 4 , qui a rejeté
le pourvoi du légataire universel du sieur M eulem berg, de
Bruxelles.
Les dispositions de cc testateur ont été annullées, parce
que la présence des témoins , U la lecture de $on testam ent,
n’y était pas mentionnée en termes formels.
Su han t le légataire, cette mention
résultait du contexte
B
fi
�10
entier de l’a cte , parce que le testateur y avait déclaré ,
en présence des témoins , persister dans ses volontés dernières.
Evidemment il n 'y a point de similitude entre cette_£spèce
et celle de l’arrêt de la Cour d ’Appel de Caen , du 2,5 juin
1806. D ans cette dernière, en e f fe t , le sieur D u ra n d , pour
établir la validité du testament de son frère , ne s’était pas
'fondé sur des présom ptions, des conjectures , ou même des
équipollences. L es expressions propres à constater la présence
des témoins à la lecture du testam ent, y étaient écrites en
plein te x te , au passage où il était fait mention de cette lec
tu re. Gn élevait seulement la question de savoir si elles appar
tenaient à tel membre de phrase ou Lien îi tel autre.
Encore une fois , il n ’est point permis de soumettre à la
révision de la C our de Cassation l ’arrêt qui a résolu , qui
a tranclié de simples difficultés grammaticales , ayant unique
ment tr a it, d’ailleurs, à un véritable point de fait.
s
11
de la
il.
S era it f a c ile - d e J u s t i f i e r , s ’il e n é t a i t b e s o i n , la d é c isio n
Cour d’Appel de Caen.
"D’abord, il est certain q u e , dans le testament du 2 bru
maire an 14 , on trouve un point et une virgule avant les
mots lësdits témoins présens .
O r , tout 'le monde sait q u e , suivant les règles de la
ponctuation , un point et une virgule ont pour.objet d’indiquer
f'jlie le sens (le‘la '‘phrase est suspendu.
Ainsi les‘mbts’ qui exprim ent la présence des témoins ayant
et<* ÿépares p ar' un point et une virgule du commencement
de phrase qui les p récèd e, ils ^se rapportent manifestement
rt’ :h'(‘c<5sSaiVémont. u la' l^riyrifité de la lecture de Tactç. Il
iW/t Viorie' lire de'.ccUc.j manière : tesdits témoins présens , le
même notaire en 'd ensuite f a i t la lecture à haute et intel
ligible V’o/.ic. ’
�4(f
il
Selon celte entente du passage controversé , l ’art. 972 du
Code Civil a été parfaitement oLservé.
Il est vrai que la Cour d’Appel a motivé son arrêt sur des
considérations indépendantes de l’existence du point qui est
au-dessus de la virgule avant les mots leschts témoins présens.
M ais , d’ une p a rt, elle ne dit rien non plus qui contra-
.
:
rie ce fait.
D ’un autre, il n ’a pas même été contesté par le sieur
Langlois et sa femme , quoiqu’ils y aient , en quelque sorte ,
été provoqués par une déclaration qui leur a été signifiée à
la requête du sieur Durand , le 18 juin 1806 , dans la vue
de rectifier une erreur où il était tombé lui-meme en sup
posant un point seul avant les mots : leschts témouis présens.
D an s cette déclaration ,
Sont
précédés
d ’ailleurs
d ’ un
point
il a
et
formellement articulé q u ’ils
d ’ une
facile h vérifier dans l ’acte
virgule 3 ponctuation
m êm e.
E t , lorsqu’elle serait différente, lorsqu’il n ’existerait qu’une
simple virgule , ou même qu’il n’en existerait pas , serait-il
permis d’asseoir la nullité d’un testament sur de puériles et
scrupuleuses minuties , telles qu’une simple virg u le, ou deux
points , ou un seul ?
E h ! f ju o i , la validité d ’un acte aussi solemnel dépendraitelle donc de l'observation des règles de l’ortographe ou de la
gram m aire ?
On sait que tous les notaires ne sont pas des académiciens •
on connaît sur-tout l’ignorance de la plupart de ceu* des cam
pagnes.
11 faut le dire hautement ; de semblables discussions élevées
toujours par un esprit de chicane et une sorte de mauvaise
f o i , insultent également à la raison , aux bon sens, ù la justice
et h la loi.
Qu'il y ait donc un point et une virgule , ou une virgule seule
I
;
�dans le lestamenl du 2 brum aire an 14 » avant Icâ mots lesdits
témoins présens ; on devra toujours décider qu’il est valable,
puisque ces mots sont écrits dans le passage où les desire la
loi : celui-lk môme où il est parlé de la lecture de l’acte au
testateur.
' P o u rq u o i, d’ailleurs, comme l’a fort bien observé la Cour
d ’a p p e l, attribuer ces mots , d'une manière exclusive, ou à la
partie de phrase qui les précède, ou à la partie de phrase qui les
suit ? Pourquoi ne pas les appliquer tout-à-la-fois à l’une et à
l ’au tre? Pourquoi 11e pas dire qu’ils prouvent en même temps
que les témoins ont assisté à la dictée de l’acte et à sa lecture?
E t s’ils devaient avoir un sens exclu sif, comment ne pas les
rapporter plutôt à la lecture, alors qu e, dans la phrase précé
dente du testam ent, se trouve déjà la mention qu’il a été d i c t é
en présence des témoins ?
On objecterait d o n c, sans fondem ent, que le mot ensuite ,
qui se trouve entre la mention de cette lecture et celle de la
présence des témoins , empêche que ces deux circonstance*
soient considérées comme co-relatives.
L e mot en su ite est, !* la vérité, un adverbe de temps. Mais
le notaire, en se servant de celte expression, en a-t-il connu
U
nature et la fo rce? A urait-il le talent si rare d’employer
toujours le mot propre? Ou ne lui croit pas même cette pré
tention.
A u surplus , le sieur Langlois et sa femme , en supposant k
ce notaire une connaissance approfondie des règles de l’ortograp h eetd e la grammaire , sont fort éloignés de lui reconnaître
aucune sorte d’expérience ni d’habileté dans son état.
Ils veulent faire croire , en e ffe t, qu’il a pris le soin ridicule
d’attester, par deux fo is , la présence des témoins où elle était
inutile à constater d ’une maniète expresse , et qu’il a omis cette
mention où elle était nécessaire il peine de nullité . C ’est accuser
gratuitement un fonctionnaire public de la plus stupide impéritie.
�$ 7
E n fin , il est facile de juger, par la lecture entière du
testam ent, qu’il a été rédigé avec les plus grandes précautions;
qu’il contient, de la manière la plus précise , et dans un grand
détail la mention de toutes les formalités voulues par la
lo i; qu’il devait donc être respecté par la dame Langlois
comme un monument légal autant que certain des dernières
volontés de son frère.
D élibéré à P a r is , le 1 er avril 1807.
GODARD,
À Paris , de l’imprimerie de LANGLOIS
G A SCHON.
rue du Petit-Pont, n° 25. 1807
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Langlois. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gaschon
Godard
Subject
The topic of the resource
testaments
témoins
vices de forme
nullité du testament
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter et consultation sur le pourvoi formé par les sieur et dame Langlois, contre un Arrêt rendu par la Cour d'Appel de Caen, le 25 juin 1806, en faveur du Sieur Durand. [suivi de] Consultation.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Langlois (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
An 14-1807
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
13 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1719
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Valsemé (14723)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53322/BCU_Factums_G1719.jpg
nullité du testament
témoins
testaments
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53323/BCU_Factums_G1720.pdf
45a5d299819a05306cbe173d4ae41ce0
PDF Text
Text
M
É
A
M
O
I
R
E
CONSULTER
E
T
CONSULTATION,
P
O
U
R
Félicité D E
N O L L E T veuve du sieur Louis Augustin. DE PlERREPONT;
La
Dam e
Rosalie
Sur la , Question de savoir si le sieur L E C O Q
D E B E U V I L L E est fondé à. se pourvoir en
Cassation contre un A rrêt de la Cour d'appel de
C A E N , qui le condamne , au double titre d ’héri
tier et de donataire du sieur de Pierrepont , à fo u r
n ir le douaire de la dame sa veu ve .
1 8 0 6
�M
É
A
M
O
I
R
E
CONSULTER-
EN 1781 , le sieur Louis-Augustin de Pierrepont est décédé,
En 1 7 8 8 , sa veuve a demandé son douaire.
Elle a formé cette demande contre les sieurs L ecoq h é r iti e r s de
son mari par représentation de la dame leur mère.
88
L e 29 fé v r ie r 17
, sentence du bailliage de Caën , qui
l’exposante une provision de la somme de 3 ,000 liv.
Le i
4
accorde
à
décembre 1792 jugement du tribunal de district de la
même ville ,q u i } 1 . condamne solidairem ent les sieurs L e c o q , en
leur qualité d 'h éritiers du sieur de Pierrepont, à donner à sa veuve
A
1
�une déclaration des biens sujets à son douaire j 2®. lui accorde une
nouvelle proûsion de 3 ,ooo fr.
L e 29 décembre , ce jngement est signifie au sieur Lecoq de B eu ville , qui refuse de l'exécuter, su r le m o tif que la (erre affectée au
dou aire appartient à tes frè r e s p u în é s, avec lesquels ce douaire
a va it été ascencé( constitué en rente).
De quelle terre entendait parler le sieur Lecoq de Beu\il!c ? Ses
frères et lui en avaient recueilli deux de leur ayeul , une comme ses
héritiers, l ’autre par l ’efiei d ’ une donation qu’il leur avait consentie
en 1776 , el qui avait clé acceptée par le sieur Lecoq de Beuville lu imeme.
Ces deux terres appelées de Saon et de Sannerville étaient égale
ment affectées an douaire de l’ Exposanlc.
Elle répond qu’elle a une action solidaire contre le sieur Lecoq
de Beuville et ses frères; que s’il n’acquitte pas les 3 ,000 lr. de
provision, elle se pourvoira sur scs biens personnels el à ses périls
cl risques , sur la terre de Sannervillc , vendue eu 1791 , à la dame
Leblanc , par ses deux frères . tant, en leur nom personnel que comme
se fa is a n t fo r t pour lui.
L a dame de Picrrepont lui faii sommation de représenter l ’acte
d ’ascensement dont il a annoncé l ’existence.
Il réplique , par exploit du 5 janvier , que les biens sujets au douaire
de la «lame de Pierrcpont, étaient en la possession des sieurs Lecoq
d'O utreval cl de Saint-Etienne , scs frères , prévenus d ’émigration ;
que ces biens étaient sous le séquestre national, et que la dame de
Pierrcpont devait se pourvoir devant les autorités administratives.
Rien ne l ’y obligeait, puisqu’ elle avait une action solidaire. Elle s’y
1
�47&
c5 )
détermine pourtant à la sollicitation du sieur de Beuville. Sa réclama
tion est infructueuse.
Elle fait de nouvelles poursuites contre le sieur de Beuville, pour
obtenir le recouvrement de la provision, qu’il est condamné à lui
payer. Il lui fait demander , il obtient, d'elie, de nombreux délais.
Elle ne peut croire qu’il lui conteste sérieusement «on douaire.
Enfin , il forme opposition , dans le mois de frimaire an 7 , au ju
gement du l i décembre I 7 9 2,
I/aflaire est portée d’abord au tribunal civil du déparlement du
Calvados, ensuite au tribunal de première instance de Caen.
L e sieur de Beuville déduit ses moyens d ’opposition : il prétend
qu'il n’est pas héritier de son ayeul ; qu’il ne possède aucun des
biens de sa succession ; qu’elle a été entièrement recueillie par les
sieurs d ’Oulreval et de Saint-Etienne; que, d ’ailleurs, elle avait été
a c c e p t é e parla dame de Renéville , leur mère , sous bénéfice d m -
vcnlaire seulement.
L e sieur de Beuville omet prudemment de parler de la donation
qui lui avait été faite en 1776.
Interpellé de s’expliquer au sujet do cette donation , il déclare
qu ’ il ne s'en rappelle point.
L a cause appointée, l ’Exposante p ro d u it l ’acte qui contient la d o
n a t io n , e t , avec cette p i è c e , plusieurs autres qui prouvent irrésisti
b l e m e n t que le sieur de B euville a pris possession de la terre d c S a n -
Ticrville, aussitôt après le décès de son ayeul ; qu’il l ’a régie et
a d m in is t r é e j q u ’il en a perçu les fruits ; que les ferm iers on t été p o u r -
A 2
�(4 )
suivis en son n o m ;
en un mot, qir’il a pleinement joui de cetio
terre, soit par lui-même, soit par ses fondés depouvoir^ jusqu’à l’é
poque où elle a été vendue à la dame Leblanc.
L e s pièces p ro d u its par l ’Exposanle contre le sieur deBeuville ,
ont encore prouvé qu’il avait fait acte d ’héritier de son ayeul ; qu'il
avait été condamne, en celle qualité, au paiement de plusieurs dettes
de la succession ; qu’il avait, en conséquence , réclamé de l ’autorité
administrative', une indemnité sur les biens de ses frères ; qu’il avait
enfin reçu Je remboursement de renies considérables dont la succes
sion éuiil composée en partie.
•s
Néanmoins il persiste à soutenir qu’il n^est point héritier, et qu’il
n ’a point profilé de la donation de 1776.
Il affirme que les divers acies , par lesquels on veut établir son
adilion d ’hérédité , n ’ont jamais été que l'ouvrage de scs fondes de
pouvoirs., qui onl dépassé leur mandat.
Il affirme encore qu’il n ’avait point autorisé ses frères à vendre . en
son nom , la terre de S a n n c n ille , et qu’il n’a point reçu sa^portion
du prix de la vente.
Parmi les pièces produites par la dame de Pierrepont, il en réclame
cinq comme lui appartenantes, et, api ès les avoir prises au gre/Ie en
communication, refuse de les rendre.
Un jugement du 2f thermidor an 10 , lui permet provisoirement de
les garder, sous la condition qu’il en léra signiiier copie à l ’E x p o sanlc.
Cet incident jugé , le fond est discuté de nouveau.
L a dame de Pierrepont, ne pouvant être privée de son douaire, en
�aucun cas , demande snbsidiairetnent la mise en cause de la dame
Leblauc , acquéreur de la terre de Sannerville.
Le
3 o frim a ire
an 1 1 , jugement de première instance , ainsi
conçu :
« i ;£> question à décider tst de savoir si la qualité d'h éritier des
» l>iens a p n t appartenu au leu cil. de Pierrepont, attribuée au cit.
»' l.ec.aq de Beuville , est. suffisamment établie au procès , pour
»-ordonner l'exécution dn jugement du 1+ décembre 1792 ; s’il est
» uéocs>-.'ure «l’ordonner rapprochement de l ’acqüéreur de la terre do
)> Sannei ville, 011 s i l ’opposition l'oimée par ledit cil. I.ecoq deBeu» ville, pour faire rapporter ce jugement, est fondée et doit élrc
)) accueillie 5 cutin , s^il v a lieu d ’accorder la provision demandée ?
)» Considérant que le douaire réclam é p ar la dame de P ie rre p o n t
)> lui est d v sur les biens que possédait son m a ri; lors de son mariage ;
» Considérant que la terre de Sannerville faisait partie de ses biens ;
» Considérant que feu le cit. de Pierrepont en disposa en 1776, par
» donation entie vils en laveur du cil. Lcuis Marie-FrançoivÀuguste
» L e c o q , tant en son nom quYn sa qualité de tuleur naturel de
)) Inouïs II*'ilri et «1p Robert—V rançoj.s. Auguste I_«ecoq , ses deux
» frères mineurs, que cette donation fu t acceptée p a r ledit Lecocq
)> a în é , pour lui et «es frères, devant Je notaire cle T r o a m , qui la)) reçut le 17 avril uu<\il an.
» Considérant qu ’il est constant , par la production des pièces com » mu niquées par Ja dame de Pieriepont , que le cit. Lecoq aîné
» s'est mis >11 possession de la terre qui lui avait été donné « p a r
j) son aie ni ; q u ’il a fait- compter le fe rm ie r de cette terre et q u 'il
)> en a usé en véritable propriétaire.
\
�( G )
)>
»
»
»
» Considérant qu’il est également constant par cetle production ,
que le cit. Lecoq aîné a fa it acte et s’est reconnu héritier des Liens
provenant du cit. Pierrepont, son grand-père ; que ce fuit résulte
particulièrement d une procédure qui a exit.té entre lui et un cit.
G a u ch er, créancier de la succession dont il s’ a g it, dans laquelle il
consent payer sa part contributive dans lu renie demandée par le
créancier.
»
»
«
»
»
»
» Considérant que les moyens employés par le cit. Lecoq de
Beuviile, pour se défendre de la qualité d’héritier qui lui estattribuée, ne peuvent être d’aucune considération , parce que cette
qualité est établie p a r des actes souscrits par ses fondés de pouvoirs reconnus et avoués par lui dans les écrilures du procès ,
parce que le cit. Le su e u r , l’un d’eux , est le même qui a figuré et
signé à !a signification préparatoire à l’opposition au jugement du
>»
v
» i 4 septembre 1792.
»
»
»
«
»
» Considérant qu’ il résulte de ces faits que le cit. Lecoq de Beuviile
réunit contre lui deux qualités pour le rendre passible du douaire
demandé par la dame de Pierrepont ; d'abord , celle de donataire
de partie des biens y sujets , et celle d’héritier aux biens, qui en
sont susceptibles ; qu’ainsi il ne peut se dispenser de répondre à la
demande qui lui est formée.
)) Considérant que rapprochement de l’acquéreur de la terre de
» Sannerville , demandé par la dame de Pierrepont , devient , quant
» à présent, inutile , parce que c’est au citoyen Lecoq â fournir le
» douaire demandé, sauf, en cas que cet approch»ment devienne
» nécessaire , à le requérir quand et ainsi qu’ il appartiendra.
w Considèrent que la dame de Pierrepont poursuit depuis 1 7 8 8 , '
» pour obtenir la liquidation et le paiement de son douaire, qu’il ne
» paraît pas même quelle ait été remplie des iuibles provisions
» qu’elle a obtenues ; que dans cet état, il est de l’équité que la
�» Justice lui subvienne par une provision à valoir sur les anvra-y?» de
» son uouaire, qui t.’¿lèvent aujourd’hui'à «les sommes cônsn'crùbies.
» Le tr ib u n a l, p a r son jugem ent en p rem ier ressort ,
.
.
...
.
«
D
»
»
»
)>
»
................................... a reçu !e cit. Leror) de IJcuviüe
opposant, poi.r la forme, au jugement du i 4 décembrç 1792;, e t ,
sans avoir égard à son opposition , dont il e^t déboute , a ordonné
<|i.p ledit jng meut t>oilira son plein et entier «Jlet , avec dépens ,
cl faisant drOiî Mir la piuvision demandée, en a accordé une de
tî,ooo !. , en ouMe telle prononcée par ledit jugement, ce q u i, en
ce r h e i , sera exécuté nonobstant opposition, np|,ellali< n el »uties
*»
voies quelconques, a la caution du douaire de ladite femme. »
L e sieur de Btuville interjette appel do ce jugem ent, el de celui du
2 1 thermidor an 10.
(
11 demande :
i \ L ’iuiinillalion de c e l u i - c i , parce qn*il ne contient pas Ica
quatre parties prescrites par la loi du 24 août 1790 ;
2°. L ’annullation du jugement définitif ( du 5 o frimaire an 1 1 ) 't
parce qu’il est la suite du premier, et parce qu’il a ordonné l’exécu
tion de relui du 14 décembre 1 7 9 2 , annnllé par’ autre jugement du
tribunal civil de Caün, du ay messidor an g. * ’ * : •
'
Il esta remarquer que ce dernier jugement n’a jamais été produit
au procès, el que d’a il't u r * , devantles premiers juges, le sieur L e coq uvait conclu formellement à/élre reçu opposant à celui du i 4
décembre 1790.
'
’
;■
f
* '1 '
Le sieur de Beuville prétend , de plu s, qu’il n’avaitîpas été vala
blement as.signè au tiibunal du cl-devant district de Cuën.
'
'
.
.
.
.
1
1
Il fuit de n ouveaux efforts p o u r sa défense au fond.
\
�( 8 )
Il demande acte de ce qu’il abandonne l’efTst de la donation de la
terre de Sannerville , et de ce qu’il n’y réclame rien.
Il invoque un jugement rendu entre lni et la dame L e b lan c, le Ier.
pluviôse an 1 1 , par le tribunal civil de Caën , jugement qui donne
acte à celle dame de la déclaration passée par le sieur Lecoq , qu’ il
lie réclame aucuns droits sur la terre de Sannerville.
Uu tel délaissement n’était que dérisoire.
L a dame de Pierrepont découvre et produit devant la Cour d’appel
qui avait appointé la cause , un acte reçu G a illa r d , notaire à
S a in t -L ô , le i 4 thermidor an 3 , contenant quittance, de la part du
sieur Lecoq de Beuviile., du remboursement d’ une rente annuelle
«le
o f. , due à la succession de son grand-père. Il est qualifié, dans
55
l ’a c t e , héritier et représentant L ou is-À u gu stin de Vierreponl , son
a ïeu l maternel.
L a dame de Pierrepont avait produit, en première instance, un autre
aclc n.çu par le notaire d’ Asigny, le 25 prairial précédent , conte
nant aussi quittance, de la part du sieur de Beuviile, de la somme
de ao,oco 1 . , pour l’extinction d’ une partie du capital d’une autre
rente annuelle de la somme de i , 55 o f.
Il est vrai que le sieur de Beuviile n'avait point figuré, en personne;
dans ces actes auxquels avait comparu pour lui le sieur Masson , en
vertu d’une procuration qu’il lui avait donnée le ib p r a ir ia l an .
3
Il imagine donc de désavouer, par rapport à la cause seulement,
ce fondé de pouvoir q u i, justement offensé de ce désaveu, lui fait
signifier , le
fructidor an »a, un acte par lequel il prend le soin do
lui rappeler que sa procuration n ’avait d'autre objet que celui
p o u r lequel i l en a f a it usage j que tout était entendu avec lu i ;
qu$
�( 9 )
4j V
nue li s Ja n d s avaient une destination convenue; que ni lui ni
le sieur Houssaye, q u i dirige ses opérations , n'ont rien
ignoré t etc.
L e sieur de Beuville, ainsi vaincu jusque dans ses derniers retranchemens , s’avise enfin de prétendre que la dame de Pierrepon; ayant
converti sa créance, en 1 7 8 1 , en une simple rente viagère, et laissé
vendre les biens de son mar>, sans se faire délivrer son douaire &n
essence, doit être renvoyée exercer ses droits vis-à-vis de la nation.
L e 5 fructidor an i 5 , la Cour d’appel prononce un premier arrêt ,
portant :
«. h a Cour , faisant droit sur l’appel du jugement du 2 1 thermidor
v an 1 0 , a annuité ledit jugement.
n Evoquant le principal , trouvé en état d’être ju g é , a déclaré le
» sieur Lecoq propriétaire des cinq pièces d’écriture, par lui reven» diquées, a ordonné que les copies signées comme de production par
» lui fournies desdiles pièces, vont lui être remises avec les originaux.
« E t sans s’arrêter aux nullités et irrégularités cottées contre le ju » gement du 5 o frimaire an 1 1 , a ordonné qu’il va être passé à
» l’examen du principal définitif, aux fins de statuer sur le mérite de
» l ’appel du sieur Lecoq au fond. »
L e 5 fructidor, arrêt définitif ainsi conçu :
« La Cour a remarqué que, pour statuer sur le mérite de l ’appel
j) au principal définitif, les questions suivantes se présentaient à
u décider :
a Le jugement du i 4 décembre 179 2 devait-il être maintenu, ainsi
» que l’ ont décidé les premiers juges ? ou devait-il être rapporté comme
» nul et surpris, au respect du sieur Lecoq j n u l, en ce qu’il aurait
B
)
�i> rendu sans assignation commise à sa personne on à son domicile, et
» surpris en ce qu’il a été condamné comme donataire et comme h é » ritier pur et simple du sieur de Pierrepont son ayeul?
\
« La restitution de la provision payée en exécution du jugement
» du «^o frimaire an 1 : , doit-elle être ordonnée ?
» Considérant q u e , suivant les dispositions de la coutume rie Nor» mandie et des réglemens qui ont eu force de loi dans cette ci-devant
» province jusqu'à la promulgation du code civil, tous, et un chacun
» des héritiers d’ une succession pouvaient être poursuivis et condatn.)) nés personnellement et solidairement pour le paiement de la tota» lité des dettes du défunt, sauf leur recours entre eux.
« Considérant qu’encore bien que l’action de ladame de Pierrepont
» n’ait été adressée qu’au sieur Lecoq de S t .- E tie n n e , ses deux frères
» unt pu valablement être condamnés comme co obligés solidaires.
ï
»
*
))
« Considérant d’ailleurs , que le sieur Lecoq aîné n 'a point c x c ip ê ,
devant les premiers jiii»rs , du défaut d’asMgnation individuelle & lui
commise; que, sur la notification qui lui fût faite du jugement du
i4 d é ce iiib ie j 7(^2 , il déclara seulement que la terre aiTi-ctée nu
douaire de la dnme de Pierrepont, appartenoit à son frère; que, dan»
son écrit du i 4 pluviôse an i o , et dans ses conclusions lors du ju-
» gement définitif, il &e borna à demander que le jugement contre le» quel il était o p p o s a n t , fut rapporté comme surpris, en sorte que
» quand son opposition eût été fondée, il serait non-recevableaujour» d’hui à la proposer.
« Considérant que, por 1 acceptation qu’il fit de la donation de la
» terre de SannerviUe, pour lui et ses frères , il fut investi de la pro» priété certaine et irrévocable de la tierce partie de cette terre q u i ,
» dès-lurs, obtint dans ses mains le inême rang que ses autres biens»
» tellement qu’ il n’a pu en être désaisi qu’au moyen d’uu acte ou d’ un
» contrat translatif de propriété par lui consenti.
�,
(ii
A&
.
)
« Considérant q u ’ il est constant qu’après la mor1 du sieur dePierre» pont, son donateur , il ne mit aiiiii que ses frères, en possession et
» jouissance de ladite terre.
« Considérant qu’en 1 7 9 1 , époque où ses frères firent la vente de la
v terre dont il s’agit, à la dame Leblanc, ils le regardèrent comme
# leur co - propriétaire, puisqu’ils prirent soumission de lui faire
» notifier cette vente.
« Considérant qu’aux termes de l’art. 442 de la coutume de N o r » mandie , les donataires sont tenus de porter toutes rentes et charges
)) réelles dues sur les choses à eux données , encore qu’il n’en soit fait
» mention dans la donation : que le douaire étant au nombre de ces
)) charges, le sieur Locoq , en acceptant la donation, a contracté
» l’obligation d’acquitter celui de la dame de Pierrepont, « raison de
>; la portion qu ’elle lui a conférée dans la terre de Sànnerville.
)> Considérant qu'il ne justifie point d ’un acte de cession ou d’a b a n » don de sa p a rt dans ladite donation.
» Considérant qu’en fait de donation entre-vifs , le droit d’accroîs» seinent n 'a point lieu; que, quoiqu'il n’ait point réclamé contre la
» vente faite par ses frères, il n’a pas pour cela perrlu son droit;
» qu’il est toujours censé propriétaire de sa part afférente dans la terre
)> de Sànnerville suivant la maxime : q u i habet actionern a d rem
» vindicandam rem ipsam habere vide lu r.
» Considérant que le délaissement ou l’abandon qu’il a déclaré
» faire, en cause d 'a p p e l , ne peut le garantir de la demande en
» douaire formée par la daine de Pierrepont ; puisque, quoiqu’ il s’as» simile, dans ses écritures, à un tiers détenteur, il n’a pas fait ce dé»
» laissement dans les formes voulues par la lo i , en pareil c a s , aveo
» offre de subrogation et de répétition des fruits perçus.
a Considérant que le sieur Lecoq doit encore être tenu do fournir
‘B a
�"• • <
( 19 )
« le douaire do la dame de Pierrepont comme héritier dans la succes« de son ayeul ; p u isq u ’il a fa it actes qui lui attribuent nécessaire
ment cette qualité.
»
j)
»
»
)>
»
» Qu’en effet, il s’est saisi des titres de cette succession ; qu’ il a
pris cette qualité vu faisant des soutiens et des réclamations, pour
empêcher les effets des actions solidaires , dirigées contre lui pour
dettes, dont scs frères et lui étaient prenables; et pour obtenir la
récompense des renies et charges , qu’il acquittait au delà de sa
portion contributive ; qu’ il a été condamné comme héritier, malr
gré ses réclamations, et qu’ il a reçu ou fait recevoir, par ses ogens,
n l'amortissement de plusieurs rentes dues à la succession de son
» a ïeu l, dont il a remis les titres et les contrats ;
» Considérant que les désaveux qu’il a passés, à l’égard do ce qui a
» été fait en son nom par les sieurs Lesueur et Moisson, ne sont
»
«
»
«
»
»
i)
»
«
»
»
point fondés, et ne peuvent être capables de détruire les conséquences qui résultent des actes et des opérations, qu<; ces deux
mandataires ont fait pour lui ; en effet, le sieur ln ’sueur était porleur de sa procuration, et il a été articulé et non méconnu , sur le
procès , qu’il résidait chez lu i, en sorte qu’ il doit ê tr e présumé avoir
géré et administré les affaires du sieur L e c o q , à sa parfaite connaissance ; d’un autre côté, ce dernier n’a-t-il pas ratifié ses faits relatifs
à la procédure, sur laquelle est intervenu le jugement de 17 9 ^ ,
rendu au profit du sieur G a u ch er, par le paiement de sa rente de
y5o livres, puisqu’il a exécu té, et cxtcule encore ce jugement, en
payant annuellement cette rente?
» Considérant, en ce qui concerne le sieur M oisson , que la pro-
)> curation dont il s’est se rv i, pour les rachats faits en ses mains , des
» rentes dues par les sieurs Jtégnaull et L e gamine, r , étaient sufli» sanies pour l’autoriser; que ce mandataire, en prenant contredit
» du désaveu qui lui a été signifié, a soutenu qu’il n’avait lien fait
�( i
3
)
V qui ne fût conforme à la volonté de son commettant, ainsi qu’à ses
v intentions, par rapport à la destination convenue, des fonds pro» venansde ces rachats, sans que le sieur Lecoq ait pris la voie pour
)> faire prononcer sur son désaveu; que ce q u i, d’ailleurs, doit faire
» présumer que le sieur Moisson n’a point abusé, ni outrepassé ses
» pouvoirs , c’e s t , d’une p a r t , les termes de sa procuration, sa date
» rapprochée de celle des amortissemens, et, d autre p art, le silence
v gardé par le sieur L e c o q , sur l’interpellation qui lui a été fa ite ,
« d’indiquer quelles étaient les autres rentes dont il voulait recevoir le
» rachat, lorqu’il donna sa procuration au sieur Moisson ;
» Considérant qu ’ il résulte de ces actes, que le sieur Lecoq n'a
» point jo u i des biens de la succession de son a ïe u l , comme héritier
» bénéficiaire au droit de sa mère ;
. » Considérant que, s’il a paru réclamer cette qualité, il l’a abdiquée
» par le fait, et s’est porté héritier p u r et simple , et absolu , et
» qu’il a pu user de celte faculté, vu l’article 91 da la coutume de
» Normandie.
M Considérant que c’est par le fait du sieur Lecoq, que la dame de
» Pierrepont est privée du gage qu’elle avait dans les deux rentes
» dont il s’a git, et qu’elle se trouve dans l’impossibilité d’agir utile» ment contre ceux qui en étaient débiteurs;
w Considérant qu’il est,constant que, sur les réclamations qu’elle a
» faites devant les corps administratifs , elle n’a point obtenu la liqui» dation de son douaire;
)) Considérant q u e , par l’arrêté du Gouvernement du 3 floréal
» an 1 1 , tous ceux qui n’ ont point été remplis par voie de liquida
it tion de leurs droits , sur des émigrés rayés , éliminés ou amnistiés,
�( |4 5
» ont été maintenus dans ces droits vis-à-vis de leurs débiteurs et co"
)> débiteurs ;
»
»
»
»
» Considérant enfin, que la dame de Pierrepont ayant été privée
de la jouissance de son douaire, pendant grand nombre d’années ,
il lui était dû une provision ; que le sieur Lecoq le reconnaît lui—
m êm e, puisqu’il n’a conclu à la restitution de celle à laquelle il a
été condamné, que pour le cas où. il parviendrait à faire réformer
le jugement du 3 o frimaire an 1 1 ;
P a r ces motifs, et ceux employés p a r les prem iers ju g e s ;
» L a C o u r , ouï M. B la iz e en son rapport, et le substitut du pro» cureur général en ses conclusions; et conformément à icelles,fai» sant droit définitivement sur l’appel du sieur Lecoq , et sans s’arrê-
»
»
»
)>
))
ter à ses moyens et exceptions, dit, qu’il a été bien ju gé , mal et
sans griefs appelé ; ordonne que le jugement, dont est a p p e l, sera
exécuté selon sa forme et teneur ; a condamné le sieur Lecoq aux
dépens des causes principale et d’appel, dan* lesquels, toute fois
n’entreront ceux relatifs au jugement du 2 x thermidor an 1 0 , etc.
Il paraît que le sieur de Beuville a formé un pourvoi en cassation.
Il n’est pas vraisemblable que ce pourvoi porte sur l ’arrêt du 3 fruc
tidor an i 5 .
La daine de Pierrepont se borne donc à demander si elle doit ejl
craindre le résultat, par rapports celui du 5 du même mois.
�C O N S U L T A T I O N .
L E C O N S E I L S O U S S I G N É , vu le Mémoire à consulter
de la «lame P icrrepon t, l ’arrêt rendu en sa faveur par la Cour d ’appel
de Caën , le ô fructidor an i 3 , ensemble les pièces du procès ;
E st
d ’a v i s
qu’il n ’est point a craindre pour la darne de Picrrepont,.
que le sieur de Beuville obtienne la cassation de l’arrêt de la Coup
d ’appel de Caeu ,
du ô fructidor an i 5 .
En la forme , il a été décidé, par cet arrêt, que le sieur de Beu ,-ville avait été valablement assigné en la personne d’un de ses frères ,
au tribunal de disirict de Caën. Cette décision est conforme à l’art.
546 de la ci-devant coutume de Normandie , cl à l ’art. i 5 o des placités, qui avaient force de loi dans celle province. On doit meme
être surpris <le ce que le sieur de Beuville a fait valoir un Ici
moyen. L a Cour d ’appel a d ’ailleurs remarqué qu'il élail non—
reccvable à le proposer..
A u fo n d , celte Cour a décidé principalement des questions de
J’a i l , qu'il n ’est pas p e r m is au sieur de Beuville de discuter de nou
veau devant la Cour suprême.
q u ’il s’ est mis en possession
avec ses frères, de la lerre de Sanncrvillc , qui leur avait été donnée
eu 1776 j 2°- q u il est héritier absolu du sieur de Picrrepont.
Elle a jngé,
en
p o in t d e f a i t
, i".
�( iG )
Ces points de f a it ne peuvent plus ¿ire révoqués en doule, sui
vant la jurisprudence invariable de la Cour supreme, qui ne formant
pas un troisième degré de jurisdiction , examine seulement si les
arrêts soumis à sa révision régulatrice, contiennent une jusie appli
cation des lois , d'après les difierens faits constatés par les juges qui
les ont rendus.
A i n s i , le sieur de Beuville étant reconnu héritier pur et simple de
son o n cle , était-il passible, en celte qualité , de l ’aelion formée
contre lui par la dame de Pierrepont, à l'effet d'exercer son douaire ?
On voit si l'affirmative de cette question peut êtrç raisonnablement
contredite.
Et pourtant le sieur de Beuville avait prétendu, devant la Cour
d ’appel, que par cela seul qu’il ne possédait aucun des biens du sieur
de Pierrepont, la Consultante avait mal à propos dirigé contre lui sa
demande en douaire , une telle action étant purem ent réelle.
Il s& ait fondé sur les dispositions des articles 378 et 379 de la
coutum e, qui sont ainsi conçus :
Art. 37 8 : ft L'héritier n’est tenu de douer la femme de son p ré)» décesseur ¡fo r s de ce q u 'il a eu de la succession. )>
Art. 379 .* « Si le m a r i, durant son mariage, a vendu de son h é » ritagtf, la femme en peut dem ander douaire ù celui qui le pos» sède. »
L e sieur de Beuville avait conclu, de la combinaison de ces deux
articles , que la veuve devait toujours s’adresser aux détenteurs des
biens sujets à son douaire.
Il les avait mal interprétés.
E t d’abord , ils ne doivent pas l’être l’ un par l’a u tre , suivant la
remarque qui en a été faite par M. Roupncl de Çhonilly.
« Car,
�(
i)
»
»
»
17
)
■«Caí*, ajoute ce commentateur, (fuand il est dit que Phérilier
n'est obligé de fournir le «¡ouaiie qoe sur ce qu’il a eu de la succession, cela nè se doit pas entendre quand son prédécesseur a
aliéné Vimmeuble sujet au douaire. E n ce cas , il est certain
que l*héritier est obligé de récompenser la veuve. »
L e sens de l ’art. 678 e s t , d’après B a sn a g e, que si le fond aífectó
au douaire venait à périr, la femme n’aurait pas d’action pour en
demander récompense ou garantie à l’héritier du mari»
Ce même article a principalement eu pour objet, dans les vues des
rédacteurs de la coutume, d’empêoher, par toute sorte de voies, que
le douaire excédât le tiers des biens immeubles du mari ; « de sorte,
1) continue Basnage, que cet article ne peut s e r v ir a l’héritier du
»
)>
))
»
m a r i , que quand le défunt a promis un douaire plus grand que les
biens ne peuvent porter , uu lorsque les biens sont péris par quelque
cas fortuit , comme si les biens consistaient en maisons,qui eussent
été brûlées pour la plupart, ou démolies en tems de gutrre , ou
))
»
»
»
»
))
»
en rentes sur le roi, dont le remboursement n’aurait été fait que de
»
peu de chose, la veuve n’en aurait pas récompense sur les biens qui
resteraient : hors ces c a s , cet article est inutile à l ’héritier , parce
qu’encore que la veuve ne lui puisse demander directement et p e rsonnellement son douaire , que sur ce qu’il a eu de la succession ,
il ne laisse pas d ’être garant envers /es acquéreurs du bien
qui leur est donné. »
Basnage, expliquant l’art. ^ 7 9 , ajoute:
« Bien que la femme puisse demander douaire sur les biens aliénés
» de son mari , néanmoins elle ne peut déposséder les acquéreurs ,
» s’il reste assez de biens en la possession de l’héritier pour lui
» fournir son douaire.
« Cet article 3 7 g , observe M. Roupnel de Chenilly, ne parle que
n d’héritage, et ne se peut appliquer ni aux rentes , ni aux ollices ;
C
�k fi
'
■
■
( 18 >
)) c a r , à le u r é g a r d , la fem m e n ’a point d’action , ni contre les débi)> leurs ayant fait l’amortissement des re n te s , ni contre le nouveau
)> titulaire de l’office, mais elle a seulement s a réco m p e n se s u r les
)j a u tres b ien s , ou
L ’art.
379 de
peu so n n ellem en t
contre les h é r itie r s d u m a r i.»
la coutum e a donc été p o rté en fa v eu r de la vtuive à ,
laquelle il donne le droit de déposséder les tiers acquéreurs des biens
im m eubles de son m a r i , si ses h éritiers ne peuvent fo u rn ir le douaire ;
mais cet article ne lui enlève point le droit de se p o u rv o ir d ’abord ,
et par prem ière a c tio n , co n tre les h é r i ti e r s , p o u r les faire co ndam ner
à lui indiquer les biens qui avaient appartenu à son mari.
E t s^ils les ont eu x -m ê m e s alién és, quel ridicule, n ’y aurail-il point,
de leur p a r t , à re n v o y e r la veuve e x e rc e r son action contre les a rq u é rcu rs q u i, sans d ou te, les ap p elleraien t aussitôt en garantie?
T e l était néanmoins le systèm e du sieur de 13euville, qui ne peut
sérieusement se p la in d re de ne l’avoir point fait adopter par les p r e
m iers juges et les juges supérieurs.
Peu im p o rte la qualification qui sera donnée à l ’action appartenant
à la veuve.
E lle a le droit incontestable de l’e x e rc e r contre les h éritiers d e
son m a r i , puisqu'elle n ’a la faculté de déposséder les tiers-acqué
reu rs des immeubles , que lorsqu’il ne lui reste pas d'autres moyens de
6e p ro cu rer son douaire.
Il ne suffit donc point à l’h é r i ti e r , p ou r repousser son iiclion, de
p réten d re qu’il ne possède aurun des biens de son m a r i ; car il le r e
présente entièrem ent. Il est môme obligé de fo u rn ir le douaire sur ses
biens p r o p r e s , si ceux de son p ré d é c e sse u r ont été alién és, o n , c e q u ;
est la mêm e c h o s e , de garan tir les détenteurs de ces b ie n s , s’ils sont
attaqués par la veuve. Elle doit en efïW a v o i r , d ’une m anière ou de
l ’a u t r e , l’usufruit du tiers de tous les immeubles qui appartenaient st
son m a r i , à l’époque du mariage.
I
�C19 )
Ainsi, dans fous les cas, l ’héritier pur et simple est tenu de lui pro
c u r e r cet usufruit.
S ’il fallait
a b so lu m e n t
qualifier l’action qui lui appartient, il serait
évident que cette action est m ix t e , ainsi que l’ont remarqué plusieurs
auteurs, notamment Rousseau Delacombe, au mot D e tte s.
Or le sieur de Beuville a été reconnu héritier pur et simple du sieur
de Pierrepont.
Donc l’action de sa veuve était légalement dirigée contre lui.
Il y a plus , la Cour d’appel a reconnu que le sieur de Beuville avait
reçu le remboursement de rentes considérables qui avaient appar
tenu à son ayeul.
D o n c , sous ce nouveau rapport, le système qu’il s’était créé lui
était inapplicable ; car il ne pouvait alléguer qu’il ne possédait au
cun des biens de son ayeul.
Ici pourraient se borner les réflexions propres à justifier l’arrêt
de la Cour d'appel d eC aen , qui déclare le sieur de Beuville, en quar
litê d’héritier p u r et simple du sieur de Pierrepont, passible de
l ’action formée par sa veuve, pour l ’exercice de son douaire.
\
Mais il est facile de démontrer qu’il en était encore passible en qua
lité de donataire, bien qu’il eût prétendu avoir abandonné l’effet de
la donation.
l i a soutenu que cet abandon devait le mettre à couvert des pour-;
suites de la dame de Pierrepont.
Il a invoqué la doctiins de R ic a rd , qui enseigne que les donataires
ne peuvent être tenus des dettes,que jusqu’à concurrence de ce qu’ils
C 2
�( 20 )
profitent des biens du défunt, et que silôt qu’ils en sont évincés , ou
fju 'ils le s ont a b a n d o n n é s v o lo n ta ire m e n t , l ’action que les créanciers
avaient contr’eux cesse absolument.
L e sieur de Beu ville a soutenu que, dans les donations entre-vifs
comme dans les dispositions testamentaires, il y avait lieu au droit
d’accroissement.
Tels ont été les principes sur lesquels il s’est fondé pour éviter
l ’application de l’art. 442 delà coutume de Normandie. „
Cet article est conçu en ces termes :
» L es donataires sont tenus de porter toutes rentes foncières et
»se ig n e u ria le s, et a u tres c h a r g e s r é e lle s , dites à r a iso n d e s ch o ses
)) à e u x d o n n é e s , encore qu’il n’ en fût fait mention en la donation,
)> sans qu'ils en puissent demander récompense aux héritiers du do» nateur. »
Une disposition aussi précise, ne laissait à examiner que la ques
tion de savoir, si le sieur de Beuville é ta it, ou non, donataire de
son ayeul.
Or , il ne contestait pas qu’ il eut cette qualité.
Donc il était tenu de fournir le douaire de la dame de Pierrepont.
C ’étail une grande erreur de sa p art, de p ré te n d re que le droit d'ac—
croisseinent n lieu pour les donations entre vifs,qui,à l’instant même
où elles sont acceptées par le donataire, le saisissent irrévocablement
de la propriété de la chose donnée.
Il ne peut dès-lors s’en dessaisir que par un acte également trans
latif de propriété.
L e sieur de Beuville a-t-il justifié d’un tel acte,à l’égard de la terre
de Sannerville ?
La Cour d’appel a décidé, en p o in t de f a i t , qu’il n’en avait pas
justi fié , et qu’il était encore propriétaire de ce domaine. Elle
en a conclu, avec raison, qu’il devait j en qualité de donataire,
�( 21 )
fournir le douaire dont il s’agit, au moins pour sa portion dans les
biens qui étaient l’objet de la donation.
S ’il n’était pas en possession de ces biens, s’ils avaient été vendus
sans sa participation , il avait une action pour les réclamer, q u i habet
actionem a d rem vindicandcim rem ipsàm habere videtur.
Que signifiait le délaissement, qu’il a prétendu avoir fa it, de la
terre de Sannerville ?
Avait-il délaissé ce domaine à la dame de Pierrepont? Avait-il
déclaré la subroger à ses droits ?
De deux choses l’ une : ou il avait aliéné la terre de Sannerville, ou
bien elle lui appartenait encore.
Au premier cas, il devait franchement déclarer cette aliénation,
afin que la Consultante fît ordonner, comme elle y avait subsidiairem e n t c o n c lu ,1a mise en cause de l’acquéreur, qui, au reste, eût formé
son recours contre le sieur de Beuville.
A u second cas, il devait abandonner, en lermes exprès, la pro
priété de sa portion, dans la terre de Sannerville , déclarer ce délais
sem ent par
acte authentique ; enfin, subroger réellement et effecti
vement la dame de Pierrepont, à son droit de propriété sur cette
terre.
Il sJest~borné à dire qu’il n’y réclamait rien. Une déclaration aussi
vague, aussi équivoque, porlée par une simple requête, ne pouvait
détruire l’effet d’une donalion entre-vifs , et les conséquences qui en
résultaient, contre le donataire, d’apres l’article 4 4 2 , de la coutume
de Normandie.
E n fin , le sieur de Beuville, reconnu héritier pur et simple, re
connu donataire de son aieul, ayait, en désespoir de cause, entrepris
�(22)
de se soustraire aux obligations que lui impose irrévocablement ce
double titre , en soutenant que la daine de Pierrepont était dechue de
son douaire, e t devenue simple créancière de l’etat, faute, par elle,
de s’être conformée à la loi du 1 er. floréal an 3 .
Cette misérable objection est suffisamment écartée par les motifs
de l’arrêt de la C o u r d’appel de Caen.
Il faut dire, avec l ’auteur d’ uue consultation, délibérée le 21 ven
tôse a n 1 3 en faveur du sieur de Beuville, que cette affaire devait se
réduire au seul point de savoir s’il a pris le titre d’héritier de son
aieul.
O r , il est souverainement jugé en f a i t , qu’il a pris ce titre.
Son pourvoi sera donc infailliblement rejeté.
D é l i b é r é à P a r is , le 1 . ja n v ier 1807,
G A C H O N,
,
----------------- ---------------- ‘ ' * ' * ..............................- » ■ ■ ■
G O D A R D.
I I
!
. I
.
.............................
P O R T H M A N N , Imprimeur ordinaire de S, A. I. et R. MADAME!,
Rue Preuve des p e tits-Champs, près le Ministère des Finances.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Nollet, Rosalie-Félicité de. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gaschon
Godard
Subject
The topic of the resource
douaire
émigrés
séquestre
donations
coutume de Normandie
successions
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter et consultation pour la dame Rosalie-Félicité de Nollet, veuve du sieur Louis-Augustin de Pierrefont ; sur la question de savoir si le sieur Lecoq de Beuville est fondé à se pourvoir en cassation contre un arrêt de la Cour d'appel de Caen, qui le condamne, au double titre d'héritier et de donataire du sieur de Pierrepont, à fournir le douaire de la dame sa veuve.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Porthmann (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1788-1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1720
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Caen (14118)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53323/BCU_Factums_G1720.jpg
coutume de Normandie
donations
douaire
émigrés
séquestre
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53324/BCU_Factums_G1721.pdf
2d9a5c6aed0c7d00a0193d87edfb37cc
PDF Text
Text
MEMOIRE
E T
CONSULTATION.
�MÉMOIRE
POUR
La dame E
P
RO LLAT, épouse de F ra n ç o is COURBY, habitant à Aigueperse.
l e o n o r e
h il ip p e
A u c u n e situation n’est comparable à l a mienne. Mon époux
est accusé d’un crime horrible dont je n’ose prononcer le nom:
son honneur et le m ien , le sort de ses enfans, seront bientôt dans
la balance de la justice; et ses persécuteurs s’agitent, quand luim êm e , accablé de sa situation, il fuit la calomnie sur un sol
étranger.
Lorsque pour la première fois cette nouvelle épouvantable
vint jusqu'à m oi, toute ma conviction de l’innocence de mon
époux ne m’empécha pas de résister à ses résolutions, et de les
ébranler par mon désespoir. O u i, et je m’en confesse coupable,
je l’importunai de mes larm es, je séduisis son courage , et sa
fuite fut un effort de sa tendresse ; maintenant je me demande
avec effroi si sa présence ne lui eût pas été plus u tile , et si son
danger, au contraire, n’est pas né de ma terreur.
Dans cette cruelle anxiété, que ne puis-je appaiser de mon
sang ceux qui sont altérés de celui de mon époux ! Q ue n ’ai-je
A
�(a )
du moins le droit de me présenter pour lui en jugement, pour
confondre ses accusateurs, pour le défendre....... ? Que dis-je?
me défendre moi - même ; car jusqu’au tombeau ma destinée
n’est-elle pas attachée à la sienne?
Mais la rigueur des lois me repousse du tribunal qui va juger
ma propre cause. Ainsi la nécessité me dicte mon devoir. J ’ap
prendrai à mes juges une partie de ce que mon époux auroit pu
leur dire, ou du moins quelques-unes des circonstances que des
témoins auroient pu attester.
Je ne me suis point dissimulé combien de difficultés j’aurois
à vaincre, quand je n’aurois à opposer que mon foible langage
à des combinaisons préparées par la m échanceté même. Car
telle est la condition d’un malheureux accusé, que déjà la ca
lomnie a jeté de profondes racin es, alors même qu’il peut en
treprendre de la combattre. Q ue peut sa voix plaintive contre
les cris précurseurs de cette astucieuse ennemie? Et lorsqu’enfin
on consent à l’entendre , combien ne faut-il pas encore qu’il
dévore l’humiliation de la défiance qu’il excite? car la préven
tion du mal est malheureusement celle qu’on s’obstine le plus à
con sfrver; et les esprits même les plus raisonnables semblent
t ro u v e r plus c o m m o d e de cro ire le c r im e q u e d ’en m éditer les
invraisemblances.
Ces réflexions portoient le découragement dans mon âme ,
quand le souvenir de mes enfans a vaincu ma répugnance, et m’a
élevée pour ainsi dire au-dessus de moi-même. O u i, me suis-je
é c r i é e , je l’entreprendrai cette tâche pénible. La timidité de l ’ é
pouse cherchera des forces dans l’amour m aternel, et ces deux
titres prêteront peut-être à mon récit un intérêt que mes foibles
accens n’auroient pas eu la prétention d ’espérer.
C ’est à des juges, au reste, que je veux m’adresser, et ceux-là
ne repousseront pas mes paroles avec l’ennui de les entendre ; leur
terrible ministère ne leur donnera de défiance que contre la pré
vention qu’ils craindroient trouver en eux mêmes. Mes récits se
ront donc écoutés comme une explication nécessaire, par ceu x
�( 3 )
que la loi a armés de sa puissance ; car ils trem bleront, sans doute,
de l’idée seule qu’ils pourroient condamner une famille honnête à
l’in fam ie, et un innocent à la mort.
Les relations de mon époux avec la maison de Murol ne furent
pas de ces liaisons soudaines et fortuites , qui ne donnent pas le
temps de s’apprécier, ou de concevoir de justes défiances. C ’est
depuis son enfance qu’il connoît le sieur de Murol iils aîné , ayant
été élevé avec lui dans le même pensionnat, à Lyon.
Cette habitude de se voir a continué dans un âge plus avancé ;
mais l’historique de ces premières liaisons n’a rien d’essentiel à
rem arquer, et je me hâte d’en venir à des époques plus récentes.
Jusques à l’année dernière, je n’avois vu à Aigueperse que les
sieurs de Murol fils , et leur père m’étoit absolument inconnu. Il
me paroissoit même que Courby le connoissoit à peine , et ne vivoit avec lui que sur le ton du respect et des convenances de
société.
Nous ignorions entièrement ses affaires, et ne connoissions
celles de ses fils que par cet extérieur d’opulence, qui fait illusion
au vulgaire tant qu’on a des ressources pour le soutenir.
Cependant, un jour de l’été dernier, le sieur de Murol p ère , se
trouvant seul chez son fils cadet avec Courby, fit tomber la con
versation sur la situation de ses fils , et sür le mécontentement
qu’il éprouvoit de leurs dépenses excessives.
Cette ouverture pouvoit n’étre que le désir secret d’ un père de
faire parvenir ses plaintes à ses fils, par un organe qu’il suppohoit
plus persuasif peut-être. Mais le sieur de Murol père ne se borna
pas là. Soit hasard, soit que la première idée lui en fit naître une
seconde, il confia bientôt à Courby qu’il méditoit pour son fils
aîné le projet d’une grande alliance, mais qu’il étoit retenu par
des dettes pressantes, dont l’éclat alloit ruiner toutes ses espé
rances.
A lo rs, comme par réflexion, il demanda à Courby s’il ne pour
rait pas lui faire trouver de l’argent.
A
2
�( 4 )
,
Un jeune homme ne pouvoitëtre qu’embarrassé à cette brusque
proposition. Courby fut forcé de lui avouer son impuissance de
lui être utile. « J ’ai des dettes moi-même, lui dit i l , sans avoir à
» me reprocher un excès de dépense ; mais j’ai eu la foiblesse de
» cautionner les effets d’un homme que je croyois incapable de
» me tromper; il a fait faillite, et m ’a laissé beaucoup à payer;
jj et dans ce m om ent, je cherche moi-méme 18,000 fr. pour finir
de m ’acquitter.
» Q u’importe ce que vous m’objectez, lui répondit M. de
» M urol; vos ressources pour avoir de l’argent ne tiennent sans
» doute qu’à une signature de plus; je vous offre la mienne pour
les 18,000 fr. dont vous avez besoin, et à votre tour, vous me
» donnerez la vôtre pour me procurer l’argent que je cherche;
elle me sera u tile, parce que vous êtes d’une famille de
te nëgocians, et que par moi-méme je ne trouve plus à emj> prunter : de cette manière , nous nous serons rendu un service
y> mutuel. »
J’ignorai dans le temps cette conversation ; et Courby m’a avoué
depuis que quoiqu’il y e û t un côté avantageux pour lui dans la
proposition du sieur de M urol, ces combinaisons d’emprunt et de
signatures bro u illo ie n t ses idées , et co n fon d oien t son in e x p é
rie n c e ; qu’il &’étoit contenté en conséquence de bégayer un con
sentement évasif, et avoit trouvé un prétexte de se retirer sans
rien terminer.
Mais le sieur de Murol père n’abandonna pas ainsi son plan. Le
20 aoû t, je le vis à Aigueperse. Il parut fâché de ne pas y trouver
C o u ib y , que je l’engageai à attendre. Courby ne revint pas le soir,
et M. de Murol ne partit que le lendemain après dîner. Je 11e cher
chai point à savoir le m otif de son voyage; je me contentai de le
recevoir avec honnêteté et empressement.
C ’est dans son chemin qu’il trouva Courby ; il le pria de rétro
grader jusqu’à Clermont, et 11e le quitta plus jusqu’à ce que les
bilh ts fussent souscrits. Je fus informée de tout cela au retour
de mon époux. Jusqu’alors il m’avoit dissimulé l’embarras où
�( 5 )
l ’avoit jeté sa complaisance pour un faux ami ; il me montra pour
18,000 ir. de billets , qui suffisoient pour le libérer.
Bientôt il s’occupa de placer ces billets à Thiers ; et le sieur
de Murol l’ignora d’autant moins, que Courby prit plusieurs fois
un cheval chez lui ( à la Borde ) pour y aller, et je crois même
un domestique.
Dans le courant de septem bre, je vis M. de Murol père une
fois à Aigueperse : il parut y être venu pour consulter M. Lagout
sur sa santé, c r a ig n a n t , d is o it-ilê tr e atteint d hydropisie. A son
retour il ne dit rien de la consultation; et cette réserve m’ayant
étonnée, j’en demandai la cause à Courby qui l’avoit accompagné.
Il me répondit q u e, sur les questions de M. Lagout, M. de
Murol avoit avoué qu’une gale traitée avec trop de précipitation
avoit depuis dix ans dérangé sa santé ; qu’il lui sem bloit, de
loin en loin, sentir une nouvelle invasion de cette m aladie, et
que sa santé alloit toujours en empirant ; que M. Lagout lui avoit
ordonné une certaine eau , dont la recette ou l’adresse étoit
contenue dans un petit imprimé qu’il lu i remit.
M. de Murol partit, engageant Courby à aller le voir les der
niers jours de septembre, à la Borde, où ses fils devoient venir
faire une partie de chasse.
C ’est au 29 ou 3o septembre qu’on place l’épouvantable ac
cusation qu’ont répandue les sieurs de Murol contre le malheu
reux Courby. Hélas! ils l’accabloient encore de démonstrations
d’amitié , quand déjà leurs affreux soupçons le signnloient en
public comme un vil criminel ; et le poison qu’ils lui préparoient
étoit bien plus dangereux et plus subtil que celui........ Mais à
quoi tendroit une plus longue réticence ; il faut bien m’avouer
à moi-méme que Courby est accusé d’un empoisonnement.
C ’est, dit-on, en mangeant des pèches que le sieur de Murol
père aperçut au fond de son verre un sédiment épais, dont le
goût lui lut désagréable, quoiqu’il eût mangé sans répugnance
les pêches qui avoient été saupoudrées de la même matière. Il
vomit beaucoup , éprouva des douleurs aiguës, eut des ulcères«
�( 6 )
dans la b ou ch e, et dit à ses am is, le lendem ain , qu’il croyoil'
avoir été empoisonné.
Voilà ce qu’a répandu la famille de M urol, en ajoutant même
que Courby, présent, disoit en confidence aux assistans : Il n’en
reviendra pas.
Ici toutes les époques deviennent précieuses, car les événemens postérieurs portent avec eux des conséquences pressantes.
Le jour même de cet événem ent, et le lendemain , les fils
M urol, leurs am is, et C o u r b y , firent la partie de chasse projetée.
Le |6 octobre, Courby retourna à la Borde : Murol fils aîné
lui emprunta huit louis pour payer des impositions ce même jour.
L e sieur de Murol père étoit présent, et dit qu’il en faisoit son
affaire.
Le même jo u r , Murol ainé engagea Courby à aller avec lui
voir le curé de Beauregard, et le sieur Parricaud, qu’il n’avoit
pas v u , dit-il, depuis son retour de Paris.
Le 10 octob re, M. de Murol père envoya son domestique h
A igueperse, avec une lettre d:invitation à Courby pour aller à
la Borde le dimanche suivant, manger un cochon de lait avec
le curé de Beauregard.
En e f f e t , le d im a n ch e su iv a n t , i3> o c t o b r e , C o u r b y alla dîner
à la B o r d e , fit le soir une partie de piquet avec M. de Murol
et le c u r é , et ne revint à Aigueperse que le lendemain.
Le 21 octobre, M. de Murol père vint à Aigueperse avec le
nommé Cbapus , domestique de son fils. Courby étoit à Gannat,
et j’engageai M. de Murol à diner.
Quand j’allai donner des ordres à la cuisine, mes domestiques
me recommandèrent de ne pas laisser toucher mes enfans par
M. de M urol, parce que Chapus leur avoit dit qu’il étoit plein
de gros boutons, depuis un remède que M. Lagout lui avoit
donné.
En attendant le dîner, M. de Murol alla chez M. L agou t,
où Couiby de retour alla le chercher.
Tém oin de la première conversation, on ne lui cacha pas la'
�( 7 )
seconde , et il entendit M. de Murol causer avec M. Lagout de
l’effet de son remède. M. de Murol se plaignit d’avoir eu des
coliques, des vomissemens, et une salivation incommode qui lui
avoit fait naître de petits ulcères dans la bouche. Il termina
cependant par rem ercier M. Lagout du rem ède, parce que sa
santé é to it, dit-il, beaucoup meilleure depuis quelque temps.
M. Lagout avoua ne pas connoltre la composition de l'eau qu’il
n’avoit conseillée qu’en le déclarant ainsi, et sur l’approbation
que sembloient y donner ses confrères. Il ne s’étonna pas des
accidens dont lui avoit parlé M. de M u rol, parce qu’il soupconn o it, d it-il, que le remède contenoit du mercure.
M. de Murol partit le soir, et recommanda beaucoup à Courby,
s’il venoit à la Borde dans la sem aine, de ne pas traverser l’Allier
qui avoit, dit-il, grossi beaucoup, et où il s’exposeroit.
Il laissa à Aigueperse une charrette couverte d’un drap , et em
prunta de
une carriole pour faire un voyage à Montluçon.
Le 29 ooptcnfljro, le sieur de Murol père vint à Aigueperse
avec un de ses fils, pour rendre la carriole qu’il avoit empruntée ,
et reprendre la sienne avec un cheval de selle que sou iils avoit
prété à Courby depuis deux mois.
Ils parurent désirer reprendre les effets de 18000 francs, si
C o u r b y ne les avoit pas négociés; e t Murol fils sembloit seul y
m ettre q u e lq u e h u m e u r. C o u r b y avo it n é g o c ié p our 16400 fr.
d’effets , p our ses propres dettes ; e t il répondit à M. d e Murol
p è re , que si la proposition faite par lu i-m êm e ne lui convenoit plus, il étoit prêt à lui souscrire des effets équivalens; et
il en signa en effet pour 19362 francs , ce qui comprenoit un
intérêt sans doute assez considérable; et je souscrivis moi-même
ces nouveaux effets dont les sieurs de Murol sont aujourd’hui
porteurs.
Un mois se passa ensuite sans que j’eusse rien de commun
avec cette famille. T out d’un coup , au mois de d écem b re,
j ’appris l’ horrible nouvelle que le sieur de Murol accusoit hau
tement Courby de l’avoir empoisonné, et qu’une procédure cri
�( 8 )
minelle étoit provoquée par ses fils et lu i, non qu’ils eussent osé
accuser en leur nom , mais à la diligence du magistrat de sûreté
de C lerm ont, qui les faisoit tous entendre comme témoins.
Ce crim e, ces com binaisons, mes idées accablantes, un retour
de comparaison sur les temps cruels des délations et des écha
fauds , tout cela m’ôta le discernement et la réflexion. Je ne
voulus entendre celles de personne. Mon époux partit, et je me
trouvai seule à la vue de ces indifférens qui soupçonnent tou
jours, et ne réfléchissent jamais.
Quoi qu’il en soit, le temps qui s’est écoulé depuis le mois de
décembre a permis à la justice de faire d’exactes recherches. L e
sieur de Murol p é r e , âgé de près de quatre-vingts a n s, a été
atteint d’une maladie épidémique inflammatoire, à laquelle s’est
jointe une hydropisie. Il s’est mis alors dans les mains d’un ch i
rurgien ignorant, et il est mort dans les premiers jours d’a v r il,
ayant survécu par conséquent plus de six mois ,à son prétendu
empoisonnement.
Je n’ai jamais désiré la mort de personne ; mais je leconfesse
sans rougir, la mort de cet homme a ôté de mon cœur un far
deau bien pesant. Ce n’est pas que j’eusse , comme de V itellius,
d e la joie à co n sid érer le c a d a v r e d ’un e n n e m i ; loin d e m o i c e
sentiment de vengeance. Mais je n’ai pu m’empécher de dire:
C ’est là qu’étoit cachée la vérité ; c ’est là que le triomphe de
l ’innocent sera écrit par les mains même de la Providence.
Que mes lecteurs me pardonnent cet aveu d’un mouvement
<jue je n’ai pu vaincre. 11 faut avoir été dans ma position cruelle,
pour sentir qu’elle juctifiecoit même un sentiment moins légitime.
Me voici donc devant mes juges , incertaine maintenant de
ce qu’il me reste à leur dire; car quand toute la procédure me
seroit con n u e, je ne puis sans ridicule me jeter dans la carrière
polémique d’une discussion de droit criminel.
Mais la défense de mon époux sera plus dans la conviction de
«es juges que dans mes efforts. Je n’ai voulu que révéler des
faits
�C9 )
faits de ma connoissance , et sans doute ils vaudront mieux, que
mes réflexions.
Un crim e ne se commet pas sans être nécessaire. C o u rb y ,
nanti d’effets signés de M. de M u ro l, n’avoit pas besoin de sa
défaire de lui pour les retenir. On est bien plutôt capable d’un
vol hardi, et sans dan ger, qu’on ne l’est d’un empoisonnement.
Si le sieur de Murol père est venu tant de fois après le 29 sep
tembre à A igueperse, et s’il a continué d’appeler Courby à la
Borde, qui pourrait se défendre d’étre convaincu qu’il n’a pas
cru être empoisonné par lui ; car eût-il cherché la société de
son assassin ?
Cependant c ’e st, dit-on, le jo u r même du déjeuner des p èch es,
que le sieur de Murol se crut empoisonné ; c ’est le lendemain
qu’il fit part de ses craintes à ses amis.
S ’il eût soupçonné d’autres personnes , on pourrait se rendre
raison de cette continuation de confiance ; mais le sieur de
Murol a dit encore avoir vu Courby saupoudrer les pêches de
la matière blanche, qui ne lui répugna qu’au fond du verre, et
qui lui causa à l’instant même des douleurs et des vomissemens.
L ’idée de l’empoisonnement, et de son auteur, se seroit donc
liée sans intervalle dans son imagination ; et alors comment con
cevoir cette suite de fréquentation journalière , ces repas mul
tipliés, qui auraient rendu aisée la consom m ation du c r i m e ,
et qui n’ont cependant donné lieu au soupçon d ’a u c u n e teutative
nouvelle ?
Comment concevoir encore qu’un homme se croyant empoi
sonné le 3o septembre , se disant tourmenté des douleurs ordi
naires de ce m al, consulte un médecin le 20 octobre , et ne lui
dise pas un mot de ses m aux, ni de ses terreurs?
Là , au contraire , les vomissemens sont attribués, par le ma
lade lui-même , à une autre cause. Ils ne l’inquiètent point du
to u t, puisque l’amélioration de sa santé, et le ieineiclm ent au
médecin , sont le seul objet de sa visite.
Cette bonne santé se soutient pendant quatre mois consécutife,
B
�( IO )
f t il tombe enfin malade. Est-il mort d’hydropisie ? est-il mort
d’une inflammation dans le ventre ? On dit l’un et l’autre. On
dit aussi qu’il a été traité de l’hydropisie, et que la ponction lui
a. été faite deux fois dans le mois qui a précédé sa mort.
Je n’entends rien en médecine : mais les effets de l’arsenic
sont connus de tout le monde ; il passe pour le plus mortel et
le plus prompt des poisons.
Si son action est brûlante et corrosive, si le premier contact
produit des ulcères dans l’instant même , com m ent concevoir
qu’un homme empoisonné devienne lentement hydropique ;
qu’une surabondance d’eau exige deux ponctions ; qu’il ne se
manifeste d’inflammation que dans le bas-ventre, sans lésion des
viscères supérieurs?
L e cadavre a été vu , dit-on, par des docteurs délégués par
la cour criminelle. Je n’ai garde de supposer qu’ils se soient
livrés à des conjectures ; ils n’avoient point, comme les Arusp ic e s , à consulter les entrailles d’une victim e pour présager
Xavenir, Leur tâche plus facile a été de chercher dans le corps
d’un hom m e, mort hydropique, si des traces de poison étoient
visibles , et de vérifier les corrosions qu’auroient dû recéler
l’estomac et les p re m iè re s voies.
Si le poison n’a pas été visible à leurs yeux , le sera-t-il à la
conscience du juge?
On prétend que C o u rb y, au lieu de donner du secours à M. de
M u ro l, les 29 et 5o septem bre, a dit à plusieurs valets de la
maison qu’il étoit vieux et ca ssé, qu’il ne guériroit pas ; et de
commentaires en com m entaires, 011 va presque jusqu’à y voir
un aveu de son crime. C ’est ainsi que la malignité interprète
les expressions les plus indifférentes. Mais comment ne pas voir
qu’un coupable, dans cette position, auroit au contraire affecté
ce qu’il ne sentoit pas , et multiplié ses soins pour n’étre pas
soupçonné.
Il a , dit-on encore , demandé à un pharmacien , après l’empoi
sonnement , et dans la r u e , si l’opium étoit un poison qui fit
�( 11 )
_
souffrir long-temps. Autre arme de la m échanceté, pour en tirer
une conséquence à charge. J’ignorois ce fa it, et j’ai même des
raisons de suspecter ceux qui l’ont accrédité. En cherchant dans
le passé à quelles époques j’ai vu mon époux attristé de l’embarras
subit où la faillite d’un ami l’avoit jeté , je n’ai pas trouvé dans ma
mémoire qu’il ait eu jamais des instans de désespoir, ou du moins
il n’en a pas manifesté en ma présence. Il savoit d’ailleurs que je
viendrois à son secours ; et je suis humiliée que pour 18000 fr. et
surtout pour une dette d’honneur, on puisse croire que mon
époux se trouvât réduit à attenter à ses jours.
Quant à toute autre version, je la dédaigne. Quel insensé con
cevrait l’idée qu’il pourroit faire avaler de l’opium à son ennem i,
c ’est-à-dire, la plus amère des potions, sans qu’il la refusât, ou
qu’il pourroit la glisser à dose suffisante parmi ses alimens?
Celui qui pour se défaire d’ un homme veut l’empoisonner, a
pour première pensée d’ensevelir enlui-m ém e le secret de son
crime. S’adresse-t-il à un pharm acien, il est le premier qu’il
trompe; et à moins de croire l’empoisonneur sans bons sen s, on
ne supposera jamais qu’il ait parlé de la mort au pharmacien à qui
il demandoit du poison.
Mais qu’aura gagné la calomnie à tout cet amas de faits incohé
rent, et de petits détails exagérés par la passion, ou grossis par
les circonstances ? c a r , s’il n’est pas constaté qu’il y ait empoison
nement, il n’y a pas de coupable à chercher.
Vaut-il mieux abandonner ce qui se présente h l’idée la plus
simple, et substituer des fictions ou des conjectures , à ce qu’on
conçoit avoir été un effet de l’ordre naturel des choses ?
Et parce qu’un vieillard, d’un tempérament u sé , est mort à
près de quatre-vingts ans, faudra-t-il s’obstiner à croire qu’il n’a
dù mourir que d’une mort violente?
S'il n’étoit mort que du plus subtil des poisons, auroit-il résisté
six mois? auroit-il surtout passé quatre mois dans le meilleur
état de santé qu’il ait eu depuis dix ans?
Certes, je n’ai pas cru un instant qu’aucun homme au m onde
B *
So5
�( 12 )
put dire en son âme qu’il est convaincu de la réalité du crim e,
et que Courby mérite la mort : je l’ai cru encore moins de ses
ju g e s, pour qui le premier devoir est de ne se rendre qu’à l ’évi
dence. Mais il m’importoit aussi de détruire jusqu’à l’apparence
d’un crime dont l’idée seule m’accablera jusqu’à ce que le soup
çon même en soit détruit pleinement.
Je ne sens que trop de quelle influence cet événement sera
pour ma destinée future ; car le malheur d’ un aussi cruel soupçon
ne peut se réparer qu’à la longue ; et j ’ose croire que les cica
trices de la calomnie ne seront point ineffaçables. La conduite
à venir de mon époux se réglera, je l’esp ère, sur les circons
tances dans lesquelles sa mauvaise étoile l ’a placé.
Je puis donc voir encore le bonheur renaître dans mon asile;
et si c ’est une illusion, que du moins un si flatteur horoscope
ne soit pas enlevé à une mère : mon époux, rendu à sa fam ille,
ne verra dans son infortune passée que le devoir sacré d’en effacer
jusqu’au souvenir. Il peut encore, malgré la calomnie, transmet
tre à ses enfans un nom sans ta ch e, et vivre avec honneur dan«
leur mémoire»
C O U R B Y , née R O L L A T .
�( *3 )
CONSULTATION.
L e C O N SE IL SO U SSIG N É , qui a lu le mémoire de la dame
R ollat, femme Courby ,
E s t i m e , d’après les faits contenus audit m ém oire, que si les
médecins délégués par la cour criminelle pour examiner le ca
davre du sieur de M urol, n’ont pas trouvé de traces de poison,
ou s’ils n’ont pas exprimé une opinion certaine et fondée sur c e
genre de m ort, il paroit impossible qu’un jury se déclare con
vaincu que le sieur Courby est coupable.
On n'a pas accusé le sieur Courby d’une simple tentative d’em
poisonnement , mais bien d’un empoisonnement effectué avec de
l’arsenic jeté sur des pèches. Par conséquent il ne faut pas sé
borner à examiner s’il y a preuve de la tentative, mais il faut
savoir s’il y a un empoisonnement et un coupable.
L a question préalable d ’ une instru ctio n crim in e lle e st de Cons
tater le co rps d ’ un d é l i t , de m ê m e que la p re m iè r e c h o se à e x a
m in er par le ju ry est de savoir si le délit est constant.
Car il n’est pas besoin de chercher s’il y a un coupable, lors
qu’il n’y a pas certitude qu’il y a eu un délit : D e re priusquàm
de reo inquirendum est; e t , comme le dit Dom at en son Traité
du droit public : « C ’est le premier et le plus indispensable des
« devoirs. Cette preuve est même tellement essentielle, qu’elle
« ne peut être suppléée ni par les dépositions des témoins , ni
« par des conjectures, ni même par la confession de l’accusé. »
D ’après c e la , peut-on bien dire que le corps du délit imputé
au sieur C ouiby, est constant, et qu’il est certain qu’il y a eu
empoisonnement? Rien ne paroit au contraire moins p ro u vé .
�( 1 4 }
Aucun rapport de médecin ou chirurgien ne parolt avoir pré
cédé ]a mort du sieur de Murol : lui seul a eu quelques soupçons
que rien n’a vérifiés. Ainsi , jusque-là aucun corps de délit n’est
constaté.
Après la mort du sieur de Murol , la cour criminelle a bien
fait ce qui étoit en elle pour constater le corps du d é lit, puis
qu’elle a commis des hommes de l ’art pour visiter le cad avre,
et en décrire l’état. Le rapport qui a dû en être fait sera soumis
au ju ry , s’il est antérieur à l’acte d’accusation ; et c ’est là où
le jury puisera principalement les idées qui appelleront sa con
viction sur le fait de savoir s’il y a un d é lit, c ’est-à-dire, s’il
est constant que le sieur de Murol père est mort empoisonné.
Sans doute la présence du poison n’est pas toujours visible ;
mais son effet n’en est pas moins marqué par des signes exté
rieurs , surtout quand le malade en a été victim e, et quand il
s’agit d'un poison aussi violent que l’arsenic.
>'f'Au^un auteur n’a mieux décrit les effets de ce poison , et les
signès'«ïf3muels on peut les connoitre , que M. Mahon , en son
Traité de niécjecine légale; et c ’est le meilleur guide qu'on
puisse avoir poiii\,raisonner sur une matière aussi grave et épi
neuse.
Les poisons corrosifs,dit cet auteur, tuent très-promptement,
et leurs effets s'annonceut^nvec une rapidité qui ne permet guère
de douter de leur emploi.\j!Tdme 2 , p. 275. )
L ’arsenic est soluble dan^tte^Lles liquides ; c ’est le plus in
domptable des poisons : il ne^ p ^ étre m itigé, ni masqué en
aucune manière. ( Page 276.
Quand il y a soupçon d’empoisonnement, tout médecin , avant
d’inspecter le corps , doit s’informer soigneusement de lïig e,
du sexe , du tempérament , des iorces , du genre de vie du
défunt , s’il étoit sain ou malade , combien de temps il a
vécu depuis, de quelles incommodités il s’est plaint, quelle
.espèce de régime cai conduite il a observée après , s’il a été
secouru par un inedeoïn expérimenté ou par des ignorans.
( Page 2ÇG. )
�c i5 )
5° ° \
Après c e la , l’inépection du cadavre consiste à examiner l'état
des parties extérieures et les signes intérieurs du corps.
Quand l’arsenic n’est pas conservé en nature dans quelques
viscères , ce qui arrive fréquem m ent, sa présence est au moins
manifestée par des traces de lésion et de corrosion assez remar
quables dans toute la route qu’il a parcourue (1) ; son action va
même jusqu’à se manifester au-dehors (2) ; et quelque nombreux
encore que soient ces signes, le médecin , comme le ju g e , ne
peuvent se croire convaincus que par leur ensemble.
Ici il faut d’autant plus de circonspection , qu’il s’agissoit d’un
sujet vieux, et dont la santé paroissoit altérée depuis long-temps.
D es douleurs internes et des vomissemens sont, dit-on, le seul
indice de poison qu’il a remarqué lui-méme (3). Mais une foule
(1)« 2°. L ’érosion inflammatoire, gangrène, taches éparses dans l’oesophage,
l ’estomac, le pylore, les intestins, le sphacèle de ces parties. — Quelquefois l’estomac percé, — le sang coagulé, — le péricarde rempli d’ un fluide jaunâtre ou
c o r r o m p u , les autres viscères ramollis et comme dissous, parsemés d’hydatides,
de pustules, de taches; le coeur flasque et comme racorni; le sang qu’il contient,
noir et presque solide; le foie noirci, ou livide, ou engorgé. »(M ahon, pag. 272.)
« On voit enfin, tant extérieurement qu’intérieurem ent, des vessies disper
sées ça et là, remplies d’ une sérosité jaune ou obscure, et presque toujours d’une
odeur désagréable. » ( Ibid. pag. 273. )
(2) « Distension excessive de l ’abdom en, au point d ’ e n menacer la rupture ;
— taches de différentes couleurs sur la surface du corps, surtout au dos, aux
pieds, à l’ epigastre ; — la prompte dissolution, quand la personne est morte du
poison. On peut trouver dans la dissection du cadavre des indices certains d’em
poisonnement : — la roideur des membres, la tuméfaction du ventre, ne sont
pis des signes constans ; — mais ce qu’il y a de constant dans les cadavres des
personnes quiontpéri d’ un poison âcre ou caustique, c’ est de trouver l’œsophage,
l’estomac et les intestins grêles, atténués, enflammés, gangrenés, rongés et sou
vent percés.... Il suffit de résumer ces signes, pour être convaincu de la néces
sité de ne jamais sc décider que par leur ensemble. » ( Ibid. p. 270, 2 7 1 , 307. )
(5) «Quand on n’a pas été à temps d’examiner la nature du vomissement, que
les symptômes sont passés, que le malade est guéri , peut-on tirer des indices
sùffisans de l’assertion du plaignant, et de celles des personnes qui l’ont assisté?
— Je ne le pense pas. » ( Ibid. pag. 3o 6. )>
�( 1 6 }
d’alimens, même trés-sains, peuvent fournir les mômes résul
tats (1).
Il paroit que le sieur de Murol avoit été mal traité d’une
gale. Les empiriques ont pour ces sortes de maux des remèdes
dont la promptitude séduit le m alade, mais dont l’effet double
ment funeste consiste à faire rentrer dans la masse du sang une
humeur vicieuse, dont la nature cherchoit à débarrasser le corps:
et s’ajoute à c e mal r é e l, le mal plus grand peut-être du remède
lui-même. Aussi est-il constant qu’ une éruption rentrée suffît
seule pour agir mortellement sur l’individu, et laisser des traces
presque semblables à celles du poison (2).
L ’opinion qn’a pu avoir le sieur de Murol lui-même sur son
état, ne doit pas être d’un très-grand poids; car on sait com
bien un m alade, «t surtout un vieillard, est sujet à se frapper
l’imagination : pour peu que ses craintes soient accréditées par
quelque soupçon, il ne trouve plus rien que d’extraordinaire dans
son état, et il s’obstine à ne pas croire que des maux naturels, ou
la caducité , puissent être l’unique cause de son dépérissement.
Cependant 1a plupart des maladies vives s’annoncent par une
invasion soudaine; et cette rapidité même semble tellement inex-
(1) « Q u ’ un homme ait mangé des alimens difficiles à d ig érer, ou faciles à
entrer en putréfaction, il peut arriver que quelque temps après il se trouve
très-m al, et q u ’il ait tous les symptômes du poison, jusqu’à mourir.
» J’ai vu une châtaigne rô tie, avalée toute en tière, donner tous les signe*
de l’empoisonnement. Les têtes et pieds de veau , les écrevisses, les huîtres,
les vins troubles et avariés, ainsi que les vins frelatés, ont très-souvent aussi
produit cet effet. » ( M alion, pag. 29g. )
(2) « Certaines maladie» laissent sur le« cadavres des traces peu différente«
des signes ordinaires du poison. »
« Une éruption rentrée, une affection scorbutique très-avancée, une bile
très-âcre, etc. — Mais par une contemplation réfléchie des sym ptôm es, et la
comparaison que le médecin en fera avec les signes que porte le cadavre, il
distinguera aisément les restes d’une maladie violente, d’avec les caractères de
l’empoisonnement. » ( Ib id . pag. 3 i 3. )
p lica b le,
�C 17 )
plicable, qu’on repasse alors dans sa mémoire Jusqu’aux moindres
détails qui ont précédé; les choses quiétoient auparavant les plus
simples se grossissent, la crédulité s’en empare. P o st hoc, ergo
propler h o c , se d it-o n ; et ce raisonnement de l’ignorance n’en
séduit pas moins quelquefois les personnes les moins prévenues.
Un soupçon alors, né du plus léger indice, acquiert bientôt de
la consistance, à tel point que les explications les plus naturelles
sont dédaignées ; le préjugé l’emporte sur l’expérience ; et on ferme
les yeux sur les exemples plus frappans, qu’on a eus souvent sous
les yeu x, des bizarreries de la nature, et des accidens de la yie (1).
Car en cette matière , dit le docteur C o ch in , 'et quand il s’agit
de juger des poisons, les conjectures les plus vraisemblables ne
sont souvent que des illusions (2).
L e célèbre auteur Zacchias avoit été consulté sur un événe
ment presque semblable à celui du sieur de Murol. Un individu
avoit fait un ample diner avec un am i, et ne tarda pas à éprouver
de grands malaises qui furent suivis d’un prompt dépérissement.
Il devint subitement pâle et extén ué, perdit la raison, et mourut.
Le diner ayant été son dernier acte de santé, les soupçons s’é
levèrent contre celui qui l’avoit partagé ; il fut mis en prison.
L e cadavre fut ouvert, et Zacchias y trouva les intestins trèsenflés, le sang coagulé dans les ventricules du cœ ur, la substance
même du cœur d’une couleur dégénérée, la tête et les lèvres
grosses, les poumons livides et adhérens , le foie corrompu.
T ou t cela pouvoit paroitre des signes de poison. Mais ce docte
(1)
« Il est une infinité de maux sourds, qui augmentant insensiblement en
intensité, peuvent avoir affligé un homme depuis longues années, sans qu’il
s’en soit lui-mème beaucoup aperçu, et q u i, éclatant tout à coup, paroissent
inconcevables à ceux qui ne sont pas au fait des divers accidens de la v ie , et
qui ont l’imagination préoccupée. » ( Ibid. png. 317. )
(a) Quest. du poison, t. i er. , pag. 4 - Recherches sur les signes anatomique*
et judiciaires des signes d'empoisonnement, par M . de Retz.
G
�M
C 18 )
médecin ne chercha que dans son art et dans son génie des con
séquences que la prévention auroit dénaturées, s’il se fû t aban
donné aux fausses impressions de l’opinion publique.
Dans une consultation très-méthodique et très-savante, Zacchias suivit pas à pas tous les symptômes décrits; et il fit résulter
de leur ensemble, que l’homme étoit mort de la jaunisse.
Il ne jugea pas possible que ces symptômes fussent nés du
poison, puisque la nature n’avoit pas fait un effort continuel et
sans relâche, pour se débarrasser de cet ennemi dangereux (x).
Il y avoit eu un vomissement soudain ; mais il avoit cessé ; mais
il n’y avoit pas eu de ces douleurs opiniâtres et de ces angoisses
toujours croissantes, qui dénotent une prochaine dégénération
des solides (2).
La corruption du foie et l’adhérence des poumons avoit paru
de quelqu’iinportnnce à Zacchias; mais il pensa que si la cause
en fût venue du poison, l’estomac et le cœur auroient dû ^tre
lésés et corrodés auparavant (3).
D ’après cela Zacchias n’hésita pas à prononcer que le malade
n’étoit pas mort de poison, mais d’une maladie naturelle (4).
L e s auteu rs q u i on t é c r it sur le droit cr im in e l ne conseillent
pas une moindre circonspection dans les jugemens qu’on peut
porter sur de semblables matières.
(1) « A ccid en tia , si ex veneno administrate superveniant, soient, cum
impe.tu tjnodam , ac vehementia apparerò, non tolerante naturò vim im
provisant ipsiiis veneni. » ( Zach. Consil• 16. )
(2)« Vom i tus indesinens, molestia intolerabilis, dolores pernecabilet ,
lipothymia , syncopis , et alia. » ( Ibid. )
3
( / « Primo et antequàm hepar lad atu r , necesse ett Ited i stomachum
Otque etiam cor. » ( Ibid. )
4
( ) « Igitur ex pradîctis patet N... à propinato veneno non fuisse tx tinctuni, sed potiùs à morbo quodam naturali. » ( Ibid. )
�( 19 )
J t 2>
u Plus l ’accusation de poison est grande, dit M. P r é v it, céîa lèbre crim inaliste, plus on doit examiner avec soin si elle est
u fondée. La mort est tous les jours accompagnée de symptômes
« qui en imposent sur cet article. Ainsi il faut user de beautc coup de prudence, observer avec soin si les accidens dont
« se plaignent les personnes qu’on dit empoisonnées sont ab« solument les suites du poison : si la personne empoisonnée
« est m orte, l’ouverture doit apprendre et constater le poison ;
« il se manifeste clairement par les premières voies, e tc .»
C Principes sur les visites et les rapports, pag. 226. J
Il y auroit donc bien du danger à s’en tenir à de simples
soupçons, ou à des indices équivoques, dans une matière d’aussi
grande conséquence. Car il suffit que d’autres maladies pré
sentent des signes semblables à ceux du poison, pour que dans
l ’incertitude il faille juger qu’il n’y a pas de preuve d’empoi
sonnement (1).
Car qui pourroit, en matière crim inelle, juger par de simples
indices, lorsque les lois elles-mêmes exigent des renseignemens
certains , des indices indubitables , et des preuves plus claires
que le jour (2)?
* Mais que! peut-on entendre par ces indices indubitables? Les
criminalistes prennent encore la peine de les signaler de ma
nière à ne pas s’y tromper. Il faut que l’esprit du juge en soit
frappé et môme contraint au point de ne pouvoir pencher pour
l’opinion contraire. C ’est la situation de l'â m e , dans laquelle
(1) « Non dicitur probatum veneni crimen, ex probations continui
vomitus , ■pel ex livore corporis, aut spumis ex ore flluentibus , quia
hcec signa possunt etiam ex pestifera feb re , aut acuto morbo, citrà
veneni causam orire. » ( Farinac. qucest. 2, n°.
32
, prax. crim. )
(2) «. Munitfi sit apertissimis documentis , vel indiciis ad probation
tionem indubitatis et luce clarioribus. » ( L, Sciant » cod. De probat. )
�( 20 )
l’esprit se repose sur le parti qu’il vient de prendre comme sur
une découverte assurée et satisfaisante, sans revenir jamais à
hésiter dans la conviction qu’il vient d’acquérir (1).
Ces maximes sont puisées dans la loi elle-m ém e, qui ne veut
pas qu’on puisse condamner un individu sur de simples soup
çons (2), parce qu’en effet l’expérience prouve que celui qui
com m ence à soupçonner , ne voit jamais comme il doit voir (3);
ce qui a fait dire à M. Domat que le juge doit se défier de la
première impression qu’on lui donne dans une affaire , parce
qu’elle est malgré lui le mobile de sa conduite, et qu’il ramène
tout à cette opinion (4).
Si d’après l’examen de tous ces principes généraux, il faut se
former une opinion, le conseil n’hésitera pas à dire que s i , com m e
on paroît le croire , les médecins délégués par la cour criminelle
n’ont pas attesté avoir trouvé dans le corps du sieur de Murol
des traces de poison , il est impossible de penser qu’il y ait ni
conviction de culpabilité, ni même conviction d’empoisonne
m ent ; c a r , comme le dit la dame Rollat dans son mémoire ,
si le poison n’a pas été visible pour les médecins , comment le
seroit-il p ou r un ju r y ?
Il n’y aura pas de corps de délit , et par conséquent il sera
inutile de chercher un coupable.
Les circonstances qui ont.précédé et suivi l’évén em en t, ne
semblent pas même donner lieu à des soupçons bien fondés ; et
(1) « Indicium indubitatum est quod coarctat mentem judicis ita ut
omnind credat, nec possit in contrarium inclinare. E st demonstratio
rei per signa sufficientia per qum animus in aliquo tanquam existente
36
35
quiescit , et plus investigare non curat. » ( Farinac. qucest.
, n°.
.)
(2) « Ne suspicionihus qur.mquam damnari oportere divus Trajanus
icripsit. » ( L. A bs. f f . Poenis. )
3
( ) « Qui suspicatur plus se videre putat. » ( Extra de testib. )
(4) Tr. <lu droit public.
�C 21 1
le résultat achève même de détruire la première impression qu’une
semblable accusation ne manque jamais de répandre.
Le sieur Courby étant dépositaire d’effets signés du sieur de
Murol p ère, quelle qu’en fût la som m e, l’envie de se les appro
prier a bien pu faire croire que l’empoisonnement avoit été un
m oyen d’y parvenir. Mais rien n’empéchoit le sieur Courby de
garder ces e ffe ts, et de s’en dire le maître : l’usurpation des
billets étoit même plus solide sans crime.
La conduite amicale du sieur de Murol envers le sieur Courby,
depuis le 29 septem bre, est le meilleur témoignage que ce der
nier puisse avoir; et si le sieur de Murol a dit à la justice avoir
eu des soupçons dès le jour m êm e , ou il a été bien inconsé
quent , ou ses soupçons ne méritent pas une grande confiance.
On ne voit pas que le 29 septembre il ait appelé à son secours
aucun homme de l’art ; par conséquent il ne faut pas croire qu’il
ait eu d’aussi grandes souffrances , ni une aussi grande terreur
qu’il a pu le dire a p rès, lorsqu’il éloit atteint d’une maladie
chronique.
Bientôt au contraire il reprit son régime accoutumé. L ’es
tomac parolt avoir fait ses fonctions comme auparavant ; et il
est bien difficile de concilier cet état de santé parfaite avec la
dégénération progressive qu’auroit dû opérer la présence de l’ar
senic , e n q u elq u e petite quan tité q u ’on le suppose.
Il faudroit m ê m e adm ettre que le poison a été pris à grande
dose , si les pêches en étoient saupoudrées , puisqu’elles ont été
avalées entièrement avec le vin , et que le sieur de Murol n’a
répugné au poison que pour la portion demeurée au fond du
verre. Le véhicule auroit donc été suffisant pour porter une
grande quantité d’arsenic dans les premières voies.
O r , il est impossible que les effets de ce poison eussent cessé
tout d’un coup , et n’eussent laissé aucunes traces.
L e fait articulé , que le sieur de Murol a subi deux fois l’o
pération de la paracentèze , ou ponction , prouve qu’il a été
�considéré comme atteint d’hydropisie; et ce traitement achève
de détruire toutes les incertitudes.
Il y a donc lieu de conclure que les soupçons du sieur de
Murol n’ont eu aucun fondement réel ; qu’à soixante-quinze
an s, et avec les circonstances qui ont accompagné sa m ort,
elle n’a eu rien que de très-naturel.
D é l i b é r é à R iom , le 16 juin 1807.
L. F. D E L A P C H IE R , avocat; B A R T H E L E M Y , doct. méd. ;
A N D R A U D , avocat; C H O SSIE R , doct. m éd.; PAG ÈSM E IM A C , avocat ; G E R Z A T , doct. méd. ; P A G E S ( de
Riom ) , avocat ; M A L B E T , doct. méd.
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Juin 1807.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rollat, Eléonore. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Barthélémy
Andraud
Chossier
Pagès-Meymac
Gerzat
Pagès
Malbet
Subject
The topic of the resource
abus de confiance
prêt
empoisonnement
Murol (famille)
homicides
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour la dame Eléonore Rollat, épouse de François Philippe Courby, habitant à Aigueperse [suivi de ] Consultation.
Particularités : Notation manuscrite : « 28 octobre 1809, après cinq jours de débats, à la cour de justice criminelle, acquittement sur ma plaidoirie. »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Juin 1807
1806-1807
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1721
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0613
BCU_Factums_M0334
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53324/BCU_Factums_G1721.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aigueperse (63001)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
empoisonnement
homicides
Murol (famille)
prêt
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53326/BCU_Factums_G1723.pdf
53cbdbebcacd0362499facc3df8df587
PDF Text
Text
MÉMOIRE
Pour
R ené
E SM E L IN
G ilb e r t
A I G U E S , C la u d e- A m able
d e l e in e
E S M E L IN
E S M E L IN
L A P E L I N , et M a r i e - M a g -
, son épouse ,
G A R D E -D E L A V IL E N N E
son épouse ; M a r i e - A
-D E U X -
d é l a ïd e
J e a n - F r a n ç o is L A -
, et T h é r è s e
E S M E L IN ,
E S M E L IN
, veuve D e -
b ard , intimés
Contre G
e n e v iè v e
E S M E L I N , veuve r/Amable D
e c iia m p s ,
ex-religieuse, appelante $
E n présence de
P rocule
E S M E X il N , ejc-religieuse y
E l encore en présence de J a c q u e s - M
a r ie - P ie r r e
L O ISE L -
G U I L L O I S , tuteur de ses enf ans , héritiers d 'Agnès
E s m e l i n , leur aïeule m aternelle, aussi intimés.
L
A. dame Dechamps dénonce aux tribunaux un traité de fa
mille , rédigé sous ses yeux par d ’anciens jurisconsultes de son
c hoix ( * ) , qu ’elle a signé, exécuté, qu’elle approuve et exécute
journellement.
(*) MM. Bergier et Boirot.
A
�5«v
v ,> .
( O
C e traité de famille a été dicté par la nécessité.
Il a été dicté par la sagesse.
E n ce qui la concerne, il a été dicté,par la générosité.
Il lui assure un patrimoine d ’environ
Elle se dit lésée.
5oooo f r . , dettes payées.
.
E t il ne lui revenoit pas une obole.
Etienne Esmelin a contracté mariage avec M a rie -A n n e -B a rth é lem y G ib o n , le 29 février iy ô ô .
Ils se sont unis sous le régime de la co m m u n a u té, avec clause
expresse que « pour y acquérir d r o i t , chacune des parties y con» fondroit 600 f r .; et le surplus de leurs biens, avec ce qui leur
h
éclierroit par succession, donation , sortiroit nature de propre-
» fonds. »
Ils n ’avoient q u ’une fortune m édiocre; elle s'est grossie par de
nombreuses successions qui se sont accumulées sur leurs tê t e s ,
spécialement du c h e f de la dam e Esmelin.
L a première qui est échue de cet estoc , a été celle du sieur
Jean-Baptiste île Lachaussée, son o n cle , décédé à Moulins en 17 6 4 .
L a seconde, celle de G ilbert de L a c h a u ss é e , aussi son o n cle ,
négociant à M o u lin s , décédé en 1 7 66.
L a troisième, celle de Jacques de L achaussée, frère des précé
dons, administrateur de l’ H ôtel-D ieu de P a ris, décédé en 1787.
Il avoit fait un testament suivi de codicille , par lequel il avoit
no m m é pour ses légataires universels, M arie F a r jo n n e l, sa m è r e ;
An toin ette de Lachaussée , veuve Lafeuillant ; Elisabeth de
L a c h a u s s é e , fem m e Laplanche ; Catherine de L a c h a u ss é e , fille
majeure ;
E t les en fans et desccndans de M a rie de Lachaussée, décédée
fem m e Gibon.
L ’inventaire de cette succession enportoit l’a ctif à deux millions
soixante mille livres.
Il fut fait un premier partage provisionnel d ’une som m e de
�(
3 )
1179500 fr. d ’effels r o y a u x , devant L a ro clio , notaire au châtelet
de. P a ris , le 29 avril 17 8 8 , qui constate que le sieur Esmelin
toucha pour sa fem m e un premier à-compte sur cette succession ,
de i 685oo fr.
M a rie F a rjo n n e l, aïeule de la dame Esmelin , qui avoit touché
un pareil à-compte de i 685oo fr. par ce partage pro visionn el,
m ourut peu de temps après.
L a dame Esmelin mourut ensuite au mois de novembre 1789.
L e sieur G ibon , son frère , directeur des aides à ChâteauT h i e r r y , mourut au mois de juillet 1790.
11 laissa encore une succession très-opulente, qui étoit divisible
en trois portions égales, entre les en fans E sm e lin , le sieur G i b o n ,
de M o ulin s, leur o n c le , et le sieur G ib on -M ontgon , leur cousin
germain.
L e sieur G ilbert G ib o n , père de la dame E sm elin , mourut en 1792.
Enfin Elisabeth E sm e lin -D u c lu so r, l ’une des filles des sieur et
dam e Esmelin , m ourut aussi sans postérité dans le courant de la
m êm e année.
Etienne Esmelin père resta en possession de toutes ces successions.
Il avoit marié q u e lq u e s-u n s de ses enfans avant la mort de
M arie-A nne-Barthélem y Gibon , son épouse.
Il en a marié d'autres d epuis, et il avoit fait aux uns et aux
autres des avancemens d ’hoirie.
D e u x de scs filles , Procule et Geneviève E sm e lin , avoient pris
le parti du cloitre, et avoient fait profession avant la mort de leur
mère.
M ais les lois des
5 brumaire et 17 nivôse an 2 ayant aboli leurs
v œ u x , elles furent rappelées à toutes ces successions.
Bientôt le refus de Procule Esmelin de prêter s e r m e n t, attira
sur elle des persécutions que chaque jour pouvoit rendre plus graves.
L e sieur Esmelin crut devoir prendre la précaution de se faire
céder ses droits, dans toutes ces successions , pour se m e t t r e , à
toutes fins , ainsi que ses enfans, à l’abri des recherches nationales. ;
Geneviève Esmelin avoit pris un parti tout opposé ; non-sculeA 2
�ment elle avoit prêté se r m e n t, mais elle ne dissitnuloit pas l ’in
tention où elle étoit de se m arier; et le sieur Esmelin crut encore
prudent de se faire céder ses droits m atern els, pour garantir sa
fam ille des recherches futures de ce gendre inconnu dont il étoit
menacé.
L e rapport de l ’effet rétroactif des lois des
5 brumaire et 17
nivôse ne tarda pas à rendre ces précautions inutiles.
M ais , dans le même t e m p s , le sieur Esmelin père étoit forcé
d ’en prendre de semblables avec d ’autres de ses en fans.
L e sieur D ebard étoit inscrit sur la liste des ém igrés, et A d é
laïde E s m e lin , son épouse, étoit en réclusion ; elle étoit menacée
du séquestre sur tous ses biens. Il fallut encore avoir recours à la
cession de ses droits maternels. Elle consentit cette cession à son
p è r e , le 1 " germinal an 2. Mais com m e elle n ’étoit que simulée,
il lui en donna une contre-lettre.
L ’inscription du sieur E s m e lin -D e u x -A ig u ë s,su r la liste fatale,
força encore le sieur Esmelin père de faire avec lui des actes simulés,
pour se soustraire, com m e ascendant d ’é m ig ré , aux persécutions
des agens du fisc.
T o u s ces actes ont disparu avec les causes qui les avoient fait
naître; et la darne D echam ps, qui en abuse aujourd’h ui, sait m ieux
que personne q u ’ils n ’ont jamais eu de réalité.
Les orages révolutionnaires s’étant c a lm é s , plusieurs des enfans
E.smelin, la dame Lapelin , le sieur E sm e lin -D e u x -A ig u e s, et les
mineurs L o is e l, ont cru devoir rechercher leurs droits maternels.
L e sieur Esmelin a terminé avec la dame Lap elin, en lui donnant
un à-compte sur
11 succession de R e n é Gibon ;
Avec le sieur Esm elin-Deux-Aigues , en s’en référant à l'arbi
trage de M. L u c a s , président du tribunal de G a n n a t, leur parent,
q u ia dicté la transaction passée cntr\nix au moisdeger111in.il an i5 .
Q uan t aux mineurs L o ise l, la contestation est restée indécise.
Ces actions éloient justes en elles-mêmes; et le sieur Esmelin se
soroit sans doute empressé de les prévenir , s’il n ’avoil pas été
arrêté p,ir les difficultés insurmontables q u ’il IrouYoit u distinguer
aa fortune personnelle de celle de ses enfans.
�( 5 3
M ais la dame D ech a m p s, subjuguée par un conseil pervers, qui
avoit voué au sieur Esmelin une haine implacable en échange des
services signalés qu ’il en avoit reçus, a dirigé contre lui des actions
d ’un autre genre, qui tendoient à compromettre sa délicatesse et
qui l’ont abreuvé d ’amertume.
Bientôt la perspective effrayante du mauvais état de ses affaires
est venue m ettre le comble aux chagrins dont il étoit dévoré.
Il avoit fait imprudemment une affaire de finance avec la dame
L e b lo n d , A m é r ica in e , qui , privée de ses revenus des île s, dont
la rentrée étoit suspendue par la guerre maritime avec l’A n g le
terre, avoit obtenu de sa facilité des avances én o rm e s, au point
qu ’il se trouvoit son créancier de plus de 160000 fr. sans la plus
légère sûreté, et à peu près sans espoir de les recouvrer.
L e sieur Esmelin n ’avoit pu faire d ’aussi grosses avances qu ’en
puisant dans les caisses des banquiers de Moulins et de C lerm ont.
Chaque jour ses dettes alloient en cro issa n t, par le taux élevé
des intérêts qui s’accumuloient.
D éjà son crédit étoit épuisé chez les banquiers de C le rm o n t, qui
ne consentoient à renouveler ses effets qu ’avec l’endossement du
sieur R ené Esm elin, son fils aîné (*), et il ne pouvoit se dissimuler
qu'il couroit à grands pas à sa r u in e .
L ’âme flétrie par les outrages de la dame Dccliamps , et ne pou
vant supporter l’idée du renversement de sa fo rtu n e , il est tombé
malade dans les premiers jours de décembre i 8o 5 , et il e*st mort
le 19 du même mois.
L es scellés ont été apposés de suite par le juge de paix des lieux.
Quelque temps après, il a été procédé à un inventaire en form e,
en présence de tous lçs intéressés, et spécialement de la dame
D ech am p s, qui a assisté à toutes les séances.
Indépendamment de l’a ctif bon qui fut porté dans cet inven-
(*) Le sieur Esmelin aîné avoit <léj?i cautionné pour 60000 fr. d’eiïets do son
père à son décès; il est porteur de ses lettres , par lesquelles il le prioit do lui
donner sa signature.
�i <•/
. ( G )
tairo, il fut fait un état particulier des créances mauvaises ou dou
teuses , montant à 267600 f r . , qui fut signé par tous les héritiers,
et spécialement par la clame Dechamps.
L a dam e Decham ps dit dans son mém oire , page
4 , que pen
dant cet inventaire ses frères furent p o lis, caressons. Ces expres
sions sont trop foibles ; elle auroit dû dire qu ’ils la comblèrent de
témoignages de tendresse, q u ’ils ne négligèrent rien pour gagner
sa confiance, et pour la soustraire à la maligne influence du per
fide conseil qui l ’éloignoit de sa fa m ille , et la conduisoit à sa perte;
Que leur ayant paru avoir des besoins, ils lui remirent la somme
de 1000 fr. qui étoit provenue des premières ventes des denrées
de la succession ;
Q u ’elle prit différens effets mobiliers qui étoient à sa conve
n a n c e, sur la prisée de l’inventaire ;
Que dans le partage qui fut fait en nature d ’une partie du m o
b i li e r , ils l ’admirent pour un h u itiè m e , quoiqu’il ne lui en tevînt
q u ’un seizième ;
Qu'enfin ils ne cessèrent de lui prodiguer les égarTls et les bons
procédés.
Instruite par elle-même de l ’état des affaires de son père ; de
plus de iSo oo o fr. de dettes de banque sur lettres de change qui
venoient chaque jour à échéance, dont plusieurs étoient déjà pro
testées, et dont les porteurs pouvoient consom m er en frais tous les
biens de la succession ;
D é p l u s de Go,000 liv. d ’autres dettes par b ille ts, ob ligations,
rentes viagères 011 constituées ;
T é m o in de l ’état de dégradation et de désordre absolu, dans
lequel se trouvoient tous les biens co m m u n s, au point que sur 24
ou a 5 do m aines, il n ’y en avoit pas un seul dont les bûtimens ne
fussent en ru in e , les granges écroulées , et hors d ’état de contenir
la. récolte prochaine.
Plus pressée d ’ailleurs de jouir de son lot q u ’aucun de s?s co
h éritiers, ù raison de sa position, clic a été la première à désirer
le partage.
�*
i i
3
( '7 )
O n est convenu de faire estimer préalablement tous les Liens
qui devoient en être l’objet.
O n a nom m é pour experts les sieurs Pienaudet et F e rrier, connus
trop avantageusement dans l ’opinion publique pour ne pas réunir
les suffrages de tous les cohéritiers; et ils ont été si agréables à la
dame D echam ps , qu'ils ont vécu et logé chez elle pendant tout le
temps q u ’ils ont travaillé à l ’estimation de la terre du B ouis, qui
joint son habitation.
Cette opération term in ée, tous les copartageans sont unanim e
ment convenus de s’en référer, sur le règlement de leurs droits res
pectifs, à la décision de deux anciens jurisconsultes de C le r m o n t ,
dont l ’un éloit grand oncle maternel à la mode de Bretagne des
mineurs Loisel.
Ils se sont tous rendus à Clerm ont avec les deux e xperts, R e naudet et F e r rie r , dans les derniers jours de mars 1806, et tous
y ont séjourné sans interruption jusqu’au 21 avril suivant.
Chaque jour ils se sont réunis chez les arbitres.
L à , chacun des intéressés a fait valoir ses droits ou ses préten
tions.
T o u t a été v u , exam iné, discuté en leur présence par les arbii
très.
M ais com m e de tous les frères et sœurs Esrnclin, six seulement
avoient des droits dans les biens maternels , à raison de la m ort
civile de Procule et de G eneviève; que tous au contraire éloient
copartageans dans les biens paternels; le premier pas & faire élo it,
de distinguer les biens paternels et maternels, pour en form er deux
masses séparées.
L es arbitres ont tenté ce travail; mais ils n ’ont pu y réussir.
11 étoit impossible de retrouver les élémens de la plupart des
successions échues aux sieur et daine Esinelin, à défaut d ’inven
taires et de partages.
Il existoit à la vérité des inventaires des deux principales, celles
de Jacques de Lachaussée et de R e n é -B a rth é lém y G ib o n ; m a i s
les héritiers Esmelin ne les avoient pas en leur possession ;
n ’ùtoicnt pas en état de les représenter.
et ils
�( 8 )
Ils n’ avoient pas des notions exactes de la nature et de la consis
tance des effets dont ces successions étoient composées.
Us ignoroient ce qui en avoit été touché par leur père , en nu
méraire ou en papier-monnoie , et les différentes époques aux
quelles ces sommes avoient été versées dans ses mains.
L e s arbitres avoient d ’ailleurs sous les yeu x une expédition fa u
tive du contrat de mariage des sieur et dam e Esmelin , qui contenoit la stipulation pure et simple de la com m unauté , sans la
clause subséquente qui portoit que «pour y acquérir droit, chacune
» des parties y confondroit 600 fr. ; et le surplus de leurs b ie n s ,
» avec ce qui leur écherroit par succession , do nation, sortiroit
» nature de propre-fonds (*). »
D e sorte que les sieur et dame Esmelin paroissoient n’avoir con
tracté q u ’une com m unauté légale et conform e à l’article 276 de
la coutum e de B ourbonnais; d ’où il sembloit résulter que tout
ce qui étoit de nature mobilière dans les successions échues aux
deux époux , avoit été confondu dans la co m m u n a u té, et appartenoit par moitié à chacun d ’eux ; ce qui frappoit spécialement sur la
succession de Jacques de Lachaussée, presque toute composée d ’ac
tions de la compagnie des Indes, ou autres effets royaux payables
au porteur.
L e s arbitres, au milieu de cette o b scu rité, crurent apercevoir
une lueur de justice dans le plan simple de diviser la masse entière
des biens et des dettes en deux portions égales, dont l’une seroit
censée m a tern elle, et l’autre censée paternelle; ce qui donnoit aux
deux religieuses un seizième chacune de la masse réelle des biens,
et les chargeoit d ’un seizième des dettes (**).
(*) Cette expédition inexacte a été représentée par Proculc Esmelin , qui
l ’avoit trouvéo dans les papiers de la succession.
Elle paroissoit mériter d’autunt plus do confiance, quelle étoit écrite en entier
do la main de Barthélém y, notairo, dépositaire de la minute.
(**) La masse totalo do l’actif bon étoit de 5f)85<)5 fr.
Les créances actives mauvaises ou douteuses, do 2G7Ü30 fr.
Les dettes passives connues lors du partage, étoient du so 5y 5G fr.
Celles découvertes depuis s’élèvent à environ 20000 fr.
Les
�(o)
L es arbitres ne se dissimulèrent p as, et ne dissimulèrent pas à
tous les cohéritiers que ce plan éloit trop favorable à Procule et
Geneviève Esmelin , même sous le point de vue de la com m unauté
légale des père et mère communs , com m e elle paroissoit l’tHre
d ’après l’expédition fautive de leur contrat de mariage.
- M a i s , d ’une p a r t , il étoit urgent de prendre un parti pour satis
faire les créanciers , dont les poursuites pouvoient à chaque ins
tant porter partout l’incendie et la dévastation.
D ’autre p a r t , il falloit par-dessus tout éviter , pour l’intérêt de
tou s, d ’en venir à des discussions juridiques, qui présenloient un
abîme sans fond et sans rives, prêt a engloutir toute la fortune
des copartageans.
On ne considérait d ’ailleurs la portion que devoit recueillir P ro
cule E sm elin , que comme un dépôt confié à la vertu, qui devoit un
jour revenir à la famille.
E t à l’égard de la dame Decham ps , tous ses cohéritiers regardoient l’avantage q u ’elle pou voit retirer de ce mode de partage,
comme un sacrifice fait à sa position et à sa qualité de mère de
famille.
Q uant aux mineurs L o i s e l , indépendamment que l’acquiesce
m ent de leur père à cette mesure étoit suffisamment justifié par
l ’exemple de tous ses copartageans majeurs , grands oncles et
grand’ tantes de ses mineurs , qui avoient le même intérêt qu'eux ,
on eut soin de les dédommager amplement de la perte que ce plan
pouvoit leur occasionner, comme on le verra dans la suite.
C e mode de partage une fois adopté par tous les cohéritiers, on
vit bientôt disparoitre la majeure partie des difficultés qui divisoient
la famille Esmelin.
11 en restoit cependant encore, qui donnèrent lieu à quelques
débats entre les cohéritiers.
L a principale étoit relative au sieur Esm elin-Deux-Aigues.
A p rès sa radiation de la liste des émigrés , il avoit traduit son
père en justice, pour obtenir de lui le règlement de ses droits ma
ternels.
�<<<
( 10 )
L e sieur E sm clin , qui connoissoit m ieux que personne les inconvéniens et les dangers de soumettre celte discussion aux tribunaux,
consentit de s’en référer à l’arbitrage de M . L u c a s , président du
tribunal de G a n n a t , leur parent.
M . L u c a s , après avoir entendu les sieurs E s m c lin , père et fils,
pendant plusieurs séa n ces, et avoir examiné leurs mémoires res
pectifs, crut devoir fixer le débet du père envers son fils, pour tous
ses droits'maternels directs et collatéraux, à
5 y j 5 o f r a n c s , dont
42760 francs pour les cap itaux, et i 5 ooo francs pour les intérêts
ou jouissances; et ce fut d ’après cet aperçu que les parties traitè
r e n t , sous sa dictée, devant H u e , notaire à G a n n a t, le 17 ger
m inal an i 5 (*).
T o u s les cohéritiers du sieur Esm elin-Deux-Aigues connoissoient
parfaitement la sincérité de ce traité; et la médiation de M . L u c a s ,
prouvée par sa sig n a tu re , ne permettoit pas d ’élever le plus léger
doute à cet égard. M ais co m m e il sembloit en résulter quelque
avantage en sa fa v e u r , ils prétendoient q u ’il devoit s’en départir
pour se mettre à leur niveau.
L e sieur Esm elin-D eux-A igues insistoit sur l’exécution de cet
a c te , com m e étant un traité à f o r f a it , convenu de bonne f o i, sur
des droits successifs dont la quotité étoit absolum ent incertaine.
11 ajoutoit que l’avantage q u ’on prétendoit résulter de ce tra ité ,
n ’étoit rien moins que réel; q u ’il étoit plus que co m p en sé, par la
circonstance q u e , dans le plan du partage proposé, il n ’avoit à pré
tendre q u ’un seizième dans les créances actives paternelles, dont il
lui seroit revenu un huitièm e, si on n ’en avoit pas confondu la
moitié dans la masse maternelle, dont il étoit exclu au moyen de
l ’exécution de ce traité.
Il ajoutoit encore q u ’en supposant que ce traité produisit quelqn’avantage en sa faveur, cet avantage ne pouvoit être c r itiq u é ,
parce q u ’il étoit bien loin d ’absorber les réserves disponibles que
(*) I.a transaction fait mention expresso qu’ollo a clé pasjéo en prdscnco et
par la médiation de INI. L u ca s, <jui l’a signéo.
�/ / /
( "
)
s’étoit faites le père com m un par les différens contrats de ma
riage de ses en fans (*).
D ’après ces considérations , il fut arrêté que le sieur E sm clinD eux-A igu ës prélèveroit, avant tout partage, le montant de ce traité.
M ais le mode de ce prélèvement n ’étoit pas sans difficultés.
D ’une p a r t , le capital des droits successifs du sieur Esm elin.
Deux-tVigues devoit être prélevé sur la masse maternelle.
D ’autre p a r t, les jouissances, et le prétendu avantage qui pouvoit résulter de ce traité en sa f a v e u r , devoient être prélevés sur la
masse paternelle.
O n prit le parti d ’en faire le prélèvement sur la masse entière,
et ce parti étoit d ’autant plus raisonnable , que la masse paternelle
étant avantagée par le plan du partage, en faisant frapper ce pré
lèvement par égalité sur les deux masses , on se rapprochoit de
plus en plus du point de justice auquel les arbitres et les parties
se proposoient de parvenir.
C e t obstacle a p p la n i, il en restoit encore quelques autres, mais
qui éprouvèrent moins de difficultés.
L e sieur R e n é Esmelin aîné avoit des prétentions de plus d ’un
genre
La
de la
avant
contre la succession de son père.
principale résultoit de la donation que lui avoit faite son père
terre de B o u is, par acte du 2 mars 1 7 9 3 , immédiatement
les lois de l’égalité ; donation qui prenoit sa source dans la
réserve que s’éloit faite le sieur Esmelin , par les différens contrats
de mariage de ses enfans, de disposer de celte terre au profit de tel
d ’entr’eux qu’ il jugeroil à propos.
C ette circonstance formoit exception aux dispositions prohibi
tives de la Cou tu m e de Bourbonnais, qui interdisoit les avantages
entre enfans, autrement que par contrat de mariage.
(*) Les parties raisonnoient d’après l’expédition inexacte du contrat de ma
riage de 17 5 6 , qui rendoit communes aux doux époux toutes les successions
mobilières.
E11 raisonnant d’après la clause insérée dans ce contraído mariage, qui les ren
doit propres à chaque estoc, le sieur Esmelin-Deux-Aigues étoit évidemment lésé.
lia
�V I
( i*
)
L e sieur Esmelin père n ’étant d ’ailleurs décédé que sous l ’empire
du nouveau C o d e , tous les avantages antérieurs pouvoient être
considérés com m e légitimes , jusqu’à concurrence de la portion
disponible.
M ais le sieur René Esmelin n ’altendit pas q u ’on lui en dem andât
le sacrifice; il fut le premier à l’offrir à ses frères et sœurs; il n ’y
mit q u ’une seule condition, celle de l’union et de la c o n c o r d e , et
que tout se terminât à l ’amiable.
L a dame D e b a r d , de son c ô t é , élevoit des réclamations d'un
intérêt m a je u r , qui prenoient leur source dans une donation entre
vifs qui lui avoit été faite par les dames Delagoutte et G u d e ve rt,
le
5 mai 1 7 7 6 , de certains biens dont le sieur Esmelin étoit m ort
en possession , q u ’elle prétendoit avoir droit de prélever en nature
sur sa succession, indépendamment d ’un grand nombre d ’années
de jouissances de ces mêm es b i e n s , q u ’elle réclamoit à litre de
créancière.
L a dame D eb ard en fit généreusement le sacrifice, sans autre
indemnité q u ’une somme de 1200 francs à prendre sur les créances
douteuses , et sans y mettre d ’autres conditions que celles q u ’y
avoit mises son frè re , l ’union et la concorde, et que tout se ter
minât à l’amiable.
Enfin, le sieur D elav ilen n e , stipulant pour sa f e m m e , dont il
étoit fondé de p o u v o ir , fit aussi le sacrifice d ’une somme de 1000 fr.
qui formoit l’objet d ’une donation q u ’il prétendoit avoir été mal à
propos confondue dans la dot qui lui avoit été constituée par sou
conlr.it de mariage.
T o u s ces obstacles applanis ,
il fut question de procéder au
partage.
On fit un premier traité pour en fixer les bases.
C ’est dans ce premier traité que se trouvent tout le moral de l’opéra lio ti , les motifs qui l ’ont déterminée, les circonstances impérieuses
qui la rendoient nécessaire, les sacrifices généreux faits par plu
sieurs des cohéritiers pour assurer la paix et l’union dans la famille.
On en lit un second pour y traiter quelques objets particuliers,
�que tous les cohéritiers croyoient devoir être renfermés dans le sein
de la famille.
E t enfin un troisième, qui contenoit le partage.
Il étoit impossible d ’employer dans ce partage la voie du sort.
L e s rapports étoient tous in é g a u x , et varioient depuis
jusqu’à
5oo fr.
35ooo fr.
L e tirage au sort n ’eût pu sc faire sans être répété jusqu’à sept
à huit fois.
Les morcellemens qui en seroient résulté eussent été tels, que
chaque dom ain e, chaque arpent de terre eût été divisé en plus de
cent poriions , contre le texte de la loi et le Yceu de la raison.
On prit donc le seul parti proposable, celui de faire des lots do
convenance.
Mais les frères et sœurs de la dame Decham ps, toujours fidèles
à leur plan de la combler d ’égards et de bons procédés, eurent l’at
tention de lui laisser le choix de celui qui lui seroit le plus agréable.
Elle choisit des biens de la terre du B o u i s , qui étoient situés
dans la même commune que ceux de scs m ineurs, qui les joignoicnt
de toutes parts, et dont l’estimation lui étoit d ’autant moins sus
pecte, qu’elle avoit été faite-sous ses y e u x , et par des experts logés
et nourris chez elle pendant loul le temps de leur opération.
On usa avec elle des mêmes procédés pour le seizième des dettes
dont son lot d e v o it ‘être ch a rg é; on lui laissa le choix de celles
dont les intérêts étoient le moins o n é r e u x , et des créanciers sur la
complaisance desquels 011 pouvoit le plus compter.
Ces différentes opérations term inées, tous les héritiers Esmelin
retournèrent dans leurs fo y e r s , en bénissant leurs arbitres, et en
se félicitant de l’union et de la concorde qu'ils regardoient com m e
rétablies e n tre u x d ’une manière inaltérable.
M ais le bonheur de la famille Esmelin 11c fut pas de longue durée.
L a dame D e c h a m p s , rentrée dans ses foyers , y retrouva le
démon de la discorde, le misérable qui avoit conduit son père au
tom beau, et qui m é d i l o i t la ruine de sa famille.
D ès ce premier m o m e n t , il fut arrêté entr’eux de tenter, par
�t 'U .
( 4
)
toutes sortes de vo ies, l’anéantissement de tous les arrangemens
faits à C lerm o n t.
A v a n t de rien entreprendre, elle eut soin de s'installer dans
son l o t , de l’ai ferm er pour plusieurs a n n é e s, de se faire payer
d ’avance du prix du b a il, et surtout de laisser à ses frères et sœurs
toutes les charges de la succession dont jusqu’ici elle n ’a pas payé
une o b o le , et qu ’ils acquittent journellement pour elle.
A près avoir ainsi pris ses p récau tion s, et le 18 juin 1 8 0 6 , la
dam e Decham ps a fait citer tous ses cohéritiers en conciliation ,
pour venir à division et partage de tous les biens meubles et im
meubles délaissés par le père c o m m u n , sans avoir égard à tous
projets de partage , qui seroient regardés com m e non avenus.
C e tte citation a été suivie d ’un procès verbal de non concilia
tion , en date du g juillet.
Le
25 du m êm e m o is , la dame Decham ps a présenté requête au
tribunal d ’arrondissement de G a n n a t, tendante au fond à ce q u ’il
lui fu t permis d ’assigner ses cohéritiers , sur la dem ande en par
ta g e , dans les délais ordinaires , et à la première au d ien ce, sur sa
demande provisoire, tendante à ce qu ’ il fût sursis à la coupe et
exploitation des difierens bois de haute f u t a i e , et tous autres dépendans de la succession du père com m un.
E lle d e m a n d o it en m êm e temps q u ’il lui fu t permis de faire pro
céder à la visite et état de tous ces bois par e x p e r t s , à l’e ffe t de
constater tous ceux qui avoient été coupés et tous ceux qui étoient
sur pied, et d ’en fixer le nom bre et la v a le u r , p o u r , après ce rap
p o r t, être pris par elle telles conclusions qu'elle aviseroit.
C e lte demande provisoire cachoit une insigne perfidie. L a dam e
D echam ps savoil q u ’il existoit, au décès du père com m u n , plus de
i 5oooo fr. de lettres de ch a n g e, toutes éch u es, proteslées 011 re
nouvelées par ses frères et sœ u rs, non compris plus de 60000 fr.
de dettes ordinaires, dont les créanciers n ’éloient pas moins im
patiens.
Elle savoit que chacun de ses cohéritiers n ’avoit d ’autres res
sources, pour luire honneur aux cngagenicns les plus u rg en s, que
�3 ( j\
dans le prix de ces b o i s , qu’ils se hàtoient de vendre et d ’exploiter.
Son projet étoit de rendre leur libération impossible, de voir leur
liberté compromise, et tous les biens livrés à l’expropriation forcée.
C e p ro je t, d ir a -t-o n , étoit insensé; elle ne pouvoit elle-même
manquer d ’en devenir victime : cela est vrai ; mais fa u t-il nier
l’évidence, parce qu’elle passe les bornes ordinaires de la vraisem
blance et de la perversité humaine ? A - t- o n oublié le vœu de
Cornélie dans les Horaces i
Quoi q u ’il en so it, le tribunal de G annat a repoussé, avec indi
gnation, cette action provisoire, par son jugement du i 5 décembre
1806, rendu d'après les conclusions motivées de M . le commissaire
impérial.
Pendant que la dame Decham ps vexoit ainsi ses frères et soeurs,
et tentoit d ’arrêter par toutes sortes de moyens l’exécution des
arrangemens faits entr’eux, ses cohéritiers cherchoient à les conso
lider et à les régulariser à l’égard des mineurs Loisel.
L e sieur Loisel avoit été assigné depuis le
5 juin , en sa qualité
de père, tuteur et légitime administrateur de ses enfans, pour en
voir ordonner l’exécution ; mais il avoit cru devoir suspendre toutes
espèces de démarches jusqu’à la décision de l ’incident élevé par
la dame Dechamps.
C e t incident term iné, le sieur Loisel a convoqué un conseil de
famille le 24 décembre 1806.
C e conseil, composé du grand-père maternel des m in eurs, de
plusieurs de leurs oncles et de leurs plus proches p a re n s, après
avoir pris communication de la transaction du i 5 a v r i l, l’a ap
prouvée dans tout son contenu , et a autorisé le sieur Loisel à se
retirer auprès de M . le commissaire impérial, qui seroit invité à
désigner trois jurisconsultes pour examiner ce traité, et en dire
leur a v is, conformément à l’article 4G7 du C od e civil.
Le
5 i décem bre, sur la requête qui lui a été présentée par le
su u r L o is e l, M . le commissaire impérial a désigné trois anciens
jurisconsultes près la cour d ’appel, également recommandables par
leur expérience et leurs lumières, M M . A n d r a u d , B o ry e et PagesVerny.
:çà (
�K *.
( iG )
. Sur l’avis de ces trois jurisconsultes, les héritiers Esmelin , à l ’e:oception de la dam e D e c h a m p s , ont demandé l ’homologation de la
transaction du i 5 avril.
L a dame D e c h a m p s,fid è le à son plan de c o n t r a d ic t io n ,n ’a pas
m anqué de s ’y opposer.
M ais sans avoir égard à son opposition , dont elle a été déboutée
avec dépens, la transaction a été hom ologuée, sur les conclusions
de M . le commissaire im périal, par jugement du 21 février 1806.
L e 21 mars, nouvelle assemblée du conseil de fam ille des mineurs
Loisel ;
Approbation du partage fait sur les bases de la transaction ho
mologuée ;
Requête du sieur Loisel à M . le commissaire im p érial, pour l ’in
viter à désigner trois jurisconsultes auxquels seroit soumis l’examen
du partage ;
Désignation de M M . A n d r a u d , B o ry e et P a g è s - V e r n y ;
A v is de ces trois jurisconsultes pour l’approbation et la pleine
et entière exécution du partage.
L a dame D echam ps en a au contraire dem andé la n u llité, fo n
dée sur le ^défaut d ’observation des formes voulues par la l o i , et
subsidiairetnent la réformation pour cause de lésion;
E t par jugem ent contradictoire du 2 mai d ern ier, rendu sur les
conclusions de M . le commissaire im p érial, elle a été déboutée de
toutes ses d e m a n d e s, et le tribunal a ordonné que le partage seroit
exécuté selon sa ¿orm e et teneur.
Appel de la dame D echam ps des trois jugemons des i 3 décembre
18 0 6 , a i février et 2 mai 1807.
Scs moyens en cause d ’appel sont les mêmes qu'en cause prin
cip a le; nullité tic la transaction et du partage, lésion résultante do
l’une et de l ’autre.
L a réponse des intimés sc divise en trois paragraphes.
Ils établiront, dans le p rem ier, que la dame D echam ps n ’est ni
rccovable, ni fondée à opposer les prétendues nullités dont clic
cx.cipc.
D an s
�D an s le second, que loin d’être lésée par les bases adoptées dans
la transaction du i 5 avril, et par le partage fait d ’après ces bases,
elle y est avantagée du tout au tout.
D ans le troisièm e, que si les intérêts des mineurs Loisel paroissent avoir été lésés par le traité du i 5 avril , en ce qu’on y a gra
tifié la dame Dechamps et Procule Esmelin au préjudice de la suc
cession m atern elle, ils en ont été amplement dédommagés.
SI".
L a dame Dechamps n’ est ni recevable , ni fondée h opposer les
prétendues nullités dont elle excipe.
T o u te s les nullités qu’invoque la dame Decliamps , contre le
traité et le partage des i 5 et 20 a vril, ont leur source dans de pré
tendus vices de formes.
O r la loi ne connoit point de vices de forme pour les majeurs ,
ils peuvent traiter de leurs intérêts à leur g r é , et leur signature
suffit pour rendre leurs engagemens irréfragables.
Ici, la dame Dechamps a signé les actes des i 5 et 20 avril.
A la vérité elle dit les avoir signés aveuglément, page 4 de son
m ém oire, sans en avoir entendu la lecture , page 14.
Mais elle a signé si peu aveuglém en t, et elle en a si bien entendu
la lecture, qu’elle nous dit elle-m êm e, page i 5 , que de retour dans
ses foyers elle a voulu se mettre en possession des articles attri
bués à son lot.
E t de f a i t , elle s’en est de suite mise en possession, en les affer
m ant par un bail qui est enregistré.
Elle n'a cessé d ’en jouir depuis , sans avoir été troublée par per
sonne ; et dans ce moment elle vient de quitter son ancienne habi
tation , qui appartenoit à ses m ineurs, pour venir habiter dans sa
propre m a ison , qui fait partie de son lot.
A i n s i , non seulement la dame Dechamps a approuvé ce partage
dans les premiers instans; mais elle n ’a cessé de l’approuver de
puis, et de l’exécuter pendant le procès.
C
�E t le fait d ’approbation le plus caractérisé, c’est ce changement
d ’h ab itation , cette translation clans sa propre m a iso n , dans le
m om ent où elle remplit l ’air de ses cris contre ce partage , q u ’elle
dit avoir signé aveuglément, et sans en prendre lecture.
L a circonstance qu ’il y a des mineurs intéressés dans ce par
t a g e , ne change rien à celte première fin de non*recevoir.
L a loi a prescrit des formes pour garantir les mineurs de la
f r a u d e , d e l à facilité ou de l ’insouciance de leurs tuteurs, et de
leur propre inexpérience lorsqu’ils sont émancipés.
M ais ils ont seuls le droi* de se plaindre de la violation de tes
fo r m e s, et il n ’est pas permis aux majeurs d ’en exciper.
C ’est ainsi que le décide l ’article i i 25 du C od e c iv il, qui porte
que u les personnes capables de s’engager , ne peuvent opposer
Vincapacité du mineur , de l’interdit ou de la fem m e m ariée, avec
lesquelles elles ont contracté.
Cette loi doit s ’appliquer avec d ’autant plus de rigueur à l’espèce,
que les parties ont prévu le cas , et en ont fait une clause expresse
de leurs conventions, en stipulant críele partage sera irrévocable
en ce qui concerne chacun des majeurs.
L a loi seroit m uette, que la convention seroit une loi écrite dont
il ne seroit pas permis de s’écarter.
C ’est en .vain que la dame Decham ps prétend excepter de cette
règle générale les partages faits avec des mineurs.
Q uand il seroit dans le texte ou dans l’esprit de la loi d ’excepter
du principe général les partages faits avec des m ineurs, la conven
tion particulière, que le partage dont il s’agit seroit irrévocable,
rn ce'qu i concerne chacun des majeurs, feroit cesser cette excep
tion , parce que la disposition de l ’hom m e fait cesser celle de la
lo i, et que celte convention n ’a rien d ’illicite et de contraire a u x '
bonnes mœurs.
M a is, d ’une par’, ce texte est clair, précis, d ’un n égatif absolu, ne
peuvent, ce qui écarte toute espèce d ’interprétation et d ’exception.
D ’aulre p art, celte loi n ’a fait que consacrer les anciens princi
pes, qui nous sont attestés par L e b r u u , dans son T r a i t é des Suc-
�( '9 )
cessions, liv. 4 , chap. i " , n°2 4 , où, parlan t du partage p rovisionnel,
il dit que le m in e u r a le droit d e s ’y tenir s ’il lui est a v a n t a g e u x ,
ou d ’y reno ncer s ’il n ’y trouve pas son co m p te ; et q ue pour rendre
cette fa c u lté r é c ip r o q u e , il fa u t qualifier le partage de sim ple pro
v i s i o n n e l , et stipuler, p ar u n e clause précise , q u ’il sera p e r m is , tant
a u x m ajeurs q u ’aux m in e u r s , de d e m a n d e r un partage d éfin itif •
« a u tr e m e n t, le m in e u r pourra se tenir au partage , si le bien q ui
» lui a été don né est plus c o m m o d e , et la faculté ne sera pas re-
» ciproque pour les majeurs.
L e m ê m e principe est rappelé par R ousseau de L a c o m b e , au
m o t P a r t a g e , sect.
3 , n* g.
Q u ’auroient donc dit ces auteurs, s i,c o m m e dans l’espèce, ilavoit
été question d ’un partage, non pas simplement provisionnel, mais
définitif; et si , au lieu du silence sur la réciprocité de la faculté
de revenir contre ce partage, il y eût été form ellem ent expliqué
q u ’il seroit irrévocable en ce qui concerne chacun des majeurs ?
M a is dans tout ce q u ’on vien t de d i r e , on a sup p osé, avec la
d a m e D e c h a m p s , que les actes q u ’elle attaqu e sont infectés de tous
les vices q u ’elle le u r sup p ose, résultans d e la violation d e to u le s
les fo rm e s voulues par la l o i , p o u r les transactions et les partages
da n s lesquels des m in e u rs s o n t intéressés ; et 011 a vu que dans c< tte
h yp oth èse elle n ’a pas le droit de les c e n s u r e r , soit parce q u e la loi
lui en interdit la f a c u l t é , soit parce q u ’elle se l ’est interdite ellem ê m e , par une convention fo rm e lle fa ite e n t r ’elle et tous ses c o
héritiers m ajeurs.
M a is cette hyp oth èse est p u r e m e n t gratuite , et toutes les f o r
m es prescrites par les lois pour la garantie des m in e u r s , o n t été
s cru p u leu se m en t observées dans l ’espèce.
O11 ne peut nier que l ’acte d u i 5 avril ne f û t une transaction
telle que la définit l’article 2044 du C o d e civil , « un co n tra t par
» lequel les parties te rm in e n t u n e co n te sta tio n n é e , ou prévien»
nent une contestation à naître. «
11 s’ agissoit déré g le r les d roitsles plus c o m p liq u e s, entre une m u l
titu de d ’héritiers , su r quatorze successions , qui présentoient de&
C
2
�♦x'i<
( 20 )
questions sans n o m b re , qui pouvoient donner lieu à des discussions
interminables.
Q u ’cxigeoit la loi pour rendre valable un pareil acte ? L 'au tori
sation du conseil de fam ille, l ’avis de trois jurisconsultes désignés
par le commissaire du G ou v e rn e m e n t, et l’homologalion du tri
b u n a l, après avoir entendu le commissaire impérial.
O r , on a vu dans le récit des faits, que toutes ces formalités ont
été exactement observées.
A la vérité, la transaction étoit rédigée avant l ’autorisation du
conseil de fa m ille , et la dam e D ecbam ps croit pouvoir y trouver
un prétexte de chicane.
Mais- ce traité, qui pour les majeurs éteit irrévocable en ce
qui conCernoit chacun d ’e u x , n'étoit qu ’un projet pour les m i
neurs , jusqu'à ce qu ’il eût été autorisé par le conseil de fa m ille ,
et par l ’avis des trois jurisconsultes, désignés par le commissaire
du G ou v e rn e m e n t; ce qui étoit prévu par l’acte m ê m e , dans le
quel on lit q u ’il ne sera passe en form e authentique, que lorsque
le sieur Loisel aura rempli pour ses mineurs les formalités pres
crites par la loi , pour en assurer la validité.
N ’est-il pas évident, d ’ailleurs, que le meilleur m o yen d ’éclairer
le conseil de famille et les jurisconsultes qui devoient donner leur
avis, étoit de leur présenter le traité tel qu'il avoit été co n ve n u ,
et q u ’il devoit être exécuté entre toutes les parties, s’il leur paroissoit dans l ’intérêt des mineurs ?
V ainem en t le tuteur auroit rendu compte à la famille assemblée
des projets d ’arrangeinens qui étoient proposés entre tous les cohé
ritiers Esm elin; vainement on auroit fait part d e ce s mêmes projets
aux trois jurisconsultes désignés par le commissaire du G ouverne
m ent pour donner leur avis; rien n ’étoit plus propre à diriger
leur opinion que le traité m ê m e , qui n ’étoil pas encore obligatoire
pour 1rs m in e u r s, et (pii ne pouvoit le devenir que par l'assentiment
de la famille assemblée , et l’avis des jurisconsultes désignés.
C ette circonstance de la préexistence du traité du i 5 a v r il, à
l’assemblée du conseil de famille c l ù l ’avis des jurisconsultes.
�n ’est donc qu’ un m oyen de plus en faveur de ce traité, parce
q u ’il en résulte que, soit l’approbation de la fam ille, soit celle des
jurisconsultes, ont été données en bien plus grande connoissance
de cause que si elles avoient précédé la rédaction de ce traité.
C ’est encore une pointillerie bien m isérable, que la critique que
fait la dame Dechamps des qualités de ce traité, dans lesquelles on
suppose les formalités remplies par le tuteur avec les dates en blanc.
O n l’a déjà d i t , pour les mineurs ce traité n ’étoit qu ’un pro
je t, qui ne devoit être passé en forme authentique et avoir d ’exé
cution qu'autant que le tuteur auroit rempli les formalités néces
saires pour le rendre valable.
Il étoit donc tout simple que les dates des actes qui devoient
constater l’observation des formes prescrites par la loi fussent en
b la n c ; les qualités étoient telles qu’elles devoient être dans l ’acte
authentique; et en passant cet acte authentique, on devoit remplir
les dates du conseil de famille et de l’avis des jurisconsultes.
Q uant au traité secondaire du m êm e jour i 5 avril, il étoit en
tièrement dans l ’intérêt des mineurs L oisel, puisque c ’est ce traité
qui leur assure la succession de René G ib o n , dont ils étoient exclus
par la loi.
Il ne peut donc y avoir ni m o tifs, ni prétexte de le censurer.
. L e partage du 20 avril, qui n’étoit que la conséquence et l’exécu
tion de la transaction, n ’étoit encore qu ’un projet pour les m ineurs,
jusqu’à ce qu’ il devînt obligatoire à leur égard, comme à l'égard
des majeurs, par l’observation des formes.
Elles ont été observées com m e pour la transaction: le conseil de
fam ille, assemblé pour la seconde f o is , l’a autorisé ; les trois ju
risconsultes désignés par le commissaire impérial , consultés de
rechef, l’ont approuvé; le tribunal l’a homologué.
A in s i, indépendamment que la dame Dechamps n ’est pas recevable à critiquer sous le point de vue de l’inobservation des for
m e s, soit ce partage, soit le traité qui l’a précédé, on voit que
sa critique seroit sans fondement, et que le sieur Loisel n’a m an
qué pour ses mineurs à aucune des précautions qu’exigeoit la loi
�«'t • *
C 22 )
pour les garantir de toute surprise , et s’assurer que leurs intérêt«
étoient ménagés jusqu’au scrupule.
§ II.
L a dame D echam ps, loin d ’étre lésée par les bases adoptées
dans la transaction du 1 5 avril, et par le partage fa it d’ après
ces bases, y est avantagée du tout au tout.
Cette proposition pouvoit paroître incertaine à l’époque du traité
du i 5 avril; aujourd’h u i, elle est démontrée mathématiquement.
O n étoit alors dans la confiance que toutes les successions échues
de l ’estoc maternel avant le décès de la dame Esmelin étoient con
fondues dans la communauté.
C e tte confiance étoit fondée sur l’expédition du contrat de m a
riage de 1 7 ^ 6 , dans laquelle on avoit omis d ’ insérer la clause que
chacun des futurs confondroit la somme de 600 liv. pour avoir
droit dans la com m unauté , et que le surplus des biens des fu tu rs,
ainsi que ceux qui leur écherroient par succession ou d o n a tio n ,
leur sortiroienl nature de propre.
C e tte erreur se trouvant rectifiée par une expédition plus exacte,
il est évident que toutes ces successions doivent être prélevées au
profit des héritiers maternels.
Il faut cependant distinguer dans ces successions celles qui sont
échues avant le décès de la darne Esmelin , de celles qui sont échues
depuis.
T o u t ce qui a été touché sur les premières de ces successions par
le sieur Esmelin , doit être prélevé sur la co m m u n auté, qu ’ il faut
considérer com m e interrompue au décès de la dame E sm elin , ar
rivé au mois do novem bre 1 7 8 9 , d'après la faculté q u ’en ont les
intimés et les mineurs Loisel par l’article 370 de la C ou tu m e de
Bourbonnais.
L e s successions échues depuis le décès de la dame E s m e lin , et
tout cc qui a été touché pur le sieur Esmelin sur les .successions
�(
S fo
23 )
antérieures depuis la même époque, doivent être prélevés sur sa
succession et sur ses biens personnels.
A in s i, on doit prélever sur la co m m u n a u té, i° ce que le sieur
Esmelin a louché sur la succession de Jean-Baptistc de
décédé à M oulins en 1764;
Lachaussée,
20 C e qu’il a touché de la succession de Gilbert de L ach aussée,
aussi décédé à Moulins en 1766;
5° L a somme de i 68 , 5o o liv. qu ’il a touchée à compte sur la suc
cession de Jacques de Lachaussée, par le partage provisionnel passé
devant L aro ch e, notaire à P aris, le 29 avril 1788 ;
4° C e qu ’il a dû toucher de la succession de M arie Ç a r jo n n e l,
jjisaïeule des enfans Esmelin , décédée en 1 7 8 8 , l’une des léga
taires universelles de Jacques de Lachaussée, qui avoit aussi touché
1 6 8 ,5oo liv. par le partage provisionnel de 1788.
E t 011 doit prélever sur la masse de sa succession, composée
soit de sa portion de la co m m u n a u té , déduction faite des prélcvemens, soit de ses biens personnels,
i° L a somme de i 88 , 55o liv. 16 s. qu ’il a reçue de la succes
sion du sieur René-B arthélem y Gibon , soit en 1790, soit pendant
les premières années des assignats, ce qui est établi par un état
écrit de sa main , que les intimés rapportent.
2°. C e q u ’il a dû toucher, pour le compte do scs enfans, de la
somme d ’environ 900,000 livres, restée indivise, de la succession
de Jacques de Lachaussée, après ce partage provisionnel ;
5°. C e qu ’il a dû loucher de cette même s o m m e , soit com m e
représentant Elizabeth de Lachaussée , fem m e Laplanche , soit
c o m m e représentant Catherine de Lachaussée, dont il avoit acquis
somme
les droils, qui étoient d ’un cinquième chacune de cette
de 900,000 liv. ; ce q u ’il n ’avoit pu faire que pour le compte de
ses enfans , à raison de l’indivision de ces droits avec eux ;
4“. C e qu ’il a dû toucher de la succession de G ilberl-B arlhélem y
G ibon , aïeul de ses enfans, soit directement, soit par l ’effet dea
cessions de droils de leurs cohéritiers dans cette succession.
On trouvera déjà une masse énorme qui suffiroit pour
la succession du sieur Esmelin.
absorber
�Mais que sera-ce, si on y joint les jouissances ou les intérêts
des capitaux, à com pter du m om ent du décès de la dam e E sm elin,
attendu q u ’aux termes de l’article 174 de la C o u tu m e de Bour
b o n n a is , l’usufruit des pères cesse de plein d ro it, à 14 ans pour
les filles, et à 18 ans pour les m i le s ?
. Si on y joint pour
5o
mille francs de ventes de bois de la com
m u n a u té , faites par le sieur Esm elin, après le décès de sa fe m m e ,
toutes établies par preuves écrites?
Pou r pareille som m e, au m o in s, de dégradations commises dans
les biens d e là co m m u n auté, depuis la mêm e épo que?
Q ue sera-ce e n fin , si on y joint plus de 225,000 l i v . d e d e tte s ,
connues lors du p artage, ou découvertes depuis, que les intimés
ont payées , ou payent journellement pour leur compte et pour
celui de la dam e D e ch a m p s?
N on compris les prétentions de la dame de B a r d , qui ont été
éteintes par le traité du i 5 avril.
N on compris encore les réclamations qui s’élèvent de toutes
parts contre cette succession, qui sont connues de la dam e D e cliamps , et qu ’on se dispensera de relever, dans la crainte de les
accréditer.
Il résulte évidemm ent de ce tableau, q u e , la succession du sieur
Esmelin fût-elle d'un million ( et elle est à peine du tie rs) , elle
seroit insuffisante pour faire face au passif dont elle est grevée.
E t il ne faut pas perdre de vue, d ’une p a rt, que la presque uni
versalité des acquisitions est antérieure au décès de la dame
Esmelin ; ce qui donne aux héritiers maternels droit
h
la moitié
de tous ces biens acquis, sans autres charges que celle de la m oitié
des reprises qui existoient alors.
D ’autre p a r t , q u e sur les 225,000 livres de dettes passives, il
y
en a pour environ 200,000 livres , qui sont du fait seul du sieur
E sm elin , et n ’ont été contractées que depuis le décès de la daine
Esm elin; ce qui les f.iit uniquement frapper sur sa succession.
D ’autre part enfin, que les 267,550 livres de dettes actives dou
teuses, qui forment un des principaux objets de cettle succession,
no
�(
( ^
r
i
&
)
Ü -
ne doivent être comptées que pour le cinq uièm e, au plus, de leur
valeur numérique ; les intimés en offrant l ’abandon à 80 pour
100 de perte.
C ’est vainement que la dame Decham ps croit pouvoir affoiblir ce tableau, en cherchant à tirer avantage du testament de la
darne Esmelin , qui contient, d it-e lle , legs du quart de tous ses
biens, au profit de son mari.
C e testament n ’est pas rapporté, et il y a lieu de croire q u ’il ne
le sera jamais ;
Il est olograph e, et il n ’est pas écrit en entier de la main de la
dame Esmelin ;
C e n ’est pas sans de bonnes raisons qu ’on n’en a parlé que vague
m ent dans le traité du i 5 avril;
C e testament n’est pas d ’ailleurs tel que le suppose la dame
Decham ps ;
Il porte legs de l'u s u f r u i t , ou du quart en propriété, au choix
du sieur Esmelin;
E t le sieur Esmelin seroit censé, par le f a i t , avoir opté l’usu
fruit , puisqu’il n’ a cessé de jouir des biens de ses en fans, jusqu'à
sa m ort. Encore faudroit-il distraire de cette jouissance la succes
sion de René G i b o n , qui n ’est échue à ses enfans qu'après le décès
de leur m ère, et à la qu elle, par co nséqu en t, ce testament ne peut
avoir d ’application.
Il est évident, d ’après ce qu ’on vient de dire, que si par l’effet
de l’anéantissement de la transaction du i 5 a v r i l , que la dame
Dechamps a l’imprudence de solliciter, chacun des cohéritiers
rentre dans son premier état , l’a ctif de la succession du sieur
Esmelin étant plus q u ’absorbé par le p assif, la daine Dechamps
ne p eut, en sa qualité d ’héritière, espérer d ’en retirer une o b o le ?
Il importe peu, d ’après cela, d ’examiner s’il y a , ou non , lésion
dans l ’estimation proportionnelle des biens dont le partage est
composé, comme le prétend la dame Dechamps.
T o u t e f o i s , pour ne rien laisser à désirer sur cette prétendue
lésion secondaire, les intimés rappelleront à la daine D echam ps,
D
�( aG )
que les b ie n s -fo n d s qui composent son lot ont été choisis par
elle ;
Q u ’ils sont pour la plupart mêlés avec ceux de ses m in e u rs, et
par conséquent parfaitement h sa convenance;
Q u ’ils ont été estimés par des experts nommés par e lle , logés
et nourris chez elle pendant tout le temps de leur opération.
Ils lui diront enfin q u e, malgré la baisse des biens-fonds, sur
venue depuis le partage, ils offrent de prendre pour leur compte
tous ceux qui se trouvent dans son lot, pour le sixième en sus de
l'estimation et du prix pour lequel ils sont entrés dans ce partage.
C ’en est assez, ou plutôt c ’en est trop, sur cette prétendue lésion;
car les intimés n ’ont que trop bien prouvé q u e , loin que la dam e
Decham ps soit lésée et dans les bases et dans les résultats du par
tage du 20 a v r i l , elle a été traitée par ses cohéritiers avec une gé
nérosité sans exemple ; que tout ce q u ’elle t i e n t , tout ce q u ’elle
possède de la succession de son p è r e , elle ne le tient que de leur
libéralité, elle ne le possède que p arle u rs bienfaits.
O n dit que ce fait est trop bien p ro u vé , parce que cette géné
rosité excessive semble nuire aux intérêts des mineurs Loisel.
Cependant on verra bientôt q u ’on leur a rendu toute la justice
q u ’ils pouvoient désirer.
§ III,
R ela tif aux mineurs L oisel.
O n ne peut se dissimuler que plus on a gratifié la dam e D echam ps
et Procule E s m c lin , plus les héritiers maternels ont dû faire de
sacrifices.
Ces sacrifices seroient faciles à justifier pour les mineurs Loisel.
O n pourroil dire que des mineurs ne sont jamais lésés quand ils
marchent sur les traces de leurs cohéritiers m a je u rs, qui ont le
m êm e intérêt q u ’e u x , surtout quand de six cohéritiers cinq sont
m ajeurs, et reconnus pour être parfaitement capables de stipuler
leurs droits et de veiller ù leurs intérêts.
O n pourroil dire enco re, com m e l ’ont fait les trois anciens ju ris
�( »7 )
consultes désignés par M . le commissaire im périal, pour donner
leur avis, que « tous les héritiers avoient le plus grand intérêt
» à ce que le partage n ’éprouvàt pas de retard. T o u s les bâtimens
>> des domaines étoient en ruine. 11 étoit dû des sommes considé» rables , qui exposoient les cohéritiers à des poursuites ruineuses,
» et qui pouvoient absorber une grande partie des biens.
« La minorité des enfans Loisel rendoit ces poursuites pres» qu'inévitables, et chacun des cohéritiers pouvoit se voir expro» prier de ses biens propres, par la circonstance q u ’il se trouvoit
» des mineurs parmi les cohéritiers.
» Il s’élevoit des contestations sur la composition des masses, et
m
la division entre les lignes paternelle et m aternelle........................
» sur les réclamations de plusieurs des héritiers , et il'cto it impos» sible de prévoir la fin de ces discussions, et les suites funestes
» qu ’elles pourroient avoir.
» L a transaction qui termine toutes ces contestations sans fr a is ,
» et dans l’espace de quelques jours qui avoient été employés à la
» préparer, o ffr o it à toutes les parties des avantages qu’on ne sau» roit trop apprécier. »
Mais ce qui tranche toute difficulté , c ’est l ’indemnité que tous
les cohéritiers majeurs ont assurée aux mineurs L o ise l, pour les
désintéresser et consolider leur ouvrage.
Il existoit dans la famille une succession dont les religieuses
étoient exclues par leurs v œ u x , et la mère des mineurs L o is e l,
parce q u ’elle étoit hors des termes de représentation.
C ’éloit celle de René G ib o n , décédé au mois de juillet 1790.
Il a été convenu par les art. 8 et 9 du traité particulier , du i 5
avril 1806, que les mineurs Loisel seroient associés pour un sixième
dans cette succession, et qu’ils commenceroiejit par prélever 5280 fr.
Us ont à partager, entr’autres objets, près de 3ooo francs de rentes
inscrites sur le grand livre, connues sous le nom de tiers consolidé ,
dont la liquidation est terminée depuis le mois de décembre der
nier, et dont la valeur, au cours, approche dans ce m om ent du ni
veau de leur capital.
D 2
�fc..\ <
(
*3 )
Ils onl, par suite de cette association, une portion dans le domaine
de L a r o c h e , provenu de cette m êm e succession.
11 a été en outre arrêté que le sieur Loisel préleveroit sur les pre
miers recouvremens 2000 f r . , pour les frais de l’instance intentée
au nom de ses mineurs au sieur Esmelin ; frais qui eussent été
compensés et perdus pour ses m in e u rs, sans cette convention par
ticulière.
D e sorte que l ’indemnité accordée aux mineurs Loisel, par leurs
cohéritiers m a je u r s , pour les dédommager des sacrifices q u ’ils pou
rvoient faire au bien de la p a ix , par leur acquiescement au traité
du
i 5 a v r il, peut être évaluée à environ
14 à i 5o o o f r . ; tandis
q u e , dans le calcul le plus rigoureux, et en regardant com m e un
bienfait absolu de la part des héritiers maternels les deux lots de
Procule et de G eneviève Esmelin , ce sacrifice ne pouvoit jamais
excéder 10000 f r . , form ant le sixième de Goooo fr.
Q u an t à la prétendue lésion résultante du défaut de proportion
dans l’estimation des biens qui composent leur l o t , comparée aux
lots de leurs cohéritiers, c ’est une inculpation gratuite faite aux
experts , dénuée de vérité com m e de vraisemblance , et qui ne
prouve a u tr e chose , si ce n ’est l’habitude où est la dam e Dechamps
de tout hasarder.
C e seroit une tâche trop pénible et trop dégoûtante, que celle de
relever tous les faits faux et calom nieux dont le mém oire île la dam e
D echam ps est rem p li; il faudroit écrire des volum es, et surcharger
une contestation qui l’est déjà trop par elle-même.
Il suffira de rappeler quelques-uns de ceux qui ont une liaison
immédiate avec les objets en litig e , pour se faire une idée de sa
vé ra cité , de sa bonne J’oi sur tous.
P a r e x em p le, 011 l i t, page i 5, que lorsqu’elle a voulu se mettre
011 possession des objets attribués à son lo t, « ù peine le foin du pré
>♦.lu domaine de Cliirat a-t-il été c o u p é , que René Esmelin l’aîné
* <l D e u x -A igu es sont venus avec une troupe de bouviers s’en einj> parer à force o u verte, en l ’accablant d ’injures et de menaces. »
�( 29 )
Oublions cette prétendue force ouverte employée contre une
femme , ces injures, ces menaces dont elle orne sa narration, pour
en venir au fait.
L e pré dont il s’agit faisoit partie de la réserve de B o u is , qui est
entrée dans le lot du sieur René Esmelin.
C e pré est nom m ém ent compris dans ce lo t, q u i , com m e tous
les autres, a été formé par les experts.
C ’est un fait prouvé par leur rapport, qui sera mis sous les y e u x
de la cour , et qui est de la parfaite connoissance de la dame
Dechamps :
A b uno disce omnes.
« Ses cohéritiers se sont emparés du bois C h a b r o l, q u ’ils font
M exploiter journellement par le sieur Gillot. »
C e bois Chabrol fait partie du lot de la dame Dechamps ; il y
est porté pour i 320 fr.
Mais c’est uniquement le fonds qui lui appartient.
L e s arbres en étoient vendus au sieur G illot, par le sieur E sm elin ,
depuis plus de trois ans avant sa m o r t , à raison de 7 fr. le pied;
ce qui portoit la vente de ce bois Chabrol à 16000 fr.
Pourra-t-on se persuader que ce soit sérieusement que la dame
D e ch a m p s, à qui 011 a donné le bois Chabrol pour i 520 fr. , en
réclame tout à la lois le fonds , qui vaut au moins 2 4 °°
et Ie
bra n lan t, qui avoit été vendu 1G000 i r . , et dont la majeure partie
étoit déjà exploitée lors du partage.
A b uno disce omnes.
« Ils ont poussé l’injustice jusqu’à usurper un autre bois contigu,
» qui appartient particulièrement à ses m ineurs, du chef de M . De» champs , leur père, et que le sieur Gillot exploite aussi. » M êm e
page i 3.
Mais la dame D echam ps nous apprend e l l e - m ê m e q u ’il y a
procès pour les limites de ce bois : il n ’y a donc , jusqu’à la dé
cision , ni injustice , ni usurpation. Sub jitdice lis est.
« (j. Il y a lésion , en ce que Renc E sm e lin , fils a în é , n ’a point
,
�t
(3 ° )
)> rapporté à la masse les terres du B e y r a t , de la Presle, la Sou-
» b r a u t, L a ro c h e , le L o g is , etc. valant plus de 200000 fra n cs, et
» qui ont été achetés et payés sous le nom de ce fils, indûm ent
» avantagé par le sieur Esmelin père. » Page 62.
L e sieur Esmelin a acheté par acte authentique, le 12 février
1792 , étant encore avec son père, un domaine appelé la Soub rau t,
une maison , des vignes, pour la s o m m e , réduite à l’éch elle, de
i 25oo fr.
L a vérité est qup celte som m e a été payée par le sieur Esm elin
père. L e sieur R ené Esmelin en a fait le rapport à la masse lors
tlu partage.
'• .
Si le père avo'it-voulu avantager son fils, d ’une manière indirecte,
de.cette acquisition, rien n ’eût été plus fa c ile ; il suffisoit de lui
donner quittance de ces i 25oo fr. qu ’il avoit payés pour^ui.
Ces fraudes ne sont pas r a r e s , et les tribunaux peuvent diffici
lement les atteindre.
L e sieur René Esmelin s ’est m a r ié , et a quitté la maison pater
nelle le 8 frim aire an
3.
Sa fem m e lui a porté le revenu d ’une dot de
a conservé l'usufruit après son décès.
45 ooo f r . , donl il
II a acquis en l’an g le bien de la P r e s le , par acte au th e n tiq u e ,
au prix de 2 {000 fr. dont 10000 fr. exigibles, et 14000 fr. en rente
viagère, à raison de 1400 fr. par a n ;
il 11’a déboursé pour cet
objet que 10000 f r . , c i .............................................................
10000 fr.
11 a a cq u is, le 2 germ inal an 1 1 , toujours par acte
authentique, le bien du Beyrat, 60000 f r . , dont Soooofr,
en délégations de co n tra ts, et
5oooo fr . en délégations
e x ig ib les, c i ..................................................................................
Soooo
L e 28 prairial an 1 2 , il a acquis e n c o r e , par acte
authentique , la locaterie du L u t ou des Chaises Gooo fr.
e i ........................................................................................................
T o t a l ......................................................
Gooo
/,G o o o fr.
�(
3i
f t ^
)
11 a revendu , par acle authentique, une portion de la locaterie
du L u t au sieur Louis Lurzat 2900 f r . , c i ........................
2900 fr.
Par acte du 21 messidor an i 3 , il a vendu au sieur
Claude Esmelin la maison et le logis situés à B ellen ave,
10000 f r . , c i ................... .......................................................... 10000
11 a revendu en détail le bien de la Presle, par différens actes authentiques, 24000 f r . , c i ............................... 24000
Il a vendu au sieur Gillot le bois delà Soubraut 3o o o f r .,
c i .....................................................................................................
Il a reçu de son père, à compte sur la succession du
3ooo
sieur René G i b o n , 2600 f r . , dont il lui a fourni quit
tance, c i ........................................................................................
T o t a l « . .................................................
A in si la différence est de
2600
42000 fr.
35oo fr.
C e n ’est pas qu’il ne reste au sieur Rend Esmelin quelque for
tune personnelle ; m ais, outre que cette fortune est grevée de
rentes viagères ou constituées, il la doit à l’heureuse circonstance
d ’avoir acheté bon m a r c h é , et d ’avoir revendu cher ;
A l’extinction de quelques viagers;
A une bonne administration ; à de grandes améliorations; à son
industrie.
L oin q u ’il ait puisé pour ces acquisitions dans la bourse de son
p ère, qui é to it, comme on l’a v u , dans un tel état de gêne que
sa liberté étoit compromise à chaque instant par l'échéance des
lettres de changes, le sieur Esmelin p ère , dans un pressant be
soin , avoit to u c h é , peu de temps avant sa m o r t,
6553 liv. prix
d ’une vente de bois qui appartenoit à son fils.
C o m m e ce fait étoit notoire dans la fam ille, il n ’est venu en
idée à aucun de ses cohéritiers de lui contester celle somme de
6553 liv. qui fait partie des dettes passives de la succession.
Il n ’y a pas un fait avancé par la dame D ech am ps, auquel il ne
fû t facile de faire une réponse aussi satisfaisante, si le temps et
la patience pcrmettoicnt de les relever tous.
�II rosie à dire un mot de deux objets dont se plaint la dame
D ech anips, et sur lesquels les intimés sont prêts à lui rendre justice.
L 'u n est rela tif à ses créances contre la succession du père co m
m un , qui dérivent de sa dot moniale et d ’arrérages de pension
q u ’elle prétend ne pas avoir été liquidées exactement.
L es intimés rapportent cette liquidation faite par M . Bergier,
et écrite de sa m a in ; ils sont convaincus que cette liquidation est
exacte. A u surplus , ils offrent de revenir à com pte avec elle sur
cet o b je t, ou devant tel commissaire q u ’il plaira à la C o u r de nom
m e r, ou devant les premiers juges.
L e second est relatif à la somme de
d d i s son lot.
4 i i 5 Iiv. de mobilier porté
E lle prétend que son lot est trop chargé de cette nature de
b ie n s , et en ce la , ses plaintes sont évidemm ent indiscrètes; car il
y a , y compris les rapports, au moins i 5 o,ooo liv. de mobilier
dans la succession , et sa quotité proportionnelle seroit d ’environ
ioo oo liv.
Elle se plaint aussi de n ’avoir pas reçu cette som m e ;
Elle n ’e u 'a reçu en effet q u ’une partie.
U n e autre partie a été payée en son acquit pour dépenses com
munes.
U n e autre partie est encore en n a tu re, n o ta m m e n t les bois de
sciage.
E nfin, il y a un déficit dans le m obilier, à raison des distrac
tions qui en ont été faites en nature ou en deniers, auquel il
doit être pourvu de la manière convenue par le traité particulier
du i 5 avril.
T o u t cela exigeoit des rapprocliemens entre la dam e Decliam ps
et le sieur Uené Esmelin a în é, que les contestations pendantes
entr’rux ont rendus impraticables.
Mais le sieur René Esmelin est toujours prêt à lui rendre justice
sur ce point , qui dépend d'un compte q u ’il offre encore de iaire
(levant tel commissaire qu'il plaira à la cour de n o m m e r , ou de
vant les premiers juges.
E n c o ïc
�S n
i
( 33 )
Encore un m ot :
L e sort de la dame Dechamps est dans l es mains des intimés.
S ’ils acquiescent à ses dem andes, elle est perdue.
S ’ils lui résistent, c ’est par pitié pour e lle , c ’est pour l’arrêter,
la malheureuse, au bord du précipice qu ’elle creuse sous ses pas.
Quant aux mineurs L o i s e l , leurs intérêts sont à couvert.
Ils sont amplement dédommagés dans la succession de René
G ib o n , des sacrifices qu’ ils font au bien de la paix.
D ’ailleurs, les traités et le partage des 1 5 et 20 avril ont eu
l ’assentiment de leur p ère, de leur aïeul m aternel, leur subrogé
tuteu r, de leur famille deux fois assemblée pour en prendre connoissance, des anciens jurisconsultes deux fois désignés par le com
missaire im périal, du commissaire impérial lui-m êm e, enfin des
juges du tribunal d e G a n n a t, q u i , parfaitement instruits des f a it s ,
des circonstances et des localités , se sont empressés de les h om o
loguer et d ’en ordonner l ’exécution.
T a n t d ’autorités réunies n e permettent pas de douter de l'uti
lité, de la sagesse, de la nécessité de ces traités pour les mineurs
com m e pour les m a jeu rs, et les intimés espèrent que la C o u r voudra
bien , en les consacrant par son a r r ê t , m ettre la dam e Decham ps
dans l’impuissance de se nuire à e lle-m ê m e , et de nuire désormais
à sa famille.
Signé
René Esmelin,
G ilbert
Esmelin - D e u x - A i g u es ,
C l a u d e - A m a b l e L a p e l i n , M a r i e - M a g d e l e i n e E s
m e l i n - L a pe l i n , J e a n - F r a n ç o i s L a g a r d e - D e l a v i Qn
L
fKQK
len n e , T h e r è s e Esmelin-Lavilenne , M a r ie-Ade-
a**J f ”
L M
.
/ * o £ - W a Ç,
/#«>(
laide
H
t
--
veuve D ebar,
B O I R O T , ancien jurisconsulte.
■*“ -
h iv * * ” * 0 “
E sm elin,
^
H U G U E T , avoué.
—
-------------—
A C L E R M O N T , de l’imprimerie de L andriot, imprimeur de la Préfecture.
\
-v v
��\
•
'•
'
V
/,
Ì S o
YÆ*>t,
G
É
N
É
A
L
O
G
I
E
s
-■ ■:
;
.
ta
an
■
S3
et«
i f ■;\r> ./ ■■ ' ' •' /
' ■ / ■ ■■■'<■ - ■}
y ,
,
/Ò''
3
¡3
O
CD
CD
g
a
&
r1
>»
o
M
I-«
>d
to
</>
O
H»-*
o
m*
++
o
3
il
m
O
CT*
H
S*
ta
en
F
FÎEl
f2At;
S t1
N . . . Delachaussée.
I
Gabriel Delachaussée. *j*
Marie Farjonel,
morte en 1788.
Ont eu n eu f cnüms.
k l <J
il
b
I
JNT.
IS
M
N...
J. Bapt. Delachaussée,
drapier à M oulins,
mort en 1768.
N . ..
"t
Jacques Delachaussée,
administrateur de
l ’Hôtel-Dieu de Paris,
m ort en 1787.
Gilbert Delachaussée,
négociant à Moulins/
m ort en 1760.
«J*
Louis Esmelin. + +
Thérèse L u cat, *J*
morte après 1756.
Ont eu trois enfans.
Gilbert G ibon, -p
mort en 1792
M arie-Catherine Delachaussée.
§SiH
Réné G ib o n ,
directeur des aides
à ChAteau-Tlnerry,
mort en 1790.
f
a s
j® r
ISS'jï
Marie-Magdeleine Esmelin.
Gilbert Gibon.
M arie-Anne G ib o n ,
morte en 1789.
Etienne Esmelin, *J»
mort en i 8o 5.
Ont eu n e u f enfans.
.VF3
K_►
'X'Xî'«4‘. H
Françoise Esm elin ,
morte en 1
Còme G ibon, vivant.
\
Agnès Esmelin.
N . . . Barathon.
1
Elizabeth Esmelin-Ducluzort,*J*
m orte en 1792.
___________ /V____________
Réné Esmelin.
Gilbert Esmelin-Deux-Aigues.
Thérèse Esmelin.
J. F. Lagarde-Lavilenne,
Marie-Adelaïde Esmelin.
Hugues Debar.
v
—
—
Marie-Magdeleine Esmelin.
Claude-Antoine Lapelin.
>-------
Intimés réunis.
Agnès-Gilberte Barathon.
Jacques-Marie-Pierre LoiseL
j
Procule Esmelin,
religieuse.
Geneviève Esmelin.
Amable Dechamps.
Intimée.
Appelante.
P
'
'
g ra sg b
K o l a . i ° . L e s ig n e -f-{- in d iq u e le s s u c c e s s io n s o u v e rte s a v a n t le m a ria g e d ’E tie n n e E s m e l i n , p è re d e s p a r t ie s , e n 17 6 6 .
w
S ° . L e s ig n e •}• in d iq u e le s s u c c e s s io n s o u v e r t e s ap rè s c e m a ria g e .
w i] Etienne-Eugène,
Agnès-Gilberte,
------- —
------ ------------------------ h
mineurs représentés par leur père.
S
3 ° . P r o c u le e t G e n e v i è v e E s m e l i n , m o r te s c i v i l e m e n t , e t ra p p e lé e s p a r l a lo i d u
5
b r u m a ir e a n 2 , n ’o n t p art q u ’à l a s u cc e ssio n d ’E t ie n n e E s m e l i n , le u r p è r e ; m a is e lle s o n t p a r t , d e so n c h e f ,
s u r s u c c e s s io n s o u v e r t e s à so n p r o fit.
K
&
^
ÉffiRËI
Intimés.
r ra rp x x cræ rŒ a
i
W Ê m I
A R I O M,
\ D e l'im p r im e r ie d e T i i i b
i
a u d
-L
a n d r i o t
,
im p r im e u r d e la C o u r d ’a p p e l.
rn o cm o m ao y
ru su j j s
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Esmelin, René. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Huguet
Subject
The topic of the resource
successions
traités de familles
coutume du Bourbonnais
vie monastique
religieuses
rétroactivité de la loi
émigrés
minorité
négoce avec les Amériques
banques
experts
arbitrages
donations
généalogie
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour René Esmelin, Gilbert Esmelin-Deux-Aigues, Claude-Amable Lapelin, et Marie-Magdeleine Esmelin, son épouse ; Jean-François Lagarde-Delavilenne, et Thérèse Esmelin, son épouse ; Marie-Adelaïde Esmelin, veuve Debard, intimé ; contre Geneviève Esmelin, veuve d'Amable Dechamps, ex-religieuse, appelante ; en présence de Procule Esmelin, ex-religieuse ; et encore en présence de Jacques-Marie-Pierre Loisel-Guillois, tuteur de ses enfants, héritiers d'Agnès Esmelin, leur aïeule maternelle aussi intimés.
Particularités : notation manuscrite : « 28 mars 1808, 1ére section, adopte les motifs du jugement du 13 octobre 1806, 21 février et 2 mai 1807, confirmé. »
Table Godemel : Transaction : 5. le majeur qui a traité avec des mineurs sur des intérêts respectifs et sur un partage, est-il recevable à demander la nullité de l’acte, pour vice de forme résultant de leur propre incapacité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1764-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
33 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1723
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Moulins (03190)
Clermont-Ferrand (63113)
Chirat-l'Eglise (3077)
Bouis (terre du)
Chirat (domaine de)
Bellenaves (03022)
Beyrat (terre du)
La Presel (terre de)
La Soubraut (terre de)
Laroche (terre de)
Le Logis (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53326/BCU_Factums_G1723.jpg
arbitrages
banques
coutume du Bourbonnais
donations
émigrés
experts
généalogie
minorité
négoce avec les Amériques
religieuses
rétroactivité de la loi
Successions
traités de familles
vie monastique
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53328/BCU_Factums_G1801.pdf
de7d1531659c918e7438d1ead83cd2ec
PDF Text
Text
PRÉCIS
EN R É P O N S E ,
POUR
Les sieur et dame RABUSSON DE V A U RE,
intimés ;
CONTRE
Les sieur et dame H IL L IA R D , cotuteurs de
demoiselle D
umont
, appelans.
Le s sieur et dame Rab usson de V au re sont divisés
d’intérêts avec la demoiselle D um ont, leur nièce. Ils ont
proposé leurs moyens avec modération , mais ils se
plaignent à juste titre du ton d’aigreur qui règne dans
la défense de leurs adversaires.
Les expressions outrageantes sont répandues avec pro•. !
A*
• ' -i .
■.,
■ . - ■-/
.'■■y ,
. •■•l *-w. h ■'
�( 2)
fusion. On lit à chaque-page, artifice, ruses, détours,
cupidité en délire, tours deforce de l’esprit hum ain, etc.
L e cœur de la clame Ililliai’d se brise, les m œ ursfré
missent , Vétonnement balance îindignation, parce que
les cohéritiers de la demoiselle Dumont réclament leur
portion héréditaire dans les biens maternels.
C'est fouler aux -pieds, de la manière la plus scan
daleuse, le pacte defa m ille le plus sacré, que de disputer
à. la demoiselle Dumont un préciput qu’on devroit s’em
presser de lui accorder, quoique les lois le lui refusent,
pour la dédommager des pertes immenses qu’elle a faites.
On ose rappeler la mort tragique d’un père infortuné,
lorsque la dame Hiliiard, son épouse, s’est remariée dans
la première année de son deuil; et c’cst dans les bras
d’un second ¿-poux qu’elle vient faire parade d’une ten
dresse exclusive pour sa fille du premier lit.
On accuse un ancien magistrat, qui jouit à juste titre
de l’estime publique, dé s’étre enrichi des dépouilles de
son beau-père, d’avoir acquis sans bourse délier, en
puisant dans celle du sieur Dumont. Et si on en croit
la dame H iliiard, la dame de Vaure a été avantagée de
plus de i ooooo francs, par des dons annuels ou par des
donations déguisées
Cependant le sieur de Vaure n’a point augmenté sa
fortune; il est, comme;dans les premières années de son
mariage, au-dessus des besoins, jamais obéré parce qu’il
n’emprunta jamais; et la note qui le concerne personnel
lement est d’autant plus indécent«5* que
dame Hiliiard
ne peut ignorer l’emploi qu’a fait M . Dumont de ses
revenus; elle sait qu’il a payé plus de 130000 francs de
�( 3 ),
dettes, comme, par exemple,"33140 fi\ aux créanciers
de son fils, premier mari de la dame ïliliiard; 3200b.fr.*
aux héritiers Dumont-Lacliassagne ; 6000 fr. au sieur
Chabot, de Moulins ; ôooo fr. à la dame Beaufort, de
Montluçon ; 4000 fr. au sieur Chaudillon, 4000 fr. à la
dame Lagrange, de Chantelle; 2Ôooo fr. restés dûs sur
le prix des domaines de Saulzet*, 20000 fr. au sieur de
D ouzon, à qui il payoit encore 3000 fr. de rentes via
gères, etc., etc.
- Les sieur et dame de Vaure répondent par des faits à
des assertions injui’ieuses, et fort inutiles pour la cause.
Ils finiront par observer que la dame Hilliard avoit toutes
sortes de motifs pour être plus modeste ; qu’elle donne
un mauvais exemple ci sa fille, qu il fuuOruit entretenir
dans de plus douces pensées ; elle devroit surtout lui
rappeler qu’elle a reçu souvent de son aïeul des témoi
gnages de tendresse, et que la dame de V au re, sa tante,
lui a donné des preuves multipliées de son affection,
pendant un an qu’elle a été confiée à ses soins. •Les déclamations de la dame Hilliard ne font point
ornement dans une cause dégagée de toutes circonstances,
et qui ne présente que des questions purement de droit.
La terre de Mont est l’objet du litige; c’est un conquôt
de communauté des sieur et dame D u m o n t, auteurs
communs des parties.
Ils étoient domiciliés, et la terre de M ont est siluée en
coutume de Bourbonnais.
- Cette coutume admet l’égalité la plus parfaite entre les
enfans; elle ne permet aux pères et mères de disposition*'
A a
�(4)
libérales qu’autant qu’elles sont faites par contrat de ma
riage au profit des contractans.
L e mari est le chef de la communauté ; il dispose seul,
à titre onéreux ou gratuit, de tous les acquêts, pendant
la durée du mariage.
Mais du moment de la dissolution il cesse d’être le
chef; il n’est qu’un simple associé, et ne peut plus par
conséquent disposer que de sa portion.
Maintenant la dame Dumont a - t- e lle pu faire une
donation en préciput à son fils, d’un conquêt de com
munauté, du vivant de son m ari, et par le contrat de
mariage de ses filles?
A - t - e l l e pu transmettre à son mari le droit d’élire*
c’est-à-dire, le droit de faire ce qu’elle.
pouvait faire
elle-même? L e mari a - t - i l p u , après la dissolution du mariage r
donner à son fils la portion qu’amendoit sa femme dans
un conquêt de communauté ?
Telles sont les questions principales; et il ne faut pas
recourir à des tours de Jbrce de Yesprit humain pour
les résoudre. A la vérité la dame Hilliard ne les a pas
présentées ainsi y mais elle trouvera bon que chacun les
pose à sa manière.
Si on daigne ensuite descendre jusqu’aux questions,
secondaires,
Des filles peuvent-elles être tout à la fois apanées et
retenues ?
L ’institution faite en faveur de lat dame de Vaure estelle grevée de la condition irritante d’abandonner à son
frère la terre de M ont en préciput ?
�( 5)
Peut-on éluder la disposition prohibitive de la lo i,
par des conditions illicites ?
Les premiers juges se sont avisés de décider négati-r
veinent ; et suivant la dame H illiard , c'est h délire de
la présomption.
Ne seroit-ce pas porter trop loin l ’abus du sophisme.
que de tenter de justifier cette décision ?
Au moins la dame Hilliard ne se plaindra pas que
les intimés aient voulu fatiguer son attention, ou lasser
sa patience leur tâche ne sera ni longue ni pénible.
Déjà les sieur et dame de la Roque qui ont le même
intérêt, ont publié leur défense; les règlemens de famille
sont connus ; les motifs et le dispositif du jugement sont
rapportés - il faut surtout éviter ic» ^¿p4titions»
L a première question se divise en deux parties : la
dame Dumont a-t-eîle p u , pendant le mariage, disposer
d’un conquêt de communauté au profit de son fils ?
p o u v o i t-elle le faire, dans tous les cas, par le contrat
de mariage de ses filles ?
Prem ière partie. L e mari est le chef et le maître de
la communauté j il a le droit exclusif de donner, vendre
et aliéner h sa volonté les meubles et les acquêts faits
pendant le mariage ; mais il ne peut le faire que par
contrats entre-vifs, et non par contrats ayant trait à la
mort : telle est la disposition de l’article 236 de la cou
tume de Bourbonnais, qui est en ce point conformé à
toutes les coutumes de communauté.
La femme qui est en la puissance de son m ari, n’a
aucune participation aux objets communs, si la coutume
restreint le droit du mari aux Contrats entre - vif3 ?
�( 6)
M. Auroux nous en donne la raison sur l’article cité,
n°. 7. Il dit que « si le mari pouvoit disposer par contrats
« à cause de m ort, la disposition tomberoit dans un
« temps auquel le droit du mari cesse, et que la femme
« commence à y avoir un droit effectif.
'« Pendant le mariage, le droit de la femme sur les
« acquêts, n’est^ qu’un droit ha bitu el• mais il devient
« actuel après la dissolution de la communauté; ce qui
« fait qu’on dit que le mari vit comme maître absolu, mais
« qu’il meurt comme associé. » Ce n’est donc que pen
dant le mariage qu’il peut disposer en maître de tous
les acquêts ; sa volonté fait la l o i , et la femme est obligée
de la respecter; elle ne prend ni ne peut prendre aucune
part aux dispositions des Liens de cette nature.
La femme ne peut môme disposer de ses propres
qu’avec le consentement de son mari, et sous son autorité;
comment auroit-elle donc eu le droit de donner à son
fils moitié de la terre de M o n t , q u i , de l’aveu de tout
le inonde, est un conquêt de communauté ?
Comment surtout auroit-elle pu donner à son fils cette
moitié, par le contrat de mariage de sa fille, lorsque
• l’article 217 de la coutume de Bourbonnais porte en
termes précis que « les père et m ère, ou F un d’e u x ,
« ne peuvent donner entre-vifs à leurs enfans , hors
« contrat de m ariage, soient leidits enfans émancipés
« ou non ? »
« La disposition de cet article, dit A u r o u x , n°. 2 ,
« a pour principe l’égalité que la nature désire entre
« les enfans, étant juste que ceux qui sont égaux en
u naissant, et qui doivent l’être dans l’uffectiou de leurs
�( 7)
« père et'mère, le soient aussi clans le partage de leurs
« biens. »
Auroux ajoute, n°. 3 , que « cette prohibition de la
« coutume s’entend directement et indirectement, et par
« quelque manière que ce soit. » Suivant cet auteur,
n°. 8 , la donation faite hors contrat ne profiteroit pas
au donataire, quand il voudroit renoncer à la succession
pour s’en tenir à son don ; et Decullant, bien pénétré
de la prohibition absolue de la coutume, s’exprime ainsi :
eritm cum paragraphus noster intendat œqualitatem
ínter liberos, ut notât MoHnœus, et non excipiat nisi
donationern fa cta m façore m atrim onii, censeo extra
hune casum prohiberi donationern cuidonatarius etiarn
cibstinendo ab hcereditate non possve *tar-e.
Passant à l’article 219 de la même coutume, les do
nations, conventions, institutions d’héritiers, faites en
contrat de mariage, sont bonnes et valables au profit
et utilité des mariés et de Vun d'eux, ou des descendons
du mariage ; ce qui veut dire que ceux qui contractent
mariage, ou les descendans, peuvent seuls profiter des
avantages stipulés. Favor hujus paragraphi, nubentes
tantum , et ex eodem matrimonio descendentes, ajficit
in tantum , ut si institutio fa c ta fu e r it in gratiam
contrahentium et aliorum non contrahentium , pro
portionibus contrahentium valeat, et pro non nubentium partibus corruat.
Voilà sans doute une décision précise et absolue, et
on ne peut en tirer d’autre conséquence, sinon que la
dame Dumont n’a pas eu le droit, pendant le mariage,
de s’occuper, encore moins de disposer de tout ou de
�( 8 ) ■
partie d’un conquêt de communauté; 2 °. qu’en lui sup
posant un droit quelconque, elle n’auroit pu le donner
à son fils que par son contrat de mariage.
E t certes, si elle ne pouvoit pas disposer, à plus forte
raison n’a-t-elle pu conférer à son époux le droit d’élire
son fils ou tout autre, pour recevoir ce bienfait; car le
droit d’élire suppose un droit préexistant plus étendu.
A vant de transmettre le pouvoir de ch oisir, il faut
pouvoir donner; ainsi, par exem ple, une femme mi
neure ne pourroit donner à son mari la faculté d aliener
ses biens, puisqu’elle ne peut elle-m êm e les vendre;
ainsi, la femme qui se trouve dans la prohibition de
disposer, ne peut transmettre à un tiers la faculté de
choisir un de ses enfans pour recevoir une libéralité de
sa part, lorsqu’elle ne peut par elle-même exercer cette
libéralité.
D ’ailleurs le droit d’élire que donneroit un époux à
l’autre, ne se ro it-il pas en contravention formelle à
l’article 226 de la coutum e, qui prohibe les avantages
entre m ari, femme et enfans, par dispositions entre-vifs
pendant le mariage? Cette prohibition, dit encore Auroux,
s’entend tant directement qu’indirectement. Cet auteur
regarde unjidéicom m is notamment comme une manière
indirecte d’éluder la défense de la lo i, et veut que celui
à qui on donne ne puisse faire la donation à la personne
prohibée, ni la retenir pour lu i, mais il doit y renoncer
«n faveur de l’héritier.
Un fidéicommis a beaucoup de similitude avec le droit
d é lire ; et cette option a été regardée comme une manière
indirecte d’éluder la prohibition de la l o i, par un arrêt
du
�( 9 )
du 18 mai 1736, rapporté p a r 'l’Epine de Grainville.
L ’arrêt ari nu lia une institution faite par un père au profit
de l’un de ses enfans qui seroit choisi par sa seconde
femme, par cela seul que l’option de l’enfant institué
avoit été donnée à la seconde fem m e, qui ne pouvoit
recevoir qu’une portion d’enfant moins prenant.
Ce droit d’élire doit donc être regardé comme non
avenu.
La dame Dumont a prédécédé son mari ; son fils ne
s’est marié qu’après la mort de sa mère; tous les enfans
ont été saisis des biens maternels, et notamment de la
portion des acquêts qui l’evenoient à leur mère : le sieur
D um ont pere n’n pin»
cjn’iin simple associé. Comment
auroit-il pu dès-lors donner à son fils la portion d’acquêt
dont les héritiers de sa femme étaient saisis? Ce seroit
évidemment disposer de la chose d’autrui, puisquè les
héritiers maternels avoient un droit actuel à la moitié
de tout ce qui compose la communauté. Cette proposi
tion est trop claire pour avoir besoin d’un plus grand
développement. Pourquoi d’ailleurs se livrer à des dis
sertations oiseuses, lorsque déjà les sieur et dame de la
Roque ont présenté leurs moyens avec la plus grande
étendue? La dame Hilliard diroit peut-être que les sieur
et dame de Vaure ont voulu fa ire briller leur esprit,
ou séduire par le prestige d'une fa u sse éloquence.
On va passer aux questions secondaires ; on discutera
ensuite rapidement les fins de non-recevoir qu’oppose la'
d me Hilliard.
La dame de Vaure, par son contrat de mariage, est
instituée héritière par égalité avec les autres enfans? sous
B
�( IO )
la réserve expresse de la terre de Mont, pour en disposer,
de la part des père et mère, au profit de tels de leurs
autres enfans qu’ils jugeront à propos, même de la future.
On a prétendu faire résulter de cette clause que la dame
de Vaure étoit bien retenue dans la maison pour tous les
biens de la succession, mais qu’elle étoit apanée et exclue
l’elativement à la terre de Mont, d’après l’article 305 de
la coutume de Bourbonnais, qui est une coutume d’ex
clusion.
On se fonde sur une consultation donnée par trois
jurisconsultes de Clermont, à la dame de Vaure ellemême, et dont on dit avoir une copie collationnce.
Etoit-il bien permis à la dame Hilliard d’argumenter
d’LUie Consultation confidentielle, donnée à la partie ad
verse, quand bien même la dame de Vaure auroit eu
la franchise de la communiquer? Ce n’étoit point ainsi
qu’on en usoit autrefois au barreau ; mais la dame Hilliard
nous apprend qu’on voit tous les jours des choses nou
velles.
Il est rare cependant qu’on soit obligé de discuter, et
qu’on oppose à une partie la consultation qu’elle a de
mandée dans son intérêt : mais en mettant le procédé à
l’écart, on prouvera que ce système est erroné dans le
fait et dans le droit.
Dans le fait, parce que la dame de Vaure est retenue
dans la maison même pour cet objet; les père et mère
lui laissent l’espoir successif comme «ux autres enfans,
en se réservant la liberté d’en disposer à son profit.
Dans le droit, parce qu’ une fille ne peut être en même
temps apanée et retenue, forclose dans une portion des
�C 11 )
biens, et héritière dans l’autre. Cette singularité impli
quèrent contradiction. L ’apanage est une exclusion absolue;
tellement que la fille apanée devient étrangère à la suc
cession, et qu’un cohéritier pourroit exercer contr’elle
la subrogation d’action, si elle achetoit un droit indivis
d’un autre cohéritier.
La forclusion est une dénégation de la qualité d’hé
ritier ; l’une ne peut subsister avec l’autre. Comment
seroit-il possible que, d’une part, la fille n’eut pas le
droit de porter un œil curieux dans les affaires et les.
papiers de famille, de connoître la consistance d’une suc
cession , et qu’en même temps elle eut tous les droits de
l ’ h é r i t i e r , d e t o u t v o i r , d e tout examiner, de provoquer
le partage?
La dame Hilliard a prévu l’objection-, elle convient
même du principe que les deux qualités sont inconci
liables; mais elle voudroit le restreindre à un cas où il
ne peut jamais avoir lie u , à une forclusion légale pro
noncée par le seul effet de la loi municipale.
C’est ce qu’il est difficile de comprendre. On ne con
cevra jamais ^comment il pourra arriver, lorsque la for
clusion est légale, qu’elle sera partielle ; car ici tout ou
çien.
Ma ¡menant qu’est-ce qu’une forclusion convention
nelle? Toujours la même chose qu’une forclusion légale,
surtout dans une coutume d’exclusion, où la renonciation
de la fille est comptée pour rien , ou du moins est con
sidérée comme surérogatoire, d’après la loi du 18 plu
viôse an 5 .
Et qu’on ne dise pas que le père a le droit de faire
B *
�C 12 )
eette bigarrure, d’apaner sa fille dans une partie, de la
retenir dans l’autre : du moment qu’il honore sa fille de
la qualité d’héritière, cette qualité est indivisible; elle
efface toute idée de forclusion et d’exclusion. Il en est
ici comme des testamens chez les Romains, où le testateur
ne pouvoit mourir partim testatus, partim intestatus.
Ces idées sont simples, n’ont rien d’exagéré, et répondent
suffisamment à la proposition des sieur et dame Hilliard.
D e u x i è m e q u e s t i o n . L ’institution faite au profit
de la dame de Vaure ne contient point la condition
irritante d’abandonner à son frère la terre de Mont en
préciput. L e rédacteur du contrat n’a stipulé que des
clauses inutiles relativement à cet immeuble.
En effet, les père et mère se sont réservé deux choses
qui n’étoient pas à leur pouvoir. La première, est celle
où il est dit que les père et mère se réservent le droit
de disposer de la terre de M o n t, au profit de celui de
leurs enfans qu’ils jugeroient à propos, même de laju tu r e .
Ils trompoient la dame de Vaure lorsqu’ils lui ont donné
cet espoir. La coutume ne leur auroit permis une dis
position au profit de la dame de V aure, qu’autant qu’elle
auroit été faite par contrat de mariage : dès qu’ils la
marioient sans disposer de cet objet à son profit, ils ne
pouvoient plus le faii’e dorénavant, pas même par tes
tament ; car dans cette coutume on ne pouvoit cumuler
la qualité d’hériter et de légataire : voilà donc une clause
inutile et trompeuse.
Par la seconde, il est dit qu’en cas de non disposition ,
la terre appartiendra à leur fils qui ne contracte pas ;
cette clause n’étoit pas plus utile que la première. André
�'■ '
( 13 )
Dumont, étranger à ce contrat , n’étoit pas saisi -, il ne
pouvoit l’être valablement que par son conti’at de ma
riage.
Gela posé, la terre de Mont a toujours demeuré dans
la succession ah intestat • et chacun des enfans successi
vement institué par égalité, a dû espérer que tant qu’il
n’y auroit pas de disposition expresse de cet immeuble
par le contrat de mariage de l’un d’e u x , il auroit un droit
égal dans la terre de Mont : cet espoir est devenu une
certitude pour la portion maternelle, dès que la mère
est morte avant le mariage de son fils, et sans en avoir
disposé par le contrat de mariage de la dame de Beauv e g a r d , sa s e c o n d e fil lu.
Qu’importe maintenant que la mère, qui ne pouvoit
pas donner un conquêt de communauté, qui n’auroit pu
disposer d’un propre que par le contrat de mariage de
l’un de ses enfans , ait ajouté que « l’institution de la
« dame de Vaure n’est faite que sous la condition de
« cette disposition, à la charge par elle de laisser jouir
« le survivant des instituans, de la portion qui lui seroit
« revenue dans les biens du prédéccdé, sans lesquelles
« charges et conditions l’institution n’auroit été faite, et
« la futui*e auroit été apanée moyennant la dot qui va
« lui être constituée. »
Ce n’est là qu’une tournure indirecte pour éluder une
loi prohibitive ; et on ne peut le faire, d’après Auroux,
par quelque manière que ce suit ; s’il en étoit autre
ment, la prohibition de la loi seroit inutile, et les hommes
ne manqueroient pas de moyens pour l’éluder. Dans une
coutume d’égalité, il faut surtout bien se g a r d e r d’établir
�( i4 )
un intermédiaire dont on pourroitse servir pour gratifier
tel enfant au préjudice de tel autre : cette vérité avoit
été bien sentie lors de la publication delà loi du 17 nivôse
an 2. On sait que le système restrictif de cette loi n’étoit
pas pour les libéralités entre époux; elle leur donnoit
au contraire la plus grande latitude lorsqu’il n’y avoit
pas d’enfans; et bientôt les époux voulurent se servir de
cette faculté , pour transmettre tout ou partie de leurs
biens à des parens incapables, en imposant cette con
dition aux donations qu’ils se faisoient de l’un à l’autre.
Ils se servoient de l’argument favori de la dame Hilliard :
« Il dépend de celui qui donne, d’imposer à ses libéra« lités les conditions qu’il lui plaît. » Mais la loi inter
prétative du 22 ventôse an 2 , questions 11 et 13, vint
annuller toutes ces conditions comme 11’étant que des
fidéicommis , ou des intermédiaires pour contrarier le
système de la loi.
N ’y a - t - i l pas ici même raison? Les sieur et dame
Hilliard pouvoient-ils faire disparoître leur incapacité,
ou contrarier le principe de la loi municipale, par des
conditions illicites , ou par un intermédiaire qui détwuiroit le système d’égalité proclamé avec autant d’éDergie, en termes irritans et prohibitifs, ne peuvent
les père et mère donner, etc. ?
Mais, dit la dame Hilliard, malgré la p r o h i b i t i o n de
l’article 2 1 7 , malgré la disposition de l’article 219, qui
dit que les dispositions ne saisissent que les contractons,
il est cependant un moyen de faire l’équipollent d’une
institution au profit d’autres personnes que des mariés.
Ce moyen, Auroux l’indique sur l’article 219, n°. 28;
�( i5 )
il consiste à instituer la personne mariée , à la charge
d’associer ses frères et sœurs à l’institution : par cette
voie, les associés, quoique non contractans, sont saisis
de leur portion , par cela seul que l’association est une
charge de l’institution.
O r , la condition du préciput n’est autre chose qu’une
condition de l’institution ; donc André Dumont a été
valablement saisi du préciput, quoique non contractant.
Voilà bien l’objection dans toute sa force.
Il est aisé d’y répondre. On convient que la charge
d’associer a été admise en jurisprudence ; on s’est fondé
sur l’avis du jurisconsulte en la loi Cum ex filio , ff. D e
vulg. et pupill.
Maïs quelle différence énorme
entre l’association, et la condition qu’on voudroit lui assi
miler!
Dans le cas de l’association , l’institué est saisi du titre
universel : c’est lui qui a tout ; l’associé ne tient rien de
l’instituant-, il ne le prend que de l’institué. C elui-ci a
des chances favorables à courir, comme, par exemplè,
le prédécès de l’associé, même avec enfans, car les enfans
ne seroient pas associés : hœres socii m eiy non est socius
m eus; la révocation de la charge ou de la condition, car
l’instituant peut révoquer toutes les clauses onéreuses, et
ne le peut qu’en faveur de l’institué.
I c i , au contraire , la dame de Vaure n’avoit rien à
gagner, et tout a perdre; elle n’étoit point saisie du titre
universel; le père ne pouvoit plus révoquer la condition
à soi] profit, et sa disposition n’avoit d’autre objet que
d’éluder la prohibition de la loi : ce n’étoit pas un titre
honorable qu’il vouloit donner h sa fille; il cherclioit un
�( i6 )
moyen d’avantager son fils, dans le cas où il ne pourroit
pas le marier ; de faire en un mot ce que la loi lui défendoit.
Gomment une semblable condition seroit-elle licite? ne
faudroit-il pas rayer absolument l’art. 217 delà coutume?
La dame ïïillia rd , poussée jusqu’au dernier retran
chement, n’a plus d’autre refuge que son arrêt de 1716;
elle se plaint de ce qu’ Auroux en a parlé trop légè
rement : mais cet arrêt unique est bien plus développé
dans un manuscrit qu’elle a le bonheur de posséder. E t
il a jugé en thèse, qu’une institution pouvoit être grevée
d’un p récipu t, au profit d’un non contractant, lorsqu’il
a été la condition de l’institution faite au profit d’une
fille q u i , sans cela, eût été apanée.
Ce manuscrit, quel qu’il soit, p o u r r o i t - il balancer
l’autorité de la loi et en modifier la rigueur? Auroux
en avoit bien assez dit sur l’arrêt invoqué par la dame
Hilliard.
Ce commentateur éclairé commence à poser en prin
cipe , sur l’article 308 de la coutume , n°. 4 , que le
préciput n’est valable qu’autant qu’il est fait en contrat
de mariage, et en fa v e u r d’icelui ,* il rappelle les termes
de l’article 217 , et l’observation de Decullant.
« A la vérité, ajoute-t-il, nombre suivant, par arrêt
« du 22 mai 1716 , le préciput de 30000 francs fait à
« Sébastien M aquin, par le contrat de mariage des dames
« ses sœurs , fut confirmé ; mais il étoit dit par leur
« contrat de mariage que dans le cas où lesdites dames
« voudraient contester ledit préciput, elles demeureroie fit
« apanées pour 24000Jfrancs chacune. »
Et c’est à raison de l’apanage si disertement exprimé,
quç
�( 17 )
que l’arrêt jugea la validité du préciput ; aussi MenudeL
dit-il que c< pour ôter tout doute, il est à propos de
« dire par le contrat, que les père et ruère ont doté la
« fille de la somme de.......... ., à la charge de venir à
« la succession en rapportant; et qu’où elle fourniroit
« débat’ contre ledit préciput, déclarent qu’ils apanent
« ladite fille de la somme d e ........., parce qu’en mettant
« simplement la clause qui/s instituent ladite fiile sous
« ledit préciput, elle peut dire qu’elle n’a pas été apanée,
« à défaut de l’exécution de ladite clause , qui sonne
« toutefois en une institution conditionnelle, et que les
« mots qui seroient dans le contrat, sans lequel préciput
cî les pere et incit* 1 iiuioicnt
te
«
«
«
^ ne sct*oient pcïS UD.
apanage formel, mais plutôt une simple énonciation du
dessein d’apaner, lequel n’étant pas disertement expliqué, ne l’empêclieroit pas de venir aux successions
des père et mère, en rapportant. »
Dans le contrat de mariage de la dame de V au re , il
n’y a point comme dans celui des dames M aq u in , que
si elle conteste le préciput, elle sera apanée à la somme
d e . i l y est seulement dit, que sans les charges et
conditions, l’institution n’auroit été faite, et la future
auroit été apanée moyennant la dot qui va lui être
constituée. 11 n’y a dans ce contrat qu’une simple énon
ciation du dessein d’apaner, et non un apanage précis;
dès-lors on ne pourroit même appliquer l’arrêt de 1716.
On ne doit pas dissimuler que M enuàel ne trouve
pas l’objection considérable, parce que, suivant ce com
mentateur, le mot dot emporte avec lui l’apanage; mais
ce n’est pas là l’opinion d’/luroux , qui tranche la
G
�( 18 )
question, et ne considère pas l’arrêt de 1716 comme
devant faire la règle : il en rend compte comme d’une
exception particulière , unique ; et il est remarquable
que sur une question aussi importante, et dans un temps
où tout étoit en faveur des mâles, il n’y ait qu’un seul
préjugé rendu dans des circonstances particulières qui
ne se rencontrent pas dans l’espèce.
Que sera-ce donc aujourd’hui que les lois nouvelles
se rapprochent davantage de l’égalité entre les enfans;
et que le Code Napoléon est plutôt restrictif que libéral,
lorsqu’il s’agit de dispositions en ligne directe !
Eh ! pourquoi s’occuper si long-temps du contrat de
mariage de la dame de Vaure ? Ce n’est point en vertu
de ce titre qu’elle vient à la succession de la mère ; les
choses ne sont plus au même état : le père a fait des
dispositions particulières dans le contrat de son fils, qui
font disparaître les clauses des contrats précédens. L a
dame de Vaure se présente pour recueillir la succession
maternelle, ouverte ab intestat, ou ce qui est la même
chose, sans aucun règlement valable.
La dame Hilliard qui redoute cette manière toute
naturelle de se présenter, la prétend non recevable à
abdiquer un titre onéreux.
Elle a exécuté, dit la dame Hilliard, les clauses et
les conditions de son institution; elle a reçu, par exemple,
son avancement d’hoirie : mais c’est encore chose nou
velle , que de faire résulter une iin de non-recevoir
d’une action si simple. Où a-t-on trouvé que l’héritier
qui reçoit un avancement d’hoirie, c’est-à-dire, une chose
qui lui donne la qualité d’héritier, qui est promise avant
�( j9 y
l’ouverture de la succession, qui est sujette à rapport
lors du partage, et qui n’est donnée qu’en attendant le
partage, soit non recevablè à venir à la succession comme
héritier ab intestat ?
Ce n’est pas sérieusement, sans doute, que la dame
Hilliai-d propose cette objection; elle ne peut pas ignorer
que tant que l’héritier ne s’est pas immiscé, il a toujours
>le droit d’abdiquer un titre onéreux, pour s’en tenir à
la qualité d’héritier ab intestat.
Mais la dame de Vaure a laissé jouir son père des
biens de son épouse, et ce ne peut être qu’en vertu des
clauses de son contrat qui lui en imposoit l’obligation :
donc elle a exécuté les conditions de son institution.
Singulière conséquence. Quoi! la dame de Yaure, patrespect pour son père, n’a pas voulu provoquer un par
tage ; elle a désiré dans son intérêt qu’il n’y eût pas
d’inventaire dissolutif, et que la communauté se con
tinuât -, elle a craint, si on v e u t , que ses recherches
donnassent de l’inquiétude ou du chagrin à son père,
qui avoit une longue habitude d’administration; et elle
seroit non recevable !
La crainte révérencielle , dit la dame H illiard, ne
peut suffire, ni pour fonder une action, ni pour justifier
une exception; l’article 1114 du Code Napoléon con
sacre ce principe.
Ce n’est pas là ce que dit le Code : il dit bien que la
seule crainte révérencielle ne suffit point pour annuller
un contrat, lorsqu’il n’y a pas eu de violence exercée ;
mais il faut entendre sainement cette disposition, c’està-dire, que si la dame de Yaure avoit passé un acte, 1111
�(2 0 )
traité avec son p è re , et qu’elle attaquât cet acte par le
seul motif de la crainte révérencielle; si elle n’étoit pas
dans la dépendance de son p ère; si son consentement
avoit été libre, et qu’elle n’eût point, d’autre motif à
opposer ce ne seroit pas suffisant pour faire annuller
l’acte.
Mais ici il n’y a point d’acte, point de consentement:
on n’oppose à la dame de Vaure que son silence ou son
inertie; on ne lui fait d’autre reproche que d’avoir resté
dans l’inaction pendant la vie de son père; ce seroit lui
donner tout au plus l’avis de demander la restitution
des jouissances perçues par le père, si d’ailleurs elle ne
préféroit la continuation de la communauté.
L es sieur et dame d e Vaure ne pousseront pas plus
loin leurs observations : ils se proposent de développer
leurs moyens avec plus d’étendue, lors de la plaidoirie
de la cause ; ils se sont expliqués sans prétention ; et
quoiqu’ils eussent dû s’attendre à quelques égards de la
part de leur nièce ils ne cesseront d e lu i donner des
exemples de modération et de décence.
Signé R A B U S S O N D E V A U R E .
DUM ONT DE VAURE.
*
M e. P A G È S (de R iom ), ancien avocat,
«
M e. V E R N I È R E , avoué.
I
A
R IO M ,
11
de l’imprimerie de T h ib a u d - L a n d r i o t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Juillet 1808.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rabusson de Vaure. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jutier
Huguet
Bernardi
Decombrousse
Chabroud
Mailhe
Poirier
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
contrats de mariage
communautés
dot
forclusion
fils avantagé
successions
avantages prohibés
préciput
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour les sieur et dame Rabusson de Vaure, intimés ; contre les sieur et dame Hilliard, cotuteurs de la demoiselle Dumont, appelans.
Particularités : notation manuscrite : texte complet de l'arrêt 1ére section 5 août 1808.
Table Godemel : Préciput : 2. une disposition de préciput, en coutume de Bourbonnais, faite en faveur d’un fils par ses père et mère, dans les contrats de mariage de ses deux sœurs, comme condition de non apanage et d’une institution contractuelle à leur profit, est-elle valable, lors surtout que par le contrat de mariage du fils, le père survivant a surabondamment confirmé cette disposition, en vertu de la faculté que s’en étaient réservée les instituants, comme condition de cette même institution ? les sœurs instituées peuvent-elles soutenir que la réserve et dispositions faites en faveur de leur frère, étranger à leurs contrats de mariage, ne pouvaient leur enlever leur portion dans l’objet réservé, cette disposition n’ayant pas été faite dans son propre contrat de mariage, aux termes de l’article 219 de la coutume ? peuvent-elles à leur institution pour se dégager des charges et conditions qui en font partie, et demander le partage par égalité ? Ou, au contraire, en cas de renonciation, devraient-elles être réduites à l’apanage fixé par leur constitution dotale ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1775-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1801
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1802
BCU_Factums_G1803
BCU_Factums_G1804
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53328/BCU_Factums_G1801.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saulzet (domaine de)
Deux-Chaises (03099)
Mont (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avantages prohibés
communautés
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
dot
fils avantagé
forclusion
préciput
secondes noces
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53329/BCU_Factums_G1802.pdf
a7cd03188ce6c67eacf6dd76a9ee7c5f
PDF Text
Text
REPONSE
Des Sr. et Dme. DE LA ROQUE DE MONS,
intimés,
AU M É M O I R E
D e s sieur et dame H I L L I A R D , cotuteurs de la
demoiselle D u m o n t , appelans.
sieur et dame de la Roque exercent des droits
consacrés par la nature et les lois ; et si leur réclamation
contrarioit les sieur et dame H illiard, ils ne devoient la
discuter qu’avec calme et décence : ils eussent peut-être
persuadé alors qu’ils croyoient avoir une bonne cause,
et qu’elle pouvoit se passer de personnalités et de décla
mations. Mais ce n’est point là le plan qu’ont voulu suivre
L
ES
A
�( o
les sieur et dame Plilliard. Les personnalités leur ont paru
devoir tenir le premier rang dans leur défense *, les
moindres circonstances leur ont paru de grands moyens;
et s’il falloit les suivre pas à pas, il faudroit écrire pour
les voisins et les voisines, qui seroient peut-être fort en
état de juger une partie des faits articulés, et de les dé
m entir, plutôt que pour la cour qui n’a qu’une simple
question de droit ù juger.
A insi, pour être entendu de la cour, il suffit de mettre
sous les yeux les expressions même des.'actes qui cons
tituent le litige.
F A I T S .
L e sieur Jean D u m o n t, et la dame Procule P itat,
eurent de leur mariage trois enfanS , M arie, épouse du
sieur de V aure, M arguerite, mère de la dame delà Roque,
et A n d ré , père de l’appelante. .Les filles furent mariées
à- l ’âge de dix-sept ans.
'
L e contrat de la dame de V a u r e , en date du 19 no
vembre 17 7 5 , contient ce qui suit :
« En faveur du m ariage, les sieur et dame Dumont
« ont institué la demoiselle future, leur fille, leur hé« xùtière par égale portion* avec les autres enfans qu’ils
« auront au jour de leur décès, de tous les biens dont
« ils mourront vêtus et saisis, sous la réserve expresse
« qu’ils se font de la terre de M ont, consistante e n . . . . .
« avec les bestiaux qui pourroient la garnir , jusqu’à
« concurrence de 5ooo livres, ensemble tous les vaisseaux
«- vinaircs} ainsi que les meubles meublans . . . . . , ar-
�( 3 )
geiHerie, en l’état que le tout se trouvera au décès du
dernier mourant ; en outre la somme de 6000 livides
que lesdits sieur et dame Dumont se proposent d’em
ployer en acquisition de fonds, cens et devoirs, pour
être annexés à ladite terre, et en faire partie, pour,
par lesdits sieur et dame D u m o n t, ou le survivant
d’eux, disposer de ladite terre au profit de tels de leurs
enfans .qu’ils jugeront à propos, même de la future,
par quelqu’acte que ce s o it, d’entre-vifs ou à cause de
m ort, sous signatures privées ou par-devant notaire;
dans laquelle réserve les sieur et dame D um ont, père
et mère de la future, entendent être comprises toutes
constructions nouvelles : et dans le cas de non dispo
sition de leur p a rt, ladite terre de M o n t , avec les
bestiaux qui se trouveront la garnir, jusqu’à concur
rence de ladite somme de 5ooo francs, les vaisseaux
vinaires, meubles meublans, lin ge, batterie de cuisine
et argenterie, en l’état que le tout se trouvera, ap
partiendront à André D um ont, leur fils, lequel en
demeurera précipué, ainsi que des annexes qui auront
été faites à ladite terre , jusqu’à concurrence des
6000 livres; ladite institution faite sous ladite réserve,
et à condition de ladite disposition, et encore à la
charge , par la fu tu re, de laisser jouir le survivant
des père et m ère, de la portion qui lui seroit revenue
dans les biens du prédécédé : sans toutes lesquelles
charges, clauses et conditions, ladite institution n’auroit
été faite , et la future auroit été apanée moyennant
« la dot qui va lui être constituée. »
En avancement de leur future succession , lesdits
A a
�(4)
sieur et dame Dumont ont constitué en dot à la future
la somme de 30000 livres, et 10000 livres de bien paraphernal. L a disposition est terminée ainsi : « Sera
. «. néanmoins tenue ladite demoiselle future, de rapporter
« tant ladite somme de 10000 livres à elle donnée pour
« lui tenir lieu de bien paraphernal, que celle de 300001.
« à elle aussi donnée en avancement d’hoirie, pourvu
« que le payement en ait été fait lors de l’ouverture
« des successions des sieur et dame ses père et m ère,
« ou de moins prendre dans lesdites successions. »
Chaque fois que les sieur et dame Hilliard ont rap
porté les stipulations de ce contrat de m ariage, ils se
sont arrêtés après ces mots : en avancement de leur
fu tu r e succession, lesdits sieur et dame D um ont ont
constitué en dot j cl la, demoiselle ¿future , la somme
de 30000 livres. Ils ont affecté d’omettre la dernière
clause, qui caractérise de la manière la plus précise la
constitution faite à la future, et explique que les 100001.
sont un bien paraphernal; que les 30000 ne sont pas
une constitution dotale, mais un* avancement d’hoirie ;
que la future est tenue de rapporter le to u t, lors de
l’ouverture des successions de ses père et mère.
La mère de la dame de la Roque se maria le 10 fé
vrier 1777? avec le sieur Grellet de Beauregard. On lit
dans leur contrat que : « Dans l’esprit du contrat de
« mariage de demoiselle Marie Dumont, lcur= fille aînée,
« avec M. Joseph Rabusson de Vaure , passé devant
« R o llat, notaire, le 19 novembre 1 7 7 5 , les sieur et
« dame Dumont ont institué la demoiselle future leur
« héritière par égale portion avec les autres enfans<
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
.
[
5
3
qu’ils auront au jour de leur décès, de tous les biens
dont ils mourront vêtus et saisis, sous la réserve expresse qu’ils se font de la terre de M o n t, telle qu’elle
est expliquée au contrat sus-daté, ensemble des autres
objets qui y sont détaillés, et de la somme de 6000 1.
dont il est parlé , p o u r, par lesdits sieur et dame
D um ont, ou le survivant d’e u x , dans les termes du
même contrat, disposer de ladite réserve au profit
de tels de leurs enfans, même de la future, par les
moyens et de la manière expliquée audit conti’at.
« Cette institution faite, en outre, aux mêmes charges
« que celles expliquées audit contrat; et en avancement
« de leur future succession, lesdits sieur et dame D u « mont ont constitué, etc., etc. » L a future est obligée
au rapport de tout ce qu’elle aura reçu. Il est bien exprimé
dans ce contrat que les sieur et dame Dumont se sont
réservé la terre de M ont avec les accessoires, pour en
disposer en faveur de tels de leurs enfans qu’ils jugeront
à propos ; mais ils ne disent pas qu’à défaut de dispo
sition, elle appartiendra par préciput à André D um ont,
et que sans cette disposition, ils auroient apané la
future : ce qui donne lieu de penser que leur volonté
n’étoit plus la m êm e, ou qu’ils craignoient que le ma
riage n’eût pas lieu si l’on pouvoit supposer que l’ins
titution de la future ne fût que conditionnelle.
En vain les adversaires prétendent - ils que ces mots ,
dans les term es, renferment les dispositions irritantes
par l e s q u e l l e s ils voudroient repousser les filles des sieur
et dame Dumont. 11 est de principe que les prohibitions,
de même que les peines, ne s’étendent pas au-delà des
�( 6 )
cas exprimes ce qui n’a été interdit qu’à une personne,
ne peut, par induction, être regardé comme interdit
à une autre. La disposition de la terre de Mont
étoit un objet assez important, pour qu’il fallût en faire
mention expresse dans le contrat de mariage de la dame
de Beau regard, si les père et mère vouloient qu’elle ap
partînt à André D um ont, en vertu de ce contrat. L ’institutiou de la mère de la dame de la Roque ne peut
être conditionnelle, lorsqu’il n’a été stipulé aucune con
dition dans son contrat ; le mot charges ne se rapporte
qu’à l’usufruit des biens du prédécédé, réservé en faveur
du survivant des père et mère : les contrats de bienfai
sance sont de droit étroit, tout y est de rigueur. Les
actes des 19 novembre 17 7 5 , et 10 février 17 7 7 , sont
des traités passés entre des familles différentes : les obli
gations de l’une sont étrangères à. l’autre.
ga
Marguerite D u m on t mourut le 8 avril 1783, huit jours
après avoir donné naissance à la dame de la Roque. La
dame Dumont ne survécut à sa fille qu’environ six mois:
• elle étoit commune en biens avec son mari ; il en con
serva la possession comme chef de la communauté, qui
se continua avec ses enfans.
André Dumont se maria en 1789. Il est dit dans son
« contrat: En faveur du présent mariage, le sieur Dumont
« père a institué et institue son fils, par égales portions avec
« ses deux sœurs, épouses de M M . Rabusson de Vaure
« et Grellet de Beauregard , de tous les biens meubles
« et immeubles dont il mourra vêtu et saisi ; et comme
« par le contrat de mariage de dame Marie Dumont ,
« épouse dudit Rabusson de V a u re, ledit sieur Dumont
�(7)
père, et ladite défunte Procule P itat, son épouse,
s’étoient conjointement réservé, même au survivant
d’eu x , la faculté de disposer au profit de tels de leurs
enfans qu’ils jugeroient à propos, et par tel acte que
bon leur semblerait, de la terredeM ont, consistante, ..
et en cas de non disposition desdits objets du vivant
desdits. sieur et dame Dumont , ils appartiendront
en toute propriété, et à titre de préciput, audit sieur
futur ép o u x, ainsi que les annexes qui auroient été
faites à ladite terre, jusqu’à concurrence de la somme
de 6000 francs.
« Et
mme ladite dame Pitat est décédée sans avoir
manifesté scs intentions à l’<5garcL de la réserve ci-dessus
désignée, ledit sieur Dumont père, usant de la faculté
de pouvoir disposer de là totalité desdites réserves,
déclare qu’il dispose, à titre de préciput, au prolit
dudit sieur futur époux, tant de ladite terre de M on t,
circonstances et dépendances d’icelle, que de tous les
autres objets ci-dessus spécifiés, et tel que le tout est
désigné et spécifié en ladite réserve portée au contrat
de mariage ci-dessus d até, des sieur et dame Rabusson
de Vaure ; p ou r, par ledit sieur futur, faire le prélè
vement et entrer en jouissance de ladite terre de M ont,
et de tous les autres objets compris en la présente dis
position , immédiatement après le décès dudit sieur
Dum ont; sous la réserve que se fait ledit sieur Dumont
p è re , de la somme de 30000 francs, à -prendre sur
ladite terre de M ont / pour en disposer en faveur de
' tels de ses enfans ou petits-enfans qu’il jugera à propos,
même en faveur dudit sieur futur, par tel acte d’entre-
�«f
«
«
ce
«
«
«
«
«
(
8
)
.
vifs, à cause de m ort, ou sous signatures privées, que bon
lui semblera ; et de suite ledit sieur Dum ont, en faveur
dudit mariage , a disposé et dispose en faveur dudit
sieur futur é p o u x , sur la susdite somme de 30000 fr.
réservée, de celle de 10000 francs ; de laquelle ledit
sieur son père se charge de lui servir l’intérêt au taux
de l’ordonnance, sans aucune retenue , jusqu’au remboursement, qu’il lui sera loisible de faire quand il
le jugera à propos.
« D e la même somme de 30000 livres, réservée par
« ledit sieur Dumont père, il a présentement disposé et
« dispose, en faveur de demoiselle Procule Grellet de
« Beauregard, sa petite-fille, fille de Jean-Baptiste Grellet
« de Beauregard, et de feue dame Marguerite D um ont,
« de la somme de 5ooo liv ., à prendre sur ladite réserve,
« payable après le décès dudit sieur Dumont père, seuec lem ent, par ledit sieur futur ép ou x, sans intérêts jus« qu’audit décès, après lequel ils auront cours au taux
« de l’ordonnance, jusqu’au remboursement, que ledit
« sieur futur sera tenu de faire dans deux ans du décès
« de son dit père; et dans le cas où ladite demoiselle
« Grellet, ou ses père et mère, contreviendraient direc
te tement ou indirectement à la disposition fa ite par ces
« présentes, de ladite terre de'M ont, en faveur du sieur
«f fu t u r ép o u x, la disposition de 5ooo livres, fa it e en
« fa v e u r de ladite demoiselle G rellet, sera et demeurera
k nulle et de nul e jfe t, et comme non fa ite ' pareille« ment, dans le cas où ledit sieur Dumont père ne dis—
« poseroit pas de son vivant des ï 5 ooo livres restantes
ft de la susdite somme réservée, elle demeurera réunie
« à
�( 9 )
« à ladite terre de M o n t, et appartiendra audit sieur
« futur époux, sous la réserve que ledit sieur Dumont
« père se fait de la jouissance, pendant sa v ie , de la
« susdite terre de M o n t, pour, après son décès, appar« tenir en toute propriété audit sieur futur époux et
« en avancement d’hoirie et de ladite institution, ledit
« sieur Dumont père a constitué en dot audit sieur futur
« la somme de.........etc., etc. »
Suivant la disposition de l’article 217 de la coutume
de Bourbonnais, sous l’empire de laquelle vivoient les
parties, la disposition de 5ooo francs, faite en faveur de
Procule G rellet, étoit nulle; la condition onéreuse dont
elle étoit grevée l’auroit aussi empêchée de l’accepter :
mais nu mois de brumaire an n , ie sieur D um ont,
présent au contrat de mariage de ladite Procule G rellet,
sa p e tite -fille, augmenta de 10000 francs l’avancement
d’hoirie promis à sa mère ; il stipula que 5ooo fr. seroient
rapportés au partage, et que les autres 5ooo non sujets
à rapport seroient payés sur la réserve qu’il s’étoit faite
en disposant de la tei’re de Mont.
A u mois de novembre i 8o 5 , le sieur Jean Dumont
décéda : c’étoit l’époque où ses enfans devoient faire
valoir leurs droits héréditaires. Les dames de Vaure et de
la R oque, après avoir fait examiner les contrats ci-dessus
cités, se sont empressées de déclarer qu’elles 11’entendoient pas contester à la demoiselle Anne Dum ont, fille
et unique héritiere d’André , la moitié de la terre de
M o n t, qui avoit appartenu au feu sieur Jean D u m o n t;
mais qu’elles se croyoient fondées à recueillir leur portion
dans l’autre m o itié, qui étoit la propriété de la dame
B
�( 1° )
Pitat, décédée avant le mariage d’André Dumont. Mères
de fam ille, et appelées par la nature et la loi au partage
égal de la succession de ladite dame Pitat, devoient-elles,
au préjudice de leurs propres enfans, abandonner à leur
cohéritière, qui recueillera les quatre sixièmes de cette
terre, la petite part que leur, attribue la coutume à
laquelle les parties étoient soumises ?
Les qualifications odieuses que les sieur et dame Hilliax-d
'ont données à la conduite des dames de Vaure et de la
R o q u e, et les inventives prodiguées dans le mémoire
!des adversaires, rejailliront sur leurs auteurs. Les sieur
et dame de la R oque, par attachement pour leur cousine
rgermaine, aimënt à se persuader qu’elle n’a aucune part
à cette indécente'diatribe.
;Lës tuteurs d e: mademoiselle ODumont troublent mal
% propos la cendre de son respectable aïeul, lorsqu’ils
disent qu’il l’a laissée dans l’abandon. On >trouverait les
preuves d’envois d’argent qu’il1lui a faits. Il est notoire*
daiis le pàj^s que quelques années avant sa mort, il la
fit venir d’une ville éloignée, où elle habitoit avec ses
tuteurs, auxquels il fit?passer pour les frais de voyage
et retour une somme plus!forte que celle qui étoit né'cessaire. Lorsque sa petite-fille partit, son trousseau étoit
bien différent de celui qu’elle avoit porté :,les autres
enfans du sieur Dumont auroient vu avec plaisir qu’il
eût fait davantage pour elle; mais-le désir de payer ses
dettes enchaînoit sa générosité.
Il n’est pas moins facile d’écarter le reproche que les
appelons font aux; dames de V a u re et de la R o qu e, sur
la conduite par elles tenue depuis le commencement du
�( II )
procès. A peine, disent-ils, la demande fut-elle formée,
qu’on vit les dames de Vaure et de la Roque poursuivre
l’audience avec une activité sans exemple, ü n croiroit
sur cette allégation que .lorsque, l’affaire'fut jugée, l’ac
tion étoit intentée depuis peu de jours : il s’étoit «coulé
une année entière ; on ne peut supposer qu’il ait été
employé des sollicitations pour obtenir, après un si long
temps, le jugement d’une affaire provisoire, en ce qu’elle
suspend le partage des successions des sieur et dame
•Dumont.
Les sieur et dame Hilliard se plaignent de ce qu’à
l’audience du 8 août, leur avocat ayant plaidé pendant
trois heures , les dames de Vaui-e-et de la Roque lais
sèrent obtenir un défaut; ils attribuent à des combinai
sons astucieuses, et à des manœuvres ténébreuses, une
chose fort simple. Il avoit été signifié, le 14 juillet pré
cédent, un écrit signé de M . Chabroud, intitulé : Notes
pour mademoiselle Dumont. Cet écrit fut envoyé aux
sieur et dame de la. R o q u e q u i' habitent le département
de la Creuse; ils l’avoient.fait.passer à leur conseil pour
y répondi-e;et leur avoué ayant reçu cette réponse peu
de jours avant le 8 août, n’avoit. pu se préparer à plai<der. L e sieur de V au re, qui avoit quelque répugnance
à plaider devant le tribunal dont il étoit membre, voyant
, que l’avoué des sieur et dame de la Roque 11’étoit pas
p r ê t , laissa prendre défaut.
Si le défenseur des sieur et damp Hilliard eût eu avec
ceux de- ses parties adverses d e s. communications ami
cales, ils l’eussent prévenu qu’il$. n e plaideraient pas à
cette audience. L ’avoué,des sieur et dame de la Roque
3 z
�( *4 )
clairem ent, dans le contrat de mariage d’André , son
fils; il y énonce les différens objets qui composoient la
réserve, et ne fait nulle mention des 6000 francs. Lorsqu’il
dit à la fin de sa disposition, que tous les objets énu
mérés appartiendront à André D um ont, il ajoute, ainsi
que les annexes qui auroient étéfaites à la terre de Mont,
ja sq u à concw'rence de 6000 francs. Lés titres d’acqui
sition et rachat de cens existoient alors; ces acquisitions
avoient été réunies à la terre de Mont : le sieur Dumont
vouloit qu’elles continuassent à en faire partie. Mais on
voit très-distinctement qu’il n’est pas entré dans la pensée
des instituans, qu’outre ladite terre et ses dépendances,
on pourroit encore exiger la somme de 6000 livres.
Par le contrat de mariage de son fils, le sieur Dumont
se dépouilla entièrement, quant à la propriété, de ce
qu’il vouloit lui donner. Les mots, avec les annexes qui
auroient été f a it e s , ne peuvent s’entendre que du passé,
et non d’acquisitions à faire dans la suite, pour joindre
à un objet, dans ce que le sieur Dumont avoit cédé
sa propriété. Il avoit si peu l’intention d’ajouter à la
valeur des choses par lui données, qu’il la diminua par
une réserve.
' Quant aux dépens, la demoiselle Dumont ayant suc
combé sur l’objet principal de la contestation, devoit
supporter une partie des frais. Les sieur et dame de
la R oque, en signifiant le jugement, se sont reservé de
poursuivre la réparation de ces deux griefs, pour lesquels
ilsseproposentd’interjeter incidemment appel. Les tuteurs
de mademoiselle Dumont sont appelans des dispositions
qui ont déclare huile la donation en préciputdè’ ld' terre
�(
)
de M ont, pour la moitié provenante du chef de la
dame Pitat. C’est sur cet appel qu’il faut en ce moment
se fixer.
MOYENS.
Il ne sera échappé à aucune des personnes qui ont lu
le mémoire de mademoiselle D um ont, que ce n’est pas
sur les dispositions de la coutume, qui fait loi entre les
parties, qu’elle fonde ses prétentions; elle n’en invoque
textuellement aucun article. E h ! comment eût-elle pu
s’en prévaloir, lorsqu’il n’en est aucun qui lui soit favo
urable ? C’est en citant des autorités et des préjugés pres
que tous puisés dans des ouvi'ages étrangers à la coutume
jie Bourbonnais , ou clans des îtianusevils inconnus aux
sieur et dame de l a vRoque, qu’elle prétend établir une
jurisprudence qui anéantiroit les dispositions de la loi
sous l’empire de laquelle vivoient les parties.
On pourrait soutenir que cette loi étant claire et pré
cise , les cours actuellement existantes doivent la faire
exécuter, sans égard pour une jurisprudence qui s’en
sçroit écartée. Mais ou verra dans la suite qu’à raison des
circonstances particulières de cette affaire, les appelans
ne peuvent tirer aucun avantage de la prétendue juris
prudence qu’ils voudraient faire admettre.
Désirant rapprocher les réponses des objections, afin
de rendre plus lumineuse la réfutation du mémoire de
leurs adversaires, les sieur et dame de la Roque auraient
voulu suivre l’ordre que les sieur et dame Hilliard ont
adopté : mais il y a dans leur mémoire tant de diffusion1
et d’incoJiérauce ! il faudroit revenir sans cesse sur ses
�c 16 )
pas. Il a donc paru plus simple d’établir quelques pro
positions qui détruisent de fond en comble le système
des appelans : on réfutera en même temps les objections
qui s’y rapportent.
PREMIÈRE
PROPOSITION.
L a coutume qui régit les parties est une coutume
d'égalité ; elle ne permettoit ni d'avantager
A n dré D u m o n t, dans les contrats de mariage
de ses sœurs, ni de les exclure des successions,
par dot ou apanage ¡ à moins que ce qui aurait
été donné à ce titre ne leur eût été irrévoca
blement acquis a Vépoque desdits contrats, et
sans être retenues dans la famille par une ins
titution; stipulation qui ne se trouve pas dans
ceux des dames de Vaure et de Beauregard.
Pour établir cette proposition et les suivantes , les
sieur et dame de la Roque n’ont pas cru devoir secouer
la poussière des anciens manuscrits des avocats de la
ci-devant province de Bourbonnais ; il leur a paru que
ceux qui ont des procès seroient trop malheureux, si
pour apprécier leurs droits il falloit fermer le livre de
la l o i , et y suppléer par les décisions de quelques
hommes plus ou moins éclairés. Cette manière de juger
seroit sujette aux plus graves inconvéniens. Un avocat
qui a fait prévaloir son avis, l’a consigné dans des notes
où
�( 17 )
oïl sans doute il n’a pas rappelé toutes les circonstances
qui auroient pu faire juger le contraire; dans le même
temps, son voisin rendoit peut-être une décision opposée.
Seroit - il juste de s’en rapporter à l’un plutôt qu’à
l’autre? N’cst-il pas plus raisonnable de laisser à l’écart
tous ces écrits p rivés, et de ne consulter que la loi à
laquelle les parties doivent obéir ?
Les contrats de mariage de tous les enfans des sieur
et dame Dumont ont été passés sous l’empire de la cou
tume de Bourbonnais. Cette coutume veut que les enfans
partagent également les biens des auteurs de leurs jours.
Les articles 217 et 219 prohibent toutes donations et
avantages en faveur des enfans, si ce n’est en contrat de
mariage. L ’article 321 ne leur permet pas de prendre part
à une succession comme héritiers et comme légataires.
M . A uroux des Pommiers, que nous citerons souvent,
parce que son commentaire a presque obtenu l’autorité
de la lo i, observe, sur l’article 317 de ladite coutume,
que « sa disposition a pour principe Végalité que la nature
« désire, étant juste que ceux qui sont égaux en nais« sance, et qui doivent l’être dans l’affection de leurs
« père et m ère, le soient aussi dans le partage de leurs
« biens. La donation entre-vifs a été exceptée, parce qu’il
« eut été difficile aux pères et mères de marier leurs
« enfans, s ils n’avoient pas eu la liberté de leur faire
« des donations entre-vifs en les mariant. »
Ce n’est donc que pour l’intérêt des mariés, et dans
leur contrat de mariage, qu’il est libre aux pères e t mères
de faire des donations entre-vifs à leurs enfans. Dumoulin,
sur le môme article de la coutume de Bourbonnais, dit
C
�C 18 )
que cela a été étendu aux ascendans , toujours en vue
de l’égalité -, façore œqualitatis.
On trouve à l’article 219 , nombre 13 et suivans, de
nouveaux développemens. M. A uroux s’y exprime en
ces termes : « Une condition pour la validité des insti« tutions contractuelles, est qu’elles soient faites en
« faveur des mariés ¿ ou de l’un d’eux, ou des descen
te dans du mariage. » C’est la disposition de notre cou
tume et de plusieurs autres ; tel est aussi le sentiment de
nos commentateurs. F a çor hujus paragraphi, dit M. de
Culant, nubentes tantum et ex eodem matrimonio des
cendentes affîcit, in tantum ut si institutio fa c ta ,fu e r it,
in gratia contrahentium, et aliorum no?i contrahentiu n i, pro portionihus contrahentium valent 3 et prç
non jiubentiuni parhbus corruat•
« Ainsi si un père fait une institution contractuelle
« en faveur de deux de ses enfans, dans le contrat de
« mariage de l’aîné des d eu x , il n’y aura que le seul
« aîné qui sera institué d’une institution contractuelle,
c< le puîné ne l’étant que par un acte' non valable à
et son égard -, la raison est que la faveur du contrat
« de mariage ne concerne que les mariés et leurs des-« cendans du mariage. » C’est le raisonnement de
M . Lebrun , Traité des successions, liv. 3 , cliap. 2, n°. 1 a.
D ’où cet auteur conclut que quoique la donation faite
aux futurs conjoints n’ait pas besoin d’être acceptée par
eux, néanmoins si elle conceraoitdes personnes étrangères,
elle devroit être acceptée par eux. M. le président B uret
pousse la chose si lo in , qu’il prétend qu’une donation,
faite en faveur de mariage à l’un des conjoints, dont il
�( z9 )
feroit sur le champ cession à une personne étrangère,
seroit n u lle, par la raison que cette donation ne seroit
pas censée faite au profit et utilité des m ariés, comme
le requiert notre article.
Par suite du même principe d’égalité, M . Auroux
décide, à l’article 321, qu’en ligne directe, le legs fait,
même au fils de l’h éritier, seroit déduit et précompté
sur la portion héréditaire du père.
Ce seroit une grande erreur de croire que l’article 305
a dérogé à cette égalité voulue par la coutume de Bour
bonnais ; il porte : c< Fille mariée et apanée, ne peut
« demander légitime ni supplément d’icelle. »
Les rédacteurs de la coutume , en déclarant forcloses
les filles mariées et apanées, n’ont pas eu intention de
les traiter moins favorablement que les garçons : ils ont
pensé qu’elles se marieroient plus avantageusement, si
au lieu de leur part dans une hérédité incertaine j on
leur constituoit une somme fix e , dont elles ne pussent
être privées par les événemens auxquels seroit exposée
la fortune de leurs père et mère.
« L ’apanage des filles, dit M . A u ro u x , sur cet article,
« ou leur exclusion de la succession de leurs père, mère,
« aïeul ou aïeule , même des successions collatérales,
« dans les termes de représentation établie par notre
« coutume en faveur des mâles , pour la conservation
« des familles, n’a rien d’injuste, parce qu’une succession
« pouvant diminuer, comme elle peut augmenter, cette
« incertitude fait que l’on suppose toujours de la justice
« et de l’égalité dans les exclusions tacites qui sont faites
C a
�( 20 )
cf moyennant un certain prix et une certaine récom« pense. »
L e texte et le commentaire de cet article de la cou
tume du Bourbonnais , font connoître qu’elle diffère
essentiellement de la coutume d’Auvergne. Dans cette
dernière, la fille mariée, dotée ou non, ne peut, suivant
l’article 20 du chapitre 1 2 , venir aux successions au
lieu que la coutume du Bourbonnais n’exclut que les
filles dotées et apanées.
Il sembleroit que la loi n’étant pas censée contenir des:
termes inutiles , il faut pour forclore la fille dans les
pays régis par la coutume de Bourbonnais , que son
contrat contienne dot et apanage. Mais les sieur et dame
de la Roque ne dissimulent pas que, par un usage peu
favorabLe au sexe le plus facile à opprim er, on considère
comme dotée et apanée toute fille à laquelle il a été
fait une constitution de dot irrévocable , sans aucune
réserve de participation à l’hérédité. On suppose que
les auteurs de ses jours ont entendu l’apaner, quoiqu’ils
n’aient pas dit que la dot qu’ils lui donnoient étoit à
titre d’apanage.
Appliquons ces principes à la cause, et prouvons que
les filles des sieur et dame Dumont n’ont été ni apanées
ni dotées.
Quoique les termes du contrat de mariage de la dame
de la R oque la mettent dans une position plus avan
tageuse , nous allons raisonner comme si toutes les sti
pulations du contrat de la dame de V au re se trouvoient
dans celui de la dame de Beauregard.
�C 21 )
Nous soutenons qu’il n’y a dans lesdits contrats ni
dot ni apanage.
Il n’y a pas d’apanage, parce qu’il y a institution : ces
deux dispositions sont incompatibles *, et'les auteurs
communs ont déclaré qu’ils n’apanoieni pas leurs filles.
Il n’y a pas de d o t, parce qu’il n’a été rien donné
irrévocablement : tout ce qui a été constitué aux filles
ne l’a été qu’en avancement d’hoirie, et à la charge du
rapport.
Les sieur et dame Hilliard seroient donc réduits, pour
combattre cette évidence de principes, à prétendre en
point de droit, qu’une fille peut être en même temps
lievititîre et apanée; m ais ce seroit une erreur choquante '
car par l’institution elle est retenue dans la maison
paternelle ; par l’apanage elle en est excluse : et on ne
peut tout à la fois être retenu dans la maison et exclu
de la maison.
O r, il a été fait une institution d’héritières en faveur
des dames de Vaure et de Beauregard , avec réserve
d’un objet dont la disposition pouvoit avoir lieu en leur
faveur ; elles n’ont donc pas été apanées.
Lorsque M . Auroux d it , dans son commentaii’e sur
l’article 305 de la coutume de Bourbonnais, « qu’une
« fille mariée par pèi'e et mère , à qui on a donné
« quelque chose de certain, est réputée apanée, et par
« conséquent excluse des successions, quoiqu’elle n’y ait
« pas expressément renoncé , et qu’on ne se soit pas
« servi du mot apané, attendu qu’il n’est pas nécessaire
« pour la validité de cette exclusion tacite et coutumière
�« qu’on se soit servi du mot apanê, pourvu qu’il y ait
« dotation faite à ladite fille. »
Il est évident que cet auteur s’exprime ainsirpour les
cas où les père et m ère, dotant leur fille, n’auroient pas
expressément énoncé s’ils entendoient qu’elle vînt ou
non à partage de leur succession; alors, d it-il, il y a
renonciation tacite et coutumière : mais cette renonciation
ne peut être supposée, lorsqu’elles ont été formellement
instituées héritières.
Après avoir fait l’institution avec réserve , et même
conditionnelle si l’on v e u t, les père et mère ont ajouté
que s’ils n’avoient pas fait cette institution, ils auroient
apané ; ce qui explique clairement qu’ils ont mieux aimé
faire l’institution que Fapanoge; car lorsqu’on annonce
que si on n’eût pas fait telle chose, on en eût fait une
autre, on dit positivement que c’est la première et non
la seconde qui a été faite.
Il est indifférent que les auteurs communs eussent pu
apaner, dès qu’ils n’ont pas usé de ce droit; s’ils eussent
fait un apanage de la manière voulue par la coutum e,
il eût été valable ; mais la disposition qu’ils ont préférée
étant prohibée par la l o i , doit être annullée.
Après l’institution , les père et mère ont dit qu’en
avancement de leur future succession, ils constituoient
en dot à la future la somme de. . . . qu’ils l’ont, par une
disposition subséquente, obligée de rapporter lors de
l’ouverture de leurs successions, ou de moins prendre dans
lcsdites successions. Les appelans voudroient adroitement
assimiler cette constitution de d o t, qualifiée d’avance-
�( *3 )
ment d’hoirie, et sujette à rapport, avec la dot dont
parle M. A u ro u x ; mais elles n’ont aucune analogie. Celle
qui est spécifiée par cet auteur, a lieu lorsqu’il n’a pas
été dit si la fille auroit ou non part aux successions; et
dans les contrats des dames de Y aure et de Beauregard,
elles ont été expressément instituéesliéritières. M . Auroux
dit positivement qu’il faut, pour la validité de la cons
titution de d o t, que la fille ait reçu un prix certain ,
une récompense qui soit hors des atteintes de tous les
événeinens : mais les sommes promises ou données aux
dames de Vaure et de Beauregard étant sujettes à rapport,
leur frère, héritier comme elles , devoit y prendre p a rt,
Js’il ii’en eût pas reçu d’égales.
Cette partie du commentaire de M . A uroux s’accorde
avec ce qu’il avoit précédemment énoncé, que l’apanage
des filles ou leur exclusion n’a rien d’injuste, parce que
les successions pouvant diminuer comme elles peuvent
augmenter, cette incertitude fait que l’on suppose toujours
de la justice et de l’égalité dans les exclusions tacites,
faites moyennant xin prix certain.
Les constitutions faites aux dames de Vaure et de
Beauregard, ne leur ont pas été irrévocablement acquises,
puisqu’on les a obligées d’en faire le rapport; ce n’est
pas un prix certain que celui qu’on n’est pas maître de
garder.
Afin de rendre cette vérité plus sensible , on a dit aux
adversaires : Supposons que postérieurement aux contrats
de mariage des dames de Vaure et de Beauregard, la
fortune des père et mère se fût évanouie ; et certes de
■pareils exemples ne sont pas rares. D ’après la loi qui
�Ch )
leur étoit faite dans leurs contrats, lesdites dames n’auroient pu s’empêcher de partager , avec l’héritière de
leur frère, tout ce qu’elles auroient reçu en avancement
d’hoirie.
Dans leur m ém oire, les adversaires cherchent à faire
entendre que ces dames, en renonçant à l’institution,
auroient conservé ce qu’elles avoient reçu , pourvu que
le fils eût trouvé sa légitim e, à défaut de laquelle la
fille même dotée est tenue de l’apporter.
Cela pourroit être vrai s’il n’y avoit dans les contrats
de mariage qu’une dot pure et simple.
Mais précisément les sieur et dame Dumont ont voulu
empêcher que les futures ne profitassent de la faculté de
retenir leur d o t , et ils ont fait ce qui étoit en eux pour
les
empêcher.
i ° . Ils n’ont donné cette dot qu’à titre d’avancement
d’hoirie.
20. Craignant qu’à ce titre encore les futures ne re
tinssent cet avancement, ils ont stipulé que la fu tu r e
seroit néanmoins tenue de rapporter la somme à elle
donnée en avancement.
Si les auteurs communs s’étant ruinés, les filles avoient
voulu garder ce qu’elles auroient reçu, avec quelle véhé
mence les adversaires ne se seroient-ils pas élevéscontre
cette prétention! Ils auroient dit avec raison qu’il n’y
avoit pas dans le contrat des dames de Vaure et de
Beauregard de constitution dotale; qu’il ne leur avoit
été rien donné ou promis qu’à titre d’avancement d’hoirie;
que tout ce qui a été reçu de cette manière est par sa
nature sujet à rapport, lors de l’ouverture des successions;
qua
e n
�( 25)
que par une stipulation bien expresse, à laquelle nulle
loi ne 9’opposoit, on les a obligées à ce rapport; qu’ainsi
leur frère doit en avoir le tie rs, étant institué comme
elles héritier pour cette quotité.
Ainsi les dames de Vaure et de la Roque , qui auroient été contraintes de partager avec l’héritière de leur
frère ce qu’elles avoient reçu, doivent, par réciprocité,
profiter des avantages que leur procurera le partage égal
des autres biens des successions communes.
f Les appelons ont dit que pour décider s’il y a eu un
apanage , il faut examiner si les père et mère ont eu
l’intention d’apaner , plutôt que les termes dont ils se
sont servis , voltmtatern potius quant vcrbci spectavi
placuitj mais il importe peu de rechercher l’intention ,
lorsqu’elle ne pouvoit suffire sans un prix certain qui
n’existe pas. Loin que cette intention ait été telle que
les sieur et dame Hilliard la supposent, elle étoit abso
lument contraire ; on en trouve la preuve dans le propre
contrat de mariage d’André Dumont. Si lors du contrat
de mariage de la dame de V a u re , dans lequel les père
et mère disent que sans l’institution ils l’auroient apanée,
leur intention eût été que cette clause produisît l’eifet
d’un apanage, personne ne devoit mieux le savoir que
le législateur de la fam ille, le sieur Dumont père; il
a prévu dans le contrat de mariage de son fils , le cas
ou la dame de la Roque se refuseroit à la délivrance
du préciput dont il disposoit en faveur d’André Dumont.
S’il avoit entendu, lors du mariage de ses filles, qu’elles
dussent etre regardées comme apanées, dans le cas oii
elles refuseroient d’exécuter les conditions attachées h
V
�( a6 )
l’institution, le sieur Dumont n’eût pas manqué de dire
que la dame de la R o q u e, si elle contestoit le don en
préciput, devoit être restreinte aux 40000 francs cons
titués à. sa m ère, en avancement d’h oirie, et que son
fils recueilleroit toute son hérédité.
A u lieu de cela, le feu sieur Dumont ne suppose
pas même que la dame de la Roque puisse jamais être
privée de sa part héréditaire, persuadé que le contrat
de mariage de la dame de Beauregard ne contenant
aucune disposition de préciput en faveur d’AndréD um ont,
la dame de la Roque pourroit le contester-, il lui fait
un don de 5ooo francs, si elle respecte la disposition
dudit préciput ; et en cas qu’elle ne veuille le souffrir,
il la prive de ce don. C’est, suivant le meilleur interprète
des c l a u s e s contenues dans les contrats de mariage des
filles, la seule peine qu’elle peut encourir. M algré la
grande envie qu’il avoit d’avantager son fils, le sieur
D u m o n t ne se croit pas autorisé à donner atteinte à l’ins
titution de ses filles : son fils n’est institué comme elles,
et conjointement avec,elles, que pour la même quotité.
Relevant avec l’apparence du triom phe, des objec
tions moins importantes, les sieur et dame Hilliard ont
passé celle-ci sous silence, quoiqu’elle leur eût été faite
dans tous les écrits signifiés en première instance ; ils
ont senti l’impuissance d’y répondre rien de plausible.
L e don de 5ooo francs fait à la demoiselle de Beauregard, dans le contrat de mariage de son oncle, étoit
radicalement nul, suivant les articles de la coutume déjà
cités, qui ne permettent de gratifier les enfans que dans
leur propre contrat de mariage. La condition apposée à
�( *7 )
cc don étoit d’ailleurs trop préjudiciable à la dame de la
Roque, pour qu’elle l’acceptât. Aussi n’a-t-elle jamais ré
clamé cette somme en vertu du contrat de mariage du 31
mai 1789. Mais le sieur Dumont père, présent au mariage
contracté par ladite demoiselle de Beau regard , le 30 bru
maire an 11 , augmenta de 10000 francs la constitution
faite à sa mère en avancement d’hoirie, et stipula que
de ces 10000 francs, 5 seroient sujets à rapport, s’ils
avoieiit été payés , et que les 5 autres seroient pris sur
sa réserve de la terre de Mont.
C ’est eh vertu de cette disposition affranchie de toute
condition, et faite dans le propre contrat de la dame
de la R o qu e, qu’elle a exigé ces 5 ooo francs, dont la
demoiselle Dumont lui sert l ’intérêt -, en attendant qu’elle
puisse les acquitter. Quant aux i 5 qui formoientle restant
de ladite réserve, le feu sieur Dumont en a fait donation
à la dame Narjot, fille de la dame de Yaure. Les tuteurs
de la demoiselle Dumont ayant formé demande en nullité
de cette donation, par la même requête qui a précédé
la demande en partage et délivrance de préciput, dirigée
contre la dame de Y a u re , les sieur et dame de la R oque,
ces derniers, pour ne pas surcharger d’un objet étranger
la contestation relative au partage et au préciput, à
laquelle les sieur et dame Narjot ne sont pas intéressés,
après avoir observé qu’il devoit être traité séparément,
sont restés spectateurs du débat qui existoit entre la
demoiselle D u m o n t, les sieur et dame Narjot.
Néanmoins la loi du 18 pluviôse an 5 , attribuant aux
héritiers non avantagés les réserves dont les instituans
D 2
�(
2 8
)
n’auroient pas valablement disposé, les sieur et dame des
la Roque ont pris devant les premiers juges des con
clusions tendantes à ce que la demoiselle Dumont fût
condamnée, si la nullité de la donation faite à la dame
Narjot étoit prononcée, à leur payer j 5oo francs faisant
moitié de la somme donnée, avec intérêts et frais. En
première instance, la demoiselle Dumont a été déboutée
de sa demande en n u llité, et condamnée à payer à la
dame Narjot les i 5ooo francs. On voit dans les motifs
des juges de Gannat, qu’ils ont été principalement dé
terminés par la considération que la demoiselle D u
mont étoit sans qualité pour contester ladite donation,
attendu que ce droit n’appartenoit qu’aux héritiers lé
gitimés;
O
" c’est-à-dire,* il la dame de V a u rc et à la dame
d e la R o q u e .
L e mémoire que les appelans ont fait imprimer ne
dit rien de ce qui s’est passé depuis ledit jugem ent,
entre la demoiselle Dumont et les sieur et dame Narjot.
Les sieur et dame de la R o q u e , qui n’en ont pas connoissance, doivent faire remarquer que si les sieur et
dame Hilliard ont interjeté appel vis-ù-vis des sieur et
dame N arjot, dans le cas où la cour prononceroit la
nullité de cette donation de iôooo francs, il y auroit
lieu d’adjuger la moitié de cette somme , aux sieur et
dame de la R oque, conformément aux conclusions par
eux prises en première instance, et à la loi du 18 plu
viôse an 5. Si au contraire les sieur et dame Hilliard
sont repoussés par la fin de non-rccevoir qui les a fait
succomber en première instance, les sieur et dame de
�( 29 )
'
la Roque entendent se réserver tous leurs droits à la
moitié de ladite somme de iôooo francs, pour les exer
cer quand et ainsi qu’ils aviseront.
SECONDE
PROPOSITION.
Tout don de préciput est formellement prohibé par
la même coutume, hors du contrat de Venfant
qui se marie. S i la jurisprudence Va admis, d’une
manière indirecte, dans les contrats de mariage
des filles instituées héritières, ce n est quautant
q u e lle s auroient été en même temps' dotées moyen
nant un p r ix certain et une récompense irrévo
cable.
i
Forcés de reconnoître dans leur mémoire qu’André
Dumont n’auroit pu être avantagé d’un préciput par le
contrat de mariage de ses sœurs, si cet avantage lui eût
été fait directement, les appelans se bornent à soutenir
qu’il a pu le recueillir par voie indirecte, à cause de la
condition mise à l’institution de ses sœurs.
Si on écoute la voix de la raison, il semble que toute
violation de la loi doit être également réprim ée, et que
le but du législateur est manqué s’il souffre qu’on ob
tienne par artifice ce qu’il a expressément défendu.
L ’article 308 de la coutume du Bourbonnais est ainsi
conçu :
. « Donations faites par père, mère ou autres ascendaos
« à leurs descendans, en préciput, en contrat de ma-
�( 30 )
« nage et faveur d’icelu i, ne sont sujettes à collation
« entre les donataires et leurs cohéritiers. »
Cet article est si formel qu’il n’a pas besoin de com
mentaire : ouvrons néanmoins celui de M. Auroux.
A p rè s avoir dit qu’il faut que le préciput soit donné
expressément à ce titre, il ajoute : « Une seconde condi« tion requise pour la validité du préciput, est qu’il
« soit fait en contrat de mariage et faveur d’icelui, ainsi
« qu’il est dit dans notre article; et la raison est qu’aux
« termes de l’article 217 suprà, les pères et mères ne
« peuvent donner entre-vifs à leurs enfans, hors contrat
« de mariage, » C’est l’observation de M. de Culant sur
notre article : « In gratiam contrahentïs matrimonium ,
« d it - il, alias m o r i b u s n o s tr is n o n v a l e t , hoc quia
« extra contraction matrimonii et ejus favorem non
« valet d o n atio facta liberis à parentibus. A rt. 217. »
M . A u ro u x ne compose pas avec la loi ; comme elle
il dit que le préciput n’est valable qu’autant qu’il est
fait en faveur de ceux qui se marient. L ’opinion de
M . de Culant, qu’il rapporte, n’est pas moins tranchante:
in gratiam contrahentis matrimonium et ejusjavorem ,
alias non valet.
« A la vérité, continue M . A u ro u x, par arrêt rendu
« au rapport de M . l’abbé Pucelle , le 22 mai 1 7 1 6 ,
« entre les dames Maquin et leur frère , le préciput
« de 30000 fr. fait au frère dans le contrat de mariage
« de ses sœurs, par les père et m è r e , fut confirmé :
« mais c’est parce que ce préciput étoit une clause et
« condition du rappel et institution desdites dames,
« sans laquelle réserve du préciput il étoit dit que
�yt
( 31 )
lesdits père et mère lesauroient apanées, et sous conVention que, où lesàites dames voudraient contester
ledit préciput, elles demeureraient apanées pour la
somme de 24000 fr a n c s chacune ; ce qui se pratique
ainsi dans cette province. »
Les appelans se sont persuadés que cet arrêt étoit
à leur avantage , tandis qu’il leur est absolument con
traire. M . A u r o u x , en rapportant les motifs qui ont
déterminé cet a rrê t, fait connoître qu’il n’est pas en
opposition avec ce qu’il a dit précédemment. Les mots
soulignés ci-dessus le sont aussi dans le commentaire
de M . A uroux ; ils contiennent la stipulation expresse
d’un apanage qui doit demeurer aux filles , et tenir
lieu de leur portion héréditaire r si elles ne veulent
souffrir le préciput. En disant qu’on a jugé ain si, par
cette raison, M . A uroux exprime d’une manière évi
dente que sans cette stipulation ont eût jugé différem
ment •, d’ou il résulte que les dames de Vaure et de
Beauregard, qui n’ont pas été apanées, et auxquelles
il n’a été rien constitué qu’en avancement d’hoirie, et
à la charge du rap p o rt, sont fondées à soutenir que
l ’arrêt de 1716 a préjugé p o u r, et non contr’elles.
Enfm M . A uroux qui avoit cité M . Menudel l’apporte
son avis, dans lequel cet auteur après avoir dit qu’on
reçoit le préciput dans le contrat de mariage des filles
instituées lieritieres à cette condition, conseille de mettre
dans le contrat que les père et mère ont doté la fille
de la somme de.... h la charge de venir à la succession
en la rapportant, et qu’où elle fourniroit débat contre
ledit préciput, ils déclarent qu’ils apanent ladite fille h
«
«
«
«
«
\
�( 3 0
la somme d e ....... parce qu’en mettant simplement la
clause qu’ils instituent ladite fille sous ledit préciput,
elle peut dire qu’elle n’a pas été apanée, à défaut d’exé
cution de ladite clause , qui sonne toutes fois en une
institution conditionnelle, et que les mots qui seroient
dans le contrat, sans lequel préciput les père et mère
l ’auroient apanée, ne seroient pas un apanage form el,
mais plutôt une simple én'oncintion du dessein d’apaner,
lequel n’étant pas diserlement expliqué , ne l’empê
che roi t pas de venir à une succession ab intestat des
père et m ère, en rapportant. Laquelle objection n’est
pourtant pas considérable , parce que le mot de dot
emporte quant à soi l’apanage, lequel est valable ah'qito
dato 2>cl promisso de pressenti.
Quoique l’avis de M . Menudel ne soit pas rédigé avec
toute la clarté qu’on pourroit désirer, on y voit que
.la solidité des stipulations par lesquelles on voudroit
assurer au fils un préciput dans le contrat de mariage
de ses sœurs , est subordonnée à la constitution d’une
dot de prœsenti. Les mots laquelle objection n'est pour
tant pas considérable, se rapportent aux difficultés que
la fille élèveroit, en alléguant qu’elle n’a pas été expres
sément apanée; ce q u i, suivant M . Menudel et même
suivant M . A u ro u x , peut être suppléé par une consti
tution à titre de dot.
L ’arrêt du 22 mai 17 16 , comme l’avis de M . Menudel,
ne peuvent être opposés, parce que les contrats de ma
riage des dames de Yaure et de Beauregard ne con
tiennent pas les deux clauses d’institution conditionnelle,
et stipulation de dot, tenant lieu de la portion hérédi
taire.
�( 33 )
faire. Les auteurs communs n’ont ni apané , ni eu
l’intention d’apaner leurs filles.
A u décès de la dame D um ont, ses filles ont été saisies
du tiers qui revenoit à chacune d’elles dans sa succession,
par la règle le mort saisit le vif. L e sieur Dumont père
n’a pu, postérieurement à ce décès , transmettre à André
Dumont la moitié de la terre de M on t, qui avoit appar
tenu à sa mère. La donation faite audit André Dumont
ne peut être validée par la faculté d’élire que les père
et mère s’étoient déférée mutuellement. Nul ne peut
faire par autrui ce qu’il ne lui est pas permis de faire
lui-même. Dès que la loi municipale défendoit impé
rieusement à la dame Dumont d’avantager son fils dans
un autre contrat de mariage que le sie n , le pouvoir
donné au mari est vicieux dans sa source : tout ce qui
a été fait en vertu de ce pouvoir est nul.
Dans nos mœurs , le droit d’élire a toujours été
regardé comme abusif ; il doit surtout être rejeté lors
qu’on ne l’a déféré que pour se procurer le moyen d’avan
tager une personne prohibée. Celui à qui ladite faculté
d’élire a été donnée ne pouvoit la recevoir , parce que
les articles 226 et 227 de la coutume de Bourbonnais,
défendent, durant le mariage, toute association, dona
tion ou autre contrat entre la femme et le mari, même
les donations mutuelles, s’ils ont des enfans.
Vainement les sieur et dame Ililliard disent-ils que
la faculté d’elire seroit n u lle, si elle étoit confé rée par
disposition directe, mais qu’elle peut valoir comme con
dition de l’institution des filles; qu’elle ne conféroit
E
�( 34 )
aucun avantage à l’époux survivant ; qu’ainsi elle n’étoit
pas contraire aux lois prohibitives d’avantages entre
époux.
3N’est-ce pas un avantage bien ré e l, et d’une grande
im portance, que celui qui met à la disposition d’un des
époux environ la moitié des biens de l’autre? D ’ailleurs
la loi n’a pas fait de distinction -, elle a prohibé toute
association, donation ou autre contrat entre époux,
même les dons mutuels : sa disposition doit être exécutée
par tous ceux qui étoient soumis à son empire.
Ce qui sera dit ci-après sur la question de savoir si
les stipulations prohibées peuvent valoir comme condi
tion d’une institution, s’appliquera à cette faculté d’élire
que les appelans vouloient en première instance faire
valoir comme mandat ou procuration; moyen qu’ils
ont abandonné, parce qu’on leur a observé que tout
.mandat expire à la mort du mandant, et que les morts ne
sauroient contracter, ni en personne, ni par procureur.
’ Il y avoit un autre vice dans la disposition de la
terre de M on t, et la faculté d’élire qui s’y rapportoit.
: Cette terre étoit un acquêt de communauté dont le
mari est seul maître, suivant l’article 136 de la même
coutume : les dispositions que faisoit la femme relative
ment à un bien sur lequel elle n’avoit pas de droit
acquis, étoient une usurpation du pouvoir que la loi
donne au mari seul sur les biens de la co m m u n a u té . O n
peut, disent les appelans, disposer d’un droit éventuel;
cela est vrai : mais la dame Duinont n’a pas disposé
'hypothétiquem ent; elle a donné, comme a elle appar-
�>/
. (
3
5
)
tenant, un bien qui étoit entre les mains de son mari.
-Aux textes les moins équivoques de la coutume, aux
suffrages de ses plus habiles interprètes, les sieur et
dame Hilliard opposent les notes manuscrites d’un ancien
avocat de M oulins; ils disent que ces notes ont été com
muniquées aux sieur et dame de la R oque, qui ne les
ont p oin t/ vues, et seroient hors d’état d’en vérifier
l’écriture. Nous avons fait connoître à quels dangers on
s’exposeroit si on vouloit asseoir des jugemens sur de
pareilles bases.
Les sieur et dame Hilliard ont encore cherché à tirer
avantage d’une consultation obtenue, d is e n t-ils , par
M . de Vaure l u i - m ô m e , de M M . B o iro t, Bergier et
D artis, sous la date du 12 décembre i 8 o 5 . Les appelans
assurent qu’ils ont copie de cette consultation, que cepen
dant ils ne tiennent pas du sieur de Vaure.
Ces jurisconsultes ont été d’avis, et c’est une erreur
échappée à des hommes très - éclairés, que le préciput
devoit être relâché à la demoiselle D um ont, en vertu
de l’institution de ses tantes ; ils ont aussi décidé qu’on
ne pouvoit regarder comme valable la faculté que les
père et mère s’étoient donnée, et au survivant d’eux,
par le contrat de la dame de V a u re, de disposer de la
totalité de la terre de M ont, au préjudice de l’institu
tion faite au profit de ladite dame, par égalité avec ses
frère et sœurs, soit parce que la coutume contenoit
des prohibitions particulières pour les dispositions des
pères et mères à leurs enfans, et pour les dispositions
entre ép ou x, soit parce que la terre de M ont étant un
E a
�, ( 36}
acquêt de communauté, la dame Pîtat donnoit ce qui
étoit sous la puissance du mari seul; qu’ainsi la repré
sentante d’André Dumont ne peut avoir la moitié de la
terre de M on t, qui a appartenu à la succession de la
dame Pitat, en vertu de la disposition faite en faveur
d’A ndré D u m o n t, par son contrat de mariage.
Enfin ils ont décidé que la somme de 6000 livres,
réservée pour acquisition de cens, et dont les premiers
juges ont mal à propos attribué la moitié à la demoiselle
D u m on t, ne pouvoit lui appartenu'.
Les sieur et dame Hilliard s’emparent de ce qui est
à leur avantage, dans cette consultation, et rejettent
tout ce qui est contraire à leurs intérêts.
En coutume d’A u v e r g n e , l’exclusion de la fille mariée
est de droit -, elle ne peut venir aux successions que par
un rappel formel dé ses père et mère : mais il n’en est
pas de même ën Boui’bonnais, où la fille a des droits
égaux à 'ceux de ses frères, dans la succession de ses
père et mère ; que pour être privée de ses droits, il
faut qu’on lui en ait assuré le prix de manière qu’elle
puisse gagner comme perdre à cet arrangement, suivant
les événemens auxquels sera exposée ensuite la fortune
de ceux dont elle auroit été instituée héritière : d’où
résulte la nécessité de faire, avec l’institution condition
n elle, une constitution de dot irrévocable, afin que si
la fille n’accfcpte pas la première, elle soit forclose par
la seconde.
�(
TRO ISIÈM E
37
),
PROPOSITION.
S i les conditions apposées à une institution sont
contraires aux lo is , Vinstitué peut profiter de
l ’institution sans exécuter la condition ; il peut
aussi renoncer a Vinstitution ; et la fille qui n a
pas été apanée, ou à laquelle il n a pas été f a it
une constitution dotale} telle quelle doit être pour
tenir lieu d’apanage, vient à la succession comme
héritière naturelle et légitime.
Pour tacher de persuader qu’André Dumont a pu
être avantagé par préciput, dans le contrat de mariage
de ses sœurs, de la moitié de la terre de M o n t, qui
appartenoit à sa m ère, parce que la destination de ce
bien , et le pouvoir d’élire donné au survivant des
époux , étoient des conditions de l’institution , les appelans exposent dans leur mémoire (page 10 et suivantes),
que la raison dit à qui veut l’entendre, qu’il est loisible
à celui qui exerce une libéralité, d’y apposer telles con
ditions qu’il juge convenables, pourvu qu’elles ne soient
contraires ni aux lois, ni aux mœurs; que c’est à celui
qui est l’objet de la libéralité, à l’accepter ou à y re
noncer; mais s’il l’accepte, il doit remplir les charges
et conditions qui y sont imposées ;
Qu’A uroux et Lebrun décident qu’on peut faire
l’équipollent d’une institution contractuelle , au profit
d’autres personnes que les mariés, en instituant la per_
�t 33 )
sonne mariée à la charge d’associer ses frères et sœurs
pour certaine quotité de l’institution ; ce qui vaut à leur
profit comme une condition de l’institution, parce que
l’association étant une charge de l’institution dont elle
fait partie, l’ institué est dans la nécessité, ou de renoncer
à l’institution, ou de consentir à l’association;
Que deux frères s’étant institués réciproquement dans
le contrat de mariage de l’un d’eux, celle faite en faveur
de celui qui ne se marioit pas , valoit comme condi
tion; que l’article 1121 du Code Napoléon a consacré
ces principes ; que cette disposition au profit d’un tiers
peut être révoquée par l ’instituant, qui n’est pas lié ,
mais le donataire ou l’institué ne peut se dégager qu’en
renonçant au bienfait ;
Que des conditions pouvant être apposées à une ins
titution , on ne voit pas ce qui pourroit faire obstacle à
ce qu’un institué fût tenu de souffrir le prélèvement d’un
précipu t, comme condition de son institution ; qu’un
instituant pouvant faire passer à des tiers une quotité de
succession, comme condition de l’institution faite au profit
de celui qui se m arie, on doit à plus forte raison décider
qu’une disposition au profit d’un tiers, qui n’a pour but
qu’une chose déterminée, peut valoir comme condition
d’une institution, suivant la maxime qui peut le plus
peut le moins ; qu’il y a plusieurs décisions d’avocats de
M ou lin s, sur un manuscrit de l’un d’e u x , et un arrêt
du 22 mai 17 16 , cité par A u ro u x, et dont les circons
tances sont développées dans ledit manuscrit ;
Que les contrats de mariage des filles des sieur et dame
Dumont contiennent une institution restreinte par la sti-
�( 39 )
pulation d’une réserve modifiée par plusieurs conditions
qu’il a plu aux instituans d’y apposer, tellement liées
avec l’institution , qu’on ne peut en supprimer une sans
anéantir, dans le vœu des instituans, l’institution ellemême •,
Que l’objection tirée par les dames de Vaure et de la
R oque, des articles 217 et 226 de la coutume, dont l’un
s’opposoit à la disposition faite au profit d’André Dum ont,
dans le contrat de mariage de ses sœurs, et l’autre à la
faculté d’élire, se détruit, en ne confondant pas les dis
positions principales et directes avec les dispositions rela
tives et conditionnelles; que l’institution faite par un père
en faveur de deux enfans , par le contrat de mariage de
l’un d’eu x , étoit nulle à l’égard de celui qui ne se marioit
p as , tandis que si l’institution n’étoit faite qu’en faveur
de celui qui se m arioit, à la charge d’associer son frère,
la disposition étoit valable au profit de ce dernier, comme
condition de l’institution faite à son frère; de m êm e, en
coutume de Bourbonnais, la disposition faite par des
époux pendant le m ariage, au profit du survivant, de
l’usufruit des biens du prédécédé, étoit n u lle , comme
contenant un avantage prohibé, tandis qu’elle a toujours
été considérée comme valide, lorsqu’elle se rattaclioit à
une institution de leurs enfans , et qu’elle en étoit la
condition ; ce qui est attesté par A u r o u x , sur les arti
cles 226 et 227 ; que c’est sur ces principes que repose
la consultation de M M . B oirot, Bergier et D artis, dont
les sieur et dame Hilliard argumentent longuement.
Nous n’avons omis aucunes des raisons par lesquelles
�( 4° )
les appelans veulent établir que la fille d’André Dumont
doit avoir, par préciput, la moitié de la terre de M ont,
qui avoit appartenu à la dame P itat, comme étant une
condition de l’institution de ses tantes.
En analisant ces raisons, on voit d’abord qu’à l’art. 308
de la loi municipale , qui défend toutes donations en
préciput, si ce n’est dans le contrat et en faveur de
l’enfant qui se m arie, les sieur et dame Hilliard n’en
opposent aucun autre duquel on puisse tirer des induc
tions contraires; mais ils disent que suivant M . A u ro u x,
dont l’avis est conforme à celui de Lebrun, on peut faire
indirectement, et par condition apposée à une institution,
des dispositions en faveur d’autres que les mariés ; qu’on
peut instituer celui qui se m arie, à la charge d’associer
telle ou telle personne, et donner l’usufruit au survivant
des é p o u x , en stipulant cette condition dans une insti
tution.
La première réflexion qui se présente est que M . A uroux
q u i, dans son commentaire sur les articles 219 et 224,
indique le moyen de faire l’équipollent d’une institution
contractuelle au profit d’un autre que les mariés, en ins
tituant la personne mariée à la charge d’associer l’autre,
ayant établi de la manière la plus positive, lorsqu’il traite
du préciput, qu’on ne peut le donner qu’à celui qui con
tracte mariage, on doit en conclure qu’il n’en est pas de
l’association, dont la coutume ne parle pas, comme du
préciput sur lequel elle a une disposition prohibitive trèsexpresse.
Dans les pays où l’association est en usage, elle a lieu
autant pour l’avantage de l’institué que pour celui de
l’associé.
�(4 0
l’associé. Ce dernier est retenu dans la maison; il aide à
cultiver les biens, à faire valoir les entreprises de com
merce. Les sieur et dame Hilliard ont cité un arrêt rap
porté par M. A u ro u x , qui confirma une institution réci
proque , faite par deux frères dans le contrat de mariage
de l’un d’eux ; mais ils se sont bien gardés d’ajouter que
M . Auroux donne pour motif que c’étoit une convention
par l’effet de laquelle les deux frères couroient même
chance, et dont le bénéfice dépendoit uniquement de la
survie.
Ces stipulations, qui peuvent tourner au profit de
l’institué, ne sauroient être comparées avec un don en
p r é c ip u t, qui a essentiellement pour objet de détruire
l’égalité voulue par la coutume à laquelle les parties
étoient soumises.
Quant à l’usufruit, les appelans ont cité le n°. 30 du
commentaire de M . A uroux , sur l’article 327 de la cou
tum e, où il dit que les conjoints père et mère, mariant
leurs enfans, peuvent convenir, en leur faisant des do
nations ou les instituant leurs héritiers, que lesdits enfans
laisseront jouir le survivant de leurs père et m è re , ainsi
qu’il est dit dans l’article 281 de la coutume de Paris,
qui s’observe en Bourbonnais, suivant M M . de Culant,
D uret et Semin : E o casu , dit M . de Culant, Jilius
recipt'oce censeiur usum Jructum douasse superstiti.
Il résulte de ce passage, que le conjoint survivant n’est
pas censé tenir l’usufruit de l’autre conjoint, auquel la
loi interdisoit cette libéralité - qu’ ü la reçoit p a r l ’e ffe t
du consentement de l’héritier institué, sans doute m a je u r ;
car M . A uroux ajoute, dans le nombre suivant, qu’il
F
�faut , pour la validité de cette convention, qu’elle soit
faite avec tous les enfans héritiers, à mesure qu’ils se
marient. Quoi qu’il en soit, lorsqu’il s’agit de déroger
à une loi précise, il ne faut pas raisonner d’un cas à un
au tre, n’y ayant jamais mêmes circonstances et mêmes
motifs.
L ’arrêt de 1 7 1 6 , cité dans les prétendues notes de
M . Beraud, et rapporté par M . A uroux loin d’être
contraire aux sieur et dame de la R o qu e, confirme les
principes- sur lesquels ils se fondent, attendu , comme
nous l’avons déjà d it , qu’il n’adjugea le- préciput qu’à,
raison de ce qu’y ayant dans les contrats des dames
M aquin , institution conditionnelle et apanage form el,
il falloit qu’elles prissent l’institution, ou qu’elles fussent
forcloses.
. M al à propos les appelans o n t-ils invoqué la dispo
sition de l’article 1121 du Code N apoléon, qui permet
de stipuler au profit d’un tiers, lorsque telle est la con
dition d’une donation que l’on fait à un autre ; cet article
suppose que la stipulation a pour objet une chose qui
n’est défendue par aucune l o i , sans quoi il seroit en
contradiction avec l’article 900, qui répute non écrite
toute condition contraire aux lois, et avec l’article 1108 ,
qui v eu t, pour la validité d’une obligation, qu’elle ait
une cause licite. La même raison écarte l’allégation que
les contrats de mariage sont susceptibles de toutes con
ventions; celles qui tendent à violer la l o i , ne sont pas
plus permises dans les contrats de mariage que dans les
autres actes.
Les appelans auroient beaucoup mieux fait de garder
�( 43 )
le silence sur la consultation de M M . Boirot, Bergier et
Da rtis , dont ils se prévalent, quant au point qui leur
est favorable , et qu’ils rejettent dans tous les autres. S’il
faut croire, sur l’allégation des adversaires, que ces juris
consultes, décidant quatre questions, ont erré dans les
trois où ils ont contrarié les prétentions de la demoiselle
Dumont , elle ne peut exiger qu’on prenne leur avis
pour guide en jugeant l’autre question, qu’ils ont décidée
contre les sieur et dame de Vaure.
En Bourbonnais, le mot dotée n’étoit synonyme d’a\panée que lorsque les père et m ère, mariant leur fille,
lui av o ie n t , avec intention de l’exclure de leur succes
sion, constitué un objet déterminé dont elle ne pou voit
être privée par les événemens auxquels leur fortune
seroit exposée, et qui formoit ainsi lejprix de la renon
ciation tacite que la fille étoit présumée avoir faite aux
Buccessions des auteurs de ses jours. Les sieur et dame
Dumont n’ont fait ni voulu faire une constitution de
ce genre.
■Le contrat de ‘mariage de la dame de 'Vaure contient
la preuve que dans l’intention des instituans le mot
dot n’étoit pas synonyme à'apanage ; car ils ont cons
titué une dot, et ont dit qu’ëlle n’étoit pas un apanage;
qu’ils en auroient constitué une à ce titre, s’ils n’avoient
mieux aimé instituer la'future comme ils l’ont ifait.
Ce ne sont pas les mots, comme les appelans l’ont dit
eux-m êm es, qu’il faut considérer en pareil cas, mais
la chose qui a été réellement faite par les père et mère.
O n t-ils privé la fille de la qualité d’héritière, si elle
n’acceptoit'pas l’institution'? L ’o n t-ils alors qfïranchie
F 2
�C44)
des charges et des inquiétudes de l’hérédité? L u i ontils donné le prix de sa renonciation tacite, en lui assurant
une somme qu’elle conserverait indépendamment de tous
les événemens ? Ne lui on t-ils réservé aucun espoir
successif? On pourrait dire, quand ils n’auroient em
ployé ni le mot d o t, ni celui d'apanage, qu’il y a for
clusion. Si au contraire la fille a été retenue dans la
fam ille, et instituée héritière; si ce qui lui a été donné
ou promis n’étoit qu’un avancement d’hoirie qu’on l’a
obligée de l’apporter, et q u i, par conséquent , n’étoit
pas une récompense certaine, eussent-ils dit expressé
ment qu’ils ont doté et apané leur fille, elle ne serait
pas forclose.
Les. auteurs communs attachoient si peu au mot dot
l’idée présentée par celui d'apanage, qu’ils se sont servi
des mêmes expressions dans le contrat de mariage d’André
Dumont ; il y est dit : « En avancement d’h oirie, le
« sieur Dumont père « constitué et constitue en d o t,
« au sieur futur époux , la somme de 40000 livres, qui,
« avec celle de 10000 livres provenante de la réserve,
« font 5oooo livres; laquelle constitution dotale sera
« imputée, etc. » Les mots constitué en dot et consti
tution dotale, employés et même plus répétés dans le
contrat de mariage du frère, que dans celui des soeurs,
ne permettent pas de douter qu’on 11’y attachoit pas.,
dans la famille, le sens que les appelans voudraient lui
donner pour le rendre identique avec celui d'apanage..
Ce qui a été dit précédemment , répond aussi à l’ob
jection que les père et mère pouvant livrer leur fille
�à une forclusion absolue, ont p u , à plus forte raison,
ne la forclore qu’en partie , et l’obliger à respecter la
destination d’un objet particulier : 011 ne conçoit pas
trop comment, dans la même succession, une fille peut
être héritière en partie, et forclose pour une autre partie.
Mais les instituans n’auroient p u , suivant la loi qui les
régissoit, forclore la fille par leur simple volonté ; elle
étoit appelée, par cette lo i, à partager leur succession;
on ne pouvoit la priver des droits qu’elle y avoit, que
par l’espèce de composition à forfait, qui se trouve dans
la constitution d’une dot certaine et irrévocable, tenant
lieu de cc qu’elle auroit recueilli dans des successions
qui pou voient diminuer comme augmenter.
L ’adage qui peut le plus peut le m o in s, est ici inap
p licable, puisque les père et mère 11’ayant pas constitué
à leur fille une dot telle qu’il la falloit pour opérer la
forclusion, ils ne pouvoient la priver ni de la totalité,
ni de partie de leurs successions. Eussent-ils pu la livrer
à une forclusion absolue en l’apanant, cette circons
tance est indifférente, dès qu’ils ne l’ont pas apanée. Il
en est comme si un particulier, voulant gratifier son
am i, lui faisoit vente d’un bien sans stipulation de p rix;
l’acquéreur n’acquerroit aucun droit par un pareil contrat,
quoiqu’il fût certain que le vendeur auroit pu valablement (
lui faire une donation cent fois plus considérable. Tant
pis pour l’avantagé, quand celui qui vouloit le gratifier
a fait ce qu’il ne pouvoit pas faire, au lieu de faire ce
qui eût été valable.
Il est certain que la terre de M ont n’a été mise hors
de l’institution faite en faveur de la dame de Vaure ,,
�( 4 0
qu’èn ce sens, qu’elle pouvoit ne pas la trouver dans
l’hérédité : c’est le seul effet qu’étoit susceptible de pro
duire la longue stipulation insérée dans son contrat de
mariage. La réserve de cette terre rendoit les instituons
maîtres d’en disposer par acte valable ; et si la dame
D u mont eût été présente au contrat de mariage de son
'fils , et lui eût donné en préciput sa moitié de cette
te rre , la fille d’A ndré D u m ont, à laquelle on ne con
teste pas l’autre moitié donnée par le père, auroit aùssi
recueilli celle-oi.
Non-seulement le contrat de mariage de la dame de
V a ure ne l’a point privée de l’espérance d’avoir part à
cet immeuble ; elle pouvoit ’môme l’avoir en totalité, si
ses père et mère en disposoîent en sa faveu r, comme
ils s’en étoient réservé le droit. A défaut de disposition
valable, cette terre rentroit dans la masse de l’hérédité,
et toiis ceux qui y venoient avec un titre universel devoient la partager.
A l’allégation, quon peut fa ir e indirectement ce qui
est prohibé ouvertement, les sieur et dame de la Roque
ont opposé la maxime bien plus digne d’être consacrée
par la justice, que la condition contraire aux lois ou aux
bonnes mœurs, est réputée non écrite; qu’ainsi, celui
qui en a été grevé n’est pas tenu de l’exécuter. 'Ils ont
v. soutenu que la loi ordonnerait vainement, s’il étoit permis
de se soustraire à son empire par des voies tortueuses et
indirectes ; rque cette vérité étoit écrite dans les anciens
livres, comme elle l’est dans les articles 900 et 1174 du
Code Napoléon; enfin, qu’elle avoit été proclamée par
plusieurs arrêts solennels.
�( 47 )
Denizart, dans sa collection de jurisprudence, au mot
Dispositions conditionnelles, n°. 2 1 , en cite un rendu
en la grand’chambre du parlement de Paris, le 13 mai
1762. Il s’agissoit d’une institution d’héritier faite par le
sieur de V auban , en faveur de son n eveu , à la charge
de laisser à la veuve la jouissance de plusieurs terres
situées dans des coutumes qui prohiboient les avantages
entre époux. L ’institution fut maintenue , et l’héritier
déchargé de la condition. Cet arrêt rendu sur les con
clusions de M. Joly de Fleury, est aussi rapporté dans la
collection des décisions nouvelles, vulgairement appelée
Nouveau D enizart, au mot Avantage prohibé. On y voit
que la veuve faisoit valoir que la disposition devoit être
exécutée en tout son contenu; que l’héritier n’étant ins
titué que sous cette condition, ne pouvoit se dispenser
de l’accomplir ; qu’à la difficulté qui naissoit de la con
dition sous laquelle l’héritier éloit institué, on observoit
qu’elle devoit être regardée comme non écrite, puisqu’elle
étoit contraire à la prohibition expresse de la coutume:
et il fut ainsi jugé.
Par un autre arrêt du 2 avril 176 2 , rapporté dans
la môme collection, le parlement de P aris, dans le ressort
duquel avoient été. passés tous les contrats de mariage des
enfans des sieur et dame D u m ont, consacra les mêmes
principes, et jugea de plus que la prohibition d’avan
tager, dans les coutumes qui la contenoient, étoit absolue,
et pouvoit etre opposée par tous ceux qui y avoient
intérêt, sans examiner si elle avoit été introduite en leur
faveur ou non.
Il seroit trop long de rapporter l’espèce de cet arrêt ;
�54>
( 48 )
il suffit de remarquer qu’on opposoit aussi à. l’héritier
qu’il n’étoit pas recevable à attaquer la principale dispo
sition de l’acte dont il tiroit lui-même son droit à l’hé
rédité ; que cet acte étoit un tout dont on ne pouvoit
diviser les dispositions; il répondoit que les lois 14 , au
digeste D e cond. et déni. , et la loi 9 , §. 10, D e hœred.
inslituend. , décident qu’une condition nulle peut être
attaquée par le légataire, sans qu’il soit exposé à perdre
son legs. M . l’avocat général écarta les fins de non-rece
vo ir, et se fonda sur ce que l’article de la coutume étant
impératif, la prohibition étoit d’ordre public, et absolue;
qu’elle avoit été introduite par les lo is, de peur que les
conjoints ne se dépouillassent trop facilement par un
amour m utuel, et plus encore pour enlever une source
de division dans les mariages, empêcher le plus adroit,
le plus intéressé de tromper l’autre, le plus violent, le
plus emporté , de forcer l’autre à donner : et toutes les
fo is, disoit ce magistrat, que quelqu’un pourra établir
un droit, une qualité, une action, la justice doit saisir avec
empressement l’occasion de faire prévaloir sur la dispo
sition prohibée de l’homme, la disposition prohibitive
de la loi.
Hors d’état de citer aucune disposition de la coutume,
ni aucun préjugé favorable au système qu’ils voudroieut
faire adopter, les appelans s’emparent de quelques phrases
d’un discours de ce très-savant jurisconsulte, qui remplit
avec tant de distinction l’une des places les plus éminentes
de l’ordre judiciaire. Mais dans la cause où M. Merlin
portoit la parole, il s’agissoit d’une condition d’épouser
telle personne ; condition qui, à l’époque où elle avoit
été
�(49 )
é,té imposée n’étoit pas illicLle ; et ici la condition a pour
objet un don en p récip u t, que le texte le plus formel
de la loi municipale défendoit de donner à l’enfant qui
ne contractoit pas mariage. M . M erlin disoit que si la
condition dont il s’occupoit devoit être considérée comme
illicite, elle conduiroit à dire qu’il falloit regarder comme
nulle l’institution faite sous cette condition.
Un pareil résultat ne procureroit aucun avantage à
la demoiselle Dumont : les dames de Vaure et de la
Roque se trouveroient placées dans la même position
que si elles s’étoient mariées sans contrat de m ariage,
ou si leurs père et mère n’avoient pas été présens à
leur contrat ; alors elles i-ecueilleroient toujours le tiers
de tous les biens de la dame P itat, leur m ère, décédée
intestat. L ’arrêt du 22 nivôse an 9 , dont les adver
saires isolent un considérant, se rapporte aussi à une
condition qui n’étoit point illicite ; et s’il y est dit que
dans les actes entre-vifs, il faut respecter la volonté de
tous, ce ne peut être que relativement aux actes synallagmatiques, consentis par des personnes capables de conI tracter, et non pour ceux où une mineure a été, en fraude
de la l o i , grevée d’une condition à laquelle il lui étoit
impossible de donner un consentement valable.
Par une bizarrerie bien extraordinaire, tout ce qui
est dit dans cette partie du mémoire des appelons est
en contradiction avec ce qu’on lit à la page i 5 , où parlant
de l’arrêt de 1716 , rapporté par A u ro u x , qui valida une
disposition en p récip u t, apposée comme condition à
une institution d’héritier, dans un contrat où on avoit
en même temps apané une fille majeure, les appelans,
G
�C5o )
disent que si cette clause de préciput eût été contraire
il la lo i, ainsi que le porte un des considérans du ju
gement de Gannat, elle auroit été réputée non écrite,
nonobstant la menace de forclusion ; qu’il a toujoui-s été
de principe qu’une clause pénale ne pouvoit valider
une clause contraire à la l o i , parce qu’autrement on
pourroit se réserver les moyens de violer la loi.
Les appelans conviennent ic i, d’une manière bien
expresse, que si les conditions mises à l’institution de
la dame de Vaure étoient contraires à la lo i, elles sont
censées non écrites. Il ne sagit donc que d’examiner le
fait; et pour cela il suffit de lire le contrat du 19 no
vembre 1775. La dame D um ont, en avantageant son
fils de sa portion de l,à terre de M on t, en cas qu’elle
n ’ e n d i s p o s â t ,pas autrement, et donnant à son mari le
droit de. la lui transférer, violait ouvertement les articles
3 1 7 , 219 et 321 de la coutume sous l’empire de laquelle?
elle v iv o it, qui défendent aux pères et mères d’avantager
leurs enfans, si ce n’est par leur.propre contrat de mariage,
ou p<jr legs tenant lieu de portion héréditaire; l’art. 227,
qui ne permet point aux époux ayant enfans de se-faire,
aucun avantage, mêmepardonmutuel', durant le mariage;
l’article 136, qui l’endant le mari seul maître de la com
munauté , prive la femme du droit de disposer des biens
qui la composent.
L a condition.de respecter le préciput eût-elle été
obligatoire'pour les dames de Vaure et de la R o q u e ,elles peuvent s’en dégager en s’en tenant à la qualité
d’hériticres naturelles et légitimes. Lq coutume du Bour
bonnais, aïticle.223, dit que rhéritier institué. est libre
�( 5i )
de renoncer. M . A u ro u x, sur cet article, observé què
celui qui a été institué héritier par son contrat de mariage,
peut renoncer, si bon lui semble } à la successiori de
l’instituant, quand elle est échue, par hl raison qüe
l’institution contractuelle n’a été introduite qu’eii faveur
des mariés et de leurs descendans, et qu’il est librë à tui
chacun de renoncer à une-cliose introduite en sa faveur^
joint que l’héritier contractuel n’étbit pas en état d’ac
cepter la succession lors de l’institution, puisqu’elle ri’étôit
pas encore ouverte, et qu’il n’a contracté que sur Ici
faculté d’être héritier s’il le véüt.
T o u s les auteurs que les sieur et damé ïlilliard ont
cités comme disant que des associations et ddns d’üsufrilit
peuvent être maintenus, s’ils sont une condition de l’ins
titution , se fondent sur ce que ¡’institué ne pèiit s’àin
franchir dé la condition qti’en renonçant à l’iilstitutioü ;
d’où il suit qu’au moyéii de èetté réiidficiatiüiri, l’insti
tution et les conditions qui ÿ tint été fiiisës sënt éorfime
non avenues.
O r , si l’institution n’existoit Jjaà,- l^îs dattieè dé Vâuf-ë
et delà Roqué, contre lesquelles il a ’ÿ à aucune forclusion
légale ni conventionnelle, cdirïttié ôn' î’à:prouvé ci-devant,
recueilleroient le tiers dé touté là succession dé là dame
1 itat, leur mère et aïeule, èri qualité de ses héritières
naturelles ét légitimes : on rie saüroit donc les en priver.
A la page 33 de leur m ém oire, les appelait ont cru
faire une forte- objection, en disant qu’ori petit opposer
aux- dames de Vaure e t de la Roque Qu’elles se p r é s e n te n t
pour succéder'en vertu dé leur institution, ou q u ’e lle s
renoncent à c& titré -q u e d&És lé prerûier cas, leur titré
G 2
�( 52 )
étant indivisible, elles doivent l’exécuter intégralement;
que, dans le second cas, n’étant plus instituées, elles ne
sont que dotées, et dès-lors forcloses de d ro it, parce
qu’aux termes de l’art. 3o 5 , et suivant la jurisprudence la
plus constante, toute fille simplement dotée est par cela
même apanée ; d’où il résulte qu’elles ne peuvent venir
comme héritières ab intestat.
On peut répondre aux appelans : Ce dilemme, qui
renferme la quintessence de tous vos moyens, n’est qu’un
tissu d’erreurs.
i°. En nous présentant comme héritières instituées ,
nous ne serions pas obligées d’exécuter intégralement
le titre qui contient l’institution; nous en séparerions
la condition de souffrir le préciput, le don fait à André
Dumont dans le contrat de mariage de ses sœurs, étant
prohibe par la loi qui nous régissoit. Nous profiterions
de l’institution comme s’il n’existoit pas de condition,
celles de ce genre étant réputées non écrites. Si ce qui
est prohibé ne pou voit pas être séparé de ce qui est permis,
on violerait les lois quand on voudrait.
Lorsqu’il est question d’une stipulation faite dans un
acte passé entre majeurs et usans de leurs droits, cha
cune des parties étant aussi coupable que, l’autre de la
contravention à la lo i, on annulle purement et simple
ment la convention. Mais ce qui a été stipulé dans le
contrat de mariage des dames de Vaure et de Beauregard,
n’est pas leur ouvrage : âgées alors d’environ dix-sept
ans, soumises à la volonté des auteurs de leurs jours,
qui dictoient la disposition, elles n’ont pu ni consentir
ni la combattre. Ce sont leurs père et mère qui ont
�( 53 )
cherché à se soustraire à la prohibition ; et malgré la
faveur que les appelans veulent qu’on accorde a ce qui
est fait indirectement, la prohibition doit produire son
effet.
2°. D e ce que les dames de Vaure et de Beauregard
ne seroient plus héritières instituées , en renonçant a
cette qualité , il ne s’ensuivroit pas qu’elles ne fussent
plus héritières : leur position seroit la même que si lors
de leur établissement il n’avoit pas été passé de contrat,
ou si elles s’étoient mariées avec les droits qu’elles
pourroient avoir. Alors la fille vient aux successions
comme héritière naturelle et légitime , et y prend sa
portion de tout ce dont les auteurs de' ses jours n’ont
pas valablement disposé ; filins aut Jilia ergo hcercs.
3 °. Ni l’article de la coutume que les sieur et dame
Hilliard ont cité,, ni la jurisprudence, ne disent point
que la fille simplement dotée est par cela même apanée;
ils ne regardent comme apanage que la dot qui a été
constituée avec intention qu’elle fût le prix de la portion
héréditaire ; prix qui doit être certain, et hors des at
teintes de tous les événemens auxquels est restée exposée
la fortune des père et mère. On a vu que celle des dames
de Vaure et de Beauregard n’étoit pas de ce genre.
Dans tous les raisonnemens qui se rattachent à leur
dilem m e, les adversaires ont oublié que les dames de
Vaure et de Beauregard étoient héritières naturelles et
légitimes des sieur et dame Dumont ; elles doivent, à
ce titre recueillir les mêmes avantages qu’avec celui
d’héritières instituées. Espérant arriver plutôt à leur but,
elles out réclam é, comme héritières naturelles et légi-
�Ç54 )
times, le tiers de tous les biens généralement quelconques,
appartenons à la dame Pitat, leur m ère, qui n’en a fait
aucune disposition valable : et dans le cas où il y auroit
quelque difficulté ( ce qui n’est pas vraisemblable ) à
leur adjuger ledit tiers de tous les biens de la dame
P itat, en leur qualité d’héritières naturelles, elles de
mandent qu’il leur soit adjugé en vertu de l’institution
contractuelle faite à leur profit par ladite dame Pitat.
On a démontré jusqu’à l’évidence que la constitution
qui leur a été faite en avancement d’h o irie, n’est point
uue dot tenant lieu d’apanage ; que leurs père et mère
n’ont pas eu l’intention de les apaner, et qu’ils n’auroient
pu le faire de cette manière : ainsi rien ne s’oppose à
ce qu’elles recueillent, comme héritières naturelles et lé
gitimes , le tiers de tous les biens de leur m ère, décédée
intestat. S’il ne leur étoit possible d’obtenir le tiers
desdits biens, qu’en qualité d’héritières contractuelles,
alors, mais seulement alors, il faudroit se fixer sur reflet
que doivent produire les stipulations contenues dans leurs
contrats de m ariage, et examiner si nonobstant la prohi
bition expresse de la coutume, la fille d’André Dumont
doit obtenir en préciput la moitié de la terre de M ont,
appartenante à la dame Pitat, qui n’en avoit pas disposé
valablement.
Que les sieur et dame Hilliard cessent de se persuader
qu’en répétant sans cesse qu’il faut que les dames de
Vaure et de la Roque soient, ou instituées, ou apanées,
on finira par les en croire sur leur parole. Elles ont
un double titre d’héritières, et peuvent préférer celui
qui leur est le plus avantageux, suivant la maxime
�( 55)
Quoties dupîici jure defertur hcereditas sublato novt
super est vêtus. La nature et la loi appellent tous le;
enfans à recueillir également les successions des auteurs
de leurs jours, lorsque les actes par lesquels on a voulu
donner atteinte à ce droit ne sont pas valables ; ou lorsque
l’enfant peut venir auxdites successions, sans se prévaloir
de ces actes, il est dégagé de toutes les charges et con
ditions qu’on a voulu lui imposer.
QUATRIÈME
PROPOSITION.
L e s dames de Vaure et de la Roque n o n t f a i t
aucun acte qui leur ait im prim é la qua lité (th é -
ritières instituées , ou dont on puisse induire
quelles se sont considérées comme apanées.
Ne pouvant se dissimuler que si les dames de Vaure
et de la Roque appréhendent la succession de la dame
P ita t, comme héritières naturelles et légitim es, il faut
regarder comme non avenues l’institution, et la condi
tion de souffrir le préciput, les appelans prétendent que.
les dames de Vaure et de la Roque ont exécuté san
reserve les contrats de mariage dont il s’agit; que pai
là; elles se sont rendues non recevables à les attaquer:
ils font: résulter cette exécution de ce qu’elles ont reçu
le tout , ou partie de leurs dots, du vivant de leurs
père et m ère, de ce que l’une:d’elles a reçu annuelle
ment depuis le décès de sa mère les intérêts de ce qui
lui était d û , et enfin de ce que Tune: et l’autre ont
t
> r.
�yÇ'-'
;
.
(-5 6 )
laissé jouir le survivant des père et mère des biens (lu
prédécédé.
Gene peut être, disent-ils, en qualité d’héritières na
turelles qu’elles ont reçu leurs constitutions de d ot; car
le droit de l’héritier naturel ne peut s’ouvrir qu’au
décès de la personne à qui l’on succède. Ce ne peut
être en qualité de filles mariées et dotées, car elles
auroient été forcloses et réduites à un apanage. Ayant
reçu en qualité d’héritières instituées, et l’institution
étant indivisible, elles n’ont pu la recueillir sans se
soumettre à relâcher à l’héritière de leur frère le préciput qui en est une charge.
.E lles ont aussi laissé jouir leur p ère, pendant plus
de vingt ans, de la succession de leur m ère, en vertu
de la condition qui avoit été apposée à leur institu
tion. La crainte révérencielle qu’elles allèguent est un
m otif chimérique; elles ne persuaderont à personne que
par le seul eifet de cette crainte elles aient ainsi laissé
jouir leur père d’une succession opulente, qu’elles pouvoient appréhender depuis plus de vingt ans, lorsqu’on
considérera surtout que depuis 1789, le sieur Dumont père
ne pouvoit plus disposer que d’une somme de iô o o o f.;
qu’il est d’ailleurs plus naturel d’admettre qu’elles ont
laissé jouir le père de lu succession de la dame P itat,
pour remplir l’obligation qui leur étoit imposée, comme
condition de l’institution, que de supposer qu’elles ont
agi^ainsi par le puéril motif d’une crainte révérencielle:
eussent-elles agi par cette crainte, elles ne pourroient
espérer d’être relevée de l’exécution de leurs contrats
de mariage, parce que l’article 1114 du Code Napo
léon
�Iéon consacre l’ancien principe, que la seule crainte révérencielle ne peut suffire pour fonder une action ; qu’il
y a parité çle raisons pour décider qu’elle ne peut jus
tifier une exception; que les lois romaines rejetoientla
crainte prétendue révérencielle , e t n’admettoient l’excep
tion de la crainte que lorsqu’elle étoit l’effet d’une vio
lence illicite, et contraire aux bonnes mœurs.
Nous avons rapporté très-fidèlement tout ce qui a
été dit par les adversaires pour fonder leur prétendue
fin de non - recevoir ; il sera facile d’anéantir ce fruit
d’une imagination féconde.
Il a été prouvé précédemment que lorsqu’un acte
contient des stipulations contraires aux lo is, on doit les
considérer comme non écrites, et exécuter l’acte comme
si elles n’existoient pas, n’y ayant à cet égard aucune
indivisibilité ; que si cette assertion pouvoit être con
tredite relativement aux actes passés entre majeurs, qui
étant tous deux coupables de la contravention à la lo i,
sont tenus de l’exécuter tel qu’il est, ou de consentira
son anéantissement total, il ne sauroit en être de même
d’une condition dont l’objet étoit prohibé , qui a ét<?
imposée à une mineure par ceux sous la puissance des
quels la nature et la loi l’avoient placée : ainsi les dames
de Vaure et de la Roque devant être dégagées de la
condition illicite qui leur a été imposée dans l ’institu
tion , leur droit n’en seroit pas moins certain quand
elles auroient exécuté sans réserve les contrats de ma
riage qu’on leur oppose.
Mais .nous allons démontrer que toutes choses sont
entières à leur égard.
H
�Il est bien constant qu’elles n’ont fait aucun acte dans
lequel elles aient pris la qualité d’héritières instituées.
Toutes les fois qu’on veut induire de quelques faits la
renonciation à un droit certain, tel que celui de renoncer,
il faut que lesdits faits soient tels qu’ils n’auroient pas eu
lie u , si ceux qui en sont les auteurs n’avoient été décidés
à prendre la qualité dont ils voudroient ensuite se dé
pouiller.
Ces principes sont v rais, même dans le cas où l’hé
ritier se seroit immiscé dans les biens de l’hérédité.
M . Lebrun, en son Traité des successions, liv. 3, chap. 8,
section 2 , rapporte ce que dit M. l’Epine de Grainville
à l’occasion d’un arrêt de 1724, qui jugea qu’ une dame
L eclerc, qu’on vouloit faire réputer héritière à cause
de diiFérens actes qu’elle paroissoit avoir faits en cette
qualité, avoit pu renoncer. Ce magistrat observe que
ledit arrêt sert à faire connoître qu’on ne doit se porter
qu’avec scrupule à déclarer héritier celui qui n’a pas
intérêt de l ’être ; que les actes qu’on peut lui opposer
ont souvent des motifs bien diiiérens, et que les seuls
qui doivent lui faire donner celte qualité sont ceux qui
établissent qu’il a voulu la prendre et s’en attribuer le
profit -, à quoi M . Lebrun ajoute qu’il suffit que l’on
puisse faire une chose en quelqu’autre qualité que celle
d’béritier, pour n’être pas réputé l’avoir faite en ladite
qualité d’héritier.
Les mêmes principes peuvent être invoqués par l’hé
ritier naturel et légitim e, exem pt, en cette qualité, de
toutes charges, lorsqu’on veut le faire déclarer héritier
contractuel pour l’obliger d’exécuter des conditions qui
lui ont été imposées en fraude de la loi.
�Il
ne résulte de la réception des sommes qui ont été
touchées par les dames de Vaure et de Beauregard, au
cune approbation de l’institution : ces sommes étoient la
représentation des alimens que les pères et mères doivent
à leurs enfans , comme ceux-ci en doivent à leurs pères
et mères lorsqu’ils sont dénués de biens. Ce qui avoit été
promis en avancement d’h oirie, n’avoit rien de commun
avec l’institution ; car on pouvoit instituer sans avance
ment d’hoirie, ou donner un avancement d’hoirie sans
institution. Ainsi ce qui a pu être reçu par les filles des
sieur et dame Duraont, en attendant l’ouverture de leurs
successions , ne les a point privées du droit d’examiner
dans la suite à quel titre elles dévoient appréhender lesdites successions.
L e second fa it, duquel on veut faire résulter l’appro
bation de l’institution, est la jouissance laissée au p è re ,
des biens de son épouse décédée.
A cet égard, les appelans ont trouvé commode de dis
simuler la réponse tranchante et décisive qui leur avoit
été faite en première instance. On leur avoit dit : Nos
père et mère étoient en communauté ; l’intérêt des dames
de Vaure et de la Roque étoit que cette communauté
ne fût pas rompue : or, la continuation n’auroit pu avoir
lie u , si les enfans avoient retiré des mains du sieur
Dumont les biens de leur m ère, dont les fruits appartenoient à la communauté. Ainsi la jouissance desdits
biens n’est pas restée au p è re , à cause de la condition
mise à l’institution , mais par un m otif bien différent,
et pour l’intérêt des héritiers de la dame Pitat.
N ’y eût-il pas eu de communauté, les d a m e s de Vaure
H ^
�( 60 )
et de la Roque n’auroient pas préjudicié à leurs droits,
en laissant jouir leur père de l’hérédité m aternelle,
pendant un temps moindre que celui qui est nécessaire
pour la prescription. Cette négligence à réclamer les
biens maternels est un fait négatif, qui ne sauroit être
considéré comme une approbation de l’institution.
Tous les jours on voit des pères privés de l’usufruit
par des secondes noces, sans que leurs enfans profitent
du bénéfice de la loi ; et jamais cependant on ne s’est
avisé de soutenir qu’ils dérogeassent à rien par ce silence,
ni même qu’ils fussent non recevables à former leur
demande en privation, après une longue jouissance du
père. L e silence des dames de Vaure et de la Roque
n’est donc ici qu’un effet de la révérence paternelle, et
de la crainte que la privation de cette jouissance n’en
gageât le sieur Dumont à frustrer ses filles de partie des
biens qu’elles espéroient trouver dans sa succession.
Les sieur et dame Hilliard ont opposé que depuis
1789 , le sieur Dumont n’avoit plus à sa disposition
que i 5ooofrancs ; que suivant le Code c iv il, la crainte
révérencielle ne pouvoit fonder une action; qu’il y avoit
même motif pour une exception ; que les lois romaines
n’acceptoient pas l’exception de la crainte révérencielle,
mais seulement celle qui étoit l’effet de la violence.
Relativement au ne jtejus J h cer et, il y a inexactitude
à dire que depuis 1789, le sieur D u m o n t ne pouvoit
disposer que de i 5ooo francs ; il pouvoit disposer de
» v in g t, la dame de la R oque n’étant pas saisie de la
somme à elle donnée dans un contrat qui n’étoit pas le
sien : mais ce n’est pas sur ces 20000 francs qu’il faut
�( 61 )
apprécier l’effet du mécontentement que ledit sieur D umont auroit pu concevoir. Il avoit la liberté de vendre ;
il pouvoit faire des dons, soit de la main à la main ,
soit par obligations simulées. Irrité contre sa fam ille,
son affection se seroit portée sur des étrangers.
L ’article 1114 du Code Napoléon, qui dit que la seule
crainte révérencielle ne peut pas fonder une action ,
fignifîe que celui qui voudroit revenir contre un acte,
sous prétexte qu’il ne l’a signé que par révérence pa
ternelle , ne seroit pas écouté, s’il n’alléguoit aucun
autre motif ; ce qui ne paroît pas comprendre le ne pejus
J 'a c e r e t , c’est-à-dire, une autre crainte bien plus forte,
celle d’être privé de la plus grande partie de l’h érédité,
sur laquelle on avoit droit de compter.
Si la crainte révérencielle ne peut suffire, suivant le
Code c iv il, pour fonder une action, il n’y a pas parité
de raisons pour l’exception ; c’est-à-dire, pour celui qui
étant maître d’exercer ou ne pas exercer un droit, sus
pend , par révérence paternelle, l’exercice de ce droit
durant le temps où il ne périclite pas. L ’enfant qui n’a
pas agi en pareil cas, a cédé à l’un des plus doux sentimens de la nature : il eût dû malgré la crainte révé
rencielle résister à son père, s’il avoit exigé un acte de
renonciation au droit qui lui étoit acquis; mais dès que
le droit ne se perdoit pas, on ne peut que louer l’enfant
d’avoir garde le silence. Elle seroit bien dure, la loi qui
placeroit une fille tendre et soumise dans l’alternative,
ou de priver ses enfans d’une partie de leur fortune,
ou de remplir d’amertume les derniers jours de celui à
qui elle doit la vie.
�( 62 )
La fin de n on -recevoir est le plus pitoyable des
moyens opposés par les appelans ; il seroit inapplicable
à la dame de la R o q u e, qui n’avoit que huit jours lors
qu’elle a perdu ;sa mère décédée avant l’accomplisse
ment de sa majorité. Les 6000 livres payées à compte,
sur ce qui lui a voit été constitué en avancement d’hoirie,
l’ont été au tuteur naturel de ladite dame de la Roque.
Par l’effet des nouvelles lois elle a atteint sa majorité
d ix -h u it mois avant la mort du sieur Dumont , son
aïeul ; mais dans cet intervalle il n’a été fait aucun acte
approbatif de l’institution; et aussitôt après la mort
dudit sieur Dumont elle a manifesté qu’elle entendoit
réclamer sa portion dans la moitié de la terre de M ont,
qui avoit appartenu à la dame Pitat; et par conséquent
ne pas approuver les actes qui.auraient dérogé à ce
droit.
CINQUIÈME
PROPOSITION.
Quand les termes des contrats de mariage des
dames de Vaure et de Beauregard , contien
draient constitution d’une dot, telle quelle doit
être pour former apanage ; quand il seroit dit
expressément que si elles contestoient le pre'ciput,
elles seroient réduites à cette d ot, il riy auroit
pas lieu de les déclarer déchues du bénéfice de
V institution, mais seulement dyordonner la dé
livrance dudit pre'ciput.
Les sieur et dame Ililliard ont souvent manifesté
�dans la cause un grand désir de dépouiller les dames
de Vaure et de la Roque de leurs droits héréditaires.
Espérant leur faire abandonner par la crainte une partie
de leur patrimoine, on a plusieurs fois fait circuler le
bruit qu’elles couroient risque d’être réduites à la somme
qui leur avoit été constituée en avancement d’hoirie ;
mais il faut rendre aux appelans la justice de dire qu’ils
ont eu la pudeur de ne pas prendre de conclusions à cet
égard devant les premiers juges. C’est une contradiction
dans leur conduite , de discuter en la cour d’appel un
objet qu’ils n’ont pas demandé en première instance.
Ils auroient fait vainement cette demande, même dans
le cas où les contrats de mariage dés daines de Vaure
et de Beauregard auroient contenu la stipulation la plus
expresse que si elles contestoient le préciput, la somme
constituée en avancement d’hoirie tiendroit lieu d’apa
nage. L e droit sacré qu’ont les enfans à la succession des
auteurs de leurs jou rs, eût fait regarder la peine comme
comminatoire : on eût ordonné la délivrance du pré
ciput, sans égard à la demande en déchéance de la por
tion héréditaire.
Les appelans nous ont eux-m êm es fourni la preuve
de cette assertion, à la page 14 de leur m ém oire, où
ils l'apportent, d’après M . Beraud, les circonstances de
l’arrêt de 17 16 , cité par M . A uroux. Les filles qui, lors
de cet arrêt, avoient contesté le préciput, étoient ma
jeures à l’époque de leur contrat de mariage; elles étoient
instituées héritières sous réserve de 30000 liv. données
en préciput à leur frère, et avec convention expresse
qu’où lesdites filles voudroient contester ledit préciput %
�'
( 64 )
elles demeureroient apanées à la somme de 24000 liv.
Cet apanage form el, et moyennant un prix certain, les
obligeoit à souffrir le p réciput, ou à se contenter de
l’apanage. L e premier tribunal ordonna que le fils prélèveroit ledit préciput.
Sur l’appel, l’intimé forma incidemment demande ten
dante à ce qu’en conséquence de la contestation du pré
cip u t, ses sœurs demeux-assent apanées, conformément à
la clause expresse stipulée dans leurs contrats de mariage;
mais l’arrêt qui intervint, en confirmant le préciput, mit
hors de cour sur la demande en déchance de la portion
héréditaire.
Les contrats de mariage des dames de Vaure et de
Beauregard les placent dans une position bien plus avan
tageuse que celle où se trouvoient celles qui donnèrent
lieu à l’arrêt de 1716. Les dames de Vaure et de Beauregard n’avoient que dix-sept ans lox’s de leurs contrats
de mariage, les autres étoient majeures; circonstance bien
importante. Il n’y a pas d’apanage, pas même de cons
titution de dot certaine, en faveur des dames de Vaure
et de Beauregard; les autres étoient expressément apanées
à une somme déterminée. Il étoit stipulé dans les contrats
de mariage de celles-ci que si elles contestoient le pré
ciput , elles demeureroient apanées à la somme qui leur
étoit constituée; tandis qu’au contraire les père et mère
des dames de Vaure et de Beauregard ont dit dans le
contx*at de la dame de Vaure qu’ils 11e l’avoient point
apanée ; et le sieur Dumont père a prévu , dans celui
d’ André D um ont, le cas où la dame de la Roque contesteroit le préciput. Loin de déclarer qu’en ce cas elle
ne
�( 65 )
ne pourroit exercer ses droits héréditaires, il s’est borné
à dire qu’elle devroit être privée de 5ooo, francs dont
il lui faisoit don sur sq réserve; et il n’a institué son fils
héritier que pour un tiers, conjointement avec ses sœurs :
de sorte que la demoiselle Dumont ne pouyroit réclame^
qu-delà du tiers des successions à partager, sans contre
venir de la manière la plus formelle au liti’e qui, lüi
assure en préciput la moitié de la terre de M ont, apparf
tenante au feu sieur Dum ont, son aïeul. Elle peut d’autant
moins contester les droits de ses cohéritières, qu’il n’çst
pus douteux que le feu sieur Dumont n’eût fait aucun
avantage audit André Dum ont, $’¡1 eût pensé que lui ou
ses représentai» essayeraient de dépouiller 1rs dames de
Voure et de Beeuregard d’une partie des droits coqsacrés
par leurs contrats de m ata ge, et jnême par celui dudit
André Dumont.
S I X I È M E
PROPOSITION.
L a disposition du jugement dont les sieur et danie
H illia rd sont appelans, doit être maintenue tant
en faveur des sieur et dame de Vaure, que des
sieur et dame de la Roque ; mais s 1il y avait
difficulté v is -à -v is des prem iers, il 11 en existe
aucune relativement aux sieur et dçime de la,
Roque.
$ ie n convaincus que les droits de la dame de V a u r e ,
leur t a n te , sont incontestables ? les sieur et dame de la
�(
66)
Roque ont toujours raisonné comme si le contrat de la
dame de Beauregard contenoit les mêmes stipulations.
Mais les clauses irritantes de celui de la darne de Vaure
n’ont pas été mises dans celui de la dame de Beauregard;
il n’y est fait nulle mention qu’en cas de non disposition
de la terre de M ont, elle appartiendra à André D um ont,
ni que l’institution des filles soit grevée de cette condition ;
il n’est pas exprim é, comme dans le premier, que sans
ces conditions l’institution n’auroit pas été faite, et qu’elle
eût été apanée : des clauses de cette nature ne peuvent
se suppléer. On dit bien que l’institution de la dame de
Beauregard est faite aux mêmes charges que celles expli
quées dans le contrat de la dame de V a u re, mais cela
ne peut s’entendre que de l’usufruit réservé en faveur du
survivant*, il n’est nullement parlé de conditions.
M al à propos les appelans prétendent-ils que le mot
charges comprend la réserve d’usufruit, et la destination
de la terre de Mont. Dans le contrat de la dame de V aure,
les instituans ont bien distingué ces deux choses. Lors
qu’ils stipulent la réserve d’usufruit, ils disent à la charge
de laisser jo u ir ; lorsqu’ils rappellent la destination de la
terre de M ont, ils se servent de ces mots, et à condition
de ladite disposition.
L e meilleur interprète des actes dont il s’agit étant sans
contredit le sieur Dumont père qui en est l’auteur, on
ne sauroit trop faire remarquer comment il les a entendus.
Toute sa pensée est dévoilée dans le contrat de mariage
d’André Dunoont : s’il lui donne le préciput, c’est, dit-il,
parce que la faculté d’en disposer lui a été attribuée par
la dame Pitat, son épouse, dans le contrat de mariage
�( 67 )
de la dame de Vaure. Il n’eût pas manqué d’exprimer
que cette faculté lui appartenoit eu vertu des contrats de
mariage de ses deux filles, s’ils eussent contenu les memes
stipulations.
Faisaut ensuite donation à la dame de la Roque d’une
somme de 5ooo f r ., il lui impose l’obligation de con
sentir audit préciput, et vent qu’elle soit privée de cette
somme de 5ooo francs , si elle ou ses père et mère con
treviennent à la disposition qu’il fait en faveur d’André
Dumout.
Eût-il pris tous ces moyens, s’il eût cru la dame de
la Roque obligée par le contrat de mariage de sa mère
à soutlrir ledit p r é c i p u t ? N ’auroit-il pas plutôt l’appelé
que c’étoit une condition de l’institution de la dame de
Beauregard, si vraiment son institution eût été condi
tionnelle ?
Ces réflexions sont simples •, elles portent la convic
tion dans tous les cœurs, malgré la subtilité avec laquelle
les appelans cherchent à les écarter : ils font des mots
dans ¿’esprit, un talisman qui suffit à tout. Mais qui
est-ce qui ignore qu’une condition à laquelle on voudroit
donner l’efTet de priver l’héritière instituée de sa portion
dans l’un des objets les plus considérables de la. sucession
qui lui étoit promise, devoit être exprimée avec d’autant
plus d’energie, qu’il est de principe que les peines ne
peuvent etre appliquées qu’à celui qui y a été positi
vement soumis?
La famille paternelle de la dame de la Roque a dû
penser que le contrat de-mariage de la dame de Be.'U regard seroit son unique loi ; elle étoit loin d’iniagiuer
la
;
*
�( 68 °
que dans ui^ coutume d’égalité , qui met les plus grands
obstacles aux dispositions en précipu t, André Dumont
en réclameroit un très - considérable , en vertu d’un
contrat de mariage qui n’étoit pas le sien, et dans lequel
il n’est pas même nommé.
S i , contre toute vraisemblance , la dame de Vaure
venoit à succomber, les sieur et dame de la Roque ont
lieu de croire que la disposition du jugement dont est
appel , qui a déclaré nulle la donation en préciput de
la terre de M o n t, pour la moitié provenante de la dame
Pitat , seroit toujours maintenue à leur égard. Ils ont
démontré précédemment que les mauvais raisonnement
sur lesquels les appèlans fondent une fin de non-recevoir
inadmissible, ne peuvent ‘s’appliquer ni à la dame de la
Roque , ni à la dame sa mère , à raison de minorité.
O n feroit des répétitions inutiles, si l’on suivoit les
sieur et dame Hilliard dans leur critique des motifs qui
ont déterminé les premiers juges, lorsqu’ils ont décidé,
sur les conclusions conformes du procureur im périal,
que la moitié de la terre de M on t, qui avoit appartenu
à la dame P itat, seroit partagée entre tous ses enfans ;
ils ont fait une juste application de la loi sous l’empire
de laquelle ils sont nés et ont toujours vécu. On iie sauroi't
douter qu’ils n’en aient saisi le véritable sens.
R É S U M É .
Il
résulte des propositions établies dans le present mé
m oire,
iu, Q u’André Dumont ne pouvoit recevoir aucun avan-
�( 69 )
tage de ses père et mère dans les contrats de mariage
des dames de Vaure et de Beauregard; que la dame Pitat
étant décédée avant le mariage dudit André D um on t,
il n’a pu recueillir dans tous les biens qui lui avoient
appartenu, qu’une portion égale à celle de ses sœurs.
2°. Que la disposition en préciput qui a été faite en
faveur du môme André D um ont, dans lé contrat de
mariage de la dame de V aure, étant prohibée formelle
ment par la coutume de Bourbonnais, à laquelle les
parties étoient soumises , doit être déclarée nulle et
comme non avenue.
3°. Qu’il en est de même de la faculté d’élire donnée
par ladite daine Dumoüt à son m ari, soit parce que ladite
coutume ne permettoit aucunes donations ni autres contrats
entre époux, soit parce que cette faculté d’élire ne pourroit être considérée que comme une procuration ou un
mandat; et il est de principe que tout pouvoir finit à la
mort de celui qui l’a donné.
4°. Que la disposition de la terre de M ont, ainsi que
la faculté d’élire, ne sauroiënt être maintenues, comme
étant une condition de l’institution faite dans le contrat
de mariage de la dame de V au re, attendu que les con
ditions' contraires aux lois ou aux mœurs sont réputées
non ecrites , et n’empêchent pas l’exécution de l’acte
dans lequel elles ont été mal A propos insérées ; qu’il
doit plus particulièrement en être ainsi, lorsque l’enfant
auquel la condition a été imposée, iie pouvoit, à cause
de sa minorité , donner aucun consentement qui lui fût
préjudiciable.
5°. Qu’il seroit également contraire aux lois et à la
�.
( 7° )
m orale, qu’on pût faire par voie indirecte ce qui est
expressément prohibé. Si quelques auteurs ont dit qu’en
contrat de mariage on pouvoit instituer avec l'obligation
d’associer une tierce personne à l’institution, et stipuler
un don d’usufruit en faveur de celui des instituans qui
su rvivrait, c’est parce que l’association peut procurer
des avantages à l’un comme à l’autre des associés; et ce
n’est pas comme donation, mais comme acte de reconnoissance de la part de l’institué, que la clause d’usufruit
obtient son effet. A u surplus, n’y ayant pas égalité de
raisons, on ne sauroit en induire qu’il est permis, malgré
la disposition de la loi m unicipale, et le sentiment de
ses plus célèbres commentateurs, de donner un préciput
à l’enfant qui ne contracte pas mariage.
6°. Que la coutume de Bourbonnais étant une coutume
d’égalité, les pères et mères ne pouvoient forclore leurs
filles de leurs successions, par le seul empire de leur
volonté : il falloit, pour lesapaner, qu’ils leur donnassent
un prix certain par la constitution d’une dot qui leur
fût irrévocablement acquise. Si quelques auteurs, et un
arrêt de 1716 , ont déclaré valable un préciput (donné au
fils, dans le contrat de mariage de ses sœurs, c'est parce
que leurs contrats contenoient deux stipulations bien dis
tinctes , institution sous la condition du préciput, et
apanage formel ; au lieu que les sieur et dame Dumont
n’ont rien constitué à leurs filles qu’en avancement d’hoirie,
et à la charge du rapport : ils ont expressément déclaré
dans leur contrat de mariage , et dans celui d’ André
D um ont, qu’ils n’avoient p a s entendu les apaner, ni les
priver, dans aucuu cas, du partage égal avec leur frère;
�( 71 )
et ce dernier n’ayant été lui-même institué que pour un
tiers , conjointement avec les dames de Vaure et de
Beauregard , n’a transmis à son héritière aucun titre
#en vertu duquel elle puisse prétendre au-delà de cette
quotité.
7°, Que les appelans peuvent d’autant moins tirer
avantage, relativement à la succession de la dame Pitat,
de la prétendue condition relative au préciput, que les
dames de Vaure et de la Roqu e ayant le droit de re
cueillir sa succession en qualité d’héritières naturelles et
légitimes, si cette condition étoit valide, elles s’en trouveroient dégagées en n’acceptant pas la qualité d’héritières
instituées, et s’en tenant à celle d’héritières naturelles
et légitimes.
8°. Que les dames de Vaure et de la R o q u e, qui
n’ont p ris , dans aucune circonstance , la qualité d’hé
ritières instituées, ne sauroient être privées du droit de
venir à la succession de la dame Pitat, comme ses héri
tières naturelles et légitim es, qu’autant qu’elles auroient
fait des actes incompatibles avec cette dernière qualité :
au lieu que les deux faits dont les appelans essayent de
tirer avantage, sont absolument insignifians ; la réception
du tout ou de partie de ce qui avoit été constitué en
avancement d’hoirie, n’ayant rien de commun avec l’ins
titution , et la jouissance laissée au père des biens de
son épouse étant une suite de la communauté conjugale,
dont la continuation ne pouvoit avoir lieu au profit des
etafans , qu’en par eux laissant cette jouissance à leur
père.
< 9°* Que nul des moyens opposés par les sieur et dame
�(7 0
Billiard, ne sont applicables à lu-daine de 1<>R oque, le
contrat do mariage de sa mère ne contenant aucune dis-'
position en faveur d’André D u m o n t, et à raison de
l e u r minorité , ni la dame de Beauregard, ni la dame de
la Roque n’ayant pu faire aucuns actes préjudiciables ;
do sorte que la disposition du jugement dont la demoiselle
Dumont est appelante, d o it, dans tous les ças, ■
être
confirmée vis-à-^vis des sieur et dame d elà Roque.
" P . 5 . Quoique dans.cette affaire il n’ait déjà été que
trop parlé de consultations, on ne peut se dispenser de
dire un mot sur celles que les appelans ont fait imprimer
à la suite de leur mémoire ; elles sont données par cinq
jurisconsultes , dont quatre avoient, avant le, commence
ment du procès, signé en faveur de mademoiselle Dumont
une autre, consultation, qui a été communiquée, et est
en quelque sorte une pièce du procès, puisque les tuteurs
l’ont présentée au conseil de fam ille, pour obtenir son
autorisation. Si la cour veut se la faire représenter, elle
remarquera qu’il existe une différence notable entre les
moyens sur lesquels la prétention de mademoiselle D u
mont étoit fondée dans la première consultation , et ceux
qui 6ont présentés dans le mémoire.
On soutenoit principalement dans la première consul?
tation , que la disposition faite par la dame P ilât, lors
du contrat de mariage de la dame de V n u re, devoit
valoir comme legs, ou disposition testamentaire en faveur
d’André Dumont ; mais les sieur et dame de la Roque
ayant démontré dans les écrits par eux signifiés en
première instance, que si la demoiselle Dumout obtenoit,
à
�(73 J
à titre de disposition testamentaire, la moitié de la terre
de M o n t, qui avoit appartenu à la dame P itat, elle ne
pourrait, suivant l’article 321 de la coutume à laquelle
les parties étoient soumises , prendre autre chose dans la
succession de ladite dame P ita t, parce que dans cette
coutume d’égalité, l’un des enfans ne peut être héritier
et légataire. Les appelans ont changé de langage, et mis
à la page 27 de leur m ém oire, qu’André Dumont ne
recueille point le préciput à titre de legs; qu'on ne lui
a donné ni légué la terre de M ont directement; qu’il ne
la recueille que par l’effet de la condition imposée à l’ins
titution des iilles. Ainsi la première consultation, et celle.'
qui ont a p p r o u v é le m é m o i r e , n ’ éta nt pas appuyées SUl’
les mêmes hases , il est probable que les avocats qui les
ont signées n’avoient pas suffisamment examiné.
D ’ailleurs, les unes et ¡les autres .paraissent données
sur un extrait du contrat Ide mariage de la dame de
V au re; extrait dans lequel a< été-«omise la clause qui
Pobligeoit au rapport de tout ce qui lui étoit promis
par ses père et mère. Cette clause formant la preuve
la moins équivoque que la dame de Vaure n’avoit pas
été d otée, dans le sens qui rend ce mot synonyme
d ’apanée, celte omission a pu induire en erreur les juris
consultes qui ont signé toutes lesdites consultations.
Les sieur et daine de la Roque auraient *pu en faire
imprimer un très-grand nombre.;■
-mais ;ils n’ont-pas cru
devoir faire usage de pareilles armes: ils citeront néan
moins des suffrages dont on doit faire d’autant plus do
cas que ce ne sont pas eux qui les ont provoqués.
E u l’i i n - 6 , lo feu sieur D u m o n t voula nt savoir quel
• IC
<=f 2>
'J '
�( 74 )
effet produiroient les lois nouvelles sur les dispositions
par lui faites, et etre instruit de celles qui lui étoient
encore,permises, lit faire un mémoire à consulter, qui fut
envoyé avec les copies des’contrats de mai'iage de ses trois
enfans, à un jurisconsulte très-distingué, alors membre du
conseil des anciens, et aujourd’hui du sénat. Ce juriscon
sulte s’environna des lumières de plusieurs membres des
conseils, qui s’étoient spécialement occupés des lois rela
tives aux successions. Parmi les questions proposées par
le feu sieur D um ont, étoit celle qui est l’objet du procès.
Dans la réponse qu’il reçut, il est dit que l’héritière
d’André Dumont ne peut à aucun titre recueillir la
moitié de la terre de M o n t, qui avoit appartenu à sa
mère; que les filles des sieur et dame Dumont, qui,
étant héritières naturelles et légitim es, n’ont pas même
besoin
de se prévaloir de l’institution faite en leur
faveur dans leurs contrats de mariage, doivent partager
cette moitié de ladite terre.
Après le décès du sieur D um on t, cette consultation
a été trouvée sous les scellés, et fait partie des papiers
de sa succession. Les sieur et dame de la Roque l’ont
citée dans les écritures par eux signifiées en première
instance. Si leur assertion eût été contredite, il eût été
facile au tribunal de se la faire représenter.
Les sieur et dame de la Roque éprouvent la plus
douce satisfaction h rappeler un autre fait cité dans la
même écriture, et dont ils ont la preuve. L ’ inventaire
du mobilier de M ont ayant donné aux héritiers l’occa
sion de manifester leurs prétentions respectives sur la
terre de M o n t, les appelans se firent autoriser par le
�(
)
conseil de famille à soutenir celles de mademoiselle Dumont, après .avoir obtenu la consultation dont nous avons
p a ilé, qu Jls communiquèrent aux dames de Vaure et
e la Roque. Elles s’étoient également consultées, et
voient une si grande confiance dans leurs moyens ,
q u e es n’hesiterent pas à proposer aux tuteurs de la
demoiselle Dumont de faire délibérer les jurisconsultes
qui avoient donné leur avis en sa fa ve u r, avec ceux
qui en avoient^ émis un contraire, et de se conformèr ‘â
«> ecision qui serait rendue par ce tribunal arbitral.
1 ous les risques d’un pareü parti S o ie n t poui les dames
f " Vaure c, de la R oql,e ; ^clles p W ô ic n t
r e v e n ir '
eontie ce. qL„ a u r o n s
mademoiselle
DiJniont « .r o * si «l]e m
voftlu. ^ ' C c a question',
apiès sa majorité ,‘ ce.qùe. les arbitres auraient'décidé.
Mais voulant 4 tout prix éviter un procès, et persuadées '
que ma emoiselle-Dumont ne reviendrait pas ccmtfç .ce
qui aurait clé jugff en- grand», .oonnoissdycc de icfu »
les dames 9 e V rnre « . de la Rbc/ue d é v o ie n t ardem
m en tq u e leiiï proposition -fût'accepté« : elle ne.'le fut
q u i! falloit plaider.
d* Ia ^
• .
.
“ ^ D u m o n t .é c r iiil...
. A ■
.
_ .
n’1n !!irn f°û'lu' i dCS întimées P^ouve que les Appëlansn . uioient ga, du les acctfseï' d'avidité', et d’avoii* voulu,
s le P'occs a ju g e r, firire*brillér leuV esprit aux dépans de la justice et de la l,„nne foi. Les efforts faits par
les dames de Vaure et a é 'V f c o q u c , pour éviter M
p io ccs, ont excédé les bornes de la prudence; et elles
evoitnt se croire exposees à aucuns reproches, en
�réclamant la foible portion qui leur revient d ans un
immeuble dont il n’a été fait, à leur préjudice, aucune
disposition valable. *
.
;
CVUu>
JJk- Hy/uk' y
Signé. L A R O Q U E
ojuiaX
TARDIF
/IfOif.
DE MONS
avoué licencié.
(AAClKXCkjC) ^ 4- irtAO/UJL f*- 4A\U*ij
t iA A llU A I d
<U^*‘ ^
iL £ *
>
Cc£t~.
Owvy /<ÿtÂ*k*4l ^JL ^
Aiio/lU /bl*
COi^uJi
o^uuu.ur
< A fJ
«
^ ^
(U A
*
6 «
<
. ■
•?
C) u * ^ > •
‘
afr, ^t'(u ÿj't*
ty u * L
^AMJÜU «A- iMlM.
tirv i.1
I
. ^
•)
■
it, «U
r'à» ^iinux
^
tA\OA^i O' 4^4*^A|'4a*Av^
o - j f 0,Jir
la. fo. c/ioa^i
Ct^u^anjtîLta^u^Jr
^
c«±L«U,v~u^*-* t iu / /'i>
lfc=*
^>tJujJ cysnf lMjliK~x cdL
^ C
u
JL l *
/ iu i/ Ü A h
«<-
C iA lA ( X U jU T
mÎ
I
l
'
, O<w ¿¿^'ï/eiîï
J
i A X t jy < A M A C * ~ J T
**.
C4JivV/J^ûjXA(J\^ ^[A4fU CÜmA«^ ¿4^ ^Ufc/Î(A Ou^ Lii*AlO,
a/f,
2u
fc*
^ liu x J C ^ a .
fo u .
^ « u o c iJ
CXU^lji .
ajÉt".
um
~à«
iift»Tbsv»
g JV U U U f^JT
CJ»r C*A
‘ -“ 'n 'X ÿ jin l A c -
y< ~ .ÿ /y X
Acû^feiA«« ^<a^ÜÎoj/^ o«0'
i < 4^
^ CUu/tUt ))*■' MAOAAU^O
A R I O M , de l’imprimerie de T HIBAULT-LANDRIOT , imprimeur
^
. de la Cour d’a p p e l.— Juillet 1808.
C^,aAjr" «4n-c«v^a^^ ^UL
‘T ^ ------ T
ta
t/w - i * K » - O . t i V
/«/tcuTZb ^ **r ^ tA‘ c^ v\ \
^*‘l •»■f'tÿùxb
ty * À Î >
'4 y
Q )< u «
6
^ iu w u /
co m A .V J
a
rf,
&>**»> /£=*—
' à o j - * t / ii
''hiA A ^c-^'-
a.
^
^ - u », — ■
f'u^ÎKÎ.,
a it. CjfjL Ul* tu ^ « vl- »*4.
t4M^ h* ¿tXAiCÎ^ ^
¿Aji^ l** y U*Mll*M«r /^vüt^K- tw^(IU»^VO
/oofos^i'
Hjv^Y3
¿L ¿ iu
�l'T1
’KujUc^jjtutluMnuwA"' ^
u)»i—«iuv^ ci»V
c u fc . c3fcjï\(,/ cy»¿yo«V^»« x^oU^JTï»»^*-
bLtí-
ìaZ£&cJ .
ttcT^C^ Â^flÉl*» Ca* £* COH^¿¿U
<Ar-
oryu^ (^ U ^ H c J s^ ^ <Aua / « «*-
r / " '" '-
/o^ <W«4 f c
¿ ¿ d të ^ cS ^ X ï^ : / «— - *~w~j/~ti{/ . ^
^o/wsts- <^!JLa. dt/VMc^«y(Ll*-foi*/¿vM ^A*1yt*~s*c_%- éu ^ T ^ *^ /'
‘
y*’U,‘« ‘ÂS & /a. ¿»i \ (>MO 'Mxtíü^VH Ü)*VOti-í«'uw¿^>' .
^
.
/0la Ct^
â<fT>lX*ï JUa
. /»^
</<L
f e v
J C T Z I f a ü T j : ^ ^ L ~ t '~ ^
lo t e t ú ,^ JU, ^
^ w Ay7V___* i f c ^ V - í C ß
^ ^
it*<W
JW
%
***f^fc^0 **r /tu<VO-4<i~tsr- VX^^X+mXa ci« /tuv^vlrv*
^ -*** CXJi~*” y
.
*<M^*~*~>^/?t^*^*y/VOL> A UlHMfaJuiH &/njL c+' &6i*rl‘*h f
â- * ^
V
“ ^ -
. Ax E M O I R> E
SUIVI
DE
"
.
f c ' ¿ 0PÍ S U L T A T I O N S.
/
,
"
'«* a.wfcà*T*. /«* Z * ^
u ' j ,
/_ .
«
x.
W(o
-/ /
. ' / */
u.t^» ^
^
^ 'U/'*v*il
/a
^
^ * * > l1
^
T ; •f /io'^
^^
f ^ r «- r ~ r —
-
C*- aJ\^t ^bc^^’/c^
.
h ^ _
_
-----^
eu'u™ / il
p ***'
<*-
—
0ow^ütwlC^ - ¿ v<X ntoULi-Jr
puju ijn e^ÎÜA^ M^cm^ ¿U f/ou-v^v
^*ur
*'***'*—
C*AJu ~ b j * - .
^
- t */Vt"
il“^ ' C
(fM'(ÿ i4^ <
t
. - t”4-.Y*» A
ì>y^
^
Ÿf*'
/ aJlriSiijhilIA í/c¿Jr* à. c*»CkviQÇ ik^»x«A-^ i***J
K /V-f— <■ „ . •
V ■.
S~r
>« /et Uivmwvu,, . . r/ /a|/^M»u " '/ U^ ‘ /W‘u' "^¿Y»u>txr
a^u*Xt*Jas i-y'*-
h é v i — ^\)4M
H U a «^ l
c< /liivVttvOKwA
ft ^
Í
á* a * t
-
1,u
A
m
(^ V k /L
* tm i ^
il»
m
VU
t 4—
***
i\l^U**wUAJ|r^\(v«
~“
lA A Ä ^ A I
UWuju^
w
UiJk'fc/i
�(¡''“‘I ?<“ * (+•p**{SJl*km* päitäL ÿi**' /'euck-%t} f /oi*M~t>‘êfci uífaL*^ tj\k- CmjvOj^Üù^Iaj
tt- ^ n v )O lw i/íi> ^
,
t* " * te £ & >
6
^
U
^
i v r ^
/ u
<a J
c*
/«A T « « ¡ K l a J f & u i
., i ' u h o
C^ujL^t'~^>c^*^ C* n u r n o
a^bJjur «**» 7fcs«
« 'c m « 4 ~
/l’ / m a j I ï Û ' ^ U v f t ì t v ,
t > U ilk —^ ^ t í f
y a .
C u y U à ÿ t-----
A .I ^ - - - ,1
f'iA^tdfc{£ïA>*^~ôi/ts¿UvUs^ %
J o&-jptn*M *£^iy
•** c j f s ^ m s ù ^ u * n 6 J * * J i
yf_/fer, o « A**4 A iAAjudu è» /o^/ua^ù>“^ °**
Al^tiuJVjH ^ /t^M ~Ôov*^^¿X4Á(J>ífu**- à^U '/iï*i/ OM.<AAXA>\¿jnjA+*
^UU/OOx- CXV- /t^ilUi
/bütr^tAJM—OCuU /* (Aoti <ÿ*.ÛMC^X*W> .
. *^u.^/fcüJL ¿L 6oi>u
/
j
v
A ^ItAV V
/-Mo.j*
fû
^4 ^UoJh,
'
i«*£*x'b..'W./ <*-
y» , f,/fr /Y,-»*-«.
.
■ ’
'pmltil*.
Uuju/lOfi* e** fo«=r c%4 t~ ^ ,a **o r 6.
./ O
: ¿/. X
¿ fiXkt
/ î>. ,
eût—et^ (uw»%/
\ltr
aljix-x^J. <jy~*
ftU
c«
-fô ü u U
lu
lÿ o o o
j'
-- *T~
> . ✓ / / / ■
'
'à o ^ L
p v *
*■
-------<u/t^
y*.------ *
U*<Ík ¿l Íjí' ¡Jt^I
( *^tf~ya^owtÂL* 7
C4Ít>^u»( 3^1/W%U)U*^(<w U
C«2£< Ul£MM
fi^maoTc*«<mV~ ^ / a T b U r 6wij^ a^iu> & ^cua ^»^4 Mamuu .
nifr.
y««« «fc^
twZbv* '
/ «»
?
)
/^iax>(/ÜfsVv*
1*
/t.
'Òo*J'~Jìm~
44 6^
* _
¿ **» «»«izf&ï’ <£
__
C V - lL
S
/a^ 16l/uu
u w
'ô t / v > f
u 2 s < » ^
* ~ »»Â »
~
<AA U
^ u í
o ö lü l« «
f ö + Z lA x
/"
^
a J tu U r ^ J u J * * .
\ÿ h
2 * tlà »
itr Cm.
<W >U
¿èlv~vuL*- à .'/ U . foi*. A+'ha f*à./o~,
¿U e~ «xc^r v ^ u ^ É , 'e*~
t^iuu
^*Al>\*A- OViMJLuk-*- -* '■
*#
(wfc«^t>ll^ÿifm. , ' ¿uu/V^/‘>
i ^ ML j ^ y v L * - < j u i J & a J C - d*Cm' u:
/ci'~boUk/lMi à« /f\>Ol> j O*-
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. De La Roque. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tardif
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
contrats de mariage
communautés
dot
forclusion
fils avantagé
successions
avantages prohibés
préciput
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse des sieur et dame de la Roque de Mons, intimés, au mémoire des sieur et dame Hilliard, cotuteurs de la demoiselle Dumont, appelans.
Table Godemel : Préciput : 2. une disposition de préciput, en coutume de Bourbonnais, faite en faveur d’un fils par ses père et mère, dans les contrats de mariage de ses deux sœurs, comme condition de non apanage et d’une institution contractuelle à leur profit, est-elle valable, lors surtout que par le contrat de mariage du fils, le père survivant a surabondamment confirmé cette disposition, en vertu de la faculté que s’en étaient réservée les instituants, comme condition de cette même institution ? les sœurs instituées peuvent-elles soutenir que la réserve et dispositions faites en faveur de leur frère, étranger à leurs contrats de mariage, ne pouvaient leur enlever leur portion dans l’objet réservé, cette disposition n’ayant pas été faite dans son propre contrat de mariage, aux termes de l’article 219 de la coutume ? peuvent-elles à leur institution pour se dégager des charges et conditions qui en font partie, et demander le partage par égalité ? Ou, au contraire, en cas de renonciation, devraient-elles être réduites à l’apanage fixé par leur constitution dotale ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1775-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
76 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1802
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1801
BCU_Factums_G1803
BCU_Factums_G1804
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53329/BCU_Factums_G1802.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saulzet (domaine de)
Deux-Chaises (03099)
Mont (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avantages prohibés
communautés
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
dot
fils avantagé
forclusion
préciput
secondes noces
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53330/BCU_Factums_G1803.pdf
a2e84655464e1d58a0469488a8e93e36
PDF Text
Text
MÉMOIRE
POUR
Les sieur et dame H I L L I A R D , cotuteurs de la demoiselle
D u m o n t , appelans;
C O N T R E
Les sieurs et dames R A B U S S O N - D E V A U R E
D E L A R O Q U E , intimés .
et
U
n e disposition de p r è c i p u t , faite e n f a v e u r d ’un fils p a r ses père et m è r e , dans les
contrats de m ariage de ses deux soeurs , c o m m e c o n d i t i o n de n on-a pa na ge et d ’une ins
titutio n c o ntractu elle à leur p r o f i t , est-elle v a l a b l e , lors surtout que par le contrat d e
mariage du f i l s , le père su rvivan t a su rab on d am m en t confirm é cette disposition , en
v ertu de la facu lté q u e s’en étoient réservée les insti t u a n s , c o m m e con d itio n de cette
m êm e institution ?
T e l l e e s t , dans l ’expression la plu s e x a c t e , la question soumise à la décision de la C o u r .
I l y auroit lieu de s’étonner , sans d o u t e , q u ’elle ait pu faire d ev an t les premiers juges
u n sujet sérieux de c o n t r o v e r s e , si l ’expérience n’a voit appris q u ’i l n ’est r i e n , en juris
p r u d e n c e , que l ’a v e u g le m e n t de l ’intérêt personnel ou le d élire de la présom ption n ’ait
ch erch é à r en d r e problém atique.
C ette cause sem ble destinée à offr ir à la m éd ita tio n un de ces exem ples frappans d u
plus grand excès où l ’on ait pu porter l ’abus du sophisme : on seroit tenté de croire que
les dames D e v a u r e et de la R o q u e n ’ont eu po u r b u t , dans cette en treprise, q u e de faire
briller leur esprit aux dépens de la raison et de la bonn e foi.
O n ne leur enviera pas ce fr iv o le avantage.
Forts de la justice de leur cause , les sieur et d a m e H illia r d n ’e m p lo iro n t que des armes
q u e' lle puisse a v o u e r ; ils se contenteront d ’opposer la vérité à l ’e r r e u r , la droiture à
l ’artifice et aux détours. L e reste sera l’ouvrage de la Cour.
Ils savent que les prestiges d ’une fausse é l o q u e n c e , et tous les tours de force de l ’esprit
hum ain , ne pe uve n t en im poser q u ’à des esprits superficiels.
I l s savent q u e , devant des magistrats intègres et éclairés , quels que soient les efforts
d' une cu pid ité en d é l i r e , le talent et la ruse ne peuvent su p pléer au bon d r o i t , et q u e
toutes les ressources de l'esprit sont v a in e s, q uan d elles heurtent de front la justice et la
Vérité.
F A I T S.
D u m a r i a g e de Jean D u m o n t a v e c P r o c u l e P i t a t , sont issus trois enfnns , savoir M
arie
M arguerite et A n d ré D um ont.
�( 4 )
L e 19 n ovem bre 1775 , M a rie D u ra o n t c o n tra c ta mariage a v e c M . Claude-Josepli
llab u sson -D eva u re.
L ’acte de leurs c on v en tion s m atrim oniales contient la clause suivante :
« E n faveur du mariage , les sieur et d a m e D u m on t ont institu é la demoiselle fu t u r e ,
leur fille , leur h éritière par égale portion avec les autres enfans q u ’ils auront au jou r de
leu r décès , de tous les biens dont ils m ou rro n t vêtus et saisis, sous la réserve expresse
qu'ils se font d e la terre d e M o n t , consistante en un c h â te a u , p r é s , terres, vignes, dîm es ,
c e n s , rentes , quatre domaines , un m ou lin et deux locateries , avec toutes les c irc o n s
tances et d épendances de lad ite te rr e , en q u oi que le tout puisse consister , a vec les bes
tiaux qui garnissent ladite terre ou p o u rr o ie n t la garnir à leur décès , jusqu a c o n c u r re n c e
de
5 ,ooo
liv r e s, en sem ble tous les vaisseaux vin a ir es, c u v e s , foudres et autres qu i se tr o u
vero nt dans ladite terre, ainsi que tous les meubles meublant les appartemens d u d it château
de M o n t , lin g e s , batteries de c u i s i n e , a rg e n te r ie , en l ’état que le tout se trouvera au décès
du dernier m ouran t desdits pére et m ère ; en o u t r e , la som m e de 6 ,0 0 0 liv. que lesdits
sieur et d a m e D u m o n t se proposent d ' e m p l o y e r en acquisition de fonds , cens et devoirs
po ur être annexés à ladite terre et en faire partie ; p o u r , par lesdits sieur et d am e D u m o n t ,
ou le survivant d ‘e u x , disposer de ladite terre au profit de tels de leurs enfans q u ’ils juge
ront à p r o p o s , m êm e de la future , par q u e lq u ’acte que ce soit d ’entre-vifs ou à cause de
i n o r t , sous signature p rivé e ou par- devant n otaire ; dans laquelle réserve les sieur et dame
D u m o n t , père et m ère de la fu ture , en tendent être com prises toutes constructions n o u
v e lle s, am éliorations et réparations utiles et d ’agréinent q u ’ils pourront a voir faites, et le
survivant d ’eux , dans les biens com posant ladite réserve ; et d ans le ca s d e non d isp o si .
d o n d e leu r p a r t , ladite terre de M o n t , avec les bestiaux q u i se trouvero nt la g a r n i r ,
j u sq u ’à c o ncurrence de ladite som m e de
5 ,000
fr a n cs , les vaisseaux v in a ir e s , meubles
m e u b la n s , l i n g e , batterie de cuisine et a r g e n te r ie , en l ’état que le tout se t r o u v e r a , a p
p a r tie n d r o n t , en tou te p r o p r ié té , à A n d r é D u m o n t, leu r f i l s , lequel en demeurera,
précipité , ainsi q u e des annexes q ui auront été faites à ladite te r r e , jusqu’à c o n c u r re n c e
de ladite som m e de 6,000 l i v . ; ladite institution faite sous la d ite réserve , et à condition,
d e la d ite d isp o sitio n , et encore à la c h a r g e , par la f u t u r e , de laisser jou ir le survivant
de ses père et inére de la portion qu i lui seroit revenue dans les biens du p r é d é c é d é ; sans
toutes le sq u e lle s c h a r g e s , cla u ses e t c o n d itio n s , la d ite in stitu tio n n ’a u r o i t é t b
f a i t e , et la future auroit été apanée m o y en n a n t la d ot qui va lui être constituée.
.« E n a va n c em e n t de leur future s u c ce ssio n , lesdits sieur et d ame D u m o n t ont constitué
en dot à la dem oiselle f u t u r e , leur f i l l e , la somme de
3o,o oo
l i v . , e t c . , etc. »
L a dot de M a r ie D u m o n t , épouse de M . D e y a u r e , lui a été payée pendant la vie de ses
pè re et mère.
E n 1 7 7 7 > Marguerite D u m o n t c o n tra c ta mariage a vec M . G r e l l e t de Beauregard.
U n e clause de leur contrat de m ariage est ainsi conçue :
« L e s sieur et d am e Dui.nont, dans l’esprit d u contrat de m ariige de m adem oiselle
M a r iç D u m o n t , leur fille a î n é e , avec M . J os e ph llabusson-Devaure , passé devant Ilolla t,
n o ta ire , le 19 n o ve m b re 1 7 7 5 , ont institué la demoiselle f ut ur e leur h é r i t i èr e par égale
p o rtio n avec les autres enfans qu ils auront au jour «le leur d é r è s , de tous Us biens d o n t
ils mourront vêtus et s.iisis, sous la réserve exp resse q u ’ils se font du la terre d e M o n t ,
telle: q u 'e lle est exp liq u ée au contrat sn sd atè , ensem ble des autres objets qui y sont
d é ta illé s , et de la som m e de G,000 iiy . dont il est p a r l é , p o u r,p u r lesdits sieur et dama
�(5)
'
(ül
D u i n o n t , ou le survivant d ’ e u x , dans le s term es d u m im e c o n t r a t , disposer de lad ite
réserve au profit de tels de leurs e n f a n s , m êm e de la f u t u r e , p a r ¿es m o y e n s e t d e la
m a n ière expliqués audit contrat.
« Cette institution faite en outre a u x m êm es ch a rg es que celles expliquées a u d it
contrat. Et en a v a n c e m e n t de leur future succession , lesdits sieur et dame D û m e n t o n t
c onstitu é en d o t à la demoiselle future , la somm e de
3 o,o oo
livres , e tc. »
L a d am e G r e lle t de Beauregard a r e ç u , pe n d a n t la vie de ses père et mère , à co m p te
de sa constitution d o ta le, une som m e de 6,000 f r a n c s , et elle a tou ché annuellem ent
les intérêts du surplus de sa dot.
E n 1 7 8 3 , P ro c u le P i t a t , m ère et aïeule des p a r tie s , d é c é d a ; Jean D u m o n t , son
d a r i , lui survécut.
C e ne fut q u ’en 1789 q u ’i l maria A n d ré D u m o n t , son f i l s , à demoiselle M a rie Sopliie-B arth e le m i G i b o n t , a ctu ellem en t épouse du sieur H illiard .
L e contrat de m ariage contient les dispositions suivantes :
« E n fa veur du présent m ariage, est-il d i t , le sieur D u m o n t père a institué et institue
i o n fils, son héritier par égale p o rtio n avec ses deux soeurs , épouses de M M . Rabus*onD e v a u r e et G r e lle t d e Beauregard , d e t ous les biens m e u b l e s et im m eub les d o n t il m ourra
Vêtu et saisi ; et c o m m e par le c on tra t de m ariage de d a m e M a r ie D u m o n t , épouse d u d i t
R a b u sso n -D e v a u re , ledit sieur D u m o n t p è r e , et ladite d éfu n te P r o c u le P i t a t , son épouse,
s'étoient co n jo in tem e n t réservé^ m êm e a u survivant d ' e u x , la fa c u lté de disposer au
profit de tels de leurs enfans q u ’ils jugeroient à p r o p o s , et par tel acte que b o n leur
s e m b l e r o i t , de la terre de M o n t , consistante en u n château , p r é s , te rr e s, d î m e s ,
YÎgnes , c e n s , r e n te s, quatre d o m a i n e s ,
un m ou lin et deux lo c aterie s, avec les c i r
constances et d ép en dan ces de ladite terre , en q uoi que le tout p u t consister, a vec les
bestiaux qui garnissoient lad ite te r r e , ou po urroien t la garnir à leur décès , ju s q u ’à c o n
c u rr e n c e de la somm e d e 5,000 l i v r e s , ensemble tous les p r e ss o irs, vaisseaux v i n a i r e s ,
c u v e s , fou d res, et autres qui se trouveroient dans ladite terre , ainsi que tous les meubles
m eublan t les appartemens d u d it château de M o n t , linge , batterie de cu isine , a r g e n te r ie ,
en l ’état que le tout se tr o u v ero it au décès du d ern ie r m ou ran t desdits sieur et d a m e
D u m o n t , père et mère ; et en cas de n on disposition desdits objets du v iv a n t desdits sieur
et d am e D u m o n t , père et m è r e , ils a p p a rtien d ro n t en toute p r o p r i é t é , et à titre de préc i p u t , audit sieur futur ép o u x , ainsi que les annexes qui auroient été faites à ladite t e r r e ,
jusqu à c o n c u r re n c e de la som m e de G,000 francs.
« E t com m e ladite d a m e P it a t , épouse d u dit sieur D u m o n t père, est décédée sans avoir
manifesté ses intentions à l ’égard de la réserve ci-dessus d é s i g n é e , ledit sieur D u m o n t père
usant de la faculté de po u voir disposer de la totalité desdites r é se r v e s, d éclare qu'il dispose
à titr e d e p r è c i p u t , au profit d u d it sieur futur é p o u x , t a n t d e la d i t e terre d e M o n t ,
circonstances et dépendances d ’i c e l l e , que d o tou s le s a u tr e s o b j e t s c i - d e s s u s s p é c ifié s ,
et tel que le tout est d é sig n é e t s p é c ifié en la d i t e réserve p o r tée a u co n tra t d e m a r ia g e
c i- d e s s u s d a té d e s s ie u r e t d a m e R a b u sso n -D e v a u r e . N e font pas partie de la présente
disposition , les grains, vins et autres denrées qu i se trouveront dans les d épendances d u d it
château de M o n t , à l ’ép oq ue du décès d u d it sieur D u m o n t pere , p o u r , par ledit sieur
fu tu r , faire le p rélèvem ent et en trer en jouissance de ladi te terre de M o n t , et d e to u s le s
a u tr e s o b je ts c o m p r is en la p ré sen te d i s p o s i t i o n , im m éd iatem en t après le décès d u d i t
sieur D u m o n t , sous la réserve q ue se fait ledit sieur D u m o n t père de la som me de 3o,o oo 1.
2
�à p ren d re sur lad ite terre de M o n t , p o u r en disposer en faveur de tels de ses enfan* ou
petits-enfans q u ’il jugera à propos , m êm e en fa veur dud it sieur futur époux, par tel acte
d ’entre-vifs , à cause de m o r t , ou sous signatures privées , que b o n lui semblera. Et de suite
le d it sieur D u m o n t , en faveur d u d it m a ria ge, a dispose et dispose en fa veur dud it sieur
fu tu r époux , sur la susdite som m e de
3 o,ooo
livres réserve e, de celle de 10,000 livres ; d e
laq u elle som m e de 10,000 livres présentement disposée en fa veur dudit sieur futur é p o u x ,
led it sieur son père se charge de lui servir 1 interet au taux de l ’o r d o n n a n c e , sans aucune
reten u e des im positions créées et à cré er, jusqu’au rem boursem ent, q u ’il lui sera loisible
de faire q u an d il le jugera à propos.
» D e la m ême som m e de 5 o,o oo livres réservée par ledit sieur D u i n o n t p é r e , il en a
présentem ent disposé et dispose en faveur de demoiselle P ro c u le G r e l le t de Beauregard ,
sa petite f i l le , fille de J e a n - B a p t i s s e G r e lle t de Beauregard et de feue d am e Marguerite
D u r a o n t , ses pére et i n è r e , de la som m e de 5 ,000 liv. à prendre sur lad ite réserve, payab le
après le décès d u d it sieür D u m o n t père se u le m e n t, par ledit sieur fu tu r é p o u x , sans
intérêt j u sq u ’audit d é c è s , après lequel ils auront cours au taux de l'o r d o n n a n c e , jusqu’au
r e m b o u r s e m e n t , que ledit sieur futur sera tenu de faire dans d eu x ans du décès de sondit
père. Et dans le cas où ladite dem oiselle P roc u le G r e l l e t , ou ses père et mère , con tre viendroienl. d ire ctem en t ou in d ir ec tem e n t à la disposition faite par ces présentes de ladite
terre de M o n t , en faveur du sieur fu tu r époux , la di s p os i t i o n des 5 , 000 livres faite en
fa v e u r de ladite d e m o i s e l l e G r e l l e t , sera et dem eurera nulle et de nul e f f e t , et c o m m e
n o n faite. P a r e i l l e m e n t , d a n s le cas où ledit sieur D u m o n t père nedisposeroit de son v i v a n t
des z5 ooo livres restantes de la susdite som me r éservé e, elle demeurera réunie à ladite
terre de M o n t , et a ppartien dra a ud it sieur futur é p o u x , sous la réserve que led it sieur
D u m o n t pére se fait de la jouissance , pe n d a n t sa vie , de la susdite terre de M o n t , pour,
après son décès , appartenir en toute prop riété a ud it sieur futur époux ; et en avancem ent
d ’iioirie , et de lad ite institution , led it sieur D u m o n t père a constitué en dot audit futur
la som m e d e ....... , etc. , etc. »
C ’est de ce mariage d ’A n d r é D u m o n t a v s c M à r ie - S o p lu e - B a r th e le m i G i b o n t , q u ’est
issue A n n e D u m o n t , appelante du jugem ent rend u par le tribunal de G a n n a t , le 26 dé»
c ein b re 1S07.
S o n p è r e , m ort v ic tim e des temps désastreux de la r é v o l u t i o n , la laissa dans les
lien s de la m inorité , où elle est en core.
P riv é e de cet a p p u i , la m ineu re D u i n o n t espéroit trouver dans la tendresse de son
a ï e u l , un supplém ent naturel à la tendresse d 'u n père : son espoir fu t déçu .
L a perte irréparable de l ’auteur de ses jours , devint po u r elle u n e source intarissabla
de pertes nouvelles : elle fit refluer, e x c lu s iv e m e n t, sur les dames D ev au re et de la
R o q u e , toute l ’affection de son aïeul.
Il n ’est personne dans la ville de G a n n a t qui ne sache que la daine D evaure , d e-.
Ve n u e l ’objet d e la p r é d ile c tio n du sieur D u m o n t père , depuis la m o r t de son fils, f u t
con stam m e n t
aussi
l ’objet de ses largesses ut d e ses libéralités.
T a n d is que cet a ï e u i , q u i jouissoit de plus de 20,000 liv. d e rente , et ne dépensoit
pas 2,000 francs par an , faîsoit passer le surplus de ses revenus a ses deux filles , la
d em oiselle D u m o n t , en tièrem ent aband o nn ée aux soins de sa inere, n a jamais reçu de
«on grand -père le plus léger secours.
C e p e n d a n t , ce sont ces d a in e s; c ’est la daine D eyaure , e l l e - m ê m e , avantagée da
�\o
3
( 7 )
plus de 100,000 fr. par des dons manuels ou par des donations d é g u isé e s, soit sous la
form e de contrats onéreux , soit sous le n om de personnes interposees ( * ) , qu i sans res
p e c t pour la m ém oire de leurs père et m è r e , et foulant aux pieds , de la inaniere la
plus sc an d ale u se, le p a c te de famille le plu s s a c r e , dispu tent a la dem oiselle D u m o n t
u n p réc ip u t q u i , lors m êm e q u ’i l n ’auroit pas été aussi lé g itim e m e n t acquises son p e r e ,
n ’auroit dû leur paroitre q u ’ un foible d éd om m a ge m en t des pertes immenses q ue lu i a
causées une révo lu tio n qui a dév oré tou te sa f o r t u n e , avec son m alheureux pere.
L e c œ u r se brise à cette i d é e , les moeurs f r é m i s s e n t , et l ’étonnem ent b a la n c e l i n dign ation ! ...................
Le
3o
brumaire an n , le sieur D u m o n t père in t e r v in t au contrat de mariage de la
dame de la R o q u e , et il réitéra à son profit la d isposition de
le contrat de mariage d ’A n d r é D u m o n t.
5 ,ooo
francs déjà faite par
Il in t ervin t pareille m ent au contrat de mariage de la demoiselle Devau re , avec le
sieur N a r j o t , passé d evant M e. Hue. , notaire à G a n n a t , le 4 ju in 1804 , et lu i fit d o
nation de la somme de i 5 ,ooo fr. par lui
c ette donatio n que sc dirigeoit un des
la d e mo i s e l l e D u m o n t au t r i b u n a l d e
d u contrat , a concouru au j u g e me n t !
réservée sur le p r é c ip u t de son fils. C ’est contre
cl-iefs de c o n clu sion de la d em and e portée par
G a n n a t ; et cepend ant le n ota ire , réd acte u r
......................
E n l’année i 8o 5 , Jean D u m o n t est d éc éd é , laissant p o u r h é r i ti e r , i°. la dame Rab usson -D evaure ; a0, la daine de la R o q u e , sa p e tite-fille, p a r représentation de M arguerite
D u m o n t ', sa m è r e ;
3°.
A n n e D u m o n t , représentant A n d ré D u m o n t , p récipué.
A u décès de Jean D u m o n t , les scellés fu rent apposés ; i l fu t p r o c é d é .à leur rec o n noissance en p résence de toutes les parties intéressées ; et l ’on se disposoit à effectuer le
partage des b ie n s , lo rsq u e les dames D e v a u r e et de la R o q u e d é c larèren t ha u tem e n t l'in
tention où elles ètoient de refuser à la d em oiselle A n n e D u m o n t le relâc h em e n t de la
m o itié du p r é c ip u t du c h e f de leur m ère.
Les sieur et dame M illiard , cotuteurs de la dem oiselle D u m o n t , r é s o l u r e n t , dèslors , de r éc la m er en ju stic e l ’exécution pleine et entière des contrats de m a ria ge
corrélatifs des i y n ovem bre i j j 5 , 9 février 1 7 7 7 , et
testée a vec une insigne mauvaise foi.
3i
mai 1 7 S 9 , qui leur étoit c o n
A p rè s avoir tenté en vain les prélim inaires de la c o n c ilia tio n , ils traduisirent les
dames D evaure et de la R o q u e , d evan t le tribun al de p r e m iè r e instan ce de l ’arrond ijsem ent de G ann at , et y prirent des conclusions t e n d a n t e s ,
« i°. A ce qu il plut au tr ib u n a l, en c e q u i lo u c h e le p r é c i p u t , ord onn er q u e les
c ontrats de m ariage susdatés , de M a rie D u m o n t a v e c le sieur C laud e Rabusson-D evaure ,
de M arguerite D u m o n t avec le sieur G rellet de Beauregard', et de feu A n d r é D u m o n t
a vec M a r ie - S o p h ie - B a r tlifle m i G ib o n t , seroient exécutés selon leur form e et te n e u r , et
n ota m m en t dans leurs dispositions relatives a u p r é c ip u t attribué à A n d ré D u m o n t ; en
( * ) Il est do n o t o r i é t é p u b l i q u e q u e dans un t e m p s où Io s i e u r D e v a u r e c t o i t o b é r é , il e s t d e v e n u
a c q u é r e u r , sans b o u r s e d é l i e r , de d e u x d o ma i n o s a p p a r t e n a n s a ux mi n e u r « D s y a t , q u * > * ' ant^ a v e n t e ,
e t o i e n t d é b i t e u r s d e s o m me s c o i u i d é r a b l o s e n v e r s le s i eur D u m o n t p è r e . —-
der ni er a également
t r a n s mi s un d o m a i n e , par v o i e d e f i d é i c o mmi s , au s i e u r D o v a u r o ; et H y a , à c e t é g a r d , p r o c è s
p e n d a n t e n t r e le« pa r t i e s au t r i b u n a l do G a n n a t . — E n f i n , on «ait qu' i l » a c h e t é , au n o m d u s i e u r
Devaure
un e m d u o n s i t u é e à M o u l i n s , m e do la C o r r o y e t i e ; e t l ’o n sait e n m ê m e t e mp s q u * l e i
f a cul t é s d u ¿i our D e v a u r e u e l u i o n t j amai s p e r m i s do fiiirc d e s a cqui s i t i ons *
�( 8
)
c o n s é q u e n c e , que les sieur et d am e H i l l i a r d , ès qualités qu'ils p r o c è d e n t , seroient au
torisés à p r é l e v e r , avant partage des successions de feu Jean D u u io n t et P rocule P i t a t ,
po u r et au nom de A n n e D u m o n t , leur mineure , représentant feu A n d r é D u m o n t , son
père , la to ta lité d e la terre d e M o n t , circon sta n ces et d ép en dan ces , et autres o b jets
désignés et spécifiés en la reserve portée aux susdits contrats de m a ria g e , q u ’ils én u m é
rèrent en l ’e x p l oi t de d em ande ; de tous lesquels o b je ts , lesdites dames R a b u sso n -D e va u re
et de la R o que , seroient tenues de Faire le r e lâ c h e m e n t, et de souffrir la distraction et
le p r é lè v e m e n t avant p a r ta g e , com m e co n d itio n de leur in s titu t io n , en ex écu tio n de
leurs contrats de mariage, si mieux elles n ’aim o ient s’en tenir à leurs c on stitu tion s dotales,
form ant apanages; les c o n d a m n e r , en outre , aux dépens sur ce c h e f ;
« 2U. Et en ce q u i tou che le surplus d es biens composant lesdites su c ce ssio n s, o rd on n er
q u ’il seroit p r o c é d é au partage , c o n fo rm é m e n t à la loi ; q u ’en cas de contestation sur la
p a r t a g e , les contestans seroient condam nés aux d é p e n s , le s q u e ls , au cas c o n t r a ir e ,
seroient p rélev és sur la chose. »
A peine la d em a n d e fu t-elle f o r m é e , q u ’on vit les dames D ev a u r e et de la R o q u e p o u r
su ivre l ’a u d ie n c e avec une a ctiv ité sans exem ple. O n céda à leurs vives s o llic it a tio n s , et la
cause fut appelée le 8 août 1807 ; l ’avoca t de la dem oiselle D u m o n t fut en tendu pend ant
trois heures c o n s é c u ti v e s , en présence de l ’avocat et des avoués de ses parties adverses ;
mais , en même temps , par l’effet d ’ une c o n tra d ictio n bizarre , et par suite de pratique!
se c r è te s , de com bin aisons nstucieuses, de m an œ u vres ténébreusement o u r d i e s , qu’il eût
été d ifficile de p r é v o ir , et dont il ne seroit peut être pas impossible d ’expliquer les motifs ,
les dames D ev a u r e et de la R o q u e se laissèrent cond am ner p a r d éfau t.
C e tt e c o n d u ite ne parut pas à tout le inonde exempte de blâine et de reproches : elle
fou rnit un a lim ent à la censure pub lique ; elle servit de texte aux entretiens des gens d u
i n o n d e ; elle d o n n a lieu à une foule de réflexions satyriques et d ’interprétations m alignes.
Les uns parurent surpris q u e les dames D e v a u r e et de la R o q u e n ’eussent fait paroitre à
l ’a u d ie n c e un a vo c a t et des avoués, que po u r a ssister à la p la id o ie r ie de leur adversaire,
et laisser p re n d re un ju ge m en t par d éfa u t. Étrangers à la tactiqu e du palais , et ne c o n noissant po in t les d étours obscurs de la c h i c a n e , ils im aginèrent que la parole avoit ex p iré
sur les lèvres des défenseurs ; et de ce q u ’ils n ’avoient rien répond u , ils en c o n c lu o ien t
assez judicieusem en t en apparence , q u ’ils n ’a voie n t rien eu de bon à répondre.
D ’a u tre s, plus sévères dans leurs d é c i s i o n s , plus délicats sur les b ie n séan c es, et no
p o u va n t supposer q u ’on en m é c o n n û t à c e point les règles au barreau , c r u r e n t vo ir , dans
cette c o n d u ite étrange , un oubli de toutes les c o n v e n a n c e s , un p r o c é d é n o u v e a u , tout
à la fois injurieux p o u r l ’avoca t de la dem oiselle D u in o n t , et irrévéren t po ur le tribunal
q u i en étoit le témoin.
L e sieur D ev a u r e , po ur c a lm e r l ’o p in io n p u b liq u e , qu'une pareille jonglerie a voit sou
lev ée c o n tre lui , ch erch a à pallier sa c o n d u i t e , en la c oloran t par des m otifs qui respiroient la plus p u r e délicatesse.
I l p ré te n d it q u ’il n ’auroit été n ullem e n t
convenable
à ses intérêts de laisser ren d re
u n juge m en t c o n t r a d i c t o i r e ; q u ’en supposant q u ’il eût gagné son procès , on n ’au roit
pas m anqué de dire q u ’il l ’a voit gagné p a r un ju g em en t d e faveu r ; »-t que dans la
supposition r o n t r a i r c , la d écision de ses collègues eut été contre lui un préjugé grave aux
y>ux de la C o u r d'appel. Il d on na sa parole d honneur ^ l avocat de la demoiselle D u m o n t ,
q u ’il ne foruaeroit p o i n t o p positio n au jugem ent par défaut.
�O n ignore ce q u ’est devenue c e t te p a r o le d 'h o n n e u r ; niais l ’opposition ne tarda
pas à paroître.
S u r cette o p p o s i t io n , la cause portée à l ’a ud ie n ce du n
d éc em b re 1S 0 7, fut de
nouveau d isc u tée ; et après plusieurs p la id o iries , il i n t e r v i n t , après un d é lib é r é , un
ju ge m en t c o n tra d icto ire , le 26 décem b re su iv a n t , dont la demoiselle D u m o n t est a p p e
lante , et dont il im p o rte d ’analiser les dispositions et les motifs.
C e jugem ent d éclare nul et de n ul effet la donation en p r é c i p u t d e la terre d ç M o n t ,
faite par le sieur D u m o n t père , en fa veur d ’A n d r é D u m o n t , son fils, p o u r la m o itié
de ladite terre, provenante du c h e f de la d am e P ro c u le P ita t , son épouse; et o rd on n e
en c o nséquence q u ’elle fera partie de sa succession a b in ts e ta t.
I l déclare b on n e et valable la d onation faite à A n d r é D u m o n t , de la somme de
6,000 f r a n c s , faisant partie de la réserve exprim ée aux contrats de m a r i a g e d e s dames
D ev a u r e et de Beauregard , mais seu lem ent p o u r la m o itié de cette somme , d u c h e f d u
pere , sa u f l’im putation , jusqu’à due c o n c u r r e n c e , dans le cas où les sieur et d am e D u inont père et m ère, au roient e m p lo y é cette som m e en acquisition de fo n d s ; e t , dans
le cas contraire , i l autorise la dem oiselle D u m o n t à faire , sur la masse de la. succession ,
le prélèvem ent (le la som m e de 3 ,000 francs.
L e s m o t i f s de c e j u g e m e n t s ont ,
« i°. Q u ’une réserve faite a v e c stipulation que la disposition en sera faite en faveur
de celui des enfans q u ’il plaira à l ’instituant c h o i s i r , n ’ôte p o in t à l ’institué le droit de
r ec u eillir sa po rtio n dans l ’objet réservé , lorsque l’instituant d écèd e sans disposition ;
« 20. Q u ’A n d ré D u m o n t n ’a pu être saisi de ladite terre de M o n t , par la clause de
destination apposée dans les contrats de m ariage des dames D ev au re et de B e a u re g a rd ,
i°. parce q u ’il étoit étranger à ces deux contrats , et q u ’il est de p r in c ip e que les contrats
ne peuvent va lo ir q u ’entre les contractan s ; a0, p a rce que , d ’apré* les dispositions de
l ’article 219 de la coutu m e de B o u r b o n n a i s , la d o n atio n de préciput ne p o u voit v a lo ir à
son profit, q u ’autant q u ’elle auroit été faite par son contrat de m aria ge;
«
5°.
Q u e P rocu le P i t a t , mère des p a r tie s, étant d écéd ée avant le mariage de son fils ,
et n’ayant pas été à portée de faire , en sa faveur , la disposition de p r é c ip u t q u ’elle lui
destinoit , dans la form e q u ’ ind iq ue l ’art. 21g de la c o u t u m e , ses trois enfans o n t été
saisis de sa succession entière au m o m e n t de son décès ;
« 4 • Q u e 1rs cla u se s, charges et conditions apposées aux institutions des dames D e
vaure et de Beauregard , étant contraires à la l o i , d o iv e n t être réputées non écrites ;
«
5
. Q u A n d ré D u m on t n ayant pu être saisi de la m oitié de la terre de M o n t , du c h e f
de sa m è r e , par la clause de destination , n ’a pu l ’être non plus par la disposition de la
totalité la terre , faite à son profit par son père , en vertu de la fa culté qui en avoit été
donnée au survivant d e u x , par la raison q u e , dans la coutum e du B ou rb on n a is, les
époux ne p o u vo ie n t se transm ettre d ’autre don que la jouissance m u tuelle des meubles
et acquêts , et dans le cas seu lem ent où il n ’exi stoi t pas d V n fa n t de leur union ;
« 6°. Q u e cette disposition de la coutum e , p r o h ib itiv e de tous avantages entre époux ,
e x c lu t tout d ro it d ’é l e c t i o n , q u i , sous l ’em p ire du d ro it r o m a in , c o » ,I|,t: S0,1S ' e mpire
des coutum es , a toujours été Considéré c o m m e a b u s i f , et pre.sqn* toujours déclaré n u l ;
“ 7°- Q u e l'inexécution des c o n d itio n s apposée» aux i nst i t ut i ons des 'lames D e v a r r e e t
de li^aurpgard , ne constitue contre elles au cu n apanage , parce que si l e j s u u r et dame
D u m o n t eussent vo u lu que leurs filles fussent réduites ù un apanage , ils se soroient se 1 vis
�C 10 )
d'expressions qui ne Iaisseroient a u c u n d o u te sur leur volonté ; d ’où il résulte qne la
m oitié de la terre de M o n t , faisoit partie a b in t e s t a t de la succession de P ro ru le P i t a t ,
et qu’elle doit être partagée c o m m e le surplus des biens com posant la succession. »
T e l s sont les dispositions et les m otifs du jugement dont la demoiselle D u m o n t est
appeIante‘
M O Y E N S .
P o u r éta b lir q u ’il a été mal jugé au jugem ent dont est appel , et que les premiers
juges ont m éc o n n u les vrais principes de la matière , la dem oiselle D u m o n t a une d ouble
tâche à rem plir.
E l l e divisera la discussion de cette cause en d eu x p a rties.
L a prem ière aura p o u r but de justifier la demande , par elle f o r m é e , en p rélèv em e n t
d e la t o t a lité du p r é c ip u t a ttribué à A n d r é D u m o n t , son père , par les trois contrats
de m ariage corrélatifs de 1 77 5 , 1777 et I 7^9 ‘
L a d euxièm e aura po u r objet la refu tation des m otifs erronés qui ont servi de base
à la décision des premiers juges.
P R E M I È R E
P A R T I E .
La demande de la demoiselle Dumont, en prélèvement de la totalité du
préciput y doit être accueillie.
P o u r d é m o n t r e r ce t t e assert i on , o n é t a bl i r a t r o i s p r o p o s i t i o n s .
£ « p r e m i è r e : Q u e les dames D ev au re et de la R o q u e sont aujourd’hui n on recev a b les à renoncer aux institutions faites à leur p r o f i t , po u r se dégager des charges
et c o n d itio n s qui en fon t partie.
L a d e u x iè m e : Q u e , si elles accep ten t l ’in s titu tio n , elles ne peuvent l ’a c c e p te r p o u r
p a r t i e , et se dispenser d ’en a c c o m p lir les c o n d i ti o n s , au nom bre desquelles se trouve
la destination de précipu t en faveur d'Andre^ D u m o n t.
L a t r o i s i è m e : Q u e , si elles renoncent au bénéfice de leur in stitu tion , en supposant
q u ’ell es y fussent encore rec e v a b le s, elles doivent être réduites à un apa na ge, fixé par
leur constitution dotale.
p r e m i è r e
p r o p o s i t i o n
.
F in d e non-recevoir.
C ’est u n p r in c ip e de tous les temps , que l ’exécution volontaire des actes em porte la
r en o n c iatio n à tous les moyens et excep tions q u ’on auroit pu opposer contre eux.
O r , les dames D ev au re et d elà R o q u e o n t e x é c u té , sans réserve, les contrats de m ariage
d o n t est question , pendant une lon gu e suite d ’années.
C ’est un fait c o n s ta n t, q u ’ elles on t reçu tout ou partie des capitaux de leurs dots ,
d u vivant de leurs père et m è r e ; que l ’ une d ’elles a reçu a n n u e lle m e n t, depuis le
décès de sa m ère , les intérêts de ce qui ¡lui restoit d û ; et qu’elles o n t , l ’une et l’autre ,
exécuté la c o n d itio n im posée à leur institu tion , de laisser jouir le survivan t des père
et mère , des biens du p red e cé d é .
Q u e les dames D ev au re et de la R o q u e veu ille n t d o n c nous dire en quelle qualité
elles ont ainsi reçu leurs constitutions de dots.
D ’a b o r d , c e n e p e u t ê t r e e n q u a l i t é d 'héritières
naturelles
: c a r l e d r o i t d ’h é r i t i e r
�( I I )
. . .
.
.
n a t u r e l n e p e ut s ’o u V r i r q u ’ au dè c ès de la p e r s o n n e à q u i l ' o n s u c c è d e , viventis nullus
h xres.
C e ne peut être non plus en qualité de filles m a r ié e s et (lo tê e s : c a r , s il en étoit
ainsi , en
r e c e v a n t leur d ota tion
elles
auroient été forcloses de la succession de
leurs père et mère , et réduites à un apanage ; tou t le inond e sait q u e , dans la c o u tu m e
du Bourbonnais , toute fille dotée à q u i l ’on a voit donné en m ariage q u elq u e chose
de certain , étoit répu tée apanée et excluse des successions , q uoiqu'elle n y eut pas
expr»ssément r e n o n c é , et q u ’on ne se fût pas servi d u m o t apanage.
C e n ’est d o n c évid em m en t q u ’e n q ualité d ’ h è r iliè r e s in s titu é e s qu'elles ont reçu
leurs constitutions dotales : — mais , en ce c a s , on sera forcé de co n v en ir que l ’institution
est in d iv is ib le ; que les dames D ev a u r e et de la R o q u e n ’ont pu la r e c u e illir sans se so u
m ettre à l'a ccom p lissem en t des conditions qui y sont a pposées; et que rien ne peut les
dispenser de r e l â c h e r , à la représentante de leur f r è r e , -le p r é c ip u t qui lui a été attribu é
c o m m e charge de leur institu tion .
Les daines D e v a u r e et de la R o que pe u ve n t d ’autant m oin s éch a p p er à cette c on sé
q u e n c e , q u ’elles ont déjà exécuté , en partie , les charges de l ’in stitu tion , pe n d a n t plus
de vin g t ans , en laissant jouir le sieur D u m o n t père de tous les biens de la succession
de leur m è r e , en vertu île la con d itio n qu i avoit été apposée à leur institution.
E n vain allègu en t - elles q u ’elles n ’ont laissé jo u ir leur père de s biens dép en dan s de la
succession d e leur m è r e , que par l ’effet d 'u ne c r a in te rèv è r en cielle ■ne p e ju s fa c a r e t.
C ’est se jouer de notre c ré d u lité , que de p r étend re substituer ainsi une vaine allégation ,
un m o tif chim ériq u e et supposé , une exception gratuite et r i d i c u l e , à un m o t i f certain ,
c on n u , d é te r m i n é , q u i d érive d ’ une obligation qui leur est imposée par leurs contrats de
m ariage.
L es dames D ev a u r e et de la R o q u e ne persuaderon t à personne q u ’elles aient ainsi laissé
jouir leur père, par le seul effet d 'u n e c r a in te r è v è r e n c ie lle , d ’une succession o p u le n te
qu’elles pou vo ient appréhend er il y a plus de v in g t a n s , lo rsq u ’on considérera surtout que,
depuis 1 7 8 9 , le sieur D u m o n t père ne p o u v o it plus disposer que d ’ une somme de i 5 ,ooo fr.
. Ajoutons que , q u an d la justice doit c h e r ch e r des règles de décision dans la conduite des
parties , c ’ est m oin s dans des allégations supposées que dans des motifs apparens q u ’elle
doit les puiser ; et il est plus naturel d ’adm ettre que si les dames D ev a u r e et de la R o que
ont laisse jou ir leur père de la succession de P roc u le P i t a t , elles n ’ont fait en cela que
rem p lir une obligation qui leur étoit imposée c o m m e con d itio n de leur in s titu tio n , que
de supposer qu elles on t ainsi agi par le p u é ril effet d ’une prétendue crainte r èvè re n c ielle.
M a i s , lors meme qu on supposeroit q u ’elles n ’ont agi que par crainte r è v è r e n c i e l l e ,
pourroient-elles esperer d è t r e relevées de l ’exécution de leurs contrats de mariage? N o n ,
sans doute.
C ’est un ancien p r in c ip e consacré par l'a r t. 1 1 1 4 du C o d e N a p o lé o n , que la seule c rainte
r èvèrencielle envers les père et m è r e , ne peut suffire pour fonder une action : il y a parité
de raison pour d é c id e r qu’elle ne peut non plus justifier une exception. T e l étoit le v œ u
des lois ro m ain es, qui n ’admettoient l ’e x c e p tio n de c r a i n t e , q u e l orsqu elle étoit l’ effet
d une violence illicite et c on tra ire aux bonnes moeurs , s e d v im a c c ip im u s a tr o c e m e t
earn <jnœ a d versn s b on os m ores f i a t ( L o i 3 , f f . f/itod tn elu s c a u s a . ); niais q u i rej.etoient
toute crainte prétendue r èv è re n c ielle. ( L o i
d e r itu n u p tia r itm , — L o i 3.6, f f . de.
pignorilr. e t h y p o th . — L o i 2 , c o d . q u i e t a d v e n u s q u o s. )
�C o n c lu o n s J o n c que les daines D e v a u r e et d e l à R o q u e seroient aujourd’hui non recevables à renoncer au b énéfice de l ’institution , pour se dispenser de rem p lir les dispositions
q u i en font partie.
DEUXIÈME
PROPOSITION.
S i le s d a m e s Devait?/* e t d e la R o q u e a c c e p te n t l'i n s t it u t i o n , e lle s d o iv en t a c c o m p lir
la c o n d it io n d e p r è c ip u t q u i y e s t a p p o s é e en fa v e u r d ’ A n d r é D u m o n t.
C e tte p r o p o s i t i o n est c om p lex e ; elle nécessite l ’examen des trois questions suivantes :
i ° . D e s c o n d i t i o n s p e u v e n t - e l l e s êtr e a p p o s é e s à une i n s t i t u t i o n ?
, ■•
2°. U n p r é c ip u t peut-il être une c o n d itio n d ’institution?
5 °.
L e précipu t don t i l s’a g i t , a-t-il été attribué à A n d r é D u m o n t , c o m m e c o n d itio n
de l ’institution de scs soeurs ?
§. Ier. D e s c o n d itio n s p e u v e n t-e lle s être a p p o sé e s à une in s titu tio n ?
P o u r Vaffirm ative s ur c e t t e q u e s t i on , il suffiroit d ' i n v o q u e r l ’a u t o r i t é d e la raison ;
e l l e d i t à q u i c o n q u e v e u t l ’e n t e n d r e , q u ’i l est l o i s i b l e à c e l u i q u i e x e r c e un e l i b é r a l i t é ^
d ' y a pp o s e r telles c o n d i t i o n s q u ’il j u g e c o n v e n a b l e s , p o u r v u q u e l l e s ne s o i ent c o n t r ai r e s
n i a u x lois , n i a u x b o n n e s m œ u r s ; u nicuiqite lic e t m odum quem v o lu erit lib e r a lita ti
suce apponere : c ’est à c e l u i qui est l ’obj et d e l a l i b é r a l i t é , à l ’a c c e p t e r o u a y r e n o n c e r ;
m a i s s’il l ’a c c e p t e , il est d e ra i s o n qu' i l ne pui sse la s y n c o p e r , e t q u il soi t t enu d e 1 a c c e p t e ^
in tég r a lem e n t , a v e c les c h a r g e s et c o n d i t i o n s q u i y s ont i mposées .
M ais i n d é p e n d a m m e n t de l'autorité de la r a i s o n , on peut en core se pr év a lo ir de l’op inion
des j u r i s c o n s ul t e s anciens q u i o nt traité la matière des institutions conditionnelles.
A u r o u x , sur la c o u tu m e d u b o u r b o n n a is , et L e b r u n , en s on T r a ité d e s s u c c e s s io n s ,
apr ès a v o i r d é m o n t r é q u e l ' i n s t i t ut i o n c o n t r a c t u e l l e ne peut être v a l a b l e m e n t faite , d ’ una
m a n ière d i r e c t e , q u ’au prof i t et ut i l i t é des ma r i é s et des d e s c e n d a n s d u m a r i a g e , et q u e t
f ai t e au prof i t d ’a ut r e s , e l l e est a b s o l um e n t nul l e et c a d u q u e , di s e n t q u ’ on p e u t f ai re i n
d ir e c te m e n t u n e i n s t i t u t i o n v a l a b l e au prof i t d un t i e r s , en 1 a p p o s a n t c o m m e c o n d itio n
à l ' i n s t i t ut i o n f ai t e au profi t des c o n t r a c t a n s ma r i ag e .
« Il y a , dit le premier de ces auteurs , un m oyen de faire
1 equipollent
d une institution
c o n t r a c t u e l l e , au profit d ’autres personnes q u e des mariés , en instituant la personne
mariée à la charge d ' a s s o c i e r ses frères et soeurs , par ex em p le, pour une certaine q u otité
de l'in stitu tio n ; ce qui v a u t, au profit des frères et sueurs, com m e u n e c o n d i t i o n de
l'institution. [ A r t . 2 1 9 , «°. 28 .)
a C a r , ajoute le même com m entateur , l'association étant une cliarg« de
.
1 institution
d o n t e l l e f a i t p u n i t * , l’ institué est dans la nécessité ou d e r e n o n c e r à l ’ i n s t i t u t i o n , ou
d e c o n s e n t i r a l ’a s s o c i a t i o n . { A r t . 2/,4 , n ° . 8 . )
« Il y a plus , ajoute-il , r est qu'à l'égard de deux institutions r é c ip ro q u e s , faites par
deux fières dans le contrat de m triage de l'un , il a été d é c id e que celle faite en faveur
du frère qui ne c o n t ra c ta it pas mariage , par celui qui c o n t r a c t o i t , ¿ to it v a la b le , et cç
à cause de la ré c ip ro c ité d-s institutions. M o nsieur le Rapporteur s'explique , et dit que
les institutions des deux frères fia n t réciproques , 1 institution que l’un avoit faite au
profit de l'autre , étoit u n e c o n d itio n de celle don t il se trouyuit en même temps bien
gratifié ; d ’où il restoit à c o n c lu r e que r e l l 1* faite en f av e u r d u frere q u i n e c o / ttr u c io it
p a s m a r ia g e , deyoit valoir 10/n/ne c o n d itio n . . . • ,
�( *3 )
« C ’est ce q ui fu t jugé au rap port d e M .
de
V
ienne
r e n d u en la g r a n d ’c h a m b r e , le î a mars 1756. ( I b i d .
, par arrêt du parlem ent de P a r i j ,
9 , à l ’a d d it io n . ) >»
On peut d o n c , suivan t cet a u te u r , apposer d e s c o n d itio n s a une in s titu tio n ; il y a
p l u s , une institution qu i ne va u d roit pas , dans certains cas , com m e disposition d i r e c t e ,
peut va loir c o m m e c o n d it io n d ’une autre institution régulièrem ent faite ; et il nous
atteste que telle étoit la ju risp ru d e n c e sous l'e m pire de la coutum e du Bourbonnais.
L e b r u n , en so n T r a ité d e s s itc c . , liv .
cette doctrin e.
3,
c h a p . a , rc°s. i 3 e t 45 , professe égalem ent
'
Ce po in t de d ro it n ’est pas n ou ve au ; il a toujours été perm is de stipuler a u p ro fit d 'u n
t i e r s , lorsque telle étoit la c o n d itio n d ’ une d on atio n q u ’on faisoit à un autre.
On peut consulter le litre 1er. J u i ; V- 4 5 du D ig e s te , qui en fournit plusieurs exemples,
n otam m ent la lo i
58 e t
suiv. ; ainsi que la l o i 10 ^ ff. d e p a c t i s d o ta lib u s .
L e C o d e N a p o l é o n , art. 11 a i , n ’a fait que m ain tenir et consacrer les anciens p rincipes
à cçt égard ; il est ainsi c o n ç u :
« O n p e u t p a r e i l l e m e n t s t i pu l e r au prof i t d 'u n tie r s , l or s q u e tel l e est la c o n d itio n
d un e s t i p u l a t i o n q u ' o n fait p o u r s o i - m ê m e , ou d ’ une d o n a tio n q u e l'o n f a i t à un a u tr e ;
c e l ui q u i a fuit c e t t e s t i p u l a t i o n ne p eut pl us la r é v o q u e r , si le tiers a d é c l a r é v o u l o i r en
profiter. »
D an s ce cas , la disposition au profit du tiers va ut c o m m e co n d itio n de la donation ;
et elle d ev roit être exécutée à l’égard de ce tiers , d it M . G r e n i e r , q u o i q u ’il ne l ’eût
pas acceptée , pa rce que la d on atio n subsisteroit a vec toutes ses cond itio ns , en vertu de
l ’a ccep tation que le donataire en auroit faite , en supposant q u e lle s n’eussent pas été r é
voquées par le donateur. {Traité d es donat. , tom. \ ,p a g . a 3 j.( «°. 7 4 . )
A la v é rité , cette disposition au profit d'u n tiers , q u i vaut c o m m e c o n d itio n d ’une
institution , ne jouit pas de toutes les prérogatives de l'institution elle-mêm e ; le tiers désigné pour r e c u e illir l ’objet de la disposition, n ’en est p>s saisi irrévocablem ent : elle peut
être révoquée au gré des c ap rices de l ’in s titu a n t, à la différence de l'institution , q ui n’es-t
pas révocable.
C ’est en c e sen s, et uniquem ent p a r c e q u e le d o n a te u r ou l ’ in s titu a n t
n 'e s t p a s lié , q u ’on p e u t dire que la disposition cond itio nn elle n ’est pas confirmée par
la faveur du c o n tra t , c o m m e l’institution.
Mais cette faculté de révo ca tion ne com péte q u ’à l ’instituant ou don ateur ; de ce qu’il
n est pas lie envers le tiers désigné , il ne s’ensuit pas que le donataire ou l’institué ne le
soit p a s : une charge a-t-el le été imposée à ce d e r n i e r , il ne d épend pas de lui de s’y
soustraire. Il peut être contraint à s’y c o n fo rm e r , soit par le donateur ou l in s t i t u a n t ,
soit s u b o r d o n n p m e n t, par le tiers d é s i g n é , si l’instituant est d écédé sans l’avoir revoquee*
•C est une loi qui lui a été imposée c o m m e c o n d itio n du b ie n fa it ; il ne peut s en dégager
q u V n renonçant au bienfait lui-mêm e.
L a l égi s l at i on n o u v e l l e a m o d i f i é , â quelques égards , l es p r i n c i p e s anci ens s ur ce t t e
m a t i è r e , en c e q u ' e l l e ne p e r m e t pl us à cel ui q u i a fait la s t i pul a t i o n de la r é v o q u e r ,
l o r s q u e le tiers a d é c l a r é v o u l o i r en prof i t er.
M a i s c e c h a n g e m e n t de l égi sl at i on n i nfl ue
en 111*11 sur la s o l ut i on d* la d i f f i c u l t é q u ’o n é l è v e à la d e mo i se l l e D u u i o n t .
D e s c o n d i t i o n s p e u v e n t d o n c être a ppos ée s à une i n st i t ut i on.
§. I I .
U n p r é c ip u t p e u t - il ¿tre une c o n d i t i o n d in s titu tio n ?
S i , cotnmc on c ro it l ’avoir dém on tré , des conditions pe uve n t être apposées à une i n s
�( i4 )
ti t ut i on
on n e v o i t pas ce q u i p o u r r o i t f ai re o b s t a c l e à ce q u ’ un i nst i t ué f ût t e n u d e s o uf f r i r
l e p r é l è v e m e n t d ’u n p r é c i p u t , c o m m e c o n d itio n d e son i nst i t ut i on.
O n v i e n t de v o i r q u e s u i v a n t
le s e n t i m e n t
d ’A u R O u x , d e L e b r u n , et de t ous les
a ut eur s q u i o n t traité la ma t i è r e des i n s t i t u t i o n s , o n p eut f ai re passer à des tiers une
q u o tité d e s ucce s si o n , c o m m e c o n d i t i o n d e l ' i n s t i t ut i o n f ai t e au profi t de c e l u i q u i se
m a r i e : à c o m b i e n p l us f orte ra i s o n do i t - o n d é c i d e r q u ’une d i s p o s i t i on au p r of i t d ’ un
t i e r s , q u i n ’a p o u r b u t q u ' u n e c h o s e p a r t ic u liè r e , q u ’ un co rp s c e r ta in e t d é te r m in é ,
p e u t v a l oi r c o n n u e c o n d i t i o n d ’ un e i ns t i t u t i on : c est l e cas d ’a p p l i q u e r la m a x i m e q u e ,
q u i p e u t le p lu s p e u t le m o in s , m in u s l i c e t c u i et p lu s ; et la r c g l e in eo q u o d p lu s
s i t sem p er i n e s t e s m in u s. ( L o i 11 o , Jf. d e reg u lis j u r i s .)
C e q u e la ra i s o n p a r o i t l é g i t i m e r , l ’aut o r i t é des a n c i e n s a vo c a t s d e la s énéchaussée du
B o u r b o n n a i s l e c o n f i r m e d e la m a n i è r e la mo i n s e q u i v o q u e .
O n p e u t p r o d u i r e , à l ’a p p u i de c e t t e a s s e r t i o n , p l u s i e u r s d é c i s i o n s d e M M . H e u i l : l a r d , T o u r î t , D u r y , C h a r r i e r et B e r a u d , é c r i t e s de la i nai n de ce de r n i er , â
l a m a r g e d ’u n a n c i e n c o m m e n t a i r e de la c o u t u m e de B o u r b o n n a i s ,
par P a v o n , l equel
a a p p a r t e n u à M . B e r a u d , l ’u n des p l us c é l éb r é s j ur i s co ns ul t es q u ’ait p r o d u i t cette
province.
« L e 7 j u i l l e t 1 7 6 1 , d i t - i l , M M . H e u i l l a r d , D u r y , T o u r e t et mo i a v o n s d é c i d é
q u e d e h u i t enf ans q u a v o i en t les sieur et d a m e Bo n n c l a t , en a y a n t i n s t i t ue q u a tre lie*
ri t i ers p a r égal e p o r t i o n a ve c les a u t r e s , sous lu réserve d'une, somm e de s i x m ille
liv r e s, p o u r en d i s p os e r p a r quel s actes q ue r e f ut d ’e n t r e - v i f s , o u à cause d e m o r t ,
a v o i e n t d i s p os é i n f r u c t u e u s e m e n t de la m o i t i é de ce t t e rés er ve au p r of i t de G i l b e r t ,
l eu r fils p u î n é , p ar le c o n t r a t de m a r i a g e de P a u l , l ’a î n é , p o u r la d i s p o s i t i on n ’a v o i r
p a s été a c e r p t é e p a r G i l b e r t , ce t t e d i s p o s i t i o n n ’a y a n t a u c u n c a r a c t è r e d ’actes e n t r e
v i f s , ou à cause de m o r t , p a r l esquel s les p è r e et mè r e a v o i e n t rest rei nt la f o r me de l eu r
d i s p os i t i o n ; q u e c e t te d is p o s itio n ne v a lo i t q u e p o u r la p o r tio n d e P a u l , co m m e
c o n d itio n d e son i n s t it u t io n , et a t t r i b u t i o n de l ’a ut re m o i t i é de la ré s er ve q u i lui a v o i t
été faite p a r son c o n t r a t de ma r i ag e . ».
Ce s j ur i s c o n s u l t e s , en d é c i d a n t q u e la d i s p os i t i o n f ai t e p a r l e c o n t r a t de ma r i ag e d e
P a u l , au prof i t de G i l b e r t , v a l o i t , p o u r la p o r t i o n de P a u l ,
c o m m e c o n d i t i o n de
so n i ns t i t u t i on , ont f o r m e l l e m e n t d é c i d é q u e le p r é l è v e m e n t d ’ une s o m m e , o u d ’un
c o r p s c e r t ai n , p o u v o i t être app o s é c o m m e c o n d i t i o n a une i n s t i t u t i on .
A u t r e d é c i s i o n , d u i 5 j ui l l et 1 7 7 a : « P a r l e c o n t r at de ma r i a g e d u s i eur G o s s e a v e c
E l i s a b e t h L a p l a n c h e , G i l b e r t L a p l a n c h e a i ns t i t u é l a di t e É l i s a b e t h s o n h é r i t i èr e p a r
ég a le p o r tio n a v e c ses autres enf ans , so u s u n e réserve d e f o n d s d e v a le u r d e q u in z e
m ille f r a n c s ; p a r le m ê m e a c t e , G i l b e r t L a p l a n c h e a di sposé de tro is m ille livres sur
c e t t e réserve , au prof i t <1’A n t o i n k L a i - l a n c h e , s on f i l s , P o u r *a p r e n d r e et p r é l e v e r
a v a n t tout p a r t ag e de la s uc c e s s i o n .
G i l b e r t L a p l a n c h e étant m o r t le 17 s e p t e mb r e 1 7 7 1 ,
il s’est agi ent re les e n f an s G o s s e , A n t o i n e et M. tri e L a p l a n c h e , n o n ma r i é s , c o m m e n t
d e v a it s e p re n d r e le p r é c ip u t.
MM. D u r y ,
Les p ar t i e s a y a n t c o m p r i s et
n o m m é p o u r arbi tres
C h a r r i e " e t m o i B i r a u j > , nous a v o n s a m p l e m e n t agité la q u e s t i o n ,
si le p r é c i pu t d e v o it être p r it en en tier sur la p o r t i o n d e la réserve a f f é re nt e aux e nf an s
G o s s e , ou s ’ils n e d e v o i e n t y c o n t r i b u e r
que
p o u r l e u r p o r t i o n v i r i l e . No u s é t i ons
d ’a c c o r d q ue Ma r i e L a p l a n c h e , non mariée, , n e d e v o i t pas y c o n t r i b u e r . P a r s e n t e n c e
a rbi t ral e du i 5 jui l l et 1 7 7 2 , n o u s a vo n s j u g é , c o n t r e I’ayi s d e M . D u r y > q u e le p r é -
�Ul
'W *
( ï5 )
c i p u t d e v a n t se p r e nd r e p a r p r é l e g s avant -partage , l es m i n e u r s G o s s e n ' y c o n t r i b u o i e n t
que pour un tiers ; q u ' A n t o i n e L a p l a n c l i e , p r é c i p u é , e n c o n f o n d o i t u n ti ers en sa p e r
s o nn e , et q u ’il p e r d o i t l e tiers au r e s p e c t de M a r i e L a p l a n c l i e , non m ariée. »
Il résul te é v i d e m m e n t de c e t t e s e n t e n c e a r b i t ra l e , q u e les trois j u r i s c o n s u l t e s q u i 1 o nt
r e n d u e ét oi ent d 'a v is unanim e q u e l e p r é c i p u t v a l o i t c o m m e c o n d i t i o n de 1 i n s t i t u t i o n
d ' E l i z a b e t h L a p l a n c l i e , et q u e M a r i e L a p l a n c l i e , n o n m a r i é e , ni p a r c o n s é q u e n t i n s
t i t u é e , ne d e v o i t pas y c o n t r i b u e r ; en sorte q u ’i l s n e d i f f é r o i e n t d o p i n i o n q u e s ur la
q u e s t i o n de s a v o i r si le p r é c i p u t s eroi t pri s e n e n t i e r sur la p o r t i o n d e la r es er ve a f f e r e n t e
aux mi n e ur s G o s s e , e nf ans d ’E l i z a b e t h L a p l a n c l i e , i n s t i t u é e , o u s'ils n e d e v o i en t y c o n
t ri b u e r q u e p o u r l e u r p o r t i o n v i r i l e .
,
Ce s aut ori t és i m p o s a n t e s , é ma n é e s des pl us fidèles i n t e r p r è t es d u d r o i t c o u t u m i e r q u i
r égi s s oi t la p r o v i n c e d u B o u r b o n n a i s , d o i v e n t être d u p l us g r a n d p o i d s dans la d é c i s i o n
d e c e t t e cause.
M a i s elles se t r o u v e n t e n c o r e étayées p a r une j n ri spru den ce q u e s on a n c i e n n e t é n e
r e n d q u e p l u s r e s pe ct ab l e .
C ’est ce q u e nous assure A u h o u x - D e s p o m m i e r s , en son Com m entaire sur l ’ art. 3 o 8 ,
n°. 5 , où il r a p p o r t e un arrêt du 22 mai 1 7 1 6 , q u i a j ugé v a l a b l e un p r é c i p u t a t t r i b u é à
u n m â l e p a r las c o nt r at s de ma r i ag e de ses soeurs, c o m m e c o n d i t i o n d e l e u r i n s t i t u t i o n .
C e t arrêt q u ’ A u n o u x ne fait q u ’i n d i q u e r , se t r o u v e a m p l e m e n t d é v e l o p p é , a v e c les
c i r c o n s t a n c e s q u i l ’a c c o m p a g n è r e n t , dans les not es m a nu s c r i t e s de M . B t R A u n , d o n t
c o m m u n i c a t i o n a été d o n n é e aux d a me s D e v a u r e et d e la R o q u e : l ' i m p o r t a n c e d e c e t t e
cause nous Tait un d e v o i r d ’e n t r a ns c r i r e l i t t é r a l e m e n t l ’e x t r a i t , tel q u ' i l existe dans la
s ource q u e nous i n d i q u o n s .
« A u r e s pe c t d u c o n t r a t d e m a r i a g e , y est-il d i t , n a î t un e que s t i on , s a v o i r , si la c o u
t u m e a p r é t e n d u q u e , p o u r la v a l i d i t é du p r é c i p u t , i l f u t néce s sa i r e q u ’il f ût fait p a r le
c o n t r a t du p r é c i p u é , ou si le mâl e n ’ é t a n t p o i n t en âge ou s i t uat i on de se m a r i e r , ses pèr e et
i n er e p e u v e n t , pur le c o n t r a t d e ma r i a g e d ’ une de ses soeurs, faire a u d i t mâ l e p r é c i p u t va l a bl e?
« C e t t e q u e s t i on f ut agi tée e n l ' a nn é e 1 7 1 6 , s u r u n a p p e l d ’ u n e s en t e n c e d e m o n s i e u r
l e s é n é c ha l , r e n d u e par d é f a u t , au prof i t de M . S é b a s t i en M a q u i s , a v o c a t , l e 29 août
1 7 1 4 , co n t r e d a m e A n n e M a q u i n , é po us e du si eur P a l i e r n e d e l ’ E c l u s e , et d a m e
M a r i e - E l u a b e t h M a q u i n , épous e d u s i eur D e s b o u c h a i n s , soeurs d u d i t S é b a s t i en
M a q u i n , l esquel l es lui c o n t e s t o i e nt u n p r é c i p u t de trente m ille liv res , q u i a v o i t été
r é s e r v é p a r le c o n t r a t du l adi te A n n e M a q u i n , p o u r en di s pos er au p r of i t des m â l e s , tel»
et ainsi q u e b o n s e m b l e r o i t au s i eur Sé bas t i en M a q u i n et E l i s a b e t h P i e d e m e s , p è r e et
m è r e des part ies ; de l a quel l e s o m m e ils a v o i e n t di s pos é au p r o f i t de S é b a s t i e n , l eu r fils,
p a r le c o n t r a t d e l adi te M a r i e E l i z a b e t h M a q u i k . L a c l a u s e d u d e r n i e r c o n t r a t é t o i t
t out -à-f ai t re l at i v e au p r e m i e r , et ell e étoi t
1 o n ç u e en ces t e r me s t
« C o n s o m m a n t le c h o i x rt la di s pos i t i on q u e se s ont réser vés d e l adi te s o m m e de trente
mille, livres , à c e t é g a r d , ils o n t d é c l a r é q u ’ils e n t en d e n t q u e ce t t e s o m m e soit pri se et
Pr é l e v é e après l eu r dé c è s , par f o r m e de p r é c ip u t , p a r S é b a s t i e n M a q u i s , l eu r fils ,
»ans q u e l edi t p r é c i p u t p r é j u d i r i c au p a y e m e n t de la s o m m e de vingt-quatre u n
q u i l ui sera fait p o u r l ’ég.ilcr a v e c les de mo i s e l l e s ses s œ u r s l o r s de son élu
e l i vr es
i ssei nent o u
a u t r e m e n t , ainsi q u ’ils a v i s e r o nt ; sans l a q u e l l e rés er ve de p r é c i p u t l esdi ts p è r e et mèrede l a f ut ure l’auroi ent a p a n é e , c o m m e il leur est p e r mi s p ar la c o u t u m e de c e t t e p r o v i n c e , ,
et sous c o n v e n t i o n q u ’o ù la f u t u r e v o u d r o i t c o n t e s t e r l edi t p r é c i p u t , e l l e demeurera; ero
•
�( 16 )
e f f e t a pa né e p o u r l a d i t e s o m m e d e v i n g t - q u a t r e m i l l e l i v r e s . L a s e n t e n c e r e n d u e f aut e d e
c o m p a r o i r , ' p o r t o i t q u ' a v a n t d e p r o c é d e r au p a r t a g e , l edi t S é b a s t i e n M a q u i n p rélèvera it
la s o m m e d e t re nt e m i l l e l i v r e s p o u r le p r é c ip u t à l ui a c c o r d é , e n s e m b l e le s in t é r ê t s ,
p o u r mo i t i é , d u j o u r d u dé c è s de sa m è r e , et de l ’aut re m o i t i é à c o m p t e r s eu l eme n t d u
j o u r du d é c è s du s i eu r M a q u i n pèr e.
« L e s d a m e s a p p e l a n t e s , p o u r f ai re i n f i r m e r la s ent ence , se f o n d o i e n t s u r l ’art. 3 o 8 ,
et p r é t e n d o i e n t q u e le p r e c ip u t ne p o u v o it être la is s é q u e p a r le c o n tr a t d e m a ria g e
d u p r é cip ité ; q u ’a i n s i , il f a l l o i t e n t e n d r e c e s t e r m e s , en fa v e u r d 'i c e l u i m a ria g e. E l l e s
a j o u t o i e n t q u e l ' i n t i mé ne p o u v o i t qua l i f i e r l edi t act e d e d o n a tio n e n tr e - v ifs , p a r c e
q u ' i l n ’a v o i t pas a c c e p t é ; q u e s’il di s o i t q u e c e f ût un e d o n a t i o n à c a us e d e m o r t , i l ne
p o u v o it être h é r itie r e t lé g a ta ir e ; q u e bi e n étoi t v r a i q u ’en c o n s é q u e n c e d e la ré s er ve
f a i t e , le si eur M a q u i n p è r e p o u v o i t d i s p os e r , ma i s q u Jil ne l ’a v o i t pas f i i t v a l a b l e m e n t
p a r un a c te étran g er à l'i n t im é ; e n f i n , q u e la s i eur M a q u i n pèr e ri avait p u , p a r une
s t ip u la tio n p é n a le , fai re Val oi r u n e c l a u s e n u l l e et c o n t r a i r e à la loi .
« L ’i n t i m é , e n r é p o n s e , se s er vi t d e qua t r e p r i n c i p a u x m o y e n s ;
« i ° . Q u e la loi n ’é t o i t p o i n t c o n ç u e en t e r me s p r o h i b i t i f s , et p a r c o n s é q u e n t p o u v o i t
p e r m e t t r e une s t i p u l a t i o n c o n t r a i r e ; q u e sa p r é t e n t i o n n e t o i t p o i n t c o n t r a i r e à la l o i ;
q u e le p r é c i p u t é t o i t f ai t à d e s c e n d a n t , e n c o n t r a t de mari . i ge et en f a v e u r d ' i c e l u i ,
p u i s q u 'i l é t a it le p r i x d u r a p p e l d e s f i l l e s , q u i a u r o ie n t été a p a n ées sans l edit p r é c i p u t ;
« 2°. Q u e cette prétention éto it suivant l ’esprit de la c o u t u m e , qui tendoit , par le s
a r t. S oi ,. 3o 5 , Z07 , 3 i o et S i 1 , à la faveur des mâles, au préjudice des filles ; que la c o u
tu m e n’a réprouvé les avantages faits par donations en tre-vifs, testamens et autres actes
p a r tic u lie r s , que parce que lesdits actes étoient p a r t ic u li e r s , et que 1rs avantag-s auroient
pù être faits à l ’ in sçu e t s a n s le c o n s e n te m e n t d e s a u tres e n f a n t , c.e que l'on ne p o u v o it
présum er en un c o n tr a t d e m a r ia g e , qui est un acte pu b lic et c o m m u n à toute la famille ;
« 3 ®. Q u e le* a pp e l a n t e s a v o i en t c o n s e n t i a u d i t p r é c i p u t , et q u ’il n ’y avoi t p o i n t de
s t i pu l a t i on p é n a l e , ma i s q u e c ’étoi t u n e c o n v e n t i o n faite a v e c fille m. i jeure;
«
4°.
Par l ’u sa g e de la p r o v i n c e , é ta b li par l ’extrait de tr e n te - n e u f c o n tr a ts d e m a
r ia g e , c o n te n a n t p a r e ille c la u s e , le rn n iij d e la s e n te n c e , une a tte s ta tio n d e s a v o ca ts
du barreau d e la sénéchaussée, d e s p r o c u r e u r s , et un c e r tific a t d e s notaires-,
« E t sur l ’a p p e l , l ' i n t i m é a y a n t f o r m é i n c i d e m m e n t d e m a n d e à ce q u ’en c o n s é q u e n c e
d e la c o n t e s t a t i o n q u i é<oit f ai t e et f o r m é e du p r é c i p u t , les a pp el a nt e s d e me u r a s s e n t
a p a n é e s , c o n f o r m é m e n t a \i cl a us e de s c o n t r a t s d e mari age.
« L e 22 mai 1 7 7 6 . au r a p po r t d e M . l ' a b b é P ucf . l l f , i nt e r v i nt arrêt :
« L a • o u r m i l l 'appt-l Uiion
n é,int t o r d o n n a q u e c e d o n t a voi t été a p p e l é s o r t i r o i t
ef f et ; et s ur la d e m a n d e d * .Sébastien M a q u i n , à fin d e d é c h é a n c e d u r a p p e l , m i t les
p a r t i e s l\ors d e c o u r ; c o n d a m n a le» «pr i a nt e s à l’a m e n d e , et tant el l es q u e leurs ma r i s
a u x troi s qua r t s de> d é p r n i , l ' a ut r e q u a r t c o m p e n s é . »
L ' e s p è c e d e c e t arrêt a ht p l i M g m n d e . m. dngi r avec, c e l l e q ui f.i■
t la ma t i è r e d e la c o n t e s
t at i on p e n d a n t e e n t r e la d e mo i s e l l e Du mo nt n tes part ¡es ad verses : on pou 1 roi t m ê m e s o u
t e n i r q u e ces d e u x e spè ces sont i d e nt i q u e s ; la s eul e d i f f é r e n c e q u ' ou y d é c o u v r e est q u e ,
di t q u e si la f ut ur e cont es t e le p r e c i p u t , ella dem eurera
apanée à la soin me de v i n g t m i l l e li vres ; t andi s q u e , dans n o t r e espéc./j, il est dit q ue , sans
da n s l ' es pèce de M a Q U I N , il
les c h a r g e s et c o n d i t i o n s de l ’i n j t i t u t i u n , la f ut u r e aurait été apanée à la s o m m e q u i l ui
est c o n s t i t ué e en d o t . .
�M3
(
17
)
L a demoiselle D u m ô n t fait Cette rem arq u e , parce q u ’il convient en tout de rendre
hom m age à la vérité, et q u ’elle veut prouv er à ses adversaires q u ’elle ne ch erch e à a ffoiblir
aucune de leurs objections : mais on leur prouvera bientôt que cetle variante ne doit être
d ’aucu n e considération dans la c a u s e , et q u e , dans l'u n et dans l ’autre c as, i l y a apanage,
s’il n ’ y a pas institution.
Q u a n t à présent , la seule conséquence à tirer de l ’arrêt de 171(1, est q u 'il a jugé in
te r m in is , q u ’une disposition de p r é c ip u t est valable lorsqu'elle est a p p o sé e , com m e con*
d ition j à une institution.
Q u ’on ne dise pas que l ’a rrêt a ainsi jugé , à raison de la m enace de forclu sio n , d o n t les
effets se fussent réalisés si l’on n'eut po in t a cc o r d é le précip u t.
*
O n répondra que la clause de l ’apanage est étrangère à la question de valid ité de préCiput ; que si cette clause de p r é c ip u t avoit été contraire à la l o i , ainsi que le porte un déj
considerans du jugement de G a n n a t , e lle a u r o it été réputée non é c r i t e , n o n o b sta n t la
m e n a c e d e fo r c lu s io n . Il a toujours été de p rincipe q u ’ une c la u s e p é n a le ne p o u v o il
v a li d e r une c la u s e c o n tr a ir e à la l o i , parce qu’autrem ent on pourroit se réserver le s
m o y en s d e v io le r lu lo i à son gré.
Il faut d o n c tenir po u r constant que si cet arrêt à d éc laré la disposition du p r é c ip u t
valable , c ’est parce q u ’une pareille disposition , q uoique faite hors le contrat de mariage
du précipué , n ’a rien de contraire à la l o i , lorsqu ’elle est une con d itio n d ’institution.
L a r a i s o n , l ’autorité des jurisconsultes de la sénéchaussée du B o u rb o n n a is, et la juris
p r u d e n c e , con cou ren t à établir q u 'u n p r é c ip u t p e u t être une c o n d itio n d 'in s t it u t io n .
§. III. L e p r é c ip u t d e la terre d e M o n t d o i t être a ttr ib u é à A n d r é D u m o n t , co m m e
la c o n d itio n d e l'in s t it u tio n d e s e s sœ urs.
P o u r se c o nvain cre de cette v é r i t é , il suffit d ’analiser la clause des contrats de mariage
des soeurs d ’A n d t é D u m on t.
Cette clause contient une institution restreinte par la stip u la tion d'une réserve , et
modifiée par plusieurs conditions q u ’il a plu aux instituans d 'y apposer ; condition» te l
lem en t liées et fondues dans un m êm e c o n t e x t e , a vec la clause d ’in stitu tion , q u ’il est i m
possible d en supprim er une par la pensée, sans a n é a n tir,d a n s le voeu des instituans, l’in i titutio n elle-inêiue.
Par cette clause , les père et m ère in stituen t leurs f i l l e s , sous une réserve déterminée ,
dont ils auront la faculté de disposer.
Ils instituent sous la c o n d itio n que si l ’un d ’eux d éc c d e Sans avoir dispôso de la
portion de la réserve , le survivant aura le droit de disposer de la totalité.
Ils'instituen t sous la c o n d itio n que s’ils d écèd en t l ’ un et l ’autre sans a vo ir disposé de Ia
réserve, elle a p p a r tien d r a , en toute propriété , à A n d ré D u m o n t , leur fils, à titre de p ré
c ip u t. « l a d i t e in s tit u tio n f a i t e , est-il d i t , so u s l a d i t e réserve, e t à c o n d td o n d e lad is p o s itio n . »
Enfin , ils instituent sous la c o n d itio n que la future laissera jouir le
survivant
des pere
et m ère, de la portion qui lui seroit revenue dans les biens du p r é d é c é d é .
S a n s to u te s le s q u e lle s c h a r g e s , c la u s e s et c o n d i t i o n s , e s t i l ajouté , la d i t e i n s t it u
tio n n ‘ a u ra it été f a i t e , et la future auroit été «panée moyennant sa constitution dotale.
Cette clause contient év id em m en t tro is c o n d i t i o n s , auxquelles les pere et in tre des d e
moiselles D u m o n t on t entendu sub ordo nn er l ’institution faife à leur profit.
.
5
* i{
�O r , deux de ces conditions se sont accom p lie s dans l ’intérêt d ’A n d ré D u m o n t .
E n effet, une prem ière con d itio n a ttachée à la cause d'institution , est q u ’en cas de
non disposition, la terre de M o n t appartiendra íi A n d r e D u m o n t . O r, P rocu le Pitat est d é
cédée sans a v o ir disposé de sa m oitié de la réserve ; l ’év én em en t de la c o n d itio n a d o n c
assuré à A n d r é D u iu o n t la m oitié de cette terre p a r v o ie d e d e s tin a tio n .
U n e d euxièm e con d itio n apposée à l'institution , est q u ’en cas de non disposition de la
part du p r é d é c é d é , le survivant aura le d roit de disposer de la totalité de la réserve. O r ,
cette seconde c o n d itio n s’est a c c o m p lie , au profit d 'A n d r é D u m o n t , par son contrat de
m ariage , en 178g ; la moitié de cette terre , d u c h e f de la mère , lui a donc encore été assurée
par v o ie d 'é le c tio n .
Il y a donc double m o tif de d é c id e r que le p réc ip u t appartient à la représentante d ’ A n
d ré D u m o n t , par la raison q u ’il lui a été a c q u i s , ou p a r v o ie d e d e s tin a tio n , ou pur v o ie
d ’ éle c tio n -, à moins q u ’o n ne d écid e q u 'il lui a été acquis p a r l'u n e e t l ’a u tre v o ie s
réu n ies.
O n persistera sans doute à soutenir que ces deux cond itio ns doive n t être réputées non
écrites , c o m m e contraires à la loi ;
Q u e la c la u s e d e d e s tin a tio n de la terre de M o n t au profit d ’A n d r é D u m o n t , hors son
contrat de mariage , est une c ontraventio n à l ’ art. 217 de la coutum e du Bourbonnais ;
E t que la f a c u l t é d ’ élir e donnée au survivant des père et mère , est contraire aux dispo
sitions de l ’ a rt. 226 de la mêm e cou tu m e.
I l c o n v ien t d ’a p p réc ier cette objection , et de la réduire à sa juste valeur.
E n ce qui con cern e la c la u s e d e d e s tin a tio n de la réserve , au profit d ’ A n d ré D u m o n t ,
à titre de p r é c i p u t , com m e cond itio n de l'institution de ses soeurs, on a déjà vu q u e , suivant
l'o p in io n des jurisconsultes les plus éclairés de la ci-devant sénéchaussée du Bourbonnais,
u n e telle disposition étoit valable ; et que cette opinion n étoit point une inn ov atio n en
ju risp ru d e n c e , puisq u 'elle se trouve consacrée par un a r r ê t , q ui rem onte à 1716.
. P o u r c o n c ilie r cette jurisprudence avec l ’a rt. 214 de la coutume , tout consiste à ne pas
confo nd re les dispositions p r in c ip a le s et d ir e c t e s , avec les dispositions r ela tiv es et c o n
d itio n n e lle s .
Ain si , par exemple , une donation p r in c ip a le ¡ q u ’ un pere auroit faite à son Fils , d ’ u n e
m a n iè r e d i r e c t e , et com m e disposition p r in c ip a le , par le contrat de mariage d ’un de
ses frères , seroit n u lle , parce q u ’une telle donation est prohibée par l ’ a rt. 217.
M ais il n ’en est pas de même d ’une d i s p o s i t i o n r e l a t i v e et i n d i r e c t e , qui se rattache c o n
d itio n n e lle m e n t à une d i s p o s i t i o n p r in c ip a le >teHe q u ’une i n s t i t u t i o n , et qui doit suivre
le sort de cette i n s t i t u t i o n , dont elle est une d é p e n d a n c e ; en sorte que c ’est moins la
d i s p o s i t i o n rela tiv e qu il faut c o n s i d é r e r en elle-m êm e , et i s o lé m e n t , pour juger de sa
V a l i d i t é , que la d i s p o s i t i o n p r in c ip a le à laquelle elle se r a tta c h e , et dont elle fuit essen
tiellem ent partie.
C e n ’est pas seulem ent en matière de p réc ip u t que la loi v a l i d o i t , com m e c o n d itio n
n e lle s , des dispositions qu’elle prohiboit lorsqu’elles étoient p r in c ip a le s et d ir e c te s .
C ’est ainsi q u e , c o m m e on l ’a déjà d i t , l ’institution faite par un p è r e , en faveur
de deux en fa n s, par le contrat de mariage de l’un d ’e u x , étoit n u lle à l ’égard de c elu i
qui ne sem.irioit pas ; tandis que
51 l'institution
n ’étoit faite q u ’en faveur de celui qui se
i n a r io i t , à la charge d a s s o c ie r son frère , la disposition étoit v a la b le au profit de ce der
nier , coim ne c o n d itio n de l'institution fait« à l ’autre.
�iJ i
( \9 )
C ’est ainsi q u ’en coutum e du B o u r b o n n a i s , la disposition faite par des époux pendant
le mariage , au profit du s u r v i v a n t , de l ’usufruit des biens du p réd é cé d é , étoit n u lle ,
c o m m e contenant un avantage p rohib é , tandis q u ’elle a toujours ete consid érée c o m m e
v a la b le lorsqu’elle se raltach oit à une in stitu tion de leurs enfans , et qu elle en étoit la
con d itio n ; ce q ui nous est attesté par tous les com m entateurs , et n otam m ent par
A uroux
, su r le s are. 226 , n°. 10 , et 227, «°.
3 o.
Il ne faut d o n c pas s’étonner si les adversaires on t c r u raisonner juste dans leur
système , en parlant d e l'a r t. 217 de la c o u tu m e ; leur erreur pr o v ien t de ce q u ’ils o n t
fait une confu sion p e rp étu elle des clauses constituant une donation p r in c ip a le , avec les
dispositions relatives et c o n d itio n n e lle s , q u i se régissent par des régies de droit b ien
différentes.
C est sur les principes que nous venons de d évelopp er , que repose essentiellement une
consultation signée de trois jurisconsultes recom inandablcs de C l e r m o n t , M M . B o i r o t ,
B
ergier
et D
artis
, sous la date du 12 d é ce m b r e i 8o 5 .
D a n s c e t t e c o u s u l t a t i o n , d e m a n d é e et o b te n u e p a r M . D
evaure
lu i- m ê m e , d o n t
les a p p e l a n s o n t sous les y e u x une c o p i e f i dè l e me n t c o l l a t i o n n é e s ur c e l l e q u i est d a n s
le* ma i n s des i n t i m é s , ces j u r i s c o n s u l t e s o n t f o r m e l l e m e n t d é c i d é q u e le p r é c i p u t
d e v o i t être r e l â c h é à la d e mo i se l l e D u i n o n t , e n v e r t u d e la c o n d i t i o n app o s ée à l ’i n s
titu tio n de ses tantes.
« L a coutum e du B o u r b o n n a is , d isen t-ils, étoit une co u tu m e de forclu sio n légale:
on lit dans l ’a rt.
5o 5 ,
que toute fille mariée et d o té e , ou , ce qui est s y n o n y m e , a p a n è s
par ses père et mère , est forclose de toutes successions directes et collatérales.
« La dame D ev a u r e , mariée et dotée par ses père et m è r e , étoit d o n c forclose de
droit par leur seul silence , et par le seul effet de la loi m unicipale.
« A u lieu de cette forclusion r ig o u reu se , les pcre et mère l ’appellent à leur succession ,
mais ils l'a ppellent a vec d e s m o d ific a tio n s ; ils veulent bien q u ’elle soit leur héritière
par égalité avec sa sœ u r et son fr c r e , mais non pas dans l'universalité de leurs biens;
ils en exceptent la terre de M ont.
« Peut-on dire que cette exception ne leur fu t pas permise ? pouvant livrer leur fille
a une forclusion absolue , ne pou voient-ils pas laisser du m oins subsister cette f o r
clusion pour une partie quelconque de leur f o r tu n e , ou pour tel et tel objet p a rticulier ?
« C o m m e on le dit v u l g a i r e m e n t , qui peut le plus peut le moins : les sieur et d ame
D u m o n t pouvant priver leur fi!le de leur succession , pouvoient à plus forte raison ne
1 en priver qu en partie ; et s ils ont voulu que la forclusion subsistât pour celte p a rtie ,
leur volonté doit être accom plie.
<( O r , cette volonté a été e i p r i m e e de la manière la p lu s ex p r esse dans le contrat de
mariage de la dame D evau re , en ce q u ’il y est dit form ellem en t que la dame D evau re
n est 'usfituée leur héritière q u ’à cond itio n q ue la terre de M o n t demeurera exceptée do
cette in s titu tio n ; que sans cette c o n d itio n l'in stitution n ’ a u r o it p a s été f a i t e , et la
ju tu r e a u r o it é t é a p a n é e m o y en n a n t la d o t q u i v a lu i être c o n s t i t u é e .
Apanage qui auroit produit lo u t son effet pour la succession d 0 1° dame D u m o n t ,
Puisqu’elle est décédée en l 7 86.
« La conséquence de tout ce q u ’on vient de dire , c ’est que si la représentante d ’A n d ré
D u m o n t conserve la terre de M o n t en p r é c i p u t , et sp écialement la moitié qui en a a p
partenu à la dame D u m o n t , ce 11’est pas en vertu de la disposition q ui en a été faite en
�( 20
)
faveu r d ’A n d r é D u m o n t , par son contrat de mariage du S i niai 1 7 8 9 , disposition q ui
étoit nulle p o u r la portion de la daine D u m o n t d é c é d é e ; mais parce que c ’étoit u n e
CONDITION EE l ' î NSTITUTION F AI T E AU PROFIT DE LA DAME D E V A U R E , Une ex cep tion
à l'in stitu tion de cet objet p a r t i c u l i e r , pour lequel les sieur et dam e D u m o n t ont voulu
laisser subsister la forclusion pron on cée par la c o u t u m e , forclu sio n à laquelle ils n’ont
Voulu déroger que pour le surplus de leurs biens.
« C ’est à ces idées simples que doit se réduire la question proposée; envisagée sous ce
po in t de vue , la décision 11’en peut être fa vorable à la dame D evaure. »
A in si s’e x p r i m e n t , dans l ’avis donné à la dam e D ev a u re , ces ju ris c o n s u lte s , don t
l ’aut6riié imposante ne sauroit être suspecte.
O n objectera peut-être , contre cet a v i s , que la forclusion légale ne peut être p artielle;
que l ’apanage est une sorte de fo r fa it qui tient lieu de la succession ; q u ’on ne peut être
apanée p o u r partie et héritière po ur p a r tie; que ces deux qualités sont in c on ciliables.
O n con v ien d ra d e la vérité de ces p r i n c i p e s , en matière de forclusion lé g a le, lors
q u ’elle a lieu dans le silence des parties , et p a r le se u l e ffe t d e la lo i m u n icipale.
ft^ais il n ’en est pas de m êm e lorsque les père et m è r e , dérogeant à cette forclusion
l é g a l e , appellent leur fille à leur succession par une institution contractuelle. Ils peuvent
alors faire l ’équ iva len t d 'u n e forclusion p a r tie lle , en imposant des charges et des c o n d i
tions à l ’institution , parce que les charges et conditions sont le prix de la n on-forclusion
légale , et de son rappel à la succession conven tion nelle ; aussi ces jurisconsultes ont-ils
form ellem en t d é c id é que la demoiselle D ü m o n t d ev oit conserver le p r é c i p u t , parce que
c'éto it u n e c o n d i t i o n d e l ’ i n s t i t u t i o n faite aux dames ses tantes.
Il reste à examiner quels pe uve n t être les effets de l ’espèce de f a c u l t é d ’é l i r e donnée
au s u r v i v a n t , par la clause q ui l ’autorise à disposer d e la to ta lité de la réserve.
I l est à peu prés indifférent à la d em oiselle D u m o n t q u ’on valide ou non les effets
de l ’é l e c t i o n faite dans le c o n tra t de mariage de son pére , puisqu’il est démontré
q u ’elle a un titre Incontestable au p r é c ip u t dans la d estin a tion prim itive de la terre
d e M o n t , au profit d e son p è r e , con n u e charge e t co n d itio n d e l'in stitu tio n de»
dames D evaure et d e Beauregard.
Mais il i m p o r t e , p o u r l ' h o n n e u r de s p r i n c i p e s , d e d i s c u t e r e n c o r e , s ous c e p o i n t
d e v u e , la q ue s t i o n d e la v a l i d i t é d u p r é c i p u t .
1
Les j ur i s c o n s ul t es d o n t i l v i e n t d ’être p a r l é , o n t é mi s l ’o p i n i o n q u e c e t t e f a c u l t é
to’ ÉLi RE é t o i t n u l l e , et q u e la d e mo i se l l e D um on t n e p o u v o i t r é c l a m e r l e p r é c i p u t ,
d u c h e f de P r o c u l e P i t a t , q u ’en v e r t u d e la cla u se co n d itio n n e lle d e destination .
E n rendant hom m age aux vastes ronnoissances de ce» j u r i s c o n s u l t e s , 1« demoiselle
D u m o n t se perm ettra de penser q u ’ils o n t erré sur ce p o i n t , et que leur erreur provient
d e ce q u ’ils ont considéré cette fa c u lté d ’électio n . en elle-m êm e , d ’une manière a b
solu e , et Art l iso la n t de l institution dont e lle éto it une d es co n d itio n s ; tandis q u ’il
falloit ra iso n n er, dans l ’e sp èc e, sur cette fa c u lté d ’é lir e , c o m m e ils ont raisonné sur la
disposition de préciput par la v o ie de la d estin a tion con dition n elle.
O n distinguoit autrefois deux sortes de dispositions subordonnées à la fa c u lté d ’elire :
— l u n e de ces espèces con ten oit un don fait à qu elqu ’ un avec charge d e rendre à un
tiers q u ’ il pourroit élire ; il y avoit là év id em m en t substitution fidéicommissaire.
L 'a u tre espèce avoit lieu lorsque la disposition étoit faite, indéfiniment ou parmi plu«ieurs personnes in d iq u é e s, à celui qui seroit élu par le tiers désigné ; elle ne c o n teu o it
�Ü?
( 2t )
aucun avantage au profit de Celui q u i devoit ¿lire ; et c ’est dans cette espèce que rentre
]a fa culté donnée au s u r v iv a n t, dans les contrats de mariage des dames D ev au re et de
Beauregard.
O n p o u r r o i t d o n c s o ut e n i r q u e ce t t e di s p o s i t i o n , p a r cel a seul q u ’elle n e c o n f è r e a u
cun é m o lu m e n t au s u r v i v a n t , ne c o n t r e v i e n t p o i n t aux l oi s p r o h i b i t i v e s d a v a n t a g e s e n t re
é p o u x ; et c e p e n d a n t ces j ur i s c o n s ul t e s ne f o n d e n t la n u l l i té de la di s pos i t i on f a c u l t a t i v e
d o n n é e au s u r v i v a n t , q ue sur ce q u ’ell e est c o n t r a i r e d l'a r t. 227 de la c o u t u m e , q u i n e
p e r m e t a u c u n a va nt a ge e nt r e ma r i et f e m m e , q u e c e l u i d u d o n m u t u e l des me u b l e s et
a c q u ê t s en u s u f r u i t , et dans le cas s e u l eme n t o ù ils n' ont p o i n t d ’e nf a n t d e l e u r u n i o n .
M a i s suppos ons q u ’il y e û t dans c e t te f a c u lt é d 'é l ir e un a va n t a g e q u e l c o n q u e au prof i t
du s u r v i v a n t , la n u l l i té d« la d i s p os i t i o n d e v r o i t - e l l e s’e n s ui v r e ?
C ’est i c i q u ’il c o n v i e n t d e r a p p e l e r la d i s t i n c t i o n des di s p o s i t i o n s p r in c ip a le s e t d i
r e c te s d ’a v e c les d i s p o s i t i o n s rela tiv es e t c o n d itio n n e lle s .
Sa ns d o u t e d e u x c o n j o i n t s , q u i p a r le c o n t r a t de m a r i a g e de l ’un d e l eurs e n f a n s , o u .
p a r t o u t a ut r e a c t e , d o n n e r o i e n t au s u r v i v a n t d ’e u x , d a n s le u r in térêt r e s p e c t if , et
p a r une cl a us e d ir e c t e e.t p r in c ip a le , la f a c u l t é de t r a ns me t t r e t out o u p a r t i e d e la suc*
c e s s i on d u p r é d é c é d é à un h é r i t i e r à é l i r e , f er oi ent u n e s t i pu l a t i o n n u lle , c o m m e co n t r ai r «
aux lois p r o h i b i t i v e s d ’a va n t a g e s e nt re é p o ux .
M ais il en est bien autrement lorsque cette faculté est donnée au survivant des c o n
jo in ts, par les contrats de mariage de leurs enfans , c o m m e ch a rg e e t c o n d itio n e x p r e s s e
d e leu rs in s titu tio n s .
L a raison e st, c o m m e on l ’a déjà d i t , q o e ce qui ne vaut pas dans un ca s com m e d i s
position p r in c ip a le , peut v a lo ir com m e disposition c o n d itio n n e lle .
C ’est a i n s i , on le r é p è t e , que le don fait par c o n jo in ts pendant le mariage , au profit
du s u r v i v a n t , de l ’usufruit des biens du p réd é cé d é , est nulle c o n n u e contenant un a va n
tage prohibé , tandis q u ’elle est v a la b le lorsqu'elle se r a tta c h e à u n e in s tit u tio n et
q u 'e lle en e s t la c o n d itio n .
C ette distinction est fon d ée sur ce que les c on v en tion s m atrim on iales sont susceptible#
de toutes sortes de clauses et c o n d itio n s qui n ’ont rien de contraire a u x bonnes m œ u rs,
et sur ce q u ’on ne pe u t pas séparer la r e n d itio n de la libéralité à laquelle elle est atta
chée , q u i s e n tit c o m m o d u m s e n tir e d e b e t e t onu s.
O r , c ’est com m e c o n d itio n de l ’in stitu tion des dames D e v a u r e et de Beauregard q u e
les sieur et dame D u m o n t o n t respectivem ent d o n n é , au su rviv an t d ’eux , la faculté de
disposer de toute la réserve ; c e q u i résulte de ces mots : « sa n s to u te s le s q u e lle s c la u s e s ,
c h a rg es e t c o n d itio n s , la d it e in s titu tio n n a u r o it été f a i t e . »
D ’où il y a lieu de c o n c lu re que la d isposition faite par Jean D u m o n t p è r e , de U
m oitié de la réserve , du c h e f d e P ro c u le P it a t , par le c o n tra t de mariage de 178 9 , en
faveur d ’A n d ré D u m o n t , est valable ; ce qui d o n n e surab on d am m en t à la r e p r é s e n t a n t *
d A n d ré D u m o n t un double titre à cette réserve.
t r o i s i è m e
r « o r o s i t [ o k.
S i les d a m e s D eva u re e t d e la R o q u e r e n o n c e n t an b én éfice d e le u r in s titu tio n ( en
su p p o sa n t q u 'e lle s y s o ie n t en co r e r e .c e v a b lc s, e lle 1 d o iv en t ê tte r é d u ite s à un
a p a n a g e , f i x é p a r le u r c o n s titu tio n d o ta le .
C e tt e prop osition ne p e u t f<*ire la matière du plus léger d oute : elle se trouve parfai-
6
�fv
( 22 )
teraent établ i e , et p a r l a
b o n n a i s , et p a r l e
pacte
l o i m u n i c i p a l e qui régissoit l ' a n c i e n n e p r o v i n c e d u B o u r
d e f a m i l l e q u i f ai t la l o i de toutes les par t i e s .
E lle est établie par la loi m u n icipale.
T o u t l e i n o n d e sait q u e , p o u r q u ’u n a p a n a g e f û t v a l ab l e c o m m e f o r c l u s i o n l é g a l e ,
c i n q c o n d i t i o n s é t a i e n t req-uises ;
i ° . Q u e la personne apanée fût une fille , et i l n ’im portoit qu’elle fut noble ou r o t u
r iè r e , majeure ou m i n e u r e , po u rv u q u'e lle eut l ’âge compétent p o u r le mariage ; a0, q u ’elle
fût mariée ;
ascendant ;
5 J.
5 °-
dotée ; 40. que la constitution dotale fût faite par père et mère ou autres
qu elle fut payée , en tout ou en partie , du v iv a n t des père et m ère.
E t il n ’étoit pas nécessaire , pour que l’apanage eût lieu , q u ’o n se fût servi du m ot
a p a n a g e : c ’étoit un point r o u tn m ie r incontestable , que la sim ple dotation d ’une fille
einportoit apanage et exclusion des successions de ses père et mère.
C 'est ce que nous attestent A
uroux,
D
fcullant
, D
urit
, G
enin
, V
incent
et
J a c q u e s P o t i f . r , a ncien s com m en tateu rs de l a coutu m e du Bourbonnais.
« U n e fille qu i a été m a riée , dit A
uroux
, par père ou par m ère , aïeul ou aïeule, et
à qui on a d onné en mariage quelque chose de certain , est réputée a p a n é e, et excluse
par conséquent des successions exprimées dans n otre a r tic le , q u o iq u ’elle n 'y eût pas expressement r e n o n c é , et q u ’on ne se soit pas servi, du m ot a p n n è ou a p a n a g e ; car il n ’est
pas nécessaire, po u r la valid ité de cette exclusion t a c it e et c o u tu m iè r e , q u ’on se soit
servi du mot a p a n é e , po u rv u qu’il y ait dotation f.iite a la fille , etc. »
O r , les d a me s D e v a u r e et de Beaur»-gard o n t é t é m a r iée s et d o té e s p a r l e u r s pèr e et mè r e ;
elles o nt r e ç u , du v i v a n t desdi ts p è r e et mè r e , tout o u p ar t i e de l eurs dot s ; il est d o n c
d a n s le voeu de la loi q u ’elles soi ent a p a n é e s , si elles ne s ont i nst i t ué es .
Ain.'i , lors même que lessieur et d.une D u m o n t ne se seroient point expliqués s u r l e u r
intention que leurs filles fussent apanées dans le cas ou elles n’accepteroient point l'ins
titu tio n avec ses charges , il faudroit nécessairement con clu re de leur reno nciatio n à l'ins
t i tu t io n , qu'elles demeurent apanées par la seule force des dispositions coutumiéres.
M ais cet apanage résulte e n outre
du p a c t e de f a m i l l e
qui fait la loi des parties.
L ' i n t e n t i o n des s i eu r et d.itno D u m o n t , q u e les d a m e s D e v a u r e et de Beauregard s oi en t
a p a n é e s si elles n ’a c c e p t e n t l eur i n s t i t ut i o n a v e c ses charges et conditions , est écrite eu
Oros
'
c a r
ac i è r e s dans leurs, c o n t r a t s d e ma r i a g e .
« De s i n s t i t u t i o n s l eur f u r e n t a c c o r d é e s , d i t M . C
iiabroud
dans nne c o n s u l t a t i o n d u
2 3 j ui n 1^07 , d o n t les i n t i m é s o n t une- c o p i e , à la c h a r g e d e la r é s ç r v e d e la terre d e
M o n t , à la c h a r g e d e la d i s p os i t i o n q u i s er o i t fai te de cett e t er re p a r les i n s t i t u a nt o u
l e s u r v i v a n t d ’e u x , à la c h a r g e d e ta d e s t i n a t i o n à A n d r é D u m o n t à d é f a u t de d i s p o ï i t i o n ; et les d o n s d e 40,000 l i y . en a v a n c e m e n t d e s uc c e s s i o n , e n t r è r e n t d a n s la i nèoi a
co mbin aison d ; volonté.
« C e q u ' i l f au t c h e r c h e r dans les d e u x c o n t r a t s , c ’rst l ’i n t e n t i o n des i n s t i t u a n s ;
v o lu n ta tr m p o t in s q u a n t v erh a s p e c iu r i p la ç a i t . ( L . 2 1 9 . f j . da v e r ho ru ni s ig n if. )
« O r , après a vo ir énum éré fes <h.irges qu'ils imposent aux instituées , ils fout é> rire que
ta n s to n te s c e s c h a r g e s , c la tts e s et c o n d itio n s , la d i t e in s titu tio n n ’ a 11ro it été f u i t e ,
et la d i t e f u t u r * a u r o it été tl p a n ce m o y en n a n t la d o t q u i a lla it lu i c tr - c o n s titu é e .
a Q u e signifie c e l t e ex p l i c a l i o n , qui n e s t pas là sans d e s s e i n , si c e n est q u e la l oi
*st L i t e à l’i nst i t ué e d ’.ic< o m p l i r les c h a r g e s et c o n d i t i o n s , ou d e r e n o n c e r à l 'i ns t i
t u t i o n , e t , d a n s c e c a s , de n ’être p l u s qu^un c fillo apai i ee et e x c l uo ? »
�( 23 \
*9
T o u t est i c i c o n d itio nn el : l'apanage ou l ’in s titu tio n , voilà l ’alternative qui est offerte
aux dames D evaure et de la R o q u e .
Il y a in s titu tio n , si les instituées se soum ettent aux obligations q u ’on leur i m p o s e ;
auquel c a s , les constitu tion s de 40,000 liv . sont u n avancem ent de l ’avantage q u i en
résultera.
S i , au c o n t r a i r e , les instituées se refusent à leurs obligations , les institutions disparoissent , et les constitutions ne sont plus q ue des fixations d ’a p a n a g e , d ’où résulte
l ’exclusion.
T e l l e fut év id e m m e n t la vo lo nté des in s titu a n s, et elle est la règle des deux institutions ;
p rim u m lo ciim o b t i n e t , rég it q u e c o n d itio n e s . ( L o i 19 , f f . d e e o n d it. e t d e m o n st. )
Osera-t*on dire , avec les intim és , que la clause ne contient point un apanage formel ;
q u ’elle ne manifeste que l ’intention où étoient les pere et mère d ’apaner leurs filles , dans
le cas ou elles n ’eussent p o in t été instituées sous des charges ?
U n e par ei l l e o b j e c t i o n s er oi t d ’a u t an t pl us i n o p p o r t u n e , q u e , c o m m e o n l ’a dé j à d i t ,
l o r s m ê m e q u e les s i eur et d a m e D u m o n t n ’a u r o i e n t pas e x p r i m é l eu r v o l o n t é , ell es
n e n s er oi ent pas m o i n s a p a n é e s , en r e n o n ç a n t à l ’i n s t i t u t i o n , p a r l e seul ef f et de l ’e x
c l u s i o n t ac i t e et c o u t u i n i è r e q u i r é s u l t e d e l e u r d o t at i o n .
M a i s c o m m e n t oser s o u t e n i r de b o n n e f oi q u e les s i eu r et d a m e D u m o n t n o n t pas
- suf f i samment m a ni f e s t é l e u r v o e u , l or s q u' i l s d é c l a r e n t s u b o r d o n n e r à des c o n d i t i o n s le
n o n - a p a n a g e d e l eur fille , et l eur r a p p e l à la s uc c e s s i on .
On le r é p è t e , ce pacte de fam ille auroit dû être sacré p o u r les dames D e v a u r e et de la
R o q u e ; rien ne d ev oit les dispenser d ’en exécuter religieusem ent le contenu.
.
Il devoit être d ’autant plus respectable à leurs y e u x , qu'il ém anoit d'un père et d ’une
m ere qui avoient été les artisans de leu r fo r tu n e , et q u i ont laissé une succession opulente
à des filles in g ra te s , qui insu ltent à leur m é m o ir e en foulant aux pieds leurs dernières
dispositions , lorsqu’elles d evoien t être p o u r elles des lois saintes et in v io lab les.
M ais il y a plus : tout ho m m e sensé ne verra dans une telle ob jec tio n q u 'u n e m isé
rable subtilité , q u ’un jeu de mots p u é r i l , qui fait d égén érer la cause en pure l o g o m a c h ie ,
in d ig n e de la majesté de la justice et de la sagesse de ses ministres.
E ll e avoit été pressentie par un drs c om m en ta teu rs de la co u tu m e du B o u rb o n n a is.
« N ous r e c e v o n s , d it M e n ü d e l , le précipu t au profit des uiâles au contrat de mariage
de la fille mariée et instituée héritière avec les frères, à la charge d u dit précipu t au profit
des f r e r e s , parce que les ascendans qui instituent p o m o ie n t apaner la fille , auquel cas la
r enonciation eût profité auxdits mâles. »
« Mais po u r «ter tout doute , a jo u t e - t - i l , il est à p ro p o s de d ire que les père et mère
®nt doie la fille de la som m e d e .......... à l.i charge de ve n ir à la succession en r ap p o rta n t,
que ou elle fuurniroit débat con tre ledit précipu t , déclarent qu'ils apanent ladite filla
6 la somme d e ..............p a r ce qu en mettant sim plem ent la clause q u ’ils instituent ladite
le sous ledit p r è r .ip u t, «lie peut dire q u ’elle n’a pas été apanée à défaut de l’exécu tion
e ladite clause , q u i so n n e to u te fo is e n i n s t i t u t i o n c o n d i t i o n n e l l e , et que les mots q u i
*®roient dans le contrat , sans lequel p réc ip u t les père et mère J'auroient n p a n e e , ne son t
P « un apanage f o r m e l , mais plutôt une sim ple énonciation d» dessein d ’apaner , le q u e l
n tant pas disertemeut exp liq u é , ne d*-vroit pas l'em pêcher de venir aux successions 11&
intestat des pere et m ère , en rapportant : laquelle o b je c t io n 11 est pourtant pas c o n s id é **
�( 24 )
ible , parce que le mot de b o t emporte quant à soi l ’ a p a n a g e
ral
p re ssen ti. »
On
v o i t que le c o m m e n t a t e u r M
enudel
,aliquo dalo de
a v o i t p r é v u ce t t e p u é r i l e o b j e c t i o n , e t
q ue l cas il en fait !
Il dit
par form e de c o n s e i l , et p o u r ôter tout prétexte aux subtilités de la c h i c a n e ,
q u 'il vaut mieux rédiger la clause de telle m a n i è r e , p lu tô t que de telle a u tre ; mai*
elle n ’en s o r t i r o i t pas moins effet , suivant l ui , parce que le m ot de d o t em porte tou
jo u r s quant à so i l apanage.
A in si , la question se trouve résolue , in te r m in is , par lin des hom m es les plu*
habiles et les plus expérimentés dans l'in telligen ce et l'interprétation de sa cou tu m e , par
un de ceux même qui l’ont com m en tée .
E t les dames D evaure et de la R o q u e auroient pu se flatter de réussir dans leur
tém éraire entreprise !
Osons le dire : s’il en étoit ainsi , il n ’y auroit plus rien de sacré parm i les h o m m e s ;
n u l a cte ne seroit A l’abri des atteintes de la cu pid ité et de la mauvaise foi. L ’effronterie pou rroit se jouer im p u n é m e n t de la foi des traites, et 1 ho m m e de bien deyroit
d outer de la justice u m n e .
D E U X I È M E
P A R T I E .
,
L e ju g em en t dont est a p p e l repose sur des m otifs insignifians ou erronés.
Si
m ité
la
dem oiselle
D u m o n t a , ainsi q u ’o n le p e n s e , c o m p lètem en t justifié la l é g it i
de ses prétentions , on d evra nécessairement en c o n c lu re q ue les premiers juge*
ont erré dans leur d éc isio n .
Mais pour ne rien laisser À désirer dans cette cause , elle va soumettre au creuset
de la discussion le s p r é te n d u s p r in c ip e s qui ont servi de base à leur jugement.
P b e m i e ' b m o t i f . « Une réserve faite avec stipulation que la disposition en sera f,iita
en faveur de^celui des enfans qu'il plaira à l ’in stitu a n t de c h o i s i r , n o t e point à l'in s
titu é le d ro it de r e c u e illir sa po rtio n dans 1 objet r e s e r v e , lorsque 1 instituant d ecede
sans d i s p o s i t i o n . »
RÉr ONSE. C ette prop osition est incontestable : elle étoit vraie sous lV m p ire de l ’or
d o n n a n c e de i 7 5 i , com m e elle l'est e n c o re a u jo u r d 'h u i , depuis que l'a rticle a de la
lo i du 18 p lu v iô se an
5
¡1 été abrogé.
M a is reçoit-elle applicatio n à l’e s p è c e ?
P o u r soutenir avec succès l'a ffirm ative , il faudroit que les sieur et d am e D u m o n t
e u s s e n t fait une réserve sous la seu le stipulation qu'ils p o u r r o i e n t en disposer en f.ivour
de c elu i de leurs enfans q u ’il leur p la iro it choisir.
Il f a u d r o i t faire disparoitre de l ’institution la clause , q u 'en cas de non disposition da
leur part , la réserve appa rtien droit à A n d ré D u m o n t à titre de p r é d p u t .
Il faudroit faire disparoitre de l ’institution la clause , qu en cas de non disposition d«
l ’ un d ’eux , le survivant pourra disposer de la totalité de la réserve.
Il faudroit f.iire disparoitre d u contrat de m ariage d ’A n d ré D u m o n t , la disposition d«
cette réserve effectuée ji.tr le sieur D u m o n t pare.
Il f a u d r o it, eu un m o t , c h a n g e r l ’état de la question.
C e p rem ier u i o t i f est d o n c en tièrem ent insignifiant.
�( *5 )
D e u x i è m e m o t i f . « A n d ré D u m o n t n ’a pu être saisi dé la terre de M o n t , par la clause
de destination , i°. parce qu'il étoit étranger aux contrats de mariage de ses soeurs , et q u ’il
est de principe que les contrats ne pe uve n t valoir q u ’entre les contractans ; z a. parce que
d après lesdispositions de T a rt. 219 de la coutum e du B ourbonnais, la donation ne p o u voit
Valoir à son p r o f i t , q u ’autant q u ’ elle auroit été faite par son contrat de mariage. »
ïlÉroN SE. Les-contrats ne pe uve n t valoir q u ’entre les contractans ; mais aussi doivent«
ils va loir entre les contractans ta n q u à m so n a n t ; o r , les sieur et dame D u m on t , c o n
tractans , n o n t in s titu é les dames Devaure et de Beauregarcl , q u ’à la charge de souffrir
la distraction de la terre de M o n t , destinée à celui des enfans qui seroit c h o i s i , et à A n d ré
D u m o n t , à d é fa u t da c h o ix . La cou tu m e du Bourbonnais qui permettoit cette institution,
ne s opposoit point à ce qu elle fut modifiée et grevé« de cette charge ; et la lo i ayant été
ainsi faite p a r les in s titu a n s, et n ’étant point c ontraire à la c o u t u m e , il n ’ y a pas da
m oyen légitim e de ne pas l ’e x é c u te r , à moins q u ’on ne renonce à l ’institution ; auquel
c a s , il ne reste plus qu une simple d o t a t i o u , e m p ortan t e x c lu s io n c o titu m iè r e , et par
conséquent a p a n a g e.
l i n v a i n d i r o i t - o n q u A n d r é D u m o n t n ’a y a n t pas f i guré au c o n t r a t , n« p e u t en r e q u é r i r
1 e xé c u t i o n : un e a c t i o n u t i l e a t o u j o u r s é t é a c c o r d é e d a n s le d r o i t , au tiers dé s i g n é , p o u r
f ai r e v a l o i r l u i - mê me , à son p r o f i t , la v o l o n t é d u d o n a t e u r , j n x t à d o n a to r is v o lu n ta le m .
N ou s avons d ém ontré que l ’ancien d roit accord oit cette action ; et l’art. 1121 du C o d e
N a p o l é o n , qui n ’est q u ’un résumé des principes à cet é g a r d , les consacre de nouveau.
C est ainsi que celui qui étoit institué sous la c o n d itio n d ’associer son frère, n’auroit
pu se dégager de la c o n d itio n , sous le prétexte que son fic re n’étoit pns partie co n tra c
tante au contrat.
L a demoiselle D u m o n t sera toujours fondée à dire aux dames DeVaure et de la R o q u e :
Ou vous vous présentez pour succéder en vertu de votre titre d ’in s titu tio n , ou bien vous
renoncez à ce titre ; dans le premier c a s , votre titre est in d iv is ib le , et vous devez l ’exécuter
in tégralem en t; dans le second c a s , n ’étant plus institu ées, vous n ’êtes que d o t é e s , et
dès-lors vous êtes f o r c lo s e s d e d r o i t , parce q u ’aux termes de l ’article 3o5 , et suivant la
ju risp rud ence la plus constante , toute fille sim plem ent d o té e est par cela m ême a p a n é» ;
d où il résulte que vous ne pouvez venir c o m m e héritières a b in te s ta t.
« M a i s , dit-on , suivant l ’art. 219 de la coutum e , la donation ne pouvoit valoir «u profit
d A n d r é D u i n o n t , qu autant q u ’elle auroit été faite par son contrat de mariage. »
O n ne répétera po in t i c i tout ce q ui a été dit p r é c é d e m m e n t , sur la différence essen
tielle qui existe entre une donation d ir e c t e et p r in c ip a le , et une disposition rela tive et
c o n d itio n n e lle attachée à une donation principale , d on t elle est une dépendance , et dont
®lle doit suivre le sort.
Kn d év elop p an t les vrais principes sur cette matière , on croit avoir réfuté d ’avance , et
Ur>e manière victorieuse , l ’ob jec tio n proposée.
M ais on léc a r te ra plus vic torieu se m en t e n c o r e , par l ’ exemple déjà rapporté.
ne institution faite au profit de deux fr è r e s , est nulle à l’égard de celui qui ne se mae l,i<s , tandis que si l ’on n'institue que celui qui se marie sous la condition que son frère
issoi ie à I i n s t i t u t i o n , e l l e v a u d i a au prof i t d e c e d e r n i e r , c o m m e c o n d i t i o n de l 'i ns
t i t u t i o n fa |le |vllltri,
C e d e u x i è m e m o tif est d o n c erroné, et c o n t r n i r e ¡1 une jurisprudence de plusieurs siècles.
T-Ro x s i e m e
motif.
« P r o c u l u P i i a t , ui ère des p ar t i e s , é t a n t d é c é d é e a v a n t le ma r i a ge
�( 36 )
d e son fils , et n ’a y a n t pas été à p o r t é s ,1e f ai re , en s* f a v e u r , la di s pos i t i on d e p r ê c i p u t
q u ' e l l e lui d e s t i n o i t , da ns la f o r m e q u ’i n d i q u e l ’ a rt, z i g de la c o u t u m e , ses trois enfans
ont é t é saisis d e sa s uc c e s s i o n au m o m e n t de son d é c è s . »
HÉroNSF.. C e m o t i f rentr e dans le p r é c é d e n t ; i l s up po s e q u e la t er r e de M o n t n ’ a pu être
a t t r i b u é e à A n d r é O ü i n o n t , p a r la d o u b le c o n d itio n app o s ée à l ’i ns t i t ut i o n de ses soeurs :
le c o n t r a i r e
ayant
Q uatrièm e
é té p r o u v é , on se di s p e n s e r a de r é p é t e r c e q u i a déj à été di t .
m o t i f
. « Les cl auses , c h a r g e s et c o n d i t i o n s a pp o s ée s a ux i n s t i t u t i on s des
d a me s D e v a u r e et de B e a u r e g a r d , é tant c o n t r ai r e s à la loi , d o i v e n t être r é p ut é e s n o n
é cr i t es . »
R é i ’O n s f . A u c u n e loi ne d é f e n d d ’i mp o s e r à u n i nst i t ué la c o n d i t i o n de s o u f f r i r le p r é
l è v e m e n t d ’un p r ê c i p u t ; et , au c o n t r a i r e , o n a t o u j o u r s t enu p o u r p r i n c i p e q u e les c o n
v e n t i o n s m a t r i m o n i a l * * é t o i e n t s us c e pt i b l es de toutes sortes d e cl a us es et c o n d i t i o n s q u i
n ’o nt r i en de c o n t r ai r e aux b o n n e s m œ u r s . '
L a r ai s on d i t
q u e des c o n d i t i o n s p o u v a n t êtr e apposées à un e l i bé r a l i t é , r i e n n e s’o p
p o s e à c e q u e le p r é l è v e m e n t d ’un p r ê c i p u t soit u n e de ces c o n d i t i o n s .
L e sentiment des auteurs, l ’autorité des anciens jurisconsultes de la sénéchaussée du
B o u r b o n n a i s , une jurisprudence d ’un siècle , tout atteste q u ’une telle c ond itio n n’a rien
d 'illicite et de con tra ire à la loi.
. C e m o t i f est d o n c e n c o r e e rroné.
M a i s ce n'est pas tout ; il est e r r o n é sous u n a ut r e r a p p o r t q ui a é c h a p p é aux p r e mi e r s
Ils avoient sans doute p e rd u de vue la différence que les lois romaines ont tracée entre
les cond itio ns illicites apposées d a n s le s te s t a m e n s , et les conditions illicites apposées
d a n s le s c o n tr a ts .
L e s p r e mi è r e s y aux t er mes d e la lo i 1 0 4 , §. i , f f . d e Irg a tis x ° . , et de la loi
3,
f f . do
c o n d itio n ib u s et d e m o n s tr a tio n ib n s , s ont r é put ée s n o n é c r i t e s , v itia n tu r e tn o n v itia n t.
L e s s e c o n d e s , au c o n r a i r e , v i c i e n t r a d i c a l e m e n t les cl a us es a u x q u e l l e s elles s ont a p
p o s é e ; , e t e m p ê c h e n t q u ’il en naisse a u c u n e o b l i g a t i o n : c ’est c e q u e d é c i d e n t e xp r e s s é me nt
l a loi 3 i , ff. d e o b lig u tio n ib n s e t a c t io n ib u s , et la lo i 7 , f f . d e v erb o ru m o b lig a tio -
n ib u s ; et c ’est ce q ui a été j ugé p ar d e u x arrêts de l a c o u r de c a s s a t i o n, des a z n i vô s e an q ,
et 6 floréal an n , r a p po r t é s p a r M . M f . r l i n , e n ses Q u e s t . île d r oi t . , v e r b . c o n d i t i o n .
I l s’agissoit , dans la d e u x i è m e e s p è c e , d ' u n e i nst i t ut i on c o n t r a c t u e l l e ;i l a quel l e on a v o i t
i m p o s é la c o n d i t i o n que l ' i nsti t ué ép o u ser a it te lle p erso n n e ; c o n d i t i o n q u e le d e m a n d e u r
en ca s s a t i o n s o u t e n o i t i l l i c i t e , et c o m m e t el l e r èp u to it non é c r ite .
« Q u a n d nous s u p po s e r i o n s , di sai t M . M b b l i n , q u e la c o n d i t i o n i i n p o s é e à M a g d e l c i n e
f î i r o i r , d ’é po us e r Pit-rre R o b y , d û t être c o n s i d é r é e , d ’apr ès le» I o n r o m a i n e s , c o m m e
i l l i c i t e , d é s h o n n ê t e et i m m o r a l e , à q u e l l e c o n s é q u e n c e c e t t e s u p p o s i t i o n nous c o n d u i r o i t eUe ?
« El le n ous c o n d u i r o i t
di r e , , n o n pas q u e la
condition
d é po us e r d o i t , d ' a p t è s les
lois
r o m a i n e s , être r e g a r d e s c o m m e non é c r i t e , mais, q " « l'in s t it u tio n c o n tr a c tu r llu f.iite
sous cett e c o n d i t i o n , d o it Ptre regarda 9.c o m m e n u lle d a n s son p r in c ip e ; »
et
il f o n d e
cette dé c i s i o n sur les lois r o m a i n e s citées,.
JLa lo i
, f f île oblig. fit n c tio m b u s , et les co n s u l er an s de 1 arrêt de la C o u r de c a s
sati on , d u 22 n i v ô s e an q , d o n n a n t p o u r m o t i f de cette d i f f é r e n c e e n t re IVffrt dt*$ c o n d i ù o n s i l l i ci t es apposées r.ux t o s l a m e n s , et ce l l e s appos ées aux n c t i s e n t r e - v i f s , q ue ces
�(2 2
( %1 '
de r n i e r s actes s ont l’o u v r a g e de pl us i eur s p e r s o n n e s q ui s t i p u l e n t s e l o n l e u r s vues et leurs
i n t é r ê t s ; e n sort e q u e ces c o n d i t i o n s e l l e s - mê me s o n t dû e s s e n t i e l l e me n t e n t r e r dans le*
c o m b i n a i s o n s de leurs v o l o n t é s , et q u' i l faut r e s p e c t e r la v o l o n t é d e t o u s , om nium volu n ta tes speclantur.
A la vé r i t é , l'a r t. 900 du C o d e N a p o l é o n a d é r o g é au d r o i t r o ma i n , en c e q u e d a n s les
d o n a t i on s e n t r e - v i f s , il r é p u t e n o n écri t es , c o m m e da ns les testatnens , les c o n d i t i o n s i m
p ossi bl es , et ce l l e s q u i s er oi ent c o n t r ai r e s aux moeurs et à la l oi ( Répert. du ju r is p . , p a r
M .
M
e r l in
, verb.
co n d itio n
) ; mai s le c h a n g e m e n t de l égi s l at i on n e p eut a vo i r a u c u n e
i n f l u e n c e s ur le sort d ' u n e co nt e s t a t i o n q ui d o i t se j ug e r d ’a pr ès les l oi s a n c i en n e s .
A i n s i s’il étoi t possi bl e de s u p p o s e r q u e h c o n d i t i o n d o n t il s’agi t f ut c o n t r a i r e a ux l o i s ,
les daines D e v a u r e et d e la R o q u e n e s er oi ent pas da n s u n e p o s i t i o n p l u s f a v o r a b l e ; c a r la
n u l l i t é d e la c o n d i t i o n e n t r a î n a n t cel l e de l ’i ns t i t u t i o n , ces d a m e s se t r o uv e r o i e n t r é dui t e s
a u n e s i mp l e d o t a t i o n , q u i o p é r e r o i t u n e f o r c l u s i o n l égal e.
Sous tous les r a p p o r t s , c e q u a t r i èm e m o t i f d u j u g e m e n t est d o n c u n e c o n t r a v e n t i o n à
tous les p r i n c i pe s .
C i n q u i è m e e t s i x i è m e m o t i f s . « A n d ré D u in o n t n'a pu être saisi de la m oitié de la
terre de M o n t , d u c h e f de P rocule P i t n t , par la disposition qu'en a faite son père à son
profit , en vertu de cette faculté réservée au survivan t , parce que ce droit d ’élection est
contraire à la coutum e du B ou rb on nais, suivant laquelle les époux ne p e u ve n t se d on n e r
que la jouissance m utuelle des meubles et acquêts , et dans le cas seulement où il n ’existe
pas d ’enfant de leur n nion. »
R
é po n se
.
L a d e mo i s e l l e D u m o n t a c o m p l è t e m e n t ré f ut é ce m o t i f da n s c e q u ’elle a d i t
sur les effets de la fa cu lté d 'é lire : p o u r ne pas se l i v r e r à des r é p ét i t i on s f as t i di eus es , e l l e
se c o n t e n t e r a de r a p p e l e r q u e , dans l ’ e s p c c e , l a f ac u l t é d o n n é e au s u r v i v a n t n ’e m p o r t e
p o i n t de s ubs t i t ut i on f î d è i c o i n mi s s a i r e , q u ’ell e ne l ui c o n f è r e a u c u n é m o l e i n e n t ; q u e s o u s
c e p o i n t de v u e , elle n ’est p o i n t c o n t r a i r e aux lois p r o h i b i t i v e s d ’a vant age s e nt re é po ux .
Q u e dans t o us les cas, si une telle f a c u l t é n e p o u v o i t v a l o i r c o m m e d i s p o s i t i o n p r i n c i pa l «
et d i r e c t e en f av e u r d u s u r v i v a n t , ell e do i t s ort i r effet c o m m e c o n d i t i o n d ’i nst i t ut i on ;
p a r la m ê m e rai son que le d o n d ’usufrui t des bi ens d u p r é d é c é d é en f av e u r d u s u r v i v a n t ,
q u i e m p o r t e p r o f i t , et qui ne peut a v o i r effet c o m m e d i s p o s i t i o n p r i n c i p a l e , est n é a n m o i n s
Val abl e q u a n d il est u n e d é p e n d a n c e d ’i n s t i t ut i o n c o n d i t i o n n e l l e .
S t p T i E M n e t dei\ n i e r MOTi r. « L ’i n e x é c u t i o n des c o n d i t i o n s ne c o n s t i t ue , c o n t r e les
dai nes D e v a u r e et de la R o q u e , a u c u n apa na ge , p a r c e q u e si les s i eur et d a m e D u m o n t
eussent vo ul u q u e leurs fille» f ussent ré dui t e s à un a p a n a g e , ils se s er o i en t s ervi s d ' e x p r e s
sions q u i ruî l aissrroi ent a u c u n d o u t e sur l eur v o l o n t é . »
RiïrONSF.
L o r s m e ne q u e les s i eur et d une D u m o n t n ’ a u r o i e n t p i s ma ni f e s t e 1 i n
tent i on o ù ils e t o i e nt q ue l eurs filles f ussent a panées si ell es n ’e x é c u t o i e n t pas les charges
*t c o n d i t i o n s de l eu r i ns t i t ut i o n , il est é v i d e n t q u e p a r le seul
fait
de l eu r
renonciation
a 1 i ns t i t ut i o n , elles se t r o u v e r o i e n t f orcl os es d e p l e i n dr oi t , en v e r t u des d i sp os i t i o ns
de la c o u t u m e . L a d e mo i se l l e D u m o n t se c r o i t di s p e n s é e d e r a p p e l e r i ci les p r e u v e s i rr é•istibles q u ’e l l e en a d o n n é e s .
Mais qui pourroit douter de l'intention des père et mère , lorsqu ils disent fo r m elle
m en t que sans toutes les cla u se s, cjiargfs et c o n d i t i o n s attachées à l institution leurs
filles n auroient point été instituées , mais apanées 11 leurs constitutions dotales ? .N'est-ce
pus le cas de répéter sans cesse , p o tiù t voluntatem quàm verba sp ccta ri p la ça it..
J J t
�A p rè s avoir réfuté lts m otifs du jugem ent dont est appel , il reste à la dem oiselle
D u m o n t à repousser quelques objections qui lui on t été faites en première instance , et
qu'on ne m anquera pas , sans d o u t e , de reproduire devant la cour.
Prem ière
oBJfcCTioN.
C e t t e o b j ec t i o n est p a r t i c u l i è r e à la d a m e de la R o q u e ; ell e
d i t : « P a r le c o n t r a t de m a r i a g e
d e la d a m e G r e l l e t d e B e a u r e g a r d , m a mè r e , les
si eur et d a m e D u m o n t , en se ré s er va nt la t er re de M o n t , n ’o nt pas-di t q u 'à d éfa u t de
d isp o sitio n , e lle appartiendrait à A n d r é D um ont. »
R
éponse.
L a clause du contrat de m ariage de la dame de Beauregard fournit la r é
ponse à cette objection.
E l l e p o r t e q u e le c o n t r a t est f ai t d a n s l'e s p r it d e c e l ui de m a d a m e D e v a u r e .
I l y est d i t q ue la rés er ve est f aite te lle q u 'e lle est exp liq u es a u d i t c o n t r a t .
11
y est ajouté que l'institution est faite sous les mêm es charges.
Q u o i de plus p o s itif! Si le contrat est fait dans le même e sp r it, si la réserve est la-
m êm e , si l ’institution est faite sous le s mêm es charges , il faut vouloir fermer les yeux
à la lu m iè r e , et m anq u er de bonne f o i , pour ne pas conven ir q u ’il existe entre ces deux
contrats une parfaite conform ité.
E n e f f e t , si l ’o n n e s o u s - e n t e n d da ns le s e c o n d c o n t r at t o ut e s les cl auses d u p r e m i e r ,
i l ne sera pas passé da n s le m êm e e s p r it.
S i l ’o n r e t r a n c h e la d e s t i n a t i o n au profi t d ’A n d r é
D m n o n t , e n cas d e n o n d i s p o s i
t i o n , la ré s er ve ne sera p l us t e l l e q u e l l e e s t e x p l i q u é e da ns le p re mi er co nt r at , et l’o n
n e p o u r r a pl us d i r e q u e l a s e c o n d e i n s t i t u t i on est sujette a ux m ê m e s c h a r g e s q u e la p r e
mière.
D isons
d o n c q u e la d e s t i n a t i o n au profi t d ’ A n d r é D u m o n t existe p a r m i les c o n d i t i o n s
i m p o s é e s à la d a m e d e B e a u r e g a r d , c o m m e e l l e existe p a r m i ce l l e s i mp o s é e s à la d a m e
Devaure.
M a is ind é pen d am m e n t de cette clause de d estin a tio n , on trouve dans le c on tra t de
m adam e de Beauregard une des conditions de {"imùUiûon form ellem en t exp rim ée, c ’est
c e lle q ui d on ne au s u rviv an t la faculté de disposer de toute la réserve ; et l'on sait que
cette condition a eu son a cc o m p lisse m en t dans le c o n tra t de 17^9 • au profit d A n d re
D um on t.
D
e u x iè m e
oisjectiom
.
« L a terre de M ont étoit un conquét de c o m m u n a u té , d on t la
d a m e D u m o n t a été incapable d e disposer pe n d a n t tout le cours de sa vie ; d o n c elle est
to m b ée dans l'hérédité. »
R éponse.
Q u ’on suppose une fem m e mariée qui a d i s p o s é d e tous Us biens q u V lla
laissera à ion d é c è s , par institution c o ntractu elle ou par te sta m ent, et q u'on rétorque
l'a r g u m en t.
Il l ’en suivra que la part de cette fem m e , dans l e s c o n q u i t s de com m unauté , ne devra
pas être com prise dans la disposition , parce q u e l l e aura été incap able d 'en d isp oser
pendant sa vie. Q uelle conséquence nbsurde ! qu elle l o g i q u e !
Sans doute la d a m e D u m o n t n ’auroit pu di s p o s e r , d'u ne manière a c t u e lle , de sa moitié
do la terre de M o n t , du viv an t de son m a r i , sans son concours ; mais ri< n ne s’opposoit
à ce q u e lle en disposât év en tu ellem en t , dans le cas où elle ne seroit pas aliénée à
1ep oque
de son dérès.
le sort de l'institution elle-même ; o r , Témolument
d e l’i n s t i t ut i o n est p u r e m e n t éventuel', o n n ’e n est saisi q u ’au d é c è s d e l ' i n s t i t u a n t ; et
L a c o n d i t i o n de p r è r i p u t suit i c i
�( 29 )............
jusque-lá ¡1 n ’y a rien de certain que le titre d ’h é r i t i e r , puisque l'in stitua n t peut faite
tou te sorte de contrats à titre onéreux.
A u s s i a-t-on t ouj ours d i s t i n g u é , dans l ’i ns t i t ut i o n , le titr e d ’h é r i t i e r , q u ’elle c o n f è r e
ir r é v o c a b le m e n t , d ’a v e c l'é m o lu m e n t , q u i n e se d é t e r m i n e q u ’au d é c è s , p a r c e q u e
j us que-l à l ’i nst i t ué n ’est saisi d e ri e n.
T
koisiéme o b ject io n .
« Dans la coutum e du B o u rb o n n a is, on ne p o u v o it être héritier
et légataire ; or, si la représentante d ’A n d ré D u m o n t r ec u eille p r é c i p u t , elle sera tout à
la fois héritière et légataire, elle réunira deux qualités incom p atib les ; elle ne peut d o n c
p rélev er le préciput et ve n ir à l'h érédité. »
R
éponse.
Confusion d ’idées , fausse application de principes : — A n d r é D u m o n t na
recueille point le p r é c ip u t à titr e d e legs-, on ne lui a légué ni donné la terre de M o n t
directem ent , et par une disposition p r in c ip a le e t is o lé e ; il tie la r ec u eille que parce
que c e s t une con d itio n im posée
à l ’institution des fille s, qui sans cela eussent été
apanées ; auquel cas A n d r é D u m o n t a u ro it recu eilli l’hérédité entière , ce qui lui eut
été bien plus avantageux.
Q u o n se r a p p e l l e c e q u i a déj à été d i t t o u c h a n t la d i s t i n c t i o n des d i sp os i t i o ns p r in
c ip a le s et c o n d itio n n e lle s , le s e n t i me n t des j u r i s c o n s u l t e s d e la s é n é c ha u s s é e du B o u r
b o nn a i s , et c e q u i a été j u g e p a r 1 a r r ê t de 1 7 1 6 ; et l ' o n sera c o n v a i n c u
q u e ce t t e
o b j e c t i o n n' est q u e l e f r u i t d e l ’i g n o r a n c e 011 d e la ma u v a i s e foi.
Q
u a t r iè m e
O
b je c t io n
.
« A la inort de m adame D u m o n t , disent les a d versa ires, la
m oitié de la terre de M o n t a dû résider sur la tête d 'A n d r é D u m o n t s e u l , ou sur la têts
de ses héritiers a b i n t e s t a t ; o r , ajoute-t-on , si elle a résidé sur l.i tète d ’A ndré D u m o n t
s e u l, vous devez renoncer à l ’argum ent tiré de ce que le su rviv an t a eu le d ro it de lui
d o n n e r cette m o i t i é , par son contrat de mariage de 17S3. »
R
éponse.
C e t t e o b j e c t i o n n ’est q u ’ un p a r a l o g i s m e q u i se r é f u t e e n de ux mot s,
O u l ’on soutient que la disposition faite en vertu de la fa cu lté d ’élire est nulle» ou ort
r ec o n n o it q u ’elle est valable.
D an s le p rem ier cas, il faut réputer c o m m e non aven ue la disposition faite en vertu
d u droit d élection ; et alors il sera vrai de dire q u ’à l’instant du décès de P rocule P i t a t ,
la propriété d e la moitié de la terre de M o n t a résidé in c o m in u ta b lem rn t sur la tête
d A n d r é D u m o n t , par la destination con d itio n n elle a c c o m p lie à son profit.
Dans le s e c o n d c a s , c o m m e i l y a v o i t d e u x c o n d i t i o n s a pp o s ée s à l ’i n s t i t ut i o n , il f a u
d r a di r e q u a u dé c è s d e P roc u le P i t a t , la saisine par v o i e d e d e s t i n a t i o n n etoi t qu eV e n t u e l l e , q u e l l e etoit e l l e - i n e me c o n d itio n n e lle et s u b o r d o n n é e à l ’é l e c t i o n à f ai re p ar
le pére s u r v i v a n t .
E n sorte que s’ il n’eût po in t fait d e l e c t i o n a vant son d é c è s , la saisine, par voie de
destination, seroit devenue d é fin itiv e et a b s o lu e ; et q u ’ayant fait une élection en faveur
du sieur D u m o n t, cette élection n ’a fait que confirm er la destination originairement faite.
L ’objection ne conduit d o n c à rien de favorable au système des a d v e r s a i r e s . o b j e c t i o n . « E n renonçan t à l 'i n s t i t u t i o n , les dames D«y.iurn et de
B e a u r ig r1, j , l e resi ent point apanées; il im p liq u e c o n t r a d i c t i o n de ronsn ltrer c o m m e
C inquièm e
apanage une dot constituée en avancem ent d 'h oirie , et qui p** s " j * ,te *'1 rapport. »
R ù t o n s f . . O r , jc lle j e l'obscurité dans la m a tiè r e , par une p e rp étu elle confusion des
lu oti el d ts choses.
8
�Sans cloute, on ne peut être apanée et héritière tou t à la f o i s , mais i l faut être
n é c e s s a i r e me n t l ’une o u l ’a ut r e .
E n v o u s i n s t i t u a n t h é r i t i èr e s sous des c o n d i t i o n s , il Falloit b i e n v o u s d o t e r e n a v a n
c e m e n t d ' h o i ri e ; ma i s c e t a v a n c e m e n t d ’h o i r i e se r é f è r e à l ’i ns t i t u t i on d o n t e l l e f ai t
p u r t i e , et s up p o s e s o n a c c e p t a t i o n . S i l ’i n s t i t ut i o n est a c c e p t é e , e l l e ne p e u t l ' êt re q u ’a v e c ses c h a r g e s et c o n d i t i o n s . S i
elle n ’est p o i n t a c c e p t é e , t oute la cl ause d i s p a r o i t , et il n e reste p l us q u ’ un e d o t a t i o n ,
q u i n ’est et n e do i t êtr e , dans l e v œ u d e l a c o u t u m e et de s p è r e et m è r e , q u ’un
apanage.
Q ue
les dai nes D e v a u r e et de B e a u r e g a r d s o i e n t d o n c c o n s é q u e n t e s et d ’a c c o r d a v e c
e l l e s - mê m e s ! Si elles r e n o n c e n t à l ’i n s t i t u t i o n , i l n e l eu r est pl us p e r m i s d ’en i n v o q u e r
l es d i s p os i t i o ns p o u r se s o us t r a i r e à l ’a p a n a g e .
S i x i è m e o i ï j e c t i o k . « P o u r q u ’une d o t soi t r é p u t é e a p a n a g e , il f aut q u ’e l l e soit c e r
t ai ne , et non s u je t te à ra p p o rt; o r ,
si les aut eurs c o m m u n s s’é t o i e nt r u i n é s , A n d r é
D u i n o n t a u r o i t p u f o r c e r ses soeurs au r a p p o r t : o n n e p e u t d o n c pas c o n s i dé r e r l e u r d o t
c o m m e un apanage. »
R é p o n s f . Il n ’est pas v r a i q u e les d a me s D e v a u r e et de B e a u r e g i r d eussent été forcée«
d e r a p p o r t e r l eurs d o t s , si les a ut e ur s c o m m u n s s et oi e nt r u i né s , p o u r v u t o u t e f o i s q u e
l e fils e ut t r o u v é sa l é g i t i m e dans la s u c c e s s i o n ; elles a u r o i e n t é i é b i e n f on d é e s
à
l ui d i r e :
N o u s r e n ô n r o n s à l ’i n s t i t u t i o n p o u r n o u s en t eni r à not r e d o t q u i c o n s t i t u e n o t r e a p a n a g e .
Il
n ’est pas vr ai n o n p l us q u ’ une Fille a p a n é e s o it d is p e n s é e d u rapport d a n s to u s
le s c a s ; ell e est au c o n t r ai r e t e n ue d e r a p p o r t e r , q u a n d les aut res enf ans ne t r o u v e n t
( L e b r u n , d e s S u c c e s s . , liv. 3 , c h a p . 8 ,
A u n o u x , su r l ’ a rt. 2 1 9 , n°. 7 9 , a u x a d d it io n s . )
pa s l e u r l é g i t i m e .
Il
sect. i ,
7 3 ; et
y a c e t t e d i f f é r e n c e , q u e la fille a p a né e est e xcl us e d e l a s u c c e s s i o n , sans p o u v o i r
d e m a n d e r un s u p p l é m e n t de l é g i t i m e ( A r t . 2 1 9 , n°. 6 7 . ) ;
T a n d i s q u ’e l l e est o b l i g é e d e r a p p o r t e r p o u r la l é g i t i m e d e ses f rères et soeurs.
L e r a i s o n n e m e n t des a d v e r s a i r e s , sur c e p o i n t c o m m e s u r t o us les a u t r e s , r e p o s e d o n c
4Ur d e faux p r i n c i p e s .
R É S U M É .
i
°.
L e s dai nes D e v a u r e et
i n s t i t u t i o n s faites
à
de
la
Roque
s ont a u j o u r d ’h u i non
reccvables
à
r e n o n c e r a ux
l eur p r o f i t , p o u r se d é g a g e r des c ha r g es et c o n d i t i o n s q u i en f o n t p a r t i e
i n t é g r a n t e , p a r c e q u ’elles o nt a c c e p t é ces i n s t i t u t i o n s , e n e x é c u t a n t , d e p u i s le dé c è s de
l e u r m è r e , et p e n d a n t u n e l ong ue s ui t e d ’a n n é e s , les c l a us es d e leurs c o n t r a t s de mari age.
C e t t e e x é c u t i o n rés ul t e d e ce q u ’ elles o nt r e ç u t out o u p a r t i e des c a p i t a u x de l eurs d o t i
d u v i v a n t d e l eurs pèr e et mè r e ; d e c e q u e l ’ un e d ’elle» a reçu a nn u e l l e m e nt , d e p u i s le
d é c è s d e sa m è r e , les i ntérêt s de ce qui l ui res t oi t d û , et d e c e q u e l l e s o n t l ’une et l ’aut re
a c c o m p l i la c o n d i t i o n i m p o s é e à l eur i n s t i t u t i o n , d e l aisser j o u i r l e s u r v i v a n t des p è r e et
m è r e des bi ens d u p r é d e c é d e .
O r , elles n ’o n t p u t o u c h e r l eurs d o t s q u e c o m m e filles m a r ié e s e t d o t é e s , ou c o m m e
h é r itiè r e s in s titu é e s .
A i » p r e m i e r c a s , elles sont a p a n é e s , et f o r c l o s e s d e s s u c c e s s i o n s d e leurs p è r e e t m è r e .
�A u secon d c a j , elles on t a ccepté l ’institution , et se tr o u v e n t soumises à l'e xécution
des charges qui en font partie.
2". A u F o a » , le p r é c ip u t attribué à A n d ré D u m o n t doit sortir son effet p a r suite
de la d o u b le c o n d itio n a ttachée à l ’institution des filles.
C ette double c o n d itio n réside dans la d estination de la t e r r e , au profit d A n d r é
Dutnont , en cas de non disposition ; et dans la fa cu lté d ’élire attribuée cousine c o n
dition de l'in s titu tio n , au su r v iv a n t des père et m è r e ; lesquelles conditions ont reçu
leur accomplissement.
5 °. Si les dames D evaure et da la R o q u e reno ncen t à l ’institution , elles dem eurent
apanées à leurs constitutions d o ta le s , p a r ce que tel est le voeu form el de la cou tum e du
Bourbonnais , et le voeu du pacte de fam ille qui fait la loi de toutes les parties.
Si toutes ces résolutions po u voie n t faire la matière du plus léger d o u t e , il faudroit dire
qu il n’y a rien de certain en jurisprudence ; que le flambeau de la loi n’est q u ’une fausse
lu eu r qui égare ; que les p r in c ip e s d u d ro it ne sont que des erreurs a ccréditées , et
que 1 evid ence m êm e peut être réd u ite en p r o b lè m e .
S ig n é H I L L I A R D et B a r t h e l e m i G I B O N T , c o tu te u r s.
M ' . J U T I E R , a voca t.
M e. H U G U E T , avoué l ic e n c i é .
v
Les anciens Jurisconsultes soussign és, sp écia lem en t attachés au ministère de la justice,
qui ont lu avec attention le M é m oire fait pour la dem oiselle A n n e D u m o n t ,
E stim en t que les propositions qui y sont discutées sont résolues d ’après les plus saines
maximes du d r o i t , en matière d ’institution c o n t r a c tu e lle , et p a rticu lièrem e n t d ’après
la jurisprudence qui a fixé sur ce po in t la juste a p p lic a t io n des dispositions de la
coutum e du Bourbonnais ;
Q u e l ’institution faite en fa veur des sœurs d ’A n d ré D u m o n t , dans leurs contrats de
m a r ia g e , est in d iv is ib le; q u ’on ne peut en détruire les ch a r g e s, sans la détruire elle-m êm e;
que 1 acceptation de l’institution entraîne nécessairement l ’a ccom p lissem en t des conditions
qui y sont apposées , lesquelles ne sont contraires ni aux lois , ni aux bonnes moeurs ; que
le p réc ip u t a ttribué à A n d r é D u m o n t , doit par con séqu e n t faire partie des droits de sa
fille qui le represente , c o m m e c o n d itio n form elle de l ’institution de ses soeurs ; que c ’est
là un pacte de fam ille consacré par plusieurs actes , auquel on peut d ’autant m oins porter
atteinte q u ’il a été exécuté ;
'
Qu ainsi la dem oiselle D u m o n t doit obtenir la réform ation d u ju gem ent rendu par 1«'
tribunal c i v i l de G a n n a t , le 26 décem b re 1807.
d é l i b è r e à P a r i s , le i /j. m ai x8o8.
B E R N A R D I.
B.
M.
D E C O MB RO U S S E.
#
V u le M é m o ire des tuteur» de la dem oiselle D u m o n t , contre les sieurs e t
�( 32 )
dames R a b u s s o n - D e v a u r e et de l a R o q u e , signé des t u t e u r s , e t de J u tie r ,
a v o c a t , et H u g u e t , a vou é ;
. ,
. ,
.
L e C onseil pense que le précipu t d e la terre de M o n t doit être adjugé en entier
à la m i n e u r e ; et que le jugem ent du tribunal de G ann at , dont les motifs sont
très-clairem en t réfutés dans le M é m o i r e , doit être infirmé.
A P a r i s , le 1 5 juin 1808.
C H A B R O U D .
* M A I L H E.
POIRIER.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Hilliard. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jutier
Huguet
Bernardi
Decombrousse
Chabroud
Mailhe
Poirier
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
contrats de mariage
communautés de biens entre époux
dot
forclusion
fils avantagé
successions
avantages prohibés
préciput
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les sieur et dame Hilliard, cotuteurs de la demoiselle Dumont, appelans ; contre les sieurs et dames Rabusson, de Vaure et de la Roque, intimés.
Table Godemel : Préciput : 2. une disposition de préciput, en coutume de Bourbonnais, faite en faveur d’un fils par ses père et mère, dans les contrats de mariage de ses deux sœurs, comme condition de non apanage et d’une institution contractuelle à leur profit, est-elle valable, lors surtout que par le contrat de mariage du fils, le père survivant a surabondamment confirmé cette disposition, en vertu de la faculté que s’en étaient réservée les instituants, comme condition de cette même institution ? les sœurs instituées peuvent-elles soutenir que la réserve et dispositions faites en faveur de leur frère, étranger à leurs contrats de mariage, ne pouvaient leur enlever leur portion dans l’objet réservé, cette disposition n’ayant pas été faite dans son propre contrat de mariage, aux termes de l’article 219 de la coutume ? peuvent-elles à leur institution pour se dégager des charges et conditions qui en font partie, et demander le partage par égalité ? Ou, au contraire, en cas de renonciation, devraient-elles être réduites à l’apanage fixé par leur constitution dotale ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1775-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1803
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1802
BCU_Factums_G1801
BCU_Factums_G1804
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53330/BCU_Factums_G1803.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saulzet (domaine de)
Deux-Chaises (03099)
Mont (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avantages prohibés
communautés de biens entre époux
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
dot
fils avantagé
forclusion
préciput
secondes noces
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53331/BCU_Factums_G1804.pdf
3165fdc4966a60d05146bd2a44a09d30
PDF Text
Text
HILLIARD , cotuteurs
D u m o n t , appelans;
P o u r les sieur et dame
de la demoiselle
RABUSSON
D E VAURE et D E L A R O Q U E intimés.
C o n t r e les sieurs et dames
,
L E S O U S S I G N E , qui a lu le mémoire imprimé
pour les sieur et dame H illiard, cotuteurs de la demoi
selle D u m o n t, appelans, contre les sieur et dame R a
busson de V a u re, et contre le sieur de la Roque, intimés-,
qui d’ailleurs connoissoit déjà la contestation, sur les
pièces originales qui lui avoient été communiquées à
P a ris, afin de connoître son opinion,
E s t d ’ a v i s que la prétention des sieur et dame
Rabusson de V a u r e , et du sieur la R o q u e , est absolu
ment destituée de fondement, et que le jugement rendu
par le tribunal civil de Gannat doit être infirmé.
O u n’a pu soutenir cette prétention qu’en se créant
Une fausse logique, à l’aide de laquelle on n’a pas craint
d’attaquer tous les principes.
Quand il y auroit quelque subtilité dans les raisonnemens des sieur et dame Rabusson de V au re, et du sieur
de la R o q u e , cette subtilité n’échapperoit certainement
pas aux lumières de la cour d’appel ; mais il est constant
A
�•> I
(
2 )
que ces raisonnemens n’ont pas même le triste mérited’etre subtils.
L e droit de la mineure Dum ont prend son fonde
ment, et dans les clauses des conti'ats de mariage de Marie
et Marguerite D u m o n t, filles de Jean Dumont et de
Procule P it a t , et dans les dispositions de l’article 3 o 5 >
de la coutume du Bourbonnais.
On sera dans la v é r i t é , en conciliant les unes avec
les autres , en considérant les conventions établies dans
les contrats de mariage comme des modifications à la loi
municipale ; modifications uniquement avantageuses aux
filles qui se marioient, et contre lesquelles elles s’élèvent
avec une injustice qui tient du ridicule. En partant de
là , on sera conduit à cette, conséquence certaine, que
M a r i e et Ma rg u er it e D um ont n’ont dû avoir que la partie
des biens de leurs père et mère qui leur a été assurée
par leurs contrats de mariage , et que tout le surplus
est devenu le patrimoine d’A n d ré Dumont.
R e m e t t o n s -nous encore sous les yeux les clauses du
contrat de mariage de Marie D u m o n t, fille aînée, en
observant qu’elles feront connoitre aussi les clauses du
contrat de mariage de Marguerite D u m ont, fille puînée,
parce que, malgré quelques réflexions qu’on a faites pour
établir une différence entre ces clauses, il sera aisément
reconnu , lors de la discussion générale des mo yens , qu’il
n’y en a aucune, et que les clauses du second contrat se
réfèrent entièrement à celles du premier.
Les filles furent instituées héritières par égales portions
avec les antres enfans; mais ce fut en même temps sous
la r é s e r v e expresse que Jean Dumont et Procule Pitat.
�(3 )
se firent de la terre de M on t et autres objets. Il fut dit
que les sieur et dame D u m o n t, ou le survivant (P eu x,
pourroient disposer des objets réservés, nu profit de tels
de leurs enfans qu’ ils jugeroient à propos , môme de la
future, par quelqu’acte que ce fût. Il fut ajouté que dans
le cas de non disposition de la part des père et m è r e ,
la terre de M o n t , et les autres objets réservés, appartiendroient en toute propriété à André D u m o n t, leur
fils, lequel en demeureroit précipité.
A la suite de ces dispositions 011 inséra encore la clause
suivante : « L a d ite institution f a i t e sous ladite réserve,
« et ¿1 condition de ladite disposition , et encore i\ la
« charge par la future de laisser jouir le survivant de
« ses père et mère de la portion qui lui seroit revenue
« dans les biens du prédécédé ; sans toutes lesquelles
« charges , clauses et conditions ladite institution
« n ’ a u r o i t é t é f a i t e , et la future auroit été apanée
.« moyennant la dot qui va lui être constituée. »
V ien t ensuite la constitution de dot, faite en avance\ ment des futures successions, de 30000 livres.
Procule Pitat décéda en 1783, sans avoir fait d’autres
dispositions que celles contenues dans les contrats de
mariage de ses filles.
A n dré D u m o n t, son fils , se maria en 1789.
Par son contrat de mariage, Jean D u m o n t, son père,
rappelant le défaut de dispositions ultérieures de la part
de Procule P ita t, son épouse, et la faculté de disposer
accordée au survivant d’eux par les contrats de m a r i a g e ,
disposa à son prolit de la totalité des réserves portées
par ces mêmes contrats.
A 2
�( 4 )
'
r
.
Contester cette disposition, en ce qui concerne Procule
P it a t , c’est attaquer l’évidence. Cette disposition doit
autant avoir son effet que celle faite personnellement par
Jean Dumont.
P o u r s’en convaincre encore plus, il faut rapprocher
des conventions et des faits qu’on vient de rap p o rter,
les dispositions de l’article 305 de la coutume de Bour
bonnais : « Fille mariée et apanée par père ou par
« m è r e , aïeul ou aïeule paternels ou maternels , après
« le décès de ses père ou m ère, aïeul ou aïeule paternels
c< ou maternels, ne peut demander légitime ni supplé« ment d’icelle, ni aussi venir à succession collatérale,
« dedans les termes de représentation, tant q u 'il y a
'« mâle ou d e s c e n d o n s d e m â le , soit mâle ou femelle,
« héritant ès-dites successions , combien qu’elle n’y ait
« expressément ren on cé, etc. »
A quoi se réduisent les conventions établies par les
contrats de m ariage, combinées aVec les dispositions de
la coutume.
Il n’est pas exact de d ir e , ainsi que le répètent sans
cesse les intim és, et comme on le voit dans le jugement
dont est appel, que Jean D um ont et Procule Pitat n’ont
pas apané Marie et Marguerite Dumont; que s’ils eussent
voulu que leurs filles fussent réduites à un apanage, ils
se sei’oient servis d’expressions qui ne laisseroient aucun
doute sur leur volonté.
Q u’ont fait Jean D um ont et Procule Pitat? Ils avoient
le pouvoir de forclore ou apancr leurs filles, et de les
réduire à une dot; mais par attachement pour elles, pour
les marier pins avantageusement, et dans les vues d’un
�(
5 )
arrangement salutaire à leur fa m ille , ils ont voulu ne
pas exercer en son entier la faculté que leur donnoit la
loi. Ils ont jugé à propos de limiter le droit de forclore;
mais la limitation d’un droit n’en est-elle pas l'exercice
même ? et celles contre lesquelles l’exercice de ce droit
pouvoit être dirigé dans toute sa fo rce , peuvent-elles
se, plaindre d’une limitation qui est entièrement à leur
avantage ?
Sans doute M arie et Marguerite D um ont ont reçu,
par leurs, contrats de m ariage, le droit de participer,
comme héritières conventionnelles, aux successions de
Jean D um on t et de Procule P ita t; mais ont-elles été
investies de ce droitt d’une manière indéfinie ? Ce droit
art^il été la base fondamentale des conventions de leurs '
contrats de m ariage? a - t - i l été accordé comme étant
l’effet d’une volonté absolue de Jean Dum ont et de
Procule Pitat? art-il été créé dans toute l’étendue possible,
sans conditions, abstraction faite des dispositions de la
loi municipale, et de la faculté de forclore qu’elle attribuoit à J e a n .D um ont et à Procule P ita t?
Il faudroit aller jusque-là pour soutenir la prétention
dep intimés ; aussi n’onti-ils pas manqué de se placer
dai^SiCette position»
Mais p o u r. peu qu’on réfléchisse suv. les dispositions
faite? , paTf.les contrats, d e , mariagi?. , on est convaincu
quelles n’ont,jamais-étç détachées de l'influence que la
loi municipqlç exçrçoitsur lç sort de M arie et Margperiter
Durp.qotj au mpment de leu 3ç;rnqpiage, lorsque la volonté
desppère; etf mère, concouroit ,qvoç le yœ,u de. la loi..
Lovsqu’jlos’agit/ d’intçrprétqp dps clauses do, contrats
A 3
�de m ariage, de démêler les vues qui ont présidé à des
arrangemens de fam ille, on ne doit pas toujours être
asservi à un ordre d’écriture. O r , en se pénétrant de
l ’ensemble des dispositions des contrats de mariage de
M arie et Marguerite D u m o n t , il devient évident pour
tout homme qui recherche la vérité de bonne fo i, que
l ’apanage ou la forclusion moyennant une d o t , ont été
la première idée qui se soit présentée à l’esprit des contractans, et que la seconde idée a été la limitation de
ce droit que les père et mère n’ont point voulu exercer
dans toute la rigueur.
L ’attribution que Jean D um ont et Procule Pitat ont
accordée à leurs filles, du droit de leur succéder, mais
non par égalité avec leur fils, et sous des réserves posi--'
tives et déterminées, stipulées en faveur de ce fils auquel
la l o i , de son propre ministère, les déféroit; cette attri
bution, disons-nous, n’a pu être autre chose qu’une
exception h la forclusion , ou une limitation du droit
de forclore. L e droit de succéder qu’ont eu Marie et
M arguerite D u m o n t, n’est point émané de la loi ; il a
été l’effet de la volonté des père et mère : ceux-ci avoient
le droit de les en p r iv e r , ils le leur ont accordé, mais
ils ne l’ont pas fait pleinement ; ils ont mis des bornes
à ce d ro it; ils ont voulu qu’il ne portât que sur une
partie des biens ; et en voulant cette restriction, ils ont
entendu que le restant des biens demeurât sous l’empire .
de la loi qui les attribuoit au fils, s’il n’en étoit pas
privé dans la suite par la volonté des père et mère.
T o u t ce qu’on vient de dire résulte de ces termes qui
s’élèveront toujours avec la plus grande force contre la
�C7 )
prétention des intimés : « Ladite intitutîon fa it e sons
« ladite réserve, et à condition de ladite disposition..,. « sans toutes lesquelles charges , clauses et conditions
« ladite institution n ’ AUROIT é t é F A I T E , ET LA
« f u t u r e a u r o i t é t é a p a n é e moyennant la dot qui
« va lui être constituée. »
Si Jean Dum ont et Procule Pitat eussent apané
M arie et Marguerite Dum ont moyennant une dot ,
elles n’auroient rien à prétendre dans les successions de
leurs père et mère ; Jean D um ont auroit eu seul le droit
de recueillir ces successions, en payant les dots. C ’est
un point qu’on ne r év o q u e pas en doute.
E t parce que Jean D u m o n t et P r o c ul e Pitat ont
voulu adoucir le sort de leurs filles ; parce qu’ils ont
voulu modifier en leur faveur le pouvoir qu’ils tenoient
de la lo i; parce qu’ils ont accordé qu’elles eussent, môme
à titre d’héritières conventionnelles, une partie de leurs
biens, outre la dot qui leur étoit constituée, mais en
réservant le restant et en confirmant la destination que
la loi en faisoit à leur fils, on prétendroit qu’il est résulté
de là que les filles sont devenues tout à coup habiles à
succéder, comme si leurs père et mère n’avoient jamais
eu le droit de les priver de leurs successions, comme s’il
n’y avoit point eu d’enfant m â le , et de la même manière
que si le droit de forclore les filles, y ayant un enfant
m âle , n’eût jamais existé !
Quelles sont les personnes qui pourront jamais être
convaincues de la vérité d’une pareille proposition ? C ’est
un principe élém entaire, indiqué par la seule raison ,
que celui qui peut le plus, peut à plus forte raison le
�moins. Jean Dum ont et Procule Pitat pouvant priver,
leurs filles du droit de leur succéder, moyennant les
dots qu’ils leur assuroient, pouvant le faire sans qu’ il y
eût de leur part aucune disposition en faveur de leur
fils ? celui-ci tenant les
* biens de la seule volonté de la Loi,
on sent qu’à plus forte raison ils ont pu relever leurs-,
filles de la forclusion coutum ière, sous des conditions,
et que ces conditions forment une loi domestique qu’il
n’est pas permis aux filles d’enfreindre.
Il y a eu un avantage pour les filles à être relevées^
de la forclusion ; cet avantage, on l’a teim de la conven
tion ; il y a été apposé des conditions. O r , on ne peut
profiter de l’avantage sans se soumettre aux conditions
sous lesquelles il^ a été fait : voilù les premières, notions
de droit contre lesquelles il est impossible qu’on s’élève
avec succès.
!
Il n’y a pas eu de convention simple et absolue/, i l i;
n’y a eu qu’une convention modifïcative de la lpi. La^.
convention a déféré aux filles une partie des biens, outre,
la d o t, et la loi a exercé tout son empire sur le surplus r
des biens;'elle les a réservés au fils, d’accord avec le vœu.,
des père et mère. Ceux-ci ont .voulu, ou qu’on s’en tînt
à la convention telle qu’elle étoit ré g lé e, et avec toutes,,
ses conditions , ou qu’on fût renvoyé à la loi. O r , la loi
perinettoit la forclusion, et les père et mère ont déclaré,)
qu’ils vouloient cette forclusion, si les filles ne se teupient
pas a la convention : « 'Sans toutes lesquelles charges,
« '.clauses et conditions ladite., institution rtauroit été
« f a i t e , et la future auroit été apanée m oyennant la
« dot (lui va lu i être constituée, y
�( 9 )
.
..
On 11e conçoit donc pas qu’on puisse dire qu’il n’y a
pas eu d’apanage dans les contrats de -mariage de Marie
et Marguerite Dumont. Celui qui auroit pu être entiè
rement libéré en donnant un écu, ne le seroit donc pas
parce qu’il en auroit voulu donner cinq ?
D u raisonnement des intimés il résulteroit encore que,
dans les principes de la coutume de Bourbonnais, un pèi’e
qui auroit eu un fils et deux filles, se seroit trouvé dans
celte nécessité absolue, ou de forclore ses filles de sa suc
cession , moyennant une d o t , ou d’assurer une égalité
pai'faite entre le frère et les sœurs : système dont l’ab
surdité se sent sans aucun effort de raison. T^a loi qui
to lé r o it, à l’égard des filles, une rigueur admise dans
des vues de bien public, permettoit sans doute un adou
cissement, bien loin de vouloir en punir des pères et
mères et ceux des enfans qui étoient l’objet de celte
rigueur.
L e second moyen sur lequel les intimés se fo n d e n t,
consite à dire qu’ André Dumont n’a pu prétendre dans
la succession de Procule Pitat une portion de biens plus
considérable que ses sœurs, parce qu’il n’y a point eu
en sa faveur une disposition directe de la part de P ro
cule Pilât.
En raisonnant ainsi on élude la question qui est
juger, pour en présenter une qui n’existe pas.
On ne sera jamais dans la question , tant qu’on di
visera les conventions portées par les contrats de mariage1
de Mario et de Marguerite D u m o n t, tant qu’on iso l cm
l’ensemble de ces conventions des dispositions de l’art. 306’
delà coutume de Bourbonnais, qui en sont le régulateur..
Il est probable
qu’on
uc désavouera
P:ts *c
principe 1
�.que les contrats de mariage ont toujours été susceptibles
de conventions et de conditions qui ne blessent ni les
mœurs ni l’ordre public. Si cela est certain, il l’est éga
lement que Marie et Marguerite Dumont n’ont dû suc
céder à leurs père et mère que sous les conditions et
réserves stipulées dans leurs contrats de mariage.
An dré Dumont a puisé pour lui ou sa descendance.,
le droit de succéder à Procule Pitat comme à Jean D u
m o n t , dans la disposition de la lo i, tant que Procule
Pitat et Jean Dum ont ne se départii'oient pns de la fa
culté qu’ils avoient de forclore ou apaner leurs filles
moyennant une dot. Ils n’ont pas voulu cette forclusion
pleine et entière ; ils y ont dérogé dans l’intérêt de
leurs filles : mais le droit de succéder de celles - ci n’a
,dû être que partiel; ce droit a dû être mesuré par la
dérogation même apposée par les père et m ère, surtout
dès qu’ils ont déclaré qu’on ne pourroit diviser les con
ventions sous lesquelles les filles étoient mariées, et que
sans l’espoir que ces conventions tiendroient telles qu’elles
étoient réglées, les filles auroient été apanées moyennant
la dot qu’ ils constituoient de suite.
Les parties, lors des contrats de mariage, et d’après
ce qui y a été convenu, ont donc été dans une position
telle, que tout ce que les filles ont dû avoir dnns les
successions de leurs père et m ère, elles n’ont pu y pré
tendre que parce que leurs père et mère n’ont pas voulu
les en priver en les livrant à toute la rigueur de la loi;
et que tout ce dont il n’étoit pas disposé en faveur des
filles, demeuroit sous l’empire de la loi, et revenoit par
cela seul à A ndré D u m o n t, à moins que ses père et
mère n'eussent voulu , d’après la réserve particulière
�(
11 )
qu’ils s’en étoient faite, o n tr a r ie r le vœu de la loi par
leur volonté.
Il n’a donc point fa llu , en faveur d’A n d ré D u m o n t,
de disposition directe de tout ce qui n’étoit pas donné
précisément à ses sœurs ; la simple réserve du surplus
des biens devenoit, par la force des clioses, par la com
binaison de la loi municipale avec les conventions des
contrats de mariage des sœ urs, une saisine en faveur
d’A n d ré D um ont : cette saisine auroit pu être anéantie
par les père et m è r e , par l’effet de l’exercice du droit
qu’ils s’étoient réservé, de disposer îY leur gré des biens
qui n’étoient pas assurés aux filles. Ma i s ce droit n’ayant
pas été e x e r cé , et au contraire Jean D u m o n t ayant dis
posé des biens réservés en faveur d’A n d ré D u m o n t ,
tant pour lui qu’en vertu du pouvoir que lui avoit
conféré Pi'ocule Pitat, en ce qui la concernoit, tous les
biens, excepté la portion qui en avoit été donnée à Marie
et Marguerite D u m o n t, ont été irrévocablement assurés
à A n d ré Dumont. t a loi et la volonté de ses père et
mère ont concouru pour en fixer la propriété sur sa tete.
A i n s i , tout se réduit à ce moyen inattaquable , que
Ma rie et Marguerite Dum ont ne peuvent succéder que
comme leurs père et mère ont voulu qu’elles succédassent;
qu’elles ne peuvent venir à leurs successions qu’en rem
plissant les conditions qui leur ont été im posées, parce
que c’est un des premiers principes du droit et de l’équité
que personne ne peut diviser son titre. Les-premiers juges
seront sans doute les seuls qui penseront que « les clauses j
« charges et conditions apposées aux i n s t i t u t i o n s des daines
« de Vaure et de Beauregard , étant contraires-à la lo i,,
�( 12 )
S ’il y a quelque ch ose de contraire à la
craint pas de dire que c’est cette opinion
choque la raison ; elle attaque la doctrine
auteurs ; elle est combattue par la pratique
l o i , on ne
m êm e; elle
de tous les
de tous les
temps.
Telles sont les réflexions, auxquelles le soussigné croit
devoir se borner , parce qu’il les regarde comme seules
décisives. Il lui suffit de renvoyer, relativement à tous les
autres moyens qui ont été opposés par les intimés , et
au défaut de fondement des autres motifs du jugement
qui est attaqué, au mémoire imprimé et distribué pour
la mineure Dumont. Elle peut se reposer sur la discussion
lumineuse et savante qu’il ren ferm e, et qui décèle un
vrai talent. La justice oblige même d’avouer qu’on trouve
dans ce mé moi re les réflexions que le soussigné vient de
faire, parce qu’il ne laisse rien à désirer.
Si le soussigné a présenté ces réllexions , s’ il ne s’est
pas contenté de donner un simple assentiment aux motifs
développés dans, le mémoire , c’est parce qu’il a cru
devoir prouver de plus en plus qu’ il a sur la question
une opinion fortement prononcée. Il a en effet la con
viction q u e les moyens des intimés sont, à proprement
parler, des chicanes créées par l'imagination, dans la vue
de priver la mineure Dumont d’un patrimoine acquis à
son malheureux père , aussi solidement et aussi légale
ment qu’ il ait été possible.
Délibéré à R iom, par l’ancien jurisconsulte soussigné,
ce 26 juillet 1808.
G R E N IE R
( du Puy-de-Dôme ).
A R I O M de 1’im p rim e tie do T h i b a u d - L a n d r i o t , im p rim e u r de la C o u r d ’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Hilliard. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
contrats de mariage
communautés
dot
forclusion
fils avantagé
successions
avantages prohibés
préciput
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour les sieur et dame Hilliard, cotuteurs de la demoiselle Dumont, appelans ; contre les sieurs et dames Rabusson de Vaure et de la Roque, intimés.
Table Godemel : Préciput : 2. une disposition de préciput, en coutume de Bourbonnais, faite en faveur d’un fils par ses père et mère, dans les contrats de mariage de ses deux sœurs, comme condition de non apanage et d’une institution contractuelle à leur profit, est-elle valable, lors surtout que par le contrat de mariage du fils, le père survivant a surabondamment confirmé cette disposition, en vertu de la faculté que s’en étaient réservée les instituants, comme condition de cette même institution ? les sœurs instituées peuvent-elles soutenir que la réserve et dispositions faites en faveur de leur frère, étranger à leurs contrats de mariage, ne pouvaient leur enlever leur portion dans l’objet réservé, cette disposition n’ayant pas été faite dans son propre contrat de mariage, aux termes de l’article 219 de la coutume ? peuvent-elles à leur institution pour se dégager des charges et conditions qui en font partie, et demander le partage par égalité ? Ou, au contraire, en cas de renonciation, devraient-elles être réduites à l’apanage fixé par leur constitution dotale ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1775-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1804
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1802
BCU_Factums_G1803
BCU_Factums_G1801
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53331/BCU_Factums_G1804.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saulzet (domaine de)
Deux-Chaises (03099)
Mont (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avantages prohibés
communautés
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
dot
fils avantagé
forclusion
préciput
secondes noces
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53337/BCU_Factums_G1810.pdf
6e42b156b7595e739df2e97e2fc906a3
PDF Text
Text
PRECIS
EN
RÉPONSE,
POUR
L e sieur E S Q U I R O N - L A V I G N A C , propriétaire
à Aurillac , appelant et intimé ;
c o n t r e
L e sieur R A G O U X , traiteur , h a b ita n t de la même
v ille, in tim é et appelant.
aP r acte du 1 5 décem bre 1 7 7 2 , les sieurs Croizetd Auterive vendirent au sieur A lexan d re - Laurent
"< $ ■
1
�Fornier , prêtre , une maison sise en la rue Neuve
de la ville d’Àurillac , composée de deux corps de
ilogis séparés par une co u r, confinée par 1» jardin
des vendeurs, de bise, elc., moyennant 5,ooo mille
livres.
Il-est convenu que l’acquéreur pourra entrer dans
le Jardin des vendeurs , et se servir de la ruelle ,
large de trois pieds et demi, pour réparer sa m a iso n ,
placer des contrevents aux fenêlres, les élever ou
élargir pourvu qu’elles soient grillées; comme aussi
que le m u r séparant Ladite nielle d u ja r d in , ne pourra
être élevé que de trois pieds et*demi, sans préjudice
aux vendeurs de pouvoir y placer des vases de fleurs;
et ¿i la charge qu'on ne pourra y jeter ni ordures,
ni eaux.
L a maison F o rm e ra été acquise par le sieur Ragoux,
qui en a fait une auberge, d even u e, grâces à son
talen t, la plus fréquentée d’Àurillac.
L e jardin des sieurs Croizet a passé , avec la
maison dont il dépend, au sieur Lavignac. L e sol de
ce jardin est plus élevé que les croisées du rez-dechaussée de la maison Ragoux ; et précisément c’est
à ce rez-de-chaussée, du côté du jardin Lavignac ^
que le sieur Ragoux a placé sa salle à manger prin
cipale.
Ce n’est pas le bruit de ce voisinage qui incommodait le plusile sieur Lavignac; mais, i^ 'le s fenêtres du
premier-îétogo ne sont pas barrées ; il'fallait que les
�( 3 )
tPûS
dames de sa famille' on de sa société renonçassent à se
promener dansson jardin, ou qu’il prit desmesures pour
faire cesser cette véritable communauté dhabilalion.
Avait-il le droit de se séparer du sieur Ragoux par y
iin mur? Il y aurait de la folie à dire absolument non;
et c’est bien l’avis despremiers juges. Mais, à quelle dis
tance et hauteur devait-il faire ce mur ? voilà la difficulté.
y L e sieur Lavignac n’ usa pas de son droit dans toute
«a latitude; on lui dit qu’il pouvait bâtir à six pieds de
distance; il préféra de s’éloigner de sept pieds et demi,
pour éviter toute espèce de discussion avec son voisin;
il laissa même une porte à la ruelle, pour que le sieur
Ragoux pût aller réparer sa maison, quand elle en
aurait besoin.
Ces précautions n’ont rien épargné au sieur Lavignac,
et le sieur Ragoux lui fit fa ir e , le i . er mai 18 0 6 , une
sommation de cesser la construction de son m ur, qup
le sieur Lavignac ne pouvait cependant pas disconti
nuer sans de grands frais, puisque ses ouviiers étaient
retenus,-et ses matériaux à pied d’œuvre.
Alors le procès a commencé, et le sieur R a g o u x ,
dans une .requête, a manifesté ses prétentions avec
exagération, et même avec humeur. Il a dit avo ir,
par sa vente , la servitude tout à la fois de passage
ci’aspcct et de prospect ; il a prétendu que pour éluder
la prohibition d’élever le mur alors existant, le sieur
Lavignac y en a substitué un nouveau, construit immé
diatement après, et en quelque sorte plaqué contre la
<
.premier ,■. que d^jà il dépasse de plus de douze pieds.
�(
4
)
Il assure que ce mur le prive de l’air, de la clarté, et
de toute espèce de salubrité; et là-dessus il reproche
au sieur Lavignac de traiter les lois et les conventions
comme les frêles tissus de l'araignée impuissante.
Les juges d'Aurillac ont voulu savoir jusqu'à quel
point cet exposé du sieur Ragoux était sincère; e t ,
le 9 août 18 0 6 , ils ont ordonné que des experts vé
rifieraient l’état des lieux; e t , après avoir demandé
toutes les dimensions de la ruelle et des murs, ils
ont chargé les experts d’aller sur les lieux, à quatre
heures après-midi , et là de vérifier si, malgré l’éléva
tion du nouveau m ur, les rayons du soleil peuvent
-aboutir aux fenêtres du rez-de-chaussée de la maison
Bagoux ; dans quelle proportion, si le nouveau mur
■intercepte le jo u r des appartemens du re%-de chaussée;
quel degré d’obscurité il leur donne relativement à
£ usage auquel ils sont destinés ; à quelle hauteur du
mur les appartemens doivent recevoir le jour néces
saire.
L e rapport des experts n'a pas confirmé ce.qu'avait
dit le sieur Lavignac. Us remarquent qu'au lieu de la
distance ancienne de trois pieds et demi, il y avait
sept pieds cinq pouces entre la maison l\agoux et le
nouveau mur.
L e nouveau mur, à partir du niveau ou accoudoir
des f e n ê t r e s , a n eu f pieds quatre pouces de hauteur
du côté du jardin, et dix pieds quatre pouces du côté
de la ru e lle , dont le sol est plus bas.
E l à partir du niveau de la ruelle, il a, d’un côté,
�( 5 )
treize pieds, et de l ’autre douze pieds cinq pouces.
Il excède l’ancien mur de 9 pieds 9 pouces et demi.
Les experts disent que l’élévation actuelle du mur
n ’empêclie pas les rayons du soleil d’aboutir aux fenê
tres du rez-de-chaussée. A deux heures et demie, il a
commencé à éclairer la façade de la maison en totalité ,
à l’exception de la première croisée de la cuisine.
A trois heures, le soleil a pénétré ensuite dans le rezde-cliaussée, par un ra3ron oblique de sept centimètres.
Cette lumière intérieure a duré un quart - d’heure.
( N ,. B. L a façade est au nord).
A quatre heures, les experts ont vu que les apparte
n o n s du rez-de-chaussée recevaient le Jo u r suffisant
pour L'usage auquel Us sont destinés.
Les experts pensent que le sieur I/avignac a pu
élever davantage son mur que le premier, puisqu’il l’a
fait plus éloigné ,* mais ils s’abstiennent de décider
jusqu’à quelle hauteur il l’a pu.
Enfin, comme la première visite avait été suivie d’une
médiation que rompit le sieur R agoux, les experts ont
voulu savoir quelle serait l’obscurité de son rez-dechaussée dans l’arrière-saison. En conséquence, ils y
sont allés par trois fois et par un tems sombre et
nébuleux, les 10 septembre , 2 novem bre et 9 dé
cembre , tantôt une heure après le lever du soleil,
tantôt une heure après son coucher. L à ayant pris
chaque fois un livre d’ un caractère assez m enu, ils ont
lu a une certaine distance des ienetres.
En somme , les experts disent bien que je mur a
�■ ï-V
( 6 )
donné de l’obscurité au rez-de-chaussée de la maison
B a g o u x , mais qu'il entre asse% de lumière dans ¿es
pièces de ce re% de chaussée pour L’usage auquel elles
sont destinées.
Cette relation des experts n’a pas satisfait le sieur
B a g o u x , qui a sollicité les premiers juges de voir le
local eux-mêmes ; et on pense aisément que , dans
cette visite, il a dû exagérer le détriment qu’il prétend
souffrir.
Quoiqu'il en soit, après cette descente non ordonnée
en jugem ent, le tribunal d’ Aurillac a condamné le
sieur Lavignac à réduire la hauteur de son mur à
neuf pieds.
Les motifs de cette décision, au nombre de douze}
se réduisent à dire que le vendeur de 17 7 2 ne s’était
pas interdit la faculté de faire un mur de séparation ,
sur-tout en s’ éloignant ; mais qu’il n’avait pas dû obs
curcir les appartemens d’une manière nuisible.
L e sieur Lavignac a interjeté appel de ce jugement ,
en ce qu’il l’oblige à démolir une partie de son mur.
L e sieur Bagoux en a aussi interjeté appel, en ce
qu ’il ne condamne pas le sieur Lavignac h le dé
molir tout entier.
M O Y E N S .
Tout le système du sieur Bagoux repose sur ce rai
sonnement : J ’ai le choit de vue ( lum inuni ) sur la
�( 7 )
ruelle, et p e u t-ê tre même la ruelle tout entière. J ’ai
de plus la servitude d’empêcher l ’élévation du mûr
de cette ruelle ( altiiis non tollendi). Doue j ’ai aussi,
par une conséquence nécessaire, la servitude d’aspect
et prospect sur votre jardin; et vous ne pouvez rien
changer à l’ancien état des lieux , parce que vous
m ’ôleriez non-seulement la quantité de lumière que
j ’avais, mais encore l ’agrément que portait à ma mai
son la vue de votre jardin. Car , dit le sieur R agoux,
à moins de contester l ’évidence, il est démontré qu’il
a élé concédé une vue de prospect, et que la perspec
tive du jardin a élé pour l’acquéreur un moyen de
séduction ou d'agrément qui a dû augmenter le prix
de la maison.
I l faut cependant que le sieur Ragoux soupçonne
que celle évidence prétendue ne soit pas sans réponse;
car il se plaint de ce que le sieur Lavignac ne lui a
présenté que des objections légères et dédaigneuses.
Sa fierté, dit-il, a souffert de descendre dans l ’arêne
avec un traiteur.
Ce reproche est bien dur, et le sieur Lavignac y a
été sensible. Loin de lui tout mépris pour un art pré
cieux qu’il honore, et dont il n’a garde de contester
1 importance. S il se fût senti coupable d’ un tel senti
ment, il l aurait certainement dissimulé avec précau
tion. C ’est déjà un adversaire assez puissant qu’ un
traiteur en réputation: tant d’intérêts s’unissent^au
sien , que tout ce qui peut le contrarier ou le disT
�traire, est exagéré par ceux qui en souffrent commo
une calamité publique, et le sieur Lavignac ne se le
cache pas (i). Ainsi loin de se plaindre envers le s.r R a goux de sa juste fierté, fondée , plus que sa prétention,
sur des autorités précises (2), le sieur Lavignac dé
clare en toute humilité qu’ il n’a à s’accuser d’avoir
traité avec légèreté, ni sa personne, ni ses objections.
I l y a répondu de son mieux ; les moyens qu’il a fait
valoir lui ont semblé très-solides3 et il ne croira s’êlre
bien défendu encore qu’en les reproduisant sans les
affaiblir.
Revenons donc à la maison du sieur R agoux, et à
l ’arêne où il nous convie. Voyons comment la servi
tude aUÎLis non tollenclL pourra le conduire à la ser( 1 ) Pour aggraver les torts du sieur L a v ig n a c envers ses con
citoyens, le sieur R a g o u x s’est obstiné à s’expatrier jusqu’à la
fin de son procès. M ais le sieur L a v ig n a c se liâte de dire , pour
sa justification, qu’ il n’a porté aucun obstacle à un prompt ju
g e m e n t , et que lorcé par ses affaires, de suspendre son départ,
il a mieux aimé s’abstenir d’être présent que de retarder d ’un
seul instant la plaidoirie de sa cause.
(2)
Faites cas de celui q u i, fier de son talent,
S'estime votre é g a l , et, d’ un air im po rtan t,
Près de son potager, que la flamme illumine,
D o n n e , avec dignité, des lois...... dans sa cuisine.
G astr.
Chant I I .
vilude
�( 9 )
vitude de prospept, et si elles dépendent nécessai
rement l’une de l’auIre.
E n matière de servitudes, il n’est pas permis de
raisonner par analogie ou par simples conséquences.
11 faut trouver dans le tilre qui les constitue tout ce
qu ’on v e u t ‘exig e r’ ou prohiber, sans que l'acte laisse
m êm e le soupçon du contraire; car les servitudes sont
de droit étroit; et comme elles font violence au libre
usage de la propriété du voisin, comme la tendance
naturelle est pour raflranchissem ent, il est de principe
que tout ce qui n'est pas mathématiquement compris
dans la clause.de servitude s’explique en faveur de celui
qu’on veut y asservir.
Ce n’est pas absolument aux lois romaines qu’il faut
recourir tpogr une question de servitudes urbaines. L a
coutume de Paris était, sur cette m atière,le droit com
mun de la F ran ce ; et qnand on compare les divisions
et subdivisions du digeste sur chaque espèce de servilude avec la briéveté de l’article 686 du code civil ( i ),
on demeure.convaincu de plus en plus que l’étendue
à donner à une servitude ne doit dépendre que du texte
littéral et non équivoque de la clause qui la constitue.
Les lois romaines , au reste, distinguent très-expres
sément ce que le sieur Ragoux veut confondre.
(i)
A rt.
686. II_est. permis
aux propriétaires d’établir sur leurs
propriétés telles servitudes que bon leur sem ble, pourvu que les
services établis. . . . n’aient rien de contraire à l ’ordre public.
• L ’ u s a g e et l'étendue d e s s e r v i t u d e s s e x’è g l c n t par le titre qui
les constitue , cl à défaut de titre, par les règles ci-apres.
2
�( 10 )
Il a , par son acte, la servitude de jour ( luminum),
et la servitude allias non tollendi, non pas pour un
édifice entier, ce qui est la plus fréquente supposi
tion des lois, mais bornée à un simple m u r, et pour
une distance convenue.
D e ces deux servitudes, il veut en faire quatre, car
il ajoute celle ne luminibus ojjiciatur , et même celle
ne prospectai ojjiciatur, qui sont très-distinctes dans le
droit, et qui portent une gêne bien différente.
;
A vec sa servitude de jour, et sans celle altiiis non
tollendi, le sieur Lavignac n’aurait eu nul besoin de
se reculer pour bâtir. Il aurait eu certainement la fa
culté d’élever le mur ancien de sa ruelle, d’après les
principes.
Car la servitude de jours {luminum') n’emporte que
- nécessité de souffrir des vues droites, sans rien laisser
au prospect : il suffit de voir le c ie l, tel est le texte
des lois 3 et i 5 du digeste de servit, præd. urb. et
l'interprétation générale des auteurs.
C ’est pourquoi ceux qui veulent une gêne moins
grande à leurs vues doivent convenir de l’ une ou
de l’autre des servitudes d’aspect; et alors ces lois,
elles-mêmes, marquent une différence sensible au ré
sultat de ces servitudes.
Elles portent avec elles une dénomination qui en
marque le sens ; ne luminibus ojjiciatur exprime au
tant que possible, que si l’acte porte expressément la
condition de ne pas offusquer la lumière, on ne pourra
pas la diminuer par un bâtiment, et de même ne pros -
�( ÏÏ )
pectui ojficiatur dénote assez que tout ce qui ôterait
le point de v u e , même dans l'éloignement, contrevien
drait à la convention.
Tout le tilre du digeste prouve que ces diverses
espèces de servitudes sont très-distinctes, et par con
séquent que l ’une ne supplée pas l’autre, à moins que
sa plus grande étendue ne comporte de plein droit la
servitude moindre.
Ainsi la servitude ne lurninibus ojjiciatur est à la
vérité comprise de plein droit dans celle ne pro spectui
ojjiciatur , qui est la plus étendue , parce que tout ce
qui tendrait à ôter la lumière d’une fenêtre , ôterait
bien, à plus forte raison, la perspective éloignée qu’elle
doit avoir.
Mais on ne peut pas, comme le sieur R a g o u x ,re n
fermer une servitude plus grande dans une servitude
moindre. Il fait beaucoup d’efforts pour prouver que
la servitude aitiùs toLlendi emporte avec elle les ser
vitudes ne Lurninibus, et prospectai ojjiciatur. C ’est
en effet de là que dépend toute sa défense.
Voyons sur quelles autorités cette prétention est
fondée : et pour ne pas mériter une seconde fois le
reproche de dédaigner ses moyens et ses objections,
le sieur Lavignac va les suivre pas à pas pour y r é
pondre.
I . re o b j e c t i o n .
P a g . 1 6.
Les lois rom aines, dit le sieur R ag o u x , ne font
pas de différence entre la servitude altiàs toLlendi, et
�'( 12 )
"celle ne Luminibus aul prospectai ojjîbîatür. L a loi 2 ,
^au J f. D e ser. pr. urb. le prouve.
r é p o n s e
.
Celte loi n’ est que la série des différentes espèces
de servitudes : elle les classe et les distingue: par con
séquent, elle ne les confond pas.
L e sieur Ragoux veut tirer d’ une simple conjonction
une conséquence fo rc ée , qu’il n’induit encore que
d’ un argument à contrario • car la loi parle des servi
tudes imposées par celui qui veut qu’on élève un mur
pour diminu'er sa lumière. Mais cette servitude affir
mative ne juge ni n’indique rien pour la servitude
contraire.
*
H Une preuve que la servitude altiÙs non tollendi ne
renferme pas cellé ne lum inibus o jjic ia tu r , c est que,
suivant cette dernière , il n’est pas me me permis de
planter des arbres qui diminuent la vue ; tandis que la
servitude*¿/¿mi non tollendi n'empêclie pas de planter
des arbrès;à toutédistance, A liu d est œ dijicare, a liu d
*cst arborem pbrièré}"'
r
On pouvait même',"cliefc lés Rom ains, en planter,
e n !cé 'cas,‘aii-de3sus même de l'édifice, dont: lii hauteur
était'cependant déterminée. Suprà eam altitudinem tandis que dans le cas des autres servitudes, cela aurait
été défendu.
II.* O B J E C T I O N . P a g . 1 7.
Toujours la loi régarcle la défense d'élever plus haut
�comme
Le s e u l
Ci3 )
moyen d’empêcher la lumière.
se rv itu s i m p o n ita r
ne
l u m in ib u s
o f f ic ia t u r
Cùm
, Aoc
m a x i m e a d e p t i v i d e t n u r , n e j u s f i l ç ic in o . i n v i t i s n o b i s
A L T iv s
æ d if ic a r e
j a t q u e ¿ta m i n u e r e L u m i n a æ d i f i -
c io ru tn n o s tr o r u m .
RÉPONSE.
Il faut faire une inversion des termes de la loi, pour
y donner le même sens que le sieur Ragoux.
Elle ne dit pas que celui qui aura la servitude ailiàs
tollendi aura aussi celle ne Luminibus officiatur • elle
dit, au contraire, que celui qui aura la dernière pourra
empêcher d’élever plus haut. Et le sieur Lavignac n’a
jamais nié ce principe.
Ainsi, le sieur Ragoux n’a que faire de s’approprier
le
m in u ere
L u m in a
qui termine cette loi
;
car il est
destiné à une autre espèce de servitude que celle de
son acte.
I I I . e o b j e c t i o n . P ag. 17 .
Les auteurs donnent le même sens à ces lois. M . de
Lamoignon a dit, en ses Arrêts, titre 2 0 , article 20 :
* S i, dans le titre de la servitude, i l ci é t é c o n v e n u q u e
« L'on n e p o u r r a o b s c u r c i r ou donner empêchement
« au mur du voisin, le propriétaire laissera les lie u î
* en Pélat où ils étaient lors de l’imposition, sans y
« faire aucun plant d’arbres ni bâtimens;nouveaux, et
« sans pouvoir aussi élever les anciens*bâtimens*. T el
est aussi le langage d’Auzanet , Ferrière, I/alaure3
Desgodets.
�RÉPONSE.
A v a n t cet article 20 (qui ne s’applique toujours qu’à
la servitude ne luminibus officiatur), M. deLam oign on
avait dit ce que le sieur R agou x a jugé à propos
d’omettre.
Art. 19. « L e propriétaire d’ un héritage, sur lequel
« le voisin a droit de v u e , peut élever sur son fonds
«• des bâtimens, et planter des arbres, pourvu qu’il y
. « a il six pieds de distance entre le mur faisant sépara« tion des héritages des parties , et le bâtiment nou« v e a u , et douze pieds de distance entre le mur et
«• le pied des arbres ■».
IV .®
objection.
P a g . 18 .
I l a été dans l’intention des parties de donner à
l ’acquéreur une vue de prospect, tant qu’elle pouvait
s’étendre; sans cela , il eût été inutile de stipuler que
le mur n’aurait que trois pieds et demi. La clause eût
.été sans in té r ê t , si le vendeur avait en le droit de
construire le lendemain un mur plus élevé à côté de
l ’autre ; il eût été inutile aussi de se réserver la faculté
de placer des vases de fleurs. S’il n’y avait eu que l’inJe n tio n de ne céder qu ’une simple vue droite, on se
serait réservé le droit de construire à une distance
déterminée. L a perspective du jardin a dû augmenter
le prix de la maison.
�'
( i5 )
RÉPONSE.
Qu’ y a-t-il dans tout cela? Des présomptions.
El c’çst par des présomptions que le s.r Ragoux veut
étendre une servitude au-delà des termes de son acte.
Il ne remarque pas que les présomptions, même'
de l’intention des parties, se tourneraient contre lui.
L a latitude qu’il prête à sa servitude serait une
grande injure aux sieurs d’A u le r iv e , et il faudrait
mettre en problème si leur raison aurait bien présidé
à une convention aussi étrange.
Non contens d’avoir vendu pour 5; ooo liv. une mai
son qui avait deux corps de logis, une cour au milieu,
et douze croisées d’un seul côté, se pourrait-il qu’ils
eussent ajouté à la souffrance de lumière de ces douze
croisées, une prohibition perpétuelle de bâtir chez
e u x , et de n’être, dans leur jardin, que sous la sur
veillance habituelle d’une multitude d’individus. Si
cela était supposable pour une maison de champs >
- comment admettre qu’un propriétaire en ait même
conçu l’idée à l ’égard d’ un jardin placé au milieu
d’ une ville populeuse?
N ’e st-il pas plus naturel de penser que le sieur
- F o rn ie r, prêtre, voyant un petit mur à trois.pieds ,
de la maison qu’il allait acquérir, eût à l ’instant la
crainte qu’il ne fût é le v é 'à une grande hauteur? E t
comme les parties doutèrent si le v e n d e u r aurait droit
de le lever à celle distance , le sieur Fornier demandà
t'\
c
5 (7
�que ce mur, si voisin, ne fût pas é le v é , et le vendeur
y consentit.
Alors le vendeur n’avait pas des projets de bâtir,
puisqu’il vendait une propriété. Ne s’occupant doue
que de jouir de ce qu’il avait, il ne voulut pas que
jon consentement, de ne pas changer la hauteur du
mur existant, s’opposât à ce qu’il y plaçât des fleurs,
tant qu’il le conserverait.
Voilà la seule pensée que durent avoir les parties,
et la seule qu’il faut leur supposer, puisqu'elle est la
seule de bon sens. Voilà le vrai pacte de quo cogita
tion est, et au-delà duquel il est clair qu'il n’y a pas
eu une ébauche de convention.
C ertes, si les sieurs Croizet eussent le lendemain
bâti un grand mur à côté de tl’ancien, et, comme le
disait d’abord le sieur Ragoux , plaqué contre le pre
m ier, il eût»élé répréhensible, parce qu’une conven• lion ne s’élude pas avec affectation.
Mais qui veut trop prouverjne prouve rien Car ce
n’ est pas.en se jouant ainsi de ses engagemens, que le s.T
Lavignac a bâti. Il a bâti à quatre pieds au-delà du pré
cédent m u r , Ci’ est à dire à 7 pieds et demi de la mai
son Ragoux.
•Sa.convention n’était restrictive que parce qu’il était
. ?en .17 7 2 : dansila distance habituelle de la loi. Mais. il
s ’est <conformé à la loi; il a exécuté ce que dit M. de
, Lanioi<rnon; et dès-lors, au-delà de 6 pieds, il retrouve
,le droit com m un, par-delà lequel sa convention n.V;st
pas allé, lui donner des .entrave&jimprévues.
Ce
�? 17 }
V.
■
Ce n’ est: pas assez , dit le sieur Ragoux, cl avoir sti
pulé qu’il ne bâtirait pas à trois pieds et d e m i, il fa l
lait qu’il se réservât de bâtir plus loin.
Disons plutôt que c’ était à l’acquéreur à stipuler
qu’on ne bâtirait pas à une plus grande distance.
Car c’ est lui qui avait besoin de la servitude, et par
conséquent du litre et de la clause.
O r, tout ce.qui n’est pas dans la prohibition rentre
de plein droit dans la loi commune.
Celle loi est l’arlicle 202 de la coutume de P a ris ,
qui veut six pieds de distance entre les vues droites et
les niurs voisins.
Et avec cette distance, la servitude ciltiùs non toi-
letidi doit être bien moins rigoureuse que cliez les ro
mains, dont les maisons, presque toujours séparées en
îles, n'avaient, de distance légale, que celle de deux
pieds ( 1 ) .
V .c
OBJECTION.
F a g- 2 1.
Mais , dit le sieur R a g o u x , s’il y a de l’incerlitude
dans l’acle de 1 7 7 2 , elle doit s’interpréter conte le ven
deur, qui potuit Legeni apertius conscribere.
Ré p o n s e .
Celle réglé de droit n’est applicable qu’à la re
cherche de la chose vendue et aux servitudes retenues
( 1 ) Si quis sepem propè alienum prœdiurn fixen t , ternu-
nuni ne exccdito, S i rnacerie/n, pedem relinqailo ; si verb domutn, pedes duos. L . ult. II’. iin. rcg.
3
�( i8; )
par le vendeur sur l’objet aliéné, mais pas du tout aux
servitudes qu’il s’impose.
Car d’après la maxime n o n jit extensio in prohibitor iis , c'est à celui qui fait constituer la servitude à son
profit, à.lui donner plus de latitude. C ’est le vœu d e là
coutume de Paris, art. 216 .
Avant de rechercher la règle de droit 1 7 2 , le sieur
•Ragoux pouvait s’arrêter à la 8 i .e qui paraît résoudre
pleinement la difficulté.
Quœ, dubitationis toLlendœ causâ, contractibus iri
ser uni ur , ju s c,oni mu ne non lœdunt. 1. 8 1 , de reg. jur.
Or comme la convention de ne pas élever un m u r,
qui n’était alors qu’à trois pieds et demi 4e la maison,
ne fut écrite .visiblement ,que pour lever le doute du
droit de bâtir à cette courte distance, il ne peut pas en.
résulter que les sieurs Croizet se soient abstenus à ja
mais d’ user du droit commun, c’est-à-dire.de bâtir à
six pieds, d’après la coutume de Paris qui était la loi
générale.
N ’y a u ra it-il donc pns une injustice évidente de
'forcer ainsi le sens d’ un acte, au point de restreindre
une propriété à une annulation absolue, pour le seul
avantage de donner une plus grande clarté à deux
pièces du rez-de-chaussée d’ une maison; et si un ven-dour était ainsi opprimé par le sens équivoque de sa
convention, ne se rait-ce pas le cas de s’écrier avec
la loi : iniquum est perimi pacto id de quo cogitatum
non est. L . 9> f f ' ^ 6 trans•
L e sieur Ragoux rejette fort loin l’art. 2 1 5 d e là
�( i9 )
coutume de Paîis.' Cependant c’est cet article qui veut
que le vendeur déclare spécialement quelles servitudes
il relient ou constitue tant pour V endrait, hauteur,
largeur, que l ’espèce j autrement quelques espèces gé
nérales de servitudes, sans les déclarer comme dessus ,
dit l ’article, ne valertt.
Cet article est donc une preuve que la clause de
servitude ne doit pas s’expliquer par analogie , ni
extension, ni présomption, mais spécialement et en
détail.
Or Y e n d r o i t marqué par la clause de 17 7 2 , est à
trois pieds et demi : donc il n’y a pas eu prohibition
de bâtir à sept pieds de distance.
V I.® o b j e c t i o n . P a g . 23 .
L e sieur Ragoilx revient à une idée qu’ il avait aban
donnée devant les premiers juges. Il voudrait la pro
priété de la ruelle, parce qu e, dit-il, il est confiné par
le jardin; cela étant , il en conclut que le sieur Lavignac ne devait au moins bâtir qu’a six pieds au-delà
de la ruelle.
h é p 0 n s E.
Voilà donc le sieur Ragoux forcé de s’emparer d’ un
mot, pour se faire un moyen.
E t quel mot encore ! quel faible m ol! Personne ne
l a mieux évalué que lu i; et il nous donne sa réfuta
tion lui m em e, à la fin de la page 22.
�( 20 )
Que signifierait alors la défense dé jeter de ¿'eau on
des ordures? 11 es! clair en effet que si la ruelle eût été
vendue au sieur R agoux, il était contradictoire que
le vendeur s'occupât de ce qu’on jetterait ensuite sur
lu chose vendue. Ce n’eût pas été immittere in alienum.
Ajoutons h cette réflexion : ijue signifierait aussi
la permission accordée au sieur Former de se servir
de la ruelle pour réparer sa maison?
Ôn ne lui en a donc concédé que Yusage momentané ;
e! l’ usage est exclusif de la propriété.
L e confin du jardin prouve seulement que la ruelle
éluit considérée comme partie du jardin, et non de la
maison , ni même comme commune. La suite de l’acte
explique parfailementl’inlenlion des parties,qui ne veu
lent accorder à l’acquéreur qu’ un usage ou tolérance.
CONCLUSION.
L a vente de 1 7 7 2 ne donne à l’acquéreur que lé droit
de vue et non de prospect.
Toute vue droite comporte avec elle une distance
de six pieds jusqu’au mur voisin:et cela explique loutà-la-fois la convention de 11e pas élever un mur alors
existant, parce qu’il n’était qu’à trois pieds et demi, et
la f a c u l t é demeurée au vendeur de bâtir à six pieus
de distance, par cela seul qu’il ne s'est pas départi spé
cialement de ce droit légal.
Ainsi il a été mal jugé en ce que la hauteur du mur
actuel a été diminuée, car un mur fait au-delà de la dis
tance voulue par la loi est hors d atteinte.
�S’il y a lieu de dire que le sieur Lavignac pouvait
batir à une dislance quelconque , il n’y a pas de raison
qui fusse penser que ce sera à quinze pieds, ou à dix,
ou à huit, car la loi n’indique aucune variation ni ar
bitraire. Il faut donc que ce soit à six pieds.
D ’après cela , il doit peu importer qu’il en résulie un
peu plus d’obscurité à un rez-de-chaussée voisin ; c’est
un mal nécessaire dans une ville. Tout ce qui tend à
empêcher la mitoyenneté des murs latéraux, et à peu
pler de jardins une rue publique, ne mérite pas de fa
veur.
Qu’est-ce d’ailleurs que cette obscurité, si, le 9 dé
cembre, les experts ont pu lire un caractère m enu, à
quelque distance des fenêtres, dans une salle plus basse
que le sol d’un jardin, par un tems nébuleux?
E t c’est pour une façade tournée au nord plein ,
qu’on veut ménager les rayons du soleil pour quelques
minutes de plus. Tout autre croirait gagner à l’élévation
d’un mur à cet aspect. Mais le sieur Ragoux avertit qu’il
a des raisons particulières, et qu’il a intérêt d’égayer ses
commensaux par la vue d’un jardin.
Voilà donc le secret principal du procès qu’il a sus
cité au sieur Lavignac. En esl-ce assez pour forcer le
sens d’une convention , et priver le sieur Lavignac du
bénéfice de la loi commune.
L ’appel incident du sieur Ragoux ne sert qu’à prouver
qu’il a cru en avoir besoin pour être c o n s é q u e n t avec
lui même.
Il fallait qu’il empêchât le sieur Lavignac de batir
�( 22 )
nulle part, ou qu’il avouât que le sieur Lavignac en
avait le d ro it, en reculant à six pieds. Alors il s’est
donné la servitude de prospect; et c’est là-dessus qu’il
a fondé son appel.
Mais son titre n’a rien qui ressemble à la servitude
de prospect ; et cette évidence achèvera de prouver que,
pour tâcher d’obtenir peu, il demande beaucoup.
L ’exagération de ses plaintes et du tort qu’il souffre
sera appréciée comme toutes les exclamations familières
aux plaideurs qui s’obstinent; ses moyens de fortune
sont fort indépendans du prospect d’un jardin qu’ on ne
veut pas qu’il montre à tout venant; et le tems qu’il
a perdu à plaider a dû lui être plus nuisible que ne le
sera jamais le mur qu’il voudrait détruire.
L e sieur Lavignac, au reste, a usé de son droit par
nécessité et avec modération. Il fallait qu’il renonçât à
son habitation et à son jardin, ou qu’il y fût libre et
indépendant. Il a fait ce que tout autre eût fait et dû
faire; et on n’est point un voisin inquiet et ambitieux,
quand, au lieu d’usurper la propriété de son voisin, on
Sacrifie à la décence et à son repos une partie de la
sienne.
,-
M .e D E L A P C H I E R , avocat.
M. e M A R I E , Licencié - avoué.
A
R I O M ,
DE L ’IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
�// gck- t'óol / • * / * & - .
' ^ \
4*<J’atj'-U ÿjL.L^A t' <—’ /« c<»M.>i' à«-»
v.'yíú„ pa^tu ¿o;7
<AA«ùüi de OÄW y i !«.y'cj~X
CJ.,~^Jty~-^VA>~*
*-----W *.
~ f,oJh K V<~*‘
^ » ' Wa/
<ArclaJi*~±K.
/c o c ^ ^ r J , ^ e^ )vy , ^ _ r
¿ <AA^ y /*y^“r'‘—*
/£ t
^ Ò. qM-v*. Ò» <fcüw ^._làJ ** b*~»Â_ ^ <*
uÆ y'&^J t-J<*,•*
—*
f t w
u ù / ^ 'b M
/ iû
a ijm
JT
< y ~ *
¿ c./fci
^
-
C l. k * .x w j
1J X
ju s x M
à *
.
A
4 ,« u l| U
t t
^
^ ¿i,
'*tU*~T e**,«—*-<£ «»*,««►** c~~va* .
(i c^íxui /£. &/« A» jJcf-r uA¿a*>.
VWJi/*^ T fc**
*¡5^“
U o ^ u
(tk
^v x .\/r /
-t > ’ ¿
L
~
ì>*
C W JV .
t_
_
_
_
_^
/o ^ *
^ ./ o «
,
* *
c‘ ~
“
Uti «o£u ^1« ycju,»/¿A*«^ aiC tS« vu gi<la ííiour, jíxA<x. fai\. ay1««»* : Q^(ams,
/( a u * u u > ¿ < m
iu o x * » » ^
O
u f 't u i u
~ i> a » iL A .
tr r jiiy ü
oiuyu. CAJLA->t \AJ»vv vydtlrtAbu^v /ou^X XXf>*txAr fc*'
CU^AWWA^X ¿U~^u*y> ^1«Aj/ua Ci)l»w>J rOMAL. tv<^
c¿lA >b«Jt
0«Tb.
»V* i i t »
/i¿l*M*r
/*
Cl«
MaaU
< jd tt*
o|^U J | ciL*^®\*-à « « ^
<*^A*
,
«1/ck caA-cv^«^ vjLjJjt.'ï><^ fu &>i Á y ^ 'b i r
^ - «-/*»«-»
¿CUX/UL. Ouy )ouW
í»ÍAjUÜ¿t A*xAt~~X" /, "V
^ AiOVMw^C^
Cyu!tl~. 4iw«. «/ub-t^V« '6-~ ^ «A^ ÿA-J
(«■ 8>*'ilWMW«*C 6 y 0«M h jA 1
^ ^ ^
^
«/-
•"
^UAAA*4ft
A
ua
/ j T
r *■“ /■“
wJCi^AAO
~~
UJlftMÎUJUM
<AA>ot/ii
/
(A |y (v )
^ ( ^ 1 / c C t . J< W S O « ¿
¿LJL
t^ \l^ A íiA X .
clb»i/uACiU***A ,
■
/«! ^ UUA*
' ^ U i U - l L . /.AAJü / vL / ^
A -f*
,
ÿ/u* ( W e ^ V ?/v^ /'o~*
, ^
C
l/ aav)
"_
^C' i l o « » ~
^
r
" J
.il
«
I
f>^---------o. J
fe
/
//
Ò*
/t,
‘ XJ . -, À„
*
u u ^ a»*«
f f **ZÜ CLA
^
( C l u / ( |L i
rj
--------- i J
/Oui/'
—
U iu iiA M W
A e f ia r - ^
---- ^
&xUy>.
<f '^ *
X \ h. f ¿a~AÍ. ow, a«, O ^ h '
^
c*"*"
i®
^ u 'v* * '< ,u
“ 5 "
_
/
^
,
j*
^
- *••-/— ** '• *-r~ *££
~~r-
- “ •■
J
.
I
°)/Tc—
,----
•
^*
. r/
rf, ^fayouyi,
< ' A llV '
f
.r .
^ « " " » .“ ^ " ^T r ’ ^
11
u
/ W ¿ ¿ , y^»' r
-V
V
Y 9^ v
W
w
/
«VAMkW
% I
0
\ ««tí*
^
■ A .y .'-J a ^ r ^ u.;/ r w i « ^ . . a - V
* * tr ù i^ jt
m
CUW-.'*AAAA
* yf'tSTUM*
ta <A. "X
««
o «->
Hfc- t.\A — e t ì o p i ' r . . .
-------------------
^
■*
9
/
^
tvw ofatali* à t* &iu A >vn>^»w^vi»^«> tiiAXi/^ fc“ ^uu/
0c—
a
(^|
/
^
^
/ >
^
(V ° U7 ' ~
\ x x îk
Ä
'
�?
• ,
'
o J t t v £ y
il*
(jlh m 6 h £ U u > ii
<)«j
tu u
o i) u u ¿ b ~
.. .. oJkk.
( l u 'l l U
CM
iUUA«.
Yà l\
U j* u L > f
tu U ÍS Ü A X à
{ ' OljlÊ X
d U ^ r v JL *
fa
ua><*x>-c¿¿¿)
&<» f ) y 9 f ^ J k r ° ' / l y Î A W
i t i t i ftK J U ib o .
vuXty-Í~í ÌLO. Uu2u (VWA/9^UUM) "^4 A VW**/JiM ^
(NV- d i
___ "b tx
/i t/t.*
UIIM ^V »aA
¿% U J
V\AM
¿
U w/b^hUl J ï '
/ / X
- -
^
(AAAXïW® 1 4
^lUui, A
*
'
V
~
• /3- ?
'' /
- / (/ • ■ » . ' /
• J YÍ
v
! /
V V
?*
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Esquiron-Lavignac 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
conflit de voisinage
servitude de vue
auberges
experts
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour le sieur Esquiron-Lavignac, propriétaire à Aurillac, appelant et intimé ; Contre le sieur Ragoux, traiteur , habitant de la même ville, intime et appelant.
Particularités : Notation manuscrite : texte intégral de l'arrêt du 11 octobre 1807, 1ére section.
Table Godemel : Servitude : 3. la servitude de jour (luminum) et celle non altuis tollendi emportent-elles celle de prospect ? quelle est son étendue ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1806-1807
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1810
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53337/BCU_Factums_G1810.jpg
auberges
Conflit de voisinage
experts
servitude de vue
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53338/BCU_Factums_G1811.pdf
d47079b0cd5c0a3994635d34b5a28a00
PDF Text
Text
'1
- h '■
A
5
M E S S IE U R S
DE L A C OUR D ’ APPEL,
»
A R I OM.
S u p p l i e n t humblement Jean-François V iro tte ,
propriétaire, habitant de la ville d’A y , arrondissement
de Reim s, département de la M arn e; sieur Antoine
D elaire, propriétaire , et dame Suzanne V iro tte , son
épouse, de lui autorisée, habitant à M ontaigut-le-Blain;
sieur Jean-François V iro tte, juge de paix du canton de
Lapalisse, habitant de la ville de Lapalisse; et dame Gil-
berte V iro tte , veuve en secondes noces de sieur Pierre
P la ce , officier de santé , demeurant en la commune de
Jaligny; tous enfans, héritiers et communs de feu sieur
M ichel Virotte et des parties adverses, intimés ;
Contre dame Anne D elaire, veuve et commune dudit
sieur M ichel V irotte; sieur Sébastien Virotte , proprié
taire; sieur Louis D esrois, propriétaire, et dame M ar guerite V iro tte, son épouse, de lui autorisée, tous h abitans de la ville de M oulins; sieur Hypolite de RuelleLargillère , et dame Suzanne V iro tte , son épouse, de
lui autorisée, habitans du lieu du V erger , mairie de
Saint-Voir; sieur Joseph Virotte-D uch arm e, proprié
taire , demeurant en la commune de M ontaigut-leBlain ; sieur Jean- H enri- Eléonore L eb ru n , p r o p r i é
taire, et dame Anne V iro tte, son épouse, de lui auto
risée, liabitans de la commune de Tréteau; sieur Antoine
A
�F aure, géom ètre, et dame Suzanne V irotte, son épouse,
de lui autorisée, habitans de la ville de Clermont-Ferrand , partie de Montferi’and , appelant de jugemens
rendus au tribunal civil de l’arrondissement de Lapalisse,
les 21 jan vier, 3 fé vrie r, 7 et 21 avril derniers, aux
fins des exploits , requête, ordonnance et exploits des 23
et 24 février, 20 et 24 a v ril, et 14 mai derniers.
Disant que par son arrêt du 18 du présent, la cour a
joint les divers appels des adversaires, pour qu’il n’y eût
plus qu’une seule contestation entre les parties, et pour les
terminer par un seul et même arrêt. Toutes les parties ne
peuvent être que parfaitement contentes d’une mesure
qui simplifie Ici marche des choses , et mène plus promp
tement à une fin..
Mais il seroit impossible que l’on incidentât sur la
forme dont les intimés attaquent l’inventaire du mois de
janvier 1762. C e t inventaire est très-sûrement n u l, d’une
nullité irrésistible ; la cour ne sauroit s’empêcher de le
juger ainsi. Mais on reproclieroit peut-être aux intimés
de n’avoir pas, par la voie de l’ap p el, saisi la cour d elà
connoissance de la validité ou invalidité de l’ordonnance,
du procès verbal des 23 et 25 janvier 1762 , et de ce qui
y est relatif.
A la rigu eu r, un appel n’est pas absolument néces
saire ; de suite on peut en venir à la nullité, et la faire
prononcer.
Mais , en toutes choses, il faut choisir le parti le plus
certain ; e t, dans le doute, il n’y a pas d’inconvénient à
interjeter incidemment appel de l’ordonnance du 23 jan
v ie r, et de tout cc qui a suivi.
�( 3 )
• Ce considéré, M essieurs, en en venant par les parties à
votre première audience, il vous plaise adjuger aux intimés
les conclusions par eux ci-devant prises , avec dépens; et
icelles reprenant, corrigeant et augmentant, donner aux
intimés acte de ce qu’en tant que de besoin ils interjettent
incidemment appel de l’ordonnance du juge de Montaigutle-Blain, du 23 janvier 1762 , du procès verbal du même
juge, en date du 25 dudit mois , contenant nomination
de curateur, permission de faii'e faire inventaire, et com
mission au premier notaire royal sur ce requis ; et c e ,
pour causes et moyens de nullité, tenir ledit appel pour
bien relevé;y faisant d ro it, en même temps que sur ceux
des adversaires, des jugemens des 21 janvier, 3 février,
7 et 21 avril derniers, par les motifs exprimés auxdits
jugemens, par ceux déjà développés par les intim és, et
notamment en ce qu i touche Vordonnance du 23 janvier
1762 ;
Attendu que par sa requête du 23 janvier 176 2 , le
sieur M ichel V irolte a exposé qu’il vouloit se remarier,
■et qu’il l’a effectué le 8 février suivant, c’est-à-dire, en
viron quinze jours après, avec la dame Anne D elaire,
ainsi qu’il résulte de leur contrat de mariage;
D ’où il suit q u e , dès avant le 23 janvier 1762 , ledit
remariage étoit arrêté, et que les deux familles avoient
entr’elles des rapports tels, qu’elles n’en faisoiçnt plus
qu’u n e , celle Delaire commandant absolument à celle
V irotte;
Attendu que par sa requête du 23 janvier 1762, le sieur
M ichel Virotte père n’avoit demandé permission d’assigner
A a
�(4 )
que des parens paternels et maternels de ses enfans mi
neurs, et non des amis à défaut de parens;
D ’où il suit que le sieur Virotte père reconnoissoit qu’il
y avoit réellement suffisance de parens des deux estocs ;
c a r, dans le fait, il y en avoit plus qu’il n’en falloit pour
compléter le nombre voulu par la coutume de Bour
bonnais et l’usage ;
A tten d u , en fa it, qu’il s’agissoit d’intérêts d’enfans mi
neurs , et que l’ordonnance du juge de Montaigut-leBlain, du 23 janvier 1762, a été rendue sans conclusions
préalables du ministère public;
Attendu, en droit, que le ministère public est le défen
seur légal des mineurs ; qu’il doit être ouï toutes les fois
qu’il est question de leur intérêt, et q u e, d’après la loi
et l’usage constant de toutes les juridictions de France,
il y a toujours eu en pareil cas des conclusions du mi
nistère p u blic ;
Attendu que par l’ordonnance du 23 janvier 1762 , le
juge de Monta igut-le-Blain a permis au sieur M ichel
V irotte d’assigner des parens paternels et maternels seule
ment , et non des amis, et que dès-lors le sieur Virotte
père devoit se renfermer strictement dans cette per
mission ;
Attendu néanmoins que par son exploit du 25 janvier
176 2 , le sieur Virotte a fait assigner sept individus,
, sans désigner le degré de parenté de chacun avec les
enfans mineurs V irotte, les indiquant seulement par les
expressions générales, tous parens -paternels, maternels
ou am is, et sans distinguer les parens d’avec les amis*,
�Attendu que le sieur V irotte père a laissé, et a même
affecté d’éviter des parens maternels de ses enfans mi
neurs , et en exprès le sieur Antoine B riro t, docteur en
médecine , leur aïeul, celui qui dans la circonstance étoit
le protuteur n é , le protuteur légitime de sespetits-enfans,
et cela pour appeler à la délibération des étrangers auxdits
mineurs, même des parens de la dame A nne D elaire,
seconde future épouse; par exem ple, le curé de Montaigutle-Blain, le sieur Barret, notaire, et le sieur François
Féjard, du R éag e, oncle de ladite dame Anne Delaire.
E n ce qui touche le procès verbal du 25 janvier 1762,
Attendu que dans icelui l’on à fait remplir par le sieur
Féjard fils, les fonctions de procureur fiscal;
Attendu que ledit sieur Féjard étoit cousin germain
de la future seconde épouse du sieur Virotte père, et
que le remariage étant arrêté dès avant ledit procès verbal,
il est inconvenant que l’on ait pris pour procureur fiscal
un individu tenant de si près à la dame Anne Delaire ;
Attendu que dans ledit procès verbal, ledit sieur Féjard
y est dit substitut du procureur ¿fiscal ÿ
Attendu que dans les justices seigneuriales les pro
cureurs fiscaux n’avoient point de substituts en titre, et
que le sieur Féjard n’étoit muni d’aucune provision à
cet égard ;
Attendu que dans le procès verbal du z 5 janvier 1762,
il n’est pas dit que le procureur fiscal en titre fût absent
ou légitimement empêché , et qu’il y eût dès-lors raison
pour le faire remplacer ;
D ’où il suit que l’ayant fait remplacer sans cause, ç a
etc dans la vue coupable d’éviter sa surveillance, pour
�( 6 \
mettre en son lieu un homme dévoué à la famille D elaire,
par ses rapports de parenté et d’aftection particulière ;
Attendu que dans les justices seigneuriales le procu
reur fiscal ne pou v o it , en cas d’empêchement légitim e,
être remplacé valablement q u e , ou par un grad ué, ou '
par un ancien curial; encore falloit-il que la qualité du
gradué ou cui'ial remplaçant fût exprimée dans l’acte
judiciaire auquel il participoit, parce que son pouvoir
de remplacer étoit attaché à son titre de gradué ou de
curiai ;
Attendu que, dans le fait, le sieur Féjard n’étoit ni
gradué, ni curial, pas même postulant en la justice de
Montaigut-le-Blain ; et que dans le procès verbal dont'
il s’agit il n’est pas exprimé qu’il fût ou gradué, ou curial,
pas même postulant ;
• D e tout quoi il résulte que ledit sieur Féjard n’ayant
point serment en justice , étoit sans caractère légal; que
dans ledit procès verbal il y a absence absolue du mi
nistère public, et que la nomination du curateur portée
par icelui est nulle;
Attendu dès-lors qu’il n’y avoit point contradicteur
légitime pour coopérer à l’inventaire et y représenter
les enfans mineurs V iro tte, et y défendre leurs intérêts;
et que ledit inventaire est n u l, comme étant fait con
tradictoirement avec une personne illégalement nommée.
En ce qui touche les omissions et fausses déclarations
bien constantes et bien prouvées dudit inventaire ;
Attendu que celles démontrées dans la cause forment
un total de plus de 8i 5 livres 12 sous, somme énorme
comparativement à celle de 1 inventaire, qui n’est que
�(7 )
de 3106 livres, puisqu’il en résulteroit une lésion de
plus du tiers au quart contre les mineurs V irotte;
A tte n d u les autres infidélités dont est vicié ledit inven
taire ;
Attendu que le fait que le livre-journ al du sieur
Virotte père a été compris en l’inventaire ne sauroit
remédier aux vices justement reprochés audit inventaire,
parce qu’un inventaire doit porter minute de tout son ■
contenu ; que l’on ne peut pas dire que ledit journal et
l’inventaire ne font qu’un même acte; que le journal
pouvoit être supprimé, et que dès-lors les mineurs Virotte
ne pouvoient avoir aucune assurance à cet égard ;
D ire qu’il a été nullement ordonné et procédé, par
les ordonnance, exploits, procès verbal et inventaires, des.
23, 25 et 26 janvier 1762 ; bien appelé : émandant,
déclarer le tout nul, irrégulier et de nul effet; ordonner
que l’amende de 3 francs sur ledit appel sera rendue;
dire qu’il a été bien jugé p a r les jugemens.des 21 janvier,
3 février, 7 et 21 août derniers, mal et sans cause appelé;
ordonner qu’ils sortiront leur plein et entier effet, et
condamner les appelans en l’amende de 10 francs et aux
dépens, même en ceux réservés, lesquels, dans tous les
cas, les intimés emploîront en frais de partage, pour en.
prélever le montant sur les biens à partager.
GOURBEYRE..
A R IOM , de l'im p rim e rie de T iii d a u d - L a n d r i o t , im prim eur.
de la C our d’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Virotte, Jean-François. 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
géomètres
Description
An account of the resource
Titre complet : A messieurs de la Cour d'Appel, à Riom [Jean-François Virotte contre Anne Delaire]
Table Godemel : Communautés : 2. pouvait-on, sous l’empire du droit coutumier, et particulièrement en Bourbonnais, interrompre une communauté conjugale, à laquelle des mineurs étaient intéressés, pour un inventaire infidèle, inexact, ouvrage du survivant seul ? L’inventaire authentique et solennel pouvait-il être remplacé par un autre acte qu’un partage ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1762-1807
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1811
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1812
BCU_Factums_G1814
BCU_Factums_G1813
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53338/BCU_Factums_G1811.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montaigut-le-Blin (03179)
Treteau (03289)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume du Bourbonnais
géomètres
secondes noces
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53339/BCU_Factums_G1812.pdf
7d84790a0b78d752b32c3757ee42abda
PDF Text
Text
55/
OBSERVATIONS
-o::ii. iiO -
oü
POUR
L e s e n fa n s V I R O T T E , d u
p r e m ie r l i t , in tim é s
e t a p p e la n s
■' . :;JJo : .
. •
C O N T R ‘E
La dame
et
,
D E L A I R E , veuve V i r o t t e ,
ses enfans appelans et intimés.
Anne
devise si fatale, cette devise : Calomnions,
calom nions , ne fut et ne sera jamais celle des enfans
V irotte, du premier lit, ni de leurs conseils. L ’auteur de
leur mémoire im prim é, tout jeune encore, est déjà connu
par ses lumières et une extrême délicatesse ; et l’on n’eût
jamais dû s’attendre à des sorties contre celui qui n’a écrit
que des faits vrais, des faits sur lesquels on lui a donné
des renseignemens certains. Mais nous avons à c o m b a t t r e
contre le machiavélisme le plus affreux. P la id o n s, plai A
C te t e
'Si
�, disent jio's adversaires *, dénaturons 1 ¿o«*, etc. ¿7
eii reste toujours quelque^chose.
r,
Les principe^ dé droit ^relatifs à la "colïtinuation de
communauté, ont été parfaitement développés par M e.
Pagès dans sa plaidoirie. Notre objet 'actuel est unique
ment de résumer quelques points de fait décisifs.
'■■■
! -
FO RM E.
4
Tout ce qui a rapport à l’inventaire de 1762 est abso
lument nul.
•
•
• P R E M I E I l r. ^ C T E .
' \ ‘ a i'M.ill
:d
. J . ::
' L)
L ’ordonnance du 23 janvierr*iy62, qui a permis d’as
signer les parens des mineurs V irotte, a été rendue sans
conclusions du ministère public.
On nous dit qu’il n’en falloit pas, et qu’aucune loi n’en
exigeoit.
Mais c’est parler contre tout ce qui se pratiquoit avant
la révolution dans toutes les juridictions, tant seigneu
riales que royales. Dans les seigneuriales, le procureur
fiscal étoit ce que dans les justices royales étoit le pro
cureur du roi ; et, dans les unes et les autres, il a toujours
été en pareil cas donné des conclusions.
Pour toute réponse aux objections des adversaires à cet
égard , nous les renvoyons h l’article 1 8 1 de la coutume
de Bourbonnais.
S e c o n d
a c t e
.
Dans sa requête, le sieur Virotte père n*a pas demandé
�( 3 )
__
M ï
permission d’assigner des amis ou voisins à défaut de
parens; il a demandé permission d’assigner des parens,
parce qu’il y en avoit assez dans les familles Brirot et
Virotte. L ’ordonnance du 23 janvier permet seulement
d’assigner des parens : l’on ne pouvoit s’en écarter.
O r, qu’a-t-il été fait ? L ’on a assigné quatre parens et
trois étrangers; parmi les parens il y en avoit deux pa
ternels et deux maternels ; parmi les étrangers étoit le
sieur Féjard père. Ce sieur Féjard étoit oncle de la dame
Anne D elaire, future épouse du sieur Virotte père (1).
Cette circonstance est très-considérable dans la cause.
Pour la faire bien ressortir, il suffit de donner quelque
attention à ce qui a précédé et suivi.
C’est le 23 janvier 1762 que le sieur Yirottepère présente
requête au juge de Montaigut-le-Blain ; il y expose qu’il
veut convoler en secondes noces , mais qu’auparavaut il
veut faire faire inventaire dissolutif de la communauté
d’entre lui et ses enfans.
Quinze jours après ( le 8 février suivant ) le sieur
Virotte père épouse la demoiselle Anne Delaire.
Du rapprochement de ces deux époques, il n’est per(1) Dans son mémoire imprimé la dame veuve Virotte a fait
dire , page 1 1 , qu’on n’établit pas sa parenté avec les Féjard,
q u o n en éta b lit e n co r e m oin s le d eg rc. Auroit-elle donc oublié
que ce sieur Féjard avoit épousé M arie D e la ir e , ta n te d e la
d a m e v eu v e V irotte ? Nous répondrons par l’acte de naissance
du sieur Féjard fils , en date du i 3 août 1735. Si l’on porte plus
loin la négation d’un fait notoire dans le canton, les e n fa n s
Virotte , du premier lit, se soumettent à prouver complètement
la parenté.
A 2
�( 4 ) •
sonne qui ne conclue qu’au 23 janvier le mariage étoit
arrêté. Ainsi il faut dii'e qu e, par affection , en janvier, le
sieur Féjard père étoit déjà l’oncle du 6ieur Yirotte père,
et que la famille Yirotte étoit déjà l’alliée de celle Delaire.
Eh bien ! c’est ce sieur F éjard , cet homme tout dévoué
ù la famille Delaire , que l’on prend pour délibérer
contre les mineurs Virotte. L ’on va plus loin ; quand
on s’en est servi comme délibérant, l’on en fait de suite
un expert pour estimer les objets à inventorier. Ainsi
l’oncle delà dame Anne Delaire joue ici deux rôles pour
opérer le mal des mineurs Yirotte.
Mais ce qu’il y a de plus étrange encore, c’est que
l ’on emploie un oncle de la dame Anne Delaire, pour
laisser de côté l’aïeul maternel des mineurs Virotte
( Antoine B rirot, docteur en médecine)^
Dans leur mémoire les adversaires on fait imprimer,
page 10 : a On voit un Antoine Brirot parmi les parens
« assignés, et cet Jbitoine B riro t 11e peut être que l’aïeul
« des mineurs.
« Ce n’est donc pas la faute du sieur Virotte, si le sieur
« Brirot n’a pas assisté à cette assemblée.
« Il est d’ailleurs de notoriété que le sieur Brirot étoit
« accablé d’infirmités, et hors d^état desortir de chez lui. »
On pourroit leur répondre qu’il y a de la mauvaise
foi dans ces deux assertions ; mais nous voulons nous
défendre sans injurier personne.
i ° . Antoine Brirot, assigné par l’exploit du 20 janvier
1762 , n’étoit point Antoine Brirot aïeul; il en étoit le
fils. Dans l’assignation, et dans le procès verbal d’assemblée
de 17 6 2 , il est qualifié bourgeois ,■ tandis que Vylntoine
�B riro t, a ïeu l , est constamment qualifié docteur en mé
decine , dans le contrat de mariage de 176 2, et dans des
actes de 1764 et 1784 , qui sont dans le dossier des mineurs
Virotte.
2°. On nie de nouveau, et avec vérité, qu’Antoine
Brirot aïeul fût infirme et hors d’état de sortir de chez lui.
D ’ailleurs on devoit l’assigner et le contumacer ; il n’y
avoit que ce moyen juridique de constater le fait contre
lui ; d’ailleurs encore, suivant M. A u ro u x, sur l’art. 180 ,
n°. 4 , l’aïeul maternel pouvoit se faire représenter par
un fondé de pouvoir. « Ceux qui sont appelés à la no
ce mination drun tuteur, dit cet auteur , y peuvent donner
<c leurs suffrages en personne , oie p ar -procureur fo n d é
cc de procuration spéciale, contenant le nom et la qua« lité de celui qu’ils nomment pour tuteur : tel est
« l’usage. »
L ’aïeul maternel étoit dans les circonstances le subrogé
tuteur légitime ; il l’étoit par l’effet de la loi : après le
sieur Virotte il étoit le seul ascendant existant.
Il doit en être d’un subrogé tuteur comme d’un tuteur;
les motifs et les règles sont les mêmes.
O r, l’article 177 de la coutume de Bourbonnais place
en première ligne la tutelle testamentaire, et la préfère
à toutes autres.
Viennent ensuite la tutelle légitime et naturelle., et
la dative.
Par l’article 17 8 , la légitime n’a pas besoin d’être con
firmée en justice.
L ’article 179 la défère à la m ère, et à défaut d’elle
« Vaïeul ou aïeule paternels ou maternels.
�( 6 )
Comment donc concevoir que l’on eût pu valable
ment se dispenser d’appeler à l’assemblée celui qui étoit
déjà le tuteur ad hoc, dont on avoit besoin pour faire
faire un inventaire dissolutif de la communauté ? On
avoit fait assigner les autres, pourquoi n’en avoir pas
usé de même envers l’aïeul maternel ?
Dire que le sieur Virotte père pouvoit assigner indis
tinctement des parens ou des amis, c’est aller ouvertement
contre la disposition de l’article 180 de la coutume de
Bourbonnais, portant : « Tutelle dative se doit donner
« p ar élection de parens et affins desdits mineurs de
« chacun côté E T A d é f a u t d e p a r e n s e t a f f i n s ,
« par élection de voisins jusqu’au nombre de sept pour
« le moins. »
De cette lo i, qui est celle des parties, il suit que l’on
ne pouvoit avoir recours aux amis ou voisins qu’à défaut
de parens et affins : tant qu’il y avoit des -parens et
affins , i l n ’ é t o i t pas permis de se servir d’amis OU voisins.
Dans la cause actuelle il falloit donc épuiser les parens
et qffitis Brirot, avant d’en venir à des amis ou voisins;
il falloit, en conformité de l’article 18 1 de la coutume
de Bourbonnais, assigner l’aïeul maternel.
Opposera-t-on que l’article i8o de cette coutume n’e6t
que pour les tutelles datives, et qu’on ne peut pas l’ap
pliquer à la nomination d’un subrogé tuteur?
D ’une part, dans l’usage l’on a toujours suivi l’art. 180
;
de la coutume de Bourbonnais pour ces nominations, et
cet usage vaut loi.
D ’autre part, si vous récusez l’article 18 0 , alors on
vous réplique par l’art. 17 9 , et l’on vous dit : « L ’aïeul
�( 7 )
« maternel étoit de droit le tuteur ad hoc ; vous en avez
« fait élire un autre qui n’est pas celui' désigné par la
« loi même : donc ce que vous avez fait est nul.
'
T
r o i s i è m e
a c t e
.
»■
Dans la nomination du subrogé tuteur l’on a fait rem
plir les fonctions de procureur fiscal par le sieur Féjard
fils.
■ *V ' . Met; j
i ° . On ne peut pas dire qu’il n’y falloitpas le concours
du ministère public; on seroit démenti par l’art. 18 1 de
la coutume de Bourbonnais, et par l’usage constant.
2°. L e sieur Féjard fils étoit cousin germain de la
future épouse du sieur Virotte père.
Dira-t-on qu’il n’eût été que récusable?
' Mais qui pouvoit être là pour proposer la récusation,
dans l’intérêt des mineurs V irotte? Tout étoit illégal,
'tout étoit monstrueux : personne ne les représentoit lé
galement, personne ne pouvoit parler pour eu:?u
3°. Dans le procès verbal on a qualifié le sieur Féjard
de substitut du procureur fiscal.
D ’une part, dans les justices seigneuriales les procuTeurs fiscaux n’avoient point de substituts : cela est connu
de tout le monde. L ’on défie les adversaires d’établir que
le sieur Féjard eût provisions ad hoc. L ’on a compulsé
les minutes des greffes, et il ne s’est trouvé aucune pres
tation de serment de sa part : il étoit donc sans caractère
public.
D ’autre part, le sieur Féjard n’étoit ni gradué ni c u r i a l ,
P » s même postulant. L ’on défie les a d v e r s a i r e s de rap-
�porter aucun autre acte judiciaire auquel il ait concourir.
L e procès verbal en question est le seul qu’il ait fait dans
toute sa vie. (Ses occupations se réduisoient à acheter et
revendre de^ grains. )
l ’ on ne peut nous opposer la loi Barbarius Philippiis.
Dans l’espèce, de cette lo i, celui dont on atLaquoit les
jugemens avoit la possession : il avoit rendu un grand
nombre de décisions : il y avoit erreur ^commune., Dans
notre cause, cette erreur n’existe pas, puisque le sieur
Féjard n’a fait qu’un acte judiciaire.
Mais., dit - o n , ce n’est pas le sieur \ irotte père qui
avoit mis là le sieur Féjard; c’étoit le bailli de Montaigut ; et vous êtes bien défavorables à attaquer, après
quarante-cinq ans de sa date, un acte qui n’est point du
fait du sieur Virotte père.
r ° . Nous réclamons à l ’instant où nous y avons inté
rêt. Notre intérêt n’est né qu’au décès du sieur Virotte
père, arrivé en i 8 o 5 . Jusque là no,us n’avions rien à direc
la communauté durcit encore, et nous ne connoissions
aucun des actes de 1762.
20. Quand il s’agit de nommer un contradicteur légi
time, c’est à celui qui en provoque la mesure à s’assurer
si les personnes qui y sont employées ont ou non carac
tère public ad hoc. L e plus grand vice d’un acte est
d’émaner d’un homme sans qualité.
Ainsi donc, point de contradicteur légitime, et nul
lité absolue de l’inventaire.
Q u a t r iè m e
�( 9 )
Q u a t r i è m e
'
a c t e
L'inventaire.
.
.
!
II a été fait en deux jours ( les 25 et 26 janvier 1762).
Dans la séance du 2 5 ¿'l’on inventorie ce qui est déclaré
être dans le domicile du sieur Virotte père.
Cette séance est close à six heures du soir : on s’ajoùrne
au lendemain deux heures de relevée. Il est dit que dans
l’intervalle les experts se transporteront dans les immeu
bles pour vérifier et estimer les bestiaux et les récoltes,
et en feront leur rapport.
A u 26 janvier le soleil n’est levé qu’à sept heures
vingt minutes : ces experts ne pouvant donc partir qu’a
lors, de sept heures vingt minutes à deux heures de re
levée , il n’y a qu’un intervalle de six heures quarante
minutes.
. ; :i ?•’>
'v,
<'
Pourtant les experts sont au rendez-vous de deux heures
de relevée, et font leur rapport au notaire, qui le con
signe dans l’inventaire.
A en juger par la relation en l’inventaire, les experts
auroient, dans un espace de six heures et quarante mi
nutes, dans un pays de terre forte, et en mauvaise saison,
i ° . fait dix lieues et un tiers (nous en avons fait le
calcul sur une carte géographique de Cassiny); 20. vérifié
et estimé les bestiaux et les récoltes de neuf gros domaines
et six locateries. Malgré le ah actu ad posse valet consecutio dont se servent les adversaires, cela n’est ni v r a i ni
vraisemblable; cela est physiquement impossible. Une idée
B
�(f *©.)
Lien plus juste se présente à la raison : tout a été fait sur
la simple déclaHation/duT sieur "\Jirotte père.
Aussi dans l’inventaire n’est-il pas dit que le sieur de
Finance, prétendu subrogé, tuteur, a accompagné les
experts dans leurs opérations. Il le devoit pourtant,
pour leur faine des obsenvàtjons utiles aux mineurs; pour
voit par) ses propres ÿeuxrsï ori< représentoit aux expèrts
tous les bestiaux;, t&ütës lesirécoltes^iOost de sa part une
négligence coupable qui fait qu?otir rie doit aucune foi à
l’inventaire, Jaa
;J r : .f •'*
'
u ■tu-, ■ ,! ,.t
-l !,
. ! '! " - -..¡„.J
" • i : •’ ■ ■
>j; j
-,.r.üjirû-rr ISaussE# déclarations , et omissions* ‘ ■)««
•; : -1 ;!• , jll< • •! i-
'*
*"/Suri ce poiiib^a'coiir vcradraîbieni donner’t une atten
tion particulière)à'la.ci’itique infmimentoexacte;qu’eri ont
faite M es. Marnier et Pinot, jurisconsultes. Ils excellent
principalement, dans ‘les.questions de; communauté.
Ici nous nous contentons de relever trois arliclesi qui
étaient, très en, évidence /et sur lesquels on ne peut pas
«.’excuser en alléguant de l’inadvertance.
çi ■
L e premier porte sur le produit des grains, évalué par
les experts à liuit coupes le cent ,i tandis) que1 Jet journal
du père atteste qu’il en a tiré treize coupesj C’fcstlei 26
janvier qu’on arbitre à huit coupés y et o’est le 23 du
même mois., trois.’ jours auparavant, que le p ère, se
rendant compte à lui-même, écrit qu’il a affermé à treize
coupes. Il y a bien là au moins lata culpa.
- L e deuxième article est relatif aux’foins et pailles étant
(ïarisLi réserve ida sieur V i roi te père. A cet égard, pas
lurmot dans ¡ ’inventaire : il avoit pourtant dans ses écuries
�( 11 )
des bestiaux et deux chevaux. Qui .croira qu’en ijaiV^ier
il fû f sans foins,et sam "paille,Si?'3lie là jà.:la-iécolte. il ÿ
avoit encore six mois. L a présoinpftion;ré.toitidonfc q’iifil
yi aVoit provisions poür la nourriture sde !ces -animaux,
oh Veut - ou ne pascse contenter- de cette présomption ?
lies enfans V irotte, du premier lit, offrent de prouver
quîeu;jauviet‘,i,762 les fenils et granges de leur'pèré étôient
amplement garnis en foins et! paillés ; ils le peuvent avec
d’autant plus de sûreté, que dans la commune de Montaigut il y a plusieurs personnes âgées de quatre-vingts
ans.
>
1
L e troisième article est relatif au bail à ferme et à la
liève de la terre du Méage.
L e bail avoit été consenti’ au sieur Virotte père pen
dant la première communauté’; par conséquent les profits
en appartenoient à la commùnauté pendant toute la durée
du bail : en 1762 il y avoit encore plusieurs années à
courir.
i; f:
Que l’on ne dise pas que le sieur V irotte, obligé, après
1762 , à exploiter seul les fermes, seul il devoit en avoit
les bénéfices.
i ° . Il étoit le tuteur légitime de ses enfans mineurs;
à ce titre il étoit tenu d’aviser aux moyens d’exploiter
aussi pour eux.
2°. Pas de raison exacte pour attribuer exclusivement
au sieur Virotte père tous les produits d’une convention
faite au profit de la première communauté.
Ainsi donc le sieur Virotte père devoit faire i n v e n
t o r i e r le bail de la terre du M éage; ne Payant p a s fait,
*1 y a omission, et nullité de l’inventaire.
B z
�■' L ’on oppose en vain que s’il ne l’a pas fait, cela vient
de ce que le ‘bail étoit- sous'signature privée ÿ et qu’il eût
fallu le faire'Contrôler.1 ' i(j • .î-uj
a:
■ J;o 7 ;
.:i°. Ce: seroit une fraude que Fon auroit voulu faire
contre le fisc., et'on ri’est>pas recevable à se prévaloir de
sa propre fraude.
•f
'
j 2 °. Peu importoit la dépense du contrôle, quand il
s’agissoit d’assiii’er l’intérêt des mineurs. A u résultat ,
l’omission existe, et c’en est assez. ^
M ais, dit-on, le sieur Virotte ne pouvoit pas porter
dans son inventaire des objets éventuels, tels que lea
profits de la ferme;
i ° . Il devoit déclarer le bail.
- 2 °. A la fin du bail il devoit faire un supplément d’in
ventaire, et y consigner le compte des bénéfices. C’est
ainsi que cela a toujours été pratiqué en pays de com
munauté ; et le sieur Virotte père est mort sans avoir
rempli cette formalité.
Quant à la liève, elle devoit être comprise en l’inven
taire ; chaque article de recette faite avant le 20 janvier
1762 devoit être paraphé par le notaire ministre de l’in
ventaire, pour empêcher toute antidate pour ce qui étoit
encore à percevoir : l’on devoit faire le dépouillement
de ce qui restoit d û, et en porter le quantum dans l’in
ventaire.
: L e sieur Virotte père étoit un comptable qui rendoit
une espèce de compte en 17 6 2 ; il étoit obligé d’en re
présenter toutes les pièces justificatives, et de les faire
énoncer dans Tinventaire : il étoit forcé à le faire ainsi,
pour mettre ses mineurs à même de revenir un jour contre-
�( i 3 :)
les erreurs, contre les omissions, et les établir avec les
pièces inventoriées.
i.
,i->! i,r' :
- O r, on le demande, en l’état des choses, comment
établir des'erreurs,;commenté même pouvoir en coter?
"Le sieur Virotte déclare in globo qu’il a en argent ou
arrérages de cens la somme de 5oo francs ; il ne dit pas-,
tant en argent , tant en cens. E s t - il donc possible de
-démêler la vérité dans cela? E t le ¡moyen de revenir
contre les tromperies , s’il y en a !
»
M ais, dit-on, la liève n’appartenoit pas au sieur Virotte,
mais au seigneur : donc il ne pouvoit la faire inventorier.
Suivant M . A u ro u x, sur l’article 22 de la coutume
de Bourbonnais, n °. 1 7 , des reçus affirmés empêchoient
la prescription des cens.
Par l’article 4 2 2 , les seigneurs ou leurs fermiers étoient
obligés d’avoir des lièves en bonne et due form e, pour
par les censitaires y trouver la preuve de leur libération,
et encore les mettre à même de demander la restitution du
trop-payé , et cela avec dommages et intérêts. Chaque
fermier étoit tenu de faire une liève pour la durée de
son bail.
Cela posé, le sieur Virotte devoit avoir et avoit réelle
ment une liève de son fait : donc elle devoit être in
ventoriée.
,
4
La directe du Méage étoit très-conséquente : le sieur
Virotte père y a fait de gros> bénéfices. A l’audience
l’on convenoit que les enfans du premier lit avoient droit
d’en demander moitié ; M . le substitut de M . le p r o c u
r e u r général y avoit même conclu. Mais où est le m o y e n
d’opérer cet effet? Tous les papiei’s féodaux sont brfilés;’
�( r4 )
il n’en reste!aucun pour faire.,des comptes. L ’impossi
bilité du fait fera-t-elle que tout demeure confondu dans
dans la seconde communautér?aLn'raison én est révoltée.
° Que le sieur Virotte ait'fait inventorier son joürnal,
cela ne remédie pas aux vices que nous prouvons, par
ce journal même, contre l’inventairè.
i<>. Ce journal ji’-a pas été paraphé par le notaire .qui
îi fait l’inventaire de 1762 ( les paraphes qui y sont-ac
tuellement 11’ont été faits qu’en 1806)',- lors de l’inven
taire après le décès du père '). Ce journal pouvoit donc
être changé après coup; il pouvoit en être fait un autre
au soutien de l’énoncé en l’inventaire. D ’ailleurs, qui nous
assuré que c’est le journal inventorié qui paroît aujour
d’hui ?
20. L e contenu en un inventaire est pour instruire les
mineurs : tout doit porter minute. Si le journal eût été
perdu ou soustrait, qu’auroient pu demander les mi
neurs? Seulement 253 f r ., montant du dépouillement du
3 0. Notre position est la même que celle où un tuteur
auroit rendu compte à son oyant, et où, après la mort
du tuteur, l’on auroit trouvé chez lui des pièces probatives d’omissions, etc., et retenues par lui. L e sieur V i
rotte père retenoit son journal : on ne l’a trouvé qu’à sa
mort.
Que l’on cesse de crier que les erreurs, les omissions, etc.
sont minces en comparaison de la valeur de la succession
a partager.
L ’on sait bien que la somme de 3106 francs, montant
de l’inventaire de 17 6 2 , n’est rien en comparaison’ de
�( 1 5. )
600000 francs, valeur actuelle de la succession Virotte.
Mais c’est à l’état des choses en 1762 , qu’il faut re
monter; c’est l ’inventaire de 1762 qu’il s’agit de juger
sans pouvoir descendre à l’état-des choses en 1806, Ces
deux époques sont bien à distinguer. En 17 62 les mineurs
' Virotte ont-ils été lésés ? Voilà la question unique, ils
l'ont été énormément, cela suffit,
.
A q u o i b o n répéter à c h aque instant que les enfans
V irotte, du premier lit, tiennent ad pa rafa s epulas ?
Dans la-cause ce lieu commun est nul. Ils ne demandent
' que ce que la loi leur accorde et ce que le père vouloit
leur assurer., s’il n'avoit pas été surpris par la mort : cela
v aut infiniment mieux que les clameurs des adversaires.
La dame veuve Virotte renonce à un testament de 17 6 8,
que l’,on ne connoissoit pas A in si, nous n’avons que faire
de nous en occuper : aussi ne pourrôit-il lui se rv ir que
contre ses propres enfans, au moyen1 de l’ institution d’hé-»
ritier par égalité déjà faite en faveur des enfans du pre
................. .. .............
mier lit..
, ...
V
W
4R
V JL^
.U Y
«JU *R
JLV E
J - A père.
W*
GO
U
BE
W
/
^
/
/
’
ç-A** lu.
'
ti
•
fl
r-
■
(
_______________
_
t . LJLa / *4r~b,tïJ
.r TU1 C ^ A * .
u
w
u
^
»
J
»
A R I O M , de l’imprimerie de T hibaud-LANDRIOT , imprimeur
de la C o ur d’appel. — Août 1807.
‘~ *"~
__
l
y
°
r
�ti
^
f
«\J C A j r f t ï
C * j UA h l t a «
U -
y ^ / lk u b W I---- *
*
-- t(/ML
^
UW A u u U ^ / À D U
tAr f ' H
V c ^ u Jc ct^
&A
k v (« ¿ b l
V J
- v /
/u a\V.OX/¡
i^ to ü tr '
Cv O v b u v M
111^..* .^
'^ U * il ílC u 4
/I f c w / u i o ,
V .'
'
^V^JL^ajUUVL
'Ì J u
^
’/ i y A u » u ì i i )
'
'+ < „ I , ’
O-tU
^U4w m.m.i>J,
Ü T Ú Í í i ^ / i ) lA
A«2fct-
iJ
< r \ í-~
tjnM ***r - o t Á ^ .
tA ** jí-
« jfí - r - - ,
^O V ^yjvln ^ V/VM>^>Úmua^ íxldfcWu (
<{/'*■* t4-*_ VuvaJ
IAA- í_líj^JÍ-kJlXj
<y»+ ti*. O v ^ .w ,^ ^c.w^-ftAyv^t^ksX- ^, ^y«ÁÜX* ds
c**«¿>cv«w^r-
CfoUju»J>
/*>*•*—
-L-
/OC/Loftr ^/*** ^ K*Âr'
àc
CL.v^foJ^ ¿,¿u ~£rf Cy^-J^ jr0x^ ,— Vdw* ^
^ CA/V***a »
t*W*-^(M c £ i ~ CU ^ v - ^ w c » - / ' i U » w
£/«a*>2>
¿
_
VtW*A4^V—^ t--- *. (a
lX
j Vj^Ou/bv«ij(
j f
0
A U »r
/ ' U*«L> Cu tu Ï A
/(u fe » ¿ U U . o ^ t i/ iiÁ Í O
/ c<
C u ^ tO > U V
'b 'o M
(A (u 4 ^ lU * ^
/ «.
ò
i ^
c t - j
*' y
"'* 1
U
cL ^ J tÚ Á ¡u -¿ J h ¿ ^ dU
/pi**iÀ Ï+
U t / fc - » u r
Z*''y ^ E U A i ^ O
C)i»>- efr-
* , ‘ | /f _ .* /I
ÜvU MU/«
<U /tt«‘
i
ti»
^
^ V *W > «W Í
í***£ C ó fr < i* °
&
jJ-\ t* ts Um JL. ( u U M . t r y t U w U .
c».
èu »y fifeu
fn¿ ?tU ü u
* »
O- fa*.
A iÎ ^ < « Jïr
Jt
—
a
ft*.
w
í/ ^
ÿ*** y'uyUÀp*>*~** /*'
*v ¿ . ^
u/u. .iMi^JhrdU
_ /
/ *_V * A*■*
W^ímJT />Í*4T Aim . - - -
.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Virotte. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
livres-journaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Observation pour les enfans Virotte, du premier lit, intimés et appelans ; contre la dame Anne delaire, veuve Virotte, et ses enfants, appelans et intimés.
Particularités : Notation manuscrite : texte intégral de l'arrêt du 22 août 1807, Seconde section. Arrêt infirmatif sur plusieurs points.
Table Godemel : Communautés : 2. pouvait-on, sous l’empire du droit coutumier, et particulièrement en Bourbonnais, interrompre une communauté conjugale, à laquelle des mineurs étaient intéressés, pour un inventaire infidèle, inexact, ouvrage du survivant seul ? L’inventaire authentique et solennel pouvait-il être remplacé par un autre acte qu’un partage ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1762-1807
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1812
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1811
BCU_Factums_G1814
BCU_Factums_G1813
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53339/BCU_Factums_G1812.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montaigut-le-Blin (03179)
Treteau (03289)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume du Bourbonnais
livres-journaux
secondes noces
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53340/BCU_Factums_G1813.pdf
4cdbc121281d938ecf46b9d890b513c5
PDF Text
Text
MEMOIRE
P o u r A n n e D E L A I R E , veuve de
M ichel Virotte , et les six Enfans
nés de leur mariage, appelans ;
les quatre Enfans du p rem ie r lit du
dit sieur V i r o l l e intimés.
C o n tr e
L ' a p p e l est, sur le fo n d , d’un jugement par défaut du tribunal
de la Palisse.
L a dame Virotte et ses enfans ont eu leurs raisons pour venir
directement aux pieds de la Cour.
)
Il a été répandu un mémoire imprimé, au n o m des enfans du
premier lit du sieur Virotte.
On y peint le sieur Virotte comme un père injuste, qui voulant
passer à de secondes noces, a pris des mesures qui tendoient ouver
tement à spolier les quatre orphelins laissés par sa premièrefemme
�( a )
E t la dame Virotte comme une femme ambitieuse, qui a obsédé
son mari, pendant quarante-quatre ans qu’a duré leur union, pour
l ’empêcher de réparer ses torts par un acte de justice éclatant.
On n’opposera à ces injures que delà modération; on ne répondra
aux calomnies que par des faits.
L e sieur Virotte, domicilié en Bourbonnais, a contracté un pre
mier mariage avec Anne Brirot, le G août 1752.
Il fut constitué à Anne B riro t, par ses père et m è re , une dot de
2000 livres en deniers, et 400 livres de meubles.
On voit dans le dernier feuillet du livre-journal du sieur Virotte,
qu'il n’a reçu de son beau-père, sur cette dot , que quelques
à-comptes, et de loin en loin.
11 eut quatre enfans de ce mariage, et il perdit sa femme au mois
de novembre 1756.
Il resta dans cet état de viduité jusqu’au mois de février 1762,
qu’il,épousa Anne Delaire.
Il prit la précaution, avant de contracter ce second mariage, de
faire-taire un inventaire dissolutil de la communauté qui avoit sub
sisté entre lui et Anne Brirot, et qui avoit continué avec les quatre
enfans qu’il avoit eus de ce mariage.
Cet inventaire fut fait dans les formes usitées dans la Coutume
de Bourbonnais.
Cette première communauté n ’avoit pas été très-avantageuse.
L e sieur Virotte et sa première femme étoient entrés en ménage
sans avances, sans moyens pécuniaires.
11 s’étoit rendu fermier de quelques biens; mais les denrées
étoient au plus vil prix, comme on peut le voir dans les pancartes
du t'Tnps. Une guerre désastreuse avoit tari toutes les sources de
la prospérité publique; et par surcroit d ’infortune, une grêle af
freuse avoit, en 1761 , dévasté toutes ses récoltes , ot altéré la qual.té du peu de grains qui a voient échappé à ce fléau.
On ne doit donc pas être étonné que l’inventaire dissolutifde la
j reniière communauté n’ait donne qu uu résultat de trois mille et
, quelques cents livres.
�( 3)
Après son second mariage, les affaires du sieur Virolte commen
cèrent à s'améliorer.
L a paix de 1762 ranima l’induslrie et le commerce. L e sieur'
Virotle, secondé par une femme économe, active et laborieuse,
augmenta ses ferm es, se livra à l’engrais des bestiaux pour la pro
vision de Paris, fit de vastes entreprises sur les bois, et embrassa
tous les genres de spéculation dont les circonstances et les localités
pouvoient lui présenter les moyens. Sa fortune s’est accrue insensi
blement , et la seconde communauté a été portée à un degré de pros
périté qui a excité l’envie des enfans du premier lit.
D e là, tous leurs efforts pour tenter de faire annuller l ’inventaire
destiné à dissoudre la première communauté contractée entre le sieur
Virotte et leur mère, et continuée avec eux jusqu’au second ma
riage du sieur Yirotte avec la dame Delaire.
Pour parvenir à ce but, il a paru tout simple de calomnier les in
tentions du sieur V iro tle , de le représenter, au moment de con
tracter une seconde union, méditant dans le silence et préparant
avec art des mesures propres à spolier les quatre orphelins laissés
par sa première femme.
On ne voit pas, à la vérité, ce dont il pouvoit spolier ces quatre
orphelins, car il étoit alors à peine au niveau de ses affaires. Mais
qu’importe! a dit l’auteur du mémoire, calomnions, calomnions,
il en reste toujours quelque chose.
Cependant, ce père injuste, dénaturé, 11e s’occupe, en contrac
tant un second mariage, que de l’intérêt de ses enfans du pre
mier lit.
L a loi le rendoit commun avec sa seconde femme; il déroge à
cette loi; il stipule expressément, dans ce second contrat, que la
communauté.n’aura lieu entr’eux que dans le cas seulement q u e,
lors du décès de l'un ou de Vautre des fu tu rs, il y aura des en
fa n s vivans du présent mariage, avec convention qu’ elle n'aura
pas lieu au cas contraire.
D e sorte que si la dame Delaire n ’avoit pas eu d ’e n f a n t , elle éloit
condamnée à travailler gratuitement, pendant toute sa vie, pour
les enfans du premier lit, sans autre espérance qu un douaire preiix
de i/|ofr., stipulé par ce contrat.
�On peut juger par là si le cœur du sieur V irotte , -préoccupé
d’une nouvelle passion , s’ étoit entièrement ferm é sur les intérêts
des demandeurs ; si la famille étrangère, à laquelle il alloit
s ’a llier , lui avoit imposé des lois contraires à ses sentimens.
M ém oire, page 2.
L e sieur Virotle ne se contenloit pas de s’occuper de la fortune de
ses enfans du premier lit, il ne négligeoit rien pour leur éducation.
Dans le premier âge, il les a fait élever chez lui par des précep
teurs; de là il les a envoyés dans des collèges. Leurs études finies,
il les a tenus chez des procureurs; et enfin parvenus à l’âge de de
venir eux-mêmes pères de famille, il leur a procuré à tous des
çtablissemens avantageux.
Q u ’on lise leurs contrats de mariage, on les trouvera tous ins
titués par égalité avec les enfans du second lit.
Les filles elles-mêmes, condamnées par la Coutume à une forclu
sion rigoureuse, ont été instituées héritières par égalité avec leura
frères des deux lits.
Enfin le sieur V i r o t t e n ’a fait q u ’un seul avantage dans sa famill e,
et cet avantage est en faveur du fils aîné du premier lit.
Quant à la dame V iro tte, elle en appelle à la conscience de ses
adversaires; c ’est à eux-m êm es, et non pas à l’auteur du Mémoire,
qu’elle demande s’ils n’ont pas. trouvé en elle une seconde m ère;
si elle ne les a pas traités, dans tous les instans, avec les mêmes
soins, avec la même tendresse que ses propres enfans.
Et en faudroit-il d’autre preuve que l’union qu’elle a su main
tenir pendant quarante-quatre an s, entre ses enfans et ceux du
premier lit, sans que, jusqu’au décès du sieur Virotte, cette union
ait été troublée par le plus léger nuage?
Quant au caractère d’ ambition qu’on lui reproche , ce n ’est
encore qu’à l’auteur du Mémoire qu’elle l’im pute, et non aux
enfans du premier lit.
A u surp'us, un mot suffit pour la justifier sur ce point.
A u moment de la mort de son m a ri, les greniers étoient pleins
de grains, les caves pleines de vin , et elle a remis près de 24,000 fr.
en numéraire, sans qu^ellc s^cn s.oit réserve une obole»
�¿ 5
C ’en est assez sur le chapitre des calomnies ; il est temps de
revenir à la cause.
L e sieur Virotte est décédé au mois de novembre i 8o 5.
U n inventaire , fait en présence de tous les intéressés, a constaté
l ’état de sa succession.
Mais les parties ont été divisées sur le mode du partage.
Les enfans du premier lit ont cru pouvoir critiquer l’inventaire
fait par le sieur V iro tte, au mois de janvier 1762, destiné à dis
soudre la première communauté contractée avec leur mère. Ils
ont prétendu que cet inventaire étoit défectueux; que la première
communaulé n’avoit pas été interrompue; que dès-lors la seconde
communauté devoit être partagée en trois portions égales entre eux,
la dame Virotte et la succession du sieur Virotte; et c ’est dans ce
sens qu’ils ont formé, au tribunal de la Palisse, leur demande en
partage, qui a été accueillie par le jugement par défaut dont la
dame Virotte et ses enfans sont appelans.
Les enfans du premier lit opposent deux sortes de moyens contre
cet inventaire.
Les uns sont relatifs à la forme, les autres à de prétendues frau
des, erreurs ou omissions.
A vant d’entrer dans la discussion de ces moyens, il n ’est pas
hors de propos de la préparer par quelques réflexions préliminaires.
L a continuation de communauté, contraire aux lois romaines
et en général à tous les principes reçus en matière de société, ctoit
autrefois inconnue en Bourbonnais.
On lit dans l’ancienne Coutume de cette province , rédigée en
i 4ç p , ce qui su it, article 6 du titre des Communautés :
« Item , l’on tient par ladite C outum e, que les enfans étant en
« puissance de père, n'acquièrent point de communauté avec leur» dit père ni ses personniers , supposé qu’ils soient seigneurs de
» leurs biens, à cause et comme héritiers de leur f e u e mère ou nuire. »
Cette continuation de communauté a été introduite dans nos
usages par l’article 118 de l’ancienne Coutume de Paris.
�»v i .
( 6 )
Elle a depuis clé étendue à beaucoup d ’autres C outum es, et
spécialement à celle de Bourbonnais, rédigée en i 520.
On lit dans l’article 2yodecette nouvelle Coutume, que « si l’un
» des conjoints par mariage , ou autres communs personniers, vont
» de vie à trépas , et laissent enfans ou autres qui soient leurs hé» ritiers, et le survivant desdits conjoints ne fa it aucun inven» taire, partage ou autre convention e'quipollant à partage, dedans
» 4° jours, à compter du jour du trépas du prémourant, la com» munauté de biens se continue et conserve entre ledit survivant et
» lesdits enfans, pour la portion du défunt, si bon leur semble; et
» néanmoins sont saisis et en possession de la succession de leurs
» père et mère trépassés, ou autres, desquels ils sont héritiers. »
Mais cette continuation de communauté a toujours répugné à
tous les bons esprits, comme n’étant propre qu’à faire naître des
procès interminables dans les familles, et à orner les tribunaux.
Aussi les célèbres jurisconsultes qui ont rédigé le nouveau C od e,
en épurant nos anciennes lois , se sont-ils empressés d ’abroger cet
usage, parce qu’ il étoit la source de procès innombrables , a dit
Tronchet, dans sa discussion au conseil d’état,*sur l'article i 44 2
du Code.
Berlier a dit après lu i , que« Tronchet a très-justement objecté
» les embarras de cette continuation de communauté ; niais ,
» ajoute-t-il, ils deviendroient plus grands encore si le survivant
» des époux se remarioit, car le nouvel époux entreroit aussi dans
» la société; c’est ce qui avoit lieu dans le ressort de la Coutume
» de Paris, et de celles qui avoient admis la continuation decom)) munauté; o r, l ’on conçoit qiCune telle institution est essentiel» lement mauvaise. »
« Quanta lacontinuation de communauté, dit encore T reilh ard ,
» après Tronchet et Berlier, on a toujours réclamé contre cette
» institution ; la section saisira avec avidité les mo y e n s qui pour» ront être proposés pour suppléer à ce remède dangereux. »
Quoi qu’il en soit, cette institution de la continuation de com
m unauté, essentiellement mauvaise, et contre laquelle on a tou
jours reclame, ctoit en vigueur au moment où le sieur Yiroltc a
�■ bsr
(
7
)
passé à de secondes noces. Il a donc dù faire, pour l'interrompre,
ce que lui prescrivoit la Coutume sous l’empire de laquelle il vivoit.
Cette Coutume exigeoit aucun inventaire, partage, ou autre
convention e’quipollant à partage.
En remontant à ce qui se pratiquoit dans les temps anciens, nous
■voyons que la jurisprudence étoit singulièrement favorable à cette
interruption de communauté.
Nous lisons dans le Prêtre , 2' cent. ch. 22 , « qu'anciennement,
)) sufficiebat de facto jactum fu isse inventarium , licet minus so» lemne , et que par quelque acte, le père ou la mère survivant
« eussent témoigné qu’ils n’avoient plus de volonté de continuer
» ladite communauté. »
Dumoulin avoit dit également, sur l'article i 83 de la Coutume
de Blois, satis est constare descriplionem bond fid°. factam.
L a plupart des commentateurs de la Coutume de Bourbonnais
ont adopté cette opinion, entr’autres, Jean Déculant, Louis Semin,
et François Déculant.
Auroux rapporte les expressions de ce dernier commentateur,
sur le mot I n v e n t a i r e : « Etiam minus solemne, dit-il, quia hoc
» nostrum statutum hoc paragrapho tanlùm requirit ad interrup» tionem societatis. I n v e n t a i r e , p a r t a c e , d i v i s i o n o u a u t r e
» c o n v e n t i o n é q u i p o l i - e n t e . Uudè sufficit , ajoute-t-il, sim plex
» declaratio contrarias voluntatis, aut actus societatis derogato» ri as. /ta semper vid i observari : ita asseril D . Joannes D écidant,
» cujus opinionis erat D . Ludovicus Semin. »
O11 trouve une multitude d ’arrêts dans Brodeau sur L o u e t ,
let. C. som. 3o , et dans tous nos autres arrêtistes, qui ont décidé,
conformément ;'i ces principes, qu’un inventaire, quoique défec
tueux, etoit suffisant pour interrompre la communauté.
On voit dans l'un de ces arrêts, du 20 février 1G10, rapporté
par Pelons, dans ses Actions [om ises, liv. 5 , act. 3o, que le prin
cipal motil qui détermina la Cour à rejeter les moyens opposés
contre l’invenlairc qui avoit été fait pour disaoudre la première
communauté, fut qu’il ne paroissoil pas r a i s o n n a b l e d appeler les
cniüns du premier lit au partage de la seconde communauté, puis~
�I
(8 )
que le premier mariage navoit duré que trois ans, et le second
quarante a n s, pendant lesquels s’ étoit accrue la communauté
par Vindustrie de cette seconde femme.
L ’auteur nous dit que « la Cour a déclaré l’inventaire avoir eu
» assez de force pour dissoudre la communauté; ce sont, ajoute-t-il,
» les mêmes mots desquels a usé M . de Ilarlay. »
D e nos jours , M . Cocliin a rappelé ces principes, et les a fait
valoir comme étant dans toute leur vigueur, dans la cause de Pierre
Tliérouenne, et-Marie Anne Pingard , sa fem m e, contre Marie
Blanchard, et Christophe Blanchard, enfans du premier mariage
de ladite Pingard. T o m . 1" , pag. 64.
Il s’agissoit, comme dans l ’espèce, d ’une question de continuation
de communauté, dans la Coutume de Senlis, fondée sur les pré
tendues défectuosités de l’inventaire fait par Marie Pingard, avant
de passer en secondes noces avec le sieur Tliérouenne.
L a Coutume de Senlis exigeoit, comme celle de Bourbonnais ,
un inventaire et rien de plus, et elle 11’admettoit même pas d ’acte
équipollent, comme celle de Bourbonnais.
, TV1 . Coc l i i n observe que nous avons en France deux sortes de
Coutumes, qui règlent de quelle manière la communauté peut être
dissoute ou continuée.
« La première de ces Coutumes, dit-il, est de celles qui deman» dent, pour dissoudre la communauté, un inventaire fait et parfait
» avec un contradicteur légitime, et qui soit clos; ce que l’on corn» prend sous l’idée générale d’inventaire solennel ; telle est la Cou» tume de Paris, dans les articles 240 et 241.
» L a seconde espèce de Coutumes est de celles qui demandent
» simplement qu’il soit fait un inventaire, sans ajouter qu’il soit
» solennel, ou, ce qui est la même chose, fait et p a r f a i t .
» D ans ces Coutumes, le moindre acte dérogeant à la commu» nauté, suffit pour en empêcher la continuation , et un inventaire,
» destitue même des formes ordinaires, en opère toujours la disso» lulion.
» C ’est ce que décident unanimement tous les auteurs qui ont
» traité la matière , ajoute M . Cocliin , et en particulier Lebrun ,
�( 9 )
» dans son Traité de la communauté, liv. 3 , chap.
>’ n io et suivans. »
3,
sect. i r” ,
11 cite
aussi les différens arrêts rapportés par Brodeau sur L ouet,
qui ont ju g ? qu’un inventaire, quoique défectueux, n’en étoit pas
moins suffisant pour interrompre la communauté.
L a dame Virotte pourroit sans doute invoquer toutes ces auto
rités avec confiance; et faisant surtout l’application à l’espèce de
1 arrêt de 1610, elle pourroit d ire, comme on le disoit lors de cet
arrêt, et avec bien plus de vérité, que le premier mariage du sieur
V ir o tte , avec Anne B r ir o t, n ’avoit duré que quatre ans; que la
première communauté ctoit nulle ou presque nulle lorsqu’elle est
entrée dans la maison du sieur Virotte; que le second mariage a
dure pendant quarante-quatre ans, pendant lesquels s,est accrue
la communauté par son industrie , et par les fruits d’un patri
moine précieux, qui ont été versés annuellement dans cette com
m unauté, qui ont singulièrement contribué à en accroître les bé
néfices; qu’il y auroit donc lieu de dire, avec M . le président de
Harlay, que l ’inventaire, quand on le supposeroit minus solemne,
auroit eu assez de force pour dissoudre la communauté'.
L a dame Virotte pourroit soutenir cette thèse avec d’autant
plus d avantage, que le sieur Virotte, non content d’avoir fait faire
un inventaire pour dissoudre la communauté d ’entre lui et ses
enfans du premier lit , avant de passer à de secondes noces, a
en outre consigné dans son contrat de mariage avec elle, une décla
ration qui prouvoit de plus en plus son intention bien prononcée de
ssoudre cette premiere communaulé.Elleest concueen ces termes:
» éclarant avoir fait faire inventaire dissolutif de la communautéqui étoit entre lui et ladite déiunte demoiselle A n n eB riro t,
»
Loulier, notaire, le a 5 janvier 1762, conformément à
» la Coutume. »
Mais tout ce qu on a dit jusqu’ici, est moins pour le besoin de
a cause que pour fixer les principes de la mal ¡ère.
a dame Virotte et ses enfans peuvent aborder avec sécurité
examen des moyens que leur opposent les enfans du premier lit,
B
�K*\.
(
10 )
contre la validité de l’inventaire sur lequel est fondée l’interrup
tion de la première communauté.
En effet, cet inventaire a été fait dans la forme la plus rigou
reuse et la plus solennelle.
L e sieur Virotte a commencé par faire assembler, devant le
juge des lie u x , le conseil de fam ille, pour nommer un subrogé
tuteur à ses enfans mineurs.
Celte assemblée a été composée de parens et amis des mineurs,
tous gens recommandables, et tenant le premier rang dans le pays.
Si l'on en croit l’auteur du M ém o ire, on a écarté, à dessein, de
cette assemblée, le sieur Antoine B r ir o t , aïeul des mineurs, qui
étoil le défenseur né de leurs intérêts, et qui pouvoit, mieux que
personne, les garantir de la spoliation dont leur père cherchoit à
les rendre victimes.
Mais on voit un Antoine Brirot parmi les parens assignés, et
cet Antoine Brirot ne peut être que l’aïeul des mineurs.
C e n ’est donc pas la faute du sieur V irotte, si le sieur Brirot
n’a pas assisté à cette assemblée.
11 est d ’ ailleurs de notoriété, que le sieur Tïrirot éloit alors accablé
d ’ infirmités , et hors d ’état de sortir de chez lui.
C e s t un fa it f a u x , dit l’auteur du Mémoire, page i 5 .
Eli bien ! si la Cour croit ce fait de quelque importance, la dame
Virotte et ses enfans déclarent qu’ils l’articulent d’une manière
expresse, et qu’ils offrent d ’en faire la preuve par toutes les voies
de droit.
Quant bu subrogé tuteur ou curateur avec lequel devoit être
fait l'inventaire , il n’a pas été du choix du sieur V ir o tte , mais
de la famille assemblée, qui a jeté les yeux sur le sieur de Finance,
châtelain de Chavroche, proche parent des mineurs, qu i'avo it
tellement la confiance de la famille Brirot, qu’il fut de rechef
n o m m é , en 1764, subrogé tuteur des enfans d ’ A n t o i ne lirirot.
Cet inventaire a donc été fait avec légitime contradicteur. C ’étoit la première et la plus importante formalité exigée par la Cou
tume de Paris et par les lois les plus rigoureuses sur la matière.
T o u s les autres moyens de forme, qu’on oppose contre cet in
ventaire, ne s o n t que de pitoyables chicanes.
�2 >6 \
( i 1 )
T e l est le moyen tiré de l’assignation donnée le même jour aux
6ept parens ou amis qui se sont réunis pour le conseil de famille,
comme si l’on ne savoit p a s, d ’une p a r t, que cette assignation étoit
superflue, puisqu’ils pouvoient se réunir volontairement chez le
juge, pour délibérer, sans assignation préalable, et d autre p a rt,
qu’il est tout simple que s’étant tous trouvés dans le meme lieu ,
on leur ait donné en même temps l’assignation pour assister au
conseil de famille.
T e l est encore le moyen tiré de la circonstance que c'est le
sieur Loulier , qui après avoir tenu l’assemblée comme b a illi, a
fait l’inventaire comme notaire. (*)
Com m e si l’on ignoroit que presque tous les baillis des justices
seigneuriales étoient en même temps notaires ; que ces fonctions
n ’avoient rien d ’incompatible; que lorsque le sieur Loulier travailloit à l’inventaire comme notaire, il avoit épuisé ses fonctions
de juge ; et qu’enfin , tel étoit l’usage universel dans les campagnes,
usage tellement consacré, que, fût-il abusif, il faudroit le main
tenir pour la tranquillité publique, d’ après la maxime tirée d e là
loi Barbarius P h i lippus : Error communis facit jus.
Il faut placer dans la même classe des chicanes vraiment pi
toyables , le moyen que l’on prétend tirer de la circonstance que
celui qui a fait les fonctions de substitut du procureur fiscal i
l ’assemblée de famille, étoit cousin de la dame Delaire.
Indépendamment qu’on n'établit pas cette parenté, qu’on en
établit encore moins le degré, où a-t-on pris qu’avant le mariage
du sieur Virotte avec la demoiselle Delaire , ce prétendu cousin
dût se récuser dans une assemblée de famille des mineurs Virotte
dans laquelle il n ’étoit pas question, et il ne pouvoit pas être ques
tion de cette prétendue cousine ?
N
O n prétend encore que ce prétendu cousin n ’étoit ni gradué, ni
curial, dans la justice de Montaigut-le-BIanc; mais il est permis,
après un demi-siècle, de tout hasarder sur des faits de ce genre.
(*)
Loulier ctoit un notaire diâtiü£uc par scs liio n s , »ci» lumière* et «es ver u s , il ^
ét é envoyé a u tribunal ré vol ut i onna i r e, a v r e M. et Mme . Da va u* et 15......par O ........M. Louher
y a péri a ve c M . et M m e. D a v a u x , lo 3 ’t llo -éal an a.
L e ttre s im prim ée» do G ..... à F o u ' | u i c r - T a i n v i l l e , 'les 16 ventoso e t i/( ge rm in al an 2 ; Cer
tifiée» pour copio c o n fo rm o , par P a ris , greffier du trib u n al ré v o lu tio n n a ire .
�( 12 )
Sa présence au procès-verbal n’est pas du fait du sieur Virotfe ; ce
n ’est pas lui qui l’y a appelé; et par cela seul qu’il y a fait telle ou
telle fonction, il est présumé en avoir eu le droit, jusqu’à preuve
contraire.
C e n’est pas une chicane moins pitoyable que le moyen qu’on
prétend faire résulter de ce que le sieur Feyard a f a it , dil-on , les
fonctions d ’expert dans l’inventaire , après avoir assisté au conseil
de famille.
L ’objet du conseil de famille étoit uniquement de nommer uit
subrogé tuteur qui eût qualité pour assister à l’inventaire, comme
légitime contradicteur; cette mission remplie, le sieur Feyard
pouvoit se livrer à toute autre fonction.
A u surplus, on ignore si, comme le prétend l’auteur du mé
m o ire, le sieur Feyard a bu et mangé avec le sieur V irotte, pen
dant la durée de l’inventaire; c’est un fait qu’il n’est pas facile
d ’éclaircir après /|5 ans : mais ce qu’il y a de certain , c ’est que
c’est abuser d ’une manière étrange de la disposition de l’ordon
nance de 1667 , que de l’appliquer à ce cas, et qu’il faut être ré
duit à une grande disette de m o y e n s pour en employer de pareils*
Après avoir ainsi épuisé sa critique sur la forme de l’inventaire,
l ’auteur du Mémoire en vient aux erreurs, aux omissions, aux
prétendues infidélités de cet inventaire, au moyen desquelles le
sieur Virotte est parvenu a spolier les quatre orphelins laissés
par sa première femme.
i l est encore bon, sur ce point , de commencer par fixer les
principes de la matière. On ne peut les puiser dans une source plus
pure que dans Polluer, l’auteur le plus accrédité du droit cou tumier. 11 s'exprime ainsi, dans son traité de la Communauté, n° 79^:
« Quoiqu’il y ait des omissions dans l’inventaire , si file s ne
)> sont pas m alicieuses , les effets omis ayant pu échapper à la
» mémoire du survivant, l’inventaire 11e laisse pas d ’être valable,
» et d'empêcher la continuation de communauté.
» L ’omission est présumée malicieuse, dit-il ailleurs, n® 688,
» lorsque la multitude des choses omises et la qualité de ces choses
« qui étoient en évidence et d ’un usage journalier, ne permet pas de
�( i
3
)
» penser qu’elles aient pu échapper à la connoissance du survivant,
« qui ne les a pas comprises dans son inventaire.
» L'omission doit surtout être jugée malicieuse, lorsque les effets
» omis dans l’inventaire ont été, par le survivant, depuis la mort ou
» pendantla dernière maladie du prédécédé, détournés du lieu où ils
» étoient, et portés hors la maison, ou cachés dans quelque recoin. »
Si après avoir ainsi posé les principes de la matière, on passe aux
erreurs ou omissions qu’on reproche à cet inventaire, que voit-on?
Une prétendue modicité dans l’estimation de quelques effets
mobiliers qui sont inventoriés.
Mais , d ’abord , nous répondrons ce que disoit M . Cochin à une
semblable objection , dans l’affaire de Marie Pingard, femme
Therouenne :
« La critique que l’on fait sur le prix des estimations, ne regarde
» point Marie Pingard; c’est le fait des experts, qui se sont sans doute
» conduits suivant ce que leur conscience leur a dicté. »
2pnt>, ces sortes d ’estimations étant soumises, en Coutume de
Bourbonnais, au droit de crue ou parisis du cinquième en sus de
l’estimation des experts, elles ne devoient pas être portées à une
valeur rigoureuse.
3 'nt-, en prenant pour exemple le lit qui faisoit partie du trous
seau d ’Anne Brirot, cette estimation est facile à justifier.
On se plaint que ce lit n’a été porté qu’à 100 francs dans l’in
ventaire, tandis qu’il avoit été porté à 200 francs par son contrat
de mariage.
Mais qu’011 ouvre le livre-journal du sieur V iro tte, dans lequel
il écrivoit jusqu’à ses plus secrètes pensées, et on y verra , au
dernier feuillet, qu’en se renflant compte de ce qu'il avoit reçu de
son beau-père, sur ce qui lui avoit été promis, il d it, en parlant
de ce lit, estimé 200 francs par M . Brirot, mais c ’est trop cher.
On avoit promis au sieur Virotte pour 300 francs de m e u b l e s ;
mais 011 lui donnoit le moins qu’on pouvoit, et il reccvoit ce qu on
vouloit lui donner, plutôt que de se brouiller ou d ’avoir des con
testations.
Il avoit reçu ce lit pour 200 f r . , parce que son beau-père, qui
en avoit clé lui-même l’appréciateur , l ’avoit exigé ) mais il a voulu
�t e
* ^ •
( 14 )
consigner celle injustice dans son registre, en faisant mention que
ce lit éloit porté à un prix excessif.
Est-il donc bien étonnant que ce même lit, après avoir servi
dix ans , n ’ ait été estimé que 100 1., et cela dans un inventaire qui
étoit soumis à la crue, ou au droit de parisis du cinquième en sus,
ce qui le portoit à i a 5 liv.
C e qu’on vient de dire s’applique également à l’estimation dulinge.
D ’une p a r t , cette estimation n’est pas du fait du sieur V irotte,
et ne pourroit avoir aucune influence sur le sort de l’inventaire.
D ’autre part, il ne faut pas perdre de vue que le sieur Virotte
n ’avoit alors qu’un très-petit m énage, que son linge étoit formé
de la toile la plus grossière, qu’il avoit dû dépérir depuis le décès
de la dame B riro t, que sa maison avoit été abandonnée à des do
mestiques ; qu’enfin la crue ou le droit de parisis faisoit un de
voir aux experts de baisser le prix des objets inventoriés, puisque
celui qui en demeuroit chargé, étoit tenu d’un cinquième en sus.
L ’auteur du Mémoire passe ensuite aux infidélités.
« L ’article 20 porte, dit-il, qu’il 11’étoït dû, sui vant le depouille» ment du livre-journal du sieur V iro tte, par le colon du domaine
» Crolet, et par les métayers ou locataires des biens de la dame
» Préverand, de la terre du Ponçut, et de celle du Méage, dont
» il étoit ferm ier, que la somme de 255 liv.
» Si l’on prend le livre-journal même, d ’après lequel l ’inventaire
» fait cette indication, on trouve à scs folios 45 , 58 , 7 1 , 110, n 3
» et 123 , la preuve qu’il étoit dû 816 livres 10 sous. »
L ’objection reçoit plusieurs réponses égalem ent décisives.
L a première est que l’inventaire constate que le sieur Virotte
a livré son journal au notaire qui procédoit à cet inventaire, pour
en faire le dépouillement.
C e qui établit, d ’une part, que cette erreur, s’il y en avoit, ne
seroit pas son ouvrage;
D ’autre part, qu’il y meltoit toute la bonne foi, toute la loyauté
et tout l’abandon qui étoient dans son caractère.
2«nt. t q UC ce qui exclut toute idée d ’infidélité, c’est qu'après
avoir livré son journal pour en faire le dépouillement, il exige
�a£j
( i5 )
qu’il soit inventorié, pour servir de monument éternel de la droi
ture et de la loyauté de sa conduite.
C e n’est pas tout; il continue de se servir du même livre-journal,
d’y écrire toutes ses affaires, et il a eu soin de le conserver jusqu’à
sa mort.
On ne craint pas de faire, à la mémoire du sieur V iro tte , l’in
jure de dire que s’il a conservé si précieusement ce livre-journal,
c ’éloit pour assurer ;t ses enfans du premier lit 1rs moyens d ’atta
quer un jour cet inventaire, et qu’il les déposoit dans l’acte même
qu’on le forçoit de faire pour dépouiller ses enfans, afin que leur
découverte devînt moins difficile. M êrti., page 17.
Malheur à l’homme qui a pu concevoir une pareille pensée! Quoi!
on pourra croire que le sieur Virotte, le plus respectable des pères,
aura conservé avec soin, dans ses archives, son livre-journal pen
dant un demi-siècle, dans l’espérance qu’après sa mort il deviendra
un brandon de discorde entre sa veuve et ses enfans des deux lits,
et quVn descendant dans la tombe, son ombre aura souri au plaisir
amer de les voir s’entredéchirer, et dévorer, en dissensions juridi
ques, la fortune qu’il a pris tant de peine à leur amasser?
Revenons à des idées plus justes, plus naturelles et plus satis
faisantes pour le cœur humain.
L e fait seul que le sieur Virotte a voulu que ce livre-journal
fût inventorié, prouve invinciblement l’impossibilité qu’il voulût
être in fidèle, et qu’il voulût spolier les quatre orphelins laisses
par sa première femme.
C e (ait seul prouve encore invinciblement l’impossibilité qu’il fût
infidèle, puisque, dès qu’il existoit une preuve écrite de cette
créance vraie ou prétendue, dans le livre-journal, et que ce livrejournal étoit inventorié, cette prétendue infidélité se reduisoit tout
au plus à une erreur de calcul, toujours sans conséquence, et qui
d ’ailleurs n ’étoit pas du fait du sieur Virotte, mais de ceux h «pii ce
journal avoit été livré pour en faire le dépouillement, c o m m e le
constate l’inventaire.
A u surplus , nous sommes bien éloignés de c o n v e n i r de cette
erreur, même sous le point de vue d’erreur de calcul. Nous 11 avons
�(
16
)
pas dans ce moment ce livre-journal sous les y e u x ; mais, d’après
l’habitude qu’a l’auteur du Mémoire de tout hasarder, il est trèspermis de croire qu'avec un examen plus approfondi et fait sans
prévention, on trouveroit un résultat bien différent de celui que
ce Mémoire nous présente.
A cette prétendue infidélité succèdent les fausses déclarations sur
le produit des gerbes de blé qui étoient alors engrangées. Or, ce pro
duit est fixé par approximation par les experts; il n’est donc pas du
fait du sieur Virotte. Ainsi, nul reproche à lui faire, quand il y
auroit une erreur quelconque sur ce produit probable des gerbes de
b lé , qui n ’étoient pas encore battues.
Mais cette erreur n’est encore que dans l'imagination de l’auteur
du Mémoire,
L e produit des gerbes qui se trouvoit écrit dans le livre-journal
au moment de l’inventaire, ne pouvoit pas être celui des gerbes
qui étoient engrangées, et qui étoient encore à battre.
L es inductions que l ’on veut tirer de ce registre, qui porte,
d it- o n , que le cent de gerbes produisoit douze coupes, tandis
qu’il n ’est porté qu’à d i x dans l’inventaire, ne sont donc qu’une
absurdité.
E t quand on voit que la discussion sur le produit présumé de
ces gerbes de blé se termine par celte exclamation, « Quelle sous}> traction ! ......... il n’ y a pas une seule raison à faire valoir pour
» l ’effacer. », on croit voir la montagne en travail.
« Viennent maintenant les omissions, dit l’auleur du Mémoire;
» elles ont un caractère de gravité révoltant. »
Encore la montagne en travail.
L a première a pour objet une obligation de 5 19 1!v. i 5 sous, du
10 juin 17G0, duc par les nommés Bafier, métayers du domaine
Barnier.
Cette omission est facile à justifier.
D ’abord, il n 'y a pas eu de soustraction , c’est-à-dire d ’omission
volontaire et faite malicieusement , puisque la pièce exibte, et
�& 6y
( 17 )
qu’elle a été conservée par le sieur Virotte, pendant quarante-quatre
ans, depuis cet inventaire.
2 ment. f cclte obligation étoit rappelée sur le livre-journal ,
au compte de ces métayers, folio 44 * et le sieur Virotte n’a pu
avoir ni la volonté de la soustraire, ni la possibilité de la soustraire,
puisqu’il a livré lui-même son registre pour en faire le dépouille
m en t, qu’il a ensuite exigé qu’il fût inventorié, et qu’il s’est sou
mis par là à le représenter dans tous les instans.
A u surplus, il est facile d’expliquer comment cette obligation a
pu échapper à ceux qui ont fait le dépouillement du livre-journal du
sieur Virotte.
Il est probable que celte obligation est restée chez le notaire
qui l’avoit reçue, et qu’on ne l’aura pas trouvée parmi les papiers
du sieur Virotte au moment de l’inventaire.
E t il n’est pas étonnant d ’ailleürs qu’on ait fait cet oubli, quoi
qu’elle fût rappelée dans le livre-journal, la page 44, où cette obli
gation étoit rappelée dans le compte des Bafier, se trouvant bâtonnée par erreur, comme on le lit à la quatorzième ligne de ce
compte, écrit de la main du sieur Virotte :
« L e compte du & février 1761 est bon, quoiqu’ il soit barré;
» c’ est une erreur. Signé Virotte.»
On conçoit qu’en faisant le relevé de ce livre-journal , on n'a
pas dû porter son attenlion sur les endroits b&tonnés ; de sorte
que la mention de cette obligation a dû naturellement échapper
à celui qui iaisoit le dépouillement du registre.
C ’est ainsi que s’explique celle omission, la seule réelle, mais
faite si innocemment, que le sieur Virotte n’a mis à l’écart, ni
l'obligation , ni le livre-journal où elle étoit relatée, et qu’il a
au contraire voulu que ce livre-journal fut inventorié, comme une
preuve irrécusable de sa bonne foi.
L e second article d ’omissions qu'on reproche à cet inventaire,
est d'une somme de
livres au total ou de 18 livres pour la moitié,
dont on suppose que le sieur Virotte a voulu spolier les quatre
orphelins de sa première femme.
G
�\
' '<
■■'J
(
i3 )
O r, ces 36 liv. avoîent été payées au sieur de Douzon par le sieur
Virotte, à la S t.M artin 1761.
C ’étoit une dette de la communauté, qu’avoit payée le sieur V i
rotte, et qui ne devoit pas être portée en actif dans l’inventaire.
L e troisième a pour objet le bail de la terre du Méago, dont le
s ie u r Virotte étoit fermier, et une somme de 464 livres 6 sous 7
deniers, dont il étoit, dit-on, en avance sur sa fe r m e , suivant
une quittance du 14 mars 1762.
On n'a sous les y e u x , ni le livre-journal, ni cette quittance;
mais sa date seule, du r4 mars 1762, prouve le contraire de cette
avance prétendue, puisqu’elle est postérieure de près de deux, mois
à l’inventaire, et plus d ’un mois au second mariage du sieur Virotle.
L e quatrième est relatif, dit-on, aux foins de réserve produits
par cinq prés, avec lesquels il engraissoit des bœufs et nourrissoit
deux chevaux.
Nous dirons ici avec M . Cochin , dans la cause de Marie Pin—
gard, « que pour établir une pareille omission, il faudroit établir
» qu’il y avoit réellement des foins.
j> M a i s il d e v o i t , d i t - o n , y en a v o i r , c ont i nue M .
Cochin.
» Et sur quoi, dit-il, est fondée cette nécessité ? D ’ailleurs, on
» inventorie ce qui est , et non pas ce qui doit être. »
A u surplus, il n ’est pas même vrai de dire qu’il dût y en avoir.
D ’abord, il n’est pas exact de dire que le sieur Virotte eût des
bœufs gras dans ses écuries; on voit dans le livre-journal, page
3 14,
qu’il n ’a commencé ce commerce qu’en 1771 D ’ailleurs, le foin de réserve que l’on suppose avoir dû se trouver
chez le sieur V iro tte, au moment de l’inventaire, avoit dû être
cueilli au mois de juin 1761. O r , il est naturel de croire que ce
foin avoit été vendu par le sieur Virotte, depuis le mois «le juin
jusqu’à la fin de janvier suivant, époque de cet inventaire; sur
tout dans une année aussi désastreuse que l’année 1761 , où le
sieur Virotte avoit perdu la presque universalité de ses récoltés
par la grêle, ce qui avoit dû le forcer d ’user de toutes scs autres
ressources pour payer le prix de ses termes.
A quoi 011 peut ajouter que le sieur Virotte ayant pris de cer-
�(
*9 )
tames quantités de foin en entrant dans ses fermes, il devoit en
rendre pareille quantité à sa sortie; et sous ce point de vue, ce foin,
s i s en étoit trouvé, n’auroit fait que représenter celui qu’il auroit pris en entrant en ferme, et n’auroit pas dû être inventorié,
comme ne formant pas un actif réel de la communauté.
cinriuîcme est relatif à l’omission des pailles des dîmes du
éaSe » T ” faisoient, dit-on, un objet de réserve.
On sait qu en Bourbonnais, à mesure que les blés sont écossés,
on ivre es pailles aux colons, pour la nourriture des bestiaux ou
pour aire des engrais ; ni le propriétaire, ni le fermier, ne sont en
usage de se les approprier.
E l à raison de la grêle de i 76 i , il y a tout lieu de croire qu'elles
furent bien loin d’elre suffisantes en 2762 , pour les besoins dés
colons.
Enfin, le sixième article d ’omission est relatif aux prébats,
q u i, dit-on, suivant le n° 5 du livre-journal, faisoient un objet
important, a raison de l’importance des fermes.
Cet objet important est affermé 12 boisseaux au fermier des
Maillards.
Ces 12 boisseaux, qui étoîent sans doute du seigle, pouvoient
alors valoir^ liv. à raison de la vilité du prix des denrées.
A i n s i , c est un ecu de 3 livres dont ce père injuste a voulu
spolier les quatre orphelins de sa première fem m e , lui qui en
passant son contrat de mariage, quelques jours après, a la précau
tion pour ménager leurs intérêts, de stipuler qu’il n’y auroit
pas de communauté entre lui et la seconde fe m m e , s’il n’y avoit
pas d enfans de leur mariage.
A u surplus , pour entendre cet article, il faut savoir que les préats sont ( (.s gerbes qu on est en usage, dans quelques domaines, de
attre une premiere fois légèrement, pour en extraire lin premier
¿rain estiné aux semences, et que l ’on finit de battre en hiver pour
achever d’en tirer les grains q„i y S o n t rcst(:>s.
1 parolt
qu il y avoit ou des p r i a i s dans le domaine des Mailar s, et que le sienr Virotto avoit affermé au métayer de ce debois"0 ^ ^ra*n (luc ccs prébats pouvoient produire, moyennant 13
�Cet objet n ’a pas été omis dans l’inventaire ; il a été compris
dans le dépouillement général qui a été fait du livre-journal, pour
faire le relevé des dettes de ces métayers.
Ainsi, cette prétendueomission n ’est pas seulement ridicule et pi
toyable en elle-même, elle est encore absolument contraire à la vérité.
L ’auteur du Mémoire, après avoir épuisé le chapitre des omis
sions , ajoute que l’inventaire présente encore à la critique une
infinité d ’articles:
T els que la déclaration de 5oo livres en numéraire ou arrérages
de cens;
Et celle faite parle sieur V iro tle, portant que les habits, linges
et hardes d’Anne Brirot, sa première femme, avoient été vendus,
échangés ou employés à l’usage des mineurs.
Est-il étonnant, sur le premier article, que le sieur Yirotte n’eût
pas une plus grosse somme en numéraire , après une grêle comme
celle qu’il venoit d ’essuyer, et après avoir payé le prix de scs fermes,
dont les échéances étoient sa- s doute à Noël ?
E t quant aux linge et hardes de la d ame B r i r o t , estimés par
son- cont rat de mariage üi 200 l ivres, le sieur V i r o t t e pouvoit-il en
faire un meilleur usage, que d’employer pour scs enfans tout ce qui
en étoit susceptible? et ne devoit-il pas, en bon père de fam ille,
vendre et échanger le surplus, comme il l ’a fait, pour en éviter
le dépérissement?
L a critique sur l’article des bestiaux 11’est pas plus raisonnable;
tout étoit constaté par des baux à chetel, et tout consisloit à cet
égard dans quelque légère différence dans la perte ou le croit.
L ’auteur du Mémoire termine sa discussion sur cet inventaire,
par rappeler les expressions de Pothicr, et nous nous plaisons à les
rappeler comme lui :
k Quoiqu’il y ait des omissions dans l’inventaire, si elles ne sont
» pas malicieuses, les effets omis ayant pu échapper à la mémoire
» du survivant, l'inventaire ne laisse pas d'être valable, et d ’em-
» pêcher la continuation de communauté. »
Nous répéterons avec lui que l’omission est présumée malicieuse,
�3
N
( 21 )
lorsque la multitude des choses omises et la qualité de ces choses,
qui étoient en évidence et d’un usage journalier , ne permettent pas
de penser qu’elles aient pu échapper à la connoissance du survivant,
qui ne les a pas comprises dans son inventaire;
Que « l’omission doitsurtout être jugée malicieuse, lorsque les ef» fels omisdans l’inventaire ont été, par le survivant, depuis lamort
» ou pendant la dernière maladie, détournés du lieu où ilsétoient ,
» et portés hors de la maison ou cachés dans quelque recoin. «
Ici on ne voit rien de soustrait, rien de détourné, rien de caché.
T o u s les objets matériels sont représentés; tout ce qui tient au
calcul est mis en évidence par l’exhibition du livre-journal, par
le dépouillement qui en est fait. S ’il se trouvoit que sur quelque
article ce dépouillement n ’eût pas été fait avec une exactitude assez
scrupuleuse, il ne faudrait pas l’imputer au sieur V iro lte, qui a
livré ce registre à l’honnête, au probe Louher, notaire, chargé de la
confection de cet inventaire, et qui y mettoit tant de loyauté et de
bonne foi , qu’il a exigé expressément qu'il fût inventorié , pour
être représenté dans tous les inslans.
Un seul article peut laisser, au premierabord, quelque léger pré
texte à la critique ; c ’est l’obligation de 5 19 francs.
■ '
Mais quand on voit que cette obligation avoit pu rester chez
le notaire qui l’avoit reçue , et ne pas se trouver parmi les papiers
du sieur V iro tte, au moment de l’inventaire;
Q u ’il n’avoit ni la volonté ni la possibilité de la soustraire, puis
qu’elle étoit couchée sur son livre-journal inventorié, à l’article du
compte de ses métayers des Barniers, folio 44 ;
Que ce compte avoit été rayé par erreur, comme on le lit dans la
note du sieur Virotte, écrite et signée de lui au même folio, ce qui
avoit du naturellement détourner l’attention de ceux qui faisoient
le dépouillement de ce journal;
Quand 011 considère, enfin, que le sieur Virotte a conservé pré
cieusement cette obligation jusqu’à sa m ort; celle omission, qui
cesse d’en etre une, «les que l’existence du titre est constatée P,ir le
journal inventorié, dépose liaulcrnc.it en faveur de la bonne foi du
sieur V iro lle , et de la loyauté de l’inventaire.
« £
�*à
(
22
)
Ajoutons q u e , s’il en étoit besoin pour la cause, on pourroit
rappeler ce que dit le Prêtre : Sufficiebat de facto factum Juisse
inventarium , l/cet minus solcmne;
C e que dit Dumoulin , sur la Coutume de Blois : Satis estcons-
tare descriptionem bond fu ie factam ;
C e que disent François Déculant, Jean Déculant et Louis Se«
m in , commentateurs de la Coutume de Bourbonnais, sur le mot
I n v e n t a i r e : Etiam minus solem n e.. . sufficil simpleoc declaratio
contrariée 'voluntatis, aut actus societatis derogatorius : itasem per vid i observari.
On pourroit dire que les nombreux a rr ê ts cités par Brodcau sur
L o u e t, ont jugé que des inventaires , quoique défectueux, suffisoient pour interrompre la communauté, surtout dans les Cou
tumes qui, comme celle de Bourbonnais, n ’exigent qu’aucun in
ventaire ( talis qualis ) , partage ou autre acte équipollent ;
Que dans la plupart de ces arrêts il étoit question d ’omissions,
et même de soustractions;
Que dans celui de 1G10, cité par Pelens, « la 5* nullité étoit,
» dit l ’a u t e ur , q u 'i l y civoit e u p lu s ie u r s o m is s io n s y »
, Que dans la cause plaidée par M . C o c h in , il étoit aussi ques
tion d’omissions considérables.
On pourroit enfin citer l’opinion de Renusson, dans son traité de
la Communauté, part. 5 , cliap. 2, n ' 35 , et ce que dit son anno
tateur, page 284, qu’ un inventaire infidèle n’empêche pas Vinter
ruption de la communauté.
A u surplus, on ne peut assez admirer la sagesse de ces décisions,
qui tcndoient à faciliter par toutes sortes de moyens l’interruption
de la continuation de communauté, lorsqu’on voit nos législateurs
reconnoitre que c’étoit une institution essentiellement mauvaise ,
une source intarissable de questions épineuses, de difficultés inex
tricables, propres à mettre en défaut toute la sagacité des plus pro
fonds jurisconsultes, qui avoient donné lieu à des milliers de vo
lumes in-folio, dont les bibliothèques étoicnl encombrées; et que
le résultat le plus ordinaire de ces continuations de communautés
étoit la ruine assurée des enfans d ’un i ,r, 2", 5% et quelquefois
�Í 7A
(
23
)
d’un 4* lit, lorsque les survivans des père et mère avoient successive
ment contracté plusieurs mariages.
Il est d ’ailleurs peu de cas où l’injustice de cette continuation de
communauté fût plus frappante que dans l’espèce.
Lorsque la dame Virotte est entrée dans la maison de son m ari,
la fortune des quatre enfans du premier lit consistoit dans la moitié
du montant de l’inventaire, qui étoit, au total, de 3 io 6 fr.
Ils ont donc été nourris, entretenus , élevés aux dépens de la se
conde communauté; c’est cette seconde communauté qui a payé
et nourri les précepteurs; payé, pour les mâles, les pensions dans
les collèges, chez les procureurs; pour les filles, les pensions dans
les couvens; c’est la seconde communauté qui a fait les frais de
leur établissement; c’est encore en partie aux dépens de cette se
conde communauté, qu’ils ont été dotés et constitués.
Ainsi, non-seulement ils n ’ont pas contribué un seul instant au
bien, à l’avantage de cette seconde communauté, ni par leurs tra
vaux, ni par leurs revenus; mais ils n’ont cessé de l’épuiscr par des
dépenses excessives au-dessus de leur état et de ce qu’étoit alors la
fortune du sieur Virotte.
L a dame Virotte ne rappelle pas ces dépenses pour en faire des
reproches aux enfans du premier lit; non-seulement son mari les
a faites de son consentement, mais elle y a contribué de tout son
pouvoir; elle meltoit sa gloire à les voir bien élevés; elle partageoit
leurs succès; elle scmbloit enfin dans tous les instans se livrer à la
douce erreur de se croire leur propre mère, et elle doit leur rendre
la justice de dire, que jusqu’à l’instant fatal qui lui a ravi le sieur
V iro tte, ils n ont cessé de lui témoigner de l’attachement, et les
égards que méritoient ses procédés généreux.
L a circonstance dont on ■vient de parler de l’établissement des
quatre enfans du premier lit, fait naître un nouveau moyen d’in
terruption de la première communauté, que la d a m e Virotte et ses '
enfans np croient pas devoir négliger, quoiqu'il soit superflu, d ’apres tous les autres moyens qui s’élèvent en leur faveur dans cette
cause.
�L a Coutume du Bourbonnais n ’exigeant, pour l’interruption de
la communauté, qu ’aucun inventaire, partage, division, ou autre
convention e’q uipollente, on a toujours pensé dans cette Coutume,
que le mariage des enfans hors de la maison paternelle , produisoit
l ’effet d ’interrompre la communauté, lors même qu’il n ’avoit pas
été fait d’inventaire, surtout s’ils avoient été dotés et constitués à
une somme équivalente ou approximative des biens qu’ils étoient
en droit de prétendre du chef du conjoint prédécédé.
C ’est ainsi que l’a pensé D um oulin, le flambeau du droit coutum ier, dans ses notes sur cette Coutum e, que l’on doit regarder
comme d'autant plus précieuses qu’elles sont plus rapprochées du
temps de sa rédaction.
Coquille se propose cette question sur l’art.
4
du tit. 2 de la
Coutume du Nivernois :
« La question est, dit cet auteur : L e père survivant n’a point fait
» d ’inventaire, mais il a marié ses filles , et leur a baillé dot com» pétente; ou bien , a marié ses fils et leur a acheté office, ou leur a
» donné autre moyen de vivre. Savoir si les enf ans susdits auront
» cont inué la c o mm u n a ut é . Sur quoi j’estime que par le mariage la
« communauté a été suffisamment contredite, jaçoit que les enfans
» n 'y aient expressément renoncé, suivant ce que dit Dumoulin, en
» l’annotation sur la Coutume de Bourbonnais, article 270, et dit
» avoir été jugé entre la veuve et les enfans de Denis Gron, qui étoit
» procureur en parlement. »
C e t auteur, qualifié de ju d icieu x, donne ensuite les raisons sur
lesquelles son avis est motivé, en ces termes :
« L a raison, selon mon avis, est que les enfans ne peuvent et ne
» doivent avoir communauté universelle en deux lieux, quand en
» l’un des deux la personne n’y est pas et n’y fait rien, et il fait mé» nage cl négocie à part où le père ne prend rien.
n E t encore pour ce que, ajoute-t-il, la dol de la fille ou le moyen
» que le père a donne à son fils, tient lieu , et est comme sa part
» du droit qu’il avoit en la masse de la communauté. »
T elle est aussi l’opinion d’Auroux-Despommiers, sur la Coutume
de Bourbonnais.
�2>YJ
(
25
)
Après avoir cité un arrêt contraire, de i6 r o , et une sentence de
1 6 1 1, qu’il dit avoir trouvés dans un manuscrit d’un certain M . Rougnon, il rapporte l’opinion du président Duret, qui s’explique ainsi,
sur ces mots, E q u i p o l l a n t a p a r t a g e : V elu tisi /ilia à superstite
nuptui tradita s i t , ejus respectu, actus est sufficiens ut societas
dissolvatur, quamvis expresse huic non renunciaverit; quo jure
utimur.
Il
ajoute que Jean Déculant atteste dans ses notes sur cet article,
qu’il l’a toujours vu ainsi pratiquer, qu’on ne consultoit pas, et
qu’on ne jugeoit pas autrement de son temps : Ita vidi semper ob
servari in judicando et consitlendo; et que la note de Dumoulin
s’applique aux mâles comme aux filles : Ç u œ M olin œ i notida
non habet solùm locuni in Jilia nupta et dotata, sed etiam in Jilio
cui in matrimonium quid certum fuerit assignaturn.
« C'est aussi, dit Auroux, le sentiment de Jean Faulcom iier,
» dans ses observations sur le présent article. »
Auroux émet ensuite son opinion personnelle sur cette question,
en ces termes :
« C e dernier sentiment me paroit le plus conforme à l’esprit de
» la Coutum e, et il me paroît qu’en s’attachant aux termes de
» notre article, on ne peut point s’empêcher de dire, que le père
» survivant et mariant ses enfans hors de chez lu i , et leur donnant
» une somme pour leur part dans les droits qui leur appartiennent
» par le décès de leur mère, fait cesser à leur égard la continua» tion d e là communauté; car il ne peut pas, ù ce qu’il me paroît,
» mieux marquer la volonté qu’il a de ne plus demeurer en com» inunauté avec son enfant, qu’en le mariant hors de chez lu i , lui
» donnant ce qu il prétend lui appartenir, et souffrant qu’il tasse
» un commerce et une communauté à part.
« Notre Coutume, au présent article, ajoute Auroux, ne demande
» autre chose pour arrêter la continuation de com m unauté, rju’un
» inventaire ou partage , division ou autre convention équ'pollant
» a partage; or, comment peut-on qualifier le m a r i a g e d ’un enfant,
» sa separation d ’avec son père, la dot q u ’on lui constitue pour scs
» droits acquis par le décès de sa mère, aulrement que de partage,
D
�(
26
)
» ou tout au moins, comme parle la Coutum e, de convention équi» pollant à partage ? »
Cet auteur, dans sa c e n t - troisième addition, rappelle que l’art.
118 de l’ancienne Coutume de Paris portoit, comme la Coutume
de Bo u r b o n n a i s , qu’il n ’y avoit point de continuation de commu
nauté, si le survivant des conjoints avoit fait faire inventaire, ou
autre acte dérogeant à la communauté; que par suite de ces ex
pressions, on décidoit alors que les enfans dotés par le survivant
ne pouvoient plus demander la continuation de communauté, parce
que le contrat de mariage étoit une espèce de partage, et acte dé
rogeant à la communauté; que les réformateurs de la Coutume ayant
supprimé ces termes, et autres actes équipollens, l’inventaire fait
en bonne forme peut s e u l, dans cette C o u tu m e , dissoudre la
communauté.
« Mais, ajoute-t-il, comme la disposition de notre Coutume, au
» présent article 270, n ’a pas été réform ée, il est vrai de dire
» que suivant cet article, et eu égard aux termes dans lesquels il
» est conç u , le mari age de l’e n fa n t, hors d e la maison d u père,
» suffit pour dissoudre la c o m m u n a u t é . »
• Enfin , il rapporte une sentence de la sénéchaussée de Moulins,
rendue le 14 mars 172 7, lui Auroux étant du nombre des juges,
par laquelle il fut jugé que « le mariage de Marie Ravel, sa consji titution de d o t , la nouvelle communauté contractée avec Fran)> çois Boucaud , sa séparation et sortie de l'ancienne commu)) n a u lé , son défaut de collaboration en ¡celle, devoient être re» gardés comme un partage ou actes équipollens à partage , dis—
» solutifs par conséquent de communauté, aux termes de l’article
» 270 de notre Coutume. »
Ici les quatre enfans du premier lit sont mariés, plusieurs de
puis trente et quelques années.
T o u s ont été dotés, non-seulement de l’universalité de leurs
biens propres, niais encore en partie aux dépens de la seconde
communauté.
Aucun d’eux n ’a mis sa collaboration dans cette seconde com
munauté.
�SYY
(
27
)
'
T o u s sont sortis de la maison paternelle.
T o u s ont contracté une nouvelle communauté.
Dès-lors Inapplication de ce préjugé se fait de lui-même à l’espèce.
Mais les parties se trouvent ici dans de bien plus forts termes.
D um oulin, Coquille, D u re t , Déculant, Faulconnier, Auroux,
supposent une communauté continuée entre un père et ses enfans,
qui n ’a pas fait d’inventaire , qui ne s’esl pas remarié, qui n ’a pas
contracté une nouvelle communauté avec une seconde femme ,
et ils n ’hésitent pas à décider que la communauté est interrompue,
lorsque les enfans sont dotés et mariés hors de la maison paternelle.
. A combien plus forte raison faut-il le décider ainsi, dans l’espèce
où il existe un inventaire fait dans le dessein de dissoudre la com
munauté ;
U ne déclaration formelle de cette dissolution, insérée dans le
second contrat de mariage du sieur Virotte;
Une nouvelle communauté contractée avec une seconde femme ;
Quatre enfans dotés et mariés hors de la maison paternelle, et
qui tous ont contracté une comrpunauté particulière, fo n t ménage
et négocient autre part, où le père ne prend rien , comme le dit
Coquille.
A combien plus forte raison encore, doit-on le décider ainsi,
dans l’espèce où ces quatre enfans du premier lit n'ont contribué
en rien à l’avantage de cette seconde communauté, ni par leur
collaboration , ni par leurs revenus, où ils l’ont au contraire épuisée
dans tous les sens par leurs dépenses, et où cette seconde commu
nauté n a subsisté, n ’a prospéré que par 44 ans d’économie, de
soins, de travaux de la dame Virotte, et par les revenus annuels
d un riche patrimoine, qui se sont confondus dans cette commu
nauté l
Q u ’oppose-t-on contre tant de moyens ? L ’arrêt des Vidalin,
rendu, dit-on, le ù mai 1768, cité par Ducher.
Cet arrêt ne peut être mis en balance avec toutes les autorités
que nous venons de citer.
On sait d’ailluurs que les arrêts dépendent le plus souvent des
circonstances , ou d’une défense négligée.
�w
2 8
E t si on s’en rapporte à l’auteur qui cite cet arrêt, on y remar
que que le père a voit institué ses enfans ses héritiers par égalité,
avec la condition ridicule de s’en tenir à une somme quelconque
pour leurs droits maternels, sous peine d'apanage pour les filles,
et pour les m ales, d ’être réduits à leur légitime.
. On ne voit pas qu’il y eût eu un inventaire destiné à dissoudre
la communauté; une seconde communauté contractée par le sur
vivant; une dot constituée aux enfans mariés, bien supérieure à
l eurs droits maternels, et toutes les circonstances qui se trouvent
dans cette affaire, et qui la rendent la plus favorable, pour l’in
terruption de la communauté, qui ait jamais paru dans les tri
bunaux.
Ajoutons que le sieur Virotte a fait un traité avec ses enfans
du premier lit, en 1784, qui forme encore une preuve nouvelle
de cette dissolution de communauté, en ce que, par ce traité, le
Sieur Virotte a restitué à ses enfans les jouissances de certains
biens qui leur étoient propres, qu’il avoit aliénés, tandis que ces
jouissances seroient entrées dans la communauté , si elle n’avoit
pas été dissoute.
Mais tout ce qu’on vient de dire dans cette dernière partie de
la discussion, n ’est que par surabondance de droit.
L ’inventaire du mois de janvier 1762 a été fait avec légitime
contradicteur; il est loyal, il est de bonne foi. il n'en eut pas
fallu davantage pour interrompre la communauté dans la Coutume
la plus sévère ; et ce n'est pas aujourd’hui qu’il faut ajouter
la
rigueur des lois sur cette m atière, lorsqu’il est reconnu que cette
institution était essentiellement mauvaise, et que les sages réfor
mateurs de nos usages gothiques, les rédacteurs du Code civil, se
sont empressés de l ’abolir.
Signé V I R O T T E - D U C H A R M E , tant pour lui
que pour sa Mère et ses frères et sœurs du second lit.
B O I R O T , ancien jurisconsulte.
D E V É Z E , avoué.
-à C L E RM O N T ,de l'imprimerie de LANDRIOT , imprimeur de la Préfecture.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Delaire, Anne. 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Devèze
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Anne Delaire, veuve de Michel Virotte, et les six enfans nés de leur mariage, appelans ; contre les quatre enfans du premier lit dudit sieur Virotte, intimés.
Table Godemel : Communautés : 2. pouvait-on, sous l’empire du droit coutumier, et particulièrement en Bourbonnais, interrompre une communauté conjugale, à laquelle des mineurs étaient intéressés, pour un inventaire infidèle, inexact, ouvrage du survivant seul ? L’inventaire authentique et solennel pouvait-il être remplacé par un autre acte qu’un partage ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1762-1807
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1813
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1811
BCU_Factums_G1814
BCU_Factums_G1812
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53340/BCU_Factums_G1813.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montaigut-le-Blin (03179)
Treteau (03289)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume du Bourbonnais
secondes noces
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53341/BCU_Factums_G1814.pdf
b0567e3d6b538e389225a1fa82ddff12
PDF Text
Text
t r ib u n a l
CT
MÉMOIRE
la p a lis s e .
POUR
Les enfans du premier lit de M i c h e l V IR O T T E ,
demandeurs ;
C O N T R E
A n n e D E L A I R E , sa veuve, et les enfans issus
de leur mariage} défendeurs.
sous l’empire du droit coutumier, et
particulièrement en Bourbonnais, interrompre une com
munauté conjugale, à laquelle des mineurs étoient inté
ressés, par un inventaire infidèle, inexact, ouvrage du
survivant seul ?
• L ’inventaire authentique et solennel pouvoit-il être
remplacé par un autre acte qu’un partage?
P
OUVOIT-O N,
A
�( 2 )
Telles sont les deux seules questions que font naître
les prétentions des enfans du premier lit de Michel Virotte.
F A I T S .
Michel Virotte s’est marié en 1762, sous le régime de
la communauté, avec Anne Brirot.
D e cette union, sont nés quatre enfans. Ce sont les
demandeurs.
A nne Brirot décéda en novembre’ 1^56 .
Michel Vix’otte pensa , quelques années après cette
perte, à un autre établissement. 11 voulut, avant de se
remarier, interrompre la communauté qui existoit entre
lui et ses enfans. Soit que son cœur, préoccupé d’une
nouvelle passion, se fût entièrement fermé sur les intérêts
des demandeurs ; soit que la famille étrangère à laquelle
il alloit s’allier lui eut imposé des lois contraires a ses
sentimens , il prit des mesures qui tendirent ouvertement
à spolier les quatre orphelins laissés par sa première
femme.
Les demandeurs se plaisent à reconnoître que s’il n’a
pas eu la force de réparer dans la suite ce premier acte
de foiblesse, il n’en a pas moins été pour eux un père
affectueux et tendre; ils doivent même convenir, pour
rendre hommage à sa mémoire, qu’il a manifesté souvent
du repentir. Les obsessions d’une femme ambitieuse l’ont
empêché de x’éparer ses torts, par un acte de justice
éclatant; mais il a emporté dans la tombe la conviction
que l’acte qui causoit ses regrets, se détruiroit de lui-même.
L e 23 janvier 1762, il présenta requête au bailli de
�'
(
3
)
Montaigut-le-Blaîn, pour obtenir permission de convo
quer à jour et heure fixes, les parens paternels et ma
ternels de ses mineurs , au nombre indiqué par la cou
tume, afin de leur nommer entre eux un curateur ou
protuteur, en présence duquel il feroit procéder, par le
premier notaire l'equis, à l’inventaire nécessaire pour
opérer la dissolution de sa commuuauté d’avec Anne
Brirot.
Ordonnance lui fut octroyée le même jour pour le sur
lendemain.
Par exploit de Morand , huissier , du 25 du même
mois, jour indiqué en l’ordonnance, il assigna avant midi
les sieurs Nicolas F au vre , bourgeois à Floret ; FrancoisMarie Definance,châtelain de Chaveroche; Antoine Brirot,
François Senectaire, demeurant l’un et l’autre à Chave
roche ; François Fejard, demeurant à Montaigut; Fran
çois Desperier, curé du même lieu ; et Annet Barret,
notaire à Saint-Gerand-le-Puy, à comparoître tous dans
la même, journée, et à dix heures du matin , devant
M c. Louher, bailli, pour délibérer sur la nomination du
curateur ou subrogé tuteur.
Il est bon d’observer que les sept personnes assignées
se trouvèrent à propos à Montaigut pour recevoir les
copies de l’ajournement; car, on neconcevroit pas autre
ment la possibilité d’une réunion si prompte de tant de
gens habitant quatre communes différentes.
L e même jour, et à l’heure de dix de la matinée, la
délibération eut lieu. T^e sieur Fejard remplit les fonc
tions de procureur fiscal, et son iils celles de parent déA
2.
�(4 )
libérant. On choisit pour subrogé tuteur François-Marie
Delinance.
D e suite, et avant même que le procès verbal de l’as
semblée de famille eût pu être mis en règle, M e_Louher,
devant qui il avoit eu lieu , comme bailli, procéda, comme
notaire, à l’inventaire. François Fejard 7 qui avoit déjà
figuré à .titre de parent dans la délibération, remplit un
second rô le , eu opérant en qualité d’expert.
L ’actif entier de la communauté ne s’éleva qu’à 3106 fr.
L e 8 février 1762 , c’est-à-dire, douze jours après l’in
ventaire, Michel Virotte contracta mariage avec Anne
Delaire. Il fut stipulé que les futurs seroient communs,
suivant La coutume du Bourbonnais, en cas d’enfans seu
lement.
D e cette seconde union- sont nés six enfans. Ce sont les
défendeurs.
I ,e cœur d’un p è r e , quel qu e g é n é r eu x et droit qu’il
s o it , se laisse toujours entraîner par le penchant d’un
nouveau lien. S’il est assez ferme pour résister à toutes
les amorces d’une seconde femme adroite , il aime trop
son repos pour ne pas céd er, par le désir de la paix.
Cette vérité se présente ici dans tout son jour.
Les propres d’Anne Delaire out été l’objet continuel
de tous les soinsde Michel Virotte; il en a triplé la valeur
par des réparations de tout genre. Trois locaterics ont été
entièrement réédiiiées ; une quatrième a été accrue d’un
bâtiment.. Le domaine Ducharnea été refait prequ’à neuf;
les terres ont été closes de murs; les vignes ont été minées
à grands frais j des,plantations immenses out été faites. Il
�CHS
(5 )
y a peu d’héritages dans le pays qui présentent l’image
d’une aussi belle tenue.
Les propres d’Anne B riro t, au contraire, ont été abso
lument négligés. On diroit, à voir ce qui s’est fait à leur
égard , que c’est un étranger insouciant qui les a admi
nistrés. Antoine B rirot, aïeul des demandeurs, mourut en
1764. Ses meubles restèrent à la disposition de ceux de ses
héritiers qui liabitoient la commune de Chaveroche. Le
sieur Virotte n’en requit point l’inventaire; il signa aveu
glément un état sommaire qui lui fut présenté, comme con
tenant un détail exact des forces mobilières delà succession,
et dont l’estimation totale étoit d’une chétive somme de
20191 liv. 11 s. Les immeubles consistoient en trois gros
domaines de forte terre, des locateries, plusieurs maisons*
avec dès dépendances considérables, et des rentes ou rede
vances , soit en nature, soit en argent. Il vendit en sa
qualité de tuteur, aux autres cohéritiers, le septième qui
en revenoit h ses quatre enfans, moyennant la modique
somme de 5ooo francs,, payable à leur majorité ou lors
de leur établissement. 11 prit en nature sa portion des
meubles et des récoltes qui étoient dans les domaines, ou
des grains dans les greniers de la maison. L ’aliénation
étoit si funeste pour les demandeurs, qu’ils l’ont attaquée
en majorité , et se sont fait donner par les héritiers
Brirot une somme de 3000 francs, une maison, un pré,,
une locaterie, et différons- autres objets.
Par l’acte passé à cet égard , le 3 juillet 1784, il fufc
dit que comme les enfans Virotte n’étoient pas encore
suflisamment remplis de leurs droits par le désistement
d?liéritages qui leur étoit fait, et le payement des 3000 fr.r
�( 6 \
et que le sieur Michel Virotte père devoit aux cohéritiers
Brirot une indemnité quelconque, pour raison de la ga
rantie qu’il leur avoit promise, en vendant les droits de
ses mineurs, cette indemnité seroit fixée à l’amiable entre
le père et les enfans, et reviendroit à ces derniers pour
achever leurs portions dans la succession de leur aïeul
maternel. D e suite l’évaluation en fut faite à 4000 francs,
que le sieur Virotte paya à ses quatre enfans du pre
mier lit.
- Les demandeurs se sont mariés successivement, et ont
été institués héritiers du père commun par égales por
tions avec leurs frères et sœurs du second l i t , sauf un
préciput de 2000 fr. au profit de François Virotte, l’aîné
des enfans du premier lit.
Après avoir ramassé une fortune considérable, Michel
Virotte a payé le tribut à la nature. Sa vie avoit cto active
et p r o b e ; il ne se r eprochoit q u ’ un seul acte d’injustice,
l’inventaire du z 5 janvier 1762. Il seroit descendu dans
la tombe sans le moindre re g re t, s’il eût pu le réparer
solennellement. Mais les obsessions de sa femme avoient
redoublé dans les dernières années de sa vieillesse : toutes
ses démarches étoient épiées ; il falloit porter le trouble
dans sn propre maison , courroucer une épouse dont les
soins lui étoient indispensables , mettre aux abois des
enfans avides comme leur mère. Tant d’entraves l’arrê
tèrent; l’idée de revenir sur le passé le suivit jusqu’au
dernier soupir. Quelques instans avant, de trépasser, il
étoit entouré de sa nombreuse famille : Mes enfans,
dit-il d’une voix éteinte, vous m’êtes tous également
chers ; je désire que vous partagiez également ma for-
�3 tS
(7 )
tune. Je ne vous laisse point de mauvaises affaires: qu’un
sordide intérêt ne vous fasse pas troubler, par des procès,
l’union qui doit régner entre vous.
Patriarche vénérable, vous connoissiez bien le cœur
humain ! L ’expérience d’une longue carrière vous avoit
appris que l’ambition détruit les liens même de la nature!
A u moins vous avez emporté, avec la crainte qu’une
affreuse zizanie ne troublât l’harmonie de vos enfans , la
certitude que la justice répareroit vosfoiblesses. C ’est vousmême qui avez conservé les traces à la faveur desquelles la
vérité doit triompher. Grâces soient rendues à la droiture
de vos intentions! les matériaux immenses dont les de
mandeurs sont nantis suffisent pour détruire toutes leà
inquiétudes que vous avez emportées au tombeau.
. A peine le sieur Virotte a-t-il eu fermé les y e u x , que
les défendeurs se sont armés de l’inventaire du 20 janvier
1762, et qu’oubliant les derniers vœux d’un bon père,
ils ont manifesté l’intention d’envahir les quatre cinquièmes
de sa succession.
\
Leurs prétentions ont nécessité des mesures bien oppo
sées à la concorde qui leur avoit été recommandée.
;
Par acte du 19 juin dernier, il a été procédéàun inven
taire qui a duré près d’un mois. Des meubles considéra
bles dans la maison du défunt, beaucoup de blé dans les
greniers, une grande quantité de vins dans les caves, plu
sieurs créances actives, et une somme de 22129 francs
¿3 centimes, sont les principaux articles inventoriés.
C ’est dans cet état des choses que les enfans du premier
lit ont form é, devant le tribunal de première instance
de l’arrondissement de Lapnlisse, demande en partage de
la succession du père commun.
�(8 )
L e principal clief de cette action a pour objet de faire
admettre la continuation de la communauté d’entre
Michel Virotte et Anne Brirot ; sa première femme.
M O Y E N S .
Il ne peut point y avoir d’équivoque sur les principes
et la jurisprudence qui existaient au temps de l’inven
taire du s 5 janvier 1762. Il est incontestable qu’alors,
comme de tout temps, il falloit, dans le droit coutumier ,
pour interrompre une communauté conjugale avec des
mineurs, un inventaire régulier, loyal et fidèle. Cette règle
é toit fondée sur des considérations majeures, telles que
la faveur des contrats de mariage, l’intérêt dû aux miueurs , la sûi’eté des familles ; elle n’étoit pas contraire
aux lois romaines: l’adage M orte sofaitur s o c ie ta s , ne
c o n v e n o i t pas ù la c o mm un a ut é du mari et de la femme,
parce que dans la société ordinaire, la continuation donneroit des étrangers inconnus pour associés ; et dans la
communauté conjugale, le survivant n’a pour associés
que ses enfans, et n’a rien h craindre, puisqu’il est le
seul qui agisse. Les bons esprits la regardoient non pas
comme une institution funeste, ainsi que le prétend le
conseil des défendeurs, mais comme une sauve-garde
tutélairc. D ’Aguesseau , la lumière de la magistrature,
disoit que c’étoit une loi dont la disposition ne devoit
pas être restreinte , mais qu’il falloit favoriser, parce que
la jurisprudence l’avoit introduite dans toutes les coutumes
qui n’a voient point de dispositions précises sur la matière.
To u s les meilleurs auteurs ont tenu le même langage -,
et
�(9)
et l’on peut dire que c’eût été un blasphème, sous l’empire
des statuts coutumiers, que de contester la justice et la
vérité du principe. Il a été abrogé par le Code civil,
sous prétexte qu’il occasionnoit des procès : cette circons
tance est étrangère à la cause, puisque le Code n’a pas
d’effet rétroactif. L e législateur a cru y suppléer , en
privant le conjoint survivant, qui ne fait pas inventaire,
du revenu des biens de ses enfans, jusqu’à dix-huit ans,
et en permettant la preuve de la consistance des biens et
effets communs. N ’est-ce pas encore une porte ouverte
aux procès?
L ’inventaire devoit être solennel et exact. Les inexac
titudes et les omissions le frappoient de nullité , soit
qu’elles fussent frauduleuses , soit qu’on pût présumer
qu’elles avoient été commises sans malice.
Lacombe , au mot com m unauté, s’exprime ainsi :
« S’il y a des omissions dans l’inventaire , quoique
« d’ailleurs il soit revêtu des formalités requises, que
« même ces omissions soient involontaires , il ne doit
« produire aucun effet, parce qu’il faut que l’inventaire
« soit bon, fidèle et exact. Si le défaut de quelques for« malités empêche la dissolution de la communauté, à
« plus forte raison les omissions, quelles qu’elles soient,
« doivent-elles l’empêcher, parce que ces formalités
« n’ont été établies que pour éviter les omissions et
« l’inexactitude. »
Denisart enseigne aussi que les simples omissions ou
inexactitudes sulïisent pour faire annuller les inventaires.
Les auteurs de la Collection de décisions nouv el l es ,
disent :
B
�( 10 )
« Pour qu’il y ait lieu à la continuation de commu« nauté, il n’est pas même nécessaire qu’il y ait fraude
ç< de la part du survivant *, il sullit qu’il y ait de sa part
« négligence notable, parce qu’il doit veiller, pour ses
« mineurs, à ce que l’inventaire soit fidèle. »
, A rg o u , dans son Institution au droit français, déclare
affirmativement que dans les coutumes où il faut un in
ventaire pour dissoudre la communauté , cet acte doit être
solennel et parfait. 11 ajoute que si le survivant n’a pas
fait inventaire loyal et fidèle, et s’il a commis un recélé,
tel inventaire ne doit pas interrompre la communauté.
. Prévôt de la Janès, dans ses Principes de la jurispru
dence française, s’explique de la manière suivante, à l’ar
ticle continuation de communauté,
« Pour empêcher la continuation de communauté, il
k faut que le survivant fiasse un inventaire solennel et
« fidèle. »
. M . Merlin , cet oracle du barreau, dont la sagacité et
!a science font l’admiration du siècle, est d’avis, dans ses
Questions de droit, qu’il faut un inventaire solennel et
en bonne forme. Ecoutons-le raisonner.
« Et en effet, ôtez l’inventaire solennel, contentez« vous d’une- simple description , d’un simple mém oire,
« d’une fixation arbitraire , et qui ne seroit l’ouvrage
« que du survivant, dont le cceuv souvent pi’éoccupé
« d’une nouvelle passion , sacrifie tout pour la satisfaire,
« quelle ressource restera-t-il à ses enfans malheureux! »
A toutes ces autorités respectables se joint la juris
prudence des arrêts. On pourroit en citer un nombre
infini ; mais il suffit saus doute d’indiquer les plus rcmar-
�quableâ : ils sont rappelés par tous les livres qui ont traité
de la matière.
A rrêt de règlement, du 10 mai 17 2 7, qui exige que
l ’inventaire soit bon et loyal, c’est-à-dire, exact et fidèle.
A rrêt de 1725, qui a ordonné la continuation de com
munauté , sur ce qu’on avoit laissé en blanc le nombre
des marcs d’argent et le poids de l’étain , quoique le
nombre des pièces et le prix du marc fussent écrits , et
que l’étain y fût également désigné , quoiqu’il n’y eût
aucune fraude, mais simplement négligence et oubli de
la part du survivant.
• A rrêt du 12 mai 17 4 7 , qui a annullé un autre inven
taire, sur le fondement d’omissions et d’inexactitudes.
A rrêt du 12 septembre 1762, fondé sur ce que l’in»ventaire contenoit des déclarations qui n’étoient pas
exactes.
Cette jurisprudence n’a pas cliangé dans le nouveau
régime. Divers jugemens ont annullé des inventaires pour
simples négligences ou omissions. Les demandeurs cite
ront, entr’autres décisions , un jugement du ci-devant
tribunal de l’A llier, qui a annullé un inventaire, par le
seul motif qu’une cuve y avoit été omise : ce jugement a
été confirmé sur l’appel à Bourges; et une autre sentence
de M oulins, confirmée à G-uéret, par laquelle on a an
nullé l’ inventaire d’un maréchal ferrant, contenant l’omis
sion d’une enclume.
On s’est fondé sur le sentiment de Rcnusson et de
Potliier , pour prétendre qu’ il n’y a que les omissions
m a licie u se s qui puissent vicier un inventaire; mais, quant
& Rcnusson, son avis est facile à pulvériser. Il dit que
B 2 -
�( 12 )
la coutume de Paris n’a pas exprimé qu’il y auroit con
tinuation de communauté, lorsque l’inventaire ne seroit
ni bon , ni loyal, et que sa disposition ne doit pas être
étendue , parce qu’elle est pénale. C’est avec le langage
de d’Aguesseau que les demandeurs écarteront cette auto
rité. Cet orateur célèbre , dans son cinquantième plai
doyer, parloit ainsi : « On a voulu faire passer pour une
« loi pénale la loi qui établit la continuation de comrau« nauté : mais ce principe ne peut être admis. Pour en
« connoître le peu de fondement, cherchons les motifs
« de la continuation de communauté. » Quant à Pothier,
on prouvera plus loin que son avis est en faveur des de
mandeurs..
Ainsi donc le point de droit est constant; il faut un
inventaire solennel, régulier, exact et fidèle..
Passons au point de fait.
E t d’abordex;miinons si l'inventaire du z 5 <janvier 1762
est solennel et régulier.
La délibération- de parens qui a nommé le subrogé1
tuteur , et l’inventaire, ont été faits le même jour. L e
premier acte devort être en forme- authentique avant le
commencement du second : cela n’a pas pu. être1, puisque
l ’un et l’autre ont été commencés eu même temps. Il est
clair que la délibération n’ctoit ni rédigée, ni signée,
quand on s’e9t occupé de l’inventaire , ou plutôt que ces
deux actes ont été faits en même temps.. Y a-t-il là de
la solennité ? Est-ce ainsi qu’on procède ordinairement^
non-seulement dans les.affaires importantes, dans les cas
où la loi veut des précautions, mais même dans les cir
constances d ’ un chétif intérêt?. L e subrogé tuteur étoit le
�C 13 )
défenseur des mineurs. La loi entendoit l’opposer au sieur
Virotte père; elle ne vouloit ni connivence, ni accord
entre eux. Peut-on présumer qu’il y eût de la contra
diction de la part de l’un vis-à-vis de l’autre, quand onvoit une marche si rapide, si singulière , approuvée par
tou^deux?
On assigne sept personnes habitant quatre communes'
différentes ; et c’est le jour même où l’on veut les faire
op é rer, à la minute où l’on a besoin d’elles, dans la>
propre maison de celui qu’il faut surveiller, qu’on les
rencontre toutes à propos. Ce n’est pas le hasard qui les
a réunies; elles ont donc été prévenues. Pourquoi les
assigner? Ce n’étoit pas pour les rapprocher, puisqu?elles>
étoient ensemble. On opposera que l’assignation étoifc
inutile : par quel motif a-t-elle donc eu lieu? C’étoitr
n’en doutons pas, pour écarter toute idée de concert;',
mais la ruse a été grossière:.
C ’est le sieur Louher qui fait les fonctions-de bailli ett
de notaire; Il y avoit incompatibilité-, un fonctionnaire’
public ne peut pas se commettre lui-m êm e: la chose est'
inouïe.. Nouveau- m otif pour se convaincre que tout étoif
concerté;, que les parens r le-juge et* le notaire étoientiW
la dévotiom du sieur Virotte. ¿ ’étoient,. dit-on les per
sonnes les plus' remarquables’ du’ paya traisoni de- plus;*
les gens hunnêtes-soutconiian3:,,les hommes qui ne tiennent'à la société que par leur fovtune om leur- naissance, sontentièrement dominés par les. règles do la politesse et-du
bon ton ; étrangers-aux affaires-, ils- ne s’occupent que de$>
bienséances».Ce seroit un injure à leurs yeux que d’épier*-
I
�( 14 )
les démarches d’un voisin qui les accueille et seirible
vouloir leur ouvrir tous ses secrets.
François Féjard cumule à son tour deux qualités op
posées ; il délibère dans l’assemblée de famille, et opère
ensuite comme expert. Aucune loi écrite, dira-t-on, ne
s’y opposoit : le bon sens, la raison, les usages reçus repoussoient ce mode. L ’ordonnance môme de 1667 ne le
vouloit pas*, elle defend aux experts de boire ou manger
avec la partie. Il est bien évident que François F éja rd ,
qui s’étoit rendu bénévolement à la demande du sieur
V ir o tte , que l’huissier avoit trouvé logé dans la maison
du sieur V irotte, avoit bu et mangé avec lui.
L e fils Féjard exerce les fonctions de procureur fiscal;
il étoit cousin d’Anne Delaire. Le mariage de cette dernière
avec Michel Virotte s’est fait dans la même quinzaine.
L e but de la loi qui récuse les parens, est d’e mp êc he r l’in
f luence, la f aveur qui peut être le résultat d’une amitié
commandée par le sang. L e cousin d’Anne Delaire n’étoitil pas intéressé, le 2.5 janvier, à ménager, à servir le sieur
Virotte, comme il l’eût été deux semaines après, dès que
le mariage étoit convenu alors, et que c’étoit à cause de
cette union projetée que l’inventaire se faisoit? C’est donc
le cas d’appliquer la règle : Eadem ra tio , idem ju s.
Enfin les mineurs avoient encore, lors de l’inventaire,
leur aïeul maternel, le sieur Antoine Brirot. C’étoit
l’homme de tous le pays qui devoit être le plus intéressé
à servir chaudement leurs intérêts; son cœur devoit leur
être entièrement ouvert : on l’écarte de l’assemblée de
parens. Ou imagine maintenant d’opposer qu’il étoit in-
�(i5)
^
firme : c’est un fait faux. La preuve que Michel Virotte
ne vouloit pas l’avoir, résulte de ce qu’il ne l’a pas fuit
assigner.
Ces irrégularités sont frappantes ; elles écartent toute
idée de solennité; elles prouvent que l’inventaire n’a été
l’ouvrage que du survivant, parce que toutes les personnes
qui ont eu l’air d’y figurer n’ont été appelées que pour la
forme, et lui étoient dévouées. C’est le cas de s’écrier avec
M . Merlin : O tez ïinventaire solennel, quelle ressource
reste-t-il aux malheureux enfan s du survivant ?
On pourvoit citer indistinctement tous les objets portés^
dans l’inventaire du 25 janvier 176 2, comme évalués à des
prix si modiques, qu’il' est impossible de repousser les«
soupçons de fraude qu’ils font naître ; mais il suffit sans
doute d’en signaler deux ou trois..
Les articles 2, 4 , 5 , 9 et 14, contiennent la description;
de cinq lits, dont trois de maîtres et deux de domestiquesr
évalués au total à 186 francs. Cette estimation n’est-elle1
pas dérisoire? et peut-on la concevoir, quand on remarque1
que les cinq lits a voient six matelats, cinq couettes, cinq?
paillasses, sept couvertures, non compris les rideaux , les*
tringles en fer, etc. ? Dans le nombre étoit compris celui
du trousseau d’Anne Brirot, qurelle avoit apporté p o u r
200 irancs,. et auquel étoient ajoutés une1couverture en;
laine, une paillasse, deux matelats et des tringles; ilvaloit
seul pour le moins les 186 francs, montant de l’estimation.L ’article 12 concerne vingt-neut drap» de lits de’
maîtres, huit de domestiques, six grandes nappes, sept
petites, quatre-vingts serviettes et dix-huit torchons; le1
tout n’est porté qu’à 128 liv. 10 sous; c’est-à-d iro, ài
�c
1
6
3
17 sous la pièce; c’est-à-dire encore, à quinze fois au moins
au-dessous de leur valeur.
Les infidélités de l’inventaire sont encore plus frap
pantes.
L ’article 20 porte qu’il n’étoit d û , suivant le dépouille
ment du livre-journal du sieur Virotte, par le colon du
domaine Crolet , et par les métayers ou locataires des
biens de la dame Préveraud, de la terre du Ponçut et de
celle du M éage, dont il étoit fermier, que la somme de
deux cent cinquante-trois fra n cs.
Si l’on prend le livre-journal m êm e, d’après lequel
l ’inventaire fait cette indication, on trouve à ses folios 45,
58 , 71 , 11 0 , 113 et 1 2 3 , la preuve qu’il étoit dû huit
cent seize livres dix sous.
Peut-il >y avoir une infidélité plus considérable?
Les défendeurs croient pouvoir la couvrir, en disant
que le père commun a fait inventorier son livre-journal;
qu’il a été dès-lors de bonne foi ; qu’il n’auroit pas donné
des armes contre lui-même, si son intention eût été ma
licieuse ; que cela prouve que les différences qui existent
entre l’inventaire et le livre-journal ne sont- que l’elfet
d’une erreur involontaire.
L a réponse est toute simple. Que les fausses déclara
tions aient été malicieuses ou non, elles existent; et les
principes les considèrent comme suffisantes pour donner
lieu à la continuation de communauté.
L ’explication de la conduite du père commun est facile
pour les cœurs des demandeurs; ils répéteront qu’il cédoit
aux impulsions d’une famille exigeante; et que son amour
paternel l’emportant sur la nouvelle passion qui préoccupoit
�( 17 )
cupoit ses sens, il cherchoit lui-même à leur assurer les
moyens d’attaquer un jour l’ouvrage de sa foiblesse, et
les déposoit dans l’acte même qu’on le forçoit de faire
pour dépouiller sesenfans, afin que leur découverte devînt
moins difficile.
Il n’y a point de contradiction entre ce système et les
inductions tirées de la précipitation de l’inventaire, et du
dévouement des parens convoqués pour la délibération
de famille, aux volontés de Michel V iro tte, parce que
la conduite extraordinaire de ce dernier, avant l’inven
taire comme pendant sa durée, étoit toujours soumise
aux désii's d’une famille avide, par laquelle il étoit forcé
de se laisser diriger.
>
A u surplus, cette manière de voir les choses n’est que
pour l’intérieur des demandeurs. Il leur en coûteroit trop
d’accuser la mémoire d’un père qu’ils ont chéri et res
pecté jusqu’à son trépas, qui leur a laissé de longs regrets,
et dont la tendresse et les bontés ne s’effaceront jamais de
leur souvenir.
Mais peu importe pour la justice le prétexte des infi
délités dont l’inventaire fourmille; elle ne peut pas sonder
les replis du coeur humain : c’est le matériel des choses
qui la frappe. O r , des fausses déclarations nombreuses
existent; il faut qu’elle prononce avec sévérité les peines
qu’elles ont provoquées.
Il est dit au n°. 26 de l’inventaire, qu’il restoit dans
les domaines Barnier, Maillard et Protat, en blé non
battu, quatre mille cent gerbes de froment, et cinq cents
gerbes de seigle ; que le cent de gerbes de froment ne
pouvoit produire qu’une quarte de grains, et le seigle
G
�ÇiS)
dix coupes ; que cela étoit prouvé par les déclarations
des métayers, et la propre expérience des experts; et que
la grêle dont la récolte avoit été frappée étoit la cause
de la modicité de ce produit. L ’article porte tout le fro
ment à quarante-une quartes, et tout le seigle à six
quartes deux coupes : le prix du froment est fixé à 8 fr.
la quarte, celui du seigle à 6 fr.
Contradiction formelle avec le livre-journal, qui in
dique, pages 2 y 16 et 28, sous la date des 2b et 26 jan
vier 176 2 , que les gerbes produisoient plus de douze
coupes par cent.
Cette fausse déclaration est de vingt-quatre quartes de
grains pour trois domaines seulement : l’infidélité a dû
être la même pour la terre du Ponçut et celle du Méage.
L e livre-journal est muet sur ce point : mais dos que
l ’inventaire a porté le produit de ces deux fermes à la
même quantité de grains que celui des Bnrnier, Maillard
et Protat, la conséquence est qu’en effet ce produit étoit
le même.
Quelle soustraction ! . . . . Il n’y a pas une seule raison
à faire valoir pour l’effacer. C’est au même moment que
les deux opérations se font; elles se contredisent. L ’in
ventaire dit que les pailles ne rendoient que huit et dix
coupes de grains par cent; le livre-journal, sous la date
du même jour, annonce au contraire que ces pailles donno ient plus de douze coupes !. . . .
Viennent maintenant les omissions : elles ont un ca
ractère de gravité révoltant.
Elles portent, i°. sur une obligation de 319 hV. jg
consentie le 10 juin 1760, par les nommés Baflier, mé-
�*9 )
.
^
tayers du domaine Barnier, au profit de Michel Virotte;
J2°. sur une somme de 36 francs, payée avec les deniers
de la communauté, à la Saint-M artin 17 6 1, au sieur
de D o u zo n , en l’acquit des Baffier, en vertu d’un acte
du 2 septembre 1761 ; 30. sur le bail de la terre du
M é a g e , dont Michel Virotte étoit ferm ier, et d’une
somme de 464 liv. 6 sous 7 deniers, dont il étoit alors
en avance sur sa ferme, suivant une quittance du 14 mars
1762; 40. sur les foins de réserve produits par cinq prés,
avec lesquels il engraissoit des bœufs et nourrissoit deux
chevaux ; 5°. sur les pailles des dîmes du M é a g e , qui
faisoient un objet de réserve; 6°. sur les Prébats, qui,
suivant le n°. 3 du livre-journal, faisoient un objet im
portant , à raison de l’importance des fermes.
L ’inventaire présente encore à la critique une infinité
d’articles.
L e sieur Virotte y dit qu’il n’avoit en argent monnoyé, ou qu’il ne lui étoit dû en arrérages de cens, sur
le terrier du M éage, que la somme de 5 oo francs; que
les habits, linges et bardes de la défunte avoient été
vendus , échangés ou employés à l’usage des mineurs.
Tous les bestiaux de ses biens et de ses fermes ne font
qu’une seule masse dans l’estimation.
Mais le sieur Virotte faisoit déjà de grandes affaires.
Gomment donc auroit-il eu si peu d’argent ?
Pourquoi n’a-t-il pas fait inventorier la liève qu’il devoit
tenir pour raison du terrier du Méage?
Peut-on présumer que les bardes d’Anne Brirot eussent
été employées pour deux petits garçons ? celle des deux
G a
�( 2° )
filles qui demeuroit avec le p è re , et qui avoit avoit à
peine six ans, pouvoit-elle les avoir usées en si peu de
temps ?
N ’est-il pas évident qu’il ne fut point fait d’estimation
des clieptels lors de l’inventaire ? Les experts, pour visiter
les divers domaines et locateries, auroient eu à parcourir
quatre à cinq communes éloignées les unes des autres.
Une pareille opération étoit-elle faisable en un jour qu’a
duré l’inventaire ? Les experts ne pouvoient pas être tout
à la fois à la maison du survivant pour apprécier les meu
bles, et dans les domaines pour évaluer les bestiaux.
S’il falloit, comme le dit Pothier , que les infidélités
fussent malicieuses pour donner lieu à la continuation de
communauté, son opinion s’appliqueroit parfaitement à
la cause. Cet auteur enseigne que l’omission est i-éputée
malicieuse, lorsque la multitude et la gravité des choses
ne permettent pas de penser q u ’elles aient pu échapper à
la connoissance du s u r v i v a n t , surtout lorsque ces choses
sont en évidence, et d’un usage journalier.
Pour la multitude des choses, elle est ici incontestable.
Pour la qualité, quoi de plus considérable qu’un tiers
de différence entre les grains inventoriés et les grains
provenus réellement de la récolte ! Quoi de plus grave
que la soustraction d’une obligation de près de 400 fr.
dans un inventaire qu’on ne fait pas monter ù mille écus
d’actif! Quoi de moins susceptible d’échappcr à la eonnoissance du survivant r que les foins que ses chevaux
mangent journellement, les pailles remplissant ses granges,
les bestiaux garnissant sa cour!
�( 21 )
Toutes ces présomptions de fraude , dira-t-on , sc dis
sipent, quand on voit que le sieur Virotte a fait inven
torier son livre-journal, qui mettoit au jour toute sa for
tune , toutes ces spéculations.
Cette considération a déjà été réfutée. Les demandeurs
répéteront qu’il y a eu fraude, dès que les infidélités et
les omissions avoient pour objet de-nuire aux mineurs.
Que le sieur Virotte ait agi par contrainte et pour plaire
à une femme qui le dirigeoit, ou qu’il se soit abandonné
librement à des vues spoliatrices et injustes, la fraude n’en
a pas moins existé..
Les défendeurs se font encore un moyen de ce que le
père commun n’a pas livré aux flammes le livre-journaL
qui décéloit ses omissions».
C’est un moyen pour les demandeurs, et non pour eux..
L a bonté de ce père vénérable lui prescrivoit de con
server soigneusement ce titre authentique, qui devoitun
jour faire réparer l’injustice dont il se repentoit..
Ainsi il est établi que l’inventaire n’étoit ni solennel,,
ni fidèle y et qu’il ne pouvoit pas interrompre la com
munautés
Cette interruption a -t-e lle pu résulter du mariage des.
demandeurs- hors la maison paternelle, avec dot du chef:
du père, ou du traité fait entre le père et les enfans,,
le 3; juillet 1784?
A u r o u x , sur l’art. 270 de la.coutume du Bourbonnais,,
n°s. 9 , 10 et n y cite un arrêt du 17 février 1610, par
lequel 011 avoit jugé que le mariage des enfans, hors*
la maison, paternelle, n’empèchoit pas-la continuation de;
�( 22 )
communauté. Ducher rapporte sur le même article le
célèbre arrêt des V idalin , du 3 mai i y 58 , qui a décidé
le même principe.
Voilà la jurisprudence bien établie.
S’il pouvoity avoir eu une jurisprudence intermédiaire,
il résulteroit de ces deux auteurs qu’elle ne s’est pas sou
tenue, parce qu’elle étoit contraire aux vrais principes.
IL n’a pas été question dans la transaction de 1784, de
la communauté, ni de sa continuation; on n’y a pas traité
de la validité ou invalidité de l’inventaire du 25 janvier
1762; et il a toujours été de principe que les transactions
n’engagent les parties que sur les objets dont elles ont
traité entre elles. Le sieur Virotte n’a jamais rendu son
compte de tutelle ; il ne leur a pas même fait raison du
mobilier, dont il a pris un septième dans la succession
d’Antoine Brirot. O r , il a toujours été de principe que
tout traité intervenu entre le tuteur et le mi ne ur devenu
majeur, est nul, s’il n’a été précédé de la reddition d’un
compte détaillé et de la remise des pièces justificatives.
Cette règle est consacrée de nouveau dans l’article 472
du Code civil.
Enfin , lors de la transaction , les demandeurs ne connoissoient ni l’inventaire , ni Je journal qui en démontre
‘ les inexactitudes et les omissions; cespièces étoient en la
possession de leur père et tuteur. Ce 11’est que depuis
son décès qu’ils en ont eu connoissance, et qu’ils ont
été à portée de faire valoir tous leurs droits.
A u total, suivant la coutume locale, comme d’après
tous les auteurs, il n’y a qu’un inventaire régulier et loyal,
�( 23
)
ou un partage, qui fasse cesser la communauté : ici il n’y
a qu’un inventaire plein d’irrégularités et de fraudes.
La première communauté n’a pas été partagée, puisque
les meubles même d’Antoine Brirot sont encore dûs aux
demandeurs, et que jamais il ne leur a été fait compte
de leur part dans les prétendues forces de la première
communauté : dès-lors la continuation est incontestable.
B O Y R O N - R O Z I E R , avocat et avoué,-
A R I O M , de l'imprimerie de T
h ib a u d - L a n d r i o t
de la Cour d'appel.
t
, imprimeur
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Virotte, Michel. 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boyron-Rozier
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les enfans du premier lit de Michel Virotte, demandeurs ; Contre Anne Delaire, sa veuve, et les enfans issus de leur mariage, défendeurs.
Table Godemel : Communautés : 2. pouvait-on, sous l’empire du droit coutumier, et particulièrement en Bourbonnais, interrompre une communauté conjugale, à laquelle des mineurs étaient intéressés, pour un inventaire infidèle, inexact, ouvrage du survivant seul ? L’inventaire authentique et solennel pouvait-il être remplacé par un autre acte qu’un partage ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1762-1807
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1814
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1812
BCU_Factums_G1813
BCU_Factums_G1811
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53341/BCU_Factums_G1814.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montaigut-le-Blin (03179)
Treteau (03289)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume du Bourbonnais
secondes noces
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53342/BCU_Factums_G1815.pdf
01991bc103b9f512fa2149539e339f57
PDF Text
Text
PRECIS
C H A LTEIX , G u i l l e LEGO T,
J e a n e t M a r t i n CH ALTEIX frères, mar
chands chauniers à Cornon, appelans;
P o u r F r a n ç o is
et P i e r r e P I N A R D ,
propriétaires de vignes dans la même com
m une , intimés.
C o n tre Je a n
SA U RET
L
es appelans sont propriétaires ou exploitans de fours
à chaux à Cornon.
Ces fours à chaux sont construits dans le terroir de la
Chaumette.
Sauret et Pinard sont propriétaires dans le même terroir,
Sauret de vingt œuvres de vigne, Pinard de huit.
A
�( 2)
TLes fours à chaux existent de toute ancienneté dans ce
territoire; il a été de tout temps en terre.-, labourables.
Les vignes de Sauret et Pinard ne sont plantées que
depuis quelques années.
Ce fait est établi par une multitude de preuves écrites
de l ’j So, 17^*2, 17 5 3 , 17 8 2 , 1788, etc.
Sauret et Pinard ont prétendu que la fumée du charbon
employé à la cuisson de la pierre à chaux donneroit à leur
vin un goût de bitume qui nuiroit à sa qualité.
Ils ont traduit en justice les propriétaires ou exploitans
des cinq fours à chaux qui avoisinoient leurs vignes, pour
voir dire qu’ils seroient tenus d’en cesser l’exploitation,
dans le jour, jusqu’après les vendanges ; sinon qu’il leur
fût permis de faire étouper les fours aux frais et dépens
des chauniers, et de faire ameubler leurs récoltes dans des
vaisseaux particuliers , pour en constater la quantité et la
qualité.
Les fours n’ont pas été éteints, les récoltes ont été ameublées dans des cuves particulières.
L e vin qui en est provenu a été analysé et dégusté par
les chimistes, qui y ont trouvé un goût de bitume plus ou
moins prononcé, en observant que ce goût nétoit nulle
ment nuisible à la santé.
Les appclans ont été condamnés provisoirement à pren
dre ce vin et à le payer au prix du cours.
Enfin, par un jugement définitif du tribunal de Clermont, du 10 juin 180G, il a été fait défenses aux appelans
d’allumer leurs fours à chaux depuis le i 5 août jusqu’après
les vendanges de chaque année, et ils ont été condamnés
pour tous doininages-intérets aux dépens.
�¿ ¡ o 2>
( 3)
C ’est sur l’appel de ce jugement que la Cour a à pro
noncer.
Avant de discuter cet appel, il est bon de se pénétrer
de quelques idées préliminaires.
Cette affaire n’est rien , vue dans l'intérêt de Sauret et
Pinard.
Elle est majeure, vue dans l’intérêt des appelans.
Elle est de la plus haute importance, considérée sous le
point de vue de l’intérêt public.
Sauret et Pinard cueillent 200 et au plus 3 oo pots de
vin dans leurs vignes.
Ce vin peut valoir deux sous par pot de moins que le
vin ordinaire de Cornon \ c’est pour eux une perte de deux
ou troispistoles, en supposant qu’ils conservent ces vignes,
que leur intérêt bien entendu les forcera bientôt d’arraclier.
Pour les chauniers , la perte est immense.
S’il faut qu’ils éteignent leurs fours depuis le i 5 ao û t,
jusqu’après les vendanges, leur commerce est paralysé
pendant environ deux mois et demi.
Ils perdent le temps le plus favorable à la construction,
le plus précieux de l’année pour la consommation de la
cliaux.
Ils sont réduits h une inaction absolue, eux, leurs do
mestiques , leurs ouvriers et leurs chevaux.
Pendant ce temps-là, leurs carrières se dégradent, les
eaux s’en emparent; et comme pendant l’hiver l’exploi
tation est à peu près nulle, ils seront obligés au printemps
de renouveler leurs travaux, et de faire les mêmes dé*
A2
-C/,
�penses, que s’il s’agissoit d’ouvrir pour la première fois
leurs carrières.
Mais c’est surtout sous le point de vue de l’intérêt
public, que cette affaire mérite la plus sérieuse attention.
Les fours à cliaux de Cornon fournissent, à peu près
exclusivem ent, toute la cliaux qui se consomme à Clermont et dans les campagnes environnantes.
Si le i 5 août les fours à chaux sont éteints, le 16 deux
à trois mille ouvriers sont sans travail.
Et ces ouvriers sont tous des étrangers, la plupart du
département de la Creuse ou des départemens voisins,
qui ne vivent que de leur journée, et qui, éloignés de leur
famille , et dépourvus de toute espèce de ressources, se
ront condamnés à mourir de faim ou à attendre leur sub
sistance des secours liumilians de l’aumône.
Ce n’est pas tout : les maçons ne p euven t cesser leur tra
vail, sans réduire à l’inaction une multitude d’ouvriers
qui leur succèdent dans la construction des bâtimens,
tels que les charpentiers, les tuiliers, les couvreurs , les
menuisiers, les serruriers , les plâtriers, et généralement
les ouvriers de tous les genres, et tous les artistes qui sont
employés à la construction ou à la décoration des bâtimens.
Ajoutons que par Une suite nécessaire de cette cessa
tion des fours à chaux, les entrepreneurs ne seront pas en
état de remplir leurs engagemens envers les propriétaires ;
que ceux-ci seront eux-mêmes privés de jouir des mai
sons qu’ils se luit oient de construire ou de réparer avant
l’hiver ; que ces propriétaires seront également forcés de
manquer à leurs engagemens envers leurs locataires, qui
�5)
forcés à leur tour de quitter leurs anciens logem ens, se
trouveront sans asile.
E t tout cela, parce que Sauret et Pinard courent risque
de vendre 200 pots de vin de Cornon deux sous meilleur
marché que leurs concitoyens.
>*
Après s’être pénétré de ces idées préliminaires, qui
nous ramènent aux grands principes de l’ordre public , il
est encore à propos de se former des idées exactes de la
propriété.
Grotius , Puffendorf et Barbeyrac divaguent sur sa dé
finition; on ne la trouve exacte et précise que dans le
Code c iv il, art. 5>44 « L a propriété est le droit de jouir et disposer des
» choses, de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en
» fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règle» mens. »
Si on en fait un usage prohibé par les lois ou par les règlemens, on est tenu de réparer le dommage que l’on
cause à autrui.
C ’est ainsi que s’en exprime Barbeyrac sur Puffendorf,
liv. 3 , cliap. i er, n.° 3 .
« Pour être obligé de réparer le mal qu’on fait à autrui,
» dit cet auteur, il faut, i° qu’on ait causé un dommage
» defendu par quelque loi, ou naturelle ou positive, etc. »
E t Domat, le plus célèbre de nos légistes, nous dit
également, liv. 3 , tit. 5 , sect. 2 , n° 17, « qu’il ne faut pas
» mettre indistinctement au nombre des cas où il peut être
» dû des dommages-intérôts, tous les événemens où une
u personne peut causer par son fait quelque perte à une
A3
�( 6)
» autre ; car il arrive souvent qu’on en cause sans qu’on
» en soit tenu : et lorsque les faits qui ont causé la perte,
» ont été licités, et que ce n’a été qu’une cessation de
» quelque commodité, et une suite d’un fait de celui qui
» usoit de son droit, il ne sera pas obligé de la réparer. »
Nam Jiemo damnum fa c it } nisi qui ici fa c it , quod
f acere jus non habet. L o i i 5 i , de cliv. reg.jur.
Appliquons ces principes à la cause.
Les appelans sont propriétaires ou exploitans de fours
¿i chaux, dans la commune de Gornon.
En continuant cette exploitation depuis le 1 5 août,
jusqu’après les vendanges , font-ils un usage de leur pro
priété' prohibé par les lois ou par les règlemens ?
S’ils causent un dommage quelconque à Sauret et P i
nard, ce dommage est-il défendu par quelque loi naturelle
ou positive ?
Tous les principes de la loi naturelle leur sont favora
bles; car, d’après ces principes, « la propriété est le droit
» de jouir et de disposer des choses, de la manière la plus
» absolue. »
Existe-t-il donc quelque loi positive, quelque règlement
qui leur soit contraire ?
E t comment peut-il s’en trouver q u i, pour garantir
quelques pots de vin de Gornon du. risque , d’ailleurs
très-incertain, d’un léger déchet dans sa qualité , paraly
sent, pendant près de trois mois du temps le plus précieux
de l’année, la fabrication d’une matière de première né*
cessité, et à laquelle tient, d’une manière absolue, quoique
plus ou moins immédiate, l’cxistencc d’une multitude
innombrable de citoyens ?
�¿(07
( 7)
Ce premier point de vue donne déjà la mesure du peu
de sagesse du jugement dont est appel •, mais c’est encore
sous bien d’autres points de vue qu’il 11e peut manquer
d’être réformé.
jmeut. ç e jUg Gment
défense aux appelans d’allumer
leurs fours à chaux, depuis le i5 août jusqu’après les ven
danges, chaque année j et en cela le tribunal de Clermont
a fait un règlement de police qui étoit hors de sa compé
tence , et qui étoit placé par la loi dans le ressort de la
puissance administrative.
Toutesles fois qu’il s’agit d’objets d’une utilité générale,
et qui influent sur l’ordre pu b lic, ce n’est plus l’affaire
des tribunaux, c’est uniquement celle de l’administration.
O r, on ne peut pas contester que la cessation de la
fabrication de la chaux , pendant près de trois mois cha
que année , dans des fours qui fournissent, presque
seuls, à la consommation d’une grande cité et des cam
pagnes populeuses qui l’environnent, ne soit un objet
d’une utilité générale , et qui ait trait à l’ordre public,
puisqu’on oubliant l’intérêt des fabricans, la perte de leur
commerce, et la dégradation de leurs carrières, cette ces
sation priveroil des milliers d’individus de leur seule
ressource pour subsister, et influeroit sur le sort d’un
bien plus grand nombre d’ouvriers secondaires qui suc
cèdent aux maçons, dans la construction des édifices (i).}
• .i
(i) Les chaunicrs do Cornon ayant cessé leurs travaux pendant quelques
jours , au commencement du mois de fructidor an î i , M. 1<j Préfet ¿crivit au
maire du leur enjoindre do les reprendre do suite, et les menaça de les y con«
traindru par la voie do la forcc-arméc.
»
( I-iCttrc <lo M. do Sujinvi au mairo do Cornon, du 6 fructidor an i l , jointe
aux pièces ).
�( 8)
2ment. Qe jugement a fixé l’époqne de la cessation des
fours à chaux au i 5 août ; et en cela il a jugé ultra
petita.
B
L a demande de Sauret et Pinard étoit du i 4 fructidor
an 12.
Ils concluoient à ce que les chauniers fussent tenus
d’éteindre leur four dans le jour , ce qui s’étendoit au len
demain i 5 fructidor, 2 septembre.
D ’ailleurs, ils n’ont fixé eux-mêmes dans tous leurs
écrits la prétendue influence de la fumée des fours à chaux
sur les raisins, qu’à partir du moment où ils commencent
à se colorer; et tout le monde sait qu’en Auvergne, et spé
cialement à Cornon, le raisin ne commence pas à se colo
rer avant Notre-Dame de septembre.
L e tribunal a donc ordonné la cessation des fours à
chaux, au moins 17 joui’s avant le terme fixé par Sauret
et Pinard cux-inêmcs,
Dès-lors il a jugé ultra petita .
O r , non-seulement c’est un moyen de mal-jugé, mais
c’est un moyen de requête civile, aux termes de l’article
34 du tit. 35 de l’Ordonnance de 1667, et du tit. /j80 du
nouveau Gode de procédure.
Nam scntentia debet esse libello confonnis, dit la loi,
et potestas judicis ultra id quod in judicium deductum
est , mujuaquam polest excedere. L o i 18 , au Dig. Com
mun i divitl.
3ment. Indépendamment de tous les moyens précédons,
et en supposant même qu’en thèse générale, les iabricansde chaux fussent garans de l’effet que peut produire
la fumée des fours à cliaux sur les raisins, pendant leur
�'( 9 )
maturité , ils n’en seroient pas tenus dans l’espèce, parce
que les fours à cliaux des appelans sont anciens dans le
territoire de la Chaumette, et que les vignes de Sauret
et Pinard sont récentes.
L e territoire de la Chaumette étoit Entièrement en
terres labourables, i l y a au plus vingt ans.
Quand Sauret et Pinard, en cédant à l’espèce de manie
qui a agité dans ces derniers temps tous les propriétaires
de la Basse-Auvergne, ont converti en vignes leurs terres
de la Chaumette, ils ont dû prévoir que la fumée des
fours à chaux produiroit l’effet dont ils se plaignent.
Dès-lors, s’ils éprouvent quelque dommage, c’est par
leur fait et leur faute, et ils ne doivent s’en prendre à per
sonne, d’après cette maxime, qui est encore tirée des règles
de droit:
Qiiod quis ex culpa sua damnum sentit, non intelligitur damnum sentirc. Loi 2o3 ,d e reg .ju r.
4ment* Enfin, la prétention de
Sauret et de Pinard pouvoit d’autant moins être accueillie, que Sauret, l’un d’eux,
avoit pratiqué un four à chaux dans sa vigne j que nonseulement il ne l’avoit pas éteint au 1 5 août, mais qu’il
étoit encore allumé le 14 fructidor, jour de la demande,
et qu il n a cessé de l’être depuis, pendant toute la matu
rité du raisin.
Il est dillicile de concevoir que Sauret ait osé se plain
dre d’un fait dont il a donné lui-même l’exemple.
A u surplus, son four n’ayant pas cessé d ’ ê t r e en activité,
si son vin , et celui de Pinard , son voisin, ont contracté
un gout de bitum e, c’est à ce four qu’il faut l’attribuer,
beaucoup plus qu’à ceux des appelans.
�D ès-lo rs, et quand en thèse générale les appelans
pourroient être tenus d’un pareil dommage, ce qui n’est
pas, ils n’en seroient pas tenus dans l’espèce, à moins que,
par une nouvelle opération chimique, on pût distinguer
les atomes de fumée du four de Sauret et des fours des ap
pelans, et prouver que ce sont les atomes émanés des fours
des appelans, qui ont exclusivement frappé chaque raisin,
et l’ont imprégné du goût de bitume dont Sauret et Pinard
se plaignent.
On oppose aux appelans que, dès le principe de la con
testation, cités en conciliation devant le juge de paix, ils
ont consenti d’éteindre leurs fours le 26 fructidor.
C ela est vrai; mais ces offres, qu’ils faisoient alors dans
l ’ignorance de leurs droits, et par suite de leur répugnance
invincible pour toute espèce de discussion ju rid iq u e,
n ’ayant pas été acceptées, les choses sont entières et loin
que ces offres doivent nuire à leur cause, elles ne sont
propres qu’à leur donner un nouveau degré de faveur
aux yeux de la justice.
B O I R O T , ancien jurisconsulte.
GARRON
A CLERM O N T , de l'imprimerie de
Landriot ,
avoué.
imprimeur de la Préfecture.
�1*?
/ 9 a x H * «* - / S o 6
6,
./.-
« A « » y V .o
6. ^ u » w
C ut
-
.
u w
«
I m
i.
1
^/| I
u Í Í “ *
/ _____
S'i+juytj f<ZuJ+
«
£*a£¿T
-' - L.__ £--r
I
att . c^~j.i <JLCy¿.
^ “ “/ “ 7
à' /
C.
,/
-r/W -**.
•' / ,. 4._
r ^
i«*^r
«*-« r r ^ / ^ C“
— '" “ 7 fr“ . - ' ¿
- /« i x i 'm y . « '
¿ i * M a ü “ » <^ W , Í * 7 /
,/
r~
/
U
/0/«va.— ^ ’ , ¿ Í ¡0 ’CT^ ‘ ^
/ . / o ™ » »OS. "*«--- * • &•
~
Ä
fl'“
r
r ' '
,
’ —
^ /„i-—
- r t r *.
^
‘- r — r ‘ * l r ~ .'*
jL «
“ *“ **>
^
,—
w ¿ —^ — —
r
- ,
t.. f - ------ r
, . ^ 1 - ■*.
^ ^ il/f, / .. t —
“ fi“ “ ' t —
*.
lu. a ^ i w ,
’
^
__ ____
^
o ì> « > —
f
oau>ù >i »
»‘ »y’
^ Cma<aaAì **
-
/
_
**
(p€
>
_r ~ , w
4“
— ’
, J j /rujsT'»'* i r *
* y - i V /
^ ^ iv /^ . ¿ u * - ' « 0
^ _ „ iiìv « * 0 * ^
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chalteix, François. 1806?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Garron
Subject
The topic of the resource
pollution atmosphérique
fours à chaux
vin
intérêt général
experts chimistes
migrations intérieures
ouvriers
droit de propriété
Chapsal
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour François Chalteix, Guillaume Legot, Jean et Martin Chalteix frères, marchandes chauniers à Cornon, appelans ; contre Jean Sauret et Pierre Pinard, propriétaires de vignes dans la même commune, intimés.
Particularités : notation manuscrite : texte complet de l'arrêt 19 août 1806, 1ére section, arrêt sur le provisoire. Bien jugé
Table Godemel : Fours à chaux : Les fabricants de chaux sont-ils garants de l’effet que peut produire la fumée des fours à chaux sur les raisins, pendant leur maturité ? des propriétaires de vigne, voisins de fours à chaux, ont-ils le droit d’empêcher les fabricants de chaux d’allumer leurs fours à chaux, depuis le moment où le raisin commence à colorer jusques aux vendanges, sous le motif que la fumée du charbon employé à la cuisson de la pierre à chaux donne à leur vin un goût de bitume, qui nuit à sa qualité ? l’intérêt public repousse-t-il la prétention des propriétaires de vignes ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1806
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1815
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Cournon-d'Auvergne (63124)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53342/BCU_Factums_G1815.jpg
Chapsal
droit de propriété
experts chimistes
fours à chaux
intérêt général
migrations intérieures
ouvriers
Pollution atmosphérique
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53343/BCU_Factums_G1816.pdf
02084d35e1d6a22170ac4a5c304d1187
PDF Text
Text
OBSERVATIONS SOMMAIRES
P our
le sieur A n t o i n e C H O P IN , docteur en
m édecine, appelant;
LABRUE-S AINTB E A U Z I L L E , intimé.
C o n t r e le sieur J a c q u e s
LA cour , après deux audiences solennelles, a déclaré
qu’il y avoit partage d’opinion dans cette cause.
T rois magistrats compartiteurs sont appelés. Une nou
velle discussion va s’ouvrir. L e sieur Chopin doit se
rassurer sur la justice et l’impartialité de ses juges ;
mais il a le droit de présenter quelques observations,
surtout pour ceux des magistrats qui n’ont point connoissance de l’affaire.
f
L e sieur Chopin père a laissé à son fils une succession
obérée. C e l u i - c i , tout entier à sa profession, ne s’est
point assez occupé de ses affaires ; les dettes se sont accu
mulées : il s’est vu dans la nécessité de réunir ses créan
ciers.
Il a traité avec eux le 9 brumaire an 9. Dans ce
contrat d’union, il donne l'état de son actif; il compose
sa terre de Champfollet d’une maison de m aître, etc. ;
r é s e rv e , trois domaines et sept locateries.
Il avoit six autres locateries dont il ne parle pas ;
mais il n 'a pas trompé ses créanciers par une omission
volontaire. D ’a b o r d , il ne le pouvoit pas. L e sieur
r
i
�( O
M artin , syndic, un des principaux créanciers, étoit le
voisin du sieui* Chopin ¡, et cotmoissoit peut-être mieux
que lui la terre de Champfollet et ses dépendances.
2°. Il ne fait pas l’abandon de ses biens à ses créanciers;
il s’oblige seulement de vendre la terre dont il a donné
l ’é t a t , de manière que les créanciers unis touchent la
somme de 90000 fr. sur le p r ix , et que celle de 5oooo fr.
soit employée à l’acquittement des dettes hypothécaires
et non exigibles.
30. Les créanciers n’ont pas ignoré que le sieur Chopin
avoit d'autres biens patrim oniaux ,* car il est dit que si
la vente, telle qu’il là propose, ne s’effectue pas avant
le 4 nivôse lors proch ain , les créanciers sont autorisés
à vendre tant ladite terre de Champfollet que ses autres
biens p atrim on ia u x , etc. ■ 1.. . ■
1
A v a n t ce traité le sieur Chopin étoit déjà en marché
.de sa terre avec le sieur Labruc-Saint-Beauzille. Ce der
nier étoit ven u en l’an 8 visiter cette propriété dans
tousses détails; ii avoit passé plusieurs mois sur les lieux ,
et à différentes reprises ; il vivoit chez le sieur C h o p in ,
qui a offert, par des conclusions précises, la preuve de
ces faits.
:i
, , ; .
U ne première v e n t e , sous seing privé , a eu lieu le
3 nivôse an 9 ; elle a ,été faite en exécution et confor
mément nu contrat d’union. Dans cet acte la terre de
Champfollet se compose de la maison , réserve , bois
fu ta ie, trois domaines et sept locateries.
Chaque dom aine, chaque locaterie est désignée par la
dénominalio,n,qui lui est p ro p re , avec le nomxle chacun
des métayers ou colons qui les cultivent.
�( 3 )
'
L e sieur Cliopin se réserve sa maison des Châtelans
et quelques héritages qui l’environnent. Cette réserve
étoit indispensable; la maison des Châtelans et les'héri
tages d’ulentoùr faisoierit partie des domaines des M ichards et des Q unissons vendus au sieur SaintrBeauzille.
Il vend aussi la locaterie de la C ro ix-R ou g e , grevée
de l ’ iisufruit d è 1Denis M agot e t 'd e sa femme jusqu’au
décès du derniër survivant.
L a vente sous seing privé n’énonce aucuns bestiaux.
L e 26 ventôse an 9 , vente authentique, toujours en
exécution et conformément au contrat d’union dont il
a été do?iné cannoissance au sieur Saint-Beauzille, ainsi
que d’une délibération postérieure des créanciers.
Ici le sieur Saint-Beauzille réclame les bestiaux , non
comme faisant valoir un d ro it, mais comme suppliant,
et pour ne pas etre vitupéré par son épouse.
I^e sieur C h o p in , franc et l o y a l , convient qu’il avoit
eu l’intention de les vendre ; en conséquence, ils sont
compris dans l’acte authentique.
Mêmes détails au surplus dans ce contrat. Toujours
trois domaines et sept locateries. M ôm e désignation et
par leurs noms propres, et par les noms des colons,
comme dans l’acte sous seing privé.
O n a ajouté que le sieur Chopin se dépnrtoit de la
susdite terre , circonstances et dépendances (F ic e lle c’est
ainsi que l’acte se termine. Mais à la première audience
le sieur Saint-Beauzille est convenu que ces expressions
n’étoient que style de notaire; que le sieur Lacod re, qui
a reçu l'a cte, ne l’avoit pas réd igé, et avoit seulement
mis
la lin ces mots d’ usage que tous les notaires ont
dans leur protocole.
2
�L e sieur Saint-Beauzille n’a pas ignoré encore que son
vendeur .avoit d’autres biens patrim oniaux, et clans le
même l ie u , puisqu’ il les lui fait ^hypothéquer spécia
lement à l’exécution de la vente, et qu’il a pris sur eux
une inscription de 25ooo francs, à raison de laquelle il y
a procès.
E n effet, le sieur C hopin, indépendamment des objets
vendus, possédoit encore le domaine de F rib ourg, les
locateries Guillerm ie, M oret , P a r a j , Baire-du-Becquet ,
des B r a s , et du L on za t. •
IL n’a vendu que les suivantes : E lie , la Croix-R ouge ,
B ela ir , Chaumeton ? J S e u ç e -d u -P u y , ChampfoUet ,
D uport.
>
L e sieur Saint-Beauzille, bien content de son marché ,
qui a fuit un placement très-avantageux, a réuni l’agréable
à l’u tile , s’est mis en possession de tous les objets nomina
tivement vendus , et rien de plus. Il a joui deux ans,
perçu deux récoltes sans se plaindre : il a même remar
qué que la locaterie la Guilfermie étoit à sa convenance*
il a proposé au sieur Chopin d’en faire l’échange avec
une de celles qu’il avoit acquises. L e marché étoit sur
le point de se conclure ; mais on n’a pu s’accorder
sur les conditions. L e sieur Chopin a encore offert la
preuve de ce fait.
En l’an 1 0 , il a formé contre le sieur Chopin une
demande qui ne fait pas infiniment d’honneur à sa déli
catesse. Il ne devoit avoir aucuns bestiaux, si on avoit
suivi strictement la. vente .sous seing privé.
11 les obtient de la.lionne foi de son vendeur, par
l’actc authentique. Mais il sa voit que ceux de la réserve
�(5)
avoicnt été vendus par les percepteurs pour le payement
des impositions.
N ’im porte, il les demande au sieur Chopin. Justice
a été faite de cette réclamation; Saint-Beauzille en a
été débouté. Mais au moins il ne demandoit que ces
bestiaux, et garda le silence sur les locateries en question.
O n doit dire cependant que le sieur Saint-Beauzille,
par acte du 22 thermidor an 9 , avoit glissé ténébi’eusement un congé au fermier du domaine de F rib o u rg , et
a u x six colons des locateries non comprises dans la vente.
Mais ce congé n’a pas eu de suite ; il n’a été ni dénoncé
ni signifié. Saint-Beauzille n’avoit pas même osé en parler
dans son m ém oire; il ne l’a fait éclore qu’à l’audience,
et pour parer au moyen puissant résultant de l’exécu
tion de la vente.
Ce n’est qu’en l’an 1 1 , après plusieurs demandes dont
le sieur Saint-Beauzille s’est départi, qu’enfin il a pré
tendu que trois locateries, celles dites la G uillerm ie ,
M oret et P a r a y , faisoient partie de sa ven te, parce
qiCil avoit acheté la terre de Chamjyfbllct, et a trouvé
des gens assez faciles pour le croire. 11 a réussi devant
les premiers juges.
O n ne peut ótre divisé sur l’absurdité des motifs du
jugement dont est appel; mais on l’est sur le résultat.
P o u r les motifs, il est impossible que l’erreur ou l’éga
rement puisse aller plus loin.
O n y remarque les contradictions les plus choqunntes:
tantôt on y dit que le contrat d’union n’a rien de com
mun avec la vente, et que le sieur Chopin a été maître
de vendre plus ou moins; ce qui conduiroit à la con-
3
�t*
( 6 }
séquence toute naturelle que le sieur Chopin n’a vendu
que ce qu’il a expressément désigné. Pas du tout : Cliopin
a vendu plus qu’il n’a voulu ! quoiqu’il ait désigné li
mitativement ce qu’ il a voulu ven d re, 011 juge qu’il a
vendu tout ce qui composoit anciennement la terre de
Champfollet.
.Bientôt après, le contrat d’union a fait la règle; car
quoique le sieur Chopin ait vendu la locaterie de la
Croix-R ouge, grevée de l’usufruit envers Denis M agot
et sa femme, dès le moment même de la vente; comme
le contrat d’union, en parlant de cet usufruit, rappeloit
le contrat de mariage de Denis M a g o t , qui ne lui donne
la jouissance qu’après la mort de C h o p in , on a jugé
quV/2 vertu du contrat d’un ion , Saint-Beauzille devoit
jouir de cette locaterie pendant la vie de son vendeur.
Excellent raisonnement, conséquence infiniment juste.
Et 11e d oit-on pas s’écrier avec le célèbre Dum oulin :
Quanta alea judipiorum !
Mais en la cou r, où les moyens se pèsent avec discer
nement, dont les arrêts sont de grands exemples, dont
tous les membres doivent obtenir des éloges, dans un
moment consacré à la censure, 011 est moins affligé que
surpris d’ un partage d’opinion.
Q u ’importe qu’011 ait mis eu usage un système de ca
lomnie; que les Baziles soient en campagne pour attaquer
les mœurs ou la conduite du sieur Chopin; c’csl la cause
et non la personne qu’on doit juger.
Q u ’a acheté le sieur Saint-Beauzille ? trois domaines
et sept locateries. C ’est ainsi que le sieur Chopin a composé
sa terre de Champfollet 5 i l en a été le maître, 11 a dicté
�( 7)
les conditions ; il n’a vendu ,que ce qu’il a désigné.
t L es cpnt.rats ¡sont de droit .étroit : on ne connoit pas
çle vente tacite. Il n’y a ni obscurité, ni ambiguïté dans
l’acte de vente. S’il y en a voit,.il faudroit examiner prin
cipalement et exclusivement l’intention des parties. P r iminn speciariquid actisit. L o i 33, ff. D e contrah. empt.
Ce n’est qu’autant que la volonté ou l ’intention des
parties ne seroit pa§ clairement manjfesté.e, qu’alors l’ambiguité s’interprète contre le vendeur. M ême loi 33. S i
non id apparent hinc id aepipitur quod venditori nocet,
ambigua enim oratio est.
E t comment peut-011 juger s’il y a ambiguïté ? L a
même loi le prévoit encore : Cuni in lege venditionis
itci sitscriptam FLUMINA, STILLICIDIAUTI NUNC SUNT,
UT ITA SUNT ncc cidditur quœ jlu m in a vel stillicidia.
C ’est alors que la loi ne trouvant qu’ une énonciation
vague, veut qu’on examine d’abord l’intention des parties;
et lorsqu’on 11e peut pas la d é c o u v rir, tant pis pour le
vendeur.
Mais il faut l’entendre sainement; et la loi 34, au même
t i t r e , nous l’apprend encore mieux. Car si un proprié
taire vend un fo n d s, et comprend dans la v e n t e , comme
accessoire, un esclave du nom de .Stychus , il ne faut
pas croire que l’acquéreur aura le droit de choisir parmi
les esclav.es qui auroient le ineme nom de Stychus. 11
ne prendra que celui que le vendeur a entendu donner,
qttetn vendilor intellexerit • c’est-à-dire, le moindre.
Les accessoires en effet sont de peu d’importance dans
une vente, nec refert quanti sit accessio siçe p/us an
minus ? Xj, eod.
�■>
c8 )
cc Ce n’est point par des suppositions conjecturales,
c< dit M. M e r lin , dans ses questions notables, tom. 5 ,
« pag. 457 ; ce n’est point par des inductions forcées,
cc que l’on peut établir une expropriation. Les propriétés
« ne peuvent se transférer que par des actes exprès et
cc formels. »
’
Plus bas , png. 462. ce Lorsqu’on a deux droits, la
cc réserve de l’un n’emporte pas la cession de l’autre;
cc
ce n’est pas par des clauses inutiles qu’on s’exproprie :
« on ne peut s’exproprier que par des clauses expresses
et directes. »
*
E n un m o t , la question paroît si cla ire, que malgré
toutes les subtilités du droit, malgré la défiance qu’on
doit avoir de ses propres lum ières, on ne pouvoit douter
cc
du succès.
11 a fallu un système ingénieux pour balancer les sufrages. U n système! on les adopte quelquefois en méde
cine , où tout est conjectural ; mais en droit ! où la loi
com m ande, où la raison éclaire, ils pourraient etre
funestes ; il jetteroient dans un arbitraire dangereux.
E n parcoui’ant avec rapidité ce beau titre du digeste
D e contrahenda em ptione , on s’est arrêté sur la loi
4 3 ) §• lCr*>
sur
l ° j 4$. O n a vu dans la première
que lorsque le maître vend un esclave dont les y e u x
sont arrachés, luminibus çffossis, mais dont il a vanté
la santé, la vente n’en est pus moins bonne, parce que
l ’acheteur présent ne peut pas ignorer la cécité de l’esplavc, et qu’il a du entendre qu’on ne parloit de sa
santé ou de sa force que pour les autres parties du corps.
L a loi 45 parle d’un homme qui a vendu des habits
�( 9 )
vieux pour des' neufs. L a vente n’est bonne qu’autant
que l’acheteur n’a pas vu que les habits étoient vieux.
Vendre des habits vieux pour des neufs! les frippiers
n’en font pas d’autres, sans s’occuper de la loi 45 ; et
l ’acheteur auroit honte de se plaindre. Pourquoi s’est-il
laissé trom per?
O n convient que ces lois ne s’appliquent pas du tout
à l’espèce ; mais on en tire la conséquence que le légis
lateur attache beaucoup d’importance à l’inspection, à
l’examen de l’acheteur. S’il a v u , c’est un maladroit de
n’avoir pas fait expliquer plus clairement son vendeur;
il ne peut plus se plaindre. Mais s’il n’a pas vu , s’il
s’en est rapporté à son vendeur, il peut tout demander,
tout prendre. L e vendeur a dissimulé, caché les objets :
il est de mauvaise foi.
O r , le sieur Saint-Beauzille n’a v u ni pu voir ; il
habite à trente lieues de là; il n’a considéré que la terre
en masse ; il n’a calculé que les reven us, et tout lui
appartient incontestablement. D e sorte qu’il pourroit
même demander non-seulem ent les trois locatcries qui
font l’objet de son am bition, mais encore les trois autres
qu’il ne veut pas ; mais encore le domaine de Fribourg
qu’il a eu la générosité d’abandonner, etc., etc.
Sans vouloir blesser personne, il semble que le sieur
Chopin peut répondre, même d’après les lois 43 et 45,
qu’on doit distinguer entre un objet mobilier et un im
meuble. Un esclave que l’on fait v o i r , un habit qu’on
étale , ne peuvent se comparer avec un immeuble que
l ’acquéreur a la faculté de v o i r , d’examiner en détail.
U n esclave, un h abit, s’achètent, se prennent dans le
�MA
(
10
)
moment même. U n immeuble ne s’acquiert qu’après un
examen sérieu x, après une visite, des informations sur
la position, la culture ou le produit. Il s’écoule ordinai
rement un long in tervalle entre la proposition et la
v e n te ; l’acquéreur a la faculté, le loisir de v o i r , s’en
q u é rir, e x a m in e r, de scruter la solvabilité du vendeur,
la facilité et la sûreté des payemens. S’il ne le fait pas,
c’est sa faute ; il a dû et pu le faire. Et croira-t-on qu’on
achète une propriété aussi considérable à l’aveugle, surtout
lorsqu’il s’agit de sa fortune ? Mais y auroit-il donc un
bouleversement général dans les idées, dans les prin
cipes , dans les habitudes sociales ?
Comment le sieur Chopin auroit-il voulu trom per?
O u lui reproche d’avoir exagéré la valeur de sa terre,
par une correspondance qui a précédé la vente.
Les lettres produites ne sont point adressées au sieur
Sain t-B eau zille; elles sont écrites à des tiers, à des p ro
priétaires voisins , q u i avoient une connoissance exacte
de cette propriété.
Quant on supposeroit que le sieur Chopin a enflé
le produit ;
Ceux à qui il s’est adressé savoient à quoi s’en tenir;
et dès qu’ils agissoient pour le sieur Saint-Beauzille, ils
ont dû l’en instruire.
Q u ’un propriétaire qui veut vendre exagère la valeur
ou le prod u it, c’est l’histoire universelle; et il n’y auroit
pas une vente v a la b le , s’il falloit annulier toutes celles
dont on a exagéré la valeur dans les pourparlers qui
précèdent. C ’est à l’acquéreur à examiner et à se déter
miner d’après
ses lumières ou ses informations,
�KZ2>
( 11 )
Il est vrai que le sieur Saint-Beauzille s’est fait présenter
comme un pauvre Limousin , borné dans la sphère
étroite d’un pays stérile, et qui jusque-là n’avoit pas su
ce que c’étoit que des locateries du Boui'bonnais.
Mais à moins de le prendre pour un descendant de
Pourceaugnac, ce n’est là qu’une jonglerie maladroite
qui ne peut en imposer à personne. O n doit se rappeler
que Saint-Beauzille est convenu avoir vu les lieux en
l ’an 8 ; que le sieur Chopin a mis en fait qu’il avoit
resté au pays plusieurs m ois, et avoit visité scrupuleusement toutes les parties de la terre mise en vente. L e
sieur Chopin a offert la preuve de ce fait.
Saint-Beauzille a bien vu , lorsqu’il s’est xnis en pos
session ; il a bien v u , lorsque les colons des trois loca
teries ont pris la récolte ; il avoit bien vu , lorsqu’il
a proposé l’échange de la G uillerm ie; il avoit bien v u ,
lorsqu’en l’an 10 il a demandé les bestiaux de la réserve,
et rien autre chose.
L ’exécution du contrat n’étoit-elle pas la meilleure
interprétation de l’acte? O n en convient encore : mais
Saint-Beauzille a p u tâtonner, hésiter avant d’entreprendre
un procès.
Singulier privilège! E t on ne peut s’empêcher de dire
qu’il a merae abuse de la permission ; car il a form é un
grand nombre de mauvaises demandes, avant de s’arrêter
au point qui fait le procès actuel.
E h ! pourquoi s’égarer dans le v a g u e , lorsqu’ il existe
un acte si clair, si précis; lorsque cet acte mérite pleine
co u iiance, d’après toute les lois de fidc instruuientorum ;
lorsque tous les efforts de la justice doivent tendre à la
stricte exécution des engagemens des parties ; lorsque
'- ü
�»•
■*.
(1 2 )
l’intention des contractans est tellement exprimée qu’il
ne peut y avoir ni a m b i g u ï t é , ni doute !
Quel est donc l’intérêt de Saint-Beauzille dans cette
cause? Il a acquis pour 1 5 oooo francs une propriété qui
rapporte plus de 8000 francs de rente : les trois locateries
qu’il convoite ne donnent pas un revenu de 1 5o fr. net.
L e sieur Chopin n’a pu ni voulu les vendre ; les bâtimens lui sont d’une nécessité absolue pour l’exploitation,
des héritages nationaux qu’il y a joints : c’est là son
objet; il en a fait part à ses créanciers, qui l’ont approuvé.
L e sieur Saint-Beauzille ne l’a pas ignoré. E t pourquoi
vient-il accabler un vendeur déjà dépouillé de presque
toute sa fortune , que le malheur accom pagne, contre
lequel les élémens même semblent conjurés ; qui a perdu
par le feu du ciel, au mois d’août dernier, tout le mo
bilier qu’il possédoit, ses liv r e s , son cabinet d’histoire
n atu re lle, ses instrum ens de physique , en un m o t, tout
ce qui étoit relatif à sa profession : perte irréparable, audessus de ses forces et de ses moyens !
Il n’avoit d’autre ressource que dans le prix qui lui est
dû par une contre-lettre. L e sieur Saint-Beauzille, qui
connoît son impuissance, abuse de son état, plaide contre
son titre, son écrit, parce qu’il sait que le sieur Chopin
n’est pas en état d e fournir aux frais d’enregistrement pour
le produire. Quod genus hoc hominum /
M c. P A G E S ( de Riom ) , ancien avocat.
M e. G O U R B E Y R E , avoué.
À R I O M , de l'im prim erie d e T h i b a u d - L a n d r i o t , imprimeur de la C our d'appel,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chopin, Antoine. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
créances
locaterie
ventes
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Observations sommaires pour le sieur Antoine Chopin, docteur en médecine, appelant ; contre le sieur Jacques Labrue-Saint-Beauzille, intimé.
Table Godemel : Vente : 11. après un contrat entre ses créanciers contenant un état de son actif immobilier, le sieur Chopin ayant vendu, le 6 ventôse an 9, la terre de Champfollet consistant en une maison de maître, réserve, trois domaines et sept locatairies, en un seul tenant, sous la seule réserve d’une maison et de quelques objets soigneusement désignés et confinés, et tel que le tout avait été énoncé en l’état produit aux créanciers ; a-t-il pu ensuite soutenir que ladite terre de Champfollet contenant dix locatairies au lieu de sept, cette vente ne comprenait pas les trois locatairies de la Guillermie, de Moret et de Paray ? s’il y a, dans le contrat de vente, des clauses obscures et ambiguës, contre qui, du vendeur ou de l’acquéreur, doivent-elles être interprétées ? 12. si le contrat de vente a stipulé, en faveur d’un tiers, réserve de la jouissance de l’une des locatairies, l’acquéreur peut-il, contre la disposition précise et absolue de son titre, prétendre que, d’après un acte antérieur, la jouissance du tiers ne devait commencer qu’après le décès du vendeur ? Clause : - obscure. - s’il y a, dans le contrat de vente, des clauses obscures et ambiguës, contre qui, du vendeur ou de l’acquéreur, doivent-elles être interprétées ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 10
An 9-An 10
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1816
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0522
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53343/BCU_Factums_G1816.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paray-sous-Briailles (03204)
Jaligny-sur-Besbre (03132)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
domaines agricoles
locaterie
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53344/BCU_Factums_G1817.pdf
8f014a08aa50bf0df6a798931ae79ffa
PDF Text
Text
POUR
L e sieur C H O P I N ,
C O N T R E
L
e
s ie u r L A B R U E
S
t
.- B E A U Z I L L E .
�Î2
ZlZ'.2æ?r'*-rm
CO N TRAT DE VENTE.
P
a r - d e v a n t les notaires publics à la résidence de
Saint-Pourçain, arrondissement de Gannat, département
de l’A l l i e r , soussignés, fut présent Antoin e Chopin ,
propriétaire, demeurant en la commune de Paray-sousBriaille, lequel, de gré et bonne vo lo n té, et en exé
cution du contrat d'union et abandon passé entre l u i ,
ou quoi q u 'i l en s o it, le citoyen M a r n ie r , son-fondé
de pouvoir y et ses créanciers y dénom m és , par-devant
D e la co d r e , l'un des notaires soussign és, le 9 brum aire
dernier; et encore de la délibération desdits créanciers,
prise par-devant le même n o ta ir e , le 9 pluviôse aussi
dernier : lesdits actes dûment enregistrés au bureau de
ladite commune de S a in t-P o u rç a in , a v en d u , c é d é ,
quitté, remis, délaissé et transporté; e t , par ces p r é
sentes, ven d , cède, quitte, rem et, délaisse et transporte
dès maintenant et à toujours , par pure vente irrévo
cable, avec promesse de garan tir, fournir et faire va
loir de tous troubles, dettes, hypothèques , actions et
autres évictions généralement quelconques, tant en juge
ment que dehors, à peine de tous dépens, dommages et
intérêts, même de restitution de deniers, le cas échéant,
au citoyen Jacques Labrue de Saint-Beauzille , habitant
de la commune du même nom de Saint-Beauzille, dé
partement de la Corrèze , ci-présent et a c c e p t a n t pour
7
�( 4 )
lu i, les siens, ses héritiers et ayans cause, savoir est la
terre de Cham pfollet , située en ladite com m une de
P a r a y et en celle du L o n z a t , consistante EN MAISON
DE M A I T R E , composée de deux corps de logis entourés
de fossés, cours, granges, écuries en mauvais état, jar
din et petit pré-verger aussi entourés de fossés; et la
réserve composée de p r é , deux étangs ; dont un à ré
tablir , bois de f u t a i e en ch ê n e , pacages, sauldois'et
gravier ; t r o i s
DOMAINES , savoir le grand d ó m a m e
de C h a m p follet, vulgairement connu sous le nom du
R o u d e t, actuellement cultivé p a r J a cq u es F a u re ; celui
des Q u a isso n s, cultivé par les nom m és B é g u in ; celui
des M ic h a r d s , cultivé par Claude Thevenet ; et SEPT
l o c a t e r i e s , savoir celle F l i e , située commune du
L on zat, cultivée par Claude R e tiv a t; celle de la C ro ixllo u g e , cultivée p a r Claude M a r tin , dont la jo u is s a n c e
est r c s e n ’ce à J c a ' i ï M a g o t cl A n to in e tte M a u r y , sa
fe m m e , ou dernier vivant de VCm d 'e u x , ainsi que
tous les batimens y attenant, et les terres, et jardin q u i
consistent en .un m orceau de terre en face du jardin,
planté en arbres fruitiers, et semé en foin artificiel,
lim ité, en bise, par partie du fossé de la M o u ze ; en
orient, par la b o ir e , sans aucun droit de pèche ; du
m id i, par partie du pré artificiel : la limite a cjuatrevingl-six toises du fossé de la M ouze en suivant le long
de la boire pour ledit toisage; et en nuit, par le chemin
de Champfollet aux Quaissons, sur q u a tre-vin g t-d eu x
toises diï piquet de borne au susdit fossé de la M ou ze,
le long dudit chemin. L ’autre terre attenante à l’écurie
�( S )
et au jardin , d’environ neuf boisselées , entourée du
chemin qui conduit aux pacages ; et en raidi, elle est
limitée par le morceau de pré artificiel déjà cité. Une
autre pièce de terre en face de ladite maison dudit
M a g o t, au n o rd , d’environ trois septerées, limitée, en
bise par le Sablon ; en orient, par la boire; en m id i,
par le cliemin des pacages; et autres aspects, par le sur
p lu s'd u champ. U ne autre pièce d’environ deux septerees et dem ie, au territoire des Rolines, limitée par
les ruaux du taillis; au m idi, par le ruisseau de la boire
de Champfollet ; et aux autres aspects, par le surplus
du cliamp. L e tout pour en jouir à la charge des ré
parations ; mais ledit M agot et sa femme , pendant
leur jouissance, auront la liberté de faire pacager deux
vaches et leurs suivans, une jument et son suivant, dans
les pacages où les bestiaux de même espèce vont pa
cager; quant aux brebis et cochons, ils iront pacager avec
ceux de la t e r r e , sans que le nombre puisse aller audessus de quatre-vingts brebis et quatre cochons. L a troi
sièm e loca terie, appelée B e la ir , dite le V ign oble , com
posée de terres labourables, d’un grand clos de vigne
attenant au jardin de ladite locaterie, ledit clos entouré
de haies vives; ensemble toui les ustensiles consistans
en deux cuves, une autre cuve à charrois, et autres objets,
si aucuns il y a, appartenansaudit Chopin. L a quatrièm e
appelée Chain net o n , cultivée par P ie r r e Lebre. L a cin
quièm e cultivée par J ea n B r u n , appelée locaterie Neuvetlu - P u y , laquelle est î\ deux feux. L a sixièm e appelée
la locaterie de Cliam pfoU et, cultivée par M arie C a rré ,
de laquelle dépend une grange. Et la septièm e cultivée
3
�( 6 )
par Claude J o u a r d , appelée la locaterie du P o r t , a i n s i
QUE LE TOUT SE LIMITE ET COMPORTE , QU’EN JOU IS
SENT LES C I -D E S S U S DÉNOMMÉS, et SANS EN RIEN E XCEPTER , RÉS ER VER NI R E T EN IR , MÊME LES GROS ET
MENUS b e s t i a u x qu i garnissent lesdites te rre , réserve ,
domaines et locateries , à l’exception de la portion des
c olo n s, d’après les cheptels, et encore en entier de ceu x
qui sont dans la loçaterie de la C r o i x - R o u g e ; ENSEM
BLE TOUS LES DR OI TS , DE QUELQUE NATURE QUE CE
SOIT, DÉPENDANS DE L A D IT E T ER RED E C h A M P F O L L E T ,
e t qui p o u rro ie n t Ê tre
R E T A B L IS ; prom ettant en
con séq u en ce, ledit v e n d e u r , de rem ettre-de bonne foi
audit acquéreur tous les titres de p ro p riété q u ’il peut
a v o ir ou qui p ou rro n t par la suite ve n ir en sa possession,
SOUS L A RÉSERVE QUE SE F A I T LEDIT ACQUÉREUR DE
L A m a i s o n DES C h a t e l a n s , co u rs, ja r d in s , granges
et autres bâtim ens y a tten a n s, a in si que le clos adjoi~
gn cin i , entouré de haies vives et sèch es, et j fossés autou r,*
lim ité s , s a v o ir , en o rien t, par le chem in de P a r a j au
L o n z a t ; de m id i, p a r le chem in ou rue de M untprofit,
au susdit chem in du L o n z a t à P a r a y • de n u it, p a r la
terre du dom aine des Q uaissons ; et de b ise , par partie
de ladite terre des Q u a isso n s, et du chem in du P o r t à
B rica d et ,* le tout ainsi et de môme q u 'il est exp liq u é
p a r le contrat d'union ci-dessus d a té , tant pour la pro
priété que pour la contenue,• secondem ent, du petit clos de
vigne situ é au-dessus du pré de la C h a ise , ladite vigne
en partie nationale ; etfin a lem en t le taillis des Bou?'ets,
com m une de Loriges. L adite vente ainsi faite, consentie,
et acceptée aux ch«rges; clauses, conventions et réserves
�pi
c!-dessus stipulées, et encore pour et m oyennant le p rix
et som m e de cent quarante mille f r a n c s , en atténuation
de laquelle ledit acquéreur payera q u a t r e - v i n g t - d i x
mille francs aux créanciers dudit vendeur, dont les créan
ces sont exigibles, et q u i, comme telles, ont été délé
guées par le susdit contrat d’union; pour ladite somme
de quatre-vingt-dix m ille f r a n c s être payée de la m a
nière et a u x époques déterminées par la délibération
dudit jo u r 4 pluviôse, de laquelle ledit acquéreur a dé
cla ré avoir pris co n n o issa n ce, a in si que du contrat
à?union ; à l'effet de quoi l’intérêt de ladite somme de
quatre-vingt-dix mille francs sera payée , sans aucune
retenue, par ledit vendeur, à partir dudit jour 9 bru
maire dernier, jusqu’au trois -nivôse, époque à laquelle
les parties étoient convenues de ladite vente ; et depuis
cette dernière ép o q u e, par ledit acquéreur, qui s’y est
soumis et o b lig é , en tant que de besoin *, et à l’égard
des cinquante mille francs parfaisant le p rix de la pré
sente vente, ils resteront entre les mains dudit acquéreur,
qui se charge en conséquence des créances non exigibles,
•comme rentes perpétuelles et viagères, ou créances déri
vant de vente de fonds ; lesquelles créances il 'promet et
‘s’oblige de p a y e r , de manière que ladite somme de cin
quante mille francs y soit totalement employée , confor
mément au susdit contrat d’union ; et dans le cas où'ladite
somme de cinquante mille francs seroit insuffisante pour
faire face à cette espèce de créance, ledit vendeur promet
et s’oblige d’en payer ce qui en défaudra, et de faire
en sorte que ledit acquéreur n’en soit nullement i n q u i è t e
ni xeclierelié \ ce q u i a été accepté et agréé par Joseph
4
�( » )
M a rtin , p ropriétaire, dem eurant en la com m une de
C réch y , P ierre R a y n a u d , propriétaire en la com m une
de C /iareil, et G ilbert-A n to in e Coupery, notaire public
en celle de B illy , lesq u els, en leur qualité de créa n ciers,
syndics et directeurs des autres créanciers un is, proinetlent de faire, avant les époques desdits payemens à
faire, homologuer en justice, ou ratifier volontairement
les susdits contrats d’ union et délibération, par ceux des
dits créancier;? qui n’y sont point entrés, et aux frais
de qui il appartiendra, soit dudit vendeur, soit des
créanciers ; e n c o n s é q u e n c e d e t o u t c e q u e d e s
s u s , ledit vendeur s’est d év êtu , d é m u n i, et dessaisi
de la propriété, possession et jo u issa n ce, f r u i t s , profits
etém olum ens DE L A SUSDITE TERRE DE ÇlIAMPFOLEET,
CIRCONSTANCES ET DÉPENDANCES D’ iCELLE , et en a
vêtu et saisi ledit acquéreur, pour par lui désormais en
faire, dire et disposer comme de sa propre chose, vrai
et loyal acquêt ; et à l’exécution des présentes, dont
ledit acquéreur fournira expédition tant audit vendeur
qu’aux syndics et directeurs , en bonne et duc forme
exécutoire , lesdites parties contractantes ont obligé ,
affecté et hypothéqué tous leurs biens présens et 11 ven ir,
et spécialem ent ce u x q u i peuvent leur appartenir actuel
lem ent dans les com m unes de P a ra y et S a in t-B e a u zille;
même ledit acquéreur, par privilège et préférence, la
susdite terre de G ham plollel, domaines et locateries en
dépendans. Fait et passé en ladite commune de P aray,
maison des Ghàtelans, cejourd’hui six ventôse, l’an neuf
de la république française, après midi.
�n>u.l
T
E xtrait
clu ^ ço ^ trà tjclu n io n ._
-
ha h ' t x ° x e . i r i . ; J “ r
n
W ü E dans le cas où la vente dont il est ci-dessus
parlé ne s’efïectueroit pas avant le 4 nivôse prochain,
le citoyen M a rn ie r, audit n o m , autorise dès l’instant
•
•
•
f
lesdits créanciers à vendre aimablement, et aux clauses,
charges et conventions les plus avantageuses, t a n t
LADITE
BIENS
TERRE DE C h AMPFOLLET QUE SES AU T RE S
pat r im o n iau x
, suivant qu’ils sont énoncés dans
l’état de l’actif annexé au présent traité; mais toujours
sous la réserve tant de la maison qu’occupoit le père
dudit C h o p in , que de tous ses biens nationaux.
Dans l’état il est dit :
-presque tous en chanbon« nage , cultivant ordinairem ent avec douze paires
« de bœufs.
*
« 8°. T
rois
d o m ain es,
« 9°. Sept loca tenes avec le labour de deux vaches
« chacune. »
�CONCLUSIONS MOTIVÉES.
T
jïï.
sieur Chopin conclut à ce qu’ il plaise à la c o u r ,
L e recevoir opposant à l’arrêt par défaut, du 30 mai
18 0 7, lequel sera sans effet.
A u p r in c ip a l,
1
j
A tte n d u que de la correspondance d ’entre les p arties,
avant la v e n t e , il ne résulte rien de syn a lla g m a tiq u e,
ïiiàis Séulement Jdes p ou rp arlers, des propositions non
term ïn éës;
‘ A tten du les Variations éntre la vente sous seing privé
¡et celle devant notairè ;
Attendu l’aveu du sieur L à b ru c , en son mémoire im
prim é , page 2. , d’être v e n u visiter les lieu x sur la fin de
l ’an 8 ; ët'què la vente devafit notaire n’ayant eu lieu que
le 26 ventôse an 9 , i l y a eu entre la visite et la vente
s ix m ois à?intervalle ( d’où il suit qu’ il a eu tout le temps
de voir et faire voir chacun des objets qu’on lui vendoit) ;
Attendu que le sieur Chopin* offre de p r ô u v e r p a r
témoins-, en cas de déni-, que soit avant 'le sous-seing
■privé, soit avant Pacte a u th en tiq u e , LE SIEUR I/ABRUE
A PASSÉ PLUSIEURS^MOIS SUR LES LIEUX POUR VISITER
ET FAIRE VISITER LES OBJETS COMPOSANT LA VENTE
QU’ON LUI FAISOIT, A TOUT EXAMINE, ARTICLE PAR
A RTICLE, et a interrogé'les -voisins su r les q u a lités,
produits et contenues des terrains ;
�( 11 )
A ttendu,que.lors du jugement par défaut, du 28 floréal
an 1 2 , obtenu p a r le sie u r L a b r u e , où ilp a r lo it s e u l ,
il est con ven u , que les locateries M o r e t , G uillau m ie et
P a ra y , en q u estio n , ne faisoient point partie de la v e n t e ,
puisqu’ il y dit q u ’e l l e s
ONT ÉTÉ OMISES DANS LE
c o n t r a t ( d ’où il suit que de son aveu elles n’y sont pas
co m p rises);
,
■
t A t t e n d u , en d ro it, qu ’ un contrat de vente est lo i entre
le vendeur et l’a ç q u é re p r, pujsqu’au titre de coiU rahenfla
em ptiQ fie, on tro uve les term es, çujÆ IN LE GE VENDITIONIS , ITA SJT-SCRIPTUM ,jetç. ;
Q u e la loi du contrat est la seule à consulter, lorsqu’elle
est clairement exp liquée ;
Q ue l’on ne doit avo ir recours au x lois du digeste, etc.
que lorsque celle du contrat est a m b ig u ë, parce que ces
lois sont alors le com plém ent de celle du c o n tra t, mais
toujours uniquem ent dans,le cas de silence ou d’obscurité
dans les termes du contrat;
A tte n d u q u ’ il n’y a aucune am biguïté dans la vente
dont il s’agit ;
A tte n d u q u e, suivant les expressions du con trat, le
sieur C h o p in n’a vendu la terre de Cham pfollet ,que
com m e consistante en qu in ze articles (y, com pris les droits
féod aux en cas de leur rétablissem ent, çt ce par p ure
complaisance p o u r le sieur L a b r u e ) ;
Attendu que les immeubles vendus, formant dans.ledit
contrat la composition de la terre de C ham pfollet, y
sont désignes chacun par leur nom p r o p r e , e t-p a rle s
noms do leurs divers cultivateurs;
Q u e les trois locateries eu question n ’y sont point
�( 12 )
nom m ées, et qu’elles étoient exploitées par des colons
autres que ceux des locateries désignées dans la vente ;
Attendu que les immeubles nommés dans la' vente sont
au nombre de q u a t o r z e , ( i i o n compris les droits féo
d a u x );
•
Que si après leur appel nominal'il est dit : « A in si que
« le tout se limite et com porte, e t q u ’ e n JOUISSENT
« ' l e s CI-DESSUS d é n o m m é s , et sans en rien excepter,
«' réserver, ni retenir, » en grammaire et en droit, cela
signifie seulement que le sieur Chopin a vendu la totalité
des quatorze articles, mais rien de plus ( cette clause
ne se référant bien évidemment qu’aux objets' antécédemment expliquées , et dont la terre de’ Champfollet a’
été composée p a r ’ W contrat ); i:r ■
i: 1;
: ‘
’
Attendu que si après le rappel des articles composant
la v en te , le sieu r'C h o p in s’est réservé la maison des
C h â t e l a n s et autres objets n o m m é s , c’est p a r c e que lors
de la vente lesdits objets dépendaient des Q uaissons et
des M ic h a r d s , nommés dans la vente (fa it que le sieur
Chopin se soumet à prouver en cas de d é n i ) , et q u e ,
sans réserve form elle, ils auraient été englobés dans ladite
vente;
Attendu que si le contrat de vente terminé par la
clause : « En- c o n s é q u e n c e d e t o u t c e q u e d e s s u s ,
« ledit vendeur s’est dévêtu , démuni et dessaisi de la pro« p riété, possession et jouissance, fruits, profits et émo« lumens DE L A SUSDITE TERRE DE C l l A M P F O L L E T ,
« c i r c o n s t a n c e s ET d é p e n d a n c e s d ’ i c e l l e , etc.,
Les mots e n c o n s é q u e n c e d e t o u t c e q u e d e s s u s
veulent dire seulement > en dialectique et en d r o it, que
�1&7
.
( 13 ) .
les parties concluent leurs conventions en conséquenceùcs
détails et des explications qu’elles ont donnés plus liaut ;
Les mots d e l a s u s d i t e t e r r e veulent dire seule
ment , en dialectique et en droit, que la terre n’a été
vendue que comme elle a été composée antécédemment,
'que comme elle a été sus d i t e , ces mots signifient très'évidemment que des objets détaillés le sieur Chopin ne
réserve absolument rien , et qu’il transmet toutes les
circonstances et dépendances de ces objets ;
Que si l’on a conservé aux objets vendus le nom de
'terre der C h am pfollet, et si l’on -s’est servi des termes
circonstances et dépendances, c’a été i°. parce que les
objets non vendus étoient très-peu de chose compara
tivement à ceux nommés dans la vente ; 20. parce cjue
le sieur Labrue avoit tenu fortement aux droits féodaux
( le sieur Chopin n’y mettoit pas de p r i x , mais la chose
plaisoit au sieur L a b r u e ) , et qu’en cas de rétablissement
ils se rattachoient de suite à la terre de Champfollet ;
3°. parce qu’on s’étoit contenté de nommer les trois
domaines, etc., sans en désigner les héritages, et que
pour exprimer que l’on ne se réservoit rien des objets
vendus, l’on jugea utile de les embrasser dans leur tout
par les mots circonstances et dépendances ;
Attendu que rémunération des quinze articles désignés
en la vente, ne sauroit être considérée comme surabon
dante, pour en induire que la dénomination de terre
de Cham pfollet embrasse tout ce qui en dépendoit avant
la vente,
10- Parce q u e , en point de droit, il'fie doit j.-rmais
y avoir de clauses inutiles dans les contrais, et que celles-
�( i4 )
y exprimées ont toutes un sens et un effet ( h moins
qu’on ne veuille violer la loi du contrat, ce q u i, dans
plusieurs circonstances, a donné lieu. cassation);
2°. Parce que l’énumération faite au contrat de vente
dont il s’agit, est décidément lim itative, pour exprimer
que le sieur Chopin n’a entendu vendre et n’a réelle
ment vendu que quinze articles dont il~a formé la terre
de Champfollet, et que le contrat d’union annonce luimême que la terre de Champfollet n’embrassoit pas tous
les biens patrimoniaux du sieur C hopin, puisqu’il y est
tdit qu’en cas de non vente par le sieur C h o p in , avant le
4 nivôse, ses créanciers pourroient vendre eux-mêmes,
.non-seulement ladite terre de C ham pfollet, mais encore
ses autres biens p a trim o n ia u x,•
Attendu que le sieur Labruc a lui-même si bien en
tendu que les trois locateries en question n’ont jamais
fait pai'tie de son acquisition, q u e ,
Premièrement, les 1 6 pluviôse et 18 ventôse an i o ,
il a demandé, i°. contre le sieur Chopin seul, la remise
des bestiaux de la réserve; 2°. contre le sieur Chopin
et les créanciers de ce dernier, le rapport de ce qu’ils
avoient touché sur les 90000 francs, et q u i l n'a élevé
aucune prétention , n i m êm efa it aucune réserva quant
à ces trois locateries.
D e u x i è m e m e n t , sans mot d i r e , il a perçu les récoltes
de Van 9 et de Van 10 dans les objets nommés dans la
vente; et ce n'est q u en Tan n q u 'il a réclam é ces loca
teries.
T ro isiè m e m e n t, le sieur L a b ru c avoit proposé d'é
changer la locateric Neuve ( nommée dans la vente )
�contre la locaterie G uillaum ie ( l’ une de celles dont il
s’agit aujourd?hui ) ; (l’oit il suit. qiC.il recom ioissoit ne
l'a voir pas a ch etée, puisqu il' la prenait en échange :
Varrangement étoit f a it ; m ais il n'eut pas lie u , parce
qiûd ne plut pas à la dame L a bru e : f a i t que le sieur
Chopin se soum et à prouver en cas de déni :
D e tout quoi il suit que pendant deux ans le sieur
Labrue a exécuté purement et simplement la vente;
Attendu, en droit, que l’interprétation la plus sûre des
conventions est l’exécution que les parties y ont donnée;
D ire qu’il a été mal jugé par le jugement d o n t est
appel ; bien appelé : émandant, et faisant ce que les pre
miers juges auroient dû faire, déclarer le sieur Labrue
purement et simplement non recevable en scs demandes,
ou en tout cas l’en débouter, et le condamner aux dépens
des causes principale et d’appel, sauf au sieur Labrue à
retirer, si bon lui semble, l’amende par lui consignée lors
de l’expédition par lui retirée de l’arret par défaut, du 30
mai 1807 ;
E n cas de difficulté, audit cas, surabondamment et subsldiairernent seulement, ordonner avant faire droit, que,
dans le délai de la lo i, le sieur Chopin fera preuve, tant
par titres que par témoins,
i ° . Que soit avant la vente sous seing p r iv é , soit avant
celle par-devant notaire, le sieur Labrue a passé plusieurs
mois sur les lie u x , qu’il a examiné et fait exam iner,
article par article, tous les objets que lui vendoit le sieur
C h o p in , et a interrogé les voisins sur les qualités, produits
et contenues des terrains ;
2°. Q ii’uv'-»ot la vente la maison des Chatelans, et autres
�( 5 1)
objets réservés nominativement par le sieur C h o p in , dépendoient des domaines des Quaissons et des Michards ;
' 3°. Q u ’un échange avoit été fait entre les parties, de
la locaterie Neuve contre celle Guillaumie, et n’a pas
eu l i e u , parce qu’il ne fut pas agréable à la dame Labrue
Sauf a u sieur Labrue la preuve du contraire, si bon
lui semble, dans les mêmes délais;
Réserver tous moyens et dépens en définitif, le tout
sans préjudice à autres actions et conclusions du sieur
Chopin.
,
GOURBEYRE, avoué,
A R I O M , de l’i mp ri me r ie de T h ibaud- L a n d r i o t , i mp ri me ur
d e la C o u r d ’a p p e l, -
M ars 1808.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chopin. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
créances
locaterie
ventes
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Pour le sieur Chopin, contre le sieur Labrue Saint-Beauzille. Contrat de vente [suivi de] Consultations motivées.
Table Godemel : Vente : 11. après un contrat entre ses créanciers contenant un état de son actif immobilier, le sieur Chopin ayant vendu, le 6 ventôse an 9, la terre de Champfollet consistant en une maison de maître, réserve, trois domaines et sept locatairies, en un seul tenant, sous la seule réserve d’une maison et de quelques objets soigneusement désignés et confinés, et tel que le tout avait été énoncé en l’état produit aux créanciers ; a-t-il pu ensuite soutenir que ladite terre de Champfollet contenant dix locatairies au lieu de sept, cette vente ne comprenait pas les trois locatairies de la Guillermie, de Moret et de Paray ? s’il y a, dans le contrat de vente, des clauses obscures et ambiguës, contre qui, du vendeur ou de l’acquéreur, doivent-elles être interprétées ? 12. si le contrat de vente a stipulé, en faveur d’un tiers, réserve de la jouissance de l’une des locatairies, l’acquéreur peut-il, contre la disposition précise et absolue de son titre, prétendre que, d’après un acte antérieur, la jouissance du tiers ne devait commencer qu’après le décès du vendeur ? Clause : - obscure. - s’il y a, dans le contrat de vente, des clauses obscures et ambiguës, contre qui, du vendeur ou de l’acquéreur, doivent-elles être interprétées ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
An 9-An 10
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1817
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1816
BCU_Factums_G1820
BCU_Factums_G1819
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53344/BCU_Factums_G1817.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paray-sous-Briailles (03204)
Jaligny-sur-Besbre (03132)
Le Lonzat
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
domaines agricoles
locaterie
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53345/BCU_Factums_G1818.pdf
6b04b57043e97389d13ff881883433b9
PDF Text
Text
OBSERVATIONS
POUR
L e sie u r L A B R U E D E S A I N T - B E A U Z I L L E
in t im é ;
C O N T R E
Le sieur C H 0 P I N , appelant.
L E sieur Chopin veut équivoquer sur l’étendue d’un
contrat de vente ; il veut en effacer les clauses principales,
celles qui commencent et terminent l’acte, et qui en sont
tout l’objet. Il ne veut past qu’on y voie une vente de,
la terre de Champfollet, quoiqu’il l’ait expressément
vendue en ces termes; quoiqu’il se soit dessaisi de cette
terre de Champfollet circonstances et dépendances il
ne veut pas qu’on y lise une réserve qu’il y a formellement écrite, dont il a soigneusement désigné tout es,-
�les parties, et que sans doute il ne peut ni outrepasser ni
étendre.
E t cet acte est le sien ! ces clauses sont son ouvrage !
L u i seul a p a rlé *, lui seul les a dictées; et cependant
il en conteste l ’efficacité : il veut avoir eu le droit de
les in sé rer dans son acte , de les y répéter plusieurs
f o is , sans autre objet que d’abuser un acquéreur venu
de trente lieues; avoir pu y intercaler un perfide détail
pour le tr o m p e r, tandis que rassuré par les termes géné
raux de sa v e n t e , par une réserve minutieusement dé
taillée , par les protestations du sieur C h o p in , par les
assertions de tout le monde^ l’acquéreur étoit persuadé^
tout à la fois de la g'énéralité de sa vente, et dé là bonne
>
*. •
foi de son vendeur.
C ’est la prétention du sieur Chopin depuis q u il a
vendu.
”
^
Alais examinons son langage lors qi?il voulait vendre;
11 sera bien,plus, propre quelle dernier à jeter des lumieres
sur l’étendue de la vente. Ce langage est écrit; car il n’y
avoit pas d’autre manière de s’entendre, à un éloigne
ment de trente lieues.
*■
r
O r , le sieur C h o p in , en discutant les conditions de la
ven te, la restreignoit-il à. certaines parties de sa terré?désignoit-il à son acquéreur sept locnteries seulement,
quand il en a v o i t d ix ? P o i n t du t o u t ; il ne le lui faisoit
pas même pressentir.
11 vouloit vendre; son rôle étoit alors d'exagérer \ c’est
lùi-mcme qui nous l’apprend ( png. 23 ), de présenter aux
clialans une superbe terre , toute d'une p ièce , de n’en
rien excepter que sa maison, d’en enfler considérable-
�----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
(3)
442
ment le produit et l’étendue, tout cela pour offrir h son
acquéreur un bel ensemble qui pût le tenter, pour en
tirer un prix excédant la valeur réelle. Jouer ce rôle
étoit, suivant le docteur C h opin , une cliose^/bi*/ ordi
naire; ce qui prouve au moins qu’elle seroit fort ordi
naire pour lui.
Seroit-ce donc aussi une chose J b rt ordinaire , après
avoir mis en pratique une si belle m orale, après avoir
trompé sur la valeur et en avoir profité, de se ménager
encore les moyens de contester après la vente une partie
de la chose vendue, d’en attaquer la substance? Mais l’espiéglerie seroit un peu trop forte, et la morale même du
docteur ne sauroit le conduire jusque-là.
L e sieur Chopin ne se plaindra pas; il veut qu’on tienne
pour certain qu’il n’a vendu et entendu vendre que cer
tains objets. E h bien! on s’en rapporte à lui. O u i , à lui
C h o p in , non au Chopin q u i a vendu , mais au Chopin
qui vouloit vendre , q u i, s’il faut l’en croire, s’expliquoit
sans fa r d , sans déguisement, disoit ingénument la vérité.
C ’est d o n c la vérité que n ou s a llon s trouver dans les
lettres du sieur Chopin ; et ce n’est pas une vérité stér i l e , car ces lettres contiennent la base , les élémens de
la vente qui les a suivies. Rien ne sauroit donc en expliquer
mieux les incertitudes ; et de même que pour juger des
objets qu’embrassent une transaction sur procès, ou un
hors de c o u r, il faut recourir aux pièces du procès, de
môme on ne peut mieux découvrir les bornes d’une vente
que dans les discussions qui l’ont préparée;
J’out l’objet de ces observations est donc de r e n d r a
publiques les négociations écrites, c’est-t\-dii*e, les lettres
A 3
J
SMk
I
j
'
�(
4
)
du sie u r C h o p in , de les m ettre plus p a rticu liè re m e n t sous
les y e u x .d e la juàtic'e. D e u x sont écrites au sieu r D e c o m b e s , q u i en étxiit l’ in te rm é d ia ire ; d e u x autres au sieur
de S a in t-B e a u z ille lu i-m êm e .
A v a n t de tran scrire ces lettres, il n’est pas inutile de
ra p p e le r que ce fut en revenant de Paris que le sieur
de: S a in t-B e a u z ille fut porté à cette acquisition par le
sieur Decombes ; et que voulant cqnnoître-la position
de G ham pfolletils y allèrent ensemble. - .
La visite ne fut qu’une apparition, d’autant plus que le
sieur Chopin prétexta des affaires, et il étoit le seul com
pagnon du sieur St.-Beauzille ; le sieur Decombes. •même
n’y avoit pas assisté. Aussi après avoir examiné seulement
l’état et la situation de cette propriété, le sieur St.-Eéauzille
demanda un état circonstancié des produits. Etranger
au pays, au genre de culture, par conséquent..hors d’état
de ju g e r ù l ’œ il de la v a le u r , de l’étenduq et du p ro d u it
des te rra in s, il ne p o u v o it asseoir sur aucune autre base
que sur le produit, la valeur de la terre et le prix qu’il
devoit y mettre. Il laissa entrevoir cependant qu’il pourroit
le porter à 1 20000 francs.
A lo rs s’établit une correspondance dans laquelle 011
disputa sur le p r i x , sur la valeur de la terre, sur les
réserves que se faisoit le sieur Chopin : c’est là ce q u ’ il
importe aujourd’hui de bien connoître , p u isq u ’on y
trouve les élémens de la vente.
lia première de ces lettres est écrite au sieu r Decombes ;
elle est du 7 thermidor an 8 , fort peu de temps après
la première entrevue; la voici :
�. v J e vous dirai bien 'd ès-choses: aü> sujet du prétêridu grand
« avantage que vous me présentez. J ’a i trouvé de la personne
« qui est à la téte de mes affaires j 5oo fran cs de ferm e de
« mes- biens ^patrimoniaux., et i 5ooo francs d ’avarice ; ce qui
«•f a i t 8 a 5o fr . de ferm e j ' e t .une, réserve, de plus de i 5oo fr« Ajoutez ce que doit gagner un fermier : ¡c’est un objet d ’une
'« 'douzaine de m ille francs -, pourfiooo fran çs qu i 1-en couteroft
de Sairit-Beauzille (1) ; car .Ias 5 q o o o francs q u i,lu i
-« restéroient entre mains ne ¡lui côûteroient pas plus de 10.25. fr.
,« de rente je vous île prouverai à laiprem ière yu$, Je. \jous
cc répète, comme je vous l’ai déjà marqué,\que d’ipi;^ uïj n)oi6
« tout sera terminé; il est bitin certainique .jQ;yendraiÿjqüelque
:« choseiqüi.arrive : rri^is i l se<présente ¡ùeàu&up. d ’4 pqfiéreurs,
« et quand ils sauront que. je vends ,'Céla> ira erifcôre mieux.» I l
« a eu tort de ne pas traiter dej suite , etc,*,;,etc. (2), » ■
. >>
L a seconde lettre est du 7 fructidor an 8 -, encore écrite
au sieur Decombes.
'I ' \ 1»
T'. .UV> .
,i'>DUOÎi .m••
1 J >. ~
•• ••
"■ - :■
!'>•■
—X*'"• r •..... ’ <>' ii
(1) On voit q u e jusque-là C ette l e t t r e n’a trait qu’aux 120000 francs offerts
par M . de Saint - Beauzille ; m;»is elle n’ en est pas moins précieuse., car clie
prouve que les biens dont le sieur «le Saint-Beaiuille donaoit 6000 francs,( en
revenu ), et que le sieur Chopin .ne vçulpit pas lui^dynner pour ce prix, parce
tjii'il, clisoit en trouver 1 200O francs >ëtoient sefr^iftuSjjMïiri/noniaux, ^nns
exception. Il étoit donç question entre les'patties ,\\<i$s In premier instanf-,
de vendre et d’acheter les biens p a trfm on iaijxdfiC /ipp in .' Or , les, jfrois
locateries contestées faisoient alors partie d eia terre; elles sont patrim oniales ;
elles £âsoient donc partie de la vente proposée .: voilà une vérité incpntestuble.
(2) T o u t le reste de cette lettre est ¿ u r jp ;mûmv. ton ^on voit q u e.c’çst. un
verbiage inutile à la contestation, i n ij ti lq’pa rj £0 tysi'(JWc 11^ réjlî'tcr içi ;[stulcnicnt elle confirm e, ce qui .est vrai, que. le jicur de »Saint-Beau7.ille n’avoit pas
voulu traiter tle suite , parce <]u’il n’avQit pu W goiç $<;$ idées que sur un ¿tat
q u i! avoit en effet demandé.
,y ,
.j ol> 1 ■
�I'
» I»
«
M
o n
c
(
h
e
r
v
o
i
s
6
i
n
)
,
\
»
« J e n ’ a i p o i n t changé d’intention; l’acquéreur que vous m’avez
« fait l’amitié de me présenter me convient parfaitement,
« parce qu'il a l’air d’un honnête homme ; mais je n’ai pas
« cessé d’étre en com pagnie, et n’ai pu faire l ’éta t en quescc
«
«
«
tion (3). M a is on voit a u jo u rd h u i , en plongeons , près de
quarante milliers de gerbes , moitié seigle et motié froment.I l fa u t em défalquer à peu près 7000 ( gerbes) pour le domaine
de la nation : vous verrez ce que cela f a i t , c ’est en èvidente (4);i pour deux mille livres environ de produits de
«
« vente de vieux et jeunes bœufs , de gros et petits cochons,
« 'et de vieux moutons ;
; i fciiov * ■ r >
■
u.c<j Pour 400 francs' de laine, et àutarit de vin; 1
Pour deux pulle francà de pessel, inayère ou plants de saules;
« Cent milliers'*de'foin de réserve au moins, et des terres
« closes en haie# vives , propres, à en’ faire deux cents milliers
« de plus ;
( 5) Il étoit donc q u estion d ’ un état'. L e sieur de Saint-Beauzillc l’avoit de
mandé; le sieur Chopin l’avoit promis : il devoit servir d’instruction à l’ache
te u r; et cette instruction pouvoit seule le conduire à fixer le prix. Eh bien!
par cette même lettre Chopift va en donner le croquis, parce qU’on l'attend,
parce qu’on, ne veut rien faiW snns celft.
(4) Ici les réflexions se -piSicatéM cri1foulé.« " ‘<1--'
m ;
Q uel <étnt de produits donne le sieur Cliopin? cst-Cc celui de troi* domaine*
•et sept loCatèries? On voit qu’il fl’ën est pas question. C'est l'étal d e tou t ce
q tt'il p o ssèd e'j de tout' cef qui est én é v id e n c e , sans en excepter ntèttio la
ricolte du dortiaîne de la Aâtiün. Il défalque ensuite le produit do cc qu’ il ne
veut pas vendre : CetW'défalcation nfc porte pfls sur les trois locuterie*, dont U
ri'a pas môme l’id6e. 11 distrait sept mille gerbé*pou r le d o m a i n e d e la nation :
tou t le reste il le présehtef i l‘«Cquireur; il lc lui1 livre : vous verrat ce que
c e la f a i t , lui'dit-il s'e'es t'en évidence. YoiW lVtat qu’il lui o ffr e ;1état de de
qu ’il voüloit lui Veridrc, de ee que le sieur dû Snlnt-Benuï.ille vôulôit aolietei',
cc qu o n lui a ven d u , qu il a nàlicté b ien tô t apr^s. r *
c o n sé q u c in m c n t de
�( 7 ). ,
.
4
' **
« D eux étangs et les fossés, qui s’ernpoissonnent de douze
« cents; ce qui fait un produit de çinquante éçus par an. I l y
« a une 'vingtaine d ’arpens de beau bois de fu ta ie ; il y a bien
« pour 3oo francs par an de bois blanc à exploiter ; il n’en coû
te teroit pas plus de 5o francs par an p o u r entretenir cette coupe.
« Les métayers et locataires payent l’imposition , et quelque
« chose au-dessus, que l’on peut com p ter, puisque cela va à
ce 600 francs. Il y* a au moins deux mille boisseaux de blé de
te mars par an pour ma part; un bon pays de chanvre, qui produit
ce au moins 600 francs par an : en forçant les cultivateurs , on
ce pourroit les obliger à en semer le double. Il est une infinité
ce d’autres produits, tels que pommes de terre , vessars, fàves ,
« p o is r o n d s , h a r i c o t s , e t c . ( 5 ) E n
1 7 8 1 , c e lt e te r r e ¿ t o i t a f-
cc f e r m é e 8000 f r a n c s , e t d e s réserves p o u r 2.000f r a n c s a u m o in s .
« D e p u is c e te m p s , f y
te
a i a n n e x é u n d o m a in e q u i è t o i t trop
m ê l é , e t e n b on s f o n d s . V o u s hioyez q u e c e la f a i t u n e su -
tc v e rb e te r r e (6 ).
■ , ~
•
u t
' '
(
! 0 r ’ 'M
j>
« Sous peu de jours j e vous f e r a i,passer un état plus circonsce tancié ; mais c ’est l’œil de l’acquéreur qyi vaut mieux que
ce tout. Comme )1 y- a environ S o m ilte fra n cs non exigibles, et
çc .13 des 5.0 qui ne p a yen t l’intérêt qu'au denier 5o ,.je ne ppis
(5)
Dans cc long détail le sieur .C lio p ia Jjse-.çt abuse Amplement do la permis
sion d ’exagérer qu ’il trouve si légitime. Mais à quoi Jbon prendre tant de peine,
lui qui étQit ¿i fort pressé, si l’étjit demandé ne devoit pas être la seulc^règle de
l ’acquéreur? N ’a vo it-il donc d ’autre but que celui de le tenter par ce détail
fastueux et outré? Il y est parvenu; et il pourroit aujourd’hui prendre'un
langage tout opposé, pour diminuer la chose vendne!
(G) Rien de plus positif. Le sieu rÇ h o p in donne poyr excjnj>lo on bail de
1781 : cette terrq ( qu’il vend ? qu’on iparcj^inde, qu’ion a çnsuUc achetée ) tjtoit
alors, d it-il, affermée ioooo francs.
C ’est cette superbe terre qu’ il s\ngit d’acquérir; plus, un domaine nouvelle
ment annexé. ( C’est celui des Quaissons. )
O r , lcibail de 1 7 8 1 copipi'énoit les trois loc^toijet cpntcktéesi L d aieur Gllrçjrt0 >
<iui a le b.til!, n d’abord tenté dti le nier j il-l'a ensuite reconnu en pLiidant : ^
conséquence est toute «impie. ' i
. îo ‘
'
T iJ rf :»■'(>
'
:
’
�' ^
( 8 )
« donner cette p r o p r ié té p a t r im o n ia le à moins de cent quatre« vingt mille livres. Si votre acquéreur prévoit pouvoir payer
« cette somme , j e l u i f e r a i p a s s e r d e p lu s g r a n d s r e n s e ig n e
nt. m e n s. Je suis bien r e c o r i n O i s S f l n t de la part que vous prenez
« à! c e ‘qui me regarde ; ma reconnoissance égale l’estimé avec
« laquelle j’ai le plaisir de me dire le plus dévoué de vos voisins.
« C II O P IN . «
11; y
' h LI i
’r/un
L a troisième lettre est (<jlu4.vendérhiaire an 9 , quoique'
datée du même, jour .de .Pan 8, époque à laquelle il n’étoit encore question de rien ; elle est écrite au sieur de
.
■
. . .
. 9
■
Saint-Beauzille par le sieur Boislaurent, sous la dictée
du^sieür Chopin. " ■ ■’
«Wt '
A?
-i\v\ \W> • ’ n :v> ; « Lamothç, ,1e 4 vendémiaire an.8 (<))•
« Monsieur Chopin est ici dans le moment rriômé que jô
« vous écris; il est venu dans l’intention de savoir si décidé« ment vous vouliez toujours acheter C h a m p fo lle t. Il a pris
ce. d e s arrançerriens q.xec $es c r é a n c i e r s V q u i l u i 'o n t d o n n é , dans
cc le cas oii v o u s a c h è t e r i e z , ju s q u ’ à Noël pour payer '/fiooà fr. J
« 45 autres mille seroient payables dans l’année. Vous seriez
« chargé de 5oooo fr. de contrats, et vous lui consentirez à lu i,
« M. Chopin , une obligation de xoooo f r . , qui ne seroit payable
« qu’autant que y o u s seriez tranquille possesseur. // d e m a n d e
u en outre 200 louis d’épingles qu’il dit que vous lui avez protc mis , la réserve d e la m a is o n q u e v o u s c o n n o is s e z , a in s i q u e
n d es te rr es q u i e n d é p e n d e n t , e t e n fin u ïie p e t i t e p ê c h e r ie e t
« tr o is s c p tc r è e s d e m a u v a is e s te rr es q u i n e
vous
c o n v ie n n e n t
« p a s (7). Il vous engage à lui faire une réponse prom pte,
(j) C’ est ici le'Sieur Chopin qui parle; car il est d it, quelques ligues plus bas,
q u e'le ticur Boislaurent écrit jous\sa d ictée . O r, que proposc-t-il,au sieur de
Saint-Bcauzillc? d’acheter Cham pfollet ; et ce n’ est pas ici d m in p fo llet, cort-,
cc
les
�« les retards pouvant préjudiciel' h ses affaires, étant en marché
cc avec une autre personne; il vous préféreroit, pourvu que voua
CC n’ayez pas changé d’idée.
« Je suis fort a ise , M onsieur, d’étre chargé d’ une pareille
« commission, puisqu’elle tend à vous rapprocher de nous. Je
« vous préviens que j'écris sous la dictée de M . Chopin.
« V eu illez, je vous p r i e , .....................
« Votre.................
« BOISLAURENT. »
L a quatrième lettre est du sieur C h o p in , et adressée
au sieur de Saint-Beauzille lui-meme.
« Saint-Beauzille , ce i 3 novembre ( 22 brumaire an 9).
cc D ’après vos deux lettres, une à M. D ecom bes, et l’autre
cc à m o i, j’avois résolu de vous répondre par une négative, ayant
cc imaginé que vous cherchiez une défaite honnête pour retirer
cc votre parole (8). D ’abord vous exagérez ou vous êtes trompé,
sis tant en trois domaines et sept locaterics, c ’ est C ha m p follet, sans autre dé
signation, sans aucune exception.
Aussi voulant en distraire quelques objets dont il n'nvoit pas parlé d’abord ,
il se c r o i L obligé de les dem ander ; bien mieux, obligé encore de persuader à
l’acquéreur, pour l’engager à y consentir, que ce sont de mauvaises terres
qui ne lu i conviennent pas. Et il se trouveroit avoir réservé trois locaterics
sans en parler ! Sont-ce donc encore des objets dont il nuroit pu dire à l’acqué
reur qu'ils ne lu i convenaient p a s, surtout celle de la Guillaumie , qui joint
immédiatement la réserve du cliAteau , qui est à sa p o rte , qui est une des
meilleures de la terre? Mais en core, quand cela scroit, auroil-il fallu le d ire,
et les réserver.
(tt) On voit ici que le sieur de Saint-Beauzille avoit répondu au sieur Chopin,
paru dégoûté de l’acquisition , à cause de la réserve qu’ il ne vouloit pas
souffrir. M algré son envie de répondre par une négative , malgré ses grandes
affaire j j n,a|gr,i ia foule d’acheteurs qui se présentoient, suivant lu i, le doc
teur fait soixante lieues pour forcer clans sou domicile un acquéreur dont ld
�«
«
«
v.
«
«
«
«
«
«
te
enajoutantquelquesode trop, comme l’a pensé M. Decombes
car vous évaluez la petite maison de mon père 2.0000 francs
cet o b je t, situé dans le plus mauvais terrain , n’a qu’un petit
pré qui n’a pas pu être fauché cette année, et qui, en bonn<
année, donne un millier de foin ; un autre qui peut en donnes
trois quintaux, et un petit réservoir à tenir un quarteron di
poissons ; un jardin «t cour d’environ 3 à 4 boisselées ( il en
faut 10 pour le setier ); une mauvaise maison bâtie en terre,
sans cave ni écurie. Il faut que je fasse tout cela. J’ai trouvé
du tout 5 o francs de ferm e, et vous le portez à 1000 francs,
A ce prix Cham pfollet (9) vaudroit plus d’un million (10). .
bonhomie Ini convenait si fo rt, et sur lequel il avoit lancé le harpon. Il ne
le trouve pas; il lui écrit : son premier mot est de lui dire q u ’i l cherche une
défaite pour retirer sa parole .
Le sieur de Saint-Beauzille avoit donc donné une parole ; et en effet il avoit
déjà offert i5oooo fran cs, et 0000 francs d ’épingles : c’étoit le prix auquel sc
réduisoit C h opin, d ’après la lettre précédente; c’ est le même prix, qui a été
convenu et payé. Cette remarque est essentielle.
,
(9) T o u jo u r s C h a m p fo lle t , lo rs q u ’o n d iscu te u n e r é s e r v e , e t C h a m p f o l l e t
sans a u tre n d jcctlo n , a p rès u n e p a r o l e d o n n é e , le p r ix a c c o r d é , et lo rs q u ’ il
n e re ste de d ébats (jue su r c e lte s e u le ré se rv e .
(10) On voit ici qu’en effet c’est la réserve des Cliâtclans qui avoit dégoûté
le sieur de Saint-Beauzille. Cette réserve est sur le point de tout rom pre; c ’est
pour cela que le docteur abandonne ses a ffa ir e s , sa com pagnie , scs malades,
et vole au fond du Limousin : là , pour endormir l’acquéreur, il lui fait en
tendre que l’objet réservé est de peu d’im portance, dans le plus mauvais
terrain , de nul produit ; lui persuade que cette réserve ne peut ni déprécier
la terre, ni en diminuer la valeur. T o u t étoit ¿o n , e x c e lle n t , superbe, dans
l’état de sa terre; tout est mauvais et mesquin dans ce qu’il se réserve. E t ce
pendant ces vilenies üiisoient discussion; le sieur de Saint-Beauzille les vouloit,
m enaçoit, pour si p eu , de retirer sa parole. E t cet homme s» convoiteux
seroit devenu tout d’ un coup si traitable, qu’il auroit c o n s e n t i , pour le même
p r i x , et sans que jusque-là il en eût été question, n la réserve de trois locateries, dont une touche sa porte, et coupe en deux la superbe terre touto
d'une pièce !
E t le sieur Chopin n’auroit pas cru devoir en faire la réserve bien expresse,
�4m
C C .................................«
................................................................................................................................
« . . . (11) C ’est d'après toutes ces réflexions que M. Decombes
« a désiré que je vous visses, n’ayant plus à retarder, attendu
« que j’attends un acquéreur de P a ris, quiconnott encore m ieux
cc que vous Champfollet (12), qui est mon voisin, et à qui,
« une fois co n ven u , je serois obligé de le céder, attendu que
« je 11e pourrois point lui dire que j’ai promis la préférence ;
« cela me forceroit de manquer à ma parole. A in s i v o y ez,
te M o n sieu r, si vous tenez à la petite réserve de la maison de
« mon p è r e , ne songez plus à Champfollet ( i 3). A u cas con
te traire, rendez -vous demain à midi à Argentac ; j’y serai
cc jusqu’à une heure et dem ie, que je partirai pour me rendre
« à P lo t, où j’ai une voiture et mon homme de confiance, et
« d’où je partirai le lendemain du matin : peut-être nous arran-,
ccgerons-nous. Je n’ai pas un jour à perdre, si je manquois deux
« occasions favorables qui se présentent. Je n’ai que jusqu’au
« 20 décembre pour vendre, après lequel temps mes créan
te ciers seroient maîtres de ma propre chose : c’est une principale
« clause du contrat qu’ils n’ont passé qu’à cette condition. Quant
« aux payem ens, ils n’ont pas changé ; ils m’ont abandonné
« tout ce que je vous dem ande, excepté deux septerées de terre ;
*c ils ne m’en ont abandonné qu’une pour réunir à mon enclos :
ci quant a u x deux que je -bous demande de p lu s , je vous les
»
lui qui a cru devoir désigner bien soigneusement les mauvais terrains qui ont
fait tant de discussion !
T 'H ' 0 « oïnctTct ÛÏÏTpige entière de la lettre, qui n’a trait qu ’aux pépinière*
et aux récoltes dont il n est pas question en la cour.
(12) Chopin convenoit bien alors que le sieur de Saint-Reaiuillc ne connoissoit pas bien Chainpfollct; qu’il n’ enconnoissoit pas bien les détails; et cepen
dant il y avoit alors parole donnée , prix accordé : tout ¿toit convenu, hors
l’article de la réserve.
(<") Toujours cette seule réserve sur Cham pfollet. Le sieur Chopin insiste :
il faut renoncera C ham pfollet , si on ne la souffre pas. O r, on y c o n s e n t en
suite; on achète donc C ham pfollet, moins cette réserve.
13
2
�■
( 12 )
« payerai à dire d ’experts ; c e s t à une demi-lieue du château,
« ainsi que la petite maison (14)- Je vous abandonnerai de
te suite le ch âteau , puisque j’ai déjà commencé à déménager*
« Je suis en attendant le plaisir do vous voir , si vous ôtes
« toujours dans la même intention,
« Votre très-humble serviteur.
«CHOPIN.
« P . S. Mais j ai 1 honneur de vous prévenir de ne pas compter
« que je retarderai d’une,dem i-journée mon départ de P lo t,
« qui sera samedi m atin, et d’Argentac demain vendredi, à
« une heure et demie. Je vous attends, et suis avec estime.
« CHOPIN.
' 1 -■ %^
cc N e craignez pas mon voisinage ; j e serai assez loin de
« vous. Je ne vais chez mes meilleurs amis que quand ils sont
« m alades, ou quand ils me l’ont fait dire dix fois : je ne me
cc mêle jamais des affaires de mes voisins, à moins qu’ils ne m’en
(i/Î) Le sieur Chopin avoit compris dans son «*tat le r e v e n u de cous s es biens
patrim oniaux ; il avoit ensuite pari«1! Ue sc réserver les Châtclans; et sauf cette
réserve, le prix ¿toit convenu pour toute la terre.
Il veut agrandir cette réserve; mais il sc croit tellement lié par cc qui a
précédé, qu’il n’ose demander gratuitement deux mauvaises septerées de terre :
il offre de les payer à dire d'experts.
Bien plus, il sc croit obligé, pour les obtenir, de représenter au sieur de
Saint-Bcnuzillc qu'elle* sont hors de sa portée, à une d-.tmi-lieue du château .
Le sieur de Saint-Beauzille consent à tout,
passe la vente pour le p rix offert et accepté depuis
long-temps; et bientôt C hopin, qui devoit être à une demi-lieue du clwltcau;
Chopin, tellement circonspect qu’il n’osoit pas sc réserver ouvertement ces
deux septerées; C h opin, lorsqu’ il a vendu , élève la piétention d’avoir con
servé trois locatcrics dont il n’nvoit jamais parlé. Il n’est plus, à une dem ilieue du ch â tea u , il est à 1,, pou c ; la locaterie la P!,iS rapprochée , la plus
précieuse,-est a lu i, sans qu il l'ait demandée ni réservée, lorsqu’il ¿toit ques
tion de Vendre toute la (erre, ni lorsqu’il l’a vendue.
�(
«
«
«
cc
13
)
4
^
prient; d’ailleurs je suis, D ieu m erci, aimé et estimé de tout
le monde ; on a bien dû vous le dire dans le pays. S i j ’osois,
je présenterois mes respects à votre aimable famille, que je
désire bien connoître (i5). »
V oilà cetle correspondance. S’ il n’en sort pns la con
viction la plus intime, la démonstration la plus com
plète que les parties ont toujours etc en marché de la
terre de Chain p follct , telle qu’elle étoit, il faut renon
cer à rien prouver.
L e docteur lu i-m ê m c n’oseroit le n ier; il n’a pas
porté jusque-là sa logique : mais il a un bien meilleur
moyen pour en repousser les inductions. Ces lettres ne
sont point le contrat, d it-il; ce n’est pas par ces mis
sives que j’ai ven d u ; je ne dois v o i r , et la justice ne
doit consulter que mon acte.
( i 5) Chopin craint tellement d’avoir éloigné son acquéreur, qu’après être
allé le chercher chez lu i, et ne l’avoir pas tro u vé, il lui promet de l'attendre
à Argentac ; il compte tellement sur sa p a ro le , il est tellement plein d’atten
tions, de prévenances, qu’il a com m encé, d it-il, à déménage r de Ch.impXbllct. Il sera le meilleur voisin du m onde; d'ailleurs voisin qu’on ne doit pas
craindre, puisqu’il sera assez loin du château. Il est si timide , qu’à peine il ose
respectueusement offrir scs hommages à l ’aim able fa m ille .
A in s i, après avoir présenté à son acquéreur la terre de C ham pfollet , lui
avoir exalté les avantages de cette superbe terre toute d'une p iè c e , en insis
tant sur une seule réserve, le sieur C h o p in , par cette lettre, essaye d’.ibord
de piquer son am our-propre en lui rappelant qu’il a offert un prix qu’on a
accepté, et qu alors il consentait à celte réserve, en paraissant croire qn’i l
cherche un prétexte honnête pour retirer sa parole. li prend ensuite le ton
doucereux, cherche à s’ insinuer, à séduire : il y parvient à force de souplesse;
ct c’ est ce patelinage qu’il appelle aujourd’hui de la bonn i foi ; c’cst ce langage
qu d ne veut plus a v o u er, parçc qu’aprèj en avoir si bien profité il ne veut
p<ii qu on Jo lui oppose.
�( i 4 )
B ravo, D octeur! il faut compter pour rien ce que
vous avez dit, ce que vous avez écrit, les états que vous
avez donnés à votre acquéreur, les promesses que vous
lui avez faites, etc., etc. B ra vo ! cette morale-ci vaut bien
l ’autre ; mais il n’est pas difficile de répondre.
L a vente est consentie cinq semaines après ces lettres;
elle en est la suite immédiate; elle en est le résultat,
comme ces lettres en sont les élém ens, et en contien
nent les bases. Ces bases ont bien servi au sieur Chopin
pour amener son acquéreur à augmenter le prix! et après
.
en avoir profité, sous ce rapport, il pourrait les renier
aujourd’h u i, parce qu’elles expliquent sa v en te?
E n second l i e u , la vente est consentie pour le prix
promis et accepté par les lettres ; ce qui prouve que les
conventions n’ont pas changé depuis.
E lle est consentie des mêmes objets ; car elle est faite
de la terre de Cham pjbllet , sous la seule ré se rv e de
la m aison des C lu itelan s, etc. j ca r on sc d é p a rt de la terre
de Cham pjbllet , circonstances et dépendances.
L a vente est donc parfaitement concordante avec les
lettres;
vendue
sement
C ’est
elle est aussi générale, aussi absolue : la terre est
en masse; les objets réservés y sont bien soigneu
désignés : tout le reste est donc vendu.
là un principe de droit bien ce rtain , car on ne
sauroit admettre à la fois une réserve expresse et une tacite.
L e s restrictions, les réserves m entales , dit un auteur,
rûont point cours dans ce genre de commerce.
Q u ’ importe le détail artificieux qui sc trouve intercalé
dans l’acte ! Quel cas a dû eu faire le sieur de SaintBeauzille, la tête pleine des idées que la correspondance
�à tt
y avoit imprimées; l’esprit rassuré par les protestations
de Chopin , par les termes généraux de l’acte, par cette
réserve dont le sieur Chopin ne se tirera jamais ! car les
objets réservés, on le sait, ne faisoient partie ni de la
réserve du château, ni des trois domaines^ ni des sept
locateries.
A la bonne heure, dit C h o p in ; mais c’étoit une pré
caution de plus.
Q u ’ il dise, un piège de plus! Mais adoptons même
qu’il eût cru pouvoir prendre cette précaution ; qu’il nous
apprenne au moins com m ent, s’il n’eût vendu que des
objets dont cette réserve étoit indépendante, elle eût pu
être l’objet d’une discussion si sérieuse, qu’elle a été à la
veille d’occasionner une rupture! Q u ’avoit à y voir l’ac
quéreur? quel droit auroit-il eu de s’opposer à cette ré
serve, si la vente n’eût pas été de la masse, de la tota
lité de la terre, des biens p atrim oniaux ?
L e sieur Chopin sent tout cela ; aussi a-t-il cru devoir
se retrancher dans un moyen tout autre. Il prétend que
le sieur de Saint-Beauzille « exécuté la vente ; il invoque
l’art. 1325 du Code Napoléon ; il va presque jusqu’à
créer une fin de non-recevoir.
( i5 )
E t ce moyen , le seul dont il ait fait du b ruit, a trouvé
quelques sectateurs!
L ’air de bonne foi du docteur a trouvé des partisans!
Personne , au re s te , moins que le sieur de SaintBeauzille , n’a le droit de s’en étonner ; il s’est laissé
prendre lui-même à cet air mielleux.
Mais voyons cette exécution dont on n’a fait tant dû
fr a c a s que dans l’espoir de jeter de la poudre aux yeux,
�Q u ’est-ce que l’exécution d’un acte ? Il y en a de deux
sortes.
L ’une consiste dans un f a i t , une action qui, émane
d’une volonté bien prononcée : il n’y a même que ce
premier cas qui constitue une exécution.
- <
S i , par e x e m p le , le sieur Chopin , après sa vente ,
avoit mis son acquéreur en possession des trois locateries
contestées, que ce fait fût légalement constaté, et qu’il
n’eût pensé à les réclamer que long-temps après, ce seroit
une véritable exécution. Il auroit beau réclamer ; il
auroit beau dire : J ’ai vendu limitativement sept locateries ; rien n’est plus clair et moins susceptible d’ambi
guïté ; on lui imposeroit silence en une phrase ; on lui
diroit : Si votre acte ne portoit réellement d’autre ex
pression que celle de sept iocateries, les trois que l’ac
quéreur auroit prises de plus n’en seroient pas moins à
vous, parce qu’évidemment elles ne seroient pas vendues.
IVlais ici , outre la d é s i g n a t i o n n u m é r i q u e , il y a une
expression générale : vous avez livré tout ce que cette
expression pou voit com prendre; de là, quelque force
que vous puissiez attribuer à la num ération, s’élève
contre vous une présomption assez forte pour servir de
règle à votre acte et à votre intention.
Et dans ce cas là même où la présomption naîtroit
d’un fait positif, d’une action, elle n’exclueroit pas tout
autre moyen légal d’expliquer la vente.
Il en est bien autrement de î exécution qu’une partie
veut induire d’ un lait purement passii ; par exemple ,
du silence de l’aulre.
Si lu partie qui scprétcndlésée ou trompée ne se plaint
pas
�( 17 )
pas aussitôt, qu’elle garde long-temps le silence, il s’élève
alors une présomption qu’elle ne s’est pas crue autorisée
à réclamer plus qu’elle n’a : cette présomption n’est rien ,
si l ’acte est clair; elle peut tendre à l ’expliquer, s’il est
ambigu.
•
- * .
Mais pour cela il faut que plusieurs circonstances con
courent ; que le silence soit absolu -, qu’il soit assez pro
longé pour qu’on puisse y vo ir une interprétation réfléchie
de l’acte ; enfin que la présomption qui eu naît ne soit
effacée par aucun au tre m o y e n de fait ou de droit. Car
si le silence a été co u rt, s’il n’a pas. été absolu, et que dans
les premiers instans la partie ait témoigné qu’elle croyoit
avoir acquis ce qu’elle a demandé ensuite , ses délais
ne sont plus rien*, ils peuvent n’être dictés que par la
prudence.
* '
,
:
Observons d’ailleurs que le silence même absolu ne forme
qu’ une de ces présomptions ordinaires qui sont laissées
à la prudence du juge, qui par conséquent ne sont plus
rien si l’acte s’explique sans elles, et surtout par des écrits;
une de ces p ré so m p tio n s q u e la lo i n e p erm e t au ju g e
de compter pour quelque ch ose, que lorsqu’elles sont
graves, précises , concordantes; qu’il ne lui permet
d’admettre que dans les cas où la preuve testimoniale
est admissible. ( A rt. 1353 du Code civil. )
Ainsi d o n c , quand le sieur de Saint-Beauzille auroît
gardé un silence absolu depuis le 6 ventôse an 9 jus
qu’au 16 vendémiaire an n ? date de sa première de
mande, ce ne seroit qu’ une présomption ; mais une pré
somption trop légère pour pouvoir interpréter l’a clf, et
justifier le vendeur ; présomption qu’il ne seroit pas même
C
�laissé à la prudence du juge d’admettre comme telle,
parce qu’elle ne seroit ni grave, ni précise , ni formée
par une foule de circonstances concordantes ; présomp
tion enfih qui ne seroit d’aucune utilité pour l’inter
prétation de l’acte, puisque le sens en seroit fixé par
des moyens plus sûrs, plus positifs, par les écrits du
vendeur lui-meme.
M ais le sieutf de Samf-Bea(r¿ille à-t-il donc attendu
dix-neuf mois à exprimer que ces ttois locateries dévoient
lui appartehir ? n’a-t-on jJa's, sur cet article * un1peu passé
à côté de la vérité sur le fait comme sur le droit?
Il achète le 6 ventôse. an 9 ; il repart, et 11e vient
s’établir à CHampfollet qu’à l’époque de la moisson.
On lüi refuse la portion du maître datl5 trois locuiteries;
aussitôt il soumet son contrat de vente à des jurisconsultes
consommés.
Une consultation lui est donnée le 6 thermidor an 9 :
le 22, il notifie son ocle de vente aux locataires, notam
ment à ceux qui jouissent les trois locateries contestées,
et leur signifie de déguerpir.
C ’est ainsi qu'il a pris possession.
Il prend deux autres consultations à P aris, une autre
à Riom , dans le cours de l’an 10.
Il se pourvoit en justice le 26 vendémiaire an i r .
E t l’on ose se faire un moyen de ce qu’il n’a joui
que sept locateries ! Les trois autres n’étoient pas en
son pouvoir -, il ne pouvoit que les réclam er comme
il l’a fait : la loi 11e lui permeltoil pns de s’y installer
de vive force ; elle ne lui ordo 11n'oit pas , sous peine
de déchéance, de les réclamer le lendemain; elle ne lui
défendoit pas lu reilcxion.
�^
( I9 )
Il n’y a donc pas un silence absolu; le sieur de SaintBeauzille n’a donc pas pensé pendant deux ans que son
acte ne lui transmettoit que sept locateries.
Il ne s’élève donc pas la moindre présomption contre
lui.
^
L e sieur Chopin a senti aussi-bien qu’ un autre toute
la foiblesse de l’objection ; il a essayé de la fortifier p a r
d’autres circonstances.
I l dit ( pag. 1 3 et 1 4 de son(m ém oire ) que le 1 6 plu
viôse an 10 le sieur de Saint-Beauzille demanda la res
t i t u t i o n , des bestiaux de la réserve, et rien de plus ;
Q ue les créanciers lui ayant fait commandement de
p a y e r, . il y ¿forma opposition j qu’il fut condamné à
payer, par un jugement et un arrêt confirm atif;
Que >
ju sq u e-là il n éto it point encore question des
trois locateries.
V o y o n s .s i , pour soutenir un faux système, le sieur
Chopin ne s’avise pas de tromper encore la justice sur
■
ces points de. fait.
\Lors de l ’acte 1relatif aux bestiaux , qui n’est qu’ une
-citation en-conciliation, le sieur de Saint-Beauzille s’est
. réservé tous>autres droits et demandes à ¡fo rm er, et
autres prétentions , conformément à Vexécution de, son
contrat d’acquisition, \ oilu. pour le premier ob jet, sur
, lequel il n’y
encore , de la part de Chopin , qu’une
èscobarderie : voyons le second.
'
E n se faisant un moyen du silence du sieur,,de SaintBeauzille sur les trois locateries, lors de l ’ i n s t a n c e avec
les créanciers, Chopin-avoit sans doute la procédure sous
'^les yeux.
�(
20
.)
Eli bien! qu’on ouvre le premier acte intervenu sur
le commandement de payer, la requête d’opposition, on
y lira ( ce qu’il y sa voit bien ) , parmi les moyens d’op
position que le sieur de Saint-Beauzillc présentait :
« D ’ailleurs l’exposant ne jouit qu’en partie des objets
« qui lui ont été vendus par l’acte du g ventôse an 9 ,
' c< et' notamment il est privé de la jouissance de trois
« locateries dont il se -propose de fo rm er demande. Les
«. bestiaux de la réserve, qui lui ont été vendus, ne lui
« ont point été liv r é s ......... La jouissance actuelle d ’ une
«
«
«
«
«
«
it
quatrième locaterie lui est encore refusée......... A in s i,
d’après tout ce qu’on vient de dire, l’exposant est bien
fondé à former opposition au commandement qui lui
a été f a i t , soit pour en obtenir la m ain -levée, soit
pous faire ordonner que ledit commandement restera
sans effet jusqu'il ce que toutes les difficultés sub
sistantes , et dont on vient de parler , seront appla-
« 7¿¿es. »
Cette requête que Chopin avoit sous les yeux lors du
m ém oire, puisqu’il parle de Tordonnance de surséance
qui est à la suite; cette requête, dit-on, était bien an
térieure au jugement de Gannat et à l’arrêt de la cour.
Cependant, suivant C hopin, il n’étoit point question
alors des trois locateries .
V o ilà un mensonge bien grossier, bien v o lo n t a ir e ,
bien réfléchi : il a échappé à Chopin. Mais ce Chopin
est si v r a i, si ingénu, que la justice ne d evra pas croire
q u ’ il ait m en ti pour le besoin d'une mauvaise ca u se ,
quoique la preuve en soit b ien acquise. Il ne ment pas,
car il offre de prouver tout ce qu’il dit, sachayt bien que
�'la preuve est inadmissible, qu’on la contestera , qu’il
n’insistera que pour la forme , et qu’il aura pu séduire
quelqu’un.
Et cependant ce mensonge, une autre inexactitude de
fait, et un sophisme sont toute la base de son moyen
d’exécution.
Et c’cst le seul moyen sur lequel il ait insisté; le seul
qui ait pu éblouir quelques esprits.
Si on l’écarle, que reste-t-il aux deux adversaires du
sieur de Saint-Beauzille ?
Il reste à Chopin la ressource de torturer son acte et
de renier ses propres écrits;
A M agot le mérite de rapporter deux titres, et de
plaider contre tous les deux.;
A l’un et à l’autre la stérile jouissance d’accabler leur
adversaire d’injures, d’épitliètes outrageantes, au grand
scandale de la justice et des auditeurs ;
E t pour parvenir à cet odieux trio m p h e, soutenir au
jourd’hui un système, demain un autre; avancer un fait,
et bientôt le rétracter ; se contredire sans cesse , avant
comme depuis le procès; mettre de côté tout ce qui est
franchise, et arborer la plus étonnante duplicité.
E t le sieur de Sain t-B eauzille seroit la dupe de ce
honteux concert de fraude et de mauvaise foi !
E h quoi ! la bonne loi n’est-elle donc plus lVime des
contrats? l’ordre et l’harmonie de la société auroient-ils
cessé de reposer sur cetle base immortelle? les tribu
naux auroient-ils de plus bel apanage, que d’en protéger
les exemples et d’en punir les infractions? t r o u v è r e n t ils jamais une occasion où ils fussent plus sûrs d’être les
�( «
)
organes'de la justice, qu’ils le seroient en confirmant un
jugement fondé.sur ce principe?
Que peut-on désirer pour l’éclaircissement.des faits?
Q u’y a-t-il de plus certain dans ¡le droit?
L ’homme q u i vent vendre , a dit quelque p a r t un
a n cien , se f a i t ordinairement un plan pour l’exécu
tion de son dessein. I l arrange, il ajuste ce plan ; il
met ¿1 part certain nombre de paroles étudiées qu’ il y
f a i t entrer, après les avoir librement concertées , tantôt
avec ses désirs , et tantôt avec ses intérêts. D e lit ré
sulte ime résolution bien fa rin ée de porter la vente
aussi haut q u i i p o u rra , et d’abuser sans scrupule
de Vimprudence et delà sim plicité des acheteurs. Maitre
et possesseur de ce q u i i v e n d ,'il n’ a seulement à se
garder que de tendre trop de pièges ; enfin il dicte les
conditions’ de la vente .............. Q u ì i s e x p li q u e donc
n e t t e m e n t , et 'q u ’ i l d a ig n e *a w m o in s'p r e n d r e la p e in e
d e 'b i e n d é c la r e r se s v o lo n tés. I l ¡ l u i est p lu s f a lc ile
de dire Ce qu’ il pense , qu’ à d’autres de le deviner ou
de le comprendre.............. D ir a -t-il q u i i n’a i p a s. su
7/lieux démêler ses intentions ? il justifie Vacheteur q u i
les a m al entendues ; avoue-t-il qu’ i l m ’a pas voulu
pârler plus ' clairement ? i l se condamne : 'mais on
voit bien qu’ i l ne tenait q u ìi lu i de dissiper les ténèbres
q u i i 'ci volontairement épaissies. Illu m in é tout à coupi
il éclaircit ses idées , ses expressions ; 'il parle devant
rles’ tribunaux une autre langue que dans les contrats :
il Cst donc juste que' l'équivoque farmée> de la fr a u d e
oiiïde Vinadvertance du vendeur s'explique uniquem ent
contre‘ lui. L e moyen 'de disculper un homme en q u i
�.( 23 )
/ ¡é 5
Vamour de la vérité n a pu débrouiller les pensées
que Vamour du gain développe ! ......... Tout conspij'et-il donc contre V.acheteur? toi{t est-il permis pour le
tromper ?
L e sieur Chopin ne veut pas qu’on le reconnois.se dans
ce vieux portrait \ mais qui, manquera de l’y voir tout
entier? d’y lire la conduite qu’il a tenue? Et pourquoi
l’a-t-il fait ? parce qu’il savoit bien que pas un, acqué
reur au monde n’eût voulu de sa terre, s’il eût çéservç
la locaterie de Guillaumie.
E t si cette réserve tacite étoit admise, ces objets, on
le sai t , appartiendroient aux créanciers, q u i, dans la
procédure tenue avec le sieur Sauret, s’en sont expres
sément réservé le droit, en déclarant qu’ils n’eussent pas
consenti à des sacrifices considérables, qu’ils n'auroient
pas souscrits sans la condition que Chopin leur délais—
seroit la généralité de ses biens patrim oniaux , et qu’ils
seroient tous compris dans la vente consentie au sieur
de Saint-Beauzille.
E t l’on soutient la corrélation 1
O ù est d on c le d ro it du sieu r Chopin à ces trois locateries ? Et si les créanciers qui les ont abandonnées
entendoient qu’elles fussent vendues au sieur de SaintBeauzille, de quel droit veut-il les contester?
Il cherche h inspirer de la pitié ! Il n’est devenu pauvre
que parce qu’ il n’a pas voulu payer ses dettes en assi
gnats *, il est sensible et b o n , et on le persécute, etc.
Il nvoit son état : son père lui a laissé une belle for
tune et 60000 francs de dettes *, toutes les autres sont de
sa création.
�( 24)
>
, .
Et ce n’est pas pour avoir fait de mauvaises affaires !
si au lieu de faire un roman cynique, en remuant les
cendres de son p è re , il avoit parlé de lui-même, on en
auroit mieux connu la cause. .
Ce n’est pas pour n'avoir pas voulu les payer en as
signats : loin de le p o u v o ir , il en a contracté à cette
époque.
E h quoi ! il a dissipe plus qu’ il n’avoit; il a obtenu de
ses créanciers une perte de 33 pour 10 0 , sa n s être négo
ciant n i banquier ; il conserve par ce moyen p lus de
60000 francs de fo rtu n e, et il veut inspirer la pitié !
Il veut contester ce qu’il a vendu !
C ’en est trop; toutes réflexions seroient inutiles : certain
de la bonté de sa cause , le sieur de Saint-Beauzille attend
avec sécurité l’arrêt de la cour; et dût-il éprouver autant
de sévérité de la décision, qu’il a essuyé d’outrages de
la défense, il n’en portera pas moins dans l’intérieur de
sa f a m i l l e , et dans l e s e i n d e l a s o c i é t é , l e témoignage
d’ une bonne conscience et d’une loyauté que ne sauroient
lui arracher ni l’injustice des hommes, ni les revers de
la fortune.
M c. V I S S A C , avocat.
M e. T A R D I F , avoué licencié.
A R I O M , de l’imprimerie de T h i b a u d - L a n d r io t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Mars 1808.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Labrue, Jacques. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Vissac
Tardif
Subject
The topic of the resource
créances
locaterie
ventes
domaines agricoles
assignats
Description
An account of the resource
Titre complet : Observations pour le sieur Labrue de Saint-Beauzille, intimé ; contre le sieur Chopin, appelant.
Table Godemel : Vente : 11. après un contrat entre ses créanciers contenant un état de son actif immobilier, le sieur Chopin ayant vendu, le 6 ventôse an 9, la terre de Champfollet consistant en une maison de maître, réserve, trois domaines et sept locatairies, en un seul tenant, sous la seule réserve d’une maison et de quelques objets soigneusement désignés et confinés, et tel que le tout avait été énoncé en l’état produit aux créanciers ; a-t-il pu ensuite soutenir que ladite terre de Champfollet contenant dix locatairies au lieu de sept, cette vente ne comprenait pas les trois locatairies de la Guillermie, de Moret et de Paray ? s’il y a, dans le contrat de vente, des clauses obscures et ambiguës, contre qui, du vendeur ou de l’acquéreur, doivent-elles être interprétées ? 12. si le contrat de vente a stipulé, en faveur d’un tiers, réserve de la jouissance de l’une des locatairies, l’acquéreur peut-il, contre la disposition précise et absolue de son titre, prétendre que, d’après un acte antérieur, la jouissance du tiers ne devait commencer qu’après le décès du vendeur ? Clause : - obscure. - s’il y a, dans le contrat de vente, des clauses obscures et ambiguës, contre qui, du vendeur ou de l’acquéreur, doivent-elles être interprétées ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
An 9-An 10
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1818
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1816
BCU_Factums_G1820
BCU_Factums_G1819
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53345/BCU_Factums_G1818.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paray-sous-Briailles (03204)
Jaligny-sur-Besbre (03132)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
Créances
domaines agricoles
locaterie
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53346/BCU_Factums_G1819.pdf
a2b58070c7aa77978abf6246317ab667
PDF Text
Text
/¿«À
MÉMOIRE
EN
RÉPONSE,
POUR
Sieur A n t o i n e CHOPIN, docteur en médecine,
appelant d’un jugement rendu au tribunal de
Gannat, le 23 août 1806;
C O N T R E
Sieur J a c q u e s L A B R U E D E S A I N T -B E A U Z I L L E , intimé.
L E sieur Labrue de Saint-Beauzille a acquis du sieur
Chopin la terre de C hampfollet. Les objets qui la compo' sent sont désignés d’une m anière claire et précise. La dé
nomination de chaque dom aine, de chaque locaterie, des
colons qui les cultivent, est rappelée avec soin. Les do
maines sont au nombre de trois ; les locateries au nombre
A
�( 2 )
de sept. L e sieur Saint-Beauzille a tout v u , tout connu.
Des visites m ultipliées, des recherches soigneuses lui ont
appris la consistance de chacun des objets qui composent
son acquisition. Il a profité de l’état de détresse de son ven
d eu r; il a acquis à grand m arché, et trouveroit un béné
fice énorme dans une revente: mais plus le gain est consi
dérable, plus les prétentions augmentent. L e sieur de SaintBeauzille voudroit dépouiller le sieur Chopin des foibles
débris de sa fortune. A u lieu de sept locateries qui lui ont
été vendues, il en réclame d ix ; il crie à la fraude, à la
mauvaise fo i, à l’astuce; il a des regrets d’avoir fait la
connoissance du sieur C h op in ; il a perdu sa tranquillité
depuis qu’il a traité avec un homm e qui sait rédiger arti
ficieusem ent les clauses d’un acte, qui com bine profon
dément les moyens de trom per son acquéreur.
L e sieur de Saint-Beauzille, en s’exprim ant ainsi, ne
s’aperçoit pas qu’il n’est que ridicule; et tous ceux qui
connoissent les de u x parties nous appi-endroient quelle est
celle qui est astucieuse ; ils diroient surtout que le sieur
Chopin , plus occupé de l’art de guérir que de calculs, n’a
jamais connu les valeurs de la place; que toute sa vie il
a été dupe de ceux qui l’ont approché ; qu’il fut souvent
trom p é, mais jamais trom peur; que toujours généreux
et lib é ra l, il a excédé ses facultés, et a fini par dissiper
sa fortu n e, lorsqu’il pouvoit l’augmenter par ses talens
et scs succès.
Les personnalités et les reproches qui sont adressés an
sieur Chopin n’ont aucun trait h la cause; c’est dans les
actes qu’on en trouve la solution. M ais qu’on ne dise pas
que le sieur Chopin a la manie ou la passion des procès ^
�il étoit parvenu à cinquante ans avant de faire donner
aucune assignation. L'e sieur Saint-Beauzille, au contraire,
depuis qu’il est acquéreur de C ham pfollet, a plaidé avec
les créanciers du sieur Chopin pour le payement du p rix ;
il a plaidé avec deux locataires à qui il refusoit le bénéfice
des cheptels ; il a quatre 'procès avec le docteur Chopin ; il
en trois avec le sieur D e la ire , un de ses voisins : en voilà
bien dix de bon compte. Il a succombé dans trois ; les
autres sont encore indécis.
F A I T S .
.
. _
¡
y '
> Il est malheureusement trop vrai que le docteur Chopin
n’a pas fait de bonnes affaires ; il avoit des dettes patrim o
niales. Souvent obligé de recourir à des em prunts, des
intérêts énormes ont accru la dette, et il s’est vu dans la
nécessité de réunir ses créanciers. L e contrat d’union est
du 9 brum aire an 9 r cet acte contient le tableau de l’actif
et du passif. Il propose l’abandon de tous ses biens propres
et p a trim o n ia u x ; il se reserve ceux q u ’il a acquis de la
n ation, la maison qu’habitoit son p è re , l’enclos qui la
jo in t; mais il met pour conditions à cet abandon, que ses
créanciers lui accorderont un délai de six mois pour vendre
ces memes biens le plus avantageusement q u ’ il pourra.
A p rès ce d é la i, s’il n’a pas trouvé d’acquéreurs, il consent
que ses créanciers vendent eux-mem es amiablement, et à
moins de frais possible; ou b ie n , est-il dit dans l’acte, si
les créanciers désirent être désintéressés de suite, le fondé
de pouvoir du sieur Chopin leur offre, en forme de délé
gation , sur le prix qui proviendra de la vente projetée de
A 2
�«I
( 4 )
sa terre d eC ham pfollet, et antres, ses biéns patrim oniaux,
une somme de 90000 fr., pour icelle être ¡payée,' m oitié
le i er. pluviôse prochain, et l’autre m oitié un an ap rès,
à tous les créanciers dont les créances sont exigibles.
L e fondé de p o u vo ir se charge de faire obliger l’acqué
reur au payement des créances p rivilégiées, comme celles
qui dérivent de ventes, de fonds, soultes de partages,
rentes constituées et viagères. .
'x
Les créanciers réunis se décident pour ce dernier parti ;
c’est-à-dire, qu’ils acceptent la délégation proposée de la
somme de 90000 fr. E n conséquence, le fondé de pou voir
oblige le sieur Chopin à faire compter à tous les créan
ciers, par form e d e ’d élégation , sur le p rix de la vente
qu’ il est dans l’intention de faire de sa terre de Cham pfd llet, et autres, ses biens patrim oniaux, la somme de
90000 fr. ; savoir, 45000 fr. le I er. pluviôse lors prochain ,
et le surplus un an après.
P a r l’art. 2 , le sieur C h o p in p ro m et de charger son ac
quéreur de toutes les créances non exigibles, tant en rentes
constituées que viagères, soultes de partages, ou autres
créances p rivilégiées, et de désintéresser ses créanciers
de telle manière que la somme de 90000 fr. soit em ployée
en l’acquit des créances exigibles, soit par obligations ou
jugem ens, soit par billets ou mémoires arrêtés.
Il est dit dans l’article 3 que dans le cas où la vente ne
s’efi’c ctueroit pas avant Je 4 nivôse lors p roch ain , les
créanciers sont autorisés, dès l’instant m êm e, à vendre
aim ablement, et aux clauses, charges et conditions les
plus avantageuses, tant la terre de Cham pfollet que les
autres biens p a trim o n ia u x, suivant qu’ils sont ‘énoncés
�( 5 )
■
dans l’état de l’actif annexé au traité d’union, et sous les
réserves exprim ées'en ce traité.
-i
A u moyen de ces conventions, il est fait remise au
sieur Chopin de tout l’excédant qu’il pourrait d evoir;
on lui donne m ain-levée de toutes saisies; on consent que
les biens réservés, et ceux que le sieur C hopin pourra
acquérir par la suite,¡dem eurent en ses mains quittes et
déchargés de tous d roits, créances et hypothèques,*-*;
Les créanciers se nomment entr’eux des syndics pour
assister aux ventes d u sieur C h o p i n , accepter les déléga
tions, en recevoir le m ontant, régir les biens, si les ventes
ne s’effectuent, jusqu’au moment où ils vendront euxmêmes volontairement. L e sieur Chopin ne pourra révo
quer la procuration qu’il donne à cet effet, et jju i est
annexée au contrat d?union.
‘
^ n
Enfin il est interdit au sieur C h o p in , ¿\ compter du
jour du tra ité , de vendre aucuns bois ni bestiaux, et
de dénaturer ses propriétés. Les commissaires sont au
torisés à en constater . l’état ; il est seulement permis
au sieur C h o p in de disposer des c h e v a u x qui sont à
son usage.
V ien t ensuite l’état des biens du sieur Chopin. Ils con
sistent principalement en la: terre de C ham pfollet, qui se
compose i° . de la maison de maître de C ham pfollet, am
plem ent d ésign ée, avec les fossés et canaux qui l’environ
nent, ainsi que des bâtimens d’exploitation, jardin, etc.
2°. D eux étangs, dont l’un s’empoissonne de quatre
cents, et l’autre de quatre cent cinquante carpes.
3°* T ro is prés de réserve, dont le prem ier fait de
vingt-cinq à trente chars de foin > le second de soixante
�à soixante-dix; le troisième nouvellem ent planté de cinq
cents pieds d’arbres pommiers ou p oiriers, à faire vingt
cliars de foin.
4°. U ne terre jointe à la réserve, de la contenue de
cinquante boisselées, bien close, et en bonne terre.
5°. U n bois futaie , beaux arbres , à la porte de
l’habitation, d’en viro n jvin g t arpenS:
i
" ii
6°. U ne autre petite maison de m aître, com posée, etc.;
c’est (l’objet réservé.
7°. Des pacages trè s-é te n d u s, bons et tr è s -b e a u x ,
pouvant nourrir cent vingt betes à cornes, douze cheT
v a u x , cinquante cochons : tous ces pacages bien plantés
en saules, peupliers, orm eau x, et autres bois.
8°. ;Trois domaines presque tous en cliambonnage j
cultivés ordinairement avec douze pâires de bœufs.
9°. Sept locateries , avec le labour de deux vaches
chacune.
I l est d it , par
f o r m e
¿ ’observation , que l’ une de-ces
locateries a été donnée en- viager au âieur Denis M agot
et sa sem m e, par leur contrat de mariage. Viennent
après les détails sur l’utilité et l’agrément de cette terre,
qu’il est inutile de rappeler. Mais on a cru im portant
d’analiser cc contrat d’union , pour prouver la corré
lation quil y a entre cet acte et la vente dont il sera
bientôt parlé. Il ne faut pas perdre de vue surtout que
l’état de la terre de Cham pfollet, présenté aux créanciers,
n’énonce que sept locateries. Il eut été diilicile de dé
signer les trbis autres, qui ne font point partie de la
terre de Ghnnipfollet : l’une d’elles est nationale, les deux
autres avoient été acquises par des actes particuliers; elles
�(7 )
n’étoient pas même alors à la disposition du sieur C h o p in ,
par des raisons qu’il doit taire, 'niais qu’il ne laissa pas
ignorer aux créanciers dans le temps: Les motifs de son
silence ne lui sont pas personnels-, et le ¡sieur SaintBeauzille en a eu lu i-m ê m e connoissance.
L e sieur C h o p in , comme on le v o i t , étoit pressé de
vendre. L e sieur L a b ru e - Saint -B eau zille se présenta
pour acq u érir; il vin t lui-m êm e-plusieurs fois survies
lie u x ; il parcourut et exam inaotoutes les possessions
avec une attention minutieuse ; il prit des informations
de tous les propriétaires vo isin s, notamment du sieur
Decombes. E n fin , après de fréquentes conférenées ,-dès
explications m ultipliées, une correspondance suivie', et
en ! très-grande connoissance de cause; on ^s’accorda sur
les conditions. U n prem ier acte sous seing p riv é -fu t
souscrit par les parties, le 3 nivôse an 9. Il est im por
tant d’en rappeler les clauses.
. 1 1 ? ;
L e sieur Chopin vend au siçur Labvue-Saint-Beauzille
sa terre de C h am p fo llet, située communes de Paray et
L o n z a t , consistante en la maison de m a îtr e , etc., bois
de futaie en ch ên e, sans en exprim er la contenue; trois
dom aines, savoir, le grand domaine de C ham pfollet, dit
du'Rondet ■
cultivé par Jacques F a u re; celui des Quaissons,
cu ltiv é'p a r les B éguins; celu i!d es'M iô liard /cu ltiv’é pat
Claude T h ev en et; sept lo ca teries, stivoir , celle E l i e ,
située commune du L o n zat, cultivée"par Claude N étira;
celle de la C rô ix -R ô u g e , cultivée par .Claltde Matftin,
dont la joui$sa?tcë èst réservée à IDenis Mrtgot e t 's A
fem m e, au dernier v iv a n t; ainsi que tous les bAtimens
y attenans, jardin et tètfrea, qui consistent, etc. Suivent
�( 8)
les confins très-exacts de cette locaterie. Il est ajouté :
L e tout pour en jouir à la charge des réparations; ledit
M agot et sa femme, auront la liberté / pendant leur jouis
sance', de faire pacager deux vaches et leurs suivans , une
jum ent et son su ivan t, dans les lieux où les bestiaux
de même espèce von t pacager. Quant aux brebis et
cochons, ils iront pacager avec ceux de la terre, sans
que le nombre puisse aller au-dessus de quatre-vingts
brebis et quatre cochons.
L a troisième locaterie, appelée Belair, dite le V ign o b le,
composée de terres labourables, d’un grand clos de vigne
attenant un jardin de -la locaterie, le clos entouré de
haies v iv e s , ensemble tous les ustensiles, consistans en
deux cuves,' une cuve à ch a rro ir, et autres objets s’il y
en a', appartenans au vendeur.
L a quatrièm e locaterie, appelée C haum eton, cultivée
par Pierre Lébre.
.
Jja c in q u iè m e , c u ltivée par Jean B r u n , appelée N e u v e
du P u y , à deux feux.
La
/
sixièm e, appelée la locaterie de C h am pfollet,
cultivée par M arien Caré : il y a une grange de plus
qu’aux autres.
L a septièm e, cultivée par Claude J o a rt, « ainsi que
«
«
«
«
«
«
le tout se limite et com porte, et tout de m ême qu’en
jouissent et les cultivent les ci-dessus dénom m és; avec
tous les droits qui peuvent ou pouvoient en dépendre,
sans en excepter aucuns, tant ceux qui oiïnroient
quelque bénéfice par la suite, que c eux qui existent
actuellement. »
L e sieur Chopin s’oblige à. cet effet de remettre de
bonne
�( 9 )
bonne foi h l ’acquéreur, h sa prem ière'réquisition, tous
les titres concernant la propriété et droits d e 1 ladite
te rre , « sous la réserve que se’ fait le “V en deu r de sa
« maison des Cliâtelans, cou r, jardin , g ra n g e,' et autres
« bâtimens y attenans, ainsi que le clos y joignant! »
Suivent les désignations et confins des objets réservés.
Il est ajouté : « L e tout a in si et* de même 'q u ’ il est
« expliqué par le contrat; d*union tant pour la pro« p n é té que p o u r 'la contenue ; plus , le petit clos de
«r vigne en partie n atio nale, ainsi que le taillis des Bou« rets, commune de L orige. »
t ' :
Cçtte »vente est faite moyennant le p rix-‘et somrrib de
i^ oooo f r . , dont l’acquéreur payera 90000 fr.’/aux>Créànciers d u 1vendeur dont les créances k>nt exigibïdV,* et q u i
sont délégués par le contrat â'abàndoû ét cCunion que
le Vendeur a passé avec les créa n ciers, le 9 brum aire
dernier, et\aux époques fix é e s patrieco'nt'rât. A-'l’égard
des 5oooo fr. parfaisant le p rii^ ils doivent, rester entre ids
mains de l’acquéreur, qui se charge en;cOn$équence“dè
toutes'les créances non exigibles , -rentes pôrptît iielles et
viagères créances p rivilé g iées, bailleurs de fonds \ et de
lüs'désintéresser de telle maniéré qu6 la' somme de 9O000 f;
soit em ployée1totalefnent eti l’âcqü'it rdëg créanciers* des
dettes 'exigibles -, conform ém ent a U vcontrdt d’abaiïdotï
et ¿¿’«/»ow/Et'dans le cas où la somme dô ôddoo fn.né suffiroit pas pour désintéresser les créâhders' (les dettes! non
exigibles, rentes perpétuelles, viagères} créanciers-privi
légiés '^bailleurs, de ïVvnrlc.', [Q vçndout-s’Oljligé dé>paye'r
ce qu’il s’en défaudra ]'^ td e faire eit is<Md!tjue i’iidtiuéB
�( <1° )
reur ne soit aucunement recherché par aucuns des créanciers'des dettes rpon exigibles.;
; J-, -, j (
Toutes ces charges et conditions sont acceptées par
l’acquéreur.
r.'
‘
r • o ,
Il est aisé de s’apercevoir que ce >contrat de vente
est fait conform ém ent et en; exécution du contrat d’union
qui l’avoit précédé/ Dans ce dernier acte lg terre de
Cham pfollet se.co m p o soif é g a le m e n tc o m m e dans la
vente ¡j) de trois dontaines et sept lôcateries. , \iV ‘ v »
L é 6 ventôse suivant', la {vente a- été passée pardevant n o taire; et il y . est dit fque* le sieur Chopin
vend en exéçutiQîi d\i\çontrat iVunioU çt abandon ,passé
avec i ses créanciers, le> 9 brum aire -dernier .et encore
de la délibération des p r in c ie r s , du 9 pluylqse a^issi
dernier. L a vente com prend la terre de Cham pfoUet,
située en la commune de Paray,. e^en celle dp L a n z a t,
consistante en,m aison;4e m aître, la .réserve ,¿etc,, trois
domaines désignés com m e dans l’acte; prép^dent }cS£pt
lôcateries avecjpareille désignation ^ etilen om d& chaque
colon' qui les cu ltivç.f Ma(is on ajoute, .ensuite y, ce,j q<ui
n’é to it?pas dans la> vente sous seing, p rivé ^ q u ç je is ie û r
Chopin v e n d ¡¿nérne. les, gros et \mertiis beütixiUàA qui
garnissent lesditcs.¡terre', réservqv^ cUxmftiAfisf(e tr 1akate rie s, à" Texception de. la portion „des ¿c&loris.-jdVprès
le cheptel > et<enfiore en entier,;iceu?c qtii'^o.nt/daus la
locaterie de la C roix-R ouge ( c’cst Celle donjt ;la| jouis
sance étoit,réservée à 'Mijgot et .sa fem m e). O »
vendre
enpore tous, [les:,fhoü..<tnqUi pourvoient être t.étàblisC L è
sieur Chopin ^ i a i t l«,imemc] réserve de sa maisbn des
�^ 2Ï1 )
Châtelans, etc.1, le tout ainôï et-dd in è ïù ë q ii'il est expliqué
Jp a r le contrat d',u n io n yci-d e ssü si‘ datô ,'Jtant pour la
'p ro p riété que pour la'CQrttenü&hiS-^T/; ie ; Jii'j
’
s* L a contenue du bois:fütàié Westrp^indO :p lu s'eip rim ée
•dans'lat Vente atithentiqùe.;,fr
üiiriod 110 ^ îîoîoo'mIj »
L ’acquéieur doit payer lïi ¿oiiime dé 90000 francs ainsi
qu’elle a été déléguée par le contrat d?i]nioü^ de lalmanière
et aux époques déterminées p a r jà d'élibération dés créan.ciers, du 4 p lu viô se ,-d e la q u e lle 'l’acquéreiitfVi déclaré
avo ir pris connoissancb, ainsi que du contrat-«l’union :
les intérêts de cette som m e de 90000f r a n c s doivent
être payés p a r le vendeur"depuis le g brum aire ju s q u a u 3' n iv ô se, et sont à l a . cïiarge ! dé l’acquéreur à
com pter de ce jour 3 nivôse. I - ' ^ •*'
.
‘ ¡..»I
Mômes conditions pour la*-somme'1 de 'Ôoooo francs
restante, que celles exprim ées en l’acte soùs‘ seing p r iv é ,
avec cette seule différence que la somme de ôoooo francs
doit être totalement em ployée à ¿’acquittement des dettes
non exigibles.
T o u te s les clauses sont acceptées et agréées par les
créanciers, syndics et directeurs présens à l’acte, qui p ro
mettent de faire hom ologuer en justice ou ratifier volon
tairement le contrat d’union et la délibération, par ceux
des créanciers qui n’y sont point Entrés, et avant l’époque
•des payemens.
.
L e contrat se termine ainsi : « En* conséquence de tout
« ce que dessus, le vendeur s’est d évêtu , démuni etdes« saisi de la p ro p riété, possession et jouissance, fruits,
« profits et émolumens de la susdite terre de ChampKf o l l e t , circonstances et dépendances"^icelle, et en a
B 2
�( î I 2>)
«
jjc
«
; t(
vêtu etsa isiled it acquéreur, pour par lui en faire, dire
e t. disposer^ cpm m e.de sa propre ch o se,, vrai et loyal
acquit ; et à l’exécution des,présentes, dont l’acquéreur
fournira expéditiQnjtant.au vendeur qu’aux syndics et
« directeurs, en bonne et due forme exécutoire, les par' « ties contractantes ont o b lig é , affecté et hypothéqué
« tous, leurs, biens présçns et A v e n ir, et spécialem ent ceu x
cc qui>pei{Ç$ni\'lei\T\^qppariteinri actuellem ent dans. les
« .'comnjtunes de P a r a y q tS a in t-B e a u zille , même ledit
; « acquéreur, parpripilçgç etpréférence 3 la susdite terre
« de C liam pjolletydom aines etlocateriesen dépendons. »
L ’intimé a rappelé avec affectation, page 9 de son
m ém oire, q u e j pour la garantie ;de-cette vente, Chopin
hypothèque vaguement le? bieùs qu’il possède- dans les
communes de Paray et du L on zat; ce ü’est pas tout-à-fait
exact, car les biens du Lonzat ne sont point hypothéqués.
L ’intimé avoit annoncé que cette remarque auroit son
application dans la s u i t e ; m a i s il a oublié d y revenir.
A u surplus, il n’est pas inutile d’observer que la dernière
clause où l’on fait départir le sieur Chopin de sa terre
de Cham pfollet, circonstances et dépendances d’icelle, a
été ajoutée dans le contrat notarié ; qu’il n’en est nulle
ment question dans l’acte sous seing p r iv é ,' où il n’est
parlé que des sept locateries, ainsi que le tout se lim ite
et com porte, et tout de même qu'en jou issen t et les cul
tivent les ci-d e ssu s dénommés. O n ne dira pas, sans
doute, que cette différence ou cette addition est une suite
de Vastuce et de, Vartifice du sieur Chopin.
L e sieur Labrue-Saint-Bcauzille se met en possession
de cette terre de Cham pfollet et des sept locateries qui
�( i3 )
^
lui sont vendues; il perçoit la récolte de l’an 9 , sans
, aucune réclamation contre qui que ce soit.
A i'rive l’époque du prem ier payem ent, en pluviôse
an 10. L e sieur Saint-Beauzille n’avoit pas du tout l’in
tention de se lib érer; il ne payoit que l’intérêt légal à
cinq centimes par franc : ses fonds étoient beaucoup m ieux
placés ; mais il falloit trouver des prétextes pour retarder
le versement qu’il d e v o ir faire.
L e 16 pluviôse an 10 , il cite le sieur Chopin en conci
liation sur la demande q u ’il v eu t form er contre l u i , en
restitution des bestiaux de la réserve de C h am pfollet,
faisant, suivant lu i, partie de son acquisition, et q u ’il dit
avoir été enlevés par son vendeur. L e sieur de SaintBeauzille ne demande rien de plus ; il avoit cependant eu
le temps de s’apercevoir qu’il n’avoit que sept locateries
au lieu de dix.
Cette citation n’eût pas été un grand m oyen pour
arrêter sa libération ; il l’abandonne : mais il provoque
le sieur Sauret, créancier h ypoth écaire, et qui n’avoit*
point adhéré au contrat ■d’union. Il se fait assigner en
déclaration d’hypothèques, dénonce cette demande, le
18 ventôse an 1 0 , au sieur Chopin et aux créanciers
unis. Il soutient que les créanciers unis doivent le garantir
des poursuites du sieur Sauret. Les créanciers, qui p ré
voient son intention, ne veulent pas en -être dupes; ils
lui déclarent qu’ils consentent à ce qu’il se retienne le
montant de la créance Sauret. L e sieur Chopin offre
de remplacer cette somme dans la caisse des créanciers;
ceux-ci acceptent cette offre, et font le commandement
à Saiut-Bcauzille de payer les termes échus.
�Opposition au commandement. Ordonnance de sur
séance, on -ne sait pourquoi. On en vient à l’audience ;
Saint-Beauzille est condamné à payer. Il interjette appel
en la cour t arrêt confirmatif. Saint-Beauzille prend son
p a r ti, paye'les d ép en s, et évite l’expédition de l ’arrêt.
Jusqu’ici il n’est point encore question des trois locateries. A in si le sieur Saint-Beauzille a joui deux ans entiers
sans se plaindre ; il a exécuté pleinement le contrat -, et
on verra dans la suite si cette exécution pendant deux
années n’explique pas assez clairement tout ce qu’il pourroit y avoir d’équivoque , s’il est vrai qu’il y ait quelque
am biguïté dans les expressions du dernier contrat.
Ce n’est qu’en l ’an 1 1 , et le 26 ven dém iaire, que le sieur
Saint-Beauzille a fait éclore un nouveau procès, et contre
le sieur C h o p in , et contre les créanciers unis. Il dem ande,
i ° . la résiliation de la ve n te , avec restitution des sommes
qu’il a payées à com pte, le remboursement des l o y a u x
C O Û l S ,e t des d o m m a g e s - i u t é r ô t s .
Subsidiairement, il conclut i°. à ce que le sieur Chopin
le fasse jouir de trois locateries appelées G ailler m ie, des
M oret et P a r a y , comme dépendantes de son acquisition,
et retenues par le sieur Chopin.
V o ilà déjà le sieur Saint-Beauzille qui reconnoît que
chacune de ces trois locateries a une dénomination qui
lui est propre. Q uelle apparence que le sieur C h o p in , qui
lui en a vendu sept, en les désignant chacune par le nom
sous lequel elles sont connues, lui ait aussi vendu les trois
autres qui diffèrent si essentiellement cntr’elles !
Ce n’est pas to u t; le sieur Saint-Beauzille veut encore
que le sieur Chopin lui fasse la contenue du bois futaie;
�( i5 )
Q u’il remplisse la contenue de tous les autres objets
de la ven te, d’après l’état annexé au contrat d’union ;
Que le sieur Chopin lui fasse raison de la plus-value de
la majeure partie de ces mêmes objets, attendu qu’ils ont
été désignés comme situés en cliam bonnage, tandis qu’en
viron moitié est en varenne; à défaut de ce, il conclut à
ce1: que le sieur Chopin soit condamné à lui payer la
somme de 40000f r a n c s , pour fausse désignation, et fausse
énonciation de contenue.
L e sieur de Saint-Beauzille demande encore que le sieur
Chopin le fasse jouir de la locaterie de la C r o ix - R o u g e ,
retenue par D e n is M agot et sa fem fne, dès le moment
même de la v e n t e , quoiqu’ils n’en aient la jouissance via
gère qu’après la morUdu sieur Chopin : à défaut de cette
jouissance,le sieur Labrue-Saint-Beauzille demande 800/r.
par a n , jusqu’au décès du sieur Chopin.
' Si
chaque locaterie vaut 800 francs par a n , la vente en
comprend sept qui1 donneraient'annuellem ent 56oo fr. ;
il en demande trois autresj q u i,'a u même p r ix , produiroient 2400 francs
ce qui feroit un revenu de 8000 fr.
Si 011 y ajoute le produit delà réserve et des trois domaines,
ce> qui est encore au-dessus des locateries, il en résulteroit
que le sieur Saint-Beauzille auroit 16 0 0 0 francs de rente,
un&i belle! m aison, pour un capital de 140000 francs : ce
serüit stins douté une grande et heureuse spéculation.
^- A r riv e le tour des créanciers unis. L e sieur SaintBeauzille demande qu’ils soient tenus de le faire jouir
intégralement des objets vendus, ou qu’il soit autorisé
^ “r etenir sur ce qu’il doit la valeur des objets manquans.
Dans le cas bù les sommes dont il reste débiteur seroient
�insuffisantes pour le dédom m ager, il conclut à ce que les
créanciers soient tenus de lui rapporter ce qu’il en man
quera.
L e i 5 nivôse an i i , assignation aux fins de la cédule,
après procès verbal de non-conciliation.
M ais bien tôt, et par acte du 23 brum aire an 1 2 , le
sieur Saint-Beauzille se départ de son assignation du i 5
nivôse précédent.
L e même jour il cite de nouveau le sieur Chopin
les créanciers un is, et Denis M agot et sa femme.
Contre le sieur C h o p in , il demande la délivrance des
trois locateries M o r e t, Guittcrm ie et P a r a y , comme
n’étant pas comprises dans aucunes des réserves portées
au contrat de vente; il conclut à la restitution des jouis
sances depuis le 3 nivôse an 9 , date de la vente sous[
seing privé.
20. Subsidiairem ent, dans le cas où la jvente.iseroit
isolée, du contrat d’ union , 'l’mtiin<5>e x ige la délivrailCOj
de, tous les biens nationaux acquis par le sieur Chopin
non réservés par la ven té, et attachés, lors d’içelle', au^r
réserve, domaines et locateries désignés dans les contrats
de nivôse et ventôse an 9 , avec restitution des jouissances
depuis le 3 nivôse.
. ;i ; ,r;n
> i
;«{• -r
,
30. L e sieur Labrue-Saint-Beauzille prétend’ ¡à (une
indemnité résultante du déficit dans les contenues,.qualités
et produits énoncés par le sieur Chopin dans l’état an
nexé au contrat d’union , et énoncé dans sa correspon
dance avec le sieur de Sain t-B eau zillc, notamment jdans
le défaut de contenue au bois futaie que le sieur CJiopini
avoit donné pour vingt arpeus, taudis qu’il n’en n.que
quatre.
�( ï7 )
4°. L e sieur Labrue de Saint-Beanzille demande les
bestiaux garnissant la réserve lors du sous-seing p rivé
du 3 nivôse an 9 , spécialement vendus par l’acte passé
devant notaires, et enlevés par le sieur Chopin entre
le sous-seing p rivé et l’acte public.
5o. L e sieur L abrue conclut à une indem nité pour
des arbres prétendus enlevés par le sieur C h o p in , entre le
contrat d’union et la vente de nivôse, au préjudice de
la clause prohibitive écrite dans le contrat d ’union.
6°. Il demande la remise des titres de propriété de
,1a terre de C liam pfollet, sinon à être autorisé à en faire la
recherche aux frais du sieur Chopin , avec dommagesintérêts pou r les titres qui se trouveroient manquer.
7 0. Il conclut à ce que le sieur C hopin soit tenu de
le faire jo u ir, et de le mettre en possession de la locaterie de la C roix-R ouge.
Contre D enis M agot et sa fem m e, il demande qu’ ils
soient tenus d’adhérer aux chefs de conclusions concer
nant la locaterie de la C roix-R ouge.
E t en fin , contre les créanciers unis , à ce qu’il soit
sursis au payement du prix de la vente jusqu’à ce qu’il
ait obtenu pleine et entière satisfaction sur tous ses
chefs de demandes.
Bientôt le sieur L ab ru e-S ain t-B eau zille est forcé de
reconnoitrc qu’il n’a pas raison avec les créanciers; il
se départ de sa demande en ce qui les con cern e, par
actes des 3 et 4 floréal an 1 2 , et ne veut désormais avoir
«flaire qu’avec le sieur Chopin , Denis M agot et sa
femme.
Il obtient même contre e u x , le 28 du même mois
C
�( i8 )
de flo réa l, un jugement par défaut; et il n’est pas inutile
d’observer qu’il expose dans ce jugement q u 'il se st
j?iis en possession de la terre de C ham pfollet, c l ï e x
ception des trois loca tenes des M o r e t , de la G uillerm ie et de P a r a y , om ises p a r A n to in e Chopin dans
Tacte de vente par lu i consentie à L a b r u e , etc.
Sur l’opposition à ce jugement de la part du sieur
Chopin et de Denis M agot et sa fem m e, l’affaire a été
portée à l’audience du tribunal de G annat, le 23 août
1806, où est intervenu un jugement contradictoire dont
la teneur suit :
« Y a-t-il corrélation parfaite entre l’acte du 9 brum aire
« an 9 , et l’acte de vente du 6 ventôse suivant?
« L e sieur Chopin p o u vo it-il, nonobstant le contrat
« d’u n io n , vendre l’universalité de ses biens ?
« L ’acte de vente du 6 ventôse , de la terre de Cham p
ee fo lle t, transmet-il au sieur Saint-Beauzille l’universa« l i t ó de c e t t e t e r r e , o u s e u l e m e n t le s o l j j e t s désignes
k audit acte ?
« L e demandeur est-il fondé à réclam er toutes les
« dépendances de la terre de C h am p fo llet, même les
cc restitutions de jouissances à com pter de son contrat
« d’acquisition ?
a
«
«
«
« Est-il également fondé à réclam er le p rix des bestinux vendus par le sieur C h o p in , dans l’intervalle du
contrat d’union à l’acte de vente du 6 ventôse, et des
bois que cc dernier auroit fait abattre dans le même
intervalle de temps?
« Est-ce le cas de donner acte au sieur Chopin de ses
« offres de remettre au sieur Saint-BeauziUe les titres
�/ fo l
( r9 )
concernant les propriétés de la terre de Cham pfollet?
« La jouissance d’ une locaterie, réservée à Denis M agot
et sa fem m e, d o it-elle avoir son effet à co m p te rd e
l’acte du 6 ventôse , ou seulement ¿\ compter du décès
du sieur Chopin ?
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
« Considérant que l’acte fait entre le sieur Chopin et
ses créanciers, le 9 brum aire an 9 , quoique rappelé
dans le contrat de vente du 6 ventôse suivant, est
absolument étranger au sieur Saint-Beauzille; que par
conséquent il n’existe aucune corrélation entre ces
deux actes ;
« Considérant que cet acte n’ôtoit pas au sieur C hopin
la faculté de vendre la partie de ses biens patrim oniaux qu’il n’avoit pas compris dans l’actif par lui fourni
« à ses créanciers ; que dès-lors il a voit la faculté de
« les vendre en totalité ;
« Considérant que l’acte de vente du 6 ventôse com cc prend la terre de C h am p fo llet, avec toutes ses cir« constances et dépendances, moins quelques objets ré« serves;
« Considérant que la réserve expresse consignée audit
« acte ne permet pas d’en supposer une tacite, surtout
k loisqu a la suite de la designaion le vendeur transmet,
« délaisse au profit de l’acquéreur toutes les circonstances
« et dépendances de sa terre, et que ces mots génériques
« ne sont pas restreints aux objets désignés;
« Considérant que , d’après le sentim ent'de D om at
« et de P o tliic r, le vendeur est obligé d’expliquer clnic< renient et nettement quelle est la chose vendue; que,
« suivant l’art. 1162 du Code N apoléon, les conventions,
G a
'"* /
�rk
(' 20 )
« lorsqu’elles sont de nature u produire du doute, s’in« terpretent eu faveur de celui qui a contracté;
« Considérant qu’il est avoué et reconnu entre les
« parties que trois locateries dites M o re t, la G uillerm ie
« et P a ra y, faisoient partie des dépendances de la terre
« de C h am p follct, avant le 6 ventôse de l ’an 9 , et que,
« nonobstant ce contrat de vente, elles ont été jouies par
k le sieur Chopin ;
« Considérant que les créanciers seuls du sieur C liopin
« auroient pu se plaindre des infractions qu’il se seroit
« permis de faire aux objets compris dans l’actif qu’il
« leur avoit fo u rn i, mais non le sieur Saint-Beauzille,
« étranger au contrat d’union, et qui n’a pas acquis leurs
« droits;
« Considérant que le sieur Saiut-Bcauzille n’établit pas
« que le sieur C h o p in , son vendeur, retienne par-devers
« .lu i d’autres.papiers concernant la terre de Cham pfollet,
«. que ceux qu’il a offert de- lui r e m e t t r e t a n t au tribunal
k - de, conciliation qu’en ce tribunal ;
« Considérant qu’à l ’égard des bestiaux et bois pré« tendus enlevés par C h opin , et que ce dernier désavoue,
« pour raison desquels le sieur Saint-Beauzille réclame
« une indemnité à dire d’experts, sa demande n’est pas
« établie ;
« Considérant que par l ’acte de vente du 6 ventôse
«
«
«
«
«
an 9 , le sieur Chopin n’a pas réservé à D enis M agot
et sa femme d autre jouissance que celle portée dans
le contrat de mariage ; que les termes employés dans
cet acte sont tels que l’on ne peut y vo ir d’autres.
dispositions;
�a l e tribun al, jugeant en premier ressort, condamne
« le sieur Chopin ¿\ livrer au sieur Saint-Beauzille toutes
« et chacuues des parties composant la terre de Cham p« fo lle t, qu’il lui a vendue le 6 ventôse an 9 , notam «
«
«
«
ment les trois locateries dites de M o re t, la G uillerm ie
et P a r a y , avec restitution depuis la vente , à dire
d’experts convenus et nommés d’o ffice, même d’ un
tiers, le cas échéant ;
«
«
«
«
a
« D éclaré le sieur Saint-Beauzille non recevable dans
le ch ef d e ses conclusions qui tendent à obtenir le p rix
des bestiaux et des bois qu’il prétend q u e le sieur
C h o p in s’est permis d’enlever dans les deux mois q u i
ont précédé l’acte du 6 ventôse de l ’an 9 ; donne acte au
sieur Chopin de ses offres de remettre au sieur de Saint-
« Beauzille.les papiers et titres qu’il a en son p o u v o ir ,
« iceux relatifs à la terre de Cham pfollet j condamne
« le sieur Saint-Beauzille à les re ce v o ir, sa u f, dans le
« cas où il découvriroit que le sieur C hopin en retient
« d’autres par-devers lu i, à se p ou rvo ir ainsi qu’il se
« l ’avisera p o u r se les faire restituer ;
« Condamne le sieur C hopin aux trois quarts desk dépens faits par le sieur Saint-Beauzille, non compris
« le coût et levée du jugem en t, et Saint-Beauzille en
v l’autre quart.
« E n ce qui touche la demande form ée contre M agot
« et sa fem m e, condamne ces derniers à vider la locaterie
« de la C ro ix -B o u g e ,
en rapporter les jouissances à.
« dire d’exp erts, depuis le 6 ventôse an 9 ; et en con« séquence déclare bon et valable le congé du z 2 tlicr-
�« miel or même année ; condamne M agot et sa femme
« aux dépens que la demande a occasionnés. »
A p p e l de ce jugement de la part du sieur C h o p in ,
par acte du 13 novem bre 1806, dans toutes les dispo
sitions qui lui portent prejudice.
M agot et sa femme se sont aussi rendus appelans ; mais
leurs moyens de défense ne concernent pas le sieur
Chopin , qui ne s’occupera que des questions qui lui sont
personnelles. Il se croit en môme temps quitte de toute
reconnoissance envers le sieur de Saint-B eauzille, de ce
qu’il a bien voulu respecter la décision des premiers juges,
ainsi qu’i l l’annonce, page 19 de son mémoire.
Il ne restera donc alors à exam iner que la seule ques
tion de savoir si le sieur Chopin , en vendant nomina
tivem ent sept locateries, a pu en vendre dix.
Ce nest pas dans les actes de vente que le sieur de
Sain t-B eauzille trouve des moyens pour appuyer la sin
g ulière prétention
la q u e lle ; il v e u t Jjien sc réduire. E n
e ffe t, le contrat d’union n’énonce que sept locateries : il
en est de même de l’acte sous seing p riv é , et de la vente
authentique. Aussi le sieur Saint-Beauzille veut principa
lement argumenter de la correspondance du sieur Chopin ;
il cite quelques fragmens de lettres dont il se dit porteur,
et qui nous apprennent que le sieur Chopin 11e lui a pas
donné l’état de la consistance et des produits.
D ès que le sieur Chopin 11e lui a pas donné l’état do
la consistance de la terre, il est impossible que le sieur
Saint-Beauzille ait entendu acheter dix locateries au lieu
de sept.
�C
23 )
^
4^7
Que le sieur Chopin a it, si l’on v e u t, exagéré le pro
duit dans sa correspondance avec le sieur D ecom bes, ce
ne seroit là qu’ une chose très-ordinaire. En gén éral, celui
qui veut vendre exagère plutôt qu’il n’affoiblit : c’est à
celui qui achète h prendre ses précautions, pour examiner
et connoître l’objet qui lui est proposé.
M ais il n ’y auroit pas même d’exagération, si l’on s’en
rapporte au sieur S a in t-B ea u zille; car il demande une
somme de 800 francs par an n ée, pour le produit de la
locaterie de la C r o i x - R o u g e ; et en calculant d’après cette
préten tion , la correspondance du sieur C h op in , même la
lettre du 7 th erm id o r, établiroit qu’il ne connoissoit pas
lui-m ôm e la valeur et le produit de sa terre.
• Il faut au surplus etre bien dépourvu de moyens, pour
s’appesantir sur des circonstances aussi minutieuses.
On se contentera-de répondre, pour ne plus y re v e n ir,
que le sieur Saint-Beauzille en impose, lorsqu’il dit qu’ il
ne conuoissoit ni la valeur ni la situation de cette pro
priété. I l a tout v u , tout examiné en personne ; il a d e
meuré un mois dans le canton , a visité les propriétaires
v o i s i n s , a pris des informations de ceux qui nvoient des
connoissances locales, notamment d’un sieur M a r t in ,
homme probe, et riche propriétaire, qui a toujours vécu
et habité près la terre de Champfollet.
E n fin , le sieur Saint-Beauzille convient qu’il est venu
visiter cette terre sur la lin de l’an 8. Il a donc eu plus de
cinq mois avant de passer la vente, pour prendre tous les
renseignemens nécessaires.
L e sieur Saint-Beauzille n’est pas plus exact lorsqu’il fait
le reproche au sieur C hopin de lui avoix' vendu un bois
�‘
C M ) .
de futaie pour une contenue de vingt septerées, tandis que
ce bois n’en contient que quatre.
D ’abord, la contenue du bois n’est exprim ée ni dans
l ’acte sous seing p r iv é , ni dans la vente authentique;
et pour ne trouver que quatre arpens dans le bois dont
il s’agit, sans doute que le sieur Labrue compte pour
rien le bois futaie du Sablon, semé depuis trente ans
dans les meilleurs chambonnages du pays, très-abondant
en chênes et orm eau x, qui déjà ont plus de trente pieds
de hauteur.
Ces petites recherches ont déjà occupé trop long-temps;
il faut aborder la question principale.
L e sieur C h opin , en vendant la terre de Cham pfollet qui
se compose d’une maison de m aître, d’une réserve, de
trois domaines et de sept locateries, a-t-il entendu et pu
vendre autre chose que les objets désignés?
Les expressions qui terminent la vente sous seing p riv é ,
o u la vente authentique, p e u v e n t - e l l e s a u t o r i s e r le sieur
Saint-Beauzille à dem ander trois locateries qui ont une
dénom ination différente de celles comprises dans la vente,
q u i, lors de la ven te, étoient entre les mains de colons
autres que ceux des sept locateries vendues ?
Il semble qu’il suffit d’énoncer les questions, pour les
résoudre en faveur du sieur Chopin.
E n gén éral, pour juger des cas où les objets accessoires
doivent faire partie de la vente ou n’y entrent point, il
faut surtout exam iner l’intention des contractons, pour
reconnoître ce qu’on a voulu com prendre ou nepns com
prendre dans la vente. C ’est ainsi ques’exprim e M . D om at,
L ois civiles, du contrat de ven te, Lit. 2, sec t. 4 ; il appuyé
son
�( *5 )
son opinion sur deux lois du ff. D e reg. jur. Sem per in
stipidationibus et in cœteris con tractibus, id sequim ur
quod actum e s t, quod fa c tio n est cum in obscuro sit
e x offectione eu ju sq u e capit interpretationem . L . 3 4 ,
L . 168.
A u titre des conventions, le morne auteur, livre i er. ,
titre I er. , section 2 , n°. 13 , dit que les obscurités et les in
certitudes des clauses qui obligent, s’interprètent en faveur
de celui qui est obligé , et il faut restreindre l ’obligation au
sens qui la dim inue; car celui qui s’oblige ne veut que le
m o in s, et l’autre a dû faire expliquer clairement ce qu’il
prétendoit. A ria?ius a it m ultùm intéressé quœ ras utràni
a liq u is' oblige t , a n aliqu is liberetur, ubi de obligando
q u er itu r, propensiores esse debere n o s , s i habeam us
occasionem ad negandum ubi de liberando e x diversot
u t ja c ilio r sis ad liberationem . L . 4 7, au if. de obi. et act.
A l’article suivant, le même auteur dit que si l’obscu
r ité , l’am biguïté, ou tout autre vice d’une expression
est un effet de la mauvaise fo i, ou de la faute de celui
qui doit expliqu er son in ten tio n , l ’interprétation s’en
fait contre lu i, parce qu’il a dû faire entendre nettement
ce qu’il vouloit : ainsi lorsqu’ un vendeur se sert d’une
expression équivoque sur les qualités de la chose vendue,
l’explication s’en fait contre lui.
Cette rè g le , que l’interprétation se fait contre le ven
d e u r, n’est donc pas; générale; elle se restreint au cas où
il est impossible de connoîtro l’intention des parties. G’est
ce que dit expressément la loi 3 3 , au ff. D e c o n tr . em pt.,
citee par Doniat. P r u n iim speclari apport et quid a c li
D
�( 26 )
s i t , s i non id apparent, tune id accipitur qu'od vendi.iori n o c c t; ambigua enim oratio est:
Cette règle du droit, d’yilleurs, d’après les loisj ne s’ap
plique ordinairement qi^aux servitudes non déclarées, ou
aux énonciations vagues et indéfinies, parce qu’alors le
vendeur a pu s’expliquer plus clairement. P o tu it leaem
*apertiiiç
’
. c o n s c n b*7e r e .
# t
v *
• ;ij
A in s i, par exem p le, si le sieur Chopin avoit’ vendu
au sieur S ain t-B eau zille sa terre de Cliam pfollet, telle
qu’elle se limite et com porte , circonstances et dépen
dances , sans en rien réserver ni re te n ir, et sans autre
désignation, il seroit obligé de livrer à l’acquéreur tout ce
qui a pu faire partie de cette terre; il auroit à se repro
cher de n’avoir pas désigné plus particulièrem ent les objets
qu’il vouloit ven d re, et ceux qu’il vouloit conserver ; et
on pourroit dire avec la loi : T u n e enim ambigua
o r a ti o est. Il seroit en effet impossible de connoître et
d ’e xpliqu er l ’intention des parties.
>.'
• M ais lorsque le sieur Chopin vend sa terre de Cham pfollet j composée d’une m aison, d’une réserve, de trois
domaines et de sept locateries; lorsqu’il désigne chacun
de ces dom aines, chacune de ces locateries par la déno
mination qui leur appartient, par le nom des colons qui
les c u ltiv e n t, alors il n’a vendu que les objets désignés : il
a restreint et lim ité la terre de Cliam pfollet a ces mêmes
objets; il n’y a ni ambiguïté ni incertitude; il a expliqué
clairement ses intentions. L ’un n’a entendu ven d re, et
l ’autre n’a entendu acheter q ue trois domaines et sept lo cuteries. C ’est le sieur Chopin qui s’ob lige; dès-lors il
�4 e) 1
{ 27 )
faut restreindre l’obligation au sens qui la diminue. Son
intention se découvre par l’expression, par la limitation
qu’il a voulu donner à sa vente.
Q u’im porte qu’ensuite le sieur Chopin ait ajouté, a in si
que le tout se lim ite et com porte; qu’il ait m is, si l'on
v e u t , circonstances et dépendances cCicelle ; ces expres
sions se rapportent nécessairement et naturellement aux
objets désignés. L e sieur Chopin n’excepte rien de ce qui
les com pose; mais il ne vend p a s le s (rois locateries qui
font l’objet de la convoitise et de la cupidité du sieur de
Saint - B e au zille , puisque ces trois locateries, qui ont
chacune un nom particulier, et d’autres colons, n’ont
été ni désignées, ni comprises dans la vente.
Ces trois locateries si fort convoitées ne faisoient pas
même anciennement partie de la terre de Cham pfollet.
Cette propriété est patrim oniale’; elle ne se composoit
que des objets désignés et vendus. Les trois locateries* ont
été acquises postérieurement : quand elles auroient été
annexées à'la terre, elles ne seroient pas p o u r cela co m
prises dans la vente , parce que le sieur Chopin auroit été
le maître de les distraire lorsqu’il a vendu.
P o u r juger d’ailleurs si la vente d’un corps de bien
comprend tout ce qui pouvoit en faire partie .ancien
nement , on examine d’abord si la vônte est générale. :
• encoi'e les auteurs qui ont traité cette question, ne la
discutent-ils que sous les rapports des testa mens ou des legs
qui ont été faits d’une te r r e , d’un domaine ou d’une
métairie; O n connoît la fameuse* loi Prœ d. 91 , de leg.
3?
Papinien parle des foncls séjans et gabinions. Il
dit que si io testateur a légué les"fonds séjans comme il
D 2
�(
2
8
}
les a a cq u is, sans parler des fonds gabiniens qu’il avoit
acquis par le même contrat et pour un même p r ix , l’argu
ment de cette acquisition faite pour un même p rix ne
seroit pas suffisant pour comprendre le tout dans le
legs; il faudroit considérer les papiers du père de fam ille,
pour savoir s’il avoit coutume de comprendre les fonds
gabiniens avec les séjans, et d’en confondre les revenus.
S cé vo la , dans la loi P a tro n . §. i cr. , de Jeg. 3, propose
l’espèce d’un legs d ’une terre composée d’héritages dont
les uns étoient situés dans la Galatie et les autres dans
la Gappadoce. L e legs ne parloit que des héritages situés
dans la G alatie; néanmoins le jurisconsulte décide que
le legs de la terre doit com prendre les héritages situés
dans la C appadoce, parce qu’ils étoient tous réu n is, et
exploités par le même fermier.
D u m oulin cependant, T raité des fiefs, §. I er. , gl.
5,
n ° . 16 , d it qu e cc n’est pas assez que le t o u t a i t été.
ex p lo ité par un m ê m e fermier , parce que cela peut avoir
été fait]pour la com m odité de la culture. Il veut encore
quelque acte qui fasse [connoître que l’intention du
seigneur a été de les unir ensemble d’une union per
pétuelle.
1’
H en rys, tom. 4 , cons. 5 , lit. des Iegs^est d’avis que le
legs d’une m étairie, fait'par Je père à soj^fils-, com prend
les héritages dépendans de ladite métairie^ quoique situés
dans une autre province. Il en donne pour motifs que
le père avoit fait valoir ces héritages conjointem ent, et
les avoit donnés ait même grangier ; mais il s’appuye
principalem ent sur la qualité des parties, et la nature de
la disposition. Il soutient qu’ un semblable legs doit être
�C
29 1
interprété largem en t, avec d’autant plus de raison que le
père a voit fait une institution universelle au profit de celui
qui contestoit le legs. L orsqu’il s’agît en effet d’une dis
position à titre gratuit, 011 doit l’étendre plutôt que la
restreindre; tandis qu’en matière de contrats à titre oné
reux , les conventions sont de droit é tro it, et doivent être
plutôt restreintes qu’étendues.
. E n fin , ces auteurs ne s’occupent que des testamens ou
legs, et ne se d écident p o u r la réunion qu’autant que la
disposition est gén érale, faite d’un corps de biens, sans
désignation ni limitation.
Ici il sagit d’une vente qui com prend à la vérité une
terre, mais laquelle terre ne se compose que des bâtim ens,
enclos, réserve, trois domaines et sept locateries.
Com m ent, lorsqu’il n’en a été vendu que sept, voudroiton en avoir d ix ? Comment trouveroit-on du doute ou de
l’incertitude, lorsqu’il y a évidem ment l’intention de ne
vendre que ces objets, lorsqu’il y a une limitation si
précise ?
Ô n objecte que le sieur C h o p in , dans sa v e n te , ne
s’est réservé que sa maison des Châtelans et les acces
soires déterminés dans l’acte de vente.
O r , dit-on, cette réserve ne peut exclure que les objets
qui y sont énoncés ; donc tout le reste est vendu.
Cet argument n’est pas m ême spécieux. L e sieur
Chopin n’a exprim é celle réserve qu’à raison de ce que
la maison des Chatelans et les accessoires étoient englobés
ct compris dans les domaines et locateries faisant partie'
de 1« vente : la distraction en est donc devenue néces-Sdiic. Mais il cloit inutile de résci’ver les locateries des
�( 3° )
M o r e t, G uillerm ie], et P a r a y , puisque le sieur Chopin
ne vendoit que sept locateries, qui toutes avoient un nom
particulier et un colon différent.
O n reproche encore au sieur Chopin de n’avoir donné
aucuns confins aux sept locateries vendues : mais celte
objection est contradictoire avec le système du sieur
Saint-Beauzille. Il ne reclame les trois locateries que parce
qu’on lui a vendu généralement et indistinctement la
terre de C h am pfollet, circonstances et dépendances. II
soutient qu’un corps de b ie n , un dom aine, une m étairie,
n ’ont pas besoin d’être confinés dans une vente ; et il
a raison en ce point.
O r , qu’est-ce qu’une locaterie, si ce n’est un corps
de b ien , c’est-à-dire, plusieurs héritages réunis sous la
main du même propriétaire ou du même colon. L e sieur
C hopin a donc dû se dispenser de confiner chaque lo
caterie ; c’eût été
augmenter le v o l u m e d’ un a c t e sans
aucune nécessité. C ependant le sieur C h o p in a pris cette
précaution, lorsqu’elle a été utile : par exem ple, comme
il avoit concédé la jouissance de la locaterie de la C roixIlou ge à Denis M agot et sa fem m e, il n’a pas oublié
de lim iter et confiner cette locaterie, pour éviter toutes
discussions avec l’acquéreur, Il a. donc, fait tout ce.qu’il
devoit et pouvoit faire pour manifester clairem ent son
intention, pour apprendre à son acqéreur qu’il ne vendoit
que des objets dé terni in és, et que celui-ci ne devoit com pter
que sur les sept locateries énoncées en la vente.
E h quoi! trois actes successifs énoncent sept locateries
seulement; le contrat d’ un ion , qui contient l’élat de l’actif
du sieur C h o p in , compose la terre de Cham pfollet de
�( 31 )
trois domaines et sept locateries -, l’acte de vente sous seing
p rivé, la vente authentique',; sfc réfèrent au contrat d’union,
et n’énoncent encore que sept locateries : comment le
sieur Saint-Beauzille peut-il donc prétendre qu’il lui en
a été vendu d ix ? où donc est le doute? où donc est
l ’ambiguïté ?
'•
A la vérité il prétend que le contrat d’union n’a aucune
corrélation avec la vente qui lui a été consentie : mais
n’est-ce pas une absurdité ? I>a vente est faite en execution
de ce contrat d ’ u n i o n , et conform ém ent à icelui. SaintBeauzille accepte toutes les conditions exprim ées en ce
contrat d’union ; il déclare en avoir pxùs connoissance ;
il s’oblige de payer les sommes déléguées, aux termes
stipulés par ce prem ier a c te , et par la délibération qui
l ’a suivi. C ’est lui qui devient le débiteur des créanciers
Chopin. Il y a novation pleine et entière : la vente lui
est consentie en présence et du consentement des syndics
et directeurs de ces mômes créanciers; il se met au lieu
et place du sieur Chopin : il n’a donc acquis que ce qui
avo it été abandonné au x créanciers ! il ne peut donc,
réclam er que sept locateries, puisqu’on n’en avoit pas
abandonné davantage aux créanciers!
C ’est ainsi que cela a été exprim é dans l’acte sous sein«t
T
.
°
prive. L e s cu'constances et dépendances dont le sieur
Saint-Beauzille fait tant de fracas , sur lesquelles il revient
si souvent, sont une addition à l’acte authentique; addi
tion qui n’est que redondance, style ou protocole de no
taire , qui ne iixc pas même l ’attention des parties, qui
ne se rapporte qu’aux objets nominativement vendus, et
ne valoit paS ia peine d’etre relevée.
�( 32 ) ^
Plus on examine les conventions stipulées entre les
parties, plus on s’étonne de l’acharnement et de l’insistcnce du sieur Saint-Beauzille. Jamais il n’y eut de contrat
plus clairement e x p liq u é; mais s i , par im possible, on y
trouvoit quelques clauses obscures, la règle la plus sûre
p ou r interpréter les actes, c’est l’exécution qu’ils ont eue.
Q u ’on ouvre tous les auteurs qui se sont occupés des con
ventions et de leur exécution, comme Despeisses, D o m at,
P o th ie r, même les auteurs élém entaires; tous enseignent
que l’obscurité ou l’am biguïté des actes s’interprète principalem entpar l’exécution que leur ont donnée les parties.
C ’est une règle tellement triv ia le , qu’on ne croit pas devoir
lu i donner un plus grand développem ent. L e Code
N apoléon répète ce principe en plusieurs en d ro its, et
m et tellement d’im portance à l’exécution des actes, qu’en
l ’article 1325, où il déclare nuls les actes sous seings privés
contenant des conventions synallagm atiques, lorsqu’ils
n’ont pas ét6 faits d o u b le s , il ajoute ces termes remar-»
quables, dans la troisième partie de l’article : « Néanmoins
« le défaut de mention que les originaux ont été faits
« doubles, triples, etc., ne peut être opposé par celui
« q u i a exécuté de sa part la convention portée dans
c l’acte. »
Cette disposition du Code est une innovation. O n
pensoit autrefois que quelleque fût l’exécution qu’on avoit
jdonnée à l’acte sous seing p r iv é , on n’en étoit pas moins
rccevable à l’attaquer de n ullité, lorsqu’il n’a v o il pas été
fait d ouble; et cela par la raison qu’on n’avoit aucun
m oyen coercitif pour forcer un tiers à l’exécuter. M ais
le législateur a pensé que celui qui avoit connoissance
sullisante
�( 33)
.
*2?
suffisante des conventions, qui les avoit déjà rem plies, ne
pouvoit plus de bonne foi revenir contre ses engagemens.
E n appliquant ces principes à l’espèce particulière,
quelle idée pourra-t-on concevoir de la témérité du siéur
Saint - Beauzille ? Il acliète le 3 nivôse an 9 , et se met
en possession dès le moment même : c’est à cette date qu’il
rapporte la consommation de la vente ; c’est de cette
époque qu’il réclam e la restitution des jouissances des trois
locateries qu’il veut faire comprendre dans sa vente..
L orsqu’il prend possession, il ne demande et ne jouit
que de sept locateries]; il perçoit toute la récolte de l’an 9;
il voit les colons de ces trois locateries recueillir les fruits ;
et ne demande i*ien contre qui que ce soit.
L e 16 pluviôse an 1 0 , il assigne le sieur Chopin en
restitution des bestiaux de la réserve de Ghampfollet :
pas un mot des trois locateries contentieuses.
Il perçoit encore les fruits de l’an 1 0 , se contente des
sept locateries ; et ne demande rien à personne.
Ce n’est que deux ans a p rès, lorsqu’il a perçu deux
récoltes, lorsqu'il a exécuté les clauses de la v e n t e , lors
qu’il est entré en payement avec les créanciers , qu’il s’avise
de vouloir agrandir sa propriété de ces trois lo cat cries.
Il ne peut pas équivoquer sur sa non-jouissance et sur
cette exécution; car lors du jugement par défaut, du 28
floréal an 12, qu’il a obtenu contre le sieur C h o p in , il dit
qu’il s’est mis en possession de la terre de Chainpfollet,
à Vexception des trois locateries dont il s'a g it, omises
pat' A n to in e Chopin dans l’acte de vente qu’il lui a con
sentie. Il conclut à la restitution des jouissances depuis
le 3 nivôse an 9 , date de la vente sous seing privé.
E
�Souvenir tardif! prétention absurde,dont rien ne peut
excuser la témérité ! L e sieur Saint-rBeauzille a interprété
lui-m êm e les conventions il a .çxcçutç le contrat dans
toute sa plénitude : il est donc absolument non recevable.
O n a voulu trouver quelque ressemblance entre cette
cause et celle du sieur Çanillac contre M e. C roze; et sans
doute on ne manquera pas d’invoquer l’arrêt de la cour
en faveur du système du sieur Saint-Beauzille : mais
quelle énorme différence entre les deux questions!
Dans la cause du sieur Ç a n illa c, celui-ci avoit vendu
au sieur M om et son domaine de Chassaigne, avec ses
circonstances et dépendances, sans en rien excepter ni
reten ir, et tel qu’il lui avoit été transmis par un partage
de fam ille, de 1784.
Dans ce partage se trouvoit comprise une annexe de la
terre de Chassaigne, appelée la V é d rin e , et le vendeur
n’avoit d’autre titre, ni de possession de la V é d rin e , qu’en
vertu de ce partage : tout étoit réuni sous une seule et
même exploitation. Dans les confins don nés, les bois de
la V éd rin e se trouvoient englobés par le contrat de vente.
L ’acquéreur M om et avoit joui du moment de son contrat,
et sans réclamation de la part du ven deur, soit de Chas
saigne, soit de la V éd rin e : après lu i, M e. C roze, second
acquéreur, avoit également joui des deux objets pendant
plusieurs années. Enfin il étoit dém ontré par les termes
de l’acte, par l’exécution qu’il avoit eu e, et par une foule
de circonstances inutiles à rappeler, que l’intention du
sieur Çanillac avoit été de vendre le to u t, qui ne faisoit
qu’ un seul et même corps de bien.
Ic i, au coutraire, le sieur Chopin a restreint la consi«-
�tance de>sa terre de Cham pfollet à trois domaines et sept
locateries :• cette restriction concorde avec le contrat d’u
nion et l ’acte de vente. L ’acquéreur n’a pas entendu acheter
autre chose ; il a pleinement exécuté le contrat ; il a eu
des discussions avec son vendeur un an après sa mise en
possession ; il a cherché à faire naître des difficultés de
tout g e n re , et n’a pas réclamé les trois locateries qui
font l’objet de sa demande actuelle. Il a joui une seconde
année même silence sur les trois locateries : ce n’est
q u’en l ’an 11 q u ’il manifeste des m ouvem ens d’in qu iétu d e , de versatilité, qui annonceroient plutôt un état
va p o re u x qu’un esprit bien sain.
Il tergiverse, il balance, il form e des demandes contre
son vendeur , contre ses créanciers; il se dép art, recom
m ence, et se départ encore; il termine enfin par faire
éclore neuf chefs de conclusions, tous plus extraordi
naires les uns que les autres : il ne sait ce qu’il veu t, ce qu’il
désire; il n’est pas même de bonne foi. Il n’a pu ignorer,
lors de la vente, que le sieur Chopin conservoit ses trois
locateries; elles sont toutes trois situées dans la commune
de Paray. Il exige que le sieur Chopin hypothèque à la
sûreté de la vente toutes les propriétés q i i i l a actuel
lement dans la commune de Paray. Cette hypothèque
spéciale, si elle etoit rég u lière, ne pourroit frapper que
sur les trois locateries dont il s’agit: la réserve des Châtelans n’est qu’ un mince accessoire qui n’offroit aucune
sûreté. L e sieur Saint-Beauzille a pris une inscription con
servatoire de 26000 francs.
Il n’y a donc pas de loyauté de la part du sieur SaintBcnuziiie, de persécuter un homme sensible et bon, de
�vouloir accabler un débiteur m alheureux, dont les dettes
ne se sont accumulées que parce qu’il a eu la délicatesse
de ne pas rembourser en assignats des créances légiti
mes, et qui doit au moins conserver les foibles débris d’une
fortune considérable qu’i l tenoit de ses pères.
f.
'
M e. P A G E S (de R iom ) , ancien avocat.
•
•
;•
A
; f< M e. G O U R B E Y R E , avoué.
.i ¿'
!
; •
:) • t
'■
'
‘‘ '
i ,/m
:>
''
.«
' 1
'
..
'
)
il
A R I O M , de l'imprimerie de T hibaud L a n d r iot , imprimeur
de la Cour d ’appel. — Février 1808.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chopin, Antoine. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Subject
The topic of the resource
créances
locaterie
ventes
fraudes
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Sieur Antoine Chopin, docteur en médecine, appelant d'un jugement rendu au tribunal de Gannat, le 23 août 1806 ; contre sieur Jacques Labrue de Saint-Beauzille, intimé.
Table Godemel : Vente : 11. après un contrat entre ses créanciers contenant un état de son actif immobilier, le sieur Chopin ayant vendu, le 6 ventôse an 9, la terre de Champfollet consistant en une maison de maître, réserve, trois domaines et sept locatairies, en un seul tenant, sous la seule réserve d’une maison et de quelques objets soigneusement désignés et confinés, et tel que le tout avait été énoncé en l’état produit aux créanciers ; a-t-il pu ensuite soutenir que ladite terre de Champfollet contenant dix locatairies au lieu de sept, cette vente ne comprenait pas les trois locatairies de la Guillermie, de Moret et de Paray ? s’il y a, dans le contrat de vente, des clauses obscures et ambiguës, contre qui, du vendeur ou de l’acquéreur, doivent-elles être interprétées ? 12. si le contrat de vente a stipulé, en faveur d’un tiers, réserve de la jouissance de l’une des locatairies, l’acquéreur peut-il, contre la disposition précise et absolue de son titre, prétendre que, d’après un acte antérieur, la jouissance du tiers ne devait commencer qu’après le décès du vendeur ? Clause : - obscure. - s’il y a, dans le contrat de vente, des clauses obscures et ambiguës, contre qui, du vendeur ou de l’acquéreur, doivent-elles être interprétées ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
An 9-An 10
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1819
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0521
BCU_Factums_G1816
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53346/BCU_Factums_G1819.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paray-sous-Briailles (03204)
Jaligny-sur-Besbre (03132)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
domaines agricoles
fraudes
locaterie
ventes