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OBSERVATIONS SOMMAIRES
r
P our
le sieur A n t o i n e C H O P IN , docteur en
m édecine, appelant ;
C o n tr e le sieur J a c q u e s L A B R U E - S A I N T B E A U Z I L L E , intimé:
^
L A cour , après deux audiences solennelles, a déclaré
qu’il y avoit partage d’opinion dans cette cause.
1
Trois magistrats compartiteui’s sont appelés; Une nou
velle discussion va s’ouvrir. L e sieur Chopin doit sé
rassurer sur la justice et l’impartialité de ses juges ;
mais il a le droit de présenter quelques observations ,
surtout pour ceux des magistrats qui n’ont point connoissance de l’affaire.
[
L e sieur Chopin père à laissé à son fils une succession
obérée. C e l u i - c i , tout entier à sa 'profession, ne s’est
point assez occupe de ses affaires ; les dettes se sont accu
mulées : il s’est vu dans la nécessité de réunir ses créan
ciers.
Il a traite avec eux le 9 brumaire an 9 d
an
sce
ce
contrat d’union, il donne l’état de son actif i l compose
sa terre de Champfollet d’une maison de maitre, e tc.;
reser ve , trois domaines et sept locateries.
w1
avoit
lI
six autres locateries dont il n e p a rle p as;
mais il n 'a pas trompé ses Créanciers par une omission
ç volontaire. D ’ab o rd , il ne l e pouv o i t pas. L e sieur
1
�( O
M artin , syndic, un des principaux créanciers, étoit le
voisin du sieur. C h o p in , et.conüoissoit.peut-être mieux
que lui la terre de Cham pfollet et ses dépendances.
2°. Il ne fait pas-l’dbandon de ses biens à ses créanciers*
il s’oblige seulement de vendre la terre dont il a donné
l ’é t a t, de manière que les créanciers unis touchent la
somme de 90000 fr. sur le p r i x , et que celle de 5oooo fr.
soit employée à l’acquittement des dettes hypothécaires
et non exigibles.
30. Les créanciers n’ont pas ignoré que le sieur Chopin
avoit cCautres biens patrim oniaux ,* car il est dit que si
la vente, telle qu’il la propose, ne s’effectue pas avant
le 4 nivôse lors pro ch ain , les créanciers sont autorisés
à vendre tant ladite terre de Champfollet que ses autrçs
biens p a trim o n ia u x , etc.
A v an t ce traité le sieur Chopin étoit déjà en marché
.de sa terre avec le sieur Labrue-Saint-Beauzille. Ce der
nier étoit venu en l’an 8 visiter cette propriété dans
tous ses détails; il avoit passé plusieurs mois sur les lieux ,
et à différentes reprisesj il vivoit chez le sieur C hopin,
qui a ofïert, par des conclusions précises, la preuve de
ces faits.
Une première v e n te , sous seing privé , a eu lieu le
3 nivôse an 9>
a etc faite en exécution et confor
mément au contrat d’union. Dans cet acte la terre de
Champfollet se compose de la m aison, réserve , bois
futaie, trois domaines et sept locateries.
Chaque domaine j^î^qup locotcyie est désignée par la
dénominatiçin q u i lui' est propre, avec le n o in d e chacun
•des. inétayer$r011 colons qui les cultivent.
�C3 )
L e sieur Chopin se réserve sa maison des Châtélans
et quelques héritages qui l’environnent. Cette réserve
étoit indispensable ; la maison des Châtélans et les héri
tages d’alentour faisoient partie des domaines des Mi~
chards et des Q unissons vendus au sieur Saint-Beauzille.
Il vend aussi la locaterie de la C roix-R ouge , grevée
de l’usufruit de'D enis M agot1et de sa femme jusqu’au
décès du dernier survivant.
L a vente sous seing p rivé n’énonce aucuns bestiaux.
L e 26 ventôse an 9 , vente authentique, toujours en
exécution et conformément au contrât d’union dont il
(i été donné connoissance au sieur Saint-Beaùzille, ainsi
que d’une délibération postérieure des créanciers.
Ici le sieur Saint-Beauzille l’éelame les bestiaux , non
comme faisant valoir un d ro it, mais comme suppliant,
et pour ne pas être vitupéré par son épouse.
L e sieur C h o p in , franc et l o y a l , convient qu’il avoit
eu l’intention de les vendre -, en conséquence, ils sont
compris dans l ’acte authentique.
Mêmes détails au surplus dans ce contrat. Toujours
trois domaines et sept locateries . IVieme désignation et
par leurs noms propres, et par les noms des colons,
comme dans l’acte sous seing privé.
On a ajouté que le sieur Chopin sç dépnrfoit de la •
susdite terre , circonstances et d é p en d a n ces d ' ¿celle ■c’est
xiinsi que pacte se termine. Mais à la première audience
le sieur Saint-Beauzille est convenu que ces expressions
n’étoient q Ue siylc de notaire-, que le sieur Lacodre, qui
a reçu l ’acte, nc l’avoit pas rédigé, Ct avoit seulement
mis à la fin CC3 mots ¿»usa c quc loas les notaires ont
dans leur protocole.
2
�(
4 )
L e sieur Saint-Beauzille n’a pas ignoré encore que sou
vendeur avoit d’autres biens -patrim oniaux ,. et dans le
même lieu , puisqu’ il les lui l'ait hypothéquer spécia
lement à l’exécution de la vente, et qu’il a pris sur eux
une inscription de 2Ôooo francs, à raison de laquelle il y
a procès.
E u effet,.le sieur C h opin , indépendamment des objets
vendus, possédoit encox’e le domaine de Frib ourg, les
localeries G uillerm ie, Mor-et, Varay^ Baire-du-Becquet ,
des B ra s , et du L o n za t.
Il n’a v e n d u que les suivantes :E lie , la Croix-Iioi/ge,
B ela ir , C haum eton , Neuve - d u - P u j y Champ fo lle t ,
IDuport.
L e sieur Saint-Beauzille, bien content de son marché ,
qui a fait un placement très-avantageux, a réuni l’agréable
à l’utile , s’est mis en possession de tous les objets nomina
tivement vendus, et rien de plus. Il a joui deux ans,
perçu deux récoltes sans se plaindre : il a même remar
qué que la locaterie la Guil/ermie étoit à sa convenance;
il a proposé au sieur Chopin d’en faire l’échange avec
une de celles qu’il avoit acquises. L e marché étoit sur
le point de se conclure ; mais on n’a pu s’accorder
sur les conditions. L e sieur Chopin a encore offert la
preuve de ce fait.
En l’an 1 0 , il a formé contre le sieur Chopin une
demande qui ne fait pas infiniment d’honneur à sa déli
catesse. Il ne devoit avoir aucuns bestiaux, si on avoit
suivi strictement la vente sous seing privé.
Il les obtient de la bonne foi de son ven d e u r, par
l’acte authentique. Mais il savoit que ceux de la réserve
�(5)
avoient été vendus par les percepteurs pour le payement
des impositions.
* N ’im porte, il les demande au sieur^ Chopin. Justice
a été faite de cette réclam ation; Saint-Beauzille en a
été débouté. Mais au moins il ne demandoit que ces
bestiaux, et garda le silence sur les locateries en question.
O n doit dire cependant que le sieur Saint-Beauzille,
par acte du 22 thermidor an 9 , avoit glissé ténébreuse
ment un congé au fermier du domaine de F rib o urg, et
a ux six colons des locateries non comprises dans la vente.
Mais ce congé n’a pas eu de suite il n’a été ni dénoncé
ni signifié. Saint-Beauzille n’avoit pas même osé en parler
dans son m ém oire; il ne l’a fait éclore qu’à l’audience,
et pour parer au moyen puissant résultant de l’exécu
tion de la vente.
Ce n’est qu’en l’an 11 , après plusieurs demandes dont
le sieur Saint-Beau zillc s’est d é p a rti, qu’enfin il a p ré
tendu que trois locateries , celles dites la Guiller/nie
M oret et P a r a j , faisoient partie de sa ven te, parce
qu 'ü avoit acheté la terre de Cham pjbllet , et a trouvé
des gens assez faciles pour le croire. Il a réussi devant
les premiers juges.
O n ne peut être divisé sur l’absurdité des motifs du
jugement dont est appel; mais on l’est sur le résultat.
■Pour les motifs, il est impossible que l’erreur oulV ga1 ement puisse aller plus loin.
On y remarque les contradictions les plus choquantes:
tantôt on y dit (]ue lc contrat d’union n’a rien de com
mun avec la vente, et que le sieur Chopin a été maître
de vendie plus ou moins; ce qui c o n d u ir o it ¡\ la con-
3
�(
6 )
séquence toute naturelle que le sieur ‘Chopin n’a vendu
que ce qu’il a expressément désigné. Pas du tout : Chopin
a vendu plus qu’il n’a voulu ! quoiqu’il ait désigné li
mitativement ce qu’il a voulu vendre , on juge qu’ il a
vendu tout ce qui composoit anciennement la terre de
Champfollet.
Bientôt après, le contrat d’union a fait la règle; car
quoique le sieur Chopin ait vendu la locnterie de la
Croix-Rouge y grevée de l’usufruit envers Denis M agot
et sa femme, dès le m om ent même de la vente; comme
le contrat d’ u n io n , en parlant de cet usufruit, rappeloit
le contrat de mariage de Denis M a g o t, qui ne lui donne
la jo u is s a n c e qu’après la mort de Chopin , on a jugé
qu yen vertu du contrat $ u n io n , Saint-Beauzille devoit
jouir de cette locaterie pendant la vie. de son vendeur.
Excellent raisonnement, conséquence infiniment juste.
Et ne doit-on pas s’écrier avec le célèbre Dumoulin :
Quanta alea judiciorum !
Mais en la cour, où les moyens se pèsent avec discer
nement, dont les arrêts sont de grands exemples, dont
tous les membres doivent obtenir des éloges, dans un
moment consacré à la censure, on est moins ailligé que
surpris d’un partage d’opinion.
Q u ’ i m p o r t e qu’on a it mis en usage un système de ca
lomnie; que les B aziles soient en campagne pour attaquer
les mœurs ou la conduite du sieur Chopin; c’est la cause
et non la p e r s o n n e qu’on doit juger.
Q u’a acheté le sieur Saint-Beauzille ? trois domaines
et sept locateries. C ’est ainsi que le sieur Chopin a composé
sa terre de Champfollet ; il en a été le maître. 11 a dicté
�(7 )
les conditions ; il n’a vendu que ce qu’il a désigné.
Les contrats sont de droit étroit : on ne connoît pas
de vente tacite. Il n’y a ni obscurité, ni ambiguïté dans
l’acte de vente. S’il y en a voit, il faudroit exam iner'prin
cipalement et exclusivement l’intention des parties. P r i mum spcciari quid a ctisit. L o i 33, ff. D e contrah. empt.
Ce n’est qu’autant que la volonté ou l’intention des
parties ne seroit pas clairement m a n ife sté e q u ’alors l’am
biguïté s’interprète contre le vendeur. M êm e lo i 33. S i
non id appareat hinc id accipitur quod venditori n o cet,
cimbigua enw i oratio est.
E t comment peut-on juger s’il y a am biguïté? L a
même loi le prévoit encore : C um in legfi venditiom s
lia sit scriplum FLUMINA, STILLICIDIA UTI NUNC SUNT,
UT i t a SUNT nec additur q u œ Jlu m in a vel stiïlicidia.
C est alors que la loi ne trouvant qu’une énonciation
vague, veut qu’on examine d’abord l’intention des parties*,
et lorsqu’on ne peut pas la d é co u v rir, tant pis pour le
. vendeur.
M ais il faut l’entendre sainement; et la loi 3 4 , au même
t itr e , nous l’apprend encore m ieux. Car si un proprié
taire vend un fonds , et comprend dans la vente , comme
accessoire, un esclave du nom de S ty ch u s, il ne faut
pas croire que l’acquéreur aura le droit de clioisn- parmi
les esclaves qui auroient le même nom de Stychus. 11
ne Prendra que celui que le vendeur a entendu donner,
qiiem vendit0r intellexerit ; c'est-à-dire, 1° moindre.
Les accessoires en effet sont de peu d’ importance dans
une vente, nec refert qua nti sit acccssio sn>e plus an
m inus ? L . eod.
�)
« Ce n’est point par des suppositions conjecturales,
dit M. M e r lin , dans ses questions notables, tom. 5 ,
pag. 457 ; ce n’est point par des inductions forcées,
que l’on peut établir une expropriation. Les propriétés
ne peuvent se transférer que par des actes exprès et
-
«
«
«
«
(
8
« formels. »
Plus b a s , pag. 462. « L o i’squ’on a deux d roits, Îa
« réserve, de l’un n’emporte pas la cession de l’autre;
« ce n’est pas par des clauses inutiles qu’on s’exproprie :
« on ne peut s’exproprier que par des clauses expresses
« et directes. »
E n un rnot, la question paroit si claire, que m algré
toutes les subtilités du d ro it, m algré la défiance qu’on
doit avoir de ses propres lum ières, on ne pouvoit douter
du succès.
11
a fallu un système ingénieux pour balancer les sufrages. Un système! on les adopte quelquefois en méde
cine, où tout est conjectural; mais en droit! où la loi
commande, où la raison éclaire, ils pourroicnt être
funestes; il jetteroient dans un arbitraire dangereux.
E n parcourant avec rapidité ce beau titre du digeste
D e contrahenda em ption e, on s’est arrêté sur la loi
43 j §• lCr*’ et surla loi 4 5- O n a vu clnr]s la première
que lorsque le maître vend un esclave dont les yeux
sont arrachés, lum inihus e fa s s is , mais dont il a vanté
la santé, la vente n’en est pas moins bonne, parce que
l ’acheteur présent ne peut pas ignorer la cécité de l’es
clave,' et qu’il
d11 entandre qu’on ne parloit de sa
santé ou de sa force que pour les autres parties du corps.
L a loi 45 parle d’un homme qui a vendu des habits
�(9 )
vieux pour des neufs. La vente n’est bonne qu’autant
que l’acheteur n’a pas vu que les habits étoient vieux.
Vendre des habits vieux pour des neufs! les frippiers
n’en font pas d’autres, sans s’occuper de la loi 46 ; et
l ’acheteur auroit honte de se plaindre. Poui’quoi s’est-il
laissé tromper?
Oni convient que ces lois ne s’appliquent pas du tout
à l’espèce ; mais on en tire la conséquence que le légis
lateur attache beaucoup d’importance a 1 inspection , a.
l’examen de l’acheteur. S’il a v u , c’est un maladroit de
n’avoir pas fait expliquer plus clairement son v e n d c u i,
il ne peut plus se plaindre. Mais s’il n’a pas v u , s il
s’en est rapporté ù son vendeur, il peut tout demander,
tout prendre. L e vendeur a dissimulé, caché les objets :
il est de mauvaise foi.
O r , le sieur Saint-Beauzille n’a vu ni pu voir •, il
habite à trente lieues de là; il n’a considéré que la terre
en masse; il n’a calculé que les revenus, et tout lui
appartient incontestablement. D e sorte qu’il pourroit
même demander non-seulement les trois locateries qui
font l’objet de son ambition, mais encore les trois autres
qu’ il ne veut pas ; mais encore le domaine de Fribourg
qu’ il a eu la générosité d’abandonner, etc., etc.
Sans vouloir blesser personne, il semble que le sieur
Chopin peut répondre, même d’après les lois 43 ct 4 ^j
qu on doit distinguer entre un objet mobilier et un im
meuble. U n esclave que l’on fait v o ir , un habit qu on
etale , ne peuvent se comparer avec un immeuble que
1 acqueieur a lu l'uculté de v o ir , d’examiner en détail.
U n esclave, Ull habit, s’achètent, se prennent dans le
�(
10
)
moment même. U n immeuble ne s’acquiert qu’après un
examen sérieux , après une v isite , des informations sur
la position, la culture ou le produit. Il s’écoule ordinai
rement un long intervalle entre la proposition et la
v e n te ; l’acquéreur a la faculté, le loisir de v o i r , s’en
q u érir, examiner, de scruter la solvabilité du vendeur,
la facilité et la sûreté des payemens. S’il ne le fait pas,
c’est sa faute; il a du et pu le faire. Et croira-t-on qu’on
achète une propriété aussi considérable à l’aveugle, surtout
lorsqu’il s’agit de sa fortune ? Mais y auroit-il donc un
bouleversement général dans les idées, dans les prin
cipes , dans les habitudes sociales ?
C o m m e n t le sieur Chopin auroit-il voulu tromper?
O n lui reproche d’avoir exagéré la valeur de sa terre,
par une correspondance qui a précédé la vente.
Les lettres produites ne sont point adressées au sieur
Saint-Beauzille; elles sont ecrites à des tiers, à des pro
priétaires voisins, qui avoient une connoissance exacte
de cette propriété.
Quant on supposeroit que le sieur Chopin a enflé
le produit ;
Ceux à qui il s’est adressé savoient à quoi s’en tenir;
et dès qu’ils agissoient pour le sieur Saint-Beauzille ils
ont dû l’en instruire.
Q u ’un propriétaire qui veut vendre exagère la valeur
ou le produit, c’est l’histoire universelle; et il n’y auroit
pas une vente valab le, s’il falloit annuller toutes celles
dont on a e x a g é r é la valeur dans les pourparlers qui
précèdent. C ’est à l’acquéreur à examiner et ù se déter
miner d’après ses lumières ou ses informations.
�( 11 )
Il est vrai que le sieur Saint-Beauzille s est fait présenter
comme un pauvre Lim ousin , borné dans la sphèie
étroite d’un pays stérile , et qui jusque-là n avoit pas su
ce que c’étoit que des locateries du Bouibonnais.
Mais à moins de le prendre pour un descendant de
Pourceaugnac, ce n’est là qu’une jonglerie nwla roite
qui ne peut en imposer à personne. O n doit se rappe er
que Saint-Beauzille est convenu avoir vu les lieux en
l’an 8 ; que le sieur Chopin a mis en fait qu i avo
resté au pays plusieurs m o is, et avoit visite sci upu e
sement toutes les parties de la terre mise en vente,
sieur Chopin a offert la preuve de ce fait.
Saint-Beauzille a bien vu , lorsqu’il s est mis en pos
session ; il a bien v u , lorsque les colons des trois loca
teries 1 ont pris la récolte ; il avoit bien v u , lorsqu il
a proposé l’écliange de la G uillerinie ; il avoit bien VU,
lorsqu’en l’an io il a demandé les bestiaux de la réserve,
et rien autre chose.
L ’exécution du contrat n’étoit-elle pas la meilleure
interprétation de l’acte ? O n en convient encore : mais
Saint-Beauzille a pu tâtonner, hésiter avant d ’e n t r e p r e n d r e
un procès.
Singulier privilège! E t on ne peut s’e m p ê c h e r de diie
v.
a
i
7 i i
•• •
n forme un
qu il a même abuse de la permission ; cax il a , ' *
grand nombre de mauvaises demandes, a v a n t de sa n e te r
au point qui fait le procès actuel.
E h ! pourquoi s’égarer dans le vague, loisqu ■ cxis e
un acte si clair, si précis; lorsque cet acte înénle pleine
confiance, d’après toute les lois defide instrumentorum ;
lorsque tous les efforts de la justice doivent tendre à la
stricte exécution des engagemens des parties } loisque
�l ’intention des contractans est tellement exprimée qu’il
ne peut y avoir ni am biguïté, ni doute!
Quel est donc l’intérêt de Saint-Beauzille dans cette
cause? Il a acquis pour 1 5oooo francs une propriété qui
rapporte plus de 8000 francs de rente : les trois locateries
qu’il convoite ne donnent pas un revenu de 1 5o fr. net.
L e sieur Chopin n’a pu ni voulu les vendre ; les bâtimens lui sont d’une nécessité absolue pour l’exploitation
des héritages nationaux q u ’ i l y a joints : c’est là son
objet; il en a fait part à ses créanciers, qui l’ont approuvé.
L e sieur S a i n t - B e a u z i l l e ne l’a pas ignoré. Et pourquoi
v i e n t - i l a c c a b l e r un vendeur déjà dépouillé de presque
toute sa fo rtu n e, que le malheur accompagne, contre
lequel les élémens même semblent conjurés ; qui a perdu
par le feu du ciel, au mois d’août dernier, tout le m o
bilier qu’il possédoit, ses livres, son cabinet d’histoire
naturelle, ses instrumens de physique; en un m o t, tout
ce qui étoit relatif à sa profession : perte irréparable, audessus de ses forces et de ses moyens!
Il
n’avoit d’autre ressource que dans le prix qui lui est
dû par une contre-lettre. L e sieur Saint-Beauzille, qui
connoît son impuissance, abuse de son état, plaide contre
son titre, son écrit, parce qu’il sait que le sieur Chopin
n’est pas en état de fournir aux frais d’enregistrement pour
le produire. Quod genus hoc hom inum !
M e. P AGE
S ( d e Riom ) , ancien avocat.
M°. g o u r b e y r e , avoué.
A R I O M , de l ’im p rim e n e d e T
h ib a u d - L a n d r io t ,
im prim eur d e la C o u r d ’appel.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chopin, Antoine. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
créances
locaterie
Description
An account of the resource
Observations sommaires pour le sieur Antoine Chopin, docteur en médecine, appelant ; contre le sieur Jacques Labrue-Saint-Beauzille, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 10
1800-Circa An 10
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0521
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0522
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53832/BCU_Factums_M0521.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paray-sous-Briailles (03204)
Jaligny-sur-Besbre (03132)
Champfollet (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
locaterie
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c15f9e347f6745906ed7346adb8e1952
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Text
RÉPONSE
A L A L E T T R E A D R E S S É E P A R M . B O IR O T ,
Ancien Jurisconsulte de Clermont, Membre du Corps -L égislatif,
et l’un des Défenseurs des Légataires de Mme.
de C h a zera t
(1),
>
A u Rédacteur du Journal de l’Empir e et inserée dans le Journal
du département du Puy-de-D ôm e , du 2 4 janvier N ° 4
M
o n s ie u r
,
Si vous vous étiez contenté, dans la lettre a laquelle je réponds, de protester
contre la manière, erronée selon vous et très vraie selon m oi, dont le
Jou rn al
de
l’Empire a présenté la thèse qui divise, devant la Cour de Cassation, les héritiers
et les légataires de madame de Chazerat, je vous assure que je ne vous aurais pas
répondu. Je vous aurais laissé vous applaudir tout a votre aise des sophismes
par lesquels, malgré votre qualité de jurisconsulte qui semblerait vous faire une
loi plus sévère de l’observance des règles de la logique, vou s dénaturez la qu
es
tion avec la mauvaisef o i la plus étrange. Je vous aurais laisse vous consumer
d'efforts malheureux, pour faire triompher, malgré votre qualité
( 1) M. Boirot prend tous ces titres dans sa lettre.
1
de légis
�( 2 )
lateur, que je lis au Las de votre lettre, et qui n’avait pas grand chose a voir
en cette occasion, pour faire triompher, dis-je, de la législation nouvelle un
testament qui y porte la plus mortelle’atteinte. J avais remarque d ailleurs, avec
un certain plaisir, que dans l’énumération de vos titres vous n’aviez pas oublié
celui de défenseur des légataires. Et ce dernier titre me semblait le contre
poison des deux autres, surtout lorsque vous aviez soin de le justifier par un.
ton colérique et par une facilité de dire des injures qui assurément ne pouvaient
appartenir qu’a un défenseur très zélé et trop z é lé , puisque ce mauvais ton
et cette triste facilité étaient également contraires , soit a la froide impartialité
du jurisconsulte, soit a la d i g n it é respectable de législateur.
J’aurais patiemment attendu le moment de la discussion contradictoire en
présence de la Cour de Cassation ; et l a , chacun de nous se serait évertué sur
le sens de la clause dont nous nous débattons.
Nous a u r io n s recherché s i , comme je le pretends avec la conviction la plus
p ro fo n d e
, le testament de madame de Chazerat n’a p a s, dans le cas où il serait
c o n f ir m e ,
cet effet nécessaire de remettre les coutumes en pleine vigueur,
pourvu qu’il plaise à un testateur d’ordonner que le code ne sera pas suivi dans
sa succession.
M ais, Monsieur, en me calomniant, vous m’avez ôté la liberté de ne pas
vous répondre.
Vous m’avez calomnié une première fo is, quand vous avez cherché a insi
nuer que c’est moi qui avais provoqué le Journal de VEmpire de parler de
la question.
Yous m’avez calomnié une seconde fois en me prêtant le projet de travail
ler l'opinion par cette voie ,pour dicter en quelque sorte, dites-vous, ses arrêts
à la Cour de Cassation.
Certes, M onsieur/je ne sàis p a s s if y a un homme assez privé de son»
pour croire que lés journauxjpuwSent exercer-ttne influence quelconque sur
l’opinion dfxÉettc Coj|P''$uprâmc ; quant h moi je ne suis pas cet homme-la.
Je n’ai point d’ailleurs provoqué le Journal de VEmpire de parler de cette
cause.
Je ne connais aucun des co-opérateurs de ce Journal estime : et je vous porte
le déll le plus fo r m e ld e citer une seule ligne ou une seule parole de moi
�(3)
dite ou écrite à qui que ce soit, pour obtenir que le Journal de YÉmpîre
s’occupât de cette question.
Le Journal de l’Empire s’en est occupé, sans doute, comme il s’occupe
fréquemment de celles qui' lui paraissent sortir des limites d’une discussion'
privée et intéresser la société tout entière. La consultation rédigée pour moi
avait été distribuée ; et elle présentait un problème fort important à résoudre :
un testateur peut-il encore aujourd'hui, et sous le Code Napoléon, renvoyer
pour le règlement de sa succession h une coutume abrégée? Cette question
a pu paraître assez grandg_au Journal de l E m p iie, po u r v u e, sans se soucier
de l’intérêt d’aucune des deux parties, mais dans le seul intérêt de la société,
ses rédacteurs aient cru avoir le droit d’en parler. Et je n eja is, Monsieur, si
je me trompe ; mais il me semble qu’en votre qualité de ajgfewwwg-, si vous
pouviez oublier votre qualité de défenseur/vous devriez montrer un peu moins
d’humeur contre ceux q u i, après tout, quand ils se tromperaient en voyant
dans le testament de madame de Cbazerat la destruction de l’ordre de succéder
du Code Napoléon, mériteraient quelque indulgence, puisque leur erreur attes
terait, du m oins, leur respect pour une législation qu’il faut respecter, parce
qu’elle est infiniment sage.
— =~
Mais où , Monsieur, cette humeur a paru davantage, c’est dans une autre
calomnie q u i, s’attachant plus directement a ma moralité personnelle, n’aurait
jamais du sortir de] votre plume, à propos d’une discussion, au reste, tout
entière de droit.
C ar, dites-m oi, je vous prie, à quoi bon, lorsqu'il s’agit
u n iq u e m e n t
de
savoir si madame de Cbazerat a pu dire, par son testament, q u 'e lle voulait
quon observât dans sa succession la représentation h l’infini telle qu’elle avait
lieu dans la coutume d’Auvergne, osez-vous bien a ffirm e r q u e le piocè#* a éle
intente par un acquéreur d e d ro its litigieux c essio n n a ire ou donataire simule
des héritiers d é c h u s par le testament ? .
Qu’est-ce que ce fait, tfabord,a de commun avec la question? Y change-t-il
quelque chose? Quand ce servît moi qui aurais intenté ce procès; quand je
serais un acquéreur de droits litigieux; quand je serais le donataire simulé de
tous les héritiers: tout cela ferait-il que la disposition de madame de Cbazerat
-
^ us 011 moins conforme aiix lois?
�(4)
Il est des causes malheureuses où les personnalités deviennent indispen
sables , parce que l’intérêt du procès réside tout entier dans des faits que
souvent on ne peut bien expliquer qu’en appréciant les personnes elles-mêmes.
Et alors encore, les législateurs recom m andent une grande modération dans
la discussion de ces faits ; les jurisconsultes ne s y livrent qu’avec beaucoup de
retenue; et les défenseurs eux-mêmes se font une loi de tout vérifier avant
de rien avancer.
Comment d on c, vou s, Monsieur, qui réunissez ces trois qualités, vous
permettez-vous une #cule personnalité dans une controverse qui est une pure
abstraction de droit, où les principes sont tout, où les faits ne sont rien, et où
les parties elles-mêmes ne s e r a i e n t pas excusables de se dire des injures ?
Comment surtoiit vous permettez-vous des personnalités que mieux que
personne vous sa v e z etre faussas]---------Je suis, dites-vous, un acquéreur de droits litigieux.
Vous me connaissez, Monsieur.
Nous habitons le même département.
Nous nous y rencontrons sans cesse.
Nous y entendons parler perpétuellement l’un de l'autre. •
Or vous ne pouvez ignorer que par mes habitudes, par mes sentiments,,
ou bien, si vous le voulez, seulement par ma position de fortune, je ne suis,
ne puis, ni ne veux être un acquéreur de droits litigieux.
Je n’ai jamais plaidé de ma vie.
Je n’ai p as, encore moins, acheté un seul procès.
Je n’ai pas non plus acheté celui-ci.
M, Mirlavaud, celui de tous les héritiers de madame de Cliazerat à qui son
testament fait le plus de to r t, parce qu’il est son héritier pour un tiers dans
la lignc/Jtiternclle, est mon très proche parent. 11 l’est au point qu’il est un dc¿
•
,
J
ÿ j » héritiers présomptifs. ■
Ç
-
(X X
Q i l l l .'U 'H
lie
M. Mirlavaud est pauvre : c eut peut-être été une raison pour que madame
de Cliazerat ne le dépouillât pas de la part héréditaire que lui donnait le Code
Napoléon.
Elle l’en a dépouillé pourtant.
^
Et non seulement elle l’en a dépouillé après sa mort ; mais de son vivant elle
lui donnait fort peu de chose.
�(5)
Pour vivre, il a fallu que cet honnête homme s’adressât à ses autres parents.
La bourse de mon père et la mienne lui furent constamment ouvertes dans
son infortune. Nous prîmes soin de lui ; et il nous dut son existence.
J’ai une sorte de pudeur à raconter ces détails que mon père et moi
n’avions pas assurément le projet de voir devenir publics. Mais c’est vous qui
me forcez, en assignant a ma qualité de donataire, une source malhonnête
de dire à quel 'sentiment honorable pour nous la donation que in’a faite
M. Mirlavaud doit sa naissance.
- M. Mirlavaud s’est vu déshériter par madame de Chazerat,
Il en a gémi.
Il a consulté.
Il a été éclairé sur ses droits :■et on lui a dit que la disposition du testament
était nulle.
Mais M. Mirlavaud était pauvre, et il voyait bien que la phalange de ses ad\ersaires, secondée par vos-bons conseils, Monsieur, par votre colère , par vos
grandes ressources en raisonnements, et par votre crédit, le mènerait loin.
L evenement a prouvé combien il voyait juste , puisqu’après avoir plaidé par
to u t, avoir gagné en première instance, perdu sur appel, le voila forcé de
venir soutenir son bon droit à cent lieues de scs foyers.
M. Mirlavaud était reconnaissant aussi.
■ Moitié pauvreté, moitié reconnaissance, il a donc désiré associer à son inté
rêt , a scs droits, et peut-être à scs dépenses, un am i, et le fils de son bienfai
teur de tous les temps,
Il m’a proposé de me faire son donataire e n /l » Im p ro p rié té , en retenant
1 usufruit pour lui-même. Il n’a pas annoncé d’autre intention que celle de
satisfaire son bon cœur.
- ■
Il n avait pas d’enfants.
•I ai cru pouvoir accepter une donation qui ne le privait personnellement d au.
cnne jouissance : et il est très vrai, alors, que, sans que l’acte m’en ait imposé
ai condition t j’a; prjs avcc moi-même rengagement de ne laisser à la charge de
• liilavaud, uucuu des frais de la contestation.
Ajoutez a ce qUC je viCIls j c dirc> quc JU0U pèr c , cousin-germain de maa in e d e C h a z e r a t 7 s’il e u t s u r v é c u a c e t te d a m e , a u ra it e tc l'u n d e se s hér;**
�(6 )
tiers, en sorte que j’aurais eu alors par le sang , dans sa succession, la même
nature de rang et de droits que m’y donne la donation.
Voila quel acheteur de procès je suis.
V oila la simulation qui a eu lieu entre M. Mirlavaud et moi.
Et prenez garde qu’après tout je n’ai de part que dans les droits de
M. Mirlavaud. Les autres héritiers, dépouillés comme lui par le testament, ne
m’ont assurément pas fait de donation; et je n’en aurais pas reçu d’eux, car ils
n’avaient pas de motifs de m’en faire. C eux-ci, qui sont MM. Andraud, Sciau,
Taphanel , plaident à côté de M. Mirlavaud. Comment donc dites-vous, Mon
sieur , que je suis l’acquéreur des droits litigieux des héritiers déchus ! Quoi !
êtes-vous déjà si avancé dans l’art de calomnier, qu en pareille matière les
p lu riels et les singuliers se confondent dans votre esprit, en telle sorte que
vous disiez indifféremment que je suis le donataire d un seul héritier, m ou
oncle a la mode de Bretagne, ou l’acquéreur des droits de tous les héritiers !
V ous ajoutez que c’est moi qui ai intenté le procès. Il n y a rien de si faux
au monde. Les légataires de madame de Chazerat, qui commençaient par ne
pas s’entendre trop bien entre eux, se sont assignés les uns les autres, afin de
faire régler le partage de la succession. M. Mirlavaud est intervenu, et a de
mandé la nullité du testament. Quant a m o i, j’ai si peu intenté le procès, que
je n’y figurais même pas.
Si j'y suis venu, il est fort extraordinaire que vous m’en fassiez un reproche.
Car c’cst vous, Monsieur, qui m’y avez appelé , puisqu’il est très probable
que vos clients, dont vous etes un si chaud défenseur, que même sans mission
d’eux , et en votre proprt^nçjm, vous faites dans les journaux des réclamations
dont il siérait fort bien à votre double caractère de jurisconsulte et de legisla*
teur, que vous leur laissez le soin, ne font rien sans votre conseil. Ce sont eux
qui m'o“ appelé"da"nTTe procès comme donataire, qu’ils savaient que j’étais, de
M. Mirlavaud.
—
Vous m’avez donc calomnié, Monsieur, et en me calomniant , v o u s, juris
consulte, vous avez violé le premier devoir de votre profession, celui de la
justice et de la modération envers les adversaires de vos clients.
Vous en avez violé la première convenance, en imprimant que la consulta
tion qui vous a donné tant de colcrc n est revêtue que d’une signature, parce
�(7 )
que tous les jurisconsultes, U qui elle a été présentée, ont refusé de la souscrire.
Le plus léger sentiment d’égards pour vos confrères vous aurait défendu de
mettre en jeu aucun dè vos confrères sans son consentement. Au reste , vous
prenez nécessairement, Monsieur, votreimaginaüqn jo u r votre m ém oire, en
affirmant un tel fait. Nul de mes conseils ordinaires n'est capable de trahir ma
confiance, et devons livrer les secrets de la clientellc. Ainsi aucun d'eux ne
vous a autorisé a alléguer rien de pareil. Il serait bien oiseux de vous établir
qu’il’n’est pas un seul de ceux qui m’ont accordé leurs avis , lorsqu il s est agi
duprocès d’appel, qui ne soit aussi d’avis de la cassation, par les moyens qu a
développés la consultation. Si donc' elle n’a pas été signee par eux, c est qu e e
n’a pas été délibérée avec eux, et que ce n’est pas en matière aussi bia
jurisconsultes signent une consultation qu’ils n ont pas réellement
I ^
e1
.
Pascal disait que des moiiies ne sont pas des raisons. Je ne dirai sûrement pas
même chose des avocats. Mais il serait*un'peu nouveau de vouloir que es
questions dd'droit se décident, non' par le poids d e s m oyens, mais par le
nombre des signatures qui se trouveraient au bas d’une consultation.
11 est fort conséquent, au reste, que vous n’ayez d’égards ni pour m oi, ni pour
vos confrères, lorsque vous ne savez pas même avoir du respect pour vos
juges.
C’est leur en manquer bien essentiellement, Monsieur, que d’oser affirmer ,
comme vous l’avez fait , que l’arrêt de la cour d’appel a confirmé à l'unanimité'
le testament de madame de Chazerat. Qui donc vous l’a dit, Monsieur, et
pourriez-vous nous apprendre de qui vous tenez cette révélation ? Certes ! je
n ’ignore pas que vous assiégiez incessamment la chambre du c o n s e il , p e n d a n t
que nos juges y délibéraient. Mais apparemment que vous ne v o u le z pas que je
suppose que vous écoutiez aux portes. Si pourtant vous n ’av ez pas ^ou u sui
prendre par cette voie le secret des opinions, il n’y a u r a i t plus eu q u un moyen
pour q u ’il vous e û t
dévoilé: et ce moyen serait te lle m e n t^ injurieux pour
magistrats de la Cour d’Appcl de Biom, que je n’ose même 1articu c i . Cl cu
sement q u e i e u r h a u t c Sputation de d is c r é tio n e t d e délicatesse les défend
suffisamment, sans que je doive in’cnm êler, de cette injure.
Cette réputation parle.
Leur indignation parle’ aussi :
e t
e lle
p a r le
...
pour vous donner uu demenli
�(8)
fo rm el sur le fait. Personne ne vous a dit ce fait: 1°. parce que personne ne
devait vous le dire ; 2 °. parce que le f a i t est fa u x
Si vous trouvez ma lettre sévère, Monsieur, n’imputez qu’à vous-même
de l’avoir rendue nécessaire. V ous, défenseur, vous aviez bien le droit de faire
valoir pour vos clients et sous leur nom , leurs moyens. Vous aviez, de plus,
le beau devoir de contenir leurs passions. Au lieu de cela, c’est en votre propre
n om , qu’excédant les droits de votre ministère et contre tous ses devoirs, vous
venez mêler vos passions personnelles aux leurs, et m’injurier en votre nom.
Vous vous êtes donc fait ma partie. il a bien fallu que je vous traite comme ma
partie. Redevenez ce que vous n'auriez pas dû cesser d'être, c’est-a-dire, un
avocat uniquement occupé d’éclaircir une abstraction de droit, sans y mêler
ni injures ni calomnies, et alors si je ne puis honorer votre raison, dont il me
semble que vous abusez en vous efforçant de prouver que le testament de
madame de Chazerat n’a pas voulu substituer dans sa succession la loi abrogée
à la loi existante, j’honorerai du moins votre ministère, puisque vous ne l’exer
cerez que dans les limites où le renferment les lois de votre état.
Je su is,
M onsieur,
Votre très humble serviteur,
,
,
.
.
MAZUEL,
De l'imprimerie de MICHAUD F R E R E S , rue des Bons-Enfants, n°. 3 4 -
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Lettre ouverte. Mazuel. 1809?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mazuel
Subject
The topic of the resource
droit de réponse
presse
successions
diffamation
testaments
Description
An account of the resource
Réponse à la lettre adressée par M. Boirot, ancien jurisonsulte de Clermont, Membre du corps-législatif, et l'un des défenseurs des légataires de Madame de Chazerat ; Au Rédacteur du Journal de l'Empire, et inséré dans le Journal du département du Puy-de-Dôme, du 24 janvier, n°4. Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Michaud frères (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1809
1801-Circa 1809
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0520
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
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BCU_Factums_M0516
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BCU_Factums_M0518
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Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
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diffamation
Droit de réponse
presse
Successions
testaments
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71b817de2333ada14037b1505e050990
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Text
MÉMOIRE A CONSULTER,
ET CONSULTATION,
POUR
Les L
égataires
u n iv e r s e ls d e M ad am e D E
C H A Z E R A T ,
V
'
CONTRE
L e S ie u r M I R L A V A U D .
M a d a m e R o llet, épouse de M . de Chazerat, ci-devant
intendant d’A u vergn e, est décédée sans postérité au mois
de septembre 1806.
<
L e système restrictif de la loi du 17 nivôse an 2 ayant
été inodiiié par celle du 4 germinal an 8 , qui permettoit
A
�(2 )
a ceux qui n’avoient ni ascendans ni clescendans, ni frères
ni sœurs, ni dcscendans de frères ou de sœurs, de dis
poser des trois quarts de leurs b ie n s , elle crut devoir
profiter de la latitude que lui donnoit celte loi.
E lle fit un testament olographe le 26 messidor an 9.
A p rès un grand nombre de legs particuliers, dont le dé
tail est superflu, elle lègue l’usufruit de ses biens à son m ari,
E t elle dispose de la propriété en ces termes :
« Quant à la propriété de mes b ien s, mon intention
» étant, autant q u i l dépend de m o i, de les faire retour» ner à ceux de mes parens qui descendent des estocs
» dont ils m e sont pai’venus, je donne et lègue tout ce
» dont il m ’est permis de disposer suivant la loi du 4
» germinal an 8, à tous ceux de mes parens de la branche
,, de mes aïeul et aïeule paternels, et de celle de mon
„ aïeule m aternelle, qui seroient en ordre de me suc»
.»
»
»
»
»
v
céder suivant les règles de la représentation à. l’infini,
telle, q u e lle avoit lieu dans la ci-devant Coutume
d Auvergne, pour être partagé entre les trois brauc lie s , au marc la livre de ce qui m’est parvenu de
chacune desdites branches, et être ensuite subdivise
dans chacune d’elles, suivant les mêmes règles de la
représentation à l’infini} et néanmoins, je veux et en-
» tends q u ’avant la division et subdivision, il soit pris
» et prélevé sur la niasse totale des biens compris au
,,
»
»
»
présent le g s, d’abord le montant de mes legs particuliers, cl ensuite le sixième du surplus, que je donne
et lègue au citoyen Fiiirudeche de Grom ont fils aîné,
et au citoyen Sablon - D ucorail a m é , chacun pour
» m o itié , etc. »
�(3 )
M me de Chazerat a fait depuis différons codicilles.
Par les deux prem iers, des 17 floréal an 10 et 14 messi
dor an 11 , après quelques legs particuliers, ou quel
ques changemens à ceux déjà laits, elle persiste au sur
plus dans toutes les dispositions contenues dans son tes
tament.
E t dans le troisièm e, du il\ messidor an 1 1 , postérieur
à la promulgation de la loi du i floréal an 1 1 , sur
les donations et testam ens, elle s’exprim e en ces termes :
« L a-n ouvelle loi m ’ayant accorde la faculté de dis» poser de la totalité de mes biens, je veu x et entends
» que le legs universel que j’avois fait par le susdit tes» tam ent, en faveur de mes parens de l’estoc de mes
-» aïeul et aïeule paternels, et de ceux de l’estoc de mon
» aïeule m aternelle, de tout ce dont il m’étoit permis
» de disposer p a r la loi du t\ g e r m i n a l an 8, ait son effet
» poui la totalité de mes biens, sauf les divisions et sub» divisions à faire entre mesdits héritiers, de la m anière
3
»
»
»
»
expliquée audit testament, sauf aussi mes legs particu liers, et les dispositions par moi faites en faveur
de mon m a ri} à tout quoi il n’est rien d é r o g é par
le présent codicille. »
A p rès le décès de M mo. de C h azerat, M . de Chazerat
s est mis en.possession de ses biens, pour en jouir en
(lu■
aUté (Tusu(Vni tier.
dispositions testamentaires ont p a r u pendant long
temps a l’abn de critique.
Ce u u
q u’;ui rnois de janvier 1808, qu un cession'
naire de droits litigie u x, agissanl au nom d’un sieur IVlirlavaud, l’uu j üs
second mariage de Phili-,
A 2
�(4)
bert M a rcelin , aïeul maternel de M m0 de Chazerat, a
cru pouvoir demander la nullité du legs universel de
la propriété de ses biens, et cela sur fe"~fondement que
ce legs universel étoit fait en haine et au mépris des
nouvelles lois.
E t cette prétendue nullité a été accueillie par le tri
bunal d’arrondissement de R iorn, q u i, par son jugem ent
du 22 juin dernier, sans s’arrêter au testament de M me de
Chazerat, du 26 messidor an 9, et à son codicille du 14
messidor an 1 1 , q u i ont été déclarés nuls, quant au le^s
universel, a o r d o n n é le partage de ses b ien s, confor
m ém ent aii Code civil.
L es légataires universels, dépouillés par ce jugem ent
se proposent d’en interjeter appel.
Ils demandent au conseil s’ils y sont fondés.
L E C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a vu et examiné
le testament, les codicilles, le jugem ent et le m ém oire
à con sulter,
que le succès de l’appel que se proposent
d ’interjeter les légataires universels de M m0 de Chazerat
ne peut la ire la matière d’un doute raisonnable.
Si on avoit besoin de justifier M mo de Chazerat du re
proche d’avoir fait son testament en haine des nouvelles
E st d avis
lois , on diroit qu’elle a déclaré form ellement qu’elle entendoit se conform er à là loi du 4 germinal an 8, qui lui
perincttoitde disposer des trois quarts de scs biens, tandis
que la Coutum e qui les régissoit, ne lui auroit permis de
disposer que du quart p a r testament j
�(5 )
Que par respect pour cette l o i , et pour les autres lois
nouvelles, elle déclare qu’elle n’entend disposer de ses
biens qu autant q u il dépend d elle ;
Quvi par déférence pour les nouvelles lois qui ont aboli
la forclusion, elle rappelle à sa succession tous les descendans de ses aïeul et aïeule paternels et de son aïeule ma
ternelle , sans distinction des se x es, des filles foi closes et
de celles qui n e l’étoient pas*,
Qu^elle n’em ploie dans son testament et dans tous ses
codicilles d’autre date que celle du calendrier républicain ;
Q u ’elle emploie les expressions du régim e républicain,
en qualifiant de citoyens M M . Farradèche de G ioinon t
et Sablon-Ducoi*ail, les seuls de ses légataires universels
qui soient désignés par leur nom.
O n ajouteroit que si quelqu’une des dispositions du
testament de M m0 de Chazerat pouvoit être considérée
comme faite en haine dès nouvelles lois, ce seroit sans
doute celle par laquelle il est dit qu’elle entend qu’il soit
3
'distribué chaque année après son décès o setiers from ent
et 10 setiers seigle a u x prêtres et a u x religieuses qui sont
demeurés Jidcles à Vancien culte de la religion catho
lique , apostolique, et qui par cette raison ont été privés
de leur traitement ;
Q ue cependant cette disposition a été f o r m e l l e m e n t ap
prouvée par un décret émané de Sa M ajeste llim p ereu r.
M ais à quoi bon rechercher les motifs des dispositions
de IVl"10 de Gliazerat j il suffit d ’ e x a m i n e r ce qu’elle a fait
et ce qu’elle a pu faire ?
L art. ()iG du Code poi'te: <( -A- défaut d ascendant et
�(
6
5
» de descendant, les libéralités paractes entre-vifs oy tes» tamentaires pourront épuiser la totalité des biens. »
Il y a deux modes de successibilité en collatérale, celui de la lo i, et celui de la volonté de l’homme.
L orsqu’un individu, qui n’aniascendansnidescendans,
m eurt ab intestat, la loi règle l’ordre dans lequel ses biens
sont dévolus à ses héritiers.
S’il a manifesté sa volonté par un testament, la loi se tait;
la volonté du testateur la rem place : dicat testator, et erit
lex .
C ’est dans ces deux mots que consiste toute la théorie
de la législation en matière de successions collatérales.
Cependant le jugem ent que nous examinons fait taire
la volonté de M me de Cliazerat, et préfère aux héritiers
de son choix ceux que la loi ne lui donnoit qu’à dé
faut de dispositions de sa part.
E t on croit justifier c& te interversion de l’ordre de
transmission des biens, établi par le Code lui-même, en
invoquant article G de ce meine C ode, ainsi con çu:
« O n ne peut déroger par des conventions particulières
» aux lois qui intéressent Vordre public et les bonnes
» mœurs. »
Ce principe est com m enté, délayé dans de nom breux
considérans , et répété jusqu’a la satiété.
1
]\]ais jamais on n’en lit une plus fausse application.
Un individu agit contre l’ordre public quand ce qu’il
fait est contraire aux maximes fondamentales du gouver
nem ent, et tend à ébranler l'édifice social.
�(7)
Il agit contre les lionnes mœurs, quand il offense l’iionnêteté publique.
O r, qu’importe à l’ordre public et aux bonnes m œ urs,
que M me de Chazerat ait disposé de ses biens en faveur
de tels ou tels de ses parons, plutôt qu’en faveur de tels ou
tels autres ?
Q u ’on dise, si l’on v e u t, qu’elle en a disposé contre le
vœ u et contre le texte de là l o i , et qu’on mette h l’écart
les grands mots d’ordre public et de bonnes m œurs, alors
on commencera à s’entendre , et la discussion pien d ia le
caractère de simplicité qu’elle doit avoir.
M mo de Chazerat a cité dans son testament la ci-devant
Coutum e d’A u v e rg n e, et cette citation an nu lle,d it-on ,ses
dispositions.
C a r on lit dans l ’article 1.390 du Code , que « les épOUX
» ne peuventplus stipuler d ’une manière générale que leur
» association sera réglée par l’une des coutum es, lois ou
•» statuts locaux qui régissoient ci-devant les diverses par» ties de l’empire français, et qui sont abrogés par le pré» sent Code. »
O n ne se seroit pas attendu a trouver dans cc texte la
nullité des dispositions faites par M m0 de C h a z e ra t en
faveur des consultans.
lCnt, parce que cette lo i, qui est au titre de la commu
naulé, u’a
commun avec les testainens, et sm tout
avec un testament en ligne collatéralle, poux lequel a
loi donne au testateur une latitude sans bornes j
. Q uy celte latitude est telle, qu’aux termes de l’ar
ticle 967 du Code, on peut disposer, soit sous le titic d ius-
�( 8
)
titution, soit sous le titre de legs, soit sous toute autre
dénomination propre à manifester sa volonté.
2ent, parce qu’il est de principe que les lois prohi
bitives doivent etre restreintes au cas qui y est p ré v u , et
qu’on ne doit pas les étendre d’ un cas à un autre, sur
tout d’une m atière ordinaire à celle' des testamens, où la
volonté est tout.
bluntas in testamentis dominatur.
» T o u t ce qui diminue la plénitude de la liberté est
» odieux et détesté par la loi. » M . d’A guesseau, plai
doyer
.
3ent, parce que la loi de la communauté est du 20 plu
viôse an 12, et que le testament de M me de Chazerat est
du mois de messidor an g , par conséquent antérieur de
plusieurs années;
58
Q u ’en supposant qu’elle fût applicable aux testamens,
et aux testamens en ligne collatérale, on 11e peut raisonna
blem ent exiger que M me de .Chazerat ait dû s’y conformer
avant qu’elle existât.
Car c’est une erreur manifeste de dire, comme on le
fait dans les considérans du jugem ent, que tout ce qui in
téresse la confection du testament, doit se juger d’après
les lois existantes au décès du testateur; tandis qu’il est au
contraire de principe incontestable que la. loi qui est en
vigu eu r au décès du testateur , règle uniquement la
quotité disponible, et que tout ce qui intéresse la confec
tion du testament, ses formes, ses expressions, et le mode
de disposer, se règle par les lois en vigueur au moment où
il a été lait.
M ais i n d é p e n d a m m e n t de ces premiers m o yen s, i l
est facile d’écarter l’application de cette loi au testament
do
�(9)
de M me de Chazerat, par des moyens encore plus di
rects.
Si on analyse le testament et le codicille d e M mede Cliazerat, on y voit qu’elle commence par manifester son in
tention de faire retourner la propriété de ses biens aux
estocs d’où ils lui sont provenus.
Par suite de cette intention qu elle vient d exp iim er,
elle donne et lègue tout ce dont il lui est permis de dis
poser par la loi du 4 germinal an 8.
_
A qui fait-elle ce don et legs ?
A tous ses parens de la branche de ses aïeul et aieule
paternels, et de son aïeule maternelle.
E lle ne les nomme pas chacun par leur nom , et il est
facile d’en sentir la raison; les m orts, les naissances jour
nalières parmi de nom breux h éritiers, auroient pu faire
naître des difficultés, et entraver l’exécution de ses v o
lontés: elle préfère de les appeler à recueillir ses biens par
la dénomination générale de parens de la branche de ses
aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule maternelle.
Jusque-là il n’y a rie n , sans doute, dans ce testament,
non-seuleinent qui porte atteinte à l’ordre public et aux
bonnes m œurs, mais qui ne soit en parfaite harmonie
avec les lois existantes alors ou intervenues depuis.
Ce qui suit n’est ni plus illégal ni plus répréhensible.
A p r è s avoir dit qu’elle appelle à r e c u e i l l i r sa succession
ses parens de ces trois branches, M me de Chazerat ajoute,
pour éviter toute équivoque s u r la désignation des parens
appelés, qlle ce Sont ceux qui s e r o i e n t en o ïd ie de lui
succeder, suivant les règles île lu représentation à l injini.
Jusqu’ici , on no trouve encore rien qui offense 1 ordre
B
�( 10 )
public et les bonnes m œ urs, rien qui soit contraire aux
lois.
M me de Chazerat, pouvant choisir parmi tous les être?
vivans ses légataires universels, pouVoit à plus forte raison
les choisir dans sa fam ille, et préférer telles ou telles
branches.
'Son choix fix é, elle avoit incontestablement le droit
d’appeler à sa succession tous les individus de chaque
branche qui seroient existans au moment de son décès; et
le seul m oyen pour cela étoit de les appeler suivant les
règles de la représentation ¿1 1 infini.
Quand le testament de M rae de Chazerat auroit été pos
térieur au C ode, elle auroit été autorisée à disposer ainsi
par le texte formel de l’art. 967, qui lui laissoit le choix de
toutes les dénominations propres à manifester sa volonté.
Xvlais elle ajoute, en parlant de la représentation à l’in
fin i, telle q u e lle avoit lieu dans la ci-devant coutume
d'Auvergne.
Si on en croit les considérans du ju gem en t, il semble
que la terre a dû s’entr’ouvrir au moment où M me de Cha
zerat a transcrit ces lignes fatales; c’est de sa part un
attentat sans exem ple, contre l’ordre public et les bonnes
mœurs ; c’est un blasphème contre la nouvelle législation,
qui appelle la vengeance des tribun aux, et frappe son
testament d’anatheme.
O n croit voir la montagne en travail.
Au*fait. O n a déjà vu que c’étoit en l’an 9 que M m0 de
Chazerat traçoit ces lignes, long-temps avant la loi sur la
com m unauté, insérée dans le Code.
lit on voit dans la discussion qui a eu lieu au conseil
�(
11
)•
d’Etat sur cet article, et par les observations de M . Berlier, que dans les temps les plus orageux de la révolution,
il n’a pas été défendu de stipuler selon telle ou telle cou
tume , m algré la défaveur alors attachée à toutes les an
ciennes institutions.
M . B erlier ajoute que « c’est parce que jusqu’à présent
» il n’y a point eu sur cette matière de nouvelles lois, et
» q u e, pour défendre de stipuler d’après les anciennes,
» par référé et en termes généraux, il falloit bien établir
»» un droit nouveau, etc. »
D ’où il résulte quJen supposant que cette loi nou
velle / uniquem ent créée pour la communauté , fut
applicable au testam ent, m êm e à un testament qui a
pour objet une succession collatérale pour laquelle la
loi donne au testateur une latitude sans bornes , le
rappel d’une ancienne loi dans ce testament seroit sans
conséquence, et il n en conserveroit pas moins toute sa
validité.
Il en seroit de même du codicille fait depuis le Code
c iv il, parce qu’il ne fait que confirm er et étendre à la
fortune entiere de M me de Chazerat, le legs des trois
quarts fait en vertu de la loi du 4 germinal an 8 , et
cela sans qu’on y aperçoive la m oindre trace du rappel des
anciennes lois.
k n second lie u , cet article i3 90 dit seulement que
les époux ne peuvent plus stipuler d u n e manière gé
nérale, qUc leur association sera reglee par lu n e des
coutumes, lois ou statuts locaux qui regissoient ci-devant
les diverses parties du territoire français.
B 2
�( la )
O r, on voit dans la discussion qui eut lieu au conseil
d’état sur cet a rticle, que « chacun conserve la faciiTté
« de faire passer dans son contrat de max-iage les dispo« sitions de la coutume qu’il prend pour rè g le , pourvu
« q u i l les énonce. »
,
A in si, dans le cas m êm e prévu par la loi du règle
m ent de la communauté entx-’ é p o u x , le vice de la con
vention ne consiste pas à r a p p e l e r telle ou telle coutum e,
mais ci la rappeler d’ une manière generate, et sans énon
cer la disposition particulière pour laquelle on l’in
voque.
O r , en
dans la fausse supposition
q u e cette l o i soit applicable à l’espèce, on voit que si
jVIme de Chazerat rappelle dans son testament la coutume
- d’A u v e rg n e , ce n’est pas d’ une manière générale, et
raisonnant^toujoui’S
comme règle unique de sa succession, mais d’une ma
nière particulière , et seulement pour désigner avec
clarté et pi’écision le mode dans lequel elle veut que
ses biens, une fois dévolus aux branches qu’elle appelle
pour les recueillir, soient divisés entre tous les individus
qui les composent, pour qu’il n’y en ait aucun d’exclu.
E lle prend si p e u , en effet, la coutume poux* règle
généi’alc et unique de sa succession, que loin de se con
form er à cette coutum e, elle s’en éloigne en tous
points.
L a coutume d’A u vergn e interdisoit à M m6 de Chazerat
la plus légère libéralité en faveui* de son inaiù, et elle
profite avec autant d’empressement que de reconnoissance de la faculté que la nouvelle loi lui accorde pour
disposer en sa laveur de ¿’usufruit universel de ses biens»
v
�( i
3 .)
L a coutume d’A u verg n e ne permettoit de disposer par
testament que du quart de ses biens, et elle dispose des
trois quarts.
E lle fait p lu s, elle déclare formellement qu’elle fait
cette disposition des trois quarts conformément à la loi
du 4 germinal an 8.
Elle prend donc cette loi pour règle de ses disposi
tions, et nullem ent la coutume d’A u vergne.
M me de Chazerat avoit différentes natures de biens.
D es propres anciens, qui lui étoient parvenus de ses
aïeul et aïeule paternels et de son aïeule m aternelle;
D es acquêts, des contrats sur l ’état et sur particuliers,
et un immense mobilier.
Tous ces acquêts, ces contx*ats, ce m obilier étoient
dévolus par la coutume d’A u vergn e aux parens paternels,
exclusivem ent à tous autres.
O r , M m®de Chazerat, au mépris de cette lo i, dispose
de tous ses biens au profit de ses parens des trois branches
de ses aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule m ater
n elle; elle veut que ces biens soient divisés entre ces
trois branches, au marc la livre de ce qui lui est parvenu
de chacune desdites branches ,* ce qui en assuroit la
majeure partie à la branche de l’aïeule maternelle, qui en
étoit form ellement exclue par la coutume.
Ainsi tout est dans ce testament en sens contraire du
texte et de l’esprit de la coutum e; et loin d e la p re n d ie
poui règle de successibilité cntx’e ses liéx’itiex-s, elle la
fxonde ouvertement dans tous les points.
M mo de C h a z e r a t n ' a pris d ’a u t r e r è g l e pour la quotité
de disposer que la loi du l\ germinal au S»
�( H >‘
E t pour le clioix de ses liéri tiers, elle n’a cherché d’autre
loi que sa volonté*, et cette volon té est absolument en
contradiction avec la coutume (VAuvergne.
L a coutum e d’A u vergn e n’a donc pas été son guide,
sa loi sacrée, l’objet d’une servile adoration, comme le
suppose le jugement.
M ais le sort de sa succession une fois fixé entre ses
parens des trois branches qu’elle a appelées à la recu eillir,
elle a cru devoir expliquer que les divisions et subdivisions
s’en feroient suivant les règles de la représentation à Vinfini.
C ’en étoit assez', elle évitoit par là le détail de tous
les individus qui composoient les trois branches de ses
légataires universels j elle prévenoit d’ailleurs les inconvéniens qui auroient pu résulter des changemens qui
pouvoient arriver dans chaque branche entre son testa
m ent et son décès.
M ais elle a cru devoir donner un plus grand déve
loppem ent à ces expressions, suivant les règles de la re
présentation à Vinfini, et éviter toute équivoque sur ce
m ode de représentation, en indiquant celui qui étoit usité ,
dans la ci-devant Coutum e d’A uvergne.
Cette Coutume n’étoit donc rap pelée, d’une p art, qu’a
vec Vénonciation de l’objet particulier pour lequel on
l’in voquoit, ce qui eût été très-permis, même en contrat
de mariage-, et en réglant la communauté entre époux.
D ’autre part, elle n’étoit rappelée que comme une
indication s u r a b o n d a n t e , superflue si l’on veu t, mais q u i,
telle qu’elle lût, n’a jamais pu nuire à l’objet principal du
testament, à la disposition delà propriété de tous les biens
aux trois branches appelées à les recueillir,
�( i5 )
O r , si la disposition principale estvalable en elle-m êm e,
et indépendamment de l’énonciation surabondante qui
a pu la su ivre, les descendans de Philibert M arcelin ,
aïeul maternel de M me de C liazerat, se trouvent sans
qualité et sans intérêt à contester la prétendue validité
ou invalidité de cette énonciation secondaire, puisqu’elle
n’a pour objet que le mode du partage entre les individus
des trois branches, auquel les descendans de Philibert
M arcelin ne peuvent avoir aucune part.
- Ajoutons que la critique de cette énonciation de la
coutume d’A u v e rg n e , qu’a faite M mede Cliazerat dans son
testament, est d’autant plus déplacée, qu’elle écrivoit ce
testament sous l’empire de la loi du 17 nivôse, qui adinetloit la représentation à l’in fin i, article 82.
Q u en admettant l e mode de p a r ta g e de la représen
tation à l’infini dans les divisions et subdivisions entre
les individus des trois branches appelées à recueillir les
biens de M mc de Cliazerat, on ne peut trouver aucune
diiïerence assignable entre les divisions et subdivisions
a faire conformément à la représentation a l’in fin i, telle
qu'elle avoit lieu dans la ci-devant coutume d ’A uvergne,
et la représentation à l’in fin i, telle q u e lle a voit lieu
d après Varticle 82 de la loi du 17 nivôse.
D e sorte que ces expressions, de la ci-devant coutume
d ’A uvergne, ou de la loi du 17 n ivôse, étoient absolu
ment syn0nymes.
Ce qui justiiieroit de plus en plus M m0 de C liazerat,
s il en étoil besoin, du prétendu délit q u on lui im pute,
puisque son testament étant fait en l’an 9 , sous l’em pire
�( is y
d elà loi du 17 nivôse, et la confection destestamens, quoi
qu’on en puisse dire , ne pouvant se référer qu’aux lois
existantes à cette époque, on ne pourroit porter l’hum eur
et l’injustice jusqu’à lui faire un crime d’avoir rappelé
une disposition des anciennes lo is , qui étoit absolument
conforme à celles de la loi n o u v e lle , qui étoit alors en
pleine vigueur.
L es autres considérans du jugem ent dont se plaignent
les consultans , ne sont fondés que sur des considérations
vagu es, telles que les inconvéniens qui peuvent naître
de l ’ e x é c u t i o n du testament de M me de Cliazerat, à raison
des p r o c è s auxquels il peut donner lieu.
O n parcourt avec affectation la longue nomenclature
de toutes les questions qu’a créées, en matière de succes
sions , la subtilité des praticiens et la funeste abondance
des com m entateurs, depuis la rédaction de la coutume
d’A u verg n e, et on les trouve toutes dans le testament de
M me de Chazerat.
Cependant rien n’est plus simple, d’une exécution plus
facile, et moins susceptible de contestation que l’opéra
tion qu’elle prescrit.
E lle possède des biens propres, provenus de trois estocs:
de son grand-père et de sa grand’m ère paternels, et de sa
grand’m ère maternelle.
Ces biens sont constatés par des partages de famille.
Ces actes sont consignés dans l’inventaire fait après le
décès de M nie de Chazerat. Ils sont d’ailleurs dans les
mains des dcsccndans des trois branches, dont les auteurs
en ont fait le partage avec ceux de JVlme de Chazerat.
A insi,
�»7 5
<
A in s i, rien n’est si facile que de trouver ces bien s, con
sistant tous en fonds de te r r e , qui sont sous les y e u x , et
pour ainsi d ire, sous la main des légataires appelés a les
recueillir
Il n’y a pas plus de difficulté sur la manière de distri
buer ses autres biens, quels q u ils soient, entre les tiois
brandies de ses héritiers.
E lle veu t que la distribution s’en fasse au marc la livre
des propres, c’est-à-dire, par exem ple, que si M
de
Cliazerata laissé pour 600,000 f. de propres, dont ^00,000 .
de l’estoc de l’aïeule m aternelle, 200,000 fr. de 1 estoc e
l’aïeul paternel, et 100,000 fr. de l’aieule paternelle, les
parens de l’estoc de l’aïeule m aternelle prendront la moi
tié de ses autres biens •, les parens de l’estoc de l’aieul pa
ternel un tiers, et les parens de l’aïeule maternelle un
sixième.
Quant à la division secondaire à faire dans chaque
branche, suivant les règles de la représentation à l’infini,
il est impossible d’y trouver le germ e du plus léger procès,
puisqu’elle dépend d’un simple tableau généalogique,
basé sur des actes de naissance et de décès, qui sont des
faits matériels sur lesquels il est diilicile à la chicane la
plus raifinée de trouver prise.
O n ne voit pas d’ailleurs où on a pris qu il faille aa
nuller un testament, parce qu’un praticien avide ou un
acquéreur de droits litigieux peut y trouver des piétextes
de faire des procès et de troubler le repos des 1 ritiers
légitimes appelés par la testatrice h r e c u e i l l i r sa succession.
C est sans doute une sollicitude très-louable que celle de
prévenir et d’éviter des procès dans les familles. M ais
G
�( >8)
faut-il priver les légataires universels de M mo de Chazerat
de 1,200,000 fr. de propriétés, parce qu’il est dans l’ordre
des possibles qu’il survienne un jour quelque contestation
entre les intéressés pour en faire le partage?
C ’est donc en tous points que ce jugement paroît sortir
de la sphère ordinaire des erreurs qui sont le partage de
l’hum aniité
Cependant cette erreur semble accréditée par l’opi
nion d’un auteur, dont l’ouvrage a paru à la veille de
l’aud ien ce, et n’a pas eu sans doute une médiocre influence
sur la d é t e r m i n a t i o n du tribunal (i).
O n lit dans cet ouvrage ce qui suit, tom. , pag. i
:
« Il est bien permis de disposer ù son gré de ses b ens,
» d’après la faculté qu’en donne la loi; mais il ne l’est pas
» de créer un ordre de succéder autre que celui qu’elle
v établit.
3
35
S’il est permis de disposer son gré de ses biens, ce ne
p eu t être que pour changer l’ordre de succéder établi par
la loi.
( Si la loi donne cette faculté de disposer à son g ré , ce ne
peut être que pour faire cesser son empire.
Si on ne p e u t, en cifet, créer en collatérale un oi’dre
de succéder autre que celui que la loi établit, il faut retran
cher du Code le titre entier des Donations et des Testamens, puisque les donations et les testamens n’ont d'autre
but que d’intervertir l’ ordre établi par la loi pour la trans-
( i) T raitJ des Donations et Testam ens, par J. Gronier, (du Puy-de-Dôm e),
ancien jurisconsulte , mombro du T rib u n a to t do la Légion d’honneur.
�( *9 )
mission des biens, et y substituer la volonté d e llio n im e .
A liquando bonus dormitat Jlomerus.
L ’auteur cite ensuite l’art. 6 du C o d e, qui interdit
toutes conventions contraires à l o i dre public et aux
bonnes mœurs.
A b u s étrange des mots et des c h o s e s , auquel on a re
pondu précédem m ent, et sur leq u el il est inutile de
l'evenir.
L a citation que fait cet auteur de l ’art. i
389 n’est pas
plus heureuse.
O n y lit que « L es époux ne peuvent faire aucune
» convention ou renonciation dont l’objet seroit de chan
» ger l’ordre légal des successions, soit par rapport a eux» mêmes dans la succession de leurs enfans ou descen» dans, soit par rapport à leurs enfans entr’eu x , sans pre» judice des donations entre-vifs ou testamentaires, qui
» pourront avoir lieu selon les formes et dans les cas dé>» terminés par le présent Code. »
O utre que cet article n ’a trait qu’à la transmission des
biens en ligne directe, et à l’interdiction qu’il fait atix
époux de donner dans leur contrat de m ariage des lois
particulières à leur postérité \
Q u ’un pareil texte ne peut avoir rien de commun avec
l’espèce qui se p résen te, où il s’agit d’une succession
collatérale dont la transmission dépend uniquem ent e
la volonté du testateur, qui a pu choisir scs liéiitiers non
seulement dans sa fam ille, mais hors de sa fam ille, et
paim i tous les êtres vivans;
Cet article porte sa réponse à l’objection dans les
expressions qui le terminent i Sans préjudice des dona*-
�( 20)
» tions et testamens qui pourront avoir lieu selon les
» form es y et dans les cas déterminés par le présent
» Code. »
E n fin , on oppose encore aux consultans l’article der
nier du C od e, qui porte q u e, « à compter du jour où ces
» lois sont exécu to ires, les lois romaines , les ordon» nances, les coutumes générales ou locales, les statuts,
» les règlemens cessent d’avoir force de loi générale ou
»> particulière dans les matieres qui sont l’effet desdites
» lois c o m p o s a n t le present Code. »
M ais en prononçant que les lois romaines, les ordon
nances et les coutumes cessent d’avoir force de lo i, on a
si peu entendu proscrire la citation de ces anciennes lo is,
et frapper d’anatlième tous les actes dans lesquels on a pu
les rappeler, ou m êm e, si l’on veu t, les prendre pour
règle de ses dispositions ou de ses conventions dans ce qui
n’est pas form ellement prohibé par le C od e, que le droit
romain est encore l’objet principal des cours de législa
tion } que le G ouvernem ent a établi pour l’enseigner des
écoles publiques dans toutes les parties de l’E m p ire , et
que nul ne peut avoir entrée au barreau, ou être admis à
une place de m agistrature, qu’autant qu’il est muni de
diplômes authentiques, qui constatent qu’il en a fait une
longue étude, et qu?il y a acquis de vastes connoissances.
O n terminera cette discussion, qui n’a quelqu’im portance que parce q u ’elle est d’un grand intérêt, par ob
server que si M m0 de Chazerat a traité l’es descendans
du second mariage de Philibert M arcelin, son aïeul ma-
�( 21 )
ternel, moins avantageusement que les descendans de
son aïeul et aïeule paternels et de son aieule m atern elle,
c’est sans doute parce qu’il ne lui etoit parvenu aucuns
biens de cet estoc, et que dans ses principes elle ne leur
devoit rie n , au lieu qu’elle se regardoit comme redevable
de sa fortune aux parens des estocs dont lui étoient par
venus ses propres, parce que c etoit avec ces propres que
s’ étoit soutenue et enrichie sa maison.
A u surplus, elle a pu avoir dautres motifs dont elle
ne devoit compte à personne, pas meme à la lo i, qui lui
laissoit un empire absolu sur sa fortune, et lui p ermettoit
de la transmettre à son gré. D ica t testator, et erit lex .
D élibéré
à Clerm ont-Ferrand, le 29 juillet 1808.
B O IR O T , B E R G IE R , D A R T IS -M A R C IL L A T , /
F A V A R D , M A U G U E , J E U D I-D U M O N T E IX ,
P A G E S , (de R io m ) , A L L E M A N T .
A C L E RM O N T , de l'imprimerie de L a n d r i o t Im p r im eu r de la Préfecture
Libraire, rueSaint-Genès, maison ci-devant
Potière.
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Farradèche de Gromont et Sablon-Ducorail. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Bergier
Dartis-Marcillat
Favard
Maugue
Jeudy-Dumonteix
Pagès
Allemand
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter et consultation, pour les légataires universels de Madame de Chazerat, contre le sieur Mirlavaud.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1801-1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0519
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53830/BCU_Factums_M0519.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Entraigues (63149)
Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
Successions
testaments
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e9fd690842b5e9bca8df64778181b075
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RÉFUTATION
Des motifs du jugem ent rendu au tribunal de pre
mière instance séant à R io m , le 22 juin 1808,
qui a déclaré les principales dispositions tes
tamentaires de M adam e D E C H A Z E R A T ,
subversives de l’ordre public et de l’ordre
social, nulles et com m e non écrites, par
cela seul que la testatrice, en rendant à trois
branches de ses parens collatéraux les biens
q u 'e lle en avoit reçus, prescrit le partage
entre eu x par souche, dans l ’ordre de la re
présentation
à l’in fin i, telle qu’elle avoit
lieu dans la ci-devant C ou tu m e d ’A u v e rg n e .
M
ad am e de Chazerat , privée d’enfans, n'ayant que
des parens collatéraux éloignés, possédant de g rands biens
d o ta u x , autrefois régis par la Coutume d A u vergn e ,
qui lui in terdisoit toute libéralité envers son époux, et
A
�(2 )
ne lui permettent de disposer enveis d autres que du
quart, par testament, dut voir avec une vive satisfaction
publier la loi du 4 germ inal an 8 , q u i, en lui con
servant la liberté que lui avoit déjà conférée celle du
17 nivôse an 2 , de tout donner à son m ari, y ajoutait
la c o n s o l a n t e faculté d’acquitter les dettes de la reconn o i s s a n c e c t de la justice, en lui permettant de dispo
ser à son gré des trois quarts de sa fortune. Aussi bénitelle cette loi lib érale, e t , sans perdre de tem p s, elle
se livra aux m o u v e m e n s de son cœ ur, de ses affections
les plus n a t u r e l l e s , les plus douces, les plus morales et
les plus justes.
^
_
Son vénérable époux tient la première place dans son
coeur} elle lui donne l’usufruit de tous ses biens, et di
v e r s objets encore en propriété.
X)’un autre côté, sa libéralité se répand en œuvres de
charité : elle récompense la fidélité dès services domes
tiques } elle fait des offrandes à la reconnoissancc et à
l’amitié} elle donne des témoignages d’affection spéciale
à ceux de scs parens avec lesquels elle a des rapports
plus habituels, et termine la longue et honorable série
¿le ces bienfaits, par cette disposition à Litre universel:
Quant à la propriété de mes b ie n s, mon intention
étant autant q u'il dépend de m o i, de les faire retour
ner à ceux de mes parens qui descendent des estocs
„ desquels ils me sont parvenus, je donne et lègue tout
ce dont il m ’est permis de disposer suivant la loi du
>, /,. germinal an 8 , à tous ceux de mes parens de
». la branche de mes aïeul et aïeule paternels, et de
>» celle de mon aïeule m aternelle, qui seroient en ordre
�(3 )
»
»
»
»
»
'»
»
de me succéder, suivant les règles de la représentation à l’infini, telle qu’elle avoit lieu dans la ci-devant
Coutume d’A u vergn e, pour être partagé entre les trois
branches, au marc la livre de ce qui m’est parvenu
de chacune desdites branches, et être ensuite subdivisé
dans chacune d ’elles, suivant les mêmes règles de la
représentation à Vinfini. »
Trois ans plus tard est venu le Gode N apoléon, qui
ne laissant plus subsister de bornes à la faculté de dis
poser, pour ceux qui m eurent sans descendans ni ascendans (« ), perm it à madame de Chazerat de donner
encore un plus grand essor à ses dispositions bienfai
santes. Elle en profite aussitôt par un codicille, oii elle
s’exprim e ainsi :
« L a nouvelle loi m ayant accorde' la fa c u lté de dis» poser de la totalité d t mes b ien s, je 'veux et entends
» que le legs universel que fa v o is fa it par le susdit
» testam ent, en faveur de mes parens de Vestoc de mes
» aïeul et aïeule paternels et de c e u x de Vestoc de
3
»
»
*
»
”
”
”
mon aïeule m aternelle, de tout ce dont il n iéto it
permis de disposer par la loi du 4 germinal an 8 , ait
son effet pour la totalité de mes biens , sauf les divisions et subdivisions à faire entre inesdits héritiers,
de la manière expliquée audit testament ; sauf aussi
mes legs particuliers, et les dispositions par moi faites en laveur de mon m ari: à tout quoi il n est lie n
nr
/
erogé pai- m0n présent codicille. »
'e cr°ira-t-on ! D es dispositions si naturelles , si sim( a ) Article gtG du Codo Napoléon.
A 2
�(4 )
p ies, si équitables, par lesquelles la testatrice n’a usé
du pouvoir illim ité que la loi venoit de lui conférer
sur ses biens, que
rendre aux différentes branches
de sa la mille ce qu’elle en avoit reçu -, des dispositions
q u e lle a déclaré si form ellement ne faire qu'en vertu
du pouvoir que lui en conféraient les nouvelles lois , ont
été dénoncées à la justice comme un attentat à l’ordre
p u b lic à l’ordre social et aux m œurs, par le dépit de
parens collatéraux à qui la testatrice a cru ne rien devoir,
parce qu’elle n’avolt rien reçu de leur branche.
L e croira-t-on encore ! Cette ridicule dénonciation a
tellem ent fait illusion aux premiers juges, qu’ils ont cru
l’ordre social ébranlé jusques dans ses fondem ens, si la
v o l o n t é de madame de Chazerat, de distribuer ses biens
dans l ’ordre de la représentation à V infini, telle qu elle
¿toit reçue dans la ci-devant Coutume (VAuvergne ,
u’étoit pas promptement frappée d’anatheme.
Ce n’est pas le testament entier qu’ils ont annullé pour
des vices de forme, il est reconnu invulnérable sous ce
rapport.
C e n’ est pas non plus le don universel d’usufruit fait
à MChazerat, ni les nom breux legs particuliers de
la testatrice qu’ils ont condamnés : tous ces legs leur ont
paru à l’abri de la plus sévère critique.
K n iin , ce n’est ni l’excès de la disposition univer7
p o u r
3
selle faite en faveur des trois brandies de parens pré
férées par la testatrice, ni Vincapacité des parens de ces
branches, pour recevoir le bienfait de la lib éralité, qui
ont m otivé la réprobation. Q u’est-ce donc que les pre
miers juges ont frappé d’anatheme ? C ’est uniquem ent
�( 5)
cette locution : J e lègue tout ce dont il m’ est permis de
disposer à tous c e u x de mes païens (de trois bran
ches spécialement désignées ) qui serment en ordre de
me su ccéd er, suivant les règles de la représentation
à l'in fin i, telle q u e lle avoit lieu dans la ci-devant Coutume d’ Auvergne.
O scandale! ô désolation! L a dame de Chazerat, comme
la Pythonisse d ’ E n d o r ( a ) , a évoqué l’ombre des morts,
elle a ressuscité la Coutum e d’ A u verg n e, s’écnoient les
Aristarques dans le p u b lic, et les juges se sont aisse
alarmer par ce bourdonnement.
^
O
déplorable erreur du zèle pour l’inviolabilité des
lois! répondrons-nous : par quel enchantement n avez
vous fait rencontrer que l’illusion à un tribunal qui clicr
choit de si bonne foi la vérité! Approchons la lum ière
des prestiges qui Vont séd u it, nous verrons disparoitre
ces fantômes comme des ombres, et ne laisser aux ver
tueux magistrats q u’ils ont égarés, que le regret d’avoir
embrassé des chimères.
M otifs textuels du jugem ent, en ce qui concerne le legs
universel en propriété', q u i l annuité.
L e legs universel en propriété , porté au testament de madame
de C h a z e r a t , est n u l, d it-o n , « attendu la maxime C° j Sta^ ^
» base de toute législation , et consacrée par l'article G u o e
» N apoléon, que nul ne peut, par des c o n v e n t i o n s particuicres ,
» déroger auoc lois qui intéressent l'ordre public et es onnes
» mecurs, puisque ce qui a été établi pour le bien t e t o u s , ne
» peut pas être interverti par la volonté changeante t es m m us. »
(<*) Premier livre des rois, chap. 28.
�(6 )
Réfutation.
E t nous aussi, prosternés devant cette maxime sacrée,
conservatrice de l’ordre so cial, nous lui rendons un hom
mage solennel : mais, qu’a-t-elle de commun avec le tes
tament de madame de Cliazerat ? En quoi la testatrice
a-t-elle dérogé , par sa volà n té privée, a ux lois qui in
téressent l’ ordre public et les bonnes mœurs? Q u el tort
fait à la société la désignation collective des légataires
universels d’un testateur, par leur qualité de parens
d’une li<me, et leur vocation dans Tordre de la repré
sentation à l’infini, au lieu d’écrire plusieurs pages pour
les dénom m er tous individuellem ent, et désigner par
ticulièrem ent la portion destinée à chacun ? E n quoi
les mœurs sont elles blessées par cette brièveté d’expres
sion aussi commode qu’exacte ?
i rc Suite des motifs.
11 fa u l rcconnoitre incontestablement pour lois d ’ordre p u b lic ,
celles qui ont un rapport direct et spécial à la société en corps ,
dont les conséquences réfléchissent éminemment sur l ’ensemble
des citovens. S i , à quelques égards , on peut regarder les lois
com m e a y a n t pour objet une certaine utilité publique, dans les
unes cependant cette utilité se borne à régler des intérêts privés ,
/ ribus et singulis : dans les autres, au contraire, cette utilité
embrasse la société entière, elle se lie à tous les intérêts, plu -
ribus ut universis. A in s i, lorsqu’un testateur fait la distribution
de ses b ie n s, il use d ’une faculté qui est toute relative à lui seul
et d;ins son intérêt p rivé ; niais le mode dont il se s e r t, l’ordre
q u ’il doit observer dans cette re p a ru tio n , est du domaine public,
qui est pour lui une barrière insurmontable.
�'( 7 )
Réfutation
.
” - <r '
T
Il n’importe nullem ent à la validité du testament de
madame de Chazerat, que ces distinctions aient de la
justesse ou qu’elles en m anquent, et que les lois qui
régissent ce testament appartiennent, les unes au droit
p riv é, les autres au droit p u b lic , lorsque ses disposi
tions "n’offensent ni les lois qui règlent le pouvoir de
dispose!', ni celles qui règlent le mode et l ordre de dis
position à obse'rver. S’il blessoit les unes ou les au tres,
il seroit également réprouvé. M ais que le sieur M irlavaud nous montre celles qui le condamnent •, jusquelà , nous nous contentcTons de lui dire , vous poursuivez
des fantômes.
Suite des motifs.
V o u s voulez des citations? en voici :
« Parm i les lois inviolables, (q u i sont pour un testateur une
3
« barrière insurm ontable), l’ art. i go du C o d e Napoléon a placé
» la prohibition laite aux époux de stipuler entre e u x , d’ une
» manière générale, que leur association sera réglée par une des
» coutumes, lois, ou statuts locaux qui régissoient c i - d e v a n t les
» diverses parties du territoire fra n ça is, et qui sont abrogées par
» le C o d e. »
Refutation.
O rd on n ez • mais nous ne voyons pas dans cet ai tide
une loi prohibitive pour les testateurs, car il ne parle
que des conventions stipulées entre époux par leui con
trat de mariage. O r, les contrats de mariage et les lestamens n’ont lien de commun.
�(8)
3
3e Suite
des motifs.
L ’article i go du C od e s’applique aux testamens, com m e aux
contrats de m ariage, et voici pourquoi : « L ’abrogation de tous les
» statuts locaux, jugés nuisibles tant p arleu r multitude que p a r la
» bizarrerie d ’un grand nombre de leurs dispositions, et l’avantage
» d ’une loi uniform e , long-temps désirée , et profondément sentie,
» entrent évidemment dans l’intérêt commun de la société; et
>, c'est s’élever contre cet intérêt de t o u s , c’est établir un code
« pour s o i , que de faire renaître des lois anéanties, de les tirer
» de l’oubli auquel le corps social les a condamnées en grande con» noissance de cause.
» L e s te s ta m e n s, ainsi que tous autres actes ou contrats, sont
» i n d i s t i n c t e m e n t soumis à ces principes sacrés. L a faction du
» testam ent, com m e le disent les lois romaines, est incontesta» blem ent d ’ordre public. L e premier devoir du testateur est de le
-» reconnoître et de le respecter : de p lu s , les grands motifs qui
» ont dicté l ’art. 1390, relativement au contrat de m ariage, s’ap» pliquent naturellement au testament : l’avantage du p u b l ic ,
» ainsi que la tranquillité des fam illes, ne sont pas moins compro» m is, en rappelant en ternies généraux, dans une disposition
» testamentaire, une coutume abolie, qu’en la reconnoissant dans
» un contrat de mariage ; dans l’un com m e dans l'autre c a s ,
» l ’intérêt public est violé, et la dame de Chazerat s’est constituée
» au-dessus de la volonté générale,
» Soit par son m ¿Pr‘s étudié de la précieuse uniformité de
« nos lo is,
» Soit en reproduisant cette multitude infinie de coutumes >
» et avec elles les contestations interminables que la sagesse du
» législateur a voulu écarter.
Réfutation.
Discutons de s a n g - f r ° i d 3 et prononçons sans nous laisser
dominer par l'enthousiasme qui outre tout : ne voyons
que
�(9 )
que ce qui est, en un mot : il n’en faudra pas davan
tage pour entendre les premiers juges eux-mêmes abju
rer , avec la bonne foi qui les caractérise , l’erreur qui
les a séduits.
L es lois qui restreignent la liberté n aturelle, qui
défendent ce qui de soi n e s t pas illicite , ou qui déro
gent autrement au droit com m un, ne s’étendent pas
hors du cas spécial pour lequel elles ont été portées.
Les lois qui prohibent certaines conventions spéciales ,
ne s’étendent pas non plus à d’autres contrats dont elles
ne parlent point (i).
Encore moins peut - on les appliquer a u x disposi
tions gratuites, qui se régissent par des principes tout
différens de ceux qui règlent les conventions (2) ; voilà
des principes universellement reconnus.
O r , l’article 1890 se trouve dans les deux cas. L a con
vention qu il proliibe pour l avenir, etoit très-usitée sous
l’ancien ré g im e , et n’a rien d’illicite en soi j il suffît de
lire cet article avec attention pour en rester convaincu.
Que porte-t-il en effet ? « L es époux ne peuvent plus
« stipuler, d’une m anière générale , que leu r association
« sera réglée par l’une des cou tum es, lo is , etc. 3 qui
« sont abrogées par le présent Gode. »
(0
V o ir Donnât, livre i e r , titre I e r , section seco n d e, nombre i 5 et iG ,
e» lo » romaines qu’il cite.
W Cela 0*1 sL vrai > que ,es conditions QU les modifications
illicites qui an-
" ,
. 7 M o n t io n s intéressées auxquelles elles sont apposées par contrat
entre-vifs , d-après les articlos , l 5 l ct , l5 5 du code, n’annullent point les dispositions testam entaires auxquelles elles sont a jo u t é e s , et sont seulement
putées tuai écrites dans I05 testamens, d’après l’article 900.
B
ré
�Ne peuvent plus ! pesons bien ces expressions. Si
les époux ne peuvent p lu s , ils pou voient donc, avant la
loi prohibitive, ce qu’elle dit qu’ils ne pourront plus :
la stipulation qu’elle leur interdit, pour l’avenir seule
m ent , sans l’annuller pour le passé , étoit donc p er
mise avant d’être prohibée : donc elle n’étoit pas illicite
en soi et de sa nature ; donc elle ne l’est aujourd’hui
qu’accidentellem ent, et parce qu’elle est formellement
prohibée : donc l’article 1390 du Code qui la prohibe,
restreint la liberté naturelle des conventions, défend
ce qui de soi n est pas illicite.
Disons pins il déroge à la liberté indéfinie des con
ven tion s matrimoniales elles - mêmes , établie en règle
générale par l’art. 1389, qui le p récèd e, et qui p o rte:
« L a loi ne régit l’association conjugale, quant aux
« b ien s, qu’à défaut de convention sp éciale, que les
« époux peuvent fa ire comme ils le jugent à propos. »
Concluons que l’art. 1890 étant une loi qui déroge a u x
reçues générales , au droit com m un, une loi d’exception ,
en un mot -, il appartient, sous tous les rapports, à la
classe des lois dont l’application doit être renferm ée dans
le cas spécial pour lequel elles ont été portées.
D ’un autre c ô té , quand l’article 1890 seroit suscep
tible d’être appliqué à des cas semblables, ad sim ilia ,
l ’extension de cette loi p ro h ib itive, d’une convention
matrimoniale qu’elle ré p ro u v e, à une disposition testa
mentaire dont elle n’a point parlé , seroit encore inadmis
sible j ca r, quelle ressemblance et quelle analogie peut-il
y avoir entre des conventions matrimoniales , qui sont
des contrats in téressés} des contrats synaUagmatiques,
�( 111
des contrats en tre-vifs, formés par le concours du con
sentement m utuel des époux , dans la vue de régler
leur société conjugale pendant leur vie , et les dispo
sitions testamentaires, qui sont des actes à cause de
mort émanés de la seule volonté libérale du testateur,
et dont l’exécution est renvoyée après son décès ? (a)
(a) N ous l ’avons déjà dit (page 9) : dans les contrats in téressé s, les condi
tions ou les m odifications illic ite s annullent la convention principale qui en est
grevée. A u contraire, dans les actes d e lib éra lité, les conditions et les m odifica
tions illicitesn o donnent point atteinte à la d ispo sitio n p rin cip a leklaquelle elles
sont ajoutées. Ces conditions ou m odifications illic ite s y étant réputées non
é c r it e s , aux termes de l’article goo du C o d e , elles doivent être retranchées du
testament. P ar ce retran chem en t, la disposition devient pure et sim p le , et
n'en est pas m oins valable. C ’est ce qu’a vo ien td it avant le Code N apoléon les
lois rom ain es, et particulièrem ent la loi 14e , au d igeste, d e C ondit. instit. ,
ainsi conçue : « Conditiones contra ed icta iniperatorum , aut contra le g e s , aut
tjuœ contra borios m o re s , v e l derisoriœ su n t , aut hujus m odi cjuas prcvtores
irnprobaverunt , pro non scriptis habentur, e t perin de ac s i hereditati sive
leg ato a djectœ non e s s e n t, hereditas leg atu m ve capitur. » C ’est aussi ce
q u ’observent R ica rd , dans son T r a ité des dispositions conven tion nelles, tit. 2,
cliap.
5 , sect. 2 j
D o m a t, dans ses L o is c iv ile s , seconde partie , liv.
3 , tit.
i er,
sect. 8 , n°. 18 j F u rg o le , T r a ité des testam ens, tom . 2 , ch ap . 7 , sect. 2 ,
n°. 125 , etc. etc.
A p p liqu an t ce principe
, nous
en co n clu ero n s , avec r a is o n , que si
d e.C h a zerat, après avoir légué à trois branches de scs parens
madame
l ’u n i v e r s a l i t é
de
ses b ien s, pour les recu eillir suivant les règles d e la représentation à l infini,
avoit 'fait à sa disposition une m odification réprouvée par la l o i , en a jo u ta n t,
te lle qu’e lle avoit lieu dans la ci-devant Coutum e d 'A u v erg n e, il faudroit tout
s*niplenient regarder co dernier m em bre de la phrase com m e non éc r it, le
trancher, C[ r <!(iu ire p ar conséquent la disposition au prem ier m em bre, qui
P te . « j 0 donne ct |£gu(j tout c0 j ont .j m ,cst p erm;s Je d isposer, à tous ceu x
01
v
6 mes parcns ({]e teUe ct tcUo brancho) qu; scroierit en ordre de me
» s u c c é d e r , suivant les règles de la représentation a l'in fin i» . O r , ce retran
chement no foro;t pas lo p]us légor dlangenlont à I'efiet de la disposition ; car
v e r r a p lu s b a s q u e la représentation à Vinfini n ^ t o i t p a s ( lifïé ie n t o e u c o u -
tumo d A u v e rg n e , do ce q u ’elle étoit partout.
B a
,
�( 12 )
• Écartons donc pour toujours l’argument de parité, qui
a servi de base à la décision des premiers juges*, puis‘qu’au lieu de parités il n’y a que des disparates impos
sibles à dissimuler entre les conventions matrimoniales
et les dispositions testamentaires.
Y a-t-il plus de justesse dans ce qu’ajoute le sieur
M irlavaud , lorsqu’il semble dire : Q u’importe que l’ar
ticle i qo du Code Napoléon n’ait pas été violé par le
testament de madame de C h azerat, avec lequel il n’a
aucun ra p p o rt, s i l ordre public lui-rneme est violé par
ce testament ? H n’en sera pas moins nul $ car on ne
peut pas plus déroger a 1 ordre p u b lic, par des dispo
sitions testam entaires, que par des conventions matri
moniales : l’art. 900 du Code Napoléon le proclame.
3
D ’accoi’d du principe 5 mais venons au fait. Comm ent
madame de Ghazerat a-t-elle violé Vordre public dans
ses dispositions testamentaires?
Elle l’a violé d’abord , nous dit-on , en se constituant
au-dessus de la volonté générale par son mépris étudié
. de la précieuse uniformité de nos lois.
N ous en demandons bien pardon au tribunal j mais
notre vu e est trop bornée pour apercevoir par quelle
disposition madame de Cliazerat a m érité ce reproche.
E lle sJest mise au-dessus de la volonté générale, par
son mépris étudié de la précieuse uniformité de nos
lo is , elle dont la libéralité étoit enchaînée par le statut
local qui régissoit ses biens avant la révolution, et qui
t ie n loin de repousser avec un mépris étudié le bien
fait de la législation nouvelle , dont la précieuse unifor
mité est venue briser ses ch a în e s, l’a saisi an contraire
�(
.3
)
arec transport! Elle qui a étendu ses largesses à mesure
que la faculté de disposer s’est étendue uniformément
dans tout Vempire, par les lois des 4 germinal an 8 , et 16
floréal an 1 1 !
Il n’y a pas moins d’irréflexion dans le reproche adressé
à la testatrice , de reproduire la multitude infinie de
coutumes que le Code p ro scrit, et avec elles les con
testations interminables que la sagesse du législateur
a voulu écarter. U n e seule des quatre cents et tant de
coutumes de France est rappelée dans son testam en t,
et sur le seul point de la représentation à l infini en
ligne collatérale. L ’unité ne constitua jamais une m ul
titude. D ’ailleurs, cette coutume u n iq u e , la danie de
Chazerat ne l’a même pas reproduite d’une manière
générale. Elle ne l’a pas rendue la seule ordonnatrice
de ses libéralités, ¿du contraire f la coutum e abolie , à
laquelle elle s’est référée sur un seul p o in t, condamnoit
presque toutes les dispositions qu’elle a faites, et notamment,
L e legs universel de l’usufruit de ses biens à son m ari,
au profit duquel tout avantage direct ou indirect lui
étoit interdit par cette loi prétendue ravivée j
L ’épuisement total dè ses biens en libéralités testar
mentaires, que la môme coutume auroit réduites au quart ;
Enfin , la confusion de ses propres, anciens et naissans> de ses acquêts , de son m o b ilier, en une seule
massc qu’elle a léguée en pi'opriété à trois branches de
ses paren s pour être partagée entre les trois branches,
au m a r c la livre de ce qui lu i ¿ to it provenu de chacune
elles, tandis que la coutume auroit attribué les meubles
et acquêts aux parons paternels exclusivem ent; qu’elle
3
�(4 )
n’auroit fait rem onter aux e sto cs d’ou ils étoient proven us,
que les immeubles e x is to n s dans la succession seulement,
et qu’elle n’accordoit aux parens du coté de ses aïeules
paternelle et m aternelle, ni la reprise , ni le rem p lo i des
dots m obilières qu’elles avoient portées dans sa famille.
A u lieu de disposer suivant l’ordre établi par la cidevant co u tu m e, elle n’a donc fait aucune disposition
à titre u n iversel, qui ne soit tout à la fois une v io la tio n
ouverte de ce sta tut l o c a l , et le x e ic ic e le plus indé
pendant de la f a c u l t é illim ité e de d isp o ser à son g r é ,
qu’elle t e n o i t du b i e n f a i t des lois nouvelles.
C o m m e n t expliquer après cela le reproche fait à sa
m é m o i r e , de s’être constituée au-dessus de la volonté
générale, par un m ép ris é tu d ié de la nouvelle législation,
et d’avoir rep ro d u it , d ’u n e m anière g é n é r a le , la cou
tume abrogée?
*
4 * S u ite d es m otifs.
Elle a mérité ce reproche, continue-t-on , « attendu que la lu i,
» en laissant au testateur la plus grande latitude dans la disposi» tion de ses biens, en l’établissant l’arbitre souverain de ses der„ nières volontés, lui a cependant donné pour bornes toutes les
» règles qui concernent l’ ordre public, les bonnes mœurs , et
♦
> les formalités des actes ; que c ’est sous ces conditions qu’il a
» reçu de la loi un pouvoir si étendu; qu’il perd son pouvoir, ou
» du moins que ce pouvoir est rendu sa n s'e ffe t, dès qu ’il oublie
» les conditions sous lesquelles il l’a reçu.
»> Que la dame de Cliazerat a méconnu ou méprisé ces prin
ts cip es, lorsque dans son testament et dans son troisième codi» cille, au mépris de la volonté et des intérêts de la so cié té , elle
» a remis en vigueur, en ternies généraux , une coutume abolie,
»' en o r d o n n a n t que ses biens retourneraient aux- vstocs desquels
�( i
5)
)> ils étoient provenus ; qu’ils seraient partagés entre, le s trois
» branches'de sa fam ille qu’elle dénomme, suivant les régies de
» la représentation à l’ infini, telle qu’ elle avoit heu dans la ci» devant Coutume <?Auvergne, et ensuite subdivisés dans cha» cune d’e lle s , suivant les mêmes règles de la représentation
» à l ’infini, ' »
J
Réfutation.
Ce ne sont là que des redites déjà réfutées ; de pures
illusions dans le droit et dans le fait déjà dissipées.
Elles ont pour base, en point de d ro it, la supposition
que toute disposition testamentaire , par laquelle le
testateur oi’donne , en termes généraux , la distribution
de ses biens d’après l’ordre autrefois suivi dans une
coutume abolie par la nouvelle législation, est illicite
et nulle en s o i, parce qu’elle viole l ’ordre public nou
vellem ent établi •, et en point de f a i t , la supposition
que madame de Cliazerat a ordonné la distribution de
ses biens dans l’ordre ci-devant établi par la coutume
d’A u vergn e.
O r , nous croyons avoir déjà suffisamment prouvé que
ces deux suppositions sont deux erreurs, l’une de droit,
1 autre d é fa it. Nous allons cependant y revenir encore,
afin de ne laisser aucun nuage sur ces vérités \ et emprun
tant , pour m ieux con vain cre, les raisônnemens irré
sistibles d’un orateur du trib u n at, lors de la discussion
l° i du 4 germ inal an 8 , nous dirons :
*
L a faculté de disposer de sa propi'iété est une éma" dation directe de la propriété elle-m em e : le droit
" de donner est le m ême que celui de jouir.
“ k e cU-oit de p ro p riété, co n sid éré dans son essence
�«
«
«
«
<t
«
«
«
/<
«
«
«
«
«
( i6 )
n atu relle, le droit de posséder ce qu’on possède,
existe avant toute société. M ais c’est la société qui le
garan tit} et il est simple q u e , pour prix de cette
garantie
la loi civile puisse imposer à Vexercice du
droit de propriété les contraintes et les formes qui
paroissent convenir au m ain tien , et même au plus
grand avantage de la société qu’elle gouverne. >*
« D e là naît la puissance du droit c iv il, non pas sur
le droit de propriété qu’il ne peut détruire, mais sur
toutes ses conséquences qu il dirige, et par conséquent
q u i l peut étendre ou resserrer à son gré.
« L a p rin c ip a le conséquence de ce droit est la transmission de la propriété elle-même , soit qu’elle s’opère
par la volonté du don ateur, soit qu’à défaut de cette
volonté la loi civile la règ le, et la détermine par la voie
de la succession. »
Il
suit, de ces grandes maximes d’ordre social, que
la faculté illimitée qu’a chaque propriétaire de disposer
de ses biens , comme il lui p la ît, daus les formes et par
les voies que bon lui semble , est la règle générale , le
droit commun : Par co n séq u en t, que toutes les lois
c iv ile s , qui donnent des b o rn es, des gênes ou des
formes à cette faculté illimitée , sont des lois limitatives
de la liberté naturelle ; et par une dernière“conséquence,
que tout ’ ce qu elles ne defendent pas expressément
reste permis au testateur. En deux m ots, que l ’ordre
p u b lic , r e l a t i v e m e n t à la fa c u lté de transmettre ses
biens à litre g ra tu it, se compose uniquement des lois
réglementaires et prohibitives que le législateur a publiées
sur la disponibilité des b ie n s, et sur le mode de dis
poser;
�*7
(
)
poser ,• de sorte qu’il est rigoureusement vrai de d ir e ,
avec le n°. 55 du décret du 22 ventôse an 2, qu'en cette
matière la loi valide ce q u e lle n annuité pas.
O r , n’est-il pas de fait constant qu’aucune loi directe
et positive nannulle la disposition d’un testateur qui ,
pour exprim er sa pensée avec plus de précision et en
moins de m o ts, lègue ses b ien s, comme madame de
Chazerat, à certaines branches de ses parens collatéraux
qu’il dénom m e, et qui prescrit le partage entx-e tous ses
légataires, dans le même ordre suivant lequel ils lui
auroient succédé sous le régim e spécial d’une coutume
abolie auquel il se réfère ? D on c la loi valide cette for
mule de disposition, par cela seul qu’elle ne l’interdit
pas •, car , encore une fois , il n’y a de formules de dis
positions , comme de formules de conventions, nulles ,
que celles qui sont spécialement prohibées.
5e Suite
des motifs.
« L e rappel qu*a fait madame de C h a z e ra t, en termes ge’n é» raux , de la coutume d ’Auvergne ( pour régler la distribution
» de ses biens entre ses légataires ) , renferme une résistance réflé>> chie à la 'volonté et
à l ’utilité publique , sous deux rapports
» frappans ; Pun en obligeant ses héritiers de faire la recherche
M de la nature et de l’origine des biens dans chaque estoc , suivant
ta coutume d ’Auvergne, contre la disposition précise du C o d e ;
et 1 autre , en astreignant ses héritiers à faire enlr eux les divi
sions et sous-divisions, suivant la r e p r é s e n t a t i o n à l in fin i,
» dans les principes de la même coutume d ’ Auvergne; or la
coutume d Auvergne avoit, sous ces deux rapports, des maximes
» spéciales et particulières à elle seule, qui s’éloignoient de toutes
« les autres coutumes qui avoient admis la fameuse rè g le , paterna
c
�(
,8 )
» palernis, materna malernis; et que ces principes de la coutume
» ont été reproduits par la dame de Chazerat dans sa famille
» et dans sa succession , com m e un brandon de discorde et de
» contestations. »
» O n objecteroit vainement que la Cou tu m e d’Auvergne n'est
» rappelée dans le testament que com m e une démonstration, un
/) point com paratif, et non com m e loi impérieuse. Raisonner ainsi,
» c ’est jouer sur les m o ts, et abuser des termes; car, comment la
» C outum e d ’Auvergne ne seroit-elle dans le testament que comme
» mode d ’indication, lorsque la dame de Chazerat veut diserte» m e n t, et en termes géminés, que cette Coutume soit la règle
» du partage de ses biens ? lorsque presque tous les appelés par elle
» ont donné à leurs conclusions la forme d ’une demande en par» tage , d'après les maximes de la Coutume d ’A u ve rg n e ? lorsque
» dans le Tait, et dans la réalité, il seroit impossible à ces héritiers
« de faire ce partage, tel q u ’il est prescrit, sans être guidés par
>, la Coutum e d ’Auvergne. A i n s i , c ’est la Coutum e d’Auvergne
» à la main , qu'ils seroient obligés de rechercher quels sont
» les biens qui sont provenus de chacune des lignes favorisées;
» qu’ils seroient obligés de faire uue recherche semblable, pour
» attribuer à chaque b ra n c h e , par la subdivision , les biens qui y
n ont aussi été rapportés ; qu'il faudroit distinguer les dots rao» biliaire ou pécuniaires, qui auront fait souche par double con>r fusion ; qu ’il faudroit égalem ent, dans le cas de la représenta» t io n , statuer si l ’oncle et le neveu, étant en ligne égale, doivent
« concourir ensem ble; si au préjudice d ’une renonciation on peut
» venir par
re p ré se n ta tio n ;
si
le
partage doit se iaire par souche,
» ou bien par tètes, et une multitude d ’autres difficultés sembla*
» blés. Ainsi
».
s ’o u v r i r o i e n t
pour ces héritiers une ample carrière
de débats , aux juges une multitude de questions
é
♦inenses,
» pour la décision desquelles la Coutume d ’Auvergne seroit la
t> seule régulatrice. .
» Qu'on ne peut pas dire que la coutume sera prise ici comme
« autorité seulement , et non com m e loi nécessaire , puisque
�( i9 )
h
cette c o u t u m e , ses u sages, sa jurisprudence seroienb la seule
» règle sur laquelle on devroit se diriger pour suivre la volonté
» et les vues rétrogrades de la testatrice; que la coutume ne seroit
« pas simple renseignement, puisque sans elle , sans s y renfVrjjier,
» on ne pourrait opérer la distinction des b i e n s , éclaircir leur
» origin e, les appliquer aux diverses lignes
,
a u x
différentes bran-
» c h e s , découvrir les individus appelés par la représentation , et
» parvenir enfin à débrouiller les obscurités de ce travail laborieux.
»» L a coutume ne seroit pas un simple m o d e , une c o n d itio n ,
» puisqu’en 'général les modes et les conditions peuvent se con^
» cevoir et s’isoler des dispositions auxquelles ils sont apj o
,
» mais ici le m o d e , la condition prescrite par la dame ce
» zerat sont inséparables; c a r , enfin , si la testatrice a institue^ e
» gataires universelles les trois lignes q u ’elle a affectionnecs, c est
» spécialement pour prendre les biens provenant de chacune d elles,
» suivant la C outum e d ’A u ve rg n e ; c ’est pour les subdiviser en» su ite , d ’après les mêmes principes, d ’après la même origine et
» nature des biens. Ses vrais héritiers seront ceux qui lui seront
« donnés par la représentation de la C outum e d ’Auvergne ; celte
» coutume se lie et s'incorpore donc à tout ce p artag e , et com » mandera à ses opérations. »
Réfutation.
Quoi! le testament de la dame de Cliazerat aura rappelé
la coutume abolie, en termes généraux ; il aura soumis
l’empire de cette loi m o rte, toutes les opérations du pai
tagede sa succession, la recherche de l’origine de ses biens,
leur application à telle ou telle autre branche de païens ,
leur distribution dans chaque branche j il aina imPos ‘ scs
- nombreux légataires l’obligation de s’y soumettre, sans
restriction et sans réserve, lorsque dans le fa it h dame
Chazerat ne s’est référée qu’à une seule des dispositions
G 2
�delà ci-devant coutum e, et qu’elle l’a contrariée sur toutes
les autres, notamment sur la distribution de ses b ien s,
qu’elle prescrit au marc la livre ?
Q uoi ! elle aura montré une résistance réfléchie à la
volonté et à l'utilité p ubliqu es, proclamées par la nou
velle législation , lorsqu’elle n’a pas fait un seul legs qui
ne soit un hommage à cette législation n o u v e lle, et
l’exercice le plus étendu des pouvoirs que les nouvelles
lois lui ont conférés, et que la coutume lui refusoit ?
E n fin , elle aura eu la folie de singer le législateur, de
prétendre re m e ttre en vigueur la Coutume d’A u v e rg n e ,
de lui redonner l’autorité d’une loi obligatoire , parce
q u’elle a emprunté quelques-unes de scs expressions pour
indiquer Tordre dans lequel elle entendoit distribuer sa
succession ? H é! depuis quand une loi n’est-elle donc plus
une règle générale commune à toutes les personnes qui se
trouveront dans le cas qiv’elle a prévu j Commune prœceptum ? Depuis quand le règlement domestique et privé,
que fait un testateur pour le partage de sa seule succes
sion , est-il donc une lo i?
C e n’est pas encore assez de ces inconcevables méprises.
Les premiers juges, égarés par un zèle louable pour l’in
violabilité de la lo i, mais poussé trop lo in , ont accusé les
intentions de la testatrice, pour faire le procès à ses der
nières volontés. A les entendre , son testament jeté dans
ça fam ille, comme un brandon de discorde, ne fut pas
l’effusion d’uii cœur aimant qui vouloit faire des heureux,
mais le délire de la haine du nouvel ordre établi, qui,
pour s’en jouer, voulut livrer son patrimoine à Pembra
sement des procès.
�( 21 )
A ces mots, il nous semble voir l’ombre de madame de
Cliazerat soulever la tête, et répondre aux magistrats:
« M essieurs, je respecte votre saint emportement : le
» m otif en est sublime ) mais daignez entendre mon
» excuse.
« V ou s ne voyez qu’une boutade extravagante de Fliu» m eur contre la législation n o u v e lle , dans ce passage
» calme et mesuré de mon testament : M on intention étant
* de fa ir e
retourner la p ro p riété d e m es b ie n s , autant
» q u i l d ép e n d de m o i , à c e u x de m es parons (¡ui descen » d o ien t d es e sto cs dont ils nie sont p ro v en u s , je donne
» et lègu e c e dont i l ni-est p er m is d e d is p o s e r , à m es p a » rens de la b ra n ch e de m es a ïe u l et a ïe u le p a te r n e ls , et
» de c e lle de m on a ïeu le m a te r n e lle , pour être partagés
» entre le s trois bran ches , au m arc la livre de c e qui
» m 'est provenu de c h a c u n e , suivant le s règles d e la re» présentation à l in fin i, telle q u e l l e a v o itlie u d a n s la
1
» ci-devant C ou tu m e d 'A uvergne.
O
» Pardonnez mon erreur, M essieurs: en m ’exprimant.
» ainsi, j ai cru parler le langage simple et n a ïf de la rai» son et de la justice. Il étoit loin de ma pensée et de mon
» cœ ur, de vouloir outrager la loi nouvelle, méconnoitre
” ou m epriser son autorité, et lui opposer une résista n ce
” rfJ lé c ld c , en prescrivant la distribution des biens que
je lé g u o is , d a n s Vordre de la représentation à l in fin i ,
entre m cs lég a ta ires, puisque ma v o lo n té n’a agi dans
mes disposiiiOÛS dernières, qu’en vertu des pouvoirs illi” mités que la loi nouvelle m ’a cco rd o it, et que la cou
tume abolie me refusoit.
“ k cussé-je offensée, cette loi nouvelle, q u i, donnant
» un libre essor à mes affections, étoit clière à mon cœur.
�( 22 )
I’eussé-je offensée par nies paroles, par la naïveté de
mes expressions , lorsque j’en saisissois le bienfait avec
transport, lorsque le fond de chacune des dispositions
de mon testament étoit un hommage à son autorité, et
que je la bénissois de cœur et d’intention, l’offense se
rait innocente: faudroit-il donc la punir?
» M inistres de la loi sur la terre, vous savez m ieux que
m oi, q u e lle ne frappe jam ais sans avertir. Lorsque je
testai, elle n’avoit p a s proscrit , et elle n’a point proscrit
encore, la formule de disposition q uem ’inspiroit le seul
amour de la ju stice, et non un fol entêtement pour
exhum er la Coutum e d’A u vergn e, ( qu’il n’étoit, ni
dans ma puissance, ni dans mon intérêt, défaire revivre,
encore moins dans ma volonté, puisque je l’ai contrariée
à chaque ligne de mon testament ). Je l’adoptai, cette
maniéré d’exprim er ma p en sée, uniquem ent parce
qu une longue tradition m ’en avoit appris le sen s,
l’étendue, la portée, et q u eje n’en connoissois pas d’au
tre qui remplît plus parfaitement mes ' intentions de
rem ettre à toute la postérité de mes premiers ancêtres,
sans restriction, les biens, ou le remploi des biens , que
j’avois reçus de chaque branche.
» Si j’en avois connu une plus propre à rendre la plé
nitude de mes intentions , je laurois em ployée: mais
j’ose défier les gens de loi les plus exercés, avec toute
des affaires qu’ils ont, et qui me manquoit
l ’ e x p é r i e n
c e
à m oi, j’ose les défier, dis-je, d’exprim er aussi complè
tement ma volonté en d’autres term es, et en aussi peu
de mots. Cependant il lalloit l’exprim er toute entière ,
ma volon té, puisque la loi du 4 germinal an 8 , et l’ar
ticle 916 du Code N apoléon, la déclarent l’arbitre eu-
�'
( »3 )
» prême dè mon testament : et parce que j aurai exp ïim e
» ma v o lo n té , de la seule m anière qui étoit propre à
» éviter toute lacune, toute m éprise, et à me faire en» tendre sans équivoque, j’aurai violé la nouvelle lo i.
» une loi qui,, sans me prescrire aucune formule:sacra» mentelle pour rendre ma pensee, sans m o n in ieid n e
» aucune, s’étoit bornée à me dire : O rdonnez, et vous
» serez obéie ? L a loi permet ce q u e lle ne défend pas ;
» elle v a lid e c e q u e lle n }an n uité p a s , encoie une fois j
» c’est ainsi que l’on raisonne dans le séjour desmorts, ou
» nous sommes à l’abri des illusions dont les vivans sont
» si souvent le jouet. L ’on n’y étouffe pas la loi pai exces
» de précaution et de zèle pour son inviolabilité j et nous
» plaindrions sincèrement les vivans, si les tribunaux
» avoient sur la terre le terrible pouvoir de boulevei'ser
» la société p a r îles p ro scrip tio n s arbitraires , en s’armant
» du prétexte , injurieux au législateur, de faire m ieux ,
» et d’être plus sages et plus prévoyans que lui.
» Je ne réponds rien à votre ingénieuse dissertation,
» sur les distinctions à faire entre les modes et les condi» tions qui peuvent se concevoir et s’ isoler des dispost» tions, d’avec les modes et les conditions qui en sont
» inséparables , parce que tout cela a trop d’espnt pour
“ m oi, qui ne fus qu’une femme sur la terre, et que je
” n a i pas le bonheur de vous comprendre. Mais ce que
» je crois bien com prendre, c’est que la
necon cam
» n o itp asla formule que j’ai ch oisie poui expum ei m.i
»•pensée : et vous, Messieurs ! plus seveies que le l i Dis
» la leur, de quel droit avez-vous refusé de l’absoudre ? ^
» Je n ai pusà rue justifier du reproche qui in est adi esse,
�» d’avoir im prudem ment je té un brandon de discorde
» dans ma fa m ille , par le prétendu cahos dans lequel
»» mon testament l’a plongée; car ce cahos imaginaire n’est
» qu’un prestige. N o n , n o n , l’esprit de vertige ne s’em» parera pas de mes légataires universels-. Ils ne feront
» pas de mon riche héritage la proie du palais, en rani-*» mant des questions usées, sur lesquelles les opinions
« sont depuis long-temps fixées. Quant aux recherches
» qu’ils auront à iairc pour établir le degré de leur pa» renté, e t ju stifier leur successibilité, elles ne diffèrent
» pas de ce lle s q ue sont tenus de faire tous les héritiers
» ah intestat en général, dans les successions échues à
» des parens collatéraux, appelés à succéder par représentation , dans les cas des articles 742 et 743 du Code; o r,
„ puisqu’elles n’empêchent pas de succéder ab intestat ,
» pourquoi empêclieroient-elles de succéder par la volonté
» d’un testateur ? »
6 e S u ite d es m otifs.
« On oppose en vain que madame de Chazerat n’a pas généra» Usé son rappel de la Coutum e d ’ Auvergne, puisqu’elle Ta res» treint à une seule de scs dispositions. C ’est une e r r e u r , car la
« soumission à une coutume prend évidemment la form e de dispo« silion g é n é rale , lorsqu’elle porte sur un objet de disposition
» générale. Or , c ’est pour la nomination de ses légataires univer» sels, que la dame de Cliazerat invoque la Coutum e d ’ Auvergne;
» c’est celte coutune en général qui regleroit leurs qualités et leurs
» avantages. C e tt e disposition prend donc nécessairement un ca» ractère de généralité dans ce partage.
» L a d a m e de C lia ze ra t eû t pu aisément spécialiser sa disposé
» tion ; elle eût pu lé g itim e m e n t faire entre ses héritiers l ’appli
cation
�(
^5 )
» cation de tels ou tels de ses biens , suivant sa volonté ; elle
» eût pu , par cette voie spéciale , faire rentrer dans chaque
» ligne, dans chaque b r a n c h e , la portion de fortune qu ’elle en
» avoit reçue ; rien ne la gênoit dans cette manière de disposer ;
» par là elle eût rempli ses intentions, respecté l’ordre p u b lic ,
» étouffé le germe de mille contestations dans sa famille ; mais au
» lieu de faire ce qui lui étoit p e r m is , elle a préféré de faire ce qui
» lui étoit défendu. D e telles dispositions ne peuvent être protégées
» par la loi qu’elles offensent. «
Réfutation.
Puisque les motifs du jugem ent se répètent sans cesse,
nous sommes forcés de nous répéter aussi, et nous dirons :
C ’est à pure perte qu’on s’épuise en raisonnemens subtils ,
pour trouver dans le testament de madame de Chazerat
un ra p p el de la cou tu m e d ’ .Auvergne en term es g én éra u x.
Quand cela se ro it, on en concluroit encoi’e mal à.
propos que le legs universel, porté par ce testament et
par le codicille qui le suivit, est n u l-, car aucune loi ne
defend à un testateur de se référer d’une manière géné
rale à une coutume a b o lie , pour la désignation des
héritiers qu'il choisit par sa propre v o lo n té, et la dis
tribution de ses biens. L ’adoption de telle ou de telle
coutume , d'une manière générale, n’est interdite qu aux
époux , pour le régime de leur association conjugale.
5 nous avons démontré que de pareilles lois prohi
bitives de ce qU{ seroit licite en soi ( cessant la prohi
bition ) , üc s’étendent pas d’un cas à l’autre , et surtout
des contrats de mariage aux testamens.
Ce n est pas tout : les prem ici’s juges n’ont pas scuD
�J'.'rnent erre Vlans le d ro it, ils se trompent encore évi
demment sur le fa it, lorsqu’ils veulent que la dame1
de Chazerat se soit référée d’une inanière générale h. la
coutume d’A u vergn e , pour la désignation de ses héri
tiers et la distribution de ses biens , tandis qu’elle n’a
presque pas fait une seule disposition qui ne soit en
contradiction avec l’ordre successif de la coutume ;
qu’elle ne s’y est référée que pour indiquer., par une
dénomination co lle ctiv e , ceux de scs parens qu’elle
entendoit p ré fé re r, et pour suppléer à une nomen
clature individuelle qu il lui eût ete impossible de faire
fivec certitude dans le sens qu elle 1 entendoit, sa volonté
étant de rendre participons à ses libéralités, ceux même
qui naîtroient dans l’intervalle de la faction de son tes
tament à son décès.
’j e Suite des motifs.
« En vain on prétend excuser la dame de Cliazerat, en allé—
» guant qu’on ne peut lui faire un reproche d ’avoir établi le par» tage de ses biens sur la représentation à l’ infini, puisque celte
« représentation étoit admise par la loi du 17 nivôse an 2 : cette
» justification ne peut être adm ise,
« 1”. P a r c e q u ’au décès de madame de C h a z e ra t, ce n ’étoil plus
» la loi du 17 nivôse qui devoit régler soit la fo r m e , soit le mérite
» de ses dernières dispositions; c étoit le Code civil, sous l ’empire
» duquel elle est décédee, et cjue son testament olographe a reçu
» une date.
» 2’ . L a testatrice est loin d avoir puisé dans la loi du 17 nivôse
» la représentation q u ’elle ordonna : cette l o i , dans toutes les
» lignes, toutes les b r a n d ie s , sous tous les points de v u e , établit la
» représentation sous le rapport de la proximité du sang. A u con*
�(
27 )
» traire , la coutume d ’Auvergne attachoit la représentation à
» l’origine et à la nature des biens. 11 falloit avoir pour auteur
» celui duquel les biens provenoient. L a loi du 17 nivôse avoit
» à cet égard puisé sa représentation dans l ’affection naturelle,
» l’avoit liée aux personnes. L a coutume d ’Auvergne l’avoit fait
» dépendre des usages féodaux, l’ avoit attachée à la glèbe, plutôt
» qu'aux liens du sang. On ne peut donc trouver aucune analogie
» entre ces deux représentations, dont la source comme les efiets
» étoient différens. »
,
Réfutation.
Q u ’a-t-on voulu dire avec la représentation prétendue
attachee par la coutume d’ Auvergne à l’ origine et a lanature des biens , plutôt q u a u x personnes j à la glèbe,
plutôt q u aux liens du sang ? Prétend-on qu’en COUume d 'A u vergn e il y avoit des générations de champs
comme des générations d’ hom m es? Q ue ce n’étoient pas
les personnes qui y succédoient par représentation au*
personnes décéd ées, propriétaires, mais les champs qui
succedoient aux cham ps? L e champ neveu, q u i partageoit avec le champ frère la succession du champ oncle?
Jamais les pages de la coutume d’A u vergn e n’ont été
a i l l é e s par ce galimathias inintelligible, et ce n’est
pas non plus ce qu’a dit le jugem ent de premiere ins
tance, n { ce
a v0l,iu t]jr a
GePcndant il n’en est pas moins erron é, lorsqu’il
regarde la représentation à l’in fin i, qu’adinettoit la cou
tume d’A u v e rg n e , comme différente dans sa nature et
ses effets de celle qu’admeltoit la loi du 17 nivôse. Elle
ne diiïère même pas de celle qu’admet encore le Gode
D 2
�(
)
civil. Pour nous en co n vain cre, mcltons-nous le texte
de la coutume sous les yeux.
« L e mort saisit le v i f son plus prochain lignager
<« habile à lui succéder, » porte l’art. Ier, titre 12. L ’art.
explique ces mots habile à succéder, en disant : « 11
« y a deux manières d’hériter , l’une du côté paternel,
« et l’autre du côté m aternel, et retournent les biens
« à Vestoc dont ils sont p ro ven u s, tellement que les
« prochains lignagers du cote paternel succèdent ah
« intestat ès biens provenus dudit estoc , et non les
»> parens du côté m atern el, et è contra. »
M ais ce n’est pas le lignager le plus prochain de f a i t ,
h l’instant du décès , qui succède exclusivem ent dans
chaque ligne ou dans chaque branche ( appelée estoc par
la coutume ). L ’art. 9 admet les parais lignagers à suc
4
céder par représentation de leurs auteurs , en ces termes:
« Représentation a lieu tant en ligne droite que
« collatérale, us que ad injinilum ( ù l'infini ) audit pays
a coutumier. »
E t en quoi consistait cette représentation ? L e com
mentateur Chabrol va répondre.
« On entend assez (nous d i t - i l ) , ce que c e s t que
« la représentation. Elle forme une espèce de fiction ,
«
«
«
«
«
«
par laquelle 011 est mis au lieu et en la place de
celui dont 011 descend. C ’est un moyen par lequel
le parent qui se trouve plus éloigné de celui auquel
il s’agit de su ccéd er, s’en rapproche et se trouve
appelé à la succession, en remontant à l’ascendant
duquel il descend, et qui étoit on degré égal avec
les autres héritiers ou leurs auteurs. Comme les ex cm-
�»9
«
«
«
«
«
«
«
«
»
«
«
(
0
pies sont toujours plus instructifs que les définitions,
continue-t-il, il n’y a qu’à supposer trois frères, P ierre,
P a u l et Jacques. Pierre vient à m ouiir sans enfans,
Paul lui survit*, mais Jacques étoit mort avant lu i,
laissant des enfans. Si la représentation n’avoit pas lieu ,
la succession de Pierre appartiendroit à Paul seul (comme
lignager plus prochain que ses neveux ). M ais par
le m oyen de la représentation , les enfans de Jacques
succèdent conjointement avec l u i , et de la même
manière que si leur père avoit survécu à P ien e. Il
en est de même dans tous les autres d egres, et à
« V in fin i, dans cette coutume. »
Ouvrons maintenant la loi du 17 nivôse an 2 , nous
trouverons à l ’art. 77 et à l’art.
presque les mêmes
expressions, et absolument la même explication de la
nature et des effets de la représentation.
L a représentation a lieu jusq u'il Vinfini en ligne col
latérale, est-il dit dans l’article 77 , et l’article
ajoute:
« Par l’effet de la représentation , les représentons en» trent dans la p la c e , dans le degré, et dans tous les
» droits du représenté. L a succession se divise en au»> tant de ‘parties qu’il y a de branches ap p elées a la
“ re c u e illir, et la subdivision se fait de la même ma" ni ère entre ceux qui en font partie.
l’article 88 achève ainsi le d é v e l o p p e m e n t . « Ces
» règles de représentation seront suivies dans la sub
» division de chaque branche. O n p a rta g es d a b o id la
■
> portion qui est attribuée à ch acu n e, en autant de
» parties égales, que le ch ef de cette branche aura laissé
» d enfans , pour Attribuer ch acu n e de ces pai tics a tous
83
83
�( 3o )
» les héritiers qui descendent de l’un de ces entons , sauf
» à la soudiviser encore entre eux dans les degrés ul» térieurs, proportionnellem ent aux droits de ceux qu’ils
» x’eprésentent. »
Q ue l’on compare maintenant de bonne foi et sans pré
vention la manière de succéder par représentation à Vin
fini de la Coutume d’A u v e rg n e , avec la manière de suc
céder aussi par représentation à l infini de la loi du 17
nivôse an 2, et qu’on nous dise ou est la différence ?
L es esprits les plus subtils n’y en apercevront as
surément aucune.
A llons plus lo in , et lisons le Code Napoléon. Il parle
aussi de représentation, et i l i a définit à l’article 7 3 g ,
précisém ent comme C h abrol, et comme la loi du 17 ni
vôse, en ces termes : « L a représentation est une fiction
» de la loi, dont l’effet est de faire entrer les représen» tans dans la place, dans le degré et dans les droits du
» représenté.
L ’article 740 l’admet à l'infin i, 'comme la Coutume
d’A u v e r g n e , en ligne directe.
4
I/articlc 7 2 l’admet également d’une manière illi
mitée t en ligue collatérale, au profit des enfans et des
cendait S des frères ou sœurs du défunt, conséquemment
¿1 Vinfini, pour cette classe de parens -, et l’article 7^3
déterminant scs effets, veut que dans tous les cas ou
elle est a d m ise, le partage s'opère par souche. E n fin ,
» que si une môme souche a produit plusieurs brandies,
» la subdivision se fasse aussi par souche dans chaque
» branche, et que les membres de la môme branche
» partagent entre eux par tête. »
�(
3.
)
• Que voit-on encore dans ce développem ent? La re
présentation, telle que la Coutume d’A u vergn e l’admettoit, quant à ses effets, avec la seule différence, que
la coutume d’A u vergn e l’admettoit en faveur de tous
les parens collatéraux en gén éral, et par conséquent
aussi-bien en faveur des descendans d’oncles, ou de
grands-oncles du défunt qui auroient été appelés à lui
succéder à défaut de lignagers plus pi*ocliains, s’ils lui
avoient survécu, comme en faveur des descendans de
ses frères ou sœurs} au lieu que le Code Napoléon n’ac
corde le droit de succéder par représentation qu aux
seuls descendans des frères et sœurs du défunt. D e sorte
qu’il est vrai de dire que la représentation du Code et
celle de la coutume ne diffèrent, ni par leurs effets, ni
par leur d u ré e , qui est également à Vinfini dans les
classes de parens où elle a lie u , ni par leur nature ,
puisqu’elles sont attachées l’une et l’autre à la filia tion
des personnes, et nullement à la filiation des biens} mais
que le Code ne l’applique pas à un si grand nombre de cas.
D o n c, c’est à tort qu’on reproche h la dame de Cliazerat d’avoir fait revivre un genre particulier de repré
sentation, qui n a aucune analogie avec la n o u v e l l e lé
gislation , puisque la loi du j 7 nivôse et le Code Napo
léon lui-même en ont admis une absolument identique.
Encore plus mal à p ro p o s, on reproche à madame
Chiiy.yj’.jf- d’avoir voulu laire revivre une représenta
tion que la Coutume d’A u verg n e avoit attachée à la glèbe,
et fa it dépendre des usages féoda ux. L ’avons-nous bien
entendu ?........ L a coutum e nvojt fai t dépendre des usa
ges féo d a u x la représentation de» personnes, qu’elle ac-
�cordoit aux roturiers comme aux nobles, et pour re
cueillir les biens roturiers comme pour recueillir les biens
nobles !
Devons-nous qualifier cette étrange imputation ? n o n ...
Laissons ce soin au lecteur.
Enfin , on semble nous dire encore que si un bon
citoyen peut entendre les mots représentation à l ’ infini,
sans frissonner, dès que le Code Napoléon les em ploie,
«ju moins ne peut-il pas entendie un testateur prescrire
le retour de ses biens a u x estocs desquels ils sont pro
venus. H é ! m essieurs, soyez d’accord avec vous-mêmes :
madame de Chazerat, suivant vous, pouvait faire rentrer
dans chaque lig n e, dans chaque branche ou estoc de ses
parens, la portion de fortune q u e lle en a reçue \ et vous
frappez son testament d’anathême, parce qu’elle a voulu
ce que vous reconnoissez qu’elle pouvoit ! Pardonnez ma
franchise, messieurs, il me semble que ce n’est pas être
conséquens.
8e Suite des motifs.
« On oppose sans raison q u ’on ne peut demander la nullité de
« la clause du testament dont il s’agit, puisqu'elle n'est pas pro» noncée par la loi : c’est encore une illusion. 11 y a nullité absolue
» dans la violation de toute loi négative prohibitive; en pronon-
» /cant
»
peu t , la loi use de toute sa puissance. Elle impose
un devoir indispensable, elle écarte tout prétexte; excludit po~
tentiarn juris et facti. O r l’art. 6 du C od e dispose q u ’on ne
peut dérober par des conventions particulières aux lois qui in téressent l’ ordre public ; l’article 1390 statue de m ê m e , que
»
les époux
»
»
»
on
ne
ne peuvent p a s
stipuler d ’une manière générale, que
» leur association sera réglée par l ’une des coutumes abolies ; et
�( 33 )
» ces termes im p érie u x, on ne peut et ne peuvent, renferm ent
»> sans doute une prohibition énergique , une impossibilité de faire
» de semblable disposition ; ils prononcent implicitement une nul-
» lité insurmontable.
Réfutation.
Puisqu’on ne se lasse point de répéter toujours la même
ch ose, ne nous lassons' point de répéter la m ême ré
ponse , et de redire : L ’application des lois prohibitives,
que l’on invoque ici pour la troisième ou quatrième fois,
est faite hors du cas pour lequel elles sont portées ; elles
n ont rien de commun avec le testament de madame
de Chazerat : qu’on cesse donc enfin d’en abuser, car
les lois prohibitives ne s’étendent pas.
9
S u ite et f in d es m otifs.
« L a nullité du legs universel qui se réfère à la coutume ne
peut etre ecartee par l’article 9 6 7 , sur lequel on veut encore
« s appuyer. C e t article p e r m e t , à la vérité, au testateur de m a» mfester sa volonté sous toute espèce de titres et de dénomi» nations; de sorte que soit que le testateur dispose à litre de
>> legs, de do n a tio n , d ’institution d ’h éritiers, et sous toute au« tre qualification, peu importe; sa volonté connu e, si elle est
« conforme à la lo i, quœ légitima est, reçoit toujours son exécu» tion : mais disposer sous toute dénom ination, n ’est pas faire
” toulp espèce de dispositions. En permettant au testateur de se
servir de toutes expressions pour dicter ses intentions , la loi
,,
Pas aulorisé à disposer sous un mode et dans une latitude
» te s C ln'°* ^ eS mœu^s,
publique, les formalités des ac^ I . * et *°ut ce qui intéresse l’ordre social, sont toujours pour
ui une barrière invincible. C 'est d ’après ce principe tutélaire
*IUC
article 900 a voulu que dans toutes les dispositions enlre-
K
�(
34
)
» vifs, ou testamentaires, les conditions contraires aux lois ou
» aux mœurs soient réputées non écrites.
» C ’est ce que la dame de C h azerat a méconnu ou m ép risé,
» en faisant l’institution d ’héritier universel dont il s’a g i t e l l e a
» violé l’ordre public , en subordonnant sa disposition aux règles
» d’une coutume abolie; elle l ’a violé en rejetant avec affecta» tion le bienfait de la loi nouvelle ; elle l’a violé en prescrivant
» une form e de p artage, qui seroit une source féconde de con» testations. L a justice com m e la loi ne peuvent accueillir une telle
» disposition ; il faut donc la regarder comme non écrite dans le
»> testament de la dam e de Cliazerat.
Réfutation.
Ces motifs ne sont pas nouveaux. On n’y voit que
le résumé de ceux que nous avons déjà réfutés. Faut-il
cependant y répondre encore, au risque de répéter sans
cesse les mêmes choses en d’autres termes ? nous dirons :
O n avoue qu’il est permis à un testateur de se servir
de toutes expressions pour dicter ses intentions, et
que sa volonté reçoit toujours son exécution , en quel
ques termes qu’il l’ait manifestée , pourvu qu’elle ne
blesse ni les m œ urs, ni l’ordre public , ni les lois pro
hibitives , ni les formalités des actes.
Soyons conséquens, et nous concluerons de là , non
comme les premiers ju ges, que les dispositions testa
mentaires de madame de Chazerat doivent être frappées
de proscription ”, mais au contraire qu’elles doivent être
maintenues et recevoir leur entière exécution , nonobs
tant que la testatrice ait emprunté de la coutume d’A u
vergne les expressions dont elle s’est s e rv ie , soit pour
abréger la nomenclature des légataires universels qu’elle
�r35D
'Vouloit ch o isir, qu’elle avoit clairem ent désignés, et
dont elle vouloit qu’aucun n’échappât à ses bienfaits \
.soit pour régler l’ordre et la proportion du partage de
ses biens qu’elle entendoit leur prescrire} et pourquoi?
i°. Parce que son testament ne contient aucune dis
position qui ne soit conforme à la nouvelle l o i , soit
pour le fo n d , soit par l’application qui en est fa ite ,
puisque la loi lui permettoit de disposer de tout ce dont
elle a disposé, et en faveur des personnes au profit des
quelles elle en a disposé.
2°. Parce qu’elle n’a pas plus violé la loi par la forme
de sa disposition que par le fond } car nous persistons
à n ie r , avec l’assurance de la conviction , que madame
de Cliazerat ait blessé, dans son testament, ni les mœurs,
ni 1 ordre public , ni aucune loi prohibitive, en em
ployant quelques expressions de la coutum e d’A u vergn e
pour manifester sa volonté.
Elle ne les a point violés en subordonnant sa dispo
sition à titre universel, aux règles d’une coutume anéan
tie , comme le supposent les premiers ju g e s , soit parce
que cette pretendue subordination de la distribution de
ses biens aux règles de la coutume d’A u v e rg n e , est
purement im aginaire, soit parce qu’en la supposant réelle
elle ne violeroit aucune lo i, ni d’ordre public, ni d’ordre
p r iv é , dès qu’aucune loi quelconque ne l’a interdite.
Elle ne les a pas violés en rejetant avec affectation le
bienfait de la l 0i nouvelle, comme on le lui reproche
en core, puisque son testament n’est d’un bout à 1 autre
que 1 exercice de ce bienfait.
EUe ne les a point violés e n fin , en prescrivant un
�(
36 )
ordre de partage qui soit plus qu’un autre une source
de procès •, car depuis long-temps l'ordre de partage ,
par représentation à l 'infini , étoit u sité, connu , fixé ,
et pratiqué sans qu’il en résu ltât ni trouble ni désordre
dans les familles.
Concluons que les premiers juges ont constamment
abandonné la réalité pour courir après des fictions dans
l’interminable série des motifs qui ont inspiré leur déci
sion. L a cour d’a p p el p o u r ro it-e lle donc hésiter a rétablir
la vérité et les p rin cip e s dans tous leurs droits, en fai
sant re n tre r dans le néant un jugement qui les renverse ?
A C le r m o n t-F e r r a n d , le 8 octobre 1808.
P a r le jurisconsulte ancien ,
B E R G IE R .
A C L E R M O N T , de l'im prim erie de
Landriot,Imprimeur de la Préfecture,
et L ib raire , ruo S ain t-G en è s , maison ci-devant Potière.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chazerat. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
Description
An account of the resource
Réfutation des motifs du jugement rendu au tribunal de première instance séant à Riom, le 22 juin 1808, qui a déclaré les principales dispositions testamentaires de Madame De Chazerat, subversives de l’ordre public et de l’ordre social, nulles et comme non écrites, par cela seul que la testatrice, en rendant à trois branches de ses parens collatéraux les biens q u 'elle en avait reçus, prescrit le partage entre eux par souche, dans l ’ordre de la représentation à l’infini, telle qu’elle avait lieu dans la ci-devant Coutume d’Auvergne.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1801-1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0518
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0632
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Joze (63180)
Maringues (63210)
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Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
Successions
testaments
-
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0f49fce5d346ea199058a0f64d750b4b
PDF Text
Text
UN DERNIER MOT
Pour les Légataires universels de Madame
DE
C HAZERAT.
« M a d a me de C h azerat, malgré scs nombreux teslamens et
» codicilles , n’a point disposé de ses biens ; elle en a laissé la dis—
» position à la coutume d’A u verg n e, à une loi abolie ; elle a
» blessé en cela l’ordre public et les bonnes mœurs. il faut donc
» la considérer com m e décédée ab intestat ; dès-lors le jugement
» qui a ordonné le partage de ses biens , conformément au Code
» c iv il, doit être confirmé. »
C ’est à ce sophisme, délayé dans soixante-quatre pages d’im
pression, que se réduit la consultation des sieurs M i r l a v a u d , et
Mazuel , son cessionnaire.
L'homme de sens qui est étranger à toutes les a r g u t i e s du.
Palais, répond : Com m ent se peut-il que madame de Chazerat
n'ait pas disposé de ses biens, et qu’elle soit m orte a b intestat?
Je lis ce qui su it dans son testament du 26 messidor an 9 .
"Q u a n t à la propriété de mes bien s, mon intention étant,
» autant qu 'il dépend de m oi, de les faire retourner à ceux de
A
�( » )
» mes parens qui descendent des estocs dont ils me sont parvenus,
» je donne et lègue tout ce dont il m’ est permis de disposer , sui» vantla lo i du 4 germinal an 8 > à tous ceux de mes parens de
)> la branche de mes aïeul et aïeule paternels, et de celle de mon
» aïeule m aternelle, qui seroient en ordre de me succéder, sui» vant les règles de la représentation à l’infini. »
E t je lis encore ce qui suit dans son codicille du 14 messidor
an
i i , postérieur au Code civil.
« L a nouvelle loi m ’ayant accordé la faculté de disposer de la
» totalité de mes biens , je veux et entends que le legs universel
» que j’avois fait par le susdit testam en t, en faveur de mes
« parens de l’estoc de mes aïeul et aïeule paternels, et de ceux
» de l’estoc de mon aïeule m aternelle, de tout ce dont il m ’étoit
» permis de disposer par la loi du 4 germinal an 8 , ait son effet
» pour la totalité de mes biens. />
Je vois évidem m ent, continue l’homme simple qui ne raisonne
que bon sens , que par ces deux testamens ou codicilles , madame
de CHazerat a disposé de ses biens au profit des descendans de
son aïeul paternel, '
. Des descendans de son aïeule paternelle,
D es descendans de son aïeule m aternelle;
Q u elle en a disposé autant qu’ il de'pendoit ¿Celle,, c’est-à-dire,
autant que le lui permettoient les lois ;
Q u ’en l ’an 9 , elle en a disposé suivant la loi du 4 germinal
an 8 , qui étoit alors en vigueur ;
(
Q u’en l’an u < elle :en a disposé suivant le Code civ il, qui
avoit s u c c é d é à la loi du 4 germinal an 8 ; quelle a rappelé et
invoqué ces lois avec la déclaration la plus fom ieile que son
intention étoit de s’y conformer.
Après avoir ainsi appelé & recueillir ses biens les descendans
des trois branches de son aïeul et aïeule paternels et de son aïeule
maternelle , elle ajoute qu elle veut que ces mêmes biens soient
distribués entr’eux suivant les règles do la représentation ¡h
l'infini,
,
�Kieni ïi’étoit plus permis que cet ordre de distribution de ses
biens, que prescrivoit madame de Chazerat entre ses légataires ; il
étoit d’ailleurs conforme à l’art. 82 de la loi du 17 nivôse an 2 , qui
étoit en vigueur au moment de la rédaction de son testament : il
ne s’est pas encore trouvé vin légiste qui ait osé attaquer cette
disposition. T o u s conviennent que si madame de Chazerat s’étoit
arrêtée là , son testament seroit à l'abri de la critique la plus sévère.
Mais après ces m o ts, suivant les règles de la représentation
à Vinfini, madame de Chazerat a ajouté, telle ¿¡u’ elle avoit lieu
dans la ci-devant coutume d’ Auvergne.
E lle n ’a p u , dit-on, ajouter ces expression», sans attenter à
l’ordre public et offenser les bonnes mœurs.
Or , le Code Napoléon d it, en termes formels , art. 6 , « qu on
» 11e peut déroger , par des conventions particulières , aux lois qui
v intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs. »
M ais remarquons qu’il s’agit dans cet article du C o d e , de con
ventions particulières qui intéressent l’ordre public et les bonnes
moeurs;
Q u un testament et un codicille ne son t pas des conventions par
ticulières ; que ces expressions ne peuvent s’appliquer qu’aux
transactions sociales, passées entre plusieurs individu» qui contrac
tent en tr’eux des engagemens quelconques, licites’ou illicites. *
11 y a une loi expresse qui règle le sort des dispositions testa
mentaires qui sont^contraires à l’ordre public et aux bonnes
mœurs; c’est l’article goo du C od e; il est conçu en ces t e r m e s :
« D ans toutes dispositions entre-vifs ou testamentaires , les c o n » ditiohs impossibles, celles q u i seront contraires aux lois et aux
»» niœurs , S E R O N T R É P U T É E S N O N -É C R IT E S . »
Et on voit dans la consultation de T u r in , que cct article du
C o d e n’e6t que le résultat de toutes les lois: r o m a i n e s rendues sur
cette m a t i è r e .
S '‘ donc il étojt vral que madamc Je Chazerat, en transcrivant
ces mots dans son testament', t e l l e qu’elle avoit lieu dans la 'c ievant coutume d’Auvergne, eût eu le malheur d’offenser l’ordre
�C4)
public et les bonnes mœurs , tout ce qui pourroit en résulter, ce
seroit que ces expressions seroient réputées non-écrites , et le tes
tament n'en seroit pas moins valable.
L a loi n’annulle pas le testament dans lequel un testateur im
prudent a pu consigner des expressions, ou meme faire quelques
dispositions contraires aux lois et aux mœurs, elle los regarde
seulement comme non-écrites , et le t e s t a m e n t a toute l’exécution
qu’il peut avoir, en retranchant ces expressions ou ces dispositions
inconvenantes et prohibées.
O n pourroit s’en tenir là , et la contestation seroit jugée.
M ais je suppose , dit encore l’homme de sen s, que l'article 6 du
Code civil puisse s’appliquer à un testament , comme aux con
ventions p a r t i c u l i è r e s , aux transactions sociales , où est donc
l ’attentat de madame de C h azerat, contre l’ordre public et les
bonnes
m œ urs !
qu’il lui étoit permis de distribuer ses biens entre
ses légataires universels, suivant les règles de la représentation à
O n co n v ie n t
l’ infini ; que si elle eut terminé sa disposition à ces dernières ex
p r e s s i o n s , elle n ’auroit rien fait contre l’ordre public et les bonnes
m œ urs, et son testament seroit exécuté sans contradiction.
C e t attentat à l'ordre social et aux bonnes mœurs, est donc tout
entier dans ces m o ts, telle qu’elle avoit lieu dans la ci-devant
coutume d'Auvergne.
Mais observons, d’abord, que ces mois n’ajoutent rien aux
précédens, suivant les règles de la représentation à l'infini.
« C ’est un moyen , dit M . C habrol, sur l’article 9 du titre 12
„ de la C o u t u m e d’A uvergne, par lequel le parent qui se trouve
» plus éloigné de celui auquel il s’agit de succéder, s’en rapproche
« et se trouve a p p e l é à la succession, en remontant à l’ascendant
» dont il descend, et qui étoit à degré égal avec les héritiers ou
» leurs auteurs. »
L e legs u n iversel d e m ad am e d e C h a ze ra t une fois fixé sur les
trois chefs de famille du mémo degré,
L ’aïeul paternel,
1
�( 5 )
' L ’aïeule paternelle,
„ E t l’aïeule m aternelle,
L a représentation à l’infini appeloit à recueillir ce legs tous les
descendans de ces trois chefs, qui seroient vivans a 1 epoque de son
décès : elle les rapproclioit tous également de leurs aut
L eur vocation étoit la m êm e, par les seules réglés gcnerales de
cette représentation à l’infini; et la Coutume d ’A u v e r g n e , rappelée dans ce tes ta m e n t, ne pouvoit ni en augmenter ni
minuer les effets.
,
n
Ces dernières expressions n’étoient donc qu'une super«.. te ,
une vraie sup erfétation , dans le testam ent de ma ame e
.
'
et tout le monde sait que ce qui est inutile ne vicie pas,
la maxime triviale super/lua non nocent.
C es expressions superflues vicient encore moins une
isp
^
lorsqu’elle en est absolument indépendante, et q u elle est enti
et parfaite sans le secours de ces expressions.
A u surplus, de quelle manière madame de Chazerat rappe e
t-elle la ci-devant Coutum e d ’Auvergne?
Après avoir fait le legs universel de ses biens aux descendans
des trois estocs de son aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule
m aternelle, elle prescrit entr’eux un mode de division de ce legs
universel, qui n’a rien de prohibé. Elle veut que cette division,
en soit faite suivant les règles de la représentation à Vinjini.
E t craig.iant que ces expressions laissent encore quelque chose
à. désirer, elle ajou te, pour développer de plus en plus ce mode
de division, que la représentation à l’infini sera telle qu’elle avoit
lieu dans la ci-devant Coutume d’ Auvergne .
A in si, cette ci-devant Coutum e d’Auvergne n ’est r a p p e l é e que
comme exemple , denionstrandi gratid, majoris démonstrations
causd, comme le disent les jurisconsultes de T u rin .
Répétons-le encore; il existe une disposition générale faite de
ses biens par madame de C h a ze ra t, une disposition n e tte , pré
cise, absolue j cette disposition est l'effet de sa volonté, et non
d une loi quelconque.
�(6)
Si sur ce point principal elle rappelle des lois, ce sont des lois
nouvelles ; c’est celle du 4 germinal an 8 ; c’est le Code Napoléon ;
ce sont les seules lois qu’elle invoque, quand il s’agit de disposer
de ses biens : c’est à ces lois qu’elle déclare vouloir se conformer.
Quand il s’agit ensuite de les diviser entre ses légataires univer
sels , c ’est encore sa volonté qui en prescrit le mode ; elle veut
impérieusement que cette division; se fasse suivant les règles de
la représentation à l 'infini.
Si après avoir prescrit ce mode d e division elle rappelle la ci devant Coutume d 'A u v e rg n e , ce n est de sa part qu’un excès de
précaution, une s u r a b o n d a n c e d e paroles, qui n’a d'autre objet
que de développer p l u s clairement sa pensée.
Ajoutons que cette Coutum e étant rappelée pour un objet par
ticulier, pour un objet déterminé, il ne reste pas même le plus léger
prétexte d’appliquer au testament de madame de Chazerat l’article
1390 du C o d e , relatif à la communauté de biens stipulée par
contrat de m ariage, tant de fois et si mal à propos cité dans cette
cause.
BOIROT.
A C L E R M O N T , de l'imprimerie de L a n d r io t t , Imprimeur do la Prefecture,
et L ibraire, rua Saint-Genès, maison ci-devant P otière.
�
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A name given to the resource
Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Mirlavaud. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
Description
An account of the resource
Un dernier mot. Pour les légataires universels de Madame de Chazerat
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1801-1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
6 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0517
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Entraigues (63149)
Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
Successions
testaments
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054b67313f42d5fab980bb2966900f0a
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Text
CONSULTATION.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a lu le testament
et le codicille de madame de C h azera t, la consultation
délibérée à C le rm o n t-F e rra in l, le 29 juillet 1808 , et
le jugem ent rendu par le tribunal de R io m , le 22 juin
p ré cé d e n t,
P artage l'opinion etablie dans la consultation du 29
juillet 1808, dont les raisons lui paroissent suffire pour
dém ontrer l’erreur dans laquelle les premiers juges sont
tombés. O n se seroit donc dispensé d’une nouvelle dis
cussion , si les parties intéressées n’eussent témoigné le
désir que le conseil soussigné m o tiv â t néanmoins particulièrement son adhésion à cette opinion.
A l o r s pour donner à ce nouvel examen un objet
une utilité qui lui soient p rop res, 0n suivra le jugement du tribunal de prem ière instance dans ses m otifs,
et on s'attachera à en faire apercevoir l’illusion.
A
�L e tribunal de R iom s’est déterminé à déclarer nuls
les testament et codicille de madame de Chazerat, parce
qu’il a estimé qu’en léguant tous ses biens î\ ses parens
de l’estoc de ses aïeul et aïeule paternels, et de l’estoc
de son aïeule m aternelle , pour^être partagés e n tre u x t
selon les règles de la représentation à l infini, telle q u e lle
étoit établie par la ci-devant coutume d'Auvergne, ma
dame de Ghazerat a remis en vigueur une coutume
abolie, a subordonné sa disposition aux règles de cette
co u tu m e , et en cela est contievenue a des lois d’ordre
public qui le lui înteidisoient.
O n rcconnoîtra sans aucun doute le principe posé
par le prem ier attendu que présente le jugem ent du
tribunal de R iom , que nul ne p e u t, par des conventions
particulières, déroger a u x lois qui intéressent l ’ordre
public et les bonnes mœurs. L a question est de savoir,
dans le fa it, si les dispositions de madame de Chazerat
dérogent à ces lois. O n accordera encore q u e , dans les
dispositions testam entaires, la forme n’est pas laissée à
l ’arbitraire de celui qui dispose -, mais on nie form elle
m ent que Vordre q u i l doit observer dans la répartition
de ses b ien s, soit du domaine p u b lic, qui doive être pour
lui-même , comme dit le t/ibunal de Riom , une barrière
insurmontable : cette idée est non-seulement inadmis
sible , mais encore in exp lica b le; car comment s’y prendroit-on pour établir que l’iioinm e qui use de la fa
culté que la loi lui donne de disposer en faveur de qui
il lui p laît, ait à observer un ordre déterminé qui soit
du domaine public ? Q uel ordre doit-il donc observer ?
S’il est soumis à un o r d r e , s’il y a pour lui une bar-
�( 3 )
îièrc insurm ontable, il n’a plus rentière liberté de su
disposition. Lorsque le disposant excède la faculté que
hi loi lui donne , c’est alors qu’il franchit la barrière ;
mais il ne s’agit point de cela. M adam e de Cliazerat
n’ayant ni descendans ni ascendans, avoit l’entière dis
position de sa fortune : il n’y avoit point de barrière
pour elle. Q u’on dise alors quel ordre et quelle barrière
on veut qu’elle ait dû rencontrer dans la répartition
qu’il lui plaisoit d’en faire ? Assurém ent la loi ne lui
en a imposé d’aucune espèce. Cette répartition étoit,
comme la disposition, en sa puissance la plus absolue •,
et l’on ne conçoit pas com m ent on a pu placer le droit
de cette répartition dans le domaine public , car rien
n ’est plus manifestement du domaine privé.
O n a du relever d’abord cette bizarre proposition ,
parce qu’elle est le germ e de la fausse opinion que le tri
bunal de R iom s est iormeo des dispositions qu’il a. cru
devoir annuller.
Parm i les lois inviolables dont le tribunal de R iom a
entendu p a rle r, il invoque l’art. i 3 go du C o d e N apo
léon , qui ne perm et pas aux futurs époux de stipuler
d ’une manière générale que leur association sera réglée
par l u n e des coutumes qui r é g i s s o i e n t ci-devant les
diverses parties du territoire , et qui sont abrogées.
Sans doute c’est là une prohibition form elle, et elle
Cst ^ 0l'dve public j mais il s’a g isso it d’établir que celte
prohibition s’appliquoit à l'espèce ; et certe# , ce n’étoit
pas facile.
I
our y arriver , on a répété que la faction du testa
ment étoit d’ordre public. Q uè veut-on dire par la fa c A 2
�( 4 }
tion ? Ce mot vague , qui ue doit s'entendre que du
m atériel de l’a c te , est mal em ployé i c i , où il s’agit du
fond de la disposition. La n é c e s sité ou l’on s’est trouvé
de se servir d’expressions éq u ivoq u es, annonce assez,
que les idées qu’on a voulu rendre n’étoient ni vraies
ni claires.
O n dit que la disposition de l art. 1390 est fondée
sur Vavantage d ’une loi uniforme pour la so c ié té , et
que c est s*é l e v e r contre cet intérêt, que de se faire un
code à s o i , et de fa ire renaître des lois anéanties ;
que ces motifs se doivent appliquer aux testamens
comme a u x pactes de m ariage, la tranquillité des
fam illes n étant pas moins compromise , en rappelant ,
en termes g én éra u x, dans un testam ent, une coutume
abolie , et avec elle toutes les difficultés q u e lle peut
fa ire naître.
Cette doctrine peche dans tous ses fondem ens; et d’a
bord le Code Napoléon a sans doute été donné pour
faire cesser la multiplicité des lois et des coutumes qui se
partageoient la F ran ce, et pour avoir un droit uniforme.
C epen dan t, dans les diverses matières de ce d ro it, une
seule admet deux régim es, au choix des contractons, et
c’est positivem ent le contrat de m ariage, dans lequel il
est permis d'opter entre le régim e dotal et celui de la
communauté. Ce contrat 11 est donc pas uniforme dans
l ’E m p ire , et lovsqu on veut se londer sur l’uniform ité,
il faut convenir que 1 exem ple est mal choisi. L ’article
i3 g o n’offre dès-lors qn une limite posée ¿\ la permission
générale de l’art. 138 7, et a la faculté particulière de
l’art. 1391. C ’e st, com m e le dit l’art. 1387, \xi\q modifi
�( s )
cation de la faculté générale de faire les conventions de
mariage comme les époux le jugeront à propos, et de
celle d’opter ientre le régim e dotal ou la communauté.
Comm ent veut-on après cela rattacher cet article aux
dispositions testamentaires, pour la répartition de la part
disponible, et montrer que ce soit s’élever contre l’uni
formité de la lo i, et se faire un code à soi, que de prendre
pour règle de la répartition d’un legs universel un mode
suivi dans une ancienne coutume. Existe-t-il un article
du Gode qui règle la m anière dont un testateur, qui
donne ce que la loi lui perm et de donner à qui bon
lui sem ble, le répartira entre ses légataires , parens ou
étrangers j qui déterm ine, par exem ple, comment il di
visera son bien dans les différentes lignes de sa parenté,
s il veut donner ù. des parens de diverses lign es? N on
assui ément. Com m ent le vœ u d’une loi uniforme seroit-il
donc v io le , la ou il n’y a de loi que la volonté du testatcui ? Com m ent lin te re t public se ro it-il com prom is,
par la m anière q uelconque, d’appliquer une libéralité
perm ise, qui ne touche que celui qui la fait et celui
qui la reçoit? N ’est-il pas évident qu’en cette matière
le testateur, en se faisant un code à lu i, ne fait qu’user
de la plénitude de sa volonté que la loi lui laisse , et à
^ quelle le public n ’a plus aucun intérêt.
Quand la volonté du testateur est constante en la forme
j,
par la loi 3 pour rendre cette volonté ceitain e,
application de cette volonté ne présente plus qu’un inn °t P1ivé* l’invocation de l’ordre public et des bonnes
cluis , sur le mode de répartition d’un legs universel
U ^icn disponible, est donc aussi déplacée qu’il soit
�( 6 )
possible : c’est néanmoins tout le fondement du système
que le triJ3unal.de R iom a créé.
L ’assimilation du testam ent, sur ce point, avec le con
trat de m ariage, est donc enfin on ne peut pas plus fausse;
puisque, prem ièrem ent, la loi dispose expressément sur
le contrat social des ép o u x, et determine limitativement
les pactes qu’elle leur perm et; et secondement, les pactes
matrim oniaux intéressant les familles dans leurs dispo
sitions, ces dispositions sont d intérêt public.
C e q u i achève de caractériser la fausse application qu’a
faite le tribunal de R io m , c’est l’expression de l’art. 1890
l u i - m ê m e , qui ne prohibe que la stipulation faite d’une
m anière gén érale, de se régler dans les conventions ma
trimoniales par une des coutumes abolies, mais non point
de stipuler nominativement telle ou telle disposition p or
tée par ces coutumes.
Par exem p le, y auroit-il contravention à l’art. 1390,
s’il étoit dit que le mari venant à prédécéder, la femme
auroit un douaire de la moitié des biens de son mari en
usufruit, tel qu’il étoit réglé par la Coutum e de Paris?
O n ne peut pas le penser-, car ce ne seroit point là
régler leur association, et encore moins la régler d’une
m anière générale. Ce que la loi a entendu par cette
m anière gén érale, c’est la stipulation autrefois en usage,
que les époux soumettoient leurs conventions m atrimo
niales ou leur communauté aux dispositions de telle cou
tume par laquelle leurs droits scroient régis et gouvernés^
M ais il n’est point nécessaire de s’appesantir ici sur
les stipulations m atrim oniales, et sur l’application de Par
ticle 1390, à telle ou telle de ces stipulations, car il est
�( 7 )
évident que cet article n ’en peut recevoir aucune A la
disposition que fait un testateur de la portion disponible
de ses biens, et que ce sont deux choses qui ne peuvent
nullem ent être assimilées.
C ’est sans fondem ent, et arbitrairem ent, que le tri
bunal de R iom a établi sur cet article la nullité qu’il a
prononcée du legs universel de madame de Chazerat,
parce qu’elle a ordonné que ses biens seroient partagés
entre les trois branches de sa fa m ille , q u e lle dénomme,
suivant les règles de la représentation a l in fin i, telle
q u e lle avoit lieu dans la ci-devant Coutume d Auvergne.
C e principal fondement de l’opinion du tribunal de
R io m , pris dans l’article 1390 du Code N ap oléon , et
dans la prétendue similitude de droit entre la répartition
d’un legs universel, et l’association des ép o u x, étant dé
m ontré faux , que reste-t-il ?
Prouvera-t-on jamais qu’en soi, cerap p eld ’un m ode de
répartition admis dans une ancienne co u tu m e, et son
application par un testateur au partage qu’il veut faire de
son bien disponible à ceux de ses païens qu’il institue,
attente à l’ordre pu b lic, blesse la société, et doive rendre
sa disposition nulle?
E li! qu’im porte à la société, que le legs de madame dé
Clinzerat soit réparti entre ses légataires de telle ou telle
ïnaniere, selon les règles de la représentation de la Coud A u v e rg n e , ou selon toute autre; que madame de
hazerut oit renvoyé aux règles de cette coutume qu’elle
pouvoit écrire tout au long dans son testament ? Com*
ment celte indication de la coutume peut-elle vicier et
annuller son-legs ?
�( 8 )
Quand on pourroit penser que madame de Chazërat
ait fait en cela une chose inconvenante et mal sonnante,
où est la loi qui défend de jamais parler d’aucune loi an
cienne , de la prendre pour modèle dans une disposition
q u elco n q u e , à peine de nullité ? O n a fait voir qu’il
n’étoit pas permis de tirer cette conséquence de l’ar
ticle i 3oo du Code Napoléon.
L es nullités ne s’inventent pas; il faut une disposition
expresse de loi pour en établir. Que faudroit-il davan
tage pour faire proscrire 1 opinion du tribunal de Riom !
En vain le tribunal de ltio m dit-il qu’il y a nullité
résultant de toute disposition de loi négative et prohi
bitive ; où est cette loi négative et prohibitive pour le
mode de répartition d’un legs universel?
C e tribunal a dit qu’en disposant comme elle l’a fait,
madame de Chazerat avoit remis en vigueur une cou
tume abolie : assurément.cela n’étoit pas en sa puissance,
et il y auroit en cela contravention à la disposition g é
nérale qui prononce l’abolition.
M ais c’est encore là où le tribunal de R iom s’est ma
nifestement égaré.
Com m ent concevoir qu’un citoyen puisse remettre en
vigu eu r une coutume abolie ? cela lui est impossible dans
le fait comme dans le droit. Si l’acte qu’il veut faire lui
est interdit par le C o d e, cette interdiction sera le prin
cipe essentiel et suffisant de la nullité de son acte, et
le rappel qu’ il aura fait d une loi ancienne n’y ajoutera
rien ; s’il lui est perm is, la c té tirera son autorité du
C o d e , et non du rappel de la loi ancienne : cela est évi
dent : l’acte ne peut donc recevoir de ce rappel ni vice
ni
►
�( 9 )
ni vertu. C e n’est pas de celte loi ancienne que l’acle
tire son d ro it, mais de la volonté du disposant,-' autori
sée par la loi. 'A in si,'d an s l’espèce; madame de Chazerat
avoit reçu du Code la faculté de disposer de tous ses
biens en faveur de qui elle voudroitj et par conséquent,
de les répartir comme il lui plairoit entre plusieurs dona
taires ou légataires.. Lors donc qu’elle a pris pour m o
dèle et pour règle de cette répartition la représentation
telle qu’elle étoit établie par la Coutum e d’A u v e rg n e ,
cette coutume ne reprend pour cela aucune force de
loi ^ la disposition reçoit toute son autorité de la volonté
de madame de C hazerat, et du Code qui laissoit cette
volonté entièrem ent libre.
La Coutume d’A irvergne n'est manifestement appelée
que pour indication, pour démonstration plus ample
de la volonté de la testatrice, qui auroit pu écrire dans
son testament tout ce que la Coutum e disposoit sur ce
p o in t, et qui s’en est dispensée en déclarant qu’elle vouloit faire com m e faisoit autrefois la Coutum e d’A u verg n e,
ce qui est la m ême chose que si elle en eût couché les
dispositions dans ce testament.
Com m ent le tribunal de R iom combat-il des idées aussi
simples et aussi claires ? par une suite d’argumentations
ties-peu claires et nullem ent concluantes, et qui repo
sant sur les fondemens vicieu x qu’on vient de détruire ,
disparoissent avec eux.
^ prétend que c’est jouer sur les mots, et abuser des
lIl,e de ne voir dans le rappel de la Cou hune
j
u ye rg n e , qu’une démonstration, une indication de
a voloulé de la testatrice, lorsque lu dame de Chazerat.
B
�( ÏO )
veut disertement que cette Coutume soit la règle du par
tage de ses biens.
M ais comme le tribunal est entraîné lui-même à le
dire , c’est madame de Chazerat qui le veut ; c’est donc
la volonté de madame de Chazerat qui opère. L a cou
tum e n’agit point \ elle n’est donc là qu'exem p li c a u sâ ,
elle n ’est que pour démonstration. Ce n’est point la
coutum e en s o i, et com m e l o i , qui règle le partage ;
c’est la testatrice, qui a indiqué l’ancienne disposition
de cette coutum e , comme étant celle qu’elle entendoit
donner pour règle à ses légataires. E t en cela , il ne
peut y avoir ni vice ni conséquence , puisque encore
une fois la loi ne m ettoit aucune limite à la volonté
de la testatrice , et que la société n ’avoit aucun intérêt
à la m anière dont madame de Chazerat répartiroit son legs.
L a justesse de ce raisonnement se démontre par la
comparaison du cas sur lequel dispose l’art. 1390 , dont
le tribunal de R io m s’est appuyé.
Pourquoi y auroit-il contravention et n u llité , si des
époux soumettoient leu r société conjugale aux disposi
tions d’une coutume abolie ? C e n’est pas parce qu’ils
r e m e t t r o ie n t en vigueur une coutum e abolie, ce qui
e st ab su rd e , mais ÿ>arce que la loi actuelle interdit tout
a u tr e m ode de société co n ju gale, que le légim e dotal
ou la com m unauté gouvernée par les règles que le Code
établit : il n’est donc plus en la puissance des contractans
d’en vouloir un autre.
A u contraire , dans l ’espèce actuelle, la loi perm ettoit
à la testatrice de donner et de répartir tous ses biens
comme elle voudroit. L e Xnode de cette rép artition ,
�( II )
quelque part qu’il fut p r is , ¿toit donc à ça disposition,
et prenoit son autorité dans sa volonté seule ?
Pour trouver une prohibition en ce cas, il faudroit
aller jusqu’à dire que la seule indication d’une.ajpcàenjie
l o i , son nom seul prononcé dans .une disposition ,, est
une atteinte à l’ordre public et aux bonnes .mcqurs 3 et
qu’ayant la faculté la plus absolue de disposer comme
cette lo i, on peut bien le .fa ir e , mais non pas Je dire.
O n n e pense pas qu’aucun homm e raisonnable. .vouJ-ût
soutenir cette proposition.
D ans le fa it et dans la réalité, dit le tribunal de R io m ,
il est im possible de fa ire ce partage, sans être guidé par
la coutume d’A u verg n e, sans rechercher Vorigine des
biens dans les lig n e s , et la règle de leur subdivision
selon la coutume • et sur ce , le tribunal énum ère toutes
les questions qui ont pu s’elever dans cette coutume.
Si cela est im possible, c’est qu’il est impossible au*
légataires de ne pas se conform er à la volonté de madame
de C h azerat, et d’avoir autre chose que ce q u’elle a
voulu leur donner. Si elle eût écrit ces règles dans .son
testam ent, sans parler de la co u tu m e, n’auroitril pas
fallu s’y conform er? Q u ’a-t-elle fait de plus eu indiquant
ces réglés écrites dans la coutum e } comme étant sa
volonté ?
L a coutum e, continue le tribunal de Rio,m , n'est paß
lci un simple mode , une sim ple condition de la dis
position ; gHq en est inséparable, elle se lie et s JincorP
hé 7 ’ ’ (m parta£e ; c>est clle (l ul (^ siSneva les vrais
ri tiers de madame de C ha zera t, et leur part dans
les biens.
B 2
�( 12 )
C ’est toujours la m ême illusion. La coutume ne les
indiquera que par la volonté de madame de Chazerat:
c’est donc cette volonté qui a g i t , et qui institue réelle
ment les individus.
Cette application de la volonté personnelle à des
dispositions de coutumc , et de cette action de la volonté
de l’homm e dans l’usage de ces dispositions, trouve son
exem ple dans le d ro it, dans les statuts matrimoniaux.
Lorsque des époux se m anoient sans contrat, la loi
du domicile leur en tenoit lie u , non pas par sa propre
force et v e r t u , non v i consuetudinis et in s e , dit D u
m o u l i n , mais par la volonté présumée des parties, qui
étoient censées l’avoir tacitement adoptée.
L e tribunal de R iom examine s’il est vrai que madame
de Chazerat ait rappelé la coutume d’A u vergn e d’une
manière particulière, et pour une disposition spéciale.
Il soutient qu’elle l’a fait d’une manière générale , parce
qu’elle lui soumet généralement le partage de tous ses
biens.
Cette question n’est pas ici de grande importance 5
elle ne doit pas exercer une influence directe sur la
décision de la cause. L e point fondamental est dans la
capacité de madame de Cliazerat de disposer, et dans
le principe qui donne l’être à sa disposition , et qui
n’est autre que sa volonté.
Si madame de Chazerat a pu disposer de tous ses biens
et les répartir entre ses légataires à sa v o lo n té , il im
porte peu de savoir jusqu’à quel point elle a pris la cou
tume d’A u vergn e pour exem ple de sa disposition.
Toutefois il est bon d’observer que le tribunal de
�( i3 )
Riom a confondu , dans ses argum entations, la disposi
tion de madame de Chazerat avec celle par laquelle elle
auroit purement et simplement subordonné sa succession
à la coutume d’A u v e rg n e , et elle auroit laissé aux dis
positions de cette coutume à lui donner des héritiers.
'Par, e x e m p le , si madame de Chazerat eût dit qu’elle
entendoit que sa succession fût gouvei*née par cette
coutume , alors elle n’eût par là désigné aucun héritier
ni légataire j elle n’eût fait par elle-m em e aucune dis
position de ses b ie n s } elle auroit attribue a cette cou
tume , non-seulement la répartition , mais la disposition *,
elle auroit é ta b li, pour sa succession ab intestat, un
autre ordre que celui déterminé par la loi. C ’est en ce
c a s, tout au p lu s , qu’on pourroit dire qu’elle auroit
violé la loi des successions, en prétendant introduire
un autre ordre de succéder que celui établi par elle.
M ais madame de Chazerat a testé j elle a disposé de ses
biens par un legs universel 5 elle a désigné ses légataires, qui
sont ses parens de la ligne de ses aïeul et aïeule paternels,
et ceux de la ligne de son aïeule maternelle ; elle a déclax-é
que son intention étoit que pour la répartition entr’eux
on suivît le mode de la représentation à l’infini tel que
l’admettoit la Coutum e d’A u vergn e : il ne s’agit là que du
partage d’un legs, et du quantum que chaque légataire y
Ple n dra ^ il ne s’agit que du mode de la r e p r é s e n ta tio n .
I«1* disposition de madame de Chazerat est complete
sui les lignes qu’elle appelle et celles qu’elle exclut; sur
a nature des biens qu’elle leur lègue 5 ce sont tous ses
ltns > meubles et im m eubles, a c q u e t s et propres, au
marc la livrc c]e cc q ui luj est venu de chacune de ses
�( >4 )
branches ; sur l'appel des branches dans l’ordre de la
représentation à l’infini. E n fin , le mode de cette repré
sentation sera celui qui avoit lieu dans la coutume d’A u
vergne : voilà sur quoi s e u l e m e n t elle ludique la coutume.
11 est donc vrai qu’elle ne r a p p e lle cette coutume que
d’une m a n iè r e particulière, sur une disposition qu’elle
énonce, et non d’une m a n iè r e générale et indéterminée.
M ais il y a plus, et l’on a très-bien démontré dans la
consultation du *9 juillet dernier, que loin de soumettre
ses dispositions d’une manière générale à la coutume
madame de Chazerat s’en étoit écartée sur
d
’ A
u
v
e
r
g
n
e
,
Lien des points-, i°. en disposant en faveur de son mari;
2°. en disposant de l’universalité de ses biens ; 3 n. en
léguant nominativement en vertu de la faculté que lui
donnoient leg lois nouvelles; 4°* en donnant ses meubles
et ses acquêts à ses parens de la ligne m aternelle, comme
à ceux de la ligne paternelle.
C ’est donc à tort que le tribunal de R iom prétend qu’il
faut voir dans la disposition de madame de Ghazerat une
soumission générale à la coutume <¥A u v e r g n e , et que
c’est cette coutume qui lui donne des h éritiers, et qui
leur partage ses biens : il est au contraix-e bien démontré
q u ’en tout c’est la volonté de madame de Chazerat qui agit.
O n ne relèvera pas plus particulièrement ce qu’a dit
le tribunal de R iom des difficultés sans nombre qui naîtroient de l’exécution de ce m ode; on l’a fait suffisamment
dans la consultation du 29 juillet, ou Io n a fait voir que
ces prétendues diilicultés n ctoient qu un épouvantail ;
et quelles que fussent ces difficultés, on n’y pourrôit
jamais trouver un m otif d’annuller le legs.
�( i5 )
On ne suivra pas non plus le tribunal de R iom dans
ses réponses à quelques motifs mis en avant par les léga
taires devant ce tribunal, et qu’on ne reproduira pas ici.
Mais il est un m oyen opposé au sieur M irlavavid, dans
la consultation du 29 juillet, et qui dispenseroit d’entrer
avec lui dans tant de discussions.
L e sieur M irlavaud est le représentant de la branche
de l’aïeul m aternel, non appelée au legs universel, et on
soutient contre lui qu’il est sans qualité et sans intérêt
pour critiquer l’emploi qu’a fait la testatrice, de la C ou
tume d’A u vergn e , attendu qu’il ne s’applique qu’à la
répartition dans les branches appelées, et que la sienne
ne l’étant pas, cette répartition ne l’intéresse pas.
E n effet, l’appel des branches est une prem ière disposi
tion distincte et divise ; quiconque n’est pas de ces bran
ches, n’est pas légataire; dès-lors il est sans intérêt comme
sans qualité pour critiquer le mode de la répartition dans
ces branches. Ces branches sont appelées avec représenta
tion à l’infini : la dame de Chazerat étoit maîtresse de
le vouloir ain si, sans que la disposition eût besoin de la
coutume d’A u vergn e. Q u ’im portojt à la branche du sieur
M irlavaud, qui n’est point appelée ? et.q u e lui importe
après cela , que cette représentation ait lieu selon la
coutume d’A u vergn e ?
Concluons que le mode.dç répartition du legs universel
de madame de Chazerat appartenoit entièrement à la
pleine et entière disposition q u ’e lle avoit de tous ses
•
l’ordre public et.la société u y .ont aucun
ixitéiet 5 que ja COutume d’A u vergn e n’étoit em ployée
�( .G )
que comme démonstration de la volonté de la testatrice;
que la disposition tiroit toute son autorité de cette volonté
et du code' qui n’y mettoit aucune b o rn e; que cette
volonté agit seule, et que l’appel de la coutume ne peut
influer sur le sort de la disposition en bien ni en mal ;
qu’il n’y a aucun argument à tirer de 1 article 1890 dans
l’espèce tout à fait différente ; car il n’y a aucune simili
tude entre la ' stipulation de l’association conjugale et le
partage d’un legs universel; que madame de Chazerat n’a
point appelé la coutume d’A u vergn e à gouverner sa suc
cession, mais l’a s e u l e m e n t indiquée comme exem ple et
comme m ode à suivre, selon sa volonté, dans la réparti
tion de ses legs dans les brandies qu’elle instituoit ; que
loin de soumettre môme ses legs à l’ordre de succéder
et aux principes de cette coutum e, elle s’en est écartée
totalement sur plusieurs points importans ; enfin, que le
sieur M irlavaud, défendeur, d’une branche non instituée,
est sans qualité et sans intérêt pour critiquer le mode de
répartition, qui n’intéresse que les branches appelées.
Il
a donc été mal jugé par le tribunal de R io m , et son
jugem ent ne peut m anquer d’être infirmé sur l’appel.
D élibéré à Paris par nous anciens Avocats soussignés,
ce 8 n o v e m b r e 1808.
DELAMALLE.
PORCHER. POIRIER. JAUBERT.
d e l a c r o i x -f r a i n v i l l e .
CHABOT, de l'Allier. CHABllOUD.
�X li )
f
Lettre de M. J
aubert
Mercredi.
\
à M. B
o ir o t
.
C e n ’est que hier au soir, Monsieur et cher Collègue, qu’on a
porté chez moi les papiers et les consultations que vous m ’aviez
annoncés ce matin. J’ai examiné le tout, et le jugement de Riom
m ’a paru, ainsi qu*à vous et à M . Delam alle, une méprise étrange.
En appliquant à une disposition testamentaire I article i3go du
Code Napoléon, relatif aux conventions matrimoniales, le tribunal
de Riom n’a pas senti quel avoit été le véritable m otif de la dis
position contenue en cet article ; il a supposé qu on avoit voulu
faire oublier lés anciennes lois et coutum es, de manière qu’il ne
pùt plus en être fait mention dans aucun acte.
Ce n ’est pas là le m otif de la loi; il eût été révolutionnaire ou
puéril.
Le Code Napoléon a voulu que les conventions matrimoniales
fussent rédigées de manière que toute tierce personne ayant à
contracter avec l’un ou l’autre époux, pût connoltre d’une manière
positive et claire les pactes de la société conjugale, soit relativement
au pouvoir et à la capacité qu^auroit l’époux de faire tel ou tel
contrat, soit relativement à l’asservissement ou à l’affranchisse
ment de ses biens par les suites du contrat de mariage.
S’il avoit été permis aux époux de stipuler dune m a n iè r e géné
rale, que leur association seroit réglée par telle ou telle c o u t u m e ,
lois ou statuts locaux , il auroit fallu que les tierces personnes
a^ec lesquelles les époux, ou l’un d’eux, auroient par la suite con
ta c té , connussent la coutum e, les lois ou statuts locaux désignés
a” s 1 association des deux époux, ou que retenus par 1° crainte
1 ^ CUt ^ans ^es
anciennes quelque prohibition , quelque
° s^ac^e >^uelqu’incapacité relative, ils s’abslmsscn*-de contracter
avec ceux dont ils ne pouvoient pas bien connoitre les lois aux
quelles il leur auroit plu de s’assujétir. Ce qui eut été dangereux pour
es ^P°ux, ou pour les tiers, et toujours pour la chose publique.
c
�( 18 )
En donnant aux époux la faculté de stipuler d’une manière géné
rale, que leur association seroit réglée par telle coutume, loi ou
usage, etc., on ébranloit le régime hypothécaire, dont l’objet
principal est de fournir aux acquéreurs l’assurance de n’être plus
troublés dans leur possession, et le moyen, de connoitre préala
blement si les biens qu’ils vouloient acquérir leur étoient transmissibles.
C es motifs de l’article 1390 du Code ne peuvent pas s’ appliquer
à des dispositions testamentaires : aussi .cette loi n’a-t-elle pas été
portée d’une manière absolue et pour tous les actes, mais seulement
pour les contrats de mariage.
L ’article précédent d u C o d e Napoléon n’a pour objet que la
prohibition des substitutions, et n 'est relatif qu’à l’ordre des suc
cessions ab intestat.
Ces réflexions que je vous soumets, mon cher Collègue, sont
sans doute surabondantes; mais après les deux consultations que
je viens de lire, on ne peut ajouter que des choses superflues. Je
vous prie d’agréer les respectueuses salutations de votre Collègue,
JA U B E R T .
A C L E R M O N T , de l'imprimerie do L andriot , Imprimeur de la Préfecture,
et Libraire , rue Saint-Genès, maison ci-devant Potière.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Mirlavaud. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delamalle
Porcher
Poirier
Jaubert
Delacroix-Frainville
Chabot
Chabroud
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
Description
An account of the resource
Consultation [Mirlavaud]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1801-1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0516
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53827/BCU_Factums_M0516.jpg
Coverage
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Entraigues (63149)
Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Rights
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Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
Successions
testaments
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fcb1269352cee8c0be5f256c27b47cfe
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CONSULTATION.
V
u
le testament olographe de la dame de Chazerat, en
date du 26messidor an 9 , par lequel, entr’autres disposi
tions, on lit la suivante, qui fuit l’objet de cette consulta
tion : « Quant à la propriété de mes biens , mon intention
» étant, autant qu’ il dépend de m o i, de les faire re» tourner à ceux de mes parens qui descendent des estocs
» dont ils me sont parvenus, je donne et lègue tout ce
» dont il m’est permis de disposer suivant la loi du 4
» germinal an 8 , à tous ceux de mes parens de la bran* ch e de mes aïeul et aïeule paternels, et de celle de
* mon aïeule maternelle ,
qui seroient en ordre de
* me succéder, suivant les règles de la représentation
à l' in fin i, telle qu’elle avoit lieu dans la ci-devant
" Coutume d'Auvergne, pour être partagé entre les
A
�» trois branches au marc la livre de ce qui m’est par» venu de chacune desdites branches , et être ensuite
»> subdivisé dans chacune d’elles suivant les mêmes
» règles de la représentation à l'in fin i, et néanmoins
» je veux et entends qu’avant la division et sulxlivi» sion, il soit pris et prélevé sur la masse totale des biens
» compris au présent legs, d’abord le montant de mes
» legs particuliers, et ensuite le sixième du surplus, que
» je donne et lègue au sieur Farradeche-de-Gromont,
» fils aîné, et au citoyen Sablon-Ducorail, aîné, cha» cun par moitié. »
V u les deux codicilles, postérieurement faits par ladite
dame, l’un en date du 7 floréal an 10, et l’autre du 14
messidor an 11 , postérieur celui-ci à la loi du 1
3 flo
réal meme annee, sur les donations et testamens.
Dans ce dernier, qui est relatif à cette consultation,
on lit les expressions suivantes : « La nouvelle loi
« m ’ayant accordé la faculté de disposer de la totalité
« de mes b ien s, je veux et entends que le legs unin vcrsel que j’àvois fait par le susdit testament, en
« faveur de mes parens de l’estoc de
mes aïeul et
« aïeule paternels, et de ceux de l’estoc de mon aïeule
« m aternelle, de tout ce dont il m’étoit permis de
« disposer par la loi du l\ germinal an 8, ait son eifet
« pour la totalité de mes biens, sauf les divisions et
�m
- « subdivisions à faire entre mesdits héritiers, de la
« manière expliquée audit testament^ sauf aussi mes
« legs particuliers, et les dispositions par moi faites
« en faveur de mon mari 5 à tout quoi il n’est rien
« dérogé par le présent codicille. »
V u l’arbre généalogique où sont rapportés les trois
estocs dont les descendans sont institués héritiers, et
même le quatrième estoc de l’aïeul maternel, qui dans
cet arbre est marqué comme une tige dont il n est
parvenu aucun bien h la testatrice.
V u le jugement du tribunal civil de R io m , dépar
tement du Puy-de-Dôm e, du 22 juin passé, par lequel
il a été d it, « que sans s’arrêter ni avoir égard audit
« legs universel, fait au profit cles trois branches d’hé« ritiers y nommés, et compris au testament olographe
« de la dame de Chazerat, du 24 messidor an 9 , et
« codicille du 14 messidor an 1 1 . . . . lequel legs uni« versel est déclaré nul et de nul effet, et comme
« non écrit dans ledit testament. »
I n t e r r o g é s s’i l y a l i e u a l a r é p a r a t i o n d e c e j u g e m e n t ,
Nous
répondons
que la singularité de ce
ju g e m e n t,
qui
ne peut que surprendre et étonner tout jurisconsulte,
nous obligc à développer dans cette consultation les prin
cipes fondamentaux sur les institutions, legs universels,
et autres dispositions testamentaires •, principes que nous
A 2
�(4)
aurions dû om ettre, s’il ne falloit y recourir pour démon
trer la futilité et l’erreur des raisonnemens, soit considérans de ce tribunal.
Nous observons donc, en premier lieu,
q u ’il
est de
principe certain et incontestable, qu’il faut dans tout
testament ou disposition
te s ta m e n ta ir e ,
considérer, i°.
la capacité de pouvoir disposer ; 2°- la form e, soit les
3
formalités extrinsèques \ °. le fond du testament, soit
la nature de la disposition \
4 • la chose dont on dispose 5
5°. Jgg causes, conditions, modes et démonstrations appo
sées auxdites dispositions..
Tous ces points ne sont pas réglés par les mêmes
principes. Il n’est pas ici question , ni de l’incapacité
du testateur, ni de la forme extrinsèque de la dispo
sition , ni de la nature de la disposition , c’est-à-dire de
legs ou substitution prohibée, ni de la qualité de la
chose dont on a disposé, c’est-à-d ire, si prohibée ou
n o n ; mais il ne s’agit que d’examiner le dernier point,
soit la nature des causes, modes, <ît, si l’on v e u t, même
des conditions apposées au legs dont il s’agit.
Dans cette discussion, ce que L’on doit singulièrement
observer, c’est qu’une condition impossible, ou mémo
prohibée par les lois, ne rend point, ni d’après le droit
L . i^decond in itit.,1 .
:t 3o de co o d ., et d em ,,
t. 900 du Cod. IS'ip.
rom ain, ni d’après le Code Napoléon , la disposition
nulle, et qu’au c o n t r a is , dclrahilur conditio, et pro
�(5)
non scripta habetur: « Dans toute disposition entre-vifs
« et testamentaires, est-il dit à l’article 900, les condi-
l . 14 . de cond. in stit.,1 .
3o. d e cond. e t dom . art.
600 du Code Napoléon.
« tions impossibles, celles qui seront contraires aux
« lois ou aux mœurs, seront réputées non écrites. «
'»
Ce qui, d’après le droit romain et le Code Napoléùn,
à l’article 1172, n’a pas lieu dans les contrats et obligations.
Si ce principe a lieu dans les conditions qui paroissent
contenir la cause finale de la volonté du testateur, il
doit avoir plus lieu encore lorsqu’il s’agit de simple
mode ou démonstration, que les lois même ne consi
dèrent pas comme la condition aussi rattachée à la volonté
du testateur} et c’est là la maxime que nous voyons éta
blie dans les lois 3 7 , 74, §. 1 et 2, au titre du dig. de
cond. et déni, et dans la Novelle 1 de Justinien : « Quoties
« secundhm voluntatem testatoris facere compellitur-,
« quoties contra iegem nihil sit julurum . . . .
et tamen
« à legato eum non esse repellendum. »
A ces principes sur les dispositions testamentaires, il
faut en ajouter un autre également certain et incon
testable , c’et-à-dire, que toute fois qu’un testateur, pour
mieux désigner sa volonté, exprime une cause, ou fart
démonstration q u i, ou n’existe pas, ou ne peut
existerai faut, comme dit Roer* avec tous les interprètes,
oter la fausse cause et explication, et voir s’il résulte en -
*
., /, ,
TU. de cond. et dcm
infxne.
■
�(6)
core de la volonté du testateur, et de la chose disposée ;
parce qu’alors la fausse cause ou explication non nocet
legatario ; mais, si detrahendo causant, v el démon strationem, il ne conste plus de la chose léguée, la disposition
est nulle ; et ce, pai-ceque, comme dit l’auteur d’après
L . i . , S 8 ,d e dot. praele g ., 1. 2 6 , S u lt. de adim .
e t transf. Ic g ., 1. i 7 ,C o d .
de testam .
les jurisconsultes romains, Quidquid demonstrandi gratia additur reijam salis demonstratajrustra est, etpro
non scripto liabendum y et c est d après ce principe
même
q u e ,
quoiqu’une institution ne puisse se faire con-
tumelice signo, c est-a-dire, en ne désignant l’héritier que
par une action scélérate qu’il auroit faite, cependant
celte institution est efficace, si en ôtant cette désignation
ignominieuse, il conste encore de la personne que le
L.
9,
S de h e r. in stit.
testateur a voulu favoriser, pure enim institutus videtur
cum malediclo.
L . /t8 , S ° - d- P!t- de
h e r. in stit.
D e ce principe concluons donc que toute fois qu'une
cause, une démonstration, soit majeure explication ou
expression même défendue, se trouvent dans une dis
position testamentaire , et que, eam detrahendo, c’està-dire, en la supprimant, il résulte de la personne et
de la chose léguée ces expressions, déclarations, démonstratrations et explications , fJ^oiqu’eiTonnées et
même prohibées, pto tion scriptis habentut, et ne v i
cient ni le legs ni l'institution.
Nous devons encore u ces maximes joindre celle que
�(7)
nous avons sur l'interprétation dés contrats, et à plus
forte raison sur l’interprétation
des
dernières volontés,
qüi selon les lois benigniore interpi'etatione surit donando,
1 . 12de rcg. jons.
c’est-à-dire que, utile per inutile non vitiatur, que les
expressions doivent toujours être entendues dans le sens
que, vitio eurent, d’où' rie suit aucune absurde, et ut
actus potius valent qua'm' pereat.
Posés ces principes incontestables, venons a
1espece.
Nous avons déjà dit qu’il ne s’agit, ni de question de
forme, ni de l’incapacité du testateur, ni de la nature de
la disposition ou de la chose lé g u é e , ’mais seulement
d’expliquer les causes, modes, ou, si l’on veu t, condi
tions apposées à la disposition.
O r , d’après les principes ci-dessus, à supposer même
ces causes, modes ou conditions contraires aux lois, 011
doit les avoir pour non-écrites, mais elles ne vicient
point le legs : donc, à supposer que le mode avec lequel
la testatrice a voulu que se partageât le legs, fût même
une condition ou mode contraire aux lo is, cela ne peut
le rendre nul.
Ce principe certain suffit déjà pour détruire tous les
considérons du tribunal, tirés de ce que la testatrice
a voulu rappeler une Coutume, c’est-à-dire, celle d’A u
vergne, et que ¿a disposition se réglât sur cette cou
tume -, rappel, qU¡ seion \c tribunal seroit p roh ibé,
et coütiendroit un m o d e, ou si l’on veut en core, une
l. i7de!eg.
�(8)
condition ou démonstration contiairc aux lois. Eu sup
primant après les paroles, suivant les règles de la re
présentation à l’ in fin i, celles qui suivent, c’est-à-dire,
telle q u elle avoit lieu dans la ci-devant Coutume d’A u
vergne , il est certain qu’il conste de la volonté du tes
tateur et de la chose léguée *, ces expressions donc, si on
les croit contraires à la lo i, ne peuvent, en les suppri
mant , vicier le legs.
L e tribunal veut argumenter de l’article 1390 du Code
Napoléon -, m ais, à supposer encore, ce qui n’est p as,
que l’acte fût n u l, si dans un contrat de mariage on
se fût rapporté à une coutume de la même manière
que la testatrice s’e st, dans l’espèce, rapportée à la Cou
tume d’A u v e rg n e , il nous suffira pour répondre au
tribunal civil, dire que l’on ne peut des contrats ar
gumenter aux dispositions de dernière volonté , puis
que dans celles-ci les modes et conditions contraires
aux lois ne les vicient p o in t, et qu’elles vicient les
actes entre-vifs.
« Ce n'est pas que je prétende , ( dit Furgole en son
„ Traité des Testamens, tom. 2 , chap. 7 , nombre 9 ,
» p . <5), qu’un testateur qui blesse la loi en quelques
» parties perde entièrement le droit de disposer, et
» que tout cc qu’il a làit soit nul; il ne doit être privé
» tle 6011 pouvoir que dans celte partie par rapport à
laquelle
�>' laquelle il à contrevenu ’à la loi \ car1 tout le reste
» qui y est conforme*où qu’elle ne réprouve pas,.doit
» demeurer dans sa force.
-f:'
Non confundamus, quœso, contractus, stipulationes,
et alia quœ inter vivos geruntur, cum iis quœ testamentis ac aliis ultïmis voluntatibus cxpediuntur, ne
inde absurda, et legibus contraria, multa sequantur, ne
juris ordo evertatur, ne forma ejus et solemnia tollantur: ne falsitatibus et dolis aditus aperiatur. Prœclare
TJlpianus : verba contraxerunt, gesserunt, non pertinent
ad ju s testandi. Verba ff. de verb.sig. — F a ch in ., t. i,
liv. 6 , chap. - 71.
Mais le fait est qu’on ne peut môme dire dans l’es
pèce que la testatrice ait apposé, ni eût l’intention
d’apposer à ce legs une explication, une relation, une
démonstration, un mode contraire aux lois.
En effet, il est certain qu’elle commence par ne vou
loir disposer, qu autant q u ii dépend d’ elle ; elle est
donc semblable à ces testateurs, qui disent qu’ils lais
sent ce que la loi leur permet de laisser. O r, dans l’un
ct ^nutre cas, il est clair qu'on ne veut agir ni en haine
fri en fraude des lois.
Cette volonté si clairement manifestée dans le com
mencement de celte disposition , continue , lorsqu elle
dû : » tout ce dont il m'est permis de disposer suivant
B
�là loi du
4
( IO )
germinal an',S. C’- est.dojic, k s tiou^dles
lo is, et non les abrogées', jqui ¿ont.lâîbase <le/sûn^isr
position.
"dl r;; : ::
..iu
-> «
Elle veut favoriser ceux qui'descendeut des trois.estocs
par elle désignés. O r j ja’ayant ni ascendâns ni descendans, rien ne l’empêehoit de le faire, et lorsque ¿même
la loi du 4 germinal tin 8 ne lui permettoit pas de dis
poser de la totalité <le ses .biens , elle n’a disposé que
de ce dont
e lle
pouyoit disposer, et elle nV 'parlé de
la totalité de son hérédité , qu’après que le .Code' N a
poléon lu i en donnait le p o u vo ir, selon les lois des
douze tables, uti pater fam ilias legas.sit, Ma ju s esto.
Toute sa marche est donc-conforme aux nouvelles lois.
En léguant les biens y désignés aux descendans des
trois estocs nommés par e l l e e l l e n’a fait Cette dispo
sition qu’au profit dé ceux qui étoient.déjà nés à son
décès, et la loi n’exige point que les légataires soient
D. leC. S
Imtit.
, de heà.
désignés parleurs noms, mais il suffit, qu’ils existent, et
que indubitabili signo dcnionstrentur,
JElle les appelle suivant les règles de la représenta
tion à l’infini. O r , les,règles de la rqirésentation A ¡’infini
sont connues , et cette volonté peut avoir son e ffe t,
«ans blesser n i ^
111 l’ordre public 9 puisqu’il lui
¿toit permis d’app^^r f^ui elle vouloit à ce legs.
Sa disposition se voit, se copnoît » s’explique, ut pçut
�f
Mi >
avoir son e ffe t'p a rrles, seules expression? de la reptérr
sentation à l’infini; les autres donc: qui: suivent., tell&
q u elle avoit lieu clans la ci-devant Coutume d ’Auvergne,
ne peuvent en rien influer sur son effet, puisqu’en disant
suivant les, règles de la représentation à. l’infini , elle
a dit tout ce qui est nécessaire à cet égard,, e t les ex
pressions suivantes, selon, etc., ne contiennent qu’ua
pléonasme, soit une. déclaration inutile.
Dans- la série et lecture de ses dispositions-, on voit
qu’elle n’a consulté que les nouvelles lo is, qu'elle s’y
est toujours rapportée ; on voit en outre qurellfc o’a
pas dit telle q u e lle a lie u , mais telle q u elle avoit lieii\
expression qui prouve qu’elle a reconnu cette coutume
anéantie par les nouvelles loia, et. qu’ellfe ne l’a- indi?
quée que majoris démonstrations causé.
Comment donc le tribunal a-t-il pu un seul instant
soupçonner que sa disposition’ fût contraire à l’ordre
p u b lic, et y appliquer l’article 6 du Code Napoléon,
puisque la loi qui estr basée sur l’ordre public a tou
jours été le guide de sa volonté et de ses dispositions,
puisque cette môme loi permet aux testateurs , qui n on*
ni asccûdans ni descendans, de disposer au profit de
mieux leur plaît ; puisqu’enfin le mode de divi
sion ne rçgarcie5 ni la faculté de .tester, ni la nature
de la disposition , ni la qualité de la chose lé g u é e ,
B 2
�nnicfue cas où si le testateur ' vôuloit heurter la l o i ,
sa ' disposition seroit frappée de nullité j
-
R ien donc n’a paru plus étonnant au soussigné, que
la singulière opinion du tribunal ù cet égard-, opinion
qui, contraire ;à tout principe de droit, a donné lieu
à un jugement qui ne peut qu’être et qui doit être
émendé.
L e tribunal pose même en matière de contrat dotal
une maxime orronnee, et contiane
3
larticle i q o ,
car, outre ce que j’ai dit ci-deSsus, qu’on ne peut dans
semblables cas de mode, ou condition contraire aux lois,
rien inférer pour celles apposées dans les dernières vo
lontés, ’il est >encore à remarquer qu’il est erronné de
dire qu e'si dès époux stipuloient expressément telle
ou telle chose , ï en ajoutant ensuite tel que cela e'toit
porté par la coutuvie, leur stipulation fût nulle , parce
qu’il est évident qu’ils n’ont pas stipule d’une manière
générale selon la coutume , ainsi que dit l’article sus
cité, ce qui arriveroit s’ils disoient généralement et sim
plem ent, et sans autre spécification, nous stipulons selon
la Coutume de Turin, P a r is, etc. Mais s’ils avoient
stipulé une somme déterminée , ou fait une convention
expresse, par exem ple, z\ T u rin , que l’augment de la
dot seroit un tiers * i ue
Innl'i g^gneroit- la moitié
de la dot , si l’épouse;'vient à mourir sans en fans, on
�( i
3)
ne peut soutenir que cette stipulation soit nulle : dans
le cas de celte stipulation expresse, de telle ou telle
chose, l’addition qu’ils auraient faite, ainsi q u il est porté
par la coutume, ne' nuiroit pas à la stipulation, puis
que l’article
ne
défend pas de nom m er, démonstration
nis c a u s é , les coutumes *, mais il défend seulement de.
stipuler, ¿u n e manière générale, que leur association seroit réglée par les coutumes, stipulation bien différente
de celle qui est faite expressément de telle chose, quoi
qu’ensuite;.la coutume soit énoncée dans l’acte -, car ce
n’est point alors la coutume qui règle la stipulation,
mais les objets qui y sont expressement déterminés.
En un m o t, lorsque les époux se rapportent en
îrénéral,
O
’ et sans autre,' à une coutum e, comme cette
coutume est abrogée, elle ne peut plus rien opérer,
devant la considérer comme'si elle n’avoit jamais existé.
Il ne résulte point de ce que les contractans ont voulu
faire, attendu qu’on ne peut alléguer la coutume pour le
démontrer.
Mais s’ils stipulent expressément telle ou telle chose,
en ajoutant m êm e, ainsi qu’ il étoit porté par la cou
tume , alors la preuve de leur volonté et de la chose
stipulée existe indépendamment de la mention faite de
la coutume.
C ’est donc contre tout principe de droit, et contre
la disposition même de l’article i
39°
^ ^ d t, q u il
�4
( * )
a plu au tribunal dé lui donner cette étrange interpré
tation.
II ne reste plus qu’à répondre à l’autre interprétation
encore plus étrange de la loi du
3o
ventôse an i î ,
qui a abrogé toutes les coutumes; car ici il n’est point
question de donner force à une coutume abrogée; mais
il s’agit simplement de la mention d’une coutume, faite
en addition, ou, pour mieux expliquer la volonté du
testateur, déjà assez expliquée et assez claire par les
expressions antécédentes de la division de son hérédité,
selon les règles de la représentation à l’infini, qui s’enten
dent- très-bien, sans la mention ou énonciation de la Cou
tume d’Auvergne.
D ’ailleurs comment supposer que la testatrice ait voulu
au mépris des lois faire revivre une coutume qui ne lui
permettoit pas de tester ainsi qu’elle l’a fait, et qui vouloit
une succession ah intestat, tandis qu’elle en ordonnoit
une testamentaire.
D ’après tous ces motifs, je suis d’avis, et même plus
qu?intimément persuadé, que le jugement du tribunal
doit être réparé, et qu’en son émendation il sera déclaré
q u e
le
le g s
dont il s agit doit avoir son entière exécution.
T urin, 3o novembre 1808.
Signe
C laude
BERTHLKB. , jurisconsulte,
ancien sénateur et avocat général.
�5
( 1 )
Je soussigné, procureur général impérial près la cour
d’appel séante à Turin , certifie la sincérité des qualités
prises par M . C. B erth ier, rédacteur de l’écrit ci-dessus.
T u rin , 9 décembre 1808.
Signé T I X I E R .
V u , les soussignés sont du meme avis.
Signé C h a r l e s B A L , avocat.
V
ic t o r
B R U N , professeur en droit, ins
pecteur de l'académie de législation.
C A Y E T A N - A M B E L , jurisconsulte.
Louis F E R R E R O , jurisconsulte.
H en ri
B E R T O L O T T E , avocat ju ris
consulte
J
o seph
.
R O L L A N , avocat, censeur de
l'académie de jurisprudence.
G I A C O M E T T E , jurisconsulte.
C L E R M O N T , de l'im p rim e rie de L a n d r i o t , Im p rim eu r de la P r é fe c tu re ,
et L ib r a ir e , ru e S a in t-G e n è s , m aison ci-d e v ant
Potière.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chazerat. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Berthier
Bal
Brun
Cayetan-Ambel
Ferrero
Bertolotte
Rollan
Giacomette
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
Description
An account of the resource
Consultation [Chazerat]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1801-1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0515
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53826/BCU_Factums_M0515.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Entraigues (63149)
Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53825/BCU_Factums_M0514.pdf
00dee9e4a0940e3eeee5879f52d540c0
PDF Text
Text
^ -------- :-----------fo u * # »’
Enveloppe.
¡0 '
C eci est mon testament olographe. Signé R o l l e t - C h a z e r a t . A u bas y a : P a ra
phé , ne varietur. R iom , ce v in gt-cin q vendém iaire an quatorze. Signé P a r a d e s
président.
T e s t a m e n t .
v
• J e soussignée Marie-Gilberte R o llet, épouse de Charles-Antoine-CIaude Chazerat,
habitante de la commune de Riom , voulant disposer avant mon décès des biens dont
il a plu à la divine providence de me gratifier en ce m o n d e , ai fait le présent testa
ment olographe entièrement é c r it , daté et signé de ma main, après avoir auparavant
recommandé mon âme à Dieu , invoqué les lumières du Saint-Esprit, prié tous les
saints et saintes du paradis d'intercéder pour moi , afin d’obtenir le pardon de mes
péchés. Je donne et lègue à Joinnet, mon valet de chambre, une somme de trois
mille livres une fois payée, plus une rente et pension viagère de quatre setiers fr o
ment.
A Pierre Barbecot, quinze cents livres une fois payées.
A Joseph Roussel, six cents livres une fois payees , plus une rente et pension via
gère de quatre stiers froment.
.
A la Babet, ma femme de chambre, une somme de quatre-vingt-dix livres pour
chacune des années qu’elle aura resté à mon service.
A la Marion, ma seconde femme de chambre, une somme de quatre-vingt-dix
livres pour chacune des années qu’elle aura resté à mon service.
A la Quantiane , ma gouvernante, de Riom , une somme de quatre-vingt-dix l i v .
pour chacune des années qu’elle aura resté à mon service.
A la Nanne , ma cuisinière, une somme de quatre-vingt-dix livres pour chacune
des années qu’elle aura resté à mon service ; plus une rente et pension viagère de trois
setiers froment.
A la Benoit , une som me de six cents livres une fois payée. Tous les legs payables
dans les trois années qui suivront mon décès, et en espèce métallique; et cependant
l ’intérêt d'iceux au denier vin gt, qui prendront cours du jour de mon décès sans
aucune retenue.
’
Je donne et lègue à la S t.-Roch, ma gouvernante à M irab el, une rente et pension
viagère de trois setiers froment, et cent vingt livres d’argent par année , et les petits
meubles qui lui manqueront pour se mettre à son ménage. Tous les legs ci-dessus
n ’auront néanmoins leur e f f e t , qu’autant que ceux au profit desquels ils sont faits,
seront encore à mon service à l ’époque de mon décès.
Les pensions payables de six mois en six mois , sans retenue, à commencer le
premier payement six mois après mon décès.
Je veux que la dame Bastide, ci-devant religieuse, soit logée et nourrie dans ma
maison pendant un an , à compter du jour de mon décès, ou qu’on lui donne une
somme de douze cents livres pour lui en tenir lieu. Je v eux d e plus que lors de sa
sortie, il lui soit payé une somme de huit cents livres; de tout quoi je lui fais don et
legs ainsi que d ’ une rente et pension viagère de la somme de sept cents livres par
année payable de six mois en six mois, sans retenue, et par avance; laquelle pension
demeurera neanmoins réduite à moindre somme de ce qu’elle touchera de la nation
réellement par année dans le cas ou la dame Bastide seroit payée en valeur réelle
du traitement qui lui est du
par la nation, comme ci-devant religieuse.
j e d o n n e e t l è g u e a u x pauvres de R io m et aux hôpitaux , vingt setiers fr o m e n t ,
d ix setiers seigle par annee.
j e d o n n e e t l è g u e a u x pauvres de Maringues et â l ’h ôpita l, six setiers froment,
trois setiers seigle par année.
to
s
lu
e
T
q
rentes
seront payées chaque année, sans retenue , à compter du
jour de o
mn e
dces, par mes héritiers ou par ceux qui jouiront de mes biens, jusqu'au
rach at ou remb oursement d'icelles , lequel ne pourra être fait qu en especes sonnantes
en valeur de quatre-vingt-dix , six ans après mon décès.
’
Je veux qu il soit distribué chaque année, après mon décès , la quantité de trente
setiers froment et d ix setiers seigle aux prêtres et aux religieuses qui ont demeuré fiI
�dèles à l’ancien culte de la religion catholique, apostolique , et qui par cette raison
ont été privés de leur traitement, et a ceux d e n t r e « qui en auron le plus de
?
• Cette
,?
i- -i ,• „ w ra fane
faite sur
besoin.
distribution
sur les
e états qqui en seront
te fournis
^ chaque
^ annee
par mon man et d e u x ® eS " xe" “ ur ¡ e cho i* des prêtres et religieuses , et pour la
paternel , m en rappo
chacun d’eux sera compris dans la distribution,
hxation de portion pour ‘ ^
‘ ^ ^ a v o i r lieu , dans le cas où les prêtres et les
Cette distribution cessera
_P . à ^
payés en valeur réelle des traitemens qui
religieuses v i e n d r o n t ^ p a r f
. J les diminueront à fur et mesure de l'ex!LUc \ L n tdt;,Sp r ê t r et religieuses , ™'en « p p o r . . « encore sur ce point aux per.
c ; - ,,,
d . R io » . „» d i . ™ . « ! " ™ î T o V Ù é . .
. . i c h .c u n . d 'e l l e . , u» d » .
m Î n . “ v .V ü 'r d !“ l . som m e de d o » « ce».» U ï w . ; e i e n u ’e l k ,
diamant de pareille vkleur.
.
Je donne et egue A M . l o u u
a» ^
u „ quatrièm e
un diamant en valeur de douze mille livres,
^ e| au survivam
^ ^
et l’ usufruit de ladite s° ,n'nej bîens ^ j-en lègue l ’ usufruit et jouissance à M . de ChaQuant au smj i l u s a
sa v ; e durant , sans être tenu à autre chose que
zerat, mon m a n , p
^ raQn ,nohilier. Ledit legs fan à condition qu’à l'époque
de faire faire inV®" inar; aUra la c a p a c i t é de recueillir, n’entendant pas que d autres
de mon deces, m
^ profiter; et dans le cas où mon mari n ’auroit pas cette
capacité1au^eiups de mon d é c è s et qu’il viendroit à la recouvrer après, je veux
E ntends que du moment où il 1aura recouvree , il reprenne 1 usufruit et jouistancé de mes b ien s, pour en jouir jusqu’à son décès.
Cet usufruit sera chargé, pendant sa duree , du payement des rentes et pensions
viagères par moi ci-dessus léguées, ainsi que du revenu annuel de mes autres legs ;
et q u a n t au principal d'iceux , s'ils deviennent exigibles pendant la durée dudit
u s u f r u i t , i l sera vendu de mes biens meubles et immeubles jusqu’à concurrence
des sommes qui seront nécessaires pour le payement, et dans ce cas l’usufruit cidessus légué se trouvera diminué d ’autant.
A l ’égard des créances et hypothèques que j’ ai contre mon m a r i, j’entends que
mes héritiers ne puissent s’en faire payer que sur ceux des bit-ns de mon mari dans
Tesauels il pourroit rentrer , et qui avaient été acquis par son pere ou par lui denotre mariage, et non sur ceux qui appartenoient à mon mari et a sa famille
P UIS
lre mariage , et dans lesquels il pourroit également rentrer ; et en cas
jTrfi nce desdits biens acquis depuis notre mariage , pour remplir lesdites
d insuinsa
_
¡ses ^ je donne et lègue l'excédant, quel qu’il soit, à mon mari,
créances ei
héritiers à poursuivre la liquidation et remboursement dtssauf en ce cas
r;ses contre la nation , comme ayant vendu les biens de uion
dites créances
^
,i„ mes biens , mon intention étantj autant qu’il dépend
mari. Quant a la
^
mes parens qiïTtlëscendent des estocs desde i i i o î T d e le*_,al„.,rVpnus , je donne et lègue tout c e l l o n t il m est permis ïïeT iïjquels ils me s° n-p-E^- /
aîT8 , à tous ceux de mes parens de la branche de
p o s e r suivant la oi
. e t de celle d e ln o n aïeule maternelle, qui sërolent
m es aïeul et j j ^ L ^ - J ^ ^ r ^ T i i v a n t l es régies du la représentation à l’infini , telle
en ordre dë i n e _ J ^ ,.. .t.. j ^ ant coutume d Auvergne . pour être partagé enTre
qu’Sltfc avoit Tieu_u2^., '
^ |;v7e de ce qui m'est parvenu du chacune desdites
les tfoiT branches a.V_ 'V .-e-.^^ ÿYse~5âns Chacune d’elles, suivant les mêmes règles
branches, et être ensui
néanmoius je veux et «utends qu’avant la divide la représentation ■»— i l i _ 1 prélevé sur la masse totale des biens compiis au
sion et subdivision >•
‘
t ¿ITmës legs particuliers et ensuite le sixième
présent W , , d a b o r d J e j u a i j J ^
F-rrad-sr.he de C T ^ Ï Ï T T Ï Ï ï T ^ r e ,
d u ^ l u s , que l p
»
e * f « ‘ ® . f h J , in par moi tlé , à la charge par eux de
et au cito ym Sablon - Durera, aine r
F rusufruit c ;.dessu, légué à mon
s o u ff r ir , sur ce q u i leur restera u u a u
*
o
�m a r i, dans le cas où ce legs pourroit avoir son effet ; et dans le cas où , contre
mon attente, le susdit legs du sixième ne pourroit valoir au profit des deux léga
taires ci-dessus nommés, je donne et lègue ledit sixième, sous les mêmes distrac
tions et réserve , aux- hôpitaux et aux pauvres des pays où j ’ai des biens. L e sixième
ci-dessus légué en faveur des citoyens F a r r a d e s c h e - G r o m o n t et Sablon-Ducorail,
ne l’est qu’à la charge de l’ usufruit de la mère de chacun des légataires , chacun pour
ta portion.
,
,
Finalement , je nomme pour exécuteur de mon present testament M . Touttee
père , que je prie de vouloir bien accepter cette charge; et pour 1 indemniser des
peines et soins qu’il prendra à cet e f f e t , et lui donner une preuve de ma r e c o n noissance pour les services qu’il m’a r e n d u s , ainsi que pour l a t t a c îement que sa
femme et lui m’ont toujours témoigné , je lui donne et legue a somme e ^ ouze
m ille livres : l’usufruit de l a q u e l l e somme sera cependant réversible sur la tete de
madame T o u ttée , en cas de décès de son mari avant elle. Tous les legs ci-dessus
seront payables dans six ans à compter du jour de mon deces , et cependant
au denier vingt sans retenue.
,
,
i„
Telles sont mes disposition et ordonnance de dernier, volonté ; et après avoir lu
et relu mon présent testament, je l’ai trouve conforme à mes intentions ; en con
séquence , j ’y ai persisté , et l ’ai signé au bas de chacune es pag
i l
«ant et révoquant tous autres testament par
¿ ¡ ' “¿ l
“ dans mon apparte-
A chacune des première , seconde et troisième pages, et au bas
En marge de chacune desdites prem ière , seconde,
'
t r o i s i è m e
1
e t
»
8
quatrième page*
y a : Paraphé , ne varietur. Riom , le vingt-cinq vendémiaire an quatorze, oigne
Parades , président. Au bas de la quatrième page y a : Enregistre a R io m , e Ving
neuf vendémiaire an quatorze, F °s. 5 3 , 54 t et 55 R°. • reçu trois francs trente
c en tim es, dixième compris , sous la réserve des droits des differens legs compris
au présent. Signé Paillard.
P r e m i e r
C o d i c i l e .
A
u j o u r d 'h u i dix - sept floréal an dix de la répu blique, je soussignée MarieGilberte Rollet , épouse de Cliarles-Antoine-Claude de Chazerat, après avoir pris
une nouvelle lecture de mon testament olographe , du vingt-six messidor an neuf,
et avoir invoqué de nouveau les lumières du Saint-Esprit, et intercédé tous le*
saints et saintes du paradis pour le salut de mon âme , ai fait au testament les
cliangeuiens et additions qui suivent. Prem ièrem ent, le cas où etoit inon^mari
à l’époque de mon testament, ayant changé par la radiation de la liste des émigrés,
j ’entends que le legs conditionnel que je lui avois fait de l’usufruit de^ tous me*
biens demeure pur et simple ; je décharge même mon mari de tout inventaire
auquel il pourroit être assujéti à raison de cet usufruit. En second l i e u ,
ce n’étoit qu’à cause de l’inscription de mon mari sur la liste des émigrés, q
)
demandé et obtenu contre lui la séparation de biens; comme
e
cote il n est p as juste que je m’enrichisse aux dépens de mon m a r i , p en
t __
es evenemens de la révolution l ’ont dépouillé de la presque totalité de sai
*
V e".* « entends que ladite séparation de biens , ainsi que ‘ V P,n' so ent rern avoit donnée mon mari d’acheter et de bâtir ma maison de R.o n , « l “ 1
SüîerC
ladite
E
V Zqu7l“
T Jq ?ni i n.°0
Z "VtaV?nues»
r ™
’ eï
* .T.1
•<1U’6"
’en conséquence l.dUe
actifs , mon
q
qu il soit, les acquisitions que i ai pu faire, m es , ,.r
i.
argen comptant, et tous arrérages qui pourroient metre dus a
P q
anrA, u
deces,
après la
la
deces, appartiennent
appartiennent à
à u>on m a ï i . à la charge nar
par lui
lui ou seshéntiers , après
cessation de son usufruit, de rendre c o m E t e l G i r j M Î H S ^ O ^ Î ^ l ^ non dit
mari a reçu de moi , soit par notre c o n t r a T d e m a r i M e ^ i S j l - ^ 1 P n x « «a Vente
de mes biens ou reinboÎi7seîïïFnr7T^~ines rentes , soit^nj^des_succMSions de mes
père et m e re , suivant les i"nv>»niâri^qiii enTürënt'faits a leurs décès. Troisièm e
ment , je veux que pou F T c p a yem en t d esaîtës'ripïïse*,
héritiers ne puissent
mes
l
�^
.
avoir recours que sur les biens de mon mari , autres que ceux qui a p pa rtin ren t
à lui et à sa f a m i l l e T T e p ô q ïïe 3e notre Tnariage , ou qui leur seroient avenus de
puis à titre de succession, et ïïâris la propriété desquels mon mari pourroit rentrer,
et sur ceux que j’ai c i - d e s s u s ' déclaré appartenir a mon mari ; je veux même que
la maison que mon mari pourroit acquérir en la commune de Clermont demeure
pareillement exceptée de la prise de mes héritiers , et que mon mari puisse li b r ^
ment disposer de la maison et du prix d’ic elle, sans que lui ni ses lieritiers puissent
être inquiétés à cet égard par les miens : la même exception aura lieu pour ma
maison de Riôîn7"dans le cas seulement où mon mari jugeroit à propos d’en dis
poser, sur quoi je m’en rapporte à sa discrétion et a sa délicatesse ; le tçutsous la
réserve portée par mon testament en faveur de mes hgntiers^en cas d ’itH^flsance
des biens de mon mari , autres que ceux sur lesquels j entends q ue mes héritiers
n’aient aucune prise.
.
Je veur-atissi qu’après mon décès ina garde-robe soit donnée à mes femmes de
chambre , pour la partager entr’elles dans la proportion du nombre d’années que
chacune d’elles aura été à mon service : la dame Bastide pourra prendre part à
ce partage pour le temps qu’elle m ’a servi en qualité de femme de chambre. Je
v e u x p a r e i l l e m e n t q u ’il soit e m p l o y é , après ^mon d e c e s ^ l a s o m m e d e m i l l e l i v re s
à faire dire des messes pour le repos de mon aine.
Je donne et lègue à M . Raim on , chirurgien, une pension viagère de cinq setiers
du plus beau froment; laquelle pension prendra cours du jour de mon décès, et sera
payable d’avance , de six en six mois.
Je veux qu’il soit remis, après mon deces , a celles des ci - devant religieuses
ursulines de c l e r m o n t , qui seront alors existantes , les devant d autel et l ’ornement
de drap d’or pour la messe , quelques aubes et napes d’autel , les tasses à café , leurs
soucoupes, deux grandes tasses, une cafetière, une bouteille d etain pour chauffer
les pieds au l i t , et un peu de savon -, le tout qui s’est trouvé après le décès de
mes soeurs, ci-devant religieuses. Comme je n’ai point payé à la famille Cordier,
de L y o n , une rente d ’à peu près vingt livres, je veux que si cette rente est due
mes héritiers soient tenus de la payer, et sans pouvoir alléguer aucune prescription :
je crois que c ’est une pareille rente que M . Hébrard a remboursée pour moi en
petits contrats , à M . B ou det, de Maringues.
Je veux enfin qu a 1 extinction des prêtres et religieuses auxquels j ’ai légué par
mon testament une rente annuelle de dix setiers seigle et trente setiers de fr o m e n t ,
ou dans le cas ou ces pretres et religieuses viendroient à être payés en valeur réelle
des iraitemens qui leur sont dûs , cette rente seroit réversible pour deux tiers aux
pauvres des lieux où sont situés mes domaines de Joze , Entraigues , Chamboiras et
Villeret , proportionnellement à la valeur de chacun desdits domaines, et pour
l ’autre tiers aux pauvres et hôpitaux de la ville de Riom. Cette réversion aura égale
ment lieu à fur et mesure de l ’extinction des soit prêtres et religieuses.
.Tft persiste au surplus dans toutes les dispositions co ntenues dans mon testnmpnf t
et veux qu’elles soient exécutées^en leur entier . saufTeTTHiangemena et additions
portés par le présent codiciie , que je veux pareillement être exécuté suivant sa
form e et teneur ; et après l ’avoir lu et relu, le présent codiciie entièrement écrit
de ma m a in , j ’y ai persisté, et l’ai signe au bas de chaque page. Fait d Rioin ,
dans mon a ppartem en t, le dix-sept floréal an dix de la république. Et signé RolletChazerat.
.
En marge de la preroicre page du codiciie ci-dessus , est écrit : Paraphé, ne v a rietur. R i o m , ce vingt-cinq vendémiaire an quatorze. Signé Parades, président.
Au bas de la seconde page est aussi écrit : Paraphé, ne varietur. R i o m , ce vingtcin q vendémiaire an quatorze. Signé I arades , président.
En marge de la seconde page J 3 : enregistre a Riom , le vin gt-n eu f vendémiaire
an quatorze , F°>. 55 , et 56 R°- •" reÇu un ‘ rar}c dix centimes , dixième compris , sous
la réserve des droits des diflererts legs compris au présent codiciie. Signé Paillard.
�S
e
c
o
n
d
C
o
d
i
c
i
l
e
.
u j o u r d ’ h u i vingt-un pluviôse an onze de la république, soussignée MarieGilberte R o l l e t , épouse de Charles-Antoine-Claude de Chazerat , ayant de nou
veau pris lecture de mon testament olographe en date du vingt-cinq messidor an
n eu f, et de mon codicile en date du dix-sept floréal an d ix , après avoir de nou
veau imploré la miséricorde divine pour le pardon de _mes fautes et le salut de
mon âm e, et invoqué les lumières du Saint-Esprit, j ai fait auxdits testament et
codicile les changemens et augmentations qui suivent.
Dans le cas où M. de Chazerat, mon m a r i, viendroit a deceder avant m o i , comme
aussi dans le cas où après avoir recueilli le legs fait à son p r o fit , il viendroit a decéder avant madame Dalagnat, je . donne et lègue a ladite dame Dalagnat , 1 usu
fruit et jouissance, pendant sa v ie , de ma maison , c o u r , jardin de M ir a b e l, en
semble de tout le mobilier qui s’ y trouvera au jour de 1 ouverture du present legs ;
plus du pré appelé des Paves, du pâcher , du verger appele Barre , du champ de
la Cave , de la vigne au-dessus , et finalement de a terre au nord du ,ardm Penaud ;
pour, par ladite dame Dalagnat, commencer ladite jouissance, dans le premier cas
ci-dessus prévu , après mon décès ; et dans le second cas , après la cessation de
l ’ usufruit par moi légué à M . de Chazerat, mon mari.
r,„„r
Je dispense expressément ladite d a m e Dalagnat de tou
ai
mnhilipr
raison dudit usufruit, n’entendant l ’assujétir qu’au simple inven a
»
et à un procès verbal de l ’état des immeubles , pour le tout e re
•
¿tat
uîlipr
« t i eiers
r s , à l ’expiration de la jouissance de ladite dame Dalagna ,
.
qu ’elle l ’aura reçu , sauf le dépérissement occasionné par 1 usage du mo
Secondement, comme il pourroit se faire qu’au moyen des dispositions par ^
faites en faveur de mes narens de l ’estoc de m es aïeul et aïeule paternels , et^ e ce ui e
mon aïeule maternelle , il ne restât pas à quelqu’ un^de mes cousins germains ou cou
sines, ou enfans de cousins germains de 1estoc de mon aïeul maternel, appeles par
la loi à ma succession , une somme suffisante p o ur_jeur subsistance , désirant venir
à leur secours , à faire partager mes libéralités ceux qui en auront besoin , je veux et
entends que si quelques-uns de mes cousins ou cousines ne trouvojent pas dans leur
portion héréditaire , jointe avec ce qu eux ou leurs enfans auront d ’ailleurs , de quoi
form er un revenu de cent francs , tant pour eux~que pour chacun de leurs enfans
qui existeront au jour de mon décès . il soitaistrait annuellement de mon legs uni
versel, la somme nécessaire pour compléter ledit revenu'de cent francs à chacun de
mes cousins et cousines, et chacun de leurs enfans, compris ce qu’eux ou leurs enfans
pourroient avoir d ’ailleurs ; et ce pendant la vie de chacun de mes dits cousins ou
cousines, et de leurs enfans. A l ’égard des enfans de cousins germains qui pourroient
être appelés de leur ch ef à ma succession , je veux également que si leur portion hé
réditaire réunie à leurs autres facultés , ne se"porte pas à un revenu de cent francs ,
je veux que la leur soit complétée aux dépensée mon legs universel, pendant leur vie.
^ Ces suppléinens ne seront exigibles qu’après la cessation de l ’ usufruit par moi
légué à M . de Chazerat, mon mari ; et après son décès , si madame D a l a g n a t re
cueille l ’usufruit particulier que je lui ai ci-dessus légué, je veux et enten s qu
le montant dudit supplément soit par elle, pendant la durée de son u s u f r u i t , co
en étant une charge ; cependant dans le cas où par le moyen de ces supp ein
,
ne resteroit pas à ladite dame Dalagnat un revenu au moins de dix-hui,
•
3
dont je lui ai ci-dessus légué l ’usufruit, je veux et criiencls q»1
. R Payer lesdits suppléinens que jusques et concurrence de ce q
P
ceder ladite somme de dix-huit cents francs de reven u, et
p usi y a , soit payé par lnes légataires universels, de même q u i
P }
totalité après la cessation de l’usufruit de ladite daine D a l a g n a t .
Je persiste au surp.Luâ_i liiasJes .dispositions p o r t é e s parjesjestainent et o e d ^ I e
auxquels ,1 n’est rirn d i a n g T p ar le ¡n e s e â T ô M Ztfc ^ t j u e l j^persiste également,
après 1 avoir lu et relu , et l ’aTlTgïïè-tlë ma-iiiiiilir^nrl^ïnrTT^nîacuiie des pages d ir e lm .
Fait a Rioin , dans mon appartement, le vingt-un pluviôse an onze de la république.
Signé Ilollet-Chazerat. Au bas de la première page du susdit c o d icile, est aussi signé
llollet-Chazerat.
A
�E n marge de chacune des deux pages est écrit : Paraphé, ne varietur. R i o i n , le
vingt-cinq vendémiaire an quatorze. Signé Parades, président.
Au bas de la seconde page y a : Enregistré à R io in , ce vingt-neuf vendémiaire
an quatorze. F°. 56-, R°. et V ° . Reçu un franc dix centimes, dixième compris ,
*ou* la réserve des droits des legs compris au présent codicile. Signé Paillard.
.
T r o i s i è m e
101
e t
q u a t r i è m e
C o d i c i l e s .
J e soussignée, Marie - Gilberte R o l l e t , épouse de Charles - Antoine - Claude de
Chazerat , après avoir pris une nouvelle lecture de mes testament et codiciles olo
graphes, en date des vingt-cinq messidor an neuf, dix-sept floréal an dix , et vingtun pluviôse an onze, et avoir de nouveau invoqué les lumières du Saint-Esprit,
ai fait auxdits testament et codiciles, les changemens et corrections qui suivent.
Premièrement, la nouvelle loi m ’ayant accordé la faculté de disposer de la totalité
de mes biens , je veux et entends que le leps universel que j’avois fdit par Je susdit
testa m ent, en faveur de mes parens de 1 estoc de mes aïeul et al'uiiL paternels . et
de ceux de l’estoc de mon aïeule maternelle. de tout ce dont il in’étoit permis de
disposer, par la loi du quatre germinal an h u i t , ait son effet pour la totalité da
ines biens , sauf les divisions et subdivisions à taire entre înês dit» héritiers de la
manière expliquée audit testament , saut' aussi ines legs particuljefs , et les disposi
tions par moi faites en faveur de inon nian~, a loue q uoi i l n’est rien dérogé par le
présent codicile.
Je veux en second lien que les dispositions par moi faites en faveur de mes cou
sins et cousines germaines , et ent'ans de cousins germains de l’estoc de inon aïeul
maternel, aient pareillement leur e ffet dans ce cas, ou en faveur de ceux qui n’auroient pas un revenu de cent francs.
—— ——
4
Troisièm em ent, relativement au legs que j ’ai fait à la dame Bastide , d’une pension
viagère de sept cents livres par année , je veux et entends que si mon inari
après lui quelqu'un de nos héritiers , garde ladite dame Bastide à sa compagnie et
lui fournisse le logement et la nourriture , ladite pension soit réduite à la somme de
tr0V . e^
p - UV
0Ut le
le]nps
la Sardera> et que l'excédant de ladite
aointne
soit .VnnV
employe
chaque
année
enqu’0n.
aumônes.
« S n T a u ^nnr V nfin ' Î “ ” * ^ CaS ° Ù ,nes b‘jOUX et dia,na"s ™ trouveroient
S
««“h p , pour
»,m 0 n fournir
f
*•’ )e
et entends
<Iu'ils
qu il fera
sera do
possible
nu VCUX
payement
de mes
less. soient vendus le plutôt
Je persiste au surplus des dispositions contenues dans lesdits testament et codiciles •
et après avoir lu et re u celui-cTTài p a i l l e , nént persisté, et l’ai signé au bas
cette page. Fait à Mirabel, dans mon appartement, le quatorze messidor, l’an onze
de la république. Signé Rollet-Chazerat.
Quoique Joseph Roussel ne soit plus â mon service , j^ confirme le legs fait à
son profit, pour la pension viagère de quatre setiers froment, et trois cents livres
qu’il me doit.
Je lègue pareille pension a Pierre Barbecot.
Je lègue une pension de trois setiers froment à la Babet , à la Marion , à la Ouantiane , mon ancienne gouvernante , et à chacune d elles. Enfin je lègue à chacun da
mes domestiques, une annee de leurs gages, outre les autres legs faits à leur profit
Fait à Rioin , dans mon appartement le neuf ventôse an treize de la république!
Signé Roliet-Chazerat. En marge¡y a : P a r a p h e ne varietur. Ilioiu le vingt-cinq
Vendémiaire an quatorze. Signé Parades, président.
Enregistré à Rioin , le vingt-neuf vendemiaire an quatorze.’ F 0. 56 V 0., et 57 R °.
Reçu un franc dix centimes, d i x»eine çorapn* , sous la réserve des droits des legs
compris au présent codicile. Signé Paillard. Au dos y a : Enregistré à Rioin ,
vingt-neuf vendémiaire an quatorze. F . 5 j R . Le dernier codicile fait sous la date
du neuf ventôse an treize. Reçu un franc dix centim es, dixième com pris , sous la
réserve de* droit» dei legs qui y »ont coinpru. Signé Paillard.
Te
�. A p p e r t que le vingt-cinq vendémiaire an quatorze , M . Claude-Pierre Parades,
président du tribunal civil séant à R i o m , a dressé procès verbal de quatre feuilles
petit papier de dimension , contenant testament et codiciles de défunte dame M arieGilbert« R o l l e t , épouse de C hazerat, des vingt-six messidor an neuf, dix-sept floréal
an dix , vingt-un pluviôse et quatorze messidor an onze , et neuf ventôse an treize ,
lesquels lui ont été représentés par M. Jacques To u ttée , substitut procureur général
impérial prés la cour d ’appel séante en ladite ville , comme lui ayant été remis par
ladite dame R ollet de C hazerat , et dont il a , par son ordonnance mise au bas dudit
procès verbal , ordonné le dépôt ès mains de M e . Bonville , notaire à Riom ; lequel
procès verbal a été enregistré à Riom , par Poughon , qui a reçu deux francs vingt
centimes.
A
p p e r t que le vingt-neuf vendémiaire an quatorze, en exécution de l'ordonnance
de M. Parades , président du tribunal civil séant à R iom , du vingt-cinq du même
mois , les testament et codiciles de la dame R o l l e t , épouse de C hazerat , ensemble
l ’expédition du procès verbal dressé de l’état d 'i ceux, p a rM . Parades, ont été déposés
ès mains de M e. Bonville , notaire à Riom ; lequel acte de dépôt du tout a été enre
gistré à Rio m , le trois brumaire an quatorze, par Poughon, qui a reçu un franc dix
centimes.
.
t
, . t
4
«
\
<
'r
' r
»
�T A B L E A U exp lica tif d a legs u n iversel, institué par M me* de C iia z e r a t en son testament du 26 messidor an 9.
A
ïeul
pa te rn e l
Jean Rollet.
A ïeule
,
,
paternelle
..................................
Dame Vigot.
—
A
ïeule
maternelle,
Jean-Philib. Marcelin. — Dame Gilberlc Gros.
P ère,
M ere,
Jean Rollet.
Jeanne Marcelin.
F
il l e
,
Dame de Ciiazerat,
Testatrice.
Descendons Rollet.
Descendons Gros.
Descendons V igot.
M M ...
M M ...
M M ...
M M ...
M M ...
M M ...
M M ...
M M ...
M M ...
ESTO C.
Aïeul paternel,
ROLLET.
ESTOC.
Forme le 4e estoc non-mentionné au
Aïeule paternelle,
testament, n’ayant possédé aucuns biens. Après la mort do
sa première femme, la dame GHberte Gros, aïeule mater
ESTO C.
Aïeule maternelle,
VIGOT.
nelle do la testatrice, ce sieur Jean-Pliilibcrt Marcelin épousa
GROS.
Domaines de Mirabelle,
Constitution dotale i5,oooliv.
en secondes noces demoiselle N * * * . C’est de ce mariage que
descend lo sieur Mirlavaud , dont le sieur Mazuel se sert du
Domaines d’Entraigues, Joze,
etc. etc.
etc. etc.
nom pour critiquer les testamens et codicilles de la dame de
etc. etc.
Chaierat.
Biens de la Testatrice, à elle propres, par elle ou son père.
Domaine de Saînt-Agoulin.
•------------ de M e n é t r o l, etc. etc.
Meubles et im m eubles, créances.
�T A B L E A U explicatif da nessidor an 9.
A
ïeul
Je
Descendons Rollet.
M M ...
M M ...
M M ...
ESTO C.
A ïeul paternel,
ROLLET.
Domaines de Mirabello,
i, Joze,
etc. etc.
£i
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Testament. Rollet-Chazerat. An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
Chazerat (Madame de)
Description
An account of the resource
Ceci est mon testament olographe. Signé Rollet-Chazerat.
Arbre généalogique.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
Circa An 9
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0514
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53825/BCU_Factums_M0514.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Entraigues (63149)
Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Rights
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Chazerat (Madame de)
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
legs universels
ordre de successions
Successions
testaments
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Text
MÉMOIRE A CONSULTER,
ET CONSULTATION,
PO UR
Les L
universels de M adame DE
CHAZERAT,
é g a t a ir e s
CO NTRE
L e S ie u r M I R L A V A U D .
M adame R ollet, épouse de M . de Chazerat, ci-devant
intendant d’Auvergne, est décédée sans postérité au mois
de septembre 1806.
L e système restrictif de la loi du 17 nivôse an 2 ayant
été modifié par celle du 4 germinal an 8 , qui permetto it
A
�(2 )
à ceux qui n’avoient ni ascendans ni descendans, ni frères
ni sœurs, ni descendans de frères ou de sœurs, de dis
poser des trois quarts de leurs biens, elle crut devoir
profiter de la latitude que lui donnoit cette loi.
Elle fit un testament olographe le 26 messidor an 9.
Après un grand nombre de legs particuliers, dont le dé
tail est superflu, elle lègue l’usufruit de ses biens à son m ari,
E t elle dispose de la propriété en ces termes :
« Quant à Ja propriété de mes biens, mon intention
» étant, autant q u il dépend de moi, de les faire retour» ner ¿1 ceux de mes parens qui descendent des estocs
» dont ils me sont parvenus, je donne et lègue tout ce
» dont il m’est pei'mis de disposer suivant la loi du 4
» germinal an 8, à tous ceux de mes parens de la branche
» de mes aïeul et aïeule paternels, et de celle de mon
» aïeule maternelle, qui seroient en ordre de me suc» céder suivant les règles de la représentation à l’infini,
» telle q u elle avait lieu dans la ci-devant Coutume
» d ’Auvergne, pour etre partagé entre les trois bran» clies, au marc la livre de ce qui m’est p a r v e n u de
» chacune desdites branches, et etre ensuite subdivisé
» dans chacune d’elles, suivant les mêmes règles de la
» rep résen tatio n à l’infini; et néanmoins, je veux et en» tends qu’avant la division et subdivision, il soit pris
» et prélevé sur la masse totale des biens compris au
» présent legs, d’abord le montant de mes legs parti* culiers, et ensuite le sixième du surplus, que je donne
» et lègue au citoyen îarradeche de Gromont fils aîné,
» et au citoyen Sablou - Ducorail aîn é, chacun pour
» m oitié, etc. »
�(
3
)
M me de Chazerat a fait depuis différens codicilles.
Par les deux premiers, des 17 floréal an 10 et 14 messi
dor an 11 , après quelques legs particuliers, ou quel
ques cliangemens à ceux déjà faits, elle persiste au sur
plus dans toutes les dispositions contenues dans son tes
tament.
Et dans le troisième, du ily messidor an 1 1 , postérieur
à la promulgation de la loi du i 3 floréal an i l , sur
les donations et testamens , elle s’exprime en ces termes :
« L a nouvelle loi m’ayant accordé la faculté de dis» poser de la totalité de mes biens, je veux çt entends
» que le legs universel que j’avois fait par le susdit tes» tainent, en faveur de mes parens de l’estoc de mes
» aïeul et aïeule paternels, et de ceux de l’estoc de mon
» aïeule maternelle, de tout ce dont il m’ étoit permis
» de disposer par la loi du 4 germinal an 8, ait son effet
» pour la totalité de mes biens, sauf les divisions et sub» divisions à faire entre mesdits héritiers, de'la manière
» expliquée audit testament, sauf aussi mes legs parti» culiers, et les dispositions par moi faites en faveur
» de mon mari ; à tout quoi il n’est rien déro gé par
» le présent codicille. »
Après le décès de M mo. de Cliazerat, M . de Chazerat
sJcst mis en possession de ses biens, pour en jouir en
qualité d’usufruitier.
Ses dispositions testamentaires ont p a r u pendant long
temps à l’abri de critique.
Ce na été qu’au mois de janvier 1808, qu un cession*
naire de droits litigieux, agissant au nom d un sieur M irlavaud, l’ un des desceudans du second mariage de PhiliA 2
�( 4 )
bert M arcelin, aïeul maternel de M mo de Chazerat, a
cru pouvoir demander la nullité du legs universel de
la propriété de ses biens, et cela sur le fondement que
ce legs universel étoit fait en liaine et au mépris des
nouvelles lois.
Et cette prétendue nullité a été accueillie par le tri
bunal d’arrondissement de R ioin, qui, par son jugement
du 22 juin dernier, sans s’arrêter au testament de M mo de
Chazerat, du 26 messidor an 9, et à son codicille du i/j.
messidor an 1 1 , qui ont été déclarés nuls, quant au legs
universel, a ordonné le partage de ses biens, confor
mément au Gode civil.
Les légataires universels, dépouillés par ce jugement
se proposent d’en interjeter appel.
Ils demandent au conseil s’ils y sont fondés.
L E C O N SE IL SO U SSIG N É , qui a vu et examiné
le testament, les codicilles, le jugement et le mémoire
à consulter,
que le succès de l’appel que se proposent
d ’interjeter les légataires universels de M me de Chazerat
ne peut faire la matière d’un doute raisonnable.
Si on avoit besoin de justifier M mo de Chazerat du re
proche d’avoir fait son testament en lutine (les nouvelles
lois , on diroit qu’elle a déclaré formellement qu’elle entendoit se conformer à la loi du 4 germinal an 8, qui lui
permettoitde disposer des trois quarts de scs biens, tandis
que la Coutume qui les régissoit, ne lui auroit permis do
disposer que du quart p a r testament y
E
st d a v is
�(5)
Que par respect pour cette lo i, et pour les autres lois
nouvelles, elle déclare qu’elle n’entend disposer de ses
biens quautant q u il dépend d'elle ;
Que par déférence pour les nouvelles lois qui ont aboli
la forclusion, elle rappelle à sa succession tous les descendans de ses aïeul et aïeule paternels et de son aïeule ma
ternelle , sans distinction des sexes , des filles forcloses et
de celles qui ne l’étoient pas*,
Qu'elle n’emploie dans son testament et dans tous ses
codicilles d’autre date que celle du calendrier républicain $
Qu’elle emploie les expressions du régime républicain,
en qualifiant de citoyens M M . Farradèche de Gromont
et Sablon-Ducorail, les seuls de ses légataires universels
qui soient désignés par leur nom.
On ajoutex-oit que si quelqu’une des dispositions du
testament de M mo de Cliazerat pouvoit être considéi'ée
comme faite en liaine des nouvelles lois, ce seroit sans
doute celle par laquelle il est dit qu’elle entend qu’il soit
distribué chaque année après son décès 3 o setiers froment
et io setiers seigle aux prêtres et aux religieuses qui sont
demeurés fid èles à l'ancien culte de la religion catho
lique , apostolique, et qui par cette raison ont été privés
de leur traitement ;
Que cependant cette disposition a été form ellem en t ap
prouvée par un déci’et émané de Sa Majesté l’E m p e re u r.
M ais ¿\ quoi bon rechercher les motifs des dispositions
de M me de Cliazerat; il suffit d’examiner ce qu elle a fait
et ce qu’elle a pu faire ?
L ’art. 91G du Gode porte: « A défaut d’ascendant et
�(6 )
» de descendant, les libéralités par actes entre-vifs ou tes» tamentaires pourront épuiser la totalité des biens. »
Il y a deux modes de successibilité en collatérale, ce
lui de la loi, et celui de la volonté de l’homme.
Lorsqu’un individu, qui n’aniascendansnidescendans
meurt cib intestat, la loi règle l’ordre dans lequel ses biens
sont dévolus à ses héritiers.
S’il a manifesté sa volonté par un testament, la loi se taitla volonté du testateur la remplace : (licat testator, et erit
lex.
C’est dans ces deux mots que consiste toute la théorie
de la législation en matière de successions collatérales.
Cependant le jugement que nous examinons fait taire
la volonté de M me de Chazerat, et préfère aux héritiers
de son choix ceux que la loi ne lui donnoit qu’à dé
faut de dispositions de sa part.
Et on croit justifier cette interversion de l’ordre de
transmission des biens, établi par le Code lui-même, en
invoquant 1 article G de ce même Code, ainsi conc.u :
« On ne peut déroger par des conventions particulières
» aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes
» mœurs. »
Ce principe est commenté,.délayé dans de nombreux
considérons , et repelé jusqu a la satiété.
JVlais jamais on n’en fit une plus fausse application.
Un individu agit contre l’ordre public quand ce qu’il
fait est contraire aux maximes fondamentales du gouver
nement, et tend à ébraulcr l’édifice social.
�(
7
)
Il agit contre les bonnes mœurs, quand il offense l’hon
nêteté publique.
Or, qu’importe à l’ordre public et aux bonnes mœurs,
que M me de Chazerat ait disposé de ses biens en faveur
de tels ou tels de ses parens, plutôt qu’en faveur de tels ou
tels autres ?
Qu’on dise, si l’on veu t, qu’elle en a disposé contre le
vœu et contre le texte de la lo i, et qu’on mette à l’écart
les grands mots d’ordre public et de bonnes mœurs, alors
on commencera à s’entendre , et la discussion prendra le
caractère de simplicité qu’elle doit avoir.
M mo de Chazerat a cité dans son testament la ci-dèvant
Coutume d’Auvergne, et cette ci tationannulle, dit-on, ses
dispositions.
Car on lit dans l’article 1390 du C ode, que « les époux
» ne peuvent plus stipuler cl une manière
cile que leur
» association sera réglée par l’une des coutumes, lois ou
» statuts locaux qui regissoient ci-devant les diverses par» ties de l’empire français, et qui sont abrogés par le pré» sent Code. »
On ne se seroit pas attendu h trouver dans ce texte La
nullité des dispositions faites par M me de Chazerat en
faveur des consul tans.
lCnt, parce que cette loi, qui est au titre de la commu
nauté, n’a rien de commun avec les testamens, et surtout
avec tin testament en ligne collatéralle, pour lequel la
loi donne au testateur une latitude sans bornes;
^ Que celte latitude est telle, qu’aux termes de l’ar
ticle 9G7 du Code, on peut disposer, soit sous le titre d’ins
�titution, soit sous le titre de legs, soit sous toute autre
dénomination propre à manifester sa volonté.
2ent, parce qu’il est de principe que les lois prohi
bitives doivent être restreintes au cas qui y est prévu, et
qu’on ne doit pas les étendre d’un cas à un autre, sur
tout d’une matière ordinaire h celle des testamens, où la
Volonté est tout. « Voluntas in testamentis dominatur.
» Tout ce qui diminue la plénitude de la liberté est
»> odieux et détesté par la loi. » M . d’Aguesseau plaidoyer 58.
3ent, parce que la loi de la communauté est du 20 plu
viôse an 12 , et que le testament de M me de Chazerat est
du mois de messidor an g , par conséquent antérieur de
plusieurs années5
Qu’en supposant qu’elle fût applicable aux testamens,
et aux testamens en ligne collatérale, on ne peut raisonna
blement exiger que M me de Chazerat ait dû s’y conformer
avant qu’elle existât.
Car c est une erreur manifeste de dire, comme on le
fait dans les considérans du jugement, que tout ce qui in
téresse la confection du testament, doit se juger d’après
les lois existantes au décès du testateur} tandis qu’il est au
contraire de principe incontestable que la loi qui est en
vigueur au décès du testateur , règle uniquement la
quotité disponible, et que tout ce qui intéressé la confec
tion du testament, ses foimes, scs expressions, et le mode
de disposer, se règle par les lois en vigueur au moment où
il a été fait.
Mais indépendamment de ces premiers m oyens, il
est facile d’écarter l’application de cette loi au testament
de
�(
9
)
de M me de Chazerat, par des moyens encore plus di
rects.
Si on analyse le testament et le codicille d eM made Cliazerat, on y voit qu’elle commence par manifester son in
tention de faire retourner la propriété de ses biens aux
estocs d’où ils lui sont provenus.
Par suite de cette intention qu’elle vient d’exprimer,
elle donne et lègue tout ce dont il lui est permis de dis
poser par la loi du 4 germinal an B.
A qui fait-elle ce don et legs ?
A tous ses parens de la branche de ses aieul et aïeule
paternels, et de son aïeule maternelle.
Elle ne les nomme pas chacun par leur nom, et il est
facile d’en sentir la raison; les morts, les naissances jour
nalières parmi de nombreux héritiers, auroient pu faire
n aître des difficultés, et e n tra v e r l’exécution de ses vo
lontés: elle prélère de les appeler à recueillir ses biens par
la dénomination générale de parens de la branche de ses
aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule maternelle.
Jusque-là il n’y a rien, sans doute, dans ce testament,
non-seulement qui porte atteinte à l’ordre public et aux
bonnes mœurs, mais qui ne soit en parfaite harmonie
avec les lois existantes alors ou intervenues depuis.
Ce qui suit n’est ni plus illégal ni plus repréhensible.
Après avoir dit qu’elle appelle à recueillir sa succession
ses parens de ces trois branches, M me de CJiazeral ajoute,
pour éviter toute équivoque sur la désignation des parens
appelés, que ce sont ceux qui seroieut en ordre de lui
succtder, suivant les l'ègles d e lu re p r é s e n t a tio n à l i n jîn i.
Jusqu ic i} on ne trouve encore rien qui offense l’ordre
B
�(
10
)
public et les bonnes mœurs, rien qui soit contraire aux
lois.
M mô de Chazerat, pouvant choisir parmi tous les êtres
vivans ses légataires universels, pouvoit à plus forte raison
les choisir dans sa famille, et préférer telles ou telles
branches.
Son choix fixé, elle avoit incontestablement le droit
d’appeler h sa succession tous les individus de chaque
branche qui seroient existans au moment de son décèsj et
le seul moyen pour cela étoit de les appeler suivant les
règles de la représentation à l infini.
Quand le testament de M me de Chazerat auroit été pos
térieur au Code, elle auroit été autorisée à disposer ainsi
par le texte formel de l’art. 967, qui lui laissoit le choix de
toutes les dénominations propres à manifester sa volonté.
Mais elle ajoute, en parlant de la représentation à l’in
fini , telle qu elle avoit lieu dans la ci-devant coutume
d’Auvergne.
Si on en croit les considérans du jugement, il semble
que la terre a dû s’entr’ouvrir au moment où M me de Chazerat a transcrit ces lignes fatalès; c’est de sa part un
attentat sans exem ple, contre l’ordre public et les bonnes
mœurs ; c’est un blasphème contre la nouvelle législation,
qui appelle la vengeance des tribunaux, et frappe son
testament d’anatlieme.
On croit voir la montagne en travail.
A u fait. On a déjà vu que c’étoit en l’an 9 que M rae de
Chazerat traçoit ces lignes, long-temps avant la loi sur la
communauté, insérée dans le Code.
Et on voit dans 1& discussion qui a eu lieu au conseil
�(
3
d’État sur cet article, et par les observations de M. Berlier, que dans les temps les plus orageux de la révolution,
il n’a pas été défendu de stipuler selon telle ou telle cou
tume *, malgré
© la défaveur alors attachée à toutes les anciennes institutions.
M . Berlier ajoute que « c’est parce que jusqu’à présent
« il n’y a point eu sur cette matière de nouvelles lois, et
» que, pour défendre de stipuler d’après les anciennes,
» par référé et en termes généraux, il falloit bien établir
» un droit nouveau, etc. »
D ’où il résulte qu'en supposant que cette loi nou
velle , uniquement créée pour la communauté , fut
applicable au testament, même à un testament qui a
pour objet une succession collatérale pour laquelle la
loi donne au testateur une latitude sans bornes, le
rappel d’une ancienne loi dans ce testament seroit sans
conséquence, et il n’en conserveroit pas moins toute sa
validité.
Il en seroit de même dû codicille fait depuis le Code
civil, parce qu’il ne fait que confirmer et étendre à la
fortune entière de M me de ChazcraJt, le legs des trois
quarts fait en vertu de la loi du 4 germinal an 8 , et
cela sans qu’on y aperçoive la moindre trace du rappel des
anciennes lois.
En second lieu, cet article i3go dit seulement que
les époux ne peuvent plus stipuler d ’une manière gé
nérale , que leur association sera réglée par I une des
coutumes, lois ou statuts locaux qui régissoient ci-devant
les diverses parties du territoire français.
B 2
�(
12
)
O r, on voit dans la discussion qui eut lieu au conseil
d’état sur cet article, que « chacun conserve la faculté
« de faire passer dans son contrat de mariage les dispo« sitions de la coutume qu’il prend pour regie, pourvu,
« q u il les énonce. »
A insi, dans le cas même prévu par la loi du règle
ment de la communauté entr’époux, le vice de la con
vention ne consiste pas à rappeler telle ou telle coutume,
mais à la rappeler (Vune manière génerûle, et sans énon
cer la disposition particulière pour laquelle on l’in
voque.
en raisonnant toujours dans la fausse supposition
loi soit applicable à l’espèce, on voit que si
3Mm® de Cliazerat rappelle dans son testament la coutume
d’A uvergne, ce n’est pas (Vune manière générale, et
c o m m e règle unique de sa succession, mais d’une ma
nière particulière , et seulement pour désigner avec
clarté et précision le mode dans lequel elle veut que
ses biens, une fois dévolus aux branches q u ’elle appelle
pour les recueillir, soient divisés entre tous les individus
qui les composent, pour qu’il n’y en ait aucun d’exclu.
Elle prend si p eu , en effet, la coutume pour règle
générale et unique de sa succession, que loin de se con
former à cette coutume, elle s’en éloigne en tous
O r,
q u e cette
points.
La coutume d’Auvergne interdisoit à M me de Cliazerat
la plus légère libéralité en faveur de son mari, et elle
profite avec autant d empiessement que de reconnoissance de la faculté que’ la nouvelle loi lui accorde pour
disposer en sa faveur de J’usufruit universel de ses biens»
�(
)
L a coutume d’Auvergne ne permettent de disposer par
testament que du quart de ses Liens, et elle dispose des
trois quarts.
T Elle fait plus, elle déclare formellement qu’elle fait
cette disposition des trois quarts conform ém ent ci la lo i
du 4 germinal an 8.
Elle prend donc cette loi pour règle de ses disposi
tions, et nullement la coutume d’Auvergne.
■ M me de Chazerat avoit différentes natures de biens.
Des propres anciens, qui lui étoient parvenus de ses
aïeul et aïeule paternels et de son aïeule maternelle;
Des acquêts, des contrats sur l’état et sur particuliers,
et un immense mobilier.
Tous ces acquêts, ces contrats, ce mobilier étoient
dévolus par la coutume d’Auvergne aux parens paternels,
exclusivement à tous autres.
• O r, M mo de Chazerat, au mépris de cette loi, dispose
de tous ses biens au profit de ses parens des trois branches
de ses aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule mater
nelle; elle veut que ces biens soient divisés entre ces
trois branches, an marc la livre de ce qui lui est parvenu
de chacune desdites branches ; ce qui en assuroit la
majeure partie à la branche de l’aïeule maternelle, qui en
éloit formellement exclue par la coutume.
Ainsi tout est dans ce testament en sens contraire du
texte et de l’esprit de la coutume; et loin de la prendre
pour règle de successibilité entre ses héritiers, elle la
fronde ouvertement dans tous les points.
M mo de Chazerat n ’a pris d’aulre règle pour la quotité
de disposer que la loi du l\ germinal an
�( i4 5
Et pour le clioix de ses héritiers, elle n’a cherché d’autre
loi que sa volonté 5 et cette volonté est absolument en
contradiction avec la coutume d ’Auvergne.
La coutume d’Auvergne n’a donc pas été son guide,
sa loi sacrée, l’objet d’une servile adoration, comme le
suppose le jugement.
Mais le sort de sa succession une fois fixé entre ses
parens des trois branches qu’elle a appelées à la recueillir,
elle a cru devoir expliquer que les divisions et subdivisions
s’en feroientsuivant les règles de larepre'sentation à Vinjîni.
C’en étoit assez j elle évitoit par là le détail de tous
les individus qui composoient les trois branches de ses
légataires universels j elle prévenoit d’ailleurs les inconvéniens qui auroient pu résulter des changemens qui
pouvoient arriver dans chaque branche entre son testa
ment et son décès.
Mais elle a cru devoir donner un plus grand déve
loppement à ces expressions, suivant les règles de la re
présentation à Vinfini, et éviter toute équivoque sur ce
mode de représentation, en indiquant celui qui étoit usité
dans la ci-devant Coutume d’Auvergne.
Cette Coutume n’étoit donc rappelée, d’une part, qu’a
vec Vénonciation de l’objet particulier pour lequel on
l’invoquoit, ce qui eût été très-permis, même en contrat
de mariage, et en réglant la communauté entre époux.
D ’autre part, elle n’étoit rappelée que comme une
indication surabondante, superflue si l’on veut, mais q u i,
telle qu’elle fut, n a jamais pu nuire ¿\ 1 objet principal du
testament, à la disposition delà propriété de tous les biens
nux trois branches appelées à les recueillir,
�( i5 )
O r , si la disposition principale est valable en elle-meme,
et indépendamment de l’énonciation surabondante qui
a pu la suivre, les descendans de Philibert M arcelin,
aïeul maternel de M me de Chazerat, se trouvent sans
qualité et sans intérêt à contester la pretendue validité
ou invalidité de cette énonciation secondaire, puisqu’elle
n’a pour objet que le mode du partage entre les individus
'des trois branches, auquel les descendans de Philibert
Marcelin ne peuvent avoir aucune part.
, Ajoutons que la critique de cette énonciation de la
coutume d’Auvergne*, qu’a faite M mede Chazerat dans son
testament, est d’autant plus déplacée, qu’elle écrivoit ce
testament sous l’empire de la loi du 1 7 nivôse, qui admettoit la repi’ésentation à l’in fin i, article 82.
Qu’en admettant le mode de partage de la représen
tation à l’infini dans les divisions et subdivisions entre
les individus des trois branches appelées à recueillir les
biens de M me de Chazerat, on ne peut trouver aucune
différence assignable entre les divisions et subdivisions
à faire conformément à la représentation à l’infini, telle
q u elle avait lieu dans la ci-devant coutume d ’Auvergne,
et la représentation à l’in fin i, telle q u elle avoit lieu
d’après Varticle 82 de la loi du 17 nivôse.
De sorte que ces expressions, de la ci-devant coutume
d Auvergne, o u de la loi du 17 nivôse, étoient absolu
ment synonymes.
^ Ce qui justificroit de plus en plus M m0 de Chazerat,
s il en étoit besoin, du prétendu délit qu’on lui impute,
puisque son testament étant fait en l’an 9 ? sous 1 empire
�( i6 )
delà loi du 17 nivôse, et la confection destestamens, quoi
qu’on en puisse dire , ne pouvant se référer qu’aux lois
existantes à cette époque, on ne pourvoit porter l’humeur
et l’injustice jusqu’à lui faire un crime d’avoir rappelé
une disposition des anciennes lo is, qui étoit absolument
conforme à celles de la loi nouvelle, qui étoit alors en
pleine vigueur.
Les autres considérans du jugement dont se plaignent
les consultans , ne sont fondés que sur des considérations
vagues, telles que les inconvéniens qui peuvent naître
de l’exécution du testament de M me de Chazerat, à raison
des procès auxquels il peut donner lieu.
On parcourt avec affectation la longue nomenclature
de toutes les questions qu’a créées, en matière de succes
sions, la subtilité des praticiens et la funeste abondance
des commentateurs, depuis la rédaction de la coutume
d’Auvergne, et on les trouve toutes dans le testament de
M me de Chazerat.
Cependant rien n’est plus simple, d’une exécution p lu s
facile, et moins susceptible de contestation que l’opéra
tion qu’elle prescrit.
Elle possède des bienspropres, provenus de trois estocs:
de son grand-père et de sa grand’mère paternels, et de sa
grand’mère maternelle.
Ces biens sont constatés par des partages de famille.
Ces actes sont consignés dans l’inventaire fait après le
décès de M we de Chazerat. Ils sont d’ailleurs dans les
mains des descendans des trois bx*anches, dont les auteurs
en ont fait le partage avec ceux de M m0 de Chazerat.
Ainsi,
�( *7 )
A in si, rien n’est si facile que de trouver ces biens, con
sistant tous en fonds de terre , qui sont sous les y e u x , et
pour ainsi dire, sous la main des légataires appelés à les
recueillir.
Il n’y a pas plus de difficulté sur la maniéré de distri
buer ses autres biens, quels qu’ils soient, entre les trois*
branches do ses héritiers.
Elle veut que la distribution s’en fasse au marc la livre
des propres, c’est-à-dire, par exemple, que si M ms de
Chazerat a laissé pour 600,000 £ de propres, dont 3oo,000 f.
de l’estoc de l’aïeule maternelle, 200,000 fr. de l’estoc de
l’aïeul paternel, et 100,000 fr. de l’aïeule paternelle, les
parens de l’estoc de l’aïeule maternelle prendront la moi
tié de ses autres biens} les parens de l’estoc de l’aïeul pa
ternel un tiers, et les parens de l’aïeule maternelle un
sixième.
Quant à la division secondaire à faire dans chaque
branche, suivant les règles de la représentation à l’infini,
il est impossible d’y trouver le germe du plus léger procès,
puisqu’elle dépend d’un simple tableau généalogique,
basé sur des actes de naissance et de décès, qui sont des
faits matériels sur lesquels il est diilicile à la chicane la
plus rallinée de trouver prise.
On ne voit pas d’ailleurs où on a pris qu’il faille an
nuliez- un testament, parce qu’un praticien avide ou un
ncquéreur de droits litigieux peut y trouver des prétextes
de faire clés procès et de troubler le repos des héritiers
légitimes appelés par la testatrice à recueillir sa succession.
C est sans doute une sollicitude très-louable que celle de
prévenir et d’éviter des procès dans les familles. Mais
G
�< i8 )
faut-il priver les iégataires universels de M mo de Chazerat
de 1,200,000 fr. de propriétés, parce qu’il est dans l’ordre
des possibles qu’il survienne un jour quelque contestation
entre les intéressés pour en faire le partage?
C’est donc en tous points que ce jugement paroît sortir
de la sphère ordinaire des .erreurs qui sont le partage de
l’humaniité
Cependant cette erreur semble accréditée par l’opi
nion d’un auteur, dont l’ouvrage a paru à la veille de
l’audience, et n’a pas eu sans doute une medLocrc iniluenec
sur la détermination duutribunal fi).
On lit dans cet ouvrage ce qui suit, lom. 3 , pag. i 35 :
« Il est bien permis de disposer à son gré de scs b ens,
» d’après la faculté qu’en donne la loi; mais il ne l’est pas
» de créer un ordre de succéder autre que celui qu’elle
w établit. »
S il est permis de disposer à son gré de ses biens, ce ne
peut être que pour changer l’ordre de succéder établi par
la loi.
Si la loi donne cette faculté de disposer à son gré, ce ne
peut être que pour faire cesser son empire.
Si on ne peut, en effet, créer en collatérale un ordre
de su ccé d e r autre que celui que la loi établit, il faut retran
cher du Code le titre entier des Donations et des Testamens, puisque les donations et les testamens n’ont d'autre
but que d’intervertir l’ ordre établi par,la loi pour la trans*
(O Traitd des Donations ct T estam ens, par J. Grcnier, (du Puj-dc Dómc),
anden jurisconsulto, mombro du Tribunat ct do la Legión d’houncur.
�.( o iÿ )
mission des biens, et y substituer la volonté dû l’homme.
ydlifjiumdo bonus domiitcil Uomcrus.
L ’auteur cite ensuite l’art. 6 du Code, qui interdit
toutes conventions contraires ù l’ordre public et aux
bonnes ' mœurs.
r
Abus étrange des mots et des choses, auquel on a ré
pondu précédemment, et sur lequel il est inutile de
revenii*.
L a citation que fait cet auteur de l’art. 1389 n’est pas
plus heureuse.
On y lit que « Les époux 11e peuvent faire aucune
* convention ou renonciation dont l’objet seroit de chan» ger l’ordre légal des successions, soit par rapport à eux» mêmes dans la succession de leurs enfans ou descen* dans, soit par rapport à leurs enfans entr’eu x, sans pré» judice des donations entre-vifs ou testamentaires, qui
« pourront avoir lieu selon les formes et dans les cas dé» terminés par le présent Code. »
Outre que cet article n’a trait qu’à la transmission des
biens en ligne directe, et à l’interdiction qu’il fait aux
époux de donner dans leur contrat de mariage des lois
particulières à leur postérité;
Qu’un pareil texte ne peut avoir rien de commun avec
l’espèce qui se présente , où il s’agit d’u n e succession
collatérale dont la transmission dépend u n iq u e m en t de
la volonté du testateur, q u i a pu choisir scs héritiers nonseulement dans sa famille, mais hors de sa famille, et
panni tous les êtres vivans;
Cet article porte sa réponse îi l’objection dans les
expressions qui le terminent : « Sans préjudice des doua-
�(20)
» lions et testamens qui pourront avoir lieu selon les
» formes , et dans les cas déterminés par le présent
» Code. »
E n fin , on oppose encore aux consultans l’article der
nier du Code, qui porte que, « à compter du jour où ces
» lois sont exécutoires , les lois romaines , les ordon» nances, les.coutumes générales ou locales, les statuts,
» les règlemens cessent d’avoir force de loi générale ou
» particulière dans les matières qui sont 1 effet desdites
» lois co m po san t le présent Code. »
Mais en p ro n o n ça n t que les lois romaines, les ordon
nances et les coutumes cessent d’avoir force de loi, on a
si peu entendu proscrire la citation de ces anciennes lois,
et frapper d’anathème tous les actes dans lesquels on a pu
les rappeler, ou même, si l’on veut, les prendre pour
règle_de ses dispositions ou de ses conventions dans ce qui
n’est pas formellement prohibé par le Code, que le droit
romain est encore l’objet principal des cours de législa
tion ) que le Gouvernement a établi pour l’enseigner des
écoles publiques dans toutes les parties de l’Em pire, et
que nul lie peut avoir entrée au barreau, ou être admis à
une place de-magistrature, qu’autant qu’il est muni de
diplômes authentiques, qui constatent qu’il en a fait une
longue étude, et qu’il y a acquis de vastes conaoissances.
On terminera cette discussion, qui n’a quelqu’importauce que parce qu’elle est d un grand intérêt, par ob
server que si M me dé Chazérat a traité les descendans
du second mariage de Philibert M arcelin, son aieul ma»
�ternel, moins avantageusement que les descendants de
son aïeul et aïeule paternels et de son aïeule maternelle,
c’est sans doute parce qu’il ne lui étoit parvenu aucuns
biens de cet estoc, et que dans ses principes elle ne leur
devoit rien, au lieu qu’elle se r egardoit comme redevable
de sa fortune aux parens des estocs dont lui étoient par
venus ses propres, parce que c’étoit avec ces propres que
s’étoit soutenue et enrichie sa maison.
A u surplus, elle a pu avoir d’autres motifs dont elle
ne devoit compte à personne, pas même à la loi, qui lui
laissoit un empire absolu sur sa fortune, et lui permettoit
de la transmettre à son gré. D icat testator, et erit lex.
D
élibéré
à Clermont-Ferrand, le 29 juillet 1808.
B O IR O T , B E R G I E R , D A R T I S - M A R C I L L A T ,
F A V A R D , M A U G U E , JE U D I-D U M O N T E IX ,
P A G E S , (de R io m ), A L L E M A N T .
C L E R M O N ]T , «lo l'imprimerie c I o L a n d r i o t , Imprimeur do la Préfecture
et Libraire, rue Saiut-Gcncs, maison ci-devant Potière.
�
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Factums Marie
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Description
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Text
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Title
A name given to the resource
[Factum. Farradèche de Gromont et Sablon-Ducorail. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Bergier
Dartis-Marcillat
Favard
Maugue
Jeudy-Dumonteix
Pagès
Allemand
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
Chazerat (Madame de)
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter, et consultation pour les légataires universels de Madame de Chazerat, contre le Sieur Mirlavaud.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1801-1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0513
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
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Entraigues (63149)
Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Rights
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Domaine public
Chazerat (Madame de)
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
legs universels
ordre de successions
Successions
testaments
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Text
L E C O N S E Î L SO U SS IG N É , qui a v u le testament
et les codiciles dé m ad am eR olet de-Chazerat, ensemble
un jugement du tribunal de première instance, séant à
R io m , du 22 juin 1808, 'et deux consultations délibé
rées à Clermont-Ferrand
et à Paris, l es 29 juillet e t.8
novem bre 1808, en faveur des légataires universels de
madame de Chazerat e t u n m ém oire à consulter:
Répondant à la question proposée dans le m é m o ire ,
et qui fait l’objet des deux consultations ci-dessus énon
cées, et qui est de savoir si;l' o n doit consid érer comme
v alable le legs universel, fait par m a d a m e de C h a zerat,
dans son testament olographe du 26 messidor an 9, au
p r ofit de ceux de ses parens qui s e r a i e n t en ordre de lui
succéder, suivant les règles de la rep résen tation a l' inf i n i telle qu’elle avait l i e u dans la ci-devant coutume
d A u vergn e; e t si l’on est bien fondé a-espérer que le
�jugement du tribunal civil de R io m , qui a déclaré nul
ce legs universel, sera confirmé sur l’appel qui a été
interjeté de ce jugem ent par les légataires universels;
.*
E
s t im e
*
, que le legs universel fait par madame de
C h azerat, ayant réellement pour objet de faire revivre
une distinction pro h ibée, sur la nature et l’origine des
bien s, et de créer un ordre de succéder, suivant les règles
d’une coutume abolie, sa disposition qui est contraire
aux lois et à l’ordre public est nulle; et que le jugement
du tribunal de R io m , qui en a prononcé la nullité, ayant
fait une juste application des véritables principes du
droit, ainsi que des règles particulières établies p a r le
code N apoléon,.le sieur Mirlavaud n’a rien à redouter
de l ’appel qui a été interjeté de ce jugement par les
légataires universels.
r
Celte décision est facile à justifier par les plus sures
maximes du droit, et par des principes qui n’ont jamais
souffert aucune atteinte. M ais, pour exposer ces prin
cipes avec plus d’ordre, la discussion sera divisée en
deux paragraphes.
On fera voir dans leiprem ier, que nul ne peut rap
peler l ’ancienne distinction sur la nature des biens
propres paternels ou maternels,, ou acquêts, ni créer
un ordre de succéder, autre que celui en vigueur lors
de l ’ouverture de lo succession. Il sera démontré dans
le second que le testament de madame de Chazerat est
en opposition avec ces principes, ou, en d’nuti es termes*
que madamç de Chazerat a ordonné la distinction do
�( 3
)
ses biens en propres, paternels ou m aternels, et eu
acquêts, et qu’elle a voulu cré e r, et qu’elle a créé en
effet un ordre de succéder, autre que celui qui était
en vigueur à l'époque de son décès.
§ . I - er
y
N u l ne peut créer un ordre de succéder, autre que celui
en vigueur Lors dz Couverture de La succession.
L e C o n s e i l , avant d’entrer en matière sur ce pre
mier paragraphe, croit devoir faire quelques réflexions
sur certains principes qui sont avancés dans la consul
tation de Clerm ont, avec une confiance apparente qui
pourrait en imposer.
>
■
»
Prem ièrem ent, de ce que l ’art. 916 du code N apo
léon dispose qu’à défaut d ’ascendans et de descendansj
les libéralités par actes entre-vifs ou testamentaires pour
ront épuiser la totalité des biens du' disposant, les au
teurs de la consultation de Clermont en ont' conclu
qu’on pouvait appliquer à la testatrice, dans toute sa
force, cette maxime du droit rom ain, dicat testator,
et erit Lex. E t selon e u x , c’est dans ces deux mois que
consiste toute la théorie ^de la législation, en matière
de successions collatérales.
Eu premier lieu, cette règle n’a jamais été admise
qu avec la condition que la volonté du testateur serait
conforme à la l o i , et qu’il n ’aurait voulu que ce que
la loi lui permettait. C ’est ce qu'on expliquera plus
particulièrement dans la suite.
2
�C4 )
En second lieu, cette rè g le , dicat testator, eterlt leocy
est plus propre au droit romain qu’à notre législation,
ainsi qu'à l’ancienne législation coutumière.
Dans le droit romain , on ne recourait à la succes
sion ab intestat, que lorsqu'il n’y avait pas de testa
ment , leg. i * f f . si labdL testament, null, ex tab. ; le
pouvoir du testateur y était sans bornes. C ’était un des
p rin c ip a u x chefs de la célèbre loi des douze tab les,
paterfatnilias u ti legassit super pecunia tutela ve suœ
reí, ita j u s estoi et Ju stin ien ., dans sa novelle 22, chap. 2 ,
n’a fait que ra p p e le r ce droit ancien, lorsqu’il a pro
clamé la m a x im e invoquée ddns ld consultation de
C le r m o n t , et dont le texte est disponat unusquiscjut
super su cs, et sit Leoc ejus voluntas. Cette puissance
du testateur tenait à des^réglemens politiques, et à des
usages qui nous, sont étrangers.
C ’était une règle incontestable du droit coutum ier,
qu’il n’y avait d’autres héritiers que les proches, que
la coutume appelait à la succession. L'héritier légitime
était fait héritier au moment de la mort de celui à
qui il succédait, quoique môme cette mort lui fût incon
nue. C ’est cette règle que les coutumes exprimaient
par ces termes : L e mort saisit le v i f son prochain,
lignager hübile
,
cl
lu i succéder.
E t c’est d’après cette 'différence que l’auteur du
nouveau traité des donations et testamens (M .Grenier),
dit avec justesse, tom. 3 , p. 240 ; «dansle droit romain,
« la volonté de l'homme faisait les héritiers; la liberté
-
* de disposer était sans bornes....... Dans les coutumes
�.
(
5
}
« de F railce, au contraire, c’était la loi qui faisait les
« héritiers, et non la volonté de l’homme. Les dispo« sitions testamentaires éfaient réduites à la nature de
« legSj'^arce que les testamens étaient assimilés aux
« codiciles. Les héritiers du sang étaient saisis par la l o i ,
«■et ceux qui a v a ie n t pour eux des libéralités testamen«■taires étaient obligés de leur en demander la déli« vrance
O r, tels sont les principes du code N apoléon, ainsi
que l ’observe le mêm e auteur. Cela résulte, i.° de ce
que le code commence par traiter des successions lé
gitimes avant de régler les successions testamentaires;
2.0 de ce que les héritiers légitimes ont la saisine légale
(code Nap. art. 7 2 4 ); 3 .° de ce q u e , lorsqu’il y a des
héritiers auxquels un droit de réserve est accordé, ces
héritiers ont la saisine légale^ et le légataire universel
est obligé de leur demander la délivrance des biens
compris dans le testament (art. 1004), et à défaut d’hé
ritiers h réserve, et de légataire universel, celui qui a
en sa faveur une disposition à titre universel, est obligé
de demander la délivrance des biens qui en sont l ’objet,
aux héritiers légitimes (art. 10 1 1).
Il s’en faut bien que ces observations soient oiseuses.
Elles conduisent ¿1 la conséquence certaine que lorsque,
sur un testament, il s’élève des difficultés, dans le doute
Tneme, la balance doit pencher en faveur de 1 héritier
du san g, contre l’héritier testamentaire ou légataire,
et il n y a rien de plus vrai que ce que disait le judi
cieux D o m a t , dans une dissertation, en s’expliquant
�.
(
6
}
même d ’après les principes du droit romain, L o is ci
viles, 2.e partie, lii>. i.'% préface, §• 3 , à LaJ in : «Dans
« les doutes où la faveur de l’ une ou l ’autre de ces
« deux sortes d’héritiers (testamentaires ou^du ¡sang)
«■peut être considérée, on doit décider pourjcelui du
« sang. »
Secondem ent, 011 a avancé dans la consultation de
Clerm ont, pag. 8, «qu’il est de principe incontestable
« que la loi qui est en vigueur au décès du testateur,
«• règle uniquement la quotité disponible, et que tout
« ce qui intéresse la confection du testam ent, ses
«• form es, ses expressions, et 1Q'mode de disposer, se
<r règle par les lois en vigueur au moment ou il a été
« fait
On accorde sans difficulté que tout ce qui concerne
les formalités extérieures du testam ent, est réglé par
la loi observée au moment où il est fait; mais pour les
conditions et le mode de la disposition, elles se rè
glent par les lois qui régissent la disposition elle-même,
c'est-à-dire, p arla loi en vigueur au moment du décès:
toute proposition contraire est une erreur.
L e mode de disposition, ainsi que les conditions im
posées à la disposition, n’ont aucun rapport avec les
formalités de l’a c t e , pour lesquelles on ne s u it , à la
vé rité ,
d ’autres
règles que celles observées lors du tes
tament. Les formalités n ’ont trait qu’à la forme exté
rieure de l’a c t e ;le mode et la condition font partie de
la disposition, et lui sont inhérentes. Il n’existe aucune
raison de soustraire le mode et la condition de la dis-
�position à l’empire de la loi qui régit la succession. C e
principe évident a au surplus été consacré par plusieurs
arrêts.
Quant à la condiiion, on peut citer un arrêt de la
Cour de cassation du 2,3 messidor an 9 , qui est rap
porté-par Fauteur qu’on ¿1 déjà c i t é , tom. 3 , n.° 534.
L a question était de savoir si le rapport d’ une dona
tion , lorsqu’il n’y en avait pas de dispense, devait avoir
lie u , ayant été faite à un successible'sous la loi de 1789,
dans la coutume de Nivernais, où le rapport n avait
point lieu dev droit entre les collatéraux, et la succes
sion du donateur s’étant ouverte sous l’empire de la
loi du 17 nivôse an 2.
On disait, pour affranchir le donataire de la néces
sité du rap p o rt, que la loi qui régissait la donation,
lorsqu elle avait été faite, ne la soumettait pas au rap->
port dans le cas ou le donataire viendrait à la succes
sion du donateur ; que c ’ était là une condition im
posée seulement par la loi qui gouvernait la succession.
. A quoi on répondait, de la part des héritiers, que
le droit de succéder était sans contredit su b o rd o n n é à
la loi qui règle la succession lors de son o u v e r t u r e ; et
qu’il en était de m êm e des conditions sous lesquelles
on succédait.
Sur celte question, le tribunal civil de la Nièvre avait
ordonné le rapport; mais sur l'a p p e l, le tribunal civil
de 1 Y on n e ayant jugé différemment, le pourvoi en
cassation fut admis contre son jugement.
L arrêt de la Cour de cassation fut fondé sur le prin-
�( 3 )
cipe que tout ce qui concerne, la succession,'n’existe'
qu’en vertu de la loi qui règle lorsqu’elle s’o u v r e , et;
sur ce que l ’article 8 de la loi du 17 nivôse ne permettait,
de succéder qu’à la charge du rapport des donations
anciennes. L ’auteur qui rapporte cet arrêt, remarqué'
avec raison qu’il es t indifférent que la succession s’ouvre
sous l’empire du code N apoléon, le principe étant le
mêm e que celui de la loi du 17 nivôse. On pourrait
citer plusieurs arrêts de différentes Cours souveraines/
qui ont consacré le même principe. Il faut donc tenir
pour une maxime in c o n te s ta b le , que la condition im
posée à une disposition testamentaire, se règle par là
loi du décès du testateur.
.
.
Quant au mode de la disposition, il est également
soumis à la loi existante à l’époque du décès ; c’est un
des points jugés par l'arrêt célèbre, rendu par la Cour
de cassation, le 18ja n v ier 180 7, dans l ’affaire des frères
Rayet. Dans l’espèce de cet arrêt, la charge imposée
par le testateur.à son héritier, de rendre l’entière héré
dité à l’aîné de.ses enfans milles, èt à défaut de milles,
à l’aînée de ses filles, était valable, et autorisée par les
lois au mois de j u in 17 8 7 , époque du testament ; mais
parce que le mode de la disposition était prohibé par
l ’art. 896 du code Napoléon, en vigueur lors du décès,
la disposition principale, indépendamment de la subs
titution, a été déclarée nulle par un arrêt de la Cour
d’appel d’A g e n , du 3 o avril 1806; et J e a n - P ie r r e
R ayet s’étant pourvu en cassation contre cet arrêt, son
pourvoi a été rejeté par la section c iv ile , conform é
ment
�( 9 )
ment aux conclusions de M.' le Procureur - général
Merlin.
>
1
Les explications dans lesquelles on vient d entrer,
ont pour objet de faire disparaître, sans îe to u r , les
sophismes dont les légataires se sont aidés dans la dis-’
cussion, et de fixer d’une manière positive les points
de législation qui tiennent a la question.
. On a opposé au consultant une fin de non-recevoir,
sur le mérite .d e laquelle le conseil doit s’expliquer
avant de passer à la discussion du fond. Cette fin de
non-recevoir est tirée d’un prétendu défaut d intérêt
et de qualité dans la personne du consultant.
L a disposition principale du testament de madame
de Chazerat, relative au legs universel fait à ses parens,
est valable en elle-m êm e, dit-on, et indépendamment
de l’énonciation, su rab o n d an te qui a pu la suivre. I<es
descendans de Philibert M arcelin, aïeul maternel de
madame de Chazerat ( l e sieur Mirlavaud est un de
ces descendans), se trouvent sans qualité et sansûntérêt
à constater la prétendue validité ou invalidité de cette
énonciation secondaire, puisqu’elle n ’a pour objet que
le mode du partage entre les individus des trois bran
ches , auquel les descendans de Philibert M arcelin ne
peuvent avoir aucune part ( i . re consultation, pag> I ^’)*
L e même raisonnement est reproduit, sous une autre
forme, dans la seconde consultation (pag* i 5 -)*
L a plus légère attention fait connaître 1 illusion de
cette fin de non-recevoir; la nullité reprochée a la dis
position de madame de Chazerat, est une nullité prin-
3
�( ÏO )
cipale et absolue qui vicie le legs universel dans son
essence ; pour être recevable à la proposer, il suffit
d’avoir un intérêt à la faire prononcer. O r, on ne peut
nier que le sieur Mirlavaud ait un véritable intérêt à
faire déclarer nul le legs universel fait par madame de
Chazerat; car si ce legs universel est annuité , la suc
cession de madame de Chazerat étant partagée suivant
les règles introduites par le code Napoléon, sera d ivisée -en deux parts égales; l ’une pour les païens de la
ligne paternelle, l’autre pour les parens de la ligne ma
ternelle (art. 7 3 3 ) ; et le sieur Mirlavaud sera appelé
à recueillir une portion dans la part attribuée aux pa
rens de la ligne maternelle de la testatrice. Il a donc
intérêt et qualité pour demander lai nullité des dispo
sitions faites par madame de Chazerat, et la fin de
n o n - recevoir jqu’on, l u i. oppose est évidemment mal
fondée. ;
,
.
* Ce que l’o n vient de dire par rapport au 'sieur M ir
lavaud, s’applique également h ceux des autres héri
tiers, à l’égard desquels le jugement n’est pas contra
dictoire. Qu’après rinfirmdtion de ce jugem en t, pour
en revenir aux .règles dii cbde: N apoléon, certains hé
ritiers ou légataires universels, veuillent superstitieuse
ment exécuter les dispositions de madame de C ha
zerat , et qu ’ils veuillent venir à la succession, selon les
principes de la coutume d’A u vergn e, on ne peut sans
doute leur contester cette faculté ; mais ils ne peuvent
l’exercer qu’en ce qui concerne leurs portions hérédi
taires , et ce c o n se n te m e n t ne peut lie r, en aucune
�( iO
manière, ceux des héritiers de droit, a qui la loi con
fère le pouvoir d ’attaquer, par voie de nullité, les dis
positions testamentaires de madame de Chazeiat.
Après avoir ainsi relevé les erreurs, que la moindre
attention fait rem arquer, dans les consultations qui
sont mises sous les yeu x du conseil, et après avoii dé
truit la fin de n o n - r e c e v o i r , opposée au sieur M irlava u d , le conseil v a passer à la démonstration du grand
principe de droit qu’il a annoncé, savoir , que nul ne
peut creçr un ordre.de succéder autre que celui en
vigueur lors du décès.
Cette vérité frappe d ’abord par sa seule évidence;
car l’ordre de succéder é ta n t de droit, public, il n est
pas au pouvoir des particuliers d’en établir un autre
qu e celui q u e les lois o n t institué. Il est bien permis,
dans le cas ou on n ’a ni ascendans, ni, descendansA de
tester de là totalité de ses b ien s>c’est-à-dire, d’en faire
des libéralités en faveur dë.personnes certaines et dé
terminées, au préjudice de stes héritiers légitimes; mais
il n’appartient qü’à la loi. d’établir un ordre de succes, sion ab intestat. Quelqu’étendue que soit, d a n s ce cas,
la puissance du testateur, on est obligé de re c o n n a ître
que celle de la lo ivlui est supérieure.
’ Si la volonté, du testateur est o b s e r v é e , c est parce
que la loi le veut ainsi; c’est parce qu’elle lui donne le
pouvoir qu’il exercé : par c o n sé q u e n t 1 empire qu a la
volonté du testateur, n’est' pas un empire absolu , puisqu il est dépendant de la loi, et qu*il releve d elle.
Pour confirmer cette décision par 1 autorité du droit
4
�( 12 )
romain lui-m êm e, dont on a invoqué les principes dans
la consultation de Clerm ont, on fera remarquer que
les lois ne permettent pas de déroger au droit public
par des conventions particulières. Privatorum p a ctis}
J u s publicum m utari non potest. Leg. 38
D e p a ct.j
que c’est par cette autorité que la loi s’est réservée,
que les sages empereurs Diocletian et M axim ian, dans
la loi 1 3 , cod. de testament. , décident qu’il est bien
permis à chacun de tester comme il veut de ses biens,
et d’imposer telles conditions que bon lui semble; mais
pourtant qu’il n ’est pas permis, ni de changer la forme
des testam en s, ni de déroger au droit public; que
c ’est par la mêm e raison qu’en la loi 5 , §.
ff. D e
adm inist. et pericul. tutor. , un testateur ayant ordonné
que les tuteurs qu’il avait donnés à ses enfans ne
seraient point com ptables, le .jurisconsulte Julien ré
sout qu’ils ne laissent pas d ’être obligés de rendre
compte de leur administration, parce( q u e , dit ce cé
lèbre jurisconsulte : Nemo J u s publicum remittere potest
fiujusm odi cautionibus, nec m utare form am antiqui
té s constitutam. On pourrait citer un grand nombre
d’autres lois qui renferment la même règle de droit:
P lu s potest /us publicum quanti privata conventio. V id .
C u ja s , a d quœst. papîn. , lib. a , a d leg. 38 }Jf. D e pact.
principalement sur les dispositions de ces lois
C
’ e s t
que se fondent ffen ry s, et les auieurs qu’il cite ( i) , pour
(i) Vasquins , de successionum creatione , lib. i , mimer.
5
3,
et sequent.
Crave.Ua., consil. 1 7 4 et consit. 9 7 5 . Cavaruvias, de testibus,
cap. 1. Surdus, decisio 3o.
�(i3)
décider que le testateur ne peut pas défendre à son
héritier d’accepter la succession par bénéfice d ’inven
taire ( H e n r y s , liv. 5 , chap. 4 , quest. 3 o.). E t il.rap
porte un arrêt du parlement de Paris, du 7ju ille t 1625,
qui l’a ainsi jugé sur les conclusions de l ’avocat-général
Bignon ; ces conclusions sont remarquables par leur
énergie : te Ouï Bignon, pour le procureur-général du
« ro i, qui a dit que la clause apposée au testament dudit
« d é fu n t étant contraire au, droit, est nulle».
Si la défense de'faire usage du bénéfice d’inventaire
est contraire au droit public, que doit-on décider d’une
disposition qui établit un ordre particulier de succession
ab intestat?
>
, D o m a t, en expliquant les règles qui veulent que le
testateur ne puisse empêcher par,son testament que
ses dispositions ne soient sujettes aux lois, ni rien or
donner qui y soit contraire, dit ; «Ainsi un testateur
* ne peut défendre à son héritier de se déclarer h é « ritier bénéficiaire (L ois civiles, liv. 3 , titre i. er, sec
tion 7 , n.° 24.).
Furgole, dans son traité des testamens (chap. 7, n.° 3),
s expliquant sur la question de savoir si le testateur
peut déroger à la lo i, et si sa puissance doit être con
sidérée com me plus forte que celle de la loi, après avoir
cité les textes des lois romaines qui traitent du pouvoir
des testateurs, ajoute : « Mais on ne peut pas induire
T 4 ? ces textes, ni d’aucun autre,.que la volonté du
" ^ t a t e u r doive prévaloir sur la puissance de la loi.
« La loi 2 3 , cod. D e légat., dit nettement le contraire,
�( H )
r en ce qu’elle exige que la volonté du testateur soif
* légitime , quœ légitima est, c'est-à-dire, conforme
« à l’esprit de la lo i, ou que du moins la loi ne rétc prouve p a s , afin qu’elle puisse dominer et être
« exécutée ».
L a n o v e lle , chap. 2, le dit encore d'une manière plus
expresse : «Siquodprœ cipitur legitimum s it, dut s i’non
« illu d aliqua lexprohibeat». Et la novelle 2 2 , cliap. 2,
qui veut qu’on considère com m e une loi la volonté
du testateur, y ajoute cette condition : «Pourvu qu’il
« dispose d ’une manière qui ne soit pas contraire aux
« lois; disponat ut dignum est -»: et cela est ordonné
de même par les lois 7 et
D e condit. instit. , et
par la loi 1 1 2 , §. 3 ¡J f. D e légat. , 1 °. C e dernier texte
dit : « S i quis scripserit fie r i testamento quod conlrà
«■j u s est vel borios mores, non valet; veluti si quis script
« serit contra legem, aliquid vel contra edictum prœ« toris, vel etiam turpe aliquid».
Ces sages dispositions des lois romaines ont été con
firmées par les lois générales et particulières dont ce
compose le code Napoléon ; l’article 6 pose le principe
général «qu’on ne peut déroger par des conventions
» particulières, aux lois qui intéressent l’ordre public
a et les bonnes mœurs*. Cet article prononce implici
tement la nullité de toute disposilion testamentaire 'y
par laquelle le testateur aurait dérogé à des lois d’ordre
public ; c ’est par une conséquence du même prîncipë
que les conditions contraires aux lois sont réputées rioiï
écritesidans les testamens ( Cod. N ap ., art 900. ).
’ s
�( i5 )
Il ne reste plus pour faire une juste application de
ces principes généraux et particuliers, qu'à déterminer
ce qu’il faut entendre par une disposition testamentaire,
qui déroge à des lois d’ordre public, et par une condi
tion contraire aux lois.
O r , il est incontestable q u e , créer un ordre de
su ccéd er, différent de celui établi par la loi en vigueur
à l’époque du décès, c ’est non-seulement tout à la fois
déroger aux lois d’ordre public, qui prescrivent l’uni
formité dans le mode de distribution des successions
ab intestat - et imposer une condition contraire au
vœu d'uniformité de législation manifesté par le légis
la te u r, mais encore, que c ’est excéder le pouvoir du
testateur-; que c ’est vouloir faire dans un testament,
ce qui ne peut se faire que par une loi; que c ’est usur
per le pouvoir du législateur.
Ces considérations sont si puissantes, et il est si vrai
que l ’ordre légal des successions est de droit p u b lic,
qu il est formellement défendu de faire , m êm e dans
les contrats de mariage, aucune stipulation qui tende
à le changer; cependant il a loujours été de prin
cipe universel, dans la jurisprudence française , que
les-conirats de mariage sont susceptibles de toutes les
stipulations qu'il plaît aux parties de former, pourvu
que ces stipulations ne contiennent rien de contraire
aux lois et aux bonnes mœurs (co d e Napoléon, art.
1 ^®7 )î e t le code Napoléon donne pour exemple d’une
sti
pulation contraire aux lois, celle dont l’objél serait
de changer l’ordre légul des successions, soit par rap-
�C 16 )
port aux époux eux-m êm es, dans la succession de leurs
enfans ou descendans, soit par rapport à leurs enfans
entr’eux (art. 1889).
C ’est encore une stipulation contraire aux lois, et
par conséquent interdite mêm e aux époux, dans leur
contrat de mariage, que celle par laquelle il serait con
venu que leur association sera réglée par l ’une des cou
tum es, lois ou statuts locaux qui régissaient ci-devant
les diverses parties du territoire français, et qui sont
abrogés par le code Napoléon (art, 13 9 1).
-t
Celte p ro h ib itio n des stipulations qui auraient pour
objet de c h a n g e r l’ordre légal des successions, ou qui
te n d ra ie n t à faire revivre 1 une des coutumes abrogées,
résulte suffisamment du principe g< néral exprimé dans
l ’article 6 , et si le législateur a jugé nécessaire de décla
rer expressément, et en termes formels, la nullité de
pareilles stipulations, on ne peut attribuer cette mesure
qu’à sa volonté ferme que l’ordre légal des successions,
qui est de droit public, ne pût être changé p a r aucune
stipulation, et que les coutumes abrogées ne fussent plus
la règle des conventions matrimoniales, ou des succes
sions.
Les législateurs du code Napoléon furent frappés dé
cette id ée, que les contrais de mariage ayant constam
ment joui de la plus grande faveur dans notre juris
prudence, qui en protégeait toutes les stipulations qui
n’étaient pas contraires à 1 ordre p u b lic, quelques per
sonnes, trop prévenues en faveur des coutumes abro
gées, pourraient se faire illusion, au point de ne point
voir
�( I? )
voir une dérogation à l’ordre p u b lic, dans des stipu
lations entre é|50u x , j j u i Je.ndraient à perpétuer l’exis
tence d’une législation abolie. Les dispositions des art.
1389 et 1390 n’ont d’autre but que de prévenir ceux
que leur affection, pour les coutumes_abrpgées, entraî
nerait à eu faire la règle de leur succession, ou de leurs
conventions matrimoniales; qu’il n’ est pas en leur puis
sance de faire dominer leurs préjugés ou leurs habitudes
sur des lois qui sont d’ordre public, et qu’ils ne pourront
pas invoquer, pour faire maintenir de semblables stipu
lations, la faveur que nos lois accordent aux conven
tions matrimoniales.
L e conseil conclut donc, avec une entière confiance,
que les successions sont de droit public ; que s’il est per
mis , dans certains cas, de disposer de tout ou de partie
de ses biens, en faveur de personnes certaines, et selon
des quotités ou des portions d e .k _ succession, que le
testateur a fixées lui-m êm e; il n’appartient qu’à la loi
civile de faire des héritiers ab intestat, et parla même
raison qu’il est hors de la puissance du testateur de
créer un ordre de succéder, autre que celui que la loi
a institué, ou ce qui est la m êm e chose, de prendre,
pour régler l ’ordre de la succession, une des coutumes
abolies.
Ainsi le Conseil regarde comme vrai, comme fon
damental et élémentaire, le principe posé par l ’auteur
du nouveau traité des donations, dont il a été déjà
parlé, 3 .e vol. n .° 525 .
K II est bien permis de disposer à son gré de ses
5
�( i8 )
« biens, d’après la faculté qu’en donne la loi; mais il
* ne l’est pas de créer u n ordre de succéder, autre que
k celui qu’elle établit. Il n’y a pas de différence entre
* la disposition testamentaire, qui porterait que la sucif cession serait réglée suivant les lois d’Angleterre ou
« de Constantinople, et celle par laquelle il serait dit
« que la succession serait déférée djiprès une des anor ciennes coutumes de France. Les juges ne sont pas
« obligés d’étudier toutes ces législations étrangères ou
«■supprimées pour en faire 1 application, et c’est le cas
« d ’invoquer non-seulement l’art. 3 du code Napoléon,
« où il est dit, les immeubles, meme ceux possédés par
« des étrangers, sont régis par les lois françaises j mais
« encore 1 art. 6 ainsi conçu : On ne peut pas déroger
« par des conventions particulières a u x lois qui intéir ressent l’ ordre public et les bonnes mœurs. L ’ordre
K
«
cr
«
4t
de succéder est sans contredit de droit public, et l’on
a toujours appliqué à ce cas la règle consignée dans
la loi 38 , ff. de pact. dont l’art. 6 du code est l’expression , ju s publicum privatorum pactis m utari non
potest •».
C ’est avec raison que l ’auteur a invoqué, à l ’appui
de son o p in io n , la disposition de l’art. 7 de la loi du
3o ventôse an 12 , et les art. 1389 et 1390 du code
N a p o léo n , ces derniers articles sont autant de consé
quences, appliquées par formes d’exemples, du prin
cipe qui était nécessairement le résultat de l’ensemble
de la législation.
Il n’est pas inutile de reprendre successivement cha-
�( *9 )
cune des objections par lesquelles les auteurs de la
première consultation ont cru combattre victorieuse
ment le principe. Ils le font en répondant aux expres
sions dans lesquelles l’auteur, qu’ils ont cherché à réfu
ter, a expliqué son opinion, et quoique ces objections
soient présentées avec le ton d’une grande confiance,
on ne craint pas de dire qu’elles ne laissent pas d’être
autant d’erreurs.
« S’il est permis de disposer à son gre de ses biens
«■(disent les auteurs de cette consultation), ce ne peut
" être que pour changer l’ordre de succéder établi par
« la loi ».
Lorsque la loi permet à la personne , ’ qui n’a ni
ascendans ni descendans, de disposer à son gré de ses
b ie n s, bien loin que cette faculté ait pour objet de
changer 1 ordre de succéder, son effet est au contraire
de faire cesser cet ordre.
C est une erreur manifeste que d’assimiler les disposi
tions testamentaires a la création d’un ordre desuccéder,
différent de celui que la loi a établi; ces deux idées
sont contradictoires, il ne saurait y avoir disposition
testamentaire, là où on ne voit qu’ un ordre de succéder
d’après une loi abolie.
* Si la loi lui donne cette faculté de disposer à son
* g ré , ce ne peut être que pour faire cesser son empire-».
Sans doute, le tçstaieur à qui la loi permet de dis
poser de tout ou d’ une partie de ses biens, a la faculté
de faire cesser l’empire de la loi, qui établit l ’ordre de
succession entre les héritiers légitimes; mais il ne suit
8
�( 2° )
pas de là qu’il paisse se faire un code à lu i, comme
l ’ont très-bien remarqué les juges de Riom. L a loi qui
lui donne le pouvoir de disposer de ses b ie n s , y met
la condition nécessaire, que la disposition qu’il fera
n ’aura rien de contraire aux lois, ni à l’ordre public;
et il est contraire aux lois, de faire revivre une légis
lation abolie; il est contraire à 1 ordre public de créer
un ordre de succéder, autre que celui de la loi obser
vée lors du décès.
« Si on ne p e u t , en effet, créer en ligne collatérale un
« ordre de succéder, autre que celui que la loi établit,
« il faut retrancher du code, le titre entier des donair tions et des testamens , puisque les 'donations et les
«■testamens n’ont d’autre b u t tque d’intervertir l’ordre
« établi par la loi, pour la transmission des b ien s, et
« y substituer la volonté de l’homme
Les auteurs de la consultation n’ont cessé de con
fondre un donataire ou un légataire avec un héritier
ab intestat ; cependant il existe entre ces deux qualités
autant de différence, qn’i l y en a entre la donation ou
le testament , et un ordre de succéder ab intestat.
XI y a testam en t, lorsque la personne, qui fait la
libéralité, désigne elle-m êm e, par leurs noms, ou par
une indication précise, et sans équivoque, ceux en
faveur de qui elle fait des legs universels ou particu
liers, et qu’elle indique les biens 011 les quotités des
biens, que chacun viendra prendre dans sa succession.
L e testament,, suivant la définition que les juriscon
sultes donnent de cet a c te , est l ’expression exacte de
�( 21 )
la volonté du testateur, sur la distribution de ses bien s,
après sa m ort; testamentum est volantatis nostrœ ju sta
sententia, leg. i , ÿ . qui testament, facer. poss. Il suit
de cette définition du testam ent, que la volonté du
testateur doit être certaine et déterminée, tant à l'égard
des personnes, au profit desquelles il dispose, qu’à l’égard
des biens qui sont l’objet de ses dispositions. C ’est pour
cette raison qu’Ulpien décide , que nul ne peut être
institué héritier dans un testament , s’il n’est désigné
d ’une manière certaine, hœres in stitu i, n isi ut certe
démonstretur nemo potest; leg. g , §. 9, ff* de hered.
instit. et que le mêm e jurisconsulte déclare nulle, l’ins
titution d ’héritier d’une personne incertaine; comme
par e x em p le , si le testateur avait institué héritier, celui
qui se serait rendu le premier à ses funérailles, qidsquis primus a d fu n u s meum venerit hœres esto, et le
m o tif que le jurisconsulte donne de cette décision, est,
que la volonté du testateur doit être certaine, quoniam
certuni consiliutn debet esse testcintis. UIpian. fragm en.
tit. 22 y §. 4,* on sent que ces règles, établies pour la
désignation des héritiers, s’appliquent aux légataires,
par identité de raison. Ainsi, il n’y a pas de tesfamment dans un acte où on ne voit pas la désignation
certaine des personnes qui sont l’objet des libéralités
du testateur, et l ’indication précise de ce que chacune
d elles est appelée à recueillir dans la succession.
Il y a ordre de succéder, toutes lès fois que le testa
teur ne faisant aucune distribution particulière de ses
bien s, se réfère pour cette distribuiion, à des règles
�( 22 )
établies, ou par une coutum e, 011 par des statuts par
ticuliers. Car qu’est-ce que créer un ordre de succé
d e r a i ce n’est établir des règles générales, suivant les
quelles les parens, à tel ou tel degré du défunt, el d’après
tel ou tel mode de représentation,partageront entr’eux la
succession? Les lois qui règlent les successions a b inte stat
ont-elles un autre b u t?
Autre cliose est donc de faire une donation ou un
t e s t a m e n t , et autre chose est de créer en ligne colla
térale un ordre de su ccéd er, différent de celui que
la loi établit.
Quoique les donations et les testamens n’aient d’autre
objet que d’intervertir 1 ordre établi par la loi, pour la
transm ission des b ien s, on ne p e u t , ni par d o n a t i o n ,
ni par testament, créer un ordre particulier de succé
d e r , et il n’y a en cela rien de contradictoire; car
créer un ordre particulier de succession, suivant une
coutume ancienne, ce n’est pas substituer la volonté
de l’homme établie par la loi, pour la transmission des
biens, c ’est substituer une loi à une autre loi; c’est subs
tituer un ordre de succéder établi par une coutume
abolie, à l ’ordre de succéder institué par la loi nou
velle.
Ce que les auteurs de la première consultation ont
dit, page 19, contre l’application au lestamenl de ma
dame de C h azerat, des articles 1389 et 1390 du code
N apoléon, n’est pas mieux fondé, et leurs raisonnemens sont tellement faibles qu’on pourrait p eu t-ê tre
se dispenser de les réfuter.
�( 23 )
Il est dit d ’abord dans l’article 1389, que les époux
« ne peuvent faire aucune convention, ni renoncia«■tion, dont l’objet serait de changer l’ordre légal des
« successions, soit par rapport à leurs enfans entr’eux ■
>
■
.
L e législateur pouvait-il dire plus clairement qu'on
ne pourrait substituer un ordre de succéder émané de
toute loi quelconque qui était abolie, a celui qui est
établi par la loi actuelle? Et si le législateur a montré
cette sévérité, à l ’égard des contrats de m ariage, qui
sont les actes les plus favorables dans la société, n ’estce pas raisonner avec sûreté que de dire que cette même
sévérité s’appliqu e, à plus forte raison, au testament
qui est un acte pure/nent de droit civil, et qui doit être
jugé avec une rigueur toute particulière?
L e législateur ajoute ensuite dans le même article ,
« sans préjudice des donations entre-vifs ou testamen» taires qui pourront avoir lieu selon les formes , et
« dans les cas déterminés par le présent code ».
Par ces dernières expressions, le législateur fixe la
ligne de démarcation que les auteurs de la consulta
tion s efforcent de faire perdre de v u e , entre une dis
position q u i, en se référant ¿i une loi ancienne, crée
un ordre de succéder aboli comme celte loi, et une
disposition qui constitue un don direct et précis de la
part d’un testateur, une libéralité qui est l’eflet de sa
volonté bien déterminée. 11 n’y a de disposition tes
tamentaire que dans le second cas, il n’y en a point
dans le premier. C ’est alors la loi abolie qui défère les
biens, et non le testateur. Celui-ci a bien voulu oï don-
�( H )
ner cetle déférence prescrite par la loi abolie. Mais il a
voulu ce qu’il ne pouvait p a s , et il n’a pas voulu ce
qu’il pouvait; et c ’est le cas d’appliquer cette maxime
vulgaire, souvent citée au palais, volait quod non potu it, et quod p o tu it, non voluit.
S i , relativement aux dispositions pour lesquelles
madame de Chazerat s’en réfère sous un rapport gén é
ral, à la coutume d’A u vergn e, il faut opérer com me
si madame de Cliazerat fût décédée, sans avoir testé,
sous l’empire de la coutume d ’Auvergne ; quelle diffé
rence peut-on faire entre ce cas et celui de l’exécu
tion de ses dispositions? On n’apperçoit, en cette partie,
aucunes traces de la volonté personnelle de madame de
Chazerat ; mais pourquoi? c’est parce que dans la réa
lité , cette volonté personnelle n’existe pas. Elle n ’a eu
d’autre volonté que de donner vigueur à une loi éteinte,
et qu’il ne lui était pas permis de faire revivre. T oute
volonté personnelle à madame de C h a ze ra t, sur la
distribution de ses biens, à titre de legs, qui seule au
rait pu être la marque caractéristique d’un testament,
cette volonté , disons-nous, disparaît et so fond dans
la volonté de la coutume d’Auvergne ; elle est une
avec cette volonté. C ’est tester sans avoir testé, que
de ne pas connaître ceux qui doivent venir à la suc
cession; o r , on est autorise a croire que madame de
Chazerat ne connaissait pas ceux qu’elle appelait h lui
succéder ; elle s’en est rapportée, à cet é g a rd , à la
coutume d’Auvergne : dans une pareille position, où
peut-on reconnaître le caractère d’une véritable dona
tion testamentaire ?
Quant
�( 25 )
Quant à l’article 1390 du code N apoléon , il y est
dit: « les époux ne peuvent plus stipuler d’une m a
te nière générale que leur association sera reglée par
'« l’une des coutumes, lois ou statuts locaux qui régis« saient les diverses parties du territoire français , et
'« qui sont abrogés par le présent code ».
Ici on retrouve, et par forme d’exem ple, le même
esprit du législateur, qui s’est déjà manifesté, et dans
l’article 6 du code Napoléon, et dans l’article 7 de la
loi du 3 o ventôse an 12.
Vous pourrez, a dit le législateur aux époux, fixer
à votre gré les conventions qui devront faire la règle
de votre communauté. Mais ces conventions doivent
émaner d’une volonté précise que vous aurez mani
festée; et vous ne pourrez, par une relation générale
à une loi a b o lie , subordonner le règlement de votre
communauté à la disposition de cette loi. Vous vous
réserveriez le pouvoir de faire revivre ce qui est éteint;
et ce pouvoir vous est refusé, parce que l’intérêt général
serait blessé par la confusion de législation qui en serait
le résultat, et que l’intérêt général est supérieur aux
intérêts, et à plus forte raison aux caprices des parti■culiers.
Est-il possible de donner un autre sens à cet article
x 39 o , d’après les motifs de son admission exposés par
M. le président M alleville, dans les observations qu’il
y a faites? «On répondit que, permettre aux époux do
« se référer pour leurs conventions à telle loi ou a telle
*■coutum e, ce serait perpétuer l’existence de ce nom -
7
�(
*6
)
« bre infini de lois et de statuts qui se partageaient la
« F rance, et manquer le but qu’on s’était proposé en
a- promulganl le code civil; que les parties pout raient
« en détail modeler leurs conventions sur telles lois ou,
a coutumes qu ellesju g era ien t à propos ; qu’il y aurait
*• même un autre inconvénient à permettre cette re« lation générale à une coutume. C ’est qu'il pourrait
« arriver que ses dispositions ne pussent plus s'exécuter».
Mais si telle a été la pensée du législateur, par rap
port aux é p o u x , le législateur n a-t-il pas eu la même
pensée respectivement aux testateurs? ne leur a-t il
pas dit: disposez a votre gré de vos biens; donnez une
quotité à un tel, un corps de biens à un autre, une
somme à un autre., etc.; qu’il y ait de votre part une
volonté connue et fixe sur vos libéralités, et sous le
rapport de la fixation des dons, et sous le rapport des
individus qui doivent les recueillir. M odelez m ê m e , si
vous vo u lez, vos dispositions sur telle loi ou sur telles
coutumes que vous aviserez , et que vous aurez dans
la pensée; mais expliquez vous-même vos dispositions
sur ce plan qui peut être le vôtre , mais qui ne peut
jamais être celui des juges. Détaillez vos dispositions,
mettez-les à découvert; ayez une volonté propre, per
sonnelle; appropriez-vous le plan sur lequel vous dis
poserez, dessinez-le avec des lignes qui partent de votre
main; mais si vous abandonnez simplement votre v o
lonté d’une manière générale, à celle d’une loi abolie,
alors vous ne faites pas de dispositions, vous manifes
tez seulement le vœu de remettre en vigueur cette loi
�( n )
abolie; alors vous sortez du pouvoir que la loi vous
confère; vous mettez vainement en opposition la loi
éteinte et la loi vivante.
On sent aisément les inconvéniens graves qui résul
teraient de la liberté qui serait accordée a chaque F ran
çais de remettre en v ig u e u r, par des dispositions tes
tamentaires, la loi ou l ’ancienne coutume sous laquelle
il aurait vécu ; ce serait admettre le concours de légis
lations diverses dans le même empire; ce serait intro
duire un vrai désordre dans la société ; les contesta
tions jenaîtraient en foule au lieu de diminuer, et le
résultat le plus certain de cette confusion, serait le m é
pris pour la législation actuelle qu’on ne saurait envi
ronner de trop de respect. C ’est cette liberté contre
laquelle le législateur s'est é le vé, et une sage politique
lui en imposait le devoir.
E n fin , dans la vue d’écarter .l’application de l ’art. 7
de la loi du 3 o çentôse an 1 2 , qui abolit toutes les an
ciennes lois et coutum es, les auteurs de la première
consultation s’expliquent ainsi:
« Mais en prononçant que les lois romaines , les
a ordonnances et les coutumes cessent d’avoir force de
* l o i , on a si peu entendu proscrire la citation des anK ciennes lois, et frapper d ’anatliême tousles actes dans
^ « lesquels on a pu les rappeler, ou même, si 1 on veut
« les prendre pour règles de ses dispositions ou de ses
« conventions dans ce qui n ’est pas formellement pro“ llibé par le code , que le droit ro m ain est encore
« 1 objet principal des cours de législation; que le gou-
8
�( 2 8 }
« vernerhent a établis pour ren seign er, des écoles pu-« bliques dans toutes les parties de l’Empire, et que
a nul ne peut avoir entrée au barreau, ou être admis
« à une place de magistrature, qu’autant qu’il est muni
« de diplômes aulhentiques qui constatent qu’il en a
a- fait une longue étud e, et qu’il y a acquis de vastes
« connaissances».
L a réponse à ces raisonnemens nJest pas embarras
sante. Ce ne sont pas les actes dans lesquels on se serait
borné à citer ou à rappeler les anciennes lois, qu’on a
dit être entachés d’un vice principal qui en entamait
la nullité, mais bien ceux par lesquels on ferait renaître
une distinction défendue sur l’origine et la nature des
biens, ou q u i, ayant pour objet de faire revivre une
coutume abolie, ne présenteraient, dans leur résultat,
aucune disposition sur les personnes ou sur les biens,
personnellement indiquée par le testateur.
L e législateur a pu vouloir l’enseignement du droit
rom ain, parce qu’il est reconnu pour être l’origine
le plus sûr fondement de toute législation civile, et
que pris comme raison é c rite , il peut donner matière à
une extension de décisions sur des cas omis, et cepen
dant il n’est personne qui ne sente qu’il ne peut plus
être rigoureusement suivi comme loi.
Aussi r e m a rq u e -t-o n q u e,si les auteurs de la pre
mière consultation ont nié le principe, qu’ on ne peut
c ré e r, par un testament, un ordre de succéder autre
que celui établi par la loi en vigueur lors du décès,
-parce qu’ils n’ont pas cru pouvoir échapper aux con-
�( 29 )
séquences qui en découlaient contre leur décision, dans
la seconde consultation, on a reconnu la vérité du prin
cipe en même tems qu’on a cherché a en montrer le
défaut d’application à l’espèce.
Q’gsl; dans cette vue .que les auteurs de la seconde
consultation font observer que le. tribunal de Riom a
confondu la disposition de madame de Cliazerat^ avec
celle par laquelle «elle aurait purement et simplement
« subordonné sa succession à la coutume d’A u v erg n e ,
«■et elle aurait laissé aux dispositions de celte coutume
« à lui donner des héritiers ; par exemple , si madame
« de Chazerat eût dit qu’elle entendait que sa succes« sion fût gouvernée par cette coutum e, alorselle n eut
« par là désigné, aucun héritier ni légataire. Elle n’eût
« fuit par elle-même aucune disposition de ses biens;
« elle aurait attribué à cette coutum e, non-seulement
« la répartition, mais la disposition ; elle aurait établi
«■pour sa succession db intestat un autre ordre que
« celui déterminé par la loi; c’est en ce cas, tout au
* p lu s, qu’on pourrait dire q u e lle aurait violé la loi
* des successions en prétendant introduire un autre
* ordre de succéder que celui établi par elle-« (Seconde
« consultation, pag. i 3.).
Ainsi, on voit les auteurs de la seconde consultation 3
obligés de reconnaître la vérité du principe de droit,
que nul ne peut créer un ordre de succéder autre que
celui établi par la loi en vigueur lors du décès. A la
vérité, ils réunissent tous leurs efforts pour écarter les
conséquences qui en résultent dans l’esp è ce , en pré-
�T
( 3 0 ).
lendanf que madame de Chazerat n’a pas voulu in
troduire un ordl-é de succéder autre que celui établi
par le code Napoléon; mais outre que le contraire sera
démontré jusqu’à l'évidence dans le paragraphe sui
vant, il suffit, pour le m om ent, de tenir pour certain
que les auteurs de la seconde consultation, qui ont
déclaré partager l’opinion émise dans la première, ad
mettent formellement un principe que les auteurs de
celle-ci réprouvent, et qu’ils qualifient d’abus étranges
des mots et des choses (Consultation de C lerm on t,
pag. 19.).
Quelles peuvent donc être les raisons q u i, sur le
même exposé des faits, et pour en veïiir à une »décision
unique, déterminent les auteurs de la première conèultation à présenter comme faux et erroné un prin
cipe de droit, que les.auteurs de la seconde consulta-*
tion reconnaissent comme vrai et inébranlable : cette
contradiction sur un principe aussi important pour la
décision uniforme des deux consultations de Clermont
et de Paris, n’anhonce-t-elle pas l’erreur de cette dé
cision qu’on cherché à rendre vraisemblable? Et la v é
rité d’une proposition est-elle bien sûrement établie,
quand ceux qui s’efforcent de la démontrer, sont ré
duits à invoquer des principes directement contraires?
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.. . effet un ordre de succéder, autfg quei çelui établi par
La loi en vigueur à l’époque de. son décès ■elle a or
donné la distinctionLde ses biens en propres et en
,
acquêts ; et ses dispositions testamentaires ne peuvent
être exécutées sans fa ire revivre /e mode dé{succéder,
établi par une coutume abolie
sans,Remonter a
une origine de biens que la loi ne permet plus de
rechercher.
• ; -'iir
i;
j
I) Ic.i
, i
jiii-
! >jr
>
Cetl.e proposilion se prouve|cqm plé(em ent, et sans
réplique, par les observations suivantes :
. }
i.° En analysant les dispositions de maçlame de Çhazerat en elles-mêmes;
,2.° E n analysant mêm e les termes dont elle s’est
servie dans son second codicile;
' •
1
3 .° E n énonçant les demandes des héritiers, qui
tendent toutes a un partage de succession, c o n fo rm é
ment à la loi ancienne;'
l
4-° En établissant que, dans le fait comme dans le
droit, il y a , dans les dispositions de madame de Cliazerat, ordre de succession.
Développons ces qualre réflexions qui concourent
•également à la ruine du système formé par les léga
taires universels.
»■>0« dit en premier lieu, qu’en analysant les dispo-
�( 32 )
sifions de madame de Cliazerat en elles-mêmes, on y
trouve la preuve qu’elle a voulu établir un ordre de
succéder autre que celui déterminé par le code N apo
lé o n , et qu’ elle a ordonné une distinction de biens,
interdite par la loi observée tant à l’époque du testa
ment qu’au moment du décès.
Commençons par rapporter le texte de ces disposi
tions : «Quant a la propriété de mes biens, mon in « tention é ta n t, autant qu'il dépend de m oi, de les
«■faire retourner h ceux de mes parens qui descendent
<r des estocs desquels ils me sont parvenus, je donne
«• et lègue tout ce dont il m'est permis de disposer
k suivant la loi du 4 germinal an 8, à tous ceux de
tr de mes parens de la branche de mes aïeul et aïeule
« paternels, et dè celle de mon aïeule maternelle, qui
« seraient1 en ordre de me succéder suivant les réglés
tr
«
«
a
«
«
de la représentation à l'in fin i, telle quelle avait lieu.
dans' la ci-deva n t coutume d ’Auvergne, pour être
partagé , entre les trois branches, au marc la livre
de ce qui m ’est parvenu de chacune desdites branches, et être ensuite subdivisé dans chacune d’elles
suivant les règles de la représentation à l’infini
L a première idée qui domine madame de Chazerat,
est que ses biens retournent, autant qu’il est en sa puis
sance, à
c e u x
de ses parens qui descendent des estocs,
ou lignes desquelles ils lui sont provenus.
Ainsi, la testatrice veut faire revivre, dans le partage
de sa succession, cette antique et fameuse règle du droit
coutumier, qui affectait les biens propres aux parens
de
�¿ 3 3 N)
de la ligne .d’o.ù. ils élâieji^bvçmis .1
materna mater tiis.' t ^ W * < p o u r çlé,t;ernuner la proportion* suivant laquelle clia,qü^,branche
appelée à la succession viéndi’cijreGueillii'JjRÎiie! çle la dis
position', il sera inévitable de F^çQUiir*irl anc ienne Ju
risprudence, et aux> règles qui y iétaieni'suivies., pp.ur
décider si des biens devaient être réputés acquêts, 011
propres parternels ou maternels. Ces règles, il s en faut
bien , n’étaient ni certaines, ni uniformes dans tous les
pays coutumiers; on peut s'en convaincreipar ce qu en
disent de Pvenusson, dans son traité des propres ,-sec
tion 10 , et .Lebrun, des successions, liv. 2, cbap. i. er
sect. i . re
k
•Indépendamment des difficultés générales qui résul
taient de la distinction des biens en propres fit én ac
quêts , la coutume d’Auvérgne avait encore, sur cette
matière , des difficultés qui lui étaient propres. La dis
position de cette coutume est 'iiinsi ^¡ojq^ivgsI : «Audit
<* pays coulumier d 'A uvergne* ÿ a deüx manières d ’hé* ritiers*, l ’ un du côté paternel^.et l’autre du Cylé. m a « ternel, et retournent les biens ¿1 l’estoc dont ils sont
« provenus, tellement que les,;procliûins lignagers, du
,r côté paternel , succèdent ab intestates biens provenus
« dudit estoc, et non les pàrens du côté maternel '.et
« contra.» (Coutum e d’A u vergn e , cliap- 12 > ?ect. 2 ;
art. 4. ).
C h a bro ly sur cet article, observe que la coutume
établit la règle générale desiipaÿscoûtuiniers : Palerna
"paternis, materna ma ternis; niais que celle îegle ne
9
�( *4 )
s’y pratique pas comme dans les autres coulumes. Il
fallait toujours dans la coutume d'Auvergne remonter
à celui qui avait p orté-l’héritage dans la fam ille, et
voir qui lui aurait succédé', si, au lieu d ’avoir des desCeUidans pendant cinq et dix générations, il fût mort
sans postérité; ce qui dérivait de ce principe général,
fondement de l’ordre de la succession des propres en
A u vergn e, qu’on devait diviser et subdiviser à l’infini
les biens de chaque estoc. Toutes les coutumes admet
taient bien une première division entre les parens pa
ternels et les parens maternels, suivant la maxime gé n é
rale : Palerna paierais, materna materais; mais non
pas ces sous-divisions à 1 infini, qui constituaient l’es
prit de la coutum e d ’Auvergne dans cette matière: il
y avait fictivement autant de successions que le défunt
avait laissé de lignagers de toutes les familles qui
avaient pris alliance avec la sienne, et qui y avaient
apporté les biens qu’il laissait. Chacun reprenait, par
représentation , les biens venus de son côté^ comme
s’ils avaient appartenu , en dernier l ie u , à celui qui
les avait portés le premier dans cette famille, et qu’il
fû t question toujours de lui succéder immédiatement.
Mais com me dans cette multiplicité de branches ,
il n’était guère possible qu’il ne s’en trouvât quelqu’une
d’éteinte, ou par une défaillance effective, ou par L’im
possibilité de fournir des preuves d’une parenté qui
remontait trop loin, il se présentait souvent la question
de savoir quelle était la ligne qui succédait, en cas de
défaillance, de celle où les biens étaient provenus, si
�( 35 )
c’était la plus proche du défunt, au tems qu’il était
décédé, ou s’il fallait remonter plus haut.
Cette question importante ne trouvait pas sa solution
précise dans la coutum e, et on était réduit à s en ré
férer sur ce point «Via jurisprudence des arrêts. Chabrol,
sur l’article ci-dessus cité,rapporte trois arrêts célèbres,
rendus dans des espèces où des difficultés de cette ria
ture avaient été agitées ; ce sont les arrêts des R e n a u d ,
des Lescalopier et des Postoly. Ce n est pas tout . la
distinction des biens auxquels les collatéraux paternels
et maternels succédaient, selon les principes d e là cou
tume d’A u vergn e, donnaient lieu à un très-grand nom
bre de questions difficiles, pour la décision desquelles
on n’avait, le plus souvent, d'autre guide qu’une juris
prudence d’arrêts, flottante et obscure. Chabrol pro
pose, sur celte matière, quatorze questions principales
qu'il serait trop long d’énoncer; mais il suffira de re
marquer que les unes ou les autres de ces questions se
présentaient dans presque tous les partages de succession,
et que Chabrol ne les résout qu’en rapportant labo
rieusement des arrêts, ou en interrogeant les disposi
tions des coutumes qui avaient quelque conformité
avec celle d’Auvergne.
D ’après les idées que l’on vient de donner des em
barras inextricables de la législation despayscoutumiers,
en matière de distinction des biens en acquets ou en
propres, on doit reconnaître qu’il était sage d abolir
cette législation, comme le fit la loi du 17 nivose an 2.
L ’article 62 de cette loi porte que «■la loi 11e reconnaît
10
�( 36 )
« aucune'différence dans la nature des biens ou dans
k
leur origine, pour en régler la transmission ». L e
code N apoléon, art. 7 8 2 , renferme une disposition
con forme.
_ Lès expressions du législateur sont remarquables :
« L a loi ne reconnaît aucune différence dans la nature
«• des biens ou dans leur origine»; c’est-à-dire, que la
loi n’admet plus, qu’elle' n’autorise plus aucune diffé
rence' dans la nature des biens ou dans leur origine,
pour en régler la transmission. D evant la l o i , il n’est
plus permis de rappeler la différence dans la nature
des biens; elle ne le souffre plus.
Ainsi , a disparu pOur jamais cette distinction des
biens'qui devait sa première origine à la féodalité, et
qui éta it, pour les familles des pays coutumiers, la
source de mille difficultés interminables, pour la déci
sion desquelles on était liv ré , le plus souvent, à l’arbi
traire des juges, ou aux caprices de la jurisprudence.
Madame de Chazerat se met en opposition avec une
loi que la sagesse et l’intérêt public ont dictée. Elle
réunit tous ses efforts pour qu’une loi aussi utile de
meure sans exécution ; elle ne craint pas de fronder
hautement le précepte de la loi, en ordonnant qu’on
fasse dans la succession la distinction de plusieurs patri
m o in e s ; qu’on fasse une différence de la nature de ces
biens, et dans leur origine; qu’on y distingue, selon
les principes de la coutume d’A uvergn e, les acquêts,
les propres paternels et les propres maternels.
En un m o t, elle établit entre ses biens une diffé-
�( 37 )
rence que n on -seu lem en t la loi ne reconnaît plus,
mais encore qu’elle défend.
L a séparation des patrimoines paternels et mater
nels étant une fois o p é ré e , quelles sont les personnes
que madame de Chazerat appelle a recueillir la portion
de ses biens, dont la loi du 4 germinal an 8 lui laisse la
disposition? Ce sont ceux de ses parens de la bianche
de ses aïeul et aïeule paternels 3 et de celle de son aïeule
maternelle « qui seraient en ordre de lui succeder sui« vant les règles de la représentation à 1 in fin i, telle
«■qu’elle avait lieu dans la ci-devant coutume d A u « vergn e, pour être partagés entre les trois branches,
« au marc-la-livre de ce qui lui est parvenu de chacune
desdites branches, et être ensuite subdivisés dans
« chacune d’elles, suivant les mêmes règles de la re« présentation à l’infini».
E n d’autres term es, madame de Chazerat établit
entre ses parens l’ordre de succéder tel qu’il était pres
crit par la ci-devant coutume d’A uvergn e; elle n ’aura
pas d autres liéritieis que ceux de ses parens qui seraient
en étal de lui succéder, suivant les règles de celle cou,lume ; d’où il suit que relativement aux biens dont la
loi permet à madame de Cliazerat de disposer, el quant
a ceux de ses parens qu’elle appelle a recueillii ces
biens, la coutume d’Auvergne doit conserver tout son
empire , et régler la succession de la même manière
qu’elle l’aurait ré g lé e , si elle fût décédée ab in testa t,
avant 1 abolition de celle co u tu m e , ce-qui est bien
�( 38 )
évidemment établir mi ordre de succéder, suivant les
dispositions d’une coutume abolie.
En second lieu , en anatysant même les termes dont
madame de Chazerat s’est servie dans son second codic i l e , on demeure convaincu que sa volonté était de
partager sa succession entre les héritiers que lui don
nait la ci-devant coutume d’A u vergn e, et selon le modo
que celte coutume établissait.
On ne peut mieux interpréter ou concevoir l’esprit
des dispositions de madame de Chazerat, que par ce
qu’elle dit e l le - m ê m e , par la manière dont elle les
présente.
D ans son second codicile, madame de Chazerat
voulant désigner ceux de ses parens qu’elle a appelés
à recueillir la portion de ses b ien s, dont la loi lui donne
la facullé de disposer, n ’emploie pas d’autres expres
sions que celles de ses héritiers, c’est-à-dire d'héritiers
appel és à la succession par la coutume d’A u v e rg n e , et
non par son testament, autrement elle se serait servie
du terme de ses Légataires universels. Sa pensée n'est
pas équivoque dans le passage suivant de son second
codicile : «secondement, comme il pourrait se faire,
« qu’au moyen des dispositions par moi faites, en faveur
«■de mes parens de 1 estoc de mon aïeul et aïeule pa« ternels , et celui de mon aïeule m aternelle, il ne
« restât pas à quelqu’ un de mes cousins germains de
« l'estoc de mon aïeule maternelle, appelés par la loi
« à ma sucaession, une somme suffisante pour leur
�(
39 )
r subsistance, désirant venir à leur secours, et faire
« partager mes libéralités à ceux qui en auront besoin,
« je veux et entends que si quelques-uns de mes cou« sins ou cousines ne trouvaient pas dans leur portion
« héréditaire, jointe avec ce qu’eux 011 leurs enfans
« auront d’ailleurs, de quoi former un revenu de cent
« francs, tant pour eux que pour chacun de leurs en« fans qui existeront au jour de mon d e ce s, il soit
« distrait annuellement de monlegs universel la somme
« nécessaire pour compléter ledit revenu de cent francs
« h chacun de mes cousins et cousines, et chacun de
« leurs enfans, compris ce qu’eux ou leurs enfans pour« raient avoir d'ailleurs; et ce, pendant la vie de mesdits
« cousins ou cousines et de leurs enfans; h l’égard des
<
*■enfans de cousins germains qui pourraient être ap« pelés, de Leur c h e f, a ma succession, je veux éga<f lement que si Leur portion hereditaire, réunie à leurs
« autres facultés, 11e se porte pas à un revenu de cent
« francs, je veux que la leur soit com plétée aux dépens
« de mon legs universel pendant leur vie
11 est sensible que ces mots, mes héritiers, qu’em
ploie constamment madame de Chazerat, dans son tes
tament et dans son premier codicile, mais s u r - t o u t
dans le second, pour désigner ses légataires universels,
Veulent diie les héritiers du sang, suivant 1 ordre de
succéder prescrit par la coutume d’Auvergne. C etta
idée se confirme encore par ce que dit la testatrice,
dans son second codicile, de ses parens appelés par La
loi a sa succession (cette loi est la ci-devant coutume
�( 40 )
d'A uvergn e, autrement il faudrait convenir que la suc
cession de madame de Chazerat doit être partagée entre
lesliériliérsque lui donne le code Napoléon) de leuf por
tion héréditaire ; ort sent qu’il n’y a de portion hérédi
taire que dans le cas'où on succède ab intestat. Si ma
dame de Chazerat eût entendu parler d’une portion
ou d’une quotité déterminée de ses biens qu’elle d o n
nait, par testament , à ceux de ses parens désignés par
elle individuellement, o u , ce qui est la même chose, si
madàoie de Chazerat eût voulu faire un testamenl ,
elle n ’eût pas'appelé sa libéralité une portion hérédi
taire. Sa volonté de faire revivre la ci-d e v a n t cou
tume d’ A u vergn e, de la donner pour loi de l’ordre de
sa succession entre ses paren s, éclate donc de toutes
parts; et soit qu’on s’attache à la lettre de son testa
ment et de ses codiciles, soit qu’on considère leur es
prit, cette volonté, contraire aux lois et à l’ordre pu
blic, ne peut être équivoque. ' '
'
'
]
En troisième lie u , dans l’énonciation des demandes
des héritiers, et de leur but, tout y comporte un par
tage de succession, conformément à la coutume d’A u
vergne.
Par les conclusions prises par les héritiers devan't
le tribunal civil de llio m , les uns ont demandé acte
de ce qu’ils donnaient les mains au partage de ladite
succession, à faire conformément aux bases déterm i
nées par le testament , et par les codiciles qui l’ont
suivi; en conséquence qu’il fût ordonné, que par trois
experts convenus, ou pris et nommés d’oflice, il serait
procédé
�(4 0
procédé aux.opérations de ce piartage ; qu il serait formé/
par ces experts, la massé générale de la succession a
diviser, à laquelle masse chacune des parties ferait tous
rapports et prélèvemens de droit ; que les mêmes e x
perts seraient chargés de déterminer la nature et la
valeur de,tous les biens meubles et immeubles qu’a
vait reçus la dame de Chazerat des branches de son
aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule maiernelle;
« soit que ces biens existent encore en nature dans la
«■succession, soit qu’ils ne s’y trouvent plus; qu ensuite
« il serait fait par les experts , distraction de la masse
« générale de la succession, comme ayant été attribuée
« aux héritiers des trois branches, exclusivement par le
« troisième codicile; que sur les trois quarts de ladite
«■masse, il serait fait distraction de tous les legs parti« culiers, soit en nature, soit en valeur; que sur le sur« plus desdits trois quarts, il serait attribué un sixième
« de ce surplus aux sieurs Farradesche de Gromond et
« Ducoraii, et que le legs de ce sixième et les autres legs
«• particuliers s e ro n t, autant que possible, payés en
*
«
*
”
"
acquêts de La succession; que le reste des trois quarts
f f
serait remis au quart de la masse générale, precedemment distrait, pour le tout former une masse particulière qui serait divisée et subdivisée entre les lien
tiers des trois branches ; c o n f o r m é m e n t aux bases
* fixées dans le testament ; ordonner en conséquence
« qu’il sera attribué a u x héritiers de chaque branche
* tes immeubles provenus de cette branche, et qui s&
» trouveraient en nature dans la succession ,* que pour
11
�C 4^ )
« remplacer les immeubles qui ne se trouveraient plus
if en nature, ou qui auraient été employés en paiement
« des legs particuliers, ilsera attribué a u x héritiers clela
a branche de Laquelle ces immeubles proviennent,.des im«■meubles d ’une valeur éga le , pris parmi les acquêts de la
«, succession ; qu’à l'égard des meubles qu’avait reçus la
« défun te, de chacune des mêmes branches, il en sera
«■payé la valeur a u x héritiers de chaque branche, soit
<r aux dépens des meubles de la succession, soit aux
<
*■dépens des acquêts-immeubles,■qu ensuiteles meubles
*
*
«
«•
«
et les acquêts restans seront divisés entre Les trois
branches d ’héritiers au marc le fr a n c , de la valeur
des biens propres, tant meubles qu’immeubles; qu’après la division générale entre les trois branches d’/zeritiers, il sera fait, d’après les mêmes bases, de la
« même m anière, une subdivision particulière entre
« les héritiers de chaque branche
D ’autres héritiers ont conclu à ce q u e , par experts
convenus, ou nom més d’office , « il fût procédé au par
te tage de La propriété des. biens demeurés du décès de
u ladite dame Rollet, épouse de Chazerat, pour d’iceux
« en être expédié à chacune des parties leur portion
<r- ajjf'érente, conformément auxdits testamens et codi* ciles; qu’à cet effet, lesdits experts seraient tenus de
« distinguer les biens provenans des estocs de M ichel
« R o lle t, François V ig o t, et Gilberte Gros, a ïeu x de
u Ladite défunte dame R o lle t, pour iceux être expédiés
« à chacune des parties, comme représentant Lesdits
« estocs j ordonner pareillement que le surplus des biens
�( 4.3 )
« serait partagé, conformé ment auxdits testament et
« codiciles, au marc le franc, entre les trois branches,
« R o lle t , Vigot et Gros ».
Il résulte clairement de ces demandes et conclusions,
que les parens, appelés à recueillir le legs universel fait
par madame de Chazerat, ont demandé un partage de
succession plutôt que la délivrance d’un legs fixé et dé
terminé ; qu’ils ont senti eux-mêmes que c ’était le cas
d’un partage de succession entre des héritiers du sang,
comme si >la testatrice fût décédée ab Intestat, et sous
l’empire de la coutume d’A u ve rgn e; il ne p.'ut s’éle
ver à cet égard, le moindre doute, lorsque les héritiers
énoncent dans leurs conclusions qu’il y a une masse
générale de la succession ; que les legs particuliers faits
par madame Rollet de Chazerat, doivent ê tre , autant
que possible, payés en acquêts de la succession; qu’ils
demandent qu’il soit attribué aux héritiers de chaque
branche, les immeubles provenus de cette bran ch e,
et qui se trouvaient en nature dans la succession; qu’il
soit procédé au partage de la propriété des biens demeurésdu décèsde la dame R o lle t, épouse de Chazerat;
que les experts soient chargés de déterminer la nature
de tous les biens meubles et immeubles qu’avait reçus
la dame de Chazerat des brandies de son aïeul et aïeule
paternels, et de son aïeule maternelle; c ’e s t - à - d ir e de
faire la distinction des acquêts et des propres, tant pa
ternels que maternels, suivant les estocs ou les lignes
d ou ils étaient1 provenus. Toutes ces demandes ne
peuvent convenir qu’à un partage de succession, selon
12
�( 44 )
l ’ordre de succéder de la c i-d e v a n t coutume d’A u
vergne, et c’est en vain qu’on y chercherait les carac
tères d’une demande en délivrance de legs.
Mais si les juges pouvaient faire droit à de sem
blables demandes, il n’est personne qui ne voie qu'ils
seraient obligés de faire une étude particulière des prin
cipes de l’ancienne coutume d’A uvergne; la distinction
seule des biens, qui n’ est qu’une opération prélimi
naire du partage, serait la matière d’une multitude de
contestations, pour la décision desquelles on n’aurait
d ’autres secours, que des arrêts, et l'opinion des com
mentateurs.
Si les demandes des héritiers de la dame de Chazerat
pouvaient être accueillies, les tribunaux retentiraient
encore pendant trente ans des procès qui s’élèveraient
sur la distinction des biens auxquels les héritiers pa
ternels et maternels succèdent, d ’après les règles de la
coutume d'Auvergne.
Comment concevoir que nos lois nouvelles se prê
tent à de pareils égaremens ? Comment soutenir ,
qu'ayant abrogé formellement toutes les anciennes
coutumes, elles ont cependant donné à un testateur la
puissance dangereuse d’en perpétuer l ’existence par
l ’effet seul de sa volonté? Il est impossible d’admettre
jamais de telles idées.
Après ce que Ton vient d’établir, on pourrait re
trancher la quatrième proposition que l’on a énoncée,
ou regarder cette proposition comme complètement
démontrée. Les réflexions précédentes ont suffisam-
�<
)
ment prouvé q u e , dons le fait comme dans le droit,
il y avait dans le legs universel de madame de C h azerat,
création d’un ordre de succéder ; si on ajoute de nouvelles
réflexions à ce qui a été dit, c e 'n ’est que pour achever
de mettre dans tout son jour la vérité d’une propo
sition qui est le point fondamental de la cause.
Commençons par rappeler les termes de la dispo
sition : « Je*donne et lègu e, etc. à tous ceux de mes
«■paren s, etc. qui seraient en ordre de m e succéder
* suivant les règles de la représentation à 1 in fin i, telle
«r qu’elle avait lieu dans la ci-devant coutume d A u
« vergn e, pour être partagé entre les trois branches,
« etc. et être ensuite subdivisé dans chacune d elles,
« suivant les mêmes règles de la représentation a
« l’infini».
Remarquons que , ni l’ordre de vocation entre les
h éritiers, ni la quotité qui est attribuée à chacun
d ’e u x , ne sont réglés par la testatrice. M adam e de
Chazerat ne sait pas quels seront ceux de ses parens
qui lui succéderont, et la portion de sa succession
qu’ils seront appelés à recueillir in d iv id u e lle m e n t ,
pour fixer l’ordre de ses héritiers entr’e u x , e t les droits
de chacun dans sa succession ; il faudra nécessaire
ment en venir à fixer les principes de la re p ré s e n ta tio n ,
selon la ci-devant coutume d ’A u v e rg n e . Ce sera cette
coutume et sa jurisprudence, en matière de représen
t a t i o n , en ligne collatérale, qui régleront 1 ordre de
succéder entre les héritiers; ce sera la ci-devant coutume
d Auvergne qui déterminera les droits des héritiers, qui
�( 46 )
fixera lu pari q u ’ils devront prendre dans la succes
sion; en un m ot, ce sera la coutum e d'A uvergne qui
fera les héritiers de madame de Chazerat.
Suivant l’article 9, chap. 12 de la ci-devant coutume
d ’Auvergne : «-Représentation a lieu, tant en droite ligne
«■que collatérale, usque in ¿rifinitum, audit pays coutumierj>.
Voilà la règle que madame de Chazerat adopte pour
déterminer l'ordre de vocation de ses héritiers; elle veut
que ses biens soient subdivisés entre ses héritiers, sui
vant les règles de la représentation à l’infini.
if
, Mais en matière de représentation,la coutume d’A u
vergne avait encore sa jurisprudence particulière; par
exem ple, il s’y agissait souvent de savoir si , lorsque
différens héritiers sont au m êm e d egré, et qu’ils n’ont
pas besoin de la représentation pour se rapprocher du
d éfu n t} ils doivent succéder par t ê t e , et par égale porlio n , ou par souches; d ’autres fois, il était question de
décider si l’un des cohéritiers venant à renoncer, son
fils ou son petit-fils, par représentation ou autrement,
pourrait venir à la succession. Ces difficultés et plusieurs
autres, dont on peut voir les détails dans Chabrol, sur
l’article 9 , cliap. 12 de la coutum e, se reproduisent
nécessairement dans le partage de la succession de m a
dame de C h azerat, et les juges se verraient contraints
à en chercher la solution dans la jurisprudence incer
taine d’une coutume abolie.
Si le partage demandé par les héritiers de madame
de C h azerat, pouvait être autorisé, il faudrait donc
�G 47 )
qu’on vît la Cour de cassation réduite à examiner si
•un jugement ou un arrêt aurait ou non violé les prin
cipes, o u , pour m ieux d ire, la jurisprudence admise
dans la coutume d’Auvergne.
E n fin , il y a vraisemblablement des héritiers de m a
dame de Chazerat, q u i, parce qu’ils descendent de filles
forcloses, aux termes de la coutume d’A u v e r g n e , pour
raient être exclus; la dame de Chazerat ne s’est point
expliquée à cet égard : elle s’est entièrement référée à
la coutume d’Auvergne ; en sorte qu’on aurait encore
à agiter des questions relatives à l’ancienne forclusion.
Ce serait inutilement que le législateur aurait mani
festé, de la manière la plus expresse, sa volonté d’abolir
les anciennes coutumes et leur jurisprudence incohé
rente. L e pouvoir d’un testateur qui n’aurait ni descendans, ni ascendans, s’élèverait au-dessus de la loi ; et
plus puissant q u e lle , il ferait rentrer la législation
civile dans le cahos et dans l’arbitraire dont elle a été
si heureusement tiree. On ne pense pas qu’un aussi
étrange système soit jamais accueilli par les tribunaux,
à qui la conservation des lois est confiée.
On a cru pouvoir justifier madame de Chazerat du
juste reproche d’avoir pris pour règle de vocation de
ses héritiers, ou pour l’ordre de sa succession, le mode
de représentation à l’infini, établi par la ci-devant cou
tume d’A u v e r g n e , en faisant observer qu’elle écrivait
son testament sous l’empire de la loi du 17 nivôse
an
qui admettait la représentation à l’infini (art. 82
et qu’il n’y a aucune différence assignable entre les divi-
�( 43 )
sioas et subdivisions à faire, conformément à la repré
sentation à l’infini, telle qu’elle avait lieu dans la cidevant coutume d’A u v e rg n e , et celles qui étaient or
données suivant le mode de représentation, introduit
par l’article 82 de la loi du 17 nivose.
« D e sorte que ces expressions de la ci-devant cou<r tume d’ Auvergne, ou de la loi du 17 nivôse, étaient
« absolument synonimes » ( i . re consultation, pag. ib .).
Cette objection est facile à détruire en peu de mots.
P re m iè re m e n t, on a démontré qu il est de principe in
contestable que le mode d une disposition ne peut etrçî
régi que par la loi en vigueur à l’époque du décès du tes
tateur; que si la confection du testament, c ’est-à-dire, la
formalité extérieure de l’a c t e , n ’est soumise à d’autres
règles qu’à celles en usage lors du testament, le mode
de disposer est essentiellement gouverné par la loi
existante lors du décès ; ainsi c ’est au code Napoléon
que la disposition de madame de Chazerat doit être
conform e, et non à la loi du 17 nivôse an 2.
Secondement, il n’est pas exact de dire que le mode
de représentation, ordonné par madame de Chazerat,
est le mêm e que celui qui était établi par la loi du
17 nivôse an 2 ; cette lo i, dans toutes les lignes, et
dans toutes les branches, établit la représentation sous
le rapport de la proxim ité du sa n g ; au contraire, la
coutume d’Auvergne , attachait la représentation h
l ’origine, et à la nature des biens ; ce mode de repré
sentation tirait son origine du régime féodal : il fallait,
pour être admis à la représentation, suivant les prin
cipes
�( (.49 - ) ,
cipes de celle coutume j avoir,pour auteur celui duquel
les biens provenaient.
:ui;
Ce système de représentation jusqu a l infini, en ligne
collatérale, est une source de difficultés, en faisant
m êm e abstraction de celles qui résultent de la dis
tinction des biens pour les afïecter ensuilô a chaque
ligne.
On connaît la c élèb re question qui s’était élevée sur
le véritable sens de l’art. 7 de la loi du 17 nivôse an 2 ,
et qui consistait à savoir si les descendans des ascendans
les plus proches devaient exclure ceux des ascendans
les plus éloignés dans chaque ligne paternelle ou mater
nelle ; ou bien si on devait admettre les descendans
des ascendans plus éloignés à concourir avec ceux des
ascendans les plus proches dans chacune de ces deux
lignes.
Cette question, connue dans la, jurisprudence sous le
nom de question de refente, avait divisé les juriscon
sultes, les .tribunaux et les législateurs e u x - m ê m e s j
elle fut, en l a n 6 , l’objet d’un référé du tribu n al de
cassation au corps législatif, sür lequel il fut statué par un
décret d’ordre du jour, du 8 nivôse an 7. Et la jurispru
dence , plusieurs années va cillan te, ne fut fixée que
par un arrêt de la Cour ¡de cassai ion, du 12 brumaire
ûn 9. Ce seul exemple fait voir la sagesse du code Na-r
poléon, qui a abrogé la représentation h 1 infini en ligne
collatérale.
'
•>De tout ce qui vient d’être dit,dansce second para-*
graphe, il résulte cette conséquence q u i, pour la déi3
�( 5° )
cision de la question soumise au conseil, est de la plus
liaule importance, que madame de Chazerat, en ce qui
concerne les dispositions de son testament, qui sont at
taquées par voie de nullité, n’a point fait, à propre
ment parler, de dispositions testamentaires; elle n’a
point légué à des particuliers indiqués et nom més, à
tels ou tels connus même par elle, telle som m e, tel
objet particulier, telle portion ou quotité de ses biens;
elle a simplement voulu une distribution réglée par la
coutume d'A uvergne : ce n est point elle qui don n e,
c ’est la coutume.
Pour q u e les vérités que l’on a déjà établies restent
dans toute leur force , et pour qu’elles ne puissent être
susceptibles d'aucun d o u t e , il ne s’agit plus que de
réfuter quelques objections auxquelles ont n ’a pas en
core répondu, et qu’on va extraire des deux consulta
tions délibérées pour les légataires universels.
PREMIÈRE
OBJECTION.
M adam e de Chazerat n’ayant ni ascendans, ni descendans, le code Nap. lui donnait la faculté de disposer
de la totalité de ses biens ( i . re consultation, pag. 5 ) ,
* soit sous le titre de l’institution, soit sous le titre de
<r le g s , soit sous toute autre dénomination propre à
« manifester sa vo lo n té * ( i . re consultation, pag. 8).
Elle n’avait à observer dans la répartition de ses biens
aucun ordre qui fut du domaine public; «elle avait
*■l’entière disposition de sa fortune. Il n 'y avait point
�( 5i )
« de barrière pour elle.... la lo i'n e'lu i en avait imposé
a d’aucune espèce (2.e consultation , pag. 3 ). Il n existe
« aucun article du code qui règle la manière dont un
« testateur, qui donne ce que la loi lui permet de
« donner à qui b on lui semble, le repartiia entre ses
a légataires, parens ou étrangers, qui determine, par
« exem ple, comme il divisera son bien dans les diffe« rentes lignes de la parenté, s il veut donner a des
« parens de diverses lignes (2.e consultation, pag. 5 ).
« L a coutume d’Auvergne n a pas été le guide de
«■madame de Chazerat; et pour le choix de ses héri« tiers, elle n’a cherché d’autre loi que sa volonté
« ( i . re consultation, pag. 14)? lorsqu’elle a pris pour
« règle de la répartition de ses b ie n s, la représentation
« telle qu’elle était établie p arla coutume d’A u vergn e;
«■cette coutume ne prend pas pour cela aucune force
« de loi :1a disposition reçoit toute son autorité d e là
« volonté de madame de C h a ze r a t, et du code qui
« laissait cette volonté entièrement libre (2 .e consul«■tation, pag. 9) ».
•
RÉPONSE.
O u i, sans doute, il y a une volonté, mais ce n est
pas la volonté que la loi permet d’émettre : on paile
de volonté permise à la testatrice ; voila précisément
ce qui est en question. On remarque, toujours deux
points essentiels dans la disposition de madame de Cha
zerat : qu elle ne donne' point personnellement ^mais
�( 52 )
qu’elle veut qu’ on distribue ce que la coutume d’A u
vergne déférait à titre de succession ; qu’elle ne désigne
pas personnellement l’ordre de vocation de ses héritiers
entr’eux , mais qu’elle veut qu’on règle leurs droits à
sa succession , d’après l’ordre établi par la coutume
elle-même. L ’on est sans cesse ramené au point de
savoir si une pareille volonté est admissible d’après la
loi. A in si, tout ce qui est dit dans les deux consultations
sur cette volonté, ne tranche point la difficulté, et ne
tend qu’à résoudre la difficulté par la difficulté même.
M adam e de Chazerat était libre de disposer de la
totalité de ses biens, sous toute dénomination propre à
manifester sa volonté : on le veut; mais cette volonté,
pour qu’elle pût être observée, ne devait rien contenir
de contraire aux lois ni à l ’ordre public.
L a loi de qui la testatrice tenait le pouvoir de faire
un testament, y avait mis cette condition nécessaire;
elle y avait mis, pour condition nécessaire, de ne pas
faire revivre une distinction de patrimoine qu’elle avait
proscrite : elle y avait mis, pour condition nécessaire,
de ne pas perpétuer l’existence d’une coutume abolie,
en rappelant un ordre de succéder qui ne devait plus
être toléré; elle y avait m is, pour condition nécessaire,
de ne pas apporter d obstacle a l’uniformité de la légis
lation, dont l’avantage inappréciable était depuis si
long-lems réclamé pour l'intérêt de tous.
Comment a-t-o n pu dire que la coutume d ’A u v e r
gne n ’a pas été le guide de madame de Chazerat? lors
que c’est cette coutume et sa jurisprudence qui doivent
�( 53 )
être suivies pour la distinction des biens propres et ac
quêts paternels et maternels j lorsque c est d après les
règles établies par la coutum e, que les héritiers seront
appelés à la succession, et que l’ordre de succéder sera
formé.
D ’ailleurs, ce serait abuser d u n e manière bien
étrange de ces termes de 1 art. 967 du code Napo^
lé o n , «soit sous le titre d institution d héritiers, soit
«• sous le titre de legs, soit sous-toute autre dénomma-'
«■tion propre ii manifester sa volonté
, que d en tirer
la conséquence absolue, que madame de Chazeiat a
pu au fond disposer sous tel mode que bon lui a semblé.
Personne n ’ignore q u e , par les expressions que I011
■vient de rapporter, le législateur a seulement voulu
faire cesser les différentes acceptions attachées dans 1 an
cienne jurisprudence, aux mots leg s 3 institution d 'h é
ritiers, donation à cause de m ort} et qu’il a entendu
écarter à jamais les conséquences qui en résultaient. H
ne s’agit , dans' cet article , que de la dénomination
donnée à la disposition, et non du mode de la v o lo n t é ,
ce qui est bien différent.
On a vainement o b je c té , dans la seconde consulta
tion, que la coutume ne reprenait pas pour cela foice
de loi ; que la disposition recevait toute son autorité
de la volonté de madame de Chazerat, et du code qui
laissait cette volonté entièrement libre.
Cette volonté de madame de Chazerat, ayant tou
jours 1 effet de remettre en vigueur une coutume cibrog é e , puisque la vérité force de c o n v e n ii, (Lins la se—-
�( 54 )
conde consultation (pag. 6 ) , quo madame de Cliazerat
«• a indiqué l'ancienne coutume , comme étant celle
«• qu’elle entendait donner pour règle à ses légataires ».
11 faut encore en revenir au point de savoir si madame
de Cliazerat a pu donner pour règle du partage entre
' ses héritiers ou légataires, l'ancienne coutume d’A u
vergne.
Mais c'est là un paradoxe qu’il n’est pas permis
d’avancer sérieusement, autrement il faut accorder aussi
qu’un testateur a la faculté, sans faire aucune disposi
tion personnelle de ses biens , d en ordonner simple
ment la distribution entre ceux qui devraient lui suc
céder, suivant telle ancienne coutum e, ou tel ancien
statut qui seraient abolis, ou selon les lois d’Angleterre,
ou de Constantinople ; ou , en d’autres term es, que l’on
peut créer un ordre de succéder autre que celui établi
par la loi; ce qui serait renverser les maximes les plus,
sures de la jurisprudence.
Faut-il le redire? c’est une erreur de prétendre que
la volonté de la testatrice était entièrement libre, qu’elle
n’avait aucune limite; elle avait pour limite les lois
d’ordre public auxquelles il était défendu à la testaIrice de porter atteinte; elle a exprimé sa volonté, il
est vrai, mais quel secours peut-on tirer d’une volonté
contraire aux lois?
C ’est donc inutilement qu’on a invoqué dans les deux
consultations, la volonté de la testatrice; on ne voit là
que des efforts iinpuissans, de la part de leurs auteurs,
pour se dérober à l’évidence qui les poursuit.
�( 55 )
SECONDE OBJECTION.
a L a seconde objection consiste à dire que la cou« tume d’Auvergne n’est rappelée dans le testament de
« madame de C h a ze ra t, que comme une indication
« surabondante ( i.ere consultation, page 1 4 ) ; pour dé« monstration plus ample de la volonté de la testatrice,
« qui aurait pu écrire dans son testament tout ce que
« la coutume diposait sur ce p o in t, et qui s’en est dis« pen sée, en déclarant qu’elle voulait faire comme
« faisait autrefois la coutume d’A uvergn e; ce qui est
« la mêm e chose que si elle en eût couché les dispo«• sitions dans ce testament ( 2.e consultation, p. 8.)».
RÉ P ONS E .
Il n y a dans cette seconde objection que sophisme
_et confusion d’idées.
Il faut bien distinguer la simple désignation d’une
coutum e, dont les dispositions auraient servi de m o
tifs et de base au règlement des libéralités contenues
dans le testament, lesquelles libéralités néanmoins se
raient explicitement et positivement développées avec
indication explicative des objets légués, et des indivi
dus appelés à les recueillir; d’ une disposition testamen
taire , par laquelle la testatrice appelle seulem ent, et
d une manière confuse , ceux qui lui auraient du suc
céd er, suivant une coutume abolie; d’une disposition
�( 136 )
par laquelle la testatrice veut faire revivre une origine
de biens, heureusement abolie par la loi actuelle; d’une
disposition dont le résultat est que des juges étudient,
et appliquent une jurisprudence de représentation rela
tive h celle coutum e; dans ce dernier cas, il n’y a pas
de volonté personnelle de la part du testateur ; il ne
reste que la volonté ou l’empire d’ une coutume abolie.
Ce n’est pas tout ; dans ce dernier cas en core, les juges
seraien t obligés de faire eux-m êm es, ou de faire faire
par des experts ce que la loi défend; c e s t-à - d ir e , de
distinguer une origine de biens,proscrite , et p a rla loi
du testament, et par la loi du décès.
M a is réplique-t-on, madame de Chazerat aurait pu
écrire dans son testament tout ce que la coutume dis
posait sur ce point,*et sa disposition aurait été valable.
Sans doute, la loi donnait à madame de Chazerat
la faculté de disposer elle -m ê m e de ses biens, entre
ses parens, dans l’ordre qu’elle aurait voulu adopter.
Sans doute que si elle eût fait elle-même le partage
de ses biens, entre tous ses parens , tel que la coutume
d’Auvergne l’aurait fait, en les appelant tous, non en
- Jermes généraux et en masse, mais individuellement,
'et en assignant nommément à chacun les biens ou la
quotité des biens qu’elle donnait, une semblable dis
position n’aurait pas été nulle, quoique par le fait là
testatrice eût réglé la distribution de ses biens, sur le
mode de succéder établi par une coutume abolie.
On va plus loin , et on accorde que madame de
Chazerat, après avoir fait elle-même la distribution des
biens
�( 57 0
biens paternels et maternels, qui lui étaient provenus
de chaque estoc, aurait été libre d appeler les parens
de chaque branche à les recueillir entr’eux, suivant les
règles de la (représentation a 1 infini, et a les partager
d'après un mode dont elle aurait pris les réglés dans
les dispositions de la ci-d e v a n t coutume d Auvergne.
Dans l’un et l’autre de ces deux cas, la disposition
deuPiadame de Chazerat aurait pu avoir son effet ;
car dans le p r e m ie r, il n’y aurait pas eu de partage
à faire selon les principes d’une coutume abrogee ;
chaque héritier trouvant dans le testament la désigna
tion des biens, ou de la quotité des biens qui lui étaient
assignés, la coutume d’Auvergne n’aurait pas repris son
empire.
Dans le second, madame de Chazerat ayant fait ellemême la distinction de ses biens paternels et maternels,
on n’eût pas été dans la nécessité, pour faire cette dis
tinction, de recourir à la grande règle du droit coutum ie r , paterna paierais , ' materna maternis , et aux
règles particulières qui étaientisuivies dans la coutume
d ’Auvergne.
L a disposition de madame de Chazerat n’eût pas été
eu opposition avec cette grande règle du code Napo
léon, et de la loi du 17 nivôse an 2 , suivant laquelle
a la loi ne considère ni la nature, ni 1 origine des
« biens pour en régler la succession (code Napoléon,
ait. 732.
règle qui est d’ordre public, et a laquelle
les particuliers n’ont pas la faculté de déroger par-leurs
testamens.
i5
�( 58 )
Q u’importe quels eussent été les motifs, la pensée
de madame de C lm zerat, s’il y avait de sa part des
dispositions personnelles qu’on pût regarder comme
produites par le seul mouvement de sa volonté; il ne
serait permis que de s’én tenir aux dispositions nettes
et précises qu’elle aurait faites.
Ce n’est pas parce qu’elle a rappelé le nom d’une
coutu m e, que sa disposition est contraire aux lois; mais
parce qu’elle a déclaré q u ’elle voulait faire, par forme
de disposition t e s ta m e n ta ire , ce que faisait autrefois la
coutum e d’A u vergn e , et que ce mode de disposer tend
à remettre en vigueur la coutume et sa jurisprudence
auxquelles elle se l’éfère. En un m ot, la coutume d’A u
vergne n’est pas seulement indiquée, elle devient l’uni
que règle de la disposition testamentaire.
TROISIÈME OBJECTION.
.
« Comment l’intérêt public serait-il compromis, par
« la manière quelconque d’appliquer une libéralité permise qui ne touche que celui qui la fait et celui qui la
« reçoit ?
« Quand la volonté du testateur est constante, en la
« forme exigée par la^loi pour rendre cette volonté
« certaine, l ’application de cette volonté ne présente
« plus qu’un intérêt privé (2.® consultation, page 3 ).
« Enfin, l’art. 1890 lu i-m ê m e ne prohibe que la
« stipulation faite d ’une manière générale de se régler
« dans les conventions matrimoniales par une des cou-
�( 5 9 }
« tûmes.abolies, mais non.point de stipuler nomina*■tivement telle ou telle disposition portée pur les
« cou lûmes......... O r, madame de Chazerat n ayant pas
« rappelé dans son testament la coutume d’Auvergne
« d'une m a n iè re générale, et comme règle unique de
« la succession, mais d’ une maniere particulieie , et
« seulement pour désigner avec clarté et précision, le
* mode dans lequel elle voulait que ses biens, une fois
« dévolus aux branches qu’elle appelait pour les re*■cu e illir, fussent divisés entre tous les individus qui
« les composaient, il s’ensuit que la disposition de l’article
« 1390 ne serait pas applicable à son testament ( i.recon« sulalion, p. 12; 2.* consultation, p. n)->.
«■La loi de la com m unauté, qui renferme l’art. 1890,
« est du 20 pluviôse an 1 2 , le testament de madame de
« Chazerat est du mois de messidor an 9......... On ne
* peut raisonnablement exiger que madame de Chazerat
« ait dû s’y conforrqer avant qu’elle existât. ( i.ere con-*
« sultation, page 8 )..v
'
•
'fri [
»
*
R É P ONS E .
On ne cesse de supposer que la libéralité de madame
de Chazerat est une libéralité p e r m i s e mais on a deja
établi qu elle ne l’était pas. Les au teu rs des deux con
sultations, mises sous les y e u x du conseil, ne cessent de
nietlre en proposition ce qui est en question; et on 11e
voit pas qu ils aient fait une seule réponse aux principes
qui sont établis par le jugement du tribunal de Piiom.
16
�( 6o )
Il ne suffît pas qu’une volonté soit constante; elle
doit encore se coordonner avec la loi.
D e la disposition testamentaire de madame de C h a
cera t à la coutume d ’A u vergn e, il y a une relation
générale. Elle n’a point
fait de dispositions parti
culières ou personnelles. Elle n ’a même pas pris la
peine de les modeler sur les principes de la coutume
d’A u v e r g n e , en les expliquant, les détaillant d’après
le type qu'elle aurait pu prendre dans celle coutume
ou ailleurs. Elle a simplement ordonné l’exécution de
la coutume d’A uvergne.E lle a renvoyé aux juges l’étude
et l’application de cette coutum e, et de sa jurispru
dence incertaine qui s’était efforcée d’en fixer le sens.
C'est ce qui a été déjà établi.
L e mode et les conditions, dont les dispositions tes
tamentaires peuvent être susceptibles, sont du ressort
de la législation existante lors du décès du disposant ; les
formes du testament appartiennent seules à la législa
tion qui est en vigueur à l’époque où il est fait.
Les articles 1389
1390 reçoivent donc leur appli
cation au testament de madame de C h a z e r a t, dès
qu'elle est décédée postérieurement à la promulgation
du code Napoléon.
A u surplus, on l’a déjà d it, ces articles ne sont que
des exem ples, des développemens fortuits du principe
qui sort de l'ensemble de notre législation, et sur-tout
des articles 6 et 900 du code Napoléon.
Les auteurs des consultations mettent en opposition
les intérêts privés avec l’intérêt public.
�( 6i )
•'Mais qu’importe au fond q u e la nullité du testament
de la dame de Chazerat tienne à l’ordre public ou!non?'
Cette nullité est-elle certaine? On a établi qu’elle l’est,
et la vérité est encore que l’ordre des successions étant
de droit p u b lic ,’ celui qui substitue à l’ordre des suc
cessions j établi par la loi en vigueur au moment de son 1
d é cè s, qui est la véritable époque de son testament,
un ordre de succéder établi par une loi abolie, tombe
dans une contravention à une loi d’ordre’ public.
Q UA T R I È M E
OBJECTION.
« P a r exem p le, y au ra it-il contravention à l’arti«
«
«
«
cle 13 9 0 ,.s’il était dit que le mari venant a prédéc&der, la femme aurait un douaire de La moitié des biens
de son mari en usufruit, tel qu’il était réglé p a rla
coutume de Paris (2.' consultation, page 6.)»? 1
R É P O N S E .
Si dans cette hypothèse l’exécution; de la disposi
tion était ordonnée, quelle*en serait la raison?
C est parce qu'elle présente un don net et précis,
qui est l’eflet de la volonté p ersonnelle du disposant.
C e don est de la moitié des biens en usufruit. Il n ’y
aurait alors qu’ une simple indication ou citation de la
coutume de Paris.
* Mais il n’y aurait pas une disposition qui se référât
uniquem ent, sous un rapport général, h' une coutume
�( 6* )
abolie q u o n dût étudier et appliquer. 11 y .aurait une
disposition personnelle et particulière; c’est cette dis
position dont l’exécution pourrait être ordonnée, abs
traction fuite de la loi ancienne qui serait citée : ^’in
dication de cette loi ne pourraitêtre qu’un motif; mais le
m o tif est indépendant de la disposition qui est claire
ment énoncée.
O n pourrait encore combattre cette comparaison
par d’autres m oyens; mais cela devient inutile : il faut
se renfermer dans la difficulté relative au testament de
madame de Cluizerat.
L ’ e x e m p l e présenté parles auteurs de la consultation,
prouve
cependant
qu’ils ne: se sont pas suffisamment
pénétrés de l’état de la question, et qu’il leur est im -,
possible de citer un exemple qui rentre dans les dispo- .
sitions de madame de Cliazerat, et d ’après lequel on
pût les justifier.
'
CINQUIÈME
■
'
i
■■
OBJECTION.
«■Madame de Çliazerat prend si peu la coutume d’Au«■vergne pour règle générale et unique de sa succès-.
<r sion, que, loin.de se conformer à cette coutum e, elle
a s’en éloigne en tout point.
« Xiü coutume d’Auvergne interdisait à madame de
« Chazeral la plus légère libéralité en faveur de son .
« mari, et elle lui lègue l’usufruit de tous ses, biens.
*
L a coutume d’Auvergne ne permettait de disposer,
« par testament, que du quart de ses b ien s, et elle dis-
�( 63 )
« pose des trois quarts, etc.» ( i . re consultai ion, pag. 12
et i 3 ; 2.c consultation, pag. 14.)-
r,‘ ::
i
•
,
X .¡i.M i;: j )i; ' R
O N SE.
.•
Il
• i,i 11 :>•
i >i ' ' . 1
1• •
ne résulte de tout c e l a 'd ’autre conséquence-,'si
ce n’est qu’il n’y a de nulles que les dispositions pour
lesquelles madame, defChazerat s en est rapportee sous
un mode général à l’empire de la coutume d’Auvergne.
On ne disconviendra pas qu’on ne.puiss^- scinder les
dispositions d’ un testam en t, annuller celles qui sont
proscrites par la lo i, et conserver celles qui lui sont
conformes. C ’est aussi ce .qu’a faitjleJribunaJ de R.iom;
a annullé les-dispoçitions qui.étaien^vicieqses, en ce
qu’on n’y voyait p(oint sa ^volonté, m^js, seulement celle
d e l à coutumç d’A u v e r g n e , dont elle voulait,l’appli
cation, en la laissant aux juges qui devaient n’ordonner
autre chose que^l’exécution de cette coutume y et il a
maintenu celles qui émanaient de la volonté.directe de
la testatrice.
•
...
■; . I • •
¿1 :
!-i
CONCLUSION.
D e tout ce qui a été dit, il résulte cette conséquence,
que les moyens proposés, tant dans la première que dans
la seconde consultation, ne détruisent pas la vérité des
deux propositions établies dans les deux paragraphes
précédens.
Dans le droit, nul ne peut créer un ordre de succé
der, autre que celui établi par la loi existante lors de
�( 64 )
son décès, ni prendre pour règle de la répartition ou
de la distinction de ses biens, les dispositions d’une cou
tume abolie.
Dans le fait, le legs universel fait par madame de
Chazerat, est en opposition avec ces maximes qui sont
d’ordre public ; car il a été démontré 1.° que madame
de Chazerat a voulu rétablir, entre ses héritiers, l’ordre
de succéder établi par la coutume d’A uvergne; qu’elle
avait pris cette coutume pour règle générale de la dis
tribution de ses biens;
2.° Q u’elle a voulu une distinction de ses biens e n
acquêts et en propres, suivant les principes et la juris
prudence de ce tte coutume ;
3 .° Q u’elle a voulu un mode de représentation à l ’in
fini, tel qu’il était suivi dans cette même coutume.
L e jugement du tribunal civil de R iom , du 22 juin
1808, q u i a prononcé la nullité de ce legs universel, a
donc fait, en décidant ainsi, une juste application des
principes; et le consultant est bien fondé à espérer
qu’ une décision aussi sage, et aussi conforme à l ’esprit
qu’à la le ttre de la l o i , sera confirmée par la Cour
d’appel de Biom.
D é l i b é r é par les anciens jurisconsultes soussignés, à
Paris, ce 24 janvier 1809.
D A R D , DESÈZE, L A C A L P R A D E , B E LLA R T.
A R IOM,
DE L ’IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J. C. SALLES.
�
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Factums Marie
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chazerat. 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Dard
Garron
Lacalprade
Bellart
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
Chazerat (Madame de)
Description
An account of the resource
Consultation [Chazerat]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1801-1809
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
64 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0512
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
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Entraigues (63149)
Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
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Chazerat (Madame de)
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conflit de lois
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legs universels
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Successions
testaments
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COUR
- i • r i'
P
R
E
D ’A P P E L
C
I
S
DE RIOM.
C
P OU R
h a m b r e s
assemblées.
BENOIT
N
o
l’aîné, B E N O I T le jeune, et
e
-,
C l a u d e ,
l
M
a
r
c
o
u
x
..
C O N T R E
et F r a n ç o i s
G u i l l a u m e
M A R C O U X ,
héritiers de: Jean - Baptiste
M A R C O U X , leur p ère , qui étoit donataire
•I
contractuel de Cl au de M A R C O U X
commun ; ledit F r a n ç o i s
père
M A R C O U X
représenté par demoiselle' G O N I N
M A R C O U X , leur mère.
. >• i *
l
F
A
I
T
.
veuve
in :
S
:i! na.
Je
a n - B a p t i s t e M a r c o u x c o n t r a c t a . m a r i a g e a v e c la dem oisele
l
Gonin ; Claude Marcoux lui; fi t donation de tous ses .biens
présens et à v e n ir, à la charge des légitimes q ui furent fixées
à 12000 francs chacune ; celle de Benoit Maxcoux , l ainé de
A
�( 3 )
.
•
tous, fut fixée à 14000 francs ', compris son titre clérical. Le
donateur'se résgrtfa la jouissance tle tons ¿¿s biens, et la somme
de 12000 francs pour en disposer a solrgré ; et en cas de non
disposition, il voulut que cette somme fût partagée entre le
donataire, Noël, Benoit le jeune, Claudine et Agathe Marcoux.
Benoit M a r co u x l'alné étoit pretre des
1 année 17 7 6 ; il vicaria
plus de d e u x ans ; et le 22 ju ille t 1779» il lut agrégé à la s o
ciété de N o t r e - D a m e : de S ain t-E tie n n e : il étoit alors âgé de
plus de v in g t-six ans.
Cette société étoit riche ; son revenu consistoit dans des rentes
provenantes de fondations , et des immeubles considérables :
chaque sociétaire se faigoit unTrevenu d’au moins i 5oo francs.
Benoit M a r c o u x , dés son. en trée, fut nommé s y n d i c , sa
cristain et vica ire : la place dé syndic lu i rendoit 5oo f r a n c s ,
ce lle de sacristain 200 fr, ,
celle de vicaire 800 francs ; ce
y,
qu i portoit son re ve n u à. 0000 f i à n c s , sur lequel il ne dépensoit
p resq ue rien , étant nourri gratuitem ent chez le sieur Georges
Thiyel', son oncle.
L'on ne peut pas constater ces faits, parce que dans les temps
anarchique? de la terreu r, ~les titres et papiers de la société
furent enlevés, des archives , et brûlés; au moins ils n’y existent
plus : c ’est ce qui résulte de la déclaration de M. le curé actuel
de cette paroisse. Mais ils ne doivent pas étonner, puisqu’il est
de nptoriété publique que lç sieur C u n it, collègue du sieur
Marcoux dans la société, y a fait des éconc^nes qui excèdent
)( 100000 francs.
''
.
. .
:
Le 29 mai 1780, Claude Marcoux père acheta une maison
sise rue Val-Benolte, à Saint-Etienne , au prix de 55 oo francs,
sur lequel il ne paya que 5 oo francs.
Cette maison étoit en mauvais état ; elle avoit un besoin
’répaVatfons 'V if ' én Tut1dressé procès verbal de somm M prisée', le >f libvèm Uk ^ 86} *
L t ^ s t e -Btinolr Mhrcôtix- i\it ch aîn é; par son 'p ère , et de
FaircM’ilïie' cè a° réparaftorrs-, Ct d’etv payer le prix , ainsi que
�( 3.;.
celui de la m aison, ’de ses deniers. Il fut émancipé le 28 mai
1781.
i' • ■' , ■
1
’ ■
L e sieur M arcoux, prêtre \ misihorâj déblai puissance pater
n e lle ’, employa .ses.économies ,,yrecoufut à la bourse de ses
amis, et paya le prix de l’acquisition i îles lods et réparations:
c’est ce iqui résulte des quittantes.)' n-,
1
L e 29 mars 1783, le sieur Claude Marcoux père approu\a
tous ces payemens, et en fit à son fils Benoît une obligation.
11 paroit que dans cet acte l’on a fait une erreur de date dans
la quittance du sieur Cizeron, que l’on a mise du i 5 janvier 1781,
tandis que réellement elle e s t d u n 5 janvier ,1782 ( 1 )• Mais
cela est assez indifférent, parce q u au i 5 janvier ;i7 8 i Benoit
Marcoux avoit bien*pu. faire des 1économies pour payer cette
somme de 2730 francs, puisqu’il étoit hors de la maison depuis
plus de quatre an s, et jouissoit depuis deux ans d’un revenu de
3 ooo francs : il avoit dès-lors un pécule^i/Æj/ cnstrense.
Le 11 janvier 1792, C laude, et Jean-Baptiste M arcoux, son
donataire, vendirent à Benoit M arcoux, prêtre, la maison dont
on vient de parler, et le.domaine de P arade, acquis par ledit
Claude Marcoux du sieur D e ve au x , le 8 mars 1768. Le prix
fut de i 65 oo francs , qui furent compensés avec 14000 francs
pour la légitime paternelle, et le surplus dévoit être imputé sur
les droits maternels.
i
1.:
Dans le même moment les parties firent un sous-seing privé,
par lequel il fut dit qu’en considération de ce que les immeubles
relâchés valoient p lu s, Benoît M arcoux cédoit et passoit quit
tance de l'obligation du 29 mars 1783, ainsi que de tout sup
plément.
)
1 »•.
ri
.
D e cet acte il résulté que Jean-Baptistè M arcoux, ainsi que
son père, reconnoissent et approuvent, et l’obb'gatidn de 1783,
et les quittances qui y sont rappelées et qui en. sont les causes.
Si elles sont un don déguisé , il est donc fait par le donateur
(1) Le sieur C izeron est m ort depuis en tou r quatorze ans.
A
2
�---------------,
( 4 ")
et lë donataire.* Quellef'absurdité ! et quelle inconséquence de
la part des héritiers de ce dernier , de vouloir critiquer et )se
plaindre du faitflniéme de'leur auteur !iq v i n ni; I
o.'
Benoit Marti o üx j- prêtre , vivoit dans >l’aisancef; ce qui luit
attira la persécution qu’il essuya<en 1 an. 2 , pendant la terreur. .
Le 5 o brumaire il fut arrêté c h e z 'lui , par ordre de l’infâme
Javogue; on lui prit io’Sjo francs et deux montres en or, ainsi
que plusieurs papiers, dans lesquels se trouvèrent ses lettres de
prêtrise : c ’est ce qui est cause q u il ne peut les représenter.
Jean-Baptiste Marcoux est décédé. Claude, son père, a survécu
à son donataire, et est ensuite mort en 1 an i o '( i ) 5 sous, le
régime des nouvelles lois.
i:
' [
Les légitimaires se sont pourvus au tribunal de Montbrison,
contre les représentans du donataire, les uns ont demandé leur
légitime fixée, une autre, ex-religieuse, sa légitime de droit,
et to u s leur portion dans la xéserve de 12000 fr. , à l’exclusion
de l’héritier.
T.
Il s’est engagé une instance dans laquelle les représentans de
l’héritier ont soutenu, i°. que la réserve devoit faire face à la
légitime de l’ex-religieuse, dont ils ne se trouvoient pas chargés;
20. qu’Agathe Marcoux, qui, dans son contrat de m ariage, s’étoit
constitué de son ch ef une somme'de 6000 francs , devoit en tenir
compte sur sa légitime , attendu que c ’étoit un don déguisé : ils*
ont succombé. S’étant rendus appelans , ils ont répudié la
donation des biens à venir , et ont soutenu que la réserve en
faisoit partie, qu’elle devoit conséquemment servir à payer les
légitimes. Leur nouveau système ayant été accueill i , à l’ex
ception d’Agathe M arcoux, qui obtint l’intégralité de sa légi
time et portion de réserve , trois des légitimaires y acquies
cèren t, et trois autres se pourvurent en cassation.
A la Cour de cassation, les représentans de Jean-Baptiste.
Marcoux ont fait valoir les mêmes moyens qu’en cause d’appel;
(1) L e 28 frim aire.
�( 5 )
ils ont été rejetés: laX ou r. a cassé 1arrêt de L yo n , et a ren
voyé les parties devant la Cour ¡d’appel de Riom.
,fi
Là on a changé de m arche, et l’on a prétendu que la réserve
étoit épu isée, i°. par le don déguisé fait à Agathe M arcou x,,
dans son contrat de mariage avec Matthieu F^rotton; 20. par un
autre don déguisé qu’ils ont cru trouver dâns l’obligation de 3780,
faite à Benoit Marcoux l’aîné par son père, et d an sja vilité du
prix du relâche du 11 janvier 1792; vilité, disent-ils, dont ce
dernier convient dans la contre-lettre du même jour, puisqu’il
y dit que les immeubles valant beaucoup plus , il cède l’obli
gation et en passe quittance; que la preuve que cette obliga
tion est un don , c ’est qu’elle rappelle des payemens faits par
Benoit M arcoux, dans un temps où il n’ayoit pas pu gagner pour
le faire.
r
L ’on est étonné d’un raisonnement aussi absurde. La Cour a
ordonné le rapport des quittances rappelées dans l’obligation,
et la preuve de l’instant où Benoit Marcoux aîné est devenu
sociétaire de Notre-Dame de Saint-Étienne.
Pour réfuter le nouveau système des appelans, il suffit de
dire, i°. à 1 égard d’Agathe M a r c o u x , femme Frotton, que tout
est d écid é, soit par 1 arrêt de la Cour d’appel de L y o n , qui a
été acquiescé dans cette partie, et qui a décidé que les 6ooo'fr.
qu’elle s’étoit constitués de son ch ef n’étoient pas un don pa
ternel ; arrêt qui a condamné les représentans du donataire à
lui payer l’intégralité de sa constitution dotale, sur laquelle le
père avoit payé une somme de 6000 fr. , et le donataire celle
de 4000 fr. ; soit par la transaction passée ensuite de cet arrêt,
le 3 i août 1807, par laquelle ils lui payent n o n - s e u l e m e n t le
restant de sa constitution, mais encore sa portion dans la réserve,
et même un supplément de légitime ;
20.. A 1 égard de Benoit Marcoux l’alné, que les payemens
rju ^ n *aUs pour son père sont sincères, et justifiés par le rapport
('s quittances; qu’ils ont été reconnus et approuvés parle père
com m un, par l’obligation de 1780 ; qu’ils l’ont été ensuite par
�(< n
ie donataire lui-m ém e, lors de la contre-lettre de 1792, puis
qu’il lui en tient compte sur le prix du relâche du môme jour :
d’où il suit une fin dé non-recevoir insurmontable, contre toute
critique.
Et peut-on être étonné qu’un prêtre qui a vicarié deux a n s,
qui ensuite, pendantdeux autres années, a joui d’un revenu
de 3ooo fran cs, par son agrégation à une riche société, ait pu
gagner 2750 francs? A l’égard des autres payemens faits posté
rieurement à son émancipation, personne n a rien à y voir; il
n’étoit plus sous la puissance paternelle ; il pouvoit emprunter
et faire tout ce qui lui plaisoit.
Pour ce qui concerne la vilité du prix du relâche, rien n’est
plus aisé que d’y répondre.
i°. D e p u is 1792 ju squ’à présent il s’est écoulé dix-sept ans,
et l’on n e s’en est pas plaint : première fin de non-recevoir.
20. L e s a ctes de re lâ ch e pour droits légitimaires ne sont pas
susceptib les d ’étre rescindés p our cause de vilité de prix.
3°. Cette action étrangère à la question soumise à la décision
de la Cour de R iom , n’est pas de sa compétence ; c’est une
action principale qui doit suivre la hiérarchie des tribunaux.
4°. Le prix est au-dessus de la valeur réelle des immeubles
relâchés ; un simple calcul suffira pour l’établir.
La maison a été achetée en 1780, 55 oo francs; il faut y
ajouter 2873 liv. 10 s . , montant des réparations , ce qui en a
porté la valeur à 8773 liv. 10 s. ; elle valoit tout au plus réel
lement , au moment du relâch e, 9000 francs.
Le domaine de Parade a c o û té , en 1768, 7800 fr. ; il étoit
affermé le 24 juin 1790 ( pour six ans) , 35 o f r . , vingt livres
de beurre, deux cents oeufs et une livre de laine; ce qui portoit
la ferme à 365 fr. n e t , et qui fait présumer une valeur réelle
de 7 ii 8000 francs. En la portant à 10000, c ’e s t , ce rtes, faire
reste de droit. Cette som m e, réunie aux 9000 f r . , valeur de la
maison f ne produit qu un total de 19000 fr. ; et le prix réel du
rtldche se porte à plus de 24 °a ° francs, comprise l’obligation
�de 178 3 , et sans y comprendre le supplément dont la renon
ciation est d’une valeur inconnue.
Le domaine de Parade a été revendu le 4 nivôse an 7 , au
moment où les immeubles avoient considérablement augmenté
de valeur, au prix de 15000 francs.
L ’on excipe de ce que Benoît Marcoux l’aîné, dans la contrelettre, a dit que les immeubles qu’on lui avoit relâchés valoient
beaucoup plus. Mais cette stipulation ne se rapporte qu’à la
valeur des immeubles relativement aux assignats qui étoient la
monnoie de ces tem ps, et non à leur valeur réelle qui est la
seule à consulter : or, il est établi qu’elle n’excédoit pas 19000f.
L é prix porté par l’acte est de 165 oo fr. ; la renonciation au
supplément valoit bien sans doute le surplus , et la cession de
l'obligation de 17 83 est véritablement une grâce de la part de
Benoît Marcoux.
Le donataire a gagné, puisqu’il a payé 19000 francs avec un
domaine qui ne produisoit que 565 fr. ; il n’a rien fourni dans
le prix ni dans les réparations de la maison achetée postérieu
rement à sa donation : il a au surplus approuvé tout ce qui
s est passé ; et n est-il pas ridicule de lui entendre opposer ses
propres faits à Noël et Benoît M arcoux le jeune, qui n’ont entré
dans aucun des actes faits avec Benoit l 'a îné? Peut-il leur op
poser quelque compensation? Il ne pourrait leur opposer qu’une
disposition formelle de la part du pére , de sa réserve, et il
n en existe point.
Signé
B enoit
M A R C O U X jeune.
A R IO M , de l’imprimerie de T HIBAUD - L andriot , imprimeur
de la Cour d’appel. — Mars 1809.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Benoît, l'aîné. 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcoux jeune
Subject
The topic of the resource
charges ecclésiastiques
dons déguisés
ventes
avancement d'hoirie
assignats
Description
An account of the resource
Précis pour Benoît l'aîné, Benoît le jeune, et Noël Marcoux ; contre Claude Guillaume et François Marcoux, héritiers de Jean-Baptiste Marcoux, leur père, qui était donataire contractuel de Claude Marcoux, pére commun : ledit François Marcoux représenté par demoiselle Gonin, veuve Marcoux, leur mère.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1780-1809
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0511
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Etienne (42218)
Parade (domaine de)
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Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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assignats
avancement d'hoirie
charges ecclésiastiques
dons déguisés
ventes
-
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ARRÊT
D E LA
COUR D’APPEL SEANT. A RIOM,
POUR
M .e P
i e r r e
- A
l e x i s
- L o u is
BRU,
Avocat,
i . er Suppléant au T r ib unal civil de S a in t - F l o u r ;
c o n t r e
L es H é r i t i e r s
de F r a n ç o i s
D A U B U S S O N , de
C le rm o n t, et J e a n M E Y R E , Greffier au T ri
bu na l de commerce de S a in t-F lo u r.
N a p o l e o n , par la grâce de D i e u et les constitu
tions , E m p e r e u r des Français, R o i d ’Italie, P r o
t e c t e u r de la Confédération du R hin , à tous pré
sens et à v e n i r , S a l u t :
L a C o u r d ’ A p p e l séant à R i o m , département du
P u y - d e - D ô m e , a rendu l’ Arrêt su ivant:
A u d ie n c e de la première C h a m b r e , du m e r c r e d i ,
8 n o ve m b re 1 8 0 9 ;
Séant Messieurs R e d o n , premier P r é s i d e n t , C h e
valier de la L é g i o n d’h o n n e u r ; B o n a r m e , d o y e n ; M a n d e t , Chapsal, Coinch on - L a f o n t , Br anche et BarretD u c o u d e r t , juges de la première C h a m b r e ;
Assistans Messieurs V e r n y et Calmard , j u g e s - a u d i teurs; M . T o u t t é e , Substitut du Proc ur eur -gén éra l ;
Entre P i e r r e - A l e x i s - L o u i s B r u , avocat et premier
suppléant au T r ib un al civil de l'arrondissement de St.F l o u r , appelant de jugeme nt rendu audit T r i b u n a l ,
le 9 août 1808, aux fins de l’exploit du 6 déc em b re
1808 , de la requête et ordonnance du 8 du m e m e
mois, et autres exploits des 10 et i 5 aussi du m ê m e
m o i s , et demandeur a u x fins d ’autre req uê te , signifiée
�----- ?--------------- -
ç-x j
à avo ué le 12 janvier 1809 , comparant par Je a n Baptiste M a r i e , son a v o u é , d’ une part;
F t Tean M e v r e , greffier du T r ib u n a l de co m m erc e
d e ladite ville de Sain t-F lou r, habitant de la m ê m e
vi lle , intimé et d é f e n d e u r , comparant par Philippe
D a u d e , son a v o u é , d’autre p a r t ;
Et Joseph Daubusson p è r e , Daubusson fils, n é g o
c i a i , habitans de la ville de Clermmit-Ferrand ; A n t o i n e - B e r n a r d M a g o t , propriétaire ; Marie Daubusson
son ép o u s e , autorisée en ju s ti c e , habitans du lieu et
c o m m u n e de C h a n o n a t ;
.
^
A r c h i m b a u d
L a g a r d e , propriétaire, et autre M a ri e
Daubusson son é p o u s e »autorisée en j u s h œ , habitans
du lieu et c o m m u n e de St.-Gervais;lesdits Daubusson,
bénéficiaires de François Daubusson leur fils
e t f r è r e , et ayant été repris avec eux en son lieu et
p l a c e , par arrêt du 9 juin 1809., aussi intimés, comparant
par A n t o in e B a y l e , leur avo ué , aussi d’autre part ;
Et ledit Jean M e y r e , appelant du m ê m e ju g e m e n t ,
aux fins de l ’exploit du 26 dudit mois de d é c e m b r e ,
comparant par ledit M . e D a u d e , son avoué , d ’ une part ;
Et ledit B r u , i n t i m é , comparant par ledit M .e M arie,
son a v o u é , d’une'part ;
Et lesdits Daubusson,Mag ot et A r c h im b a u d -L a g a rd e ,
encore appelahs du m êm e ju g em e nt , et demandeurs aux
fins de la requête signifiée à avoué le 18 janvier 1 8 0 9 ,
c o m p a r a n t par ledit M . e B a y l e , leur a vo ué , d’autre part ;
E| ledit Bru, intimé et défendeur, comparant par ledit
M e M a r i e , son a v o u é , d ’autre part.^
h
é
r i t i e
r s
L e s c o n c l u s i o n s d e B r u , s o n t : Q u ’il p l a i s e à l a C o u r
~ u, ’ .'1
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&é
p
1 a r le T r ib
^ u n a l c i v_i l d e S t . -#
Elour en ce qu ll 11 a été accorcle amB r u > m délai ni
dommages et intérêts; ém endan t, lui accorder le délai
qu’il plaira à la Cour fixer pour le paiement des c o n
damnations contre lui prononcées p a r le jugement dont
est appel ; c o n d a m n e r M e y r e et les héritiers Daubusson,
à 10,000 f. de dommages et intérêts applicables, du con
sentement de B r u , au x hospices de R i o m et de Saint-
�< 3 )
F l o u r ; supprimer les mémoires imprimés de M e y r e *
ordonner l’impression de l ’arrêt à intervenir au n om bre
de 3 5 o exe m plaires, et condam n er M e y r e et les hér i
tiers Daubusson a u x dépens.
L e s conclusions de M e y r e tendent à ce q u’il plaise
à la C o u r , sans s’arrêter à l ’appel de Bru, dans lequel
il sera déclaré n o n - r e c e v a b l e ; sans s’arrêter pareille
ment à la dem ande en suppression de mémoires, de la
quelle il sera d é b o u t é , dire q u ’il a été m al jugé par le
jug em ent dont est appel, en ce que la créance dont il
s’agit a été réduite à la somme de 8,240 fr. ; en ce
que les intérêts n'ont été adjugés à M e y r e que depuis
la demande; en ce que M e y r e a été condamné aux dépens;
é m e n d a n t , condam ner Bru à p a y e r à M e y r e la somme
de 20,240 fr. ave c les intérêts à com pt er du jour du
protêt des effets dont il s'agit; le conda m ner en outre
en tousles d ép en s, tant en cause principale que d ’appel;
ordonner que l ’am ende consignée sera re ndue ; ordonner
encore que les mémoires publiés par B r u , seront et de
meureront supprimés c o m m e injurieux et c a l o m n i e u x ,
a v e c dommages et intérêts.
L e s conclusions des héritiers Da ub uss on, sont : Q u ’il
plaise à la C o u r dire q u ’il a été m al jug é p a r l e j u g e
ment dont est appel; é m e n d a n t , les r e n v o y e r de toutes
les demandes formées par Bru ; ordonner la suppres
sion des libelles distribués ; le condamner en 1 0 ,0 0 0 fr.
de dom mages et intérêts applicables de leur consen
tement aux hospices de Riom et de Clermont; condamner
Bru en tous les dépens des causes principales et d ’appel»
et ordonner que l’am ende consignée sera rendue.
FAITS.
En l’an 10 et en l ’an 1 1 , Bru avait emprunté di
verses sommes à M e y r e , et avait souscrit, pour ces
emprunts, des letlres de ch an ge, dans lesquelles Bru
prétend q u ’élaient compris les iniérêts calculés sur le
taux de v i n g l - q u a l r G pour ce n t; ces le tl r e s de c h a n g e ,
à leur é c h é an c e, avaient été renouvelées et re m pla-
�(4 )
céesj suivant B r u , par de nouvelles lettres de change
qui se c o m p o s a ie n t , et des sommes portées dans les
précédens effets, et des intérêts de ces sommes, cal
culés aussi au tau x de vingt-quatre pour c e n t , en sorte
que les capitaux et les intérêts étaient confondus dans
les lettres, et formaient une masse qui, à chaque r e
nouv elle m en t , produisait de n ou ve au x intérêts aussi
h vin^t-qualre pour cent. Ces renouvellemens d ’effets,
le taux de l ’intérêt e x i g é , et la confusion des capitaux
et des intérêts dans les lettres de ch an ge, sont indi
qués par plusieurs notes écrites de la main de M e y r e ,
et produites au procès par une série de lettres de
chancre que B ru avait retirées de M e y r e . Les. mêmes
notes*, écrites par M e y r e , indiquent aussi divers paiemens faits par B r u , durant le cours de cette opéra
t i o n , et Bru prétend en avoir fait plusieurs autres.
L e s renouvellemens d effets ont eu lieu jusqu’au 9
août 1 8 0 7 , date de l ’éc héance des dernières lettres de
change ; et selon Bru , les intérêts avaient toujours
été exigés à vingt-quatre pour ce nt, exc ept é depuis
le 9 mai 1806 , époque à laquelle ils ava ie nt été
réduits à dix - huit. Dans cette série de lettres de
ch a n g e , renouvelées de l’an 10 à 1807, celles anté
rieures au 9 mai 1806 avaient toutes été consenties
au profit de M e y r e , et toules passées par M e y r e , à
l ’ordre de D au b u sso n , revêtues au dos de la signa
ture de M e y re . De pui s le 9 mai 1806, elles avaient
été consenties au profit de Daubusson ; et c ’est à
l ’ordre de Daubusson q u’avaient été tirées nota m ment
dernières lettres de change payables le 9 août 1807.
Ces différentes lettres de c h a n g e , depuis les premiers
mois de l’an 1 2 , étaient revêtues de deux n u m é r o s ,
l'un renvoyant au registre de M e y r e , et l’autre à celui
de Daubusson.
L e 11 a oût 18 0 7 , protêt à la requête de Daubusson
des lettres de change tirées en sa faveur par Bru , et
s’élevant à la so mme de 20,240 fr. Bru est assigné
devant le Tribunal de c om m erce de Saint-Flour, tou
l e
s
�(
5 )
jours à la requête de D a u b u s s o n , et le 24 août il
oblient contre lui un ju geme nt par d é f a u t , qui le
c o n d a m n e , par corps, au paiement de 20,240 f r . , et
qui ordonne une exécution provisoire.
Br u fo rm e opposition à ce jugement , soutient que
les lettres de change sont simulées, q u ’elles ne sont que
des billets de prêts usuraires, et que le T r ib u n a l de
c o m m e r c e est inc ompétent. U n second jugement du
7 septembre déboute Bru de son opposition, et B ru
en interjette app el, par requête et exploit des 11 et
12 septembre.
Sur l ’a p p e l , arrêt contradictoirement rendu en la
C o u r , le 20 n o v e m b r e 1 8 0 7 , qui par les motifs que
les lettres de change n ’étaient que de simples billets,
et n ’avaient eu pour objet q u ’un simple pr êt, et que
la série de ces lettres de change n ’était que la suite
d ’ une seule négociation dans laquelle Daubusson et
M e y r e étaient ou c o m m u n s , ou prête-noms l’ un de
l ’a u t r e , prononce q u ’il avait été nullement et in c om p é t e m m e n t jugé par le T r ib u n a l de c om m erce de
S a in t-F lou r; et p o u r être fait droit aux parties, les
r en v o ie devant le T r ib u n a l civil de S a i n t - F l o u r , , où
était déjà pendante une dem ande fo rm ée par B r u ,
contre M e y r e et D a u b u s s o n , en réduction des inté
rêts usuraires, et en imputation de la valeur de ces
intérêts usuraires sur le montant des lettres de change
dont on lui demandait le paiement.
Cette d e m a n d e , qui avait été soumise à la conci
liati on, avait été formée par exploit du 5 octobre pré
cé d e n t, et Bru avait conclu à 12,000 fr. de réduction,
si m ie u x n ’aimaient Daubusson et M e y r e en venir à
un c o m p t e , en représentant leurs registres. Bru offrait
dans ce dernier cas de leur allouer l ’intérêt à cinq
po u r cent.
On remarque que dans l’arrêt dont on vient de
rendre c o m p t e , Daubusson était seul partie contre Bru.
t<’aiïaire poursuivie devant le Tr ibun al civil de St.F l o u r , Daubusson n’est plus la partie principale contre
�( 6 )
B r u , c ’est M e y r e ; celui-ci, par exploit du 3 o janvier
1808 , expose à Bru : « Q u ’il ne peut disconvenir q u’à
« diverses époques il ne lui ait fourni des fonds; q u ’à
« raison de c e , Bru n’ait fourni des lettres de ch ange ,
« au nom de François Daub uss on , de C l e r m o n t , et
« que par l ’arrêt du 20 n o v e m b r e , ces lettres de change
« ont été considérées c o m m e de simples promesses ».
E n conséque nce , M e y r e , en son'p ro pre n o m , appelle
B r u devant le T r ib u n a l de Saint-Flour, en reconnais
sance de l ’écriture et signature mise au bas des lettres
de c h a n g e , et en paiement des 20,240 francs, montant
'd’icelles, ave c intérêls depuis le protêt.
Ces lettres de c h a n g e t i r é e s a 1 ordre de D a u b u sso n ,
n ’ ont cependant jamais été passées a celui de M e y r e ,
et l ’aval de celui-ci n’y avait pas été apposé.
P a r act e signifié à a v o u é le 6 février 180 8, et par
r e q u ê t e signifiée aussi h avoué le i 5 mars suivant ,
B r u fo rm e contre M e y r e et Daubusson une dem ande
en pai em ent de 1 5 ,ooo fr. de dommages et in t é r ê l s ,
h raison des poursuites ve xat oire s, et des injures q u’il
a essuyées de leur part.
L ’affaire portée à une première audience le 23
'lüars 1808 , Daubusson n ?y paraît que pour dem ander
son r e n v o i , parce que l ’affaire ne le concerne pas.
B r u dem and e le rapport des registres de M e y r e et de
Daubusson depuis l ’an 1 0 , et le T r ib u n a l de SaintF l o u r , sans avoir égard à la demande en renvoi de
D au b u sso n , ordonne q u ’ils seront tenus de représenter
les registres q u ’ils avaient^tenus ou dû* tenir, par suite
d u c o m m e r c e auquel ils s étaient livrés; et c e , depuis
et compris Fan 10 jusques et compris 1807. Ce j u g e
m e n t est signifié à av o u é le 29 m a r s , et aux d om i
ciles de M e y r e et D a u b u s s o n , par exploits du m ê m e
jour 9 avril 1808, a vec sommation de s’y conformer.
'Cbjligemerit n’est e xé cuté ni par M e y r e ni par D au b u s•son; ce dernier ne se présente plus, et M e y r e se co n
tente de produire do simples registres d ’annotations,
indiquatitisculement les lettres de change qui lui ont
été faites, et 11e co m m en ça nt q u ’en l ’an 12.
�C7 )
_ En cet é t a t , la cause portée d e nouveau à l’audience
du T r ib u n a l civil de S a in t - F l o u r , il y est r e n d u , le 9août 1808, le ju g em e nt dont est a p p e l , ainsi conçu :
« L e T r i b u n a l , considérant q u ’a n c i e n n e m e n t , en
matière c i v i l e , l a stipulation d’intérêt pour simple prêt
n’était pas perm is e, q u ’ elle ne l’a été que par le d é
cret du 3 octobre 1 7 8 9 , au taux déterminé par la loi;
« Considérant que le taux légal était alors de cinq
pour c e n t , sans re t e n u e , et depuis la loi du 23 n o
v e m b r e 1 7 9 0 , avec la faculté de stipuler la non retenue;
« Considérant que si Ton ex c e p t e la fameuse l o i ,
presqu’aussilôt rapportée que p r o m u l g u é e , qui décla
rant l’argent marchandise , semblait autoriser to u te
espèce de traiic , auc une loi n’a changé le taux légal
de cinq pour cent en matière civile, pas m ê m e la der
nière loi du 3 septembre 18 07;
« Considérant que l'intérêt con ventionnel qui, jus
q u ’à la publication du code N a p o l é o n , devait être le
m ê m e que l’intérêt lé gal, devait être stipulé par écrit;
qu'il n y a de différence entre cette loi et l’art. 1907
du c o d e , q n ’en ce q u e des intérêts stipulés en co n T
séquence de cet article, et excédant le taux légal, doi
v e n t ê t œ n o n - s e u l e m e n t stipulés par écrit , mais e n r
core indiquer le taux de l’intérêt c o n v e n u , tandis q u e ,
d ’après la loi de 178 9 et de 1790, il suffisait de s’obliger
par écrit à payer l’intérêt, a v e c ou sans r eten u e;
« Considérant en effet que sans cet e n g a g e m e n t écrit
et spécial, pour l’ intérêt du capital p r o m i s , devenait
parfaitement inutile la loi de 1 7 8 9 , dont un des prin
cipaux objets était sans doute d ’éteindre ou au moins de
restreindre cette cupidité g é n ér ale , signe non équivor
que de la décadence des mœurs qui a va it , antérieu
re m en t à sa pr omulga tion, fait imaginer divers m oye n s
détournés de faire produire intérêt aux contrats de
simples prêts, contre le vœu de la loi qui le déf endait
alors; q u ’en effet en présentant, par e x e m p l e , une
obligation où tout paraît capital,, le prêteur pourrait
a son gré alternativement soutenir, ou que réellement:
�( 8 }
tout est ca p it al , on s i, par des circonstances particu
lières et autres que l'obligation, il était prouvé q u ’elle
re n f e rm e des intérêts , excip er de la convention ; que
cette manière de contracter ne serait qu'un m o y e n
facile d ’ex éc uter une loi rapportée (celle qui avait
déclaré l’argent m ar ch an dis e), et pr ouve dès-lors suf
fisamment la nécessité de la stipulation par écrit pour
les in térê ts, avant c o m m e depuis le code;
« Considérant que des principes posés, il résulte
q ue tout intérêt q u e l c o n q u e , excessif'ou n o n , qui n’est
pas stipulé par é c r i t , est par cela m ê m e illégi tim e,
et ne peut être alloué par les Tr ib unaux ;
«• Considérant q u ’excip er de prétendues négocia
tions publiques qui ont excéd é de beaucoup pour les
intérêts le taux de cinq poui ce nt, a moins q u ’il ne
s’ agisse d ’intérêt légitimement stipulé par éc ri t, c ’est
vouloir présenter c o m m e l o i , la contravention à la
l o i , et moins offrir un m o y e n , que rappeler le sou
ve nir des m au x qui ont désolé la F r a n c e , et que le
héros qui la g ouv ern e fait si heureusement réparer
chaque jour ;
n- Considérant que l’anatocisme fut toujours sévère
m e n t réprimé par les lois; q u’il n ’est p a s , c o m m e on
a voulu le donner à ente ndre , autorisé par les arti
cles i l 54 et 1 1 55 du code Nap oléon ; que l’article
1 1 6 4 forme à la vérité droit n ou ve au , e n f e r m e ! t a n t
q u e l’intérêt d’ un capital échu produise intérêt; mais
q u ’in dépen dam m en t de ce que cela doit s’entendre
S e u l e m e n t d ’un intérêt légitimement acquis et échu ,
et au moins pour une année entière, com m e le dit
l ’article, il faut encore que si c ’est par convention ,
elle soit é c r i t e , et fasse distinguer l’intérêt con venu
de celui qui devient capital; que dès-lors les articles
précités 11e pe uvent s’applique1’ a des intérêts illégagalement exigés ou pe rçus, confondus et amalgamés
avec d’autres intérêts et capitaux dans le m ê m e titre,
sans quoi il faudrait regarder c o m m e inuliles ou mal
conçus les articles e u x - m ê m e s n 5 4 , 1 1 55 et 1907^
�( 9 )
et dire q u ’ils auraient dû être remplacés par la dis
position de la loi qui déclarait l ’argent marchandise
puisqu'ils devaient avoir le m ê m e effet ; Nc ’est-à-dire
celui dans tous les tems employé, par les usuriers ,
pour ruiner les familles ;
« Attendu que l ’article 190 6, qui a introduit un droit
nouveau au moins pour le ci-devant parlement de Paris,
n ’a d ’application qu'à l ’intérêt et au taux fixé par la l o i ,
lorsqu’il a été volontairement p a y é et q u’il n’avait pas
été st ip ulé, et nullement à des intérêts excessifs, non
librement stipulés, impérieusement co mmandés au be
soin, et q u ’on ne prétend acquittés que p a r c e q u ’ils
se trouvent compris dans des effets renouvelés, et a m a l
gamés avec de n ou ve au x capitaux ou intérêts;
« A tte n du que l’art. 5 de la loi du 3septem bre 1807,
ainsi que l’arrêt de la Cour de cassation, du 9 mai der
nier , invoqués par M e y r e , sont sans analogie ave c la
cause actuelle ;
«-Attendu, par application à l’espèce à ju g e r , q u ’il
est constant que les effets dont le paiement est r é c l a m é ,
sont la suited une négociation c o m m u n e à Daubusson et
M e y r e , ayant eu pour objet de simples prêts faits à
P i e rre -A le x is -L o u is B r u , a v e c anatocisme et cu m u la
tion d intérêts excessifs; que cette c o m m un auté d’in
térêts deja tenue pour constante par l’arrêt de la Cour
d appel de R i o m , ne peut laisser aucun d o u t e , si l ’on
considère, d ’ u n côté, le refus de Daubusson de présenter
ses registres, l ’affectation de M e y r e de ne présenter que
des registres q u ’il n o m m e annotations, et ceux depuis
a n 1 2 se u l e m e n t, q uo iqu’il soit prouvé q u ’il en tenait,
ou devait tenir en l’an 10; et que sur ce m otif il ait été
c o n c a m n é à les représenter; si l’on considère sa preen l i o n , de n’avoir été que l’agent de Daubusson, et
.e C ls^, *^u *enr des deniersde celui-ci clans les fonds prêtes
au s. B i u ; e t , d ’autre p a r t , le paiement ou rembourse
m ent qu il prétend avoir fait audit Daubusson, et sur
lequel il fonde sa demande contre le sieur B r u , quoi
que Daubusson en ait fait sa propre aflàire, en accep
tant les lettres de change en son n o m , en en poursui
�( 10 )
vant aussi le paiement en son nom au Tr ibun al de c o m
mer ce et à la C our d ’app el, et a v e c tout cela nulle g a
rantie ex er cé e par M e y r e , contre Daubusson, dans le
cas où la demande du sieur Bru serait accueillie;
«■A l l e n d u que M e y r e se plaint mal à propos du d é
faut de com m un icatio n des lettres de change et notes
dont excipe le sieui' B r u , pu isque 4ci représentation des
registres n’ étant ordonnée que pour l a b u tt e m e n t a vec
c e s lettres de change et notes, la communication de cellesci était par cela m ê m e indirectement ordonnée; que
rien n'empêchait q u ’elle eut lieu devant le juge-com
missaire qui avait été n o m m é pour c e , si la représen
tation des registres de Daub u ss on, et de tous ce ux que
M e y r e était tenu de produire eût été faite;
«Att en du que Me}rre n’a pas dénié avoir remis à Bru,
et les lettres de change et les notes écrites de la main
dudit M e y r e , que ledit Bru rapporte;
« A t ten d u que les premières lettres de change rappor
tées ne pr ésentent'qu e des capitaux; niais.que la suite
des opérations rend vraisemblable, et laisserait croire,
c o m m e l ’a prétendu le sieur B r u , qu'on y avait a m a l
gamé un intérêt à 24 pour ce n t; q u ’il résulte en effet
de la note d e u x iè m e , écrite de la main du sieur M e y r e ,
que'trois lettres de change retirées p a r l e sieur Bru, et
par lui rapportées, l’ une de 5 ,000 f., l’autre de 3 ;o o o f . ,
et l ’autre de i ,338 f r . , toutes sous-la date du 21 nivôse
an 12 , et formant un total de 9, 338 francs, furent co n
senties eu remplacement d’autres effets de l ’an 10 et
de l'an 1 i , e t desquelles l’intérêt à 2 4 pour cent se trouve
calculé dans la note pour former le total de 9, 338 fr.;
que la note troisième énonçant de nouveau les trois
]ülires de change de 0,000 f i , de 3 ,000 fr. et i , 338 f r . ;
plus, d ’autres effets retires et îapportés par B r u , a v e c ,
pour chacun de c e u x - c i , un calcul partiel d ’intérêt à
24 p o u r c e n t , contient un total de 16,436 fr., a vec un
nouveau calcul, pour six mois, de cette s o m m e, se por
tail! à celle de i 8 , i 5 i fr. ; que le tout calc ulé, avec
addition du prix du papier des billets, est ensuite de
ven u l'objet de nouvelles lettres de chan ge ; que la 4.*,
�( II )
5 .eet 6.e notes contiennent également des calculs à 24p ou r
c e n l , en rappelant successivement des effets p r é cé d e m
m en t cons enti s, prou ve nt q u ’ils ont été le r e m p l a c e
ment les uns des autres; que l'intérêt déjà très-fort dans
la première opération , allait toujours croissant; q u ’il
semblerait m ê m e , par le soin que l’on avait mis de
comprendre le prix du papier des billets, que ce prix
produisait aussi un intérêt excessif;
« A t ten d u que si aux époques de renou vellement
O n rem arq ue quelque différence, c o m m e dans le total
de la dernière note qui paraît exc éder de quelque chose
le montant des lettres de change aujourd’hui réclamées,
qui n ’est que de 20,240 fr., cela peut provenir de q u e l
ques paiemens faits, ledit Bru ayant déclaré n avoir la
note de tous ce ux qu'il a faits;
« A t te n d u que ces différences prouven t la nécessité
de la représentation des registres de Daubusson et M e y r e ,
et d ’un c o m p t e à faire par abutte m ent de ces registres
a v e c les let tres de change et notes de la main de M e y r e ,
rapportées par B r u ;
«A t te n d u enfin q u ’à défaut d’en venir à ce c o m p t e ,
Daubusson et M e y r e doivent être condamnés à faire
raison au sieur Bru de la so m m e de 12,000 f r . , à la
quelle ledit Bru s’est r e s t r e i n t , a v e c d ’autant plus de
raison, que par apperçu ce lte so mme de 12,000 fr. pa
raît être plutôt au-dessous de la restitution à laquelle
ledit Bru a droit de p r éten d r e, déduction faite de l ’in
térêt à 5 pour cent q u ’il a consenti d ’allouer; q u e si elle
était au-dessus, lesclits M e y r e et Daubusson o n t m o y e n
de se réditner de tout excédant en v e n a n t à c om p te;
« Par ces divers motifs, le T r ib un al donne défaut
contre ledit Daubusson ; faisant droit sur les demandes
réciproques des parties , qui ont été jointes par ju g e
ment contradictoire du 23 mai dernier ; co nd am ne
François Daubusson et M e y r e , conjointement, a faire
raison a Pierre-Alexis-Louis Bru, de la somme de 12,000 f.
a laquelle ledit Bru a voulu se restreindre pour resti
tution d ’intérêt excessif et usuraire, de lu i, par e u x
p e r ç u , et exigé depuis et compris l’an 1 0 , jusques et
�( 12 )
compris les lettres de change du i 5 mai 1807, dont le
paiement est r é c l a m é ; lesquelles ont été rec on nu es ,
p a r arrêt de la C our d’app el , n ’être le résultat d ’aucun
c om m erce entr’eux et ledit B r u , mais la suite d’ une
négociation dans laquelle Daub uss on et M e y r e étaient
c o m m u n s , qui n’ a eu p o u r objet que de s im p le s prêts;
si m ieux n ’aiment lesdits Daubusson et M e y r e , suivant
le com pt e qui sera fait devant le commissaire qui avait
été con v en u p o u r la r e p r é s e n t a t i o n des registres et
leur abutement ave c les lettres de change et notes de
M e y r e , r a p p o r t é e s par B r u , avec d i s t i n c t i o n de ce qui
était capital ou intérêts; et c e , sur la représentation
e f fectiv e , tant de la part de Daubusson que de M e y r e ,
des r e g i s t r e s t e n u s par chacun d e u x , depuis et compris
l ’an 10 et l’ab utte m en l qui en sera fait a vec les lettres
de ch ange et notes rapportées par B r u , à la déduction .
néa n m oin s sur les intérêts dont la restitution est or
d o n n é e , de l’intérêt à 5 pour cent de chaque c a p i t a l ,
j u s q u ’a u jour dudit c o m p t e , que ledit B r u , par ses cita
tions des 29 octobre et 29 décembre 1 8 0 7 , a consenti
d ’allouer auxditsDaubusson et M e y r e ; et pour parvenir
à la restitution c i -dessus p r o n o n c é e , ordonne que la
s om m e de 20,2.40 fr., montant des e f f e t s du i 5 mai
1807 , désignés sous la couleur de letlre de ch an ge, sera
r é d u it e , déduction faite de celle susdite de 12,000 f r . , à
celle de 8,240 f r ., sauf erreur de calcul, ou à lelle autre
som m e que donnera pour résultat le com pt e or d on n é,
s’il est p r é f é r é par lesdits M e y r e et Daubusson ; ce fais-int co ndam n e ledit B r u , d ’après le consentement de
■n-mhiKwon à c e que M e y r e louche le montant des efïets
souscrits au nom de Daubusson, réclamés aujourd'hui
par M e y r e seul, ledit consentement constaté par le j u
g em en t contradictoire du 23 mars dernier, h payer audit
M e y r e , la somme de 8,240 i r . , avec intérêt de ladite
so n im eà
de la demande formée par ledit M e y r e ,
le 3o janvier de rnie r, ou celle totale, a laquelle se Irouvera monter le compte ordonne des capitaux îec.uspar
ledit B r u , avec les intérêts à 5 pour c e n t , dont ledit
Bi 11 a offert la déduction sur c e u x dont la restitution est
c
o
m
p
t
e
r
�( i3 )
ordonnée ; ordonne, du consentement dudit Daubusson,
égal em ent consigné dans le ju g em ent du 2.3 m ar s , que
Finscription hyp othécai re faite en son nom sur ledit Bru,
sera rayé e des registres du bureau (des h ypoth èques sur
la représentation qui sera faite au conservateur du pr é
sent ju geme nt ; ordonne en outre que celle no uve ll e
ment laite sous le nom dudit M e y r e , sera et d e m e u
rera réduite au montant des condamnations prononcées
par ledit ju geme nt au profil dudit M e y r e ; et pour tous
dommages -intérêts envers ledit B r u , c e lu i- c i, quoique
restant déb it eu r, et n’ayan t fait des offres réelles de
ce qui reste d û , mais ayan t soutenu une contestation
juste et nécessaire, condamne envers lui Daubusson et
M e y r e , chacun à leur é g a r d , en tous les dépens, m ê m e
en ceux réservés, hors le coût du présent jugement dont
ledit Bru sera tenu de fournir expédition à ses frais audit
M e y r e , pour servir de titre à ce dernier, pour ce qui
lui reste d û ; et attendu que le d e m a n d e u r , outre la
déduction de 12,000 fr. sur les 20,240 f r . , montant des
effets dont il s’iigit, r e s t e débiteur du surplus ; le T r i
bunal ord onne, quant à la condamnation qui en est p r o
noncée p a r l e présent j u g e m e n t , q u ’il sera ex é c u t é par
provision, nonobstant tout a pp el, et sans y p r é j u d i c i e l
« Sur le surplus des d e m a n d e s , fins et conclusions
des parties, les met hors d ’instance».
Sur l ’appel , M e y r e ayant publié d eu x m é m o i r e s
imprimés signés de l u i, et contenant des faits inju
rieux contre Bru, celui-ci, par requête signifiée à avoué
le 12 janvier 1 8 0 9 , en a demandé la s u p p r e s s io n en
concluant à des dommages-intérêts, et à l ’impression
et afliche de l’arrêt à intervenir.
L e 18 du m ê m e m o is , arrêt contradictoire qui or
donne l ’exécution du ju gem ent du 23 mars 1808, et
le rapport des registres et livres de commerce de M e y r e
et Daubusson , depuis et compris l ’an 10.
M e y r e n’a rapporté en la Cour que les m ê m e s r e
gistres d ’annotations depuis l’an 12 , q u ’il avait déjà
présentés en première instance.
L e s héritiers Daubusson, de leur c ô t é , n ’ ont pro-
�r T4 ;
duit q u ’ un registre de c om pte co u ra nt, qui ne remon te
aussi qu'à l’an 12.
D a n s les registres de D au b u sson , ne sont pas énon
cées les dernières lettres de change qui sont l ’objet
d e l à cause, souscrites par B r u , en faveur de François
D a u b u s s o n , et les registres de M e y r e en contiennent
la mention a v e c ces m ots: Traites de B r u , au nom
de F ra n çois D a ubusson.
A l’audience de la C o u r , l ’avoc at des héritiers D a u
busson a d éc lar é, a u nom de ses parties, et d ’après les
instructions q u ’il a dit avo ir reçues de défunt François
Daubusson l u i - m ê m e , que celui-ci n’avait jamais prêté
à B r u , q u ’il n’avait jamais entendu être le créancier
de B r u , ni être le propriétaire des lettres de c h a n g e ,
dont le paiement est de m andé ; et que ces lettres de
change , quoique faites sous le nom de Daubusson
a va ie nt toujours appartenu à M e y re .
’
QUESTIONS.
XjE ju g em ent dont est appel d o i t - i l être confirmé
dans ses principales dispositions relatives à la r é d u c
ti o n , ou au co m pte q u ’il o rd o n n e?
L e s intérêts sont-ils dus depuis le protêt ?
D o i t - o n accorder uu délai à Bru pour le paiement
des condamnations prono nc ée s?
L a suppression des m ém oire s, signés B r u , doit-elle
être ordonnée ?
D o i t - on ordonner la suppression des mémoires ,
signés M e y r e , com m e renfermant des imputations
étrangères à la cause , et qui excédaient les bornes
d ’ une légitime défen s e?
Y a-t-il lieu à accorder à Bru de plus amples dommages-inlérêls ?
Est-ce le cas d ’ordon ner l ’i m pression e t a ffiche de l ’arrê I?
Signifié les qualités ci-dessus à P h i l i p p e D a u d e ,
a v o u é de M e y r e , et à An toin e B a y l e , avoué des h é
ritier.^ D aub uss on ; fait le 25 novembre 18 0 9 ; signé
Ma§sis, huissier audiencier de la C o u r ; enregistré à
Riorn , le 27 novembre 1809, reçu 55 c e n ti m es,s ig n é
P o u g h o p , commis.
�( i5 )
Ap rès avoir ouï à l ’audience du 6 du présent les
avoués des parties, en leurs conclusions; A l l e m a n d ,
avocat de B r u , P a g è s - V e r n y , avocat de M ^ r e , et
B a y l e fils , avocat de Daubusson et F a v i e r , en leurs
plaidoiries ; après avoir o u ï , à l’audience d e c e j o u r d ’hui,
M e y r e en ses observations, et M. T o u t t é e , subslitut
du P r o c u r e u r - g é n é r a l impérial en ses conclusions;
L A C O U R , statuant sur les app el s, principal et
incident respectivement interjetés par les parties, du
ju g em e nt rendu au T i i b u n a l civil de Saint-Flour, le
9 août 1 8 0 8 , met les appellations au n é a n t ; ordonne
que ledit jugeme nt sortira son plein et entier effet, et
néanmoins que les intérêts de la som me de 8,240 fr.
qui n’ont été adjugés que depuis la d e m a n d e , seront
payés à co m p t er des époques des protêts des effets
dont il s'agit ; ordonne q u e dans la q u i n z a i n e , à c o m
pter de ce jour , M e y r e , partie de P a g è s , fera son
option de la so m m e ci-dessus réduite à 8,240 fr. ou du
c om pte ordonné par le ju gem ent dont est appel, sinon et
faute de ce faire dans ledit délai, et icelui passé, q u’il
demeurera déchu de ladite option; et que de cette é p o
que l ’inscription dudit M e y r e demeur era réduite à ladite
so m m e de 8,240 f r . , et sera r a y e s , en vertu du présent
arrêt, pour tout ce qui ex cédera cette s o m m e ; ordonne
aussi q u e , dans trois mois, à co m pt er de ladite réduc
tion d ’inscription, B r u , partie d ’A l le m a nd sera tenu de
p a y e r à M e y r e ladite so m m e de 8,240 fr. et les intérêts.
Statuant sur les demandes de M e y r e , partie de
Pa gès , et des D a u b u s s o n , parties de B a y l e ; en sup
pression des mémoires de B r u , partie d ’A l l e m a n d ;
A tte n du que Bru n ’a proposé que des moyens sor
tant de sa cause ; que s’il s’est servi d ’expressions
a m è res, du moins elles ne sortaient pas des bornes
d une légitime défense , et q u ’il n’y a mêlé a u c u n e
personnalité étrangère à la cause ;
L a C our déboute M e y r e et les Daubusson de leur de
m ande, quant à ce.
Faisant droit sur la dem ande de
Bru , partie d ’A l l e m a n d , en suppression
mémoires
et libelles de M e y r e , partie de Pagès;
des
�-
(
1
0
)
At te n d u que ledit M e y r e s’ est livré , dans ses mémoires,
à des injures grossières, outrageuses et personnelles qui,
n ’ayant aucun trait à la cause, ne p o u v a ie n t a v o i r d ’a u tre
but que la diffamation de la parlie d ’Allemand,
L a Cou r ordonne que les deu x m é m o i r e s , signés
M e y r e , l ’un i n t i t u l é , M ém oire pour Jean M eyre,
greffier a u tribun al de commerce établi à S t.-F lo u r
contre M * P ie r r e - A le x is -L o u is B r u , avocat et pre
m ier suppléant de ju g e au tribunal de première in s
tance de l ’arrondissem ent de S a in t-F lo u r , c o m m e n
çant par ces mots : B r u a ,f a i t imprimer d eu x mé
moires contre m o i, « et finissant par ceux-ci : D es
négociations d o n t j ' a i été chargé par B r u l ’autre
i n t it u lé , L e G ea i d ép lu m é, ou dernières observations
p our J ea n M ey re, g reffier d u tribunal de commerce
de S a in t-F lo u r , contre P ierre -A lex is-L o u is B r u , avo
cat et premier suppléant de ju g e au tribunal de pre
mière instance de l ’arrondissem ent de S t.-F lo u r co m
m e n ç a n t par ces mots ! B r u n a cesse de me traiter
d ’e s c r o c et de v o l e u r et fin is s a n t par la sig n a tu re,
D a u d e , apposée au bas d'un e lettre. Lesdits deux mém o i res imprimes a Saint-Flour, de l ’imprimerie de V . e
Sardine, 1809, seront et dem eureront supprimés; per
m e t à B r u , partie d A l l e m a n d , de faire imprimer et
afficher le present arrêt jusqu’a concurrence de cen t
e x e m p l a i r e s , aux frais de M e y r e , parlie de Pagès.
Sur le surplus des demandes , met les parties h o rs
de C o u r ; e t , pour plus amples dommages-intérêts, con
dam ne M e y r e aux dépens des causes d ’appel et de
mandes envers Bru , m êm e en ce ux réservés par les
arrêts préparatoires, et au coût entier du présent arrêt •
con dam n e les parties de Bayle , en ce qui l e s c o n
cerne , aux dépens envers Bru , et condamne tant
M e y r e que Bru et les D aub u ss on, respectivement en
l ’amende de 10 francs. A la minute ont signé R e d o n
premier président, et G A R R O N , greffier.
M a n d o n s et o r d o n n o n s à tous huissiers, etc.
C oll a tionné , signé G A R R O N ; Greffier.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Arrêt de la Cour d'Appel de Riom. Audience du 8 novembre 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Garron
Subject
The topic of the resource
libelle
diffamation
diffusion du factum
censure
Description
An account of the resource
Arrêt de la Cour d'Appel séant à Riom, pour Maître Pierre-Alexis-Louis Bru, Avocat, 1er suppléant au tribunal civil de Saint-Flour ; contre les héritiers de François Daubusson, de Clermont, et Jean Meyre, greffier au tribunal de commerce de Saint Flour.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
An 10-1809
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0509
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0506
BCU_Factums_M0505
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53820/BCU_Factums_M0509.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chanonat (63084)
Clermont-Ferrand (63113)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Censure
diffamation
diffusion du factum
libelle
-
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0be5e487781d5468285f42d29bba1e8b
PDF Text
Text
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I'T *.î T t T 1 î
T t î * ^ Æ *'*■T T ~r111
MÉMOIRE
DE
Jean
Jo seph
B égon
DE
LAR O U ZIÈRE,
Régisseur
d u haras Impérial de D e u x -P o n t s , agissant en qua
lité de fondé de
A nne
B égon
Procuration
de
F r a n ç o is
L o u is
D E L A R O U Z I È R E son père, deman
deur au principal, appelant du jugement rendu par
le Tribunal de
première
instance
séant
à Gannat,
Département d’Allier, le 25 A o û t 1809 ;
CONTRE
Les héritiers de J e a n
B a p t is t e
L u c a s , en son vivant
a v o c a t , habitant la ville de Gannat ; lesdits héritiers
défendeurs au principal, intimés.
L
E ju gem ent dont est appel est tellem ent opposé à tout principe
de droit et d’éq u ité , que son existence me paroit un
à reso u d re
il n’est pas m oins p é n ib le ,
en
p ro b lè m e
difficile
voyant au nombre
de mes parties adverses le Président du T ribu n al qui vient de me
condamner.
Après ce léger tribut payé aux sentimens q u ’inspire inévitablem ent
une injustice criante, je vais m ’occuper de l’exposé des faits. Ils sont
de nature à ne pas laisser long tems l ’opinion en suspens sur la droi
ture et la délicatesse de mes parties adverses.
A
�( 2 )*
Je suis forcé de donner une plus grande latitude au dit e xp o sé,
et de rendre com pte p our ainsi dire
de mes procédés envers mes
adversaires; vu qu’on a rép an d u , m em e accrédité, dans m on propre
pays, avant et pendant le p ro cè s, m êm e depuis le ju g em en t,
j ’étois dirigé par de perfides conseils;
que
que le silence de m on père
est une preuve convaincante qu ’il désapprouve ma conduite, et ne
peut vo ir de bon œil une telle demande de ma p art, sachant bien
q u ’il a été pleinem ent
satisfait.
Je suis curieux de savoir d ’àprès
quelle jurisprudence un père et commettant doit compte au p u b lic
des in s tr u c tio n s qu ’il donne à son fils et fondé de procuration, et
celui ci, com ptable outre l’exhibition de ses pouvoirs, des instructions
q u ’il reçoit. Com m e une telle prétention n est que rid icu le, 011 peut
se contenter d ’en rire ;
a sse rtio n
mais
il n e n est pas
ainsi de la dernière
tendante à m e faire passer pour un malhonnête h o m m e ,
capable de dem ander ce que je sais ne pas être
dû.
Je ne puis
m éconnoitre les auteurs d ’une calom nie aussi noire, puis
qu ’ils ont
excipé authentiquem ent de ce m oyen odieux en pleine
audience.
Q u ’ils apprennent d o n c,
p uisqu’ils paraissent l’ig n o re r, que si une
force majeure a fait disparoitre la fortune à laquelle je pouvois pré
tendre, rien n’est capable m êm e d ’altérer les sentimens d ’honneur qui
nés avec m oi ne peuvent s’éteindre qu ’avec m oi : p uisqu’ils veulent
qu e le p u b lic soit ju g e de ma conduite, je ne crains pas de la faire
connoitre,
F A I T S .
M .r L u ca s, avocat habitant en son vivan t la ville de Gannat', mari,père et b e a u -p è re des intim és, avoit acheté de M .r de Larouzière la
terre de la Jonch ère, il en fit le dernier payem ent en 1786. ( A ce
qu e je «rois, je ne m e rappele pas 1 époque d’une m anière p ositive,
n ’ayant vu q u ’une seule fois en passant la date de sa dernière qu it
tance. ) Q u o iq u ’il en so it, il fut ob lig é, pour effectuer le dit paye
m e n t, d ’em prunter huit m ille Livres de M ,r B onnet, chirurgien de
�(
3
)
l’h o te l-d ie u de C lerm o n t, lequel exigea une lettre de change de la
dite som m e, ayant p our échéance le
V ers la fini du mois de M ai
24 Juin 1787.
1787
M .r Lucas se transporta c h e z '
M .r de Larouzière à St. Pont distant de deux lieues et demie de Gannat, et le sollicita de lui rendre
cette somme de 8000
faire face à la lettre de change de M .r Bonnet.
L iv .
pour
M .r de Larouzière
qui avoit alors des engagemens pris pour des constructions considé
rables déjà com m encées, se trouva dans l’im possibilité de se dessaisir
de l ’argent com ptant qu ’il pouvoit avo ir, et fut forcé de répondre à
M .r Lucas par un refus;
mais ce dernier, connoissant par
expé
rience le naturel obligeant de M .r de Larouzière qui avoit contracté
depuis long tems
l’habitude de lu i rendre des services essentiels,
dépeignit avec tant d ’am ertum e sa pénible situation et les dangers
auxquels l’exposeroit le protêt de la lettre de change qu 'il avoit sous
crite uniquem ent p our le payer, q u ’il finit par obtenir du dit M .r de
Larouzière une autorisation de toucher en son nom la dite somme de
8000 L iv , des mains de M .r de S a lv e rt; mais sous la condition qu ’il
serviroit sans retenue les intérêts de la dite somme du jo u r où M .r
de Salvert cesseroit d’en être le débiteur. (C e tte somme faisoit partie
d ’une plus forte due par M .r D u to u r de Salvert qui avoit depuis pcy
acheté la terre de M ontchoisy de M .r de Larouzière. ) M .r de Larouziere xendit ainsi, à M .r Lucas le dernier terme de payem ent de la
terre de la Jo n ch ère, en rem boursant à M .r Bonnet la somme qui
avoit servi
au dit payem ent.
L e 3 Juin 1 7 8 7 , M .r Lucas écrivit à M .r de Larouzière la lettre
suivante :
« M onsieur!
m A u lieu des 8000 L iv . que vous avez bien
>» prendre
de
M .r de Salvert pour
voulu m autoriser a
acquitter la lettre de change
« de M . B o n n et, vous verrez par la lettre c i-jo in te
de M . de Sal
ir vert qu il pourra disposer de 5 oo Louis vers le 9 du co u ran t,
A a
�(
'4
)
ce qu i me fait présum er qu e vous êtes convenu , M onsieu r, avec
„ lu i de toucher 4000 L iv . Com m ent vo u lez-vou s que cette somme
vous
parvienne ; si
vous d ésirez, M o n sieu r, que je les reçoive
„ avec les 8000 L iv res, il seroit peut - etre nécessaire de me donner
„ une quittance
plaisir
de douze m ille Francs ; alors je me chargerai avec
des 4000 L iv r e s , pour vous les apporter à St. P on t. Je
„ joins encore ici m on billet tant des 8000 L iv. dont je ferai tout
,, de suite l’em ploi que des intérêts ju squau jour de St. Jean 1788»
„ en prenant à cet égard sur m on
de Salvert à partir du 26 M ai.
com pte celui que retranche M .r
“ etc.
S ig n é , Lucas.
( Cette lettre est dans les pièces au procès ainsi que deux autres,
com m e elles
entièrem ent de la main de M .r L ucas, )»il falloit que
M .r Lucas connut bien la parfaite intégrité de M .r de Larouzière
p ou r lui envoyer un billet de la somme q u ’il d ésiroit, et des intérêts
de la dite somme sans retenue pour un a n , sans avoir rien touché.
P e u t - être craignoit il que des circonstances im prévues ou des réfléxions ultérieures ne le fissent changer d’intention à son égard, vu
le refus q u ’il avoit éprouvé de prim e a b o rd ,
et crut il le lier par
cet excès de confiance, auquel il avoit cependant la certitude morale
de ne courir aucun risque ; mais q u oiq u ’il en s o it, ce billet ri (toit
nullement obligatoire, ne liait encore en rien Mr. Lucas envers M r.
de Larouzière, puisqu'il n'avait pas encore une obole en main.
L e 8 Juin 1787 , M .r Lucas reçut de M .r de Salvert la som m e de
8000 Livres au nom de M .r de Larouzière et lui donna la reconnoissance suivante :
„ Je s o u s s ig n é , ayant pouvoir de M .r de Larouzière reconnois que
•
„ M .r de Salvert m ’a payé la somme de h uit m ille L iv r e s , de la„ quelle il lu i sera tenu com pte sut ce qu il reste à payer du p rix
„ de M ouchoisy. L e présent reçu
,, de Larouzière ne serviront qu à
„ somme de h u it m ille Francs. “
et ma promesse ou billet à M .*
établir que j ’ai touché la
Signé , Lucas,
>
dite
�(
5
)
( O n voit par ce reçn i° ) que M .r L ucas, ainsi qu ’il y étoit auto
risé, prend la qualité de mandataire de M .r de L arouzière,
touche
en son nom 8000 L iv . et garantit à M .r de Salvert q u ’il lu i en sera
tenu com pte sur le p rix de son acquisition,
2 ) Il y déclare lui
m em e que ce reçu servira à établir q u ’il a touché la somme de 8000
L ivres* en
effet,
c’est alors seulement q u ’il a com m encé à etre lié
envers M .r de L arouzière,
qualité de mandataire ;
deniers,
et à devenir com ptable envers lu i, en
auparavant il ne lui devoit ni com pte ni
malgré sa promesse antérieure, dont l’existence étoit aussi
singulière q u ’inusitée. .S’il en a fa it mention dans son r e ç u , la raison
en est
bien
sim ple;
il étoit facile de prévoir que lors du com pte
final entre M. M. de Larouzière et de S a lv e r t, ce dernier exigeroit
une quittance générale par devant N otaire et que M.r de Larouziere
étant en droit de retirer
ses quittances partielles
entre les mains le dit reçu et la prom esse;
auroit à l’avenir
dès lors il étoit indis
pensable de faire connoitre que ces deux pièces n’avoient qu’un seul
e t m ê m e o b je t,
e t n ’é ta b lis so ie n t d ’engagem ent, à la charge de celui
q u i les avoit souscrites, que p our
h u it, et n o n
pour
seize m ille
quatre cent F ran cs, com m e cela auroit eu lieu sans cette précaution
que la prudence exig eo it; ainsi ce tître , tant
q u ’il a été entre les
mains de M.r de Salvert, a été dans ses intérêts et a rem p li ainsi son
objet en lui assurant son recours c o n tr e ,Mr. Lucas dans le cas où
il ne serviroit pas à sa libération envers M.r de Larouzière; mais il
a cessé entièrem ent
son effet
à l ’égard de M.r de S alvert, à dater
d e l’époque postérieure, où M.r de Larouzière le prenant pour quit
tance a consenti
existe au pied
au
dit M.r de Salvert la
quittance générale qui
de son contrat d ’acquisition; . dès lo rs il n a
conservé d ’effet que dans l’intérêt de M.r de Larouzière;
il est la seule
plus
bien p lu s,
et unique preuve que M'»* L u c a s a touché des fonds
appartenants à M.r de L arouziere; sans lu i, il seroit im possible au
com m ettant de fa ire . rendre com pte à s.on mandataire ; et tant qu il
�( 6 )
«c
entre les mains de M.r
L u cas; -il ne p e u t-ê tre
de, L aro u ziere, il a force contre M.r
annullé que par une qu ittan ce, par une
preuve authentique du payem ent to ta l.)
Passant de cette ' lo n g u e , mais indispensable digression à la co n ti
nuation de l’exposé des faits, je vais faire mention d ’une autre lettra
de M.r Lucas,
à M.r de L arouzière,
■voici la teneur :
.
en date du 6 Mai 1788 , dont
„ M onsieur !
„ Retenu ici par 1 état triste de ma fille , j ’envoie à St. Pont m on
„ fils cadet q u i vous rem ettra i ) une lettre de change sur le Sieur
C um et négociant c o m m is s io n n a ire à Auvaise; il faudra avoir atten
tion de mettre votre signature deux doigts au dessous de m on ordre.
2)
400 L iv. argent,
montant de l’année d ’intérêts
que je
vous
d ois, à écheoir le jo u r de St. Jean baptiste prochain. 3) U n billet
de 63 oo L iv. payable une année après pour le capital que je vous
reste et l ’intérêt; au m oyen de quoi vous voudrez b ien , M onsieur,
„ donner au porteur le billet de 8400 L iv. que vous) avez de m oi;
,, je ma félicite d ’avoir pu répondre à votre désir, en obtenant une
„ lettre de change; elle doit être acquittée sans faute le dernier de
ce m o is, parce qu’à L y o n , on n’admet point le délai de faveur de
,, d ix jo u rs, etc. “ Signé , Lucas.
f
C ette lettre ne prouve autre chose que l’envoi de la prem iere année
d ’intérêts
«ans retenue , de la somme principale de 8000 Livres
et
d ’un p ayem ent, à com pte de qooo Livres par une lettre de change
q u i
réduit le principal resté dû à 6000 L iv . et les intérêts à 3 oo L iv .
1 L e 22 A v ril 1 7 8 9 , ainsi que la veuve de M.r Lucas-Téiablit dans
sa défense
ce q u i ne pouvoit lüi être contesté, Madamé dë Larou
ziere demanda à M.r Lucas
échues pour
3 00 L iv. q u ’elle a reçues qu oique non
une année ¿'in térêts, depuis le 24 Juin
1 7 8 8 'jusqu’à
pareil jo u r de l’année 17^ 9;
^
f
- A u mois de Septem bre*!* m ê m e 1'a n n é e 1789V la révolution com -
�' -
• .
(
7
}
mençant à éclater, la fam ille de Larouziere p rit le parti de s’expatrier
et à été contrainte de rester nom bre d ’années dans les pays étrangers.
L e 26 Mars, sans autre date (mais on voit que c’est forcém ent le
56 Mars 1 7 9 0 )
M .r Lucas écrivit à Mr. de Bonneval beau frère de
Mr. de Larouziere et chargé de ses intérêts en France la lettre suivante.
M onsieur!
„ Je ne demande pas m ieux que
Paris le 26 Marsde m e libérer des 63 oo Livres
» restées dues à Mr. de Larouziere sur le p rix
il venant ici au mois de Décembre 1789 j ’y
de la
Jonchére. E n
apportai cette
tom m e
» dans l’intention de m e concerter avec Mr. de B o n a l, pour la faire
,, p arven ir, à sa destination par la voie d ’un banquier de P arisj je
» pris en
conséquence des mesures relatives avec Mr. Cou teux de
9« C anteleux ; mais deux lettres écrites à Mr. de Larouziere sont de-,
„ meurées sans réponse. E lle contenoient invitation d'envoyer à une
„ personne de confiance 1) m on b ille t, s) une procuration de lui et
,, de M adam e ;sa m ère, à l’efFet de m e
passer .quittance finale par
„ devan t N o ta ire ; n’en ayant qu'une sous signature privée. M'a tran^
„ quillité est attachée à cette dernière précaution, M r. de Bonal itteste-
„ roit au besoin tout ce que j ’avance. “
„ V o u s demandez aujourd’h u i, M onsieur la délivrance des 63 oo
,, L ivres qu oique vous ne soyez point saisi de tna promesse. Mr. de
v Larouziere auroit d û au m oins la jo in d re à la procuration qu ’il
m vous a laissée ou envoyée; cependant, com m e je ne ve u x p as avoir
»> l’air de d élayer, que d ’ailleurs les circonstances
peuvent rendre
» nécessaires cette somme à Mr. de L arouziere, j'offre de la com pter
« à la personne que vous chargerez de la recevoir i c i, en vertu de
” ^ procuration de M r. de Larouzihe et de la vôtre ; à condition ,
” sous votre bon p la isir, que vous vous obligerez à rapporter sous
« àeux mois tant mon billet qui dès à présent sera annuité, qu'une
v procuration de M r. et de Madame de Larcuzihe la mire pour
îj pflsstr la quittance finale que j e désire voir au pitd dt mon contrat
�(
8
V
„ d'acquisition.I Encore une f o i, ma tranquillité, celle de m a famille
„ exigent cette mesure qu'elle sollicite de moi avec raison ; ( * ) car il,
„
est
t o u j o u r s
d an gereu x-d e laisser en blanc un contrat d# prés de
„ quatre vingt m ille L iv r e s , j ’espère , M onsieur, que vous ne ver„ rez rien autre chose, dans ma conduite qu ’une envie de me mettre;
„ en règle; èn tous cas, je serais bien fâché que l’o n ^ e n sâ t autre„ m ent; n ’ayarit rien tant à cœur que de donner à Mr. de Larouziere
„ les preuves d ’un vrai a tta c h e m e n t et à vous M o n sieu r, les m ar„ ques
d ’une entière confiance.
J’ai l ’honneur
„ L ucas, rue de Bussy , hôtel de g
; (C e tte
lettre
faisant m ention
r
e
n
d ’être etc.
a
d
e
Signé
.
du m ois^de D écem bre 1789
é v id e m m e n t postérieure, et ne parlant que d es
^
est
intérêts d’une anneér
en spécifiant la somme de 63 00 L iv. resté due paroit
être forcé
m ent du 26 Mars i 79 °> e^e prouve d’une manière indubitable que
Mr. Lucas n ’avoit rien changé dans ses rapports d ’intérêts avec
M r.
de L arouziere, lors de sa sprtie de France et. com m e il étoit décédé
à l’époque de la rentrée en France de la fam ille de L aro u zie re , il
n ’auroit pu se libérer que par m ain tierce;
dans ce cas, il devrait
exister des preuves de sa libération accompagnées de toutes les p ro
curations et engagement q u ’il demande si positivem ent dans sa lettre;
d ’ailleurs, com m e dans la dite lettre il e x ig e , à plusieurs reprises et
de r ig u e u r , pour condition de sa libération une quittance finale au
pied
('•>) C ’ est cette même fam ille, aujourd’hui si ignorante, sur la ma
nière dont il a opere sa pretendue lib éra tio n , contre laquelle je plaide.
11 paroit que c ’est elle qui a empeche' Mr. Lucas de se libérer dans le
tems. Ce n’est donc pas un mal qu’elle so it punie par 011 elle a peche',
et qu’elle paye aujourd’hui les intérêts de ses conseils; car on v o it que
Mr. Lucas livre' à son propre mouvement a toujours été
rendre au de'sirs de Mr. de Larouzière.
dispose
à se
�(
)
9
pied de son contrat d’acquisition, passée en vertu d ’une procuration
de Mr. et de Madame de Lorouziere la m ère. Il est aisé de vo ir si
la dite quittance finale par devant N otaire, autre que celle sous sig-
nature privée mentionnée dans la
dite lettre se trouve au pied du
co n trat, ou m êm e séparément. Si elle a eu
présom ption
lie u , c’est une
forte
en faveur de la libération; dans le cas contraire, elle
€st plus que douteuse. )
C e qu ’il y a de certain est que la promesse de Mr. Lucas a été
adressée des pays étrangers à Mr. de Bonal évêque de Clerm ont habi
tant alors Paris ainsi
effectuât,
soit
que Mr. L u c a s , pour que le payement s’en
par l’effet d’un besoin de fon d ,
soit d’après invita
tion de Mr. Lucas, com m e il le dit dans sa lettre où il annonce que
deux écrites à cet égard sont restées sans réponse. Le seul résultat
de cet envoi a été la perte de la promesse.
M r. de B onal, qu i a écrit à Mr. de Larouziere dans l ’intervalle de
sa sortie de France à son décés à M u n ic h , ne lui a parlé ni du paye
m en t, ni m em e de la promesse. N e T a v o it-il pas re çu e ? le peu de
sûreté des correspondances dans ces tems orageux rend la chose facile
à croire. J’ai fait à plusieurs reprises
des tentatives p our savoir si
elle n’étoit pa» restée dans les papiers de ce respectable prélat. J’ai
m êm e depuis fait prendre des inform ations à M unich. Toutes me3
recherches ont été vaines.
A u retour de toute la fam ille en France,
m on père me ch argea
com m e l’aîné des ses enfans d ’exam iner si parm i les ruines de notre
ancienne fo rtu n e,
il ne seroit pas possible d ’en rencorítrer
quelques
débris susceptibles d e tre utilisés; une telle occupation eut été par
frop déchirante pour
cet infortuné pere de d ix enfans.
R evêtu de sa procuration, mon prem ier soin a été de me mettre
en mesure de retirer ses papiers du lieu où il me dit les avoir pla
cés^ en dépôt. J en ai reçu l’envoi à deux reprises différentes m em e
éloignées lu n e de 1 a u tre , ainsi que je pourrois
le p ro u ver, si be-*
li
�( 10 )
soin étoit, ,par les lettres de voiture que j'ai conservées.* ils étoient
en outre dans le plus grand désordre.
D ans le prem ier e n v o i, je trouvai la troisième lettre de Mr. L a
cas du q 6 mars présum é 179 °* commençant ainsi : „ je ne dem ande
„ pas m ieu x que de m e libérer des 63 oo liv. resté dues à Mr. de
Larouzière
m uni de cette pièce je me rendis chez M. L u c a s,
président du T rib u n al de prem ière instance séant à G annat, gendre
et l ’un des héritiers du ch ef de
sa fem m e, de Mr. L ucas d éb iteu r;
Mr. le président après en av*oir pris
lecture s’absenta un instant et
m ’apporta en r e v e n a n t le contrat d’acquisition de la terre de la Jonchère revêtu au bas
de la quittance
finale sous signature privée
de Mr. de Larouziere m on pere.
Après des r é fle x io n s de part et d’autre, il finit par m e dire que
sans doute cette lettre contenoit une erreur de la part de son beau
p ère ; que la quittance qu’il me présentoit prouvoit indubitablem ent
qu ’il n’étoit plus rien dû
enfin
que cette somme de
à m on père sur la terre de la Jonchère;
63 oo liv . resté due provenoit nécessai
rem ent d ’un autre titre , et q u ’aussitôt que je le lui présenterois, i l
s’ empresseroit d ’y contribuer pour la quottepart de sa fem m e. R ien
de m ieux.
L e second envoi des papiers m ’apporta les d eu x
autres lettres,
mais point de titre. M r. Lucas exigea la présentation de celui dont
elles font m ention. D es circonstances fâcheuses et bien connues -m’ont
mis dans le cas d etre plusieurs années sans avoir de com m unication
avec m on père. N om m é régisseur du haras im périal de D eu x-P o n ts,
je le v is,
p our la prém ière fois depuis cette époque, en m e ren
dant à m on poste ; et il m e transmit sur cette affaire tous les renseignemens que sa m ém oire p u t lui fournir.
Vers le mois d’Août 1808, un
procès m ajeur,
qu i nécessitoit
p résence, m ’appela dans m on Départem ent. Je profitai de cette
occasion poor v©ir ’si je ne trouverai! pas, chez M. M.
4e
Salvert
�(
n
)
fils, des renseignemens sur la créance de Mrv Lccas. Q u e lle fut mà
surprise en découvrant qu e m on p ere, lors de la quittance général«
que je vis dans le contrat d ’acquisition de la terre de M o n tch o isy,
n ’avoit pas retiré ses quittances partielles parm i lesquelles se tro u vo it
le
tître
originaire
de
la créance,
savoir la reconnoissance de M r.
Lucas. Ces Messieurs ne firent aucune difficulté de m e remettre cette
pièce
q u i depuis long tems n’étoit plus
dans leurs intérêts et qui
n ’avoit plus d ’effet que dans celui de m on pere à qui appartenoient
les fonds versés entre les mains de M r. Lucas.
Je m e rendis alors accompagné d'un têftioill auprès de M r. Lucas
le président avec le tître
et les lettres,
ne doutant nullem ent qu il
ne fût frappé com m e m oi du rapport parfait qui existe entre tou
tes ces pièces;
mais je fus prom ptem ent déçu de m on espoir par
une réception peu honnête. Il m e déclara q u ’il ne vo u lo it rien vo ir
ni lire ,
que ces lettres n’étoient q u ’une
présom ption sans avantage
p ou r m o i, qu e le tître dont je lu i parlais n’étoit que dans l’intérêt
de M r. de S a lv e r t , et n u lle m e n t d an s celui de m on p è r e ; que tant
que je ne rapporterais
pas celui
m entionné dans les
lettres,
je
n’avois rien à espérer; enfin, qu ’il m e prévenoit une fois p our toutes
q u a moins d’y être contraint par les voies de d r o it, il ne payeroit
pas sa portion d ’héritier.
Il
est facile de concevoir com bien je fus m écontent du peu de dé
licatesse de ce prém ier magistat du trib u n a l, et surtout de m e voir
un procès à soutenir sur son P alier; néanm oins il fallut b ia n y sous
crire, et après m ’être assuré que je ne tirerais pas un m e ille u r parti
de ses cohénfiers dont il
en conciliation
au bureau
I M r. L u ca s, héritière
est le
de
co n seil, *je c o m m e n ç a i p ar
paix
p our m o itié ,
la
veuve
et
de la su ccession
com m une
de »
de son mari,
ï e n étois pas assujetti de rigueur à cette fo r m a lit é , vu que 1 article'
49 du code de procédure en dispense „ lorsque les demandes sont>» formées contre plus de deux parties eijcore qu elles ayent le lUeme
B 3
�(
12
)
intérêt. “ Maïs il étoit à croire que
Madame Lucas respeCteroiî
les intentions de son mari en reconnoissant son écritu re,
poseroit à, un p rocès si peu
sa fam ille.
A u jo u r f ix é ,
et s’op -
dans le cas de faire honneur à toute-
,
.
,
M adame L u cas, soit qu ’elle fût m alade, comme-
elle le fit d ire, soit
qu ’on l’ait em pêché de com paroitre, fut rem
placée par sa ' f i l l e , femme de M r. Lucas le président, la m êm e q u i
étoit malade lors de la seconde lettre de son père : je savois qu ’elle
jo u it de la réputation d’être habile en affaire, et je m e tins sur mes
gardes.
Après
u n assaut de politesse de part et d ’autre,
elle m it
tout en œ u v re , p ou r m e faire croire à la libération de son p ere ,
sans c e p e n d a n t m ’en donner
la plus légère preuve. V oyan t en Ma
dam e Lucas tout l’extérieur de la bonne fo i, je regardai com m e utile
' de chercher à lui faire connoitre la vérité , croyant à la possibilité
q u ’elle l ’ig n o râ t, et je lui com m uniquai, à l ’appui du titre de 8000ü v . sur lequel étoit fondée ma dem ande, les deux prém ières lettres
de son p e re , dont elle me dit reconnoitre l ’écriture; mais je trouvai
prudent de garder par devers m oi la troisième p our porter le coup
d écisif aux derniers instants, dans le cas où l’on parviendroit a don
n er un certain degré de vraisem blance à une lib ératio n , en déterm i
nant une époque. Bien p lu s, je mis sous ses y eu x un petit registre de
m on pere sur papier ord in aire, dans lequel est ouvert chaque article
de
ses
affaires actives et passives,
et je lui fis lir e , à l’article de
M r Lucas r e la t i f à la Jonchère, la phrase suivaute, à peu près dansce» termes :
Mr. Lucas redoit un principal de six mille livres , les
intérêts sont payés jusque s et compris la S t-J ea n 1789 ; je la p ria i
d ’observer
que cette, phrase est écrite en entier de la main de ma
f mire décédée 'le cinq Juillet 17 9 2 hors de France .
Elle m e dit alors-
(ju’d lc reconnoissoitbien 1 ecnture j rn«us c^uc néanmoins clic persistoiç.
à m’assurer que son pere ne devoit plus rien. Je la priai de m’en don
ner le moindre indice, soit par une lettre, soit par un registre, en,.
�(-.3
)
un m ot par la m oindre écriture de la main d* son pere. E lle me
répondit q u ’il n’existoit rien qui put en ju stifier; mais que néanmoins
cela étoit ainsi.
V oyan t alors com bien je m ’étois abusé, après avoir porté encore
la complaisance et les égards au point de lui donner une copie , de
ma m a in , de la reconnoissance sous seing privée de son p ere,
je
rom pis la séance, que je terminai par la signature du procès verbal
de non conciliation.
Les pièces furent remises à un avo u é, et je repartis ensuite p our
rejoindre m on poste à D e u x - ponts.
E n passant par P aris, je voulus encore me rendre chez M r. Lucas
m édecin des eaux minérales de' V ic h i, fils et le troisième des héritiers
de
M r. Lucas d éb iteu r, p our voir s’il seroit plus raisonnable que
les autres, et lu i exposai le bu t de ma visite. 11 me répondit que je
le remettais sur la v o ie , en lui disant que la promesse avoit été en
voyée à M r. l’évêque de C lerm o n t; q u ’il étoit alqrs avec son p ere ,
et qu ’il se r a p p e lo it fo r t bien que la s o m m e avoit été rem ise à un
grand vicaire de ce prélat ; Je lui en dem andai le nom q ü ’il devoit
savo ir, étant du mêm e diocéce. Il m e répondit que n o n ; mais q u ’il
étoit certain que ce grand vicaire avoit reçu la som m e et l ’avoit fait
passer à ma grand m ere en Suisse ; puis se reprenant il m e dit ; je
m e trom p e, c’est à Constance: com m e ma grand m ere n ’a jamai*
v u ni la Suisse ni Constance, et q u ’elle n ’a pas quitté la famille hors
de F ran ce, tant qu ’elle a v é cu , il m ’étoit difficile d’ajouter foi à de
pareilles co n tes, auxquels il avoit eu le tem& d ’être préparé par son
beau frère,
en venant au x eaux de V ic h i les années précédentes;
d ailleurs démentis- par le défaut de présentation de toutes les pro
curations, engagem ens, et quittances exigées dans la troisième lettre
de M r. L ucas, son pere. V o y an t que je ne m ’étois pas m ieux adressé
à Paris qu ’à G annat, j e
Ççurs au procès, commencé.
m e retirai bien décidé à laisser un libre
�(
14
)
M aintenant j’apprends que le *5 A oût 1809 la cause a été plaidée,
v
et que mes parties adverses auxquelles on avait notifié avant l’au
dience la troisièm e lettre de M r. L u cas, loin d’en paroitre surp ris,
n ’en ont tenu aucun com pte, n ’ont pas même cherché à établir la
m oindre q u ittan ce,
ni preuve réelle de libération; je vois que Mr.
le président du trib u n a l, qui de toutes manières se trouvoit dans
son centre et ne peut ignorer que trop souvent par un abus de lois
faites pour réprim er par fois le d o l, mais toujours pour protéger les
créances légitim es, la form e em porte le fo n d , à fait prendre
avoué une to u r n u r e
par son
de chicane dont la mauvaise foi fait rougir en
m êm e tems que son peu de solidité fait p itié , en avançant par son
organe que le second billet de 63 oo livres de Mr. Lucas substitué à
celu i de 8400 livres opère une novation qui établit suffisamment la
libération des défendeurs;
néanmoins un m o y e n , aussi contraire à
tout principe dans l ’espèce présente, qu ’il est o d ie u x , à p ré v a lu , et
le tribunal a ren d u , à la satisfaction de son p résiden t, le jugem ent
su ivan t, qu ’il faut avoir sous les y e u x p ou r y croire. L e voici tel
q u ’il vient dej: m ’être transmis par m on a vo u é, en me faisant dire
q u ’il lui a été signifié le q3 O ctobre.
Attendu qu ’il est prouvé au procès que Mr. de Larouzière pere
,
a consenti que Mr. de Salvert son débiteur com pte au Sieur feu
L u cas, m a ri, père et beau père des défendeurs une somme de
8000 livres tou rn o is, à com pte de ce qu’il lu i devoit.
A tte n d u
qu ’il
est également prouvé que le Sieur feu Lucas a
touché cette somme du Sieur de Salvert auquel il en a d o m ié 'u n e l
„ reconnoissance.
Attendu que cette reconnoissance donnée par le Sieur feu Lucas
à M r. de Salvert ne l’a été que dans l’intérêt du dit Sr. Salvert
„ envers M r. de Larouziere.
„ Attendu q u ’il est également prouvé ’que précédem m ent à cette
reconnoissance le dit Sieur feu Lucas |avoit consenti un billet à
�( i5 )
*, Mr. de Larouzière père de 8000 livres tournois ensem ble les inté„ rets ;
que dès lo r s , ce b illet dans l’intérêt du Sr. de Larouzière
père et ( il m anque un m ot c’est sans doute celu i: antérieur) à la
„ reconnoissance dans l’intérêt du Sieur de S alvert, avoit
un seul
m et m êm e objet.
v Attendu m êm e
q u ’il est établi au procès que le payem ent de
»» ce m êm e billet a été Fait par le Sieur feu Lucas en consentant une
» lettre de change de 2000 livres qu ’il lui a cedée sur un négoeiant
m de L y o n , et un billet
q u ’il lui souscrivit de 63 oo livres tournois,
*» y com pris les in térêts, et que par la novation qu i s’est opérée
«> les défendeurs ont suffisamment établi leur libération.
»> Le tribunal par jugem ent
en 1 ,er ressort déclare le dem andeur
%, mal fondé dans sa demande et le condam ne aux dépens taxés et
h liquidés à la somme de soixante quatre Francs
„ times envers
la partie
vingt trois Cen-
de M .e M an cel, à celle de quatre vingt
s* d ix huit Francs envers les parties de Farradèche V ia le tte , en ce
,,
n o n com pi-is le Coust et sig n ific a tio n du présent jugem ent auquel
„ il est pareillem ent condamné. “ Fait etc.
A in si, sans avoir exa m in é, à ce q u ’il p aro it, si la base sur laquelle
est fondée cette prétendue novation est solidem ent établie, ni si cette
base m êm e solide peut opérer n o va tio n , des magistrats ont déclaré
les défendeurs valablem ent libérés sans faire preuve de payem ent et
m a demande m al fon d ée, ne craignant pas d ’augm entsr encore la
perte de m on
père par sa condamnation aux dépens. En vérité les
bras en tom bent; mais m e tournant aussitôt du coté de la cour d ’apP el de R io m , dont l’intégrité a toujours été à l’abri m êm e de toute
suspicion,
je vais passer, sans autre réflexion à cet égard, à mes
moyens de défense, sachant bien que justice sera rendue à qui elle
appartient.
t Mais auparavant, pour dévoiler entièrem ent l’infam ie des auteurs de
1 atteinte grave portée à m a répu tation , je vais term iner 1 exposé des
�(
16
)
faits par la Copie de la lettre que j ’ai reçu de m on p e re ,
depuis h
perte de son procès.
„ Je reçois, m on cher am i, la lettre par laquelle tu m ’annonces la
„ perte de notre procès contre les héritiers Lucas ; j ’en suis peu surZ p ris , d ’après la teneur de celle que tu me transmets, et qui prouve
” q u e c ’é to it un parti pris d ’avance; mais ce qui m ’étonne de la part
” de nos adversaires, c’est q u ’ils n’y aient pas mis plus d ’adresse,
” car c’est une insigne gaucherie d ’avoir excipé de
”
une cause ou l’on
m on silence dans
n’agissait q u ’en vertu de ma procuration. Ils
”, ont ergotté sur ce q u ’elle n’est pas ad boc, comme s’ils avaient pu
” îrrnnrpr
cuie la position dans laquelle je me trouvais quand cett*
affaire c o m m e n ç a exigeoit que je te confiasse la totalité de nos in
térêts, et que ma
situation actuelle n ’étant rien moins qu ’une li
berté entière, j’ai dû te laisser le soin de term iner des affaires que
tu avais commencées. Com m e j ’im agine que tu appeleras sans délai
„ de ce jugem ent non moins ridicule
qu ’in iq u e , je ne doute
pas
„ que le tribunal de R io m , en me réintégrant dans mes d ro its, n©
„ répare aux dépens des héritiers L ucas, l’injur» q u ’ils ¿ont si gra„ tuitem ent et si gauchement faite.
„ A u x termes ou j ’en étais avec L u ca s, et d’après la m anière dont
M j’en agis lorsqu’un pressant besoin le fit recourir à ma bourse,
je
„ devais croire qu’il suffirait à ses enfans et particulièrem ent à leur
m è re , qui connoissait toutes les affaires de son m ari, que j’énon
çasse ma créance pour q u ’ils s’empressassent d’y faire honneur; mais
„
p u i s q u ’il
en est tout autrem ent, il est bien force de recourir à des
„ m oyens rigoureux.
Je n’ai plus le billet que Lucas m e laissa en échange de la lettre
que je lui rem is, et en vertu de laquelle il alla toucher les 8000
livres dont il avait besoin chez Mr. D u tour dépositaire
de mes
„ fonds : ces Messieurs n’ont snrement pas besoin que je leur dise
„ .comment et pourquoi je n'ai plus es p ap ier, de mêm e que je lea
dispense
�( *7 )
„ dispense de m ’apprencire com m ent et pourquoi Mr. Lucas n’a du
•» perdre aucun
des siens; mais ayant eu le bonheur de recouvrer
>, ma lettre à Mr.
,, re m it,
D u tour ainsi
que le billet que Mr. Lucas lu i
en recevant la som m e, et ayant produit l’un et l’a u tre ,
55 je crois avoir établi suffisament ma créance pour qu’elle ne puisse
>j être éteinte que par la restitution de la dite somme ou par une
s> quittance; il n’y a pas de qu ittance, donc il faut de l’argent.
„ Ces Messieurs disent, sans en fournir de preuve ni m êm e aucun
», docum ent, que leur père m ’a payé, assertion non recevable contre
» un titre constitutif d'une créance; d ’ailleurs, je
leur oppose par
« surabondance une réponse de Mr. Lucas, à q u i, pendant que j ’étois
î* loin de ma p atrie, on demanda la som m e, et qui écrivit ne vou« loir payer q u ’autant que l’on rem pliroit
une condition qu ’il in-
n diquait; cette condition
étrangère à l’affaire en
est entièrem ent
» question; mais n’ayant pas été rem p lie, elle devient une preuve de
» plus que la somme est encore due. E n fin , et dans la supposition
,, que Mr. Lucas m ’ayant payé aurait égaré la quittance q u ’il n ’eut
,, pas m anqué d ’ex ig er, à qui ses héritiers persuaderont ils q u ’il fût
„ hom m e à laisser entre les mains de M r. D u to u r et ma lettre et le
„
billet de sa main
titres vraim ent constitutif de sa dette envers
» m oi; je suis indigné de la mauvaise foi de ces Messieurs.
„
Q u an t à 'la prétendue délégation qui selon eux opère novation
}> du titre, c’est une astutieuse subtilité dont j ’abandonne la discussi sion,
à M n D ’apchier,
q u i,
j ’espère, voudra bien se ch a rg e r
s? de cette nouvelle affaire ; du m oin s, je
le désire, ayant la plus
j) grande confiance en son honnêteté et en ses lum ières, vois d o n c,
» mon bon a m i, à m ettre au plutôt cette affaire en règle, afin que
5> nous obtenions prom pte justice. A d ie u , embrasses ton (rare pour
55 m o i, et q u ’il te le rende. Je vous renouvelle l’assurance de ma
» tendresse. “
O n voit qu il existe dans la lettre de m on pere une application
C
�(
iS
)
de la novation qu i n’est p a s ju ste. Cela tient à une erreur que j ’ai
com m ise, en lu i rendant com pte de la perte du procès avant d ’avoir
le jugem ent. Cette erreur est d ’aulant plus pardonnable que le prem ier
attendu du jugem ent tend à faire porter la novation sur ia déléga
tion • A u reste, elle n’est pas plus excusable, moins absurde d’une
m a n iè r e q u e d e l’autre.
Com m e
on seroit peut être encore capable de supposer la dite
lettre controuvée, j ’enverrai l’original en même tems que ce m ém oire,
afin q u ’il soit jo in t au x p ièces,
et qu’on ait la facilité de vérifier
l’écriture et la signature.
m
o
y
e
n
s
.
Cette cause est très simple. La présentation des pièces est tin m o
yen ir r é s is tib le ; mais puisque j ’ai affaire à des adversaires de mauvaise
f o i , j e vais lu i donner un
plus grand développem ent, que je divi
serai en quatre questions à résoudre; suivant le rang des objections
q u ’ils m ’ont faites, lesquelles sont faciles à réfuter.
1) Les trois lettres d e M .r Lucas ne fourn issen t-t-elles qu’une pré
som ption vaine?
2) L e titre présenté n’eat-il que dans l’intérêt de M .r de S alvert,
et nullem ent dans celui de M .r de L arouzière?
3) L a base sur laquelle est fondée la prétendue novation est-elle
»olidement établie?
4) E n fin , dans le cas où elle seroit suffisamment appuyée et passeroit p our constante; opère - 1’ - elle novation ?
P R E M I È R E
q
u
e
s
t
i
o
n
.
Les trois lettres de M .r Lucas ne fournissent elles q u ’une présom p
tion vaine ?
Je prétends que ces lettres fussent - elles seules et non accompagnéesdu tître constitutif p résen té, suffiraient p our prQCurer à M .r de La-
�(
roüzière le payem ent de ce
19
)
qui est resté dû sur sa créance, et je
fonde1 mon_opinion sur les lo ix.
En effet,
le Code N ap oléon ,
1
après nous avoir d it , article 134g ,■
que ,, les présomptions sont des conséquences que la loi ou le m a,, gistrat tire d'un
fait connu à un fait inconnu “ , nous apprend
art. 1 353 que „ les présomptions qui ne sont point établies par les
1, lo ix sont abandonnées aux lum ières et à la prudence du m agistrat
„ qui ne doit admettre que des présomptions graves, précises, et con„ cordantes, et dans le cas seulement où la loi admet les preuves
5, testim oniales,
„
à moins que l’acte ne soit attaqué pour cause de
fraude ou de dol. “
A van t l ’application de cet article, nous voyons, art. 33 47 , que
,, les preuves testimoniales sont admissibles lorsqu’il existe u n com„
m encem ent de preu ve
par écrit “ et q u ’on appêle
„
acte par écrit qui est émané de c e lu i,
ainsi’,,
tout
contre lequel la dem ande
,, est formée ou de celui q u ’il représente, et qui read vraisem blable
,, le fait allégué “ et art. 134 8 , qu ’elles sont encore adm issibles ,, au
,, cas où
le créancier a perdu
„ littérale, par suite d’un
le
tître qui lui servoit de preu ve
cas fortuit, im p ré v u , et résultant d ’une
,, force majeure. “
Faisons maintenant l’analyse des lettres : on v o it, 1) q u ’elles sont enentièrem ent de la main du feu débiteur ; Elles sont reconnues pour
telles par ses
Héritiers ; donc il ne peut exister ni fraude ni dol.
2) que la prem ière déterm ine l’origine de la créance, sa q u o tité , et
fait m ention form elle
de l’existence d ’un b ille t, co n te n a n t le prin
cipal et les intérêts pour un a n , eu un m o t, elle est pour ainsi dire
elle mêm e un billet sous signature privée. 3) que la seconde, suite
de la prem ière, fuit m ention du payem ent sans retenue de cette pre
m ière année d’intérêts et d’un à com pte sur le p rincipal,
et que
faisant elle m êm e le décom pte du principal restant avec 1 année fu
ture d intérêts, elle déterm ine la s o m m e exacte. 4) Q u e la troisièm e
C 2
�(
20
)
exige pour le payem ent de la somme q u e lle déterm ine com m e resté
due
et la m êm e que celle portée dans la lettre précédente, une
condition à rem plir. Certainem ent je défie de
plus précise,
trouver
de preuve
plus concordante, et moins suspecte, puis q u e lle est
fournie par le débiteur défunt.
Enfin le billet m entionné a été perdu par l’envoi qu ’en a fait celui
q u ’u n e 'fo rce bien
m ajeure assurément, la révolution, em pêchoit de
se présenter sous peine de la vie; je demande à tout hom m e intégre
et droit s’il peut exister jun cas plus susceptible de l ’application des
articles précités du co d e, et si tout magistrat peut raisonnablement
tirer de ces lettres d ’autre co n s é q u e n c e que la vérité pleine et entière.
Savoir q u ’il a été dû par M .r Lucas â M .r de Larouzière ,
un prin
cipal de 8000 livres, q u i l ’année d ’après a été réduit à 6000 livres
par le payem ent de 2000 liv re s, m oyennant une lettre de change
sur L yo n ; que les intérêts des deux premieres années ont été acquit
tés sans retenue ; enfin que le dit principal çt les intérêts sans retenue
depuis le 24 Juin 1789 restent à payer en deniers ou quittance.
C om m ent, d ’après ce, peut on traiter de vaines des présomptions
si graves qu ’elles sont admises par les lo ix , et font d ailleurs par elles
m êm e preuve irrésistible?
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
L e tître présenté n’e st-il que dans l ’intérêt de M .r de S a lv e r t, et
n u lle m e n t dans celui de M .r de Larouzière ?
C o m m e n t p e u t- il se
ses
mais encore un
faire que non seulement mes parties adver
tribunal
se perm ettent
d’avancer que la dite
reconnoissance n’a été donnée que dans l’intérêt de M .r de Salvert?
Sans d o u te , c o m m e je l’ai déjà d it, elle étoit dans son intérêt pour
lui procurer son r e c o u rs contre qui de droit en cas de contestation ;
mais
elle n ’y étoit q u ’accidentellem ent. Je demande quelles sont les
personnes ;qui y figurent? M .r de Salvert payant , M ,r Lucas recevant
�(
au nom
de M r. de Larouzière
21
)
et prenant la
qualité de fondé de
p o u v o ir, et M .r de Larouzière à qui les fonds appartiennent. N ’estil pas inconcevable que ce soit précisément celui à qui appartiennent
les fonds qui soit déclaré ne pas être partie intéressée dans cet acte,
et ne pas être en droit de s’en servir pour se faire rendre com pte
de ses deniers par celui qui les a touchés en son nom ?
U ne telle assertion est aussi fausse que ridicule; car c’est précisé
m ent l’inverse; et il seroit plus vrai de dire, que ce tître ne regarde
qu e M .r de Larouzière; car M .r de Salvert, nullem ent tenu d ’entrer
dans les conventions du mandat en vertu du quel il a p a y é , étoit à
coup sur bien e n d r o it, aussitôt après avoir satisfait M .r de Larouzière
dans la personne de son fondé de p o u v o ir,
de lu i dire; je
n’a i, ni
i*e veux rien avoir à dém êler avec M .r Lucas; je ne connois que
vous m on ven d eu r; veuillez me donner une quittance de 8000 l i v r . ,
€t voici l’exécution de votre m andat, faites en tel usage q u ’il vous
plaira contre votre mandataire? Certes on ne peut contester ce droit.
Si
M .r de Salvert connoissant parfaitem ent M .r de Larouzière, et
sachant bien q u e , sans recourir à des voies de rigu eu r, cette pièce
seroit sans difficulté reçue p our quittance à l’aven ir, s’en est contenté
par honn êteté, s’e n su it-il delà que cette délicatesse em pêche ce tître
de valoir dans les interets de M .r de Larouzière ? Q u e lle est la per
sonne intègre à qui on le persuadera ? Q u i pourra croire en o u tre
de bonne f o i, que M .r L u ca s, avocat, prenant toutes les p ré ca u tio n s
relatées dans sa troisièm e lettre, après avoir statué dans sa reco n n o issance q u ’elle servira, ainsi q u ’une autre pièce qui lu i est c o m m u n e ,
a établir qu ’il a touché 8000 liv r e s , ait été hom m e à laisser un tître
qui le rend com ptable, entre les mains de M .r de S a lv e r t, qui avoit
depuis long-tems une quittance générale, s’il se fû t entièrement libéré.
Quant à celui q u ’on ne redemande com m e le véritable que parce
qu on sait qu il n ’y est plus, p e u t-o n contester la vraisemblance si
non la certitude m o ra le , que cette promesse antérieure consentie
�(
22
)
avant de recevoir les fonds à renvoyé à la reconnoissance qui devait
forcém ent exister à l’avenir, lors du tersem ent des fonds. D ès lors,
ce tte
reconnoissance constituant seule la créance,
et faisant m ention
de la promesse antérieure com m e lu i étant commune, e n a éteint l’effet.
E t si cette promesse antérieure est restée néanmoins entre les mains
de M .r de L arouzière, c’ert sans doute par mesure de sûreté, en cas
que son titre sous signature privée qui se trouvoit en m ain tierce,
vin t à s’égarer. Je
suis fâché de ne pouvoir citer aucun article du
Code N apoléon à l’appui de ce que j ’avance ; mais j’avoue que je
suis forcé de r e c o n n o itr e l’im possibilité où
a été tout législateur de
prévoir un cas pareil. Il est m êm e vraisem blable que ce phénom ène
ne reparaîtra plus d ’ici à la fin du m onde ; ainsi la présentation de
m on titre à la cour d ’appel est sous tous les rapports
le m eilleur
m oyen que je puisse em ployer p our réfuter cette objection.
T R O I S I È M E
O
"V U E . S T I O N .
L a base sur laquelle est fondée la prétendue novation est-elle soli
dem ent établie?
Cette prétendue novation est fondée sur la seconde lettre de M.T
L u c a s, qui fait m ention de l’envoi d’un b illet de 63 oo livres, titre
fatal; mais qui n’établit nullem ent
L a r o u z iè r e ;
qu ’il ait été accepté par M .r de
car le dit billet n’étoit pas dans la lettre,
com m e
le
prem ier que l’on redem ande, mais entre les mains du fils cadet qui
d evo it le rem ettre; ainsi ce billet si fort contre les intérêts de M .r
' de L a r o u z iè r e , dès q u ’il auroit eu pour destination d’opérer une nova tio n 'et de com prom ettre sa créance, a bien pu être refusé par lu i;
I l a bien eu la faculté de garder le p rem ier,
les cas répondre a M»
e t, devant dans tous
Lucas, de lui accuser rcception, ou de lu i
envoyer quittance, de la prem ière année d’intérêts, et de <2000 liv .,
à com pte, sur le capital; or, à cet égard, les héritiers Lucas ne peuvent
fcire présum er de l ’acceptation de ce second billet que par la présen«;
�(
23
)
tation du p rem ier; d ’autant que la troisième lettre contient une par
ticularité
frappante;
„ jo u rd ’h u i,
savoir dans cette phrase „ vous demandez au-
M on sieu r, la délivrance des 63 oo livres, quoique vous
„ ne soyez pas saisi de ma promesse “ on voit que cette lettre posté
rieure aux autres est la seule, ou l’on retrouve l ’expression de pro-
Viesse, la m êm e que celle consignée dans la reconnoissance à M .r de
Salvert;
ce qui prouve id en tité,
et que c’est la promesse de 8400
livres qui a été p e r d u e , et non le billet de b 3 oo liv re s, dont l’exi
stence entre les mains de M .r de' Larouzière n’est pas prouvée. C e
pendant c’est sur une telle base que le tribunal de Gannat a établi
une novation. Je demande d ’après quel principe de d ro it,
d ’après
quelle loi ? C ar le tribunal n’en cite aucune dans son jugem ent.
J■
£ ne puis donc m ’em pêcher de trouver aussi extraordinaire qu ’ini
que que M .r le président L ucas, le m êm e qui m ’a déclaré en pré
sence d ’un tém oin que les lettres de son beau père n’offroient q u ’une
vaine présom ption fasse aujourd’hui prévaloir dans son propre tribu
n a l, non une p r e u v e , c o m m e je v ie n s de le dém ontrer, mais une
simple présom ption tirée de la seconde de ces mêm es lettres. Je n ’au
rais jam ais
im aginé q u ’elles ne pûssent avoir de valeu r que contre
m on p ère; cependant, par un renversem ent de tout ordre social et
ju d icia ire , cela existe ainsi.
M aintenaut il m e reste à fixer l ’attention sur un autre point non
moins im p ortant; savoir: que ce billet fatal de 63 oo liv re s,
dont
on veut à tout p rix la représentation, qui opère, dit-on, une n o v a tio n ,
ne peut plus être entre les mains de m on p è r e , quand bien m êm e,
il y aurait été. — V o ici com m ent.
Les héritiers, qu i ne p eu v e n t, d ise n t-ils, produire aucune qu it
tance ni preuve de payem ent, ont bien fait présenter par la veuve
Lucas dans ses défenses, outre plusieurs lettres de m on pere et de
ma m ere inutiles à g a rd er, une de cette dernière qui prouve que le
S2 A v ril 1789 elle a dem andé 3 00 livres provenant de 1 année d in -
�(
24
)
térêts du 24 Juin 1788 à pareil jo u r 178 g: autant que je puis me
rappeler, n’ayant plus ces défenses sous les y e u x , M. Lucas doit même
avoir écrit sur cette lettre que cette somme de 3 oo livres a été en-r
voyée par lui. Q u elle p récau tion , de sa part de la v o ir fait, et de la
part de ses héritiers d ’avoir conservé la lettre ! S ils en avaient eu
d ’a u tres, à coup sur elles ne seroient pas plus égarées que celle ci.
C om m e la chose est parfaitement conform e au régistre dont j ’avais’
précédem m ent donné connoissance, au bureau de paix, à Madame L u
cas, femme de M .r le président, dans lequel est écrit de la main de:
feu ma mère que les intérêts du principal de 6000 livres resté dû sont
payés jusques et com pris le jour de St. Jean 178 9 ,
la chose n’a pas
été susceptible de la m oindre difficulté.
Mais a lo rs, d ’après la m arche suivie pour le prem ier billet de 8400
liv r e s , supposé que mon père eut accepté le second, ce dit second
b illet
de 63 00 livres a dû nécessairement être retiré par M .r L u ca s,
lors du payem ent postérieur de 3 oo liv re s, à cause de sa date; vu
q u i l com prenoit des intérêts acquittés, et rien ne nous apprend par
quoi il a été rem placé; Je demande alors aux héritiers eux mêmes de
m instruire sur ce fa it, et de me dire ce que je*dots leur représenter,
a u jo u rd h u i; il est bien a présumer qu ’il a dû s’opérer une troisième
n o vation , suivant la jurisprudence du tribunal de G annat, et qu’el
les devaient se succéder les unes autres,
à tous les à com ptes, ju s
qu ’au payem ent définitif ; Mais il ne reste aucune trace de ce qui a
eu lieu à cet ég ard ; D ’après c e , si l’on refuse le tître constitutif
qui établit le m o d e , la date, et la quotité
prim itive de la dette,
quel tîfre r e s t e - t - il donc à M .r de Larouzière? car ce second billet
après avoir éteint le p rem ier,
à ce que l’on d it, semble avoir lui
m êm e subi un sort pareil. Il paroit donc constant que la prem ière
promesse est celle restée entre les mains de mon
p ère, et que c’est
celle qui s’est perdue. O r , s il s est opéré une novation à son égard,
elle ne peut avoir eu lieu que par la reconnoissance postérieure don-
n
�(
»5
)
née a M .r de Salvert laquelle en faisant mention d’une promesse an
térieure com m e lui étant com m u ne,
l’auroit éteinte. Et c’est préci
sément cette reconnoissance qui est présentée aujourd’hui
Q U A T R I È M E
' . Q U E S T I O N .
Maintenant supposons l’existence ^du second
billet de 63 oo livr,
bien dém ontrée, bien reconnue. Je pi’étends qu ’il ne pourroit opérer
novation;
m on assertion, est fondée sur l’article 1273 du Code N a
poléon, dont voici la te n e u r: „ la novation ne se présume p o in t, il
„ faut que la volonté de l’opérer résulte clairem ent de 1acte “ or
n ’ayant pas l’acte, com m ent sait-on si cette volonté y est énoncée?
N éanm oins on a passé outre.
L ’intention du législateur est tellem ent de mettre une barrière in
surm ontable à toute subtilité de l’espèce présente, que l’art. 1275 du
d it/ C o d e porte que . „ la-délégation par laquelle un débiteur donn^
„ au créancier un autre débiteur qu i s’oblige envers le créancier,
,, n’opére point n o vatio n si le créancier n ’a expressément déclaré
„ q u ’il entend décharger son débiteur qui a fait la délégation. “ C om
m ent d ’après cela,
p e u t-o n
prétendre q u ’un débiteur puisse opérer
novation sur lu i m êm e, sans le concours de son créancier, et quelle
preuve a t’on donné que m on père ait consenti que le second billet
annullât les antérieurs? O n vo it m êm e que l’intention
du débiteur
étoit bien éloignée d ’entendre opérer la m oindre novation ; car il dé
bute dans sa troisième lettre par d ire: je 11e demande pas m ieu x
que de me libérer des 63 00 livres resté dues à M r. de Larouziere
sur le prix fo ¡a Joucbère; e t, en bon fran çais, r e s t é dû veut dire
reste d ’une plus forte"’*’ qui a été due. S’il eut t’té assez de m auvaise
foi pour vouloir user de la n ovation , il eut^au moins écrit: les 63 oo
livres que je dois à M .r de Larouzière.
.
Q uan d à cette phrase, sur le prix de la J o n c h è r e , q u ia beaucoup
effarouché M .r le président, com m e il est d it p o s itiv e m e n t dans le cou-
~h tSotuhfS'
^
�•rant de sa lettre, qu ’il n ’en n ’a q u ’une sous signature p riv é e , cela
•prouve évidem m ent q u ’il se rappeloit
parfaitement l’existence, au
pied du contrat, de la dite quittance, que m a montrée le dit M .r L u
cas président; et il est vraisem blable, vu ce que j’ai dit dans l’exposé
des faits, que mon père lui ayant rendu par la suite toute ou partie
de la som m e, en vertu de laquelle il avoit obtenu la dite quittance
fin a le , il ne se regardait pas com m e libéré à cet égard : par la même
raison, ma m è r e , en m ettant sur le régistre à l’article de la Jonchère
que 6000 livres restent d u s, ou sont redus par M .r L ucas, a pu re
garder cette somme com m e en provenant encore. Cela ne signifie rien •
c'est une erreur de bonne foi de part et d autre; d ’ailleurs, aujourd’hui
on ne dem ande rien à
ses héritiers sur le p rix de la Jonchère.
M a is il est inutile de m etendre davantage sur un jugem ent aussi
c o n tr a ir e aux lois qu'à la saine morale. Rien ne peut excuser le tribunal
de Gannat d’avoir prononcé une novation évidem m ent controuvée
de
plus interdite expressément par l ’article 1 q 7 3 du Code N apoléon, et
d ’avoir ainsi oommis envers M .r de L a ro u zie re , qui ne réclam e que
ce qu’il prouve authentiquem ent lui être d û ,
une injustice criante
qui semble avoir pour but de sauver au président de ce tribunal et
à ses cohéritiers, o u tre .la perte du p rocès, la lio n té d e n e pouvoir
établir la libération d ’une créance q u ’ils se sont prononcés rie pas vou
lo ir acquitter. Si un tel écart n’est pas le résultat d ’un fait exprès
si le ju gem ent n’a pas été.redigé d ’avance, il ne peut être l'effet que
d ’un défaut d examen de la cause, ou d une grande ignorance
de la
p art de Magistrats qui cependant ont la fortune p ublique entre les
m ains; quelque puisse en etre la cause, je ne saurais m ’em pêcher de
gém ir tant p our mes concitoyens que p our moi ,
en vo yan t des
poids aussi faux mis dans la balance de la justice.
Com m e rien ne peut éteindre en m oi
pays qui m ’a vu naitre, je regarde
l’intérêt toujours dû au
com m e un devoir que le pré
sent m ém oire soit adressé à son Excellence
le gran d j u g e ,
M
in istre
�( 27 )
PE
la
Ju s t ic e ;
mais com m e, en m êm e tem s, il est indigne de m a
loyauté d agir à cet é g a rd , à l’insçu de tous mes adversaires, je les
en préviens authentiquem ent ici.
Je crois avoir établi d ’une m anière incontestable que le
principal
de booo livres resté dû à M .r de Larouzière ne 'p eu t être annullé
que par des quittances ; je demande encore aujourd’hui aux héritiers
Lucas de fournir à cet égard une preuve de p ayem en t,
s’ils en ont,
en leur déclarant que je n ’en connois aucune; et je ne cesserai de
leur répéter q u ’il est plus q u ’absurde de leur p art, sur la présenta
tion d ’un titre contre e u x , de prétendre qu'on veut leur faire payer
deux fois la mêm e créance, tandis q u ’ils ne peuvent établir une pre
m ière libération; car il faut prouver
un prém ier
payem ent,
pour
être en droit de se défendre d ’un second.
Mais
il me reste encore à traiter par précaution
le chapitre des
intérêts dus depuis le 24 Juin 1 7 S 9 ; attendu qu 'il m ’est revenu que
nies parties adverses s’étoient p roposé, dans tous les cas de les con
tester, disant que les lois cl alors les p rohiboien t; j ’ignore ce qu'ils
peuvent avoir à dire à c e t égard; mais ils me persuaderont difficile
m ent que les lois ayent jamais pu prohiber l’exécution d ’une conven
tion
formelle et précise entre deux
contractans,
ainsi q u ’elle
est
consignée par écrit dans la prem ière lettre de M .r Lucas ; surtout
lorsque le dit M . Lucas pressant m on père de déplacer des fonds
provenant de la vente d ’un im m euble d ’une main
où
ils lui rap
portaient intérêts de plein d r o it, et de' laquelle il n’avoit aucune
intention de les retirer a lo rs, stipule q u ’il prend à cet égard le lieu
et place de son acquéreur: cette convention de toute ju stice, je dis
p lu s, sans laquelle m on père ii’eut
c e r t a i n e m e n t
pas "consenti au dé
placement d ’une somme aussi forte que celle de 8000 livres, doit^être
rem plie tant par M. Lucas que par ses héritiers,
vu qu il a stipulé
pour eux comme pour lu i, d ’après l’article 1122 du Code N apoléon.
Mais ce qui me
paroit hors de tout doute et incontestable est
V
2
�(
que
cette
28
)
M .r L ucas, mandataire de M .r de Larouziere ayant touché en
qualité
une somme appartenante à son commettant le 8 Juin
1 7 8 7 , et l’ayant em ployé à son usage le 24 Juin même an n ée,
acquitter une lettre
pour
de change q u ’il avoit souscrite à M .r Bonnet à
C lerm o n t, est tenu d'en payer les intérêts a son com m ettant, à dater
du dit 24 Juin
1 787; ainsi que le prescrit l’article ig g 6 du Code
N apoléon, qui s’exprim e ainsi:
„ sommes q u ’il a em ployées
M .r Lucas l ’a exécuté,
,, le mandataire
à son usage,
doit l’intérêt des
à dater de cet em ploi. “
en les payant ju squ au 24 Juin 1 789,
ainsi
que cela est prouvé de sa m ain; rien ne peut donc en empêcher la
continuation ju sq u ’à rentière libération de la somme principale.
Bien p lu s , les héritiers Lucas sont dans le cas d ’être condamnés à
des d o m m a g e s et intérêts, en vertu de l’article 1147 du Code N a
poléon qui porte : „ le débiteur est condam né,
»
s’il y a lieu
au
„ payem ent de dommages et in térêts, soit à raison de l'inexécution
„ de l'obligation , soite à raison du retard dans l'exécution , toutes les
/^vfois q u ’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étran„ gère qui ne peut lui être im p utée,
encore q u ’il n ’y ait aucune
„ mauvaise foi de sa part. “ O r , non seulem ent leur père lui m êm e
ne pourroit se prévaloir d’aucune force m ajeure, vu q u ’il est prouvé
de sa main q u ’il a refusé de satisfaire à la demande de sa créance
en im posant une condition entièrem ent étrangère à la dite créance •
mais encore je
les défie eu x-m êm es de prouver que le retard dans
l’exécution de la demande que je leur en ai faite depuis sa m ort
d ’autre cause que leur mauvaise foi.
ait
En c o n s é q u e n c e , attendu q u ’il est prouvé par les pièces au p ro
cès que M .r Lucas a touché le 8 Juin 1 7 8 7 , en qualité de fondé
de pouvoir de M .r de Larouzière une somme de huit m ille-livres
appartenante à son commettant.
A ttendu q u ’il est également prouvé que le 24 Juin 1 787 , ce manw
dataire a em ployé la somme entiere à son usage»
�29
(
)
Attendu que la libération est prouvée n ’avoir eu lien que pour
deux m ille livres sur le p rin cip a l, e t, quant aux intérêts, qu e pour
ceu x de deux années, payés sans retentie} depuis le 124 Juin 1 7 8 7 ,
ju sq u ’au 24 Juin 1789.
Attendu
que les héritiers du dit mandataire ont refusé de faire
honneur au reste d e l à créance qu oique saisis de la succession, et
prouvé leur refus par un procès dans
lequel ils ont fait prévaloir
des m oyens aussi contraires aux lois qu ’odieux.
Attendu enfin, que leur mauvaise
foi dém ontrée est la cause
u n iq u e de frais énormes de correspondance à une distance de près
de deux cent lie u e s,
ponses à
tant p our l ’instruction de la cause et les ré
leurs écritures
que pour l’impression e t,l’envoi d ’un mé
m oire en cour d ’appel, de la part du fondé de p ou voir du créancier,
( v u que le dit fondé de pouvoir occupe un em ploi du gouvernem ent
qu ’il n ’a pu quitter ) ;
et que des
dommages
et intérêts doivent
1 indemniser de ces frais injustes.
Je conclus à ce q u ’il plaise à la co u r, en déclarant que le trib u
nal de prem ière instance de G annat à m al ju g é , de condam ner les
héritiers de M .r Jean Baptiste Lucas à payer à M .r François Louis
A nne Bégon de L arouzière, ou à son fondé de p rocuration.
3)
due
les intérêts sans retenue de la somme de six m ille livres resté
en p rin cip al, depuis le 24 Juin 178g ju sq u ’au jo u r de la de
mande , présumée être du 24 D écem bre m ille huit cent h uit ( va que
je n ’en connois pas la d a te ,
mais d ’après le procès verbal de non
conciliation ) ; savoir dix n e u f ans et d e m i, à trois cent Francs. . • .
faisant
..................................................................................... 5 850 livres
2) le principal de six m ille livres ci
T otal
.
.
•
.
.
•
6000
•
11850 liv r-
3} les- intérêts de la dite somme de onze m ille h uit cent cinquante
�(
livre s, sauf e rre u r,
3o
)
depuis le jo u r de la demande ju sq u ’au parfait
payem ent, dont la cour est prié de déterm iner l’époque fixe.
4) tels dommages et intérêts q u ’il plaira à la cour de taxer.
5) e n fin , tous les frais et dépens tant de cause principale que
d ’appel.
Je suis bien aise de tém oigner ici ma reconnoissauce à M .r d e
L ’a p c hi e r , tant en m on n o m , q u a celui de ma fam ille, de ce q u ’il
veu t bien se charger de faire triom pher p ou r la seconde fois nos in
térêts à la cour d ’appel de R iom . L a réputation d ’honnêteté et de
talens dont il jouit à la dite cour est trop bien acquise, pour qu ’il
soit besoin de faire ici son éloge. J'abandonne donc entièrem ent le
soin de la cause à ses lum ières, en le priant d ’exam iner si d'appel
contient assignation à com paroitre dans les délais de la l o i , s’il est
signifié, à dom icile, â tous les h é r i t i e r s en un mot, s’il renferm e tou
tes les formalités présentes par les lo ix à peine de n u llité , et de veil
ler à ce qu e l ’avoué, dont je lui laisse le ch o ix , se conform e aux
conclusions énoncées dans le présent mém oire.
Je le préviens q u ’en ma qualité de fondé de procuration de m on
père seul agissant en son n o m , je n ’ai pas encore reçu signification,
à d o m icile, du jugem ent dont est ap p el, et q u e j ’ai seulement en
avis qu ’il a été signifié, à avo u é, le 2 3 O ctobre dernier.
A D e u x -P ô n ts , le 8 D écem bre 1809.
Je a n
J o sep h
B É G O N d e L A R O U Z IÈ R E .
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Bégon de Larouzière, Jean-Joseph. 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Larouzière
Subject
The topic of the resource
créances
Description
An account of the resource
Mémoire de Jean Joseph Bégon de Larouzière, régisseur du haras Impérial de Deux-Ponts, agissant en qualité de fondé de procuration de François Louis Anne Bégon de Larouzière son père, demandeur au principal, appelant du jugement rendu par le Tribunal de première instance séant à Gannat, Département d'Allier, le 25 août 1809 ; contre les héritiers de Jean Baptiste Lucas, en son vivant avocat, habitant de la ville de Gannat ; lesdits héritiers défendeurs au principal, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1786-1809
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0508
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Saint-Pont (03252)
La Jonchère (terre de)
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Domaine public
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Créances
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5fee17be7f0064cbb3460e8a5199fe32
PDF Text
Text
M
É
M
O
I
R
E
POUR
Dame M a r i e - U r s u l e S A L V A I N G D E
B O I S S I E U , et sieur J e a n - P i e r r e
S A U Z E T DE S A I N T - C L E M E N T ,
son m ari, appelans d’un jugement rendu au
tribunal du P u y, le 9 mai 1807;
c o n t r e
J e a n -A n d r é - G u illa u m e
SOUTEY-
R A N , ancien avocat, intimé;
e t
e n c o r e
c o n t r e
L e c u r a t e u r a la succession vacante du sieur
Pierre-Antoine
aussi intimé.
B r u n e l de S a i n t - M a r c e l,
L A dame de Saint-Clément devoit avoir une fortune
considérable; elle s’en voit tout à coup dépouillée par
trente-trois ventes qu’on a arrachées à la foiblesse d’un
vieillard nonagénaire. Toutes ces aliénations ont eu lieu
A
�( 2 )
sans nécessite et sans cause légitim e; un moment de ca
price ou de contrariété les a déterminées : il y avoit
même une certaine combinaison dans le choix des acqué
reurs. Il est pénible pour la dame de Saint-Clément de
se voir obligée de dire que son aïeul, sans autre motif,,
se félicitoit d’avoir trouvé des moyens plus sûrs de dé
pouiller sa petite-fille, parce qu’il avoit vendu à des
hommes de loi qui saui'oient bien se défendre. E t ces
hommes de loi devraient être bien humiliés de se voir
signaler comme des gens redoutables; ils devroient se
reprocher d’avoir accepté une vente faite dans un moment
d’humeur et de colèi’e , par un vieillard dont ils étoient
les conseils, qu’ils dirigeoient dans toutes ses démarches,
et dont les manœuvres étoient tellement connues, que
déjà ils avoient dans leurs mains une opposition qui -les
avertissoit de l’incapacité ou de l ’impuissance du vendeur.
lies sieurs Souteyran, père et fils, ont négligé ces
avertissemens ; ils ont méprisé les avis d’une mère alar
mée; ils ont voulu courir les risques de ce qu’ils appeloient une bonne affaire , et ne rougissent pas d’avoir
dans les mains un bien aussi mal acquis.
Les premiers juges leur ont été favorables : mais ce
succès ne sera qu’éphémère ; et la cour proscrira avec
indignation un contrat frauduleux et nul.
F A I T S .
Thomas-François Arcis,'et Marîe-Thérèse Bossolade,
ont eu de leur mariage M ane-Claire A rcis, qui épousa
le sieur Antoine Brunei de Saint-Marcel.
�( 3 }
Son contrat
m ariage, du 13 juin 1735, contient les
conventions suivantes :
Marie Bossolade, veuve A r c i s , donne à sa fille la
maison et jardin qui lui appartiennent en la ville du Puy,
au-dessous de la porte de Vienne.
Elle se départ en faveur de sa fille, et du sieur SainlM a rcel, son ép ou x, de l’habitation à elle léguée par le
sieur A r c i s , son m ari, dans la maison située rue de la
Courrerie.
Elle se démet en faveur de sa fille, et du sieur SaintM a rc e l, son é p o u x , de l’hérédité du sieur A rcis, dont
elle étoit chargée par son testament, sans se rien ré
server ni retenir.
Ee sieur Saint-Marcel décharge sa belle-mère de lu
somme de 18000 francs portée en l’inventaire du sieur
A r c is , au moyen de la remise et délivi’ance que lui fait
la dame A r c is , des meubles, argent, argenterie, pro~
messes, obligations, contrats de vente qui provenoient
du défunt.
L e sieur Saint-Marcel, pour augment de dot et gain
de survie, donne à son épouse une somme de 4000fr.,
payable en cas de prédécès.
D u mariage du sieur Brunei de Saint-Marcel, et de
la dame A r c is , sont provenues deux filles; l’une ClaireT h é r è s e , qui a épousé le sieur Surel de S a i n t - J u li e n ;
la seconde, M arie-Françoise-Eouise, qui s’est niariee
avec le sieur Salvaing de Boissieu. C ’est de ce dernier
mariage qu’est née Marie-Ursule, épouse du sieur S a u zet
de Saint-Clément.
Par le contrat de mariage de Claire-Thérèse, femme
A 2
�( 4 )
Saint-Julien, en date du 17 février 17^ 9, ses père et
mère la légitimèrent à une somme de 40000 francs pour
ses droits paternels et maternels. L e contrat de mariage
porte quittance d’ une somme de iôooo francs ; et le
surplus de sa constitution dotale, qui est de z 5ooo f r .,
est stipulé payable , savoir : 10000 francs dans Vannée
du décès du prem ier m ourant des père et mère , et
i5ooo fr. dans Tan révolu après le décès du survivan t,
sans in térêt, qu’à compter de l’échéance des termes.
Par le contrat de mariage de la dame de Boissieu ,
du 8 juin 176 2 , ses père et mère lui font donation
entre-vifs , irrévocable, contractuelle et dotale, de tous
et chacun leurs biens meubles et immeubles présens
et à venir, sous la réserve expresse que se font les do
nateurs de la jouissance des biens donnés pendant leur
vie; laquelle jouissance sera réversible de l’un à l’autre.
Ils se réservent un capital de 12000 fr. pour pouvoir
s’en servir dans leurs besoins , et en disposer tant à la
vie qu’à la m ort, en faveur de qui ils jugeront à propos.
[I est dit que cette somme de 12000 francs, également
réversible de l’un à l’autre , sera prise sur les biens à
■venir, s’ il leur en échoit, et subsidiairement, sur leurs
biens actuels.
Les sieur et dame Saint-Marcel se réservent aussi tout
ce qui peut leur être du provenant d’arrérages de fermes,
censives, obligations, comptes de leurs journaux, et gé
néralement toutes les dettes actives.
En attendant que l’usufruit soit consolidé h la pro
priété des biens donnés , ils donnent et constituent en
d o t, à leur fille, en avancement d’hoirie, et pour sup
�( 5 )
porter les charges du mariage, la somme de 20000 f r . ',
plus , d ix- neuf marcs et deux onces d’ai'genterie : ils
payent 11000 fr. à compte, et s’obligent d’acquitter dans
un an la somme de 9000 fr. pour parfaire l’avancement.
« Mais comme ils n’ont deniers en mains pour le
« payement de la somme de 9000 francs, non plus que
« pour acquitter la constitution de la dame Saint-Julien,
« dont il reste dû 12600 francs, nonobstant la quittance
« insérée dans son contrat de mariage, du 17 février
« 1 7 5 9 , insi que les termes qui écherront à l’a v e n ir,
K et pour acquitter leurs autres dettes passives, il a été
« convenu et accordé qu’il sera libre aux sieur et dame
« Saint-Marcel, de vendre et aliéner les domaines de
« Rocharnaud, Mons et Orzillac, champs et vignes de
« Couchât, au terroir de Chadrac; les fonds dépendans
« du domaine de Pouzarol , situés ès-mandemens de
« cette v i ll e , consistans en m a is o n , prés , vergers , et
« champs-, les prés situés au terroir de Ceissac ; et fin a
ls. lem ent\e domaine de Chaspuzac, à leur juste valeur,
« et su r le pied de l estim a tion , p o u rservir au payement
« desdites créances , c o n c u r r e m m e n t aux susdites
« constitutions , et autres dettes connues des parties
« intéressées ; ensemble, pour remplir la réserve du
cc capital de 12000 francs , s i les donateurs sont dans
K le cas de s'en servir ,* le tout suivant le payement,
« et délégation q u i en sera J a ite . »
O n s’oblige de fournir au sieur de Boissieu , futur
époux, un double de la quittance du produit des ventes.
L excédant du produit des ventes au-delà des créances
et reserve ? doit être placé, du consentement du sieur de
�( 6 )
Boissieu et de sa femme, cliez des personnes solvables.
L e revenu en sera payé aux donateurs pendant leur vie,
sans que les acquéreurs puissent être recherchés , en
rapportant néanm oins un légitime emploi de conform ité
à l'état connu des parties.
Si l’intérêt des futurs époux peut exiger l’aliénation
des biens qui l’esteront à la future, il est convenu que
le sieur de Boissieu pourra les vendre à leur juste valeur,
après le décès des donateurs, sans que les acquéreurs
puissent être recherchés par la demoiselle de St.-Marcel,
ou les siens, qui ne pourront répéter dans les biens du
vendeur que le juste prix des fonds par lui aliénés.
O n e x c e p t e des ventes permises à l’époux , le moulin
appelé de Saint-M arcel, et la maison du Puy. Ces objets
ne pourront être vendus que dans le cas où on en
trouveroit un prix avantageux.
En ce qui concerne le mobilier ou meubles meublans,
il est convenu, sans en faire un inventaire plus détaillé,
qu’ils seront remis à la dame de Boissieu dans l’état où
ils se trouveront au décès du dernier mourant de scs
père et mère ; ils sont cependant évalués, dans l’élat
actuel, à la somme de 6000 francs.
I,e même jour 8 juin 1762,. il fut fait un état double
entre les. sieur et dame de Saint-M arcel, et le sieur
Sàlvaing de Boissieu, leur gendre, des dettes qu’avoient
alors les père et mère : cet état se porte à la somme
de 49600 francs, sans y comprendre les 9000 fr. faisant
partie de l’avancement d’hoirie de la dame de Boissieu’*
et qui dévoient être payés dans l’année du contrat 4$
maïiage. Mais, on porte dans cet état une somme q u i
�n’étoit pas exigible ; on veut parler de celle de 2.5ooo f.
due sur la dot de la dame de Saint-Julien, dont io o o o f.
étoient payables après l’an révolu du décès du premiei
mourant des père et m ère, et i 5ooo francs n étoient
exigibles qu’après l’an révolu du décès du sui vivant.
On ne parle pas dans cet état de la somme de 1 2000 f . ,
montant de la réserve, parce qu’on se rappelle que cette
réserve ne devoit être prise que sur les biens a t enir Les sieur et dame de Saint-Marcel se dépouilloient
donc irrévocablement de leurs propriétés, au profit de
leur fille, par ce contrat de mariage. S ils se îeservoient
la faculté de vendre une portion des biens donnés, ils
ne pouvoient le faire q u ’ e n acquittement de leuis dettes.
L e s biens dévoient être vendus à leur juste valeur ■
, et
sur le pied de Vestimation. Ils .étoient obliges d?en dé
léguer le prix aux créanciers; ils étoient tenuside fournir
à leur gendre un double du produit des ventes; .enfin,
-ils devoient rapporter la preuve d ’un légitime em ploi
des deniers de ces mômes ventes.
? . ;i: ••■iG
Les père et m è re , au moyen".de ces conventions,
n’étoient plus que de simples mandataires, qui devoient
à leur fille un compte rigoureux de leur mandat; encore
cette faculté de vendre, réservée par le contrat,• étoitelle exorbitante et contraire au droit jcommun. iCétoit
donner et retenir : o r , ¡en g é n é r a l, donner ¿ t retenu
ne vaut. Si on excepte les contrats <ie mariage de cette
prohibition , c’est qu’ils sont susceptîblos'ide toutes des
conventions qui ne blessent pas le«'
-mœurs.-Mais
■toujours on doit restreindre ce quUedt exo.rbit«in t , et
b o n n e s -
lorsqu’ une faculté de ce genre est subordonnée à de cei>
�( 8 )
tain es conditions , on doit les remplir avec exactitude.
La dame A rcis, femme Saint-Marcel, est morte le 16
juin 1784. L e sieur Saint-Marcel a parcouru une très1on°1ue carrière; il a survécu vingt-un ans à sa femme;
il est décédé le 24 octobre i 8o 5 , âgé de quatre-vingtdix-sept ans.
Il semble qu’aussitôt après le mariage de la dame de
Boissieu, les père et mère ont aiï'ecté de se jouer de leurs
engagemens. Les ventes se sont multipliées : depuis le 27
juin 1762, jusqu’au 18 novembre 1782, les sieur et dame
Saint-M arcel ont vendu successivement des immeubles
donnés, pour la somme de 47^®9 f^ncs.
L e sieur de Boissieu voyoit avec regret toutes ces
aliénations ; il se permettoit à cet égard quelques obser
vations respectueuses : elles étoient mal accueillies.
Plusieurs lettres du sièur Saint-Marcel annoncent de
sa part un changement d’affection, des regrets amers et
peu flatteurs pour sa fille, d’avoir légitimé la dame SaintJulien , et institué la dame de Boissieu.
Ce fut bien pis encore après la mort de la dame son
épouse. Il se mit dans la tête de payer par anticipation,
à la dame Saint-Julien, la somme qui n’étoit exigible
q u ’ u n , an après ;sa mort. Il écrivoit à la dame de Bois
sieu qu’elle seroit encore la mieux partagée; qu’il auroit
dû laisser ses deux filles égales. Cependant la foi des
contrats de mariage doit être gardée : sans la donation
faite à la dame de Boissieu, son mariage n’eût pas eu
lieu;.ses enfans n’auroient pas vu le jour.
jjj Ce fut avec desi-peines infinies) que le sieur de Bois
sieu obtint de son beau-père la préférence pour un jardin
appelé
�( 9 )
appelé de V ien n e, que son b e a u - p e r e lui délaissa avec
hum eur, pour une somme de 3500 francs, a condition
que son gendre seroit tenu de p r é c o m p t e r j o o fumes
sur celle de 12000 francs, montant de sa reseive. L af
fection qu’avoient montrée le sieur de Boissieu e t la dame
son épouse pour ce jardin déplut au sieur de SaintMarcel : il ne destinoit point cet objet à son gendre*, il
se crut humilié en a c c é d a n t à ses d é s i r s .
L e contrat de mariage de la dame de Boissieu contient
l’énumération des biens qui poui'roient etie aliènes pour
cause légitime. A la suite de tous les immeubles désignés,
on lit ces mots : H t fin a lem en t le domaine de Chaspuzac.
Il n’y a rien d’inutile dans un contrat. Ces expressions
limitative^ mettoient le domaine de Chaspuzac au der
nier l’ang; il ne pouvoit être vendu qu’après que tous
les autres objets désignés auroient été épuisés : il y avoit
même de gi’ands motifs p o u r conserver cette propriété',
elle étoit à la bienséance du sieur de Boissieu , près de
ses autres possessions, et en augmentoit la valeur. L e
domaine d’Orzillac étoit un des premiers destinés à la
vente ; il restoit dans les mains du sieur de Saint-Marcel :
par contrariété, le sieur Saint-M arcel veut vendre le
domaine de Chaspuzac. Déjà le nombre des ventes pai
lui consenties se portoit à trente-deux, toutes sans esti
m a tio n : plusieurs avec cession de plus-value; toutes sans
épingles-, la plupart sans cause, sans n é c e s s i t é , « créa it,
au comptant, sans jamais justifier de l’emploi ; toutes sans
aiïiches, sans formalités quelconques, et à vil prix.
Les sieur et dame de Boissieu apprirent avec eflioi que
Je domaine de Chaspuzac alloit encore leur échapper, ils
�( 1° )
furent instruits que les sieurs Soutcyran , père et fils, l’un
procureur, l’autre avocat, se présentaient pour acquérir..
L e 31 mars 1791? les sieur et dame de Boissieu prirent
le parti de faire notifier un acte extrajudiciaire aux sieurs
Souteyran, par lequel ils déclarent « qu’étant venu à
cc leur connoissance que les sieurs Souteyran étoient sur
« le point d’aclaetcr le domaine de Chaspuzac, ils leur
« dénoncent que la propriété leur appartient; qu’il ne
« dépend pas du sieur S a i n t - M a r c e l de les en dépouiller;
cc que par les ventes qu’il a déjà faites, il a plus qu’abcc sorbé les réserves contenues dans leur contrat de ma« riage ; que par ce moyen , et autres à d éd u ire, ils
cc entendent se conserver ce domaine ; qu’ils n’auront
cc aucun égard à toutes les sûretés que les d«mes Soucc teyran pourroient prendre, et terminent par leur laisser
« copie du contrat de mariage de la dame Boissieu. »
Cette déclaration d’une mère de famille qui voit dis
siper sans nécessité le bien de ses enfans, auroit dû
arrêter des personnes délicates, surtout des hommes
d’affaires. Mais les sieurs Souteyran bravèrent l’opposition
des sieur et dame de Boissieu, et ils n’en furent que plus
empressés de terminer. U occa sio ii cVim bon m a r c h é ,
et la facilité que donnoient alors les assignais pour les
payemens, les déterminèrent.
L e 25 octobre 179 1, le sieur Brunei de Saint-Marcel,
excipant des clauses du contrat de mariage de sa fille,
qui lui permettent de vendre le domaine de Chaspuzac,
dépendant de son patrimoine, et autres immeubles y
désignés, pour payer ses dettes, acquitter 12000 francs
qui restent dûs de la dot faite à son autre fille Saint-
�( 11 )
J u lie n , et se retenir et disposer de 12000 francs par lui
réservés , vend au sieur Souteyran , ci-d eva n t procu
reur, et à la dame O b rier, son épouse, l’entière pro
priété de son domaine de Chaspuzac, deux petites rentes
en dépendantes. Cette vente est faite par le sieur SaintMarcel, comme seigueur haut-justicier, avec les charges,
pour l’a v e n ir, de la taille et des dîmes ( supprimées
par la loi du 14 avril 179°)*
Cette vente est faite moyennant 2o5oo f r . , et 600 fi.
pour épingles ; sur lequel prix la dame S a i n t - Julien
reçoit la somme de 12000 francs sans aucune garantie^
et les 9100 francs restans, le vendeur déclaré les avoir
reçus à compte de sa réserve , ou autres hypothéqués
par lui acquises sur les biens des sieur et dame de Boissieu, suivant l’état par lui tenu, subrogeant les acquéreurs
à tous ses droits.
L e sieur Saint-Marcel se félicite d’avoir si bien choisi
ses acquéreurs; ce sont, écrit-il à sa fille, des hommes
de loi, qui sauront bien se défendre, q u i vous mèneront
dur. Il mêle l’ironie à ses menaces; il trouve plaisant que
son gendre, qui est attaqué de cécité, et ne peut avoir
aucune jouissance, soit encore assez téméraire pour se
plaindre des ventes que fait son beau-père.
Ces hommes de l o i , si fort vantés par le sieur SaintM arcel, ne voulurent pas lui donner le démenti. L e sur
lendemain de la vente, c’est-à-dire, le 27 octobre 1 7 9 1 1
ils firent citer le sieur de Saint-M arcel, pour qu il fût
tenu de faix*e valoir la vente qu’il leur avoit consentie,
et de faire donner main-levée de l’opposition iormee par
les sieur et dame de Boissieu.
V> z
�( 12 )
Les sieurs Souteyran étoient assez maladroits dans cette
démarche précipitée. C ’étoit reconnoitre qu’ils avoieiït
acquis des droits litigieux , ce qui est vigoureusement
prohibé aux gens de loi. Mais tout se faisoit concurrem
ment avec le sieur S a in t - Marcel. L e gendre du sieur
Souie37ran devient l’avoué du vendeur ; 0n assigne les
sieur et dame de Boissieu en main-levée de leur oppo
sition; on fait joindre les d e u x . demandes; et le jugement
de jonction est notifié aux sieur et dame de Boissieu le
30 janvier 1792.
L e 3 février suivant, on leur fait notifier 1°. l’état des
ventes consenties tant par la dame Saint-Marcel que par
son m ari, conjointement ou séparément, depuis le con
trat de mariage des sieur et dame de Boissieu , du 8
juin 1762.
2°. L ’état général des payemens faits par le sieur de
Sa in t-M a rce l, depuis le mariage du sieur de Boissieu,
pour fo rm er Pemploi des sommes provenantes des ventes
faites depuis la môme époque.
L e 5 mai 1792, les sieur et dame de Boissieu signifient
aux sieurs Souteyran le contrat de mariage de la demoi
selle de Boissieu, leur fille, avec le sieur Sauzet de SaintClément, en date du 8 janvier 1792; et comme ce contrat
de m a r i a g e contient une donation universelle au profit
de la dame de Saint-Clément, les sieur et dame de Bois
sieu d é c l a r e n t qu’ils n’ont plus d’ intérêt dans la cause,
qu’ ils doivent être mis hors d’instance, et que les sieurs
Souteyran peuvent, s’ils le jugent à propos, diriger leurs
poursuites contre les sieur et dame de Saint-Clément.
O u profite bien vite de cet avis. L e 9 du même mois
�( 13 \
,
i>.
de m ai, les sieur et dame de Saint-Clement sont appelcS
en cause. On obtient contre e u x , par défaut, un juge
ment de jonction, le 30; il leur est notitié sous le nom
de leur aïeul, le 9 juin suivant, avec un memoiie expli
catif vraiment in ju rieux, et qu’on pourvoit qualifie! de
libelle, si on ne s’étoit servi du nom du grand-pere.
En tête de cette signification se trouvent deux pieces
bien essentielles au procès.
La première est un acte notarié, du 20 avril 1792,
par lequel les acquéreurs et le vendeur reconnoisjent ne
s’être pas conform és a u x clauses du contiat de maiiage
des sieur et dame de Boissieu, lors de la vente du domaine
de Chaspuzac. Ils dérogent au prix exprime dans cette
vente ; ils conviennent mutuellement que la vente du
domaine de Chaspuzac sortira son plein et entier effet,
pour son prix et valeur , siiivant l’estimation qui en
sera faite par le sieur R eco u les, expert, habitant de la
ville du P u y , qu’ils ont amiablement nommé pour leur
expert commun. Ils le dispensent de toute formalité ,
de toute prestation de serment; ils s’obligent d’acquiescer
à l’estimation qui sera faite à frais communs. Si elle
excède la somme de 21100 francs, portée par le contrat,
les acquéreurs rembourseront sans délai l’excédant au
sieur S a in t-M a rce l, qui promet à son tour de rendre
2e m o in s , s’il y a lieu.
L a deuxième pièce est le procès verbal d ’ e s t i m a t i o n du
sieur R eco u les, du 14 mai 1792. On v o i t par ce procès
verbal que le domaine de Chaspuzac se c o m p o s e de
quatre-vin gt-sep t pièces d’immeubles : son estimation
est portée à la somme de 21427 fr. ; de sorte q u il y «
�( l4 )
un accroissement de prix de 327 fr. Mais 011 remarque
que l’expert a négligé d’estimer les bois pins, les arbres
enradiqués autour des héritages, les meubles, la maison
de lu ferme, etc. On voit au bas de ce rapport que les
acquéreurs et les vendeurs l’approuvent et le confirment
dans tout son contenu, et veulent qu’il sorte son plein
et entier effet; et cette approbation, en date du 16 mai
1 79 2 , n’a j)as même étéJ a itc double.
O n élague les incidens de procédure qui eurent lieu
depuis cette signification ; on se contentera d’observer
que le 18 mai 179 3, intervint jugement qui appointe les
parties en droit : le procès fut distribué le 17. Là se ra
lentit l’ardeur des sieurs Souteyran. L e sieur de Boissieu
mourut le 6 ventôse an 5 : bientôt les sieur et dame de
Saint-Clém ent apprennent que leur aïeul étoit circon
venu , et qu’on vouloit encore arracher à sa foiblesse les
derniers immeubles qui lui restoient. Ils prirent le parti
de le faire citer de nouveau, ainsi que les sieurs Sou
teyran , devant le tribunal civil du P u y , le 28 messidor
an 6 , pour voir prononcer sur les conclusions déjà prises
ou à prendre , avec déclaration expresse faite au sieur
Saint-Marcel, que les sieur et dame Saint-Clément s’op
posent formellement à ce qu’aucune nouvelle vente soit
par lui consentie , et avec protestation de se> pourvoir
par les voies de droit contre toutes les ventes qui avoient
été faites par
passé, ou qui pourroient l’être à l’avenir.
L e sieur Souteyran père est décédé le 10 nivôse an 1 3 ;
le sieur de ‘S a i n t - M a r c e l , âgé-de quatre-vingt-dix-sept
ans, est m ort le 2 brum aire an 14.
L e lendemain de son décès, les scellés furent apposés
�C 15)
sur ses meubles; il fut procédé à la rém otion, eL à l’in
ventaire du mobilier , le 6 du même m o is , et jours
suivans»
Cet inventaire prouve que le mobilier est réduit à un
état pitoyable ; que tout étoit à l’abandon , et dans un
état de dégradation absolue.
La dame de Saint-Clément , sous l’autorité de son
m ari, en sa qualité de donataii’e contractuelle de tous les
biens présens et à venir de la dame Françoise-Louise
Brunel-Saint-Marcel, sa mère, mit un acte au greffe du
tribunal civil du Puy , par lequel elle déclare qu’elle
s en tenoit à la donation de biens présens faite à sa mère
par feu Sain t-M arcel, son a ïe u l, dans son contrat de
mariage du 8 juin 1 762 ; qu'elle renonce à tous biens
« v e n ir , et répudie la succession du sieur Saint-Marcel,
son aïeul.
Cette répudiation a été réitérée le 20 février 1806 ;
et le 25 mars suivant la dame de Saint-Clément et son
mari ont fait citer le sieur Souteyran, avocat, au bureau
de p a ix , pour se concilier sur la demande tendante à
reprise et continuation de l’instance pendante entre
les parties, et à ce q u e , ayant égard à ce qui résulte des
actes y énoncés, et à la répudiation par elle faite des
biens à venir de son aïeul, p o u r s ’eu tenir à la donation
dotale faite à sa mère le 8 juin 176 2 , la vente du do
maine de Chaspuzac, consentie par feu sieur Saint-Marcel
au s^eui'Souteyran , le 20 octobre 1791» solt déclarée
nulle , comme faite à non domino , pro non debito ,
par contravention formelle au contrat de mariage de la
dame de Boissieu, sa m è r e , et au mépris de l’acte d’op
�( i6 )
position du 31 mars 1791 ; qu’en conséquence le sieur
Souteyran soit condamné ù se désister du domaine de
CJiasuuzac, à en restituer les jouissances ainsi que de
X
’
*
d ro it, etc. L e sieur Souteyran comparoît au bureau de
paix; il s’étonne que la dame Saint-Clément veuille at
taquer la vente du domaine dont il s’agit ; il argue la
procédure de nullité; il prétend cjue la dame SaintClément n’avoit rien à faire dans toutes ces demandes ;
qu’en vertu de l’art. 1649 du Code Napoléon, le mari
seul avoit le droit de poursuivre les détenteurs des biens
dotaux de sa femme ; que celle-ci ne pouvoit figurer
au pi’ocès. Ce moyen étoit assez mal imaginé pour un
avocat, parce que le Code s’applique principalement à
l’administration, et que la présence de la femme ne
vicioit pas la procédure , dès que le mari étoit en qua
lité. Cependant le sieur de Saint-Clément, effrayé de cette
demande en nullité, peut-être parce qu’il plaidoit contre
un avocat, a cru devoir renouveler la citation, inter
venir dans l’instance; ce qui a donné lieu à un nouveau
procès verbal du bureau de paix, où le sieur Souteyran
a répété ce qu’il avoit déjà dit. Il y a eu ensuite assi
gnation aux fins de la cédule; jugement qui,donne acte
de l’intervention, et ordonne la reprise ; et enfin autre
jugement du 13 août 1806, qui a nommé pour cura
teur à la succession vacante du sieur Saint-Marcel, la
personne du sieur Belledent, avoué. Bientôt il s’est ouvert
une longue discussion sur les prétentions respectives des
parties.
L es sieur et dame Saint-Clément ont soutenu que la
vente du domaine de Chaspuzac, consentie au sieur
Souteyran,
�( 17 )
Souteyran, étoit nulle ; que l’aliénation avoit été faite
au préjudice des véritables propriétaires-, qu’elle avoit
eu lieu sans cause comme sans nécessité, en contraven
tion formelle aux clauses du contrat de m ariage, du 8
juin 1762; qu’elle avoit été l’eiï'et du repentir, d’ une
humeur injuste, de la haine, de l’intrigue et de la col
lusion.
L e sieur de Saint-Marcel avoit fait une donation uni
verselle en faveur de sa fille, sous la réserve de l’usu
fruit : s i, en attendant que cet usufruit f û t consolidé
à la propriété, les donateurs s’étoient reservé la faculté
de vendre certaine partie de leurs biens, ce ne pou voit
être que pour acquitter des dettes exigibles, après une
estimation préalable , et à la charge d’un emploi dont
il seroit justifié.
Il falloit suivre dans les ventes l’ordre établi par le
contrat.
L e domaine de Cliaspuzac étoit le dernier objet qui
de voit être atteint : tout le reste devoit être épuisé avant
qu’on pût songer à l’aliénation de cette propriété.
Cependant la vente est faite pour payer à la dame S a in tJulien une somme qui ne concernoit pas le sieur de
Saint-Marcel : c’étoit la dame de Boissieu qui en étoit
tenue; sa sœur ne pouvoit l’exiger qu’un an après le
décès du sieur Sain t-M arcel ; cette s o m m e ne devoit
pioduiie d interet qu’à défaut de p a y e m e n t à 1 époque
de l’exigibilité.
D ’un autre c ô t é , le surplus du prix de cette vente est
employé à payer une réserve qui, aux termes du contrat
de mariage, ne devoit être prise que sur les biens à venir.
G
�( *8 )
X/es ventes ne contenoient aucune délégation au profil:
des créanciers ; la délégation étoit une des conditions
essentielles de la vente.
Les acquéreurs a voient donc interverti l ’ordre prescrit
par le contrat de 1762. Ils avoient acquis sans estima
tion , et à vil prix ; ils avoient reconnu le vice de leur
contrat, puisque , par un acte postérieur , ils avoient
dérogé à toutes les clauses de la vente, et s’en étoient rap
portés à l’estimation d’un tiers. Cette estimation , faite
sans formalité, erronée et partiale, auroit dû au moins
être contradictoire avec les donataires , et n’a été approuvée entre les acquéreurs et le vendeur que par un
acte sous seing privé non fait double.
Les acquéreurs ont eu sous les yeux le contrat de ma
riage de 1762; ils ont connu la nécessité et le mode de
l ’emploi ; ils s’en sont écartés en connoissance de cause.
Les acquéreurs ont su que le sieur de Saint-Marcel
avoit plus qu’absorbe, par ses aliénations, le montant
des dettes connues et énoncées dans l’état joint au contrat
de 1762.
En effet, suivant cet état, il étoit d û, i ° . au sieur de
Saint-Julien, pour reste de la dot promise par son con
trat, la somme de douze mille six cents fr., nonobstant
la quittance insérée au même acte, ci. . . .
12600
2°. A Messieurs du chapitre de la cathé
drale du P u y , pur billet du 28 décembre
2000
174 6, deux mille francs, ç i .........................
30. A u x darnes religieuses de Vais, par
14600 fr.
�( i9 )
C i-co n tre..................
14600 fr.
contrat du 10 avril 1737 , pareille somme
de deux mille francs , c i ................................
2000
4 °* A u sieur Farense, prêtre, de Cliarantus, par contrat du 14 octobre 1733, deux
mille francs, c i ........................... ......................
2000
5 °. A u même sieur Saint-Julien, la somme '
de vingt-cinq mille fr. énoncée payable aux
termes portés par son contrat de mariage, ci. . 2Ô000
6°. A u sieur de St.-M arcel, prêtre, frère
du donateur, par billet sous seing p r iv é ,
du 24 janvier 1738 , pour ses droits suc
cessifs paternels et maternels, la somme de .•
t <_
six mille francs, c i .................................. .
6000
T o ta l
.....................................
49600 fr.
T e l est l’etat annexé au contrat. A u bas sont ajoutés
ces mots ;
« Nous soussignés , certifions que l’état ci-dessus est
,« celui dont il a ete fait mention dans le contrat de
« mariage de cejourd’l i u i , auquel nous offrons respec« tivemûnt de nous conformer. Fait d o u b le , ce 8 juin
« 1762. » Suivent les signatures.
Il est dém ontré, d’après cet acte fait double, que les
donateurs ne pouvoient vendre aux conditions exprimées
au contrat, que jusqu’à concurrence i° . de la somme de
neuf mille francs payable au sieur Boissieu dans un an,
c i . . . . ....................... ............... .......................... ..
9000 fr.
2°. A u sieur Saint - Julien > douze m ille_________
9000 fr.
G 2
�( 20 )
D e Vautre p a r t . . . .
9000 fr,
six cents francs, c i ...........................................
3°. Que le sieur S a in t-J u lien n’a pu
exiger qu’une somme de dix mille francs
sur les 2Ôooo francs promis l’année d’après
la mort de la dame Saint-Marcel; c’est-àdire, le 16 juin 178 5, attendu que la dame
Saint-Marcel est décédée le 16 juin 1784,
12600
ci............................................................................
40. A u x chapitre et «l’cligieuses, quatre
10000
mille francs, c i ..................................................
5 °. A u sieur Farense, ou au sieur SaintM arcel, prêtres, huit mille francs, c i . . . .
6°. Enfin, si l’on veut, pour remplir la
réserve de 12000 francs que s’étoit faite les
donateurs, la somme de neuf mille francs,
4000
ci.......................................................................... ..
O n ne trouvera que la somme de cin
quante-deux mille six cents francs, c i . . . .
8000
9000
62600 fr.
Jusqu’à concurrence de laquelle les donateui's avoient
la faculté de vendre, à la charge de l’estimation et de
l’emploi.
On a restreint ci - dessus la réserve de la somme de
12000 francs, a celle de 9000 francs; et il faut expliquer
la cause de celte réduction.
On n’a pos oublié que cette réserve de 12000 francs
ne de voit être prise que sur les biens à v en ir, et subsidiairernent seulement, sur les biens actuels, en cas de
besoin. O r , le 17 septembre 1 7 7 3 , la dame Arcis a re-
�(2 1 )
cueilli un legs de 3000 francs, de la part de la dame
P eyret, veuve C alm ard, par son testament mystique,
du 5 février 1 7 7 3 , ce qui réduit bien évidemment la
réserve à 9000 francs ; de sorte que les donateurs ne
pouvoient donc rigoureusement aliéner que jusqu’à con
currence de 52600 francs.
Qu’on compare maintenant l ’état des ventes qui ont
été faites depuis 176 2 , par les sieur et dame de SaintMarcel, conjointement ou sépai'ément, et antérieurement
à la vente du domaine de Chaspuzac, on voit par l’état
des ventes, signifié le 3 fé v r ie r 179 2, état infidèle dont
on a relevé les omissions avec exactitude,
i° . Une vente par la dame Saint-Marcel,
d’un cliamp compris dans la donation , au
prix de sept cents francs, en faveur de Jean
Arnaud, le 27 juin 176 2 , ci.........................
700 fr.
20. A u t r e v e n t e d e la m ê m e a u m ê m e ,
^ le 29 août 1762, au prix de cinq cent qua
rante francs, c i ..................................................
30. A u tre vente sous seing p rivé, par la
dite dame, en faveur de M . Raymont, prêtre,
le 16 octobre 176 2, au prix de huit mille
francs, c i ..............................................................
540
8000
Nuta. P l u s , une somme de deux cent
cinquante fr. pour épingles, ainsi qu’il est
prouvé au procès, ci........................................
4°. Autre vente de deux prés, par la dame
Saint-Marcel, en faveur de Marie Enjolras,
949° fr.
�C 22 )
D e Vautre y a r t....................
949 ° fr-
veuve Gallien, le 7 décembre 1762, au prix
de deux mille francs ( P ic lio t , notaire ) ,
ci............................................................................
5°. A u tre vente par la même, à Claude
Bernard , le 2 5 avril 1763 , au prix de
six cents francs, c i ......... .................................
6°. V ente par M . Saint-Marcel, au sieur
B r u n e i, le 5 septembre 17 6 3 , au prix de
2000
six cents francs, c i ...........................................
7 0. A u tre vente par le sieur Saint-Marcel,
à un sieur V incent, le 4 novembre 1763 ,
au prix de trois mille deux cents francs, ci.
8°. A u tre vente par M . Saint-Marcel, à
Jean V ianis, de plusieurs fonds à Farreivoles, le 11 décembre 1762 (V a le tte , no
t a i r e ) , au prix de quatre-vingt-dix-neuf
600
francs, c i .............................................................
90. A u tre , par*lc même au m ême, d’ un
c h e z a l, le 1 5 mars 1763 (m êm e notaire ) ,
au prix de neuf francs, ci.............................
io °. A u tre, par le même au même, d’une
maison et grange à Fa rreivoles (même no
taire ) , au prix de cent francs, c i ........... .. .
110. A u t r e vente par M . de Saint-Marcel,
à V idal Masson , le 6 avril 1 7 6 4 , pour
seize cents francs, c i .........................................
12°. A u tre vente par le même, à J.-Pierre
600
3200
99
p
100
1600
17698 fr.
�C 23 )
C i-con tre. . ................
17698 fi<
B u rre l, le 28 août 1 7 6 4 , avec cession de
toute plus-value, au prix de trois cents f i . ?
C i ............................................................................................ ...
130. Autre vente à Jean-Pierre Sicard,
le i i mars 1765, pour trois cents francs, ci.
140. A u tre vente p ar le même, a Matthieu
R o u x , le 30 janvier 1770 ? pour six cent
•«
cinquante francs , c i .
...........................
i 5°. A u tre vente par les sieur et dame
Saint-Marcel, au sieur B ru n ei, le 21 avril
1765, pour sept cent cinquante francs, c i . .
160. A u tre , par le sieur Saint-Marcel, à
Pierre R o c h e , le 10 décembre 176 6, pour
trois cent quatre-vingt-quatorze francs, ci.
17 0. A u tr e , par le m êm e, à Hyacinthe et
Marie Rotidil, le 7 mars 1767 , pour quatre
cent quatre-vingts francs , c i .........................
180. A u tr e , par le sieur Saint-Marcel, au
sieur B runei, le 18 mars 1767, au prix de
sept cents francs, c i ............................................
190. A u tre vente -privée, par le m êm e,
le 23 mars 1768, à Jean-Pierre Pages, pour
quatorze cents francs, ci..................................
200. A u tre, à A ndré R o u x , du 13 novem
bre 1769, avec cession de plus-value, pour
cinq cent cinquante francs, ci.........................
2 i° . A u tr e , en faveur de la dame veuve
300
3° °
- 7 ^°
394
480
700
1400
55o
___
23222 fr.
�( M )
JDe Vautre p a r t....................
B o u lh io l, le 23 décembre 1 7 7 0 , au prix
de trois mille huit cents francs, c i ................
220. A u t r e , à Matthieu A l y r o l , le 21
janvier 1772 , pour quatre cent cinquante
francs, avec cession de plus-value, ci........
23'’. Autre, au sieur Flori, du 30 septembre
1771 , au prix de trois mille francs, c i . . ,
2 4 ° . A u t r e , au profit du sieur SaintM arcel, curé de l’Hôtel-Dieu, le 4 décembre
1 7 7 2 , pour sept mille huit cents francs, ci.
25°. A u tr e , au sieur Chaumel, le 21 mars
1 7 7 3 , pour neuf cent cinquante francs, ci.
26°. A u t r e , à Louis B le u , le 1er. décernbre 1 7 7 6 , pour quatre-vingt-seize f r . ,
ci...................................................... ......................
27 0. A u tre vente privée, au sieur F lo ri,
23222 fr.
3800
4^0
3000
7800
960
96
le i er. décembre 1 7 8 1, pour quatorze cents
francs, c i ........................................................... ..
1400
28°. A utre, du 8 novembre 1782, au prix
de cinq mille six cents francs , c i ................ 56 oo
290. A u tre , du 19 avril 1786, pour quatre
400
cents fran cs, c i ......... ........................................
30°. Expédition du jardin d eV ien n e, par
le sieur Saint-Marcel, au sieur de Boissieu,
son gendre , le 28 mai 1788 , pour trois
t
mille cinq cents francs, c i .............................
3600
31°. Délaissement de fonds par le sieur
50218 fr.
�( 25 )
C i-con tre.......................
St.-Marcel, en faveur du syndic de l’hôpital
du P u y , le 6 novembre 1782, au prix de
trois cents fr., avec promesse que les pauvres
assisteront i\ son décès, ainsi qu’est d usage
d’y assister lors du décès d’ un bienfaiteur,
ci.............................................................................
5 o 2 i 8 fr.
300
320. Autre délaissement de fonds, par le
même , en faveur du directeur de 1 HotelD ieu , le 9 février 1783, au prix de quatorze
cents francs, c i ..................................................
1400
T o t a l .............................................
5 i9 i 8
fr.
À
Qu’ on ajoute les 3000 f r . , montant du legs fait a la
dame Saint-M arcel, le 5 février 1 7 7 3 » e*- recueilli Ie 170 t«. 1 3 - n i 7 /_ —
décembre suivant, l’on verra qu’il y avoit entre les mains
J2.
du sieur de Saint-Marcel, -5^yt 8 -fr. pour f<nre face aux
dettes exigibles de son vivant^
Par quel inconcevable caprice le sieur Saint-Marcel
a-t-il donc vendu le domaine de Chaspuzac ? L e sieur
Souteyran , sous le nom du sieur Saint-M arcel, voulut
justifier cette vente, en donnant un état des prétendus
payemens faits par le sieur S a in t-M a rc e l, et qu’il fait
porter à la somme de 76619 fr. •, de sorte que m ê m e en
«joutant le prix de la vente de Chaspuzac, le sieur SaintMarcel se trouveroit encore en avance.
, ,
M a i s de quel droit le sieur S a i n t - M a r c e l se seroit il
permis de payer des prétendues dettes non c o m p i is e s e n
l’état fait double entre son gendre et lu i ? d un a u t ie côte,
comment ces payemens sont-ils justifies? la ph*Pa it p^ï1
�(
)
des quittances sous seing p r i v é , qui n’annoncent que des
dettes fictives ou des dettes postérieures au contrat ; par
des remboursemens de capitaux aliénés à titre de rentes
constituées avec toutes retenues ; dettes qui ne pouvoient
exiger l’aliénation des immeubles. Ce seroit de la part
du sieur de Saint-Marcel la plus mauvaise administra
tion , s’il eût été propriétaire : c’est un mandataire infi
dèle , qui a excédé ou abusé de son mandat, dès qu’il
n’avoit qu’un titre précaire.
D e v o it- il encore aliéner des immeubles pour remLoui’scr à la dame Saint—J uIicj , sa fille , un capital qui
ne produisoit aucun in té rê t, qui n’étoit exigible qu’un
an après son décès, qui par conséquent n’étoit pas sa
dette personnelle? C ’est à sa iille de Boissieu qu’il devoit
laisser ce soin ; c’est elle seule qui étoit chargée de cc
remboursement.
L e sieur de Saint-Marceljétoit d’autant moins excusable,
qu’indépenàamnient des sommes provenues des ventes
multipliées qu’il a faites, il avoit encore tous les effets,
meubles et bijoux de la dame Arcis , son épouse, qui
avoit joui de ses biens aventifs considérables, puisqu’elle
avoit recueilli la succession de la dame Bossolade, sa
m ère, et de deux oncles. L e sieur de S a in t-M a rce l ne
s’ é t o i t - i l pas réservé encore ses contrats, les arrérages
des rentes, des baux de ferme, toutes ses dettes actives?
N ’étoit-il pas plus naturel d’utiliser ces objets , de les
vendre, et eu employer le prix à l’acquittement des dettes?
Toutes ces circonstances établissoient que la vente du
d o m a i n e de Chaspuzac avoit été faite sans nécessité comme
sans cause; qu’elle étoit le fruit de l’intrigue, de la pré-
�( 27 )
vcntion et de l’artifice; qu’elle avoit été Consentie par
une personne incapable ; que dès-lors elle devoit être
déclarée nulle.
Les sieur et dame Saint-Clément donnoient une nou
velle force à ces moyens, en argumentant de la vilité du
prix de cette vente. Cette vilité est démontrée par les
baux de ferme. O n voit en effet que ce domaine étoit
affermé sous la réserve du bâtiment du m aître, de tous
les bois pins, de toutes les plantations qui sont autour
¿es propriétés, et du verger qui environne les bâtimens,
moyennant 5oo francs argent, vingt-deux setiers seigle,
de seize cartons le setier ; quatre setiers o r g e , même
mesure; huit cartons de pois blancs, cinquante livres
beurre, et cinquante livres de fromage, quatre paires de
chapons, dix-huit livres chanvre, deux charges de raves,
d une charge pommes de terre, le tout portable au P u y ;
dix journés de bœufs , la moitié de la tonte des arbres ,
tous les plançons à planter par le ferm ier, le chauffage
a la ville et à la campagne.
Si on ajoute qu’à l’époque de la vente la dîme étoit
suppi im ee, on verra qu’un domaine qui rapporte plus
de 2000 francs de revenus n’a été vendu, le 21 octobre
I 79 I j que 21100 fr. assignats, n’a été estimé, le 14 mai
I 79 2 ? qu’ une somme de 21427 fr, assignats, q u i , d’après
1 échelle du tem ps, donne la somme de 14784 liv. 12 sous
en numéraire.
après ces détails , ilsembloit que la n u l l i t é delà vente
ne pouvoit faire la matière d’un doute : cependant la
cause portee à l’audience du tribunal du P u y , le 12
m;u i 8o7 , les siçur et dame S a i n t -Clément ont sncD 2
D
�(
2
8
)
combé. l î est indispensable de connoître les motifs et
le dispositif de ce jugement. Les premiers juges posent
trois questions.
i° . L e sieur de Saint-Marcel a-t-il été autorisé, en exé
cution des clauses insérées au contrat de mariage des sieur
et dame de Boissieu, à vendre le domaine de Chaspuzac?
2 °. L ’opposition faite de la part des mariés de Boissieu
et Saint-Marcel peut-elle être considérée comme un moyen
suffisant pour opérer l’annullation de la vente?
3°. Cette vente peut-elle êti’e considérée comme faite
à v il p r i x , en ce qu’elle n’a pas été précédée d’ une
estimation contradictoire avec les parties intéressées; et,
sous ce rap port, doit-elle être déclarée n u lle ?
« Attendu qu’il résulte des clauses insérées au contrat
« de mariage du sieur Salvaing de Boissieu , et de dame
« Marie-Françoise-Louise de Saint-Marcel, qu’il fut con« venu entre les parties contractantes, que le sieur de
«
«
«
<f
«
«
«
«
«
«
«
Saint-Marcel et son épouse, donateurs, aïeuls des demandeurs , auroient la faculté de vendre les domaines,
champs et vignes spécifiés au contrat de mariage,
parmi lesquels se trouve compris le domaine de Cliaspuznc , vendu au sieur Souteyran ,
o
i n. Pour le payement de la somme de 9000 francs,
restée due au sieux- de Boissieu, pour la constitution
de dot de son épouse; 20. pour la somme de 12600 fr.
du premier payement de la dot de la dame SaintJu lien , outre ceux qui écherront à l’avenir; 3°. pour
les autres dettes passives des donateurs; 40. pour la
réserve de 12000 francs faite par les donateurs, à
« la charge que les ventes seroient faites à leur juste
�« valeur et sur le pied de l’estimation ; à la chaige encore
« d’en rapporter un légitime em ploi, de conformité à
«l’état connu des parties;
.
« Attendu qu’il est indifférent que le domaine de
« Chaspuzac ait été rappelé le dernier des ° je s
« vendre, puisqu’on n’avoit pas obligé les donateurs
« l’aliéner qu’après avoir épuisé les autres héritages rap« pelés en ordre a n t é r ie u r e m e n t ; q u ’il étoit par conse« quent libre à ces derniers de vendie le domaine contei
« tieux avant les autres objets dont l’aliénation etoit
« autorisée ;
« Attendu qu’il résulte de la combinaison des clauses
« insérées au contrat de m ariage, avec 1 état connu es
« parties dont il y est fait mention , que les donateurs
« pouvoient aliéner des biens dependans de leur patii
« m o in e , jusqu’à concui'rence, i° . d’une somme de
« 4960 0 fr. ; 2°. (le celle de 9000 francs , pour reste de la
« dot d e là dame de Boissieu; 3°. de celle de 1200 fr.
« pour la réserve stipulée par les donateurs; 40. enfin
« pour la somme de 4000 francs additionnée à l’effet
« connu des parties, ain si que les demandeurs en
« conviennent ;
« Que ces diverses sommes s’élèvent à celle de 74 6 0 0 fi.
« Attendu que d’après les états produits des ventes,
0 le prix total d’icelles ne s’élevoit p as, lors de la vente
« de Chaspuzac, à beaucoup pi’ès, à la s u s d i t e somme
« de 74600 francs; que dès-lors , en exécution du conlia
« de mariage, l e s . donateurs ou l’un deux étoient auto« risés à vendre le domaine contentieux , poui p u venir
« au payement des dettes dont étoient g r e v é s les biens par
« eux donnés ; qu’en supposant qu’après les dettes payées,
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
( 30 )
il se fût trouvé de l’excédant, la vente du domaine
n’en seroit pas moins v a la b le , puisque les vendeurs
n’auroient été obligés que d’en faire un e m p lo i, ou
de placer cet excédant en mains sûres, du consentement des donataires ;
« Attendu qu’on ne peut pas soutenir raisonnablement
que les sieur et dame S a i n t -M arcel ne fussent autorisés à anticiper les termes de la dot de la dame de
Saint-Julien , puisqu’il résulte tant du contrat de mariage que de l ’état y m en tion n e, qu’il etoit libi'e aux
donateurs de vendre j u s q u ’ à concurrence de 20ooo fr.
qu’ils restoient devoir pour cet objet, et qu’on ne
les avoit restreints par aucune clause prohibitive dans
ce même contrat, à attendre l’échéance de tous les
termes de la constitution
de dot y;
«
« Attendu qu’il seroit également injuste de prétendre
« qu’il devoit se faire une compensation du produit des
«
«
«
le
«
«
«
ventes des biens de la dame de Saint-M arccl, faites
par son mari antérieurement au contrat de mariage
des sieur et dame de Boissieu, avec la réserve stipu
lee au contrat d’une somme de 12000 francs , puisqu’il
résulte de l’esprit et de la lettre de ce dernier contrat
que les donateurs avoient entendu n’être pas recherchés
à raison desdites ventes par les donataires.
« En ce qui touche l’opposition faite par les mariés
« de Boissieu et Saint-Marcel, envers la vente du domaine
a de Chaspuzac ;
« Attendu qu’étant établi que le sieur de Saint-Marcel
« étoit suffisamment autorisé à vendre le domaine con« tentieux, et qu’à l’époque de la vente les dettes dé« clarces tarit dans le contrat de mariage que dans l’état
/
/
�( 31 )
« y énoncé, n’étant pas entièrement payées, on doit né
cessairement convenir que l’opposition dont il s’agit
ne devoit pas arrêter la vente du domaine, et qu’ainsi
cette opposition ne sauroit être un motif suffisant pour
constituer l’acquéreur en mauvaise fo i, et opérer la
nullité de la vente.
« En ce qui touche le moyen de nullité proposé sur
la vilité du prix de la vente, et du défaut de l’esti
mation préalable faite contradictoirement de l’objet
dont il s’agit;
« Attendu qu’en supposant qu’il y eût de l’irrégula
rité quant au défaut d’estimation, et que la vente eût
ete faite à vil prix,.ces deux circonstances ne sauroient
en faire prononcer la nullité ; que les demandeurs ne
pourroient tout au plus qu’être reçus à faire procéder
à une nouvelle estimation , eu égard à la valeur de
l’objet vendu à l’époque du-contrat de ven te, pour
en réclamer l’excédant, si toutefois il étoit établi qu’il
n’a pas été vendu à sa juste valeur.
« D ’après ces motifs , le tribun al, faisant droit aux
conclusions prises par M e. Souteyran, sans avoir égard
à celles prises par les demandeurs, non plus qu’à l’op
position faite par les sieur et dame de Boissieu, à la
vente du domaine de Chaspuzac, les a démis de leur
demande en nullité de la vente par fin de non-valoir;
ce faisant, a maintenu M«. Souteyran dans la propriété
et jouissance du susdit domaine; demeurant néanmoins
lé se rjé aux sieur et dame de Saint-Clément de faire
procéder, si bon leur semble, à leurs frais avancés,
1 estimation du susdit domaine, eu égard à sa valeur
�( 32 )
« à 1 époque du contrat de vente, et ce par experts con« venus ou pris d’office : les condamne en tons les dépens
« tant envers le sieur Souteyran qu’envers le curateur à
« l’hoirie vacante. »
Cette rédaction n’est pas un effort de génie; elle est
un tissu d’erreurs et d’absurdités. Les sieur et dame de
Saint-Clément n’ont pas hésité à en interjeter appel. Ils
vont démontrer que ce jugement a tout à la fois consacré
l’injustice, et violé les principes les plus connus.
C ’est dans le contrat du 8 juin 1762 qu’il faut chercher
la solution des questions à juger. Les premiers juges disent
qu’ils en ont combiné les clauses , qu’ils ont apprécié
Tesprit et la lettre de ce contrat, et que le résultat est
tout en faveur du sieur Souteyran. Il s’agit donc d’analiser
cet acte, qui ne laisse point de louche dans son interpré
tation.
Il contient d’abord une donation entre-vifs, irrévocable
et dotale, au profit de la dame de Boissieu, de tous les
biens meubles et immeubles, présens et à v en ir, des sieur
et dame Saint-Marcel, donateurs.
Cette donation emporte dessaisissement actuel de tous
les biens présens, puisqu’elle est accompagnée de la tra
dition la plus ordinaire, la réserve de Cusufruit au profit
des donateurs.
A la vérité , elle est tout à la fois de biens présens
et à ven ir, ce qui nécessite la survie du donataire pour
en calculer les effets, mais n’emporte pas moins la tra
dition de tous les biens présens ; puisque le donataire,
comme on le sait, a le droit d’abdiquer à la mort du
donateur les biens à v e n ir, pour s’en tenir aux biens
présens.
Au
�( 33 )
A u moyen de cette abdication, le donataire a le droit
de conserver la propriété de tous les biens qui existoient
lors de la donation, sans autre charge que de payer les
dettes antérieures à cette môme donation.
Tels sont les principes certains en cette matiere, con
sacrés par l’ordonnance de 1731.
Les sieur et darne de Saint-Clém ent, par représen
tation de la dame de Boissieu , leur m ère, o n t déclare ,
au moment de l’ouverture de la succession du sieur Saint"M a rc e l, qu’ ils abdiquoient les biens à v e n ir , pour s’en
tenir aux biens présens : les voilà donc irrévocablement
propriétaires de tous les biens qui existoient le 8 juin 1762.
11 est vi'ai que lors de ce contrat de mariage les dona
teurs se sont réservé,7*nonobstant la donation ,* la faculté
de vendre certains biens qui en faisoient partie.
Mais cette faculté exorbitante est subordonnée à des
conditions et à des causes disertement exprimées , et dont
il etoit impossible de s’écarter : dicta lex est contractui.
Dans un contrat de m ariage, tout est à l’avantage des
époux ; tout doit être largement et libéralement inter
prété pour eux : le père lui-même est présumé s’être
conduit avec des intentions libérales pour l’avantage de
ses enfans ; et tout ce qu’il a fait ou voulu faire est
toujours censé en leur faveur.
Les conditions apposées à la vente ne sont pas des
conditions potestatw es, elles sont irritantes. On ne peut
séparer la faculté de la condition; l’une ne peut subsister
sans l’autre. Tels sont encore les principes généraux.
O r , peut-on dire que la fa c u lté de vendre, réservee
dans le contrat de mai’iage de la dame de Boissieu, soit
E
�( 34 )
une faculté absolue et illimitée ? N ’est-il pas évident,
au contraire , qu’elle est restreinte à un objet prévu ,
passé ou présent, c’est-ù-dire, le payement des dettes
contractées antérieurement à la donation, et qui existoient
alors ? Dans ce cas, l’événement ou la cause étant déter
miné , la condition en est inséparable ; elle anéantit ou
fait subsister la faculté , sans qu’elle puisse être étendue
d’un cas à un autre. Conditio in prœteritum non tantum
in prœsens tempus rela ta , statim a ut peremit obligatio n em , ant omnino non diff'ert. L . 100, ff. Ü ü verb.
obligat.
En effet, les sieur et dame de Saint-Marcel ne se ré
servent la faculté de vendre que pour certains objets :
i°. pour le payement de la somme de gooo francs, qui
faisoit le complément de l’avancement d’hoirie de la
dame de Boissieu ; 2°. pour la somme de 12600 f'r. due
à la dame de Saint-Julien, et pour acquitter les autres
dettes passives des donateurs.
Si le montant de ces dettes passives n’est pas exprimé
au contrat, c’est parce qu’il est dit et répété que cet état
est connu des parties. On voit en effet que le même
jour cet état a été donné au sieur de Boissieu, et que
les père et mère ont certifié qu’il étoit le même que celui
dont il a été fait mention dans le contrat de mariage,
et auquel on s'oblige de se conformer.
Si les père et mère, en se réservant la faculté de vendre
pour acquitter le premier terme de la dot de la dame
Saint-Julien, ont ajouté ces mots : Outre ceux q u i écher
ront à l'a v en ir, ils n’ont pu nécessairement entendre
que le premier terme qui devoit échoir un an après la
�( 35 )
mort du premier d’entr’e u x , c’est-à-dire, ioooo francs :
il est impossible qu’ils aient eu en vue celui qui ne devoit
être payé qu’après le décès du survivant. Cependant on
v o it, dans l’état annexé au contrat, qu’ils y ont compris
ces deux termes; e t, malgré cette cumulation, l’état des
dettes ne se porte qu’à 49600 francs.
Ce seroit donc donner une grande latitude à la faculté
reservée, que d’autoriser les ventes jusqu’à concurrence
de 49600 francs, en les employant à l’acquittement de
ces dettes connues.
Mais encore à quelle condition devoient être faites ces
ventes ? Suivant le co n tra t, on ne pouvoit les faire
qu’avec délégation aux créanciers; ët la plupart des ventes
ne contiennent aucune délégation.
Les sieur et dame de Saint-Marcel ne pouvoient vendre
les immeubles qu’à leur juste valeur, et sur le pied de
I estimation : partout il y a vilité de p r i x , et jamais on
n’a pris la précaution de faire estimer.
Les donateurs devoient rapporter un légitime em p lo i,
de conformité à l’état connu des parties, et aucun acqué
reur n’a veillé à cet emploi.
La première somme qui devoit être acquittée étoit
celle de 9000 francs, servant à compléter l ’a v a n c e m e n t
d hoirie de 20000 francs, constitué à la dame de Bois
sieu; et le sieur de Boissieu n’a jamais reçu cette somme;
II n’a touché sur celle de 20000 francs', c o n s t i t u é e en
avancement d’h oirie, qu’une somme de 12000 francs,
en payemens m orcelés, o u , comme il le dit, et comme
e Pkre en convient dans ses lettres, à parties brisées.
yns le contrat on désigne par ordre les immeubles
E 2
�( 36 )
qui doivent être vendus. L e domaine de Chaspuzac est
le dernier qui peut l’être : il faut épuiser tous les autres
avant d’en venir à celui-ci; et cependant il a été vendu,
tandis que les autres, notamment O rzü la c, un des pre
miers désignés, est encore existant dans la succession.
Les premiers juges, à la vérité, sont peu touchés de
cette circonstance. Peu im p orte, disent-ils, que Chasp uzac soit le premier ou le dernier; il auvoit fallu une
prohibition expresse d’aliéner celui-lu avant les autres;
et comme il n’existe pas de clause de ce genre, le sieur
de Saint-Marcel a pu faire comme il lui a plu.
C ’est étrangement raisonner. Il n’y a rien d’inutile dans
un contrat de mariage. N ’est-il pas raisonnable de penser
que lorsque les donateurs se sont réservé la faculté de
v en d re, ils ont dû d’abord penser aux objets les moins
importans et les moins précieux? Et ils ont bien claire
ment stipulé que le domaine de Chaspuzac ne pourroit
être vendu que le dernier, par ces expressions limita
tives, et finalem ent : ce qui veut dire, en bon français,
qu’une'chose doit être fajte avant l’autre; c’est-à -d ire,
que les premiers immeubles désignés doivent être épuisés
avant d’en venir au dernier. .
En un m o t, les pèi’e et mère donateurs n’avoient plus
sur les biens donnés qu’un titre précaire : s’ils en conservoient l’administration par leur réserve d’usufruit, ils
ne pouvoient plus en disposer à titre gratuit.
S’ils se sont reserve la f a c u l t é de vendre une portion
de ces biens donnés, ils se sont imposé des conditions
dont ils n’ont pu s’écarter. Ils ne pouvoient aggraver la
condition des donataires, sans manquer à la foi promise.
�C 37 )
Ils sont devenus de simples mandataires, les procureuis
constitués de leur fille, et ont dû se renfermer dans leur
mandat. Personne n’ignore que le mandataire qui a ex
cédé ses pouvoirs, ne peut engager le mandant : la loi 10,
au cod. D e p ro cu r, en a une disposition expresse. ^
Quelle étoit la charge des mandataires ? Us devoient
vendre pour cause légitime ; ils devoient déléguei le p iix
des ventes aux c ré a n c ie rs connus •, ils devoient iaiie un
emploi des deniers -, ils devoient vendre les immeubles
à leur juste valeur, et sur le prix de l’estimation. Toutes
les ventes sont faites sans délégation, sans em ploi, sans
estimation ; donc toutes les ventes sont nulles.
Celle consentie au sieur Souteyran a des ciiconstances
particulières auxquelles l’acquéreur ne peut échapper.
Il a connu le vice de son acquisition; il a été aveiti de
l ’incapacité du vendeur; il a acheté sciemment un procès j
comment p o u rro it-il donc résister à la demande en
nullité ?
Il faut se rappeler que les sieur et dame de Boissieu
avoient été prévenus des manœuvres pratiquées auprès
du sieur de Saint-Marcel par le sieur Souteyran père,
pour se faire vendre le domaine de Chaspuzac.
Les sieur et dame de Boissieu, pour l’é v ite r , firent
notifier une opposition au sieur Souteyran , le 3 1 mars
1 7 9 1, et lui donnèrent copie du contrat de mariage , du
8 juin 1762 , qui étoit le pacte de famille.
Par cette notification , les sieur et dame de Boissieu
apprenoient au sieur Souteyran que le sieur Saint i
étoit dans l’incapacité d’aliéner ; qu’il »voit épuisé la
�( 38 )
quotité permise ou réservée, et que désormais toute vente
par lui consentie seroit absolument nulle.
La première idée que devoit faire naître cette décla
ration , surtout à un homme d’affaires, étoit d’abandonner
tout projet d’acquisition.
En effet, c’étoit acquérir un procès; c’étoit entrer en
litige sur le fo n d du d ro it, puisqu’on contestoit la capa
cité du vendeur.
A u m oins, si on ne v o u l o i t pas acheter de procès,
devoit-on, avant tout, faire statuer sur l’opposition qui
avoit été formée par le sieur de Boissicu : les tribunaux
en a u r o i e n t apprécié le mérite. C ’étoit un procès de fa
mille une discussion qui nécessiloit l’examen des droits
du s i e u r de S ain t-M arcel, de l’état des ventes par lui
faites, des dettes par lui payées; en un m o t, des affaires""
les plus secrètes de l’intérieur de cette fam ille, dans les
quelles le sieur Souteyran ne devoit pas pénétrer.
Mais celu i-ci croit pouvoir tout braver. Un procu
reur qui a de l’empire sur son c lie n t, le détermine à lui
v e n d r e , pour avoir le droit de plaider le surlendemain, ,
e t d’entamer un procès qui dure depuis cette vente. Aussi
voit-on le plaisir qu’avoit le sieur Saint-Marcel d’avoir
si bien choisi son acquéreur. Par une première lettre
du 27 octobre 1 7 9 1 , le père écrit à sa fille qu’ il a dé
pouillée deux jours auparavant, q u 'il lu i sera f o r t a isé
de fa ir e valoir cette vente.
Plusieurs lettres ensuite, des 5 , 9 , 1 9 , et jours snivans
dii mois de
novem bre,
portent « q u ’il a fait cette vente
« pour se libérer envers sa fille d’une somme de 12000 f . ,
�( 39 )
quoique non payable q ua p rès l u i , qu’il a bien voulu
gi'atuitement lui payer, parce q u i l lu i a plu a in si ;
que sa fille et son gendre se souviennent qu’ils auront
affaire cï un hom m e de loi entendu, q u i saura bien
donner au contrat de vente toute l ’authenticité et
valeur qu’il mérite. »
Dans une autre il écrit que « les sieur et dame de
« Boissieu auront affaire à un homme de loi q u i les
« mènera dur • que de son côté il a tant de moyens
« de faire repentir M. de Boissieu de tout ce qu’il a osé
« entreprendre, qu’il en sera toujours la d up e, et en
« payera la façon. »
L e sieur Souteyran donne bientôt cette satisfaction à
son vendeur, puisque le surlendemain il assigne le sieur
de Saint-Marcel pour faire valoir la vente , donne son
gendre pour avoué au sieur de Saint-Marcel, et fait mettre
en cause les sieur et dame Boissieu.
Mais cet hom m e de l o i , q u i d e v o i t si b i e n s a v o i r son
métier, qui devoit donner à cette vente une s i grande
«
«
«
«
«
«
authenticité et v a leu r, qui avoit sous les y e u x le contrat
de mariage de 1 7 6 2 , s’aperçoit cependant qu’il ne s’est
pas conformé aux clauses du contrat, et que la vente est
nulle.
Il croit réparer sa faute en dérogeant à cette vente
par un acte postérieur, et en faisant estimer pour la forme
le domaine qu’il venoit d’acquérir. Mais s’il s a v o i t si
bien son m étier, comment n’a-t-il pas vu que cette esti
mation devoit être contradictoire avec les sieur et dame
Boissieu ; qu’elle ne pouvoit etre faite amiablement, sans
form alité, et par un seul expert. O n ne voit là que ma-
�( 4° )
la dresse , embarras d’ un liomme incertain , comme on
l ’est toujours quand 011 achète un procès ; et le sieur
Souteyran a évidemment trompé le sieur de Sainl-Marccl
dans son attente.
Cet homme de loi si instruit croit justifier d’un em ploi,
en payant à la dame de Saint-Julien une somme qui ne
lui étoit pas due; en faisant porter le surplus du prix
sur une réserve qui ne devoit être prise que sur les
biens à v en iri et il étoit échu des biens depuis la do
nation , notamment le legs de 3000 fr. de la dame veuve
Calmar.
Cet hom m e de lo i ne s’est pas dissimulé le vice de
son acquisition, puisqu’il a essayé de le réparer : il
s’est jugé lui-même; comment donc pourroit-il échapper
ù la nullité ?
Il
étoit homme de lo i; le sieur de Saint-Marcel étoit
son client ; il a acquis un procès : il y avoit contestation
sur le f o n d du d r o it, puisqu’on attaquoit la capacité
du vendeur. La chose étoit donc litigieuse, d’après l’art.
1-700 du Code N ap oléon , qui ne fuit, en ce p o in t,
que rappeler les anciens principes. L e sieur Souteyran
n’a donc pu acquérir ; sa vente est réprouvée par les
lois anciennes et nouvelles. Les lois P e r d ¡versos mettent
au dernier rang de la société ceux qui achètent des procès;
l ’article 54 de l’ordonnance de i 56o défend à tous juges,
avocats, procureurs, d’en acquérir. Colle prohibition est
renouvelée par l’article 1697 du Code Napoléon. Et
ce n’est point ici le cas d’une subrogation; c’est un vice
radical, qui entraîne la nullité de la vcnle : il y a iucapacité absolue de la part de l’acquéreur.
Le
�( 41 )
L e sieur Souteyran ne justifiera jamais cette acquisition.
Quels sont en effet les moyens qu’il a proposés pour
sa défense ? O n les trouve répétés dans les inotifs du
jugem ent, qui les a adoptés dans leur entier.
Il
prétend, i ° . que les père et m ère, lors du contrat
de mariage de 1762 , stipulèrent la faculté de vendre et
aliéner les immeubles y désignés, parmi lesquels on trouve
le domaine de C haspuzac ,• il en tire la conséquence
que la propriété de cet immeuble ne quitta jamais le
donateur; et si le sieur de S a in t-M a rce l a voit ju s in
7'c , pourquoi le sieur Souteyran père n’auroit-il pas
acquis?
L e sieur Souteyran, en proposant ce moyen , ne s’aper
çoit pas qu’il commet une erreur évidente. La donation
portée au contrat de mariage de 1762 est universelle; les
donateurs ne se réservent que l’usufruit, ce qui est une
tradition feinte qui emporte le dessaisissement de la pro
priété : et si les donateurs conservent.la faculté d’aliéner
certains im meubles, ce n’est que comme mandataires de
leur f ille , et en remplissant toutes les conditions qu’ils
se sont imposées.
L e sieur Souteyran rit de l’opposition qui a précédé
la vente ; il trouve plaisant que les appelans aient la
prétention de penser qu’avant d’acquérir le domaine de
Chaspuzac il auroit fallu faire statuer sur l ’o p p o s itio n :
le sieur Souteyran ne trouve aucune loi qui l’y ait oblige.
Il semble cependant que la loi se trouvoit dons le contrat
môme qu’il avoit sous les yeu x; qu’ un donataire universel
a lè droit de s’opposer à ce qu’on vende les objets qui
font partie de la donation. L e contrat fait la loi des parties :
F
�( 42 )
dicta lex est contractai. S’il restoit des dettes à acquitter,
le sieur de Boissieu n’avoit-il pas le droit d’arrêter les
ven tes, en offrant de payer les dettes ? Son opposition
avoit pour objet de prouver qu’il n’existoit pas de dettes,
et que la faculté de ven d re, réservée par le contrat, étoit
absorbée.
L e sieur Souteyran répond à cet argument, en disant
que M . de Boissieu s’appeloit Monsieur court d’argent;
qu’il avoit été obligé de stipuler dans son contrat la
permission honteuse d’aliéner des immeubles de son
épouse ; que lui Souteyran avoit prêté 3000 francs au
sieur de Boissieu, en 1780, et avoit été obligé de lui
envoyer les huissiers.
Ce n’est là qu’une grossièreté qui ne répond ni au
point de fa it, ni au point de droit. Tous les jours on
voit dans les contrats de semblables permissions d’aliénei*,
sans qu’on ait jamais regardé des clauses de ce genre
comme honteuses. Elles sont plutôt des clauses de con
venance , pour faciliter des reviremens de fortune , et
annoncent au contraii'e une grande confiance dans la
solvabilité du m ari.
L e sieur Souteyran veut prouver la légitimité de cette
vente, par l’état des ventes précédentes, et des payemens
qui o u i été faits par le sieur de Saint-Marcel. Mais on
a vu au contraire, par ces états, que le sieur de SaintMarcel avoit abusé de la permission , et excédé son
mandat, p u i s q u ’ il avoit vendu au-delà des sommes portées
en l’état donné au sieur de Boissieu, le jour du mariage;
état qui se réfère sut contrat , et ne fait qu un seul et
même acte.
�( 43 )
L e sieur Souteyran approuve le sieur de Saint-Marcel
d’avoir anticipé le payement de la dame de Saint-Julien,
comme d’avoir pris les 12000 francs de sa réserve. L e
contrat lui en donnoit le droit; et s’il avoit pris un terme
avec la dame de Saint-Julien , c’étoit un avantage qui
lui étoit personnel ; il étoit le maître d’en user sans que
la dame de Boissieu pût s’en plaindre. Mais comment
accorder cette proposition avec ce qui est exprimé dans
l ’état, que la somme de 25 ooo francs due à la dame de
Saint-Julien , est payable a u x termes portés p a r son
contrat de mariage. Telle est la loi des parties. 11 ne
pouvoit y avoir qu’un seul terme exigible, c’étoit celui
payable un an après le décès du premier mourant. Ce
terme étoit échu depuis le 16 juin 178 5; il étoit payé
depuis le mois de novembre 1784, ainsi que la quittance
en fait foi : le payement du surplus, fait à la dame de
Saint-Julien, n’a donc pas été une cause légitime de
vente , ni un légitime emploi ?
L a réserve ne devoit être prise que sur les biens à
venir, et il en étoit échu de cette nature : on ne pouvoit
donc vendre pour cet o b je t, sans avoir épuisé les pre
miers. D ’ un autre cô té, le sieur de Saint-Marcel avoit
déjà employé sur cette réserve, partie du p rix du jardin
de V ie n n e , qu’il avoit délaissé à son gendre : il l’avoit
ainsi exigé. Coinmentdonc a-t-il pu vendre ainsi p o u r cet
objet ? E n vain le sieur Souteyran diroit-il que le sieur
Saint-Marcel s’étoit réservé la faculté de disposer de cette
somme, tant à la vie qu’à la mort : en vain accuseroit-il
les appelans d ’a v o i r tronqué cette clause du co n tra t,
quoiqu ils aient fait imprimer le contrat en entier. Une
�( 44 )
disposition gratuite ne s’en lend ordinairement que pour
avoir effet après la mort. Auroit-elle dû avoir effet pendant
la v i e , que le sieur de Saint-Marcel devoit, dans tous
les cas, épuiser les biens a venir échus avant la dona
tion ; et c’est ce qu’il n’a pas fait.
L e sieur Souteyran prétend que les appelans usent dé
la chicane la plus rafinée, en soutenant que le domaine
de Chaspuzac ne pou voit être vendu que le dernier. L ’or
dre énoncé au contrat lui paroît la chose la plus indif
férente. L e sieur de Saint-Marcel a bien fait de garder
O rzilla c, qui est plus avantageusement situé que Chas
p u za c : d’ailleurs Chaspuzac a été vendu à son p r i x , et
le sieur Souteyran consentiroit même à une nouvelle esti
mation. Il se fait ensuite des complimens sur sa proposi
tion honnete et lo y a le, et termine par se répandre en
injures contre les sieur et dame de Boissieu, qui ont fait
mourir leur père insolvable. Comme il faut être consé
quent, il vante ensuite la fortune qu’il leur a laissée, en
faisant avec emphase l’énumération des immeubles qui
leur restent.
Cette diatribe ne vaut pas la peine d’une réponse. On
croit d’ailleurs' avoir prouvé , par ce qui précède, qu’en
effet le domaine de Chaspuzac étoit le dernier en ordre,
et ne pouvoit être vendu qu’après que les autres auroient
été épuisés.
Q u ’importe que ce domaine de Chaspuzac fût un patri
moine du sieur Saint-Maicel, des qu il 1 avoit déjà d on n é,
ou qu’il ne p o u v o i t vendre qu’à des conditions qu’il n’a
pas remplies? Si la dame Saint-Clément a déjà échoué
dans une demande en nullité de vente d’un bien dotal de
�( 45 )
la dame Saint-Marcel, le sieur Souteyran ne peut in vo
quer ce préjugé, puisqu’il y a appel en la cour de ce juge
ment qui choque ouvertement les principes, et qu’il y sera
nécessairement réformé.
O n ne doit pas passer sous silence l’énonciation qui se
trouve dans un des motifs du jugement. Il y est dit qu’il
avoit été additionné à l’état connu des parties une somme
de 4000 francs, et que les demandeurs en conviennent.
C ’est une fausse énonciation, qui ne peut être que le
fruit de l’erreur ou de la surprise. V oilà l’inconvénient
de laisser rédiger les jugemens par les parties intéressées.
Il n’y a aucune trace de cet aveu dans toute la procé
dure. Ce seroit d’ailleurs contre toute vérité, parce qu’il
n’y eut jamais d’addition à l’état annexé au contrat, et
remis au sieur de Boissieu. C ’est une allégation controuvée
du sieur Souteyran, et qui doit être effacée du jugement.
En résumant : les circonstances, les motifs de considé
ration , ainsi que les moyens de droit, tout se réunit en
faveur des sieur et dame de Saint-Clément. Ils réclament
le patrimoine de leur mère : ils n’en ont été privés que
par caprice ; et la cupidité des acquéreurs ne doit pas leur
profiter.
Signé S A U Z E T D E S A I N T - C L É M E N T .
M e. P A G E S ( d e Riom ) , ancien
a v o c a t.
M e. G A R R O N jeu n e, avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de
T h ib à u d - L a n d r io t , im p r im e u r
de la Cour d ’appel. — Avril 1808.
�
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Factums Marie
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[Factum. Salvaing de Boissieu, Marie-Ursule. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Garron
Subject
The topic of the resource
abus de faiblesse
successions
Description
An account of the resource
Mémoire pour Dame Marie-Ursule Salvaing de Boissieu, et sieur Jean-Pierre Sauzet de Saint-Clément, son mari, appelans d'un jugement rendu au tribunal du Puy, le 9 mai 1807 ; contre Jean-André-Guillaume Souteyran, ancien avocat, intimé ; et encore contre le curateur à la succession vacante du sieur Pierre-Antoine Brunel de Saint-Marcel, aussi intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1735-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0507
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
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Domaine public
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MEMOIRE
EN R É P O N S E ,
sieur A n t o i n e BR E C H E T ancien chef
d’escadron habitant de la ville de Clermont,
.
J..
;
■ <
...t:
intime;
P our
C ontre
•
1
E
dame
J e ANNE-Fr a n çoise
DE
V E N Y , veuve dw sieur S i c a u d - DE M a r i o l ,
habitante de la même ville, appelante à un. juge
ment rendu au tribunal d’arrondissement de
Clermont, le 1 5 août 1 8 0 7 ;
n p r é s e n c e
de dame M A R I E A V E L I N
veuve du sieur V È N Y d e T h e i x , tutrice légale
de demoiselle A n n e - F r a n ç o is e - J e a n n e d e V é n y ,
sa fille;
E t de dame F r a n ç o i s e V E T H I Z O N -V E N Y ,
fille adoptive du sieur V e n y d e T h e i x , et du
sieur J e a n - B a p t i s t e D E V È Z E } son mari:
tous intimés.
L A dame veuve de M ariol a présenté comme tresurgente une cause fort com pliquée. Pour prouver cette
A
�( a )
urgen ce, elle a fait publier sur l’appel un mémoire im
p rim é , de quarante-sept pages petit caractère, dans le
quel on est obligé de chercher péniblement les questions
qu’elle fait naîtrep
r \
On a cru d’aborcl qu’elle a voit voulu donner une
édition /nouvelle.du M ém orial de la.cou r.d e cassation'
et sans doute le soin qu’elle a eu de faire réimprim er
cette collection d’arrêts, avoit pour objét de donner des
leçons à ses juges.
•‘
' i
E lle ajoute , d it - o n , qu’elle a des protections puis
santes : c’est vraisemblablement pour intimider le sieur
Brecliet; Insenkéb! la daine de M ariol ne peut pas ignorer
qu’en la cou'r1les .protections et les manœuvres sont plus
dangereuses qu^ tiles ; que les magistrats savent tenir
d’une main ferme la balance de T h ém is, et que les per
sonnes n’y sont d’aucune considération.
\ X>avdame veuve de M ariol pourroit-elle être protégée
lorsqu’elle ose attaquer des règlemens de famille qu’elle
doit respecter , r é c l a m e r c o n t r e sa p r o p r e conscience
l ’exécution des titres dont la fraude et la simulation sont
évidentes, et qu’elle n’a pas osé mettre au jour quand
elle étoit en présence de ses cohéritiers; lorsqu’elle vient
s’en prendre à un ancien m ilitaire, créancier originaire
de sa fam ille, et qui n’a cessé de donner des preuves de
sa franchise et de sa loyauté ?
Il est rare, au surplus, de voir figurer la dame M ariol
comme créancière ; il n’en sera que plus facile de prouver
qu’elle est tout à la fois défavorable et mal fondée dans
ses prétentions.
�( 3 )
F A I T
S.
»
L e 3 brumaire an 7 , le sieur B recliet, ancien chef
d’escadron, couvert de blessures, ayant obtenu une re
traite honorable, a épousé la demoiselle A n n e G iron.
Les père et mère de son épouse lui constituèrent en
avancement d’hoirie une somme de 12000 fr ., à prendre
sur celle de 15466 liv . 13 s. 4 d. qui leur étoit due par
les héritiers de défunte M arguerite Dauphin , veuve
V é n y de V illem ont.
Comme il étoit notoire que les
créances sur
cette maison
n’étoient pas de l’argent com ptant, on a soin d’annoncer
que cette créance étoit due par acte sous seing p r iv é , du
25 mars 1788; que cet acte est reconnu, vérifié, et déposé
chez Chastelut, notaire; qu’il est suivi de sentence obtenue
contre la clam e D a u p h i n ; p l u s , d’un jugement arbitral;
p lu s , d’ un jugement du tribunal civil du Puy-de-D ôm e,
du 23 floréal an 5 , qui déclare le tout exécutoire contre
les héritiers de la veuve Villem ont.
Ces jugem ens, ces titres ne rendoient pas les payemens
plus faciles; il auroit fallu user de voies rigoureuses,
d’expropriation, par exemple. Une occasion se présente,
et le sieur Brechet la saisit, quelques sacrifices qu’on exige.
L e 30 germinal an 9 , il achète de la dame V é n y ,
épouse séparée , quant aux biens , de J e a n - Charles
D unoyer du Sauvage, ou plutôt d’un sieur G uinez, son
fopdé de p o u v o ir, la portion qui étoit avenue à la^dame
du Sauvage dans le domaine | de. ,The;ix, par le partage
de fam ille, du 18 pluviôse an 7.
.
A 2
�( 4 )
Cette vente est faite, i ° . sons la réserve des arbres qui
avoient été jDrécédemment vendus , et dont l’acquéreur
est tenu de souffrir l’exploitation, dégradation immense,
très-ordinaire dans cette fam ille, qui a toujours com
mencé par là avant d’aliener le fonds.
2°. L ’acquéreur ne peut entrer en jouissance qu’après
la levée de la récolte de l’année, qui est expressément
réservée dans son entier.
•
- 3 ° . 'L e p rix1 est fixé à la somme de 29300 francs
en déduction dé laquelle le sieur Brecliet paye celle
de 2100 francs.
Quant à la somme de 27200 fr. parfaisant le prix
racqüéreîir rest tenu de la payer en l’acquit de la dame
du Sauvage, aux créanciers de feue M arguerite DauphinM onti’odès, sa mère. Il est dit que ces créanciers sont
dénommés en l’acte passé entre la dame D a u p h in ,'le
sieur V é n y de T h e ix , et la dame M a rio l, devant Coste
notaire à Beaumont le 20 mars 17 9 3 , notam m ent à
J . B . G iron , ou ¿1 l'a cq u éreu r, en qualité de m ari
de dame A n n e G ir o n , à Julien P eyren d, etc.
A l’égard du surplus, l’acquéreur sera tenu de le
payer aux autres créanciers de la dame D aup hin, jusqu’à
concurrence de la portion pour laquelle la dame du
Sauvage doit contribuer dans le payement des dettes de
la dame sa mère'.
c
Il n’est pas inutile d’observer que la dame du Sauvage
affecte et hypothèque spécialement à la garantie de cette
v e n te , le qu art à 'e lle appartenant du domairie>de : St.Genesl-Ciiiimpanelle^ dont la totalité a été depuis vendue
nu sieur Dalnias 7 et qui etoit alors:indivis,
9.;
�( 5 )
L e sieur Brechet ¿toit bien éloigné de penser alors
à cette acquisition ; il en eut l’obligation à la dame
M a r io l, qui le sollicita et le détermina par ces manières
engageantes, ces formes aimables qu’on lui connoit ; et
bientôt la dame M ariol a affecté de publier que le
sieur Brechet avoit fait une grande affaire, quand il. a
acquis cette portion du bien de T h e ix : cependant une
portion égale a été vendue au sieur L e v e t , moyennant
une somme de 26000 francs; la portion du sieur de
T h e ix , plus considérable, et en fort bon état, rit» été
vendue que 36000 francs : cependant la portion acquise
n’étoit affermée que 800 fran cs, par bail du 20 vendé
miaire an 9 , pour neuf ans, sur quoi 200 francs d im
position. Les arbres vendus valoient plus de 2000 fr. •
la réserve de la récolte de l’année étoit encore une di
m inution ; et le sieur Brechet a été obligé de faire
pour 7854 fr. de réparations. Enfin , pour sauver des
débris les arbres qui restoient h couper, il lui en a coûté
1800 francs. V o ilà le grand m arché qu’a fait le sieur
Brechet.
Il d e v o ir, sans d ifficu lté, se mettre en r è g le , faire
transcrire et notifier son contrat; il cède aux sollicitations
de la dame M a rio l, qui le conjure de 11e pas faire des
frais inutiles : il paye les créanciers délégués ; il en
rapporte les quittances; il se contente ensuite de prendre
une inscription sur les biens hypothéqués ù la sûreté de
la ven te, une à R io m , l’autre à Clermont. Elles sont
sous la date des 7 et 8 floréal an 9.
L e sieur Brechet reste trois ans dans la p laS cntiere
sécurité : bientôt on lui fait parvenir des propos ou des
�( 6 )
menaces de la dame M ariol -, il se détermine à faire
transcrire son contrat. Cette transci’iption est du 27 ven
démiaire an 12.
L e 13 brum aire su iv a n t, la dame veuve M ariol lui
fait notifier une mise aux enchères. Il est à propos d ’anaUser cet acte fort important au procès.
L a dame veuve M ariol fait cette enchère comme
créancière de la dame V é n y
du Sauvage ,
tant en
vertu de son contrat de îtia n a g e , en date du ç> février
1771 ? que d?obligation du 7 piairial an 11 • elle ne
dit mot sur une certaine obligation de 10000.fr. qu’elle
a fait éclore depuis, et dont elle n’a pas sans doute osé
parler dans son acte d’enchère.
E lle s’exprim e au surplus assez disertement sur la
portion des biens vendue au sieur Breclict. E lle y dé
clare que ces immeubles appartenoient à la dame sa
sœ ur, et lui étoient avenus pa r Je partage qu'elle a
passé avec ses cohéritiers , devant Coste , n o ta ire,
le 18 p l u v i ô s e nn 7 : e l l e n ’a v o i t p a s i m a g i n é a lo r s que
ce partage n’étoit que provisionnel, comme elle menace
de le dire aujourd’h u i, quoiqu’elle n’en ait pas même
parlé dans son mémoire.
E lle n’enchérit d’ailleurs que d’un vingtièm e ; il est
vrai que sa réquisition est antérieure à la promulgation
du Code Napoléon en cette partie, qui exige que l’en
chère soit d’un dixième. Elle ne l’auroit peut-être pas
fait trois mois plus ta rd , même trois mois plutôt : mais
elle savoit que ce bien avoit passe en d’autres mains \
que le sieur Brecliet l’avoit échangé avec un individu
q u ’a u tr e fo is la daine de M ariol n’auroit pas voulu
.
�blesser : elle a cru< pouvoir mettre le sieur Brechet ou
son acquéreur à contribution ; et si elle en a été quitte
a .meilleur marché pour son enchère , elle n’en sera
pas plus heureuse.
L e sieur Brechet ne fut pas fort effrayé de cette dé
m arche, qui tendoit tout au plus à la ruine de la dame
du Sauvage; ce qui n’étoit pas infiniment délicat de la
part de sa sœur, évidemment alors sa débitrice.
L e 6 frimaire an 1 2 , le sieur Brechet commença par
faire une saisie-arrêt entre les mains de la dame M ariol
et du sieur V é n y de T h e i x , de tout ce qu’ ils devoient
à la dame du Sauvage , notamment la restitution des
jouissances de la succession du sieur V é n y d’A r b o u z c ,
frère com m un, et la somme de 10000 francs provenante
d e là vente de Saint-Genest-Cham panelle; cette somme
faisant le quart revenant h la dame du Sauvage dans
cette vente.
Celte saisie-arrêt est faite pour la garantie du p rix
porté au contrat de vente du 30 germinal an 9.
L e même jo u r , cette saisie-arrêt, ainsi que la mise
aux enchèi'es de la dame M a r io l, sont dénoncées à la
dame du Sauvage.
L e 14 nivôse an 1 2 , le sieur Brechet prend le parti
de faire signifier à la dame M ariol un acte extraju
diciaire , par lequel il lui déclare que pour la mettre
hors d’in té rê t, il lui offre de lui payer la totalité de
ses créances contre la dame V é n y , femme séparée,
quant aux b ien s, du sieur du Sauvage, tant en p ^ n~
c ip a l, intérêts que f r a i s : il lui fait en conscqucnce
sommation de déclarer, dans vingt-quatre heures, le
�C 8 )
m ontant de ses créances , afin que le payement en puisse
être fait de suite. 11 offre de plus de lui éviter et la ga
rantir de toutes poursuites de la part des autres créan
ciers , relativement à cette en clitic 5 a la . cliarge aussi,
par la dame M a rio l, de le subroger à son lieu et place,
avec toute g a ra n tie , protestant de nullité et de tous
dépens, dommages-intérêts, etc.
L a dame M ariol s’empresse de répondre ; et le môme
jour elle fait notifier au sieur Brechet qu’elle accepte
ses offres, pour quelles ne puissent plus être révoquées
à l ’a ven ir; en conséquence, et donnant pour le moment
le d éta il, autant que possible, de ses créances, elle dé
clare qu’il lui est dû la somme de 30000 fr a n c s pour
la dot en préciput et avantage à elle faits par la dame
D aup h in , sa m ère, suivant son contrat de mariage du 9
février 1771 ; les intérêts de cette som m e, depuis le
décès de la dame Dauphin ; plus, la somme de 6000 fr.
montant d’une obligation consentie par la dame V é n y
du Sauvage , à son proiit , le 7 prairial an 1 i • p lus
les frais de mise à exécution, dans lesquels doivent né
cessairement entrer l’acte de mise aux enchères les
poursuites ultérieures; et là-dessus une longue histoire
sur les affiches qu’elle avoit déjà fait im prim er, dont
quelques-unes sont timbrées, d’autres 11e le sont pas etc
Pas encore un mot de cette obligation de 10000 fr*
de la dame D aup h in , faite en 1793, moment sans doute
fort opportun. Il est cependant extraordinaire que la
dame M ario l, si fertile en détails, qui u’oublie pas inôme
la façon et l’impression de ses affiches, g 0rde le silence
sur un objet aussi im portan t, et qu’elle ne devoit pas
ignorer.
La
�(9 )
La dame Ma v io l, bien contente d’e lle -m ê m e après
cette notification , appelle cela un contrat ju d icia ire ;
et voilà que les contrats judiciaires sont des actes irré
vocables; et voilà que la cour de cassation l’a jugé ainsi
par une foule d’arrêts. Sirey et Denevers , qui se dis
putent sur tant de choses, sont d’accord sur ce p oin t;
chacun cite les siens, etc.
( U n contrat judiciaire ! lorsqu’on n’a aucune connoissance de ce qui est dem andé, lorsque la dame M ariol
elle - même , en notifiant son enchere, ne donne copie
d’aucun titre, n’ énonce aucune som m e; mais si au lieu
de demander 36000 francs en p rin cip al, et le payement
de l’im prim eur des affiches, elle eût demandé cent mille
écus, un m illion, par exem ple, il auroit donc fallu que
le sieur Brechet payât tout sans réflexion , sans exam en,
par la force du contrat ju d icia ire ?
L e sieur Brecliet n’a pas été de cet avis ; il a raison
nablement pensé qu’avant de p ayer, il falloil savoir
ce qui étoit légitimement d û ; en conséquence, il a cru
devoir consulter les cohéritiers de la dame M ariol, pour
savoir leur opinion sur ce point. L e 18 nivôse an 1 2 ,
il a fait citer devant le bureau de paix , la dame du
Sauvage et son m ari; les sieurs R ib eyre, le sieur V én y
de T l i e i x , et la dame veuve M ariol.
Il a exposé qu’il avoit fait transcrire son contrat de
Vente d’une partie du domaine de T lie ix ; qu’il l’a fait
n otifier; que la dame M ariol a fait une enchère; q 116
pour la faire cesser, il a offert de lui payer le montant
de ses créances ; que la dame M ariol a bien vite acCepté : mais le sieur Brechet croit qu’a va it
Payer
�( 10 )
il faut que les créances de la dame M ariol soient liquidées
tant en présence de la dame du Sauvage, qu’en celle des
autres cohéritiers, afin de fixer la portion que chacun
doit p a y e r , parce qu’entre cohéritiers , la dame de
M ariol ne peut prétendre à une action solidaire, mais
seulement h zinc action personnelle pour la portion de
chacun ; que la dame veuve M ariol doit même faire
confusion de ses créances , dans la proportion de son
amendement : en conséquence, le sieur Brechet demande
que tous les cohéritiers s’accordent entr’eux pour fixer
liquider ou compenser les créances prétendues par la
dame de M ariol.
I æs gens éclairés que le sieur Brechet a instruits de
ses 'dém arches, ont pensé qu’il agissoit sagem ent, qu’il
ne ptoposoit que des choses justes, et que la dame M ariol
ne pouvoit exiger que des créances légitimement établies
dans la proportion et d’après les hases expliquées par le
sieur Brechet.
M ais il est si 'diilicile d’accorder tout le monde ! Les
parties se présentent au bureau de paix ; ]e sieur du
Sauvage se fâche de ce qu’on a dit qu’il étoit habitant de
Clentoont; il veut être habitant du M onastier, et ne veut
plus parler.
L a dame du S au vage, maîtresse de scs biens aventifs
approuve les réclamations de sa sœ ur, mais jusqu’à eon*
currence de yôoo fr. seulement, pour sa portion con
tributive Ylims le préciput de 30000 francs.
E lle recortnoît d evo iï la -somme de '6000 fr. portée par
son obligation du 16 prairial an 11 ; et loin'd’être créan
cière de sa sœui’ pour restitution 'de '/oitissarices de la ‘suc-
�(II )
cession tl’A r b o u z e , elle est au contraire débitrice de d iiférentes sommes payées par la dame de M ariol à la dame
D au p h in , m ère commune. E n dernier résultat, elle n en
tend prendre aucune part aux contestations, qui s élevent.
L e sieur Balthazard de T h e ix n’est pas si complaisant;
il déclare avec assez de rudesse qu il entend contester
les prétentions de la dame M a rio l; il obseive q u elle a
laissé écouler hu it ans sans réclam er ses prétendus droits;
qu'elle a laissé consomm er les partages , a signé les
com prom is, nom ination $ exp erts, et a accepté son lot
sans se rien réserver j qu’elfe a laissé vendre Icl tota ite
des. biens de la succession de la mere commune , et a
souffert les partages du m obilier sans encore aucune
réclam ation.
O n craindroit d’affoiblir les observations du sieur e
T h e ix si on ne les transcri voit littéralement.
Il a j o u t e q u e « la d e m a n d e q u e fait la dame de M ariol
« à ses c o h é r i t i e r s , par l’incident qu’elle fait au sieur
«
«
«
«
«
B reclie t, est plutôt une vexation qu’une justice ; que
cette demande est inconsidérée, d’apres les actes qui
se sont passés dans la fam ille, et dont elle a parfaite
connoissance ; que sa demande est absorbée par les lois
anciennes; que c’est un avantage prohibé par les lois
« existantes lors du décès de la mère. »
Il observe en outre « que la dame D auphin fit, dans
« l’intervalle du 28 brumaire à son d écès, deux testa« mens, codiciles, fidéicommis, etc. Il requiert la maia« lçvée de toutes inscriptions faites par la dame JVlauo ,
« et finit par toutes protestations et r é s e r v e s . »
^
Survient la dame M a r io l , qui ne sait pas ce que c est
B 2
�( 12 )
que confusion, com pensation, fins de non-recevoir, etc.;
ces mots barbares n’ont jamais retenti à son oreille; elle
suppose que c’est pour faire diversion à sa demande : elle
veut de l’argent, rien que de l ’argent; le sieur Brechet
a prom is, s’est engagé; elle veut qu’il paye, et le somme
de se concilier sur sa dem ande, dont elle n’entend point
rabatti'e une obole.
A l’égard de son frère , il ne sait ce qu’ ü ¿[¡t . e]je
n’a renoncé à rien : quand il fera apparoir de ses pré
tentions, on saura bien lui répondre; et s’il veut exciper
des testamens de sa m ère, c’est à lui à les produire, etc
L e 10 pluviôse an 1 2 , requête du sieur Brechet. 11
demande permission de faire assigner la dame de M ariol
pour lui voir donner acte de la réitération des offres
qu’il fait de lui payer ce qui lui sera d û , après qu’elle
aura fait liquider ses créances ; il demande qu’elle soit
tenue de justifier de ses titres, tant en présence de la
dame du Sauvage que de ses autres cohéritiers.
C est a l o r s q u e la d a m e M a r i o l , p a r u n e requête du
13 thermidor an 1 2 , fait éclore une obligation de la
somme de 10000 f r . , en date du 25 février i 793? soul
erite à son profit par la dame sa m è re , et payable dcifis
d ix ans. Elle n’a voit point assez demandé au sieur Brechet
par légèreté ou par oubli : elle forme la demande inci
dente de celte somme ; et comme le sieur Brechet avoit
offert de tout p a y e r, il payera bien encore cette somme
de 10000 francs.
Bientôt après elle donne copie de cette obligation, de
celle qui lui a été consentie par la dame du Sauvage
le 7 prairial an^i 1 , et pour la sûreté de laquelle elle'est
�( ï3 )
déléguée par sa sœ ur, à prendre sur une rente et les
arrérages échus ; le tout dû par la dame Dalagnat et la
dame C orm eret, sa sœur. E t ce que la dame M a iio l ne
dit pas , c’est qu’elle a été remboursée par les dames
Dalagnat et Cormeret. O n la croit trop délicate et tiop
honnête pour ne pas convenir de ce remboursement
dans tous les cas, on lui en administreroit la pieuve.
U ne grande discussion s’élève entre les parties, sur la
,
créances r é c l a m é e s .
,
L a dame M ariol entend repéter a ses oiei es q u e e
n’a ni disposition ni préciput qu’elle n etoit pas sais e
irrévocablement des 30000 fr. portés en son c o n t i a t c e
lé g itim ité des
mariage ; qu’elle n’a pas ignoré qu’en ligne diiecte 1
falloit l’apporter ce qu’on avoit reçu , lorsqu on venoit
à partage. Aussi s’étoit-elle rendu justice*, elle a paitagc
avec ses cohéritiers le seul immeuble ( la terre de T h e ix )
qui p r o v e n o i t d e la s u c c e s s i o n d e sa m è r e ; e l l e n a de
mandé ni préciput ni obligation : tout s’est bien passé.
A l’égard de l ’obligation de la dame du S au vage, on
lui a représenté qu’elle avoit oublié la précaution la plus
essentielle; qu’elle n’avoit pas demandé l’autorisation du
m a r i, si évidemment nécessaire. O n ajoute aujourd liui
qu’elle en est même payée.
On a fini par lui dire qu’elle n’avoit pas d’hypotlieque
pour cette prétendue obligation : à la vérité elle avoit
bien fait h yp o th éq u er, par une clause générale , tou*
les biens que sa sœur pouvoit avoir dans 1 arrondissement
du bureau de C lerm o n t, et dans celui de R iom ; inaIS nn
n supposé qu’une hypothèque de ce genre (.'toit u ° P va&ue
pour qu’elle fut v a l a b l e , 1d’après la loi du n brum aire
�( i4 )
an 7 , et le Code Napoléon, qui exigent une désignation
plus précise.
O n a rem ontré qu’il étoit assez difficile de penser que
la dame du Sauvage, pour la sûreté d’une obligation en
date du 7 prairial an u , eût eu l’intention d’bypothéquer des biens vendus, depuis le 30 germinal an 9, plus
de deux ans auparavant : on a dû croire que la vente
a v o it opéré mie tradition en fa,veur de son acquéreur,
et que la dame du S a u v a g e tfa vo it pas voulu commettre
un délit grave ( un-stellionat ) ; que sa sœur même ne
l’auroit pas exigé.
L es premiers juges ont été de cet avis; ils ont pensé,
« i° . que la dame de V illem on t étant morte en l ’an 4 ,
k sous l’em pire de la loi du 17 nivôse an 2 , cette loi
« ne lui perniettoit de faire aucun avantage en faveur
« de ses successibles;
« 2°. Q ue la loi du 18, pluviôse an 5 n’avoit confirmé
« que les avantages faits irrévocablem ent avant la publi« cation d e la p r e m i è r e *,
« 3°- Que la dot de 30000 f r ., stipulée par le contrat
a de mariage de la dame M ariol, étoit plutôt une expec« tative qu’un avantage irrévocable , puisque la dame
« V illem on t s’étoit réservée la faculté d’appeler sa iille
« à sa succession, en rapportant les 30000 ir. ; ce qui
« fait disparoître toute idée d’irrévocabilité. »
L es premiers juges ont d it, en quatrième lie u , que
cr d’après l’allégation des parties, la dame de V illem ont
« a fait un testament explicatif de ses volontés (1 ); que
(1) Ce testament est du 25 brumaire an 4. La dame de Vil-
�( i5 )
« la clame de M ariol est venue au partage de la sftcces« sion de sa m ère avec ses autres frères et sœ urs, en 1 an 7,
« et rta point réclam é en préciput la dot de 30000J r .
5o. Quant à l’obligation de 10000 fr. souscrite par la
m ère, les premiers juges ont encore décidé que, « d apies
« les présom ptions, cet acte étoit un avantage in d iiect,
« que ces présomptions se cliaugeoient en certitude ,
« quand on voit la dame M ariol v e n ir , en 1 an 7 > au
« partage de la succession de sa m b te, avec ses frères et
« sœurs, sans réclamer le p rélèvem en rd u montant de
« cette obligation. » N ’auroient - ils pas pu ajoutei que
la dame M ariol avoit au moins 'manqué de m ém one ,
lorsque demandant au sieur Bréchet tout ce qui lui etoit
d u , même les frais d’impression de ses affiches, elle ne
parloit pas de son obligation de ïo o o o f r . , et qu elle la
passée sous silence au bureau de p a ix , etc. ?
Quoi qu’il e n s o i t , le t r i b u n a l d o n t est appel est assez
malavisé pour décider que n i la s o m m e de 3 0 0 0 0 f r . ,
ni l’obligation de 10000 f r . , ne peuvent être regardées
comme dettes de la succession de la dame de V illem on t;
qu’ainsi le sieur B ro ch et, acquéreur d’ une portion du
bien de T h e i x , ne peut être chargé de les acquitter.
Quant à l’obligation'de la dame du Sauvage , elle n est
lem ont , par cet acte qui n’a pas été enregistré , mais que -la
dame Mariol ne désavouera ,pas, institue sa fille son héritière»
conjointement avec le sieur de Theix , son frère, et la daine
du Sauvage, sa sœur. La testatrice explique que les droits e
son fils aîné sont fixés sur la terre de Montrodès et
e e
,
entepd qu’ils ne s’étendent pas au ttélà.
�(
ï6
)
p o i n t autorisée ni par son m ari, ni par la justice; et cette
obligation est consentie sous l’em pire du Code Napoléon :
elle est donc n u lle, d’après l’article 217 de ce Code.
E t si cette nullité peut être opposee par la femme ,
d’après l’article 225 du même C o d e, il est assez raison
nable d’en conclure qu’elle peut l ’être aussi par ceux
que la fem m e, en pareil cas, seroit tenue de garantir :
c’est être assez' conséquent.
L e tribunal ajoute que cette obligation est postérieure
de deux ans h la vente consentie par la dame du Sau
vage au sieur Brecliet. Les biens vendus au sieur Brechet
ctoient entre ses mains lors de cette obligation. L a stiulation d’hypotlièque n’a pu comprendre que les biens
•ippartenans à la dame du Sauvage lors de l’obligation.
La dame de M ariol n’ignoroit pas la vente con
sentie par sa sœur; il n’a pu être dans son intention de
\ui faire commettre un stellionat ; de même qu’il n’a
pu être dans l’intention de la dame du Sauvage de s’en
rendre coupable.
O n s’étonne pour la dame de M ariol, et, par égard,
on ne fera aucune autre réflexion, qu’elle ait osé cri
tiquer de pareils motifs.
XI est dit encore que cette obligation ne contient aucune
■iffectation spéciale de la portion de la terre de T h e ix ,
acquise par le sieur Brechet; qu’il n’y a qu’une affectation
générale des biens à elle appartenans dans les arrondissemens de R ioin et de Clermont ; de semblables e x ressions ne peuvent se rapporter en aucun cas aux biens
qui ne lui appartenoient plus à cette époque.
O n remar<!ue aussi q u’aux tenues du môme article 4
de
�C 17 )
de la loi du 11 brum aire an 7 , il auroit fa llu , pour
une hypothèque spéciale, indiquer la nature, la situation
des immeubles, et préciser la commune où ils sont situés.
(L a cour d’appel l’a jugé in term in is , par arrêt du 17
mars 1808.)
On observe également que le sieur V é n y de Theix.
oppose à la dame M ariol une fin de non-recevoir résul
tante de ce qu’au partage de la succession de la mère
com m une, en l ’an 7 , la dame M ariol s’est fait justice
à elle-m êm e, en ne demandant pas à prélever sa dot
de 30000 fra n cs, et a préféré de venir au partage avec
ses frères et sœurs.
Quant aux autres créances réclamées par la dame M ar io l, on ne peut y statuer qu’après un compte préalable.
11 en résulte que la dame M ariol est déclarée non
recevable dans sa demande en payem ent, tant de la somme
de 3 0 0 0 0 f r . , que de celle de 1 0 0 0 0 fr. ; elle n’est pas
plus heureuse pour le montant de l'obligation de sa
sœur , sauf à elle à se p o u rvo ir contre la dame du
Sauvage.
Il est ordonné que les sieurs de V é n y et la dame de
M a rio l, sa sœur, viendront à compte devant Chassaigne,
notaire com m is, sur le payement des dettes qu’ils pré
tendent avoir respectivement fait à la décharge de la
succession de la m ère commune.
Il est fait, dès à présent, main-levée au sieur de Vény?
de l’inscription de la dame M ariol , ayant pour objet
les 30000 iran cs, ainsi que l’obligation des 10000
L e sieur Bréchet obtient également la m ain'ievée des
iftscriptions de lu dame de M ariol.
C
�(
1 8
\
L e tribunal maintient les inscriptions de la dame
M a rio l, sur le sieur V é n y de T lie ix , ayant tout autre
objet que les deux premiers ; il est ordonné que les
parties contesteront plus amplement sur le mérite de ces
inscriptions conservées. L a dame de M ariol est con
damnée aux dépens envers le sieur Brechet ; les autres
sont réservés.
C ’est de ce jugement que la dame M ariol a eu le
courage d’interjeter appel; e t, si on veut l’en cro ire ,
il est très-urgent de la faire payer de toutes ces sommes,
car elle a grand besoin d’argent.
C ’est elle qui fait expédier et signifier le jugem ent,
à là vérité sous toutes réserves : sa signification est
du 29 janvier 1808 , près de six mois après sa date.
E lle a eu le temps de mettre au jour un long mémoire
qui a accompagné sa requête d’urgence et son appel, en
date des 11 et 17 février d ern ier; et comme elle Cst
préparée dans sa défense, elle entend que tout le monde
le so it; elle demande jx être jugée sans délai.
L e sieur Brecliet se prête volontiers à ce caprice ; il
vient soutenir,
i<\ Q u’il n’y a point de contrat judiciaire entre les
parties ;
20. Q ue la dame M aritil n’a aucun préciput sur là
succession maternelle ;
3^ Q ue les créances prétendues de la dame Mario]
sont frauduleuses et simulées;
4 0 . Que l’obligation de la dame du Sauvage esc nulle;
5°. Q u’en la supposant valable, elle n’a aucune hy
pothèque sur ls sieur Biechet pour le montant de celte
obligation.
�(
)
On va essayer de prouver ces cinq propositions : on
présentera ensuite quelques moyens de considération en
faveur du sieur Brechet; il promet d’avance de ne pas
abuser de ses avantages, par ménagement pour la dame
de M ariol.
§•
I er-
I l n’y a point de contrat ju d icia ire entre les parties.
Q u’est-ce qu’ un contrat judiciaire? Suivant la définition
que nous en donnent les auteurs élémentaires, cest celui
par lequel le dem andeur, après avoir forme une d e
mande , s’en départ en justice c’est celui par lequel le
défendeur, après avoir contesté la prétention, y acquiesce
et l’approuve en jugement.
Ces contrats ont une grande force , parce qu’ ils ont
une grande solennité ; ils sont au-dessus des contrats
ordinaires : c ’est en f a c e m ê m e de la ju s t i c e , q u e cette
espèce de contrat reçoit sa perfection ; de ses juges on
en fait ses témoins. D e sorte que ces engageinens qui ont
été ordinairement préparés par de mûres réflexions, par
l ’avis de ses con seils, sont bien supérieurs aux transac
tions qui se font hors la présence de la justice.
D e tels contrats ne sont pas susceptibles d’examen ; les
jugemens qui interviennent ne peuvent être attaqués par
aucune voie : tout est irrévocablem ent consommé.
O r , pourroit-on reconnoître à cette définition l e s actes
qui ont eu lieu entre les parties; et où a-t-on trouve
qu’il y avoit entr’elles un contrat judiciaire? Ia justice
a~t-elle sanctionné des actes e x t r a judiciaires et fu g itifs?
C 2
�C 20 )
L a dame de M ariol fait une enchère ; elle en a le
droit dès qu’elle se suppose créancière : mais cette dé
marche entraîne des conséquences bien graves; elle tend
à la ruine du vendeur, qui doit une garantie pleine et
entière à l’acquéreur.
Une expropriation auroit encore des suites plus fu
nestes. Que fait le sieur Brechet? il offre de désintéresser
la dame M ariol; de lui payer le montant de ses créances
' lorsqu’elle les aura fait connoître : mais le sieur Brechet
ne doit pas les payer à l’aveugle ; il ne peut contracter
hors la présence de son vendeur, à qui il a déjà dénoncé
cette enchère un mois auparavant.
Il faut que la dame de M ariol justifie de scs titres- il
le demande; il l’exige : il faut qu’elle établisse la légi
timité de ses créances ; rien de plus juste.
Q u ’im porte, si l’on veu t, que la dame M ariol ait pris
une inscription; qu’elle ait énoncé dans cet acte purement
conservatoire, des créances réelles ou imaginaires! elle
a été maîtresse de sa cause, de la f i x a t i o n : i l n’y a rien
de contradictoire avec les parties intéressées; et ce seroit
se compromettre bien gauchem ent, que d’aller payer
sans aucune discussion, tout ce qu’il plairoit à la dame
de M ariol de demander.
II est extraordinaire d’entendre dire à la dame de
M a r io l, que le sieur Brechet avoit connoissance du re
le v é des inscriptions de la dame de M a rio l, contre la
dame du Sauvage , et que ce relevé se portoit à une
somme de 160407 francs.
O11 ne voit pas trop où elle veut en ven ir, lorsqu’elle
énonce celte proposition; voudrai t-elle prétendre que lp>
�( 21 )
sieur B rechet, d’après cette connoissance, a dû complet
bien vite cette somme de 160407 francs? Cependant elle
ne lui demande que 30000 fr. d’ une p a rt, et 6000 fx.
de l’autre; p lu s, les frais d’impression de ses affiches.
Ce n’est que long-temps après, que par une demande
incidente, et par un agréable sou ven ir, elle réclamé
encore une somme de 10000 fr ., montant de 1 obligation
souscrite par sa mère.
C om m ent, avec de semblables variantes, pourroit-elle
supposer qu’il y a un contrat judiciaire? Il faut lui rendie
justice : quoique la dame M ariol ait fait un paiabiap
p a rticu lier sur ce contrat, elle n’insiste que foiblem ent,
il lu i -paraît seulem ent que le contrat^ jüdiciahe etoit
form é ; et un arrêt de la cour su p rêm e, du 23 avr^
1807, l’a , suivant e lle , formellement décidé. Cependant
quand on examine bien cet arrêt, on voit qu’il a jugé
tout autre chose : d’abord , c’est un arrêt dé rejet, qui
dès-lors ne juge rien ; mais il confirme un arrêt de la
cour de T o u lo u se , qui a décidé que la dame G a y ra l,
créancière inscrite, pouvoit aller en avant sur son en
chère, m algré les offres postérieures de d’ A u b ern ad , de
payer les créances inscrites, s a u f discussion.
O r , ce n’est pas là du tout la question qui nous oc
cupe. E n effet, si la dame M a rio l, nonobstant les offres
du sieur B re clie t, avoit refusé de se départir de son
en ch è re , qu’elle eût demandé la continuation de ses
poursuites, et qu’il fût procédé à l’exp rop riatio n , elle
auroit eu un prétexte pour soutenir qu’ayànt reçu une
Notification comme créan cière, elle avoit le d r o i t d en
cliürir ? et ne vouloitp as nuire aux autres cicanciers;
�qu’on exam ineroit h l’ordre si ses créances étoient légi
tim es, etc.
,■
. V o ilà peut-être ce qu’elle auroit pu d ire; c’est alors
qu’elle auroit argumenté de l’arrêt du 2 3 avril 1807
non pour prouver que la : cour de Toulouse avoit bien
ju g é , mais pour établir qu’elle n’avoit violé aucunes lois.
M ais f4 ' présent que la -dame M ariol s’est départie de
son enchè re ; qu’il ne s’agit plus que de discuter sur le
jn é rite de ses créances, ou sur leur légitimité l’arrêt
de T o u lo u se, comme l’arrêt de cassation, deviennent
absolument étrangers à l’espèce.
E n un m o t, le sieur B recliet, qui a Une garant;e à
exercer contre sa venderesse, n’a. pu ni dû payer sans
ex a m en , sans le faire dire contradictoirement avec les
parties intéressées; s’il l’avoit fait sans aucune précaution
on lui répondroit avec raison qu’il a pris sur son compte
de payer ce qui n’étoit pas dû , et qu’il n’a dès-lors
aucun recours.
Cette proposition est d’une telle évidence, qu’il semble
.que toute la question se réduit à examiner le mérite des
créances réclamées par la dame. M ariol.
:
§.
11.
L a dame de M a rio l ne peut prétendre à aucun précipite
su r la succession maternelle.
P a r son contrat du 9 février 1.771, la dame de V illem ont^sa m ère, lui constitue une somme de 30000fr
Cette somme n’est payable qu’après le décès de la cons
tituante, et, suas, intérêts jusqu’à ce.
�( 23 )
Cette constitution n’emporte ni forclusion, ni renon
ciation. Si la mère vient à m ourir sans avoir fait d’autres
dispositions, la dame M ariol viendra à partage de sa
succession, sans même être obligée de rapporter la somme
de 30000 francs; m ais il sera libre à la dame de V illemont de faire telles dispositions que bon lui semblera,
même par testam ent, et de réduire la demoiselle future
à la dot de 30000 francs ci-dessus constituée , ou de
l ’instituer héritière , à la charge du rapport de cette
dot.
L a succession de la dame de "V illemont est ouverte
en l’an 4 , sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2.
L ’article 8 de cette loi veut que les eüfans, descendans
fet co llatérau x, ne puissent prendre part aux successions
de leurs pères et m ères, ascendans ou attires parens, sans
rapporter les donations qui leur ont été faites antérieu
rem ent, sans préjudice de l’exécution des coutumes qui
assujétissent les donations à ra p p o rt, même dans le cas
où les donataires renoncent à la succession du donateur ;
et la loi ajoute que cet article sera ob servé, nonobstant
toute dispense de rapport.
L a disposition de cette loi n’a pas été mécônr^ue de
la dame de M ariol. Elle sait aussi qu’en principe gé
néral toutes donations en ligne directe'sont sujeft.es à
rapport, à moins qu’elles-n’aient été faites eiï'précipiU.
M ais la dame de M ariol prétend que la disposition
rigoureuse de cette loi a été modifiée ou rétractée par
l ’article I er. de la loi du 18 pluviôse an 5 et que
d’ailleurs sa donation de 30000 fr. est faitë en précîput.1
Q ue porte cet article i 0r. de la loi du1 18 pluviôse
�( 24 )
an 5? il maintient tous prélèvem ens, préciputs, et autres
dispositions ir r é v o c a b le s de le u r n a t u r e , stipulées en ligne
directe avant La publication de la loi du 7 mars 1793.
O r c o m m e n t la dame M ariol prouvera-t-elle qu’il
ex iste* d an s so 11 c o n tr at un ,prélèvem ent de 30000 francs
ir r é v o c a b le de sa nature ? Il n’y a pas une expression
qui ne p r o u v e au contraire la révocabilité. La dame de
Villem ont ne manifeste aucune volonté certaine; tout
dépend de sa fantaisie, de son caprice ou de son affection:
elle peut laisser sa fille avec cette som m e, sans qu’elle
prétendre autre chose; elle se réserve le droit de
lu i donner cette somme en préciput, si bon lui semble,
de l’instituer h éritière, s’il lui plaît, avec ou sans rapport
de sa dot. C ’est bien l à , sans contredit, l’analise exacte
de cette stipulation, aussi mobile que le papillon diurne.
L a dame M ariol espère, et ne tient rien ; on peut tout
p
u
i s s e
lui ôter, comme on peut tout lui laisser; et elle vient
dire qu’elle-est irrévocablement saisie, lorsque son sort
dépend d’ un seul m o t; lorsque sa ;mère seréserve une
pleine et entière liberté dé faire tout lè contraire de ce
q u ’elle laisse espérer.
•; •
î i ’est-il pas au contraire évident que; jamais clause ne
fut plus incertaine; que tout dépendait, non pas d’un évé
n e m en t ,.n o n pas.d ’une simple condition, mais du plus
léger chiingement de volo'nté.
E lle prétend qu’il s’est élevé une très-grande contro
verse sur ce point : mais c’est une bien grande erreur.
L a seule question qui ait divisé les jurisconsultes, étoit
celle de savoir s i, lorsqu’une disposition universelle étoit
faite à la charge d’associer un tiers, la portion revenante
�'
(
2
5
)
à ce tiers devoit faire partie de la succession ah intestat;
on soutenoit d ’un côté qu’elle tom boit dans la succession
ah intestat, parce que la charge d’associer étoit i*évocable
à volon té; d’autres, avec plus de raison, pensoient que
la révocabilité de l’association né’-pouvoit avoir lieu
qu’au profit du donataire déjà saisi du bien universel;
que cette charge d’associer étoit une simple condition, et
non une disposition; que dès-lors l’associé étoit saisi; et
ce dernier système a prévalu. L a cour d’appel l’a ainsi
décidé par ses arrêts.
M ais autrem ent, toutes les fois que le disposant ne
s’est pas dépouillé ; toutes les fois qu’il a pu donner ù
un autre ce qu’il prom ettoit au prem ier conditionnel
lement , on a décidé avec raison qu’il n’y avoit aucune
disposition irrévocable.
L a dame M ariol n’est pas heureuse dans l’application
de ses arrêts de la cour de cassation ; les trois arrêts
qu’elle rappelle n’ont pas em pêché que la cour n’ait
jugé tout le contraire dans la cause du sieur Gardet de
V a yre.
Mais l ’appelante ne veut pas faire attention , ou se
dissimule à elle-m êm e, que dans l ’espèce de ces trois
arrêts, il s’agissoit seulement d’un droit d’élection confié
à un tiers; et q u e , dans ces trois cas, la succession du
disposant étoit ouverte antérieurement à la loi du 17
nivôse, et même à la loi du 7 mars 1 7 9 3 , qui défendoit
toute disposition en ligne directe.
A lo rs on a dû dire que la loi du 17 nivôse ne pouvoit
àvoir d’effet qu’à compter de sa publication ; q ue tout
ce qui étoit antérieur étoit hors de son domaine ; qu’elle
D
�(26)
ne pouvoit régler les successions ouvertes avant qu’elle
fût prom ulguée; et voilà le principe consacré par la loi
du 18 pluviôse an 5. '
• Aussi ou pourroit écouter la dame M ariol, si la dame
sa m ère étoit morte avant le 7 mars 1793 ; il seroit
raisonnable alors de soutenir que la dame V illem on t
étant décédée sans faire d’autres dispositions, la dame sa
fille peut user de la disposition contenue en son contrat
de mariage.
r , (j .
Mais vouloir le soutenir ainsi, pour une-succession
ouverte en l’an 4 , soùs l’empire d’une loi prohibitive
et x*igoureuse, il faut absolument effacer l’article 8 de la
lo i du 17 nivôse an 2 ; il faut vouloir contester l’évi
dence , et aller jusqu’à prétendre que cette loi n’a aucun
e ffe t, pas môme à com pter de sa publication.
Il faudroit encore effacer la loi du 9 fructidor an 3 ,
celle du 3 vendémiaire an 4 , et morne celle du 18 plu
viôse an 5 , art. 9 , 10 et 1 1 , qui veulent impérativement
que la loi du 8 avril 17 9 1, celles des 4 janvier et 7 mars
17 9 3 , celles des 5 brum aire et 17 nivôse an 2 , soient
exécutées à com pter de leur publication.
. E t ne peut-on pas observer encore à la dame M ariol
qu’elle passe bien légèrem ent sur l’article,2 de la loi du 18
pluviôse? Il est singulier qu’elle n’ait parlé que de l ’article
I er. ; le ac. est cependant assez essentiel : il vcut que jcs
réserves dont il n’a pas été irrévocablement disposé
fassent partie de la succession ab in testa t, et appar
tiennent aux h éritiers, autres que les .donataires ou hé
ritiers institues.
O r , on ne contestera pas sans doute qu’il u»y ait c|ims
�(
27 )
le contrat de 1771 une réserve de la dame d e \ illemont,
de disposer de tout le surplus de sa succession ; et dans
ce cas, la dame M ariol est bien au moins donataire de
la somme de 30000 francs. Q u’elle nous explique main
tenant, com m ent, avec cette qualité de donataire, elle
pourroit prendre part à la ré se rv e , sans rapporter sa
donation !
Ce n’est pas avec plus d’adresse que la dame de M ario
veut argumenter de l’arrêt rendu en faveur des enfans
de sa sœur : elle feint d’ignorer la différence qui se tiouve
entre sa sœur et elle. L a dame R ibeyre n étoit pas ie
CUî** au
A
ritière; elle ne venoit pas à la succession de sa m c ie ,
elle réclamoit un supplément de dot éventuel, et il a 01^
bien le lui donner : mais si elle fût venue à la succession
de la dame de V ille m o n t, point de doute q u elle auioit
rapporté sÔooo francs , et qu’elle n’auroit pas eu les
10000 francs de supplément j il n’y a donc aucune parité
entre les deux causes.
Si on considère enfin que la dame M ariol s’est jugée
elle-m êm e*, qu’elle a resté liuit ans sans reclamer ce
prétendu prélèvem ent; qu’elle est venue à partage de la
succession de sa m ère, sans rien demander et sans se faire
aucune ré se rv e , il demeurera pour constant qu elle est-
absolument non recevable.
O s e r a -t-e lle dire que ce partage n’est p a s définitif?
t. -Ota*
n.»*
elle ne le montre pas; elle n’en a qu’ un extrait dans ses
&-Vfu}waê—jK. .Asie/
pièces. M ais peut-on concevoir un partage provision»^
»
jf&zï ctr* l*4
entre majeurs ? Il peut y avoir quelques objets om|S 5 ce
crt*<&tUL>
qui ne donnerait pas lieu à un nouveau partage .
... 1
quand il ne serait que p ro visio n n el, la dame
ario )__ . _ /!$*&//
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X^er/u^fun\
m.
*
rti.vvil. i/ucr (t‘ ■Ÿî.itirr&t
/fTjtr/
�( *8 )
peut-elle se flatter dû faire croire que lorsqu’elle partage
l’objet le plus im p o rtan t, le seul immeuble de la suc
cession, elle auroit négligé de faire connoître ses pré
tentions ou ses droits à un prélèvem ent considérable V
Non • on doit même penser que la dame de M ariol a
trop ’de délicatesse pour insister davantage sur une de
mande exagérée : elle se lassera de courir après une ombre
ne p o u r r o i t jamais saisir.
O n terminera par rappeler à 1« dame de M ariol qu’il
existe un testament et un codicile de la dame de V illemont reçu C oste, notaire à Besum ont; que dans ces
actes la dame Villem ont a manifeste ses volontés; qu’elle
a o r d o n n é que ses enfaus fussent héritiers par égalité ; et
si ces actes, 'qui contiennent d’autres le g s , ne sont pas
légalem ent obligatoires, ils le sont au moins dans le foiintérieur : la dame de M ariol ne devroit-elle pas surtout
q u ’e l l e
respecter les dernières volontés de sa. m ère?
-§• I 11Jjds créances réclamées -parla dame M a riol'son t f r a u
duleuses ei nulles. :
i
r
^ , ^ 0 T o c t ;,r e s de la dame M ariol consistent,
Qe A*
-LiCS IHl^
r. (
'
)
,o F n une obligation de la somme de 10000 Irancs,
r
U i . -i. .fin. «y«./' W r i t e par la dame sa m ere le 23 février «793 ;
ÿr'&.*.-Y*o/0-2°. En unc obligation de 6000 fr-., en date du 7 praitiÛ tûu A A an t t , souscrite par la dame V é n y ' femme séparée,
W
- • '*
<L /,**« .
»“ * W e n 8 > d u s!eur d u S a u v a g c ‘ ,
O n va discuter le m ente de chacune dans son ordre.
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U é LU- uu* W ^ O ^ ,; , - —
r
p u
^ e / j / « J f a Î L ^ t ^ L p s C \<Joco>f* , M \
f
l our 1 obligation de la m ere, on suspecte aisément des
titres de ce g en re , et de simples présomptions suffisentu
pour les anéantir. Il en coûte si peu d’arracher à la facilité
ou à la foiblesse une obligation payable dans d ix aj?s :
le terme est un peu lo n g , et le bon Lafontaine l’avoit
remarqué dans une ingénieuse allégorie. Mais la justice
doit empêcher les fraudes et les donations déguisées; parce
que, comme le dit judicieusement L eb ru n , il faut défendre
le plus ce qui arriverait le plus souvent.
O r , quand on considère que cette obligation est causée
pour prêts fa its en divers temps par la dame de M a rio l,
sans autre explication , sans préciser en aucune manière
ni les époques, ni les sommes, il est difficile de se per
suader qu’on ait fait un compte bien e x a c t, et que la
dame de M ariol ait prêté jusqu’à concurrence de 8ooo fr.
sans b ille ts, sans notes et sans précaution.
O n doit s’étonner davantage que par traité du 20 mars
1793 5 dame M ariol et son frère se reconnoissent dé
biteurs d’une somme de 62000 francs envers la dame de
V illem ont ; qu’en payement de cette somme le frère et
la sœur se chargent de 56ooo francs de dettes envers les
créanciers de la m ère, s’obligent de lui payer le surplus;
et que la dame de M ariol n’ait proposé aucune déduction
du montant de l’obligation, qui étoit cependant de fraîche
date.
t a*«*?
'Z'
Ce n’est pas tout encore; la dame de M ariol traite avec 'X edvw ¿ 6 ^ Æ
ses cohéritiers, fait avec eux le partage des biens : c’étoit
$.e.-¿â
encore le moment de parler de cette obligation; elJtf n’en
dit rien ; elle ne parle pas même de la somme de 2,000 fr.
promise par la dame de M ontrodès.
�A
/.
( 3° )
td buul S A * J
S
L orsqu’elle veut form er un contrat judiciaire avec le
un J* <«.c - b t r Ç d j sieur Brechet, qu’elle lui donne le montant de ses créances
t^
'^
^
ïliw int*1 / avec tant de d(:’tailsi elle Sarde encore ce titre pour une
(l
[ m eilleure occasion.
cr o*t trouver Ie moment opportun; elle forme
W * * / ?
mie demande incidente pour cet objet, dont elle n’avoit
rien dit au bureau de paix en présence de son frère, de
sa sœ ur, de ses neveux.
L a dame de M ariol p eu t-elle espérer quelque succès
dans cette démarche tardive? On a releve toutes ces cir
constances sans vouloir la blesser : mais le sieur Brechet
n’a pas besoin de s’appesantir davantage sur ce point. Les
héritiers du sieur V é n y de T h e i x , neveux de la dame
M a r io l, sont en cause; ils viennent demander justice :
ils diront ;\ leur tante que sans doute elle n’auroit pas
la cruauté d’arracher à des orphelins le dernier morceau
de pain qui leur reste ; qu’ils lui appartiennent d’assez
•
..
près pour qu’elle dût avoir quelques ménagemens ; et
la discussion de cette partie de la cause leur est exclu
sivement attribuée. Ce qui reste à dire au sieur Brechet,
c’est que la dame du Sauvage, dont il est acquéreur, ne
devroit elle-m ôm e qu’ une très-p etite partie de cette
s o m m e , en supposant l’obligation sincère ; elle n’en seroit tenue que dans la proportion de son amendement,
et entre cohéritiers ils ne sont tenus que personnelle• m ent, pour leur part : l’action hypothécaire n’appartient
qu’aux créanciers , non aux cohéritiers.
O n en vient à l’obligation de 6000 francs, consentie
par la dame de V é n y , femme séparée, quant aux biens,
de J e a n -C h a rle s D unpyer du Sauvage, et sans autori
sation de son mari»
�( 31 )
Pleuvent tout à coup les arrêts de la cour de cassation.
i° . Les obligations consenties parles femmes d’émigrés,
sans autorisation, sont valables. Il n’y a ici ci11 une diffi- <
culte qu’il sera impossible de vain cre, c’est que 1 obli
gation est de l’an n ; que le sieur du Sauvage, rentré (
depuis l’an 8 , a été réintégré dans tous ses droits par
le sénatus-consulte de l ’an io ; que dès-lors il n’y a plus
d’émigrés.
L ’article 217 du Code prononce la nullité des obliga
tions souscrites par les femmes sans autorisation de leius
maris.
L ’article 225 dit que celte nullité peut etre relevee
par la fem m e; mais il n’y a que la femme seule, et ex
clusivement , qui ait le droit de relever cette nullité ,
dit la dame de M ariol. Les créanciers de la fem m e, qui
ont une garantie à exercer contr’elle, qui par conséquent
peuvent exercer tous les droits de leur débitrice, n’ont
pas le droit d’exciper de cette nullité : donc la femme
sans autorisation, peut avec im punité, et en fraude de
ses créanciers, consentir des obligations de toutes parts,
conférer des hypothèques au préjudice de ceux qui àuroient des droits antérieurs, ruiner des pères de fam ille,
se jouer de leurs engagemens, etc. V o ilà les conséquences
qui résultent de ce système ; et ce n’est pas sérieusement
sans doute que la dame de M ariol l’a proposé. Les lois
Quœ in fraudent creditorur/i, dont les dispositions sont
répétées dans le Code N apoléon, seroient donc vaines
et illusoires.
M ais lors de cette obligation, la l o i , ou la pa l^e
Code relative aux hypothèques, n’étoit pas prom ulguée;
�(3 0
o r , d’après la loi du n brum aire an 7 , on ne connoissoit point de vente sans transcription; la transmission
de la propriété ne s’opéroit que par la transcription ;
elle étoit le com plém ent de la vente qui jusque-là ne
pouvoit être opposée à des tiers : plusieurs arrêts de
la cour de cassation l’ont ainsi juge.
O n en con vien t; on ne trouvoit peut-être pas dans la
lo i, que la transmission de la propriété ne s’opéroit que
par la transcription ; il étoit peut-etre raisonnable de
penser que la transcription n’avoit d’autre objet que de
purger les hypothèques; la loi n’entendoit vraisembla
blement par les tie r s , que les créanciers qui venoient
par ordre d’hypothèque. L e Code-Napoléon l’a dit bientôt
après : cependant on jugeoit tout autrement. E t qu’im
porte le défaut de transcription , si l’obligation est nulle.
La dame M a r io l, en proposant cette objection , auroit
peut-être bien quelques petits reproches à se faire ; car
si le sieur Brechet a acquis, c’est elle qui l’a sollicité ;
s’il n’a pas transcrit, c’est encore pour l’obliger, et éviter
des frais de notification qui auroient réveillé bien du
monde : mais enfin, qu’a de commun le défaut de trans
cription avec la nullité de l’obligation ? c’est ce qu’on
cherche à deviner.
O n demandera encore à la dame de M ariol pourquoi,
dans son m ém o ire, elle glisse si légèrement sur la dé
légation contenue en cette obligation , et ne dénom m e
pas les débiteurs délégués; ils sont cependant bien connus:
c’étoit la dame D alagnat, et la dame de C o rm eret, sa
sœur. O r , 1g sieur Brechet a la certitude que ces dames
ont fait acquitter toutes les dettes de la dame deFreydefon,
leur
�( 33 )
leur mère : la dame de M ariol a donc été payée de s i
créance; et que signifierait alors le défaut de transcription?
E t quand le sieur Brechet n’auroit pas transcrit , la
dame M ariol persuadera-t-elle à qui que ce soit, qu une
obligation de l’an 11 lui donne des droits sur une vente
faite en l’an 9 ; que sa sœur a voulu hypothéquer un bien
qui ne lui appartenoit plu s, et dont elle avoit reçu le
prix ? L a dame du Sauvage n’a pas fait mention de cette
propriété; elle ne l’a point affectée à la sûreté du payement
de l ’obligation; si elle l’eût fait, elle eût commis un stellionat : la dame M ariol, sa sœur, qui connoissoit la vente,
ne l’auroit pas exigé. Et quelle est donc aujourd hui son
inconséquence ( l’expression est modeste ) , d’oser venu
demander au sieur B re ch e t, acquéreur de la n 9 > le
payement d’une obligation souscrite par sa venderesse en
l’an 1 1 , parce que le sieur Brechet n’a pas fait transcrire
son contrat ?
L a dame M ariol n’a pas senti l’inconvenance de sa
demande; un seul instant de réflexion l’en fera départir;
et ses amis doivent lui en donner le conseil.
§•
IV .
L a dame M a r io l, dans tous les ca s, ri à point d'hypo
thèque sur le bien vendu en Van 9 au sieur Brechet.
P o u r démontrer cette proposition , il est essentiel de
rappeler la clause qui termine l’obligation de la dame
du Sauvage.
a A u payement du prêt ci-dessus, la daine du Sau\ agi,
E
�«
«
«
«
«
«
a obligé et affecté la portion qui peut lui revenir des
biens des successions de la dame de M ontrodes, et du
sieur V é n y de V ille m o n t, son m ari, situés tant dans
l’arrondissement du bureau des hypothéqués de cette
ville (C le rm o n t), que dans celui de Riom , consistans
en bfitimens , prés , terres et vignes, »
A r t. 4 de la loi du n brumaire an y. « T ou te sti—
« pulation volontaire d’hypotlvcque doit indiquer la
« nature et la situation des immeubles hypothéqués-,
c< elle ne peut comprendre que des biens appartenons
« au débiteur lors de la stipulation. »
A r t. 2129 du Code Napoléon. « Il n’y a d’hypothèque
« conventionnelle valable que celle q u i, soit dans le titre
« authentique constitutif de la créance, soit dans un acte
« authentique postérieur, déclare spécialement la nature
« et la situation de chacun des immeubles actuellement
« appartenons au débiteur, sur lesquels il consent l ’h y« polhèque de la créance. »
A v ec deux lois aussi précises, on ne trouvera point
dans l’obligation d’hypothèque valable : une désignation
va «me et générale ne remplit pas le but de la loi. Comment
le créancier pourroit-il connoître les immeubles qui lui
sont affectés, lorsqu’on se contente de lui donner des
biens situés dans les arrondissemens de Clermont et de
R io m ? n’est-ce pas un inconnu qu’il faut chercher dans
un espace indéfini?
L a loi ne rcconnoît plus d’hypothèque générale ,
q u ’a u t a n t qu’elle résulte d’un jugement; et lorsqu’ il s’agit
d’une liyPolll£iCi lie conventionnelle, il faut qu’elle soit
spéciale, c’est-à-dire, circonscrite, déterm inée, avec la
�( 35)
désignation de chaque o b jet, de sa nature et de sa si
tuation.
Il faut que l’objet hypothéqué appartienne actuellement
au débiteur : o r, la dame du Sauvage étoit dépouillée
depuis deux ans de l’immeuble vendu par elle au sieur
Brechet.
La transcription n’étoit pas nécessaire relativement a
la veuderesse; il y a voit de sa part tradition réelle; elle
ne pouvoit donc plus H yp o th éq u er sans se rendre cou
pable d’un délit grave, sans s’exposer a la contrainte par
corps.
E t croira-t-on jamais qu’ une loi- ait v o u lu ,'o n ne
dit pas to lérer, mais organiser, créer, autoriser un stellion at? Comment vou d roit-on abuser d’une affectation
générale, lorsque la loi exige une désignation plus ex
presse ?
La co u r, par un arrêt récen t, du 17 mars 1808, a
jugé en thèse qu’il n’y avoit d’hypothèque spéciale qu’au
tant cju’on avoit désigné d’une manière précise les im
meubles , leur n atu re, et le lieu de leur situation. Cet
arrêt, rendu en très-grande connoissance de cause, est
d’autant plus remarquable q u e , dans l’espèce de la cause,
on avoit alfecté les immeubles appartenans au débiteur
dans une commune dénommée ; ce qui faisoit incliner à
penser que l ’hypothèque étoit spéciale, parce que le dé
biteur pouvoit avoir des propriétés dans toute autre com
mune.
Mais la loi est tellement expresse, tellement limitat*v e >
que les magistrats ne crurent pas devoir s’en écarter.
�( 36 )
m algré les circonstances qui se présento ient en faveur
du créancier.
Ici rien de favorable à la dame de M ariol : elle connoissoit la vente faite au sieur Brechet; elle savoit que
sa sœur s’étoit dépouillée de cette propriété ; elle n’a
donc pas entendu la comprendre dans la stipulation d 'h y
pothèque insérée en son obligation.
E h ! on ne doit pas le dissimuler, la dame de M ariol
est aveuglée dans sa propre cause ; ce ne peut pas être
une ressource pour elle : ses démarches sont in c o n s i
dérées , ses prétentions téméraires ; son insistance ne
feroit point honneur à sa délicatesse; et l’opinion publique
qui dans son pays proscrivoit, condamnoit sa prétention
a dû influer sur ses juges naturels, et la suivra jusqu’en
la cour.
M e, P A G E S (de R io m ), ancien avocat.
-
M e. T A R D 1 F , avoué licencié.
A R I O M de l’imprimerie de Thidaud-Landriot , imprimeur
. d e l a c o u r d’appel. —Avril 1808. ‘
�
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Factums Marie
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bréchet, Antoine. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Tardif
Subject
The topic of the resource
successions
avancement d'hoirie
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Antoine Bréchet ancien chef d'escadron, habitant de la ville de Clermont, intimé ; Contre dame Jeanne-Françoise de Vény, veuve du sieur Sicaud de Mariol, habitante de la même ville, appelante d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Clermont, le 15 août 1807 ; en présence de dame Marie Avelin, veuve du sieur Vény de Theix, tutrice légale de demoiselle Anne-Françoise-Jeanne de Vény, sa fille ; et de dame Françoise Véthizon-Vény, fille adoptive du sieur Veny de Theix, et du sieur Jean-Baptiste Devèze, son mari : tous intimés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1788-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0504
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Saint-Genès-Champanelle (63345)
Theix (village de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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avancement d'hoirie
Successions
-
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PDF Text
Text
MÉMOIRES
A
C O N S U L T E R ,
ET CONSULTATIONS.
PA R
.
des reconnoissances très-anciennes, et nouvelle
ment ratifiées, le s habitans d’un village avoient reconnu
des cens sur des héritages par eux possédés, en expri
mant la contenance et les confins de chacun de ces hé
ritages ; et en même temps ils avoient reconnu que tous
les autres héritages non sujets à cens, situés dans les ap
partenances du villa g e, appartenoient au seigneur, en
toute propriété , et que quand ils les cultivoient, ils
etoient obligés d’en délivrer au seigneur la percière au
quart des fruits.
E n conséquence, et dans tous les temps ? le seigneur
A
�( O
avoit perçu le quart des fruits de tous les héritages cul
tivés et non sujets à des cens.
Mais depuis la révolution, le ci-devant seigneur a été
privé de ses droits de percière, qui lui ont été x’efusés,
et il a d’ailleurs conservé les reconnoissances qui les lui
atti'ibuent, et qu’il a soustraites au brûlement ordonné
par l’article 6 de la loi du 17 juillet 1793 et il demande
si aujourd’hui il peut faire usage en justice des reconnois
sances qui lui donnent le droit de perciere, des que les
mêmes reconnoissances établissent en meme temps des
droits féodaux de censive sur d’autres héritages.
l e
c o n s e il
s o u s s ig n é
, qui a vu le pré
sent m ém oire,
E s t i m e que le ci-devant seigneur peut, sans danger,
produire en justice les titres qui établissent ses droits de
propriété sur des héritages soumis à la percière au quart
des fruits , quoique les mômes titres lui attribuent des
droits féodaux sur d’autres héritages, et qu’il n’a pas à
craindre que par le mélange de divers droits, dans les
mêmes titres , les tribunaux ordonnent le brûlement de
ces titres.
La disposition de la loi du 17 juillet 1793 , dans l’ar
ticle 6 , relatif au brûlement des titres féodaux, n’est plus
aujourd’hui susceptible d’exécution. Celte disposition pro
duite par l’effervescence du temps, au milieu des maux
incalculables de 1793 , disposition odieuse en elle-même,
et dangereuse daDS ses effets, a dû nécessairement disparoître -, elle n’a pu vivre davantage que les circonstances
�(
3
)
qui l’a voient vu naître, et les désordres qui l’avoient
produite.
L e Lrulement des titres même uniquement féodaux
étoit dangereux , pour beaucoup de propriétaires non
seigneurs , qui pouvoient s’en servir pour établir leurs
propriétés; car on suppose que les concessions, à la
charge de droits féodaux, eussent été faites à des parti
culiers qui n’en auroient pas joui pendant le temps né
cessaire pour en acquérir la prescription , dès que les
titres de concession auroient été brûlés, comment auroientils pu se défendre des demandes en éviction qui auroient
été formées contre eux? Ces titres leur étoient donc né
cessaires pour conserver leur patrimoine ; et cependant,
parce qu’il y auroit été question de droits féodaux, il
auroit fallu les brûler! Quels désastres ! Quel bouleverse
ment dans les fortunes! Quels maux n’auroient pas pro
duits l’article 6 d e la lo i d u 1 7 ju ille t 1 7 9 3 , si son exécu
tion avoit été maintenue!
E lle étoit donc odieuse cette disposition; mais elle étoit
de plus sans objet : car la suppression des droits féodaux
garantissoit suffisamment les redevables contre les auteurs
des titres; et sous ce rapport on reconnoît toute la vigueur
de la loi du 17 juillet 1793. Mais il en est autrement de
la disposition de son article 6 ; il n’a pu ni dû être exé
cuté lorsque l’effervescence révolutionnaire a c o m m e n c é
à s’appaiser.
Aussi ces vérités furent-elles senties bientôt après la
loi de 1793 : l’article 6 de cette loi avoit ordonne que
les titres féodaux seroient remis aux municipalités pour
y être brûlés; mais l’article 3 de celle du 8 pluviôse an 3 ,
A 2
�C4 )
ordonna, au contraire, « que tous les titres remis aux mu« nicipalités, en exécution de la loi du 17 juillet 1793,
« y resteroient en d épô t , jusqu'à ce qu'il en aurait été
« autrement ordonné. »
Qu’on trouve si l’on peut la levée de cette suspension?
Jusque-là il faut reconnoître que l’abrogation de l’art. 6
de la loi du 17 juillet 1793, n’est pas seulement impli
cite , mais qu’elle est expresse; car la suspension, en pareil
cas , vaut une abrogation parfaite.
M ais il y a plus ; l’article 4 de la même lo i défend
aux notaires et autres officiers publics et privés de déli
vrer des extra its ou expéditions desdits actes, sans les
avoir purgés de tout ce qu i est proscrit par la pré
senta loi.
'Donc la loi permet de délivrer des expéditions en pur
geant les actes des qualifications proscrites; donc l’inten
tion du législateur étoit de conserver ces actes.
XI y a plus encore; car, sur la représentation du comité
de législation et du ministre de la justice , qu’en certain
cas il étoit essentiel d’avoir ces actes dans leur intégralité,
la loi du 11 messidor an 4 « perm it, dans les cas prévus,
aux notaires et autres officiers publics et privés, de
« délivrer des copies ou expéditions des actes désignés
dans la loi du 18 pluviôse, sans lespurger, aux termes
« de l’article 4 de ladite loi. »
Il est donc évident que le législateur a voulu que l’on
c o n s e r v â t les titres, puisqu’il
a senti le besoin que l’on
voit avo ir, pour l’utilité publique, non-seulement
des titres en eux-memes, mais encore de toutes les qua
lifications proscrites qu’ils pouvoient contenir.
s
�(
5
)
Qu’on vienne après cela s’appuyer de ce que la loi du
17 juillet 1793, et le brûleraient, sont rappelés dans plu
sieurs lois postérieures, puisque ces lois ne rappellent le
brûleraient que pour l’abroger.
Dira-t-on encore que l’avis du conseil d’état, du 30
pluviôse an 1 1 , rappelle ce brûleraient? Mais c’est vrai
ment une dérision que de vouloir sans cesse, et dans
toute sorte de cas, appliquer cet avis. 11 a pour objet,
non pas des titres, mais les réclamations fondées sur des
titres mixtes, qu’il déclare compris dans l’abolition : mais
il ne statue rien sur le brûleraient ; il n’en parle que par
occasion , et'comme ayant dans le temps frappé sans dis
tinction les titres mixtes comme les autres , et seulement
pour en tirer la conséquence que les droits fondés sur
des titres m ixtes, sont rangés sur la même ligne que les
droits purement féodaux.
Ce seroit bien plus faussement encore q u ’on prétendroit
tirer un moyen de la jurisprudence de la cour de cassation,
qui ne fait, dit-on, aucune distinction entre les différentes
dispositions de la loi du 17 juillet 1793.
Il est vrai que la cour de cassation n’a pas dit expres
sément qu’il étoit défendu de brûler les titres, mais elle l’a
dit par sa conduite; car elle fait une distinction bien sen
sible entre les diverses dispositions de la loi du 17 juillet
I 793* O n lui a souvent présenté des titres qu’elle a 'rejetés
comme féodaux, et elle a déclaré, dans ces cas, les rede
vances abolies. Mais a-t-elle jamais retenu ces titres pour
les faire bi’ûler? Ne les a-t-elle pas , au contraire , laissés
entre les mains de ceux qui les avoient présentes ?
Ainsi tout doit rassurer le consultant sur la crainte
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qu’il auroit de vo ir livrer aux flammes les reconnoissances
qu’il pourroit produire pour établir sa propriété sur les
héritages sujets à des droits de percière, et au quart des
fruits; droits qui n’ont en eux-mêmes absolument rien
de féo d a l, et que par conséquent on croit qu’il peut
réclamer justement.
85
D é l i b é r é à R iom , le 27 septembre i o .
ANDRAUD.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é est du même avis, par
les mêmes considérations, sur tous les points qui sont
traités dans la consultation ci-dessus.
D é l ib é r é à Clermont-Ferrand, le 9 frimaire an 14.
B E R G 1ER.
D a n s les mêmes actes, les habitans du village du M ontel ont passé reconnoissance en faveur de leur seigneur,
i<\ chacun pour ce qui le concernoit, de divers articles
de cens; 2°. de la propriété des héritages non censuels
du pays > et de la redevance dont ils étoient tenus envers
lu i, sous le nom de percière, lorsqu’ils les cultivoient.
On demande si ces actes peuvent être produits en justice,
pour établir a u jo u rd ’h u i les demandes en prestation de
la percière.
�7
(
)
V u quelques notes et une consultation,
L e C o n se il répond, comme l’auteur de la consulta
tion visée, que la percière est due par les tenanciers des
héritages qui y sont sujets, n’ayant point été atteinte par
l ’abolition des redevances féodales ; et qu’il n’y a ni obs
tacle ni inconvénient à ce que les reconnoissances rela
tives soient employées dans la poursuite dont elle sera
l’objet.
On est dispensé de toute discussion sur la nature non
féodale du droit de percière, après celle dont il a été la
matière, et devant la cour d’appel de R io in , et devant
la cour de cassation, dans l’affaire d’entre le sieur Lassalle
et quelques habitans de la commune de Blanzat.
Dans le cas présent, la demande de la percière sera
établie, comme dans celui du sieur Lassalle, sur de sim
ples reconnoissances. Il a été jugé, et il le sera encore,
que la percière est de nature purement foncière, et n’a
point été comprise dans la suppression des droits féodaux.
Aussi n’est-ce pas le fond du droit de percière qui est
la matière des difficultés dont on cherche la solution ;
mais les reconnoissances, qui en sont les titres uniques,
sont en même tem ps, relativement à d’autres héritages,
ceux de la directe du seigneur, et des cens dont elle étoit
le principe ; et l’on craint que les redevables n’objectent,
i° . que de tels titres ne peuvent être produits, parce que
la loi en avoit ordonné le brulement; 2°. que les mêmes
actes étant relatifs à des droits féodaux, en même temps
qu’au droit foncier de la percière, il y a au moins un
�(
8
)
mélange de féodalité, d’après lequel il faut résoudre que
tout a été supprimé.
Il est vrai que la loi du 17 juillet 1793, après avoir
aboli sans indemnité toutes les redevances seigneuriales
et féodales (art. i er.)> ordonna le brûlement de tous les
titres constitutifs ou récognitifs de ces redevances (art. 6
et suiv.); mais comme elle réserva expressément les rentes
et prestations purement foncièi’eset non féodales (art. 2),
011 voit bien que les titres de ces prestations durent etre
exceptés de l ’incendie.
Ce fut l’esprit révolutionnaire qui dicta cet étrange
c o m m a n d e m e n t , et qui voulut que l’infraction en fût
punie par la peine des fers ; mais l’esprit révolutionnaire
ne réflécliissoit pas.
O n ne vit pns que les titres établissant, en faveur des
s e ig n e u r s , des droits féodaux, pou voient être ceux et les
seuls de la propriété des censitaires;
Que des droits féodaux pouvoient avoir été constitués
ou reconnus accidentellement dans des actes d’ailleurs de
la plus grande im portance, et jusque dans des contrats
de mariage;
E t qu’après to u t, ce seroit souvent une question à ré
soudre, avant l’incendie, si les droits créés ou énoncés
dans les actes, étoient ou n’étoient pas féodaux.
Ces considérations et d’autres se présentèrent quand le
premier mouvement fut appaisé; et ce précepte, qui avoit
de si graves inconvéniens, fut oublié même par ses mo
teurs.
On l’a fort bien remarqué dans la consultation visée ;
�9
(
).
des actes postérieurs, et de législation, et de gouverne
ment, font comprendi’e que la mesure indiscrète du brûlement a été abandonnée : ces textes de la loi de juillet
1793 y restent pour être pris en argumentation de la vo'lo n té formelle d’abolir tous les droits féodaux, et non
pour provoquer des poursuites de nouveaux incendies, et
des peines.
Ce qui est constant, c’est que depuis quelques années
les tribunaux retentissent des débats d’entre les ci-devant
seigneui’s et leurs censitaires ; que les juges ont examiné
les titres, proscrit les droits reconnus féodaux, et rendu
toute leur consistance à ceux qui n’avoient pas ce carac
tère, ou qui n’en avoient que l’apparence, sans qu’il
soit venu à la pensée de personne, que des brulemens
dussent encore être ordonnés, et qu’il y eût des peines à
infliger à ceux qui succomboient dans leurs demandes en
payement de redevances.
Un assentiment général a donc mis hors d’usage le pré
cepte du brûlement : l’on sait bien que la d é s u é tu d e abroge
les lois, et qu’elles tombent devant la réprobation com
mune, comme devant des lois postérieures et contraires,
non solùm suffrogio legislatoris, sed etiam tacito con
sensu omnium per desuetüdinem abrogari. L . 32, ff. D e
legib. ’ et cela, on doit en convenir, s’opère bien plus
facilement, lorsqu’il s’agit d’une erreur évidente, et, pour
ainsi d ire , d’une fièvre de la législation.
Rien donc ne s’oppose à ce que, pour établir la demande
du droit de percière, on produise les reconnoissances qui
en ont été passées, bien que ces actes contiennent en
meme temps des reconnoissances de cens.
�( ID )
D e cet assemblage de reconnoissances diverses dans les
mêmes actes, conclura-t-on que celles qui ont rapport
aux cens abolis, communiquent par leur réunion le vice
qui leur est propre, à celles qui regardent la redevance
non féodale de la percière ? C’est la difficulté véritable
de l’affaire.
Comme la loi de juillet 1793 avoit excepté de la sup
pression les rentes et prestations purement foncières et
non féodales, on fut embarrassé dans le cas ou dans le
même titre et la même concession se trouvoient établis
des droits féodaux et des droits purement fonciers, et
qu’il fallo it, ce sembloit, b rû lera cause de ceux-là, et
c o n s e r v e r à cause de ceux-ci.
U n membre de la convention nationale proposa, le
2 octobre, de séparer dans les actes ce qui étoit pure
ment foncier; mais la convention passa à l’ordre du jour,
et par conséquent refusa d’ordonner la séparation.
Elle s’expliqua même en termes très-précis à ce sujet,
l o r sq u e, le 7 ventôse an 2 , interrogée sur le point de
savoir si l’administration du domaine national devoit re
cevoir le rachat qui lui étoit offert d’une rente foncière
à laquelle un cens étoit ajouté, elle répondit que les rentes
foncières, créées avec mélange de cens ou autres signes
de féodalité, avoient été supprimées.
C ’est de là que partiront les redevables de la percière,
pour soutenir que les mêmes actes contenant les recon
n o i s s a n c e s de ce droit, et des reconnoissances de cens,
l’abolition totale est la conséquence du mélange.
On 11e sauroit même le dissimuler; si, dans le temps de
la loi de juillet 1793? lorsque l’effervescence qui l’avoit
�(
1 1
)
amenée présidoit encore à son exécution, ces reconnois
sances avoient paru , brûlées sans m erci, elles n’auroient
pas laissé plus de traces de la percière que du cens; mais
il ne faut pas argumenter de l’extension dont la pensée du
législateur pou voit être alors susceptible. Puisque la me
sure du brûlement a été abandonnée, elle ne doit, comme
on l’a d it, être tirée à conséquence qu’en ce sens qu’elle
confirma la suppression de toutes prestations féodales, ou
mélangées de féodalité.
E t puisque les actes restent, ce qu’il y a à vérifier, c’est
si la percière, d’après les reconnoissances, est mélangée de
féodalité : le résultat est évidemment négatif.
Comment supposeroit-on le mélange? Il est dit que les
héritages sur lesquels cette redevance se perçoit, sont la
propriété du seigneur, et que, pour raison de cette pro
priété , il perçoit une certaine quotité des fruits qui en
proviennent. II n ’y a là a u c u n e sé p ara tio n du domaine
direct et du domaine utile, et ainsi aucun caractère de
féodalité ; et rien n’est ajouté qui soit entaché de ce vice.
Il n’importe que, dans les mêmes actes, on rencontre
des reconnoissances de cens ; aucune confusion n’en est
la conséquence. Si l’on discute l’un de ces actes, on devra
dire qu’il renferme deux titres; que l’un relatif aux cens
est supprimé, et l’autre regardant la percière est main
tenu; que la cause, la nature, les obligations et les héri
tages sont divers; qu’après avoir reconnu les cens, le re
devable a pu aliéner les héritages censuels et être quitte,
et pourtant continuer d’être obligé sous le rapport de la
percière; et que là où tout est si nettement distinct, il n’y
a réellement point de mélange.
�( Ï2 )
En un m o t, il y a mélange de féodalité, lorsque le
même héritage, d’après le même titre constitutif, sup
porte avec la rente un droit féodal quelconque envers
le même seigneur; et l’idée n’en peut être conçue, lors
qu’il faut passer d’une redevance à une autre, d’une cause
à une autre, d’un héritage à un autre, etc. L e même écrit
contient deux ou plusieurs transactions, sans les confon
dre; elles y sont accolées et non mélangées.
A in si, les reconnoissances que le précepte oublié du
brûlemeut n’empêche pas d’employer, établiront la de
mande de la percière ; et le prétexte du mélange de féo
dalité ne fournira aux redevables qu’une exception faci
lement repoussée.
D é l ib é r é a Paris, le i er. brumaire an 14.
CHABROUD.
D u même avis, par les mêmes motifs.
DÉLIBÉRÉ à Clermout-Ferrand, le 9 frimaire an 14.
BERGI ER.
L
e
CONSEIL SOUSSIGNÉ, qui a vu la reconnois-
sance consentie au seigneur de Chalusset, par les habitans
du village du M ontel, et la présente consultation,
E s t d u même AVIS, et par les mêmes raisons auxquelles
�( ï3 )
il ajoutera un moyen qui trancheroit tous les doutes, s’il
pou voit encore en subsister.
Ce moyen se puise dans les dispositions d’an décret
impérial qui se trouve rappelé dans le tome 4, an 13,
du Recueil de jurisprudence de la cour de cassation, par
S ire y , à la pag. 29 du supplément, èt qui se trouve en
core sous la date du 29 vendémiaire an 1 3 , à la suite
du n°. 213 des Instructions décadaires sur l’enregistre
m en t, tom. 1 2 , pag. 238.
Après que dans l’article 5 de ce décret, il est d i t ,
« on doit considérer comme preuve de l’abolition d’une
« redevance, le titre constitutif, par lequel le même im« meuble se trouve gi’e v é , au profit du même seigneur,
« de redevances foncières et de redevances reconnues féo« dales’, » il est ajouté dans l’article 6 : « N e sera point
« admissible comme -preuve de mélange deféodalité, un
« titre récognitif \ dans lequel les redeva?ices fon cières
«r et les redevances féodales se trouveront énoncées dis« tinctement et séparément, sans q u i l y ait de liaison
« entre Vune et l'autre énonciation. »
O r , dans la reconnoissance du ténement du M ontel,
chacun des habitans et détenteurs a reconnu individuel
lement tenir, savoir, tel particulier, tels et tels héritages,
chacun par sa contenance et ses confins, et sous tel cens
pour chaque héritage ; et ce n’est qu’après toutes ces rcconnoissances, qu’alors tous les détenteurs se réunissent
pour reconnoître que tous lesau très héritages du même téne
ment, qui ne sont point asservis à des cens, appartiennent
en toute propriété audit seigneur j et q üC lorsqu’ils les
cultivent, ils sont tenus de lui en délivrer le quart des
�*4
(
)
fruits : prestation connue en Auvergne sous le nom de
percière, et ailleurs sous ceux de champart, agrier
terrage, etc. ; mais qui est une prestation purement fon
cière, surtout dans une coutume allodiale, comme celle
d’Auvergne.
L ’application des dispositions du décret impérial se
fait donc bien sensiblement à l’espèce du titre récognitif
des habitans du Montel. La percière est une redevance
purement foncière, qui ne frappe pas sur les mêmes i?nm eubles, et qui se trouve énoncée distinctement et sé
parément , et sans aucune liaison antr’elle et les cens
établis par la même reconnoissance sur des héritages toutà-fait differens.
D é l ib é r é a R io m , le 14 mars 1807,
a n d r a u d
.
de la reconnoissance consentie au terrier
de la terre de Chalusset, par les habitans du
village du M ontel> devant Bouyon et Mornac
notaires, le 24 février 1788.
E xtrait
Par-devant les notaires royaux soussignés, et témoins
ci-après nommés, ont comparu Sébastien Faure, Amable
Audanson , Pierre Breschard ( et plusieurs autres dé
nommés ) , tous laboureurs, habitans du village du M on
tel; lesquels, de gré et bonne volonté, après avoir pris
communication d’une reconnoissance reçue de la Farge
notaire ro y a l, le £2 juin 15 7 7 , consentie au profit de'
�( i5 )
Gilbert Daubusson, seigneur de Banson , insérée dans
une expédition du terrier de la (cire de Banson , signée
Rochette, notaire, et du plan figuré du M ontel, qui leur
a été représenté par M . de Sarrazin, et qu’ils ont trouvé
sincère et véritable, de tout quoi ils ont dit être certains
et bien instruits, ont reconnu et confessé ten ir, porter et
posséder, avoir tenu et possédé de tout temps et ancien
neté, du sieur de Sarrazin , a c c e p ta n t, etc. i° . de ladite
reconnoissance, art. i 55y dudit terrier, tiennent, Louis
Beaumont, une maison , grange et étable, et un jardin ;
M ichel M om et, un jardin, etc. M ichel Chom ot, une
maison , etc. Louis G o u rd y, quatre clienevières , etc. ( et
ainsi de plusieurs autres, tous dénommés particulière
ment ) , au cens annuel et perpétuel, solidaire et uni
forme d’argent, 21 s. 2 d . , seigle, etc. avoine, etc. avec
tous droits de directe seigneurie. ( Viennent ensuite d’autres
particu liers q u i reconnoissent c h a c u n les h é ritag e s qu’ils
possèdent sous un cens solidaire en directe seigneurie. )
Tous les cens des susdites pagésies, compris en la présente
reconnoissance, en tout droit de directe seigneurie, tiers
denier de lods et ventes, usage de chevalier, taillables
aux quatre cas en toute justice, haute, moyenne et basse,
payables et portables à la fête de Saint-Julien , 28 août
de chaque année, au château de Banson, pagésie par pagésie, comme dit est.
C’est à la suite de cette clause que se trouve im m é d ia
tement celle ci-après transcrite.
- Reconnoissent de plus tous lesdits confessans , que
toutes les autres terres , héritages et propriétés non in
vestis , situés dans ladite justice dudit seigneur, sont
�( 16 )
et appartiennent en fo n d s et propriété audit sieur de
S a rra zin , dont ils ont promis et se sont obligés de lui
payer la percière de tous les f r u i ts y croissant, qu’ ils
seront tenus de porter à ses granges , et qu ils ne pour
ront partager n i déplacer , sans appeler ledit seigneur
ou ses préposés, etc. Fait et passé , etc. le 24 fevrier
1 7 8 8 en présence de et d e , etc. soussignés, . avec ledit
seigneur et les sieurs H ugon , le R o y , C lo z e l, Tailhard ie r , Sanitas, V id o u z e , G rangh on et Dezrim ard ; les
autres confessans ont déclaré ne savoir signer ; de ce enquis. L ’expédition signée par M ornac, notaire.
,
A. R IO M
de l’imprimerie de
L andriot
, seul imprimeur de
la Cour d’appel. — 1807.
�
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Factums Marie
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Description
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Les habitants de Montel. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Bergier
Chabroud
Subject
The topic of the resource
percière
droits féodaux
contentieux post-révolutionnaires
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter et consultations.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1793-1807
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0503
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montel-de-Gelat (63237)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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contentieux post-révolutionnaires
droits féodaux
Percière
-
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e468cae842c27fae8b720976645ba913
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MEMOIRE
A CONSULTER.
*
E N l’an 12, le sieur Blanchard , mon beau-frère, teinturier
à R iom , voulut s’associer avec le sieur Castillon , propriétaire
de cette ville, pour l’exploitation d’un cylindre à indiennes,
qu’ils achetèrent en commun au sieur Dufour , serrurier, de
meurant à Paris.
Dom icilié moi-même à Paris, je consentis, pour obliger mon
beau-frère , à cautionner le payement de sa m oitié, vis-à-vis du
vendeur et ce vendeur exigea encore que le sieur Castillon
vînt certifier ma caution.
- L ’acte, passé à P aris, sous signatures privées, le 18 prairial
an i i , est ainsi conçu :
« Nous soussignés, M ichel D ufour, serrurier machiniste, rue
de la J uiverie, n° 27 , à Paris,
« Pierre Blanchard-,-teinturier, habitant de la ville de R iom,
département du Puy-de-Dôm e, autorisé par le sieur Castillon,
d e présent à R iom , qui a promis de trouver bon et de ratifier
les conventions suivantes,
A
�. ¿ tie n n e Castillon, propriétaire de la ville de R io m , dépav-
tCI^ E t Jean -B ap tiste Assollant, rue de la Vieille-Draperie, n ” 4 7,
, Sommes convenus de ce qui suit; savoir: que mo, M .cliel
D ufour promets et m’oblige de construire, faire condui r e ^
mettre en place un cylindre suivi de tous les agrès nécessaires a_
t r ^ n r r ^ T ^ d r e r les toiles de coton, fiy a m s j £ j a i M e „„-ïTitTSÏÏe largeur j u s q ^ H ^ ' u n e a m ^ s trois rouleau^.
Æ S 5 t S ™ r , celui du m i li e u ^ S ^ iv r e T a c quarante-cinq
nonces v s ,le s deux autres en papier, à la façon anglaise;le
tout bien co n d itio n n é , et dans toutes scs proportions, afin 'qu’il
puisse cylindrer de la première qualité: de faire aller ledit cy¡indl.e p nr eau avec la même roue d’un moulinJarinier ou rnailmii me sera fournie par lesdits Castillon et Blan^FnrrnTdê fournir iQut .ce qui sera nécessaire pour ladite mécatouFconduit et placé dans l’espace de quatre mois, h
compter de ce jour: le q u e l cylin d re je garantis pendant un an
entier- d’après lequel temps, étant bien conditionnedans toutes
ses parties, je n’aurai plus aucune responsabilité; et en ce qui
concerne la.conduite, elle sera aux frais des acquéreurs, qu’ils
pnyeront aussïïôTreçu ; il sera conforme à celui que j’aïTirproportion de sa grandeui .
« L e prix dudit cylindre sera de la somme de huit mille six
cent ^î-vnnrp.-seizc livres dix sousa rg e g t, tournois , de laquelle
swnm cnwTCastillon promets et m’oblige de faire passer, par
lettres de change ou autrement, en la demeure du sieur Dufour,
à Paris s«*;»«», la somme de quatre mille trois cent trente-huit
livres cinq sous , savoir, celle de deux milllrcent-st.i^ïrÆ-neuf
livres deux sous six deniers, daii^ un a n , a comptei du jour
que le cylindre sera en état de travaillci, et celle de deux mille
cent soixante-neuf livres deux sous six deniers , un an après ,
avec rintéret à raison de six pour cent, sans aucune retenue.
�« A l’égard des quatre mille trois cent trente-huit livres cinq
sous, restans, pour parfaire celle de huit mille six cent soixantesçise livres dix sous,
. « M oi Blan^iajdjtïi’oblige et promets de payer ladite somme
audit sieur D ufour, audit domicile^mêmes espèces¿ payeinens
ç[ug.dessusa afin qu’au jit terme de deux
ans il ne soit ríen dû audit Dufour.
« E t moi Jgan-Baptiste Assollant, promets et m’oblige qu’en
casaque ledit Blanchard ne pût payer la totalité ou partie des
^
quatre mille trois cent trente-huit livres cinq sous, aux termes CaH+V+w *Ci-dessus , a p rèstoutes p oursuites faites . dans ce cas seulenient, je promets et m’oblige de payer audit Dufour les sommes
qui pourroientlui êtredues par ledit Blanchard, que je cautionne.
Castilloiïf^cn outre, dan^ïe cas où ledit Dufour ^
n e p û t être payé en tnut où en paati-eipnHtrsitur Blanchard, et^P
^
sieur Assollant, sa caution, aux échéances dites ci-dessjjs, après
«
toutes poursuites fa ite s, dans ce cas seulem ent, jawdengage et
promets d’acquitter au sieur Dufour le restant du prix ou la totalité , avec les intérêts, au même prix; alors ledit cylindre lui aj>
partiendra en son entier, sauf à lui de rendre néanmoins ce qui
auroit été payé par ledit Blanchard en principal et intérêts, les
dommages-intérêts qui pourroient être dûs audit Castillon à cause
de non-payement, déduits; en ce cas seulem ent, ledit Castillon
sera libre de faire vendre ledit cylindre ,^pour le"~prix enfproVenant être payé au sieur D uiour, jusqu’à concurrence de ce
q u i lui seroiPaû, le surplus seroit payé et rem boursé à celui qui
auroit le plutôt satisfait à ses engagemens, et le restan t, s’il y en
avoit, à celui qui, par sa faute, y auroit donné lieu. Néanmoins,
ce qui pourroit rester dû au sieur D u fo u r, de la part du sieur
Blanchard (fitsii ca u tio n , n e pourra être exigible centro ledit*
qu’un an après les deux axis expirésTqtti
pgw etttovp+Hjno,
�r
« Nous P ierre Blanchard et Etienne Castillon, fournirons et
payerons les maçons et matériaux, chaux, sable et pierres qui se
ront nécessaires audit D ufou r, pour le placement dudit r.ylfp.
dre. 11 est convenu entre les parties qu’en cas q*K»Îesdi(s Castillon et Blanchard veuillent avancer le terme de leur payementledit Dufour s’oblige à leur faire une remise cfe douze pour r.pn t
J «tesd its Castillon et Blanchard s’interdisènt la faculté, jusqu’à
parfait payement dudit cylindre, d’en exiger la ven te, même en
cas de mésintelligence entr’eux; mais une fois p ayé, ils se réser-.
* vent respectivement le droit, en cas d’incompatibilité, de de
mander et faire effectuer la venté dudit cylindre, et d’en partager
le prix , à l’exception néanmoins, qu’en cas de défaut dé paye-*
ment dudit Blanchard, il sera libre audit Castillon de le faire ven
dre , p o u r, du prix enjprovenant, fiftir de paya^letliH ifeii*^
(^ e q u i p o u r r o i t 4« ^ » * ^ d
« Jiait Jnple entre nous, sous nos signatures privées, présens,
à Palis les.siçjiî’SDufoux-, Assollant et Blanchard, ledit Castillon
devant signer en son domicile, le 18 prairial an 11.
Signé, Dufour, Assollant et Blanchard. ,,
Rien de plus clair que la nature de l’obligation que j’ai con
tractée; rien de mieux désigné que la personne envers laquelle'
je me suis obligé, et de mieux précisé que l’événement et la>
condition de mon obligation.
C ’est à Paris que j’ai cautionné le payement d’un objet mo
bilier.
C ’est envers le sieur D ufour, domicilié à Paris, que je me suis
obligé.
C ’étoit faute de payement aux termes convenus, et après
toutes poursuites faites, dans ce cas seulement} cikti’acte que
j’étois obligé de- payer au sieur Dufour les sommes qui-p o u r '
roient lui être dues par le sieur Blanchard.
. ...
�(5 )
L ’obligation du sieur Castillon envers le sieur Dufour étoit
d’abord de payer sa moitié du prix du cylindre, et quant à l’autre moitié, l’obligation dépendoit de deux événement.
L e prem ier, du non-payement aux échéances.
L e second, de poursuites faites contre Blanchard, et contre
m oi, sa caution.
On examinera bientôt si le sieur Castillon n’a pas changé
volontairement la position des choses, et s’il n’a pas amené l’im
possibilité de réaliser les conventions. Il faut remarquer d’abord
il'
que le premier terme de payement étoit fixé au dix-huit prai
rial an i a , et que le trente frimaire an 12 , a été passé entre le
sieur D ufour, le sieur Castillon et un sieur A lb ert, qui n’est
point en cause, un acte dont je me suis procuré la connoissance.
2f
----Cet acte, sous signatures privées, est ainsi conçu :
« Nous soussignés, M ichel D u fo u r, serrurier, et Etienne
?"
Castillon, propriétaire, et Claude A lb ert, négociant, tous deux
habitans de cette ville de R io m , sommes convenus de ce qui
suit :
« M oi D ufour, reconnois avoir reçu de M . Castillon seul, et
de ses deniers , la somme de huit mille six cent soixante seize
livres dix sous , pour le payement par anticipation du prix du
cylindre par moi vendu au sieur Castillon et à Pierre Blanchard,
teinturier à Riom. En conséquence, je tiens quitte ledit Castil
lon de ladite somme , et Je subroge , sans néanmoins aucune
priorité à la subrogation ci-après, en tous mes droits contre le
citoyen Blanchard et Jean-Baptiste Assollant, sa cautiflS^ je lui
donne pouvoir de se servir de mon nom pour la répétition de
lu moitié de ladite somme de 8,676 livres 10 sous et intérêts •, et
attendu néanmoins que dans cette somme il y est entré celle de
7>°oo livres, prêtée audit Castillon par le citoyen A lb ert, moi
-Qüj^ur, du consentement dudit Castillon, subroge ledit citoyen
A lbert en tous mes droitssur ledit cylindre, jusqu’à lu libération
�(6)
^litière dudit Castillon envers le citoyen A lb ert, des effets de
commerce jusqu’à la concurrence de la somme de 7,000 livres,
“ .a a tirés cejourd’hui au profit d* ce dernier. D ém o n co té,
^ o i A lbert, en acceptant la subrogation faite a mon proüt, dé
claré que sans cette condition je n’auro.s pas prêté ladite somme
'„ d it Castillon-, et reconnois que pour le plein et entier effet
d’icelle, j’ai demeuré dépositaire tant du double du citoyen D u
four, que de celui dudit Castillon. Fait triple entre nous a Riom ,
sous nos signatures, le 3o frimaire an,
de la république fran' caise Si,rn é , A lbert, Dufour et Castillon. ”
•
3 Cette convention sembloit mettre le sieur Castillon aux droits
du sieur Dufour-, et en ne supposant pas, ce qui paroîtroit dé
montré, que le sieur Blanchard a paru sous le nom du sieur A l
bert pour prêter les fonds, ou que depuis, au moins, il a rem
bourse sur les produits du cylindre l’avance faite par le sieur
* Castillon, dans le désir de profiter du bénéfice de la remise de
douze pour cent, il est établi du moins que les conditions du
traité de l’an 11 devoient toujours s’accomplit.
C ’est ce qui n’eut point lie u , et le 18 prairial an 12, terme du
premier payement, et le 18 prairial an i 3 , terme du second
L v p m rn t s’écoulèrent successivement sans aucune réclamation
contre le sieur Blanchard, ni de la part du sieur D ufour, désin
téressé par l’acte de frimaire an 12, ni de la part du sieur Castillo n , qui paroissoit à ses droits. .
O n n’a point constaté que le sieur Blanchard ne vouloit point
....
payer~aux termes convenus. ..... .. ............ ......
Il n’a été exercé aucunes .gpursuites a u ^ v e i W p o q u w d e
payem ent, pour constater l’insolvabilité actuelle du débiteur.
Je me suis procuré la connoissance d’un autre acte sous seingp riv é , en date du 1 3 brumaire an i 3 , foit entre le sieur Dutour,
lesîeu r Castillon et le sieur Blanchard ; cet acte est ainsi conçu :
' « Par-devant, etc. ont été présens Pierrc-M icliel D ufour, ser-
�( 7 )
rurier-machiniste, habitant à Paris, rue de la Juiverie, n°. 27,
d’une part ;
L t Etienne Castillon et Pierre Blanchard, propriétaires, habitans de la ville de R iom , d’autre part.
Lesquelles parties ont dit que par acte sous seing privé, du
18 prairial an 1 1 , le sieur Dufour avoit vendu auxdits sieurs Cas
tillon et Blanchard un cylindre suivi de tous ses agrès, bien
conditionné dans toutes ses proportions, ainsi qu’il est plus au
long expliqué audit acte, que ledit sieur Dufour devoit garantir
pendant une année entière, ù compter du jour de sa mise en ac
tivité; que peu de temps après que le cylindre eut été posé, l’un
des rouleaux éprouva quelque défectuosité, et que le second
avoit cassé, ce qui avoit donné lieu à une réclamation judiciaire
de la part des sieurs Castillon et Blanchard, contre le sieur D u
four , qui avoit été portée au tribunal'de commerce de R iortl,
Pa r exploit du 7 v en d ém iaire an i 3 ; que le d it sieur Dufour ayan t
réparé le prem ier rouleau, et remplacé le second, il ne restoit
plus qu’à faire prononcer sur la garantie promise et sur les domuiages-intérêts que lesdits sieurs Castillon et Blanchard prétendoient leur être dûs. Comme ces contestations auroient donné
lieu h des frais considérables et à des voyages dispendieux, sur
tout par l’éloignement-du sieur D ufour, les parties, pour les évi
ter , et pour leur tranquillité réciproque, on t, de l’avis de leurs
conseils , traité et transigé par transaction sur procès, ainsi qu’il
suit :
.
A rt. Ier. — L e sieur Dufour s’oblige de délivrer, dans son niq^ ,
gaein à Paris, dans cinq m ois, à compter de ce jou r, auxdits
sieurs Castillon ot Blanchard, un rouleau en papier, bien condi
tionné, et conforme au dernier reçu, q u i a été posé le i3 du
courant, et qui a trois boulons.
Airr. 2.— A u moyen de laquelle délivrance ledit sieur Dufour
demeurera -entièrement dégagé envers les sieurs Castillon et
�'(
8
;
Blanchard, à compter de ce jour, tant de la garantie promise par
l’acte dudit jour 18 prairial an x i , que par celle de rouleau à
recevoir.
"
:
En conséquence, les parties promettent de ne plus le recher
cher directement ni indirectement pour raison de ladite garan
tie, ni pour le passé, ni pour l’avenir.
A rt. 3 . — A u moyen des conventions ci-dessus, et en faisant
par le sieur Dufour la délivrance du rouleau dont il s’agit, aux
termes ci-dessus stipulés, tous procès intentés et à intenter entre
les parties, pour raison tant de ladite garantie que pour dommages-intérêts, demeurent éteints et assoupis, sans autres dépens de
part ni d’autre.
Nous soussignés, dénommés en l’acte ci-dessus et de l’autre
part, après en avoir pris connoissance, l’approuvons dans tout
son contenu, et promettons l’exécuter selon sa forme et teneur.
Fait triple entré nous, sous nos signatures, à R iô m , ce i 3
brumaire an ï 3.
...
^ — ;;---Signé, Blanchard, Castillon et Dufour. »
Cet acte donne lieu nécessairement à plusieurs observations
et le conseil examinera quelles sont les conséquences qui en dé.rivent.
On remarque, d’abord, que je ne suis point partie dans cette
transaction, où les sieurs Castillon et Blanchard renoncent envers
Dufour à la garantie promise par l’acte du 18 prairial an n et
y dérogent en ce point.
On voit qu’il n’est question dans cet acte d’aucune réclamation
possible de la part du sieur D ufour, contre le sieur Blanchard
et qu’il est payé intégralement du prix du cylindre.
Si, au contraire, il existe une action possible à cette époque,
c’est contre le sieur Dufour \ elle est reconnue, par ce dernier
appartenir à Blanchard comme à Castillon, et il transige sur cette
action intentée par l’exploit du 7 vendémiaire an 13 , qui contient
�(9)
la demande au tribunal de commerce, de dommages-intérêts, et
l ’exécution de la garantie promise par Dufour , en l’an onze.
Ainsi, Dufour est bien payé, Blanchard est bien libéré envers
lu i, et on ne lui demande rien, pas plus qu’à sa caution.
A lb e r t, lui-même , qui, dans l’acte du 3 o frimaire an 12 , paroît subrogé aux droits du sieur D u fo u r, pour le cas de nonpayem entde la somme quiparoît prêtée àCastillon, pour éteindre
à l’avance la dette de Blanchard et la sienne, n’est point appelé
à cette transaction. Il semble impossible de ne pas tirer de ces
faits la conséquence que Castillon et Blanchard ont concouru à
exécu ter, à son égard , les conventions que Castillon semble
avoir faites avec A lbert : comme il faut nécessairement en conp
d u re qu’à l’époque du i 3 brumaire an i 3 , A lb e rt, n’ayant au
cune réclamation à faire contre Castillon, ce dernier, en fait
comme en droit, avoit acquitté envers Dufour la dette de Blan
chard , principal obligé avec lui.
Ce fut par line lettre du sieur Castillon, datée de 'Riôm, le 17
frfriiâîre an i 3 , c’est-à-dire long-temps après l’échéance dû preîriièr ferme indiqué par l’acte' de l’an onze, le seul qui fût alors
à ma connoïssance, que j’entrevis le plan combiné entre mon
beau-frère et Castillon de me forcer à les aider "de ma bourse, et
en saisissant ^ comme prétexte, le cautionnement que pavois
contracté envers Blanchard ,~e"t en alléguantqu’il n’avoit point
acquitté la première portion de sa dette, ce qu’on n’a eu garde
de faire constater, aux termes convenus, par aucune voie légale.
Cette lettre est ainsi conçue :
« M on sieur,"voilà'là~ troisième que j’ai 'iTïÔnhéur ~dë ’vous
» écrire; il me semble q u i vous ne poüvczriai'ré autrement'que
” me faire réponse,attendu que vous êtes obligé, ainsi que m oi,
» à payer, faute par M . Blanchard, votre beau-frère , d’avoir
» lc rrroÿen de le faire. C ’est donc avec moi qu’il faudroit trou* ver quelques moyens pour éviter la perte totale de votre
B
�( 10 )
somr et de sa famille. Si je suis obligó de poursuivre son mari
corps , les frais augm enteron t la somme ; ils seront en pure
perte pour celui de nous qui se trouvera a même de payer :
espérance de bien faire leurs affaires se trouve etemte par ce
moven Combien il me répugne d’être obligé a poursuivre
imi qu’y a deux ans qu’il habite ma maison, et qui est à
même de faire de bonnes afTaires, si notre.fabrique va en augnentant ' 11 ne faut pas s’attendre que nous puissions mettre le
cvlindre "en
parce qu’il est dit, qu’aucune des parties ne
v e n t e ,
a en demander la vente qu’il ne soit totalement payé
^ar chacune d’elles: vous n’avez qu’à voir votre double -, vous
^trouverez cette clause expresse -, ainsi nous n’avons que le
droit de faire des poursuites d’usage. Il paroît que vous n’avez
pas entendu obliger votre beau-frère jusqu’au point de payer
pour lui. Ce service est bien considérable 5 mais_si_vous^ne
l’aviez pas cautionné , jc^n’aurois j>as entré dans la vente , et
n ouTñ eTeríoñsIñi l’un ni^’aütfë dans cesembarras. L e terme
est échuT a i n s i que des~eTfêts que jjT con tractés , qu’il m’est
"impossible d e l Æ g fe , si vo u sjic venez de bon cœ ur sousc^ â T 5 sCTg 5s ^ é n i» ce
vons POUVCZ fairePar d’autrcs
efíbtTsur*Paris. C ’est le plus grand service que vous puissiez
rendre à votre sœur et à sa famille, qui peuvent bien vous con
server le principal et le revenu, et le bien payer par le moyen
de leur travail et du produit du cylindre, et surtout si notre
indiennerie se soutient. V e uillez m e faireréBpnse de suite.J^Û
été dans cette affaire de bonne fo i: vous ne pouvez vous oblicar )c ne saurois S0UPÇ011*
ncr q u e lo ^ ^ ^ e ^ n r n t d ^ s nos doubles n’ait pas été fait
de votre aveu et consentement, puisqu’il paroît que Redouble
que j’ai entre i ™ i n s ^ s t ^ c r it ™ _ e r ^
prouvé clé'votre signa tureTEu ne recevant pas de rtponse, je
1 ne s a in ^ o T m ’a ttè n a ^ 'Y o u s connoissez plus cj[ue moi que
�( 11 )
» les poursuites vont vite en fait de marchandises, et que si je
» suis forcé d’y v e n ir, ce ne sera pas long , que nous nous ver» rons de près à Paris. Suivant la lettre de mon frère , que j’ai
» reçue ces jours derniers, il paroît que sa femme vous parla, et
» que vous lui répondîtes que vous n’aviez pas de réponse à me
» faire, attendu que vous aviez écrit au sieur Blanchard, et que
» vous lui aviez écrit vos intentions sur mes deux lettres. V otre
>> beau-frère m’a soutenu n’avoir reçu aucune lettre de votre part,
» mais qu’il en attendoit de jour en jour. Celle-ci restant sans
» réponse, de suite je prendrai mon parti à ne rien ména» g e r , il en arrivera ce qui pourra. Si vous pouviez ih’éviter de
» faire contrôler nos doubles et toutes poursuites , notrej abrr» que, en vaudroit bien m ie u x ^ et que vous devenez bien mte» ressant pour votre beau-frère et sa famille, qui n’ont pas d’au» tre ressource ; et en acquittant chacun nos obligations , il se
» trouve u n fonds que chacun a in térêt de m én ager , les uns
» pour soutenir leur maison , et les autres pour trouver leurs
» fonds. Pensez-y sérieusement, je n’entends pas vous surpren» dre*, j'ê vous écris Ce que je pense, et je suis en attendant
» réponse , avec une parfaite considération et confiance, M oii» sieur , votre très-liumble et obéissant serviteur.
» Signé, Castillon jeune, B io m ,le 17 frimaire an i 3 .
» P . S. M . Blanchard m’a dit qu’il étoit sur le point de faii’e le
»>voyage de Paris, s’il ne recevoit bonne réponse de votre part.
« Répondez donc de suite, bien ou m al’, qu’on sache comment
»> il faut s’y prendre. »
Il faut s’arrêter surtout, dans cette lettre, au point de fait
qu’elle constate j que le cylindre avoitservia elever une fabrique
d’indiennerie, et que ces mots , notre fabrique , notre indiennerie, établissent sans Réplique le fait d’une société entre Castilloü et Blaac'faardrsocielé q u ia du produire des résultats oui
Ba
�( 12 )
ont pu et dû servir à liquider Blanchard, soit envers Dulour,
soit envers Castillon, soit envers Albert.
TS’en
pas tirer la conséquence que Castillon a acquitté,
le ,3 frimaire an .3 , une dette de la société, pour laquelle il est
non-recevalile à me rechercher comme garant ?
Te dois encore ne pas omettre un fait qui démontrera le ma
n è g e employé constamment, et d’accord,pour me forcer à p a y «
un engagement que je regardois comme anéanti.
_
«
Le “ m e germinal an 13 , je reçus une assignation a compa*
d o i t - o n
i-oître le treize floréal an 13 , « à l’audience du tribunal de com^ 1 rce de B-ipmj pour me voir condamner, solidairement avec
t - S ï e i i Blanchard.,,comme..caution-~de^e..dei;nier,.et même
7 par corps, à p a yer la somme .de.
ccn t,so ix a ^ -six
1 livres dix sous, avec les intérêts au taux de six pour cent par
!> nn pour le quart du cylindre vendu aux sieurs Castillon et
» B lanch ard , moyennant huit mille six cent soixante-seize liv.
dix sous, comme m’étant_porté caution pour le sieur Blari* r W pour
ladite moitié étoit exigible le cinq
!" nivôse a S m a . « àfcu tep w r.te.Se!V
payement de sa moitié dans la moitié du prix du cylin^
■, l’énonue du cinq niv6se, époque indiquée comme con", venue entre les parties, et aux dépens. »'
.
.
Cet exploit me fut signifié à Pans, à mon domicile, par Belli„ uet jeune, huissier, à la requête du sienr Dufour, qui elisoit
d micile à Paris pour vingt-quatre heures seulement , et i\ Riom
rh 97 un sieur Gomot.
Je fus instruit aussitôt, par le sieur Dufour,que cette assena•
tété faite sans son aveu; etsonbut etoitfacile à deviner,
tionavoitc
déclaration en forme authentiTe crus devoir prendie cciic
t . ’ t l ü.do»e.gei».inaLüHc-fut-rédigée ainsi qu il slut :
T
l ’v-uj’ourÆlu.i «st compai-u.d.çy.an.t Tardif et sonegHegue,jio-
taircs à Paris, soussignés,,-
•
..............................
�C 1.3 )
» Sieur :]Viî ichcl D u fou r, serrurier-machiniste, demeurant iv
Paris, rue de ltuTuiverie, n°. 27.
.
- » Lequela,»par ces présentes',1déclaré que c’est à tort et à son
insu que, par exploit de Bellaguet jeune, huissier près lps tribu
naux de Paris, en date du onze germinal courant, enregistré, il'
a été donné ipsa requête assignation au sieur Jean- Baptiste
Assollant, demeurant rue des Marmôuzets , n°. 4 2, pour com
paroir, le 13 floréal prochain; à l’audience du tribunal de cornmerce de R iôm ; que son intention n’est' pas et n’a jamais été de
donner aucune suite à ladite assignation, ni d’exercer aucune
poursuite contre ledit sieur Assollant, vis^à-vis duquel il n’a
aucune réclamation à élever; qu’il n’entend nullement non plus
en exercer aucune pour les causes mentionnées audit exploit,
dont' il se désiste purement ¡et simplement en consentant sa
pleine et'entière nullité.; ■ in*r '-rrp ■
<v
'
!
” I ^e présent désistement, donné en faveur dudit sieur Assoljant, ne p o u rra , dans aucun cas ni d’aucune manière ¿m u r e , soit
aux droits du slaur -'Gastillon^ Isoit. du sixmr .'Blanchard y ou 1de
toute autre personne que ce soit.
S
x
»-Dont acte-fait eti passé en la idÈmeuré du sieur D u fo u r, le
germinal an i 3 . »•
En •s'an*6tantf&eulemcnt au' fait 'établi par cette déclaration,
que le sieur Dufour n a aucune réclamation à élever contre
moi, n’^ti i?ésii|tei--t’-U pas une fin de non-recevoir bien impérativ e ‘, contre toute action intentée ou à intenter, et ne peut-on
pas employer un raisonnement bien décisif ?
J ’ai contracté un engagement envers le sieur Dufour: le sieur
Dufour est payé; il n’a aucune réclamation à élever contre m oi,
1l n ’en a aucune à élever contre Blanchard ? En supposant qu’un
nouveau créancier ait été substitué ù l’ancien, envers lequel le
débiteur s’est trouvé déchargé, la novation ne s’est-elle pas
opérée complètement ? et ne suis-je pas déchargé de toute ga-
�( i4 )
'
„ n tic par ce seul fait? Je livre ces réflexions aux lumières de
1
’
'il) ■'!,
mon conseil.
■
.i • o
Je restai dans l’inaction avec l’acte rapporté , et le sieur Castillon qui fut sans doute prévenu de son existence, renonça
„our le moment à ses projets; car ce ne fut qu’en vendémiaire
an i4 seulement qu’il fit constater l’insolvalnlite de son associé
et au il me fit citer devant le tribunal de commerce de R io m ,
„ o L m e voir condamner, et par corps,' à liu payer la somme due:
‘ r Blanchard, après m’avoir, dénoncé le jugement de condam
nation rendu antérieurement contre ce dernier.
Sur le déclinatoire présenté au tribunal de commerce, il a été
vdonné de plaider a u fond ;'etil’article 8, titre 8 de l’ordonnance
de 1667 pàroît avoir ifôndé -l’opinion des premiers juges.
' L a cour d’appel se trouvé saisie par moi; et tels sont en
abrégé les faits et moyens que j’ai cru devoir -communiquer à
jnes cons.e.iU ,_quijpn^priés de les peser et de^résoudre les ques
tions suivantes m
~
-—
Les juges de Riom sont-ils incompetens ratione loci et ratione materiœ ?
'
^ r
l ' 1
'•
a°i L e sieur Castillon doit-il être déclare non-recevable dans
sa demande ?
3°. L e sieur Castillon a-t-il un recours quelconque ,à exercer
contre m oi?
ASSOLLANT.
�CONSULTATIONS.
-Lj E C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a vu le mémoire à
consulter pour le sieur Assollant,
P
rend l a
r é s o l u t io n s u iv a n t e
:
Les Juges de Riom sont incompétens \
L e sieur Castillon est non-recevable dans sa demande, et
aucun recours ne lui est ouvert contre le sieur Assollant, pour
le remboursement de la dette qu’il a acquittée volontairement
a titre de sociétaire et de co-obligé avec le sieur Blanchard.
P
r e m iè r e
Q
u e s t i o n
.
L a question de compétence proposée doit être résolue en faveur
du sieur Assollant sous le premier rapport, ratione loci.
I
m c o m p é t e n c e
ratione loci.
O n ne peut s'empêcher de penser que les juges du tribunal
de commerce de R io m , qui se sont déclarés compétens, ont fait
une fausse application des lois, et ont violé les règles de compé
tence.
’ Ils ont violé l’article 1 7 , titre 12 de l’ordonnance de com
m erce, et faussement appliqué l’article 8, titre 8 , de l’ordon
nance de 1667.
.
L ’article 1 7 , titre 12 , de l’ordonnance du commerce, est
ainsi conçu ;
« Dans les matières attribuées aux juges et consuls, le créan« cicr pourra donner l’assignation , à son choix, ou au lieu du
« domicile du débiteur, ou au lieu auquel la promesse a été
“
qjla marchandise fournie, ou au lieu auquel le payement
* doit être fait. »
�( 16 )
O n , v o it-q u e -le
v
r
cni«
c
r é
a
n
c
i e
r
des -conditions
m
e
p eu t assigner que dans trois
exp rim ées:
Le* premier , est le lieu du domicile du débiteur;
Le deuxième, est le lieu otx la promesse a etc faite et la marclxandise foui-nie;
.
;
' L e troisième, est le lieu auquel le payement doit etre fait.
L ’application du droit au fait, est focile.
L e sieur Assollant est dom icilié à Pans : sous ce rapport, on ne
pouvoit et on ne devoit l’assigner que devant les juges de Paris.
C ’est à Paris que l’acte du 18 prairial an n , contenant la
romesse des sieurs Dùfour et Assollant , a été fait et signé, et
si la marchandise devoit être fournie à Riom , la double condi
tion-exigée par l’ordonnance pour compéter la juridiction ne se
trouvant pas réunie, la compétence ne peut se décider en faveur
du juge du lieu où la marchandise a été fournie ; car les deux
conditions requises par l’ordonnancé pour fixer la compétence,
ne se trouvant pas jointes, ce point ne peut la déterminer.
T ’ordonnancé ne compète point et le juge du lieu où la pro
messe a été fcite T e F cB fttrd u lieu où la marchandise a été
fournie- elle ne recpnnoît comme compétent, que le juge de
l’on droit où à la fois la promesse a été faite et la marchandise
fou rn ie; autrem ent, il faut
d
’ a
p
erzo
r è
s
en
revenir à la règle générale,
laquelle on dit ordinairement , f d
e m e ju s
se c u tu s
e s ,
i lo m i c i lm m s c t/ iii d e b e s .
L’avis du commentateur Bornier se rattache au notre. 11
énonce l ’ o p i n i o n que cette disposition e t l a m a r c h a n d i s e f o u r n i e
n’a été ajoutée que relativement aux marchands forains, et
encore pense-t-il que trois circonstance doivent y concourir ;
la première, que la marchandise soit livrée au lieu de 1 établis
sement des consuls ; la seconde, que la ccdule ou obligation y
soit passée ; la troisième, que le payement y soit destine.
Il n’excepte'que le cas où Ta~mafclviiKÎisé 3 du ocre payée
prom ptem ent,
�( *7 )
promptement, parce que le marchand peut s’en aller d’heure en
heure; mais si l’on a vendu à crédit, dit-il, habitéfuie depretio,
en ce cas le marchand ne peut être convenu hors de la juridic
tion de son domicile.
L e commentateur Jouese est aussi d’avis que le concours des
trois circonstances doit avoir lieu pour distraire le débiteur de sa
juridiction naturelle.
A insi, en considérant encore que le payement devoit être fait
à Paris au sieur D ufour, d’après l’acte cité, cette troisième cir
constance vient démontrer que les juges de Riom ont violé les
dispositions de l’ordonnance, en retenant une cause dont les
juges de Paris devoient seuls connoître.
C ’est vainement qu’ils s’appuyent du vœu de l’ordonnance de
1667 : fausse application en est aussi évidente que la violation
de celle de 1673 est démontrée.
L ’a rticle 8, titre 8 de l ’ordonnance de 1677 est ainsi conçu :
« Ceux qui seront assignés en garantie formelle ou sim ple,
» seront tenus de procéder en la juridiction où la demande ori» ginaire sera pendante, encore qu’ils dénient être garans, si ce
» n’est que le garant soit privilégié, et qu’il demande son renvoi
» par-devant le juge de son privilège. Mais s’il paroît, par écrit
» ou par l’évidence du fait, que la demande originaire n’ait été
» formée que pour traduire le garant hors sa juridiction, enjoi*
» gnons aux juges de renvoyer la cause par-devant ceux qui en
» doivent connoître; et en cas de contravention, pourront les
» juges être intimés, et pris à partie en leur nom. »
L e principe consacré par l’ordonnance ne peut être appli
cable à l’espèce.
D ’abord il ne s’agissoit point, de la part du sieur Assollant,
de procéder en la juridiction où la demande originaire étoit
pendante.
Tout étoit jugé avec le sieur Blanchard, assigné au lieu de son
�( i8 )
rlnmicile. Il s’agissoit de faire exécuter une obligation devenue
personnelle au sieur Assollant, par l’insolvabilité de Blanchard
après toutes poursuites faites; et cette poursuite engendroit une
action distincte et séparée. La demande nouvelle à intenter ne
pouvoit être portée devant le juge de la demande originaire
_puisquelle n y étoit plus pendante, et que l’ordonnance impose
cette condition. La raison de la loi est évidente \ elle suppose
que l’action en garantie peut et doit être formée dans le même
temps que la demande originaire j et pour abréger les procé
dures , elle veut faire décider par un seul jugem ent, ce qui
autrement entraîneroit deux procedures et deux jugemens
Les conditions de la loi sont contraires à celle du cas particulier
où la demande contre Blanchard dut être formée, et où toutes
les poursuites durent être faites avant de s’adresser à sa caution.
L e principe enfin qu’on doit-rechercher.dans les conventions,
quelle a été la commune intention des parties contractantes
doit recevoir ici sa juste application.
Il est évident que le sieur Assollant, s’engageant à Paris en
vers le sieur D u four, demeurant à Paris, n’a jamais entendu être
distrait de ses juges naturels, pour aller plaider à Riom. L e sieur
D ufour, avec lequel il a contracté, et envers lequel seul il s’est
obligé, ainsi qu’on le démontrera bientôt, n’a jamais eu non plUs
l’intention d’aller former h R iom une demande contre le sieur
Assollant.
“
On ne peut donc s’empêcher de conclure que, sous ces divers
rapports, l’incompétence des juges de R iom , ratione loci, ne
peut être raisonnablement contestée.
I
m c o m p é t e n c e
ratione person ce et materiœ.
Ce double moyen d’incompétence peut être invoqué avec
succès par le sieur Assollant. Il est fondé sur sa qualité person
nelle et sur la nature de l’obligation qu’il a contractée.
�( >9 )
Blanchard, négociant, a pu être traduit devant les juges du tri;
hunal de commerce, relativement aux difiérens intervenus sur
la vente d’iuT^objet mobilier servant à travailler cIcT sa pro.¡Uu*
fession.
Sa qualité personnelle et la matière compétoient également la
^
Lx
jundictiom
A u contraire, le sieur A ssollant, employé à la comptabilité, et
n’adoptant point d’autre qualité dans l’acte de prairial an 11, devoit être considéré comme lusticiahle des tribunaux civils, ra^
tïone personœ.
s .
Sous un autre rapport, il ne pouvoit être traduit devant les
juges du commerce, incompétens ratione materiœ. On a du re
marquer que l’obligation de la caution est distincte et séparée de
celle du débiteur principal, avec lequel il n’y a point d’engngQj
ment solidaire. Assollant a cautionné le payement du prix d’un
objet m obilier, après la discussion de ¿lanchard.» aux termes
convenus, et on voit qu’il n’a point contracté en qualité de com
merçant ni de sociétaire, comme il n’a point renoncé à sa juri
diction ordinaire, pour en adopter une autre.
L ’obligation consentie par le sieur Assollant avoit-elle ouvert
une action contre lui? Elle étoit personnelle à lui ; elle étoit sé- ^
¿7
parée de celle à diriger contre Blanchard': on n’a pu former de
demande, à raison de cette obligation purement civile, que de
vant des juges ordinaires.
• S’ètre^idressé aux juges du commerce, c’est, de la part de l’ad
versaire, avoir méconnu les règles de compétence.
A vo ir retenu cette cause pour la juger, c’est, de la part des
juges du tribunal de commerce, avoir violé le^droit et la loi.
Ils sont incompétens à l’égard du sieur A ssollant, 'ratione pcrsonce et ratione materiœ.
L ’on ne doit pas clouter que les juges d’appel s’empresseront
de venger les principes méconnus par les premiers juges.
G 2
�S
e c o n d e
q u e s t i o n
.
Le sieur Castillon doit-il être déclare' non-recevâhle dans sa
demande ?
Les fins de non-recevoir s’élèvent en foule contre la demande
du sieur Castillon, dirigée contre le sieur Assollant; elles se
puisent et dans les actes et dans les faits exposés, et dans l’appli
cation la plus juste du droit.
L ’acte du 18 prairial an 1 1 , établissant que le sieur Assollant
n’a contracté d’obligation qu’envers D u fo u r, «t que le sieur
Castillon ne s’est point réservé de recours contre le sieur Assolla n t. lorsqu e , pour le cas prévu de non-payement A» )n pn^ t^ ,
Blanchard et de sa caution, il est^stipulé dans l’acte que leT^TTTr
¿ ^appartiendra en son entier au sieur C ^ illo n Tlfer^TTiT»
première fin de non-recevoir contre l’action qu’il intente.
Par l’effet de l’acte du 3 o frimaire de l’an 12 ? Dufour se trou
vant sans action, et le sieur Assollant ne pouvant plus être su
brogé par lui en des droits et p riv ilèg es q u ’il n ’a p lu s, le sieur
C astillon lui-même ne pouvant faire usage de la subrogation
pour la transmettre, en cas de payement, au sieur Assollant, sans
ouvrir une action contre le débiteur cautionné, qui rêÏÏueroit
sur le créancier, il en résulte que le sieur Assollant se trouve
déchargé de son cautionnement, et que le sieur Castillon'est nônrecevable à le poursuivre comme caution du sieur Blanchard
U ne autre fin de non-recevoir résulte encore de la novation
établie par cet acte de frimaire an. 12 . où un nouveau créancier
se trouve substitué à l’ancien, envers lequel le débiteur s’est
trouvé^ déchargé.
A u cunes poursuites n’ayant été faites aux; termes fo n vpmic.
contre Blanchard, par qui que ce soit, toute action contre le
sieur Assollant, qui ne s’étoit soumis
payer pour son beaufrère qu’après toutes poursùites faites, aux termes convenus et
dans ce cas seulem ent, est non-reccvable.
�( ai )
Enfin la preuve du payement de la part de Blanchard, qui ré- )
suite d’une foule de circonstances, forme un dernier moyen, qui,
^
appuyé de tous les autres} qui se prêtent un mutuel secours, dé
montre avec eux qu’il ne peut exercer aucun recours contre le
sieur Assollant •, point que la troisième question présente à décider.
Pour bien apprécier les moyens de fait et de droit qui fondent les fins de non-recevoir indiquées, il faut s’arrêter d’abord
à l’examen de l’acte du 18 prairial an n , qui contient en luimême la solution d’une partie des questions que la demande du
sieur Castillon présente à décider.
Blanchard et Castillon sont constitués débiteurs principaux
envers le sieur D ufour ; Assollant y est déclaré la caution du
sieur Blanchard envers le sieur D ufour ; Castillon est encore
certificateu r de caution envers le sie u r D ufour.
Les obligations et des débiteurs principaux, et de la caution,
et du certificateur de caution, sont toutes consignées dans le
même contrat.
Castillon s’oblige au payement de la moitié du cylindre, en
vers Dufour.
Blanchard prend le même engagement pour l’autre moitié
envers le même vendeur, et le sieur Assollant s’oblige de payer
au sieur Dufour la totalité ou partie de la dette de Blanchard ,
si elle existe encore aux termes convenus, après toutes pour
suites faites, et dans ce cas seulement; ce sont les expressions de
l’acte.
On ne voit pas que le sieur Assollant contracte aucun enga
gement envers le sieur Castillon ; il ne s’oblige qu envers Dufour.
Castillon vient cautionner la caution clle-meme envers Dufour, et il promet de payer, si Blanchard et sa caution ne payent
point , après toutes poursuites faites,
^ml
/ h truj^ C.
X ul
®
�(
22
)
D ans ce cas p ré v u de non-payem ent de la part de B lancliard
et du sieur A s s o lla n t, il est stipulé qu e le cylindre appar
tiendra en son entier à Castillon , et qu’ il sera libre de le faire
' CO n p r é v o it m ê m e le cas d’un déficit q u i doit être à la charge
de celu i des d eu x associés, q u i , par le défaut de p a y em en t, y
auroit donné lie u -, et l’on ne p eu t s’ em pêch er de rem arquer que
C astillon ne se réserve pas d’action en répétition contre le sieur
AST e lle est en abrégé l’économ ie de l ’acte du 18 p rairial, trans
crit en entier dans le m ém oire à consulter : la p rem ière fin de
n o n -recevo ir in d iq u ée en découle nécessairem ent.
P o in t d’ o b ligation , p oin t de droit.
L e sieur A ssollant n ’a p oint contracté d’ obligation envers le
sieur Castillon : ce dern ier n ’a donc personnellem ent aucun droit
contre lui.
On peut dire plus encore-, c’est que la lettre, comme 1 esput
du contrat, prouve que jamais les parties n’ont entendu créer
une obligation d’Assollant envers Castillon.
Il étoit dans la nature des choses que le sieur D ufour exigeât
ue B lanchard fût caution n é, et qu e la caution le fût elle-m êm e -,
^ «toit u n e sûreté personnelle pour le ven d eu r. Mais Castillon,
n u i devoit p articip er il la propriété, C»” ™ 0 *Tcq>J°itotiônraa
rv lin d rc ne pouvoit ot n e,d ev o it ex ig er q u ’u n e clio se, dons le
cas o ù il’ p n yeroit le cy lin d re , c’étoit le droit d’en disposer; ja
mais il ne p o u v o it p ré ten d re, en acquittant sa dette (pu isqu e
tout nssocié est ten u indéfinim ent des dettes de l ’a u tre), à rép éter
le p ayem en t contre u n ü m é t r a n g e r à sa propriété com m e à ses
produits.
.
.
___ Il est vrai c e p e n d a n tq u ç ja n s je d r o .t commun la caution
¿ » t obligée, e î^ T k ^ r t i li c a t e u r , de la même man .cro que le
débiteur principal est obligé e n v e r s là caution; mais dans 1espèce
�(
23
)
particulière, il y a dérogation tacite à ce droit, et l’on voit clai
rement que telle a été la volonté dés parties.
Castillon ne s’est point engagé pour Assollant, mais pour son
associé Blanchard, et il s’est engagé, sous la seule condition d’un
recours, soit sur la personne de cet associé, soit sur le cylindre
appartenant à la société.
En vain Castillon opposeroit-il à cette fin de non-recevoir le
droit qu’il prétendroit faire résulter de la subrogation,qui lui a
été consentie par D ufour, dans l’acte du 3 o frimaire an 12 ; c’est
dans le fait même du payement constaté par cet acte, que se
puise une autre fin de non-recevoir qui va être développée.
La subrogation n’a pas pu déti’uire la loi que les parties s’étoient créée à elîe-même le 18 prairial an 1 1 , et il n’a pas pu dependre du sieur Castillon de changer la position du sieur Assol^lant, par des conventions particulières, qui n’ont point altéré
l’efiet des conventions générales.
s. I I .
En droit, la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux
droits, privilèges et hypothèques du créancier, ne peut plus, par
le fait de ce créancier, s’opérer en faveur de sa caution.
Ce principe a été consacré par le Code civil des Français,
Qrt^2o37 ?
déjà adopté par notre ancienne jurisprudence.
Dans l’excellent article Caution, fait par M . M erlin , et rap
porté au Répertoire de jurisprudence, on lit, au chapitre intitulé,
D e la manière dontfinissent les cautionnemens, que le caution
nement, en thèse générale, finit, lorsque les obligations pour
lesquelles il est donné s’étcippent, et que ces obligations peu
vent s’éteindre de différentes manières, notamment,
«” 7 »^Lorsque le créancier s’est mis hors d’état de faire à la
caution une cession ou une subrogation utile de ses droits
et de ses hypothéqués , comme lorsqu’il a pris des arrange-
�( ¡>4)'
mens avec son débiteur ou avec des personnes tierces, de
façon qu’en recherchant la caution , celle-ci j ie puisse agir
contre le débiteur cautionné , que l’action ne reflue contre
~lo créancier. A quoi bon seroit-il, ajoute-t-on, qu’un créancier
pût exercer un cautionnement dont il ne pourroit plus tirer
aucune utilité ? >>
D e l’application de ce principe , aux faits de la cause , résulte
un second moyen de repousser la demande du sieur Castillon.
En fait, il est établi, par l’acte du 3 o frimaire de l’an 12, que
le sieur Dufour a été payé du sieur Blanchard par le sieur Castillon , associé de ce dernier. E n cet état de choses, comment
le sieur Dufour créancier subrogeroit-il le sieur Assollànt à dpg
droits qu’il n’a plus ? et comment le sieur Castillon lui-même en supposant que la subrogation contenue en l’acte cité ouvri
ront quelque droit en sa faveur, pourroit-il en conférer un qui
s’exerceroit contre lui-même, puisqu’associé de Blanchard et
tenu mdefimment des dettes de la société ? la subrogation qu’il
feroH.au sieur Assollànt de tous ses droits , donner oit lieuTi des
poursuites contre^ lui ; et qu’ainsi Faction contre
cautionné , reflueroiFsur le créancier.
Il est évident que le créancier du sieur Assollànt, caution de
Blanchard, soit qu’on doive le voir dans le sieur .Dufour , soit
qu’on puisse le trouver dans le sieur Castillon , s’est mis hors
d’état de faire à la caution une subrogation utile de ses droits. Il
a donc ouvert par son fait une fin de non-recevoir contre l’action
qu’il intente.
S iiiCette fin de non-recevoir résulte de la novation opérée par
l’acte déjà cité du 3o frima irejan 12.
On ne peut pas contester que le cautionnement finit lorsqu’il
y a une novation.
C ’est
�(
^5
)■
C’est l’avis de M . M erlin, consigné dans le Répertoire, verbo
Caution, §. 3. — C ’est celui de tous les jurisconsultes.
C ’est le vœu de la loi, consigné dans l’article 1281 du Code
civil, ainsi concu :
A rt. 1281. « Par la novation faite entre le créancier et l’un
des débiteurs solidaires, les co-débiteurs sont libérés.
« La novation opérée à l’égard du débiteur principal, libère
^ c a u tio n s . »
'
__
Prouver la novation, c’est établir la libération du sieur Assol
lant; c’est justifier que l’action intentée contre lui n’est pas rece..... ..
Vable.
. ■_
.. Pour y parvenir, il faut rappeler en peu do. .mots les carac
tères de la novation , qui peuvent s’appliquer au.cas particulier.
L a novation est le changement d’une obligation en une autre.
Graran de C oulon, verbo Novation, Répert. de jurisp.
Lorsque la novation sc fait avec l’intervention d’un nouveau
débiteur, ou d’un nouveau créancier, la différence de créancier
ou de débiteur est une différence suffisante pour rendre la nova
tion utile, sans qu’il soit nécessaire qu’il en intervienne d’autres.
Pothier, Traité des obligations, part. 3 , chap. 2 , §. 4 ? n°- 56 1.
Lorsque par l’effet d’un nouvel arrangem ent, un nouveau
créancier est substitué à l’ancien, envers lequel le débiteur se
troij^rejdéchargé , il y a novation. Art. 1271 dn Cnde çivil.
Ces principes, adoptés par les meilleurs jurisconsultes, et con
sacrés par la l o i , sont incontestables.
Il est question d’examiner s’ils çeuvent être appliqués aiifait.
T)n voit dans l’acte du 3o^frimaire an 12 ; que,l’obligation
contenue en l’acte du i8"prairîal an 11 est changée en une au tre.
On remarque qu’un co-obligé paye une dette non-exigible ,
et qu’au moyen de ce payement , fait avec l'intervention de deux
nouveaux créanciers,savoir,le sieur Castillon et le sieur Albert,
le débiteur principal est libéré envers l’ancien créancier.
D
�( 26 )
-N'est-il pas évident, selon l'avis .le l’ othier, que la différence
est suffisante pour rendre la novation utile , sans q u .l sort né
cessaire qu’il en intervienne d’autres ?
- O n voit"enfin que par l'effet d'un nouvel engagement, de
nouveaux créanciers sont substitués à 1 ancien , envers lequel
le débiteur principal, et même le codébiteur, se trouvent libères.
L a n ovation est parfaite.
Sans doute on pourrait objecter,j n l a j ç ^ v oi.t. éte exigible
'
si le sieurGastillon avortjxg ç comme
c e r t i f i e u r de e a u r i ^ S i S i ^
^
1-1”11 J u u
de^
ni vis-^vîs~~de ses rnrHffeiteiirs , et dans ce ca s ^ o n
J ^ S - ^ k i r e q'ïïK le rértîfiSteur ayant payé doit avoir
la caution ~quTit a cerliliée; mais dans l’esUfd e ïësTdeux conditions d’exigibilité de la dette et de payefrrn t à titre de certificateur de caution n’existant p o in t, le
p a v e m e n t fait le 3o frimaire de l’an 12 n’est plus qu’un paye
ment volontaire et libératit, lait par un codebiteui poui le
com pte du débiteur p rin cip al j q u i sc trouve lib é ré envers le
01 L a qualité de codébiteur rend illusoire la subrogationjmSl
^^Tfnj ’ p.ônsëStîFparragCfërTcreanôér^ elle n’empêche point
lTnovatîon, qui se trouve parfaite par rexti.ncti.Qn de la dette de
la art du débiteur, et parla substitution de nouveaux créanciers
¿a la place de l’ancien ,''envers lequel le principal débiteur se
trouve libéré. E lle est bien plus illusoire encore, lorsqu’on
*0
considère q u e c’est un associé qm a pa^é la d ç tte d e la société et
n„. |!n feit , nn; son inté rê t, c W l d i ^ o u r )omPde’la j^ g ^
i i r ô S S ^ r S t M a S r d é e par l'acte d'épraïnarah f i . h t une
d 5 5 !S d S 5 S 3 S 5 B ô n vient militer en faveur de la caution, et
néccsSUe la rigoureuse application du droit; c’est que la nova
tion opérée a préjudicié à cette caution. lin effet, infoimée de la
libération j et ne. voyant point exercer de poursuites aux épo
�(
27 .5
ques convenues, elle a dû penser que la novation e toit parfaite,
et l’avoit déchargée de son obligation : consequemment elle a du
cesser de veiller à la solvabilité du débiteur principal.
S- I V .
La loi du contrat, qu’ón rie peut violer impunément, loi ac
ceptée par toutes les parties le 18 prairial an 1 1 , commandoit, à
défaut de payement de la part de Blanchard , de frire des pour6uitcj» contre lui aux termes convenus *, et api es toutes pouisui
tes faites, dans ce cas seulement, l'obligation du sieui sso an
existait; l’exécution de la clause exprimée ouvroit seule un droi
contre, le sieur A ssollant, caution de Blanchard, dioit sans
quel il ne pouvoit y avoir d action.
^ ^
%A vo ir v iolé la loi du contrat. en n é g lk e a n tJ f e S C i y
une clause désignée de rigueur par ces mots, dans ce cas seu e
ment , clause inexécutable après les termes convenus, C est
avoir ouvert la fin de non-recevoir la plus forte contre toute ac
tion en recours contre lê sieur AssoIÎant.
^
Ce n’a point été sans dessein que la condition im p erative de
poursuites aux termes convenus contre Blanchard, a été inseree
dans l’acte dont est question , et que le droit résultant de l’obli
gation du sieur Assollant n’étoit réputé ouvert qu’après toutes
poursuites faites, et dans ce cas seulement.
lie sieur Assolant n’avoit pas voulu prendre sur lui les nsq s
qu’il pouvoit c o u r i r par la négligence du créancier ^j.1
-T**
mité son obligation à un temps déterminé, passé loque , e e c e‘vroit s’éteindre. Si le sieur BlanchaVcl etoit insolvable à 1 époque
désignée, le sieur Assollant devoit payer pour lu i. mais 1 c evoit
être prévenu de In so lvab ilité, elle devoit être actuelle et prou
vé^ aux termes convenus. L e silence des cieanciers a prouve
que le sieur Blanchard n’ét°it.pas insolvable alors.
S’il l’est devenu depuis, le toïl irréparable fait a la caution en
D 2
�( 28 )
violant la loi du contrat, justifie pleinement la fin de non-recevoir invoquée.
y
U n dernier moyen vient se rattacher h tous ceux indiqués ;
il se tire de la preuve que Blaueliard s’esUikéiXJSa onPeUenieHt,
r,
cc c.ui r ésl,lte d’une foule de circonstances qui formeroient
au moins des présomptions de la nature de celles que la loi abandonni aux lumières et à la prudence du magistrat. Cespresomp,;ons peuvent guider sa décision lorsqir elles sont ainSl que
dans le cas particulier, graves , précises et concordantes.
Elles résultent,
.
i° D e la qualité_des£arties adverses, qui, étant de sggiétc
ur l’exploitation du cylindre , ont nécessairement appliqué
S premiers produits à. l’ext^çtion d e là dettecontractée pour
en acquérir la propriété et en user en société.
E lles résu lten t,
la
° D u p e i n e n t anticipé , fait par C astillo n , qin dém ontre
fî-inre au’il avoit dans son associe? et la certitude q u il
—---------
"t d’être rcniBoursé.
^ F U e s naissent du silence du sieur_Albert dans la contestation,
uoi ue subrogé aux droits du sieur Dufour sur le cylindre,
p a r l ’acte du 3 o frim aire.
'
L a transaction du i 3 brumaire an i 3 , entre D u fo u r, Cas-
V
*
et Blanchard, offre encore une présomption plus forte de
vi ° - t-on Dans cette transaction TP ufour reconnoit, avec Cas™ 1 iifi B la n cïïS rrësT lib ér^ n vers, lui. Blanchard paroît
e! transige 7
“
i r
intentée à sa r e q u ê te comme à celle de son associé, contre D u fou r, en
exécution
de l’acte de pianîa a n n .
C ’est à une époque bien postérieure aux termes de paye
ment convenus, et à la date de l’acte de frimaire an i ï , que
Blanchard transige eu commun avec Castillon, sur 1action en
�(
29
)
garantie de la bonté du cylindre, que l’acte de l’an 11 ouvroit
contre Dufour ; et si ces circonstances n’établissoient pas une
libération nécessaire, d’où pouvoit seule résulter un droit ex^clusii pour Blancliard et Castillon de sacrifier comme d’améliorer
la chose, de quel œil la justice verroit-elle un accord fait au pré
judice de la caution , à laquelle on ne peut contester le droit
d’être subrogé en toutes les actions ouverte^ au débiteur princi
pal, pour contester le payement de la dette envers le créancier?
Cet acte ouvriroit encore une fin de non-recevoir contre l’ac
tion du sieur Castillon, s’il n’établissoit pas implicitement l’ex
tinction de la dette de Blanchard envers Dufour.
4°- L ’exploit abandonné du n germinal an i 3 , fait évidem
ment de concert entre Castillon et Blanchard, sous le nom de
Dufour^ qui l’a désavoué en démontrant l’artifice des adversaires
du sieur Assollant, prouve que la demande intentée contre lui
n ’est qu’une ruse employée pour le forcer à payer une dette
acquittée.
'5°. L ’acte du 12 germinal an t 3 , souscrit par D ufour, établit
encore la libération de Blanchard, puisque dans cet acte le seul
créancier envers lequel Assollant s’est obligé, sous des condi
tions exprim ées, déclare q u il n'a aucune réclamation à élever.
6°. E nfin, la lettre dn 17 frimaire , écrite par le sieur Castillon
au sieur Assollant, établit que la fabrique d’indiennerie, montée
avec le cylindre, est exploitée en commun; qu’elle est en plein
rapport; et au milieu des réclamations exercées par Castillon, on
devine aisément, par les conseils qu’il adresse à la caution, et les
espérances qu’il lui donne d’être remboursée sur le revenu de la
fabrique, qu’il n’a rien à prétendre, et qu’il cherche forcer le
sieur Assollant à faire une mise de fonds pour son beau-frère,
dans la société : but vers lequel tendoit l’acte du 3o frimaire
an 11 , et qu’on aura vainement tenté d’atteindre par la demande
du sieur Castillon , que le sieur A lbert eût dû form er, s’il n’eût
�I 3° )
pus été payé par la société de commerce, dont l’existence est in
contestable.
La libération de Blanchard se présume par tous ces faits-, et si
la justice en doutoit encore, elle voudioit jeter un regard, et sur
l’acte de société (i) que devroit produire Castillon, et sur les
registres qui doivent contenir l’emploi du produit du cylindre
et la mise de fonds de chacun des sociétaires : il est certain que
la preuve de la libération s’y trouveroit matériellement établie.
En dernière analyse, et à cote de tous les moy ens qui sont indi
qués en faveur du sieur Assollant, viendra se placer encore la con
sidération pluspuissante peut-être, que le sieur Castillon nepourroit s’imputer qu’à lui-même d’avoir mal choisi son associé, et
d’avoir imprudemment paye pour lui une dette noh-e^igible.
O n n’oubliera point en effet que. si le sieur Castillon devoit
payer la dette de Blanchard, que le sieur Assollant avoit cau
tionné vis-à-vis du sieur Dufour, c’étoitalorsque ce dernier n’auroit point été payé, ni de Blanchard, ni du sieur Assolla»!;, aux
termes convenus, après toutes poursuites faites, et dans ce cas
seulement ; mais que cette faculté étant personnelle à 'Dufour,
<ille n’a ouvert aucun droit à Castillon, puisque les conditions
sous lesquelles il devoit s’ouvrir n’ont pas reçu leur accomplis
sement, par la seule volonté de Castillon, qui ne peut se venger
que sur le cylindre.
O n verra que Castillon avoit un^ interet à se conduire ainsi
qu’il l’a fait : c’étoit celui de jouir de la remise de douze pour
cent, et que c’est ce qui l’a porté à suivre la foi de Blanchard,
et à acquitter sa dette , devenue depuis la dette de la société.
On sentira qu’il n’a pas dû poursuivre son associé aux termes
convenus, puisque ces poursuites auroient tourné contre la
société, et que révénement d’une déconfiture, si elle est réelle,
ne peut faire revivre en sa faveur un droit qu’il a laissé pres( i ) O u devra le provoquer form ellem ent par exceptions.
�C 5i )
crire, faute de remplir les conditiéils sôu3 lesquelles il pouvoit'
seul exister.
On sera convaincu qu’il à pü âe faire rembourser, aiix termes
convenus, par son associé , puisqu’il n’a point exercé de pour
suites contré lui. On pensera que, si depuis Blanchard est devenu
insolvable, le tort que Castillon peut en éprouver, n’est dû
qu’à son im prudence, et que l’imprudence comme la cupidité
peuvent jamais servir de titres contre un tiers de borinë foi.
L e sieur Assollant a rendu un service d’ami ; il n’a dû se croire
obligé que jusqu’aux termes des payémens indiqués'. Dans le
silence des parties intéressées1qui s’étoierit soumises à1 lui justi
fier l’insolvabilité du débiteur à cette1époque, il a dû croire
Blanchard libéré totalement , et il n’a pas dû s’inquiéter de sa
position ultérieure.
Il
a dû bien moins encore se persuader qu’un codébiteur,
q u i avoit acq u itté vo lo ntairem en t u n e dette non-exigible, vicn-'
droit s’adresser après longues années à un; homme qui n e lû t
jamais obligé envers lui-, e tq iii, on le rép ète,(air c’est le mot
le plus important de la défense du sieur Assollant], ne dêvoTt"
payer qu’après des poursuites à termes f ix e s , qui n ont point
été effectuées, qui ne peuvent plus Vêtre, et qui seulesouvroient
une action contre la cdïïtion quon pôufsüit.
L e droit et l’équité se réunissent donc en faveur du sieur
Assollant pour proscrire l’action que le sieur Castillon a formée
contre lui.
Et en résumant toute la discussion ci-dessus ;
Considérant sür la prem ière question,
1 • Qùo l’acte du 18 prairial an 1 1 , a été fait et signé a P aris}
Que le sieur Assollant réputé débiteur à défaut de payement
pai Blanchard qu’il a cautionné, a indiqué dans l’acte son domi
cile a Paris\ et encore, que le payement devoit être fait à Paris \
2 • Que l’obligation contractée par Assollant, l’a été en sa
�qualité de citoyen non-commerçant, et qu’il n’a point renoncé
à sa juridiction ;
3°. Que le cautionnement du sieur Assollant constitue une
obligation distincte et divisible de celle de Blanchard, en ce que,
i°. Elle n’est point solidaire avec celle du débiteur principal;
2°. En ce qu’elle ne pouvoit exister qu’après une discussion
préalable ;
3°. Q u’il ne s’agissoit point de procéder sur une assignation
en garantie formelle ou simple en la juridiction commerciale
de R iom , où la demande originaire auroit été pendante, puis
q u e d’abord la
demande originaire formée contre Blanchard ,
devoit être jugée, aux termes de l’acte de prairial an i x, lorsque
le sieur Assollant devoit être assigné ;
Q u’il étoit question, au contraire, de juger une demande dis
tincte et formée séparément contre le sieur Assollant, à fin de
p ayem en t de la somme dont Blanchard étoit réputé débiteur
pa’rjùgem ent, demande formée contre le sieur Assollant, comme
s’étant obligé à payer pour B lanch ard , sous des conditions eX-‘
' pTiméés en ;l’acte.
*' Par ces motifs, le conseil estime qu’il y a lieu de réformer
la décision des juges du tribunal de commerce de R iom , comme
ayant violé les règles de compétence, ratione lo c i, personœ et
materiœ.
Sur la seconde question,
Attendu qu’il est établi en fait, et prouvé par pièces ,
i°. Que les sieurs Blanchard et Caslillon se sont associés pour
élever et exploiter en commun une manufacture d’indiennes ;
Qu’ils ont acheté pour l’exercice de leur profession, un cylin
dre muni de tous scs agrès , au sieur D u fo u i, serrurier-machi
niste ;
Q u’ils sont convenus d’en payer le prix à des époques déter
minées , chacun par moitié ;
�(•33 )
Que le sieur Assollant, en cautionnant le sieur Blanchard ,
s est obligé envers le sieur D ufour, seulement, alors que le dé
biteur principal ne pourroit pas payer la totalité ou partie de sa
dette, de l’acquitter, après toutes poursuites faites aux termes
convenus, ei dans ce cas seulement ;
Que le vendeur a exigé, pour sa sûreté personnelle, que le
sieur Castillon certifiât la caution de son associé, et se soumît à
Payer, dans le cas où elle ne seroit point acquittée aux termes
fixés , après toutes poursuites faites , et dans ce cas seulement ;
Q ue dans cette hypothèse , le sieur Castillon s’est réservé la
propriété exclusive du cylindre, comme le droit de déduire, sur
les sommes payées par Blanchard, les dommages-intérêts qu’il
auroit droit de prétendre ; mais qu’il ne s’est réservé aucun droit
de réclamation contre le sieur Assollant*,
Que le 3 o ventôse an 12 , Castillon a payé volontairement la
dette de Blanchard, qui n’étoit point exigible, et qu’il s’est fait
substituer avec un sieur A lbert, comme nouveaux créanciers, au
sieur D u fo u r, ancien créancier, envers lequel Blanchard, débi
teur principal, s’est trouvé libéré;
Q ue le 18 prairial an 12, terme du premier payement indi
q u é, s’est écoulé sans réclamations judiciaires contre Blanchard
ni sa caution, soit de la part de D ufour, soit de celle de Castillon,
soit enfin de celle d’Albert ;
Que le 7 vendémiaire an i 3 , Castillon et Blanchard ont tra
duit le sieur Dufour devant le tribunal de commerce de Riom ,
pour obtenir contre lui des dommages-intérêts, à raison de la
mauvaise qualité du cylindre qu’il avoit garanti pendant un an;
Que le i 3 brumaire an i3 , ils ont transigé sur cette réclama
tion, et se sont reconnus respectivement quittes et libérés, au
moyen de la livraison d’un rouleau que Dufour s’oblitreoit d’ef
fectuer;
Qu il est prouve, par un acte du douze germinal an i 3 , passé
E
�.( 34 5
devant Tardif et son confrère, notaires à Paris, que le sieur Dufour n’avoit à cette époque aucune réclamation à former contre
Blanchard et sa caution ; et qu’une assignation, donnée le onze
germinal an i 3 au sieur Assolant, avoit été mal à propos signi
fiée à la requête du sieur D u fou r, qui l’a désavouée ;
Que cette assignation, évidemment nulle, et d’ailleurs tardi
vem ent donnée, n’a point été renouvelee le dix-huit prairial an
treize, à la seconde époque fixée pour la libération de Blanchard,
qui s’est écoulée comme la première, sans aucune réclamation
de qui que ce fût;
Que les poursuites de Castillon contre Blanchard n’ont eu lieu
qu’en vendémiaire an quatorze, c’est-à-dire, deux ans après le
premier tci'me fixé pour toutes poursuites a défaut de payement,
contre les débiteurs de D ufour;
Que c’est en cet état de choses que le sieur Assollant a été cité
devant les juges du commerce à Riom , à la requête de Castillon,
en sa qualité de nouveau créan cier de B lan ch ard , comme étant
aux droits du sieur D ufour, ancien créancier.
Attendu qu’il résulte de tous ces faits ,
i°. Que Castillon, associé de Blanchard, n’a point acquitté la
dette de Blanchard et d’Assollant envers Dufour, après des pour
suites judiciaires contre ces derniers , faites eu sa qualité de certificateur de caution, mais qu’il a acquitté volontairement une
dette de la société , non encore exigible, et dont en sa qualité
d’associé il pouvoit être tenu ;
2°. Que l’acte du trente frimaire an douze a opéré une nova
tion , puisqu’un nouveau créancier a été substitué à l’ancien, en»
vers’lequel le débiteur principal s’est trouvé libéré ;
3 °. Que par l’effet de l’acte susdaté de frimaire an treize, A s
solant, caution envers D ufour, n’a pu être subrogé par ce dernier
en des droits et privilèges contre Blanchard, qu’il a reconnu ne
plus avoir, dans les actes des i 3 brumaire et 12 germinal aa 13 j
�Ç 35 )
Qu’il ne pourrait point l’être également par Castillon d’une
manière utile, puisque l’action qui en résulterait contre Blan
chard pourroit refluer contre lu i, à x-aison de la société de com
merce qui a subsisté et paraît subsister encore entr’eux;
Que dans son intérêt personnel Castillon n’a pas voulu pour
suivre son associé aux époques fixées par l’acte de prairial an
onze, et que l’acte n’ouvroit une action à D ufbur, ou ses ayanscause, contre les co-obligés, qu’après toutes poursuites faites, aux
termes convenus, contre le principal débiteur *,
4 °. Que le sieur Assollant n’a souscrit aucun engagement en
vers Castillon, qui a prévu le cas où Blanchard et sa caution ne
payeraient pas le sieur D ufour, en se réservant la propriété du
cylindre et un droit de recours en dommages et intérêts contre
son associé, sans en retenir aucun contre sa caution.
Considérant que toutes ces conséquences forcées des faits éta
blissent autant cle fins de non-recevoir contre la demande de
Castillon, en ce que,
i°. Tout associé étant indéfiniment tenu des dettes de la so
ciété, est non-recevable à répéter, contre la caution de son asso
cié, le payement volontaire d’une dette de la société, et qu’un
certificateur de caution n’a de droit contre la caution que lorsqu il a payé pour elle une dette exigible, et après toutes pour
suites faites ;
2°. E n ce que le cautionnement finissant par la n ovation ,
Castillon n’a point d’action contre Assollant •,
>
3 . En ce que l’obligation s’éteignant lorsque le créancier s est
mis hors d’état de faire à la caution une cession ou une subroga
tion utile de ses droits, et le cautionnement cessant avec l’obli
gation, Dufour et Castillon n’ont plus aucun droit contre Asso
lant, caution de Blanchard envers Dufour qui est payé ;
4 • En ce que la loi du contrat a établi., dans l’espèce, une fin
de non-recevoir expresse contre l’action exercée maintenant
«
E 2
�( 36 )
contre la caution, en prescrivant au créancier Dufour de discuter
le débiteur principal aux ternies convenus, et d’épuiser dès-lors
les poursuites, pour pouvoir s’adresser, dans ce cas seulement, à
la caution ;
Q u’à défaut de poursuites aux termes convenus, le sieur
Assollant a pu se croire déchargé des causes de son caution
nement, et ne plus veiller à la solvabilité du débiteur principal;
et conséquemment que Castillon est lui-même non-recevable
dans son action, personne ne pouvant avoir plus de droits que
Dufour , qui devroit lui-même être déclaré non-recevable , s’il
s’adressoit à la caution, sans avoir fait toutes poursuites aux ter
mes convenus *,
5 °. Enfin , en ce que toute action doit dériver d’un droit et
que Castillon n’a plus de droit contre Assollant,
P u isqu e d’abord il ne peut user de celui qui est ouvert à tout
ccitificateu i de caution, n ayant pas p aye Dufour en cette qua
lité, et après des poursuites ju d ic ia ire s;
Puisqu’il a acquitté volontairement une dette de la société et
qu’il a ainsi libéré Blanchard envers le sieur D u fo u r, et opéré
une novation, dont l’effet a été de décharger sa caution de toute
garantie 5
Q u’il ne tient aucun droit de la subrogation consentie en l’acle
de frimaire an 12 , parce que ces dispositions, qui sont à l’égard
du sieur A ssollant, res inter alios a cta , ne peuvent lui être
opposées en ce qu’elles ont de dérogatoire à l’acte de prairial an
11 , et que cette subrogation ouvrant à Castillon le droit de
Dufour contre Blanchard, lui a oie en meme temps celui qui
pouvoit s’ouvrir un jour en sa faveur contre Assollant, s’il étoit
contraint d’acquitter sa dette ;
Qu’il suit donc de là, que Castillon a eu un droit hypothéti
que contre Assollant, mais que l’événement possible n’est point
arrivé par son fait ; que le droit qui en dérivoit s’est anéanti, et
�( 37-5
se trouve remplacé par celui de propriété du cylindre et de
poursuite contre Blanchard, que Castillon s’est réservé en tout
événement dans l’acte de prairial an 11 , droit qu’il peut puiser
encore dans l’acte de frimaire an 1 2, s’il est vrai qu’il n’ait point
été remboursé par son associé, et qu’il ait bénévolement payé
d’abord le sieur Dufour et ensuite le sieur Albert.
E t en tous cas et en un m ot, sans droit contre Assollant, Cas
tillon n’est pas recevable dans son action.
Sur la troisième question ,
Attendu que les faits, moyens et considérations exposés cidessus, et notamment dans le § 5 , attestent la libération de Blan
chard, envers D ufour, et que la caution se trouve ainsi déchargée
de l’engagement qu’elle avoit contracté envers lu i, le 18 prairial
an 11 ;
L e conseil, en persistant dans ses précédentes résolutions,
estime quele sieur Assollant est déchargé de son cautionnement,
et qu’à cet égard on n’a aucun recours à exercer contre lui.
Délibéré à Paris, le 14 août 1806, par les jurisconsultes
soussignés.
PETIT-D AU TERIVE, G A IR A T , JULLIENNE,
PRIE U R (de la Marne).
�'( 38 J
L ’A N C I E N A V O C A T S O U S S IG N É , qui a pris lecture du
mémoire et de la consultation à la suite,
et par les mêmes motifs, sur tous les points.
Il observe que le sieur Assollant doit insister sur un moyen de
nullité qui paroît décisif. L ’exploit introductif de l’instance est
donné à une femme qui n'a voulu dire son nom. L ’huissier n’a
pas rempli le vœu de l’ordonnance de 1667, article 3 du titre 2,
qui veut, à peine de nullité, qu’il soit fait mention, en l’original
et en la copie, des personnes auxquelles les exploits ont été
laissés. L e sieur Assollant peut invoquer avec succès la jurispru
dence constante de la Cour d’appel et de la Cour de cassation.
X/irrégularité de cet exploit est évidente -, et ce moyen n’a pas
été couvert par les défenses au fond j il a été opposé in limine
E
st d u m ê m e a v i s ,
litis.
Sur l’incompétence des juges de commerce, le soussigné re
m arque, d’après Jousse, sur l’art. 4 du titre 12 de l’ordonnance
de 1673, que la vente d’un cylindre ne peut être de la compé
tence des tribunaux de commerce. Il faut bien distinguer les
ventes faites par des marchands et artisans des choses qui doivent
être converties en ouvrages de la profession de l’acheteur, d’avec
celles qui ne doivent point être employées ou converties en
ouvrages de la profession. Ces dernières ne sont point de la
compétence des tribunaux de commerce. Jousse prend pour
exemple la vente d’un métier à bas faite à un bonnetier. Il décide
que la vente de ce métier est une vente ordinaire, faite pour
l’usage de l’ouvrier seulement, et non afin de revendre ; et dèslors, d it-illes juges de commerce ne peuvent en connoître.
Cette doctrine s’applique parfaitement à l’espèce particulière ;
la vente d’un cylindre pour calandrer est ¿\ plus forte raison une
vente ordinaire, laite pour l’usage de l’artisan seulement, et non
pour être revendu.
�( 39 )
Relativement aux moyens du fond, le soussigné n’a rien à
ajouter les moyens sont développés avec autant de force que de
clarté, et la libération du sieur Assollant est évidente.
Délibéré à R io m , le 22 août 1806.
P A G E S ( de Riom ).
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A RIO M , de l’imprimerie do
Landriot, seul
imprimeur de la Cour d'appel
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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[Factum. Dufour, Michel. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Petit-Dauterive
Gairat
Julienne
Prieur
Pagès
Subject
The topic of the resource
créances
cylindre à indiennes
textile
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
An 11-1806
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0502
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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Relation
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BCU_Factums_M0310
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cylindre à indiennes
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CONSULTATION
Pour
l e
sie u r
PINTHON.
L ES A V O C A T S SO U SSIG N ÉS,• qui ont lu , 1 °. les
titres et pièces d’un procès entre les sieurs Cibot et Pin-"
thon ; 2°. une consultation donnée par l’un d’eux au
sieur Pinthon, en 1 8 1 1 ; 30. le jugement rendu au tri
bunal civil d’Aubusson, le 20 novembre 1 8 1 1 , en faveur
du sieur Pinthon; 40. un imprimé publié par le sieur
Cibot, contenant ses griefs d’appel contre ledit jugementsuivi de trois consultations délibérées à Riom , à Clermont
et à Limoges, par M es. Yissac Bergier et Dumas
que la redevance de deux setiers de grains,
due à M. le duc d’Orléans, et non au sieur Cibot, a
été abolie, comme féodale, au profit du sieur Pinthon;
que le tribunal d’Aubusson s’est parfaitement conformé
aux principes en le jugeant ainsi ; et que tout ce qui
a été écrit en faveur du sieur Cibot se réduit à des
maximes inapplicables, qui ne peuvent pas empêcher la
confirmation de ce jugement.
On a comparé une charge foncière, assise sur un im
meuble vendu, à une simple créance que le vendeur
pouvoit Réclamer après l’avoir déléguée. Et c’est ainsi
qu’après avoir dénaturé la question, on a appelé au
secours du sieur Cibot tous les lieux communs du droit ?
A
E stim en t
�( 3 )
en matière de délégation, pour en conclure que cette
charge foncière, féodale d’après lui-même, étoit rentrée
dans ses mains, comme roturière, après la suppression
de la féodalité. On a prétendu qu’il pouvoit la récla
mer à son profit, comme n’étant éteinte qu’au préju
dice de M. le duc d’Orléans.
Ce système est si faux, si contraire aux lois, que le
premier mouvement est de s’étonner que de simples so
phismes, sans application et sans liaisons, aient pu séduire
trois jurisconsultes. Mais il paroît que le sieur Gibot s’est
’attaché principalement à leur persuader qu’il avoit fait
de grandes réparations dans ce qu’il a cédé au sieur
Pinthon, et qu’il seroit injuste de faire gagner au sieur
Pinthon une redevance supprimée, plutôt qu’à lui. On
remarque, en effet, que les opinions de ses conseils
paroissent plutôt lui être favorables par équité que par
principes; mais il ne sera pas difficile de prouver que,
ni l’équité, ni les principes, ne sont en faveur du sieur
Cibot.
f a it s
.
En 1784, les agéns de M. le duc d’Orléans concédè
rent au sieur Cibot , à titre d’emphytéose perpétuelle, deux
étangs, l’un appelé du Périchon, et l’autre de la Rivière,
dépendans de sa seigneurie d’Evaux, moyennant neuf
setiers de grains, de cens'annuels et "perpétuels, por
tant droit de directe seigneurie, lods et vente, à raison
du tiers denier, payable et portable chacun an par ledit
Gibot au fermier de son altesse, à chaque fête de SaintJulien. Il est dit que le preneur jouira desdits étangs,
conformément au titre do propriété de M. le duc, et
�(3 )
qu’il lui sera libre de les convertir en telle nature de
production que bon lui semblera, en les améliorant,
et entretenant les chaussées. Il est ajouté que le preneur
oblige spécialement par privilège lesdits étangs, dans
quelque état de produit qu’ils puissent ôtreMnis, ainsi
que le revenu d’iceux.
\
•
A l’époque de cette concession, Arnaud-Pintlion étoit
fermier de la terre d’Evaux, par bail du 9 mars 17 8 1,
qui s’est prolongé jusqu’après 1792 •, et cette observation
n’est pas sans utilité.
•
.
} ;* . >*
Par acte du 20 mars 1786*, le sieur Cibot délaissa âudifc
Arnaud-Pinthon, au même titre,d’êmphytéose perpé
tuelle, avec garantie, la queue de l’étang Périclion ( que
l’on dit équivaloir à un huitième de l’étang ), avec condi
tion ( comme dans l’acte de 1784) que le sieur Pintlïon
pourroit convertir ladite queue d’étang en telle nature de
production que bon lui sembleroit; et après avoir réglé
le mode des jouissances respectives, il fut ajouté que le
sieur Pinthon se conformeroit au surplus, pour ladite
jouissance, aux clauses insérées en Vacte d'emphytéose
consenti par le duc d’ Orléans au sieur, Cibot, le 24
juillet 1784*
Voici maintenant la clause que s’approprie le sieur
Cibot pour réclamer une redevance non féodale, comme
constituée uniquement à son profit. « Le présent délais« sement ainsi fait entre les parties, moyennant la rente
« annuelle, perpétuelle et non rachetable, de deux
« setiers blé-seigle, mesure d’E v a u x , que ledit sieur
« Pitithon sera tenu de payer à son altesse, ses rece« vèurs ou ferm iers? en décharge dudit Cibot, en cette
A z
�(
4
)
« ville d’Evaux, et à chaque fête de Saint-Julien, et de
« laquelle redevance il remettra la quittance qu’il en
« retirera audit M. Gibot.
« Reconnoît ledit sieur Cibot avoir reçu avant ces pré« sentes, dudit sieur Pinthon, la somme de 60 francs,
« pour épingles, dont quittance. »
Toutes les conditions de cet acte se sont accomplies.
L e sieur Armand - Pinthon s’est payé par ses mains,
comme fermier d’E v a u x , des deux setiers de ble dont
il étoit chargé; et cela a eu lieu ainsi jusqu’à la fin de
son bail, résilié de droit, comme tous les baux de cette
nature, par les lois féodales.
C’est en cet état, et après cette exécution constante
de l’emphytéose de 178 6, que la redevance de neuf
setiers de grains, due à M. le duc d’Orléans, a été sup
primée par ces mêmes lois. Le résultat de cette suppres
sion a été que le sieur Gibot a été affranchi d’une re
devance de sept setiers, et le sieur Pinthon a été af~
franchi d’une redevance de deux setiers.
C ’est ainsi que toutes les parties l’ont entend« ; et le
sieur Cibot ne peut pas s’en défendre, puisque, depuis
1792 jusqu’en 18 10 , il ne lui est pas même venu à la
pensée de réclamer pou? le payement de cette redevance
éteinte.
- Mais en 18 10 , il s’est ravisé, et ses conseils ont cru
apercevoir quelque différence entre la redevance de 1784,
parce qu’elle étoit appelée cen.9 , et la redevance de 1786,
parce qu’elle étoit appelée rente , quoiqu’elles fussent
toutes deux payables ou duc d’Orléans.
E a conséquence, le sieur Cibot a notifié au sieur
�-
.
( 5 )
Pintlion qu’il révoquoit l’indication de payement par
lui faite en 1786, et il lui a fait sommation de payer les
arrérages de la redevance de deux setiers, échus depuis
la suppression, de même que de continuer à l’avenir
le service de ladite redevance à son profit.
Le sieur Pinthon a répondu qu’il avoit été débiteur
du duc d’Orléans, et qu’il avoit servi la redevance jus
qu’en 1792; qu’ensuite les lois ayant aboli la féodalité,
son héritage avoit été affranchi de la redevance de deux
setiers, comme les héritages du sieur Cibot l’avoient
été pour le surplus de la redevance demeurée à sa
charge.
Cette défense du sieur Pinthon a été adoptée par le
tribunal d’Aubusson.
Il a donné pour motifs à sa décision, i° . que l’objet
emphytéosé par Cibot à Pinthon étoit une portion de
ce que Cibot avoit acquis lui-m êm e du duc d’Orléans,
moyennant une redevance féodale; 20. que le sieur Cibot
exigea du sieur Pinthon l’obligation de payer sa rente
de deux setiers au même terme, au même lieu, à la
même mesure, et au même ^seigneur, à la décharge de
lui Cibot, et en diminution des neuf setiers compris
dans le premier bail ; 30. que cette redevance de deux
setiers n’est qu’une fraction de la rente féodale de neuf
setiers; ce qui s’indmt de l’obligation ci-dessus, et delà
charge imposée à Pinthon de jouir conformément au
premier bail; 40, que Cibot n’auroit pas pu exiger ponc
lui le payement de la redevance, sans contrevenir à la
convention de la payer au seigneur, et parce que ce
seigneur aurait, pu l’exiger solidairement de Pinthon
�( 6 )
lui-même, comme détenteur d’une portion de son eraphytéose ; 5°. que les redevances abolies l’ont été au
profit du détenteur du fonds qui en étoit grevé, et non
au profit de Cibot.
Ces motifs sont d’une grande solidité; et lorsqu’après
s’en être pénétré on cherche à approfondir les raisonnemens du sieur Cibot pour les bien entendre, on les
trouve d’une foiblesse telle, qu’ils ne peuvent soutenir
aucune comparaison*
Moyens du
sieur Cibot»
Le système du sieur Cibot se réduit à deux propo
sitions principales. La première consiste à dire qu’il n’a
stipulé une rente de deux setiers que pour lui, et non
pour le duc d’Orléans ; que si à la vérité il a indiqué
le duc d’Orléans pour recevoir, ce n’est point une dé
légation parfaite, mais une simple indication de paye
ment, qui n’opère pas novation, suivant l’article 1277
du Code civil. Il en conclut que lui seul étoit resté dé
biteur du duc d’Orléans, et que Pinthon n’auroit pas
pu rembourser la rente au duc d’ Orléans, môme avec
son acceptation, sans la participation de lui Cibot ; il en
conclut encore qu’il a pu révoquer son indication de
payement, et redemander pour lui une rente dont la
délégation n’avoit pas été consommée»
La deuxième proposition du sieur Cibot est puisée dans
quelques arrêts sur les arroturemens de rentes féodales,
parce qu’ il est de principe que les redevances détachées
du fief avant la suppression ne sont plus féodales; et le
sieur Cibot en conclut que la redevance créée par lui
n’étoit plus seigneuriale, étant stipulée payable à lui, et
nou en faveur du iief.
�- ( 7 )
- Voilà le résumé des moyens qu’il s’agit de discuter,
pour justifier l’opinion déjà émise en faveur du juge
ment d’Aubusson.
- Avant de s’occuper du fond de cette affaire, le sîeur
Pinthon pourra proposer la fin de non-recevoir de l’ap
pel , parce que l’objet de la demande sur laquelle le
tribunal d’Aubusson a statué, n’excédoit pas 1,000 fr.
Cette fin de non-recevoir peut être proposée d’après
l’article 453 du Gode de procédure , quoique le juge
ment ne soit pas qualifié en dernier ressort.
Par sa sommation d u ji4 août Ï8 10 , le sieur Cibot
avoit demandé tous les arrérages de la redevance de deux
setiers, échus depuis 178 6 , outre le service à venir de
ladite rente ; mais lors du jugement dont est appel, il
avoit restreint ses conclusions aux arrérages échus de
1786 à 1792 , et aux arrérages de cinq ans antérieurs au
commandement; ce qui fait dix ans d’arrérages. O r, sui
vant la jurisprudence, la compétence se règle par les
dernières conclusions prises au procès, surtout lors
qu’elles réduisent les prétentions du demandeur. ( Voir
Sirey , suppl. de l’an 1 2 , page 1 9 1 ; Denevers, 1 8 11 ,
page 465, et 18 12 , page 475. )
Suivant la loi du 18 décembre 1790 , qui permettoit
le rachat des rentes, il étoit dit que lorsqu’elles auroient
été créées sans évaluation de capital, ce capital seroit
fixé , savoir, au denier vingt à l’égard des rentes créées
en argent, et au denier vingt-cinq du produit annuel à
l’égard des rentes payables en grains, récoltes, sçrvice
d’homme, etc., en ajoutant un dixième auxdits capitaux,
Fin de nonrecevoir de
l’appel.
�( 6 )
si les rentes avoient été créées sous la condition de non re
tenue des impositions ( titre 3 , article 4 ) ; et pour avoir
une règle générale de fixation, quant aux redevances en
grains, il doit être fait sur la pancarte du marché le plus
prochain, une année commune des quatorze années an
térieures en retranchant les deux plus foibles, et prenant
le dixième du surplus ( article 7 ).
D ’après ce procédé, le sieur Pinthon s’étant procuré
la pancarte du marché de la ville d’ E v a u x , il en résulte
que le terme moyen de chaque année se porte à 26 fr,
30 c., ce qui, au denier vingt-cinq, forme un capital de
657 fr. 5o c ., à quoi il faut ajouter 216 fr. 80 c ., pour
les années d’arrérages , déduction faite du cinquième ;
ce qui fait un total de 874 fr. 30 centimes. Il est donc
prouvé que le montant total de la demande, y compris
les arrérages échus, qui doivent être portés en compte,
suivant la jurisprudence, ne s’élèvent pas à la somme
de 1,000 francs.
La loi du 24 août 1790, qui détermine le taux de
la compétence judiciaire, dit au titre 4 , article 5 : « Les
« juges de district connoîtront en premier et dernier res« sort de toutes affaires personnelles et mobilières, jus« qu’à la valeur de 1,000 fr. de principal, et des affaires
« réelles dont l’objet principal sera de 5o fr. de revenu
« déterminé, soit en rentes, soit par prix de bail. »
On pourra objecter que la redevance de deux setiers
de grains dont il s’agit, n’est pas expressément déter
minée à 5o francs de revenu. A cela il sufliroit peut-,
être de répondre que la loi postérieure, du 18 décembre
179 0 , est venue faire le complément de cet article, en
fixant
�(
9
)
fixant légalèment le capital des redevances qui jüsques
alors n’en avoit aucun, parce qu’elles.étoient créées irrachetables.
'
Mais il ne faut pas traiter aussi légèrement une ques
tion, qui n’étoitpas alors sans difficulté par d’autres motifs.
La loi du 18 décembre 1790 portoit que la faculté
de racheter les rentes ne changeoit rien à leur nature
immobilière, ni aux droits que les créanciers des bailleurs
pouvoient exercer sur lesdites rentes. D ’après cela on
pouvoit considérer une rente où redevance, comme
inhérente à l’immeuble, à tel point que les procès qui
pouvoient s’élever sur la propriété des rentes, fussent ré
putés avoir pour objet l’immeuble lui-même sur lequel
elle étoit assise.
Ceci néanmoins n’étoit pas sans réponse, puisque l’ar
ticle cité de la loi du 24 août 1790 comprenoit dans la
compétence de dernier ressort les affaires réelles qui
n’excédoient pas 5o francs de rente.
: Mais une observation plus satisfaisante, c’est que la
nature des redevances foncières est absolument changée
depuis le Code civil, : en 17 9 0 elles étoient immeuble,
et le Code civil les a classées parmi les choses mobi
lières (art. 529 et 630 ). Ce point de droit est aujourd’hui
reconnu comme une vérité incontestable.
Ce changement de législation répond à toutes les
difficultés qu’on auroit pu se faire sur la possibilité de
juger en dernier ressort la propriété d’une redevance dont
le capital, réglé parla loi elle-même et sans arbitraire , ne
s’élève pas à 1,000 francs. Dès qu’une semblable rente n’est
plus un immeuble, dès que le propriétaire n’a sur l’héritage
B
�C
)
asservi à la rente, qu’une simple créance privilégiée de
bailleur de fonds, il n’y a pas plus de raison de disputer
sur la compétence en pareil cas , qu’il n’y en auroit de
prétendre que le prix d’une vente, ou d’une ferme payable
en denrées au taux de la mercuriale, ne peut pas être jugé
en dernier ressort, même au-dessous de 1,000 francs (i).
Il ne faut pas s’appesantir davantage sur cette iin denon-recevoir, dont le sieur Pinthon n’a véritablement
pas besoin ; car les objections qu’on lui propose n’ont
rien de redoutable y ni même de spécieux..
Réponse
au premier
moyen du
sieur Cibot.
La première proposition du sieur Pinthon n’est fondée*
que sür une confusion de principes du droit.
Sans contredit il n’est douteux pour personne que la
simple indication de payement n’opère pas de novation,
et que souvent on peut la rétracter. Mais qu’est-ce que
tout cela siguifie à la cause actuelle ?
Le sieur Pinthon ne veut pas prétendre qu’il y ait
de novation dans son emphytéose de 1786, puisqu’il
soutient au contraire ne devoir qu’ une portion de la re^
devance établie en 1784, et puisqu’en effet il a été astreint,
en 1786 , à se conformer aux clauses de Pacte de 1784Le sieur Ci bot s’embarrasse donc lui - même dans ses
propres citations, puisque c’est le sieur Pinthon qui est
intéressé à ce qu’il n’y ait pas de novation.
L ’indication de payement peut être révoquée : cela
est vrai, mais non pas dans tous les-cas. Aussi la loi est
( 0 La Cour d’appel de Riom a prononcé une lin de non-recevoir d’appel,
s’ngissant d’une rente en blé, parce que, d’après Ja pancarte, le p r i n c i p a l et les
arrérages nc se portèrent pas ù 1,000 ir, ( Journal des audiences, n». 27. )
�( II )
muette à cet égard, pour ne pas établir mal à propos
une règle générale.
Dans une obligation mobilière, et même dans la vente
à prix fixe d’un immeuble qui n’est sujet à aucunes
charges foncières ou hypothécaires, il est sans difficulté
que le prêteur et le vendeur peuvent donner à ce prix
toutes les destinations qui sont à leur convenance; ils peu
vent charger leur débiteur de payer une portion de ce prix
à un créancier; et si ce créancier n’accepte point cette
indication de payement, il est sans difficulté encore que
le créancier est le maître de la révoquer : cela ne blesse
l’intérêt de personne, car il est indifférent au débiteur
de se libérer envers l’un ou l’autre , pourvu qu’on lui
donne une quittance solide.
Mais cette hypothèse n’a rien de commun à une charge
réelle et foncière assise sur l’héritage vendu ; elle en
est inséparable sans le concours de volonté des parties
intéressées ; elle suit l’immeuble en quelques mains qu’il
passe; et par conséquent le vendeur ne peut pas détruire
l’indication qu’il a faite, pour exiger qu’on paye à luimême cette charge foncière, s’il ne rapporte le coiisen*tement exprès du bailleur de fonds.
Avant la révolution, dans la plupart des mutations des
biens en roture, la première condition de la vente étoit
de payer au seigneur telle quotité de redevance à laquelle
l'héritage vendu étoit asservi; et il étoit peut-être sans
exemple que de semblables indications de payemens fus
sent acceptées par les seigneurs, au profit de qui elles
étoient laites. Croit-on cependant que le vendeur, dans
cette espèce, pût notifier à son acquéreur, comme le sieur
B 2
�( ra )
Cibot, qu’il révoquoit l’iadicatioii de payement' par lut
faite, et le sommer de payer la redevance à lui-même?
Un semblable système auroit eu des suites bien ex
traordinaires après la suppression de la féodalité. Chaque
vendeur auroit pu, avec cette formalité, tourner à son
profit la suppression des redevances, qui n’auroient fait
que changer de possesseur. Heureusement personne ne
s’est avisé de cette tournure, et les redevances féodales
sont restées abolies au profit des derniers propriétaires.
Le sieur Cibot n’auroit pas même pu révoquer son
indication de payement, s’il se fût agi d’une créance sim
plement hypothécaire^
Car alors l’acquéreur n’étoit plus sans intérêt à voir
détruire sa convention, et le vendeur n’étoit plus au
torisé à dire qu’elle étoit stipulée pour lui seul. En effet,
celui qui en achetant convient de payer à un créancier
hypothécaire, a fait cette convention pour sa propre
sûreté, et pour ne pas demeurer exposé à des poursuites.
Il n’est donc pas au pouvoir du vendeur de détruire
cette convention , quoiqu’elle ne soit pas acceptée par
le créancier; car elle fait partie intégrante de Pacte; et
suivant l’article 113 4 du Code civil, les conventions
tiennent lieu de lois à ceux qui les ont faites.
Il n’y auroit qu’un moyen pour le vendeur de révo
quer son indication de payement malgré l'acquéreur, ce
seroit de payer lui-même la créance déléguée. Mais alorsr
prcnons-y bien garde, cela ne lui donneroit pas le droit
d’agir en révoquant la stipulation; ce scrôit au contraire
l’avoir exécutée, car il agiroit comme subrogé au créan
cier, conformément ¿\ l’article 126 1 du Code civil-
�(
!3
)
- O r, si le sieur Gibot étoit allé rembourser la rede
vance du duc d’Orléans avant la suppression, il est évi
dent que son action se seroit éteinte comme celle du duc
d’Orléans, dont il auroit pris la place par subrogation;
car subrogatum capit naturam subrogat?,
La rigueur des lois féodales est bien précise à cet
égard. On sait que tous les tenanciers d’une même reconnoissance étoient débiteurs solidaires envers le sei
gneur ; cependant s’ils avoient payé volontairement la
dette de leur codébiteur solidaire, ils n’avoient pas d’ac
tion en répétition contre lui après la suppression. La loi
du 9 brumaire an 2 ne donne cette action qu’à ceux qui
ont payé comme contraints , et par autorité de justice<
Mais il paroît que le système du sieur Cibot étoit
fondé sur une règle générale qui n’admet aucune excep
tion ; il a même poussé l’exagération jusqu’à mettre en
principe ( pages 9 et 10 ) que le sieur Pinthon n’auroit
pas pu'rembourser la rente au duc d’Orléans sans la
participation de lui Cibot, qui seul avoit capacité pour
faire ce remboursement.
Il est vraisemblable,que le sieur Gibot, en écrivant
une erreur de droit aussi intolérable, a oublié que dans
son emphytéose de 1786 il avoit chargé spécialement le
sieur Pintlion de payer au duc d'O rléans, et de lui
rapporter quittance. Il n’étoit pas question du rembour
sement du capital, parce que la redevance alors n’étoit
pas remboursable; mais lorsqu’elle l’est devenue, il est
évident que le sieur Pintlion pou voit libérer le sieur
Cibot et lui-m êm e, puisque c’éloit tout à la fois son
obligation et son intérêt personnel. ,L ’article 1236 du
Code dit qu’uue obligation peut être acquittée par toute
✓
�Ch )
personne intéressée, telle qu’un coobligé.’L ’article I 25r
ajoute que la subrogation a lieu de plein droit, i ° . au
profit de Yacquéreur d’un immeuble, qui emploie le
prix de son acquisition au payement des créanciers ayant
hypothèque sur Vhéritage ; 2°. au profit de celui qui,
étant tenu ayec d’autres ou pour d'autres au payement
de la dette, avoit intérêt de Tacquitter,
Ce n’étoit pas sans réflexion que le sieur Cibot écrivoit
un paradoxe aussi choquant, c’étoit pour en tirer une
conséquence en faveur de son système ; car immédiate
ment après ( pâge 10 ) il observe que le remboursement
s’est opéré par la suppression féodale, et que la créance
n'a pu s*éteindre qu'au profit de celui qui la déçoit ,*
d’où il conclut que le duc d’Orléans étant censé avoir
été remboursé par la suppression, l’indication de paye
ment s’est évanouie, et Cibot est redevenu créancier.
Cette conclusion n’étant que la suite d’un principe
faux, est par cela même nécessairement fausse. Mais ce
u’est pas tout; car il est facile de rétorquer contre le sieur
Cibot son propre raisonnement. En eiTet, si déjà il a
été prouvé, la loi h la main, que le sieur Pinthon étoit
débiteur du duc d’Orléans, et pouvoit le rembourser,
c’est lui qui dira maintenant, avec plus de raison : L a
créance n'a pu s'éteiiulre qiiau profit de celui qui la
devoit. O r, c’est moi Pinthon qui devois cette créance,
d’après mon titre; donc elle s’est éteinte à mon profit.
Rien n’est plus concluant et plus décisif’ que ce rai
sonnement puisé dans le propre écrit du sieur Cibot :
«joutons, pour abonder dans son sens, et ne pas même
lui laisser ln ressource de forcer l'application de ses prin
cipes en matière de délégation, qu’il y a eu, de la part
�c i5 y
du duc d’Orléans, acceptation de fait de la délégation
portée en l’acte de 1786.
En effet, il ne faut pas oublier qu’Arnaud-Pinthon
étoit fermier de la terre d’E v a u x , et même il est dé
nommé ainsi dans l’acte de 1786 : il avoit donc qualité
pour stipuler les intérêts du duc d’Orléans, dont il étoit
naturellement le negotiornm gestor, A in si, quand il a
stipulé l’obligation de payer au duc d’Orléans deux setiers de grains en décharge du sieuu Cibot, sa stipulation
a valu acceptation de la part du duc d’Orléans ; et cette
acceptation s’est réitérée à chaque payement qui a été fait
en décharge du sieur Cibot, c’est-à-d ire, pendant les
années 178 6 , 178 7, 178 8 , 1789, 1790, 17 9 1 et 1792.
Mais le duc d’Orléans n’avoit pas besoin de cette ac
ceptation de délégation par son fermier; car, i ° . suivant
Lathaumassière, en son Traité du franc-alleu, et Bacquet,
au Traité des francs-fiefs , la déclaration d’un vendeur,
que son héritage doit une redevance, fait titre au sei
gneur ; il est réputé l’avoir acceptée, quoiqu’il n’y ait
pas de sa part d’approbation formelle; 20. le duc d’Or
léans ayant concédé deux étangs en 1 7 8 4 , moyennant
neuf setiers de redevance , avec retenue du domaine
direct, avoit sous-entendu que les aliénations qui se-*
roient faites par son censitaire, de tout ou partie de ce
terrain, porteroient la condition de les assujétir à la re
devance qui en étoit inséparable , et par là même il
acceptait les délégations qui pou voient être faites à per
pétuité sur tous les propriétaires successifs de l’immeuble.
Celte délégation étoit tellement forcée, que le sieur
Cibot n’auroit pas même p u , comme on l’a déjà d itr
�( 16 )
notifier au sieur Pintîion , qu’il s’opposoit à ce que le
payement fût fait à M. le duc d’Orléans ; car le sieur
Pinthon devoit cette rente, non-seulement comme acqué
reur du sieur Cibot, mais encore comme détenteur d’un
héritage asservi au domaine direct du duc d’Orléans.
Il tenoit au duc d’Orléans par un l(en féodal dont
celui-ci pouvoit seul le détacher. Il n’étoit donc pas au
pouvoir du sieur Cibot de s’adjuger personnellement le
profit d’une redevance inséparable de l’immeuble. Il veut
se faire un moyen de ce qu’il étoit le débiteur de cette
redevance; par conséquent il n’en étoit pas le créancier.
L e sieur Cibot répond à cela (page 17 ) d’une ma
nière assez singulière. Pour imaginer un raisonnement,
il suppose un terrain allodial, pour en conclure qu’on
peut poursuivre solidairement une rente foncière comme
une rente féodale. Un peu plus bas il suppose qu’il a
payé le seigneur, pour en conclure que , s'il Vavoit
payé il auroit pu agir contre le sieur Pinthon.
Il est difficile de pénétrer le sens de ces deux sup
positions, et de deviner comment le sieur Cibot peut ar
gumenter d’ une situation imaginaire, pour en tirer une
conséquence en faveur d’une situation diamétralement
contraire. Car enfin les étangs n’étoient pas allodiaux;
cela est convenu. Le sieur Cibot n’a pas pnyé le seigneur;
il n’a pas môme notifié, avant la suppression , qu’il ré-^
voquoit son indication de payement; par conséquent la
redevance étoit encore attachée à la ¿féodalité au mo~
ment de la suppression, ce qui est le signe principal
de l’abolition , d’après les propres termes des arrêts de
passation que le sieur Cibot a cités.
Toute
y
�( *7 )
Toute l’illusion du sieur Cibot est renfermée dans
l’idée qu’il existe deux redevances distinctes dans les
deux setiers que doit payer le sieur Pinthon. Les mots
en sa décharge sont commentés par lu i, pour signifier
tout à la fois une rente féodale due par lu i, et une
rente roturière due à lui» Mais ce n’est pas avec un
jeu de mots qu’on interprète les actes. Il est de prin
cipe qu'on ne juge les actes que par l’intention des parties/
et non par l’examen scrupuleux de chaque expression.
Il est encore de principe que toute condition doit être
accomplie de la manière que les parties ont vraisem
blablement voulu et entendu qu’elle le fût. ( Gode civil,
articles n 56 , 1 1 6 2 , 1 1 7 1 ).
Or , comme l’a très-bien remarqué le tribunal d’Aubusson, il n’est pas possible de voir deux natures de
redevance dans les actes de 1784 et 1786. Les deux setiers
étoient payables au duc d’Orléans, comme seigneur
d’E vaux, à la même mesure et au même terme : ajou
tons que la redevance étoit assise sur le même immeuble
vendu en 1784, et que toute redevance payable au sei
gneur, sur un immeuble provenu de son fief, est néces
sairement féodale.
Dumoulin, l’oracle du droit sur les matières féodales,
nous enseigne à quel signe 011 peut reconnoître qu’une
seconde redevance est un sur-cens, distinct du cens prin
cipal ; et il décide que même quand une seconde re
devance seroit établie en augmentation de la première,
elle n’en est pas moins censuelle, lorsqu’elle n’est pas
expressément séparée du chef-cens. (Rousseaud-Lacombe,
v °. cens)...........
G
�( 18 )
O r, le sieur Cibot ne trouvera pas deux redevances,
dont l’une soit étrangère au seigneur, et en augmenta
tion de celle créée en 1784. Lorsqu’il a chargé de payer
deux setiers pour lu i, et d’exécuter cet acte de 1784,,
il lui étoit impossible de mieux exprimer la désignation
d’une partie de la redevance de( 1784. En effet, il n’en
a plus payé que sept setiers^ et le sieur Pinthon a payé
les deux autres.
Après que le sieur Cibot a tiré des inductions de
toutes les règles de droit, en matière de délégation , il
se retranche dans des moyens d’équité qui lui semblent
plus persuasifs, et il se prévaut de la garantie qu’il a
promise, comme si cette garantie pouvoit ôter quelquechose au caractère féodal d’une redevance.
Mais cette garantie n’étoit pas purement gratuite.
i ° . Il chargeoit le sieur Pinthon d’une redevance plus
considérable que n’auroit dû le comporter une petite
portion d’étang qu’il falloit mettre en culture; 2°. il
l’obligeoit de faire une haie de séparation d’avec le sur
plus de l’étang; 30. il rcccvoit 60 francs d’épingles.
Le sieur Cibot fait valoir comme une grande charge
l’obligation qu’il s’étoit imposée d’empecher l’eau de relluer sur la queue de l’étang. Mais il s’arrête là, et n’ajoute
pas qu’il obligeoit Pinthon de faciliter l’écoulcment de
ladite eau. La.plusgrande charge étoit,donc pour Pinthon ;
et Cibot ne faisoit qu’une chose fort naturelle, puisque
personne n’auroit voulu acheter un terrain submergé.
M ais, dès que Pinthon étoit tenu de faciliter l’écoulement
de l’eau, l’engagement de Cibot se réduisoit à rien.
Il fuit valoir encore qu’il avoitmis l’étang en valeur ; et
�( *9 )
l’avoit fait entourer de fossés et de plant v if, ce dont il
accuse le sieur Pinthon d’avoir profite. Mais l’acte de 1786
dément cette supposition , car il y est dit que le sieur
Pinthon pourra convertir la queue de Tétang en telle
natiwe de production que bon lui semblera ; ce qui
prouve clairement que cette partie n’avoit pas été déjà
mise en valeur.
Au reste, encore une fois, ce ne seroit là que des
moyens de considération, étrangers à la question de
féodalité. lie sieur Cibot n’a rien risqué en promettant
de garantir un .objet solidement acquis, et lui-même
ayant gagné sept setiers de redevance, n’est pas trèsfavorable à trouver injuste que son copropriétaire ait
gagné les' deux setiers qui étoient mis à sa'charge.
r. ■\
La seconde proposition'du sieur .Cibot seroit la plus Réponse
propice à son système, à cause de son obscurité, s’il^ a~la scconile
, .
. f , .
.
.
proposition
n’étoit pas très-aisé d’éclaircir ce qu’il a voulu dire, et du sieur,
de démontrer qu’il s’est placé dans une situation qui nd
Cibot.,
lui appartient pas.
Tous les arrêts de cassation, invoqués par le sieur Cibot,
sur l’arro turement des redevances, sont dans l’espèce que
voici. Une concession est faite par un seigneur de fief;
moyennant une redevance, et jusque-là cette redevance
est féodale. Ensuite le seigneur vend cette redevance à
un roturier, avec réserve de la directe. C’est après’ cela
que surviennent les lois suppressives de la féodalité. Le
roturier, acquéreur de cette redevance, dit avec raison
qu’elle n’est pns supprimée, parce qu’elle n’étoit plus
féodale au'moment de la suppression , i°. parce qu’elle
C 2
�(
)
n’étoit pas due à un possesseur de fief; 2°. parce que le
vendeur s’étant réservé la directe, et l’ayant séparée de
la redevance, il ne subsistoit plus aucun lien féodal qui
la mît dans la classe des redevances supprimées.
Ces moyens ont été adoptés par la Cour de cassation,
dans les arrêts que cite le sieur Cibot, des 10 nivôse
an 14 , 7 juillet 18 0 7, et 21 juillet 18 11 . Il n’est pas be
soin de commentaire pour voir tout d’un coup que cette
jurisprudence n’a rien de commun h l’espèce actuelle,
car le duc 4’Orléans n’a pas vendu sa redevance.
Pour se trouver dans l’espèce de ces arrêts, le sieur
Cibot fait un amphigouri fort bizarre. Il y remarque
qu’il n’a constitué aucune directe à son profit, que la
directe n’est jamais sortie des mains du duc d’Orléans,
que lui Cibot n’y a jamais eu ni droit ni prétention ;
d’où il conclut qu’il y a arroturement de fait, même quand
il auroit dit, en 178 0 , que sa redevance étoit féodale(pages 12 et 1 3 )r
Avec une telle manière de raisonner on peut s’appli
quer au hasard, tous les arrêts possibles, pourvu qu’il
y ait quelques mots d’une physionomie semblable. M. le
duc d’Orléans, qui a établi une redevance sur deux étangs,
en 1784, a-t-il vendu cette redevance au sieur Cibot?
celui-ci l’a - t - i l perçue jusqu’à la suppression? Pas un
mot de tout cela : la redevance et la directe sont restées
dans les mains du duc d’Orléans. Où donc y a-t-il la
moindre application aux arrêts cités ? Si le sieur Cibot
eût voulu être plus exact dans ses citations d’arrêts sur
rarroturement, il en auroit cité un quatrième, du 29 avril
1 8 1 1 , qui se trouve au verso du dernier arrêt par lui
�( ai )
cité. U's’agissoit d’iine redevance vendue a un roturier,
sans retenue de la directe. La Cour de cassation juge
qu’ il n’y a pas arroturement, et que la redevance est
abolie, attendu......... que bien qu'elle eût été déclarée
f o n c i è r e y elle n'avoit pas cessé pour cela d e conserver
sa qualité originelle de rente féo da le, parce que la
qualification de rente fo n cière, qui lui avoit été donnée
par ladite vente, rüétoit pas incompatible avec sa Ha
bilité originaire, '( Denevers, 1 8 1 1 , p. 497. ) On com
prend, parla conformité de ces motifs avec l’induction que
tiroit le sieur Cibot de ce que l’acte de 1786 parle de
rente fo n cière, pourquoi il n’a pas jugé à propos de citer
cet arrêt.
L e principal motif de décision, dans cette affaire, est
de considérer les droits du duc d’Orléans sur la queue
d’étang vendue au sieur Pinthon ; car pour déclarer fon
cière la redevance de deux setiers i assise sur cet héritage,
il faudroit pouvoir dire que le duc d’Orléans n’avoit rien
à voir dans cette redevance, ni dans le fait, ni dans le droit.
O r, le duc d’Orléans étoit propriétaire de cette rede
vance dans le fait comme dans le droit/
J
io. U l’étoit dans le fait, parce que le sieur Cibot l’avoit
indiqué pour la recevoir; ce qui n’étoit qu’une exécu
tion de l’emphytéose de 1784, Cibot étoit le maître ,
comme acquéreur des deux étangs, de distribuer la re
devance de neuf setiers sur toute la surface des étangs,
^ et dans la proportion qui lui plaisoit, puisque cela ne
nuisoit pas à la solidarité ; mais il n’étoit pas le maître
de priver le seigneur de percevoir sa redevance sur toutes
�( 22 )
les portions de ces étangs. Aussi avoit-il assujétî le sieur
Pinthon à se conformer pour sa jouissance à l’acte de 1784.
2°. Il l’étoit dans le droit; car le lien féodal qui s’étoit
formé en 1784, loin de s’être dissous en 1786, n’avoit
fait que se consolider, en y rattachant le sieur Pinthon,
qui prenoit la place du sieur Cibot pour une portion;
à la vérité, sans en détacher le sieur Cibot, qui restoit
copropriétaire et codébiteur en pagésie.
Les principes élémentaires en matière de féodalité ne
permettent pas de penser que le lien féodal ne continue
pas d’exister au profit du second acquéreur, à l’égird
d’une redevance qu’il doit payer au seigneur; il n’y a
de différence que lorsque le môme acte porte deux re
devances distinctes, l’une au profit du seigneur, et l’autre
au profit du vendeur, laquelle est en sus de la première
et n’y déroge pas.
On a déjà invoqué la doctrine de Dumoulin, pour
prouver qu’une redevance est toujours réputée féodale,
lorsqu’elle se rattache au fief et n’en est pas expressé
ment séparée. O r , jusqu’à la suppression des cens, il n’est
pas possible de voir un autre créancier que le duc d’ Or
léans. Sa directe couvroit tout; la redevance qui lui
étoit payée emportoit directe et droits seigneuriaux,
contra le sieur Pinthon : elle étoit donc nécessairement
féodale à son égard.
Quelle étoit donc celle de? parties qui devoit profiter
de la suppression? Cela ne peut plus faire un doute sé~
riuux. O11 avoit regardé comme un principe, dans une
précédente consultation, que la suppression 11e doit pnv
�, ( 23 )
fíter qii au propriétaire, d’après l’esprit de la loi et de
la jurisprudence. Mais le sieur Cibot s’élève avec vigueur
contre ce principe (page 1 9 ) , et il' veut que la loi n’ait
entendu que punir les seigneurs, sans s’inquiéter'de celui
qui profîteroit de la suppression,
r
La loi du 20 août 17 9 2 , qui s’est occupée la pre
mière de cette suppression, suffira seule.pour désabuser’
le sieur Cibot ; elle dit mot pour m ot, dans son préam
bule, que son but est Vaffranchissement des propriétés,
commandé par Vintérêt précieux de Vagriculture : et
ensuite les premiers mots du texte de la loi sont, i ° . de
permettre au propriétaire le rachat des redevances justi
fiées par titre primitif; 2°. de permettre à tout acquéreur
d’exiger la représentation de ce titre primitif.
Evidemment donc, si cette loi n’eût pas été suivie d’une
suppression absolue et sans conditionaucun autre que
le sieur Pinthon n’étoit désigné pour faire le rachat;
aucun autre m êm en’avoit intérêt de le faire.
Le sieur Cibot, qui se trouve à son aise depuis la sup
pression, pour dire qu’il auroit pu rembourser la re
devance au seigneur, et pour en conclure que cette fa
culté équivaut à un remboursement effectif, n’auroit eu
aucun intérêt à ce pnyememt ; car s’il eût remboursé leseigneur, on pouvoit le rembourser lui-même. Mais il
suffit d’avoir prouvé que le sieur Pinthon avoit droit
et qualité pour faire le rachat permis par la loi du 2o>
août 1792. La conséquence forcée de cette preuve, est
que la suppression absolue, prononcée par les lois posté
rieures , n’a profité qu’à lui,-
�C 24 )
Depuis la consultation donnée au sieur Pinthon en
1 8 1 1 , le journal de Denevers a rapporté un arrêt du
2 septembre 1 8 11 , qui ne permet plus de douter que la
suppression d'une redevance profite à l’acquéreur et non
au vendeur, lorsque l’acquéreur étoit chargé de l’acquitter
au seigneur, Yoici l’espèce de cet arrêt, si conforme à
l’espèce actuelle.
L e comte d’Issuile, seigneur féodal de la forêt de
Beaufort, en concéda, le 2.6 février 1 7 7 8 , quatre-vingthuit arpens au sieur Teissier-Lamothe, moyennant 40 fr.
de redevance féodale.
En 17 8 1, le sieur Teissier-Lamothe donna à titre de
bail à rente, à Jean Loiseau et sa femme, cinq arpens
de cette forêt, à la charge par eux de servir deux par
ties de rente, l’une de 40 fr. due au comte d’Issuile,
et l’autre de 29 fr, au profit du bailleur; ce à la charge
cc en outre de se conformer aux autres conditions dé« taillées dans le sumptum, et à l’esprit tant des arrêts du
« conseil de 17 7 1 et 17 7 5 , qu’au bail à cens de 1718 . »
L a veuve Loiseau déguerpit cet héritage ; et lorsque
ses enfans ont été majeurs, ils ont demandé le désiste
ment pour une moitié : le sieur Teissier l’a offert, à la
charge d’être payé de la redevance de 69 fr. par ar
pent.
Le sieur Teissier distinguoit avec raison la rente de
29 fr. de celle de 40 fr. La première étoit foncière, comme
séparée du chef-cens, et comme créée ¿\ son profit per
sonnel ; mais en reconnoissant que la rente de 40 fr*
avoit été originairement féodale, il soutenoit qu’il devoit
seul profiter de l’abolition, parce que ceLte redevance
avoit
�( 25 )
avoit été arroiurée à l’égard des mariés Loîseau, par
l’eftet du bail à rente qu’il leur avoit consenti.
' La Gour d’appel d’Angers a déclaré abolie-la rente
de 40 f r ., et n’a ordonné le payement que de celle dè
29 fr. Le sieur Teissier s’étant pourvu en cassation, faisoit valoir les mêmes moyens que le sieur Gibot. Il di
soit être resté débiteur direct de la .redevance de 40 fr.
envers le comte d’Issuile, et avoir été seul autorisé à
? amortir. 11 prétendoit que le bail à rente de 1781 n’avoit
porté aucune atteinte à ses obligations 'personnelles envers
le seigneur direct ; d’ou il concluoit qu’il avoit dû pro
fiter de la suppression plutôt que les Loiseaü, parce que
ceux-ci n'avoient pas contracté avec le seigneur, et que
n’ayant jamáis été en contact avec lui, il ne s’étoit établi
aucun lien féodal en tr’eux.'
' Les Loiseau répondoient que la redevance de 40 fr.
due au seigneur étoit inhérente au fonds; que l’abolition
des redevances devoit profiter au fonds qui en étoit
grevé, et par conséquent au propriétaire de ces fonds.
’L a section civile de la Cour de cassation a rejeté lé
pourvoi, par des motifs aussi simples que clairs : attendu
que la rente dont il s agit étoit féodale de sa nature ,
qu'elle étoit due p a r l e f o n d s , et que les défendeurs
s*étoient chargés d'en payer le montant. — Rejette, etc.
Penevers, 1 8 1 1 , pag. 498.
•
* Cet arrêta été discuté dans la consultation de M e. Vissao,
qui y trouve défaut d’application , parce que Loisenu
avoit souffert la clause de se conformer à des arrêts du
conseil, et à un bail à cens, qui emportaient condition
D
�(a6)
de faire au seigneur les obéissances de fiefs, et de relever
de la seigneurie de Beaufort.
Mais est-il possible de trouver dans l’emphytéose de
1786, que le sieur Pintlion ait été dispensé de tout cela?
Cet acte de 1786 porte, i°. que Pintlion sera tenu de
se conformer, pour sa jouissance, a u x c l a u s e s i n s é
r é e s e n l ’ a c t e d ’e m p h y t é o s e , c o n s e n t i p a r l e d u c
24 j u i l l e t 17 8 4 ;
20. que ledit Piuthon sera tenu et obligé de payer à son
altesse , ses receveurs ou fermiers , deux setiers de seigle
en décharge dudit M. Cibot.
O r, les clauses de l’acte de 1784 portent expressément
que les étangs sont tenus en directe de M. le duc d’Or
léans , qu’ils sont dans la mouvance de sa seigneurie
d’Evaux , et que la redevance de neuf setiers est féodale.
Tout cela n’est-il pas mot à mot la copie de la clause
insérée au bail desLoiseau?
Où donc est la différence, pour trouver une autre
nature de redevance dans celle de deux setiers, que le
sieur Pintlion est tenu et obligé de payer au duc d’Or
léans en décharge de Cibot, c’est-à-dire, en diminution
des neuf setiers créés par le bail de 17 8 4 , déclaré com
mun au sieur Pintlion ?
d ’O r l é a n s a u s i e u r C i b o t , l e
Le sieur Cibot, voulant éluder la corrélation de l’acte
de 1786 avec celui de 178 4 , joue avec les mots, et ob
serve que le sieur Pintlion n’a été chargé de se confor
mer aux clauses de l’acte de 1784, que pour sa jouis
sance. Mais on lui demanderait comment ce premier acte
peut lui être commun en cette partie, sans l’être encore
�( 27 )
dans l’obligation de relever du seigneur féodal, et d’être
soumis à tous les privilèges de la concession primitive.
t
.V
Il est vraisemblable que cette clause de l’acte de 1786
avoit échappé à M e. Dumas; car il n’auroit pas d it, dans
sa consultation, que le bail de 1784 étoit, à l’égard
du sieur Pinthon, res inter alios acta ,* qu’ainsi il ne
pouvoit en tirer aucune induction. Ce jurisconsulte, en
se laissant séduire par les principes sur les délégations
de payement, ne paroît néanmoins convaincu de leur
application, que parce que le sieur Cibot l’a trompé,
en lui disant que l’indication de payement n’avoit point
été exécutée par le sieur Pinthon. Il regarde en effet
comme constant que le sieur Pinthon n’a rien payé
pendant toutes les années postérieures à son acquisition.
Mais on a déjà prouvé que cette: supposition du sieur
Cibot étoit fausse ; que le sieur Pinthon, fermier d’Evaux,
s’étoit payé à lui-même la redevance due au seigneur;
que le sieur Cibot.en avoit été pleinement déchargé,
et n’avoit rien payé lui-même. Ainsi la délégation a été
parfaitement exécutée de la manière que l’exigeoit l’acte
de 1786.
Ce n’est que par la nécessité de ne laisser aucune objec
tion sans réponse, qu’on s’est cru obligé de discuter avec
autant de détail une question fort simple par elle-même,
sur laquelle on avoit le secours de plusieurs lois précises,
et d’un arrêt plus précis encore. En deux mots, le sieur
Pinthon n’a jamais été un seul instant débiteur du sieur
Cibot ; il 11e l’a été que du duc d’Orléans, La redevance
�qu'il payoit au seigneur étoit assise sur un immeuble
détaché d’un fief, avec retenue de la directe, et c’est en
cet état que la loi de 1793 l’a ôtée au duc d’Orléans,
pour en affranchir l’héritage. Croira-t-on qu’après une
abolition qui a duré dix-huit ans, cette redevance soit
ressuscitée tout à coup, comme'roturière, au profit du
sieur Cibot, qui n’en a jamais été ni voulu être le créancier
avant la suppression ? Non sans doute, cette redevance
n’a jamais changé de nature; elle étoit féodale en 178 4 ,
elle l’étoit encore en 1 7 8 6 } elle rétoit en 1 7 9 2 lorsque
la loi l’a frappée. La propriété concédée en 1784 étoit
alors divisée en deux parts , comme la redevance, et
chacune de ces parts a été affranchie de ce qui pesoit
sur elle. Il seroit donc illégal de prononcer que les deux
fractions du même héritage n’ont pas participé également
au bénéfice de la loi ; et il seroit injuste de penser que
le sieur Cibot, gagnant une redevance contre le duc
d’Orléans, se mette aussitôt à sa place pour en gagner
une autre, provenue de la même origine.
D é lib é r é à Riom, le 28 octobre 1812.
L . F. D E L A P C HIE R , P A G E S , A L L E M A N D ,
A RIOM, de l’imp. de T H IB A U D , imprim. de la Cour impériale, et librairet
rue des Taules , maison L a n d r io t . — Novembre 1 8 1 3 .
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Pinthon. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Pagès
Allemand
Subject
The topic of the resource
abolition des privilèges
droits féodaux
bail emphytéotique
bail
Description
An account of the resource
Consultation pour le sieur Pinthon
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
1784-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0426
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Évaux-les-Bains (23076 )
Périchon (Étang du)
La Rivière (Étang de)
Rights
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Domaine public
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abolition des privilèges
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droits féodaux
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MÉMOIRE
POUR
L e sieur A U B R E T O N , receveur de l’en
registrement et des domaines en la ville
d’A h u n , défendeur en assistance de cause;
c o n t r e
Le sieur H e n r y - C l a u d e B E R M O N D ,
ancien administrateur des loteries , rentier
demeurant à P a ris, demandeur ;
ETC ON TR E
L o u i s J O R R A N D , notaire impérial, habitant
de la ville d’Ahun, défendeur au principal;
EN
De
PRÉSENCE
B E T - B O U Q U E T , habitant de
la ville d’Auzance, aussi défendeur
G aspard
.
V
i c t i m e depuis dix ans de la duplicité de ceux en
qui j’avois placé ma confiance, j’ai su me résigner à mon
sort, et j’ai vu avec le calme de la probité trompée passer
ma fortune en des mains étrangères. Mais ceux qui s’en
A
�(2 )
disputent les lambeaux se croient autorisés à expliquer ma
conduite , chacun suivant l’intérêt qui le dirige. Si ces
explications sont nécessaires à la justice, elles 11e doivent
émaner que de m oi : je,dois la vérité à des magistrats
q u i, j’ose l’espérer, n’auront pu que me plaindre, sans
me retirer leui^ estime. Je la dois encore à nies c ré a n cie rs ,
en retour de la confiance honorable qu’ils m ’o n t accordée,
en me chargeant moi-même de ma propre liquidation.
; U n concours d’événemens plus imprévus les uns que
les autres, m’a plongé dans un abîme où je veux rester
seul. Mes créanciers ne me reprocheront point d’avoir
rien dissimulé de ma position; je leur dévoilerai ce que
j’ai fait et ce que j’ai eu projet de faire. Si je me suis
ab u sé'p ar des espérances chim ériques, ils savent déjà
que les chances du commerce trompent l ’habiJeté comme
l ’inexpérience; et ils ne demanderont de moi que l’as
surance de ne leur céler ni mes ressources réelles, ni
celles de mes opérations qui tendoient à les augmenter.
Je vais donc leur en rendre un compte fidèle; il attes
tera ma bonne volonté, et la foi que j’aurai, autant que
possible, gardée à mes engagemens.
F A I T S .
Je fis l’entreprise, eu l’an 5 , de fournir cinquante
mille pieds cubes de bois pour la marine. L e m a rch é
en fut passé avec le ministre.
Son excellence me fit avancer une somme de 5o,ooo fc.
pour subvenir aux frais considérables de mes premières
avances; et cette somme devoit m’être retenue sur mes
livraisons; c’est-à-dire, par un tiers sur chacune, ju squ ’à
extinction des 5o,ooo francs.
�(
3 )
Je m’empressai aussitôt d’établir sur divers points les
relations qui m’étoient nécessaires. U n sieur L ia is, ar
mateur de Cherbourg, ayant encore une maison d’affaires
à Paris, me fut indiqué, et il accepta ma correspondance;
il faisoit pour moi les avances de fonds sur mes simples
traites, et recevoit pour mon compte les rescriptions du
gouvernement.
M a spéculation eut bientôt épuisé tous mes fonds
disponibles ; je ne recevois plus du gouvernement que
des valeurs qui perdoient jusqu’à 5o pour 100 : elle ne
me fut donc que très-onéreuse. L ’inobservation des or
donnances pendant la révolution , avoit laissé dévaster
les futaies, et les bois propres à la marine étoient singu
lièrement rares ; les propriétaires qui les vendoient de
gré à gré se prévaloient de ces circonstances.
Cependant il falloit fournir au gouvernement pour
couvrir ses avances. D ’ailleurs on espère toujours que
l ’avenir vaudra mieux que le présent; je continuois donc
de fourn ir, et peu à peu j’épuisois mes ressources.
L e «sieur L ia is , indépendamment de ses recettes, se
mit à découvert ►pour moi de 12,000 f r . , qu’il avança
sur mes simples traites ; mais lorsque j’eus besoin de
nouvelles avances, et qu’il me vit livré à l u i, Liais me
parla un autre langage, et voulut des précautions.
P o u r m’avancer 24,000 f r . , le sieur L i a i s , se confor
mant au formulaire des prêteurs de la capitale, voulut
i° . une obligation notariée, pour avoir une hypothèque
spéciale ; 20. des lettres de change pour la môme somme
et aux mômes échéances.
Il n’y avoit pas à hésiter, puisqu’il s’agissoit de remplir
A 2
�(4)
des engagemens; je fis l’obligation, je iis les lettres de
change; j’exigeai seulement qu’ il fût dit dans l’obligation
que par l’acquit des lettres de change l’obligation demeureroit solue et acquittée; d’où il résulte que je n’avois
pas à payer d’obligation, mais bien des lettres de.change.
La seule chose cependant qui me parut e x tr a o r d in a ir e ,
c’est que le sieur Liais voulut faire faire l’obligation
sous un nom étranger; il donna pour prétexte que ces
fonds n’appartenoient point à sa maison de Cherbourg,
et qu’ il ne vouloit pas s’assujétir à lui en montrer l’ori
gine. Les motifs du sieur Liais ne m’intéressoient pas,
il me suffisoit de n’avoir affaire qu’à lu i; et en effet,
il restoit porteur de l’obligation q u i, y compris les in
térêts pour dix-huit mois, fut consentie pour la somme
de 32,640 francs. J ’ai continué de traiter avec lui.dans
notre correspondance et nos comptes ultérieurs, pour
les intérêts après l’échéance.
.
'
L ’obligation avoit été faite sous le nom d’un* sieur
Caillas , musicien , ami du sieur Liais , et habitant la
même maison.
Les lettres de change furent tirées par le sieur L iais,
sous le nom dé veuve Liais et fils, au profit de Caillas
sur m o i, et j’en fis sur-le-champ acceptation pour payer
à échéance.
L e sieur Liais étoit nanti de ce double g ag e, et ce
pendant je n’a vois pas encore les 24,000 francs; je devois
seulement tirer sur lui successivement pour me remplir
de cette somme ; et ma confiance étoit telle envers cet
armateur , que je ne soupçonnois pas môme que mes
traites pouvoient encore lui faire un titre de plus.
�(5 )
Je tirai sur lui pour 12,000 francs d’effets;'il les laissa
protester, sous prétexte que l’obligation n’étoit pas encore
inscrite ; enfin , et après cette form alité, il les accepta.
Je restai en compte courant avec lui , et il est inutile
que j’en dise les détails : je n’avois encore de lui aucune
défiance, v
Je me trouvai à Paris quelque temps avant l’échéance
de robligation. Liais me fit beaucoup valoir les prétendus
services qu’il m’a voit rendus; il me demanda de lui sous
crire , par obligeance, pour 5o,ooo francs de billets à
ordre, en me promettant de les imputer sur l’obligation,
s’i l ‘ne les: retiroit pas«-.;Cette proposition m’effraya ; je ne cru sp a s devoir y
adhérer. Je me rendis à Rochefort.
; ; ,
L ia is , qui étoit instruit.rde ce v o y a g e , m’écrivit à
R ochefort, le 12 prairial an 1.1 , la lettre ci-après, sous
le couvert des Imbert, mes commissionnaires, avec les
quels il étoit aussi en correspondance.
« J ’ai, lieu d’être étonné, M onsieur, de la manière
«
«
«
«
«
«
dont vous en agissez avec m o i, après tous les procédés
que j’ai eus pour vous : vous ne pouviez vous refuser
à me souscrire les effets que je vous avois demandés.
Je vous le répète, si pari défaut de remise de vous
j’éprouvois quelques désagrémens, je ne manquerois
pas de les faire retomber sur vous; vous auriez perdu
«
«
«
..
ma confiance ; et dès ce moment j’enverrois un exprès
pour vous poursuivre, tant pour ce que; vo u s.m e
devez en co m p te cou ran t, que pour l’ inscription. »
L ’obligation étoit du 27 nivôse a m o , et devoit échoir,
�m
ainsi que les six lettres de change, le 30 messidor an 11.
J ’avois-tout lieu de redouter l’effet de la menace qui
m ’étoit faite : je cédai; j’envoyai les 5o,ooo francs de
traites , en réfléchissant qu’elles couvroient ma dette
hypothécaire de 32,640 francs.
L e 28 messidor, deux jours avant l’échéance de l’obli
gation et des six lettres de change, Liais m ’écrivit :
cc T o u t honneur sera fait à vos traites échéant en fruc« tidor.
« Je suis en pourparler avec quelqu’un pour lui subs« tituer votre obligation , qui seroit payable dans les
« termes que vous demandez ; m ais, avant t o u t , l’on
c< désire avoir un nouveau certificat des hypothèques :
« envoyez-moi ce certificat de suite. » Cette lettre, enre
gistrée le 18 nivôse an 13, étoit d’une adresse remar
quable; car, en m’annonçant que les traites de 5o,ooo fr.
seroient acquittées fidèlement, il est clair que je redevenois débiteur de l’obligation; elle me tranquillisoit sur
l'échéance, tout en me prévenant qu’il p o u rro ity avoir
u n transport ; ce q u i , e n core u n e fo is, m’étoit indifférent,
si les traites étoient acquittées ; et tout étoit combiné
pour m ’en donner pleine confiance.
M a sécurité 11e fut pas longue : on me présenta pour
plus de 20,000 francs de traites tirées par m oi, à valoir
sur les rentrées de la m arine, touchées par Liais pour
mon compte , et à cet effet acceptées par Liais ( indé
pendantes de 5o,ooo francs donnés par obligeance )*
Je n’étois point en mesure pour couvrir une aussi forte
somme, parce que rien n’avoit dû m’y préparer. Il étoit
�(7)
clair que le sieur Liais ar ri voit à une faillite ; mais les .
porteurs d’effets étoient fondés à s’en prendre à moi ;
je ne pou vois pas m’en défendre*
Dans cette conjoncture, partagé entre l ’espoir, qui ne
se perd jamais, de venir à bout de mes affaires, et la né
cessité peut-être urgente de déclarer une suspension à
mes créanciers, j’étois dans cette pénible situation d’un
liomme q u i, ne pouvant tirer aucun parti de la confusion
de ses idées, semble implorer les conseils de tout le monde, •
et cependant craint de les demander.
C ’est ici où commencent mes relations avec le sieur
Jorrand , qui parut prendre intérêt à moi avec une fran
chise si cordiale, que je remerciai la providence de m’en
voyer un sauveur dans l’homme de qui j’aurois peut-être
le moins espéré des consolations.
i J ’étois élevé avec l’opinion que la fortune du sieur
Jorrand devoit son accroissement à la mienne. J ’avois
perdu mon père à l’age de dix ans; celui du sieur Jorrand
fut mon curateur et l’administrateur de mes biens : sans
clientelle et sans fortune apparente , il s’occupoit des
affaires de mon p è r e , et travailloit dans son étude lors
qu’ il venoit dans la ville d’Ahun.
L e sieur Jorrand, devenu après son père notaire et
p ro cu re u r, sembloit devoir être mon protecteur par
reconnoissance. Je fus surnuméraire à l’enregistrement,
pour conserver une place occupée depuis un siècle par mes
ancêtres. La régie vouloit me la conserver, et cependant
le sieur Jorrand l’avoit sollicitée et obtenue. A la vérité
cette conquête ne s’étoit pas consolidée sur la tête de
l’ usurpateur ; la régie avoit eu la bonté de penser que
�(
8 )
les démarches de mon protecteur n’étoient qu’ une perfidie,
et ni’a voit rendu presqu’aussitôt la place de mon p è r e ,
en destituant le sieur Jorrand.
Son procédé, dont j’avois à cette époque exprimé l’in
dignation avec toute la vivacité de mon âge, ne m’avoit
pas, comme on peut le croire, disposé à regarder désor
mais le sieur Jorrand comme un ami bien chaud. Il est
vrai que le temps fait tout oublier. La révolution est
venue encore passer par-dessus ce petit événement. L e
sieur Jorrand a été député à la convention ; il a voulu
depuis être receveur général du département; et ayant
fait le voyage dé Paris pour ses sollicitations, il s’est établi
chez mon frère : en sorte qu’insensiblement, et d’occa
sions en occasions, les rapports s’étoient rétablis entre nous
à l’époque à laquelle je viens de m’arrêter. Ils s’étoient
même rétablis au point que depuis quelques années il
vivoit habituellement chez m o i, il y faisoit son étude,
et je n’avois rien de caché pour lui : il sembloit par ses
prévenances vouloir me faire oublier le passé. 'Dans la
p ro s p é rité momentanée de mes affaires, il m’avoit offert
6es soins, sa bourse et son crédit. Je m’absentois souvent
des mois entiers, il faisoit les affaires du dehors comme du
dedans; je n’avois donc pu avoir rien de caché pour lui.
A l’époque de ma suspension, il paya pour moi 10,000 fr.
a M . Fauchier, montant de deux traites que je ne devois
p a s , mais que j’avois négociées à M . Fauchier ( ce sont
les premières traites acceptées par L ia is, qui sont reve
nues sur moi ). Cette som m e, en y comprenant les intérêts
et quelques autres avances, s’est portée à 14,000 fr. lors
qu’il a rédigé l’état de mon passif.
Son
�■'( 9 ).
Son obligeance ne nie sembla donc pas assez étrange
pour que je dusse m’en défier, dans ma situation. L e sieur
Jorrand ayant singulièrement accru sa fortune par l ’ac
quisition des biens de ra b b a jje,d u ,M o u ler, passant pour
avoir un portefeuille considérable, et,m ’ayant d’ailleurs
l ’obligation de plusieurs services domestiques que je n’ai
nulle envie de lui reprocher , me sem bloit, à poiut
nom m é, l’homme le plus propre à me délivrer de l ’em
barras où m’avoient, jeté les circonstances.
Je donnai donc tète baissée dans; la-proposition qu’il
me fit de ses services ; je rne reprochai même d’avoir
nourri dans mon cœur, pendant ^ingt ans, l’injustice de
le croire un malhonnête hom m e, ne doutant p;js que
son empressement à m’o b lig e r, après m’iivoir n u i , ne
fut un acte honorable de contrition et de grandeur d’âme.
Je crus aussi à la compensation ,du bien et du mal dans
les destinées humaines; et je fus(1dès cet instant résigné
¿1 exécuter avec u n e ,.confiance aveugle^ tout ce que le
r¡sieur Jorrand voudroit me prescrire..
• ■vil se fit d’abord livrer.,tous mes papiers; fit un état
exact de toutes mes ressources; étiqueta de sa main jus
qu’aux'choses les plus minutieuses, même ma commis
sion de yeceveur; il dressa l’état de mes .dettes (q u e je
rapporte écrit ¡de»jsa m ain ) ; et quand-il eut tout v u ,
il concerta le plan de son opération. ;
Il faut, me dit-il, que j’aie un titre ostensible et for
mel pour régir toutes vos affaires, Vous allez donc me
? consentir un bail à ferme pour neuf ans de tous vos
biens. L e prix en sera dit payé, d’avance pour les six
premières années. Tous vos bestiaux me seront vendus;
B
�( ito))
cette vente aussi portera quittance.'Quaïît'a’Vos'marchés
avec le gouvernem ent, vous m’en passerez le transfert
aussitôt! que j’aurai pu comprendre auprès des bureaux
du ministre si je n’ai aucun ‘risque à courir en me
substituant à vous.
T o u t autre qtfe moi eût réfléchi peut - être sur le
danger incalculable 1d ’un dépouillement aussi absolu.
Mais que le lecteur se mette s’il le peut àJla !place d’un
homme qui ayant jusqu’alôrs tenu àjses engagemens avec
h o n n e u r, s e voit à la veille d’y m an q uer, et de ^sup
porter les soupçons injurieux de tous-ceux qui se Soiit
confiés en sa signature.
Si dans une telle situation on est encore blâmable de
n’avoir pas tout p r é v u , j’admirerai’ la force dpâftie(de
ceux qui auroient pu mieux faire; pour moi, je ne vis
que l’obligeance du sieur Jorrand, et je souscrivis à tout.
Un seul point cependant me causoit une légère répu
gnance , c’étoit de donner quittance par anticipation ;
non pas que j’eusse la pensée que le sieur Jorrand en
abuseroit ; elle eût été in co m p a tib le avec ma confiance
absolue en lui : mais il me sembloit que mes créanciers
pouvoient y voir le signe d’une fraude dirigée contre
e u x , et cette simple apparence me révoltoit. L e sieur
Jorrand eut bientôt à cet égard vaincu mes scrupules.
V o tre bail à ferm e, me d it-il, ne sera qu’un épou
vantail pour ces petits récalcitrans, qui dérangent tou
jours les opérations d’une masse de créanciers, en faisant
des saisies et des frais inutiles. Mais j’écrirai moi-même
à vos principaux créanciers que je suis à la tête de vos
affaires, pour les retirer d’un simple engorgement. Vous
�( 11 )
conserverez; la> possession yde. vos propriétés-, où je ne
ferai que puiser annuellement .ce qui sera nécessaire à
votre liquidation. A in sirne vous^ inquiétez'vpas) de; l’ap
parence , lorsque je; serai p r ê t. à déclarer comme v o u s ,
que je n’ai point payé les sommes dont l’acte portera
quittance; d’ailleurs, je ne veu xravoir votre actif que
pour payer tout le mondei
A
r
.
'
r
/
Je n’eus rien à répondre à cette explication , et je
fus rassuré par le fait, en demeurant en possession appa
rente de tous mes< biens, dont je; n’ai retiré cependant
que le peu de denrees necessairèsi ài ma; consommation.
Lorsque la faillite du sieur Liais eut rejeté su r'm o i
toutes mes traites, qui étoient plutôt'les siennes,, je me
rendis à Paris, où habitoient la majeure partie des-créan
ciers qui les avoient fait présenter : là je les convoquai,
pour leur exposer la cause de mes r e t a r d s le u r commu
niquer ma-situation! avec; le sieuxvLiaisi, etrson dernier
arrêté de compte avec moi. J ’eus la satisfaction* de voir
qu’aucun blâme ne me fut imputé
mes créanciers eurent
confiance.en m o i; et'en me donnant umdélai- de trois
ans) pour continuer mes fournitures<au gouvernem ent,
ils m?autoriserent à disposer de la totalité 'de mes fonds.
L e sieur Jorrand ayant assisté à cette convocation', se
fit nommer; syndic ; fonction qui-lui donnoiÉ toutedatitude
pour l’exécution,du p la n ta g e et généreux duquel j’at*.
î
tendois lestplus grands avantages.
: t) t ;
L ’affirmation des créances eut lieu à Guéreb léi 12 ger-i
m inai an 1 2 ; et le sieur Jorrand’ s’y fit’
réserve des
« sommes payées pour moi après le contrat d ’ u n io n .,
« pour déplacement et préparatipn: de bùisi de marine
« étant actuellement à Pontarion. »
�( I2‘ )
Pendant m'es'négocic\tions avec mes'créanciers * “je^visois
à une spéculation plus avantageuse que la -précédente’ ,‘
et je ne doutois jDasr'qu’en ! la faisant réussir je ne vinsse
à bout de mes engagemens sans une diminution notable
dans ma fortuné,
;
r. <>.
'
■ -j
'■•Lie ministrôf(>uvroit'UnrConCo:iirs pour dés fournitures., ■
à faire à la marine dans les ports de l’Ouest.
;*
Les prix s’annonçoient comme infiniment plus avan
tageux aux spéculateurs que dans mes marchés de l’an 5
et de l’an 10 , en ce que le transport des bois devoit être
p a y é p a r lieues; ce qui n’avoit>pas eu lieu dans les mar-r
cliés précédens.
: ’ *i;
Un autre encouragement consistoit à faciliter lesîachats
par la marque des bois propres à la m arine, desquels
alors la destination ne pouvoit plus être détournée.
Mais il m’étoit impossible de faire aucune soumission
en mon nom ,' en ayant déjà une première qui n’étoit
point remplie ; tout onéreuse qu’elle étoit, le ministre
n’auroit souscrit aucun marché nouveau avec m o i, tant
que le premier n’étoit pas pleinement exécuté.
Je ne pou vois donc agir qu’avec un nom emprunté;
et je me fis présenter sous celui du sieur Bet-Bouquet,
mont beau-frère.
Les sieurs Imbert , négocians à R och efort, chargés
de cette négociation, me marquèrent, le 12 messidor
an 1 1 , que ce marché étoit passé, et m ’en annoncèrent
les conditions.
' '
'
‘
Par une autre du 28, ils me demandèrent mon appro
bation pour ce m arché, parce qu’ils savoient bien qu’il
me concernait seul j je ’leur répondis pour donner cette
�( i3 )
approbation et les remercier-, ils m’en accusèrent récep
tion le 17 thermidor an 11.
Ceci se passoit, comme on le v o i t ? peu de jours avant
mon bail a ferme , consenti au sieur Jorrand , et si le
jour même de ce bail il ne se fit pas investir de ce marché,
c’est qu’il n’étoit encore qu’ un projet, jusqu’à ce que la
soumission du sieur Bet-Bouquet fût approuvée par le
ministre.
Cette approbation fut donnée et le transfert fut signé
par Bouquet, à la date du I er. brumaire au 12 , au profit
du sieur Jorrand : il-sait-lui-même qu’à cette époque on
m ’oifroit 30,000 francs de bénéfice sur ce seul marché.
Mais l ’espoir de me récupérer entièrement, m ’empêcha
d’accepter cette négociation : le sieur Jorrand d'ailleurs,
qui me faisoit entrevoir de plus grands bénéfices, m’ob
serva qu’il seroit possible que les traites que l’on m’offroit en payement des 30,000 francs, ne fussent peutêtre pas acquittées. Je gardai donc le marché pour mon
co m pte, sous le nom du sieur Jorrand.
J ’hésitois si peu à mettre sur sa tête ma fortune et mes
ressources, que je voulois encore qu’il prît le transfert
de mon ancien marché de l’an 5 , qui devenoit bien meil
leur par les circonstances, puisque les payemens s’eifectuoient exactement. Ce qui m’engageoit encore à lui faire
ce transfert, c’est que je craignois que le gouvernement,
informé de ma suspension, n’annullât ce marché, et ne^
mît des entraves dans ma liquidation.
T r o p prudent pour accepter ce transfert, sans être
éclairci de toutes les chances à courir, le sieur Jorrand
m ’envoya à Paris pour savoû* si le ministre voudroit
�( r4 )
l’accepter, parce que cette acceptation l’auroit mis hors de
danger pour les suites.
J ’écrivis au sieur Jorrand que cette substitution pouvoit souffrir quelques difficultés ; et mes lettres qu’il n’a
certainement pas perdues, aideront peut-être à éclaircir
mes intentions sur l’un et l’autre marché. Je lui faisois
part des difficultés qu’il y a v o it, et le sollicitois de venir
pour les lever lui-m êm e; il me répondit par une lettre
du 10 pluviôse an 1 2 , datée d’A lm n :
« D ès que tu trouves quelque difficulté aux change« mens proposés pour la fourniture , et que tu as l’espoir
« de la conserver, tout déplacement de ma part devien« droit inutile; presse donc la levée des obstacles, afin
« que Ton puisse mettre en mouvement les bois préparés;
c< fais surtout en sorte d’obtenir des fonds, sans quoi tout
« seroit entravé. T u sais que je suis déjà en avance de
« beaucoup. »
Cependant', et malgré sa lettre, le sieur Jorrand partit
à l’instant pour Paris en, toute, hâte. Le 14 pluviôse an
1 2 , il écrivoit à; ma fem m e, de Paris :
ce Aubretonia bien; traité avec >la grande majorité de(
cc ses créanciers, etc. : quant à lia fourniture, elle pouvoit»
ce se continuer sous 1son nom ; la seule'difficulté est* dej
ce faire lever quelques oppositions à la* trésorerie, afin'
« d’en recevoir les deux tiers-des livraisons faitesr,, au>
« moyen desquelles: on feroit.face aux dépenses des' li-<
c< vraisons à faire. Aubreton espère obtenir bientôt ces*
« mainlevées. Comme’ je ne puis prendre ici aucun
« engagement direct, je neparoîtrai pas, et ne ferai qu’ùH>
« très-court séjour. »
�( i 5 .)
¡Lorsque le sieur .-Jorrand vit qu’il ne pouvoit pas-réunir
les deux marchés sur sa tête, il dirigea tout vers le marché
Bonquet.iJeimis à sa disposition la totalité des Lois de
construction qui étoient déjà préparés pour moi avant
de .marche 'Bouquet ; ce que Jorrand n^ignoroit pas ,
puisqu’il m’en parloit lui-même dans sa lettre du 10
pluviôse.
Ces bois furent.envoyés à A n goulêm e, pour le compte
du."marché Bouquet; mais les.agens de la marine trou
vant de la précipitation à cet envoi, décidèrent queices
bois ne pouvoient être que ma propriété , parce que
Bouquet ne pouvoit pas avoir eu le tem ps d ’en faire
exploiter et mettre en route depuis sa soumission ; en
conséquence il y eut séquestre à Angoulêm e ; mais il
fut bientôt levé à cause des besoins de la m arine, et sur
les représentations que je iis, ainsi que >MM. Im bert,
à l’ingénieur, que M . Jorrand étoit mon mandataire
pour l’un et pour, l’autre marché : la correspondance
de M M . Imbert en fait mention, et les bois furent reçus
sous le nom de Bouquet.
Les envois se sont continués, depuis cette ép oqu e,
toujours pour le compte du marché Bouquet, mais avec
les bois qui m’appartenoient avant l’an 12 , et qui ont
dû produire des rentrées pour plus de 30,000 francs.
Il m’étoit dû des sommes assez considérables d’arriéré
par le gouvernement; j’avois encore pour 10,000 francs
de rescriptions : tout cela fut mis à la disposition du sieur
Jorrand.
Si on joint à ce produit celui de mes biens-fonds ,
valant au moins 2,000 francs par année ; tous mes bes
tiaux, valant à peu près 8,ooo fr.; une créance arriérée
�( 16 )
de 1,000 francs sur mon m étayer, etc., on voit que le
sieur Jorrand a eu toute facilité pour liquider mes dettes
réelles sans bourse d é lié e , et même en commençant à
se mettre à couvert pour la sienne.
J ’ai dit que le sieur Jorrand avoit été nommé syndic
de mes créanciers par le concordat de l’an 12; il demanda
une nouvelle convocation à Aubusson, et sollicita le sieur
Queyrat de s’y faire nommer syndic.
L e concordat me donne six années de délai pour payer,
en m en tio n n a n t toujours que c’étoit pour parachever ma
fourniture avec le gouvernement. L e sieur Jorrand, qui
a signé et dirigé ce concordat, y a bien laissé*entendre
que cette fourniture s’étoit continuée pendant les années
précédentes; et cependant il savoit mieux que moi que
toutes les livraisons avoient été mises sur le compte du
marché Bouquet.
Je ne crois pas que le sieur Jorrand eut alors le projet
bien formé de s’approprier le marché Bouquet; j’en-juge
par les lettres qu’il é c riv o it, et par l’emploi qu’il faisoit
de mes fonds à toutes mes affaires sans distinction.
Dans un projet de lettre qui 111’cst resté de sa main ,
il écrivoit a un de mes créanciers plus' obstiné que les
autres, pour l’engager à adhérer'au concordat; et dans
ses motifs de persuasion il lui disoit : « La situation
« d’Aubreton a pris son principe dans des circonstances
ce qui ne se renouvelleront pas.... Maintenant il a pris
« des arrangemens d’après lesquels son travail sera dirigé
cc par quelqiCun q u i inspire une pleine confiance, et il
« y a tout lieu de croire que le résultat en sera plus
« avantageux. »
Je reviens à Liais , que j’avois laissé en l’an 11 en
�. ( 17)
faillite o u verte, et qui cependant, faisant ressource de
tou t, avoit trouvé un moyen plus funeste que le pre
mier, pour compléter ma ruine.
J ’étois parvenu à obtenir de lui un arrêté de compte
daté de C h erb ourg, du 2 brumaire an 1 2 , qui régloit
toutes nos affaires, et comprenoit les traites postérieures
à mon obligation ; il se trouve soldé en ma faveur par
27,791 francs 88 centimes, en ce que j’acquitterai les
5 o,ooo francs de traites données par obligeance. L ia is ,
au surplus, reconnut par ce même arrêté de c o m p te ,
écrit en entier de sa m a in , que toutes les autres traites
se trouvoient acquittées. ( O n ne doit donc pas perdre
de vue que les 32,640 francs de traites souscrites lors de
l’obligation étant acquittés par m oi, l’obligation devenoit
nulle. )
O n vient de voir que je demeurai chargé d’acquitter
les 5o,ooo francs de traites données d’obligeance; et par
le même arrêté de compte il fut convenu que jusqu’au
parfait acquittement desdites traites, l ’obligation demeureroit en dépôt entre les mains d’un sieur Pothier, à qui
je payerois les intérêts annuels.
Je vis le sieur P oth ier; il me reçut parfaitement; et
après m’avoir laissé parler du sieur L ia is , il captiva ma
confiance, en me montrant une grande indignation contre
sa conduite envers moi : il me marqua beaucoup d’a
m itié, m’ouvrit sa bourse, et m’offrit même 3,000 francs
sans intérêts.
J ’acceptai cette somme : elle a été remboursée en partie
par le sieur Jorrand.
L a fatalité qui m’a poursuivi dans toutes mes affaires
C
�( i 8 ) .
a voulu que ce sieur P o th ier, si obligeant pour m o i, si
courroucé contre L ia is, fût au contraire un intime ami
de Liais et de Caillas, qui tous trois, comme je l’ai su
depuis , étoient associés pour l ’entreprise de la tourbe
carbonisée.
Comme il étoit écrit que chaque dépôt se convertiroit
en transfert, le sieur Potliier s’est trouvé muni d’un
transfert de mon obligation, passé à son profit par Caillas,
prête-nom de L iais, en fructidor an 13.
A in si, et malgré ma correspondance et mon arrêté de
compte avec Liais, qui prouvent sa propriété et ma libé
ration, le tout bien en règle, et enregistré avant le trans
fert d’une obligation éteinte, L i a i s , mon débiteur de
27,791 francs, sans attendre les délais du concordat,
fit mettre mes biens en expropriation , sous le nom de
P o th ier, par-devant le tribunal de Guère t.
L à , le sieur Jorrand se présenta avec mon acte du
28 thermidor an 1 1 , pour revendiquer mes bestiaux
comme sa propriété : mais cet acte fut attaqué de nullité,
comme fait après la cessation de mes payemens ; et le
tribunal de Guéret ordonna une preuve que le sieur
Jorrand n’a point laissé faire.
Il n’étoit point encore aguerri à se dire propriétaire
des dépôts que j’avois confiés à sa bonne fo i, ou peutêtre avoit-il des vues plus grandes.
Quoi qu’il en soit, ce jugement ayant p e u t-ê tre eu
reflet d’éloigner beaucoup d’enchérisseurs, le sieur Jor
rand crut le moment favorable pour acheter à vil prix
les biens de celui qu’il proclamoit son am i, et qui avoit
mis corps et biens sous sa tutelle.
�( !9 )
J ’avois , bien avant cette adjudication, formé contre
Polluer une demande pour faire annuller le transport
de l ’obligation de Liais. Cette procédure fut suivie devant
le tribunal d’A u bu sson , saisi d’une demande en homo-7
logation du concordat ; mais le sieur Pothier déclina
la compétence, et demanda son renvoi à Paris : il l’a
obtenu, sur l’appel, en la Cour de Limoges.
Déjà dupe du sieur Potliier, je ne devois pas laisser
à mes créanciers l’embarras de se dépétrer de ses chicanes.
L a malignité d’autrui m’a donné enfin de l’expérience,
et je l’a i , quoique un peu ta rd , mise en pratique. C ’est
au magistrat de sûreté que je dénonçai les manœuvres
des trois associés de la tourbe carbonisée ; mais le di
recteur du jury jugea à propos de renvoyer les parties
à fins civiles. Je ne perdis pas courage, et une nouvelle
plainte adressée à son excellence le grand -ju ge, avec
les pièces justificatives, eut plus d’efficacité : Caillas fut
arrêté, et dans plusieurs interrogatoires qu’il a subis,
ainsi que Pothier, ils révélèrent sans doute tout ce que
j’avois intérêt de faire connoître, puisque le magistrat de
sûreté ordonna que les papiers du sieur Caillas seroient
saisis. Mais un sieur P é r ie r, gendre du sieur Pothier,
en est instruit; il trouve le moyen de communiquer avec
Caillas, détenu chez le magistrat de sûreté, prend ses
clefs , et va enlever ses papiers, qu’il dépose chez un
agent de change : heureusement il est pris sur le fait,
rendant les clefs à Caillas ; le magistrat de sûreté lui
fait rendre les papiers , les fait déposer au gre ffe, et
décide qu’il y a lieu à instruction criminelle. Je rends
plainte contre le sieur P érier; mais le même directeur
C a
/
�( 20 )
du jury se trouve encore là, et prend sur lui de décider
que me trouvant seul plaignant, il n’y a pas lieu à suivre
le procès quant à présent.
Cette suspension bizarre et arbitraire décidera sans
doute mes créanciers à seconder, mes efforts pour dé
masquer une collusion aussi déhontée; il ne sera peutêtre pas impossible de prouver que des escrocs de Paris
ne sont pas plus invulnérables que d’autres.
C ’est pour parvenir à ces fins, que le sieur Berm ond,
habitant la ville de Paris, a été nommé syndic, et le
sieur Picolet, avocat en la Cour de cassation, conseil
de l’union ; ce dernier, qui a toutes les pièces, a tout
di rigé jusqu’à présen t, même la procédure contre le
sieur Jorrand : l’un et l’autre se sont fait connoître ,
et ont choisi leur avoué à G u é r e t , avec lequel ils sont
en correspondance.
.Pendant que je m’efforçois de lutter contre la dilapi
dation de ma fo rtu n e , le sieur Jorrand étoit en dis
cussion avec les sieurs I m b e rt, mes correspondans de
Kochefort , sur les p rod u its du m a rch é Bouquet. Ce
procès important a laissé des traces précieuses que les
plaideurs des deux parts voudroient bien avoir pu sup
prim er; car aujourd’hui ils colludent, et sans leurs débats
écrits j’en serois réduit à attester la vérité par ma seule
science, les sieurs Imbert m’ayant refusé toute commu
nication depuis leur accord avec le sieur Jorrand.
Je vois par un jugement du tribunal de commerce de
R och efort, du 13 janvier 18 1 0 , que le sieur Jorran d,
comme fondé de pouvoir de Bouquet, avoifc assigné les
sieurs Imbert en 1809, pour lui payer 37,946 fr. 40 cent.
�( 2t )
par eux reçus, du payeur de la marine, sur le marché
Bouquet, et comme commissionaires chargés par ledit
B o u q u et, pour fourniture de bois de construction.
Il offroit déduire 12,000 francs, et 144 fr. payés sur
ses mandats (sans doute pour les frais de séquestre de
l ’an 1 2 ) .
A ce la , les Imbert répondoient qu’ils avoient été les
com m issionnaires cï*Aubreton, am i de J o r r a n d , pour
une fourniture de l’an 10, et que dans le cours de cette
fourniture ils lui avoient endossé pour 8,000 fr. de lettres
de change venues à protêt ; en sorte que leur créance,
suivant e u x , est montée à 12,888 francs 67 centimes. '
Ils ajoutoient « que le sieur Aubreton , se trouvant hors
« d’état de remplir la fourniture de bois qu’il s’étoit
« soumis de faire, et se trouvant encore débiteur envers
« le gouvernemen de vingt et quelques mille francs, pour
« én éviter en apparence la retenue, demanda aux sieurs
« Imbert de faire une nouvelle soumission pour la four« niture de quatre cent quatorze stères, ou douze mille
«
«
«
«
«
et
«
«
«
«
«
pieds cubes de bois de construction, sous un nom em*
prunté, c’est-à-dire, sous le nom du sieur B o u q u et ;
laquelle soumission a eu lieu le 6 messidor an r i , souS
le cautionnement des sieurs Imbert. Cette soumission
ainsi faite et acceptée, le sieur J o rra n d , se mit à la
tête de cette nouvelle fourniture, et fit choix des sieurs
Im bert, pour ses commissionaires en cette v ille ; et
comme il avoit une parfaite connoissance de’ la créance
des sieurs Imbert sur ledit sieur A u b reto n , dont 011 lui
a fourni un double du compte balancé, ledit sieur
Jorran d, indépendamment de la commission d’usage,
�( 32 )
consentit à ce que lesdits sieurs Imbert fissent la retenue
du cinquième du produit net de la fourniture de bois
qui seroit faite sous le nom de B o u qu et, pour se rem
plir de leur créance sur ledit sieur A u breto n ;
« Que peu de temps après des bois furent mis en
et route, et même rendus à Angoulêm e, pour compléter
« la fourniture de Bouquet. L e ministre, jugeant avec
«c raison que les bois expédiés étoient la propriété du
« sieur Aubreton , puisque ledit Bouquet n’avoit pas eu
« le temps d’en faire exploiter et préparer, donna des
c< ordres pour qu’ils fussent séquestrés, pour être livrés
«
«
«
et
« sous le nom du sieur Aubreton ; et ce n’est qu’après
cc de vives sollicitations et les besoins pressans du p o rt,
« que le ministre s’est déterminé à consentir que les
« plançons et bordages fussent reçus sous le nom de
cc B o u q u e t, quoiqu’il fût bien constant que les bois
cc composant la première livraison de ce dernier, étoient
cc la propriété dudit sieur Aubreton. »
A cela le sieur Jorrand ne répondoit qu’en éludant,
et se re n fe rm o it dans son titre. C e p e n d a n t, par une
inconséquence assez inexplicable, il avouoit ( peut-être
à cause de sa correspondance) que sur le marché Bou
q u et, il étoit bien convenu de laisser déduire le cin
quième de la dette d’Au breton ; mais il s’en prenoit aux
Im b e r t, qui par leur retenue des fonds de la m arine,
avoient arrêté les nouvelles expéditions.
L e tribunal de commerce de Rochefort mit la cause
en délibéré, ès-mains de son président; et après a v o ir
entendu un rapport fait sur l’examen des pièces respec
tivement produites 9 il rendit un jugement qui fixe les
�( 23 )
points de faits reconnus constans , avec une précision
dont rien ne doit être omis.
« Considérant, 8°. que le sieur Aubreton vouloit con« tinuer la fourniture sous un autre nom que le sien,
« attendu qu’il avoit encore beaucoup d’autres bois d’achat,
« dont majeure partie étoient exploités et en route, écrivit
« au sieur Imbert de faire en sorte de passer un nouveau
« marché avec la marine, pour la fourniture de quatre
« cent quatorze stères, ou douze mille pieds cubes de
k
«
«
«
bois de construction, sous le nom du sieur B o u q u e t,
lequel marché eut lieu le 6 messidor an i i , au nom
dudit sieur B o u q u e t, et sous le cautionnement des
sieurs Imbert père et fils;
,
c< Considérant, 90. qu’à l’époque de ce m arché, le
« sieur J o r r a n d y fa m i intim e du sieur A u b r e to n , et
« comme chargé d’une procuration générale de Bouquet,
« se mit à la tête de cette fourn iture, et a continué les
« sieurs Imbert père et fils pour ses commissionnaires
c< en cette v ille ;
«
«
«
«
«
«
«
«
« Considérant, io°. que le sieur Jorrand étant parfaitement instruit de la créance des sieurs Imbert père
et fils sur A u b reto n , puisque leur compte balancé se
trouve jo in t ¿1 la production de B o u q u e t, tout en leur
accordant la commission d’usage , consent en outre
qu’ils prélèvent, sur le montant de la fourniture nette
de Bouquet, un cinquième d’ icelle, pour se remplir
du montant de leur créance sur ledit sieur Aubreton;
« Considérant, i i ° . que peu de temps après ce nouveau m arch é, ayant été mis des bois en route pouy
�( 24 )
opérer la fourniture dont il étoit question pour icelui,
le gouvernement les considérant comme étant la propriété du sieur A u b r e to n , avec d’autant plus de raison
que Bouquet n’avoit pas eu le temps d’en faire exploiter
et préparer jusqu’alors, ils furent, en vertu des ordres
du ministre, séquestrés, pour être livrés sous le nom
du sieur A u b reto n ; q u ’il paroît m êm e, d’après une
lettre du sieur Penevert, que le nombre étoit de deux
cent dix-huit pièces ;
« C o n s id é r a n t , 120. que par suite, et sur la repré« sentation qui fut faite des besoins pressans que le port
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
a voit des bois de l'espèce de ceux qui se trou voient
soit en route et rendus à A n go u lê m e, le ministre, par
sa dépêche du 21 messidor an 12 , a consenti que les
bois en plançons et bordages dont il s’agit, q u i f a is oient
partie des bois dûA u b r e to n , quoique passés en vente
sous le nom de ce dernier, fussent distraitsy et reçus
sous le nom de B o u q u et; ce qui fut fait;
c'c Considérant, 130. qu’indépendamment de ce concc s e n le m e n t , il pa ro ît q u e les bois q u i co m p osent la pre« mière fourniture faite par Bouquet étoient la propriété
cc du sieur A u b r e to n , puisque d’après les ordres donnés
« par le sieur Penevert au sieur T r ip o n , contre-maître
« charpentier, ce dernier a fait une recette provisoire,
« en plançons et bordages, de cent cinquante-huit pièces,
cc cubant ensemble deux mille cent quarante-huit pieds
cc cubes, suivant son procès verbal du 6 fructidor an 12,
cc sur le produit desquels les sieurs Imbert père et fils
« paroissoient avoir des droits pour se remplir d’autant
cc de
�( 25 )
« de leur créance sur ledit sieur A u breton , soit en totalité
« ou partie. » (i)
Par ces motifs, le tribunal de Rochefort a réglé la
recette des Imbert à 39,340 fr. 64 ce n t., et leur dépense
à 25,287 fr. 83 ce n t., y compris les 12,000 francs déjà
payés au sieur Jorrand , et le surplus pour droit de
commission et frais de voiture; ce qui constitue les sieurs
Imbert débiteurs de 11,567 francs.
Jorrand a interjeté appel à Poitiers, le 10 février
1810 , à cause des droits de commission accordés , et
pour un article de 960 francs pour voiture : tout quoi,
disoit-il, étoit accordé au mépris des écrits, conventions
et obligations souscrites par les sieurs Im bert.
Mais en même temps le sieur Jorrand ne voulant pas
perdre de temps, a fait un commandement aux sieurs
Imbert de payer les 11,567 fr. accordés par le jugement
qu’il approuvoit en cette partie.
Sur cet appel les parties ont transigé et passé un arrêt
d’expédient à Poitiers. Mais quel qu’il s o it, il ne doit
être que relatif aux griefs d’appel, et il ne peut rien
changer aux faits reconnus constans par le jugement de
Rochefort.
(1) Les sept premiers motifs se rapportent à mon marché per
sonnel antérieur; les quatorzième, quinzième et seizième motifs
sont la fixation des recettes et déduction.
Pour pouvoir se présenter sous le nom de Bouquet, Jorrand
a donné à Bouquet la qualité de marchand patenté première
classe. Cette patente est fausse; le maire a certifié q u e lle
n’existoit pas.
P
�( 2 6 }
J ’ai voulu réclamer auprès des sieurs Imbert les pièces
par elles produites au président de Roehefort. Je leur
ai demandé des explications sur les écrits, conventions
et obligations dont parloit le sieur Jorrand dans son
appel. Je n’ai rien pu obtenir des sieurs lmbert : dès
l’instant qu’ils ont été d’accord avec le sieur J o rra n d ,
ils ont été muets pour moi.
Ils pouvoient avoir cette l'éticence pour mes créan
ciers; car en se payant par leurs mains ils ont senti qu’ils
faisoient tort à la masse, et qu’ils s’exposoient à des re
cherches. Mais, à mon égard, je ne devine pas pourquoi
ils ont voulu me taire la vérité, à moi qui 11’ai donné
à Jorrand l’administration de mes biens et de mes res
sources , qui ne l ’ai chargé de l’exécution de mes mar
chés que pour les payer ainsi que les autres créanciers
( ma correspondance avec les Imbert en fait mention
expresse ). Ce ne peut donc etre que le sieur Jorrand
qui leur a prescrit le silence.
Si c’est pour m’ôter les preuves de propriété du mar
ché B o u q u e t, ils savent bien qu’elles résultent de leur
correspondance do l’an 12 et 1809 ; mais ils auront cru
tous mes papiers au pouvoir du sieur Jorran d , ce qui
étoit très-vraisemblable.
Déjà les créanciers convoqués le 22 juin 1809, pour
la nomination d’ un syndic à la place du sieur Queyrat,
nvoient eu l’œil ouvert sur les démarches du sieur J o r
rand , et avoient chargé le sieur Bermond , nouveau
syndic, de le poursuivre en reddition de ses comptes.
L e sieur Bermond ayant pris le temps d’aller aux
enquêtes, a voit commencé une procédure à Guéret par
�( *7 )
une requête du 14 avril 18 10 , pour demander que le
sieur Jorrand rendît com pte, comme mon associé, et
pour conclure, dans le cas où il ne le seroit p a s , à la
nullité de toutes ventes , baux à ferme , transport de
créances ; de tout quoi le produit seroit rapporté à la
masse des créanciers.
Le syndic ne parle pas, dans cette requête, du marché
.Bouquet, soit qu’il l’ignorât, soit qu’il ne crût pas pou
voir attaquer le sieur Jorrand sur cet article. C ’est le
sieur Bouquet qu’il a assigné le 18 juin 18 10 , pour le
faire condamner à rendre compte du bénéfice des bois
relatifs au marché fait sous son nom.
L e tribunal a ordonné jusqu’à présent trois articles
d’instruction sur cette affaire; i°. que le sieur Bouquet
produiroit le transfert par lui fait à Jorrand; 20. que
Jorrand seroit appelé en cause; 30. que je serois aussi
appelé pour répondre aux interpellations qui me seroient
faites.
Jorrand n’est venu à l’audience que pour se plaindre
de moi ; il a c r u , je n’en doute pas, que celui qui crie
le plus haut fait le plus d’impression ; il a supposé que
des injures lui donneroient une quittance.
Je crois en avoir assez dit pour prouver le contraire :
une reddition de compte, qui tournera au profit de mes
créanciers, ne doit pas m’être indifférente. Si ce compte
est dû il faut qu’il se rende. Les faits que j’ai rapportés
me semblent assez précis pour ne pas douter ; et je me
ibornerai à en tirer quelques conséquences.
D 2
�( *8)
Objections et réponses.
L e sieur Jorrand nie foi’mellement que le marché
Bouquet fasse partie de son mandat; il prétend qu’il en
est sérieusement propriétaire en son nom , par le transfert
du I er. brumaire an 12.
Cela est impossible. Tous ceux qui ont participé à ce
marché et à ses suites lui donnent un démenti formel.
Les sieurs Im b ert, de R och efort, ont constaté par
toute leur correspondance que c’est m oi qui leur ai donné
l ’ordre de faire ce ma relié sous le nom de Bouquet; que
c’est pour m oi qu’ils l’ont fait.
L e sieur Bouquet, dans les actes de procédure éma
nés de lu i, convient ne s’être jamais mêlé de ce marché;
il dit n’avoir été que mon p r ê t e - n o m , pour le f a i r e
tourner en ma fa v eu r ,* et qu’après avoir donné une
procuration à J o rra n d , le I er. brumaire an 12 , parce
que Jorra n d f a is a it alors toutes mes affaires , il en fit
un transfert, pour ne plus figurer nominativement.
Les agens de la marine sont venus compléter ces preuves
en faisant saisir les premiers bois fournis par le marché
B ouquet, en constatant que ces bois étoient les m iens.
Enfin le jugement de Rochefort achève la conviction,
en donnant des détails sur des faits personnels au sieur
Jorrand; et certes le résultat de ce jugement ne peut pas
être suspect pour la cause actuelle; car ni le syndic des
créanciers, ni aucune autre partie intéressée n’y étoit
appelée , et tout s’est révélé entre le sieur Jorrand et
les Imbert.
�( 29 )
Que si aujourd’hui les Imbert nioient des faits articulés
par eux-mêmes, et non contestés par le sieur Jorrand,
leurs lettres restent pour attester que moi seul étoit à
leurs yeux le négociateur et le propriétaire.
M a is, dit le sieur Jorrand, il ne s’agit pas de savoir
quel étoit le propriétaire avant le I er. brumaire an 12,
si je le suis devenu à cette époque.
\
Cette objection ne pourra être écoutée que lorsque le
sieur Jorrand rapportera, i°. sa correspondance avec les
commissionnaires depuis son transfert; 20. les pièces pro
duites par lui au tribunal de Rochefort, ainsi que l’atteste
le jugement; 30. les écrits, conventions et obligations
d’entre lu i et les sieurs Im b e r t, suivant ce qu’il a dit
dans son appel du 10 février 1810 : alors on saura si
véritablement le sieur Jorrand a eu la conscience de sa
propriété dans le marché Bouquet.
En attendant qu’il communique ces pièces essentielles,
011 peut trouver des indices dans quelques lettres des
sieurs Im b e rt, les seuls commissionnaires qui se soient
mêlés des fournitures de Rochefort.
Dans une lettre à mon adresse, du 16 ventôse an 12,
les Irnbert me rendent compte de ce qu’ils ont fait poul
ie marché Bouquet, et ils me disent : « D ’après la levée
« du séquestre apposé sur vos bois, votre ancienne four« niture doit reprendre son cours comme cette dernière
cc que rien ne doit plus arrêter. Nous pensons d’ailleurs
cc qu’il ne dépendra que de vous qu’il y ait une certaine
« quantité de bois destinée pour la remplir, lorsque telle
ce ou telle partie sera marquée ¡)our M . B ouquet. »
�( 3° )
L e 2 prairial an 12, c’est encore à moi qu’ils s'adressent
pour dire : « Nous attendons toujours ,avec impatience
et de vos nouvelles, ainsi que de M . Jo rra n d , pour Ici
«¿fourniture B ou q u et : il,nous tarde bien de recevoir
« des bois pour cette soumission. »
L e 21 du même m ois, ils m’écrivent encore pour se
plaindre de mon silence : « Depuis deux mois que vous
« êtes instruit que toutes les difficultés sont levées, que
c< vous pouvez donner cours à votre marché, ain si qu'à
« celui B o u q u e t, vous ne vous êtes nullement mis en
« mesure pour livrer en ce port. »
Ces lettres sont d’une date postérieure au transfert,
daté du I er. brumaire au 12,
Les sieurs Imbert n’ignoroient pas ce transfert appa
ren t; cependant ils ne parloient de Jorrand que comme
d’un fondé de p o u vo ir, d’un agent, et ils entendoient
toujours ne se mêler du marché Bouquet que pour m oi.
Ils l’ont cru jusqu’à la fin.
L eur lettre du 11 mai 1809 est encore plus expres
sive. J e leur demandois un compte du m a rch é Bouquet;
ils me répondent : « Nous sommes tout prêts à vous
«
«
«
«
«
«
cc
«
fournir un compte exact de toutes les livraisons que
nous avons exécutées sur le marché Bouquet, dès que
nous aurons la garantie formelle que sur leur produit
nous prélèverons tout ce que vous nous devez. Quand
nous serons tous d’accord sur ce point essentiellement
nécessaire à nos intérêts, qui ont bien souffert de cette
créance, nous réglerons avec vous , et rem ettrons
ensuite à qui de droit ce qui pourra rester en nos
�( 31 )
* mains ; jusque-là nous ne nous démunirons pas d’un
« sou. »
Et lorsque le sieur Jorrand s’est présenté à eux sous
le nom de Bouquet , en 1809, pour leur demander des
comptes, ils ont dit à Bouquet comme à Jorrand qu’ils
n’avoient suivi ce marché, depuis son origine, que comme
mes commissionnaires, et pour m oi.
S’ il y avoit du doute vis-à-vis Jorrand, en son nom ,
il n’y en a pas vis-à-vis Jorran d, syndic de mes créan*
ciers.
Celui - ci ne peut prétexter aucune erreur , aucune
croyance d’avoir géré pro suo.
Lorsqu’il a été nommé syndic depuis l’an 12 jusqu’à
1806, lorsqu’il a accepté ce syndicat, Jorrand a con
tracté l’obliga tion de ne rien détourner pour l u i , mais
de rapporter fidèlement à la masse tout ce qui seroit
provenu de ma fortune, de mes ressources, de mes bé
néfices.
O r , le marché Bouquet étoit dans mon actif; le sieur
Jorrand ne l’ignoroit pas : ses bénéfices étoient donc ma
propriété. Quand même il auroit eu seul une correspon
dance pour ce ma relié , et une gestion suivie, tout cela
'se rapportoit à sa qualité de syndic.
A cela il répond que la date du transfert le met à
l’abri de cette comptabilité. Je ne suis syndic, d i t - i l ,
que sous la date du 2 5 nivôse an 12; le transfert Bouquet
est du i«r. brumaire an 12 : donc j’étois propriétaire
avant d’être syndic.
L a loi et les faits repoussent cette objection.
�( 32 )
L e transfert du i er. brumaire an 12 est un acte sous
seing p r iv é , enregistré seulement en 1810.
O r , les actes sous seing privé n’ont de date contre les
tiers que du jour de l’enregistrement ( Code civil, art. 1328 ).
Rien n’autorise donc le sieur Jorrand à montrer cet
acte comme un titre antérieur à son syndicat.
Je ne puis sur cette date précise donner des notions
bien certaines , n’ayant pas la mémoire assez locale sur
un fait auquel je n’attachois alors aucune importance :
mon attestation pour ou contre seroit d’ailleurs inutile
à mes créanciers, qui ne verront que la date légale.
Ils demanderont de plus au sieur Jorrand ce que
veut dire sa réserve insérée dans l’acte d’affirmation de
sa créance, le 12 germinal an 1 2 , ce de ce qu'il a voit
« payé pour A u b r e to n , pour déplacement et préparation
' « des bois de marine qui sont maintenant à Pontarion. »
Ces , bois n’ont pas été livrés sur mon marché de
l’an 5 , sur lequel le sieur Jorrand n’a presque rien
fournis.
Cette livraison n’étoit donc faite que pour le marché
B o u q u e t, et alors le sieur Jorrand n’entendoit avoir
avancé les frais de transport que pour m o i.
Il paroît que ces bois de Pontarion y étoient encore
au 29 thermidor an 1 2 , époque où le sieur T r ip o n , par
une lettre ci Vadresse du sieur Jo rra n d ou du sieur
A u b r e to n , nous écrivoit à l’un ou à l’autre de venir
l’y joindre : preuve ajoutée à toutes les autres, que tous
mes correspondans ne faisoient aucune différence entre
les intérêts de Jorrand et les miens.
Supposons,
�C 33 )
Supposons, si le sieur Jorrand l’aiine m ie u x , que sou
transfert a véritablement la date du ier, brumaire an 12;
il n’en résultera rien de plus avantageux pour lui.
Car à cette d a te, le transfert sera toujours postérieur
à la cessation de mes payemens, qui est de l’an 11. ( L e
concordat de 1806 a rejeté, comme tardive, l ’inscription
du sieur Jorran d, qui est du 4 vendémiaire an 12. )
Suivant la déclaration de 1702, confirmée par le Code
de commerce, ce transfert seroit n u l, quand même il
seroit an térieur, s’il n’avoit précédé cette cessation de
plus de dix jours.
En vain le sieur Jorrand oppose-t-il que le nom Bouquet
lui suffit pour être à couvert. Les matières de fraude
sont remises à la prudence du juge; la loi s’en rapporte
entièrement à lu i, comme le prouvent l’art. 1363 du Code
civil, et l’art 444. du Code de commerce.
.. Ici la nullité seroit de plein droit; ca r, par une cir
constance que le sieur Jorrand n’expliquera jamais , le
transfert est gratuit.
Q u’il explique, s’il sc peut, comment après avoir pris
la peine de suivre une admission de m arch é, près des
commissaires de la m a r in e , et ensuite dans les bureaux
r du ministre, après avoir fait les dépenses nécessaires
pour cette négociation , il seroit concevable qu’on en
laissât gratis tout l’avantage à un nouveau ven u?
Personne n’y croira ; et précisément la résistance du
sieur Jorrand à s’approprier ce marché, aide à convaincre
q u ’ il étoit trop avantageux pour le donner pour rien.
D ’autres en offraient un bénéfice considérable, et cer
tainement je ne m’en serois pas privé pour faire un pur
E
�( 34 )
cadeau au sieur J o r r a n d , trop opulent pour le recevoir.
Quand j’aurois voulu le faire, je ne le pouvois pas;
la loi me défendoit de rien détourner de mes créanciers,
pour en préférer un seul.
Aussi n’en ai-je pas eu la pensée, et nul ne peut m’en
accuser : ma correspondance avec les sieurs Im bert, qui
étoient aussi mes créanciers, le prouve. J ’ai continué
après l’an 12 de me présenter à eux comme propriétaire
du marché B ouquet, et c’est ainsi qu’ils m’ont toujours
considéré jusqu’à 1809, comme l’atteste le jugement de
Rochefort.
Ce transfert, mon bail à ferm e, ma vente de bestiaux,
l ’état de mes dettes de la main du sieur J o rran d , ses
lettres à mes créanciers; cela fait un tout inséparable,
un corps de faits et d?opérations qui se lient mutuelle
m en t, et s’expliquent les uns par les autres.
O n ne croiroit à la mutation sérieuse du marché Bou
q u et, que si on pouvoit croire à celle de mes bestiaux
et de mes récoltes.
O r , le sieur Jorrand n’a pas même osé persister à vou
loir s’approprier mes bestiaux. Il a avoué n’avoir qu’un
titre co lo ré, et une propriété apparente.
D e même il l’a dit pour son bail à ferme; et la preuve
en est qu’il n’en a pas demandé la maintenue lors de
l’expropriation.
A in si il ne faut le juger que comme il s’est jugé lu imême ;
Puisqu’il ne veut pas garder la qualité honorable d’ami
officieux, chargé d’améliorer ma fortune, il faut qu’il
avoue n’avoir voulu que la dévorer.
�( 35 ) .
Mais malgré lui il n’est qu’ un mandataire comptable :
et une triple qualité l’oblige à rendre un compte depuis
la fin de l’an n .
i°. Comme fermier sans avoir rien p a y é , il doit un
compte des récoltes, des bestiaux et de leur cro ît, des
bois coupés et de l’arriéré des fermages.
Et qu’il n’objecte pas que déjà je suis convenu avoir
conservé la possession de mes biens ; cet aveu que je
pou vois dissimuler, puisqu’un bail authentiqua m’en dispensoit, est une preuve de ma véracité. Mais j’ai expliqué
que ma possession avoit consisté à être le maître appa
rent comme par le passé, et à recevoir le blé néces
saire à ma consommation; mais le surplus des denrées,
les bestiaux, les bois, etc., sont restés à la disposition du
sieur J o rra n d , comme je l’ai déjà dit.
Q u’il n’objecte pas non plus qu’étant mon créancier
de 14,000 francs, il a entendu se payer par ses mains,
en prenant quittance des fermages et des bestiaux par
anticipation.
Il ne peut pas le dire a in s i, puisqu’il a affirm é, en
nivôse an 12 , être mon créancier de ces 14,000 fr.
20. Comme mon mandataire général il est comptable,
i ° . de tous les bois préparés à mes frais, qu’il a employés
au marché Bouquet ; 20. des bénéfices de ce même mar
ché ; 30. de 10,000 francs qu’il a touchés pour moi de la
trésorerie, et de toutes autres sommes moins considé
rables que je pourrai justifier.
30. Comme syndic des créanciers, il est encore com p
table de tout ce qu’il a dû faire pour rechercher tout
mon actif ( notamment la créance de 27,791 francs, due
�( 36 )
par L ia is, et celle de 10,000 francs, montant de deux
traites acquittées au sieur F a u c h ie r), faire valoir mes
ressources, et n’en laisser péricliter aucune.
L e sieur Jorrand’veut singulièremet abréger sa respon
sabilité. Il dit qu’il n’a été syndic que pendant l’an 12 ,
l ’an 13 , et partie de l’an 14 ; et même qu’il n’a point
de-comptes à rendre pendant ce délai, parce que les
créanciers m’avoient laissé la gestion de mes affaires.
Il y auroit bien de la mauvaise foi dans cettte objection,
si elle étoit sérieuse; c a r ie sieur Jorrand n’auroit eu un
syndicat de deux ans que pour s’approprier tout ce que
mon actif présentoit d’avantageux, et il auroit accepté
une fonction purement oisive.
Cette prétention choque la loi, qui répute tout syndic
comptable. Elle choque aussi la vérité ; car plusieurs let
tres du sieur Jorrand prouvent qu’ il géroit mon actif,
régloit et recevoit. Ainsi je n’avois conservé la gestion de
mes affaires , que comme marque honorable de confiance
>
■
de mes créanciers; mais par le fait, c’est le sieur Jorrand
qui a tout dirigé , et je ne me suis mêlé que de ce qu’il
m ’abandonnoit, et sous sa tutelle.
Ouant
à la durée du syndicat
du sieur J o rran d ', ce n’est
V
“
pas là ce qui doit borner sa comptabilité; car un bail à
ferme de neuf ans, et le marché Bouquet, d’ une durée in
définie, n’ont rien de compatible avec les deux ans du
syndicat.
Il ne faut pas non plus que le sieur Jorrand prétende
être quitte, pour avoir fait les fournitures des seuls bois
préparés pour mon compte ; il suffit qu’ il ait voulu
prendre sur sa tête le marché Bouquet, pour qu’il doive
�C 37 )
rendre compte du bénéfice dont il étoit susceptible, sans
le régler à sa manière.
T o u t mandataire doit accomplir le mandat, tant qu’ il
en demeure chargé , et répond des dommoges-intérêts
qui pourroient résulter de son inexécution (C o d e civil,
- article 1991 ).
Si cette loi peut quelquefois paroître sévère pour
celui qui est resté chargé du mandat de gré à gré , et
par oubli de s’en départir, ce n’est au moins pas pour
celui qui a voulu le retenir en croyant se l’approprier.
L e sieur Jorrand a dit en plaidant, qu’il devoit ce
procès à l’acquisition qu’il avoit faite de ma maison.
J ’ai pu etre étonné (com m e tout le m o n d e) que
lui Jorrand, déjà propriétaire de trois maisons, dont deux
au Moutier et une à À h u n , en ait acheté une quatrième.
Mais je ne comprends pas trop comment le sieur J o r
rand a pu supposer que je ne lui demandrois compte de
rien, s’il n’a voit pas acheté ma maison. C’eût été faire tort
de 5o,ooo francs à mes créanciers , et le sieur Jorrand a
oublié son rôle en laisant croire que son intention étoit
de les frustrer, en ne rendant compte de rien
L e sieur Jorrand a longuement discuté sur le contrat
d’union du sieur B erm on d, qu’il prétend ne pas etre
dans les formes voulues par les ordonnances.
Il dit « que les sieurs Bermond et Serson ne sont pas
et créanciers , parce qu’ Àubreton avoit suspendu en
« thermidor an 11 , et que leur obligation est du i5
« vendémiaire an 12. » Il ajoute qu’aucun des créanciers
n’a aiïirtrié, et que le contrat n’est pas homologué.
Quoique le sieur Jorrand connoisse à fond cette ma-
�( 38 )
tiè re , tout ce qu’il a dit à ce sujet n’est que mensonge.
Tous les créanciers ont figuré au contrat d’union.
M M . Bermond et Serson sont créanciers, parce que
leur obligation n’est qu’un arrêté de compte, suite d’un
premier titre. Tous ont affirmé leurs créances, et le
sieur Jorrand comme les autres.
Il y a eu jugement d’homologation; les sieurs Bermond
et Serson y sont parties; le sieur Jorrand sa voit tout cela
mieux que m o i , et cependant il le démentoit.
Je n’ai plus qu’un mot à répondre au sieur Jorrand.
IÎ a dit que je l’ai trompé sur l’état de mes dettes, pour
l ’engager dans mes mauvaises affaires ; et sans autre
explication il a pris texte dans ses propres paroles pour
se courroucer contre moi.
Trom per Jorrand eût été un peu difficile ; et je ne
me pique pas de faire des miracles.
Gomment ose-t-il dire que l’état de mes dettes lui étoit
inconnu? c’est lu i qui l’a dressé, et je l’ai encore écrit
de sa main! je le mettrai sous ses yeux , pour qu’il le
reconnoisse, et ne mente plus, au moins sur cet article (i).
Je n’ai pu rien dissimuler à Jorrand, puisqu’il avoit
tout en son p o u vo ir, qu’il cherchoit mes créances où
elles étoieut, et gouvernoit ma fortune comme la sienne.
Lorsqu’on se dit trompé, il faudroit un peu consulter
l’opinion publique pour savoir son secret, et surtout
(1) Le contrat d’union diminue le passif de plus de 80,000 fr.
Plusieurs des créanciers ont été tirés de la liste, notamment le
sieur Q u e y ra t, qui n’a signé le concordat que co m m e -démis
sionnaire.
�( 39 )
il ne faudroit pas s’aveugler au point de dire ce qui
choque l’évidence. Ceux qui compareront l’opulence de
Jorrand et la m ienne, demanderont ce qu’est devenue
ma fortune : on le leur dira ; et alors il est vraisem
blable que je ne passerai plus pour avoir fait une dupe
du sieur Jorrand.
Je crois qu’il faut arrêter là le cours de mes réflexions,
elles me mèneroient peut-être au delà des bornes que je
me suis prescrites; et après avoir dit que j’avois supporté
sans amertume la perte de mes biens, je serois peut-être
inconséquent. D ’ailleurs ma tache a été remplie en ren
dant un compte fidèle de ma conduite depuis l’an n :
je désire que mes créanciers me rendent la justice de
penser que j’ai voulu faire pour le mieux. Si le sieur
Jorrand a l’ infidélité de leur disputer un dépôt qui eût
dû être sacré entre ses mains, il a été de mon devoir
de m’y opposer de tou les mes forces. Maintenant, si les
Liais, les Caillas, les Pothier et les Jorrand triomphent,
je me consolerai en pensant que je n’ai rien à me re
procher, ni dans mes intentions, ni dans mes efforts,
et j’aurai la fierté de dire seul : T o u t est p e rd u , fors
l’honneur.
Signé A U B R E T O N .
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
A R IO M , de l’imp. d cT H IB A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire»
rue des T aules, maison L a n d r i ot. — Décembre 1810.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aubreton. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Subject
The topic of the resource
créances
fraudes
commerce du bois
construction navale
Description
An account of the resource
Mémoire pour le sieur Aubreton, receveur de l'enregistrement et des domaines en la ville d'Ahun, défendeur en assistance de cause ; contre le sieur Henry-Claude Bermond, ancien administrateur des loteries, rentier demeurant à Paris, demandeur ; et contre Louis Jorrand, notaire impérial, habitant de la ville d'Ahun, défendeur au principal ; en présence de Gaspard Bet-Bouquet, habitant de la ville d'Auzance, aussi défendeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
An 5-1810
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0425
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ahun (23001)
Auzances (23013)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53809/BCU_Factums_M0425.jpg
commerce du bois
construction navale
Créances
fraudes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53808/BCU_Factums_M0424.pdf
db20d44e9c624ced60fb8705a89233b3
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MÉMOIRE
A LA COUR I M P E R I A L E
DE RI OM,
P O U R les M a i r e et H a b i t a n s de V ic-le-C om te ,
intimés ;
CONTRE
E
t ie n n e
N A T E Y , habitant
à
N yon en,
H e lv é lie, appelant.
D a n s
un mémoire publié en janvier 1809 ,l e s
h a b it a n s d e Vic-le-C ompte crurent avoir présenté leur
cause avec un ensemble de faits et de moyens qui
épargnat des discussions nouvelles
mais par quatre
réponses imprimées coup sur c o u p ,
le sieur N atey
-
9
�( 2 )
leur prouva que la latte n ’était pas finie , et qu'il
fallait se préparer à discuter encore.
lies trois premières réponses n'étaient qu’ une r é
pétition de ses moyens et des injures éternelles dont
le maire de Vie a été forcé de se faire une do ulou
reuse habitude depuis le co m m en cem en t de la con
testation. Ces diatribes nouvelles n ’engagèrenl pas la
com m un e de Vie à répondre , persuadée que le sieur
N a t e y n’ayant plus à qui parler, se lasserait d’écrire;
elle se trompait, car bientôt un quatrième écrit parut,
contenant des fragmens iijiprimés de quatorze pièces
inédites ; alors la com m un e de Vie fut
forcée
de
rompre le silence pour discuter ce q u ’on jugeait à
propos de lui produire.
Cependant le sieur N a t e y en imprimant des ti tre s,
ne les communiquait pas , et cela se remarque au style
des discussions auxquelles ils ont donné lieu. Enfin
sur l’a p p e l, on est parvenu h voir cette production
nouve ll e, dont le sieur N a t e y se prévaut com m e d ’ un
faisceau de titres favorables à sa cause : un procèsverbal fait au greffe de la C o u r , paraît assurer q u ’il
ne lui reste plus rien à produire.
Ainsi la co m m un e de Vi e est m a i n te n a n t en pré
sence de toutes les forces du sieur N a t e y ; elle peut
donc espérer que l’exam en auquel elle va se l iv r e r ,
achèvera d’éclaircir une cause déjà jugé é p a u l a n t et
aussi solennellement
qu’ elle pouvait l’être^cw
mais que m alh eu reu s em en t, l’obstination des pr o-
�( 3 )
priétaires de Chadieo J a remis en litige à tontes les
époques q u ’ils ont cru favorables à leur prétention.
Cet
exa m en eût pu se réduire aux titres princi
p a u x , et ne partir que des conventions laites il y a
trois siècles, ce qui était une époque assez r e c u l é e ;
mais le sieur N a t e y remonte à deux siècles a u - d e l à ,
et tire des inductions des moindres mots : on sera donc
forcé de reprendre la série de tous les titres co nnus,
pour que le sieur N a t e y ne répète pas toujours que
les habilans de V ie ont aiïeclé de ne pas v o i r , quand
ils avaient seulement cru inutile de répondre.
O B JET
DU
PROCÈS.
Il consiste en une grande étendue de terrain, appelée
Les Gachiers et La Vergiere. Quoique l 5Allier les sé
pare de V i c - l e - C o m t e , il est p r o u v é , par tous les titres
produits et par l ’aveu du sieur N a t e y , qu’ils sont situés
dans l’ancienne justice de Vi c-le-Com te .
Il est p r o u v é encor e que ce terrain n’a jamais cessé
d’être destiné au pâturage
des bestiaux arans
des
habilans de V ic-le-C o m t e. Ils le tenaient en défense
contre l’entrée de tous autres bestiaux. En usant de
ce terrain pour le pâturage, et en le tenant en défense,
les habilans de Vie exerçaient tout le droit de pro
priété que la Coutume d A u verg n e a entendu donner
aux communautés d’habitans, et que les lois nouvelles
leur ont confirmé par des expressions explicatives et
positives.
z
�( 4 )
,
c
Placés entre Chadieu et l’ 41 Her, les Gâchîers ont
tour-à-tour excité la convoitise des seigneurs voisins.
L e s justices d ’A u t e z a t , de M o n f o n , de Chalus aboulissaient h cette partie ; et de-là sont nées de loin en
loin des prétentions que les habitans de V ic- le- C om te
ont toujours repoussées. Ces luttes n ’ont fait au con
traire que confirmer leur droit ; car ils sont restés en
possession du pâturage et du droit exclusif de tenir les
Gâchiers en défense.
Ce n ’est point encore le momen t d’ examiner quels
titres s’appliquent à ce local, et marquent l ’ancien état
des choses. Les procès qui ont eu lieu entre les par
ties, dans des tems très-loin de nous, doivent plutôt
nous apprendre quels furent les titres que les parties
jugèrent propres à fortifier leurs prétentions.
Cette observation n ’a pas pour but d’éluder l’ex am en
de tout ce qu’a produit le sieur N a t e y ; on ne veut rien
en omettre. Mais il est d ’abord essentiel de parler du plus
ancien procès qui paraisse avoir été soutenu entre les
parties, il en résultera de grands éclaircissemens pour
l ’intelligence des titres actuellement produits. P eu t- être
sera-t-il plus aisé ensuite d’en déterminer l’application
a c t u e l l e , par comparaison a vec ce qui était dit à des
époques contemporaines.
Prem ier procès terminé par transaction de i
5ii.
i
Il ne reste d’autres traces de cet ancien”procès q u ’une
longue écriture ploy ée en rou leau, suivant l ’usage du
�.(
5
)
fems, et où se trouve la date d ’une sentence de 1458 ;
dont l’appel était pendant.
On y voit que les habitans troublés dans leur pos
session par une sentence de séquestre , dont ils étaient
appelans, argumentaient de leur possession i m m é m o
riale de pâturage pour leurs bestiaux arans, et de tenir
les Gâchiers en défense.
Leur s adversaires, propriétaires de Chadieu ( l e sieur
Morinot- D e b o r , et le sieur D u b r e u il , gendre de F ra n co n in -D e b o r ) prétendaient avoir bail à cens par m a
dame de B e r r y , comtesse d ’A u verg n e , m o y e n n a n t
3 fr. d’o r , au m o y e n duquel ils disaient avoir droit
au pacage des G âc h ie rs , à la coupe des arbres
et
m ê m e au labourage qui lui donnait droil de les tenir
en défense pendant trois mois de l’année. Par ce m o t i f ,
ils avaient mis en cause le sieur D e l m a s , procureur
fiscal du comté d’A u v e r g n e , qui s’ était adjoint à eux.
L e s consuls de V ie niaient ce bail h cens^ qui n ’était
pas produit, et disaient que le sieur Franconin-D ebor,
pour avoir la permission de faire passer ses bestiaux
à travers les G âc h ie r s , pour les mener à la rivière ,
sans encourir l ’amende ( d e 60 s. ) , et pour avoir du
bois à sa proximité , avait obtenu cette permission
pour le terns de la vie de madame la comtesse de
33e r r y , m o y e n n a n t la redevance de 3 fr. d or ( o u 60s.
valeur de la clame ).
.V o i c i , au reste, les propres dires des consuls de V i e ,
dans leurs m oyens d’appel contre l ’objection des pro
�( 6 )
prié!aires de Chadieu de ce que leur prédécesseur, feu
Franconin avait droit aux Gâcliiers , m oye nnan t un
cens de trois francs d'or.
« R ép o n d en t lesdits consuls q ue de ladite adsance ils ne
savent
rien , et le nient expressément , et le posent par fait
contraire , en tems que. besoin
serait....... Item , et si aucune
adsance fut f a it e , audit cens de trois francs d’o r , audit f eu
F ra nc on i n . si ne fut-elle faite seulem ent au regard et tant
que lo u ch e la couspe des leignes des arbres lors y étant audit
g â c h i e r , et des fruits des autres arbres francs qui pour lors
y étaient et sont e n c o r e , p our ce
et C h a r n a y sont lointains de b o i s ,
que les lirj ux de
C h ad i eu
p our a voir le .chauffage
dudit Fr an con in et de ses successeurs....... I t e m , et c o mbi en
que ladite adsance eut élé faite___ si ne l’avait é t é ,
sinon
au regard des leignes et fruits , et de donner et permettre audit
feu F ranconin fa c u lté et perm ission de p ou v oir traverser ledit
g â ch ier , ensem ble son b é ta il , s'en aller en A lli e r , pour Vy
abreuver , et p uis s ’en retourner adraye par ledit g â c h ie r ,
afin de le garder d'am ende envers ju s tic e , p our ce que
les lie u x de Chadieu et de Charnay ne sont pas de la j u s
tic e de V ie , en la q u elle ledit territoire des G âcliiers est
s i s } com m e dit est : laquelle chose serait et est bel et g r an d
a v a nt a g e audit Bort ; et il en devrait être c o nt en t , veu que
tous les jo u rs il et ses bêtes et dudit D u b reu il pourraient
être prinses par ju s t ic e .......... Item , ne pouvait donner p e r
missi on
audit
F r a n c o n i n de pâturer sans le
desdits consuls. O r es!-il
prédécesseurs ne
ainsi
consentem ent
que lesdils consuls ni leurs
consentirent j a m ai s ........
Jtern , et ne v a u
drait rien la prétendue adsance perpétuelle dudit Gâ chi er ; car
sera p ro u vé que ce fut durant la vie de feue bonne m ém oi re
M a d a m e cje Be rr y , de laquelle un n o m m é Bernard C h a l m e
était officier en ladite C o m t é ; et o m br é de son of ï ic e , il était
tellement craint que nul
des ma na ns de la ville n ’osait re-
�( 7 )
v a nc h er son cas contre lui. E t p o u r ce que ledit C h a l m e , au
i ems de lors ma ri a un e sienne fille a ve c nn fils dudit F r a n conin , et pour l’alliance d’entre ledit Chai me et F r a n co n i n ,
i celui C h a l m e fit passer à ladite da me ladite adsance perpétuelle
( s’aucune en fut oncques passëe ) , sans y entrevoir le co n sen
tem ent et v o lo n té desdits con su ls ce que serait ne'cessaire p o ur
que ladite adsance perpétuelle dut ou put sortir effet.... h e m . . . ,
q u ’ ils sont en possession de faire p ât ur er l eur bétail en tout
temps et saison de l’a n , et aussi qu’ils ont le droit de p r o h i
b e r a u xd its M o rin o-D eb ort et D u b reu il , et à tous autres
q u 'ils ne clôturent n i labourent n i m ettent en défense led it
circu it de G âchier, ledit tems défensable on antres quel conques,
et aussi q u ’ils ne fassent pâturer leur bétail en quelque tem ps
et saisons de Pan que ce s o i t , etc. ».
On ignore les attires débats de ce procès et d’ un,
autre procès pendant dans le même te m s, tant sur le
p é ti toir e qu e sur le possessoire, ce qui, jusqu'en 1667,
n ’était pas incompatible. On trouve seulement des let très
de relief d’appel de 1 4 5 3 , qui prouvent qu’il devait
être porté aux grands jours généraux d ’A u v e r g n e , où
furent ajournés Pierre .Delmas, procureur fiscal, et
Morinot-Debort.
Il est vraisemblable qu'il n’y avilit pas encore de
jugeynent définitif lors de la rédaction de la Coutume',
5 i o ; et'cela est prouvé par la transaction de i 5 i i .
Celte transaction du 2 juillet i 5 i i , passée entre
en i
Anto ine D e b o r , curé de S a i n t - P i e r r e , seigneur de
Chadieu, et les consuls et habilans de V i e , rappelle le
procès existant au sujet des deux Gûchiers, dont les
confins sont exactement donnés.
�('
8
)
Il y est exposé que les consuls de Vie prétendaient
avoir tout droit de propriété et possession à sesdits
Gâcliiers, sis en la justice et châtellenie de Vic-le-,
C o m t e , desquels ils ont joui de toute ancienneté; et
q u ’il n’était pas permis audit D e b o r d ’y faire pâturer,
vu q u ’il est en autrui justice.
L e seigneur de Chadieu répondait que les Gâchiers
lai appartenaient en pr opriété, par veslison de mes
sieurs les comtes de Boulogne et dM u ve rg ne.
On y rappelle ensuite les deu x procès existans pour
raison des droits de propriété et de pâturage.
Viennent ensuite les conventions de la transaction
bien définitives, bien claires, bien parfaitement e x é
cutées, par Les propriétaires de C h a d ie u , et qui l’eussent
toujours été si Chadieu n’eût été par la suité réuni
dans la m ê m e main que la haute justice de Monton.
I l est convenu par cette transaction, i.° que le
grand Gâchier sera joui en c o m m u n ;
j2.° Qu e les liabitans de Vie auront droit de le tenir
en défense depuis N o t r e - D a m e de mars jusqu'au 16
m a i , ou autre tems plus ou moins long q u ’il sera
avisé par la c om m u n e de Vie ;
3.® Qu e lesdits liabitans de Vie désigneront la qua
lité du bétail admis au pâturage ;
4 -° Que le petit G âch ie r sera joui en com m un en
toute saison de l ’a n , sans être mis en défense;
5 .° Qu e les seigneurs de Chadieu ne pourront y
faire.
�^9 )
faire pâturer d’autre bétail que le leur ou celui de leurs
m é ta y e r s , tenu à cheptel d’e u x , et dans la ju sti ce ,
sans fraude;
r
6.° Que le bétail et arbres sur pied èsdits Gâchiers,
appartiendra en propriété aux seigneurs de Chadieu,
qui paieront la censive due , à raison de c e , à madame
la comtesse d’A u v e r g n e ;
7°. Que les seigneurs de Chadieu ne pourront planter
aucun nouvel arb re , mais remplacer ce ux qui périront
ou seront arrachés ( i ) .
Cette transaction pr o d u it e en une expédition collationée sur /’o rig in a l, a donné lieu à des exclamations
du sieur N a t e y > d ’autant plus grandes que la pièce
est plus précieuse et décisive. 11 y a découvert que
l ’original est représenté par une demoiselle Pelissier,
épouse d’un sieur B o n n et, procureur fiscal ; et co m m e
le notaire s’appelle Pelissier, le sieur N a tey a trouvé
très-plaisant d ’opposer que le maire de Vi e produisait
un acte faux , signé par une demoiselle.
11 n 'y a q u ’ une petite cfifficulté , c'est que cette
demoiselle Pelissier n’est pas m êm e dite avoir signé,
et au contraire, il est dit, collationê sur son o r ig in a l,
par
m oi
N O T A IR E
ROYAL
so u s sig n é
est en efîet le seul qui ait signé
,
etc.; et ce m oi
p e l issie r
, signature
d’h om m e indubitablement , et de la m ê m e main que
le collatroné.
( i ) L é texte littéral de ces conventions est dans le mémoire des habitai»»
ipjprimé en 1807, page G,
3
�( IO )
Cette'transaction de
i
5 i i a été produite dans tous
les procès postérieurs.
I l faut remarquer co m m e chose
essentielle pour
l ’aven ir, qu’elle n’a eu lieu q u ’avec le propriétaire de
C h ad ie u , et non avec le seigneur de Monlon.
Titres produits par Le sieur Natey
procès de 164 1.
antérieurs au,
i°. D e u x lettres patentes de 1344 et 1 3 7 4 pr ouvent
que Chadieu était un fief séparé de M onto n ^ appelé
Le clos de C h a d ie u , tenu en arrière-fief du sieur de
B e a u f o rt, seigneur de Monton.
Cet arrière-fief avait 76 septerées, et n’avait aucune
directe.
2.0
Un»acte du 9 /février 1 43 7 pr ouve q u ’ un sieur
de Gons , propriétaire de Chadieu , fit h om m a ge à
M . de Beaufort de ce clos de Chadieu , et d'une
vergière confinée par autre vergière dudit seigneur,
plus du droit dê pacage dans les G â c h i e r s , que le
seigneur dominant dit être à lui.
L e sieur N a t e y tire des inductions de ce titre pour
dire les Gâchiers appartiennent k C h ad ie u; et le titre
dit au contraire que les Gâchiers sont hors C h ad ie u ,
étant confinés par Chadieu , s a u f le droit de pacage.
•A la vérité les Gâchiers sont dits appartenir au
seigneur de M o n t o n; mais attendons d ’autres ti tr es,
et ce seigneur dira l u i- m ê m e que les Gâchiers ne sont
pas à lui. Jusqu’ici il suffit de bien observer que le
�( II )
propriétaire de C ha d ieu n ’a , d ’après son propre litre,
q u ’un droit de pacage.
; Il est encore à observer que dans le procès terminé
en 1 5 i i , le propriétaire de Chadieu ne parla pas de
cet acte, et sur-tout n'appela pas en cause le sieur de
Beaufort co m m e tenant le pacage de lui.
A u contraire ? il ne prit droit que sur un bail h
cens de Jeanne de B e rry ( morte en 1 4 2 8 ) , et mit en
cause son procureur fiscal.
3 .° L e sieur N a t e y a imprimé un titre q u ’il date de
i 53 o , pour prouver que le propriétaire de Chadieu
a acheté les Gâchiers en . i 53 o.
L e maire de Vi e avait opposé les lois de 1 7 9 3 , qui
obligent les ci-devant seigneurs de fiefs à restituer les
co m m unaux a u x e o m m u n e s , à moins que les seigneurs
ne produisent un titre légitime d ’ acquisition. Aussitôt
le sieur N a t e y a trouvé un titre d’acquisition, ( c ’est
ainsi au moins q u ’il le d é n o m m e ) .
A la v é r ité , il n’a pas le titre q u ’il a imprimé sous
cette daie de i 53 o ( 1 ), mais c ’est un fragment q u Jil a
trouvé dans un autre acte de i 665 q u ’il produit. Il en
résulterait q ue le sieur de Beaufort ¡seigneur de Monton>
(déjà censé propriétaire des Gâchiers, au dire d e T a t i e
de 1437) traitait pour ces Gâchiers en i 53 o. A v e c qui?....
A v e c les habilansd’Au tezat,do ril ilétail encore seigneur,
et dont aucun acte ni procéduie n ’explique ni n’indique
m ê m e les moindres prélentions a ces Gâchiers.
/
( 1) V . Mémoire Eatey, intitulé : Observations d éfin itiv es, etc., pag«5.
4
�( *2 )
Cet acte de i 5 3 o , qui n’existe pas, et qui ne peuf
pas être suppléé parla relation fautive et obscure qu’on
en trouve dans un acte de i 665 , n ’a d’ailleurs aucune
analogie à la cause act ue lle, et'vn’apprend pas m êm e
s’il y a identité de local. A u reste , q u ’importe aux
habilans de Vi e un acte passé entre un seigneur et
ses vassaux seuls, pour les faire désister de prétentions
imaginaires , en l’absence et à l’insu de la seule partie
intéressée, qui n’en dem eur e pas moins en possession.
D e tels fragmens d’a c t e s , fussent-ils à l’abri de toute
su spicio n, ne sont ni des titre s, ni des pièces pro
b ante s, et ne méritent pas d ’être honorés de ce nom.
4 ‘ ° L e sieur N a t e y a produit un acte du . . . . . .
i
53 i , sur lequel il fonde év id em m en t tout son es
p o i r ; aussi était-il le seul qu'il eût d’abord jugé digne
d ’être produit à l’appui de .sa demande.
Cet acte signé en expédition par un notaire ( dont
il serait peut-etre plus difficile de vérifier la signature
que celle de ce PeU ssier, que le sieur N a t e y a si fort
à cœur de récuser), est dans la forme d’une transac
tion qui serait censée avoir eu lieu entre les habilans
de V i e et le seigneur de Monto n ( q u i n’était pas alors
propriétaire de C li a d ie u ), au sujet des Gâchiers, sans
parler le moins du monde du long procès de 1 4^ 8, ni
m êm e d'aucuns des actes déjà connus.
A la vérité, et ce qui aide à comprendre toutes ces
omissions, les habilans de Vie présens audit acte ne sont
pas du tout les consuls qui jusqu’alors avaient plaidé,
gouverné les Gâchiers et représenté leur ville, et que
�( i3 )
rien n’aurait empêchés de transiger eux-mêmes à une
aussi grande proximité.
C e sont les sieurs L . D e v a l , J. M arg er ide, F. L a ch al, M. A r n a u d , P. Bresson, tous, est-il dit , de La
ju r id ic tio n de V i c - l e - C o m t e , faisant pour les habitans.
L e sieur de Beaufort est l u i- m êm e présent de son côté.
•Les choses se passent dans une salle du château de
Chalus, appartenant au sieur de Beaufort.
Il leur expose qu'il tient à cause de son m ande~
ment de M o u to n , la justice h a u t e , m o y e n n e et basse
du canton de Chadieu ès appartenances duquel est sise
une verg ière , pré ou pâturai joignant l’Allie r, et que
les habitans de Vie ne peuvent y faire pâturer parce
que c ’est en a utrui ju stice.
Puis on fait répondre à ces habitans que Le cas de
ju s tic e ne<Les regarde pas ( i ) ; mais q u ’ils réclament
le pacage en vertu d’une concession dudit seigneur
de M o n t o n , pour service par eux rendus en 1425.
Après ce la, M. de Beaufort leur permet par recon
naissance, de faire pâturer leurs bestiaux à ladite ve r
gière appelée les Gâcliiers, tant au canton de C had ie u,
q u ’au terroir de C h a l u s , sans y porter dommage.
Puis il se réserve le droit de clorre et semer ce qu’il v o u d r a ; et cependant il veut bien permettre aux ha(1)
A quoi leur eût donc servi de plaider cent a n s , pour ce cas de
justice ?
L e sieur N atey veut cependant qu’ils aient plaidé deux cents autres
années depuis , pour n’avoir qu’un droit de justice , et qu’ils
obtenu que cela en 1641.
n ’a ien t
�( i ‘4 )
bifans de V ie le pacage après la Levée de La récolte>
s’ils font les clôtures e t ' n o n autrement.
Et enfin co m m e M. de Beaufort savait bien que cet
acte occulte n'empêcherait pas les consuls de Vi e d'user
de leurs droits, il termine par la plus contradictoire
des clauses.
I l stipule que les habitans de V i e demeureront g ar
diens en d éfen se, et que le seigneur de Mon ton n ’en
verra au pacage que les bestiaux du clos de Chadieu
( d o n t il n’était pas propriétaire ) , et de ses métairies.
Il est de la plus grande év id en ce que les consuls
de V i e ignorèrent absolument un acte aussi suspect ,
pour ne rien dire de plus.
Cet acte qui parle d'un, procès sans en dire les d é
bats , contre la forme du tems ; qui parle d#
'une pro
cure donnée a u x 5 habitans de V i e , sans en dire la
date ni la teneur; qui fait dire aux habitans de Vie,
le contraire de tout ce q u ’ils avaient soutenu av ec tant
de force , était-il fait dans la pr évo yan ce que le sieur
de Beaufort serait un jour acquéreur de C h ad ie u? D u
moins les choses étaient arrangées de manière à cadrer
av ec le passé et l’avenir. Quoi qu’il en soit de cet acte
b iz a r r e ,l ’ordre accoutumé ne fut pas changé :les mêmes
bestiaux furent menés au pacage ; et celui q u i , dans
cet a c t e , semblait parler en m a î t r e , consentit à rece
voir désordres de ce ux à qui il venait de donner une
simple permission.
Jusque-là nous avons vu les habitans de V i e repré-
�(
.i 5 )
'
sentes par des consuls. Ici ou n’eit veut pas : on n’a
appelé que cinq individus sans caractère.
S’ils ont eu une pr ocure , de qui Favaient-ils ? L e
notaire peut bien ne pas l ’avoir transcrite, mais si elle
était émanée d’ un délibéraloire des habitans, ilTau rait
dit.
C et acte sincère ou faux resta dans un oubli absolu.
L e s consuls de V i e ont continué de faire valoir leurs
droits et leur transaction.
L e seigneur de Beaufort en fît-il usage l u i - m ê m e ?
Nous allons le savoir dans Finstant m ê m e , dans u n
cinquième titre produit au procès.
En i
536 , le sieur de Beaufort fut assigné par le
seigneur de Vic-le-C om te, pour avoir retiré des épaves
de la rivière d’Allier. I l se défendit en soutenant que
les justices s’ étendaient jusqu’à la rivière d'Allier.
C'était le m êm e Jacques Beaufort qui a v a it , dit-on ,
acheté les Gàchiers en i 53 o des habitans d ’Autezat.
C ’était le m êm e qui venait de faire déclarer dans
sa salle basse de C h a l u s , que La ju s tic e comprenait
les Gâchie rs, et que les habitans de V ie n ’y avaient
pas droit, étant en autre ju s tice , mais par sa permis
sion et concession.
Cependant il transigea le 8 décem bre 1 6 4 2 , et il
reconnut que la justice du comté d’A uvergn e ( dont
�C i6')
V i c - l e - C o m t e est c h e f lieu ) , comprenait la rivière
d’Allier d 'u n côté et d ’autre (i).
U n dernier titre, produit aujourd’hui au procès par
le sieur N a t e y , est plus précieux e n c o r e ; c ’est le titre
d'acquisition m êm e de C h a d ie u , du i
3 décembre 1627.
Il en avait très-bien jugé l’importance , car lorsqu’on
le lui opposa pour la première f o i s , il fit signifier
un réquisitoire à ce que le maire fût tenu de lui en
donner copie. Idée bizarre , car c ’est lui-même qui
en a l’expédition. C ’est son propre titre.
Ce titre dit donc que le sieur Laguesle vendit au
sieur de Beaufort, i.° Chadieu co n ten ant, etc. confiné
PAR
le
p a c a g e
d e
V
ic
-
le
-C
o m t e
,
appelé la
gière ; 2.0 trois prés confinés par les Gâchiers ,*
d r o it
d e
p a c a g e
V er-
3 .°
LE
dans lesdits Gâchiers et vergières;
4.0 les arbres plantés le long de la rivière.
- I^e sieur N a l e y jo ue a v e c les mois , pacages de V ic le -C o m te , p o u r dire que cela ne suppose au x habitons
que Je pacage q u ’il .leur accorde.
Mais il est muet sur l ’explication qui vient après,
et qui ne restreint au simple droit de pacage que le
seul propriétaire de Chadieu.
(1)
L e sieur N atey a menacé d'attaquer cet acte de fa u x , d’abord in
définiment si on continuait d ’en faire usage.
On a continué d’en faire usage, et le sieur N a t e y , baissant d’un ton,
9 dit qu’ il s’inscrirait en faux si l’acte parlait des Gâchiers. Il ne ris
quait rien a v ec ce conditionnel ,
car le mémoire des habitans de V i e ,
(p a g e 6 ) , ne rapportait de cet acte que ce qu’on vient de. répéter.
En
�( *7 )
E n ne scindant pas le sens de l’a cte, il est d ’une
clarté incontestable que le sieur de Beaufort a acheté
Le droit de pacage dans les Gâchiers et vergières qui
font deux pacages de Vic-le-Com te.
Un autre acquéreur pourrait é q u i v o q u e r , en disant
qu’il a mal entendu ce qu'il exprimait ; mais il est
incompatible que le sieur de Beaufort, se prétendant
propriétaire des Gâchiers , en vertu des actes de i 53 o
et 1 5 3 1 , consentît cependant à reconnaître que ces
Gâchiers étaient les pacages de V i c - l e - C o m t e , et sur
tout à acheter un droit de pacage dans sa propre
chose.
L e sieur Laguesle, qui vendait Chadieu, était le suc
cesseur d’Antoine D ebord qui avait passé la transaction
de 1 5 l i.
Aussi il l’exécutait pleinement dans sa vente.
Il suivait de point en point les clauses de cette
transaction de i
5 11.
Elle ne lui donnait dans les Gachiers que le droit
de pacage, et il n’a vendu au sieur de Beaufort que
le droit de pacage.
Elle lui donnait les arbres, et il a vendu les arbres.
Elle reconnaissait les Gâchiers com m e pacages de
Vic-le-Comte, et il les a reconnus com m e pacages de
Vie le-Comte.
Il les a exceplés de sa v e n t e , en les donnant pour
contin de Chadieu.
• .
L e sieur de Beaufort ? a c q u é r e u r , a accepté toutes
ces clauses.
5
�c î8 )
Il n’a m ê m e fait aucune réserve contraire.
Il a donc f o u r n i , l u i - m ê m e , une première preuve
qn’il ne regardai! pas com m e un titre sa prétendue .
transaction de i 5 3 i .
Procès ju g é en 1 6 4 1 ,
Francois de B e au fo rt ayant ainsi acheté Chadieu
avec des clauses récognitives du droit d ’autrui, voulut
a rra c h er, par la force et par son crédit ; ce q u ’il n’avait
pu obtenir par d ’autres voies.
En i 632 il suscita une querelle entre ses domesti
ques et les pâtres de Vie.
Les consuls prenant cette querelle c o m m e un trouble
à leurs droits, en rendirent plainte; leur démarche
prouva q u ’ils méconnaissaient et l’acte de i 5 3 t , et
la soi-disant procure qui eût dû être ém anée d’eux.
Il
reste
une information
de
cette époq ue ,
et
Ton rem a rq u e, dans les dépositions, que tous les té
moins, tout désintéressés q u ’ils étaient, ne parlent ja
mais des Gâchiers, q u ’en ajoutant uniformément et
n aïv e m en t : les Gâchiers appartenant a u x kabitans
de Vie-Le-Com te,
François de B e a u f o r t , co nv aincu , ne pouvait plus
lutter ave c des derni-mesures. 11 e n v o y a tenir des as
sises sur les Gâchiers par ses officiers. Puis il y fît saisir
des bestiaux, prétendant cette fois que les Gâchiers
étaient dans sa ju s tic e de C hains. Les habitans de V ie
1
�( *9 )
répondirent que les Gâchiers étaient dans leur jus
tice ( i ) , en vertu de La transaction de i 5 i i .
L e procureur du ro i, au comté d ’A u v e r g n e , inlerv i n t , disant que les Gâchiers étaient propriété du roi,
co m m e sis en la justice de Vic-le-Comle. IL se pLaignit
de ce que Le sieur de B ea u fo rt n avait f a i t apparoir
d ’aucun titr e , (2) quoique sommé de le faire.
U n e sentence du 7 février 1 6 2 6 , ordonna que le
sieur de Beaufort serait tenu de répondre dans quin
zaine.
Il répondit, ( 3) mais quels titres produisit-il? un seul
a c t e , celui du 20 octobre i 53 o (q u ' o n ne montre
plus), par lequel la propriété des Gâchiers lui aurait
été transmise par transaction et échange avec les h a
bita ns d ’Autezat.
M üls U ne produisit pas La prétendue transaction
de i
5 3 i , qui eût été plus applicable.
A u contraire , il argumenla de La redevance de
3 /r.
pour en conclure q u ’il résultait de cette rede
vance p o u r Lesdits Lieuoc, q u ’ils élaient à lui, sur-tout
d ’or,
depuis
q u ’il
était
encore aux droits des
habitans
d'Autezat (4).
( 1) Donc les consuls de V i e n’avaient pas fait d ir e , en i 5 3 i3 que la justice
ne les regardait pas.
(2) Ces mots soulignés avaient été retranchés par.le sieur Natey.
Pièce imprimée
a u x
observations définitives du sieur N a t e y , pag. io.* k
(3) Pièce imprimée i b i d ., pag. n. ,'12 et i3.
(4) Tout cet article est retranché dans la pièce imprimée.
6
�( 20 )
*■ Il combat lit La transaction de t 5 i t , en disant, non
^ pas co m m e le'traduit aujourd’hui le sieur N a t e y , que
c ’était une pièce fausse ; il disait seulement que les
consuls ne justifiaient pas de la ratification pr om is e;
q il ainsi ledit acle était nul et de nul effet..., faux...;
q u ’on devait le mettre au néant.
C ’était une conclusion tirée de la non exhibition,
mais ce n’élait pas une déclaration expresse qui arguât
l ’acte de faux.
On
voit
tout d’ un coup
que c’était le mom ent
d ’objecter aux consuls de Vi e la transaction de i
53 i,
si elle n ’était pas el le-m ême un acle faux.
Cette transaction eût répondu à tout ; à la ques
tion de justice, à la proprié té, etc.; le procès eût été
fini.
11 y avait eu une enquêle sur la possession ; le sieur
de Beaufort l’avait laissé faire : il discuta pied-à-pied
les dépositions avec beaucoup d ’injures contre les té
moins.
E n un seul m o t , l ’acte de
i
53 i eût fait to m b e r,
l ’enq uê te , si les habilans de Vie eussent été réduits
à une concession remunératoire de pacage hors leur
justice.
•Cependant François de Beaüfort ne fit aucun usage
d ’un acte passé dans son propre château. S’il existait
alors, au moins il n'osa pas en révéler l'existence.
L e procès fut ju g é, par sentence du
5 juin 1637 , en
�( 2ï )
faveur de François de Beaufort. L e siêùr N a tey rie la
produit pas (i).
Il a dii qu’elle donnait au sieur de
Beaufort la saisine des G âch ie rs , à cause de la justice.
Les consuls de Vie interjetèrent appel au par le men t,
com m e de juge inc ompétent, suspect et récusé.
L e sieur de la R o c h e - B r i a n t , seigneur de L a c h a u x ,
( f i e f sur le territoire de V i e ) , intervint pour demander
le pacage aux G â c h i e r s , et la propriété des arbres.
L e procès, d’abord appointé, en 1 6 4 0 , fut jugé sur
productions respectives, par arrêt d é fin it if du 17 mai
1641.
Cet arrêt , toujours considéré h Vi e com m e le seul
titre désormais nécessaire pour la propriété des G â
chiers, et conservé, en cette qualité, aux archives de
la c o m m u n e , est produit au procès actuel en deu x
expéditions originales, l’ u n e , en parchemin , avec la
signification, l ’autre, en imprimé , collationnée, signé
H en ry, avec un fa c tu m , imprimé dans le m êm e tems.
L e vu de pièces de l ’arrêt ne mentionne que la
production faite au parlement.
I
fa ctu m prouve que les liabilansdeVic avaient pro
duit plusieurs titres, et notamment ta transaction d e i b n .
Il prouve qu’on reprochait à la dame de Beaufort
de n ’avoir produit aucun titre ou acte de justice an
térieur au procès.
( 1 ) Sans doute à cause du vu de pièces qui aurait prouvé les titres
que chacun avait produits.
�( 22 )
Il pr ou ve aussi que. les consuls avaient dé couvert
la vente de 1 6 2 7 , et l’opposaient com m e preuve ém a
n é e du sieur de Beaufort lu i- m êm e , que les Gâchiers
étaient propriété de V i c - I e - C o m l e , et que la maison
de Beaufort n’y avait que le droit de pacage et les
arbres.
L e vu de pièces prouve que ce f a c t u m fit prendre
à m a d a m e de B e a u fo r t des Lettres de rescision , p ou r
être relevée des cla uses
apposées en son propre contrat
d ’acquisition , de 1627.
L ’arrêt avait à statuer sur deux chefs bien distincts
q u ’il faut remarquer dès à présent, parce que le iieur
N a t e y s’étudie à les confondre; l’un était la question
pétitoire du pâturage : elle était pendante entre toutes les
parties; l ’autre était relative aux arbres, et elle n’était
pendante qu’entre la dame de Beaufort et le sieur de
la R oche -Brian t.
O r , i.° « L e procès du pâturage est jugé définitive
ment. L a C o u r , sans s'arrêter a u x lettres de rescision
obtenues les 11
août 1640 et 21 avril dernier ( 1 ) ,
maintient et garde les habitans de V i e * et le sieur de
la R o c h e - B r i a n t, en la possession, sasine et jouissance
des Gâchiers 3 tant pour le droit de ju s t ic e que de
pacage (2);
« Ordonne que les consuls p ourro nt tenir lesdits
( 0 Cette p a r tie e s s e n t ie lle <le l’ arrêt a é té r e t r a n c h é e da ns l ’ i m p r i m é
d é f . , p. ïi>.
du sieu r N a t e y . — O b s e r v a t i o n s
(2)
Ici il n’ est parlé que de pacage, s’agissant d’ uu droit commua au
fiicjiu’ de Lachaux.
�(
23 )
Gâchiers en défense ( i ) , depuis le zb mars jusqu’au
i
5 m a i , ou autre tems plus ou moins (2);
«• Que la dame de Chadieu 9 et Chalus et ses m é
t a y e r s , sans f r a u d e , pourront y en vo ye r plTurer leurs
bestiaux ( 3) ;
«• Co nda mne la dame de Beaufort aux dépens, etc.»
2.0
L e procès des arbres reste seul en suspens, et les
habitans de V ie ne doivent pas m ê m e y être appelés.
* « Sur Le surplus de l’intervention dudit la R o c h e Briant , concernant Le retail et coupe des arbres au
grand Gâchier , les parties articuleront plus am p le
m e n t par-devant le juge de R i o m , autre que celui
dont est a p p el, etc.»
Voilà l ’arrêt que le sieur N a t e y atteste n ’avoir été
que provisoire sur les Gâchiers , vis-à-vis les habitans
11 ordonne de point én po in t'l'e xé cut ion de
la transaction de i 5 i i .
de Vie.
Séquestre des G â ch iers, et Procès crim inels.
L e comté d’A u v e r g n e passa dans la maison de Bouil
l o n , par échange avec Sedan.
C e changement inspira au sieur de Beaufort un
nouv eau désir de disputer les, Gâchiers aux habitans
de Vic -l e- Com te .
(1) lo i il est parlé des consuls seuls , et le signe de la
accordé à eux.
propriété
(2) Expressions prises, mot pour m o t, dans la transaction de
est
i5 ir.
(S) Autres expressions de iSi I. — Quelle est celle des parties que l’ar
rêt réduit au simple pacage ?
�C> 4 )
Il co mmença par faire défricher une partie des Gâchiers. Les consuls s’en plaignirent à leur nouveau
seigneur; et co m m e ses agens n ’étaient encore au fait
de rien , la récolte fut seulement séquestrée par or
donnance de M. P e g e y r e , commissaire de la chambre
des c o m p t e s , du 6 mars 1662; elle ordonna que le
sieur de Beaufort p ro d u ira it ses prétendus titres.' El c o m m e les consuls de Vie avaient le droit appa
rent
jusqu'à cette production, il fut ordonné que le
produit de la récolle serait versé en leurs mains, avec
défense au sieur de Beaufort de les troubler.
Les consuls donnent ces récolles à ferme au sieur
Cliamboissier, notaire de la ville , par acte du
5 juillet
166 5.
C e Chamboissierpa}^ sa ferme aux consuls le 12 mars
1666.
4
I.,es lems étaient propices. lies vexations qui pesaient
stirles campagnes n'avaienlpas encore mérité correction
royale. L e sieur de Be aufort, em ploya la force pour
chasser les bestiaux de Vie: on se bal til ;desarbres furent
coupés , le cuisinier de Chadieu fut lué par un n om m é
Eaure , cultivateur , de Vie. On informa de pari et
d ’aulie , et on en était lù lorsque les grands jours furent
convoqués à Clermont pour réprimer Les violences et les
oppressions des puis sans , et protéger La fa ib lesse des
officiers de ju stice (1).
(1) Préainbulg de l ’arrêt de convocation ,
.
août 1 665. )
Les
�( ^5 )
L e s sieur, et dame de Beaufort , décrétés de prisede-corps, par arrêt des grands jours, ré c rim in è ren t, dé
noncèrent les habilans de V i e , pour assemblées illicites,
et tâchèrent d ’intéresser à leur cause le nouveau sei
gneur de Vi c-le -C omte , M. le duc de Bouillon.
On représente aujourd’hui une pièce assez singulière,
quoique sans influence dans la contestation. C ’est une
espèce d’accord entre M. de Beaufort et M . le duc de
Bo u il l o n , daté du 6 janvier 1688 (1).
On fait déclarer à M. le duc de Bouillon q u ’il s’est
intéressé ¿1 obtenir l'abandon de tous procès civils et
criminels contre les officiers, consuls et autres habilans
de V i e , à leur p r iè r e , à condition de l ’indemniser
des dommages fa its, ventes, séquestres, coupes d ’ar
bres, etc.
Ensuite, M . de B o u il l o n , parlant pour lui s e u l , dit
q u ’ayant pris connaissance du légitime droit de M. de
Beaufort ès Gâchier et V e r g iè r e , il réitère définitive
ment son désistement de rien prétendre ès-dils l i e u x ,
comme domaines dépendans du comté d \Auvergne (2),
AUTREM ENT
que
po u r
l a
j u s t ic e
,
promettant ne
p o r t e r , ni faire’ porter par les c o u r s , ni cour de sa
M a j e s t é , aucun trouble à la possession desdits l i e u x ,
par M. de Beaufort : l’acte termine par une promesse
faite par M. de Bouillon au nom de ses vassaux , q u ’ils
(1) Im prim é aux observations définitives, page 22.
(2) Ces mots en italique ont été retranchés dans l’imprimé des observa
tions définitives.
7
�(26)
vivront à l ’avenir en bons voisins avec M . de Beau fort,
et renoncent à tous procès contre M . et m adam e de
B ea u fo r t (i).
'P uis l ’acte est dit f a i t triple , l ’ un pour M. de Bouil
lon , l’autre pour M. de B e au fo rt, le
3.e pour les offi
ciers et habitans de V ie.
\ M a i s , il n ’y a que de u x signatures.
Celle des consuls n’y est pas.
L e nouveau seigneur de Vi e avait eu sans doute
de bonnes inten ti ons, si tant est que la pièce soit de
lui : mais ses agens mettaient ses propres intérêts à
couvert en lui faisant réserver la ju s tic e sur les Gâcliiers , ce qui était la seule chose à laquelle il pût pré
tend re; ils compromettaient fort les intérêts des h ab itans d e ' V i e , par des expressions équivoques dont le
sieur de B e aufo rt se serait prévalu un jour.
A la vé rit é , les mots d q légitim e droit et d e possession,
pouvaient bien ne s’entendre que des arbres et du droit
de pacage promiscu, q u ’on ne contestait pas à M . de
Beaufort. L a clause de vivre en bons v o isin s, prouvait
q u ’on n’avait pas entendu disposer de la propriété :
car si la rivière d ’ Allier eût dû être la limite des parties,
la clause eût été bien inutile.
E n f i n ,
l ’abandon des pr o
cès contre M . et m adam e la com tesse, ne pourrait pas
s'entendre des procès sur la
p r o p r ié t é .
.Car il n 'y avait
pas alors de procès sur la propriété.
( i ) Cette clause est aussi retranchée dans l’imprimé.
�( 27 )
Q uoi qu’il en s o it, les consuls de Vie se défièrent;
ils ne signèrent pas , ils n’approuvèrent pas; et ce qui
va le prouver dans l ’instant m ê m e , c ’est q u ’il y eut
reprise des mêmes procès.
Cependant , ces procès eussent été éteints par cet
acte de 1668 , proclamé avec complaisance par le sieur
N a l e y , com m e une reconnaissance expresse, faite par
les ha bilans de V i e , que la propriété des Gâchiers appar
tenait uniquem ent à M. de Beaufort!
L e s poursuites furent reprises par requête du
3 1 juin
1 6 7 4 , donnée par M . de B r o g l i e , second mari de la
v e u v e de M . de Beaufort.
L es consuls de V ie y répondirent par requête du i . er
juillet 1 6 7 4 , et demandèrent leur renvoi.
.
Ces deux pièces détruisant absolument la prétendue
transaction de 1 6 6 8 , sont assez précieuses pour devoir
être analysées
•
M . de Broglie expose dans sa requête qu’il a existé
un procès e n tre Marie P e l o u x , v e u v e Beaufort , les
habilans de Vie , et le seigneur de L a c h a u x , «pour la
maintenue respective des droits de pour justice , et
p a c a g e
dans les Gâchiers.
Q ue ce procès f u t ju g é par arrêt du 26 mars 1 6 4 1 ,
qui porte , etc.
Que cet arrêt a ete execute.
M a i s , qu’à, l’égard de la coupe et retail des arbres,
le sieur de L a c h a u x , a abandonné sa dem a nde, en sorte
que les seigneurs de Chqdieu,, ont avant comme depuis
8
�(
ledit arrêt j o u i
dv
28
r e t a il e t
)
coupe
d es
ar bres
, sis
es G âchiers.
Il parle des plaintes de 1 6 6 6 , pour assemblées illicites
et coupes d’arbres; ail sujet de tout q u o i , M. le duc
de Bouillon écrivit à M. de Beaufort', le 24 avril 1669 ,
pour surseoir. Et il ajo ute, que depuis ce temps il ri en»
a p lus été parlé.
Il se plaint ensuite de nouvelles coupes d’arbres 9 et
demande permission d’informer.
A cela les consuls de Vie répondirent que l ’arrêt de
16 4 1 ayant réglé Les parties , et réduit le seigneur
de Chadieu au simple droit de pacage saris f r a u d e ,
après le terns dé/ensable e x p ir é , ne lui donnait pas le
retail des arbres, mais le soumetlait à une décision
entre lui et le S.r de Lach aux : q u ’il y avait eu en 1666
des informations respectives, décrets , arrêts des grands
jours , etc. Q u au mépris des d its arrêts des g ra n d s
jo u r s 7 le sieur de B ea ufort , a y a n t c o ntin u é ses vi o
lences par le retail des m êmes arbres, les habitans en
auraient fait couper la majeure pa rtie, et vendu iceu x:
q u ’y ayant eu informations et décrets, il était intervenu
de u x arrêts du parlement , par lesquels les habitans
ont été reçus ap p e l a n s , et le sieur de Beaufort aurait
été condamné à se représenter pour être procédé a u
ju g em en t du procès
intenté pendant la tenue des
grands j o u r s , pour raison d u d it trouble, retail et coupe,
d ’arbres. En conséquence , et à cause de ce procès
pendant , ils requièrent être délaissés au p ar le m en t3
sa isi d u différent des parties en état d'être ju g é .
�'
( *9 ) '
Il paraît qu’il ne fut donné aucune suite à cette p ro
cé dure, qui prouve p a r f a i t e m e n t , i.° que les habitans
de V i e ne croyaient pas a v o i r , par l ’entrem ise, aban
donné les Gâchiers de M. de Bouillon ; 2.°. que le
seigneur de Chadieu ne le croyait pas lui-même.
,
A v e u x et dénombremens.
Mais si le seigneur de Chadiéu n’ osa plus plaider
au p a r le m e n t , il n’en essayait pas moins des actes
furtifs d ’usurpation, si on croit les aveu x et dé nom
bremens que produit le sieur N atey, quoiqu’il ne faille
pas du tout prendre à la lettre les inductions qu’il en
t i r e , ni m ê m e les preuves q u ’il y a vues,
L e i . er septembre 1 6 6 9 ,
( 0 François de Beaufort
fit un d é n o m b r e m e n t , i.° pour Chadieu , 2.0 pour
Chalus et pour À u te zat.
C hadieu, très-distinctement reconnu , /y comprend
une vergière cl ose, de 3 o journaux.
Ensuite vient Ch alus, plus un château appelé de
Chalus-les-Bussieres et Les Gâchiers 3 avec une autre
métairie appelée Le R u d e t , p lu s , etc.
L e sieur N a t e y a mis Chadieu et Chalus dans uu
m ê m e contexte , pour faire sortir en lettres majuscules
(1) C ’est Pacte d a té, par erreur, du 18 août 1670, aux Observations
définitives, pag. * 3 .
^
�(
3o )
la vergïere et puis les G â ch iers, ( i ) com m e dépendances
de Chadieu.
Mais il est visible que les Gâchiers placés là incognito
après Chalus, auraient dépaysé tous les observateurs;
ce n’était pas la peine, car les consuls de V ie n’étaient
point appelés à cet a c t e , qui ne les empêchait pas
d ’user de leurs droits, et de tenir les Gâchiers en dé
fense.
Le i
5 mai 1684 , le sieur Parades agissant pour
Jeanne de Beau/ort, fille de François, fit un d é n o m
brement où il comprit plus clairement les G âch ie rs ,
mais d ’une manière entortillée , qui en apparence ne
disait rien, mais qui n'en eût pas moins appelé l ’a l i e n tion et la vigilance des habitans de V i e , s’ils eussent
été informés de ce dénombrement.
C e déno m brem en t comprend C h a d i e u , les Ma rt re s,
M o n t o n ; il y est reconnu la vergière et le grand
G âch ier, co m m e pacages actuels entre l’Allier et les
terres de C h a d ieu .
O n n ’avait donc pas osé les donner c o m m e pro-'
p r i é t é , çt si V ie s’en fût p l a i n t , le sieur de Parade
aurait r é p o n d u , i.° que l ’arrêt de 1641 donne au
seigneur de Ch adieu le droit de p a ca g e, et q u ’il y
avait lieu de mentionner ce pa c a ge, parce qu’ un dé
nombrement ne doit rien o m e t t r e ; 2.0 q u ’en confi( 1 ) L ’ imprimé du sieur TNatey p la c e , entre le mot Chalus-les-Bussières et le mot les Gâchiers, up poiqt et v ir g u le , qui paraît les séparer
eu deux articles reconnus. Cette ponctuation 11’est pas dans l’original.
�( 3 l )
nant les Gâchiers par les terres de G hadieiL, ^c’était
avoir dit assez q u ’ils ne faisaient pas partie des terres
de Chadieu.
U n e plus grande exp lic a tio n! vient, ensuite ; car
Jeanne de Beaufort reconnaît la justice haute, m o y e n n e
et basse sur le t o u t , s a u f les, G â c h ie r s, en sorte que
d’après la C o u tu m e d’A u v e r g n e c ’ était reconnaître le
droit des habitans de V i e , tout aussi bien que ceux
de leur seigneur.
L e sieur N a t e y qui a cru voir de plus grands ré
sultats dans cette pièce, l ’a intitulée fastueus eme nt,
dénombrement j u g é contradictoirem ent le 20 novembre
16 8 6 ; et il y a ajouté les certificats de publication.
Qui ne croirait d ’après cela que l’acte est publié à
V i e , et q u ’ une opposition de Vie a été jugée en fa
veu r du sieur de Be aufort, contre V ic ^
B i e n de tout cela. L e dénom bre m en t a été publié
à M onton et aux Martres; l’opposition fut form ée par
un sieur Barberin , prêtre de Monton,
v
««*,
Si le sieur de Parades avait cru devoir faire un
d é n o m b re m e n t, dans les termes ci-dessus, pour l ’a
vantage de Jeanne de B e a u f o rt, m in eu r e; elle-même
n'osa pas le réitérer dans les mêmes termes.
O n lit dans un aveu et dé nombrement du 9 juillet
1 7 2 3 , (1) que Jeanne de B e a u f o r t, v e u v e de T a n e ,
(1) L e sieur N atey n’a pas jugé à propos de produire c e l u i - c i , et le
m otif se devine aisément, L e maire de V i e en a une expédition
archives impériales.
p rise
aux
�C
32 ,
reconnaît six articles distincts, Lihadieu, C h a l u s , vun
m o u l i n , les Martres, les cens et directe de Monïon >
C o r e n t, et c., et enfin un moulin Bannel à P l a u z a t ,
sans y comprendre le moins du monde Les G â ck iers,
ni dans le détail des articles de Cbadieu , ni dans
ceux de Chalus-les-Bussières.
P o u r ne plus revenir sur les d é n o m b r e m e n s , il faut
dire un mot de celui du sieur de la R o c h e - B r i a n t , du
28 février 1 6 8 4 , que le sieur N a t e y argue de f a u x ;
car c ’est son m oy en favori contre tous Les actes qui lui
ont déplu dans cette cause, L e sieur N a t e y ne doute
pas de ce faux , parce qu’il a un certificat du d é p o
sitaire des archives impériales , que cet acte n ’existe
pas dans les archives : (1) et parce que dans six m é
moires successifs i l a menacé le maire de V ie de ce
f a u x , s’il redisait un mot de cette p i è c e , il croit fer
m em e n t qu’il n ’en sera plus parlé.
r L'e xp éd ition de cet aveu et dénom b re m ent, confiée
ail maire .de V i e , par le propriétaire de Lachau x (qui
pour ce m o t i f a aussi sa part d ’injures) (2) est originale
et en parchemin. Il y est reconnu un droit de pacage
d a n s Le G â ch ier, et à celte clause est ajouté ce qui suit :
« C o m m e aussi M M . de V ille-C o m te, à q u i i'L appar
tie n t, avaient donné , de leur libérale volonté , en
(1) Ce n’est malheureusement pas la seule piece qui manque aux archives
impériales. L e maire de V ie y a fait aussi, pour d’autres titres, des re
cherches infructueuses.
(a) V o y e z le mémoire N a tey , intitulé : R é s u m é , pag. 26 et 27.
paiement
�( 33 )
paiement des services qu'il leur avait rendus an par
lem en t, contre la dame de Be aufort, q ui prétendait
que Ledit G â c h ie r fu t à eLLe, en considération que feu
son père fit juger le procès, lesdils habitans lui don
nèrent quatre-vingts pieds d ’arbres en l ’étendue dudit
lieu de Gâchier
Ce titre^ toujours joint au dossier des habitans de
V i e , ne leur avait pas semblé assez important pour en
tirer de grandes ind uctions, parce q u ’il n’ajoute rien
à l'arrêt de 1641'. Mais le sieur N atey , croyant se faire
un m o yen de ses inculpations, a demandé le dépôt de
cet acte au greffe; et là il a tout de suite tr o u vé, en
présentant Le parchem in à La transparence, que l'acte
a été gratté , altéré , falsifié > etc.
Cela est vrai, le parchemin paraît gratté en un en
droit ; mais en quel endroit?.... Précisément ce n’est
en aucune des lignes q u ’on vient de transcrire! (1).
(1) Cette perspicacité du sieur N a ley a fait naître la pensée au maire
de Vie de regarder d e ‘plus près les litres du sieur N atey , et i.° dans un
3 o octobre 166 5 , uù le sieur Natey a copié la relation d’un acte
du 2.0 octobre i 53o (im prim é aux observations définitives , page 5 , et
acte du
dans tous ses autres m é m o i r e s ) , il a vu que les m ots, appartenans au x
habitans d’Aute&at, et le m ot, acquis-, sout visiblement refaits et sur
chargés. ,
.
•
2.° Dans l’ écrit informe de 1668 , où on fait dire à M . de B e a u fo r t ,
q u ’ il se désistera de ses procès,, sous condition d ’être indemnisé , ces
mots sont aussi refaits et surchargés.
3 .° Dans l’ordonnance P egeyre, de i 6 6 3 , q u i, iante par Le sieur de
Beaufort d'avoir justifié de ses prétendus titres s le déclare déchu,
¿ i l ne tes produic dans l'an. Ces derniers m uts, s’U ne les produit
9
�C 34 )
. Laissons donc toute cet te petite guerre de 'm oi s, cette
diversion ét udiée, qui appelle Inattention sur de légers
accessoires , et reprenons la série de faits qui prouvent
que les consuls de Vie n'ont jamais abandonné leurs
droits sur les G âch ie rs, et que les prétendues pièces
d e i 5 3 i et de 1668 ont été pour eu x des actes ignorés
qui ne les ont pas empêchés un seul instant de jouir
et de tenir en dé fe nse5 c ’ e s t - à - d i r e , d’agir en proprié
taires , en réduisant le seigneur de Chadieu au simple
pâturage sans fraude.
¿1aires P ièces prouvant* Cexécution de la Transaction
de i 5 i i .
Il paraît q u ’en 1 7 1 5 certains voisins des Gâchiers,
suscilés ou non par le propriétaire de Cliadieu,, y
faisaient des entreprises, plus faites pour appeler l’at
tention des habitans de V i e , que des dénombremens 5
les consuls convoquèrent une assemblée générale le
21 juin 1 7 1 5 .
On y expose les troubles et usurpations de ces voisins
« qui se prévalant de l ’absence des habitans de Vic
i e - C o m t e , ont la précaution de tems en tems , et
dans l ’aria qui portent un changement absolu dans cette ordonnance,
sont une addition visible.
ï a u t i l , pour c e la , accuser l e s i e u r N a le y de ces altérations d’actes?
Non ; car on ne doit paa être injuste ou passionné par récrimination. P lu
sieurs de ces surcharges sont insignifiantes. Quant aux autres, les habitans
de V i e ne veulent pas perdre de tems à en scruter le résultat. L eu r cause
»’ en a pas besoin.
�( 35 )
sur-tout en hiver , de faire changer de lit au ruisseau
appelé de C h a r le t, qui confine d ’une part ledit grand
G â c h ie r, en quoi ifs réussissent avec d’autant plus
de facilité, que l ’eau dudit ruisseau étant une eau
do rm ante, et dont ler cours se comble de limon tous
les hivers, ils font de nouvelles rases en dedans ledit
G â c h i e r , gagnent terrain , et l ’agrandissent à grands
p a s , aux dépens du bien de la commune toujours mal
d é f e n d u e ; en sorte qu’ils ont déjà usurpé de c e ll e
manière un grand canton de la meilleure partie dudit
G â c h i e r , ainsi q u ’il est aisé à juger par l ’inspection
des lieux et outre ce , prétendent d?usurper certain,
terrain ou gravier que la rivière d ’ A ilie r a laissé p u is
quelques années , q u o iq u il a p p a r t i e n n e par bons
titres, tant pour le droit de ju stic e que de pa ca g e, à la
commune d u d it V ie. En conséquence de q u o i , tous les,
habitans ont délibéré unanimement que lesdils sieurs
consuls sont advoués de soutenir en justice les,droils
de la c o m m u n e , en ce que regarde la propriété, pos
session, saisine et jou issa n ce desdits G â chiers, qui leur
a été adjugée , tarit pour le su sd it droit de ju stice que
de p a ca g e, par l’arrêt contradictoire, rendu par nos
seigneurs de la Cour de parlement, le 17 mai 1 6 4 1 ,
et pour cet ef fet , se régir par conseil, elc. ».
Les
habitans de Vie avaient parlé de l'enterre
ment fait en 1 7 9 0 , d ’ une fem me de Chalus , prise par
le curé de V i e , au ruisseau de Charlet , com m e lim ite
de la paroisse, >et le sieur N a t e y , s’égaye de la circons
tance. (1) Elle n’a pas un grand poids , en effet, pour
la proprié lé des Gâchiers, mais elle se trouve là fort
à-propos pour expliquer comm ent le ruisseau de Char (1) Mémoire intitulé ; Réplique 3 imprimé en 1810, page 29.
10
�1 3 6 }
let peut se trouver une limite des Gâchiers , sans la
subversion de topographie que le sieur N a l e y se plaisait
à reprocher au maire de V ie (i).
Ils avaient parlé encore a^une requête du i . er mai
174 6 * donnée par les régisseurs m êm e
de C h a d i e u ,
pour demander à titre d’excuse et de dénégaiion une
m ain -le v é e de best iaux, saisis p a r l e s consuls de Vie,
Cette pièce était importante pour prouver la vigi
lance des consuls à tenir en défense les Gâchiers, et
le langage modéré des régisseurs de C h a d i e u , très-au
fait des usages. I l s se soum irent par leurs conclusions
a payer le dommage et la clame. L e sieur N a t e y , n ’a
rien répondu h un fait aussi p r é c i s , émané des agens
de ses prédécesseurs.
U ne autre procédure dont on n ’avait plus p a r l é ,
et qui n ’a été retrouvée à Clermont , que depuis le
précédent m é m o i r e , date de 1762. Le s consuls firent
encore saisir des moutons de M. de T a n e , pacageant
en fraude dans les G â c h ie r s , Leur appartenant, est-il
(1) A u t r e mémoire intitulé : R ép liq u e, imprimé en 1807, page 4 ; et
sur-tout le mémoire intitulé : R ésu m é, page 3 o , où le sieur Na t ey atteste
l’ impossibililé que« le merveilleux ruisseau de C h a r l e t , vainqueur des flots
« rapides de l’A l l i e r , ait pu fournir un passage pour aller servir de limite
« à l’autre rive...... Eu s’ étayant difficilement de faits f a u x , il prouve ( le
« maire ) qu’ il connaît l’iniquité de sa ca u se, et ne répugne à aucuns moyens
« pour tromper les tribunaux et le public ».
Cette vespérie n’a besoin d’autre réponse que des deux pièces de 1715
et 1720 et des tiues même de Chadieu, où le ruisseau Charlet est confin.
�? 37 )
d i t , de tems immémorial. Car leur langage n ’a jamais
varié.
M . de T a n e présenta requête au sénéchal de Clerm o n t , le 4 septembre 1762 , pour demander des d é
fenses, et la m ain -levé e de cette saisie : et pour obtenir
cette main-levée sur r e q u ê te , il exposa en fait que
c ’était hors les pacages des habitans de V i e , que les
moutons avaient été saisis, et dans l ’étendue de la
justice.
Cependant , il paraît que le sieur de T a n e voulu t
soutenir avoir droit de faire pacager ses bestiaux avant
La S t.- M a r lin , c ’e s t - à - d i r e , pendant le tems que les
consuls de Vi e réservaient le pacage au gros bétail,
et tenaient les Gâchiers en défenses des autres bestiaux,
en exécution de la transaction de i
5 i i , et de l ’arrêt
de 1641.
C e projet d’innovation donna lieu à une assemblée
générale des habitans, le 28 juillet 1764. On y expose
l ’usage immémorial de publier C ouverture d u pacage
annuellement à la p e nt ecôte, pour réserver le pacage
au gros bétail jusqu'à la S t .- M a r t i n , et on autorise les
consuls à s’opposer à toute innovation , plaider, etc.
Il ne reste d’autres pièces de ce procès qu'une requête
du 1.” juillet 1 7 5 5 , rédigée et signée par M .e T i x i e r ,
avocat. On y voit que M. de T a n e , dans des causes d ’a p
pel du 29 janvier,avait conclu à l'exécution de l'arrêt de
1 6 4 1 , et q u ’en conséquence, lui et ses métayers fussent
maintenus dans le droit et possession d’envoyer pâturer.
�C
38 )
Leurs bestia ux dans Le com m unal d u g ra n d et petit
G â ch ie r , en tout tems.
L e s consuls de V i e répondaient que ce communal
était Leur propriété , que l’arrêt de 1641 l ’avait jugé
ainsi, que c ’élait à eux à le tenir en déf en se, etc.
E n 1 7 6 5 , une autre saisie de moutons fut faite par
les habilans de Vie , par des habilans de C o r e n t ,
(vas saux du sieur de T a n e ). Ils ne s’en défendirent
aussi que par des excuse s, en reconnaissant dans leur
propre requête le droit de propriété des Iiabitans deVic.
■ E n 1 7 6 6 , un délibératoire autorisa le-maire à d e m a n
der une plantation de bornes.
Cette
fermeté soutenue des habilans de Vi e , fit
comprendre au sieur de T a n e , q u ’il avait commis une
imp ru de nce , en concluant lu i- m ê m e à l’exécution de
l ’arrêt de 1641. I l vit que pour tenter un succès * il
fallait revenir sur ses p as , c'e£i ce q u ’il fit en 1768.
Procès actuel y commencé en 1768.
L e sieur de
T a n e exposa dans une
commission
obtenue au p a r l e m e n t , que les Gâchiers et V er giè re,
dépendaient de ses domaines de Chadieu et Chalus ;
qu ’ils étaient ja d is asservis à une redevance de
3 fr.
d’or, envers le seigneur d e V i c - l e - C o m t e , pour laquelle
il y a procès en la sénéchaussée; que les consuls de
VicLOrit'tenié plusieurs fois d ’oblenir le droit de pa cage,
tant que le terrain serait eri vaine p â tu re, ou sans d é -
�( 39 )
fense : qu’ il y eut procès au .parlement avec M ar ie
P e l o u x , et que les consuls de V ie soutenaient q u elle
était reduite a L unique propriété, (r) Ç Vi en t ensuite la
teneur de la sentence de 1637 , et de l ’arrêt de 1 6 4 1 .)
L e sieur de T a n e continue, et dit : «• néanmoins afin
que le juge actuel de L a c h a u x , ne puisse lui objecter
l ’ancienne prétention de ses prédécesseurs sur Le retaiL
et coupe des arbres du grand Gâchier , laissé indécis ,
il est bien fondé à faire prononcer sur ce chef.
Après cela le sieur de T a n e demanda permission
d ’assigner, et.il assigna le sieur Vassadel, seigneur,de
la Chau x , pour voir statuer sur Le c h e f d u procès resté
indécis : en con séq uen ce , ajoute - t - i l , pour se voir
défendre de couper et le troubler dans Le droit d e pro
priété des Gâchiers , sauf audit sieur de L a c h a u x
et
a u x habilans de V ie le pacage pendant la vaine pâture.
Il assigna en m êm e -te m s les habitans de .Vie en arrêt
comm un.
Dans les formes ordinaires de la procédure , une
demande ainsi formée contre deux personnes, ne p o u
vait être séparée; et si les habitans de Vi e ne com pa
raissaient pas. il fallait un arrêt de jo nc tion; ce n ’ est
pas ce que fit le sieur de Tane.
Il prit, le i 5 mai 1 7 6 8 , contre le Sr.Vassadel se u l3 un
arrêt par défaut, sur Lechefdeprocès resté in d écis, c o m m e
le porte l ’a r r ê t , et il obtint-toutes ses conclusions.
(1) II faut convenir que tout cet exposé était d’ une grande exactitude,
d ’après ce qu’on a lu.
�( 4° ) _
' Ensuite il transigea avec le sieur Vas sadel, toujours
seul ^ pour le faire départir de la coupe des arbres;
mais le sieur Vassadel exprima des réserves de tous
les droits des habitans de Vie.
C e u x - c i se défendirent vigoureusement , com m e
troublés dans leur propriété par cette demande ; ils
répétèrent que les Gâchiers étaient leur c o m m u n a l ,
leur propri été , sauf la servitude de p a c a g e , due au
sieur de T a n e ; ils conclurent à ÿ être maintenu s; le
procès fut appointé avec eux.
T o u t procès a été abandonné par le sieur de T a n e ,
depuis cette époq ue, la saisine des Gâchiers est restée
aux habitans de Vie.
E n l’an 1 0 , le sieur N a t e y rec om m enç a les hos
tilités, en signifiant l’acte de i
5 3 i , qui voyait le jour
pour la première fois; il déclara q u ’il voulait clorre;
le maire lui répondit qu’il formait opposition à toute
clôture.
.A l o r s , et par exploit du 21 ventôse an 10, le sieur
N a t e y assigna le maire de V ie au pélitoire dans la
fo rm e suivante.
Il
mit en tête de son exploit les arrêts de 1768 et
1 7 6 9 , où le sieur de T a n e était en qualité com m e
dem a nd eu r, et les officiers municipaux de Vie com m e
défendeurs ,* il déclara reprendre cette instance devant
la ( »our d’app el , com m e représentant le P a r l e m e n t ,
et assigna le maire de V i e ,
pour voir d ir e , q u ’ayant
égard à ce qui résulte de l’acte de i
53 i , de l’arrêt
de
�( 4 0
de 164.1 ( i ) , et des arrêts de 1768 et
1769, et,
sans s’arrêter a la demande des habitans de Vie (2),
N a tey fut maintenu dans la propriété et jouissance des
Gâchiers et Ver gièr e, avec défenses de l’y troubler., etc.
C'est après cette demande pétitoire que le sieur
N a t e y ayant fait des plantations et des fossés3 le maire
de V i e se pourvut en complainte possessoire contre les
ouvr iers, dont le sieur N a t e y prit le fait et cause. Ce
possessoire fut jugé le 2 3 messidor an 10 ; et il y eut
appel.
•
Dans le m ê m e te m s , le sieur N a t e y revint en la
C our poursuivre sa demande du 21 ventôse an 10.
L e s habitans de Vie dirent en défenses que le procès
repris par N a t e y , étant une demande principale portée
de piano au parlement , suivant l ’usage
abusif de
•> cette é p o q u e , devait d’après les lois actuelles subir
les deux degrés de juridiction ; ils conclurent au renvoi
par deux requêtes des 23 fructidor et i
1
a n ; 11,
3 thermidor
:
L a c o u r j par arrêt du 18 tliermidor an i r , au
rapport de monsieur C o i n c h o n - L a f o n t , jugea que la
v c o n t e s t a t i o n ayant été portée de piano au parlement
de Paris en première instance , il y avait lieu h subir
(1) Regardant l’arrêt de
1641 comme définitif, il n’ en reprenait pas
les poursuites, au contraire, il en argumentait comme d’ un titre..... .
(a) Le*sieur Nat ey explique, qu’il a entendu parler des conclusions en
maintenue, prises par les habitans3 en défenses à la demande de 1768. *
11
�( 4 0
les deux degrés de juridiction , possession néanmoins
tenante en faveur de Natey.
L e sieur N a t e y usa largement de sa v i c t o i r e , et
réduisit les habilans de Vi e à un dénuement de pacages,
dont la tradition la plus reculée ne leur donnait aucun
exemple.
Ils se pourvurent en cassation et co m m e ils ne p o u
vaient em pêcher l ’exécution de l’arrêt , le maire de
V i e assigna N a t e y au tribunal de C l e r m o n t , le 8 fruc
tidor an i i , pour procéder sur La dem ande form ée
par N a te ij; en co nséquence , et y statuant, pour voir
maintenir les habilans de Vie dans la propriété et pos
session , avec défenses de changer l’état des lieux.
U n jugement du 9 nivôse an 12 fit défenses pro
visoires à Natey de défricher. Il fut infirmé par arrêt du
12 prairial an 12. Mais cet arrêt et celui du i 3 ther
midor an 1 1 , furent cassés.
Il est cependant essentiel de remarquer que ce dernier
arrêt ne fut cassé qu’en ce qu'il accordait la posses
sion au sieur N a t e y ; mais, q u ’il fut maintenu en ce
q u ’il renvoyait La demande du sieur N a t e y , à subir les
deux degrés de juridiction.
L e possessoire fut jugé le 29 août 1807 , par juge
ment en dernier ressort du tribunal civil de Riom ,
délégué par la Cour de cassation, et les habilans de
Vie maintenus en la possession du pacage, des Gâchiers
et v e r g i è r e , açec restitution de jo u is s a n c e s , à dires
d ’experts.
�U 3 )
Ge jugem ent en dernier ressort réduisait nécessaire
ment le sieur N a t e y à poursuivre sa demande au péliloire ; aussi se hâta-t-il de revenir à C l e r m o n t , où
il surprit un jugement par d é f a u t , qui remettait la
cause de quinzaine.
Mais il n'avait pas parfourni le possessoire, et il
ne l ’a pas m êm e parfourni encore!
U n second jugement du 9 avril 1808 reçut l ’op p o
sition des habitans de V i e , sursit de
3 m o is , pendant
lequel tems les condamnations possessoires seraient
liquidées.
Elles l’ont été dans ce d é l a i , et un jugement du
tribunal civil de R i o m , du 18 mai 1808 , a homologué
le rapport des experts, par défaut contre N a t e y ; i l a
été confirmé par autre jugement du 26 mai 1809, qui
le déboute de son opposition.
T o u t cela n’a pas produit le parfournissement du
possessoire, au contraire le sieur N a t e y , pour neutra
liser les conditions possessoires, avait interjeté appel
en la C o u r , du jugement du 7 avril 1808, qui avait
prononcé un simple sursis; il demandait ¿1 la Cour l ’é
vocation du principal, et le jugement du pétiloire.
C'est alors que le sieur N atey imagina, pour la pre
mière fois, de prétendre que malgré ses demandes il
n'était pas demandeur ; et co m m e le jugeme nt de
Clermont lui en avait nécessairement et par habitude
donné la qualité , il en fit un gr ief d ’appel.
L a C o u r, par arrêt du 29 juin 1809, s‘m s s’arrêter
h cette demande e n é v o c a l io n du principal, se déclara
�( 44 ;
i n c o m p é t e n t e , et renv oy a le sieur N a f e y à faire statuer
sur le fon d , à Cle rmont, dans le plus b r e f délai.
«
Cependant il fallait exécuter le jugement possessoire, et la com m un e de V i e , après d’aussi incroyables
chicanes, devait compter que le cours de la justice ne
serait pas interrompu en faveur du sieur N a t e y ; mais
à son grand étonnement , le maire de Vie £eçut la
notification d’un arrêté administratif, qui l’empêchait
de mettre à exécution le jugem ent en dernier ressort
de Riom.
Il se vit obligé d’attaquer cet abus de pou voir , et
de porter ses plaintes aux pieds de Sa Majesté I m p é
riale. Il y trouva la ju sti ce , et par décret impérial
du
28
décembre
1810,
l’arrêté ci-dessus fut
avec ordre d’exécuter le jugement du
20
ca ssé,
août
1807,
en réintégrant la co m m une dans la possession des
Gâchiers.
« N A P O L E O N , Empereur des Français.,.., vu la requête.,.. ;
un arrêt du parlement de Par i s, du
1 7 mai
1641 ........;
un
j ugement du tribunal civil cle R i o m , rendu en dernier r e ssort ,
le 29 août
1807,
session....... ; un
qui maintient la commune de V i e en pos
procès-verbal d u ......... ; l’arrêté
de préfecture , remplaçant
quatre août mil
le préfet du
du conseiller
Puy-de-Dôme ,
du
huit cent n e u f, qui , sur le prétexte de m é
nager les intérêts
de la commune , et dans des vues d’ordre
p u b l i c , ordonne que le sieur
ment la jouissance des
Nat ey
terrains
conservera provisoire
litigieux ; que le
droit de
p a c a g e sera estimé par des e x pe r ts , et le p ri x en sera versé
dans la
caisse de la c o mm u n e ..... ......... j enfin la requête du
�.(
-45 )
maire de V i e i la réponse du sieur Natéy , la répliqué du
maire , et autres pièces à l ’appui ;
Considérant qu 'un jugem ent en dernier ressort ayant main -
tenu la commune de T^ic dans la possession du terrain liti
g ieu x , et fait défenses au
sieur N a t ey de l ’y t r o ub l e r , rien
préfecture , re m p la ça n t
ne pouvait autoriser le conseiller de
le préfet
du
P u y - d e - D ô m e , à légitimer
les
entreprises
du
sieur N a t e y , contraires auxdites défenses ;
Sur
l ’avis de notre commission du contentieux;
Notre
Conseil d ’Etat entendu ,
Nous avons
Art.
^
décrété et décrétons
ce qui suit :
i . er L ’arrêté du conseiller de p réf ec tur e, remplaçant
le préfet
du P u y - d e - D ô m e , du
quatre
août mil
huit cent
n e u f , est annullé.
2. L ’état des lieux sera rétabli tel qu’il était avant ledit
arrêté , aux frais du sieur N a t e y , et le jugem ent du tribunal
civil de R i o m , du vingt août m il huit cent s e p t , sortira
son
S.
plein
et entier effet.
Notre ministre de l ’intérieur est chargé de l ’exécution
].
du présent décret.
A p p r o u v é , etc.
Signé N A P O L E O N .
Quelque précis que fût ce décret im p é r ia l , le sieur
N a t e y ne s’ est pas tenu pour b a t t u , et il a prouvé
que ses ressources étaient aussi inépuisables que son
génie était fécond à en découvrir d'inattendues. Mais
il faut oublier cette inégalité de forces pour ne pa s
être découragé par les comparaisons.
Reprenons la série des faits judiciaires , pour suivre le
sieur N atey dans cette autre a r è n e 3 où il n’est pas moins*
inventif. E n voici une preuve :
�(.46 )
Plaidant enfin sa cause au fond, le sieur N a t e y s’est
efforcé principalement à prouver qu’il n’était pas de
m an de ur au pétitoire , mais bien d é f e n d e u r , d’où il
a conclu comme il fallait s’y attendre , que la c o m
mun e de Vie demanderesse avait tout à prouver.
l i e tribunal dè Clermont a décidé que c’était le sieur
Natey” qui était d e m a n d e u r , et au surplus a accordé
que les limites des justices de Vi e et Mo uton seraient
fixées par experts.
Alors qu’a fait le sieur N a t e y ?
Il s’est hâlé de signifier les qualités de ce j u g e m e n t ,
pour arranger les choses à son contentement ; et il a com
m encé ainsi : entre Les habitans de
par
req u ête
V
ic ,
dem andeurs
des 6 et 7 ju ille t 1 7 6 8 , et le sieur N a t e y
défendeur.
• Ensuite se mettant à l ’aise dans les faits , il n'est r e
m o nt é q u ’à i 63 o , pour esquiver les acles de i 5 i i ,
15 4 2 et 1 6 2 7 , et sans même supposer que les habitans
de Vi e en eussent parlé.
E n f in , à l’article de sa propre p r o c é d u r e , le sieur
N a t e y , passant de 17 6 9 à l ’an 1 0 , S'est bien gardé
d ’averlir que c ’est lui q u i, le premier, avait attaqué. l i a
dit que le maire de Vi e s’était fait autoriser à reprendre
l ’instance de 1768 ; après quoi il a bien voulu avouer
que de son côté, il l’avait aussi reprise ; en sorte q u e , p a r
cet arrangement chronologique, tout le monde pouvait
croire que les habitans de Vie étaient demandeurs à
toutes les époques.
�( 47 )
Ces qualités furent arrêtées par une opposition ten
dante à faire rectifier tous les faits , ou la vérité était
altérée.
«
M. le président a fait droit sur cette opposition , en
rétablissant les qualités qui déjà l’étaient suffisamment
par le ju g em e nt, dont la teneur suit:
« At tendu (sur lé règlement des qualités) que depuis
l ’époque de l’arrêt d e l à ci-devant Cour du parlement
de Paris, du 17 mai 1641 , qui régla la contestation,
alors pendante en la dile C o u r , entre les consuls de
V i e , les héritiers Beaufort-Canillac , propriétaires du
clos de Ch ad ieu , et le sieur la Roche-Briant ci-devant
seigneur de L a c h a u x , il ne s’est élevé entre les parties
que des plaintes relativement à l’inexécution de cet
arrêt, et que le tout a été terminé ou abandonné dans
les temps les plus reculés ;
« Attendu que l ’arrêt précité a été exécuté jusqu’ en
1 7 6 6 , époque où le sieur de T a n e voulut faire juger
la branche du procès qui était restée indécise d ’après
cet arrêt entre la famille Beaufort qu’il représentait,
et sieur Vassadel - Lach aux représentant le sieur la
Roche-Briant ;
« Attendu qu’en 1 7 6 6 , le sieur de T a n e assigna en
la ci-devant Cour du parlement de P a ri s , non-seu
lement
le sieur Vas sadel-Lachaux pour faire pro
noncer sur ce que l’arrêt dont il s'agit avait laissé
indécis, mais qu'il appela encore les habitans de Vie
pour voir déclarer communes avec eux les condam
nations à intervenir;
�( 48 )
te A t ie n d a que le procès actuel n’est que la suite de
cette dem ande
q u ’il a plu au sieur N a t e y de re
prendre contre le maire de V i e ; que par conséquent,
pe dernier doit toujours être considéré com m e le d e
m an de ur principal, ainsi que l’était le sieur de T a n e ,
quelques demandes incidentes que les h ab il a n s d e Vie
aient pu f o r m e r , par requête ou a u t r e m e n t , depuis
I j6 6 jusqu’à ce m o m e n t ; p u i s q u e tout ce q u ’ils ont
fait jusqu’à ce jour ne l’a été q u ’en défendant à la
demande formée contre e u x , pour y parer et pour
la conservation de leurs prétendus droits 5
En ce qui touche le fon d ,
«• Attendu que les parties sont contraires en faits
sur les limites des justices et autres terres d e l à maison
Canillac-Beaufort , qui toutes joignent e n se m b le , et
celle du comté d ’A u v e r g n e , d ’autre p a r t ;
«■Attendu que le sieur Natey, prétend que la rivière
d ’Allier sert de bornes à la justice de V ie sur Allier;
«■At tendu
que les habilans et corps co m m un de
cette co m m une
présentent des titres qui semblent
contrarier cette assertion;
« At tendu que les juges ne peuvent* pas eux -mêmes
éclaircir tous ces points; de f a i t , à délaut d ’instruc
tions suffisantes ¿1 cet égard;
« L e tribunal faisant d r o i t , i.° sur le règlement
des qualités, ordonne que le sieur N a t e y étant au
lieu et droits du sieur de T a n e , dem andeur originaire,
procédera en la ca use , en qu¿ilité de d e m a n d e u r , et
�' ( 49 )
'le maire de là c o m m u n e de V i e sur Allier , en qualité
de défendeur ( i ) ;
« 2.0 A v a n t faire droit au fond , sans préjudicier ni
nuire aux droits respectifs des parties, ordonne q u ’elles
conviendront d’experts, à l ’efîet de vérifier les lieux con
tentieux , en lever un plan géométrique , et désigner les
anciennes limites de la justice de V i e , clief-lieu du cidevant comté d’A u v e r g n e , e t 'd e s autres justices qui
la joignent; et déclarer si les pâturages, dits Les g ra n d
"et petit G âchæ r et La V ergière, sont enclavés dans la
ci-devant justice du comté d’A u v e r g n e , ou dans quelle
justice ils sont situés, etc., tous moye ns de fait et de
dro it, ainsi que les dépens, réservés ».
L e Sieur N a t e y a interjeté appel de ce
ju g e
ment.
Il poursuivait cet a p p e l , faisait des réquisitions, et
se plaisait déjà à accuser la lenteur du maire de V i e ,
long-tems avant d ’avoir m êm e fait expédier et signi
fier le jugement de Clermont.
Par deux actes successifs, l ’ un du 22 août 1 8 1 1 ,
l ’autre sans date, tous deux signés Jea n de B a t%, le
sieur N atey a fait sommation au maire de Vie de d é
clarer s’il entendait se servir des actes de i
5 i i , 1642
et 1 6 8 4 , et du pouvoir donné au maire de V ie par
(1) S’il n’y avait pas en d’opposition aux qualités de ce j ugement,
on voit combien le sieur Natey l’aurait rendu ridicule
5 puisque
ceux qui
seraient restés e n ' qualité, comme demandeurs, étaient jugés n’être quo
défendeurs.
x3
�(
5o )
les habitans, le 9 messieor an i o } se réservant, audit
cas, d ’attaquer lesdits acles par inscription de f a u x :
•il en a demandé la communication par la voie du
greffe.
L e maire a répondu q u ’il entendait se servir de tout&s
les pièces produites au procès; qu'il en a vail donné maintes
fois co m m unic a ti on, et qu'il l'offrait encore aux d é f e n
seurs du sieur de Batz.
P a r arrêt préparatoire, du
25 novembre 1 8 1 1 , la
C o u r a ordonné le dépôt respectif au greffe de tous
les titres du procès.
Ce dépôt a eu lieu; le sieur de Batz a verbalisé sur
chaque pièce produite. Cependant il s’est fort appaisé
sur l’inscription de faux. Il a .r é f l é c h i, et il dit que les
pièces menacées n'en valent pas la peine.
♦
A u jo u r d ’hui le sieur de Batz a donné son ultim atum
dans des conclusions où , reprenant tous ses m o y e n s , il
dit que ses prédécesseurs n'ont jamais pu être dem an
deurs, parce q u ’ils ont toujours possédé les G a c h ie r s , et
que les habitans furent demandeurs en pr opriété, en
1768 ; que le 8 fructidor an 11 , ils portèrent à C le r
mont leur dem ande en propriété, et mirent la* cause au
tôle le i .er vendémiaire an 1 2 , c o m m e demandeurs ;
qu'ensuite ils formèrent une demande au possessoire,
quoique la loi leur interdît cette double action ; q u ’ un
jugement du 9 nivôse an 12 les dén o m m e demandeurs ;
que si, en 176 8, le sieur de T a n e assigna les habitans le
p r e m i e r , il abandonna celte demande dont il n’est pas
fait mention en l ’arrêt du i 5 mars 1768 ; que si N a t e y l ’a
�(
)
-reprise le 24 germinal an i o , il n’a pas assigné en décla
ration d ’arrêt com mun. Enfin le sieur N atey prétend
que l’arret de 1641 ne peut avoir donné la propriété
aux habitans de Vic^ parce q u ’ils n’étaient demandeurs
q u ’en simple servitude de pacage , tandis que la pro
priété des Gâchieis n’était en litige qu'entre les sieurs
de Beaufort et de la Roche-Briant. Après tout c e la , le
sieur N a t e y a conclu au mal j u g é , à ré voca tion du prin
cipal et à être gardé et maintenu en la propriété des
Gâchiers et vergières.
L e s habitans de Vie ont interjeté appel incident du
m ê m e ju g em e nt , en ce q u ’il ordonnait une expertise
inutile, puisque le sieur N atey avait toujours reconnu
que les Gâchiers étaient dans la justice de Vic-le-Comte.
Voilà donc enfin où en est ce procès suscité par le
sieur N a t e y , quoiqu’il en dise ; et déjà le maire de Vie
croit avoir rendu compte du passé de manière à passer
rapidement sur les questions que font naître les co n
clusions ci-dessus.
§
I.er
Q uel était le d em a n d eu r?
i.° Dans le f a i t , c ’est celui qui a voulu l ’être.
2.0 Dans le droit , c ’est celui qui a succombé au
\
possessoire.
Puisqu’il est convenu par le S.r Natey, que le procès
actuel a co m m en cé en 1768 , rien n ’est'plus aisé que
d ’y retrouver le demandeur.
41
�i 52 )
Depuis q u ’ on a inventé les procès, on ne connaît
sous le nom de demandeur., que celui qui ajourne d e
vant un tribunal pour se faire adjuger des conclusions
quelconques.'Celui qui est ajourné s’appelle le d éfen
deur; et si celui-ci, en répondant à ce qu’on lui dit, prend
des conclusions incidentes, il en résulte seulement qu’il
est demandeur en celte partie : reus excipiendo f i t actor.
Mais il n ’ôte pas à son adversaire la qualité de deman
deur originaire.
O r , c’est le sieur de T a n e q u i , le 14 août 1 7 6 6 ,
a assigné le sieur de L a c h a u x , pour se voir garder au,
droit de propriété des G â c h i e r s , et des arbres. Il a en
m ê m e tems assigné les habitans de V i e en arrêt comm u n , ce qui, en style de palais, leur rend communes
les conclusions prises en maintenue de propriété.
Si en défenses à cette demande , les consuls de Vie
ont pris des conclusions incidentes en maintenue do
propriété, par requête du 6 juillet 1 7 6 8 , c’est parce que
c ’çst la défense naturelle et habituelle de tout proprié
taire , troublé par une demande péliloire.
M a i s , dit le sieur N a t e y , la demande originaire du
sieur do T a n e , était abandonnée.
11 n ’en a plus été
question dans les arrêts postérieurs. C ’est vous qui êtes
restés demandeurs originaires.
L a sincérité du sieur N a t e y , va se lire dans l ’arrêt
m êm e d^appointement, du 8 mars 1769.
« E n t r e Antoine de T a n e , d e m a n d e u r , suivant
sa commission et exploit,, du 9 juillet et 14 août 1766
�(53)
« El: le
maire et
DE F EN DE UR S
échevins de Vie - l e - C o m i e ,
» ;
» Et lesdits maire et échevins dem andeurs , en deux
requê tes, des 6 et 7 juillet 1768. j>
C el arrêt est la dernière procédure de 1769.
Quan d le sieur N a t e y Ta reprise , en Fan 10 , c’ est
encore lui qui a assigné ie i . er , et qui a pris des co n
clusions pétiloires.
C ’ est lui qui dans sa propre demande a expliqué que
les conclusions prises en 1768 , par les habitans, en
maintenue de propriété étaient en défenses à la de
m an de du sieur de T a n e .
C ’est lui qui a signifié l’arrêt du 18 thermidor an 1 1 ,
où il dit que c ’est Antoine de T a n e , qui assigna les
habitans de Vie en 1768 ; et que ce ux -ci formèrent
une demande incidente 3 pour être déclarés proprié
taires ;
C ’est lui q u i, dans l ’arrêt du i
5 prairial au 12., a
dit que les habitans n'avaient formé qu'une dem ande
incidente , que le sieur de T a n e était premier d e m a n
deur; q u e l u i N a t e y , était encore d e m a n d e u r e n l ’an 10 ,
et que les habitans de Vie lui avaient opposé que ces
deux
demandes , étant
des
dem andes p rin cip a le s,
avaient dû subir les deux degrés de juridiction.
A tout cela le sieur N a t e y r é p o n d , en montrant
un extrait de mise au rôle, qui qualifie les habitans
de V i e , demandeurs par exploit du 8 fructidor an n ;
�(_ 54 )
2.ù le jugement du 9 nivôse an 1 2 , qui les qualifie
demandeurs.
Il est vrai que tout ajournement constitue un de
mande ur : et le m a i r e , qui assignait pour procéder
sur l'instance intentée par Le sueur N a tey , et pour con
clure à ce q u ’il lût fait défenses au sieur N a l e y de
déf richer, était lout à la fois, demandeur en reprise,
et deman deur incident. Mais n ’est-ce pas abuser des
m o t s , que de chercher là le dem a n d eu r, quand déjà
il y a instance pendante.
A u reste, q u ’on parcoure toutes les pièces étran
gères à cette demande incidente , depuis 1766 jusqu’à
1 8 1 0 , par-tout on verra les habifans de Vi e qualifiés
défendeurs, par le sieur N a t e y l u i - m ê m e , jusqu'à ce
que condamné au possessoire, il ait compris toute l’i m
portance qu’il y avait pour lui , de n’être plus de
mandeur au pétitoire.
E n vérité , ce serait une étrange subversion des
principes et des usages, que de transfigurer ainsi le
sieur N a t e y , en ce qu'il lui plaît de devenir suivant
les circonstances.
C onda m né au possessoire, et par conséquent obligé
de demander ce qu’ il ne possède pas , il réduirait les
habitans de Vie à réclamer eux -m ê m e s -ce qu’ils pos
sèdent, ce qu'ils tiennent d ’un jugement en dernier
ressort..
U n piège était caché sous une prétention aussi peu
intéressée en apparence. L e sieur N a t e y voulait arriver;
�(
55)
par une manœuvre habile , à faire infirmer par la
C ou r ce jugement possessoire.
•
§. I I /
Y avait-il heu d ’ ordonner une exp ertise, pour savoir
su les G âchiers et vergieres sont dans là ju s tic e de
V ic -le -Ç o m te ?
Ici l’appelant et les intimés sont d ’acccord , ce qui
n ’ est pas fréquent entre plaideurs.
U n e expertise était inutile pour constater ce qui
était con v en u par toutes les parties.
En effet , les habilans de Vi e ont toujours argu
men té de la transaction de i
5 i i , de l’arrêt de 1 6 4 1 ,
qui disent les Gâchiers situés dans la justice de V i e le-Comte.
L e sieur N a t e y , dans tons ses écrits, s’est préci
sément fait un m o y e n de cette énonciation; car p r e
nant le mot h la lettre pour faire un argument a
contrario sen su , il a dit que l’arrêt de 1641 ? donnant
les Gâchiers aux habitans de Vi e l e -C o m t e à titre de
ju s tic e , il fallait en conclure q u ’ils ne l ’avaient pas
â titre de propriété.
Ainsi une expertise, outre sa difficulté actuelle, et
sa longueur nécessaire, était un m o y e n d'instruction
absolument fruslratoire, puisqu’il -n'y a aucun fait à
éclaircir.
�(
56
)
§• III.
.
'
%
>
Y a-t-il lúea à évocation du p rin cip a l?
L a C o u r , par arrêt du 29 juin 1 8 0 9 , a statué sur
¡’évocation alors dem andée ’ elle a prononcé qu’elle
ne devait pas avoir lieu , et a r en v oy é les parties
devant le tribunal de Clermont.
'
C e tribunal a-t-il rempli le premier degré de j u
ridiction, en statuant sur le règlement des qualités,
et ordonnant une expertise ? Voilà ce que le maire de
Vie ne croit pas m êm e devoir discuter.
L e s juridictions sont de droit public.
U n maire n’a aucun caractère pour aquiescer a une
év oc a ti on, ni pour la contester.
L a Cour prononcera donc dans sa sagesse , si les
habitans de V i e d o i v e n t toujours av o ir les deux degrés
de juridiction
§ IV.
t
•
L e s habitans de T^ic n ont-ils sur les G âchiers qu’ un
simple droit de pacage?
C'est ce que le sieur N a t e y induit de sa prétendue
transaction de 1 5 3 1 , de la foi et- h om m age de 14 8 7 ,
du sous seing privó, de M. de B o u il l o n , de. 1668, et
m ê m e de l ’arrêt de 1641.
L a transaction de i 5 3 i , outre tous les indires de
fcilsiflcation qui s’élèvent contre elle, ne serait ¡pas .un
titre
�.
(
57 3
titre pour le propriétaire de Chadieu, car alors le sîeur
de Beaufort ne Tétait pas.
Elle n ’a jamais été produite par lui dans les procès
postérieurs; donc, si jamais elle a eu vigueur de titre,
elle l’aurait perdu par abandon et inexécution de deux
siècles.
Les habitans de Vie , n'étaient pas légitimement r e
présentés. Y e û t - i l eu une p r o c u r a t i o n ,
elle n’ é
manait pas d ’un délibératoire du corps c o m m u n , et
ne pouvait m êm e valoir sans homologation.
L e prétexte pris dans cette transaction , pour traiter
avec quatre individus sans caractère, est une concession
de 1 4 2 5 , qui aurait réduit les habitans à une simple
servitude dans la moitié. Cette concession n'a jamais
été représentée , pas m ê m e dans les anciens procès.
A u contraire, le propriétaire de Cliadieu argumentait
d ’ une concession faite à Lui par le seigneur d e V i c - l e C o m l e , m o ye nnant
3 francs d’or.
Les titres postérieurs détruisent cette transaction.
L a foi et h om m age de 1437 est encore moins un
titre pour le propriétaire de Chadieu.
II y est réduit à une simple fa c u ité de pacage dans
les Gâchiers.
Il n’a jamais entendu lu i- m êm e excéder cette faculté ,
puisqu’il n’a vendu que cela en 1627.
L a mention de propriété favorable au seigneur do
M o n t o n , dans cet acte de 1437, est inutile au proprié
taire de Chadieu. D ’ailleurs, le seigneur de M o n t o n a
x5
�(
58
)
reconnu pos térieurement, en 1 6 2 7 , que ces anciennes
énonciations étaient fausses.
»
1
l/ a rrê t de 1641 a réglé le droit des parties, sur le
v u de tous les titres produits.
Les habitans de Vi e produisaient la transaction de
l 5 n , et l ’arrêt en ordonne mot pour mot l ’exécution.
L e sieur de B e a u f o r t , q u i a u r a i t n e u t r a l i s é cette
t r a n s a c t i o n , s’il en a v a i t eu une autre de i 5 3 i , ne pro
duisit rien de p a r e i l , et ne se défendit pas mêm e avec
des moyens q u i y eussent de l ’a n a l o g i e .
Il sentit le besoin de rétracter les a v e u x émanés de
lui dans son propre titre de 1627. L'arrêt l’en débout a,
' en sorte que le titre et les ave u x sont demeurés c o m
muns aux habitans de Vie.
Il voulait faire sanctionner les actes de propriétaire
q u ’il avait faits par des tenues d ’assises ; il en fut débouté.
Il voulait réduire les habitans de Vi e à un simple pa
cage, et avoir lui-même la haute main; il en fut débouté.
Et leshabitansde Vi e furent maintenus en l a s a i s i n e
et possession des Gâchiers , et au droit de les tenir en
défenses de tout retail , en tems et saison q u ’il leur
p la ira it fixer.
L e propriétaire de Chadieu fut réduit à la simple
faculté de pacage sans f r a u d e , pour lui et ses métayers,
dans le tems seulement où les habitans de Vie ne m et
traient pas les Gâchiers en défense.
Si l’arrêt donne la saisine
et possession , tant pour
le droit de ju s tic e que de p a ca g e, c'est tout ce q u ’a v a it
�( 59 )
obtenu le sieur de Beaufort dans les mêmes termes
par la sentence du
5 juin 1637. L e sieur de Beaufort
n ’avait conclu qu’à être maintenu en La possession ,
saisine et pacage des Gâchiers , tant pour Le droit de
ju s t ic e que de pacage. C e p e n d a n t , le sieur N a l e v se
fait un moyen de ce que le sieur de Beaufort plaidait
pour La propriété des Gâchiers.
C ’ était au reste ce qui, dans le style du tems, dé
signait le droit d’une com m un auté d’habitans à un
pacage ou communal.
L a C outu m e d’A u vergne ne s’exprimait pas autre
ment pour indiquer le droit des communautés d ’ha
bitans aux com m un aux de leur enclave.
Quant aux liabitans d’ une m ê m e justice , il leur
est leu et permis faire pâturer leur b é t a i l , pâturages
co m m u n s, terres hermes et vacans, situés en ladite
justice, en tout tems et saison de l’a n , (art. 3 , tit. 28)
L ’art. 4 donne ensuite une faculté générale de pâtu
rage , en tous héritages portant fruits , après les fruits
levés.
Il a plu au sieur N a t e y de confondre ces deux ar
ticles pour ne voir que le dernier, afin d'arranger à sa
guise l’arrêt de 1 6 4 1 , de manière à ce qu'il ne signi
fiât rien du tout.
A l’entendre, cet a r r ê t , parlant de droit de ju s tic e
■
j*
.
n ’a rien donné que La vaine pâture.
^
Bie n ne serait plus exact si l’arrêt n’avait parlé que
dans le sens de l’article 4 , en permettant le pâturage
après Les fr u its Levés.
16
�( 6o )
Mais il a parlé dans le sens de l’article
3 , en don
nant le droit de pâturage en tout tenis et saison de
i ’a n , et m ê m e le droit de tenir en défenses.
O r ce droit ne peut donc s’entendre des pâturages
co m m u n s, terres hermes et vaca n s, sis en la justice;
et tout cela était la propriété du corps c o m m u n des
liabitans.
'
«•Quant a u x c o m m u n a u x , terres hermes et vacans,
« dit Basmaison , les seigneurs justiciers prétendent
« q u ’ils leur appartiennent à cause de leurs justices;
« mais la C o u t u m e , conform e au droit c o m m u n , les
cc attribue à l ’université des corps des liabitans qui ré « sident en m êm e justice au bas pa ys, ou en m êm e
«• village au haut pays , sans que le seigneur ait aucun
« avantage ni préférence à ses sujets, que d ’en jouir
«• com m e l'un d ’eux».
C e vieux principe, corroboré par les lois nouvelles,
était le droit com mun de la France dans les pays m ê m e
où le texte de la loi donnait formellement les terres
lie rmes au seigneur justicier.
A u r o u x , sur l'article
3 3 1 de la C o u tu m e du Bour
bonnais, dit : ffLes terres hermes et vacantes appar«■tiennent au seigneur, suivant notre article; mais il ne
«■faut pas confondre sous ce nom les comm unes ou
v com m un aux qui appartiennent aux liabitans d’un vil« lage ou d ’une paroisse, com m e il est dit dans l ’an« cienne C ou lum e( titr e 8, art. i . er : — Et n e s o n t r é p u « tés, dit cet art ic le, terres hermes Les p â tu ra u x dont
tr aucunes villes > villages ou comtés Jo u issen t et ont
�( 6i )
* j o u i pour leur aisance ou de leur bétail, tant et si
r longuement qu il nest mémoire du contraire , sans pré« judioe des droits seigneuriaux ou autres)».
«Ces c o m m u n a u x , continue A u r o u x , ou pâturages
« com m uns , sont pâturages ou terres non cultivés,
« charmes 5 etc.1, appartenant en commun auxl iab it ans
» d ’ un bourg ou village dans lesquels les habitans des
« lieux peuvent indifféremment, en tout tem s } m ener
« paître leurs bestiaux, com m e il est porté en l'article
5 du titre 10 d e l à C o u tu m e du B e r r y , et en Carticle 3 du titre 28 de la Coutume d ’Auvergne».
« i
L a m êm e chose était enseignée par le président
D u r e t sur cet article
3 3 1 ; A liter quandb habitantes
communiter u tu n tu r .,. JSihil enim impedit quominus
municipes fu n d u m communem possideant.
Cette définition dés pâturages com m uns , que la
jouissance immémoriale des habitaos répute commu
n a u x y est ici d’autant plus pr éc ie us e, q u ’elle vient
d ’ une C ou tu m e ayant des principes plus féodaux que
les nôtres : les deux s a v a n s magistrats, qui ont écrit
sur cette Coutu m e voisine, viennent donc à l’appui
de ce q u ’a dit Basmaison sur la nôtre.
Q u ’importe après cela si le texte de ces deu x Cou
tumes n’est pas aussi clair qu’il pouvait l ’être. L a féo
dalité avait aussi ses prétentions; et si elle ne maîtri
sait pas la l o i , peut-être en avait-elle dirigé la rédaction.
On voit q u ’en Bourbonnais , l’article le plus clair et
le plus décisif avait été oublié lors de la inform ati on,
'q u oiq u’aucun autre article ne l ’abrogeat ; et d ’ailleurs
�(
6
2
)
rien ne pouvait être abrogé dans la rédaction d'une
Coutume.
I/arrêt de 16 41 , rédigé dans les mêmes termes que
la Coutu m e d ’A u v e r g n e , doit donc avoir le m êm e
sens; et certes il est bien plus clair lorsqu’il donne La
saisine aux habilans de V i e , et réduit le propriétaire
de Chadieu au pacage, sans fraude.
Si le mot de propriété n ’ e s t pas dans cet arrêt, c ’est
parce qu’ il n’était pas dans la loi, parce que les pré
tentions des seigneurs y étaient 1111 obstacle : le droit
de triage semblait exiger des précautions; on y aurait
dérogé si la propriété eût été nominativement déférée
aux com m un es, sans ménagement ou modification.
Mais ce ménagement n ’était relatif qu’à l’intérêt
d’entre les vassaux et leur seigneur; aucun autre ne
peut venir se placer entre eux pour en profiler. Ici
le droit du sieur N atey est m a r q u é , c ’est lé simple
pacage. Hors de-là , il n’a p l u s r i e n d a n s l ’arrêt , que
Je relail des a r b r e s , qui lui restait encore à disputer
au seigneur de Lac baux.
Cependant , le sieur N a t e y assure que
cet arrêt
ne juge rien sur le fond du droit ; il atteste m êm e
que les liabilans de Vie ne réclamaient q u ’au pacage
une servitude, q u ’ils reconnaissaient le sieur de Beaufort co m m e propriétaire. Il est é v i d e n t qu'il a rêvé
tout cela , puisqu’il n ’y a pas un seul mol , un seul
mol de celle objection qui 11e soit une fausse allégation
de sa part.
L e s habilans de Vie plaidaient si bien en 1 6 ^ 1 ,
�( 63 )
pour avoir Les G â ch iers, qu'ils étaient appelans d’une
sentence qui les attribuait au sieur de Beaufort dans
les mêmes termes em ploy és par les habitans, pour les
avoir au m ê m e titre, saisine et possession.
Si donc ces mots voulaient dire la propriété, quand
le sieur de Beaufort les employait , ils voulaient dire
aussi la propriété vis-à-vis les habitans.
C ette dissection de mots a pu paraître importante
au sieur N a t e y , parce que c'élait sa seule ressource,
mais aucune personne de bonne foi ne s’y trompera :
le sieur de T a n e ne s y trompa pas , lorsque n’ayant
pu surprendre un arrêt contre les habitans de Vie., en
1 7 6 8 , et arrêté par leur rigoureuse défense , il se borna
à solliciter le duc de Bouillon d'intervenir pour r é
clamer lu i- m ê m e les G âch ie rs , à cause de sa haute
justice. (1)
(1) L e sieur Natey s’est plaint de ce que ce fait avait éié cité par le
maire de V i e , sans être justifié. Certes, le rapport fait au conseil d’ un
grand seigneur n’est pas une pièce de procès. L e sieur Natey est libre de
croire ou de douter, ou au moins d’attester qu’il ne croit pas. Ce rapport
n’ est pas donné comme un titre; il est .seulement un exposé de l’ état de
l’afFdiie, en 1774» et de l’opinion du rapporteur. L e maire de V i e , qui
l ’a trouvé dans les archives de sa co mmu n e, y a puisé les principaux
renseiguemens de cette longue affaire, où la mobilité des hommes et des
évéuemens a fait perdre tant de titres essentiels. Cette pièce est donc pré
cieuse pour lui ; car le sieur Natey 11e dit pas un mot auquel elle ne ré
ponde. On en jugera par les réflexions du rapporteur sur le résultat des
titres respectifs, et notamment de l’arrêt de 1641....... On va les transcrire.
« Quel intérêt, Messieurs, croyez-vous que S. A . puisse avoir dans une
contestation où il s’agit de la propriété de pacages, q u i , d ’ a p r è s la tran
saction de i 5 i i , passée entre les habitans de Vic-le-Comte et le seigneur
�\
( 64 )
M a i s , dit le sieur N a t e y , il restait encore une pro
priété ¿1 juger en 1641. L ’arrêt n ’y statue pas.
C e l t e propriété était celle des arbres et de leur retail,
et rien n ’explique mieux la concession faite par la
comtesse d’A u v e r g n e , m oyen n an t
3 fr. d ’or : elle
avait cédé , c o m m e seigneur justicier', tout ce qui p o u
vait être à elle dans les G â c h i e r s , i.° lés arbres , car les
4_____ jt.---- —— ------------------------ --------------------- — ___
de Chadieu , et tin contrat de vente de la terre de C h a d i e u , de 1 627 ,
paraît avoir été j u g é e , en faveur des habitaiis de V i c - l e * C o m t e , par l’arrêt
de 1641............
a II était question , lors de cet arrêt, de l’appel de la sénéchaussée de
Ri om , qui avait déclaré la dame ve uv e de Be a u f o rt , dame de Chadieu
et, de Chalus, propriétaire des grand et petit Gâchiers...............
« L a dame veuve de Beaufort avait pris des lettres de rescision contre
les clauses apposées dans le contrat de 1627, mais l’arrêt de 1641 , saris
s'arrêter à, ces lettres de rescision , a infirmé la sentence de la s é n é
chaussée de R i o m , et les tenues d’assises faites par les officiers............
« V o u s v o y e z , Mes si eur s, que cet arrêt
clauses de la transaction de
i
5i
i
est absolument conf orme aux
, et qu’il en est mê me la confirmation.
« Si la dame veuve Beaufort eût été propriétaire des grand et petit
Gâchiers , l’arrêt n’eût pas infirmé les sentences de tenues d’assises faites
par ses officiers, et il n’aurait pas prononcé, comme il l’a Fait
la confir
mation de celles du bailli de Vic-l e-Comte.
« S i , au contrai re, les habitans de Vic-le-Comte n’ en eussent pas été
propriétaires, cet arrêt 11e les aurait pas maintenus dans le droit de jus
tice sur les grand et petit Gâ ch i e r s; en leur donnant la justice, il les a
jugés propriétaires, puisqu’aux termes de la Coutume d’ Au ver gne , les par
cages appartiennent aux justices dai.s lesquelles ils sont situés.
« Ant ér i eure me nt , et en 1750, M. de Ta ne était dans l’intime persua
sion qu’il
n’avait rien à prétendre dans les grand et petit Gâchieis. E n
effet, je vois par une correspondance
suivie
entre lui et les gens d’affaiie
de M. le duc de Boui l lon, qui s’est trouvée aux archives de S. A . , qu’ il
sollicitait ses gens d’a(faire pour s’e m p i r e r , au nom de feu M. le duc do
Bouillon , du Gâchiet et de la vergière que la commune de Vic-lt-C.oii»,c
détail appropriés comme communal.
seigneurs
�(
65
)
seigneurs se sont arrogé le droi t de se dire proprié
taires y j u s q a à la révolution , dès arbres plantés dans les
co m m u n au x et places publiques de.leur ju slice , 2.0 le
droit de pacage, car elle Pavait c o m m e tout autre de ses
sujets, ainsi que le dit Basmaison. A la vérité ce droit
n ’était pas cessible, mais madame de B e r r y , qui n’ usait
pas de ce pacage , crut pouvoir le vendre.
*
« J e vois aussi par des écritures signifiées le 14 mars 1753, que feu M .
le duc de Bouillon a formé contre les hafcitans de Vic-le-Comte , aux re
quêtes du palais en la seconde c h a m b r e , par commission et exploit des 29
j an vi e r , i 3 septembre 1 7 5 2 , et par une requête du 10 janvier 1753, une
demande à ce qu’ ils fusseut condamnés à venir à partage et division , avec
M. le duc de Bouillon , des communaux de Vi c- le- Co mt e , appelés les grand
et petit Gâcliîers, pour en être délaissé un tiers à M. le duc de Bouillon ,
à son c h o i x , séparé des deux autres tiers.
« Cette demande formée par feu M. le duc de Bouil l on, en 175 2, contre
les habitans de Vi c- le- Co mt e, prouve évidemment que M. de Ta ne ne
jouissait alors jd’aucun droit sur les grand et petit G â c h i e r s , et que les ha
bitans de Vic-le-Comte en étaient seuls propriétaires ; il y a même lieu
de cr oi re , d’après les lettres de M. de T a n e , que ce n’a été quo sur ses
représentations, et à sa sollicitation, que le conseil du feu prince s’est dé
terminé à la former.
« Ce
qui peut avoir donné quelques années après à M. de Tdne des
idées de propriété sur les Gâchiers dont il s’agit, c’est sans doute la dé
couverte qu’il a faite d’un extrait du reçu des cens dus à la seigneurie de
V i c- le - Co ml e , des années 1644, 1645, jusques çt compris 1649, affirmé
le
5 mai i 651.
*
' Cet extrait porte :
« Madame de Beaufort, à cause de sa terre, fol.
565 , art. 2 , poUr ]e
« Gâ cl uer, 2 fr. d’or.
« Plus
565 , art. i . e r , à cause de C h a lu s , et pour le Gâcl ii er, 20 s. d’or.
En maige de cet a r t . , il y a : le fermier a refusé f ep y a procès à
Hiorn, etc ».
17
�y 66)
L e s habîfans de Vie , accoutumés par les usages f é o
daux à ne rien prétendre aux arbres, furent exclus de
cette contestation qui resta indécise entre le sieur de
Beaufort et le sieur de Châteaubriant. Quant à e u x ,
leur procès fut fini, la saisine des Gâchiers, accordée par
les premiers juges au sieur de B e a u f o r t , fut donnée
à eux ; tous les actes d ’usurpation de propriété du sieur
de B eau fort fu ren t annuités, les habitans de V i e obtin
rent leurs dépens. Ainsi il ne resta rien à juger à leur
égard.
Voilà donc un titre f o r m e l , un arrêt de cour sou
veraine , qui fait à jamais la loi des p a r t i e s , et qui ne
permet pas de revenir aux débats qui y furent agités,
sans un renversement dangereux de tout ce qui doit
tranquil i«er la société.
Il n’est plus temsde montrer des actes antérieurs à 164 1 ,
et de s’efforcer à en tirer des inductions fausses ou hasardées. Si ces actes ont été produits, ils sont jugés; s’ils ne
l o n i pas é l é , ils n’existaient pas alors, ou ils élaient sans
application. Ce qui pouvait êlre censuré et vérifié à
c e tte .é p o q u e ne peut plus l’être aujourd’h u i ; et une
croyance aveu gle ne
doit pas naître de la difficulté
d'asseoir ses doutes.
Allons m êm e plusmloin , et disons que si l’arrêt de
164 1 n ’avait pas tout j u g é , c o m m e il est au moins
certain que les parties avaient produit to.us leurs titres
en 1641 i co m m e aucun autre titre n’a été produit dans
le procès de 1 7 6 8 , la cause devrait être jugée avec
les m e mes titres; parce q u ’il n ’est pas naturel de m o n-
�( 67 )
trer pour la première fois au bout de
3 oo ans des actes
que Ton dit êlre sincères et aut he nti q ues, quand il
n’est plus possible de les vérifier , et quand ceux de
qui ils émanèrent n'en ont fait aucun usage.A u reste, et on doit le dire ave c instance, le seul
tifrede i 6 2 7 e x p l i q u e tout, rend tout autre titre inutile;
et c o m m e cet acte.reste en vigueu r par le rejet des
lettres de rescision, le procès ne pourrait être jugé
aujourd’hui que dans le sens de ce titre. L e proprié
taire de Cliadieu
serait toujours
réduit
au
simple
pacage.
• Après cela , faut-il venir aux prétendus titres du
sieur Nate}r, postérieurs à 1641 ? D e bonne foi, la pro
cédure en séquestre faite contre lui, se tournera-t-elle
en sa faveur pour lui faire un titre? U n écrit de M. de
Bouill on, destiné à être triple, et ne l ’étant pas, m an
quant de la signature des consuls de Vie., peut-il êlre
obligatoire contr’e u x ? M. de Bouillon qui 11e s’occupait
que du procès alors existant, et non de la propriété des
G û c h i e r s , qui avait quant à lui le soin de réserver la
justice,
la seule chose qui l’intéressiit , a - t - i l . p u ,
a-t-il même entendu faire départir les habilans de Vie
d ’ une propriété dont il ne s’agissait pas ?
Il y aurait de la honte à le croire , et h supposer
cela pût êlre cru ; ainsi il serait oiseux d ’ajouter
que
d’au 1res
réllexions à ce qui est si évident.
* Le s a veu x et dénombrernens de Cli adieu , au milieu
du vague qui se Trouve dans to u s, et des insidieuses
expressions qui 01H été placées dans quelques u n s ,
18
�( 68 )
ne méritent pas une grande attention. Ignorés des ha-'
bilans
de V i e , publiés dans des paroisses étrangères
à e u x , ces actes leur ont été égalem en t é t ra n g e rs, et
ce serait .choquer les moindres principes que de les re
garder c o m m e le simulacre m ê m e d ’un titre à l'égard
des habilans de Vi e. O n ne perd point une propriété
sans son c o n s e n t e m e n t ,o u sans une décision judiciaire.
M a i s , ce qui écarte toutes ces nouvelles découvertes
du sieur N a t e y c ’est la possession constante des habitans de Vie. C a r , que leur importait toutes ces petites
hostilités craintives et tortueuses, tant qu'ils n’ étaient
pas troublés dans la saisine qui leur était donnée par
leur litres, et confirmée par un arrêt souverain.
Ils furent troublés, dit le sieur N a t e y , par des défricliemens, à deux époques. Cela est v r a i , mais on a
v u ce qui en arriva; des coupes d ’arbres, des rixes, des
procès c r i m i n e l s . Quand leur seigneur change a, leurs
forces ne furent plus é g a l e s , ils souffrirent , mais ils
parvinrent à faire ôter au sieur de B eau fo rt, par un
séquestre, ce q u ’ils n ’étaient pas assez forts pour ôter
eux -m êm es . Bientôt les choses furent rétablies au point
où elles en étaient avant ce trouble, les habilans de
V ie furent remis en possession et saisine ; ils conti
nuèrent de tenir les Gâchiers en défenses , et le sieur
de Beaufort ne s’avisa plus de défricher.
Si les siens le tentèrent quelq uefois , une multitude
de pièces prouvent q u ’ ils furent réprimés; et il résulte
de celte longue possession que TantÎl de 1641 a to u
jours été exécuté. 11 résulte m ê m e des lenlatives des
�( 69 )
sienrs de Beaufort et de' T a n e , un droit plus fort et
m ie u x établi, en faveur des Yi&biians', possessio post contradictionem .
C ’est dans cet état de possession que la révolution
les a trouvés, et les lois de cette époq ue ont si bien
expliqué la C o u tu m e d ’A ü v e r g n e dans le sens de Basmaison j q u ’il n ’est plus possible de se faire un doute
raisonnable s u r la propriété des habitans ’de Vie.
L ’art. 2,, section 4 , de la loi du 10 juin 179 3 porte
que les biens c o m m u n a u x connus sous Le nom de terres
v a in es, vagues, p a ca g es, etc., app artiennent, de Leur
n a tu re, a u x habitans des comm unes dans le terriloire
desquels ils sont situés. C el te loi est toujours en vigueur,
c o m m e le prouvent plusieurs décrets impériaux.
L e sieur N a t e y , qui trouve des moyens contre les
arrêts et contre les lois, en trouve deux contre l ’appli
cation de cet article. Il dit que les Gâchiers ne sont pas
dans la co m m u n e de V i e , et que les liabilans de V ie
n ’ ont jamais dit que les Gâchiers fussent leurs c o m m u
n a u x , q u ’ainsi il faut q u ’ils prouvent par titres que ce
sont‘des com m un au x. On ne prend pas m ieux une loi'
a la lettre.
A v a n t 1 7 9 0 , les territoires se distinguaient par jus
tice en L i m a g n e , el co m m e il n’y a plus eu de jus
tice en 1 7 9 1 , il ne fallait pas espérer de trouver dans
une loi de 1 79 3 l’ancienne circonspection établie par
la Coutu me d ’ Auvergne. Mais la loi nouvelle n ’avait pas
d ’ellet rétroactif pour changer l’ordre établi jusqu’alors.
l i e commentaire naturel de cet art. 4 , se trouve
dans les art. 8 et 9 de la loi du 28 août 1792.
�( 7° )
«■Art. 8. Le s communes qui justifieront avoirancien-,
nement possédé des biens dont elles auraient été d é
possédées en tout ou partie par des ci-deva n tseign eu rs,
pourront se faire réintégrer dans la propriété et pos
session...., nonobstant tous arrêts, jugemens et pos
sessions contraires, à moins que les seigneurs ne re
présentent un acte authentique, qui constate q u ’ils ont
l é g iti m em e n t acheté lesdits biens.
Art. g. L es terres vaines et va gu es, landes, dont
les communes ne pourraient pas justifier avoir été en
possession, sont censés Leur appartenir, et Leur seront
adjugées ? si elles forment leur action dans le délai de
5 ans, à moins que les seigneurs ne prouvent par
titres ou par possession ex clu siv e, continuée paisible
ment et sans trouble pour 40 ans, qu’ils en ont la
\
propriété
'
Cette dernière disposition a été réformée par la loi
de 1 7 9 2 , qui veut un titre d’acquisition , et proscrit
toute possession5 mais les habitans de Vie n’ont pas
besoin de s’en prévaloir.
Ils n’ont, pas eu besoin non plus de former une
demande en réintégration de p ropri été , car ils étaient
en possession ; ils le sont encore. Ils payent seuls la con
tribution foncière, depuis 1 7 9 0 ; et s’ils ne l’ont pas
p a y é e plutôt , pour prévenir les sarcasmes du sieur
N a t e y , qui joue sur cette d a te , c ’est par une raison
q u ’on le prie de trouver
bonne : ces terrains
ne
payaient pas de contribution foncière avant 1790.
A u c u n e c o m m u n e voisine 11e dispute ce c o m m u n a l
aux habitans de Vie 3 c’ est le sieur JNaley seul "qui ne
�( 71 )
peut défendre pour autrui,, et qui défendrait tout aussi
infructueusement autrui que l u i- m ê m e ; car la loi ac
tuelle ne donne pas les c o m m u n a u x , elle les conserve
aux communes quand elles possèdent, ou leur rend
ceux q u ’elles ont possédés anciennement.
Si les habitans de Vi e n ’ont pas donné le nom de
com m unal aux Gâchiers * dans les anciens procès, ils
ont parlé le langage du te ms , celui de la loi; et ce qu’ils
disaient et voulaient, signifiait la m ê m e chose. On a
déjà donné cette explication.
. Vouloir des titres pour assurer des com m un aux à
une commune , c’est se mettre en opposition avec la
Coutu me d ' A u v e r g n e , avec les auteurs cités, et avec
les lois anciennes et nouvelles.
D o m in iu m cœpit à possessions, et il le faut b i e n ,
quand la propriété est im m é m o r ia l e , ou de droit public;
L a présomption seule suffit pour indiquer le m a î t r e ,
quand il s'agit de pâturages sur lesquels aucun indi
vidu n ’a un titre de propriété , pascua prœ sum untur
esse universitatis. T o u t cela est mot pour mot ce qu'ont
dit en d’autres t e r m e s , Basmaison, A u r o u x , etc. ; c’est
ce que supposent l’ordonnance de Blois , l’édit des
c o m m u n e s, les lois de 1792 et 1793. Les pâturages
c o m m u n s , les terres h e r m e s , appartiennent de Leur
nature aux hab itans, et sont présumés de droit être
des communaux.
On ne se rappelle aucune autre objection du sieur
N atey , et c ’est déjà lui avoir répondu trop longue
ment. Ma is, comment s’en dispenser , lorsque dans tous
�( 72 )
ses écrits il chante victoire à la moindre argutie restée
sans réponse. C ’était à lui à tout p r o u v e r , et il veut
que les habitans de Vie prouvent tout. L e seul m o y e n
dont ils eusent besoin é t a i t , possideo quia possideo , ils
y ajoutent des titres, un arrêt souverain et des actes
multipliés de prohibition.
Ordinairement pour gagner les causes il faut b e a u
coup moins de titres et de moyens. Mais les habitans
de V i c sont accoutumés depuis deux siècles à ne vaincre
que pour replaider encore. En 1 5 1 1 tout était fini ;
on recommença en 1637. T o u t fut terminé encore
v.
en 1641 , et cependant le procès a été renouvelé en
1768. E n f in , un jugement de 1807 a statué sur le
possessoire en dernier ressort , et
le sieur N a t e y la
renouvelle indirectement par des incidens de qualités.
I l a mêm e trouvé le secret d’en paralyser l ’exécution.
l es habitans de V i c ont eu jusqu’ici la patience du plus
faible : mais ils oseront se flatter que les lois seront e x é
cutées pour e u x ; et qu’ave c des transactions, des arrêts
et des lois positives, ils verront la fin d'une tracasserie
dont le but le plus réel, et le mieux étudié , a été de les
forcer, par dégoût ou lassitude, h sacrifier le droit le
le plus évident.
M . e D E L A P C H I E R , avocat.
M . e D E V E Z E , avoué-Licencié.
A
R I O M , de l ’im p rim e rie de la C o u r im périale et du B a rrea u ,
ch ez J . - C . S A L L E S .
�
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Title
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Factums Marie
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Description
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Le maire et les Habitants de Vic-le-Comte. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Devèze
Subject
The topic of the resource
communaux
pacage
rivières
Description
An account of the resource
Mémoire pour le maire et les Habitants de Vic-le-Comte, intimés ; contre Etienne Natey, habitant à Nyon en Helvétie, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1511-Circa An 12
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
72 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0424
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0412
BCU_Factums_M0423
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0413
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53808/BCU_Factums_M0424.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vic-le-Comte (63457)
Authezat (63021)
Nyon (Suisse)
Les Gachiers (terrain de)
La Vergière (terrain de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
communaux
pacage
rivières
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53807/BCU_Factums_M0423.pdf
7887ef65a97d1c066524297e3798aa67
PDF Text
Text
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41
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j r .
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�COUR
r
MEMOIRE
EN
IMPÉRIALE
RÉPONSE?
POUR
Sieur J oseph DE L A ROCH E-LAM BERT,
habitant à Issoire, intimé et appelant ;
C O N T R E
Dame F r a n c o i s e - A g l a é - G A b r i e l l e D E
L A L U Z E R N E et sieur P i e r r e D E L A
G R A N G E - G O U R D O N , son m ari; dame
A n g é liq u e - A r m a n d e - C a m ille D E LA
L U Z E R N E et sieur A n a t h o c l e - M a x i m ilien H U RAU LT D E
V I B R A Y E , son
mari, habitans de la ville de P a r is , héritiers
bénéficiaires de madame d e M o w t m o r i n , laquelle
étoit héritière bénéficiaire du sieur EmmanuëlFrédéric de T a n e , son frère, appelans ;
CONT RE
Sieur HENRI D U V E R G I E R , habitant a P a ris;
S i m o n T E R O U L D E yhabitant à Daudeville;
P i e r r e - L o u is L A I S N E , ancien sellier à
Paris habitant à Sens; A n t o i n e - L o u is
A
DE RIOM.
CH A M BR Ï.
�( a )
D U C H A S T E L , apothicaire à Paris ; etJEÀN
C H A R D O N y chapelier y habitant a P a ris,
syndics et créanciers unis dudit sieur d e T a n e ,,
aussi appelans,
C ON TR E
Sieur
A
D E TANE - SA N T E N A S,
habitant à Paris y intimé ;
m é d é e
ET
C O N T R E
Sieur L o u i s N A T T H E Y , habitant de Nyon en
Suisse y aussi intimé.
la révolution et les assignats, cette cause seroit
de la p lu s grande s im p lic ité dans les questions qu’elle
fait naître. L ’acquéreur d’une te r r e , chargé d’en payer
S a n s
le p rix à un notaire choisi par une direction de créan
c ie r s , lui en paye près de m oitié; ensuite il revend la
te rre, et laisse dans les mains du second acquéreur une
somme égale à ce q u 'il doit : des lettres de ratification
sont prises. Ce second acquéreur , p o u r s u iv i par les opposans, produit des quittances de consignation, assigne
les créanciers en m ainlevée de leurs oppositions, et fait
juger sa libération valable à leur égard.
Cependant ces c r é a n c ie i’s attaquent le prem ier acqué
r e u r, qui met en cause son garant : c e lu i-c i emploie
�C3 )
pour libération le jugement qui a validé sa consignation.
A lo rs l’acquéreur observe aux créanciers qui le pou r
suivent , que leurs oppositions à des lettres de ratification
^ ont lie leurs interets à ceux du second acquéreur qui les
a obtenues, et que s’ils ont laissé juger qu’ils étoient
payés , ils ne peuvent pas demander à être payés une
seconde fois.
V o ilà à quoi se réduit la question p rin cip ale, et il
est évident que jusqu’ici elle ne présente en point de
droit aucune difficulté sérieuse : mais le payement a été
fait en assignats, et les créanciers veulent en rejeter la
perte sur autrui. Les héritiers bénéficiaires du vendeur
origin aire, qui com prennent que si la perte des assignats
n’étoit pas pour les créanciers elle seroit pour euxmêmes , font cause commune avec e u x , pour que tout
retom be sur le prem ier acquéreur.
A lo rs tout s’exagère et se com plique. L ’émigration de
l ’acquéreur s’ajoute au procès, comme un point capital
qui domine tout : d'autres circonstances étrangères vien
nent se prêter à m ille équivoques. Quand la matière est
élaborée , on se croit déjà assez fort pour injurier et
celui qu’on veut faire payer ce qu’il ne doit pas, et le
tribunal même où il a trouvé justice. E n fin , après avoir
présenté un faisceau de lois étrangères à la question, et
d’arrêts assez bien choisis dans la m ultitude, mais plus
étrangers en core, on vient crier à l ’injustice et à l’indé
licatesse , en disant froidement : « Q ue m’im porte si vous
« devez recouvrer ou non
5ooooo francs que je vous
« demande pour une dette qui n’est pas la vôtre ! Que
A 2
�(4 )
«
«
«
«
m’im porte encore si vous êtes ruiné par ce payem ent,,
et si votre famille est respectable. Je veux de l’argent,
et je ne veux en demander qu’à vous que je suppose
moins en mesure de me résister; d’ailleurs votre émi-
« gration se prête à tous mes sophismes : il y a tant de
« lois, sur cette m atière,, qu’ il est im possible.de ne pas
« y voir que tout doit retomber sur vous. D ’ailleurs ,
« quand je me suis donné la licence d’im prim er qu’une
«• décision contraire à mon intérêt étoit un, jugement de
« f a v e u r , j’ai calculé l’effet de cette injure sur l’esprit
« des magistrats auxquels j’en demande la réform e. Si
« je ne puis les forcer à croire qu’il faut sacrifier un
ém igré par préférence, m on adroite censure sera tou«■jours d’un poids quelconque dans la balance ; elle
« achèvera probablem ent de-me conquérir le suffrage de
« ceux, dont l’opinion auroit été incertaine. »
A in si eût parlé M achiavel ; ainsi parlent les syndicsdes créanciers, de T an e , qui v e u le n t, p e r jh s et n e fa s ,
intéresser en se présentant comme des victimes.
Q u ’ils tâchent de prouver à la Cour, que m algré leursoppositions à des lettres, m algré un jugement qui pro
nonce contre eu x la validité du payement que le sieur
Natthey a été chargé-de leur faire, il leur reste encore une
action : voilà leur cause..
Mais que dans leur colère et dans leurs' calculs ils fassent
semblant de supposer de l’adresse, des insinuations et de
la faveur; que tournant tout du côté de Immigration, ils
cherchent à insinuer que cette ém igration deviendra aux
sieur et dame de la R oche-Lam bert un moyen de s’em
parer des plus clairs deniers des»créanciers de T a n e ,
�(5 )
et que ce sera s*être f a i t de ses propres J'a i! tes un m oyen
d?acquérir : voilà ce qui n’est ni la cause ni la. vérité r
mais une insigne et brutale calomnie;
Car personne ne sait m ieux que les adversaires qu’il
n?y a qu’à perdre dans tous les cas pour les sieur et dame
la R o ch e-L am b ert, puisqu’ils ont payé 178000 francs en>
écus sur une terre qu7ils n’ont pas : et on ose encore leu r
demander plus de ôooooo francs pour la même terre; et
on les signale comme des débiteurs de mauvaise fo i, parce:
qu’ils résistent à cette épouvantable injustice..
f a i t s
;
A p rès la m ort du sieur Em m anuël-Frédéric de Tane>,
sa succession fut acceptée sous bénéfice d’inventaire par
Françoise-G -abrièlle de T a n e , épouse de M . de M o n tm orin , ministre des affaires étrangères.
Madame de M ontm orin ne pou voit vendre en cette
qualité les biens de la succession sans y appeler- les
créanciers ; elle fit apposer des affiches pour vendre aux
enchères les terres de la Soucheyi’e , Chadieu, la ChauxM ongros et le m obilier de la succession. Il y a eu pour
777400 francs de ventes avant 1790.
L a terre de Ghadieu fut vendue par madame de
M ontm orin aux sieur et dame de la R oche-Lam bert, par
acte du 17 juin 178 8 , moyennant 376000 francs, et les
frais et faux f r a i s évalués à 5 deniers par liv re , produisant
7812 liv. 10 s. Il fut dit que les 376000 fr. seroient
payés solidairement par les sieur et dame de la R ocheLam bert eiitre les m ains de Trutat¿ notaire-séquestre,
�(6)
ou a u x créanciers q u i auront été délégués; savoir, un
quart au i 5 septem bre, et le surplus dans le courant
des deux années, en trois payemens. Il est ajouté que
les acquéreurs prendront à leurs frais des lettres de rati
fication , et q u e , s’il se trouve des oppositions du ch ef
de madame de M on tm orin , elle les fera lever dans les
six semaines ; mais hors ce c a s, elle ni les créanciers ne
seront tenus de garantir, et l’acquéreur n’aura son recours
que contre les créanciers qui auront touché le prix.
A la suite dudit acte on lit une intervention des sieurs
de T an e de Santenas, T ero u ld e, commissaire à terrier;
C hardon, chapelier; L ouis L a isn é , sellier, et T o u ta in ,
tailleur d’h ab its, tous syndics des créanciers de T a n e ,
lesq u els, après avoir pris lecture de la ven te, la con
firm ent et ratifient a u x conditions y exprim ées. Ils font
élection de dom icile chez M- P ern ot-D u plessis, procu^
reur au parlement.
L e jour même de la’ v en te, M . de la R oche-Lam bert
paya la somme particulière de 7812 liv. 10 s ., à T ru ta t,
n otaire; dans les années 1790 et 1791 il versa dans les
mains du même notaire 170644 francs.
E n 1 7 9 1 , les sieur et dame de la R o ch e -L a m b e rt,
voyageant en A lle m a g n e , envoyèrent au sieur de SaintPoney , leur b e a u -frè r e , deux procurations; celle du
sieur de la R oche-L am bert porte pou voir d'em prunter
les sommes nécessaires à ses a ffa ires, g érer, liq u id er,
vendre : elle est passée devant H eidz, notaire à Coblentz,
le 16 octobre 1791.
• L a procuration de la dame de la R oche-Lam bert porte
pou voir & em prunter 60000f t \ pour placer sur C ha d ieu ,
�(7 )
régler compte açec M . T r u t a t , notaire j recevoir ,
donner q u itta n ce, fa ire tous emprunts qiùil jugera bon
être, pour Varrangement des affaires de son m a ri. Cette
seconde procuration est passée devant L u tn e r, notaire à
W o r m s , le 20 octobre 1 7 9 1 ( 1 ) .
E n vertu de ces actes, le sieur de Saint-Poney se crut
autorisé à passer la vente ci-après :
L e 27 novem bre 1791 , par acte reçu C a b a l, notaire
à-Paris , le sieur de Saint-Poney, comme porteur de pro
curations des sieur et dame de la R o c h e -L a m b e rt, et
s’obligeant de faire ratifier dans le mois ( parce qu’il
n ’avoit pas de pou voir de la dame de la R oche-Lam bert ) ,
vendit la terre de Chadieu au sieur Sauzay, banquier à
P a ris, moyennant ôooooo f r . , dont il reçut i2Ôooo fiv
en assignats, et quant aux 376000 fr. r le sieur Sauzay
prom it les payer dans un an a u x sieur et dame de la
R oche-Lam be? t , o u y si bon lu i sem blait, a u x créanciers
desdits sieur et dame de la R o c h e - L a m b e r t , et spé
cialem ent a u x créanciers privilégiés sur ladite terre..
Il est dit ensuite que si au sceau des lettres de ratification
il survient des oppositions du chef des sieur et dame de
la R o ch e-L am b ert, le sieur de Saint-Poney les oblige et
( 1 ) Ces deux procurations répondent déjà aux im putations
injurieuses des créanciers de T a n e , qui ont dit que les sieur et
dam e de la Roche-Lam bert quittoient la F rance en s’occupant
plutôt de se faire des ressources que de payer leurs dettes.
Personne n’ a ignoré que leur prem ière pensée a été de s’o ccu p er
de leurs c ré a n c ie rs, et que tel a été l’ unique objet de la mis
sion donnée à M. de Saint-Poney.
�s’ oblige personnellement de les faire lever sous quinzaine.
E n fin , pour l ’exécution de ladite clause, le sieur de SaintP on ey fait une élection de dom icile à Paris.
L e 4 janvier 17 9 2 , il fut pris des lettres de ratification
sur la vente de 1788 ; elles furent scellées à la charge
des soixante-treize oppositions. Il est essentiel de remar
quer que plusieurs des créanciers de Tane sont opposans
individuellem ent ; mais qu’il n’y a pas d’opposition de la
part des syndics.
L e 22 avril 179 2 , le sieur Sauzay prit des lettres de
ratification sur son acquisition de 1791 ; elles furent frap
pées de huit oppositions, dont l’u n e , du 22 décembre
1 7 9 1 , étoit à la requête des syndics des créanciers de
•Tane.
Dans la même année 17 9 2 , le sieur de la R oche-L am bert fut porté sur la liste des émigrés.
L a dame de la R oche-Lam bert n’a jamais été portée
sur aucune liste.
Sous prétexte d’une loi du 30 octobre 1792, ordonnant
le séquestre des biens des absens du te rrito ire, sans les
désigner encore comme émigrés , le sieur Sauzay fit
déclarer par le curé d’A u tezat, à la m unicipalité du lieu ,
qu’en vertu de sa vente il devoit aux sieur et dame de
la R oche - Lam bert 376000 francs. Mais aussitôt il fit
mention qu’il a voit pris des lettres de ratification, et que
les créanciers opposans aux lettres absorberont le p r ix
et au delà : d’où il conclut qu’il a intérêt de conserver
les deniers ci-dessus, parce qu’ils sont sa sûreté, dès que
la terre -est h y po t h é q u é e . « E n sorte q u e , dit le sieur
a Sauzay, s 'il[fa itfa ir e ladite déclaration, c’est m oins
« à
�(9 )
«
«
«
«
«
«
«
à cause des sommes dont il peut paroître débiteur, et
dont la république ne pourra ja m a is profiter, puisq u elles doivent être absorbées pa r les dits créanciers
hypothécaires opposans a u x lettres de ra tifica tio n ,
que pour donner des preuves de son civ ism e, et empêcher qiüon ne lui fasse des reproches de négligence
ou intelligence. »
Par acte du 25 juillet 17 9 3 , le sieur Sauzay vendit au
sieur Feuillant un pré-verger sis aux M artres, les m ou
lins et fours banaux des M artres, dépendans de la terre
de Chadieu , moyennant la somme de 61100 francs,
payable après l’obtention des lettres de ratification.
L e 7 nivôse an 2, par acte reçu Gabal, notaire à P aris,
le sieur Sauzay vendit le surplus de ladite terre de Chadieu
au sieur W a llie r , Suisse, pour lui ou la personne que
W a llie r se réserva de déclarer dans les six m ois, m oyen
nant 530000 fr. dont W a llie r paya comptant 40000 f r . ,
s’obligea de payer 135000 fr. à Sauzay, après le sceau des
lettres, et enfin à l’égard des
355ooo fr. restans, W a llie r
fut délégué à les payer, so it a u x créanciers de T a n e ,
précédent propriétaire, q u i se sont trouvés o p p o s a n s
A U X L E T T R E S D E R A T I F I C A T I O N PR ISES P A R S A U Z A Y ,
soit afin d'en f a i r e le dépôt et la consignation partout
où besoin se ra , aussitôt après le sceau sans opposition
su r le sieur S a u za y des lettres de ratification à prendre
sur la présente vente.
L e sieur Na tthey dit avoir été subrogé par le sieur W a llie r
à ladite vente, par acte sous seing p rivé du même jour.
Il dit que le directeur de la régie du Puy-de-D ôm e
fit décerner, le 24 ventôse au 2 , une contrainte contre
B
�( ï° )
le sieur S a u za y > pour payer 5ooooo francs par lui dûs
au sieur de la Roche - Lambert eu vertu du contrat de
vente de 179 1, sous prétexta que le vendeur étoit ém igré.
E nsuite, et à la date du 26 floréal un 2 , le sieur
Natthey produit la pièce suivante :
3
cc Je soussigné, receveu r de l’enregistrem ent et des domaines
« au bureau 'de S ain t-A m a n t-T a llen d e, reconnois avoir reçu à
cc titre de dépôt, du G . E tienne-Jean-Louis N a t t h e y , de N y o n ,
cc au canton de Berne en Suisse ( propriétaire de Chadieu ,
,
te suivant la déclaration de com m and en sa faveur par le
■« C. W a llie r , du 7 nivôse d e r n ie r ) , la somme de trois cen t
ce cinquante - cinq m ille livres,, pour servir itant au .nom des
a cit. N atth ey et S a u z a y , qu’en ce lu i du C. Jean-JBaptiste
cc W a llie r , à la libération de Chadieu.
cc D e quoi m ’a été dem andée la présente déclaration , à l’e ffet
cc d’arrêter toutes poursuites et la mainmise nationale sur ledit
cc Chadieu.
ce Saint-A m ant, le 26 floréal an 2. Sig n é M a u g u è . »
Il
p a v o ît q u ’ un a r r ê té du d é p a r t e m e n t , e n l’an 3 ,
annülla la ^vente fa ite au sieur Sauzay, et mit la terre
de Chadieu en séquestre : mais ce séquestre fut levé par
un autre arrêté du 4 vendémiaire an 4 , et la restitution
de fruits fut ordonnée au profit du sieur Natthey.
Dans la même année, un procès eut lieu au tribunal
de la Seine, entre les sieur Natthey et W a llie r, se disant
tous les deux acquéreurs de Sauzay , et se disputant
Chadieu par la voie civile et par la voie criminelle.
Ce procès prouve que le sieur W a llie r avoit voulu 3e
libérer envers les créanciers opposans de Sauzay, et que
le sieur Natthey prenoit pour son compte cette libération :
�( 11 )
il fit des offres à W a llie r , et même une consignation en
mandats. Mais les lois sur la réduction du papier-monnoie
n’étant pas encore rendues, le tribunal de la Seine sus
pendit le p ro cè s, et on en ignore l’issue.
Les créanciers de T an e produisent à ce sujet la pièce sui
vante, tirée des mêmes registres du receveur de St.-Amant.
cc D u i 5 frim aire an
4j
reçu du C . J e a n -M a r ie T 'V a llier,
cc des deniers empruntés de J a q u e ro t, par acte d u ............. la
« somme de 355ooo francs , à valoir sur le prix .du domaine
« acquis par S a u za y , des sieur et dame de la R oche-Lam bert,
ce ém igrés , suivant le contrat du 27 novem bre 1791 ; ladite
« somme de 355ooo fr. payée en une rescription de la trésorerie
cc nationale sur le receveur du district de C lerm o n t, n°. 424, en
ce date du i 5 brum aire dernier ; dont quittance. S ig n é M a u g u e . «
/
Les créanciers ont retiré du même registre la pièce
suivante :
cc D u 26 frimaire an
a de 32851 francs
25
4 »reçu
de Jean-Louis N atbhey la somme
centim es pour les intérêts restans du prix
cc
principal du domaine de C h ad ieu , acquis de la R o ch e L a m -
cc
b e rt, sa fem m e et Saint-Poney, ém igrés, par le sieur Antoine
S au zay, lequel en a fait vente au C. W a llie r , par acte reçu
C a b a l, notaire à P a ris, le 7 nivôse an 2 , lequel W a llie r a
passé déclaration au profit dudit N a tth e y , par acte sous seing
p r iv é , du 7 nivôse an 2 , enregistré à Paris le 17 messidor
cc
cc
cc
ce
an 3 , par P in au lt; ledit payem ent fait en conséquence de la
cc liquidation des intérêts faite par le sieur A lia s , directeur de
cc correspondance à la régie de l’enregistrem ent à Paris , le
cc 12 frim aire présent m ois; et ledit payem ent effectu é en une
cc rescription de la trésorerie nationale sur les domaines d’ém i« g rés, n°. 493 ? e t sous la date dudit jour 12 du présent mois.
cc
« Certifié c o n fo rm e , le 8 vendém iaire an 11. Sig n é
M
B 2
augue
.
»
�( 12 )
L e iei\ nivôse an 4 , Natthey donna un exploit aux
créanciers de T a n e , aux domiciles par eux élus en leur
opposition ; il leur fait sommation en ladite qualité de
créanciers opposans a u x lettres de ratification prises
par Sauzay, de se trouver le i 5 pluviôse suivant .chez
le receveur de Saint-Am ant, pour y recevoir le p rix de
C hadieu. Il est constaté par cet exploit (resté au pouvoir
de Natthey, qui en a donné copie), que Natthey y procède
c o m m e obligé d?a c q u it t e r 376000 fra n cs en ca p ita ly et
3 2 8 5 2 / h en intérêts , tant pour se libérer lui-m êm e 9
que pour libérer le sieur S a u z a y , a in si que les sieur et
dame de la R o ch e -L a m b e rt? premiers acquéreurs j et
il fait la sommation au nom des uns et des autres.
Les créanciers ne se présentèrent p a s; et le sieur
Natthey fit dresser, le i5 pluviôse an 4 , par le receveur
de S ain t-A m an t, la pièce suivante produite par lui.
«
cc
«
cc
« Je soussigné, receveur de l’enregistrem ent et des domaines
au bureau de Saint-Am ant-Tallende, d éclare, d’après le débat
des com ptes qui a eu lieu cejourd’hui entre moi et le cit.
Parades, des Martres , fondé de p o u v o ir d u C. E tie n n e -J e a n L o u is N a tth e y , propriétaire de Chadieu , qu’il a été versé
cc dans ma caisse, tant par ledit Parades qu’en vertu de saisies
cc
tc
cc
cc
cc
te
«
cc
cc
nationales par moi faites avant la levée du séquestre de Chad ieu , la somme de s ix cent d ix - n e u f m ille s ix cent quatre c
là >res quinze sous en l ’acquit d u d it d o m a in e, 'dont quittance
et d éch arge, sauf audit Parades, qui en fait expresse réserve
pour ledit C. N atth ey , de plus ample e x a m e n et apuratiou
desdits com ptes , et de se pourvoir d e v a n t q u i il appartiendra ,
pour la restitution des sommes qu’il prétend avoir payées en
sus des sommes dues p ar led it C. N a tth ey pour la libération
dudit dom aine de Chadieu.
cc Saiut-Am ant-Tallende, le i 5 pluviôse an 4«Signé M a u g u e . »
�'
( I3 )
En marge est écrit :
« Sur 1 invitation du C. Parades , je déclare qu’ aucun des
« créanciers appelés par lui dans son exploit du i er. nivôse der« n ier, n a com paru cejourd ’hui en m on bureau.
« L e i 5 pluviôse an 4 * Sign é M a u g u e . »
Jusqu’ici les créanciers de Tane n’ont form é aucune
demande. Etoit-ce pour attendre la radiation du sieur de
la Roche-Lam bert? Ils veulent qu’on le croie ainsi. Mais
nous voici au sénatus-consulte, du 3 floréal an 10 , et
c’est le moment d’être attentif sur leur prem ière d é
m arche, pour apprendre d’eux lequel des acquéreurs ils
ont considéré comme leur débiteur.
Souvenons-nous qu’en décembre 179.1, les syndics ont
formé opposition aux lettres de ratification prises par
S a u z a y , sur sa vente du 27 novem bre 179 1.
P ar exploit du 11 brumaire an 11 , les syndics des
créanciers de Tane font assigner Sauza y au tribunal de
la Seine, pour leur payer 263980 francs qui leur restent
dûs sur la vente de 1788 ; en conséquence, ils concluent
contre ledit Sauzay, comme obligé à payer ladite somme
de 263980 francs , à ce que la vente ci lu i consentie
le 27 novembre 1791 , soit exécutée , et qu’il soit con
damné audit p a ye m e n t. (C ette pièce est produite par le
sieur Natthey. )
L e 22 pluviôse an 1 1 , Sauzay dénonce cette demande
h Natthey.
A lors Natthey assigne lesdits syndics au tribunal d e Clerm ont, pour voir dire qn’ il est valablement libère au moyen
des versemens par lui laits, et pour être condamnés ù lui
donner m ainlevée de leurs oppositions.
�C »4 )
le
«
«
«
«
«
«
«
L e 7 pluviôse an 1 2 , le tribunal de Clerm ont rend
jugement suivant :
« L e tribunal déclare le demandeur (N atthey) bien et
valablement libéré du p rix de la terre de Chadieu l
en conséquence , fait m ainlevée de l’opposition faite
par les défendeurs (les syndics) au bureau des h yp othèques de C lerm ont, le 2 décem bre; ordonne qu’elle
sera rayée des registres du conservateur, en vertu du
présent jugem ent; condamné les créanciers aux dom mages-intérêts de N atthey, à donner par déclaration. »
E li vertu de ce jugem ent, le sieur Natthey a fait rayer
toutes les oppositions prises par les créanciers de Tane
sur Chadieu. Les syndics n’y ont mis aucun obstacle,
et ont laissé passer quatre autres années sans hostilités.
T o u t d’un co u p , en 1808, ils ont pris une inscription
de 495369 francs aux bureaux d’Issoire , A m bert et C ler
m ont, sur tous les biens appartenans ou ayan t appar
tenu a u x sieur et dame de la R o ch e-L a m b ert, en vertu
de la vente de 1788.
Les sieur et dame de la R och e-L am b ert, instruits de
cette attaque, ont pris de leur côté une inscription sur
le sieur N atthey, pour supplément à la précédente, qu’ils
ont considérée comme frappant sur Chadieu.
Il eût été hors de p ro p o s, jusqu’à p résen t, de dire
que pour verser 170644 francs en 1791 , il avoit été
emprunté pour les sieur et dame de la R oche-Lam bert,
savoir, 44000 francs à la dame de B ourneville, m ère de
madame de la R o ch e-L am b ert, et 30000 francs au sieur
Gabriel de T a n e - S a n t e n a s , représenté par Am édée.
�( x5 )
On a vu que le sieur de S t.-P on cy, vendant à Sauzay,
ne lui laissa pas seulement les 263000 francs dûs aux
créanciers de T.ane, mais encore une somme suffisante
pour rembourser les prêteurs ci-dessus.
E t comme les syndics n’a voient inscrit que pour leur
in térêt, il falloit grever Chadieu du surplus de la somme
laissée entre les mains de Sauzay; c’est pourquoi il a été
pris à la requête des sieur et dame de la R och e-L am bert,
inscription supplémentaire de 112000 fr. sur Chadieu.
Cette inscription supplémentaire a été le prétexte du
procès actuel.
L e sieur N atthey, par exploit du 17 août 1808, a fait
assigner les sieur et dame de la R oche-Lam bert en main
levée de ladite inscription.
L e lendem ain, Am édée de Tane (très-d’accord, comme
on le voit déjà., avec Natthey) a fait un commandement aux
sieur et dame de la R oche-Lam bert de payer les arré
rages de l’em prunt ci-dessus de 30000 francs.
L e 23 du même m ois, il a été présenté requête au
tribunal de C lerm ont, sous le nom des sieur et dame de
la R o c h e - L a m b e r t ; ils ont conclu à la mise en cause des
créanciers de T a n e , et à ce que le sieur Natthey, se disant
lib é r é , fût tenu de fa ir e valoir envers eux ladite libé
ration , sinon .de garantir les sieur et dame de la RocheLam bert. Ils ont co n clu , en conséquence, à la résiliation
des ventes de 17 9* ^ suivantes, et au désistement de
Chadieu. Enfin ils ont conclu contre les créanciers de
Tane à :1a mainlevée de leur inscription, et contre le sieur
A m édée de Tane à la mainlevée du commandement de
�(
i6
)
payer par lu i fait, attendu que N atthey, chargé de payer
tout le m onde, a dit avoir fait juger sa libération valable.
Cette mise en cause a .eu lieu , les demandes ont été
jointes, et la cause a été jugée sur le fond le n juillet
1809.
Par ce ju g em en t, le tribunal de Clerm ont distingue
les intérêts des créanciers de T a n e , d’avec ceux d’A m édée
de Tane. A l’égard des prem iers, il déclare valablement
libérés tant le sieur Natthey que les sieur et dame de la
R och e-L am bert, par suite du jugement non attaqué, du
7 pluviôse an 12 ; en conséquence, il ordonne mainlevée
de leurs inscriptions.
Quant au sieur A m édée de T a n e , il considère la somme
de 30000 fr. prêtée pour déposer chez le notaire T ru ta t,
comme obligation directe et indépendante de l’acquisition
non purgée par les lettres, et il déboute les sieur et dame
de la Roche-Lam bert de leur opposition au commande
ment de p a y e r (1).
I l y a appel de ce ju g e m e n t , tant p a r les héritiers et
créanciers de Tane contre les sieur et dame de la RocheL am bert, que par les sieur et dame de la Roche-Lam bert
contre Natthey et contre le sieur A m édée de Tane. O n a
déjà indiqué en commençant quelles sont les prétentions
des créanciers : elles se réduisent à dire qu’ils ont deux
actions distinctes; l’une contre les acquéreurs de Chadieu,
l’autre contre les sieur et dame de la R o ch e-L a m b ert;
(1) C e jugem ent est transcrit en son en tie r, avec les m otifs,
à la fm du m ém oire des créanciers de T a n e , ce qui a rendu
inutile d’en parler ayec plus de détail.
d’où
�( *7 )
<l’où ils concluent que le jugement de l’an 1 2 , q u i, en
déclarant les acquéreurs libérés, les autorise à faire radier
leurs inscriptions, ne les empêche pas de se faire payer
par les sieur et dame de la Roche-Lam bert.
M O Y E N S .
P o u r suivre cet appel dans toutes ses faces, et pour être
clair, autant que possible, dans une discussion dénaturée
et obscurcie par de fausses applications de prin cipes, il
est nécessaire de séparer les moyens des créanciers de
T a n e d’avec ceux des héritiers de M on tm orin , quoiqu’ils
aient réuni leurs intérêts, sérieusement ou non. O n exa
m inera, en prem ier lieu , s’il est vrai que les créanciers de
T a n e aient, ainsi qu’ils le prétendent, une double action
contre les acquéreurs de Chadieu et contre les sieur et
dame de la R o ch e-L am b ert, et si la libération du sieur
Natthey, jugée valable par jugement du 7 pluviôse an 12 ,
a dû profiter au sieur de la R o ch e-L am b ert.
20. Sur l’appel des héritiers de M ontm orin il s’agira
de savoir s i , au cas où le versement du p rix de Chadieu
seroit jugé être l’effet de la confiscation n ationale, et
n’avoir pas acquitté les créanciers de T a n e , la perte de
ce versement doit être pour les héritiers de madame de
M on tm orin , comme condamnée à m o r t, ou pour le
sieur de la R oche-Lam bert, comme ém igré.
30. Quant à l’appel du sieur de la R o c h e -L a m b e rt
contre le sieur Am édée de T a n e , il y aura lieu d’exam iner
si le sieur Natthey, charge de faire face à. tout, a également
lib éré le sieur de la R oche-Lam bert de cette dette.
C
�( .18)
E n fin , l’appel contre le sieur Natthey donnera lieu à la
question de savoir s i, dans le cas où le sieur de la Roche*
Lam bert seroit condamné à payer des sommes quelconques
aux créanciers délégués ou opposans, le sieur Natthey lui
devra une garantie, et quelle doit en être l’étendue.
A
p p e l
d e s
c r é a n c i e r s
de
T
a n e
.
La prétendue ém igration du sieur de la Roche-Lam bert
est le prem ier texte de la proposition des créanciers d e
T a n e ; ils l’appuyent sur un arrêté du conseil d’état, du
3 floréal an 1 1 , portant que tout créancier d'émigré
non liq u id é, a le droit de retirer ses titres du dépôt na
tional pour poursuivre l’ém igré : ils en concluent qu^
les émigrés sont rentrés avec la charge de leurs obliga
tions personnelles, quoiqu’ils aient perdu les biens soumis
à leurs dettes.
R ien de plus incontestable que ce point de d roit; mais
aussi rien de moins applicable à la cause.
L ’arrêté de l’an n seroit applicable, si Ghadieu.ayant
été vendu nationalement,, le sieur de la R oche-Lam bert
vouloit renvoyer le vendeur ou ses créanciers au gran d
liv r e , pour rechercher le prix versé par l’acquéreur du
gouvernement..
Mais qu’y a-t-il de commun entre cette espèce et celle
où sont les parties? Il faudroit s’obstiner à ne pas réfléchir
pour ne pas y trouver une prodigieuse différence.
i° . La terre de C h ad ieu , qui est le gage de la dette,
et à raison de laquelle le sieur de la Roche-Lam bert a
été débiteur, com me détenteur y n’a point été vendue;
�( r9 )
la nation ne s’en est point emparée : un séquestre aussitôt.,
m is que l e v é , n’a pas em pêché les acquéreurs de rester
propriétaires incommutables depuis 1 7 9 1 , et ils le sont
encore.
Cette terre étoit vendue , li vrée , sortie des mains du
sieur de la R o ch e-L a m b ert, au 27 novem bre 1 7 9 1 , et
le sieur de la R o ch e-L a m b ert n’a été mis sur la liste
des ém igrés qu’en 1792. L a vente ayant une date au
thentique avant le 9 février 179 2, devoit avoir tout son
effet aux termes des lois : la nation n’a pas pu vendre
Chadieu ; et en effet elle ne l’a pas vendu.
20. Dans quelle loi croit-on trouver l’horrible injustice
de rendre les émigrés victimes des évén em en s, lors
q u ’à vant leur départ ils ont mis hors leurs mains l ’im
m euble par eux acquis, et ont transporté sur un nouvel
acquéreur toute la dette dont l’immeuble étoit le 'gage;
lorsque les créanciers ont accepté ce transfert par une
opposition expresse sur la deuxièm e vente ; lo rsq u e ,
suivant toutes les idées reçues, l’acquéreur intermédiaire
étoit dégagé de toute dette ; lorsqu’enfin les choses
n’étoient plus entières depuis 1791 , et n’a voient rien
de commun avec l’ém igration?
30. 11 ne s’agit pas de créanciers d’ém ig ré, q u i, après
avoir eu la nation pour seul o b lig é, parce qu’elle s’étoit
emparée de leur gage, reviennent à leur propre débiteur;
ce sont des créanciers opposansqui changeant leur action,
laissent de côté l’acquéreur qui a pris des lettres, et qui
possède, pour s’adresser à un acquéreur interm édiaire.
Les créanciers de Tan e ont bien senti qu’il falloit
C 2
�C 20 )
prouver , avant t o u t , comment ils avoient une action
directe contre les sieur et dame de la R oche-Lam bert ;
aussi ils débutent par dire rapidement qu’il y a envers
eux engagement personnel de la part des sieur et dame
de la Roche-Lam bert.
Ces créanciers-là ne veulent pas manquer de sûretés;
ils se donnent pour débiteurs solidaires, i° . les héritiers
de M ontm orin ou d e T a n e , comme obligés directement;
2°. le sieur Sauzay, à cause de ses lettres de ratification
ou C h a d ie u , à cause de l’hypothèque ; 30. le sieur de
la R oche-Lam bert, comme délégué envers eux par l’acte
de 1788..
P o u r amener à eux le sieur de la R o ch e-L am b ert,
#
il y a une seule chose à chercher : c’est une délégation.
Car il n’y a pas de délégation parfaite sans novation,
c’est-à-dire, sans l’extinction de la dette du prem ier obligé;
et de même il n’y a pas de novation sans l’intention
form elle de l’opérer. Ce sont là des principes élémentaires.
O r , qu’on lise et relise le contrat de vente de 1788,
on n’y verra pas même Papparence d’une novation ; au
\
contraire,, madame de M ontm orin reste débitrice des
créanciers de son frère. Ils se gardent bien de lui donner
quittance des 376000 fr. que payeront les acquéreurs de
C h ad ieu; ils conservent sans le moindre- doute-le droit
de s’adresser à. madame de M ontm orin ; et cela est si
bien p ro u v é , que nous voyons dans l’inscription du 11
janvier i8 o8 ‘, et en la C o u r, les dames de la L u zern e ,
héritières de M ontm orin , se r é u n ir aux créanciers de
Tane pour attaquer le sieur la R oche-Lam bert, à cause
de Tintérêt qu’i l a ù ne pas payer lui-mêm e.
�( 21 )
Si les dames de la- Luzerne n’étoient pas restées débi
trices envers les créanciers de T an e , elles ne seraient
pas là pour fa ir e valoir la vente ; elles n’auroient pas à
s’inquiéter s’ils seront payés des 376000 francs ; car l’acte
de 1788 leur vaudroit quittance de cette som m e, s’il y
avoit eu une réelle délégation qui rendît les sieur et
dame de la R oche-Lam bert débiteurs personnels, comme
délégués envers les créanciers*
M a is, d it-o n , les créanciers sont parties en Facte
1788. D on c il y a délégation et obligation directe
personnelle des sieur et dame de la R oche-Lam bert ;
l ’ont même exécutée en partie par leurs payemeus
de
et
ils
do
170644 francs.
Il est vrai que les syndics des créanciers de Tane sont
intervenus à la fin de Facte de 178 8 , pour ratifier et
c o n fir m e r la vente. Mais pourquoi se dissimuler les motifs
d e cette in terven tion , commandée par d’autres circons
tances.
Madame de M oütm orin étoit héritière1 bénéficiaire ;
elle habitoit Paris.
L a c o u tu m e de P a r is ne permet à l’héritier bénéfi
ciaire de vendre les meubles même de la succession,
sans les formalités judiciaires, auxquelles les créanciers
connus doivent être appelés. Cette coutume est muette
sur les immeubles; mais l’article 343 de celle d’Orléans,
plus n o u v e lle m e n t réfo rm ée, en est le supplém ent; et
s u iv a n t la ju ris p ru d e n c e constante à P a iis5 aucun héritier
bénéficiaire ne peut vendre les immeubles sans appeler
les créanciers.
�22)
A in s i, pour la solidité de l’acte de 178 8 , il falloit
leur concours. On eût bien pu faire valoir qu’ils avoient
coopéré aux affiches ; mais n’étoit-il pas plus sage de
leur faire approuver la vente, pour la sûreté de l’acqué
re u r, pour éviter des enchères et d’autres contestations',
q u i , bonnes ou m auvaises, ne sont que trop souvent
suggérées à des masses de créanciers ? Il étoit donc pru
dent ici d’avoir leur approbation; mais qu’avoit-elle de
commun à une délégation , lorsque ces créanciers, en
faisant une simple ratification in fo r m a com m uni d’un
acte qui ne contenoit qu’une indication de payem ent,
11e disoient pas dans leur intervention qu’ils acceptaient
l ’engagement des sieur et dame la R oche-Lam bert , et
qu’ils éteignoient celui de madame de M ontm orin ?
Ce n’étoit donc que pour lever une difficulté, et pour
la sûreté de la ven te, que les créanciers intervenoient";
mais point du tout pour une délégation qu’il ne faut
pas sous-entendre, et qu’on ne peut placer là sans cho
quer la loi elle-même. Q uœ dubitationis tollendœ causâ
in contractibus inseruntur, ju s com m une non lœdunt.
(
Quant aux payemens postérieurs faits par les sieur et
dame de la R oche-Lam bert aux créanciers, c’est encore
vouloir forcer le sens des choses les plus simples, que
d’y trouver une preuve de délégation parfaite et d’en
gagement personnel.
« P ou r qu’il y ait délégation (dit M . Pothier, n°. 564),
« il faut que la volonté du c r é a n c ie r de décharger le
« premier d éb iteur, et de se contenter de Vobligation
« de ce nouveau débiteur qui s’oblige envers lui à la
�< *3 )
« place du p rem ier, soit bien m arquée. C ’est pourquoi
« si P ierre, l’un des héritiers, pour se décharger d’une
« rente envers m o i, a , par un partage, chargé Jacques,
c< son cohéritier, de me la payer à sa décharge , il. riy aura
« pas de délégation, et Pierre ne sera pas déchargé envers
« m o i, si je ri*a i par q uel qu'acte déclaré fo rm ellem en t
« que je déchargeois P ierre : sans c e la , quoique j’aie
« reçu de Jacques seul les arrérages pendant un temps
« considérable, on rien pourra pas conclure que je Taie
« accepté pour mon seul débiteur à la place de P ie r r e 9
« et que j'a ie déchargé P ie r r e . L . 40, g. 2, ff. D e pact. »
Effaçons donc de cette cause que les sieur et dame
4 e la R oche-Lam bert ont contracté une obligation pertonnelle envers les créanciers de Tan e , sous prétexte
d’une délégation qui n’existe pas, et substituons-y qu’ils
ont contracté , com m e acquéreurs E T d é t e n t e u r s ,
l ’obligation de payer 375000 fr. pour le p rix de la terre
de Chadieu.
Q ue va -t-il en résulter ? R ien que de fort ordinaire ;
c’est que s’il y a eu ensuite des lettres de ratification, les
créanciers opposans auront une action sur le p r ix , et
n’en auront plus contre l’acquéreur personnellem ent.
Quand il y auroit eu délégation parfaite, elle seroit
anéantie par ces lettres de ratification qui ont opéré un
nouveau contrat entre l’acquéreur et les opposans, lequel*
contrat détruiroit absolument toute délégation anté
rieure \ c^r les conventions particulières de la vente-
�( 24 )
doivent cesser absolument pour faire place à celles que
la loi d ic te , et dont elle ordonne l’exécution.
L e résultat des lettres de ratification prises par le sieur
de la R o ch e-L a m b ert, sur la vente de 1788, devoit être
une procédure d’ ordre entre les soixante-treize créanciers
opposans.
Ce n’est pas ce qu’ont fait les créanciers de T a n e ; ils
ont commencé l’attaque par une inscription sur les biens
personnels du sieur de la Roche-Lam bert.
S’ils n’ont pas ouvert un ordre contre le sieur de la
R oche-Lam bert, e ’est qu’en effet ils ne le pouvoient pas;
car, i° . les syndics n’ont pas form é opposition aux lettres
de ratification prises par les sieur et dame de la R och eLam bert , sur la vente de 178 8 , mais seulement à la
vente faite au-sieur Sauzay le 27 novem bre 1791.
A in si ils ont transporté leur action en payement sur
le sieur S au zay, et ont laissé aux créanciers opposans
sur la vente de 1788, le droit exclusif d’attaquer les sieur
et dame de la R oche-Lam bert.
Ils së sont jugés eux-m êm es sur ce p o in t, par leur
exploit donné à Sauzay en l’an 4 , précisément parce qu’il
étoit obligé envers eux par ces lettres de ratification.
2°. Les lois invoquées par les créanciers , sur Immi
gration , prouvent qu’il 11’y avoit plus lieu à un ord re,
si un ém igré étoit débiteur, parce que le gouvernem ent,
dans ce c a s , forçoit la consignation en ses mains pour
distribuer les deniers lui-même.
3°. Les créanciers pouvoient encore moins ou vrir un
ordre contre le sieur do la R o c h e -L a m b e rt, après le
jugement
�(
25
)
jugement du 7 pluviôse an 1 2 , qui est rendu par suite
de leur provocation contre Sauzay. N atthey, son garant,
a répondu à leur demande ^n faisant juger qu’il avoit
payé valablement.
Les créanciers de Tarie se croient dispensés de tou t,
quand ils disent que cette chose jugée est un p iè g e , et
qu’ils ne veulent pas y tomber. Ils en sont les maîtres:
mais ce jugement est contr’eux; il n’est chose jugée pour
aucune autre personne.
'
L ’idée la plus bizarre des créanciers est de renvoyer
ce jugement à dém êler au sieur de la R och e-L am b ert,
qui n’y est pas partie, afin, disent-ils, de le faire réform er,
parce qu’on n’a pas pu valider une consignation faite sans
offres, sans permission de justice, sans appeler les créan
ciers, et faite surtout chez un receveur d’enregistrement.
Ils en concluent que ce versement est pour un ém igré,
et nullement pour libération envers eux.
Si les sieur et dame de la R oche-Lam bert avoient à
prouver sérieusement et nécessairement.que la somme
versée par le sieur Natthey a été pour le compte des
créanciers opposans, ils le prouveraient aisém ent, sans
rien contester des lois même qu’on leur oppose.
Il s’agit en ce point d’ une vérité de ré v o lu tio n , où il
ne seroit pas prudent de s’abandonner à ses propres
forces. P ou r être m ieux é co u té, en cherchant le sens
de quelques lois de circonstance que le législateur ne
nous a pas données comme ratio scr ip ta , il est plus
convenable d’emprunter le langage littéral d une autorité
prépondérante.
D
�c 76 )
L es créanciers de T a n e , en citant beaucoup d’arrêts/
ont prévu qu’on pourroit leur opposer celui rendu en
la C o u r de cassation entre les héritiers Lecom te et la
dame Bélanger; ils l’ont brièvem ent réfu té} en disant que
l ’espèce ne s’appliquoit pas à la cause.
Ils ont eu rigoureusement raison ; car quoique dans
cet arrêt il fût question d’une somme versée à la régie
par l ’acquéreur d’un bien de condam né, après des lettres
de ratification , les créanciers n’avoient de procès que
contre l’acquéreur qui avoit payé ; en sorte que minu
tieusement on peut bien dire que l’espèce n’est pas mot
pour m ot la même.
Mais ce n’est pas dans les motifs de l’arrêt que
nous puiserons des moyens j c’est dans le plaidoyer de
M . M e rlin , qui y a discuté avec sa profondeur ordi
naire le sens des lois qui ont obligé les débiteurs des
condamnés et des ém igrés à verser les sommes par eux
dues, à la régie de Venregistrement. Dans cette discus
sion , ce. magistrat n ’omet pas d’examiner aussi quel doit
être Veffet de ce versem ent, et pour q u i il est présumé
être fait. V o ici en peu de mots l’espèce de cet arrêt.
M . d’O rm esson , vendeur d’une ferme moyennant
425ooo fr. ? avoit reçu 340000 fr. ; il fut condamné à
m o rt, et la régie se fit payer 89904 fr. restans sur le
p rix de la vente.
A p rès la loi qui restitue les biens aux héritiers, la
dame B élan ger, acquéreur, prit des lettres de ratifica
tion. Les héritiers L ecom te, créanciers opposans, pour
suivirent le payement du prix, L a dame Bélanger se pré-
�( >7 )
iendit libérée m algré l’opp osition , et soutint que le
créancier n’avoit d’action que contre le trésor public ,
parce qu’ayant versé le prix de sa vente, comme y étant
obligée à cause.de la condamnation de son vendeur et la
confiscation de ses biens, son versement étoit pour le
compte des a yan t d r o it, et par conséquent des créan
ciers hypothécaires, en même temps que pour le compte
du vendeur.
C ’est pour examiner cette prétention que M . M erlin
discute; et nous allons voir qu’il l’adopte entièrement.
« Si au lieu de payer aux héritiers Lecom te (créanciers)
« le moatant de leur créance, la dame Bélanger l’eût
« payé à un tiers autorisé à recevoir p ou r eu x ( i ), leur
•« hypothèque se seroit éteinte ni plus ni moins que par
« un payement fait à eu x-m êm es... . . .
c< Q u e re ste -t-il à exam iner? Un seul point, celui de
-« s a v o ir si en effet les héritiers Lecom te o n t , par les
« m ains $ un tie r s , touché après la m ort du citoyen
cc d’Orm esson, ce qui leur étoit dû par la dame Bélanger.
cc (A rtic le 14 de la loi du 8 avril 1792. Les débicc teurs des ém igrés, à quelque titre que ce soit, ne
cc pourront se libérer valablement qu’en payant h 1$
,c< caisse du séquestre. )
« C ’est donc par forme de séquestre, que la nation
cc va recevoir les sommes dues aux émigrés. La nation
« ne les recevra donc pas précisément pour son compte
,« personnel,* elle les recevra pour le compte de ceux q u it
(i) Ces mots sont aussi en lettres italiques dans le plaidoyer
de M. M e rlin ; ils sont conform es à la r t. 1 ^ 9 du Code c iv il/
D 2
�'
( 28)
«
«
«
«
pourront y avoir droit ; elles les recevra par conséquent pour les remettre a u x créanciers que les émigrés
peuvent avoir laissés en F ran ce, sauf à en retenir le
restant à son p ro fit, s’il y a lieu..,. . . .
« (A rtic le 17. Les sommes déclarées en vertu des
c< articles précéd en s.. . . seront versées.. . , dans la caisse
« des receveurs de l’enregistrem ent, et ce nonobstant
« toutes oppositions de la part des créanciers de chaque
« é m ig ré , et sans y préjudiciel'. )
« V o ilà qui confirme , qui développe bien clairement
' « les conséquences que nous tirions tout à l ’heure de l ’ar« ticle 14 de la loi du 8 ‘.avril 1792. L e s oppositions des
« créanciers d’un émigré ne peuvent ni em pêcher ni
« dispenser son débiteur de verser à la caisse du rece« veur de l’enregistrement le montant de ce qu'il d o it,
« mais ces oppositions n’en souffriront point pour cela :
« elles tiendront sur la som m e que le receveur de Ven« registrement aura touchée. P reuve évidente et sans
„« réplique que le receveur de Venregistrement touche
« pour le compte des créanciers opposans ; p r e u v e évi
te dente et sans réplique que les créanciers opposajis
« sont censés recevoir par les m ains du receveur de
« Tenregistrement j preuve évidente et sans rép liq u e,
« enfin, que le débiteur, en se libérant entre les mains
« du receveur de l’enregistrement, est censé p a y e r , non
« pas seulement à la république, m ais encore a u x créan« ciers même opposans. » Questions de d ro it, tome 5 ,
y 0. Lettres de ratification.
Il faut rem arquer maintenant que c’est dans ce sens
que la question avoit été déjà jugée. Les créanciers d’O r-
�^
( 29 )
messon n’avoiënt été autorisés à attaquer l’acquéreur qu'en
cas d?insuffisance des deniers versés, et le recours n’étoit
ouvert contre la succession d!Ormesson qu’au même cas
d’insufiisance. L e pourvoi des créanciers fut rejeté.
Les conséquences de ce qu’on vient de lire sont toute
la défense du sieur de la Roche-Lam bert ; elles prouvent
que les créanciers de Tane ne se sont fait une cause qu’en
dénaturant jusqu’aux faits,' et en jouant sur les mots.
' Quand ils ont poursuivi Sauzaÿ pour les payer comme
leur d ébiteur, N atthey, son garan t, a fait juger contre
e u x qu’il étoit valablement libéré par deux quittances
de l’an 2 et de l’an 4. Ces expressions ont paru équivo
ques aux créanciers; ils ont dit qu’il ne s’ensuivoit pas
la preuve d’un p ayem ent, mais plutôt d’un versement
pour un ém igré.
Il falloit bien le dire ainsi pour s’emparer de l ’arrêté
du 3 floréal an 1 1 , qui ne se rapporte qu’aux créanciers
d’ém igré qui n’ont pas provoqué leur liquidation , et à
l’égard desquels il n’y a pas eu de payem ent. ?
Disons donc avec M . M erlin que si Natthey a payé
•le prix de C h ad ieu, soit en l’an 2 , soit en l’an 4 , ce n ’est
pas pour le sieur de la Roche-Lam bert qui n’avoit aucun
drçit à ce p r ix , mais pour les créanciers hypothécaires.
- A in si, quand les créanciers de Tane pourraient s’em
parer des lois d’émigration qui ne les regardent pas, il
est bien prouvé qu’ils n’y gagneroient rien', puisqu’aux
termes des lois on a versé pour eu x : par conséquent
ils sont payés; e t, ne craignons pas de ré p é te r, 1’arrçté
�( 3° )
du 3 floréal an n , . l a seule loi de leur système, ne-se
rapporte nullement à eux.
D e là est venu cet embrouillement de cause, de moyens
et de procédure. Il falloit se faire une qualité qu’on n’a
pas, épouvanter par une inscription de ôooooo francs,,
et bien se garder de'com m encer rune attaque d irecte,
pour mettre le prétendu débiteur dans un plus grand
embarras. ,
’
*
Mais qui a autorisé', on le ré p è te , les créanciers de
T an e à prendre cette inscription? car il faut avoir un
titre exprès et portant obligation directe de la part d’un
in dividu, pour ¡^rendre inscription sur ses biens. E t certes
ces créanciers qui n’en avoient pas en 1791 contre le
sieur de la R o c h e -L a m b e rt, en avoient encore moins
en 1808.
: t
A
ppel
des
h é r i t i e r s
de
M
o n t m o r i n
.
leur égard , il n’est pas.douteux qu’une obligation
personnelle de la part: des sieur et dame de lu R ocheLam bert a existé.
'
-
i
A
M ais existe-t-elle encore après des lettres de ratification
et un versement jugé valable? C ’est ce qu’il est difficile
d’adopter.
-'iL e s héritiers de M ontm orin n’auroient une action di
recte que dans trois cas qui doivent c o n c o u r ir .
L e p rem ier, en rapportant le consentement exprès
des créanciers opposans aux deux lettres de ratification.
L e sbçond,' en prouvant que les acquéreurs postérieurs,
�( 31 )
chargés de payer en l’acquit du sieur delà Roche-Lam bert,
n ’ont pas payé.
L e troisièm e, en prouvant encore que la perte des
versemeus faits p our la libération de Chadieu doit être
plutôt pour le sieur de la R oche-L am bert, à cause de son
ém igration, que pour les héritiers de madame de M ontr
m o rin , à cause de sa condamnation révolutionnaire.
V o ilà ce que devoient justifier, les héritiers de Mônt>
m orin, au lieu de se jeter dans les questions de savoir si
les versemens ont dû être faits avec ou sans des offres ^
avec ou sans permission de la justice, et si après les lettres
de ratification, et même après le 23 septembre 17 9 3 ,
c’étoit encore chez le notaire Xrutat que les deniers de
voient être versés, comme on ne s’est pas fait un scrupule
de le soutenir.
4
;
/
C e p e n d a n t les héritiers de M ontm orin ont fait une
inscription, non sur Chadieu dont ils ne veulent pas,
mais sur les biens particuliers du sieur de la R ocheLam bert. En avoient-ils le d ro it?
•
v
• D ’abord ils’ ne rapportent ni m ain levée, : ni consen
tement des créanciers opposans : ce seroit cependant chose
de prem ière n é c e s s ité , quand il n ÿ auroit pas .d’autre
o b sta cle .
::
:
:
En second lieu , comment prouvent-ils que les acqué*
reurs postérieurs n’ont pas p a y é ? ,
,
T o u t ce qu’on vient de dire prouve avec évidence une
libération.
Les sieur et dame de la R oche-Lam bert ont acheté
d’eux et se sont engagés à payer le p r ix , soit à T ru ta t,
�(
3*
)
soîï aux créanciers, à déléguer dans le cours de deux
années.
Ensuite Chadieu a été vendu à S au zay, à qui on a
laissé l’option de payer 375000 f r . , soit aux vendeurs,
soit aux créanciers, et spécialement a u x créanciers p ri
vilégiés sur la terre.
•
On ne peut pas tirer parti de cette option, car le sieur
de la R oclie-L am bert n’a rien touché de ces 376000 fr.
laissés dans les mains de son acquéreur pour faire face à
tout ; et le sieur Sauzay ayant mis son contrat au bureau
des h ypoth èques, a contracté Vobligation directe envers
les mêmes créa n ciers, de payer les 376000 francs.
• Ce contrat judiciaire résultant des le tt r e s e ffa c e l’al
ternative : c’est donc comme si la vente de 1791 contenoit
indication expresse de payer 376000 fr. a u x créanciers
privilégiés seulem ent.
A son to u r, le sieur Sauzay vend au sieur W a llie r ;
et il a si bien entendu que les oppositions formées à ses
lettres, par le syndic des créanciers d e T a n e , l’ont obligé
de ne payer qu’à eux , qu’il délègue W a llie r ou Natthey
à paj^er 355ooo fr. a u x créanciers de T a n e , opposans
a u x lettres de ratification.
Celui-ci appelle les créanciers en nivôse an 4 , pour
payer.en leur présence, se disant obligé de les payer.
Il les assigne comme opposans aux lettres de Sauzay, et
aux domiciles élus par leurs oppositions. Il procède tant
en son nom qiCau nom des prem iers acquéreurs : c’est
en cette qualité qu’ il verse le prix de sa vente.
; Ensuite il les assigne, et fait juger contre e u x y en qua
lité de créanciers de Tane> c£tv il est libéré.
Et
�( 33 )
E t on appelle ce jugement res inter alios acta. On
dit qu’il ne s’agissoit de faire juger le versement valable
que dans l’ intérêt d’un é m ig ré , parce qu’il est question
de lui dans les dires du sieur Nattliey. M ais, i° . il est
aussi question des héritiers de M ontm orin et de la 'con
fiscation de leurs biens ; car Nattliey’, qui clierchoit à
consolider sa lib ératio n , ne manquoit pas de justifier dé
son m ieux son versem en t, par le narré de toutes les
circonstances qui pouvoient la rendre meilleure.
2°. Ce qui prouve que ce jugement n’étoit pas contre
l’ém igré plutôt que contre un autre, c’est que cet ém igré
n’est ni p a rtie , ni appelé à ce jugement dont on veut
lui appliquer tout l’effet.
O r , vit-on jamais de plus inconcevable système, nonseulement en matière de chose ju g é e , mais encore en
matière d’hypothèque et de lettres de ratification ?
D ’un cô té, ce sont des créanciers opposans qui veulent
n’avoir plus rien de com m un, ni avec celui qui a obtenu
les lettres, ni avec son mandataire, chargé de le libérer
envers ces mêmes créanciers opposans, et qui ne veulent
s’adresser qu’au prem ier acquéreur, après avoir laissé
juger contre eu x la validité de la libération suivie de la
mainlevée de leurs oppositions; mainlevée qui lève toutes
les équivoques sur Veffet du payem ent.
D ’un autre côté, ce sont les héritiers du vendeur q u i,
après une libération jugée v a la b le, et une mainlevée
des oppositions, ont la bonté de se réunir spontanément
avec les créanciers d’une succession bénéficiaire , pour
demander qu’on annulle cette libération sans attaquer
la jugement.
E
�( 34, )
N ’est-ce pas un abus du raisonnement que de soutenir *
de tels paradoxes? Si mon acquéreur-chargé de vous
p n y e r a fait juger contre vous qu’ i l avoit valablement
p a yé y qui pourra d ire , sans choquer le bon sens, que
•je n’aiipas payé m oi-m êm e, et que je reste débiteur?
A II devient donc bien inutile de rechercher si le verse
ment a pu être fait comme il l’a été , quelle étoit la
caisse ou il falloit verser, et s’il y avoit suspension des
remboursemens ; car re - judicata pro veritate habetur,
un payement qui auroit été fait en assignats, après leur
suppression, seroit certainement réputé être en trèsbonne m onnoie, si un jugement l’avoit'dit : n u l n ’auroit
le droit de parler des vices d’une telle libéi’ation , tant
que ce jugement ne seroit pas attaqué.
S’il s’agissoit néanmoins d’examiner la jurisprudence
qu’on a p r é te n d u si constante sur la défense des lois de
c o n s ig n e r sans o ffres p ré a la b le s , et sans appeler les
créanciers, il se trouveroit à côté des c ita tio n s n o m
breuses faites par les adversaires, d’autres citations plus
applicables et plus précises sur la matière des consigna
tions fo rcé es, après des lettres de ratification.
Mais à quoi serviroit cette surabondance de doctrine
et de dissertation, si ce n’est à grossir un écrit de choses
inutiles , puisque les créanciers et les héritiers de Tane
ne veulent rien discuter de tout cela avec le mandataire
de Sauzay, chargé de faire face à, leurs oppositions,
qu’au contraire ils passent condamnation sur la validité
de son payement.
E t ; chose étoïlnante, ce que les adversaires ne pou-
�( 35 )
voient opposer que sur le procès de Pan 1 2 , et à Natthey,
ils l’ont réservé pour les sieur et dame de' la Roche-,
L am b ert, après avoir, laissé juger que le payement étoit
régulier.
S’il n’y avoit pas de collusion eçtre les, héritiers et les
créanciers, est-ce que les héritiers de M ontm orin ( qui
après les oppositions aux lettres ne sont plus que les
cautions du payement ) n’opposeroient pas aux créanciers
l ’exception cedendarum actionum , et ne leur diroient
pas que s’il leur a plu de laisser juger que leur gage
étoit perd u , et s’ils’ne sont pas en état de subroger à leurs
hypothèques, ils n’ont plus de recours à exercer.
S’il n’y avoit pas collusion encore entre les créanciers et
N atthey, qu’ils expliquent donc pou rquoi, se disant aussi
certains de la nullité de ses consignations, ils craignent
de s’adresser à lui ou à Sauzay, qui par'ses lettres de ra
tification a contracté l’obligation de payer aux créanciers
privilégiés 375000 fr. ; pourquoi iis paroissent regarder
ses versemens de Tan 2 et de l’an 4 comme un chiffon
inform e, sans le prouver, s’ils en savent si bien le secret?
Mais l’exception que ne veulent pas opposer les héri
tiers d e T a n e , le sieur de la R oche-Lam bert le fera , et
il en a le pouvoir. On ne peut le forcer de payer sans
qu’il ait le droit d’opposer aux créanciers de Tane que
s’ils ne font pas tomber le jugement de l’an 1 2 , et s’ils
ne remettent pas les parties au même état où elles étoient
avant ledit jugem ent, ils ont perdu tout- recours contre
lu i; car il est d’une épouvantable injustice qu’on puisse
E a
�C 36 ) •
lu i'd ire : « V ou s avez acheté Chadieu , et vous l ’avez
»■
‘ revendu à la charge de nous payer; nous avons accepté
« cette charge par une opposition. Maintenant nous ne
« pouvons vous subroger ni à nos droits sur Chadieu ,
« ni à nos droits sur le prix ; et cependant nous voulons
* être-payé par v o u s, qui ne le serez par personne, et
« qui n’aurez ni la chose ni le prix. »
Quelque atroce que soit ce système, on ne rougit pas
de le sou ten ir, 011 le trouve au contraire fort équitable;
on se passionne même au point de dire que M i de la
Roche-Lam bert manque à ses devoirs lorsqu’il n’est pas
du même avis. A la vérité ce -n’est ni dans Condillac ni
dans Puffendorff qu’on va puiser pour justifier l’équité
mathématique de ce raisonnem ent; c’est seulement dans
les lois sur les ém igrés, qu’on a prétendu trouver la preuve
que res périt domino signifie, en langage de révo lu tio n ,
que le prix d’un immeuble dû à'des créanciers opposans,
pour une vente antérieure à toute émigration , a péri
p ou r Témigré,
.
Pourquoi ajouter,à la dureté des lois jrévolutionaires,
quand elles ne sont pas coupables de cettei subversion de
tous les principes ?
Les lois de 1792 ordonnèrent le séquestre des biens
des ém igrés, et chargèrent la régie de l’enregistrement
de ce séquestre; elles ordonnèrent a u x débiteurs des
émigrés de verser dans la caisse de ce séquestre.
Mais - qu’y a-t-il de c o m m u n entre Chadieu vendu à
Sauzay par acte n otarié, en 1 7 9 1 , et un bien d'ém igré?
Qu’y a-t-il de commun entre un acquéreur non émigré^
'
�( 37 )
qui par des lettres de ratification a form é un contrat ju
diciaire avec des opposans non ém ig rés, et des débiteurs
d’émigrés ?
Mais admettons en toute hum ilité qu’ un républicole n’a
dû souffrir de rien,* et que tout le sacrifice doit tom ber
sur le proscrit, n’y a-t-il pas lieu de s’étonner que les
héritiers de M ontm orin soient ici à l’unisson avec les
créanciers de Tan e , pour dire que rémigré seul doit
perdre le versement ?
■Si la Cour, partageant l’opinion des adversaires, quoi
qu’à notre sens elle déplace toutes les idées, jugeoit que
N atthey,. quatrième débiteur, ayant payé la dette de
Sauzay, troisième débiteur, n’a pas libéré les sieur et
dame de la Roche - Lam bert , seconds débiteurs, il
faudra b ien , pour être conséquent, arriver jusqu’aux
héritiers de M on tm orin , premiers débiteurs, et dire que
le moins qui puisse résulter de ce cahos, c’est que cette
dette a subsisté concurremment sur ces deux derniers.
Mais si M . de la Roche-Lam bert a été sur la liste des
émigrés , madame de M ontm orin a été condamnée révolutionnairement : ainsi les lois sont les mêmes pour les
deux circonstances.
L ’article I er. de la loi du 26 frim aire an 2 , dit que les
biens des condamnés devoient être régis et liq u id és, et
vendus comme les biens des émigrés.
L a seule réponse qu’on ait pu faire à cette observa
tio n , a été de dire que madame de M ontm orin fut con
damnée le 20 floréal an 2 , et que la nouvelle n’a pu
�( 3 8 }
arriver en Suisse assez tôt pour que Natthey revînt en
A u verg n e consigner le 26.
Cette réponse est-elle bien sérieuse contre celui qui
prend la chose en l’état 011 il la tro u ve, lorsque surtout
on sait fort bien que ce n’est pas le N atth ey, de N y o n ;
qui a consigné à Sain t-A m an t?
Que l’on dispute tant qu’on voudra contre le sieur
N atth ey, sur la vraisemblance de ses versem ens, sur
leurs dates et leur réalité; tant qu’il y a quittance et juge
ment de libération, le sieur de la Roche-Lam bert profite
du payement fait par son mandataire, qui ne peut être
libéré sans que le mandant le soit.
Si malgré cette évidence de libération il falloit en venir
à imputer sur q u e lq u ’ u n la perte de ses versem ens, il
est évident que ce ne peut êtrer sur celui à q u i il aurait
p ro fité, c’e s t - à - d i r e , aux héritiers de Tane , comme
vendeurs de la terre, comme propriétaires du p r ix , puis
qu’ils étoient propriétaires de Chadieu juqu’au payement.
Il n’y a en effet aucune raison de p r é f é r e r pour la
perte, les sieur et dame de la R o c h e -L a m b e r t, et de
s’arrêter à eux plutôt qu’à Sauzay ou W a llie r ; il y auroit
à cela une inconséquence tout arbitraire ; car il faut
opter entre le vendeur oli l’acquéreur, dont les lettres
sont grevées d’oppositions : l’un est le débiteur'personnel,
et l’autre le débiteur hypothécaire.
Les acquéreurs intermédiaires n’ont contracté qu’une
obligation transitoire : à aucun titre le principe res périt
domino ne peut être pour eux.
Car la terre n’étant pas à e u x , la somme consignée
�( 39 )
n’etoit pas pour eux. Q u’elle ait été versée pour-les'hé
ritiers de M ontm orin ou pour les créanciers de Tane,.
c est toujours aux héritiers de M^ontmonn que lu somme
devoit profiter, puisqu’elle étoit destinée à payer leurs
dettes.
Comment donc a-t-on pu espérer de prouver qu’une
somme devoit périr pour les sieur et dame de la R ocheL a m b e r t, qui n’étoient propriétaires ' de cette somme
à aucun titre et en aucune q u alité, pas plus qu’ils ne
l ’étoient de Chadieu ?
Il faut conclure plutôt que si la libération de Natthey
n’a profité qu’à lui seul et n’a eu lieu qu’à cause du sé
questre national, c’est le vendeur séquestré qui se retrouve
passible de sa dette, et non l’acquéreur, qui ne s’est obligé
que comme détenteur, et qui a donné pouvoir à un tiers
de verser pour lui.
Cum jussu meo id quod m ih i debes sohns creditori
m e o , et tu à me et ego à creditore meo liberoi\ L . 6 4 ,
ff. D e solutionibus.
S o u v e n o n s -n o u s e n c o r e q u e M . M e r lin a p r o u v é q u ’ u n
v e r s e m e n t fa it à la caisse d u s é q u e s tr e , é to it ce n sé ê tre
fa it a u x créa n ciers , et q u e c ’est a b s o lu m e n t c o m m e si
ces c ré a n c ie rs a v o ie n t e u x -m ê m e s re ç u et d o n n é q u itta n c e .
T o u t ce qu’il a dit se rapporte parfaitement aux hé
ritiers de M ontm orin, qui viennent se présenter comme
ayant été créanciers de l’émigré pour lequel ils assurent
que la somme étoit versée.
U n autre moyen s’applique1 encore aux héritiers de-
�C 4®)
M ontm orin ; c’est que leur système de se dire créanciers
d’un ém igré , conduit à remarquer que c’est la nation
qui les a représentés l’un et l’autre depuis le 20 floréal
an 2 , jusqu’au 21 prairial an 3 , époque de la resti
tution des biens aux condamnés.
O r, la nation auroit été débitrice et créancière du prix
de Chadieu : donc il y a extinction de la dette par con
fusion. (C o d e c iv il, art. 1300. Sénatus-consulte, du 6
floréal an 1 0 , art 17. )
A in s i, et dans toutes les hypothèses, les héritiers de
M ontm orin sont payés par N a tth e y , ou n’ont de recours
que contre Natthey ou Sauzay. Ils ne s’appliqueront pas
l’arrêté du 3 floréal an 11 , pour revenir de la nation à
l’ém ig ré, puisque la nation les a traités de m êm e, et
leur a rendu leurs droits ut ex nunc. V o ilà , n’en dou
tons pas , ce qui est dém ontré jusqu’à l’évidence.
A
ppel
contre
le
sieur
A
m édée
de
T
an e
.
L e jugement de Clerm ont n’est pas conséquent dans
ses dispositions : il juge d’abord que le versement fait
par le sieur Natthey a éteint les délégations dont Sauzay
avoit chargé W a llie r ; et cependant il condamne les sieur
et dame de la Roclie-Lam bert à payer la créance du sieur
A m édée de T a n e , qui prétend représenter pour le tout
le sieur de Santenas, prêteur de 30000 francs.
S’il est jugé que Natthey a valablement payé le prix
entier de sa v e n te , il est constant que le sieur Santenas
n’a plus d’action ; car le sieur de la R oche-Lam bert a
laissé
�(4 0
laissé entre les mains de Sauzay une somme suffisante
pour payer tout le p rix par eux d û , c’e s t - à - d i r e ,
375000 fr. , quoiqu ils eussent payé déjà 170644 fr. :
à son tour, Sauzay a laissé à Natthey une somme suffisante
pour désintéresser les ayant droit de ses vendeurs.
A u reste, il suffit de renvoyer sur cet appel à ce qui
a été déjà d it, et de se réserver contre Natthey la ga
rantie que le tribunal de Clerm ont n’a pas voulu pro
n o n cer, par une,autre inconséquence.
A
ppel
contre
le
sie u r
N
a t t h e y
.
Cet appel n’a qu’un objet subsidiaire, puisque, si on
ne demande rien au sieur de la R oche-Lam bert, il n’aura
rien à demander au sieur Natthey , dans son propre
intérêt.
Mais si, par impossible, le sieur de la R oche-Lam bert,
qui n’a pas Chadieu, étoit condamné à payer le prix de
Chadieu , alors bien évidemment le sieur Natthey ne
peut éviter une garantie, puisqu’il s’est engagé expressé
ment à faire payer 355ooo francs a u x créanciers de
Tane , opposans a u x lettres de ratification prises par
S a u za y , ou à consigner après le sceau de ses lettres,
Dira-t-il qu’il a payé en vertu d’une contrainte ; que sa
libération est jugée valable açec les créanciers,* qu’ainsi
il a rempli son obligation mot pour mot ?
Mais tout cela ne le délie pas de son engagement
envers le vendeur ; car il ne suffit pas qu il d ise , j’ai
payé; il doit être prêt à faire valoir son payement vis-àvis le vendeur, toutes les fois que celui-ci sera recherché.
F
�( 4» )
.
Lorsqu'un acquéreur s’est soumis à payer le p rix de
sa vente à des tiers, ce n’est pas assez qu’il rapporte des
quittances* il n’est pas dégagé pour cela de faire juger
en -présence de son vendeur qu’elles sont suffisantes pour
lu i, de faire en sorte qu’il soit quitte envers les créanciers
qu’il a spécialement d élégués, et d’arrêter à toutes les
occasions les poursuites qui pourroient le troubler.
Cet engagement est tellement de stricte justice, que les
lois sur le papier-m onnoie n’ont point assimilé les ac
quéreurs chargés de payer des délégations, aux autres
acquéreurs de cette époque : elles ne leur ont permis
de réclamer aucune réd u ction , et ont rigoureusement
exigé qiüils rapportassent les quittances des créanciers
délégués par la v en te, même lorsqu’il n’y avoit qu’une
simple indication de payement.
Toutes les difficultés du payement fait par un acquéreur
ne peuvent être levées et discutées que par lui : sans cela,
par une collusion coupable, il pourroit obtenir des créan
ciers délégués qu’ ils s’obstinassent à ne poursuivre que le
vendeur, lequel n’ayant rien payé lui-m êm e, seroit privé
de tous moyens de défense.
E s t - il proposable, en effet, d’assujétir le sieur de la
R o ch e-L a m b e rt à faire valoir seul les quittances d’un
payement qu’il n’a pas fait, vis-à-vis des créanciers qui
suspectent ce payem ent, et q u i, m algré un jugem ent,
persistent à dire que la libération est irrégulière?
Comment le sieur de la R o c h e -L a m b e rt sera-t-il en
état d’éclairer les héritiers et créanciers de T an e sur
leurs doutes, et de leu r apprendre si le prem ier verse
m ent de 3 55 ooo fr . 7 que N atthey dit avo ir fait à Saint-
�( 43 )
A m ant le 26 floréal an 2 , sans appeler personne, doit
être préféré au second versement de 619604 f r . , qu’il
dit avoir fait chez le même receveur le i5 pluviôse an 4 ,
en appelant les créanciers opposans ?
A u cun autre que Natthey ne peut dire aux créanciers
si sa quittance du 1 5 pluviôse an 4 est un versement ou
un co m p te, si la quittance de 32861 fr. en fait partie,
et enfin si les 264604 fr. qu’il a demandés à la régie pour
indemnité d’un séquestre de huit m o is, lui ont été tenus
à compte ; car rien ne donne la clef de tous ces faits *, et
cependant il faut savoir ce que la république a retenu,
pour savoir ce que Natthey a payé réellement.
L e sieur Natthey paroît vouloir dire qu’il a payé en
vertu d’un ordre de la r é g ie , et qu’il n’a pas d’autre
compte à ren dre, puisque sa quittance est un acte ad
ministratif.
Mais où auroit-il pris cette étrange doctrine ? elle
eût été très-commode pour payer ses dettes sans gêne;
car à supposer que la régie eût refusé une contrainte à
celui qui désiroit lui com pter 355ooo francs , il faut au
moins convenir qu’une contrainte 11’est pas un ordre, et
n’a rien de commun avec un acte administratif.
Que Natthey objecte aux créanciers opposans tout ce
qui lui semblera bon pour faire valoir la consignation
que son contrat l’oblige à faire partout où besoin s e r a ,
après le sceau des lettres de ratification ,* mais plus il
sera en règle pour ce qu’il a fait comme m andataire,
plus il lui sera aisé de faire valoir son »payement; et il
ne s’en dispensera pas en rejetant la validité de ce qu’il
F 2
�( 44 )
a fait aux risques de son m andant, car il est obligé sans
exception , ou de faire va lo ir ses payemens contre les
créanciers et de faire cesser leur réclam ation, ou de
garantir le sieur de la Roche-Lam bert de l’effet de leurs
recherches.
' Que si le sieur Natthey p réten d o it, ainsi qu’il en a
menacé , s’isoler de cette procédure , en disant que la
validité de ses versemens n’est pas de la compétence judi
ciaire, on lui répondroit qu’il ne peut pas proposer de
déclinatoire, par plusieurs motifs.
i° . Parce que lu i-m êm e a soumis la validité de ses
versemens à l’autorité judiciaire, et a obtenu jugement
à cet égard le 7 pluviôse an 1 2 ; il a opposé ensuite ce
jugement comme un moyen pérem ptoire sur la cause
actuelle.
2°. Parce que la demande en garantie a été jo in te ,
et que loin d^attaquer le jugement de jonction, le sieur
Natthey a plaidé au fond.
3°. Parce que dans des lettres missives adressées au sieur
de la Roche*-Lambert, le sieur Natthey a offert sa garantie
pour le procès actuel; en sorte que ce nouvel engage
ment a produit une nouvelle action qui ne peut être
soumise qu’aux tribunaux civils.
40. Parce qu’ il résulte des arrêts déjà cités de part et
d’autre, que les tribunaux ont toujours statué sur la vali
dité des versemens faits dans les caisses publiques par les
acquéreurs même des biens provenus d’émigrés ou con
damnés.
Dans tous les cas, les lettres du sieur Natthey suffi-
�( 45 )
sent (i) ; l’offre expresse de sa garantie a été acceptée ex
pressément par le sieur de la R oche--Lam bert dans ses
21 juin 1808.
(1) « J’ai reçu votre le ttre , M onsieur, et je ne veux pas un
cc seul instant vous faire attendre ma réponse.
ce
cc
cc
cc
cc
cc
cc
cc
« J’ai d’abord été fort surpris des inscriptions que les créan
ciers de T a n e ont prises sur vos biens ; j ’ai dû ensuite me
souvenir qu’ils avoient précédem m ent regretté de n’avoir pas
pris cette voie d’abord , et de s’ètre engagés dans une autre
voie qui ne leur a pas plus réussi que c e lle -c i ne peut leur
prom ettre du succès. V ous croyez d’a v a n c e , je l’espère, que
toutes choses sont parfaitem ent en règle vis-à-vis d ’eux...........
ce V o u s avez quelqu’apparence d’inquiétude sur le vrai propriétaire de Ghadieu. D ’un mot je vous tirerai de toute inquiétude. I l n e t i e n d r a q u ’ a vous q u e N a t t i i e y o u m o i , a v o t r e
te C H O I X ,
OU T O U S D E U X R E U N I S , N E V O U S O F F R I O N S D E NO US SU RS-
cc
a
titu e r
vous
dans
cette
a ffa ir e
: je vous en passerai acte
cc public avec grand plaisir et sans inquiétude ; c a r , encore une
ce fo is , toutes Choses sont parfaitem ent en règle avec ces mescc sieurs et tous autres.
cc
cc V oilà u n prem ier problèm e réso lu , à votre satisfaction sans
doute. V ous v o y e z q u e N a t t i i e y n i m o i n e n o u s e f f a ç o n s ;
te Q U E M E M E NO US VOUS' O F F R O N S , SOUS N O T R E G A R A N T I E E T C E L L E
CC D E
C H A D I E U , D E N O U S SU B S TI T U E R
A VOUS. . .......................
cc V ous êtes encore dans l’e r r e u r , quand vous supposez que
cc les créanciers de T an e avoient fait opposition aux lettres de
cc ratification obtenues par M. votre, père sur MM. de T ane.
cc Fayon s’in scrivit, fit inscrire aux hypothèques d’autres créan
ce ciers non u n is, et ne fit point inscrire l’union...............I I n ’y
<c eut aucun acte conservatoire de la part de l’union;
�( 4 <S )
réponses : ainsi ce nouvel engagement passé entre M . de
Batz, représentant JNultliey , et M . de la R o ch e-L am b ert,
« Mais aux lettres de ratification prises par Sauzay sur M. votre'
« votre p è r e , l’union fit o p position , alors trop tardive si elle
cc étoit nécessaire. En l’an 4 > il y eut des lettres de ratification
cc prises sur S a u za y, et l’union eut le tort extrêm e de ne pas
cc prendre d’in scrip tio n , ni faire d’opposition.
cc Ils n’ont donc que celle du 2 2 décem bre 1 7 9 1 ; mais il y a
cc. condam nation contr’eux sur c e p o in t, à l’occasion de l’inscc
tance très-âpre et très-vive qu’ils avoient com m encée à Paris
cc
contre Sauzay. Repoussés dans cette voie par laquelle ils atta-
ct
quoient, dans S a u za y, W a llie r et N a tth e y , et se trouvant à
bout de voie , c ’est alors qu’ils regrettèrent de n’avoir pas
attaqué d’abord M. votre père ou votre fam ille, au lieu de se
faire condam ner sur leu r inscription de 1 7 9 1 . M a is , à dire
v r a i , je n’aurois pas im aginé qu’après plusieurs années de
silence et d’inaction, ils auroient im aginé de finir par où. ils
auroient voulu com m encer. Mais les actes su bséqu en s , leur
liquidation, l e u r payem en t, sont tels qu’ils ne peuvent cherc h e r qu’à effrayer et à a r r a c h e r q u e l q u ’a r g e n t , du moins de
Sauzay : c ’étoit contre Sauzay leur plus solide projet.
cc
cc
cc
ce
cc
cc
cc
cc
cc
cc S ’ils ont pris des inscriptions folles sur vos b ie n s , ils en
ce
ont égalem ent pris sur Chadieu.................... Instruisez-m oi de
ce tout ce qui s’est passé d eux à vous dans cette insurgence, et
ce vous aurez de ma part, ou par m oi, instructions parfaites. Je
ce vous répète que m ’identifiant à N a tth e y , je me mettrai avec
cc plaisir à votre lieu et place. N e perdez pas un moment à m e
ce faire savoir s’il y a de simples inscriptions prises, ou s’il y a
ce quelque demande form ée. V oilà de ma part, j ’esp ère, fran« ch ise, loyauté autant que vous pouvez d ésirer, et plus que
« vous ne pourriez exiger.
cc Recevez l’assurance de mon bien sincère et invariable
�.
(
47)
est aussi valable que s’il eût été souscrit par un acte en
form e; ca r, d’après les principes, on contracte valable
ment per epistolam a ut per n un tium .
ce attach em en t, et veuillez le faire agréer à M. votre père,
te S ig n é D e B atz.
« D ès que j ’aurai votre ré p o n se , je partirai ou vous écrirai
cc sur-le-cham p. Je ne suis nullem ent in q u ie t, parce que je
ce connois les faits, et qu’ils sont réguliers. »
Paris, g juillet 1S08.
,
v*
te
te
«
ce
« Je n'ai pas perdu de tem ps, M onsieur, à prendre tous les
re.nseignemens et toutes les instructions utiles contre les créan
ciers de Tane. J’aurai une consultation dés plus habiles gens,
L ’a f f a i r e paroit inattaquable par les créanciers de T an e. Il est
heureux pour vous et pour moi que j’aye pris, dans le temps
u t ile , surabondance de p récau tio n , pour acquitter à la fois
ce
vous et m o i, et pour m ettre dans tous les sens les créanciers
c< en dem eure. V ous ne pouvez vous défendre que par mes
cc pièces.....................M. votre père n’auroit pas dû prendre inscc cription sur C h a d ie u , surtout sans m ’en prévenir : il n’auroit
et pas dû en prendre au nom d’autrui ; il ne devoit voir que les
cc créanciers. Son intérêt est de faire cause com m une a v e c
cc Chadieu : quiconque lu i dira le contraire se tro m p era , rin
ce duira en erreur. A u reste , je lui dem ande, et j ’espère qu’il
ce ne m e le refusera pas , de vouloir bien faire rayer son inscc cription au bureau de Clerm ont. J’ai b e so in , pour ma seule
« délicatesse v is-à -v is de deux personnes à qui j’ai fait deux
« em prunts, d’avoir leur certificat d’inscription avant le vôtre,
« parce qu’agissant de bonne foi et d entière confiance en m o ir
et ils ont reçu dans leu r acte ma parole d’honneur qu’il n ’existoit
�( 4 8 }
M . de Batz, représentant N atthey, a toujours continué
d’agir en conséquence de ce nouvel engagement. Il a
envoyé au sieur de L aroch e-L am b ert la consultation
très-détaillée de M M . P oirier et Bellard (annoncée dans
Ici dernière le ttre ), pour le rassurer sur ses risques, et
lui attester que les versemens de Natthey éteignoient la
créance.
11 y a donc impossibilité de délier le sieur Natthey de
son nouvel engagem ent, qui lève tous les scrupules des
lois de rém ig ratio n , lesquelles n’ont rien de commun à
une garantie offerte et acceptée en 1808.
te
a
pas d’hypothèque sur Chadieu ; e t , certes , je croyois la
donner en toute vé rité, et il se trouve que la vôtre existoit
le jour m êm e où j’affirmois q u il n’en existoit p a s, ou du
moins que celle du m aire de V i e , qui est nulle de f a it , et
celle de deux pauvres petits créanciers que j’ai fait condam ner
à Riom , et que j’espère faire rayer à tous momens. M. votre
p è r e , a p r è s a v o ir fait r a y e r celle q u ’il a déjà faite , pourra
au m êm e instant , s’il le j u g e à p r o p o s , la fa ir e r é ta b lir . Je
n’y suis que pour ma délicatesse seu lem en t, et j ’espère qu’il
cc
ne me refusera pas cette satisfaction lé g ère, q u i, dans aucun
cc
cc
«
«
cc
«
c<
cc cas , ne peut lui être dom m ageable , et qui a été pour moi
ce le sujet d’une véritable contrariété , honneur et délicatesse
cc
parlant.
A u su rp lu s, je prends le parti d’aller porter cette lettre à
cc M. V a u trin , et je m’en rapporte à ce qu’il vous conseillera
cc
cc à ce t égard.
Je vous re n o u ve lle , M onsieur, l’assurance de mon dévoue« m ent à vos in térêts, et de mon bien sincère attachem ent.
cc
«
S ig n é D e B a tz . »
II
�( 49 )
_
?f II,n e reste plus gu-un mütr àcdire sur l’elTet 'de cette
garantie, s’il tfaflloit eii’ Veriir à elle'; il est réglé par le
Code civil ^ iquiis’exprim e ainsi : ;
,* A rticle i ? 42 ^ c< T ou te ¡obligation de falrejse résout en
« dommages-intérêts, en cag de ;non-exécution.de:larpàr£
« du débiteur. »
A rticle 1184.
L a condition résolutoire est toujours
« sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour
« le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à »
« son engagement.
« Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein
« droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point
« été e x é c u te ra le c h o ix , ou de forcer l ’autre à l’exé« cution de la convention lorsqu’elle est possible, o ird ’cn
« demander la résolution avec, dommage^ et intérêts.
« L a résolution doit être demandée en justice, et il
« peut être accordé au défendeur un délai selon les cir« constances. »
L e sieur de la Roche-Lam bert a conclu à la résolution
de la vente de 1791 , si la condition de le faire tenir
quitte de 355ooo fr. n’est pas exécutée : la loi ne lui
permet pas de douter que cette résolution ne soit pro
noncée, s’il étoit condamné à payer lui-même la somme
considérable qu’on lui dem ande, et qu’il ne doit pas.
Comment le sieur Natthey pourroit-il soutenir l’idée
qlie lç sieur de la R.oche ~Lam bei t dut etie oblige de
payer Chadieu sans l’avoir, tandis que lui, Natthey, auroit
Chadieu sans le payer?
Jusqu’à présent le sieur Natthey n’a. point /«levé une
prétention aussi im m orale; il est vraisemblable qu’il s’en
G
�( 5o )
tiendra à ce qui est raisonnable et légitim e : ainsi , à son
égard , il ^suffit de s’arrêter à l’idée qu’il fera valoir ses
payem ens, puisqu’il s’y est én gagé, ou -qu’il s’arrangera
avec les créanciers de telle manière que son vendéur soit
à. l ’abri de toutes recherches;1
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e. M A R I E , licencié avoué.
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À o'
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A-RIOM, de l’imp. de T H I B A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des Taules, maison L a n d r i o t . — Juillet 1810,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roche-Lambert, Joseph de. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
assignats
émigrés
confiscation nationale
créances
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Joseph de la Roche-Lambert, habitant d'Issoire, intimé et appelant ; contre Dame Françoise-Aglaé-Gabrielle de la Luzerne et sieur Pierre de la Grange-Gourdon, son mari, dame Angélique-Armande-Camille de la Luzerne et sieur Anathocle-Maximilien Hurault de Vibraye, son mari, habitans de la ville de Paris, héritiers bénéficiaires de la dame de Montmorin, laquelle était héritière bénéficiaire du sieur Emmanuel Frédéric de Tane, son frère, appelans ; contre sieur Henri Duvergier, habitant à Paris ; Simon Teroulde, habitant à Daudeville ; Pierre-Louis Laisné, ancien sellier à Paris, habitant à Sens ; Antoine-Louis Duchastel, apothicaire à Paris ; et Jean Chardon, chapelier, habitant à Paris, syndics et créanciers unis dudit sieur de Tane, aussi appelans ; contre Sieur Amédée de Tane-Santenas, habitant à Paris, intimé ; et contre Sieur Louis Natthey, habitant de Nyon en Suisse, aussi intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1511-1810
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0423
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0412
BCU_Factums_M0413
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53807/BCU_Factums_M0423.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Issoire (63178)
Paris (75056)
Daudeville
Sens (89387)
Nyon (Suisse)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
confiscation nationale
Créances
émigrés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53806/BCU_Factums_M0422.pdf
0eefc26dac33679d328f75c977b78c46
PDF Text
Text
M É M O I R E
E T
CONSULTATION.
��M É M O I R E
A CONSULTER,
ET C O N S U L T A T I O N
POUR
J
a c q u e s
S A U L N I E R , propriétaire, habitant de
la commune d’A g o n g e s , membre du conseil de
l ’arrondissement de M oulins, et président du canton
de Souvigny
CONTRE
Un E crit signé J A Q U O T , traiteur à P a r is , rue de
la H arpe, se disant créancier du sieur
U
n
C o u d ert.
libelle diffamatoire est jeté avec profusion dans le p u b lic,
au mépris de toutes les lois de police.
Un sieur Jaquot l'a signé comme mon accusateur, et je n’ai
jamais eu de relations avec cet homme. Un autre individu col
porte ce libelle; et plus inconnu encore, il laisse savoir à peine
quel est son état et son nom.
1
�( 2 )
Ce sieur Jaquot m ’accuse d’avoir acheté une propriété qui
devait être le gage d’une créance de 25,ooo fr. qu’il dit avoir
contre le sieur Coudert, de qui j ’ai acheté une propriété il y
a onze ans.
Une cédule signée'par moi comme juge de p a ix , devait ,
suivant lui , m ’empêcher d’acquérir ; et cependant , le sieur
Jaquot, qui a connu ma vente judiciairement depuis l ’an n ,
ne s’était pas même douté que je fusse réprehensible, puisqu’il
s’est présenté à moi à cette époque pour saisir et recevoir' la
partie disponible du prix de mon acquisition : et c’est après avoir
reçu annuellement huit jDaiemens de moi, comme acquéreur,
qu’il imagine d’attaquer cette vente, ou plutôt de me diffamer
joour me faire acheter son silence.
Q u ’a i- je donc fait de condamnable, en achetant un objet
mis en vente, et en justifiant de tous mes paiemens ? Je suis
à le chercher moi-même.
Il est rare qu’en suivant le cours de ses affaires, on puisse
éviter toujours de froisser les intérêts d’autrüi; mais les devoirs
de la société n’imposent pas la nécessité de s’oublier perpétuel
lement pour ceux qui n’ont aucun titre à cette abnégation de
soi-même. On est tenu sans doute d ’observer ce que les lois et
la probité exigent, et je suis prêt à soumettre toute ma conduite
à
la censure, pour que mes conseils recherchent avec scrupule
si je me suis écarté de cette double ligne.
J ’étais juge de paix du canton de Saint-Menoux , lorsque le
sieur Coudert habitait la commune d’Agonges; je n’avais d’autre
liaison avec lui que celle d’un voisin de c a m p a g n e , et je ne con
naissais absolument aucune de ses relations.
L e sieur Coudert, né sans fortune, avait été élevé à Paris
pour se destiner au palais. Dans les dernieres années de la ré
volution, il se fit recevoir avoué aux tribunaux de la Seine.
E n 1793, un sieur Faure, son oncle, propriétaire de la terre
de P rm g y, commune d’A g o n g e s, et d’une riche habitation à
Saint-Domingue, lui fit donation eutre-vifs de ces deux objets.
�( 3)
Après ce changement de fortune, le sieur Coudert resla
encore quelque tems à Paris , et vint en l ’an 5 habiter sa terre
de Pringy, avec tout le de'goût que devait y porter un habitant
de la capitale, obligé par les circonstances de vivre isolément
dans une campagne de province.
Cependant, et malgré ce dégoût, personne ne supposait que
le sieur C ou dert, dont on ignorait les affaires, songeât à vendre
une propriété qui semblait sa seule ressource : les revenus de
son habitation de Saint-Domingue ne lui parvenaient pas; et,
quoique dès l’an 8 tous les esprits fussent occupés de nos colo
nies , il ne paraissait pas vraisemblable que le sieur Coudert eût
le projet de quitter le continent, jusqu’à ce que les communi
cations fussent bien rétablies.
A cette époque je cherchais à faire une acquisition, et l ’idée
ne me vint pas même de rien proposer au sieur Coudert. J ’avais
en vue une autre propriété; j ’en suivais la négociation , et me
croyais au moment de terminer, lorsqu’on m’annonça brusque
ment, dans un dîner où se trouvait le sieur Côudert, que mon
affaire était manquée , et qu’un autre était acquéreur.
Je parus sans doute affligé de celte nouvelle, et en effet elle
me fut sensible. L e sieur Coudert, qui en fit la remarque,
m ’attira après le dîner dans un coin de l’apparleraent, pour me
dire :
« Ne vous affectez pas de ce coup m a n q u é, il peut se ré« parer, si vous voulez acheter Pringy; je ne tarderai pas à le
« vendre; j ’ai des deltes qui ne me laissent presque aucun re« venu ; j ’entends fort peu à régir les biens , et j ’aime mieux me
« liquider et avoir un revenu certain, qui me suffira jusqu’à ce
« que j’aie mes biens de Saint-Domingue : le général Leclerc
« j a déjà fait rendre les possessions françaises; ainsi la mienne
« ne peut pas me manquer ».
J ’avoue cjne , charmé de cette proposition, je m’occupai dèslors de la faire réussir; je pris des renseignemens sur la terre
de Pringy : j’en parcourus tous les héritages , et cherchai ,
�( ,4 )
comme font les acquéreurs, à connaître la valeur de ce que
je devais acheter.
La négociation dura assez long - tems. L e sieur Coudert
devait rassembler l’état de ses dettes qu’il voulait déléguer, et
j ’étais intéressé moi-même à avoir sur ce point une rédaction
soignée. Je demandai à communiquer le tout à M . D u rin , pré
sident de la cour criminelle de Moulins. Nous y fîmes plusieurs
voyages. M . Durin lut tout , rédigea l ’acte , et m ’en remit le
p r o j e t , écrit de sa m a i n , pour le donner ail notaire qui devait
recevoir la vente.
Les conventions étaient, que j’achetais la terre de Pringy
moyennant 72,000 fr. L e sieur Coudert déléguait 54,526 fr. à
treize créanciers dénommés en l’acte, dont douze étaient porteurs
de titres hypothécaires; et à l ’égard des 17,474 f r . , le s.r Coudert
convertissait cette somme en une rente viagère de 1,200 francs
pour lu i, dont 600 fr. étaient réversibles sur la tête de Sylvie
Coudert sa sœur.
Tous ces points étaient arrêtés, conclus, et rédigés m êm e;
depuis plusieurs jours, par le notaire, lorsque la veille de la
clôture de l’a c t e , on me
présenta à signer, c o m m e j u g e de
p a ix , une cédule donnée à la requête d’un sieur J a q u o t , traiteur
à Paris, pour citer le sieur Coudert au bureau de conciliation.
On conçoit aisément que je ne suis pas en état de dire,
après onze ans , si celte cédule disait qu’il était dû au sieur
Jaquot 25 ,ooo francs pour fournitures d’alimens et d’assignats
pendant cinq a n s , ni si elle disait que le sieur Coudert avait
fait un billet de ces 25,000 francs, ni enfin si ce billet était
de l’an 5 ou de tout autre époque.
M a mémoire n’est pas assez fidèle pour avoir conservé ces
même pour me dire si j ’ai lu e0 effet toute celte
cédule. Il n’était question, c o m m e je viens de le dire r que
d’ une cédule de conciliation ; et ce serait exiger beaucoup des
juges de paix , que de vouloir qu’ils missent une grande at
tention à une permission de citer, lorsqu’il s’agil sur-tout d’une
détails , ni
�( 5 )
action hors de leur compétence. J ’avais (Tailleurs pris toute
espèce de précautions vis-à-vis le sieur C ou dert, pour n’avoir
rien a démêler avec ses créanciers; j ’avais exigé de lui un état
exact de ses dettes, à produire à M\ D urin, pour les déléguei*
Il donna cet-état, en ajoutant qu’il laissait en arrière quelques
usuriers à qui il avait déjà trop payé, et quelques petites dettes
domestiques, peu considérables, dont il ignorait lui-même le
montant.
A u reste, quand j ’aurais parfaitement vu tout ce que sup
posera le sieur Jaquot, je ne comprends pas encore en quoi
il pouvait être de mon devoir de rompre mon marché pour
attendre l’issue d’une semblable réclamation. L e sieur Coudert
devait savoir mieux que personne, ce qu’il avait à régler
sur ce point. U n traiteur, demandant des pensions fournies
pendant la plus grande dépréciation des assignats, ne devait pas
paraître créancier de sommes bien considérables, quand même
on aurait su qu’il réclamait 25 ,ooo francs. Ainsi je ne supposai
pas le moins du monde, que j ’allais m’exposer à une vengeance
terrible, qui ne devait éclater qu’au bout de dix ans.
Je laissai donc clorre l ’acte du notaire : il fut signé par Dom
Picard et le sieur Mérite, comme témoins. L e notaire me de
manda 4,000 francs pour les droils de fisc ; et je lui comptai
cette somme : puis regardant toutes choses comme terminées,
je ne songeai plus qu’à entrer en possession de ma nouvelle
propriété.
Quelque tems après , le notaire me porta mon contrat de
vente expédié, enregistré, transcrit ; je ne m’occupai donc
plus de cette affaire, si ce n’est pour satisfaire à mes engagemens. J ’ai exécuté toutes mes conditions; quelques créanciers
avaient des sommes plus considérables a reclamer que ce qui
était prévu, j’en ai payé pour 1,340 francs au-delà de ce à quoi
je m’étais obligé.
J ’ignore si le sieur Jaquot est allé au bureau de paix après
sa citation; je sais seulement que je ne l’y ai jamais v u ? ni
�(6 )
personne de sa part. Je n’ai entendu parler de lui qu’en l’an
époque à laquelle il fit une saisie-arrêt, entre mes mains, de ce
que je pouvais devoir à mon vendeur. Cette saisie fut motivée
sur un jugement qu’il disait avoir pris contre le sieur Coudert,
le 18 pluviôse an n ; et cette date semble prouver que depuis
la cédule de l’an 9 , il n’avait fait aucunes diligences, en*sorte
que si j ’eusse suspendu mon acquisition pour attendre ses
poursuites, le délai aurait été un peu long.
J e iis une déclaration judiciaire sur cette saisie-arrêt et sur
quelques a u tres,'je répondis que je devais 1,200 fr. de rente
viagère, en vertu de mon contrat de rente, du 22 frimaire
an 9. L e sieur Jaquot fut appelé à l’audience du 11 fructidor
an 1 1 , et la , discutant ses droits, il demanda que je fusse tenu
de verser entre ses mains les arrérages de la rente viagère
de 1,200 francs, par moi due au sieur Coudert, aux termes
de mon contrat d’acquisition.
L e tribunal de Moulins régla les droits du sieur Jaquot ;
il fut admis à venir à concurrence avec cinq autres créanciers
saisissans, qui étaient un boucher, deux boulangers, un jour
nalier et un officier de santé ( L a qualité de ces saisissans prouve
que le sieur Coudert avait accusé vrai, en n’exceptant, de l’état
de ses créanciers, que quelques dettes domestiques).
11 me semble que c’était alors le moment de se plaindre de
mon acquisition , si le sieur Jaquot avait à m’en blâmer. A u
contraire il est obligé de déclarer qu’il a poursuivi la distribu
tion de la rente par moi due au sieur Coudert, et qu’il s’est
fait adjuger 600 francs par an, à recevoir de mes deniers et
du prix de ma vente.
Voilà donc un règlement positif entre le sieur Jaquot et m o i,
provoqué par lu i, et exécuté de ma part.
Neuf ans se sont passés depuis ce règlement, lorsque tout
d ’un coup j’apprends que le département de l’Aliier est inondé
d’un écrit imprimé, signé de ce même Jaquot qui m ’accuse
aigrement de prévarication et de dol-, sous prétexte que mon
�( 7 )
acquisition lui fait perdre sa créance. Je suis accouru à M oulins,
où on m’a dit que le colporteur de ce libelle , se disant homme
d’affaires et auteur de l ’écrit, était parti pour le déparlement du
P u y - d e - D ô m e . J ’y suis venu encore, et j ’ai vu , soit dans ma
route, soi* à R iom , soit à Clermont, que le libelle était dans
les mains de tout le monde.
Je ne doute pas un instant que cet être officieux ayant fouillé
dans les papiers de J a q u o t, et trouvé la cédule signée de moi
en Pan 9 , aura bâti sur le rapprochement des dates tout l’écha
faudage d’un procès; et au métier qu’il fait de distribuer en
personne ses propres calomnies , pour m 'intim ider par un pro
cès g ra v e, ainsi qu’il a la naïveté de l ' imprimer , je ne doute pas
un instant qu’il ne soit acquéreur ou actionnaire du billet de
25.000 f r . , signé du sieur Coudert.
Pour fortifier la circonstance du rapprochement des dates,
l ’auteur de l’écrit ajoute que la terre de Pringy a été acquise parmoi au plus vil prix , à 72,000 fr. , y compris un mobilier de
16.000 f r ., tandis qu’elle consiste en 6 domaines garnis de bes
tiaux , et est évaluée à 125,000 fr. dans un acte du 16 avril 1793;..*
que je retiens encore 17,474 IV. de capital pour-un viager de
1,200 f r . , ce qui fait 1111 autre bénéfice de 5,474 fr.’ ;... que ce
viager fut encore stipulé insaisissable, pour en enlever la res- '
source aux:créanciers;... que, par des combinaisons criminelles
avec le sieur Couderl , j ’ai fait déléguer des créances non éta
blies par titres, en omettant des dettes légitimes, et en faisant
ajouter que ce qui ne serait pas dû serait gagné pour moi.... L e
sieur Jaquot dit enfin que j’ai fait transcrire sur-le-champ , afin
de lui enlever son hypothèque.
Voilà en somme tous les chefs d’accusation auxquels j ’ai à
répondre.
J ’ai acheté Pringy au-dessus du prix courant des propriétésde mon département. Six domaines semblent une masse consi
dérable pour les pays où la bonté du terrein n’exige pas qu’on
divise beaucoup'les exploitations. Mais dans un pays sablora-
�( 8 )
neux où, pour avoir des bras , il faut fournir aux colons des
bâtim ens, des bestiau x, et tous les besoins de la v i e , on est
forcé de multiplier les habitations , et leur nombre est insigni
fiant pour la valeur de la terre.
Je voudrais pouvoir présenter des baux à ferme de cette
propriété , à l’époque de mon acquisition ; mais le sieur Coudert
n’avait pu trouver à affermer que les domaines qui offraient aux
colons le plus d’avantage. L ’ un, du 3 thermidor an 6 , fait pour
neuf ans, était de 45o fr. ; l’autre, du 24 prairial an 7 , fait
aussi pour neuf ans , l’était de 400 fr. A i n s i , quand on éva
luerait au même prix ceux que le sieur Coudert fut obligé de
garder pour son compte , on ne trouverait qu’un prix annuel
,
de 2 55 o fr .; et ajoutat-on encore pour la réserve une somme
égale à un domaine, je n’eusse jamais atteint le revenu de mon
argent.
Cependant tout le département de l’Allier sait bien q u ’en
l’an 0 , l ’an 9 et l’an 10 , les propriétés de quelqu’im portance,
y étaient au plus bas prix. J e pourrais citer de nombreux exem
ples d’immeubles vendus à moins de moitié qu’ils ne se ven
draient aujourd’h u i ; et m al gr é cette bonne fortune des a c q u é
reurs, aucun d ’eux n ’a été assez malheureux pou»* trouver en
son chemin de soi-disant créanciers, qui se soient avisés, au
bout de dix nus, de leur reprocher un bénéfice trop considérable.
J ’ai cherché l’élat des contributions, pour indiquer la somme
à laquelle je suis imposé pour Pringy; mais celte cote est con
fondue avec celle de mes autres propriétés, parce qu’oulre les
six domaines de Pringy , j ’ai, sous la même perception, neuf
domaines attenans, et plusieurs locateries. Je crois, cependant,
que l’impôt de Pringy est de 780 francs, à quelque petite dif
férence en plus ou en moins; et je 11e sais pas s’il ne faut pas
en distraire l’impôt d’une prairie assez vaste, que j ’ai annexée à
I >r“ 1gy depuis mon acquisition.
L a déduction, q u ’ il a plu a Jaquot de faire, de 16,000 fr.
de mobilier, prouve toute la bonne foi du rédacteur de son
écrit ?
�( 9 )
écrit, comme si on ne savait pas que les droits d’enregistrement
du mobilier coûtent deux pour cent, et celui des immeubles
quatre pour cent.
Lorsque le sieur Jaquot a dit que Pringy avait été évalué
125,000 fr. dans une donation du 16 avril 1773 , il a menti sur
ce point comme sur le reste ; car cet acte prouve que dans la
somme de 125,000 fr. (assignats) a étc compris le quart ap
partenant au donateur dans une hab itation , appelée M ontL o u is , sise au quartier du P o n t-S a in t-L o u is au Port-auPrince.
O r, cette habitation dans sa totalité passait pour produire
plus de 3 o,ooo fr. de rente; le quart donné valait donc la peine
de n’être pas oublié ; et le sieur Coudert lui-même l’oubliait si
peu , qu’il fondait tout son espoir d’aisance sur le revenu de
cette habitation, dans laquelle il croyait rentrer incessamment.
Quant au capital de 17,474 f r . , laissé dans mes mains par un
viager de 1,200 fr ., il faut remarquer que ces 1,200 fr. étaient
réversibles sur la tête de Sylvie Coudert, et que j’avais deux
chances à courir. L a probabilité de leur vie était fort à consi
dérer sans doute ; car le sieur Coudert se disait âgé de 42 ans,
et sa sœur était plus jeune que lui.
Ce viager n’était point stipulé insaisissable , comme le dit le
sieur Jaquot, avec un mensonge de plus; il n’y avait de stipula
tion semblable que pour les 600 fr. destinés à Sylvie Coudert ,
après la mort de son frère ; et M. Durin crut cette précaution
nécessaire, parce que Sylvie Coudert étant en la puissance d’ un
mari qui faisait mal ses affaires, il fallait que ce viager ne fût
pas détourné; et pour cela, le sieur Coudert fit dire que les
<>600 fr. de sa sœur seraient insaisissables, et seraient touchés
par elle sur ses seules quittances. Mais les 1,200 fr. du viager
dus au sieur Coudert, étaient si bien saisissables , que le sit‘llf
Jaquot les a saisis; qu’on ne lui a pas même opposé qu’ils fus-
3
�( IO )
sent insaisissables, et qu’il est forcé de convenir avoir touché
600 fr. par a n , à cause de la saisie.
Il y a pour 54,526 francs de délégations à treize créanciers;
et, si on excepte i , 3 oo francs délégués à des ouvriers, les douze
autres articles de créances sont fondés sur des titres hypothé
caires. L e compte de tout ce qui leur était du fut donné par
le sieur Coudert. J ’avais à cœur de ne laisser aucune hypo
thèque sur Pringy ; et il était possible que le sieur Coudert
eût enflé les états, par lui donnés, de ses dettes, afin de se faire
des capitaux qu’il eût réclamés pour l u i , comme non délégués.
Je priai donc M. Durin de faire en sorte que le sieur Coudert
fût forcé de déléguer toutes ses dettes sans restriction. C’est alors
que M. Durin eut idée de stipuler, dans sa rédaction, que dans
le cas où toutes les sommes, déléguées par le sieur Coudert, ne
seraient pas dues, je serais dispensé de les acquiter, sans être
tenu de rembourser le montant au vendeur.
Cette clause eut l’effet que je devais en attendre; le s.r Coudert
fut forcé de donner un élat exact de ses dettes ; il était intéressé,
par-là, à remplir les 54,526 francs de bonnes et valables délé
gations; et il n’y ma nq ua pas. N o n - seulement il a fait en sorte
de ne rien me laisser en bénéfice; mais comme il avait plutôt
restreint qu’augmenté, f a i été obligé de payer 1,340 fr. au-delà
des 54,526, et je puis le prouver par mes quittances.
Quant à la promptitude de la transcription, il faut se reportqr
à l’époque de ma vente, où on sait que suivant la rigueur de la
loi sur les hypothèques, la transcription était le complément
de la vente; aussi les notaires ne manqua i ent jamais d’averlir
les acquéreurs de la nécessité absolue de p ay er les frais de trans
cription, en même lems que les autres droits. O n sait qu’un
acquéreur s’en remet absolument à son notaire de confiance; et
je me contentai de payer au mien ce qu’il me demanda pour le
coût de la vente.
�( I I )
Devais-je encore prendre sur mon compte le bilan entier de
la fortune de mon vendeur, qui venait de déléguer franchement
pour 54,5oo francs de dettes, et qui restait propriétaire d’une
riche habitation, a Saint-Domingue, et de 4^0 francs de rentet
indépendamment des 1,200 francs que je devais lui payer?
Il paraît que le sieur Jaqu ot, avant de publier un manifeste
contre m oi, avait écrit des lettres à M oulins, sous prétexte de
prendre des conseils pour me poursuivre. S’il écrivait du même
ton qu’il imprime, il est fort vraisemblable que dans les ré
ponses qu’il a reçues, on l’ait regardé comme une victime d’une
machination tendant à le dépouiller; et c’était peut-être pour
se faire des pièces à produire, qu’il se mettait ainsi en corres
pondance avec M M . Ossavy, Boiron et Gueullette, successive
ment. Quoi qu’il en soit, les fragmens qu’il a choisis dans ces
lettres prouvent assez que tout en abondant dans ses idées, par
politesse, on ne lui conseillait que le silence.
Il me parle & articles secrets arrêtés avec le sieur Coudert,
qu’il appelle mon complice ; et un instant après il se dit en re
lation lui-même avec le sieur Coudert 5 qui semblerait se donner
à son tour comme une victime dépouillée, tout en promettant
justice à ses créanciers, aux dépens de qui il appartiendra.
Mais je ne vois , dans ce langage énigmatique du sieur Cou
dert , aucune indication de ces prétendus articles secrets, que je
11’ai jamais connus; et si le sieur Coudert n’a rien dit de pareil
au sieur J a q u o t, comment donc celui-ci avance-t-il ce que sa
méchanceté seule a su inventer pour colorer ses grossières
injures?
Si ce Jaquot et son croupier étaient gens moins impénétrables,
j’eusse pu rechercher avant tout comment il était possible qu’un
traiteur de la rue de la Harpe eût pu devenir créancier de 25,000 f,
numéraire, pour la nourriture d’un homme, qu’il dit lui avoir
fournie pendant cinq ans.
L a donation d’avril 179^ C
m,a ^ it rechercher pour ré
pondre ¿1 l’une de ses fausses citations) prouve que le s.v Coudert
4
�( 12 )
habitait alors à l’hôtel d’A n jo u , rue S a in t -A n d r é - d e s -A r t s ,
n.° 22. Ainsi ce ne peut être qu’après cette donation qu’il est
allé rester chez le sieur Jaquot jusqu’au 11 ventôse an 5 , époque
du règlement de ses comptes.
D ’abord il n’y a que quatre ans d’intervalle au lieu de c i n q ,
et puis c’était précisément Je tems de la plus grande dépréciation
des assignats. Lorsque le sieur Jaquot renvoya le sieur Coudert
aussitôt après la chute des assignats , il fit sans doute un acte
de grande sagesse de régler ses com ptes, et de se faire donner
un billet; mais ne faut-il pas s’épouvanter de voir une nourri
ture de cinq ans se monter à 25 ,ooo francs en numéraire, à une
époque semblable ?
Jaquot, à la vérité, a soin de dire que ces 25 ,ooo fr. ne sont
pas tous comptés pour alimens; il y ajoute le logement, les dé
penses d’entretien, et de l’argent prêté dans les besoins du sieur
Coudert. Mais quelles sommes énormes n’aurait-il pas fallu
prêter en assignats de l’an 3 et de l’an 4 , pour atteindre 6,000 f.
par an en écus. L e sieur Jacquot est-il bien présumé s’être ainsi
mis en avance vis-à-vis un seul de ses pensionnaires ? ce n’était
pas au moins l’usage de ses pareils.
Je remarque maintenant la bizarrerie de ma destinée, et je
me demande comment il se fait que je sois accusé de retirer
un revenu trop considérable de Pringy, tandis que ce revenu
n’a pas suffi au sieur Coudert pour payer son traiteur; et c’est
ce même traiteur qui vient, avec un billet de 26,000 francs,'
crier au voleur, afin qu’on ne songe pas à lui, et qu’on ne le
croie que volé.
M ais, au reste, que m ’importe de scruter la manière d’agir
d’un traiteur envers un habitué de sa maison; je n’eusse jamais
supposé avoir rien de commun a vec lui; mais puisque le hasard
et m;i mauvaise fortune m ’ ont mis en rapport avec cet homme,
an point de me réduire à une justification de ses calomnies, je
demande 1.° si, d’après les circonstances que je viens d’exposer,
je puis avoir à redouter le procès dont il me menace pour faire
�( i3 )
annuller ma vente comme frauduleuse; 2.° si je suis fondé,
moi-même , a le poursuivre en réparation civile ou criminelle,
avecdommages-intérêts, applicables aux hospices; et par quelle
voie je puis, y parvenir.
S A U L N IE R .
CONSULTATION.
T A?, conseil, soussigné, qui a l u , i.° le mémoire ci-dessus;
2.° l’acte de donation faite par Je s.r Charles Faure au s.r Coudert,
le 16 avril 1792; 3 .° deux baux à ferme, consentis par le sieur
Coudert, des domaines Cottin et Langeron , en date des 3 ther
midor an 6, et 24 prairial an 7; 4.0 le contrat de vente consentie
par le sieur Coudert au sieur Saulnier, devant Aucouturier,
notaire à Saint-Menoux, le 22 frimaire an 9 ; 5 .° une copie du
jugement rendu entre Foret, Fêvre, J a q uo t et autres saisissans,
le sieur Saulnier, liers-saisi, et le sieur Coudert, partie saisie,
le 11 fructidor an 11 ; 6.° un mémoire imprimé, signé Jaquot,
daté de Paris, du i . er avril 1 8 1 1 ,
Est d’avis , sur la première question , que les faits exposés
au mémoire du sieur Jaquot , ne sont pas de nature, à faire
jamais prononcer la nullité de la vente consentie par le sieur
Coudert au sieur Saulnier. .
A la vérité, et quoi qu’en dise Rousseau - Lacombe en ses
matières civiles, les lois (juce in fraudent creditorum sont ob
servées en France; et l ’art. 1167 du Code civil prouve parfaite
ment que ces lois sont en-pleine vigueur. Il faut donc regarder
comme un principe certain que la régularité de ra^quisition ,
�( i4 )
faite par le sieur Saulnier, ne le préserverait pas de la recherche
des créanciers, s’ils prouvaient clairement que cette vente a été
faite en fraude de leurs droits.
Mais il ne suffit pas d’alléguer la fraude ; il ne suffit pas
même de prouver que le débiteur a exécuté le projet de faire tort
à ses créanciers; il faut encore que l ’acquéreur ait participé à la
fraude : Contra emptorem q u i, sciens fraudent, com paratif.
( L . 5 , C od. de revoc. h. quæ in fraud. crédit. )
E t ce sont les créanciers qui doivent prouver la participation
de fraude qu’ils imputent à l’acquéreur : Fraudent creditores
agentes probare debent. ( L . 18, fF. de probat. )
O r, en examinant les circonstances de l’acquisition du sieur
Saulnier, 011 ne peut y voir aucune preuve qu’il ait eu le projet
formé de dépouiller le sieur Jaquot de sa créance.
Ce n’est pas assez qu’un acquéreur sache directement ou indi
rectement que (son vendeur doit, pour qu’il faille en tirer la
conséquence qu’il eût dû ne pas acheter, sans donner le tems
aux créanciers de prendre toutes les précautions nécessaires.
Raremen t on vend ses biens sans avoir des créanciers; et si,
parce que l’acquéreur les a connus, il était exposé a être accusé
de fraude; il faut convenir que les contrats de vente ne seraient
pas des actes aussi solides qu’on le croit communément.
L a loi ne donne nulle part cette latitude aux créanciers, par
cela même que, dans l’usage, celui qui achète ne se croit pas
le droit de porter l’inquisition dans les affaires de son vendeur.
On convient du prix , on s’occupe de part et d’autre de ses avan
tages, et tout le rôle de l’acquéreur est de payer avec sûreté. Il
n’est donc pas suspect, par cela seul qu’il saurait des créanciers
que son vendeur ne lui délègue pas : il n’ est coupable de fraude
que s’il a véritablement concerté avec son vendeur les moyens
de Irustrer ses créanciers connus. Et sur ce point encore la loi
s’explique clairement : Quod ait prœtor, S C ie n te , sic accipimus te conscio ci'fraudent participante. Non en im , si sim pliciter scia ilium creditores habere, hoc sufficit ad contenden-
�( l!> )
dum teneri eum actio'ne ; sed si particeps jra u d is est. ( L . 10 ,
if. cjuæ in fraud. crédit. ).
Cependant il se trouve ici deux circonstances assez extraordi
naires pour mériter quelques réflexions de plus sur la position
où le consultant s’est trouvé : i.° Comme juge de paix il a signé
une cédule donnée par le sieur Jaquot, créancier dq son ven
deur; 2.° il a fait transcrire son contrat de vente deux jours
après s a rdate , et avant que le sieur Jaquot eût pu obtenir h y
pothèque.
Sans doute il eût'été plus louable peut-être que le sieur Sauln ie r , par respect pour la noble fonction dont il était revêtu, se
])rivât d’acquérir jusqu’à ce que Je sieur Jaquot eût achevé de se
mettre en règle, ou qu’il exigeât une délégation de cette créance.
Mais il faut convenir que 1 absence d’un simple procédé n’est
pas une faute aux yeux de la lo i, et on ne doit pas êlre plus
sévère qu’elle.
Un juge ne peut pas acheter des droits litigieux} ni se rendre
adjudicataire d’objets vendus en sa justice. V oilà tout ce que la
loi exige de plus à son égard; tout le reste des conventions qui
le concernent demeure’donc dans la règle générale.
Si le sieur Saulnier a lu la cédule qu’il a délivrée le 21 fri
maire an 9 , comme il fout le croire, il y a vu certainement que
le sieur Jaquot prétendait à une créance de ü5 ,ooo fr. contre le
sieur Coudert, et qu’il n’avait encore aucune hypothèque.
Mais en revenant aux règles générales , qui confondent le
juge avec les autres h o m m e s,y a-t-il réellement signe de fraude
dans l’acquisition faite le lendemain de la connaissance que le
sieur Saulnier a eue de celle créance ! On croit pouvoir dire lé
galement que non.
L e sieur Saulnier était déjà en négociation d’une terre assez
considérable; il dit même que tout était conclu et préparé pour
la signature; ainsi, à moins de renoncer absolument à acquérir,
il était difficile de changer les convçnlions déjà faites, pour
(Jonner place à un nouveau créauqier, lorsque la première con-
�( 1(5 )
dition du vendeur était d'avoir 1,200 fr. de viager, et que tout
le surplus était délégué à des créanciers hypothécaires. IL est
visible que l ’acquéreur avait intérêt de préférer les délégations
hypothécaires, et de renvoyer le simple billet du sieur Jaquot
sur les 17,000 francs non délégués. M ais, à son tour, le ven
deur aurait mis plus de résistance encore à ne rien retrancher
de son viager ; ainsi il n’y aurait pas eu de vente.
À la vérité, il y aurait eu un autre parti plus convenable pour
éviter tous les reproches : le sieur Saulnier, en ne transcrivant
p as, eût donné le tems au sieur Jaquot de se procurer une
hypothèque, et de la faire valoir.
Cependant on est forcé de convenir que dans ce cas le sieur
Saulnier s’exposait à ne faire rien de.solide ; car suivant l’art. 26
de la loi du 11 brumaire an 7 , il n’existait pas de vente incomrautable sans une transcription. Le s.r Coudert pouvait vendre à
un autre, et emprunter sur l’immeuble déjà sorti de ses mains,
sans que l’acquéreur pût s’en défendre, s’il n’avait pas transcrit ;
et ici les deux parties ne paraissent pas avoir une grande con
fiance dans le sieur Coudert.
Peut-être bien y a-t-il eu quelque précipitation dans la trans
cription de la vente du sieur Coudert; mais en supposant qu’elle
eût été retardée de quinzaine , ce qui était un terme assez long
pour cette époque, on ne voit pas trop ce que cette prolonga
tion eût valu de plus au sieur Ja q u ot, car en quinze jours il
pouvait difficilement obtenir un jugement contre son débiteur.
Cette transcription , au reste , ne se trouverait un signe de
fraude que si le sieur Saulnier eût voulu en abuser pour se faire'
donner une quittance collusoire de la portion du p rix, restée
libre en ses mains. Mais, au contraire , le sieur Saulnier n’a rien
changé à sa situation; il est resté débiteur du sieur Coudert, et
les créanciers non délégués ont pu s üdiesser a lui pour laire
des saisies-arrêts.
Il faut encore apercevoir une excuse en faveur du consultant,
dans les biens qui restaient au sieur Coudert. Ils consistaient,
�( 17 )
i.o dans le quart d’ une habitation à Saint-Domingue; 2 .° dans
des contrats de rentes perpétuelles de 450 francs annuellement;
3 .° dans la rente viagère de 1,200 francs créée à son profit par
l’acte de l’an 9.
Les biens de Saint-Domingue 11e lui ont pas été d’une grande
ressource à cause de la guerre; mais la fortune du s.r Coudert
ne doit pas s’apprécier, parce qu’elle est en 1811. Il faut se
reportera l’an 9, et considérer s’il avait assez d’espérances réelles
pour ne pas être présumé avoir voulu frustrer ses créanciers en
Vendant le seul immeuble qu’il eût en France, car l’action n’est
ouverte aux créanciers que dans le cas d’insolvabilité de leur
débiteur, nisi de ipsius inopiâ constet , et il faut de plus que
le vendeur et l ’acquéreur se soient Concertés pour ôter toute
ressource aux créanciers, comme 011 l ’a déjà dit. r
Or , en l’an 9 , il était très-probable que les possessions de
Saint-Domingue fussent considérées comme une espérance trèsréelle ; et on se souvient même que le succès de nos armes, à
cette époque, y ramenait une grande quantité de Français, soit
pour y retrouver leurs propriétés q u i , çp éffpt, leur était fidè
lement rendues , soit pour y courir les chances de la fortune.
Ainsi le siepr Coudert ne devait.pas.se croire hors de toutes
ressources, lorsqu’il vendait Pringy moyennant 72,000 francs.
. D ’ailleurs, l’emploi.du prix,de ,petite vente ne se prête pas à
.des idées de fraude , de la part ^ ê m e du vendeur, puisqu’il
.en délègue la majeure .partie à ses créanciers hypothécaires, et
s’en réserve à peine .un quart poi^r le.destiner à un viager.
Si donc „il ne résulte, pqs, ¿le çonsiliuin fr a i(d is , en la per
sonne du .vendeur, il,y en\aura.1ç.ncQK? moins, dans la personne
•de .1-acquéreur ¿\qui n’élflit tenu h \a.uti;e,.çhose , ,.vis - à - vis les
•créanciers du vendeur¿,quià\'ne\ pas; nser d,e, fraude pour leur
-ôter , par. des .voies -illicites , ^ e 1prix;,,c9n,yenu.<O r ,, tqut ce
^prix a un emploi bien connu; le,sieur Slaulnier a parfaitement
suivi cet emploi; il a payé les créanciers (Mégués : et quant
�( i8 )
à la rente réservée au vendeur, il ne s’en est point dessaisi au
préjudice des créanciers, et la preuve en résulte du propre fait
du sieur Jaquot.
Cette dernière circonstance n’est pas seulement exclusive de
la fraude imputée au sieur Saulnier, elle est encore décisive
contre le sieur Jaquot , pour neutraliser tous les procès qu’il
pourrait intenter.
En effet, le sieur Jaquot a fait, en prairial an n , une saisiearrêt entre les mains du sieur Saulnier ; et quand il pourrait
supposer qu’il ignorait sa qualité d’acquéreur en saisissant, au
moins ne l’a-t-il pas ign o ré , lorsque le sieur Saulnier a fait sa
déclaration judiciaire. Cependant , au lieu d’attaquer la vente
du sieur Saulnier comme frauduleuse , le sieur Jaquot s’est pré
senté pour en recevoir la portion du prix disponible. Il se l’est
fait adjuger en jugement ; il la reçue tous les ans depuis l’an u
il a donc approuvé ce qu’il veut attaquer aujourd’hui.
Car il est de principe qu’on approuve une vente n u lle, lors
qu’on en reçoit le p r ix , et encore lorsqu’on agit pour le deman
der. Cette règle a lien même contre le mineur dont les biens
auraient été vendus illégalement sans sa participation et sans
formalités. Il devient non recevable à attaquer cette aliénation ,
par cela seul qu’en majorité il en aura reçu , ou simplement
réclamé le prix.
On peut voir, sur cette question des approbations faciles, les
principes enseignés par ï)omat *en ses Lois civiles , et par
M- Merlin en ses Questions de droit, tom. 6 , pag. 217. JSec
silentio prœtermiltendum alienationes illa s quce, initio insp e c to , ipso'jure nullœ erant).*. Subindè e x post facto confirm a r ip o s s e , si rninor1ja ü i m ajor fa ctu s alienationem ralam
liabuerit, siv e ëxpressè'\ Sive tacitè dùm ïnstituit ad œstimationem seu preliuiti êjus quod illitiite dislractuiu est.... Subsecuta solutio , vel p etitià 'ï'v ela ccèp ta tlo cestim atlonis, necessariam tacitœ ralihabilionis inducit conjectuVam. ( V o ë t . in
fL l i b .'27 > tit,.9:. ) ;
! i11
�( i9 )
On lit, à la suite de la dissertation de M. Merlin sur cette
question , un arrêt de la Cour de cassation, qui a jugé dans le
même sens : « Attendu que Marie Bordenave a ratifié la vente par
« la quittance qu’elle adonnée' en majorité delà portion du prix
« qui restait à payer à l ’époque où elle est devenue majeure ».
( 4 thermidor an 9. )
Ici la qualité des parties n’est pas la même ; mais il n’y a pas
de raison pour détourner l'application des mêmes principes. II
n ’y a à cela qu’une exception , et ce serait le cas où la connais
sance de la fraude ne serait survenue qu’après ; car l’action
révocatoire ne commence à la vérité que à die detectœ fra u d is.
Mais le sieur Jaquot n’annonce aucune découverte nouvelle;
tout ce qu’il sait aujourd’hui, il avoue l’avoir su en l’an 11. L a
vilité de prix, la transcription , sa cédule signée du sieur Saulnier, tout cela existait, et lui était connu, lorsqu’il a attaqué
le sieur Saulnier en l ’an 11 , pour verser dans ses mains une
portion du prix de son acquisition, et lorsqu’il l ’a touchée a n
nuellement.
Cette fin de non*recevoir ne peut pas être accusée de sévérité,
lorsqu’on voit au digeste, d’où sont tirées les lois quœ in fraudem
creditorum , que l’action en nullité de la vente 11’était admise
que pendant un an, à compter du jour où le créancier a pu être
informé qu’il existait une vente de son gage. Intrà annum , quo
experiundi potestas fu e r it, actionem dabo, ( L . i . re, ff\ quœ
in fr . )
■A u reste, les délais plus ou moins longs que la loi a pu ac
corder au sieur J a q u o t, pour exercer son action , deviennent
inutiles, lorsqu’au lieu d’agir il a approuvé l’acte. Ainsi , en
réunissant l’approbation et l’absence des preuves auxquelles la
loi l’aurait soumis, on ne peut voir dans les menaces du sieur
Jaquot, contre le sieur Saulnier, que l’effet de l’humeur, peutêtre fort excusable, d’un créancier qui perd; mais il ne paraît
pas qu’il puisse en résulter rien d’inquiétant contre le sieur
Saulnier.
6
�( 20 )
S u r l à SECONDE q u e s t i o n , le s.r Sanlnier paraît fondé à se
pourvoir contre le sieur Jaquot en réparation des injures véri
tablement grossières et outrées qui se lisent à toutes les pages
du mémoire imprimé, répandu avec profusion dans les départemens de l’A llier et du Puy-de-D ôm e, sous le nom du sieur
Jciquot.
Ptien n’est plus g r a v e , en effet, que l’imputation faite au
sieur ¿Saulnier. L ’accusation publique d q p révarica tion ^ dol et
f r a u d e , qui se lisent dès la première page ; la menace de le
citer devant les tribunaux pour fa ir e appliquer sur son fro n t
le fe r de V ig n om in ie, résultat in fa illib le d'une conduite per
verse et sca n d a leu se, sont un genre de diffamation si grave
contre un ancien juge de paix, qu’il est impossible de concevoir
une accusation publique qui pût porter une plus grande atteinte
à sa réputation. Il est donc légitime et presque indispensable que
le sieur Sanlnier en demande une réparation, qui soit aussi pu
blique que l’offense.
Les anciennes ordonnances étaient extrêmement sévères contre
les écrits contenant diffamation. Les édits de i 56 i et i 563 fai
saient défense de semer des libelles , l’un à peine^de punition
corporelle, l’autre à peine de confiscation de corps et de biens.
Un édit de 1626 prononça la peine de mort contre les libellâtes
et diffamateurs. Enfin un arrêt de régleraient de 1723, sur la
librairie, étendit même jusqu’aux imprimeurs les peines rela
tives aux libelles diffamatoires. Il ordonne de les démettre de
leur profession, et les déclare incapables de l’exercer à l’avenir.
L a déclaration de 1728 condamne les compositeurs de libelles
au bannissement. Celle de
les condamne aux galères per
pétuelles.
L e Code pénal du 25 septembre 1791 , et celui du 3 bru
maire an 4 , n’ont prévu que le délit des injures verbales; mais
ces lois sont muettes sur les calomnies écrites; en conséquence,
les anciennes peines furent alors considérées comme abrogées : les
tribunaux n’ont cru pouvoir adjuger que des dommages-inté-
�( 21 )
rets civils h la partie offensée, ainsi que l ’a décidé la Cour de
cassation, par trois arrêts des 11 brumaire an 8, 20 ventôse an 12 ,
et 21 germinal an i3.
L e nouveau Code des délits et des peines, qui n’est loi, pour
le ressort de la Cour impériale, que depuis son installation, dé
finit clairement la calomnie écrite et la punit.
Art. 367, « Sera coupable du délit de calomnie, celui qui.....
« dans un écrit, imprimé ou non, qui aura été affiché, vendu
«
«
«
«
«
ou distribué, aura im pu té, à un individu quelconque, des
faits qui, s’ils existaient, exposeraient celui contre lequel ils
sont articulés a des poursuites criminelles ou correctionnelles,
ou même l’exposeraient seulement au mépris ou à la haine
des citoyens ».
On ne peut pas objecter au sieur Saulnier qu’avant de savoir
s’il y a calomnie, il s’agit d’examiner si l’imputation qui lui est
faite est ou non mensongère , afin de savoir si elle est une
calomnie.
L a loi n’a pas pu vouloir que le diffamateur commençât par
attaquer la réputation de son adversaire, lorsque la voie des
tribunaux lui était ouverte pour demander justice si elle lui
était due. A u reste, la loi répond elle-même à cette objection.
Art. 368 . « Est réputée fausse toute imputation à l’appui
« de laquelle la preuve Légale n’est pas rapportée. En consé« quence, l’auteur de l’imputation ne sera pas admis , pour sa
« défense, à demander que la preuve en soit faite ».
L a peine de la diffamation varie suivant les conséquences
que l’imputation eût produites. Les art. 3 7 1 , 375 et 376 graduent
cette peine; et il paraît inutile d’en chercher l’application.
Mais sera-ce cette loi qui devra régler la procédure et la peine,
ou seront-ce les lois précédentes? car le sieur Jaquot a daté son
mémoire du i.c* avril 18 11; et cependant il ne l’a d i s t r i b u é à
Riom , Clermont et Moulins que dans le mois de juin. On serait
bien porté à croire que cette date a été mise afin que les réglemens nouveaux sur la librairie 11e gênassent, ni le sieur Jaquot,
�( 22 )
ni son imprimeur, à cause de la permission qu’il eût fallu de
mander à la police. Quoi qu’il en soit, si l’impression elle-même
conslitue le délit, il résulte encore davantage de la colportation
et distribution que le sieur Jaquot en a fait faire : et comme ce
fait est postérieur à la mise en activité de la loi, c’est elle évi
demment qui doit punir le délit sans qu’il y ait pour cela ré
troactivité.
O r , aux termes des art. 2, et 3 du Code criminel, le sieur
Saulnier peut exercer une action en réparation et dommages-,
intérêts.
Pour y parvenir il peut, ou dénoncer le fait à M. le procureuï
impérial aux termes de l’art. 3 i du même Code, ou donner une
citation devant le tribunal correctionnel, soit de Paris, soit de
Riom , soit de Moulins, contre le sieur Jaquot, pour être con
damné i.°e n une somme fixée pour dommages-intérêts (a p p li
cable , ainsi que le sieur Saulnier le jugera à propos); 2.0 aux
peines correctionnelles prononcées par la loi contre le délit de
diffamation; 3.° à l’affiche du ju g e m en t, au nombre de cinq
cents exemplaires, aux frais dudit Jaquot.
Cette citation devra contenir élection de domicile dans la/
ville où siège le tribun al, et sera donnée à trois jours auxquels
il faudra ajouter un jour pour six lieues, suivant que cela est
établi par les art. 182 et 189 du Code criminel.
On a dit que les tribunaux: de Riom ou de Moulins sont
compétens pour connaître de cette demande ; et en e ffet, c’est
toujours le tribunal dans le ressort duquel le délit a été commis,
qui est compétent pour le réprimer; cela d’ailleurs est encore
prévu p ir l’art. 29.
Or, il a été déjà remarqué que le délit n’avait pas été seulement
commis à Paris par l’impression du metnoire du s.r J a q u o t,
mais qu’il l’avait été encore a Riom et a Moulins par la dis
t r i b u t i o n qui en a été faite dans ces deux villes avec profusion.
Si le sieur Jaquot objectait que c’est un mémoire pour sa
défense, comme créancier, et qu’il sera soumis seulement à la
�( 2 3 }
censure du tribunal qui jugera le fond du procès civil, on lui
répondra qu’il n’y a pas de procès commencé; que l’art. 377
du Gode pénal s’applique aux mémoires donnés dans une cause
de laquelle les juges sont déjà s a is is , et que l ’une des parties
plaidantes fait imprimer pour sa défense. Mais lorsqu’il n’y a
pas de procès déjà pendant, il faut en revenir à l’art. 368 , qui
ne permet pas de plaider pour rechercher si le diffamateur a
dit v r a i, il faut qu’il prouve sur-le-champ la vérité de ce qu’il
a v a n ce , par jugement ou acte authentique , aux termes de
l ’art. 370.
En effet, la réputation des hommes ne doit pas être flottante
et en suspens.
Si le sieur Jaquot avait a accuser de fraude le sieur Saulnier,
il devait faire ju g er qu’il y avait fraude ; et ensuite il eût été
excusable de l’imprimer ; mais il est incontestable qu’il n’a
pas pu e x abrupto l’avilir, et appeler Pigrtominie sur sa tête.
L a société est intéressée à ce qu’ une diffamation aussi incon
sidérée ne reste pas impunie.
D
élibéré
à R io m , le
juin 1811.
M .e D E L A P C H 1 E R , ancien avocat,
L
e
C
onseil
s o u s s ig n é
,
V u la Consultation ci- dessus, est du mê m e avis sur tous les
points , par les mêmes motifs.
En premier lieu , la menace du sieur Jaquot de faire un pro
cès au sieur Saulnier, au sujet de l'acquisition qu’il fit du sieur
Coudert, le 22 frimaire an 9 ( 1 2 décembre 1 8 0 0 ) , et d’en
poursuivre la révocation après plus de dix ans d’exécution pu
blique , comme faite en fraude des créanciers du vendeur, tandis
que le prix entier, moins le capital d u n e rente viagère de
1,200 f r . , leur fut délégué, et que lui Jaquot, créancier chirographaire non délégué ,'mais saisissant, reçoit chaque année,
depuis huit ans, son contingent
de cette rente viagère, en vertu
�a h )
de jugement de distribution, rendu entre les saisissans , I’acquéreur tiers-saisi, et le vendeur, partie saisie, le n fructidor
an i i , est d’une témérité sans exemple. Comment, en effet,
écouter les clameurs d’un créancier qui ne se réveille , pour
crier à la fraude contre la vente des biens de son débiteur,
qu’après avoir donné dès l ’origine, et pendant le cours de huit
années consécutives, l’approbation la plus formelle à cette alié
nation , en recevant son contingent du prix, d’après un juge
ment de distribution, prov oqué par lui-même?
Une aliénation, par voie de vente , ne peut préjudiciel’ aux
créanciers du vendeur, et être faite en fraude de leurs droits,
que de l’une de ces deux manières : ou parce qu’elle est fa it e à
v il p r i x , ou parce que le prix est payé immédiatement après
la transcription du contrat, au vendeur qui le soustrait à ses
créanciers non inscrits.
Dans les deux cas, cette fraude n’ouvre l ’action révocatoire
aux créanciers, qu’autant qu’il est prouvé que Vacquéreur a
participé à la fra u d e pour en profiter, et q u e , par l’événe
ment , les créanciers ont perdu leurs créances , par l'effet de
l ’aliénation attaquée ( i ) .
O r, aucune de ces circonstances ne se rencontre dans l’espèce :
i.° Le sieur Coudert, vendeur, n’a point consenti la vente
dîi 22 frimaire an 9 , à dessein de frauder ses créanciers par la
soustraction du p r ix ; et le sieur Saulnier, acquéreur, n’a pas
favorisé cette soustraction frauduleuse, puisque les trois quarts
de ce prix et plu s, ont été délégués aux créanciers hypothé
caires, inscrits ou non, et que l’autre quart, converti en rente
viagère, a resté entre les mains de l ’acquéreur, où il pouvait
être saisi par les créanciers non délégués , et où il l’a ¿lé
réellement ;
2.0 Si les créanciers chirographaires sont dans le cas 'de perdre
(1) V o i r D o m a t , lois c i v i l e s , liv. 2 , tit. 1 0 , sect. i . r o , n.°s
3, 4
et
6,
et les lois q u ’ il cite.
2.°
�( 25 )
une partie de leurs créances, ce n’est pas la vente faite au sieur
Saulnier, qui leur en a occasionné la perte, puisqu’ils ont
profité de tout ce qui pouvait leur revenir du prix.
Diront-ils que la perte de leurs créances dérive d e la vilité
du prix de la ven te, et de la conversion d’un quart environ de
ce prix, en rente viagère? Mais est-ce après plus de dix ans
d’approbation de la conversion d’une partie du prix en viager,
et de silence sur la prétendue vilité, que l’on peut écouter des
clameurs qui ne sont appuyées d’aucune preuve? des vociféra
tions purement hasardées?
D ’ailleurs, quand il y aurait eu une lésion réelle dans la
fixation du prix, on conviendra bien que ce serait une absurdité
de vouloir lui assigner pour cause, le dessein formel concerté
entre le vendeur et l’acquéreur, de faire perdre les créanciers du
premier, tout exprès pour gratifier l’acquéreur à leur préjudice :
cependant il faudrait que ce concert odieux fût invinciblement
p ro u vé , pour que les créanciers du vendeur fussent admis
à dépouiller un acquéreur qui possède publiquement et paisi
blement, depuis plus de dix ans, en vertu d’une vente dont ils ont
connu toutes les conditions dans le tems, qu’ils n’ont jamais improuvée ni accusée de collusion ni de fraude, et dont la loi pré
sume la sincérité et la loyauté, jusqu’à la preuve contraire.
Ces réflexions suffisent pour inspirer une sécurité parfaite au sieur
Saulnier sur toutes les tentatives que pourrait faire le s.r Jaquot.
E n second lie u , autant il est certain que le sieur Saulnier
n’a rien à redouter de l’attaque dont il est menacé par le sieur
Jaquot, autant il est constant qu’il est fondé à demander ven
geance aux tribunaux du libelle infâme que cet audacieux a
répandu contre lui, à profusion, par les voies indiquées dans la
Consultation. L ’ofiense est trop gratuite pour rester impunie ,
et trop grave pour être dissimulée.
D
élibéré
à Clermond-Ferrand, le 17 juin 1811.
BERGIER.
R l O M , J.-C , S A L L E S , Im prim eur de la Cour Impériale et du Palais.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Saulnier, Jacques. 1811]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Bergier
Subject
The topic of the resource
créances
diffamation
libelle
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter et consultation pour Jacques Saulnier, propriétaire, habitant de la commune d'Agonges, membre du conseil de l'arrondissement de Moulins, et président du canton de Souvigny ; contre un écrit signé Jacquot, traiteur à Paris, rue de la Harpe, se disant créancier du sieur Courdert.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1811
Circa 1793-1811
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0422
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Agonges (03002)
Paris (75056)
Rights
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Domaine public
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Créances
diffamation
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MÉMOIRE
EN R E PON S E
POUR
D am e J à c q u e t t e - G i l b e r t e B O N I OL et le sieur,
J e a n B O U R D I L L O N - D U G R A V I E R ? son m a r i
dame M a r g u e r i t e B O N IO L et le sieur C h a r l e s
A R R A G O N È S D E L A V A L 9 son mari;'et demoiselle
M
arie
B O N I O L , tous propriétaires,, habitans de
la villet,de Clermont-Ferrand,, intimés.
contre
D am e M a r i e B O N I O L et Le sieur G i l b e r t S E R S I R O N , son m ari, propriétaires habitàns du lieu
de Roure paroisse de S a in t- Pierre -Le Chastel
appelans.
L
a
'
i
,
dame Sersiron demande à ses nièces le partage
de deux successions ouvertes il y a plus de 40 ans.
�■
( ^
Il y aurait lieu de s’étonner de sa p a tien ce, sî ,
depuis cette époque , elle attendait encore ce qui lui
revient; mais en i7 7 7 > clle fornpa la mêm e.dem ande
contre sa mère- et sou frère : et aprèsi un procès trèscourt, elle vitit à partage avec son frère et sa sœur.
Chacun prit la portion qui lui rev en a it, et le lot de
la dame Sersiron fut de trois domaines.
Elle s’en mit s u r - le - c h a m p en possession, et le
procès cessa. Elle a joui , depuis cette é p o q u e , sans
rien réclamer : elle a disposé de son lot en maître
absolu , coupant tous les bois , vendant tantôt des
parcelles de cham ps, tantôt un domaine entier : nul
n’avait le droit de l’en empêcher, puisqu’elle disposait
de sa propriété.
Pendant que la 'd a m e Sersiron dissipait son patri
moine par des dégradations, son frère améliorait le
s ie n , et payait de grosses dettes laissées à sa charge.
Alors l ’envie faisait des comparaisons; cepen d an t,
comme tout était term iné, on était forcé de s’en tenir
à de la convoitise.
Mais la mère est m orte, le frère est m o rt, les trois
nièces en bas-âge ont été mises en tutelle. Des liaisons
de famille ont amené une confiance sans bornes ; et
lorsque la tante en a tiré tout le parti que l’expérience
de son âge fait supposer, alors levant le masque, elle
a dit ¿1 ses nièces : vous n’avez plus à votre pouvoir
le partage qui fixe mon lot ; je prétends qu ’il n ’y en
a jamais e u , et je veux reprendre la. demande que je*
formai en 1777 ; car je soutiens ne posséder trois do-’
�.
'
(
3
. }
mainesiqu’cV-tiire de provision
j ’élevërai même bien
d'autres prétentions:que tous les changemens survenus
depuisïcette époque favoriseront.
Voilà l’origine et le plan du procès. L a mauvaise
foi :1 a fait: n aître, la mauvaise foi l ’a entretenu par
des variations continuelles de prétentions ; toujours
croissantes. Mais ce qui a échappé aux accidens et à
l’im p révo yan ce, a suffi pour convaincre les premiers
juges que là dame Sersiron cherche des dupes, et ne
demande rien dedégilime. L a Cour en sera convaincue
aussi, et ne sera pas plus-disposée certainement à ac
corder à la mauvaise foi un triomphe qu’elle ne mérite
jamais.
. .
F A IT S .'
W<î !Îî.v;î.îC-:L e sieur A nnet Boniol, substitut de M. le procureurgénéral à la Cour des aides de C le rm o n t, laissa1,
de son mariage avec M arie -G ilb e rte D argn at, trois
enfans, savoir, Marie-Françoise, Marguerite et Antoine
Boniol.
Il mourut le 4 avril 1766 , laissant un testament
olographe, daté du 21 mars 17^4, par lequel il léguait
tous ses revenus à sa fem m e, sans reddition de com pte;
et léguait un quart en préciput à son fils, s’il en sur
venait un.
L a dame veuve Boniol, dépositaire de ce testament,
le remit en 1767 au sieur A lley ra t, notaire h Giat.
Elle fit faire un inventaire, et se mit en possession des
biens.
�4
Si on en croit les sieur et dame Sersîrorï* qui blâment
tout, ce dépôt chez un notaire, qui n’était pas le plus
voisin, ce testament fait 12 ans avant de mourir, sont
des choses fort extraordinaires. Mais il n’était pas pos
sible de le déposer chez iin notaire du lieu : car il n’y
en avait* pas. '
Et lorsque la date’ du testament leur fait soupçonner
qu’il a pu^y en avoir un autre, ils sont inconséquens
lorsqu’ils remarquent eux-m êm es que le sieur Boniol
était 'dans la force de l'âge en 17*54 ; et qu'en léguant'
un quart à son fils à naître, il ajoutait que si ce fils
décédait, le legs vaudrait pour tout autre enfant mâle
qu il a u ra it, ne f u t - i l que Le vingtième, ce qui nJan-rN
nonçait pas l'idée d’une mort très-prochaine.
Une sœur du sieur Boniol père, qui avait toujours
habité la m aison, mourut en‘ 1 7 6 8 , et légua par
testam ent, au même Antoine B o n io l, f son neveu,,
un quart de ses biens-, dont la presque totalité venait
du sieur M ugnol, son m ari, qui lui en avait fait don.
Elle avait institué le sieur Annet B on iol, son- fr è r e ,
son héritier, en partie, par son contrat de mariage du
20 novembre 1747 : mais la majeure partie de sa suc
cession était encore disponible à son décès.
Marguerite Boniol, l’aînée des enfans d’A n n e t, con
tracta m ariage, le 6 juillet 1772 , avec le s.r Sersiron.
Elle se constitua en dot la portion à elle échue par le
décès de son père ; et la dame D argnat, sa mère, lui
constitua de son chef une somme de 6,000 fr.? payable
après la majorité du 111s, à condition qu’elle ne sera
�(
5.}
point inquiétée dans sa gestion, et que son fils ne le
sera pas dans le quart à lui légué par son père, sinon
la dame Dargnat réduit sa constitution à 2,000 fr.
X<a dame Sersiron dit qu’elle n’a renoncé qu’à con
dition des 6,000 francs : mais qu'elle a gardé un silence
respectueux sur la constitution des 2,000 francs. Si elle
avait bien lu l’acte, elle aurait vu qu’elle a réitéré sa
renonciation, après cette restriction à 2,000 francs.
Cependant la dame Dargnat ne voulant pas profiter
du legs général des revenus que lui avait fait son mari,
se montra généreuse envers sa fille, et elle crut devoir
annoncer ses intentions aux familles réunies ; elle
déclara donc que son intention était de se départir de la
jouissance des biens de son mari, aussitôt que son fils
serait m ajeur; et elle renvoya le partage des biens à
faire à cette époque, jusqu’à laquelle elle s'engagea
à payer 5 00 francs par an à sa fille.
Malgré cette convention, les sieur et dame Sersiron,
commençant à être tracassiers, avant d’y être autorisés,
firent assigner la dame Dargnat en qualité de tutrice
de son fils, pour venir à partage de la succession de
leur père, et de celle de la dame M agnol, sans pré
jud ice, disent-ils , à toute demande en reddition de
compte de tutelle.
L a dame Boniol répondit à cette demande par des
défenses, du 14 juillet 1 7 7 7 , i.° qu’elle était préma
turée quant au partage des biens patrimoniaux, d’après
les conventions du contrat de mariage de 1 7 7 2 , jus
qu’à la majorité de son fils; 2.0 que le mobilier de la
�(
6
)
tante avait été partagé après son décès, et que la dame
Sersiron a eu sa portion
consistant en un quart ;
3.° qu’elle offrait le partage des immeubles de cette
dernière succession.
Ces défenses arrêtèrent l’empressement de la dame
Sersiron ; elle vit qu’il fallait attendre la majorité de
son frè r e , et en effet elle cessa jusqu’alors ses pour
suites.
de 17 77 n ’ avait pas été faite seulement
au nom des sieur et dame Sersiron ; ils l ’avaient in
L a demande
tentée aussi au nom de Marie-Françoise B o n io l, qui
avait épousé le sieur Peyronet. Mais soit que ce fut
à rinsu de la,dame P ey ro n et, soit q u e lle se reprochât
cette hostilité envers sa m ère, elle ne voulut pas prêter
son nom à une nouvelle demande.
r lies sieur et dame Sersiron assignèrent donc seuls
le sieur Antoine B on io l, par exploit du 26 août 1 7 8 3 ,
pour venir à partage de la succession du père com m un,
et de celle de la dame M ag n ol leur lante. L e sieur
Boniol donna de simples défenses de style, auxquelles
on répondit par de longues répliques, qui n’éclaircissaienl rien ; le sieur Sersiron, pour abréger, forma une
demande additionnelle, pour obtenir une provision de
3ooo fr. , quoiqu’il fût régulièrement payé de 5 oo fr.
On y défendit comme à une chicane , en disant qu'une
provision n’est due qu’à celui qui ne touche rien ;
au surplus il ne paraît pas qu'il y eût de difïicullés éle
vées sur le fonds du partage.
La dame veuve Boniol décéda le 21 septembre 1784.
�(
7
)
Il n’y avait pins de prétextes de retarder le partage;
en conséquence, les trois co-héritiers se rapprochèrent
pour convenir de leurs droits respectifs.
Apres avoir vérifié la valeur des biens, chacun sut
bientôt à quoi s’en tenir; mais là comme par-tout les
sieur et dame Sersiron furent les plus difficiles; les con
seils de leur pays ne leur parurent pas suffisans; ils v o u
lurent en référer à M .e L a p e y re , et le sieur Boniol se
fit un devoir d’adopter le choix de ce jurisconsulte.
On se rendit donc à R io m , où les traités furent rédigés.
L ’acte qui concerne la dame P eyron et contenait
une cession de droits, m oyennant 45,000 fr. ; et pour
la valeur de cette somme il lui fut délivré un domaine
évalué à 3 i,ooo fr. ; le surplus fut payable à termes
convenus. Cette cession fut faite sous seing privé le
9 octobre 1784.
Quant à la dame Sersiron , qui était encore en puis
sance maritale, et
h
qui le sieur Boniol était bien aise
de ne pas donner sa portion en a r g e n t , il lui fut d é
laissé trois domaines pour sa portion des biens pater
nels , et 6000 fr. pour sa dot maternelle. C ’est cet
acte que les sieur et dame Sersiron savent perdu, et
dont la perte est le seul m otif du procès actuel.
Tant que le sieur Boniol a vécu , les sieur et dame
Sersiron n’ont pas m êm e conçu l ’idée de prétendre
que le procès n’élait pas entièrement terminé. On
s’élait quitté avec un acte : la dame Sersiron qui n'avait
porté à Riom que son exploit de 1 7 7 7 , parce qu’il
réglait ses demandes, en avait fait remise au sieur
�C8 )
Boniol com me pièce désormais inutile. Elle avait été
mise en possession des trois domaines à l’instant m êm e;
il lui restait à recevoir 6000 francs.
t Jusqu’alors les quittances données parle sieur Sersiron
n ’avaient aucune im p u tatio n /p arce qu’elles se rap
portaient au seul revenu de 5 oo fr. promis p a r le c o n 7
trat de mariage de 1 7 7 2 ; mais après
changent, et le slyle de ces quittances
dont on veut se prévaloir.; ; > .
Dans l ’intervalle de 1784 à 1788
fit en deux fo is , au sieur. Sersiron ,
1784 les sommes
éclaircit le doute
, le sieur Boniol
un paiement de
1200 fr. 3 mais par une confiance fort mal avisée, il
n'en prit point de quittance.
Lorsqu’il demanda cette quittance à son beau-frère,
il paraît que celui-ci disputa sur l’imputation d’une
somme de 436 francs, q u i, sans doute, était un reste
de la dernière année du revenu de 5 oo francs* On
n ’avait pas dans ce moment là le traité sous les y e u x ,
pour vé ri lier si celte somme de 436 francs y était
portée comme quittancée , par le moyen des autres
arrangemens, ou si elle y était portée comme restée
en débet. On imagine bien que le sieur Sersiron ne
manqua, pas de vouloir faire toutes ses protestations
sur cet article ; et comme il est écrit que les êtres les
plus disposés à la mauvaise f o i , s’y laissent souvent
prendre par les précautions même q u 'i ls ont cherché à
accumuler, il est résulté de cette première quittance la
révélation de ce que les sieur et dame Sersiron osent
nier aujourd’hui.
Je,
�G9 )
« J e , soussigné, reconnais avoir reçu dç M . Boniôl , mon
beau-irère, la somme de douze cents f r . , en, ¡deux p a iem e n s,
suivant les arrangemens p r i s entre nous^ ‘l ’un de 436 francs,
en 178 7, dont il "n’a pas de quittance, e t 'q u i doit être porté
sur le traité de A/.e L apey re; et l’autre paiement de 764 fr. ;
lesquelles deux somoles/font celle .de *1,200 fiv, dont quittance j
et dans le cas que la susdite somme de 436 fivsoit portée dans
le traité de
L a p ey re, sans .quittance, la présente quittance
ne vaudra que pour la somme de 76^ î r . , dont .quittance ».
« Fait ce 22 mai 1788. Signé Sersiron ».
«V
.*!•, . .
iv
'
-r-.-. ■ !
,
.
T
i':; À :. : ,r . ’ ■J'
■ •'
r X<e ;2.8 juin* de 1$ m ê m e gnn^e 1788,,. le sieur Ser
siron donna une autre quittance de 612 fr. Alors il
n ’y avait plu? de reserves a. faire 7 e;L le sieur Sersiron
$e: cfl^enta. .de dire ; ; % c u 6r2.fr; de mon,beau-frère,
à compte de ce q u il me doit pour^la Légitime de ma
fem m e
ir , -J
. Il a été donné quatre autres quittances au sieur B o .
*
../*
.j
n
&
Y
’
} f r
:f!
,
*
niol, l’une de 720 fr., le 24„octobrer 1788; la secotide
de 1,100 fr., le* 1-5 juillet; 1789; la troisième.de 760 f r . ,
le 29 septembre, 178 9; et la quatrième de 400 f r . , le
2 5 mai 179 1. Toutes sont dans les mêmes termes :
q u i l me d o it pour La Légitime de ma fem m ei ,
rOn a /trouvé par hasardjune lettre isolée de la dame
Sersiron, écrite en/l’an 2 a son^rère'; elle lui demande
.60 fr. ,tr em prunter, >ce q u ivne laisse pas douter que
toutes leurs araires d’intérêt ne fussent alors terminées.
. , L e sieur, Antoine Boniol est0 mort en l’an 8 , lais
sant deu* filles mi nègres qui furent mises sous la tutelle
d’ un étranger. Ce tuteur i i t émanciper, ses pupilles aus
sitôt qu’il le put.
?
3
�( IO )
Ces cliangemens donnèrent au sienr Sersiron quelque
espoir d’en tirer parti. D e fréquentes visites faites chez
ses nièces laissent beaucoup de soupçons.surleur motif,,
mais de ces soupçons qu’il faut taire quand on e n ,e s t
réduit,¡.à ne pas. pou voir!prouver ce qu’o n avancer*
Quoiqu’il en- 'soft du résultat de ces visiles*, le sieur
Sersiron les interrompit to u t-à -x ;o u p pour menacer
d ’une demande en partage. . . f ■
■ •
;
•l.es demoiselles Boniol semblaient avoir plus à craindre
u n e -recherche
de la part*de la famille Peyronet : car
F ran çoise’Boniol, qui avait traité avec A n toin e, était
décédée, laissant trois enfans; et ceux-ci auraient p u ,’
peut êtïè sans mauvaise foi, nier l’existence d’ un traité
qui n’était pas de leur fait. ' •
’
Ils furent les premiers auxquels on s’adressa : mais
les demoiselles Boniol ne trouvèrent avec eux que de
la loyauté et de la bonne foi.
Les enfans Peyronet avouèrent avoir t r o u v é , dans
les> papiers de leur m è r e , le traité sous seing p riv é ,
écrit sur un quarré de papier en 17 8 6 , et ils se firent
un devoir d’en offrir la ratification.
E n conséquence, et pour y donner une forme plus
régulière, il fut fait un nouvel acte le 6 germinal an 12,
par - devant notaire, contenant les conventions déjà
faites ; c'est-à-dire que le domaine donné à la veu ve
Peyronet pour 3 1,000 francs, fut mis à son lot ; on
vint à compte des paiemens fa its , dont deux étaient
de 1793 : les héritiers Boniol se reconnurent débiteurs
de 7>9°8 francs.
�( II
)
Les sieur et dame, Sersiron qui ont eu connaissance
de cet a c t e , disent, pour se soulager la conscience,
que les héritiers Peyronet n'ont traité qu’avec un sup
plément de lot , parce que c’est. en efFet le terme em
ployé par le notaire. Mais s’ils ne se plaisaient ■
pas à
tout dénaturer, ils verraient que le domaine seul étant,
considéré comme un lot, il était bien juste que ce lot
d'immeubles eût un supplément de 7,908 francs en
l ’an i 3 , puisqu’il en avait eu un de 14,000 fr. en 1784.
Quoiqu’il en soit, cette leçon de bonne'foi fut en
pure perte pour les sieur et dame Sersiron ; et tout fâchés
qu’ils étaient de perdre un auxiliaire qui aurait rendu
plus probable le défaut de partage, ils formèrent de
mande par citation du 10 vendémiaire an 1 4 , en reprise
dé l’exploit de 17 77 (quoiqu’ils en eussent remis l’ori
ginal depuis le traité); et ils.conclurent au partage des
deux successions d'Annet Boniol et de la veuve Magnoî ,
ppur être délaissé à la dame Sersiron uui tiers de. cha
cune dans les immeubles, et un quart dans le mobilier,
avec restitution de jouissances^/>wi\y Le m ariage de la
dame Sersiron, et intérêts depuis la demande de 1 7 7 7 .
f Le s premières, défenses données à cette demande
ne furent qu’une ébauche des.moyèns à faire valoir,
et dont on se lit réserve pour, l'a plaidoierie (a fin sans
doute d’attendre que le sieur Sersiron eût donné quel
ques explications de plus ) ; on se contenta de dire que
la demande
e n
partage était non recevable
,
qu’elle
était encore prescrile, puisqu’on la fondait sur un ex
ploit de 1777, qui n’existait pas, et que le sieur Ser~
4
�(12
)
siron ne représentait pas ; qu’elle était encore sans
intérêt, parce que la dame Sersiron avait reçu un do~
mairie de 1 5^ooo f r . , ce qui excédait de beaucoup le
quart
qui lui rev en a it, d’après le testament de 1754.
On voif que l’avoué chargé de rédiger ces défenses
ignorait la réception de deux autres domaines , et don
nait du large aux sieur et dame Sersiron , toujours prêts
à profiter des circonstances.
A u lieu de répondre par une écriture, ils se content
tèrent de signifier des conclusions,, où , n'avouant tout
juste que ce que les défenses les empêchaient de nier,
ils offrent de rapporter Le petit domaine dont iis sont a i
possession, ainsi que tout ce qu’ils peuvent avoir touché.
Ils ajoutèrent que°, d’après les termes du testament olo-<
graphe, il n’y avait eu legs, au profit d’Antoine Boniol,
que du quart des m e u b le s en sorte que les immeubles
devaient être partagés par égalité.
On voit déjà la perfidie de cette offre de rapporter Le
petit dom aine, puisqu’ils en ont eu trois 5 mais elle estbien plus grande encore dans ces mots dont Us sont
en possesion, lorsqu’on saura qu’ils avaient-déjà vendu1
un des trois domaines, en sorte que croyant tout cela
ignoré de leurs nièces , ils ne craignaient pas d’offrir
le petit domaine dont ils étaient en possession, parce
qu’ils avaient lu dans les défenses que l’avoué ne con
naissait qu’un petit domaine évalué par lurà i 5,ooofr.
A l’égard du testament, et pour comprendre la res
triction que les sieur et dame Sersiron voulaient y
fa ir e ; il faut savoir que ce testament portait legs, par
�( ï3 )
Annet Boniol à son fils à naître, du quart de ses biens;
'meubles et effets, le tout par préciput. Les sieur et dame
Sersiron jouant misérablement sur la virgule cjui vient
après le mot biens, et qu’ils supprimaient, prétendirent
que le testateur n’avait entendu léguer que ses biens
meubles.
Les héritiers Boniol répondirent que cette honteuse
équivoque s’évanouissait à la lecture du testament en
tier, parce que le testateur, revenant sur son inten
tio n , disait ailleurs léguer le quart en préciput à son
enfant mâle ; qu’en lin autre endroit , léguant à sa
femm e , dans les mêmes term es, la jouissance de ses
bien s, meubles et effets, il ajoutait à Pirislant le-m otif
qui l ’avait engagé à laisser à sa femme le revenu de
tous ses biens] et enfin les sieurs Boniol ajoutaient-que?
ces m o ts, le tout par préciput, montraient assez que
le mot biens avait un sens séparé du mot meubles, et
s’entendait de toute l'acception que la loi et les usages
donnent au mot biens.
Lorsque les héritiers Boniol virent que les sieur et
dame Sersiron affectaient d’éviter les explications sur
le passé, ils pensèrent qu’en les obligeant par les voies
légales, ils parviendraient h la découverte de la v é rité 5
ils demandèrent d o n c ‘ un interrogatoire sur faits et
articles, et 1’obtinrent.
Mais il fallait, suivant la l o i , signifier les questions
sur lesquelles les sieur et dame Sersiron devaient
être interrogés, et quoiqu’on ne doive pas douter de
la perfection des lois, il sera bien permis de penser
�( H )
au moins que deux personnes devant être interrogées
sur les mêmes faits , sont à-peu-près certaines d’être,
unif orm es, lorsqu’elles sont à portée de concerter leurs
réponses.
*
C ep en d a n t, et malgré la préparation qu’il est im
possible de ne pas supposer dans les réponses des sieur
et dame Sersiron, on va voir que le sieur Sersiron fut
au moment de révéler ce q u ’il avait pris tant de peine
à cacher.
Après que le sieur Sersiron eut fièrement répondu
à la première question qu'il n’y avait ja m a is eu de traité
contenant partage de la succession Boniol^ le magistrat
lui demanda si M .e L ap eyre n ’en avait pas été chargé.
Il répondit que M .6 Lapeyre n’avait été employé dans
cette a ffa ire, n i pour rédaction de tra ité, Ni AUTRE
MENT.
Viennent quelques autres questions auxquelles il n’y
avait qu’à répondre non pour être conséquent. Mais
ensuite le .magistrat représenta au sieur Sersiron la
quittance de 17 8 8 , dans laquelle il était question de
M .e Lapeyre, et il lui demanda comment ilse faisait qu’il
y eût parlé lui-mêm e d’un jurisconsulte absolument
étranger à cette affa ire, com m e il venait de le dire.
L e pas était glissant, et tout exercé qu’était le sieur
Sersiron, il fallait absolument cju’il revînt sur ses pas.
11 répondit donc qu’à la rcrité, M .e Lapeyre avait
été chargé de fa ir e un tra ité, mais que cet arrange
ment. n ’eut pas lieu ; que s’il avait mentionné ce traité
dans une quittan ce, c’était dans la supposition qu’il
aurait lieu.
�( i5 )
Quant à la délivrance des trois dom aines, et aux
sommes payées, le sieur Sersiron dit que le sieur Boniol.
ne lui avait donne ces domaines que comme provision,
et que les sommes reçues'concernaient la succession
maternelle.
,
L a dame Sersiron répondit comme son mari * mais
pour ne pas faillir, elle se fit la violence de parler
moins, et s’expliqua sur chaque article avec une briè
veté surprenante , toujours pour nier ; sauf qu’elle
ré p é ta , mot à m o t, que les trois domaines étaient
Une provision sur la succession paternelle, et les sommes
reçues en paiement de ses droits maternels.
• A u lieu de s’avouer vaincus par leurs contradic
tions et l’invraisemblance de leurs allégations, les sieur
et dame Sersiron crurent qu’il fallait faire bonne con
tenance, et être plus exigeans que jamais. En consé
quence , n’osant plus faire réduire le teslament au
quart des m eubles, ils n’abandonnèrent cette p r ê t e r
tion que pour en mettre au jour une n o u v e lle , plus
absurde encore.
. ,
Quoique le testament de 1754 eût éfé lu et coni^
menté par eu x, comme on vient de le vo ir, ils im a
ginèrent de dire brusquement que ce testament avait
été irrégulièrement déposé en 1767, et qu’ils n ’en re
connaissaient pas l'existence.
.
En conséquence, par de nouvelles conclusions du 2
août 1 8 1 0 , ils déclarèrent rétracter ce qu’ils avaient
'd é jà dit, et rectifier leurs demandes! Ils révoquèrent
donc l’ofire par eux faite d’allouer m ê m e -le quart
�c i 6 )
des ' meubles ; ils sommèrent les héritiers Boniol de
s’exp liqu er, e t ‘ déclarer positivemènt si ce testament
existe en original et en minute cke% le notaire, p o u r ,
en 'cas.de non - existence,»être redemandé le^part^ge.
de toute la succession par égalité. Ils demandèrent
enfin un compulsoire contre le notaire.
* ,
Les héritiers Boniol'qui avaient dans leurs mains ,
non-seulement une expéditiqn,, ayant ¡plus de 40 an£
de date, délivrée à leur grand’vmè;re ^jiiais encore une
autre: expédition que la 'dame P eyron el( leur,, avait
délivrée lors du partage de 1784, trouvèrent si bizarre
q u’on leur demandât sérieusement une explication sur
Inexistence ou non-existencô de la miniTte cl’un notaire,
q u ’ils ne crurent pas-nécessaire de répondre à, cette
chicane nouvelle;; ils sollicitèrent l’audience , ou la
cause fut soutenue avec chaleur par,les sieur et dame
Sersiron pendant plusieurs,séances.
août 1810/ifut rendu le jugement dé
finitif que les sieur et dame Sersiron se sont contenté
E n fi n, le 14
d en on cer comme proscrivant leurs demandes
mais
dont les héritiers Boniol ont le plus grand intérêt de
mettre les motifs sages et précis sous les y e u x ,de ,1a
Cour.
,
J
u g e m e n t
'
dont
j. ' *
est
a t t e l
.
- ^
« Attendu qu’il résulte, i-° de 1 énonciation ¡d’un
traité rédigé par M .c L a p e y r e , contenue dans la quit
tance du 22 mars 17883
« 2 ,®
�( *7 )
« 2.® D u délaissement de trois domaines, dépendant
de la succession à partager, fait aux sieur et dame
Sersiron ;
« 3.° D e 1 aliénation qu’ils ont faite d’un de ces trois
domaines ;
« Qu’il y eut en 1784 un premier partage, et que tout
porte à croire que ledit règlement était définitif« Attendu que les partages sont du nombre des
contrats qui se^ forment par le simple consentement
verb al, sans qu’il soit besoin pour leur validité qu’ils
soient revêtus de la solennité de l ’écriture;
« Attendu que les sieur et dame Sersiron étaient
majeurs en 178 4, lors du partage;
« Attendu que d’après l'art. 13 4 .d e l’ordonnance
de i 539, les majeurs n’ont que 10 ans pour se pour
voir contre les actes passés durant leur minorité;
. * Attendu que c'est en 1784 que les sieur et dame.
Sersiron ont fait ce règlement portant partage, et que
n’ayant formé leur demande en reprise d’instance pour
en venir à un nouveau partage, qu’en l ’an 14 , il s’est
écoulé un laps de tems de plus de 2 4 années;
c<Mais attendu que les parties se doivent un com pte,
tant sur le paiement des arrérages d’un revenu de
5oo francs promis à la dame Sersiron par son contrat
de mariage, jusqua l’évenement du partage, que sur
les paiemens faits sur la dot de 6,000francs, constituée
à ladite Sersiron, par la-dame Dargnat, sa m ère;
« L e tribunal déclare les sieur et dame Sersiron non
recevables dans
le u r
demande en reprise d’instance,
�( IB )
ainsi que dans celle qu’ils ont formée pour en venir à
un nouveau partage; ordonne que les parties se reti
reront par-devant M .c Chassagne, doyen des notaires
de cette com m une, que le tribunal nomme d’office
pour recevoir le compte que les parties se doivent,
tant sur les arrérages d’ un revenu de 5 oo francs porté
au contrat de mariage de la dame Sersiron, que sur
le paiement de la dot de 6,000 francs, qui lui a été
donnée par la dame D a r g n a t , sa m è r e 5
« Condamne les héritiers Boniol au quart des dé
pens; réserve un autre quart des dépens jusqu’après
la reddition de compte; et condamne les sieur et dame
Sersiron, en l’autre m oitié, ainsi qu’au coût, expédition
et signification du présent jugement».
T e l est le jugement que les sieur et dame Sersiron
n’ont pas craint d’attaquer comme injuste ; et persé
vérant dans leur esprit de ch ica n e, ils ont renouvelé
en la Cour la demande en compulsoire du testament
de 17^4, qu'ils avaient formée en désespoir de cause ;
comme s i, après 44 ans de délai, après la mort du
notaire, et peut-être de son successeur, le soin qu’on
avait eu de ses minutes pouvait être de quelque in
fluence dans cette cause, lorsque ce testament avait
été connu et discuté par ceux-la mêm e qui feignent
aujourd’hui de le méconnaître.
Non contens d'avoir m a n i f e s t é leur mauvaise foi
dans une série de conclusions toujours variables et con
tradictoires, les sieur el dame Sersiron ont cru devoir
�( i9 )
la rendre publique par la voie de l ’impression. Ils obli
gent donc leurs neveux à révéler par la même voie
des faits qu’ils eussent préféré ensevelir dans le secret
d’une plaidoirie. Mais puisque le gant en est jeté, les
héritiers Boniol ont dû se tenir en défense, et exposer
à la Cour tous les faits qui ont précédé le procès actuel,
pour ne lui laisser ignoreraucune des demandes et des
prétentions toujours croissantes de leurs adversaires :
car leur nombre et leur changement rapide n’est pas
du tout inutile à la conviction de leur mauvaise foi.
Suivant les sieuç et dame Sersiron dans leur mémoire,
rien ne prouve l'existence d’un partage, et ils s’opposent
absolument à ce que la preuve testimoniale en soit
ordonnée, d’ou ils concluent que leur action est fondée
malgré leur mise en possession séparée de trois do
maines, depuis 178 4, et l’abandon absolu du procès.
Après cela, et croyant avoir assez prouvé lè besoin
d’un nouveau partage, les sieur et dame Sersiron exa
minent quelles doivent en être les bases; ils attestent
que le notaire n’a pas trouvé la minuté du testament,
ni du dépôt, d ’où ils concluent qu’il faut tout par
tager par égalité. A l’égard de la succession de la
dame M agnol, dont le testament n ’e s t pas p e rd u ,
ils font une autre découverte : elle avait institué son
frère en 1747 >
en concluent qu’elle n'a pu
léguer un quart a son neveu.
'
Voilà en quoi consistent les moyens auxquels les
héritiers Boniol ont à répondre. Ils suivront pour cela
l ’ordre des questions présentées par leurs adversaires.
6
�(
2°
)
MOYENS.
§. I er
L a demande en partage est-elle recevable?
Il ne s’est pas écoulé 3 o ans, disent les sieur et dame
Sersiron 3 depuis le décès du sieur Annet Boniol, jus
qu'à la demande de 1777 et * 7 ^ 3 ; donc ^ y a lieu à
partage, parce que celle action dure 3 o ans.
Rien n’est plus incontestable que ce principe de
droit; chaque c o - h é r itie r a 3o ans pour demander
un partage,' c’est-à-dire, pour forcer ses co-hériliers
à lui abandonner sa portion des biens communs; et il
n ’est pas moins incontestable que de 1767 à 17 77 ou
178 3 , il n’y a pas 3 o ans.
Mais qu’ est-ce que cela p ro u ve , sinon qu’en 17 77
et 1783 la demande était recevable? S’ensuit-il néces
sairement qu'elle le soit encore aujourd’hui?
O u i, si les choses étaient en 18 11 au mêm e état
qu’en 1777. N o n , si le défendeur en partage a donné
ce qu'on lui demandait.
L a loi donne aussi 3 o ans à un associé pour ré
clamer sa portion de la société ; mais si, après l’avoir
dem andée, on prouve qu’il a été mis en possession de
sa part, si vingt-quatre ans de silence ont succédé à
cette mise en possession, cet associé sera-t-il admis à
recommencer contre la seconde génération le procès
�( 2 1 .)
qu’il a terminé avec la première? Il est impossible cle
le penser.
■ Quel- est le but d'une demande en partage , si ce
n ’est d’oblenir la mise en possession d’ un lot ou le dé
sistement d'une portion de la succession? Or, supposons
qu'un demandeur en désistement, qui était privé d e là
chose demandée, lorsqu’il a agi en justice pour obliger
son adversaire à;la lui livrer, se trouve ensuite nanti
.de ce qui était l’objet de,sa.réclamation ; pourra-t-il,
.après un long délai, reprendre un procès qu’il n’avait
intenté que pour obtenir, et qu'il a abandonné après
avoir obtenu?
•
i . ' •
'
- ,Cette prétention serait repoussée sans d o u te , parce
q u’elle serait de mauvaise: f o i , et parce que l ’action
serait éteinte par le paiement ou la délivrance de la
chose demandée. •
.\
\
•
Toutes les obligations/produisent une action.-Mais
avant de dire qu'elles sont éteintes p a rla prescription,
la lo L d it qu’elles’s'éteignent par le paiement.
~ L e co-héritier eh 'possession de toute la succession
commune contracte sans difficulté l’obligalion de rendre
la portion des autres. Sa gestion opère un quasi-con
t r a t , q u i, d'après la lo i„ a les mêmes effets qu'un en
gagement
qu il aurait signé ; mais si on l’attaque pour
se désister, et si, après avoir disputé quelque te m s ,
il se désiste, il est évident, que son obligation ne sub
siste plus; elle est éteinte par la remise ou paiement de
la chose demandée.
i
�( 22 )
Ainsi, bien loin que les exploits de 17 7 7 et de 1783
servent aux sieur et dame Sersiron, comme une dili
gence.interruptive de prescription, ils ne sont là que
.pour attester leur mauvaise foi , sans aucune autre
utilité pour eux.
■ Car, par cela seul qu’ils poursuivaient avec vigueur
en 1783 , par cela seul qu’ils montraient, par des con
clusions réitérées, leur empressement à finir ce procès^
ils ont prouvé par leur silence , survenu brusquement
et non interrom pu, depuis 1 7 8 4 , que le procès était
fini, et par conséquent que la demande a cessé d’exister.
M a is , disent-ils, j ’ai pu l ’interrompre sans l’aban
donner; à la vérité', ma demande n ra valu trois do
maines et 6000 fr. N ’importe, je suis le maître de don
ner à ce désistement une autre cause; et je dis que les
domaines ne sont qu’ une provision; en sorte qu’il faut
achever le partage, que cette-jouissance provisoire n ’a
fait que suspendre.
" S
'
L e sieur Boniol, il faut en convenir,, était un héritier
d ’une générosité bien rare. On lui demande, par une
requête du 26 août 178 3, une provision de trois mille
fra n cs seulement ; et après avoir mêm e disputé ces
3 ooo fr. en offrant le partage, il donne volontairement
trois dom aines, c ’est-à-dire plus de 40,000 fr. qu'on ne
lui demande pas. Cela serait admirable; mais l’habitude
du palais n ’accoutume pas à' voir les défendeurs offrir
douze fois ce qu'on leur a demandé.
11 faut cependant attacher une idée quelconque à
�c
2
3
}
cet abandon de trois demaines et à ce paiement d’ un
grand nombre de sommes, après la cessation absolue
du procès. O r, quelle autre idée y ajouter, si ce n’est
que le procès a été terminé , que l’obligation a été
éteinte par le paiement. Voilà une demande tendante
à obtenir des immeubles et de l’argent. L e défendeur
y adhère, et donne des immeubles et de l'argent; il
n 'y a donc plus d’action, et la meilleure preuve que le
demandeur se désiste de sa dem ande, c'est qu’il aban
donne pendant vingt-quatre ans un procès qu'il pour
suivait avec chaleur , c ’est qu’il remet l’original du
seul exploit qui lui fût utile, celui de 1 7 7 7 , qui con
tenait le règlement des conclusions, et l e - s e u l, par
conséquent , qu'il ait été nécessaire de porter à Riom
chez M .e L a p e y re , avec les deux testamens et l’in
ventaire. Cet exploit n ’a pas été perdu , comme on
voudrait le faire croire; il a dû être remis par les Ser
siron, comme la veuve Peyronel remit l’expédition du
testament de 1 7 5 4 , délivrée à elle, par cela seul qu’après
avoir traité elle1n’en avait plus besoin.
~ Que les sieur et dame Sersiron ne s'ingénient donc
plus à chercher des possibilités , et à dire qu’on a peutêtre retenu cet exploit dans les fréquentes com muni
cations de pièces, et qu’ils prennent garde au contraire
r
à ce que Ici Cour ne pense pas d’elle-m êm e, que par
un hasard dont ils ont p rofité, lorsque chacun reprit
ses papiers après le procès fin i, le sieur Boniol crut
etnporter-son double du traité , e t se trouva n’avoir
pris qu’ un exploit inutile. Ce n ’est encore là qu’une
�( 24 )
Vraisemblance ( i ) ; mais dé tous les soupçons que tai
sent les héritiers B ô n io l, celui-là leur serait le moins
pénible , parce que la perte de ce traité ne serait née
que du hasard.
< Quoi qu’il en soit de toutes ces conjectures, elles
n’ôtent rien ni n'ajoutent rien à la principale vérité
de cette cause, et au point capital duquel il ne faut
point s’écarter , c ’est q u ’il y a eu un procès pour ob
tenir un lot de succession, et que ce procès a été fini
aussitôt que le demandeur a obtenu’ ce lot. -j
Il y a donc;eu désistement de fait et’ de droit de la.
demande, puisqu’elle était âcquiescée, et l ’acquiescer
ment suivi d’exécution. Et qu’on ne dise pas qu’il faut
un jugem ent pour terminer un procès : la loi n’est pas
aussi exigeante ; elle se contente d’ un simple acte
d’avoué à a vo u é, même pour së désister de la demande
sans rien obtenir; cependant‘on sait combien un acte
pareil est sujet à s’égarer. L a loi ne parle pas de désiste-,
me nt ', pour le cas où le défendeur a adhéré à la demande ::
car le législateur ne voulant pas prescrire des.•.formes*
inutiles, n'a pas cru devoir s’occuper d’une espèce sem
blable , parce qu’elle se réduisait à un point de fait
^
I
:
.
- I
• ' *
( i ) Si cette vraisemblance où ces soupçons choquent la dame
Sersiron, q u ’elle explique comment elle se trouve nantie de
l'expédition du testament rdu s.r M n g n o l, du 10 décembre i y 35 ,
poiiqnt legs du quart à s a , f ç m m e lo r s q u ’à aucun titre , et dans
aucune circonstance la dame S e r s h o n n a dû avoir les papiers
de la dame M o g u o l, si le procès n était pas fini.
' qui
�( *5 )
qui rentrait dans.le domaine du juge, et dans Içs pré
somptions que la: loi lui abandonne absolument.
Nous voici arrivés a l’arlicle le plus incommode pour
les sieur,et; dame; Sersiroii. «Oppressés ¡sous le poids de
tant de circonstançes;;accumulées sachant bien que
c’est-là de Vévidence pour «tout ;lej m o n d e , mais que le
magistuatneipeut donner, à ce [qui n’esUpas écrit, que
le nom dejpïésprhpjions^ilpjspiix fort prononcés pour
em pêcher, autant qu’ils le pourront, l’examen de ces
ci ipo ns ta nces>) A u§si s]en tç>urç n t-ils,de tous 1es articles de
la loi qui pourraient donner à la Cour la tentation de
ne. pas trop réfléchir sur la réunion des présomptions,
qui, suivant;eux, n e rdoiyjent pas,dispenser d’ un écrit
formel; n Ii\,p
'V. ^ i r A'i
c I - r ; <\
îLa Cour, disent-ils , <n’a pas leîdrôit de se servir^ de
présomptions eh cette matière : car la loi ne les aban
d o n n e à ’sa ipriidencè qué dans'les;cas ou elle admet
les preuves testimoniales (Code civil, i 353 ). O r, con-ù n u eh t-ils} illn’ÿ a’pasliëu'à preuve* testimoniale dans
tout ce qui excède i 5 o francs : la loi a voulu en ce
.cas qu’il fût passé. u!n écrit ( 1 3 4 1 ) .
•
Voilà donc le palladium derrière lequel les sieur et
darnesSersirônYse ^ont retranchés, • le vïnciilum ju r is
'présentent à lia Cou^ ipour, qu'elle, se refuse à
l ’éviderjce par respect pour la loi.
•
;jMais|CQ9Cplosse 3) des pieds d’argile ; il est appuyé
q u ’i l s
sur une base qui n'est qu# s p é c ie u s e , i et-'que* la loi
•ëlle-mêmè'va détruireo u- ïiiinorr.i«-* >{ ,
' . 'Ii’ait. r
*.du Code(¡défend d’admettre la preuve
7
�(*6 )
des conventions excédant i 5o francs : mais Part. i 347
dit aussi que cette règle reçoit exception lorsqu’il y a
commencement de preuve par écrit.
E t qu’ést-cë qu’un commencement de> preuve par
écrit
? Lia
loi le définit elle-même.'*
ft
; ■
r
•
«■On appelle- ainsi tout ¡acte pàr ^crit>,i *émahé'de
c< celui contre iequel la demande est fo r m é e , ou de
« celui qu5il( représente > et qui rei^d vraisemblable lé
« fait'àirégüè. « '
. < . ; ç'i;. • >\,ç n t
INTy: a -t-il donc -pas’ commencement de preuve par
écrit, 'd’un partage,
* *«i’ ^ ’
.. ‘ ?? i
!
i.0
Dans l ’aveu du siëur Sersiron, qu’il a reçu trois
domaines e n ’ abandonnaht sa demande en 1784.;
■
2.° Dans les quittances réitérées , qu’il a données
11 compte de lai-légitime de sa-femme , lorsqu’à uparavant il les donnait sur le revenu .provisoire d e ‘5o o fr .;
*3 .0v Dans la quittaiice oii ilpaule du traité de. M.® L a "peÿré;
1 ** • >*
”
> •
=
■
■
v
i :. \ ■
4.° Dans feon interrogatoire, où il dit' que M .e L a
peyre-n'a jamais été’ chargé de cette affaire ? et où
il dit ensuite qu’il en à -été chargé pou r-faire un
traité.
• P " '*• ;
•»-
ci on 1;
•
Cliàcli il' dé ces *f a i t s 1émanés de celui iontre qui le
' f a it est àrlicuié, -nAèSt^il'pas seul suffi&antpour rendre
vraisemblable le fait*alléglté ’qu'il y'a'<eu un partage
après la deinande feii partage, et que^c^est'pour cela
Qu’e l l e ' p l u s été suivies’p * ^ fl * î;
«>n •.<.
L a preuve testimoniale est doncradmis‘s ibley‘et;mâiniènant Îoüiè-Pdbj^ctiOri loitabe-pc&ifî sijlai preuve est
�o; 27 j
admissible■,les-préjonïptijons restent abandonnées
h
la
prudence de là Cour ,<id’après l’art. 1 353 . ; r
O r, qui pourrait nier qu’il n’y ait ¡ci un tel concours
de présomptions que" la vérité peçce de. toutes parts?
Et véritablement ce serait douter de la justice que de
ne pas leur donner le caractère d ’une preuve matérielle.
Sôus F ordonnance de M o u l i n s q u i avait la mêm e
disposition que l’art. 1341 du C o d e, mais qui ne donf.
riait pas. la latitude de Tartv 1:347 , l e s auteurs sentaient;
la nécessité de. s'écarter de la; rigueur de cette loi,'dans
les. cas d'évidence où:il serait plus nuisible qu’utile de
l ’appliquer sans, discernement.
:.
Omrùif'. aLid probando genere ( dit ;Bjoic’eau ) fratldes
detegù dehere eocisUtno y ne lew ista 'quœ crimèn intendit
everbere,, 'permittere vidùatur j et itaeos su/rimo ju r e et
stricto. ejus obsèrvaiïotie major injuria, nascatun
- -.Aussi la j u ris p ru de nç a s’accor d a - t- elle uniformément
u.regarder lés préàomptions comme'des preuves, lors-!
qu'elles étaient assez fortes pour en tenir, lieu.
L a présomption de »droit, dit Dahiiy, chap. 7 , est
« u n e conjecture clans un,é affaire douteuse, qui résulte
dr des argument :dt des indices qu’on 'liré de certaines
«• icirconstanées.du faitiqui'^accompagnent pour l’ordi-*
cc naire
Naseeksc 'ex\ eb quod plerumque iia s oiea t ac
te ciderc, et ram contrà ».
, ’O r v on le.demande aux.sieur et dame Sersiron, n ’estil pas d’usage le plus fréquent qu’un défendeur ne dé
livre ce •q,u'6n lut a'demandé, que lorsqu’il e s td ’acôrd,
et que le réclamant consent â se désister de sa demande?
8
�(
2
8
X
......................................................................................
Voilà bien qaod plerumque accidit. Qu’ils disent encore'
s’ils ont vu souvent donnér trois domaines en provi-'
sion , et 6000 fr. d’argent , lorsque’ le demandeur se
contentait de 3 ooo fr. ; il faudra bien qu’ils reconnais
sent qu’un défendeur ne donne ce prodigieux excédant
c]ue p'our être quitte entièrement ; et làrdessusr il ne:
faut pas seulement dire raro contra, car on les défie
de citer un seul exem ple où. un défendeur ait donné
tout cela pour qu’onr continuât dé plaider1contre lui.*
« 'jJj'sl loi, continue D an ty , ’regarde les présomptions
« comme des té m o in s lo rs q u e la preuve'par témoins"
« ou celle par écrit viennent à manquer
>
• On peut suivre encore toutes les conditions que cet
auteur exige pour la concordance ‘des présomptions,
et leiir liaison entr’elles p t o u t cela est.^répété dans
l'art. 1 353 du C od e, et plus on réfléchira sur la liaison
des faits eritr’eux>depuis 1784,' jusqu’à la itiortM 'Antoine Boniol,; plus on sera pénétré de ^leur »parfaite
concordancè. ; ;oî :: : nrt : '¡'.-a!)
!i,oi
j Un autre fait étranger a u x ’ Sersiron s’y:<lie pour
achever de dissiper tous les* doutes. C ’est’dans le même
tems et poiir les^mêmes intérêts que lia veuve1Peyronet
traita. Elle avait même pluspa? demander : car elle
n ’avait reçu aucuns revenus depuis la 'mort, de son
p è re , jusqu’à 1784, tandis que la femme Sersiron avait
reçu 5 oo francs par an. L a veuve Peyronet r e ç o it ,
non par provision, mais par tous ses droits paternels,
maternels, et ceux de la tante, en capital et intérêts^
45,000 fr. L a dame Sersiron a reçu trois domaines
�( 29 )
qui valent plus de 40,000 francs, et 6,000 francs en
argent (n o n compris les 4 3 6 ) , et elle ose d ire , elle ^
ose faire plaider sans honte, qu’elle n’a reçu tout cela
que provisoirement, et sans entendre renoncer à son
action en partagé. L ’esprit se soulève d’indignation à
cette persévérance de mauvaise foi.
L e signe le plus infaillible que puissent en donner
les sieur et dame Sersiron, c’est l’effort qu’ils font pour
éviter tous les' éclàircissemens que la Cour voudrait
prendre.
■
'
\,
N ’ordonnez pas de preuve testimoniale, disent-ils,
la loi le défend.
N e jugez pas la cause par les présomptions, ajou
tent-ils, la loi le défend encore.
N ’ajoutez aucune foi à l’énonciation d’ un traité qui
se trouve dans la quittance de 1788 : car la loi ne
l ’admettrait, que si les termes du traité y étaient écrits:
non créditer referenti nisi constet de reiato.
Il n’ÿ avait plus qu’ un mot à ajouter, et ils lelaissent
entendre : n’ajoutez foi qu’à ce que nous disons, c ’est
le seul m oyen de nous rassurer; car si nous ne sommes
pas nos propres juges, toute recherche de la vérité
nous épouvanté.
11 est vraisemblable que la Cour ne. se laissera pas
toucher par des terreurs aussi intéressées. L e plus beau
ministère du juge est de démasquer la mauvaise fo i,
et de proscrire les procès qui lui doivent le jour; voilà
pourquoi la loi abandonne les présomptions à sa con
science et à son discernement.
.
�(
30)
Ici il n’y a pas seulement une présomption non éta
blie par la loi, comme celle indiquée en l ’art. i 353 du
Code , il y a présomption légale, J u r is et de ju re.
L'art. 888, conforme à l’opinion de M ornac, réputé
partage” tout acte qui a eu pour objet de fa ir e cesser,
C indivision entre co-héritiers.
.
Si de-là nous venons au Code , de J id e instrum ent
nous y lirons qu’un partage est un fait qui peut être
constaté sans écritures. Itzstrum entis etiam non interve*
n ien tib u s , semeL divisio recte fa c ta non habetur irrita .
( L . 9 .)
Il en est de m ê m e , à plus forte raison, si Pacte à
été dressé, et ne se trouve plus. A m is sis etiam ( instrumentis ) quœ intercesserant, non tolli substantiam
çeritatis'placuit. ( L. 10. ) I
- On ne manquera pas de répondre à ces textes que la
loi française ne les admet pas, puisqu’elle veut un écriit
pour les conventions excédant i 5 o fr.
Sans doute unei conventions à fu tu r a besoin d’être
écrite pour faire fo i, mais une convention exécutée en
a-t-elle eu besoin? Ce serait méconnaître la loi que
d’exagérer
ainsi.
O
v
Si j ’assigne quelqu’un pour me délaisser son c h am p ,
'que je dirai avoir a c h e té , je serai éconduit sans diffi
culté , parce que je devais prévoir qu’on pourrait re4 user la tradition. Mais si déjà j ’ai la maison, et que
l ’acquéreur ait reçu mon a r g e n t* et ne le désavoue
pas, alors le contrat do ut des est parfait ^ et la néces
sité d ’un acte s’évanouit.
�(
3
1
)
Mais si la Cour jugeait dans sa sagesse qu'il n’y a
pas ici de présomption légale> il y a au moins un con
cours de présomptions ordinaires, capable de prouver
l ’existence d un partage ; leur liaison et leur gravité
sont entraînantes.
.
, Un partage est demandé; on le refuse d ’abord jus
qu’à la majorité du fils; il y a reprise alors, et après
un court procès., il y a délaissement au x deux sœurs
d ’un lot égal.
Toutes deux accepten t, et le procès,s’arrête ; toutes
-deux sont en possession pendant vingt - quatre ans,,
sans rien demander au-delà ; l'une des sœurs avoue
le partage , l’autre le nie ; et précisément celle qui le
nie a vendu une portion de son lot.
Plusieurs sommes sont payées; les imputations chan
gent; on y relate un iraité ^ on y dit le nom du ré
dacteur de ce traité. Quand toutes les sommes sont
payées, l e sieur Sersiron écrit pour emprunter de L'ar
gent au sieur Boniol.
•,
L e sieur Boniol meurt sans qu’on songe à reprendre
un procès éteint j on va chez ses enfans, on vit f a - ♦
rnili.èrement avec e u x , on ne leur parle d ’aucun pro
cès à avoir,;, mais on s'instruit peu à peu de l ’état de
leurs..affaires ; on s'assure de leur ignorance absolue
du passé; alors on leur intente un procès; et combien
d ’asluce et de variation on met dans sa poursuite!
On dit d’abord qu’on n’a reçu qu’un domaine, jus- qu ’à c e 'q u e 'les mineurs^sachent^queJeur père en a
• ’ donné trois. On n ’avoue pas les sommes iç ç u e s , jus-
�(3 0
qu’à ce qu’ils aient retrouvé leurs quiltances. Quand
on est interrogé , on dit sur le même fait le blanc
et le noir. On bat encore la campagne sur le testament
de 1 7 5 4 ; et après l ’avoir discuté dans ses term es, on
en nie l ’existence; 011 ose encore-imprimer contre
une mère le soupçon d ’avoir fabriqué ce testament.
Ce n’est donc pas assez que les circonstances prouvent
le fait d’ un partage. L a mauvaise foi des adversaires
vient fortifier cette preuve : car si la Cour se décidait
à condamner des mineurs qui viennent franchement
exposer leur situation, ce ne serait qu’avec la convic
tion de la sincérité des demandeurs. Mais quelle con
fiance méritent ceux qui mentent ainsi sur plusieurs
articles. N e faut-il pas croire qu'ils mentent également
sur le point capital : semel m en d a x, semper m en d a x/
ce proverbe est rarement sans exactitude.
Cependant les sieur et dame Sersiron veulent se
donner un simulacre de sincérité. Si la quittance de
17 8 8 , disent-ils, parle du traité de M.* Lapeyre c’est
tom m e d’ un acte à f a ir e } et dans l ’incertitude s3il le
sera,
L a plus simple lecture d e ,c e tte pièce donne un
nouveau démenti à cette version : ( les'arrangemens
p r i s entre nous.......et dans le- ca s, y est-U d u , que
ladite
somme
de 436 fr. soit portée
d a n s le
tra ité
de M .e Lapeyre, sans quittance, la présente ne vaudra
que pout 7 6 4 fr a n c s ). Ces termes prouvent bien qu’on
parlait d’un traité déjà existant; car si alors il n ’eût pas
été
fait, comme on le dit dans l’interrogatoire; on avait
eu
�('3 3 ),
eu simplement le :p ro je t de jçharger :MV\ L a p e y r e d e -,
rédiger un traité; et si, par le fa it, on ne rav.ai^jjraii^is^
chargé de cette a f f a i r e , ril était inutile7 de! prévoir ce
qui serait ou neuserait pas dans<un aptp:¡noiljexistapt ;
il suffisait du siojple re^ù de i^^ppjfpy stfnsimpiitatipn ,
sauf à le rappeler,dañóle projetnd’jaçtei lorsqu’il s’agirait
de le signer. . . • •.•Ynu;',; oor^/ inoj ; [
M .e ;Lapeyre .est mort*? et les adversaires, ne crai
gnant . plus ses ^révélations Qse,fyt jinvoquer; le. té.moi>
i
gnàge de M;.ej Beaulaton ,- p/ir.ç^ ?que çla jquiUance i ne’
parlé ipáSe.dfc lux-i oi*ps'i<:í, oiíivíIücd n L /m'; ;-í: .tjsÍ oh
¿ 7 Mais; .qu’ils, prennent;’ garde. ! G e : respectable ; juris
consulte a su [aussi ceqili^s’estjpassç 5 ej|: quoique .Jetéms éfface, en général,ler;Sp,U;Veflir;.^
rentes , çm nei dput^ ,pas; qu’il
jsejjrappglle» très-bien
qu’il y a eu un traité. Lui-piême vint à Tracros^en 17 8 4 ,
¿ivec le sieur .Çhassaingj .çuré de-ServagnaL; Qeli^i-ci se
ï e t irá,}parce:q;uç;lp &fo§çr$iron, rp&rçti$ij: ,a^ejd^fenrce
•injiqrièiise icQntre îqu$ (j^ux^quii dÍRÍ$SLti$n;írijo^ pour
Tabréviation des dií&eulíé&w¿nais ;lev^ipiriç,' $ieur ç,uré
.' '
.
.
' 'c: ' '
de Servagnat,
vint
féliciter
O
* ensuite
—
\ la famille
' ' » ■' * sur ' Taccommodement dopt il,fu,t instruit.Xes dames P^yronet
et Sersiron se plaignaient(de,la/modicité ^e.lpujs lois;
et le sieur Peyronet, notaire à^Herment^leur répondit
qu’elles n’en auraient pas;eu autant en justice, et quo
.tout le bien n e rapportant pas 3,000 fr. de rente, on
leur avait beaucoup,trop donné.
...
. ,
v
Voilà ce que des renseignemens précis ont appris
aux héritiers Boniol; ils les prouveront si la Cour croit
5
�G 3 4 -))
cet fe^reurv^ nécessaire : ’et rie a ne p eu t em pêcher de
n j . l i n î f.-t'i; r t *, , > • i. j r 1:-Â ^ •*;
Jüéqti’ ifci tes héritiers»-Bbniolf n’ont pas même parlé
dii:;poiiit dé idftjit combattu ppr les adversaires, qui
prétëridènT 'qué leUr ^osseSsiori séparée de trois domaines
déplii> i ^8:4!]2riè! f^oiivte’ pais uiilpariageJ ,
Sans doute, la jouissance séparée pendant 10 ans n é
p rd u v ë ff>as dépLeiti d ro it iin* partage : cela est vrai.
- i {M àïâ Gèlë ne peut s’entendre ‘que de ceux - qui ont
jro üi 's’é|b'àréWërii? sütis ^pTbcèstét cdiiïme pari sufccessiort
de leur auteur. A u contraire, lorsque l ’un dès héritiers
é ta it d ’abord'én possession de; tout ^et qu’ ensuite après
tind^ dèm'aiïd&il àbândonrfe-à^on c o ^ h é iilie r un rlot
é g a l a i ;bë qü$ lui9éèrait-révénü^ !ilJÿ à rpréscmiptionide
partagé1/ ét lü jiï^tifee 3iè dôit' plus ordonner fce qué les
pattiés^elléé-rilênles !ô ïif ïé g ïé i l!V^
1 i: ’ r >n ' i; ;
«• Partage-pdiï 7Rou'sÎeâU“ Lacom be 3 doit êtref fait ÿ
ir- bien-rqii-oŸi ¿vt>*jélii; ¿épdré'meirt ^efa'dàtït fort iorigir1iéjufei' Sfeûfemèftff^éëir'énlongüô jduîssarice induit ;pârXiQèi^ f t i d ê è * é \ i ü k r ' é s > < p à r e x e m p l e , s ï
n’ c h a c u n 'a 'pà’s séd é séparém ent 'éga le*portion ,
’ou que^
t< n’ÿ ^jfehtfipi3à^gràndë •inégàlité;? : Pun - ait ¡fait la foi >,
« où rériciii^-déteiaratibn^é^km lot.
Partage; .sect.
« l ; ïeV n.'° :4 y èt ¿ect. llt ^ rii0 4 ».
Dèspéissës ét-Boeriufe insistent plus fortement encore
sur lës conséquences de cette jouissance séparée. Lebrun
donne pour exemple le cas où il y ju r a it eu iin »projet
de partage écrit ; après lequel chacun S& serait mis en
pos^ësfcîon. * ^
0
�<
35)
* Ainsiile? principe général :n"a» lieu, q u e , dans les cas
ordinaires d’ une¡po^se^siqn séparée, sans apparence de
partage y e.t5$v.fcCou-iaqri^égalij jê q^i i|iit ¡présumer^au
contraire
& p^s ;^ q ,[
VJOn \u .
• 'I c i; il .est) notoire-que res t^Qi^j dona.aiji^s val^i^nt plus
que ¡la portion spaternelle d e }a dàfine ;Sersir.on,;.§fi 1784;
et on voit que,la quiMange,,âé,i)7$8; ^quiya^Là la m en
tion postérieure ,/üd.i»i^?.paij‘k&ii$luiepj& chaîne:.une
ratificationoécrite .du ! p^iHflge, 0b luod n "inoy % °
L e point 1derdroit discuté pa;r les £iet}rfjet,daüie, Ser
si ron 7 loiriide le u rê tre favo rable, npifait donc qu’ajou*er<a.ux auires[pr.ésomptiops ac.çumu 1é es :; .qui ne lais^
sent raucuii doute 'sur la fin de, j&oh-rèeeYoirj de-leur
demande en noiivea à partage^ rrin -^j r y i W : 3 0 it*-:,- r\
Cii
:• *!>: . i[) r>ï .
i
:b
i
ci l:/j N? .§. ' . L L - i
K 'u V I r '
*;,
•v-c. 7 :
.. iic. , ./:r' -r
r n v'\X2ommentïie fe fa it. Le partagé?. ; ;i
"VI
11c~*
o i .'i ; t -
uir. ?.-M
h. 3- c
- Il est ¡visible que cette (qàestion nîest traitée par les
héritiers B o n io l, que pour ne pas laisseroç.roir;e ;iaux
,rê vèriesodtes ;sieur e t , dam e sSersiron, ’ iqAii' &<pjit.der jtt a u'vaise*formai\tousries'.points, avi*-,« *\uA ? ,»v\; Ç|U
Car^Vdès.queU’èxîstencertrun Cpactage .'est-(prouvée,
jîli efltiin-U'tilè deVsavpir; jcom.ment ah faut en «faire .un
‘auilte.’ALà cloi ne' xlo'nnai’tVqu^VidîXbaris p,our-,revenir:,
s'il y savait.'lésion'*/ icinilTiniyi a: eubaucunej 4 ésjpn:; et
¿tflieu’idd dix ians'v o h ren a laissé Jécoùler ¡Yingt-quatre.
A u reste, et comme les s.r et dame Sersiron veulent
�-
, ( .'3 6 }
apitoyer sur leur' sort * ils disent qu’il! leur revenait
plus qu’on ne leur a donné. Cette chicane a un autre
motif'^lus astucieux!; ils veulent grossir leur amende-r
ment pour éloigner la principale présomption d'ün par
tage ^parcé que si” le 'lo t qu’ils possèdent était’ Beau
coup !m 5 ins considérable que leur amendement réel}
la Cour-rie Croirait-pas qu’ils ont entendu partager définitivenfièàt ;; ët voilà leur espérance.t i -ji- ;
Pour venir à .bout de cette* démonstration, ’ils atta
quent *lés deux îéStamens de 175 4 et de! 1768;:
Quant auMéstament ide 1768 , ib.est.’d’un' même
itttéirêt pour Jâ^ntestationi; car »outre que les biens de
lâ’ tantene consistaient q u a u :quart de ceux de son marr,
la dameSersiron n’y amenderait d'après elle-même que
le tiers des sept huitièmes de ce quart : ainsi il suffit de
s’occuper de l’objet m ajeur/.qui est le testament du
père, fait en 1764.
Y
Après avôir nié ;sans pudeur l ’existence d’un partage
exécuté 24 ans, les sieur et dame Sersiron nient l'exis
tence d’uh'U‘e stament!?q u ^ otit connu et* .approuvé
pè&datit 4'oians;i
on
^
c
l.
Y* 'i ^ oi '• ,.t
-1 'Onodit^qu’ilspl’ont conriu- et,approuvé ; et en effet y
on lit, clans leur propre coritratcde m a ria g e., que la
,dame B on io l, m è r e , y énonce Le testam entilolographe
-d^Aiinet B o n io l\ d u 2.i:m ars 1 7 6 4 9,déposé a u x m in u tes
A ley ra ti n o ta ire cu G ia ty su iv a n t llàcte d u
3roj ù ï n . 17.64 ;
'donc' les^siôur et^dame*» Sersirlôni savaient en: 177 2 <Jue
•ce'testam'ênt existait et on ne leur^en cachait pas le
-lieu de dépôt.-^ tinn-b io *.? i-'A
�( 3? )
A la v é r ité , commetils le disent i r e s - b i e n , on ne
leur montra pas la minute de ce testament, parce que
sans doute l'usage n’était pas alors de montrer les mi
nutes, plutôt que les expéditions aux demoiselles qui
se mariaient : mais ce qui était d’ usage alors, c’est qu'il
fallait attaquer dans les 10 ans les approbations qu’on
avait données. Or, 40 ans(se sont passés sans attaquer
ce testament ainsi approuvé.
;
1,
L e notaire Alleyrat était vivant en 1 7 7 2 ; ils pou
vaient demander à voir sa minute ; ils le pouvaient
-encore en 1777? lorsqu’ils formèrent leur d em an d e,
lorsqu’ils élevèrent des doutes sur la ¡validité des leo-s.
et que M. Chabrol fut consulté sur Le vu du testament,
le 6 mars 1777.
'
-,
. Il y a 25 ou 3 o ans que le notaire Alleyrat est mort,
après avoir délivré une première expédition à la dame
B o n io l, une seconde à la dame P e y r o n e t , et • sans
•doute line troisième à la dame Sersiron qui n’en con
viendra pas, parce qu’elle nie tout,* mais qui ne fera
croire à personne qu’elle seule n’ait pas voulu en avoir
u n e, lorsque précisément elle seule a élevé des con.r
testations sur ce testament.
!
Nous avons déjà dit, que d’abord la dame Sersiion
avait conclu à ce que le teslament de 1754 ne valût
que pour le quart du mobilier , parce que cela résultait
.des ternies ds cc testament.
Après cet aveu formel de la par finie connaissance
d’ un acte déjà médité pour son intérêt , la dame Sersii’on revient sur ses pets au mois d ’août 18 10 , pour dire
�( 38 )
à ses neveux : «M ontrez moi ce testament : je soutiens
« qu'il n’existe pas ».
' Cependant il existe deux expéditions fort anciennes
de ce -testament ;le*iotaire qui les a délivrées est mort
il y a plus de 2 5 ans, et il est visible ^qu’elles sont an
térieures à 1777.
; .
C ’est un testament olographe, d i t - o n ; il ne vaut
que quand il est signé, et comment vo u le z-v o u s que
-la signature soit reconnue par nous, si nous neila voyons
pas.
Où est donc le besoin de «ce tte reconnaissance d'écri,ture pour un testament<dôntrl'auteur est mort il y a
f45 ans? ‘ '
' Ji
••’ ’ .
11 ne s’agit pas ici de l’adtigé non creditur referen ti 7
ni m êm e’ de celui In antiquis enunciatura probant.
;Car l’expédition originale existe; elle est prise sur l'acte
[m êm e; en conséquene elle fait pleine foi en justice.
I/a rl. i3 3 4 du Code civil porte : <r Les copies, lors« que le titre original subsiste , ne font foi que de ce
« qui est contenu au titre, dont-la représentation peut
* toujours être demandée
~
^ Lorsque le titre original n existe p lu s , les copies
a* font foi d’après les distinctions suivantes:
« i.° Les grosses ou premières expéditions fo n t la
« même f o i que Coriginal, etc. »
Ainsi la loi a prévu la perte des titres ; elle n’a pas
exigé qu'on prouverait com me nt il s'est perdu, ainsi
que le disent les adversaires ; lorsqu’il en existe des
expéditions originales , il suffit de les représenter.
�( 39 )
Outre celte preuve Légale, les héritiers Boniol rap
portent , i.° l’extrait du répertoire du notaire chargé
de ce testament; 2.0 le certificat du contrôleur qui en
a enregistré la minute; 3.° les quittances des legs par
ticuliers qui y sont contenus.
S’il faut, de la part d e la dame Sersiron, une recon
naissance de l’écriture de son père , elle la trouvera
dans son contrat de mariage et dans les actes de pro
cédure où elle a commenté et chicané tout à son aise
sur les expressions de ce testament.
L a dame Sersiron devait réfléchir à tout cela avant
d’insulter aux mânes de sa m è r e , jusqu’à l’accuser
d’avoir fabriqué un testament, et avant d’attaquer la
probité d’un notaire qu’elle flétrit aussi d ’un soupçon
de complicité. Mais plus une cause est déplorable ,
plus l ’intérêt suggère des moyens honteux aux plai
deurs qui, per f a s et n e fa s , voudraient réussir.
M ,e D E L A P C H I E R
ancien avocat.
M . e D E V È Z E , avoué- Licenc ié.
J
■
♦
A R I O M , de l’imprimerie du Palais, chez J.-C . S A L L E S .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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[Factum. Boniol, Jacquette-Gilberte. 1810?]
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An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Devèze
Subject
The topic of the resource
successions
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Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Dame Jacquette-Gilberte Boniol et le sieur Jean Bourdillon-Dugravier, son mari ; dame Marguerite Boniol et le sieur Charles Arragonès de Laval, son mari ; et demoiselle Marie Boniol, tous propriétaires, habitans de la ville de Clermont-Ferrand, intimés. Contre Dame Marie Boniol et le sieur Gilbert Sersiron, son mari, propriétaires habitans du lieu de Roure, paroisse de Saint-Pierre-le-Chastel, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1810
1754-Circa 1810
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
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Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
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39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0421
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
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Clermont-Ferrand (63113)
Saint-Pierre-le-Chastel (63385)
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�MEMOIRE
POUR
Joseph
A
D U B I N , P i e r r e M O U R G U Y E et G
a b rie lle
B A R E Y R I E , fem m e B A P T I S T A L , cu ltiv ateu rs,
habitant au village de M o n c e l, com m un e de SainteEulalie, appelans et défendeurs en p é rem p tio n ;
CONTRE
L e sieur A n d r é C A B A N E , se d isa n t ancien ferm ier
de La terre de S a in t-C h a m a n t, in tim é et dem andeur.
;
‘
7
'
L e sieur Cabane prend le prétexte d’ une pérem ption
pour poursuivre l’effet de plusieurs sentences féodales,
contre les appelans, qui cependant ont régulièrem ent
payé ce q u ’ils doivent eux-m êm es, mais que la pagésie
forcerait de p a ye r des sommes considérables p ou r les
cens de tout leur village.
i
�Ca )
L a révolution a éteint la pagésie et la féodalité; le
sieur Cabane l’avo u e : il avou e aussi qu’ une dem ande
en pérem ption d’appel a pour résultat d’obtenir la
confirmation de la sentence attaquée; d ’où il faudrait
conclure que si le législateur a annullé la sentence et
l ’appel , il s’ensuit nécessairement qu'il ne reste plus
de procès en pérem ption.
Mais ce n’est pas ainsi que raisonne le sieur Cabane.
Il dit que des sentences rendues au profit du seigneur
p e uven t n’être pas féodales ; que d’ailleurs il n’y a
procès que sur la pérem ption d ’ un a p p e l, ce qui est
un procès indépendant de l’appel ; d ’où il conclut que
la Cour doit juger la p é rem p tio n , sans s’inquiéter de
l’objet pour lequel on plaide.
V o ilà tout le systèm e que les appelans ont à co m
battre ; mais en prouvant q u ’il n ’y a ni pérem ption
de f a it , ni procès à ju g e r , ils se préserveront d’une
injustice criante qui aurait pour résultat de les forcer
à payer la dette d’a utrui, sans avoir aucun m o yen de
recouvrem ent.
FAITS.
L es agens du sieur de L ig n e ra c, seigneur de SaintCham ant et S a in t-M a rtin , formaient presque annuel
lem ent des demandes contre plusieurs censitaires, et
obtenaient sentences sur sentences.
Cette multitude de poursuites , gardées par devers
eux , n’est certainement pas une preuve de n on paiement. On sait que le moindre retard occasionnait
�(3)
des diligences, toujours en pagésie contre les prin
cipaux tenanciers, et toujours avec des réserves des
condamnalions précédentes.
L e 6 fevrier 1 7 6 4 , Gabriélle Berghaud et Louis
M o u rg u y e furent assignés à la requête du marquis de
L ig n e ra c, seigneur de S a in t-C h a m a n t, devant le juge
de Sain t-M artin , com m e tenanciers de tout ou partie
du village M o n c e l, pour payer audit seigneur trentehuit setiers seigle, trente setiers a vo in e , sept livres un
sou a r g e n t , e tc ., pour les cen s, rentes et droits sei
gneuriaux d u s a u d it seigneur, sur ledit v illa g e , par
reconnaissances solidaires, et c e , par chacune des trois
dernières années échu es, avec l ’intérêt : le sieur de
L ign erac termine par indiquer le paiem ent à faire
entre les mains du sieur C a b a n e, son ferm ier-g én éra l,
a vec réserve de tous autres dus, droits de lods, etc.
Sur cet ex p lo it, le juge du seigneur rendit une
sentence par défaut le 17 mars 1764. L e sieur Cabane
en rapporte une copie in fo rm e , et sans form e exécu
toire.
Aussitôt que les autres censitaires du village furent
informés de cette demande en pagésie qui allait re
tom ber sur e u x , ils s'en plaiguirent. O n voit par une
requête du 17 mai 1 7 6 6 , que les nom m és L a b ru n e ,
A lz ia c , Louis Berghaud et M e y lia c articulèrent avoir
p ayé exactement leurs cens au sieur Cabane , qui
endossait leurs paiemens sur les liéves sans donner de
quittances; ils dem an dèren t, en c o n s é q u e n c e , p e r-
�( 4 )
mission de l ’assigner pour vérifier le fait; et leur donner
quittance des sommes par lui reçues.
Le
juge donna
une simple ordonnance portant
permis d ’assigner; et ce qui ne sera pas vu sans éton
nem ent , le sieur Cabane interjeta ap p el, au parlem ent,
de cette ordonnance d u 'j u g e , qui permettait de l’as
signer pour déclarer ce q u ’il avait reçu. C e ne serait
donc pas lui qui aurait obtenu les sentences qu’il s’ad
juge aujourd’h ui? car a u r a it- il; osé étouffer la voix
de ceux q u ’il poursuivait indirectement en la personne
de leurs co-paginaires.
>
L e 18 janvier 1 7 6 8 , Louis Bareyrie et Louis M ôurg u y e furent assignés à la requête du seigneur, pour p a ye r
solidairement les dernières années des cens du village. L e
29-février 1 7 6 8 , le juge du seigneur rendit une autre
sentence par d é fa u t, q u i'a d ju g e lesdites conclusions.
Elle est dans la m êm e form e que la précédente.
Pendant que ces poursuites étaient dirigées à la re
quête du seigneur, contre B areyrie et M o u rg u y e , il
en existait d ’autres contre François
D aub in en vertu
j
de sentences obtenues contre lui en 17 5 9 et 1 7 6 1 ,
pour la m êm e pagésie. Ses meubles et ses bestiaux
furent exécutés le 14 mars 1 7 7 1 , avec dép lacem en t,
toujours à la requête du seigneur.
L e 4 mars 1 7 7 4 , Louis M o u rg u ye et ledit Joseph
Daubin furent assignés en pagésie pour payer les trois
dernières années du ténem eut , toujours à la requête
du seigneur, et ils y furent condam nés par d é fa u t, par
sentence du 27 août 1774»
�l 5)
Ils ont été encore assignés en 177 8 e t 1 178 1 , et
condam nés par sentences des
19
décem bre
177 8
et 17 décem bre 178 1 5 toutes ces sentences sont sans
form e e x éc u to ire; la dernière seu le-est signée du
-greffier, maïs en seconde expédition. Il paraît que
ces mêmes sentences furent successivement attaquées
par appel porté à Salers ; aucune des parties n ’a les
procédures qui y furent faites.
L e 2 n ovem bre 1 7 8 4 ,
'
,
4e sieur C a b a n e , en qualité
de ferm ier générai des terres- pour lors appartenantes
a u sieur de L ig n e r a c , fit • signifier les sentences de
1 7 6 8 , 1 7 7 4 , 1 7 7 8 et 1 7 8 1 ’ à L ouis B a r e y r ie , Louis
M o u rg u y e et Joseph D a u b in , a vec som m ation de les
e x é c u te r, et assignation en liquidation des grains.
'
C e u x -c i1notifièrent au sieur C a b a n e , par exploit du
1 7 novem bre 1 7 8 4 , qu'ils persistaient dans l’appel déjà
interjeté des deux premières sentences, et q u ’ils inter
jetaient appel des d eu x d ern ières, co m m e n u lle s, in
compétentes et attentatoires à l’autorité de la sénéchaus
sée d ’A u vergn e , saisie de la contestation ; en consé
q u en ce, ils assignèrent le sieur Cabane à y p r o c é d e r ,
com m e se d isa n t ancien ferm ier et aux droits du sieur
de L ig n e r a c , tant pour lui que pour ledit s e ig n e u r ,
dont il prenait le f a i t et cause.
L e sieur Cabane se présenta, sur cet a p p e l, le 10
février 1 7 8 6 ; il dit que sa présentation ne fut suivie
d’aucunes autres procédures.
L e 1 3 août 1 7 8 8 , il demanda la pérem ption de
T a p p e l, et obtint sentence par d é fa u t, le 14 juillet
�(,6)
1 7 8 9 , qui prononça ladite pérem ption; le 4 août 17 8 9 ;
les B areyrie en interjetèrent appel simple au parlement.
O n ignore s’il fut pris des lettres de re lief sur cet appel,
et si le parlement fut saisi. L a révolution a d évoré
ou paralysé tout ce .q u i tenait aux matières féodales,
et il n'est pas surprenant , ni que la trace de ce qui
a pu exister soit ¿perdu, ni que toutes les parties aient
gardé le silence depuis 1 7 8 9 .
... :
..
L es lois de.r.793 ayant ;cc>ndamné aux flammes les
titres et sentences qui porteraient signe de féodalité
ou qui la renseigneraient, certainem ent le s.r Cabane
a dû s’y - c o n fo r m e r , ely.vpilà pourquoi il n ’a plus les
expéditions exécutoires des sentences du sieur de L i gnerac ; voilà ,pourquoi ne . réclam ant r ie n , pendant
vingt an s, contre des censitaires-qui avaient payé leur
item ré g u liè re m e n t, et qui ne devaient plus payer la
portion des autres, tous les d ocum ens, toutes les traces
de leurs procédures se sont perdues en presque totalité;
et aujourd’hui on veut qu’ils en soient victimes.
L e sieur Cabane s’est souvenu en 1809 de l ’appel
de 1 7 8 9 , et il a pensé que s'il pouvait l ’attaquer par la
pérem ption , il obtiendrait par cette voie indirecte une
confirmation de se n te n c e / q u e la C our ne pourrait pas
prononcer directement.
En con séquen ce, par exploit du 22 février 1 8 0 9 ,
le sieur C abane a assigné en la C our d’appel Joseph
D a u b in , et Louis M o u rgu ye ( d é c é d é p o u r voir dé
clarer l’appel simple-, du 4 !aout 1 7 8 9 , n u i, périmé et
com m e non a v e n u , et voir ordonney l ’exécution de
la sentence attaquée.
�(7 )
P ar autre exploit du 1 3 juillet 1 8 0 9 , il a'assign é
M o u rg u y e fils , et Gabriellë B a r e y r ie , fille de L o u i s ,
pour voir déclarer.le m êm e appel de 1 7 8 9 , pêri> désert
et n u l y v oir en conséquence ordonner ¡’exécution de
la sentence attaquée.
1: L es parties en sont venues à l ’audience de la C o u r ,
le 10 mars 18 10 ; .les appelans ont soutenu q u ’ un
appel sim p le, et non suivi d'ajo urn em en t, ne pouvait
pas tom ber en pérem ption , et que la désertion ne
pouvait jamais avoir lie u , sans que l'appelant eût droit
de ren o u veler son appel.
; L a Cour n ’a pas débouté expressém ent le s.r Cabane
de ses demandes en pérem ption et désertion , mais
elle a ordonné que les parties mettraient leur procé
dure en état* sur l ’appel du 4 août 1 7 8 9 , et a remis
la cause d'un m o is , pour y . statuer.
L e sieur C a b a n e , en notifiant cet arrêt, le 22 m a i,
a u x appelans ¡( les a assignés co m m e cor-debiteurs so
lid a ir e s , pour .lui voiii a d ju g e r 'le s conclusions prises
par lesi deux exploits,de 18 0 9 , ¡et ew tout cas, pour
procéder sur 1’appel >de 1789 7 et vo ir prononcer le
bien -ju gé de la senlence du 14 juillet 1789.
..
Ces
conclusions prouvent que. le s,r C aban e n ’ab an
donne pas sa prétention de faire, déclarer cet appel
péri et désert. C epen dan t, quoique, l ’arrêt de la C ou r
jie soit,pas m o tiv é , et ne statue pas expressément sur
ses premières conclusions, il est évident que la C o u r
n'a pas entendu
les
adopter,; ni m êm e les laisser re*
�(8 )
p ro d u ire; eau elle n ’aurait pas ordonné, de «faire une
procédure sur un appel périm é ou désert.
\ Mais puisque le sieur Cabane ne veu t pas se,croire
ju g é sur ce point, les appelans le prendront au.m ot*
pou r dem ander eux - m êm es un 'arrêt»¡positif sur sesf
dem andés.ën pérem ption et désertion y qui étaient la
seule chose à ju g e r , f a u f à lui à recom m encer toute
procédure nouvelle qu’il avisera.
•
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M O Y E N S .'. •
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Il né p e u t y . avoir lieu à pérem ption pour un appel
simple : car l ’ordonnance de Roussillon ne fait périm er
que yles \ in sta n ces} et un appel 'simple n ’en est- p a s'
une , dès; q u ’aucun juge n ’e n est saisie T e lle a été sud
ce point la jurisprudence constante.*
*
r
■ : .
n ¿.
.
- *■
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.
. "il. !
.
Quant à.'la désertion , elle n'est point opposée à.
D a u b in y assigné par le premier, exploit du n février
18 0 9 , qui rie contient aucunes conclusions à cet égard;
I l suffit donc d ’y répondre au nom des M o u rg u y e et
B areyrie.
11
■
> ; {-W
'
- D ’abord la désertion est incom patible a vec la p é
rem p tion ; car si un appel pouvait périmer^ il ne serait
pas désert. L e sieur C abane devait d ’abord conclure à
la désertion, qui était la prem ière fin de non-recevoir
à opposer dans Tordre de la procédure; il a dem andé
que Fappel fû t déclaré péri et désert. A i n s i , en s’oc
cupant
�( 9 )
■
cnpant de la p é rem p tio n , il a renoncé à la désertion;
de m em e que s il eût conclu au bien jugé et à la p é
rem p tio n , il aurait renoncé à la pérem ption : à plus
forte îaison faut —il lui dire qu ayan t assigné D aubin
et M o u r g a y e p è r e , en février 1 8 0 9 , sans parler de
désertion, il n ’a pu y conclure contre M o u r g u y e fils
par un exploit postérieur.
L a désertion, au reste, n’est plus prononcée par les
tribunaux depuis 1790 ; lorsque des tribunaux
ont
vo u lu renouveler cet ancien u sag e, la C our de cas
sation n ’a point approuvé leurs décisions, et cela par
un m o tif bien sage et bien simple.
C ’est q u ’avant la révolu tio n , la jurisprudence gé nérale était d’accorder trente ans pour interjeter appel,
en sorte que la désertion prononcée ne produisait que
des effets frustratoires , puisqu’elle n’ em pêchait pas
de refaire l ’appel : aussi plusieurs parlemens avaien t
l ’ usage de converir en anticipation les demandes en
désertion q u i , dès-lors, se réduisaient à des dép en s,
com m e le dit B r o d e a u , lettre P , n.° 14.
Mais depuis que les appels sont limités à un délai
plus c o u r t , c ’e st-à -d ire , à trois mois et à dix ans, la
désertion a paru un abus à r é f o r m e r , puisqu’on ne
peut pas la faire m arch er avec le droit de recom m en cer
un appel pendant trente ans. V o ilà pourquoi la dé
sertion est absolum ent to m b ée en désuétude : on en
est convaincu par le grand nom bre d arrêts qui se
trouvent aux Bulletins de cassation de Fan 7 , de l ’an 9,
de l’an 10 et de l ’an 11. Par-tout on voit les désertions
3
�( IO )
proscrites; et nulle part on ne voit q u ’il en ait été
toléré une s e u l e , m êm e par simple rejet.
Il y a donc lieu , en statuant sur les demandes du
sieur C a b a n e , de le 'd é b o u te r de ses conclusions en
pérem ption et désertion. O r , on le répète , c’était là
l ’objet unique de ses conclusions avant l’arrêt du. 10
mars 1 8 1 0 ; et il ne peut pas les confondre avec le
bien jugé de la sentence de 1 7 8 9 , puisqu’au lieu de
se départir de sa’ prem ière d em a n d e, qui y était en
core plus in com p atib le, il la renouvelle et y persiste.
«
C ep en d an t, si la C o u r croyait devoir statuer sur.les
nouvelles conclusions du si’e ur C abane , il s’agira de
savoir au fo n d ;s’il ,a p u reprendre une procédure de
pérem ption en m atière fé o d a le , au préjudice des lois
qui ont éteint'tous les ptocès y relatifs; et subsictfairement,- s’il y a pérem ption.
.
, . . ?.
- A bordons , ^dès à’ présent , le subsidiaire, qui sera
plus briévem ’eiU e x p é d ié , et disons qu'il n ’y a pas de
pérem ption.
’
*
'J
»I
,
il-
r
*
l
*
L îappielportéén la séfléchauss<$6 d ’A u v e rg n ç , était un
•appel'¡d'incompétence. On soutenait que l$s premiers
appels ay a ni saisi la séuéchapsséë', le ç.r Cabane n ’avait
revenir devant le juge du seigneur poui* dem ander une
-pagésie;en vertu de reconnaissances de cens soumises
ou juge supérieur.' En effet, la sénéchaussée seule é tci.it
'Compétente p o u r accorder ou refuser les arrérages de
ces mêmes c e n s , échus pendant le p ro cès; il fallait
�(II )'
y conclure devant e l l e , et. non saisir un juge déjà
dépouillé, pour multiplier les sentences et les appels.
Cet appel d incom pétence n’était pas susceptible de
péremption , 'suivant l’opinion »des auteurs, conform e
au texte m êm e de la loi.
Rousseau -X a c o m b e ., ; v.° péremption , n.°* 1 2 , dit
q u ’ elle n’a pas lieu è's-causes o u :procès du d o m ain e,
n i ès-appeLs ci’incom pétence, parce que cela regarde; Le
droit pubLic. n ,
'
■
’
“ C ette décision est'co n fo rm e à la loi Prpperandum
d’où est tirée l’ordonnance de Roussillon. Censemus
itaque omnes Lites non ultra triennii meta s , post Litem
contestatam , esse protrahendas. {ecccëptis tantum modor
causis quœ a d \ ju s JiscàLe pertin en t, v'eL quœ a d p u bLicas respiciunt fun ctiones).
r
• , - j :;
N ’y a u r a i t - i l pas en effet un in con vénient graye .
que le silence d ’ une p artie, souvent occasionné par la
difficulté de réunir des co-intéressés, ou par des .pour
parlers d ’arrangem ens, pû t donner la force de choseju gée à des sentences rendues par des personnes sans
ca ractère, et peut-être quelquefois dans dés matières
où il serait choquant que ces sentences ne fussent pas
réform ées?
^
!
C ertes, les juridictions sont de droit p u b lic, cela est
incontestable ; et s il est encore incontestable q u ’ une
partie ne peut déroger au droit public par une co n
vention
particulière, com m ent le p o u rra it-e lle par
son silence ? - C ’est donc une monstruosité que la loi
a voulu prévoir et éviter, en disant que la pérem ption
4
�( 12)
n ’ aurait pas lieu pour ce qui tient au droit p u b lic, aux
fonctions p u b liq u e s; en un m o t , à l’ordre des juri
dictions.
Mais quand la pérem ption eû t pu exister ic i avant
1 7 8 9 , il est impossible d ’adopter que la procédure y
relative ait seule resté debout , quand l ’appel et les
sentences sont anéantis co m m e chose féodale.
A cela le sieur Cabane, objecte, i.° q u ’il ne s^agit
pas de féodalité , parce quë c ’est uu ferm ier qui est
créancier, et que la suppression n ’atteint pas les fer
miers 5 2.0 que quand l ’objet du procès serait féod al, )
il n’est question que de juger s’il y a pérem ption ; ce
qui est une procédure indépendante.
R épondons d’abord que le sieur C abane se dit fer- >
m ie r, sans l’établir par des b a u x de ferm e. Il a pris,
celte qualité dans une signification .des senten ces, en
1 7 8 4 , et l’appel lui en a é té : notifié, co m m e se disant*
ferm ier et aucc droits du sieur de Lig n erac,
>
Q uo iq u’il en ' s o i t , com m ent l’objet du procès ne
serait-ii pas fé o d a l, lorsqu’il s'agit de cens demandés
à trois censitaires, par le seigneur, et en celte qualité,^
pour la totalité de la redevance assise sur un iénem ent.
A la v é r i t é , il y a des cas où les fermiers ne sont*
pas atteints par la suppression féo d a le, mais c ’est quand
ils se sont procuré un titre personnel, em portant no
vation.
-i
•Une lettre du com ité de législation, écrite au tri-,
bun al du district de R io m , le 9 prairial an
a décidé
q u ’ une rente constituée au profit d ’un fermier,, en 1 7 3 0 ,
�(.
13
)
devait être p a y é e , quoiqu’elle dérivât d’arrérages de
cens. U n e lettre du ministre de la ju s tic e , écrite au
commissaire du d irectoire, à P a u , le 22 pluviôse an 7 ÿ
décide de la m êm e m an ière,
pour une obligation /
consentie à un f e r m ie r , pour cens. R ien n ’est plus
légal que ces décisions, puisque Le ferm ier était censé
avoir touché ce q ui lu i était d u , et l ’avoir échangé
contre une obligation q u i, par cette fic tio n , rentre'
d a n s la classe des autres obligations, 'M ais cette r é
flexion du ministre prouve par e lle -m ê m e que le fer
m ier n’aurait pas été exem p t de la suppression, s’il
n ’y avait pas eu engagem ent personnel h son p r o fit,
dont refiait 'avait été de dénaturer Corigine fé o d a le ,
e t évid em m en t le titre ne cessait d’être féodal que
par novation.
L a n ovatio n , en effet, peut seule em pêch er de re
garder com m e féodal ce que la loi déclare tel. N ovatio
est p rio n s d e b itiin aluum debitum tra n sf usio
p erim a tv r.
ut prior
Si donc la prem ière dette est étein te , il
n ’en reste q u ’ une entré de simples particuliers, et la
féodalité est évanouie. M a i s , hors ce cas dirim ant, la
règle générale reste; et il est aisé de m ontrer que les
fermiérs ne sont pas à l’abri des suppressions féodales.
L a loi du 2 5 août 1792 , supprim e tous les droits
féodaux. L ’art. 10 porte que les arrérages; m êm e ce u x
dus en vertu de ju g e m e n s , ne sont pas exigibles; l’art.
12 éteint tous les procès relatifs aux droits féodaux.
On a quelquefois argumenté de Fart. i 3 , qui c o n
serve au x fermiers les« actions qui leur sont réservées
�( H )
par Fart. 3 j de la loi du i 5 mars 1 7 9 0 , de se faire
restituer, les sommes payées aux seigneurs, pour les
droits é c h u s , depuis Le 4 août 1789.
f M ais en lisant cette loi de 1 7 9 0 , on rem arque qu’ elle
est relative aux droits de bannalité et de justice, sup
primés le 4 août 178 9 ; fil y est dit que les b au x sont
résiliés depuis la suppréssion > et que si les fermiers ont
p a y é au seigneur.des pots de v i n , ils les répéteront au’
prorata de la non jouissance.
,
, , '
?
U n e dernière loi du 28 nivôse an 2 , a déclaré ne
pas com prendre dans l ’annullation des procès féo d a u x ,
ceux intentés, i.° p ar:des vassaux ou censitaires, pour
restitution des droits exigés'd’e u x ; 2.0 par des ci^deyant
ferm iers, pour, restitution des pots dé vin qu'ils .ont
avan cés, ou des fermages qu’ils ont payés .à raison des
droits qui leur étaient afferm és, et dont ils n’o n t pu
jo u ir...
' ;< 'j fu!-;- b u>* p,i -■
■
; (!
;.r . h -h w )' 1 .•*> .
A in s i, bien loin q u ’il résulte de ¡’ensemble des lois une
exception pour les fermiers 9 et un droit subsistant en
leur fa v e u r, contre Les censitaires, il faut en conclure,
au contraire^ que la loi ne s’est occupée d ’eux pendant
trois.fois>, que. rpour leur donner une action contre L&
seigneur, seulement y--et■
■
que , par conséquent , elle les
a laissés pour tout; le reste dans la règle générale de
la suppression,
à
moins? q u ’ils
n ’e u s s e n t,
com m e on
l'a diéjà dit ,. un titre nouvel et. personnel: . \ t
1 .>
C.e,'»point de droit se co n firm e quand* oit suit les lois
postérieure^ C elle !du 1.7rjuillet 179.3, en ordonnant
le brûlem ent de tous les titres i é o d a u x , y assujétit
�( ,i 5 )
tous les dépositaires defcdits titres f et:déclare qu3e.lle;y
com prend t o u s ju g em en s 'et a r r ê ts,qui porteraient re
connaissance des d ro its. féodaux , pu qui les rensei
gneraient. Ixes registres et cueillerets*sont désignés en
core pour le brûlement. Or, tout le. m o n d e se rappelle
que les ^fermiers furent les 'prem iersià brûler leurs re
gistres ' de recettes,
‘
•; :
\] •. î :
...s.
U n e autre p reu ve que la lo i r i exceptait personne,
•c ’ est qu’il fallut une exception -expresse^le <9 .frimair.e
an 2 y par esprit d ’équité en Sayem idhsoco-déàitéùns
jqui avaient p a yé la part de leurs- co>-.obligés: en
v e r tu d e1 la pagésie; et e n c o r e , ce- droit ne fut ouvert
q u ’ à celui qui p rouverait a vo ir.payé par autorité de,
\ ju s tic e . e i i t
: donc iin ferm ier ¿,aurait.-iL iun'>pri
v i l è g e , --sous p rétex te q u ’i l a '-payé son- ferm age (m ais
volon tairem en t), lorsque le co-débiteur poursuivi ^ mais
non c o n d a m n é , n ’aurait pas d’action en pareil cas, et
■¿supporterait la suppression.rx
;
P eu t-être bie h. élira it-o n ;pu^ accorder ce,, privilège
;à un fe rm ier, dans un tems où la jurisprudence exa
minait la vraie quaLité du: d e m a n d e u r , “ pour savoir
•s’il était seigneur ou non ; ca r'lo rsq u 'o n adm ettait le
-propriétaire lu i-m êm e à dem ander un cens sous p r é
t e x t e que l-abolition: n ’était p ro n o n c é e que contre Les
seigneurs , il était très-co n séq u en t que les ferm iers
réussissent par le m êm e motif.
Mais aucun; tribunal ne reviendrait à cette jurispru
dence, depuis l ’avis du conseil d ’é t a t , du
3 o pluviôse
�(
)
an i- r , et sur-tout depuis les décrets im périaux des i 3
messidor an i
3 , et 2 5 avril 1807, portant que Lorsque
Le titre ne présente aucune a m big u ité, ceLui auquel ce
titre est opposé, ne peut pas être a dm is a soutenir q u i l
n avait pas de seigneurie.
r
'
L e sieur C abane ne se dissimule pas que ces décrets
le condam nent visiblement ; mais il croit y échapper,
en disant qu'il y a chose jugée par les sentences qu’il
produit. C'est une double e r r e u r; car, i.° c'est dé
cider la question par la question e lle - m ê m e , puisqu’il
-y a appel de ces sentences , et que la pérem ption
q u ’il demande est* dirigée contre cet appel; 2.0 il crée
' une autre exception im a g in a ire , puisque quatre lois
successives ont annulié positivem ent le s ju g e m e n s et
arrêts portant condam nation de droits fé o d a u x , ce qui
p r o u v e que la chose jugée n ’est pas pour elle un titre
meilleur.
:
’
t
R em arquons encore , quoique ce soit sans une grande
u t ilit é , que ces 'sentences sont rendues au p r o fit d u
sieur de L ig n e r a c , seigneur, pour les cens de sa terre;
à la vérité , on voit à la fin du dispositif, que ce
seigneur indique le sieur Cabane com m e devant r e
cevo ir le paiem ent des condamnations : mais quel tour
de force ne faudrait-il pas pour profiter de ce bout
d’oreille, afin de changer le rôle des parties et effacer
les qualités du dem an deur! Cette argutie mesquine
peut-elle être proposée sérieusem ent, et ne serait-elle
pas indigne de la C o u r?
Il
�( i 7 J
I l suffit , sans d o u t e , de rem arq uer que it seigneur
seul est en qualité dans les sentences. Elles em portent
donc tout le privilège du cens.
Enfin, que le sieur Cabane réponde h cette question:
Si les censitaires avaient fait débouter Le dem andeur de
sa d e m a n d e, contre qui auraient-ils eu action pour les
dépens ?
Concluons d o n c, sur cette prem ière partie d e s .p r é
tentions du sieur C a b a n e , que l’objet des sentences
q u ’il poursuit est f é o d a l , et que rien ne peut les faire
excep ter de la suppression.
V o y o n s actuellem ent co m m en t une pérem ption
aurait le privilège inoui de neutraliser toutes, les lois
féodales, et de ressusciter, pour le sieur C aban e seul,
un genre d’action abandonné par tout le m onde et
par lu i- m ê m e , depuis la ré v o lu tio n , lorsqu’il s’est agi
purem ent de cens.
,
Retenons bien que la loi a supprimé non-seulement
les droits f é o d a u x , mais encore tous Les procès y r e
latifs.
A p rès les lois des 2.5 août 1 7 9 2 , et 17 juillet 1 7 9 3 ,
qui portaient expressément cette suppression, il paraît
q u e , sous divers prétextes, des poursuites eurent lieu
de la part de quelques ferm iers, et que des censitaires
eux-m êm es voulurent faire prononcer par les tribunaux
q u ’ils ne devaient rien. Alors une loi du 9 brum aire
an 2, déclara de nouveau nuls et com m e non aven u s,
tous jugernens sur les procès intentés a raison des droits
féodaux ou censuels, ensemble les poursuites fa ite s en
5.
�( i8 )
exécution desdits ju g e m e n s , ordonna que les frais pos
térieurs aux lois d'abolition seraient à la charge des
avoués qui les auraient fa ils , et défendit au x ju g e s ,
à peine de fo rfa itu re , de prononcer sur les instances
indécises.
T rès-c erta in em en t, après cette lo i, le sieur C abane
ne se serait pas cru fondé à poursuivre les censitaires
de Sain t-C h am ant ; et il a bien prouvé ^ par le f a it,
q u ’il partageait sur ce point l'opinion générale. C o m
m en t donc aurait-il aujourd’hui un droit qu’il n’avait
pas alors, et en quoi les lois seraient-elles devenues
plus indulgentes sur la féodalité ?
J a m a is , au co n tra ire , elles n ’ont été moins équi
voques depuis que les décrets im périaux ont prescrit
de ne pas considérer si te dem andeur est seig n eu r,
mais seulement si Le titre de sa dem ande est féodal :
car s’il n ’y a pas d’am biguité sur le t i t r e , il y a sup
pression.
E q u ivo q u eraît-o n encore sur cette ambiguïté , en di
sant q u ’un ferm ier peut poursuivre ? M ais a vec ce
cercle vicieux où a r r iv e r a it-o n , si ce n ’est à jugèr
de la féodalité par La personne du créancier? et c ’est
ce que la loi proscrit absolument. Sa sévérité est te lle ,
q u ’il n ’y a pas seulement suppression par le signe féo
dal, mais encore par le mélange de féodalité.
D ès q u ’il y a dans les titres opposés par le sieur C a
b a n e , signe ou m élange de
féodalité,
il ne reste à e n 1
tirer que deux conséquences incontestables;
i.° Si les sentences sont féodales, la loi les a déclarées
�( 19 )
nulles et co m m e non a ven u e s, y eût-il arrêt ou choseju g é e ( L o i , 17 juillet 1 7 9 3 , art.
3 , 6 et 8 .) ;
2,° L annullation ne se borne pas au x sentences et
arrêts ; elle s étend aux poursuites postérieures ( L o i*
9 brum aire an 2 , art. i . er).
A in si, toute procédure tendant à rappeler ou faire
rev iv re ce que la loi a a b o li, est rép rou vée et inadmis
sible.
D ’après de telles lo is, u’ est-ce donc pas une p u é
rilité que de dire à une C ou r souveraine : Vou s n ’aurez
pas à juger l ’appel cPune sentence féo d a le • vous aurez
seulement à juger la péremption de l ’ appel d ’une sen
tence f é o d a le ?
A b u s des mots et pure cacophonie.
Quand il existe un ap p el, l ’intim é n'est pas réduit à
tin seul m o y e n de défense; il peut l’ attaquer par des
vices de f o r m e , des fins de n o n - r e c e v o ir , ou la p é
rem ption : tout cela est égal aux y e u x de la lo i; tout
cela rentre dans les exceptions du défendeur.
L e résultat uniform e de ces exceptions est d ’a rriver
a la confirm ation de la sentence attaquée par un appel j
o r , ce résultat est le but du procès : in oninibus respice
J în e m .
I l n’est donc pas permis de croire que la C o u r veuille
ju ger un fragment de procès sans regarder à son ori
gine et à ses conséquences.
U n e pérem ption d ’ailleurs est si peu un procès nou
veau, q u ’elle ne s’introduit pas par un exploit à domi
cile, et en i . re instance. L'usage a toujours été d e c o n -
�( 20 )
d u r e par r e q u ê t e , quand il n ’y a pas de décès survenu ;
et le code a c tu e l, article 4 0 0 , en fait un devoir. L e
sieur C ab a n e a lui-mêm e constaté cet usage, en signi
fiant sa dem ande en p é re m p tio n , par requête signi
fiée à procureur le 12 août 1788.
Il a don c/lui-m êm e considéré la pérem ption com m e
un m o yen de procès.
11 l’a proposée co m m e un e exception.
I l a condamné son propre système.
M ais quand on serait privé de le citer lui-m êm e pour
pro u ver qu’ une pérem ption d ’appel n'est pas un procès
nouveau et indépendant , la raison seule dirait que
quand le fonds du procès est a b o l i , il n'est pas plus
perm is de plaider pour la pérem ption que pour la
prescription.
,
f>
L a féodalité n ’est pas la seule matière abolie par la
révolution ; et il est sans exem ple que des procès re
v iven t sous prétexte de savoir s’ils sont périmés. N e
trouverait - 011 pas ridicule , par e x e m p le , que par
suite d’ un procès en m atière b én éficiale, un d é v o lu taire qui aurait obtenu un bénéfice co n teslé, vînt re
prendre d evant les tribunaux actuels la pérem ption
d ’ un appel y rela tif?
L a loi n’a permis q u ’en un seul cas de plaider sur
les matières supprimées 5 c ’est dans les retraits lignagers , et seulem ent pour les dépens. L à on pourrait re
prendre une dem ande en péremption ; mais l'exception
confirme la règle , q u i de uno d i c i t , de altero negat.
,Au d em eu ra n t, l ’idée conçue par le sieur C a b a n e,
�( 21 )
cPisoler une pérem p tio n , n ’est q u ’ un piège contre des
censitaires qui ne doivent r i e n , et qui seraient plus
victimes de la suppression de la féod a lité, que si la fé o
dalité existait encore.
E n effet, un arrêt de pérem ption emporterait de plein
droit la confirmation de cinq sentences féodales.
L es censitaires n ’auraient aucune voie pour en em
p êch er l ’exécution. L ’accès aux tribunaux leur serait
ferm é ; tous les degrés de juridiction seraient épuisés,
et le prem ier juge ne pourrait réform er une décision
ém anée de lui. L e sieur C abane ferait donc ex écu te r
sans obstacle des sentences dont l’arrêt aurait prononcé
im plicitem ent la confirmation : car quel juge pourrait
arrêter des poursuites faites par suite d ’un arrêt de la
C o u r?
Ces poursuites forceraient les appelans à payer la
dette d 'a u tr u i, sans m oyen s de répétition. O n dit la
dette d ’a u tru i, c a r , encore une fois., les censitaires,
poursuivis par le sieur C a b a n e , ont p a y é régulièrem ent
leu r portion des cens.
Ils prouvent par les quittances de cens à eux données
chaque année par les préposés du seigneur, sur un cahier
particulier, savoir 7par le sieur C a b a n e , j usques et compris
1 7 8 ° ; p a r le sieur L a d e n , depuis 1780 jusqu’à 1 7 8 6 ;
et enfin par le sieur C o u d e r t , pour les années posté
rieures.
Ainsi ce n’est que par la force de la solidarité et de
la pagésie que le sieur Cabane veut faire p ayer aux
D a u b in , M o u rgu ye et B are yrie ce q u ’ils 11e doivent pas»
4,
6
�( 22 )
Mais une loi du 20 août 1792 a supprim é la soli
darité; c’ est donc pour l ’éluder qu’il veu t se prévaloir
de sentences qui com prenn en t le cens de tou t un
ténemerit.
Si la solidarité existait encore . l'action serait re
poussée par l’exception cedendarum a ction u m .L e sieur
C aban e ne pourrait se faire: p a y e r , qu'en subrogeant
à ses action s, pour être t rem boursé du c o - d é b i t e u r
solidaire. ( C o d e civil, art. 20 37.)
O r , co m m en t pourrait - il subroger à une action
é te in te ? com m en t serait-il en état de justifier ce q ue
doivent les Ço-débiteurs? co m m en t et par quelle v o ie
les forcerait-on de p ayer une portion de cens in con n u e?
Ces difficultés ach èven t de m ontrer q u ’il est toujours
im prudent d'éluder les l o is , m êm e les plus sévères.
C hacun en profite dans ce q u ’elles ont d ’a van tageu x
pour lui ; et souvent hors de là , les taxe d ’injustice.
A u reste, il ne s'agit pas de montrer que la dem ande
du sieur Cabane causerait aux appelans un tort consi
dérable : il suffit d ’avoir prouvé q u ’elle tend à la v io
lation de la lo i, et ce serait s'aveugler v o lo n ta irem en t,
que d’hésiter à s’en dire convaincu.
M . e D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M . e G A R R O N , Licencié-avoué.
A RIO M , de l'Imprimerie du Palais, chez J.-C. SA LLE S.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Daubin, Joseph. 1810?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Garron
Subject
The topic of the resource
cens
contentieux post-révolutionnaires
Description
An account of the resource
Mémoire Pour Joseph Daubin, Pierre Mourguye et Gabrielle Bareyrie, femme Baptistal, cultivateurs, habitant au village de Moncel, commune de Sainte-Eulalie, appelans et défendeurs en péremption; Contre Le sieur André Cabane, se disant ancien fermier de la terre de Saint-Chamant, intimé et demandeur.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1810
1764-Circa 1810
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0420
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0625
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53804/BCU_Factums_M0420.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Sainet-Eulalie (15186)
Saint-Chamant (15176)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cens
contentieux post-révolutionnaires
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53803/BCU_Factums_M0419.pdf
96ad767d43a4f4ec02b0e429940109ba
PDF Text
Text
\
/
MÉMOIRE
EN RÉPO N SE .
�COUR
I M PÉ R I AL E
MÉ MOI R E
D E RIOM.
EN R É P O N S E ,
POUR
-
...
I re. CHAMBRE.
Audience
.
2- juillet
D am e J e a n n e -M a rie D E C H A M P F L O U R ,
v e u v e d u sieur
de ontr o z i e r sieur J e a n - B â p t i s t e D E C H A M P F L O U R ; dam e M a r i è A n n e- F é l i c i t é D E
F R E D E F O N T , et sieur J e a n J a c q u e s D E
R O C H E T T E , son m a r i ; d e m o ise lle G a Br i e l l e D U R A N D D E P E R I G N A T , et dame
M a r ie D U R A N D , religieuse; tous habitans
P a u l-F ra nçois
M
de la ville de Glermont Ferrand, intimés
'
.
CONTRE
Dame A n n e - E m il ie . D E F E L I X veuve de
sieur C l a u d e - F r a n ç o i s - L é o n
propriétaire à Collongues, arrondissement d’Aix,
département des Bouches-du-Rhône, appelante ;
y
d e
en
PRE
S im ia n e
i
s e n c e
De dame MARGUERITE D E C H A R D O N , veuve
du sieur J a c q u e s - F r a n ç o is de M o n t a n i e r ;
C l a u d e - A n t o in e - J oseph D E C H A R
D O N ; demoiselle A nne D E C H A R D O N
18 io.
�(4)
dame P e k r e t t e D E C H A R D O N , veuve du
sieur V a l l e t t e d e R o c h e v e r t ; tous proprié~
taires7 habitans de la ville de Riom, intimés;
ET
EN
PRÉSENCE
De J ac ques - M a r ie L A V I G N E , et J e a n
P I R E L , habitans de la ville d’Ambert, aussi
intimés.
Q U E S T IO N S .
i°. L es religieux q u i, -par Veffet rétroactif de la loi
du
brumaire an 2 , ont obtenu un droit successif de
la nation représentant un émigré, ont-ils été soumis ci
rendre cette succession après le rapport de cet effet
rétroactif, lorsque les héritiers rétablis se sont trouvés
représentés par la république, comme émigrés ?
2.0. L a nation 7 dans ce cas particulier, ri1est-elle pas
censée avoir renoncé à toute recherche, et rCavoir point
voulu user du bénéfice des lois des 9fru ctid o r an 3 r et
3 vendémiaire an 4?
3°. L e sénatus-consulte du 6 flo r éa l an 10 r ia - t - il
rendu aux émigrés am nistiésy ou à leurs héritiers3 que
les biens qui se trouvoient dans les mains de la nation7
p a r la voie du séquestre y au moment de Pamnistie?
5
E s questions sont exactement les m em es q u e celles
1
p i’éseutécs p a r 'la dam e clc Sijuiauc» Il faut, y ajouter
�( 5 )
qu’elle se dit créancière du sieur Hector de SimiaiieJ
mort émigré , et que c’est en cette qualité qu’exerçant
les droits de la république, elle veut faire aujourd’hui
ce qu’elle prétend que la république auroit d û ju ire après
le 9 fructidor an 3 , c’est-à-dire, ôter aux héritiers d’une
religieuse ce qui lüi a été abandonné nationalement, dont
elle a joui dix ans et jusqu’à sa mort. Cette prétention
est si bizarre, qu’il faut être surpris de la voir élever
sérieusement, après tant de lois faites pour-rassurer les
possesseurs des biens transmis y à quelque titre que ce
soit, par la république.
-
• H' J >!) *111:
F A I T S .
:
,
ci
i.:
:
•
La dame Anne D elaire, épouse de M. de Clary , est
décédée le 27 octobre 1791.
Elle avoit institué pour .héritiers, par un testament de
17 8 7 , M . Hector de Simiane, son cousin paternel, et
M . de Chardon, son cousin maternél, à la charge,d’ac
quitter pour 240000 francs de legs.
Hector de Simiane, domicilié à A vign on , étoit sorti
de France à l’époque des troubles du Comtpt. Mais n’y
a y a n t
encore aucunes lois contre les ém igrés, il paroîfc
que M . de Simiane se présenta pour recueillir la suc
cession de Clary; mais en 1792 il fut inscrit sur la liste des
émigrés, et le séquestre fut mis sur ses biens.
Jusqu’au 28 mars 1793? ce séquestre n’étoit qu’une
occupation des biens. Mais la loi du^8 juillet 1793 bannit
à perpétuité les émigrés, et les déclara morts civilement,
Madame de Clary ayoit une sœur religieuse (Jeanne
�5
(-6 )
) : la loi du brumaire an 2 Tappela à succéder,'
puisque madame de Clary étoit morte après le 14 juillet
1789.^11 conséquence j Jeanne de Clary obtint à son profit
la mainlevée du séquestre, fut-déclarée héritière de sa'
sœur, et envoyée ëii possession de tous les biens, par un
arrêté du S nivôfce an 2.
= >* •
c
La loi du 9 fructidor an 3 abolit l’effet rétroactif de
la loi du 17 nivôse. E n vertu de ce changement de légis
lation, on dit que M . de Chardon reprit les biens maternels
de madame de Glary, qui~lui étoient légués par le tes
tament de 1787.
Si le sieur de Simiane eût été régnicole à cette époque,
il n’est pas douteux qu’il n’eût eu aussi le droit de re
prendre les biens paternels dans les mains de Jeanne
Delaire.
• Mais il étoit toujours suu la liste des émigrés *,
' Il étoit mort sans postérité avant la loi du 9 fructidor,
à A sti, et en état d’émigration;
■ Pur conséquent il ne luissoit à ses héritiers que les
biens dont il étoit propriétaire à l’époque de son ’décès.,
c’est-à-dire, le 12 prairial an 3.
C ’est ainsi que la famille elle-même l’entendît'‘à’ cette
époque-, et une circonstance assez singulière va le prouver.
* M . de Simiane mouroit sans enfans : il laissoit deux
héritiers ab intestat ,* l’un étoit le sieur Vidaud de la
T o u r , et l’autre étoit Jeanne D eîaire elle-même.
L e sieur Vidaud de la T o u r avoit seul qualité pour
disputer à la religieuse Delaire la propriété des biens
Glary, et pour prétendre qu ils etoient dans la mnssc de
la succession de Simiane.
Delaîre
�x i y
Bien loin dfen/agiu aipsi, M . Vidaud de la T o u rse
réunit à Jcanne Delaiye pour demander au directoire
executif la. radiation de M . de Simiane , et l’envoi en
possession de ses biens propres situés à: Avignon.
En effet;,/ils obtinrent; une radiation le 28 nivôse an 5.
. Alors, ils prirent la* qualité d’héritiers bénéficiaires de
M. de Simiane; et. en vertu d’un jugement du tribunal
de Vaucluse, du 24 thermidor an , ils firent commettre
•le» sieur Ghambaud, notaire à Avignon^, pour faire l’in
ventaire du mobilier de, la succession.
Il ne vint pas, même à' la pensée du sieur Vidéïud de
la T o u r (seul intéressé, on le rép ète,) de faire com
prendre dans ce mobilier de la succession Simiane
aucuue portion de la succession de madame de Glarjr,
L ’arrêté de radiation n’avoit été qu’une indulgence
éphémère due aux circonstances. Les lois de l’an 3 sur
les émigrés avoient fait des exceptions pour les émigrés
d’A vign o n , et la journée du 18 fructidor an
ramena
les mesures générales de 1793. En conséquence, une loi
du 22 nivôse, an 6 ordonna que les émigrés avignonnais
qui auroient obtenu des radiations par suite de la loi
du 9 fructidor an 3 , seroient réintégrés sur la liste.
L e séquestre fut donc remis sur les biens du sieur dq
Simiane, mais seulement à V aucluse, et il ne fut levé
qu’après l’amnistie générale, du 6 floréal* an 10.
A lors Jeanne Delaire se réunit encore au sieur Vidaud
de. la Tour;, son cohéritier.; ils obtinrent 1a. radiation du
défunt, le 26 frimaire an II*
Ils sollicitèrent l’envoi en possession des biens; et c’est
ici le cas de remarquer encore que M. Vidaud de la T our
5
5
�(8)
n’eut pas plus qu’en l’an n la pensée de se mettre en
possession des biens d’A u vergn e, qu’il ne fît de diligences
qu’à Vaucluse, et laissa la religieuse Delaire en pleine
possession des biens de sa sœur.
Il y a plus : car la religieuse Delaire vendit seule
tous les biens de sa sœur en l’àn 10 , après le sénatusconsulte , et le sieur Vidaud de la T o u r ne s’y opposa
'pas.
- Dans le même temps on cherchoit à empêcher la des
tination que M . le Préfet de Vaucluse vouloit faire d’un
domaine du sieur de Simiane pour une pépinière : le
sieur Vidaud de la T o u r réclamoit contre cette occupa
tion, conjointement avec Jeanne Delaire; et même après
la-mort de Jeanne Delaire il ne crut pas pouvoir vendre
ce domaine sans y appeler ses héritiers.
La dame Delaire, religieuse, est décédée le n messidor
an i i . Les familles de Chardon et Champflour se sont
partagé la succession comme héritières des deux lignes :
elles ont eu à défendre cette qualité dans deux procès ;
mais elles ont fait juger qu’elles étoient héritières, et
elles sont toujours restées en' possession.
La daine Félix de Simiane s’est elle-même adressée à
elles en cette qualité, le 8 février 1808, non pas pour
leur disputer les biens, ni former des demandes hypo
thécaires , mais seulement pour faire liquider à Avignon
ses reprises contre elles, comme héritières du sieur de
Simiane, par représentation de la religieuse Delaire.
Ce seroit peut-être une triche fort difficile pour la dame
Simiane de justifier ces reprises, ¡orsqu’ayant vécu à.
Asti- jusqu’à la mort de> son parent, elle s’est emparée de
tout
�(9)
tout son mobilier, de toutes les ressources qui les faisoient
exister l’un et l’autre hors de France. Et elle vient aujour
d’h u i, comme héritière de sa fille par les lois actuelles >
reclamer la succession de son fils et l’éffet d’un testament
qui a rendu ce dernier créancier, du chef de son père,
du sieur de Simiane, mort à Asti.
Quoi qu'il en soit de ce circuit de qualités, madame
de Simiane procédant comme héritière de sa fille, qui
l ’étoit de son frè re, s’est fait adjuger 296000 fr. pour des
terres vendues de l’estoc de la dame de Seveyrac, aïeule,
p o u r’ des pensions et des ferm ages, sans expliquer le
moins du monde comment tout cela lui est rigoureuse
ment dû.
Les héritiers Chatnpflour, par acte du 18 février 1809, >
répudièrent au greffe d’A vignon la succession du sieur
de Simiane.
Jusque-là on prévoit difficilement comment la dame
veuve de Simiane pourra enfin renverser tout cet ordre
de choses , et s’en prendre aux biens de la religieuse
Delaire. Il paroît qu’elle-même n’auroit pas commencé
cette attaque; mais elle y fut menée par circonstance, et
elle a cru peut-être de bon augure d’être appelée à un
procès par des débiteurs de 92000 fr., qui ne vouloient
se libérer qu’en sa présence. V oici comment la dame de
Simiane a été appelee à ce procès, et quelle est l’origine
de sa réclamation actuelle.
Il paroît qu’en prairial an 10, la dame de Sim iane,
h peine rayée elle-même de la liste des émigrés, s’occupa
B
�( 10 )
d ’a c t e s
conservatoires pour la sûreté de ses prétendues'
reprises : ses/agens'firent en son nom des inscriptions à
A vign on , à Glermont et à A m bert, et même une saisiearrêt entre lés mains des sieurs Lavigne et P ire l, qui.
avoient acheté des immeubles de la religieuse Delaire.
Ces mesures n’avoient rien que de n aturel, puisque,
Jeanne Delairë étoit héritière du sieur de Simiane , et
par conséquent débitrice personnelle de l’adversaire tant
qu’e l l e n e répudieroit pas: Ainsi il ne faut pas regarder,
ces actes de l’an i o comme une prétention semblable à
celle que manifeste aujourd’hui la dame de Sim iane,;
après une répudiation.
En 1809 , les héritiers Delaire assignèrent les sieurs
Lavigne et Pirel en payement de la;somme de 92160 fr .;
prix de la vente à eux consentie par Jeanne D elaire,
en l’an 10 , et des intérêts depuis cette vente.
Les sieurs Lavigne et Pirel ayant en mains une saisiearrêt, en exeipèrent, et demandèrent la mise en cause
de^la >damé de Simiane : elle fut ordonnée ; et la dame
de'Simiane fut'assignée en mainlevée de sa saisie et de
ses inscriptions.
Ses droits n’étoient pas encore liquidés, et elle se hâta
d’obtenir à A vignon un jugement par défaut , le 16
mars 1809.
A lors madame de Simiane se disant créancière se
présenta au tribunal de Glermont pour demander la con^'
iirmation de sa saisie-arrêt; et alors elle éleva , pour la
premièi’e fo is , la prétention que les biens de madame
de Clary appartenoient à Hector de Simiane pour moitié,
qu’ainsi ces biens étoient le gage de scs reprises.
�( II )
Le* tribunal de Clermont n’a point accueilli cette der
mande ; il a annullé la saisie-arrêt et les inscriptions de
la dame de Simiane : son jugement du 9 août 1809 est
fondé sur des motifs très-solides et très-lumineux.
Ils se réduisent à dire que M . de Simiane ayant perdu
les biens Clary par son émigration, et étant mort émi
gré , ses héritiers n’auroient pu les réclamer que si ces
biens s’étoient trouvés dans les mains de la nation lors
de l’amnistie ; mais que la nation ayant été désistée de
ces biens par la religieuse D elaire, et n’ayant pas eu le
droit de les lui redemander, les héritiers de l’amnistié
n’ont dû prendre ses biens dans les mains du gouverne
ment qu’en l’état où la révolution les avoit laissés (i)La dame de Simiane prétend n’avoir pas perdu l’es
pérance de faire réformer cette décision qu’elle trouve
cependant légale dans ses bases mais trop sévère i et
fausse dans ses conséquences.
Il semble cependant difficile que la Cour pût être
plus indulgente, sans blesser les droits des héritiers de
la dame D elaire, et sans porter atteinte aux lois qui les
ont investis de cette succession.
MOYENS.
Les lois qui vont etre citées rappelleront des souvenirs
pénibles, et ramèneront peut-être à des idées de pros
cription et d’injustice, Mais sans s’occuper d’une justifia
(1) Le jugement est transcrit littéralement dans le mémoire
de madame de Simiane,
‘ ■ 1.
B *
�( lï )
cation qui seroit aussi déplacée qu’une critique, il sera
bien permis du moins de demander à la dame de Simiaûè
si elle croit avoir eu un titre plus sacré que Jeanne Delaire, pour lui disputer la succession de sa sœur, et si
les lois de 1793 ont été véritablement une spoliation
dans cette circonstance.
v Madame de Clary n’avoit qu’une sœur; elle n’avoit
pas pu en mourant lui laisser sa fortune, puisque les
religieuses étoient incapables de succéder. Elle pensa alors
à des parens éloignés , et sa mort précéda l’époque de
l’abolition absolue de la vie monastique.
En août 1792 les religieuses furent expulsées de leurs
asiles , et les biens qu’elles possédoient en échange de
■ceux qu’elles avoient abandonnés en renonçant au siècle,
leur furent enlevés avant qu’il fût question de dépouiller
les émigrés de leurs fortunes.
Peu de temps après , les lois qui avoient rendu les
religieuses aü monde leur permirent d’être successibles ;
et alors, il ne faut pas en douter, si madame de Clary
eût vécu , ses intentions eussent été d’accord avec la na
ture et la lo i; sa sœur eût été son héritière.
E h bien ! ce que madame de Clary au tombeau ne pouvoit pas réparer, l’a été par le hasard d’une révolution;
le bannissement de M . de Simiane lui a ôté ce que les
jnânes de sa bienfaitrice lui regrettaient indubitablement ;
et cette sœùr jadis bannie elle-même et morte au m onde,
a retrouvé une fortune à laquelle d’autres événemens
l ’avoient rendue étrangère.
Qui donc osera dire qtie Jeanne Delaire usurpoit,
lorsqu’ une loi lui a donné la fortune de ça sœur ? Madame
�j
.
de Simiane le d it, sinon à elle, au moins à ses héritiers.
Elle va plus loin dans son injustice, car c’est contre eux
qu’elle veut rejeter tout l’effet de l’émigration , tandis
qu’elle veut, elle-même émigrée, avoir été invulnérable.
Elle vient dire aux héritiers de Clary : « Je vous sais
« bon gré de la peine que vous avez prise d’obtenir des
« radiations ; mais sic vos non vobis, je m’en adjugerai
« tout le profit, si vous le trouvez bon. Jeanne Delaire
« a empêché la nation de vendre les biens Clary, vous
« avez empêché l'a vente des biens Simiane; tout cela
« sera mon bénéfice. Je reviens de l’émigration non
ce seulement avec la dépouille du défunt, mais encore
« avec des titres qui absorbent tout le reste, et je pourc< suis des’reprises que la nation française a eu la bonté
« de me réserver intactes. T out ce qui a été vendu est
« perdu pour les héritiers républicoles ; et tout ce qui
« reste est conservé pour moi. »
1 13
Mais ce n’est pas par des réflexions morales qu’il faut
repousser l’attaque de la dame de Simiane ; ce sont les
lois elles-mêmes qui sauront y répondre victorieusement.
La loi du 28 mars 1793 a déclaré morts civilement
tous ceux qui , alors inscrits sur des listes d’émigrés 7
n’étoient point rentrés en France dans les délais accordés
par les lois précédentes.
Il ne s’agit pas de vérifier quelle étoit l’époque de l’ins
cription du sieur de Simiane, et si les émigrés d’A vignon
devoient être exceptés : car le Comtat fut réuni à la France
en 1 7 9 1 3 et par conséquent les lois de 1792 et 1793 les
atteignirent comme les autres Français.
�*4
C;
)
Tout ce qu’il faut savoir, c’est que M . de Simiane
n’étoit pas rentré en France avant le 28 mars 1793. A in si,
aux yeux de.la lo i, M. de Simiane est mort depuis cette
époque.
'
N ’est-ce pas- assez de sa mort civile ? eh bien ! s’il
faut^ y ajouter l’époque de sa mort naturelle, M . de
Simiane est ynort à Asti le 12 prairial an 3.
A lors il étoit encore sur la; liste des émigrés : ainsi
ses biens n’ont pas pu être transmis par lui à ses héri
tiers ■•■naturels>• puisque la loi les avoit déclarés acquis
irrévocablement 'à la nation.
Peut-être bien que si rien n’eût dérangé cet ordre, et
-si la nation eût conservé jusqu’à l’an 11 les immeubles
du sieur de Simiane, ses héritiers en auroient obtenu la
, N
remise lorsqu'ils sont parvenus à le faire rayer de la liste
des émigrés après sa mort : cette mesure étoit une consé
quence de l’amnistie. Le gouvernement n’a voulu retenir
que les bois7 et les perceptions déjà faites : mais aussi ne
voulant être généreux ou juste que dans son intérêt, il
a marqué fortement l’intention que nul possesseur tenant
son titre de l’autorité publique, ne fût inquiété pour
aucune cause.
Voilà ce que la dame de Simiane paroît ne pas vouloir
com prendre; les articles de la loi lui. semblent équi
voques; elle n’y a vu que l’ordre donné aux émigrés de
-maintenir les partages faits avec la république ; et se
mettant ainsi à l’aise , elle a cru s u f f i s a n t de dire que la
religieuse Delaire n’avoit fait a u c u n partage avec la répu
blique ; d’où, elle a conclu que les héritiers de Simiane
ont tuès-bien eu le droit de disputer à cette religieuse
�5
( f )
les biens qu?elle avoit obtenus par un arrêté authentique
du 8 nivôse an 2.
C’est là la "seule ¡prétention sur laquelle la dame de
Simiane insiste ; car elle reconnoît que Mv Hector de
Simiane étant mort en état d’émigration et de mort
civile, n’étoit pas alors propriétaire des biens qu’elle ré
clame : mais elle soutient que si ses héritiers n’étoient
pas successibles à l'heurè de sa m ort, ils le sont devenus
huit ans après, c’est-à-dire, lors du certificat d’amnistie
délivré en l’an 11.
^
'
i
rv
•
,
■
î‘■
. '
. I
; Ce point capital de la contestation reçoit deux réponses,
l’une, générale et relative aux effets de l’amnistie d’émi-*
gration ; l’autre, particulière, résultante de la qualité
de religieuse qu’avoit Jeanne de Clary.
Pour être plus clair dans la première réponse, il faut
la faire précéder de la loi elle-mêmé, dont il’ sera facile
ensuite de tirer des conséquences.
L e sénatus-consulte, du 6 floréal an 10 , porte, ar
ticle 16 : « Les individus amnistiés ne pourront, sous
« aucun prétexte, attaquer les partages de présuccession,
cc succession, ou autres actes et arrangem ensfaits entre
c< la république et les particuliers, avant la présente
cc am nistie. »
A rt. 17. « Ceux de leurs biens qui sont encore dans
« les mains de la nation (autres que les bois et forêts,..,.
« les créances qui pouvoient leur appartenir sur le trésor
« public, et dont l’extinction s’est opérée par confusion
« au moment ou la république a été saisie de leurs
�( i<> )
« biens, droits et dettes actives ) ,' leur seront rendus
« sans restitution de fruits. »
rX ?arrêté des consuls, du'9 thermidor an 10, dit c< qu’il
« est conforme à l’esprit du sénatus- consulte d’étendre
« la grâce aux héritiers, quand la mort a mis le prévenu
« lui-m êm e h o rs ,d’état d’en profiter. S’il eût vécu , il
« seroit rentré dans les biens dont l’art. 17 du sénatus« consulte fait remise aux amnistiés; comment refuser
cc là memejgmce à ses enfans républicoles, et nés ayant
« l’émigration ? »
Si ce que la loi accorde aux enfans de l’émigré doit
s’étendre aussi aux collatéraux, croira-t-on, d’après ce
qu’on vient;de lire, que les héritiers de M . de Simiane
eussent pu demander ses biens à tout autre possesseur
qu’au gouvernement?
Les héritiers Simiane ne l’ont pas cru possible ; ils ont
vu vendre par la religieuse Delaire tous les biens qu’elle
tenoit de la république , et il n’est venu à la pensée de
personne qu’ils fussent fondés à attaquer son titre, en lui
objectant qu’après le 9 fructidor an 3 elle auroit dû rendre
à la république ce que la république lui avoit donné.
A supposer qu’on tienne pour réponse suffisante à ce
fa it, le droit qu’ils auroient eu de s’y opposer ( ce qui
nous ramène à la question), il faudra bien qu’on indique
comment et par quelle voie on auroit pu soi-m êm e
attaquer un actef a i t entre la république et la religieuse
D elaire.
Sera-ce soiis prétexte du rapport de l’effet rétroactif
de*la loi du 17 nivôse ? mais la loi dit que l’amnistié
pourra attaquer l’acte sous aucun prétexte.
]Madame
�( 17 )
Madame deSimiane aura encore quelques efforts de plus
à faire pour prouver que les héritiers de l’amnistié pouvoient rechercher des biens q u i riétoient plus dans les
mains de la natioîi depuis l’an 2. Ce n’est pas qu’elle
n’ait bien prévu cette difficulté, dont elle fait une question
principale en tête de son mémoire ; mais elle l’a éludée,
et l’a laissée à peu près sans réponse.
Répétera-t-elle que la religieuse Delaire a dû rendre
à la nation les biens Clary aussitôt après la loi du 9 fruc
tidor an 3 ? Mais comment une aussi bonne pensée n’estelle venue qu’à madame de Simiane? et comment le fisc,
toujours si en éveil, ne s’en est-il point avisé? Quantum
mutatus ab illo l faudroit-il s’écrier; ou plutôt il faudroit
se croire fort convaincu par cette seule réflexion, que
le fisc n’étoit point autorisé à ôter à Jeanne Delaire les
biens dont elle étoit en possession, puisqu’il ne les de
manda pas.
Ce que la nation n’a pas fait en l’an 3 , la dame de
Simiane voudroit que les héritiers de son mari l’eussent
fait en vertu de l’amnistie, q u i, suivant elle, auroit un
effet rétroactif au temps de la mort et même de l’émi*gration.
Mais aucun effet rétroactif n’est donné à l’amnistie; et
c’est pour cela que le sénatus-consulte veut que l’émigré
vienne prendre dans les mains de la nation seulement,
ce qui y reste.
On a vu à Besançon un sieur Masson, ém igré, dont
les biens avoient été vendus à sa femme pendant même
qu’ il étoit en réclamation, venir après l’amnistie de^
ttiander à sa femme, non pas l’éviction du bien national,
G
�( iS )
mais l l’administration de la communauté. La Cour de
Besançon avoit jugé que l’amnistie avoit rétabli la puis
sance maritale, et par conséquent la communauté comme
si elle n’eût jamais été interrompue rmais cet arrêt a été
cassé le/io juin 1806, par lé motif principal que le sieur
Masson avoit été en état de mort civile jusqu’à sa, radia
tion , et que Vamnistie ri avoit pas eu d'effet rétroactifs
1 -Sans doute'il y a quelque répugnance à penser que
malgré la règle le mort saisit le v if , M. de Simiane',
mort en l’an 3 , n’a eu d’héritiers qu’en-Tan m i . Mais
on conçoit que pendant cette lacune c’est la république
q u ia été héritière intermédiaire; et remarquons qu’elle
n’a pas voulu l’être à titre d’usufruit ou de iidéicommis;
elle n’a pas même voulu qu’on lui succédât par repré
sentation ^ de peur qu’on usât de ses droits ou de ses
omissions pour faire des procès ; elle a déclaré avoir
rempli le degré comme propriétaire, et avec le droit
utendi et abutendi, elle n’a rappelé l’émigré que pour
reprendre rebus integris ce qui restoit dans ses mains ;
et sans lui donner le droit de porter ses regards en arrière
pour rechercher quel étoit le titre de possession de ceux
qui occupoient ses biens, la loi a placé pour lui un mu y
d’airain entre le passé et l’avenir.
' .■V o ilà , ce semble, l’idée la plus juste qu’on puisse se
former de cette législation, et c’en seroit assez peut-être
pour prouver qu’en thèse générale les héritiers Simiane
:in’ont- pas dû contester à Jeanne Delaire le droit de dis
poser des biens de sa soeur. Voyons cependant ce que la
circonstance que’Jeanne Delaire etoit religieuse, ajoutera
àe force à la précédente démonstration.
�*9
(
)
Lorsque l’assemblée constituante, voulant favoriser la
sortie des cloîtres, eut rendu la loi-du 19 février 1*790,
qui permettoit aux religieux des deux sexes de rentrer
dans le monde, il fut nécessaire d’expliquer s’ils deviendroient capables de successions .: alors fut rendue une
seconde l o i, du 26 mars 1790, ainsi conçue":
i A rt. i er. « Les religieux qui sortiront de leurs maisons
« demeureront incapables de successions, et ne pourront
« recevoir par donations entrevifs et testamens. que ’des
« pensions ou rentes viagères.’ »
\ :
* \ ,j[
A rt. 2. « Néanmoins lorsqu’ils ne se trouveront en
« concours qu’avec le fisc, ils hériteront dans cp cas pré*
« J'érablement à lui. »
.o . /j
L a loi du
brumaire an 2 , :art. 4 , dit que rc< les re« ligieux et religieuses sont appelés à Recueillir les s u o
te cessions qui leur sont échues à compter du 14 juillet
« 1789. »
C;.
L ’art. 7 dit qu’audit cas de successions ils rapporteront
les dots constituées par leur profession monastique, et
que leurs rentes et pensions seront éteintes^
.
C ’est en vertu de cette loi que Jeanne Delaire a ré-»
clamé la succession de madame de Clary, sa sœur, dont
elle étoit seule héritière al? intestat. E l l e ew a obtenu
la propriété par arrêté du 8 nivôse ail 2.
•. *
i Lorsque la loi du brumaire an 2 fut rapportée dans
Bon effet rétroactif, le 9 fructidor an 3 , Jeanne Delaire
auroit pu être obligée par M. de Simiane de rendre la
moitié des biens de sa sœ ur, si M . de Simiane eût élé
vivant-, mais il étoit frappé de mort civile : et de morne
5
5
G
3
�( 2° )
que les émigrés ne peuvent pas recueillir les successions
ouvertes pendant leur mort civile, de même ils n’ont pas
d’action pour réclamer le bénéfice d’une lo i; car, suivant
la loi du 12 ventôse an 8, les émigrés ne peuvent mçç-*
quer le droit civil des fra n ça is.
Jeanne Delaire n’avoit donc pas M . de Simiane pour
concurrent , mais seulement le fisc en sa place pour la
moitié paternelle, et M . de Chardon pour les Liens
maternels.
Celui-ci a pris sa portion, parce qu’il étoit républicole; mais le fisc n’a pas pris la sienne, car il en étoit
empêché par l’art, 2 de la loi du 26 mars 1790, ci-dessus
citée.
Il est bien incontestable en effet que si M . de Simiane
ou le fisc étoient mis de côté, Jeanne Delaire se trouvoit héritière de sa sœur : ainsi elle étoit parfaitement
dans l’application de la loi qui l’appeloit à succéder.
A in s i, sans aller plus loin , voilà déjà la religieuse
Delaire avec un titre légal. Elle 11’est pas seulement habile
à succéder, elle n’est pas détenteur provisoire et précaire ;
elle est héritière ; elle occupe les biens pro suo. Car .il
n’y a pas encore d’amnistie , il n’y en aura que dans
huit ans; et le fisc lui a cédé sa place, non pas pour jouir,
mais pour succéder directement et personnellement.
La loi du 9 fructidor an 3 n’a donc rien dérangé au
titre de propriété donné par la nation à Jeanne Delaire.
Cette loi a été expliquée par celle du 3 vendémiaire an 4;
et en même temps que le législateur rend à tous les héri
tiers déchus le droit d’ôter aux personnes rappelées ce
�(
21
)
qu’elles tenoient de l’effet rétroactif, il déclare formel
lement que le fisc n’aura pas le même droit contre les
religieuses.
En effet, l’art.
s’exprime ainsi : « Les partages faits
« entre la république et les personnes déchues , qui
« étoient ci-devant religieux ou religieuses ......... sont
« maintenus, sauf l’exécution de l’art. 7 de la loi du 17
« nivôse (relatif à la confusion des pensions). »
Rien n’étoit plus clair que cette intention de la loi (1).
Cependant madame de Simiane ne veut pas y voir ce
qui est évident : elle se contente de dire que la reli
gieuse Delà ire n’a pas fait de partage avec la république,
d’où il suit que l’article ne la regarde pas.^
Il
suffiroit de répondre que la loi ne peut pas tout
dire, et exprimer tous les cas, et que scire leges non est
earum verba tenere, sed vint ac potestatem. Mais ce
n’est pas même le cas de chercher un sens , car il est
parfaitement rendu.
La loi qui doit être b riè v e , et qui doit prendre pour
exemple ce qui arrive le plus souvent, n’a pas pu sup
poser de prime abord qu’une religieuse se trouveroit
unique héritière. Il n’étoit que trop d’usage que ce
5
(1) Comme cet article prouve qu’en laissant les successions
aux religieuses, et en retenant leurs pensions, la république a
aussi songé à son intérêt, madame de Simiane se récrie, en
disant qu’on ne donne pas une grosse succession pour 5oo fr,
de rente. Elle oublie que dans les loteries on donne 10000 fr.'
pour un écu ; ce qui ne prouve pas pour cela une fausse spécu-.
lation, parce qu’un gros lot n’est pas pour tout le inonde.
�4
22
■
)
fussent les familles nombreuses qui peuplassent les monastères, pour le plus grand avantage d’un héritier prin
cipal. Le plus souvent aussi c’est cet héritier que la
nation a représenté par confiscation , et alors elle a eu
un partage à faire avec les religieux rappelés par l’effet
rétroactif de la loi du 5 brumaire.
Si dans le cas de ce partage la nation s’est interdit
le droit d’ôter au religieux la portion qu’il n’avoit eue
que temporairement, qu’en résulte-t-il autre chose, si
ce n’est que tous /es droits de la nation ont été aban
donnés aux religieux, comme l’avoit déjà dit la loi du
26 mars 1790?
Et comment peut - on demander à son imagination
qu’elle invente une différence entre le cas d’un abandon
par la voie d’un partage, ou d’un abandon par la voie
du délaissement total? N ’est-ce pas toujours la république
qui cède son droit tel quel? et qu’importe de recher
cher s’il étoit universel ou de quotité, lorsqu’il ne s’agit
ici que de savoir si on peut exciper du droit de la ré
publique ?
En un m ot, si M . de Simiane eût v é c u , il est indu
bitable qu’il ne pouvoit troubler Jeanne D elaire, parce
qu’elle étoit héritière avant son amnistie, parce que le
sénatus-consulte ne lui donnoit droit de rechercher des
immeubles que dans les mains de la n a tion , parce que
la remise des biens Clary, faite à Jeanne Delaire en l’an 2,
étoit consolidée par l’art.
de la loi du 3 vendémiaire
au 4 , et enfin parce que les émigrés n’ont pas le droit
de rechercher si la république a eu tort de donner à
quelqu’un ia propriété de ce qui étoit à eux,
5
�( 3 )
Ce que ne pouvoit pas faire M . de Simiane, ses héri
tiers Font pu encore moins quand cette propriété a été
consolidée par une longue possession. Mais madame de
Simiane, qu’est-elle pour vouloir bouleverser tout ce qui
a été iait, et respecté même par le fisc? Elle est un simple
créancier réduit à exercer les droits de son débiteur.
Mais qu’elle explique comment elle veut exercer les droits
d’un émigré mort avant sa radiation, et par conséquent
exercer, du chef de cet ém igré, les droits de la répu
blique qui ne le lui permet pas.
E n fin , et pour comble d’incohérences, madame de
Simiane a débuté par une saisie-arrêt du prix des ventes
faites par Jeanne Delaire après l'amnistie , ce qui est
une reconnoissance évidente du droit de propriété de la
venderesse, et par conséquent une preuve de plus que
toutes les parties intéressées croyoient également à cette
propriété, comme à la chose du monde la moins suscep
tible de contestation.
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat,
M e. D E V E Z E ,
licencié avoué.
A R IO M , de l’imp. de T H tB A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire
rue des Taules, maison L a n d r i o t , — Juin 1 8 1 0 ,
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Champflour, Jeanne-Marie. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Devèze
Subject
The topic of the resource
créances
émigrés
séquestre
successions
rétroactivité de la loi
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Dame Jeanne-Marie de Champflour, veuve du sieur Paul-François de Montrozier ; sieur Jean-Baptiste de Champflour ; dame Marie-Anne-Félicité de Fredefont, et sieur Jean-Jacques de Rochette, son mari ; demoiselle Gabrielle Durant de Pérignat, et dame Marie Durand, religieuse ; tous habitans de la ville de Clermont-Ferrand, intimé ; contre Dame Anne-Emilie de Félix, veuve de Claude-François-Léon de Simiane, propriétaire à Collongues, arrondissement d'Aix, département des Bouches-du-Rhône, appelante ; en présente de dame Marguerite de Chardon, veuve du sieur Jacques-François de Montanier ; Claude-Antoine-Joseph de Chardon ; demoiselle Anne de Chardon, dame Perette de Chardon, veuve du sieur Vallette de Rochevert ; tous propriétaires, habitans de la ville de Riom, intimés ; et en présence de Jacques-Marie Lavigne, et Jean Pirel, habitans de la ville d'Ambert, aussi intimés. Questions . 1°. Les religieux qui, par effet rétroactif de la loi du 5 brumaire an 2, ont obtenu un droit successif de la nation représentant un émigré, ont-ils été soumis à rendre cette succession après le rapport de cet effet rétroactif, lorsque les héritiers rétablis se sont trouvés représentés par la république, comme émigrés ? 2°. La nation, dans ce cas particulier, n'est-elle pas censée avoir renoncé à toute recherche, et n'avoir point voulu user du bénéfice des lois des 9 fructidor an 3, et 3 vendémiaire an 4 ? 3°. Le sénatus-consulte du 6 floréal an 10 n'a-t-il rendu aux émigrés amnistiés, ou à leurs héritiers, que les biens qui se trouvaient dans les mains de la nation par la voie du séquestre au moment de l'amnistie ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1787-1810
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0419
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ambert (63003)
Clermont-Ferrand (63113)
Collongues (06045)
Riom (63300)
Comtat vénaissin
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53803/BCU_Factums_M0419.jpg
Créances
émigrés
rétroactivité de la loi
séquestre
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53802/BCU_Factums_M0418.pdf
b85c185120574c7eaf8c751cda3edb8f
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Text
PRÉCIS
POUR
J o s e p h V E Y S S I E R E , marchand, habitant de
la ville de Pleaux, intimé;
CONTRE
A n to in e F IL IO L et Marie C H A V IG N A C ,
sa femme
appelans.
habitans de la même v ille,
f •
f
L e sieur Veyssière a voulu faire une construction sur
un terrain qui lui appartient, et il en a été empêché par
le sieur F ilio l, partie adverse qui a prétendu que ce
local étoit une place publique.
L e bailliage d’A urillac, jugeant d’après les titres pro
duits, a décidé que ce local étoit la propriété du sieur
Veyssière. Cependant; à cause d’un acte qui sembloit
i
•s
�( 2 )
concéder aux adversaires un droit de servitude, il n’a
permis au sieur Veyssière de bâtir que jusqu’à trois pieds
de distance du mur latéral de la maison Filiol. Il a
ordonné encore que le sieur Veyssière n’obstrueroit point
la vue d’une fenêtre placée à cet aspect.
Cette décision privoit le sieur Veyssière d’une portion
de son terrain, et cependant il étoit prêt à s’y soumettre;
mais les Filiol ont cru l!affaire assez importante pour se
pourvoir par appel au parlement.
T ou t le local contentieux n’a que onze toises et quatre
pieds de surface. Les F ilio l, qui n’osent pas le réclamer
comme propriété, arrêtent depuis vingt^-huit ans une^
construction pour un aussi mince intérêt : on ne com
prend pas même qu’il y ait aucun autre intérêt que celui
d’être mauvais voisin.
Il est temps qu’une aussi longue obstination ait une
fin. Les Filiol ont cru embrouiller ce procès par la
production de plusieurs titres \ et il importe au sieur
Veyssière de simplifier ce qu’on a voulu-rendre difficile,
en se servant des actes même des Filiol pour y trouver
leur condamnation. Il a dans cette affaire un intérêt plus
considérable que l’étendue du terrain ne paroît le com
porter. Ce local, qui n’est pour son adversaire qu’une
place publique, est pour lui' une propriété précieuse f .
incorporée à sa maison y destinée de tout temps à aug- menter une boutique qui fait sa ressource principale,;
�( 3 )
f a i t s
.
Les deux maisons des parties sont situées dans la ville
de Pleaux, à l’extremité de deux rues qui se x’éunissent
à angle droit.
Cependant ces dçux maisons ne sont pas contiguës ;
elles sont séparées par un espace triangulaire qui fait le
sujet de la contestation. La base de ce triangle s’arrondit
pour faire le tournant des deux rues; et un rang bien
marqué de fortes pierres prouve au simple aspect que
la ville n’a fait paver que ce qui étoit au public, et n’a
jamais eu de prétention sur cette propriété particulière.
La maison Veyssière provient du sieur F u m e l,‘ qui
l’avoit achetée de sieur Cueilhe, en 1721. A lors elle étoit
en ruine absolue , car le contrat ne comprend qu''un
airialde m aison, à présent en ja rd in , eîpatüs au-devant,
avec les matériaux qu i y sont. On lui donna pour confin
im médiat, la maison R ix a in , de m idi. La même chose
est’ répétée dans la vente du sieur Fumel au sieur
Veyssière, en 1746; ce qui prouve que les lieux étoient
encore au même état après cette époque.
C ’est aujourd’hui Filiol qui jouit de la maison R ixain ,
du chef de. M arie Chavignac, sa femme, fille de Jean
Chavignac, boucher, qui l’avoit achetée en i 75o . L e
pignon ou mur latéral de cette maison borde le triangle
qui fait l’objet du procès ' toute, sa façade est sur la rue.
Il paroît qu’il y avoit un jardin derrière la maison
Veyssière, acheté par lui, en 1 7 3 7 * ^es Rixain a voient
aussi 1111 jardin derrière leur maison. En lisant les confins
2
�des anciens titres, il est vraisemblable qu’il y a eu des
échanges et sans doute-des conventions de voisinage sur
le local contentieux. On ne voit aucunes traces de ces
conventions, mais tout prouve qu’il a du en exister.
. L e sieur Veyssière n’ayant aclieté que pour bâtir,
n’occupa pas tout son terrain par une maison; il laissa un
espace vide au tournant de la rue, afin d’avoir deux
façades pour sa boutique, qui étoit l’objet le plus essen
tiel pour lui.
. ?:
v Cet espace vide (que le même motif empêchoit de
clore) étoit trop à la proximité de Ghavignac, boucher,
pour qu’à la longue lui ou les siens n’en abusassent pas.
A la vérité il respecta lui-même les droits de son voin ;
mais après sa mort la veuve Ghavignac se permit de
placer sur ce local des fumiers et immondices en assez
grande quantité pour incommoder le sieur Veyssière-,
qui s’en plaignit. Cette première hostilité, qui remonte
a. quarante-deux ans, est assez importante pour être
indiquée avec un peu plus de détail.
C’est par une requête du 4 ju in 17 7 2 , que le sieur
Veyssière exposa aux juges de Pleaux qu’il étoit pro
priétaire d’un espace triangulaire placé entre sa maison
et celle de Chavignac; que la veuve Ghavignac y mettoit
du fumier et immondices que la pluie condu isoit
la porte de la boutique de lui Veyssière, ce qui nuisoit
aux étoffes, et surtout aux galons, etc.
, . Sur cela intervint sentence*de police, qui défend à la
;veuve Ghavignac de répandre dès fumiers sur ledit terrain
appartenant ti V eyssière, et la condamne à 5 francs
d’amende. .
�.
;c 5 5
Cette sentence fut signifiée à la veuve Chav’gnac.
Elle fut encore affichée à P leau x, à la diligence du
procureur d’office.
Cette sentence ne fut pas attaquée; au contraire, elle
fut pleinement exécutée, et les Chavignac cessèrent de
mettre des fumiers sur ce local.
; Ce respect pour la propriété du sieur Y e y ssière dura
vingt ans, et dureroit sans doute encore, si le sieur Filiol
ne fut entré gendre dans la maison Chavignac.
En 1782 le sieur Veyssière annonça le projet de pro
longer sa maison sur une partie de son triangle vacant,
et il assembla même des matériaux pour cette construction.
A ussitôt, et pour l’en empêcher, le sieur F iliol ouvrit
une porte qui avoit^autrefois existé sur ce lo cal, mais
qui avoit été murée depuis très-long-temps ,sans doute ,
en vertu des conventions que la série des actes fait pré
sumer avoir eu lieu.
L e sieur Veyssièrefoi'ma opposition à ce nouvel œ uvre,
et offrit même de payer la moitié du pignon de la maison
C havignac, pour le rendre mitoyen ; en conséquence il
donna une assignation auxdites fins, aux mariés F ilio l,
le 8 juillet 1783.
Les Filiol répondirent en défenses, que cette porte
n’avoit été fermée par eux que depuis environ dix-liuit
an s, pour Vutilité de leur commerce ; que si la vente
consentie à Veyssière en 1746 lui donne pour confin la»
maison R ix a in , c’étoit une subtilité de l’acquéreur ;
mais que le local contentieux étoit une place publique.
L e procès ainsi commence donna lieu à d’assez longs
débatsj qui ne prpduisirent pas de tres-grands éclaircis-
3
�c ‘9
..
semens ; 'chacune des parties assigna son vendeur en re
cours. L e vendeur des Filiol répondit avec raison1qu’il
ne leur devoit aucune garantie , d’après leurs propres
'défenses, puisqu’ils n’indiquoierit le local en question que
'comme une place publique. '
"
Les Filiol découvrirent une transaction du 24 mai 1529,
passée entre Pierre Estève et Pierre R ix a in , dans laquelle
ion voit qu’il s’agissoit d’une cour sise au-devant de la
maison Estève. R ixain , qui bâtissoit alors, y ouvroit une
porte, et prétendoit avoir le droit d’y placer des fumiers
et de les y recueillir. Sur quoi les parties réglèrent entre
■
elles, i° . que Rixain pourroit édifier ladite porte à l’étage
soutrane devers ladite cour et la rue d’Empëssine, mais
q iù iljie "pourroitfaire aucune autre porte, ni escalier,
ni latrines, n i autres servitudes, si ce n’est tant seule
ment une fenêtre à l’étage seconde dudit chapial; 2°. que
Pierre Estève pourroit colliger les fiens provenant de
ladite cou r, savoir de l’arrête de ladite porte devers le
prosial dudit E stève, et qu’il pourroit mettre des pailles
en ladite cour devers ledit prosial, pour congregnier en
fumier ; 30. que Rixain pourroit colliger le fient de l’autre
côté, savoir de l’arrête soutrane de la'porte^, à l’arrête
•soutrane delà boutique Cheminât, mais qu'il ne -pourroit
mettre dans la cour n i fu m ie r , ni poules.
Il fut encore produit de part et d’autre un grand nombre
de pièces qui ne semblent pas mériter un examen parti
culier; seulement il est nécessaire de dire que Veyssière
•ayant produit la sentence de 1773? c*ont ^ a été parlé
plus haut, le sieur Filiol en interjeta appel en 1784?
•c’est-à-dire, yingt-un ans api’es sa signification»
�( 7 )
G*est en cet état que les juges d’Aurillac prononcèrent
par sentence du 8 juillet 1784.
* Cette sentence maintient le sieur Veyssière en la.pro
priété et possession de l’airial et patus. en. contestation ;
et dans le cas où il voudroit y bâtir, elle ordonne qu’il
laissera trois pieds de distance vers la maison F ilio l, à
partir du coin de ladite maison, du côté de la rue Pessin e, jusqu’à un- demi-pied au delà de l’angle supérieur
de la porte de ladite maison donnant sur ledit terrain,
t II est ajouté en ladite sentence que Veyssière sera tenu
de ne point ôter et borner le jour de la fenêtre de ladite
maison donnant sur ledit terrain, pratiquée jusqu’à l’autre
eoin.de ladite maison.
.. . .
, ,
Enfin Veyssière est débouté de ses demandes en fer
meture de porte et de fenêtre, et de mitoyenneté de
mur. Les parties sont mises hors de cour sur leurs autres
conclusions, et sur les demandes en recours.
L ;Quoique cette sentence fût plus véritablement nuisible
au sieur Veyssière qu’aux F ilio l, ce sont eux cependant
qui en interjetèrent appel.
Leurs moyens , quoique plus diffus qu’à A u rilla c ,
étoient les mêmes ; seulement on remarque au folio 74
de leurs griefs, qu’ils prétendent avoir droit à la propriété,,
même du terrain, s’ils vouloient le soutenir; mais ils
ajoutent .à l’instant que pour être de meilleure foi que
Veyssière, ils conviennent que ce terrain fait partie d’unev
place appartenant à la commune de Pleaux.
. ..Cet appel, suspendu depuis la révolution, a été repris
en la Cour.
, .
4
�(S )
M O Y E N S .
Il ne s’agît pas de savoir laquelle des deux parties est
propriétaire du local contentieux , puisque les adver
saires n’ont aucune prétention à cette propriété, et veu-*
lent seulement l’attribuer à la commune de P leau x, qui
ne la réclame pas.
’
L e sieur Veyssière se seroit cru fondé à soutenir qu’iB
étoit propriétaire de la totalité , avant la sentence5d’A u rillac ; mais cette sentence laisse aux Filiol un droit de
passage et un droit de vue. Il s’agit donc de savoir si*
ceux-ci sont fondés à réclamer davantage.
Il est visible que les premiers juges se sont fondés- su-i?
le traité de 1629, quoique la porte permise par cet acte
eût été bouchée depuis. Mais en fin , puisque le sieutf
Veyssière n’est pas appelant, il faut admettre que* les
Filiol doivent conserver cette porte. Voyons seulement
si cette porte suppose une place p ub lique, comme ils
le prétendent.
,
Remarquons que cet acte de 1529 est: produit par euxmêmès.
r
, L e locaiLy est désigné comme cour en avais t de la>
maison d’Estëve ( représenté par Veyssière
Dans: toutes les. parties die l’acte'il n’y* est pas-don^é:
d’autre nom. Les Filiol sont donc bien lbin: d’avoir prouvé*
par: cet acte que' ce fût une place publique.
Tous les autres actes qu’ils o n t produits, et'ceux qu’on;
a produits contre eux,, donnent à. la; maison Veyssière,
pour confin immédiat, celle des Filiol. Donc il n’y a
pas entre ces deux maisons de place publique.
i
�'C 9 )
Ce confín donne même lieu à une autre conséquence;
e’est que le locai en contestation doit nécessairement ap
partenir au sieur Veyssiërë.
’
‘
L ’acte de 1629, quoiqu’il ait laissé une porte et Une
fenêtre aux auteuTS des Filio! , ne contrarié pas du tout
cette preuve de propriété; au contraire, 011 est convaincu
par sa lecture que la concession faite aux auteurs de
Filiol n’est qu’une servitude ; ce qui consolidé l’idée de
propriété sur la tête des auteurs d’Estève.
N'
Toutes les expressions de cet acte conduisent à cette
démonstration : « Il est accordé que Rixain
édifiei?
« ladite porte devers ladite co û t, etc. ; il ne pourra faire
c< aucun autre escalier, latrines, n i autres servitudes,
« si ce n’est tant seulement, etc. »
! ?.
La cour n’étoit donc ni à R ixain, ni au public, puis
qu’il reconnoissoit à Estèvë le droit de lui accorder la
permission d’ouvrir une porte et une fenêtre, de limiter
cette permission à- un& s e u l e et enfin dé'donner len o m
de servitude' à cette concession.
,(
’• 1 .
L ’acte va plus loin encore, s’il est possible / pour
prouver quëi:cé n?est pour Rixain qu’une servitude.
Comme il va ouvrir une porte, et quenaturellem ent
il faut qu’il ait' le' droit de ñét/tóyer son passage, Estéve'
détermine^néanmoins jusqu’où il pourra nettoyer e't colliger ‘le fient. Il est borné ¡1 l’arrête* des portes; et quoi-'
qu’Estève garde le droit de mettre du fumier dans la cour,
il est néanmoins expliqué que Rixain ne pourra y mettra
ni fum ier, ni poules *. le devant et les cotés de sa porte
ne Sont pas même exceptés' de colte^ dbfense).
Certes il n’est pas possible de V'oir lUie distiiVction plus
�( 10 )
marquée entre les droits reconnus à ces deux parties. L ’un
accorde, perm et, défend ;* l’autre accepte ce qui lui est
concédé, et se soumet à ne pas faire ce qui lui est dé
fendu. L ’un estjdonc*le propriétaire; l’autre.tient.de lui
une simple servitude, et ne,peut ni l’étendre, ni encore
moins disputer le droit de propriété sur tout ce qui n?est
pas compris dans la servitude. .
^*
r Que-doivent donc avoir les »Filiol,, d?après -cer titre
émane d’e u x , e t , synallagmatique avec leurs .auteurs ?
"Rien autre chose qu’une porte, une fenêtre seulement,
et le droit de passage ppur arriver à »cette porte.
^ ..P 9883^ ^8t assez expliqué en l’acte paç
la limitation dQ'Coïliger lesjiens. ïlixain ne peut aller que
jusqu’à l’arrête de la porte, et JCstève a tout }e surplus
depuis la mêipe limite. 7 ; r /. ] £.
r
.
0 ;
, j Là dimension de la; porte prouve assez d’ailleurs quelles
furent les véritables intentions( des parties en 1629. Une
porte.latéralejne^pouvojt pas avoir pour objet’un passage,
de chevaux ou voitures, mais un passage à pied pour
cette,. sorjtie^jcie dégagement. Les premiers juges ont
donc -p^laiiement entendu ,1e sens de l’acte et .la loça^
litp, en (^opnant trois pieds de passage, aux adversaires;
etI .encore
excédé
la convention
l
ç . ontrils
:
T•' 1
7: en donnant un
demir-pied jdej plu?r;au delà^de la porte, puisque l’acte
disoit jusqu'à^ Varrête de la porte. Mai$ cette dilférence
est. trop minutieuse :pour que le sieur, Veyssière s’en,
' v u
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>"■
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* ■ J f I
:
'
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•
:
|
acte d e 1629 . s u f f i t donc seul pour justifier le
jugement dpnt est appel. Mais il ne faut pas-laisser crojre
C et
�Î-I Ï )
Iqne les autres actes-<produits de ¿part* et d’autre' pour:roient cbntrarier;cette'démonstration.1 A ü >contraireÿ ils
viennent à son appui, et prouvent eux*mêmes que^dans
ttous ' les temps les i successeurs d*Estève- se ¡sont toüjôurs
►regardes comme5propnétaiTes du local «qui'“séparoi^sa
maison d e là maison Rixain.
..
'iî. Eu- Ï704,' 'François Cueilhe acheta la r h ai son Es tè v e ,
îquiî avoit alors;1changé
face ; et çfacte jporté^ «; Un
-« petit ’jardin , 'autrefois airial de mà:îson{;, confiné, de
r« jour, par la rue d’Empéssine;< de midi ét nuit, parla
~cc maison et jardin d e , Françoise' R ixa in ^ etc.' »
"î ; En 17 2 1, ce Cueilhe donna le même objet* en côntrëtébhange au sieur Fumel : « Un airiül de maison, à présent
;« en jardin, et -patus ( où cour) a u -d em n t^ m ec les iiiac< tériaux qui y sont ;-confiné.par la rue de* jour; la mai-ce son R ix a in , de midi y le jardin Rixain', de nuity etc. »
t‘ On voit encore , par ’im^acte de 1722, que le sieur
'Fum el, payant le droit'de l’ods au seign eu rd éclara dans
l’acte les mêmes confins de l’àirial e t le patus à lui vendus.
.Si c’eût été une place vague ou publique, on sait assez
¿que le seigneur àuroit réclamé’ contré cette mutation, au
:lieu de l’approuver.
\
-I ;
En 1746,' le sieur- Fumel vendit -cet airial au sieur
Veyssière; il y comprit de même 'le patus (o;u-cour },
•et donna toujours pour confin la maison KR ixain\ V oilà donc -une série d’actes-qui ont tous'le-m êm e
confin. 11 est donc prouvé/autant qu’ il'pèuV l’être , que
le sieur Veyssière est propriétaire jusqu’à la ^iHaisbn
R ixain, puisque lui et tous ses prédécesseurs ont acheté
cette propriété.
�I 12 5
Ils en ont joui sans trouble, non-seulement quand il
y avoit maison et cô u r, mais encore quand la maison
.étoit en. ruine et en jardin.
• Les matériaux de l’airiaL étoient sur place, .comme le
disent les actes, et il est de principe que vestigia posscssionern retinent.
La .procédure de 1773 prouve que quand le sieur
Veyssière eut b£tir, il s’opposa aux petites usurpations
dont ses voisins avoient pris rhabitude pendant que les
lie.ux ayoient été inhabités. Il prit naturellement, et sans
se douter qu’on pût le lui disputer, la qualité de pro
priétaire de' ce local; il’ fit juger .et afficher .cette qua
lité.; Mais quand- il n’y auroit eu que- sa requête, elle
suffiroit., .puisqu’il y a possession ,après' contradiction;
ce qui .est le plus puissant des titres.
/Toutes ces preuves accumulées sont tellement palpa
bles à la simple lecture des actes,,que la Goui* ne croira
certainement pas avoir besoin d’interlocutoire, dans une
.matière bailleurs d’un aussi mince intérêt.
La Cour ne peut pas être embarrassée par un conflit
-d’actes,qui.contrariex-.oient ceux qu!on vient de rapporter;
car les adversaires ont pris soin de n’en produire que
-.de,’semblables en tout point, pour les confins, aux actes
.(Je 17.04, 172X et 174$.
Ils ont signifié la vente consentie à Chavignac, leur
père et beau-père, en 1750. Elle c o m p r e n d la maison
•provenue des R ix a in , en Vétdt quelle est à présent
( ce qui prouve déjà que les étoupemens qui gvoient
eu lieu étoient l’objet d ’ une convention ). Cette maison
vendue est confinée par Vairial de la maison T^eyssière,
�r3 )
' Ce confia donné par le vendeur est donc une reconnoissance expresse du confin indiqué à Veyssière dans
sa vente de 1746. Et quand les adversaires ont dit devant
les premiers juges que Veyssière s’étoit fait donner ce
confia par subtilité, ils n’ont dit qu’une sottise, puis
que leur père achetait, quatre ans après, avec le même
c onf i ne t approuvoit mot pour mot ce qui étoit exprimé
dans la vente consentie au'sieur Veyssière.
- Maintenant il faut ajouter à ce titre si précis, et pro
duit par les adversaires eux-mêmes , la transaction de
IÔ29, encore produite par e u x , et il faudra reconnoi
tre que ces pièces émanées d’eux sont encore plus pro
bantes qu’aucune autre, pour démontrer que le sieur
Veyssière est propriétaire de tout le terrain qui est situé
entre la maison des adversaires et la rué d’Empessine.
......................
(
A vant de terminer, il ne faut pas négliger de répondre
a ce que les Filiol ont proposé encore comme des griefs
d’appel.
•
1
‘ i°. Ils disent que la sentence d’ Aurillac n’a pas pro
noncé sur l’appel incident par eux interjeté de la sen
tence de 1772.
Cette sentence regardoit Veyssière comme proprié
taire du local contentieux, et défendoit aux Chavignac
d’y placer des fumiers. La sentence d’Aurillac prononce
dans le même sens, en maintenant le sieur Veyssière en
cette propriété. C’étoit donc statuer sur deux appels qui
avoiçnt le même objet. D ’ailleurs'l’appel de la sentence
de 1773 n’étoit pas recevuble onze ans après la signi
fication.
�(
1
4
5
2°. Les Filîol objectent que la sentence d’Aurillac a
maintenu Veyssière en proprié lé, sans qu’il l’eût demandé.
Gela est d’une grande mauvaise fo i, si ce n’est pas
plutôt une chicane ; car en vérité il n’est pas possible
de supposer que le sieur Veyssière eût un autre but que
celui de conserver sa propriété. Dans tous ses écrits il
a dit qu’il étoit propriétaire ; partout il a conclu à ce
ce qu’il fût fait défenses aux adversaires de passer et
d’ouvrir des fenêtres; il est même allé jusqu’à conclure
à la mitoyenneté du mur des Filiol. Ainsi ses conclusions
étoient non-seulement' assez étendues, mais elles l’étoient
trop sans doute, puisqu’il a été débouté de sa demande
en mitoyenneté.
30. Les F iliol se plaignent d’avoir été condamnés
en la moitié des dépens.
Il est visible que ce grief n’est ajouté que pour faire
nombre ; car si les Filiol avoient raison, il leur étoit
inutile de faire un grief des dépens, puisqu’ils suivent
toujours la condamnation ; si au contraire ils ont to rt, ce
seroit plutôt le sieur Veyssière qui auroit à se plaindre de
perdre la moitié de ses dépens, à cause d’un chef de
conclusion qui n’occupoit qu’une bien petite place dans
tous les frais occasionnés par les adversaires,
Cette division de griefs, au reste, ne doit pas faire
perdre de vue l’unique question de cette afia ire. Les
Filiol n’ont pas prouvé que le local en contestation fût
une place publique : la commune n’y a jamais eu de
prétention; leurs propres titres les condamnent, et attri
buent la propriété au sieur Veyssière.
�( 1 5 )
Ainsi les premiers juges n’ont fait qu’ordonner l’exé
cution de tous les titres des parties , en lui conservant
cette propriete; et s’ils ont accordé un droit de passage
une porte et une fenêtre aux adversaires, c’étoit évi
demment le pis aller de ce que le sieur Veyssière avoit
à craindre.
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
Me. TARDIF, licencié avoué.
A I U O M , de l’im p. d e T H I B A U D , hnprim . de la C o u r im périale, e tlib ra ire ;;
ru e des T a u le s , maison LahdMOT». — N ovem bre x 8 n»,
�
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Veyssière, Joseph. 1811]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Tardif
Subject
The topic of the resource
limites de propriétés
conflit de voisinage
Description
An account of the resource
Précis pour Joseph Veyssière, marchand, habitant de la ville de Pleaux, intimé ; contre Antoine Filiol et Marie Chavignac, sa femme, habitans de la même ville, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1811
1721-1811
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0418
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pleaux (15153)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53802/BCU_Factums_M0418.jpg
Conflit de voisinage
limites de propriétés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53801/BCU_Factums_M0417.pdf
7707becb249e49f5ce060bbeb6698663
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Text
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r é p o n s e
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Pour F r a n ç o i s LE RASLE , ancien ’ avocat à u
parlement de Paris, habitant à Paris, intime
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et incidemment appelant ; .*, fy;:ino^ i! v.v -^n
*
le Directeur de la régie et des do
maines, p o u r s u iv a n t a u n o m d e monsieur
; le P R ÉFET du département du Puy-de-Dôme,
C o n tr e M .
la ca u se d e M
le b a r o n d e H o m p e s c h
*r lie u t e n a n t g é n é r a l a u ' s e r v ic e d e l'A n g l e
te r r e } a p p e la n t
^ m : 'Jt
. i'J: j'jfp'
présence de madame' M a r i e - E l i s a b e t h
T A L E Y R A N D D E P É R IG O R D , veuve
de Jacques-Charles d e C h abannes , intimée ;
En
E t en core en p résen ce de d a m e M
'
a r îe - L o u is e
B R A C H E T v e u v e 'd e R e c l e s n e ,~ H e n r i -
M ALLET,
C O Q , intimés, .
Joseph
et J a c q u e s
F IL L E .t:,
IS
IV',
i.;'
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i) l
e; cause de la plus grande 'simplicité- a été em
brouillée par des demandes en nullité e t en-reddition
de compte, que la régie ne-peut aujourd’hui -.justifier
A
U
n
�:
C 2 )
par aucun titr e , ni étaver par aucun texte de loi.
Pour ôter, un prix de vente aux créanciers d’une suc
cession bénéficiaire, et le recevoir elle-même, la régie
leur oppose une rquitfcance non enregistrée, pour l’op
poser à des actes" authentiques.
^
, , rEüe attaque 'de, nullité une inscription prise sur la
succession bénéficiaire., sous prétexte de l’erreur dans
la date d u 1m ois, q u o i q u e la séparation des patrimoines
ait été o rd o n n é e , et qu e l’acquéreur n’ait eu pour créan
cier de fait et de droit queles créanciers de la succession*
E n fin , elle persiste à demander un compte préalable
de gestion., sous prétexte d’une procuration ancienne,
sanS‘ pouvoir justifier d’aucune gestion ni versement de
dèniôrs.cLLrX \ : i
>
,
.. 0Qu£lque& faits é t quelques réflexions suffiront pour
renverser un système de résistance plus opiniâtre que
spécieux*
Vî - r t v.' î . ’A I ŒVS*;a
••Vf
' V: f- V
' '
L e sieur le .Rasle est’créancier, du sieur Jean-Frédéric
dè Chabanes, et de madame Marie-Élisabeth Taleyrand
deiPérigord:, sa irtière, d’une )Sümme .de 63,000 francs ,
pp^tée. Jÿar .obligation ; passée devant Eouchev, notaire
à P^risy-le 30. thernpidor 0an< 12.
—
‘ Par cet acte,^madame âe Ghabanes a subrogé le
sieur le Rasle à l ’effet d’une inscription prise par elle,,
le 26 ventôse an 11 Psur lés biens de Jacques-Charles
d^ ChafraneS ^ .son haari ■
>:et de Marie-JacquesfOilbert
deMuhabanes,; son fils ^ héritier ;dudit Charles.
i'xGettè insétiptidû*étoit de 2 2 1,8 58 .francs, rc’est-ù-dire,
�(3 )
*47 >*44' francs pour le capital de sa dot ou douaire y
* 3 >7 I 4 francs pour les intérêts*, et 60,000 francs pour
le droit d’habitation ou préciput de communauté ; mais
la subrogation n’est faite que jusqu’à concurrence des
53.000 francs dûs a u 1sieur le Raslé.
“
:• ,
L e 2g ventôse^ an 1 3 , M . de Chabanes. a. subrogé
le sieur le Rasle, pour plus grande sûreté, à l’effet d’une
inscription qu’il avoit prise lui-mêmé, le 9 prairial an 10,
sur la succession de M arie-Jacques-Gilbert., son.frère
(acceptée par lui sous bénéfice d’inventaire).
'i
Cette inscription étoit de 630,000 francs, c’est-à-dire,
300.000 francs pour la légitime dudit sifeur Frédéric, de
Chabanes, promise par son contrat de mariage, d u '24
juillet 1780, et le surplus pour intérêts échus ou à échoir*
M . de Chabanes n’étoit alors connu à Paris que
comme le descendant d’une illustre maison, et coirtme
l’inventeur breveté des vélocifers. On ignoroit que déjà
à Londres il avoit fait des entreprises de commerce, ni
quelle en avoit été l’issue.
'
M . le baron de Hompesch s’est présenté comme ac
quéreur de la terre de Rochefort, sur laquelle frappe
l’inscription de madame de Chabanes, dont il demande la
nullité et la radiation.
f-î
M . de Hompesch d it, dans son m ém oire, qu’il étoit
lié d'affaires et d’amitié,à Londres, avec M . de Chabanes*
Il a expliqué, dans d’autres écrits, la nature de.cette
liaison. M. de Chabanes avoit fait à Londres une grande
entreprise sur le commerce du charbon. M . de Hompesch,
sans révéler quelle sorte d’intérêtTil avoit dans cette
entreprise, se contente de dire qu’il aJréglé ses comptes
A 2
�(4 I
avec M . de Chabanes à 2,396 livres sterling 2 sons
et- dem i, -dont ‘M . de Ghabanès resta son débiteur;
2°. que ’M . de Chabànes parvint à fa ir e passer son
établissement sur Ict téte de M ►de Hompesch.
Quoi qu’il en soit du passé 7 il paroît que M . de Chabanes vendit à M . de Hompesch, par acte sous seing
privéy du 7 pluviôse an 1 1 , fait à Paris, i°. en qua
lité dûhéritier bénéficiaire de son frère, la terre de R oehefort ; 2.0. en son n om , une créance de i 5,ooo francs
sur la dame Bernard, veuve de Ghabanès, sa parenter
payable après le décès de ladite dame;. '
' L ’acte .ne. porte aucune compensation avec des créances
précédentes; au contraire,, M.-de Hompesch s oblige de
payer le p rix aussitôt après la transcription...
Ce prix de vente, n’est pas> fixé ; il fut remis à l’esti
mation des fsieurs W anhoorick et Houssey.
Ces arbitresivinrent. de Paris estimer la terre de R ochefort à 66,000 fiV, et le prix de la créance à'm oitié
du capital ? attendu l’usufruit. ( La dame Bernard avoit
quatre-vingts ans.- } j
•
: Cette vente alarma madame de Chabanes, qui n’avoifc
plus que ce 1gage, ( r ) pourj. toutes ses reprises. Il paroit
que guidée par le texte de la coutume de P aris, elle
cx’Ut devoir eri demander la nullité ( en l’an 12 ), comme
faite par un héritier bénéficiaire sans les, formalités lé
gales. • L
I,J . î
).
\
1' r
(1) La terre de Lapalisse, v e n u e par substitution d’un oncle r
ïi’étoit pas sujette à l’hypothèque de madame de Chabanes».
�( 5 )
- Cette demande avoit été accueillie par jugement du
22 floréal an 12 ; mais ce jugement fut infirmé en la
Cour impériale de la Seine, le 20 frimaire an 1 4 , par
le motif que la coutume d’Auvergne ne prescrit aucunes
formes à l’héritier bénéficiaire pour aliéner les biens de
la succession.
Il est bien à remarquer que lors de cet arrêt M . de
Hompesch ne ,dit pas le moins du monde qu’il eût rien
payé à son vendeur; au contraire, il demandoit acte de
ses offres de payer le prix de sa vente à qui il seroit
dit et ordonné.
M . de Hompesch avoit transcrit, mais il ne notifioit
pas sa transcription pour sommer les créanciers de faire
une enchère. Madame de Chabanes le mit en demeure
de faire cette notification , par exploit du 31 janvier
1806, pour être fait enchère s’il y avoit lieu, sinon elle
lui fit sommation de payer ses créances, en exécution de
l’art. 2169 du Code civil.
Cette sommation n’a pas engagé M . de Hompesch à
se mettre en règle; il a même vendu à M . de Sarrasin,
le 16 mai 1807, la terre de R ochefort, moyennant le
prix apparent de 72,000 francs, en se soumettant à faire
radier les inscriptions, et à ne recevoir 30,000 francs
qu’après cette radiation, sans intérêts jusqu’alors.
Pour tenir sa parole envers M . de Sarrasin , M. .de
Hompesch a assigné en mainlevée d’inscription, i° . la
dame de Taleyrand-Périgord,- veuve de Chabanes; '2?. le
sieur le Rasle, la dame de Reclesrie, lés .sieurs M allet
et V illecoq, tous subrogés à 1 inscription de. madame dé
Chabanes.
• .
.- - ,,
�C « .)
l i a prétendu que rinscription étoit n u lle, et que
bailleurs madame de Chabanes étant comptable envers
ses fils, n’avoit pas dû prendre d’inscription jusqu’à l’apu
rement de son compte.
Il a conclu encore à la reddition de ce com pte, et à
des dommages-intérêts.
Pour moyen de nullité de l’inscription, M . de Hompescli a dit que le contrat de mariage de madame T a leyrand de Périgord y étoit daté du 18 juin 1769, au
lieu du 18 février 1759.
M . de Hompesch a produit alors une quittance sous
seing p riv é , de M . de Chabanes, datée du jour même
de sa vente ( 7 pluviôse an 11 ) , enregistrée le 25 mai
1808, par laquelle M . de Chabanes auroit reconnu avoir
reçu par anticipation, de M . de H om pesch, 86,000 fr.
Il s’est prévalu de cette quittance pour dire qu’il y
avoit compensation et payement des 66,000 fr. dûs pour
p rix de la terre de Rochefort ; d’où il s’ensuivoit que les
inscriptions étoient inutiles pour le forcer à payer ce dont
il étoit déjà libéré.
' Pour prouver que madame de Chabanes étoit comp
table envers son fils, M . de Hompesch a produit une
procuration à elle donnée le 30 juin 1782, pour régir
ses biens, et un bail à ferme de la terre de Curton, du
4 janvier 1783.
Madame de Chabanes a répondu que son inscription
étoit régulière, et que loin d’avoir fait usage des pro
curations à elle données pour recevoir aucune somme,
elle prouvoit être en avance de fonds.
ELle a conclu à la séparation des patrimoines.
.
�(7 )
^ D e son côté, M; le R asle, plaidant avec les deux ins
criptions de l’an 10 et de l’an n , a pris les mêmes
conclusions que madame de Chabanes , en ajoutant que
1 effet de 1 inscription de l’an io devoit lui être adjugé,
comme seul subrogé à cette inscription, contre laquelle
M . de Hompesch ne proposoit aucun moyen de nullité;
* -^ar jugement du 14 avril 18 10 , le tribunal de Clermont a décidé , i ° . que l’inscription de madame de Cha- banes étoit régulière, parce que la date du mois et de
Tannée étoit conform e, et qu’il n’y avoit pas d’autres
actes de la même année; 20. que la compensation n’avoit
pas lieu par un acte sous seing p rivé, au préjudice des
droits acquis à des tiers , surtout en succession bénéfi
ciaire; 30. que la séparation des patrimoines est de droit,
et s’oppose encore à toute compensation ; 40. que les
prétentions de M. de Hompesch, à faire déclarer madame
de Chabanes comptable et débitrice, doivent être dis
cutées lors de l’o rd re, dont il ne s’agit pas.
En conséquence, le tribunal de Clermont a déclaré
l’inscription valable , a ordonné la séparation des patri
moines demandée par madame de Chabanes, et a con
damné M , de Hompesch à rapporter le prix de son
acquisition, sous réserves des droits respectifs des parties,
même du sieur de H om pesch, pour les faire valoir à
l’ordre.
Sur le surplus des demandes, les parties ont été mises
hors de Courr
’ <
L a régie de l’enregistrement a été autorisée par M. le
�( 8 )
•Préfet du P uy-de-D ôm e à mettre le séquestre sur les
biens de M . de Hompesch, comme sujet de l’Angleterre,
et à interjeter appel dudit jugement.
- M . le Rasle ne voyant aucun chef du jugement statuer
sur ses conclusions, et craignant qu’on ne lui objectât
le hors de Cour prononcé, pour l’éliminer de l’instance
sur l’ap p el, a cru devoir interjeter un appel incident,
m otivé sur le silence du jugem ent à son égard, et no
tamment en ce qu’il ne lui avoit pas adjugé tout l’effet
de l’inscription de l’an 10.
C ’est en cet état que la cause fut présentée en l’au
dience d elà C ou r, du 8 juin 1811. Les conclusions de
M . de Hompesch étoient toujours pour la nullité et
radiation des inscriptions, et subsidiairement pour un
compte. Cependant l’arrêt ordonne seulement une plus
ample contestation sur le compte demandé à madame de
Chabanes, jet sur le bénéfice de la séparation des pa
trimoines.
lia régie*, parlant aujourd’h u i au nom de M . de
H om pesch , n’en revien t pas m oins à toutes ses prétentions.
Elle veut encore la nullité de l’inscription de madame
de Chabanes, pour erreur dans le mois de l’année 1769.
Elle refuse à madame de Chabanes le droit de de
mander la séparation des patrimoines, parce que, dit-elle,
elle n’est pas créancière.
Enfin, la régie ajoute que si m adam e de Chabanes
est jugée créancière, son fils, qui a droit comme elle à
la séparation des patrimoines, primeroit son hypothèque,
ayant une inscription antérieure.
' Néanmoins ayant bien compris que ce dernier moyen
servoit
�servoit au sieur le Rasle plus qu’à lu i, la régie se hâte
de dire que M . de Ghabanes n’a pas pu subroger M . le
Rasle a son inscription sur Rochefort , parce qu’alors
les choses n etoient plus entières , M . de Hompesch étant
libéré du prix de sa vente par un payement antérieur.
T e l est le sommaire des moyens de M . de Hompesch.
M. le R asle, qui les a déjà réfutés, s’en tiendroit à ses
précédens écrits, si l’arrêt de la Cour ne lui faisoit un
devoir de donner une plus grande explication sur le fond
de la contestation , qui avoit été renvoyé aux discussions
de l’ordre. Il doit donc se défendre aujourd’h u i, comme
préparé à être jugé sur le tout. Ainsi le sieur le Rasle
va répondre aux prétentions de M . de Hompesch, dans
le même ordre qu’il les propose ; après quoi il résu
mera ses propres prétentions, comme corollaire de ce
qu’il aura prouvé.
§• Ier.
L'inscription de madame de Chabanes ( cédée au sieur
le R a sle, pour 53,000fr a n c s ) est-elle nulle?
Il y avoit une question préalable que M . de Hompesch
a jugé à propos d’omettre, quoiqu’elle eût été agitée
la première audience de la Cour.
E to it-il besoin d'une inscription ?
M . de Hompesch auroit pu trouver tout à la fois la
solution de ces deux questions dans le silence même de
l’arrêt du 8 ju in , qui ne laisse à statuer que sur le pré
tendu compte et ses résultats, sans rien préjuger sur le
Jbnd, Alors M , de Hompesch se seroit épargné l’articlë
R
�(
Ip
)
p rin cip al de sa [discussion;, celui* à la vérité q u il avoit
fortifié- le plus , parce qu’il paroissoit y; attacher le plus
d’importance.
-.•• •
Ce n’est, pas sans une grande méditation que la Cour’
a>élagué les;fins^de nç.n-reçevoir , qui eussent été pré
judicielles et péremptoix’es ; c’est qu’en effet, il n’est
plus douteux;iquç¿les créanciers n’ont besoin d’aucune
inscription pour depaander la séparation des patrimoine»
dans les -successions ou,vertes avant le Code civil»
; Les titres;<du code et du digeste D e bonorum sépa
ration ibu s, la loi sur le régime hypothécaire, du 11 bru,maire an 7 , açcordojenl; expressément.et sans condition y
aux créanciers du défunt*, le droit dedemander la sépa
ration des patrimoines. L ’art. 878 du Code civil donne
le même droit dans tous les cas et contre tout créancier.
A la vérité, l’art. 2111 exige une inscription dans les
six mois de Y ouverture de. la succession, et défend de
prendre hypothèque valable sur l’héritier avant ce délai.
Mais, il n’étp.it pas possible, d’appliquer cette disposi
tion aux successions anciennes , vsans un effet rétroactif
que la loi prohibe, et même sans contrarier ouvertement
le texter.de la lo i, qui n’entendoit*pas fixer un délai,
quand ce délai étoit pass-é.
A u surplus, cette question a; été solennellement jugée
en la Cour de cassation, par arrêt du 8 mai 1811*, qu’il
est inutile de transcrire, parce que tous, les arrêtjstes
l ’ont recueilli comme fixant la jurisprudence. (Denevers,
18 i l , page 267. Sirey., 1 8 1 1 , pag* Bibl. du, barreau,
année 18x1. Jurisp.,du Code civil,, etc.)
jXon-seulejcaent ce point de droit est constant aujour-
�r( xO
d’iiui pour toutes les successions anciennes,'mais ikfaudroit le dire de même pour une succession oüverte'sous
le Gode c iv il, lorsqu’elle n’est acceptée que sous bénéfice
d ’inventaire.
Car , à l’égard d’une-telle succession, la séparation
des patrimoines est de d roit, puisque, i° . l’effet du bé
néfice d’inventaire est à*empêcher la confusion des biens
de l’héritier avec ceux de la succession, suivant l’art. 8oa
du Gode civil ; 2 l’héritier bénéficiaire n’est qu’ un
administrateur qui doit rendre compte aux créanciers
de la succession, d’après l’art. 803.
?
• Il ne faut donc pas d'inscription pour avertir les
créanciers personnels de l’héritier de ne pas compter
sur une confusiorn‘ impossible ; et. à ; quoi senviroit-elle,
lorsque l’art. 2146 du Code a dit que les .inscriptions
prises depuis l’ouverture d’une «succession bénéficiaire,
ne produisent aucun effet entre les créanciers de la
succession.
Ces principes viennent fl’être appliqués par un* arrêt
de la Cour impériale de Paris, entre le sieur -Pigal,
créancier chirographaire de la succession Ledoux ( ou
verte sous le Code civil , et acceptée par bénéfice d’in
ventaire), et les créanciers inscrits de la dame C hol,
héritière bénéficiaire. Ceux-ci prétendôient à la priorité /
comme seuls hypothécaires et inscrits; ils réclamoient
le bénéfice de l’article 2 1 1 1 , qui exige une inscription
dans les six mois pour permettre la séparation des pa
trimoines. Mais la Cour de Parislajugé.autrem ent.
« Attendu que par cela .seul qu’une succession .est
« acceptée par bénéfice d’inventaire, la séparation des
B 2
�( 12 )
« patrimoines existe nécessairement ; que les créanciers
« de l’hérédité n’ont pas besoin, en ce cas, de demander
« cette séparation ; que c’est par une conséquence de ce
« principe, que l’article 2146 du Gode Napoléon porte
« que l’inscription prise depuis l’ouvertue de la succes« sion , ne produit aucun effet entre les créanciers de
« cette succession, lorsqu’elle est acceptée sous bénéfice
« d’inventaire ;
« Attendu que l’article 2 111 ne s’applique qu’aux suc« cessions acceptées purement et simplement;
« M et l’appellation et ce dont est appel au néant ; émen« dant, décharge l’appelant des condamnations contre
« lui prononcées.
. ■
« D u 20 juillet 1811. Cour impériale de Paris (1). »
D ’après cela , et puisque madame de Chabanes est
créancière d’une succession non-seulement bénéficiaire,
mais encore ouverte avant le Code civil, il ne paroît pas
fort essentiel de suivre M . de Hompesch dans sa disser
tation sur l’effet que doit produire, dans une in scrip tion ,
la différence entre le 18 fév rier ^rj 5g, et le 18 Juin 1759.
Les deux arrêts copiés par M . de Hompesch n’avoient
d’ailleurs qu’une application fort indirecte à la cause ac
tuelle; car dans le premier (du 22 avril 1807) il s’agissoit
d?une inscription faite sans la moindre mention d’un titre;
dans le second (du 7 septembre 180 7), l’inscription ne
eontenoit ni les noms, ni les prénoms des créanciers pour
qui elle étoit faite, ni la vraie date du titre; en sorte
(1) Sirey, supplément, 18117 PaS* 385. Deneyers , supplé
ment, j 8 n , pag. eoo.
�( ;! 3 )
_
_
v
qu’il étoit impossible de casser l’arrêt qui avoit jugé une
semblable inscription irrégulière.
T ou t cela, n’a rien de, commun-jt ,u ne, inscription où
le nom et le prénom du créancier, le nom et le prénom
du débiteur, la*date'de l’année, et l’époque de l’exigi•bilité sont réguliers. Qu’importe après cela la ’différence
.du m ois, lorsqu’aucune hypothèque de; la ’mêmeoànnée
'n ’est en concurrence;lorsqu’il seroit ridicule de’ supposer
-un mariagevarrivé deux fois dans la même année entre
les mêmes personnes ;, et lorsqu’enfin avec le secours des
’tables' alphabétiques des contrats de mariages 'établies
-dans ' tous les bureaux d’enregistrement / depuis 174 0 ,
-aucun créancier postérieur ; ne pourroit prétendre de
bonne foi se trouver dépaysé dans' ses recherches.
Ce moyen dé nullité avoit été parfaitement'discuté
par le jugement dont est appela qùi l’a rejeté. Rien n’étoit
plus pitoyable, en'effet , que d’avoir crû'renverser un
titre avec un aussi frêle’ moyen •d’attaq u e:‘>’a ücupium
sjlla barum , et rien de plus.
'
‘ ’I '
r. . : Vp
A u reste, cette arme s’est; brisée dans les mains de
’ M . de Hompesch , depuis l’arrêt de cassation dont il
n’a pas jugé a propos de parler , parce;qu’il lui eût été
trop difficile d’en esquiver l'application. ■ ^ ;
A in s i, et dans toutes les1 hypothèses, Madame de
Chabanes a un titre 'd é créance régulier sur la succes
sion bénéficiaire de son mari ’et de son fils (G ilbert).
La terre de ' R o ch efort est son gage, et ce gage est
affecte spécialem ent à la créance de M .-le R asle, pour
•■un capital de 83,000‘frai-ùiSr' ; '
" c,' .1.1 ! :
�'(i4)
§. I I.
,
'
Madame de Chabanes est-etie créancière?
Alitant «M. dè Hompesch favoit été abondant dans
jses idées pour )discuter la question précédente sur ;là•quelle la Cour n elu i avoit demandé aucune explication ,
•lautant il ;acétéîbref et stérile sur la prétention élevée
op&rjluL, que madame de Chabanes >/’est pas créancière.
• En dix Ugnes bien comptées, M . de Hompesch a
-stout dit./Unejprocuration’du 30 juin ¡1781 (1) /u n bail à
cferme du i4)ja.nvier 1783, une procuration du 20 mars
',178.6, pour vendre deux cents carreaux de terrain ap
partenant à son fils à St.-Domingiie-, voilà, suivant M . de
Hompesch, trois pièces qui prouvent tout ce que la
Cour a voulu ;savoir. Il croit sur la foi de ces dix lignes
que madamje de Chabanes doit être réputée -débitrice,
sans autije démonstration, et il le croit rpar cela seul
qu’il y a conclu : C red id i propter qu od lo cu tu s su m .
Ce qui valoit cependant la peine d’être recherché, c’étoit
l’usage que madame de Chabanes pouvoit avoir fait de
ces procurations pour recevoir. Car enfin il arrive tous
les jours que celui qui voyage donne un pouvoir pour
•renouveler ses baux our faire d’autres actes urgens en
-son absence , sans que pour cela le mandataire ait touché
les revenus du mandant. Il eût été fort aisé à M . de
Hompesch de compléter ses preuves, en puisant dans
(1) Elle est du 3o juin 1782. Vérifié sur les pièces même de
M. de Hompesch.
�( i 5 )
tes mêmes sources ou il a trouvé les* trdîs'actes dont ifr
se prévaut. Les inventaires et 'papiers* de la maison dfe
Chabanes étoient à sa disposition^, puisqu’ils sont proLI
duits par madame'de CHabanesi
' * ‘
; Régulièrement c’étoit à M . de Hompesch à prouver
que madame de Chabanes avoit reçu* des sommes pour
son fils, puisqu’il a articulé ce fait, et cju’jil est deman
deur. M. le Rasle. pourroit avec plus de raison éluder
la difficulté, en disant que madame de Chabanes reste
créancière de sa dot et reprises, tant qu’on ne rapporte
pas des quittances de compensation. Mais l’arrêt* de la
Cour ne seroit pas exécuté; et pendant que M. de Hom
pesch se récrie sur la lenteur de ce procès qu’il ne veut
pas éclaircir,, M . le Rasle va donner à la Cour les ex
plications qu’elle demande, parce*qu’il'plaide pour tout
autre motif que* celui de contrarier M.- de; Hompesch.
Il a l’intérêt très-réel de recouvrer son argent.
Mademoiselle de Taleyrand-Périgord'se marià‘Te 18
février 17 5 9 , avec M . Jean-Charles d e‘ Chabanes.
.E lle se constitua en d o t, x°. ses droits légitimaires
paternels, tels qu’ils étoient réglés par acte d e ’ liquidaT
tion passé entre. M . de Taleyrand-Périgord et ses enfans,
le 14 juin 17 5 7 ; 2<\ une rente d e 56,000 francs^annuel
lement sur l’état ; 3p. une rente viagère-' de 42 francs,
constituée en tontine sur sa tête, par sa bisaïeule; 40: la
dame de Taleyrand:, sa mère , lui lit donation de 80,000 fr.
L e douaire de la future fût fixé à 6,000 francsde rente
viagère, réductible à 4,000 francs*, en casd’enfâns, et le fonds du douaire- fut réglé à! 80,000 francs.
Il lui fut assuré un droit d?habitâtion-dans l’un des
�( *6 )
châteaux du futur; avec meubles nécessaires et convena
bles à sa qualité , et la jouissance des jardins, parcs et.
prés-clôtures dudit château.
L e préciput de communauté fut fixé à 26,000 francs,
que la future pourroit retirer, même,en renonçant à la
communauté, avec son carosse, sa toilette, garderobe, ,
diamans et bijoux»
* . 1
.
.
j
, M . Frédéric çle Chabanes, fils de Jean-Charles, se maria
10,24 juillet 1780, avec mademoiselle de Y o yer d’A r genson. Son ¡père lui donna pour légitime 300,000 fr.
M . de jChabanes père, accablé de dettes, en France,
et ayant obtenu une concession de terrains à Saint-Do
m ingue, partit pour cette île, à la fin de 1779, et laissa,t
dit-on , une procuration, faisant espérer vraisemblable
ment à ses créranciers des fonds d’A m ériq u e, q u i, comme <
on va le voir, ne devoient jamais arriver à leur destination.
A peine débarqué à Saint-Domingue, M . de Chabanes
ne pouvant sans doute exploiter les terrains concédés.
sans une habitation, en acheta une du sieur Bourguignon,
appelée des Trois-Palmistes.
Il paya un à-compte de 26,300 francs, mais avec les
deniers du sieur Jouette ; le surplus du prix n’étoit pas
payé à sa m o rt, pas plus que le prix de seize nègres
qu’il avoit achetés.
.
M , de Chabanes père mourut à Saint-Domingue, le 26
septembre 1780, laissant un testament du
par lequel
il légua son habitation d e s Trois-Palmistes à M . le baron de
Taleyrand-Périgord, à la charge d’en payer le prix, e t .
cçlui des sei^ç,nègres, et de rembourser M . Jouetlc, .
�( *7 )
Madame de Chabanes fut nommée tutrice de ses dèux
enfans , mais seulement honoraire. L e sieur Morandez
.fut nommé tuteur oneraire; et lui seul, suivant l’usage ?
dut toucher les revenus, pour en rendre compte.
On va tout d’un coup apprécier ce que pouvoient être
ces revenus, après la déduction des charges.
Dans un précédent m ém oire, M . de Hompesch évaluoit à 23,600 francs le revenu des terres de la succes
sion (1).
Sans perdre du temps à prouver qu’il y a de l’enflure
dans cet état, voyons seulement les charges relatées dans
l’inventaire lui-mêine (d u 18 janvier 178 1).
La succession devoit,
i°. En rentes perpétuelles, dont le capital au denier
vingt é t o it......................................................... 41,700 fr.
2°. Des rentes viagères, dont le capital au
denier dix étoit d e .........................................
30,000
3°. En obligations ou effets, avec ou sans
in térêts............................................................... 176,202
40.' A u x fournisseurs de la m aison.........
16,254
5 °. Dettes de Saint-Domingue.................. 638,000
Qu’on ajoute à cela les arrérages et intérêts non payés,
les reprises de madame de Chabanes, etc., on sera con
(1) M. de Hompesch y ajoutait 20,000 francs de rente pour
Lapalisse, idéalement, à la vérité, et par un simple calcul de
probabilité. Mais la terre de Lapalisse venoit de Jean de Çhabanes , qui l’avoit substituée au profit de l’un des enfans de
Charles de Chabanes ; ainsi cette terre n’a jamais appartenu à
la succession.
G
�(r8)
vaincu à Pinstant que les revenus étoieut au-dessous de
zéro.
.
Madame de'Chabanes en fut si promptement iconvain
cue, qu’elle renonça à la communauté par acte du 7 juillet
'1781, pour s’en tenir à ses reprises. ( L ’inventaire n’étoit
terminé et clos que le 16 juin 1781. )
Ses deux fils se portèrent héritiers bénéficiaires , et
traitèrent sur la substitution de'Lapalisse, qui fut déclarée
appartenir à Frédéric, par acte du 30 mars 1782, homo
logué au parlement.
Jusque-là madame de Chabanes n’avoit eu aucune ges
tion. Son fils Frédéric, marié et émancipé avant la mort
de son p è re , jouissoit de ses revenus. Madame de Cha
banes avoit eu quelques instans la qualité de tutrice hono
raire de son fils Gilbert ( émancipé l e .14 janvier 1782);
mais l’inventaire prouve que tout l ’actif et les papiers
de la succession furent.remis au tuteur onéraire, le sieur
Morandez. C’est donc à-celui-là seul qu’on a un ^compte
à demander pour, cette première époque. •
En 1782, ^Gilbert de Chabanes, partant pour SaintDom ingue, laissa ¿.madame de Chabanes, sa m ère, une
procuration (le 30 juin 1782) pour régir ses biens de
France, toujours communs et indivis avec son frère, qui
n’avoit pas encore répudié. Ne pouvant mettre à la voile
qu’en juillet ou ao û t, on présume bien qu’il se munit
de tous les fonds que les fermiers purent lui donner,
sans s’embarrasser des charges qu’il laissoit à acquitter.
Son voyage fut aussi court qu’il pouvoit -l’être. IL ne
dut rester que quatre ou cinq mois a Saint-Domingue;
eau il se trouve un acte notarié ; souscrit par lui en
�f
î
France le 29 juillet 1783; et nous allons voir par d’autres
actes qu il ne s’absenta plus jusqu’à la fin de l’année 1788.
L e seul usage qu’ait fait madame de Chabanes, de ce
pouvoir du 30 juin 1782,, ou plutôt le seul- qu’on lui
im pute, est un bail à ferme de la terre de Curton, fait
en vertu d’une procuration de madame de Chabanes , du
14 janvier 1783, devant un notaire de Bordeaux (1).
M . de Hompesch ne prétend pas que ce bail prouve le
moins du monde que madame* de Chabanes ait rien
touché par anticipation sur ce bail ; et quant aux termes
à échoir, on voit que M . Gilbert.de Chabanes étoit déjà
de retour avant que le premier terme eût pu arriver.
Gilbert de Chabanes avoit eu le temps de connoître le
mauvais état de sa fortune à Saint-Domingue. Il en re
vint dans le printemps de 1783, et le premier acte connu
qu’il fit en France fut une déclaration du 29 juillet 1783,
pour consentir à l’exécution du testament du p è r e , et
à la délivrance des legs.
M . le baron de Taleyrand - Périgord , légataire de
l’habitation des Trois-Palmistes (à la charge de la payer),
s’en mit en possession ; et par arrangement de famille
(1) M. de Hompesch avoit dit dans un premier mémoire que
le prix de ce bail étoit de 7,000 francs, qu’il mettoit en ligne
pour faire monter le revenu de la succession à a3,6oo francs.
Mais où avoit-il pris ce fait? Ce n’est pas dans le bail; il ne l’a
pas dans son dossier : il a l’inventaire de 1789, où ce-bail1 est
énoncé, cote 3, et le prix n’est que de 3, 5oo francs.
Il cite aussi les baux des autres terres, e£ ne les produit pas.
Est-il aussi exact pour ceux-là que pour Curton?
C 2
�f20)
avec madame de Chabanes, sa sa u r, il lui vendit celte
hab talion iè n août 1783.
* Madame de Cliabanes eut donc des démarches à faire
pour régir cette propriété, ou pour en vendre de quoi
faire les payemens les plus urgens.
V oilà ce qui explique les deux procurations des 5 mai
1784, et 20 mars 1786, où M . de Hompesch prétendoit
trouver des preuves si claires de la gestion de madame
de Chabanes, et même des ventes par elle faites de la
propriété de ses fils.
La procuration du 5 mai 1784 contient pouvoir par
madame de Chabanes à M . le comte O gorm an, résidant
à Saint-Domingue, de régir et affermer l’habitation des
Trois - Palmistes, appartenant à ladite dame de Cha
banes (1) ; et celle du 20 mars 1786 lui donna pouvoir
d’en vendre deux cents carreaux ( l’habitation en avoit
trois cents ). On ignore si cette vente a eu lieu ; mais il est
inutile de le rechercher, puisqu’elle ne vendoit que sa
propriété, et non celle de ses enfans.
Madame de Chabanes se mêloit si peu des revenus
de son fils depuis son retour en France, qu’il est prouvé,
i°. par deux procurations des 24 février 1784, et 17 août
1 7 8 5 , que Gilbert de Chabanes avoit chargé M . de
Junquières, avocat, de ré g ir , affermer ses biens de
France, recevoir tous loyers et rentes, etc. ; 20. par trois
(1) M. de Hompesch a imprimé dans son dernier mémoire,
page 16, que madame de Chabanes avoit donné une procura
tion , le 20 mars 1786, pour vendre deux cents carreaux de
terrain a p p a rten a n t
à
son fils- dlîlé*
�( 21 )
procurations des 8 mars 1785, 20 mars 1786, et 31 janvier
* 7^7 y qu’il avoit chargé M . Bessaiguet de Léogane de
régir ses biens d’Am érique, et d’en toucher les revenus;
3°. par des baux des 10 septembre 1785, 16 mars 1787, et
25 février 1788, qu’il afferma par lui-même , ou par
d’autres mandataires que sa mère 5les terres de Rocliefort,
Madiq et V iq , à l’expiration des baux précédens; 40. par
des actes des 6 mai 1786, 29 avril 1786, et 30 juin 1788,
qu’il régloit ses affaires et ses com ptes, tantôt par luimêm e, tantôt par ses agens, mais toujours sans l’inter
vention de madame de Chabanes. *
Tous ces actes sont faits aussi sans la participation de
Frédéric de'Chabanes, parce qu’après avoir e u , comme
on l’a d it, la qualité d’héritier bénéficiaire, Frédéric
avoit répudié, le 30 décembre 1785, à la succession de
son p ère, pour s’en tenir, aux 300,000 francs de légitime
assurés par son contrat de mariage.
M . Gilbert de Chabanes, parti une seconde fois pour
Saint-Domingue à la fin de 1788, y mourut le 6 mai
1789 : son inventaire fut commencé à Paris le 6 juillet
suivant.
M . de Hompesch avoit d’abord affecté de remarquer
que madame de Chabanes parut à cet inventaire comme
héritière des meubles et acquêts, qualité de laquelle il
tiroit de grandes conséquences. 11 eût dû y voir plutôt
qu’elle n’y étoit à la première séance que comme habile
à se porter héritière, et qu’élle n’y étoit plus du tout
à la seconde séance , au moyen de sa renonciation.
En effet, dès le lendemain de l’ouverture d’inventaire,
et par acte du 7 juillet 1789, madame de Chabanes avoit
�( 22 )
renoncé à Ja succession de son fils; sa- répudiation, datée
et énoncée à la seconde séance, ne pouvoit pas être igno
rée de M . de Hompesch ,, qui a cet inventaii'e dans son
dossier.
Frédéric de Chabanes accepta la succession par bé
néfice d’inventaire r le n juillet 1789, fit continuer l’in
ventaire comme seul héritier de son frère, et se mit en
possession^ des biecfs en cette qualité.
V oilà tous les éclaircissemens qu’il a été possible de
donner à la Cour sur la prétendue gestion de madame
d€ Chabanes. Il est prouvé qu’elle n’a eu de gestion que
pendant la fin de 1782, jusqu’au milieu de l’année 1783;
et on ne montre aucun payement fait en ses mains en
cette qualité.
M ais, comment vivoit donc . madame de Chabanes,
a voit demandé M . de Hompesch, si elle ne touchoit
rien? Sa dot étoit si médiocre !
A cette question tudesque, madame de Chabanes ré
pondit qu’elle avoit, i ° . la rente de 6,000 francs portée
en son contrat de mariage; 2°. son traitement de dame
d’honneur, de 4,000 francs; 30. un brevet de pension
créée pour elle en 1779, de 6,997 francs.
Quoi qu’il en soit, il est prouvé que madame de
Chabanes ne doit aucun compte ; 011 si on insiste à vouloir
qu’elle en doive un pour six mois, elle l’a rendu, en
disant qu’elle n’avoit rien touché, et qu’au contraire il
est prouvé, par l’inventaire de 1781 , que madame de
Chabanes étoit en avance de
francs.
�( 23 )
Ainsi , M .’ le Rasle, son subroge*, revient présenter
avec confiance l’inscription d u 2,6 ■
ventôse an 1 1 , et
■conclure, non-seulement à ce ,qu’elle 1ne soit pas rayée,
mais encore à être -colloque pour 53,000 francs et les
intérêts , au rang de cette inscription.
Est-elle ou’ n’est-elle pas exagérée 1quanÈ aux arrérages
et droit d’habitation ? M. de Hompesch ne dit plus rien
là-dessus’ : au reste^ cettë^ discussion'¿^appartient qu’à
madame de Chabanes. Car il suffit à *M. *le Rasle qu’i l y
ait une créance incontestable dè 53,000 francs, et il n’a
besoin d’aucune nouvelle explication pour prouver ce fait.
7
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& inscription de Frédéric de Chabanes doit-elle primer
celle de madame de Chabanes ? et M . de Hompesch
est-il aux droits de M . de Ghabanes-contrite libéré?
pour réclamer cette priorité ?- Mi/ ,4‘ &***■ •r '
j
k
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ja
...
I /
•; J
M . de Hompesch le dit ainsi, croyant s’attribuer à lui
seul la créance de M. ide Chabanes, au préjudice de la
subrogation faite à M . le Rasle.[J
oooço^;u r;o
:>
Pour arriver à cette démonstration, il part d e: lo in \
et il est obligé de confesser des principes èt des faits qui
doivent abréger singulièrement la difficulté. Car M .-le
Rasle va s’en emparer* à l’instant, commè de chose utile
à lui seul.
i'
.
;fni
i
Frédéric de Chabanes, dit M . de Hompesch, -est créant
cier de son père et de son frère\ en’ vërtu de ¿Ôn cotitra'fc
de mariage ^ donc il a aussi-le droit de demander la
�.
( M )
.séparation des patrim oines.. . . . . . Adopté. Car M. de
Chabanes, simple héritier bénéficiaire de son frère, n’a
pas fait de confusion : il peut donc venir comme créan
cier , de son chef, à la succession du défunt.
L ’effet de la séparation des patrimoines , continue
M . de, H om pesch, est de faire payer les créanciers du
défunt '.avant, ceux de Vhéritier ; elle établit un mur de
séparation entre ces d eu x’ classes de créan ciers............ ..
Adopté encore. M . de Hompesch a traité avec Frédéric
de Chabanes, et il- n’a de garantie que contre son ven
deur. , M. $e Hompesch n’est pas créancier de la suc
cession ’ il ne peut donc pas venir en p riorité, ni
même en concurrence avec madame de Chabanes, qui
est créancière de la succession. L e mur de séparation
est bâti par M. de Hompesch lui-m êm e ; il faut que
les créanciers de la succession bénéficiaire soient d’un
côté avec le prix de l’immeuble; l’acquéreur restera de
l ’autre avec les créanciers personnels du vendeur.
C e n’ étoit p a s , à la v é r it é , p o u r cette conclusion que
ft/h de H om pesch a placé M . de Chabanes au rang de
créancier de la succession , et q u ’il lu i a accordé une
créance de 630,000 francs; il continue son raisonnement,
et; i l dit
‘ :
’
• J ’ai payé 86,000 francs à) mon vendeur, le jour même
de ma vente ; donc je suis libéré par compensation. Il
a reçu cette somme sans im p u ta tio n , et je suis maître
de l’imputer sur la terre de R o c h e f o r t plutôt que sur la
créançe vendue. M on vendeur a donc touché sa propre
créance hypothécaire et inscrite ; ce qui me met à sa
plaqe pour son inscription.
Autant
�( 25)
Autant d’erreurs que de mots.
Que peut signifier à des tiers une quittance occulte
et suspecte, contradictoire avec le titre même de M . de
Hornpescli, et avec le langage qu’il a tenu pendant
quatre ans?
En quoi et comment cette quittance, fut-elle authen
tique, vaud roit-elle libération, compensation, subro
gation, etc., après une transcription qui forme un contrat
•judiciaire tacite, vinculum ju r is , entre l’acquéreur et
les créanciers dont l’immeuble est le gage ?
M. de Hompesch , se disant créancier de M . de Cîiabanes, tantôt de 9,900 livres sterling (o u 230^00 fr .),
tantôt de 2,396 liv. 2 s. et demi sterling, produisant
aujourd’h ui, pour le prouver, quatre actes publics passés
à Londres, et contenant obligation de i 6 , 5oo liv. sterling,
ou , si on veut, de 8,080 liv. sterling (1), auroit-il oublié
(1) Ceci mérite une explication qui ne sera pas inutile pour
montrer que M. de Hompesch sait parfaitement faire ses affaires,
et qu’ainsi il ne faut pas attribuer à une simple négligence les
précautions qu’il dit n’avoir pas voulu prendre lors de sa vente.
Voici le style de l’une de ces obligations.
« Soit notoire à tous, par ces présentes, que moi Jean-Frédéric
« de Chabanes-Lapalisse, marchand de charbon de Mille-Banck« Street-Westminster, reconnois devoir et être fermement en« gagé envers M. Charles Hompesch, communément appelé le
« baron de Hompesch Nei/i E lm s, dans le comté de J u ry, en la
« somme de huit mille livres sterling, argent bon et légal de
« la Grande-Bretagne, etc.
cc La condition de l’obligation ci-dessus, est que si le susdit
D
�c * 6 ')
qu’il a avoué avoir été lié d’intérêt avec M . de Chabanes à Londres , et avoir succédé à ses magasins et
marchandises?
Sa prétendue quittance ne contient libération sur le
passé que de 36,000 francs, q u i viennent, a-t-il dit, en
déduction du p rix des ventes. L e surplus est un nouvel
emprunt de 5 o,ooo francs en traites sur Londres, et en
cautionnement d’effets.,
On croiroit que M . de Hompesch, pour corroborer
cette pièce, -et donner quelque vraisemblance à. sa date,
rapporte au moins les comptes et les traites acquittées :
point du tout; il ne justifie rien..
M . de Hom pesch, qui veut ne pas payer un prix de
vente, et qui prétend établir une concurrence avec des
créanciers hypothécaires, ne s’est pas flatté, sans doute,
«
te
«
«
engagé 'Frédéric Chabanes-Lapalisse , ses héritiers, exécu
teurs et administrateurs , payent ou payeront exactement
et fidèlem ent, ou feront payer audit Charles Hompesch la
pleine somme de q u a tr e m ille liv r e s sterling de monnoie
<c légale de la Grande-Bretagne, avec les intérêts de ladite somme
« à cinq pour cent par an, à dater du jour de la susdite obli
ge gation, aussitôt la demande fa ite ; alors, le bon ci-dessus
c<
cf.
cc
<c
cc
de h u it m ill e l i v r e s Csterling) doit être n u l, sinon le susdit
bon ou la susdite obligation doit rester dans toute sa force
ou pleine valeur.
<c Londres, Tan fa*, du règne de notre souverain seigneur
Georges I I I , roi des royaumes unis de la Grande-Bretagne,
dans l’année de notre S e ig n e u r 1802.
• ce S ig n é J o h n -F r é d é r ic d e C hab an es -L a p a lis s e . »
�( *7 )
de venir dispute? le gage des autres créanciers avec un
chiffon sans date et sans probabilité, comme s’il eût été
le maître de se donner une créance.
: Dans sa propre vente du 7 .pluviôse an 1 1 , M . de
Hompesch ne dit pas qu’il a payé; il d it, au contraire,
qu’il payera le prix après la transcription. ~
i II ne peut prétexter à cette clause, toute de son fa it,
aucun m otif secret, vaucune gêne. Il achetait sous seing
privé.
En plaidant à P aris, il réitéroit cet engagement en
présence de madame de Chabanes. Il offroit de payer
à qui par justice seroit ordonné.
Que fa u t-il conclure de cela, si ce n’est qu’alors la
quittance datée du 7 pluviôse an 11 n’existoit pas?
- Quand elle auroit existé, M. de Hompesch se jugeoit
lui-mêm e. Il contractoit un engagement qu’il veut ré
voquer aujourd’hui . . . . et avec quoi ?
A vec un prétendu règlement sous seing p rivé, qui
réduit à 36,000 francs sa créance apparente, d’abord
si énorm e, pour laquelle, à la v é r ité , il est encore
possesseur des titres.
Quand il seroit croyable que M . de Chabanes a payé
230,000 francs sans retirer les titres, il faut dire que
le titre et le règlement ne valent pas mieux l’un que
l’autre.
Les obligations passées à Londres ne font un titre
en F ran ce, que lorsqu’elles sont confirmées par un ju
gement rendu en France. ( Code c iv il, art. i 5 . S ire y ,
an 12, p a g .. . . et 192* D enevers, 1808, pag, 449;
D %
�( *8 )
1810, pag. 2,36, 238*, 18 11, pag. 468. M erlin, Questions
de d r o it , V °. Etranger et Jugem en t, §. 14. )
Sa prétendue quittance est sous seing p r iv é , et n’a au
cune valeur contre des tiers, suivant l’article 1328 du
Gode civil.
-^
L a compensation qu’il propose est donc un rêve que
ne firent jamais ‘ des acquéreurs d’immeubles grevés
d’h y p o th è q u e s; et ce q u i rend plus inconvenable la
préten tion de M . de H om pesch, c’est que sa soi-disant
quittance ne le subroge pas même à l’inscription dont
il veut s’emparer au préjudice d’un transport authenti
que fait au sieur le Rasle..
A in s i, plus on veut examiner le système de M . de
H om pesch, pour y chercher de vraies objections à ré
soudre, plus on demeure étonné qu’avec une pièce’
apocryphe et sans valeur il ait cru .sérieusement acheter
uu immeuble grevé d’hypothèque, sans le payer.
Q u e l p riv ilè g e auroit donc cet a cq u éreu r, après avo ir
pris des engagem ens bien form els par son a cte, et les
avoir réitérés par sa transcription ?
L a loi étoit là pour lui expliquer les effets de cette
transcription, et lui- marquer ses devoirs.
« La transcription.... ne purge pas les- hypothèques
« et privilèges établis sur l’immeuble.
« L e vendeur ne transmet à l’acquéreur que la pi-o« priété et les droits qu'il avoit lui-même à la chose
« vendue. Il les transmet avec l'affectation des mêmes
« privilèges et hypothèques dont il étoit chargé. » ( Code:
c iv il, art. 2182. )
�( *9 )
j- « L ’acquéreur déclarera..., qu’il est prêt à acquitter,
xc sur-lc-champ ^‘'les dettes et charges hypothécaires, jus« qu’à concurrence seulement du p rix , sans distinction
cc des dettes exigibles ou non exigibles. »>( Gode civil, art.
2184.)
«
M . de Hompesch ne s’est peut-être pas dissimulé qu’il
n’éviteroit pas de se conformer à la précision de ces
articles. Aussi il les a éludés, eu ne faisant aucune no
tification de sa transcription, pour qu’il n’y eût encore
ni enchère, ni ouverture d’ordre. Pendant ce temps-là,
il a engagé M . de Sarrasin, son acquéreur, à,transcrire
lui-même et à notifier aux créanciers inscrits; et M. de
Hompesch continuoit de les occuper à discuter sa quit
tance et ses prétentions novatrices.
Passons sur cet épisode, qui importe moins au sieur
le Rasle qu’il n’importera à madame de Chabanes et à.
ses subrogés postérieurs; suivons encore M . de Hom
pesch dans ses objections*
Il sait bien qu’il n’est pas subrogé à M. de Chabanes,
mais il veut se mettre à sa place de plein droit , en
disant que la quittance du 7 pluviôse an 11 équivaut à
un payement que l’héritier bénéficiante se seroit fait à
lui-même de sa propre créance,• et en ce cas, dit-il, il le
porteroit valablement en compte de bénéfice d’inventaire
vis-à-vis les autres créanciers.
Si l’opération supposée étoit justifiée par un acte authen
tique , il resteroit encore la question de savoir si M . de Chabanes, héritier et administrateur de la succession, auroit
pu se payer par ses mains sans un ordre judiciaire. Mais
�( 3° )
acceptons, s’il le faut, sa quittance comme .un transport ;
fait à M . de Hompesch, le 7 pluviôse au 1 1 , d’une porr
tion de la créance de M. de Chabanes contre la suc
cession bénéficiaire.: il existe un autre transport au profit
de M . le Rasle, du 29 ventôse an 13. Lequel aura la
préférence ?
'
Il n’y a de transport valable que celui qui est accepté
par acte authentique par le débiteur, ou celui qui est
fait avec remise du titre et notification au débiteur. ( Code
c iv il, art. x689, 1690.)
. O r , M . de Hompesch n’a ni acte authentique, ni re
mise du titre, ni notification.
M . le Rasle a tout à la fois acte authentique, remise
du titre, et une inscription en son nom , qui est la seule
notification qu’il pût faire légalement après une trans
cription.
Ainsi tout ce que M. de Hompesch a dit pour prouver
que M . de Chabanes est créancier sur l’immeuble vendu,
est dit en faveur du sieur le Rasle; e t, d’après cela, le
droit que s’arrogeoit M. de Hompesch, d’imputer les
86,000 francs à sa guise, devient sans intérêt.
Cependant il n’est pas inutile de lui observer que la
clause de sa vente, comparée avec sa quittance, prouve
qu’il avoit entendu lui-même imputer ces 86,000 francs
sur la partie de sa dette non sujette à transcription.
En citant l’art. 1 256 du C o d e , pour prouver que le dé
biteur est présumé payer la dette qu’il avoit le plus d’in
térêt d’acquitter, M» de Hompesch a pris cet article à
�(3 0
rebours ; car il àvoît intérêt de ne payer que la dettë
mobilière j vendûe par M . de Chabanes
son nom\
et il avoit intérêt à ne pas payer à an héritier bénéfi
ciaire le prix d’un immeuble, pour ne pas le payer deux
fois.
L ’ordre de créances qu’a fait M . de H om pesch, en
plaçant le fils au premier ran g, à cause de la date de son
inscription, est encore sans intérêt; car M . le Rasle re
présente le fils et la m ère, et M . de Hompesch n’en re
présente aucun. D ’ailleurs, il arrangeoit les choses à l’in
verse de l’ordre légal des collocations; car y ayant lieu ,
d’après lui-m êm e, à séparation des patrimoines sur une
succession bénéficiaire ( ouverte avant le Code ), madame
de Chabanes doit être colloquée au premier rang, parce
que son hypothèque est de 1759 : son fils ne doit être
payé qu’après elle, puisque son titre n’est que de 1780,
M . de Hompesch se plaint de ce que les premiers juges
avoient renvoyé les parties à un ordre. Il atteste qu’il
n’en faut pas, et que l’ordre est tout fait.
Si madame de Chabanes n’a pas de raison pour s’y
opposer, M . le Rasle est encore tout prêt à faire écho
avec M , de Hompesch, pour répéter après lui : Un ordre
est inutile ; il est tout fait.
Personne, en effet, n’est moins intéressé à en vouloir
un que M . le Rasle ; il représente les deux créanciers
inscrits, par une subrogation antérieure en date à tous
les titres dont se prévalent les autres parties de la cause.
Il peut donc parfaitement abonder dans le sens de M . de
Hompesch, pour que la Cour fasse dès à présent la col-
�( 3= 0
location des 66,000 francs, parce qu’il sèra inévitablement colloqué au premier rang, pour le montant de son
inscription et des accessoires.
RÉSUM É.
M . de Hompesch est acquéreur d’un immeuble pro
venu de la succession bénéficiaire de Gilbert de Chabanes.
Cet immeuble est grevé d’une hypothèque de madame
de Chabanes-, depuis 17 5g , et d’une hypothèque de
M . Frédéric de Chabanes, depuis 1780.
M . le Rasle est subrogé à ces deux hypothèques jus
qu’à concurrence de 53,000 francs.
Elles sont conservées par des inscriptions régulières;
pt d’ailleurs y ayant lieu à séparation des patrimoines,
il n’a pas fallu d’inscription.
M . de Chabanes, qui a vendu l’immeuble grevé, n’a
pu ôter aux créanciers de la succession le droit de rece
voir le prix qui représente l’immeuble.
Il n’a pas perdu lui-même le droit de venir comme
créancier de la succession, puisqu’il n’a vendu que comme
héritier bénéficiaire.
Ainsi le sieur le Rasle, subrogé a M . de Chabanes, peut
se faire payer en vertu de son inscription, qui est re
connue au procès avoir une cause légitime ; il le peut
aussi comme subrogé à madame de Chabanes. A in si, avec
ces deux titres, rien ne l ’empêchc de toucher les premiers
deniers de la vente.
I,a demande d’un com pte, contre madame de Cha
banes ,
�( 33 )
banes, ne porte aucun obstacle à ce versement, puisque
M . de H om pescli, obligé de justifier sa demande en
com pte, n’a pas prouvé que madame de Cliabanes fût
débitrice.
Pendant l’année qui a précédé l’émancipation de son
fils, le sieur M orandez, tuteur onéraire, a eu la gestion
comptable.
L a procuration du 30 juin 1782 n’a pas duré six
m ois, et n’a été suivie d’aucune gestion comptable.
Ainsi madame de Chabanes reste avec ses créances, et
3VL de Hompescli n’a aucun m otif de ne pas payer après
sa transcription, comme il s’y est obligé.
La quittance sous seing privé, qu’il rapporte, ne s’im
pute ni ne peut s’imputer sur le prix de sa vente, et peut
encore moins être opposée à un créancier hypothécaire.
La cause n’a donc aucune sorte de difficulté, puis
qu’il ne s’agit que de l’exécution d’un titre clair et non
contesté. On plaide pour savoir si un acquéreur payera
le prix de son acquisition.
I^e sieur le Rasle n’a pas cru devoir grossir ce mé
moire d'une discussion sur son appel incident, parce
qu’il n’étoit fondé que sur le silence du jugement de
Clermont à son égard. On ne lui conteste pas le droit
de se présenter comme subrogé aux deux inscriptions;
e t, au contraire, on les discute contre lu i, en cette
qualité. M. le Rasle a donc obtenu déjà tout ce qu’il
avoit intérêt d’obtenir.
Il ne s’arrêtera qu’un instant sur une demande en
doiïUïiages-intérôts que M . de Hompescli a jugé a propos
form er, sous prétexte que lui-m êm e, M . de H om E
�( 34 )
pesch, bien confiant dans la bonté de sa cause, s’est
engagé vis-à-vis M . de Sarrasin , à rapporter la radiation des inscriptions dans le mois de la transcription,
et que ses adversaires ont la dureté d’em pêcher, en
voulant prendre pour eux l’argent que M . de Hompesch
s’étoit destiné. M. de Hompesch ajoute q u e , dans la
même confiance, il a consenti, vis-à-vis de M . de Sarrasin,
à ne toucher 30,000 francs qu’après cette radiation, sans
intérêts! E t sur cela il prend son texte pour dire qu’il
doit être indemnisé de ce qu’il perd.
Que ne s’obligeait-il, par une clause plus chevalelesque encore, à un dédit considérable, pour avoir le
plaisir de le demander!
Cependant la rég ie, qui parle aujourd’hui pour ellemême , trouve cette réclamation très-légitime.
Il
suffit de lui répondre qu ’ un Créancier . qui plaide
pour être payé d’une dette non suspecte et fondée en
titres, ne doit de dommages-intérêts à personne; et si
qu elqu ’un en d evo it dans cette c a u se , ce seroit plutôt la
régie, pour le mauvais exemple qu’elle y a don n é, en
voulant faire prévaloir un acte non enregistré, à des
subrogations authentiques, pour retarder le payement
d’ un prix dé vente exigible depuis neuf ans.
M e. D E L À P C H I E R , ancien avocat.
M c. B E À U D E L O U X , avoué licencié.
r > *
J ,T
: r.
A. R I O M , de l’imp. d e T H Î B A U D , imprîm. de la Cour impériale, cl libraire,
'
' f
rue des T au le s , maison L a n d rio t. — Janvier 1 8 1 2 .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Le Rascle, François. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Beaudeloux
Subject
The topic of the resource
créances
brevets
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour François Le Rasle, ancien avocat au parlement de Paris, habitant à Paris, intimé et incidemment appelant; Contre M. le Directeur de la régie et des domaines, poursuivant, au nom de monsieur le Préfet du département du Puy-de-Dôme, la cause de M. le baron de Hompesch, lieutenant général au service de l'Angleterre, appelant; En présence de Madame Marie-Elisabeth Taleyrand de Périgord, veuve de Jacques-Charles de Chabanes, intimée; Et encore en présence de dame Marie-Louise Brachet, veuve de Reclesne, Henri-Joseph Mallet, et Jacques Villecoq, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
1804-1812
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0417
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_G2201
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
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Domaine public
brevets
Créances
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c9aafba94fb7442e224d43c3301a3c09
PDF Text
Text
POUR
S.r
Josep h
B U R E L L E r N otaire
i m p é r i a l , -habitant
de
la. ville de Varennes-sur-A l l ie r, appelant.
CONTRE.
L es sieurs G u i l l a u m e D E L A I R E ,B
J
D ELA~
' G E N E S T E , et F r a n ç . - B l a i s é B A R D O N N E T D E - L Á - T Ó U L E ' , intimés.
'
'
L e propriétaire d’ une m aison ayant dés vues et égouts sur
le terrain, d ’un voisin , a-t-il le droit de r é c la m e r une portion
de ce te r r a in , à titre de tou r d ’é chelle , en co u tu m e de B o u r
b o n n a is , et sans ft itre ?
,• . »
.
" L é voisin qu i n'a jam ais ce ssé !de* jouir de son terrain e x clu sivem ent , peut-il être contraint d’en ab a n d o n n e r une partie ,
et de batir à une distance q u i ne nuise pas a u x vues d é jà 'é ta b lie s?
C '
est
à cela que se réduit toute la difficulté actuelle.
Elle était d'abord bien plus considérable : car les
�.........
( o
sieurs D elaire et Bardonnet réclamaient co m m e pro
priété le terrain q u ’ils ne dem andent aujou rd ’hui que
co m m e servitude de convenance.
Ils com prenaient q u ’il leur fallait des litres
et ils
disaient en avoir*; mais pour les appliquer il fallait dé
naturer la lo ca lité , et il s la dénaturaient.
I l n ’a pas tenu à eux que la C our ne crût sur leur
attestation qu'il régnait le long de leur maison une ai
sance en d é p e n d a n t , bien distincte, sur laquelle d on
naient des fenêtres ouvrant et ferm a n t ; une ancienne
porte à d e u x battans , ouvrant en d e h o rs, a vec ses
g o n d s, et encore un évier égoutant. L e tribunal de L a palisse a cru tout cela , et a condam né le sieur Burelle. "
L a C o u r a vo u lu éclaircir la v é r ité , et a ordonné une
expertise.
Alors tout ce q u ’avaient attesté les sieurs D ela ire et
Bardonnet n ’a plus été qu'un rêve. L ’aisance s’est trouvée
du côté opposé à celui où ils la plaçaient. L es experts
n'ont vu ni cet évier ég o u ta n t, ni ce lle porte à d e u x
ba tta n s, q u i (suivant eu x ) était encore en place.
Us n ’ont v u , au lieu de celte p o rte , q u ’ un trou irré
gulier, rebâti com m e une usurpation e m p ê c h é e , et mas
qué par des planches; un évier égalem ent condam né en
m açon n erie ; une seule fenêtre au rez-de-chaussée agran
die après c o u p , et b arrée; deux autres fenêtres sous
le toit : le tout sans contrevents au dehors, et un sou
pirail.
L ’expertise condam ne donc tout ce qu’ a v a ie n t mis
en % il les sieurs Delaire et Bard onn et, et l’applica-
�( 3 )
.tion qu’ils faisaient de leurs titres. Mais les experts ter
m inent par ém ettre leur opinion sur la question de
droit qui devait résulter de leur vérification , et ils
opinent pour que les sieurs D elaire et Bardonnet o b
tiennent de la Cour La concession d ’un tour d’échelle ,
V oilà en som m e le résultat de la cause 7 dont les faits
vo n t être rappelés à la C our ; ils dispenseront le sieur
J 3urelle de revenir sur les rapprochem ens de titres et
les raisonneméns q u ’il avait présentés d’abord pour
p ro u ver que lui seul était sincère sur la localité ; il ne
lui restera q u ’à prouver que tout le terrain jusqu'au
m u r du sieur D e la ir e , est sa p ro p riété, et que sans un
“titre contraire, on ne peut pas plus lu.i en disputer; trois
pieds que là totalité parce q u e , dans aucun p a ys,
on ne peut pas ôter du terrain à un voisin, lorsqu’ on
n ’a à lui opposer ni titre, ni possession.
w
;
: 1;., l . :
—; î r' i
r :.
• ’F A I T S . . . ‘ j
‘
..
: - : ï r '!
.
'
I^e sieur Burelle est adjudicataire d ’ un enclos trèsp r é c ie u x , situé au faubourg de la ville de V a re n n e s,
- v e n u des sœurs de la. Charité , e t , avant elles, de la
cure de Varennes.
'
;
f
Ji n i > -A
Cet, enclos.est co n fin é , de bise, par la grande ro u te ;
et d’ occident ^ pctr
baicmciis et jQif.çfoti ¡dit steitr
■D elaire,
. * r
' Ces bûtimens çt jardin du sieur D e la ire , portan t,
jadis, le : nom du logis du; Cheval-Blanc , proviennent
d’ un Gilbert S e n a u d , qui le vendit à Gilbert M o n e r a t,
�( 4 )
le i .cr juin 1689. L ’acte contient un détail de chambres,
■grenier, c a v e , écurie et aisances pour aller à ladite
écurie ; cour et jardin par derrière , le tout ayan t
deux coupées, et se confinant par La terre d u curé de
, T^areiraes ; ! d ’orient et m id i; par la maison, cour et
•jardin de la v e u v e M o in a r d , de n u it, et par le grand
c h e m in , de bise.
;Gilberi D u ch é n e acheta cette maison de M o n é ra t,
¡le 2 8 'mai; 1700.;.O n 'y voit, le m êm e détail des objets
vendus,?at toujours p o u r c o n fin im m édiat La terre du
a ir e dé Varetities\ '
:
n. L e 6 décem bre 1792 ^Philippe D e le v a u x et sa fem m e
^vendirent les ;tniemes 'bâtinifens ei jardin» au sieur B a rdonnet - l a - î T o u l e e n c o r e ; c o n f i n é s r par Le\ jardirù des
D arnes 'de la charité ( l e m ê m e que celui du curé de
V a r e n n e s )« <
: , .>•
-■
jc . ;
-, :
L e sieur B a rd o n n e t-la -T o u le avait réuni a la m aison
, du C h eval-Blanc, le biiïiiiumt M o in a r d , -qui la joignait
¿1 l’occident. Il vendit le tout au sieur L a g en este, le
24 novem bre 1 7 8 3 ) &V n o y a n t pour voisin que des
.religieuses , a V u e crui:>pas -devoir s’assenvir. ail^‘ c o n ^iins de 5e& propres ¡titres."H vendit donc <r une’ m aison
rr com posée de c h a m b r e s , cabinets./'grenier-,
cave,,
; « c our , - c u is jn e , ;les tx)‘urs d ’. é c h e l l e , autres issues,
Les
’ * joups^du côté du clos dés Sœurs g rises,, lajil dajis }e
« haut q u e dans le b a s , dont partie ont é té polontcki«
ùtr\e(it, b o u c h a s par le sieur v e n d e u r ,,ou ses auteu rs,
« et q u ’il sera l i b r e au .sieur accpiéreur de l'aire ouvrir
*
h sa v o l o n t é j p l u s , u n jardin .et m o r c e a u de t e r r e *
�r«
«
.e?
«;
<C‘-5P
avec un p u ils ^circonstances et dépendances, e.n fun
seul té n e m e n t, d’entour trois coupées,, y compris
le sqJ des-.büjtir^ens e t ç o u r ^ j^igpant le grand cliemin fdç sP Wis a .¡Lyon
'4e, ¿4 ch a-
f rt i * > S c%}A'k\ pis 1 ri(>•t c ' ^rcrb j,l il
:.y •<*
-jG - *r *
L• - ’année
suivante,
le s*r
tagen.este
vendit
les
-mêmes
c. . . 7
.J J ..O :
' a. u R
r ;i_ .xi
■
* ' ! I‘
:•
objets -•au sieur
;Drelaire, ?en suivant
m ot
pour mot
le
c i . “ l ' . ' . M J. i i J
) 1.1J : ii
i l . J>. , j , . i
; '.‘ i . .) i
o . . . r.,-
^ é f a il0e t , l e ? q o R t o 4 h A ? 4M * i i . i u>oi> t f
oi; Î ' f
ai,
ê F ^ M .Ç ^ e^ ; ! î ç n^ i l ps;Ç®iFir^e
,1a charit,é..^çoptjg^.^Faiçe. ^nfj^ab^t.ion.j.Il ne pouv a i t la p l a ce r q u e d u côt^, du „grand f b e m i n * et sur
ra^gnemgn.t
-È i^ia î p } eji?
g litres p^aisp^Si Jl^batit , d o p e ;d 'a b o r d
t ì of gw é de ,|fi cj^ i^ p ;n .P ,$ l^ r e y J ’espace
,-cour * tçi^ fatten d ant^qu'il
.pût com pléter -ses c,onstrucUo,ns, p a r -une écurie et
^t I^a ^l^^ernjat.ur^lle de^ceye.rem ise. rélait Vis-à-vis sa
jg h isp n * c ^ t - à j ^ i r ç ^ Jp ltp-ng ;% qcelle <Jii sieur P e la ire ;
v et c ’ est ici le lieu de dire quel est l ’étai de^la maison
D elaire à ce,t aspqçt.
, X g f a ç a d e de c e l l e maison est sur la g ra n de
tou
le:
. . 7i .5 ? r. cifl,:,, > . •.. . n
\ : «. •
V
•' .•
y
,.çlle avait,-jadis., des fenêtres e i portes ii l ’occident ;
inais quand le s.r ,B ard onnet eut acheté deu£ maisons ,
il les réunit par des constructions. E q fin , du côté de
rencÎps des Soeurs grises, il y a deux fenêtres sous ,1e
t o i t , une fenêU’e plus .basse-* ca rré e , et un soupirail
de cave. L e sieur Delaire y a ajouté un petit tr o u ,
pour éclairer un escalier, eti.il l a icii^ fort irrégulier.,
p eu t-êire pour que çette. innovation ne fut pas ap-
�w
perçu e dans le tems." E n f i n , le toit a une saillie de
..............................., .............., . . .
v in g t pouces.
'
R ie n de tout 'cela S a u r a it pu em p êch er le sieur
Burelle d’adosâër sa'n ouvelle construction au m u r du
sieur D elaire , à la c h a r g e , tout au p lu s; de p a ye r
la m oitié d e 'c e m ur , cpbur le rendre m ito y e n , s'il ne
l ’était pas. Mais afin 'd’é v îté r le s discussions et les pertes
de t e m s , le sieur Burelfé2'pifêféra faire qiiatre murs
neufs , et laisserLénlrfe?ih îi; e ty î e 'sieur D elaire', une
r r .
. . ’ Í . ' * -î , T
'
• •*
r
f
petite r u e lle , Jqui d ’aiiréuts rbcevrâit lesr eaux de son
toit ; c’est ainsi q u ’il a bâti.'
'
" '
!
:! *
L e sieur DelkireV.s’ittiaginant que lé 'Côde civil p ré
vaudrait sur'la toutttriib rdu ‘BourboHiiaiis j, fît signifier
"au sieur B ú r e l l e ü û é ! dënoftcÎàii'drt3 dë^oiivél-cfeiu^ifèr,
disant que lui e t 'seá áüteuts dVáíiefitrtoujours 'joui1des
vues et é gou ts, que le C od e maintenait les servitudes
continues et'd p párente s J
vqti‘ë / siiiVatit 4 *àrti&lé ¿ 7 8 ,
le sieur B u reííé né' pôùvâït!1 Bâtir^ '^ u^ ^ ïx píéd¿ntíe
! 'V 1*> ?p c î ' r' eh u: il cl n i l,//o 1}
. .........; t !'
distance de son mur.
L
A la suite de cette d énon ciatïôn, le ‘siètir D ëlaire
assigna le sieur B u re lle , pour dém olir’, ckinâ deux jo b r s ,
le m ur q u ’il faisait bâtir ci d ix -h u it póu¿es de La m aison
d u d it D elaire y ainsi que lé m ur, aspect de rtiidi, faisant
liaison a vec ladite maison ÎDélairë , e t pour etre tenu
de laisser s i x pieds de d is ta n c e , entre ladite maison
et la propriété dudit Burelle* non compris le
tour
d'échelle.
,
On plaida au trib u n a l'd é la Palissé'sur cette p r é
tention du sieur D e la ir e , qui mit en cause le sieur
�(7 )
Lageneste, lequel a ap p elé en garantie le s,r *BardonnetL a to u le 3 ces trois j adversaires firent, yaloir. les ventes
de 1782 et 178 4 ( ém anées d ’e u x , et qui sont leur
ouvrage ), r pourp-en;'conclure , q ^ ils ont ces vues et^
égouts par une possession im niéiuoriale qui leur vaut^
titre.
:
. .
• ¡:
V r
. .
L e sieur Burelle d éco u vrit les ventes de 1689 e t
de 1700, qui condam naient celle de 1 7 8 s. M ais les sieurs
Bardonnet et D elaire ne perdirent pas courage jl-éçurie
et aisances comprises dans^ lesdites. ventes., leur four
nirent un m o y e n de p lu s, dont ils ,se saisirent, en
disant que l ’.écurie était au bout de la m aison, et les
aisances ..en . dehors. Ils e n 0jncliquaient les- vestiges
com m ec très-rvisibles, h des juges qpi ne les rvoyaien t
p a s , en ajoutant qu'il n’y av^itpas de façade du côté de.
la grande (route ; q u ’elle „était toute entière du côté
des Speurs, grises, et g u ü j i i j qvaip aucun autre moyen}
popùr parvenir
Cécurie , q u ’en, longeant la. façade de,
ladite ,piaisop.J(5 n fip ^ marchant, de. p reuves en preuves
ils ne se. con testèren t plus ;d ^ vo ir des fenêtres
trouvèrent des portes à deux..bat tans.
, :
t
ils
.En.vain.le
sieur Burelle se■■'récriait
contre ce,boule............
...........................
I•
' • - : J -. - ■.
} ..
versem ent absolu de.la l o c a l i t é , e n vain prouvait*-il
que Técurie et ses aisançes ne pouvaient êlre qu(’enIre
la m a i s o n M o n e r a t, et celle du Cheval-Piano, puisque
les ventes postérieures à la réunion de.ces deux maisons
ne ^mentionnaient plus: ces. aisances, et -qvi’en les pla
çant à l’o rié n t, elles|n’auraient eu ,n i en trée, ni issue,
puisque le m ur de Fenclos joignait la maison D ela ire,
�à anglé droil ; en vain* pYoüvàit^iFp&f tin devis n otarié,
de 1 7 9 3 , que lë siëur 'Delaire avait bât!i sur r e m p la
cem en t de c e lte 'a r ic ie n n é é b ü r iè ^ c è 'q iii com prenait
un lodai tout autre que ’ctelüi1 q û ’iÎ î riHiqxi a il a u fo ur—
d*iiu'i contre sa^ propre convictìon". Tout" Cela n ’a pas
persuadé aux premiers juges q u ’il fallait au moins v é
rifier laquelle des deu x pai!tie^rendait un com pte inexact
de la localité. '*
’
‘
U n jugemerit du t 'j octobre r8o8 , statua sur un
incident é le v é 'a u sujet d ’ü'n prôjet d ’arrangem ent ; ce'
jugem ent donne acte ad âieur! Buréllë- d ë ce q u ’il a1
sur ce point déféré le serm ent à ses adversaires y e t
de ce q ü ’iïs ont rëfci'sé' de lé ■p^êtér; ;1It ;-ordÔnfre'
fbnds ^ q u ’ôti prdfliiirâ '¿ ii greffe ^ÜTïcteté*',?-èâiisfïda,f ë )?
érioncë d&iis;la‘ U h i é W } ï 6 ^ >
o t fcr.q.
!tL ë jugement définitif, du 2i ‘ décembre1'1808, règle*
d’abord là"suite dit mérite- i’htìd&hi: y et yc stà!tuéJ èri1
faveni'"dii1 siiiir1
'est intitilé* dò ìVans^rÌré'Tés'.
m'plifs>qiii*'é*ÿ5rk^pèfVérit’riP sliffit dfe itieÌtrd;'sélusilÌesl
y e u x ^ é la C out^ eux ^iti còiicèrrie^t'l^^ohd’s. 'M1
-i
« Considérant que les parties n’ayant fias satisfait
« aii ju|emènt( prépdPâtbirè‘^dÎ!‘ i y ’ acfòb'rd ’d erider,
cc!il *ÿ a
'cjub *l^aishridé"'p'ò ' dller1à•
cT*l’éc'urîè méntioiinéë(dahy l'acte die vdnte du 'i *r juin
«•''1(589, dariâ celili du 20 mai 1700 ? et dans celui
« reçu Chartieir, notaire à Charroux, le 19 novembre
« 1*752 ', ’signifié paiv à'cle'' de ' Decimi p ^ dii 'i^ juin
« 1764, n V pÿs* été changée posléribhrèïhént par 'le'
p’èrè de fa initie , môme'quand il a pii donner aux
'de présdthê’r
üV
«
« Sœurs
�( 9 )
« sœurs de la Charité de V a re n n e s, le surplus du terrain
« qui fait aujourd’hui le sujet de la contestation dont
oc il s agit, p u isq u ’ il n avait pour lors d ’autres moyens
« pour parvenir a son é c u r ie , d ’autres jo u r s ou vues
« pour sa m aison ou auberge
f' Considérant que-, de son aveu , le sieur Burelle
« est tenu: de souffrir les droits de jouissances qui
« pouvaient se, trouver légalement établis lorsqu’il est
« d eve n u 'p ro p riétaire du terrain litigieux 5
« Considérant que l ’acte de vente de la maison de
« la partie de D e r e n n e s, rapporté par la partie de
« B e li in , porte que cette maison a été ven d u e en
« 1 6 8 9 , a v e c ses aisances pour aller à écurie, le tout
« co n fo rm ém en t à un décret de M . le ju g e d e . V a « rre n n e s, et rappelé dans ledit acte-de^ 1689 ; et que
« ces aisances ne pouvaient être moindres, de d ix -n e u f
« d écim ètres, o u ,s ix pieds de la rg eu r, ladite maison
« form ant alors u n e auberge ; que cet acte [qui a cent
? Idixrneuf ansi de d a te , doit.faiçe p reu ve de.sor» énon» ciatiori, qüoi'que le décret y rappelé et non daté ,
« suivant' lequel la maison, et ses aisances étaient
cc vend u es, ne soit pas rap porté; que par con séq u en t,
« les vues droites, égouts saillans et to u r s 'd ’échelle de
'« cette
m a is o n ,
vendus a v e c icelle par les actes des
« 25 octobre 1 7 8 4 , et 24 n o vem b re 1 7 8 3 , seraient
« même moins une servitude qu’un, droit de propriété
;
« que la partie de D erennes et ses auteurs ont con stamment 'conservé, par une possession im mém oriale
3
�C IO )
« non déniée , desdits égouts , vues droites , tours
« d ’échelle et porte à d e u x batlans
« Condam ne le sieur Burelle à dém olir le mur qu il
« a fait construire en midi de la maison du sieur D e « Jaire, à l'indue distance de cirïq déèimètres^ où d ix « huit pouces environ , et c e , dans le mois de la si« gnification , à personne ou domicile , dü présent
« jugem ent ; passé l e q u e l d é la i, autorise ladite partie
« de D erenn es à le faire dém olir aux frais dudit B u
te relie, qui sera contraint a u -re m b o u rse m e n t, sur les
« quitlances authentiques des ouvriers qui y auront
c< travaillé ; fait défenses à Burelle de faire à l’aven ir
« aucunes constructions sur ledit terrain , qu’ à- la dis« 'tanCe de^dix-tîeuf décim ètres , àu ‘s ix pbeds, confor« 'rn ém en t à l’article '678 idu Code N apoléon^ de la
« maisôri de ladite partie de D erennes : co n dam n e
« Burelle aux dépens à cet é g a rd , tant des dem andes
« p r i n c i p a l e s , tqu’ é n g a r a n t i e , etc. »
< •
L e sieur DelàtÎfd ■
rr en cfvait 'pas dem andé autant \
Car il rie voulait pas être propriétaire du local en con
testation : cependant i l poursuivait l’e xécu lio n de ce
j u g e m e n t , lorsque le sieur Burelle en a porté l ’appel
devant l a 'C o u r , ou il a été obligé de lutter encore
contré
les exagérations de ses adversaires q u i, toujours
peu sincères sur la localités, ne m anquaient pas de se
^prévaloir ¡de ce q u ’ ils a p pe la i en t la conviction person
nelle des premiers juges.
M ais il est inutile de reven ir sur leurs dires; la Cour
�C
)
se les rappellera par la lecture de son arrêt interlo
cu toire, du 21 m ai 1 8 1 0 , dont on va préciser les dis
positions.
P ar cet a r r ê t , la Cour a commis les sieurs L e g a y ,
Gailhe et Savarin , experts, pour v é rifier, i.° quel est
Remplacement de ré c u rie et des aisances énoncées a u x
actes de 1689 et 1700*, s’ils pensent que ces aisances
s’appliquent, au terrain ou le ,sie u r Burelle a fait un
m u r ; 2.0maudit cas, quelle était l ’issue desdites aisances
pour a rriv e r’ à ladite é c u r i e , et au m ê m e c a s , si le
n o u ve au m ur de Burelle est à une distance suffisante
dé la maison de D elaire.; 3 .° quelle est tl a saillie du
ioit!; si la ch u te des eaux .est lib re , ou si elles tom b en t
sur le m û r 'd e Burellé^-.et sont,,repoussées icontre le
m u r de D elaire ; 4.0 le.s dimensions de sou p ira il, et
si en. b âtissan t, B u re lle a éd ifié sur tou t ou partie
d u d ft soupirail ? ou su r ses fondem ens ;
5 .° l 'é v i e r }re
j e t a i Les ea u x de [La cu isin e <dè D ela ire 'sur'le .terrain
en q u estion ,* 6.-° l’ouvertu re pratiquée dans le m u r , et
que D elaire prétend avoir été une porte à deuoc venta use
ouvrant extérieurement sur Les aisances ou terrain dont
il s 'a g it, et .s’iL est vrai q u ’à l ’extérieur on voie.encore
les gonds de cette porte; 7 .0 si cette p o rte , ce soupirail,
*cet évier et les fenêtres de la façade de la maison de
^Delaire, qu'on d it avoir été anciennem ent d u x ô té d u d it
terrain^ sont d’ancienne construction ; si ces o u v ia g es
et tous autres indices leur paraissent sufJTisan3 pour
attester l’ usage dudit terrain à titre• d 'aisan ces de La
m aison D ela ire ; faire toutes autres observations, etc.
4
�( 12 )
L e s experts ont déposé leur rapport le 1 6 août
1810. Ils ont vérifié sur le i . er article que , d’après
les litres et la localité , l ’écurie et les aisances pour y
parvenir étaient à l’aspect opposé du locaLen contes
tation ; que le sieur Delaire - avait rebâti l u i - m ê m e
sur les fondem ens de ladite écurie ; que les aisances*
étaient entre les deux m aisons, réunies avant 1 7 6 2 ,
et ne pouvaient être du côté des Sœurs grises ,>!ou il
n ’y avait m êm e jamais eii d ’issue du côté du chem in.
* Ils ont dit que le toit du sieur D elaire étant en
saillie horizontale de vingt p o u c e s , portaient les eatix
sur le nouveau m ur du sieur B u re lle , au point de le
dégrader en peu d ’années ; et delà les eaux refluaient
par incidence contre le m ur du sieur Delaire.
Ils ont constaté l’ex iste n ce , i.° de deux croisées au
grenier et sous le toit, ferm ant par simple v o le t, ddnt
l ’ un est c l o u é ; 2.0 d ’ u n e o u v e r t u r e p r a t i q u é e depuis
peu par le sieur D elaire pour éclairer un escalier ; 3 :®
d ’ une croisée à quatre pieds du sol, ouvrant et ferm ant
a vec v it r a g e , barrée de trois b a rre s , n’ayant pas sa
fo rm e prim itive, ayant été a g ra n d ie, mais depuis longtertis; 3.® d’ un évier qui ne sert p l u s , et qui est bâti
dans le mur.
Ils ont donné les dimensions d ’ un soupirail b â t i'e n
p ie r r e , sans s a illie , b a r r é , et a v e c araignée. On a
mis en dehors trois pierres, non pas incorporées dans
le m ur (c o m m e on le disait), mais posées sur ch a m p ,
pou r éviter le reflux des eaux. L a nouvelle construction
y a fait am onceler du terrain : mais il est constaté-que
�,( i 3 )
le sieur Burelle n’a pas bâti sur ces pierres com m e on
le soutenait aussi.
A u lieu de la porte à deux battans et de ses gonds
existans en co re, les experts n’ont v u q u ’ une ancienne
ouverture q u ’on avait voulu p r a tiq u e r , mais qu'on
avait rebâtie ; elle avait eu trois pieds de haut sur deux;
pieds de large ; elle était plus haute que le s o l , de
deux pieds : ils ignorent si le projet avait été d ’y faire
un placard ou une fe n ê tr e , et ils ont p ré su m é , h son
ir r é g u la r ité , que les religieuses
ne laissèrent point
a ch ev er l’ouverture. En effet, une dam e v e u v e J o ig n y
ileur a déclaré que ce projet avait occasionné de la
discu ssion entre les religieuses et le s.r la T o u le ; mais
q u ’ensuite ce jour avait été bouché : les experts pensent
q ue ce furent les religieuses qui appliquèrent desplanches
en dehors pour leur sû reté, et parce que cet étoupem en t
avait été fait en m açonnerie grossière.
L e s experts term inent leurs réponses aux questions
faites par la C o u r, en disant que là'J a çade et l ’entrée
de la maison Delaire ont toujours été du côté du grand
chem in , et qu il n y a ja m a is eu de porte donnant
sur le terrain litig ie u x . Ils rem arquent seulement que
sur la façade du côté de B u relie, co m m e sur celle du
côté opposé, il y avait eu des assises de pierres figurées
au pinceau 5 que les deux fenêtres du toit , et le sou
p ira il, leur ont paru de première construction, et que
1 avancem ent du toit prouve que la maison avait été
isolée de tout autre à cet aspect ; d’où ils concluent
q u ’elle n’a aucun caractère de mitoyenneté.
�( H )
C e lte dernière réflexion en fournit à l ’instant un e
autre
aux experts, lorsqu’ils semblaient avoir tout dit.
Ils croient q u ’une maison est présum ée de droit avoir
un tour d ’é c h e ll e , par cela seul qu'elle a des jours et
un égout du côté du voisin; la plantation de la char
mille à une petite distance du m u r , leur paraît une
chose d é c is iv e , et ils rec ue il l ent a vec soin la relation
des indicateurs, dont l ’ un désigne cette distance co m m e
suffisante pour le passage d ’un h um m e chargé d ’un
faix de bois; l ’a u tre , pour laisser passer les rayons du
soleil : un autre a vu cinq à six pieux de bois pourris,
sans dire à quelle é p o q u e , ni à quelle distance, ni à
quel u sa ge; un autre a vu dans un vieu x m ur u n e
vieille porte qui ne s’ouvrait pas ; e n f in , un Charles
G irau d , qui était e n c o re , en .1 7 9 1 , ferm ier de l ’enclos
des Sœurs de la C h a r it é , a dit q u ’il cultivait ju s q u ’ au
m u r dê La m a iso n JDeLaire, ruais q u e des fenêt res on
jelait des ordures sur ses sem is.Tels sont les dires qui ont
ach evé la conviction des experts sur le tour d ’é c h e lle;
laquelle conviction ils ne m anquent pas de fortifier
par la réflexion d ’usage , que le voisin n’aurait pas
souffert
chez lui des servitudes, telles que des égouts
et des jours , s’il 11’y avait été obligé.
T e l est le rapport des experts
com m is
par la C o u r:
et on peut dire a vec confiance que si les sieurs D e
laire
et Bardonnet fussent c o n v e n u s des points de fait
et de localité q u i y sont fixés , ce rapport eût été
pa r f a i t e m e n t
in u lile; car la question du tour d ’échelle
( ¿ipparlenait tout entière au point de droit, sur lequel
la Cour n’avait pas besoin d’éclaircissemens.
�( i
5 )
L e sieur Burelle n ’aura donc rien à critiquer de ce
qui lient à l ’expertise e lle - m ê m e ; au con tra ire, il se
prévaudra de ce que la localité était telle q u ’il l ’avait
décrite a v e c ex a ctitu d e , et de ce que ses adversaires
ont été constitués en mauvaise foi sur tous les points:
toute sa tâche consistera donc à prouver q u ’ un tour
d ’échelle ne se donne pas sans t i t r e , et que les cir
constances qui ont déterm iné les experts ne p e u v en t
jpas suppléer au titre que la loi exige im périeusem ent.
M OYENS.
L e s auteurs enseignent que le tour d ’échelle s’entend
<Je deu x m a n i è r e s ; l’ u n e , de la faculté de poser des
échelles sur le fonds voisin,, quand on veut réparer
^sa m a iso n ; l’autre., du ¡terrain abandonné par le pro
priétaire , pour avoir droit d ’y faire des jours.
L e prem ier a lieu sans titre , parce qu’il est sim
p lem en t précaire, e-1 n ’ôle rien à la propriété du voisin.
Presque tout le pays coutum ier avait adopté à-cel égard
la disposilion de l ’article 5 i o de la coutum e de B o u rx bonnais. « Quand aucun fait édifice et répare son lié« rita g e , son voisin lui est tenu de donner et prêter
« patience à ce faire, en réparant et amendant dili—
« gem m ent,
par celui qui édifie, ce qu'il aura ro m p u ,
« démoli et gâté à sondit voisin ; et ne peut pour c e ,
« le réédifieur, acquérir nul droit de possession co n tre,
« ni au préjudice de celui qui a souffert ladite rép a« ration o u édifice ».
�( *6 )
Cet article était nécessaire en Bourbonnais o ù , d’après
l ’article 6 1 9 , aucune servitude n'a lieu sans titre.
L e second tour d ’éch elle, im proprem ent appelé de
ce n o m , tient à la p r o p rié té , et ne peut se prouver
que com m e la propriété elle-m e me.
C e lu i-c i est parfaitem ent inutile en Bourbonnais 5
puisque la loi y donne le tour d’échelle à titre de fa
culté. I l n’y a donc aucune probabilité que le pro
priétaire d’une maison pouvant à son aise faire une
façade sur la ru e , et m êm e une autre du côté de sa
cour, ait abandonné une portion de son terrain sur cette
m ê m e ru e , pour s’isoler de son voisin , et avoir q uel
qu es
feuêti es de plus.
M a is, d it - o n , voilà des vues et un égout qui font
présum er cet abandon : car co m m en t supposer que le
voisin eût souffert une servitude aussi dangereuse, s’il
n ’y eût été fo rc é ?
C ette réflexion est toute d’A u vergn e., et au moins
elle y convient parfaitem ent; car les servitudes y sont
prescriptibles par la co u tu m e , en sorte q u ’il faut y être
sur ses gardes pour veiller aux entreprises d’ un voisin
q u i, en bâtissant, ferait des fenêtres ou des toits en
saillie ; tout cela d evan t avoir vigueur de titre au bout
de trente a n s , suivant le texte de la coutum e.
Mais on n’a pas besoin des m ê m e s précautions en
Bourbonnais; car tant qu'on laisse son terrain en place
vid e, sans y bâtir, on n ’a pas besoin de s’inquiéter de
ce q u e son voisin fera sur sa limite ; et si on n'en
ép rouve aucune incom m odité ré e lle, rien n ’em p êch e
de
�( *7 )
de le to lérer,'puisq ue la loi donne le droit èxprès de
tout faire détruire.
L ’article 5 19 de la cou tum e prohibe tout- droit de
servitu d e, possession et sa is in e , en place vide , par
quelque laps de tems que ce soit.
L eq u e l des usages vaut le m ieux ? C e n ’est point
ici le lieu de l’exam iner : tout ce qu'on peut en d ire ,
c ’est q u ’on est moins gêné sur les procédés de voisi
nage
lorsqu’on ne court pas le risque de perdre ses
droits. Alors les vu es, les égouts et autres com m odités
que se donne le propriétaire v o is in , d evien n ent sans
co n sé q u en ce , et restent co m m e tolérés, tant q u ’il n ’y
a pas de motifs essentiels pour y m ettre em pêch em en t.
C e q ui a embar ras sé les e x p e r t s n ’ est pas u n e n o u
v e a u t é p o u r tout le p a y s c o u t u m i e r , o ù les s er vitudes
*
'
»
t
n ’avaient pas lieu sans titre. I l était inévitable que'
cette législation produirait une
indulgence
dont le
possesseur voudrait' souvènt se prévaloir à la lon gu e:
mais la loi ést ven u e tnèttre, uhe barrière à son usur
p a t io n , et lui a p p ren d re'q u e s’ il a pii faire dès jours
et des égouts dans des contrées de toléran ce, aucun laps
de tems ne peut c on v e r t i r sa possession en une propriété.
T o u t é s ’lës coutum es ¡qui-ont prévti la q u e s tio n , l a 1
décident de là m êm e m’anière. ' '
’’
■
O rléa n s, 2^5. K V u es ^ égouts et autres droits de
« se rvitu d e, ne portent saisine à celui qui les a , s’ il
« n a titre valable \ et sans titre v a la b le , fne lès peut
« prescrire par quelque terris que ce soit n. ( L a côutùni0
de Blois, en l'art. a 3 o , a les m êm es dispositions).
�( i8 )
Sens, i o 5. « Celui qui a égout sur PKérifage d’a u t r u i,
* est tenu de le retirer, lorsque le voisin veut bâtir ». 1
M e l u n 3 1 9 1 . « C h acun peul lever son b â t im e n t ,
« tout d r o it , aplom b et à ligne , si haut que bon lui.
« sem ble, et contraindre son voisin de retirer'chevrons
« et toutes autres choses qu’il trouvera sur ladite place,
« em pêchant le bâtim ent qu'on y peut faire ? nonobstant
« quelque laps de tems que ce soit, f û t - il de cent a n s ,
« et p lus Jt>.
.t -
.
B o u rb o n n a is, 519. « A ü c u n , en place v id e , n ’ac-*
« quiert droit de se rvitu d e, possession et saisine, par
« quelque laps de tems que ce s o i t , et j a ç a i t , q ue
« Yégoufi qu évier, d ’une maison descende en ladite
« place,,, ou que l ’on ait pues sur ic e lle , ou que Ton
« ait passé et repassé, allé et ven u par aucun te m sj
« pourtant*n’est acquis en ladite place ou cham p v id e,
« aucun dr^oit de servitude, par quelque laps dei tems
« .que, ce soit,, tyntfn%
qu 9¡¿¿y;
titre du, contraire, ou
« q u ’ès-çhoses. si^dites y çûl eu contradiction’, et après« icelle joui^ a^ c^ .de trentej ans ».
f K ;
•
,
;
A i n s i, tou ¡es. ces 1cpuf u mes ;ont. pré vu tout ce qui
devait résulter, des vues , égouts , éviers , chevrons et
autres choses anciennem ent étabjiesjsuit,un tçrrain non
b â t i, lorsque le possesseur voudrait s’en prévaloir; 011
plutôt ces co u tu m es, qui sont le résultat de l ’exp é
rien ce, ont condam né des prétentions q u i, en les ac
cu eillan t, juraien t
la lopgue détruit, le,, principe de
riinprpscript¡¡bililè des servitude®* \e \ em pêché ;to u te >.
espèce de tolérance.
. ■.
�( *9 )
L e s sieurs D elaire et B ard onnet argum entent du
Code c i v i l , en distinguant les servitudes continues et
apparentes qui peuvent prescrire par trente ans. Mais
le Code civil n ’est pas la loi des parties : il le sera à
com pter de r 8 o 3 . Et c ’est depuis cette époque seule
m ent que les habitans du Bourbonnais auront à veiller
sur les fenêtres et égouts des maisons voisines : jusquelà , la loi du territoire veillait pour e u x , et les pré
servait de toute prescription. ;
C ette l o i , cependant, ne semble pas aussi claire aux
^sieurs Bardonnet et D e l a i r e , q u ’elle l ’était pour A u roux-des-Pom m iers, et ils trouven t que' le m ot place
vide n’a aucun rapport aux en clo s, jardins et terres
cultivées ; sur tout quoi ils pensent q u ’on peut établir
une servitude autrem ent que par titre.
Supposons pour un instant, qu’A u ro u x ait eu tort
de ne pas être de cette o p in io n , et demandons a u x
sieurs Bardonnet et D e l a i r e , com m ent et par quoi ils
ont grevé de servitude l’enclos et terrain cultivé des
Sœurs grises, quant aux six pieds qu'ils récla m en t, ou
à tout autre espace m oin dre?
Ils reconnaissent ne l ’avoir jamais p ossédé, et sup
posent que le sieur Burelle a pu l ’acquérir par Icl
prescription : d’après cela ils n ’ont ni titre ni possession.
E st-ce par la saillie du toit de vingt pouces ? mais
ce serait décider la question par la q u e s tio n , et e u x
seuls seraient de leur avis.
A u r o u x , en pensant que l ’article 5 19 s’étend 11 toute
espèce de servitudes, en donne une b on n e raison; c ’est
6
�( 20 )
« d i t - i l , qu’il faut en attribuer l ’origine au p r é c a ir e ,
« à l ’a m itié , à la toléran ce, et qu’il ne serait pas juste
a d ’établir une servitude sur ce fondem ent ».
.D e c u lla n t, sur le m ot ég o u t, donne la note suivante :
H o c sequitur quod ¿¿cet per tr¿g¿nta a n tios, vel aLcud
tempus ¿ongius et immemor¿a¿e, stitlLCidlum e x tecto
dom us vicirtœ
in
aream meam
cec¿der¿ty non tamen
acqu¿r¿tur servitus > et possum cogéré vLcinum ut aquam
pLui>¿am d¿l>ertat, et rec¿p¿at m fu n d u m suum .
A i n s i , D ecullan t ne suppose pas que la place soit
vacante et non cultivée \ il la désigne par l ’expression
générale du sol ou terrain appartenant au vo isin , ¿n,
aream meam ,* et en cela il pense co m m e  u r o u x *
co m m e le$ r éd a ct eu rs des coutum es ci-dessus citées’*
et co m m e tous les com m entateurs de la cou tum e de
Paris.
O ù en s e r a it - o n , en e f ï e t , si après avo ir souffert
en b o n voisin ce q u ’on n ’avait pas un grand i n t é r ê t
d’e m p ê c h e r , il fallait s’attendre à la singulière apos
trophe des sieurs D elaire et B ard o nn et? « C ’est à vous
« de reculer de six p ie d s , disent-ils au sieur Burelle ;
« Ca
r
,
suivant la lo i, nul ne peut faire des fenêtres
« en son m u r, si ce n ’est à six pieds de distance du
« voisin ».
Ils 11e se sont pas aperçus que cette loi les condam ne
eux-m êm es, puisque ce sont eux qui
o nt
fait des fenêtres,
et cependant leur héritage n’était pas à six pieds du
champ voisin. Ils ne
devaient
donc pas les ouvrir 5 et
en Bourbonnais cette ouverture est réputée tolérance.
�( 21 )
C ’est une bien bizarre idée que celle de re n v o y e r à
six pieds de soi celui qui nous a laissé m ettre à notre
aise ; si celui qui a des vues avait conservé le droit
de les garder, au moins n e faudrait-il pas le chasser
à la plus grande distance connue.
E n effet, la distance, à R e im s , n ’ est que de d eu x
pieds et dem i (art.
35 y ) . E n L o rra in e , de ce q u ’e m
porte le tour d’ un contrevent (titre 4). E n A n jo u et
M a in e , d ’ un dem i-p ied ( 4-55 et 4 6 3 ).
Ces deux dernières coutum es donnent lieu à un raison
nem ent qui n ’est pas sans analogie à l ’espèce. D 'ab ord
elles n’adm ettent pas les servitudes sans titre; mais en
s u ite , elles adm ettent la possession lorsqu'elle est ac
com pagnée d ’un ouvrage e x té rie u r5, e nf i n , elles per
m ettent de faire vues sur s o i, n 'y eût- il qu’ un dem ipied d’y voir. L e rapprochem ent de ces principes prouve com b ien
la loi est en garde sur les conséquences à tirer des ou
vrages extérieurs; com m ent donc faudrait-il présumer
q u ’on a laissé plus de vingt pouces de distance, en
B o u rb o n n a is, où la cou tum e parle d ’imprescriptibilité
ab so lu e, et sans m odification?
Mais avan t que les experts se crussent autorisés à
présumer que le propriétaire de la maison Delaire avait
dû se retirer sur soi pour avoir des vues et égo u ts, il
fallait q u ’ils tirassent plutôt des présom ptions, soit de
leur plan, soit des titres, soit des principes. Il est dom
m age q u ’ils aient aussi mal fini un excellent rapport :
on ne peut cependant s’em pêcher de dire ; que leur
�( 22 )
digression sur le tour d’échelle, détruit par de fausses
idées les observations lumineuses q u ’ils avaient faites
sur tout ce qui tenait aux titres et au local.
D e sin it in piscem muUer fortnosa superne.
Mais si les dernières raisons du rapport ne sont pas
concluantes, il est facile d 'y su p p lée r, sans s’en écarter
le moins du monde. E n e f f e t , le plan des experts
donne l ’alignem ent de la mai so n D e la ire , de son jardin
et de son cham p qui viennent à la suite. Ces trois
objets sont sur la m êm e ligne ; et la m aison , au lieu
d ’abandonner cette ligne en arrière de six p ie d s, se
prolonge sans la quitter, et se courbe m êm e en dehors
sur son extrém ité : donc s’il y a quelque chose à -pré
sum er ^ c'est que loin de laisser du terrain, le proprié
taire de la maison n ’a pas m êm e voulu abandonner
une c o u r b e , afin de profiter de toute sa ligne.
Si du plan nous venons aux titres m êm e de la maison
des adversaires, e n 1 6 8 9 , 1 7 0 0 et 1 7 5 2 , no us v er r ons
que la terre du C u r é ou des Sœurs grises est donnée
pour confia im m édiat de la maison D e la ire , par ceu xlà m êm e qui vendaient et achetaient ladite maison.
Q ue si le sieur Bardonnet revenait à l'acte de 1 7 8 2 ,
ém ané de lu i- m ê m e , on lui répondrait que Les tours
d ’échelLe, par lui ven d u s, n ’ayant rien de spécifié pour
l ’aspect ni l ’étendue , ne sont q u ’ une superfétation de
s ty le , com m e les entrées et issues q u ’il vendait aussi;
en sorle q u ’il n ’ajoulait rien de spécial à ce qui était
aussi une cession de la loi. M ais loin d’indiquer une
distance quelconque du côté de l’enclos des Sœurs grises,
�( 2 3 }
il n ’a pas m anqué l u i - m ê m e de le donner aussi pour
con fin , sans parler de ruelle ni d ’interm édiaire; ce qui
n est pas une m édiocre circonstance.
E n fin , les experts auraient bien d û , en décidant un
point de droit, s’occuper un peu des principes, et hésiter
à prononcer que celui qui prétend s’être retiré sur son
terrain, pour b âtir, n’a besoin, pour le faire juger a in si,
que d ’une simple conjecture ; ils auraient vu que cette
retraite doit être p ro uvée par éc rit, ou par des bornes.
Ils l’auraient v u dans Desgodets, qui est le guide le
plus usuel des exp erts, et dans A u r o u x , qui est le guide
le plus sûr pour les lois de sa province. Desgodets, sur
l ’art. 210 de la coutum e de P a ris, indique l ’alignem ent
que doit prendre le second propriétaire qui bâtit , et
il le borne à la limite laissée par l ’autre propriétaire,
si c e l u i - c i a laissé l ’espace du tour d ’échelle hors de
ses m u rs , et qu’ il y a it acte valable q u i le prouve.
« Quand on s’est retiré de trois p ie d s , dit A u ro u x
« sur l ’article
5 i o , il faut planter bornes au-delà , et
« dresser proces-verbal double avec le v oisin , ou laisser
« un bout de m ur ou de p ig n o n , pour m arquer que
« le terrain est encore à s o i , sans quoi il faut pré«' sum er le contraire. D e là est ven u e la m axim e q u ’en
« pignon ou m ur à pied droit
n’y a pas de tour
« d'échelle ».
» >
C ette autorité si précieuse n’est, com m e on le v o it,
q u ’ un plus grand développem ent du p rin cip e, q u ’en
Bourbonnais il n ÿ a pas de servitude sans titre. Si on
en était quitte pour dire com m e le tribunal dev la
�( 24 )
Palisse, q ue c’est à titre de propriété q u ’on donne u n
tour d ’é c h e ll e , plutôt q u ’à titre de servitude , il ne
serait pas difficile d ’éluder la loi à son loisir, et l ’usur
p a te u r aurait tout à gagner, puisqu’au lieu d ’une simple
servitude q u ’il aurait cru co n q u érir, on lui donnerait
une propriété pour se m ettre d ’accord a vec la loi.
Quel a été le m o tif des experts, lorsqu’ils ont voulu
constater q u ’il y avait eu une charm ille parallèle à la
maison D elaire , et qu’on pou vait passer entre cette
charmille et le m u r ?
’
Ont-ils pris garde q u e , non-seulem ent à cause de
la végétation des arbres, mais encore par l’obligation
de la lo i, ces charmilles ne pouvaient pas être adossées
contre le m u r ? 11 fallait absolument laisser une dis
tance telle, que les vents ne pussent pas y pousser les'
branches. Mais , encore une fo is , quand la distance
aurait été à vingt pied s, cet adm inicule v a u t - i l un'
titne pour donner le terrain in term éd ia ire? si une
charmille é t a i t u n e l i m i t e , où s’a r r ê t e r a i t - ô n , car celleci ne longeait qu’ une partie de la maison voisine ?
T a n t que les experts n’ont raisonné que par h y p o
th èse, ils ne sont pas fort à crain dre, puisqu’ils pensent
autrem ent que la loi. Mais il y a lieu de s’é to n n e r,
q u e , dans leur résu m é, ils aient paru regarder com m e
co n sta n t, q u ’une porte avait existé jadis dans le m ur
des bâtimens du sieur Delaire.
Qui le leur a dit ? un seul indicateur, dont ils ne
disent ni le n o m , ni l ’a g e , tandis que d’autres indi-r
* cateurs désignés, et d ’ un âge a van cé, font la description
de
�.
. ( 25 }
de Fétat ancien des lie u x , et ne disent rien de pareil.
C et inconnu méritait^il donc assez de confiance pour
qu un fait aussi invraisemblable fût regardé com m e
Constant ? 1
C e qui devait prouver cette invraisem blance a u x
exp erts, était’ l ’ép iso d e , noté par e u x -m ê m e s y de la
porte ou fenêtre que le sieur Bardonnet avait vo u lu
f a ir e , et dont les religieuses em pêch èren t Touverture :
s’il avait eu une ruelle laissée p a r '‘l u i , hors de sa
m a is o n , elles n ’auraient pas pu s’y o p p o ser, m êm e
quand cette ruelle n’aurait été que pour le tour d’é
c h e l l e , ainsi que l’enseigne C œ pola, en son traité de
'servitut. urb. prœd. , ch. 1 1 , n.° 6. :
* C ette résistance des religieuses ’ devait paraître un
m o y e n ¡décisif a u x experts : car en l ’absence d’un titre ,
le sieur Bardonnet aurait dû avoir possession après
contradiction ; et au c o n tr a ir e , la contradiction avait
eu pour résultat d’em pêch er dè posséder. '
C ette réflexion si naturelle se fortifiait par la décla
ration de l ’in d icateu r, qui / pendant sa ferm e , avait
cultivé le terrain ju sq u 'a u , mu r ) fait d’autant plus in
con testable, que les sieurs D elaire et B a rd o n n e t, loin
d e - le n ie r , ont regardé le terrain en litige co m m e
acquis a u sieur Burelle par la prèscription.
C om m en t donc des expertsaussi judicieux et instruits,
ont-ils négligé des conséquences aussi frappantes, nées
de leurs propres rem arques, pour s arrêter à ce q u ’ils
ne voyaient ni par leurs y e u x , ni par les y e u x d ’autrui ;
en un m o t, pour courir après un fantôme. N ’en soyons
7
�( s6 )
pas surpris; car que le-plus sage a d o p te’ un systèm e
q u e lco n q u e , il veut le fortifier de tout ce q u ’il croit
propre à le faire valoir, et il ne se hâte pas de noter
ce qui le contrarie. C e r te s , la question était délicate
pour des experts nourris des usages d’A u vergn e. Il y
avait)Un rebord de bois a une fen être, et^ sans d o u te,
les experts se sont s o u v e n u s aussitôt de la cou tu m e
locale de C l e r m o n t . L es principes auxquels on est fa
miliarisé dès son e n fa n c e , reviennent toujours à la
m ém oire com m e un e-règle dominante et sure. D é là
vient q u ’ici les experts ont parfaitem ent raisonné dans
tout ce qui ne tenait pas spécialement aux usages
d ’A u v e r g n e ; mais une fpi$;yenus à cet a rticle, le na
turel lfa em po rté; et rejetant toute réflexion 'co n traire,
ils ont p r o n o n c é ren point de jdroit co m m e ils l ’eussent
fait pour un procès d 'A u ve rg n e. N aiurarn expellas
f u r c â j tameiz, usqub 'reciirret»
-, .
;
P e u t-ê tre leur opinion?}) assez brièvem en t énoncée
sur le>tour d ’échelle,jest-ellë donnéé-com m e un m o yen
term e entre la demande]du s ie u r D e la ir e , qui, co m m e
on l’a dit, veut avoir six pieds.de distance, non compris
le todr d'échelle , e tile * ju g e m e n t de< la Palisse , qui
accorde six. pieds. ¡Mais un procès n ’est pas jugé; par
a m e n d e m e n t, quand la loi ne compose pas.
t
Elle compose s i ’p e u , que m ê m e en coutum e d ’A u
v e r g n e , des vues et é gouts n’em p êc h en tcpas le voisin
d'acheter>la m i t o y e n n e t é du m ur pour y bâtir, et de
supprimer les
jours.
L a C our l ’a ainsi jugé dans la
causé des sieurs C hevalier et C h a p a v e y r e , en l ’an i 3 j
�( %1 }
et cependant il y avait aussi une façade à vues droites
qui n était point mise à la hauteur de coutum e : la
C ou r jugea seulement que le stillicide était acquis par
la prescription, et ordonna qu'il serait conservé en b â
tissant contre le m ur : mais les vues ont été bouchées.
L e sieur C hevalier citait deux arrêts, l’ un du parlem ent
de P aris, par A u g e a rd ; l’autre , de-la C ou r de cassation:
ces arrêts ordonnaient aussi la suppression des jours
pratiqués sur l ’héritage voisin , malgré leur n écessité,
et m algré toutes prescriptions et présomptions.
C ’est p eu t-être un in con vénient que d ’ôter des fe
nêtres h celui qui en a usé lon g-tem s : mais il a dû
s’y atten dre; et l'inconvénient serait bien plus grand
de dépouiller le voisin d ’ une portipn de sa p ro p riété,
de le forcer m êm e h dém olir un bâtim ent. L e sieur
Burelle avait sacrifié une partie de son droit pour vivre
en bon voisin ; il avait abandonné une partie de son
terrain ( 1 8 , 20 et 22 pouces, suivant le r a p p o r t ) , et
s’ était retiré de près de deux pied s, sans y être o b lig é ,
et lorsqu’il aurait pu faire supprim er l ’égout et les jours
du sieur Delaire.
C elui-ci trouve que l ’eau de son toit lui revient par
incidence, après être tom bée sur le m ur du s.r Bu relle;
mais le plus grand dom m age en ce cas serait bien pour
ce dernier; au resle, il y a un m o yen peu dispendieux
d ’éviter ce dom m age resp ectif, c ’est de cou per la
m oilié de saillie du toit, ou d y placer un chenal qui
conduira les égouts dans la rue.
.Si le sieur Burelle eût cru ne pas éviter uft procès,
�(28)
r
.
'
il a u r a it " agi différem m ent, et il aurait usé de tout 'son7
droit.; Mais quand il a sacrifié quelque chose à la p a ix /
on ne peut pas en tirer avan tage; et encore une fois,
si les lois ne sont pas un vain m o t, le sieur Burelle ne
peut pas être contraint d’aban donner son terrain à celui
qui n ’a nul tître pour s'en dire propriétaire : il a pour
lui la lo c a lité , les titres , l’expertise , la c o u t u m e , e t
l ’opinion uniform e de tous les com m entateurs.
M . e D E L A P C H I E R , ancien avocat,
j
M . G O U R B E Y R E p è r e , avoué.
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A RIO M , de l'imprimerie du Palais, chez J.-C, SALLES.
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Burelle, Joseph. 1810?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Gourbeyre, père
Subject
The topic of the resource
coutume du Bourbonnais
droit de voisinage
nuisances
Description
An account of the resource
Mémoire pour Sieur Joseph Burelle, Notaire impérial, habitant de la ville de Varennes-sur-Allier, appelant ; Contre les sieurs Guillaume Delaire, J.-B de la Geneste, et Franç.-Blaise Bardonnet-de-la-Toule, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1810
1689-Circa 1810
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0415
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Varennes-sur-Allier (03298)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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coutume du Bourbonnais
droit de voisinage
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MÉMOIRE
EN RÉPONSE,
POUR
Louis D E F A U R E DE C H A Z O U R S ,
ancien capitaine d’infanterie, Habitant au lieu
'de la Com be, commune de Saint-Quentin
demandeur en exécution de jugement;
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M
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a ir e
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C O N T R E
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:
de la ville de Gannat,
défendeurs.
a b it a n s
L e sieur de Chazours se vît enlever, en 1790, une
récolte de vingt septerées, à main armée, par une foule
d’individus se disant envoyés par une autorité adminis
trative. A la suite de cette voie de fait il fut obligé, par
A
�(a-)
la force des circonstances, d’abandonner environ qua
rante septerées, de terre : mais lorsque des temps plus
heureux lui ont permis d’élever la v o ix , il a réclamé
contre une violence que les tribunaux ne pouvoient que
blâmer et proscrire.
Après une révolution , le temps présent n’est point
comptable des erreurs du passé, et il est rare que celui
à qui elles furent étrangères veuille se charger de leur
justification. Aussi pendant toute la durée du litige sur
la nullité de l’abandon forcé dont on vient de parler,
M . le maire de Gannat avoit défendu les intérêts de sa
commune avec le ton de: décence et de modération qui
convenoit à la dignité de sa place et à la nature du procès.
Pourquoi faut-il; que changeant tout à coup le genre
de sa défense, M. le maire de Gannat ne veuille plus
répondre qu’avec emportement à un demandeur qui avoit
soumis ses prétentions à la justice ? quel a pu être son
motif, de ne donner de la publicité à sa défense que pour
la noyer dans un amas d’injures calomnieuses et incon
venantes ?
Et certes le moment étoit bien choisi, pour s’irriter
ainsi brusquement et comme par réminiscence. On conçoit
que dans le commencement de ce procès, et lorsque M. de
Chazours se plaignoit d’un acte de violence, sans autre
preuve que son allégation , il eût pu y avoir quelque
chose d’excusable, que le maire de 1811 mît une certaine
véhémence à venger ses prédécesseurs d’une inculpation
dont il pouvoit douter.
Mais c’est après un jugement non attaqué, pronon
çant la nullité de l’acte illégal qui fait toute la matière
�( 3 )
du procès; c’est en produisant lui-m ôm e des pièces
officielles qui constatent la voie de fait articulée par
M. de Chazours ; c’est enfin lorsqu’il ne s’agit plus, de
la part de M. le maire de Gannat, que de produire des
titres, comme il l’avoit promis ; c’est alors, disons-nous,
que M. le maire de G-annat, ne pouvant tenir sa promesse,
perd toute mesure et s’en prend à tout le monde, accuse
le sieur de Chazours pour avoir réussi, accuse le juge
ment pour avoir annuité ce qui étoit nul, et s’accuse
lui -môme d’indolence et d’insouciance pour l’avoir laissé
rendre.
De quel profit pour la cause peut donc être cette colère
posthume, lorsque l’acte qui en étoit le seul objet est
déjà déclaré nul, et que, par une conséquence forcée,
il faut remettre les parties au même' état qii’elles étoient
en 1791 ?
M. de GHàzours a été d’abord plus sensible qu’il n’étoit
nécessaire à ce ton d’irascibilité et d’aigreur qui règne
dans tout le mémoire de M. le maire de Gannat. Les
épithètes d>usurpateur habituel et de spoliateur ne pouvoient paroîtré que fort dures pour un homriae élevé à
l’école de l’honneur, et qui croit avoir fourni une longue
carrière de délicatesse ; il s’est demandé à quels signes
un homme peut être déclaré usurpateur habituel, lorsqu’ayant h la main le titre de propriété de ses ancêtres,
il n’a pas dépassé d’une ligne lesÎ)ornJes qui y sont écrites,
et lorsqu’il rie se défend que poiir conserver ce qu’ils
lui ont transmis. Alors il’ ne lui a plus semblé que l’opi
nion publique dût être fort touchée d’une récrimination
injurieuse, qtii n’est que trop habituelle à ceux qui se
A 2
�C4 )
voient vaincus, quoique peut-être il n’y eût pas lieu de
s’attendre qu’un magistrat se livreroit à ce genre de
défense.
Quoi qu’il en soit, voyons ce qui résultera des faits
de cette cause, et si déjà il n’est pas éclairci que la com
mune deGannat est seule convaincue d’usurpation.
F A I T S .
La ville de Gannat est propriétaire d’un grand com
munal appelé de Chantoirat, borné au nord-ouest par
lin ruisseau appelé de Sigilon.
Ce ru isseau, coulant dans une gorge, sépare ce com
munal d’un ténement appelé des TSruyères, et de toutes
les autres propriétés du sieur de Chazours.
Il est difficile qu’une limite soit mieux marquée par
la nature. Cependant les habitans de Gannat voyant au
revers de leurs communaux un terrain souvent inculte,
y laissoient aller leurs bestiaux, ce q u i, en terre v a in e ,
étoit sans conséquence; mais le propriétaire de Chazours
n’en faisoit pas moins des défrichemens partiels et suc
cessifs sur tout son ténement : il en percevoit sans obs
tacle les récoltes, et alors les bestiaux voisins étoient
soigneusement chassés.
Comme quelquefois cette expulsion avoit pu être
faite par les colons h force ouverte, l’esprit de résistance
portoit les expulsés à aller se plaindre à la mairie ,dç
Gannat, en alléguant que leurs auteurs ayant joui du
pacage sans trouble, le local étoit présumé faire partie
des communaux. La m airie, pour ne pas paroître né-
�( 5 )
gliger les intérêts de sa' v ille , avoit cru par deux fois
devoir verbaliser, et menacer de procès. Mais le sieur
de Chazours n’en étoit que plus attentif à défricher pour
faire des actes publics cie propriétaire, et cependant la
mairie de Gannat n’a jamais osé l’attaquer pour empêcher
ces défrichemens.
Ses successeurs appellent cela de l’insouciance et de
l’oubli, lorsqu’au contraire des procès verbaux de dires
et menaces constatent que tout étoit mis en œuvre pour
épouvanter le propriétaire , mais que sa bonne conte
nance tint en respect la commune qui n’avoit de droits
d’aucune espèce. En sorte que toute cette verbalisation
ne reste là que comme un monument, pour attester que
le sieur de Chazours est resté en possession malgré la
contradiction ; ce qui de toutes les preuves de propriété
est certainement la plus publique et la plus incontestable.
Comment, en effet, une commune voisine auroit-elle
cru possible, sans titre, de franchir les limites naturelles
de ses communaux, pour s’arroger une propriété nonseulement d’un nom étranger, mais encore faisant suite
et corps avec toutes les propriétés de Chazours, sans le
moindre signe de séparation, sans bornes, sans fossés,
sans titres? En sorte que- par un arbitraire dont l’idée ne
peut pas se soutenir, la commune de Gannat, une fois
entrée dans ce territoire, sans savoir elle-même jusqu’où
elle vouloit aller, auroit été aussi fondée à le réclamer
tout entier qu’à en vouloir une petite portion.
Et véritablement si la commune de Gannat avoit con
servé un droit quelconque sur un espace inconnu, le
sieur de Chazours eût été absolument à la merci de
�. m
l’étendue qu’elle auroit jugé à propos de se donner,
comme il ne l’a que trop été dans les circonstances dif
ficiles où il a été forcé de subir la loi du plus fort.
Mais avant de parler de cette époque, il faut dire un
mot des actes que M . le maire de Gannat n’ose pas appeler
des titres, mais qui prouvent, suivant lui, que le ténement des Bruyères a été pour ses prédécesseurs un sujet
d?inquiétude et de discussion.
Le premier acte d’inquiétude date de l’année 1680 ;
mais comme cet acte est tout en faveur du sieur de
Chazours, M . le maire ne juge pas à propos de s’en
prévaloir.
L e conseil du roi avoit ordonné une confection de
rôles pour les terrains que les privilégiés possédoient
hors de leurs privilèges ; et un sieur Desessart fut en
voyé en Bourbonnais pour vérifier les possessions qui
pouvoient être sujettes à cet impôt. L ’occasion étoit belle
pour eeux des habitans de Gannat q u i , à cause de la
proximité du ténement des Bruyères, auroient voulu le
faire ajouter aux communaux, et en arrêter les défrichemens ; en conséquence, ils indiquèrent le sieur de
Chazours, comme ayant usurpé cent sesterces de terre
sur les habitans de Gannat, sans autre explication.
Sur cette dénonciation occulte, le sieur de Chazours
fut taxé à 1,000 fr., le 28 janvier 1680; mais aussitôt il
se pourvut, en déclarant qu’il se soumettoit au* payement
du quadruple, et à l’abandonnement des héritages taxés,
si on pou voit prouver qu’ils fussent usurpés.
Comme personne n’osa entreprendre de faire cette
�' ( 7 )preuve, il intervint une ordonnance de l’intendant, du
18 mars 1680, qui déchargea le sieur de Cliazours de
cette taxe 5 sauf audit Desessart à justifier de Vusurpation
-par lui prétendue.
Ce sieur Desessart ne la justifia pas ; ses souffleurs ne
lui donnèrent ni titres , ni renseignemens. En consé
quence , le sieur de Chazours continua de défricher, et
resta paisible propriétaire de ces cent sepierées comme
de sa chose propre.
Quatre-vingt-cinq ans de tranquillité suivirent cette
première tentative de trouble* L e sieur de Chazours
avoit même consolidé sa propriété dans cet intervalle,
en achetant de la maison de Fontanges le droit de jus
tice sur tout ce qui lüi appartenait déjà et Chazours.
On voit par une prise de possession publique , faite
en présence de deux habitans de Gannat, qu’il fit l’en
ceinte de toutes ses possessions de la même manière que
son acte de vente les déterminoit ; et précisément on y
remarque, du côté de Gannat, le confin immuable du
ruisseau de Sigilon.
En-1765,.les-métayers!de Chazours chassèrent les ber
gers de Gannat, qui s e - plaignirent à leur mairie d’avoir
été maltraités.
On conçoit aisément que ces plaintes aigrirent les.
parties, et que les maîtres des troupeaux ne manquèrent
pas de murmurer que la ville négligeoit de vérifier si
elle étoit propriétaire.
Il falloit bien ne pas se montrer insouciant ; et la
mairie se mit ù l’abri de tout reproche, en envoyant sur
�(
8 )
les lieux l’arpenteur de la mairie, avec un notaire, deux
procureurs du roi et un médecin.
Cet arpenteur, allant chercher des confins, sans titres
et sans bornes, avoit à faire une assez bizarre opération.
Mais on ne se douteroit jamais comment la ville de Gannat imagina de suppléer aux titres qu’elle n’avoit pas.
E lle arrêta, par un délibératoire, que Vétendue du ter
rain appelé des Bruyères seroit constatée sur le rapport
des labou reurs , vignerons et journaliers DE G a n n â T !!
Enfin voici le notaire, l’arpenteur et les commissaires,
arrivés sur le local où ils sont conduits par ces indicateurs
désintéressés, qui disent qu'entre le ruisseau de Sigilon
et une autre partie de terrain mise en valeur par M. de
Chazours, il y a trente-une septerée'b, moins cinq septerées’
défrichées à l’aspect de nuit, tant antérieurement que
postérieurement à une année, sans avoir pu distinguer
les anciennes d'avec les nouvelles entreprises.
Ensuite les commissaires font leurs plaintes sur un
inaltraitem ent exercé de la part du sieur de Chazours,
sur les bergers de Gannat, en différentes reprises, après *
avoir chassé les bestiaux, notamment mercredi dernier.
A cela M. Chazours répond qu’il n’a maltraité personne,
qu’il n’a pas même chassé des bestiaux : « qu'au surplus
« il est surpris des mouvemens que se donnent les
« liabitans de Gannat pour la propriété et l’usage dudit
« terrain, puisqu’ils n’ont aucun droit certain sur icelui,
« parce que ce terrain, dans toute son étendue, lui ap-
« par tient. »
Alors il produit l’acte de 1680 , pour prouver que
les habitans de Gannat n’ont jamais tenté de justifier
qu’il
�.
. ( 9 )
qu’il eut rien usurpé ; enfin il dit que c’est par tolé
rance de sa part, si les bestiaux de différens' particuliers
ont pacagé , mais qu’on ne peut en induire une ‘pos
session qu’il sera toùjours en* droit dé contrarier.1 1 * '3
A cela les commissaires l’épondent « que saris s’arrêter
« maintenant à la question-de savoir à qui des'habitans
« ‘de Gannat ou'dé M . Defaure appartient lé ’terrain
« des Bruyères, question qui ne doit être agitée que
« dans Vinstance qui suivra sans doute /’opération d’au« jourd’h u i, et pour laquelle instance lesdits sieurs comCf missaires font toutes protestations contraires à celles
« dudit sieur de ' Chazours , ils se bornent à dire que
« outre la possession immémoriale et notamment d'an et
« jo u r, dans laquelle sont les habitans de Gannat d’en-'
« vôyer pacager leurs bestiaux sur le terrain contentieux j
« seules circonstances pour autoriser leurs démarches ,
« ils ont encore l’avantage de réunir en leur faveur dif« férens aveux dudit sieur de Chazours, qui sont acceptés.
« A u moyen de tout quoi ’ ils persisteront dans cette
« possession, et dans Vusage non interrompu où ils sont
« de faire pacager leurs bestiaux dans lesdits commu« naux, par une suite de cette possession. * J
*
cc Et en faisant les réserves nécessaires et capables de
« les maintenir dans généralement tous leurs droits, tant
« sur le terrain renfermé dans les confins ci-dessus iri« diqués, que sur celui qui leur sert de confin à l’aspect
« d’occident, et autres qui seront reconnus faire partie de'
« leurs communaux, ils dht signé sans aücîune approba« tion préjudiciable; observant au surplus Jque la fixation’
« de la commune, relativement auxdrts^confîrisViiiation
B
�( 10 )
faite sur le rapport des anciens habitans déjà nommés,
est demeurée sans réplique, ce qui est accepté,* re
quérant lesditg' sieurs commissaires M . de Chazours
de leur, indiquer laa partie,.dudit terrain défrichée antérieurement à une année, d’avec celle défrichée pos
térieuremenj: ^à une année. »
M . de^Chazours leur répond que tout ce qui est la
bouré a été défriché de temps immémorial.
Les commissaires ne veulent pas y croire, et font en
core des protestations, en disant que la ville assemblée!
saura relever et détruire les prétentions du sieur de
Clïazours. Puis ils signent encore pour la dernière fois,
en ajoutant que les droits des habitans se trouvent con
servés par.leurs réserves et protestations, qu’ils réitèrent
encore pour la plus grande satisfaction de leurs commettans.
Enfin, voilà ce procès verbal fini, et il en étoit bien
temps. Ou a cru devoir le faire connoître dans tous ses
détails , parce que M . le maire de Gannat le produit
comme une pièce importante pour sa commune; et certes
il l’est bien davantage pour le sieur de Chazours.
Où est en effet cette instance qui devoit suivre Vopé
ration d'aujourd'hui ?
Qu’a fait la ville assemblée, pour éteindre les préten
tions du sieur de Chazours?
Si la ville de Gannat s’est assemblée , c’est pour se
«
«
if
«
k
te
tair.ç ;
C’est pour reconnoître qu’on lui avoit fait faire une
fausse démarche; .
!
C’est pour laisser M . de Chazours défricher tout à son
�( « ) '
aise, sans oser lui intenter ce procès si solennellement et
si indiscrètement annoncé.
Si on doutoit de cette suite de défrichemens, on en
trouveroit la preuve dans un autre procès verbal, du 23
juin 1768, que M . le maire de Gannat a eu la bonté
de conserver, pour attester ce fait.
Ce défrichement de 1768 étoit considérable, et c’étoit
bien encore le cas que la ville s’assemblât pour éteindre
ce qui étoit un peu plus que des prétentions *, mais on
voit seulement que, dans une tournée générale ordonnée
par la commune pour constater les usurpations des voi
sins, et parmi trente-sept anticipations constatées (car
la ville de Gannat ne se mettoit pas en recherches pour
peu de chose ), les indicateurs firent écrire au procès
verbal que M. de Chazours avoit anticipé cent quatrevingts pas de plus cette année, dans le ténement des
Bruyères.
Cet acte demeura inconnu à M . de Chazours, qui
continua de faire des actes de propriété jusques à la
révolution.
En 1789 , plusieurs individus allèrent à la mairie de
mander qu’on verbalisât encore pour des usurpations at
tribuées non-seulement à M. de Chazours, au delà du
ruisseau de Sigilon , mais encore à M . de Fontanges,
dont les propriétés joignent les véritables communaux
de Gannat, en deçà du ruisseau de Sigilon.
En conséquence, on dit par un procès verbal du 17
août 1789, que des commissaires se sont transportés sur
les lieux , « avec les indicateurs pris dans la classe
« des paysans cultivateurs ; et suivant leur déclaration,
B a
�«
«
«
«
«
«
«
»
«
( 12 )
il paroît qu’en entrant par le cliemin de Gannat allant
à Chazours, au delà du r i f de Sigïlon ,;M . de Chazours
a annexé A u n e t e r r e q u i l u i a p p a r t i e n t , 'APp e l é e d e s B r u y è r e s , la quantité de quarante septerées de terre, ou environ, anciennement défrichées,
prises dans cette partie du communal ; et autant que
peuvent se rappeler les indicateurs, ils ont fait remarquer 4qu’il y a environ trois septerées nouvellement
défrichées, et le tout en guérêt, etc. »
En ce temps-là y . l’assemblée constituante rendit un
décret, le 18 décembre 1789 , portant défenses aux mu
nicipalités et communautés d’habitans, sous prétexte
dÜusurpations, droit de propriété, ou tout autre pré
texte, d’agir par voies de fait, etc.
Cependant les soi-disant indicateurs ne se bornoient
pas, comme autrefois, à faire verbaliser à Chazours : les
temps étoient changés; et des menaces très-vives épouvantoient les colons pour la sûreté de leurs récoltes. Le
sieur de Chazours fit enceindre les ensemencemens de
l’année suivante de larges fossés, et ne douta pas que la
municipalité e lle-m êm e, conformément au décret cidessus, ne les prît sous sa protection.
Il se trompoit. M. le procureur de la commune donna
le 20 juin 1790 un réquisitoire ainsi conçu :
« i°. A ce que, pour les terres dont M. Defaure est
« en possession avant le 4 août 1789, il soit dit et or« donné que l’on se pourvoira par les voies de droit
« devant les juges qui en doivent connoître; que les six
* quartelées nouvellement ensemencées et défrichées par
�( ?3 )
«
le sieur Defaure,
s o i e n t , r é c o l t é e s e t ENGRANGÉES
« PAR DES GENS QUE VOUS COMMETTREZ A CET EFFET-',
«
«
«
«
«
et qu’il sera fait défenses au sieur Defaure dé n’y rien
recueillir. Requiert aussi q u ’i l s o i t e n v o y é d e s g e n s
pour combler les fossés faits tant dans le communal
que dans le chemin qui conduit à Begues et aux
Viviers. »
»
Y eut-il une délibération prise sur ce réquisitoire? on
l’ignore. Le- sieur de Chazours ne fut informé de ces
mesures que par l’apparition inopinée d’un officier mu
nicipal suivi d’une foule d’hommes venant en tumulte
dans ses propriétés, pour couper et enlever la récolte
ensemencée dans vingt septerées ou environ du ténement
des Bruyères. Le sieur de Chazours, informé de cette
irruption par le bruit considérable qui l’accompagnoit,
s’enferma dans sa maison, avec toute la terreur et l’in
quiétude qu’on peut aisément supposer. Il défendit même
aux gens de sa maison d’aller en apprendre la cause, de
peur d’irriter la multitude.
Toute la récolte du maître et du colon fut enlevée,
chargée, conduite et engrangée à Gannat. L ’attroupement
n’étant irrité par aucun obstacle, se borna à des cris et
des menaces, et se retira, escortant cette récolte comme
une conquête.
Voilà ce qui s’est passé en 1790, dans cette année
que M. le maire de Gannat, dans sa satisfaction, appelle
« Vépoque du véritable esprit public, dirigé par Vamour
« du bien général, et par une opinion réfléchie ? dégagée
« de toute prévention. »
�.
(*4 )
Quoi qu’il en soit, et quelle que fût la direction de
cet esprit public, il falloit louvoyer, et se garantir, s’il
se pou v o it, de toutes incursions nouvelles. JLe sieur de
Chazours exposa sa situation à la municipalité assemblée,
qui blâmant, il faut le croire, ce mouvement révolu
tionnaire, mais forcée peut-être par la difficulté des
temps de ne pas rendre une sévère justice, proposa un
arbitrage au sieur de Chazours , pour régler les limites
des communaux.
Un arbitrage en cette matière, étoit une chose fort
bizarre ; mais il n’y avoit pas à hésiter. Le sieur de
Chazours se trouva trop heureux d’accepter ce qui avoit
un simulacre de justice, et ce qui donnoit du temps;
en conséquence , par délibération du 20 mars 1791 ,
M M . Legay père, et Becquemi, experts, furent choisis
pour prendre connoissance des titres, s’aider du témoi
gnage des anciens hahitans et gens connoissant l’état
des lieux, et faire leur rapport devant trois hommes de
lois, chargés de prononcer définitivement sur la contes
tation.
Cet accord fut homologué par le département, et les
experts se réunirent. M. de Chazours, ne se rappelle
pas s’il donna à déjeûner aux officiers municipaux qui
les accompagnèrent : l’état de gêne où le tenoit cette
affaire, et les menaces violentes des parties intéressées,
ne lui ont pas permis de garder une telle niaiserie dans
sa mémoire.
Il sait seulement qu’il alla sur les lieux, et que fidèle
au compromis, il donna des titres aux experts, mais que
la municipalité ne leur en donna pas.
�( i5 )
Elle n’en a jamais eu.
Mais elle leur envoya ces anciens habitans, ces éter
nels indicateurs, obstinés à appeler communal tout ce
qui avoit été parcouru par leur vaine pâture hors les
temps des défrichemens.
On voit tout de suite comment les choses dûrent se
passer, quelle aigreur s’en mêla , quelles menaces en
furent l’accompagnement.
Aussi ne fut-il plus question de permettre aux experts
de faire leur rapport à des hommes de lois, pour avoir
une décision définitive.
Les experts eux-mêmes, intimidés, et pressés d’émettre
une opinion, conseillèrent au sieur de Chazours d’adopter
les limites qu’on voudroit prescrire. Mandés à la mairie
avec le sieur de Chazours, il s y rendirent avec la cohorte
des indicateurs, et là fut rédigée, le 30 avril 179 1, une
prétendue transaction , par laquelle rejetant dès la pre
mière ligne la distinction adoptée jusqu’alors entre les
communaux de Chantoirat et le ténement des Bruyères,
tout est confondu sous le nom des communaux de Chan
toirat. On y dit que les titi'es et documens respectivement
produits, n’ont pas procuré des éclaircissemens sufïisans
sur les vraies limites : en conséquence de quoi on fixe
les lieux où seront plantées deux bornes aux angles, et
des bornes intermédiaires. Il est dit que Laplanche ,
expert, placera ces bornes en présence du sieur de
Chazours, qui a promis de s'y rendre.
Cette transaction n’a pas été homologuée, comme on
pourroit le croire, d’après cette pièce retrouvée, que
�( 16 )
M. le maire annonce dans son mémoire ( page i 5 ).
On avoit bien fait homologuer le compromis, qui pré
cisément n’a pas été exécuté ; mais on n’a pas osé pré
senter à l’homologation la pièce qu’on juge à propos d’ap
peler une transaction.
Elle a cependant été exécutée, et on peut dire même
largement exécutée ; car on a pris ce qu’on a voulu ;
et si l’abrégé de plan, qui est dans les pièces de la mairie,
est fidèle, évidemment la commune a pris beaucoup plus
que d’abord elle ne .vouloit prendre.
Mais aucune borne n’a été plantée. Le sieur de Cha
zours , une fois sorti de la municipalité, n’a eu garde d’en
requérir la plantation ; et les habitans eux-mêmes, plus
pressés de s’emparer que d’exécuter leur acte, ont’ oublié
que cette plantation en étoit'partie intégrante et nécessaire;
. On sait que de jour en ijour les tëmps devinrent plus
orageux ; il falloit de la patience .pour de plus grandes
choses, et M . de Chazours rongea son frein. En 179 3,
il fut incarcéré à Moulins, comme suspect; ses biens
furent mis en séquestre, et un maréchal de Gannat en
ut le fermier national.
>
Les communaux furent partagés ; ils devoient l’être par
tête , et on fut forcé d’en donner un lot au sieur de
Chazours. M. le maire de Gannat paroît extrêmement
satisfait que M. de Chazours ait eu ce lot, et il en tire
les plus grandes conséquences. Mais un maire sait bien
que ce n’est pas l’habitant qui se fait son lot. L e sieur
de Chazours n’en a pas dem andé, il 11’a pas même assisté
aux délibérations; il en étoit empêché. On l’a compris,
comme
�( *7 )
comme tout le m onde, dans un partage municipal *, il
n’eut pas été prudent de refuser un lot, et le sieur de
Chazours a laissé jouir le sien par un vieux domestique,
comme s’il avoit prévu que la mairie, se prévalant de
son propre fait , lui feroit un jour une aussi singulière
objection.
En l’an 13 , les habitans de Gannat ont fait un nou
veau partage, et M . le maire n’a pas manqué de re
chercher si ce lot ne se trouvoit pas placé dans le terrain
contentieux. On voit, à la page 14 de son mémoire, qu’il
s’efforce de le faire entendre ainsi, en disant qu’il est
dans ce même ténernent des Bruyères, mais dans une
partie séparée par le ruisseau Sigilon.
Ce n’est là qu’une équivoque, mais elle n’y est pas
placée sans cause. Pourquoi dire que ce lot est dans le
ténement des B ruyères, lorsqu’il est dans le vrai com
munal de Gannat, dans le local appelé Chantoirat, qui
n’a jamais eu d’autre nom ? Pourquoi dire que M . de
Chazours a -participé au second partage , et ratijié par
là ce qu’il attaque, lorsqu’au contraire M. de Chazours
a formé opposition à ce partage, par exploit de l’huis
sier Labalme ? Il n’a pas plus voulu jouir de ce lot que
du premier; et certes il ne pou voit pas empêcher qu’on ne
lui donnât encore un lot malgré lui : il avoit fait tout
ce qu’il pouvoit faire, en protestant par écrit, et en assi
gnant en désistement.
C’est en effet en l’an 13, et précisément avant ce partage , que le sieur de Chazours a commencé sa récla
mation. Jusqu’alors, se reposant sur l’inexécution de cet
acte de 1791, quant aux bornes, et sur les lois qui prosG
�( i8 )
cri vent les actes de violence, il avoit attendu avec pa
tience l’instant favorable de rentrer dans ses droits. Les
anarchies et les factions qui s’étoient succédées depuis
1793 jusqu’au consulat, ne lui avoient présenté aucune
occurrence favorable. Enfin, voyant l’ordre affermi, et
les lois en vigueur, il présenta une pétition à la préfec
ture, pour parvenir à l’annullation de l’acte de 1791.
Un conseiller de préfecture répondit, par un arrêté du
12 frimaire an 13 , qu’il autorisoit le sieur de Chazours
à plaider devant les tribunaux, néanmoins en ajoutant
son avis dans des motifs contraires au sieur de Chazours,
et en disant qu’il y avoit un acte solennel et authentique,
et qu’il faut faire respecter les conventions écrites.
Quoi qu’il en soit de cet avis, M. de Chazours a fait
assigner les habitans de Gannat en la personne de M. le
maire, par exploit du 21 prairial an 13 , pour voir
annuller l’acte du 30 avril 1791, et se désister du terrain
placé entre le ruisseau de Sigilon et les autres propriétés
du sieur de Chazours.
Cette demande n’étoit pas de nature à éprouver de
sérieuses contradictions : aussi, par jugement du 4 août
1809, la nullité de la transaction a été prononcée.
11 est vrai que cette nullité n’a pas été fondée sur la
violence, parce que les habitans de Gannat n’avoient
encore jugé à propos de produire le réquisitoire de 1790,
et qu’ils soutenoient n’avoir usé d’aucunes voies de fait.
L e défaut d’autorisation pour transiger étoit un motif
suffisant, et le tribunal s’est borné à celui-là, en élaguant
toutes les fins de non-recevoir opposées par la commune.
Cette nullité devoit naturellement amener le désiste-
�( i9 )
ment; mais en désespoir de cause, M .le maire de Gannat
a trouvé le moyen de le retarder encore : n’ayant plaidé
que sur la nullité, il a dit qu’il avoit des titres, et il
a demandé un délai pour les produire. Le tribunal s’est
laissé toucher par l’idée que ces titres à produire seroient
peut - être d’une grande importance ; en conséquence ,
après avoir prononcé la nullité, il a dit : « Attendu que
« la commune de Gannat n’a pas suffisamment déduit
« ses moyens pour établir son droit à l’objet litigieux ;
« que son importance nécessite d’accorder un délai à
« la commune pour déveloper ses prétentions et faire
« la recherche de ses titres, si aucuns y a;
« Le tribunal déclare nulle la transaction du 30 avril
« 1791 ; et pour être fait droit sur la demande en dé« sisteinent, remet la cause d’un mois, etc. »
A u lieu d’un mois, la commune en a d’abord pris
huit, et s’est laissé condamner par défaut, le 12 avril
1810 : son opposition lui a donné un délai de dix autres
mois. Et c’est ainsi que se jouant de la justice et de sa
promesse de rapporter des titres qu’elle n’a pas, la com
mune de Gannat, contre toutes les règles , s’est main
tenue en possession.
Maintenant que M. le maire de Gannat est forcé d’a
vouer qu’il n’a aucune espèce de titres, il n’en est pas
plus déconcerté; et pour se tirer d’embarras il dénature
le genre de la cause, et feint de se regarder comme un
simple défendeur qui attend paisiblement les preuves de
propriété que la loi exige de tout demandeur.
Il dit au sieur de Chazours *.
i°* C’est vous qui êtes demandeur en désistement ;
C 2
�( 2° )
c’est à vous à justifier votre demande par des titres,
et vous seul devez en produire; 2°. vous m’avez mal
assigné, puisque ce sont des individus qui jouissent,
et non le corps commun; 30. vous êtes non recevable,
pour avoir participé deux fois au partage des commu
naux ; 40. enfin , comme seigneur de Chqzours, vous
n’avez possédé qu’à titre féodal, ce qui est proscrit par
les lois de 1792 et 1793.
Voilà la somme des eiiorts de M . le maire de Gannat,
et à quoi se réduisent toutes les objections qu’il met à
la pince de ses titres. Il s’agit d’y répondre, et la tâche
ne sera pas bien difficile.
M O Y E N S .
Il ne faut plus parler, comme le dit très-bien M. le
- maire de Gannat, de l’acte de 1791, puisqu’il est déclaré
nul par un jugement non attaqué; mais il ne faut pas
gémir avec lui sur ce premier acte de justice, ni l’appeler
un mal , car il n’est encore qu’un demi-mal; et il est indu
bitable que si ce jugement n’étoit pas rendu, et si le
tribunal eût pu soupçonner qu’on l’induisoit en erreur
sur des titres qu’on étoit hors d’état de produire, M. de
Chazours ne seroit pas obligé de lutter encore pour ob
tenir le complément de la justice qui lui a été rendue.
Oublions cependant que M . le maire de Gannat a
pi’omis de fournir des titres, et ne nous souvenons que
de ses quatre objections.
La première est proposée comme la plus embarrassante;
�( 21 )
c’est par elle que M. le maire commence ses moyens, et
c’est par elle qu’il les termine en la développant ; c’est
l ’alpha et l’omega de ses pensées. Il est visible que c’est
là qu’il a placé toute sa confiance; et en vérité voilà une
confiance solidement établie.
Rien n’est plus incontestable que la maxime invoquée
par M. le maire de Gannat, que tout demandeur doit
justifier sa demande, et que le défendeur n’a rien à prouver.
Sans difficulté , lorsque les choses se sont passées régu
lièrement, il n’y a pas même lieu de mettre cette vérité
en problème; elle se réduit à dire que celui qui,possède
n’a rien à prouver \possideo quia possideo, Si on l’assigne
il n’a que cela à répondre.
G’étoit aûssi tout ce qu’avoit à répondre M . de Cha
zours, lorsqu’on le menaçoit, en 1765, d’un procès qui,
disoit-on, alloit commencer tout de suite. 11 ne commença
pas; et M. de Chazours étoit encore en état, en 1790,
de répondre à la commune de Gannat : C’est à vous à
tout prouver, car je suis possesseur.
Cependant il se trouve un procureur de la commune
qui tranche la difficulté, et qui abrège singulièrement le
procès. En vingt-quatre heures la règle possideo a changé
de citateur; et par suite de cette admirable prévoyance,
M . le maire de Gannat dit aujourd’hui froidement à
M . de Chazours, après l’avoir chassé de chez lui : C’est
à vous qui vous plaignez, à tout prouver, car aujour
d'hui vous ne possédez plus.
Ainsi on pourroit donc renverser les maximes fon
damentales de la propriété, et changer les qualités des
�^ ( 22 )
parties, en réduisant à être demandeur celui qui n’avoit
rien à prouver.
-Aucune loi n’a laissé échapper une telle monstruosité;
et au contraire, en remontant à cette législation vaste
qui prévoyoit tout, nous trouvons un livre entier du
digeste consacré à nous donner des idées plus saines, et
à nous enseigner comment il faut entendre les règles
générales de cette matière.
Le législateur avoit fait, sur les contestations élevées
en matière de désistement et de possession ( interdicto
ati possidetis ), plusieurs lois explicatives, afin que le
juge s’occupât, non pas de celui qui étoit le demandeur
de fa it, mais de celui qui devoit l’être, ut nimiriim
sciatur quis actoris, qui s rei partibus fungi debeat, et
cui incumbet onus probandi.
Ces sortes d’actions étoient, par cette raison, appelées
extrordinaires, parce que la règle que le demandeur doit
tout prouver cessoit. Quand le possesseur ancien avoit été
troublé , le juge ne recherchoit autre chose , si ce n’est le
fait de cette possession, et, sans autre examen , il remet
tait le possesseur en l’état ou il étoit d’abord ; c’étoit
alors à l’autre partie à se constituer demandeur.
Rien de tout cela n’est étranger au droit français. La
maxime spoliatus antè omnia restituendus, est le som
maire de tout le livre 43 du digeste ; elle est le fon
dement de toutes les actions en complainte et réintégrande, qui sont singulièrement protégées par nos lois.
.. Celui qui est troublé a le choix de plusieurs actions.
Peut-il élever sa voix dans l’année, alors un juge de
�( *3 )
paix le rétablit promptement dans ses droits; et celui
qui l’a troublé ne peut, même avec les meilleurs titres,
être admis à prouver qu’il est propriétaire, qu’après avoir
rétabli le demandeur dans sa possession, rendu compte
des fruits, et.tout payé, même les dépens.
Veut-il prendre la voie criminelle si le trouble a eu
lieu de voie de fait, l’action lui est encore ouverte, et
il faut encore que tout soit rétabli et soldé avant qu’on
puisse l’attaquer au pétitoire.
Enfin, si l’action n’a pas pu être intentée dans l’année,
ou si, comme dans l’espèce , le trouble a été suivi d’un
simulacre d’acte qui colore la possession de l'usurpateur,
alors il faut bien que le troublé s’adresse aux tribunaux
civils pour faire tomber l’acte qu’on lui oppose; mais
cet obstacle étant vaincu, chacun rentre dans ses droits,
en vertu de la maxime spoliatus antè ornnia restituendus.
Les parties reprennent alors les qualités de demandeur
et défendeur, comme elles eussent dû le faire avant
Yacte et le trouble; et certes ce seroit donner une prime
à l’usurpation, si l’ancien possesseur paisible étoit réduit
à prouver sa propriété, avant d’être rétabli dans sa
possession.
Tel est l’objet de« la cause actuelle , et c’est en vain
que M. le maire de Gannat feint de s’y méprendre. M. de
Chazours n’est pas demandeur au pétitoire, pour réclamer
ce qui est paisiblement possédé par un autre; il est sim
plement demandeur en nullité d’un acte de violence qui
l’a dépossédé lui-même, et il a conclu au désistement
de l’objet usurpé , toujours d’après lu règle spoliatus
�( 24 )
ante omnia restituendus, Lorsqu’il a prouvé la nullité
de cet acte, il a fait tout ce qu’exigeoit sa qualité de de
mandeur.
' Le procès actuel est donc fini ; et quand il plaira à
M . le maire de Gannat d’en commencer un autre, comme
demandeur au pétitoire,, M. de Chazours sera prêt à
le soutenir.
Mais M . le maire de Gannat se fait quelque part un
moyen de ce qu’il n’existe pas de bornes d’entre les com
munaux et les champs de Chazours. Veut-il en conclure
qu’en attendant sa dépossession il faut vérifier actuelle
ment les limites? Mais cette objection ne seroit qu’un
prétexte de violation des principes; le savant Domat va
y répondre.
- « Si des parties qui sont en procès pour des confins,
« se contestent aussi la possession des lieux qu’il faut
« borner, il faudra premièrement juger la possession ;
« car la question des confins regarde la propriété , qui
« ne doit être jugée qu’après la possession. ( Liv. 2 ,
« tit. 6 , sect i re. , n°. 8.) »
Le motif de ce principe vient toujours à l’appui de
la situation du sieur de Chazours, ut hoc online f a c t o ,
de dominii disceptatione probationes , ab eo qui de
possessione victus e s t, exigantur. ( L . 35 , 1T. de acq.
rel am. poss. L. 3 , C. de in terdie t. )
Il faut donc regarder comme un point certain et in
dubitable, que ce n’est pas à la commune de Gannat à
faire les conditions au sieur de Chazours ; que c’est à
elle-même à montrer des titres de propriété si elle en
�(*5 )
com m e elle l’a avan cé; et q u e, dans l ’état actuel, n’y <
ayant eu de procès que pour une rescisiQn qui remet les
parties au même é ta t, la rescision prononcée ne laisse
plus qu’à prononcer le désistem ent, pou r que M . de
Chazours soit remis en possession.
Ces principes invoqués par M. de Chazours ne pourroient céder qu’à la démonstration évidente que feroit
la commune de Gannat, de titres précis et non sujets à
litige. Peut-être bien que par esprit d’équité le tribunal
ne se décideroit pas facilement à expulser celui qui ,
malgré un titre vicieux, viendroit en exhiber un sans
reproche, qui auroit été méconnu : c’est ce qu’a dû
supposer le tribunal, lorsque M . le maire de Gannat a
promis d’en produire ; et pour ne rien précipiter , le
tribunal a suspendu le complément de sa décision.
Maintenant il est éclairci que la commune de Gannat
n’a de titres d’aucune espèce. Un confin vague et incer
tain , énoncé dans deux ventes, contemporaines de la
tracasserie de 1680 , et du fait de deux habitans de
Gannat, ne peut pas être honoré sérieusement du nom
de titre. 11 est donc impossible que la commune de Gannat
tarde plus long-temps à se désister ; et tout délai par elle
obtenu depuis la rescision du titre vicieux de son usur
pation , n’est qu’une prolongation de durée de la loi du
plus fort.
La deuxième objection de M. le maire de Gannat n’est
qu’un faux-fuyant sans intérêt et sans but. O11 n’a jamais
pu assigner que le maire pour réclamer ce qu’il prétend
être un communal; si on eût assigné les individus, la
D
�6 )
procédure eût été nulles( a comme
l’a jugé maintes fois
'la Cour de cassation.
■M. le maire de Gannat cite un arrêt de la Cour d’appel,
concernant les héritiers Dufraisse ,' pour un marais du
Cheix. Ce marais avoit été partagé avant la révolution,
en vertu d’un arrêt du conseil; il ne pouvoit donc plus
être revendiqué comme communal, lorsqu’on plaida en
1806 , pour attaquer une sentence arbitrale qui avoit
eu lieu pendant l’émigration de M. Dufraisse.
Mais sans perdre du temps à discuter sérieusement,
et par l’application des lois, une difficulté imaginaire,
il suffit au sieur de Chazours de s’autoriser d’un juge
ment rendu par le tribunal, entre la ville de Riom et
la commune d’Ennezat, confirmé par la Cour d’appel.
’ M . le maire d’Ennezat opposoit aussi qu’y ayant eu
un partage des communaux, fait en exécution de la loi
du 10 juin 1793* et la loi du 9 ventôse an 12 déclarant
-propriétaires ceux qui ont partagé les communaux, eux
seuls avoient dû être assignés.
• Cependant le jugement et l’arrêt ont proscrit cette
prétention, et la procédure faite contre le maire a été
déclarée valable.
Remarquons encore combien M. le maire de Gannat
est favorable à proposer ce mauvais moyen d éform é,
après avoir plaidé au fond , et après avoir succombé
sur l’objet principal3 qui ne laisse plus qu’a prononcer
une exécution de fait d’un désistement déjà réellement
obtenu*
La troisième objection est plus misérable encore ; et
�( 27 )
on ne sait comment qualifier la prétendue" fui de nonrecevoir tirée de deux partages des communaux auxquels
on prétend^que M. de Ghazours a participé.
Il a déjà dit que si le premier partage, fait en exécu
tion de la loi du 10 juin 1793 , a compris le terrain
qui lui avoit été enlevé en 1790, c’est par suite de la
voie de fait qu’il n’avoit pas pu empêcher. Ce partage
se faisoit en 1794, à une époque où le sieur de Ghazours
n’avoit ni la possibilité ni la liberté d’y coopérer. Le
comité de surveillance de Gannat y avoit mis bon ordre,
en ordonnant, par un arrêté du 5 juin 1793, que le sieur
de Chazours seroit tenu d’habiter la ville de Gannat,
sans pouvoir en sortir sous quelque prétexte que ce soit.
Ensuite il fut envoyé en,détention à M oulins, où il est
resté jusqu’au 19 brum aire an 3.
N’est-ce donc pas, de la part de M. le maire de Gannat,
une ironie cruelle, de supposer, aux pages 14 et 19 de
son mémoire, que le sieur de Chazours a participé volontairement au partage des communaux par deux fois,
et que par avidité il a même abdiqué le domicile qu’il
se donnoit à la Combe ppour profiter du domicile réel
qu’il a à Chazours, afin d’avoir sa part des communaux?
Cet arrêté de surveillance, du 5 juin 1793 ( joint aux
pièces ) , prouve combien le choix d’un domicile étoit
volontaire au sieur de Chazours. Une participation au
partage de 1793? n’étoit pas plus volontaire de la part
d’un proscrit, et d’ailleurs on ne Yy appela pas. Enfin,
quant au partage de l’an 13, commencé après la demande
de M. de Chazours contre la commune, qu’a-t-il pu faire
de plus que de protester par écrit contre ce partage, et
Ü2
�(zS)
de former opposition par un huissier, à ce qu’il comprît
la portion de terrain pour laquelle il étoit en procès.
Comment après cette opération M . le maire de Gan-^
nat a-t-il pu imprimer sérieusement qu’il y avoit par
ticipation volontaire, acquiescement et fin de non-recevoir contre la demande ?
Venons h la dernière objection de M . le maire de
Gannat; il s’est plu à la développer comme un point
de droit très-ardu. M. de Chazours, dit-il, étoit sei
gneur; or un seigneur ne pouvoit pas avoir des terres
vagues ou pacages, qui de leur nature appartiennent aux
communes. D onc la commune de Gannat aura l’objet
contentieux à titre de terres vagues.
A la vérité, avant d’en venir à cette solide conclu
sion, M7 le maire de Gannat a préparé sa matière, en
disant que M. de Chazours n’ayant pas de titre, et ob
ligé de l’avouer, y supplée en trouvant dans la loi de
1793 que ses titres o n t été brûlés ; et sur ce supplém ent,
en effet très - ridicule, M. le maire de Gannat s’égaye
pendant une page entière (3 0 ) aux dépens de celui
qu’il signale comme raisonnant tout de travers.
M . de Chazours ( d’ailleurs fort enchanté d’avoir pu
fournir l’occasion de cette gaieté à M. le maire de Gan
n at), peut bien avoir dit que tous ses papiers avoient
été brûlés, parce que c’est la vérité , sans qu’il y ait
rien de plaisant dans cet événement. Il peut bien re
gretter la perte d’une transaction du i 5 avril 1698, qui,
faite à une époque non suspecte , et pour l’assiette des
cens dûs par le domaine de Chazours, devoit être pré-
�( 29 )
cieuse pour la cause. Mais ce n’est pas dans la loi qu’il
a trouvé ce brûlement, pas plus qu’il n’a trouvé dans ce
brûlement une preuve de propriété.
C’est un malheur, sans doute, pour le sieur de Cha
zours d’avoir perdu des titres qui lui eussent plus d’une
fois, peut-être, épargné des procès. Mais s’il est privé
d’en justifier ici, il a du moins l’avantage de n’en avoir
nul besoin, puisqu’il étoit en possession de défricher,
de temps immémorial, le terrain en contestation, lors-*
qu’il a été expulsé par voie de fait.
• S’il lui falloit des titres à l’appui de cette longue pos
session , la mairie de Gannat a conservé l’acte de 1680,
et le procès verbal de 1765, qui constatent qu’il y a eu
possession après contradiction ; ce qui incontestablement
est le signe de propriété le plus infaillible.
Le sieilr de Chazours prouve encors, par une prise
de possession notariée, du 26 novembre 1748, que son
1 père ayant acheté du sieur de la Fauconnière le droit
de justice dans Vétendue de ses biens de C hazours,
le seigneur de la Fauconnière, qui avoit intérêt de res
treindre les limites de ce démembrement de fief, en fit
une circonscription exacte ; et on y lit que cette étendue
des biens, alors appartenons au sieur de Chazours, com
mence de la Croix de Saint-Antoine à l'étang R oup,
le long du ruisseau, et de là , en suivant le même ruis
seau , jusq 11 au pré du sieur de Chazours , confinant
ceux du domaine de la Cabome. Ensuite , et après avoir
décrit tout ceconfin, qui précisément est celui qui sépare
Chazours des communaux de Gannat, on continue l’enceinte aux autres aspects, et généralement dans tout ce
�( 30 )
qui peut appartenir audit sieur de Chazours, dépendant
dudit domaine de Chazours, suivant les termes de l’acte.
M. le maire de Gannat ne sachant comment com
battre un titre aussi précis, et n’ayant rien de pareil à
produire de son côté (quoiqu’aucune loi n’ait fait brûler
les titres de sa commune), trouve plus commode d’en
appeler à la féodalité : et avec ce cri de guerre, il croit,
comme Gédéon, que tous les remparts qui lui font obs
tacle vont tomber en ruine, pour faciliter sa victoire.
Mais ne perdons pas de temps à rechercher si les lois
féodales ont ôté aux seigneurs leurs propriétés foncières],
ou simplement les redevances féodales; demandons seu
lement à M. le maire de Gannat où il a trouvé que M. de
Chazours étoit seigneur de Gannat.
Car il faudroit qu’il fût seigneur de Gannat, et qu’il
eût dépouillé les habitans de leurs biens par sa puissance
féodale, pour donner lieu à l’application des lois des 28
août 1792, et 10 juin 1793, dans le cas ci t é, ainsi que
l’a jugé la Cour de cassation, par trois arrêts des 7 mes
sidor an 12 , 17 vendémiaire an 13 , et 19 février 1806.
En effet, où seroit la puissance féodale sur ceux qui
étoient hors le fief, et soumis à une autre féodalité?
O r, 011 a vu que Chazours n’étoit qu’un simple do
maine roturier jusqu’en 1748, et qu’il étoit dans le iief
et justice de la Fauconnière ; qu’alors le domaine direct
y fut réuni par la vente qu’en fit le seigneur de la Faucon
nière. Mais les habitans de Gannat n’étoientpas dans la
seigneurie de la Fauconnière, et par conséquent ils ne
sont pas devenus assujétis à la puissance féodale de l’ac
quéreur de 1748.
�( 31 )
Cet acquéi’eur de 1748 étoit bien moins seigneur encore
en 1680 ? lorsqu’on le taxoit comme usurpateur, et qu’il
résistoit à cette taxe, en défiant de prouver qu’il eût
rien usurpé sur Gannat.
Ce n’éloit alors aucune puissance féodale qui empêchoit
les habitans de Gannat de soutenir qu’il y avoit usurpa
tion, pour empêcher le sieur de Chazours de jouir,
comme il l’a toujours fait, jusqu'au ruisseau Sigilon,
et de défricher successivement ce dont il jouissoit comme
propriétaire.
Que deviennent après cela toutes les citations de M. le
maire de Gannat, pour prouver, i° . d’après Dumoulin 7
Basmaison, etc., que les terres incultes appartiennent
au maître du territoire, et non au seigneur de la justice;
2°. que les lois de 1629 et 1667 défendent aux seigneurs
d'usurper les communaux, et permettent aux habitans de
rentrer dans ceux qu’ils auroient vendus ou donnés*
30. que la loi du 10 juin 1793 attribue les communaux
et terres vagues aux habitans des communes dans h
territoire desquelles ils sont situés.
Aucune de ces autorités n’a d’application. Basmaison ,
sur l’article 19 du titre 27 de la Coutume d’Auvergne, dit
bien en général que les vacans sont présumés être aux ha
bitans ; mais il faut le suivre dans sa distinction. «Les terres
« hernies et vacans d é f r i c h é s , sont réputés être au
« seigneur du territoire, et non pas au public , ni aux
« villes, bourgs et bourgades. » Dumoulin dit, sterilia
et inculta ; et ici il s’agit de terres défrichées successi-
�C 32 )
vem ent, et en suivant périodiquement les surfaces qui
pouvoient donner des récoltes.
Cet auteur, en disant encore que ces terres vagues sont
au maître du territoire, ad dominum territorii, laisseroit la preuve de propriété à faire à la commune de
Gannat. C’est.donc à elle à produire des titres pour montrer
que le territoire de Gannat va au delà du ruisseau de Sigilon, et dans la partie que l’acte de 1748 dit appar
tenir au sieur de Chazours, et être une dépendance de
son domaine.
Les ordonnances de 1629 et 1667 sont étrangères à la
cause. Il n’y a ici aucun communal vendu ni donné ; aucun
titre ne constate ni aliénation, ni usurpation féodale.
La loi du 10 juin 1793 laisse encore tout à prouver
à la commune de Gannat, puisqu’il faut que le terrain
soit dans son territoire, et que ce soit des terres vagues
et abandonnées, si déjà elles ne sont pas reconnues comme
communal.
Quelque dure qu’ait été cette lo i, elle ne pousse pas
l’injustice au point de dispenser les communes de toute
preuve, lorsqu’elles voudront s’arroger des propriétés
d’autrui. Elle ne change rien aux principes enseignés
par Coquille, qui, tout en disant que les communaux
appartiennent de droit aux liabitans , ajoute que cette
présomption cesse, s'ils ne rapportent point de titres,
ou s'ils ne payent aucune redevance.
E n fin , la rigueur de la loi n’a jamais ete étendue aux
terres en culture, dans les cas même où le seigneur avoit
usé de sa puissance féodale; caries terres hermes et vacans
sont
�( 33 )
sont seulement attribués aux habitans; et on connoît sur
cette question un arrêt de cassation, du 27 avril 1808,
qui a jugé la question formellement.
M. le maire de Gannat, après avoir accumulé les plus
mauvaises citations , comprend cependant qu’elles ne suf
fisent pas s’il ne prouve rien ,* et il est allé compulser tous
les registres des notaires de sa commune, pour y découvrir
une vente de 1678, et un partage de 1683, où des vignes
de Chantoirat sont confinées par les communes, de midi.
M. de Chazours a déjà répondu à cette nouvelle produc
tion, en faisant remarquer la date de ces actes et la qualité
des parties. D ’ailleurs Chantoirat est un territoire trèsconsidérable, et s’il confine les communaux, d’une part,
ce n’est pas un signe certain que les actes, dont on produit
une simple note, joignent le local contentieux.
Aussi ce-n’est pas sur cela que M . le maire insiste,
comme preuve, c’est sur ce qu’il appelle la possession des
habitans de Gannat; car, dit-il, ils ont constamment
possédé.
Mais quelle est cette possession si vaguement énoncée ?
Les faits du mémoire de M. le maire nous apprennent
qu’elle a consisté dans plusieurs pacages de bestiaux.
Mais a-t-on jamais vu que le simple pacage attribue
une possession, et soit une preuve de propriété ?
On n’ose pas dire qu’il ait eu lieu en temps de récoltes;
on ne s’en prévaut que comme ayant eu lieu sur les
portions de terre non cultivées, ou après les récoltes
levées ; or, cette espèce de pacage ou marchage n’est attri
butive d’aucune espèce de droit.
« C’est, dit D unod, un reste de l’ancienne communion
E
�( 34 )
« des biens. Le vain pâturage est utile aux communautés,
« et ne fait aucun préjudice aux propriétaires qui ont
« cessé de cultiver leurs héritages, ou abandonné les
« fruits qui peuvent y croître. Mais ce vain pâturage
« n’acquiert point de droit et ne donne pas lieu à la près« cription, etc. Fas est, jus non est. » ( Part, i re. , ch. 12. )
« A in si, dit M. de Malle ville sur l’art. 2232 du Code
« civil, quand j’a11rois pendant cent ans fait paître mes
gc bestiaux sur les fonds en friche de mon voisin, cela
« ne l’empêchera pas de les cultiver. »
La commune de Gannat ne peut donc se prévaloir
d’aucune espèce de possession, sous prétexte d’un pacage.
On a vu que ce pacage ne s’exerçoit que sur les terrains
en friche, et que M. de Chazours et ses auteurs n’ont
jamais cessé de défricher quand ils l’ont voulu.
Les procès verbaux, rapportés par la commune, de
1765, 1768 et 1789, loin d’être favorables à cette pos
session , sont au contraire ce que M. le maire pouvoit
produire de plus formel pour se faire condamner.
En effet, il ne faut pas croire qu’il suffise à quelqu’un
d’avoir consigné dans un acte l’annonce qu’il a faite
d’une prétention; car tout le monde, p?ir ce moyen,
pourroit se faire des titres. Mais il faut persévérer dans
Fattaque ; et lorsqu’on a menacé de former unv de
mande, il faut tenir sa promesse, sinon on est présumé
avoir reconnu n’avoir aucun droit. S i cognitâ rei veritate suum negotium deseruerit , nolens m lite improbâ perseverare.
C’est par ce m otif, qu’en matière de trouble on re
garde comme plus solide le droit de celui q u i, après
�( 35 )
avoir été troublé, b’a tenu aucun compte de la résis
tance, et a continué de jouir.
Ceci s’est même étendu aux servitudes, quoiqu’odieuses
de leur nature; et l’empêchement qu’on a voulu y ap
porter , fait un titre plus fort à celui qui la réclame, lors
qu’il est prouvé qu’après l’empêchement il a continué
de jouir comme auparavant, ainsi que l’enseigne le docte
Fa ber. D ic i solet, interrumpi prœscriptionem servitutis
naturaliter, per contradictionem et prohibitionem ejus,
adversùs quern prœscribebatur,*idtamen intelîigi debet,
si prohibitio tffectum liabuerit : alioquin si prohibitus
in servitute perseveraverit, tanto fortiiis erit ju s prœscribentis.
- Après cela , et quand on relit les procès verbaux de
1765 et 1768 , on n’y voit plus qu’une vaine formalité,
qui n’a pas empêché les actes de propriété du sieur de
Chazours, et qui a seulement affoibli le prétendu droit
que vouloient s’arroger les habitans de Gannat, d’em
pêcher les défrichemens.
Le procès verbal de 1789 signifie encore moins; car
c’est un autre acte obscur, encore moins interruptif
de possession , et qui, en reconnoissant M. de Chazours
propriétaire d’une terre appelée le ténement des Bruyè
res , renverse le système actuel de la commune de Gannat,
et achève la démonstration que si aujourd’hui elle veut
se dire propriétaire d’une portion de ce ténement, c’est
à elle à exhiber des titres.
L ’acte de 1791 est inutile à la commune, puisqu’il est
annuité ; ne le fût-il pas, il seroit inutile à sa possession,
parce qu’il étoit la suite d’une expulsion de voie d e i‘a it;
�( 36 )
arrivée après des menaces d’assignation, qui n’ont jamais
été effectuées. Car, comme le dit Dom at, « celui de qui
« la possession n’est interrompue que par une voie de
« fait, sans forme de justice, ne laisse pas d’être consi« déré comme possesseur , parce qu’il a le droit de ren« trer en possession. Ainsi le temps de la possession de
« l’usurpateur n’interrompt pas la sienne. » ( Liv. 3, t. 7 y
sect. 4. )
C’est donc toujours M . de Chazours qui est réputé
possesseur, d’après les principes; il l’est encore plus
depuis le jugement qui remet les parties au même état*
et qui est passé en force de chose jugée.
O r, on le répète, le possesseur n’a rien à prouver;
et cependant M . de Chazours seul prouve qu’il est pro
priétaire. A u contraire, M. le maire de Gannat ne rap
porte aucuns titres, et ne prouve rien. Comment donc
une cause aussi simple a-t-elle pu donner lieu à une résis
tance aussi opiniâtre, et à des injures aussi réfléchies et
aussi accum ulées? Il ne faut pas s’en étonner, les injures
sont le dédommagement le plus commode de l’absence
des raisons. Elles sont douloureuses pour celui qui en a
été l’objet; mais il est dédommagé à son tour par le
succès , et il est assez vengé en obtenant justice.
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M . M I O C H E , avoué licencié.
A. RIOM, de l’imp. deTHIBAUD, im prim . de la Cour impériale, et libraire,
r u e d e s t a ulcs maison L a n d r i o t »
Mars 1811
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Factums Marie
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Description
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A name given to the resource
[Factum. Defaure de Chazours, Louis. 1811]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Mioche
Subject
The topic of the resource
communaux
limites de communaux
pacage
vols
experts
arbitrages
troubles publics
bornage
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Louis Defaure de Chazours, ancien capitaine d'infanterie, habitant au lieu de la Combe, commune de Saint-Quentin, demandeur en exécution de jugement ; contre les maire et habitans de la ville de Gannat, défendeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1811
1680-1811
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0414
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Saint-Quentin (02691)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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28dce18cff8747d778589fa16f98bb5a
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Dame F r a n ç o i s e - A g l a é - G a b r i e l l e D E
L A L U Z E R N E et sieur P i e r r e D E L A
G R A N G E - G'OU R D O N i, son mari ; dame
A n g é l iq u e - A r m a n d e - C a m il l e D E L A
L U Z E R N E , et sieur A n a t h o c l e - M a x i ^ M IL IE N H U R A U L T D E nVI B R A Y E , son
mb éa nr i é, ,fhabitans
de la'ville de -Paris y héritiers
fic ia ir e s d e m a d a m e
M o n t m o r in la q u e lle
é toit héritiaire bénéficiaire du sieur EmmanuelFrédér ic -De Tane,s on f r èr e appel ans • ‘
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SieurHenriDuvergierhabitantàParis SimonTerouldeabitantàDauville
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D U C H A S T E L , apothicaire à Paris ; et J e AN
C H A R D O N y chapelier y habitant à P a risr
syndics et créanciers unis dudit sieur d e T a n e ,
aussi appelanSy
CONTRE
Sieur
D E TANE - SAN TEN AS y
habitant à P a ris , intimé ;
A m édée
\
1
E T
C
O
N
T
R
E
Sieur L o u is N A T T H E Y , habitant de, Nyort en
Suisse y austsi intimé ,
la révolution et les assignats, cette cause seroit
de la plus gran d e simplicité dans les questions qu’elle
fait naître. L ’acquéreur d’uné terré, chargé d’en payer
lie prix à un notaire choisi par une direction de créan
ciers, lui en paye près de moitié;, ensuite il revend la
terre, et laisse-dans les‘¡mains du second acquéreur une
somme égale à ce qu'il doit : des lettres de ratification
sont prises. Ce second aciqUéreur/poursuivi par les opposans, produit.des quittances de consignation, assigne
les créanciers en mainlevée de leurs oppositions, et fait
juger sa libération valable à leur égard.
Cependant ces, créanciers attaquent le premier acqué
reur, qui met en causç son. ga$an& : celui -ci. emploie
UANS
�C3 )
pôur libération le jugement qui a validé sa consignation.
Alors l’acquéreur observe aux créanciers qui le pour
suivent, qjieileurs oppositions à des lettres de ratification
ont lié leurs intérêts à ceux dit second acquéreur qui les
a obtenues, et que s’ils ont laissé juger qu’ils étoient
payés, ils ne peuvent pas demander à être payés une
seconde fois.
Voilà à quoi âe'réduit la question principale, et il
est évident que jusqu’ici elle në présente en point de
droit aucune difficulté sérieuse s 'mais le payement a été
fait en assignats, et les créanciers veulent en rejeter la
perte sur autrui. Les héritiers bénéficiaires du v e n d e u r
originaire , qui comprennent que si la perte des assignats
n’étoit pas pour les créanciers-elle seroit pour euxmêmes, font cause commune avec eux, pour que tout
retombe sur le premier acquéreur.
Alors tout s’exagère et se complique. L ’émigration de
l’acquéreur s’ajoute au procès, comme un point capital
qui domine tout;: d’autres circonstances étrangères vien
nent se prêter à mille équivoques. Quand la matière est
élaborée , on se croit déjà assez fort pour injurier et
celui qu’on veut faire payer ce qu’il ne doit pas , et le
.tribunal même où il a trouvé justice. Enfin, après avoir
présenté un faisceau de lois étrangères à la question, et
d’arrêts assez bien choisis dans la multitude, mais plus
étrangers encore, on~vient crier à l’injustice et à l’indé
licatesse, en disant froidement : « Que'm’importe si vous
« devez recouvrer ou non 5ooooo francs: que je vous
« demande pour une dette qui n’est pas-la vôtre ! Que
A 2
�(4.)
«. m’importe en.côjrè ,si vo u â tes ruiné par ce payement
« et si votre famille est respectable*..Je veux.de>Pargent,
«• et je ne veux en demander qu’à vous que je suppose;
« moins en mesMve.;de me-résister’ ; d?aille.iirs voüreiémi« gration.se ¡prête à tous mes sophismes :*'jl y^ajjt.ant de;
« lois sur cette matière, qu’il est impossible dfej ne-'pasr
« y voir que tout doit retomber sur vous..pinailleurs.,;
« quand je me suis donné la licence d’imprimer qu’une
« décision contraire à}mon intérêt étoit unjjjugcmfint de
« fa v e u r , j’ai-calculé; Peffet 'dé ,cettje»in jurp sue, liesprit,
« des magistrats auxquels j’eri idemaïnde ' la réforme.::Si
« je ne puis le s ’forcer, à- croire gqu’il feu ti sacrifier uni
« émigré par préférence, mon .adroite censure sera*tou« jours d’un poids quelcqnque' dans, la i balance;;Vielle
a achèvera probablement de me conquérir le suffrage de^
« ceux, dont l’opinion auroit; été incertaine. ! »[ , *< < .
Ainsi eût parlé Machiavel?;, ainsi panlerit vies '.syndicsdes créanciers de T an e, qui veulent, pe?;\fas et nefas ,
intéresser en se présentant comme des victimes..
Qu’ils .tâchent de-prouver à la Gour que malgré leurs
oppositions à/des lettresy; malgré un jugement qui pro
nonce contre eux la validité du payement que le-sieur.
Natthey a été chargé'de-leur faire, il leur reste encore une,
action : voilà leur cause.
t ;
Mais que dans,leur colère et dans leurs calculs- ils fassent
semblant de supposer, de l’adresse, des insinuations et-de
la faveur; quo tournant tout du côté de Immigration, ils
cherchent ¿\ insinuer que cette émigration deviendra aux
sieur et dame de la'Roche-Lambert, un moyen de s’em
parer des plus clairs deniers des créanciers de T a n e ,
�(5 )
et que ce sera s'être,fait de ses propresJautes un moyen
d’acquérir voilà ce qui n’est ni la cause ni la vérité 3
mais une insigne et brutale calomnie.
•Car personne ne sait mieux que les adversaires qu'il
n’y a qu’à perdre dans tous les cas pour les sieur et dame
la Roche-Lambert, puisqu’ils ont payé 178000 francs en
écus sur une terre qu’ils n’ont pas : et on ose encore leur
demander plus de 5ooooo francs pour la même terre; et
on les signale comme des débiteurs de mauvaise fo i, parce
qu’ils résistent à cette épouvantable injustice..
*
... ■i
■:
:
F
A
I
T
S
.
*
- Apres la mort dû'sieur Emmanuël-Frédéric de Tane*
sa succession1 fut acceptée sou& bénéfice d’inventaire par
Françoise- Gabriëlle) de Tane, épouse de M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères.
Madame-de Montmorin ne-pou voit vendre en cette
qualité les .biens, de la succession sans y appeler les
créanciers ; elle fit apposer’des affiches pour vendre aux
enchères les terres de la Soucheyre, Chadieu, la GhauxMongros et le* mobilier de la succession. Il y a eu pour
7 7 7 4 0 o francs de ventes avant 1790:
La terre de Chadieu fut vendue' par madame de
Montmorin aux sieur et dame de la Roche-Lambert, par
acte du 17 juin 1788, moyennant 376000 francs, et les
frais et faux f r a is évalués à 5 deniers par livre, produisant
7812 liv. 10 s. Il fut dit que les 376000' fr. seroient:
payés solidairement par les sieur et dame de la RocheLambert entre ¡es mains de Trutaty notaire-séquestre ?
•
�( 6 )
ou aux créanciers qui auront été délégués• savoir, un
quart au i 5 septembre , et le surplus dans le courant
des deux années , en trois payemens. Il est ajouté que
les acquéreurs prendront à leurs frais des lettres de rati
fication , et que, s’il se trouve des oppositions du chef
de madame de Montmorin, elle les fera lever dans les
six semaines; mais hors, ce cas , elle ni les créanciers ne
seront tenus de garantir, et l’acquéreur n’aura son recours
que contre les créanciers qui auront touché le prix.
A la suite dudit acte on lit une intervention des sieurs
de Tane de Santenas, Teroulde, commissaire à terrier;
Chardon, chapelier; Louis Laisné, sellier, et Toutain,
tailleur d’habits, tous syndics des créan ciers de Tane,
lesquels , après avoir pris lecture de la vente , la con
firment et ratifient aux conditions y exprimées. Ils font
élection de domicile chez M. Pernot-Duplessis/procu
reur au parlement.
Le jour même de la vente, M. de la Roche-Lambert
paya la somme particulière de 7812 lîv. 10 s., à Tvutaty
notaire; dans les années 1790 et 1791 il versa dans les
mains du même notaire 170644 francs.
• En 1791 , les sieur et dame de'la Roclie-Lambert,
voyageant en Allemagne, envoyèrent au sieur de SaintPoney , leur beau-frère, deux procurations; celle du
sieur de la Roche-Lambert porte pouvoir $ emprunter
les sommes nécessaires à ses affaires , gérer , liquider ,
vendre : elle est passée devant Heidz, notaire à Coblentz,
le 16 octobre 179 1.
La procuration de la dame de la Roche-Lambert porte
pouvoir d'emprunter 60000 fr , pour placer sur Chadieu ,
�(7)
régler compte avec M\ T ru tat , notaire ; recevoir ,
donner quittance , faire tous emprunts qu'il jugera bon
être 9pour Parrangement des affaires de son mari. Cette
seconde procuration est passée devant Lutner, notaire à
Worms , le 25 octobre 1791 (1).
En vertu de ces actes,.le sieur de Saint-Poney se crut
autorisé à passer la vente ci-après :
Le 27 novembre 1791 , par acte reçu Cabal, notaire
à Paris, le sieur de Saint-Poney, comme porteur de pro
curations des sieur et dame de la Roche - Lam bert, et
s’obligeant de faire ratifier dans le mois ( parce qu’il
n’avoit pas de pouvoir de la dame delà Roche-Lambert ),
vendit la terre de Chadieu au sieur Sauzay, banquier à
Pa ris , moyennant ôooooo fr ., dont il reçut 126000 fr.
en assignats, et quant aux 376000 fr. , le sieur Sauzay
promit les payer dans un an aux sieur' et dame de la
Roche-Lambert you , si bon lui semblait, aux créanciers
desdits sieur et dame de la R och e-Lam bert , et spé
cialement aux créanciers privilégiés sur ladite terre.
Il est dit ensuite que si au sceau des lettres de ratification
il survient des oppositions du chef des sieur et dame de
la Roche-Lambert, le sieur de Saint-Poney les oblige et
( 1 ) Ces deux procurations répondent déjà aux imputations
injurieuses des créanciers de T a n e , qui ont dit que les sieur et
dame de la Roche-Lambert quittaient la Fiance en s’occupant
plutôt de se faire des ressources que de payer leurs dettes.
Personne n’ a ignoré que leur première pensée a été de s’occuper
de leurs créanciers, et que tel a été' l’ unique objet de la mis
sion donnée à M. de Saint-Poney.
�( 8 .)
s’oblige personnellement de les faire lever sous quinzaine.
Enfin, pour l’exécution de ladite clause, le sieur de SaintPoney fait une élection de domicile à Paris.
'
Le 4 janvier 179 2, il fut pris des lettres de ratification
sur la vente de 1788 ; elles furent scellées à la charge
des soixante-treize oppositions. Il est essentiel de remar
quer que plusieurs des créanciers de Tane sont opposans
individuellement; mais qu’il n’y a pas d’opposition de la
part des syndics. .
/ •' ' '
1
L e 22 avril 1792., le sieur Sauzay prit des lettres de
ratification sur son acquisition de 1791 ; elles furent frap
pées de huit oppositions, dont l’une, du 22 décembre
1 7 9 1 , étoit à la requête des syndics des créanciers de
Tane.
Jn . -j
jrj *i> r .*ii oooooct ü; .«irr. /< m r ^-n,ci
Dans la même année 1793 > ^ sieur clejla Roclie-Lam
ber t fut porté sur la 'liste des émigrés, v/rv f\ ? A
La dame de la Roche-Lambfert n’a jamais été -portée
sur aucune liste. \ , ’ 1,
Sous prétexte d’une loijdu 30 octobre 1792, ordonnant
le séquestre des biens desrabsens du territoire:,jsans ]e$
désigner encore comme émigrés,--le sieuib Séjuzayi^fit
déclarer par le curé d’Autezat, à la municipalité*jdu lieu,,1
qu’en vertu de sa vente il devoit aux sieur et dame de
la Roche-Lam bert 376000 francs. Mais aussitôt il fit
mention qu’il avoit pris des lettres dti^at ificéition^èt que
les créanciers opposâns* aux: rèttres1
prix'
et au delà : d’où il conclut qû’ii a iii(-eret^e 'conserver
les deniers ci-dessus, parce qu’ils sont sa sûreté, dès que
la terre pst hypothéquée. « E n sorte que , dit.,1e sieur
« Sauzuy, s'il fa it fa ir e ladite déclaration , c'est moins.
« à
_
�a cause des sommes dont il peut paroître débiteur ,.et
dont la république nèipourra jamais p ro f ter ^ puisqii elles doivent être absorbées par lesdits créanciers
hypothécaires opposans aux lettres de ratification ,
que pour donner des preuves de son civisme y et empêcher qu!on ne lui fasse des reproches de négligence
ou intelligence» »jJ . j *
i ->
Par acte du 25 juillet 1793 , le sîeur Sauzay vendit au
sieur Feuillant un pré-verger sis aux Martres, les mou
lins et fours banaux des. Martres, dépendans de la terre
de Ghadieu yumoyennanti la somme de 6 1100 francs ,
payable après l’obtention des lettres de ratification.
" Le 7' nivôse an 2, par acte reçu Cabal, notaire à Paris,
le sieur Sauzay vendit le surplus de ladite terre de Cliadieu
^au ¡sieur .W allier, Suisse, pour lui ou la ‘personne que
W allier se réserva de déclarer dans les six mois, moyen
nant 5.30009 frrj dont^Wallie^paya comptant 40000 f r .,
s’obligea de payer 136000 fr. à Sauzay, après le sceau des
lettres, et enfin à l’égard des 355ooo fr. restans, W allier
-fut délégué à les_payer,-: soit aux 'créanciers de T ajie ,
précédent propriétaire \ qui se sont trouvés OPPOSANS
«
«
«
'«
«
«
«
A U X L E T T R E S DE R A T I F I C A T I O N PRISES PAR S A U Z A Y ,
soit afin d’en fa ir e le dépôt et la consignation partout
où besoin sera , aussitôt après, le sceau sans opposition
sur le sieur Sauzay des lettres de ratification à prendre
sur la présente .vente. ■ • !
,
‘LesieurNattheyditavoir été subrogé par le sieur W allier
à ladite vente, par acte sous seing privé du même jour.
Il dit que le directeur de la régie du Puy-de-Dôine
fit décerner , le- 24 ventôse an 2 , une contrainte contre
B
�( 10. )
le sieur Sauzay , pour payer 5ooooo francs par lui dûs
au sieur de la Roche-Lambert-en vertu du contrat de
vente de 17 9 1, sous prétexte que le vendeur étoit émigré.
Ensuite, et à la. date du 26 floréal an 2 , le sieur
Natthey produit la pièce suivante :
'
■
cc Je soussigné, receveur de l'enregistrement e t des domaines
ce au bureau de Saint-Am ant-Tallende, reconnois avoir reçu à
cc titre de dépôt, du G. Etienne-Jean-Louis Natthey, de N yon,
cc au canton de Berne en Suisse ( propriétaire de Chadieu ,
ce suivant la déclaration de command en sa faveur-par le
« C. W allie r, du 7 nivôse d e rn ie r), la somme de trois cent
cc cinquante-cinq mille livres , pour servir tant au nom des
cc cit. Natthey et Sauzay , qu’en celui du C. Jean-Baptiste
cc W a llie r, à la libération dp Chadieu.
c< D e quoi m’a été demandée la présente déclaration
cc
cc
, à l ’effet
d’arrêter toutes poursuites et la mainmise nationale' sur ledit
1
Chadieu.
U Saint-Amant, le 26 ilotéal àn 2. Signé Mavgue. h >
.
* -
1
w.
^
.
..
’ . :,
. •
.11 pavoît qu’ un arrêté du département , en l’an 3 ,
ànnulla la vente faite au sieur Sauzay , et mit ta terre
de Chadieu en séquestre : mais ce séquestre fut levé par
un autre arrêté du 4 vendémiaire an 4 , et la restitution
de fruits fut ordonnée au profit du sieur Natthey.
Dans la même année, un procès eut lieu au tribunal
de la Seine, entre les sieur Natthey et ‘Wallier, se disant
tous les deux acquéreurs de Sauzay, et se disputant
Chadieu par la voie civile et par la voie criminelle.
Ce procès prouve que lo-sieur W allier avoit voulu se
libérer envers les créanciers opposans de Sauzay, et que
le sieur Natthey prenoit pour son compte cette libération :
�Ci1 )
il fit des! offres à Wallier:, et même u n e - consignation, en
mandats. Mais les* loisjsurlla réduction ,.du papier-môunoie
n’étant pas encore rendues, le tribunal de'la„Seine sus
pendit le procès, et on en ignore l’issue.
Les créanciers de Tane produisent à ce sujet la pièce sui
vante, tirée des mêmes registres du receveur de St.-Amant.
cc D u i 5 frimaire an
4 ? reçu du C . Jean-M arie W allier ^
cc des deniers empruntés de Ja q u e ro t, par acte d u ............ la
«c somme de 355ooo francs , à valoir sur le prix du domaine
cc acquis par Sa u z a y, des sieur et dame de la Roche-Lam bert,
« ém igrés, suivant le contrat du 27 novembre 17 9 1 ; ladite
«c somme de 355 ooo fr. payée en une rescription de la trésorerie
« nationale sur le receveur du district de Clermont, n°. 42,4, eu
ce date du i 5 brumaire dernier; dont quittance. Signé Maugue. »
L e s créan ciers o n t retiré du m êm e registre la pièce
suivante :
cc D u 26 frimaire an 4 , reçu de
cc de 3 2 8 5 1 francs
Jean-Louis Natthey la somme
25 centimes pour les intérêts restans du prix
ce‘principal dii domaine vde Chadieu, acquis de la Roche-Lam-
i< b ért, ’sa femme’ et Saint-P;oncÿ, émigrés; par le sieur Antoine
« Sa’uzay,"lequel en a fait vente au C. W allie r, par acte reçu
« C ab al, notaire à Paris, le 7 nivôse an 2 , lequel W allier a
ce passé déclaration au profit dudij: Natthey, par acte sous seing
cc privé , du 7 nivôse an 2 , enregistré il Paris le 17 messidor
cc an 3 , par Pinault ; ledit payement 'fait en conséquence de la
cc liquidation des intérêts faite par le sieur A lias, directeur de
cc correspondance à la régie de l’enregistrement à Paris , le
cc 12 frimaire présent mois; et ledit payement effectué en une
cc rescription de -la trésorerie nationale sur les domaines d’émi-
« 'g r é s , n ° / 4 g 3 , çt souô la date dudit jour 12 du présent mois.
« Certifié conform e, le 8 vendémiaire an 1 1 . Signé Maugue. »
’ '
B 2
�( 12 )
L e i ev. nivôse an 4 , Natthey donna un exploit aux
créanciers de Tane, aux domiciles par eux élus en leur
opposition ; il leur fait sommation en ladite, qualité de
créanciers opposans aux lettres de ratification prisesr
par Sauzny; de se trouver le i 5 pluviôse suivant chez
le receveur de Saint-Amant, pour y: recevoir leprioo, de>
Ch adieu. Il est constaté par cet exploit (resté au. pouvoir
de Natthey, qui en a donné copie), que l^atthey y procède
comme obligé d’acquitter 37 5ooo frauc^e^ cjap.ital^et^
32852 fr . en intérêts , tant pour se libérer lui^niéme y
que pour libérer'le sieur Sàuzay , ainsi que les,sieur'et
daine de la Roche-Lam bert , premiers acquéreurs et
il fait la sommation au nom des uns et des autres.
Les créanciers 11e se présentèrent pas ; et le sieur
Natthey fit dresser, le i 5 pluviôse an 4 , par le receveur
de Saint-Amant, la pièce suivante produite par lui.
« Je soussigné, receveur de l’enregistrement et des domaines
« au bureau de Saint Amant-Tallende, déclare, d’après le débat
<c des co m p tes qui a eu. lieu ce jo u rd ’hui entre m oi et le .ç it»
ce Parades , des Martres , fondé de pouvoir du C. Etienne-Jean cc Louis Natthey , propriétaire de Chadieu , qu’il a été versé
cc dans ma caisse, tant par ledit Parades qu’en vertu de saisies
cc nationales par moi faites avant la levée du séquestre de Cha?
six cent dix-neu f mille six cent quatre
cc livres quinze sous en l’acquit dudit domaine., dont quittance
cc dieu, la somme de
cc et décharge, sauf audit Parades, qui en Tait expresse réserve
cc pour ledit C. Natthey , de plus ample examen et apuration
r< desdits com ptes , et de se pourvoir d ev an t qui il appartiendra ,
« pour la restitution des sommes qu’il prétend avoir payées en
« sus des sommes dues,par ledit, C. Natthey pour la libération
« dudit domaine de Chadieu.
« Saint-Amant-Tallende, le i 5 pluviôse an 4. Signé M a u g u e . »
�En marge est écrit :
( i3 )
« Sur l’invitation du C. Parades , je déclare qu’ aucun des
« créanciers appelés par lui dans son exploit du i er. niyôse der« nier, n’a comparu cejourd’hui en mon bureau.
« Le i 5 pluviôse an 4. Signé M a u g u e . »
Jusqu’ici les créanciers- de Tane n’ont formé aucune
demande. Etoit-ce pour attendre la radiation du sieur de
la- Roche-Lambert? Ils veulent qu’on le croie ainsi. Mais
nous voici au sénatus-consulter, du .3 floréal an 10 , et
^c’est le moment d’être attentif sur leur première dé
marche y pour apprendre d’eux lequel des acquéreurs ils
ont considéré comme leur débiteur.
Souvenons-nous qu’en décembre 17 9 1, les syndics ont
formé opposition aux lettres de ratification prises par
Sauzay , sur sa vente du 27 novembre 1791Par exploit du 1 1 brumaire an 1 1 , les syndics des
créanciers de Tane font assigner Sauzay au tribunal de
la Seine, pour leur payer 263980 francs qui leur restent
dûs sur la* vente de 1788; en conséquence, ils concluent
contre ledit Sauzay, comme obligé à(payer ladite somme
de 263980 francs , à ce que la vente à lui consentie
le 27 novembre 1791 , soit exécutée , et qu’il soit con
damné audit payement. (Cette pièce est produite par le
sieur Natthey.)
Le 22 pluviôse an 1 1 , Sauzay dénonce cette demande
à Natthey..
Alors Natthey assigne lesdits syndics au tribunal'de Clermontj.pour voir dire qu’il est valablement libéré au moyen
des versemens par lui laits, et pour être condamnés h lui
donner mainlevée de leurs oppositions.
�( ¿
4 )
Le 7 pluviôse an 1 2 , le tribunal de Clermont rend
le jugement suivant :
« Le tribunal déclare le demandeur (Natthey) bien et
« valablement libéré du prix de la terre de Chadieu ,*
« en conséquence, fait mainlevée de l’opposition faite
« par les défendeurs (les syndics) au bureau des hypo« thèques de Clermont, le 2 décembre ; ordonne qu’elle
« sera rayée des registres du conservateur, en vertu du
« présent jugement; condamne les créanciers aux dom« mages-intérêts de Natthey, à donner par déclaration. »
En vertu de ce jugement, le sieur Natthey a fait rayer
toutes les oppositions prises par les créanciers de Tane
sur Chadieu . Les syndics n’y ont mis aucun obstacle,
et ont laissé passer quatre autres années sans hostilités.
Tout d’un coup, en 1808, ils ont pris une inscription
de 495369 francs aux bureaux d’Issoire, Ambert et Cler
mont, sur tous les biens appartenans ou ayant appar
tenu aux sieur et dame de la Roche-Lambert, en vertu
de la vente de 1788.
Les sieur et dame de la Roche-Lambert, instruits de
cette attaque, ont pris de leur côté une inscription sur
le sieur Natthey, pour supplément à la précédente, qu’ils
ont considérée comme frappant sur Chadieu.
Il eût été hors de propos, jusqu’à présent, de dire
que pour verser 170644 francs en 17 9 1 ? ^ 3voit été
emprunté pour les sieur et dame de la Roche-Lambert,
savoir, 44000 francs à la dame de Bourneville, mère de
madame de la Roche-Lambert, et 30000 francs au sieur
Gabriel de Tane-Santenas, représenté par Amédée.
�(
)
On a vu que le sieur de St.-Poncy, vendant à Sauzay,
ne lui laissa pas seulement les 263000 francs dûs aux
créanciers de T an e, mais encore une somme suffisante
pour rembourser les prêteurs ci-dessus.
Et comme les syndics n ’ a voient inscrit que pour leur
intérêt, il falloit grever Chadieu du surplus de la somme
laissée entre »les mains de Sauzay; c’est pourquoi il a été
pris à la requête des sieur et dame de la Roche-Lambert,
inscription supplémentaire de 112000 fr. sur Chadieu.
Cette inscription supplémentaire a été le prétexte du
procès actuel.
. .,
Le sieur Natthey, par exploit du 17 août 1808, a fait
.assigner les sieur et dame de la Roche-Lambert en main
levée'd e ladite inscription.
Le lendemain, Amédée de Tane (très-d’accord, comme
. on le voit déjà, avec Natthey) a fait un commandement aux
sieur et dame de la Roche-Lambert de payer les arré
rages de l’emprunt ci-dessus de 30000 francs.
Le 23 du même mois, il a été présenté requête au
tribunal de Clermont, sous le nom des sieur et dame de
la Roche-Lambert; ils ont conclu à la mise en cause des
créanciers de Tane, et à ce que le sieur Natthey, se disant
libéré,' fût tenu de faire valoir envers eux ladite libé#
ration, sinon de garantir les sieur et dame de la RocheLambert. Ils'ont conclu , en conséquence, à la résiliation
des ventes de 17 91 et suivantes, et au désistement de
Chadieu. Euiin ils ont conclu contre les créanciers de
Tane à:1a mainlevée de leur inscription, et contre le sieur
Amédée de Tane à la mainlevée du. coin mandement, de
�( i6 )
payer par lui fait, attendu que Natthey, chargé de payer
tout le monde, a dit avoir fait juger sa libération valable.
Cette mise en cause a eu lieu, les demandes ont été
jointes, et la cause a été jugée sur le fond le n juillet
1809.
Par ce jugement, le tribunal de Clermont distingue
les intérêts des créanciers de Tane, d’avec ceux d’Amédée
de Tane. A l’égard des premiers, il déclare valablement
libérés tant le sieur Natthey que les sieur et dame de la
Roche-Lambert, par suite du jugement non attaqué, du
7 pluviôse an 12 ; en conséquence, il ordonne mainlevée
de leurs inscriptions.
Quant au sieur Amédée de T-ane, il considère la somme
de 30000 fr. prêtée pour déposer chez le notaire Trutat,
comme obligation directe et indépendante de l'acquisition
non purgée par les lettres, et il déboute les sieur et dame
de' la Roche-Lambert de leur opposition au commande
ment de payer (1).
11 y a appel de ce jugement, tant par les héritiers et ,
créanciers de Tane contre les sieur et dame de la RocheLambert, que par les sieur et dame de la Rodhe-Lambert
contre Natthey et contre le sieur Amédée de Tane. On a
déjà indiqué en commençant quelles sont les prétentions
"des créanciers : elles se réduisent à dire qu’ils ont deux
actions distinctes; l’une contre les acquéreurs de Chadieu,
l’autre contre les sieur et dame de la Roche-Lam bert;
(1) Ce jugement est transcrit en son entier, avec les motifs,
à la fin du mémoire des créanciers de T a n e , ce qui a rendu
inutile d’en parler ayec plus de détail.
d’où
�( i7 )
d’où ils concluent que le jugement de l’an 1 2 , qui, en
déclarant les acquéreurs libérés, les autorise à faire radier
leurs inscriptions, ne les empêche pas de se faire payer
par les sieur et dame de la Roche-Lambert.
M O Y E N S .
Pour suivre cet appel dans toutes ses faces, et pour etre
clair, autant que possible, dans une discussion denaturee
et obscurcie par de fausses applications de principes, il
est nécessaire de séparer les moyens des créanciers de
Tane d’avec ceux des héritiers de Montmorin, quoiqu’ils
^ient réuni leurs intérêts, sérieusement ou noni On exa
minera, en premier lieu, s’il est vrai que les créanciers de
Tane aient, ainsi qu’ils le prétendent, une double action
contre les acquéreurs de Chadieu et contre les sieur et
dame de la Roche-Lambert, et si la libération du sieur
Natthey, jugée valable par jugement du 7 pluviôse an 12 ,
a dû profiter au sieur de la Roche-Lambert.
2°. Sur l’appel des héritiers de Montmorin il s’agira
de savoir s i, au cas où le versement du prix de Chadieu
seroit jugé être l’effet de la confiscation nationale, et
n’avoir pas acquitté les créanciers de Tane, la perte de
ce versement doit être pour les héritiers de madame de
Montmorin, comme condamnée à m o rt, ou pour le
sieur de la Roche-Lambert, comme émigré.
30. Quant à l’appel du sieur de la Roche-Lam bert
contre le sieur Amédée de Tane ', il y aura lieu d’examiner
si le sieur Natthey, chargé de faire face à tout, a également
libéré le sieur de la Roche-Lambert de cette dette.
C
�( ï8)
Enfin, l’appel contre le sieur Natthey donnera lieu à la
question de savoir si, dans le cas où le sieur de la RocheLambert seroit condamné à payer des sommes quelconquesaux créanciers délégués ou opposans, le sieur Natthey lui
devra une garantie, et quelle doit en être l’étendue.
A ppel
d es
c r é a n c i e r s
de
T a ne*
La prétendue émigration du sieur de la Roche-Lambert
est le premier texte de la proposition des créanciers de
Tane ; ils l’appuyent sur un arrêté^ du conseil d’état, du
3 floréal an i l , portant que tout créancier à'émigré
non liquidé, a le droit de retirer ses titres du dépôt na
tional pour poursuivre rémigré : ils en concluent que
les émigrés sont rentrés avec la charge de leurs obliga
tions personnelles, quoiqu’ils aient perdu les biens soumis
à leurs dettes.
Rien de plus incontestable que ce point de droit; mais
aussi rien de moins applicable à la couse.
L ’arrêté de l’an 1 1 seroit applicable, si Chadieu ayant
été vendu nationalement, le sieur de la Roche-Lambert
vouloit renvoyer le vendeur ou ses créanciers au grand
livre, pour rechercher le prix versé par l’acquéreur du
gouvernement.
Mais qu’y a-t-il de commun entre cette espèce et celle
où sont les parties? Il faudroit s’obstiner à ne pas réfléchir
pour ne pas y trouver une prodigieuse différence;
i°. La terre de Chadieu, qui est le gage de la dette,
et à raison de laquelle le sieur de la Roche-Lambert a
été débiteur, comme détenteur y n’a point été vendue m
0
�C 19 )
la nation né s’en est point emparée : un séquestre aussitôtmis que le vé , n’a pas empêché les acquéreurs de rester
propriétaires incommutables depuis 1 7 9 1 , et ils le sont
encore.
Cette terre étoit vendue , li vrée, sortie des mains du
sieur de la Roche-Lambert, au 27 novembre 1 7 9 1 , et
le sieur de la Roche-Lambert n’a été mis sur la liste
des émigrés qu’en 1792. La vente ayant une date au
thentique açant le 9 février 17 9 2 , devoit avoir tout son
effet aux termes des lois : la nation n’a pas pu vendre
Ghadieu ; et en effet elle ne l’a pas vendu.
20. Dans quelle loi croit-on trouver l’horrible injustice
de rendre les émigrés victimes des événemens , lorsqu’avant leur départ ils ont mis hors leurs mains l’im
meuble par eux acquis, et ont transporté sur un nouvel
acquéreur toute la dette dont l’immeuble étoit le gage;
lorsque les créanciers ont accepté ce transfert par une
opposition expresse sur la deuxième vente ; lorsque,
suivant toutes les idées reçues, l’acquéreur intermédiaire
étoit dégagé de toute dette ; lorsqu’enfin les choses
n’étoient plus entières depuis 17 9 1 , et n’avoient rien
de commun avec l’émigration ?'
3°. 11 ne s’agit pas de créanciers à'émigré, qui, après
avoir eu la nation pour seul obligé, ’parce qu’elle s'étoit
emparée de leur gage, reviennent à leur propre débiteur;
ce sont des créanciers opposans qui changeant leur action,
laissent de côté l’acquéreur qui a pris des lettres, et qui
possède, pour s’adresser à un acquéreur intermédiaire.
♦
t e s créanciers de Tane ont 'bien senti qu’il falloit
C 2
�(
20
)
p ro u v e r, avant tou t, comment ils avoient une action
directe contre les sieur et dame de la Roche-Lambert ;
aussi ils débutent par dire rapidement qu’il y a envers
eux engagement -personnel de la part des sieur et dame
de la Roche-Lambert.
- Ces créanciers-là ne veulent pas manquer de sûretés;
ils se donnent pour débiteurs solidaires, r°. les héritiers
de Montmorin ou de Tane,. comme« obligés directement;
2°. le sieur Sauzay, à cause de ses lettres de ratification,
ou Ghadieu, à cause' de l’hypothèque ; 30. le sieur de
la Roche-Lambert, comme délégué envers eux par Pacte
de 1788^
Pour amener à eux le sieur de Ta Roche-Lambert,
il y a une-seule chose à chercher : c’est une délégation.
Car il n’y a pas de délégation parfaite'sans novation,
c’est-à-dire,.sans l’extinction de la dette du<premier obligé;
et de même il- n’y xa pas de novation sans, l’intention
formelle de l’opérer. Ce sont là des principes élémentaires.
O r, qu’on lise et relise le contrat de vente de 1788*
on n’y verra pas même l’apparence d’une novation ; au*
contraire-,, madame de- Montmorin reste- débitrice des
créanciers, de son frère. Ils se gardent bien de lui donner
quittance des 3760,00 fr. que payeront les acquéreurs deChadieu ; ils conservent sans le moindre-doute le droit
de s’adresser à madame de Montmorin et cela est si
bien prouvé, que nous.voyons dans l’inscription du 1-1
janvier 1,808, et en la Cour* les dames de la Luzerne,
héritières de Montmorin , se réunii’ aux créanciers de
Tnne pour attaquer le sieur la Roche-Lambert, à cause
de l’intérêt qu’il a à, ne pas payer lui-même..
�( 21 )
Si les daines de la Luzerne n’étoient pas restées débitrices envers les créanciers de Tane , elles ne seroient
pas là pour fa ire valoir la vente ; elles n’auroient pas à
s’inquiéter s’ils seront payés des 376000 francs*, car l’acte
de 1788 leur vaudroit quittance de cette somme, s’il y
avoit eu une réelle délégation qui rendît les sieur et
dame de la Roche-Lambert débiteurs personnels, comme
délégués envers les créanciers#
'
M ais, dit-on, les créanciers sont parties en Facte de
1788. Donc il y a délégation et obligation directe et
personnelle des sieur et dame de la Roche-Lambert ; ils
l?ont même exécutée en partie par leurs payemens de
170644 francs.
Il est vrai que les syndics des créanciers de Tane sont
intervenus à la fin de l’acte de 1788 , pour ratifier et
confirmer la vente. Mais pourquoi se dissimuler les motifs
de cette intervention, commandée, par d’autres circons
tances.
Madame de Montmorin étoit héritière bénéficiaire ;
elle habitoit Paris.
1
La coutume de Paris ne permet à1 l’héritier bénéfi
ciaire de vendre les meubles même de la succession,
sans les formalités judiciaires, auxquelles les créanciers
connus doivent être appelés. Cette coutume est muette
sur les immeubles*, mais l’article 343 de celle d’Orléans,
plus nouvellement réformée, en est le supplément; et
suivant la jurisprudence constante à Paris, aucun héritier
bénéficiaire ne-peut vendre les immeubles sans appeler,
les créanciers.
�t A in si, pour la solidité de l’acte de 178 8 , il falloit
leur concours. On eût bien pu faire valoir qu’ils avoient
coopéré aux affiches ; mais n’étoit-il pas plus sage de
leur faire approuver la vente, pour la sûreté de l’acqué
reur , pour éviter des enchères et d’autres contestations,
q u i, bonnes ou mauvaises, ne sont que trop souvent
suggérées à des masses de créanciers ? Il éloit donc pru
dent ici d’avoir leur approbation; mais qu’avoit-elle de
commun à une délégation, lorsque ces créanciers, en
faisant une simple ratification in form â communi d’un
acte qui ne contenoit 'qu’une indication de payement,
ne disoient pas dans leur intervention qu’ils acceptaient
l’engagement des sieur et dame la Roche-Lambert i et
qu’ils éteignoient celui de madame de Montmorin ?
Ce n’étoit donc que pour lever une difficulté, et pour
la sûreté de la vente, que les créanciers intervenoient;
mais point du tout pour une délégation qu’il ne faut
pas sous-entendre, et qu'on ne peut placer là sans cho
quer la loi elle-même. Quce dubitationis tollendœ causa
in contractibus inseruntur, jus cdmmune non lœdunt.
Quant aux payemens postérieurs faits par les sieur et
dame de la Roche-Lambert aux créanciers, c’est encore
vouloir forcer le sens des choses les plus simples, que
d’y trouver une preuve de délégation parfaite et d’en
gagement personnel.
c< Pour qu’il y ait délégation (dit M. Pothier, n°. 564),
« il faut que la volonté du créancier de décharger le
« premier débiteur, et de se contenter de Vobligation
de ce nouveau débiteur qui s’oblige envers lui à la
�( *3 )
« place du premier, soit bien marquée. C’est pourquoi
« si Pierre, l’un des héritiers, pour se décharger d’une
« rente envers moi, a, par un partage, chargé Jacques,
« son cohéritier, de me la payer à sa décharge, il rfy aura
<< pas de délégation, et Pierre ne sera pas déchargé envers
« m oi, si je n'ai par quelqii’acte déclaré formellement
« que je déchargeois Pierre : sans cela, quoique j’aie
« reçu de Jacques seul les arrérages pendant un temps
« considérable, on rten pourra pas conclure que je Taie
« accepté pour mon seul débiteur à la place de P ierre9
« et que j raie déchargé pierre.. L . 40, §. 2, ff. D e pact. »
Effaçons donc de cette cause que les sieur et dame
de la Roche-Lambert ont contracté une obligation per
sonnelle envers les créanciers de Ta ne-, sous prétexte
d’une délégation qui n’existe pas 3 et substituons-y qu’ils
ont contracté , comme acquéreurs E T D É T E N T E U R S ,
l’obligation de payer 376000 fr. pour le prix de la terre
de Chadieu.
Que va-t-il en résulter? Rien que de fort ordinaire;
c’est que s’il y a eu ensuite des lettres de ratification, les>
créanciers opposans auront une action sur le p r ix , et
n’en auront plus contre l’acquéreur personnellement.*
Quand il y auroit eu délégation parfaite, elle seroit
anéantie par ces lettres de ratification qui ont opéré un
nouveau contrat entre l’acquéreur et les opposans, lequel
contrat détruiroit absolument toute délégation anté
rieure ; car les conventions particulières de la vente
�( 24 )
doivent cesser absolument pour faire place à celles que
la loi dicte, et dont elle ordonne l’exécution. '
Le résultat des lettres de ratification prises par le sieur
de la Roche-Lambert, sur la vente de 1788, devoit être
une procédure d’ordre entre lés soixante-treize créanciers
opposans.
Ce n’est pas ce qu’ont fait les créanciers de Tane; ils
ont commencé l’attaque par une inscription sur les biens
■personnels du sieur de la Roche-Lambert.
^ 'S’ils n’ont pas ouvert un ordre contre le sieur de la
Roche-Lambert,'.c’est qu’en effèt ils ne le pouvoient pas^
car, 10. les syndics n’ont pas formé opposition aux lettres
de ratification prises par les sieur et dame de la RocheLambert , sur la vente de 178 8 , mais seulement à la
vente faite au sieur Sauzay le 27 novembre 17 9 1. ' ’
Ainsi ils ont transporté leur action en payement sur
le sieur Sauzay, et ont laissé aux créanciers opposans
sur la vente de 1788, le droit exclusif d’attaqùer les sieur
et dame de la Roclie-Lambert.
Ils se sont jugés eux-mêmes sur ce point , par leur
exploit donné à Sauzay en l ’an 4 , précisément parce qu’il
étoit obligé envers eux par ces lettres de ratification.
• 2°. Les lois invoquées par les créanciers , sur l’émigration , prouvent qu’il n’y avoit plus lieu à un ordre,
si un émigré étoit.débiteur, parce que le gouvernement,
dans ce cas, forçoit la consignation en ses mains pour
distribuer les deniers lui-même.
30. Les créanciers pouvoient encore moins ouvrir un
ordre contre le sieur do la Roche-Lam bert, après le
jugement
�( *5 )
jugement du 7 pluviôse an 1 2 , qui est rendu par suite
de leur provocation contre Sauzay. Natthey, son garant,
a répondu à leur demande en faisant juger qu’il avoit
payé valablement.
Les créanciers de Tane se croient dispensés de tout,
quand ils disent que cette chose jugée est un piège , et
qu’ils ne veulent pas y tomber. Ils ' en’ sont les maîtres :
mais ce jugement est contr’eux; il n’est chose jugée pour
aucune autre personne.
- * ■
'r
L ’idée la plus bizarre des créanciers est de renvoyer
ce jugement à démêler au sieür de laf Roche-Lambert J
qui n’y est pas partie, afin, disent-ils, de le faire réformer,
parce qu’on n’a pas pu valider une consignation faite sans
offres, sans permission de justice, sans appeler lès créan
ciers, et faite surtout chez un receveur d’enregistrement.
Ils en concluent que ce versement est ¡pour un émigré,
* et nullement pour libération envers eux. 1 "
r
,\
\
Si les sieur et dame de la Roche-Lamliert avoient à
prouver sérieusement et nécessairement que la somme
versée par le sieur Natthey a été pour le compte des
créanciers opposans, ils le prouveroient aisément, sans
rien contester des lois même qu’on leur oppose. .
11 s’agit eu ce point d’une vérité de révolution, où il
ne seroit pas prudent de s’abandonner à ses propres
forces. Pour être mieux écouté, en cherchant le sèns
de quelques lois de circonstance que le* législateur ne
nous a pas données comme ratio scripta , il est plus
convenable d’emprunter le langage littéral d\me autorité
prépondérante.
D
�( »6 )
Les créanciers de Tane, en citant beaucoup d’arrêts,
ont prévu qu’on pourvoit leur opposer celui rendu en
la Cour de cassation entre les héritiers Lecomte et la
dame Bélanger; ils l’ont brièvement réfuté, en disant que
l’espèce ne s’appliquoit pas à la cause.
Ils ont eu rigoureusement raison; car quoique dans
cet arrêt il fut question d’une somme versée à la régie
par l’acquéreur d’un bien de condamné, après des lettres
de ratification , les créanciers n’avoient de procès que
contre l’acquéreur qui avoit payé; en sorte que minu
tieusement on peut bien dire que l’espèce n’est pas mot
pour mot la même.
Mais ce n’est pas dans les motifs de l’arrêt que
nous puiserons des moyens ; c’est dans le plaidoyer de
M. M erlin, qui y a discuté avec sa profondeur ordi
naire le sens des lois qui ont obligé les débiteurs des
condamnés et des émigrés à verser les sommes par eux;
dues, ¿1 la régie de Venregistrement. Dans cette discus
sion, ce magistrat n’omet pas d’examiner aussi quel doit
être Feffet de ce versement, et pour qui il est présumé
être fait. Yoici en peu de mots l’espèce de cet arrêt.
M. d’Ormesson, vendeur d’une ferme moyennant
425ooo f r . , avoit reçu 340000 fr. ; il fut condamné à
m ort, et la régie se fit payer 89904 fr. restans sur le
prix de la vente.
Après la loi qui restitue les biens aux héritiers, la
dame Bélanger, acquéreur, prit des lettres de ratifica
tion. Les héritiers Lecomte, créanciers opposans, pour
suivirent le payement du prix. La dame Bélanger se prér
�( 27 )
{dudit libérée malgré l’opposition, ' et soutint que le
créancier n’avoit d’action que contre le trésor public ,
parce qu’ayant versé le prix de sa vente; comme y étantobligée à cause.de la condamnation de son vendeur et la
confiscation de ses biens, son versement étoit polir le
compte des ayant droit , et par conséquent des créant
ciers hypothécaires, en même temps que pour le compte
du vendeur.
'
v
C’est pour examiner cette prétention que M. Merlin
discute’; et nous ,allons, voir qu’il l’adopté entièrement.
- « Si au lieu de payer aux héritiersLecomte (créanciers)
« le montant de leur créance, la dame Bélanger l’eût
« payé à un tiers autorisé à recevoir pour eux ( i ), leur
« hypothèque se seroit éteinte ni plus ni moins que par
« un payement fait à eux-mêmes..
cc Que reste-t-il à examiner? Un seul point, celui de
« savoir si en effet les héritiers Lecomte on t, par les
c< mains d'un tiers , touché après la mort du citoyen
« d’Ormesson, ce qui leur étoit dû par la dame Bélanger.
• « (Article 14 de la loi du 8 avril 1792. Les débi
te tcurs des émigrés, à quelque titre que ce soit, ne
c< pourront se libérer valablement qu’en payant h la
cc caisse du séquestre.)
c< C’est donc par forme de séquestre , que la nation
ce va recevoir les sommes dues aux émigrés. La nution
« ne les recevra donc pas précisément pour son compte
« personjiel ’ elle les recevra pour le compte de ceux qui
(1) Ces mots sont aussi en lettres italiques dans le plaidoyer
de M. Merlin ; ils sont conformes à l’art. 12 39 du Code civil,
D 2
�c
2
8
}
pourront y aÿoir droit ; elles les recevra par consé~
quent pour les remettre aux créanciers que les émigrés
peuvent avoir laissés en France, sauf à en retenir le
restant à son profit, s’il y a lieu..........
>
« (Article 17. Les sommes déclarées en vertu des
« articles précédens.. . . seront versées.. . . dans la caisse
« des receveurs de l’enregistrement, et ce nonobstant
« toutes oppositions de la part des créanciers de chaque
« émigré, et sans y préjudicier. )
• « Voilà qui confirme, qui développe bien clairement
« les conséquences que nous tirions tout à l’heure de l’ar« ticle 14 de la loi du 8 avril 1792. Les oppositions des
« créanciers d'un émigré ne peuvent ni empêcher ni
« dispenser son débiteur de verser à la caisse du rece« veur de l’enregistrement le montant de ce qu'il doit;
« mais ces oppositions n’en souffriront point pour cela :
« elles tiendront sur la somme que le receveur de Ven« registrement aura touchée. Preuve évidente et sans
•c réplique que le receveur de Venregistrement touche
« pour le compte des créanciers opposans ; preuve évi« dente et sans réplique que les créanciers opposans
« sont censés recevoir par les mains du receveur de
« Tenregistrement ,* preuve évidente et sans réplique,
« enfin, que le débiteur, en se libérant entre les mains
« du receveur de l’enregistrement, est censé payer , non
« pas seulement à la république, mais encore aux créan~
« ciers même opposans. » Questions de droit, tome 5 ,
v°. Lettres de ratification .
Il faut remarquer maintenant que c’est dans ce sens
que la question avoit été déjà jugée. Les créanciers d’Or«
«
«
«
�( 29 )
messon n’avoient été autorisés à attaquer l’acquéreur qu'en
cas d'insuffisance des deniers versés , et le recours n’étoit
ouvert contre la succession d?Ormesson qu’au même cas
d’insuffisance. Le pourvoi des créanciers fut rejeté.
>
Les conséquences de ce qu’on vient de lire sont toute
la défense du sieur de la Roche-Lambert; elles prouvent
que les créanciers de Tane ne se sont fait une cause qu’en
dénaturant jusqu’aux faits, et en jouant sur les mots.
Quand ils ont poursuivi Sauzay pour les payer comme
leur débiteur, Natthey, son garant, a fait juger contre
eux qu’il étoit valablement libéré par deux quittances
de l’an 2 et de l’an 4. Ces expressions ont paru, équivo
ques aux créanciers; ils ont dit qu’il ne s’ensuivoit pas
la preuve d’un payement , mais plutôt d’un versement
pour un émigré.
Il falloit bien le dire ainsi pour s’emparer de l’arrêté
du 3 floréal an 1 1 , qui ne se rapporte qu’aux créanciers
d’émigré qui n’ont pas provoqué leur liquidation, et à
l’égard desquels il n’y a pas eu de payement.
Disons donc avec M. Merlin que si Natthey a payé
le prix de Chadieu, soit en l’an 2 , soit en l’an 4 , ce n’est
pas pour le sieur de la Roche-Lambert qui n’avoit aucun
droit à ce p r ix , mais pour les créanciers hypothécaires.
Ainsi, quand les créanciers de Tane pourroient s’em
parer des lois d’émigration qui ne les regardent pas, il
est bien prouvé qu’ils n’y gagneroient rien, puisqu’aux
termes des lois on a versé pour eux : par conséquent
ils sont payés; et, ne craignons pas de répéter, l’arrêté
�( 3° )
du 3 floréal an n , la seule loi de leur système, ne se
rapporte nullement à eux.
De là est venu cet embrouillement de cause, de moyens
et de procédure. Il falloit se faire une qualité qu’on n’a
pas, épouvanter par une inscription de ôooooo francs,
et bien se garder de commencer une attaque directe,
pour mettre le prétendu débiteur dans un plus grand
embarras.
Mais qui a autorisé, on le répète, les créanciers de
Tane à prendre cette inscription? car il faut avoir un
titre exprès et portant obligation directe de la part d’un
individu, pour prendre inscription sur ses biens. Et certes
ces créanciers qui n’en avoient pas en 179 1 contre le
sieur de la Hoche - Lam bert, en avoient encore moins
en 1808.
A ppel des h é r it ier s
de
M ontmorin.
A leur égard, il n’est pas douteux qu’une obligation
personnelle de la part des sieur et dame de la RocheLambert a existé.
Mais existe-t-elle encore après des lettres de ratification
et un versement jugé valable? C’est ce qu’il est difficile
d’adopter.
Les héritiers de Montinorin n’auroient une action di
recte que dans trois cas qui doivent concourir.
Le premier , en rapportant le consentement exprès
des créanciers opposans aux deux lettres de ratification.
Le second, en prouvant que les acquéreurs postérieurs ,
�( 31 )
chargés de payer en l’acquit du sieur de la Roche-Lambeït,
n’ont pas payé.
Le troisième, en prouvant encore que la perte des
versemens faits pour la libération de Chadieu doit être
plutôt pour le sieur de la Roche-Lambert, à cause de son
émigration , que pour les héritiers de madame de Montmorin'; à cause, de sa. condamnation révolutionnaire.
Voilà ce que dévoient justifier les héritiers de Montr
morin, au lieu de se jeter dans les questions de savoir si
les versemens ont dû être faits avec ou sans des offres,
avec ou sans permission de la justice, et si après les lettres
de ratification, et même après le 23 septembre 17 9 3 ,
c’étoit encore chez le notaire Trutat que les deniers devoient être versés, comme on ne s’est pas fait un scrupule
de le soutenir. .
Cependant les héritiers de Montmorin ont fait une
inscription, non sur Chadieu dont ils ne veulent pas,
mais sur les biens particuliers du sieur de la RocheLambert. En avoient-ils le droit?
D ’abord ils ne rapportent ni mainlevée , ni conseil*
tement des créanciers opposans : ce seroit cependant chose
,de première nécessité, quand il n’y auroit pas d’autre
obstacle.
Eu second lieu , comment prouvent-ils que les acqué
reurs postérieurs n’ont pas payé ?
Tout ce qu’on vient de dire prouve avec évidence une
libération.
Les sieur et dame de la Roche-Lambert ont acheté
d’eux et se sont engagés à payer le prix ; soit h Trutat,
�( 32 )
soit aux créanciers, à déléguer dans le cours de deux
années.
Ensuite Chadieu a été vendu à Sauzay, à qui on a
laissé l’option de payer 375000 f r . , soit aux vendeurs,
soit aux créanciers, et spécialement aux créanciers pri
vilégiés sur la terre.
On ne peut pas tirer parti de cette option, car le sieur
de la Roclie-Lambert n’a rien touché de ces 375000 fr.
laissés dans les mains de son acquéreur pour faire face à
tout; et le sieur Sauzay ayant mis son contrat au bureau
des hypothèques, a contracté Vobligation directe envers
les mêmes créanciers , de payer les 375000 francs.
Ce contrat judiciaire résultant des lettres, efface l’al
ternative : c’est donc comme si la vente de 1791 contenoit
indication expresse de payer 376000 fr. aux créanciers
privilégiés seulement.
A son tour, le sieur Sauzay vend au sieur W allier ;
et il a si bien entendu que les oppositions formées à ses
lettres, par le syndic des créanciers de Tane, l’ont obligé
de ue payer qu’à eux, qu’il délègue W'allier ou Natthey
à payer %55ooo fr. aux créanciers de Tane , opposans
aux lettres de ratification.
Celui-ci appelle les créanciers en nivôse an 4 , pour
payer en leur présence, se disant obligé de les payer.
Il les assigne comme opposajis aux lettres de Sauzay, et
aux domiciles élus par leurs oppositions. Il procède tant
en son nom qu'au nom des premiers acquéreurs : c’est
en cette qualité qu’il verse le prix de sa vente.
Ensuite il les assigne, et lait juger contre eux, en qua
lité de créanciers de Tane} qu’il est libéré.
Et
�( 33 )
Et on appelle ce jugement res inter alios acta . On
dit qu’il ne s’agissoit de faire juger le versement valable
que dans l’intérêt d’un émigré, parce qu’il est question
de lui dans les dires du sieur Natthey. Mais, i°. il est
aussi question des héritiers de Montmorin et de la con
fiscation de leurs biens; car Natthey, qui cherchoit à
consolider sa libération, ne manquoit pas de justifier de
son mieux son versement, par le narré de toutes les
circonstances qui pouvoient la rendre meilleure.
2°. Ce qui prouve que ce jugement n’étoit pas contre
l’émigré plutôt que contre un autre, c’est que cet émigré
n’est ni partie, ni appelé à ce jugement dont on veut
..lui appliquer tout l’effet.
O r, vit-on jamais de plus inconcevable système, nonseulement en matière de chose jugée , mais encore en
matière d’hypothèque et de lettres de ratification ?
D ’un côté, ce sont des créanciers opposans qui veulent
n’avoir plus rien de commun, ni avec celui qui a obtenu
les lettres, ni avec son mandataire, chargé de le libérer
envers ces mêmes créanciers opposans, et qui ne veulent
s’adresser qu’au premier acquéreur, après avoir laissé
juger contre eux la validité de la libération suivie de la
mainlevée de leurs oppositions; mainlevée qui lève toutes
les équivoques sur Veffet du payement.
D ’un autre côté, ce sont les héritiers du vendeur qui,
après u n e Nlibération jugée valable, et une mainlevée
des oppositions, ont la bonté de se réunir spontanément
avec les créanciers d’une succession bénéficiaire, pour
demander qu’on annulle cette libération sans attaquer
h jugement
E
�(34 r
N’est-ce pas un abus du raisonnement" que de soutenir
de tels paradoxes? Si mon acquéreur chnrgé de vous
payer a fait juger contre von* qu’il avoit valablement
pavé, qui pourra dire, sans choquer le bon sens, que
je n’ai pas payé moi-même, et que je reste débiteur?
Il devient donc bien inutile de rechercher si le verse
ment a pu être fait comme il l’a été , quelle étoit la
caisse où il falloit verser, et s’il y avoit suspension des
remboursemens ; car re* judicata pro veritate habetur ,
un payement qui auroit été fait en assignats, après leur
suppression , serait certainement réputé être en trèsbonne monnoie, si un jugement l’avoit dit :■ nul n’auroit
le droit de parler des vices d’une telle libération , tant
que ce jugement ne seroit pas attaqué..
' J
S’il s’agissoit néanmoins d’examiner la jurisprudence
qu’on a prétendu si constante sur la défense des lois de
consigner sans offres préalables , et sans appeler les
créanciers, il se trouveroit à côté des citations nom
breuses faites par les adversaires, d’autres citations plus
applicables et plus précises sur la matière des consigna
tions forcées, après des lettres de ratification.
Mais à quoi serviroit cette surabondance de doctrine
et de dissertation, si ce n’est à grossir un écrit de choses
inutiles, puisque les créanciers et les héritiers de Tanene veulent rien discuter de tout cela avec le mandataire
de Sauzay, chargé de faire face à leurs oppositions,
qu’au contraire ils passent condamnation sur la validitéde son payement.
E t , chose étonnante, ce que les adversaires ne pou-
�( 35 )
voient opposer que sur le procès de l’an 1 2 , et à Natthey,
ils l’ont réservé pour les sieur et dame de la RocheLambert, après avoir laissé juger que le payement étoit
régulier.
S’il n’y avoit pas de collusion entre les héritiers et les
créanciers, est-ce que les héritiers de Montmorin ( qui
après les oppositions aux lettres ne sont plus que les
cautions du payement ) n’opposeroient pas aux créanciers
l’exception cedendarum actionurn , et ne leur diroieut
pas que s’il leur a plu de laisser juger que leur gage
étoit perdu, et s’ils ne sont pas en état de subroger à leurs
hypothèques, ils n’ont plus de recours à exercer.
S’il n’y avoit pas collusion encore entre les créanciers et
Natthey, qu’ils expliquent donc pourquoi, se disant aussi
certains de la nullité de ses consignations, ils craignent
de s’adresser à lui ou à Sauzay, qui par ses lettres de ra
tification a contracté l’obligation de payer aux créanciers
privilégiés 375000 fr. ; pourquoi ils paroissent regarder
ses versemens de l’an 2 et de l’an 4 comme un chiffon
informe, sans le prouver, s’ils en savent si bien le secret?
Mais l’exception que ne veulent pas opposer les héri
tiers de Tane, le sieur de la Roche-Lambert le fera , et
il en a le pouvoir. On ne peut le forcer de payer sans
qu’il ait le droit d’opposer aux créanciers de Tane que
s’ils ne font pas tomber le jugement de l’an 1 2 , et s’ils
ne remettent pas les parties au même état où elles étoient
avant ledit jugement, ils ont perdu tout recours contre
lui *, car il est d’une épouvantable injustice qu’on puisse
E 2
�( 36 )
lui dire : « Vous avez acheté Chadieu , et vous l’avez
« revendu à la charge de nous payer; nous avons accepté
« cette charge par une opposition. Maintenant nous ne
« pouvons vous subroger ni à nos droits sur Chadieu,
« ni à nos droits sur le prix ; et cependant nous voulons
« être payé par vous , qui ne le serez par personne, et
« qui n’aurez ni la chose ni le prix. »
Quelque atroce que soit ce système, on ne rougit pas
de le soutenir, on le trouve au contraire fort équitable ;
on se passionne même au point de dire que M. de la
Roche-Lambert manque à ses devoirs lorsqu’il n’est pas
du même avis. A la vérité ce n’est ni dans Condillac ni
dans Puffendorff qu’on va puiser pour justifier l’équité
mathématique de ce raisonnement; c’est seulement dans
les lois sur les émigrés, quron a prétendu trouver la preuve
q u e res périt domino signifié, en langage de révolution,
que le~prix d’un immeuble dû à des créanciers opposans,
pour une vente antérieure à toute é m ig ra tio n a péri
pour t émigré.
Pourquoi ajouter à la dureté des lois révolutionaires,
quand elles ne sont pas coupables de cette subversion de
tous les principes ?
Les lois de 1792 ordonnèrent le séquestre des biens
des émigrés , et chargèrent la régie de l’enregistrement
de ce séquestre; elles ordonnèrent aux débiteurs des
émigrés de verser dans la caisse de ce séquestre.
Mais qu’y a-t-il de commun entre Chadieu vendu à
Sauzay par acte notarié, en 179 1? et un bien d'émigré?
Qu’y a-t-il de commun entre un acquéreur non émigré,
�C 37 )
qui par des lettres de ratification a formé un contrat ju
diciaire avec des opposans non émigrés , et des débiteurs
d’émigrés?
Mais admettons en toute humilité qu’un républicole n’a
dû souffrir de rien, et que tout le sacrifice doit tomber
sur le proscrit, n’ÿ a-t-il pas lieu de s’étonner que les
héritiers de Montmorin' soient ici à l’unisson avec les
créanciers de. Tane 5 pour dire que Vémigre seul doit
perdre le versement ?
Si la Cour, partageant l’opinion des adversaires, quoi
qu’à notre sens elle déplace toutes les idées, jugeoit que
Natthey,, quatrième débiteur, ayant payé la dette de
Sauzay, troisième débiteur, n’a pas libéré les sieur et
dame de la Roche —Lambcrt , seconds débiteurs, il
faudra bien, pour être conséquentarriver jusqu’aux
héritiers de Montmorin, premiers débiteurs, et dire que
le moins qui puisse résulter de ce cahos, c’est que cette
dette a subsisté concurremment sur ces deux derniers.
Mais si M. de la Roche-Lambert a été sur la liste des
émigrés, madame de Montmorin a été condamnée révolutionnairemept : ainsi les lois sont les mêmes pour les
deux circonstances.
L ’article i eiv de la loi du 26 frimaire an 2 , dit que lès
biens des condamnés devoient être régis et liquidés, et
vendus comme'les biens des émigrésLa seule réponse qu’on ait pu* faire à cette observa
tion, a été de dire que madame de Montmorin fut con
damnée le 20 floréal an 2 , et que la nouvelle n’a pu;
�( 38 )
arriver en Suisse assez tôt pour que Natthey revînt en
Auvergne consigner le 26.
Cette réponse est-elle bien sérieuse contre celui qui
prend la chose en l’état où il la trouve, lorsque surtout
on sait fort bien que ce n’est pas le Natthey, de Nyon,
qui a consigné à Saint-Amant?
Que l’on dispute tant qu’on voudra contre le sieur
Natthey, sur la vraisemblance de ses versemens, sur
leurs dates et leur réalité; tant qu’il y a quittance et juge
ment de libération, le sieur de la Roche-Lambert profite
du payement fait par son mandataire, qui ne peut être
libéré sans que le mandant le soit.
Si malgré cette évidence de libération il falloit en venir
à imputer sur quelqu’un la perte de ses versemens, il
est évident que ce ne peut être sur celui à qui il auroit
profité ^ c’e s t-à -d ir e , aux héritiers de Tané, comme
vendeurs de la terre, comme propriétaires du prix, puis
qu’ils étoient propriétaires de Chadieu juqu’au payement.
Il n’y a en effet aucune raison de préférer pour la
perte les sieur et dame de la Roche - Lambert , et de
s’arrêter à eux plutôt qu’à Sauzay ou W allier; il y auroit
à cela une inconséquence tout arbitraire ; car il faut
opter entre le vendeur ou l’acquéreur, dont les lettres
sont grevées d’oppositions : l’un est le débiteur personnel,
et l’autre le débiteur hypothécaire.
Les acquéreurs intermédiaires n’ont contracté qu’une
obligation transitoire : à aucun titre le principe res périt
dowino ne peut être pour eux.
Car la terre n’étant pas à eu x, la somme consignée
�( 39 )
n’étoit pas pour eux. Qu’elle ait été versée pour les hé
ritiers de'Montmorin ou pour les créanciers de Tane,
c’est toujours aux hér'tiers de Montmorin que la somme
"devoit profiter, puisqu’elle étoit destinée à payer leurs
dettes.
• :
Gomment'donc a-t-on pu. espérer de prouver, qu’une
somme devoit périr pour les sieur et dame de la Roche1Lam bert, qui n’étoient propriétaires de cette somme
à aucun titre et en aucune qualité , pas plus qu’ils ne
l’étoient de Chadieu ?
Il faut conclure plutôt que si ta libération de Natthey
n’a profité qu’à lui seul et n’a eu lieu qu’à cause du sé
questre national,‘ c’est le vendeur séquestré1qui se retrouve
-passible de sa dette, et non l’acquéreur, qui ne s’est obligé
que comme détenteur - et qui a donné pouvoir.à un tiers
de verser pour lui.
*
Y- .
Cum jussu meo id quod mihi debes sohns creditori
meo , et tu à me et ego à creditore meo liberor. L , 64,,
ff. De sohitionibus..
• .. r . ?
Souvenons-nous encore que M. Merlin a prouvé qu’un
versement fait à la caisse du séquestre, étoit censé être
fait aux créanciers , et que c’est absolument comme si
ces créanciers avoient eux-mêmes reçu et donné quittance.
Tout ce qu’il a dit se* rapporte parfaitement aux hé
ritiers de-Montmorin, qui viennent se présenter comme
ayant été créanciers de l’émigré pour lequel ils-assurent
que la somme étoit versee..
Un autre moyen s’applique' encore aux héritiers de'
�( 4° )
/
Montmorin ; c’est que leur système de se dire créanciers
d’un émigré , conduit à remarquer que c’est la nation
qui les a représentés l’un et l’autre depuis le 20 floréal
an 2 , jusqu’au 21 prairial an 3 , époque de la resti
tution des biens aux condamnés.
Or, la nation auroit été débitrice et créancière du prix
de Chadieu : donc il-y a extinction de la dette par con
fusion. (Code civil, art. 1300. Sénatus-consulte, du 6
floréal an 10 , art 17. )
Ainsi, et dans toutes les hypothèses, les héritiers de
Montmorin sont payés par Natthey , ou n’ont de recours
que contre Natthey ou Sauzay. Iis ne s’appliqueront pas
l’arrêté du 3 floréal an 1 1 , pour revenir de la nation à
l’émigré, puisque la nation les a traités de même, et
leur a rendu leurs droits ut ex nunc. V oilà, n’en dou
tons pas , ce qui est démontré jusqu’à l’évidence.
A
p p e l
c o n t r e
l e
sie u r
.
A iyiéd ée d e T a n e .
Le jugement de Clermont n?est pas conséquent dans
ses dispositions : il juge d’abord que le versement fait
par le sieur Natthey a éteint les délégations dont Sauzay
avoit chargé W allier; et cependant il condamne les sieur
et dame de la Roche-Lambert à payer la créance du sieur
Amédée de Tane, qui prétend représenter pour le tout
le sieur de Santenas, prêteur de 30000 francs.
S’il est jugé que Natthey a valablement payé le prix
entier de sa vente, il est constant que le sieur Santenas
•w’a plus d’action ; car le sieur de la Roche-Lajmbert a
laissé
�( 4T )
laissé entre les mains dç Sauzay une somme suffisante
■pour payer tout le prix par eux d û , c’e s t - à - d ir e ,
3y5ooo fr. , quoiqu’ils eussent payé déjà 170644 fr. :
à son tour, Sauzay a laissé à Natthey une somme suffisante
pour désintéresser les ayant droit de ses vendeurs.
Au reste, il suffit dé renvoyer sur cet appel à ce qui
a été déjà dit , et de se réserver contre Natthey la ga
rantie que le tribunal de Clermont n’a pas voulu pro
noncer , par une autre inconséquence.
A ppel contre le s ie u r N a t t h e y ,
Cet appel n’a qu’un objet subsidiaire, puisque, si on
ne demande rien au sieur de la Roche-Lambert, il n’aura
rien à demander au sieur Natthey , dans son propre
intérêt.
Mais si, par impossible, le sieur de la Roclie-Lambert,
qui n’a pas Chadieu, étoit condamné à payer le prix de
Chadieu , alors bien évidemment le sieur Natthey ne
peut éviter une garantie, puisqu’il s’est engagé expressé
ment à faire payer 355ooq francs aux créanciers de
Tane , opposans aux lettres de ratification prises par
Sauzay , ou à consigner après le sceau de ses lettres.
Dira-t-il qu’il a payé en vertu d’une contrainte ; que sa
libération est jugée valable avec les créanciers ; qu’ainsi
il a rempli son obligation mot pour mot ?
Mais tout cela ne le délie pas de son engagement
envers le vendeur ; car il ne suffit pas qu’il dise, j’ai
payé; il doit être prêt à faire valoir son payement vis-àvis le vendeur, toutes les fois que celui-ci sera recherché.
F
�(4 0
Lorsqu'un acquéreur s’est soumis à payer le prix de
sa vente à des tiers, ce n’est pas assez qu’il rapporte des
quittances 3 il n’est pas dégagé pour cela de faire juger
en présence de son vendeur qu’elles sont suffisantes pour
lui , de faire en sorte qu’il soit quitte envers les créanciers
qu’il a spécialement délégués, et d’arrêter à toutes les
occasions les poursuites qui pourroient le troubler.
Cet engagement est tellement de stricte justice, que les
lois sur le papier-monnoie n’ont point assimilé les ac
quéreurs chargés de.payer des délégations, aux autres
acquéreurs de cette époque : elles ne leur ont permis
de réclamer aucune réduction, et ont rigoureusement
exigé qu’ils rapportassent les quittances des créanciers
délégués p a rla vente , même lorsqu’il n’y avoit qu’une
simple indication de payement.
Toutes les difficultés du payement fait par un acquéreur
ne peuvent être levées et discutées que par lui : sans cela,
par une collusion coupable, il pourroit obtenir des créan
ciers délégués qu’ils s’obstinassent à ne poursuivre que le
vendeur, lequel noyant rien payé lui-même, seroit privé
de tons moyens de défense.
E st-il proposable, en effet, d’assujétir le sieur de la
Roche-Lambert à faire valoir seul les quittances d’un
payement qu’il n’a pas fait, vis-à-vis des créanciers qui
suspectent ce payement, et qui, malgré un jugement,
persistent à dire que la libération est irrégulière?
Comment le sieur de la R o ch e-L am bert sera-t-il en
état d’éclairer les héritiers et créanciers de Tane sur
leurs doutes, et de leur apprendre si le premier verse
ment de 355ooo fr., que Natthey dit avoir fait à Saint-
�C 43 )•
Amant le 26 floréal an. 2 , sans appeler personne, doit
être préféré au second versement de 619604 f r . , qu’il
dit avoir fait chez le même receveur le i 5 pluviôse an 4?
en appelant les créanciers opposans ?
Aucun autre que Natthey ne peut dire aux créanciers
si sa quittance du i5 pluviôse an 4 est un versement ou
un compte, si la quittance de 32861 fr. en fait partie,
et enfin si les 264604 fr. qu’il a demandés à la régie pour
indemnité d’un séquestre de huit mois , lui ont été tenus
à compte ; car rien ne donne la clef de tous ces faits ; et
cependant il faut savoir ce que la république a retenu,
pour sav.oir ce que Natthey a payé réellement.
Le sieur Natthey paroît vouloir dire qu’il a payé en
vertu d’un ordre de la régie , et qu’il n’a pas d’autre
compte à rendre, puisque sa quittance est un acte ad
ministratif.
Mais où auroit-il pris cette étrange doctrine ? elle
eût été très-commode pour payer ses dettes sans gêne;
car à supposer que la régie eût refusé une contrainte à
celui qui désiroit lui compter 366000 francs, il faut au
moins convenir qu’ une contrainte n’est pas un ordre, et
n’a rien de commun avec un acte administratif.
Que Natthey objecte aux créanciers opposans tout ce
qui lui semblera bon pour faire valoir la consignation
que son contrat l’oblige à faire partout où besoin sera ,
après le sceau des lettres de ratification ; mais plus il
sera en règle pour ce qu’il a fait comme mandataire,
plus il lui sera aisé de faire valoir son payement; et il
ne s’cn dispensera pas en rejetant la validité de ce qu’il
F 2
�( 44 )
a fait aux risques de son mandant, car il est obligé sans
exception, ou de faire valoir ses payemens contre les
créanciers et de faire cesser leur réclamation, ou de
garantir le sieur de la Roche-Lambert de l’effet de leurs
recherches.
Que si le sieur Natthey prétendoit, ainsi qu’il en a
menacé, s’isoler de cette procédure , en disant que la
validité de ses versemens n’est pas de la compétence judi
ciaire, on lui répondroit qu’il ne peut pas proposer de
déclinatoire, par plusieurs motifs.
i°. Parce que lui-môme a soumis la validité de ses
versemens à l’autorité judiciaire, et a obtenu jugement
à cet égard le 7 pluviôse an 1 2 ; il a opposé ensuite ce
jugement comme un moyen péremptoire sur la cause
actuelle.
20. Parce que lia demande en garantie a été jointe,
et que-loin d’attaquer le jugement de jonction, le sieur
Natthey a plaidé au fond.
3°. P a rc e que dans des lettres missives adressées au sieur
de la Roche-Lambert, le sieur Natthey a offert sa garantie
pour le procès actuel ; en sorte que ce nouvel engage
ment a produit une nouvelle action qui ne peut être
soumise qu’aux tribunaux civils.
40. Parce qu’il résulte des arrêts déjà cités de part et
d’autre, que les tribunaux ont t o u j o u r s statué sur la vali
dité des versemens faits dans les caisses publiques par les
acquéreurs même des biens provenus d’émigrés ou con
damnés.
Dans tous les cas, les lettres du sieur Natthey suffi-
�( 45 )
sent (r); l’offre expresse de sa garantie a été acceptée ex
pressément par le sieur de la Boche-Lam bert dans ses
2 1 ju in 1 8 0 8 .
(r) « J ’ai reçu votre lettre, Monsieur, et je ne veux pas un
« seul instant vous faire attendre ma réponse.
cc J ’ai d abords été fort surpris des inscriptions que les créan
ce ciers de Tane ont prises sur vos biens ; j’ai dû ensuite me
« souvenir qu’ils avoient précédemment regretté de n’avoir pas
cc pris cette voie d’ abord, et de s’être engagés dans une autre
cc voie qui ne leur a pas plus réussi que celle-ci ne peut leur
« promettre du succès. Vous croyez d’avance, je l’espère, que
cc toutes choses sont parfaitement en règle vis-à-vis d’e u x ..........
cc Vous avez quelqu’apparence d’inquiétude sur le vrai pro« priétaire de Chadieu. D ’un mot je vous tirerai dô toute inquié<c tude. I l n e t i e n d r a , q u ’ a vous q u e N a t t h e y o u m o i , a v o t h e
<C CH OIX , OU TOUS DEUX R É U N IS , N E VOUS OFFRIONS DE NOUS SUI3S-
cc
cc
t i t u e r a vous d a n s c e t t e a f f a i r e : je vous en passerai acte
public avec grand plaisir et sans inquiétude ; c a r , encore une
ce fo is, toutes choses sont parfaitement en règle avec ces mescc sieurs et tous autres.
cc Voilà un premier problème résolu, à votre satisfaction sanste doute. Vous v o y e z q u e N a t t h e y n i m o i n e n o u s e f f a ç o n s ;
cc QUE M EM E NOUS VOUS O FFR O N S, SOUS N OTRE GARA N TIE ET CELLE
CC DE CH AD IEU , DE NOUS SUBSTITUER A VOUS..................................
? ce
Vous êtes encore dans l’erreu r, quand vous supposez que
« les créanciers de Tane avoient fait opposition aux lettres de
te ratification obtenues par M. votre père sur MM. de Tane.
cc
ce
Fayon s’inscrivit, fit inscrire aux hypothèques d’autres créan
ciers non unis , et ne fit point inscrire l’union............. \\ n’y
« eut aucun acte conservatoire de la part de l’ union.
�(
4
6
}
réponses : ainsi ce nouvel engagement passé entre M. de
Batz, représentant Natthey , et M. de la Roche-Lambert,
« Mais aux lettres de ratification prises par Sauzay sur M. votre
<c votre p è r e , l’ union fit opposition , alors trop tardive si elle
cc étoit nécessaire. En l’an 4, il y eut des lettres de ratification
cc prises sur Sauzay, et l’union eut le tort extrême de ne pas
cc prendre d’inscription, ni faire d opposition.
<c Us n’ont donc que celle du 2 2 décembre 17 9 1 ; mais il y a
cc
condamnation contr’eux sur ce point,
cc
tance très-âpre et trés-vive qu’ils avoient commencée
cc
cc
contre Sauzay. Repoussés dans cette voie par laquelle ils attaquoient, dans Sauzay, W allier et N atth ey, et se trouvant à
bout de voie , c ’est alors qu’ils regrettèrent de 11’avoir pas
attaqué d’abord M. votre père ou votre famille, au lieu de se
cc
faire condamner sur leur inscription de
ce
v r a i, je n’aurois pas imaginé qu’après plusieurs années de
silence et d’inaction, ils auroient imaginé de finir par où ils
cc
cc
cc
à
l’occasion de l’ins-
17 9 1.
M ais,
Paris
à
à
dire
auroient voulu commencer. Mais les actes subséquens, leur
<c liquidation, leur payem ent, sont tels qu’ils ne peuvent chercc cher qu’à e f f r a y e r e t à a r r a c h e r q u e l q u ’ a r g e n t , du moins de
cc Sauzay : c ’étoit contre Sauzay leur plus solide projet.
cc
cc
S ’ils ont pris des inscriptions folles sur vos biens, ils en
cc ont également pris sur Chadieu...................Instruisez-moi de
cc
tout ce qui s’est passé d’eux à vous dans cette insurgence, et
cc
vous aurez de ma part, ou par moi, instructions parfaites. Je
cc
vous répète que m’identifiant à N atth ey, je me mettrai avec
cc
ce
plaisir à votre lieu et place. N e perdez pas un moment a me
faire savoir s’il y a de simples inscriptions prises, ou s il y a
ce
quelque demande formée. Voilà de ma part, j espère, fran-
« chise, loyauté autant que vous pouvez désirer, et plus que
** vous ne pourriez exiger.
“ Keccvez l’assurance de mon bien sincère et invariable
�( 47 )
est aussi valable que s’il eût été souscrit par un acte en
forme; car, d’après les principes, 011 contracte valable
ment par epLstolam a ut per nuntium.
«attach em en t, et veuillez le faire agréer àJM . votre père.
« <Signc De Batz.
« Dès que j’aurai votre réponse, je partirai ou vous écrirai
« sur-le-champ. Je ne suis nullement in qu iet, parce que je
« connois les faits, et qu’ils sont réguliers. :»
Paris, 9 juillet 1808.
« Je n’ai pas perdu de tem ps, Monsieur, à prendre tous les
cc rëriseîgnernens et toutes les instructions utiles contre les créan-
« f.ciers de'Tane. J ’aurai une consultation des plus habiles gens.
« L/affàireparolt inattaquable par les créanciers de Tane. II est
et heureux pour vous et pour moi que j’aye pris, dans le temps
« u tile , surabondance de précaution, pour acquitter à la fois
cc vous et moi, et pour mettre dans tous les sens les créanciers
cc en demeure. Vous ne pouvez vous défendre que par mes
cc pièces. . . . . . . . .
ec
c<
cc
cc
«
M. votre père n’ auroit pas dû prendre ins
cription sur Chadieu, surtout sans m’en prévenir : il n’auroit
pas dû en prendre au nom d’autrui ; il ne devoit voir que les
créanciers. Son intérêt est de faire cause commune avec
Chadieu : quiconque lui dira le contraire se trompera , l’induira en erreur. Au reste, je lui demande, et j’espère qu’il
« ne me le refusera p as, de vouloir bien faire rayer 9on ins
ec cription au bureau de Clermont. J ’ai besoin, pour ma seule
« délicatesse vis-à-vis de deux personnes à qui j’ai fait deux
emprunts, d’avoir leur certificat d’inseription avant le vôtre,
parce qu’agissant de bonne foi et d^entu-rre confiance en m oi,
ce ils ont reçu dans leur acte ma parole d’honneur qu’il n’existoit
�-
,
(
4
8
}
M. de Batz, représentant Naüliey, a toujours continué
<T;igir en conséquence de ce nouvel engagement. Il a
envoyé au sieur de Laroche-Lambert la consultation
très-détaillée de MM. Poirier et Bellard (annoncée dans
la dernière lettre), pour le rassurer sur ses risques, et
lui attester que les versemens de Natthey éteignoient la
créance.
Il y a donc im p o s s ib ilit é de délier le sieur INÎatthey de
son nouvel engagement, qui lève tous les scrupules des
lois de rémigration, lesquelles n’ont rien de commun à
une garantie offerte et acceptée en 1808.
cc j)as d’hypothèque sur Chadieu ; e t , certes , je croyois la
cc donner en toute vérité , et il se trouve que la vôtre existoit
« le jour même où j’affinnois qu’il n’en existoit pas , ou du
cc moins que celle du m aire de V i e , qui est nulle de fa it , et
cc celle de deux pauvres petits créanciers que j ’ai fait condamner
ce à Riom , et que j ’esp ère faire ra y e r à tous momens. M. votre
cc p ère , après avo ir fait ra y e r ce lle q u ’il a déjà faite , pourra
cc au m ê m e in s ta n t , s’il le juge à p ro p o s, la faire rétablir. Je
ce n’y suis que pour ma délicatesse seulement, et j ’espère qu’il
ce 11e me refusera pas cette satisfaction légère, qui, dans aucun
cc cas , ne peut lui être dommageable, et qui a été pour moi
w le sujet d’une véritable contrariété , honneur et délicatesse
cc parlant.
ce Au surplus, je prends le parti d’aller porter cette lettre à
cc M . Vautrin, et je m’en rapporte à. c e qu’il vous conseillera
cc à cet égard.
cc Je vous renouvelle , Monsieur,
1 assurance de mon dévoue-
cc ment à vos intérêts, et de mon bien sincère attachement.
u S i g n e D e B a tz . »
II
�( 49 )
Il'n e reste plus qu’un mot à dire sur l’effet de "cette
garantie, s’il falloit en venir à elle ; il est réglé ,par le
Code civil, qui s’exprime ainsfÎ
: Article 114 2 . c< Toute obligation de faire se résout en
« dommages-intérêts, en cas'de non-exécution delà part
« du débiteur. »
Article 1184. « La condition résolutoire est toujours
« sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour
« le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à
« son engagement.
« Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein
« droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point
« été exécuté, a le choix, ou de forcer l’autre à l’exé« eution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en
« demander la résolution avec dommages et intérêts.
« La résolution doit être demandée en justice, et il
« peut être accordé au défendeur un délai selon les cir« constances. »
Le sieur de la Roche-Lambert a conclu à la résolution
de la vente de 179 1 , si la condition de le faire tenir
quitte de 355ooo fr. n’est pas exécutée : la loi' ne lui
permet pas de douter que cette résolution ne soit pro
noncée, s’il étoit condamné à payer lui-même la somme
considérable qu’on lui demande, et qu’il ne doit pas.
Comment le sieur Natthey pourroit-il soutenir l’idée
que le sieur de la Roche-Lambert dut être obligé de
payer Chadieu sans l’avoir, tandis que lui, Natthey, auroit
Chadieu sans le payer?
Jusqu’à présent le sieur Natthey n’a point élevé une
prétention aussi immorale; il est vraisemblable qu’il s’en
�( 5o )
tiendra à ce qui est raisonnable et légitime : ainsi , à son
égard, il suffit de s’arrêter à l’idée qu’il fera valoir ses
payemens, puisqu’il s’y est engagé, ou qu’il s’arrangera
avec les créanciers de telle manière que son vendeur soit
à l’abri de toutes recherches.
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat,
M e. M A R I E , licencié avoué.
A R I O M , de l’ imp. de T H I B A U D , imprim. de la C o u r impériale, et libraire,
rue dej T a u le s , maison
L a n d r i o t. —
Juillet 1 8 1 0 ,
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roche-Lambert, Joseph de. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
assignats
émigrés
confiscation nationale
créances
receveurs de l'enregistrement
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Joseph de la Roche-Lambert, habitant d'Issoire, intimé et appelant ; contre Dame Françoise-Aglaé-Gabrielle de la Luzerne et sieur Pierre de la Grange-Gourdon, son mari, dame Angélique-Armande-Camille de la Luzerne et sieur Anathocle-Maximilien Hurault de Vibraye, son mari, habitans de la ville de Paris, héritiers bénéficiaires de la dame de Montmorin, laquelle était héritière bénéficiaire du sieur Emmanuel Frédéric de Tane, son frère, appelans ; contre sieur Henri Duvergier, habitant à Paris ; Simon Teroulde, habitant à Daudeville ; Pierre-Louis Laisné, ancien sellier à Paris, habitant à Sens ; Antoine-Louis Duchastel, apothicaire à Paris ; et Jean Chardon, chapelier, habitant à Paris, syndics et créanciers unis dudit sieur de Tane, aussi appelans ; contre Sieur Amédée de Tane-Santenas, habitant à Paris, intimé ; et contre Sieur Louis Natthey, habitant de Nyon en Suisse, aussi intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1511-1810
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0413
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0423
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0412
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53797/BCU_Factums_M0413.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Issoire (63178)
Paris (75056)
Daudeville
Sens (89387)
Nyon (Suisse)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
confiscation nationale
Créances
émigrés
receveurs de l'enregistrement
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53796/BCU_Factums_M0412.pdf
b25bc707f0b3860b76157e7217997a10
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MÉMOIRE
POUR
leM A I R E etlesH
abitansdeVic-le-Com
te
;
C O N T R E
Le Sieur N A T E Y ? de N yon , m Helvetie.
i
L e sieur Natey veut dépouiller la commune de V ic
de trois communaux , qui lui ont été dispulés jadis par
tous les Seigneurs voisins, mais qu’elle a su conserver
malgré leurs efforts, par des transactions et un arrêt
souverain.
Une possession immémoriale se réunit à d’aussi puissans titres : la commune de V ic n’a jamais plaidé qu’en
défendant.
L e sieur Natey 'commençant un nouveau procès,
n’a pas voulu en attendre le résultat: il a fait planter
et défricher une partie des communaux de V ic , par
voie de fait, et sans en demander l’autorisation à la
justice.
A
�( * )
L ’instant qu’il a choisi, pour renouveler des pré
tentions jugées et abandonnées depuis 160 ans, est
remarquable.
C ’est sous l’empire de la loi du 10 juin 1793? qui
assura et restitua même aux communes les propriétés
de celle nature ; et le sieur Natey n’est lui-même
acquéreur de Chadieu que depuis cette loi.
Cependant c’est sous de tels auspices, et contre ses
propres titres , que le sieur Natey a tenté des innova
tions brusques et attentatoires, dont ses prédécesseurs
n ’avaient même jamais marqué l’intention dans le plus
lia ut point de leur splendeur.
Les liabitans de Vie ont un intérêt majeur a repous
ser ces prétentions, et leur défense ne sera pas un
essai. Les armes qui ont fait succomber les Canillac, sont
encore dans leurs-mains; et si le sieur Naley est plus
opiniâtre qu’e u x, il est à croire qu’il ne sera pas plus
invincible.
F A I T S .
La commune de V i e - l e - C o m t e est séparée de
Chadieu, Autezat et Chalus-les-Bussière, par la rivière
d’Allier.
Entre Chadieu et la rivière est un pacage appelé
La Vergiere.
Entre Chadieu et Chalus, sur le bord de la même
rivière , est un autre pacage appelé Le grand Gachier,
aliénant, de jour, à la Vergière, séparé du territoire
de Chalus par le ruisseau appelé de Charlet. Enfin ce
�(3)
même pacage se prolonge de l'occident à l'orient ; et
la parlie orientale , séparée de la première par un
chemin, s’appelle Le petit Gcicliier, toujours resserré
en ire le terri loire de Clialus et la rivière.
L e ruisseau de Charlet a toujours été la limite de
la paroisse de Vic-le-Comte ; et s'il paraît extraordi
naire que le territoire d’une commune franchisse une
rivière, la position topographique des lieux peut en
faire soupçonner la cause. Jadis l’Allier dut avoir son
cours à l’extrémité méridionale et occidentale des Gachiers et de la Vergière. Après une inondation qui couvrit
ces pacages de grèves encore existantes, le fleuve, chan
geant son lit, laissa la majeure partie de ces pacages sur
la rive gauche, et cet atterrissement considérable ne dut
pas être abandonné par les habitans de Vic-le-Comte.
Il est aisé de concevoir cependant combien cet acci
dent pouvait leur nuire. Les Seigneurs voisins allaient
être jaloux de ne plus être limités par la rivière, et le
moindre mal devait être une promiscuité de pacage,
qu'alors il y avait peu d’intérêt d’ëmpêcher.
Une première transaction du 2 juillet i 5 i i , atteste
quelles étaient alois les prétentions du Seigneur de
Chadieu (Anioine Debord).
Il avouait bien que le grand Gachier et le petit Gachier
étaient situés l’un et l’autre en la justice et châtellenie
de Vic-le-Comte; mai; il prétendait en être investi par
M M les comtes de Boulogne et d’Auvergne, seigneurs
de Vic-le-Com te, offrant le justifier.
D e leur côté les consuls et habitans de Vic-le-Comte
A 2
�(4 )
prétendaient que lesdits Gachiers leur appartenaient en
toute propriété et seigneurie, et qu’ils en avaient: joui
de tout tenis. Ils prétendaient encore empêcher le
seigneur de Chadieu d’y faire pacager ses bestiaux ^ vu
qu’il était habitant en autrui ju stic e , c'est-à-dire, en
la justice d’Aulezat.
Sur quoi deux procès étaient nés pour raison desdits
droits de propriété et de pâturage.
L e seigneur de Chadieu * ayant déjà perdu son pro
cès devant le premier juge, et encore sur appel en la
sénéchaussée, était appelant au parlemen t lorsqu’il tran
sigea j et voici les termes de la transaction :
« C ’est à savoir que dudit grand Gachier ci-dessus confiné
lesdites parties jouiront comme on a accoutumé par com m un,
par ensemble, et y faire pâturer tout bétail, testons, pourceaux et
oyes que l’une partie ni l ’autre n’y pourront faire pâturer en
moins que ce soit et est leu et permis èsdits habitans de V ie ,
le tenir en deff'ense de tout .bétail quelconque depuis NotreDame de mars jusqu’au 16 du mois de may ou autre tems plus
ou moins lo n g q u i l sera avisé par ladite commune de V ie
sans que durant ledit tems un ni l’autre y puisse faire pâturer
chacun b é ta il, si ce n’est après ledit tems deffensable passé et
selon la délibération de ladite commune et en telle qualité que
lesdits habitans de V ie estimeront : sera permis èsdits seigneurs
de Chadieux en jouir et user comme dit est : et au regard du p etit
Gachier lesdites parties en toute saison de l’an avec leurs bes
tiaux quelconques soit bouine, chevaline et pourceaux , oyes
et autres quelconques comme pâturage commun entre les par
ties sans ce que lesdits consuls et habitans de V ie le puissent
mettre en deiïense ni limiter quant auxdites qualités de bestiaux
®i hon ne semble èsdits seigneurs de Chadieux. Toutesfois ne
�( 5 ’)
pourront lesdits Seigneurs ni leurs métayers faire palurer èsdits
Gachiers ni aucun d’eux autre bétail que ceux qui appartien
nent èsdits seigneurs de Chadieux ou que lesdits métayers
tiendront à cheptel d’eux sans aucune fraude sans que lesdits
y puissent mettre bétail c£autrui demeurant a u h e ju stice que
dudit V ie ou celui que leurs métayers tiennent à cheptel d’eux
ou à leur profit. Et au regard du tail et arbres desdits Gachicrs
qu’est du pied demeurera et appartiendra en propriété et pos
session et seigneurie èsdits seigneurs de Chadieux sans que lesdits
consuls et habitans y puissent prétendre aucune chose, et par ce
moyen seront y ceux seigneurs de Chadieux payer la censive
cleube à cause de ce chacun an à la dame comtesse de Boulogne
et d’Auvergne. Et ne pourront lesdits seigneurs de Chadieux
planter èsdits Gachiers de nouvel aucun arbre, vrai et que
aucun des arbres anciens'de pied planté ou qui ont été plantés et
ci-devant, soit morts et arrachés, pourront replanter d’autres
arbres sans y faire aucun autre plant nouvel,.etc. Fait le 2 juillet
f l 5 i 1, etc. »
Ainsi le lot de chacun est bien expliqué ; par cette
transaction, le seigneur de Chadieu a pâturage dans
les deux Gachiers, et la propriété des arbres existons,,
sans pouvoir en planler d’autres.
Tous tes actes de propriété et d’empêchement res
tent aux habitons de Vie-le-Comte (1).
En 1 536 , le sieur Jacques de Beaufort, seigneur en
partie de Chalus-les-Bussières, voulut se permettre de
retirer des épaves flottantes dans la rivière d’A llie r, de
(0
Ic i le sieur N a t e y place un acte a p o c ry p h e de i 63 i , qui étend la justice
de M o u t o n , C h ad ie u et C halu s jusqu’ à P A I l i e r , et qui réduil les habitans de
V i e , de leur consentem ent, au pacage dans leurs propres c o m m u n a u x ; cet acte
d ém e n ti par tout ce qui va suivre , sera rapporté c i - a p r è s , pages 22 et
�( 6 )
laquelle il e s t séparé parles deux Gachiers, comme nous
l ’avons dit.
L e procureur-général du comté d’Auvergne le fit
assigner , sur le m olif que M. le comte d’Auvergné
était seigneur et possesseur de toute la rivière d’Allier,
.d’un côté et d’autre, tant que dure ledit comté.
De sa part, le seigneur de Chalus prétendait que la
limite de ses justices des Martres} et en partie de Chalusles-Bussières,, s’étendait jusqu’à la rivière d’Allier qui
en était la séparation.
Sur quoi, les parties ayant compromis transigèrent
le 8 décembre 1542, et il fu t convenu q u au comte
cVAuvergne demeurerait et appartiendrait l’entière j u s
tice, haute, moyenne et basse de Ladite riçière d A llie r ,
d
’u n
côté
et
d ’a u t r e
.
Cette transaction, passée à B iom , fut honorée de
signatures bien respectables , MM. M ich el B r a n d o n ,
lieutenant-général, J ea n de Sirm ond et A n n e D u bou rg
.
Après cette transaction qui réglait tout à la fois le
territoire du seigneur de Vic-le-Comte et celui des liabitans, il ne paraît pas que pendant un siècle il y ait
eu de procès.
Mais le i 3 décembre 1 6 2 7 , François BeaufortCanillac acquit du sieur Laguele la terre de Chadieu,
et bientôt les procès recommencèrent.
Cependant son propre contrat d’acquisition était
bien limitatif et bien clair.
�(7 )
Il achète le lieu de Chadieu« consistant en nn domaine; con
te finé par le pacage de V ic -le -C o m te , appelé la Vergière ,
« de jour ;
« P lu s, un pré au terroir Darson , confrontant au G a ch ier,
de bise ;
«
«
«
«
« Plus, un autre pré jouxte audit G a ch ier, de bise;
« Plus, le droit de pacage dans les susdits Gachier et Verg iè r e , et quantité d’arbres connus sous le nom de pibles et
autres, étant le long de k fiivière d’A llier, depuis le bois de
Macliont jusqu’au bateau de B r o la t, lesquels appartiennent
audit Cliadieu ;
« Plus, un pré dessus ledit Gacîiier, jo u x t e ledit G a ch ier,
« de bise ;
' ■
,
Voila donc exactement ce que le prédécesseur du
sieur Natey acheta, et ce qu’il n’acheta pas.
En i 6 3 3 , le sieur de Canillac, plus jaloux des com
munaux depuis son acquisition de Chadieu1., voulut
faire de nouveaux efforts, en qualité de seigneur, haut
justicier de Monton; et malgré la transaction de 15 4 2 ,
il envoya ses officiers de justice tenir assises sur le com
munal des Gachier.
Les officiers de Vie ignorèrent cette hostilité furtive ;
ils tinrent aussi des assises dans le me me local, en i6327
comme ils en avaient tenu depuis et comprise l’année
I 474 *
Mais en i 6 3 6 , le sieur de Canillac fit saisir les bes
tiaux de deux habitans de Vic-le-Gom te, et un procès
s'engagea.
En 1637,
dame Peloux? veuve Beaufort, tutrice
�.
.
( 8 ')
de ses enfans, obtint une sentence en la sénéchaussée
d’Auvergne, qui lui accorda la possession et saisine dii
grand et petit Gachiers, tant pour le droit de justice,
que de pacage. 11 y eut appel de cette sentence et des
assises , au parlem ent, où le procès fut appointé au
rapport de M. de Benoise, le i 3 août 1640.
> '
L à , les habitans de Vie se plaignirent de ce que la
dame Peloux , qui intentait un procès à cause de sa
justice de Mon ton et les Martres , ressort de Riom ,
avait affecté de les assigner devant une sénéchaussée,
intéressée au procès à cause de son ressort , et avait
obtenu line sentence, au préjudice des récusations.
Les habitans de Vie soutinrent être propriétaires des
Gachiers,, d'après la transaction de
i 5 ii
’ et d’après
le titre même d’acquisition de Chadieu en 1627 , qu’ils
opposèrent à la dame de Canillac, auxquels titres ils
ajoutèrent la possession paisible qu’ils avaient des pâ
turages ¿ et le droit de les rendre déferisablès.
Enlin ils firent remarquer que les officiers de Monton n’avaient exercé aucun acte de justice sur les com
munaux, si ce n’est depuis le procès intenté ou ¿1 la veille
des’intenter ; et dirent que si quelques témoins, justicia
bles du sieur de Beaufort, avaient déposé que sa justice
s’étendait jusqu’ci la rivière'd’Allier, ces dépositions,
détruites d’ailleurs par les titres des appelans et par
leur enquête, n’étaient dues qu’à l’autorité du sieur
de Beaufort , sénéchal de la province, gouverneur de
Vic~le-Comte et de tout le comté d’Auvergne.
�( 9 >■’
Sur ces moyens., publiés dans un facium imprimé, là
dame de Beaufort ne se dissimula pas les conséquences
de sa propre acquisition de 1627.
En conséquence, elle prit le 11 août 1 6 4 0 , des lettres
de rescision contre cette vente, et en demanda l’en
térine ment.
Pour n'être pas isolés^ et sans protections, les habitans de V ic-le-C o m te intéressèrent à leur procès le
sieur de la Rochebriant, seigneur de la Chaux, à qui
ils concédèrent pour cela quatre-vingts pieds d’arbres
des Gacbiers ; le seigneur de la Chaux intervint au
procès, il réclama le droit de pacage dans les Gachiers,
comme ayant son fief dans la justice de Vic-le-Comte?
et il réclama aussi les arbres à lui concédés.
L e 17 mai 16 41, arrêt définitif ainsi conçu :
Entre les consuls et habitans de V ie - le -C o m te , appelans ,
d’ une part ;
« E t Marie de Peloux, veuve de François de Beaufort de
. « C a n illa c, seigneur de M onton, les Martres, Chalus-les-Bus« sières et Chadieu, tutrice de leurs enfans , d’autre part ;
« Et Annet de Larocliebriant, seigueur de la C hau x, dénian
te deur en intervention , à cause de sa terre de la G liaux, sise en
« la justice de Vic-le-Gomte.
« V u etc. lettres de nous obtenues par ladite P e lo u x , le i r
« août 1640, pour être relevée des clauses apposées dans le
« contrat d’acquisition fa ite par ledit Beaufort son mari , de
« ladite terre de C hadieu, le i 3 décembre 1627;
Notre dite Cour, par son jugement et arrêt, faisant droit, tant
sur le procès par écrit, intervention, q u ’appellations verbales desd.
consuls, desd. jugemens des i 5 m a i, 4 juin 1687>e* de toutce cjui
s’en est suivi, e n s e m b l e des assises tenues par lesofliciers de Mon-
B
�(. IO )
to n , des 21 mai i 63 s et 16 mars 1 638 , et dudit de Larochebrianf,
de ladite sentence du 5 juin 637 >sans $ arrêter auxdiles lettres
des i i août 640 et 20 avril dernier , a mis et met les appella
tions , sentence , et ce dont a été appelé, au néant, sans amende ;
en émendant, a maintenu et gardé, et maintient et garde ïesdits
consuls et Larocliebriant en la possession, saisine et jo u issa n ce
des grand et petit G a chier, tant pour le droit de justice, que
de pacage ; ordonne que lesdits consuls pourront tenir ledit
Gachier en défense de tout bétail depuis le 25 mars jusqu’au i 5
mai ou autre iems plus ou m o in s, sans que les uns ni les autres
en puissent jo uir, sinon après le teins défensable expiré , dans
lesquels grand et petit Gachier , ladite dame de Chadieu et de
Chalus-les-Eussières et ses métayers pourront sans fraude en
voyer pâturer leurs bestiaux ,* et sur les appellations verbales de
ladite Beauiort, a mis et met les appellations au néant ; ordonne
que ce dont a été appelé sortira effet • condamne ladite B ea ufo r t aux dépens de la cause principale , sans dépens desdites
lettres et causes d’appel, et sur le surplus de Vintervention du
dit de Larocliebriant, concernant le reta il et coupe des arbres
sis au grand Gachier , les parties articuleront plus amplement
leur demande par-devant le juge de JRiom, autre que celui dont
est a p p e l, escriront, produiront, bailleront contredits et salvation , pour le tout vu et rapporté, être ordonné ce qu’il appar
tiendra pour raison , sans dépens de ladite intervention pour
moitié le surplus réserve, la taxe des adjugés à notre dite Cour
réservée, si mandons , etc. D onné-à P a r is, en notre parlem ent ,
le 17 mai 1641, signé Guyot ; collationné h l’original, par moi
conseiller-secrétaire du roi et de ses finances, signé Henry.
Cet arrêt jugeait donc ce qui élait de l’intérêt des
habitons de V ic - le - C o m t e ; car quant au retail des
•arbres, qui n’avait élé qu’un prétexte d’intervention*
il leur importait peu qui du sieur de la Chaux, ou de la
dame de Beauiort en demeurai le maître.
�( ÏI )
Les habit-ans de V ie, restés propriétaires, payèrent
le droit d’amortissement, aussitôt après l'arrêt de 1641.
- Vingt-quatre ans de tranquillité prouvèrent que les sei
gneurs de Chadieu étaient forcés de respecter cet arrêt.
.Mais en i 665 ces vexations féodales, qui appelèrent
pour l’Auvergne l’attention du, Souverain , n/éparN gnèrent pas les habitans de Vic-le-Comte, et ce que
le sieur de Canillac n’avait pu obtenir de la justice, il
essaya l’arracher par la violence (1); il voulut chasser
(1) D écla ra tion du, R o i , d u 3 i ao û t i 665 , pour Rétablissem ent des
grands jo u r s en Auvergne» « L O U I S , etc. N o u s som m es avertis que le
« mal est plus grand dans les p r o v in c e s éloig nées de notre C our de P a r le m e n t,
« que les lois y sont m é p risé e s, les peu ple? exposés à toutes sortes de vio« lences et d ’oppression^ que lesg eutilsliom m es abusent souvent de leur c rê
te dit ; -que'la-faiblesse des officiers de justice est si g r a n d e , q ue po uvant
» résister à leurs ve?iation s, les crimes d em e u ren t i m p u n i s , etc.
R èglem ent p u b lié à C lern ion t , le i . er octobre i 665 . « L O U I S , — L e
« principal fruit que nous espérons de l’ établissement de notre C o u r des grands
« jom àest le soulagemeut-de nos sujets q u i, pendant la licence des g u e rr e s, se
« sont trouvés accablés sous l’autorité et violen ce des p lu s p u issa n s de la
« province , non-seulement p a rla n églig en ce ou la faiblesse des prem iers juges,
« mais en core par la m alice des a c c u s é s , qui se sont servis de toutes sortes
« d’artifices pour rendre les p r o c é d u r e s , faites contre eu x , im m oi telles 5 . . . .
^ détournent et égarent les p r e u v e s , etc.
A rrêt de règlement du 9 ja n v ie r 1666. « Sur ce qui a été rem on tré qu’ il
« se com m et dans la prov in ce d’ A u v e r g n e plusieurs a bus..........L e s seigneurs
v réduisent les r e d e v a b le s à l’im possibilité ; . . . . les contraignent à la banna« lité
sans forme de justice exigent des am end es ; . . . et quand il y a plainte,
« font payer l’am en d e , et f o n t cesser les poursuites . . . à tous lesquels désor« d r e s i l était nécessaire de p o u r v o i r , etc.
N o ta . Procès-verbal. . . . « M . le marquis du P on t-d u -C h â tea u de la m aison
* de C a n i l l a c , suivi d’ un gros de gentilsh om m es de m a r q u e , tous à c h e v a l , se
« présente , après avoir mis pied à te rr e , devant le carosse de m onseigneur le
« président, et lui fit c o m plim en t. ( C ’ était J a c q u e s de B e a u fo rt , (ils de la dam a
« de P e lo u x ).
B a
�( 12 )
les habitans de V ic - le - C o m t e de la rive gauche de
¡ ’Allier. ,
Ceux-ci en portèrent leurs plaintes à MM. les commis
saires des grands jours ; une des premières opérations de
cette Cour fut de décréter le s.r Beaufort de Canillac de
prise de corps, et sa femme d’ajournement personnel.
L e 3 o janvier 1666, un arrêt des grands jours les
mit en liberté provisoire 3 mais à la charge de se re
présenter à la première assignation, faute de quoi, leurs
biens seront saisis et annotés. Mais les grands jours
cessèrent deux mois après; et le sieur de Canillac, pour
se venger, accusa les habitans de Vic-le-Comte d’avoir
tenu des assemblées illicites, et d’avoir coupé les arbres
des Gachiers, seule propriété qu'il se crût en droit d'y
réclamer.
Sur cette plainte, le sieur de Canillac fit décréter
quelques habitans de Vic-le-Comte, mais ils se pour
vurent par appel au parlement.
L e 19 avril 1666, arrêt du parlement qui ordonne
que dans le mois, le s.r de Canillac et sa femme seront
tenus de se représenter a u x pieds de La Cour, pour
être procédé au jugement du procès, faute de ce faire
dans ledit délai, seront pris au corps, et conduits pri
sonniers en la conciergerie du Palais, si appréhendés
peuvent être, sinon ajournés à son de trompe, et leurs
biens saisis et annotés; et cependant a mis et met Les
habitans de V ie-L e- Comte en La protection et sauve
garde du R o i et de La Cour.
Les vexations du sieur de Canillac eurent donc leur
�( i3 )
térme ; la Volonté d'un gouvernement ferme devait
être respectée , et cent ans de repos pour les habitans de Vic-le-Comte furent l’heureux résullat de cette
sévérité.
'
Non-seulement ils ont joui cent ans sans trouble*
mais à chaque fois que l’occasion s’est présentée de
maintenir leurs droits, ils les ont fait valoir et ont su
les conserver.
En 1730 , une femme décéda à Chalus-les-Bussières,
et voulut être enterrée à Vic-le-Comte. .
Son curé porta le corps ju sq u 'a u ruisseau de Charlet
(qui borne les deux Gachiers, et qui leur est donné
pour limite dans la transaction de i 5 i 1 ); et le curé de
Vic-le-Comte vint le chercher à ce ruisseau.
L'acte mortuaire dit que le corps fut enlevé au bord
du ruisseau, voisin de ladite maison (Clialus), Limite
desdites deux paroisses.
En 1 7 3 6 , un troupeau de moutons du domaine
Darson, dépendant de Chadieu, fut saisi par des ber
gers de V ic - le - C o m t e ; les régisseurs de Chadieu en
demandèrent la m ain -levée, offrant de prouver que
ces moutons ne pacageaient pas dans les Gachiers ,
mais bien dans ta justice de Chadieu.
En 17 6 5, les bergers de Vic-le-Comte saisirent en
core des moulons appartenant à des propriétaires de
la paroisse d’Autezai (qui comprend Chadieu); ceuxci demandèrent main-levée des moutons pris, disent-ils,
�( )
I4
dans le pacage des Gachier appartenant a ladite ville,
aux offres de les représenter, et de payer les frais de
pâture.
Cependant si les habitans de Vic-le-Comte n’étaient
point inquiétés par le propriétaire de Chadieu, leur
tranquillité était mënacée par une sourde intrigue dont
ils n’ont découvert les traces que cinquante ans après.
L a maison de Tanne possédait Chadieu et Menton.
Sans doute les transactions et arrêts des siècles précédenslui ôtaient tout espoir de succès dans une attaque
directe; mais que iit-on?
M. le le duc de Bouillon avait acquis le comté d’A u
vergne par échange de sa principauté de Sedan.
L e sieur dé
de demander
Comte, et de
ensuite on lui
Tanné proposa aux agens de ce prince
le tirage des communaux de V ic-lese "faire adjuger les Gachiers, lesquels
céderait par arrangement (i).
( i ) C e r e n seign em en t résulte d ’ un rapport lait en 1774, au conseil de B o u illo n ,
dans lequel 011 rend com pte de toutes les préteutioas des seigneurs de C h a d ie u
aux c o m m u n a u x des G a c h i e r s , sur les pièces qui furent sans doute fournies
par la maison de T a n n e .
On y m en tion ne une lettre écrite le 4 octobre 1750 , par le sieur de T a n n e ,
qui disait que M . le d uc de Bouillriiv aurait ce terrain q uan d il v o u d r a it;
que rien 11e lui serait plus facile que d’ obtenir un arrêt du c o n s e il, et que
dès que son A lte sse en aurait la p r o p r i é t é , il s’en acco'mmod#rait et céderait
quatre-vin gt-dix septlers de b lé qui lui étaient dus dans la terre de V i c le-C om te ou de M irefleur. I l ajoutait « il s’en faut des d eu x tiers que le terrain
« dont est question v a ille l’offre que je fais ; mais j’aurai l’ho n n e u r de vous
« dire n a t u r e l l e m e n t , que de v o ir les bestiaux de C6 S ccinciillGS pacager à la
« porte de mon, c h â t e a u , m e d é p l i a i t infinim ent ».
D a n s une lettre du 10 d é c e m b r e s u i v a n t , le sieur de T a n n e d is a it , « c e
« qu’ il y 4 de certain , qu elqu e ch ose jqn’il puisse y a voir , la c o m m u n a u té ne
« saurait refuser le tievs de ces p a cag es, tout S eign eu r étant en droit de prendro
« son tiers des c o m m u n a u x situés dans sa justice».
�f( i5 ')
• Sans doute cette intrigue réussit Vcar le' 29*janvier
-i 7 5 2 ? il fut/obtenu? sous le nom de M. de Bouillon,
nne commission pour assigner les habitans de Vic-leC om té/ à.l’effet de-venir h partage des communaux
:et Gachiers^-pour lui en être délaissé tin tiers à son
choix, -y. '
■: - ■
» • • ‘ *• '
•
' Mais le conseil de Bouillon fut sans doute détrompé,,
et cette demande n’eut pas de suite.
î ; Quand le sieur de Tanne fut bien certain jque M.
de Bouillon ne voulait pas plaider sous sa direction
il se décida à attaquer lui-même les habitans de V icle-Comte.
1
) ,
< .
Son agrèssion à la vérité fut un peii oblique; c’est
au .Seigneur de la Chaux y qu’il s’en prit pour faire ter
miner avec lui le procès de 1641 /resté indécis, entre
e u x , à l’égard des arbres.
> II assigna au parlement, le 14 août'1766, le sieur
Vassadel, Seigneur de la Chaux , .pour voir dire q u e ,
■
faute par lui d’avoir articule plus amplement les faits
contestés-lors de l’arrêt de 1641 , il serait déclaré nonrecevable, et demeurerait déchu de tous droits et coupe
;sur lesdits 'arbres\ ensemble sur ceux qui seraient rem
placés à Tavenir , sans préjudice (et dans celte offre
généreuse et équivoque gissait Tas tu ce de Fin te ni ion),
sans préjudice audit Seigneur de la Chaux et aux habi
tans de la Chaux et Vic-le-Comte de faire pâturer leurs
bestiaux dans les grands et petits Gacliiers, hors le tems
de défense, tant qu’ils seront en vaine pâture, et dans
�•(
)
uii élât non prohibé p a rla Coutume. Par le même
exploit, il assigna les habitons de V ie -le -C o m te en
arrêt commun.
L e sieur Vassadel se laissa condamnér f>ar défaut le
5 mars 1768 ; mais les habitans de ¡Vic-lerCom te ne
furent pas dupes du rôle accessoire et désintéressé, qu’on
voulait leur faire jouer; ils donnèrent une requête le 6
juillet 1768, dans laquelle ils exposèrent qu’ils étaient
seuls et véritables propriétaires du communal dont il
s’agit. Ils conclurent à' ce que le sieur de Tanne fût
déclaré à leur égard non-recevable dans leur demande;
à ce que l'arrêt de 1641 fût exécuté suivant sa forme
et teneur, en conséquence à être gardés et maintenus
dans le droit de propriété et jouissance du grand et
petit Gachiers, et même des arbres y plantés, sans prér
ju d ice (dirent-ils à leur tour), au sieur de Tanne d’y
faire pacager les bestiaux de Chadieu et Chalus hors
Le temÈ de défense, qu il plairait auoc habitans jic c c r
tant que lesdits Gachier seraient en vaine pâture. Enfin
ils conclurent à ce qu’il fût plante des bornes entre
,
lesdits Gachier et les propriétés conliguës du sieur de
Tanne.
Déconcerté par cette résistance, le sieur de Tanne
transigea avec le sieur Vassadel seul, le 22 février 1769.
Ce dernier se désista de sa demande en coupe et retail
des arbres, et néanmoins exigea qu’il fût mentionné
dans l’acte sa réserve expresse de tous les droits des
habitans de Vic-Le-Com le, et du droit de pacage.
Quant à la demande formée contre les habitans, il
y
�( )
*7
y eut arrêt d'appointement en.droit, le 8 mars 1769*
Le procès fat porté, en 1 7 7 1 , an Conseil supérieur,
établi à Clermont.
L e sieur de Tanne crut avoir tout gagné à la réforme
du parlement , et par imitation peut-être de ce qui
s^élait tenté en i 6 6 5 , il ne garda plus de mesures.
> Il voulut ouvrir dans le grand Gachier un fossé;
mais à la première tentative les habitans de Vie le com
blèrent, et restèrent en possession. *
Alors il rendit plainte et articula’des faits de violence
faux et mensongers ; il supposa qu’un attroupement
avait brisé ses fenêtres et avait dévasté ses caves.; ’
Sur la déposition de quelques témoins gagnés^ et de
ses propres domestiques,, il fit décréter des individus de
Vic-le-Comle.
Mais les officiers municipaux de cette ville rendirent
plainte en subornation de témoins. L a vérité fut révé
lée, et le sieur de Tanne fut décrété de prise.de corps
à son tour.
Pendant ce tems-là les habitans de Vic-le-Comte
veillaient à leur propriété , et saisissaient les bestiaux
pris en délit. Les valets de Chadieu, voulant servir la
passion du maître, tirèrent un coup de fusil sur ceux
qui ramenaient les. bestiaux saisis. Un poignet fracassé
donna lieu h une autre information.
Enfin le seigneur de Chadieu sembla convaincu que
les voies de violence ne lui réussiraient pas plus que
C
�C 18 )
celles des procès r et il abandonna totalement ses pour
suites et ses prétentions.
Mais ce ne fat pas sans intriguer encore auprès de
la maison de Bouillon, que cette fois il sollicitait d’in
tervenir au procès relatif aux Gachier, sous prétexte
qu’il devait un cens à cet égard au comté d’Auvergne ,
et qu’il ne devait le payer que s'il parvenait à être pro
priétaire i mais ses tentatives furent encore une fois
rejetées par le conseil de Bouillon (i).
Voilà encore pour les habitans de Vic-le-Comte une
autre période de plus de trente ans de repos.
A u commencement de la révolution, le sieur de
Laroche-Lambert, propriétaire de Chadieu 3 proposa
un accord a la municipalité de Vic-le-Comte.
Loin de prétendre à une propriété dans les Gachier,
il offrit de se désister du pacage auquel il prétendait droit
dans les Gachier par ancienne concession, pourvu qu’on
lui délaissât la portion de la Vergière correspondante
à son jardin de Chadieu jusqu’à la rivière.
L a convention était faite, l’autorisation sollicitée, et
le jour pris pour la plantation des bornes, lorsque Fun
des officiers municipaux de Vie (Denis Dissai) préten
dit que la cession de terrain était beaucoup plus consi
dérable que le pacage abandonné ? et s’opposa à ré
change.
(*)C’est à cette occasion que fut fait le rapport ci-dessus mentionné, en 1774,
tendant à ne pas accéder à la proposiÙQn du sieur de Tanne, relativement à
l ’intervention de M. de Bouillon.
�( i9 )
-Bientôt le sieur de L a roche-Lambert émigra, et il
ne fut plus question de cet arrangement.
_ L a loi du 10 juin 1793 vint permettre aux communes
le partage de leurs com munaux'; et certes si les liabitans de Vie eussent jugé à propos d’exécuter celte loi,
ils. n’auraient pas aujourd’hui autant de chicanes a
combattre.
Mais le voisinage de la rivière empêcha de prendre
ce parti ; rassemblée générale des habitans délibéra
qu’un défrichement exposerait la terre végétale à être
entraînée à la moindre inondation; en conséquence il
fut arrêté que les Gachier ne se partageraient pas.
Les liabitans de Vie n’en ont pas moins continué
de payer seuls l ’impôt foncier des communaux qu’on
leur dispute.
En Tan 4, la terre de Chadieu fut vendue,pour quel
ques assignats consignés à la trésorerie nationale (1).
( ï ) L e sieur V a l l i e r p rem ier ou second acq u éreu r de C h a d i e u , a subrogé la
sieur N a t e y le 7 nivôse an 2, et il lui a laissé à pa y er pour tout ou partie du prix
535,12,5 francs dus à la maison de L a r o c h e - L a m b e r t.
Le
25
fr im aire an 4 , le sieur N a t e y a obtenu ju gem ent qui lui perm et de
consigner
56, 5oo
fr. en mandats représentant les
535j i a 5
fr. d ’a ssign ats, à
l ’ échelle des mandats.
L e 2.8 messidor an 4 , le sieur N a t e y a consigné les
56, 5oo
francs, avec d é-
c'araUon que la som m e était em p ru n tée des deniers du sieur R e b o u l.
L e 7 pluviôse an 6 , le sieur R e b o u l a fait assigner le sieur N a t e y pour lu i
p a y e r ladite s o m m e , c’ est-à-dire
p l o y é e à acheter les
56, 5oo
3 ,186
francs en n u m é r a i r e ,q u ’ il avait e m
francs de mandats.
L e 22 frim aire an i 3 , le sieur N a t e y a fait juger qu’ il ne d evait rien au
sieur l l e b o u l . A in si voilà une équation a lg é b r i q u e , digne de r e m a r q u e ;
S 35 i a 5 :
565oo
: : 3 i ü 6 : 0.
�( 20 )
" Que Chadieu ait été vendu au s.r Sauzai, ou au s.r
V allier, ou au s.r Natey qui ont plaidé long-tems ensem
ble, en consignan! et s’invectivant ,tout cela ne fait rien
à la cause; que le s,r de Balz en ait été le véritable ac
quéreur sous leurs trois noms, cela serait plus indiffé
rent encore s’il n’avait été lui-même l’agent direct et
visible de toutes les tracasseries et insultes dirigées
contre la commune de Vie et le maire qui la repré
sente.
L e sieur Natey se fait un titre aujourd’hui de ce
qui s’est passé jusqu’au procès; et par cette raison les
habitans de Vie sont forcés d’entrer dans quelques
détails.
En l’an 5 , apparut inopinément à la maison com
mune de Vie, un individu prenant le nom de BeLmont,
accompagné des sieurs M a z i n et M al le t, experts.
Ceux-ci exposèrent le prétexte de leur venue, par
lèrent de\Chadieu ; et quand le sieur Belmont eut longtems écouté la conversation sans y prendre part, il se
dit fondé des pouvoirs du propriétaire de Chadieu, et
marqua un grand désir de vivre en bonne intelligence
avec la commune; en cette qualité, la commune l’ac
cueillit avec intérêt. Bientôt le sieur Beünont fut ar
rêté à Riom, conduit à L yon, et p a r v in t à s’échapper
sur la route; le 18 brumaire lui re n d it la liberté.
llreparul ¿Chadieu et à Vie sous le nom du s.r Jea n ;
on accueillit encore le sieur Jean, car le nom du por
teur dune procuration importait peu; il proposa de
�( 21 )
reprendre les bases de l’arrangement commencé avec
le sieur de Laroche-Lambert.
11 fut convenu que de part et d’autre on se don
nerait communication de ses titres; la municipalité de
Vie y satisfit avec franchise, et le sieur Perrin, géo
mètre à Cornon, fut nommé expert commun ; alors
le sieur de Batz s'était fait connaître sous son nom ,
et la municipalité de Vie avoue qu’elle eut confiance
dans ses paroles.
Elle le prouva en demandant au Préfet une auto
risation pour traiter avec lui ; elle le prouva encore
plus en chargeant le sieur de Batz lui-même de cher
cher les papiers de la commune chez les procureurs
de Pa ris , qui avaient occupé pour elle au parlement
de Paris} ou au conseil supérieur. Le sieur Perrin
vint sur les lieux : pour abréger, le sieur de Batz lui
donna un plan des lieux , qu’il venait de faire lever ,
mais le sieur Perrin dit qu'il voulait en lever un .luimême.
Ce premier point sembla mettre quelque froideur
dans la négociation, et le sieur de Batz bientôt éleva
des difficultés sur ses propres offres ; le sol de la V ergière, dit-il, était dégradé par l’inondation de 1790,
qui avait enlevé la terre végétale; mais sur-le-champ
on fouilla, et il s’en trouva à une grande profondeur.
Cependant le sieur de Batz répandait que des con
sultations lui donnaient droit à la propriété de tous les
communaux ; il communiqua la consultation, deux ar
rêts et l’acte de 1627, mais n’en attesta pas moins per
sister dans les projets ouverts de conciliation.
�( 22 )
A u mois de germinal an 9 , le sieur de Bai2 fit ar
racher de son jardin cinq ou six peupliers bordant une
pièce d’eau, et les fit transplanler dans la parlie de la
Vergière qui devait lui être assignée.
L e maire de Vie ne fut que long-tems après informé
de cette plantation : il marqua son étonnement • mais le
sieur de Batz le rassura en disant que^c’était un essai
pour savoir s’il y avait de la terre végélale dans le
terrain qui lui était promis. Il laissa entrevoir aussi
qu’ayant droit de remplacer les arbres morts, il.avait
cru pouvoir user de son droit sans avertissement (1).
Enfin le maire de Vie voulant terminer, manda le sieur
Perrin ; mais celui-ci répondit que déjà le sieur de Batz
l’avait payé, avec invitation à cesser ses opérations.
Forcé alors d’expliquer sa conduite, le sieur de Batz
déclara que les mêmes bases d’arrangement ne pou
vaient plus avoir lieu , parce qu’il espérait faire changer
les choses de face, au moyen d’une transaction de x 5 3 i,
qu'il avait donnée à expédier au sieur Bonjour, notaire.
L e 6 frimaire an 10, toutes les négociations furent
rompues par la notification d’une transaction, dont
voici le précis :
Jacques Beau fort de Canillac, Seigneur du Pont-du-Château ,
de Monton , des Martres, de Clialus-les-Bussières, du canton
( l ) H paraît aujourd’ hui que cette plantation était une perfidie. Q u o iq u ’ on
fut en négociation ouverte et a v o u é e , le sieur N a t e j' avait planté fu r tiv e
m ent. L e jour choisi pour n’être pas vu , la hauteur des a rb re s, tout prou ve
qu il m éditait une hostilité ; mais à cause de la négociation , i l n ’y avait jjas
lieu de s’ en plaindre.
�. ( 23 )
de Chadieu et antres, traite avec les habitans de V i e , c’est à
savoir les soussignés en leur nom et pure procure, baillée en
bonne et due iorme(inais sans qu’on dise par q u i) , et après
un préambule qui énonce que, comme Seigneur de M onton ,
dont la ju stice s’étendait sur Chadieu , duquel dépendaient une
vergière, pré et pâturai , ledit sieur Beauiort disait avoir la pro
priété desdits fonds. A quoi les individus de Y i c se contentaient
d’opposer qu’ils avaient la possession de faire pâturer leur bétail;
on transige sur ce soi-disant procès ainsi qu il suit :
« Il est reconnu par ces soussignés que les antécesseurs dudit
« Seigneur avaient concédé, en 1425, auxdits habitans de faire
« pâturer leur bétail à la vergière, pré ou pâturai appelés les
t Gachiers , tant audit canton de Chadieu qu’au terroir de
« Chalus ; réservé audit Seigneur les arbres, fruits et bétail : à
« lui réservé aussi de clorre tout ou partie, pour planter des
« arbres ou ensemencer une moitié à la fois. Et si les habitans
« iont les clôtures , ils pourront y pâturer après la livrée des
« récoltes; demeurant lesdits habitans gardiens en défenses ».
Ensuite ces soussignés promettent audit nom de tenir à tou
jours ledit appointement ; à raison de quoi leur baille cette
présente ratification , sous condition que lesdits habitans ne re
tourneront plus à contester le droit dudit Seigneur.
F a it en présence des soussignés, en la salle basse du château
de Chalus , le 16 novembre i 53 i. Puis ont signé , e st-il dit ,
après ledit Seigneur, quatre individus de Y i c , fa isa n t pour
lesdits habitans, et trois témoins de Monton et des Martres ,
puis C. Regny, lieutenant de Mont-Ferrand , et Jussat, notaire.
Ensuite il est dit : « E xp éd ié h. Manlhot, fondé de pouvoir de
« Natey , par Manlhot et B o n jo u r , notaires, qui attestent la
« signature du notaire J u s s a t, comme expédition originale,
« représentée par M an lhot, et par lui retirée».
Cet acle qui dut * s’il exista, exciter le mépris des
contemporains , et dont il ne subsiste aucune trace
�( 24 )
d’exécutionr, ne méritait pas davantage d’inquiéter
les habitans de Vie-le-Cornte. Le Maire fut autorisé
à repousser cette hostilité, et il signifia au sieur Natey,
le 29 nivôse an xo, i.° les clauses de la vente de 1627,
qui donnait un démenti à la prétendue transaction.
2.0 L ’arrêt de 1641 , qui, sur le vu de tous les moyens
et titres du Seigneur de Chadieu, réglait les droits res
pectifs. Il protesta contre toute voie de fait.
Alors le sieur Natey imagina d’assigner le maire de
Vie en ki Cour d’appel, par exploit du 21 ventôse an 10
( et ceci est remarquable ) , en reprise du procès de
16 4 1, qu’il prétendit non jugé.
Bon ou mauvais, cet exploit annonçait du moins un
recours aux voies judiciaires; mais bientôt le S.r Natey
préféra les voies de fait.
¡En germinal an 1 0 , 4 27 arbres furent plantés à la
haie à la vergière, qui fut entourée de fossés. Des
procès-verbaux en furent dressés par les gardes-champêtres de Vie, le 26.
L e 26, le maire de Vie rendit plainte au directeur
du jury, contre les nommés Lelong et Tournemire qui
avaient dirigé ces travaux. Le 27 la plainte fut réglée
en simple police, 011 civilisée.
Le 3 iloréal, le maire de Vie assigna devant le juge
de paix lesdits Lelong et T o u r n e m i r e , en complainte
possessoire, avec défenses d’y faire des planta]ions à
1 avenir, et pour être condamnés à rétablir les lieux.
Au
�( 25 )
A u lieu de répondre à justice, les assignés allèrent,
le i o floréal, entourer le grand,Gacliier de fossés.
L e 11 floréal ils vinrent à l’audience , dire qu’ils
avaient agi comme autorisés par le sieur Natey. L 'au
dience fut remise au 2 3.
Ce qui se passa ensuite exige encore des détails que
la responsabilité du maire de Vie ne permet pas d ’o
mettre, parce que la version intéressée du sieur Natey
les dénature.
A l’audience du 2 3 , le sieur Bonjour, paraissant
pour le sieur N atey, opposa que depuis quatre siècles,
des procès existaient: qu’à la vérité il y avait eu dans
cet intervalle plusieurs jugemens; mais qu’ils n ’avaient
rien prononcé définitivement. Il produisit sa transaction
de i 5 3 i , et dit que l ’arrêt de 1641 ne pouvait lui être
opposé, parce que le procès avait été repris en la Cour
d’appel......... Il prétendit que les liabitans de Vie n’a
vaient pas pu citer au possessoire, parce qu’ils n’avaient
m la propriété ni la possession, ayant eu chaque année'
procès ou litige.
A cela les liabitans de Vie répondirent que la transac
tion Natey était une pièce controuvée, dont on n’aurait
pas manqué de faire usage en 1641. . . . Qug l'arrêt
avait réglé tous les droits des parties, et que, si le sieur
Natey avait établi la litispendance par une reprise, c'é1ail une raison de plus pour qu’il s’abstint de toute
innovation jusqu’à un jugement définitif.
Après quoi le juge de paix demanda au maire de
D
�( ¿ 6 .)
V ie, s’il était en é tat’de prouver que de tout tems^et
notamment depuis an et jour les liabitans de Vie avaient
joui du droit de pacage paisiblement et sans opposi
tion . sans interruption d’arbres et clôture pour fossé.
( Nota , pas un mot de possession exclusive).
L e maire de Vie offrit cette preuve: elle fut ordon
née avant de se retirer. L e 5 prairial fut indiqué pour
l ’enquêle, et le maire prit sur le bureau du juge de
paix une copie du dispositif.
Mais le fondé de pouvoir du s.r Natey eut des affaires
pour ce jour-là , et le juge de paix m a n d a te i . er prai
rial , au maire de Vie, qu’il n’y aurait pas d’enquête le 5 .
En réponse, le maire de Vie demanda l'expédition
du jugement et une cédule.
L e juge de paix lui marqua que ces jugemens nés©1
signifiaient pas, et qu'il porterait l ’expédition avec lui
le jour de son transport.
- Cependant il fallait assigner des témoins. On indiqua
le 7 messidor, et le greffier envoya an maire de Vie une
copie du jugement, dans laquelle il fut étonné de lire
qu'il était chargé de prouver avoir joui exclusivement
du pacage; ce qui n’était pas même énoncé dans sa
demande, ni dans les dires ci-dessus rappelés.
L e 1 6 prairial le maire de Vie écrivit au juge de paix,
pour se plaindre de cette addition , faite sans doute par
ni ¿garde après le prononcé de l’audience.
Le même jour le juge de paix lui répondit que ce
mot était une inattention, et qu’il en serait f a i t justice.
(Ces lettres sont enregistrées).
�(
)
4 messidor, le maire dé Vie
2 '7
. Les 2 et
assigna ses
témoins pour le 7. L e 7 , le juge de paix lés entendit:
le mot exclusivement fut raturé sur l’expédition, que
le juge de paix se fit remettre pour les entendre.
Les vingt-trois premiers témoins déposèrent avoir _
vu pacager les bestiaux de V ie, et n’avoir remarqué
ni arbres ni fossés. Les quatre suivans disent de même,
et parlent d’arbres qui furent plantés il y a dix ans,
mais enlevés dans la quinzaine de leur plantation.
Un autre ajoute que les trois peupliers qui font partie
de la plantation actuelle, sont âgés de deux ans, mais
qu’il ignore quand ils furent plantés.
Après ces témoins, viennent les sieurs Fayon et Bon
jour , dont les dires , beaucoup plus détaillés, remontent
à plus de vingt ans, et se réduisent h dire que les Sei
gneurs de Cliadieu et Clialus plantaient des arbres et;
saussaie près de chez eux; mais que s’ils empiétaient:
le moins du monde sur les Gacliiers, les habitans de
Vie usaient de leur droit ; que même ils allaient paca
ger jusques dans ces saussaies , et qu'il y avait des
saisies de bestiaux et des contestations. Us rappellent le
fossé fait par le sieur de Tanne, mais comblé le même
jour, et le procès criminel qui en fut la suite. Ils parlent
de deux noyers arrachés jadis par le propriétaire de
Chadieu, et d’un troisième déraciné par l'inondation,
de 1790. Enfin quant au fait positif de la complainte,
ils répètent le langage des autres témoins; sauf que
l’un d’eux, le sieur Bonjour croit que les trois peupliers
ci-dessus sont plantés depuis deux ans ? ce qu’il a jugé
sans doute à leur âge.
X) 2
�Cependant le juge de paix, par son jugement', daté
du
messidor an 10, pensa que la preuve n'était pas
suffisante, et rendit le jugement qui suit:
« Attendu qu’il résulte de l ’enquête que dans le ténement de
«
«
«
«
,«
et
la vergière il existait trois noyers, dont les fruits étaient
cueillis par les anciens propriétaires de Chadieu; que-deux de
ces noyers ont été a r r a c h é s et exploités pour leur compte , et
que le troisième, ayant été déraciné par un débordement de
la rivière, a été pris par les propriétaires de C hadieu, et ém
ployé à faire la clôture d’un héritage à eux appartenant ;
« Attendu qu’il résulte également de ladite enquête que les
« arbres pibles et peupliers d’Italie, qui existent actuellement
« dans ledit terrein, ont été plantés depuis deux ans , et par
« conséquent plus d’an et jour avant la demande;
« Attendu que les parties sont en contestation pour raison de
« la propriété des terreins contentieux, et que le droit de pacage
a n’est pas contesté aux habitans de V ie ;
« N o u s , ayant aucunement égard à ce qui résulte de l’ena quête faite par le maire de Vic-sur-Allier, d’avoir fait la preuve
« ordonnée par notre jugement interlocutoire du vingt-trois
« floréal dernier, l’avons débouté de sa demande, et le condam« nons aux dépens , même à ceux réservés par ledit ju g e m en t,
« sauf à lui à se pourvoir au pétitoire, ainsi qu’il avisera, etc.»
Les 7 et i i thermidor an 10 , appel par le maire
de V ie, desdils jugemens interlocutoire et définitif.
L e i 5 prairial an 1 1 , le tribunal civil deClerm ont,
sans vouloir statuer sur ledit appel* le déchira non receVüble , par deux motifs:
1-° En ce que l’appel du jugement interlocutoire n'a
vait pas été interjeté dans les trois mois de sa date.
�( 29 )
2.° En ce que l’autorisation donnée ait maire, n’avait
suffi que pour plaider en première instance (i).
Pendant ce premier procès, des arbres furent coupés
en délit , le i5 prairial an 10, et le sieur Natey en
rendit plainte contre trois cultivateurs du village de
Lachaux, commune de Vie.
L e 1 8 thermidor an i o, il fut débouté de sa demande,
et interjeta appel au tribunal criminel, où le maire de
Vie crut devoir intervenir par un appel incident, pour
veiller aux conclusions que prendrait le sieur Nate}'.'
Par jugement du 3 brumaire an n , le tribunal cri
minel, infirmant le jugement correctionnel, fit défenses
aux délinquans de récidiver, avec amende. Quant à
Tappel du m aire, il fut déclaré non recevable comme
non émis dans le délai (quoiqu’il n ’y eût pas de signi
fication ).
.
Nous avons dit que le 21 ventôse an 10 ; le sieur
Natey avait conclu à la reprise du procès de 1641.
L e 5 brumaire an 1 1 , il conclut aussi à la reprise du
procès de 1768; mais les liabitans objectèrent que ce
(1) L e m a ire de V i e a été autorisé plusieurs fois par ses c om m ettan s et
par M . le P réfet ; il l’a été de nouveau le 20 f é v rie r 1G06. L e s m e n a c e s et
les d em i-m ots d i r s i e u r N a t e y , dans son m é m o i r e , ex p ireron t d e v a n t les
motifs de l’arrêt de c a ss a tio n , c i - a p r è s
én on cé . Si l’autorisation de 1806
était in su flisan te, le m aire de V i e en obtiendra une
elle suffira.
autre,
s’il le f a u t , et
�( 3o )dernier procès, porte de piano au parlement, devait
subir les deux degrés de jurisdiction.
Alors le sieur Natey conclut à ce q u e , dans le cas
où les parties seraient renvoyées en première instance,
la possession provisoire lui fût accordée, sauf aux liabi1ans leur droit de pacage dans les parties iion ense
mencées.
Par arrêt du 18 thermidor an n , la Cour d’appel
renvo}:a les parties à se pourvoir en première instance,
pour faire statuer sur le droit de propriété; et néan
moins la possession tenante en faveur du sieur N a t e y ,
ainsi qu elle lui avait été attribuée par le jugement cri
minel, du 3 brumaire, et parle jugement de la justice
de p a ix , du 1 5 prairial an n .
'
I.e sieur Natey ayant ainsi obtenu en trois Tribu
naux tout ce qu’il demandait, ne fut plus empressé de
poursuivre le fond de ses demandes.
Sachant que le maire de Vie s’était pourvu en cas
sation, il se hâla d’agir dans les Gachiers comme en un
pays de conquête; il défricha, sema, et afferma même
à des étrangers le pacage de ce qu’il laissait en friche.
Pour s’opposer à cette usurpation , en exécutant
d’ailleurs des jugemens en dernier ressort , le maire
de Vie reprit, le 12 brumaire an 12, au tribunal de
Clermonl, la demande du 5 brumaire , et assigna le
sieur Natey pour voir mainlenir les babil ans de Vie
en la propriété des communaux Gachier et la Vergière,
et cependant par provision voir faire défenses de chai>
�, ( 3i y _
ger l’état des lieux ; ayec autorisation à jouir comme
par le passé.
. L e 9 nivôsë an 12 ; le Tribunal de Clermont statua
si?r ler provisoire : fetjparle ’motif principal qu’en plai
dant au possessôirei^ le s/ Naleÿ n’aîvait pas contesté le
droit de pacage aux habilans de,Vie, tandis.que ce droit
deviendrait illusoire par des défrichemens, le Tribunal
lit défenses provisôires au sieur Natey de ‘ défricher
jusgu]au jugemctU 'd é fin itif > dépens réservés,
r II interjeta appef de-ce ju gem en t, jqui fut infirme
en la Cour d'appel de.iU om , par arrêt du 1 3 . prairial
an i 2 ? toujours sur le motif du jugement de la jus
tice rde paix, et même du jugement criminel., sur le
m otif encore que tout .étaiit réparable eh définitif, parce*
que les jouissances des terrains litigieux seraient ’adju
gées à qui de droit, lorsqu’il serait,statué sur la questipn ¡de .propriété, ih
1 s. _.?«■
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L a 1 Cour de cassation*. par sescarrets du 28 brumaire
!1 f- '
I
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an' 14^'a cassé loùles'cës décisions, c’est-a-dire . i.° le
jugement du tribunal de Clermont, du 1 5 prairial an 1 1,
sur appel de la justice depaix 5 2.0Tc\rrêt du 18 thermi
dor an 11 ; 3 .° l’arrêt du i 3 prairiaT an 12 (1).
T e l est le derniôr état âès contestations.
(1)
‘
D e v a n t la C o u r de cassation le sieur N a t e y avai t cru se débarrasser de
la c o m m u n e de V i e , en ne pl ai dant que contre le mai r e. Il d onna un pou
v o i r pour s’ inscrire en f aux cqntre, r a u l p r j s a t i o n q y i lui. était d o n n é e de
,}i
c
pl ai der et publia par-tout q ue ce ma i r e 1né méri tait ainsi m' -conf i ance ni con
sidération.
, '
-,
' ‘
7
]
ti.
r’
Cett e c al omn i eus e intrigue n’ a laissé au .sieur N i l t e y . q u e la li onl e de s
,
c o n c ep t i o n ; et la C o u r s u p r e me n’en a été q u e plus emp r e s s é e à rendr
justice
q ua n d el l e a connu le pi ège
3 et
d éc ou v er t la vérité.
�( 32 )
MOYENS.
La première difficulté à faire décider doit être rap
pel du possessoire. Quand il sera jugé , les ha bilans de
Vie poursuivront les demandes pétiloires qu’il a plu
au sieur Natey d’introduire, sous prétexte qu’il n’y a
rien encore de jugé, depuis le procès de 1641 , sur
la propriété des communaux qu’il réclame.
L e but actuel de ce mémoire ne devrait être que la
discussion de l’action possessoire : mais les liabilans de
Vie l’ont déjà dit ; fatigués de procès, ils ne calculent
pas quel plus grand avantage ils pourraient avoir de
diviser leur défense. Tout dire et tout finir est pour
eux le cri de la lassitude et la volonté du décourage
ment; ainsi plus de formes , plus d’ordre de moyens >
tout sera sacrifié à l’impatience d’une décision. Les.
liabilans de Vie commenceront même par la partie la
plus éloignée de leur procès , c’esl-à dire par l ’ex am e n
de la question de proprié lé, C'est d'ailleurs l'ordre ,
sinon le plus régulier, au moins le plus nalurel, et celui
que le sie#ur N aley a suivi lui-même. Quand ils auront
prouvé leur propriété, il n ’en résultera qu'une plus
grande preuve d'injustice de ce qu’ils sont privés de la
possession.
Q u e s t i o n
t é t i t o i r e
.
On connaissait avant la révolu lion un principe de
droit, toujours invoqué avec succès dans les applica
tions de titres; c’est que le plus ancien doit être pré
féré :
�( 33 )
féré : ad prim ordium'tituli posterior refertur éventas.
C ’est parce qu’on présumait avec raison que le secondtilre n’aurait pas eu lieu., si le premier n’avait été
dissimulé ou inconnu.
Les lois nouvelles; ont enseigné un autre principe:
c’est que s’il y a concours de plusieurs titres , le plus
favorable aux communes doit être préféré, sans avoir
égard à l’ancienneté.
: Les habitans de Vie peuvent se passer de'cet! e induldulgence de la loi; car quand la transaction de i 5 3 i ne.
serait pas un acte apocryphe', et étranger au s.r N a te y ,
elle est postérieure à celle de i 5 i i qui a au moins
l.avaniage d’être mentionnée dans les actes postérieurs.
En i 5 i i , on plaidait pour la propriété des Gaehiers.
!Le seigneur de Chadieu avait déjà perdu son procès
en deux tribunaux, lorsqu’on transigea.
■ On convient, par cet acte, de jouir des Gaehiers en
pâturage commun, comme on a accoutumé; mais l ’ex
plication de cet usage arrive à l’instant.
• '
C ’est aux habitans de Vie qu’il est leu et permis de
tenir en défense lesdits communaux, du 2 5 mars au i5
m a i, ou autre tems plus ou moins long q u il sera avisé
par eu x. - .• '
r t.
Les beslianx de Chadieu ne peuvent s’y ’introduire,r
après le tems défe.nsable, qu’en telle qualité que Lesdits
habitans estimeront.
Il est défendu a u x seigneurs de Chadieu d;y intro
duire d’autres bestiaux que les leurs, ou ceux de leurs
métayers.
- ,
' '
E
�• A
quelles
( 34 )
enseignes peut-on mieux reconnaître quel
est le propriétaire parmi deux possesseurs?
L ’un d’eux a, par-dessus sa jouissance, le droit de
dire : j ’ordonne ou je défends.
L ’autre peut jouir; mais il obéit.
N ’est-il pas évident que le premier est le maître ou
le propriétaire , et que le second n’est qu’ un simple
possesseur.
« De droit com m un, a dit M. Merlin, la donation
«' du droit de jouir d'un bien emporte la propriété
même, toutes les fois qu’au droit de jouir est ajoutéy« soit une faculté qui ne peut être exercée , soit une
«. charge qui ne peut être remplie que par le propriétaire ».
« La loi Proculus u ff. de usufr; en fournit la preuve
« et l’exemple. Un testateur lègue l’usufruit d’une mai« son*; à la charge qu’il la grèvera de la servitude, altiùs
« non tollendi ».
te La loi décide que par là le testateur-est censé avoir
« légué la maison, q u ia , dit Godefroi, qualitas et
« facilitas frucluario hic conceditur quæ proprietariis
« sotis competit.
D e là venons de suite à l’acte de 16 2 7, et à l’arrêt
de 1641 ; ils ne sont plus que des ratifications de la
transaction claire et précise de
i
5ii.
Cest à ce faisceau' de titres qu'on ose opposer un
acte suspect et astucieux de x 5 3 i , honoré du nom de
transaction. D ’après la signilication qui en a été faite,
�( 3S )
son moindre défaut est dé n’être que; là copie d’une
expédition ; dès-lors elle ne mérite aucune foi d’après
l ’article i 335 du Gode civil.
Existait-elle vraiment 3 en ï 53 i,, cette transaction?
Mais comment se fait-il donc que la maison d e rCanillac,
la maison de Tanne aient été aveuglées au point de
ne pas en faire usage, pendant deux longs procès? Com
ment'un acquéreur tient-il de ses vendeurs june expé
dition originale q u e 'c e u x - c i ne connaissaient pias ?,
Est-ce'donc à Herculanum qû’il a découvert un vieux
titre , qui n’était pas dans le chartrier de ses prédé
cesseurs ?
;
.
'
, Admettons que.la copie'de cet acte soit authenti
que, tout prouve qu’il n’eut aucune exécution, et le
motif s’en-conçoit aisément; Des personnes sans carac
tère et trompées ne pouvaient pas obliger le corps
commun de V ie, par leur stipulation, quatre liabitans
de V ie, menés dans une salle basse du cliâtëau de Ghalus, où ils s’entendaient opposer des titres, sans opposer
eux-mêmes l’acte récent de i 5 i i , avouant que les Gacliierssont de Chadieu et deChalus, së réduisante un
droit précaire et de sujétion, tandis qùe vingt ans au
paravant leur commune parlait en maître ; certes ces
quatre liabitans n’étaient que des mannequins qu'on
avait appelés pour les surprendre; car jamais habitant
n’aurait plus niai servi son pays , et plus mal-adroitement soutenu ses intérêts.
On dit qu’ ils avaient une procuration* mais où este lle ? quelle en est l ’étendue? comment savoir si le
£ 2
�( 36 )
mandataire s’est renfermé dans les bornes de son man
dat, si custodkt fin es mandate dUigenter \ car ce n'est
pas dans la volonté du mandataire que git la conven
tion , mais bien dans celle du mandant.
Enfin, qu’e s t - c e qu'un acte suivi de deux cent
soixante-dix ans d’oubli, et d’oubli le plus profond?
Rien ; car une convention n'est quelque chose dans
la société que par Inexécution qu’elle a eue, si elle est
ancienne, ou bien par le droit qu’elle donne de se pro
curer celte exéculion, si elle est récente. O r, la nonexécution se prouve déjà par la transaction de 1642,
qui dément les prétentions supposées du s.r de Canillac^
et ne mentionne pas même la prétendue transaction
de
i
53i.
*
D ’autres démentis résultent encore de l’acte de 1627,
et de l’arrêt de 1641.
A quel titre encore le sieur Natey fait-il valoir à
son profit cette transaction de i 5 3 i ?
Est - il le Seigneur de Monlon ou de Chalus-les-^
Bussière?^car c’est en cette qualité seule que traitait
le sieur de Canillac.
■ Il ne pouvait pas traiter comme propriétaire et Sei
gneur de Chadieu, en i 53 i , car il n’acquit Chadieu
qu'en 1627.
S’il a réclamé un droit sur les Gachiers, comme les
disant de Chadieu, c’est qu'il disait avoir la haute et
^moyenne justice sur Chadieu y à cause de son mande
ment de Monton.
�( 37 )
Son moyen était une conséquence de cette maxime
féodale : Jurldlcus, ratio ne Imperll, vlndlcat prœdia ad
pecorum pastum commoda , Iri jurlsdlctlonls fin it us
septa.
Ainsi en donnant à la transaction de i 5 3 i , toute la
valeur d’un acte sincère et en v ig u eu r, les Gachiers
ont été réclamés pour Monton. Quand M. de Canillac,
après avoir acheté Cliadieu , l’a revendu, il n’a rien
démembré du tief dominant, et n’a vendu aucun des
droits de la haute justice.
L e sieur Natey, en voulant se prévaloir de l’acte de
i 5 3 i , excipe donc du droit d’autrui.
Car, propriétaire de Chadieu, il ne peut faire valoir
d’autres actes que ceux du fait des précédens proprié
taires de Chadieu, c’est-à-dire d’actes passés pendant
qu’ils en étaient propriétaires.
- Quand même le sieur de Canillac aurait été proprié
taire de Chadieu en 1 53 1 , le titre d’acquisition de 1627,
stipulé par lui-même, efface tout ce que des actes an
térieurs auraient pu dire. Tout Chadieu est confiné par
les Gachiers de Vic-le-Comte.
Or ce titre de 1627 se communique de plein droit
au sieur Natey.
Celui qui achète un fonds confiné par le pacage d’un
voisin est sans contredit exclu de ce pacage; car le confin ne peut jamais faire partie de la chose confinée.
Souvenons-nous de l’embarras que donnèrent ces
clauses iila dame de Canillac en 1641 ; elle essaya de
�[ 38 )
prendre des lettres de rescision, mais le parlement ne
les adopta pas.
L a dame de Canillac, en demandant des lettres,
pouvait dire que, si Chadieu avait été vendu avec excep-»
lion formelle des Gachiers, au moins ils lui apparte
naient à un autre titre, c’est-à-dire à cause de la haule
justice qu’elle avait avant 1627.
Mais ce moyen de la dame de Canillac, le sieur
Natey ne Ta pas même; car il n’a pour lui qu’une trans
mission de l’acte de 1627, sans lettres de rescision.
Par quel prestige inouï a-t-il donc pu persuader un
seul instant qu’il avait des droits de propriété , même
apparens, sur des pâturages formellement exceptés de
sa venle.
L ’arrêt de 1641 n’est d'après cela/m algré son im
portance, qu’un mo37en surabondant pour les liabilans
de Viole-Com te ; et cependant cet arrêt seul leur suf
firai 1 9 car il a jugé les procès actuels.
Il les juge d’abord, en refusant d’entériner les lettres
de rescision de la dame de Canillac ; car c ’est avoir
décidé ipso fa c to 3 et par une conséquence forcée, que
lé propriétaire de Chadieu était borné par les Gachiers
apparlenans aux liabilans de V ic-le-Com te, suivant
l’acle de 1627.
Il a jugé -encore qye le propriétaire de Chadieu n’a,
dans ces Gachiers, que le droil de pacage qui lui a été
Vendu par le même acte de 1627.
L e parlement Ta tellement jugé ainsi} qu’il ajoute
�( % , >
comme complément que les habitans pourront tenir
en défenses ledit Gachier depuis le 2 5 mars jusqu’au 2 5
m ai, ou autre tems plus au moins, et il réduit la dame
de Canillac à y envoyer pâturer ses bestiaux et ceux de
ses métayers, sans fraude.
N ’y a-t-il pas là encore la distinction visible du pro
priétaire et du possesseur ?
Ne sont-ce pas les propres expressions de la transac
tion de 1 5 1 1 , que le parlement adopte et confirme ?
Cependant le sieur Natey n ’a pas craint d’objecter,
i.° que cet arrêt de 1641 ne jugeait rien; il a même
assigné en reprise de ce procès qu’il dit encore indécis.
Evidemment il n*a pas voulu lire ; car l’arrêt n'or
donne un plus ample contesté que sur Le surplus de
Cintervention du sieur Larochebriant, concernant la
coupe et retail des arbres.
L e procès est tellement fini pour les habitans de Viele-C o m te , que la dame'de Canillac est condamnée aux
dépens de la cause principale envers eux. Les dépens
d’appel sont compensés, et il n5y a de réserve que la
moitié des dépens d'intei’vention.
i
2.0
Le sieur Natey objecte encore qriel’arrêt de 1641
ne prononce pas le mol de propriété.
Mais l’équi valent ne suffisait-’il pas dans un tems où
cette propriété était subordonnée au triage que le Sei
gneur du lieu pouvait s’arroger.
Ces précautions féodale?, qui motivèrent les expressions
�( 4° )
de l’aefe de i 5 i i , dirigèrent aussi l'arrêt de 16 41, qui
voulait s’y conformer; mais il a été prouvé plus haut 3
que la propriété résultait de ses expressions mêmes.
3 .° Le sieur Natey objecte aussi que l’arrêt de 1768
juge tout le procès , et réduit les habitans de Vie au
simple pacage des Gacliiers, tant qu’ils seront en vaine
pâture seulement.
’Rien n’est plus aisé que de faire dire ce qu’on veut
dans un arrêt rendu en l'absence de la partie intéressée.
Cet arrêt * on le répète , est pour les habitans de Vie
res inter aUos acta, l’arrêt du 8 mars 1769 éteint le
précédent à leur égard. Ainsi les habitans de Vie n’ont
pas même besoin de former tierce opposition à celui
de 1768.
Enfin que disputons-nous aujourd'hui? Ldem corpus,
eadem causa petendi, eadem conditio personarum.
Donc il y a force de chose jugée, c'est-à-dire le plus
invincible des moyens.
Ainsi la plus ancienne des transaclions,le propre titre
du sieur N atey, et un arrêt souverain , concourent à
prouver que les habitans de Vic-le-Comte sont pro
priétaires des communaux en litige, et que le sieur
Natey n’y a qu’un simple droit de pacage, subordonné
aux arrêtés de la mairie de Vie pour les tems de pro
hibition.
Quand
�(
)
Quand ces litres n'existeraient pas, la loi du 10 juin*
1793 donnerait aux «habitons de Vie la propriété des
communaux qu’ils réclament,'en prouvant seulement
par la transaction de 1642^ e t autres actes, qu’ils sont
situés dans la justice ou paroisse de Vie , et sans être
astreints à établir aucun titre de propriété qui leur fût
personnel.
« Tous les biens communaux en général, connus
sous le nom de terres vaines et vagues, gartes, gar« riquès , laudes,.'pacages, palis-, etc. sont et appau« tiennent ; de leur nature, aux liabitans des communes’
« dans le territoire desquels ils sont situés (section 4,
« article .2) ». 0
‘
A l’égard ides arbres, le sieur Natey ne les aurait
que par la transaction de i 5 i i ‘5 alors ils furent délais
sés au propriétaire de Chadieu, comme seigneur ; et en
effet c’était encore une prétention féodale.
Mais la loi du 28 'août 1792, art. 12, porte: «-Tous
« les arbres actuellement existans sur les places, marais
« et autres biens dont les communautés ont, ou recou« vreront la propriété> sont censés leur appartenir,
« sans préjudice des droits que les particuliers non Sei« gneurs peuvent avoir acquis par titre ou possession »,
*i
'
!'
Q u e s t i o n
p o s s e s s o i r e
,
Pour prouver que l’arrêt de 1641 n’adjugeait pas la
propriété aux habitans de V ie, le sieur Natey dit que
c^jt arrêt ne leur a donné qu’une possession de pacage
F
�t 4* )
dans; les G'achiers, comme situés dans la commune de
Vie. Quand cela serait, et en;adoptant même qu’il ne
résultât de cet,arrêt aucune propriété, cette possession,
et saisine attribuée aux.habùans de Vie , avec droit de
tenir en défenses, n’en serait que plus sacrée, si, comme
le prétend le sieur N a te y, le procès n’était pas fini j
car c'est un principe de jurisprudence et de raison,
que les parties doivent demeurer pendant toute la durée
du procès au même état qu’elles sont en commençant,
et qu’il n’y :a lie.u. à innovation qu’avec l’autorisation
du juge saisi. •
.
Admettons la fiction du sieur Natey que l’arrêt de
1641 n'accorde que provisoirement ', cette possession et
saisine, n’est-ce pas désobéir à la-justice que d’y porter
obstacle, sur-tout par voie de fait?
Il faut encore remarquer que le sieur Natey a fait
planter les communaux de 427 arbres j et les à entou
rés de fossés pour priver les habitans du pacage, après
qu’il les a assignés lui-même le 28 ventôse an 10, pour
reprendre le procès de 1 6 4 1 } prétendu indécis, et se
Voir faire défenses de pacager.
Il avouait donc avoir besoin et obtenir ces défenses
des tribunaux, et cependant il se rendait justice luimême.
Quand il n’y aurait que cette circonstance, elle mo
tive seule une demande eh complainte et sans qu’il fût
besoin d’interlocutoire. Car c'est un préjugé irréfléchi
que d’astreindre à prouver par des témoins ce qui est
prouvé par titres, et n’est pas même contesté.
�( 4 3 ')
- Jamais le sieur Natey n’a contesté àux liabilans de
Vie d’avoir joui un an, et même un siècle du droit de
pacage; ail contraire il les a assignés en reprise et au
pélitoire avant de leur disputer la possession.
« La complainte, dit M. Pigeau, est fondée sur le
« principe que tout possesseur étant présumé proprié* taire, jusqu’à la preuve du contraire, on ne doit pas
« lui enlever sa possession ja s q u à ce que la justice La,
ce Lui ait ôtée) qnë d’ailleurs on ne doit pas se faire « justice à soi-même, mais la réclamer» (tome 2yp. 8 ).
Quel besoin y avait-il donc d’interlocutoire pour véri
fier une possession reconnue par l’exercice de l’action
pélitoire? Et comment encore plus a-t-il pu résulter de
cet interlocutoire que les habitans de Vie n’eussent pas
de possession ? Jamais l’abus des mots a-t-il été poussé
plus loin ?
'
Sans doute'le mode d’interlocutoire que le juge de
paix sembla avoir adopté par erreur, devait conduire
au ne fausse conséquence, car il astreignait à prouver
que les liabilans de Vie avaient joui des Gachiers et
vergière exclusivement j ce qui a été corrigé avec raison_,
quoique le sieur Naley veuille en abuser.
Les liabilans de Vie ont interjeté appel de ce juge
ment, et ils y sont recevables, ainsi que l’a jugé la Cour
de cassation, en rejetant la décision du tribunal de
Clermont.
O r, le i . cr grief d’appel contre ce jugement est de
dire q u il était inulile, parce que la possession était
autorisée par un arrêt, parce qu’elle n’était pas niée,
F 2
�( 44 )
et parce que le sieur Natey ne pouvait’ changer l’état
des parties pendant la durée de sa propre demande.
t L e 2* grief consiste en ce que les habitans de
Vie ont été chargés de prouver une possession de
tout terns, au lieu de l’être d’un an seulement ; ce qui
a fait errer ensuite le ju ge, comme nous allons le re
marquer.
L e 3.* grief porte sur ce mot exclusivement ( i ),
que les habitans de Vie n’avaient pas articulé dans leur
demande, ni dans la réponse faite à l'interpellation
précise du juge de paix. 11 a donc jugé, à cet égard,
sans nécessité et ultrà petita.
. .
Quant au jugement du fond, le juge de paix n’a mal
jugé que pour avoir voulu être conséquent (2). S'il n’a
vait chargé les habitans de Vie que de prouver un
an de possession , il n'aurait examiné que les troubles
de cette dernière a n n ée , et il n’ aurait pas interrogé
les témoins sur ce qui s’était passé il y a 20 et 3 o ans.
( 1 ) Si le m ê m e mot a resté dans l’expédition du sieur N a t e y , l’honnête
ju g e de paix de V a y r e se trouve dupe de sa confiance. L e s habitans d e
V i e ne ve u len t abuser de rien ; car la v o ie de l’appel suffit pour effacer un
m ot qui n'a urait jam ais du être é c r it , et voilà pourquoi le sieur N a t e y a
fait tant d ’effo rts, à C l e r m o n t , contre l’ad m issio n .d e cet appel.
(2) L e sieur
N a t e y prétend que le jugem ent d éfinitif est l’ouvrage de
M . T o u t t é e ; mais lui a -t-on mis sons les y e u x tous les faits p r é c é d e r a ?
non ; car il est impossible que ce profond jurisconsulte ait d éc id é c o m m e on
suppose qu’il l’a fait. Si , a v e c une exp éd ition vicieuse de j u g e m e n t , on
lui a laissé croire que le m aire de V i e s’ était soumis à faire une p reuve
de possession e x c lu s iv e , il a été trompé.
�C 45 )
Mais le juge de paix avait ordonné une preuve de
possession de tout tenis ; et parce qu’il n'a pas voulu
avoir dit une chose inutile , il a recherché tout ce qu’on
a voulu déposer de plus ancien et de plus minutieux.
Trois noyers arrachés depuis vingt ans ont paru an
juge de paix un trouble de possession annale, parce
qu’ils étaient , à ce qu’on croit sans l’établir, sur le
bord de la Vergière.
Trois peupliers plantés lui ont semblé encore un
trouble de possession annale'du pacage, parce qu’ils
étaient plantés, dit-on, il y a plus de deux ans.
L e fait est qu’ils l’ont été moins d'un an avant la
demande, h l’âge de deux ans, ce qui a trompé deux
témoins. Alors cela aurait tout au plus obligé les haBitans dé Vie à faire remonter leur possession à l’an
et jour antérieur au trouble.
Au reste, cela est indifférent, veut-on croire les ha
bitons de Vie sur cette époque de plantation? ils ont eu
le droit d’assigner dans l’année du trouble, si c’en est
un ; et alors depuis les noyers jusqu’aux peupliers, il y
a plus d’un an de possession paisible.
Veut-on croire le sieur N atey, et le jugement dont
est appel? alors des peupliers, plantés plus de deux ans
auparavant, ne sont pas un trouble à la possession d'an
et jour.
Mais , dans le propre système du sieur N atey, ces
arrachement et plantation d’arbres ne seraient pas un
trouble. Car il prétend avoir le droit de couper et re-
�( 46 )
tailler les arbres èxistâns, comme aussi d’en planter de
nou ve au x en remplacement.
Ainsi cette possession articulée, qu’il ne s'agit ici d?avouerni decontester, est totalementdistincte du pacage.
Par conséquent il n’en résulte pas un trouble contre
celui qui, à ce qu’on prétend., n’avait pas le droit de
l’e mpêcher.
Le juge de paix, pour avoir été d’abord trop con
séquent , a fini par une inconséquence, car les noyers
et peupliers, qui l’ont si étrangement abusé, se rappor
taient au pacage de la Vergière, et non au grand Gachier, dans lequel les habitans de Vie avaient été encore
plus troublés ¡par un fossé de circonvallation, qui les
privait absolument du pacage.
* La prétendue interruption , arrivée h la Vergière-,
n'avait rien de commun avec le grand G achier, qui
lui-même est très-distinct de la Vergière. Ainsi le juge
de paix a rendu sans molifs la cause indivisible, dans
deux chefs séparés; ce qui est un vice subsidiaire de sa
décision.
11 serait difficile de contester sans injustice le droit
qu’ont eu les habitans de Vie de s’opposer au trouble
fait à leur possession. Toute commune a action possessoire pour ses communaux, comme la Cour de cassa
tion la jugé le i . er avril i8c6 (B ulletin, n,° 5 i ; D enevers , sup, page n 3 ).,Celle de Vie était fondée en
litres, et avait une possession avouée de deux siècles.
Ses moyens se réunissent donc à l’intérêt public pour
�( 47 )
empêcher une voie de fait repréliensible. Spolia tus
Unie oïrmia restituendus.
r é s u m é
.
Avant 1627 ,1a maison de Canillac prétendait aux
communaux Gachier et la Vergière, parce que, situés
sur la rive gauche de l’Allier, ils étaient le seul fonds
qui' empêchât la. haute justice de Monton de s'éten
dre jusqu’à la rivière.
Alors le propriétaire de Chadieu ne partageait pas
cette prétention, car il vendit Chadieu en 1627, con
finé par les Gachiers appartenant a T^ic-le-Comte, sauf
le droit de pacage, seulement., pour.lé propriétaire de
Chadieu. Si la maison de Canillac a persisté , après cette
acquisition, à vouloir ces communaux, ce n’était pas
comme dépendans de sa nouvelle propriété, mais tou
jours à cause de La haute ju stice de Monton qui avait
resté dans ses mains.
11
n’y avait que le retail des arbres qui fût réclamé
¿1 cause de Chadieu, par suite de l’acte de i 5 i i . Mais
le sieur Natey n’a acquis que .Chadieu, et jamais la
haute justice n’a été dans ses mains.
Par conséquent tous les procès de la maison de Ca
nillac, excepté le retail des arbres, sont étrangers au
sieur Naley.
Tout réside h son égard dans le contrat d’acquisi
tion de 1627 ?
Ia maison de Canillac, qui ne put
être restituée en 1641, contre les confins de cette vente,
�( 48 )
a vendu Chadieu à la maison de T anne, tel qu’il était
acquis en 1627 ; de même il a passé au sieur N atey,
avec la même consistance et limitation.
Quand le sieur de Tanne a plaidé en 1768, contre
le sieur Vassadel, il ne s’agissait que des arbres. Si le
sieur de Tanne y mêla des prétentions aux commu
naux , ces prétentions furent vigoureusement repoussées,
et c’est la seule partie de procès qui soit restée indécise.
Les habitans de Vic-le-Comte n’en tinrent pas moins
les communaux en défenses , comme ils l’avaient fait
depuis i 5 i i et 1641.
Ils n’ont jamais été troublés dans ce droit, et tout
ce qui a pu se faire, quant aux arbres, dépendrait du
mode d’explication de l ’acte de i 5 n , et ne serait pas
un trouble ; car il faut que le trouble consiste dans
l’intention formelle d’enlever la possession, pour se
l'attribuer à soi.
Au fait, les habitans de Vie ont pour eux des titres
formels, qui leur confirment h eux-mêmes la propriété
des communaux en litige.
Ils ont une seconde confirmation par arrêt souverain.
Ils ont une troisième confirmation de propriété parla
loi du 10 juin 1793, après laquelle le sieur Natey est
devenu acquéreur.
Us en ont une quatrième, préférable aux antres,
dans le titre même de propriété de Chadieu, l’acie
de 162,7,
De
�( 49 )
D esa part, qu’a le sieur Natey ? un seul acte sus
pect; acte tombé des nues ¿pour la cause actuelle, après
200 ans d’oubli et de non-exécution ; après 160 ans de
procès ; et cet acte encore lui est totalement étranger.
C ar, de bonne foi, il ne peut compter pour lui l’arrêtde 1768, qui, loin de rien juger avec les liabilans
de V ie , est au contraire suivi, à leur égard, de procé
dures appointées. Il ne peut opposer davantage la
transaction de 1769, qui réserve leurs droits.
Ainsi il n© reste au sieur Natey qu’ un seul et vrai
t itr e .... la vente de 1627, qui est le juge le plus in
faillible de toute la contestation.
Voilà donc aveu quelles armes le sieur Natey a en
trepris de dépouiller une commune paisible , d’une
propriété tant de fois disputée, et tant de fois restée à
son pouvoir.
Quand les Canillac gouvernaient le Languedoc et
l’Auvergne , leurs tentatives pour le même objet
furent toujours vaines, et leur puissance même fut, au
près des Cours, leur pierre d’achoppement. Quand ils
voulurent abuser de leur nom , ils furent punis d’un
décret de prise de corps.
Voilà quelle fut la justice de cette Cour suprême,
devant laquelle les puissans courbaient la tête, et qui
se faisait un honneur de venger les faibles de leur op
pression. Cette égalité de justice a été d’ une heureuse
influence pour les habitans de Vie ; cent quarante ans
de repos en ont été le fruit.
G
�'C: 5 o )
Comment se fait-il que le successeur inconnu des
Canillac , le propriétaire invisible de Cliadieu ait voulu
détruire en un instant une si longue paix, et troubler
une si heureuse harmonie?
Comment se fait-il que le système d’oppression des
Canillac contre les habitans de Vie , ait, après un siècle
et dem i, passé dans Famé d’an cit037en du canton de
Berne, qu’ils n’ont jamais vu.
Et cela encore après une révolution qui n’a anéanti
la féodalité que pour l'affranchissement des communes.
Quel est le but de ce sieur W atey, pour oser plus
en quelques mois, que n’ont tenté en un siècle ses
illustres prédécesseurs?
Quel est donc son talisman pour avoir tout boule
versé si rapidement, fait violence à une possession
paisible, irrité tous les esprits, heurté les intérêts d’une
multitude d’hommes qui respectaient les sipns.
Se croit-il dans celte contrée si fort au-dessus des
magistrats et des lois', qu’il se permette impunément
d accabler d’invectives et d'outrages un honnête fonc
tionnaire public, parce que, sans se cacher sous le nom
d'autrui, il a soutenu avec zèle et chaleur les intérêts
de ses concitoyens.
. v
Les liabitans de Vie furent mis en 1 666 sous la pro
tection du Monarque et de la C o u r , elle ne leur a
point été retirée, et ils sauront la faire valoir.
Ils l'invoqueront contre un nouveau genre de tyran
nie, qui, pour savoir se populariser, n'en est que plus
dangereuse et plus intolérable.
�( 5i )
Mais cet écrit n'en est point la place ; et tout ce qu’il
reste à y ajouter, c’est que le sieur Natey n'a pas plus
dans sa colère, que dans ses titres, les moyens de se
faire adjuger par les tribunaux une propriété, qu'il
n'obtiendrait qu’avec une évidente injustice.
M .e D E L A P C H IE R , A vo ca t
M .e M A Y E T , Avoué-Licencié.
A * R I O M ;
D E L ’I M P R IM E R IE D U P A L A I S ? C H E Z J.-C. SALLES»
�
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Le maire et les Habitans de Vic-le-Comte. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Mayet
Subject
The topic of the resource
communaux
pacage
rivières
Description
An account of the resource
Mémoire pour le maire et les Habitans de Vic-le-Comte ; contre le sieur Natey, de Nyon, Helvétie.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1511-Circa An 12
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
51 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0412
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0423
BCU_Factums_M0413
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53796/BCU_Factums_M0412.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vic-le-Comte (63457)
Authezat (63021)
Nyon (Suisse)
Corent (63120)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
communaux
pacage
rivières
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53795/BCU_Factums_M0411.pdf
87b55140fa8b5b2c672c573c1960951d
PDF Text
Text
M
É
M
O
I
R
E
PO U R
G asp ard -R och
M OM ET,
propriétaire à P a r is ,
in tim é ;
CONTRE
J ean -J oseph C R O Z E , sous-préfet de Brioude,
appelant ;
E N
P R É S E N C E
D'IGNACE B EA UFOR T- M O N T B O IS SIER
D E CANILLAC, appelant.
un b ien et le p a y e r , s’o b l i g e r et r e m p lir
ses engagemens , sont des opérations tellement vulgaires
qu’il n’y a nul mérite à les concevoir ; mais garder en
ses mains pendant dix ans la moitié du prix de son ac
quisition , susciter à son vendeur procès sur procès, le
forcer à payer
ooo francs le domaine qu’on a acheté
de lui 36000 francs, et cependant lui soutenir qu’il a
vendu un second domaine s a n s l’avoir su , et sans en avoir
jamais été propriétaire; enfin répondre à une somma
tion de payement par dix chefs de demandes incidentes P
A
C
HE T E R
65
�C2 )
voilà une conception grande et instructive, un coup de
maître qui décèle le génie et les grandes inspirations.
Il en coûte singulièrement au sieur Momet de désigner
le sieur Groze comme coupable d’une .telle conduite •,
mais réduit lui-même par le sieur Groze à se justifier de
n’avoir pas vendu le bien d’autrui, le sieur Momet est
dans la dure nécessité de dire la vérité à la cour, pour
sa propre défense.
F A I T S .
Par acte passé devant Deloche, notaire k Paris, le 30
vendémiaire an 4, le sieur de Canillac vendit au sieur
Momet le domaine dit de Chassaigne,
« Consistant en maison de chef, cou r, jardin et dépence dances, ensemble les bâtimens nécessaires à l’exploitac< tion , le tout contenant cinq septerées deux quarte« ronnée;
« Plus soixante septerées trois quarteronnées de terres
« labourables ;
« Plus vingt-une septerées de prés ;
« Plus cent vingt septerées de bois ;
« Plus deux septerées deux quarteronnées de vigne \
« Plus cinq septerées une coupée de terres incultes;
« Ge qui forme au total deux cent dix septerées une
c< quarteronnée de terrain, ainsi que le tout se poursuit
« et comporte , sans réserve, même le mobilier vif et
« mort qui se trouvera dans ledit domaine appartenant
« audit vendeur, qui entend vendre audit acquéreur tout
« ce qu’il possède ; et les droits qu’il a et peut avoir dans
�(3)
« ledit domaine et dépendances, à dix arpens près, en
« dehors ou en dedans. »
La vente est faite moyennant 600000 francs de prix
apparent, dont l’acte porte quittance.
11 est dit que le domaine vendu appartient audit sieur
de Canillac, comme lui étant échu par le partage des
biens du sieur Pierre de Canillac, son oncle, et que le
vendeur s’oblige de remettre à l’acquéreur un extrait
dudit partage, de l’inventaire fait après son décès, du
contrat de mai’iage de lui Canillac, et du contrat de vente
de la terre de Beaumont.
Il est dit enfin que l’acquéreur se réserve les fermages et
produits de l’année 1794? et que l’acquéreur sera tenu
d’entretenir le bail ou traité fait avec le fermier dudit
domaine, pour Tannée courante seulement ( i j g ô ) .
Le sieur Croze, domicilié à Brioude, habitant alors Paris
comme membre du conseil des cinq cents, ayant eu connoissance de cette acquisition, pi^oposa au sieur Momet
de lui vendre ce même domaine, dit de Chassaigne,
avant que ce dernier sût même en quoi il consistoit. L ’ac
cord eut lieu moyennant 36000 francs. Mais le sieur Croze
n’ayant pas la moitié du prix qu’il étoit convenu de payer
comptant lors de la signature de l’acte de vente, demanda
six semaines pour se le procurer, ainsi qu’une vente sous
signature privée, laquelle lui fut consentie pour le seul
domaine de Chassaigne. Le sieur Croze ne désavouera
certainement pas ce fait.
Le sieur Croze alla à Brioude chercher ses fonds, et bien
probablement visiter l’objet qu’il avoit acquis; dès-lors il
A
2
�(45
conçut le projet de faire englober dans sa vente devant
notaire le petit domaine de la Védrine, qui était voisin de
celui de Chassaigne. De retour, il convint de passer la
vente devait notaire, le 27 prairial an 4; mais il pria le
sieur Momet de lui donner en môme temps une procura
tion générale pour gérer, administrer, même vendre ce
domaine de Gliassaigne, sous prétexte qu’il ne vouloitpas
encore faire connoître sur les lieux son acquisition; ce que
le sieur Momet ne crut pas devoir lui refuser.
En conséquence le sieur Momet remit à M e. Deloche,
notaire du sieur Croze, le double du sous-seing privé, et
une expédition du contrat à lui passé parlesieurdeCanillac,
pour qu’il rédigeât la vente et la procuration conformément
aux actes qu’il remettoit. Ils le furent en effet*, et le 27 prai
rial, jour pris avec le sieur Croze, M e. Deloche vint chez
le sieur Momet, muni de ces deux actes rédigés, et littéra
lement conformes au contrat de vente que lui avoit passé
M. de Canillac. Le sieur Croze fit dire qu’il ne pouvoit
venir ce jour-là , mais qu’il viendroit le 29. N é a n m o in s
comme il n’était nullement n é cessa ire de la présence du „
sieur Croze pour signer la procuration convenue, le sieur
Momet en signa ce même jour, 27 prairial, la minute,
qui ne faisoit mention que du seul domaine de Chassaigne,
ne contenoit aucun renvoi, et l’approbation ne constatait
que trois mots rayés.
Le 29 , M e. Deloche et le sieur Croze se rendirent en
semble chez le sieur Momet pour la signature du con
trat de vente. Du 27 au 29 , la minute n’avoit éprouvé
aucun changement, ne contenoit aucun renvoi, et ne
faisoit toujours mention que du seul domaine de Chas-
�(5)
saigne. Ce fut' h la lecture de cet, a c t e q u e l l e sieur
Croze;parvint à taire mutiler la première rédaction r et
à faire ajouter quatorze renvois, tous plus insidieux les
uns que les autres. Bientôt la .cour en reconnoîlra paj;
elle-même toute l’astuce et la perfidie, •
v; ,,
D ’abord ce ne furent que de'simples corrections clq
quelques m ots, puis quelques changemens de sens ;
enfin , des phrases entières à rectifier. Il étoit dit , par
exemple , que les fruits lui appartiendroient depuis les
dernières échéances : il prétendit que cela étoit vague,
quoique correspondant à la première vente , et s’expli
quant par elle; il voulut faire substituer 1796 et 1796.
Iln ’avoitparsa vente qu’une quittance sans numération,
et il voulut faire ajouter la numération d’espèces. Le no
taire eut la complaisance d’ajouter cette numération ; et il
est constant aujourd’hui qu’il ne paya alors effectivement
que moitié de son prix.
Il prétendit n’être pas assez sûr de la propriété de
M. de Canillac ; il voulut une remise de titres : que ne
vouloit-il pas ? Enfin , le sieur Groze aborda une clause
plus épineuse. Il prétendit que le domaine de Chassaigne,
quoique ne portant que ce nom , comprenoit un petit
domaine ou locaterie, appelé de la V éd rin e, qui en
étoit une dépendance; qu’autrefois ces domaines étoient
distincts, et séparés; mais que depuis long-temps ils n’en
faisoient plus qu’un, parce que dans l’un des deux do
maines les bâtimens d’exploitation étoient écroulés.r(L e
domaine de la Védrine, dit-on, contient seul cent trente
septerées de terre. )
. Ce lait pouvoit être exact. Le sieur Momet n’en a^oit
�(6)
auciine cônnoissance, et disoit seulement : « Je ne puis
a vous vèndre que ce que j’ai acheté : puisqu’il n’est
« pas question de ce domaine dans mon contrat , je ne
« puis en parler dans le mien; s’il fait partie de mon
« acquisition, il fera partie de la vôtre. » Alors le sieur
Croze se retrancha à demander que , pour éviter
toute difficulté, et ne pas compromettre le sieur Momet,
il fût fait mention du domaine de la Védrine , comme
désigné seulement dans le contrat fait par le sieur de
Canillac au sieur M omet, sous le seul nom du domaine
de Chassaigne. Le notaire fut d’avis de cette rédaction de
clause; parce que, disoit-il, vous réféi’ant en tout à votre
contrat, si Passertion du sieur Croze est vraie, vous ne
vous engagez à rien ; si elle est fausse, vous ne vous
engagez pas davantage. Vaincu par ce raisonnement
v ra i, le sieur Momet voulant en finir et toucher l’a
compte que le sieur Croze lui donnoit, consentit à cette
rédaction.
Il en fut de même de la clause p a r l a q u e l l e , après
celle de la garantie formelle qui est la même que celle
portée au contrat du 30 vendémiaire, le sieur Croze
exigea que le sieur Momet renonçât à tout excédant de
mesure, à quelque quantité qiCil puisse monter. Le sieur
Croze et son notaire dirent au sieur Momet : N’entendezvous pas vendre tout ce que vous avez acquis ? Il en
convint : donc, dirent-ils, cette clause ne vous engage
à rien.
Ainsi successivement furent vaincues les répugnances
du sieur Momet, q u i, habitant de Paris , ne connoissoit
pas ce qu’il vendoit, traitoit avec le sieur Croze ; do-
�7
(
)
#
’
micilîé de Brioude, qui connoissoit parfaitement ce qu’il
achetoit, et toute l’étendue du contrat de vente faite au
sieur Momet, dont il avoit sous les yeux une expédition,
et depuis long-temps une copie.
La prévoyance du sieur Croze fut telle , qu’en deman
dant successivement les corrections ci-dessus , il étonnoit
d’autant moins le sieur M om et, que s’il lui eût pré
senté à la fois quatorze renvois à ajouter ; ce qui lui
ôtoit toute idée d’exiger, comme alors il l’auroit fait,
sans doute, une refonte entière de l’acte, pour dévelop
per les additions faites , et expliquer des clauses équivo
ques qui n’étoient ainsi écrites que pour s’identifier à la
première rédaction.
Il fut inséré dans ce contrat quittance des 36000 fr.
et le sieur Momet, qui n’a rien dissimulé dans cette cause,
s’est empressé de convenir qu’il n’avoitreçu qu’une partie
de ce prix ; et qu’après le contrat, il fut fait un billet
de dépôt de 19650 fr. 7souscrit par le sieur Croze au profit
du sieur Momet, daté du i prairial an 4. ( C’étoit alors
le seul mode valable pour stipuler en numéraire, )
Quoi qu’il en soit , pour que la cour ait sous les
yeux le résultat de ce qui vient de lui être d it, et voie
par quel arç on peut surprendre un citoyen sans défiance ?
voici l’image de la minute de la vente du 29 prairial
an 4 , d’après le vidimé oi’donné ;
5
Nota. T o u t ce qui se trouve entre deux crochets dans l'acte ciaprès, ainsi que dans la procuration, a été rayé dans les minutes.
�2.) Prairial 4-
(8)
P
ar - d e v a n t les notair es
r u s t i c s au département
et à la résidence de P aris, soussignés,
Fut présent Gaspard-Roch M om et, citoyen fran
çais, demeurant à Paris, place des Victoires-Nationales, section de la H alle au L ié, n°. 5 ,
Lequel a par ces présentes, vendu, cédé, quitté
et délaissé, dès maintenant et à toujours, et a promis
de garantir de tous troubles, dons, douaires, dettes,
hypothèques, évictions, substitutions, aliénations, x
empéchemens généralement quelconques,
A u citoyen Jean-Joseph C roze, homme de lo i,
demeurant à P a ris, rue des Saussayes, n°. 124^,
section de^- [Rou] Champs-Elysées , à ce présent et
acceptant, acquéreur pour lu i, ses héritiers et ayans
cause,
* et autres
f domaines de Chassai-
L es -J- domaine dit de Chassaigne, district de
gne et de la Védrine, dé
signés seulement, dans le
contrat qui sera ci-après
énonce, sous le seul nom
du
Brioude , département de H aute-L oire, consistant
en une maison de’ ch ef, bâtie à la.m oderne, co u r,
jardin et dépendances, ensemble les bâtimens néces
'% •
S
saires à l’e x p lo ila tio n , le tout c o n te n a n t cin q septerées
trois q u artero n n ées [de terre la b o u ra b le ] ;
Plus soixante septerées trois quarteronnées de terre
labourable ;
Plus vingt-une septerées de j^rés ;
Plus cent vingt septerées de bo is, tant taillis que
haute futaie, situées dans la commune de Chassaigne
et dans celle de Sansac ;
Plus deux septerées deux quarteronnées de vigne ;
et enfin cinq septerées une coupe de terrain inculte:
ce qui forme au total deux ce n t, dix septerées une
qyarteronnée de terrain, ¡ainsi que le tout se poursuit
et comporte, sans aucune exception ni rcser\e, même
le mobilier v if et m ort, de quelque nature qu’il soit,
qui se trouvera dans ledit domaine et dépendances :
garantissant
�(
9
)'
garantissant en outre audit acquéreur les deux cent
+| par ledit vendeur repéter c^x sopterées une quarteronnée, à dix arpens près,
contre Vacquéreur l’ excé- [en dehors ou en dedans,] sans pouvoir +1 [répéter
dantdesdites terres, à quelcéd an t. ]
que quantité qu’ il puisse
P ° ur Par ledit Croze, ses héritiers et ayans cause,
monter.
jo u ir, faire et disposer dudit domaine en pleine propriété , et comme de chose leur appartenante , à
compter de ce jour, et en commencer la jouissance -+X notaires à P aris,
[& compter des dernières échéances, de manière que
de réc°lte des fermages et autres produits
dudit domaine appartiendra audit acquéreur;] ledit
*+• par les revenus et fer- vendeur se réservant seulement les fermages de l ’année
mages des années mil sept mil sept cent quatre-vingt-quatorze ( vieux style ).
cent quatre-vingt-quinze et
L e domaine présentement vendu appartient audit
nul sept cent quatre-vingt- cit. M om et, comme l'ayant acquis du cit. Ignace
seize, vieu x style ;
Beaufort-Canillac, par contrat passé devant D eloche,
Gn a ^
ct son c o n f rè re , x le tren te ve n
d ém iaire d e rn ie r, en registré à P a ris le m êm e jo u r.
A à lu charge
L a présente vente est faite A par ledit acquéreur,
@
(JUi S,° WiSe > l °mde W er et acquitter les droits d’en
registrement et frais de contrat auxquels la présente
vente pourra donner lieu ; 2°. la contribution foncière
/. I an trois et l an quatre, à laquelle ledit domaine peut être imposé pour /t [la
présente année] et les années suivantes; 5°. d’entre
tenir le bail ou traité fait [pour la présente année seu
lem ent] avec le citoyen fermier dudit dom aine, si
aucun il y a.
Etenoutre cette venteestfaitem oyennant lasomme
de tren te-six mille livres de prix principal, francs
deniers audit vendeur; laquellesom m eledit acquéreur
T nombrées et réellement a P ^ en lcm en t payée audit citoyen M o m et, qui ]e
délivrées à la vue des no- rcconnoit- cn esPeces, sonnantes 0 et monnaie ayant
tairessoussignés,
C0UtS’ comPtées + - dont 11 ost “ n ien t, eu quitte et
¿¿y.
f* d’ or et d’ argent,
�( IO )
décharge ledit citoyen C ro ze, et de toutes choses re
latives au prix de ladite vente.
A u m oyen de quoi ledit citoyen M om et a présente
ment cédé et transporté, sous la garantie ci-devant
exprimée, tous droits de propriété qu’il a et peut avoir
sur ledit dom aine, de quelque nature qu’ils soient,
même tous droits rescindans et rescisoires, mais sans
aucune garantie à l ’égard de ces derniers, voulant qu’il
en soit saisi et mis en possession par qui et ainsi qu’il
appartiendra, constituant à cet e ffet, pour son pro-t- d’opposition à l’ entrée cur.eur ’ le Porteur donnant pouvoir.
en possession dudit doH sera loisible audit acquéreur d’obtenir à ses frais, •
main e, +|
sur le présent contrat, dans le délai de quatre m ois,
¿Wï
toutes lettres de ratification nécessaires; et si, au
sceau desdites lettres, il y a ou se trouve des oppoou de troublefo n d é dans s^ioris procédant du lait dudit vendeur ou de ses •
la possession et jouissance
ledit cit0J en Mornet s’oblige de les faire
dudit domaine présente- Iever et cesser’ ct d ’en rapporter audit acquéreur
ment vendu, le cit. M o m e t les mainlevées et radiations nécessaires, quinzaine
promet et s’ oblige d’en in- aPrès Ia dénonciation qui lui en aura été faite à son
demniser ledit cit. Croze dom icile, le tout aux frais dudit vendeur; de manière
en lui fournissant, cîans '["<•
acquéreur ne soit tenu que du coût des
V
. j „ // simples lettres de ratification.
Varrondissement des der
.
r i i- i
partemens de la HauteEn cas d CVICt,on’ ^ Cdudlt dom a,neprésentement
LoireetduPuy-de-Dôm e, ven d u > le cit- M om et Promet de rendre ai,dit cit.
des terresformant corps de C roze,dans les departemens etreonvoisins, des terres
ferm e, et c e , à dire d’ e x - Pour la méme ïa le u r' ,ct ce> à dlre d’cxperts, et non
perts, sans pouvoir par le- la somme (ïu’11 ,Tient de « cevo ^ .]
dit vendeur offrir, pour
^ o n n o l t ledit cit. Croze que ledit cit. M om et lui
l’ indemnité, le rembourse- a P a i e m e n t remis une expédition en papier du
ment du prix de lad. vente,
et contraindre le cit. Croze
h Vaccepter
.
contrat de ïcn te susdat<; ct <5n0nce’ fa,t audlt c,t*
M om ct ; P,us ^ d U i o n en papier de la transac^on en f ° rme ^e partage, taite entre ledit citoyen
Canillac et [la dame] sa sœur, passée devant M ony,
qui en a gardé m inute, çt son confrère, notaires i\
�Paris, le
( 11 )
sept juin m il sept
cent quatre-vingt-qualre,
d o n t d éch arge.
x incessamment
A l’égard d’un extrait de l'inventaire fait après le
décès du père du cit. Pierre B eaufort-C anillac, de
celui du contrat de mariage dudit vendeur Canillac
avec la citoyenne son épouse, en ce qui concerne le
douaire ; de celui du contrat de vente de la terre de
Beaum ont, en ce qui concerne ce moine douaire,
]e
]V[omet s’oblige de les remettre x audit cit.
+| et Varrêt d’ enregistrenientf qui ont été obtenus
sur la transaction dudit
jour sept juin mil sept cent
quatre-vingt-quatre.
vau,
Croze, avec toutes autres pièces au soutien de ladite
propriété, que pourroit lui remettre ledit cit. C anillac,
aussitôt que ce dernier les lui aura remises, et jiotamment les lettres patentes -H [les lettres.]
Enfin le citoyen M om et s’oblige, au besoin, d’aider
l’acquéreur, à sa première réquisition , des diverses
quittances des payemens par lui laits pour le citoyen
-4- et de luijustifier des su- Canillac
différons de ses créanciers privilégies o u '
bromations portées ès-dites hypothécaires sur les biens présentement ven d u s,-4quittances , jusqu’ à due le tout à peine de tous dépens, dommages-intérêts. A
concurrence de la somme
Pour l’exécution des présentes, les parties élisent
de quatre cent mille livres domicile en leurs demeures à P a ris, ci-devant déassignats;
signées, auxquels lie u x , nonobstant, prom ettant,
A Enfin le citoyen Momet obligeant, renonçant.
s’ oblige de remettre aussi
Fait et passé à P aris, en la demeure du vendeur,
incessammentaud.acqué- l'an quatre de la république française, une et indireur toutes les pièces qui visible, le vingt-neul prairial, après m id i, et ont
lui seront nécessaires pour signé ces présentes, où quatre-vingt-quatre mots sont
se faire mettre enposses- rayés comme nuls, (i) Ainsi signé M om et, Croze,
sionréelle dudit domaine, Fleury etD elo ch e, ces deux derniers notaires, avec
d?ici au p r e m i e r fructidor paraphes. Au-dessous est écrit : Enregistré à Paris,
prochain, et obtenir celles bureau du Contrat-Social, le 6 messidor an 4 , F . 117,
qui pourraient lui man- ^ol- 10 ; R . quatorze cent quarante livres, valeur fixe
querm
en mandats, sur
ooo liv. Signé Grou.
56
G
u il l a u m e .
^
(1) Ce sont les mots rayés à la plume dans le cours de l’acte.
D
e l o c iie .^
^
�( is )
Après cet acte , il restoit encore à retoucher à la pro
cu ra tio n à laquelle on n’avoit pas pensé ; mais pour cela
on n’eut pas besoin du sieur Momet : et au lieu de porter
le renvoi ( et de la V'édrine ) , en marge , on en fut
quitte pour le placer au bas de la première page, en le
faisant aboutir au paraphe du sieur Momet ; ce qui est
prohibé par la loi du n ventôse sur le notariat, et par
les lois précédentes ( i) . Il paroît nécessaire de mettre
aussi cette procuration sous les yeux de la cour.
2T] Prairial 4.
P a r - d e v a n t l e s n o t a i r e s p u b l i c s au département de la Seine
et à la résidence de P aris, soussignés,
Fut présent Gaspard-R ocli M om et, citoyen français, demeu
rant à Paris, place des Victoires-Nationales, n°.
H alle au blé ;
3,
section de la
Lequel a fait et constitué pour son procureur général et spécial
le citoyen Jean-Joseph Croze, homme de lo i, demeurant à Paris,
rue des Saussayes, n°. 1243, section des Cham ps-Elysées, auquel
il donne pouvoir d e , pour lui et en son n o m , régir, gouverner et
(1) Le notaire a dit, au procès verbal du vidimé, que le renvoi avoit été
approuvé dans cette procuration par les paraphes du sieur M omet, du notaire
en second, et de l’enregistreur. Le sieur Momet désavoue ce fait, et il vient
de se pourvoir extraordinairement à Paris, contre le sieur Deloche.
Mais ce qui prouve que le renvoi n’a été mis qu’après l’enregistrement,
et hors la présence du sieur M omet, c’est que la copie légale de l’enregistre
ment de cette procuration, levée par le sieur M omet, ne porte mention que
de la gestion du srul domaine de Chassaigne , et ne constate aucun renvoi,
quoique la formule des registres l’exige, s’il y en a; et au contraire on voit,
dans l’extrait de l’enregistrement de la vente, que la minute y est dite avoir
quatorze renvois ; enfin la cour verra par des s a jo u t é s , par les ratures non
approuvées des mots de Chassaigne, qu’il n’étoit question que d’ un domaine
seulement,
�( 13 )
administrer les domaines de C hassaigne-t-, situés dans le ci-devant
district de Brioude, département d e là H aute-L oire, consistant en
terres, m aison, bâtimens et vignes; recevoir de tous locataires,
fermiers et autres personnes qu’il appartiendra, soit en nature ou
autrem ent, les loyers échus et à échoir ; compter avec tous débi
teurs , débattre, clore et arrêter lesdits comptes, en fixer et recevoir
le reliquat ; de tous reçus donner bonnes et valables quittances et
décharges ; accepter tous transports et délégations pour le payement
de toutes sommes dues par quelques débiteurs ; louer ou vendre, soit
en totalité ou en partie, le domaine dont il s’a g it, à quelques per
sonnes que procureur constitué jugera £i propos; laire lesdits baux
ou ventes aux p rix , charges, clauses et conditions qui lui paroltront le plus convenables; faire faire môme toutes dém olitions,
[reconstructions] et augmentations qu’il jugera nécessaires ; nom
mer et convenir de tous architectes, entrepreneurs et autres gens
de b â tim e n s ; c o m p te r avec tous fo u rn isse u rs, les payer, s’en faire
rem ettre q u itta n c e s ; to u ch e r m ô m e , en to ta lité ou autrement, le
prix des ventes qu’il pourroit fa ire dans ledit dom aine; de tous
reçus donner bonnes et valables quittances et décharges; faire régir
môme le jd iti domaines [de Chassaigne] par qui bon lui semblera;
lui donner pour cela, à celui qui acceptera ladite charge, tous
pouvoirs nécessaires. Dans le cas où quelques débiteurs se refuseroient à payer au constituant les sommes qu’ils lui doivent, et qu’il
surviendroit quelques difficultés avec qui que ce soit, faire contre
qui il appartiendra toutes poursuites, c o n tra in te s [et d ilig en ces] et
diligences nécessaires; comparoitre devant tous juges de paix , soit
en demandant ou défendant, s’y concilier, si faire se peut; à défaut
d’arrangem ens, comparoitre devant tous tribunaux com pélens, y
plaider, ou bien nommer et convenir de tous défenseurs officieux
en causes; les révoquer, en substituer d’autres; obtenir tous jugemens, les faire mettre à exécution ou bien en appeler; faire toutes
H- et de la Védrine
�\
( 14 )
exclusions de tribunaux, former toutes oppositions, donner tou tes
m a in le v é e s , consentir radiation, traiter, transiger, composer ^
substituer ès-dils pouvoirs, et généralement faire tout ce qui sera
nécessaire, promettant l’avoir pour agréable.
Fait et passé à P aris, en la demeure dudit citoyen M om et, Fan
quatre de la république française, une et indivisible, le vingt-sept
prairial; et a signé.
Hayé trois mots nuls.
Signé M om et, avec Fleury et D eloclie, ces deux derniers no
taires, avec paraphes. A u bas est écrit : Enregistré à P aris, bu
reau C ontrat-Social, le messidor an ; R* vingt sous assignats.
Signé Grou.
5
G
u i l l a u m e
4
.
A»
D
e l o c
Cependant le sieur Momet se croyoit tranquille, et
assuré surtout de toucher au temps convenu les 19650 fr.
qui lui étoient dûs ; mais il en étoit encore bien loin.
Quand il fut question de payer, le sieur Croze parla
des créanciers du sieur de Canillac, et voulut des lettres
de ratification. Q u o iq u ’il eût été convenu q u e ce seroit
son contrat qu’il feroit purger, et non celui du sieur
M om et, il pria ce dernier de souffrir que ce fût la pre
mière vente, par la raison qu’elle présentoit un prix
inférieur, et qu’il lui en coûteroit moins, s’en chargeant
pour son propre compte , et promettant d’indemniser
de tout le sieur Momet qui , cette fois encore , s’en
rapporta au sieur Croze, dont le caractère de député étoit
fait pour mériter sa confiance.
Le contrat du 30 vendémiaire an 4 fut donc mis ,
par les soins du sieur Croze , au bureau des hypothè
ques du Puy. Par les soins encore du sieur Croze, il y
�5
( i )
eut des enchères qui portèrent ce domaine de Ghassaigne
à
ooo francs numéraire.
Il n’y avoit pas à balancer; le sieur Momet s’étoit obligé à
faire jouir, il fut obligé de retenir le domaine en parfou unissant les enchères; et la mère du sieur Croze fut,
à l’insçu du sieur M om et, caution du parfournissement.
Les lettres de ratification furent scellées, à la diligence
du sieur Croze , pour
ooo francs au profit du sieur
Momet , le 14 brumaire an 7.
A in s i, voilà déjà le sieur Momet obligé de payer un
domaine ooo francs en numéraire, outre les frais mon
tant à 3600 francs, après l’avoir vendu 36000 francs, et
n’en avoir touché que 18000 francs.
Par l’inspection de ces lettres de ratification , si sa
correspondance ne le prouvoit pas , on reconnoîtroit
que tout est L’ouvrage du sieur Croze ; on verroit qu’il
s’est torturé pour arriver à y faire comprendre indirec
tement, il est vrai, tout ce qui se trouvoit à Ghassaigne,
en y faisant qualifier ce domaine de terre-domaine, quoi
qu’il se fît expédier des lettres sur le contrat du 30 ven
démiaire, qui ne porte que le nom de domaine.
Ces lettres furent frappées des oppositions de q u a tr e
créanciers de M. de Canillac , quoique le sieur Momet
n’eût cessé de prier le sieur Croze de les désintéresser avant
les lettres ; mais cela eût évité les sur-enchères , et le
sieur Croze n’auroit pas eu un prétexte pour ne pas payer.
Enfin , quatre ans se passèrent : le sieur Momet réclama
de nouveau son payement.
Alors il lui fut signifié, le 11 floréal an 1 1 , une de
mande en ouverture d’ordre ? à la requête du sieur Labas-
65
65
65
1
�( ,i6 )
tide , de B r io u d e , l’un des créanciers Canillac. Le sieur
Croze sign ifia cette demande au sieur Momet.
P o u r lever cet obstacle, le sieur Momet chargea le
sieur Fabre de payer au sieur Labastide 2700 francs ,
montant de sa réclamation, ce qu’il fit ; et le sieur
Labastide donna quittance le 12 messidor an n . Cepen
dant le sieur Croze, débiteur déplus de 18000 francs,
avoit mis le sieur Momet dans le cas de payer le triple de
son acquisition , et laissé faire pour plus de 3600 francs de
frais, nonobstant toutes les remontrances des créanciers,
notamment du sieur Labastide, l’un d’eux, poursuivant,
qui, indigné, en écrivit au sieur Momet.
Il ne devoit donc plus y avoir de prétexte pour le
sieur Croze ; mais bientôt un autre incident le mit plus
à son aise.
Par exploit du 13 fructidor an 1 1 , il paroît que le
sieur de Canillac fit assigner le sieur Croze en désistement
du domaine de la V édrine, comme ayant été par lui
u su rp é .
Aussitôt le sieur Croze saisit et arrêta en ses propres
mains, sans aucune permission de justice, ce qu’il
au sieur M om et, et lui dénonça cette saisie arbitraire.
Le sieur Momet fut forcé alors de prendre les voies ju
diciaires, et il fit citer, le 13 nivôse an 12, le sieur Croze,
en payement en deniers ou quittances du billet de 19660 f.
et en mainlevée des inscriptions qu’avoit faites ledit sieur
Croze pour sa garantie; il le somma de faire ti’anscrire sa
vente.
Au bureau de paix on remarque, de la part du sieur
Momet, une longue explication de tous ses moyens. Quant
au
devoit
�(17 )
au sieur Croze , il reconnut son écriture du billet, offrit
de payer sans intérêts, à la charge des demandes ci-après.
Sur le surplus, il refusa toute explication, et dit que sans
se nuire ni se préjudicier sur ce qu'il peut avoir d it, il
pense qiùau m oins, quant à présent, il n'y a lieu ci con
ciliation.
Assigné le 30 pluviôse en payement, il forma à son
tour dix chefs de demande contre le sieur M om et, par
exploit du 8 floréal an 12.
i°. A ce que le sieur Momet fût tenu de faire cesser la
demande du sieur Labastide.
20. A ce qu’il fût tenu de faire cesser aussi la demande
formée par le sieur de Canillac, en désistement.
°. A ce que la saisie-arrêt faite par lui-même en ses
mairis fût confirmée.
40. A ce que le sieur Momet fût condamné à lui payer
les fermages de la terre de la Chassaigne, échus depuis 1795
jusqu’au jour de la demande.
°. A ce que le sieur Momet fût condamné à rapporter
mainlevée de toutes oppositions et inscriptions existantes
sur les biens vendus.
6°. A ce qu’il fût tenu de lui remettre tous les titres de
pi'opriété des biens vendus.
70. A ce qu’il fût tenu de prouver avoir payé pour
400000 francs de dettes à la décharge du sieur de Canillac,
suivant les contrats de vente, et justifier des quittances.
8°. A ce que le sieur Momet fût condamné à payer
sieur Croze 2873 francs pour voyages et dépenses qu’il a
faits pour ledit sieur M omet, en vertu de sa procura
tion du 27 prairial an 4*
3
5
audit
C
�(i8).
9°. A ce qu’il fût tenu de lui représenter et remettre
les titres de créance qu’il dit avoir contre ledit sieur Croze.
- io °. A ce que, faute de justifier de quittance avec su
brogation pour 450000 francs, le sieur Momet fût con
damné à lui fournir, à dire d’experts, des terres de même
nature et valeur que celle de la Chassaigne, et à lui rem
bourser ce qu’il a touché du prix.
Le sieur Croze n’oublia pas ensuite de demander la
jonction de ses conclusions à celles du sieur Momet, et la
jonction fut ordonnée par jugement du 23 prairial an 13.
Eu réponse aux demandes du sieur Croze , le sieur
Momet ne dissimula pas que le billet de 19660 francs par
lui réclamé comprenoit i o francs d’intérêts*, aussi se
borna-t-ilréclam er seulement lesintérêtsde 18000 francs;
il offrit de remettre, audience tenante, tous les titres de
propriété du sieur de Canillac, comme il s’y étoit obligé par
la dixième clause de la vente ; il justifia d’un certificat de
65
n o n -in s c r ip t io n sur lu i et son v e n d e u r ; et d ’ a b o n d a n t, offrit
encore de r a p p o r te r la mainlevée de toutes inscriptions,
aussitôt que le sieur Croze auroit fait transcrire et les lui
auroit notifiées ; et il soutint que le surplus des demandes
du sieur Croze n’étoient pas fondées, et que notamment,
à l’égard de sa garantie, il étoit évident que le sieur Momet
n’avoit pas vendu ni entendu vendre plus qu’il n’avoit
acquis lui-même.
Le sieur Croze répondit à la demande du sieur de
Canillac, en le sommant de justifier s’il étoit réintégré dans
son état civil, attendu qu’il avoit été émigré; puis il lui
opposa qu’il étoit insolvable, et demanda caution judicatum
A l’égard du sieur Momet ; il lui objecta que
�19
(
)
si le sieur de Canillac faisoit juger que la Védrine étoit un.
domaine séparé de la Chassaigne, le sieur Momet devoit
lui remplacer cette éviction en un autre corps de domaine,
d’après leur convention, parce que le sieur Momet lui avoit
vendu et garanti distinctement les domaines de la Chas
saigne et de la Védrine.
Sur ces moyens respectifs, le tribunal de Brioude rendit,
le 21 messidor an 13, entre toutes les parties, un juge
ment dont il importe de faire connoître littéralement les
motifs et les dispositions.
Jugement dont est appel.
Entre le sieur de C a n illa c ................le sieur M o m e t...................
et le sieur C ro z e ...............
E n ce qui Couche la demande récursoire dirigée contre le sieur
Momet par le sieur C ro z e , au sujet de la demande du sieur L a
bastide ;
Attendu qu’il est prouvé par acte reçu Grenier , notaire, le i3
messidor an 11 , que ce dernier a été désintéressé; qu’il avoit été
justifié de cet acte audit sieur Croze , lors du procès verbal de nonconciliation , du 29 nivôse an 12; que ce chef de demande devenoit
dès - lors inutile , et que d’ailleurs il a été justifié de cet acte à
l ’avoué dudit sieur C roze, par acte du 22 prairial dernier; qu’ainsi
ce chef de demande ne présente plus de difficulté.
E n ce qui touche la demande principale formée de la part du
sieur Canillac, au désistement du domaine de la V édrin e;
. A ttendu que les terres de Chassaigne, Cusse et Lacougeat sont
échues au sieur Canillac par le partage, et qu’il n’y est nullement
fait mention du domaine d e là V édrine, dont il a cependant tou
jours joui, ou par lu i, ou par ses représentons, comme étant an
n exé, et form ant une dépendance du domaine de Chassaigne,
dont l’exploitation étoil au lieu de la V é d rin e, et non à Chassaigne ;
C 2
�3
4
A ttendu que lors de la vente du o vendémiaire an > les do**
maines de Chassaigne et de la Védrine étoient affermés à un seul
ferm ier, et sans distinction du prix; que par ladite ven te, ledit
sieur Canillac autorisa son acquéreur à toucher en totalité le prix
du ferm age, ce qu'il n'auroit pas fa it, s’il avoit entendu ne vendre
que le domaine de Chassaigne seulement ;
Attendu que lors de la procuration du sieur C a n illa c, dudit
jour ig germinal an 6 , il n'est nullement fait mention de faire
aucune réclamation au sujet du domaine de la V é d rin e, et s’il
n'eût pas été dans son intention de vendre la V éd rin e, comme
une dépendance de Chassaigne, il n'auroit pas négligé>de s’en occu
per lors de cette procuration.
E n ce qui touche la demande récursoire formée contre le sieur
M o m et, au sujet de cette même demande en désistement;
Attendu que, dès que d’après les motifs précéderas la d em an d e du
sieur Canillac doit être rejetée, il devient dès-lors inutile d'exa
miner si cette demande récusoire est bien ou mal fondée.
E n ce qui touche la saisie-arrêt faite par le sieur Croze entre
ses m ains, comme des biens du sieur M o m et;
Attendu que le sieur Croze est lui-même débiteur du sieur
M o m e t; q u ’il n ’ a pas pu fa ire saisir en ses m a in s sans u n titre
contre celui-ci ; que le prétendu péril d’éviction résultant de la
demande en désistement formée contre lui n’étoit pas un m o tif
suffisant pour autoriser cette saisie; que d'ailleurs le sieur Momet
a offert de donner caution pour sûreté du payement qu'il réclam e,
conformément aux dispositions de l'article 1623 du Code c iv il, et
que dès-lors cette saisie ne sauroit être confirmée.
E n ce qui touche la demande en payement des fermages de 1795,
formée par ledit sieur Croze contre ledit sieur M o m e t ;
Attendu que ce dernier, en autorisant le sieur C ro z e , par la sus
dite vente, à percevoir lesdits fermages,nes^estpaslui-memechargé
de faire des poursuites pour le recouvrement d'iceux; qu'il n'a fait
que.m ettre à cet égard le sieur Croze à son lieu, droit et place,
çt que c’est au sieur Croze à les réclamer contre ceux qui les doivent
�( 21 )
ou qui les ont perçus ; qu’il est de fait que le sieur Momet n’a rien
to u ch é, et qu’il ne sauroit être garant de ce que lesdits fermages
sont retenus par le fait d’une force m ajeure; que d’ailleurs le sieur
Croze ne fait apparoir d ’aucunes diligences faites de sa part pour
la répétition de ces mêmes fermages.
•En ce qui concerne la demande en mainlevée des inscriptions
subsistantes sur les biens vendus au sieur Croze par le sieur M om et ;
Attendu que celui-ci a obtenu des lettres de ratification sur
son contrat de vente, le 14 brumaire an 7 , scellées, à la charge
des oppositions ;
Attendu qu’il a établi par le rapport des actes énoncés au procès
verbal de non - conciliation , du 29 nivôse an 1 1 , que le sieur
M om et a désintéressé la dame C ensat, le sieur L abastide, et les
autres créanciers opposans au sceau desdites lettres ; qu’il a justifié
à l’audience qu’il n’existoitque deux inscriptions contre lu i, à Fépoque du 27 p lu viôse an 12 ; q u ’il n ’en est p oin t survenu d'autre jus
qu’au 27 du présent , et que ces inscriptions ont été radiées par
le conservateur des hypothèques de cejourd’hui ; ce qui est prouvé
par trois certificats de ce dernier, des dates sus-énoncées ;
Attendu d ’ailleurs que le sieur Croze n ’a point lui-même obtenu
des lettres de ratification , ni fait transcrire son contrat, et qu’aux
termes de la vente sus-énoncée, il ne peut forcer le sieur M om et
à lui justifier d ’aucune mainlevée, avant d’avoir fait transcrire
son titre et d’avoir dénoncé les inscriptions qui peuvent subsister
contre lui ; qu’ainsi ce chef de demande doit être rejeté.
E n ce qui touche la remise des titres réclamés par le sieur
C ro z e , en vertu de la neuvième clause dudit contrat de vente ;
Attendu qu’il n’a pas désavoué avoir reçu les lettres patentes et
l’arrêt du 7 juin 1784, et que le sieur Momet lui a o ffe rt, audience
tenante, la remise des autres actes énoncés en ladite clause ;
qu’ainsi ce chef de demande devient dès-lors sans objet.
En ce qui touche la demande en remise de titres et quittances,
avec subrogation constatant que le sieur M om et a payé en dé
charge du sieur de Canillac, pour 00000 francs de créances hy
pothécaires ;
4
�C 22 )
Attendu que cette clause du contrat n’est point impéralive ;
que le sieur Momet ne s’est obligé que d’aider au besoin ledit
sieur Croze des titres et quittances; que ce besoin n'est point
constaté; qu’il nepourroit l’être qu’autant que le sieur Croze leroit
transcrire son titre, et qu’il existeroit des inscriptions procédantes
du fait dudit Momet ou de ses auteurs; et que dès que le sieur
Momet se soumet de rapporter la mainlevée de toutes les ins
criptions qui pourroient exister, le sieur Croze n’est point fondé
sur ce chef de demande , puisqu’il y est dès-lors sans intérêt.
E n ce qui touche le payement de la somme de 2893 francs
réclamé par le sieur C ro z e , pour voyages, dépenses par lui faits
en vertu de la procuration du 27 prairial an 4 ;
Attendu qu’il a été soutenu par le sieur Momet que cette procu
ration n avoit été donnée que le jour même de la vente, quoique
datée de deux jours avant, et pour servir de titre apparent au
sieur Croze ;
Attendu que cette procuration ^ relative à la gestion et à l ’admi
nistration, au louage et à la vente du bien y énoncé , a d’ailleurs
été révoquée par la vente qui est survenue deux jours après; que le
sieur C roze, à l’époque de cette vente, ne pouvoit avoir rien fait
en vertu de cette procuration, et que s’il a agi postérieurement,
ce n’a pu être que pour son compte et son intérêt personnel; qu’il
n ’établit pas d’ailleurs ce qu’il a fait pour le compte du sieur M om et,
en vertu de cette procuration, et que dès-lors ce chef de
demande
doit être rejeté.
E n c e qui touche la demande en rapport du prix de ladite vente,,
touché par le sieur M om et, et le remplacement en im m eubles,
faute de justification desdits titres de créances et quittances ;
Attendu que le sieur Croze est en possession et jouit paisible
ment des biens à lui vendus; qu’il n ’a point éprouvé d’obstacles à
son entrée en possession ; qu’il n’est point troublé dans sa jouissance,
et que ce n’auroit été que dans ces cas qu’il auroit pu réclamer
l’exécution de la clause du contrat de vente; qu’ainsi il est encore
mal fondé dans ce ch ef de demande.
�(< 2 3 )
E n ce qui touche la demande en payement de la somme de 19660 f.
montant du billet daté du i5 prairial an 4, quoique fait réellement
le 29 dudit mois, etdes intérêts du montant de la sommede 18000 f .,
depuis ledit jour 29 prairial an 4> sous la déduction de tous payemens , et sous la déduction sur les intérêts, depuis ladite époque,
de la somme de 1620 fra n cs, compris pour intérêts dans ledit
billet ;
Attendu que quoique lors du procès verbal de non-concilia
tion le sieur Croze n’eût pas voulu s’expliquer sur la vraie cause
dudit b ille t, il est cependant convenu, lors du jugement contra
dictoire du 23 prairial d ern ier, qu’il avoit eu pour cause réelle
le restant du prix de la vente dudit jour 29 prairial an 4 ;
Attendu que quoique fait sous la forme d ’un dépôt, ce billet
ne dérive pas moins du restant du prix d’une vente d’im m eubles,
pour la som m ede 18000 francs , et que sous ce rapport les inté
rêts de cette som m e so n t dûs de d r o it , depuis la d ate de la vente ,
d’après les disposition s de l ’article i
du Code c iv il , . qui ne
sont que confirmatives du droit ancien, fondé sur les dispositions
de la loi au code D e actione empti et venditi ;
Attendu que quoiqu’il ait été soutenu par le sieur M om et que
dans ledit billet de 19660 francs il avoit été compris les intérêts
de ladite somme de 18000 francs , jusqu’à une époque fixée entre
les parties, ce fait n’a point été formellement désavoué par le sieur
652
C ro z e ;
A tte n d u qu^il est p ro u vé par une lettre du sieur C roze, d u 7
fructidor an 6 , en réponse à une autre que le sieur M om et lui
avoit écrite peu de jours avant, dans laquelle celui-ci se p la ign o it
du retard que le sieur Croze mettoit à se libérer, que celui-ci
convint qu’il n’est en arrière de payer que depuis deux mois huit
jo u r s , et qu’ il ne souffrira pas que ledit sieur Momet soit en
perte ; d’où il suit la preuve non équivoque qu’il y avoit réelle
ment un terme convenu entre les parties pour le payement dudit
billet, et que le sieur Croze a promis de ne pas souffrir que le
sieur Momet fû t en perte; qu’ainsi, sous tous les rapports, les in-
�(
24)
térêls de la somme de 18000 francs sont dûs depuis l’époque de
le u r ven te.
E n ce qui touche la demande en ratification d ’inscriptions faites
par le sieur Croze contre le sieur M om et;
Attendu que le sieur Croze a la faculté, par son titre d’acqui
sition , de purger les privilèges et hypothèques dont les biens à lui
vendus peuvent être grevés ; que le mode de. purger lesdites hypo
thèques et privilèges, est établi par l’article 2181 et suivant du Code
civil, et qu’il ne dépend que du sieur Croze d ’en user ;
Attendu qu’aux termes de son contrat d’acquisition les frais de
la transcription d ’icelui sont à sa charge, et que s’il ne veut pas
faire transcrire son titr e , il ne peut pas le dispenser d’accorder
la mainlevée des inscriptions subsistantes de sa part contre ledit
sieur M om et ;
/
. Attendu qu’aux termes de l’article 2160 du C o d e , la radia
tion d ’inscription doit être ordonnée, lorsque les droits de privi
lèges et hypothèques sont effacés par les voies légales, et que si le
sjeur Croze ne veut pas profiter du hénéfice de la loi dans un délai
fixe, le sieur M om et doit obtenir Ja radiation des inscriptions
que ce dernier a faites contre lu i, ne pouvant pas être, par le fait
du sieur Croze, privé du droi£ d ’ exercer ses actions contre les ac
quéreurs de ses biens.
Par tous ces m o tifs, le tribunal, jugeant en premier ressort,
D éclare le sieur de Canillac non recevable dans sa demande en
désistement de la partie de domaine dit de la V éd rin e, garde et
maintient ledit sieur Croze dans la possession et jouissance de ladite
partie de dom aine, comme annexée et form ant dépendance du do
maine dit de la Chassaigne ; et faisant droit sur tous les autres
chefs de demande formés réciproquement de la part desdits sieurs,
M om et et C r o z e , le tribunal donne acte audit sieur Momet de
ce que ce dernier reconnoit avoir reçu l’arrêt d’enregistrement
e.t les lettres patentes sus - énoncés , et de pe que ledit sieur
M om et lui a o ffe r t, audience tenante, et a jnis sur le bureau de
l’audience les autres titres réclamés par ledit sieur Croze, en vertu
de
�(
25
)
de la dixième clause dudit contrat de vente; lui donne pareillement
acte dé ce qu’il offre de rapporter la mainlevée de toutes les
inscriptions prociédantes1de son fait ou de celui d esès auteurs, sur
les biens vendus, des q u e ‘ledit: sieur' Croze aura fait transcrire
son titre de propriété, et dénoncé audit sieur M om et lesdites inscrip
tions ; et ayant égard âuxçlites o ffre s, faisant droit sur les con
clusions prises par ledit siéur M om et, condamne le sieur Croze à
payer audit' sieur M om et, en deniers‘’ou quittances valables , la
somme de 19650 francs, montant dudit b ille t, avec les intérêts
de la somme de 18000 fra n c s, depuis la date de ladite vente
jusqu’au payem ent, sous là déduction néanmoins de la sommé
de i o francs comprise dans ledit b ille t, pour intérêt de ladite
som m e, lesquels payemens qui ont pu être faits seront imputés
d'abord sur les intérêts^ et ^stibsidiairement sur le principal ; et
ordonne que ledit sieur Crozè sera tenu, dans le délai de deux
m ois , à compter de cc jo u r , de faire tra n scrire son titre d'acquisi
tion ; faute de ce f a ir e , et icelui passé, sans qu’il soit besoin d'autro
jugem ent, le tribunal fait pleine et entière mainlevée en faveur
dudit sieur M o m e t, des inscriptions faites contre lui de la part dudiÇ
65
sieur C rozd, et notamment de celleà faites au bureau de Paris %
vol. 18, n \ 674,* en celui de Corbeil, vol.
583
3 \ n\
5o3 ; en celui
de D ieppe, vol. 11 , n°.
; ordonne que sur la remise qui*sera
faite par ledit sieur M om et, \ chacun des conservateurs desdits bu
reaux des hypothèques, de l'expédition par extrait du présent juge
ment , ils seront tenus de radier lesdites inscriptions ; quoi faisant
ils en demeureront bien et valablement déchargés; fait pareille
ment mainlevée audit sieur M om et de toutes autres inscriptions
faites contre lui de la part dudit sieur C ro ze, et ordonne qu'elles
seront radiées par tous conservateurs qui pourroient les avoir faites,
ainsi qu’il est dit ci-dessus; et enfin fait mainlevée de toutes
saisies et oppositions faites par ledit sieur Croze, contre ledit sieur
M o m e t, et ordonne qu’à la remise ou payement de tous les ob
jets ou sommes saisis, tous gardiens seront contraints, sur la re
présentation du présent jugem ent, par les voies de d ro it; quoi
D
�(
26)
faisant ils demeureront bien et valablement décharges- envers ledit
sieur C ro s e ; sur le surplus des autres fins *et conclusions, prises
respectivement par les parties, le tribunal les met hors de cour et
de procès; condamne ledit sieur Croze en tous les dépens faits par
ledit sieur Momet sur ladite demande en payement du susdit billet >
lesquels ont été taxés, et liquidés, d'après Favis du commissaire
taxateur de la chambre des avoués, à la somme de 562 fr.
cent, j
le condamne pareillement en tous les autres dépens faits par ledit
sieur M o m et, tant en défendant que dem andant, sur les.autres de
mandes , lesquels ont été taxés et liquidés comme dessus, à la
somme de 29g,francs 11 centimes, et condamne ledit sieur Canillac
aux deux tiers des dépens faits par ledit sieur Croze,. suivant la taxe qui
en sera faite,, et même aux deux tiers des derniers.dépens adjugés
ci-dessus, audit sieur M o m et, le tout non compris, l’expédition et
signification du présent jugement,, qui. se ro n t su p p ortées par ledit
55
sieur C ro ze, sauf à lui à en répéter les deux tiers contre ledit sieur
de Canillac , auxquels deux tiers celui-ci est pareillement condamné y
et quant: à la condamnation prononcée contre ledit sieur Croze en
payem ent dudit b illet, le tribunal ordonne que cette partie du pré
sent jugement sera exécutée nonobstant tout appel, et audit cas
à la ch a rg e de do n n er c a u tio n , atte n d u que ledit. sieur M om et esl:
fondé en titre à cet. égard*.
3
Fait et ju g é , le 21 messidor an i '..
Le sieur Croze ayant interjeté appel de ce jugement,,
Te sieur Momet voulut,. d’après ses dernières dispositions ,
le faire payer, en donnant caution ; mais le sieur Croze
demanda des défenses à la cour, et insista pour en obtenir;
malgré l’article 5652 du Code civil. Cependant, par arrêt
du
il fut débouté de sa demande, mais à là
charge par le sieur Momet de donner caution jusqu’à,
concurrence de 3 6 0 0 a francs.
�( 2? )
C’est en cet état qu’il s’agit de répondre aux moyens que
lé!1sieur Croze propose sur l’appel.
i
m o y e n s
.
L ’objet principal de la cause est de savoir si le sieur
Croze peut être fondé à retenir ce qui reste à payer duprix de la vente du 29 prairial an 4 ,'soit à cause du trou
ble qu’il éprouve par une demande en désistement, soit
sur le fondement de ses propres inscriptions, soit enfin
sous prétexte que le sieur Momet n’a p'as achevé de rem
plir les conditions auxquelles il s’étoit soumis.
Pour abréger beaucoup la discussion de tous les chefs
de co n clu sion s re sp e c tiv e s , le sieu r M o m e t passera ra p i
d em en t sur ce u x q u i p résen ten t p eu d ’i n t é r ê t , afin de ne
demander l’attention de la cour que sur les points les plus
importans de la contestation.
!
Le i er. chef des conclusions- du siéur Croze formoit
double emploi et n’a plus aujourd’hui d’intérêt ; il demandoit que le sieur Momet fît cesser les poursuites du sieur
de Labastide ; mais personne ne savoit mieux que le
sieur C ro ze que ces poursuites étoient éteintes par un
acte antérieur au procès. Le sieur Momet avoit payé la
créance du sieur Labastidè.
Le 3e. chef des mêmes conclusions est décidé par les
premiers juges, conformément aux principes. Le sieur
Croze n’ayant pas de titre, ne pouvoit faire une saisiearrêt'sans autorité de justice. A u reste le payement du
billet dui sieur Croze est l’objet d’une demande, et ses
moyens sur ce point seront examinés ci-après. ' p '
D 2
�( 28 )
L e 4e. chef a pour objet les fermages de 1795 et années
suivantes. A cet égard c’est la clause du contrat qu’il faut'
consulter. « P ou rra, le sieur Croze, disposer du domaine
« comme de sa chose propre, à compter de ce jour, à
« commencer la jouissance et fermages parles années 179$
« et 1796, le vendeur se réservant seulement les fer« mages de 1794, qu’il n’a pas même touchés. »
A in si, faculté ppur le sieur Croze, réserve pour le sieur
Momet.
Il faudroit donc que le sieur Croze offrît de prouver
que le sieur Momet a reçu au delà de sa réserve ; et il
ne l’articule pas même. C’est donc à lui à se poui’voir
pour cet objet; car le sieur Momet lui a seulement dit à
cet égard qu’il se départoit des fermages passés, et renoncoit
à les recevoir.
o
Le 6e. chef est sans objet. Le sieur Momet auroit
pu objecter au sieur Croze qu’il devoit seulement lui
fo u r n ir les titres d e p r o p r i é t é , aussitôt que le sieur de
Canillac les lui auroit remis ; néanmoins il a déjà donné
les titres les plus importans au sieur Croze, qui les a
dans son dossier ; il a offert le surplus à Brioude , en
jugement.
Les e. et 7e. chefs n’ont de même plus d’intérêt. Le
sieur Momet s’étoit obligé à justifier des quittances des
créanciers de Canillac pour 400000 francs ( assignats ) ;
mais il pourroit dire encore que cette clause étoit liée à
la faculté qu’avoit le sieur Croze de purger son contrat, et
de demander mainlevée des oppositions du fait du sieur
Momet ou de ses auteurs. Mais le sieur Momët rapporte
des quittances excédant de beaucoup la somme promise ;
5
�9
( 2 :;)
il rapporte aussi la mainlevée de toutes les inscriptions.
Le 9e. chef des conclusions du sieur Croze est encore sans
objet; c’est même une demande extraordinaire. Il veut que
le sieur Momet soit tenu de lui représenter et remettre
les titres de créance qu’il peut avoir contra luù Mais
ces titres de créances sont le billet de dépôt. L e sieur
Croze n’en désavoue pas l’existence ; il en a même saisi le
montant en ses mains. Ainsi le titre de créance du sieur
Momet lui sera remis sans difficulté aussitôt qu’il l’aura
payé.
Maintenant il est aisé de réduire le surplus delà cause.
Le sieur Momet a formé deux chefs de demande, qui sont
le payement du billet de ig o francs avec intérêts, et la
mainlevée des inscriptions du sieur Croze. Le sieur Croze
répond à cette demande : Je vous payerai quand vous
aurez fait cesser la demande du sieur Canillac, ou que
vous m’aurez fourni des immeubles d’égale valeur au do
maine de la Védrine ( 2 e. et 10e. chefs de demandes.) ;
quand vous m’aurez payé 2873 francs pour le temps que
j’ai employé au sujet de votre procuration ( 8e. chef. ) ;
enfin je ne puis vous donner mainlevée de mes propres
inscriptions , parce que vous me devez une garantie.
Ainsi ce qui reste à discuter présente les questions sui
vantes : i°. Que doit le sieur Croze au sieur Momet?
20. Le sieur Croze est-il fondé à retenir ce qu’il doit,
comme prétendant à une garantie de la demande formée
par le sieur de Canillac? 30. Est-il dû au sieur Croze 2873 f.
pour dépenses faites comme fondé de pouvoir? 40. A-t-il
droit de maintenir les inscriptions par lui faites sur le
sieur Momet ?
•
•
65
�Que doit le sieur Croze au sieur Momet ?
Il lui doit le montant du billet de 19660 francs, causé
poiir dépôt, sous la date du i prairial an 4 ; il le doit
en deniers ou quittances. Ainsi, au cas qu’il représente,
comme il le d it, des preuves de payemens faits pour près
de moitié de la somme, il n’y aura pas de difficulté à cet
égard, sauf que les imputations se feront d’abord sur les
intérêts.
Mais , dit le sieur Croze, je ne dois pas d’intérêt, parce
qu’un dépôt n’en produit pas ; le billet d ’ailleu rs n’est q u e
de 18000 francs en principal et i o francs pour intérêts
de deux ans. Si vous voulez que ce soit un simple billet,
alors, comme c’étoit un temps d’assignats ou mandats,
votre capital sera réduit à l’échelle de dépréciation, et je
vous p a ye ra i des in térêts.
A l’échelle de dépréciation ! Le sieur Croze a-t-il osé
sérieusement le proposer, quand les lois de l’an 6 sont
formelles, et quand déjà il a acheté à si vil prix ?
Il prétend que 600000 francs, de vendémiaire an 4, ne
valoient que 8000 francs numéraire. Que yaudroient donc
19650 francs en'prairial suivant?
Il veut persuader que le sieur Momet a gagné beaucoup
sur lui, tandis que le domaine acquis en apparence en assi
gnats, a coûté au sieur Momet 68600 francs, malgré lu i,
quoiqu’il ne l’eût vendu au sieur Croze que 36000 francs.
Le sieur Croze confond ses propres idées, quand il dit
que le billet du 1 prairial est un dépôt, pour en refuser
5
65
5
�(30
Pintérêt; car précisément il en a fait line saisie-arrêt,
comme d’un prix de venter A u reste le fait est aujourd’hui
reconnu» *
Le billet cependant n’a en capital que 18000 francs;
le sieur Momet se fait un devoir d’en convenir : mais
l’intérêt de cette somme sera dû après le terme fixé entre
les parties ; et les principes à cet égard sont assez certains
pour ne pas exiger de discussion.
On sait que tout prix de vente porte intérêt de sa
nature, s’il n’y a stipulation contraire *, car le capital
représente un fonds qui produit des fruits annuels. L ’ar
ticle i
du Code civil n’a rien changé sur ce point aux
lois précédentes..
652
f. I L
L e sieur Croze est-il fondé à retenir ce qi? il doit, comme
prétendant à une garantie de la demande ' formée
\par le sieur de Ganïllac ? est-il fon d é à demander un
remplacement, en immeubles T du domaine de la
Védrinel.
Sur cette question , le sieur Momet ne disputera pascontre les principes ; ca r, si réellement il est garant du
désistement ,, il n’auroit pas d’action jusq.ù’à ce qu’il l’eût
fait cesser, ou fourni une caution..
Ce n’est pas que le sieur Croze ne lui ait contesté,
même en ce cas , le droit de réclamer son payement,
moyennant caution. Cependant l’article 1653 du Code
civil en a la disposition expresse , et les lois romaines y
étoient conformes. Dom inu quœstione rnotâ emptorpre—
�32
(
)
tium solvere non cogitur, nisijidejussores idonei prcestentar.
’
•
Mais le sieur Croze a-t-il prouvé que le sieur Momet
fût son garant ?
Souvenons-nous que le sieur de Canillac demande le
désistement d’un domaine appelé de la Védrine, qu’il pré
tend distinct et séparé de celui de la Chassaigne , d’après
des baux et d’autres actes. Le sieur de Canillac a arti
culé que le domaine seul de la Chassaigne contient en
terres, prés et bois , les mêmes surfaces qu’il a vendues
l pour deux cent dix septerées.
Si le sieur de Canillac le prouve , et s’il obtient le dé
sistement qu’il demande, comment le sieu r C ro ze pourro it-il assurer avec pudeur que le sieur Momet lui a
vendu un second domaine?
Avant de répéter cette coupable prétention, que le sieur
Croze jette donc lesyeux sur la forme de l’acte qu’il a si fort
dépecé et dénaturé , mais dont la vérité sort malgré lui.
S ’il a eu le p ro je t d ’en lacer u n cito yen sans d é fia n c e ,
en méditant de si loin les moyens qu’il emploie aujour
d’hui , il n’en est pas encore à Yeçentus fraudis ; car il
est singulièrement resserré dans les clauses qui restent,
et qu’il ne peut effacer.
Dans une vente, il ne faut pas chercher l’intention
dans des équivoques, surtout pour ce qui regarde la
chose vendue ; car c’est là la substance principale de l’acte;
et dès-lors les mots ne sont plus rien pour désigner l’objet
vendu , quand il est matériellement exprimé.
En effet, que je vende un terrain d’une surface donnée
ou avec des confins constans, sans difficulté l’erreur sur
la
�( 33 )
la dénomination ne prévaudra pas, parce que la cliose
vendue sera constante.
O r , ici est-il possible de se méprendre ? et par quelles
équivoques le sieur Croze voudroit-il persuader que le
sieur Momet lui a vendu deux domaines, quand même
il n’en auroit acheté qu’un?
Le sieur de Canillac vend à Momet des bâtimens et
jardins ayant cinq septerées cinq quarteronnées ; et le sieur
Momet vend à son tour au sieur Croze des bâtimens et
jardins de la même surface , avec les mêmes expressions
copiées mot pour mot.
. En terres, en prés, en b o is, en vignes, en terrains in
cultes , on voit encore dans les deux ventes les mêmes
détails de contenue, sans la plus légère différence.
Le sieur de Canillac termine par énoncer que le tout
se porte à deux cent dix septerées une quarteronnée ; et
le sie.ur Momet ne manque pas de recopier aussi la même
redondance,-comme s’il eût voulu mieux avertir qu’il
avoit le projet marqué de s’asservir à transcrire en toutes
lettres tout ce qui concernoit l’étendue et les surfaces de la1
chose vendue.
Enfin ? le sieur de Canillac garantit les deux cent dix
septerées une quarteronnée, à dix arpens près; le sieur
Momet encore garantit la même étendue, et ne garantit
pas un pouce au delà.
Il avoit le droit de limiter sa garantie : il en a
sagement usé. O r , tant que le sieur Croze ne sera pas
fondé à dire au sieur Momet : Je n’ai pas les deux
cents septerées que vous m’avez garanties, il n’a à cet
égard^ aucune demande à former contre lui ; car ce ne
E
�( 34
\
peut être-qu’après avoir prouvé ce déficit, et si dans le
seul domaine de Chassaigne il ne trouve pas les deux cents
septerées, mesure du lieu , qu’il pourra former une de
mande en supplément contre le sieur Momet. Mais le
sieur Croze qui a fait arpenter Chassaigne, sait bien que
les deux cent dix septerées s’y trouvent.
Quel seroit donc l’interprète astucieux q u i, trouvant
ainsi la chose vendue désignée avec tant de détails ,
s’obstineroit à la chercher plutôt dans des mots et dans
des circonlocutions ?
En effet, sortons de cette partie claire et précise du
contrat , nous ne trouvons plus que de l’obscurité ou des
pièges.
Ces ratures nombreuses , ces quatorze renvois, ces
laborieuses corrections font naître tant d’idées pénibles,
qu’il vaut mieux ne pas se jeter dans le détail des obser
vations qu’il y auroit lieu de faire à chaque ligne.
U n e seule r é fle x io n ju g e cette vente. Si le sieur Croze
n ’a pas prévu et p r é p a r é sa d éfen se du p ro cès actuel ,
alors le deuxième renvoi n’est de sa part qu’une précau
tion contre le sieur de Canillac, et il n’a pas d’action
contre le sieur Momet.
Si au contraire il veut trouver dans le deuxième renvoi
une action et une précaution contre le sieur M om et,
alors il sera clair pour tout le monde que le troisième
renvoi est une précaution en faveur du sieur Croze ; et
nul homme de bonne foi ne se défendra d’y voir le
consilium fraudis le plus évident, et le motif radical
de toutes les autres corrections.
Que cependant le sieur Croze ne suppose pas que cette
�35
(
)
option lui soit laissée ; car il ne s’agit pas d’interpréter
ce qu’il a voulu faire, mais ce qui a été fait. Les règles
d’interpi-étation des actes, sont, d’après les lois, toutes
favorables à la bonne fo i, sans jamais se prêter à pré
férer même le sens littéral
l’intention connue. Co/ztrahentium voluntatem potiùs qucim verba spectari
plaçait : principe rappelé par l’article 1 1 du Code civil.
Que le sieur Croze cesse donc de placer sa confiance
dans son troisième renvoi, où il a cru insérer un do
maine ; car des paroles vagues ne créent pas une vente;
et il verra encore dans l’article 1163 du Code que les
termes généraux doivent toujours se restreindre à l’objet
positif de la convention.
Si ces principes ne jugent pas toute la question , si
déjà l’intention de la vente n’est pas assez claire par le
détail minutieux de la chose vendue , on peut suivre
encore le sieur Momet dans la tradition qu’il effectue.
Qu’abandonne-t-il au sieur Croze ? tout droit de pro
priété qu il a et peut avoir sur ledit domaine. Comment
déclare-t-il en être propriétaire ? comme îayant acquis
du sieur Canillac ^par acte du 30 vendémiaire an 4.
Quels actes lui demande le sieur Croze pour ses titres
de propriété ? les titres de la fam ille de Canillac.
A in si, le sieur Momet ne vend évidemment que ce
qu’il a acheté par Vacte du 30 vendémiaire an 4; il en
fournit une expédition notariée au sieur Croze : conséquemment il n’emploie le mot vente au lieu de subro
gation , que pour ajouter sa garantie à celle du sieur de
Cnn illac.
1617
161
four-
à
56
Enfin , les articles
et
8 du Gode civil
E z
�o s y
nissent au sieur Momet un moyen de droit qui le fait
s’applaudir d’avoir été assez soigneux pour détailler toutes
les mesures de la chose vendue.
Car le maximum de l’excédant seroit d’un vingtième
en sus ( ce qui se rapporte aux dix arpens en plus ou en
moins Mais cent ti’ente septerées à englober de plus,
ne sont pas le vingtième de deux cent dix (i).
(i) Pendant l’impression de ce mémoire, deux actes ont été déposés au greffe
de la co u r, à la diligence du sieur de Canillac, et leur existence est très-im*
portante pour la cause.
Il paroit que le sieur Croze avoit des craintes sur sa propriété, à cause de
l’émigration du sieur de Canillac ; et sous prétexte de lui être utile dans les
diligences à faire pour les séquestres, ou môme p eu t-être de lui dem ander une
ratification de la vente du 3o vendémiaire an 4 , il conçut le projet d’arranger
les choses de manière à éviter les difficultés. En conséquence, au lieu de de
m ander directement une ratification au sieur de Canillac, le sieur Croze ne
voulut qu’une procuration : le plus adroit étoit de se la faire adresser par le
sieur M om et, pour pouvoir dire, à tout événement, que c’étoit son ouvrage ;
et il en vint à bout, soit par ses instigations, soit par le canal d’un des commis
du sieur M omet, avec lesquels il étoit e n r a p p o r t , ainsi qu’il résulte des lettres
du sieur C roze, des 8 brumaire an , 27 prairial et 11 messidor an 6 , fort
curieuses, et qui montrent avec quel art le sieur Croze enlaçoit le sieur
M om et, tantôt par des prières, tantôt par des menaces.
5
P a r-d e v a n t.......... a été présent le cit. Ignace B ea u fo rt-C a n illac, lequel donne pouvoir
à ........ de réclam er le m obilier saisi sur lu i p a r........... et le prix de celui vendu par l ’admi
nistration.........de réclam er les fermages échus depuis 1789, et qu’il n ’a pas cédés au sieur
M om et, dont en tant que de besoin il ratifie la vente f ; donner quittan ce, etc. F ait le 19 ger
minal an
6.
■f portée en celle de C hassaigne, qu’il donne pouvoir de ratifier, si besoin est.
Le sieur Croze, muni de cette procuration qui n'expliquoit rien, voulut
la faire expliquer plus clairement; en conséquence, après l’avoir remplie du
nom du sieur Cailhe., il se fit donner par lui l’acte suivant :
P a r-d e v a n t........ a été présent le cit. J e a n -R e n c C a ilh e .......... fondé de pouvoir du sieur
de C an illac, par acte du 19 germinal an 6 .........le q u el, en ladite qu alité, ratifie, confirme
4
et approuve, et même renouvelle, si besoin e s t , la vente faite par e-cit. de C a n illa c... . . .
�E st-il dû au sieur Croze 2873 fra n cs pour dépenses
fa ites en vertu de la procuration du sieur Momet ?
Il
est étrange que le sieur Croze ait osé former une
demande de cette nature, sous prétexte qu’il y a eu un
intervalle du 27 prairial au 29 , et qu’il a été fondé de
pouvoir avant d’être acquéreur.
Mais s’il est clair que le sieur Croze n’a jamais pu
des domaines de Chassaigne et dépendances, S O U S ZE N O M DE L A V É D R I N E , ou toute autre
3
4
dénomination........par contrat reçu D e lo c h e , du o vendémiaire an ......... L a présente ratifi
cation acceptée P O U R le cit. Momet P A R le cit. Jean Croze , homm e de l o i , demeurant à
B rio u d e , présent et a ccep tan t, tant pour ledit cit. M om et, et comme fondé de procuration
gén érale, que personnellement pour lui-méme, comme acquéreur des mêmes b ie n s, suivant
le contrat du 29 prairial an > etc. F a it le 16 prairial an 6.
4
Ainsi peut-on être surpris que le sieur Croze ait abusé de la confiance du
lieur Momet avec qui il traitoit, lorsqu’il abuse de la bonté d’un honnête
homme qui n’a aucune raison d’être en défiance contre lu i, au point de lui
faire exprimer des clauses qui sont hors de sa procuration?
Certainement le fondé de pouvoir n’a pas deviné si le domaine de la Védrine
étoit compris dans la vente du 3o vendémiaire an 4; il falloit que l’auteur dé
cette divination y eût plus d’intérêt que le fondé de pouvoir ; Is f e c i t , oui
prodest .
Le sieur Croze a encore très-justement calculé qu’il falloit faire trouver la
veilte det la Védrine dans la vente du 3o vendémiaire an 4 , pour îa faire
résulter de la vente du ¿9 prairial; et voilà pourquoi la ratification ou vente
renouvelée de la Chassaigne et la Védrine est acceptée par lui pour le sieur
Momet; voilà pourquoi encore, dans les lettres de ratification prises l’année
suivante sur la vente du o vendémiaire, qui comprenoit le domaine de la
Chassaigne, le sieur Croze ne put s’empêchpr de faire mettre la terre-do
maine. Ce nimia precauùio juge tout à la fois ses intentions ou ses calculs;
et personne ne se défendra de dire qu’en achetant loyalement et franchement
une propriété qu’on connoît, on la fait désigner sans équivoque, au lieu ¿’em
ployer autant de détour».
3
�( 3 8 )
7 user de cette procuration avant la vente, il en résultera
q u ’alors la procuration donnée par le propriétaire du
domaine de la Chassaigne, pour le régir , gouverner ,
administrer et vendre, sera annullée de plein droit par
la vente. Car alors le sieur Croze n’a plus eu à i égir,
administrer ni vendre pour le compte du sieur Momet,
ce qui lui appartenoit à lui-même.
O r, la procuration n’a été enregistrée à Paris que le
messidor an 4, par conséquent après la vente du 29 prai
rial. Il n’a donc pas été au pouvoir du sieur Croze de faire
usage de cette procuration avant d’être acquéreur.
Dira-t-il que lu procuration portoit aussi autorisation
de régler les loyers échus et à échoir, débattre et arrêter
les comptes? Mais par sa vente du 29 prairial, il a eu soin
de faire délaisser au sieur Momet son droit aux fermages
antérieurs : conséquemment, si le sieur Croze a fait des
poursuites, c’est pour lui ; s’il a réglé des comptes, c’est
pour lui. Il seroit donc bien commode qu’il eût une ré
pétition de 2873 francs contre un autre, pour avoir fait
ses propres affaires.
5
§. IV ,
L e sieur Croze a-t-il droit de maintenir les inscriptions
qiCil a fa ites sur le sieur Momet ?
Le sieur Croze avec des inscriptions aura des procès ;
avec une transcription il n’en aura pas. Cependant depuis
dix ans il ne veut pas transcrire.
Mais si le sieur Croze aime mieux des procès que sa
tranquillité, le sieur Momel aiine mieux sa tranquillité que
�( 39 )
des procès ; et il ne doit pas être victime de ce goût par
ticulier au sieur Croze. On ne vend pas pour être gêné
perpétuellement dans ses affaires, et pour être toute sa
vie esclave de son acquéreur. Cette gênea été, etest telle,
qu’elle a opéré successivement la ruine du sieur M om et,
qui ayant fait, depuis l’an 7, nombre de ventes, 11’en peut
toucher la totalité du prix; et d’après des reventes faites
par plusieurs de ses acquéreurs, il a été exposé aux pour
suites les plus x-uineuses pour le rapport de la seule main
levée du sieur Croze, ou des sommes qui lui avoient été
payées. Les plus honnêtes se sont contentés , ne pouvant
toucher eux-mêmes leur prix déposé, de toucher du sieur
Momet les intérêts de ces sommes ; intérêts qui depuis
long-temps montent à 7496 francs par an. Le sieur Momet
peut donc avec raison dire qu’il eût été bien heureux
pour lui de n’avoir jamais connu le sieur Croze.
A la vérité un acquéreur a une hypothèque sur les
biens de son vendeur pour la sûreté de sa garantie ; mais
il a en même temps une voie ouverte pour éviter les re
cherches des créanciers qui ont aussi hypothèque sur l’im
meuble ; c’est de faire transcrire.
Aussi les lois sur les hypothèques parlent des oppositions
ou inscriptions faites en vertu de créances, et ne disent
rien de celles qui n’ont pour but qu’une garantie; ce qui
prouve que le législateur a entendu que la voie de la trans
cription y suppléeroit; car l’acquéreur n’est pas un créan
cier. La loi a voulu une inscription d’office pour le ven
deur, s’il lui restoit dû quelque chose; mais elle n’a pas eu
la même précaution pour l’acquéreur, quoique la garantie
soit une clause tellement d’usage, que la loi la supplée
�C 4° )
si elle n’est pas exprimée, et s’il n’y a clause contraire.
Les acquéreurs qui s’obstinent à vouloir faire des ins
criptions disent ordinairement que s’ils ne craignent pas
les créances, au moins ils peuvent craindre les demandes
en éviction, qui souvent peuvent survenir au bout d’un
très-long-temps, à cause des minorités qui se succèdent.
Mais , sous ce prétexte, on seroit forcé de maintenir des
inscriptions pendant des siècles; et avec cette terreur pa
nique , celui qui vendroit une seule propriété auroit le
reste de ses biens en séquestre, sans pouvoir en disposer.
Aussi la jurisprudence a-t-elle restreint sur ce point les
prétentions des acquéreurs, en les obligeant à purger leur
vente , pour forcer leur vendeur à faire radier les inscrip
tions , sans qu’ils pussent eux - mêmes en conserver une
après la mainlevée de toutes les autres.
C’est ce qu’enseigne M. Grenier, tribun, en son Com
mentaire de l’édit de 17 7 1, page 2Ô2 de la seconde édi
tion. Il cite à cet égard un arrêt conforme, rendu au parle
ment de Paris, entre le sieur deM âconetla dame Gironde,
le 3 mai 1785. Le parlement de Rouen avoit jugé de
le 18 mars 1779, et le
de
31
1784.
C’est encore ce qu’ a jugé la seconde section de la
c o u r, le
prairial an 11 , entre les sieurs Choussy et
Gardelle. Ce dernier vouloit maintenir une opposition
faite par lui pour sa garantie, et prétendoit que le sieur
Choussy n’ayant plus d’immeubles, il avoit intérêt de conserver ses droits sur celui qu’il avoit vendu le dernier.
Mais le sieur Choussy vint à l’audience avec la mainlevée
des oppositions qui avoient frappé les lettres obtenues sur
sa
parlement
25
même
Toulouse le août
�C 41 )
sa vente, et la cour lui accorda la mainlevée de l’oppo
sition de garantie formée par le sieur Gardelle.
Ainsi le sieur Momet répète au sieur Crose-: Faites
transcrire à vos frais votre contrat, comme vous en avez
la faculté ; notifiez-moi les inscriptions, s’il en existe : tant
que je seraien demeure d’en avoir mainlevée, vous aurez
droit de maintenir vos inscriptions ; sinon vous n’êtes
pas le maître delà faire durer éternellement, en ne faisant
jamais transcrire.
C’est là ce qu’a jugé le tribunal de Brioude, et il est
clair dès-lors qu’il s’est parfaitement conformé à la juris
prudence : ce n’e$t pas seulement en point de droit qu’il
a bien jugé, car, par le fait, le sieur Momet a établi qu’il
n’existoit plus d’inscriptions sur le bien de Cliassaigne ;
Ainsi le sieur Croze n’a de motifs de précaution que dans
son désir de ne pas payer, et dans son projet bien con
duit de consommer la ruine du sieur Momet.
Si la justice a atteint le sieur Croze dans sa propre ville,
et si ses concitoyens même ont été indignés des horribles
chicanes qu’il renouvelle sans cesse depuis tant d’années ,
pour s’approprier, au plus vil p rix, une belle propriété
qu’il voudroit accroître encore , à combien plus forte
raison doit-il s’attendre à ne pas se jouer de l’intégrité de
la cour. I^e sieur Momet pourroit mériter quelqu’intérêt,
par la dure position à laquelle le sieur Croze, en gênant
toutes ses affaires, est parvenu à le réduire ; mais il se
contente de gémir en lui-même du malheur de l’avoir
connu, et il n’osera solliciter de la cour que la plus rigou
reuse justice. 11 ne plaide ici que-cfe dûmno vitando $
F
�(40
et loin de rien dissimuler ; il se présente avec des pièces
o rig in a le s qui doivent seules éclairer et convaincre ; car
ses intérêts ne seront jamais mieux défendus que lors
que la cour sera à portée de tout voir, et de prononcer
en plus grande connoissance de cause.
Signé M O M E T ,
Me, D E L A P C H I E R , avocat.
Me C R O IZ IE R , avoué.
A R IO M , de l'imprimerie de L à n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d'appel.'— M ai 1806.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Momet, Gaspard-Roch. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Croizier
Subject
The topic of the resource
fraudes
ventes
abus de confiance
notaires
Description
An account of the resource
Mémoire pour Gaspard-Roch Momet, propriétaire à Paris, intimé ; contre Jean-Joseph Croze, sous-préfet de Brioude, appelant ; en présence d'Ignace Beaufort-Monboissier de Canillac, appelant.
Extrait de minutes du contrat de vente. Extrait de jugements.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1795-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
42 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0411
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Paris (75056)
Chassaigne (domaine de)
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Domaine public
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Text
M É M O I R E
POUR
ANNE NAZO,
V E U V E DU GÉNÉRAL DESTAING,
CONTRE
LES HÉRITIERS DESTAING.
A RIOM,
D e l ’I mfrimeme du P a l a is , chez J.-C. SALLES.
A v r i l i 8ii.
�MÉMOIRE
POUR
Anne
N A Z O , veuve de J a c q u e s - Z a c h a r i e
D E S T A I N G , général de d iv isio n ,
en son n o m ,
et com m e tutrice de M a r i a D E S T A I N G , sa
fille , intimée;
CONTRE
Les sieurs et demoiselle D E S T A I N G
,
appelants.
L ocuti sunt adversùm me linguâ dolosâ , et sermonibus
odii circumdederunt m e, et expugnaverunt me gratis .......
E t posuerunt adversùm me mala pro bonis , et odium pro
dilectiotie med Ps. 108.
Uen Egyptienne, jetée hors de sa patrie par un concours
d événemens que toute la prévoyance humaine n’aurait pu maî
triser ni prévoir, plaide depuis huit ans pour conserver un nom
qui lui fut donné avec solennité sur les rives du N il, et qu’elle
a toujours porté avec honneur.
�( 2 )
Tout ce que la capitale de l’Egypte avait d’illustre , fut le
témoin de son mariage. Les fêtes qui l’accompagnèrent sont
restées dans la mémoirede tous les héros de l’armée d’Orient,
qui l’attestent : PEmpereur lui-même, convaincu de la réalité
de ce mariage, fit donner une pension à la veuve d’un général
qu’il avait estimé. La famille Destaing, plus convaincue que
personne, et plus intéressée à l’être, s’était fait un devoir d’ap
peler, d’accueillir, de présenter aux liabitans de leur ville cette
femme malheureuse, comme flattée de lui appartenir.
A insi, du moins, cette étrangère qui n’ aborda les rivages de
France que pour apprendre la mort de son époux, avait la con
solation d’exhaler sa douleur parmi ceux qui avaient à pleurer
une perte commune. Sa fille j née au milieu des tempêtes de la
m er, se tr o u v a it dans un asile assuré au sein d’une lamille qui
désormais était la s ien n e . T e l l e fut la situation de la dame
Destaing, pendant une année, après la mort de son mari. Tout
ce que les lois de France prescrivent pour rattacher une orphe
line à ceux sous la protection desquels elle est placée, fut exécuté
par la famille Destaing, comme si la providence avait voulu lui
ôter les moyens d’être injuste; et déjà à Aurillac, comme au
Caire , une n o t o r ié té h o n o r a b l e a s s ig n a it dans la société, à M a
dame Destaing et à sa fille, le rang auquel elles avaient droit de
prétendre.
Quel démon jaloux a troublé cette harmonie, et a pu réduire
la dame Destaing à chercher les preuves de son état, après en
avoir eu la possession légitime aussi publiquement et sans effort?
Quel événement inopiné a transformé tout d’un coup une famille
douce et hospitalière en une horde d’ennemis acharnés, cherchant
d ’équivoques calomnies jusque dans le secret d’une correspon
dance tronquée, outrageant la mémoire de celui qui illustra leur
nom, et disputant avec mauvaise foi contre tous les signes de
vérité qui les confondent ?
L ’or! cette divinité des nations, a brillé aux yeux des héritiers
Destaing. La succession du général leur a semblé une proie qu’il
�3
.
(
)
fallait disputer avec une opinicitre constance; et dès cet instant
sa veuve et sa fille ne leur ont semblé que deux êtres importuns ,
qu’il fallait rejeter et méconnaître.
A lo rs, par une brusque inconséquence, la dame Destaing
présentée à une ville entière comme une sœur; son enfant placé
dans tous les registres d'Aurillac , comme héritière légitime du
général, n’ont plus été que des aventurières inconnues, introduiles par une astuce criminelle dans une famille étrangère.
Ce n’était point assez, pour une femme faible et sans défense,
d’avoir pour elle l’opinion publique et la conscience de la vérité.
Que peut la vérité contre une calomnie soutenue avec éclat et
persévérance? Le vulgaire, qui aime le merveilleux, commence
à douter, aussitôt que des fables injurieuses ont été préparées
pour donner à sa curiosité un autre aliment.
Mais Ce n’est point au tribunal de l’opinion que d’aussi grands
intérêts sont soumis ; la dame Destaing est placée sous l’égide
des lois; et si elle est forcée de gémir des lenteurs de la justice,
du moins elle pourra se féliciter de ce que toutes les formules
exigées d’elle ne laisseront aucun léger doute aux esprits les plus
incrédules.
Cependant la dame Destaing n’a nullement le projet de se
renfermer dans des moyens judiciaires, et de dédaigner l’opinion
qu’on peut avoir d’elle; il lui importe, plus qu’à-personne, de
donner de la publicité à sa conduite, et de proclamer les témoi
gnages honorables de ceux qui ont été à portée de la juger. Elle
veut de l’estime; et rien, dans ses actions, ne lui a ôté le droit
d’en obtenir.
F A IT S .
Tous les faits de cette cause sont liés aux grands événemens
de l’histoire.
Une armée de héros, une colonie de sa vans allèrent en l’an 6
porter en Egypte la gloire du nom Français.
On se souvient de la rapidité de cette conquête. Alexandrie
�(4
\
fut prise d’assaut le lendemain même du débarquement. Les
Mamelouks furent vaincus dès leur première apparition , et la
capitale ouvrit ses portes^ l ’armée victorieuse.
Cette armée n’était point au Caire comme dans une ville con
quise. Son premier élablissement fut rinstitut des sciences et
arts, chargé de donner des plans d’amélioration pour les canaux
du Nil, r'agriculture et le commerce.
Cependant les héritiers Destaing, ramenant tout à leur idée
dominante, ne veulent voir dans les chefs de cette armée, que
des conquérans licencieux, qui, comme dans un vaste sérail,
appelaient à eux toutes les victimes qu’il leur plaisait de choisir,
ou plutôt n’avaient qu’à attendre celles que les pères de famille
eux-mêmes venaient leur présenter, par politesse et pour prix de
la victoire.
Laissons cette atroce calomnie à la réflexion des lecteurs in
formés des usages de l’Orient, et poursuivons un récit plus véri
dique.
Quoique le but de l’expédition d’Egypte fût caché dans ces
vastes conceptions qu’il n’appartient pas au vulgaire de péné
trer, tout prouve que le premier projet du grand homme était la
fondation d’une Colonie française. Au reste, l’établissement de
l ’ a r m é e e n E g y p t e d e v i n t b ie n tô t u n e nécessité. L e m a l h e u r e u x
d’Aboukir, et la perte de la flotte achevèrent d’ôter aux
Français débarqués tout espoir prochain de retour.
com bat
Il fallut donc tourner toutes ses idées vers cette terre étran
gère , s’y créer un centre d’affection, s’y faire une patrie.
E t, certes, voilà quelle a dû être, quelle a été en effet la dis
position des esprits, ubi benè, ibi patria : rien n’est plus fran
çais que cette maxime; et bientôt les vainqueurs de l'Egypte se
regardèrent comme naturalisés sur les bords du Nil.
L e mariage seul pouvait resserrer les liens entre les deux na
tions. Les généraux français en donnèrent le premier exemple;
ils devaient ce gage à la confiance qu’ils voulaient inspirer. Ce
pendant ils surent allier à leurs vues politiques les combinaisons
�¿l’intérêt que les chances de l’avenir ne leur permettaient pas
d’abandonner.
L e général en chef Menou épousa une jeune et riche musul
mane, fille du maître des bains d’Alexandrie. Les généraux Lantin , Delzons et Bonnecarrère épousèrent des filles de négocians
établis à Rosette; plusieurs autres généraux et militaires français
suivirent cet exemple.
Les pères de famille d’Egypte n’étaient donc pas différens
de ceux des autres régions. Ils attachaient de importance au
mariage de leurs filles ; ils veillaient à leur bonheur et ne les
1
prostituaient pas.
Joanni Nazo, ancien officier au service de Russie, et élu com
mandant du bataillon des Grecs par le général de l ’armée
française, avait, à cause de ses fonctions, des relations habituelles
avec le général Destaing, q u i, de la province de Cathié, ou il
fut envoyé d’abord, vint commander la ville du Caire.
S o p h i e M i s c k , é p o u s e d e J o a n n i N a z o , a v a i t , d ’ un p r e m i e r
m a r i a g e , d e u x f i l l e s , d o n t l ’a în é e ( A n n e ) a v a i t d ix -s e p t a n s.
Le général Destaing demanda la main d’Anne Nazo ( née
Trisoglow * ) ; il l’obtint, et regarda cette alliance comme un
grand avantage. Joanni Nazo avait alors beaucoup de fortune.
Il n’était pas, comme les héritiers Destaing se sont plu à le
dire, un marchand d’ea u -d e -v ie; Nazo était fermier-général
des droits imposés par le Grand-Seigneur sur les liqueurs spiritueüses de tout genre : on sait que les Musulmans, à qui lekoran
les défend, ne font en Egypte que la moindre parlie de la p o p u
lation. Tous les c o m m e r c e s y sont au pair, et les rangs ne s’y me
surent que par la fortune. Il faut bien dire tout cela aux héritiers
Destaing, pour qu’ils cessent leurs railleries amères contre une
famille à laquelle en Egypte on accordait quelque distinction, et
qu’ils soient soulagés du moins du poids d’une mésalliance.
*
En Egypte, le second mari donne son nom aux eufans de sa femme,
en sigue de la puissance paternelle qu’il a sur eux.
1
\
�( 6 )
A n n e N a zo , promise au général Destaîng, fut conduite par
sa famille clans l’église grecque de Saint-Nicolas , où elle fut
reçue par le patriarche, qui daigna lui-même se charger de la
célébration.
On demande, depuis huit ans, à une jeune épouse, dans
quelle forme légale fut constatée cette cérémonie, et si les
prêtres de sa religion tiennent des registres publics. Quelle est
l'européenne qui, ayant eu toute l’instruction et toute la liberté
dont d’autres mœurs ont privé les femmes de l’Orient, serait bien
en état de rendre compte de l’observation des formes légales qui
ont accompagné son mariage? Sans doute la dame Destaing a
conservé le souvenir de la cérémonie auguste de l’église. La
couronne sacrée mise sur sa tête , la bénédiction et l ’échange
des anneaux, les paroles saintes du patriarche qui demandait en
vain a Dieu, pour les époux , une longue suite d’années : tout
cela s’est gravé dans sa mémoire ; et elle sait très-bien cju’il n’y
a point eu d’autres formalités.
Accompagnée par sa famille et par ses esclaves dans la maison
du général, elle fut présentée par lui au général en chef et à un
grand nombre de convives distingués, appelés au repas nuptial
et à un bal européen. Mais après ce premier hommage aux
mœurs françaises, tout r e n t r a d a n s l ’o r d r e a c c o u t u m é , et s a u f
quelques exceptions, le général Destaing se conforma dans l’in
térieur de son ménage aux habitudes égyptiennes.
Ainsi se passèrent plusieurs mois dans le calme et sans événemens. Bientôt des révoltes fomentées par les Mamelouks,
donnèrent aux épouses des généraux français de vives et justes
alarmes. C ’est alors que leur tendresse inquiète veillait à préserver
du danger ceux qui n’étaient plus pour elles des étrangers et des
usurpateurs, mais des époux et des frères.
Peu de tems après, on apprit qu’une armée ottomane s’avançnit vers la Syrie, tandis qu’une îlot le anglaise entrait dans la
Méditéranée.
Les Français allèrent sur-le-champ attaquer ces armées jusque
�7
(
)
dans leurs retranchemens; mai§ que peut la valeur contre le
nombre? Séparés en forces inégales, les généraux français ne
voulurent se confier qu’en leur courage, et ne recevoir aucune
loi du vainqueur.
La dame Destaing a v a i t conjuré son époux de lui apprendre
le succès de ses armes. Blessé grièvement et enfermé dans la
place d’Alexandrie, le général ne put écrire lui-même; mais il
fit donner de ses nouvelles à la dame Destaing, par un arabe,
son domeslique, pour la rassurer sur 1 état de sa blessure.
La dame Destaing était alors a la citadelle du Caire, ou le
général Béliard, qui y commandait, avait fait préparer des logemens pour les épouses des généraux français , et celles de
quelques officiers de marque, parce que les armées ennemies
étaient aux portes du'Caire.
Trois lettres arabes furent adressées à. la dame Destaing, à la
citadelle du Caire*. Les héritiers Destaing n’ont pu les attaquer
que du côté du style , qui, certes-, n’est pas académique .- niais
aurait-on cru que les formules épistolaires de France fussent
d’obligation pour les nations étrangères, et pour un domestique?
Aussitôt que le général put tenir la plum e, il écrivit lui-même
à son épouse, dans une langue que son oreille entendait moins
aisément, peut-être, mais.que son cœur sentait bien mieux.
« A lexand rie, le i
5 prairial an 9.
« I l y a long-tems, ma chère am ie, que je 11'ai pas de tes
« nouvelles ; je désire que tu te portes aussi bien que moi.
*
Ces lettres ont pour adresse : à M adam e A n n e , fem m e Destaing.
Elles sont datées, l’ une du mois doul hadeh ,P a u tre du mois doui hid.jeh. ,
de. l’année I2i5 de l’hégire, répondant aux mois de germinal et floréal
an 9. Il n’y est question que de la blessure du général Destaing, d’assu
rance de revenir bientôt, et de complimens pour Joanni Nazo. Elles sont
jointes aux pièces avec la traduction de M. Sylvestre de Sacy, professeur
de langues arabe et persaue, et membre de l’Iostitut.
�( 8
?
« J o a n n i, qui est chez le général B élia rd , devrait savoir »
« quand il part des détachemens pour A lexa n d rie, et en proa filer pour nCenvoyer des lettres. Cependant, il ne Va pas
« fa it la dernière fois : il fa u t le gronder de ma part, pour
« qu 'il soit plus exact à Tavenir. On m'a dit que tu étais
« grosse; j e suis étonné que tu ne m’en aies rien écrit : éclaircis
« mon doute à cet égard. Sois assurée que j e t'aime toujours,
a et qu’il me tarde beaucoup de te revoir. E n attendant, je
« t'embrasse, ainsi que ta mère et ta sœur, sans oublier la
« bonne vieille. Le général D e s t a i n g ».
Cette lettre , la seule* que le hasard ait fait conserver à la
dame Destaing, semble réunir en elle les rapports de sa fai mille entière avec son époux ; elle est restée comme un monu
ment , pour confondre les calomnies principales des héritiers
Destaing, et leur prouver qu’ils se mentent à eux-mêmes quand
ils feignent de croire que le général n’avait jamais cru a v o i r
avec une jeune grecque que ce qu’il leur plaît de nommer,
dans leurs idées licencieuses, un arrangement oriental.
L e siège du Caire fut prolongé pendant plus de trois mois;
enfin le général Béliard capitula avec le major Hutkinson, en
messidor an 9. Un article portait , que l’armée anglaise fourni
rait des vaisseaux de transport pour 'conduire à Marseille les
Français et ceux déjà attachés à leur fortune. Les dames reti
rées à la citadelle avaient la faculté de rentrer dans la ville du
Caire.
Mais le général en chef Menou ne voulut point ratifier cette
capitulation ; les portes de la ville restèrent fermées, les per
sonnes comprises dans la capitulation, la garde d’honneur choisie
pour leur escorte, la dame Menou elle-même, furent obligées
de continuer leur route jusqu’à Alexandrie. L à , le général Des
taing, craignant encore pour son épouse les dangers d’une ville
assiégée, lui donna ordre de se rendre en France, où il devait
incessamment la rejoindre.
Joanni Nazo , compris comme commandant de la légion
grecque,
�9
(
)
grecque, dans la capitulation du Caire, devait partir avec la
dame Destaing et le reste de sa famille. Le général leur écrivit
de l’attendre à Marseille, ainsi que nous l’apprennent les héritiers
Destaing.
Un vaisseau grec ( le Saint-Jean), dans le plus mauvais état,
se trouvait dans la rade d’Aboukir pour recevoir cette famille
et son escorte. Plusieurs autres Egyptiens s’y jettèrent pour ne
pas retomber sous la domination musulmane.
Tout ce que les relations de voyages ont recueilli de con
trariétés et de périls était destiné à ce frêle navire. Incapable de
résister à la moindre agression des pirates de l’A rchip el, hors
d’état de tenir la mer sans des réparations urgentes et considé
rables} il ne se mit en route que pour louvoyer d’îles en îles,
poursuivi par des corsaires, et assailli par des tempêtes.
Un long séjour dans l’île de Pathmos fut nécessaire pour
radouber le vaisseau. L a dame Destaing, extrêmement souf
frante , croyait s’y reposer et attendre l'époque de ses couches.
~ M ais, tout à coup , on fut a v e r t i du danger que couraient
des Français et des Grecs d’être la proie des Turcs en croisière
dans cette mer. On leva l’ancre à l’instant : mais après un long
trajet, le vaisseau fut repoussé jusqu’à l’île de Céphalonie, qu’il
avail déjà dépassée. C’est là que la dame Destaing accoucha à
bord. Un prêtre grec, desservant une chapelle voisine du rivage^
baptisa l’enfant sous le nom de Maria d’Estaing, tenue, sur les
fonds baptismaux, par Sophie Misck, sa grand’mère, et par le
sieur Nassilïi, officier de l ’ e s c o r t e .
Deux jours après, le tems propice permit de remettre à la
voile : mais une autre tempête attendait le vaisseau dans le
canal de Messine; rejeté en arrière de o lieues dans la mer '•
Ionienne, il parvint à un port de la Calabre , d’où, après de
nouveaux dangers , dont il serait minutieux de donner le détail,
et forcé de changer de route, il aborda à Tarente, dans le gou
vernement de M. le général Soult (aujourd’hui maréchal de
Empire et duc de Dalmatie ).
•
5
1
3
�( 10 )
C ’est ainsi qu’ une famille malheureuse, jouet des vicissitudes
de.la terre et de la mer, errait de plages en plages pendant six:
mois entiers. Eniin elle était sous la protection française; et dès
cet instant il y eut une trêve à ses malheurs.
M. le général Soult, iniormé de l’arrivée <lu vaisseau , et
de la qualité des passagers, eut la bonté d’offrir lui-m êm e à
Madame Destaing, de la part de son épouse, tout ce qui pouvait
être nécessaire à sa santé et aux agrémens de son séjour.
Les lois maritimes exigeant de tous les vaisseaux une quaran
taine, M. le général était obligé d’abord de borner ses attentions à
de simples offres de services. Il écrivit au capitaine du vaisseau,
le 22 frimaire an 10.......... « V eu illez, je vous prie, renouveler
à madame Destaing les offres de services que mon épouse et
moi lui faisons de tous les secours qui pourraient lui être né
cessaires y elle nous obligera infiniment dûen disposer. SouLT».'
Qui donc avait pu informer M. le g é n é r a l Soult du nom de
la dame Deslaing, et l’intéresser à elle? le voici : Pendant cette
longue et périlleuse traversée du vaisseau le St.-Jean, l’arméefrançaise avait évacué Alexandrie ; les généraux Menou et Destaing
avaient fait voile pour Marseille, où depuis long-tems ils croyaient
leurs épouses arrivées ; dans leur route ils s’informaient de la
destinée de ce v a i s s e a u ; il paraît m ê m e q u ’ils é c r i v ir e n t à M. le
général Soult, et voilà ce^qui valait à madame Destaing des at
tentions aussi flatteuses.
M. le général Soult ne s’en tint pas à des offres ; il insista
pour que Madame Destaing allât se rétablir dans sa maison de
campagne, et l’invita ensuite à habiter son propre palais.
Après un mois de séjour, Madame Destaing, remise de ses
souffrances, voulut partir de Tarente, mais en marquant une
grande répugnance pour continuer son voyage par la Méditéranée.
M. le général Soult porta la bonté jusqu’à lui tracer, lui-même,
une route pour aller par terre jusqu’au premier port de son
gouvernement, de là traverser l’Adriatique, et continuer par
terre d’Ancone à Lyon.
�( v u ) .
Tout cela s’exécula de point en point, et sans le plus léger
accident. M. le général Soult voulut encore donner sa voiture
à Madame Deslaing jusqu’au port de Barletta. Il lit chercher
une nourrice pour sa fille, et chargea M. Desbrosses, officier
français, de raccompagner jusqu’à Lyon.
Voilà comment et sous quels auspices est venue en France
celle que les héritiers Deslaing accablent de dédains et d’op
probres.
Madame Destaing s’arrêta quelques jours à Lyon pour se
reposer et attendre des nouvelles de son mari. Joanni Nazo partit
sur-le-champ pour aller le joindre à Paris.
On peut se représenter l’impatience d’une jeune.épouse de
* retrouver celui pour, qui elle s’était exposée à tant de périls.
Hélas! il -était dans sa destinée de ne plus le revoir. Joanni
n’était arrivé à Paris que pour être en quelque sorte le témoin
du convoi de son meilleur ami.
L ’a c c u e i l a f f e c t u e u x d u g é n é r a l n ’a v a i t p a s p r é p a r é Nazo à
ce malheur. Le ré cit mutuel de leurs aventures depuis leur
séparation ; l’empressement du général de revoir sa femme
et d’embrasser son enfant pour la.première fois; leurs projets
pour l'avenir avaient occupé le peu d’iristans qu’ils passèrent
ensemble....... La mort en disposa autrement.
L a dame Destaing ignorait à Lyon qu’un coup mortel venait
de la frapper elle-même. Elle comptait les instans, et se croyait
heureuse, lorsqu’un sieur Bordin , chapelier à Lyon , se présenta
chez elle avec une l ettre du sieur Destaing père, qui invitait
ce sieur Bordin à accompagner sa fille à Aurillac, en lui laissant
entrevoir une partie de son malheur.
Combien elle allait être à plaindre , celle qui, tombant tout‘à-coup des illusions riantes de sa pensée dans la certitude d’un
isolement affreux , allait se trouver sans époux et sans patrie
, parmi des êtres dont la demeure , - les habitudes, la langue
meme lui étaient inconnues. Que celui qui a pu se faire une
idée des fantômes de bonheur qui naguères remplissaient son
4
�âme , se représente s’il se peut l’horrible situation de cette in
fortunée Egyptienne, au milieu du cahos où son imagination
épouvantée dut la placer.
Cependant la dame Destaing fut reçue par son beau-père et
sa belle-mère avec toute l’affabilité et la tendresse qui pouvaient
la rassurer.
L a famille entière, il faut le dire, lui donna les mêmes
marques d’amitié et d’intérêt. Cette conduite généreuse la toucha
jusqu’au fond de l’âm e, et la dame Destaing trouve du plaisir
à en marquer sa refconnaissance. Un odieux intérêt n’était point
venu encore empoisonner ce premier élan de la nature. Chacun
avait alors à pleurer un fils, un époux, un frère. Les liens du sang
se resserraient davantage par un besoin mutuel d’épanchemens
et de consolations.
Cependant la famille D e s t a i n g c r u t néc ess ai r e de remplir
les formalités légales pour la succession du général. Les scellés
avaient été mis à Paris dans l’hôtel Méot qu’il habitait le jour
même de sa mort ( i floréal an 10 ).
Il s’agissait de les lever, et pour cela il fallait faire connaître
les héritiers de la succession.
C ’est la f a m i ll e D e s t a i n g qui e n p r i t l ’i n i t i a t iv e ; u n conseil
de famille fut convoqué devant le juge de paix d’Aurillac, le
messidor an 10. L à le s.r Destaing, père du général, juge au
tribunal de première instance, exposa : «que Jacques-Zacharie
« Destaing , son fils , général de division, était décédé à Paris ,
« laissant uneJîlle unique, âgée de cinq mois, nommée M a r i a ,
« provenant de son mariage avec ulnne jNazo , grecque d'ori« g in e, laquelle avait besoin d’un tuteur, attendu la minorité
« de sa mère
D ’après cela le conseil de famille * délibérant, choisit pour
5
5
*
Delzons, père, le même qui avait toute la confiance du général
Destaing à ses derniers momens , et M . Delzons, général de brigade 3 marié
aussi en Egypte, sont membres de ce conseil de famille.
�3
( i
)
tuteur de Maria Destain g, M. Destaing, son aïeul; fixa à 1,000 fri
le douaire annuel de la dame veuve Destaing ; lui alloua des
habits de deuil pour elle et pour une négresse qu’elle avait à
son service ; et s’occupa encore du salaire de la nourrice qu’elle
avait amenée de Tarente à Aurillac.
.
Le sieur Destaing père déclara accepter la tutèlle de sa petitefille , et fit le serment ordinaire d’en remplir fidèlement les
fonctions.
Voilà donc les qualités réglées; l’état de la mère et de l’enfant
placé sous la protection de la loi, et leurs intérêts remis entre
les mains de celui à qui * sans taucun doute, lé1 défunt les
aurait confiés lui-même.
.• .
’ >
.
') :
Le lendemain une procuration fut envoyée; les scellés furent
levés à Paris, et suivis d’un inventaire. Dans tous ces actes on
agit constammènt au nom du sieùr Destaing père , tuteur de
Maria D e s t a i n g , J i l l e e t u n iq u e h é r itiè re du g é n é r a l D e s t a i n g 1
L ’inventaire ne p o u v a i t c o n t e n i r q u e ce q u ’ o n laisse dans un
appartement d’hôlel garni; des vêtemens , des armes, quelques
papiers de portefeuille *, et deux rouleaux de o louis. On y
^consigne ce fait, que le-général avait remis, péu de jours avant
5
sa mort, à M. Delzons père, législateur, 18,000 fr. qu’il avait
touchés à la trésorerie, -pour qu’il les fît passer à Aurillac.
Pendant ces tristes opérations, la dame Destaing vivait à
.Aurillac, quelquefois dans les sociétés où onia présentait, et
qui voulaient bien s’accdutumer à sa tristesse, le plus souvent
retirée chez elle , occupée de sa fille , et presque heureuse de
vivre parmi ceux q u i , en lui apprenant leur langue, lui parlaient
de son époux.
Une grande satisfaction pour elle fut d’apprendre que Sa
Majesté avait eu la générosité de la faire placer sur le tableau
*
11 y avait une lettre du lieutenant Latapie , et une lettre de Joanni
Nazo , toutes deux écrites de Tarente. Ces lettres avaient été supprimées
depuis, et n’ont pu être communiquées qu’ en vertu d’un arrêt de la Cour.
�4
( i
)
des pensions, comme veuve du général D e sta in g , i jours
après sa mort *.
Cet état de quiétude dura environ une année. Mais les'frères
et sœur Destaing, prévoyant que la fortune du général, qui leur
avait procuré une augmentation d’aisance, leur serait retirée dans
peu de tems , changèrent insensiblement le bon accueil qu’ils
avaient.faità leur belle-sœur; et une petite persécution commença
sourdement conlr’elle.
La mélancolie de la d a m e Destaing lui faisant préférer la so
litude, on la représenta comme un être farouche qui méditait
des procès. Si, de loin en loin, quelques âmes sensibles venaient
du dehors pour la distraire , on supposait de l ’intrigue et des
conseils. La dame Destaing, sa belle-mère, ‘fut séduite la pre
mière par ces in s in u a tio n s désintéressées en apparence : enfin
à force de persévérance v i s - à - v i s - le s ie u r D e s t a i n g , o n p a r v in t
à inspirer de la défiance à ce respectable père de famille : on le
rendit tout dilïerentrde lui-même.f
. -r ,
L e premier résultat de cette défiance prit d’abord une direction
toute différente de celle qu’on avait voulu lui donner : le bon
tuteur n’avait point des entrailles de collatéral pour Reniant d<?
son fils ; et la seule p u n it io n q u i lu i v i n t e n i d é e c o n tr e la mère^
fut de faire enlever l’enfant pour le cacher à la campagne, en
prenant des précautions pour que la dame Destaing 11e découvrît
5
pas sa retraite.
,
Mais ce n’était pas là le compte de la petite faction ennemie,’
qui comprenait bien que ce procédé consolidait l’état de Tentant
au lieu de le détruire.
Alors on parut compatir à la douleur d’une mère justement
alarmée. La dame Delzons (égyptienne, et jusqu’alors très-liée
avec la dame Destaing), écrivit d’Aurillac à Joanni Nazo ce
qui-se passait. Nazo partit sur-le-cham p; ses plaintes furent
vives de part et d’autre , il s’y mêla de l’aigreur. La dame
* Le brevet de celte pension est du 29 floréal an 10.
�5
( i
)
Destaing quitta Aurillac avec Nazo pour aller joindre sa mère
à Marseille; mais le sieur Destaing, son-beau-père, ne voulut
jamais que Maria Destaing partît avec eux.
Joanni Nazo, personnellement maltraité dans une famille qui
ne lui semblait avoir ce droit envers lui sous aucun rapport,
suivit peut-être un peu trop son premier mouvement. D ’après
les conseils qui lui furent donnés, il fit rédiger un1acte de noto
riété, par lequel les réfugiés Egyptiens qui avaient traversé la
mer avec la dame Destaing, certifièrent qu’elle était mariée au
Caire, et qu’elle avait donné le jour à une fille baptisée à Céphalonie, sous le nom de Maria ;:;et muni de cette piece, il fit
adresser un mémoire à l’Empereur pour réclamer Maria Destaing.1
Sa Majesté daigna y répondre par une note de sa main; et Son
Exc. le Grand-Juge en ayant donné avis au sieur Destaing pèrej'
celui-ci ne mit aucun obstacle à rendre l’enfant qu’il avait retenu.
Mais aussitôt ses idées et son système changèrent. Ses enfans
p r o fit è r e n t de ce tte c ir c o n s t a n c e p o u r s’e m p a r e r -'e n tiè r e m e n t d e
son e s p r i t , et l’ e n v e n i m e r c o n tr e la m a l h e u r e u s e ét r a n gère qu’il
avait j u s q u ’ a lo r s c h é r ie c o m m e sa f ille . T e l l e a été la s o u r c e du
procès.
*
L a première*hoslilité vint des^frères et sœui* Destaing, et cela
était bien dans l’ordre. Ils .firent saisir, entre les mains de leurpère, le mobilier et revenus'de la succession du général, comme
prétendant être ses seuls héritiers.
I l eût été plus n a t u r e l d’assigner la veuve, dont ils ne pouvaient
pas méconnaître au moins les prétentions et la possession qu’elle
avait eue de son état dans leur propre maison. Mais cette lenteur
eût été trop douce; il fallait tout d’ un coup , par une saisie, lui
enlever les ressources que lui donnait la délibération du conseil
de famille. La dame Destaing fut donc forcée de prendre les v o ie s
judiciaires: elle assigna, le 27 nivôse an 1 2 , le sieur Destain«
pere ( au tribunal de la Seine, lieu du décès), pour demander,
remise de la succession , et une provision pour ses alimens, dont
on avait ailecté de la priver,
�( i6 )
Cette privation était inhumaine ; mais la dame Destaing a été
heureuse de la souffrir. Dans le moment de sa.plus grande dé
tresse, elle reçut de la munificence de Sa Majesté Impériale le
brevet d’une pension de 2,000 fr. au lieu de 520 fr. qu’elle était
jusqu’alors *.
Croirait-on que les héritiers Destaing ont attribué cet acte de
bonté à leur conseil de famille, qui, disent-ils, avait donné par
erreur, à Anne Nazo, une qualité dont elle fit usage pour ob
tenir une pension ! Remarquons seulement que ce conseil de
famille est du 5 messidor an 10, et que déjà le premier brevet
de pension était donné à Anne Nazo, comme veuve D estaing,
plus d'un mois auparavant.
Au lieu de répondre à la demande de la dame Destaing,
ses adversaires introduisirent à Aurillac une procédure obscure,
qui prouve que tous moyens leur étaient bons pour multiplier
contr’elle les incidens et les ennemis.
Les frères et sœur Destaing assignèrent leur père à Aurillac,
en remise de la succession du général, comme s’ils ignoraient la
demande déjà formée par leur belle-sœur. Il répondit qu’Anne
Nazo prétendait à la même succession, et sur cela sa mise en
cause fui ordonnée. Cependant le jugement ne fut signifié qu’au
sieur D e s t a i n g père, le m o in s in té r e s s é à le c o n n a îtr e ; et la dame
Destaing n’en a appris l’existence que long-tems après.
On lui laissait, pendant ce tems-là, obtenir un jugement à
Paris ; et ensuite on se pourvut en règlement de juges. Le procès
ne fut renvoyé ni à Paris ni à Aurillac : il le fut au tribunal de
Mauriac ; tout cela dura près de trois ans; et enfin la dame Des
taing recommença son procès à Mauriac, où elle était renvoyée.
3
* « Ministère du trésor public . — Paris, i pluviôse an 12».
«Art. i . er L a pension de 520 fr. accordée par arrêté du 29 floréal an 10 , à
K Anne Naz>o, née en Egypte, veuve du, s.r Jacqucs-Zacharie D estaing ,
K général de division, mort le i 5 floréal an 1 0 , est portée à 2,000 fr. >».
« Art. a. Les Ministres de la guerre et du trésor public sont chargés, etc. ».
« Signé N A P O L E O N ».
Là
�17
(
)
Là on fit dire an sieur Destaing père, qu’il révoquait Vaveu
qu’il avait fait de Cétat et possession de la veuve Destaing et
de sa fil Je. Il prétendit que c’était à elle à prouver son mariage et
la. naissance de-J’enfant ; que les certificats de Marseille étaient
suspects et;ne prouvaient rien. Il termina par dire qu’il ne con
naissait d’autre enfant de son fils, qu'un-enfant naturel, né
avant son départ pour l’Egypte ( que l’on disait tantôt né aux
Pyrénées, tantôt d’une femme de Paris). Puis il demanda à Ja
dame Destaing une caution pour être admise à plaider, comme
étrangère.
Voilà.-ce que les héritiers Destaing osèrent suggérer à leur
père y sans égard pour 4a mémoire du général ; et ainsi leur
animosité était telle contre sa veuve, qu’ils aimaient mieux ap
peler à la succession un inconnu, sans nom, et auquel la loi
ne donnait ni titre ni qualité.
r •!, ■' t 0’ ?uj •»[
*
Cependant la dame Destaing voulant ne laisser aucune sus
picion sur son c e r t if ic a t d’égyptiçns, et p o u v a n t f o r t aisément
le suppléer par des témoignages français, réunit devant le juge
de paix de Paris, en la forme légale des,actes de notoriété,
sept citoyens distingués qui s’étaient trouvés au Caire en l’an 8,et
eiVl’an 9; i.° l’ordonnateur en chef de l’armée; 2.0 l’inspecteurgénéral aux revues; .° lè' chirurgien en chef de l’armée; 4.0 un
général de brigade; 5.° le trésorier-général d e là couronne;
6.° le directeur-général de l ’imprimerie impériale; 7.0 un prêtre
égyptien, professeur .de langues orientales.
« Ils attestèrent qu’Anne Nazo avait été unie religieusement
« au Caire} suivant les rites du pays, et en légitime mariage
« avec le général Destaing , dans le courant de l’an 8 , par le
« patriarche d’Alexandrie. Que l’acte de célébration n’en avait
« pas été rédigé, parce que ce n’était pas l’usage : mais que ce
« mariage n’en était pas moins constant, ayant été célébré en
« présence d’un grand nombre de militaires français , et ‘de la
tf plupart des déclarant Que depuis cette célébration Anne
3
�( i8 )
« TSfnzo n’avait pas cessé d’habiter en Egypte avec son m a ri,
« q u i l’a toujours traitée comme son épouse légitim e ».
La dame Destaing avait été privée de faire entendre M. le
général en chef de l’armée d’Egypte, et M. le général Dupas,
alors absens; le premier, comme gouverneur des départemens
au-delà des Alpes; le second, comme gouverneur du château
•de Stupinis; elle leur fit écrire pour leur demander la déclaration
de la vérité sur son mariage, et reçut deux certificats attestant
avec la même force la connaissance personnelle que ces deux
généraux avaient de son mariage *.
L ’acte de notoriété fut homologué par le tribunal civilde la
Seine, sur le rapport d’un juge, et sur les conclusions du
ministère public.
■
>
Munie de celle pièce importante, de son brevet de pension
et de l’acte de tutelle, la dame Destaing crut son procès fini,
et se présenta à l’audience de Mauriac. Mais combien elle se
* «Je déclare, au nom de la vérité et de l’honneur, que, lorsque je com
mandais l’armée d’Orient, en E gypte, M. le général Deslaing s’est inarié
en l’an 8 avec mademoiselle Anne Nazo.................L e général était venu»
m'en faire part................ Je m’engageai à y assister, ainsi (jji’au repas
qui eut lieu après le mariage. Je remplis nia promesse. Tout s*y passa
avec la plus grande régularité sous les rapports civils et religieux ».
« A T u r in , le 18 juillet 1806 ».
« L e général M e n o u ».
lr
*
«Je certifie qu’ étant chef de brigade, commandant la citadelle du Caire
sous les ordres du général Destaing , f a
de son légitime mariage
avec mademoiselle A n n e Nazo............ J ’atteste
avoir eu des liaisons particulières
guées qui m’ont dit
i eu parfaite et sure connaissance
av e c
beau cou p
de persounes très-distin
avoir été présentes à ce mariage^ qui fut.célébré
publiquement.................. ».
«Paris, le 3o juillet 1806».
« L e général D u p a s ».
�( *9 )
trompait! La cause eut été trop simple a v e c le sieur Destaing
père; les frères et sœur voulurent plaider aussi; mais il sera
inutile de les suivre dans leur intervention, leur tierce oppo
sition, leur saisie, leurs incidens de toute espèce : il suflit de
parler du jugement de Mauriac, du i août 1807, dont il est
nécessaire de préciser les dispositions pour les comparer avec
l ’arrêt postérieur de la Cour d’appel.
. ' <
•' < "
3
Le» tribunal de Mauriac ne crut pas devoir s’arrêter aux preuves
existant es; il les jugea insuffisantes, et ordonna que la dame
Destaing p r o u v e r a i t , i . ° « Qu’i^n’est pas dusage au Caire et à
« Géphalonie de tenir des registres et faire des actes de* mariage
« et de naissance; 2.0 qu’elle.a été mariée au Cairér, en l’an 8,
« avec le général Destaing, par le patriarche d’Alexandrie, avec
« les cérémonies usitées dans le lieu ; .° qu’elle a cohabité de« puisiavec le générai.Destaing jusqu’à son retour en France);
a et que daias tout ce tems elle a été publiquement reconnue
a . pour épouSe du généi'al D e s t a i n g ; 4.0 qu’elle est accouchée à
« Céphalonie, en nivôse an 10 , d’une fille provenue de ce ma« riage , laquelle a tété nommée Maria Destaing ». * ,
3
Tl y e u t , d’e *p a ri:Je d’â ü ttié^7ajj^el d e’oé jugement';'là dame
Deslaing ^én-plaigriair, paï’be'cju^iï l’assüjëtissait â^une preuve
non-'seulement’ déjà- faite ; mais-qù’elle 'crut inulUk^ puisqu’elle
avait une possession d’ëtàt'émanée de^la famille Destaing ellemême. Les héritiers Dest&îng S’en plaignirent'aussi’, en ce qu e,
disaient-ils , le Gode civil ne jjéririèt de prôavet les mariagers que
par éci'it et par les registres de1l’état civil. 'ff!' : c' M ); ; ’
h
?
*»
•
:
, ,1
1 1
> i
.. *i !
»
Le^n était point assez d’avoir accable de calomnies la dame
Destaing à Aurillac, Mauriac^ et Paris, les héritiers Destaing
lui réservaient pour la Cour d’appel des imputations plus dures
encore. A les’croire, elle n’était qu’une prostituée de la plus
vile classe , offerte au général par sa propre famille avant même
qu’il eût sur ce point montré aucun désir'; une grecque aiiifi-
6
�( 2° )
cieuse et rusée, qui avait su en imposer quelque tems à une fa-?
mille crédule ; ensuite, et pour avoir le droit d’jnsister sur la re
présentation d’un acte civil, ils la transformaient en musulmane
échappée d’un harem, et la sommaient de représenter l’acte de
mariage que le Cadi avait dû rédiger.
La Cour d’appel, par arrêt du n juin 1808 , a cru devoir,
dans une matière aussi importante , laisser subsister la preuve
ordonnée, mais avec des motifs bien précieux pour la dame
Destaing, et qui prouvent que les magistrats, convaincus comme
hommes, ont seulement voulu ne négliger aucun moyen légal de
découvrir la vérité.
•
.
'
Cependant la preuve ordonnée à Mauriac n’a point été exigée
par la Cour avec autant d’étendue. « La Cour dit qu’il a été bien
« jugé en ce que la preuve testimoniale a été ordonnée, et néan« moins, réd u isa n t V in te r lo c u to ir e , o r d o n n e q u e d a n s six mois
« Anne Nazo fera preuve, tant par titres que par témoins, de« vant les premiers juges, que pendant que le général Destaing
« était en activité de service au Caire, elle à été mariée avec lui
« publiquement et solennellement par le patriarche d’Alexan« drie, suivant le rit grec et suivant les formes et usages obser« vés dans le pays ; V a u to r ise à f a i r e en ten d re le s p a re n s , tant
a d’elle que du général Destaing , ainsi que toutes les personnes
« qui ont déjà donné des attestations par forme d’acte de no« toriété, à Marseille et à P aris, ou des c e r tific a ts dans la
« cause, sauf toijs autres reproches de droit qui pourront être
« proposés, et sur le s q u e ls les premiers juges statueront, sauf
« preuye contraire ; ordonne que les frères et sœur Destaing
« rapporteront les deux lettres mentionnées en l ’inventaire
« du 24 messidor an 10 ».
Les héritiers Destaing menaçaient de se pourvoir en cassation,
parce qu’ils attendaient la décision d’une cause semblable sur
laquelle il y avait pourvoi contre Néphis David, Géorgienne,
�(
21
)
mariée en Egypte avéc M. le général Faultrier * ; aussi ont-ils
retardé l’exécution de l ’arrêt par mille chicanes plus absurdes les
unes que les autres. , ^
A Paris ils arrêtent brusquement l’enquête, en disant que le
président de Mauriac n’a pas pu donner une com m ission rogatoire. L e jugeTCommissaire ne voulant pas ju g e r ce grave procès,
le renvoie à Mauriac, et Mauriac le renvoie en la Cour. L à ,
Taincus dans leur misérable incident par la simple lecture du
texte de là lo i, ils osent bièn s’opposer à une prorogation du
délai qu’ils ont consumé eux-m'êriiès en chicanes; m ais la Cour
en fait ju stice , et, par arrêt du 12 décembre i 808 , elle autorise
lè président de Mauriac à donner les com m issions nécessaires,
renouvelle le délai d’enquête, et punit les héritiers Destaing
par une condamnation'des dépens faits à Riom , à Mauriac et à
Paris. Pendant tout ce délai, ¡les témoins appelés à Paris ont été
renvoyés sans être entendus.?;1, 1:
Enfin les e n q u ê t e s se f o n t , l ’ u n e à M a r s e i l l e , une autre à
Paris, une a u tr e à Aurillac , et une dernière à Mauriac > mais
l ’obstination des héritiers Destaing ne se lasse pas. L ’enquête de
Paris est remarquable, suivtout par la verbalisation continuelle
dejl’unjdes héritiers Destaing, qui, sans exagération , y parlait
plus que les témoins et le juge ; à chaque mot il avait des’ obser
vations à faire écrire, ou des questions nouvelles à adresser aux
*
L a Cour de Metz avait ordonné que Népliis rapporterait seulement
Un acte de notoriété, constatant que lés chrétiens grecs ou romains q u i se
marient à G iz é , près le C aire, ne sont pas dans l’ usage de faire constater
leurs mariages sur des registres publics.
Les héritiers attaquèrent cet arrêt par le motif que des ordres du jour
publiés en E gypte, en l’an 6 , exigeaient que tous les actes, entre Français
et Egyptiens , fussent reçus par les commissaires des guerres.
L a Cour de cassation a décidé que ces ordres du jour étaient sans ap
plication ; que l’acte de notoriété était suffisant, et avait été légalement
ordonnéj en conséquence, le pourvoi a été rejeté le 8 juin 1809.
�'( 22 )
témoins; et quelles '¡questions encore!.'... (Si en-Egypte il n’est
pds reçu qu’on se marie pour un terris.i.Vj S’ilcn’est pas vrai que
les T u r c s coupent la tête aux femmes q u i ont commerce avec
les Européens,.... etc.!, etc.)'• - 'j ; m
.
Eh bien, toutes ces billevesées sont fidèlement'écrites dans l’en
quête de Paris., renouvelées ad libitum , et suivies à chaque
nouvelle déposition deiquestions pi ils absurdes encore. M. le
juge-enquêteur avait’ la:bpntéde tout entendre.
A Marseille, il n y avait pour lès héritiers Destaing'qn’uri
fondéde pouvcoir.;ie.t soitf qu’il ri’asât ¡pa'sise permettre toute cette
verbalisation*, r‘soit que les' juges*méridionaux soientimoins^paiiens quejceux dè là capitale^ l’enquéteVest faite'en lalforme ordi*
naire, et ce sontJès'témoins qui y occupent la plus grande place.
Cependant à-Marseille,’ côm'me à Paris, on ne manque pas
de fhire: insérer des 'reproches)îcoritrè: tliaquô ¡parent,¡et.» contre
chaque témoin qui déjà avaient donné des attestations (malgré
l’arrêt de la Cour, qui autorise expressément’ kuivdéposiiioirs).
; ¡ Malgré toute cette* obstination lesi'ënqûêtés'se-paraehèvenf
des témoins distingués rendent Acompte de ce qu’ils ont vu et
entendu. Il résulte deleuTS déposiiàons une preuve a ussif complète
qu'il était possible;de-l’attendrç après ce'quï avaitîétéiproduit?
avant les interlocutoires;/; • • •' £ ■ > { •>! h ; ¿ ' : .]
g,-jfq
Les deux enquêtes; de la-dame Destaing sont composées :de
dix-sept témoins entendus à Paris, et dix entendus à Marseille.
Pour ne pas être diffus, en suivant le détail d'un aussi grapd
nombre de dépositions , il .faut ¡le? rapporter à tfois.,faits.prin-^
cipaux : i.° lia ,fête nuptiale ;.,a,° la cérémonie de l’église.; ,° la
notoriété du mariage.
. ^
i
i’.° MM. les généraux L a grange, Duranteau et Bertrand ,*
MM. Sdrldlon, secrétaire-général du ministère de la guerre;
M arcel, directeur-général*de l’imprimerie impériale; Clément,
négociant ; Larrey, médecin ; A n a a Obadani, ancien commis
saire de police au C a ire , ont déposé avoir assisté au repas de
3
�*3
(
)
noces: les sieurs D u fé s , Tutungi et 'MiscTc, parens.d’Anjie
N azo, le déposent aussi. Ces témoins y ont vu encore M. le
général en chef Menou (décédé pendant.le procès ) , et plusieurs
prêtres grecs. M .tD aure, commissaire: des guerres, dit y avoir
été invité , mais que son)service le retarda, et qu’il vint après le
dîner. On ajoute que ce fut la fê te la plus solennelle qu’on eût
vue dans le pays.
' >\ »
2.0 L a célébration ecclésiastique est l’objet de treize déposi
tions. Le général; Destaing avait communiqué, son mariage à
tous les dignitaires,de son armée. Il y avait.eu des billets d'invi»
tation ; et M. Sartelon dit même qu’i l croit avoir v u l’annonce de
ce mariage dans la gazette du Caire. MM. 'Lagrange et Larrey
déclarent avoir reçu une.invitation du général Destaing.’ Leur
service les empêcha d’arriver assez tôt. M .Larrey dit qu’il arriva
lorsqu’on sortait de l'ég lise, et qu’il's’eXcusa auprès du général
sur son défaut d’exactitude. JDçn M pnacjiis, l;es.s.rs T a k et V id a l
déposent que plusieurs témoins,oculaires , qu’ilsuomment, leur
ont dit avoir assisté à cette célébration dans Véglise SaintJNicolas. L e sieur. C/j «/rc, ancien interprète de M. le prince de
Neufchâtel, déclare avoir vü les préparatifs de la fête sur la
place Atabel-elzZarguavlLeS sieurs* O b a d a n i commissaire de
police; R o sette, bijoutier, étaient présens à la célébration du
mariage, fa ite par le patriarche d*Alexandrie, dans la même
église. Les sieurs Joseph D u fé s , Joseph Tutungi, Ibrahim
Tuturtgi, Sophie Misck et- Joseph Misck ..déposent également
avoir assisté à cette célébration fa ite par le patriarche, avec
les rites observés par lestGrecs, le jour des rois dejl’église.grecque,
o u >1.7 janvier; ils ajoutent que le colpnel Nicolas Papas Qglou
étaiüe parrain de la mariée, suivant l’usage. Le sieur Barthélemî Serra dit avoir élé invité à cette cérémonie par le général
Destaing, mais, n’avoir pas accepté, parce, qu’il était brouillé
avec la f a m i l l e N a z o i l ajoute que le général Dçstaing lui dit ,
avant son mariage, qu’il, serait célébré sjijvfint le rit g r e c , et
qu’ensuite il lui dit que son mariage avait été célébré par le
�( H )
'patriarche g rec, selon le rit grec; qu’il avait voulu se conformer
à l’usage du pays.
.° Quant a la notoriété, il serait oiseuxd’énumérer les té
moins qui'déposent que le mariage était public au Caire; il est
plus sûr de dire, sans craindre de se tromper, que tous les té
m oins, sans exception , attestent ‘que toute la ville du Caire
regardait ce mariage comme légitime ,* et précisément tous ces
militaires français , qû’on a peints comme ne s’occupant .des
femmes que pour les déshonorer, sont ceux qui attestent le,plus
fortement que personhe ne doutait, au Caire et à l\armée j de,
ta légitimité de cé'rhàriüge. \ ■
' v
t ' ; ■, - \v
Les héritie'rs'Destaing ont fait de leur côté deux enquêtes ,
l’une à Aurillac, composée de trois témoins, et l’autre à Mau
riac, de deux témoins.
»
A A urillac, ce so n t le sie u r D e l z o n s p è r e et la dame Delzons
Sa belle-fille, cousins des héritiers Destaing, et une demoiselle.
3
Françoise Gronier. L e sieur Delzons père, qui n’a rien vu , rapii
porte seulement deux conversations : un jour, à P aris, le géné
ral Destaing causant avec sa belle-fille, lui disait que sa femme
pouvait être mariée, mais que'lui'ne l’était pas ; le sieur Del--’
z o n s a jo u t e q u ’ il fit c e s se r c e lt e p la is a n te r ie J U n a u tr e j o u r , à
Paris, lé général Delzons\ son Jils , lui dit qu’il y avait eu
dans la maison Nazo une cérémonie religieuse 'à laquelle il
avait assisté.
•
,■ ' .
‘L a dame'Delzons, née Varsy, déclare n’être arrivée au Caire
que le o nivôse an 9 , et ori lui dit que la veille on avait conduit
Anne Nazo chez'le général/'à l’entrée de la nuit, sans cérémonie
ni f êt e; qu’il y eut unefête ensuite, mais pour le baptême de son
enfant, et qu’Anné Nazo y occupait la place de maîtresse de la
jnaison. Elle ajoute que cependant elle a ouï-dire que le jour
qu’Âiine Nazo!aVait été conduite chéz le g é n é r a l Destaing, il y
aOait eu une' cérémonie rèllgieuse qui avait été fa ite par le
patriarche d*Alexandrie, à laquelle peu de personnes avaient
assisté.
3
Jusque
�25
(
)
Jusque-là on voit que la dame Delzons se tient en mesure
pour ne dire que le moins possible. Mais le juge l’interroge sur
son opinion particulière, et elle termine par dire qu’ elle croit
qiùon regardait au Caire Anne Nazo comme épouse légitime
du sieur Destaing, et que pour e lle , elle la croyait fem m e du
général D estaing, et lui rendait les honneurs attachés à ce
titre.
La demoiselle Gronier, fille, à ce qu’il paraît, fort curieuse, et
qui n’oublie rien, dépose s’être trouvée à Lyon lorsque le général
I)estaing arriva d’Egypte : elle dîna avec lu i.L occasion de parler
de son mariage venait si naturellement, qu’elle ne la laissa pas
échapper. Elle ouvrit donc la conversation, comme c’était tout
simple, et parla de cette belle Grecque qu'il avait épousée, que
tout le monde le disait, que sa famille en était instruite, etc. L e
général, qui avait perdu en Orient l’habitude de cette locjuacité
d u se x e , lui r é p o n d i t seulement : E lle est passée cCuïi côté et
moi de Vautre. P u i s il se tut sans m is é r ic o r d e . M a i s la demoiselle
Gronier t i r a , à ce qu’elle dit, plusieurs conjectures du mouve
ment de ses doigts , quand il indiquait deux côtés1opptTsés ; e t ,
?ïie pouvant plus rien dire sur cefchapitre, elle p'arla suii?d’autres
'q u ’elle juge inutile Jd’être racontés.'Lofsqu’en'süfte la d'ame
Destaing f u t venue à Àurillac , la'demoiselle Gronier (par une
prescience du procès actuel), poussa le scrupule jusqu’à demander
à la dame Des laing s'il y avait des registres de mariage a u C a i r e ,
et la dame D e s t a i n g lui répondit encore qu’elle'croit avoir vu le
prêtre écrire dans un gros livre. Enfin, passant aux ouï-dires, la
demoiselle G r o n i e r a e n te n d u déclarer , par madame D e lz o n s,
femme du général, qu’Anne Nazo avait été mariée , e t q u e s o n
m a r i {le général D elzon s ) y é t a i t p r é s e n t . (V o ilà l’abrégé
de la déposition de la demoiselle Gronier, que les héritiers Destaing p ré te n d e n t leur être fort avantageuse).
Les deux témoins de Mauriac disent fort peu de choses, quoiqu ils fussent dans la maison du général, lors de son mariage.
L ’un était son palfrenier au Caire; le cuisinier lui dit qu’on
7
�(26),
avait mené une femme chez le général : et il n’en sait pas
d a v a n t a g e pour ce jour-là. Ensuite il a v u un grand repas où
ét ai ent le général Menou et tout Cétat-major. Cette femme y
était aussi, il l’a entendu appeler Madame Destaing.
L ’autre était un militaire travaillant comme menuisier chez le
général. On lui dit aussi qu’on menait une femme, et il courut
pour la regarder : mais il ne vit pas sa figure, parce qu'elle
était voilée; elle était accompagnée par une autre femme; et il
vit plusieurs esclaves de son escorte, restés dans la cour; alors,
craignant d’être aperçu, il se retira.
Il paraît que ce n’était pas pour ces détails-là qu’on avait
appelé ces témoins; mais, pour que leur témoignage ne fût pas
tout à fait inutile, les héritiers Destaing leur font demander s’ils
ont vu des m a r i a g e s e n E g y p t e . Tous deux déposent en avoir
vu un : la mariée était sous un d a i s , p r é c é d é e d e m u s i c i e n s
montés sur des chameaux.
Voilà en total le résultat des enquêtes; et on voit que l’en
quête contraire ne fait que confirmer pleinement l ’enquête
directe , loin de la détruire.
Aussi les héritiers Destaing, comprenant fort bien que, sous
ce point de vue, leur cause devenait insoutenable, ont-ils voulu
tourner tous leurs efforts du côté de l’acte civil du mariage.
En rendant compte de l’enquête de Paris et de Marseille,
on n’a pas dit qu’à chaque déposition les héritiers Destaing
faisaient expliquer les témoins sur la tenue des registres de
l’état civil en Egypte, quoique cet article fût exclu de la preuve
par l’arrêt de la Cour.
Mais plus cette partie était obscure, et plus les héritiers
Destaing y ont fondé d’espérances. Cependant ils n’ont eu rien
à y gagner dans les enquêtes; car si quelques témoins ont dit
qu’il existait des registres, c’est avec l’explication très-lumi
neuse de la différence des églises. Ainsi les héritiers Destaing
n’avaient encore rien éclairci qui ne leur fut contraire.
L e procès des héritiers Faultrier leur a fourni d’autres rest
�( 27 )
sources; ils ont su que cette famille avait fait venir du consul
d'Egypte des certificats sur la tenue des registres civils, et aussitôt
ils s’en sont procuré une copie légalisée à Metz.
Ces certificats émanent, à ce qu’ils disent, du préfet et du
patriarche des prêtres grecs catholiques, et du supérieur de la
mission.
La dame Destaing, qui n’avait jamais ouï parler au Caire
des personnes dénommées en ces certificats, et qui avait de
grandes raisons d’en suspecter la véracité, n’a eu à consulter
aucune personne plus sure et plus instruite que don Raphaël
Monachis, l ’ u n des témoins de son enquête , prêtre grec
catholique romain / appelé de l’Egypte par Sa Majesté Impériale
pour être professeur de langues orientales à la bibliothèque
impériale.
Don Monachis avait été envoyé d’Egypte à Rome pour faire
ses études. Revenu au couvent des Druses, sur le M ont-Liban
(résidence du seul patriarche grec, reconnu par l’église de Rome),
il reçut la mission d’aller au Caire, remplir les fonctions de curé
catholique, ou premier vicaire du patriarche grec catholique,
jusqu’à ce qu’il en eût obtenu la permission de venir en France.
Ce lettré a parfaitement expliqué aux conseils de la dame
Destaing l’équivoque que ces certificats pouvaient produire aux
yeux de ceux qui ignorent la différence qui existe entre les
prêtres latins ou catholiques, et les prêtres grecs schismatiques.
Les prêtres catholiques qui ont reçu de l’instruction tiennent
en Egypte des registres qu’ils signent pour eux seuls, parce que
l’Etat ne les reconnaît point, et encore cet usage est-il récent ;
mais les prêtres du schisme grec élevés dans le pays , et n’y
recevant aucune espèce d’instruction, ne tiennent jamais de
registres.
,
Voilà ce qu’a dit don Monachis dans une attestation notariée,
que les conseils de la dame Destaing ont désiré obtenir de lui
comme^garantie d’un simple fait historique, qui eût pu paraître
apocryphe dans la bouche d’une partie intéressée.
3
�(
2
8
)
C ’est ainsi qu’il fallait être en garde contre les embûches sans
cesse renaissantes des héritiers Destaing. Enfin ayant épuisé
toutes leurs ressources, il ne leur restait que celle de faire tomber
les enquêtes, et ils ont bien osé conclure devant le tribunal de
Mauriac à ce qu’il se désistât de Vinterlocutoire ordonné par
l ’arrêt de la Cour. Ils ont reproché les témoins de Marseille
comme transfuges et incapables de témoignage , et ils ont pré
tendu avoir prouvé qu’il existait des registres de mariage en
Egypte, d’où ils ont conclu que la dame Destaing ne pouvait
se dire épouse légitime tant qu’elle ne rapporterait pas l’acte
civil de son mariage. Et enfin ils ont demandé qu’elle res
tituât les objets à elle fournis pendant la tutelle de leur père ,
avec défenses à elle et à sa fille de porter le nom Destaing à
l ’avenir.
Ces derniers efforts de la chicane expirante ont eu le sort qu’ils
méritaient ; et, par un jugement du 14 août 1810 , parfaitement
m otivé, le tribunal de M auriac, convaincu de l’extrême évi
dence des preuves, a reconnu Anne Nazo pour épouse légitime
du général Destaing, et Marie Destaing pour l’enfant légitime
né de ce mariage.
La voie de l’appel était encore ouverte aux héritiers Destaing,
et ils ne l’ont pas négligée. Veulent-ils encore se venger de la
vérité par des outrages ? Mais il n’est plus tems de répéter un de
ces romans diffamatoires , dont l ’imagination fait tous les frais ;
qu’elle arrange avec art et prestige pour que l’incertitude soit
forcée d’hésiter entre le mensonge et la réalité. A u j o u r d ’h u i tout
ce qui s’est passé au Caire est connu ; les faits, les noms, les
qualités , les usages , sont constans ; la dame Destaing aurait
donc rigoureusement rempli sa tâche , en faisant un détail
exact de ce qui résulte d’un aussi long procès ; mais elle est
forcée de parcourir encore le cercle des objections dans les
quelles les héritiers Destaing ont semblé mettre encore un peu
de confiance.
�(
29.5
MOYENS.
Lorsqu’ un étranger se dit malheureux dans une patrie qui
n’est pas la sienne, les esprits durs ou superficiels sont quelque
fois disposés à lui reprocher d’avoir abandonné le sol qui l’a vu
naître; on scrute les causes de son émigration , on les voit rare
ment du meilleur côté, et on se roidit contre ses plaintes. C ’est
ainsi qu’une sorte de prévention nationale repousse l ’étranger
en réclamation jusqu’à ce que l’évidence de ses droits soit en
traînante, et alors l’indifférence même se sent portée à consoler
l ’être malheureux qui a eu tant de peine à iaire apercevoir la
vérité.
Mais si cette vérité est si lente, le vulgaire, dans sa curiosité
d’un moment, a-1-il toujours le tems de l’attendre? Avide de
tout ce qui rompt la monotonie de ses habitudes, l’esprit du
in o n d e s’e m p a r e des é v é n e m e n s e x t r a o r d in a i r e s p o u r les juger
avec la p r o m p t i t u d e qui c o n v ie n t à la mobilité de ses sensations.
Si l’art a mis quelque adresse à arranger une calomnie avec des
élémens merveilleux et tant soit peu vraisemblables , malheur à
la victime, car le monde a une prédilection marquée pour ce
qui s’éloigne du cours ordinaire des actions de la vie. Enfin le
tems ramène tout à la conviction et à la justice ; car lui seul est
la puissance capable de dévorer la calomnie et d’éteindre la
curiosité.
Cependant ce bienfait du tems n’est pas toujours un résultat
assuré. Le nuagede la calomnie est quelquefois tellement épais que
l’opinion ne cherche plus à le percer. Heureusement les magis
trats ne se décident point comme le vulgaire; fermant les yeux
au prestige qui pourrait les persuader sans les convaincre, dé
daignant les narrations intéressées qui pourraient les séduire, eux
seuls appellent le tems au secours de là vérité, et forcent l’opi
nion à proclamer qu’elle n’avait été crédule que par lassitude ou
indifférence.
�( 3o )
C ’est une grande consolation sans doute pour la dame Des*
taing, d’avoir pu prouver son état avec plus de clarté qu’elle
ne pouvait l’espérer à un aussi grand éloignement de sa patrie;
mais qu’elles ont été longues ces années de procès ! et qui jamais
la dédommagera de la cruelle anxiété où une ligue obstinée s’est
plu à la tenir depuis l’an n ? Le vaincu, n’en doutons pas, s’ap
plaudira encore intérieurement du mal réel qu’il aura fait, alors
même qu’il sera réduit à l’impuissance de l’agraver.
Cependant les hostilités n’ont point cessé encore; l’évidence ne
peut arracher aux héritiers Destaing l’aveu de leur conviction:
ils s’écrient encore qu’il n’y a point eu de mariage; que les en
quêtes doivent être rejetées, et qu’il faut des registres de l’état
c iv il, parce qu’ils disent avoir constaté leur existence.
Les enquêtes d o i v e n t être rejetées! Voilà bien le cri forcé d e
la crainte; et p o u r q u o i le se rai ent - el l e s , si la C o u r les a jugées
nécessaires ?
L a loi, disent les héritiers Destaing, ne s’oppose pas à ce que
le juge s’éloigne de son interlocutoire; cela est vrai, lorsque des
preuves écrites sont venues éclaircir ce qui était d’abord douteux.
Mais quelle lumière nouvelle ont donc apportée les héritiers Des
taing? q u e l le s p r e u v e s in a t t e n d u e s m o n t r e n t - il s de la fau sseté d u
mariage que tant de témoins attestent ? Aucune ; absolument
aucune : la cause est donc dans le même état qu’elle était lorsque
lai Cour a ordonné une preuve. Ainsi on ne peut comprendre
quel esprit de vertige les a poussés tout d’un coup à demander
à un tribunal de première instance le rejet d’un interlocutoire
ordonné par arrêt de'la Cour.
L ’arrêt subsiste, et il est pleinement exécuté : la preuve est
complète. Une foule de témoins du premier rang parlent de la
célébration du mariage et des fêtes données pour le rendre
plus solennel : les uns étaient témoins oculaires des fê te s , les
autres témoins oculaires de la célébration » d autres etaient in
vités et n’ont pu être présens à tout; d’autres enfin ont seulement
ouï attester la célébration ; mais cette attestation leur avait été
�( 3i )
-
donnée par des personnes -présentes qui n’ont pu être appelées
à l’enquête. Ce 11e sont point là de ces ouï-dires vagues dont
la source est inconnue , et qui ne méritent aucune confiance :
ajoutons les attestations de MM. les généraux Menou et Dupas,
et de tant d’autres témoignages précieux dont la dame Destaing
a été privée. Gomment la passion empêcherait-elle ses adversaires
eux-mêmes de convenir qu’il résulte de cet ensemble un corps
de preuves tellement parfait, que la mauvaise foi peut seule
feindre un doute qu’elle n’a pas?
On ne peut pas dire que ce corps de preuves soit altéré le
moins possible par les enquêtes contraires. I l fa u t dire plutôt
que ces enquêtes aident à la conviction ; elles indiquent ellesmê nés que le général D elzons * était présent à la célébration
d i mariage, et achèvent de démontrer combien l’opinion, sur la
légitimité de ce mariage, était certaine pour ceux-là même qui,
d a n s l’a r r a n g e m e n t de leu rs d é p o s i t i o n s , m a r q u a i e n t l a v o l o n t é
d ’être f a v o r a b l e s a u x h é r i t i e r s .D e s t a i n g .
Ils le comprennent parfaitement ; mais ils osent attaquer une
enquête enlière, pour la faire tomber en masse par la plus au
dacieuse des tentatives. L ’enquête de Marseille est composée
d’Egyptiens qui y habitent depuis le retour de l’armée ; et les
héritiers Destaing ont osé dire que ces transfuges élaient inca
pables de témoignage.
Cette injure irréfléchie pouvait-elle s’adresser à des individus
qui vivent depuis dix ans sur le sol Français, et avec des pen
sions du gouvernement? L ’Empereur a-t-il mis sur leur front
un sceau de réprobation qui les avilisse, lorsqu’au contraire il
leur accorde asile et protection? et cette protection auguste
ne les met-elle pas au pair des autres citoyens ?
Comment ont mérité cette dure qualification des hommes qui
*
Aujourd’hui indiqué par les héritiers Destaing comme ayant démenti
par écrit ce qu’il a dit à son père et à sa femme.
�(
3a
)
'
n’ont été coupables que d’attachement à la France? Vivant
sous un joug de fer en Egypte, à cause de la différence de
leur religion, ils avaient dû regarder les Français comme des
libérateurs, et s’étaient prononcés pour leur cause. Pouvaient-ils,
au départ de l’armée, se livrera la vengeance des Ottomans?
et la France n’acqiiitle-t-elle pas une dette sacrée en leur
donnant un asile? Elle ne leur a imposé aucune condition. Ils
étaient Français en Egypte : pourquoi ne le seraient-ils pas enFrance? Sont-ils donc des transfuges, ceux qui, séparés de leurs
familles, et accoutumés par des mœurs simples à l ’a mou r de la
-patrie *, pleurent encore l’Egypte où ils n'ont plus l’espoir d’aller
mourir?
Nos lois sont hospitalières, et on les calomnie. L ’art. i du
Code Nap. dit : que « l’étranger qui aura été admis par le gou« vemement à é t a b li r son d o m i c i l e en F r a n c e , y j o u i r a des
« droits c iv ils, tant qu’il continuera d’y résider ». Or, suivant
3
25
l ’art.
, on n’est incapable de porter témoignage que lorsqu’on
a été privé de ses droits civils. Une législation aussi claire
devait fermer la bouche aux héritiers Destaing, et épargner
aux Egyptiens, devenus Français, un reproche brutal, et d’autant
plus inutile à la c a u s e , que L’ a r r ê t de la Cour avait supposé ces
réfugiés capables de témoignage.
C e n’est pas tout encore pour les héritiers Destaing de récuser
par un moyen général tous les témoins d’une enquête; il en reste
*« Lorsque M. Maillet était consul au Caire, les Jésuites persuadèrent
« à la cour de France de faire venir à Paris dès enfans de Cophtes pour
« les élever aux collèges de Louis-le-Grand. On devait les instruire dans
« la fo i, et les renvoyer convertir leur nation schisinatique. A force d’ar« gent on obtint le consentement de quelques pères extrêmement pauvres:
« mais lorsqu’il fallut se séparer, la tendresse se réveilla dans toute sa
« force,, et ils aimèrent mieux retomber dans la misère que d’acheter ün
« état d’aisance par un sacrifice qui coûtait trop à leur cœur ». ( Savari,
sur l’Egypte, lettre 14).
un e
�33
(
)
une autre composée de généraux et d’hommes respectables, qui,
ayant la confiance du gouvernement, ont contenu les héritiers
Deslaing dans leurs apostrophes. '
Mais leurs ressources ne sont pas épuisées.
Nîî trouvant pas de témoins qui voulussent dire qu il n y avait
pas eu de mariage, les héritiers Destaing ont conçu lidée de se
faire écrire une lettre qui leur racontât de point en point, et ab
ovo, tout ce qui s’était passé au Caire , h Tarente, à L y o n , a
•Aurillac et à Paris.
Mais de quel nom se servir pou^r cette lettre? Ils n en ont pas
vu de plus convenable que celui du général Dèlzons., leur cousin,
ancien ami du général Destaing , qui certainement a tout vu ,
niais qui depuis l’an 10 avait gardé une neutralité dont aucune
des parties ne pouvait le blâmer.
C ’est de lui qu’on produit une lettre de six grandes pages, si peu
d’afccord avec la loyauté de ce militaire, q u ’ i l est difficile decioiie
à sa réalité. P l u s on la l i t , et p l u s on est convaincu que c’est une
véritable injure faite à ce général, de lui imputer un écrit pareil.
On lit dans cette lettre, datée du 17'janvier 1809 (e t qu’on a
signifiée comme pièce du procès ) ^ que M. Delzôns s’accuse
d’avoir introduit Anne 'Nazo dans l a ’ maison‘ du sieur Destaing
père, .après la mort du''général, pour reàewôir lès secours hospi
taliers dus au malheur ; mais qu’il est faui qU’il y ait eu aucun
mariage entr’elle et le général Destaing.
Cette lettre atteste qu’il n’y a eu entr’eux qu’wrc arrangement
oriental ou un mariage à tems
L ’auteur s’y rappelle parfaite*
Les enquêtes prouvent que les mariages
musulmans. L e
avec la femme
engagemens de
Mahomet, qui
à teins n’ont lieu qu entre les
Cadi vend une permission de vivre pendant un tems donné,
que l’on a choisie ; la police exige cette formalité : et les
ce genre sont en parfaite concordance avec la religion de
admet la pluralité des femmes. « Employez vos richesses à
« vous procurer des épouses chastes et vertueuses. Donnez la dot promise
« suivant la loi. Cet engagement accompli, tous les accords que vous ferez
« ensemble, seront licites ». ( K o r a n , ch. 4, v. 29).
9
�(
34 )
ment du jou r et de Y heure ou Anne Nazo est entrée chez le gé
néral D e s t a i n g , et du jour de sa sortie (au bout de dix ans).
P u i s v i e n t une plaidoierie en forme sur le résullat des ordres du
jour de larmee, relativement a la tenue des registres prescrits
aux commissaires des guerres. Tout y est avec ses dates et des
exemples. La lettre est terminée par un'démenti formel au cer
tificat du général en chef Menou, p o u r avoir dit que lui Menou
avait assisté au mariage, et que tout s'était passé avec la plus
grande régularité, sous les rapports civils .et religieux.
Non ,1111 général français n’a point écrit cette lettre; on abuse
de son nom pour tromper la Cour.
'
Un général français n’a point démenti son chef, qui a donné
un certificat au nom de la vérité et de Vhonneur. Il n’eût point
attendu la mort de ce chef, pour faire à ses mânes la plus san
glante des injures.
Non , le général Delzons n’a point écrit qu’il n’y avait eu
qu’un arrangement oriental fait avec l ’accord des parens Nazo;
lorsque vingt-cinq témoins disent le contraire, lorsque M. Del
zons, son père, a déposé que LE GÉNÉRAL D e l z o n s , SON FILS ,
lui
avait
dit
qu'il y avait eu une cérémonie religieuse,
A L A Q U E L L E IL A V A I T
A S S I S T É ; l o rs q ue F r a n ç o i s e
Gronier a
déposé que madame Delzons ¡fem m e du général, lui avait dit
qu'A nne Nazo avait été\mariée avec le général D estaing, et
QUE SON MARI Y ÉTAI T PRÉSENT.
L e général Delzons a encore moins écrit qu’il s’accusait
d’avoir introduit Anne Nazo dans la maison de son beau-père-,
à A u rilla c , pour recevoir des secours hospitaliers ; ca rie gé
néral Delzons est membre du. conseil de fa m ille , du messidor
an io , qui défère à l’aïeul la tutelle de Maria Destaing, comme
5
fille légitime de son fils.
C’est dans ce procès-verbal que le général Delzons a dit la
vérité ; là il a écrit et signé que le général Destaing a laissé
une f i l l e lég itim e provenant de son mariage avec A n n e Nazo.
Voilà seulement ce que le général Delzons a dit en présence
�(.35
)
de la justice et d’une famille entière; et cela est incompatible
avec ce qu’on suppose émané de lui, après dix ans de neutralité
et d'un oubli inévitable des faits , des dates et des détails. La
lettre qu’on lui attribue n’est donc qu’une injure farte à la loyauté
de ce général, qui la désavouerait, n’en doutons pas, s’il était
instruit qu’ôn abuse ainsi de son nom.
Mais c’est trop s’arrêter à une'pièce qui n’est au procès que
pour attester que les héritiers Destaing emploient toutes sortes
de voies pour calomnier et persuader ; comme s’ils s’attendaient
que la Cour , après avoir rejeté une masse d’attestations authen
tiques, aura plutôt confiance dans le certificat intéressé, informe
ét isolé, fait sous le nom d’un parent qui luî-même avait attesté
légalement le contraire de ce qu’on lui fait dire.
Les enquêtes restent donc dans toute leur force, et il 'serait
superilu de s’y appesantir : léur simple 'lecture’'opère u n e c o n
v ic tio n t e lle m e n t e n tr a în a n te , que le s c o m m e n t e r s¿irait les
a ffa ib lir .
. r
~ C’est à ces enquêtes seules que la Cour a réduit toute la cause,
en modifiant l’interlocutoire ordonné parles premiers juges, qui
avaient exigé cle plusda‘ preuve de Peiisi'étlce ou non existence
f
1
des registres de l’état civil au greffe.- ï il0a
' u '
1 r:
' Cependant les héritiers Destaing se confient'encore dans cette
partie de'-leurs objections.*-Ils n'ont pas perdu l’espoir de faire
adopter par la Cour ce qu’elle a rejeté, et ils veulent astreindre
la dame Destaing à rapporter un acte de mariage tiré des registres
de l’état civil.
”v - - 1 f; •1 ,)li 11 ‘
Car, disent-ils, il existe des registres en Egypte : nous le
prouvons à l’aide dés certificats délivrés aux héritiers Faultrier.
D ’ailleurs les ordres du jour’ de l’armée exigeaient que tous les
actes fussent reçus par les commissaires des guerres, pour être
valables; vous avez dû vous y conformer.
'
Que sont les ordres du jour de l’an 6 et de l ’an 7? Leur'début
( Varmée est prévenue, etc. éprouve seul qu’il ne s’agissait pas'
d’une loi générale pour l’Egypte. Et comment oser sans ridicule"
10
�(
36
)
supposer que la légitimité des mariages et le sort d'une'province
a u r o n t été réglés au son du tambour par une proclamation faite
s u r une place d’armes, vraisemblablement fort peu fréquentée
des indigènes?
Qu’on ouvre les journaux du tems, et ils apprendront que
l’Einpereur allant vaincre comme César, laissait au vaincu ses
lois, ses usages et sa croyance ; parlant du Christ aux Grecs , et
du Dieu de Jacob aux Musulmans, tout, excepté son épée,
été concorde et tolérance.
Ses successeurs ont suivi son exemple et ses ordres. « Nous
« avons respecté, dirent-ils aux Egyptiens, en se préparant à
« les quitter, vos mœurs, vos lo is } vos usages.. . . » Et le
Divan du Caire a remercié officiellement le premier Consul, en
l’an 9, de ce respect poux* les mœurs de l’Egypte, en lui expri
m ant, avec l’élévation orientale , une juste reconnaissance.
Des ordres du jour n’ont donc pas été une Joi générale, faite
pour changer les habitudes de l’Egypte sur la forme des ma
riages. C ’est, au reste , ce qu’a expressément jugé l’arrêt de cas
sation des héritiers Faultrier , et ce qu’avait déjà préjugé la Cour
en n’exigeant de la dame Destaing que la preuve de son mariage
suivant les formes de son pays. .
,
Que sont encore ces certificats, égyptiens présentés par les hé
a
ritiers Faultrier, et que les héritiers Destaing s’approprient ? Il
suffirait de leur répondre que ces copies sont dans le procès actuel
une pièce étrangère, et que n’étant pas prises sur l’original, dans
lus formes légales, elles ne peuvent faire aucune foi en justice ,
suivant l’article i
du Code Napoléon.
Qu’a de commun le procès de îa Géorgienne Népliis (achetée
comme esclave par le général Faultrier, présentée, à la vérité,
à Metz , comme son épouse, mais méconnue aussitôt qu’il fut
mort), avec le procès d’Anne Nazo, appelée en France par son
époux, reçue, accueillie par sa famille, après sa mort, et ayant
eu une possession d’état légale et publique, consignée dans les
registres judiciaires et dans ceux de la maison impériale ?
336
�_ ( 37 )
Mais admettons ces certificats comme sincères et authentiques ,
tout prouve que ceux qui ont cherché à se les procurer n’ont
voulu que surprendre la justice par une équivoque.
On sait que toutes les religions sont tolérées dans les états du
Grand-Seigneur, quoique l’islamisme y soit la religion domi
nante. On sait encore que Mahomet I I , vainqueur de Constantinople, jura de respecter le christianisme; et ses successeurs
ont gardé son serment.
'
A la vérité, un serment de fidélité et un tribut fort onéreux
sont exigés des évêques et des patriarches ; h cela près rien ne
s’oppose à ce que les prêtres latins, grecs et arméniens, exercent
leur culte publiquement dans les états du Grand-Seigneur; e l
les minarets seuls y distinguent les mosquées des églises chré
tiennes.
L ’Egypte, l’un des berceaux du christianisme , l’un des pre
miers asiles des fidèles persécutés, n ’a v a it point échappé au
schisme des Grecs , et toute tolérance cessa quand celle secte
se sentir assez forte pour disputer de domination; l’église latine
fut long-tems proscrite par les Grecs , mais sans perdre jamais
l’espoir de ramener ses enfans égarés à l’unité religieuse. De
tout tems la cour de Rome a entretenu dans ces déserts de laJ
Thébaïde, si grands en souvenirs, des prêtres catholiques qui,
semblables aux persécutés de toutes les révolulions religieuses,
conservaient le feu sacré de la foi pour des lems pins prospères.
C ’est ainsi que sur la montagne des Druses, dans la chaîne du
Mont-Liban , de pieux ecclésiastiques, soumis à tous les dogmes
de l’Eglise romaine, et sous son obédience, se répandent dans
les villes de l’Egypte, soit sous le titre de missionnaires, soit
sous le titre de curés 3 ou tout autre caractère qui leur est donné
par leur chef.
Ce chef est connu parmi eux sous le nom de Patriarche
d’Alexandrie, non pas celui qui, prêtant serment de fidélité au
Grand-Seigneur, se regarde comme indépendant de Rome , et
�(38
)
de l ’Eglise d’Orient , mais un patriarche dépen
dant du Pape, et vivant dans l'unité de l’église catholique.
Maintenant, il faut rappeler que la daine Destaing n’est pas
née dans la religion grecque la tin e, mais dans celle connue en
France sous le nom de schismaliquegrecque. Le patriarche grec
et les prêtres ou papas, exerçant le culte public grec au Caire,
sont donc les seuls qui eussent pu donner des attestations dignes
de foi sur le rit de leur église.
Mais ce n’est pas d’eux qu’on rapporte des certificats ; il paraît
que les héritiers Faultrier en ont demandé aux prêtres latins. Cela
était indifférent dans leur cause ; car l ’arrêt de Metz , du
fé
vrier i o , confirmé par la Cour de cassation, exigeait seule
ment un acte de notoriété des prêtres de la religion chrétienne
grecque ou romaine , établis à Gizé. Et en effet, on ne voit pas
si Néphis David a prétendu avoir- été mariée à Gizé par un
prêtre du schisme grec. Peut-être aussi a-t-elle de son côté rap
porté un acte de notoriété de l ’église schismalique grecque y
pour satisfaire à l’arrêt de Metz. Mais on ignore pleinement les
détails-de son procès et le genre de sa défense.
Quoi qu’il en soit, les héritiers Destaing se sont emparés des
certificats donnés aux héritiers Faultrier. Voyons maintenant
ce qu’ils disent. Le premier est ainsi conçu :
•.
.
*
« Je soussigné, Préfet des prêtres grecs catholiques , en
« Egypte, déclare que tous les mariages qui sont célébrés, soit
« par m oi, soit par les prêtres grecs catholiques qui sont sous
« ma dépendance, sont inscrits sur un registre, etc., écrit par
« le père Constantin H adad, vicaire de Son Eminence le
« Patriarche grec en Egypte. Au Caire, le 7 du mois eclibat
chef suprême
83
25
« ( 7 février 1809 ).
Le suivant atteste qu’il n’a pas trouvé dans les archives de
son église le mariage du général Faultrier. Il est signé : Benediclus de JXledicina, missionnaire apostolique, curé et vicaire
sup ci leur de la mission d’Egypte• A u Caire, le 20 février 1809,
�3
( 9 )
Ces deux certificats sont de l a ’main même de ces ecclesias
tiques. Le premier est en arabe, et le second en latin : ils sont
traduits par un interprète du Consul de France.
Le troisième n’a aucune signature, ni même le nom du certJicateur. II consiste à dire qu’aucun prêtre de notre dépendance
ne peut célébrer de mariage entre des personnes de différentes
religions. Il ajoute que si le mariage est fait entre des personnes
de la même religion, il faut la permission du patriarche, et on
l’inscrit sur un registre.
k L ’original de cette pièce est en italien ( ce qui est fort éton
nant ). La copie produite par les héritiers Destaing commence
ainsi : « I l y a en tête une ligne de caractères majuscules en
« arabe ou cophte ». A la fin du certificat , on dit : « Suivent
« des signatures en caractères étrangers ». Puis le Consul fran
çais ajoute que ces signatures sont celles du patriarche grec et
du prêtre à qui les registres sont confiés.
S’il fallait met Ire plus d’importance à ce dernier certificat, on
se,demanderait pourquoi les premiers sont donnés au C a ire,
l e ........, et celui-ci en Egypte , l e ..........? Pourquoi celui-ci est
fait en italien , dans une langue que les signataires 11’enlendaient pas ? Et pourquoi enfin le secrétaire interprète du Con
sulat , qui a fort bien traduit de Varabe le certificat du père
Constantin Hadad, n’a pas su dire la valeur des mots composant
les signatures et l’intitulé du troisième acte, et n’a pas même
compris si tout cela était arabe ou cophte?
Quelle foi ajouter à un certificat où celui qui écrit la pë'nsée
d’un autre ne parle pas la même langue que le signataire, et où
le traducteur se contente de dire que les signatures sont en ca
ractères étrangers ?
Il fallait qu’on demandai aussi à ces prêtres latins si les re
gistres qu’ils tiennent sont des actes de l’état civil, dans une
contrée régie par les lois turques; ils auraient répondu que de
pauvres prêtres, soutenus par leur zele, au milieu de la bar-
�(
4°
)
barie et des obstacles, n’aspirent qu’à la propagation de la foi,
et tiennent de simples notes pour reconnaître le petit nombre cîe
prosélytes que l’JEglise de Rome a conservés dans cette terre de
persécution *.
Mais , dans cet entassement de bizarreries , il ne faut pas s’oc
cuper des détails et des objections sans nombre q u i s’élèveraient
contre la forme de ces actes ; il suffit de reconnaître qu’ils ne sont
pas émanés des prêtres de la religion de la dame Destaing, et
alors on n’a pas pu les lui opposer.
Les prêtres de sa religion n’ont donné aucun certificat. Com
ment le pourraient-ils ? Il est constant qu’ ils ne tiennent aucun
registre ; leur éducation ne se fait pas en Europe; on les instruit
des dogmes de leur foi ; Je patriarche les ordonne prêtres ou
papas, sans exiger d’eux d’autre instruction; à peine quelques-
*
Les missionaires de Rome n’ont jamais cessé clans ces parties du monde
de s’employer à faire des prosélytes; en conséquence, ils ont fondé avec
beaucoup de peine et à grands frais, parmi ces sectes, des sociétés qui ont
reconnu la doctrine et la juridiction du Pape. On sait que parmi les Grecs
qui vivent sous l’empire Turc , plusieurs ont embrassé la foi et la discipline
de l’église latine, et sont g ouver nés par des prêtres et évêques de leur
nation, mais confirmés par le pape. Il y a à Rome un collège exprès, fondé
dans la vue de faire des conversions parmi les Grecs, et d’ajouter de nou
veaux sujets à l’église romaine. On y élève un certain nombre d’étudians
Grecs. (Histoire de l’Eglise, par Mosheiin , tonie , page 272.)
5
Rien ne caractérise plus la religion des Grecs que leur aversion invincible
pour l’église de R o m e , qui a fait échouer jusqu’à présent toutes les ten
tatives du saint-siège et de ses nombreux missionnaires, pour les réunir
aux Latins. Il est vrai que les docteurs romains ont fondé quelques églises
dans l’Archipel : mais ces églises sont pauvres et peu considérables; et les
Grecs ou les T u r c s , leurs maîtres, ne veulent pas permettre aux mission
naires de Rome de s’ étendre davantage. ( lb ld . page 260.)
Etat de l'E glise Grecque , par Cow el , tome i . or, page irsS.
'Lettres Edifiantes , tonie 10 , page 828.
uns
�u o
uns savent écrire, suivant le témoignage de tons les voyageurs *.
Il n y a de lettrés parmi eux.que les prêtres latins, qui n’ont
qu une portion très-exiguë du peuple attachée à leur croyance,
et q u i, perpétuellement poursuivis par la haîne des G recs, et
osant a peine faire des prosélytes **, ne se soutiennent que par
leur zèle et par la pitié des Francs, mais sont à peiné connus pour
prêtres par les Egyptiens, parmi lesquels ils vivent.
Mais il est impossible de mieux expliquer cette partie de la
cause , que ne l’a fait don Monachis dans son attestation , qui
perdrait beaucoup d’être simplemont extraite, et qui ne peut
que jeter le plus grand jour sur la seule objection dans laquelle
les héritiers Destaing semblent placer leur dernière confiance.
(
« Par-devant M .e Massé et son confrère, notaires impériaux
« à Paris, soussignés, est comparu Don Raphaël de Monachis,
« ancien premier curé g r e c c a t h o l i q u e r o m a i n au grand C a i r e ,
« en Egypte, ou p rem ier v ica ir e de so n é m in e n ce le p a tria rch e
« g r e c c a th o liq u e r o m a i n , résidant au couvent de St.-Sauveur
*
« Que voyait-on dans cette terre natale des sciences et des arts? Tout
ce qu’on voit chez presque tous les peuples esclaves : un clergé superstitieux
et ignorant, etc. ( Coray. Mém. sur l ’ ètcit de la civilisation, des Grecs).
« Par-tout domine encore un clergé ignorant....... L e couvent de Neamoni
nourrit plus de o moines, dont 4 ou disent la messe j pas un seul ne sait
l ’ancien grec, et une douzaine au plus savent lire et écrire le grec moderne...
A u couvent de Megaspision , leur ignorance surpasse encore, s’il est possible 3
celle des moines de Neamoni. Je doute qu’il s’en trouvât 4 ou ( s u r o o ) ,
sachant lire et écrire ». (Bartholdi, Voyage en Grèce , en i o , t. 2).
45
5
5
83
3
** « L e clergé grec ne cesse d’exciter le peuple à la haîne des autres reli
gions, et sur-tout de la catholique romaine........ La haîne des Grecs et des
Romains est si forte dans plusieurs île s , que tous moyens leur sont bons pour
se nuire. M. de P a w est très-fondé à avancer que le premier usage , que
les Grecs ne manqueraient pas de faire de leur liberté, serait d’allumer une
guerre de religion........ Il est interdit aux Romains de faire des prosélytes''
parmi les Grecs, au lieu q u e ceux-ci peuvent en faire parmi les Romains.
( Ibid. tom. 2. )
11
�C 42 )
« sur la m o n t a g n e des Druses , dans le Mont-Liban , ancien
« m e m b r e du Divan et de l’institut d’Egypte, actuellement
« professeur de langues orientales à la bibliothèque impériale,
« à Paris, y demeurant, rue du Chantre, n.° 24,
« Lequel} sur l’invitation de madame Nazo, veuve du général
.« Destaing, et après avoir pris lecture de la copie de trois cer« tificats qui paraissent avoir été délivrés au Caire par des prêtres
« grecs catholiques romains, les 7 , 10 et 20 février 1809, con« cernant le mariage du général Faultrier avec une Géorgienne ,
« et pour faire cesser les doutes et les erreurs qui pourraient
« résulter desdits certificats,
« A fait l’exposé des faits suivans :
« Avant le concile de Florence, les églises orientales étaient
cc réunies par la foi, et soumises à l’église de Rome, dite église
« occidentale. Mais après le c o n c i l e , les d e u x églises orientale
« et occidentale furent divisées, faute de se trouver d’accord
« sur cinq dogmes de la foi, dont l’un était de reconnaître le
cc Pape comme chef suprême de toute l’église chrétienne ; en
cc conséquence, les quatre patriarches de Constantinople, d’An« tioche, d’Alexandrie et de Jérusalem se séparèrent du saint« siège de R o m e , qui les c onsi déra et les consi dère encore
a comme schismatiques. De cette nouvelle secte s’en sont formées
cc d ’autres, telles que les hérétiques, mais qui sont demeurés
te en plus petit nombre que les schismatiques.
cc Depuis environ 1 2 0 ans, un archevêque de Damas, grec
cc schismatique, ramené a la foi par un Jésuite, renonça au
cc schisme, et rentra dans la religion grecque catholique romaine;
cc mais ne pouvant pas rester à Damas, à cause des persécutions
cc des grecs schismatiques , il se retira sur la montagne des
« Druses, dans le M ont-L iban, avec une suite de quelques
« prêtres de la même opinion que lui. Us s’y établirent sous la
« protection des Français qui se trouvaient en grand nombre
cc dans les villes.de T y r et de Sidon. Alors le Pape Innocent X I ,
cc sur la demande des peuples qui avaient embrassé la foi, le
�43
(
)
« nomma patriarche par intérim ( c ’est-à-dire, jusqu’à ce que
« quatre sièges d’Orient , ou l’un d’e u x , fussent revenus à la
« foi), de tous les Grecs catholiques romains qui se trouvaient
cc répandus en Orient dans les pays occupés par les Grecs
« schismatiques.
« Depuis cette époque, le patriarche de tous les Grecs catho« tiques romains a résidé et réside encore au couvent Saint« Sauveur, sur la montagne des Druses.
« L e déclarant, au sortir des collèges de Rom e, ou il a fait
« ses études, fut envoyé au couvent de Saint - Sauveur , pour y
« être ordonné prêtre par le patriarche de son rit. Après y être
« resté quelque tems, il fut envoyé dans la ville du grand Caire,
« par son éminence le patriarche A gapius Matac> qui existait
« alors, et qui vraisemblablement existe encore aujourd’hui,
« pour y remplir les fonctions de premier curé, ou premier
« vicaire du patriarche, en Egypte.
« Avant son d é p a r t , il r e ç u t l ’o r d r e du p a t r i a r c h e de se con« former à l’usage des Européens, en tenant des registres pour
« constater les naissances, mariages et décès; en conséquence
« de ces ordres, le déclarant fut le premier qui commença ces
<c registres en Egypte, pour constater l’état des Grecs catholiques,
« et les lit tenir par les cinq prêtres grecs catholiques, sous ses
« ordres, qui sont les seuls qui existent au Caire pour le rit
« grec catholique romain.
« Les actes étaient de simples notes signées du curé , et
« jamais par les parties.
« Le déclarant exerça les fonctions de premier vicaire jusqu’à
a son départ de l ’Egypte pour la France, où il fut appelé par
« le premier Consul, par l’intermédiaire du général Sébastiani,
« et d’où il n’est parti qu’avec permission de son patriarche.
« Après son départ, il fut remplacé par le père Jean Nassere;
« et celui-ci, depuis décédé, a été remplacé par Constantin
« Iladad, qui exerce encore aujourd’hui les fonctions de prê
te mier curé de l’Egypte, ou premier vicaire de son éminence
J2
�(
44
)
« le patriarche grec catholique , résidant à la montagne des
« Druses ; l e q u e l Constantin Hadad a délivré les certificats ci« dessus mentionnés.
« En conséquence, Don Raphaël déclare que Constantin
« Hadad, son successeur, n’a déclaré que la vérité, en certifiant
« qu’il est tenu des registres de l’état civ il, au Caire, par les
« prêtres grecs catholiques , sous ses ordres : mais qu’il faut
« bien disiinguer de ceux-ci, qui sont en petit nombre, les grecs
« schismatiques, qui sont bien plus nombreux, et dans la re« ligion desquels la dame Destaing a été mariée par le patriarche
« qui réside à Alexandrie.
« Qu’à l’égard des Grecs schismatiques et de toutes les autres
« sectes qui sont sorties de celle-là, ils n'ont jam ais tenu de re
ts. gis très de naissances, mariages et décès, en Egypte; et que
« la raison s’en tire naturellement de l e u r défaut d’instruction
« qui ne se trouve pas chez les Grecs catholiques , dont les
« prêtres, en partie, font leurs études à Rome.
« Laquelle déclaration mondit Don Raphaël de Monachis a
« affirmée sincère et véritable, pour servir et valoir ce que de
« raison ».
« F a i t et passé à P a r i s , e t c . , etc. ».
Il est donc prouvé, jusqu’à l’évidence, que la validité des
mariages des Grecs, en Egypte, ne dépend pas de leur inscrip
tion sur un registre civil, parce que ces registres n’existent pas
en Egypte comme en Europe : aucun voyageur ne dit que cette
formalité y ait lieu ; au contraire , M. le sénateur comte de
Yolney, dans l’ouvrage qui lui a fait une si grande réputation
littéraire, et qui sera le modèle perpétuel des voyages, atteste
la répugnance des Turcs pour les dénombremens de population
dans les états de leur obéissance*.
*O u
souvent des questions sur la population du Caire., Si l’on veut
en croire le douanier Antoine Faraoun, cité par le baron de T o t t , elle
�4
'
(
& )
A quoi tient donc cette obstination des héritiers Destaing, à
ne vouloir reconnaître la dame Destaing comme mariée 7 que
si elle rapporte une preuve écrite et légale de son mariage?
Que d’exclamations on eût faites, si elle se fût présentée avec un
acte de mariage pour elle, et un acte de naissance pour sa fille.
iVoyez, eût-on dit, cette Grecque artificieuse, qui, pour s’intro
duire dans une famille étrangère, a pris la précaution insolite de
se munir de pièces impossibles à vérifier, et qu’elle a évidemment
fabriquées en Afrique ou au milieu de *Archipel !
Eh bien ! la dame Destaing n’avait ni médité des artifices ni
prévu les machinations insidieuses , desquelles elle aurait à se
défendre, Partie du Caire par ordre de son époux , changeant de
patrie pour suivre sa destinée, c’est pour lui seul qu’elle avait
souffert, c’est de lui qu’elle attendait des consolations. Son époux,
sa fille, étaient pour elle ses pénates et son avenir : avait-elle
donc des preuves ù chercher pour des êlres qu’elle ne connais
sait pas ?
La dame Destaing a toujours été si rassurée sur son état et
celui de sa fille, qu’elle n’avait pas même fait des démarches
pour rechercher à Céphalonie si le baptême de sa fille avait été
constaté ; et il y avait d’autant plus lieu de le croire ainsi, que
cette île européenne devait avoir un clergé grec plus éclairé que
celui de l’Egypte.
Mais les recherches de ses ennemis allaient faire pour elle des
tentatives dont le but uniforme était toujours de lui opposer une
1
approche de 700,000 âmes y compris Boulâq , faubourg et port détaché
de la ville : mais tous les calculs de population, en Turquie, sont arbi
traires, parce qu’ on n’ y tient point de registres de naissances , de
morts ou de mariages. Les Musulmans ont même des préjugés supersti
tieux contre les dénombremens. Les seuls chrétiens pourraient être recensés
au moyen des billets de leur capitation. ( Voyage en Egypte et en S y rie,
3
par M. de V o ln e y , 4.« é d itio n , 1807, tome i . cr /?. ao . )
�(
46
)
tenue des registres avec laquelle on croyait la confondre, si le
baptême de sa fille ne s’y trouvait pas.
Pendant que les députés des îles ioniennes étaient à Paris,
madame Destaing reçut l’acte qui suit :
,
,
« Du douze novembre dix-huit cent sep t à A r g o s to li île
« de C éphalonie , sont comparus, par-devant nous notaire sous« signé, le révérendissime papas, M. A n dréM azarachi d ’A n « z o lo , desservant de l’église solitaire de Saint-Constantin , qui
« est dans le voisinage et sur la rive dépendante des villages
« d’A d ilin a ta et iïA r g a ta , situés dans l’île de Céphalonie, et
« M. Jean L a v ra n g a , lequel prêtre sus-nommé a baptisé , en
« Vannée dix-huit cent deux au mois de ja n v ie r , ne se sou«t venant pas en quel jour du mois, un enfant du sexe féminin}
« fille de madame A n n e Nazo et du général D esta in g , laquelle ,
« suivant la déclaration faite, à lui prêtre comparant, par les sus« nommés, était née de légitime mariage, et a été nommée Marie y
« et elle a été tenue sur les fonds de baptême par M. Jean
« Lavranga et le capitaine Siffi, Fanchiote, lequel ne se trouve
r« pas présentement dans cette île; le présent sera affirmé avec
« serment p a r les susdits p r e tre et s ie u r L a v r a n g a ; ils déclarent
« en outre que, dans cette église, située dans ce lieu solitaire,
« on ne tient poin t de registres baptistaires ni mortuaires. La
,
« présente est donnée pour rendre témoignage à la vérité ; et les
« comparans se ressouviennent parfaitement d’avoir administré
« le sacrement susdit, ce qu’ils affirment comme témoins.
« Signé A n d ré M azarachi , prêtre, j’affirme avec serment;
Jean Lavranga , j’affirme avec serment; Jean Ç lin si , témoin;
« Spire Cacurato , témoin ; D im itri Caruso , notaire. A la
« suite du présent original est une traduction italienne, signee
« Dimitri Caruso, notaire; et une légalisation en même langue,
«
“ dont la traduction suit :
« E m p i r e F r a n ç a i s . — Son Excellence Savio A n n in o ,
�47
(
)
« administrateur du gouvernement de Céphalonie,' certifie que
« le susdit M. Garuso, notaire public, est tel qu’il se qualifie,
« et que l’on peut avoir pleine et entière foi à ses signatures.
« Donné en l’administration de Céphalonie, le dix-neuf novembre
« mil huit cent sept. Signé Savio ¿Lnnino, administrateur; et
« Jedn-Baptiste Tipaldo Pretteiulavi, chef de bureau »,
Cet acte fut présenté à M. Marino M aiura, principal député
des îles ioniennes , q u i , au grand étonnement de Madame
Destaing, lui apprit que c’était lui-même qui avait fait rediger
cet acte de baptême, à la demande de l’un des aides-de - camp
de M. le maréchal Marmont, qui le réclamait de la part de
M. le général D elzons (employé en Dalmatie).
L a famille Destaing, qui faisait rechercher ce fait aussi loin,
9n’en a plus fait usage lorsque le renseignement a été contraire à
■ses prétentions.
Et peut-être l’honnête ecclésiastique , .informé par ces re
cherches des vexations suscitées à une malheureuse étrangère, se
sera fait un devoir de charité chrétienne de fui envoyer cet acte,
• de son propre mouvement, pour rendre hommage à la vérité.
L e tribunal de la Seine a ordonné, par jugement du juillet
1809 , que.cet acte serait transcrit>dans les registres de l’état civil
de Paris, pour servir d’acte de naissance à Maria Destaing.
C’est'ainsi que ce qui était sollicité pour nuire à la dame
Destaing n’a été utile qu’à elle.
Mais continuons l'a réfutation des objections que continuent de
lui faire les héritiers Destaing:.
Il est impossible, disent-ils, de croire au mariage d’un général
français qui n’a pas été célébré de la même manière que ceux
de ses frères d’armes. O r, les mariages des généraux Delzons,
Lantin, Menou et Bonne-Carrère ont été reçus par des com
missaires des g u e r r e s . Telle était donc la forme, et pourquoi
Anne Nazo ne l’a-t-elle pas suivie? pourquoi, au moins, n’y
5
\
�48
(
)
a-t-il pas été accompagné des fêtes d’usage, dans les rues du
Caire ?
Les généraux Delzons, Lantin et Bonne-Carrère épousaient
les demoiselles Varsy, filles d’un ancien négociant français,
établi à Rosette, ville presque européenne à cause de son com
merce. L à , certainement, un catholique, mariant ses trois filles
avec des Français, devait se soumettre aux lois françaises, et ne
devait aller chercher ni le C a d i, ni les prêtres d’une autre re
ligion. Aussi ne dit-on pas un mot de la cérémonie religieuse
de ces trois mariages qui a dû être faite par un prêtre catholique,
ou régularisé en France au retour de la famille Varsy.
Le général Menou épousait une musulmane : son mariage
a d u etre lait devant le C a d i. Son épouse d u t être promenée dans
les rues sous \in d a i s , e n t o u r é e d e ses parens et de ses esclaves,
au son des instrumens. C a r tel est l ’ u s a g e à l ’é g a r d des m a r i a g e s
musulmans *, qui, dans la religion dominante, ont seulsle pri
vilège de l’éclat et de la publicité.
Mais Anne Nazo, de religion grecque, mariée à un Européen,
de religion laline ou romaine , n’avait pas le droit d’en rendre
la c é r é m o n ie p u b l i q u e , ni par des fêtes religieuses, ni par
aucune in s c r ip tio n d a n s des registres, ni p a r u n e promenade
dans les rues, sous un dais, comme les Musulmans.
C ’était bien assez que sa famille eût vaincu à cet égard les
préjugés de sa nation, en la donnant à un Européen, à un catho-
*
«C ’est ordinairement le soir que la marche commence î des baladins
la précèdent; de nombreux esclaves étalent aux yeux du peuple les effets,
les bijoux destinés à Pusage de la mariée ; des troupes de danseurs s’avancent
eu cadence au son des instrumens ; la jeune épouse paraît sous un dais
porté par quatre esclaves; un voile la couvre entièrement; une longue
suite de flambeaux éclaire le cortège ; de tems en tems des chœurs de
Turcs chantent des couplets à la louange des nouveaux époux». ( Savari,
tome 3 , lettre 3 ) .
'
'
lique
�liqne romain, à un militaire * ; la famille Nazo avait ail moins
dicté la loi sur le point principal, en exigeant que la célébration
fût faite avec les cérémonies du rit grec.
On demande ensuite à la dame Destaing pourquoi son mariage
a été fait sans contra t. Mais en France même il n’est nécessaire
que quand il y a des intérêts à régler. En fallait-il plutôt en
Egypte où le Koran est le Gode universel et supplée à tout. L e
général Destaing allait s’allier à une famille opulente. Qu’avait-il
en échange à offrir? Sa fortune dépendait de son épée. Ses revenus
étaient fondés sur la loi du plus fort. Dans un pays où l ’industrie
et le commerce sont tout, des chances aussi frêles ne présentaient
à la famille Nazo rien que de fort aléatoire.
On se plaît à représenter les Nazo comme une famille sans
fortune et sans considération, et Joanni Nazo comme un aven
turier de la lie du peuple. Sur tout cela les héritiers Destaing
o n t b e a u je u d e m e n t i r , m a i n t e n a n t q u e le p lu s l iq u i d e de la
f o r t u n e N a z o est da n s le u r s m a in s . M a i s les témoins ne donnent
p a s d ’e u x l’idée qu’on veut en suggérer. On voit dans les enquêtes
que Joanni Nazo, à l’occasion de son mariage avec Sophie Misck ,
dépensa o,obo écus.
5
On se plaît encore à jeter du ridicule sur ce que la mère d’Anne
Nazo répudia Barlhélemi pour épouser Joanni Nazo ; et là-dessus
on se récrie sur de telles mœurs, comme si une famille africaine
avait dû prévoir qu’il faudrait rougir de ce qui est toléré dans sa
nation , et s’en justifier un jour aux yeux des sieurs et demoiselle
Destaing, d’Aurillac.
Si la prétention des Européens est de blâmer ce qu’ils blâment,
et de louer ce qu’ils louent, il faut qu’ils donnent le droit de re
présailles aux nations étrangères, et ils auraient beaucoup à y
perdre. En Egypte , le lien du mariage est plus sacré qu’en
* «Les parens (G rec s) ne font aucune difficulté d’accorder leur fille à
* uu T u r c, pourvu q u ’ il soit riche et puissant, tandis qu’ils refusent opi»
« uiâtrément de l'accorder à un catholique.
(Baitlioldij tome 2.)
�(
5o
)
France , tant qu’il dure ; mais il n’est pas indissoluble. Si la reli
gion se prête à des injustices, ce sont ses ministres qu’il faut en
accuser *, mais non les époux mécontens, qui n’ont agi que sous
leur direction.
Barthélémy était catholique; Sophie Misck était grecque, et
les prêtres de son culte prononçaient anathême contre un lien
qu’ils n’approuvaient pas.
C ’était pour eux un acte religieux que la rupture de ce mariage,
pour en contracter un second plus orthodoxe : la religion grecque
le v eut, et le gouvernement le tolere.
A u reste, que Sophie Misck ait été ou non l’épouse de Barthé
l é m y , on ne voit pas comment Anne Nazo en serait plus ou moins
l ’ épous e du g é né r a l Destaing.
Enfin on porte le dernier coup à la dame Destaing; et déses
pérant de lui ôter le n o m d ’ é p o u s e , o n v e u t du moins en em
poisonner les souvenirs, et tâcher d’effacer dans son cœur le
respect qu’elle doit aux mânes de son époux. Ce n’est plus une
lettre étrangère qu’on lui oppose,'ce sont deux lettres de son
époux lui-même, écrites à son père, q u i, dit-on, fournissent la
preuve qu’il n’y a pas eu de mariage, et qu’il l’a désavoué.
L ’ u n e est é c rite d u C a i r e ; et l e g é n é r a l p a r l e d ’ un arran
gement oriental avec une jeune grecque qui fait les honneurs
de sa maison.
L ’autre est datée de Paris. Le général marque à son père qu’il
n’a pas dû plus croire à la lettre de Latapie qu\ï la sienne **;
*
« L e clergé ( grec) ne cesse d’exciter le peuple à la liaîne des autres reli
gions, et sur-tout de la catholique romaine, en accordant très-libéralement
des absolutions à ceux qui ont trompé les membres de cette religion, ou qui
se proposent de le faire » (Bartholdy, t. 2).
** Les héritiers Destaing avaient imprimé plutôt au lieu de p lu s , parce
que cela changeait le sens. Il en résultait que le général avait voulu que
son père crût à sa Lettre
yrai.
9 tandis
qu’il avoue lui-mêine qu’il n’a pas dit
�5
(
i )
qu’ il ne se serait pas marié sans l’en prévenir ; mais qu’à la
véi'ilc il a d'autres liens qui pourraient bien amener celui-là.
Remarquons, et déjà la Cour l’a remarqué elle-même dans
son arrêt interlocutoire *, que ces deux lettres étaient dans les
mains du sieur Destaing père, lorsqu’il a reçu Anne Nazo ,
et qu’après un mois de méditations il lui a donné un rang dans
sa famille, en se rendant le tuteur de son enfant.
Il a donc jugé ces lettres en père clairvoyant; et ce n’est pas
là qu’il a cherché la vérité. L ’une s’ excusait à ses yeux par la
licence des camps; les jeunes Français, fussent-ils aux confins
de la terre, ont la manie de tout métamorphoser en bonues
fortunes : mais un vieillard sait à quoi s’en tenir. L ’autre lettre lui
semblait une justification embarrassée d’un fils soumis encore à
l ’autorité paternelle; il y devinait la vérité; et bientôt elle ne
lui fut plus cachée, lorsque la dame Delzons, égyptienne, lui
eut r a p p o r t é q u e lle é ta it l ’o p i n i o n u n a n i m e du C a i r e et de
l’armée , sur le m a r i a g e de son fils ; lorsqu’encore le général
Delzons, qui y avait assisté, vint lui en apprendre les détails.
C ’est donc par pure méchanceté , et sans besoin , que les
héritiers Destaing, ont publié ces’ lettres. L ’ honnenr le leur dé
fendait, puisqu’elles n’étaient point à leur adresse. La bienséance
le leur défendait encore; car une confidence licencieuse, que leur
père avait jugée fausse, ne devait pas être reproduite.
* «Attendu que le litre d’ épouse et celui de mère ont été reconnus par
la famille du général Destaing..................Q u’ un mois après son arrivée à
A urillac, Destaing père9 ne doutant pas du mariage et de l’avis et con
sentement de ses proches parens, s’est rendu tuteur.................... Que cette
reconnaissance et cette acceptation de tutelle paraissent d’autant plus con
sidérables, qu’on pourrait les regarder comme la suite d’ un examen -appro
fondi , et de certitudes acquises par le père, puisque deux lettres de son
fils, l’ une datée d’Egypte, l’autre écrite de P a r is , lui donnant tout le sujet
de douter de ce mariage, ou même de ne pas y croire, il n’en avait pas
moins consenti l’acte en question , et que ses proches p areils y avaient aussi
concouru ». (a.e motif de l’arrêt du n juin 1808).
�( , 5 .2 }
Mais cette méchanceté n’était pas sans b u t , et on le voit
dans l’afïbctation que les héritiers Destaing ont eue à recueillir
la déposition des sieur et clame Delzons, à qui le général disait
çp? A n n e Nazo était mariée 3 mais qu’il ne Vêtait pas. On
aperçoit maintenant que la lettre est présentée pour être en
ha rmonie avec cette conversation si souvent répétée par eux.
Si celte conversation était vraie, il est cruel pour la dame
Destaing d’en comprendre le sens : mais elle ne serait d’aucune
influence pour sa cause.
Que les Européens, dans l’immoralité de leurs théâtres,
mettent en scène des malheureuses abusées par toutes les appa
rences d’un mariage réel, et cependant dupes des artifices d’un
homme qui s’est joué de la religion et de la probité, 011 ne
s’étonnera pas que ce scandale dramatique obtienne quelques
applaudissemens. M a i s q u i oserait produi re dans le monde une
semblable atrocité comme un événement réel, pour s’en appro
prier les conséquences ? qui même oserait repousser de soi la
victime d’un artifice que le voile de la religion aurait ennobli
pour elle?
Quelle que soit l’intention des héritiers Destaing, en laissant
croire que le g é n é r a l a v o u l u t r o m p e r la famille N a z o par le si
mulacre d’un mariage nul à ses yeux , la perfidie de cette sup
position serait en pure perte pour eux ; car la loi viendrait au
secours de celle qui aurait clé dupe des apparences. En eiïet la
bonne foi de l’un des époux suffit pour la validité de son mariage
et la légitimité des enfans *. Mais la dame Destaing se hâte de
dire que les cérémonies publiques qui eurent lieu au Caire, les
lettres de son époux, sa conduite soutenue envers elle, le justifient
pleinement de l’inculpation dont on a voulu le flétrir. La légéreté
de sa nation, peut-être la crainte d’être blâmé par son père, ont
pu lui dicter quelques mots é q u i v o q u e s 5 mais son cœur fut
* Code Napoléon, articles 201 et
202,
�53
(
)
innocent d’une telle lâcheté; elle était indigne, de lui, et toulës
ses actions la démentent, r. -¿.j
Ceux-là seuls sont coupables , qui n’ont pas rougi d’exhumer
de la tombe de leur frère ce qui ne pouvait être utile à leur intérêt,
qu’en imprimant une tache sur sa mémoire. Mais c’est .trop s’arrêter à des réfutations pénibles et inutiles.
Ce ne sont point des cendres éteintes qu’il faut interroger pour
la recherché de la vérité ; tout la révèle , tout l’atteste; et l’in
crédulité ne peut plus être que le masque'hypocrite de la dis
corde qui ne s’avoue jamais vaincue.
^Ihest tems qu’on cesse de disputer à une,épouse malheureuse
un nom qu’elle a acheté assez cher , et qui seul aujourd’hui doit
l’indemniser de tout ce qu’elle a perdu. Elle l’a reçu en Afrique ,
aux pieds des autels ; elle l’a porté publiquement dans sa patrie,
sur les mers , et dans toutes les villes d’Europe que sa situation
l’a forcée de parcourir. S es adversaires e u x - m ê m e s n’eurent pas
même la pensée de lui en donner u n autre; ils l ’apprirent à
ceux qui l’ignoraient ; et c’est après une possession d’état, ainsi
émanée d’eux , qu’ils ont voulu déshonorer et méconnaître celle
qu’ils avaient accueillie et protégée, L a dame Destaing n’a jamais
supposé que cet avilissement put l’atteindre : elle ne tire aucune
vanité d’appartenir aux héritiers Destaing, plutôt qu’à une autre
famille; mais le titre sacré d’épouse, mais les droits plus sacrés
encore de l’orpheline qui lui doit le jour, lie pouvaient pas être
vains à ses yeux.
Sa fille, seule, au milieu de tant de contrariétés, a soutenu son
courage; la dame Destaing n’avait pas d’héritage plus précieux
à lui laisser qu’un nom qui ne fût pas déshonoré; et elle-même
ne devait point rougir aux yeux de son enfant du vice de sa
naissance.
Pouvant attendre sans crainte l’examen du présent et du passé,
la dame Destaing a pu se soumettre sans murmure aux lenteurs
de la justice, sachant bien que l’intérêt privé pouvait élever des
'
14
�( &4 )
les formes de son mariage , mais que la malignité
n’en hasarderait aucune sur la pureté de ses actions.
• Un jour peut-être les héritiers Destaing seront honteux de ce
procès , et s’enorgueilliront de celle qu’ils voulaient avilir et
proscrire. Mais si la passion ne leur permet pas aujourd’hui
d’être justes,la dame Destaing n’en doit pas moins aux mânes
'de son époux de ne pas se croire en guerre éternelle avec ceux
qu’il lui désigna comme des protecteurs et des frères, et qui
partagent avec elle la gloire de son nom.
doutes
sur
M.e D E L A P C H I E R ,
M.e T A R D I F ,
c. •*.
.
.
ancien avocat.
avoué-licencié.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Nazo, Anne. 1811]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Tardif
Subject
The topic of the resource
contestations de légitimité de mariages étrangers
expédition d'Egypte
opinion publique
xénophobie
Delzons
Description
An account of the resource
Mémoire pour Anne Nazo, veuve de Jacques-Zacharie Destaing, général de division, en son nom, et comme tutrice de Maria Destaing, sa fille , intimés; contre les sieurs et demoiselle Destaing, appelants.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1811
An 6-1811
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
54 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0410
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Le Caire (Egypte)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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contestations de légitimité de mariages étrangers
Delzons
expédition d'Egypte
opinion publique
xénophobie
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Text
M É M O I R E E N RÉPONSE
POUR
A
n t o i n e
VARAGNE,
et a u t r e s ;
intimés;
CONTRE
P i
erre
-I
srael
R O L A N D } Toi
n et te
-G
a b r i elle
R O L A N D , et Le sieur G R O S son m ari, appelans.
L
e
père du sieur Roland avait trompé les mineurs
Varagne et les avait dépouillés de tout leur patrimoine;
le sieur Roland et la dame Gros se plaignent aujourd'hui
de ce qu'un Varagne les a trompés à son tour pendant
qu’ils étaient mineurs, et a repris ses biens. Si cela était
vrai, il faudrait remonter à la source et ne tromper
personne ; mais ce n’est pas ainsi que les adversaires l'en
tendent; ils veulent bien rétrograder jusques avant la 2.
époque, mais non jusqu a la premiere, c est-à-dire,qu’ils
veulent retenir ce que leur père avait pris. A la vérité
ils sont obligés de convenir que son usurpation n’était
A
�( 2 )
.
pas la chose du monde la plus solide; mais au moyen
de quelques prescriptions et pérempiions ils espèrent la
légitimer, il laul croire au contraire qu’une œuvre d'iniquite et de tenèbres ne prévaudra pas contre une transac
tion sage et prudente qui en effaçait la turpitude; et la
publicité même que les héritiers Roland ont voulu
mettre à cette cause, ne prouvera que mieux à la Cour
qu’ils n’avaient pas mûrement réfléchi, quand ils ont.
voulu blâmer ce qu’avait délibéré leur famille, pour cou
vrir le passé et leur rendre justice.
F A I T S .
L e 18 septembre 1747, le sieur Pierre Roland avait
vendu à Géraud Varagne un domaine appelé de Fleu
ra c, moyennant 12,000 francs.
fut dit que Varagne
demeurait quitte du prix, au moyen de ce qu'il créait
11
et constituait au proiit du sieur Holanc! une rente de
5oo fr. par année, payable en deux termes, jusquesau
remboursement des 12,000 fr.
Géraud Varagne mourut en 1762, laissant trois enfans
mineurs, Antoine, Marianne et Sébastien.
11 avait payé
5
la rente de oo ir. avec la plus grande
exactitude, et 011 serait hors d’état d’établir qu’il eût
laissé pour un sou de deltes. Ses enfans devaient donc
être à l'abri de l’inquiétude.
Mais le sieur Roland îegrctlait singulièrement le
domaine de Fleurac q u ' i l a v a i t vendu , disait-il, ;i trop
bas prix , el que le bon étal où l'avait mis l ’acquéreur
�( 3
}
lui faisait encore envier davanlage. La mort de cet ac
quéreur lui fournit le prétexte de se reme!tre en pos
session en expulsant ses enfans. Abandonnés de tout le
✓
monde, ils ne pouvaient l’en empêclier, et d’ailleurs ils
n'ont jamais été informés des diligences qu’il pouvait
faire; c'est seulement après sa mort et par la remise
qu ’on leur a faite de ses procédures, qu’ils ont connu
celles dont ils vont rendre compte.
L e sieur Roland fit nommer un tuteur aux deux
puînés; et comme Antoine Varagne avait déjà 16 ans,
il le fit émanciper, c’est-à-dire, on présenta sous son
nom une requête au juge de Fleurac , le 20 décembre
1 7 5 2 , pour demander son émancipation (1).
Après cela, le 16 février i y
, le sieur Roland as
signa ledit A n t o in e V a r a g n e et le tuteur de ses frère et
sœur , pour lui payer s o fr ., la seule somme à lui due
pour le terme d’une demi-année de sa rente, échue
53
5
depuis La mort de Géraud Varagne.
Une sentence par défaut, obtenue le i .er mars 1753,
adjugea ces conclusions, et condamna les mineurs à dé
clarer de suite s’ils entendaient ou non être héritiers
de leur père.
Cette sentence était sans doute bien inutile pour moliver l’usurpalion du domaine, et le sieur Roland le
sentit bien. Il chercha à persuader Antoine Varagne
( 1 ) A i n s i il n’étnit pas ma ri é a va nt la mo rt de son p e r e , et
é m a nc i p é p a r le m a r i ag e > confine le disent les Adversaires ù Ici
f in de la p ag e 1 7 de leur m é m oi re .
A 2
�qu'il n’avait pas d’intérêt à conserver un bien où il pas
serait sa jeunesse pour partager ensuite son industrie
avec deux enfans en bas Age ; un jeune homme de
dix-sept ans n’est pas bien difficile à séduire. Deux cenls
francs que le sieur Roland lui promit, achevèrent de lui
tourner la tête: il promit tout ce qu’on voulut.
En conséquence le 24 mars 1753, le sieur Roland
1 assembla cinq cultivateurs sous le titre d’une assemblée
de parens, auxquels le jeune Varagne représenta, à ce
qui y est dit, que le domaine de Fleurac lui serait plus
onéreux que profitable, que son père Favait acheté
1rop cher, n’avait pas même pu payer les droits de lods,
qu’à la vérité il avait acquitté la renie, mais que c’était
en contractant plusieurs dettes passives, et que son père
en avait conçu un v if chagrin, qu’il croyait avoir été
cause cle sa mort, que même , en m ourant, il lu i avait
conseillé de supplier le sieur lio la n d de reprendre son
domaine ; d'après quoi il voulait suivre ce conseil, et
renoncer à la succession de sondit père.
Après cet acte de piété liliale, dans lequel le souf
fleur se fait assez remarquer, il était question de pren
dre l’avis de trois parens paternels et trois maternels
qui avaient été a s s i g n é s la veille ; leur délibération 11e
doit pas être passée sous silence.
lies trois parens maternels votent pour tout ce qui
est demandé, c’est-à-dire, 1 abandon et la répudiation,
quoique l’un lut l’opposé de l’autre 3 mais le sieur
lioland ava il voulu tout prévoir.
Des trois parens paternels,, l’un ne vint pas; parce
�( 5 )
que, clit-on , il était malade ; les autres deux, indignés
de ce qui se passait , et ne voulant pas participer à
l ’expoliation de leur neveu , déclarèrent qu’ ils n'en
tendaient pas qu’ il abandonnât Le domaine , ni qu il
répudiât. Celle réponse est consignée en Fade.
Cependant le juge, considérant que les parens ma
ternels étaient en plus grand nombre, homologua la
délibéra lion desdits trois parens maternels, et homo
logua même celle du curateur qui n avait rien dit.
Comme Antoine Varagne avait bien rempli son
r ô le , le sieur Roland lui donna le lendemain, non
pas précisément la somme promise, mais un billet de
200 francs, payable dans huit ans seulement, c’està-dire , à sa majorité , afin que si alors il voulait
se pourvoir, le sieur Roland pût au moins sauver
l ’argent.
Muni de cette homologation, le sieur Roland crut
en avoir assez fait pour mettre son usurpation en évi
53
dence , et par acte du 27 avril 1 7 , il donna à ferme
à un étranger le domaine de Fleurac ; et, s’il faut en
croire les adversaires, il poussa le nimia precautio jus
qu’à fiiire signer comme témoins , le curateur et le
mineur de dix-sept ans.
'
Cependant le sieur Roland ne pouvait se dissimu
ler qu'il avait fait une mauvaise procédure, et que
les pupilles Varagne, n'étant pas même nommés dans
l’avis des trois parens , auraient 1111 jour h réclamer
contre lui des restitutions de jouissances; il s’agissait
donc de porter remède ¿1 ce danger. Depuis plus de
�(
6
)
trois ans il était en possession du domaine, et avait
trouvé lout en bon état ; mais une vieille grange
lui sembla un prétexte suffisant pour ce qu’il avait a
faire.
L e tuteur étant mort, le sieur Roland en fît nom
mer un second le 24 mars i j d , et présenta une re
quête dans laquelle il exposa que les enfans Varagne,
ayant déserté le domaine , avaient laissé le tout en
très-mauvais état ; qu'il avait été forcé de préposer
des gens pour la culture, afin d’éviter le dépérisse
ment , que Le nouveau, tuteur ne prenait non plus aucun
soin pour jouir du domaine.
En conséquence il demanda permission d’assigner
Antoine Varagne et le tuteur, savoir au provisoire
pour faire constater Yétat de la grange, procéder au
6
bail a rabais des réparations, et au fonds , pour voir
dire que la vente de 1747 serait résiliée, et q u il serait
autorisé à reprendre la propriété dudit domaine , et
aussi pour être condamnés à payer ta rente de oo f ,
jusqu'à, ce q u il sera rentré en ladite propriété.
5
Le
5
mai il obtint une sentence provisoire qui lui
permit de faire constater les réparations; et aussi pro
digue de formalités pour celte inutile précaution, qu’il
en avait été avare en s’emparant de tout, 011 compte
dix-neuf pièces de procédure, affiches ou exploits entre
sa requête, et une sentence du i .cr juin qui adjugea
le rabais h 1,246 fr.
Ces réparations, comme on le vo it, n’avaient été
nécessaires que pour 1111 seul des batimens, et il était
�(
7 )
singulier qu’après trois ans d’usurpation, le sieur Roland
s'avisât de s’en prendre aux Yaragne qui n’avaient joui
que de 1747 à 1752.
Quoiqu’il en soit, après celle sentence provisoire,
le sieur Roland en oblint une seconde le 29 septem
bre 1756^ qui, adjugeant les singulières conclusions
de sa requête * déclara La vente de 1747 résolue, lui
permit de rentrer dans la propriété, et condamna les
Yaragne au paiement des arrérages ju sq u a sa rentree.
Cependant les collecteurs, plus justes que l u i , s’obs
tinaient à ne pas vouloir changer la cote d’impositions,
malgré son bail à ferme et sa nouvelle procédure ; en
conséquence, avant de laisser terminer le répartement
de 1 7 5 7 , le sieur Roland présenta une requête 11 l’i n
tendance pour se plaindre de celle insubordination 5
et comme il avait une charge à privilèges, il demanda
une cote d’oflice, modérée suivant le produit du bien,
qui à peine s’élevait, disait-il, d’après son bail, h cinq
cent cinquante francs : aveu, qui, en matière de sur
taux, où on n’exagère pas, fait assez voir combien
peu Varagne, cultivant par ses mains, avait dû être
grévé en payant 5 00 fr.
Sans doute, Antoine Yaragne , devenu majeur, 110
voulut pas accéder aux propositions qui lui furent
faites; car le 23 décembre de la même année, le
sieur Roland le lit assigner, ainsi que le tuteur, pour
voir déclarer lc?s sentences du i . er mars 1763 çt 29
septembre 1766 rendues contre eux-mêmes , en con
séquence , e s t - i l dit, se voir condamner à payer.,
�5
(
8
)
33
i.° 2 o fr. portés parla première, et
fr. de dixième;
2.0 1,246 fr. pour le montant du bail à rabais. Le 20
février 1768 , il surprit une sentence adjudicative.
Varagne en interjeta appel.
Cet acte imprévu dut déconcerter le sieur Roland,
qui sans doute chercha à renouer raccommodement,
et à gagner du tems. Ce qui le prouve, c’est que na
turellement le plus pressé, parce qu’il était créancier
et demandeur, il se contenta de se présenter le 19
avril 1768, et garda le silence pendant trois ans.
Après cette époque, il dressa le 18 juin 1771 un
exploit de demande en péremption , et il est démontré
par écrit qu’il n’y eut pas de copie remise, ou si on
Veut que l’huissier ne la donna pas. Aussi ne fut-il
pas difficile au sieur Roland , de surprendre , le 28
août 1 7 7 2 , une sentence par défaut qui déclara l’ap
pel périmé. Mais cette péremption, comme on voit,
était pe u i m p o r t a n t e , puisque la sentence de 1768
ne portait que des condamnations pécuniaires , et
ne disait rien de la résolution, déjà prononcée en
1756.
A peine Marguerite Varagne fut-elle majeure, que
le sieur Roland , toujours inquiet sur sa procédure,
chercha à obtenir d’elle un acquiescement aux sen
tences, et par acte du 16 février 1773, il paraît qu’il
lui extorqua cet acquiescement, sans prix.
Iiü sieur Roland mourut le i juillet de la mémo
a n n e e , et toute la peine qu’il avait prise pour êiro
rie I10
3
�'(
9
)
riclie ne l'empêcha p a s , ¿1 ce que disent les adver
saires, de laisser des dettes. Il avait fait un testament
par lequel il instituait celui de ses en fa l i s qui serait
élu par un conseil de famille.
Antoine Varagne ne redoutant plus le sieur Roland
mort, avait déjà annoncé qu’il allait interjeter appel
de la’ sentence de 17 ^ 6 , s’inscrire en faux contre
l’exploit de 1771 , et réclamer les restitutions de jouis
sances de vingt-un ans, tant de son chef que comme
cédataire de Sébastien son frère, et même du chef
de Marianne sa sœur , en se faisant subroger.
Cette réclamation était si peu difficultueuse , que
le conseil de famille, composé des hommes les plus
éclairés, ne trouva rien plus expédient que de rendre
le domaine , et de tâcher d’obtenir la remise des
jouissances.
En conséquence, Antoine Varagne traita le o oc
3
tobre 1773 avec le tuteur des enfans Roland, auto^
risé du conseil de famille. Après l’exposé de ses pré
tentions , l’acte porte qu’il reprendra le domaine,
vendu en 17 4 7 , et que le prix principal delà vente ( 1)
demeure fixé comme alors à 12,000’ francs et 72 fr.
d ’étrennes. Varagne paya de suite 2,472 fr. , et le
surplus fut dit payable à termes annuels de 1,600 fr.1
et de 1,000 fr. sauf l’intérêt jusqu’au paiement. A n
moyen de quoi le tuteur remit a Varagne les pro-
( 1) Les appelans avaient dit r e n ie , pag. 8 de leur mémoire:
erreur qui influerait sur les moyens de résolution. '
B
�( 10 )
cédnres et sentences , et le subrogea à l’acte passé le
16 février précédent avec Marianne Varagne, à ses
risques et périls. Et com me le sieur Roland pouvait
avoir déjà démembré le domaine, le conseil de famille,
toujours prévoyant, fit stipuler, pour éviter les recours,
que s'il y avait des ventes au-dessous de oo francs,
Varagne n’aurait rien à demander; mais que si elles
excédaient cette somme , il répéterait le surplus du.
prix seulement.
3
En vertu de cet acte, Antoine Varagne se mit in
continent en possession de son domaine , et paya ré
gulièrement deux à-comptes au tuteur ,■dès la pre
mière quittance, on vérifia quelles ventes le sieur
Roland avaient passées, et elles se trouvèrent d’un
pré de trois journaux, et de partie d'un autre pré.
Comme les deux actes ne portaient de prix que 778 f.
Antoine Varagne, suivant sa convention, n’eut qne
478 fr. à déduire.
Bientôt le sieur Pierre-Israël Roland devint ma
jeur, et (ce qu’il ne disait pas jusqu'à ce que les V a
ragne l’aient découvert) le même conseil de famille
s’assembla le 4 décembre 1777 pour l’élire héritier
universel de son père, à la charge de payer les légi
times portées par son testament.
Ledit sieur Roland prit des arrangemens avec ses
frères et sœurs, en se mettant en possession de toute
la succession ; il s’obligea vraisemblablement à payer
leur légitime qui était assez considérable, el il avoue
aujourd lmi qu’il les représente tous à. l ’exception de
la dame Gros.
x
�( II )
En 1 7 7 7 , ü éfaîl: échu un terme de 1,000 fr. sur
le traité de 1773; et le sieur Roland, aussitôt qu'il fut
héritier, n'avait pas manqué, à ce qu’il paraît, de
prendre connaissance de cet acte. Car non-seulement
il demanda à Varagne le terme échu , mais il l’en
gagea même à avancer le terme suivant , pressé sans
doute d’acquitter les légitimes.
En effet on voit par quittance du 27 juillet 17 7 8 ,
que le sieur Pierre-Israël Roland , avocat en parle
ment, reçut d’Antoine Varagne 2,000 francs, savoir
1,000 fr. pour le terme échu h la Toussaint de 1777?
et 1,000 fr . par anticipation pour Le terme a échoir
à La Toussaint de 1788, porté au traité passé devant
Le notaire soussigné, entre son tuteur, les conseillers ci
la tutelle et ledit V^aragne.
Dira-t-on que c’était Varagne qui s’empressait d’avoir une ratification d’un majeur; mais elle n’est pas
la seule ?
Quatre ans après, et lorsque le sieur Roland eut eu
le loisir de méditer l’actif et le passif de la succession
de son père, le surplus des 12,000 fr. était é c h u , et
Varagne paya par quittance du 11 juin 1782, audit
sieur R o la n d , avocat, la somme de 4,000 francs pour
tout reste et fin a l paiement du prix de la vente et
délaissement du domaine de Fleurac ayant appartenu
au x auteurs dudit sieur R o la n d , et délaissé audit
Varagne par traité reçu par le notaire soussigné, de
laquelle dite somme de 4,000 fr. ensemble du prix
entier de Ladite vente, Ledit sieur R oland c l promis le
faire tenir quitte envers et contre tous.
�( I2 )
Antoine Varagne mourut, après avoir ainsi liquidé
sa fortune; il laissait sa veuve tutrice; et l’un de ses
fils, ayant été m arié, laissait aussi une veuve tutrice,
le sieur Roland trouvait là une bien belle occasion
pour marcher sur les traces de son père, et repren
dre ce qui 11e lui appartenait plus. La crainte de trouver
de 1*obstacle en son nom seul lui fît emprunter le
nom de ses frères et sœurs pour former sa demande,
et cacher soigneusement la qualité d’héritier universel,
dont il avait cependant usé en prenant tout le prix
de la vente.
En conséquence, par requête du
février 1788,
il fut formé demande devant le juge de Salers, en
25
nullité du traité de 1 7 7 3 , et désistement, ¿1 la requête
des sieurs Pierre-Israël R o la n d , avocat, Jean-Marie
Roland curé de Salers , G u y Roland , prêtre corrimunaliste, Louis-Israël Roland, prêtre, et ToinetteGabrielle Rol an d , contre Catherine Lape }Tre , en
qualité de tutrice des enfans d’Antoine Varagne père
son mari, Marguerite Chaumeil, aussi tutrice des en-
3
fans d’Antoine Varagne fils son mari, et Jean V a
ragne fils.
Les Varagne qui ne voulaient pas plaidera Salers,
se laissèrent condamner par défaut le 10 juin 1788,
et interjetèrent appel en la sénéchaussée d Auvergne.
La cause fut appointée au conseil, et le sieur Ro
land comprenant tissez que sou systeme d envahisse
ment n’y ferait pas fortune , v o u l u t se rendre un
peu moins défavorable. 11 reconnut qu’il avait mal
�13
(
)
à propos demandé le désistement lot al , et que Sé
bastien Varagne aurait eu droit de rentrer dans le
domaine; en conséquence il se départit de sa demande
pour un tiers. A l’égard des deux autres , il soutint
que son tuteur avait été trompé, et qu’après le traité
de février 1 7 7 3 , et les sentences de 1768 et 1 7 7 2 ,
Marianne et Antoine Varagne avaient perdu toute
propriété, de sorte que le traité de-novembre 1773
contenait une aliénation de biens de mineurs contre
laquelle ses frères et lui pouvaient réclamër pendant
trente ans.
Mais les tutrices Varagne, pour repousser ces moyens,
firent des recherches dans les études de notaires, et
trouvèrent les quittances de 1778 et 1782 , le testa
ment du sieur Roland père, et l ’élection de 1777.
Ces pièces, jointes aux circonstances de l’acte de
1773 , .étaient si décisives que la sénéchaussée d 'A u
vergne, par sentence rendue au rapport de M :r Bidon,
le
3 septembre
1790 , n’hésita pas à infirmer celle par
défaut de Salers , et à débouler les sieurs Roland do
leur demande.
A leur tour les sieurs Roland ont interjeté appel
de celle sentence au parlement de Paris; ce n’est
qu’en l’an 10 qu’ils en ont repris les poursuites de
vant la Cour.
ne reste plus qu’à rendre compte
des moyens respectifs et à répondre à ceux proposés
par les appelans dans leurs écritures et leur mémoire.
]1
�(
)
M O Y E N S .
système des appelans est, comme on le prévoit
sans peine , fondé tout entier sur l’état des choses
subsistant avant la transaction de 1 7 7 3 ; alors disentils aux Varagne , votre expropriation était légalement
consommée, vous deviez une rente foncière que vous
ne payez pas, ainsi il y avait heu à résolution ; vous
avez déguerpi les biens, et vous le pouviez, quoique
mineurs, avec le décret du juge. Ainsi rien n’était
plus légitime que les sentences de 1753 , 1756 ,'et
1768; d’ailleurs c'était chose jugée à cause de la pé
remption prononcée en 1772 contre Antoine Varagne,
et quant à Marianne elle avait tout approuvé par un
L
e
traité contre lequel il n’y avait pas lieu h retrait, dès
qu'il ne s’agissait que de résolution; ni à subrogation
légale, puisque ce traité acquérait au sieur Roland
rem sib'i necessariam.
Si donc, disent les adversaires, nous étions proprié
taires incommutables en 1 7 7 3 , notre luleur n’a pu
aliéner notre propriété sans formes et sans nécessité.
Nous nous sommes pourvus dans le tems, et les quit
tances du prix ne sont pas une approbation.
Quoique cet ordre de moyens soit une inversion de
questions, et que naturellement la première chose ¿1
examiner dût être la fin de non recevoir , cependant
les intimés suivront cette série des rno}rens présentés
parles adversaires, puisque leur but est d y répondre.
Ils examineront donc i.° si le sieur Roland avait re-
J
�5
( i )
couvré la propriété du domaine de Fleurac, lorsqu’il
s’en empara en 1753 ; 2.0 si au cas qu’il ne fut pas alors
propriétaire, il Test devenu par les sentences de 1 7 , ;
1 7 5 6 , 1768 et 1772 , et si elles étaient chose jugée
en 1773, tant contre Antoine que contre Marie V a
ragne; .° si la transaction du o octobre 1773 était
nue aliénation des biens des mineurs Roland; 4.0 si,
en ce cas, les adversaires se sont pourvus en tems utile;
53
3
5.°; enfin
3
si les quittances de 1778 et 1782 produisent
une fin de non recevoir.
P
r e m i è r e
q u e s t i o n
.
L e sieur R oland pere avait-il recouvré la propriété
du domaine de Fleurac, lorsqu’il s’en empara en 1753
L e sieur Roland avait vendu ce domaine en 1747 ;
ainsi sans difficulté Geraud Varagne en était proprié
taire ¿1 son décès en 1752.
Mais quelle était la nature de cet acte de 1747 ? car
de cet examen préalable dépend la discussion relative
aux moyens proposés de déguerpissement et de réso
lution.
Souvenons-nous qu’en 17 4 7 .le sieur Roland avait
vendu un domaine moyennant 12,000 fr. ,pourlaquelle
somme l’acquéreur avait constitué une rente de oo fr.
Ainsi d ’après les principes celle renie 11’élait paspuremem foncière ; c’était une simple renie constituée,
assise sur un immeuble avec privilège spécial.
5
�( x6 )
Par conséquent le bailleur n'avait pas retenu le do
maine direct ;dèslors c’était une aliénation pure et simple
de sa part , ce qui changeait totalement le droit qu’il
s’est arrogé de s'emparer du fonds, comme s’il 11’eût
délaissé que la propriété utile.
Cette différence à faire entre les ventes h charge do
rente constituée, ouïes baux à rente foncière, nous
est enseignée par les auteurs du nouveau Denizart au
mot arrérages : «-Unhéritage, disent-ils, peut être vendu.
« moyennant une rente de telle somme, ou bien le prix
« de l’héritage peut être fixé d’abord ¿1 telle somme,
c< et ensuite les parties convenir par le même acte que
rr la somme formera le capital d’une rente constituée
«
«
«
«
entre les mains de ¡’acquéreur. Dans le premier cas
nul doute que la rente ne soit foncière ; mais au second,
la rente renferme une véritable constitution de rente
à prix d’argent >3.
Sans doute cette opinion ne sera pas taxée d'innova-»
lion; car on la retrouve dans Loyseau en son traité du
déguerpissement. «Toutefois, dit-il, en toutes ces renies
« foncières, il y a une signalée précaution, et unere'«■marque de grande importance , c’est quesi le contrat
« est fait en forme de vente , auquel le prix soit parti« culaiisé et spécifié, pour lequel prix soit constitué
* rente à la suite du même contrat, alors, à bien en« tendre , telle rente ne doit pas être estimée foncière,
c< mais simple rente constituée, (f. 1 • ch. . n.° 14e! 17).
L e même principe est enseigné par Bas 11âge sur l’aiv
ticle
de Normandie, par Pothier au traité du con
trat
5
5^5
�( 17 )
'
trat de constitution de re n te , n.° 1 3 3 , par divers arrêts
de cassation de Tan 9 et Tan 1 1 , et par un arrêt de
la Cour de l’an i 3.
Cela posé, on ne voit plus où s’appuient les deux
moyens des adversaires, fondés sur ce que les enfans
Varagne avaient pu déguerpir le domaine, pour ne pas
payer la rente, et sur ce que, ne payant pas la rente,
la résolution était de plein droit après trois ans.
L e premier moyen ne semblait pas trop raisonnable,
parce que dans les faits ci-dessus rapportés, on ne voit
rien qui ait beaucoup d analogie avec un déguerpisse
ment. Mais les adversaires prétendent que le simple
fait d’abandon du domaine équivaut dans l’espèce à
un déguerpissement, par la raison, disent-ils, que d'a
près L o y se a u , les mineurs peuvent aussi déguerpir
pourvu qu’il intervienne décret du juge pour le leur
permettre, après un avis de parens. Or, ajoutent-ils,
cette autorisation judiciaire se trouve dans la délibé
ration des parens qui avaient autorisé les mineurs à
abandonner le domaine et même à répudier la suc
cession.
‘Erreur dans le fait et dans le droit.
Dans le fait ; car celte délibération n’autorisait pas
les mineurs, mais l’émancipé seul; et loin d’être com
plet te, on voit que les parens paternels eurent l’énergie
de s’indigner bâillement de ce qu'on méditait contre
un enfant, et que les parens maternels accédèrent seuls
à ce qui était demandé.
Dans le droit ; car ce n'est pas cette délibération
C
�( i8 )• •
qui aurait produit un déguerpissement, elle y auto
risait seulement Fémancipé, et cependant il s'en est
tenu à cette démarche, déjà même le sieur Roland
s^était emparé du domaine; et quand il sollicitait une
répudia lion, il est clair qu’il exigeait deux choses con
tradictoires , parce qu’un déguerpissement était une
adition d’hérédité.
Un déguerpissement n’est pas un acte tellement sans
conséquence qu’il puisse avoir lieu par accord verbal,
car il est une aliénation, et non midis pactis dominicu
transferuntar.
D ’abord il n’est pas très-certain qu’un tel acte soit
permis a des tuteurs, même avec le décret du juge;
la loi s’y oppose formellement ; prœdia vendi, v e l
7
i p s j s c a r e r e permitti non debet, et si permis sam s it
nulla est venditio, rmllumque decretam. (L. si æs. ff.
de reb. eor. etc.)
Cependant admettons qu’ un tuteur puisse déguerpir
avec le décret du juge; au moins faut-il, quand le
décret est intervenu ; qu’il y ait un déguerpissement
formel.
Loyseau , invoqué par les adversaires, dit
déguerpissement doit être fait en jugem ent,
qu’on ne confonde pas celle expression, il
c’est-à-dire en L'audience de ju stice, les plaids
*
«
«
«
*
que le
et pour
ajoute,
tenant-
car, continue cet auteur, le respect ,1a majesté du
lieu où la justice est exercée, la présence des magistrais, la fréquence des assislans donne a cet acle
plus d’autoriié , parce que le déguerpissement est
un acte d’importance. (Liv. .)
5
�9
( i )
Si donc il y avait eu lieu à déguerpissement, les
adversaires ne pourraient en invoquer aucun , car il
n'y en a d’aucune espèce. Mais ce n ’était pas le cas
dès que la rente n’était pas foncière. Car, cdmmë dit
Chopin sur l ’art. 109 de la coutume de Paris, « en
« rente rachetable sous un principal exprim é, n’y a
« lieu à déguerpissement, cum sit ootiàs emptor, quàm
« conductor pretii vectigalis ».
Opposera-t-on qne ces principes sont en faveur du
bailleur et non contre lui : mais dès que le déguer
pissement est une aliénation , il faut que le contrat
soit bilatéral ou synallagmatique, et jamais il ne sera
possible de penser que des mineurs sur-tout aient fait
un déguerpissement valable, sans aucun acte, même
hors jugement et par le seul fait de leur dépossession.
Quant à la résolution, faute de paiement par trois
ans, elle n'avait pas lieu en rente constituée; mais
3
ce serait devancer les adversaires que d’examiner
ici cette question, .car ils ont été forcés de recon
naître q u e , d’après leur propre syslê'me, il n’y avait
pas lieu à résolution quand leur père s’empara du
'domaine en iy’ ; parce que la sentence du r.er mars
de ladite année ne portait condamnation que d’ un
demi-terme de la rente de oo francs, échu encore
depuis la mort de Géraud Varagne.
Ainsi, sur celte première question, il est constant
que sous aucun point de vue , le sieur Roland n’é
tait propriétaire du domaine de Flenrac lorsqu’il s'en
empara, et le donna h ferme le
avril 1753.
53
5
^5
C 2
�( 20
DEUXIÈME
)
QUESTION.
L e sieur R oland est-il devenu propriétaire du do
maine de Fleurac par les sentences de 1 7 5 3 , 17^6,
1768 et 1772 ?
Ces sentences étaient-elles passées en force de chose
jugée en 1773 , tant contre Antoine V^aragne que
contre Marianne sa sœur ?
L a sentence de 1753 ne signifie rien pour la pro
priété, cela est convenu; elle n’était qu’un achemi
nement aux autres, et eût été elle-même irrégulière,
puisque le sieur Roland a dit Géraud Varagne mort
en novembre 17 52 , et que depuis cette époque jus
qu’après les trois mois et quarante jours il n ’avait pas
d’action, d'après l’ordonnance de 1667 , renouvelée
par le Code civil.
En 1756, il y eut deux sentences, mais la première
11e parle que de bail à rabais et non de propriété ;
c'est la seconde seulement, du 29 sepiembre, qui pro
nonce la résolution de l ’acte de 1747*
On ne peul pas douter que le juge n’ait été sur
pris lors de cette sentence , puisque l ’exposé de la
requête, sur laquelle elle est rendue, suppose que le
sieur Roland n’était pas encore en possession du do
maine de Fleurac. Il demandait j u s q u e s - l à les arré
rages de la renie de oo f r . ,, et cerles c’était abuser
étrangement du silence forcé des mineurs Varagne;
car s'il eût conlessé au juge, que depuis plus de trois
5
�(
)
ans il percevait les fruits du domaine, sur lequel la
dite renie était assise, le juge au lieu de lui adjuger
sa demande, l'aurait éconduit, quoique par défaut.
Cette sentence, il est vrai, quelque mauvaise qu’elle
fût, disposait de la propriété du domaine; mais elle
était susceptible d’appel pendant trente ans d’après la'
jurisprudence; et dès-lors en 1 7 7 3 , elle pouvait être
attaquée.
Ce n’est pas ainsi, à la vérité, que les adversaires le
supposent. Ils soutiennent, au contraire, qu’il y avait
chose jugée en 17 7 3, et que tout espoir de retour était
ôté contre la procédure précédente, sauf néanmoins
les droits de Sébastien Varagne qu’ils reconnaissent
entiers. A l’égard des deux autres, ils séparent Antoine
Varagne de Marianne sa sœur.
Antoine Varagne, d ire n t-ils, avait bien interjeté
appel de la sentence<de 1768; mais cet appel avait
été déclaré péri, et la péremption emportait le bien
jugé de cette sentence, et dès-lors de celle du 29
septembre 1766.
Mais les sieurs Roland confondent aujourd’hui ces
sentences, qui avaient un objet très-distinct en 1772.
L a sentence de 1768 n'avait pas pour objet de
faire déclarer les précédentes exécutoires contre les
Varagne , puisqu’elles étaient rendues contre eu x mêmes:; si le mot y fut employé ce n’était que par un
vice de style; car le but très-clair de la demande était
d’obtenir le paiement de 1,246 fr. prix apparent du
�( 2* )
bail à rabais, dont le S.rRoland n'avait pas encore obtenu
de condamnations. On voit en effet parla lecture de la
sentence de 1768, qu’elle ne porte que des condamna
tions pécuniaires, et ne dit pas un mot de la résolutiou.
La sentence de 1772 prononce la péremption de
l ’appel de celle de 1768, et est encore plus étrangère que
toutes les autres à la propriété du domaine de Fleurac;
car, quand la péremption serait irrévocable, l’effet de
la sentence de 1768 ne s’étendrait pas au -d elà des
condamnations qu’elle prononce.
A in si, quand les sentences de 1768 et 1772 auraient
passé en force de chose jugée en 17 7 3 , au moins la
sentence du 29 septembre 1706, la seule qui pronon
çât la résolution de la vente de 1747, était-elle évidem
ment susceptible d’appel en 1773.
Mais si, par impossible, la Cour pouvait considérer
dans la sentence de 1768, une résolution que celte sen
tence ne prononce pas , comme alors celle de 1772 au
rait une plus grande influence, c’est alors le cas d’exa
miner la validité de l'exploit de 1 7 7 1 , sur lequel cette
sentence a été surprise.
Il est démontré que la copie de cet exploit a été souf
flée. La lecture de l’original le prouve. Et en vain les
adversaires ont-ils ouvert une longue discussion surdes
mots écrits 011 ajoutés , on voit clairement que leur
père , ou le rédacteur de l'exploit a eu deux pensées
l ’une après l'autre, et que la deuxième a corrigé la
première ; mais ce n'est là disputer que sur le genre
d’inlidélité ; car l e s adversaires sont obligés d’avouer qu’il
�(
2 3 }
y en a une. L ’huissier au moins n’a pas porté la copie;
l'assigné, qui ne i’a pas reçue, soutient l'exploit nul, et il
l ’est sans difficulté. Si donc il n’y avait pas de demande
en péremption, il n’y avait pas de péremption; alors
l’appel était recevable en 1773. Toute la faveur eut été
pour cet appel, et toute la défaveur pour une péremp
tion extorquée par un faux évident.
Du chef deMarianne Varagne, Antoine eût été, disentils, moins reccvable encore, puisqu’elle avait tout ap
prouvé par le traité du 16 février 1773 , ainsi personne
ne pouvait réclamer pour elle.
Pourquoi donc ses frères n’auraient-ils pas eu d’action
en subrogation légale , si M ari anne avait cédé un droit
litigieux et universel ? Ce tte prétention paraît choquer
les adversaires; mais c’est qu’ils partent toujours de cet te
idée fausse, que leur père avait conservé la propriété
directe du domaine, et alors ils se croient dans l ’ex
ception de la loi exceptis cessionibus quas ¿s qui possidet pro tuiliorie sucî accipit.
Cela est très-bien quand, avec un titre légitime pour
une partie , on possède tout, et que, pour confirmer sa
possession , 011 achette rem necessariam.
Mais quand on n’a que la portion d’un cohéritier par
usurpation, il est clair qu’on ne cherche pas à y rester
pour éviter un procès; mais qu’on se prépare à en sou
tenir un contre les cohéritiers.
Suivant le système des adversaires, et en interprétant
juduïquemenl l’excepliou de la loi, rien ne serait plus
�24
(
)
facile que de l’éluder. L ’acquéreur d’un droit de copro
priété ou d’ ùn droit successif se mettrait d’avance en
possession d’uri objet, et ensuite il en serait quitte pour
dire qu’il est dans l ’exception de la loi, parce que
possidetis, pro tuitione accepct.
Pourquoi encore les frères de Marianne Varagne
Sauraient-ils pas eu une action en retrait; car s’il est
certain que le domaine de Fleurac a resté dans la famille
Varagne, il est clair que Marianne Varagne était pro
priétaire d’une portion , par la règle Le mort saisit le vif.
Mais, disent-ils, un retrait n’a lieu qu’en matière de
vente ou d’acte équipolent à vente.
L ’objection même les condamne; car dès que l’acte
de 1 747 était une vente, Marianne Varagne, propriétaire,
n ’a pu s’en départir que par unacteéquipolent à vente.
En vain oppose-t-on qu’elle a cédé son droit par une
transaction. Une transaction n’est qu’ un acte indéfini
qui admet toutes les espèces de conventions, et qui
dèslors retient elle-même le nom le plus analogue à
son objet principal. Ainsi quand , par l’effet d’une
transaction, l’immeuble d’un contractant passe h un
autre, l ’acte est toujours une vente, puisqu’il en a les
caractères; car la qualité des actes ne doit pas se juger
par les noms qu’on leur donne, mais parleur substance.
Si Marianne Varagne n’avait eu que ju s ad rem> il
est possible que la transaction ne lïit pas considérée
comme une vente, dès qu’elle n’aurait cédé qu’une
simple prétention litigieuse ; mais il est clair qu'elle
avait ju s iti rcy et qu’étaul propriétaire au décès de
son
�25
(
)
son père, aucun acle ne lui avait ôté celle propriété.
Son abandon était donc une vente pure et simple.
Or, sans se jeter dans un long examen sur les cas
où le retrait était admissible, les adversaires ne nie
ront pas qu’en vente d’immeubles il ne fût admissible
au profit d'un frère.
Ils ne nieront pas encore qu’il n’eût été même ad
missible quand Marianne n’aurait abandonné que j u s
ad rem; car il est de principe enseigné par Polluer
d’après Dumoulin, Duplessis et autres auteurs, que la
vente d'un droit réputé pour héritage suffit pour
donner ouverture au retrait.
L e même auteur dit plus clairement à la page pré
cédente, que la créance qu’on a pour se faire livrer
un héritage, est sujette à r e t r a i t si elle est cédée: et
cette doctrine n’est qu’une conséquence du principe
que actio ) qtiœ tendit ad aliquid immobile ; est im
mobiles .
Dans la circonstance sur-tout, et après la conduite
du sieur Roland père , lorsqu’il venait d’y mettre la
de rnière main en ôlanl le patrimoine d’une jeune fille
sous prétexte des dangers d'un procès, il n’est pas
de tribunal qui eût refusé d'admettre un retrait qu’au
rait exercé Antoine ou Sébastien Varagne ; parce que
c’était la voie la plus légitime pour tout rétablir en
son premier état, et qu’il ne s’agissait que d’arrêter
une usurpation.
Mais, objectent encore les adversaires, qu’aurait pu
fane Antoine Varagnep tant pour lui que pour sa,
D
�( 26 )
sœur, quand il aurait pu exercer les droits de l ’un
et de l'autre, et interjeter appel de la sentence de
1*756? cet appel aurait été non recevable au fonds,
parce qu’une résolution prononcée est inattaquable.
Sans doute, une résolution Légale est inattaquable,
et il était inutile de rappeler tout ce que dit sur cette
question M.r Chabrol : car ce n’est pas le principe que
contesteront les V a ra g n e , mais bien l’application, qui
est véritablement choquante sous toutes les faces.
D ’abord M.r Chabrol parle des rentes foncières , et
ici il ne s’agit que de rente constituée.
Il aurait fallu cinq ans d’arrérages dans ce dernier
cas; il eût fallu trois ans, si c’eût été une rente fon
cière. Or , ici il n’y avait que six mois d’arrérages.
Pour que la résolution soit légale , il faut que la
sentence, qui condamne au paiement, porte un délai,
sinon la demeure peut toujours être purgée. L a sen
tence de 1 7
56
n ’en portait aucun.
Ce n’dst qu’après la sentence et le délai que le
bailleur peut se mettre en possession; ici, le vendeur
usurpait depuis trois ans. L e motif de résolution em
ployé par le sieur Holand était même mal-honnete:
loin d’y parler d’un abandon inutile fait par des pu
pilles chassés du domaine, il prenait pour prétexte le
défaut de paiement des arrérages. Il trompait donc
la justice, car il demandait ces arrérages, et cepen
dant il jouissait : il avait ôté par son propre fait aux
mineurs Varague toute possibilité de les payer.
�(
’
r
«
-1
TROISIÈME
L a transaction du
i
3o
)
*
—•
/.
QUESTION.
octobre 1773 éta it-elle une
aliénation des biens des mineurs R oland ?
r
•
,
r
citations des adversaires, pour,montrer qu’on
ne peut vendre sans formalités le bien des mineurs,
ne sont pas plus applicables, que n’est fondé le re
L
es
proche fait à la sénéchaussée d’Auvergne de les avoir
méconnues.
. .1
Il est très-vrai que le tuteur ne peut de gré h gré
et sans nécessité vendre les immeubles de ses mineurs.
Mais ici, c e 'qué cédait le tuteur 11’était pas un im
meuble de ses mineursj et il y avait nécessité.
Ce n’était pas un im m e u b l e des mineurs Roland,
puisque leur père l’avait vendu ; que l’acte de 1747
n’étant pas un bail à rente, il s’était départi, de la
propriété ,utile et directë , puisqu’eùfin il n’ÿ avait
eu ni pu y avoir de résolution valable.
;
Il y avait nécessité, puisque les parties allaient enIrer en procès, et que ce procès ne pouvait pas être
d’une solution difficile.
• -f
Ccir des mineurs dont un seul avait trente-cinq ans,
se plaignant d’un mode d ’usurpation qui eût crié ven
geance, n'avaient pas à craindre une résistance bien
sérieuse.
Quand le faux de l’exploit de 1771 n’eût pas fait
tomber la péreinplion, elle ne sc fûl ra p p o rte qu’à
la sentence de 1768, et le pis-aller eût été de payer
D 2
�( 28} ,..
mal à propos 1,246 fr., si les héritiers Roland avaient
établi avoir employé celle somme. Mais de sa part,
Antoine Varagne aurait eu à répéter les jouissances
de vingt-un ans à dire d’experts.
O r , les adversaires ont prétendu que le domaine
valait o,ooo fr. • et en né fixant les fruits qu’à 1,000 fr.
par an, ils eussent été débiteurs de 21,000 fr.
A la vérité il eût fallu déduire moitié pour la
rente de oo fr. plus les 283 fr. de la sentence de
1 7 5 3 , et si on veut les 1,246 francs; mais, comme
on v o i t , les mineurs Roland auraient toujours été re
liquat aires de 9,000 fr.
3
5
Ils avaient doncplus d’intérêt à traiter que Varagne,
puisqu’ils obtenaient le sacrifice de cette somme, au
lieu de faire'eux-mêmes celui des réparations, comme
ils essayent de le persuader. .
Leur tuteur avait sans difficulté le droit de transiger,
puisqu’il né s’agissait que de terminer un procès. En
vain dirait-011 que ce procès n'était pas commencé 5
car il est de principe que transactco f i t de Lite rnotâ,
aut movendâ.
L ’exposé de la transaction prouve les difficultés qui
allaient naître : au lieu d’assigner et de plaider, on
transigea. .
Si quelque chose devait ajouter à la faveur due à
un acte aussi respectable qu’une transaction, ce serait
de connaître les personnes qui composaient le conseil
do famille, et qui en ont été les auteurs. Car que
Maigne, tuteur, fui ou non un chapelier el un homme
�(
2
9
3
peu intelligent, l’acte n’était pas purement de son fait,
il était le résultat des réflexions d’une famille distin
guée, ¿1 laquelle les adversaires devaient plutôt d e là
reconnaissance que des reproches ; reproches d'ailleurs
d’autant plus aisés à multiplier, que les intimés n’ont
aucun intérêt d'en vérifier la sincérité.
QUATRIÈME
QUESTION.
Les appeians se sont-ils pourvus en tenis utile contre
La transaction ¿/e 1773?
O u i, disent-ils, par deux motifs ; le premier c’est
qu’elle n’a été passée que par notre tuteur; le second
c’est que vous avez retenu les pièces, et que le délai
pour nous pourvoir ne court que de leur remise.
La réponse ¿1 ce premier motif pourrait être ren
voyée h la question suivante, parce qu’au moins les
quittances de 1778 et 1782 ne sont pas du fait du
tuteur; mais pour suivre exactement les moyens des
adversaires, il suffit quanta présent de leur rappeler
ces quittances.
Il est aisé de voir le but de la distinction à faire entre
les actes des mineurs, et ceux de leur tuteur.
Souvent il serait injuste de les déclarer non recevables
après 10 ans, à l’égard de ces derniers actes, parce que
peut-être ils en auraient ignoré l’existence; et la pres
cription n’est qu'une peine imposée par la loi ¿1 celui
qui néglige d’agir.
Mais toutes les fois qu il est certain que le mineur a
�( 30 )
connu l'acte , toutes les lois sur-tout rqu'il l’a adôplé ,
c ’est alors que le fait du tuteur étant le sien, le mi
neur a à s’imputer de ne pas se pourvoir.
- Or, par cela seul que le sieur Israël Roland, hériiier deTson père, a connu et adopté en 1778 l ’acte de
1 7 7 3 , et sans examiner reflet de son approbation, il
a dû se pourvoir.
Comme, dès 1778, il connaissait la date de ce traité
de 1773, il devait savoir qu'à supposer qu’il eût droit
de l’attaquer, il ne le pouvait que jusqu’en 1783, parce
qu’il se l ’était approprié; cependant il n’a formé de
mande qu'en 1788.
Alors non-seulement il y avait plus de dix ans de*
puis le traité de 1773, mais le sieur Israël Roland avait
plus de trente-cinq ans.
L e deuxième moyen des adversaires sur cette ques
tion annonce l'embarras d’en proposer de meilleurs;
C a r , contre^quel acte devaient-ils se po u rv o ir ?
Est-ce contre la transaction? Est-ce contre les pièces
y visées ?
Sans doute ce n’est pas contre les sentences y énon*
cées, puisqu'ilsenexcipent. C ’est donccontrela transac
tion; mais ils n'articulent pas sans doute que Varagne
l'ait retenue.
A vec un système comme celui qu’ils hasardent, il
faudrait dire que tout traité d’après lequel on aura
remis des pièces à une partie (ce qui arrive tous les
jours) sera attaquable à perpét uité; et, comme dit Du^
moulin pour les choses précaires, eUa-niper mille antios,
�(
3 1 7
D ’abord les adversaires pouvaient très-bien voir dans
la transaction , que leur père avait vendu un domaine,
et l’avait ôté ensuite à des mineurs par abus de leur
faiblesse, mais que ces mineurs l'avaient repris ; c'était
là tout le secret des pièces remises à Varagne.
Or, comme la transaction n’était pas retenue, si
les adversaires voulaient se pourvoir, rien ne les en
empêchait; et alors, comme aujourd’hui, ils auraient
redemandé toutes ces pièces., qu’on ne leur cache pas.
Outre la faiblesse de ce moyen, il n’a de prétexte
que la mauvaise foi; car les adversaires ont prétendu
que les sentences de novembre 1756 et de 1772 n’é
taient pas énoncées dans le traité, de 1773, de même
que le traité du 16 février, pour leur en- cacher l’exis
tence. Cette allégation leur a même paru si impor
tante qu'ils y ont employé les pages 7 , 8 , 49, 5o, 53
et 54 de leur mémoire.
L ’omission supposée de la sentence de novembre
1756 n'est qu'une misérable équivoque. La sentence
de novembre 1756 était au moins visée et énoncée
dans celle de 1768 , puisque les adversaires préten
dent que celle dernière renouvelait en entier celle
de 1756.
En second lieu , on voit à la fin des dires de V a
ragne au traité, que parmi ses moyens contre la pro
cédure il disait qu’il était recevable à lenir les encragemens de son père
que l a
sentence
dans
La c i r c o n s t a n c e s u r - t o u t
qui or d o nn e
la
Ré s o l u t i o n
jde
�3
( a )
LA v e n t e n’enlève cette faculté qu’après o ans, etc.
Or , où est donc cet le sentence, si ce n’est celle
du 29 novembre i y
?
^
3
56
On n’a donc pas caché aux mineurs qu’il existait
une sentence prononçant une résolution.
Quant à la sentence de 1772 , l’équivoque est en
core plus sensible ; on nous a c a ch é , disent les adver
saires, qu’il y eût une sentence prononçant la péremp
tion (pag. 8 et 9).
Mais , en parlant de la sentence.de 1768 , on ajoute
que Varagne s3était rendu appelant, mais que la sen
tence avait passé en force de chose jugée comme n ayant
pas fa it diligence sur son appel pendant trois ans con
sécutifs.
N ’est-ce donc pas se faire des moyens de tout que
de ne pas voir là le synonime d’une péremption ; et
que les expressions ci-dessus expliquaient môme mieux
le droit des mineurs: dès-lors on ne voulail pas écarter
ce qui leur aurait donné trop de lumières.
Enfin à l’égard du traité avec Marianne Varagne,
comment les adversaires ont-ils encore osé dire qu’on
le leur avait caché.
L a transaction porte que le sieur R o la n d , par acte
!»
(
#
reçu V alette, notaire, Le 16 février dernier, contrôlé
le 2 , a réglé avec Marianne Varagne, sœur dudit
jinloine.
Plus loin, Antoine dit qu’à l’égard de Facto passé
avec
5
1
�33
(
)
Marianne Varagne, il était dans le cas de demander
La subrogation.
L ’acte est donc énoncé, visé et daté. L e règlement
avec la sœur ne*peut supposer qu’une cession de sa
part, puisque le frère veut s’y faire subroger.
Ainsi les adversaires sont obligés d’en imposer à la
Cour pour se rendre favorables, et il est de la plus
grande évidence que rien ne s’opposait à ce qu’ils ré
clamassent dans les dix ans contre le traité-de 1 7 7 3 ,
s’ils cro}raient y être recevables, ce qui va être enfin
examiné.
C I N Q TJIEJVEE
QUESTION.
L es quittances de 1778 et 1782 produisent-eLLes une
J in de non recevoir contre La demande?
P
ie r r e -Isra el
R
oland
venait d’être élu héritier
universel de son père en 1777 ^lorsqu’il reçut le prix de
la vente de 1747, en vertu de la transaction de 1773.
Si l’ouverture de la succession 11’était pas en droit
écrit, au moins le domaine de F le uracy était-il situé5
Israël Roland était donc seul maître du procès y re
latif. D ’ailleurs , en coutume comme en droit écrit,
les légataires sont les maîtres d’accepter le legs porté
parle testament; or, le sieur Roland ne s’est pas mis
en peine d’établir que ses frères et sœurs aient répudié
leur legs pour réclamer leur légitime, quoiqu’on lui
ait fait souvent cette interpellation.
•Antoine Vuragnc ne pouvait donc s’adresser qu’à
E
�3
( 4 )
lui seul pour p a y e r , et la Cour a bien remarqué que
le sieur Israël Roland agissait aussi comme seul héritier
puisqu’il reçut la première fois tout le terme échu, et
la seconde fois la totalité aussi des quatre termes restans.
Mais , dit le sieur Roland, forcé par la conséquence
de son propre f a i t , l'approbation d’un acte nul ne le
valide pas, parce que qui cotifirmat nihil dat d’après
Dumoulin , en second lieu je serais relevé comme
mineur initio inspecte, puisque^ l’acte étant commencé
pendant ma minorité; ce que j ’ai fait en majorité n'en
est qu’ une suite.
La première objection n?est fondée que sur des prin
cipes absolument inapplicables. L e passage de Dumou
lin ne s'applique qu’aux actes radicalement nuls, et
lion à ceux simplement sujets à restitution.
Or, ce serait pour la première fois qu’on soutien
drait que la transaction faite par un tuteur, m ê m e a v e c
aliénation, fût nulle d'une nullité radicale, et ne fût
pas susceptible d’une simple ratification de la part du
mineur devenu majeur.
Au lieu de citer la loi si sine decreto qui ne peut
s’appliquer que par argument à contrario, les adver
saires eussent dû voir la loi 10 au if. de rebus eoru/n
qui sub lu tela sunt sone decreto non aUenandts , dont
la disposition expresse décide î:i difficulté dans les plus
fort.s termes. Car après avoir prohibé les ventes’du bien
des pupilles, (ailes sans décret du juge, cette loi dit
que si néanmoins le tuteur en a employé le prix dans.
�(
3 5 }
son com pte,et que le mineur l’ait reçu en majorité, il
ne peut plus revendiquer l ’héritage vendu. Prœdio pupiU illicite venundato , œstimatione solutâi vindicatio
prœdii ex œquitate inkibctur. A quoi la glose ajoute non
tam aspere tractanclum est ju s prokibitœ alienationis
prœdiorum pupilariorum , ut et solutâ œstimatione ci
tu tore in eniptorem pupilus summo jure experiatur.
• A plus forte raison quand le mineur reçoit directe
ment le prix du débiteur lui-même , e t , comme le dit
le profond Voétius sur la même loi , ’le paiement, même
la demande, même encore la simple approbation du
prix après la majorité empêchent la réclamation. Si
sine decreto alienata ponerentur tninoris bona , tune
¿mm subsecuta post majorennitatem impletarri solutio,
çeL exa ctio, vel petitio , veL acceptatio œstim ationis,
necessariam tacitœ ratihabiùonis inducit conjecturant.
Userait difficile de rien ajouter à des autorités aussi
claires, et c’est d’ailleurs un principe universellement
reconnu que l’on approuve une vente quand on en
reçoit le prix.
D ’après cela il est inutile de peser les expressions
employées dans les quittances de 1778 et 1782, puis
qu’il ne s’agissait pas de confirmer un acte radicale
ment nul. D ’ailleurs, en lisant les quittances, on ne
peut pas douter que le sieur Roland ne connût la
transaction aussi bien que Varagne, puisqu’il savait le
«montant de chaque terme, leur échéance, et ce qui
restait à payer. Il Scivait que c était pour le domaine
•d,e Fleurac, et il savait encore que ce domaine prove-
�36
(
)
nait de ses auteurs. Son consentement à recevoir le
prix d’un domaine transmis par ses auteurs à Varagne
aurait donc valu seul une vente nouvelle, car on y
trouve res, consensus et pretium. Ajoutons que c’était
un avocat qui traitait avec un cultivateur.
L e second moyen des adversaires est tiré du para
graphe scio qui , comme le dit Lebrun , a fait errer
plus de jurisconsultes que la mer n’a égaré de pilotes.
Mais cette loi a aujourd’hui un sens bien déterminé,
et n'égare que ceux qui veulent lutter contre la ju
risprudence.
L e mineur, qui a imprudemment accepté une suc
cession à la veille de sa majorité,, ne renonce pas tou
jours aussitôt qu’il est majeur; et comme chaque jour en
ce cas il continue de faire acte d’héritier , la loi examine
si ces actes ne sont qu'une suite de ce qu’il a com
mencé en minorité , et alors elle l ’en relève.
La difficulté de distinguer la nature de ces actes
donne lieu à tous les majeurs, qui se trouvent dans
ce cas, de prétendre que ce qu’ils ont fait est une
suite de la première immixtion. Maison examine tou
jours si le mineur était obligé de faire l’acte nouveau,
ou s’il pouvait s'en empêcher.
« Car, si le mineur, dit Lebrun, pouvait
» de mettre la dernière main à l’afíaire ;
« après favoir achevée en m a j o r i t é , il ne
(f cire relevé. »
Les adversaires s’emparent d’une partie
s'exempter
en ce cas,
pourra pas
de ce pas-
�. (
37
)
sage, et disent aussitôt que la transaction était com
plète pendant leur minorité, et que Lebrun à été mal
appliqué.
: ;
Mais un peu plus loin ils eussent trouvé que L e
brun lai-même enseigne que le cas seul où le nouvel
acle ne produit pas une fin de non recevoir, est seu
lement quand ce nouvel acle a une conséquence né
cessaire avec ce qui s’est fait en minorité , et préci
sément Lebrun prend pour exemple quand L’affaire
ayant été a c c o m p l i e en minorité
jorité par quelque nouvel acte.
se
confirme en ma
Remarquons que pour employer ce m o y e n , les
adversaires s’approprieni la transaction de 1773, comme
étant de leur fait par le moyen de leur tuteur, el c’est
de leur part une inconséquence qui marque assez leur
embarras.
D ’ailleurs, en quelque'position qu’ils se placent, ils
ne peuvent invoquer Yinitio inspecto, puisque les quit
tances ne sont certes pas une suite nécessaire d’un acte
qu'ils disent nul, et sur-tout d’un acte qui n’était pas
de leur propre fait.
JSec silentio prœtermittendum, dit encore Voetius sur
le même titre (tu digeste, alietiatiqnes illas, quce i n i t i o
inspecto
nullœ erant, tanquam .contra senatusconsultum factce, subindè est post/ado confirmari posse
prœsertlm si minor j a m major fa ctu s alienationem
ratam lia buer it , sive expresse s i p ^e t a c i t e .
La question de Yinitio' inspecto s’est présentée de
�(
38
)
vant la Cour dans une espèce biçn plus favorable pour
le réclamant. Un mineur ayant fait acte d'héritier
était poursuivi pour une rente ; à peine majeur ( de
21 ans seulement) le créancier lui fit faire une rati
fication. II se pourvut presqu'aussilôt après, et fit va
loir son ignorance absolue des forces de la succession,
ayant eu un tuteur encore comptable, et il exposa que
l ’adition d’hérédité emportait nécessairement le devoir
de payer les rentes; mais par arrêt du 4 floréal an 10,
la Cour proscrivit sa prétention, attendu que sa rati
fication n’était pas une suite nécessaire de l’aditioft
d’hérédité.
Les adversaires ne se dissimulent pas la faiblesse de
leurs moyens contre la fin de non recevoir , et en
désespoir de cause ils observent que la dame Gros ne
peut en être victime, n’ayant pas donné ces quit tances,
D é j à les V ara gne ont répondu à ce m o y e n par le
défi d’établir qu’aucun des puînés Roland ait répudié
le legs du .testament de leur père pour demander leur
légitime. Une autre réponse va se trouver dans un
arrêt de la Cour de cassation.
En 1791 , Marie Eordenave fille aînée, avait été
instituée héritière par le testament de sa mère.
Elle vendit un domaine en minorité en 179 3, en
Vertu d’autorisation; et après des oilres réelles, elle
reçut partie du prix en majorité.
Elle demanda la nullité en l’an 4 > e l ses sœurs so
�9
‘( 3 >)
.
joignirent à elle. L e tribunal de 'Pau avait adjugé la
demande; mais, sur l’appel, celui des Hautes-Pyrénées
avait déclaré Marie Bordenave non recevable'à cause
de sa quittance, et ses sœurs aussi non recevablesparce
qu’elles pouvaient réclamer leurs droits sur1 lei' Autres
biens.
*
.r
:
Ai *’
Sur le pourvoi des trois sœursj la Cour de cassation
a rejeté la demande par arrêt du 4 thermidor an 9,
par ce' seul motif qui embrasse tout : « Attendu que
« Marie Bordenave , héritière( universelle , a ratifié la« dite vente par la quittance qu’elléla donnée en ma" jorité, de la portion qui restait à payer à l’époque à
, « laquelle elle est devenue majeure.«
Il
semble que ce motif soit fait exprès pour la cause ;
la fin de non recevoir des deux adversaires y est écrite,
sans qu’il soit besoin d’y changer un seul mot.
Les fins de non recevoir sont souvent odieuses parce
qu’elles tendent h priver une partie d’user de son droit.
Mais ici, il est difficile d’en proposer une plus favorable ;
car elle n’a pas pour but de priver le sieur Roland de
ses moyens au fonds, mais bien de l’empêcher lui-même
.d^opposer d’autres lins de non recevoir plus odieuses.
Ce 11 est pas que tous ses arrière-moyens fussent très
¿1 craindre, parce que son père , trop pressé d’usurper
n ’a rien fait de bon; mais il est toujours agréable de
vaincre un adversaire avec ses propres armes, et de
neutraliser une injuste attaque. A u reste le’moyen pria-
�4
( ° )
cipal de la cause n’est pas une simple fin de non re
cevoir et n’en a que le nom. Car le procès a été éteint
par une transaction ; le sieur Roland en l'adoptant a
voulu aussi éteindre le procès, et a véritablement fait
une transaction nouvelle, contre laquelle il ne doit pas
être admis à se pourvoir.
M .r T I O L I E R , Rapporteur.
M .e D E L A P C H I E R , Avocat.
M .e T A R D I F , Licencié-Avoué.
A
RIOM,
P e rimprimerie du Palais , chez J. - C. S
a l l e s
#
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Varagne, Antoine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tiolier
Delapchier
Tardif
Subject
The topic of the resource
abus de tutelle
conseils de famille
fraudes
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Antoine Varagne, et autres ; intimés ; contre Pierre-Israël Roland, Toinette-Gabrielle Roland, et le sieur Gros son mari, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1747-Circa An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0409
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0741
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MEMOIRE
EN
RÉPONSE,
POUR
Le sieur S O U T E Y R A N , ancien avocat au
P u y, intimé ;
CONTRE
Le sieur S A U Z E T -S A IN T -C L É M E N T et
la dame S A L V A IN G D E B O IS S IE U ,
son épouse, appelans.
L E père du sieur Souteyran acheta en 1791 un domaine
du sieur Saint- M a rce l , aïeul de la dame Sauzet. Il le
paya; il s’en mit en possession. Son fils en jouit encore.
A
�( 2 3
L e sieur Sauzet a prétendu faire résulter du contrat
de mariage de son beau-père que cette vente est nulle,
parce que le sieur Saint-M arcel ayant tout donné à sa
iille (sauf réserve de vendre ce domaine et plusieurs
autres, jusqu’à concurrence de ses dettes, à juste prix
et sur le pied de l’estimation), ne devoit rien en 1 7 9 1;
qu’ainsi il n’avoit pas dû vendre, et qu’il y avoit d’ailleurs
vilité de prix.
Rien n’étoit plus simple que cette discussion; elle dépendoit des clauses d’un contrat de mariage, et du fait
de savoir si le sieur Saint-Marcel avoit épuisé le droit
de vendre en 1791.
Les premiers juges ont pensé que non : mais quoiqu’il
V eût une estimation , ils en ont ordonné une seconde,
%
>
/
contradictoire avec le sieur Sauzet, pour vérifier s’il y
avoit vilité dé p r ix , comme il l’a prétendu.
L e sieur Souteyran ne s’en est pas plaint : le sieur
Sauzet avoit bien moins s’en plaindre, puisque c’étoit
lui donner le moyen de prouver qu’il n’avoit pas menti.
C e p e n d a n t il a interjeté a p p e l , et il en étoit fort le
maître, puisqu’il avoit à parcourir deux degrés de ju
ridiction.
Mais a-t-il cru suppléer à de bonnes raisons, par un
torrent d’injures, prodiguées sans ménagement à un
homme mort? à un homme dont la probité n’eut .point
été aussi indiscrètement attaquée devant les premiers
juges, parce qu’ il avoit emporté leur estime au tombeau.
C’est pour la cour que le sieur Sauzet avoit réservé
des diatribes mensongères , une accusation directe de
rapine et d’ infidélité , qu’ il a cru luire résulter de la
�(3 )
seule circonstance que le sieur Souteyran père étoit
'procureur.
O u i, il étoit procureur : il en remplissoit les devoirs
pénibles avec zèle et délicatesse. Son fils s’honore de lui
appartenir , et se fait un devoir sacré de venger sa
mémoire.
Que quelques classes de la société saisissent les occa
sions d’attaquer les individus attachés au palais, ce bour
donnement de frelons ne peut incommoder que ceux
qui ont des reproches à se faire. Dans le temps de
M olière ? il étoit du bon ton d’attaquer les médecins.
A près eux on s’empara des procureurs ; et dans la mo
notonie des cercles, le plus insipide conteur est encore
sûr de suspendre les bâillemens de la multitude, s’il a
quelques sarcasmes à renouveler sur ce chapitre. On se
croit vraiment du mérite ? q u a n d on a dit son mot sur
cette classe laborieuse; et il n’est pas d’oisif qui n’ait
là-dessus sa provision de rebus dans la mémoire. C ’est
à la vérité une excuse pour son inutilité ; l’amourpropre la lui suggère : et il faut bien laisser quelque
chose h dire a ces oisifs-là, puisqu’ils n’ont rien retenu
de plus essentiel.
Mais quand devant une cour supérieure, un juge de
p a ix (i) attaque directement un procureur d’avoir abusé
de son ministère envers son c lie n t, pour envahir une
propriété par un acte f r a u d u l e u x quand il veut faire
rougir son fils d’avoir dans les mains un bien mal ac(i) L e sieur S a u z e t-S a in t-C lé m e n t a toujours pris au procès la
qualité de propriétaire ; mais il est juge de pai x c l at/oemr
A 2
�.(4 )
quis ( i ) , ce juge de paix doit savoir que les magistrats
auxquels on soumet cette grave accusation , ne la re
garderont point comme un quolibet de société, et qu’il
s’engage à avoir à la main la preuve de ce qu’il avance.
O r le sieur Souteyran nie formellement que son père
ait été le conseil du sieur Saint-Marcel, et que celui-ci lut
son client. Quand il l’auroit été, il eût pu acquérir un
immeuble de gré à g r é , sans sortir de la ligne de ses
devoirs.
L a famille de Boissieu a-t-elle resté dans la ligne des
siens, quand elle a abreuvé d’amertume toute la vieillesse
d’un père, d’un bienfaiteur?
L e sieur de S a in t-M a rc e l avoit réduit l’une de ses
filles à une légitime , pour enrichir l’autre. En se dé
pouillant pour elle, il s’étoit réservé la faculté de vendre
cinq domaines; il n’en a pas vendu la m oitié, et encore
n’a - t - i l pas fait une seule vente sans être inquiété y
tourmenté, réduit à se voler pour ainsi dire lui-même,,
afin de vivre dans l’aisance. Et ainsi quarante ans. de sa
vie se sont passés à lutter contre une interdiction de
fait, à laquelle on vouloit le réduire.
Maintenant qu’on est enrichi de sa dépouille, on le
peint comme un être foible et inutile, qui n’a vendu que
par caprice ou co n tra riété, qui a dépouillé son h é ri
tière d’une fortune considérable par trente-trois ventes
arrachées à la fa ib lesse de ce vieillard nonagénaire.
(i) Toutes cos injures sont du fait p erso n n e l du sieur SauzetSaint-Clémont : le jurisconsulte auteur de son mémoire a exigé
sa signiHim;*
.
�(S )
Et trente-deux de ces ventes étoient faites avant 1788.
La trente-troisième l’a été en 1791.
Et le sieur Saint-Marcel a survécu quinze ans à cette
dernière vente.
Et il n’a été nonagénaire qu’à l’heure de sa mort.
V oilà cependant avec quelle exactitude le sieur Sauzet
appelle l’aniraadversion de la cour sur le sieur Souteyran
dès les premières lignes de son mémoire.
L e sieur Souteyran dédaigneroit ces injures pour luimême ; mais il y est justement sensible , puisqu’elles
attaquent un père dont il respecte avec raison la mémoire.
Si les sieur et dame Sauzet l ’eussent imité , il n’y
auroit pas de procès.
F A I T S .
L e sieur Brunei de Saint-Marcel, etla dame A rcis, son
épouse, ont laissé deux filles : Claire-Thérèse qui épousa
le sieur de Saint-Julien, et Marie-Louise qui épousa le
sieur Salvaing de Boissieu, père de la dame de SaintClément.
Par le contrat de la dame de Saint-Julien, du 17 fé
vrier 1 7 5 9 , ses père et mère lui constituèrent une dot
de 40000 francs ; le contrat porte quittance de i 5ooo fr.,
et il est stipulé que 10000 francs sont payables dans
l ’année du premier décès des père et m ère, et i 5o o o fr.
dans l’année du dernier décès.
L e contrat de mariage de la dame de Boissieu est
du 8 juin 1762 ; et comme c’est dans les clauses de cet
acte que le sieur Saint-Clément veut puiser Ieskmoyens
�C6 )
de nullité de la vente consentie an sieur Soufeyran, il
importe d’en analiser les clauses avec ordre et exactitude.
i ° . lies père et mère de la dame de Boissieu lui font
donation de tous leurs biens présens et à venir , s a u f
les réserves ci-ciprès.
2°. Ils se réservent la jouissance des Liens donnés ,
pendant leur v i e , réversible de l’un à l’autre , et un
capital de 12000 fr. pour s’en servir dans leurs besoins,
et en disposer tant à la vie qifci la mort , à leur
p laisir et volonté , en fa v e u r de qui ils jugeraient à
propos ; réversible également de l’un a l’autre, a prendre
sur les biens à venir s’il en échoit, et subsidiairement,
sur leurs biens actuels.
30. Les père et mère de la future lui constituent en
avancement d’hoirie, une somme de 20000 fr. et 19 marcs
2 onces argenterie : l’acte porte quittance de 11000 f r . ,
et de l ’argenterie.
4 0. Les sieur et dame Marcel déclarent n’avoir aucuns
deniers en mains pour le payement de la somme restante
de 9000 f r a n c s , ni pour acquitter la dot de la dame
Saint-Julien, dont il reste dû 12600 f r a n c s , nonobstant
la quittance insérée dans son contrat de mariage de 1769,
a in si que les ternies ci éch o ir , et pour acquitter leurs
autres dettes passives ; en conséquence il est convenu
et accordé qu’il sera libre aux sieur et dame SaintMarcel de vendre et aliéner les domaines de R o ch a rn a u d , M ons et O r z illa c , les champs et vignes de
C o u ch â t, les fonds dépendans du domaine de P o u za ro l,
les prés situés au terroir de C e y ssa c, et finalement le
domaiuc de C h a sp u za c, à leur juste valeur, et sur le
�:
(7 ^.
pîccl de l’estimation, pour servir au 'payement àesdites
créances, concurrem m ent a u x susdites constitution s, et
autres dettes connues des parties intéressées, ensemble
p our remplir la réserve de 12000 / r ., si les donateurs
sont dans le cas de s’en servir; le tout suivant le payement,
et délégation qui en sera faite : à l’effet de quoi il sera
fourni au sieur de Boissieu un double de la quittance
du produit desdites ventes.
5°. Il est ajouté que Vexcédant du susdit p r ix de vente
au-delà desdites créances et réserves , sera placé , du
consentement du sieur Boissieu et son épouse, chez des
personnes solvables, pour le revenu en être payé aux
donateurs pendant leur vie, sans les acquéreurs pouvoir
être recherchés sous quelques façons et manières que ce
puisse être, en rapportant néanmoins un légitime emploi
de conformité à l’état connu des parties.
6°. Il est dit enfin que le sieur de Boissieu lui-même
pourra vendre aussi les autres biens après le décès des
donateurs, à leur juste v a le u r, excepté un moulin et une
maison , sauf encore le cas ou il en trouveroit un prix
avantageux.
L e même jour dudit contrat, du 8 juin 176 2 , il fut
fait entre les sieur et dame S a i n t -M arcel un état double
des dettes dont il est parlé dans le contrat, lesquelles se
portent à 49600 francs, ¿1 quoi il est ajouté une somme
de 4000 francs; ce qui porta le montant desdites dettes
î\ 63600 francs.
Il paroît que les sieur et darne Saint-M arccl ne tav-
�(8 )
dèrent pas à commencer les ventes de quelques-uns des
objets ci-dessus réservés: il y en eut trois dans Humée 1762,
et environ v i n g t - c i n q dans les années 1 7 6 3 , 176 4,
1765 1766 1767 1768 1769 1770 1 77 2 1773
177 6 , 1781 , 1782 et 1788.
D ’après l’état notifié par le défunt, le total desdites
ventes se portoit, en 1788, à 49440 francs.
Suivant le même état , il avoit payé à ladite époque
de 1788, pour 53246 francs de dettes, et il avoit besoin
de vendre encore , i°. pour une somme de 3806 francs, '
pour être au pair de ses payemens; 20. pour iôooo francs
encore dûs à la dame de Saint-Julien ; 30. pour 12000 fr.
dont il s’étoit réservé la faculté de disposer.
T elle étoit la position du sieur de S a i n t - M a r c e l , lorsque
la création des assignats vint lui inspirer des craintes pour
,
,
,
,
,
,
,
,
l ’avenir; soit qu’il ne voulût que se reposer sur lui-même
du soin d’assurer à la dame de Saint-Julien, sa fille aînée,
la somme intégrale qu’il lui avoit promise; soit que dès
que la défiance p o u r le sieur de B o i s s i e u , son g e n d r e ,
ne lui fît craindre q u ’il s’a c qui tte r oi t envers elle avec
une monnoie dont il avoit vu jadis une épreuve désastrueuse, le sieur de Saint-Marcel publia le projet qu’ il
avoit de vendre ce qu’il s’étoit réservé par le contrat de
mariage de 1762.
Il proposa le domaine de Chaspuzac au sieur de Sou
teyran, qui lui en offrit le prix le plus avantageux. Si l’un
avoit besoin de v e n d r e , l’autre avoit besoin d’acheter. Car
la dame Souteyran venoit de recevoir 16000 francs d’ une
succession du sieur O b r ie r , son oncle, et vouloit les
placer. X,c sieur Saint-Marcel crut faire un acte de bon
père
�(9)
père de famille, en vendant ce domaine de Chaspuzac ,
situé dans un pays montagneux et aride, plutôt que le
domaine d’Orzillac, bien plus considérable, et situé dans
un pays de vignoble.
L a convention avec le sieur Souteyran étoit terminée
lorsque le sieur de Boissieu , qui , à ce que disent les
sieur et dame Sauzet, étoit en correspondance avec son
b eau-p ère, sur plusieurs difficultés d’in té rê t, se mit en
tête d’empêclier les ventes que le sieur de Saint-Marcel
avoit droit de consentir. Il fit savoir hautement qu’il entendoit s’y opposer, et menaça même de son courroux
ceux qui oseroient acquérir.
Il poussa plus loin ses projets d’opposition ; car le 31
mars 1791 , il fit signifier au sieur Souteyran qu’il avoit
appris sa négociation avec le sieur de Saint - Marcel :
mais que la propriété du domaine de Chaspuzac appartenoit à sa femme et à lu i, et non au sieur de SaintM a rc el, et qu’en conséquence ils étoient opposans à la
vente que ledit sieur de Saint-Marcel étoit sur le point
de consentir.
Il faut avouer que cette notification ne donna pas du
goût au sieur Souteyran, et que ne voulant rien avoir à
démêler avec le sieur de Boissieu, il rompit les conventions
qu’ il avoit faites.
Plusieurs mois se passèrent, et le sieur de Saint-Marcel
les employa à persuader au sieur Souteyran qu’il ne devoit
pas plier sous la tyrannie du sieur de Boissieu, honnne
connu pour être aux expédions, et qui n’avoit fait une
hostilité que dans l’espoir de laire acheter son conseuB
�C 10 )
tement : il alla même jusqu’à faire un point d’honneur
au sieur Souteyran de l’obligation où il étoit de ne pas
rompre un engagement sur lequel lui , Saint - M a rc e l,
avoit com pté; et il ne lui dissimula pas qu’ il ne regarderoit que comme une rupture fort volontaire le pré
texte que prendroit le sieur Souteyran de l’opposition
du sieur de Boissieu , puisqu’il etoit bien évident qu’il
avoit le droit de vendre.
L e sieur Souteyran ne voulut pas sedédire, et consentit
d’acquérir ; mais il y mit pour condition que le sieur
S a in t-M a rc e l feroit cesser l’opposition de son gendre.
En conséquence, par acte du 25 octobre 1 7 9 1, les sieur
et dame Souteyran achetèrent du sieur Saint - Marcel le
domaine de Chaspuzac, moyennant 21100 francs, dont
16000 francs furent payés par la dame Souteyran , et
5 io o francs par le sieur Souteyran, son mari.
L e contrat porte que la vente est faite en exécution
des clauses du contrat de mariage delà dame de Boissieu ,
du 8 juin 1762, pou?' p a y e r se s d ette s p a s s iv e s , acquitter
la somme de 1200 o fr a n cs q u i reste due de la dot fa ite
à son autre fille Claire-Thérèse S a in t-M a rce l, veuve
du sieur Suret - S a in t- Ju lien , et se retenir et disposer
de 1200o fra n cs par lu i réservés dans ledit contrat de
mariage.
L a dame de Suint-Julien intervient au contrat pour
recevoir ladite somme de 12000 francs pour le resle de
sa dot, et subroger l’acquéreur à scs privilèges et h ypo
thèques.
Quant aux 9100 francs reslans , le sieur de Saint-
�C 11 )
Marcel déclara les avoir reçus à compte de sa dite réserve
de 1 2000 francs, ou autres hypothèques par lui acquises3
suivant l’état par lui tenu.
Cette vente étant consommée, le sieur Souteyran n’eut
rien de plus pressé que d’engager le sieur S ain t-M arcel
de tenir à son tour sa parole.
Il lui signifia en conséquence l’opposition du sieur de
Boissieu, et lui donna assignation le 19 décembre 1791.
L e sieur Saint-Marcel, de sa part, la dénonça à son gendre
par exploit du 13 décem bre, avec assignation en main
levée.
Pendant qu’on plaidoit sur cette opposition , le sieur
de Boissieu continuoit ses menaces , et ne dissimuloit
pas que son'moyen unique de faire tomber la vente du
25 octobre , étoit le défaut d ’estimati on stipulée en son
contrat de mariage.
Comme le sieur de Souteyran n’avoit point à redouter
cette estimation, il la réclama lui-même du sieur de SaintMarcel ; en conséquence, par acte notarié du 25 avril
1792 , les parties convinrent que pour ôter tous pré
textes au sieur de Boissieu , elles dérogeoient au prix dé
terminé par l’acte du 2 5 octobre 1 7 9 1; elles stipulèrent
que ladite vente du domaine de Chaspuzac sorti roi t son
plein et entier effet pour le prix et valeur qui en seroit
fait par le sieur R e co u l, expert-féodiste au P u y , et que
les parties seroient tenues d’acquiescer à ladite estimation
sans pouvoir revenir contre. Ce fut une faute peut-être
de ne point appeler le sieur de Boissieu à cette estimation ;
mais le contrat de mariage ne le disoit pas.
En exécution dudit a cte , le sieur Recoul fit son estiB 2
�__
( 12 )
-mation le 14 mai 1792. On y remarque tous les immeubles
estimés en détail à la somme de 2142-7 francs.
Cette estimation fut approuvée par le sieur SaintMàrcel et par les sieur et dame Souteyran; ce qui étoit
assez inutile, au moyen de l ’acte précédent; et le sieur
Souteyran paya l’excédant de 427 francs, outre les frais
de l’acte du 23 a v r i l , et moitié des huit journées em
ployées par l’expert pour ladite estimation.
A p rès ces formalités les procédures furent reprises*
lies sieur et dame de Boissieu, dégoûtés sans doute de
leur opposition inconsidérée , signifièrent que par le
contrat de mariage de leur fille avec le sieur Sauzet-SaintClément, ils lui avoient fait une donation universelle, et
q u ’en conséquence le procès la regardoit seule à l’avenir.
Un jugement de jonction étant intervenu le 22 ju in ,
le sieur de Boissieu, plus accoutumé aux procès que tous
les procureurs dont son gendre le suppose intim idé, in
terjeta appel dudit jugem ent, et fit une exclusion de tri
b u n a u x . Cet a p p e l fut porté à I s s e n g e a u x , et p a r jugement
du 28 octobre le sieur de Boissieu fut déclaré non recevable.
L a cause étant revenue au Puy 7 fut appointée en
droit par jugement du 30 avril 1793; et depuis cette
époque le sieur de Boissieu et sa femme, les sieur et dame
Sauzet-Saint-Clément, déjà mis en cause, avoient abso
lument abandonné cette affaire par un silence de plus de
dix ans.
Ils n’avoient cependant pas
employé
cet intervalle sans
Ils attaquèrent, en l’an 1 0 , un autre acquéreur
du sieur S a in t- M a r c e l , et conclurent au désistement et
plaider.
�( 13 )
à la nullité de la v e n t e , comme faite à non domino :
mais par un jugement de l’an 13 il fut juge « que le
« sieur de Saint-Marcel s’étant réservé de vendre pour
ce faire face à 74600 fv. de dettes, y compris 12000 fr.
« qui éloient pour le donntaiveœs a lien u m , on ne pou« voit reprocher audit sieur Saint-Marcel d’avoir vendu
« sans cause ». D ’après q u o i, et par lesdits motifs, les
sieur et dame de Saint-Clément furent déboutés de leur
demande en désistem ent,
L e sieur de Sain t-M arcel est mort en l’an 1 4 , et les
adversaires ont répudié à sa succession, de même qu’aux
biens à venir de la dame A r c i s , s’en tenant aux biens
présens qui existoient en 1762 ; ils ont cru par là se
donner un titre positif de donataires universels, môme
des biens réservés.
L e 26 juillet 1806, les sieur et dame Sauzet-SaintClément ont repris leurs poursuites contre le sieur Souteyuan iils.
Leurs moyens étant les mêmes que ceux du sieur de
Boissieu, il est inutile de les rappeler; et il suffit de dire
que par jugement du 12 mai 1807, les sieur et dame de
Saint-Clément ont été déboutés de leur dem ande, en
obtenant néanmoins l’avantage de faire procéder à une
nouvelle estimation du domaine , s’ils le prétendoient
vendu au-dessous de sa valeur.
Les motifs de ce jugement s e réduisent à d ire, i ° . que
d’après le contrat de m ariage, et l’état du même jo u r,
il y «voit de la part des donateurs, reserve de vendre
pour la somme de S4600 francs ; 2Q. que d’après les
�( 14 )
états pro luits , le p rix total des ventes ne s’élevoit pas
à beaucoup près à cette som m e, lors de la vente de
Chaspuzac ; qu’ainsi le sieur de Saint-Marcel étoit au
torisé à vendre ce domaine; 30. que quand il se seroit
trouvé de l’excédant sur le prix de ladite vente , elle
n’en seroit pas moins valable , puisque le vendeur
n’auroit été obligé qu’à faire un e m p lo i, ou à placer
cet excédant en des mains sûres, du consentement des
donataires; 40. que rien n’empêchoit d’anticiper les termes
de la dot de la dame Saint-Julien, puisque les donateurs
s’étoient réservé de vendre jusqu’à concurrence de
ces 2Ôooo francs; 5°. que l’opposition du sieur deBoissieu
n’avoit pu annuller une vente que le sieur de SaintM arcel étoit suffisamment autorisé à faire , sauf à re
quérir une nouvelle estimation.
Cette faculté d’estimation n’a point satisfait les sieur
et dame de Saint-Clément : ils se sont pourvus en la
cour ; et ce n’est v é r i t a b l e m e n t q u ’e n d é na t ur a nt le
contrat de 176 2, et en changeant leur position, qu’ils
ont pu dire quelque chose de spécieux, pour soutenir
que lé sieur de Saint-M arcel, leur aïeul, n’avoit aucun
droit de vendre.
A les en croire, ils ont une donation entre-vifs, irré
vocable et dotale de tous les biens meubles et im
meubles, présens et à v e n ir, des sieur et dame SaintMarcel , ce qui emporte dessaisissement actuel de tous
les biens présens.
Il faut bien en venir cependant à la réserve de vendre,
stipulée au contrat de 1762 j ruais cela n’embarrasse pas
�( i5 )
les sieur et dame de Saint-Clém ent; c’est, disent-ils,
une faculté exorbitante qui doit être largement inter
prétée* pour e u x , parce qu’elle est dans leur contrat de
mariage. Cette faculté de vendre est d’ailleurs limitée
à des objets spécialement désignés, et à des dettes an
térieures ou présentes.
O r , d isen t-ils, si on pouvoit entendre qu’il y eût
faculté de payer le premier terme de la dot de la dame
de Saint-Julien , au moins ce ne pouvoit pas être le
terme payable au décès du survivant.
Il falloit délégation, et il n’y en a point; juste valeur,
et il y a vilité de p r ix ; légitime em p loi, et aucun ac
quéreur n’y a veillé.
lia première dette à payer étoit 9000 francs au sieur
de Boissieu ; ils ne le sont pas. L e domaine d’Orzillac ,
devoit être vendu le premier, il n’est pas vendu encore;
Chaspuzac devoit être vendu le dernier, et il a été
vendu plutôt.
L ’état des ventes et payemens n’est pas e x a c t, conti
nuent les appelans; il faut en distraire 4000 francs qui
ont été mal à propos ajoutés dans le jugement, par l’état
double.
Enfin la vente ne pouvoit avoir lieu au profit du sieur
Souteyran, parce qu’il étoit un p ro cu reu r, et m ê m e ,
ajoute-t-on , le conseil du sieur de S ain t-M arcel ; elle
étoit litigieuse, parce qu’il y avoit opposition de la part
du sieur de Boissieu.
Telles sont en résumé toutes les objections proposées
par les sieur et dame de Saint-Clément. V oyon s si elles
�(i 6)
suffiront pour déposséder un acquéreur après seize ans
de possession.
M O Y E N S .
C ’est une erreur de la part des sieur et dame SauzetSaint-Clém ent, de supposer que le contrat de mariage
de 17 62 p o rte, de la part du sieur de Saint-Marcel, une
donation entre-vifs de tous ses biens présens et à v e n ir ,
avec dessaisissement actuel de tous les biens présens. Il
est aisé de concevoir qu’en se mettant si fort à l’aise sur
l’éteudue d’une clause principale, ils aient pu tirer des
conséquences fort à leur avantage.
Mais le père de famille qui fait une donation de tout
son bien, sous réserve de cin q d o m a in es, ne fait point
une donation de tous ses biens présens • car ce qui est
réservé n’est pas donné.
Il faut donc commencer par supprimer tout d’ un coup
des m o y e n s des sieur et d a m e Sauzet la q u a l it é de dona
taires universels qu’ils se sont donnée de leur chef si
gratuitement.
Il 11e faut pas plus s’attacher A la proposition des sieur
et dame Sauzet d’interpréter largement cette réserve en
leur faveu r, sous prétexte qu’elle est par contrat de ma
riage : car c’est encore pour se donner la licence d’en induire
de larges conséquences. 11 est au moins bien étrange que
des héritiers institués appellent la réserve de Pinstiliiant
une (acuité exorbitante , comme si tous les biens n’étoient
pas à lui , et comme s’il n’étoit pas plus vrai de dire que
tout
�( J7 )
tout doit être entendu, dans le d o u te, en faveur de celui
qui a fait la libéralité.
C ’est en effet un principe enseigné par R ica rd , que s’il
y a quelque chose d’ambigu dans une donation, il est
permis au donateur d’expliquer lui-même les bornes qu’il
a entendu mettre à sa libéralité, sans quoi il faudroitdire
qu’il est donateur malgré lu i; ce qui résiste à la plus
simple définition de ce genre de contrat : D o n a tio est
liberalitas quœ dam quœ nullo ju re cogenle conceditur.
Ici le sieur de Saint-Marcel a non-seulement expliqué
lui-même l’étendue de sa réserve, mais encore cette étendue
est tellement claire et précise, qu’il faut seulement lire
avec attention l ’acte lui-m êm e, pour être certain qu’il ne
faut aucune interprétation.
L e sieur Saint - M a r c e l s’est r é s er vé de v e n d r e cinq
domaines, et en o u t r e des cham ps, vignes et prés ; et
déjà il a annoncé, par l’étendue de cette réserve, que son
héritière n’auroit pas le droit de le tracasser tant qu’il
n’auroit point vendu tous ces objets. 11 lui a annoncé
encore que tous ces objets n’étoient point nominative
ment compris dans la donation et dans la tradition effec
tive qui en étoil la suite.
A la vérité le sieur Saint - Marcel exprime pourquoi
il a intention de vendre; mais à supposer que cela veuille
dire qu’il s’impose des conditions à lui-même pour ne
vendre q u ’ u n e portion des objets réservés, il est au moins
certain que tout ce qu’il a destiné à être rempli par cette
réserve , doit être épuisé sur la réserve elle - m ê m e , et
q u e , jusqu’à cet épuisement, l’héritière n’a nulle espèce
de droits sur aucune portion de ladite réserve.
Il s’agit donc d’examiner si le sieur Saint-Marcel avoit
C
�( 18 )
éteint en 1791 les objets qu’il avoit retenus dans ses
propres biens, et toutes ses dettes passives; à tout quoi
les biens à vendre devoient faire face : car voilà toute
la cause.
O r , il résulte de l ’état double fait entre le sieur St.M arcel et son gendre , le même jour du contrat de
mariage, que ces dettes se portoient à 49600 f r . , à quoi
le sieur de Boissieu ajouta 2000 fr. dûs à lu i-m êm e, et
2000 fr. dûs à un sieur IDadiac, ce qui lit ¿3600 francs.
20. L e sieur Saint-Marcel s’étoit réservé 12000 francs
pour en disposer ainsi qu’il aviseroit, et cette somme
ajoutée à la précédente, porte la réserve à 656oo francs.
30. L e sieur de Saint-M arcel déclara dans le temps
avoir oublié quatre sommes par lui dues; savoir, 400 fr.
au sieur Ladevèze , p r ê tr e ,.p o u r un billet de 17 5 7 ;
957 francs, pour arrérages de cens dûs au sieur Gaillard;
800 francs pour les intérêts de la légitime du sieur SaintM arcel, cu ré ; et 562 francs dûs au sieur Im bert, son
p r o c u r e u r ; tout q u o i avoit été p a y é lors des diverses
ventes consenties par ledit sieur S a in t-M a rce l, suivant
plusieurs quittances bien antérieures à 1790.
40. Il restoit dû au sieur de Boissieu lui-m êm e plu
sieurs sommes non payées de l ’avancement d’hoirie cons
titué à la dame Saint-M arcel, son épouse; et il résulte
des diverses quittances par lui données audit sieur St.M a rc el, qu’ il a reçu après 1762 une somme de 11000 fr.
provenante de diverses ventes.
Ainsi en récapitulant les dettes acquittées par le sieur
Saint-M arcel, de 1762 à 1788 , époque de la dernière
vente antérieure à celle faite au sieur Souteyran , 011
trouve que le sieur Saint-Marcel a payé, d’après son état,
�( *9 )
i°. A u sieur D adiac.................. . . . . . . . . . .
2000 fr.
2°. A u sieur Gaillard, pour censives, suivant
sa quittance de 1766..............................................
967
3 °- A u x religieuses de V a is .........................
2000
4 °* A la ca th éd ra le .........................................
2000
5°. A u sieur Farenge, prêtre.......................
1800
6°. A u sieur Sain t-M arcel, curé, pour sa
légitim e, suivant quittance du 4 décembre
1 7 7 2 ...........................................................................
6800
' 7°. A u sieur Lad evèze, suivant quittance
du 30 juin 1 7 7 1 .....................................................
400
80. A u .sieur Imbert, suivant quittance du
8 octobre 1 7 8 4 .......................................................
562
9°. A u x sieur et dame Saint - Julien , en
onze quittances....................................................... 26600
io°. A u sieur de Boissieu, en cinq quittan
ces . . . . ....................................................................
11000
53119 fr.
Il lui restoit à payer 12000 francs à
la dame Saint-Julien, et il avoit encore
sa réserve personnelle de 12000 francs,
}
s
j
24000
77*19 fr.
Venons maintenant aux ventes consenties par le sieur
de Saint-Marcel.
L e sieur Saint-Clément, à la page 21 de son m ém oire,
les porte ¿1 trente-deux, montant à 51918 francs.
D ’abord les articles 3 et 4 font double em ploi, parce
que le domaine entier de Mons fut vendu au sieur R e ym on d , p rê tre , qui ensuite en aliéna deux héritages à la
C 2
�( 20 )
veuve Galien ; et comme la vente du sieur Reymond
n’étoit que sous seing p r iv é , il pria la dame Arcis de
vendre en son nom à ladite veuve Galien. L e prix de
cette dernière vente fut de 2000 francs, et 25o francs
d’épingles, que le sieur Reymond reçut en déduction des
8000 francs par lui dûs.
A cela près nous supposerons que toutes les autres
ventes sont exactes, quoiqu’elles ne soient pas toutes jus
tifiées; nous admettrons même les deux dernières, que
le sieur Sauzet-Saint-Clément n’auroit peut-être pas dû
oser porter en compte ? car elles font partie des honneurs
funèbres du sieur Saint-Marcel, qui avoit trouvé prudent
d ’y pourvoir par lui-même.
Nous ne porterons donc en déduction des 51918 francs
ci-d essu s, que 2260 francs pou r’ le double em ploi; ce
qui réduit les ventes à 49668 francs.
lie sieur Saint-Marcel étoit donc en avance, avant 1791,
de la somme de 34Ôi francs , outre les 12000 francs dûs
à la dame de Saint-Julien, et sa réserve personnelle de
12000 francs.
Il avoit donc le droit de vendre encore jusqu’à con
currence de 27451 francs.
Cependant il n’a vendu que jusqu’à concurrence de
21427 francs.
A in s i, quand il faudroit s’en tenir même à l’état des
trente-deux ventes désignées par le sieur Sauzet-SaintC lém ent, il resteroit toujours une somme excédante; et
le sieur Saint-Marcel, en vendant en 1 7 9 1 , n’auroit pas
même rempli toute la somme qu’ il avoit droit d’atteindre.
Cette démonstration est si claire, qu’elle rend à peu
près inutile de répondre à la plupart des objections du
�( 21 )
sieur Saint-Clém ent contre la vente faite au sieur Souteyran.
L e défaut de délégation et d’emploi étoit déjà démenti
par la vente elle-même.
L a négation du sieur Saint - C lém en t, d’avoir reçu
9000 francs qui restoient dûs de l’avancement d’hoirie du
sieur de Boissieu, est encore démentie par l’état ci-dessus,
et par les quittances données au sieur Saint-Marcel. L e
sieur de Boissieu a même reçu 11000 francs; ce qui
complète les 9000 francs ci-dessus, et les 2000 francs du
b ille t, qu’ il fit ajouter à l’état des dettes.
L e sieur Saint-Clément ne peut pas pardonner à son
aïeul d’avoir payé la dame de S ain t-Ju lien de toute sa
dot ; ce qu’il appelle avoir payé par anticipation , et
contre la convention de 1 7 62., au moins pour une moitié
qui n’étoit payable qu'après soji décès.
Mais cette objection même porte avec elle sa réponse :
car qui devoit payer?
A la vérité , lors du mariage de la dame de SaintJulien , il fut pris des termes éloignés , qui alloient
jusqu’au décès des sieur et dame Saint-Marcel.
11 en résultoit que le dernier terme n’étoit payable que
p ar les héritiers desdits sieur et dame Saint-Marcel.
Mais lorsque ces derniers, en mariant leur fille cadette,
en 1762, se réservèrent cinq domaines pour payer leurs
dettes, parmi lesquelles fut comprise la dot de la dame
de Saint-Julien, cette clause précédente fut dénaturée.
Car on ne peut pas entendre sans doute que les sieur
et dame Suiut-Marcel payeroient les 2Ôooo francs de dot
après leur d écès, puisqu’ils avoient stipulé qu’ils vendroient pour payer eux-m êm es.
�( 22 )
Il suffit donc de remarquer que la dot de 25 ooo fr. est
comprise dans les dettes pour lesquelles le sieur SaintÏVIarcel s’étoit réservé de vendre. Cela seul justifie la vente
qu’il a consentie pour achever le payement de cette dot.
D ’ailleurs les assignats, le danger de laisser ce payement
à demander au sieur de Boissieu, justifient encore mieux
le sieur Saint-M arcel, qui avoit bien eu assez des tra
casseries personnelles qu’on lui avoit fait éprouver, sans
en léguer d’autres à la dame de Saint-Julien.
Faut-il parler du moyen du sieur Sauzet, fondé sur
le mot fin a lem en t? Il prétend que Chaspuzac étant le
dernier nommé des cinq domaines, il auroit fallu vendre
les autres auparavant.
O n n’a pas vendu Orzillac qui étoit le premier in
diqué, et le meilleur : il s’en plaint.
Ainsi il tire parti de tout. Vendre lui fournit un
moyen ; ne pas vendre lui en fournit un autre.
Une des objections du sieur Sauzet ( page 45 ) , est
dirigée c ont re les pr em ie r s juges e u x - m ô m e s . 11 les ac
cuse d’avoir laissé insérer dans le jugement Vaveu des
-parties, qu’il y eut 4000 francs ajoutés à l’état des dettes
de 49600 francs. C ’est, d it- il, une erreur ou une sur
prise, parce que ces 4000 francs n’étoient pas dûs ; et
il faut effacer cela du jugement.
Eh bien ! le sieur Sauzet l’a très-hautement avoué à
l ’audience, et il ne pouvoit pas le nier.
Car l’addition fut faite et signée par le sieur de Bois
sieu, pour son propre intérêt. En effet, sur 4000 francs il
y avoit 2000 francs dûs à lui-même : et il n’a pas manqué
de les toucher, comme on le voit en l’état du sieur SaintMarccl.
�( 23 )
Il reste à dire un mot , un seul mot du reproche
fondé sur ce qu’un procureur ne peut pas acheter des
droits litigieux.
Cela est très-exact en principe. Mais où le sieur Sauzet
a-t-il puisé qu’un immeuble, un d o m a in e, fût un droit
litigieux ?
La loi P e r diversas, qu’il invoque, dit q ui redim nnt
libídine v ili actiones litigiosas.
Mais à supposer qu’un exploit insensé pût produire un
litige, le sieur Souteyran n’aclietoit pas une simple action;
il n’aclietoit pas le droit de poursuivre une liquidation
inconnue. Il achetoit une propriété certaine, et il en
obtenoit la tradition dans l’instant même.
L ’objet de l’acte étoit donc déterminé et connu. Il n’y
avoit rien d’inconnu au vendeur, et dès-lors tout le motif
de la loi^cesse, parce qu’elle n’a voulu prévenir que l’abus
de confiance qui résulteroit du cas où un procureur, plus
au fait que son client de la valeur d’ une action litigieuse,
l’achèteroit à vil p r i x , en le trompant.
Cette méchanceté du sieur Sauzet-Saint-Clément est donc
sans application ; et elle étoit d’autant plus de mauvaise
foi , qu’ il sait bien que le sieur Souteyran père n’étoil
point le procureur du sieur Saint-Marcel.
F a u t - i l ne pas omettre encore la correspondance du
sieur Saint-Marcel aux sieur et dame de Boissieu, qu’il
menaçoit d'un hom me de loi q u i les m eneroit dur ?
Ce n’est pas cette correspondance qui fera le plus d’honneur
à ceux à qui elle est adressée : car ce qu’on voit de plus
clair dans le peu que le sieur Sauzet a jugé à propos d’en
extraire dans une écriture, c’est que le sieur Saint-Marcel
avoit de grands reproches à faire à son gendre et à sa iille.
�( 24 )
Ce respectable vieillard avoit de grands regrets d’avoir
réduit la dame de Saint-Julien, sa fille, à 40000francs ; les
procédés de son héritière le navroient de douleur , et
il s’en plaignoit amèrement. Q u’il menaçât son gendre
de s’adresser à des hommes de loi pour cesser d’être
opprimé par lui , cela étoit fort naturel dans la position
du sieur de Saint-Marcel. Il a plu au sieur Sauzet d’ad
juger cette menace au profit du sieur Souteyran p è r e ,
quoiqu’il sache fort bien que ce procureur-là étoit moins
à craindre que le sieur de Boissieu. Mais tout cela n’est pas la cause. L e sieur Souteyran a
acheté un domaine du sieur Saint - Marcel : il en a eu le
droit. Il pouvoit payer en assignats, il a payé en argent;
ceux qui l’ont vu existent.
Il exigea une estimation plutôt par délicatesse que par
nécessité ; et il paya à dire d’experts. A u jou rd ’hui une
seconde estimation est ordonnée : le sieur Souteyran eût
p u s’en plaindre ; mais il n’y a vu que le moyen de jus
tifier son p è r e , en p r o u v a n t qu’il n ’a p o i n t acheté à vil
prix. L e sieur Sauzet au contraire attaque un jugement
qui lui permet d’établir qu’il a dit la vérité ; mais il trouve
plus commode d’insulter le sieur Souteyran, que de laisser
éclaircir s’il n’en impose pas.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e . B E A U D E L O U X , avoué.
A R IO M , do l’imprimerie de T h ib a u d - L ANDRIOT, imprimeur de la Cour d’appel.
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Souteyran. 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Beaudeloux
Subject
The topic of the resource
contrats de mariage
réserve héréditaire
donations
abus d'autorité
créances
assignats
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour le sieur Souteyran, ancien avocat au Puy, intimé ; contre le sieur Sauzet-Saint-Clément et la dame Salvaing de Boissieu, son épouse, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1759-Circa 1807
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0408
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rocharnaud (domaine de)
Mons (domaine de)
Orzillac (domaine d’)
Couchat (vignes de)
Pouzarol (domaine de)
Chaspuzac (domaine de)
Ceyssac (43045)
Rights
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Domaine public
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810cbd07c98a0078fd86b0cb3c26ca6c
PDF Text
Text
SUR
UNE
CONTESTATION
RELATIVE
A LA
P O S S E S S IO N
ET
P R O P R IÉ T É
DE MINES A CHARBON.
A RI OM,
de
l ’im prim erie
IMPRIMEUR
de
de
l a
L A N D R IO T ,
cour
A oût 1804
d ’a p p e l .
se u l
�MEMOIRE
COUR
D ’ AP P E L
EN R É P ONS E ,
SÉANTE
A RIOM.
POUR
P
ierre
- J
ean
- B
aptiste
T R E IC H
LA
P L E N E , a p p e la n t;
CONTRE
.
,
T R E I C H - D E S F A R G E S veuve
Lachaud 9 Jean
COUDER , et L é o
n a r d CHA DE N I E R , intimés
M a r ie
A v e c des titres de propriété , et la garantie des lois,
le sieur Treich a été jusqu’à présent à la merci de tout
‘le monde. Un ancien vendeur qui se croyoit intéressé
A
�(2)
à lui faire un procès y associa deux autres individus
absolument étrangers à ce débat ; et pendant que les tri
bunaux en étoient occupés, pendant l’appel d’une sen
tence qui n’a besoin que d’être lue pour être condamnée,
un intendant disposa du sujet de la querelle au profit
d’un inconnu. Bientôt c e lu i-c i trouva en son che
min la révolution , qui lui ôta sa p ro ie, et la remit
aux mains du possesseur, sous la surveillance adminis
trative. M ais, dans la rapide succession des surveillans,
ceux du lendemain détruisirent la volonté de ceux de
la veille; et, après un cahos d’arrêtés administratifs con
tradictoires , la confusion alloit devenir d’autant plus
gran d e, que le procès sur la propriété étoit encore en
suspens devant les tribunaux. Une cour d’appel pro
nonça sur cette propriété : m ais, comme si c’étoit un
attentat d’avoir éclairci la difficulté , ou fit un crime à
son arrêt d’avoir confondu l’accessoire avec le principal;
et, ce qui doit le plus éto n n er, la cour de cassation, étourdie
sans doute par cette Babel de décisions et d’incohé
rences , a adopté ce système et cassé l’arrêt comme in
com pétent, non pas quant au jugement delà propriété,
mais quant à celui de la possession , qui néanmoins étoit
aussi en litige. Quoi qu’il en soit, cette multitude d’ar
rêtés ne peut, plus aujourd’hui embarrasser la cause;
le ministre de l’intérieur les en a écartés ; et il s’agit
simplement de savoir si le vendeur d’une inine, qui l’a
vu exploiter pendant 45 ans sans y rien prétendre,
a p u , après ce long espace, et sous prétexte que dans
sa vente il existoit une réserve dont il n’a jamais fait
usage , réclamer uue c o p ro p riété contre un tiers déten-
�( 3
)
teur ; si encore il le* p e u t, après avoir vendu le surplus
de ses droits sans aucune mention de ceux qu’il veut
faire revivre. Gomme cette cause est tout entière dans
les faits; que les intimés nient aujourd’hui une posses
sion qu’ils ont avouée dans d’autres temps ; et qu’ils se
fondent sur un seul acte qui' estj détruit par plusieurs
autres actes et circonstances ; l’appelant est obligé de pré
senter ces mêmes faits avec un certain détail absolument
nécessaire à l’intelligence de ses moyens.
*
'
•J ‘
'
■■• F AI T S .
*: )
■
„
A u village de là P le a u ’, dans le département de la>
Gorrèze , sont des mines de houille ou charbon de
terre appartenantes à divers particuliers. Je a n T re ic h ,
père de l’appelant, en étoit le p rin cip al propriétaire.
En 1747 , il'acquit de Pierre Beynes sa portion dans,
la terre appelée improprement le communal de la Pleau,
parce qu’elle appartenoit à quatre propriétaires. '
L e 25 mars i j 5 5 , il acquit du même Pierre Beynes
tout le terrein où étoient ses mines et carrières à charbon,
dans lequel fut comprise la terre appelée la Charoulière
qui fait l’objet de la contestation. Ledit héritage vendu,,
est-il dit j tant pour ce qui concerne les mines et car
rières à charbon ? que pour les bois , terres et buges qui
sont au-dessus , moyennant 3000^; Il fut1dit que l’ac
quéreur entretiendroit un marché fait avec le maréchal du,
lieu pour sa provision de charbon , et que le vendeur
auroit lui-même sa provision annuelle dans les carrières
vendues,
A 2
�(4)
Cette terré de la Charoulière, qui a en surface trois
septerées , ayoit été vendue audit Pierre Beynes par
François Beynes, aïeul d’Antoinette, femme Chadenier*
sa vo ir, deux septerées avant 1736 ? par un acte que
l’on ne connoît pas ; l’autre septerée fut vendue avec une
autre terre par acte du I er. décembre 1736; et cette
septerée vendue y est confinée de jou r avec autre partie,
de la même terre , ci-deçant délaissée par ledit vendeur
audit acquéreur.
On y remarque encore la clause suivante : « Sous
« la réserve expresse que fait ledit vendeur, du consen
ti tement dudit acquéreur, de la moitié de tout le char« bon qui pourra se creuser dans ladite terre appelée la
« Charoulière, une des deux ci-dessus vendue, à la charge
« que les frais et dépens qui conviendront faire pour
« le déterrement du charbon , se répartiront également
« entre ledit vendeur et ledit acquéreur. »
M ais to u t p ro u v e que cette charge fut rédim ée b ien tô t
a p rè s , in dépendam m ent encore de ce qui résulte de l’acte
ci-dessus de i j 55.
Antoine Beynes, fils et héritier dudit François, tant en
son nom que comme cédataire de ses frères et sœurs, vendit
à Marianne la P lè n e , veuve dudit Jean Treich (mère de
l ’appelant ), par acte du 29 août 1768, un terrein appelé
Cliazalas, « confrontant de toutes parts avec le chemin
« de T u lles, les carrières communes dudit village de la
« Pleau, avec autres carrières et terrein de ladite de« moiselle la P lè n e , etc. ,* ensemble les carrières A cliar« bon de pierre, pratiquées et à pratiquer dans ladite
« pièce de terrein} etc. \ comme aussi a vendu à ladite*
�m
derpoisdle-la rP5lène.jla pai:tf.et-portion .appartenante
« -audit vendeur^,çsdiiesrqualités ^$ur,les*camères. situées
« dans* le;,communal, jdç.Plpau ?re t c . fsans par. Je yendeun
- « se faire, aucune réserve de.sa portionjdans leditçom « munal ;jetc. ; derneure chargée ladite ac.quéreu^e.d’exé« guter.les ^conventions portées au contrat dA29„septem« bre 1766 , )etc. ^ de jn êm e aussi sera obligée ladite ac« rquéreu?e:>de délivrer, au vendeur et^auxf siens-la quan« tité de soixante quartes de charbon annuellement,
« tant et si longuement qu’il se recueillera du charbon
« dans lesdites «carrières ci-dessus vendues , à* la charge
que le vendeur}ou
les siens
seront-tenus
de
les creuser ,
•‘
S
-'
.) \
A V« eux-mêmes; ou faire\ creuser à leurs dépens, etc. ,»r
Cet, acte de 1766 { lequel seul Antoine Beynes voulut
rappeler’) étoit ,un traité p a r lui fait avec B ern ard ü o d e t
pour;extraire le|charbon de ladite terre, Chazalas, con
frontant-, disoit-il lui-.m êm e haudit,acte, d’une part la
charbonnière commune , et d’autre part la charbonnière,
des héritiers• du J'en ysieur Treich le cadet. - •
• Antoine Beynes n’avoit guère d’autre ressource que sa
rente 4e soixante 7quar tes de cjiarbon , qu’il fit. valoir,
quelque, temps ,Lsans ayoir g^rde de réclamer aucun autre
droit en yerÇu.de l’act^ de^S^.'jIlla.,vendit le 6 janvier
1771 , et Marianne la Plène latremboi^rsa par actç du 27'
du même mois.
.T o u t se..rgiinissoit donc à séparer, entièrement les in
térêts de .JViarianne la Plène d’avec ,çeux dudit Beynes,
lorsque Marie Treiçh-D ersfarges.? par jalousie de voisi
nage , à cause de la charbonnière duicommunal dont elle
avoit acquis une partie depuis quelque temps ,• après avoir
�n, ........ .,.C6)
essayé de faire à Marianne ld Plène-/en 1 7 7 5 , un pro
cès ériminel qu’elle fut forcée ¿ ’abandonner , découvrit
i’acte dé 1736, et, ne pouvant en user ellè-m êm e, elle
eut recours à un moyen jusqu’alors inconnu pour chi
caner un voisin. Elle se fit associer par ledit Beynes ,
en' 1777 /avec J e a n C ouder, à la ¿faculté de creuser
dans là t e r r e d e la Charoulière eh entier, et en échange
on associa ledit Beynes au charbon à recueillir dans le
co?nmu?iah
A la vérité on ne supposa pas tout à fait que le droit
de Beynes fût bien certain ; car il fut ditque si ledit Beynes
riavoit pas ce droit de creuser dans la terre de la Cha
roulière/la société ( évaluée à 4 **“) n’auroit aucun effet.
Les trois associés se mirent en œuvre âu mois d’août
1781 , firent une fouille dans le communal, où la veuve
Desfarges avoit une portion, et de là ils poussèrent leurs
travaux sous la terre de la Charoulière, qui domine ce
communal.
M arie la Plène aussitôt présenta une requête, de
m anda le transport du juge de S ain t-A n gel, lequel fit sur
les lieu x, le 8 août 178 1, un procès verbal qui fixa les
prétentions des parties, et qu’il est essentiel d’analiser,
parce que les intimés feignent d’iguorer comment le
premier juge a constaté des dires qu’ils désavouent à
présent.
Les Desfarges, Beynes et Couder, qui d’abord ne semb lo ien t se défendre qu’en soutenant que leur fouille
n’avoii pas pénétré sous la C h aro u lière, essayèrent néan
moins le ton offensif, et d éclarèren t audit procès verbal
qu’ils pm ioient les démarches de la veuve la Plène pour
�(7)
un trouble*à leur-propriété ; que les .causes., dont se ser,voit et «y'etoit ci-devant-servie ladite demoiselle la Plène,,
pour tirer du charbon d e l à .terre de la Charonliere,
portaient.un préjudice notable audit Be'^rieç et autres^ au
droit de retirer du*charbon-de ladite terre, et que ladite
i .
'
\\ ' •> ■'
7 ‘ .1
j : , ou
demoiselle la Plène ne pou voit ^empêcher de leur faire
compte de la m oitié de.ce charbon depuis le temps qu'elle
m o ü acquis.
ui., - , I10(i,
Ils ajoutèrent la demande .qu’il leur,.fut donné-acte de
leurs .réquisitions, et réclamations , f sous, réserve. de la
restitution de la m oitié.du charbon çi-devaiit retiré de
la Charouliere par la demoiselle la Vlene depuis so?i
acquisition , et autres que de d r o i t •
D e son côté, la demoiselle la Plène se plaignit de ce
,qu’on avoit fait un chemin souterrein, pour venir, par cette
peinte adroite, dans sa charbonnière ouverte ,* mais qu’on
ne pouvoit s’aider du titre de 1736, parce qu’il n’avoitpas
d’application, et que, d’ailleurs il étoit doublement
prescrit.
Pendant cette première'diligence les intimés ne se-, liâtoient pas moins de fouiller le charbon , ils avancèrent si
rapidement, et avec si peu de précautions, qu’ils pensèrent
se trouver pris sous la galerie de la veuve la P lèn e,
parce qu’ils ne se doimoi.ent pas .la, peine de mettre des
étais. La veuve Desfarges crut faire ,une heureuse diver
sion en rendant plainte., . . # .
. L a veuve la Plène et scs ouvriers furent décrétés de
soit ouï, et interrogés; mais la veuve Desfarges en fut
.pour su tentative, et la procédure fut civilisée.
On continua le, procès.civil; et les intimés prirent, le
�( 8 ).
20 novembre 1781, les conclusions qu’ils avoiént annon^
cées lors du procès verbal, c’est-à-dire, i°. qu’à Vavenir
le charbon fût partagé par moitié ; 20. que pour le passé
la demoiselle la Plène fût condamnée à leur restituer
6000 cartes du charbon qtfelle a retiré et f a i t ' creuser
sous le champ de la Charoulière, et ce pour leur
m oitié, à quoi ils se restreignent ; 30. à la moitié dudit
charbon retiré de ladite terre depuis Vinstance] 40. en
¿000
de dommages-intérêts.
L e 17 mai 1782 intervint la sentence du premier juge,
qui déclare les intimés propriétaires de moitié des car
rières de charbon qui sont dans la terre dé la Charou
lière , et de moitié de celles du communal de la Pleau
(qui n’étoient pas en litige) ; mais, attendu, est-il dit, que
les intimés n’ont pas réclamé dans le temps contre Yex
ploitation de charbon faite avant Vinstance par la de
moiselle la Plène , \publiquement et ouvertement, en
v e rtu de son contrat de i j 55 , au vu et su dudit Beynes et
de ses associés, sans réclam ations, la veuve la Plène est
renvoyée de la demande en décharge de tout compte du
charbon extrait, et ils sont renvoyés eux-mêmes de toute
demande. L e surplus de cette sentence règle le mode
d’exploitation pour l’avenir.
Les Beynes, Couder et veuve Desfarges n’ont point
attaqué ce jugement.
La veuve la Plène en interjeta appel en 1782. Cet appel
fut instruit en la sénéchaussée de T u lle : elle étoit sur
le point d’obtenir justice.
M ais, 'Sic vos non nobrs, un nommé 'Saint-Victour
profita do ces querelles pour persuader que l’explôitation
de
�;(• 9 ).
de ces mines étoit en mauvaises mains ; il en obtint
d’abord de l’intendant de Limoges la concession pour
«un an; puis il fit valoir ses dépenses, l ’excellence de son
administration, son utilité, etc. Il-obtint en 1783 une
concession de quinze ans..
;
i La loi du 28 juillet 1791 expulsa xe .Saint-Victour,
qui néanmoins ne fut pas décourage, et qui, dans toutes
les phases d e 'la révolution, se tint aux avenues des
administrations et des ministères, pour solliciter quelquesr
uns des arrêtés ci-après, et en venir de .longue, main à
réussir.
r
•'
‘
Les mines étant seulement sous la surveillance admi~
nistrative , les propriétaires .de Pleau obtinrent , le
6 novembre 17.91, un arrêté du département de la Goi>
rèze, q u i les remettoit en possession de leurs carrières.
Saint-Victour intrigua et prétendit que lui seul avoit mis
les charbonnières en état de produit il fallut des enquêtes
pour le vaincre. E n fin, en 179 3, il parut céder, et fit
faire par Bettinger, son associé, un traité avec Pierre-;
Jean Treich appelant, lequel 'concédoit, h prix fixe,
audit Bettinger, l’exploitation de ses mines pendant vingt
ans. L e département homologua ce traité le 19 juin, 1793.
D ’autres cliangemcns.amenèrent d’autres intrigues. On
fit écrire au ministre de l’intérieur «par le ministre,de la
m arin e, pour les mines de Pleau; on eut des ¿ivis de,.la
commission des mines, d’autres de celle des travaux pu
blics. On fit ordonner quelles propriétaires exploiteroient en commun.
L e département de la Corrèze p rit, les 5 et i 5 plu
viôse an 5 , deux arrêtés qu’il crut etre en c.onforinité
.
!
\ B
�(io)
de ces règlemens ; mais ils furent cassés par le ministre
de l’intérieur, le 8 floréal an 5.
Les propriétaires des mines se réunirent, le 24 nivôse
an , pour organiser une exploitation en com mun, sous
la direction de Mazaud. On pressent que Treich appe
lant, et principal p ro p rié ta ire , ne pouvoit y participer à
cause du traité qu’il avoit fait avec Bettinger.
Un autre obstacle s’opposoit à cette union. Les arrêtés
6
des 6 novembre - 1791 et I 9 j11*11 I 793 subsistoient
en core, et étoient exécutés.
Mais le bien général ne permit pas sans doute à l’ad
ministration de la Corrèze de se laisser guider servile
ment par des décisions sous la foi desquelles on avoit
traité , et de se laisser maîtriser par des considérations
particulières. L e plus difficile ne fut donc pas de vaincre
ce léger empêchement :
JDiruit, cedificat, mutât quadrata rotandis.
lie département de l’an 6 cassa , le 23 ventôse, les
arrêtés du département ou plutôt des départemens
de 1791 et de 1793. L ’union de la compagnie Mazaud
fut hom ologuée, et il fut enjoint à Treich de déclarer
sous quinzaine s’il entendoit s’y réunir, sinon il étoit
censé avoir renoncé à son droit.
Treich se pourvut près des autorités supérieures ; il
osa même élever sa voix jusqu’au chef de l’état; et
bientôt nous verrons qu’il n’a pas supplié en vain.
Cependant cet arrêté de l’an 6 étoit le dernier état
des choses, lorsque l’appel de T re ic h , fils et héritier
de Marie la Plène , fut porté à T u lles, comme tribunal
choisi par les parties : il fut ensuite dévolu à la cour
d’appfel de Limoges.
�( ÏI )
■
Les a d v e rsa ire sfo rts d e là décision administrative,
contestèrent d’abord la compétence judiciaire : mais
comment un arrêté auroit - il pu suspendre un appel
pendant ? .D ’ailleurs l’arrêté ne régloit rien sur la pro
priété des parties : la cour de Limoges retint donc la
contestation.
•
i Les parties plaidèrent : au fond ; et le 28 -germinal
an 9 intervint l’arrêt suivant :
■
. « Considérant qu’il résulte du contrat du i^\ dccein« bre 1736 -une vente pure , simple •et parfaite de
« l’entier fonds.de la portion de la terre la ¡Charoulière,
« qui fut vendue par cet acte ; que la réserve énoncée
« à la suite de cet acte , même du consentement de
« l’acquéreur, n’y est apposée que comme un su p p lé
ée ment du prix déjà stipulé ; q u ’ainsi cette clause n’avoit
« point fait retenir au vendeur la »propriété de la
« moitié de la mine de charbon existante sous le ter« rein aliéné ; qu’il n’en dérivoit contre l’acquéreur,
« qu’une simple action en réclamation de cette moitié
« de charbon ; que cette action en soi est prescriptible
« comme toutes les autres , par le laps de trente années;
« que les intimés ont avoué et soutenu, au procès , que
« n i François Beynes , auteur à!Antoine , n i ledit
« A ntoine lui-même , navoient jam ais jo u i de la mine
« à charbon , depuis ledit contrat de 1736 , ju sq iien
0 1780 ; ce qui embrasse un espace de quarante-quatre
« ans , plus que suffisant pour prescrire ;
« C onsidérant que cette action est prescrite par le
« non-usage; que Jean Beynes, premier acquéreur,
« Jean Treicb, père de l’appelant; et l’appelant lui-même,
B 2
�( 12 )
«- ont possédé ladite moitié de m ine, avec titre suffisant
« pour en acquérir la propriété avec bonne foi et sans
te interruption pendant plus de trente ans; qu’ainsi cette
« prescription se trouve acquise en faveur de l’acqué« reur ; que dès-lors l’exâmen et la solution des autres
« questions agitées au procès deviennent inutiles, etc.
« L e tribunal dit qu’il a été mal ju g é ;.... garde et
« maintient l’appelant au droit et possession de jouir
« des mines à charbon existantes dans la terre la Cha« roulière ; ... le relaxe* de l’accusation et plainte;...
« condamne les intimés à lui rendre le charbon par
« eux perçu dans ladite terre ,... depuis le trouble jus« qu’au jou r.... de l’arrêté du 23 ventôse an 6 ,... et'
« 100
de dommages-intérêts ,.... sans préjudice à la
« restitution en temps et lieu , s’il y éch et, du charbon
cc perçu depuis ledit jour 23 ventôse an 6 , etc. »
Les intimés se pourvurent en cassation sur quatre
moyens. Celui de l’incompétence fut rejeté à l’unanimité*'
en la section des requêtes. L e prétexte de la minorité de
Beynes , qu’il ne prouvoit encore pas régulièrement ,
fit réussir l’admission. La section civile rejeta à son
tour ce moyen , et s’attacha à l’incompétence : il en est
résulté que l’avis de huit juges l’a emporté sur celui de
vingt-trois.
Quoi qu’il en soit, les deux arrêts de Limoges ont été cas
sés le 14 nivôse an 1 1, pour avoir statué sur la possession
en même temps que sur la propriété, parce q u e, dit
l’arrêt, la possession dérivoit de l’arrêté du 23 ventôse
an 6
et cependant cet arrêté avoit été respecté à Lim o
ges comme une barrière insurmontable. Les parties sont
�( 13 ) '
. _,
renvoyées à faire statuer sur leur appel én cette cour.
Les intimés se figurèrent que cet arrêt de cassation étoit '
un triomphe définitif, et ils allèrent.de suite se mettre en
possession des mines de Charoulière : ils y disposentJ
aujourd’hui en maîtres.
•
Mais bientôt les plaintes que Treicli avoit portées au
pied du trône ont été fructueuses. L e ministre a donne
ordre au préfet de la Corrèze de casser l’arrêté du 23 ven- ’
tôse an 6. Cela a été effectué par arrêté du 27 flo ré a lJ
an 12 , qui permet pour un an à Treich et autres d’ex
ploiter chacun dans sa p ropriété, à la charge de s’expli
quer dans ce délai pour régler le mode d’extraction u "
venir.
N ’y ayant donc plus d’em pêchem ens adm inistratifs ,
l’appel a été suivi en la cour. Les intimés ne voudroient ‘
y plaider que sur la propriété ; ils prétendent que leur *
droit est im prescriptible, et qu’il ne s’est pas écoulé de ‘
prescription , soit à cause de la clandestinité , soit quant
au délai suffisant pour prescrire.
M O Y E N S .
Ce n’est pas un très-grand malheur qu’une bonne cause
soit remise en jugement après avoir été gagnée en der
nier ressort , lorsque la cour suprême n’a blâmé cette
décision que dans un très-petit accessoire. Mais 011 ne
peut s’empêcher de s’étonner grandement que l’arrêt
d’ une cour d’ap p el, reconnue compétente pour le fo n d
du procès et pour la majeure partie des accessoires, ait
été pleinement cassé, sans que cet arrêt, au fon d , soit
suspect d’aucun vice.
�( M )
A u reste, le sieur Treich se consolera aisément de
celte vicissitude , q u i, en jugement comme en adminis
tration , n’épargne pas les choses les plus irréfragables \
car si son arrêt de Limoges a été cassé, il a au moins
l ’avantage que le moyen de non-prescription, sur lequel
les intimés avoient insisté davantage, n’a pu être accueilli
ni à la section des requêtes , ni à la section civile , et
que l’arrêt de la cour de cassation, dans tous ses motifs,
n’attaque aucunement l’arrêt de Limoges dans les ques^
tions de la propriété, et même de la possession antérieure
à l’an 6 , mais seulement pour s’être mis en opposition
à l’arrêté du département, du 23 ventôse an 6,
Les motifs de cassation font naître une idée bien na**
turelle : car ils sont fondés, non pas sur le droit qu’avoit
la compagnie Mazaud à la possession, mais sur la pos
sibilité qu’elle y eût droit, quand le gouvernement auroit
ratifié l’arrêté de l’an 6,
- O r , Mazaud n’ayant plus ni arrêté ni expectative , nô
faudroit-il pas dire que sublatâ sausâ tollitur effectus ?
et que la cassation étant fondée sur une condition nonsuivie d’événement, il n’y a aucun obstacle à ce que l’arrêt
de Limoges subsiste.
On répondra qu’il y a chose jugée ; mais on se demanderoit laquelle ? et cette réponse même nous con
duira au moins h être persuadés que ç’est bien sans
nécessité, et surtout sans motifs existans , que le droit
des parties est remis en litige.
. D ’Argentrédéploroitla misère des plaideurs et l’éternité
des procès : M iseri litigantes ! de quitus m liil certi est
cotislitutmn , et qitôd ab arbitrio cujttsqiie et opincttione
potiàs pend e t, quàrn àcertis regulis, Mais qu’a uroit-il dit
�( i 5 .)
si, outre les tribunaux, il eût fallu parcourir un cercle d’ad
ministrations sans être plus certain le lendemain que la veil
le, et sans que ces administrations le-fussent elles-mêmes?
Quoi qu’il en soit, supposons, car il faut bien le sup
poser , que les choses sont au même état que lors de la
cassation, et par conséquent qu’il existe un arrêté du
23 ventôse an 6.
Si cet arrêté subsistoit aujourd’hui, la cour auroit à exa
miner encore la même question de compétence relative
ment à la possession des mines; et il seroît bien difficile,
on ose le d ire , qu’elle se conformât mieux que la cour
de Limoges à la démarcation des pouvoirs; car pourroitelle faire plus, que d’arrêter ses condamnations à l’époque
où l’administration avoit disposé de l’avenir ?
>
Mais , dans tous les sens possibles, le passé étoit dans
le domaine judiciaire ; les jouissances de 1781 à 1791
étoient en litige par la sentence de S ain t-A n gel, et par
l’appel de la veuve Treich.
Les jouissances de 1791 à l’an 6 étoient encore l’objet
de l’a p p el, et on ne peut pas invoquer l’art. i cr. de la
loi du 28 juillet 1791 ; car s’il place les mines sous la
surveillance administrative, il n’ôte pas le fait de la pos
session , et d’ailleurs elle étoit autorisée par deux arrêtés
de 1791 et de 1793.
Ces deux arrêtés n’ont été rapportés que le 23 ventôse
an 6 ; mais jusque-là ils avoient eu leur exécution , et ce
dernier arrêté ne les rapporte aussi que pour l’avenir.
Ainsi Lim oges, loin d’être en opposition à des arrêtés
administratifs, s’y étoit au contraire entièrement con
formé : ainsi la cour, en statuant de m êm e, s’y conforineroit encore.
�( 'i 6 )
Mais elle n’a pas même l?empêcliement de cet arrête
de l’an 6 ; e t , quoi qu’en disent les intim és, rien ne
s’oppose aujourd’hui, à sa pleine compétence ; car l’arrêté
du préfet, en cassant celui de l’an 6 par ordre du mi
nistre, n’a pas borné cette infirmation à un seul ch ef,
comme ils le supposent. L ’arrêté est cassé.
A u reste ? il est toujours vrai que la compagnie Mazaud
n’a plus le privilège exclusif. L e droit d’exploiter est
rendu à chaque propriétaire, au moins provisoirement\
et d’ailleurs encore il est véritablement oiseux de recher
cher quel reste d’existence a l’arrêté de l’an 6 ; car si les
intimés ont joui avant l’an 6 , ils ne doivent rien à la
compagnie Mazaud , qui n’existoit p as, mais à T r e ic h ,
qui avoit le droit de jouir. L a question de propriété
emporte donc avec elle la question des jouissances.
A in s i, bien loin de se restreindre à moins que n’a jugé
L im oges, il semble que la cour n’a aucun empêchement
à adjuger même les jouissances postérieures à l’an 6 5
car la com pagnie Mazaud n’a jamais eu de droit ni de
possession sur les propriétés de l’appelant, seulement elle
y avoit une expectative au cas que Treich ne réussît pas
dans sa réclamation auprès du ministère. Mais l’arrêté de
l’an 6 n’est plus. La compagnie Mazaud r d’après même
les intimés ( page 14 de leur mémoire ) , n’a plus de
droits ; et s’il est vrai que la possession des mines ait
besoin d’une autorisation ? le sieur Treich l’a encore
obtenue. Ainsi reflet le plus immédiat de cotte. obtenT
tion doit être que ceux qui posséderont dans ses pro
priétés malgré lui , doivent lui rendre compte.
A u reste , il s’agit ici de com pétence, et par consé
quent
�C *7 )
quent d’ordre public : la cour y statuera dans sa sagesse.
Il suffit à l’appelant de rentrer dans ses propriétés *, et:
il n’y voit d’autre ' obstacle que l’obstination de ses1
adversaires:
* ' /
• . t. '
■ * "i
* Soit que la cour juge toute la possession, ou seule
ment une partie de la possession , il est au moins cer
tain qu’il n’y a de vrai litige que sur la propriété.*
D ’après cela, si l’arrêt de Limoges est cassé, même pour’
ce qu’il avoit compétemmènt jugé , le sieur Treich ne
sera pas plus embarrassé de prouver à Riom- qu’à
Limoges qu’il est seul propriétaire* de la Charoulièreet des mines qui en dépendent. Ses preuves à cet égard
ne sont pas équivoques.
’ i° . Il tient cette propriété de Pierre Beynes. Elle
est vendue sans charges.
.
f •
2°. Son titre est fortifié par le fait même du pre
mier vendeur , q u i, achevant d’aliéner ses propriétés
adjacentes et droits de m in es, ne s’est fait aucune
espèce de réserve.
*
3°. Il a joui plus de io ans avec titre et bonne foi :
il a joui même plus de 30 ans sans trouble ni récla
mation.
40. Cette jouissance est constante au procès.
Les intimés ne se sont pas dissimulés toute la puis
sance de ce dernier moyen -, aussi' ils s'efforcent de la
diminuer par des négations.
Ils n’ont jamais avoué, disent-ils, que M arie la P lèn c,
C
�( i8 )
veuve T reich , ait jo u i, et ils ne trouvent aucunes traces de
cet aveu ; et l’appelant, au contraire , a toujours d it,
suivant eu x , au bureau de paix , et dans ses écritures,
n’avoir ouvert de carrière dans la terre de la Charou
lière que depuis dix-huit mois.
A u bureau de paix ? les parties n’y sont jamais allées.
Pans les écritures de l’appelant ? il a toujours d it, ab
ovo , qu’il y avoit jouissance et prescription. C’est donc
dans les interrogatoires? Mais de quel interrogatoire a-t-on
voulu parler ? est-ce de celui de 1775? est-ce de celui de
1781 ? car la veuve Desfarges est armée de deux procès
criminels qu’elle a soin de produire avec son procès civil.
L e premier interrogatoire est vraiment une pièce
curieuse; e t, s’il faut juger la sentence de 1782 par les
interrogats de 177^ , la comparaison ne sera pas trèsavantageuse par la sentence. L e juge demande à la veuve
la Plène s’il n’est pas vrai qu’elle est propriétaire de
moitié du communal, et autres carrières ; ..... s’il n’est pas
vrai qu’elle tient sous son joug les liabitans du village; ...
s’il n’est pas vrai qu’elle a coutume de lasser les parti
culiers qui ont essayé de creuser du charbon, etc. Elle
répond qu’elle est propriétaire de moitié du communal,
et de plusieui's autres carrières particulières ; ... qu’elle
n’empêche pas les particuliers de creuser où ils ont droit,
mais qu’elle a toujours fait ses efforts pour les empêcher
de creuser dans ses fonds.
Ce ne sont là que des pauvretés , cela est vrai; mais,
au lieu d’y trouver une preuve que la veuve la Plène
ne joirssoit pas, on y voit au contraire qu’elle eu (.en
duit très-bien jouir seule doses carrières, envers et contre
tous ; elle ne s'en défendoit pas.
�C *9')
* Sont-ce les interrogatoires de 1781 ? Cai* il'est parlé
de dix-huit mois dans rinterrogatôire de Martin Bêynës
et dans celui de sa fem m e, qui ont rendu compte de la
derniere excavation qui donnoit lieu à la plaintè; Mais la
veuve la Plène explique, dans son interrogatoire du
même jo u r, que cette carrière n’est qu’une continua
tion de creusement ; et plus loin! elle parle encore de
ce nouveau creusement.
Comment la veuve la Plène auroit-elle , én effèt, menti
à' la" vérité contre elle-même ,- lorsqu’on lit dans les écri
tures de ce même procès de' 1781 , qu’elle a toujours1
joui. « Les contrats de ven te, dit-elle ( dans là requête
« copiée à la suite de ces interrogatoires dans les pièces« des intimés ) , ont toujours été suivis d?exécution
« par la jouissance paisible et tranquille que là stip« pliante a eue seule des fonds ÿ mentionnés, notam« ment de la terre de1 la Charoulière , à l’exclusion dé;
« tous autres, et sans opposition. »
Non-seulement la veuve la Plène a parlé de sa pos
session constante , mais les intimés ne l’ont jamais désa
vouée en première instance. Leurs* réquisitions au procèî
verbal du 8 août 1781 , leurs conclusions dans la-requête’
du 20 novembre suivant, qui en font le complément,*
ne laissent aucun doute à cet égard. L ’appelant ne les
rappellera pas, parce que“la coïir a dû së convaincre, par^
le seul récit des faits, que ce point de jouissance exclu
sive étoit constant dans la cause.
* Q u ’y a-t-il encore de plus exprès et de plus concluant
que la fin de la sentence de 1782, pour prouver que cette
G a
�( 2° )
possession a eu lieu au vu et su des adversaires, publi
quement et sans réclamation.
Ils n’ont pas interjeté appel de cette sentence ; donc le
débouté, motivé sur la jouissance exclusive à leur vu et su 7
demeure inattaquable : le motif et le dispositif ne peuvent
se séparer. Enfin, peut-on douter de la possession constante
de T reicli, après avoir vu les aveux faits devant la cour
de Lim oges, et rappelés dans les motifs de son arrêt?
Ainsi la jouissance des Treich est constante; ainsi les
Beynes n’ont jamais joui ni fait de réclamation de la
réserve qui se tx*ouve au contrat de 1736. O r, avec ces
points de fait, il sera aisé de prouver que l’appelant
doit être tranquille par la prescription, indépendam
ment des moyens qui résultent des actes de 1768, 1769
et 1771.
V e u t-o n considérer Antoine Beynes isolément, et
comme s’il plaidoit contre Pierre Beynes son acquéreur?
alors, à la vérité, il faudroit une prescription de trente ans.
O r , cette prescription s’y trouve, car Antoine Beynes
n’a jamais articulé avoir joui ; et , de l’époque de sa
vente en 1736 jusqu’à 1781, il y a prescription, comme
l ’a jugé la cour de Lim oges, car il y a quarante-quatre
ans.
Les intimés essayent d’en diminuer la durée en disant
qu’Antoine Beynes étoit mineur. D ’abord, outre qu’il
11’éloit pas seul héritier du vendeur, il n’y pas moins
trente-deux ans utiles sur sa tête; et si les intimés, dans
leur mémoire (pag» 11 )? veulent trouver neui ans de
moins, c’est qu’ils ne comptent pas rintervaile de 1736
à 1755.
�( 2Í )
Pour justifier cette déduction, ils disent que c’est en
1755 seulement que la cause de la possession a été changée. '
Mais il n’est pas nécessaire de changer la cause d’une pos
session pour prescrire par trente ans; car cette prescrip
tion n’exige aucune autre condition que là possession à
titre de propriétaire; neque bona fides requiritur, sed sola
possessio per tricennium. Le Gode civil encore rappelle
sur ce point les anciens principes.
« On peut prescrire contre son titre, en ce sens que
« l’on prescrit la libération de l’obligation que l’on a
« contractée. » (A rt. 2241.)
Nous avons considéré la prescription du côté de Beynes
vendeur, et elle est acquise par trente ans; mais il reste à la
considérer du côté de Treich acquéreur en 1^5 5 ; et, sous
ce point de vue, il suffit de dix ans de prescription.
L a loi comprend expressément dans la prescription de
dix ans les charges auxquelles le fonds est asservi, et
personne ne doute que, dans la plupart des pays de droit
écrit, cette prescription n’ait été constamment admise.
L e parlement de Bordeaux, d’où il paroît que ressortissoit l’ancien Limousin , admettoit la prescription de dix
ans en faveur du tiers possesseur, ainsi que l’enseigne
Lapeyrère, lettre P , n°. 83.
A la vérité , son annotateur inconnu prétend que Bor
deaux n’admet que la prescription de (rente ans. Mais la
cour jugera lequel des deux mérite d’être préféré, nu
cas qu’il y eût lieu d'aborder cette question secondaire.
Lapeyrère «avoit d it, au n°. 60, que la prescription
s’ilcqnéroit par dix ans au tiers possesseur, suivant arrêt
de règlement de 1626.
�( 22 )
• Mais , au reste , deux moyens prouvent qu’elle doit
avoir lieu dans la cause.
'
'
- i Q. Tous les parlemens qui ont refusé d’admettre la
prescription de dix ans se fondent sur l’Authentique M alœ
J id e i, et en tirent l’induction que la bonne foi ne se
présume pas contre le propriétaire, parce qu’on ne peut
pas présumer qu’il ait connu son droit et n’ait pas réclamé.
Cessât longi temporis preescriptio, si verus do m inu s ignoret ju s suum et aliénationem facta?n, Dans ce
cas il n’y a que la prescription de trente ans.
Mais comment ne pas voir qu’ Antoine Beynes n’est
point dans le cas de cette lo i? Il n’a pas ignoré son droit,
puisque l’héritage vient de lui-m êm e, puisque ce droit
est porté par un titre de son fait.
Il n’a pas même ignoré la vente de i j 55 , car en 1766
et en 1768 il reconnoissoit les héritiers Treich pour
propriétaires des carrieres voisines et du ténement de la
Charoulière.
E n second lieu , l’A u th e n tiq u e Ma?ce fidei ne se rap
porte qu’à la vente d’un immeuble; et les parlemens qui
la reçoivent ont néanmoins continué d’adopter la pos
session de dix ans quant aux charges et hypothèques
dont l’immeuble lui-même est grevé, et que D unodm et
sur la même ligne quant à la prescription de dix ans.
O r , la réserve dé partager le charbon à extraire,
énoncée en l’acte de 1736? qu’est-elle autre chose qu’ une
charge, une servitude, un droit h des fruits temporaires ?
E t 11’étoit-il pas ridicule que le juge de Saint-Angel
appelât ce droit une propriété, et jugeât que les intimés,
même Couder et la veuve D esfarges, étoientpropriétaires
�< * 3 '?
pour, m o itié, comme si après une vente le vendeur demeuroit propriétaire ;, et comme si dans un fonds il y avoit
deux propriétés, l’une du tréfonds et l’autre de la super
ficie.
.
M ais, dans tous les cas, il est superflu de remonter à
cette réserve de 1736, parce que Jean Treich ayant acquis
en 1755 , sans qu’elle fût mentionnée, a joui avec bonne
f o i, au vu et su du vendeur, qui connoissoit son droit ;
ainsi l’appelant a prescription suffisante.
. Les intimés répondent que la .prescription n’a couru
dans l’espèce par aucun laps de temps; d’abord, parce que
c’est un droit de pure faculté ; en second lieu , parce quç
s’agissant de possession sous la terre, il y a clandestinité.
. Autant vaudroit avoir dit etia?n per jnille aniios ,
comme le dit Dumoulin sur le T itre vicieux. Cependant,
il faut en convenir, il seroit un peu dur de songer quq
de vieux titres portant réserve d’un droit peuvent tom
ber des nues à la vingtième génération, et dessaisir ceuxlà même qui ont pour eux le titre et la bonne foi sans
s’attendre à 'aucun trouble.,
L ’espèce de Cancérius,rapportée par D unod, parmi les
exemples qu’il donne des droits de pure faculté, est déjà
contraire à l’un des faits principaux de la cause; c’est que
si le propriétaire d’un château ruiné n’a pas perdu la fa
culté de le faire réparer par les habitans, c’est parce qu’il
ne l’a pas réparé sans eu x; sans quoi le droit seroit pres
crit. O r , ici Beynes avoue qu’on a joui sans lui.
M ais, à la page suivante, Dunod explique la c¿mse d’une
manière à épargner à l’appelant une discussion plus éten
due sur les droits de pure faculté.
�( H )
' « 11 faut distinguer entre la pure faculté, qui a son
« fondement dans la nature, dans le droit public commun
c< à tous ou à plusieurs d’une même société, et dans la
« liberté de faire ou de ne pas faire certaines choses,
« sans aucune préexistence ou mélange de titre, de
« convention ou d’action; et celle qui vient d’un titre,
« qu i tire son origine d'un co n tra t, qui est propre à
« celui qui a le titre, qui résulte d’un droit form é, qui
« produit une action , et qui peut être déduite en ju
te gement.
« La première de ces facultés n’est pas sujette à la pres
et cription, tant qu’elle n’est pas intervertie. M ais la se« conde se prescrit sans interversion , parce qu’elle dé« rive d’une convention et d’une action qui sont pres
et criptibles et dans le commerce ordinaire, à moins
a qu’elle ne tombe sur des choses qui sont d’une condi« tion à ne pouvoir être prescrites. » (D unod , pag. 90.)
' Ces principes s’appliquent sans effort à la cause. L e
vendeur de 1736 avoit son droit dans son propre titre;
il a pu le faire valoir ; il avoit une action : donc sa ré
serve étoit prescriptible, comme l’avoit jugé la cour d’appel
de Limoges.
Remarquons d’ailleurs qu’en cette partie les moyens
des intimés s’enlredétruisent. Ils prétendent que Beynes
a eu le droit, non pas seulement d’attendre qu’on creusât
pour partager , mais de creuser lui-même.
La preuve, c’est qu’il a associé pour creuser ; la preuve,
c’est qu’on a creusé soi-même, et plaidé pour soutenir
qu’on en avoit le droit.
La preuve enlin , c’est que la sentence de 1782 adjuge
ce
�( *5
) ) ...............................................................
en droit; c'est qu’elle déclare les intimes propriétaires de
la moitié de la mine.
*
Une propriété n’est donc pas une pure faculté ; et
concoit-on un propriétaire qui conserve son droit sans
prescription, quand un autre en jouit d’après lui-même
exclusivement?
.
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V
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Mais cette jouissance, dit-on, a été clandestine.
A cela il n’y auroit qu’un jnot à répondre ; c’est
que la; sentence de 1782 dit que la jouissance a eu lieu
au vu et su d’Antoine Beynes. O r , cette sentence n’est
pas attaquée par les intimés. Dira-t-on que cette, sentence
est annullée par l’appel ? Mais il n’y a appel nécessaire
ment par celui qui perd son procès, que pour la partie où
il le perd.
<
D ’ailleurs, il est de principe que les, aveux consignés
dans un acte subsistent malgré son annullation , comme
l’enseigne Cochin , tome 5 , page 274, et comme l’a jugé
la cour de cassation le 29 floréal an 7.
Ce qui vient d’être dit s’applique à l’arrêt de Lim oges,
qui mentionne l’aveu de la possession.
Mais rappelant 11e veut pas écarter ce moyen de clan
destinité seulement par une fin de non-recevoir. Car ici
les parties sont loin de ce qu’on peut appeler une posses
sion clandestine : il n’y en a ni dans le fait ni dans le droit.
Dans le fait, aucun habitant de la Pleau n’a mieux su
que Beynes tous les tours et détours des.charbonnières ;
et quand il se fait un moyen de ce que la Charoulière
n’a pas eu d’excavation verticale, il sait bien qu’à la Pleau
D
*
�àn n’a'jamais.--comme en Flandre / exploité ces mines
par des puits.
X^a montagne ou est la houille est en cône régulier ;
par conséquent, pour creuser dans une surface, il faut
creuser par une tranchée1 horizontale au pied du plan
incliné. Par ce m oyen, qui est le seul usité à la Pleau, rien
n’indique mieux où se dii’ige la fou ille, et il est impos
sible de s’y tromper.
La procédure1prouve d’ailleurs que c’est dans un 'tertre
de la Charoulièrd quéi se trouve l’une des ouvertures ;
d’autres*- sont au com m unal, mais au pied de la Charouliêre y et' en direction~de cette mine.
!
/ .i i
•
.
A u x termes du d ro it, une possession clandestine sup
pose le dol ; c’est-à-dire , l’intention de cacher ce qu’on
fait à celui qui a intérêt'de le saVoir. Il n’est pas besoin,
pour l’étirblir, d’aller rechercher d’autres principes que
ceux-là même consignés au m ém o ire des intim és :
Clàtii possidere eum die ¿m us , qui f u r t i v e ingressus
est possessionem , i g n o r a n t e e o queni sibi controversiam facturum s u s p ic a b a t u r j et ne facerct t im e . jja t . L. 6 , fï‘. D e acq, P o s s .
V oilà donc trois choses qu’il faut regarder comme
constantes: i°. que M arie la Piène ait \ox\\fu rtivem en t,
2°. qu’elle ait craint une action de la part d’Antoine
Bcyncs; 30. qu’Antoine Beynes ait ignoré la possession.
La sentence de 1782 répond 'à tous ces faits, en disant
que Marie la Plèrie a joui publiquevidnt. La plainte de
177^ prouve aussi qu’elle ne craignoit pas les mauvaises
�C 27 ?
contestations ; et enfin les écritures des intimés, ci-dessus
rappelées, contiennent la meilleure réponse à leur moyen.
• Mais quand tout cela n’existeroit p a s, vit-on jamais
Appeler clandestine la possession de celui qui a un titre ?
La clandestinité n’est réprouvée que pour celui qui a
voulu prescrire par 4e seul secours de la possession , et
parce que sans possession publique il n’a vraiment pas,
de possession.
'
" Mais celui qui a un titre n’a besoin d’avertir per
sonne qu’il joùit ; car c’est en vertu de son titre qu’il pos
sède , et le vice de clandestinité ne lui est point appli
cable.
•
i !
Dunod , invoqué par les intim és, après avoir cité la
loi 6 , dit à la page suivante : « Celui qui a joui en vertu
<< d’un titre ne p e u t être regardé com m e possesseur clan« destin , son titre le faisant supposer de bonne; foi dans
« le commencement; ce qui suifit pour prescrire suivant
« le droit civil. »
*. '
L e Code civil répète que la bonne f o i , quand il .y a
un titre , est toujours présumée , et que c'est à celui qui
allègue la mauvaise foi à la prouver. ( Art. 2268. ) .•
Les intimés disent qu’on devoit avertir Bcynes pour
fouiller le charbon ; mais ils conviennent au moins que
l’usage n’étoit pas de le fa ire 'par écrit : et d’ailleurs, on
le rép ète, ils se sont dits copropriétaires.
‘ Il n’y a donc aucun obstacle à ce que la prescription
ait eu son cours; et Treich ayant un titre e t’ bonne foi
depuis 1755 , a valablement prescrit contre les entreprises
des associés de 1777*
Ce n’est pas que la prescription lui soit un moyen néD 2
�( 28
}
cessaire ; c a r, indépendamment de la présomption Lien
fondée , que la reserve de 1736 a du être rachetée comme
l ’a été celle de 1768 , par un acte que Treicli avoit dés
espéré de trouver; il doit demeurer, ce semble , pour
chose absolument évidente, quAntoine Beynes a renoncé
à cette réserve de 1736 par tous les actes qu’il a passés
ensuite.
Com m ent, en effet, Antoine Beynes, qni a toujours
habité le village de la P leau , qui a passé sa vie dans les
mines de l’endroit ( et on peut en offrir la preuve ) ;
Antoine Beynes , qui en 1766 faisoit un traité pour ex
trade du charbon dans ses propriétés, auroit-il manqué
d’y comprendre la Charoulière, s’il y avoit eu le même
droit d’extraction ?
Comment Antoine Beynes, qui vendoit en 1768 tous
scs droits aux mines, en se réservant du charbon, 11’auroit-il pas rappelé l’ancienne réserve ? T out prouve donc
qu’elle n’existoit plus, ou qu’il y renonçoit.
L ’appelant avoit proposé un subsidiaire à Limoges ,
et il étoit fondé; c’est q ue, dans tous les cas , n’y ayant
qu'une septerée de la Charoulière, vendue en 1736 , et
cette terre ayant trois septerées, la réserve ne pouvoit
frapper que sur la terre alors vendue, ci non sur celle
qui l’avoit été depuis long-temps : car les conventions 11e
se réfèrent qu’à l’acte présent, s’il 11’y a stipulation con
traire ; e t , dans le doute , l’interprétation se feroit contre
le vendeur, in euju s potestate f u it Jegeni apertiùs diccre. La sentence de Saint-Angcl étoit donc encoye vi
cieuse, même sous ce rapport.
Cette défense se résume en peu de mots. La propriété
�( 29 )
de la Charoulière est sans difficulté à Jean Treich. Les
actes qu’il a passés avec les Beynes , prouvent que cette
propriété est affranchie de toutes charges. Il est constant
d’ailleurs qu’Antoine Beynes n’a jamais joui , depuis
1736 , du droit qu’il réclame. Il est constant que T reich
et M arie la Plène ont joui exclusivement et publique
ment , au vu et su dudit Beynes, sans réclamation de
charges ni de copropriété.
Ainsi Beynes a -perdu son d ro it, soit contre son acqué
reur , soit contre le tiers-détenteur, par une possession
de trente ans.
Ainsi Treich a acquis la franchise de la terre la Cha
roulière, par la possession de dix ans entre présens, comme
acquéreur ; et même surabondamment, en ajoutant sa
possession à celle de son vendeur , comme il a droit de
le fa ire, il peut invoquer la prescription de trente ans.
Conséquem ment, sous tous les points de vue possibles,
la prétention des intimés n’est qu’une-tracasserie , et la
sentence de Saint-Angel avoit été justement infirmée par
la cour de Limoges.
M . B A R R E T - D U C O U D E R T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. M A R I E , licencié-avoué.
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Treich la Pleine, Pierre-Jean-Baptiste. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
mines
Description
An account of the resource
Mémoire sur une contestation relative à la possession et propriété de mines à charbon. Mémoire en réponse pour Pierre-Jean-Baptiste Treich la Plène, appelant ; contre Marie Treich-Desfarges, veuve Lachaud, Jean Couder, et Léonard Chadenier, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1747-1804
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0407
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0249
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_G1306
BCU_Factums_G1307
BCU_Factums_G1308
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Mines
-
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ece0c7764bb8b76052bb1b9ef2ac74e9
PDF Text
Text
P
R
E
C
I
S
POUR
Jean
V
E S O L , Appelant d’un jugement d'Aurillac ;
CONTRE
J o se p h L A T O U R N E R I E y P i e r r e
JA R R IG E
et sa fem m e, et R ose J O N Q U I E R E , veuve de
P i e r r e P E Y R I N , intimés
.
iimiiirmu.—
L es parties plaident pour une prise d’e a u , une ser
vitude de passage, et une usurpation de terrain.
Au bas du village de la Maletie sont les batimens
de Vesol. Les aisances de ces batimens sont closes de
murailles à l’aspect de jour, qui les séparent des champs,
et ouvertes du côté du cou ch an t, c’est-à-dire du côté
des autres maisons du village.
i
�( 2 )
Derrière ces m u rs, et dans un champ appartenant
h V e so l, naît une source considérable : il la conduit à
t r a v e r s lesdits murs, pour en faire une fontaine qui
jaillit dans des bacs placés entre ses bâtimens.
Il était naturel que les habitans usassent de ces eaux
pour leurs besoins domestiques; Vesol s’y est prêté sans
difficultés.
Au-dessous des bâtimens de Vesol sont des prés; le
prem ier, appelé d e v a n t L ho s ta lui appartient; le se
cond pré est celui de Jarrige; le troisième pré est celui
des Latournerie; le quatrième est celui de la v.e Peyrin.
Com me les eaux sont abondantes, et que Vesol n'a
besoin que de son propre arrosement, l’ usage s’est intro
duit insensiblement de jou ir de ces ea u x, chacun à son
tour; c ’était le meilleur moyen d’éviter les petites ra
pines que l’adresse sait mettre à profit, et les débats où
la loi du plus fort prévaut sur la propriété. L a distribu
tion de ces eaux n’était pas toujours faite d’ une manière
bien équitable, mais comme il y en avait assez, on ne
s’en plaignait pas.
Il y avait une égale tolérance pour le passage qui
originairement n’était dû qu’à un seu l, car les trois prés
et les terres en dépendantes, étaient jadis à un seul in
dividu; Vesol n’avait pas même attaché une grande im
portance à ce que les intimés c o n t i n u a s s e n t d’en user de
m êm e; les trois prés s’exploitant aux mêmes époques, il
n ’y avait d’inconvénient pour personne ; car chacun por
tait sesfumiers,et faisait ses travaux, aux mêmes époques,
soit en automne, s o i t à la f i n de l’hiver, ensuite les prés
�( 3 ) '
étaient fermés pour tout le monde; et lorsque le pre
mier pré avait levé ses foins, il n ’éprouvait aucun dom
mage du passage des chards, pour la récolle de l ’autre.
Mais bientôt les intimés n’ont répondu à ces procédés
de bon voisinage, qu’en tracassant Vesol de toutes les
manières.
Latournerie notamment, a une terre h côté de son
p ré; il y a fait un autre pré de mauvaise qualité, qu’il
s'imagine rendre bon en y travaillant toujours; et quoi
que la terre adjacente joigne un chemin p u b lic , plus
court que celui qui traverse le pré V esol, il s'est obstiné
depuis peu d’années à ne vouloir passer que cbez V esol,
même pour ce nouveau pré ; de manière qu’il n’y avait
plus ni clôtures, ni époques qu’il jugeât h propos de'
respecter.
Il en faisait de même pour les eaux; non content de
les prendre à son tour, il se permettait depuis quelques
années de venir faire des rases profondes dans le pré
V esol, sous prétexte de faciliter le cours de l’e au , de
sorte que les terres et les engrais de Vesol suivaient la
rapidité de l’eau, et rendaient un pré fertile aux dépens
de l’autre.
. Peyrin et Jarrige, de leur côté, voyant cette acti
vité de leur voisin, et ne voulant pas lui en laisser tout
le profit, l’imitaient de leur m ieux, de sorte que le pré
de Vesol n’aurait pas tardé à devenir plutôt le bien d’au
trui que le sien, s’il avait eu une plus longue patience.
*
Jarrige lui avait donné de plus un autre sujet de
mécontentement ; il a fait un jardin dans une te rre ,
s
i
2
�(4 )
limitrophe da pré Vesol, et quoique ce jardin fût sé
paré par un tertre et une haie, Jarrige a trouvé le
m o y e n de faire disparaître la haie, de cultiver la terre
jusqu’au-delà du tertre; et sous prétexte de suivre son
terrain, il a planté une autre haie dans la nouvelle
ligne qu’il a jugé à propos de se tracer.
Vesol était assez p e u s o i g n e u x de ses propriétés, parce
que attiré par un commerce en E spagne, il y passait pres
que tout son tems ; mais lorsqu’il a vu qu’on abusait de
son absence et de sa facilité? pour dégrader son pré de
toutes les manières , il s’est décidé h se pourvoir. En
conséquence, par exploit du 1 6 prairial an 12 , il a
assigné les Latournerie, Jarrige et P e y rin , i.° pour être
condamnés à venir à partage des eaux,, en proportion
de la contenue des prés de chacune des parties, faire
fixe les dimensions de la rigole qui traverse le pré de
Lhostal, et se voir faire défenses de fossoyer le terrain,
s o u s prétexte d ' é l a r g i r ladite rigole j 2.0 pour voir dire
que lesdits Latournerie et autres seront tenus de passer
sur leurs propres fonds, pour le service de leurs prés,
et qu’il leur sera fait défenses de traverser le pré Lhos
tal; 3.° condamner ledit Lajarrige à enlever les buissons
plantés hors la ligne séparative de ses héritages, rendre
le terrain usurpé, et planter des bornes.
Quelque modérée que fût cette demande, elle a été
contestée sur tous les points par les adversaires 5 et le
tribunal d'Aurillac , par jugement du 3 juin 1808, a (
débouté Vesol de toutes ses réclamation , sans autre
examen.
�( 5 } .
L a Cour pensera-t-elle de même? cela est difficile ¿1
croire; car il est d’intérêt public que les propriétés soient
comptées pour quelque chose, et véritablement on peut
dire' que le tribunal d’Aurillac a compté les droits de
Vesol pour rien.
L ’eau "cependant naît dans le champ Voisin de sou
p ré, de-là elle arrive à sa basse-cour, et de-là ¿1 son
pré, sans aucun intermédiaire. O r, n ’est-il pas révol
tant que le propriétaire de l’eau en ait beaucoup moins
que ceux qui la tiennent de lui?
En e f fe t , le pré de Vesol a aujourd’hui sept jour
naux deux tiers (trois hectares sept cent soixante-deux
centiares ) ; le pré de Jarrigé a un journal ( quarante
ares douze centiares); le pré de Latournerie a un jour
nal et demi (soixante ares dix-huit centiares). Cepen
dant les intimés ne veulent accorder Feau à Vesol que
pendant trois jours de la semaine, et les deux autres la
garderaient quatre jours.
L e jugement ne le dit pas positivement ainsi, mais
il s'appuie sur une convention ancienne que rien ne
constate; il suppose un aveu de V esol, qui ne pouvait
parler que des derniers tems où on ne cessait d em
piéter sur ses droits; et après avoir vaguement dit que
la jouissance des eaux, faite un certain nombre de jo u rs
par chacun, faisait présumer un ancien partage : ce
jugement déboute sans fixer les droits de personne (1).
(1)
« A t t e n d u q u ’il esl constant et a v o u é d a n s la c a u s e , q u e les
« e a u x de la d ite fon tain e sont p e r ç u e s , p o u r l’a r r o s e m e n t des prés
�(
6)
C elle décision blesse évidemment l ’équité et les prin
cipes; car si Vesol, plus modéré que la plupart des
plaideurs, s’est borné à demander un partage de l’eau,
quoiqu'elle fût sa propriété (pour éviter les frais énor
m e s, et l’issue toujours incertaine des expertises et des
enquêtes), il ne fallait pas en conclure qu’il se condam
nait lui-m êm e, et le débouter de la plus équitable des
réclamations.
En effet, quand l’eau ne serait pas née chez Vesol,
au moins on ne lui conteste pas que son pré fournil ,
dans une longueur de soixante-cinq toises, la rase qui
la conduit chez.les adversaires. O r, où serait donc la
justice que ce p r é , qui a le triplé d’étendue des autres,
ne reçut l'eau, pour ainsi dire, qu’en transit, et fût le
plus inégalement partagé.
On dit à cela que c’est l’usage des parties:mais d’abord
c’est la plus mauvaises des bases dans celle matière;
car les eaux des arrosemens étant une chose publique,
destinée par la nature à Futilité de lous, elles se règlent
a r e s p e c tif s des p a rtie s , un n o m b r e de j o u r s , d é t e r m in é p o u r
« c h a c u n ; q u e ce r è g l e m e n t est e x é c u t é , sans a u c u n e c o n te sta « t i o n , d e p u is u n tem s i m m é m o r i a l , et n o t a m m e n t d e p u is p lu s
« d e tren te ans ;
« A t t e n d u q u e cette jo u is s a n c e s é p a r é e , et la p e r c e p tio n des
« e a u x , faite p a r toutes les p arties a u x j o u r s et h eures d é te rm i« nés p o u r c h a c u n e d ’e l l e s , a n n o n c e n t un a n c ie n p a r t a g e ;
« A t t e n d u q u e l ’e x is te n c e de ce p a r ta g e se p r é su m e e n c o r e p a r
« la c ir c o n s t a n c e , q u e les d é fe n d e u r s sont dans la n é c e s s it é , p o u r
« r e c e v o i r les e a u x , p o u r l ’arrosernent d e le u r s p r é s , de la c o n
te d u i r e à tra v e rs le p r é d u d e m a n d e u r .
�(
7)
par le nombre et l’étendue des prés voisins, et sont
soumises à des variations continuelles, S'il n5}^ a que
deux prés aujourd'hui, le voisin qui en fera un demain
ne doit pas être privé d’arrosement, et jamais la pos
session n’a été un-titre pour ceux qui avaient arrosé plus
ou moins.
:‘
Dans une cause plaidée, le 24 novembre 1 8 0 8 , en
la 2.e chambre de la Cour , il s'agissait d’un partage
d’eau ordonné entre deux voisins. Le frère de celui qui
avait succombé formait tierce opposition , parce qu’il
avait trouvé un titre ancien, qui réglait les jours et
heures de Farrosement. M. le Procureur-gén éral, en
rappelant les principes de la matière j enseigna que les
litres limitatifs des arrosemens n ’empêchaient pas de
réclamer u n e a u t r e d i s t r i b u t i o n d’eau toutes les fois
qu'elle était nécessaire.
Cet avis était parfaitement conforme à l’art. 645 du
code Napoléon, qui/après avoir tracé des règles géné
rales sur les cours d’e au , termine par inviter les tri
bunaux à concilier l'intérêt de l'agriculture avec le res
pect dû à la propriété.
A in s i, un titre m êm e, opposé à Vesol, ne l ’empê
cherait pas de demander une quantité d’eau propor
tionnée aux besoins de son pré. A plus forte raison ne
Veut-il qu’ une chose ju ste, lorsque c’est lui quia le titre;
lorsqu’encore, comme premier riverain , il aurait le
droit.de garder toute l ’eau, parce qu’elle traverse son
héritage, sauf à la rendre à son cours ordinaire à La
sortie de son pré (Art. 644 )•
*
�( 8)
On lui oppose qu'elle naît dans un com munal, et
qu’il ne l’a pas désavoué; mais le fait parle plus haut
que ces poinfilleries inutiles : la source n5a pas changéde place, et il sera aisé de convaincre qu’elle naît chez
lui. Mais à quoi servirait un aveu ou désaveu, lorsqu’au,
lieu de faire usage de la loi prœses ; lorsqu’au lieii d ’in
voquer le cam sit duruniy etc., Vesol se bornait à de
mander un partage de cette eau.
11 n’y a en faveur des intimés,, ni titre, ni équité,
ni principes; et au contraire, il y a en faveur de Vesol',"
une loi expresse qui dispense d’examiner, si l’eau est à,
lui, ni si elle traverse son[ héritage.
C ’est la loi 2. 5 , au digeste, De seru¿tuí¿bus'y ^\úy en
s’occupant des sources aides voisins, ne s'informe pas'
lequel d’eux a pu avoir la possëssion de plus ou moins
d’heures ou d'années. Elle veut que la division de l’eau
soit faite pro modo juger uni.
'
L e droit de passage contesté par V e s o l, n’était pas
u n e réclamai ion juste. Plusieurs propriétaires font fouler
'
aux pieds de leurs bestiaux 1 herbe de son p ré, tandis
qu’ils peuvent passer sur leurs propres fonds, pour ar
river à un chemin public aussi court et aussi facile.
Un seul
des
adversaires (Lajarrige) est forcé de passer
chez L alo u rn erie, mais seulement sur un espace de six
à dix toises, tandis qu’il traverse soixante cinq toises
du pré de Vesol. O r, comme les prés et terres de tous
les intimés viennent du meme propriétaire, et portent
le môme nom , Lalournerie doit le passage plutôt que
Vesol. Au reste , le pis aller serait pour Vesol la ser
vitude
�(9 )
vitude d’un seul pré qui est le moindre de tous.
Quant à Peyrin, on dit aussi que son pré est enclavé,
sans avoir une issue, par d’autres fonds à lui. Mais il
y a lieu de lui faire la même réponse qu’à Jarrige. D ’ail
leurs, il n’est séparé du chemin que par un autre petit
pré et terre de Vesol;, et celui-ci lui offrira subsidiairement le passage, de ce côté, pour éviter la longue tra
versée de son pré de Lhostal.
On naccusera pas Vesol d<? mettre de l ’humeur à cette
offre; car Latournerie y gagnera l’exemption du passage
de Peyrin , qui traversait son pré dans toute sa longueur
pour arriver à celui de Lhostal.
Quant à Latournerie, qui est le plus incommode de
tous p,q>ur le passage , il n’a aucun m otif plausible pour
vouloir s*y maintenir ; car sa propriété va jusqu’au
ch e m in .
,
Les motifs du jugement à 9A urillac (i) sont bien faibles,
(2)
« A t t e n d u q u e le p ré a p p a r te n a n t à L a j a r r i g e , et c e lu i a p
te p a rte n a n t à R o s e J o n q u i è r e , v e u v e P e y r i n , n ’on t a u c u n e issue,
à soit sur le s p rop riétés desdits L a j a r r i g e et v e u v e P e y r i n , soit
cc s u r le c h e m i n p u b l i c ; q u e p o u r l’ e x p lo ita tio n d e ce s p r é s , i l
« n ’ existe d ’a utre p a ss a g e q u e c e lu i q u ’ ils p r a tiq u e n t d ’a b o r d s u t
« le p r é d e J o s e p h L a t o u r n e r i e , et en su ite s u r c e lu i d e d e v a n t
« L h o s t a l , du d e m a n d e u r ;
« A t t e n d u q u e , de l ’a v e u d u d e m a n d e u r , ils o n t la possession
« i m m é m o r i a le de p a s s a g e , à travers son p r é , p o u r l ’e x p lo i t a « tion du l e u r ;
j
« A t t e n d u ( q u a n d il serait v r a i q u e l ’o n n e p e u t a c q u é r i r , p a r
« la p o s se s s io n , la se r v itu d e du p a s s a g e s u r l’h é r ita g e d ’a u t r u i ,
« l o r s q u ’o n p e u t se s e r v ir p a r son p r o p r e fo n d s ou p a r u n c h e -
3
�quand ils parlent de possession trentenairesur cette ques
tion; car des principes surs? et sur lesquels il n’y avait
jjàs'lieu d’exprimer un doute, font considérer la m a
tière des servitudes comme liée aussi à l ’intérêt de l’asriO
cullurè; d’où il résulte que les servitudes nécessaires
sont les seules que la jurisprudence ait voulu maintenir.
«
«
«
«
Mazuer dit que « si ’celui qui derii&nde chemin et
passage par la plus prochaine terre, le peut avoir
d’ailleurs , il n’y doit être reçu, encore qu’il fût plus
long et fâcheux (Traduction d e ‘F onfanon, titre 39,
n.° 2.)-».
• ) lif ; ’
-' .
Legrand dit la même chose sur l’art. i 3o de la cou<r tunie de T royes, n .° 34; il cite un arrêt du parlement
«* dé'Toulouse, qui ju ge q u e le voisin n’était pas* tenu de
«* donner passage par son’ pré , même en p a y a n t, si le
« voisin qui le demande peut passer ailleurs, quoi« qu’avec de très-grandes difficultés??.
L ’ a r r ê t des C l i a b a n i e r a jugé c o n f o r m é m e n t à ces
p r i n c i p e s ; et D e n i z a r t , V . ° servitude, en cite un autre
du i . cr septembre 1 7 6 1 , qui a jugé de m êm e, en sup
primant la servitude de passage, quoique le chemin
fût difficile, et même dangereux; car il s'agissait de
passer sur de fausses grèves de la Loire : cependant le
^
_______ ■
___ t '
« m i n p u b l i c ) ; q ue J e a n V e s o l , p a ssant su r l’h é r ita g e d e J o s e p h
« L a t o u r n e r i e , q u i n e s’en p la in t p a s , et cette servi!ucle de p a s« sage r é c i p r o q u e éta n t s o u te n u e p a r une possession p lu s q u e
« tr e n te n a ir e , fait p r é s u m e r une a n c ie n n e d e s lin a tio n du p ère de
« f a m i ll e , ou u ne c o n v e n t i o n q u ’ il ne d é p e n d p as de Y e z o l d e
.« d é t r u i r e , en r e n o n ç a n t a u p a s s a g e dont il a use j u s q u ’il présent».
�( II j
demandeur avait une possession de trente ans; et c’était
dans la coutume d’A n jo u , qui porte que le droit des ser
vitudes rurales s’acquiert par trente ans de possession.
Cette jurisprudence, qui n’a pas changé encore au
jourd’hui, prouve que les tribunaux n’ont pas atlendu
les conseils du code civil pour concilier l ’intérêt de l’agricullure au respect dû à la propriété.
Enfin, et si la Cour dans sa sagesse ne croyait pas pou
voir refuser le passage à tous les intimés, Vesol deman
dera au moins que ce passage soit prohibé pendant la
clôture des prés, c'est-à-dire; depuis le 2 5 mars jusqu’à
la levée dés foins, et ensuite jusqu’à la levée des re
gains.
C ’est ainsi que la Cour l’a jugé dans la cause de Veyssière contre V eyssière, le i . er juin dernier, quoiqu’un
titre exprès donnât le passage àdrayeet charrette, à tra
vers un pré. Il n’a pas paru à la Cour que ce titre pût
autoriser à passer jusqu’après la levée des foins et des
regains.
L e dernier ch e f de la contestation ne mérite aucun
développement, et il suffit de remarquer à cet égard que
le tribunal d’ Aurillac n’a pas attaché une grande impor
tance à rendre justice ; car il a débouté d’une demande
non éclaircie, sans s’informer si elle était mal fondée (i);
( i ) « A t te n d u q u e l’i n n o v a t i o n , q u i a été r e p r o c h é e a u x d i t s L a » j a r r i g e et c o n s o r ts , est d é s a v o u é e , et ne p r é se n te a u c u n i n té « r ê t , et q u e les h érita g es sont b o r n é s p a r un tertre assez é l e v é ;
« q u e dès-lors toute o p é r a tio n , te n d a n t à u n n o u v e a u b o r n a g e
•
•
« serait in u tile et f r u s t r a l o ir e ;
O
*
�( 12 )
il s’agissait d’ une empiétation, et par conséquent si elle
était déniée par Lajarrige il n’y avait de voie légale et
juste que d’ordonner une vérification.
M .e D E L A P C H I E R , ancien Avocat.
M .e C O S T È S , Licencié-Avoué.
:
A RIOM,
D E L ’I M P R I M E R I E D U P A L A I S , C H E Z J .- C . S A L L E S .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Vesol, Jean. 1808?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Costes
Subject
The topic of the resource
conflit de voisinage
servitude de passage
jouissance des eaux
bornage
poids et mesures
Description
An account of the resource
Précis pour Jean Vesol, appelant d'un jugement d'Aurillac ; contre Joseph Latournerie, Pierre Jarrige et sa femme, et Rose Jonquière, veuve de Pierre Peyrin, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1808
1804-Circa 1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0406
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tournemire (15238)
La Malétie (village de)
Jarrige (pré de)
Latourneries (pré des)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53790/BCU_Factums_M0406.jpg
bornage
Conflit de voisinage
Jouissance des eaux
poids et mesures
servitude de passage
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53789/BCU_Factums_M0405.pdf
0918f67b4aa2f6f0d33f538ebcdaefc3
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Text
MEMOIRE
TRIBUNAL
d ' A
p p e l
Séant à Riom.
P O U R
P ie r r e
T O Ù Z E T ,
T O U Z E T , R é g is
P ie r r e
B U IS S O N -
et L o u is C E L E Y R O N ,
C O N T R E
J e a n - J o s e p h C H O U S S Y - D U P I N , homme
de loi , habitant ci - devant à St. - GermainL h erm, maintenant, au P u y , appelant.
Q u a n d on est convenu qu’une chose étoit vendue
a u p r i x qui Seroit fixé,par un tiers, si ce tiers l'a fix é,
« la loi v eu t, quel qu’il soit, que l’acquéreur paye ce prix
« tel qu’il a été déterminé, et que la vente soit consommée...
Si le tiers n’a voulu, ou n’a pu faire le p rix, alors
l a loi ne veut pas qu’on conjecture si les contractans
o
tentendu s’en référer à une personne certaine, ou
n
A
�.
.
( 2
}
.
.
.
« à l’arbitrage indéfini ; elle croit impossible, et prohibe
« d’ajouter à la convention des contractans ». Loi dernière
au code de contrahenda emptione.
L e citoyen Choussy a vendu une propriété à dire d’ex
perts ; il en a choisi deux et dirigé le choix d’un troi
sième : ces experts ont fait leurs opérations en sa présence;
il les a sommés de déposer leurs rapports; ils lui ont obéi :
maintenant il prétend qu’il y a lésion dans le prix; il
demande une nouvelle expertise', ou une résiliation ,• voilà
la cause.
Jugée par le droit , elle eut été trop simple. L e citoyen.
Choussy a voulu l’enchevêtrer de faits et de circonstances.
Noircissant d’un trait de plume acquéreurs , experts et
juges ; Vojtafefc te 'pcvhifté ******* t\v* i
, il
s’est persuadé que ses calomnies aborderoient plus ai
sément à un second tribunal j éloigné de la localité et
des personnes.
Mais c’est déjà p ou r l u i u n assez gran d succès d’avoir
obtenu la plum e d’un jurlsconsulte' célèbre, pour accré
diter ses prétentions captieuses,; et aviver par le prestige de
l’éloquence ses diatribes mensongères. Il pouvoit tromper
son conseil sans obstacle : ici il trouvera l’obstacle de la
vérité, celui du droit sainement appliqué à la cause ; l'un
et l’autre se réuniront pour le contraindre â exécuter une
convention lib re , consommée, et que la justice ne peut
sans violence modifier ni dissoudre.
‘
F A I T S.
■
'Féolgaux, qui est l’objet de la contestation, est une
propriété Voisine dela'G haise-D ieu, composée ¿’un petit
�•
.
(3 )
■. .
.
'domaine de montagne, semant env.iron 14 sçtiprs de
7séiglej et d’un bois de sapins d’environ 100 septerées,
partie en rapport, partie en landes. Situés au milieu de
hautes montagnes, dévastés par les moindres ouragans,
éloignés de toutes communications commerciales, ces bois
ne deviendront une propriété productive , que si le gou
vernement se charge à grands frais d’ouvrir des routes
aboutissantes; sans cela les ventes seront toujours rares
et difficultueuses. L a cause même en fournit un exemple.
L e citoyen Ghoussy avoit à vendre des chablis gissans
'depuis l’an cin q , et il dit que plus de 1 5o pieds de ces
arbres sont encore dans le bois.
L e cit. Dulac étoit précédent propriétaire de Féolgoux
' qu’il habitok, et dont il portoit le nom ; il -le „vendit au
citoyen Choussy, moyennant 49,000 livres, par acte du
19 novembre 1785. L e c i t o y e n Ghoussy y a joint un étang
national , qui lui a coûté 4,063 livres. F é o lg o u x étoit im
posé en l’an sept, à 593 ^ i 5 ^ de contribution foncière.
L e citoyen Choussy s’est pourvu en sur-taxe; e t, par arrête
du i 5 ventôse an h u it, après une expertise, il a obtenu
que la contribution pour l’avenir, ne seroit portée qu’à
-336"* 8 J.
* Les bois de F éolgou x, après avoir souffert quelques
dégradations pendant les premières années de la révo
lu tio n , furent horriblement dévastés par un ouragan en
la n cinq. Le citoyen Ghoussy nous apprend lui-même (1)
qu’il fut légalement vérifié qu’il y avoit 5,723 pieds d’arbres
déracinés ou rompus.
C1) Page 38 de son mémoire.
�.
(
4
)
C’est depuis cet accident que le citoyen Choussy, dé
goûté de sa propriété, a cherché des acquéreurs : une lu
crative expérience ne lui laissoit pas même supposer qu’il
dût vendre Féolgoux à sa valeur réelle. Préparant des
calculs, mais certain qu’on ne les croiroit pas, il voulut
les fortifier par le travail d’un expert à sa main. Le cit.
Dupré fit donc par ses ordres le toisé et le plan deFéolgoux,
en y ajoutant une estimation portant sur tous les objets de
détail, et exagérée en toutes choses.
Alors le citoyen Choussy, ayant jeté les yeux sur les
citoyens Touzet et Buisson, fit plusieurs voyages à Ambert,
pour louanger devant eux, comme par hasard, tous les
avantages qui résulteroient de cette acquisition ; n’omit
rien pour leur persuader que cette propriété alloit les
enrichir excessivement, et finit par leur proposer ses
conditions. Le prix fut fixé par le citoyen C h o u ssy, à
i i 5,ooo livres. Les citoyens Touzet et Buisson n'y accédoient que sous beaucoup de clauses , sur lesquelles on n’a
jamais été d’accord. L e citoyen Choussy envoya cependant
un projet de vente sous seing p riv é , à sa manière; le
citoyen *1 ouzet le copia, et c est alors seulement que les
parties entrèrent en pourparler sérieux, que les acqué
reurs virent par eux - mêmes toute la dégradation de la
fo rêt, exigèrent que tous les arbres abattus par l’ouragan
fissent partie de la vente, et cela fut réellement convenu.
Mais bientôt ceux qui s’intéressoient à eux les empê
chèrent de faire une sottise. Ils déclarèrent au citoyen
Choussy que sa p rop riété étoit beaucoup trop chère, et
qu’ils ne vouloient plus acquérir.
Cette explication est donmfe parce que le cit. Choussy,
�dans son mém oire, a voulu tirer de grandes inductions
de cette première fixation de prix à n 5,ooo livres } mais
alors même il y avoit en sus un mobilier que le citoyen
Choussy disoit valoir 6,000 livres} alors il y avoit un pre
considérable qu’il a vendu depuis} alors; tous les arbres
déracinés par l’ouragan, faisoient partie de la vente par
la dernière convention des parties ( i) , et le cit. Choussy en
portoit la valeur dans ses lettres, à 2.6,000 livres \ alors les
propriétés foncières de ces montagnes, malgré la prétendue
influence du 18 fructidor; alors les bois, et c’est un fait
.notoire, avoient une valeur vénale infiniment supérieure
à celle du temps présent.
'
Quoi qu’il en soit, la négociation de vente de Féolgoux
fut rom pue, au grand regret du citoyen Choussy q u i,
pendant trois ans de recherches, n’a pas trouvé d’autres
acquéreurs , et qui , pai' une suite de correspondance
entretenue de loin en loin , sous les plus légers prétextes ,
n’a cessé de remontrer en cent manières au citoyen
T o u zet, qu’en refusant d’acheter F éolgou x, il perdoit
une fortune.
E nfin, dans l’été de l’année dernière, le cit. Choussy
venu à A m b ert, fit au citoyen Touzet des ouvertures
plus pressantes -, et celui - ci lui avoua, en tranchant le
m o t, qu’il se défioit de toute affaire avec lui ; qu’il craignoit dêtre dupe , et qu’il n’achèteroit qu’après avoir
bien connu ce qu il achetoit : alors le citoyen Choussy,
entre-voyant une autre voie d’en venir à ses fins, proposa
de vendre, à dire d’experts, et cela fut ainsi accordé.
( 1 ) Gela est prouvé par plusieurs lettres du cit. Choussy.
�•
.
-
( 6 )
.
■
.
O n pense bien que le citoyen Choussy voulut désigner
son expert D upréqui déjà avoit estimé Féolgoux : Touzet
l’ignoroit. L e citoyen Choussy demanda même qu’on,
adjoignit à' Düpré un autre expert des lieux même 5 il
dit beaucoup de bien du citoyen Langlade ( 1 ) , expert
et juge de paix de la Chaise-Dieu, supposant déjà qu’il
seroit entièrement dans la dépendance du citoyen D upré,
plus âgé que lui. Les choses en effet furent arrêtées ainsi.
11 fut convenu qu’il seroit déduit 10,000 *** sur le prix
de l’estimation. L e citoyen Touzet associa à son marclié
les citoyens Buisson et Celeyron frères. Le citoyen Choussy
fit lui-même le projet de vente; il fut soumis à la correc
tion d’un conseil commun ; et dès le même jour le cit.
Choussy publioit q u e, s’il avoit rabattu 10,000 livres,
ses acquéreurs payeroient ce rabais plus cher qu’ils ne
croyoient.
.
L ’acte de vente fut reçue par Pon chon , notaire, le 12
messidor an 8 ; il p orte que « le citoyen Choussy vend
« aux citoyens Touzet, Buisson et Celeyron frères , le bien
« de FéolgouXj domaines et bois en dépendans, sis en lk
« commune de M alvière, canton de la Chaise-D ieu, et
« les subroge à l’adjudication de deux étangs nationaux,
cc moyennant, savoir, pour les étangs, le prix de l’adju« dication, suivant l’échelle; et pour le domaine et bois,
te m oyennant le p rix et somme auxquels le tout sera estimé
------------------------- -
■
- -
■
-¡T—
1
( 1) Le cit. Choussy a avoué devant les premiers juges, que
c’est lui qui a désigné Langlade. Cela est prouvé encore par une
lettre antérieure au procès, dont il argumente, et où il est dit que
c’est lui qui a indiqué cet expert.
*
�(
7
)
f
*
« en numéraire par e x p e rts .. . . nom m es, savoir.........
«les citoyens D upré , expert - géom ètre, habitant de la
« Chaise-Dieu, et le citoyen Langlade, juge de paix de
« ladite commune ; et au cas que lesdits experts soient
« divisés dans ladite estimation, en ce cas les acquéreurs
« «t vendeurs veulent qu’ à leu r in su , lesd. experts puis
s e n t prendre un tiers pour les départager; lesquels
* experts seront tenus de déposer leur rapport d estimation
« ès mains de Ponchon, notaire, le plutôt possible, avec
« convention que sur le prix total de leur estimation, led.
« Choussy sera tenu de diminuer la somme de i o 3ooo
« et le surplus après lad. déduction composera le prix
• de vente dudit domaine........... lequel p r ix , ainsi que ^
•»celui de lad. subrogation, seront payés aud. Choussy,
« savoir, un quart dans deux ans, du jour du dépôt dud.
« rapport d’experts ; un autre quart dans t r o is ans, du
« m ê m e j o u r , à la charge de l'intérêt, exempt de retenue,
« à compter du dépôt dudit rapport.........l’autre moitié
« du prix formera un capital que le citoyen Choussy aliène
« en rente viagère à 10 pour 100 aussi sans retenue ; le
« tout comme condition expresse du rabais de 10,000 liv. :
« le tout payable de six en six mois , du jour du dépôt
« dudit rapport.
«• L e citoyen Choussy se réserve les arbres abattus ou
« rompus par les ouragans, desquels arbres il déclare avoir
« fait vente dans le temps, et les acquéreurs pourront les
« retirer dans les temps prescrits par lesdites ventes.
»‘I l se réserve aussi le m obilier, même les glaces;
«dépendant e s bestiaux et outils d’agriculture feront partie
�*
C8 ) :
cc de la ven te, et seront sujets à l’estimation des experts.'
, «II se réserve-la faculté de rachat, pendant trois ans,
« à com pter de la remise ou dépôt ;du rapport d’experts,
« dans le cas où il ne seroit, pas payé en numérairel ’ '
et Sous ces conditions et réserves, le citoyen Choussy'
« se départ des-à-présent et pour toujours, de la pro
p r i é t é possession et jouissance des objets ci-dessus
«vendus, avec toutes clauses translatives de propriété,
« requises et nécessaires, voulant et consentant n’en pou^*
« voir jouir à l’avenir qu’au nom et titre de précaire.
* Il est dit enfin que les acquéreurs payeront tous les
cc frais de l’estimation, fourniront au citoyen Choussy une
cc expédition de la vente et, du rapport qui contiendra
« ladite estimation ».
r
. ; - s.
..r‘>
• • •' •
Les citoyens Dupre et !Langlade s’occupèrent de' suite
de l’objet de leur nomination; ils se.transportèrent sur,
les lie u x , les parcoururent, et le citoyen Dupré produisit,
un plan par lui fait à l’avance pour -le citoyen Choussy : >
cela est constaté par les rapports.
.
5
Ce plan ainsi tombé des nues, le verbiage impératif,,
du citoyen Choussy, l’air de. déférence du cit. D u p ré ,,
donnèrent de la méfiance aux acquéreurs ; mais ennemis^
des chicanes, et liés par leurs propres conventions, ils
laissèrent opérer les experts, avec le plan du citoyen
D upré, et eurent même la patience d’entendre toutes les;>
exagérations du citoyen[Choussy, pour décupler, s’il Tavoit»
pu,' la .valeur(Cde ses immeubles.
«
¿ , 11 , . i, . -. . .• » » **•». ,t „•*
. Cependant, ne se croyant pas encore assez fort de toutes
cçs préparations, le citoyen Choussy voulut faire appeler erj,
auxiliaire
�( 9 K
. .
auxiliaire un marchand de bois de sa plus intime con
naissance ( i ) ; il les mena tous dans les parties de bois qu il
savoit les plus en valeur, se confondit eri éloges de chaque
arbre, n’oublia pas de mesurer les plus gros, voulut qu’on
appréciât le surplus par comparaison, ou qu’on comptât
tous les1arbres >et fit cè qu’il put pour intimider le citoyen
Langlade qui avoit voulu hasarder quelques réflexions
lui disant à chaque mot qu’il n’y entendoit rien. •
■
Le citoyen Langlade ne dit plus rien ; il tenoit la plumey
il écrivit tous les prix qu’on voulut, mais il mit a cote
le rabais qui lui paroissoit juste,'pour en conférer avec
son collègue. Ce fait nous est appris par le cit. Choussy
lui-même. ( 2)
Pendant toutes ces opérations, les experts furent hé
bergés chez le citoyen Choussy , qui ne manqua qpas ,
comme on le pense bien, d’exagérer encore la valeur de
tous ses arbres-, jusqu’à ce qu’ayant pris jour avec eüx
pour .déposer leurs rapports , il crut que toute sa
persuasion auroit eu son effet, et que le citoyen Langlade
seroit assez complaisant pour porter,com m e le citoyen
D u pré, à 120,000 livres en l’an h u it, un bien q u i, avant
la baisse des immeubles, n’avoit été estimé que 1 1 5,ooo liv .
ayant un mobilier considérable et 5,723 pieds d’arbres
de plus.
.•
,
( 1 ) Le citoyen Mannet, qui fut appelé sur la réquisition du
citoyen Choussy, non pas pour tiers expert comme le citoyen
Choussy l’avoit absurdement prétendu en première instance -,
*nais comme indicateur, ainsi que le disent les premiers rapports.
Êa> Ei* son exploit de demande du 8 fructidor an 8, pag. 2.
B
�( IO )
L ’em pressem ent du citoyen Ghoussy de faire aller ses
experts à Ambert pour faire courir, comme il le répète
si souvent, un intérêt de 30 livres par jo u r, ne permit
pas sans doute au citoyen Langlade de faire à son collègue
toutes les observations qui naissoient de la différence des
prix qu’il avoit mis pendant l’opération à chaque article.
Leurs évaluations, en grand et par aperçu , avoient bien
paru faites en commun sur les lieux, mais sauf les rabais
mis par le citoyen Langlade ; de sorte que le citoyen
D upré avoit fait à l’avance un rapport commun aux deux
experts, croyant n'avoir pas plus de difficultés à le faire
signer au citoyen Langlade, qu’il n’en avoit eu à faire
adopter ses plans.
Mais le citoyen Langlade trompa l’espoir des 30 liv.
par jour :• il réfléchit, avec raison , qu’on avoit voulu
estimer une foret en détail, comme on estime quelques
arbres qu’on va livrer à des acquéreurs, tandis que les
acquéreurs de dix mille arbres ne se trouvent qu’à la
longue , ou en vendant au quart de la valeur.
Il réfléchit, par comparaison, que tous les arbres abattus
par l’ouragan de l’an 5 , n’étoient pas encore vendus à
la fin de l’an 8 , et que cette lenteur forcée ne supposoit pas une facilité de vendre pour des sommes appro
chant de 30 livres par jour.
Ces motifs , et beaucoup d’autres très-judicieux, que
le citoyen Ghoussy a trouvé plus aisé de critiquer par des
sarcasmes que de com battre par de bonnes raisons, en
gagèrent le citoyen Langlade à faire un rapport séparé,
dans lequ el, disant que les premiers calculs faits sur les
lieux n'étant qu’hypothétiques et par simple aperçu, il
�èn revient à une évaluation particulière de tous les objets
soumis à son estimation ,• et appliquant alors à chaque
article tous les rabais que le citoyen Choussy déclare lui
avoir vu écrire lors de la visite des lieux , il est résulté
de son estimation , que les''objets vendus sont en valeur
de 73,001 f. 70 cent.; cë'qu i, en faisant la déduction de
10,000 livres, eût donné un prix de vente de 63,001
francs 70 cent.
L e citoyen D u p r é , de son c ô t é , fait le m êm e jo u r un
ra p p o rt, peut-être celui préparé à l’avance , dans le q u e l,
sans réflexions sur son travail i ne donnant aucunes bases,
ne calculant aucuns cas fo rtu its, qu oiqu ’ il eut v u dans
le bois m êm e les vestiges encore récens d’un ouragan
terrible , omettant m êm e , com m e il le reconnoît en
suite ( 1 ) , de déduire aucunes charges d’entretien ; il estime
F éo lgo u x à là somm e exliorbitante de 130 ,132 francs
centimes.
■
' Lé citoyen D u p ré, au reste, quoique son rapport soit
au pluriel, suivant l’habitude, entendoit si peu avoir voulu
exprimer que le citoyen Langlade étoit 'd’abord de son
• avis, que les expérts ont sur leur discordance un colloque
qui; précisément est dans le rapport de Langlade.
Là celui-ci donne les causes de sonévaluation inférieure,
et Dupré intervient à la suite;;dé ce rapport, pour dé
clarer;qu’il persiste dàns:iison opération.
.
~‘ Cette discordance, raisonhéè'entre les experts , est donc
entièrement indépendante des causes honteuses auxquelles
le citoyen Choussy a trouvé'bon de les attribuer.
‘M l
(0 t)ans lé troisième rapport. '
1
B 2
�( 12 )
La parenté du citoyen Langlade , par alliance avec la
mère des citoyens Celeyron , morte il y a douze ans,
le citoyen Ghoussy la connoissoit avant l’estimation. Il l’a
reconnu au procès.
Les repas donnés aux experts l’étoient plutôt pour le
citoyen Choussy, à qui on devoit une représaille ; les
deux.experts ne se sont pas quittés, le citoyen Choussy
ne les a pas quittés ; et d’ailleurs les négocians de cette
ville de Cadis et de Lacets étoient assez simples pour
ignor.er jusqu’à présent qu’une probité fût vénale, et que
des festins en fussent le prix.
. ,
:
Quoi qu’il eu soit, les deux rapports étant faits sépa
rément, il fut nécessaire de nommer un tiers-expert, et
il devoit l’être ¿1 F insu des parties ; car c’est ainsi qu’elles
l’ayoient youlu.
.
..
.
Mais le citoyen Choussy ne crut sans doute avoir fait
des conventions que pour en régler le mode. Ne pou
vant désigner un expert à sa fantaisie, il pensa qu’il par
viendront au m ôm e b u t, en en récusant plusieurs.
,
Il eut.m êm e l’insidieuse précaution, après avoir promis
de dîner avec toutes les-parties le dernier jour, après s’être
fait attendre très-long-temps, de signifier sa récusation
pendant ce dîner (i).
Il venoit d’apprendre que les experts avoient nqmmé
le citoyen Couchard, très-étranger à toutes les parties;
quoique cette nomination.fut cgnsée.faite a l insu des par~
.
•
.
,----------------------------------------1
- ------------------ —
r—
-------- --------------
^
(i) Le citoyen Choussy ne cite pas ce fait dans son mémoire ;
mais les intimés , qui ne craignent dans leur conduite ni les
écluircissemcns, ni l’opinion, n’ont interet de riencacber.
�( x3 )
_
v .
ties *, les experts venoient même de lai écrire, pour 1 invi
ter à accepter sa commission de tiers-expert, le, citoyen.
,Choussy se crut permis de récuser n o n -seulement cet
.expert, qui eut le désagrém ent de faire ^n voyage inu^
.tile , mais encore les citoyens F aurot,'G ctrnier , Jourde
et P ic h a t, comme ayant déjà estimé Féolgoux ; ce qui
.prouve qu’aucun d’eux ne l’avoit estimé comme le cit.
D u p ré , ou comme il convenoit au citoyen Choussy ; ce qui
prouve aussi que ce n’est pas le citoyen Couchard qui a
refusé d’accepter, comme le citoyen Choussy a cru à
propos de le dire (i).
,
Il est essentiel de remarquer que , par cette récusa
tio n , qui est du 10 therm idor, le citoyen Choussy fait
sommation aux citoyens D upré £t Langlade.de nommer
un tiers-expert, et de déposer , chacun séparément,
leurs rapports, p o u r en être d élivré des expéditions a
lu i et au tiers-expert.
L e droit d’élection d'un tiers-expert, d’abord n’excluant
personne, puis infiniment circonscrit par les cinq récu
sations du citoyen Choussy, eut enfin son eifet. Les experts
cherchant dans toute la contrée quelqu’un qui put ne pas
lui déplaire, nommèrent le citoyen T a rd it, ancien ami
du citoyen Choussy (2), et le citoyen T ard if fut assez heu
reux pour être agréé.
r
'■
>
L e citoyen Choussy fut même si satisfait de cette nomi
nation , qu’il chercha à prévenir cet expert, à lui faire des
' (1) Page i 5 du Mémoire, ligne dernière.
(a ) Cette qualité ne sera pas niée par le citoyen Choussy,,
�C X4 )
*
représen tation s, à lui écrire plusieurs lettres, comme il
le dit lui-même dans son exploit de demande.
L e tiers-expert prit jour avec ses collègues, pour se
transporter sur les lieux , débarqua à Fé'olgoux où le
'citoyen Chôu'ssy l’attendoit, y fut hébergé, et. sans doute
travaillé comme ses prédécesseurs, fut pressé de faire sori
‘ opération par le citoyen Choussy, qui vouloit lui servir
d’indicateur, sans que les acquéreurs eussent le temps de
s y rendre, termina enfin sa tierce-expertise, de concert
avec les citoyens D upré et Langlade, et se rendit avec
eux à la Chaise-Dieu, pour se concerter avec eux sur la
rédaction et le dépôt du rapport.
A peine ces trois experts furent à la Chaise-Dieu , qu’il
leur fut fait un acte instrumentaire par le citoyen Choussy.
Cette pièce est très-essentielle dans la contestation. Il est
indispensable d’en rapporter le précis.
L e citoyen Choussy signifie à T ard if :
'
« Attendu qu’il a terminé son opération de tiers-expert,
« de vouloir bien, dans le jour, ou au plus tard dans celui
« de dem ain, déposer son rapport estimatif entre les mains
« de Ponchon, notaire à Ambert ; de profiter pour cela
« de la présence des premiers experts, qui ont été divisés
(<après avoir été d’accord ; de prendre en très - grande
« considération, que s’il attend la commodité de Langlade,
a cjui1 demande un délai de dix jours, pour'faire un
««'voyage, lui Choussy q u i, depuis la ven te, ne jouit
«■
.plus, qu’au contraire les acquéreurs jouissent ( i ) , il sera
.
( i ) Il a fallu deux jugemens depuis cet exploit, pour les
mell re en possession.
.
.
�.y
. , A
^ l5 ^
.
«privé de ses intérêts, qui ne courent que du jour du
« dépôt du rap port....... C om m e c’est son rapprot de lui
« T a r d i f , qui^fixe définitivem ent le p r ix de la v en te,
« et que les deux premiers rapports des premiers experts
« sont insignifïans pour fixer le jour du cours des intérêts,
« lui Tardif n’est pas obligé d’attendre pour ledit d ép ô t,
« que les rapports des cit. Dupré et Langlade l’aient pré« cédé • toute sa commission se réduisant, après ses opéra« tions terminées, de faire clorre et déposer son rapport. »
De là l’huissier se transporte chez les citoyens Langlade
et Dupré.
« Il leur est déclaré que dans le cas où d’après la somma« tion du io thermidor, ils n’auroient pas déposé chacun
»■leur rapport estimatif du bien de Féolgoux,etoù, faute de
«lavo ir fait, il seroit apporté du retard dans la clôture
« du rapport du tiers-expert, et dépôt d’icelui.... il proteste
« contr'eux , etc. »
« A cela Dupré répond qu’il est prêt à partir, qu’il offre
« de signer le rapport du tiers et d’assister à la clôture. »
« Langlade dit qu’il a un voyage a faire à Brioude, qu’il
« demande jusqu’au 28. »
'
« Choussy lui réplique qu’il a le temps le même jour
« d’aller à A m b ert, que s’il ne l’a pas, il peut donner une
« procuration dont on. payera les frais, faire déposer son
« rapport par Dupré ou Tardif, et que rien ne l’empêche
«de signer ici le rapport de T a rd if, dont le dépôt seul
«en attendant finira l’époque du cours des intérêts. »
Enfin , l’impatience du citoyen Choussy eut son terme :
les trois rapports furent déposés le 29 thermidor.
Celui du citoyen Tardif n’a pas répondu aux vues du
�C 16 )
cîtoyeri Choussy. On pense bien que depuis cet instant,v
T ard if prévenu, Tardif en correspondance, T ard if hé
b e r g é , prôné et choyé, n’a plus été qu’un rustre incapable,
gagné aussi par des festins, suspect, et ne pouvant faire
foi en justice.......
* T.<e rapport de Tardif est disserté et signé'par les trois'
experts:' “ ^
!
' Tardif annonce d’abord qu’il s’est rendu à JFéolgoux,
sur l’invitation des citoyens Langlade et'D u p ré; que là
il s’est réuni à eux.
Ensuite il leur demande des explications sur plusieurs
points des précédens rapports. D upré, entr'autres choses,
avoue avoir omis de déduire les frais de garde.
Après ce colloque il est dit que Choussy requiert de
commencer l’opération , offrant d’y être présent, pour
faire toutes les indications nécessaires, répétant toujours
qu’un retard lui est préjudiciable, l’intérêt devant courir
du jour-dü dépôt du rapport
Il est dit que T a r d if, D u p r é , Langlad e et Choussy vont
sur les lieux. On procède à la vérification, et il est ajouté :,
« Après avoir pris les renseignemens convenables, pris
« enconsidération’les situations et localités, la stagnation
é<. du commerce des b o is, le peu de valeur 'du bois dé
« chauffage dans les environs de la Chaise-Dieu et de
« Féolgoux, et la difficulté de Texploitation des bois de
« fayard et boulaux, nous estimons ...total, 85 ooi fr. yo ci
« de quoi ôtant ioooo fr. reste à la somme de yôooi francs
« 70 c. laquelle somme form era le prix principal de la
« vente. »
1
‘
Ce rapport est- terminé ainsi : « Tout qiîoi est notre
rapport,
�.
( !7 ) '
.
«rapport, que'nous ayons clos à S ain t-A m ant, en îa
« demeure du citoyen Tardif.. Et- avons signé avec les’
a citoyens D upré et Langlade. » .
'
-Ensuite le citoyen D upré apposant sa signature , a
ajouté, pour ne pas se compromettre, les mots conmia
-présent.
. . ' ••\'r 5r.
‘
‘
Dès le même jour, le citoyen Choussy fit citer les acqué
reurs au bureau de paix ; e to u b lia n t qu’il avoit menti
en disant qu’ils jouissoient, oubliant que, par sa vente,
ils avoient droit de jo u ir, il leur fit, de son chef, défenses
de se mettre en possession.
“
1
Le 8 fructidor il les assigna devant le tribunal civil
d’Ambert ; et, après un débordement de mots , de gros
sièretés et de contradictions, noyés dans huit pages de
minute , il conclut : i°. à ce que , sans s’arrêter au rap
port sépare dé L a n g l a d e , a t t e n d u q u e M a n r i e t fut appelc
com m e indicateur et tiers-expert, et que les experts n’ont
pu en nommer un second; sans s’arrêter de même au
rapport de T a r d if, comme sans droit ni pouvoir , le rap
port de Diipré soit hom ologué, pour être exécuté suivant
sa forme et teneur , et le prix de vente fixé à 120,123 1. ;
2°. subsidiairèment à ce que , sans s’arrêter aux rapports
de Langlade et T ard if, et même à celui de M annet, il
soit ordonné un amendement de rapport, et procédé à
"une nouvelle estimation des objets vendus, par de nou
veaux experts ¡probes,{intègres et éclairés., dont les parties
conviendront, sinon pris et .nommes d office par le tri-;
bunal, même un' tiers, non par lesdits experts, mais par
le tribunal ; duquel amendement il offre les avances ?,sauf
son recours.
: .'
*
�.
( 18 )
.
.
.
Cette cause fut pïaidée très-contradictoirement au tri
bunal d’A m b ert, et on imagineroit difficilement les nom
breuses et minutieuses recherches du citoyen Choussy,
pour se faire des moyens de tout, et suppléer à la qua
lité par le nombre.
'
. .- .
Ayant fouillé les registres de l’état civil, pour découvrir
des parentés, soit aux experts , soit à ses juges, afin d’en
user au besoin, il avoit découvert que de femmes en
femmes la trisaïeule du citoyen Buisson avoit été parente
d’une bisaïeule de la femme du citoyen T a r d if, ou du
moins que des ressemblances de noms très-communs dans,
la contrée faisoiënt présumer cette antique alliance. Il
attendit le jour de l’audience pour augmenter , par de la
surprise, l’effet de cette découverte ; et elle fut réellement
une grande surprise pour le citoyen Buisson et sa fam ille,
qui ne coimoissoient pas cette parenté, même par tra
dition.
Cependant, se confiant peu dans ce moyen , le citoyen
Choussy en chercha d’autres dans les expressions du rap
port de Dupré , pour le dire d’accord avec Langlade,
dans l’indication de Mannet, dans la clôture des premiers
rapports un jour de décade j dans la loi sur les tiers-arbitres,
dans les contributions calculées à sa m anière, jusque
dans la probabilité qu il ne devoit pas vivre long-temps.
Pour faire croire qu’il n’avoit pas d’intérêt à tenir à
ses conditions, il démandoit-enfin la nullité de la ven te,'
quoiqu’il rj’y eût pas conclu.
-' •
Malgré tant d’efforts pour parvenir à ses 30 liv. par
jou r, le tribunal d’Ambert rendit, le 8 brumaire an 9 ,
le jugement dont la teneur suit :
.
••
�( x9 ^
.
.
.
.
.
'« Attendu qu’il ne s’agit point d’expertise judiciaire j
» que les parties-se sont fait la loi à elles *■inerties par
» un acte authentique, et que leurs consentions ont été
.............
*> exécutées} -, . ' . ’i .->i i ■ -, \ ..
si A ttendu ’q ü e les récusations du citoyen Ghoussy contre
» les ekperte n’ëtoiént proposables-qu’avant:le,dépôt de
h
leurs rapports , et qu’au côrittai're il a. approuvé leurs
â opérations par sa présence, et leurs rapports par ses
» réquisitions écrites de les déposer chez le notaire qui
» a reçu la vehte ;
'
• >> Attendu que cette Vente réunit le consentement, la
chose et le p r ix ; que ce prix^pst fixé par le rapport
? du citoyen T a rd if , ainsi que ,1e citoyen Ghoussy Ta
»
écrit hii-^mê me par la sommation du 19 therm idor; qu’il
» ne peut aujourd’hui revenir contre! cet écrit et contre
» sa Convention, clairem ent é n o n c é e , audit acte de vente ;
L e trib u n a l , par jugem ent^n prem ier ressort, ayant
» égard au rapport .du citoyen T a rd if,, tiers-expert, et
» icelui homologuant ,d éb o u te le citoyen Ghoussy de sa
». :derüande ^ ordonne que la vente du 4 messidor an 8
» sera exécutée suivant sa fo rp ie etr,teneur, moyennant
» le prix fixé par ledit rapport »,à 763001 francs 70 cen t.,
» d’après la déduction de, ,10^009 livres de remise accor
* dée par ledit contrat de y ente ; fait main - levée aux
» défendeurs; de la d é f e n s e de jouir ’ à eux faite par le
» citoyen Ghoussy , en sa citation du 8 fructidor an 8 ;
»' leur permet deijse mettre enjjjossessipn d.es objets ven
» d u s , avec défenses au citoyen Ghoussy de les troubler,
# aux peines de droit ; condamne le citoyen Ghoussy aux
» dépens ; et attendu que les défendeurs sont fondés en.
Ca" 1
�C 2° )
» titre , ordonne que lè présent jugement sera exécuté,
» nonobstant l’appel et sans y préjudicier ».
'
L e citoyen Choussy s’est pourvu contre ce jugement,
et sa première démarche a été de vouloir encore empêcher
les acquéreurs de se mettre en possession. L ’incident qu’il
a élevé pour obtenir des défenses d’exécution du pre
mier jugem ent, la répétition qu’il a faite à l’audience
de tous les moyens qu’il avoit présentés à Am bert, n’ont
pu 1:empêcher de succom ber encore sur ce provisoire.
L e jugement rendu le 6 pluviôse dernier est motivé encore
sur ce que les parties se* sont fait des conventions qui
doivent être exécutées.
1
‘ ' ' «;<
Ce mauvais succès du citoyen Choussy eût dû lui faire
présumer que le tribunal maintiendra un tel principe.
Mais il a fait une dernière tentative. Il a ém is, dans le
même jou r, un mémoire dfe qüarante-quatfe pages d’im
pression, et des causes d’ap]5"el signifiées",'en''dix-sept
pages de m inute, sur grand papier.
'■
1 r'
f
L es m oyens sont les m êm es; les demandes diffèrent.
Dans le m ém oire, il laisse aux acquéreurs la faculté
d’annuller la vente du 4 méssidor. • :
'
.... ■
Dans les)!causes d’ap p el¿il conclut à cette nullité ;'et,
seulement par subsidiaire-, à ùne nouvelle expertises.
Les acquéreurs discuteront ‘d’abord les moyens du
mémoire. Ils en viendront‘ensuite aux conclusions des
causés d’appel.
‘ ,j -•
^ a'} t V ,fK •• ‘
Dans son mémoire , le citoÿèri'Choussy propose trois
inoyens principaux.'1 k/ •
5 n'
1
" - ,J‘-> «
Les intimés en ont üri seul j c’est leur convention, H
doit prévaloir.
' j
;
�.
( 21 )
Les faits ont répondu d’avance aux moyens que pro
pose le citoyen Choussy. Un examen particulier sur cha
cun. achèvera de les détruire (i).
„
P R E M I È R E
QTJES
T' I 0 tf.
L e rapport du citoyen T a r d if est-il n ul pour cause de
parenté avec Vun des acquéreurs ?
,
• Cette parenté, si elle existe, est d’une assez rare espèce.
Depuis la souche qui remonte au dix-septième siècle à un
A rtaud, il y a e u , de générations en générations, jusquau citoyen T ard if, cinq changemens de noms.
Dans ces alliances successives q u i, venues d’Ambert ont
passé à Marsac , de-là à Saint-Amand, comment croire
que les enfans par alliance des cousins issus de g e r m a i n ,
alliés e u x - m ê m e s , a ie n t c o n s e r v é l ’h a b i t u d e d e la parenté ,
si dégénérée dans nos mœurs, à travers cette variation
de familles, de noms et de demeures? Dans la réalité,
les uns et les autres l’ignoroient \ ils en doutent encore.
Mais cette parenté ne mérite pas de recherches plus
profondes ; le temps est passé de les faire : le citoyen
Choussy ne peut plus s’en,faire un moyen de récusation,
parce que tout est consommé; ainsi, il seroit oiseux de
lui disputer le mérite matériel de sa découverte.
I Un juge peut être récusben tout état de cause, c’est(iV Les intimés eussent voulu dire moins de choses ; mais le
citoyen B oiro t, ordinairement si concis , en a dit beaucoup :
il y auroit de la présomption à traiter légèrement les objections
gué ce jurisconsulte a crues proposables.
, -
�C 22 )
.,
à - d i r e , avant qu*il ait prononcé ; voilà le principe, on ne
le conteste pas.
_
'
Mais doit-il se récuser lui-m em è, quatid ÎÎ ne cottnoît
pas les motifs de^ récusation ; ou sil-ne le fait pas, rendil une décision nulle ? voici en quoi les intimés combat
tront le fcitoyen Chouèsy ; ils soutiennent là négative. .
L ’article Ier. de l’ordonnance de 1667, dît: « que les
« récusations seront valables en matière civile, si le juge
« est parent de l’üne des parties , jusqu’aux degrés de cou« sins issus de germain';.... et néanmoins il pourra demeu-*
« rer juge si toutes les parties y consentent par écrit».
La récusation, est donc simplement valable ou Jucul->
tative j elle n’est donc pas de droit. Il n’y a donc plus lieu
de la proposer, quand les parties ont consenti que le juge
connût de l’affaire. ,
E n supposant, comme le citoyen Clroussy l’entend, que
le citoyen T a r d if ait êxêrfcé les fonctions d’arbitre (1) ;
non seulem ent il l’a requis de p ro c é d e r, mais après son
opération il la requis par écrit de déposer son rapport.
L ’article II dit : « que le jugç pourra être récusé en
« matière criminelle, s’il est pâvent où allié jusqu’au cin
« quième degré ; et s'il porte lè iiont, et qu’il soit dé la'
« f a m i l l e ; .. . .. il s’abstiendra en quelque degré icjue”cer
« puisse être, quand la patenté ou alliance1sera coït*
« nue par le ju g e, ou justifiée Jjar l’ une des partrês;
.
-------«nonobstant le consentement, etc. » •
?'II. est donc des cas où la parenté,peut n’être pas connue
(1). p»ge 24.
�( 23 )
.
par le ju ge, et remarquons ici qu’on ne lui ordonne de
s’abstenir, que quand il porte le n o m , sans cela la récu
sation peut seulement être proposée, et devient comme'
au civil facultative.
, L ’article X V II dit : que le juge qui saura des causes va
lables-de récusation est tenu de les proposer.
'
A in si, il faut qu’il soit constant qu’il les ait sues.
L ’article X X I d it , que celui qui voudra récuser pourra
le faire en tout état de cause, en , affirmant que les
causes de récusation sont venues depuis peu à sa connoissance.
•
L e citoyen Choussy dans son mémoire s’approprie fort
à son aise les dispositions de cçt article.
Il offre son affirmation que les causes • de récusation
ne sont venues à sa connaissance que depuis l’opération
du citoyen T a rd if: ce n^est nullem ent le cas de s’en ré
férer à cette affirmation. Les intimés s’applaudissent que
le succès de leur cause n’en dépende pas.
La récusation étant proposable en tout état de cause;
le citoyen Choussy qui voudroit affirmer, dit que ces
expressions le concernent, et qu'il est encore en causer
Mais dix lignes plus bas il prétend que T p d i f exer-r
çoit le ministère d’arbitre : o r , si cet arbitre a pro
noncé le 29 therm idor, les parties ne sont donc plus
en état de cause devant lui.
,
•
La cause actuelle est étrangère à la cause dé l’arbitre j
il étoit' inutile de chercher des autorités pour appliquer
à l'expertise de T ard if, le titre des récusations de l’o r
donnance de 1667. En expertise comme en arbitrage,
la récusation devoit être proposée pendant sa durée 3
elle n’étoit plus proposable après la décision.
�( H jr
.
Jousse sur les mots: en tout état de cause, dît ju s
qu’au jugement définitif.
t ,
Despeisse (i) explique q u ela récusation doit être pro
posée avant la contestation en cause èt que si les causes
n’en sont connues qu’après, on sera reçu à récuser, en
affirmant, jusqu’au jugement du procès ; « pourvu, ajoute« t - il, que le juge qu’on veut récuser n’ait pas opiné;
« car après avoir donné son suffrage, il ne peut pas être
«récusé, sinon qu’il l’ait'donné, après avoir lu la requête
« de récusation ». 1
'
."‘
L a loi apertissim i, au code de ju d ic iis , dit;même"
qu’on ne peut récuser le juge que dans le cours du' procès
pendant devant lu i, en lui signifiant mie récusation, et
qu'après sa décision, il ne peut être récusé. L icea t ei
q u i suspeçtum judicem p uta t, atttequam lis ihcphetu r, eum recusàre 3 ut ad'alium curratur, xhbello rëcüsationis eip o rtectd .
■
....
L e citoyen Tardif eût-il été récusable, comme on le
prétend , le citoyen Choussy devoit lu i notifier à luirnéme ses motifs de récusation. La loi précédente le dit
ainsi; l'ordonnance de 1667 plus explicative en prescrit
le mode en l ’article X X IIÏ ; elle veut en l’article X X V I ,
que la récusation soit communiquée au ju g e , qui sera
tenu de déclarer si les faits sont véritables ou non.
On n’opposera pas sans doute, que l’ordonnance en
parlant des causes'de récusations que les juges ou les parties,
sont censés ne pas connoître d’abord, ne concernent pas
la parenté ou alliance. L ’article II suppose que les juges
.
( 1 ) Titre I V , de la récusation, tome 2, page 641.
-
•
* peuvent
�V _
C ^5 )
_
peuvent l’igriorér; l'articlet X IX enjoint aux parties de
déclarer les causes de récusation i pour parenté ou
alliance, et de les proposer, lorsqu’ils les connoîtront.
Les causes de. parenté ou alliance contre le citoyen
,Tardif ont doncdvi être proposée s par le citoyen Choussy
en état de causé 'r c’est-à-dire, avant la décision de ce
tiers-expert.
'
i
,
' A u contraire, loin d’en proposer avant cette décision,
il a en' tout état de cause assisté à l’opération ; il a requis
le citoyen T ard if, par ides lettres ; et, après sa décision
m êm e, il l’a requis par sa'signification du 19 thermidor,
de déposer cette décision,. ¡j
p
u , .
. Ainsi il est dans le cas de l’art. Ier.;de l’ordonnance. Il a
donné par écrit des consentement, formels ; et n’e u t-il
qu’assisté volontairement au travail du citoyen T a r d if , il
seroit par cela seul aujourd’hui non recevable à s’ea
plaindre.
-frll ajété ju g é , dit le commetitateur de l’ordonnance,
«par un arrêt ,du 23 ievrier ,170,8, rapporté au journal
« des audiences, qu’une partie qui avoit procédé volontai«rententdevant un jugé, ne-pouvôit plus ensuite le récu
s e r , quoique-ce ju g e ;eût connoissânce de la cause qui
« .donnoit liqu)à lai contestation
• a'. ;• 1 ...
‘ Cet arrêt est^dans’.ùne especé moins favorable que celle
•de la cause. «:
jôovù •<! Ji'-';
. ; -. oCar,fcien)ine)pjroùvé que ¡Tardif, et- Buisson se crussent
pa'rens^;T,o;ut i'jjroûveiaiü.cpntraiçe:.<ï1\ l ’ignoroient. Les
plus anciens de leur farnillo frssurfcnt encore que non.
' Il r$Ste-)àr dir£ surice. moyen ,■que si la' récusation du
citoyen :Tavdif éfcpit, eiiCQre^prap’osable après sa décision,
elle ne l'annulleroit pas.
.-oi
'if.-h j'j D ’
t
�t *6 )
' L ’ordonnance dans aucun article rie parle de nullités. Or}
Jes nullités ne se suppléent pas.
T ;
L a loi du 4 germinal an a , fait la différence des lois an
ciennes et de celles postérieures à ,1789.
Elle veut qu’on n’applique la nullité aux premières’,
que dans le cas des formes prescrites y à peine de .nullité.
Mais l’ordonnance ne pouvoit pas s’occuper.de Ja nullité
■que propose le citoyen Ghoussy , sans l’établir; car elle
n’admet les récusations que jusqu’à la prononciation du
juge. Ainsi il né peut'y avoir Ü€!ti à nullité ,q u e si/lejuge
«voit passé outre , aprèsuneré^usation,
’ : 1 ,
C’est par ces motifs que le tribuhàl d’Anibert s’est décidé;
ils étoient écrits d a n sla îo î.ll a doric légalement homolo
gué le rapport. Il n y & donc pas -lieu de réformer sa
décision. * / - *“ • ■
■ 1
■
■
■ '
L
e
B E ï ï ’XlÈ' ffiE' hltr’ES'TlOTî. '
r a p p o r t
y
e n
d u
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c i t o y e n
q i t u t i
. ,
T
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r d r f e s t- il n u l , c o m
s e u l - p a r l e s ‘t r o i s
’ .r, : ¡. '/;
m
e x p e r t s
/•) -
i
’
: a■
& f t é ’â è v t i n t
•r é u n i s
,i
,
■
? '
.
Q u a n D-le: citoyen Æhoussy signifioit oüxicitoyenfe'Dupré
Langlade ; de fairfe «t à é ^ m t r ^ V p / i a c u h ' ‘A é p a i c ë m e n t ,
leurs rapports; quand ilsign i’fiofct-»ai0)’c itbÿdfii'Tâi*iif que
Son rapport -devait $ & ü h ôxér Je ‘-prix:de4a v^ente), -et qu’il
étoit inutile qu’il attendît le dépôt des deux premiers:rap
p o rts, il>ne fprôvoybitipas^ ¿qu’après rex^cution de ses'ore t .
-dres*, >il trouverait phis>séwrittqu’til ;n?eût 'dû ÿ-&vo ir qu?un
ra p p o tt‘-CQinimtrnJ,'>d t e > t r o i & > J1,
ar->r,iu,
, •
A ujourd’hui., dans: [Si sagesse; il'prétend'■qu^ilfalloit
-que cela fût ainsi^ ertiijse «fonde -sur les5conventions des
parties, et sur la loi.
. ;
�...
.
(■h î
>
.
..
• L a vente du 4 messidor, dit q u e , si les experts ne sont
pas d’accord, ils: choisiront un tîers pour les départager,et parle en plusieurs endroits d’un rapport d’experts quicon tiendra ^estimation, mais non pas’ de plusieurs:
5
S’il y aVoit à cela de 1?atnph ih 01ogi e, ‘le citoyen Chouçsy
nous aex^UéJuélui-même dans ses sigftife&tionsr le sens qu’il
donrioit à sa convention. Alors il étoit sincère' ,rparce qu’il;
ne cherchoit pas un moyen.
'
'
Il nous a appris que, si les premiers experts étoient d’ac><
cord, un seul rapport fixoitlp prix,que 3’ils hè Tétoierit pas,
un seul rapport lé fixôit encore; cela est-très-vrai’. Dansr
tous les cas il n’y a donc qu’un rapport unique à considérer
Dans l’espèce, les deux premiers rapports pouvoiént
ctre ou n’être pas déposés, cela iinportoit p e u ; et comme
la signifié lie citoyen Choüàsy^ ils devenoient inutiles dès
qu’il s’en faisbit un. troisième. IVlai'S'il étoitbon de’les rédi
ger ; et tel est l’usage général des expertises ; car c’est parlà que le tiers-expert prend connoissànce des points de
division des premiers.
1
•
En quoi donc le dépôt des trois rapports est-il- répré
hensible ? Si cela ne nuit pas, si tel ‘est Tüsage, si sür-tout
les experts ont obéi aux injonctions du citoyen’ Choussy,
de quoi peut-il se plaindre ?
.
' 11 invoque encore la lo i, non pas pour dire qu’elle a
plus de poids que la convéntion des parties, mais pôùr
prétendre qu’elle avoit réglé là même chose. '
Pour citer des lois , il falioit se créer une application ; le
citoyen Choussy avoit appelé les tiers~experts, des experts^
pendant les 26 premières pages-dé son mémoire. Mais
cela le gênoit, et il en fait des arbitres.. • .
'..
D i
�c 28 )
Ce n’est pas par une expression générique de latinité
qu’il peut le prouver. Arbitrium signifie une décision quel
conque 5 et dans les mernes lois,' il est employé d’autres
expressions pour dire la même chose (1). Le nom d'expert
appartient à notre langue seule ; celui d’arbitrium bon i
viri est le seul qui y réponde, et cependant, quand le
préteur y renvoyoit une contestation, il n’entendoit pas
nommer un arbitre, et lui céder toutes les fonctions
judiciaires.
; ; vCette définition pourroit s’approfondir davantage, mais
elle est oiseuse, et ce n’est pas dans ces nuances de mots
que git.la contestation.
.. '
• ' i; •
Ce qu’avoit dit le citoyen Choussy, étoit pour en venir
à la loi du 18 thermidor an trois, qui veut: « que le tiers
« arbitre, nommé en cas de partage , ne puisse prononcer
« seul en faveur de l’un des deux- avis, mais.qu’il se
« réunisse aux arbitres pour délibérer et juger.
.
O r , le citoyen T a r d if, expert ou arbitre, a fait, quoi
qu’on en dise, tout ce que cette loi prescrit aux arbitres
de faire: ' •
■
'.
Il s’est réuni à eux; il a discuté, délibéré et prononcé
avec les citoyens D upré et Langlade ; ils ont signé son
rapport.
Q u’importe que le citoyen Dupré ait ajouté à la signa»
ture comme présent ? si cela signifioit qu’il n’approuvoit pas l’opération, ,en est-elle moins valable ? s’eston moins réuni avec lui ? mais s i , dans un tribunal, l’un
(1) Par exemple il est dit: Secundùm ejus estimationem, vendis
tionem ad ejf'ectumpervénire*
'
�.
.
.
( 2
9
.
des juges vouloit écrire au plumitif qu’il n’est pas àe l’avis
du jugement, sans doute cela ne l’annulleroit pas.
Qu’importe encore que le tribunal d’Am bert ait dit dans
Je jugement dont est appel, ayant égard au rapport du
citoyen T a rd if, et icelui homologuant : il falloit bien lui
donner un n o m , et il ne pouvoit pas d ire , le rapport
des citoyens Du p ré , Langladeet T ard if, c’eût été les ho
mologuer tous.
,
■ L e citoyen Choussy avoit voulu que les deux premiers
fussent faits séparément; il avoit donc rendu nécessaire
qu’on distinguât le dernier rapport des deux autres , et
on ne pouvoit lui donner que le nom du tiers - expert
chargé de départager les autres, en se réunissant à eux.
Un sénéchal donnoit son nom aux sentences, et cela ne
signifioit pas qu’il les eût rendues seul.
C e que le citoyen T a r d if a dit au singulier dans ce tiers
rap p o rt, bien loin de prouver contre la réunion des
experts, comme le citoyen Ghoussy veut le persuader en
scindant isolément quelques phrases, prouve tout le con
traire. En effet, dans le commencement du rapport qui
doit être un procès-verbal, T ard if partant de chez lu i,
allant à la Chaise-Dieu, et demandant à ses collègues le
sujet de sa convocation , ne peut pas parler au nom de
tous; il eût été inintelligible:il dit donc3je suis allé, etc.ja
les ai invités, etc. L e cit. D upré m'a observé, etc., parce
. qu’alors il distingue ce qu’il fait et ce qu’il dit ; mais lorsqu’ensuite il va s’occuper de l’opération, il dit: nous
sommas transportés à Féolgoux avec les citoyens D upré
et Langlade, y avons trouvé le citoyen Choussy , q u i
nous a requis, de commencer nos vérifications , offrant
�t 3d )
de nous accompagner e tfa ir e toutes les indications né
cessaires , et de terminer n o s opérations, etc. ( i ) avons
procédé , etc* estimons , etc.
Voilà dorlc T ard if ne parlant plus seul, et cette diffétenèe même de langage prouve que sans être obligé de'se
conformer à la loi du i8thei-midor, il en a suivi les dispo
sitions. Ï1 lui suffisoit de se réunir à ses collègues ; il a fait
plus , il a fait toute son opération en commun. On voit
inême parles signatures, que l’un est de son avis, et que
l’autre n’en est pas. Il y a donc m ajorité, et elle n’étoit
pûs nécessaire.
;
L e dtoyen Choussy se confie si peu en ses moyens, que
polir en augmenter la masse, il veut tirer parti de ce que
le notaire qui a reçu l’acte de dépôt des trois rapports, a
appelé le troisième celui du citoyen Tardif» Mais il suffit de
lui demander comment, en ayant exigé trois, il eût pu
l'appeler lui-m êm e?
,
• •
'
Il a vu aussi que darts la lettre des premiers experts à
Gouchard , ils le convoquent pour revoir notre estima-»
tion et rédiger tous trois notre rapport.
Mais le' citoyen Choussy ne remarque pas que si les
experts efttendoient alors n'en faire qu’un seul, c’est luiinême qui y a mis obstacle en les requérant d’en déposer
deux, chacun séparémènL II a donc voulu ce qu’il blâme^
Les intimés l’ont trouvé bon ; ainsi y ayant accord entre
les parties, quelle correction y a-t-il à y faire ?
'
L e citoyen Choussy sent si bien cette conséquence, qu’il
(t) Il eût au moins dit, notre opération, s’il eût entendu par
ler an pluriel pour lui seul.
�(
3 1
)
t
.
.
v
.
se bat les flancs pour atténuer la signification qu’il a faite
le 19 thermidor; il ne vouloit, dit-il, qu’éviter au ci
toyen T ard if, comme au citoyen Langlade, les délices
de Capoue ( i) : il étoit impatient de perdre ses intérêt?
de 30 fr. par jour. A in s i, tout çe qu’il a dit dans sa juste
impatience, ne peut pas être pris pour des règles donr
■nées aux experts, qui vajoute-t-iJ, trouvoient ç^es règles
dans la loi du 1$ th erm idor,et dans Ja convention synallagmatique du 4 messidor.
'
. C ’-est sûrement pour le citoyen Çhoussy une biep puis
sante excuse, que le chagrin de perdre un intérêt de
30 fr. par jou r: 30 fr. ! ! et pour Féolgoux , q u i, année
commune j n’a jamais rapporté net ,2-000 f r . , en y com
prenant même Jes ventes de bois .réglées >et habituelles (2).
Mais c’est un peu .tard, pour ^expliquer des arrière-penfees qui ne détruiront pas des cçritg : ü&étoijt ¡pas prohibé f
par Jæ ypnie du 4 messidor, de fair^ ¿plusieurs rapports.
¡Ainsi, en soi-même , il.n’y auroit rien (d’irrégulier ; à plus
forte raison, quand les parties y ont cons<?rçt.i .exprçsr
sèment.
On contracte en jugement .çomnje par-^ejrçaiftt notâmes;
(1) Ainsi cette obscure cité, tout à l’heure, ne florissant que
par ses cadis et ses lacets, est devenue une Capoue attractive.
Elle s’énorgueilliroit de cette prompte métamorphose , si bien
t ô t , la changeant‘en Caprée honteuçe, le citoyen Glioussy ne
•Juiumputoit une facilité de.corruption .qu^il croit,possible^ que les
acquéreurs ne .s’étonnent pas qw’il croie possible; niais,dgf»t np
tribunal.honnête doit s’indigner.
(2) Cela est prouv.é par .des expertises, jointes au procès.
�.
(3 0
.
^
et si dans'le cours d’une contestation, l’une des parties
requiert et l’autre ne conteste pas, dès-lors le contrat
judiciaire est formé. L e citoyen Choussy, qui veut si
obstinément que l’opération des experts soit et ne soit
qu'un arbitrage ordinaire, récusera-t-il ce principe et,son
application?
’
’
<£
' Quoi qu’il en dise, lié par sa convention , voulant y
chercher de l’obscurité pour la dissoudre, il a lui-même
dissipé cette obscurité par ses réquisitions; il a expliqué
aux experts ce qu’ils avoient à faire : ils s’y sont conformés.
A in si, ses moyens actuels sont des argumens contre luimême.-•
•1
■ i
•'
* Il veu t, pour soutenir ces moyens, que lés experts
aient été des arbitres, et leur estimation un arbitrage.
D ’après lui,les tribunaux ne seroient pas compétens; car
la loi du 24aoiit 1790, dit que les décisions arbitrales sont
rendues en dernier ressort. Nos constitutions veulent, de
plus , qu’on ne puisse les attaquer,' même par le recours
en cassation.
•
..
.
T R O I ‘ S I E WT E
Q U E S T I 0 N.
J
Y a - t-il lieu (Tordonner un amendement de rapport,
,
, . ou la vente est-elle consommée ?
.
f.
-i '
.!
1
. ;
L e s arbitres de la question précédente sont redeyçnus
des experts pour donner au citoyen Choussy la facilité
de*prétendre qu’il y a lieu à. un amendement > r
-;
Pour le p ro u ver, il s’entoure de moyéns de considé
rations: jls sont nuls contre une'vente j de quelques auto
rités ,
_
�(C
33
)
•rités, elles sont foibles et hors1 la cause; de quelques
fragmens de lo i, ils sont inapplicables. .
■
Des autorités, claires èfc puissantes ’, une :loi unique et
décisive seront'opposées : la >cause. y est écrite; .
Ce n’est pas nominativement une action en lésion qu’a
intentée le citoyen Choùssy, il;la savôit supprimée;:mais
il y a conclu sous une autre forme: : >; .!
!
• Prétendant que.Féolgôux vaut le doublé de l’estimation
qui fixe le prix de vente, demandant que des experts
nouveaux vérifient cette p r o p r ié té , pour savoir si elle
vaut plus ; et en ce cas, concluant à ce que le supplément
soit payé par les acquéreurs, ou que la vente soit résiliée,
voilà bien certainement toute l’essence de l’action , en
lésion ; et si l’on en croit le citoyen Choùssy, cette lésion
est énorme.
•
, • <-• * ' '
■
Ingénieux dans ses calculs, il rappelle l’estimation qui
fut faite de 5723 pieds d’arbres que l’ouragan de l’an 5
déracina , à 48,000 fr., dit-il, s'ils eussent été sur p ied ,
€t 16,000 fr. en l’état où ils étoieril. Les dégâts étoient
dans un dixième de la forêt ; ainsi, dans la même pro
portion , les neuf dixièmes auroient , selon lu i, valu
400,000 fr.
'
.
Mais qui ne sait pas’ qu’un ouragan qui déracine
5723 arbres, ne hisse pas intacts neuf dixièmes d’une
fo rê t, qu’il dévaste tout arbre qui présente une grande
surface ; et qu’ainsi n’ayant fait de dégât que dans un.
dixième de la fo rê t, cela prouve que dans le surplus il
y avoit très-peu d’arbres d’un volume à offrir de la
résistance au fléau. O r , vouloir faire estimer les parties
stériles ou dépeuplées sur lç meme pied» peut bien etre
�'(
34
)
; l’idce d’un spéculateur >qui postule 30 fr. d’intérêt' par
jo u r, mais n est aux yeux de là justice qu’une proposition
captieuse d’ùne mauvaise foi révoltante.
•
L e cit. Choussy donne une autre base d’estimation , qui
est celle faite par les citoyens Garnierët Faurot, experts (1),
nommés par l’administration de la Chaise-Dieu , sur une
demande par lui formée en l’an 8 , en réduction de ses
rimpôts ; ils o n t, dit-il,estimé Féolgôüx à 1 i 1,322 fr. 60 c.
'•au .bas p rix , ajoute-t-il, qu’on a coutume de donner à ces
sortes d’évaluations. '
c> ;
’
•
Ceci seroit mieux trouvé, si le citoyen Choussy disoit
4out; mais semblable à celui qui présenteroit pour titre
un jugement de première instance , réformé sur l’appel,
-■il montre l’opération; de deux premiers experts, mais il
ne dit pas qu’il s’est pourvu par appel devant l’adminis'tration centrale Comme d’iméestimation exhorbitante, que
'de nouveaux experts (2 ) ont estimé Féogoulx presqu’à
-moitié moins, et que lé dernier rapport de ces experts a
été séul hom ologué- p ar l ’adm inistration cen tra le , par
■arrêté du i 5 ventôse an 8 : ainsi, le citoyen Choussy pré
sentait une pièce rejetée, ce qui n’ëstpas délicat, et taisoit
une pièce admise.
La première convention' d’acheter Féogoulx, faite à
‘ il5 ,o o o f r ., est fort loin de lui être un moyen; car,
quoique les sous-seings privés lui fassent réserve des chablis,
il est de fait, et on le prouveroit s’il le n ie , qu’ils devoient
( 1 ) Deux de ceux qu’il a récusés dans son exploit du 10
thermidor.
(2) Les citoyens Jourde et Pichat qu’il a aussi récusés.
�.
.
C 35:3
faire partie de la ven telorsq u e les-acquéreurs surent qu il
y en avoit un grand nombre. Malgré delà, ils'ont résilié,
trouvant Féolgoux trop cber'!à cette somme ¿ quoiqu’il y
eût alors un. mobilier considérabley'eiü ces -chablis’ portés
par le.citoyen Choussy, dans ses-lettr'es, à 26,000 fi\‘ ’
•; A.cette>époqùe encorë les'propriétés avoient'une valeur
bien plus considérable qu'aujourd’hui ; et si leîi8 fructidor
produisit d abord quelque resserrement d’argent chez les
capitalistes, sans doute il ne fit pas un effet aussi subit dans des
pays agrestes! j dans, lesquels les révolutions n ont quune
lente influence ; peutrêtre aussi la crainte alors accréditée
d’un retour au papier monnoie donna-t-elle plus de valeur
aux propriétés foncières. Quoi qu’il en soit, nous recher
chons des effets et non des causes, et il est de notoriété que
nonobstant tous autres résultats de fructidoretde brumaire,
les biens-fonds , les bois su r-tou t,valoien t en l’an 5 et 1an 6
beaucoup plus qu’en l’an 8 , non-seulement dans le canton,
de la Chaise-Dieu, mais dans toute l’étendue des départemens du Puy-de-Dôme et de la Haute-Loire.
Les réflexions du citoyen Choussy, sur la facilité de la
vente des bois, sont de même purement systématiques,
comme la plupart des idées d’économie publique. Depuis
plusieurs siècles on se plaint de la rareté des bois , et ce
que les conseils de département ont dit 1 année dernière,
Louis X IV le disoit aussi dans le préambule de son ordon
nance de 1669. Tout cela ne prouvera pas que le bois de
Féolgoux vaille davantage; les ventes darbres n y sont
pas plus communes, pas plus que dans les nombreuses
forêts plus rapprochées encore des ports de l’Allier.
L ’aspérité des chemins de traverse, la difficulté de l’ex■
£ 2
�A
(. 36 )
p lo ita tio n , empocheront long-temps ce bois d’avoir une
valeur. L'ouvèrtute; des communications ne peut être
payée que par le gouvernement : mais espérera-t-on qu’il
s’occupe de routes nouvelles et particulières avant d’en
tretenir celles qui existent ? Si les conseils généi-aux ont dit
que les bois de la Chaise-Dieu ne suffisoient plus à construire
les bateaux, le citoyen Choussy, qui les cite, pouvoit plus
que personne les désabuser de cette grande erreur ; car
lui-m êm e, depuis l’an 5 , n’a pu vendre encore tous les
arbres que l’ouragan avoit déracinés, et qui dépérissent
nécessairement faute d’acquéreurs (1).
(1)
Ce Fait est déclaré au procès par une requête du citoyen’
Choussy, du 3 ventôse.
Le citoyen Choussy parle souvent de sa bonne foi dans cette
affaire; en voici un échantillon. L ’ouragan de l’an 6 avoit déra
ciné beaucoup d’arbres, d’autres étoient rompus à 5 ,1 0 et 12 pieds
de hauteur : c’est ce qu’on appelle piquets. Un grand nombre
d’autres arbres étoient seulement épointés très-foibleinent à perte
de v ue. S e p t jours après la v e n t e , C h o u s s y se hâta de vendre
ces derniers arbres, pensant bien que les experts n’iroient pas
croire qu’ils faisoient partie des arbres rompus que Choussy avoit
réservés comme déjàvendus. En effet, lorsque les experts vinrent,
Choussy voulut qu’on estimât tous les arbres droits en général,
( cela est prouvé par la déclaration des experts, de Dupré luimême, en un acte instrumentaire, du 14 ventôse an 9 ); Choussy
fit même comprendre dans l’estimation les piquets pour une
somme de 40 fr. (cela est prouvé par les trois rapports ). Pour
être plus libre de consommer cette petite escroquerie , il chassa
le garde de bois, qui étoit a Féolgoux lors de la vente, et qui
étoit agréé par toutes les parties. Les acquéreurs ne jouissant
pas, n’ont pu avoir l’œil sur ce qui s® paasoit dans le bois j ils
�C 37 )
Il seroit plus raisonnable, sans doute, aux intimes, de
présenter de leur p a rt, pour moyens de considération,
cfette stagnation de commerce, constatée par cet engorge
ment de bois pendant quatre ans ; ce qui ne leur promet
pas pour l’avenir des spéculations heureuses; la rareté du
numéraire telle, qu’à moins de dégrader promptement
pour ven d re, à quelque prix que ce soit, ils ne pourront
payer au citoyen Choussy des capitaux à termes rappro
chés, outre un intérêt considérable; l’accident nouveau
d’un ouragan terrible, qui vient encore de diminuer la
valeur des plus beaux arbres en dégradant ceux qui res
tent ; enfin le taux des impositions de tout Féolgoux à
336 fr. 8 s. (1) ; ce q u i, à l’égard d’un propriétaire forain
ne l’ont appris que par le procès-verbal de leur prise de pos
session; ils ont tr o u v é le bois p le in d e scieurs de long , et ont VU
q u e par un genre d e précaution fort inusitée, le bois coupé plus
récemment est hors la forêt, tandis que celui exploité avant la
vente y est encore gissant; aussi le citoyen Choussy se jacte
d’avoir au port 22,000 toises de bois, non compris ce qu’il a
vendu. On peut conjecturer combien cet entassement paralysera
pour long-temps les ventes que les acquéreurs pourroient faire.
Ce mésus a donné lieu à]un incident qui n’est pas encore jugé,
parce que le citoyen Choussy a mis au rôle la cause principale,
pour faire disparoître ce débat secondaire par de plus grands
intérêts; cependant il sera jugé en même temps que le fonds.
Les intimés pourroient donner à leur discussion, sur cet inci
dent , une plus grande latitude ; mais il est inutile de grossir ce
mémoire.
' (x) Fixation d’office, par arrêté de l’administration centrale.
En l’an 4, Féolgoux payoit en principal et sous additionnels 232 1.
2 s. 2 d. Que l’on ne dise pas que la cote des bois doit Être très-
�(38 )
sur-tout, doit donner une idée suffisante de la valeur ap proximative de cette propriété.
Mais des moyens de considérations ne doivent pas juger
la cause ; ainsi, abandonnons ce qu’a dit le citoyen Choussy,
sur ce point, et ce qui nous resteroit à dire, pour en venir
à l’examen des moyens particuliers qu’il a cherché à faire
valoir.
Il critique le rapport de T ardif et celui de Langlade,
sur ce qu’il s'est fait déduction des charges, et il s’étonne
qu’on ait entendu acheter un bien franc et quitte de
charges ; il auroitsûrement raison si c’étoitde toutes charges
foncières; car nul n’en est exempt : mais des réparations,
des frais de gardes de bois, etc., dont on n’entend pas
s’exempter non plus, n’en sont pas moins des objets à
prendre en considération par des experts qui estiment le
p rix vénal d’une propriété. Car plus il doit en coûter
de frais d’entretien , moins il y a de revenus, et c’est par
le calcul des revenus réels que s’estiment les capitaux.'
lie citoyen Choussy se plaint encore que L an glad e ait
laissé le soin à T ard if d’apprécier ces charges ; car, dit-il,
nemo unus cogendus est sententiam dicera. L ’expression
cogendus suppose de la nécessité, de la contrainte, et
non pas la simple prière de l’un des experts à un autre ,
d’expliquer luirm êm e ce qu’il n’entend pas bien. Cette
déférence n’exclut pas ensuite 1 examen de l’explication,
et rien ne prouve que Tardif ait décidé seul ce point
foible; cela étoit ainsi lors des lois de 179° : niais Part. 70 de la
loi du 3 frimaire an 7 veut que les bois soient taxés, pour touto
leur valeur, à deux et demi pour cent.
�,
.
.
( 39 )
de Texpertise, puisqu’au contraire le reste du rapport est
rédigé en commun. Déjà nous avons fait observer la diffé
ren ce *qui existe dans ce rapport, entre les colloques du
' préambule et le rapport lui-mêm e; ce n’est donc pas par
un fragment de cette conférence qu’il faut juger le rap
p o r t, c’est par le dispositif de la décision en elle-même.
O r cette décision est faite en com m un, et elle est signée
des trois experts : ainsi ce rapport n’est nullement dans
le cas de la loi citée.
<
Ce que dit Pothier d’une estimation manifestement ini
que yn’est pas un moyen pour le citoyen Choùssy, puisqu’il
pré-suppose que cette iniquité est déjà manifeste, et c’est
là la question. L ’auteur du recueil de jurisprudence donne
-l’explication de ces expressions dangereusement obscures,
. dont cet auteur ne se défend pas toujours. P a r exem ple ,
dit-iL , si un im m euble en valeu r de 1,000 livres étoit
estimé 24 livres; alors il seroit clair qu’il y auroit une
injustice évidente contre laquelle les parties seroient au
torisées à réclamer.
Sans doute c’est ainsi que l’a entendu P o th ier, qui
en cela a raisonné par ses propres idées, sur le juste et
l’injuste, ne se, basant sur aucune loi. D om at, encore
cité par le citoyen Choùssy, n’a rien dit d’assez précis
sur la contestation, pour balancer des autorités plus po
sitives , et encore moins les lois qui la jugent. L ’espèce
de faculté qu’il laisse aux contractans de revenir contre
. leurs conventions, si contradictoire aux principes que cet
auteur enseigne aux pages précédentes, suppose comme
P o th ier, que les bornes de la raison et de l’équité soient
violées, et que l’on n’ait pas nommé des personnes de
�C 40 )
-
probité et qui s’y connussent, dès qu’il ne veut annuller
que ce qui sera arbitré contre cette règle.
O ù est donc ici la violation des bornes de la raison;
où est la violation de l’équité, si ce n’est plutôt celle de
la cupidité du citoyen Choussy. A -t-il indiqué un seul
fait d’improbité contre les experts; ce nést donc que de
l’ignorance qu'il leur suppose, et c’est depuis l’expertise
seulement qu’il s’en est avisé.
O ù est encore l’application de la loi 76 du if. pro socio ?
O ù est cepravum arbitrium ? cette manifesta iniquitas
que cette loi exige pour refaire l’arbitrage de société qui
ne nous concerne pas ?
Il falloit donc expliquer par quelles règles devoit être
décidée la question préalable de ce praçwn arbitrium ;
à quels signes le tribunal dont est appel avoit dû le re
connoitre ; si l’estimation à 85 ;ooo livres d’un bien qui
paye 336 livres d’im pôts, présente au détriment du ven
deur une évidente iniquité.
Les arbitrages de société exigent une pondération d’in
térêts respectifs infiniment égale, parce qu’il répugne ù
l’essence de l’association, qu’aucun des associés ait un
bénéfice supérieur à la portion qu’il doit en avoir. Mais les
contrats de vente ne sont pas assujétis aux mêmes règles,
et l’erreur de croire que l’idée du vendeur d’être grevé
p a rle p rix , lui donne droit de s’en plaindre, est corrigée
par la loi si voluntate au code de rescindenda venditione,
qui lui reproche d’ignorer la substance du contrat d ac
quisition, qui n’adm et pas de telles plaintes.
La loi 22 au if. lo ca ti, enseigne q u ’il est de droit naturel
d’acheter au moindre p rix , et de vendre au plus haut prix
qu’on
�( 4 i.)
quon le puisses Quemadmodùnv in emendo et vendendo
naturaliter convessum est quod pluris s it , m inons
emere'f et qiaodlminoms siL, plurùs■
vendere., etinvicem se
ciicunvscrihere.\ . ,
i :
......
T e lle , en effet, doit être la--latitude des; transactions,
libres;et'du; coxnimercc des immeubles ÿ d’ailleurs: , comme
le;dit Dumoulin avec sera; énergie;ordinaire (;r) : « L ’égalité
» entre le prix et la1 valeur de; la chose vendue ne con
» siste pas en un point indivisible' y elle n est pas; une
» égalité mathématique ».
‘
. Il est bien constant que; l’acte du 4 messidor est une
vente librement consentie entre m ajeurs, et librement
exécutée en la forme convenue. T o u t y est obligatoire
et sacramente]., Féolgoux est vendu , c’est la chose ; le
citoyen Choussy- se démet de la p rop riété ; voilà le con
sentem ent et la tradition', conroborée même par le constitut de précaire qui y est exprimé. Le prix est laissé à
l’arbitrage de deux experts; q u i, en cas de discordance,
doivent s’en choisir un troisième à l’insu des parties : tout
cela s?est littéralement exécuté.
‘ Les deux experts ont été discordara (2) ; ils en ont pris
1(1) Trait, des cont. usur., quest. i 4 r n°., 171.
(2) Le citoyen Choussjr revient souvent sur cette discordance,
pour dire qu’elle n’eut lieu qu’au retour des experts de la ChaiseDieu; mais il nous prouve lui-même que Langlade n’ctoit pas,
sur les lieux, de l’avis de Dupré. i°. En disant, dans son expertise
du 8 fructidor an 8, que Langlade écrwoit toujours à côté un
prix différent ; 20. dans ses causes drappel du 23 ventôse der
nier , que Langl'ade « avoit médité (Tavance le projet de ne signer
F
�/ C 42 )
un troisième, agréé comme eux par le citoyen Choussy.
L e prix de vente a été réglé en sa présence ; le rapport
fixant le prix a été déposé : et dès-lors les trois condi
tions qui constituent le contrat de vente sont remplies.
T o u t est donc consommé. ’
- L e prix de vente fixé par les experts est précisément
la même chose que si elles en fussent convenues ellesmêmes. On ne trouvera aucun auteur qui établisse en
cela la moindre différence. Ils se réunissent, au contraire,
à dire que le prix ainsi fixé par experts est absolument
semblable au prix volontaire. Or , sans doute, si le cit.
Ghoussy fut convenu de vendre pour le prix qui a été
estime, en vain proposeroit-il ses systèmes sur les chances
politiques et sur la rareté du bois j il n’auroit aucun moyen
pour obtenir davantage.
N ’est-ce donc pas s’abuser, que de proposer à un tri
bunal de rectifier une expertise qui n’a point été judiciai
rement ordonnée , et qui n’est point du ressort judiciaire?
La nom ination des experts qui ont opéré tient essentiel
lement à la substance d’un acte volontaire, à la partie la
plus délicate du contrat de ven te, au consentement si
incompatible avec toute espèce de contrainte. Si les acqué
reurs se trouvoient lésés, que pourroient-ils dire , quelle
voie eussent-ils eue pour se délier de leur consentement ?
La loi cependant doit être égale. Autrefois, à la vérité,
l’acquéreur n’avoit pas la voie de la lésion \ elle étoit pour
« le rapport commun , que dans le cas où Dupré seroit assez
» foible pour consentir à une estimation dont le prix avoit sans
» doute été arrêté de concert avec les acquéreurs ».
�( 43 )
le vendeur seul;*mais le citoyen Choussy assure que ce
n’est pas cette action qu’il a voulu diriger.
Comment donc lui accorder un droit que les acqué
reurs n’ont pas ? S’ils ne nomment pas des experts, ce
-sera donc à la justice a'emnommer d’office ? Mais alors,
'que devient le*consentement des parties , essentiel pour
le contrat de vente ? Uri consentement forcé le suppléerat - il, quand une vente synallagmatique libre sera méta
>morphosée en une vente judiciaire ?
L e citoyen Choussy, qui a bien senti que sa prétention
appeloit ce renversement de principes, a cherché à cor
riger cette incohérence. Il offre de résilier la vente. Mais
les acquéreurs auroient-ils le droit de le lui offrir ? peutil donc dire : ou on fera ce que je v e u x , ou il n’y aura
pas de vente ? Mais il- ne dit pas qui doit payer au m oins
6,000 liv. de prem iers frais que les acquéreurs ont déjà
déboursés. . ’■
La raison dit qu’une deuxième expertise ne peut avoir
lieu ; la loi aussi le veut expressément ; elle a déjà été
rappelée, et en voici le texte :
'
S i q u is rem ita com p a ra çerit u t res vendita esset
q u a n ti T itiu s œ stim a çerit....... Sancirnus u t s i qu id em
■ipse q u i n om in a tu s est pretium d efin ierit o m n i m o d ò
secundùm ejus œ stim ationem et pretia p ersolvi et ven• àition em ad effectum pervenire..... S i h u ju sm o d i pre
tiu m cù m in scriptis f u e r i t redactum ....... P e r o m n ia
com pletum eta b so lu tu m s ii; sin autem ipse T itiu s n olu er it vel non p o tu eritp retiu m d efin ire, tune prò n ih ilo esse
ven dition em ..... N u llâ con jectu râ s e rv a n d â , utrù m in
personam ce rta in , an in b o n i v ir i a r b itr iu m , respicien-
F a
�tes conirahentes adhc&cpacta venerint, hoc impossîbile
credentes expellimus (i).
Ce respect de la loi pour le maintien d’une convention,
libre est digne de remarque ; elle ne veut pasque le juge
prenne sur lui de rien conjecturer, nullâ conjecturâ serr
V a n d â elle ne veut pas qu’il ordonne, en aucun cas,
une nouvelle expertise, in boni viri arbitrium expelli
mus ; et cela par le seul doute que les contractans aient! eu
en vue d y consentir, an respicientes contrahentes ad
hœc pacta venerint.
■ Cette loi si formelle, u'nique.sur la m atière, a été répétée
aux mstitutes,, comme contenant les principes élémen
taires du droit (.2). La .même expression omnimodô y
consacre encore que l’estimation des experts, quelle quelle
>$oit, ne doit point être réformée. ,
. ■
C e mot omnimodô., est commenté par J^innius y en ces
termes: Ergo eüam si multo pluris aut minoris rem
-estimaçerit ( Titius ) quàm valet.
JDespeisses (3) dit, que si l'expert choisi a fait le p rix,
quel qu’ il soit, la vente:est banne j et doit avoir lieu pour
Je prix fixé par cet expert; « quoique, ajoute-t-il, ce prix
c ne soit pas le juste prix, et même qu’ïly ait lésion d’outre« moitié ». Cet auteur ajoute, que la loi ci-dessus, prohi
bant toute nouvelle expertise, montre pleinement que son
•intention par le mot omnimodô, est que le prix soit défi
nitif.
(1) Loi dernière, cod. de contrahcTidcL entphone.
(2) Inst., liv. 3 , tit. 24, de emptione et venditione.
(3) Page première, scct. 3.
�I
( 4$)
.
.
’ ' Rousseau de'la Combe ( ij dit de -même, que si le prix
a été déterminé par un tiers, la vente est valable ; « soit que
le prix soit juste ou injuste ». Ce sont ses expressions.
• L a jurisprudence s’est 'conformée à -ces principes, et
nous en avons ;un exemple asseztnouveaufl ¡même .dans ce
¿département.
; *
:
L e citoyen Costilles avoit vendu un domaine au citoyen
. Coiffier, à dire d’experts; le «citoyen Coiffier le prétendit
r exhorbitant, et opposa même que l'immeuble venant delà
femme Costilles, ce qu’il disoit .avoir ignoré jen acquérant,
¿il seroit en péril d’éviction. [Plaidant emla ¡sénéchaussée
d’ Auvergne , la loi si quis lui:fut opposée : la sénéchaussée
ne crut pas pouvoir rien changer à iune- convention, et le
• citoyen Coiffier ne put obtenir ni la résiliation de la vente,
'•ni un amendement. La sentence fut rendue,1e 7 _mars 1 7 8 6 ,
-et confirm ée par arrêt de ¡la grand -,chambre, du 6 mars
1789 (2).
.
'
^
N on , il n’y a pas lieu à amendement: cette décision est
écrite tout au long par le citoyen Choùssy, et de sa propre
main, dans l’acte instrum entais , du 1 9 ■thermidor. Il y.a
d it, après avoir su que les premiers experts étaient divi
sés, et avoient fait deux rapports séparés, que le rapport
(1) N°. vente.
(2) Cette sentence est citée dans une consultation donnée pour
la cause, sur le vu de toutes pièces, par les citoyens Dartis,
Toultée, Deval, Pagès , Andraud, Prévôt et Maugue. Ces juris
consultes ne supposent pas -que le citoyen. Choùssy mérite plus
de faveur que le citoyen Coiffier, et nonobstant ses moyens, ils
'■trouvent la cause jugée par sa convention, par ses écrits et par
-les principes.
, ,
�.
.
(
4 6
>
• du citoyen T ard if devoit seul fixer le prix de la vente. II
étoit donc surabondant de rechercher d’autres autorités
que la sienne.
Tout est consommé; la vente n’est plus susceptible d’au
' cune formalité; les experts ont rempli leur tâche, et si
quelqu’un avoit à s’en plaindre, ce n’est pas le citoyen.
' Choussy qui ne les a pas quittés.
'
:
‘ >
Il ne peut critiquer leurs qualités. Us sont nommés,
- avoués et requis, soit par la ven te, soit par-tous les écrits
qu’il a répandus dans la cause;
- ' ■
N i leur droit d’opérer ; il a reconnu par les mêmes écrits,
ses lettres et ses prévenances ;
.
' •
Ni leur travail ; il étoit présent à toiit ; ni même .leurs
rapports ; il les a rendus nécessaires par ses notifications.
Telle est la conséquënce de l’assistance d'une partie au
travail d’un exp ert, quelle la rend non recevable à pro
poser les m oyens, même les plus fondés. En voici un
exem ple:
'
•
D ans un p ro cès, en exécution de la loi du 10 juin 1793,
■qui enjoint aux arbitres de nommer des experts pour faire
' les vérifications nécessaires, les arbitres nommés se trans
portèrent eux-mêmes sur les lieux, firent l’expertise, et
ensuite l’arbitrage.
Le tribunal de cassation a toujours cassé de semblables
jugemens; le norrimé Morisot se pourvut devant lui. Mais
par jugement du 18 vendemiaire an 5 , la demande en cas
sation fut rejetée, p a r le motif, que M orisot avoit assisté
les arbitres dans leurs opérations.
L e citoyen Choussy a cru qu’en offrant de payer les
frais d’un amendement, il parviendroit plus aisément .à
�.
(
47
)
.
.
'
persüader que cet amendement ne nuiroit à personne;
mais il n’a pas remarqué que ce n’est point ici un rapport
d’ instruction et du ressort judiciaire, qu’il ne s’agit pas
de vérifier une propriété contestée, mais qu’on demande
à faire augmenter un prix de vente.
O r , le citoyen Choussy qui a dit tant de choses contre
les premiers experts, q u i, après en avoir récusé cinq, se
plaint de deux autres. N ’est-il pas bien inconséquent de
vouloir recourir de nouveau à un art aussi conjectural?
Mais calculons un peu à quoi cela mèneroit les parties.
Si deux autres experts étoient encore divisés, il en faudroit
un sixième, et si celui-là se trouvoit de l’avis du citoyen
D u p ré , alors les voix seroient égales ; car chaque partie en
auroit trois en sa faveur.
, Faudrait-il donc sanctionner plutôt cette deuxièm e e x
pertise que la px-emière ? M ais ce seroit une injustice , dès
que le nombre d’opinions seroit égal pour et contre. L e
tribunal alors n’hésiteroit sûrement pas à ordonner encore
une nouvelle vérification, dont le résultat seroit peutêtre encore aussi bizarre, ou plus obscur.
Tout cela peut arriver, et la justice doit tout prévoir.
Des acquéreurs qui jouissent sous la foi de leur conven
tion , doivent compter sur un prix qui ne dépende pas
de nouveaux hasards.
Ce prix est fixé;, il l’est comme les parties l’ont voulu;
elles n’ont pas entendu laisser à aucune d’elles la faculté
d’en requérir un nouveau. A in si, n’y eût-il pas tout le
danger , tout l’inconvénient dont on vient de donner une
idée légère, la convention des parties n’en seroit pas moins
prohibitive de tout règlement nouveau ; dès lors un amen-
�(
C 48 )
dément, en les jetant dans de nouvelles incertitudes, vîole*
roit cette prohibition.
Q u a t r i è m e
Q} u e, s t i o. m.
L a vente du ^messidor est-elle n u lle?'’
’
C e t t e prétention singulière, contrastant"& tout ce'
que le citoyen Ghoussy a dit et écrit, n’a pas été jugée par
fauteur de son mémoire digne d’être émise; mais le citoyen
Choussy n’abandonne pas1 aussi aisément le faisceau des
quatre conclusions diverses qu’il1avoit prises err première ■
instance':■il;sait trop bien qu’on simplifie une bonne cause1,
mais qu’iïfaut l'embrouiller quand elle est mauvaise. Certes,
on ne peut s’empêcher de lui rendre la'justice , qu’il a1 fait
tout ce qui étoifc en lui pour ne pas s'écarter dè cette
méthode;
C ’est encore peut - être un grand sacrifice dû. citoyens
C h o u s sy , de ne plus insister à v o u lo ir faire considérer
M an n et com m e tiers--expert. Ce M an n et, appelé com m e
indicateur pour une partie seulement de l’expertise , muet
dans les rapports , n’ayant) rien signé, ne sachant peut-être
pas lire, pouvoit-il décemment être dit tiers-expert? Telle
fut cependant la première des conclusions prises par le
citoyen Choussy en son exploit de demande.
Quoi qu’il! en soit, le moyen de nullité de la vente,
jeté en désespoir de cause, ne mérite un examen que parce
qu’il est proposé ; c a ry pour qu’une vente soit nulle , il
faut qu'elle manque de Fane des trois conditions qui cons
tituent ce genre de contrat.
O r, lai chose-vendue- est bien désignée : c est Féolgoux.
Le
�( 49)
L e consentement est donné , l’acte du 4 messidor l’ex
prime ; le prix a été définitivement fixé par le rapport du
citoyen T a rd if, ainsi que le citoyen Choussy l’a décidé
par écrit dans son acte du 19 thermidor.
• Ce qui achève de constituer la vente, c’est la tradition ;
elle est effective : les acquéreurs sont en possession. Elle
étoit déjà promise et acceptée dès l’acte du 4 messidor ;
car le citoyen Choussy y déclare se départir dès à présent,
et pour toujours, de la propriété, possession et jouissance
des objets vendus, et consent n’en jouir à l’avenir qu’au
seul titre de précaire.
Cette translation stipulée et réelle, n’exige aucune dis
cussion: le fait répond à tout; il achève même de con
vaincre que les parties remettant leur sort entier à une
première expertise , ne vôuloient se réserver aucun moyen
rescisoire, puisque dès-lors elles déclaraient la vente con
sommée dans des expressions aussi sacramentelles. .
'
'
:
C O N C L U S I O N .
4
L e citoyen Choussy a vendu Féolgoux à dire d’experts
nommés par la venté ; ces experts devoient nommer un.
tiers en cas de division : ils l’ont fait; le tiers-expert a été
agréé par le citoyen Choussy.
Toutes les parties ont assisté à la première expertise : le
citoyen Choussy seul a assisté à la seconde; il l’a requise,
il l’a pressée pour y être seul ; quand elle a été terminée,
il 3 requis par écrit le tiers-expert de déposer son rapport
pour fixer seul le prix de la vente.
'
T o u t est d o n c -consommé, des récusations frivoles ne
G
�C 5o )
sont plus proposables; un amendement ne l'est pas davan
tage : la justice supplée aux conventions, et ne les détruit
pas.
Les moyens de considération sont en plus grand nombre
contre le citoyen Choussy. Une propriété qui paye 336 fr.
de contribution foncière, séparée de toutes communica
tions commerciales, est très-chèrement achetée à 65,000 fr.
non compris des frais et faux frais excessifs : les calculs
usuraires du citoyen Choussy ne détruiront ni des-faits ni
son propre ouvrage (i).
>. '
'
Des moyens de considération ne jugent pas une question
de droit ; des personnalités méprisables ne doivent pas la
juger non plus. L e citoyen' Choussy ne s’opposera pas à ce
qu’on juge plutôt la cause que les personnes.
Il
se plaint d’etre trompé ! qui persuadera-t-il ? aucun
de ceux sans douté qui jamais entendirent prononcer sonnom. Mais par qui trom pé? par quatre jeunes gens,dont
le plus âgé n’a pas trente-trois ans, et dont le plus jeune
est de l'âge de la réquisition : Choussy trompé ! ces deux
mots sont étonnés de se trouver ensemble.
- D isons m ieux, il vouloit trouver des dupes ; il est irrité
de n’avoir pas complètement réussi. Pourquoi donc la
force de l’habitude lui fait-elle croire que manquer de
(1) Le citoyen Choussy ,'qui évalue son bois seul à 400,000 fr.,
n’a pas voulu entendre une proposition qui lui fut faite, audience
tenante , à Ambert. Ses acquéreurs lui proposèrent de résilier'Ia
vente, s’il vouloit leur donner à chacun c e n t louis de bénéfice;
ils l’ont proposé encore après le-jugement et certes, celui qui
doit gagner 100,000 écus,’neles cède pas pourio,ooo fr./ Y
�dupes c’est l’être lui-même ? qu’il ait cru vendre Féolgoux
beaucoup plus , cela se présume ; mais parce qu’il
ne l’a vendu que ce qu’il vaut, il n’y a pas de quoi être
inconsolable.
En un m ot, la cause appartient à une convention; cette
convention est exécutée et légale. Les choses ne sont plus
entières, la vente est consommée ; la ressource conjecturale
d’une nouvelle expertise auroit beaucoup d’inconvéniens
et aucun avantage. Ces m otifs, concluans et précis, exprimés dans le jugement dont est appel par le tribunal
d’Ambert pour valider la vente, embrassent toute la cause,
et suffisent pour prouver la nécessité de maintenir ce
jugement.
DEM A Y ,
L . F. D E L A P C H I E R ,
A v oué.
A
R
io m
,
de
Homme de lo i
l'imprimerie de L
a n d r io t ,
Tribunal d’appel. An 9.
imprimeur du
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Touzet, Pierre. An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Demay
Delapchier
Subject
The topic of the resource
experts
acquisitions
Description
An account of the resource
Mémoire pour Pierre Touzet, Pierre Buisson-Touzet, Régis et Louis Celeyron, habitans de la ville d'Ambert, intimés ; contre Jean-Joseph Choussy-Dupin, homme de loi, habitant ci-devant à St-Germain-Lherm, maintenant au Puy, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
1785-Circa An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
51 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0405
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0155
BCU_Factums_M0156
BCU_Factums_M0157
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ambert (63003)
Saint-Germain-l'Herm (63353)
Le Puy-en-Velay (43157)
Propriété de Féolgoux
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Domaine public
acquisitions
experts
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Text
J
M a r g u e r i t e S O B R I E R , v e u v e D a u d i n , a p p e la n te ;
C O N T R E
Sieur F r a n ç o is C A P E L L E , intimé et appelant;
EN
P R É S E N C E
D 'A n t . D E S P R A T S , et d'E l é a za r d R O S T A N G D A U D I N , appelans et intimés,
L
A dam e Daudin vouloit oublier tout ce qui tient à une vente
qu'elle a signée en 1 7 8 2 . L e sieur C ap e lle , qui l’a trompée, veut
obtenir contr’elle une garantie ; il faut lui démontrer qu’il ne lui
en est dû aucune,
.
L e sieur D escaffres, par son testament du 7 avril 1 7 7 3 , institua
Eléazard Daudin , son petit-neveu , pour son héritier ; il légua à
Marguerite Sobrier, sa mère, le mobilier et l’usufruit de ses biens ,
et la désigna exécutrice testamentaire, avec pouvoir de vendre pour
le paye ment de ses dettes,
Elle avoit vendu quelques objets avant 178 2 , et ne voyoit pas de
nécessité d’en aliéner encore, lorsque le sieur Capelle concerta avec
Daudin fils , m in eu r, le projet de se faire vendre le domaine du
Y ern et, dépendant de la succession Descaffres.
• Daudin fils, épris d'une passion violente, avoit résolu d’aller se
marier à Avignon ou en Italie ; et, pour cela, il cherchoit de l'ar
gent: un négociateur du sieur Capelle lui proposa la vente de ce
domaine.
(
A
�(
2
)
-
- ‘
M ineur, et n ’ayant pas le pouvoir de vendre, Daudin fils y
décida sa mère , qui fixa le prix à 21600 francs. En eût-elle voulu
demander le double, il n ’y a voit pas d ’obstacles, puisque le sieur
Capelle avoit déjà son plan.^
^
Il feignit d’adopter le prix de ¿16 0 0 francs , exigea que le contrat
portai quittance, au moyen des billets qu’il devoit faire ou céder.
En effe t , par acte notarié du 1 " . mars 17 8 2 , la veuve Daudin lui
vendit avec garantie , moyennant 21600 francs , le domaine du
V e rn e t, tous les bestiaux ët outils d’agriculture, ensemble cin
quante setiers de blé à prendre sur la récolte pendante, et le quart
du surplus de ladite récolte.
~
M ais ce prix , bien sérieux pour la dame Daudin , n ’étoit que
fictif pour le sieur Capelle ; déjà il avoit arrêté, avec Daudin fils,
que le prix du domaine ne seroit que de i 58oo fran cs, sur lequel il
devoit compter à peu près 4000 francs pour le voyage d’Italie, et
le surplus étoit délégué sur une maison de commerce d’Aurillac.
L a prévoyance fut portée plus loin; D audin, m ineur, pouvoit
réclamer un jo u r, et le sieur Capelle se munit d'une ratification
générale , dont la date fut laissée en blanc. 11 paroit meme qu elle
étoit fabriquée avant la vente ; c a r, dans I incertitude du mode de
mutation , le sieur Capelle y fit ratifier tous les actes passés à son
profit ( et il n’y en a qu’un seul ). Daudin fils écrivit tout cet
acte, excepté la date : le sieur Capelle avoue qu’elle est d'une autre
main.
On comprend d’avance que les articles secrets de cette capi
tulation étoient subordonnés à la reprise des billets signés le jour
de la vente. Daudin fils lés enleva, et disparut.
L a dame D a u d in , justement irritée, rendit plainte en soustrac
tion des billets de 21600 francs, et en outre, de divers blancs
seings. Sur le vu des inform ations, le bailliage de Vie rendit une
sentence, le 18 juillet 17 8 3 , qui condamna Daudin fils à restituer
à sa mère 21600 fran cs, permit de faire des saisies-arrêts , et
annulla les blancs seings q u i, en e ile t, n ont plus reparu. Ces
informations sont perdues, et on ignore qui a eu le crédit de les
/
�( 3 )
supprimer: la sentence seule existe, et le sieur Capelle d it, clans
son mémoire , qu’il en est porteur.
Il est à croire que ces informations secrètes , suivant 1 usage ,
contenoient des révélations qui seroient aujourd’hui b i e n utiles;
car le lieutenant général de V ie ( le sieur Sistrières ) , qui se trouvoit seigneur féodal d’une partie du domaine du Ver n e t, exerça
le retrait contre le sieur Capelle, et soutint que le prix réel n’étoit
pas de 21600 francs.
«.
Alors Daudin fils étoit de retour; le sieur Sistrières l’interrogea
ou le fit interroger; mais Daudin fils peu rassuré encore , et
pudori sito par cens , fut fidèle à son m entor, et répondit de ma
nière à mériter ses éloges : il se hâta de s’en glorifier par une
lettre du 10 août 17 8 5 , que le sieur Capelle a la bonté de produire.
■ « J ’ai subi interrogatoire pour savoir ce que j ’ai reçu de y o u s
» Sistrières croit que vous n’ avez fait de billets que pour quatorze
y> mille frarj.es ; j’ai dit que vous en aviez fait pour tout le con
» tenu au contrat, ce qui l’interloqua fort. Quoi qu’il en so it, je
» ne vous nuirai jamais , parce que vous nS avez paye ce que
» vous tn*aviez promis.' »
L e procès Sistrières ditfa quelques années encore, et fut terminé
par un traité du 5 mai 1789 , dans lequel les parties se contentent
.
de dire que, parfaitement instruites de leurs droits, elles se sont
respectivement départies de leurs prétentions.
T ous ces résultats mystérieux étoient ignorés de la dame Daudin,
qui se consoloit de ses chagrins précédens par le retour de son fils.
L a révolution a amené pour elle d’autres terreurs et d’autres sacri
fices : elle a été enfin obligée de faire plusieurs ventes ; et le sieur
Capelle, qui ne conçoit pas que les fortunes puissent diminuer, lui
en fait un crime. Elle a réglé ses affaires avec son fils pour la suc
cession Descaffres ; et n’ayant plus que le souvenir de son ancienne
aisance, elle étoit loin de s’attendre, sur la fin de sa carrière, à
être accusée de collusion et de complots de la part de l’homme à
qui elle pouvoit en reprocher si justement.
Daudin fils a cédé ses droits à Desprats , qui a cité le sieur
A 2
�4 )
Capelle en désistement du domaine du Vernet en l ’an 8. L e sieur
Capelle a produit la ratification, qu’il a datée de 17 8 8 ; et alors
D a u d i n ',’ mis en cause par D esprals, a commencé une procédure
en inscription de faux contre la date de cette ratification.
L e tribunal d’ Aurillac en a ordonné le dépôt au greffe; le procès
verbal mentionne que la date est d’une autre'main, et d’une encre
plus noire, qu’on a repassée sur plusieurs lettres du même acte. Le
sieur Capelle se défendoit d’abord par des nullités contre cette
procédure; mais il a fini par la rendré sans objet; en déclarantqu’il reconnoissoil la date de la ratification pour être d’une autre
main. • .1
”
'
•
...
- L e sieur Capelle, qui sentoit bien toute la difficulté qu’il avoitde faire usnge désormais de cette ratification, a cherché à élaguer'
tout à lait Daudin fils, s’il le pouvoit; d’abord il le; reconnoissoil
pour héritier Descaffres ; ensuite il a attaqué le testament de nul-,
lité , et'a prétendu que la mère étoit héritière'(*),
. ... . „
Sa défense s ’est basée principalement sur ce moyen il a , de
p lus, crié à la collusion, et s’est.tourmenté, par^un appareil d’in-r.
terrogatoires, pour se donner l’apparence d’u n e \iclirne de Ja raau-,
vaise foi. En concluant à la garantie contre la dame Daudin , il
a affecté de dire qu'il ri’ auroit pas cependant de ressources contre
elle, s’il perdoit son procès. L e sieur C ap elle, p a r . jugement du i 5,
germ inal an 1 1 , a été débouté,de sa demande en nullité du testa-j
ment de 17 7 3 ./La vente du i " , mars' 178 2 , et la ratification de
178 8 , ont été déclarées,nulles. L e sièur Capelle a été condamné
à se désister du domaine du V ern et. L a daine Daudin a été çonrfamnée à le garantir et indemniser, et à lui payer non-seulement
21600 francs , mais: encore'ses dommagc^-intérèls. Daudin fils est
condamné à rembourser 1 38oo francs', et les améliorations, U
£st ordonné que , sur une demande en garantip solidaire formée
par Capelle contre les sieur et dame Daudin , les parties contesC
(* ) A u jo u rd’hui il se juge lui-m ém c ; ca r, pendant l ’impression <Ie cc m é m o ire , il vient do
conclure contre Dcspr^ts à la m l'rog.ition légale. Jist-ce un propriétaire qui achète «a propriété I
c it-c e ua acqu éreur, prc.t à vtre c v iiic é , qui achète le fo n d i u procès i rem sibi necessariam.
�( 5 )
f
teront plus amplement. L a dame Daudin est condamnée aux dépens.
Toutes les parties ont interjeté appel de ce jugement.
M O Y E N S .
_
L a vente de 1782 est annullée; et cependant la dame Daudin
est condamnée à garantir le sieur Capelle , et même en des dommages-interèts considérables : n’y a-t-il pas à cela de l’inconséquence?
Une telle décision se conçoit, si le sieur Capelle a acquis loya
lement et de bonne foi ; car alors la garantie qu’il a fait stipuler
ne peut pas être illusoire.
Mais s’il a voulu tromper celle qui lui vendoit, il répugneroità toute justice qu’elle seule fû t grevée, et qu’il profitât au con
traire de sa propre fraude.
■
O r, il est indubitable que le sieur Capelle atrompé la dam eD auin,
et il doit en résulter non-seulement qu’il n’y a pas lieu à garantie,
mais même qu’il n’y a pas de vente.
i°. Il n’y a pas de vente ; car le consentem ent en fait le prin
cipal caractère , el il fau t qu’ il intervienne sur la chose et sur
le prix , sans cela il n ’y a pas de vente.
. Ce ne seroit qu’une subtilité de dire qu’il a dans la vente de
1782 un.prix quelconque, parce que si ce prix n’est pas réellement
celui dont les parties sont tombées d’accord , il n’y a plus véritable
consentement; surtout quand c’est l'acheteur qui veut donner une
somme moindre : tels sont les principes.
» L e consentement, dit Pothier, doit aussi intervenir sur le
prix. Ce consentement ne se trouve p oin t, si l’un compte vendre
» pour uïie sommé plus grande quecelle pourlaquelle l’autre compte
» acheter. Il n’y a donc pas de contrat de vente, faute de consen
ti tement. h ( T raité du contrat de vente.', pâg. y . i n\ 36. )
E t ce n’ est là que la copie de la loi elle-même : S i in pretio vel
in re errent, vel dissentiant, conlractus erit imperjectus. L . 9
ff- D e contr. enipt.
^ A. quoi la glose ajoute : Quod si minus emptor , majhs venditor
p u tw it, impeditur conlractus.
t a loi a donc voulu pourvoir aux surprises, et il n’importe que,
�,( 6 )
dans l'espèce , la vente ait été exécutée, parce qu’il est évident
que la même erreur , qui président au contrat, devoit en proléger
l’exécution.
. ,
L e principe est général ; et si l’acheteur a le secret de persuader
au vendeur qu’il est cl’accord sur le prix , il est certain qu’il y
aura le simulacre d’une vente, jusqu’à ce que le vendeur soit certain
qu’il a été trompé ; alors , si par les circonstances on peut juger
qu'il s ’est opéré une nouvelle convention , celle-là seule aura quel
que considération, plutôt que la première qui étoit vicieuse.
Si donc on pouvoit reprocher à la dame Daudin qu’elle n’a pas
réclamé plutôt, elle répondroit avec raison que la collusion de son
fils et du sieur Capelle contre elle-même a entretenu son erreur; ’
qu’elle a si bien cru le sieur Capelle innocéttti; qu’elle n'a accusé
que son fils, comme il’l’observe lui-même- : elle a si bien cru avoir
stipulé pour prix de vente 21600 fran cs, qu’elle a fait condamner
son fils à lui payer 21600 francs.’ <
Quel intérêt auroit-élle eu d’ailleurs-à faire un procès pour ce
dom aine? il ne lut appartenoît pas. L e principal intéressé étoit
son iils; mais il colludoit, et il étoit condamné à son égard.
Les éclaircissemens d’ ailleurs ne sont nés que du procès actuel,
des variations du sieur C apelle, et de la lellre de 1783 qu’il a
produite.
!
Ses variations ctbierit frappantes : i°. il diçoit, quant au testament
Descaffres, qu’il a voit été rassuré, en achetant, par le pouvoir que ce
testament, dont il avoit connoissance, donnoit à la dame Daudin
de vendre. Ensuite^, il a dit qu’on lui en avoit caché l’existence
il en a demandé la nullité, et il répète encore aujourd’hui qu’il l’a
méconnu.
V
>
■ :
2°. Quant au prix de la vente, le sieur Capelle disoit d’abord
que l’enlèvement des b i l l e t s étoit un conte; que la vente faisoit fo i;,
que les 21600 francs avoient été payes comptant, ce qui exclut
toute idée de soustraction d ’effets : et, aujourd’hui, il est obligé de
changer de langage , et de dire qu’il n’a'p ayé que Gooo francs
com ptant, et fait des billets pour le-surplus.
-,
L a lollrq de iy 83 a rendu'nécessaire cette esnèo.e de confes-
�.
^ 7 ^
.
.
,
sion forcée ; car , comment répéter qu’il n’y avoit pas eu d’effets ,
lorsque Daudin (ils écrivoit : J ’ai dit que vous en avçz fa it pour tout
le contenu au contrat ; et le sieur Capelle,avoit excipé de cette lettre.
Mais , c’est delà que naissoit la révélation essentielle pour la
dame Daudin : elle étoit forcée d’y lire tout à la fois la surprise
qui lui avoit été faite, et la sujétion de son fils pour la tromper
encore a p r è s son retour. Vous m ’ a v e z payé ce que vous m’avez
promis ; je ne .vous, nuirai jamais : donc il résultoit de ces deux
phrases qu’il y avoit un prix autre que les 21600 francs : donc le
sieur Capelle a voit payé directement à Daudin fils ; vous m ’ a v e z payé.
■ E t dès-lors quelle poignante réflexion pour la dame Daudin î
Jusque-là elle avoit pu croire que son fils, ayant enlevé des billets,
avoit couru chez les banquiers pour s’en faire payer avant pa fuite ;
et il a fallu voir dans cette lettre que le sieur Capelle avoit payé à
tin fils de famille rebelle, à un mineur, des billels enlevés, et après
une information d’un genre aussi peu ordinaire.
L a dame D audin avoit bien aisément été trompée. Son erreur a
duré jusqu’à ce que son fils , détrom pé lui-m im e sur le compte du
sieur C ap elle, a fait la cession qui adonné lieu au procès. A lo rs ,
attaquée elle-même, elle a eu intérêt d’examiner ce qu’elle eût mieux
aimé ignorer toujours.
11 n ’y a pas de vente, disons-nous , puisqu’il n’y a pas de consen
tement sur le p rix , dès que le sieur Capelle avoit machiné le projet
de n ’aclieler que i 38oo fr. un domainequ’il feignoit payer 21600 fr.
Mais encore moins , y a-t-il lieu à garantie , et cette proposition
est fondée sur les principes les plus constans.
' On peut vendre la chose d’autrui , dit le sieur Capelle , et par
conséquent on peut garantir une telle vente : cela est vrai ; mais
alors il y a au moins dans l’acheteur bonne foi dans la garantie qu’il
fait stipuler.
Dans l’espèce, le sieur Capelle n’étoit pas plus de bonne foi dans
cette garantie que dans la vente; caria garantie éloit une coud ilion
du prix de 21600 fran cs; si donc il savoit qu’à son égard le prix
¿toit moindre , H y avoit dol dans la garantie qu’il exigeoil.
�( S )
» L e dol, dît le Code c iv il, est une cause de nullité de la con
» vention , lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties
» sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre
» partie n’auroit pas contracté. » ( A rt. 1 1 16. )
O r , personne ne doute que la dame Daudin n’auroit pas vendu
et encore moins garanti au sieur Capelle, s’il l’avoit prévenue qu’il
iïiachinoit avec Daudin fils le projet de n’acheter que pour i 38oo f r .,
et même de fournir ce prix à un jeune homme qui fuyoit sa fam ille,
penturo.
En général, l’acheteur qui sait le vice de la chose vendue sciens
rei gravamen , ne peut pas demander de garantie; et à plus forte
raison celui qui a coopéré à ce vice, et qui plutôt l’a créé lui-même,
en sous-entendant un prix que le vendeur ignoroit et n’adoptoit pas.
E t, à cet égard, il faut remarquer un double principe; c’est que,
i°. la garantie même de tout troubles et évictions ne peut s’entendre
que d’une cause d’éviction qui existât avant la vente, et que le
vendeur pouvoit ou devoit savoir ; 2°, que si la cause d’éviction
résulle de la vente elle-même, quant à sa forme ou sa substance,
il faut que l’acheteur se fasse garantir expressément de ce vice connu.
y> L e débiteur, dit l’article u 5o du Code civil, n’est tenu que,
» dos dom mages-intérêts qui ont clé p révu s, ou qu ’on a pu prévoir
» lors du contrat ; » et cet article s’applique à la garantie d’évic
tion , d’après l’article i 63g ,
.
C ’est en vertu de ce principe que la cour d’appel de Paris, par
arrêt du 27 messidor an 1 0 , déchargeoit de la garantie un ven
deur qui s’y étoit soumis solidairement; mais à l’égard de-Pim-*
meuble d’un interdit, qui ne pouvoit êlre vendu sans form es;
» Considérant qu’on n’entend par garantie d’évictions et troubles,,
» que ceux étrangers au contrat, et dont il y a une cause e x is
tí tanle au temps du contrat....... Qu’on n’entend point par cette
>) garantie l’éviction dont les vices du contrat même sont la
» cause. » ( J. palais, n°. 1 7 1 , )
Dans l’espèce, la vente de 1782 a deux vices : l'u n , que lachóse
vendue étpit à autrui : le sieur Capelle n’ignorolt pas le testament;
�( 9 )
.
.
il l ’a avoué, et sa précaution anticipée de prendre une ratification
en blanc , le prouve d’avantage. >,
Le second.vice, radical en ce qu’il attaquela substancede 1 a c te ,1'
étoit connu de l’acheteur seul, et cette circonstance est bien plus
décisive-que celle de l ’arrêt de Paris. L e sieur Capelle savoit seul
que le prix exigé par la dame Daudin n’étoit pas le prix qu'il vouloit payer, et la dame Daudin qui garantissoit ne le savoit pas.
A-t-ellç donc donné un consentement valable à la garantie? Non*
car non videntur qui errant consentirez
» 'L é troisième ca s, dit Potliier, auquel il n ’y a pas lieu à la
» la garantie , est celui d’un acheteur q u i, ayant connoissancede.
». la cause qui donne-,lieu à l’éviction , l ’a cachée au vendeur qui
». l’ignoroit, et de qui il a stipulé la garantie : comme en ce cas
». c’est l’acheteur,qui,a induit en erreur le vendeur, en stipulant
» de lui une garantie qu’il n ’auroit pas promise ..... le vendeur
» parolt fondé à l’exclure de son action de garantie par l’excep» tion du d o l, en lui offrant seulement de lui rendre le prix
»' qu’il a reçu. »_ Contr. de vente , pag. i , n°. 191*
- : O r , la dame D audin n ’a rien-reçu , et le sieur Capelle le sait
mieux que personne. D audin fils avoue avoir reçu les i 5£oo francs J
il en a offert le remboursement, et dès-lors la veuve Daudin doit
rester au£si neutre dans cette malheureuse affaire, qu’elle l’eût
toujours été sans les manœuvres du sieur Capelle.
Répétera-t-il que tout est controuvé dans ce qu’il appelle une
perfide calomnie? la dame D audin, qui n’a eu intérêt de s’informer
de la vérité que depuis qu’on l’attaque, offre de prouver à la cour
que, par le dql du sieur Capelle, le prix exigé par elle fut fixé à une
somme beaucoup moindre entre lui et Daudin , alors âgé de
dix-neuf ans j qu il n’y eut pas, comme il le dit, pour i 56oo fr,
d’effets tirés sur la maison Lespinat et D om ergue, et que cette
maison n ’en a acquitté que pour 10000 francs au plus.
Mais qu’est-il besoin d’une preuve testimoniale, quand tout est
clair par des écrits, et qu’il y a plus de matériaux qu’il nVn est
nécessaire pour asseoir les présomptions que la. loi exi^e seules ert
matière de fraude.
.
�( 10 )
Que le sieur Capelle explique, s’il le peut, com m ent le prix réel
de sa vente étoit de 2 1 6 0 0 fra n c s , lorsque la lettre qu ’il produit
porte : V o u s
m’avez payé ce que vous m’avez promis, je ne vous
n u ir a i p a s .
Q u ’ il explique comment il a payé 6000 francs en argent, et le
surplus en effets, lorsque la lettre porte : Vous en avez fa it pour
tout le contenu au contrat ; lorsqu’après une plainte en soustrac
tion dos Billets, Daudin fils est condamné à payer à sa mère
vingt-u n mille s ix cents livres.
Qu’il explique dans quel temps il a payé ces billets, faits à divers
term es; est-ce au banquier? il avoit une saisie-arrêt; est-ce à
Daudin fils? Mais un magistrat pouvoit-il acquitter des billets
volés , à l'auteur du v o l, m ineur, après l’éclat d’une information?
Que sont devenus ces billets qu’aujourd’hui il avoue? Acquittés
par lu i, il doit les avoir.
N on, ce ne sont pas là les signes de cette loyale franchise
qu’il faut toujours retrouver dans les transactions sociales.
L e sieur Capelle a obligé la dame Daudin à s’instruire de ce
qu’elle s’efforçoit d’ignorer, et à voir ses derniers momens em
poisonnés par la conviction d'une trame qu’elle eût été plus heu
reuse de ne pas aussi pleinement acquérir.
Cette conviction même ne l’eût engagée à aucune démarche ;
car leur éclat même eût rappelé des chagrins que le cœur d’une
mère sait dissimuler. Mais le sieur Capelle lui envie cette paix
et sa neutralité j il ose demander à la dame Daudin une garantie
surprise par des manœuvres sans lesquelles il est évident qu’elle
n ’auroit pas contractée. Une telle demande n’est donc que le pro
duit de la turpitude ; elle est proscrite par les principes : car nemini
f r aus sua patrocinari debet ,
Me
D E L A P C H I E R , avocat.
M r.
FA YE,
avoué.
A R IO M , de l’imprimerie de L a n d r io t , seul imprimeur de la
Cour d’appel.— Therm idor an 1 3.
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Sobrier, Marguerite. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
successions
ventes
domaines agricoles
consentement
Description
An account of the resource
Mémoire pour Marguerite Sobrier, veuve Daudin, appelante ; contre Sieur François Capelle, intimé et appelant ; en présence d'Ant. Desprats, et d'Eléazard Rostang-Daudin, appelans et intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1773-Circa An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0404
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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Vic-sur-Cère (15258)
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PRÉCIS SUR DÉLIBÉRÉ
SEANT
P O U R
F r a n ç o i s
.
R O C H E ,
D ’APPEU
A RIOM.
a p p ela n t ;
C O N T R E
A n t o i n e F A U R E , J o s e p h P I T O U , et B e n o i t
M A N D E T , intimés.
propriétaire réduit à la mendicité par une friponnerie,
fait un dernier effort pour inspirer, en faveur de ses malheureux
enfans, un intérêt qu’il ne réclame pas pour lui-m êm e, et que
les circonstances de sa cause forcent assez de sentir.
T o u s les élémens de la résistance semblent conjurés contre sa
misère; e t, chose inouie peut-être, c’est après avoir prouvé.clairement qu'il étoit volé , que pour la première fois il doute du
succès de sa réclamation.
E t d û t , cet aveu , paroitrc étrange lui-même , il n ’en contras
tera que davantage avec la conviction intime de cette foule de
témoins appelés par la cour pour l ’instruire de la vérité.
Roche, forcé par un enchaînement de faits connus de la cour,
A
�Co
de vendre sous un nom em prunté, consentit, le i 3 messidor
an 10, une vente simulée de tous ses biens , sans exception,
à F au re, moyennant 16000 fran cs, à employer à ses dettes; et
il fut fait une contre-letlre portant que Faure, en les revendant,
auroit pour indemnité de ses engagemens 3ooo francs de bénéfice,
moyennant qu o i, et après le prélèvement des igooo francs et
des frais , tout l ’excédant a p p a r t ie n d r o it à Roche.
C e l homme infidèle, se voyant maître d abuser de la confiance
d ’un a m i, proposa à ses beaux-frères d’acheter ces biens a vil prix,
à condition de l’associer lui-même dans le bénéfice; mais ils reje
tèrent Celle offre avec indignation. V oyant qu’il n’y avoit pas de
fripons dans sa fam ille, il fit la proposition a d’autres qui refu
sèrent encore : enfin, la totalité des biens de Roche a été vendue,
le
brumaire an 11
aux sieurs Pitou de illo m , et IVÏandet
de Domaise , par un acte passé dans une auberge de Billom ,
devant un notaire de Saint - D i è r , et un notaire de Cunlhat,
moyennant 20/^00 f . , qui couvrent assez exactement les iqooo f.
et les Irais et taux frais ; de sorte que l’excédant revenant à Roche
se rédiûl à zéro.
L e s d e u x a c q u é r e u r s , à qui l a c o n t r e - l e t t r e étoit connue, comme
la cour n ’en doute plus, semblèrent d’abord ne vouloir pas lutter
contre l ’indignation publique, et se contenter d ’un bénéfice. T on
bien t’appartient, dirent-ils à R o ch e, nous nous arrangerons :
mais ils vouloient 6000 francs ; Roche offrit 100 louis, puis 200;
13
toutes les personnes honnêles du pays s'intéressèrent à cet arran
gem ent: les acquéreurs ne se relâchèrent pas.
lis avoient mieux connu la valeur des biens. Un domaine à
la Valette , dont Faure lui-même avoit offert 3/,000.francs; des
biens à la Chapelle-Àignon, pour plus de 20000 francs, toul cela
biens patrimoniaux, leur paroissoit une assez belle proie. Ils signi
fièrent leur venle à R o ch e, qui notifia une protestation ; mais en
verlu d une ordonnance il fallut déguerpir.
■
Roche a donc élé obligé de plaider conlre cette usurpation. L e
{*) L e Jour mémo où ou (ut vrtvsau '¡ue llo ch e arrivait (lü l'a ris, et ou il arriva eu effet.
�( 3 )
.
f
tribunal de Clormont lui a refusé la preuve du dol ; mais maigre
tous les efforts des Faure et consorts, pour soutenir que cette
preuve n'étoit pas admissible, la cour n ’a pas pensé que les lois in
terdissent l’éclaircissement de la fraude, et la preuve a été ordonnée.
Cette preuve consistait à établir, i°. que Faure avoit toujours
dit n ’être pas sincèrement acquéreur de Roche , mais prête-nom ;
2°. qu’il avoit offert lui-même 24000 francs du seul domaine de
la Valette ; 3°. que lors de la vente faite à F a u re , il proposoit un
prix de 35ooo fra n cs, que Roche vouloit réduire à 16000 f r . ;
4°- qu’il avoit proposé à ses beaux-frères de leur vendre et les as
socier au bénéfice des reventes , malgré sa contre-lettre ; 5°. queles
sieurs Pitou et Mandet avoient eu connoissance de cette contrelettre; enfin qu’il avoit tenu le propos qu’ils étoient trois associés,
ayant chacun 8000 francs à gagner.
T rois enquêtes ont été respectivement faites; et dans une ma
tière o ù , comme le dit C oquille, tout est occulte , où les parties
s’étudient avec soin à cacher la fraude sous les apparences de
la vérité ; dans une matière où la loi se contente de simples pré
somptions , ces trois enquêtes prouvent, certes, bien plus que la
cour ne pouvoit s’y attendre.
L a vérité ne s’y cache p a s , on y voit sans détour et sans
ambiguité tout ce qu’ il faut savoir. Jamais peut-être un abus de
confiance n’a été plus à découvert. U n fourbe consommé rougiroit de n’avoir pas su rendre sa fraude plus occulte; mais de bons
Auvergnats ne sont improbes qu’en se faisant violence, et le
naturel perce malgré eux : ce qui prouve combien il est aisé d’éviter
la contagion de l’exemple par une sévérité bien entendue.
?Ce Faure, qui se disoit obligé de vendre, le lendemain de la
foire de Clerm ont, parce que Roche avoit fui à Paris , qu’il devoit à la veuve Cossandois , et que lu i, F a u re, étant sans res
sources, alloit être arrêté pour les dettes de R o ch e..,, ce Faure
cependant savoit du sieur Nicolas que Roche arrivoit. ( V . les
20c. et I2e. témoins.) Roche ne devoit pas un sou à la veuve Cos
sandois ; le sieur P rad ier, à quji il dçyoit, venoit de donner du
A
a
�.
(-4 }
tenips^, et Faure venoit d’em prunter, pour le compte de1R oche,
yooo francs le jour même de la vente. ( V . les Ier- et 2e. témoins
de l ’enquête Pitou . ),
C e F a u re , qui prétend avoir été acquéreur légitime, et avoir eu
la fa cu lté de vendre ou de ne pas vendre , a dit à qui a voulu
l'entendre, qu’il n’étoit que le préte-nom de Roche. ( V . les 6 v ,
io ''. , 120. , i 3e. et i 5e. témoins■de Venquête , et le 2e. de la
continuation. ) A d'autres il a dit qu’il étoit le maître de le duper;
qu’il le tenoit.
Faure avoit, disoit-il, acheté les biens par une vente sincère ,
et à toute leur valeur, pour 16000 francs ; et il a cependant
oitert lui-meme 24000 francs du seul domaine de la Valette*
( V . les 7e. , i 5" . , 22e. témoins de Venquêté directe; le 2eï
de la continuation. ) Ce domaine se u l, ont dit plusieurs témoins ,
valoit plus dé 3oooo francs; et son impôt le; prouve. L e bail
à ferme actuel va, en denrée ou argent, à g 5o francs,, sans-les
impositions. Les biens de la Chapelle, vendus ou à vendre, iront
à plus de 18000 francs.
L e troisième fait 'interloque est prouvé de même. Lors de la
vente fictive de l’an 10 , Faure proposoit un prix fictif de 35ooo f . ,
et Roche ne vouloit qu’un prix de 10000 francs, puisque, disoit-il,
il ne s’agissoitpas de vendre. ( V . les témoins Roche et Laver roux.)
Faure, qui devoit vendre pour des prix d ’accord avec R o ch e ,
(¡V. la déposition du sieur Pradier. ) qui ne devoit avoir que 3ooo f.
et laisser à Roche tout l’excédant ; Faure cherchoit à vendre
à; bas prix«, et à se faire associer par l’acquéreur dans les
bénéfices des reventes: il l’a proposé à trois personnes avant de
vendre aux sieurs Pitou et M andet. ( V . les 20. , i 3e. , i 4e**
17e. témoins de l’enquête directe; les i et- et ac. de la continuation,
le 5.0 témoin de Venquête P ito u .)
Qui donc pourra douter dfc bonne foi de l'infidélité de ce F a u re,
q u i, sachant ce que valent les biens de R o ch e, s’ arrange pour,
vendre de manière h ne rien laisser de cet excéd a n t convenu, et
cherche des complices jusqu’à ce qu’il en ait trouve ?
.
�' T o u t cela semble étrangér aux sieurs Pitoü et’ Mandet',- q u i,
moins parleurs que F aure, n ’ont pas fait autant de confidences,
et qui se retranchent à dire qu’ils ont acquis de‘ bonne foi1 parce
qu’ils ont une vente.
‘
L a cour se rappelle qii’à la première audience ils soutinrent
n’avoir vu que la vente consentie à F au re, et n ’avoir jamais connu
la contre-lettre; la copie de cette contre-lettre même ,' disoit Faurë
pour leur prêter son'secours,«n’étoit sortie de chez le'n o taire que
depuis le procès.
,
1
T o ü t cela est' mensonge; le clerc qui écrivit la contre-lettré’ en.
fit à l’instant deux copies: On a voulu équivoqüer sur leut desti
nation ; mais plusieurs' témoins disent que Faure étoït*nanti de la
siérine longtemps avant la seconde vente. ( V . les iô T. ,
, i 5' . ,
ï8 \ ,• tém. de Venq. directe, et lé 2*. de\l’eriqi P ito u .)
D ’autres témoins attestent avoir parlé eux-mêmfcs de la cdntre-r
lettre a u ‘ sieur M andet', avant cette vente. L ’un des' notaires 1qui
l’a reçue déclare qu’il en fut questionî
Iss
. et i8*’ tém. ).
Q uand'on est surpris à m entir, on fait to n n e contenance: les
sieurs.Pitou et M andet disent aujourd’hui que la connoissahce dè
cette contre-lellre ne les rend pas de mauvaise foi. A qui croientils donc en imposer? Com m ent auront-ils pu- v o ir\ dans cette
contre-lettre, qu'après avoir prélevé igooo francs et les frais , tout
l ’excédant appartiendra à Roche , sans croire qu'il dut y avoir un
excédant? comment auront-ils pensé que Roche faisoit à Faure un
don de 3ooo fra n cs, pour vendre ses biens de manière à ne pas
lui laisser un sou? ont-ils pu lire là'contre-lettre sans voir qu’il
- étoit’ impossible de vôir dans cette vente'une mutation sincère?
Les sieurs Pilou H Mandet prétendent être tout' à fait exempta
decollusion , parce qu’elle n ’est pas; disent-ils, clairement prouvéei
M ais comment expliqueront-ils ce propos de F a u re:N o iis sommes
trois, et c’est pour nous un bénéfice d e '8ooo francs chacun?
{ V . les 17*. et 210. tém. de l ’e n q ., et le 1" .d e la continuation.)
.
Comment se débarrasseront-ils de cette déposition'de V achier,
leur propre notaire, q u i, au moment de la vente ; et quand ou
�(
6
)
connolt la contre-lettre, rappelle Vultimatum de Faure? Je v e u x
que le p rix couvre les 3ooo francs qui me reviennent, avec les frais
et fa u x frais ; et en effet 20400 francs couvroient tout cela exac
tement.
j Com m ent expliqueront-ils ce hasard étonnant, qu’un homme
de Tours vende à deux personnes de B illom et de Dotnaise, des
biens situés à Oliergues et à la Chapelle-Aignon, par-devant un
notaire de S t.-D ie r et un notaire de Cunlhat, quoique la réunion
eut lieu dans une ville populeuse?
Quel sens donneront-ils à ce propos de l’u n .d 'e u x , à R o c h e ,
après la vente : Ton bien t’appartient? avoient-ils donc la con
viction d'être acquéreurs sérieusement et de bonne fo i?
’
. .N o n , il faut le dire avec cette profonde conviction que la vérité
inspire, tout cela n’est pas de la bonne foi. D e tels actes ne sont
pas des conventions sincères, et que là loi doive protéger.
II n’y a de prouvé, d it-o n , que le consiliumfraudis : y a-t-on
bien réfléchi, et n ’est-ce pas une sorte d’ironie contre un malheu
reux dépouillé de tout? et certes, si quelque chose est clair, c ’est
X’eventus fraudis p l u t ô t même q u e le c o n s iliiim . L ’u n est l ’e f f e t ou
le résultat ; car le dépouillement existe. L ’ au tre en est la cause
présumée. Si donc on avoue qu'elle existe, comment séparer l’effet
de la cause ?
Faure étoit forcé de vendre, d it-o n ; des huissiers le poursuivoient pour les créances de Roche. Ce n ’étoit que pour ses propres
créances, car c’étoit la Cossandois, créancière de Faure, et qui
a donné un certificat de ne l'avoir jamais été de Roche. Pradier,
seul créancier de celui-ci, avoit donné du temps. Faure savoit
que Roche étoit en route ; et il arriva en effet le même jour de
la vente. Faure venoit d’emprunter 7000 francs pour Roche : il
ne vendoit donc pas par nécessité, mais par suiLe de ses recher
ches d’associés, avec lesquels il partagea la dépouille de Roche.
Yoilà ce qui étoit plus évident que tant de présomptions de bonne
i;’oi qu’il faut chercher dans la charité chrétienne, et non dans les
enquêtes, où l’on ne voit que dol et mauvaise foi à toutes los lignes.
�La cour les a voulues, ces enquêtes ; seroit-il possible qu'elle les
comptât pour rien , quand leurs frais considérables ont achevé
d’épuiser un malheureux qui eût appelé toute sa contrée en
masse pour tout expliquer, et dire aux magistrats que ses enne
mis même partagent encore Tindignation générale contre, ses
spoliateurs?
..
Une seule chose est aujourd’hui à examiner. Résulte-t-il des
enquêtes que.Roche est volé?
On ne peut douter alors que les sieurs Pitou et M andet ont
colludé avec F au re; et il seroit dès-lors injuste de leur laisser
une propriété qui ne fut jamais celle de leur vendeur.
Mais s’il étoit possible que ces acquéreurs fussent m aintenus,
est il même douteux que Faure dût être tenu à indemniser R o ch e,
lui qui cherchoit des associés au vol qu’il m éditoit, lui qui est
démontré fourbe par tant de témoins? L a seule idée de son impu
nité révolte; et cependant il est aussi sur les r a n g s pour partager
la d é p o u ille de R o c h e , et re ce v o ir la r é c o m p e n s e de son infidélité.
E n résultat, les sieurs Pitou et Mandet auroient pour 20400 fr.
deux corps de bien qui valent, suivant les témoins, 5oooo francs.
Quand ils ont voulu traiter de gré à gré, ils offroient 18000 fr.
de plus; ils avoient même payé un à-compte et accepté une quit
tance avec réserves : ils en conviennent, et cependant ils n ’ont eu
garde de la représenter.
Mais on dit à Roche que l’acte par lui consenti donne tout pouvoir
à F a u re, et que Faure a pu se considérer comme propriétaire , et
vendre; tout cela étoit le moyen qui devoit empêcher les enquêtes;
la cour a jugé que le droit de Faure dépendoit de l3intention des
parties, et non de la simulation de Facto.
l L...
Cette décision de la cour étoit pleine de moralité et de justice :
la règle générale que les conventions des hommes font leur loi ,
n ’est exacte que par la supposition préexistante d’un consentement
libre et d'une intention conforme aux clauses. Mais quelle loi pour
voit dire à celui q u i , dupe de son imprudence, s’est exposé
à manquer de tout : cela sera parce que vous l’avez voulu? L a
�)8(
lo i, qui .n’a pu prévenir .cette imprudence, le protège encore, s’il
réclame son secours. Jamais l’être qui se noie n ’a été repoussé du
rivage j et quand il a été jeté au malheureux Roche une planche
dans son naufrage, quand elle lui a été si utile, est-il proposable
de l'avoir appelé au port pour le rejeter dans l’abîme.
■r
. ..
M e D E L A P C H I E R , avocat.
M e M A R I E , licencié avoue'
A R IO M , de l ’im prim erie de L a n d r io t , seul im p rim eu r de la
C our d ’appel. — F ru c tid o r an 13.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roche, François. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
contre-lettre
prête-nom
ventes
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Précis sur délibéré pour François Roche, appelant ; contre Antoine Faure, Joseph Pitou, et Benoit Mandet, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1802-Circa An 13
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0402
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0736
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53786/BCU_Factums_M0402.jpg
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Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Contre-lettre
domaines agricoles
prête-nom
ventes
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6ca8a80a3be30a24eb331e1873abf0a3
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Text
PRECIS
EN R É P O N S E
POUR
T h é o d o r e et J u l e s d e V E Y R A C , in ti m és;
CONTRE
M ar ie
G I N O U X , Veuve de J
ean
- J acques de
V E Y R A C , appelante.
E s t - c e
bien d’elle-m êm e que la veuve V e y ra c a
voulu parler, quand elle imprime qu’elle ne désire que
la paix et le repos., qu’elle a toujours voulu être juste,
et qu’usant de tous les ménagemens q u ’exigeait sa
qualité de seconde m ère, elle en a rempli les devoirs
avec bienséance?
Il faut donc que les enfans V eyrac oublient que
depuis neuf ans elle relient la fortune de leur p è re ,
z
�v.
(a )
«ans qu’ils aient pu toucher aulre chose que quelques
minces revenus, arrachés en partie parties saisies-arrêts,
qu’elle a su encore neutraliser.
•
!
Il faut donc qu’ils oublient quatorze jugemens ou
arrêts qu’il a fallu obtenir contre elle , dans lesquels
elle seule a été condamnée aux dépens, et trois fois
en son nom personnel.
Il faut donc qu’ils oublient l ’expoliation m éditée,
sous son n o m , par un certain Lam bert, que la coup
a.condamné à restitution.
'
Il faut donc qu’ils oublient les calomnies et les li
belles qu’elle a plps d’une fois répandus contre une
famille respectable, à l’égard de laquelle elle devait
effectivement user de ménagemens, parce qu'indépen
damment même de ses chicanes, elle avait beaucoup
de choses à faire pardonner.
son
v i s a g e , et étudiant un rôle nouveau, a cru se rendre
plus recommandable en la cour, les enfans V eyrac ne
M a i s si la v e u v e V e y r a c , c o m p o s a n t a u j o u r d ’ h u i
sont point dupes de cet astucieux travestissement. Sa
conduile soutenue, pendant huit a n s , leur a prouvé
qu’une belle-mère n’est , le plus souvent, qu’un être ,
incorrigible et malfaisant, dont il ne faut attendre ni
procédés ni contrilion.
Ainsi la veuve Veyrac peut cesser la contrainle qu’elle
s’est imposée, et reprendre son caractère. Ceux qu’elle
a si long-iems outragés lui pardonneraient tout, si les
larmes dont elle se dit a b reu vée, étaient celles de la
�( )
3
pénitence ; mais quand des larmes ne font qu’un moyen
de procès , elles ne séduisent p o in t, et ne sont que
ridicules.
L ’objet principal de la contestation était terminé
entre les parties, après toutes les chicanes qu’il était
judiciairement possible de susciter aux enfans Veyrac.
Il était jugé qu’ils auraient 10,000 francs de rente
perpétuelle sur la succession de leur a ïe u l, outre les
droits de leur mère, et la succession d’un oncle.
L e tribunal du P u y , la cour d’appel, la cour de
cassation avaient décidé que cela serait ainsi ; mais la
veuve V eyrac a médité un m oyen de paralyser une
décision aussi bien consolidée; et cette attaque indirecte
de la chose jugée , est aujourd’hui l’objet du procès
pendant en la cour.
C ’est dans le contrat de mariage de François-Camille
de V e y ra c , et dans la clause même jugée p a rla cour?
que la veuve V eyrac puise ses moyens d’attaque.
Par l ’article 2 de ce contrat, du 19 janvier 1 7 8 5 ,
Jean-Jacques de V e y ra c , donne et constitue à Fran
çois-Camille de Veyrac son lils (père des intimés), d ix
mULe Livres de rente annuelle et perpétuelle, avec son
hôtel au P u y , et la moitié de ses meubles.
lui assure
de plus la moitié des biens dépendans de la succession
de la dame de Maison-Seule, mère du futur, pour en
11
j°uir après son décès; et enfin il lui donne la faculté
prendre dans ses bois celui nécessaire a l’ usage de
sa maison.
2,
�3
«
«
«
«
«
«
'
.
.
(
4
}
L'article
est ainsi conçu : <rDans la donation et
constitution ci-dessus de 10,000 francs de rente est
comprise la substitution faite au profit du futur par
le sieur de V eyrac de Maison-Seule son aïeul, dans
son testament. Comme aussi le fu tu r ne pourra point
rechercher ledit, seigneur son père, relativement à
l’inventaire de M. son oncle le chevalier de Veyrac*.
A rticle 4. «rLes autres biens dudit sieur de V eyrac,
«■en quelques nalures qu’ils soient , terres , contrats
« et autres, lui demeureront réservés, ainsi que les
« fruits des autres biens propres du fu tu r , desquels
« ledit seigneur son père a droit de jouir en vertu de
« sa puissance paternelle ; lesquelles clauses ont été
« expressément requises par ledit de Veyrac père (1)».
.Après le décès de François-Camille de V e y r a c , en.
l’an 6 , la famille, présidée par l’aïe u l, lui-m êm e, crut
devoir déférer la tutelle au sieur de G laven as, le beaufrère et le meilleur ami du défunt.
( 1 ) Ce contrat de mariage a une clause dé réversion, stipulée
au cas où le futur ayant des enfans, ils décéderaient. L a veuve
V e y ra c a jugé à propos (p ag. 6 de son mém oire) d’y lire : dé
céderait ; ce qui ôlerait aux enfnns de Camille tout l’effet du
contrat de mariage de leur père : cependant elle n’y insiste pas.
Mais elle devait dire à la cour que celte découverte n’est pas
nouvelle de sa part ; q u ’elle proposa ce moyen en l’an 7 , et
rendit nécessaire un compulsoire de la minute du contrat de
mariage. Il fut reconnu qu’il y avait ils décéderaient , et alors
la clause est devenue sans effet, parce que les enfans vivent. L a
veuve s’est tue depuis cette époque. Comment donc revient-elle
sur ses pas, quand tout est ju g é ?
�( 5 >
.
.
- Ce n’est pas sans adresse et sans mauvaise foi que
la veuve V eyrac parle de manœuvres employées par
la famille pour contrarier le vieillard sur ce point ;
elle sait mieux que personne que tout se passa de son
a v e u , parce qu’il partageait sincèrement les craintes
de toute la famille sur l’avenir que préparait sa seconde
femme aux enfans de son fils. Elle sait encore que le
sieur de Glavenas n ’ a c c e p t a , pour ainsi dire que malgré
lu i, une tutelle onéreuse; et les mineurs V eyrac se
plaisent à déclarer que sans lui ils n’auraient pas eu les
moyens de vivre, malgré leurs 10,000 fr. de rente, puis
que, pendant les interminables procès, suscités par leur
marâtre, elle a trouvé le secret de retenir leur fortune.
Voilà l’explication de l’une des calomnies de la veuve
Ve37rac : revenons maintenant aux premières causes du
procès, avec la b riévelé que com porte une cause , dont
tous les détails ont été rappelés dans des imprimés précédens , et qui n’a besoin que d’être réduite au seul
point de vue sous lequel elle se présente en la cour.
Jean -Jacques V eyrac é ta it, avant sa m o rt, livré
exclusivement aux volontés de sa femme et de ses con
seils. Contrariée de ce qu’il n’avait pas voulu la tutelle,
elle l1engagea à ne rien payer de la pension des mineurs,
ou plutôt elle refusa pour lui : et le tuteur se vit obligé,
plus d’un an après son entrée en exe rcice, d’obtenir
Une sentence le 2y thermidor an 7, pour se procurer le
paiement de la rente de 10,000 f r ., et faire régler ce
�•
( 6 }
,
dont le sieur de V eyrac père ne s’était pas retenu
l ’ usufruit.
Mais il est faux de dire que les saisies-arrêts furent
accumulées sur le sieur de Veyrac pour le priver de
tous ses revenus , et qu’il passa ses dernières années
dans un dénuement absolu. Ces faits sont de la pure
invention de Marie Ginoux; aucune saisie-arrêt n’eut
lieu pendant la vie du sieur de V eyrac ; on l’a défie
d’en produire une seule.
A compter du décès du sieur de Veyrac ( i . er bru
maire an 8 ) , il a fallu se résoudre h plaider avec la
v e u v e , pour ainsi dire, jour par jour.
Verbalisations sans fin à tous les actes et inventaires;
refus de délaisser le mobilier même des mineurs ; oppo
sitions sur oppositions h toutes les procédures et à toutes
les saisies-arrêts5 offres de payer tantôt les arrérages de
la renie de 10,000 fr. , tantôt le capital, puis révoca
tion de ses offres et désaveu : opposition à des jngemens passés en chose jugée , et appel de ceux qui la
déclaraient non-recevable : voilà en bref comment
s’est passé l’an 8.
I/an 9 fut employé h des discussions plus sérieuses,
mais moins rapides. Les mineurs avaienl pris des con
clusions générales pour le règlement de leurs droits j
la v e u v e , à la vérité , contesta tout > forma des de
mandes incidentes, mais sans concevoir même l’idée
de répéter les sommes énormes qui font le sujet de
sa demande actuelle.
�.
( 7 }
.
Cependant c’était alors le m om ent; car les mineurs
avaient conclu au paiement de toutes leurs reprises dans
tous les estocs de la famille de Veyrac.
Condamnée par défaut le 21 nivôse an 9 , la veuve
V eyrac forma opposition, et fut déboutée par jugement
du 14 germinal suivant; elle en interjeta appel.
L ’an 9 fut encore consacré à l’épisode de L am b ert,
qui ne dut pas préparer la cour à être très-favorable
à la veuve Veyrac.
L e jugement du 14 germinal an 9 fut confirmé par
la cour, le 28 pluviôse an 10 ; et la veuve V eyrac fut
condamnée aux dépens de la cause d’a p p e l, en son
nom personnel, et sans répétition, comme elle l ’avait
été déjà au P u y , pour les dépens de l’opposition. Elle
s’est pourvue en cassation, où elle a encore succombé.
Les points principaux du procès étaient jugés, ce
pendant il restait sept articles non éclaircis ; mais la
veuve V eyrac n’entendait pas se contenter d ’un aussi
petit nombre de difficultés ; aussitôt après son appel,
elle présenta requête au P u y , pour plaider en même
tems sur plusieurs nouvelles prétentions de sa part.
A v e c cette découverte inopinée, la veuve V eyrac a
trouvé le secret de prolonger la contestation pendant
près de sept ans; c’était là tout son but.
Car elle a eu la satisfaction de dire qu’avec tant de
j ugeniens et d’arrêts, les mineurs V eyrac ne sont pas
plus avancés en 1808 qu’en l’an 8.
�( 8 )
^
Ceci paraîtra sûrement une fable ; cependant rien
n’est plus réel> et voici par quel secret la veuve Veyrac
est parvenue à paralyser les arrêts de la cour.
•
En faisant donation de 10,000 fr. de rente à son
fils, M. de V eyrac père dit que dans La donation,
est comprise La substitution faite au profit du futur
par son aïeul,
' C'est là où la veuve V eyrac a pris son texte; elle
a dit aux mineurs V eyrac : « A y e z votre rente, j’y
« consens, puisqu’on m’y force ; mais dans votre renie
«
«•
«
«
est une substitution. D a n s cette substitution, se trouvent des dettes; et non-seulement ces dettes se com
posent des dots et légitimes que vous d e m a n d e z,
mais vous me devez vous-m êm e une foule d’arti^
* d e s , notamment la dot de votre bisaïeule, etc.»
C ’est dans ce raisonnement que le procès actuel a
pris sa source. Il est inutile de rappeler tous les chefs
de demandes décidés p arle jugement du P u y ; il suffit
de dire que les mineurs V eyrac s’en sont tenus de leur
part aux articles restés indécis en l’an 9.
Elle a formé six nouveaux chefs de demande qui
sont de prétendues dettes dé la substitution , et qui
sont au reste énumérées dans son mémoire (page 17).
L e tribunal du P u y a statué sur le tout, le 26 prai
rial an 12; il a pensé que les mineurs devaient avoir
leur rente franche et quitte, et en outre les succes
sions dont leur père ne s’était pas départi par son con
trat de mariage.
�.
(
9
}
A vant de suivre la veuve V eyrac dans ses demandes
et moyens, il faut d’abord savoir ce qui a été demandé
et jugé entre les parties avant ce procès, pour éviter
la confusion, et mettre la cour à portée de vérifier
tout d’ un coup ce qui a été jugé ou préjugé.
En Tan 9, les mineurs Veyrac demandèrent, i.° acte
de leur option de s’en tenir aux 10,000 fr. de rente ;
2.0
j oo fr. pour la moitié de la dot et reprises de la
38 5
3 5
dame Morges leur mère ; .° ,ooo fr. pour moitié de sou
mobilier ; 4.0 la moitié du mobilier délaissé par Jac
ques-Antoine de V e y ra c , bisaïeul; .° 22,000 fr. pour la
5
légitime de Jean-Hugues de V eyrac; 6.° l’exéculorialité du jugement du 27 thermidor an 7 , pour ladite
rente de 10,000 fr., paiement des arrérages et conti
nuation du paiement à ven ir; 7.0 le partage de la suc
cession deM arie-Anne Belut de Trinlinliac leur aïeule;
8.° la moitié des sommes reçues par Jean-Jacques
V e y ra c , pour les biens aventifs de la dame de Morges,
aïeule des mineurs; 9.0 la distraction définitive du m o
bilier de leur père; io.° i o fr. montant d’un billet
fait au tuteur pour vente d’un cheval ; n . ° la faculté
de prendre du bois à perpétuité , conformément au
contrat de mariage.
5
Loin de proposer aucuns moyens de compensation
conlre ces demandes, voici les conclusions que prit la
y^uve V e yra c, telles qu’elles sont consignées dans le
jugenQent définitif du 14 germinal an
A- ce qu’il lu i
3
�( IO )
fu t donne acte de ce que sur les articles i , 4 et 10, elle
s’ en rapportait à La prudence du tribunal, ainsi que
sur le paiement de la rente de 10,000 fr. et de ce quelle
consentait leur délivrer des à présent les titres en bonne
form e d ’ une créance de 2 ,000 fr . en capital} due par
la maison V o g u ié; sur le surplus des demandes à ce
que les mineurs en fussent déboutés, attendu qu’elles
n étaient pas établies.
5
E n expliquant ces conclusions, elle fit plaider sur
l’art. 2 des demandes, que si les mineurs établissaient,
par des quittances, que le défunt eût reçu 70,000 fr.
de la dame de Morges, elle ne ferait aucune difficulté
sur ce ch ef de demande; elle dit la même chose sur
l ’article .
3
Sur l’art.
5, elle objecta qu’on
11e justifiait ni le tes
tam ent, ni la consistance des droits de Jean-Hugues ,
et que d’ailleurs François - Camille de Veyrac avait
répudié à ladite succession.
Sur l’art. 6 , qu’elle ne contestait pas le paiement
de la rente de 10,000 fr. mais que les arrérages anté
rieurs à l’an 7 étaient surpayés.
1
Sur art. 7 , elle pretendit que la succession Trin tinhac était bien assurée pour moitié au père des
mineurs , par son contrat de m ariage, mais que ce
mot n’opérait pas une donation, sur-tout en D au phiné. Cet article fut au reste discuté par elle; en
point de droit, avec une extrême longueur.
�(II )
Sur l’art.-8 , elle dit qu’il fallait prouver que Jean
Jacques V eyrac avait donné des quittances.
Sur l’art. 9 , elle soutint que le père des mineurs
s’était emparé de la maison du P u y 5 et en avait dis
sipé la majeure partie.,
Sur l’art, i i , elle prétendit que la faculté de pren
dre du bois était personnelle au père des m ineurs, et
qu’il était ridicule de vouloir qu’elle s’étendît à sa
postérité.
¥
Voilà tout ce qui fut soumis aux premiers juges, et
par suite à la cour d’appel.
.
1
Les mineurs obtinrent la rente de 10,000 francs , a
faculté de prendre du bois, le partage des immeubles
Trintinhac, et une partie du mobilier. U n e preuve
fut ordonnée à l ’égard d’une autre partie dudit m o
bilier , et sur tout le surplus, il fut ordonné plus
ample contestation.
Comment donc la dame V eyrac , après des con
clusions et une plaidoirie aussi précises, a-t-elle pu
se démentir elle-même, au point de prétendre ensuite
. que la remise de la substitution mettait, sur le compte
de François - Camille de V e y r a c , toutes les dettes de
son ^aïeul?
Si cela eût été ainsi, comment donc la veuve V eyrac
a~t-elle consenti à subordonner le paiement de plu
sieurs deües à un simple rapport de quittances; c’était
■
4
�(
12
)
îë cas au contraire de soutenir qu’ elle ne devail rie n ,
et d’opposer des compensations.
Les demandes pendantes en l’an 9 présentaient le
cadre général de toutes les prétentions respectives; les
mineurs, qui n’avaient rien, étaient demandeurs, et
avaient réuni tous leurs chefs de demande. La tutrice
était défenderesse contr’eux, et demanderesse en par
tage conlre l’interdit ; elle avait aussi présenté à la
fois toutes ses prétentions.
Ses demandes ultérieures formées après Leju g em en t'
d é fin itif, où elle emploie quarante rôles à faire valoir
ses m oyens, sont donc des prétentions de mauvaise
f o i , et non-recevables?
Elle ne les présentait, disait-elle alors, que parce que
te jugem ent était exécutoire nonobstant Cappet. Elle
n'avait donc d’autre but que de paralyser des créances
Certaines par des prétentions imaginaires : et ce qu’elle
ne mettait en a v a n t. que comme une chicane a vo u é e,
elle le soutient aujourd’hui avec obstination.
Mais qu’est-il besoin de lins de non-recevoir contre
des demandes aussi déplorables? Suivons les moj^ens
de la veuve V e y r a c , et quelques réflexions suffiront
pour montrer qu’elle ne peut pas être de bonne foi
elle-même dans sa découverte.
La principale question à traiter n’est pas de savoir
si le contrat de mariage de 1787 contient La remise de
la substitution de l’aïeul, par Jean-Jacques V e y r a c , à
�( 13 ) _
.
son f i l s , mais si au contraire il ne contient pas la
remise de cette substitution par le f ils t au-profit du
père (i).
L a clause du contrat en effet ne laisse pas d’équi
voque, comme le dit fort bien la veuve de V eyra c
(page 39 de son mémoire),' «le sieur de V eyrac ne
«• donne 10,000 fr. de rente à son fils que pour s’ ac« quitter envers lui. Nemo liberalis, n isi Liberatus ».
Il est difficile d’être plus d’accord sur les principes,
et de l’être plutôt. Car les mineurs V eyrac adoptent
parfaitement celte première et fondamentale pensée
de leur adversaire.
Que résulle-t-il en effet de la clause du contrat, qui
ne peut pas s’interpréter de deux manières? C ’est que
Jean-Jacques de V e y r a c , grevé ou débiteur d’ une subs
t i t u t i o n , s’ e n est acquitté p a r le moyen du contrat.
C ’est là le contrat do ut des ; et comment conce
voir que celui que la veuve V eyrac dit acquitté par
le moyen d’une rente, qui est le prix de sa libération,
11’ait pas retenu pour son compte la chose même qu’il
payait de son argent?
Il faut encore ajouter, avec la veuve V e y r a c , que
sans cet arrangem ent, et si François-Camille V eyrac
n’avait pas eu droit à la substitution, son père ne lu i
aurait pas fa it une constitution aussi forte.
s
(0
T_.es motifs du jugement dont est appel, sur cette ques-
tl0" , sont au mémoire de la veuve V e y r a c , page a 2 , dernier
alinéa; \Q dispositif est page 3 z.
�(
*4
)
‘
.
L e p è r e a donc bien entendu s’ acquitter tout à la
fois des droits de son fils à,1a substitution, et de sa dette
paternelle pour l’établissement de ce fils ; c’est-à-dire,
qu’il a entendu payer ces deux objets.
;
Et de quelque terme qu’on se soit servi pour expri
mer cette intention, n’est-il pas de principe qu’elle se
détermine par la nature de l’acte, plutôt que par les
expressions dont on s’est servi. Potiùs id quod actum ,
quàrn quod dictum est.
'
I c i , ce qui a été convenu n’est obscur pour personne.
L e père s’est acquitté de la substitution en la payant
par une rente. L e fils y a consenti • et par conséquent
le père n ’a plus été grevé de cette substitution.
S’il n’en a plus été g r e v é , le fils a cessé d’y avoir
des droits; et dès-lors la mutation s’est opérée par cet
échange entre une rente et les droits dont il .donnait
quittance au père.
Si donc il y a dans cette convention res, consen
sus et pretium, comment s’obstiner à vouloir que celui
qui est devenu le propriétaire libre des biens substitués,
en ait cependant laissé toutes les charges à un autre?
Il serait inutile, d’après ces observations, de suivre
la discussion à laquelle s’est livrée la veuve V eyrac
pour prouver, par des lois romaines, qu’on peut faire
une restitution anticipée de fidéicommis, et que dès
cet instant les dettes de l’hérédité ont passé sur la tête
du propriétaire des biens substitues.
Certainement tout cela est incontestable; mais ou
en est l’application?
'
�( i5 )
Toute cette discussion est fondée sur un seul mot,
restitution anticipée des biens substitués; et ce mot est
de la pure invention de la veuve V e y r a c , car il n’est
pas au contrat de mariage.
A u contraire, il en résulte que le père a retenu pour
lui les biens substitués; et la veuve V eyrac en jouit.
Il suffit donc de lui rétorquer ses propres citations,
et de dire avec elle que les dettes et charges de l’h é
rédité sont à la charge de celui qui est devenu proprié
taire des biens substitués.
Jean-Jacques V eyra c fut libéré de la condition de
rendre; dès-lors les biens substitués ne sont restés dans
ses mains que deducto œre alieno.
C ’est une idée bien étrange que celle de la veuve
V eyrac : lorsqu’elle ne peut plus résister à payer la
r e n te , elle veu t la couvrir par des dettes. Elle prétend
que le donateur de la rente a sous-entendu que le
donataire resterait son débiteur d’une somme inconnue,
et que la chose donnée en resterait grevée. Conception
véritablement sans exemple.
■
Et si les dettes des biens substitués se fussent portées
à 240,000 fr., il en résulterait que le s.r de V eyrac aurait
donné la somme de 240,000 fr., sur laquelle il aurait
retenu 240,000 fr. ; c’est-à-dire, qu’il aurait donné zéro.
Si la veuve V eyra c avait transcrit (pag. 39) la fin
de l ’article 2 du contrat de mariage, cette fin aurait
évité le sens forcé qu'elle y donne. Comme aussi le
fu tu r ne pourra rechercher Ledit seigneur son père pour
�C 16 )
C inventaire de son oncle : cela suppose nécessairement
que si quelque chose est sous-entendu, c’est la répétition
de la même convention pour ce qui précède ; c’està-dire, q u il ne pourra rechercher son pere pour les
biens de la substitution.
L a veuve V eyrac a bien copié cet article 2, en la
page 5 ; mais les mots comme aussi y ont été négligés ;
cependant ils expliquent toute r i n t e n t i o n , et ils ôtent
absolument l’équivoque qu’elle a voulu faire naître
d’une remise anticipée de la substitution.
Il y aurait encore bien des choses à dire pour for
tifier cette démonstration \ mais ce ne serait que ré
péter ce qu’ont dit les mineurs, dans leur mémoire
publié en première instance (pag. 18 et suivantes), et
ce qu’a dit le curateur de l’interdit, en son mémoire
3
(pag. i ); il suffit d’y renvoyer. L a cour y appercevra
un fait très-important, c’est que la succession du substi
tuant a été évaluée à 867,499 livres ; ce qui faisait
pour la substitution 433,749 liv. 10 sous, que le père
des mineurs a abandonnés pour une rente de 10,000 fr.
Il pouvait aussi demander les fruits faute de publica
tion ; de sorte que son père ne lui donna pas même le
produit net de ce qu’il lui devait.
La veuve Veyrac criait ¿1 la collusion contre le cura- 1
leur de l’interdit , parce qu’il ne voulait pas être de
moitié dans s e s paradoxes. Mais le curateur lui répondit
qu’avant de plaider comme elle au hasard, il avait
consulté trois anciens jurisconsultes de Toulouse (mes
sieurs
�( 17 )
/■
.
sieurs G a r y , Lespinasse et L aviguerie), qu ils avaient
décidé en faveur des mineurs , et que cela faisait loi
pour lui, parce qu e, en le nommant curateur, on lui
avait recommandé d'être circonspect , et de ne pas
élever de difficultés déplacées. (Cette recommandalion
avait été faite aussi à la veuve V e y ra c , en la condam
nant trois fois aux dépens en son nom 5 mais elle n’en
a pas été corrigée.)
Les premiers juges ont donc déclaré qu’il ne résul
tait de la donation de 10,000 fr. de rente, aucune
charge de payer les dettes de la substitution au dona
teur. En conséquence , ils ont mis hors de cour la
veuve V eyrac sur tous ses chefs de demande, qui ne
prenaient leur source que dans ladite prétention.
Ainsi les mineurs V eyrac ne s’occuperont plus de
ces chefs de d em a n d e , que la veuve Veyrac a ren
voyés à la fin de son mémoire (pag. y ) 7 et qu’elle
5
ne fonde sur aucun moyen.
\
La première conséquence que tire la veuve V eyrac
de la démonstration q u ’elle croit avoir faite de la
remise de substitution , est de dire (pag. 46) que toutes
les demandes relatives à la restitution de la dot de la
dame de Morges (première femme de Jean-Jacques
V e y ra c ), s’écroulent, d’elles-mêmes.
Ceci était en effet très-conséquent. Mais la veuve
Veyrac avait, oublié que, lors du jugement de Tan 9 ,
e^e avait soumis ces chefs au rapport des quittances.
-
5
�( i8 j
: Aujourd’hui'ces quittances sont rapportées ; donc les
mineurs ont droit de réclamer cette dot, parce que
leur père ne s’est pas départi de la succession de sa
mère.
Il importe peu que les quittances aient été données
par Jean -Jacques V eyrac ou par son p è re , puisque
c ’est là une succession dont aucune l o i , ni aucune
convention ne prive les mineurs. Mais si cela impor
tait, il faudrait rectifier la citation que fait la veuve *
V eyrac : Pater pertes quetn est adm inistrado prœsumitur totum récépissé. Dumoulin dit : V ir penès
quem , etc. A la vérité, il ajoute une comparaison re
lative au père qui s’oblige avec le fils, c’est-à-dire, le
fils sous La puissance paternelle, comme la femme sous
la puissance maritale; et ce qui le p ro u v e , c ’est que
Dumoulin ajoute qu’il parle des femmes dont les biens
sont dotaaoc, et q u’il en serait autrem ent si elles étaient
communes.
Après avoir contesté la dot de la dame de M orges,
la veuve V eyrac dispútele trousseau (pag. 47 ) , parce
q u e , d it - e ll e , le mari l ’a gagné par sa survie, à la
charge des funérailles, ce qui est, si on l’en croit, une
une règle de droit commun.
L a veuve Veyrac ne se serait-elle point accom
modée en cela de la coutume d’Auvergne? Mais cette
coutume est étrangère à la cause : c’est le droit ro
main qui régit les parties; et il ne donne pas le trous-
�19
(
)
v
seau au mari. L a novelle 1 1 7 exprime les cas ou un
mari a quelque chose à espérer sur la succession de
sa femme ; mais il n’y est question ni de trousseau, ni
d’enterrement.
L a veu ve V eyra c combat le gain de survie de 7,000 f.
stipulé au profit de ladite dame de Morges. Ici c’est
dans une loi romaine qu’elle puise le principe que les
donations entre époux, quoique faites entre-vifs, sont
révocables, et qu’il faut la survie de 1 époux.
Cela est très-vrai pour les donations faites pendant
le mariage, constante matrimonio j mais quand il s’agit
d’ un don fait par le contrat de mariage l u i - m ê m e ,
tout est perpétuel et irrévocable , sur-tout quand on
en est ainsi convenu.
O r , le contrat de m ariage porte que le sieur de
V e y ra c donne à la dame de Morges la somme de
7,000 f r ., qui Lui appartiendra, et dont elle pourra d is
poser à sa volonté,
qu ’e l l e
s u r v iv e
ou p r é d é c è d e
,
qu’ il y ait des enfans ou non.
'
L à le m otif de prohibition des lois contre les dona
tions"^ conjugales n’existe plus, rie mutuo amore sese
invicem spolientur. D ’ailleurs, ce qu’a voulu une loi
générale cède à une convention sous la foi de laquelle
un mariage a été contracté, legem contractus d ix it.
1
/
Nous ne suivrons pas la veuve V eyrac dans sa dis
cussion sur divers articles des biens aventifs de la dame
f
6
�( 20 )
.
'
de Morges (pag. 49 et o)- les premiers juges s’en sont
retenu la connaissance ( pag.
).
. Elle adopte le legs de 10,000 fr. fait à la dame de
5
35
Morges , et offre de payer sous déduction d’un neu
vième. C ’est précisément ce qu’ont décidé les premiers
juges (pag. 3 4 ).
.
Quant au ch ef relatif à la légitime du chevalier de Veyrac, l ’adversaire la contesté par deux moyens; i.° parce
que c’est une delte de la substitution ; 2.° parce qu’il est
à présumer qu’elle a été payée,, et qiCelle croit être
certaine que la quittance est dans les papiers de la suc
cession. ’
D éjà il a été prouvé que ce premier moyen était
un songe, et le second est de la même nature.
C a r ia veuve Veyrac n ’a pas encore, donné assez de
gages de sa véracité, pour qu’on doive la croire sur pa
role dans ses simples présomptions. N ’a - t - e l l e pas eu
assez de neuf ans pour chercher dans les papiers de la
succession ?
•
'
Il s’agit d’une légitime due et non prescrite : il n'y
avait donc de griefs à proposer qu’avec une quittance?
C'est bien assez que les premiers juges n’aient pas
adjugé les 6,000 fr. demandés de plus. Mais si la veuve
a osé nier l'écriture du défunt, l ’interlocutoire qu’elle
a rendu nécessaire ne lui aura valu, que le plaisir de
plaider un peu plus long-tems, sans lui épargner une
condamnation.
�( 21 )
Faut-il la remercier de ce qu’ elle ne dispute pas
53
la condamnation de 75 fr. (page
); il semble qu elle
se fait violence en ne contestant pas cet objet ; mais
il est constaté par un billet du défunt.
L a veuve Veyrac se plaint d’être condamnée aux
intérêts des intérêts (page
) ; et elle prétend que
c’est un anatocisme, à la vérité adopté par le Code civil ,
54
mais qui en cela établit un droit nouveau.
,
C’est au contraire un bien vieux principe en F ra n c e ,
l
t
que les intérêts qui courent, ex natura rei, peuvent en
produire eux-m êm es, du jour de la demande : et pré
cisément les dots et les légitimes sont de ce nombre.
En cela les intérêts qui courent sans demande, ne
sont , à proprement parler , que Les fru its dus à la
fem m e et au légitimaire, du jour de l’ouverture de leurs
droits; et il n’y a pas d’anatocisme à ce que des fruits
produisent des intérêts.
'
Ce n’est point assez à la veu ve V eyrac de gloser
contre le jugement dans ce qu’il d it, il faut encore
qu’elle le blâme dans ce qu’il ne dit pas. » Les prê
te miers juges, d it-e lle (page
), ont bien imaginé
« de condamner la veuve Ginoux solidairement et
«■hypothécairement. Entre cohéritiers, il n’y a pas
55
. ff d’action solidaire ; mais on a pris à tâche de l’accacc hier par les condamnations les plus injustes».
/ *»
v
lamentation aurait dû être réservée pour un
�(
22
)
cas plus réel. Car précisément les premiers juges n’ont
pas condamné la veuve V e yra c solidairement.
Ils l’ont condamnée pour m oitié, et hypothécairement pour le tout. Cela est ainsi répété trois fois dans
le ju g e m e n t, c’e s t - à - d i r e , à chaque condamnation
(pages
,
et 37).
34 36
Cette disposition n’est-elle pas conforme aux anciens
principes, et à l’art. 873 du Code civil? la veuve Veyrac
a moitié dans la succession; donc elle doit supporter
les dettes personnellement pour sa part et portion , et
hypothécairement pour le tout.
L a veuve V eyra c n’a point encore assez d’un adver
saire, et elle rompt encore une lance contre l ’interdit,
parce qu’il a obtenu une condamnation d’intérêts de
puis le 28 août 1792.
Mais la veuve V eyrac, qui le met en qualité dans son
m ém oire, com m e intim é, n ’a point interjeté appel
contre lui. Sans doute elle l’avait oublié, ou elle s’en
repent ; et pour se consoler, elle crie dans le désert.
Théodore
de
VEYRAC.
M. e D E L A P C H I E R , ancien A vocat.
M. e G A R R O N , L icen cié-a voué.
A R I O M , D E L ’IM P . D U P A L A I S , C H E Z J.-C. S A L L E S .
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Veyrac, Théodore de. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Garron
Subject
The topic of the resource
successions
rentes
contrats de mariage
substitution
droit romain
anatocisme
Description
An account of the resource
Précis en réponse, pour Théodore et Jules de Veyrac, intimés ; contre Marie Ginoux, veuve de Jean-Jacques de Veyrac, appelante.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
Circa 1785-Circa An 12
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0401
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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fre
Coverage
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Le Puy-en-Velay (43157)
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anatocisme
contrats de mariage
droit Romain
rentes
substitution
Successions
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caj^.
MEMOIRE
POUR
Le sieur ROCHEFORT-D’A IL L Y , intimé;
CONTRE
L e sieur C A V Y , appelant.
Ce
n’est pas pour expliquer sa cause, que le sieur
Cavy a imprimé ses moyens ; elle étoit en effet si peu
importante : il le déclare lui - même ; mais il a voulu
apprendre au public, sous la garantie de sa signature,
qu’ il étoit, lui Cavy, un agriculteur intelligent, un fer
mier bien au-dessus du maître, un propriétaire considéré,
faisant de grandes spéculations.
Il pouvoit, sans inconvénient, se donner la jouissance
de publier ainsi ses vertus par la voie de l'impression ,
sans y ajouter l'affectation d’accabler le sieur d’A illy de
personnalités et d’injures.
Le sieur d’ A illy ne se juge pas lui-même , et ne se dit
au-dessus de personne. Il réclame franchement ses droits
À
�( 2 )
et les tribunaux n’ont pas encore jugé qu’il fît de mau
vais procès. Il est possible qu’un jeune homme qui n’a
pas les goûls de son âge , ne plaise pas aux faiseurs de
grandes spéculations, du moins dans le sens qu’ils l’en
tendent ; mais les devoirs de la société n’exigent pas
qu’on soit dupe ; et si le sieur Cavy ne l’enlend pas de
la même manière, si ses grandes spéculations sont déran
gées par des jeunes gens n’ayant'pas les goûts de leur
âge, il en résultera seulement que tous les dix ans il ne
doublera pas sa fortune, et qu’il se désabusera à la longue
de la bonne opinion qu’il a de lui-même.
F A I T S .
L a terre de la Font, appartenante au sieur Maréchal,
aïeul du sieur d’A illy , fut affermée au sieur Cavy, le 27
brumaire an 6, pour neuf ans.
L e bail porte la clause suivante : « Les étangs seront
« empoissonnés aux frais du preneur, et le produit, à
« chaque pêche, sera partagé par moitié entre le bailleur
« et le preneur »
Ces étangs étoient jadis au nombre de cinq; les étangs
de l’A r c h e , Chapot et la P ip e , ont toujours resté en
rapport ; mais ceux connus sous le nom de G irou x et
Tiroisau , ont été mis à sec il y a environ cinquante
ans ; depuis cette époque il y est né des arbres que le
sieur Cavy a exploités.
Quand la loi du 14 frimaire an 2 ordonna le dessè
chement des étangs, le sieur Maréchal s’étoit contenté
de faire uter la bonde de l’étang Chapot, et les eaux
�(
3 )
s'écoulèrent. Il n’y: avoit môme pas lieu d’exécuter la loi
autrement ; car un grand cliemin a été pratiqué sur la
chaussée, et il eût été intercepté, si la chaussée avoit été
détruite.
Une loi du n thermidor an 3 ayant rapporté celle
du 14 frim aire, tous les propriétaires d’étangs non dé
truits n’avoient eu qu’une bonde à replacer, pour que
l’ancien volume d’eau y fût retenu. Tout prouve que
c’est ainsi que le sieur Maréchal avoit rétabli l’ancien
état des choses, lorsqu’il donna sa terre à ferme au sieur
Cuvy, et stipula que les étangs seroient empoissonnés
p a r le p r e n e u r , à ses frais.
Il seroit indifférent, d’après cette clause, que ces étangs
fussent déjà empoissonnés en l’an 6 , puisque s’ils ne
l’étoient pas, le sieur Gavy étoit chai'gé de cet empois
sonnement. Mais c’est un fait constant que les étangs de
l’A rch e et de la Pipe furent péchés peu de mois après
le bail de l’an 6 , et que l’étang Chapot fut péché en
l’an 7.
L e sieur Gavy ne nie pas la péclie des deux premiers
étangs; il n’ose pas même la nier pour l’élang Chapot\
mais comme cet aveu le condamne, le sieur Cavy fait
des efforts surnaturels pour prouver que cette pêche n’est
pas une pèche, et que l’étang n’est pas un étang.
A le croire, des métayers y ramassèrent un peu d’eau
avec des molles, après une sécheresse, en l’an . Celte
eau , destinée à abreuver les bestiaux et à faire rouir le
chanvre, produisit bientôt le prodige de féconder un
ancien frai qui avoit demeuré dans la vase depuis l’an 2 ,
et de procréer des carpes tellement disposées à réparer
A 2
6
�(4 )
Te temps perdu, qu’elles se trouvèrent, au bout de quel
ques mois, peser une livre et demie, et furent en état
d’être pêchées et partagées en l’an 7. (M ém oire Cavy,
pages 3 et 4. )
INous examinerons bientôt le degré de probabilité dece système du sieur C avy; mais pour continuer le récit
des faits, les étangs de l’A rch e et de la P ip e , pecliés
en l’an 6 , le furent de nouveau en l’an 9, suivant l’ordre
périodique des pèches; et l’étang Cliapot péché en l’an
7 , devoit l’être en l’an 10.
Le sieur Maréchal mourut le 1 1 thermidor an 9. Le
sieur d’A illy , son petit - fils et son héritier , eut des
comptes à apurer avec le sieur Cavy. Il alloua des sommes
considérables sans quittances, et le sieur Cavy dût alors
lui trouver les goûts de son âge. Bientôt le sieur d’A illy
trouva dans les papiers de son aïeul d’anciens comptes,
et états du sieur Cavy. Il y vit la nécessité d’examiner
sa gestion de plus p rès, et se convainquit bientôt que
son système dominant, comme il le dit lui-m êm e, est
de fa ire de grandes spéculations, sans s'arrêter aux
de ta ils min utieux.
Les.conditions du bail n’étoient exécutées en effet que
pour les grands articles de production. M ais, i°. le sieur
Cavy s’étoit obligé de planter soixante-dix œuvres de
vigne. Cela eût produit fort-peu el, dépensé beaucoup:
il l’a voit oublié* 2°. L e sieur Cavy 11e devoit pas faire
de défricheinens; mais cela produit beaucoup, et le sieur
Cavy avoil défriché. 30. Il ne devoit employer les en
grais qu’aux terres et vignes des domaines ; il les avoit
détournés pour $011 compte. 40. Le sieur Cavy ne devoit
�C5 )
exploiter les bois que suivant les périodes ordinaires; il
les avoit devancées, etc., etc.
Peut-être bien eût-il été plus louable à un jeune liomme
de fermer les yeux sur les opérations du spéculateur.
Malheureusement pour le sieur C avy, le jeune homme
fut assez mal avisé pour voir clair, et pour faire dresser
en effet plusieurs procès verbaux de mésus, les uns pour
poursuivre sur le champ, et les auti’es pour conserver
une action en fin de bail.
T el fut le conseil de gens sages et prudens. L e sieur
Cavy sentit qu’il étoit alors plus urgent de se tirer
d’affaire que d’exlialcr son courroux ; il vint prier le sieur
d’A illy de se relâcher de scs droits ; et celui-ci fut plus
généreux qu’il ne devoit l’être. Il se départit de tous
dommages - intérêts pour les défriclicmcns, les bois, la
non plantation de vigne, etc., et, par une amnistie gé
nérale pour ce qui étoit en litige, il consentit de ne plus
rechercher le sieur Cavy pour les faits antérieurs de la
jouissance, sous réserve de tout ce qu’il pourroit faire
dans la suite de contraire aux clauses de sou bail. Telles
furent en précis les conventions du traité du ie«1. ven
démiaire an ro.
Il ne pouvoit pas être question dans ce traité, ni dans
les débats qui le précédèrent, de la pêche de l’étang
Chapot, puisqu’elle ne devoit avoir lieu que dans le
courant de l’an 10 : le sieur d’A illy n’avoit même pris
à cet égard aucunes informations positives. D ’ailleurs, il
y a moyen de pêcher un étang quand on veut, en y jetant
du poisson assez gros; et le sieur Cavy sait par expérience
comment cela.se pratique. Le sieur d’A illy l’invita à tenir
A3
�( 6 )
ses engngemens sur ce point, et l’objet en valoîtla peine y
puisque l’étang Chapot a cinq mille deux cent soixantequatre toises de superficie.
Sur son refus, il l’a assigné le 9. thermidor an 1 1 ^
I,0. pour lui payer une somme de 1200 fr. en indemnité
de la pêche dudit étang Chapot pour l’an 10 ; 2°..pour êtrecondamné à l’empoissonner afin de le mettre en état;
d’être péché en l’an 13.
L e sieur Cavy a d’abord dit au bureau de paix que
cet étang n’est plus en produit depuis la loi sur le des
sèchement des étangs; qu’il n’avoit pas de poisson quand
il l’a pris, et n’a pas fait partie des objets affermés.
Dans, ses défenses ensuite , craignant les résultats de
la pêche de l’aa 7 , et obligé d’en convenir, il a imaginé
d’expliquer la cause, de cette pêche, comme il a été cidevant rapporté.
L e tribunal de Gannata fait justice de ces moyens, et,,
par son jugement du 19 prairial an 1 2 , il a adjugé la de
mande, si mieux n’aimoit le sieur Cavy payer à dire
d’experts.
L e sieur Cavy s’est figuré de trouver devant, la cour
un plus grand degré de crédulité, pour faire adopter le
système par. lequel il veut avouer et nier tout à la fois
que l’étang Chapot ait cessé d’être à sec depuis l’an 2 ;
il s’agit de le détromper,,et de justifier le jugement qu’il;
attaque.
M O Y E N S . .
Les griefs du sieur Cavy se bornent à deux , non com
pris le chapitre des. injures, qui n’est pas le moindre;'
�,
t 7)
10. le traité de ï’an ïo est, dit-il, une fin de nôn-réCè=voir contre la demande ; 2°. l’étang étoit à sec lors du
bail de l’an 6 : ainsi, la charge d’empoissonner ne s’.y
appliquoit pas.
R
é p o n s e
à u
p ï i ë m i e r
m o y e n
.
L e traité du premier vendémiaire an ïo , dit le sieur
Cavy pour la première fois sur l’appel, est une transac
tion sur procès , ayant pour but d’éteindre id de quo
'cogitatum f u it.
Adoptons la définition, elle le condamne.
Souvenons-nous que le sieur C avy, dans le début de
ses injures, a dit que le sieur d’A illy ne mar'ehoit qu’avec
des notaires et huissiers ; il donne une plus ample expli
cation de ce qui a précédé le traité, à la page 4 de son
mémoire, alinéa 3.
jLe sieur M aréchal est décédé ,• son -petit-fils s’est
présenté avec des vues hostiles j tous les jours nouvelles
querelles ; c’est un baliveau moderne que Cavy a coupé j
procès v e rb a l, e x p e r tis e s .... ce sont des vignes m al
plantées ,• procès verb a l, expertise , etc. . . » . . JEnjîn ,
dix-sept procès verbaux dressés p a r des notaires, signi
fié s p a r des huissiers , sont entre les m ains du sieur
Cavy, . . . . On parvient à rapprocher les parties, et le
prem ier vendémiaire an ï o il fu t passé un traité, etc.
Nous devons donc trouver inévitablement, dans ccs
dix-sept procès verbaux, quelles étoient les difficultés
sur lesquelles les parties voulurent traiter; c’est-à-dire,
id de quo cogitatum est.
A 4
�( 8 )
L e sieur Cavy dit avoir entre les mains ces dix-sept
procès verbaux; qu’il les exhibe, et il aura raison de dire
que le traité comprend le défaut d’empoissonnement d&
l’étang Chapot, s’il y a eu un procès verbal relatif à cet
étang, si de eo cogitaturn est.
L ’étang Chapot a cinq mille deux cent soixante-quatre
toises de superficie ; son empoissonnement valoit sans
doute la peine d’un procès verbal, pour un homme qui
ne marche qu’avec des notaires, et qui fait des procès
vevbnu'x pour les moindres volailles de la cour. L e sieur
Cavy sera-t-il donc réduit à dire q u e le sieur d’A illy a
regardé ce mésus comme une chose trop minutieuse ; mais
ce seroit une inconséquence ?•
Mais il n’y avoit pas lieu à procès verbal pour l’étang
Chapot. L e sieur d’ A illy n’avoit rien ù voir dans l'em
poissonnement ; il n’avoit intérêt qu’à la pêche ; et certes
s’il eût fait des procès verbaux avant l’an 10 , le sieur
Cavy n’auroit pas manqué de dire, avec plus de raison ,
que cette précaution prématurée étoit une pure tracas
serie.
Déjà le sieur Cavy ayant négligé d’empoissonner un
autre étang, a fait ce qu’il auroit pu faire pour l’étang
Chapot : il est allé acheter du poisson assez gros pour
être bientôt péché, et, par là , il a prévenu toute diffi
culté. Si donc le sieur d’A illy n’a pas dû faire çle. procès
verbal avant l’an 1 0 ; si, dans le fait surtout, il n’y en
a pas, 011 11’a pu traiter le premier vendémiaire an 10 ,
sur la privation de la pêche, sur une chose à venir y sans
une stipulation positive, et qui s’y rapportât expressément..
Puisque la transaction n’étoit pas faite de lite rnuici „
�( 9 )
dès qu’il n’y avoit pas de litige antérieur, il est sensible
que, pour induire de l’acte que les parties voulurent tran
siger de lite movendâ , il falloit une explication claire
et précise de l’objet de ce litige.
Mais quand il scroit prouvé qu’il y a eu des sujets de
contestation pour l’étang Ghapot, ne seroit-ce pas extorquer un département d’action, que de l’induire d’une
expression généi'ale qui n’y avoit pas un rapport im
médiat et nécessaire.
On a parlé dans ce traité de bois coupés, de défri-,
chemens faits, de vignes non plantées , et on n’y voit
pas un mot de l’étang Chapot, plus important que la
plupart des choses exprimées.
Si donc après avoir spécialement traité des divers objets
en litige, il est ajouté une clause générale qui absout le
sieur Cavy de tous faits de jouissance antérieurs, le motif
en est sensible ; c’est que toutes les coupes de bois, tous
les défrichemens pouvoient n’être pas constatés. L e sieur
d’A illy auroit pu opposer ensuite qu’il n’avoit traité que
sur ce qui étoit constant à cet égard ; et il y eut sur ce
point quittance finale. Mais il seroit bizarre de lui donner
pins d’extension que les parties elles - mêmes ne l’ont
voulu.
Les lois, en favorisant les transactions, n’en font pas
un piège ou une chose aléatoire ; elles ne disent pas que
la transaction comprendra tout ce qui sera présum é, mais
c e qui sera p r o u v é avoir été le sujet de l’accord. Tan
tum in his interpositum pactum nocebit, de quibus
ùiter eos action esse p r o b a t u r . L . 9 , if. D e trarisact.
La même loi ajoute qu’il seroit injuste d’éteindre une
A 5
�c io y
action par un traité, si celui qui en excipe ne prouve
pas qu’il y en a été question. Injustum est perimi pacto
id de quo cogitatum non docetur . L . 9 , ibid.
L e Code civil est plus positif encore. « Art. 2048, Les
« transactions se renferment dans leur objet : la renon« dation qui y est faite à tous droits, actions et pi’éd tentions , ne. s’entend que de ce qui est relatif au dif« férent qui y a donné lieu. »
Il faudroit donc que le sieur C avy, on le répète, prou
vât clairement qu’il y a eu différent sur la pèche de l’étang
Cavy. Ses dix-sept procès verbaux , ses dix-huit procès
ne le prouvent pas.
M ais, fallût-il même abonder dans son sens, rien encore
ne seroit réglé pour la contestation actuelle, quand l’étang
Chapot seroit comprisdans l’art. 12 du traité qu’il invoque.
L e sieur Cavy s’est abstenu de le rechercher pour aucun
fait antérieur de sa jouissance, sous toutes réserves pour
l'avenir.
Mais que peut-on entendre par la jouissance d’un do
maine ou d’un étang? ce n’est autre chose, sans doute, que
la perception des fruits qui en proviennent. On ne jouitpas en semant, on jouit par la récolte.
Qu’un propriétaire donne quittance à son métayer de
toute sa jouissance jusqu’au jour, en résultera-t-il que la
quittance ôte au propriétaire le droit de se plaindre lors
de la récolte suivante, s i, par la faute du m étayer, il
n’y a rien h cueillir? Personne, sans doute, ne s’avisera
de le prétendre.
O r, la pêche d’un étang en est la récolte; et il n’y a
pas moins de singularité à vouloir que le sieur d’A illy x ■
�( ; 1 1 y* ’
par un abandon de la jouissance passée, ait aussi aban
donné la jouissance à venir.
E n fin , le sieur Cavy s’est jugé lui-même relativement
à l’étang la P ip e , pour lequel il y a eu un procès dont
il sera parlé ci-après, (pag. 1 8 ) ; il a été assigné après le
temps de la pêche passé, en l’an 1 2 , il n’a pas même eu
idée de -prétendre que le traité de l’an 10 l’eût dispensé
d’empoissonner. Il a reconnu sa négligence, il a été con
damné. Sa défense explique donc le traité de l’an 10.
La plus sûre interprétation est celle qu’il en a faite luimême.
r é p o n s e
a u
d e u x i è m e
m o y e x
L e dessèchement de l’étang Chapot, en l’an 2, ne signifie
rien à la cause, puisqu’il nefalloit, pour le remettre en pro
duit, pas plus d’embarras que pour les étangs de l’Arche '
et de la P ip e , toujours péchés depuis l’an 3 ; c’est-à-dii*e ,
qu’il n’étoit question que d’y replacer son ancienne bonde.
Remarquons encore que dans le bail de l’an 6 , le sieur
Cavy s’est soumis à une clause qu’il ne veut pas enten
dre. Il n’est pas dit qu’il profitera d’une pêche déjà prête
à prendre*, il est dit qu’il empoissonnera les étangs, pour
en partager la pêche ; c’est-à-dire, il semera pour par
tager la récolte.
Ainsi il importeroit fort peu qu’il y eût du poisson
dans l’étang Chapot en l’an 6 ; s’il n’y en avoit pas , il
devoit y en mettre : voilà son obligation positive,,
Mais il y avoit du poisson en l’an 6 , puisqu’il y a eu
une pêche en l’an 7. Dans la vérité elle fut abondante et
�( 12 ) ,
réelle ; au reste , ce n’est pas de son abondance-qu’il ré
sulte rien. Adoptons, si l’on v eu t, qu’il n’y eût que des
carpes d’une livre et demie , il est toujours avoué qu’il
fut péché du poisson en l’an 7 , et c’est tout ce qu’il s’agit
'de' savoir.
' 'r
■ ............2 '
L e sieur Cavy ne s’est pas dissimulé toute la puissance
de ce fait, et toute la conséquence de ses résultats. Aussi
‘ a-t-il tourné de ce côté tous ses efforts, et nous avons rap
pelé, dans le récit des faits, l’explication étrange qu’il a
'donnée de cette” pêche de l’an 7.
Son moyen se réduit à un système nouveau qui bat
en ruine toutes les notions élémentaires sur la génération
des poissons.
"
'
Fut-il jamais concevable que de l’eau ramassée en l’an 6,
après une sécheresse, et retenue parqüelques mottes pour
l’abreuvement des bestiaux, ou le rouissage du chanvre,
oit pu créer du poisson sans empoissonnement, et hâter
sa croissance au point de faire, pour l’an 7 , des carpes
d’une livre et demie ?
Cependant le sieur Cavy ne se contente pas d’alléguer,
il certifie que son système est fondé sur l’expérience. On
a v u ,,d it- il, naître du poisson dans un étang desséché
depuis vingt ans, parce que la vase a conservé le fra i, et
que l’eau y étant revenue en a développé les germes.
Si les choses se passent de cette manière , la physique
jusqu’à présent s’est étrangement abusée, en enseignant
que la chaleur est le premier agent de la reproduction
des êtres; et l’histoire naturelle ne nous nuroit ' pas
moins induits en erreur , en nous apprenant que c’est la
’ chaleur de la vase qui fait éclore le frai du poisson.
�( *3 )
Quand un étang est mis à sec , le frai , qui sous son
enveloppe visqueuse étoit roulé dans les ondes, a dû se
reposer sur la vase après leur écoulement ; et dans cette
position naturelle , trouvant bientôt une plus grande
chaleur , la vase a dû en mûrir les germes , par cette
espèce de dissolution qui prépare le développement et la
génération (i)„
Mais quand le poisson est ainsi prêt à naître, la nature
q u i a favorisé sa création se trouve privée d’un autre
agent élémentaire ; la chaleur n’a fait que dissoudre ; l’eau
étoit nécessaire pour conserver. Ainsi le frai n’a pu passer
de la corruption à la vie ; la seconde opération de la
nature lui a manqué ; il a resté dans le néant (2).
L e sieur Cavy a donc présenté le système que quelque
chose pût être créée de rien. E x hoc lato nascantur,
a-t-il dit ; mais ce commandement n’étoit pas en sa
puissance; et nul ne sera persuadé, par sa prétendue
expérience, que des poissons soient nés sans empoisson
nement, après dix et vingt ans , dans un étang desséche.
Mais, ù ce premier miracle, le sieur Cavy en a ajouté
»
•»
»
»
»
»
(1) « Les femelles se portent en foule vers les Lords de l’ctang,
traînent leur centre sur la terre........ L e Jjut de la nature, danscelte opération, est d’obliger le poisson à déposer ses œufs dans
un endroit où il y ait peu d’eau, afin que la clialetir des rayons
du soleil la pénètre, l’écîiauffe, ainsi que la ierre qu’elle recouvre. Cette chaleur suffit pour faire éclore les œufs douze ou
quinze jours après. » ( Cours d’agriculture, p ar Vabbë llo zicr,
tome 4 , p»ge
34*
3. )
(2) « Si l’eau ne recouvre pas toujours le frai, il est perdut sc;
» putréfie sur le b o rd , et' sc corrompt. ».
�( H )
un second ; scs germes développés dans de la vase, après
•line sécheresse de l’an 6 , ont produit des carpes d’une
livre et demie en l’an 7 ; ce qui n’est pas moins impos
sible. La marche de la nature est plus lente. On sait que
le poisson d’étang a besoin de plusieurs années pour
arriver au temps où il doit être péché , ce qui est fondé
sur une constante expérience (i).
, L e sieur Cavy ne veut pas s’en tenir î\ ces invraisem
blances -, obligé de.convenir qu’il a été fait nne pêche
en l’an 7 , il ne peut nier dès-lors qu’il y avoit de l’eau
en l’an 6 , et il cherche e n c o r e ù en c h a n g e r la desti
nation. Ge n’est plus pour une pêche que cette eau est
retenue dans l’étang ; c’est pour abreuver les bestiaux ,
c’est pour rouir du chanvre.
O r , on sait que le» bestiaux allant boire dans une
marre ou dans tout autre lieu , y pénètrent autant qu’ils
peuvent s’y avancer, et foulent tout aux pieds; ce qui
n’est pas très-propre à conserver le poisson (2).
( 1) « L a première et la deuxième armée ce petit poisson n'étant
» grand que comme une feuille de saule, est nommé feuille.
» Quelquefois, lorsque le fonds de l’étang est bon , ayant passé
» deu x étés, il a quatre pouces, et pour lors, quoique feuille, on
» commence à lui donner le nom d ’alevin ; mais il ne le mérite
» pas encore. » ( ]Maison rustique, tome 3 , page 587. )
» On appelle alevin le petit poisson qui a cinq pouces; il n’est
» ordinairement de cette grandeur qu’après trois étés : c’est l’alevin
» dont on se sert pour empoissonnement. On pêche les étangs de
» trois en trois ans, après qu’011 les a alevinés. » (¿tornare, tome 3,
page 5(j4 , édition in -lf. )
(a) «11 ne faut pas se mettre en peine si ce petit poisson trouvera
�c r5 )
On sait encore- que rien ne corrompt plus les eaux
stagnantes qu’un routoir ; rien par conséquent de plus
incompatible avec le poisson qui ne peut y vivre.
Il reste donc une chose pour bien constante , et que
rien n’affoiblit ni ne dément c’est qu’il y avoit de l’eau
dans l’étang Chapot en l’an 6 ; c’est que cette eau a été
donnée au sieur Cavy en état de produire une pêche en
l’an 7 ; c’est que cette pêche a été partagée entre le sieur
Cavy et le sieur Maréchal.
Voilà dès-lors l’exécution pleine et entière du bail ;
voilà surtout l’explication parlante de ce que le sieur Cavy
veut esquiver.
Si l’étang Chapot n’ctoit pas de la comprise du bail ,
et si le sieur, Maréchal n’avoit pas entendu que le sieur
Cavy fût tenu de l’empoissonner, comment se Faisoit-il’
qu’il partageât une pêche où. le sièur Cavy n’avoit rien à
voir?
Si au contraire l’étang desséché étoit affermé sans charge
de l’empoissonner, et si tout le produit de la terre devroit
appartenir au sieur Cavy, à compter de son bail, pourquoi'
lui-même se croyoit-il interdit en l’an 7 , de s’emparer
seul de ce poisson qu’il dit fortuitement né ? pourquoi's’est-il cru obligé'de le partager avec le sieur Maréchal,,
si le sieur Maréchal n’y avoit rien à-prétendre ?
Qui ne voit, dans cette conduite, l’éclaircissement positif
de toute la( cause ! et certes les tribunaux, dans l’obscurité» de quoi vivre ; il n’y a qu’à avoir soin qu’il n’ÿ manque pas d’eau,,
» qu’ il n’y ait aucun brochet qui on Ire dans la carpière, n i aucun:
», bétail qui y fréquente.. » ( M aison rustique, ihid. \
�C 1« )
<lcs discussions , n’ont pas toujurs un guide aussi sûr ;
car il n’y a plus à chercher une simple intention vague
et isolée de toutes circonstances. Ici le fait est venu au
secours de la présomption : la clause est donc expliquée
par son exécution ; et personne n’ignore, en point de
droit, que de toutes les interprétations c’est la meilleui’e.
Mais on le répète au sieur Cavy qui s’obstine à offrir
une preuve inutile ; il est absolument indifférent qu’il
y ait eu du poisson ou même de l’eau en l’an 6 dans
l’étang Chapot. Son bail l’obligeoit à empoissonner pour
fournir moitié de la pêche : voilà au moins une obliga
tion qui n’est pas ambiguë'.
L ’étang Chapot étoit sans doute un étang tant que la
chaussée n’en étoit pas détruite ; un grand chemin l’avoit
conservée : ainsi, toute la peine à prendre étoit de replacer
la bonde qui avoit dû i*ester dans les batimens d’exploi
tation pendant le court espace du dessèchement. Quant
à la grille, il n’y en avoit jamais eu.
Supposons donc que cette bonde ne fût pas à sa place
en l’an 6 ; le sieur Cavy , en s’obligeant à empoissonner,
devoit faire stipuler qu’elle y seroit remise. En vain ditil que c’étoit au sieur Maréchal à y pourvoir , parce
que ce n’étoit pas une réparation locative ; c’étoit au
contraire à lui Cavy à le mettre en demeure.
L e sieur Cavy, en prenant les étangs à ferm e, et s’obli
geant de les empoissonner , étoit censé , suivant les prin
cipes , les avoir reçus en lion état, faute d’avoir fait cons
tater qu’ ils ne l’étoient pas, comme l’ont justement dit les
premiers juges.
Quand le sieur Cavy met sur la même ligne l’étang
�C r7 )
Clin pot et les étangs de G ¿roux et de Tiroisau , pour
faire croire que ce sont trois étangs abandonnés par le
propriétdirè depuis l’an-2 ,( page 1 1 du mémoire ),; il
y a impudeur et mauvaise foi dans cette allégation ; eau
les étangs de G iroux dt Tiroisau sont détruits depuis
5o ans, une route passe au travers, des bois y croissent,
et le sieur Cavy pouvoit d’autant moins l’ignorer qu’il en
a fait lui-même l’exploitation.
Voilà douq. le degré de confiance qu’il mérite ; et c’est
avec un tel mensonge qu’il viendi’a crier à l’injustice, et blâ
mer le tribunal qui a jugé suivant les titres et les principes.,
■
f
.?*,!) • - R é
*ponses
1 ■
a u x
i n j u r e s
..
o
■'
: Il ne'falloit pas compter pour rien^ce point essen
tiel des moyens du sieur Cavy , puisqu’il en a ‘fait la
batterie principale de son agression. Suivons-le donc dans
scs rftproclics , pour savoir s’il y aura été plus exact qu’à
l’égard de l’étang de Tiroisau.
-.1
D
j* 1
fr . J
l 4*
i °. Le sieur Cavy a accuse, le sieur d’A illy ’de procès
'iilo.j , • •)!. •
J
1 1
-,
verl)aux faits pour un four, une huche, un chenil, des’
qrbres morts. Le sieur d’Ailly ignore absolument, sur tous,
ces. objets, ce que le sieur Cavy a voulu dire.
2°. Il accuse 'le* sieur d’Ailly de lui avoir fait dixhuit procès. Il y a dans cette seule calomnie quatorze;
mensonges; car, 'mitre'le procès terminé en l’an iopar un traité, le sieur d’A illy a plaidé, i ° . pour des
v i g n e s ; ,0e procès est pendant; 2°. pour le défaut de
pêche de l’étang de la P ip e , et il a gagné son pro-
�co s(i); 3 0. il ne reste que la cause actuelle , où le sieur
d’A illy a encore obtenu justice. '
3°. Il est tout aussi faux que le sieur d’Ailly ait eu^
des* procès avec ses métayers-, quoiqu’il eût eu occasion
d’en avoir. Il a préféré des sacrifices.
Voilà donc encore la véracité du sieur Cavy. On jugera
maintenant de>quel côté est la passion et la tracasserie.
L ’homme passionné est celui qui parle et agit-contre sa
conscience ; l'homme tracassier est celui q u i , ayant perdu
des procès où il devoit se'rendre justice, s’obstine encore
à plaider contre ses conventions.
4°. Le sieur d’A illy est accusé d’avoir fait faire dixsept procès Verbaux. A supposer qu’ il y ait dans ce
deuxième fait plus d’exactitude, le sieur d’A illy en ignore
la plupart. Mais il a un garde forestier dont l’état est
(
i
8
)
( i j Ce procès de l ’étang la Pipe prouve beaucoup en faveur de
la cause actuelle du sieur d ’A illy.
#t
L e sieur d ’A illy a assigné, en l’an 1 2 , le sieur C a v y , 1°. en
dornmages-inlérèls, parce (jue l’étang n ’éloit pas pèclie; 2°. pour
être tenu de l’empoïssonner, afin d'être pèdié en l ’an i 5.
L e sieur C av y a répondu qu’ il y avoit. des réparations h faire;
niais q u e, faute par lui tl’avoir fait constater V(Hat des lieux., il
avouoit Sa négligence. 11 a été condamné en iqG fr. de dotnmagrsihtérèts par'des experts. L e sieur Cavy a été moins récalcitrant
pour l’étang la Pipe, parce qu'il n’a que cinq cents toises : l’étang
Cliapot en a cinq mille.
L e j ugement dont est nj’ipo] ne condamne le sieur C avy qu’A
1200 fr. de (Joinrnagrs-’intén ts. A dire d ’espéris,’ e l , dims la pr<i-r
portion ci-d essu s,-ileù t été condamné à njfio J'r.
1
�( 19 )
de parcourir ses propriétés pour y constater les vols et
les dévastations. Si ce garde a été exact dans scs fonc
tions , le sieur d’A illy ne peut pas l’en blâmer ; tant pis
pour ceux qui se seroient trouvés dix-sept fois en con
travention visible.
5°. Après s’être peint comme victime , le sieur Cavy
veut encore se donner comme généreux. 11 a fai t, dit-il,
des voyages pour le sieur d’A illy ; il s’est sacrifié et n’a
pu être payé qu’après un procès, et avec un jugement
arbitral. (Pages 2 et 9. )
Autre allégation pleine de fausseté et de mauvaise foi.
L e sieur Cavy est expressément défié de produire aucune
procédure, aucun c o m p r o m i s , aucun jugement arbitral.
11 a fait un voyage à Lyon pour le sieur M aréchal,
cela est v rai; mais il n’étoit pas seul, et n’a pas dépensé
une obole.
Quoique défrayé de tout, le sieur Cavy réclama 5oo fr.
pour ses journées. Cette somme étoit exhorbitante, mais
elle lui a été payée sans la moindre diminution.
Voilà encore la véracité, toujours la véracité du sieur
Cavy. Il meut , il injurie : cela dispense de meilleures
raisons. 11 signale le sieur d’A ilfy comme processif, et il
a lui-même plusieurs procès où sa bonne foi est mise en
grand problème. Le sieur d’A illy pourroit en donner les*
détails ; mais ils sont étrangers à sa défense ; et pour ne
pas imiter ce qu’il blâm e, il ne récriminera pas.
En se renfermant donc dans le seul objet de sg cause,
le sieur d’A illy répète avec le tribunal de première
instance, i ° . que le sieur Cavy s’est obligé d’empois
sonner, et qu’il a dû le faire sans alléguer le prétexte
�(20
)
d’un défaut de réparation démenti par toutes les circons
tances , et d’ailleurs non constaté; 2 °. que l’aveu d’ une
pèche partagée en l’an 7 interprète la cause que le sieur
Cavy dit obscure , et dispense de tout autre examen ; 3 0. il
répond à l’objection nouvelle du sieur C avy, que le traité
de l’an 10 n’a pas plus éteint, pour un étang que pour
l’autre, l’action en partage de la pêche; que d’ailleurs
rien n’établit que cet objet fût alors en litige; et que,
s’agissant d’ une chose à venir, tout prouve au contraire
que les parties ne s’en occupèrent pas.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
Me.
T A R D I F , avoué.
A r i o m , de l'imprimerie de L a n d ri o t , seul imprimeur de la
Cour d ’appel.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Rochefort d'Ailly. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Tardif
Subject
The topic of the resource
ferme
pêche
bail à ferme
étangs
assèchements
bail
Description
An account of the resource
Mémoire pour le sieur Rochefort d'Ailly, intimé ; contre le sieur Cavy, appelant.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1797-Circa An 12
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0336
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0626
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La Font (terre de)
Chapot (étang)
Saint-Rémy-en-Rollat (03258)
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bail à ferme
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ferme
pêche
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O B SE R V A TIO N S
P O U R
Les Q U A Y R U T ,
T H O M A S
T RI B UN ,
et V I L L E M A U D ,
in t im é s ;
d
'a pp ej i
de Rion:
C O N T R E
A n t o in e
Q U A Y R U T ,
a p p e la n t
C h arles Q uay r u t a-t-il été comptable envers A ntoine, M arie et Magdeleirie
Q u ayru t, ses frère et sœ urs? ,
A n toin e, qui soutient aujourd’hui qu’il ne l’étoit pas , a dit le contraire deux
fois ; 1°. par un exploit du 2 5 nivôse an 5 ; 20. par l’exploit même de sa demande.
Aujourd’hui il objecte que Charles, n'étant pas majeur au décès de son père,
n ’a pas été protuteur ni comptable , d’après la jurisprudence d’un jugement
du 1 3 nivôse an 10 ; que ses sœurs ont reconnu en majorité avoir perçu leur por
tion de mobilier à l'échéance de chaque succession, avoir donné leur consente
ment aux actes passés par Charles, et avoir joui chaque année en commun;
q u ’ainsi elles ne peuvent s ’élever contre leur fait ; qu’enfin Charles les a ins
truites suffisamment lors de leurs cessions dé 1789 et de l’an 6.
Ce qu’il y auroit de plus fort dans ces objections seroit la jurisprudence du
tribunal, si elle étoit applicable.
.
Mais le jugement opposé étoit dans une autre espece : c étoient des frères e t
sœurs qui avoient habité ensemble, et il n ’y avoit pas d’actes faits par un seul
pour tous; il n’y avoit que la présomption de jouissance exclusive par l’a îné, à
cause de son âge plus avancé.
Aussi les motifs du tribunal sont assez précis, pour qu’on ne puisse pas abuser
d e sa jurisprudence : « A tten d u , est-il dit, qu’ il n’y a pas de preuve de gestion
exclusive. » L e dernier m otif prouve aussi qu’il ne s agissoit que de simple
jouissance.
T
L e tribunal a si peu entendu fixer pour jurisprudence qu’il falloit être indiqué
pour tuteur par la coutume , au moment du décès du p è re , pour être protuteur
et comptable, qu’il a jugé depuis, le 18 ventôse an 10 , dans la cause des Rey et
R o u gie r , qu’un b e a u -frère,. demeurant dans la maison, avoit été comptablé
envers les frères de sa femme, mineurs au décès du père, par cela se ul qu’étant
mineurs quand il étoit majeur, il étoit présumé avoir joui pour e u x .;L a cession
q u ’ils lui avoient consentie, et même une ratification, ont été déclarées nulles
comme non précédées d’un compte.
■i
Comment donc Antoine Quayrut1 a-t-il osé prétendre que , par un renversement
total.de la jurisprudence constante et des principes, le tribunal vouloit à l’avenir
I
�(
2)
adopter des actes suspects de fr a u d e , contre le texte précis des ordonnances de
j (j et de 1G 6 7 ?
il n 'y a eu diversité d ’opinions que sur la question des d ix an s, com battue
entre l’ordonnance de i ç) et les m axim es de l ’arrêt de 1 7 0 6 ; m axim es adoptées
par Je parlement tant q u ’il a régné. L a jurisprudence en est revenue aux dix
ans ; mais les principes sur l ’incapacité des comptables n ’ont reçu aucune atteinte.
Personne ne conteste que la première règle dans les ventes est de savoir ce
qu on v e n d ; que dans le cas m ême où la chose vendue étoit distincte, il y avoit
^ action rescisoire; et que dans le cas où elle n ’étoitpas distincte, com m e dans les
droits successifs, il falloit que l'acheteur et le vendeur eussent fait le jtictum retis ,
c est-à-dire, que l’un n ’eût pas su plus que l’autre ce qu’ il y avoit dans le filet.
H o r s de cela il y a fra u d e , on n ’en a jam ais d o u té ; et ja d is , dans ce c a s ,
les cessions faites étoient nulles : aujourd’hui encore le C od e civil ne valide que
celles qui sont sans fra u d e. ( L i v . III, art. C L X X I X . )
C o m m e n t donc contester de bonne foi que Charles Q u ay ru t ait été com ptable,
depuis 17 7 8 jusqu’à l’époque des cessions qu’ il s ’est fait consentir? tous les actes
écrits de la gestion des affaires sont de son fait.
C o m m e n t concevoir que 6es sœ u r s , et m êm e A n to in e , partie a d v e rse , aient
.joui et géré en c o m m u n , com m e on le leur a fait d éclarer, lorsque dans tous
.les actes, les traités, les ventes et acquisitions, on ne voit toujours que C harles
Q u ay ru t se u l?
V eu t-on dire que c ’étoit pour éviter les frais d 'u n e p ro cu ration ? mais les actes
faits dans le lieu m ême n ’en avoient pas b e so in ; il falloit appeler les sœ u rs, si
on les comptoit pour quelque chose.
Charles Q u a y r u t , allant en A n jo u acheter les droits de son onelr» contre la
succession c o m m u n e, étoit chargé de payer 200 fran cs à ses sœurs : il ne leur
en a jam ais dit un m ot. Il y a là d e u x procédés d ’infidélité et de fraude.
Il a traité en 17 8 2 sur la succession personnelle de cet o n c le ; il n ’ a jamais
dit ù ses sœurs le résultat de ce traité : cela seul annulleroit la cession faite. C a r
com m ent o n t - e l l e s pu connoltre lu chose v e n d u e , m ême par approxim ation?
S ’il y a frau d e et nullité quant à la succession de l’o n c le , il y a nullité pour le
t o u t ; car ki vente est pour un seul prix.
D an s la cession de 17 8 9 il n ’a rien dit de la créance M andon ( / p liv. 1 4 s. )•
D a n s le traité de l’an 6 il Pa réduite à 2/(o francs on principal et intérêts.
Il n ’a parlé
dans l’une ni dans l ’autre d ’ un traité fait avec
,
. les T h o m a s , en
1 7 8 8 , portant établissement d \m e servitude pour i o francs q u ’il a reçus.
55
53
5
5
1
L ’inventaire, fait après son décès, mentionne, i°. un échange qu’il a i\.it on
1 7 7 8 ; 2*. plusieurs ventes d’immeubles à son profit; f>°. une sentence consulaire
par lui obtenue en t 7 7 9 ï 4°* UT1f! procédure suivie en son nom dans le même
tem ps; f>°. une quittance par lui donnée en 1781 ;■(?. une obligation de i7^/>> rtc.
1
C es actes, connus de adversaire s e u l , qui en est dépositaire, et q ,M 8 J'st tout
ap prop rié-au décès du frère c o m m u n , achèvent de prouver tout à la lois que
Charles Q uayrut g é r o il, plaidoit et recevoit s e u l, sans que ses sœurs lussent
jam ais comptées pour r i e n , m ême dans les p r o e î s ; ils prouvent encore (juc
Charles Q u a y ru t, en faisant les affaires de la mai so n, les iaisoit au moins Ircsbien pour son c o m p te , puisqu’il achetait des im m eu b les, m ême avant sa nui-
�( 3)
jo r i t é , tandis que scs sœurs n'ont e u , en se m a r ia n t, que ce q u ’il a bien voulu
leur donner. E t qui croira que des filles, généralem ent plus économes que des
jeunes g e n s , n ’eussent fait aucune épargne, si elles eussent pris la moindre part
dans les jouissances, le m ob ilier, les ach ats, les ventes des b e s tia u x , etc .?
„ D an s tous les procès où des cessions étoient attaquées, on n ’a p e u t - ê t r e
jamais réuni autant de preuves écrites d ’une gestion exclusive.
M a is , dit l’adversaire, vous avez reconnu, en m ajorité, avoir joui en c o m m u n ,
avoir pris le mobilier à chaque ouverture de succession, avoir consenti à ces actes.
R em arquons d ’abord que si l’acte pèche en lui-même par le défaut d ’un com pte,
toutes les déclarations pèchent aussi. Elles étoient en effet une précaution néces
saire, l ’ouvrage du comptable plutôt que celui du cédant, com m e dit C h ab rol.
( T o m . i , pug. 1 * )
avant de mériter une pleine c ro y an c e, le com ptable
devoit instruire, et non exiger des déclarations tendantes à la décharge im plicite
du compte, pour nous servir des expressions littérales d ’un jugem ent du tribunal
d e cassation, rendu en semblable espèce. ( messidor an 4> l)ull. )
C om m en t ici encore, ajouter foi à ces d éclarations, lorsqu’ elles sont démenties
p a r des faits évidens , et d 'u n genre absurde?
D ém enties par les faits. D epuis 1 7 7 8 jusqu’aux cessio n s, on voit Charles dans
tous les actes c o n n u s, on ne voit pas une seule fois ses sœurs. Charles stipuloit
pour tous ses cohéritiers sans les appeler, donc il n ’y avoit pas gestion com m une.
.Ainsi la fausseté de la déclaration contraire est prouvée par écrit.
D ’un genre absurde. E n effet les deux sœurs ont dit avoir pris leur portion
de mobilier , à l’échéance de chaque succession. O r au décès du père ( 1 7 7 2 ) ,
l'une avoit trois ans et l’autre huit : au décès de la m ère ( 1 7 7 5 ) , l’une avoit
s ix ans et l ’autre onze. E lles ont dit avoir consenti à l’ acte im portant de 1 7 8 5 ,
où Charles ralifioit une cession de sa mère , après un procès gagné , après un
-jugement qui annulloit cette cession ; m ais alors elles étoient m in eures, la cadette
avoit quinze ans et demi. O r qui croira qu’on ait cherché le consentement de
d eu x filles mineures pour une vente d ’im m eu b le s? E t en quoi ce consentement
avoit-il de la v a le u r?
T o u t se réunit à vicier les deux cessions de 17 8 9 et de l’an 6 , m algré les
fausses déclarations y insérées par le notaire , ho m m e de confiance des frères
Q u ay ru t, à tel point q u ’ il s’est attaché aux.audiences du trib u n a l, sur la cause
44
3
qu'il y
com m une.
Charles Q uayrut a été évidem m ent comptable envers ses sœurs , com m e
envers son f r è r e , quoiqu’il ne le prétende plus aussi po sitivem ent; il l’a été au
titre d ’ administrateur ou p ro lu te u r, et de negotinnun gestor.
Il a été adm inistrateur, a y an t ou n ’ayant pas le consentement de ses sœ urs;
c a r , dans les àct'es-qu’il a prfâsés., .il sfcst fa it fort pour elle s; il a promis leur
faire agréer cl ratifier.
. ,.
A in si dans les actes qu’ il «‘ com m encés en m a jo r ité , il n ’ a plus d ’/’mf/o ins
pecta à in v o q u e r, ces actes 11’étoient plus une suite nécessaire de sa gestion en
m in o r ité ; il g éro it, m a j e u r , , pour des sœurs m in eures, non emancipecs.
�D é sig n é p a r la coutum e, com m e le premier dans l ’ordre des tutelles, c’est lui
q ui au ro it été nom m é s ’il eût convoqué la fam ille ; il a m ieux aimé gérer et passer
des actes im p o r ta n s , sans m êm e faire ém anciper ses sœurs ; donc l’obligation
q u ’il a contractée en se faisan t fo rt pour ses sœ urs, est une obligation de com p
tab le, de pro tuteur ( f f . qu i pro tutore gerunt ).
C e m oyen paroît pu issan t, et ne se détruit par aucun des faits de la cause.
L e premier acte des filles devenues m ajeures a été de vend re, sans q u ’elles aient
pu connoitre un seul instant ce q u ’elles vendoient.
Charles Q u ay ru t a été negotiorum gestor, puisqu’il n ’avoit pas de procuration
éc rite, et q u ’il ne pouvoit pas m êm e en avoir de ses sœurs non émancipées.
Or le negotiorum gestor est tenu de l ’action en reddition de com pte, com m e
le tuteur ; il doit, com m e le tu te u r, actus sui rationes red d ere, suivant les
expressions de la loi qui s o n t , com m e on v o i t , les m êmes que pour le tuteur.
( L . 2 , f f . N eg. gest. ) Il doit les rendre a d ex a c tissimam diligentiam. ( Inst. de
o b . q u ae ex quasi contr. nasc. )
L ’ordonnance de 1667 déclare tout adm inistrateur c o m p ta b le; l ’ordonnance
de 1 5 5 9 défend toutes dispositions au profit des tuteurs et administrateurs, avant
q u ’ils aient rendu le compte q u ’ils d oiven t; et c’est sur le m o t if de cette ordon
n a n c e , que le tribunal de cassation , se c on form an t en cela à une jurisprudence
de deux siècles, a annullé une cession faite à un com ptable, qui cependant n ’étoit
pas tuteur , par cela seul q u ’il y trouvoit la décharge im plicite a e son compte.
L ’arrêt même de 17 0 6 étoit dans les termes de la cause ; c’étoit un fondé de
p o u v o ir, étran ger, qui en co re avoit rendu un c o m p te , m ais qui n ’y avoit pas
donné assez de d étail; il fut jugé que n ’a y an t pas suffisam m ent instruit ceux à qui
il devoit ce compte , il n ’avoit pu valablem en t traiter avec eux sur ce q u 'ils ne
connoissoient pas aussi-bien que lui. A in si ubi eadem ratio , etc.
»
C e que dem andent les intimés ne tend pas à obtenir une reddition de compte
coûteuse et difficile ; c ’est au contraire pour empêcher q u ’ il n ’en soit rendu un
à l’appelant qui le d em ande, quoiqu'il se soit ingéré dans les a f f a i r e s , com m e
cela est prouvé par quelques quittances. A ntoine Q u ay ru t ne s ’est absenté que
pendant cinq à six ans , et pour quelques mois seulement. A son retour il participoit aux a ffa ir e s , qu an d s es. sœurs gardoient les troupeaux. C e q u ’il veut
obtenir laisseroit les parties dans un long prôctis, tandis nue la dem ande des
intimés ne tend q u ’a obtenir un égal d r o it, pour tout c o n fondreiet compenser
dans la succession de C h a r le s Q u a y r u t, dont chaque-partie est héritière, et à la
quelle il s ’agira seulement d ’ajouter en rapport les som m es reçues par chaque
cohéritier.
.
A in si les premiers juges ont été conduits par la loi, et par un m o y e n p u issant
de considération , à adopter un mode d e juger qui amène la fin des procès entre
les parties, et q ui tend à l’égalité, considérée de tout temps com m e l'a m e des
partages.
D E L A P C H IE R homme de
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A R I OM-, de l'imprimerie du L a n d r i o t s e u l i m p r i m e u r d u t r i b u n a l d 'a p p e l
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Quayrut. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Mandet
Subject
The topic of the resource
successions
abus
tutelle
Description
An account of the resource
Observations pour les Quayrut, Thomas et Villemaud, intimés ; contre Antoine Quayrut, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1785-Circa An11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0333
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0735
BCU_Factums_M0241
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abus
Successions
tutelle
-
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3ff6cde508731ba2c137ebd5b88fe555
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Text
M
E
M
O
I
R
E
EN R É P O N S E
A CONSULTATION SIGNIFIÉE,
POUR
Antoine-Am broise,
J e a n -B a p tiste
et
F r a n ç o is PÉRISSEL, B o n n e t t e PÉRISSEL,
le cito yen M O R T I L L E T , son mari, e t M a r
g u e r i t e PERISSEL, intimés ;
/
„
Ck^'' ii ' iwi{ùJv/'tUA,( ÙI /
CONTRE
A
nnet
'
P E R I S S E L , avoué au tribunal d'appel
de Riom appelant.
L citoyen Périssel est héritier contractuel de ses père'
E
et mère. Il a joui de leurs biens depuis 17 9 1, et en a
vendu plus des deux tiers. Maintenant, pour ne pas payer
à ses frères et sœurs leurs légitimes conventionnelles, il
A
�(
2
)
veut les forcer ù venir à partage avec lui de ces mêmes
Liens , qui se composeront en ce cas, i°. du tiers qui
lui reste; 2°. d’autant de procès qu’il a fait de ventes.
Libre en 1792 de n’être pas héritier, il a traité pour
le redevenir. Libre de nouveau en l’an 2 , il a traité
encore. Quand il a pu partager, il n’a pas voulu de par
tage : le désir ne lui en est venu qu’après avoir tout
innové et dénaturé.
(
Vaincu par les circonstances, le citoyen Périssel a
voulu dissimuler ou affoiblir au moins les plus déter
minantes. Il le falloit sans doute pour obtenir un avis
favorable de jurisconsultes célèbres, (1) qui, s’ils eussent
eu tous les actes de la famille au lieu d’un mémoire
infidèle, n’eussent pas basé leur décision usurpée sur
des lois que le citoyen Périssel s’est lui-mcme rendues
étrangères.
Les légitimâmes Périssel ne s’effraieront donc pas de
cette nouvelle arme de leur frère; ils osent croire au
contraire qu’ils la neutraliseront dans ses mains, en rap
pelant les faits avec plus de détail et d’exactitude.
F A I T S .
Pierre Périssel et M iclielle Labry, père et mère des
parties, ont laissé huit enfans.
( 1 ) 11 étoit peut-être inconvenant de la part du citoyen Férissel,
de signifier au lieu de causes d ’appel, une consultation imprimée
des citoyens Bigot - Préarneneu, G renier, Favard cl Iicrgier. 11
sem ble que ce soit vouloir capter les suffrages par le poids des
signatures. Le respect du aux tribunaux ne perrnettoit pas autre
fois de signifier des consultations comme un acte de procédure.
�( 3 )
Gilberte fut mariée au citoyen Colange, en 1767 :
Marianne avec le citoyen Coudert, en 1773. Toutes deux
furent dotées effuso sermone, et forcloses, mais sous fa
culté du rappel. Les autres enfans sont les parties qui
plaident.
L e 20 septembre 1786, le citoyen Périssel père vendit
à Annet Périssel, appelant, son office de procureur en
la sénéchaussée d’A u vergn e, pour la somme modique
de 14,000 francs. L ’acte porte quittance de 6,000 francs;
et il fut dit que l’acquéreur seroit dépositaire des 8,000 fr.
restans jusqu’au décès de son p ère, pour les rapporter
à sa succession.
L e 4 mai 1789, Annet Périssel se maria avec Gilberte
Albert.
Il fut institué héritier universel de ses père et mère,
sous réserve de 2,000 francs, à la charge de payer les légi
times suivantes : i°. à chacun de ses trois frères, 12,000 fr. ;
2°. à Bonnette, sa sœur, 10,000 francs-, 30. k M arguerite,
autre sœur, 8,000 francs; 40. à la dame Colange, un sup
plément de ,ooo francs; ?. à la dame Coudert, un
supplément de 4,000 francs.
Ces sommes furent dites payables, moitié deux ans
après le décès du père, et moitié dans l’an du décès de
la mère; et si celle-ci décédoit la première, moitié après
le décès du père, et moitié un an après le premier
payement. Enfin, il fut dit que dès le moment du décès
du sieur Périssel père, le futur se mettroit en possession
de l’universalité des successions de ses père et m ère, à la
charge de payer à sa mère une pension viagère convenue.
L e sieur Périssel père est mort en 1790. A ses derA a
5
5
�(
4
)
mers momens il eut une inquiétude : son héritier-, en
achetant à très-bas prix un des meilleurs offices de pro
cureur de la sénéchaussée, avoit toujours espéré que
son pèi'c lui donneroit quittance des 8,000 francs qu’il
avoit en dépôt; et c’est alors qu’il renouvela plus sérieu
sement ses tentatives. Un de ses raisonnemens principaux
auprès du père , étoit la charge trop considérable des
légitimes, et la menace d’abandonner l’institution pater
nelle, pour faire perdre les supplémens des deux filles
fo rclo seset pour que les légitimes qui étoient faites ejfuso
sermonc 11e fussent pas imputées sur les biens de la mère.
Cette menace frappa peut-être trop le mourant, qui
voulut consolider son ouvrage. Il fit un testament le
29 septembre 1790, par lequel il légua aux dames Golange et Coudert les mêmes sommes de ,000 francs et
de 4,000 francs qu’il leur avoit promises ; et prenant tout
à fait à la lettre ce que lui avoit dit son fils, il ajouta
que s’il abdiquoit l’institution d’héritier, et si cette abdi
cation diminuoit les légitimes de ses puînés, les deux
legs qu’il venoit de faire souffriroient une diminution
proportionnelle.
L e père mourut cinq jours après ce testament. Annet
Périssel, s’abusant toujours sur l’imputation des légitimes,
voulut abdiquer l’institution paternelle. En effet, il déclara
lors d’un inventaire du 24 mai 179 1, qu’il abdiquoit reflet
de l’institution contractuelle faite à son profit par son père,
pour s’en tenir à sa portion héréditaire dans les biens pa—
lcrneïs, se réservant l’ellet de ladite institution pour lesbiens maternels : cette déclaration fut acceptée par ses frères
et sœurs, sous la réserve de leurs moyens contre la retenue
que leur frère entendoit faire des biens maternels.
5
�(
5
)
L e citoyen Périssel ne tarda pas à se désabuser du sys
tème faux qui l’avoit engagé dans une démarche dont
il se repentoit. Il proposa aux puînés de rétablir les
choses comme elles étoient avant son abdication» ; et
comme il y avoit des mineurs , comme il vouloit
redevenir héritier avec sûreté, il assembla un bureau
de famille composé de six hommes de loi et de deux
experts. Ce bureau rendit une décision arbitrale le 28
janvier 1792 : cette décision fut adoptée par les parties,
et homologuée le 7 avril.
On y voit qu’Annet Périssel ayant proposé à ses frères
et sœurs de laisser les choses dans leur premier état,
c’est-à-dire, de laisser subsister sur sa tête l’institution
faite en sa faveur par ses pèi*e et m ère, aux mêmes
clauses, charges cl conditions portées par son contrat
de mariage ,• sur cette proposition les parties nomment
un bureau de famille.
L e bureau entend le rapport des citoyens M aneville
et Savarin, et s’occupe de former la masse tant des biens
de la succession de M e. Pierre P é r is s e l, que de ceux
de dame M ichelle L abry ; après cela, pour la sureto
de l’appelant contre les mineurs, le bureau dit que, toutes
charges déduites,.il revenoità peine à l’héritier une por
tion égale h celle de ses frères et sœurs; qu’un partage
seroit long et difficile, en raison des reprises delà m ère,
compensations, et rappel des filles forcloses..
E t v u , est-il dit,, le consentement par écrit donné
par dame Michelle Lnbry, à ce que ledit Annet Périssel
exécutât, tant à son égard qu’à celui de ses frères et sœurs,
les clauses et conditions de son contrat de mariage j le
�'
.
(6 )
bureau, pour le bien général des cohéritiers, est d’avis
que les offres fa ite s par A n n et Périssel à ses fr è r e s et
sœ urs, soient par eux acceptées comme avantageuses.
Eu conséquence, leslégitimaires déclarent qu’ils accep
tent lesdites çffres ; consentent que leur frère exécute
toutes les dispositions portées par son contrat de mariage,
à condition d’être renvoyés indemnes de toutes charges
des biens des père et m ère, sans qu’en cas de recherche,
de la part de quelqu’un d’eu x, ledit Périssel puisse se
dispenser d’exécuter les engagemens portés par son con
trat de max-iage, vis-à-vis des autres.
A u moyen de qu oi, l’abdication faite par l’intimé,
et l ’acceptation d’icelle, dans l’iiiventaire, demeurent
comme non avenues.
Voik\ donc Annet Périssel en possession des biens de
ses père et m ère, aux charges de son contrat de ma
riage; et loin d’avoir du regret, comme il le dit, d’être
redevenu héritier, il se trouva fort bien de jouir de tout,
de vendre ç;\ et là des immeubles, et il craignit, au con
traire, que la révolution ne lxii ôtât la qualité dont il veut
aujourd’hui se dépouiller lui-même.
La loi du 17 nivôse ordonnoit le partage, par égalité,
de toutes les successions ouvertes depuis 1789 ; et dès - lors
venoit fort à propos le relever de ses engagemens, s’il
les eût Irouvés onéreux : deux années de jouissance lui
avoient donné le temps de s’en apercevoir.
Il fit donner une citation à ses frères et sœurs, le 7 ger
minal an 2, sous prétexte de se concilier sur le partage
par égalité voulu par la loi; mais, au fait, pour les faire
réunir et consentir de nouveau qu’il demeurât héritier.
�7
C )
Il conviendra, sans cloute, qu’il les a engages à souscrh’e à ces arrangemens , en leur dictant, lui-m êm e, des
procurations en blanc, pour consentir, soit au partage
des biens des père et mère tout à la fois, soit au main
tien des précédentes conventions.
Il fut passé un second traité, le 4 prairial an 2 , en
présence de deux hommes de lo i, pris pour tribunal de
famille.
Pour satisfaire à la loi du 17 nivôse , il falloit parler
de partage et d’égalité, avant de convenir d’autre cliose.
L ’acte contient, à cet effet, deux parties très-distinctes,
que le citoyen Périssel veut empêcher d’apercevoir.
Les arbitres reconnoissent, d’abord, qu’il paroît pres
que impossible de faire un partage égal des biens du
père , parce qu’ils sont confondus avec ceux de la mère.
Sur cela, ils pensent que les parties doivent inviter leur
mère à consentir que ses biens se partagent en même
temps. Michelle Labry intervient, et dit, que pour main
tenir l’union entre ses enfans, et leur témoigner son
attachement, elle souscrit à ses propositions, pourvu que
le partage se fasse par égalité entre ses enfans.
Après cet hommage rendu à la loi du 17 nivôse, les
arbitres se sont occupés, disent-ils, en présence de toutes
les parties, et après la fixation faite de la valeur des
biens paternels et maternels, et composer la portion
revenante à chacune.
D ’après cette opération, est-il d it, les parties s’étant
convaincues que l’institution d’héritier, faite en faveur
d’Annet Périssel, ne leur étoit point préjudiciable, clc.
les parties traitent et transigent comme il suit :
�(
8
)
Annet Périssel s'oblige de payer à ses frères et sœurs
le montant des légitimes, telles quelles s ontfix é e s par
son contrat de m ariage, dans les termes y stipulés,
sans, qu’en cas de recherche par quelqu’un d’e u x , il
puisse se dispenser d’exécuter tous les payemens portés
par son contrat, vis-à-vis les autres..L e s légitimaires
ratifient, à cet effet, Tinstitution portée par ledit con
trat de m ariage, ainsi que la sentence du tribunal de
fam ille, du 7 avril 1792; se départant, en tant que de
besoin, de toute propriété sur lesdites successions, vou
lant que leur frère en jouisse et dispose : ce q u i est
accepté par lui.
_ M ichelle L a b ry intervient encore à cette nouvelle
convention, et consent aussi qu’Annet Périssel, son fils,
jouisse et dispose, comme il Ta f a i t jusqu i c i , x'atifiant,
à cet effet, le délaissement de la propi'iété et jouissance
de ses biens, tel qi£il est porté par le contrat de ma
riage de 1789.
L e citoyen Périssel avoit bien ses raisons, lorsqu’il
étoit en l’an 2 moins difficile qu’aujoui-d’liu i, pour rester
héritier : le moment étoit opportun pour vendre et
liquider la succession.
L ’objet le plus considérable des biens de la mère, étoit
un domaine appelé de la Barge; il le vendit au citoyen
Larue, moyennant la somme de 33,000 francs, environ.
Laruc, pressé de payer, avoit consigné le prix de son
acquisition. L e danger étoit urgent; il falloit, pour écarter
l’effet de celte consignation, une tournure quelconque.
Comme la mèi'e étoit vivante, elle seule p o u v o i t arrêter
L arue, cil l’assignant, comme propriétaire du domaine,
II
�*
(
9
)
Il falloît une occasion aussi im pérative, pour l’engager
à s’y prêter : sans cela, le scrupule de sa conscience lui
eût fait rejeter toute proposition de x*evenir conlre ses
engagemens, même en apparence. A vec un peu plus de
mémoii’e , le citoyen Périssel eût dit ce qu’on vient de
dire ; avec un peu plus de bonne fo i, il eût ajouté , que
l’intervention de Miclielle L ab ry, dans cette affaire , fut
si peu sérieuse, que c’est de l’un des légitimâmes qu’il
en reçut le conseil.
Quoi qu’il en soit, M iclielle L ab ry, avant d’assigner
L a ru e , signa un acte préalable du 29 prairial an 4 ,
portant, qu’elle révoquoit le consentement par elle
donné , à ce qu’Annet Périssel jouît de ses biens.
En même temps, elle assigna Annet Périssel, pour
voir déclarer valable ladite révocation.
En même temps, elle assigna Larue en désistement du
•domaine de la Barge.
Comme la première demande n’éloit que pour la
forme, elle a demeuré impoursuivie; mais celle du citoyen
Larue a été suivie d’un jugem ent, par lequel M iclielle
Labry a été déboutée de sa demande. Annet Périssel
a payé à Larue les frais de cette procédure.
Malgré cet échec, la demande n’en avoit pas moins eu
’eiTet qu’on s’étoit promis. La chûte du papier-monnoie
a eu lieu avant la libération de Larue, et la valeur réelle
du domaine.de la Barge a été fixée par une expertise.
Annet Périssel, comme on le pense bien, n’avoit pas
cessé de jouir des biens de sa mère, malgré l’acte du 29
prairial an 4 5
continué celte jouissance sans la moindre
innovation, aux mêmes charges de la pension via°-èr<j
1
B
�( ÏO )
stipulée par son contrat de m ariage, jusqu’au décès deM iclielle L a b ry , arrivé le floréal an 8.
La succession de M ichelle Labry étoit beaucoup
moindre que celle de son.mari ; et comme Annet Périssel'
devoit payer alors l’autre moitié des légitim es, il s’est
persuadé qu’en abdiquant cette succession, il se dispen
serait de payer cette moitié. En conséquence, il a fait
cette abdication au greffe, le 14 prairial-, et a attendu
patiemment qu’on l’assignât, sans cesser de jouir.
Les légitimantes l’ont fait citer en l’an 9 , et les parties
sont d’abord convenues de s’en rapporter à des arbitres
dont le choix distingué ne devoit pas laisser croire qu’au
cune d’elles préférât un procès à leur décision : mais
précisément cette décision étant connue du citoyen P é
rissel , n’a pas eu «on approbation, et il a fallu plaider.
L e citoyen Périssel a donné aux légitimaix-es une assi
gnation , le 26 messidor an 9 , pour voir déclarer valable
son abdication, et venir à partage de la succession de la mère.
A u moment de l’audience, il a conclu par requête à la
nullité des deux traités de 1792 et de l’an 2. Il sembloit
dès lors qu’il faisoit revivre l’abdication du père, et il le
dit ainsi à présent : mais sa requête ne contient nullement
l’offre de partager lôs biens du père; au contraire, il a
conclu au partage des biens maternels seulement. Et en
plaidant, son défenseur s’est attaché à faire valoir la
nécessité d’imputer une moitié des légitimes sur les biens
maternels, persistant toujours à retenir les biens du père
pour l’autre moitié.
Par le jugement dont est appel, du 2 nivôse an 10 , le
tribunal d’arrondissement de jRioxu a pensé qu’au moyen
5
�Périssel et des ventes par lui faites, les choses n’étoient plus
entièi*es; que les conventions faites entre les parties étoient
-corrélatives et indivisibles ; qu’ainsi il n’étoit pas au pouvoir
de l’une des parties de rejeter les clauses qu’il trouvoit oné
reuses : qu’il n’y avoitdans ces actes ni traité sur la succession
d’une personne vivante, pui&qu’Annet Périssel jouissoit
de tout comme propriétaire jax\§ vœu de mort prochaine,
puisque la mère avoit donne son consentement-, et d’après
ces motifs présentés avec un développement très-clair et
une force de raisonnement qu’il a été plus aisé de critiquer
que d’affoiblir, le tribunal de première instance, sans
s’arrêter à l’abdication d’Annet Périssel , a ordonné
■
l’exécution de son contrat de m ariage , et des traités de
1792 et an 2; a ordonné qu’Ambroise Périssel, un des
légitimantes, feroit déduction sur sa légitime de la valeur
d’un immeuble par lui vendu; et à l’égard des citoyens
Colange et Coudert, le partage est ordonné avec eux ,
parce qu’ils y donnoient les mains.
Annet Périssel a interjeté appel de ce jugem ent, et
prétend toujours que les actes qu’il a passés en 1792 et
en l’an 2, sont nuls, comme traitant sur la sticcession d’une
personne vivante. En désespoir de cause, il offre maintenant le partage des deux successions de ses père et mère>,
et dit que'sH 11 faîTïïes ventes ,"~éïïes_ne changent rien
à la position des légitimaires, parce qu’on mettra iictivement les objets vendus j^son lot, suivant l’usage.
T el est le système de défensëTcle l’appelant : son seul
mérite est d’être défendu par des opinions respectables;
son moindre défaut est d’être inexécutable.
B a
�C 12 )
M O Y E N S ,
'
Les intimés n’auront de plan dans leurs m oyens, que
de suivre les objections proposées contre eux ; et en y
répondant, ils se flattent de prouver que les traités de
1792 et de l’an 2 , ne sont nullement contraires aux lois;
que les circonstances en rendent le maintien nécessaire,
et que l’ajjpelant a rendu un partage impossible..
Il est très-certain qu’on ne peut pas vendre la succession
d’une personne vivante, et que dans ce cas non seulement
il manque une des conditions nécessaires à la vente', qui
est la chose ; mais encore , qu’une telle vente est contre
les bonnes mœurs, comme injurieuse à la personne de
qui on vend la succession futureMais n’y a-t-il pas une grande différence de ce qui s’est
passé entre les parties, à la vente d’une succession future T
et ne semble-t-il pas qu’il étoit presque inutile de recher
cher si une telle vente est nulle en droit, dès que le
citoyen Périssel qui se plaint des traités, n’a pas vendu
la succession de sa mère. Si cela est évident, les lois citées,
dès-lors ne le concernent pas.
L a consultation du citoyen Périssel semble confondreen sa faveur le titre du digeste, de hœreditate vel actione
vendita, et le titre du code de pactis : c’est peut - être
une erreur*
lia dénomination de ces titres annonce une diversité
de matière; les lois qui s’y trouvent pour la cause portent,
aussi une diversité de législation.
A n if. de hœred. vel act. vend, la loi première dit eu
�3
( i )
général que la vente de la succession d’une personne
vivante est n u lle, parce que ce n’est pas une cliose vénale.
Mais la législation s’cn tenoit à la prohibition de
vendre; et il paroît que l’école césaréenne se faisoit des
doutes sur plusieurs genres de conventions qui étoient
faites sur l’espérance des successions futures : ces doutes
donnèrent lieu à une application portée par la loi der
nière au code'de pactis.
Cette explication prouve que le législateur ne con
fond oit pas les ventés et les pactes ; il ne confondoit pas
le cas où un héritier pressé de succéder, vend incognito
son espoir à la succession , avec le cas bien différent où
le pacte est un arrangement de famille fait soùs les yeux
de la personne dont la succession est l’objet du traité.
La consultation du citoyen Périssel dit en principe
général que toute espèce de conventions sur les successions
futures-, étoient odieuses et dévoient être anmillées, parce
-qiie cètteioi porte omnes hujus modipactiones odiosœ....
»s-ancimus'omni modo repelli, n is i, etc.
M ais, au milieu de cette règle générale , étoit une
explication limitative qu’il étoit peut-être essentiel de
laisser à sa place ; car le législateur ne déclare pas nulles
toutes les conventions faites sur la succession de personnes
vivantes, mais seulement les conventions faites à Finsu
de celui auquel on doit succéder.
Ce n’est donc pas une nullité générale et indéfinie ; car
il faut lire omnes hujus modipactiones odiosœ..- QUODAM
V I V E N T E E T I G N O R A N T E , DE REBUS E J U S . . . . Sancimus
om ni modo repelli.
La loi ajoute que le consentement de celui de cujus
�C 14 )
valide de telles conventions : nisi ipse de cujus hœreditate
pactumest, voluntatern suam accomodaçerit et ad cxtremuni vitœperseveraverit .Elle termine par des expressions
qui ne permettent pas d’équivoque ‘ tune enim sublatâ
acerbissimâ spe, licebit eis , illo sciente et juben te,
Jiujus modi pactiones serçare> Quod etiani anterioribus
constitutionibus non erat incognitum. Telle étoit la
position des parties : ainsi les ti’aités de 1792 et de l’an 2,
sont déclarés valables par ce texte bien clair et doublement
répété.
L a consultation du citoyen Périssel répond à cette loi,
i ° . qu’elle n’est pas admise dans le droit français, d’après
Godefroi, D o m at, Louet et Potliier; 20. que la dame
Périssel a révoqué son consentement.
Comment Godefroi auroit - il dit expressément le
contraire de la loi même qu’il commente, lorsqu’il com
mence sa note par ces expressions, eo de cujus successione
. agitur, sciente , jubente, adde et nequidem in mortis
articula reçoeante de ejus hereditate , lie et viventis,
pascisci possumus. Godefroi, dans ce qui suit, ne fait que
donner un raisonnement tendant à prouver que les contractans ne peuvent s’obliger envers lu i, parce qu’il 11e s’oblige
pas envers eux ; pasciscens non obhgatur, ergo nec
,pasciscentibus consentire. On voit donc que le raisonne
ment de Godefroi est relatif seulement à l’intérêt qu’^
au traité celui qui y donne son consentement, ci non
aux contractans entre eux; ce qui le prouve, c’cst
lin de sa note : So/çe hoc nostro casu qui consentit
hœreditatern suam , non promittit absolutè, ciim ante
.jnorteni suam voluntatern reçoeare possit. Cet auteur
�. c i5 ,}
nya donc pas commis l’inconséquence de détruire dans le
milieu de sa note, les expressions approbatives du com
mencement.
Il eût d’ailleurs été le seul commentateur de son opi
nion : Cujas , Accurse , Voetius, approuvent la loi ;
Coccéius y ajoute la réflexion que la nullité n’est pro
noncée qu’en faveur des vivans, et qu’ainsi ils peuvent y
renoncer par leur consentement : nam cùrn hoc in favorem viventium constitutum s it, Mi suo fa vo re renuntiare possunt.
Domat est cité comme disant qu’un héritier ne peut
pas renoncer à une succession, sans savoir le décès de celui
de euju s , et son aptitude à succéder. Ce n’étoit pas, ce
sem ble, le consulter dans la partie de son excellent
ouvrage , la plus applicable à l’espèce;
Dom at, après avoir dît au tit. er. sect. j y ? des conven
tions, qu’un héritier peut traiter avec ses cohéi’itiers, detous ses droits en là succession , pour préférer un parti
certain à l’attente incertaine des événemens , ajoute la
note suivante.
« Il faut prendre garde dans l’usage de cette règle,.
» de ne pas l’étendrc à des cas qui blesseroient les lois
» ou les bonnes mœurs. Com m e, par exemple, si deux
» héritiers présomptifs traitoient entre eux sur la succès-» sion future de celui à qui ils doivent succéder ; car
» cette convention scroit illicite, si ce n èst q u e lle fû t fa ite
par la volonté expresse de celui de la succession de q u i
» on traiteroit. »
A u tit. Ier. section I I I , des héritiers, Domat regarde*
comme incapable de succession celui qui auroit disposé.-
1
,
/
�(i6)
des biens d’une personne à qui il devoit succéder, avant
sa m ort, et sans son consentement. Il se fonde sur la
loi S i quis v in I G N O R A N T I S ; if. de his quœ ut ind.
Dans son Legum delectus, au titre D e pactis, Dom at,
qui réduit les lois à leur sens exact , rapporte la loi
dernière ci-dessus rappelée, en ces termes,circa jid u ra m
viçentis successionern pascisci illicitum , eo non consentiente vel ignorante. Il ajoute en n ote, quod s i consen~
se r i t , semper tamen revocare pote st. Ainsi Domat est
tout à fait contraire au citoyen Périssel qui l’a cité.
L ouet, lettre H , n°. 6 , cite un arrêt de 1630 et non de
173°? ( ce
pouvoit se confondre dès qu’il étoit d it, édi
tion de 1772 ,) qui ne semble nullement avoir jugé en
tlièse, qu’un traité quelconque fait sur une succession fu
ture, étoit nul malgré le consentement de cujus bonis.
Car d’abord il s’agissoit d’une vente d’hérédité : ce n’est
pas l’acquéreur qui se plaignoit.
En, second lie u , il paroît que celui qui.avoit donné
spn consentementl’avoit révoqué, et avoit pris des lettres
de rescision pour cela. Car Louet dit que les lettres
lurent entérinées, la révocation de la vente et du con
sentement déclarée bonne. 11 n’y a donc à cet arrêt rien
que de naturel et juste, puisque la loi cilée permet do
révoquer le consentement qui seul validoit l’acte.
. Enfin , il pouvoit y avoir une contrainte dans cette
vente d’hérédité, démontrée par le vendeur.
Louet peut d’autant moins avoir entendu fixer la règte
générale qu’on suppose, qu’il seroit en contradiction aVCC
lui-même sur ce qu’ il dit lettre R , n°. 9.
« On tient pareillement que le consentement qui sur
vient
�. ^ 17 ^
» vient après coup,' valide la convention sur le rappel ou
» autre (convention) fa ite sur fu tu r e succession. » Il cite
à cet égard Dumoulin sur Alexand. liv. 6. con. 113.
P o th ier, invoqué pour le citoyen Périssel, ne lui est
pas plus favorable ; car au lieu cité , il ne parle que de
la vente des successions, et lorsqu’il dit que sa décision
sur la vente est conforme à celle des jurisconsultes romains
qui ont condamné toutes sortes de conventions sur les
successions futures, d’après les lois 19 et ult. de partis,
cet auteur renvoie à ce qu’il a dit au n°, 132 du traité
des obligations.
O r , voici ce que dit P otliier, à ce n°. 132, en rap
pelant les mêmes lois. « Ces lois proscrivent, comme
» indécentes et contraires à l’honnêteté publique, toutes
» les conventions par rapport aux successions futures.....
» à moins que le tiers n intervînt et ne donnât son
» consentement à la convention. »
Aucun des auteurs cités en faveur de l’appelant, n’a
donc pensé que la loi citée ne fût pas admise en droit
français.
Rien ne seroit plus aisé que de citer une foule d’autres
auteurs, qui rappellent les mêmes principes. Henrys,
Ricard, Lebrun, M eynard, Rousseau la Combe, etc. ne
pensent pas, non plus, que cette loi soit abrogée ; mais il
suffit d’en trouver l’approbation dans les auteurs même
cités pour le citoyen Périssel ; et lorsque Domat a classé
cette loi dans son Legum delectus, il ne faut pas d’autres
preuves, sans doute, que le droit français ne la rejette pas.
La législation actuelle la rejette encore moins ; car l’art.
26 de la loi du 17 nivôse, porte que les donations ou
-
G
�. c 18 1
ventes h fonds perdu, faites en ligne directe ou collatérale,
a l’un des héritiers présomptifs, sont interdites, à moins
que les autres cohéritiers n'y interviennent et y con
sentent. Cet article n’e s t-il pas une imitation de la loi
dernière de p actis, et ne permet-il pas y comme elle
de traiter sur une succession future.
L e tribunal de cassation n’a pas été de l’avis de la
consultation du citoyen Périssel, dans un jugement du
premier brumaix-e an 10; car quoiqu’il ait maintenu la
nullité d’une cession de succession à échoir, ses motifs
prouvent qu’il se fût décidé par la l o i , si la loi eût été
suivie.
D eux frères Falcimaigne firent un traité, en 1790,
par la m édiationjï’tm arbitre. L e père étoit vivan t, et
les parties, à cause des reprises du p ère, vouloient pro
céder au partage, conjointement, tant des biens de la
mère m orte, que du père vivant.
L ’aîné délaissa certains objets au cadet, pour ïa valeur
d’un sixième, garanti de toutes dettes, et les parties se
tinrent quittes pour les deux successions. L e père donna
ison approbation au bas de l’acte.
L e cédant se pourvut contre cet acte , ét demanda le
partage , qui fut ordonné par jugement du tribunal civil
du Puy-de-Dôm e, du 8 frimaire an 6 , sur appel du
Cantal. L ’aîné se pourvut en cassation, et fit valoir lf?
consentement de son père. L e défenseur du cadet n’alloit
pas j u s q u ’ à prétendre que la loi ult. départis fût abi*ogéej
niais il disoit que le traité étoit contre les bonnes nicc'>u^s >
et nul, étant fait hors la présence du p ère; qu’ensuite
le consentement ultérieur du père ne yalidoit Pas 1111
acte nul.
7
�C *9 )
L e tribunal de cassation adopta ces moyens, et rejeta
le p ou rvoi, par les motifs qui suivent.
« Attendu que Falcimaigne, père, n’est pas intervenu
» dans le traité du 9 novembre 179° » attendu qu’a
» défaut de cette intervention, Tacte est n u l, aux termes
» des lois romaines , sous l’empire desquelles vivoient
» les parties : » donc, par argument a contrario , si
Falcimaigne père étoit intervenu dans l’acte, le traité
fait entre ses enfans eût été valable.
Donc la loi dernière depactis est en vigueur en France,
et les traités passés entre les frères et sœurs Périssel, en
1792 et en l’an 2, sont valables; car M iclielle L ab ry,
leur mère, est intervenue dans ces traités et y a donné
son consentement.
Mais , ajoute le citoyen Périssel, ce consentement a ét(é
révoqué par elle, par l’acte du 29 prairial an 4 ; c’est
comme s’il n’existoit pas , et la loi n’est plus applicable.
Ce moyen, d’abord, n’est pas de bonne foi ; car p e r
sonne ne sait mieux que le citoyen Périssel, que sa mère
ne se prêta que pour la form e, à l’acte du 29 prairial
on 4 , pour .le tirer d’embarras, et éviter le payement
que La rue vouloit lui faire en assignats.
Les circonstances le prouvent, puisque le même jour
elle donna une assignation, et à l’intimé pour la formç,
et à Larue pour 6C désister.
Elles le prouvent encore p lu s, puisque l’assignation
donnée au citoyen Périssel resta sans poursuites, d’après
lui - même ; et en effet il a continué de demeurer eji
possession des biens, et de payer la pension de la mère.
Qu’est-ce donc qu’une révocation d’acte, quand elle no
C 2
�( 20 )
consiste que dans les m ots, et que Pacte prétendu révoqué
continue d’avoir son exécution. On ne juge pas de l’in'tention des parties par ce qu’elles écrivent, mais parce
qu’elles font, surtout quand l’intention des parties se reconnoît ; c a r , c’est une règle de droit q u e, de contrahentium mente ubi apparet ea debetpotiüs attendvq.uàm
'verba. L . 2 19 , de verb. signif. C’en est une autre que,
' in contractibus semper id sequimitr quod actitrn est.
I<e citoyen Périssel, pour augmenter ses moyens à cet
égard, d it, que le consentement donné par sa m ère,
étoit une démission de biens qui étoit révocable ad
nutum y et que ce consentement d’ailleurs n’a pas été
exécuté, puisqu’elle ne l’avoit donné qu’à condition
d’un partage par égalité , tandis qu’on avoit fait tout le
contraire.
Quelque indifférent qu’il soit à la cause, de savoir si
les consentemens de la dame Périssel étoient une démis
sion, puisqu’elle n’a jamais été réellement révoquée,
il est difficile de trouver dans les divers actes de la famille
les caractères d’une démission de biens.
« La démission de biens, dit Lebrun ( liv. 1er. cj1> ]er )
» est un acte par lequel, par une anticipation de succession
7) on abandonne à tous ses héritiers présomptifs, la pro» priété ou l’usufrit de ses biens. »
« Je n’estime pas, continue cet auteur, qu’elle puisse
» être faite en faveur de quelques-uns des héritiers na5) turels, à l’exclusion des autres, à moins que la coutume
» n’eu dispose autrement.... Celui qui se démet en faveur
» d’un ou de deux, au préjudice des autres au meme
» degré, est réputé donner, et la démission sera sujette a
» l’insmuation. »
�( 21 )
Boulenois, question deuxième, est du même avis. « L a
» démission de biens, d it-il, doit être faite aux héritiers
» présomptifs ; mais ce n’est pas assez, elle doit etre faite
» à tous ; car sans cela elle n’imite pas la loi en la pré» venant, et ne sera pas une démission de biens. »
L a dame Périssel n’a pas fait de démission par les actes
de 179-3 et de l’an 2 , car ils se réfèrent tous deux au
contrat de mariage de 1789, dans lequel elle instituoit
l’intimé seul héritier universel, consentant qu’il jouît de
'sa succession aussitôt le décès de son p ère, à la charge
d’une pension.
Cet acte n’étoit pas une démission , d’après Lebrun ;
’ il étoit une donation h rente viagère, ainsi que l’appelant
l ’a dénommée dans le procès devant les arbitres, la disant
irrévocable pour cette cause; et en effet, elle l’est même
d’après l’article X V I de la loi du 17 nivôse, puisque les
cohéritiers du degré égal sont intervenus pour y consentir,
après que cette loi l’a permis.
Quant à l’objection, que le consentement de la dame
Périssel n’étoit donné que pour un partage par égalité ;
il est bien étonnant qu’elle soit présentée comme une
vérité, lorsque l’acte de l’an 2 la dément formellement.
Il y a dans cet acte deux consentemens de la dame
rissel; l’un, pour le partage, quand ses enfans paroissoient
d’abord vouloir partager pour satisfaire à la loi du 17
nivôse ; le deuxième ensuite , pour maintenir toutes les
clauses du contrat de mariage, et laisser ses biens à l’intimé
seul qui les avoit déjà : c’est ce dernier consentement qui
termine l’acte, et qui est exécuté; le premier étoit donc
un simple projet. Ainsi de bonne foi falloit-il en faire un
�( 22 )
moyen ? II en résultait même un moyen contraire; car si
la mère vouloit un partage par égalité , ce n’est donc pas
elle qui gênoit l’appelant. Pourquoi donc ne profitoit-il
pas de cette volonté , pour vouloir lui-m êm e ce qu’il
demande à présent ?
Mais que signifie encore cet acte de l’an 2, lorsque celui
de 1792 existoit ; les vices du second n’annulleroient pas
le premier , et il resteroit toujoui-s entre les parties le
traité de 1792, fait en grande connoissance de cause entx*o
toutes les parties, par lequel l’intimé a accepté la ratifica
tion d’abandon de la part de sa m ère, du consentement
de.ses cohéritiers, et s’est obligé dii*ectement de leur payer
leurs légitimes conventionnelles, du consentement de la
mère. Rien sans doute n’est plus irrévocable que cet acte.
Les autres objections proposées ne sont pas plus fondées
que les précédentes.
•La consultation du citoyen Périssel combat les motifs
du jugement dont est appel, et pense qu’ils sont vicieux
en ce qu’ils sont appuyés d’abord sur l’indivisibilité des
institutions, et sur ce qu’il avoit toujours exécuté les
traités, joui et vendu.
L a confusion d’idées imputée aux quatre premiers
motifs de ce jugement,est un reproche d’autant plus injuste
qu’ils sont très-clairs etméthodiques, et que les expressions
substituées pour les épurer, n’en rendent rien moins que le
sens; ou plutôt elles 11e sont que l’extrait du dernier m o t i f j
et nullement des trois autres. L ’indivisibilité des institu
tions n’est point du tout ce qui a décidé les juges dont est
appel ; mais bien l’indivisibilité des c o n v e n t i o n s libres
faites entre les parties, l’exécutioii de ces conventions
�/
2 3
)
pendant huit ans, et l’évidence que les choses ne peuvent
être remises en leur premier état.
. A lors le citoyen Périssel vouloit ne partager que la
succession de la m ère, quoique la consultation dise qu’il
offroit les deu'x partages; et c’est cette erreur, peut-être,
qui a fait trouver de la confusion où il n’y en avoit pas.
Cependant le jugement même rendoit compte des efforts
faits par l’appelant pour prouver qu’il pouvoit retenir
l ’une des deux institutions, en payant la moitié des
légitimes.
Les auteurs de la consultation ont laissé entrevoir que
ce système leur sembloit fondé en principe ; mais à la
vérité, en glissant légèrement sur cette erreur, et pour se
servir de leurs propres expressions , marchant sur des
charbons arde?is. Car sérieusement les termes de paye-*
ment des légitimes étoient pour la commodité de l ’hé
ritier , et nullement pour la division des estocs. L é
principe que partes non diçisœ censentur œquales est
pour tout autre chose que pour des dots ou légitimes
faites effuso serm one, si ce n’est dans les-pays de com
munauté ; car il répugne à la raison , comme le dit le
Commentateur de notre coutume, qu’une femme qui a sou
vent beaucoup moins de fortune que son m ari, contx-ibue
pour moitié aux légitimes. Aussi la jurisprudence veutelle qu’en ce cas, la contribution des estocs soit fixée par
une ventilation.
Aujourd’hui cette discussion devenoit oiseuse, puisque
le citoyen Périssel veut bien offrir un partage gén éral,
qui u’est pas plus acceptable ; mais en ce cas, il devenoit
également oiseux de chercher à établir que la nullité
�S 24)
des actes attaques devoit avoir lieu pouf la succession
futui’e seulement. Les deux autorités citées, Brodeau et
L ebrun , ne seroient d’ailleurs pas applicables à la cause ,
s’il étoit encore question de la division à laquelle le citoyen.
Périssel renonce.
Cet abandon que fait le citoyen Périssel de ses premiers
moyens ne le rend pas pour cela plus favorable; car il
faut toujours qu’il fasse tomber les actes de 1792 et de
l ’an 2 , et il faudroit encore qu’il remît les choses en
leur premier état, ce qui est devenu impossible par son
fait.
L a validité de ces actes a été déjà établie en elle-même,
fit le citoyen Périssel n’a pas même la ressource de dire
que son consentement ait été gêné, car toujours il a été
»le moteur des conventions qui ont eu lieu.
S’il n’existoit que son contrat de mariage , peut-être
bien argumentant de la crainte révérentielle, pourroit-il
dire que l’engagement qu’il a pris de payer les légitimes ,
étoit extorqué par ses père et m ère, ne pejus J'acerent p
.comme il l’a fait valoir en première instance, et encore
lui opposeroit-on l’édit si quis omissa causa tesiamenti,
le sentiment de L ebru n , liv, I I I , cliap. I I , n°, 40, et
celui de Dom at, liv, I I I , tit. Ier. sect. Y . n°. 17.
Mais c’est après la mort de son p è re , c’est après avoir
d’abord abdiqué , qu’il est venu ratifier ses engagemens
en toute connoissance de cause, proposer lui-même cette
ratification, et agir depuis en véritable propriétaire , par
une jouissance exclusive de huit ans , et par un grand,
nombre de ventes ; enfin traiter une seconde fois.
P eu t - il donc se dire gêné par le consentement de sa
mère
�*5
(
)
mère ? Il y auroit à cela de la mauvaise f o i , car elle n’est
venue le donner que quand il l’a appelée pour cela, et
pa rce qu’il avoit intére t de l’avoir.
La crainte révérentielle n’est pas un moyen d’annullation adopté légèrement. Lapeyrère , lettre R , n°. 4 1 ,
dit qu’on 11e l’admet pas pour le fils majeur. Il excepte le cas
où il auroit fait des protestations secrètes, pour constater
qu’il n’a pas été libre , à supposer encore qu’il y eût de la
lésion. Henrys et Bretonnier, question 175 du liv. I V ,
sont du même avis. Ricard désire aussi ces protestations.
I c i , où sont donc les pi’otestations du citoyen Périssel,
et où est la lésion ? Bien loin de protester , il a au
conti’aii-e confirmé ses premières conventions par de
nouvelles ; et la libex*té qu’il avoit de faire en l’an 2
ce qu’il demande à présent, est la meilleure preuve qu’il
n’a fait alors que sa volonté.
Q u’a donc de commun la position de l’appelant avec
les pi’incipes rigoureux q u i, dans le sens même adopté
pour lu i, annullci'oient indistinctement toutes les conven
tions relatives à des successions futures. Voit-on ici ce
que les autcui’s appellent corvina conventio, cette soif
de la succession d’un vivant que la loi appelle acerbissimani spem , ces dangei’s que comporte ce désir de
succéder trist/ssimi et pericnlosieçentûs? Tout est effacé
par le consentement que donne la dame Périssel à chaque
ratification ; et ain si, comme ledit Despeisses, ( des suc
cessions et testamens, tit. Ier. sect. I I I ) : « On ne ci’oit
5) pas que ce soit le désir de capter l’hérédité d’autrui, qui
» ait fait faire detelles conventions;et 011 présume, dans
» ce cas, que celui de l’hérédité duquel il s’agit, a bien
D
�{**)
» reconnu la prud’homie et fidélité de ceux auxquels
» il permet de pactiser de son hérédité de son vivant. »
La position du citoyen P érissel, lors des actes qu’il
attaque , n’a en effet rien qui tienne de la contrainte ,
du dol, ni’de Terreur ; les jurisconsultes qui lui ont donné
des m oyens, reconnoissent (page 2 ) que ceux-là ne
doivent pas décider la contestation. G’étoit cependant les
moyens sur lesquels en première instance il fondoit tout
son espoir; en les abandonnant, il se retranche sur ses
hésitations et variations, et sur ce qu?il traitoit sur de&
objets qu’il ne pouvoit connoître.
Mais comment ses variations peuvent-elles être un
moyen pour lu i, lorsqu’elles prouvent au contraire qu’il
a eu toute la liberté possible^ d’ètre ou de n’être pas
héritier. Après son abdication , il a proposé de redevenir
héritier : n’est - ce pas en connoissance de cause ? Après
avoir joui deux ans de to u t, il pouvoit partager par
égalité, en vertu de la loi du 17 nivôse : ses frères enétoieiit d’accord. Point du tout : il reste héritier. Mais
alors il n’y avoit plus de nécessité présumée ;,et s’il a opté
pour l’institution , à qui donc peut-il s’en prendre ?
A cette époque de l’an 2, peut-il dire de bonne foi que sa
mère n’eût pas été bien aise de jouir elle-même de ses biens
fonds, au lieu d’avoir une pension de cent pistoles en
assignats ?
Quand il dit qu’il ne connoissoit pas le testament de
s o n père, c’est un jeu sans doute;mais à quoi p e u t s e r v i r
ce testament dans la cause. Dabord i l n ’a u g m e n t e ni ne
diminue les droits des parties. I/appelant
p r é v a u t d une
supposition d’abdication, et cela est d ’ a u t a n t plus sans
5
s ’ y
�7
( f2 \
objet, que le père ne le prévoyoit que pour sa succession,
tandis que ce n’est précisément pas celle que le citoyen
Périssel a voulu abdiquer.
Les biens , d i t - i l , étoient insuffisans pour acquitter
les charges ; mais, si cela étoit, pourquoi les reprenoit-il
en 1792? Pourquoi les reprenoit-il en l’an 2 ? Comment
se fait-il qu’il ne se soit avisé de cela qu’après huit ans de
jouissance ?
Plus on lit les traités faits à ces deux époques , plus
on se pénètre que personne moins que l’appelant ne peut
les attaquer , et qu’ils sont irréfragables pour lui. Mais
suivons son système jusqu’au bout : supposons que le
partage qu’il demande soit ordonné, soit pour u n e , soit
pour deux successions ; il est clair que ce partage est
devenu impossible par son propre fait. Cette démonstra
tion prouvera ce que les intimés ont dit dabord, que les
■circonstances ont rendu le maintien des deux traités
nécessaire.
La succession de Pierre Périssel étoit composée en
•immeubles ] i° . de deux maisons ; 2°, de deux septerées
de terre à Couriat; 30. de onze œuvres de vigne à la
V aye ; 40 de sept septerées de terre à Mariolle ; °. d’un
.jardin près Mozac.
La succession de Miclielle Labry étoit composée,
i° . du domaine de la B arge; 2°. d’un p ré-verger à
Mozac ; 30. de dix-sepL œuvres de vigne au même lieu.
Annet Périssel a vendu les trois premiers objets de
la succession du p ère, moyennant 27,200 francs : il ne
lui reste que sept septerées de terre, et un jardin.
Il a vendu le domaine de la m ère, à La rue, ce qui
D a
5
�C *8 )
a donné lieu au procès dont il a été parlé ci-devant. Ce
domaine, vendu 35,000 francs d’assignats, a été estimé
•20,800, sans les bestiaux. La succession du père y avoit
'une reprise, mais qui se réduisoit en argent.
Il a encore vendu le pré-verger de la même succes
sion , pour 4,000 francs ; il ne lui reste que les dix-sept
•œuvres de vigne.
M aintenant, qu’il explique quels objets il présente à
partager? il ne lui en reste que trois, qui sont les moindres.
Sans doute , il ne veut pas prétendre que la moitié
des légitimes qu’il a payée, partie en assignats, vaille
pour la moitié de la portion héréditaire-, car, dès qu’il
offre le partage de tou t, il est de droit que les immeubles
seraient partagés par égalité, sauf le rapport, par chacun,
de ce qu’il a touch é, de même qu’il rapporteroit, de
son côté, les 8,000 francs restant du prix de l’office de
son père, le mobilier qu’il a usé, et les rentes dont il a
reçu les remboursemens.
Il y a huit enfans, il ne lui reviendroit donc qu’un
huitième, et en mettant, par aperçu, les immeubles à
80,000 francs, il ne lui en reviendroit que 10,000 francs.
Cependant il en a vendu pour plus de ,ooo francs. Sa
demande a donc pour objet de donner à ses cohéritiers,
non pas des immeubles à partager , mais des procès ; et,
ce qui est in ou i, sa demande tend à créer des procès
contre lui-m êm e, car tous les acquéreurs se pourvoiroient contre lui.
Les auteurs de sa consultation ont donc été induits en
erreur, lorsqu’ils ont cru trouver, à ces ventes, le l’emede
ordinaire de faire échoir les objets au lot du vendeur.
52
�29
(
)
Mais s’il lui revient 10,000 francs, on ne peut lui en faire
échoir
. En sachant cela ils n’eussent pas dit : « que
» les cohéritiers sont désintéressés par le rapport de
» la valeur de l’ob jet, comme par le rapport de l’objet
» môme. » C'ir alors , ce prétendu principe eut été une
.très-grande erreur ; on ne peut mobiliser la portion d’un
copartngeant, et l’empêcher d’avoir sa porlion de tous
les immeubles.
A ces moyens devoit s’en ajouter un autre plus im
portant encore ; c’est que, quand les légitimaires seroient
suffisamment indemnisés par les procès que l’appelant
leur cèderoit contre ses acquéreurs, en échange de leur
légitim e, ces acquéreurs ne manqueraient pas d’opposer
qu’ils ont traité avec le vrai propriétaire, et de pré
tendre qu’on ne peut les évincer.
En effet, Annet Périssel avoit qualité pour vendre;
il étoit héritier universel et jouissoit de tous les biens.
Les légitimaires se sont contentés de leurs légitimes con
ventionnelles ; ainsi, d’après cette option, ils n’ont plus
eu d’action pour troubler les acquéreurs des immeubles.
Comment donc le citoyen Périssel peut-il leur rendre
cette action, lui précisément qui a ven du, et qui est
obligé de garantir. Cette proposition de sa part est même
bizarre et choque le bon sens.
L ’acquéreur du domaine de la Barge, Larue, a prouvé,
même en plus forts term es, que sa vente devoit sortir
effet; car il l’a fait déclarer valable par jugement , contre
Michelle Labry elle-même, et ce jugement a été exécuté.
La conséquence de ce jugement est frappante. Si les
légitimaires étoient réduits k chercher leur légitime en
52
�3
( ° )
assignant les acquéreurs de leur frère , Larue leur opposeroit la chose jugée ; et comment pourroient-ils, eux
‘héritiers de leur m ère, faire tomber un jugement rendu
contre elle.
Ces entraves évidentes suffiroient, seules, pour pros
crire les propositions inacceptables du citoyen Périssel.
Les choses ne sont plus entières, et c’est par son fait;
c’est lui-même qui , dans une manutention de huit ans,
'a tout dénaturé, tout bouleversé; et il veut que les choses
se remettent dans leur premier état, quand il l’a rendu
impossible. Il reste quelques biens fonds qui suffiront,
à peine, pour la portion de ceux qui ont donné les mains
au partage des biens de la m ère, ou même pour la
légitime de ceux qui auraient droit de la demander en
biens fonds, d’après la loi du 18 pluviôse.
Mais il est effrayant de calculer où mènerait la néces
sité de recomposer, en entier, les deux successions ; car
les ventes, l’office, le m obilier, les rentes remboursées
et l’abolition de la forclusion , rendraient un partage la
•chose du monde la plus inextricable et la plus ruineuse;
la famille l’avoit pensé ainsi, lors des traités, et que seraitce donc maintenant que rien n’est à sa place!
Ces moyens ne sont pas simplement déconsidération,
car des cohéritiers doivent partager une succession et non
pas le simulacre d’une succession ; ils doivent trouver
des biens fonds en masse, et non des procès. Une c a u s e
de cette nature s’étoit présentée au tribunal civil de c c
département, entre le sieur de Bassiguac, d o n a t a i r e de
son père, des biens présens et à venir, et ses s œ u r s , envers
lesquelles il étoit grevé de légitimes conventionnelles. 11
�(30
avoit aussi joui de tout, du vivant de jo n p è r e , e jja it
plusieurs ventes ; cependant, après sa m o rt, il disoit dç
môme, que ce qu’il avoit fait, pendant la vie de son père,
n’avoit pu l’obliger, et il vouloit abdiquer sa donation.
M ais, par jugement du^i6 prairial an , il fut jugé
que les choses n’étant plus entières, il devoit exécuter
ses engageinens. IA u î des motifs de ce jugement mérité
d’ètre transcrit, à cause de sa grande analogie à la con
testation actuelle.
cc Attendu qu’il a aliéné une partie des biens donnés,
33 que les acquéreurs ont traité de bonne f o i, et ne peu33 vent pas être valablement dépossédés ; que respecti33 vement à eux, l’exercice de l’abdication est impraticable, _
33 et que, par conséquent, cette même abdication, qui
33 ne peut pas avoir lieu à l’égard des acquéreurs, ne
33 peut pas être admise par rapport aux citoyennes de
» Bassignac. 33
Ce jugement a été confirmé sur appel. ^
Ge n’est donc pas une chose aussi aisée que le dit la
consultation du citoyen Péi'issel, de faire rapporter au
partage tout ce qu’il a aliéné ; car les acquéreurs d iroient qu’ils ont acquis valablement, et Larue surtout,
opposeroit un jugement qui seroit une barrière insur
montable.
Ainsi les prétentions du citoyen Périssel sont contraires
tout à la fois aux principes et aux circonstances. Il étoit
tenu par son contrat de mariage de payer des légitimes
que scs père et mère n’avoient pas aggravées par inofficiosité,puisqu’ils le faisoienl héritier univei’sel. Il a prouvé
lui - même qu’il ne trouvoit pas cette charge excessive,
5
�( 32 )
puisqu’il a ratifié son contrat de mariage par deux fois ,
qu’il a joui de tout pendant huit ans sans abdiquer, et
qu’il a vendu les deux tiers des biens pour mieux montrer
qu’il n’entendoit pas revenir sur le passé. Il étoit majeur
et versé dans les affaires, il a traité et vendu en connoissance de cause. Aujourd’hui les choses ne sont plus en
tières ; au lieu des formes ordinaires d’un partage, il n’y
auroit qu’entraves, procès et difficultés. Il faut donc en
revenir aux traités faits entre les parties, dont les con
ventions devroient être validées par nécessité et par pru
dence, quand il n’auroit pas été démontré qu’elles sont
adoptées par les p rincipes, et qu’elles ont été de la part
du citoyen Périssel, le résultat de l’expérience et de la
réflexion.
L . F. D E L A P C H IE R , homme de loi.
C O L A N G E , avoué.
A R I O M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul Imprimeur du
T ribunal d ’appel. — A n 1 0
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Périssel, Antoine-Ambroise. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Colange
Subject
The topic of the resource
successions
bureau de famille
tribunal de familles
partage
égalité des héritiers
offices
ventes de biens successoraux
doctrine
jurisprudence
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse à consultation signifiée, pour Antoine-Ambroise, Jean-Baptiste et François Périssel, Bonnette Périssel, le citoyen Mortillet, son mari, et Marguerite Périssel, intimés ; Contre Annet Périssel, avoué au tribunal d'appel de Riom appelant.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1767-Circa An 10
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0332
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Mozac (63245)
La Barge (domaine de)
Rights
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Domaine public
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Bureau de Famille
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égalité des héritiers
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MÉMOIRE
EN R É P O N S E ,
P our J e a n n e et M a r i e - G a b r i e l l e N O Y E R , P i e r r e
et J o s e p h G R E L I C H E , leurs m aris, habitant à
M o z u n , intimés ;
Contre J o s e p h N O Y E R - D U B O U Y , habitant à
Chamaliere, appelant ; en présence d ’'A n n e N O Y E R L A G A R D E avoué au Tribunal civil de Clermont,
intimés.
�M
É
M
O
I
R
E
EN R É P O N S E ,
Pour J e a n n e e t M a r i e -G a b r i e l l e N O Y E R , P ie r r e
et J oseph G R E L I C H E , leurs m aris, habitant à
M ozun , intimés ;
,
Contre J oseph N O Y E R - D U B O U Y habitant-à
Chamalière, appelant; en présence d ’A n n e N O Y E R L A G A R D E avoué au Tribunal civil de Clermont,
intimés.
,
E citoyen N oyer-Dubouy crie au vo le u r, pour qu’on
ne le soupçonne pas; il se plaint de tout le monde: il
ne veut pas tout-à-fait, comme Harpagon , faire pendre
la ville et les fauxbourgs, mais après avoir mis une foule
l
de personnes à l ’index de sa colère, il va grondant
encore contre ceux qu’il ne désigne pas. Son mémoire
est un acte d’accusation contre son p è r e , ses frères,
ses sœurs , ses beau-frères, le juge de paix et assesseurs
de M o zu n , les juges, le commissaire et le greffier du
A
�( a )
tribunal civil de Clerm ont, le magistrat de sûreté, etc.
Il ne s’agil rien moins que de v o l , bris de scellés , pré
varication ; et véritablement son procès semble être la
matière d’une conspiration vaste,m éditée depuis l’an 5,
et dont les ramifications sont sans nombre.
Ces personnalités si multipliées, mêlées à des moyens
présentés cependant avec talent et adresse , doiventelles ajouter plus de persuasion en faveur de la narra
tion du citoyen N oyer-D ubouy, et convaincre davantage
de la sincérité des'faits qu’il avance? non ; la vérité
plus simple et plus naïve n’a pas pour escorte des in
jures et des accusations. Les dames Greliclie diront au
citoyen D u b o u y , avec moins d’aigreur et plus de fran
chise , qu’il a voulu les faire ses dupes ; qu'elles résistent
de tout leur pouvoir à le devenir ; et que c’est là tout
le secret de ses plaintes et de la contestation : qu’après
avoir fait régler ses droits dans les successions confon
dues des père et mère , il a voulu faire distinguer la
succession de la mère pour s’en créer de nouveaux ;
et sur une réponse équivoque au bureau de paix , il a
bâti l’édifice gigantesque de ses prétentions toujrturs
croissantes, et du procès interminable qui menace de
dévorer toute la succession.
Dans ce calios de faits, de débats minutieux et de
procédures, s’il y avait un point de départ positif, il
faudrait s’en emparer pour se rendre plus promptement
intelligible ; mais malheureusement la cause le serait
moins, si les détails en étaient omis, si rensemble en
était rompu ; car le système du citoyen N oyer-D u bou y
�C 3 )
.
est fondé principalement sur la procédure; il faudra
donc la parcourir toute entière. Il s’attache aussi à
prouver que sa mère a laissé une succession opulente;
il sera donc nécessaire d’en examiner la consistance.
' ' ii* .
F A I T S .
Jean-Baptiste-Josepli Noyer épousa, en 1760, Fran
çoise T i x i e r , fille de Marien T ixier , commis-greffier
de la cour des aides.
Marien T ixier , marié à Jeanne L e y m e r ie , qui lui
porta 5 oo livres de d o t , avait de son ch e f une petite
maison , un jardin de deux œuvres, une vigne de huit
à dix, une terre de trois quartonnées ; lout cela était
imposé , à son décès, pour un revenu présumé de 168
livres. Il avait trois enfans.
lie contrat de mariage de 1760, a des clauses pro
portionnées à cette richesse ; i.° la future porte un
trousseau estimé 35 o liv. ; 2.0 elle est instituée héritière
par égalité avec Gabrielle sa sœur, sauf un préciput
de 1000 liv. ; 3.° ses robes, ses bagues et joyaux font
un total de 120 liv.; 4 ° riche douairière, la future a
l ’expectative d’un gain de survie de 120 liv. en capital.
Marien T ixier, qui dans sa qualité était commis au
paiement des gages de la cour des aides, mit de la
négligence dans ses comptes. A sa m ort, en 1760, il
avait été condamné à plus de 80,000 liv. de contraintes
ou d’amendes. Sa succession se trouva en outre débi
trice de sommes assez considérables envers une seconde
femme.
A a
�( 4 )
L e fisc s'empara de la succession; le mobilier fut
vendu publiquement, et produisit 1269 livres; il fallut
.
en distraire 264 liv. de frais, et le surplus fut déposé
au greffe.
L a dame N oyer et sa sœur répudièrent au greffe ,
le 14 avril 1760. Jean Giraudias fut nommé curateur.
L e sieur N oyer avait acquis les créances de la veu ve;
il en donna l’é t a t , de m êm e que des siennes, par une
requête du 16 avril. L e total de ses demandes se por
tait alors à 5029 liv. 5 sous, h prélever sur la succession.
L e curateur fit faire le bail judiciaire des immeubles.
Beaucoup d’enchérisseurs se présentèrent ; des remises
furent ordonnées; l’adjudication fut faite à
livres.
Cependant le citoyen N oyer fit des démarches pour
l’honneur de son beau-père et pour sauver quelque
chose de sa succession ; il fit des voyages à Paris ,
sollicita des modérations, et enfin obtint, le 29 mai
1764 , un arrêt du conseil qui réduisit les droits du
fisc à 2000 livres, chargea le citoyen Noyer de payer
cette somme au trésor public , outre ce qui serait dû
au sieur de P ille, procureur à la chambre des comptes
(il paraît que c’était 1200 liv. ), au moyen de quoi le
citoyen N oyer fut subrogé aux droits du fisc contre la
succession.
Cette liquidation néanmoins n’engagea pas la dame
N oyer à se rendre héritière. On voit qu’ un autre cura
teur fut nommé après Giraudias , et que ce curateur
vendit h M .r Reboul la petite maison T ix ie r , moyen
nant 3 i2 o liv r e s, dont 2000 livres furent déléguées au
�( 5)
trésor, et io o o liv. à. M .r de Pille. M .r Reboul voulut
la garantie du sieur N o y e r, créancier principal, qui in
tervint pour la donner.
L e même jour le sieur N o y e r, tou jours comme person
nellement créancier, obtint la main-levée de deux saisiesarrêts, faites sur les deniers consignés au greffe, sur
le sieur Berard de Chazelle, débiteur de 1400 liv., et
sur le sieur de Vichy-VarVas , débiteur d’une rente de
2.5 livres. On ne voit pas s’il toucha ces deux sommes.
E n 1 7 6 7 , il vendit le jardin au sieur R e y m o n d ,
chirurgien , à la charge de payer une rente de 2 5 liv.
et moyennant 748 liv. (M arien Tixier l’avait a ch e té ,le
6 avril 17 4 2 , moyennant 35 liv. de rente ). Quant à la
vigne et à la terre , le citoyen D ubouy dit que son père
les a aussi vendues.
Françoise T ix ie r, femme N o y e r , n’était pas seule
hérilière de Marien , elle avait une sœur religieuse ;
l’autre était Marie-Gabrielle, vivant avec elle.
Quand la succession du père fut liquidée, celle-ci
voulut y avoir part, et demanda un com pte, non à sa
sœur, mais au cit. N o y e r, qui, comme créancier, oc
cupait la succession. Il fut, à ce sujet, fait entre eux un
traité, le 27 décembre 1767. L e citoyen Noyer y rend
compte d elà succession fixée à 11,088 liv.; sur quoi il
dit qu’y ayant pour 5,689 liv. ^ sous de dettes, ilresle
net 5 ,399 liv. 5 sous ; que Françoise Tixier ayant un
prélèvement de 1,000 liv ., il reste à Gabrielle T ixier
à prendre la moitié du surplus, c’est-à-dire 2,200 liv .,
à quoi le cit. N oyer ajoute 7 00
qu il a touchées pour
�m
sa belle-sœur sur d’autres affaires; de sorte qu’il se re
connaît son débiteur de 2,900 liv ., pour laquelle il crée
une renie raclieiable de 145 liv.; et comme Gabrielle
Tixier avait projet de rester près de sa sœur, il est dit
qu’en cas d'incompatibilité, elle pourra demander rem
boursement des 700 liv.
Y eut-il séparation? La rente fut-elle rachetée? on
l’ignore ; mais ce qu’on rem arque, c ’est qu’en 1766 et
1 7 6 7 , Gabrielle T ixier acheta une maison et des im
meubles dans le village de Provarel prèsSermentizon,
par trois ventes, moyennant 658 liv. On remarque aussique par acte du i 5 janvier 177^ , elle revendit tous ces
héritages au cit. N oyer son b e a u - fr è r e , moyennant
600 liv. dont elle lui donna quittance.
Ainsi ces immeubles s’effacent de sa succession, qui
consisterait tout au plus dans ses vêtemens et dans la
rente de 145 liv., s’il n’est pas jugé que les ventes qui Font
suivie de si près, en prouvent le remboursement.
Les sieur et dame N oyer avaient cinq enfans, trois
maies et deux filles; le tems était venu de les établir;
niais la forlune de la mère élait toujours incertaine,
ou plutôt elle était réputée entièrement nulle, puis
qu’elle 11’avait pas r é v o q u é sa répudiation.
Pour ne pas jouer un rôle tout-à-fait neutre lors de
rétablissement de ses enfans, on voit qu’elle sollicita
de son mari une reconnaissance de
lut faite le 8 novembre 17 7 6 , pour
touchés de la succession de son père,
11011 compris ce qui serait porté par
5,000 liv., qui lui
deniers, est-il dit,
et prix des ventes ;
quittance donnée
�( 7)
par Annet T ard if audit défunt T ixier<L a dame Ncryer
accepte cette reconnaissance.
Elle avait cinq enfatis; la générosité de son mari la
m e t t a i t à même de leur donner à chacun i,o c o liv. On
voit en effet par les contrats de mariage de ses enfans ,
et notamment de ses deux filles mariées aux deux ci
toyens Greliche, en 1776 et 1777 , qu'elle leur promet
de son c h e f une somme de 1,000 livres, payable après
son décès.
Gabrielle T ixier étant décédée, il paraît que la dame
N o y e r, sa sœ ur, fit assigner son mari en 17 8 3 , pour
obtenir une moitié de la succession de ses père et mère,
comme héritière de sa sœur, attendu que cette succes
sion lui était paraphernale. Elle reprit celte demande en
178 8 , et on ne remarque dans l ’un ni l’autre des ex
ploits qu’elle se plaignit de la reconnaissance de 1 7 7 5 ,
ni aucun des faits que son fils D ubouy lui fait dire six
mois après, dans un testament.
Ce testament, daté du 20 juillet 1 7 8 9 , qui n’est
revêtu d’aucunes formes, ne mériterait pas les regards
de lu justice, si le cit. D ubouy ne s’en faisait positive
ment un titre. Mais il en argumente expressément, il
en fait une pièce de sa production ; il huit donc en
rappeler le contenu.
La dame N oyer institue le cit. D u b o u y , son héritier
universel; elle prie son époux de lui reconnaître ce qui
lui est dù en conscience et probité.
Autant que je puis m ’en souvenir, dit-elle, mon mari
a reçu , i.° 7 à 8,000 liv. déposées chez M .r Reboul.
�C-8 )
2.°.Environ 2 5 o louis d’or de 24 lîv. que ]e^Tis moi-même
dans l’armoire démon père, à ¿’instant de sa mort. 3 .° Les
Jbiens qu’il a vendus...... Je n’ai de reconnu que 5,oooliv.
Je prie mon époux de reconnaître Le surplus, en con
science et probité, à Jean-Joseph Noyer-Dubouy, mon
héritier,
q u e j e p r i e d ’é v i t e r l a
r e c h e r c h e d e mes
DROITS P A R COMMUNE RENOMMÉE.
Qui ne v o i t , dans ce testam ent, une c o p ie , une
caricature du légataire universel ?
On devient certain de la captation, quand on re
marque que le citoyen N o yer-D u b ou y s’est marié un
an après, en 1790 , sans que la mère ait répété celte
institution.
Par son contrat de m ariage, on voit que son père
lui lègue les biens du B o u y , pour lui être remis après
son décès et celui de sa fem m e, la jouissance desquels
leur demeure réservée: ledit legs fait pour lui tenir lieu
de sa porlion héréditaire quand elle sera échue.
A la charge de p a yer, après le décès desdits sieur
et dame N oyer, 2,000 liv. h chacune des dames Grelic h e , pour pareille somme qui leur sera due par la
succession desdits sieur et dame Noyer, pour reste de
leurs dots, à elle faites par ledit sieur N oyer et sa femme;
plus 2,000 livres aux héritiers de droit, faisant au total
6,000 livres.
La mère ne paraît à ce contrat de mariage, que par
un fondé de pouvoir, ayant charge d ’autoriser le ma
riage; mais elle n’institue pas. L e legs est évidemment
fait pour tenir lieu des deux successions.
Le
�( 9)
L e cil. N oyer père, fut mis en réclusion h Billom ;
le n e u f iliermidor ne l’en délivra pas. U n chagrin
profond, dont il est inutile de dire les causes, fer
mentait dans son ame. 11 mourut le huit fructidor
an deux.
Quinze jours avant sa mort, il avait fait un testament
en présence des citoyens Girodias , L asteyras, M artinGibergue , B o m p a rd , Fournier et Q u esn e, détenus
comme lui ; en présence des citoyens Reynaud et
Bouchardon, commissaires du comité de surveillance,
et de Voltaire-Lausset, concierge de la maison de ré
clusion.
La loi du 19 ventôse devait lui inspirer des craintes
de confiscation. Il était encore fortement occupé du
projet de diminuer le legs, qu’il avait fait au citoyen
D u b o u y, de son principal im m euble, et la loi du 17
nivôse ne le rassurait pas assez. Dans celte double
occurence J e parti le plus prudent était de tenter une
reconnaissance au profit de sa femme; il déclara donc
luidevoir 12,000liv.pour le prix des ventes des meubles
et immeubles de son beau-père et de sa b e lle -sœ u r,
sans préjudice à d’autres reconnaissances.
A lout événem ent, il lui légua l'usufruit de ses biens,
et institua ses cinq enfans héritiers par égalité.
Cependant le district de Billom décida sagemenl et
légalement, le 11 fructidor, que les biens d’un détenu
mort et non ju g é , n’étaicnL plus susceptibles de con
fiscation ni de séquestre ; il permit aux hériliers N oyer
de faire lever par le juge de paix , les scellés niiî
B
�( 10 )
par le comité de surveillance, lors dé l’arrestation (i).
Les droits de la dame N o y e r , sur la succession de
son mari, étaient plus confondus que jamais dans la
succession du père, par le legs d’usufruit à elle fait par
le testament. A la vérité, ce legs ne devait être que de
m oitié, et il restait des difficultés pour liquider ses droits
sur l’autre moitié.
^
Ces difficultés, elle voulut les applanir toutes de son
vivant, pour ne laissera ses enfans aucune semence de
discorde. Elle les réunit tous pour leur céder ses droits
etreprises, moyennant unepension viagère de i , 5 ooliv.,
son logem ent, la jouissance d'un jardin, et moyennant
le délaissement de deux vaches, et tous les comestibles.
Cette pièce est rappelée au jugement du zb ventôse
an 5. Folio 5 , II0.
Ce traité liquidait entièrement la succession pater
nelle; les cinq héritiers en firent vendre tout le mobibilier. M ary Noyer aîn é, vendit sa portion à ses frères
et sœurs, moyennant 16,000 liv ., sous la réserve du
mobilier qui se trouverait chez sa mère, à son décès,
c ’est-à-dire, de ce que les uns et les autres entendaient
par la succession effective. A u moyen de quoi le partage
fut fait par quart ou par égalité , comme le voulait le
père par son testament.
( i ) Cette expression de scellés prouve que le comité n’avait
pas fait un inventaire général, comme le prétend le cit. P u b o u y ,
pour ajouter qu’on l’a soustrait; si quelqu’un est
su spect
de cette
soustraction , ce ne peut être ceux d ’entre les parties qui n’ont
haute les comités révolutionnaires que comme supplians.
�( lï )
Les deux dames Greliclie eurent les biens de Moznn.
Les citoyens Noyer-Lagarde et Noyer-D ubouy eurent
indivisément le domaine du B o u y , que l’intimé a au
jourd’hui seul.
L a dame N oyer ne survécut pas lo n g -te m s à ces
arrangemens de famille: elle décéda le 8 messidor an 3 ;
et comme ses héritiers supposaient toujours que sa suc
cession n ’élait que dans son mobilier, il en fut fait un
partage sans réclamation.
Mais bientôt advint le rapport de l’effet rétroactif
de la loi du 17 nivôse ; et malgré le testament de son
père, leciloyen N o y e r-D u b o ù y se crut autorisé à pour
suivre ses frères et sœurs, au moyen de son contrat de
mariage. Il 11e perdit pas un instant.
L a loi qui permettait de revenir à partage élait du
4 vendémiaire an 4. 11 commença les hostilités le 28,
par faire poser les scellés sur une armoire du père com
mun , dans laquelle restaient des papiers de sa succes
s io n , de même que d’autres objets restés indivis.
Il est à remarquer que dans le procès-verbal du juge
de paix, il signe N oijer-D uboujj, requérant seulement
Capposition des scellés , en qualité d ’acquéreur et de
légitim aire, conformément a son contrat de mariage.
C ’est qu’en effet, il ne prétendait pas alors que cette
armoire contînt des papiers si précieux pour la suc
cession maternelle; ¡1 était nanti de ces titres lui-même,
et savait que celte succession n’était rien.
On y voit que la clef de cette armoire était au pou
voir *du citoyen Noyer-Lagarde.
B 2
�( 12 )
C elle hostilité fut le signal des procédures. L e cit.
I<agarde,qui avait vendu à D ubouy sa moitié du do
maine du B o u y, et qui sans doute en était m écontent,
assigna ses cohéritiers en partage.
A u bureau de paix, le citoyen D ubouy dit qu’il s’en
tenait à la donation faite par son contrat de mariage,
et qu’il entendait seulement venir à partage des biens
de sa mère , sauf ses droits, dans le cas où il se trou
verait un titre qui le rendrait héritier.
A l’audience, il ne s’occupa plus de cette succession
maternelle, parce qu’il savait bien que tout était con
fondu dans le domaine du B ouy: et par jugement du
2 5 ventôse an 5 , les ventes faites par M ary Noyer
et par N oyer - L a g a rd e , de même que le partage du
22 fructidor an 2 , relatif aux biens paternels , lurent
nnnullés, comme prenant leur source dans l’effet ré
troactif de la loi du 17 nivôse. 2° L e domaine du Bouy
fut délaissé au citoyen N oycr-D u b ou y comme dona
taire contractuel; 3 .° le partage de la succession pa
ternelle fut ordonné entre les quatre autres enfans
N o y e r; 4.0 il fut réglé ce que chacun devait payer à
l ’autre, soit D ubou y h ses frères, pour les réserves de
la donation, notamment les 6,0001. dont il était tenu, et
pour ce qu’il avait touché en mobilier, soit les doux frères
à D u b o u y ,p o u r ce qu’ils avaient touché de leurs ventes.
Ce jugement tout avantageux qu’il était au citoyen
D u b o u y , était un règlement de famille; les quatre
cohéritiers appelés au partage nouveau, ordonné par
ledit jugem ent, s’empressèrent de l’exécuter.
�( 13 )
Ils avaient besoin pour cela des papiers de famille
et effets paternels, contenus dans l’armoire où étaient
les scellés du 28 vendémiaire an 4 ; le juge de paix
était sans doute tenu de les lever , sur la représenta
tion du jugement du ¿5 ventôse : mais avec le cit.
D u b o u y , il fallait des précautions.
, Les copartageans l ’assignèrent donc le 5 germinal
an 5, pour être présent à la rém otion, sans que cela
fût bien nécessaire ; le 6 germinal au so ir, en son
absence, il fut fait un inventaire.
L e juge de paix était à la vérité beau-frere des beaufrères des copartageans; mais quand un juge de paix a
mis des scellés sur les titres d’une succession, il n’y a
pas de p r é v a r i c a t i o n , quand un juge de paix les lève
sur la réquisition de ceux indiqués par un ju gem en t,
pour partager seuls cette succession.
L e juge de paix et ses assesseurs firent un inven
taire , contenant quatre-vingt-dix-sept cotes de titres.
Cet inventaire n'est pas une pièce occulte, le citoyen
D ubouy en a une expédition.
A la suite de l’inventaire les copartageans, voulant
éviter d’autres frais, firent un partage en deux lots d©
la succession N oyer ;N o yer-L ag ard e, pour lui et M ary
N o y e r , eut à son lot les 6000 liv- à prendre sur NoyerD u b o u y , en vertu de la donation de 179 0»
du juge
ment de l’an 5.
L e cit. D u b o u y, favorablement traité par la justice,
trouva dans cette opération les matériaux d’un procès
bien plus lucratif que le premier. Il fit citer ses colié-
�C 14 )
ritiers pour être condamnés à réintégrer le mobilier
enlevé. Il demanda en outre pour dommages-intérêts
60.000 livres écus, quoique les écus ne fussent pas alors
Irès-communs. Il prétendit qu’on avait soustrait l ’o r,
l’argent, les titres, les bordereaux des ventes , et le
testament du 20 ju ille t 1789. (M en teu r! il est dans ses
pièces, cote 14 de sa production).
On pense bien que sur une telle d em an de, la séance
du bureau de paix dut être orageuse (18 floréal an 5 ).
Com m e D ubouy voulait faire représenter les effets
d ’ u n e succession qu’il n’avait pas voulue^onlui demanda
en quelle qualité il entendait agir ; il répondit : que
c ’était comme héritier universel de sa mère, aquéreur
de ses frères, et légitimaire de son père.
Alors les citoy ensGreliclie, faisant pour leurs femmes,
lui disent qu’ils en étaient bien aises, parce qu’ayant
1.000 liv. du clief maternel par leur contrat de mariage,
et ne sachant où les prendre , puisque la mere avait
répudié à la succession de ses père et m ère, ils lui de
mandaient chacun ladite somme de 1,000 liv.
N o y e r - D u b o u y , qui en savait plus qu eux ; quoiqu’il
les accusât d’avoir pris tous les titres, répondit qu’il
acceptait la renonciation qu’ils faisaient de la succession
maternelle, et qu’il se chargeait de les p a y e r , si la somme
leur était due.
Les citoyens Greliche alors, quoiqu’ils ne
soupçon
nassent pas un piège, dirent qu ils n’avaient jam ais
renoncé h la succession maternelle, com m ele prétendait
le cit. D u b o u y, mais qu’ils acceptaient les 1,000 liv.
�( i5 )
A u surplus ils répondirent que s’ils avaient fait lever
les scellés, ils en avaient le droit, en vertu du jugement
du 16 ventôse.
Voilà le précis exact de ce procès-verbal du 1 8 floréal
an 5 , sur lequel le cit. D ubouy a basé toutes ses pré
tentions, pour ruiner la succession ab intestat de son
père, par la recherche de celle de Marien Tixier son
aïeul.
Cependant le cito}re n N o y e r-D u b o u y avait interjeté
appel du jugement du 2 5 ventôse. Il prétendait ne de
voir pas rendre compte de la majeure partie du mobilier
qu’il avait retiré de la succession paternelle, parce qu’il
l ’avait, disait-il, acheté en vente publique , et payé à
ses cohéritiers, c’e st-à -d ire, mis en dépôt dans Carmoire scellée.,
L e 11 ventôse an 6 , cet appel fut jugé au P u y , et
le jugement de Riom fut infirmé dans l’objet de la con
damnation ci-dessus rappelée.
L e cit. N o y er-L a g a rd e, qui dans tout le procès a pris
mal à propos bien des choses sur son com pte, déféra
le serinent décisoire au cit. D ubouy , qui en consé
quence fut autorisé à retenir le m obilier, à la charge
d ’affirmer.
Comme la levée des scellés lui avait fait naître l’idée
d’obtenir le partage des droits maternels , il plaida for
tement pour l'obtenir; mais il ne put obtenir que la
réserve de son action, qu’on ne pouvait lui refuser, et il
est même essentiel de remarquer qu’il no plaidait pas
pour être héritier universel ; car i.° il ne dit rien de la
�( i 6 )
prétendue répudiation du 18 floréal ; 2.0 il fait dire au
premier m otif que la succession de la mère est divi
sible en cinq.
L ’affirmation ordonnée fut un autre sujet de discorde
entre les frères Noyer. I^e citoyen D u b o u y fut accusé
d ’avoir soufflé les copies de signification du jugem ent,
pour faire son affirmation incognito. L ’huissier fut mis
en prison ; mais les choses se pacifièrent : M ary-Noyer
déclara par-devant notaires avoir reçu sa copie; l’huis
sier fut mis en liberté. Enfin lé cit. D ubouy a affirmé,
et on-ne lui dira pas par récrimination qu’il a volé ce
m obilier; car res ju d ica ta pro veritate habetur.
L e cit. D ubouy reprit sa demande relative à la suc
cession m aternelle, le 7 prairial an 6. Il cita au bureau
de paix ses frères et sœurs pour lui remettre la succes
sion , les papiers, le testam ent,-etc ., comme étant seul
héritier, à cause de l’abdication faite le 18 floréal, si
non à lui payer 60,000 liv. (1). A u bureau de paix 011
( 1 ) Il faut être bien osé pour motiver des conclusions aussi
exagérées , sur le fait présumé que les titres, relatifs à la succes
sion de la m ère, ont été enlevés , lorsqu’on les a soi-même.
L e cit. D u b o u y est porteur, 1.° de l'o rig in a l du contrat de
mariage de sa m è r e , expédié à elle-même, cote i . re de
duction ; 2.0 du traité o rig in a l de 1765, cote 4 ;
3 .° de
sa
pro
l ’expédi
tion originale de la reconnaissance de 1 7 7 6 , cote n ; 4 -° c^es
orig ina ux d ’exploits donnés à la requête de la mère contre son
m û r i, en 1787 et 1788 , et du petit d é fa u t, délivré au greffe , sur
ces exploits , cote i3 ; 5.° du testament de sa mfcre; du 20 juillet
178 9, toujours en o rig in a l, cote 14.
ne
�C 17 )
ne dit rien. L e cit. D u b o u y expliqua sa citation par son
assignation du 18 thermidor, et demanda i.° le mobilier
suivant l’inventaire; 2.0 5,ooo liv. pour la reconnaissance
de 1 7 7 3 .° 12,000 liv. pour celle de l’an 2; 4.0 43,000
cli v. pour les autres.reconnaissances énoncées dans celle
de l’an 2.
« ■ ,
Sauf à déduire 4,000 liv. dues; savoir: 1,000 livres à
-Mary N o y e r, lesquelles lui resteront,comme son aquér e u r , et 3,000 livres aux citoyens Greliche et N oyer-Lagarde.
.1
Il saisit en ses mains 4,000 liv. (il avait écrit 6 ) , par
lui dues en vertu de sa donation ; ladite somme prove
nant de La succession du père} l ’huissier lui fait défenses
de s’en désaisir.
;
j .
Cette demande' ne put être jugée ¿1 Riom • il la reprit
en l’an 8 , devant le tribunal de Clermonl ; là il pré
senta une pétition pour demander 6,000 liv. de provi
sion ; puis il augmenta même ses conclusions principales
et demanda 3,900 livres de plus, par un exploit du 9
fructidor an 8 , pour la succession de Gabrielïe T ix ier,
comme échue à sa mère en parapliernal.
L e cit. D ubouy se croyait si bien prêt, à obtenir ces
sommes imaginaires, qu’il fit des saisies arrêts, des
inscriptions au bureau dos hypothèques, etc.
t.
Q ui donc est le voleur ?
Mais il a avoué avoir eu une clef lors des scelle's', et L a garde
une autre. Peut-être voit-on là 'p o u rq u o i il veut absolument
"persuader que Lagarde collude avec tous les autres , et pour
quoi il le signale'com m e son ennemi déclare'.
C
�( 18 )
La translation du proccs de Riom à Clermont semble
peut-être une chose très-ordinaire et indifférente au
procès; elle n ’est cependant rien moins que cela; car
on pressent bien que le cit. L a g a rd e, étant avoué à
C lerm on t et partie lui-même en son nom dans la cause,
dut naturellement en suivre l’instruclion. Elle l’inté
ressait d ’ailleurs seul en quelque sorte ; car il plaidait
pour conserver les 6,000 1. échues à sou lot, par le par
tage du 6 germinal an 5.
L a copie d’exploit était posée à son domicile ; il pou
vait donc se présenter sa n s en attendre d’au 1res. Il
n ’avait nul besoin de procuration, et il n ’en demanda
'pas; ce} qu’il y a de certain, c’est qu’il a toujours agi
seul et à sa guise.
Il paraît vrai qu’il y eut sur la demande provisoire
de D ubouy une plaidoirie, non pas le i 5 fructidor, mais
le 2 vendémiaire an 9, et qu’il fut rendu un jugement qui
joignit le provisoire au fonds. Ainsi ilétait inutile de nom
mer et placer les juges et les auditeurs, de crier tollé
contre le greffier qui a dû faire son devoir. L e tribunal
sera indigné de ces injures qui n’avaient pas d’o b je t ,
et qu'il fallait au moins appuyer par un certificat. Mais
c ’était perdre l’occasion de dire que le jugement fut
inotivé sur, la répudiation • ce qui est faux.
L e cit. Lagarde étant dans la cause avoué pour luim êm e, et procurator in rem suam pour ses beau-frères,
ne s’en tint pas à l’instruction ordinaire de sa cause; il
fit donner, le 2,5 ventôse.an 9, une a s s ig n a t i o n à sa re
quête et à celle des citoyen et dame Greliclie ^pour con-
�( T9 )
d u re le citoyen D u b o u y , i.° au paiement de 1,000 liv.
pour chacun en sa qualité d’héritier dela mère ; 2.0 à la
radiation des inscriptions par lui faites; 3.° en 12,000 1.
de dommages-inlérêts.
Certes ce ne sont pas les cit. et dame Gì eliche qui
firent pour cet exploit ; i.° ils habitent M ozun , et l’huis
sier est de Clermont; 2 ° c’est le cit. Lagarde qui.s’y
constitue avoué ; 3 .° il est écrit en entier de la main du
cit. Lagarde; mais jusques-là il n’y avait pas de répu
diation, et cet exploit n’en ferait pas une. A u reste-,,
quand les citoyens D u bouy et Lagarde ont pu se par- /.
lager des titres, ils ont bien pu aussi arranger un ex
ploit entre eux.
L e 6 floréal an 9 , le cit. D ubouy se. laissa condam-,
ner par défaut, et par conséquent il se laissait, débouter.,
de ses demandes ; mais aussi il se faisait, condam nera
payer les 1,000 liv. en qualité d ’héritier. C ’était là son
but et son piège. L a collusion est-elle donc tout-à-fait
imaginaire?
■
<
D u b o u y , dans son appel, déclara expressément
acquiescer au ju g e m e n t, en ce qui concernait la répu
diation et son acceptation de la qualité d’héritier.
Beaucoup plus urgent sur l ’appel, parce qu’il croyait
avoir atteint son b u t, il donna ses causes d’appel quinze,
jours après son exploit ; c’est là que jouissant de son
adresse, il appelle le citoyen Lagarde, praticien trèss u b lil,e i le raille, en feignant le louer ou le crainduei
11 argumente du testament de sa mère pouç prouver
l’opulence de la succession T ixier; il dit que Jç; traité,
�( 2<> )
fait avec elle, est une démission de biens, révocable
et inutile , qui ne l’a pas empêché de transmettre sa
succession h ses héritiers, et par conséquent à lui seul,
puisqu’il est reconnu seul héritier maternel.
L e citoyen T a r d if, constitué avoué pour tous les
intimés, tenant sa correspondance et les pièces du ci
toyen Lagarde, y vo}7antles citoyens et dame Greliche,
en qualité, étant dès-lors suffisamment autorisé de faire
sa procédure , et n ’ayant ni ne pouvant avoir aucun
sujet de méfiance dans celte affaire, donna sa réponse
à causes d’appel , et ne put qu’écrire en faveur du
jugem ent, attaqué pour en obtenir la confirmation.
L a cause avait été au rôle de l’an 9; le cit. D ubouy
surprit un jugement par d éfa u t, sur ce même rô le ,
le 11 ventôse an 10. Il se fit adjuger les deux recon
naissances de 1775 et de l’an 2. Mais il n’osa pas sans
doute conclure aux 43,000 livres pour les reconnais
sances présumées ; le jugement ne lui adjuge ,
cet
égard, que des dom m ages-intérêts à donner par dé
claration , de même que pour le mobilier.
Il signifia sa déclaration en exécution de ce juge
m en t, et ne parla que du mobilier.
Les citoyens et dame Greliche ne se doutaient guère
qu’il se fit en leur nom une telle procédure; mais ils
avaient peine à croire que le citoyen D ubouy les eût
laissés si l o n g -teins sans procès. Dans leur m éfiance,
ils s’informèrent, et quand ils eurent appris la vérité,
ils se hâtèrent de réparer ce qui avait été fait en leur
nom ; leur seule voie légale et juste était un désaveu.
�( 21 )
Ils ne pouvaient ni ne devaient le proposer contre le
citoyen Tardif ; sa procédure était régulière et de bonne
foi. Tout partait du citoyen N o y e r-L a g a rd e ; c ’éiait
donc lui qu’il fallait désavouer.
En vertu de leur déclaration le désaveu fut mis
au
greffe de Clerm ont, l’assignation pour le voir statuer,
fut donnée non seulement au citoyen L agard e, mais
au citoyen D u b o u y , pour qu’il y veillât à ses intérêts;
et n’eût pas le prétexte de crier à la collusion. L e 20
prairial an 1 0 , le désaveu fut prononcé par défaut;
le citoyen D u bo u y a interjeté appel de ce jugement.
Dans cet intervalle encore, survint un nouveau pro
cès; le citoyen Lagarde se plaignit de ce que les 6,oool.
qui lui avaient été cédées par le parfage du 6 germinal
an 5 , ne lui étaient pas payées, et il cita les citoyens
et dame G reliclie, au bureau de p a ix , le 2b prairial
an 1 o.
C e u x - c i lui répondirent qu'ils n ’entendaient plus
rien aux chicanes qui s’élevaient journellement sur la
succession ISoyer. Qu’ un jugement de R io m , et un ju
gement du P u y y condamnaient le citoyen D u b o u y ,
et qu’il n’y avait qu’à les exécuter. Il fat donné as
signation néanmoins par le citoyen Lagarde aux cit.
Greliclie qui la dénoncèrent au citoyen Dubouy.
Ainsi se termine cette éternelle procédui-e ; l’appel
du désaveu a été instruit de part et d’au tre, et joint
à l’opposition pendante,sur la demande du cit. D ubouy
L a cause a été plaidée sur le tout, le 14 fructidor an 10
et le tribunal a prononcé un appoinlement.
�( 22 }
M O Y E N S .
L e cit. D u b o u y , dans son m ém oire, prétend que le
désaveu n’est pas recevable, parce qu’il est couvert par
désapprobations suffisantes, et que l ’opposition au ju
gement du 11 ventose an 10, n’est aussi pas recevable.
Il ne s’occupe que par subsidiaire du fonds de la con
testation. Pour suivre son plan d’a tla q u e , il faut éta
blir comme lui plusieurs questions. L a première sera
de savoir si le désaveu du cit. Noyer-Lagarde doit être
reçu; la deuxièm e, si l ’opposition au jugement du n
ventôse an 10, doit être admise, quoique la cause ait
été au rôle ; la troisième, en quoi consiste la succes
sion de Françoise T ixier ; la cinquième , quel est le
droit des parties sur ladite succession.
P R E M I È R E
QUESTION".'
L e désaveu doLtril être reçu ?
Ce désaveu a été prononcé par défaut, le 20 prairial
an 10; le citoyen D u b o u y en est appelant; ainsi il ne
devait avoir rien à combattre que la demande. Mais le
citoyen D u bouy s’attache à tout, et il trouve un vice
de forme dans lé jugement du 20 prairial, comme non
motivé. Mais il n’a pas bien lu sa propre copie, car
elle porte un m otif et la loi n’en exige pas un plus
grand nombre. D ’ailleurs attaquer le jugement dans sa
forme ne serait pas faire tomber la demande; le tri
bunal d’appel n’en jugerait pas moins le fonds, ainsi
✓
�( 2 3 }
le premier moyen est tout à la fois inexact el mutile:
passons donc au désaveu en lui-même.
Pour qu’il ait l i e u , dit le citoyen D u b o u y , il faut
que ce que l’avoué a fait, l’ait été hors de ses pouvoirs,
sans consentement et sans approbation postérieure. Or
y ayant eu instance avec les dames Greliche , le cit.
Lagarde en étant l ’avoué , y ayant eu plaidoirie et
jugement en fructidor an 8 et le 6 floréal an g , les
dames Greliche les ont approuvés, et par conséquent
l ’avoué et la procédure. Or encore le citoyen Lagarde
avait plusieurs pièces pour constater son p o u v o ir, i.° le
procès-verbal du 18 fructidor an 5 ; 2.° l’exploit du 21
ventôse ; 3 .° la signification du 21 floréal an 9. Enfin
le citoyen D ubou y oppose que le cit. T a rd if, avoué
des dames G relich e, au tribunal d’ap p el, n ’est pas
désavoué pas plus que les huissiers Chassaing et Massis
qui ont signifié des actes de la procédure.
Sans doute, s’il y avait une approbation postérieure
du citoyen Lagarde , elle équivaudrait à une procu
ration précédente,carralikabltLo mandalo comparatur:
mais peut-on raisonnablement vo ir, dans des actes faits
sous le nom des citoyens et dame Greliche, des appro
bations de la procédure du citoyen Lagarde.
Il était, dit-on, nanti de la copie d’exploit et du
procès-verbal du 18 floréal an 5. Et certainement on
ne peut pas nier qu’une copie d’exploit et procès-verbal,
contenant des dires, ne soient un pouvoir suffisant à
un avoué pour se présenter, et répéter les mêmes dires
en jugement. Mais le cit. Lagarde n ’avait pas besoin
�( 24 )
de la copie posée aux citoyens Greliche ; il avait la
sienne, car il était partie au même exp loit, et il s’est
présenlé pour tous.
Les dires du procès - verbal ne l ’autorisaient pas à
répudier , car ce procès - verbal du 1 8 flo réa l, porte
au contraire que les citoyens Greliclie n entendent pas
répudier.
D ’ailleurs, c’était une succession parapliernale ou
verte aux dames Greliclie. Les maris, exclus parla loi
de jouir même les parapliernaux , ne pouvaient pas
disposer de la propriété de ces parapliernaux. Ils ne
l ’eussent pas pu davantage, quand la succession aurait
été dotale, parce que le mari n’a que Y adm inistra
tion de la d o t , et n’a aucune qualité pour répudier
une succession ouverte au profit de sa femm e ; car ce
serait aliéner.
• L e cit. N oyer-Lagarde ne pouvait ignorer ces prin
cipes; ainsi quand même il aurait eu une procuration
pour occuper, il ne devait pas répudier en jugement ,
si la procuration n’en portait le mandat exprès, et
n’était donnée pour cela par les dames Greliche ellesmêmes.
L e jugement d j fructidor an 8 , est un être imagi
naire. Lors du jugement du 2 vendémiaire an neuf,
il paraît qu’on attaquait les reconnaissances, ce qui
est l’opposé d’une répudiation ; enfin le j u g e m e n t do
lloréal an 9, est précisément l’objet principal du désaveu.
L ’exploit du 21 ventôse fait partie de la procédure
suivie par le cit. I/ngarde. Il l’a fait donner pour fixer
les
�( *
5 .)
les conclusions prises dans l’instance, et s’y est consti
tué avou é; il paraît mêm e qu’il est écrit de sa main.
L a signification du 21 floréal ne fait qu’un avec le
jugement du 6 , qui est la principale pièce désavouée.
E t tout le monde sait bien , que quand un avoué ins
truit une procédure, dans laquelle ily a lieu de faire des
significations, c ’est lui qui charge l’huissier de les faire.
Si don c, il fallait désavouer aussi l ’huissier, ce serait
un cercle vicieux , car l’huissier dirait : je tiens mon
pouvoir du cit. Lagarde , et ce serait h celui-ci qu’il
faudrait revenir.
E n fin , et par les mêmes raisons, le citoyen D ubouy
ne peut pas argumenter de ce que les dames Greliche
n ’ont pas fait aussi un désaveu contre l’avoué qui a
occupé pour elles, au tribunal d’appel. Elles se sont
bien donné garde de faire cette injure h l’exactitude
et la délicatesse du cit. T ard if qui a été induit en erreur
par le c. Lagarde. A v e c l’expédition du 6 floréal et la copie
d’a p p e l, il était en règle et à l ’abri de tout reproche;
il aurait même eu une action en dommages-intérêts.
T oute la question du désaveu consiste donc dans les
déclarations qui ont pu être faites en ju stice, à Clermont; car dans les pièces précédentes, rien n’autori
sait le cit. Lagarde à répudier pour les dames Greliche.
L e procès-verbal du 18 floréal devait au contraire l’en
empêcher.Il s’est donc exposé à un désaveu, et comment,
sous prétexte d’une collusion qu’il plaît au cit. D u b o u y
de supposer, ce désaveu serait-il rejeté s’il est fondé.
N ’y aurait-il pas plutôt lieu de croire que cette
D
�( *6 )
collusion a eu lieu entre le citoyen Lagarde son ven
deur, et lui. Quand on mit les scellés, l ’un d’eux prit
la clef de l’armoire , et l ’autre la porte du cabinet,
cela est avoué au mémoire Dubouy. L e cit. Lagarde
a dans son dossier tous les titres de la succession du
père ; et le citoyen D ubouy a dans le sien tous les
titres originaux de la succession de la m è r e , quoiqu’il
se fasse un m oyen de n ’avoir pas assisté à l’inventaire
du 6 germinal. E n fin , le citoyen Lagarde fait des dé
clarations en jugem ent, et le citoyen D u bou y se laisse
condamner par défaut pour les accepter- incontinent.
A la v é r it é , il serait difficile de croire à ce que ces
deux frères fussent en bonne intelligence, lorsqu’on
lit tout ce que le citoyen D u bou y exprime aux pages
21 et 22 de son m é m o ire, pour insinuer fraternelle
ment que le cit. Lagarde s’est mis dans le cas d ’une
destitution. Mais qu’il ne fasse pas tomber l ’odieux de
ce danger surles cit. Greliche ; car dussent-ils encourir en
core le reproche de collusion, ils déclarent qu’ils auraient
fait les sacrifices les plus grands, si l’insidieux analhême
du cit. D ubouy eût dû être le résultat de leur demande.
Ils déclarent aussi que lorsqu’ils ont fait , amère
ment peut-être, au citoyen Lagarde le reproche d’avoir
usurpé leur confiance et d’avoir sacrifié leurs intérêls,
le citoyen Lagarde lenr dit avoir agi d’après une, con
sultation des citoyens B e rg ie r, Boirot et D a r l i s , par
laquelle ces jurisconsultes étaient d’avis que toute la
succession maternelle élait confondue dans celle du
père ; par le traité de l’an 2 j qu’elle ne consistait que
�C 27 )
dans ce que la mère a laissé en m o b ilie r, après son.
décès, et qu’ainsi il avait vil plus d ’avantage à la laisser
toute entière au citoyen D u b o u y , pour qu’il payât
les sommes promises par les contrats de mariage.
Que le cit. D u b o u y trouve inconséquent ou non de
rapporter un fait qui disculpe le citoyen Lagarde , les
dames Greliche n’en ont pas moins cru de leur devoir
de ne pas le taire. Mais tout en reconnaissant que le
citoyen Lagarde a pu agir de bonne foi et même avec
précaution , elles n'en sont pas moins fondées à dire
qu’une consultation n’est pas un m andat, et que le
cit. D u b o u y , en faisant une procédure et des décla
rations sans pouvoir, s’est mis dans le cas d’ un désaveu.
C e n’est pas que ce désaveu eût été absolument né
cessaire, puisque la succession de Françoise T ixier est
à peu près nulle, comme on l’établira sur la troisième
question. Il aurait p e u t-ê tre même été plus avanta-r
geux aux dames Greliche d’adopter ce qui a été fait
en leur nom; car une répudiation conditionelle doit être
acceplée, comme a voulu la faire le renonçant, ou toutà-fait rejetée. Mais la ténacité du cit. D u b o u y , à vou
loir ruiner la succession de son père par celle de sa mère*
a fait que les dames Greliche, venant pour la première
fois en cause, ont voulu s’y présenter sans l ’entrave
des faits d’autrui. N e pouvant préjuger l’opinion du
tribunal, elles auraient véritablement débuté avec té
mérité et en dupes, si pour ménager le cit. Lagarde ,
elles avaient ratifié sa procédure. L e désaveu a été
pour elle un acte pru d en t, nécessaire, et quoiqu'en
D a
�.
c
28
)
dise le cit. D u b o u y , il ne peut être rejeté , parce qu’il
ne s’agit pas ici d’une simple instruction de procédure,
qu’il y a répudiation en jugem ent, et que pour cela
seul il fallait un mandat spécial.
D E U X I È M E
QUESTION.
L ’opposition, au jugem ent du 11 ventôse an 10, est-elle
recevable ?
T o u t e s les prétentions du citoyen Noyer-D ubouy
sont nouvelles et singulières. Aucun autre que lui n’a
vait im agin é, depuis 1790, de rappeler un article de loi
qui ne peut plus s’adapter aux formes actuelles, et on
peut dire,presqu’avec certitude, qu’il n’est pas de journal
parmi ceux qui rapportent depuis long-tems la jurispru
dence du tribunal de cassation etdesautrestribunauxde
la république, qui contienne aucun jugem ent, ni même
aucune'tentative pareille. Mais le cit. Noyer-Dubouy
veut être m odèle, il veut faire juger la question : on n’a
pas le droit de l’en empêcher. Cependant cette oppo
sition est antérieure au désaveu; ainsi la question n’in
téresserait les dames Greliclie , que dans le cas où le
désaveu serait rejeté. Elles ne vont donc s’en occuper
que par subsidiaire, et pour répondre à tous les moyens
opposés par le citoyen Dubouy.
Il est très-vrai que l’ordonnance porte en l’art. I I I
du titre X X X V , que les parties ne peuvent se pour
voir, par opposition, contre les jugemens en dernier
ressort, quand ils ont été rendus à tour de rôle.
�( f9 )
Il est très-vrai aussi qu’une loi ne tombe en désué
tude que tacito omnium consensus et il était assez inu
tile de transcrire un plaidoyer de Merlin pour corrobo
rer ce principe, et appliquer à la cause toutes.lés au
torités qui y sont rapportées. Il ne s’agissait, dans ce
plaidoyer, que d elà fin de non recevoir de l’opposition,
après La huitaine, mais non à tour de rôle ; et le cit.
Merlin n’y a recueilli des extraits des arrétistes de plu
sieurs parlemens, que pour établir que la jurisprudence
du parlement de Paris, d’admettre les oppositions après
la huitaine, n’était pas uniforme dans le royaume.
Ces citations ne peuvent rien sur la question de
l ’opposition aux jugemens pris à tour de rôle , car il
n’y a pas parité de raison ; c’était uné jurisprudence
particulière au parlement de Paris, et dans quelques
autres, d’admettre l’opposition après la huitaine; mais
le parlement de Paris ne l’admettait pas, quand la cause
était venue à tour de rôle. Il y avait donc une dis
tinction à faire, et cette distinction même juge la ques
tion qui nous occupe.
A vant la révolution, on faisait une différence entre
les causes venant sur p lacet, et les causes appelées à
tour de rôle. Celles-ci étaient placées au rôle bien longtemsavant d’être appelées. L e rôle était public, à Riom,
deux fois dans l’a n n é e , à la St. Martin et à la St.-Jean,
et tous les mois au parlement. L a lecture publique des
causes prévenait les parties long-teins ¿1 l ’avance ; et
comme la loi était précise, et l’ usage des tribunaux
constant sur ce point, il fallait bien se tenir prêt au
�c 3 0 }
tour de rôle; ce qui, au reste, n ’était pas très-urgent ;
car la m ulliplicité des placets occupait la majeure partie
des audiences.
Aujourd’h u i, toutes les causes doivent être placéesau rôle, sans distinction, d’après la loi du 24 août 1790,
et la loi du 21 ventôse , relative aux droits de greffe.
Ainsi il est contraire aux principes reçus, qu ’une loi
rigoureuse qui ne s’étendait qu’à une partie des causes,
s’étende aujourd’hui tacilement à toutes les causes ; car
les peines ne peuvent être que restreintes, mais non
étendues au-delà de leurs strictes dispositions; et certes
la fin de non recevoir d’une opposition, est bien une
peine prononcée contre le plaideur en retard.
Si le tribunal de cassation a jugé que l ’article de l’or
donnance n’était pas tombé en désuétude pour l’op
position après la huitaine, c ’est que dans la révolution
la fin de non recevoir avait été presque généralement
prononcée par les tribunaux : mais il n’en est pas de
même de la fin de non recevoir des causes venues à
tour de rôle. Aucun jugement conforme au système du
cit. D ubouy ne peut être cité par lui depuis 1790 ;
et comme le mode d’appel des causes a changé à cette
époque, il est clair que ce changement a fait tomber
en désuétude l’article de l’ordonnance tacito omnium
consensu. L ’usage universel a expliqué la loi du 24 août
1790. En cette partie, tous les tribunaux ont admis l’op
position aux jugemens en gén éral, pourvu qu’elle fût
formée dans la huitaine. Ainsi il ne s’agit plus de re
chercher la loi ancienne qui permettait aux parties de
�( 3i )
mettre au rôle les causes qu’il leur plaisait, puisque
la loi nouvelle ôte cette liberté -, et y assujettit toutes
les causes. L e mode d’interprétation de ces lois est donc
suffisamment justifié par quatorze ans de jurisprudence;
car consuetudo optima est legum interpres (i).
Mais au reste.le cit. D ubouy est non recevable luimême à demander la fin de non re c e v o ir, par deux
motifs ;
i.° L ’opposition au jugement a été formée le 18
ventôse an 10; elle a été suivie de la procédure du
désaveu dont D u b o u y a interjeté appel.
, , ,.j ■
O r , par requête du 28 thermidor an 10, il a conclu à
ce que son appel du désaveu fût joint à La cause pen
dante sur Copposition.
Il a donc reconnu que cette opposition était rece
vable , puisqu’elle faisait une cause. Ainsi il a couvert
la fin de non recevoir qu’il oppose.
2.0
L a cause a été contradictoirement plaidée sur
le f o n d s , le 14 fructidor an 10 , quand le tribunal a
appointé. L a fin de non recevoir devait encore y être
proposée à limine litis ,* elle est donc couverte, et le
cit. D u bou y doit, malgré lu i, plaider le fonds.
( 1 ) D ep uis la rédaction de ce mémoire,, le tribunal de cassa
tion a ju g é la question en thèse. Il a casse', le
3 pluviôse
an 12,
un jugement du tribunal de Neufchâteau , qui avait déclaré une
opposition à un jugem ent en dernier ressort non recevable ,
parce qu’il était rendu à tour de rôle.
V o y . le J o u rn a l des audiences de c a s sa tio n , par D en evert,
an 1 2 , p a g e 212.
�( 3a )
T R O I S I È M E
QUESTION,
JE'n quoi consiste la succession de F r a n ç o is e T i X i e r ?
Françoise T ixier n ’a traité avec ses enfans que pour
éviter que cette question se présentât après elle.'
Toussesenfans étaient ses héritiers par égalité, même
avant le 17 nivôse, puisqu’elle n ’en avait avantagé au
cun. L a forclusion de ses filles était abolie depuis le 8
avril 1791.
A la vérité, le cit. D ubouy dit : Je suis donataire de
mon père ; et après le prélèvement de ma donation ,
mes cohéritiers ont partagé le surplus sans moi : mais
je dois prélever aussi sur le surplus ma portion, ail
moins des biens de ma m ère; ainsi il faut connaître sa
succession.
Mais le cit. D u bou y ne veut pas se rappeler que par
son contrat de mariage , son père , en lui léguant le
domaine du Bouy après son décès et après le décès de
Françoise T ix ie r , en le chargeant de payer à chacune
de ses deux sœurs 2,000 liv. qui leur resteraient dues
alors, par la succession des sieur et dame Noyer, a dou
blement marqué par ces expressions que les deux suc
cessions étaient confondues , et que les dettes de la
mère devaient se payer indifféremment par la succes
sion du père, qui les englobait toutes deux. Aussi la
m ère, qui se fait représenter à ce c o n trat, ne donne
rien.
L a mère n’a donc fait que ratifier en quelque sorte
cette
�( ( 4*33 ) )
Ycette confusión' Sos deux'snccessi'ons", en'traitant avec
^ses enfaná, tóúnís-en'Kan d èu x(i). A laivérité otupeut
¿objecter': qu’alors les circonstances n ’étaient plus les
¿mêmes, parce que <la'loi du 17 nivôse voulait un parJ tage par égalité. Maisice^ne sont Ipas les ènfans seuls
-qui ontttraitéien, vertu de çetteloi ; la mère elle-même,
que-la. loi n’obligeait pas, est <venu'e:traiter ayec'eu x
pour ses droits et reprises; et qu’a—t-elle fait autre chose
, :que de des confondre dans la succession du père j conime
odéjà ils l'étaient respectivement àiNoyer-Dubouy:i:>
o . A i n s i ¿ q u e'là loi du 17 nivôse soit ou ne soit pas;, il
( 1 ) L e cit. D u b o u y conteste , à la page 41 de son m é m o ire ,
l ’éxis^èrice de cet acte comme 11011 vérifie ni, enregistré. Il le
produisait d’abord lui-même j’-'il en arg u m en tait, ‘ét ‘il l'il saris
doute retiré de ses pièces. Mais il produit, sous la cote 18, un
acte du même jo u r, quoique aussij n<fn enregistré, et il y a
souligné lui-même ce qui suit : Convenu en outre que dans la
présenle cession sojit com pris.les droits cédés p ar notre.m ère
'c o m m u n e , par acte de céjourd*liui ^ 2.° dans ses causés d'appel,
cole 40 , 'il excipé plusieurs fo iiclu tVa'itd' lait ehtre l^ in ère et
les enfans , et il le idate* à clitiqîne lois j dil*2a fructidor a n >2;
3.°
il en assure encore l ’existence a la page 7 de son mémoire ;
,4.0 on lit dansée jugement du-aÜ ventosean
5)
folio
5
II.0, ce
qui suit : « ¿4près que tous Les 'héritiers eurent pris des arran-
o. .
Mi •/ ;
.■
¡r
gc'.mens avec I r a n ç o is e T ix ie r le u r jn e r e , relativem ent à sa
con stitu tion de d o t, gains , avantages m atrim on ia ux'et autres
créances q u e lle avait à répéter contre la succession de son
m ari , etc. » Ce traito est donc: un acte constant au procès. L e
çit. D u b o u y , qui en a toujours excipé, ne peub donc.rçfyser de
le remettre dans sa production-
* t
v.
‘*
•^ ÍV
J «': .
E
�: ( c 34 ) )
'
,
cn’en esfpasrmoins vrai que J e .ôi l. I)ubhriy nfcrjHuoa’
prendre que le'domaine du Bo'uyij) après lefdücès.£/e.jBi
père et. mère, h la charge de payer '6roooJiy.' dus. pà/iles
deux successions ;e t les a u Ires liérit ier&ont eu à prendre
, ces 6,000 livres,, et le surplusdeabienstdomme f o i r a n t
,la succession ab.itileita t, plus Jes/bestiaubc; .et comes
tibles qui furent laissés à=la mère itor# d e L'arrangement,
et pris sur la succession paternelle.:-: îo ..!*■ .!: ' i ' ;
. C ’est ainsi que toutes les partiesiToht entendu non
seulement en l’an 2 , mais lors du jugement ,de Ventôse
an 5 , puisqu’ elles laissèrent toutes ordonner lé partage
de la succession du père, sans demander celui de la
mère ; puisque le cit. D,ubouy se laissa notamment con
damner à rapporter le s^ o o q ji^ . dues par la supcpssion
du père et de la mère „ sains proposer de compensation
ide celte somme avec les prétendues reprises1qu’il de
mande aujourd’h u i, et qu’il fait frapper sur la succes
sion paternelle.
Celte intention,des parties est claire; elle était fon
dée suî ,1e?. actes . de .famille, à Inexécution desquels
chacun se rendait; aucun ne doutait alors que la suc
cession dô la mère ne fût composée seulement de son
mobilier tel qu’il était ¿péciiié par le traité de l ’an 2 ;
et si l’appelant a varié au P u y , c*èst que la levée des
* 1v
\
C
V
'
scçllés lui avait donné le prétexte de se créer une nou
velle source de réclamations et de procès. ■
,.»
Ce n ’est pas tout que les parties l’aient entendu ainsi,
car c’est aussi1de cette manière qu’elles devdieni T’en
tendre; les actes les y obligeaient.
�C
35
)
CiiFrançoise •Tifcier:ayait-elle: le droit de traiter avec
ses enfans en l ’an 2? ebpeutVon appeler J’dcte qu’elle
a fait, un partage anticipé d’une succession qui.s5ést>
ouverte de nouveau à son décès ; car voilà le s.ÿstêi’n e
actuel du citoyefm Dubouy; on oo L. :: >ç
rr n \
* L es principes; sur les; démissions rie s?appliquent;pas!
à la cause ; ce n ’estpas ici un-abandon fait parilne. m.èréde-ses.biens m eublesjetim m eubles jiévidens ^connus; 3
desquels elle se.désaisisse pour leu x/ et;quc?ils>parlagent!
ensa^présence. <&[ i-iialb Im’:1
îu ' :iil'i
Il ii’y a rdans ^espèce ni biens connus, ;ni désaisissemerii effectif, ni partage actuel.. Ge. n ’est d on c pas ce;
partage anticipé dont excipe le cit. D ubou y com m et
moyen principal j iL n’y à donc pas: de. démission.
>
C ’est un .traité sur des droits inconnus!;, litig ie u x ;,
c ’est une vente ii fonds*pèrdu de ces mêmes droits,.autorisée par ltariiclë!26 derknloi du 17 nivôse , ;qui •
était encore en Vigueur au décès-deila mère. ^ uj >•. . c
: Dans le cas même où làm ereaurail prévu ^rétablisse
ment des actes de sa famille et lé rapport-de la loi du
17 nivôse dans son effet .rétroactif , là.cession qu’elle
faisait était valable; car le citüDuboüy.devait.s’ëirtenir'
à son d om ain e , et alors s e s reprises frappaient sur la
succession ab intestat} c’est-à-dire y contre les ¡autres
héritiers.
, .
•<>' Eh b ie n , elle vend ses reprises à fonds perdmà ceux-
ci ; et comme il fallait, suivant la loi, que les autrcsq
successibles y consentissent et y intervinssent),Me cit.
D ubouy y est intervenu et ¡y a consenti. L e vœuide laloi a donc été rempli.
�( 35 )
.■vIl’.iTe^ira; pas Cfue'c’e&t-iün •à’cte,»forcérpar^la 'craîlîte
révéreniièlle; car }a loiai’admet puis ce :m o y e n <
',iloils-~.
qu’èllèi,exigé, le consentement des successibles y isans'»
distinction.' fUipv urj ¿ 'oV) :ioa i; m.vuum -S üVwtvjo
A u reste , quand ce ne seraif pas! lfV une .'vente l’à'i
fonds: perdli ,uôn demanderait) en' vertu, de)¿quçlle*loi
ib peut être défendu à 1unei mère-’4&-trailer<avec>seS*
enianspsur des droits.susceptibles) dtuplus. grande litigô-;->
les loi&’prptègept les;transactions com ibe l’a'cte le;plus'
utile à la société , puisqu’il éteint les .procès et se^
pourrait-il que les procès, entre une m^re etkles enfutis,
fussent une cliose nécessaire et, non, susceptible-d’ar-i
rangement ? ':u/7 .
m
ir '.b V.;-. ij\.i
'~çy - ’
Ce système cho'que; car si Erancôtsç ' T ixi er pouvait •
agir et plaider ; sansi contredit bll©'pouvait transige!* ;
car ila ’transaction• a lie u 'd e LLl& m o tâ .a iit movendâ.
O r qui contestera ài<ï’ranç6is(i-Tixier le droit de de
mander ses droits etoi’eprisds en l’an 2;?'Mais>parce que
rienih’était pliisicortiusietiinextricable que ses droits;
parce quTelle savait elle - même que son m a ri, en lui i
donnant l’ usufruit de; moitiés, n’avait, puîrèconnàître
12,00a liv. a u - ’delà. de la) quotité disponible
qui elle savait qu’il faudrait prouver
parce \
kabuit de .
la .première -reconnaissance., Françoise .Tixier a fait. ,
avec ses enfans, une transaction, que la nécessité et son
intérêt l’auraient obligée de,faire ayec les étranges; .les
plus divisés d ’intérut a.vec elle; cti^fesl là (Cette transac
tion qu’on veut,confondre avec-une démission, avecune simple libéralité dictée par la tendresse maternelle,
�( 37 )
spontanément-, sans nulles circonstances; et pour la? seule
utilité do'ses'en fans. ):
r
, Si la mère a traité avec tous, il.n Jy a là que de la
ressemblance avec une démission, parce que la mère
était bien:obligée de traiter avec tous ceux qui avaient,
un procès à soutenir contr’elle<> i;
Ainsi,, vouloir que cette réunion nécessaire de tous
les enfans change la nature de l ’a cte , ferait retomber
dans lecsysiême qu’on ne peut'transiger avjec.ses'enfiins.
'Lorsque le filsdiisiéür de L a n g h a c(i) a demandé par
deux fois, au tribunal de cassation, la nullité d’ un traité
fait avec son père pour ses droits m aternels, il n ’osait
pas même plaider qu’on ne peut pas traiter .avec son
père; il faisait valoir des moyens rescisoires,’et cepen
dant le traité à été maintenu..Ulne transaction peut donc
êlre à l’abri, même d e là puissance paternelle. Préten
dre que le rapport de l’effet rétroactif de la loi du 17
nivôse a annullé le ,1railé fait avec, Françoise T i x i e r ,
c’est vouloir oublier ^qu’elle n ’avait que faire de la loi*
du 17 nivôseü G a n d ’une part, elle traitait pour ses rc.r;
prises, et !de l ’autre, pour un usufruit qui n ’en a pas
été moins mainleilU'par les lois postérieures.
F ran çoiseT ixierij’aldonclaissé de succession que dans
son mobilier et non-dans ses reprises; etlen partant de ,
cette vérité la plus évidente, la plus naturelle , le liibunal clague toutes les autres questions du procès. Car
le cit.D ubôu ya pris sa portion du mobilier, il n’a pas eu
idée de prétendre,qu’on en eut volé : il a donc toul son lot.
( 1) Journal de SiREy. Jugement decassation du 25 frim.rc nn 10.
�(
38
)
¡¿Tout conduit h penser, que telle a.toujours étéT;in-.
tenlion et le but des parties, et que c’est là la plus exacte
jusliceà leur rendre. Mais pour suivre le cih D ubouy
dans ses prétentions , et s’il pouvait faire composer la:
succession de Françoise-Tixier de ses droitslet;reprises/
voyons quel en serait le résultat.) "■
>' Vr:.-?, i;
' :-'.j
Q u’aurait obtenu Françoise Tixier^ si elle eût voulu
plaider en l’an 2?
' u-:..»
• i'
- Ses droits étaient-ils fixés:pardesudeux; reconnais-)
Sances, ou par.la consistance réelle dé; la succession de
son père et de-sa» sœ ur?i‘
’
n
1: •
" ' »
Pour cette explication* il faut se;basér: s u r quelquès*
principes.
•
r
oî •
v %'i^ba*!;' <• 1
r
¡Toutes les reconnaissances.que fait le'riiari , après le^
mariage , sont réputées; des.libéralités j si la femme ne
prouve undè habuit; et alors ces libéralités n’ont d’efiet
que pour la portion dont le mariipouvait disposer. ConJessio de dot&\ recep ici-fada. 'per mdritum 3 constante
matrimonio y valet iti vim doriationis. Et il faut, comme
dit Coquille , enquérir et prouver la vérité du fait, si
on veut faire valoir la reconnaissance a u - d e l à de la
portion disponible. Ainsi l’enseignent encore Ricard et
Furgole. Ainsi l’a iju g è le tribunal, le 21 prairial an 10,
en ordonnant l ’apport d e l’inventaire d ’une succession
indiquée com m e1 Y undè h a b u it, dans une
reconnais
sance semblable.
Il est encore de principe,' qu’en pays de droit écrit,
où le sieur N oyer était domicilié, le mari et la femme
ne peuvent se faire de donations pendant le m ariage,
�v( 39 >)
et cela p^r une prévoyance de la 'lo i, /ze matuoamore
1
^•
, inler se., invicem spoUentur.
1
, A la vérité ces donations prennent leur effet par
la m o rt, si elles n’ont pas é té ( révoquées auparavant.
Mais parce iqu’ellesrne fo n t ;qu’une donation à cause
-de m ort, éllçs se règlent par la quotité disponible qui
a lieu 'àil’ouverture de la succession.
O r , au»décès du sieur N o y e r , la loi du 17 nivôse
régissait toute la république; et si elle effaçait les prohi
b itio n s du droit-écrit, en donnant toute latitude aux
.dispositions;entre ép o u x, au'moins elle les restreignait,
-quand il y avait des enfans, àT u su fruit des choses don
nées, si elles n ’excédaient pas; la moitié des biens. (Art.
. î i 3 et 14).
>
: Ainsi Françoise T ixier devait prouver en Fan 2 la
-consistance 'de la succession.liquidée de son père.
Il fallait fair,e estimer les biens vendus non par le
curateur, mais par le sieur N oyerfen son nom ; non
¡pas suivant 1^ évaluations ridicules, que le cit. D u b o u y
leur donne au taux actuel, mais à la valeur de 1760.
,11 fallait établir la .consistance du mobilier, et ensuite
i.déduire des, charges et les dettes. Ces dettes sont con
sidérables, puisque le seul article des reprises du sieur
N o y e r , justifiées par k requête du 16 avril 1 7 6 0 , se
porte à une somme de 5,029 liv. 1.6 s., outre les 2,0001.
payées au tréspr public, 1,200 liv. au sieur D epille, et
89 liv. 7 s. au sieur Dufraisse. D é jà , par la compurai-son de celte s.eule dette avec les biens, il est évident
en simple aperçu., que si le sieur N oyer fit une recon-
�/ C 4° 0
naissance de 5,o o o à sa fem m e, c ’éfait pour qu’elle no
fût pas humiliée de n’avoir rien à donnera ses ënfans,
lors de le u r ’établissement, et pour la mettre à môme
de donner à chacun 1,000 liv:.
i;
«
-- • J ■
Mais quand il ÿ aurait quelque excé d a n t, tout ce
que Françoise T ixier n'auraît pas justifié lui apparteten ir, dans les reconnaissances , devenait simple libé
ralité, et alors combien de diminution cette libéralité
" n ’éprouvait-elle pas?
«
:
' J
D ’abord le cit. D u b o u y faisait passer, avant t o u t ,
le don o u legs du d o m a i n e , puisqu’il lui était assuré
par son contrat de mariage, et puisque les reconnais
sances ne prenaient effet ¡qu’à la mort.
‘‘f
Les deux reconnaissances de 5,ooo liv. et de 12,000 I.
ne valaient eu l’an 2 que pour l’usufruit de ces deux
sommes, mais cet usufruit était confondu dans l’usu
fruit de moitié qui était aussi légué par le sieur N oyer
à sa femme ; il absorbait toute la «quotité disponible.
T^es deux reconnaissances devenaient donc nulles' et
sans effet.
'
M
Non seulement l’usufruit de moitié absorbait tout ,
mais il ne pouvait avoir lieu concurremment avec le
don du dom aine, sur lequel l’ usufruit ne frappait pas ,
q u ’a u t a n t que la légitime des puînés devait rester in
tacte, et sans charges suivant les principes, ce qui ne
se pouvait pas. Françoise T ixier n’était donc p;is fon
d é e à p l a i d e r pour obtenir les1deux reconnai ssances .
Il est inutile d’occuper le tribunal de la demande ridi
cule que le sieur N oyer avait formée de 48,000 l i v . , pour
représentation
�(
4*
)
représentation des reconnaissances supposées enlevées,
et du testament de sa mère (q u o iq u ’il en soit nanti) ;
il a abandonné cette demande qui d’ailleurs ne méri
tait pas qu’on s’occupât sérieusement de la combattre.
. Françoise T ixier était encore héritière de sa sœur,
mais les droits de celle-ci étaient liquidés par un traité
dont le cit. D u bouy n'a demandé le prix qu’en l’an 8.
O r ce traité ne donne pas une somme exig ib le , mais
une rente qu'on ne peut forcer à rembourser : et tout
prouve qu’elle avait été remboursée par le cit. N oyer
p è r e , puisque sa belle-sœur acheta des immeubles pour
à peu près ce qui lui était dû.
Ces immeubles ne font pas partie de sa succession,
puisqu’elle les a revendus au sieur N oyer père ; ainsi
quand cette succession ne serait pas confondue dans le
traité, elle n’en serait pas moins absolument nulle.
Voilà donc à quoi se réduit la prétention du citoyen
D u b o u y , si le tribunal veut faire discuter, à grands frais,
le mérite des reconnaissances; et si, en les approfondis
sant de plus en plus , il ne se trouve pas encore plus
fortement convaincu , que Françoise T ixier a fait une
transaction respectable et nécessaire, et qu’en traitant
avec ses enfans, ut a frater no certamine eos prœservarebj elle a prudemment calculé leurs intérêts et le sien.
Q u e l est le droit des parties sur la succession T i x i e r ?
L
e
citoyen D ubouy a un testament de sa mère qui
le fait héritier universel. Ce testament est olographe, et
F
�(
4
2
3
daté de 1789 : mais il n ’est pas enregistré, ainsi ce n’est
pas une pièce à produire.
Ce testament, dicté évidemment p a r le cit. D u bo u y,
semble tacitement révoqué par son contrat de mariage
qui est postérieur, et dont les clauses semblent con
traires à ce testament, au lieu d’y renouveler l’institu
tion , il serait aussi annullé de droit par le traité de
l ’an 2. Car un testament est ultimœ voluntatis testatio.
Or un acte de 1789 n’était pas la dernière volonté de
Françoise Tixier.
Mais à quoi servirait ce testament, dès que la succes
sion de la mère ne consiste que dans son mobilier ;
il est partagé ; et voilà ce qui faisait prendre au mot
le cit. D u b o u y , lorsqu’il se disait seul héritier d’une
succession nulle , parce que cette nullité m êm e rendait
illusoire la promesse de 1,000 livres, que la mère avait
faite h ses filles lors de leur mariage.
Il ne servirait à rien encore si le tribunal voulait
annuller le traité de l’an 2, et fixer la succession de la
m è re , car le pis aller serait d’adjuger la reconnaissance
de 5 ,ooo liv. la seule que son époque puisse faire res
pecter; et alors les dames Greliche y auraient 1,000 liv.
chacune, dès que cetle somme leur est promise avant
le testament. Ce serait donc à leur égard un partage
par égalité, malgré l ’institution.
Mais soit que la succession malernelle se compose de
mobilier, ou de ces 5,000 l iv ., ou de loute autre chose,
le cit. D ubouy doit toujours rendre compte des 6,000 1.
qui sont une charge de sa donation, ce qui est Iota-
�( 43 )
lement distinct du procès a c tu e l, et ce qui est jugé.
- Il a cherché jusqu’à présent à retarder le paiement
de cette somme , et il y est parvenu , en plaidant qu’il
fallait attendre la décision relative au partage de la
m ère; le moment est donc ven u, non pas d’y rapporter
ces 6,000 liv. mais de les payer, car il n’est donataire
qu’à cette condition.
j Ainsi ce procès si compliqué par les conclusions si
souvent changées du cit. D ù b o u y , se simplifie extrê
m em ent, et se réduit à des points certains.
1
L ’opposition au jugement par défaut est recevable;
ainsi le jugement surpris par le cit. D u b o u y est com me
non avenu.
L e désaveu estfondé au cas qu’il ait été nécessaire;
mais quand les sieurs Greliche auraient répudié au
bureau de p a ix , et même en jugem ent, une succession
parapliernale à leurs fem m es, celles-ci ne sont pas liées
par cette répudiation ; c’est une nullité viscérale; les
maris n’ont promis aucune garantie. S’il y avait enga
gement de leur p a r t , ce serait le sujet d’une action
particulière à diriger contre eux; mais cela ne produi
rait pas une répudiation.
r
•'
D ’après cela, le partage de la succession de Françoise
Tixier doit être ordonné entre toutes les parties ; mais
cette succession se réduit au mobilier, puisque les droits
litigieux et incorporels, dont elle pouvait se composer,
sont: vendus par transaction.
Si le tribunal annullait cette transaction, alors la suc
cession de Françoise Tixier n’en serait pas moins réduite
F a
�( 44 )
à rien, soit parce qu ’elle egt décédée sans avoir révoqué
sa,répudiation de 1760 , soit parce que les recouvreinens des biens de son père sont absorbés par les dettes ;
soit parce que sa soeur ayant acquis des biens1, pour le
p_yix de sa cession de droits, les a revendus,
r Si le tribunal donnait effet aux reconnaissances sans
les compenser avec les reprises du cit. N o y e r p è re , il
annullerait sans, doute'celle de l ’an 2 , com m e1n ’étant
qu’un avantagé in d ir e c tt e n d a n t à surpasser la quotité
disponible par la loi d u ^7 nivôse, et ne donnerait effet
qu’à, celle de 1775.
L a succession de Françoise T ixier une fois connue,
se régie aisement ; il est à. peu près égal que le citoyen
•Dubouy en soit*-héritier: ou ne' le soit pas; mais le tri
bunal ne peut avoir égajrd au testament de 1 7 8 9 ,puisque
i.° il n’est pas enregistré; 2 ° il est annullé par le con
trat de mariage de 17,90 > et le traité de l’an 2.
Il £dul donc en revenir aii point d’où on est parti,
c ’esl-ti-dire , a u jugem ent du a 5 ventôse an 5 ; tout est
réglé par l u i , et le tribunal n’a pas de guide plus sûr;
car le cit. D ubouy avait tout demandé alors, comme
011 peut le voir par le procès-verbal du i . er pluviôse
p ré cé d e n t, et ce fait n’est pas détruit par de simples
réserves qu’il a faites au P u y postérieurement et dans
d ’autres circonstances. Ces deux pièces du procès mar
quent assez que les parties entendaient faire terminer
toutes leurs contestations à cette époque, et celte in
tention fait crouler toutes les procédures, toutes les
conclusions, toutes.les injures du cit. N o y e r-D u b o u y ;
�(4 5 )
car il devait alors bien expliquer ses prétentions, et il
les avait expliquées; toutes les considérations ont été
pesées alors, et il ne p e u t , sans mauvaise foi a faire
renaître un procès d'un autre procès, et exiger que la
Justice partage avec lui ses embûches et ses cavillations.
M.r MARCHEIX , Rapporteur.
L . F. DELAPCHIER, Homme de loi.
F A Y E , Avoué.
A RIOM, DE L IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
�
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Title
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Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Noyer, Jeanne. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
créances
successions
captation d'héritage
prison
contre-révolution
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Jeanne et Marie-Gabrielle Noyer, Pierre et Joseph Greliche, leurs maris, habitant à Mozun, intimés ; contre Joseph Noyer-Dubouy, habitant à Chamalière, appelant ; en présence d'Anne Noyer-Lagarde, avoué au Tribunal civil de Clermont, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1750-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0330
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chamalières (63075)
Mauzun (63216)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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captation d'héritage
contre-révolution
Créances
prison
Successions
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503ec65ba2e4e5e60d20bcf4f5be230a
PDF Text
Text
|
M
E
M
O
I
R
E
POUR
ftys
-
G
uillau m e
M A IG N O/ L f ils, habitant à Bon-
lieu, canton d’E v au x, appelant ;
c o n t r e
,
A n t o i n e G U I L L A U M E maréchal a P on
taumur, intimé ;
ET
C O N T R E
,
G ilb e r te M A IG N O L , P ie r r e L E G A Y
mari
A n to in e
-
M A IG N O L
, son
G ilb e r te
veuve Paneveyre, et autres, héri
Pierre M a i g n o l , d e Landogne, intimés;
M A IG N O L ,
tiers
EN P R É S E N C E
,
D e G u i l l a u m e M A I G N O L père habitant au
lieu du Cheval-Blanc, commune de Condat, ap
pelé en assistance de cause.
U
n
acte sous seing p r i v é , synallagm atique, est-il nul
s’ il n’a pas été fait double ? Peut-il être opposé à un dona
taire contractuel s’il n ’a de date certaine que postérieure
ment à sa donation ? E n fin quels caractères d ’exécution
A
’
,
�faut-il à cet acte p o u r q u ’il soit obligatoire m algré les
nullités qui le vicient ?
Telles sont les questions que présente cette cause, en
supposant qu ’ un acte sous seing p r i v é , produit par les h é
ritiers M a ig n o l, soit une vente. C a r , en p oin t de fait,
l’appelant démontrera que cet acte n’est qu’un ti^re de
possession,
*
F A I T S . '
. v
'
•
*•
P a r acte du 16 mai 1^ 5 5 , M ic h e l L en o b le donna ¿1 bail *
em pylitéotique à des nomm és C liefd eville, un p ré situé
près de L a n d o g n e , m oyennant 90 francs de rente annuelle.
C ’est ce p ré qui fait
1’objet
de la contestation.
L e m êm e j o u r , L en o b le vendit ladite rente de 90 fr.
îi G uillaum e M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , p o u r le payer
de 1800 francs qu ’il lui devoit.
L e 16 juin 1 7 7 7 , C h efd eville subrogea ledit G uillaum e
M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , audit bail em p yhtéo liq ue ;
de sorte q u ’il lui céda la p ro p riété du pré.
Ce pré étant situé près de L a n d o g n e , étoit désiré beau
coup par le s ie u rP ie rre M a ig n o l, notaire audit lie u ; et il
paroît q u ’il chercha les m oyens d’en devenir propriétaire.
Il étoit créancier dessieui’s L a rfe u il d’une rente de 56 f. ?
au principal de
2800 francs, créée en 1 7 2 0 , due p o u r
m oitié par les héritiers de Jean-Franeois L arfeuil.
L e s L a rfe u il ayant vendu en rente un petit domaine à
Jean Gastier, P ierre M a ig n o l, de L a n d o g n e , avoit obtenu
contre lui une sentence hypothécaire en 1 7 6 6 , portant
permission de se mettre en possession ou faire vendre.
D e son c ô té , G uillau m e M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c
,
�( .3 )
seigneur féodal dudit d o m a in e , et ayant acheté de l’ un des
L arfeu il la m oitié de la rente due par Jean G a s tie r , lA
poursuivoit p our être payé des cens , lods et arréragés de
rente, et se tro u vo it empôclié par ladite sentence de 1 7 6 6 ,
en ce que son vendeur l’avoit chargé de payer à P ie rre
M a ig n o l la p ortion de la rente de 1720.
Cette procédure fournit à ce dernier l ’occasion de faire
des
propositions à G uillau m e
M a i g n o l , du
C h e va l-
Blanc , et de profiter de son ascendant, en lui faisant
entendre que rien n’étoit plus aisé p o u r lui que de de
ve n ir p ropriétaire de ce petit domaine ven du à G a stier,
lequel étoit parfaitement à sa bienséance, puisqu’il jo i—
gnoit ses propriétés du Clieval-Blanc.
Il paroît que P ierre M aign o l proposa à G uillau m e de
faire par ce m oyen un échange de ses droits à ce d o
maine , avec le p ré venu de L e n o b le , assurant sans doute
q u ’il n’y avoit plus qu’à se mettre en possession dudit d o
maine , au m oyen de sa sentence de 1766.
Cependant le sieur M a ig n o l, du C h e v a l - B l a n c , ne
donna pas pleinement dans le piège. Il fut passé un acte
entre les parties, le 2 octobre 1779* M ais cet acte ne
contient pas de v e n t e ; sa contexture m êm e p ro u v e que
le sieur M a ig n o l, du Cheval - B la n c , entendoit stipuler
toute autre chose q u ’ une vente , et ne vo u lo it que
laisser le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , jouir du p ré
L e n o b l e , jusqu’à ce q u ’il y eût quelque chose de certain
p o u r lui-mêrne au sujet du domaine Gastier. l
E n e f f e t , on lit dans cet acte, du 2 octobre 177 9 ■
>que
P ierre M a i g n o l , de L a n d o g n e , cède à G uillau m e M a i
g n o l la rente de 28 fran cs, au principal de 1400 francs
A
2
�( 4 )
faisant moitié de celle de 1 7 2 0 , due par les héritiers de
Jean - François
L a r f e u i l ,' ensemble les arrérages
éclms
J
O
depuis 1 7 5 8 ; p l u s , il cède audit G uillaum e M a ig n o l ,
du C h e v a l- B la n c , l ’efiet de la sentence de 1 7 6 6 , p ar lui
obtenue contre Gastier.
Le
p r ix dudit transport est fixé
entre
les parties
à 2000 fran cs, p o u r l’acquit de laquelle somme M a ig n o l,
du C h e v a l- B la n c ( propriétaire cependant du p ré L e n o b l e ) , cède seulement à M a ig n o l, de L a n d o g n e , le c o n
trat de renie de 90 francs à lui dû par les héritiers de
P ierre L e n o b le , suivant l ’acte du 16 m ai 1 7 5 5 ; la quelle
rente est -payable, est-il d i t , p a r les jo u is s o n s du p ré
appelé P r é ■■Grand y s u r le q u e l elle e st sp écia lem en t
affectée.
E n co n sé q u e n c e , au m oyen de la rem ise que fera
G uillaum e M a ig n o l des titres co n stitu tifs de ladite rente
de 90 francs, ensemble des titres de créances y énoncés ,
il demeurera quitte de la somm e de 1800 francs: et quant
h la somme de 200 fra n c s, P ie rre M a ig n o l reconnoît
l ’avoir reçue en d élivran ce de promesse de ladite somme.
D e sa p a r t , P ie rre M a ig n o l remet à G uillaum e la sen-*tence de 1 7 6 6 , obtenue contre G astier; et néanmoins il
se réserve le contrat de rente de 1 7 2 0 , p ou r p ou rsu ivre
le payement de la m oitié qui lui re s te , et m ê m e , d it -il,
les arrérages de la m oitié v e n d u e , antérieurs à 17^ 8 ;
enfin les parties se cèdent respectivement les droits rescindans et rescisoires qui peu ven t résulter des contrats cidessus énoncés.
Il paroît aujourd’hui un acte sous seing p riv é , de la
m êm e date que le transport ci - dessus, assez diilicilc à
�( 5 )
accorder avec les clauses dont on vient de rendre com pte,
du moins dans le sens que les adversaires lui d o n n e n t ,
mais qui p rou veroit assez, s’ il étoit réellem ent de cette
date, que le sieur M a ig n o l, de L an d o gn e, n ’avoit cherch é
à extorquer un écrit quelconque du sieur M a i g n o l , du
C h e v a l-B la n c , que p o u r tirer parti un jour de son obscu
rité. Il est néanmoins évident q u ’il ne s’agissoit alors que
de lui laisser les jouissances du pré L e n o b le p o u r 90 fr.
par a n , afin de le payer de l ’intérêt des 1800 francs cidessus stipulés, jusqu’à ce que l’occupation réelle du do
maine Gastier perm ît de faire un échange définitif.
Q u o i q u ’il en soit, et en attendant que cet écrit jus
q u ’à présent inconnu soit mis sous les y e u x d e là c o u r , et
discuté, il s’agit de continuer l ’ordre des faits. L e sieur
M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , eut bientôt à s’ap plaudir de
n ’avoir pas entièrement cédé aux assurances du sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e ; car huit jours après l’acte du 2
octobre 1779 , ayant pris possession notariée du domaine
G astier, en vertu d e l à sentence de 1 7 6 6 , qui venoit de
lui être c é d é e , ledit Gastier loin de se rendre à une
expropriation v o lo n ta ire , c o m m e l’avoit prom is le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , alla au contraire traiter avec l’ un
des L a r f e u i l , ses v e n d e u rs, qui offrit de payer le sieur
M a i g n o l , et conclut à ce qu ’il fût déchu de ses demandes.
En e f fe t , par une sentence de la sénéchaussée d ’A u
v e r g n e , au rapport de M . F a y d it , G uillaum e M a ig n o l
fut d é b o u té , à la charge d ’être payé des cens à lui dûs per
so n nellem ent, et seulement de la moitié des arrérages
de rente par lui acquise de L aurent L arfeuil.
Cette sentence ne dit rien de la m oitié de rente cédée
par P ierre M a ig n o l à G uillaum e , q u o iq u ’elle fût de
�(6 )
m a n d ée , et que la sentence de 17 66 en portât condam
nation; de sorte que par le fa it, G uillaum e M a ig n o l, du
C heval-B lanc, n’a pas t o u c h é ,à ce qu ’ il p a ro ît, un denier
de ce qui lui a été vendu par M a ig n o l , de L a n d o g n e ,
le 2 octobre 1779
tandis q u ’on élève la prétention de
s’a p p r o p r ie r , sans bourse d é lier, un p ré q u ’ il n’a pas
vendu.
Cependant P ierre M a ig n o l, de L a n d o g n e , s’étoit mis en
possession dudit p r é , et les fruits devoient lui en rester
p o u r la rente de go francs , suivant la clause du traité, tant
que le sieur M a i g n o l , du C h e v a l - B l a n c , ne préféreroil pas
jo uir lui-m êm e en payant ladite rente.
O n pense bien que le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e ,
s’arrangea p ou r faire'durer cet état de choses encore lo n g
temps , et q u ’il ne manqua pas de rév eille r de loin en
loin l ’espoir de son cousin de devenir p ropriétaire du
petit dom aine G a s tie r , qui étoit si fort à. sa bienséance.
L e sieur M a ig n o l, du C h eval - B l a n c , éloigné du p ré
L e n o b le , ne mettoit pas un grand pi’ix à en jouir lu im êm e , et peut-être lui en exagéroit-on les inconvéniens ;
peut-être aussi le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , sayoit-il
tirer parti d’ une espèce de dépendance dans laquelle il
avoit su tenir son parent.
L es choses restèrent en cet état jusqu’en l ’an 7 , que
le sieur M a i g n o l , fils de G u illa u m e , donataire universel
de son père par son contrat de m ariage, se mit en pos
session de ses biens en cette q u a lité , et demanda à son
père des renseignemens sur le résultat de l’acle de 1 7 7 9 ,
et d e là prise de possession du dom aine G a stier, que son
père lui rernettoit avec d’autres titres. C ’est alors que le
sieur M a ig n o l père expliqua à sou fils que si, à la v é r it é }
�(7 )
il ne jouissoit pas du domaine G a s t ie r , il restoit maître
du p ré L e n o b le , q u ’il reprendrait quand il v o u d r a it , et
que lu i, M a i g n o l p è r e , n’avoit pas encore ré c la m é , parce
q u ’on l ’avoit toujours bercé d’un vain espoir , et parce
q u ’il devoit au sieur M aignol, de L a n d o g n e ,p o u r un procès
de fam ille; ce qui l ’avoit em pêché de le contrarier.
M a ig n o l fils vo u lu t avoir une explication avec le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , qui lui refusa toute com m unica
tion sur ce poin t, et ne lui répondit qu ’en pressant le paye
m ent d ’une créance étrangère au procès actuel. M a ig n o l
fils paya le 2
5 nivôse an 9 ,
et se crut dès-lors autorisé à
reco u vrer ses droits.
I/acte de 1779 qui lu i avoit été remis n’énonçoit que
l ’acte de i r/ 5 5 ) lequel ne donnoit la p rop riété du p ré q u ’à
Ch efd eville : il s’agissoit donc de rechercher la vente que
C hefd eville avoit dû faire au sieur M a ig n o l, du C h evalBlanc. Mais l ’acte en avoit été reçu par le sieur M a ig n o l,
de L a n d o g n e , et il étoit difficile de se le p rocurer ; il l’avoit
refusé plusieurs fois. Enfin M a ig n o l fils, étant p arvenu
à trouver la date de l’enregistrem ent, étoit p rêt à p o u r
suivre le sieur M a ig n o l, de J/andogne, lorsqu’il décéda.
A lo r s il demanda une expédition au n o t a ir e , son suc
cesse u r, q u i , en cherchant avec l u i , ne trouva pas la
m inute de l’acte dans la liasse de 1777? n * au répertoire.
A l o r s , p o u r éviter toutes difficultés, M a ig n o l fils p rit le
parti d’acheter du m êm e C h efd eville, le 14 fructidor an 1 1 ,
une ratification de la vente q u ’ il avoit consentie en 1 7 7 7 .
M u n i de cette p ièce , M a ig n o l fils informé que le pos
sesseur du pré L en o h le étoit A n to in e G u illa u m e , de P o n t à u m u r , le fit citer ch désistement, par cédule du 3 ven
démiaire an 12.
�C8)
G uillau m e ne vo u lu t pas plus donner d ’explica lions que
le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , et ne com parut au bureau
de p aix que p o u r o b éir à la loi. Ensuile il se défendit
par des réquisitoires de qualités et de titres ;'et après cela,
il demanda la nullité de l ’e x p lo it , sous p rétexte que les
confins du p ré n’y étoient pas én o n cés, q u o iq u ’ils le fussent dans la cédule.
Il succomba justement sur cette ch ican e, par jugem ent
du 4 pluviôse an 12 , lequel néanmoins réserva les dépens
p o u r y'étre fait d r o it , en statuant au fond.
Enfin il plut à G u i l l a u m e de r é v é l e r q u ’ il étoit acqué
reur du sieur M aig n o l , de I,an dogn e, par acte du 29 ven
tôse an 6 , et il assigna son vendeur en garantie.
L e sieur M a ig n o l, d e L a n d o g n e , étoit décédé dans l ’in
tervalle; ses enfans in t e r v in r e n t , et en rendant com pte
des faits, ils se contentoient d ’abord de dire que leur père
étoit propriétaire en vertu d ’un acte , sans l’indiquer. Ce
pendant il falloit ne pas s’en tenir à des mots ; et les h éri
tiers M a ig n o l produisirent enfin un acte sous seing p r i v é ,
sous la date du 2 octobre 1 7 7 9 , enregistré seulement depuis
le p r o c è s , et ainsi conçu :
« J e soussign é, subroge M e. P ierre M a i g n o l , bailli
« de L a n d o g n e , ù l’effet de la vente du bail em phytéo« tique , appelé P r é - G r a n d , que M e. A n n c t C h efd eville
« m ’a consentie devant M a ig n o l, n o ta ire, le six juin m il
« sept cent so ixa n te-d ix-sep t, p o u r p a r lu i j o u ir dudit
« pré ainsi q u ’ il avisera bon ê tre , m oyennant la somme
« de deux cent quatre-vingts liv r e s , dont deux cents livres
a demeurent compensées avec pareille somme de d e u x
« centslivrescom prise en la cession que ledit sieur M a i g n o l
« m ’a faite d e v a n t A lle y r a t cejourd’h u i , d ’ un cont rat de
« rente
�(
a
cc
a
«
9)
rente sur les sieurs de L a r fe u il, et les quatre-vingts livres
restantes me seront déduites sur les arrérages réservés
par l’acte ci-dessus daté. Fait ce deux octobre m il sept
cent soixante-dix-neuf; et s 'g n é M aignoJ.
« Enregistré à R i o m , le 24 nivôse an 13 : reçu
fr.
5
c e n t ., etc. »
Les héritiers M a ig n o l com prirent bien qu ’ils ne p o u voient pas opposer cet acte à M aign o l fils , com m e ayant
cc 6 0
une date certaine antérieure au procès. E n conséquence,
pou r a vo ir plus de droits vis-à-vis M a ign o l p è r e , ils de
mandèrent sa mise en cause , qui fut ordonnée par juge
ment du 6 therm idor an 12.
XiC sieur M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , ainsi assigné en
garantie par les adversaires, dit en défenses q u ’il reconnoissoit sa signature, mais que l’écrit q u ’on lui représentoit ne contenoit de sa part aucune convention synallagniatique qui l’eût p riv é de la prop riété de son pré.
L a cause en cet état portée à l’audience du tribunal
d ’arrondissement de R i o m , le 23-ventôse an 1 3 , les h éri
tiers M a ign o l s’efforcèrent de jeter de la défaveu r sur
G uillaum e M a ig n o l p è r e ; et le sieur L e g a y , l ’ un d ’e u x ,
qui avoit écrit com m e scribe la m inute de l’acte du 2 oc
tobre 1779 , alla jusqu’à dire, en désespoir de cause, q u ’il
avoit écrit aussi un double du sous-seing p riv é p o u r être
remis au sieur M a i g n o l , du Cheval-Blanc.
Q uelque défiance que dût inspirer au tribunal une mise
en fait de cette im p o rta n c e, venant d’une partie intéressée
à la fin d’ une seconde p la id o ir ie , elle ré u s s it, et le t r i
bunal ordonna la comparoissance-des parties en personne
ppur être questionnées sur ce fait.
B
�( IO )
A l ’audicncc du 6 floréal an 1 3 , tout le m onde com
parut ; le tribunal fit plusieurs questions h M aign ol père
et à M a ig n o l fils. L e sieur L egny lui-m em e fut admis à
rép o n dre sur le fait par lui allégué , et le tout fut consigné
dans le jugement en form e d’interrogatoires.
M . le p rocu reu r im périal fut pleinem ent d ’avis que
l ’acte sous seing p riv é 11’avoit pas eu p ou r objet une vente
qu ’il n’ énonçoit pas, et q u ’il étoit d ’ailleurs nul com m e
n ’étant pas double. Cependant le tribunal y vit une ven te,
et qui plus est, une vente va la b le; en con séq u en ce, il
déboula M a ig n o l iils de ses demandes (1).
(x)
J u g e m e n t
d o n t
e s t
a p p e l
.
Entre Guillaume Maignol fils.......... Antoine Guillaume.............
Marie-Gilberte M aignol, et sieur Pierre L e g a y , son m ari; A n
toine M aignol, Gilberte M a ig n o l, yeuve P a n e v e y re , et autres.. . .
et Guillaume Maignol père.........
Interrogatoire de G uillaum e M a ig n o l pùre.
A lui demandé si à l’époque de l’acte n otarié, du 2 octobre
1 7 7 9 , il a été fait le mémo jo u r, entre les mêmes parties , un
acte sous signature privée. — Répond qu’il y a eu en effet un acte
sous seing privé. — D cm . Par qui les doubles ont été écrits, et
s’il reconnoit le double sous seing privé qui lui est représcnlé
et rapporté par les parties de M c. Mayet. — Rép. que ledit acte
avoit été écrit de sa main. — D em . Qui est-ce qui a dicté les co n
ventions. — Rép. que c ’é lo itle sieur Pierre Maignol. — Dr/n. Si
ledit sieur Pierre Maignol avoit écrit quelque chose. — Rép. que
non , et qu’il est très-mémoralif qu ’il n’y a pas eu d’autre double
écrit du sous-seing privé, que celui qui lui est représenté
D cm . Quel a été le but de cet acte sous seing privé? — Rép.
�L e sieur M a ig n o l fils a interjeté appel de ce jugem en t,
et ses m o y en s, p ou r le faire accueillir , sont fondés sur
les principes les plus constans et sur la plus exacte justice.
que c ’étoit pour céder au sieur Pierre Maignol la jo u issa n ce du
pré dont est question , ju s q u ’il de nouveaux arrangemens entre
eu x. — D em . L e sieur Pierre Maignol ne devoit donc pas avoir
cette jouissance par l’acte notarié ? — Hép. que non ; qu’il n’y
a que l’acte sous seing privé qui la lui délaisse. — A lui demandé
s’il ne fut pas question entr’ eux de chercher à éviter les droits
de lods. — Rép. qu’il ne sait pas ce que le sieur Pierre Maignol
pensoit ; que pour lui ce m otif n’est entré pour rien dans cet
acte. — D em . S ’il a été question de la propriété du pré. — Rép.
que non , que ce n ’étoit pas son intention , et que ce ne pouvoit
être non plus celle du sieur Maignol. — D em . Pourquoi, n ’ayant
été question que de la jouissance, l’acte sous seing privé ne fait
aucune m ention de cette jouissance. — Rép. qu’il a écrit sous
la dictée de M. Maignol. — D em . Si son fils étoit présent à c e t
acte. — Rép. que non ; mais qu’en ayant eu connoissance peu
de temps après , il lui en avoit témoigné son mécontentement.
— D em . Q uel ¿Ige avoit alors votre fils? — Rép. environ seize
ans. — A lui demandé si le sieur Maignol, ayant intention de
se soustraire aux droits de lods , n avoit pas aussi l’intention de
devenir propriétaire au lieu de simple jouissant du pré. — A
répondu que M. Maignol a bien pu avoir cette intention ; mais
qu’il n’a pas été question de la propriété entre les parties. —
D em . Lorsque vous avez fait donation de tous vos biens à votre
fils , aviez-vous alors la jouissance du pré? — Rép. que M. M ai
gnol en jouissoit alors. — D em . Avez-vous donné le pré dont il
s’agit? — Rép. qu’il a donné en général tous les biens qu’il avoit.
_D em . Avez-vous eu connoissance de la vente du p r é , faite
le 29 ventôse an 6 par M. Maignol à Guillaume ? — Rép. que
cet. objet pouvant se re n d ro , il ne s’est pas mis en peine dü
B 2
�( 1* )
M O Y E N S .
L es premiers juges se sont occupés de l’acte sous seing
s’ informer de ce que le sieur Maignol feroit relativement à cette
affaire. — D em . S ’il a^su la vente. — Rep. q u ’il en a eu connoissance quelque temps après ; et ensuite a ajouté affirmati
vem ent qu'il l’avoit sue quatre à cinq mois après. — D em . S ’il
avoit d’autres éclaircissemens à donner. — Rép. qu’ayant appris
la vente du pré par P ierre M aign ol à Antoine G u i lla u m e , il a
voulu se procurer l’acte de vente de 1 7 7 7 , dont la minute étoit
chez ledit sieur Pierre Maignol ; il 11’avoit pu se le procurer
d abord. — D em . Si le sieur L c g a y , notaire, a écrit un autre
double de l’acte sous seing privé. — Rép. que non.
Interrogatoire du sieur M a ig n o l fils .
D em . S ’il avoit eu connoissance des affaires faites par son père
avec le sieur Pierre Maignol, en 1779. — Rép. qu’il n’en a eu co n
noissance que depuis qu’il a été à la tète de la maison ; qu’a
vant , son père lui avoit parlé des arrangemens faits avec le sieur
Pierre M a ig n o l, en lui disant qu’il espéroit rentrer dans le pré.
•— D em . Rappelez-vous ce que vous a dit M. votre père à l’égard
de l’acte notarié et du sous-seing privé. — Rép. qu’il lui a dit
avoir consulté MM . P a g è s , Andraud et Grenier sur l’acte sous
seing p rivé, et qu’on lui avoit dit qu’il étoit n u l , pour n ’avoir
pas été fait double. — D em . M. votre père avoit donc cet acte
alors? — Rép. qu’il ne l’avoit pas, mais qu’il se rappeloit de son
contenu ; que son père lui a toujours dit qu’il n ’ y avoit pas eu
de double de c e t acte. — M. Maignol père i n t e r p e l é s’il est
vrai q u ’ il a consulté les trois jurisconsultes s u s - n o m m é s . — Rép.
qu’o u i, qu’il n ’avoit pas l’a c te ; mais que sur c e qu il en avoit
rapporté, M. Andraud l u i ayoit assuré que la c t é étoit nul. —
�3
( i )
p riv é dont les adversaires font leur titre , com m e si cet
acte étoit souscrit par le demandeur lui-m ém e ; ils ont
D em . à M. Maignol fils, s’il a vu entre les mains de son père
un écrit sous seing privé. — Ré p. n’en avoir pas vu , et que
son père lui a toujours assuré qu’il n’avoit pas été fait de double.
— D em . Si lors de la donation à lui faite par son p ère, celuici lui avoit aussi donné le pré. — Rép. que son père disoit tou
jours qu’il avoit droit de se remettre en possession dudit pré,
mais qu’il lui donrioit pour prétexte q u ’il n’avoit pas le titre
qui établissoit la propriété de ce pré , la minute de ce titre étant
entre les mains de Pierre Maignol. — D em . Avez-vous eu connoissance que M. L e g a y , notaire, eût fait un des doubles du
sous-seing privé de 1779? — Rép. qu’il a ouï dire par son père
que le sieur L egay avoit été le scribe de l’acte notarié, et non
du sous seing privé.
Interrogatoire de M e. A n to in e Bouyon.
D em . A v e z -v o u s eu connoissance qu’il eût été fait un acte
double sous seing privé? — Rép. n’avoir eui,connoissance et
n’avoir entendu parler de cet acte que depuis l’affaire dont
s’agit.
Interrogatoire de M e. P ierre L eg a y.
D em . Avez - vous eu connoissance qu’il eût été fait un acte
double sous seing privé? — Rép. que se trouvant a Landogne,
M. Maignol , de L a n d o g n e , qui étoit dans son cabinet avec
M. M a ig n o l, du Cheval-Blanc , l’appela , et l’invita à écrire un
double sous seing privé , contenant subrogation de rente , et
n o t a m m e n t contenant aussi cession d'un pré de la part du sieur
M aignol, du Cheval-Blanc , .au profit du sieur Pierre M aignol,
de Landogne. — D em . Etes-vous mémoratif si l ’acte que vous
écrivîtes étoit sur papier. timbré ou sur papier libre?,«*- Ilép.
�( I 4 )
confondu les moyens de M a ig n o l fils avec ceux de M a 'g n o l
p è r e , sans donner de motifs de cette résolution princi-
qu’il ne se rappelle pas sur quel papier il écrivit. — D em . Q u e l
qu’un écrivoit il ave c v o u s ? — Rép. qu’il ne s’en rappelle pas
très - positivement ; que néanmoins, sans pouvoir bien le c e r
tifier , il croit que M. M a ig n o l, du Cheval-Blanc , écrivoit avec
l u i , et que M. M a ig n o l, de L a n d o g n e , leur dictoit. — D n n . Lors
que vous eûtes fini d’écrire , qui est ce qui signa? — Rép. qu’il
ne s’en rappelle pas. — D em . S’il n’écrivit qu’un acte , et s’il
n’en écrivit pas deux. — Ilép. qu’il est mémoratif d’en avoir
écrit un seulement. — D em . M. M aignol, de L an d o g n e , écri
vit il en même temps que vous? Rép. que non; que c ’est lui
qui dictoit.
Après ces différens interrogatoires, M. le procureur impérial
a porté la parole ; et après un résumé de l’affaire , il a été d’avis
de déclarer nul l’acte sous seing p r i v é , du 2 octobre 1779»
parce qu’il n’avoit pas £té fait double ; a conclu à ce qu ’Antoine Guillaume fut condamné à se désister du pré dont il s’a g i t ,
en faveur du sieur Guillaume Maignol père , ou quoi que ce soit
Guillaume M aignol, son fils et donataire, avec restitution de
jouissances, et aux dépens. Il a pareillement conclu à ce que
les parties de M ayet fussent tenues de garantir ledit Antoine
Guillaume des condamnations contre lui prononcées.
Les débats terminés , le tribunal a ordonné que les pièces
seroient mises sur le bu reau , pour en être délibéré en la chambre
du conseil.
1 L a cause de nouveau appelée en cette a u d ie n c e , il en est
résulté les questions suivantes à résoudre.
Q
uestions
.
Quels effets doivent avoir les actes des iG mai xjS'j , 6 juin
1)777, l’acte notarié, du ¿1 octobre *779 , et l’acte sous seing
�5
( i )
pnlc ; et cependant ce iféto it pas une m édiocre difficulté
que celle de savoir jusqu’à quel point un fils, donataire
p riv é , du même jour deux octobre 1779} intervenus dans la
famille des Maignol?
L ’acte sous seing privé, du 2 octobre 17 7 9 , n’énonçant pas
qu’il a été fait double , cette irrégularité doit-elle le faire dé
clarer n u l, lorsque cet acte a r e ç u , du consentement de celui
qui veut l’attaquer, une exécution complète pendant plus de
vingt cinq ans?
*:
’
E n ce q u i touche la demande en désistement, formée contre
le nommé Antoine Guillaume', du pré dont il s’a g it;
Attendu que cette demande est subordonnée à l'effet que
doivent avoir différens actes qui ont été consentis entre les
Maignol , relativement au pré en question.
En ce qui touche la validité de ces actes ;
Attendu qu’il est établi que par le contrat du 16 mai 17 5 5 ,
Guillaume Maignol père a acquis la propriété de la rente fon
cière de go francs , assise sur le pré dont il s’a git;
Attendu que par contrat du 6 juin 1777, le même Guillaume
Maignol père étant devenu propriétaire de ce pré , a réuni par con
séquent dans sa main la rente , et le pré qui étoit asservi à cette
rente; que dès-lors il y a eu en sa personne confusion des qua
lités de créancier et de débiteur, ce q u i a opéré nécessairement
l ’extinction de ladite rente ;
Attendu que le contrat du 2 octobre 1779? consenti par G u il
laume Maignol père à Pierre M a ig n o l, so n p arè n t, n’a pu avoir
réellement pour objet la cession de la rente qui n’existoit p l u s ,
et 11e peut se référer qu’à la cession de la propriété du pré;>
Attendu que l ’acte sous seing privé du même jour 2 octobre
jy y g , intervenu entre les mêmes Guillaume Maignol p è r e 1,
et Pierre Maignol, a subrogé ledit Pierre Maignol à la cession
consentie à Guillaume Maignol p a r l e contiat du 6 'juin 17^7;
�(i 6)
par acte authentique , p o u v o it être tenu de l ’effet d’ un
acte sous seing p r i v é , n’ayant de date certaine qu’après sa
donation.
que cette subrogation générale des effets de l’acte de 1777 ,
ne peut s’entendre que de la propriété du pré dont il s’a g i t ,
puisque cet acte de 1777 étoit uniquement translatif de la pro
priété du m êm e pré ;
Attendu que quoique cet acte sous seing privé , du 2 octobre
1779, ne fasse aucune mention qu’il a été fait double entre les
p a r t ie s , G u illa u m e M aignol p è r e , ni G u illa u m e Maignol fils,
ne p euvent, dans,les circonstances où se trouvent les parties,
e xciper de cette omission , parce qu’il résulte des réponses
faites par lesdits Maignol pére et fils, lors de leur comparution
h l ’audience, qu’ils ont connu la possession publique de Pierre
Maignol, et après lu i, du mommé Antoine G u illa u m e, tiers dé
tenteur ; qu’ils ne se sont pas mis en devoir de réclam er contre
cette possession ; qu’ils ne se sont pas mis en devoir non plus
de réclamer contre l’acte du 2 octobre 1779, quoique cet acte
fût présent à leu r esprit , et du fait personnel de Guillaume
JMaignol père ; .
Attendu que cette exécution donnée à cet acte sous seing
p rivé, du 2 octobre 1779» forme une fin de non-recevoir contre
G uillaum e M a ig n o l, d ’après l’article iSaü du Code civil ;
Par ces m o tifs ,
L a tr ib u n a l, p a r ju g em en t en prem ier resso rt, ayant a u
cunem ent égard à ce qui résulte des réponses faites par les
dits Maignol père et fils, lors d e leur comparution à l'audience
dudit jour 6 du présent mois de floréal, déclare G u i l l a u m e et
autre Guillnume Maignol , père et fils , non r e c e v a b l e s dans
l e u r demande en désistement du pré dont il s ’a g i t . Sur le sur
p l u s d e toutes les demandes en recours et contre recours, e t
iiutres demandes, met les parties hors de cause ; compense les
Une
�C *7 )
U ne donation contractuelle ne peut subir aucune dim i
nution ; car c’est sous la foi de cette promesse que deux
familles se sont unies. Q uand la donation contient tous les
biens p résen s, elle doit se composer de toutes les actions
qui résultent des titres remis par le donateur au dona
taire; caries actions sont aussi des meubles ou des im m eu
bles, suivant l ’objet qu ’elles tendent à recouvrer.
Gomment donc admettre que les droits assurés à des
futurs et ù leurs descendans, par leur contrat de m ariage,
puissent être diminués sous aucun prétexte par des sousseing privés , d’ une date à la v é rité a n té rie u re , mais non
constatée par l’enregistrem ent? Il en résulteroit souvent
que deux fam illes, après a vo ir com pté sur une fortune
conséquente et prop o rtio n n ée, sur le vu de plusieurs titres,
n’auroient cependant fait q u ’un calcul in u tile , et que l’ un
des ép o ux se tro u ve ro it, après ses noces, n’avo ir que la
moitié de la fo rtu n e 'q u ’il avoit établie et justifiée en se
mariant.
C ’est p our p réven ir de tels mécomptes que les lois pros
crivent les contre-lettres aux contrats de m a ria g e, et q u e ,
dépens entre ledit Antoine G u illa u m e , ledit Antoine Maignol
et consorts ; et condamne lesdits Guillaume et autre Guillaume
M a ig n o l, père et fils , en tous les dépens faits tant à l’égard
dudit Antoine Maignol et consorts és-dits noms , qu’en c e u x
qui ont été compensés entre lesdits Antoine G u illa u m e , A n
toine Maignol et consorts ; et aux c o û t, expédition et significa
tion du présent jugement.
Fait et prononcé publiquem ent, à l’audience du tribunal civil
de première instance , séant à Iliom , par M M . P a r a d e s , p rési
dent ; D a n i e l , A s t i e h et M a n d o s s e , ju g es , le 18 floréal an i 3.
C
�( 18 )
dans les donations de biens présens et à v e n i r , il est permis
aux ép o ux de s’en tenir aux biens présens, p ou r que leur
contrat ne souffre aucune dim inution dans la fortune alors
p rom ise, et qu ’ils demeurent entièrement hors de la dé
pendance du donateur.
Certes le sieur M a ig n o l fils n’entend en cette cause élever
aucune sorte de soupçon contre la sincérité de l’écrit de
son p è r e ; mais il n ’est ici que le c h e f de sa fam ille, et
il plaide p o u r le maintien d’ une donation qui a saisi aussi
ses descendans. Son contrat de m ariage a été com pté p our
r ie n , et c’étoit l ’acte qui devoit l ’em porter sur toutes les
autres considérations. D e vagues recherches sur l ’ inten
tion des parties, et sur la connoissance que M aign o l fils
avoit pu avo ir à seize ans de l ’existence d’ un sous-seing
p r i v é , ne pou vo ien t conduire les premiers juges que des
hypothèses à l’abstraction , et de l ’abstraction à l’erreur.
A quoi p ou voient tendre en effet les questions faites au
sieur M a ig n o l fils, s’il avoit eu connoissance de l’écrit sous
seing p riv é en 1779 , ù un âge où on n’a que faire de s’oc
cuper des petits détails d’une fortune dont on ne jouit pas ?
L e sieur M a ign o l père avoit dit a son fils qu il avoit signe
un acte nul et non d o u b le , p o u r ceder au sieur M a ig n o l,
de L a n d o g n e , les jo u issa n ce s d’un pré. U ne consultation
d’avocats en porta le mêm e jugem ent; et dès-lors on pense
bien que cette décision qui sans doute tranquillisa le p è re ,
11’ occupa bientôt plus le fils. Il a fallu ensuite l’im por
tance et les débats d’un procès p ou r lui rappeler un fait
presque effacé de son souvenir.
Toutes les précautions q u ’ont prises les prem iers juges
�C r9 )
p ou r chercher la pensée des sienrs M a ig n o l père et fils dans
leurs réponses , et les mettre en défaut par des questions
inattendues, ne p ouvoient donc changer l ’état de la cause.
Il y avoit un point de vue certa in , qui conduisoit à une
simple question de d ro it, et dispensoit de se perdre dans
le vague des conjectures.
Po u v o it-o n opposer à M üignol fils, donataire contrac
tuel en l ’an 7, demandeur en désistement en l’an 11, un acte
sous seing p r iv é , enregistré en l ’an 1 3 ? C e sous-seing p riv é
étoit-il une vente et une vente valable du p ré conten
tieu x? La jouissance dudit p r é , q u ’avoit eue le sieur M a i
g n o l , de L a n d o g u e , supposoit - elle nécessairement une
vente , com m e l ’ont décidé les premiers juges ?
Q uand m êm e il auroit été possible de dim inuer par
une vente sous seing p riv é l ’e0et d ’une donation c o n
tractuelle , au moins au roit-il fallu que cette vente fût
p a rfa ite , et que l’acte duquel on ve u t la faire résulter en
eût tous les caractères et toutes les formes.
A u contraire, on ne vo it dans le sous-seing p r iv é , du 2
octobre 1 7 7 9 , et en le supposant a cette d a te , q u ’ un
acte obscur et é q u iv o q u e , dont l’intention n’a pas m êm e
pu être bien exp liqu ée par ceux qui s’en font un titre.
Si l’on se reporte aux circonstances qui ont p récédé et
accompagné cet a c t e , on est bientôt convaincu que le
sieur M aign o l, du Cheval-Blanc, n’entendoit céder son p ré
L en o b le , que dans l’expectative du domaine Gastier ; et
q u e , jusqu’à ce qu’ il pût être propriétaire lui-m êm e ,
il n’entendoit pas vendre.
Sans cela , com m ent exp liquer cet amalgame d’actes
C 2
�( 2° )
in u tile s, et en quelque sol’te inintelligibles et incompa
tibles ?
M a ig n o l père étoit propriéta ire du pré L e n o b l e , di
sent les adversaires , puisqu’il avoit acquis la rente en
l y S ô , et l ’effet du bail em phytéotique en 1 7 7 7 , par acte
passé devant M a ig n o l, de L a n d o g n e , lui-même.
Cela est certain ; et c’est précisément parce que M aignol,
de L a n d o g n e , étoit le rédacteur de l’acte de 177 7 , q u ’il
ne p ou voit pas ignorer que le sieur M a i g n o l , du ChevalBlanc , propriétaire du domaine utile et direct du pré
I,enoble , n ’avoit qu ’ un mot à dire p our le vendre , sans
u ser d’autant de détours e t de circonlocutions.
Si son intention eût été de v e n d r e V pourcfuoi donc
a uroit-il'ven du une rente de 1755 , qui n’existoit p lu s ,
et q u ’ il créoit sur lui-m êm e en d’autres te rm e s, en don-^
nant une plus ancienne hyp oth èqu e ?
P o u rq u o i auroit-il fait deu x actes au lieu d’ un seul ?
p o u rq u o i a u r o it-il pris des précautions p o u r valider un
acte absolument inutile, et n’en auroit-il pris aucune p ou r
la rédaction du seul acte qui eût un sens et un résultat ?
A qui persuadera-t-on que le sieur M a ig n o l, de L a n
dogne , bailli de sa justice, et notaire intelligent, se fût
contenté de tels actes, s’ il eût voulu devenir réellement
et solidement p rop riétaire? ou p lutôt, qui ne sera pas p er
suadé , à la lecture de ces deux actes du mêm e jour ,
que le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , a vo ulu enlacer le
sieur M a ig n o l, du C h e va l-B la n c, par des clauses e nt or
tillées et peu intelligibles , qui présentassent au besoin
un sens favorable à l’intention de ce d e rn ie r, lequel dût
en effet s'y laisser prendre.
�C ar ne percions pas de v u e que le sieur M a i g n o l , de
L a n d o g n e, a d icté ( on l’avoue ) l’acte sous seing p riv é ,
du 2 octobre 1779. ^ étoit donc bien le maître de d icter
une vente, si telle étoit l ’intention de M aignol père. D èslors s’il n ’en a pas dicté une claire et non é q u iv o q u e , il
est clair que l ’acte doit être interprété contra eum in
cu ju s potes ta te era t legern apertiùs dicere.
O r , le sieur M a ig n o l , de L a n d o g n e, s’est fait subroger
à l’effet d’une vente de bail em phytéotique d’ un p r é , p o u r
p a r lu i jo u ir d udit p ré ainsi qu ’ il avisera bon ê t r e ,
moyennant 280 francs ; et cela ne ressemble nullem ent
à la vente franche et simple dudit pré.
11 est bien plus clair q u ’il ne s’agissoit que de jouis
sances, et l’acte notarié le p r o u v e ; car la rente de 90 fr.
créée ou renouvelée par M a ig n o l, du C h eval - Blanc ,
étoit payable par les jo u is s a n s du pré. O r , peut-on à
présent se m éprendre à l’intention des parties ? L ’acte
notarié étoit un prem ier pas vers une convention plus
importante. L es parties .prévoyoient que M a ig n o l , du
C h e v a l-B la n c , auroit le domaine Gasticr , et alors tout
auroit été consommé. Jusque-là il devoit une rente ; et
cependant il stipuloil q u ’elle seroit payée par ceux qui
jouiroient du pré.
S’il eût jo u i, il devoit payer lu i-m ê m e ; mais le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , devoit j o u i r , et alors il se payoit
par ses mains, d’après la clause, comme jo u is s a n t ; il lui
falloit donc un nouveau titre p o u r jo u ir du p ré : voilà
donc le m otif exact et visible du sous-seing p riv é.
Cette interprétation si facile n’a point échappé aux
�héritiers M a ig n o l, à qui il auroit peut-être été nécessaire
de demander aussi à quoi avoit pu être utile de faire deux
actes p ou r un. Il est vrai qu ’ ils a voient p ré v u l ’objec
tio n , et y avoient répondu d’avan ce; c’é to it, dirent-ils
d 'a b o r d , p o u r éviter les droits d’enregistrement.
M ais , d ’après le tarit'de 1722 , qui étoit suivi en 1 7 7 7 ,
une vente d’ immeubles payoit un droit de 1 fr. p our
les premiers roo f r . , et 10 sous p ou r choque 100 francs
suivans. A in s i , c’étoit 36 sous p ou r 280 francs ; et à
supposer , com m e l’entendent les adversaires , que le p rix
eût été de 2000 fran cs, c’eût été 10 liv. 10 sous; tandis
que Pacte notarié , du 2 octobre 1 7 7 9 , a Pay é un droit
de contrôle de 14 liv. 12 sous; ce qui encore ne dispensoit pas du contrôle du sous-seing p r iv é , quand il y au
roit lieu de le produire.
A u ssi n’est-ce plus là la cause q u ’ont donnée depuis
les adversaires; c’é to it, ont-ils d i t , p ou r éviter le paye
ment des droits de lods.
Sin gulière raison p o u r le bailli de la justice, qui ne
pou voit p is être traité bien rigoureusement en iiscaliLc.
A u reste, le droit le pins ordinaire étoit de 2 sous 6 de
niers p our livre. Ce q u ’il appelle son contrat de vente
portoit un p rix de 280 fr. ; c’étoit donc 35 fr.
q u ’ il
s’ agissoit d’éviter.
Dira-t-on encore que cette somme n’étoit pas le p r ix
réel ? Mais , si le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , 11e faisoit
un sous-seing p riv é que p o u r ne pas payer des lods , ce
n’étoit donc pas la crainte de ce droit qui lui faisoit dis
simuler le p rix : convenons plutôt que si au lieu du p rix
imaginaire q u ’ il a lait écrire dans ce sous-seing p riv é , il
�( *3 )
avoit inséi'é un p rix ap pro xim atif de la valeur de l ’im
m eu b le, il auroit excité la défiance du sieur M a ig n o l, du
Cheval-B lanc ; et c’est ce q u ’il vo u lo it éviter. R e m a r
quons encore q u ’avec cette version, les adversaires sont
forcés de donner p our prétexte de l’illégalité d’ un acte ,
une fraude que leur père vouloit co m m ettre , et dont
cependant ils veulent s’adjuger le profit.
Com m ent donc v o ir une vente de prop riété dans ce
sous-seing p r i v é ? Com m ent concevoir q u ’il ait une exis
tence com patible avec l’acte notarié du mêm e jo u r ? A u
contraire , en ne vo ya n t dans le sous-seing p riv é qu ’un
p o u v o ir de jo u ir du p ré p ou r la rente de 90 fra n cs, et le
lé g e r supplém ent convenu , on entend alors parfaitement
l ’existence simultanée des deux actes ; et 011 conçoit com
m ent le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , créancier d ’ une
rente payable par les jo u is s a n s du pré , eut besoin d ’un
second litre qui le rendît jo u is s a n t lu i-m ê m e ?
D e cette m a n ière, il n’ étoit plus nécessaire que l ’acte
sous seing p riv é fut double ; car si le sieur M a ig n o l, du
C heval-B lan c , avoit v o u lu demander les jouissances du
p r é , le sieur M a ig n o l, de L an dogne, lui auroit ex h ib é son
é c r it, portant qu ’il avoit eu le droit d’en jouir. Si h son
to u r ce dernier avoit demandé les arrérages de rente ,
l ’autre auroit répondu q u e , comme jo u is s a n t du p r é , il
se les de voit à lui-m êm e.
L a cause est donc claire dans ce sens; mais si on veut
v o ir une vente dans ce sous-seing p r i v é , alors non-seu
lement tout est in e xp lica b le, com m e on vien t de l’o b
s e r v e r, mais encore les_principes s’opposent absolument
à ce que cet acte puisse contenir une v en te va la b le.
�C 24 )
L es actes translatifs de p rop riété sont des actes trop im-
portans à la société, p ou r q u ’on puisse les dispenser avec
trop de légèreté de la rigueur des formes légales. Ce que
la loi a v o u lu , a dû être la règle com m une ; et si quelques
exceptions tolèrent par fois l’arbitraire, dont il faut tou
jours se tenir en défiance, ce ne peut être que p o u r venir
au secours de l ’ignorance qui a traité avec bonne fo i, et
qui ne doit pas en demeurer victime.
M ais un notaire éclairé com m e le sieur M a i g n o l , de
L a n d o g n e , pou vo it-il ig n ç rer que tous les actes synallagmatiques doivent porter m in u te, s’ ils sont notariés, et
doivent être faits do u b les, s’ ils sont faits sous seing p r iv é ?
L a raison le d i r o i t , si les premiers élémens du di’oit ne
l ’enseignoient com m e un principe.
C ’est mêm e la plus usuelle des maximes ; car tous les
jours 011 fait de pareils actes, et les moins expérim entés
n ’oublient pas de v o u lo ir en retenir une copie. Cela arrive
p o u r les actes les plus simples ; et com m ent un notaire
qui eût dicté une vente l’auroit-il oublié p o u r lui-m êm e ?
L a nécessité do rédiger en double écrit les actes synallngma tiques d érive évidem m ent de la nature mêm e de
ces actes ; car si p o u r la validité d ’ un acte de ce genre
il est requis que chacune des parties soit obligée envers
l’autre; si p ou r la validité d ’ une vente il est nécessaire que
l’un consente à ve n d re, et que l’autre consente à acheter,
il faut dès-lors, par une conséquence fo rcé e, que chacun
puisse avoir dans ses mains la p reu ve que l’autre a co n
s e n t i; sans cela , il seroit au p o u v o ir de l’une des parties
de détruire l’acte, ou de contester son existence.
T o u s les auteurs enseignent ces p rincipes, et prou ven t
par
�( 25 3 ,
par une foule d’arrêts, qu ’ils ont été consacrés p a rla juris
prudence la plus constante.
U n arrêt du 6 août 1740 déclara nul un acte par lequel
l ’archevêque de Reim s s’ étoit soumis à acheter l’ hôtel de
Conti m oyennant 450000 fr. L ’acte n ’étoit pas fait double ;
mais les héritiers du prince de Conti opposoient que l’acte
n’avoit pas dû être d o u b le , parce q u ’il n ’étoit obligatoire
que pour l’archevêque qui l ’avoit signé. L a m êm e chose
fut ju gée par arrêt du 29 n o vem bre 1781 , entre le sieur
F o rg et et le duc de G ram m o n t : il y avoit m êm e eu m en
tion de l’acte et réparations commencées ; néanmoins le
sieur F o rg et obtint que les lie u x seroient remis en leur
prem ier é ta t, ou des dom m ages-inlérêts en cas qu'ils ne
pussent se l’établir.
U n autre arrêt du 23 juin 1 7 67 a jugé la rigueur du
principe dans des termes plus lorts encore. D e u x co h é ri
tiers a voient fait un partage sous seing p r iv é , et l’ un d ’eu x
devoit payer p o u r retour de lot à l’autre 240 fr. L ’acte
fut déposé chez le curé du lie u ; chacun jouit de son l o t ;
et dans un contrat de mariage postérieur, un des copartageans se constitua, en présence des autres, le lot à lui échu.
L ’un des coh éritiers, après plusieurs ann ées, demanda
un p a rta g e , et soutint que l’acte q u ’on lui présentoit éloit
nul p ou r n’a vo ir pas été fait double. O n lui opposoit le
dépôt en main tierce , sa prop re exécution pendant six
a n s, et des coupes d ’arbres dans son l o t , sa présence m êm e
au contrat de mariage ci-dessus, et l’adhésion de tous les
autres héritiers,
Ces moyens avoient réussi en prem ière instance en 1764rnais sur l’appel à A m ien s , la force des principes p réD
�( *6 )
valut. U n e sentence de 1766 prononça la nullité de l ’acte,
et ordonna un nouveau partage. Sur appel au parle
m ent, cette sentence fut c o n firm é e, après une plaidoirie
très-d éb a ttu e, dit l’arrêtiste, et l’appel fut mis au néant.
Enfin 011 conuolt l ’arrêt cité par L é p in e de G rainville.
U ne vente avoit été faite en deux doubles; mais il n ’étoit
pas fait mention dans les deux écrits q u ’ils eussent été faits
doubles : ils étoient représentés tous d e u x , et cependant
l’acte fut déclaré nul.
C e u x qui ne veulen t v o ir dans les procès que des cir
constances to u jo u r s variables, et ces apparences fugitives
de bon ou mauvais d r o it, qui s'évanouiroient souvent le
le n d e m a in , si 011 les exam inoit sous un autre point de
v u e , c e u x -là , d iso n s-n o u s , p ou rroien t s’étonner d ’ une
telle jurisprudence, sans songer que si le sum rnum ju s a
par fois ses inconvéniens, l’arbitraire en a m ille fois davan
tage. Ils peu ven t lire dans L é p in e de G ra in ville les motifs
qui engagèrent le parlement à se décider p o u r la nullité
dans l’espèce ci-dessus, et peut-être cesseront-ils de penser
que le juge doit rester le maître de son o p in io n ,q u a n d il
en vo it le d a n g e r , et quand il peut se gu ider par les
principes.
L ’article 1325 du Code civil les rappelle , et devoit
em pêcher les premiers juges de faire autant d'efforts p ou r
rechercher s’ il avoit été fait un double du sous-seing p rivé
du 2 octobre 1779? (l lli ? par son style et son c o n t e x t e ,
p ro u vo it cependant assez par lui-m êm e q u ’il n’avoit pas
dû être fait double.
« L es actes sous seing p r i v é , dit le C o d e ,q u i contien« lient des conventions syuallagmatiques, ne son t valables
�C 27 )
« q u ’autant q u ’ils ont été faits en autant d’originaux qu’il
« y a de parties ayant un intérêt distinct.
« C h a q u e originalàa\\. contenir la m en tion du nom bre
a des originaux qui en ont été faits.
« Néanm oins le défaut de m ention que les o rig in au x
« ont été faits doubles, ne peut être opposé par celui qui
« a exécuté de sa part la convention portée en l ’acte. »
A i n s i , quand il eut été vi*ai que le sieur I-egay eû t
écrit un double sous la dictée du sieur M a i g n o l , de L a n
dogne -, quand il seroit aisé de con cevoir que celui-ci eut
de sa part signé un écrit par lequel il auvoit dit ; J e s o u s
s ig n é
, subroge M e. P ie r r e M a ig n o l ( c’est-à-dire, lui-
même ) , à F e ffe t, ctc. ; quand celte rédaction insensée
sei’oit vraisem blable, un tel acte n’en vaudroit pas m ie u x ,
parce que ch a q u e orig in a l ne contiendroit pas la m en
tion q u ’ il a été fait double.
M a is , s’écrient les héritiers M a ig n o l , au moins êtesvousdans l’exception du Gode que vous citez vous-m êm e;
car vous avez la issé jo u ir le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e :
donc vous avez e x é c u té la vente.
O n pou rro it d ’abord répondre que le Code civil peut
être in v o q u é p ou r le passé , quand il est conform e aux
anciens p rin c ip e s , si Jiempè déclarét jus avtiquum nova
constitutio , mais q u ’il ne faut pns le suivre lorsqu’il s’en
écarte ; que d ’après cela il y avoit lieu de le citer p o u r
le déiaut de mention du m ot fa it double , parce que les
arrêts y étoient conformes ; mais que les arrêts n’atlachoient. aucune im portance à l ’exécution d’ un acte nu]
dans son p rin cip e , com m e on le vo it notamment par l’arrêt
D
21
�(
2
8
)
de 176 7 ; car ce seroit donner un effet rétroactif à la l o i ,
ce qui n’est pas dans l ’intention du Code.
M ais passons encore légèrem ent sur ce moyen, et voyons
s’il y a réellem ent une e xécu tio n de l’acte sous seing p riv é
dans le sens de l’art. 1 3 2 5 , c’est-à-dire, si le sieur M a ig n o l,
du C heval-B lan c , en la issa n t jo u ir le sieur M a ig n o l, de
L a n d o g n e , a nécessairement entendu ex é cu te r un acte
de vente.
Sans doute , si j’achète un p ré et que je paye le p r ix
c o n v e n u , j’exécute la convention ; de m ê m e , si je vends
un p ré dont j’étois en possession h ier , et qu ’après en
avo ir touché le p rix je le liv re dem ain, sans autre cause
de tradition , et sans é q u i v o q u e , j’exécute encore le
m arché. V o ilà bien ce q u ’a vo u lu dire le Code : pas de
difficulté sur ce point.
M a i s , si l’acheteur s’empare de l’objet vendu , ou s’ il
a un autre titre de possession que la v e n t e , alors l’équ i
v o q u e du m ode de possession p roduit l ’éq u iv o q u e du titre,
et le vice du titre renaît dès l’instant q u ’il n’est plus pos
sible d’être convaincu que l'occupation de la chose vendue
soit l’effet n écessa ire de l’acte de v e n te , com m e la preuve
certaine de son exécution.
O r , revenons à la position des parties en 1779. Sans
d o u t e , s’ il n’existoit d’autre acte que le sous-seing p r i v é ,
et si le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , n’étoit en posses
sion qu'en vertu de cet a c t e , il seroit difficile de p ré
tendre q u ’il n’a eu aucune exécution.
M a is , i° . q u ’on supprime tout à fa ille sous-seing p r iv é ,
et on concevra encore d ’après l’acte notarié du 2 octobre
1779 ,q u e le sieur M a ig n o l; de L a n d o g n e , a eu qualité
p o u r jouir.
�( z9 )
E n e ffe t , com m e le disent les adversaires , il fit créer
en sa faveur une rente qui n ’existoit plus. L e sieur M a ig n o l , du Cheval-Blanc , ne stipuloit pas q u ’il la payeroit,
mais il disoit qu’elle seroit payée p a r les jo u is s a n s du
pré. D o n c le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , ch erchoit un
titre de jouissance, p o u r em pêcher de transporter cette
jouissance à d’autres : donc s’il a joui ensuite, c’est d’après
sa prop re convention p o u r le pa yem en t de sa rente. Sa
jouissance n’est donc pas la p reu ve certaine de V exécu tion
d’ un contrat de vente.
2°. Cette prétendue vente est encore si obscure, que ce
n’est en vérité pas la peine de vio le r une loi p o u r elle.
U n notaire qui veut acheter p o u r être p r o p r ié ta ire , ne
se fait pas subroger à un bail em phytéotique p o u r jo u ir .
U n notaire qui dicte une vente p o u r lui-m êm e, la dicte
com m e celles q u ’il rédige p o u r les a u tre s , et ne fait pas
écrire un b arbo u illage, ou astucieux, ou vide de sens.
M ais enfin les adversaires qui ne veulent v o ir que l ’e x
ception du Code c i v i l , parce qu ’elle leur est fav o ra b le,
et que rien n’a plus de latitude au gré des plaideurs que
les exceptions des lo is ; les adversaires, disons-nous, ne
rem arquent pas qu’ il faut cependant entendre la loi dans
un sens raisonnable ; car c’est bien là au moins l ’inten
tion du législateur.
L a nullité ne peut pas êlre opposée par celui q u i u
e x é c u té de sa p a rt la convention : voilà l’exception du
Code.
P o u r appliquer cette e xce p tio n , fa u t -il une exécution
a c t iv e ? faut-il une exécution en tière ?
J e vends aujourd’hui un im m euble par acte non don-
�( 33 )
Lie , et je le livre. Si au terme on ne me paye p a s , je
ne puis me servir de ma vente , cnr je n’en ai pas. J'aurai
bien une action en désistement qui forcera l ’acheteur à
s’exp liq u e r : mais si la vente lui est onéreuse , il se
désistera ; s’ il la trouve avantageuse, il la produira ; et
je ne pourrai l’em pêcher d’être maître de sa c a u s e , parce
que j’aurai e x é c u té de m a p a ît la convention. A in s i
une convention syn a lla g m a tiq u e m'aura obligé s e u l:
voilà l’abus des interprétations forcées d’ une loi qui n’a
rien voulu de pareil.
L es di fie rentes parties de l’article 1 3 2 6 , doivent s’e x
p liq u er l ’une par l’autre , de manière ù être entendues
e n se m b le , et sans s’entredétruire. L e Code a vo ulu que
V exécu tion fût un m oyen contre le d éfa u t de m en tion
que l ’acte ait été fait double : mais si chacune des parties
est obligée envers l ’a u tr e , il est bien toujours néces
saire que celle qui a encore un in térêt distinct à l'e x é
cu tio n de l’a c te , ait pardevers elle le double qui force
l ’autre à T exécuter de sa part.
Sans d o u te , quand le Code civil ôte toute action à
celui qui a e x é c u té de sa p a r t , c’est lorsque par cette
pleine exécution il n ’a plus un intérêt à l’exécution qui
reste à faire de la part des autres : voilà sans contredit
l ’ unique sens que la loi puisse présenter, en l’expliquant
par scs propres expressions.
A c c i a les adversaires répondent que le sieur M a i g n o l ,
du C h e va l- B la n c , étoit payé , et 11’avoit plus d ’intérêt à
a voir un double.
D ’abord c’esL une erreur de fait. L e sous-seing privtî
�C 31 )
p ro u ve lu i-m êm e le contraire; car si le p r ix supposé à la
vente est de 280 francs , il en resterait dû plus du tiers, dès
que 80 francs dem euraient à im puter sur des arrérages de
rente , dont le prétendu vendeur ne p o u vo it pas de
m ander la compensation sans un double.
20. Les adversaires supposent que le vrai p r ix de la
cession étoit les 2000 francs cédés par la rente des L arfeuil ; mais le sieur A îaignol père , qui a remis les titres
de cette rente à son donataire , lui a attesté n’en a vo ir
jamais touché un denier ; celui-ci n’eu a rien reçu non
plus : il falloit donc un double p o u r réclam er en rem
placem ent un p r ix de v e n t e , ou p our en demander la
résolution.
3 0. Une circonstance non moins sensible p ro u v e encore
la nécessité d’avo ir un double de vente, si c’en étoit une.
L e sieur M a i g n o l , de L a n d o g n c , p ou vo it être é v i n c é , ou
perdre son pré par force m ajeure; alors en supprimant
son double il retrou voit l’acte notarié du m êm e jo u r , et
demandoit au sieur M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , le paye
ment d’ une rente de 90 francs.
V o ilà quelle étoit la position du prétendu v e n d eu r;
et voilà précisément les motifs de cette jurisprudence sé
v è re q u i , en sacrifiant quelques intérêts particuliers , faisoit la leçon aux citoyens, et les préservoit de l’abus de
ces actes p rivés q u i , à l’économ ie p r è s , sont le plus sou
vent une occasion de surprises et une source de procès.
L a cou r doit juger ici la valeur d’un acte équ ivoqu e et
suspect. Si donc la rigueur de la loi fut jamais ap pli
cable , c’est sans doute dans une circonstance où il s’agit
�( 32 )
d’une prétendue v e n te , q u i , qu oique dictée par un no
taire, ne contient aucune des clauses d ’usage, aucune des
formes extrinsèques les plus c o m m u n e s, et à l’égard de
laquelle on ne donne aucune de ces excuses que la bonne
foi fait adm ettre, ou que l’ ignorance fait tolérer.
M e. D E L A P C H I E R ,
avocat.
M e. V E R N I È R E , avoué,
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d rio t , seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Juin 1806.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Maignol, Guillaume. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Vernières
Subject
The topic of the resource
rentes
ventes
bail emphytéotique
interrogatoires
donations contractuelles
conflit de lois
donations
bail
Description
An account of the resource
Mémoire pour Guillaume Maignol fils, habitant à Bonlieu, canton d'Évaux, appelant ; contre Antoine Guillaume, maréchal à Pontaumur, intimé ; et contre Gilberte Maignol, Pierre Legay, son mari, Antoine Maignol, Gilberte Maignol, veuve Paneveyre, et autres héritiers de Pierre Maignol, de Landogne, intimés ; en présence de Guillaume Maignol père, habitant au lieu du Cheval-Blanc, commune de Condat, appelé, en assistance de cause.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1755-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
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32 p.
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An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0328
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
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BCU_Factums_G1605
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Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
Condat (15054)
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Domaine public
bail
Bail emphytéotique
conflit de lois
donations
donations contractuelles
interrogatoires
rentes
ventes
-
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Text
PRECIS
COUR
D ’A PPEL
P O U R
DE RIOM.
L a dame D E M A R I O L , et les sieurs D E
V É N Y et D E R I B E Y R E , enfans et
héritiers de la dame D E V
il l e m o n t
appelans;
,
C O N T R E
L e sieur R I X A I N , intimé.
L e sieur R ixain , fermier de la dame de V illem ont, lui avoit
fait souscrire, en l’an 2 , une obligation de 26000 fr. Légitime
ou n o n , cet engagement auroit été respecté par les appelan s ,
si le sieur Rixain se fût borné à suivre le sort de son propre
titre : mais l’obligation étant en assignats, le sieur Rixain a pré
tendu qu’elle avoit une cause antérieure à leur émission ; e t ,
pour le prouver, il a fallu qu'il reproduisit tous ses payemens
A
�r
2
)
et objets de répétition. Ce nouveau compte établit clairement
aujourd’hui que le sieur Rixain n’a payé que quatre années de
ferme au lieu de six ; et les héritiers de Villemont réclament les
deux années qu’il-doit. Voilà ce qui semble au sieur Rixain ex
trêmement injuste. Il ne prouve pas cependant q u ’il ait payé; m ais,
il se retranche sur l’acte de l ’an 2 , qui n’expliquoit rien , et q u i,
expliqué et dénaturé par son fait, n’est plus un titre pour lui-méme.
FA IT S .
Le 26 mai 1787, la dame de Villem ont donna à ferme an
sieur R ixain, pour n euf ans à compter du i cr. mars 1788,
les trois terres de V illem ont, T eix et M ontrodès, moyennant
17600 francs.
L e même jour il fut d it, par une contre-lettre , que la dame
de Villem ont résilieroit le bail de la terre de Villemont si ses
enfans lui payoient ses reprises, et que l’indemnité seroit de
1200 fr. par chaque année à courir.
Le i avril 1789, le bail fut résilié pour la terre de T e ix , et
il fut dit que Villem ont resteroit affermé 8000 fr. et Montrodès
pour 4000 francs.
Le 26 février 1793»
dame de Villem ont, remboursée par
ses enfans, signifia un congé au sieur Rixain , et lui offrit
4800 fr. pour l’indemnité de quatre ans.
Les parties com prom irent; et par jugement du 7 juin
les arbitres , jugeant le congé venu à tard, déclarèrent le bail
résilié au i cr. mars 1794 5 et condamnèrent la dame de V ille
mont à payer
oo fr. pour trois années de non-jouissance ; ils
ordonnèrent une plus ample contestation sur des demandes contre
le sieur R ixain , pour dim es, dégradations, e t c . , dues à la dame
de Mariol et au sieur de Teix.
Ce jugement fut signifié au sieur Rixain , avec commande
ment de payer à la dame de Mariol et au sieu r de Ih e ix .
Le a ventôse an 2 , le sieur Rixain iit à la dame veuve de
5
36
3
�C 3 ).
somme
5
36oo
et
Villem ont sommation de payer la
¡de
fr. ,
ré
clama de plus 28632 liv. 2 sous den. par lui surpayés, dit-il,
après avoir payé les six années de sa ferme ; to ta l, 32262 liv.
2 sous
deniers.
Le 4 messidor an 2, il fut fait arrêté de compte dans lequel
on fait dire à la .dame de Villemont qu’après avoir examiné le
dit compte , et discuté tant à raison du dédommagement par
elle dù des objets supprimés par les décrets qu’autrem ent, elle
a trouvé un excédant de 6262 liv. 2 sous
deniers.
En conséquence de quoi la dame de Villem ont se reconnut
.débitrice de 2G000 fr. pour solde de tout compte.
Il fut ajouté qu’elle avoit fait compte à Rixain de la nonjouissance de Montrodés pour trois ans , et q u e , comme ses
sous-fermiers refusoient, dit-il, de payer, à cause des suppres
sions féodales, il étoit autorisé à faire avec eux des ventilations,
après quoi il se payeroit par ses mains de sa créance, en receyant de ces sous-fermiers ce qu’ils devroient.
Cette dernière clause annonçoit assez combien la dame de
Villem ont se méloit peu elle-même des comptes du sieur R ixain,
et le laissoit maître de tout régler lui-méme. Quoi qu’il en soit,
le sieur Rixain dit ayoir traité avec ces sous-ferm iers, et reçu
5
5
^972 francs..
La dame de Villemont étant décédée en l’an 4 j le sieur Rixain
assigna, en l’an 6, ses héritiers en payement des 26000 francs,
montant de l’obligation , et des arbitres furent nommés. Ils ren
dirent un jugement arbitral le 21 pluviôse an G. Comme il est
la base du procès actuel , il est important d’en connoitre les
détails et les dispositions.
Les héritiers de Villem ont, voyant un règlement fait par leur
jnère, contenant obligation, à la date de l’an 2 , en demandoient
la réduction.
Le sieur Rixain répondit que tout ce qu’il avoit payé étoit
antérieur aux assignats, et qu’il étoit prêt à l’établir par les
ancien? comptes et pièces qui étoient en son pouvoir.
A
jL
.
2,
�En conséquence,
( 4sa3 réclamation, les arbitres re
et d’après
viennent à un compte général sur le vu de trois comptes des
i er. juillet, 20 décembre 1790, et 2 janvier 1791; et le nouveau
compte donna le résultat suivant :
i°. Le sieur Rixain a payé, d’après ces trois états, 62263 f. 46 c,
Sur quoi il d evo it, pour quatre ans de ferm e
alors échus..........................................
48000
d>
Donc il étoit alors créancier de. . . . . . . . .
14265
20. Il a payé, depuis ladite époque de janvier 1791
jusques au mois de mai 1793 , 804$ fr.
Ces 8045 fr. sont réductibles, et valent............... £¡982
5°. Il reste,
36
pour atteindre l’obligation,
y i fr.
Cette somme est rédu ctib le, et vaut.....................
T o t a l de
1110
ce qui est dû au sieur Rixain.............. 2 1 355
46
>v
35
81
497
Sur quoi il a reçu des fermiers
2 fr. ? et il a payé 268 fr,
au notaire, pour frais de l’obligation de l’an 2.
Et d’aprés ce compte nouveau, les arbitres, n’ayant à juger
que l’obligation , condamnent les héritiers Villem ont à payer
cette somme de 2i355 fr. 81 cent. , et néanmoins à déduire
4972 fr. imputables sur les intérêts et sur les 268 fr. payés au
notaire.
Le sieur Rixain interjeta appel de ce jugement ; mais , sur
l ’a p p e l, le jugement arbitral fut confirmé le i pluviôse an 8.
Le 29 ventôse su iva n t, les héritiers de Villem ont firent si
gnifier ces jugemens , et , en se reconnoissant débiteurs de
21
f r . , ils d ir e n t que cette somme étoit compensée et au
delà, i°. avec les
2 fr- re Çus par Rixain; 20. avec 24000 ir.
par lui dûs pour deux années de sa ferme , non c o m p r is e s au
compte ; et lui firent sommation de payer l’excédant.
Néanmoins le sieur Rixain jugea à propos, le 6 n iv ô se an 10 r
de faire aux héritiers Villem ont un c o m m a n d e m e n t d expro
priation. Il* en demandèrent la n u llité, de même que la main
5
355
497
�(5)
levée d’une inscription par lui faite en l’an 7 , de 54200 francs.
Par jugement du tribunal de Riom , du 6 floréal an 13, con
tradictoire seulement avec deux d’entr’e u x , ils furent déboutés
de leur demande.
'
M O Y E N S .
L e sieur Rixain n’en a qu’un s e u l, et il le reproduit sous
toutes les faces possibles : c ’est aussi sa réponse à toutes les
objections.
J’a i, d it-il, une quittance finale du 4 messidor an 2.
Cela est v ra i, ou plutôt cela étoit vrai. Mais il l’a lui-même
annullée en exigeant un nouveau compte.
Sans doute il pouvoit s’en prévaloir ; et quoique ce fût un
acte d’aveuglem ent, né de l'aspérité des temps , il auroit eu
le droit de se prévaloir de son obscurité m êm e, et de réclamer
eCooo fr. , s’il se fût borné à les vouloir à l’échelle.
Mais le désir d’avoir davantage l’a forcé à représenter toutes
ses pièces comptables pour vérifier les époques de tous ses payemens et objets de répétition quelconques : et alors les arbitres,
mentionnant ce qu’ils ont v u , transcrivant le résultat de ses
propres com ptes, ont écrit qu’il 11’avoit payé en total que 62263 fr.
dans tout le temps de sa ferme.
D ’après cela il est aisé^le savoir si les six années de cette ferme
ont été payées. Les arbitres ont très-clairement porté en conqjte
quatre années, et s’ils en avoient porté deux autres, on les trou•yeroit également.
Il faudroit sans difficulté que ces deux années fussent com
prises dans les 8045 francs ou dans les 3691 francs ; mais cela
est impossible. Dans la première somme sont les
oo francs
portés par le jugement arbitral du 7 janvier 179^ : le sieur Rixain
l ’avoue ; il dit avoir payé le surplus.
Quand il l’auroit p a y é , ce ne pouvoit être qu’à compte des
deux années de sa ferme. C a r , quoi qu’il puisse d ire , il faut
36
�(
...
.
,
bien , dans un compte où il porte tout ce qu’il a p a y é , tout
ce qu’il a à répéter , ¿quelque titre que ce soit, qu’on trouve
tout ce qu’il devoit.
O r, on voit que la masse de ses payemens et autres objets,
est composée de trois articles ; et on ne voit sur le total qu’une
seule déduction de 48000 francs pour quatre années de ferm e:
donc deux années sont oubliées.
M ais, dit le sieur R ixain , si les arbitres n’ont pas dit que ces
deux ans sont payés , ils n’ont pas dit non plus qu’ils ne sont
pas payés.
Ce n’est là q u ’ u n jeu de mots ; car un fermier qui devoit six
ans de ferme , et qui porte en compte t o u t ce qu’il a payé en
six ans, tout ce qu’il prétendoit réclam er d’ailleurs, devoit dé
duire les six ans de sa ferme avant de se dire créancier. S ’il
n’en a déduit que quatre, il n’en a payé que quatre ; et par con
séquent c ’est avoir dit suffisamment qu’il en doit deux.
A cette démonstration le sieur Rixain objecte que les arbitres J’
en déduisant les 48000 fra n cs, n’ont parlé que des quatre ans
échus en 1791.
Mais qu’importe l’écliéance, lorsque les deux années suivantes
ne se trouvent pas mentionnées. C a r , encore une fo is , si elles
ne sont pas comprises au com p te, le sieur Rixain les doit.
Le sieur Rixain , qui ne s’est pas dissimulé la nécessité de
retrouver ces deux années, veut les laisser apercevoir 'dans une
prétendue indemnité dont le compte des arbitres 11e parle pas;
et avec raison.
J’a i , d it-il, açquité ces deux années par compensation aveo
les indemnités qui m’étoient dues pour 1791, 1792 et 1793. E t,
pour établir quelques données sur ce moyen , le sieur Rixain
calcule quelques produits des terres de Villem ont et Montrodés.
En un seul mot l’obscurité qu’il a voulu jeter sur cette partie
se dissipe : il devoit iîîooo fr. par an ; qu’il suive son propro
calcul, et il verra qu’il est encore loin d’avoir payé deux an$
par compensation.
�/
7}
Au fait, cette Indemnité n’étoit presque rien. Villemont devoit
beaucoup de c e n s , et le sieur Rixain les a gagnés. En 1791 il
n’a perdu que les banalités s’il y en a v o it, car les autres droits
féodaux n’ont été supprimés qu’en 1792. Il avoit même été
formé contre lu i, en 1793, une demande en indemnité de la
dlrne, fondée sur la loi du 14 avril 1791.
En l’an 2 il a déciaré avoir été payé^de_ l’indemnité pour
Montrodès ; et il est de principe que les déclarations contenues
en un acte annullé subsistent.
A u lieu de prendre tant de peine pour persuader que les
deux années omises sont dans le compte arbitral, sans qu’on
les y ap erçoive, le sieur Rixain n’avoit qu’ une chose à faire ,
c’étoit de reproduire ses acquits de 1791 à 1795. Car il a tout
exhibé aux arbitres , et il est encore nanti de ce qui peut
prouver qu’il a payé. Un galant homme doit toujours être prêt
à revenir à compte.
Forcé d’avouer que le jugement arbitral de l’an 6 est a u
jo u r d ’h u i le seul titre de la ca u se , le sieur Rixain y cherche
encore une objection; il dit aux héritiers de Villemont : Si vous
étiez créanciers, pourquoi vous borniez-vous à demander une
réduction à l’échelle?
Mais ce n’est-là q u u n cercle vicieux pour remonter à l'acte
de l ’an 2. O r, on le répète au sieur Rixain , c ’étoit à lui k
adopter cette restriction ; et s’il a couru le hasard de vouloir
un nouveau compte , il ne peut s’emparer de deux chances ,
et revenir à ce qu’il a détruit.
Quand les arbitres ont lu ses pièces et refait un compte ,
les sieurs de Villem ont ne pouvoient qu’en attendre le résultat,
et n’avoient pas le droit de se mêler à la délibération des ar
bitres, pour prendre des conclusions sur le résultat même de
leur jugement.
Mais aussitôt qu’ils ont vu , par ce jugem ent, que le compte
nouveau ne portoit en compte que quatre ans de ferm e, ils
�C8 )
ont réclamé les deux ans restans, par la signification même du
jugement confirmatif.
Rien n’est donc m ieux établi que leur droit de s’opposer à
une expropriation commencée pro non debito. Il est de prin
cipe qu’après un compte les omissions donnent droit à une ré
clamation postérieure, sans qu’il soit besoin d’attaquer le pre
mier compte qui contient l'omission. ( V . la loi 1re. ff. quæ
sent, sine appell. , et l’article 21 du titre 29 de l’ordonnance
de 1667. )
La compensation s’est opérée de plein droit avec la créance
du sieur Rixain. Son bail est exécutoire contre lu i, et il n’a pas
f a llu f o r m e r u n e d e m a n d e ju diciaire.
Quant au com m andem ent, il est nul en la forme contre la
dame de M ariol, qui n’avoit de domicile de droit que celui de
son m ari, à M ariol, et q u i, assignée à C lerm on t, ne l’a été
à personne ou domicile.
L ’arrêt de cassation invoqué pour éluder cette nullité , ne s’y
applique pas. Un cohéritier, poursuivi seul, ne pouvoit exciper
du droit d’autrui ; et c ’est pour cela que l’expropriation faite
contre lui fut jugée valable. Mais ici on a mis en cause la
dame de Mariol ; et dès-lors elle a droit de se prévaloir des
nullités qui la concernent.
M e. D E L A P C H I E R ,
M°.
G O U R BEYRE,
avocat.
avoué,
<
il'
A R IO M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul i m p r i m e u r de la
Cour d’appel. — Janvier 1806
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Mariol. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
bail
contre-lettre
indemnité pour congés
ferme
assignats
Description
An account of the resource
Précis pour la dame de Mariol, et les sieurs de Vény et de Ribeyre, enfans et héritiers de la dame de Villemont, appelans ; contre le sieur Rixain, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1787-1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0327
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0742
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53775/BCU_Factums_M0327.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Villemont (terre de)
Teix (terre de)
Montrodeix (terre de)
Clermont-Ferrand (63113)
Saint-Genès-Champanelle (63345)
Orcines (63263)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
bail
Contre-lettre
ferme
indemnité pour congés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53774/BCU_Factums_M0326.pdf
b87c237863031fd8c9f10d2276f606cc
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Text
M E M O I R E EN RÉPO N SE ,
POUR
i
C a t h e r i n e M O L I N , et les S .r et d a m e V E N D R I E Z
et B O R N E , i n t i m é s
1
CONTRE
J e a n et. autre J e a n
CIIOUVENC ,
appelans.
Q U E S T I O N S .
i.° L a procédure des appelans a-t-elle été périmée de plein
droit dans le ressort du parlement de Toulouse ?
2.0
S i elle n'est pas périm ée, peu ven t-ils, comme tiers acqué
reurs., repousser l'action des intim és par la prescription de
d ix ans , dans le même parlement ?
3.° S 'il n'y a pas prescription , les appelons sont-ils recevables en ladite qua lité d'acquéreurs d'un cohéritier, à form er
tierce opposition à des jugem ens en dernier ressort, rendus
sur appointem ent, entre leur vendeur et ses autres cohéritiers,
pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession
com m une ?
4.° Thérèse M ol in a-t-elle eu 10 ou 3o ans pour se pourvoir
contre une renonciation surprise en m inorité par des protuteurs,
dans l ’ignorance de ses droits et sans être informée que les testamens de ses père et mère étaient nuls ?
Cette question doit-elle être décidée par une jurisprudence
autre que celle du parlement de Toulouse ?
5 .° Catherine Mol in a-t-elle p erd u , p a r la prescription de 30
A
�c o
ans, le droit de demander le partage, pendant sa cohabitation
dans la maison paternelle ?
6.° L e testament de Catherine Ferrapie , sans signature ,
ou déclaration négative de la testatrice, et sans lecture à ladite
testatrice , est-il valable? Que résulte-t-il pour ou contre sa
validité de ce qu’il est antérieur à la publication de l'ordon
nance de 1735 ?
7.0
L a première substitution q u il c o n tie n t, est-elle Jidéicommissaire ou jid u cia ire ? L a seconde e st-e lle u n e substitution
pupillaire ? Est elle valable? A -t-elle transmis la succession à
Marie Mo lin , dernière appelée ?
8.° L e testament de Pierre Mo/in , qui a simplement légu é
une légitime à ses enfatis puinés , est-il nul pour vice de prétérition ?
T P e l l e S sont les questions importantes et nombreuses qui
divisent les parties et qui ont occupé la Cour pendant plusieurs
audiences. Une expédition infidelle du testament de Catherine
Ferrapie, rapporfée par les Chouvenc , contenait deux expres
sions, dont ils abusaient en faveur de leur cause. La Cour s’est
vue forcée d’ordonner une collation vidimée de la minute de cet
acte; aujourd’hui la nouvelle expédition est rapporiée, et les
intimés se verront enfin en possession de leurs droits successifs,
après avoir plaidé 22 ans, et subi, pour faire juger un simple
partage, quatre degrés de juridiction.
F A I T S .
Tierre TWoîin avait, dit-on, pour frères Marcelin, Biaise , et
Ignace Molin. Toi,is , excepté le dernier , s**>nt inutiles à la
cause; et pour ne pas l’embrouiller, les intimés se c o n t e n t e n t
d’en rappeler les noms , pour passer à la descendance de Pierre,
marié a Catherine Ferrapie. Ils ont eu six enfans.
�C3 )
Pierre Molin , mort en 174)5.
Catherine Ferrapie, morle en 1735.
2.
3.
I
____ !____
Marie Molin.
Marguerite ,
Pierre ,
1 e r m ari,
N .. Chambarliac.
morte s. p.
né le 2 mai
en 1741.
i ? 3r ;
2.c marij
4.
<
^
;
*>
JL
Catherine , J ea n n e ,
intimée.
m. s. p.
Thérèse.
Louis Borne.
I
en I770.
N ... C cjoux.
mort s. p.
Jeanne B o rn e ,
3 .e mari ,
le 3 novemb.
C la u d e -L a m b e rt
Lacroisière.
L ouis Vendviez >
1748.
intim és.
L e 20 mars 17 3 5 , Catherine Ferrapie fit son testament. Elle
légua à ses six enfans leur légitime de droit, à titre d’institution.
.Voici les dispositions et la forme de ce testament:
Catherine FeiTapie institue pour ses héritiers universels Ign ace
M olin , curé de Chambon, son beau-frère, et Pierre Boyer, son
oncle, « à la chargede remettre, quand bon leur semblera, ladite
« hérédité à P ierre, fils de la testatrice, et au cas que ledit Pierre
« Molin vînt à mourir sans pouvoir disposer, ou sans avoir
«
«
«
«
«
«
«
«
a
«
«
recueilli ladite hérédité, elle lui substitue Marie. Ladite testatrice fait ladite institution sans distaclion de quarte et sans
qu’ils soient obligés de rendre aucun com pte des fr u its de
ladite hérédité, et à la charge de faire entretenir et élever ses
enfans__ Fait et récité audit T e n ce , dans la maison d’autre
sieur Pierre Molin, en présence d e .............témoins soussignés.
Ladite testatrice ille de ce enquise et requise............ »
L e 20 mai 1743 , Pierre Molin père, lit son testament : « il
institue pour son héritier Pierre Molin son fils. . . . Il donne
et lègue à ses cinq autres enfans leur légitime de droit;
et attendu le bas âge de son héritier, il prie Ign ace M olin,
curé de Chambon , son frère, et M a rie, sa fille , de régir et
« administrer ses biens , jusqu’à ce que son héritier soit en état
A 2
�U )
« de le faire......... Fait et récité à Tence , maison du testateur»;
Pierre Molin mourut le 21 du même mois de mai 1748. Alors
Ma rie Molin , majeure, et mariée dans la maison paternelle ,
s’empara des deux successions. Ignace Molin était curé de Cham
bón , Pierre Boyer était mort en 1740; et Pierre Molin , appelé
aux deux successions, s’engagea aussitôt qu’il en eut l ’âge. Il
mourut à Lille le 3 novembre 1748, et on fut long-tems dans la
famille à douter de sa mort.
Quelques années après, on trouva l’occasion de marier la plus
jeune sœur, Thérèse Molin, avec le sieur Borne , d’ une province
étrangère, moins capable par conséquent d’avoir l’œil aux aiïaires
de la maison , et par le contrat de maringe du 5 juin 1755 , le
sieur Chambarliac lui constitua 1,900 IV. de dot, en bien expri
mant que c’était pour les successions du père, de la mère, de
la sœur décédée, et même on ajouta celle du frère , quoiqu’on
n’eût pas de nouvelles de la mort. Thérèse Molin, m ineure, re
nonça à toutes successions, et s’obligra de la confirmer et raliJier à sa majorité. On ne s’ est jamais avisé de lui demander cette
ratification. Mais , indépendamment de cela , malgré son éloi
gnement, elle aurait cherché à se pourvoir, sans l’apathie du sieur
Borne son mari, et si encore sa famille, flattée de l’alliance du
sieur Chambarliac, n’eût toujours persuadé que Marie Molin
était l’héritière de ses père et n ère. Çi-nnd le sieur Chambar
liac décéda, elle passa ende secondes noces avec le sieur Dejoux,
puis en de troisièmes, avec le sieur Lambert-Lacroisière, qu’elle
institua héritier universel , et qui a ch e va , a peu de chose p rès,
de dissiper la succession.
Thérèse M olin , veuve, revint habiter près de sa famille, et
ne connut qu’alors l ’étendue du sacrifice qu’on avait extorqué
de son inexpérience. Le 22 janvier 1783, elle assigna Marie Molin
et Lacroisière, son iroisième m a r i , en partage des successions
de sus père, mère, frère et sœurs, pour lui être délaissé sa por
tion aderante.
Après cette demande, elle fit donation de scs biens à la dame
�( 5 )
Vendriez, sa fille , qui intervint. L e procès fut appointé à T en te ,
et le 2 novembre 1784, il intervint sentence qui ordonna le par
tage du chef de Jeanne seulement ; et avant faire droit sur le sur
plus , ordonna une estimation préalable des biens des père et
inère communs.
L es deux parlies interjetèrent appel de celte sentence ; les pro
cédures se conîinuèrent en procès par écrit jusqu’à la révolution.
L e tribunal du district du Pay fut choisi pour connaître de cet
appe!.
Ce tribunal rendit son jugement le 26 janvier 1793, sur pro
ductions respectives, et jugea dans ses motifs :
i.° Que le testament du père était nul par prétention; z.° que
la substitution, portée dans celui de la mère, avait saisi Pierre
Moün de la succe-s'on , et que ledit Molin étant mort après
quatorze ans, les substitutions s’étaient alors éteintes.; 3.° que
la renonciation de Thérèse Molin était n u lle, comme n’étant
dirigée ru profit de personne , comme faite par une mineure ,
ave-, ronvtut on de ratification non effectuée, et comme dirigée
au pi 'fil d’une piolut'ice , et que l’action avait duré trente ans.
En conséquence, ce tribunal ordonna le partage desdites suc
cessions, pour être délaissé à la dame Vendriez sa portion, expli
quée et calculée audit jugement.
]>(■son còlè, Catherine M olin, sortie de la maison paternelle
à la mort de sa sœur, en 1788 , avait assigné Lambert-Lacroisière, son héritier, le 27 novembre delà même année pour venir
à partage, • t lui expédier un cinquième clu chef de son père, et
seulement un douzième, du chef’ de sa mère, parce qu’elle avait
aussi vécu dans !,i croyance , que Marie Molin était héritière
par des testamens qu’elle n’avait jamais vus ; elle demanda éga
lement les successions collatérales.
Une sentence du 17 août 1790 ordonna ce partage , pour être
expédié un douzième des biens de la m ère, un dixième des biens
du père, et dans les mêmes propulsions pour les successions col
latérales.
�,
( 6 )
ueux parties interjetèrent encore appel ; Catherine Molía
alcirs ayant eu connaissance du testament de sa mère, rectifia
ses conclusions, et demanda un seizième du ch ef maternel.
L e Puy était aussi saisi de cet appel qui s’instruisit en
procès par écrit par plusieurs écritures, et il était sur le point
de recevoir sa décision, lorsque fut rendu le jugement ci dessus,
du 26 janvier 1793.
On présume sans peine que Lacroisière, succombant vis-à-vis
Marie - Thérèse Molin , en dernier ressort, n’avait garde de
plaider plus long-tems contre Catherine, devant le même tri
bunal. Il demanda accommodement ; les parties traitèrent , le
19 fév rier 1793 , et comme on le voit , en grande connaissance
de cause.
Lacroisière, par cet acte , dit qu’il adhère au jugement , en
dernier ressort, du 26 ja n v ie r, et consent que des experts fassent
le partage des portions revenant à Thérèze Molin.
Il y consent aussi vis-à-vis Catherine M o lin , mais avec con
vention qu’elle ne réclamera les jouissances que depuis 1788.
II est convenu que les experts expédieront d’abord la maison
qu’il occupe , un domaine et un jardin, et déduiront les créances
qu’ila’acquittées envers Jean-Antoine M olin, à la décharge de tous.
É t comme évidemment ces biens ne suffisaient pas, il apprend
qu’il a vendu aux nommés Chouuenc , Graisse, C u o q , B o y e r ,
B eléa g e , et laisse à Catherine et Thérèse M olin , à se pourvoir
contre eux , ainsi qu’elles aviseront.
E n fin , celles-ci font le sacrifice de tous leurs dépens, tant des
causes principales que d’appel.
L e 26 février 179^, les intimés signifient à ces tiers acquéreurs,
uon-seuleinent ce traité, mais encore le jugement du 26 janvier,
pour qu’ils l’attaquent s’ils s’y croient fondés.
L e 11 avril, ils les assignent tous en désistement et jugement
commun; la plupart acquiescent à la demaude. L e moyen des
Chouvcncn’était pas alors d’attaquer le jugement du 26 janvier
1790 , mais de dire qu’ils avaient des lettres de ratification.
�^( 7 )
L e 19 prairial an 2 , un jugement ordonne le désistement en
expliquant que les intimés épuiseront, 1 les biens libres, 2.°ceux
abandonnés par les acquéreurs , qui ont acquiesces avant d ’en
venir aux Chouvenc. Ils sont condamnés à rapporter les jouis
sances , seulement depuis la demandé comme acquéreurs do
bonne foi.
Depuis cette époque le tems de la pérémption s’accomplit : ce
n’est que le 9 vendémiaire an 8, que les Chouvenc
l’ex
ploit de l’an 4 à Catherine IVlolin seule, pour assister en la cause.
L;; 16 g e n r r n a l an 9 , les i nt i mé s ont a ss i g n é les C h o u v e n c en
la c o u r , p o u r se v o i r d ém e t t r e d e l e u r a p p e l .
1 ..
C ’est en la cour , seuhment pour la première fois , que les
Chouvencont imaginé d ’attaquer lejugement du 26 janvier 1793,
par tierce opposition. Lt ui^ résistance soutenue est fondée sur
l e u r prétendue bonne foi : cependant il s ont acquis d’une’. cohé
ritière qui a v a i t une sœur dans la m a i s o n ; ils ont fait plus, ils lui
ont payé le prix de la vente, quand elle était séparée de biens.
M O Y E N S .
Si, quand les intimés ont plaidé avec le sieur Lar'roisière, ils
avaient'éu le moindre'soupçon de la Vente laileaux Chouvenc,
le même procès aurait tout terminé: et certts, en voyant toute
la résistance du sieur Lacroisière , et combien le tribunal du Pu y
a approfondi les questions de ce proc<'-, ¡1 est aisé de voir que les
moyens des Chouvenc n’auraient rien c hangé à sa décision. Quand
ils ont été appelés devant les tribunaux de la Hante-Loire et de
L ’Ardêche, l’idée 11e leur est pas même venue d’attaquer le ju
gement du 26 janvier 179.3 , et de faire rejuger un procès qui
leur était étranger , et dont l’issue eût indubitablement été la
même; mais à R io m , une diversité, ou plutôt une innovation
de jurisprudence a changé leur plan. Les Chouvenc veulent au
jourd’hui faire tout remettre en question; mais avant d’aborder
le fonds , ils sont arrêtés par des questions préalables qu’il
»’agit d’examiner.
�T
P R E M I È R E
Q UE S T I O N.
P--
i'VV. '■ L a procédure des appelons est-elle périm ée?
-?ï. ;
v.
.
„
Jp.i 'P.i;opcrandurn et l'ordonnance de Roussillon veulent
que tous les procès'soient promptement jugés ou entretenus par
des:procédures, sinon l’instance est déclarée périe.
u
L e parlement de Paris avait modifié ces lois par un arrêt de
règlement! de 1692 , qui voulait que la péremption n’eût lieu
qu’après; une ¡demande ; mais cet arrêt n’a eu d’efïet que daîîs son
ressort. Au parlement de Toulouse, au contraire, i’ordonnance
de.Iloussillon était suivie à la rigueur; la question de savoir si la
procédure avait été entretenue sans discontimmtion , était môme
devenue, un formulaire dans le dispositif des sentences; la pé
remption y a toujours eu lieu de plein droit, et le juge la suppléait
si on ne la demandait pas.
Cette jurisprudence a dû se maintenir, et s’est maintenue en
effet en la Cour. Quand des questions de péremption se sont pré
sentées pour l'ancien resâôrt de Toulouse, la Cour a jugé, notam
ment les 18 pluviôse an.t i,et 12 nivps.e an 12, que-la péremption
avait eu lieu de plein droit, même pendant la révolution , et la
suppression des avoues.
On objecte que les intimés ont couvert la péremption en anti
cipant le 16 germinal an 9.
. Mais i.° cet exploit assigne les.Chouvenc pour se voir démettre
de leur appel, et cette e x p r e s s i o n générale et indéterminée com
prenait toutes les voies légales qui pouvaient conduire à cette
démission d’appel ; il serait donc bizarre de dire que celuMà ap
prouve un a p p el, qui assigne l’appelant aux fins de s’en voir
démettre. Il faut bijen que la péremption même soit'prononcée
en justice, et personne n’osera exiger que celui qui la prétend
acquise, soit obligé de s’en tenir à ce moyen seul ; car en Cour
d’appel il n’y a pas d’exceptions sur lesquelles il faut statuer préa
lablement , comme l’exige, en première instance, l’ordonnance
�(9)
de 1667.. On sait assez qu’il faut, en Cour souveraine, proposer
tons ses moyens à la fois.
2.0
Cette question a été discutée par M .r le procureur géné
ral Merlin, en ses nouvelles questions de droit , v.° a p p e l, §. 9,
avec sa profondeur ordinaire, et il décide que d’après le système
de l’ancienne et de la nouvelle législation, la péremption est un
moyen de droit public tendant à l’abréviation des parties , et
qui ne se couvre pas. Les ordonnances , dit-il, le veulent ainsi,
les anciens arrêts y sont conformes, et la loi du 14 octobre 1790,
qui s’est occupée de la procédure des justices de paix, dit qu’a
près quatre m ois, Vinstance sera périmée de droit et Vaction
éteinte ; donc, a jou te-t-il, le juge doit déclarer la péremption
acquise, lors même que la partie intéressée n’y conclurait pas.
M .r M erlin, en sa discussion, ne s’occupe pas, comme 011
pourrait le croire , des péremptions de quatre mois, qu’il ne cite'
que pour compai'aison. L ’ordonnance de Houssillon lui semble
aussi claire, toutes instances discontinuées pendant trois ans
sont éteintes et péries. Avant son arrêt de 1692 , le parlement
de Paris le jugeait ainsi. On trouve deux arrêts précis des 27
juillet 1604, et 27 août 1610. Menelet et Bouchel enseignent les
mêmes principes.
« L a péremption, dit B o u c h e l, une fois acquise, ne se couvre
« point par une procédure volontaire , depuis faite en l’instance
« péiie, ensorte que nonobstant qiton ait repris celte instance].,
« on peut faire juger la péremption...............L ’ordonnance de
« Houssillon porte que toutes instances sont éteintes et péries.
« C est un droit public auquel on ne peut deroger».
Par une fatalité attachée aux lois humaines , les auteurs con
temporains les trouvent ordinairement très-décisives et sur-tout
très - respectables ; mais à la longue ce respect s’aflaiblit singu
lièrement. De là vient que les auteurs du i6 .e siècle voyaient, dans
l ’ordonnance de 149^, ce que nous ne voulons pas y voir; tandis
que par une inconséquence bizarre, nous trouvons la loi du 14
octobre très-impérative, quoique ces deux lois disent positive
ment la môme chose.
�C 10 )
A u reste, il s’agit ici de suivre la jurisprudence du parlement
de Toulouse; la péremption y était jugée de plein droit t et c’est
dire assez qu’elle y était un moyen de droit public.
Les Chouvenc ont cru trouver une interruption dans le chan
gement de personnes; mais c’est un rêve de dire que Jeanne
Borne n’ait pas été en cause avant l’an 8; elle était en qüalilé dans
le jugement de 1793. Quant à Chouvenc fils , il lui a plu d’inter
venir comme donataire, sur l’appel, mais son père est toujours
en cause, et s’il a laissé accomplir la péremption, elle n’en est
pas moins bien acquise contre le légitime contradicteur.
D E U X I È M E
QUES TI ON.
L e s appelons , tiers acquéreurs , peuvent-ils invoquer, à T ou
lo u se, la prescription de d ix a n s?
Les Chouvenc font des efforts incroyables pour l’établir, et
pour forcer à être de leur avis les auteurs même du parlement
de Toulouse qui, sans exception, sont d’un avis contraire.
Cependant les Chouvenc débutent par convenir (pag. 9 de leur
m ém oire), que Marie M olin ne pouvait pas vendre la portion
de ses cohéritiers , qu’ il est c e r t a i n que ces cohéritiers avaient
TRENTE ANS UTlEES pour réclamer contre toute v e n t e f a it e par
l'u n d'eux.
M a is , continuent-ils, la question concerne l acquéreur ; on
leur demandera d’abord c o m m e n t il est possible d’avoir trente
ans pour se pourvoir contre les ventes, et de 11e pas les avoir
contre Vacquéreur ; comme ce serait inexplicable , il vaut mieux:
dire que les Chouvenc ont été forcés de reconnaître l ’évidence
du principe.
A u reste , en examinant la question en elle-m êm e, ce n’est
pas dans le Code civil qu’il faut la chercher, car dans une grande
paille de ses articles, et notamment sur les prescriptions, il a
adopté tantôt le pur droit romain, et tantôt la Coutume de Paris.
Mais pour ne pas faire de confusion à l’avenir, et respecter le
�C I* )
passé, l ’art. 2281 lermine le Code par dire que les prescriptions
commencées seront réglées conformément aux lois anciennes.
Il faut donc chercher ailleurs que dans le Code, s’il y a lieu
à la prescription de dix ans; et même si nous trouvions de l’obs
curité dans les lois romaines qui régissaient les parties , il fau
drait dire avec la Cour de cassation que Yusage est l ’interprète
le plus sûr des l o i s , et s’en référer à ce qui a été jugé de tout
tems sur ce point par le parlement de Toulouse.
Mais la loi n’est nullement obscure, et si on trouve au
Code une loi qui établit la prescription de dix ans en faveur
du tiers possesseur, on voit aussitôt après l’authentique malce
fid e i qui l’ explique et la commente, en déclarant que les dix
ans n’ont lieu, que quand le vendeur a été de bonne foi. Malce
ji d e i possessore a lién a n te, cessât longi temporis prescriptio ,
si verus dominus ignoret ju s suum et alienationem factam .
Si ce commentaire de la loi elle-même ne paraît pas assez clair,
si comme les Chouvenc le disent, il y avait moyen d’en torturer
le sens en présumant que les intimés ont connu la vente, nous
trouverons la suite de l’authentique dans la novelle d’où elle est
tirée, et il sera très-clair alors que ce 11’est que la bonne foi du
vendeur qu’il faut considérer. S i autem ignorât verus alienatarum rerum dom inus , non aliter hune excludi nisi per triennalem prescriptionem : non valente dicere eo qui res hoc modo
possidet quia ipse bond fid e p ossid et , quandb ipse à mald jid e
possidente hoc accepit. Novell. 119, ch. 7.
Puisque la loi est si claire et si positive, il faudrait donc s’é
tonner que le parlement de Paris jugciit pour la prescription de
dix ans, en faveur de l’acquéreur, si nous ne savions que la Cou
tume de Paris en a une disposition expresse, et que dans les moin
dres doutes, elle était la règle pour ce parlement.
Quant au parlement de Toulouse, tous les auteurs de son res
sort attestent, sans exception, que la prescription de dix ans 11’y
est admise que pour l’hypothèque, et que le tiers possesseur ne
prescrit que par trente ans.
�( 12\
Eoutaric , page 182 , a , sur ce su jet, une discussion très-ap
profondie. Serres, page
annonce la seule prescription de
trenfe ans comme un principe n'on contesté. Graverol et Larocheflavin, p. 5 io; Catelan , p. 5oy, disent « que le parlement
« de Toulouse n ’a pas reçu cette usucapion de dix ans , que
« Juslinien même avait transformée en prescription de trente
« ans; qu’ainsi le tiers acquéreur purge l’action hypothécaire
« par dix ans , et non le droit de propriété pour lequel il faut
« trente ans ».
Furgole , en son traité des testamens , tom. 3 , pag- 4*7? s’explique ainsi : « Au parlement de Toulouse , on ne connaît d’autre
« prescription pour l’acquisition ou la perte des droits person« nels ou réels que celle de trente ans. Ainsi un héritier pourra
« demander pendant trente ans, même à celui qui possède avec
« uii titre, lequel 11’est pas capable de lui attribuer la propriété,
« comme ayant été consenti à non domino.
Ces principes sont élémentaires dans les parlemens de T o u
louse, A ix , Bordeaux et Grenoble. On peut consulter là dessus
encore Catelan , livre 7 , chap. 21 ; Lapeyrère , lettre P , n.° 83 ;
Montvalon , page i o 5 ; Decormis , tom. 2 , col. 589 ; Bretonier ,
v.° prescription ; M .p M erlin, v.° hypothèque, §. i 3 , et la
ïnaximfe est tellement devenue triviale dans les parlemens du
droit écrit, que suivant Dupérier , » la prescription de dix ans,
« en ce cas, n’est plus maintenant que pour les écoles ».
Cela peut paraître étrange dans un parlement qui ne s’y con
formait pas ; le docte Domat y avait réfléchi lui-même , et ne
s’en étonnait pas : « Les lois, disait-il, qui marquent le terus des
« prescriptions ne sont (pie des lois arbitraires, car la nature ne
«
«
«
«
k
fixe pas quel tems il faut pour prescrire. . . . Il se règle dilféremment en diverses provinces , et il y a même de celles qui
se régissent par le droit écrit où l’on n’observe pas les divers
t e m s de prescription du droit romain. Il y en a ou elles ont été
réduites à une seule prescription de trente ans. »
Nous verrons sur la 4.« question , que la Cour de cassation a
�( i 3 )
consacré, par trois arrêts, la nécessité de suivre la jurisprudence
du parlement de T ou lou se, et expressément sur la matière des
prescriptions.
Concluons dnnc que les Chouvenc ne peuvent invoquer la pres
cription de dix a n s , dans un ressort où on ne citerait pas un seul
arrêt ou jugement q u i, en semblable Ctis , l ’ait jamais admise.
Dans leur propre système , il faudrait les supposer de bonne fo i,
et il est impossible qu’ils le fussent.
L a loi, au reste, n’est nullement en leur faveur, et ce n’est
que surabondamment qu’il y a lieu d’invoquer l ’invariabilité
de la jurisprudence.
T R O I S I È M E
QUESTION.
L a tierce opposition des appelans est-elle receuable ?
« Pour être reçu tiers opposant, disent les auteurs, il nesuiTit
« pas d’avoir intérêt de l’attaquer, il faut avoir été partie
«
saire dans le
néces-
j rocès jugé. »
Les Chouvenc étaient-ils donc parties nécessaires dans le
procès d’en Ire les intimés et le sieur Lacroisière, de quoi s’agissnit-il ? d’un partage.
Mais un partage de succession ne pouvait être fait qu’entre
cohéritiers, A c tio ■familiœ erciscundæ salis hœredibus com -
p etit.
Les questions d’un partage sont tellement élrangères à tous
autres, que quand un tiers achète la portion d’un cohéritier ,
les autres peuvent l’expulser en le remboursant , pour l’empê
cher de pénétrer les secrets de la famille. Aussi en droit, l’ac
tion en partage 681-0116”, par sa seule définition , exclusive de
toute admission étrangère : A c tio fa m iliœ erciscundæ est actio
civilis quâ cohœredes
dividundâ.
in te r s£
ag a n t de commun i hœreditate
Jusque-là un acquéreur n’est pas partie nécessaire dans un
partage ; il a suivi la foi de son vendeur, et quand la novelle
119 le répute acquéreur de mauvaise f o i , par cela seul que ac-
�C «4 )
cepit à viald Jide possidente, il est bien plus difficile encore de
supposer que deux cohéritiers ont nullement et inutilement
procédé pour avoir omis d’appeler un tiers possesseur, quand
toutes les affaires de la maison leur étaient inconnues.
Les Chouvenc n’ont pas dû être assignés nécessairement•
L ’ordonnance de 1667 d’ailleurs ne donne pas la faculté de
tierce opposition à ceux qui ont été condamnés par eux-mêmes,
ou leurs ayant-cause.
Or comment expliquer l’étendue de ce mot ayant c a u s e , ce
sont, disent les auteurs, ceux qui représentent le condamné à
titre universel ou à titre singulier, pour la chose litigieuse. Ainsi,
dit R o dier, un créancier, 1111 acquéreur sont des ayant cause.
Nons allons voir encore que le Droit romain les place sur la
même ligne.
A u 1F. des appels et au code des évictions , les lois entendent
si bien que le créancier et l’acquéreur soient des ayant cause du
propriétaire ou vendeur, et qu’il a pu être condamné hors leur
présence, qu’elles lui acccordent ledroitd’interjeteri/^tf/, comme
condamnés eux-mêmes en sa personne
Si emptor de proprietate victus e s t , eo cessan te, auctor ejus
appellare polerit ,• item si auctor egeiit et victus s i t , non est
deneganda emptori appellandi facultas. . . . I d q u e ità constitulinn est in persond creditoris. L . 4. ff. de appellat.
L ’acquéreur et le créancier sont donc identifiés avec le procès
du vendeur ; et quand c e l u i - c i a lui-meme interjeté a p p el, la loi,
toujours juste , permet encore à l’acquéreur d’intervenir au
procès, si le vendeur paraissait suspect dans les moyens qu’il
propose. Quin e lia m si auctor ap pellaverit, deindè in causcv
dejensione suspectus visu sest, penndè de/ensio causæ ctnylori
comniittcnda est, atijue si ipse appellasset. L . ead.
L e Code civil s’est conformé à ces principes, sur-tout en ma
tière de partage, et bien loin de vouloir que des cohéritiers soient
passibles d’aucune résistance étrangère , après le partage con
sommé , il n’admet les créanciers qu’à intervenirà leurs frais ,
�( i5 )
sans pouvoir ensuite attaquer le partage autrement que s’il y avait
été statué au préjudic e d’une opposition par eux formée (art. 08a).
31 y 3 plus ; car si , par l’eil'et du partage , un seul cohéritier
avait obtenu tout l’immeuble commun , à titre de licitation ,
envain tous acquéreurs ou créanciers des autres cosuccesibles
tenteraient de l’évincer , l ’art 883 lui répondrait « que chaque
u cohéritier est censé avoir succédés«// et immédiatement à tous
« les effets compris en son lo t , ou à lui échus par licitation. »
Ainsi Thérèse et Catherine Molin o n t, dans la portion qui
leur est attribuée par un jugement en dernier ressort, une pro
priété qui leur est transmise ex causa antiquâ, et qui est réputée
leur appartenir depuis l'ouverture des successions. Ainsi les
Chouvenc, qui n’étaient pas parties nécessaires au procès relatif
au partage, mais qui pouvaient seulement y intervenir, trouvent
aujourd’hui un mur d’airain dans la chose ju gée, et ne peuvent
plus faire juger avec eux seuls une demande en partage , de
successions qui leur sont étrangères.
Si, après s’être pénétré de toute la puissance de ces principes,
il fallait en venir à la jurisprudence, les arrêts abondent en faveur
des intimées, et on n’en citerait pas un seul qui fût favorable
aux Chouvenc.
Parmi le grand nombre d ’arrêts qui se trouvent dans tous les
livres, nous ne puiserons que dans des sources indubitables ,
pour qu’on ne puisse pas même présumer que l’espèce de ladécicision n’a pas bien été saisie.
i.° M .r Cochi» , en ses notes alphabétiques, tom. 5, pag,
dit ; « jugé par anêt du 3 i mai 1726, en faveur des sieur et dame
« Massol contre M .r le président Amelot et le comte de Tavanes,
« que le tiers détenteur , assigné en déclaration d’hypothèque
« par ceux qui ont obtenu des arrêts contradictoires contre son
« vendeur , ne peut y former tierce opposition, quoique son
« acquisition y soit antérieure. »
z.° M .r Merlin , au répertoire, v.° tierce opposition , cite
deux arrêts. Par le premier, « la dame de Couilans était en procès
�( 16 )!
avec un seigneur voisin pour mouvance de fief. . elle vendit
sa terre. . . . on continua de plaider avec elle. . . . elle perdit
son procès par arrêt de 1728 . . . son acquéreur ayant réclamé
des droits seigneuriaux, l’autre seigneur lui opposa cet arrêt. . .
l’acquéreur y foîrna tierce opposition , on lui répondit qu’il
devait s’imputer de n’être pris intervenu : par arrêt du 3 i
mai 1742, il fut déclaré non recevable dans sa tierceopposition.»
Par le 2.° arrêt, « le marquis de Lusignan vendit, en 1720 ,
« des terres au sieur Dauriac. . . . Les héritiers de la dame de
« Monriquet firent, en 1727, confirmer , sur a p p el, une sentence
« de 1718 , contre le marquis de Lusignan seul. M .r Dauriac
« soutint qu’on aurait dû l’appeler, et forma tierce opposition....
« On lui répondit qu’il devait intervenir. . . . qu’il était censé
« avoir été partie dans l’arrêt par son vendeur , qu’en cette
«
«
«
«
«
«
«
« partie il était l ’ayant cause du marquis de Lusignan. Par arrêt
« du 6 septembre 1750 , il fut déclaré non recevable. »
3 .° L e B u lletin officiel de cassation rapporte un arrêt du 12
fructidor an g , dans lequel , pendant un bail à ferme , de
forges, moyennant 122,400 f. , le s .r Forestier se fit envoyer en
possession de ces forges, par jugement en dernier ressort et par
défaut du 3 janvier 1792. . . Godet, créancier, forma tierce oppo
sition , et dit que cette dépossession était le fruit d’une collusion.
Néanmoins l’arrêt, « vu les art. 5 et 11 du titre 27 de l’ordon« nance de 1667, et l’art. i . er du titre 35. . . . Attendu que la
« reserve du droit des tierces personnes, ne concerne que celles
« qui n’ont pas été parties appelées ni représentées.. .. que le
« sieur Godet , comme créancier de Lessart , était à cet égard.
« son ayant cause. . . . que Lessart a été a p p elé ., . . que Godet,
« en qualité de son ayant cause , n’aurait pu être r e c e v a b l e à
« attaquer ce jugement, qu’autant qu’il eût été justifié que Les
te §art a u r a i t été lui-même admissible à se pourvoir. . . . q u e les
« juges de C a n , en admettant la tierce opposition du cit. G odet,
« ont violé l ’art. 5 de l ’ordonnance concernant l'autorité de la
« Chosç ju g é e , et ont contrevenu formellement à l’art. i . er du
titre
�(
«7
)
<< titre 35 , qui ne permet de rétracter, autrement quepar requête
« c iv ile , les jugemens rendus en dernier ressort , avec ceux
« qui y ont été parties, ou leurs ayant cause.................. Casse
« et annulle etc. »
Voilà donc la pleine confirmation de la loi 4 fï. de appellationibus et du code civil. L ’acquéreur ou le créancier peuvent
intervenir s’ils suspectent ; ils peuvent même attaquer la chose
jugée, par la voie de l’appel, aux risques et périls du vendeur ,
si le jugement est en premier ressort; par la requête civile , s’il
est en dernier ressort.
Tout cela encore ne serait pas accordé contre un partage , s’il
n’y avait eu fraude évidente. Aucuns de ces arrêts 11e sont dans
l’espèce d’ un procès de succession. S olis hæredibus competit.
D eu x autres moyens résistent à l’admission de la tierce oppo
sition des appelans. i°. Les tiei'ces personnes ne sont admises in
définiment à s’opposer, d’après l ’ordonnance, que par la raison
bien naturelle qu’ils ne connaissent pas le jugement. Mais il a
été signifié aux Chouvenc en 1793; et ils n’ont formé tierce op
position qu’après dix ans. 2°. Dans les circonstances d elà cause,
c’était de leur part une action principale, et ils devaient épuiser
les voies de conciliation.
Les Chouvenc objectent qu’ils ignoraient le procès. Cepen
dant ils veulent que les intimés aient connu leur vente, bien plus
occulte sans doute qu’un procès , qui a duré depuis 1783 à 1793,
dans une petite commune. Quand ils voyaient Catherine Molin
dans la maison paternelle, pouvaient-ils bien acheter de bonne
foi sans sa participation? quand ils l’en ont vu sortir; quand
Thérèse est revenue de l’Ardèche dans son pays natal, n’ont-ils
pas dû présumer qu’elles allaient intenter un procès, ont-ils pu
se défendre de l ’inquiétude naturelle à celui qui a acquis une
chose indivise, et qui sur-tout en a payé le prix capital à une
femme séparée de biens.
A u reste, s’il y a de l’inconvénient pour un acquéreur d’être
cqjndamné sans être en cause, n’y en aurait-il pas un plus grand
C
\
�( 18}
encore, d’exiger en règle génén e , que 'ont cohéritier dût sa
voir s’il y a des acquéreurs, avant derechercli r ses dro‘ts, c’està-dire lut tenu de connaître les forces ue iu succession , lors
qu’au contraire il a le droit de les puiser dans un inventaire, ou
dans une preuve de commune renommée.
Si les acquéreurs étaient parties nécessaires dans une action de
partage , serait-ce donc pour en discuter toutes les questions et
*ous lés actes de la famille? Une telle prétention résiste à toutes
Jes notions reçues ?
»
!
Q U A T R I È M E
QUESTION.
Thérèse M ulin avait-elle d ix ans ou trente ans pour se pour
voir contre sa renonciation ?
Cette question doit-elle être décidée par une jurisprudence
autre que celle du parlement de Toulouse ?
L a nécessité de discuter ces deux points ne marque que plus
fortement tout le danger qu’il y aurait d’admettre les Chouvenc
à pénétrer, par une voie d’intrusion, dans une famille étrangère,
pour dire à des cohéritiers : vous avez péniblement obtenu un
règlement de vos droits, on. a ajinullé deux testamens: J e m ’y
o p p ose; je veux faire rejuger tout cela; je veux scruter vos
testamens, vos.contrats de mariage, tout ce qui s est passe dans
votre maison depuis i y 35 jusqu’en 179^' ^ os cohéritiers n’y
seront pas même appelés, car il y a chose jugee avec eux , et
c’ est rr.oi seul qui veux faire régler, avec vous tous , vos droits
successifs, je suis à présent, dans la succession de vos ancêtres,
la seule partie légitime.
Si ce s y s t è m e des Chouvenc, qui cependant est toute la base
c’u procès a c tu e l, ne révolte pas au premier aperçu ; s’il faut
trouver en eux le seul légitim e contradicteur, voyons donc par
quelle jurisprudence la chose ju g ee et remise en litige doit être
rejugee .
Thérèse Molin s’était pourvue en 1783, contre une renoncia-
�C T9 )
tion de 1755. Elle y a été recevable, parce que dans tout le par
lement de Toulouse , et pendant plusieurs siècles , on n’a pas un
seul exemple que les actions en nullité aient été prescriptibles par
moins de 3o ans. Nous avons vu sur la 2.e question que toutes les
actions y étaient réglées à celte durée, à la seule exception de
l’açtion hypothécaire.
Les Chouvenc ayant leur pi’ocès en cette C o u r, ont été séduits
par une innovation de jurisprudence , qui n’a même pris quelque
consistance que depuis le Code civil et par induction de l’un de
ses articles; jusques là, la Cour d’appel ne s’était pas prononcée^
et on trouverait même dans l’un deses arrêts que les anciens prin
cipes en celte matière n’étaient pas oubliés.
Mais quand cela serait autrement,. 11’est-ce pas une folie des
Chouvenc de penser que la Cour d’appel, par un nivellement
désastreux, ramènera à sa jurisprudence, même la.chose ju g é e,
même des questions nées en iy 83 , dans un parlement étranger,
et à une époque où la Cour d’appel aurait indubitablement jugé
comme lui. *
Qui donc ne verrait pas le danger incalculable qui en serait la
suite, et non-seulement dans le cas de la chose déjà ju gée, mais
encore quand elle serait pleinement en litige? Soumettre brus
quement un vaste pays à une jurisprudence qui jusqu’alors lui
était inconnue, serait sans doute porter le trouble dans des
familles, dérouter tous les gens d’affaires qui n’auraient plus désor
mais que des conseils vagues à donner aux autres, et une marche
incertaine à tenir pour eux mêmes.
Les lois ne sont pas un ordre donné au peuple ; elles sont
réputées être émanées de lu i, par le pouvoir que lege regid
il en a donné au prince. En les exécutant, il les explique, et la
manière d’expliquer les lois par l’usage , dit V in n iu s ,
d’après un auteur latin, vaut mieux que ce qu’on lit dans la loi
elle-même. P lu s valcre leges quœ moribus comprobalce su tit,
qïiam quœ scripto con stan t, vérité biçn plus marquée encore
par la maxime si connue, que la jurisdrudence est le meilleur
C a
�I
(
20
)
interprète des lois. Consuetudo est legum optima interpres.
L a jurisprudence en effet qui n’est pas seulement un mode de
juger, mais d’après la définition de Vinnius , JustitL v habitus
praclicus , n’a pas cessé d’être une espèce de législation impcrative, depuis que les anciens ressorts des Cours sont confondus.
Quand Rome n’avait pour règle que la loi des 12 tables, les dé
cisions des jurisconsultes responsa prudentum fixaient la ma
nière de les interpréter, et cette jurisprudence devint une législa
tion additionnelle; et lorsque des Proconsuls et des Préfets furent
envoyés dans les provinces, il leur était prescrit de soumettre les lois
à la jurisprudence et de respecter les usages. Præses provinciœ ,
probalis bis (/i/æ in oppido, frequenter in eodem controversice
gen ere, servata s u n t, causé cognild statuit. L . 1. cod. quce s.
long. cons.
L a Cour d’appel donne tous les jours cet exemple, en décla
rant dans ses arrêts qu’elle est déterminée par la jurisprudence
du parlement de Toulouse.
L a Cour de cassation que l’on pourrait croire, par le but de
son institution , plus attachée à la lettre de la loi qu’aux diverses
jurisprudences, s’est souvent prononcée de la manière la plus for*
melle sur la question qui nous occupe.
« Considérant ( por-îe un i . er arrêt du 2 messidor an 11 ) , que
« les dispositions du droit romain ne font loi dans les pays même
« qu’elles régissent, que dans les points et selon le sens qui ont
«< été adoptés par la jurisprudence ; qu’il est constant que, par
« une longue suite d’arrêts semblables, le parlement de Tou« louse a jugé., etc.» ( S ir e y , page 809).
' 2.0 Dans une autre cause, du 5 floréal an 12 , la Cour de cas«
saiion a dit: « Considérant que quoique en générai on puisse par
v
«
*
«
•
«
le droit romain acquérir les servitudes par 10 ans entre présens, et 20 ans enlre absens ; cependant, d'après la jurisprudence du parlement de Toulouse constatée par divers arrêls,
les servitudes discontinues ne pouvaient s’acquérir que par la
possession immémoriale , et que c'est ainsi q u 'il a entendu la
lo i t etc. casse et aimulle, etc. *~^Lullctin, u.° 52).
�(
21
)
3.° Un arrêt du 2.1 du même mois a jugé de même, « que la
« jurisprudence des arrêts rendus par une Cour souveraine, non
« étrangère au pouvoir législatif, pouvait être considérée comme
« fixant le sens des dispositions législatives. » ( Sirey, p. 267).
Si donc la Cour admet les Chouvenc à discuter les questions
qui ont été agitées au Puy avec Lacroisière, elle ne les jugera
évidemment que par la jurisprudence du parlement de Toulouse.
Thérèse Molin a renoncé en 1755, cela est vrai; mais, 1.« elle
était mineure , et la convention porte qu’elle sera tenue de con
firm er et ratifier à sa majorité. Elle n’en à rien fait. Il n’y a doue
pas de partage final là où il y a lieu de le confirmer en majorité;
ce n’est jamais qu’une mesure provisionnelle.
2.0 On fit renoncer Thérèse Molin à tous droits et supplément.
Il est évident qu’on lui fit entendre en minorité qu’elle n’avait
qu’une légitime de rigueur. Donc on la trompait. Sa renoncia
tion d’ailleurs n’est dirigée au profit de personne.
3 .° Si on suppose qu’elle a approuvé lestestamens, une appro
bation tacite ne suffisait pas; car il fallait les connaître. Celui-là
seul prescrit le droit de réclamer contre u n e destination de légi
time , qui agnovit ju d iciu m defuncti. Tels sont les principes
invariables comme la Cour l’a
souvent
jugé, et notamment les
21 thermidor an 8, et 4 pluviôse an 10.
4.0 L e testament de 1705 a été e x p é d i é par le notaire, avec
des expressions qui en changeaient le sens. C ’était donc induire en
erreur les parties intéressées. T h é r è s e Molin pouvait croire Marie
Molin substituée, puisque la condition du décès de Pierre, sans
avoir rem is, était remplie , tandis q u e celle de son décès, sans
avoir re cu e illiy ne l’était pas. O r, non videnlur qui errant consentire , et la prescription ne court que du jour de la découverte
de la vérité.
5 .° Thérèse Molin i née en 1733, avait deux ans au décès de sa
mère , et dix ans au décès de son père en 1748. Marie Molin
alors avait vingt-cinq ans ; car elle était née au mois de lévrier
�c 22} .
1718. L e père l ’avait chargée de régir et administrer conjoinletement avec Ignace Molin, curé de Chambon; et les Chouvenc
qui connaissent plus d'actes de la famille que les intimés n’en ont
jamais connus, nous apprennent que ledit Ignace Molin parle
dans son testament de ses droits légitimaires sur les biens de ses
père et m ère, dont jo u issa it Marie M olin,
L a voilà donc évidemment protutrice , ou au moins compta
ble depuis 1743, envers une sœur de dix ans, qui naturellement
ne pouvait se mêler des affaires de la maison. L e frère n’avait
que douze ans, et s’absenta quand il put s’enrôler. L a chance
était donc bien inégale, lorsqu’il fut traité en 17^5 , entre Marie
Molin qui, pendant douze ans, avait connu toutes les forces de
lç succession et le vice des testarnens, et Thérèse Molin qui
ignorait tout.
. O r, le parlement de Toulouse n ’a jamais hésité d’admettre en
pareil cas le renonçant non visis tahu lis, à se pourvoir pen
dant trente ansl Q u ’on consulte May'nard , liv. 2 , chap. 99 et
100 ; D olive, liv. 4, chàp. 16; Càtelan, liv. 8 ; Brefonnier, v.°
restitution ; ou plutôt qu’on parcoure tous les. auteurs de ce
parlement, ou ceux qui mentionnent su jurisprudence , on ne
trouvera nulle part que l’art. 134 de l’ordonnance de 1639 ait
été jamais appliqué à cette espèce.
L e parlement de Paris, après l ’ordonnance de i539 , jugea
long-tcms , comme le p a r l e m e n t de .Toulouse a toujours ]uge
Les auteurs du tems môme de cette ordonnance , notamment
M .f D u v a l, de rebus dubiis , enseignaient qu’il n’y a contre les
actions on nullité que l ’action trentenaire. Quarante ans après
lo parlement de Paris changea sa jurisprudence', mais enfin il la
c h a n g e a do nouveau après l ’ordonnance dé 1667; et il a inva
riablement jugé depuis que l’art. 184 de l’ordonnance de i5o9
ne s ’ a p p l i q u a i t qu’aux actions rescisoircs.
Cette j u r i s p r u d e n c e c o n s t a n t e s ’est m a i n t e n u e j u s q u au Code
civil. O n a v u e n c o r e , dans les di s cus s ion s s u r c e C o d e , les efforts
des sections r é un i ç s de la Cour d ’a p p e l de P a r i s , p o u r faire m a i n -
�C *3 )
tenir l ’action de trente ans, et on n’y voit d’opposition que dans
les deux Cours d’Orléans et de Liège.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme commença par suivre les
anciens principes. Il jugea le 28 pluviôse an 4 , entre les
Cliatnpomier et Sezel, que l ’action en nullité avait duré trente
ans, en. floréal an 5 , à la vérité il changea de jurisprudence.
Cependant la Cour de cassation ne lui donnait pas cet exemple;
elle avait jugé en thèse le 3 messidor an 4 , que Gilberte Laporte
avait été recevable pendant trente ans à se pourvoir contre sa
renonciation faite par son contrat de mariage, en faveur de son
beau-frère, et voici les motifs bien précis de son arrêt.
«
«
«
«c
« Attendu que l ’art. i 3 i de l’ordonnance de i 53c), déclare
nulles toutes dispositions en faveur des tuteurs ou administrateurs. etc. directement ou indirectement, avant le compte
rendu , et qu’une vente , faite par une mineure en faveur d’une
personne qui administrait ses b iens, présente un avantage
« indirect ;
« Attendu qu’en pareil cas l ’action subsiste pendant trente ans,
« parce que suivant l’art. i . er, tit. 29 de l’ordonnance de 1667,
« le comptable ne cessant de l ’être que par la reddition de son
« compte, c’est le compte seul qui peut éclairer le mineur sur
a ses intérêts;
« Attendu que l’art. i 34 de l’ordonnance de 1539 fIu^restreint
« le délai à dix ans , n’est relatif qu’aux actions rescisoires,
« qui n’ont rien de commun avec celles en nullité qui durent
« trente a n s , et pour lesquelles il n’était pas besoin de lettres f
« casse et annulle , etc. »
II est même remarquable que le Bulletin officiel ju sq u 'à ce
jo u r ne mentionne aucun arrêt qui contrarie le précédent.
L a Cour d’appel de Hiom ne s’est prononcée, pour les dix
ans , pour la première fois, que le 18 prairial an 11 , c’est-àdire, depuis le Code civil, et p ir induction de l’article 475. On
verrait m êm e , dans un arrêt du 25 nivôse an 10 , que la pre
mière section avait admis une femme pendant trente ans, et jugé
�C*4 )
encore que l'action n’avait couru qu’après le décès du père, qui
avait constitué la dot maternelle par le contrat attaqué. Mais si
cet arrêt ne juge pas la question isolément et en thèse, il paraît
au moins certain que la Cour n’a jamais jugé en faveur de dix;
a n s, avant le Gode civil.
Comment donc concevoir que la Cour pût infirmer le juge
ment du Puy qui a admis Thérèse M olin, après dix ans , lors
que ce tribunal a jugé comme son parlement , comme le par
lement de Paris , comme la Cour de casation elle-même.
!
)
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N , .
Inaction de Catherine M olin est-elle prescrite par trente ans t
quoiqu’elle ait cohabité la maison paternelle ?
Les Cliouvenc se sont attachés singulièrement à établir cette
prescription par des citations qui n’ont pas la moindre analogie.
i.° Dargentré qu’ils invoquent sur l’art. 276 de Bretagne , ne
s’occupe pas de la question. D om at, au tir. 7 du liv. 3 ne s’en
occupe pas davantage. L e Code c i v i l , art. 2243 se contente de
dire qu’il y a interruption naturelle, quand ce possesseur est
privé pendant un an de la jouissance de la chose. Enfin , L a peyrère , bien loin de vouloir la prescription, dit expressément
ce qui suit : « Tant que les enfans sont nourris sur les biens de
« l ’hérédité, la prescription de la légitimé ne court point contre
« eux». Son annotateur ajoute « idem , en matière départagé»;
et il se fonde sur Coquille , en la question 259.
M ais, outre Lapeyrère, on ne voit pas d’auteurs qui aient
traité la question , s’être expliqués autrement, et si on en cite
plusieurs autres, c’est seulement pour convaincre les Cliouvenc
q u ’ils n’ont pas voulu chercher la question où ils l’auraient
trouvée.
Dolive en fait une question expresse au chap. 3 i du liv. 5 ,
et décide que « si les enfans vivent en commun sur les biens de
« l’hérédité , cette prescription ne court pas contre eux , en cette
« rencontre,
�C r f)
«
«
«
«
rencontre, depuis la mort de leur père , mais depuis seulement qu’ils ont cessé d’être nourris sur ses biens , parce que
recevant journellement leur nourriture sur le patrimoine du
défunt, ils sont censés être en possession. »
Dolive cite deux arrêts des 10 janvier i 63o et 26 août i 636.
Cette opinion est encore enseignée par V e d e l, liv. 2 , cliap. 36;
Serres, pag. 294; Dunod , p. ¡101; Despeisses, to m .2 , p. 3 i 3 ;
et L e b ru n , liv. 3 , des successions. C ’est aujourd’hui un principe
incontestable, dont la raison et la justice prescriraient l’observa
tion, si les auteurs ne l ’enseignaient pas.
L a Cour d’appel vient très-réceminent de prononcer, dans
un arrêt du i 3 ventôse an i 3 , le motif suivant :
« Attendu que l’habitation d’Antoine et Pierre Vescham be,
« dans la maison paternelle , a constamment réclamé la con« servation de leurs droits. »
Ainsi Catherine Molin qui a habité la maison paternelle jus
qu’en 1788; qui n’en est sortie que pour former la demande,
n’a pas un instant de prescription à redouter. Ce fait a été éclairci
dans le procès contre Lacroisière, qui soutenait alors, comme les
Chouvenc le font aujourd’h u i , que la cohabitation n’avait pas
empêché de prescrire.
Les Chouvenc veulent que cette prescription ait couru à
leur égard , quand elle n’aurait pas couru contre Lacroisière,'
il est difficile de concevoir sous quel prétexte, à moins que ce 11e
soit pour en revenir à la prescription de dix ans , qui a déjà été
démontrée être sans application dans la cause.
Il est plus difficile de concevoir encore sur quoi serait fondée
la différence q u ’ils veulent établir entre les portions de Catherine
et J ea n n e , et celles de Marguerite et de Pierre Molin ; car l’ac
tion d’un cohéritier se compose de tous les droits partiels, q u i
ad hœreditalem ven iun t; et comme les portions advenues à
Catherine Molin par le décès de ses sœurs , se sont accrues à
la sienne, aussitôt leurs décès, en vertu de la règle, le mort
9aisit le v i j , Catherine Molin a été, dès ceLle époque, proD
�C
26
)
priétaire d’une quotité plus co n sid éra b le, et n’en a pas plus
perdu une fraction que la totalitéT
S
i x i è m e
Q
u e s t i o n
.
I .e testameut de Catherine Ferrapie est-il valable?
« U n testam ent, dit R ic a rd , est un acte dont toute la valeur
« est dans sa solennité, et dont toute la solennité est dans ses
« foi mes. »
E n effet , dans cet acte si im p o rta n t, il faut que toutes les
formalités aient été ostensiblement remplies : elles sont toutes
de rigueur d ’après les ordonnances.
L e testament de 1735 est vicié par deux nullités textuelles : 1.0
il est dit f a i t et récité en la maison de Pierre Mo lin ; mais rien
ne constate que la lecture ait été faite à la testatrice.Cependant
la loi l ’exige impérieusement; et il est bien indispensable qu'un
testament soit lu à celui qui l’a d i c t é , pour q u ’il soit certain
que ce sont là ses véritables intentions;
2.0
11 n ’est fait aucune mention de la signature de la testa
trice ou de sa déclaration de 11’avoir su ou pu signer , car on y
lit seulement : « L adite testatrice ILLE de ce enquise. »
O r , l’ordonnance de 178b dit que « les notaires écriront les
« dernières volontés du testateur, et lu i en leront ensuite lec« ture , de laquelle il sera fait une mention expresse.... A près
« quoi le testament sera signé par le testateur , le notaire et les
« témoins ; et en cas que le testateur déclare q u ’il ne sait ou ne
« peut sig n e r, il en sera fait mention ( a r t . 2 3 ) à peine de
« nullité ( art. 47 )• »
M u s , disent les Chouvenc , le
testament de Catherine
Ferrapie est antérieur à l'ordonnance de 1735 : cela est vrai.
M ais cette ordonnance ne fait que répéter en cette partie les
dispositions des ordonnances d’Orléans et de Blois.
« Et on cas que les parties ou témoins ne sauront point
« s i g n e r , les notaires fe r o n t m ention de la réquisition par eux
�( 27 )
« faite aux parties ou témoins de sig n e r, et de leur réponse
« qu’ils ne savent signer. » Ordonnance d’Orléans , art. 84 ;
ordonnance de Blois , art. i 65.
Ces ordonnances exigent donc du testament une réponse
d ’une manière plus expresse encore que celle de xy 35.
E t les auteurs qui ont écrit avant l’ordonnance de 1735 ,
enseignent que cette réponse ne peut être suppléée par ce que
dit le notaire en son nom. ( L e Maitre , sur Paris , article 14,.
chapitre i . e r ; R a v io t, question 164; Maillart , sur Artois t
art. 74 ).
On cite souvent Ricard, comme ayant rapporté un arrêt de i 65z
validant un testament où il était dit : « Lequel n’a pu signer t
a interpellé de le faire. » Mais on pourrait voir que Ricard le
désapprouve, en disant que cela est un peu subtil , et qu’il y a
grande apparence'que la faveur des dispositions dont il s’agissait
contribua à faire rendre cet arrêt.
Aussi Ricard , n.° i 526 , citant un arrêt qui validait un testa
ment où le testateur a déclaré ne savoir signer , sans que le
notaire eût dit l’avoir interpellé , ajoute : « Il en serait toute« fois autrement , si le notaire déclarait de son nom que le
« testateur n’a pu signer , parce qu’encore le testament ne fait
« foi , ni de l’interpellation du notaire , ni de la réponse du
« testateur.... Car le notaire, dit Ricard , au n.° i 568 , ne doit
<c contribuer d’autre chose que de son oreille et de sa main ,
« dans la rédaction du testament. »
t- L a jurisprudence s’est conformée à cette rigueur; et on trouve
dans Denizart un arrêt du 3 septembre 1768, qui a annullé un
testament du Bourbonnais , dans lequel il était dit que le tes
tateur n’avait pu signer à cause de sa faiblesse, de ce enquis.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme a jugé deux fois de la
même manière , le 17 ventôse an 6 , sur appel du Cantal et
le 23 pluviôse an 7 , entre les héritiers V a ch ier, d’Arlanc.
L a question ne paraît pas s’être encore présentée en la Cour»
mais l’art.. 973 du Code civil veut aussi que si le testateur ddD 2
�. ( 2 8 )
clare ne savoir signer, il soit fait mention expresse de sa décla
ration ; ainsi la loi n’a pas c h a n g é , et la cause actuelle fixera
sur ce j:oint la jurisprudence.
Les Cliouvenc se sont imaginé cpie les ordonnances d'Orléans
et de Blois n’avaient pas été enregistrées au parlement de T ou
louse ; mais on leur demanderait comment il se fait que tous
les auteurs de ce parlement s’y réfèrent et les citent comme lois,
sans dire nulle part que leur parlement ne les adopte pas.
A la vérité D >!ive dit que de son teins on n’était p is rigou
reux sur les signatures de testamens , et que même on n’exan iuait pas si le testateur avait signé; mais Serres, Boutaric
et F u r g o l e ne disent rien de p a r e i l . Furgole dit au contraire'
que les form alités que les lois prescrivent, pour la validité des
testamens , sont de droit public , et qu’un testament doit porter
la preuve avec lui-même; que toutes les formalités de la loi ont
été religieusement observées.
Dans le testament de Catherine Ferrapie , il n’y a pas même
1 1 j reuve que le notaire ait parlé des causes de la non signature
de la testatrice ; car le mot ille ne signifie rien. Les Cliouvenc
se sont efforcés de persuader qu’///<? veut dire il/itéré , puis
i[u illile r é veut dire ne sait écrire, puis enfin que les mots ne
sait écrire équivalent à la réponse ou déclaration voulue par
les ordonnances.
Mais d’abord quand cette pénible graduation pourrait mener
à quelque chose , il y aurait toujours une autre irrégularité ,
en ce qu’une formalité rigoureuse aurait été substituée par une
simple abréviation.
Un arrêt de règlement de i 685 défend aux notaires d’ user
d’aucune abréviation ou interligne dans toute espèce d’actes. Si
elles ne touchent pas à l’essence de l’acte, elles sont seulement
elles-mêmes considérées comme nulles.
T
Vinnius et la loi nous apprennent que dans les testamens sur
to u t, cpii sont testatio mentis , il faut éc.rire en toutes lettres
et d’une manière intelligible sans user de simples notes ou abré-
�( 29^
viations. Ccvterum Htteris iisque usitatis et legibilîbus scribenduin esse p la c u it , non sig n is, obscurisve n o u s , l. G , § . ult.
de bon. p o ss.
L e mot illilé r é , au reste , ne se trouve , ni dans le dictiounaire de l’Acadéinie, ni dans le dictionnaire de pratique de Ferrière, ni dans le glossaire de Delaurière ; 011 n ou veau diction
naire de Trévoux le mot M étré, signifiant celui qui ne connaît
pas les belles lettres. A u reste quand ce mot signifierait quelque
chose , if n’y a pas dans le testament illité r é , il y a ille , et par
conséquent ce serait mépriser évidemment la loi que de trouver ,
dans ce mot biznrre , une déclaration de la testatrice, qu elle n a
pu ou su signer. Allons plus loin nieine , le mot illitcre ne lu
remplacei’ait pas.
SEPTIÈME
QUESTION.
Q u elle est la nature de la substitution du testament de 1735 ?
a-t elle transmis la succession à Marie M olin ?
Quand ce testament serait valable en la forme , il ne produi
rait pas encore l’effet de réduire Thérèse et Catherine Molin à
une légitime de rigueur.
Car le système des Chouvenc à cet égard , est fondé unique
ment sur une erreur de principes, qu’ils accréditaient encore plus
par iine expression infidelle de l’expédition, qu’ils avaient d’abord
produite, de ce testâmes.
Les héritiers inslitués, disaient ils , etaient Ignace Molin et
pierre Boyer. Ils étaient chargés de r e n d r e la succession à Pierre
Molin quand bon leur semblerait. Pierre Molin est mort en 1748,
et Marie Molin était appelée à la substitution, dans le cas où
ledit Pierre Molin décéderait sans avoir remis la succession ; or
il est décédé sans l’avoir remise , donc , en vertu de la maxime
substitutus substituto est substituías instituto , Marie Molin a
recueilli l’hérédité directement des deux héritiers institués.
D ’abord il est prouvé par l’extrait vidimé du testament de
�( 3° )
1735 , fait en exécution de l’arrêt de la C o u r , qu’au lieu du
mot remis il y a recueilli. Cela p o sé , voyons maintenant quel
est le sens de la substitution ?
L e testament d’une mère qui , ayant des enfans , instituerait
des étrangers , serait évidemment inoflicieux et susceptible de
contradiction ; mais les principes y ont pourvu en faisant une dif
férence entre la substitution fidéicommissaire et la substitution
fiduciaire.
L a première fait passer réellement la succession sur la tête du
grevé : l’autre ne lui transmet qu’un dépôt à titre de confiance,
et le grevé d’un fiduce ne compte pour rien dans les degrés de
la substitution.
Péi’égrinus, qui a fait un traité sur les fidéicommis, le définit
ainsi. F iduciarius est hœres q u i, non sut contem platione sed
alterius gratiâ institutus , eidem reslituere hereditatem ,p o st
diem certam vel incertam , rogatus proponitur.
« Ces substitutions, disent ïïenrys et Bretonier, sont corn
et munes dans les pays de droit é crit, sur-tout en faveur du sur
et vivant des époux , pour maintenir les enfans dans le respect
«c et l’obéissance hoc consilio ut parenti obsequerenlur.........
« Quoique le tems de la restitution, contiuuent-ils , ne soit pas
« marqué dans le testament, néanmoins on doit présumer que
« son intention a été que le survivant ierait bon usage de cette
« liberté , et n’attendrait pas jusqu’a sa mort pour en faire la res*
« titution. . . .
« On doit penser, dit ailleurs le même auteur, qu’un père
« chérit plus ses enfans que leur mère ; qu’il vise plutôt à leur
« utilité, et n e l’avantage qu’à leur considération ; qu’ainsi il ne
« l’a instituée que parla nécessité de leur bas â g e , non ut /¿lus
minoribus obesset , sed potius ut eis consu/eret. » ( henr. t.
i . c r , p. 736, t. 3 , p. 69 ).
Tous les auteurs ont adopté cette distinction , et donnent
d’autres signes du fiduce, qu’on retrouve tous dans le testament
de 1735.
�C 3f )
i .° Catherine Ferrapie avait un ills et des filles ; cependant
elle paraissait instituer deux oncles ;
2*0 Ferrapie chargeait ces oncles de remettre l'hérédité à son
fils, sans distraction de cpiarte. Ces prétendus héritiersn’avaient
donc l’espoir d'aucun droit , de leur c h e f, à la succession ; car
tout héritier grevé de fidéicornmis a le droit de retenir la quarte
trébellianique ( 1. i . cr §. 5 , ad treb. ) ;
3 °. En remettant l’hérédité à Pierre , ils étaient dispensés par
la testatrice de rendre aucun compte des fruits. Si donc ils eussent
été de véritables héritiers , jouissant pro suo , les fruits leur
eussent appartenu de plein droit , sur leur propre chose , sans
aucune stipulation ;
4.0 Enfin ils étaient institués à la charge d’élever les enfans :
le but de la testatrice était donc de maintenir seulement ses
enfans dans l’obéissance envers deux oncles , ut parentibus
obsequerentur. A cela près, elle exigeait les mêmes soins pour
eux, que si elle eût été vivante , sed potius ut eis consuleret.
Ainsi disparaissent Pierre Boyer et Ignace Molin , simples
dépositaires, pour faire place à Pierre Molin , impubère , véri
table héritier en premier degré de la succession de Catherine
Ferrapie.
Pierre Molin , propriétaire de la succession, l’ayant recueillie
dès 1735, était à la vérité grévé lui-même de substitution envers
Marie Molin } mais seulement au cas q u 'il vint à mourir sans
pouvoir d isposer, ou sans avoir recueilli ladite hérédité.
On voit dans cette clause tous les caractères de la substitution
pupillaire , qui consistent comme on sait à faire soi-même le
testament de l’enfant impubère , si non extiterit hœ resJilius ,
aut si irnpubes decesserit ( instit. ).
Pierre Molin n’est pas mort sans pouvoir disposer ; car
en pays de droit écrit le mineur avait testamenti fa ctio n em
aussitôt qu’il avait atteint sa puberté. Or , Pierre Molin , né
en 1731 , était pubère en 1746 , et il n ’est décédé qu’en 1748.
Si ce moyen 11’était pas péremptoire , on opposerait aux
�C 30
Chouvenc que la mère ne pouvait pas faire une substitution
pupillaire ; car il faut pour cela avoir la puissance paternelle ,
comme l ’enseignent les institutes , is substituere p o iesi liberis
inipuberibus q u o s IN p o t e s t a t e h a b e t , cùm ejus œtatis sint
in quâ ip si lestamentum fa cere non possunt.
, Il ne reste donc que l ’institution de Pierre Molin , sans charge
de substitution envers Marie. A u surplus elle serait éloignée
«ncore par le principe enseigné par Cujas sur cette matière ;
c’est que la règlesu b stitu tu s subslilulo n’a pas lieu en la subs
titution pupillaire , et le substitué au pupille n’est pas censé
l ’héritier du testateur. (C u ja s, ad j. 41. de vul. et pnp. su b.)
A insi le testament de
, valable ou non , a transmis la
succession maternelle toute entière à Pierre Molin. Il est mort
pubère ; il est mort ab intestat-, donc ses sœurs lui ont succédé
par égalité , et ont de son c h e f recueilli cette succession.
H U I T I È M E
Q UE S TI ON.
L e testament de 1743 e st-il n u l?
Il
est évidemment n u l, mais cette nullité 11e change rien à
l’ordre de succéder dans les biens paternels ; et on ne s’en occupe
que parce q u ’elle a été agitée lors du jugement de 1793.
Pierre Molin,père a institue son (ils héritier , et a seulement
légué une légitime à ses filles ; or les institutes nous disent que le
père de famille doit instituer tous ses enfans héritiers, ou les
exhéréder nominativement, aut hæredem in s titu a i, aut exhœTedem nomi/iatim f a c ia t , ahocjum inutilitcr testabitur.
Cette disposition a etc répétée dans l’art. 5o de l'ordonnance
de 1735, qui dit que, dons les pays de droit écrit, ceux qui ont
droit de légitime , seront institués héritiers , au moins en ce que
le testateur leur donnera.
M us l'héritier, institué par le testament de 174^ >étant décédé
ab in testa t, il importe.peu que ses sœurs viennent de son chef
ou
/
�( 33 )
ou ju r e suo , à la succession de leur p ère, il n’est pas moins vrai
de dire qu’elle doit être partagée entr’elles par égalité'.
Les Chouvenc terminent leur mémoire par demander, i.o
q u ’on estime les biens de la succession Molin ; 2.° qu’on accorde
«à Marie Molin leur venderesse , les prélèvemens qu’elle aurait à
l'aire, notamment trois qu’ils indiquent ; 3.° qu’ils leur soit ac
cordé un compulsoire pour chercher des quittances, s’il en existe.
A l’égard des deux premiers articles, le jugement dont est
appel, y a fait d r o it, en ordonnant que tous les biens seraient
épuisés pour former le lot des intimés, avant d’en venir aux
Chouvenc.
Ainsi les Chouvenc assisteront à la formation des lots pour
veiller à leurs intérêts ; c’était tout ce que les premiers juges
devaient et pouvaient faire, pour conserver l ’intérêt de toutes
les parties ; ce que demandent les Chouvenc appartient donc à
à l’exécution du jugement dont est appel.
A lors, seulement ils pourront s’occuper des prélèvemens et de
l ’estimation des biens, sans laquelle le partage serait impossible..
Quant au eornpulsoire , c’est encore à cette époque qu’ils au
ront droit et intérêt d’en requérir, s’il y a lieu , et il ne leur
sera pas refusé ; mais leur réclamation actuelle n’est qu’une
inquiétude tracassière , fondée sur une simple possibilité de
fraude qu’ils n’ont pas le droit de soupçonner sans motif; car
la fraude ne se présume pas.
Tout prouve dans cette cause que c’est Lacroisière qui souille
encore un troisième procès, après en avoir perdu deux , et les
exclamations des Chouvenc, pour crier à la collusion , ne sont
q u ’une finesse de plus ; ils sont venus à l ’audience avec une
foule de papiers de la famille Molin , qu’ils ne pouvaient tenir
que de lui. Tout ce qu’ils ont expliqué sur cette famille avec
tant de détails, 11e peut être de leur science personnelle, et il
s-t remarquable qu’ils n’ont jamais demandé en communication
E
�(
3 4
)
les pièces du procès par écrit jugé en 1793 , quoiqu’il soit le
siège principal des difficultés qu’ils élèvent.
Mais tel est le résultat fréquent des tierces oppositions for
mées par les ayant cause; elles ne sont qu’un piège tendu aux
tribunaux et une voie tortueuse de la chicane pour éprouver la
variation des jurisprudences. A u reste , si la Cour veut statuer
sur les questions d ’un partage, avec l ’acquéreur d’un cohéritier;
si elle veut examiner le bien jugé du jugement en dernier res
sort de 1793 , elle reconnaîtra que les dispositions de ce juge
ment étaient sages et légales, et n’y trouvera rien qui mérite
censure et réformation.
M.* D E L A P C H I E R , avocat.
M .e D A U D E , avoué.
A
R I O M ,
D e l ’imprimerie du Palais, chez J.-C. S A L L E S . ( A n X I I I )•
�
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Factums Marie
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Description
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Text
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Title
A name given to the resource
[Factum. Molin, Catherine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
successions
tutelle
prétérition
prescription
testaments
coutume de Paris
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Catherine Molin, et les Sieur et dame Vendriez et Borne, intimés ; contre Jean et autre Jean Chouvenc, appelans.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1735-Circa An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0326
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0624
BCU_Factums_M0729
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prescription
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Successions
testaments
tutelle
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MÉMOIRE
Pour le sieur M A B I T ,
défendeur et appelant;
C0UR
d
’ A
p p e l
Contre le sieur R O D D E de Vernière 9 demandeur;
R I O M.
E t Contre le sieur P E R R E T \ et la dame P R I N C E
son épouse, intim és .
II—
L
en
e
Sectlon*
B—
sieur M a b i t , en faisant infirmer au parl em en t de P a r i s ,
1781 , la plus mauvaise des sentences que la sénéchaussée
de C l e r m o n t ait jamais p u r e n d r e , c r o ya it a vo ir t r i o m p h é
de toutes les difficultés que le sieur de V e r n i è r e po uv a it lui
susciter.
Mais le vaincu v e u t e nc ore dicter les co nditions :
e t le sieur M a b i t pour joui r de sa v i c t o i r e , est o b l i g é de
lu tt e r encor e c o nt r e dix ou o n z e p ro cè s no u v e a u x q u ’il plaît
au sieur de V e r n i è r e de lui susciter.
A
�U )
A v a n t ce tt e entra ve in a tt en d u e , le sieur M a b i t avait prii
des en gage ments a v e c le sieur P r i n c e ; et le retard q u ’il a
é t é forcé
de m e tt re à leur e x é c u t i o n
a fait naître e nc ore
des contestations e n t r 'e u x . T o u t cela s’est m ê l é , discuté et
emb ro uillé
au p a r le m e n t ;
les parties en sont aujourdJhui
plus loin que jamai s, de ce qui les divisait d ’abo rd; de telle
s o r t e , q u ’à ne prendre que le résultat de ce qui s'est passé,
on peut dire à la lettre que jamais h o m m e ne fut plus mal
he u re u x que le sieur M a b i t d ’avoir g a g n é un bon procès.
C e p e n d a n t il faut sortir enfin de ce dédale et mettre un
terme aux prétentions toujours croissantes
des
adverfaires :
ils o n t eu le loisir de les méditer et accu m ule r depuis 17.90.
M a i s leur no mb re ne do it
pas effrayer la
C o u r ; tou te la
cause réside à l ’égard du sieur de V e r n i è r e , dans un acte de
1 6 6 7 , et dans l 'e x a m e n d ’un rapport fait en e x éc u t i o n de
l ’arrêt de 1 7 8 t . Q u a n t au sieur P e r r e t , il y a instance pen
dante sur la lésion de l ’acte qui lui do nne une act ion : mais
puisq u’il est
partie i n t e r v e n a n t e , il n’en faudra
dire un m o t de ses ré c l a m a ti o n s , devenues
pas moins
inséparables du
p r o c è s ; c e sera d’ailleurs un ensemble à présenter à la C o u r
po u r ne pas y revenir.
F A I T S , .
En
i£tfo,
un sieur Jean L a r i b e ,
bailliage de V i e
lieutenant criminel au
en C a r l a d è s , fie un testament par
le q u el
il institua J ea n n e D e c o m b l a t sa v e u v e , heritière fiduciaire:
il lég ua 2,000 liv. à ch a c u n de ses d eu x fils J ean et C h a r l e s ,
et 3,000 liv. à sa fille.
11 laissait entr’autres propriétés, trois domaines appelés
�( 3 ]
L a r i b e , le T e i l , et Besse ( ou Baratou ) ; mais il avait des
d e t t e s , et le principal créan ci er était le sieur de C a l d a g u é s ;
outre ses créances personnelles il e n acquit pour 8,822 l i v . ,
et alors il se tr o uv a créancier de 2-2,212 l i v . ; alors il p r o
posa à la v e u v e L a r i b e , de lui cé de r à antichrèse les fiefs
de L ar ib e et du T e i l , imaginant qu ’elle ne serait jamais e n
état de les racheter.
E n co ns é q u e nc e j l'ac te suivant fut passé entre les parties,
le
f
avril
1667;
il
c la u s e s , parce quelles
est essentiel
d’en
rappeler toutes
les
donnent lieu aux difficultés actuelles»
« L a dem oiselle D ecom blat tant en qualité d’héritière bénéficiaire de
» son m ari, que comme tutrice de ses enfans, confesse devoir au sieur
» de Caldagués la somme de 2 2 ,2 12 liv . ( pour les causes y détail:> lées ).
» Plus 1,600 liv . pour le titre clérical du sieur Laribe p rê tre , à la » quelle les héritages affectés pour raison d’icelui ont été estimés par
» e x p erts, et lequel titre clérical ledit sieur de Caldagués a pris sur soi
» en l ’assignant sur d’autres fonds à lui appartenant; et i 3o liv . d’autre,
» pour deux fondations faites aux prêtres de Polm inh ac; dont aussi ledit
» sieur Caldagués
s’est ch arg é , revenant lesdites
sommes en bloc à
» .¿3,942 liv.
» Pour le paiem ent de laquelle ladite dem oiselle D ecom b lat, a b aillé
» et délaissé audit sieur C aldagués, pour jouir par form e et m anière d’hy» pothèque tant et si longuem ent qu’elle sera en demeure de payer ladite
» somme p rin cip ale: savoir les héritages suivants, sis et situés aux v il» lages de L aribe et du T e il qui consistent, etc.
» Lesquels héritages ont été estimés
26 , 3oo l i v . , par François C am -
» befort et A n toin e Senezergués exp erts, suivant leur rapport de m ain
» privée du 17 m ars, et parce que l ’estimation desdits héritages excède
» la
somme de
22,942 liv.
due audit sieur de C aldagués, pour les
» causes ci-dessus; de la somme de 2 , 35 y l i v ., laquelle somme ledit
» lieu r Caldagués à promis et s’est obligé payer à Jeanne de L a r ib e ,
A 2
�’(
)
4
» femme à Jean Cam bon, pour ses droits légitim aircsj et autres à elle
y dû s, en fonds au regard d’exp erts, là. où ledit sieur Caldagués trouvera
» à propos de lui
en assign er, en faisant laquelle assignation, ladite
» Laribe présente et acceptante, autorisée dudit Cambon ci présent, elle
» sera tenue de subroger ledit sieur Caldagués et s’obliger en toute action
» de ses droits jusqu’à concurrence de ladite somme de 2,357 l i v . , à ce
» m oyen ledit sieur Caldagués jouira de tous les susdits h éritages, suivant
» l ’estimation desdits exp erts, les fruits desquels héritages pendant ladite
» jouissance, demeureront par ce m oyen compensés avec lesdits intérêts
» desdites som m es, comme ayant été estimés que la valeur d’iceux ne
» pouvait excéder le légitim e intérêt; avec p a c te , que tandis que ladite
» D ecom blat souffrira ladite jouissance, ledit sieur Caldagués ne pourra
>> la contraindre au paiem ent du p rin cip a l, car sans ce p acte, elle n ’eut
» consenti aux p résen tes.............a été convenu entre lesdites p arties, que
» si ledit sieur Caldagués trouve être pour son m ieux de stipuler vente
» pure et perpétuelle desdits h éritages, ou qu’il trouve acquéreur duquel
» il puisse retirer paiem ent de sa d ette, qu’il veuille stipuler ladite vente
» en l ’an et en l ’autre desdits c a s , ladite dem oiselle D ecom blat sera
» tenue de faire et consentir ladite vente en paiem ent dedites som m es,
» sous la réservation de tous droits d’hypothèque.
» S’est réservé ledit sieur C aldagués, le contenu en deux promesses
» consenties par ledit feu sieur de L aribe p ère, l ’une au pied de l ’autre,
» en faveur dudit feu sieur Caldagués père, des 6 octobre 1642 et 10 juin
» i 65 i , et de pouvoir reprendre la poursuite desdits criées qu’il avait faites
» audit Clerm ont sur les biens dudit sieur de L a rib e , en cas qu’il vie n » drait à être troublé en la jouissance desdits héritages: et d’autant que
» dans lesdits héritages ci-dessus baillés et délaissés audit sieur Caldagués
» se trouvent compris les héritages qui sont assignés audit sieur de L aribe
» prêtre , pour son titre p resb ytéral, ledit sieur de Caldagués lui a baillé
» et délaissé par forme d’éch an g e , pour tenir lieu du même titre presby» té r a l, un pré appelé de Bedissol par lui acquis de Jean D elcam p et
» Isabelle Cam pinhol m ariés, sis et appartenances du village de Besse,
» contenant environ six œuvres.
* Et parce que ledit pré est de plus grande v a leu r, ledit sieur de
�( ? )
» Laribe p rêtre, pour tout supplém ent, a promis et s ’est obligé de payer
» audit sieur Caldagués la somme de 600 liv . dans six a n s, et cependant
s> le revenu annu ellem ent, à raison d’un sol pour liv re à chacun joui
» et fête de Saint M ic h e l, et de plus ledit sieur Caldagués demeure quitte
» envers ledit sieur L aribe p rê tre , de la somme de 400 l i v . , procédant
» de ladite cession par lui faite cfjo u rd ’hui de pareille somme à prendre
» sur ladite
dem oiselle D ecom b lat, pour les causes d’ic e lle : et encore
» ledit sieur de Laribe prêtre, a promis d’acquitter ledit sieur Caldagués
» envers ladite communauté et prêtres de Polm inhac de ladite somme de
» i 3o l i v . , pour lesdites fondations de laquelle il s ’est ch argé, et d’en
» payer le revenu a ladite com m unauté, à laquelle promet faire a g r é e r ,
» et icelle demeure affecté et hypothéqué par exprès ledit pré de Bedissol:
» et partant lesdits héritages baillés audit sieur de Caldagués déchargés
» de ladite somme de 1 3o liv.
>> Ladite dem oiselle de Com blât pour plus grande assurance dudit sieur
» de Caldagués, tant de ladite jouissance qu’autres pactes et conventions
» ci-dessus, a consenti et consent que tous ses autres b ien s, dépendant
» des hérédités desdits feu
sieurs de L aribe lui dem eurent affectés •
» comme aussi les bestiaux qui sont à présent au domaine de B esse'
» consistant en dix vaches pleines ou g a rn ie s, et une paire de tauraux *
» pour être lesdits bestiaux provenus desdits chetels mentionnés aux» dites obligations. »
P o u r paye r Jeann e L a r i b e f e mm e C a m b o n , de la somme
de 2 , 5 J7 liv. promise par l ’acte ci-dessus, le sieur de C a l - ’
dagués lui délaissa le 11
mai 1670 par for me d ’h y p o t h è q u e
huit h é r i t a g e s , pour par elle en jouir jusqu’à l ’entier pai em e nt
de ladite somme.
B i e n t ô t un sieur P a g é s - D e s u t t e s , fermier et créan ci er d e
c e n s , fit des poursuites et m ê m e une saisie réelle contre la
v e u v e L aribe. L e
sieur C al d ag u és en prit occasion de re
prendre la sienne en
1672 pour avoir la p r é f é r e n c e , et un
sieur de Boissieux, cr éa nc ie r d ’environ 40 0 liv,., fit une
sième saisie réelle en 1678,
tr01'
�< o
C e s pr o c é du re s n’o nt pas e m p ê c h é le sieur de C a l d a g u é s , de
rester en possession de to ut le d om ain e de L a r i b e et du T e i l .
Il a m êm e j u g é à propos de s’emparer depuis du domaine de
Besse d ont il jouic e n c o r e , ou q u ’il a r é ce m m e n t vendu.
En
1 7 7 4 le sîeur M a b i t , créan ci er du sieur Jean-Joseph
de L a g a r d e de 12,000 liv. descendant et héritier des L a r i b e ,
n’ eut de ressource pour être payé , que d’ac cepter ce
que
son dé biteur était en état de lui vendre.
En
ledit sieur de L a g a r d e , par acte du 9 aoû t
1 7 7 4 , vend it au
sieur M a b i t
consé qu en ce
pour lui ou son mieux a é i i r e , ave c promesse
de garantir le fi ef et domaines de Lari be
et du
T e i l , et
autres héritages à lui appartenants, c o m m e représentant Jean
L a r i b e et Jeann e de C o m b l â t , tels q u ’ils furent délaissés à
titre
d ’h y p o t h è q u e à Jean de C a ld ag ué s par le con tra t du
y avril
\66~i.
L a d i t e v e n te
fut
faite quitte
de
toutes dettes
th èq u e s, à l’e x c e p t i o n des obits et f o n d a t i o n s ,
et hyp o
moyennant
18,000 livres.
E t e n c o r e à la ch a r g e par ledit a c q u é r e u r , de payer aux
héritie rs
Caldagués
en
principal
et
acce ss oir e,
toutes les
somm es qui leur seront dues en vertu dudit a cte d ’hypothèque
du $ a v ril
1 C6~j, après avoir préalablement
déduit et p r é
c o m p t é le m o nt a nt des jouissances des objets vendus.
A p r è s c e tt e acq uis iti on , le sieur M a b i t
demande
en
désistement
formée par
se subrogea à la
son v e nd e ur
c o n tr e
la dame de Ca ld a g ué s et le sieur de V e r n i è r e son m a r i , qui
prétendirent
faire résulter
de
l’intention
des parties, que
l a c t é de 1 6 6 7 e t ait une ve nte pu re et simple. C e système fut
�( 7 )
adopté par la sénéchaussé de C l e r m o n t q u i , par sentence du
3 septembre 1 7 7 7 , débouta le sieur M a b i t de sa demande.
M a is sur l’a pp e l, le parlement rendit h o m m a g e aux prin
c ip e s , et cond amn a le sieur de V e r n i è r e à se désister, sans
néanmoins d ’autres
restitutions de jo u i s s a n c e s , qu e celles
échues depuis la dem an de; les dispositions de c e t arrêt sont
en c or e essentielles à répéter textu el le me nt .
« Notredites Cour.... ém endant.... condamne M arie-hypolite Caldagués,
»
femme autorisée par justice de M athieu R o d e, à se désister au profit
»
de M a b it, des héritages baillés et délaissés par ledit acte à Jean de
» C aldagués, pour jouir par forme et m anière d’hypoth èque, tant et si
»
longuem ent, que Jeanne D ecom blat veu ve L a rib e , serait en demeure
» de payer les sommes principales par elle dues audit C aldagués, en
» payant par ledit M ab it, à ladite femme Rode ou à son m ari, le m ontant
» des créances dudit Jean C aldagués, liquidées par ledit acte du
5 a vril
» 1 6 6 7 , sauf h. ladite femme R o d e, à faire valoir les droits qui peuvent
»
résulter en sa faveur pour indem nités, tant des héritages donnés par
» ledit Caldagués à Jean de Laribe en échange de son titre c lé r ic a l, et
»
en l ’acquit des fondations, qui étaient assignées sur les héritages dé-
»
laissés par ladite veuve L arib e; que du paiem ent des droits légitim aires
»
de Jeanne de Laribe femme C am b on ; et encore pour paiem ent fait
»
par Jean François Caldagués, de cens et rentes, pour années antérieures,
» à l ’époque du 5 avril 1667 et des lods et ven tes, pour raison dudit.
»
acte de délaissem ent, en exécution de la sentence des requêtes du
»
palais du 27 juin 1678; défenses desdits M abit et de Lagarde réservces
»
au contraire : com m e aussi condamne ladite M arie Seneze veuve A n n e t
y> C aldagués, K se désister au profit dudit M a b it, de la jouissance des»
dits héritages énoncés audit acte de 16G7, et à lui rendre et restituer
» les fruits d'iceux à compter du 2 o juillet 177/1 >j our
demande, jus-
»
qu’au jour du désistem ent, suivant l ’estimation qui en sera faite par
»
exp erts, qui seront con ven us, ou nommés d’office devant le lieutenant
» général de la sénéchaussée de V ie en C arlad és, que notredite Cour a
» commis à cet effet; que le montant desdits fruits et ie\eaus sera com«
�( 8 )
» pensd jusqu'à due concurrence, avec les intérêt« des créances de ladite
» femme R y d e , échus depuis ledit jour 2 juillet 1 7 7 4 ; et qul
échéron^
» jusqu’au jour du p aiem en t, à faire par ledit M abit audit Rode et sa
» fem m e, en vertu du présent arrêt; condamne ladite veuve Caldagués a
» payer audit M abit l ’excédent, si aucuns y a desdits fruits et reven u s,
» après ladite com pensation, ensem ble les intérêts dudit excédant année
» par année: condamne ladite femme Rode et ladite veuve Caldagués ,
» tant envers ledit M abit qu’envers ledit de L agard e, chacun à leur égard
» aux deux tiers de tous les dépens, tant de cause principale que d’appel,
» interventions et dem andes, sommations et dénonciations, l ’autre tiers
s» desdits dépens compensé.
C o m m e le sieur M a b i t n’ avait acquis que pour recouvrer
une c r é a n c e , il ne fut pas plutôt devenu pr op ri ét air e, q u Jil
revendit au sieur P r i n c e , le 20 mai 1 7 8 2 ; par cet acte il fie
é le cti on de m i e u x , en sa f a v e u r , à la charge par ledit sieur
P r i n c e , de lui rembourser les sommes par lui a v a n c é e s ; et
de se c h a rg er du
surplus du prix de l’ac quisition, c o n f o r
m é m e n t à l ’a c t e de 1 7 7 4 et à l ’arrêt de 1 7 8 1 .
Il eût été heureux
ce tt e
pour le sieur
M ab it de
s en tenir a
première c o n v e n t i o n , puisqu elle lui évitait tout e m
barras à venir. Mais le sieur Prince plus p r é v o y a n t , l’en gagea
à prendre sur son c om pte le soin d’ex éc u te r l’arrêt et à régler
e nt r’e u x , le m o n ta n t de ce que devrait le sieur Prince pour
son acquisition. C e nouvel e n g ag e m e n t donna lieu a un acte
du 22 septembre 178 j , dont voici les dispositions.
« E n exécution de l ’élection faite par le sieur M abit en faveur du sieur
v P rin ce , par acte du 2o mai 17 8 2 , ils ont réglé et liquidé toutes les
» sommes avancées par M a b it, et celles qu’il s’était obligé de payer »
5 avril 16 6 7, p a r la vente
25 mai 1 7 8 1 , frais et faux-frais, à
» portées tan t, par le contrat d’hypothèque du
» du 9 août 1774» que par l ’arrêt du
» 1% somme de
35 , 5 oo l i y . , en ce non compris i,2 o o liv . pour le droit
de
�f
9 )
» de lods ( payé par le sieur M abit ); qui est à la charge du sieur Prince-'
» et dans le cas que contre toute apparence, il fût jugé être dû deux
» droits de lods, ledit M abit sera tenu de payer le second sans répétition,
se réservant, etc.
» Lesquelles sommes de
1
35 , 5 oo liv . d’une p art, et i,2 o o liv . d’a u tre,
» le sieur Prince s’oblige de payer audit M abit; savoir 14,000 liv. le 16
» octobre prochain, et 4,000 liv. chaque année ensuite, fora le dernier
'» terme a échoir le 16 octobre 178 8 , qui sera de 6,700 liv. avec P in » térêt qui diminuera à proportion des paiemens.
» A u m oyen desquels, et de la jouissance des domaines de Laribe et
» d u T e i l, qui appartiendra audit sieur M abit pendant les
5 premières
» années, qui comm enceront et prendront leur cours, à la Notre-Dame
» de mars prochaine; ledit sieur M abit s’oblige de délaisser à l ’expiration
» de ladite jouissance, audit sieur Prince le ch etel, outils d’agriculture
» et vaisselle de m ontagne, dont lesdits domaines se trouveront garn is,
» jusqu’à concurrence de la somme de 2,400 l iv ., dont 2,3oo liv . en
» bestiaux, et 100 liv. en outils et vaisselle, et en o u tre , de délaisser
» audit sieur P rin ce, les fo in s, p ailles, fum ier, et grains dont lesdits
» domaines se trouveront garnis, et ensem pncés; en conséquence ledit
y sieur M abit, aura la liberté pendant lesdites cinq années de prend.e
» du bois, à moins dom m age, pour le chauffage, clôture des possessions,
» et outils d’agriculture; à condition que ledit sieur M ab it, paiera foutes
» les charges, pendant lesdites cinq années, et qu’il fera entretenir les
» bâtim ens, des réparations menues et locatives, et qu’il usera du tout
» en bon père de fam ille : avec la liberté de faire exploiter lesdits do» m aines, par ferm ier, m etayer, ou domestiques; et ledit sieur Prince
» aura néanmoins la liberté de faire couper et prendre tels arbres qu’il
» jugera à propos ; immédiatement après l ’arrangement ou décision , des
» contestations a term in er, entre ledit sieur M a b it, la dame de Calda» g u és, les sieurs et dame de V ernières, ainsi et de même qu’il le pourra
» après lesdites cinq années: à l ’expiration desquelles ledit sieur M abit
y promet de remettre audit sieur Prince , lesdits contrats d’hypothéquo ,
» v e n te , arrêt et autres, qu’il pourra avoir en son p ou voir, concernant
» lesdits domaines.
B
�( <0 )
» D em eurant'expliqué que les ténem ent et m ontagne appelé de Bara»- to u , de la contenue de
53. septérées seulem ent, no fait pas partie des-
>> dits domaines ven d u s, quoique possédé par le ferm ier actuel.
» Expliqué
au ssi, que ladite vente est fa ite , avec promesse de la
» part dudit sieur M a b it, de faire jouir ledit sieur P rin c e , de l ’effet
» d’ic e lle , après lesdites-cinq a n n ées, et de le garantir et évictionner
» de tous troubles, et de le faire tenir quitte de toutes dettes, et arrérages
»• de cens du p assé, et jusqu’à l ’expiration desdites cinq années; même
» du droit de francfïef, s ’il en est dù au prorata desdites cinq années.
Il est aisé de voir., par cette c o n v e n t i o n , que le sieur M ab it
s attendait à n’avoir aucune difficulté
e t dame de V e r n i è r e :
sérieuse ave c les sieur
en e ff e t, il ne s’agissait que d’estimer
les jouissances faites depuis 1 7 7 4 . , et de les déduire sur les
3 .6 ,100 liv. ; d’après c e l a , et en supposant une ou deux années
em plo yé es à cette terminaison de p r o c è s , le sieur Ma b it pouvait
raisonnablement com pte r de jouir l u i - m ê m e
pendant 3 ans
desdits d o m a in e s , avant de les remettre au sieur Prince.
M a i s , c e n’était là qu’ un beau rêve., et le sieur de V e r n i è r e
préparait au sieur M a b i t une série de difficultés 3 qu’il avait
été loin de prévoir.
C e pe nd a nt des négociations furent entamées : le sieur L e g a y
p è r e , e x pe rt -g é o m è tr e , avait déjà fait des propositions au nom
d e la maison de V e r n i è r e ; le sieur Mabit se rendit à C l e r m o n t
ave c des fonds suffisans pour terminer. M . R e b o u l rédigea un
projet de traité qui fut ré v i sé ,
par M . res T o u t t é e p è r e , et
D a r t i s , il ne resrait que la somme à fixer : mais le sieur de
»Vernière la vo u lu t plus considérable que l’arrêt ne lui en d o n
nait le d r o it ; et le sieur Mabit fut forcé de re no nc er a un projet
de m é d i a t i o n , par lequ el il avait pr o u vé qu’il savait faire des
sacrifices.
�( I l ')
E n partant de C l e r m o n t ,
11 laissa
ses fonds en dép ôt., chez
le sieur d’A u b u s s o n , né g o cia nt ( i ) ; en faisant savoir aux per
sonnes qui avaient bien voulu s oc cu p er de c e tt e médiation y
que ces fonds seraient destinés a faire face a la dette du sieur
M a b i t , aussitôt que le sieur de V e rn i è re voudrait se borner à
des conditions que le sieur M a b i t pût adopter.
Après la rupture de cet a r r a n g e m e n t , les experts furent
no mmés par procès-verbal du bailliage de V i e , du 12 avril
1787.
Lo rs de h prestation de serment des e x p e r ts , les sieur et
dame de V e r n i è r e ann oncèrent une foule de demandes , résul
tantes des réserves qu’ils avaient fait insérer dans l’arrêt de
1781 : mais les experts ne se crurent pas autorisés à outre
passer les dispositions de c e t arrêt.
C e s experts ( R e d o u l y et T h o u r y ) , ne furent pas d’accord.
Redouly
estima les jouissances de chaque année a 1,800
liv. déduction faite des cas fortuits, des lab ou rs, s e m e n c e s ,
et réparations locat ive s; sauf néanmoins a déduire les i m p o
sitions royales et
autres charges
d é duc ti ble s, qu il n a v a i t
pu c a l c u l e r , parce que le sieur de V e rn iè re n’avait pas ju g é
à propos de remettre les extraits ni aucuns t i t r e s , quo ique
l ’expertise fut poursuivie à sa diligence.
T h o u r y estima les mêmes jouissances po ur chaque année
(1)
Ce dépôt est constaté par des pièces du procès, sous la date de
17 9 0 , et il l ’est encore plus par la consignation que le sieur Daubusson
fit de i5 ,5 o o liv. en assignats; consignation déclarée nulle par arrêt de
la Cour d’appel du 26 prairial an i 3 .
L e sieur Perret a touché cette som m e, et les intérêts (
23 ,000 liv . )
B 2
�(
h }6 ï o
12
)
l i v . , sy a n t fait les mêmes d é d u c t i o n s, sau f celles des
charges pour le m êm e motif.
..
Ils se ré unissent, a décla rer quMIs
n’o nt estimé aucuns
bestiaux ni c r o i t , parce q u ’ils n’en est pas men tion né dans
l ’antichrèse.
C e rapport est affirmé le 2 septembre
A cette épo qu e le sieur M a b i t
Vernière
178 7.
était absent, le sieur de
ne perdit pas un m o m e n t
pour obtenir un tiers
ex pe rt de son choix.
L e 1 2 du m ê m e m o i s , le sieur L e g a y fut n o m m é d’office
et le sieur M a b i t alarmé au-dela de toute expression, d ’avoir
po ur e x p e r t , celui
qui le premier en proposition
d’arran
g e m e n t , avait stipulé les intérêts de la maison de V e r n i è r e ,
se hâta de faire signifier une récusation.
L e sieur de V e rn iè re en poursuivit le dé bouté avec c h a l e u r ,
le bailliage de V i e délaissa les parties au pa rl e m e n t, ou après
une
foule
d'écritures
r e s p e c t iv e s , la
L e g a y fut confirmée par arrêt du 4 mai
nomination
du sieur
17.90.
Ma is rien ne tenait tant a c œ u r au sieur M a b i t , que de
s’ opposer à l’opération de c et expert (et les faits prouveront
b ie nt ô t s’il a calculé juste ) , il se pourvut au conseil d état
con tr e l ’arrêt qui le déboutait de sa récusation.
L e conseil était en séance pour y s a tu e r, lorsque le décret
de l’assemblée constituante lui apprit sa suppression.
La Cour
de cassation a été
ensuite saisie du
pourvoi ,
mais le sieur de V e r n i è r e } plus pressé 3 n ’avait pas m ê m e at?
�(
'3
,)
tendu pour faire opérer son tiers ex pe rt qu’on pût s a v o i r , s'il en
aurait l’autorisation ( i ) .
L e sieur L e g a y affirma son rapport le
1 6 a o ût 17^0.
II n’avait d'autre opération à faire qu’à c h e rc h e r un m o y e n
ter m e , qui fut de justice entre i ,800 liv. et 2, 6 <;o liv. s a u f la
déduction des charges foncières : le sieur de V e r n i è r e ne man
qua pas de lui f o u rn ir , à cet e f f e t , tous les titres nécessaires;
son e xp e rt de confiance ne pouvait pas être g ê n é en c e tt e
partie par l ’opinion de ses c oll èg ues à qui il avait affecté de
ne pas les confier (2).
P o u r ne pas anticiper sur les réflexions que fait naître en
fo ule le r apport du sieur L e g a y , il suffit de dire qu’il n’adopte
ni 2 , 5 5 0 liv. ni 1,800 liv. mais q u’en ex ce pt a nt de son estima-
(1) Pour ne pas revenir ensuite sur ce qui a été jugé au sujet de cette
récusation , il suffit de dire que la cour de cassation n ’a prononcé que le 3
pluviôse an 1 0 , et a rejeté le pourvoi.
L e sieur M abit ne craint pas d’avouer qu’il a fait tout ce qui était en lu i
pour n ’avoir pas un expert qu’il avait des motifs de suspecter. Il a eu la sa
tisfaction d’apprendre en 17 9 0 , par M M . les Conseillers d’état, après leur
suppression, que s’ils eussent ju g é, l ’arrêt aurait été cassé.
L e sieur de V ernière a fait sentir à cette occasion au sieur M abit qu’une
occasion de petite vengeance n ’était pas toujours à n ég lig e r; il a fait exécu
ter chez, le sieur M a b it, et vendre des lits , pendules et pincettes, pour Ie9
frais de cassation. Cependant le sieur M a b it, créancier des frais de C le rm ont et du parlem ent, n ’a pas usé de reprébailles ; on l ’a exécuté, quand
il devait croire a une compensation.
(2) C eci n ’est pas un fait simplement présumé; les extraits des cotes
sont
parmi les pièces de M . de V ern ière. sous la date du i 3 juillet 1787 ; et le
rapport des premiers experts n ’est affirmé que le 2 septembre
suivant.
�C »4 )
tion treize héritages sur vi ng t- hui t; en déduisant des charges
éteintes par l’a n t i c h r è s e , en doublant l ' i m p ô t , etc. il est par
venu à n’évaluer les joui ssa n ces , année c o m m u n e , qu’à .938 1,
6 sous 3 deniers.
P en dan t que les intérêts du sieur Mabi t étaient ainsi tr a it é s ,
les cinq ans de suspension qu’ il avait stipulés pour la mise e a
possession du sieur Prin ce s’étaient écoulés.
A l ’époque
fixe
du
mars
17851, le sieur Prin ce était
allé se présenter clans les do m a in e s, pour en prendre posses
sion et en faire constater l'état.
Su r le refus qu’il éprouva , il avait fait assigner le sieur
M a b i t le 14 juillet 1785?, devant le bailliage d ’Aurillac.
i.°
Pou r lui remettre des bestiaux et outils jusqu’à c o n
currence de 2,4.00 liv.;
2.0 P o u r lui c o m pt e r les jouissances depuis le 25- mars pré
cé de nt ;
3.0 P o u r le décharger de toutes hy po thè que s de la dame
de V e r n i è r e ;
4 . 0 P o u r faire désister ladite dame de V e r n i è r e des d o
maines à lu i vendus , aux offres par lui
de lui payer le prix
c o n v e n u , e t ce au moment ou il serait mis en possession.
S i n o n à lui rembourser les sommes par lui payées et les
l o y a u x - c o û t s de son acq u is itio n; plus 2 ^ 0 0 0 liv. de d o m mages-intérêts.
E n réponse à c e tt e d e m a n d e , le sieur M a b i t avait justifié
des diligences qu’il avait faites pour mettre le sieur Prince en
possession, et des obstacles survenus par la récusation néces«aire du sieur L e g a y .
�Néanmoins
( »s1 ) <
le sieur Prin ce obtint le y fevrier 17^0 une.
sentence par défaut adjudicative de ses conclusions.
S u r l’appel de cette sentence au par le me nt, le sieur P r i n c e
demanda l' e x é cu t io n pro visoi re, qui fit un incident appointé
à mettre et no n - ju g é .
A cette épo que e n c o r e , le sieur Prince prit occasion de sa
sentence par d é f a u t , pour faire des saisies-arrêts sur tous le s
débiteurs du sieur M a b i t , malgr é un arrêt de défense.
A u t r e procès au parlement à ce sujet: le sieur M a b i t ne
se défendait q u ’en donnant les mains à ce que le sieur Pr in ce
to uc hâ t les sommes dues par les tiers saisis, sa u f à en tenir
c o m p t e , a l ’ex cep ti on seulement de la som me de 1 5 ,5 0 0 li v.
déposée che z le sieur Daubusson., pour faire face en tant qu e
de besoin à la créan ce de la dame de V e r n i è r e .
S u r c e l a , arrêt sur productions respectives le
10 ju il le t
1 7 9 0 , qui fit ma in -l ev ée provisoire au sieur M a b i t desdits
saisies-arrêts, à la ch a rg e suivant ses offres de donner cau tio n
jusq u’a 30,000 liv. (1)
C ’est ainsi que le sieur Pr in ce harcelait le sieur M a b i t ,
pendant q u ’il avait besoin de tous ses m o y e n s , pour résister
aux efforts du sieur de V e r n i è r e , dont le but était de se main
tenir en possession.
Enfin quand le sieur de V e r n i è r e fut muni du rapport du
(1) L e sieur Prince a paralysé l ’effet de cet a rrêt, en contestant les
cautions offertes,
et lassant le sieur M abit qu’il publiait insolvable.—
D e l à sont nées des consignations, des procès et une privation pour le
sieur M abit de tous ses fonds disponibles depuis 1750.
�( I* )
sieur L e g a y , îl présenta une requête au parlement le 10 sep
tembre
17510,
par laquelle il co ncl ut
à ce que en h o m o
log uant le rapport du sieur L e g a y , le sieur Mabit fût tenu
de lui payer
i.° les 2 5, 3 00 l i v . , prix de l’antichrèse d ’après
l ’arrêt de 1 7 8 1 .
2.0
5,025
liv. pour l' e xc éd a n t de intérêts de ladite somme
sur les jouissances ;
3.0 5 , o o o liv. pour indemnité du pré Ôedissol, délaissé à
l 'a b b é L a r i b e ;
4.0 300 liv. par année pour les jouissances dudit pr é ;
10,000 liv.
pour indemnité
des héritages délaissés à
l a femme Cambon ;
5.° Les jouissances desdits héritages depuis 1 7 7 4 ;
7 . 0 721
liv. pour arrérages de c e n s , portés par sentence
'de 1578 ;
8.° 448 liv. pour les droits de Iods, payés à raison de l’antichrèse ;
p .° Les intérêts desdites deux sommes depuis
io.°
»578;
1 , 3 4 7 liv. pour les d eu x promesses r é s e r v é e s , ave c
intérêts depuis i 5 7 f .
( Nota. Ces conclusions ont été augmentés en l ’an i 3 , voyez page 2 i. )
A
peine ce tte requête fut signifiée,
agissant de c o n c er t c o m m e les dates le
senta une à son tour le
que le sieur P r i n c e ,
p r o u v e n t , en pré
du mêm e mo is, pour i n t e r v e n i r ,
c o m m e substitué au sieur M a b i t , au procès introduit par la
requête du
1 0 ; en conséquence il demanda à être mis en
possession des deux domaines en présence dudit sieur M a b i t ,
�(
>7 )
aux offres cle payer audit M a b i t , ce qu'il restait lui dev oir *
e t c e , aussi-tôt sa mise en possession: sinon et faute de c e
faire,
il
offrit
aussi de
payer
au sieur fde
Vernière
les
3 6 ,10 0 Iiv. portés par l’arrêt de 1781 et c o n c l u t , en ce c a s ,
con tr e le sieur M a b i t , à la répétition de ladite so mm e et de
Ce qu ’il lui avait déjà payé.
L e lendemain de ce tt e r e qu êt e , il en présenta une sec ond e
pour d emander l’adjudication provisoire de ses c o n c l u s i o n s }
cette demande fut appointée à mettre.
A son tour e n c o r e , le sieur de V e r n i è r e donna une nou
ve lle r e q u ê t e ,
pour
intervenir
dans la
demande du sieur
P r i n c e , c ’est-à-dire qu’il intervint dans sa propre instance.
.
A ce cahos de demandes, le sieur M a b i t ne répondait au
sieur Prince que par u n dilemme bien pressant: ou l ’acte que
je vous ai consenti en 1785 ( lui disait-il ) , est une électi on
de m i e u x , ou c ’est une vente. Dans le premier cas vous d e v e z
en me payant sans d é l a i , prendre sur votre c o m pt e toutes les
demandes du sieur de V e r n i è r e , et je n’ ai plus de procès à sou
tenir; dans le d e uxi èm e cas il y a lieu à lésion d’outre moitié.
T e l était l ’état de la p r o c é d u r e , lors de la suppression du
par lem en t: et de là jusqu’à la reprise des poursuites en l ’an
8 , il s’ est passé quelques faits intermédiaires, qu ’il suffira de
me nti on ner rapidement.
Q u a n t au sieur de V e r n i è r e demeuré en possession , il n y a
eu rien à demêler avec lui: il s’est seulement cru autorisé en
l ’an 7 à faire sur le sieur M a b i t une inscription de 60,000 liv.
L e sieur Prince assigné en 1790 pour les droits de lods de
son acte de 1783 , avait imaginé d ’assigner Je sieur M a b i t en
recours.
C
�(
*8
)
Condamné à V i e , il s’était pourvu au parlement et y avaîe
encore intimé le sieur Mabit; puis le tribunal de Figeac fut
saisi de cet appel en 17^2.
L à , le sieur M a b i t , for cé de plaider c o m m e vendeur, revint
à ce qu’ il avait demandé au parle me nt, et c o n c lu t à la réscision
de la cession par lui consentie en
1785 pour lésion d’outre
m o i t i é ; le sieur Pr in ce opposa que cette demande devait subir
d eu x degré s de j u r i d i c t i o n , et il n 'y fut pas statué.
L e 7 messidor an 7 , le sieur Prince profita d ’une circons
tance fav o ra b le , pour arriver tout d ’un coup à ce que tant de
personnes n’avaient pû obtenir; il paya les 25,300 liv. au sieur
de V e r n i è r e qui lui en donna qu it ta n ce , et l’autorisa à se me t
tre en possession des domaines de L ar ib e e t du T e i l au 2 ;
mars d e l a n S , sous réserve des bestiaux et c h e t e l , et sous la
réserve par le sieur de V e r n i è r e de répéter co ntr e le sieur
M a b i t , toutes les créances réservées par l’arrêt de 1 7 8 1 , sauf
le recours de M a b i t contre qui il avisera.
L e sieur Prince se mit do nc en possession, ne fit rien cons
tat er, et n’appela pas m ê m e le sieur Mabit.
E n l’an 8 il fut fait un c o m p r o m i s; mais le sieur Prince;
révoqua les arbitres, et il fallut rentrer en lice.
L e 25 germinal an 8, le sieur Prince assigna le sieur M a b i t
devant le tribunal de
Sai nt- Fl our . Par c e t ex ploi t qui fixe
ses con clu sio ns; il demande que Je sieur M a b i t soit cond amn é
à lui payer. i°. L es 26,300 liv. qu'il a payées le 7 messidor
an 7 av e c intérêts.
a.° Les jouissances des deux domaines depuis le 25; mars,
�( *J> )
I
culcure j
pou* Ja valeur des bestiaux et outils d'agrï-
^,p Les foins, pailles et fumier qui devaient se trouver aux
domaines en 178^;
j , ° L ’indemnité de soixante-dix-sept septerées sur le t é n e me nt de B a r a t o u , attendu qu’il n’en fût r é s e r v é ’que cinqu ant etrois , et q u Jil s’en trouve ce nt trente ;
6 ° L e s do m m a g es -in té r ê ts résultant de la n o n - jo u i s s a n c e
de la faculté de co uper du bois ;
7 ,# Les dégradations consistant dans l’éc rou lem en t d’une
maison et d ’une gran ge faute d’entretien ;
8.° L e s dégradations commises depuis « 7 8 9 ;
p.° A rapporter main-levée de l ’inscription de ¿0,000 liv.
faite par le sieur de V e r n i è r e ,
ou pa ye r ladite somme de
60,000 liv. av e c i n t é r ê t s ; payer e nc ore les dommages-intérêts
résultant de ladite inscription.
¡A u x offres faites par le sieur P r i n c e , de déduire sur le«
• om me s les moins pr ivi lé gié es, ce qu’il reste devoir au sieur
M a b i t depuis le 22 septembre 1783.
L e 2 floréal s u i v a n t , le sieur M a b i t d én on ça c e tt e de
mande au sieur de V e r n i è r e , et l’assigna en r e c o u r s , i . ° quant
au paiement des 26,300 liv. q u’il avait reçues mal à propos
avant d’en fixer la compensation ;
2.0
Q u a n t au paiement des jouissances; 5 / quant à la main
le vé e de l’inscription ; 4.0 quant aux dégradations.
L e p floréal suivant j le sieur Mabit assigna de sa part le
sieur P rin ce, pour conclure contre lui à la m ain-levée de*
Ca
�(
50
)
iJtisîes-arrêts sur lui faites a v e c d o m m a g e s - i n t é r ê t * , et pour
reprendre la demande en lésion intentée à F i g e a c , mais sur
laquelle le sieur Prin ce avait demandé à subir les deux degrés
de jurisdiction. Il soutint que toutes les demandes du sieur
Prin ce ne pouvaient être jugées en première i n s t a n c e , puis
que déjà il avait obtenu une sentence le j février i j ÿ o , de
laquelle il y eut appel au parlement.
L e tribunal civil d’Au r il la c rendit un ju ge me nt le 14 ther
midor an p , par lequel il retint la demande en paiement des
2 6 ,3 0 0 liv. et celle en indemnité du ténement de Baratou ,
et r e n vo ya la demande en lésion ; et au tr es , en la C o u r d'appel.
Mais y sur l’appel du sieur M a b i t , la C o u r , par son arrêt
du 2 6 prairial an 1 1 , infirma ledit j u g e m e n t , en ce que les
premiers juges n’avaient pas aussi r e n v o y é
la demande en
paieme nt des 26,300 liv.
L a C o u r ne re nvoya pas en première insta nc e, la demande
e n lésion par la raison seule que ce tt e demande avait été
f o rm é e à F i g e a c en de uxième ressort. L e sieur Ma bi t signifia
en ther mi dor an 1 1 qu’il sé désistait du droit de la poursuivre
en l’é tat où el'e é t a i t , sous réserve expresse de la reprendre
en première instance.
L e sieur Prin ce étant d é c é d é , la dame P e r r e t , sa fille, â re
pris les poursuites par exploit du 14. ventôse an 1 2 , où elle
a ajouté aux conclusions prises en l’an 8 , celles tendantes à
faire h o m o l o g u e r le désistement signifié par le sieur M a b i t de
«a demande en lésion , sans lui laisser le droit de la poursuivre
en premier degr é de jurisdiction.
t. D e sa part le sieur de V ernière, par «ne requête présenté«
�( 21 )
en la C o u r le a8 frimaire an 1 3 , a reno uve lé et e xpl iq ué toutes
ses préte nti ons ; il a diminué l’article 2 de ca requête du 10
septembre 1 7 5 0 , et a ajouté 6 nouveaux chefs de demande.
i.® E n paiement d’une somme de 2,000 liv. q u ’il dit avoir
été payé e pour la lé gitime de Charles L ar ib e en 1 Í P 4 ;
2.0
D e 2,000 liv. pour les améliorations par lui faites par
des burons à la m o n t a g n e , avec intérêts depuis la prise de
possession du sieur Pr in ce ;
3*° 3 j7 î>3 ü v. f sols pour les reconstructions d e s b a ti m e n s *
ave c intérêts depuis les quittances des ouvriers ;
4 .* $00 liv. pour les frais que le sieur de V e r n i è r e a é t é
o b li g é de faire pour se maintenir dans la jouissance des b ie n s ,
et en conserver la propriété à la famille L a r i b e ;
y . ° A ce que pour le paiement des sommes par lui d e m a n
d é e s , il soit autorisé à suivre l ’effet de son inscription sur les
deux domaines, et m êm e sur les autres biens des sieurs M a b i t
et Prin ce ;
. tf.® A u x c o û t des rapp or ts, et aux dépens.
M
O Y E N S .
L e dernier état de la procédure annonce à la c o u r , com
bien de délais et de lenteurs entraînerait cette interminable
a f f a ir e , s’il fallait ne pr oc éde r que pas à p a s ,
dans T o rd re
naturel qu’il faudrait suivre, pour obtenir une décision g é n é
rale sur toutes les difficultés.
D ’abord le sieur Perret ve ut faire juge r le désistement de
la lé s i o n , avant de revenir en pre mièr e in st a nc e , pour qu’il
y soie statué.
�( Ai )
Il lui reste en première instance ses eonclosicms en indem*
nité du ténement de tëaratou.
L e surplus de ses demandes en paiement des
a^ foo
liv»
joui ssan ces , c h e c e l , foins et pailles, d o m m a g e s - in t é r ê t s , dé
gradations et m a i n - le v é e , est pendant en la C o u r .
A l ’égard du sieur de V e r n i è r e toutes les contestations sont
pendantes devant la C o u r .
L ’expertise est v i c ie u s e , et c ’est en core une question préa
lable à examiner.
Ma is plus il est constant que les délais
brouillé l ’affaire
passés o n t
em
plus il est nécessaire de réunir toutes les
difficultés, pour que la C o u r soit à même de s t a t u e r , to u t
à la f o i s , sur ce qui peut être actuellement décidé , et pour
que les parties ne soient plus abandonnées à la divagation de
leurs demandes. L ’arrêt de 1781 a réservé des p r o c è s ; c ’est un
ma lh eu r:
mais si le sieur de V e r n i è r e se croit recevable à
s’en p r é v a l o i r , la C o u r jugera d’abord l ’effet de cette r é se rv e ,
en m êm e tems qu’elle statuera sur l’hom o lo g a ti on du rapport
L e g a y , et sur l’appel de la sentence obtenue par le sieur
P r i n c e en
179 0 . L e sieur M a b i t divisera do nc ses m o y e n * ,
en c e qui c o n c e r n e le sieur de V e r n i è r e et la dame Pe rre t ;
e t à l ’égard de chacun d ' e u x , il subdivisera sa défense en
autant de paragraphes qu’ils ont pris des chefs de conclusions.
Réponse
aux
dem andes du sieu r de V e r n iè r e .
,
L ’homologation du rapport le paiement des 1 6 3300 L
S. I . er
L ’ a r t i c l e des
00 liv. est aujourd’hui transporté au
�( *? )
«leur Pe rr et , et n*a d’ailleurs jamais ét é un sujet de contestation.
M a i s l ’hom o lo g a ti on du rapport du sieur L e g a y est le point
cur lequel le sieur de V e r n i è r e insiste ave c le plus de chaleur.
I l est certain que ce rapport est pour lui une p i è c e bien
essentielle ; c a r , par l ’effet du r a is o nn e m en t, c et expert e*t allé
jusqu’à pr ou ve r à c e u x qui auront la bo nté
de le croire ,
q u e deux domaines jugés par deux experts de 1 6 6 7 , d e vo ir
produire un revenu net de 1,315- liv. à c e t t e é p o q u e , n’o n t
cependant p r o d u it , cent v in g t- d e u x ans après, qu’un revenu
de P38 livres.
S i ce tte monstrueuse opération devait su b s is te r, il faudrait
rega rde r c o m m e une calamité le besoin où sont les tribu naux
et les parties de recourir à des experts : heureusement il est
permis de se po urv oi r contre leurs décisions ; et s i fo r t e raù on es non concludunty l ’équité et la jurisprudence ne pe rmet
tent pas que l’une des parties soient vic tim e de leurs erreurs.
L a C o u r se rappelle que les deux premiers experts étaient
divisés entre 1,800 liv. et 2 , 6 j o liv. de produit annuel ; tous
d e u x à la vér it é avaient laissé en arrière les impositions et
charges foncières : mais tous deux déclaraient avoir fait toutes
les autres d é d u c t i o n s , mêm e celle des cas fortuits.
L ’expert L e g a y n’avait d o n c , c o m m e tiers e x p e r t ,
q u ’à
départager ses c o l l è g u e s , et ensuite à déduire les charges d’a
près les quittances produites.
Si le sieur L e g a y eut borné son opération à ce qui était
de son d e v o i r ; si partageant m êm e l ’avis de R e d o u l y , il se
fût borné à 1,800 liv.; quelque modique que fût ce tte somme,
po ur une terre considérable j on ne pourrait au moins pas lui
�( *4 )
reprocher cette affectation ch o q ua nt e de c o nt ro uv e r des d é
ductions infinies et i n u s i t é e s , à chaque anné e de son esti
mation.
A chaque a n n é e , le sieur L e g a y , prenant le m o ye n t e r m e ,
est forcé de reconnaître que le produit annuel des biens est bien
au-dessus de 1,800 liv. sa moindre année est de 1,960 liv. la
plus forte est de 3,109 liv. toutes les autres années passent
a , 000 liv. A u total de 1774. à 1 7 8 9 , l ’année c o m m u n e est
estimée à 2,388 liv. 9 sous.
Ce rte s le sieur L e g a y ne sera pas suspect au sieur de V e r
nière , dans ces évaluations; c a r , sur vingt-huit héritages dont
les domaines sont c o m p o s é s , il en laisse treize sans estim a
tion.
A co m bi e n do nc aurait - il po rté l ’évaluation s’il eût
t o u t calculé ?
C o m m e n t le sieur L e g a y s’est-il don c do nné le droit ar
bitraire de faire ce tte omission? il a d i t , quant aux bâtimens,
g r a n g e s , v e rg e rs et ja rd in s, je fixe leur revenu à ^/"o, parce
qu e dans un domaine , ce n’est là q u u n accessoire ? V o i la toute
la raison qu’ il en donne.
I l en dit autant d’un m o u l i n ; il ne peut servir ( d i t - i l ) ,
q u ’aux personnes qui habit ent la ma ison, et si par fo is , il sert
à
quelques a u t r e s , les frais d ’entretien absorbent l e produit.
O n s’attendait qu’un bois de haute futaie , essence de chê ne
e t un bois t a il lis , auraient au moins trouvé grâce devant ce t
e xp e rt ; poi nt du to ut : il suppose qu’on n’y a rien coupé
( malgré les reconstructions articulées au procès par le sieur
de V e r n i è r e ) et il pense que ce tte nature de biens est plutôt
une jouissance p assive qu’ utile. En fin il d é co u v re une e x c e l
le nt e
�( 2? )
le nte raison pour effacer les bois de son rapport. Ils n’ étaient
pas porté s, dit-i l, aux rôles des impositions; c o m m e si le sieur
L e g a y ig n or a it , que c ’est pour la première fois, en 1 7 5 1 , que
les bois de haute futaie ont été cotisés pour leur produit, d ’après
la loi du premier décembre J7po.
L e s montagnes et herbages valaient enfin la peine d’être
comptées pour quelque c h o s e , puisque M . d e V e r n i è r e d e m a n d e
aujourd’hui ¿,000 liv. pour les améliorations q u ’il y a faites;
poi nt du tout e n c o r e , le sieur L e g a y dit qu ’elles n’ont rap
p or té aucuns revenus.
V o i l à c e p en d a n t , ave c quels élémens le sieur L e g a y a c o m
m en cé son est imation, pour l’a finir, pour ainsi d i r e , malgré
lui-même à 2,508 liv. p so ls , année com mu ne .
Mais vient ensuite le travail des déduc tio ns, et c ’est ici oti
le sieur L e g a y s’est ingénié à les multiplier; sans se souvenir
du travail de ses co nfr ère s, et sans se souvenir qu’il fallait être
con séq ue nt av e c ce qu'il vena it de dire.
i.°
A p r è s avoir porté à ^éro le produit des bâtimens et
jardins, il dit qu’il faut déduire les frais de leur entretien.
a*° D é d u c t i o n
des cen s:
c ’est la pencarte
du M u r
de
Barrés qu’il va che rche r à cinq lieues du domaine , tandis que
A u ri ll a c n’en est qu’à deux lieues; mais la mesure du M u r de
Barrés à un tiers en sus.
j . ° Déductio n des im po s ition s , et ici le sieur L e g a y
a fait un coup d’autorité qui passe les bornes de l ’exp er
t i s e ; cha rgé de déduire l ’i m p ô t , il a voulu doubler la d é d u c
t i o n , et voilà com m ent il s’y est pris: le sie u r d e C a l d a g u é s ,
a - i - i l d i t , comm e p r i v i l é g i é , n’a été imposé qu’à m i - t a r i f , il
. D
�( ai )
n’est pas juste qu’ un autre jouisse de son p r i v i lè g e ; en c o n s é
quence il faut lui rembourser le double de ce q u ’il a payé :
certes il est impossible que la C o u r ne soit pas révo lté e de
c et te manière d ’opérer. S ’il était poss ib le, en restitution de
jouissance, d ’obtenir plus qu’on a p a y é , on ferait remarquer
au sieur de V e r n i è r e que les forains privilégiés étaient ord i
nairement imposés av e c r i g u e u r , précisément parce q u ’ils g r e
vaient la paroisse par le mi-tarif; on ferait remarquer aussi que
les privilégiés payaient des ving tième s bien plus considérables
que les aut res , et que cependant le sieur L e g a y n ’a pas ju g é
à propos de réduire sur le v i n g t i è m e , dès q u ’il doublait l' i m
position. En fin le sieur M a b i t ajoutera que si
le sieur de
V e r n i è r e se fût désisté de s ui te , les d e u x domaines auraient
é t é donnés au sieur de C a l o n n e , gendre du sieur M a b i t , tout
aussi privilégié que le sieur de C a l d a g u é s ,
qui
n’avait pas
plus de privilège que le premier propriétaire, L ag a rd e .
4..0 L e
sieur
Legay a
déduit
une
fo ndation
due
aux
prêtres de P o l m i n h a c , et c ’est au moins un double emploi :
car l ’acte de 16 6 7 prouve que le sieur de C a l d a g u é s , en se
c har gea nt de payer l’abbé L a r i b e , le cha rg e l u i - m ê m e d ’ac
quitter ce tt e fond ation ; c e capital fut compris dans les 2 5 ,3 0 0
l i v . , de sorte que le sieur de
Vernière
aurait deux fois la
m ê m e c h o se ; mais comm ent le sieur L e g a y a-t-il supposé qu e
le sieur de V e r n i è r e avait p a y é , en 1774, et années suivantes,
cette
fondation annuelle? il laisse croire q u ’il a fait ce tt e
d é du ct io n sur les quit tan ces , mais on défie le sieur de V e r n i è r e
de les pr o d u ir e , car jamais la fondation
n’a é té à sa ch a rg e.
j.° Le sieur Legay déduit encore un huitième de ce qui lui
reste, pour les cas fortuits, en se fondant sur le titre d assiette
�( 2? )
des rentes de la c o u tu m e d ’ A u v e r g n e ; mais n’est-ce pas là
abuser de t o u t , après avoir supprimé tout-à-fait treize articles;
car si les produits des m o u l i n s , des b o i s , des jardins et des
bâtimens étaient des objets sujets à cas f o r t u it s , c ’était là q u ’il
f a l la i t appliquer le titre
de l ’assiette des rentes, et dé duire
un huitième ; mais quand le sieur L e g a y en a porté le produit à
%ero, parce qu ’il est fort uit , co mme nta-t-il osé ensuite réduire
un h u i t i è m e à 1 égard des produits les plus fixes et les moins
sujets à variation?
6 .° L e sieur L e g a y avertit q u ’il a eu égard en I . re l i g n e *
à ce que les bestiaux appartenaient au sieur de C a l d a g u é s ,
c ’est-à-dire q u ’il a moins estimé le produit b r u t , parce que
les domaines éta ient par ce m o y e n isolés et réduits à une
ex ploitation
é t r a n g è r e : mais il y a là un double préjudice
co nt r e le sieur M a b i t ; car en premier lieu toute la différence
devait être de ne pas estimer un croît de b es ti au x; en d e u
x i è m e l i e u , ces bestiaux se nourrissaient dans les paccages ec
m on ta gn es des domaines , que le sieur L e g a y a c o m p té pour
r i e n ; ainsi il a fait nourrir aux dépens du sieur M a b i t , des
b e st i a u x , dont le prod uit non-seulement a resté tout entier au
sieur de V e r n i è r e , mais qui e n c o r e , en vivant aux dépens des
d o m a i n e s , sont cause que le produit en est porté plus bas.
C e s bestiaux étant cotisés avant 17«?«, le sieur Ma b it ne pro
fitant pas de leur p r o d u it , il ne devait donc pas supporter cette,
imposition c o m m e le sieur L e g a y l ’a lui fait supp or ter , puis
q u ’il la double au contraire dans ses déductions.
V o i l à la justice du tiers e x p e r t ; c ’est ainsi qu’il a raisonné
e t o p é r é , pour parvenir à la vé ri té , à la solution d’un problème
D a
�( =8 )
bien difficile, dès qu'il s’agissait de rendre les revenus de 1 7 7 4
à
1785) beaucoup moindres q u ’il n’étaient en 1 6 6 7 , malgré
e n c o r e de prétendues améliorations.
L e sieur M ab it ne suppose pas m ê m e , q ue la Co u r mette
en q uesti on, si cet étr ange rapport doit être h o m o l o g u é , il
ne peut s’attendre à une injustice c r i a n t e ; en conséquence
les conclusions q u ’il a prises en am endement n’exig ent pas
d ’autre développement de sa part,
Cependant il est une voie d’abréviation que le sieur M a b it
indiquera l ui-m ê m e à la C o u r , quoiqu’il doive beaucoup y
p e r d r e ; la v o i c i :
L e sieur L e g a y , c o m m e tiers e x pe r t , a dû , suivant l’usage %
prendre un terme m o y e n , il l’a fa it: Tannée c o m m u n e de
son estimation est de 2,308 1. p so ls , sau f déduction de l ’im p ô t
et des charges.
Qu an d le sieur L e g a y a voulu faire par a v a n c e , et sans
m is sio n, l ’estimation de 1 7 9 0 , il a porté le revenu net d e
ladite an né e 1 7 9 0 , et années a v e n ir , à i , 6 o o liv.
So n m o tif a été qu ’alors, les privilèges aya nt c e s s é , il n’était
plus question de doubler l ' i m p ô t ; si donc pour le passé, il
était ridicule de le d o u b le r , le taux de 1790 peut servir d e
poin t comparatif, et alors le sieur M ab it fera une proposition
te lle m e n t modérée qu ’elle prouvera sûrement combien il désire
a c h e te r la fin du procès par des sacrifices.
Il conse nti ra, que
toutes les années
1 7 7 4 et
su iv a nt e s,
soient fixées a 1,600 liv. de produit net et franc de toutes
c ha rg es ; tmis ce co nsenteme nt est intégral et indivisible.
«Sil n’est pas nd>pté, il persiste à une nouvelle ex pe r tis e;
elle est c o m m a n d é e par la juscicei elle est d ’ailleurs néces-
�( 39
)
s a i r e , en ce c a s , pour les années postérieures au rapport des
premiers experts.
A u j o u r d ’hui il n’ y aura plus l ’in convénient des tierces exp er
tises, dès que le co de de procédure ve ut le co nc ou rs de trois
experts: leur travail sera do nc la règle invariable des par ti es,
pour toutes les années sujetes à estimation,
§.
I I.
JJexcédant de Vintérêt sur les jouissances .
E n 179 0, le sieur de V e r n i è r e demandait 6,026 l i v . , aujour
d ’hui il se borne à 4 ,^ 7 4 l i v . , parce q u ’il v e u t bien déduire
les v i n g ti è m e s , qu’il avait oubliés.
L ’arrêt de 1 7 8 1 , ne pr é vo ya it pas qu’il se tr ou vât un expert
au m o n d e , capable d’estimer après 1 7 7 4 les jouissances de
ces deux domaines au-dessous du prix de l ’année 1 6 6 7 : aussi
a-t-il condamné seulement le sieur de V e r n i è r e à payer au
sieur M a b i t l'ex céd a n t des jo u issa n c es.
L e sieur de V e r n i è r e lui-même ne le prévoyait pas davan
tag e ; car loin de demander, avant la découverte du sieur L e g a y ,
un ex céd ant d’in té rê t, il concluait le 10 avril er le 10 sep
tembre
1 7 9 0 , à être autorisé à jo u ir sans rendre co m p te, et
pour le seul revenu des 26,300 liv.
Mai ntenant que le sieur L e g a y a par lé, le sieur de V e r
nière veut absolument rendre c o m pt e et même avoir un e x c é
dant d ’ intérêt; à la vérité il s’arrête à propos, car dans sa
requ ête du 28 frimaire an 1 5 , par une inconséquence vra im en t
b i z a r r e , il demande à compenser les intérêts des 26,300 liy,
ave c les jouissances pour les années postérieures à 178$,
�(
)
L a cause de cette variation se devine a is é m e n t , et le sieur
de V e r n i è r e aime mi eux être incon sé qu ent q ue d ’y perdre,'
c ’est que L e g a y a porté ces dernières années à 1,600 liv. tan
dis que l'intérêt est de 1,515: liv. s e u le m e n t , voilà pourquoi
le sieur de V e r n i è r e offre cette fois une compensation.
L a loi est faite aux parties par l ’arrêt de
1781 , le sieur
de V e r n iè r e doit l’e xc é d a nt des jouissances, et le sieur Mabic
ne doit payer aucun ex céd a nt
Re m a rq u o ns e n c o r e , que les 26,300 liv. se c om pos ant en
grande partie d’intérêt des sommes d u e s , ne do ive nt produire
d ’autre i n té r ê t, que pour les capitaux seulement.
Si la C o u r croit devoir s’écarter des expressions de cet arrêt,
in voq ué cependant par le sieur de V e r n iè r e quand il y trouve
son i n t é r ê t , alors ce c h e f de demande doit rester en suspens
jusqu’à la no uve lle e x p e r t i s e , qui réglera toutes les estimations.
5.
III
et
IV .
U indemnité du pré B édissol.— Jouissances dudit pré.
E n 1 7 9 0 , le sieur Mab it ne pouvait répondre au sieur de
V e r n i è r e sur ce c h e f , que par l’acte de 1 6 6 7 , d’où résultait
néanmoins une réfutation suffisante.
E n 18 0 6 ,
11 a j) u t e r a
à ce tt e r é po ns e , la mention d ’un acte
du fait m ê m e du sieur de V e r n i è r e ou de c e u x qu ’il repré
se n t e , et dont il est surprenant qu’on lui ait c a c h é l ’existence.
En
1 6 6 7 , Ie
sieur de Cal dagués voulait deux
domaines
valant 2 6 ,3 00 l i v . , et il n’était c r é a n c i e r , malgr é toutes ses ces
sions , qu e de 22,21 2 liv. Il acquit don c de g r é a g ré d autres
c r é a n c e s , parmi lesquelles
était le
titre cl érical de l abb é
�( ?t
)
L a r i b s ; ce titre était du revenu de 60 liv. pendant sa v i e , dont
le capital fut porté à 1,600 l i v . ; le sieur de Cald ag ué s pouvait
les payer en a r g e n t , il pouvait aussi délaisser ceux des fonds
de la succession qui y éta ient hypothéqués.
Il
ne fit ni l’un ni l ’a u t r e , et préféra donner un sien pré
appelé de Bédissol.
C e pré valait 1,000 liv. de plus que les 1,600 l i v . , puisque
le sieur de Cal dagués eut quittance de 600 liv. d ’une part, et
4.00 liv. d ’autre.
Ce pendant c ’est à cette mêm e plus v a l u e , ainsi p a y é e , que
prétend aujourd’hui le sieur de V e r n i è r e , à la vérité en pre
n ant une tournure plus spécieuse.
\ L e mo t éch a n g e, é n o n c é dans les deux actes de 1 6 6 7 , la lui
a s u g g é r é e : il dit au sieur Mabie,y<? devois fournir à l ’abbé
L ar i b e des fonds de la succession pour 1,600 l i v ., je lui ai
do nné en éc ha ng e un pré qui vaut à présent 7,600 liv. O n
m ’é v i n c e de ce que je gardais en c o n tr e - é c h a n g e , d o n c il faut
que je trouve mo n pré ou au moins la plus value des 1,600 1.
D ’abord le sieur de Cald agués ne devait pas des fonds. U n
titre clérical emporte une h y p o t h è q u e , mais non la p r o p r i é t é ;
l e sieur de Caldagu és a donné un sien pré, pour s'acq uitt er
des 1,600 liv. et de 1,000 liv. en su s, c ’est là une vente e t
non un éch an g e, puisque le prix est in numerato\ d'ailleurs la
plus value fut payée à l ’é p o q u e , et ne doit plus l ’être.
L e sieur de V e r n i è r e , pour être c o n sé q u e n t, ne devait pas
recevoir toute la somme de 26,300 l i v ., s’il voulait garder le
droit de prétendre à une i n d e m n i t é , sous prétexte d 'é c h a n ge .
M a i s où est le con trat d 'éch an ge quand il n'y a d’une part
�( 3* )
que cîe l’argent. L e sieur de
reçue en
V e r n i è r e , outre la plus v a l u e ,
1 6 5 7 , a to uc hé les
1,600 liv. en l ’an 7 ,
puisque
cette somme est comprise dans les 26,300 li v .; il n’a do nc
rien à demander.
Jusqu’ici le sieur de V e r n i è r e persuade à la C o u r quJil est
év in cé du pré Bédi ssol, er que ne pouvant l’avoir en na tu re ,
dès que sans doute il a été aliéné par les héritiers de 1 abbé
L a r i b e , il faut lui en payer la valeur.
E h bien ! c ’est le sieur de Cald ag ué s lui-même qui
1a
vendu !
la vente est du 20 juin 1 7 1 4 , et sera produite si le sieur de
V e r n i è r e le désire; le renseignement e n v i e n t de ses propres
papiers.
Ainsi, c o m m e cela est vraisemblable, un titre clérical n’étant
q u ’une chose v i a g è r e , la rente étant seulement h y p o th é q u é e
sur les fonds de la succession, le sieur de Ca ld a g u é s ne d ut
donner à l’abbé L a r i b e , qu’ un é c h a n g e d’h y p o th è q u e : voilà
pourquo i le pré Bédissol revint dans ses mains.
Il est inutile s m s doute de répondre au m o y e n du sieur
de V e r n i è r e , que l’arrêt de 1781 lui accorde ce tte indemnité
e t les s u i v a n te s , qu ainsi c est chose jugé e.
C a r il fut inséré seulement en l’arrêt, ( e t sans doute pour le
con so ler de la perte
d’un procès par 1 ex pectative de plusieurs
autres ) ; s a u f à fa ir e valoir e t c ., défenses contraires réservéts à
M a b i t , et au sieur Lag ar de .
§.
V
et
V I.
Indemnités des héritages délaissés en 1 6 7 0 . - - Jouis
sances de ces héritages.
Cette demande est, s’il est possible, plus mauvaise encore
que
�( I? )
que la p r é c é d e n t e ; car le titre m êm e sur lequel
le sieur de
V e r n i è r e la f o n d e , est le meilleur m o y e u du sieur Ma bi t pour
la faire rejeter.
L e sieur de Cal dagués se chargea en 16 6y pour augm en ter
sa c r é a n c e , de payer à Jeanne L a r i b e , femme C a m b o n , une
so mm e de 2,3 f 7 liv.
Le
1 1 mai 1 6 7 0 , il lui délaissa des héritages à lui appar-
tenans , pour se Libérer du paiem ent de ladite somme.
Si ce délaissement se trouvait une a li é n a ti o n , il suffirait de
répondre au sieur de V e r n i è r e , que le sieur de Cal da gu és, ayant
délaissé de ses héritages pour s'acquitter d ’une som m e due et
pour faire sa condition me il le ur e, c ’est là une opération qui
était dans son intérêt seul: et il est étrange qu’il v e u i l l e , ce nt
v in g t ans a p r è s , rendre qui que ce soit responsable de ce
q u ’il a préféré payer en bien fonds.
Mais à cette ré p o n se , qui serait décisive, s’en joint une qui
l ’est bien da va nt a g e; c'est que le sieur de Caldagués ne délaissa
à Jeanne Laribe les immeubles en 1670, q t à titre d'hypothèque\
il ne les lui délaissa que pour en jo u ir ju s q u à l e ffe c tif pait~
m ent de ladite somme de 2, 3^7 liv.
D ’après cela rien n'empêcherait le sieur de V e r n i è r e , de
retirer les immeubles abandonnés en 16 7 0, rien ne l’en a em
pêché de les retirer en 1 7 7 4 ; et il est c h o q u a n t , q u ’il vienne
argumen ter de c et acte de 1 6 7 0 , co m m e d’un sacrifice f o r c é ,
po ur prétendre q u ’il lui est dû 10,000 liv. de capital, en indém.
nité de ce qu’il a perdu.
Si le sieur de V e rn iè re n’a pas ju g é à propos de rentrer da ns
ces immeubles en
1774;
c ’est <lue depuis lo n g - t e m s le sieur
E
�C
34 )
de C a ld s g u és y était rentré et m ê m e
les avait vendus en
1 7 5 ° , par acte reçu R a s t i g n a c , notaire à Ra u lh a c.
V o i là ce que le sieur de V e r n i è r e aurait peut-être dû r é
véler lors du procès de 1 7 7 4 ; au lieu de se faire des réserves
fondées sur l ’ignorance où devait être le sieur M a b i t d ’un fait
étranger.
E n un m o t , le sieur de V e r n i è r e s’est c har gé en 1 6 ^ 7 , de
payer à Jeanne Laribe 2,3^7 l i v . , pour avoir le droit de p u i r
des domaines de Laribe et du T e i l ; il en a joui pour l’intérêt
de 25,500 liv. et a reçu les 26,500 liv. ; donc il est payé en tiè
re me n t de tout ce qui a com po sé ses créances.
§.
V II.
Arrérages de cens portés par sentence de 1 6 7 8 .
L e sieur de V e r n i è r e a reçu en 1667 deux domaines impignorés pour 2 6 ,3 0 0 l i v . , il a laissé à ses débiteurs d’autres
b ie ns , et nota mme nt le domaine de Besse, dont il s est emparé
ensuite sans qu ’on sache c om me nt .
L e s titres de créa nc e, qu’il s’est procuré ensuite, lui ont bien
donné unea ct ion pour se pourvoir, paraction personnelle c o nt re
ses débiteurs, et par action hy po th é c a ire contre le domaine
de Besse; mais a-t-il pû ou voulu a ug me nte r la charge d h y p o
th èq u e des domaines
de
L ar ib e et du T e i l ? cela
n est ni
démo ntré ni vraisemblable.
E n 1 6 6 7 , il fit vérifier que ces deux domaines ne pouvaient
«uffire q u ’à faire face à l’intérêt de 25.300 liv.
Lorsqu'ensuite il a au gmenté sa c r é a n c e , il n’est pas à pré«umer qu ’il ait abandonné les biens libres pour surcharger le»
�( K )
biens grévéa: personne ne po v^ic l’y confraindr®, et les faits
p a rje n t , puisqu il s esc rnis ensuite en possession du domaine
de Bjsse.
Maintenant à l’égard du sieur M a b i t , quelle action a-t-il
pour le forcer à payer une dette étrangère à l’antichrèse?
L e sieur Ma bi t est subrogé aux Laribe pour les domaines
de Laribe et du T e l 1; il n’est o b ’igé par son a c t e , que de
paye r les sommes comprises en ce tte antichrèse, c ’est-à-dire
2 5, j c o
<
livres.
L e sieur de V e r n i è r e n'a do nc qu’une action personnelle
pour le surplus, contre le représentant de la maison L a r i b e , et
demander si bon
lui semblait l’exécutorialité de la sentence
de 16 7 8 : car on n’a jamais vu attaquer un acquéreur avant
d ’av'oir un titre personnel contre le vendeur.
D ’ail leurs, à l’égard du sieur M a b i t , et quand on le pour
suivrait par l’action hy pothécaire, l’ex ception cedendarum actionuni le garantit de toute recherche.
■ Perso nne n’ignore que la caution e ll e- mê m e est fondée à
u s e r de cette e x c e p t i o n , parce qu il est de justice qu en la
forçant à payer la dette d’autrui, on soit forcé de s u b r o g e r ;
et la subrogation n’est v a l a b l e , q u ’autant que l ’action cé d é e
par le créancier est entière et conservée.
C e s principes
anciens
sont maintenus
par l’article 2037
du c o de c i v i i , qui pro no nc e m êm e l’extinction du ca ut ion
ne me nt f o r m e l , lorsque la subrogation a u x dioits hypothèques
e t privilèges du créa n cier , ne p eut p lu s , p ar le f a i t de ce créaitc u r f s’opérer en fa v e u r de la caution.
'
O r , le sieur Mdbit dira au sieur de V e r n i è r e : quand vous
obtîntes une sentence en 1678 pour des cens, vous aviez un
E 2
�I ys )
pri vilè ge sur le domaine de B e s se , débiteur de partie de e t
c e n s:
commsnt
pouvez-vous
m’y
subroger,
puisque
ce
domaine n’est plus dans la famille? Il faut do nc que vous re
m e t t i e z , à mon é g a r d , les choses au
m êm e
état où elles
étaient en 1 6 7 8 ; il faut que vous me rendiez les biens de
la famille alors
existans
pour que
j ’y e x er c e vos
droits »
sinon vous ne po uv e z me contraindre au paiement.
C e t t e observation décisive dispense d’ex aminer la question
de sa v o i r , si la créance du sieur de V e r n i è r e est pr e s c r i te ;
il croit q u ’ ayant joui d’un g a g e il n ’a pas prescrit; mais cela
ne serait vrai que hors l’hypothèque, spéciale; car il répugne
au bon sens que c e l u i , à qui on laisserait un immeuble de.
3,000 l i v . , pour une dette de 3,000 l i v . , pût ensuite se faire
des créances de 100,000 liv. et soutenir q u ’elles n’ont jamais
pre scr it , parce q u ’il avait un g a g e de 3,000 liv.
Au reste, le sieur de V e rn i è re n'a plus ce g a g e depuis 1774,.
dès que les
domaines ont été ve nd us;
il devait don c au
moins se mettre en réglé depuis ce tte é p o q u e , et il a laissé
passer plus de trente ans, sans poursuivre les vrais débiteurs
de ce q u ’il entend récl am er; o r , il est responsable de la pres
cription courue pendant ses poursuites, ainsi que la C o u r la
j u g é les 27 thermidor an 8 et 17 messidor an 11.
Mais encore une fois, il ne f i u t pas surcharger ce tte cause,
de m oye ns inutiles; les principes veule nt que
le sieur de
V e r n i è r e ne puisse forcer le sieur M a b i t à payer
les dettes
de la maison L a r i b e , étrangères aux 26,300 l i v ., par cela seul
qu ’il ne lui a pas conservé les privilèges et h y p o t h è q u e s , exis?
tans en
1 67 B: et l’équité c omma nd e en core
plus impérati
veme nt au sîtur de V e r n i è r e de ne pas intenter des actions,.
�(
37
)
qu’il est présumé avoir éteintes depuis I o n g - t em s , dès q u ’il
s’est emparé du domaine de B e s s e , qui était le g a g e de ce qu’il
demande.
5.
V III
et I X .
L e s droits de lods adjugés par la même sentence .—
L e s intérêts*
L e sieur de V e r n i è r e demandait pour c e t article 448 liv.
en 1 7 9 0 , fondé sur la sentence de 1 6 7 8 , qui ne les liquide pas;
aujourd huy il les porte à 580 l i v ., d ’après un traité sous seingp r i v é , fait en 169 4 ave c le fermier.
C ’est ici une dette personnellè au sieur de C a l d a g u é s , et eri
effet lors de l ’arrêt de 1 7 8 1 , il n’a pas eu m ê m e idée de s’en
faire la réserve.
L e s droits de lods ne sont dus que pour les ventes ; à la v é
rité quand le titre de possession la prorogeait au-delà de dix
a ns , l’usage était d’accorder des droits de lods; mais ce n’étaic
là q u ’une indu lge nce pour les fermiers, afin d abréger le tems
d é leur surveillance, et d’empêcher les mutations frauduleuses.
Q u o i q u ’ il en soit de cet usage , la charge était imposée sur
le possesseur de dix ans; mais c ’est vraiment une idée nouve lle et
choqu ant e que d’appeler le propriétaire d ’un fo nd s, pour payer
le droit de lods de la cession q u ’il en a faite. Po ur qu o i le sieur
de V e r n i è r e n’a-t-il pas imaginé aussi de demander les loya ux
coi'ts de toutes les cessions q u ’il s’est procurées lors de l’an«
ti ch rè s e , et les loyaux coûts de J’antichrèse el le-m ême? C a r il
y a parité de moyens.
-
L ’arrêt de 17 8 1, dit le sieur de V e r n i è r e , ordonne
en quelque-
sorte c e tt e restitution; mais c ’eut été ordonner ce qu’il ne'de**
�( 38 )
mandait pas: d ’ailleurs l’arrêt n'eut fair que réserver l ’a r t i o n ,
et il est évident qu’elle n’est fond ée sur rien. L e sieur de C a l dagués entendit si b>en , dans le t e m s , que ces droits de lods le
concernaient s e u l , qu’il n’en forma aucune demande.
S.
X.
L e s deux promesses réservees en 1 66 y avec Vintérêt
depuis l 6
7 î-
L e sieur de Cald ag ué s se fit en 1667 la réserve d’un p r o c è s ,
c o m m e le sieur de V e r n i è r e e n 1781 s’en est réservé plusieurs
ai.trcs. 11 voulut faire exprimer dans l’antichrèse que deux pro
messes montant à 1,54-7 liv. n'étaient pas comprises dans ses
créances actives, parce qu’en effet il n’avait pas d ’action pour
les réclamer.
Il fallait bien en effet qu’il n’eut pas d ’a c t io n ; car o b l ’g é
pour devenir créancier de 26.300 liv. de prendre des trans
ports d ’autres cr éances, il lui eut été bien plus avantageux de
porter ses propres créances en ligne de c o m p t e : mais ces deux
promesses n’étaient .qu’un vain ti tre , et en voilà l’origine.
L e sieur Lari be avait cédé au sieur de C a l d a g u é s , une obli
gation de 1,3 j o liv. due par le sieur de P r a la t , sous la date
de 1722.
L e s biens du sieur de Pralat furent mis en snisie r é e l l e , et le
sieur de Ca ld a g u é s, après avoir fait quelques d il ig e n c es , revint
c o nt re le sieur L a r i b e , qui lui remboursa ladite som me de 13 j o
liv. au m o ye n de quoi le sieur de Calda gu és rétrocéda l ’obli
gation au sieur L a r i b e , pour en être pavé c o m m e il aviserait.
M aïs le sieur de C a ld a g u é s , ne vou lrn t perdre ni les intérêts
de son a r g e n t , ni ses frais a van cé s, fit faire d ’abord en 164.*
�(
3P
)
au sieur Laribe p è r e , un billet portant: « Je confesse devoir à
» Al. C a l d a g u é s , avo cat de C a r l a d e z , la som me de 6<jo l i v . ,
» procédant des intérêts et dépens à lui adjugés par sentence
» de 173 j , laquelle somme promets payer audit sieur, lo ts et
» au cas que j e sois colloque pour les intérêts et d ép en s, aux
» criées conduites au bailliage d ’A u r i ll a c , etc. »
N e u f ans après, c e s criées n’avaient sans doute rien pro du it ;
et le sieur de C a l d a g u é s , toujours vi g il an t , voulu t e n c or e un
titre de plus pour les mêmes in térêts, qui ne couraient plus
depuis l ’époque
du remboursement du principal.
U n nouveau billet fut fait en
i
6ji
, et il est é v i d e n t qu'on
ajouta au capital de 1, 370 liv. les intérêts calculés en 163.2;
car ce d e ux ièm e billet est ainsi co n c»u :
« Je soussigné confesse devoir audit sieur Caldagués, outre la somme
y ci-dessus et autres pour certaines causes et considérations, la somme
» de 657 liv. 16 sols procédant des intérêts à lui adjugé», contre le sieur
p de Pralat, par ladite sentence, que ledit sieur Caldagués ma fait cession,
» nonobstant qu’au m oyen de ladite cession je dusse prétendre lesJita
» intérêts m ’appartenir, et auxquels pour lesdites causes et considérations,
» je renonce en sa faveur, laquelle susdite somme je promets lui p a y e r,
» lors et au cas que j e sois colloque pour lesdits intcrets, par la senlenc»
y d’ordre et non autrement, £/c. »
T e l s sont les deux billets dont le sierr cîe Cal dagués se fie
réserve en 1 6 6 7 , ce qui prouve qu'alors encore il n’y avait
pas de collocation ; il fit assigner la veuve Laribe en paiement
de ce§, b i ll e t s, sans justifier que la cause de ce paiement fut sur
venue , et le 12 août 1 67 7 il obtint sentence qui o r d o n n e ,
que
la veuve
Laribe
défendra
p é r e m p t o i r e m e n t , sinon
et
faute de c e , la condamne au paiement d e b ite s sommes de
�( 40 )
i p o liv. et 6^-j liv. \6 sols avec in térêts, ainsi que le sieur de
Calda gu és l’avait demandé.
Cependant le sieur de Cald ag ué s s'en tint là , et ne poursuivit
pas une seconde s e n te n c e , sans doute pareequ’il y eut des dé
fenses le 9 janvier 1 6 7 6 ; d’ailleurs s’il est devenu ensuite cré
a n c ie r , il aura e m pl o y é sans doute ce tte créance vis-à-vis le
domaine de Besse, et rien ne semblait pouvoir l’emp êc he r d’en
agir ave c cette famille L a r i b e , c o m m e il le jugeait à propos.
Q u o i q u ’il en s o it , et dès que le sieur de V e r n i è r e demande
aujourd’hui des sommes qui n’étaient
dues que conditionnel-
lem en t, sans qu’il prouve l’évé ne me nt de la condition , le sieur
M a b i t , en ce qui le c o n c e r n e , s’ en tiendra à la réponse qu’il a
faite sur le §. 7 ci-dessus.
La demande ne peut être dirigée contre lui personnellement,
il ne s’est pas chargé de payer d’autres sommes que les 2 6,30 0
l i v . , il n’est pas héritier de la famille L a r i b e , et l’action h y p o
thécaire ne peut avoir lieu que quand l ’action personnelle est
entière.
L e sieur de V e r n i è r e n'est pas en état de subroger à ses pri
v i lè g e s et h y p o t h è q u e s ; les biens alors existans sont un g a g e
per du ; enfin le sieur de V e r n i è r e est garant de sa propre de
mande , tant qu’ il ne prouvera pas a quel titre il s est empare du
domaine de Be^se et Baratou : et au cas qu il en soit acquéreur ,
quelles créances il a e m pl o y ée s a cette acquisition.
S.
X I.
L a légitime payée à Charles Laribe .
Ma in te na nt ce sont des prétentions nouvelles auxquelles le
«leur de V e r n i è r e n’avait pas c o n c lu en » y p o , et qui en effet
n'étaient
�(
4l
)
n Yt a ie nt p^s dans l’arrêt de 1781 ; il ve»'t " ’avoir rien perdu
pour ar tîiidre, car il augmente aujourd’hui ses prétentions de
plu? de 8 000 liv. en capirai.
La légitime rie Cl'.rtrles Lpril e avait éré fix ée , par le testa
me nt de 1660 à 2,000 liv. et il est b:en étonnant q u e , si elle
n ’é n ï f pis p a y é i en
1¿ 6 7 , Pantichrèse n’en contînt a n c n e
mention, il esc étonnant encor e que Charles Laribe aîné . héri
tier bénéficiaire de la succession de son p è r e , ait reçu d e g r é à gré
-
une légitime d ’un é t r a n g e r , t .e n u sept ans après la m o rt de
son [ ère.
Al aissa quittance obscure et é q u i v o q u e , doit être connue de
la C o u r , pour q u ’elle y voie c o m m e n t le sieur de Caldagués
se fanait des titres, pour, envahir sans doute aussi le domaine
de Resse, qu'il v o u d r a i t retenir sans prix.
« L ’an t 6 >jy et le 2 m a i, a été présent M . Charles L arib e, diacre de
» l ’église de V ie , lequel a reconnu être content et satisfait de M . de Cal» dagues des droits paternels, qui pouvaient competer et appartenir en
» l ’hérédité de M .e Jean L a r i b e , et autres généralement quelconques, et a
» subrogé ledit sieur de Cal» agues, en son lieu et jdac.e, et ce( moyennant
» la somme entr’eux convenue, dont ledit L an be content, a quitte leuit sieur
V de Caldagués etc. »
L e sieur de V e rn i è re avait tenté ce c h e f de demande en
1 7 8 7 , co.imie on le voit par le procès-verbal de prestation de
serment des experts; mais ensuite dans sa requête de 1 7 ^ 0 , il
j î ’osa pas le reproduire.
C o m m e n t en effet voit-il là un titre pour demander 2,000
liv.? où est-il pr o uv é que le sieur de Cald ag ué s les a ( ay
?
La succession ét ut o bérée à ce que dit le sieur de V e rn ié re
lui m ê m e ; le d n i t d e s héritiers ne pouvait être réglé que sur
c e qui restait après les dettes payées.
F
�( 42 )
R i e n ne constate que Char les Laribe ait jamais rien
de
m a n d é , pas plus que sa sœur légit im ée à 3,000 l i v . , ils o n t
laissé prescrire leurs dr oit s, et rien ne prouve q u ’ils aient re
levé la prescription par aucun fait ni aucune procédure.
E t ce serait tout d’ un coup après trente-sept ans de délai,,
que le sieur de C a ld a g u é s , ave c quelque mod ique s o m m e , se
serait fait un titre de 2,000 l i v . , pour ne le mettre en lumière
que plus d'un siècle après sa date. L a raison se révolte contre
une semblable prétention.
Mais de quel droit e n c o r e , veut-il former dempnde pour la
première fois en 1 80 j cont re le s ieur Mabit ? q uan d celui ci en se
rait le débiteur p e r s o n n e l , il opposerait ave c f o n d e m e n t q u ’ il y
avait prescription de \66o à 1697 contre Char les L a r i b e , qu’ il
y a encoreprescription jusqu’en 1 7 7 4 contre le sieurde V e r n i è r e ,
et enfin que le droit eût-il été mêm e conservé j u s q u a 1 7 7 4 *
il y a prescription de 1 7 7 4 à i 8 o j .
L e sieur M a b i t
est en core fondé dans l ’ex ce pt io n ceden-
detum a ctionum } et dans les observations q u ’il a faites sur les.
chefs précédens.
f.
X II
et X I I I .
Am éliorations à une m o n ta g n e R é p a r a tio n s aux
batimens.
L ’arrêt de 178 1 n’en dit r i e n , et le sieur de V e r n i è r e se
souvient pour la première f o is , au bout de vingt-cinq a n s , de
c e qui n’aurait pas dû lui échapper quand il prenait des con~
clusions générales.
L ’objet n’était cependant pas d’un mince intérêt, car les.
deux articles se portent à ¿,763 liv.
�(
L e sieur de V e r n i è r e
4^ )
3 commencé
par l'amélioration la plus
ré c e n t e ; il prétend avoir converti en m on ta gn e très-productive
des
terres incultes et des bruyèr es, et y avoir fait bâtir un
buron et un v é d é l a t , à quoi il dit avoir dépensé 2,000 liv.
Si cela était e x a c t , le sieur de V e r n i e r e ferait la la plus
sévère des critiques contre le rapport du sieur L e g a y .
C a r cet expert a porté à tfr o le produit de cette m o n t a g n e ;
o r sans doute si on y avait dépensé 2,000 liv. pour la mettre
en v a le u r , l'expe rt
do nc fait un
tort
bien
volontaire
au
sieur M a b i t , en le privant absolument d’un revenu clair et non
con testé.
Ri^.n ie prouve que la mont ag ne ne fût pas en rapport, avant
ces prétendues a m é li o r a t i o n s , le sieur de V e r n i è r e n’a rien fait
constater; ses conclusions ne sonr fondées que sur son allégation.
Il y a plus, car il n’a rien fait constater e n c o r e , ni réclamé
en cédant les dom lines au sieur P r i n c e , il ne s’est pas m êm e
fait de réserve de ce q u ’ il demande aujourd’hui.
O ù serait d’ailleurs la jus ti ce, que le sieur de V e rn i è r e e û t
profité pendant plus d’un siècle de ses prétendues améliorations,
q u ’il n’eii rendît aucun c o m p t e , et que cependant i! vînt récla
me r toute sa d é pe n se , c o m m e s’il était au lendemain des répa
rations qu’il articule.
Il devait lo ge r les b e s t i a u x , dès q u ’ils sont à lu i; il les a
nourris sur la m o n t a g n e , pour en doubler le revenu: et sans
rien payer pour tout c e l a , son expert diminue le produit des
terres, parce que les bestiaux étaient à lui.
L e sieur de Ve rn iè re demande en suite , des réparations faites
après l’antichrèse, et il produit deux procès-verbaux de l ’état
des b i e n s , i’un de
1 autre de 1 6S6.
F 2
�(
44
)
D a n s le premier, on remarque q u ’entr’autres choses, le sîenr
de Caldagués se plaignait de ce que les granges et érables
n ’étaient pas de la longueur n écessa ire, de ce qu ’il y avait des
cheminées à refaire et des toits a réparer.
D a ns le second p r o c è s - v e r b a l , il s’agissait encore des toits
à réparer.
Un e partie de ces réparations était pour l ’aisance du posses
seu r, une autre partie était occasionnée par son défaut d ’entrerien.
R i e n ne constate qu^en \66y les bâtimens ne fussent pas en
bo n é t a t ; si le sieur de Caldag ués ne voulait pas demeurer
cha rg é des réparations à ve n i r, il devait faire dresser procèsverbal à son entrée.
C e m o y e n , qui serait valable contre un simple fe rmier, esc
bien plus décisif à l’égard d'un preneur à antichrèse; quand il
répa re, c ’est pour lui: car sa longu e jouissance lui donne le
tems de profiter de ses propres réparations.
Les deux procès -ve rbau x porteraient la dépense à moins de
2,000 li v . , ils ont encore un double e m p l o i , car si le sieur de.
C al d ag u és ent réparé les toits en 1 6 8 4 , il n’aurait pas eu à les
ré pnr er en 1686.
T o u t cela au reste n’est pas à demander à un tiers acquéreur.
L e sieur de V e r n i è r e peut se pourvoir co ntre ceux qui repré
sentent la succession et se défendre c o n t r ’eux des fins de nonre ce vo ir et de la prescription.
Q u a n d le sieur de Ve rn iè re a reçu du sieur Prince les 26,^00,
liv. en l’an 7 , il n a réservé contre le sieur M ab it que ce qui
suit: « Les créances a lui réservées par l ’arrêt de 1781 , pour:
» raison desquelles les parüesi etaient en instance au parlement
» de Paris ».
�( 4r )
Ainsi le sieur de V e r n i è r e n’a retenu aucune action pour ces
réparations, qu’il n’avait pas demandées au parlement.
C o m m e n t d’ailleurs les réclamerait-il contre le sieur M a b i r , .
sans inconséquence? il a refusé de lui faire c o m p te des dé gr a
dations.
s.
X I V .
Frais fa its pour conserver les biens à la fa m ille Laribe .
C e t t e demande n’est pas seulement nouvelle en d a te ; elle
l ’est aussi par son genrd: le sieur de C a ld a g u é s , possesseur en
1 6 6 7 , eut des pr o c è s; il lui reste de vieilles pro cédures, et il
veut q u ’on lui paye t o u t , sans savoir s'il avait tort ou raison.
Mais s’il avait raison, il a dû faire condamner aux d é p e n s ,
ce u x qui succombaient ; s ’il a e x erc é des recours contre la fa
mille L aribe, le sieur de V e rn i è re 11e peut leur demander des
dépens que s’il en a obtenus par ju g e m e n t , sinon il n’a d’autre
voie que de reprendre les instances pendantes. Voilà tout ce
q u ’il était nécessaire de dire sur ce c h e f extraordinaire de c o n
clusions.
S.
X V.
Sur Vinscription du sieur de Vernière,
I! demande à être autorisé d’en suivre l’effet sur les deux do
maine s , et même sur tous les biens des sieurs Prince et Mabic*
E v i d e m m e n t d é b i t e u r , le sieur de Ve rn iè re a fait une ins
cription de 60,000 liv. il a été pay é de son capital après ce tte
i n re ri p ti o n , et cependant il n’entend rien en déduire.
C e tt e inscription est aussi frustratoire que les conclusions
q u ’elle oc cas ionne ; car il y a des lettres de ratification du i a
a v r i l »788,
�(
4*
)
E lles sont scellées à h cha rge d’une opposition du sieur
de V ern iè re : dès-lors co m m e il n’a pas fait d ' e n c h è r e s , toute
son action se réduit à demander le rapport du prix de la vente
de 1774-, purgée par les lettres de 1788.
C ’est ici peut être le moyen le plus considérable auquel vien
n e n t a b o u t i r toutes les discussions des chefs de demande réser
vés par l’arrêt de 178 1 , mais réservée sauf défenses contraires.
Car q u m d l’arrêt de 1781 porterait des condamnations pré
cises et considérables qui grèveraient les deux domaines, la chose
j u g é e s’éteindrait devant les lettres de ratification, qui ont op éré
une pleine novation et une convention racite entre l'a cquéreur
et l'opposant. Celui-ci n’a plus eu le droit d'e xa gé rer la valeur
de l’im m e u b l e , et de vouloir être pavé de toutes ses c r é a n c e s ;
il était le maître d’e n c h é r i r , et s’il ne l’a pas f a i t , il en est résulté
de sa part l ’aveu formel que les biens ne valaient pas au-delà de
ce que portait l’acte de v en te ; dès lors ce prix est devenu tout
son g a g e , et toute action ex cédan te a été éteinte.
T e l s sont les principes et les conséquences de l’édit de 1 7 7 1 ,
e t ils détruisent tout à la f >is les quinze chefs de demande du
sieur de V e r n i è r e , quand même il aursic raison sur tous.
M ain tena nt , pour en revenir à l’i îscription , le sieur de
V e r n iè r e n’a pas pu la faire cur un immeuble purgé d hypo*thè que par les lettres de ratification, sauf l’action résultant de
son opposition ; il demande à la f ire valoir sur les autres biens
de ses prétendus d ébite urs, mais c e s t un songe qu ’il ne renou«
velle ra pas vraisemblablement ; il n’a de débiteur direct que les
L a r i b e , c ’est con tre eux seuls qu’il peut s ’inscrive. J a m a i s on
n’a vu un créancier opposant abandonner l ’effet de son oppo
s i t i o n , pour se dire créancier direct d ’un a c q u é r e u r , quand il
�( 47 )
croît que le prix de vente.ne lu i suffira pas, et qu’il a oublié
d’enchérir.
s.
XV I.
L e coût des rapports et les dépens .
L e sieur de V e r n i è r e a été condamne par l ’arrêt de 1781 à
restituer des jouissances à dire d’experts ; il soutenait ne pas les
d e v o i r , l’arrêt qui le cond amn e aux dépens a donc entendu y
comprendre ceux de l’estimation à laquelle il s’opposait.
D ’ailleurs il n’a fait aucunes o ff- es : et c e p e n d a n t , posses
seur à antichrèse » ayant dû s’attendre à c o mp te r des f r u i t s ,
au moins depuis la d e m a n d e , il était naturel q u ’il sût ce qu’il
fallait p a y e r , au moins par approximation.
C ’est don c le sieur de V e rn i è re qui doit le c o û t des premiers
rapports ; quant au coû t du trois ième, que la C o u r réformera sans
le moindre d o u t e , l'événement prouvera laquelle des parties
devra les frais ultérieurs.
R é p o n se
a u x
d e m a n d e s
d u
s i e u r
P r in c e ,
L e sieur Prin ce a long-temps poursuivi le sieur M a b i t a v e c
acharnement ; les se n te n c e s , les arrêts, les provisoires n’allaient
p a s assez vite à son g r é ; et c e p e n d a n t, débiteur de partie des
sommes portées par l ’acte de 1783 ^ le sieur Prince n'aurait eu
le droit d ’exiger du sieur Mabit l’exécution de ses e ng age m e n s , qu’après avoir rempli les siens lui-même.
A u j o u r d ’hui le sieur Perret son gendre est moins hâti f; il est
en possession des d eu x domaines depuis l ’an 7. 11 a to u c h é
2 j , o o o livres du sieur Daubusson ; il a touché ou dû to uc her
environ j o j o o o liv. de plusieurs autres tiers saisis; et il attend
�(
48
)
aujourd’hui avec patience que le sieur de V e r n i è r e et le sieur
M a b i t se soient e x p l i q u é s , pour s’expliquer lui-même.
Cependant ses demandes n’en subsistent pas m o i n s , et elles
entravent le procès , de manière que le sieur M ab it ne co m ba t
une difficulté d’un c ô t é , que pour en voir renaître d’un autre
en plus grand nombre. Ses deux a d ve rs a ir e s, au lieu de se pré
senter en même t e m p s , semblent s accorder et ne 1 attaquer
qu'alternativement. Mais il est temps de mettre une fin a cet
éternal procès, et le parti que proposera le sieur Mabit; dans son
d é c o u r a g e m e n t , ne peut erre refusé , puisqu’ il est l’adoption
des conclusions du sieur Prince.
En
1 7 8 9 , le sieur Prince a c o nc lu contre le sieur M a b i t ,
à ce que i ’acte de 178? fût résolu ave c dommages-intérêts.
Il a obtenu le f février 175)0 une sentence par d é f a u t , qui
condamne le sieur Mab it à lui rembourser les sommes par lui
reçues ave c intér êt s, et à ses dommages-intérêts, à donner par
déclaration.
Sur l’appel de cette sentenc e au parlement, le sieur Prince a
conclu au bien ju g é ; eh bien ! le sieur Mabit y donne les mains;
il adopte les propres conclusions de son adversaire. 11 se soumet
de venir à c o m pt e des sommes qu il a reçues, et a payer les
dommages-intérêts qu’évalueront des experts , au temps de sa r .
co nd am na tio n; dès-lors tour procès doit être fini entre le sieur
M a b i t et les sieur et dame Perret.
O b je c t e r a - t - o n que les choses ne sont plus nu même é t a t ,
parce que le sieur M a b i t a souffert que le sieur Prince se mît
en ’ ossession ?
D ’abord le sieur Prince ne l’v a pas même appelé ; mais quand
il y aurait de ia part du sieur M a b i t des approbations q
ii n’a
jamais
�( 49 )
jamais dofinées de cette mise de possession; elles ne seraient
que d’une bien faible c o n s é q u e n c e , lorsque les c l o s e s en sont
venues nu point qu’un procès serait r u i n e u x , et que le retour
aux premières conclusions du demandeur lui-même doit être
le but naturel de la justice , s’agissant d’éteindre de longues
contestations. Il y a d’aüleurs chose iugée par la sentence du y
février 1 7 9 0 ; l’appel est un droit facultatif pour celui qui l ’a
interjeté > et certes il peut s’en départir.
O r , le sieur Mabit s en est d é p a r t i , il acquiesce à la sentence
à condition qu’elle sera e xé c u té e telle qu’elle est rendue.
D o n c aux termes de
1art.
f du rirre 27 de l ’o r don na nce de
1 6 6 7 , cet te sentence passe aujourd’hui en force de chose j u g é e ,
et vaut c o m m e transaction entre les parties.
L a C o u r est suppliée de prendre cette offre du sieur Ma b it
en considération ; quelque long q u ’ait ét é un procès , il n’a ja
mais pu être refusé au défendeur de donner les mains à la de
mande ; car plus on s’est éloig né du premier é t a t de la cause ,
plus il importe à l’intérêt des parties d’y revenir. Q u e si le sieur
P e rr et obje ct e pour
s’en défendre des moyens nés
de son
intérêt actuel et du ch a ng em en t de la cause , la C o u r n’en
pesera pas moins dans sa sagesse le grand avantage qui résultera
pour le repos de deux f a m i ll e s , de les mettre hors d’sffaire tout
d’ un c ou p , plutôt que leur faire entretenir une foule de procès
interminables.
Il faudra, dira-t-on peut-être, une expertise pour statuer sur
les dommages-intérêts; mais elle est indispensable p^ur estimer
les jouissances que réclament les sieurs et dame Perret.
Enfin le sieur et dame Perret peuvent-ils avoir des moyens
G
�( fO )
pour s’opposer à l’adoption de leur propre d e m a n d e , et de la
sentence obtenue par leur père et beau-père.
D ’après ces offres expresses faites par le sieur M a b i t , par
des conclusions précises, il n’ en. doit pas moins, puisqu’il plaide
en C o u r sou veraine, suivre les sieurs et dame Perret dans leurs
chefs de d e m a n d e , sans néanmoins y porter toute l ’attention
qu ’ils ex ig e ra ie n t , si les sieur et dame Perret eussent voulu s’en
expliquer d a v a n ta g e , ou pl u tô t s’il n’était pas vraisemblable
que la C o u r n’aura point à y statuer.
A v a n t de suivre cette série , il est une question préalable
qui est celle de la lé si o n , à laquelle a con cl u le sieur M a b i t ;
et qu ’il devra suivre si la C o u r n'adopte pas ce qu’il vient de
proposer. C e t t e demande avait ét é fo rm ée à F i g e a c sur appel ;
mais le sieur Pr in ce a voulu d eu x degrés de jurisdiction : le
sieur M a b i t , pour ne pas contester ce qui est j u s t e , s’est départi
de cette demande c o m m e h o r s l a c o m p é t e n c e a c t u e l l e d e l a C o u r ,
sousla réserve expresse de la reprendre devant les premiers juges.
Il
n’y a point fait statuer e n c o r e , et il serait bien dans l’ordre
que ce tte action principale fût discutée la pre mi ère ; mais la
C o u r est saisie dès à présent de plusieurs demandes des sieur
e t dame P e r r e t , et le sieur Ma bi t ne peut pas en retarder la
discussion jusqu’après le juge me nt des questions préalables ,
parce que la C o u r a le droit de tout ju g e r, ec qu’il a intér êt de
ne pas diviser sa défense.
§. I . er
e t
II.
L e s 2.6,300 livres et les jouissances.
Si l'ac te de 1785 n’est pas résolu par la sentence du j f é
vrier 1 7 9 0 , ou par la lé s i o n , ce premier c h e f de d e m a n d e ne
sera pas contesté ; mais le sieur P r i n c e n ’a pas eu d’action di*.
�C
)
recte contre le sieur M abit, ou du moins elle est prématurée.
sieur Prince, a payé en 1 an 7 les 26) j 00 hv* il susit le droit
de s’en dire cr éa nc ie r, sauf à lui à rendre c o m p t e des sommes
q u ’il devait au sieur M a b i t , et de celles qu’il a reçues et pouvait
r e c e v o i r , du c ons en te me nt du sieur M a b i t , des mains des tiers
saisis; snuf e nc ore au sieur Prince à prendre à sa charge l ’é v é
nement du c om pte des jouissances que doit Je sieur de V e r n i è r e .
C a r ces créances devaient se compenser jusqu’à due co nc ur
rence ; et le sieur Prince n’a pas eu le droit de se faire une
créance particulière de ce qui était éteint par la compensation.
Les jouissances de 1789 à l’an 8 inclusivement, sont dues par
le sieur de V e rn iè re ; car c ’est lui q u i a j o u i , et le sieur Prince
ne l’a pas i g n o r é , puisqu’il a retiré les deux domaines de Laribe
et du T e i l de la main du sieur de V e r n i è r e , et de g ré à gré.
C e serait une double opération bien frustratoire que de
condamner le sieur Mabit à payer ces jouissances au sieur P e rret,
et de condamner le sieur de Vernière à les payer au sieur M ab it.
Les sieur et dame Perret n’ ont pas le droit de refuser de les
rece voi r directement du sieur de V e r n i è r e , que la C o u r c o n
damnera à les payer ; car 1 ,° le sieur Prince a traité lui- m ê m e ,
sans la participation du sieur M a b i t , et à son insçu, a v e c le
sieur de V e r n i è r e , d’un article capital qui devait 'j faire f a c e ,
2.0 il est intervenu dans le procès d’entre le sieur d e V e r n i è r e
et le sieur M a b i t , précisément pour e x e r c e r les droits d e son
p r é t e n d u d éb ite ur, de sorte qu’ il est venu au devant, lui-meme,
de la subrogation qui aura lieu en c o n d a m n a n t le sieur de
V e r n i è r e à rendre c o m p t e de ces jouissances dues aux sieur
et dame Perret depuis 1789 jusqu’en l ’an 8 , époque de leur en
tré e en possession des domaines dont s’ag it,
G 2
�'( f * y
§. I I I
ET I V .
L e s bestiaux, outils d*agriculture , f o i n s , pailles s
fum ier et grains .
L e sieur P er ret demande 2,400 livres pour le che ptel des
bestiaux et outils d ’agricultur e, promis par l’acte de 1783 ; mais
il est de fait positif que ce tt e somme n’est pas due.
L e sieur Alabit avait sur cela fait interroger sur faits et ar
ticles le sieur Prince. Mais il n’a pu en obtenir que des réponses
év asives, de sorte que pour en finir, le sieur Ma bi t défère sur
ce point le serment au sieur Perret et à son épouse.
Q u a n t aux foins , pailles et f u m i e r , la convention de 1783 a
eu son ex écution par le fait; car de sa part le sieur de V e r n i è r e , en remettant les domaines au sieur Perret en l’an 8 ,
ne pouvait emporter les engr ais, et il est constant qu’il a laissé
au sieur Perret lesdits domaines pourvus de fo in s, pailles, fu
mier et outils d’ag riculture, et la ré colte pendante par ra cines;
c e fait sera établi s’il est n i é , de sorte que l ’article ne peut être
alloué.
A l’égard des gr ains, on ne co mp re nd g u è r e à quel titre le
sieur P r i n c e , qui s’est fait céder deux domaines et les jouis«
sances ( ou grains ) échus depuis le 27 mars 1 7 8 5 , peut en outre
se croire fondé à demander les grains semés avant le 25 mars 9
e t dépendant de la ré col t e précédente.
Si ce n’est pas ce qu’il demande, il fait double emploi ave c
les jouissances de 178«?, q u ’il a demandées en l ’article premier,
et q u ’il ne peut avoir deux fois.
Enfin c ’est un chef de demande à diriger contre le sieur de
V e r n i è r e , qui aya nt pris à antichrèse le y avril 1 6 6 7 , et a y a n t
rendu le
mars 1799 a du laisser les immeubles iti statu
o r , c ’cst au sieur Mab ic qu ’il doit la dernière réco lt e.
�s. v.
L 9indemnité de 7 7 septérees de Baratou .
C e c h e f de demande, le plus ridicule de tous, ivestpas pendant
en la C o u r : il est donc inutile d’occuper ses momens d’une dis
cussion étrangère. L e sieur Ma b it sa flatte d ’avoir dém ontré à
Aur il lac q u e , ' n ’ayant cédé que ce qui est dans l ’anti chr èse , il
est inutile de chicaner sur l ’étendue de l ’e x c e p t i o n , pourvu
q u e l l e ne diminue rien de la chose cédée.
S.
V I.
Dommages-intérêts ¡p our privation de couper d u bois .
L ’acte de 178 j , portait que le sieur Prin ce aurait la faculté
de co uper du bois dans les d o m a in e s, immédiatement après
l ’arrangement ou décision des contestations à terminer entre
ledit sieur M a b i t et les sieur et dame de V e r n i è r e : le sieur
P r i n c e demande des dommages-intérêts pour n ’avoir pas usé de
cette faculté depuis 1783 jusqu’à 1789.
Si cette demande était fo ndée, le sieur de V e rn iè r e serait
seul pajsible de ces prétendus dommages-intérêts; c a r i e sieur
M a b i t n’a rien emp êché , et l ’obstacle serait venu du sieur de
V e r n iè r e .
M ais la clause mêm e de l ’acte de 1 7 8 3 , porte avec elle la
preuve d’une fin de n o n - r e c e v o i r : car le procès est encore
pendant.
S.
V I I.
Dégradations de maison et grange.
C e s dégradations ont eu lieu pendant l’antichrèse, et par con«
l é q u e n t le sieur P e r r e t , qui se considère co m m e acquéreur et
no n - su b ro g é , n’a pas droit d’y prétendre. Un nouvel acquéreur
n’a pas d’action pour les dégradations antérieures à son titre;
car il n’a acquis les choses qu’en l ’état où elles étaient alors.
�( 74 )
C e s principes sont co ns ta ns , et ont é té confirmés par un
arrêt du parlement de Paris q u ’on trouve au supplément de
D én iz a rt . La C o u r d’appel a ju g é de môme en l ’an n ,
la cause des O li va in et R o m e u f .
§.
dans
l-
V I I I .
Dégradations postérieures à 1 7 8 p .
A l’égard de c e ll e s - c i , le sieur Perret aurait eu une a c n o n
co ntr e c eu x qui les avaient c o m m i s e s , aussi en avait-il for mé
demande expresse aussi tôt après sa mise en possession, contre
le fermier , qui fut condamné à lui en faire c o m pt e .
L e sieur Perret a reçu depuis long-temps le montant de ces
dégra da tions , et s’est départi même de ce c h e f par requêce du
4. floréal an p.
5. I x.
M a in levée de l’ inscription du sieur de Vernière.
I c i , le sieur Mabit a moins à dire co ntre le sieur Perret que
co ntre le sieur de V e r n i è r e ; car c ’était une affectation presque
ridicule de faire une inscription de 60,000 l i v . , c o nt re tç sieur
M a b i t , qui ne pouvait devoir cette som m e dans toutes les sup
positions possibles. L e sieur de V e rn i è re devait bien penser
qu’en faisant semblant de s en croire cr éa nc ie r, il n y avait pas
là de quoi séduire les t r i b u n a u x , au point de les persuader qu’il
devait l’être. U n e seconde affectation a consisté à ne pas m ê m e
la d im in u e r , quoique le sieur de V e r n i c r e ait reçu 26,300 liv.
en l’an 7 , et cependant l’inscription est aussi de l’an 7.
C e t t e é n o r m e inscription a paralysé les affaires du sieur
M a b i t , et le sieur de V e r n i è r e lui devra des dommages-intérêts.
- Q - ' a n t a u sieur P e r re t, qu’il en o b t i e n n e , s’il le p e u t , c o nt re
Jouteur de l ’inscription ; mais non-seuiement i l n’a pas le d r o it
»
�d'en réc’ amer co ntr e le sieur M a b i t qui en a souffert le premiery
su contraire il lui devra lui-même des do mmages-intérêts pour
les saisies-arrêts q u ’ il a multipliées d’une manière v é x a t o i r e ,
m a lg ré un arrêt de
dé fe ns e , et en affectant de laisser tout
ignorer au sieur M a b i t , que cette conduite à mis lo ng - te m s
dans la détresse, et forcé de vendre des propriétés en assignats,
pour avoir les moyen s d’exister.
L e sieur Perret devra le c o m pt e des sommes qu’il é t a it c h a r g é
de payer d’après l’a c te de 1783 ; car le sieur Prince avait le
premier oublié ses e n gag em en s: il devait payer à termes fixes
avant 1 7 8 9 , et n’avait pas droit de suspendre ses paiemens jusqu a la tradition. C a r il autorisait au contraire le sieur M a b i t
a retenir 1 imme ubl ê jusqu au p a i e m e n t , suivant les principes;
et d’ailleurs le sieur Pr in ce l u i - m ê m e , pleinement rassuré par
des lettres de ratification et un arrêt souverain, n’était pas en
péril d ’éviction.
L e sieur M ab it n’ayant pas été assez heu re ux pour parvenir
à un arrangement à l’a m i a b l e , à cette cause, fait tous ses efforts
pour applanir les difficultés qu’elle pr é se nt e , et prévenir celles
qui pe uvent naître enc ore .
V i s- à - v i s le sieur de V e r n i è r e , il a offert un sacrifice pour
dispenser de la réf orm e inévitable du rapport L é g a y ; et, ce point
terminé, les autres difficultés peuvent être tout à la fois décidée»
par la C o u r.
A l’égard des sieur et dame P e r r e t , il s’est départi de son
appel, et a acquiescé à la cho se j u g é e ,
pour éviter les l o n
gueurs du procès en l é s i o n , et de celui de Baratou pendant
en première instance, de même que des autres chefs d’instance
pendant en la C o u r d’appel.
S i la Cour ne croit pas pouvoir adopter ces proposition
�( 5 6 )
ma lg ré leur utilité, il semble que la première opération à faire
sera naturellement de char ger trois e xpe rts , soit de reviser et
amender le travail du sieur L e g a y , soit d ’estimer les jouissances
postérieures et les objets o m i s , soit enfin d’évaluer les dégra
dations et no tamment la maison et gran ge écroulées.
P e n dant cette o pé r a t io n , le sieur Mabit fera statuer en pre
mière instance sur la lésion et sur le c h e f du té ne me n t de
Baratou, après quoi, et sur l’appel incident, s il y a lieu, la C o u r
prononcera en définitif sur toutes les difficultés, et fixera les
b ases du compte général qui aura lieu pour les créances respec
t iv e s, mais lequel c o m pt e se réduira alors à une simple opéra
tion arithmétique.
Q u o i q u ' i l en s o it , le sieur Mab it supplie la C o u r de prendre
en considération l’embarras ou l’ont placé depuis si lon g t e m s
les exagérations de l’un et de l’autre de ses adversaires, l’un le
peignit d ’abord c o m m e ayant grossi singulièrement sa fortune
par cette acquisition de
17 7 4 , l’autre
le représenta c o m m e
insolvable. A u j o u r d ’hui qu’il est vérifié que le sieur Mabit a eu
plus à perdre q u ’ à g a g n e r , ils sont d’accord tous deux pour
c o n s o m m e r sa ruine. C e t t e position doit mériter quelque intérêt
aux ye ux de la C o u r , lorsqu’elle sera co nvaincue sur-tout que le
sieur Mab it n’é lè ve aucune contestation d é p la c é e , et n’ a rien de
plus à c œ u r que d ’obtenir prompte justice.
M. e D E L A P C H I E R , A v o c a t.
M. e C O S T E , Avoue licencié.
À R IO M , D E
L ’IM P R IM E R IE
DE
Mr
DÉGOUTTE.
�
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[Factum. Mabit. An 13?]
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Coste
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successions
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Mémoire pour Pour le sieur Mabit, défendeur et appelant ; Contre le sieur Rodde de Vernière, demandeur ; Et contre le sieur Perret et la dame Prince, son épouse, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de M. Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1781-Circa An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
56 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0325
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0329
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Vic-sur-Cère (15258)
Laribe (domaine de)
Teil (domaine de)
Besse (domaine de)
Baratou (domaine de)
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experts
Successions
-
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fa8e732fcaa4da3f3ae419077bfbd542
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Text
COUR
P R E C I S
EN
D ’A P P E L
DE RIOM.
RÉPONSE,
C
h a m b r e s
assemblées.
P O U R
La
veu ve
B
et les enfa n s mineurs de
a p t i s t e
M A R C O U X ,
J
e a n
appelans;
C O N T R E
B
e n o i t
M A R C O U X
M A R C O U X
C O U X ,
L
jeu n e,
a in e,
et
N
B
o ë l
e n o i t
M A R
intim és.
E S intimés ont im p rim é
un m ém oire où B enoît
M a rco u x aîné ne parle que de lui et p ou r lui. E n syn
copant ainsi les faits de la cause 7 elle se dénature
les mineurs M a rc o u x ont besoin de les rétablir.
A
et
�( 2)
Claude M n rco u x a eu sept enfans.
j|
P a r le contrat de mai'iage de J e a n -B a p tiste , il lui a
fait donation de ses biens présens et à v e n ir , à la charge
de p a yer, i° . à N o ë l, Benoît je u n e, Claudine et .Agathe
M a rc o u x , une légitim ejde 12000 fr. ; 20. à Benoît aîné
12000 f r . , non com pris 2000 fr. de son titre cléric a l;
)
/ 'C .
-3 °- à A n to in e tte , religieuse, une pension de
5o francs.
Il se réserva 12000 francs p o u r en disposer , avec
m ention que s’ il n’en disposoit p a s ,
ces 12000 francs
seroieut partagés entre le f u t u r et les quatre enfans lé g i
timés à 12000 francs ( c ’est-à-dire, que B en o ît, p rê tre ,
en étoit exclus ).
Il fut stipulé q u e si le futur vo u lo it payer les lé g i
tim es, Claude M a r c o u x , son p è r e , lui en payeroit l’in
térêt au taux de l ’ordonnance.
Bientôt après ce m a ria g e , Benoît M a r c o u x , p r ê t r e >
s’empara de l’esprit de son p ère ; et Jean-Baptiste M a r
cou x fut relégué h o rs de la m a iso n , avec 1200 francs
de rente.
Benoît M a r c o u x , fait docteur en th é o lo g ie , ne vo yo it
paç a rriver les bénéfices en aussi grande hâte qu ’il l’eût
désiré. Il n’a jamais été que simple communaliste ou
sociétaire de sa paroisse; et tout p rou ve q u ’ il persuada
à son père de grossir sa l é g i t im e , sans égard p o u r ses
prem iers e n g a g e m e n s , sous la promesse p e u t - ê t r e de
rendre un jour avec u su re , à ses n e v e u x , la p ortion
q u ’ il alloit distraire de la donation de 1779.
" Claude M a r c o u x avoit acheté une maison à SaintÉtienne , le 28 mai 1 7 8 0 , m oyennant
55 oo francs. Il
songea bientôt à eu faire don ¿1 son fils Benoît ; mais.
�( 3 )
p o u r ne pas paroître don ner atteinte à sa d o n a tio n , on
p rit la tournure de faire d o n n er toutes les quittances à
B e n o ît , prêtre.
A p r è s en a vo ir retiré-’quelques-unes, on réfléchit q u ’il
n ’étoit pas encore ém a n cip é, et que le 'ra n g de sociétaire
de paroisse n’ém ancipoit pas*, en con séq u en ce, B enoît
M a rco u x , qui g o u vern oit son p è r e , se fit 'émanciper le
28 mai 1781.
i.I
A l o r s , ët coup s u r ‘c o u p , il se fit donner une foule
de-quittances; de sorte q u ’avant <là fin k l e ‘l ’année il parut
a vo ir payé la maison et tous les ouvriers qu i l’avoient
réparée et embellie.
Bientôt ces quittances'ne p a r u r e n t ‘pas un titre assez
solide; et B enoît M a i’cou x sc fit faire par son >père , le
29 mars ¡1783, unë Obligation de 7 7 1 4 fra n cs, où on
ne manqua pas de sp'écifier^en détail toutes les quittances
qu i en étoient le m o tif : cette somm e de 7 7 1 4 francs fut
dite payable à v o lo n té ' et requête , avec h yp o th èq u e
¿ p é d a le sur ladite maison.
Cette'-maison n’eûtf'été encore qu ’ an foible d o n , si
on ne vô y o it pas que M a rc o u x p è r e , m algré sa grande
disance, absorboit des capitaux considérables, dont on
ne p e u t qu e-d evin er ^’emploi/ Enfin lorsque la r é v o lu
tion vint ôter à B e n o ît, p rê tre , tout espoir de grossir
ses revenus par des bén éfices, il ne chercha plus de
Voies inditefctes ( qui d’ailleurs s’entredétruisent en se
m u ltip lia n t) j-et »il vo u lu t faire un coup de maître en
faisant participer le donataire l u i - m e m e à sa p rop re:
spoliation.
•'
’ \
• vi.
; i: j «•!
Ly 1
Bcnôît 'M a r c o u x , p r ê t r e , ’ se fit
A 2
�( 4 )
ven dre ou délaisser par Claude et J e a n -B a p tiste M a r
c o u x , i° . la maison sur laquelle il avoit hypothèque -,
2°. un domaine appelé de P arade, m oyennant 14000 fr.
à lui dûs p ou r légitim e et titre clérical.
Il fut ajouté que ces immeubles avoient une plusvalue de 2 5 00 francs qui seroient imputés sur les Liens
m aternels ( c ’est-à-dire, sur une créance im aginaire, car
la m ère est encore vivante en 1809).
L e m êm e jour il fut stipulé par un autre acte que
la p lu s - v a lu e étoit plus (considérable encore qu ’on ne
l ’avoit d it; et B en o ît, p r ê tr e , non-seulement se départit
de l’o b lig a tio n , devenue in u tile , de 7 7 1 4 francs, il
reconnut inême être rem p li par ces,' im m eubles d u .su p
plém ent de-légitim e*
i■
_' :j;
•
'f
Ce n’est pas seulement en faveur; de Benoît M a rc o u x :
que le donateur a oublié ses engdgemens. A g a t h e M arc o u x fut m ariée avec le sieur Frotton le 14 novem bre
1787 ; et non-seulement le père hii^constitua 12000 fr.
et 2000 francs sur sa r é s e rv e , ;imais il fut:dit en l ’acte
que la dame .Agathe . M a r c o u x ( qui n’étoit pas éman
cipée et n’avoit pas quitté la com pagnie de son p è r e )
se constituoit de plus une somme de 6000 f r . , q u ’elle
dit p ro v en ir de ses ép a rg n es, et dont l ’acte porte quit
tance.
■,
1
Q u e p o u v o it faire à ¡tout cela le donataire? rie n , sans
d o u t e , que tâcher de reconquérir l’allec lion de son p ère
par une soumission aveugle à ses v o lo n t é s ,,e t lui ôter,
s’il le p o u v o it, les.¿occasions d’aliéner encore, sous p ré
texte du payem ent des légitimes.
.
'
C ’est dans ces yues que Jean-Baptiste M a rc o u x paya
�( 5)
4000 francs sur la dot d’A g a t h e , et 12000 francs potiv
la légitime de N oël.
' ’>r. UIf'-iqr, - :
•r Jean - Baptiste M a rc o u x ïnçmrut en 1794 laissant
plusieurs enfans en bas âge : il espéra, q u ’iils trouvei’oient
un appui dans leur aïeul; mais il est,resté sous la m ê m e "
dépendance jusqu’à son décès arrivé en l ’an 10. E t si
la C our p ou voit douter encore de la spoliation du do
nataire , il suffira de lui dire que la v e u v e M a r c o u x ,
rentrée.)enfin dans la maison après les-scellés et in ven
taire, n’a pas trouvé dans la dépouille, de Claude M a r
coux
un centime p o u r , lui faire rendre les derniers
devoirs.
,!
k) . ° i
, pr
^ Ses plaintes ne lui ont valu q u e . des 4ironies et ides
procédés vexa.tpires ; six cohéritiers ont-affecté de . l u i
faire notifier l e m ê m e jour ^six citations, et ensiytej.&rx
exploits de demande en payem ent des légitimes -et de
la réserve; en proclamant encore q u ’ils,ne s’en tenoient
à leur légitim e en' argent jjq u ^ p a rc e , qu ’il n ’y en avoit
pas dans la succession, et.poijL;, $ejinénagerjle plaisir de
demander ensuite Un supplém ent en<corps héréditaires.^
E n s u ite , et de peur qu’il lui restât, des ressources
p o u r .acquitter ce q u ’ ils c^ein.indoiept, ils ,on t fait des
saisies-arrêts\sur le s d éb ü eu rsret-les, revenus ,de, la' suc
cession.
ij;, ,fT ■
iririJ-.n'T - i ' '
L a veu ve'(M arco u x a; opposé,(i 1?--; ¡q«’elle ne devoit
paâ.de réserve , -surtout par la circonstance qu’elle devoit
faire, face à la légitime im p révue de la .religieuse; 2°. que
A g a th e MarcouX/idevqit/Tapporter I;le. don sim ulé qui
lui avoit été fuit de; 6000,francs ;; 3 0/ q u ’il n’y: avoit pas
�(6)
liéu dë réserver un s u p p lé m e n t , lorsque la légitim e
étoit acceptée après le décès.
!L e tribunal de M ôn tbrison a rejeté ces moyens par
jugem ent dù i i 1 fructidor an i r , ' et à adjugé toutes les
dem andes, c’ëst-à-dirë , !la lé g it im e , lü ré s e rv e , et l ’ex £ëctative d’ uri supplément.
*- Su r l’appél j la.veuvê Mai'cOux a , par ordre d’ un conseil
d é "famille, °rdilbhcé é u ÿ biens à 'venir de la d o n a tio n ,
p o u r '¿’tin 't ë n i F a ü i biëhs ■
’p résëiis, et n’être tenue des
légitimes quë ‘par rëtranchëmerit.
L a C o u r ’ü ’àppel de L y o n , par arrêt du I er. tlierm idor
an 1 3 , a ordonné , i ° . que les légitimes seroient prises
aur les: biens libre's, dans lésquels sera dotifondue la réserve
dé 12000 f r a r i d y $ a ü f 'à !teriir par rëtratichemetit sur les
biën's ’ présent ; 20. que chaque iégitim aire ïa p p o rte ro it
cë qu ’i l ' à reçu à titré de lé g itim e ,’ ce qu i excejitoit
À jgatlie, à l ’égard de.ldtj'üëllë i l ’a été dit au surplus que
Boh'contrat de iiiûi‘iâgeIsëroit éxéëuté' suivant sa form e
ct'tën eu ri ( B llë^ V ô ît-fo riiiéld éU ia n d ë seulement de ce
qüi lui jrëstoit & 'tôüdlîét de
dot. )
î; Eti ^oürsuivdnt ;la éàssdtioii dë cët arrêt > (Benoît
Mafrcoiix , p r ê t r e , ¿voit fbrt bien 'sëhti à quoi le m è h e roit lë rbppbl-t dë ce qii’ il 'oVôlt reçu à titre de légi
tim e ; aussi, prenant l ’alarme sur les suites d ’un-déÎuissëttifeht (Jüi taë l ’Ntirôit pû’s inquiété S’ il ëût été lég itim e,'
il s’étôit ëhiprësSé'Së protestér, par tfôte du -'24 fév rier
1806, qüë &i ô ii ïie rës|)ëctoit pas sa 'V th ïe Üe v j ÿ l , il
dfta^üèMît ën ^aŸÎiritië1 lëfe miriëtiVs M itr c o u x , ëo'rtïine
hM itiéré:idé ‘(Té&iirBdj^tistë , qUFel'o'it-^ia’L'tit' aüdik'iTdle. ‘
�Quoi, q u ’ il en soit , l ’arret. (3<5ri>yon a été
;• 1a
•cause :a . étéoTeovQy.^i cî^vanfcllii' ,Goin\. cjgjliionj i ¡ fit la
cause a/été iphudée. devant elle.. -.aur/f] c c o d
i'(" . ;.(,f
L es mineurs M arcoux .ont renouvelé lé^; moyens; p té r
sentes en la C o u r de L yo n -, sur lu confusion'dt* la ré
serve dans les biens à ven ir. Ils le p o u v a i e n t , parce q u ’un
arrêt de cassation n’est q u ’. une opinion , e t rn ’e$tjpoirit
une lo i; ils le d e v o i e n t , p a r c e ‘que l’arret de I-yori fut
rendu avec solennité et méditation.!
- nn
Ils ont ajoiité à cette question p r i n c i p a l que la dona
tion des biens présens ne p o u v o it pas au surplus être
g re v é e d’une réserve .de 12000 f r . , si le. père en ovpit
disposé de son vivant! directement-.,ou indirectement.
O r , il étoit incontestable que 1b p ère a vo it retranché
plus de 12000 francs des biens donnés à son fils en J 7 7 9 ,
e t par conséquent la donation ne devo it pas souffrir
un second retranchement de 12000 fr. après sa .mojt’k
i ° . Claude M a rc o u x père av.oit ven du en 1778; un
im m eu ble en la com m u n e d ’A n ié r e ; il lui restoit 4
toucher 6000 francs lors de sa donation : il. les a reçus,
après 1 7 7 9 ; et q u o iq u ’ ils aient été évidem m ent em ployas
à payer la maison acquise en 1 7 8 0 , il ne reste aucune
trace de ce capital de 6000 francs.
.1
■ - •!
:
20. Il a vendu depuis 177 9 u n e /rente¡a 11 sieur, Pierre)
R iga u d , de S a in t-E tien n e, et .a touché p o u r le capital
2400 francs.
3 0. Il s’est fait rem bourser par le sieur Jacques Biti'aloi^
une rente au p rin cipal de
5 q o o francs.:
1.
40. Il a fait un don simulé à A g a th e M a r c o u x , de
6000 frans; et il est vra im e n t im possible :en fait et e à
�r ( 8 )
droit de prétendre, q u ’une fille n o n 'é m a n c ip é e , qui n ’a
"j’ainhis ë<i> d^aUtre doifticild' q'ue - c e lu i>de; so n -p ère , ait
pu avoir 6000 francs de sesïâ œ /tîersiW à u tcsles règles
•de droit/se* réuûfesent p o u r dire< que ¿cette; sommet est
réputée légalem ent p ro v en ir e x ' su b sta n liâ p a l ris ; et par
conséquent c è s 6 o o o francs sont encore retranchés de la
"donation des biens* présens.'
!'■ V. 1 ■
■*>.-_> ,Vi. •
Jxj!5 °. lia délaissé àBenoît>M arcoux, prêtre,‘ p ou r 14000 f.,
une maison et un domaine considérables. Si on ne peut
•pas p ro u ve r sans experts que ces objets valoient 30000 f . ,
au moins est-il avo ué par le prêtre lu i- m ê m e qu ’iL y
avoit 1 0 2 1 4 francs d e plus-value.
■Ces faits étoient clairs et positifs
aussi les oncles
M a rco u x ont-ils cru plus, à propds d’y répondre par des
fins de non-recevbir. < >
Ils disent, i° . que les'ca p itau x reçus par le père ne
sont pas pris, sur la donation de biens présens , parce
qüe le donataire n’est saisi du m obilier que lorsqu’il y
a un état a n n e x é 'à l ’acte; 20. q u ’à l ’égard des 6000 fr.
d ’ A g a tlie , il y a chose jugée et m êm e acquiescée; 3 0. que
B enoît M a rc o u x , p rêtre, est p ropriétaire par délaissement
du donataire l u i - m ê m e , et que d ’ailleurs il avoit un
pécule q u a s i c a s tr e n s e , étant sociétaire de sa paroisse,
ce qu i lui donnoit un revenu de 3000 fr. depuis 1779.
- L a prem ière objection des oncles M a rc o u x est une
erreur de d r o i t , sous deux points de vu e : car d ’abord
lds rentes foncières étoient, avant le Gode c i v i l , un im
m eu b le; les rentes constituées étoient un im m euble fictif;
ci à -ce titre il ne falloit pas d’état annexé à la donation.
E u second lie u , cet état n ’est pas exig é par l’ordonnance
de
�. (
9
)
de 1 7 3 1 , p ou r les donations faites par contrat de mariage.
C ’est l’article i 5 qui exige cet é t a t , et l ’article 17 ex
cepte form ellem ent les donations contractuelles de la dis
position de l ’article i 5 . Ce p rin cip e, au reste, est enseigné
par R ic a r d , L o u e t , M . de Lam oignon en ses arrêtés, et
par M . F u rg o le sur les articles 1 5 et 17 de l ’ordonnance
de 17 3 1 . Il est donc surprenant q u ’il ait p u être c o m
battu à l’audience'de la C our.
L a deuxièm e objection est plutôt fondée sur des mots
que sur des raisons : car p o u r opposer la chose ju g é e ,
il faut q u ’il y ait tout à la fois eadem r e s , eadem ca u sa
p e te n d î, eadem con d itio p erso jia ru m .
O r , la contestation particulière qui s’étoit élevée contre
A g a t h e M a rc o u x , est chose étrangère au x intimés a c
tuels. L es mineurs demandoient à chaque légitim aire le
rapport de ce qu ’ il avoit reçu p o u r com poser sa p ro p re
légitim e et la réserve , si elle étoit due. Il a été jugé
qu’ A g a tlie M a rc o u x ne devoit pas ce ra p p o rt, parce que
son contrat de mariage devoit être exé cu té . E t en effet,
si le p ère avoit dans ses mains plus de 6000 fr. dispo
nibles , les mineurs n’avoient aucune qualité p o u r exa
m iner si les 6000 francs étoient donnés ou non.
M ais en m êm e temps la C o u r de L y o n dispensoit les
mineurs de rien payer de la réserve ; de sorte que la
chose jugée se réduisoit à dire que les 6000 fr. , pris
ou non sur la ré s e rv e , étoient une chose acquise à titre
valable.
C om m ent se p e u t - i l que les adversaires syncopent
encore cet arrêt cassé, p o u r y prendre un fragm ent de
B
�( IO))
la chose ju g é e , et rejeter le surplus? C a u sa ju d ic a ti est
in d ivid u a .
>
•
D ’ailleurs il ne s’agit pas aujourd’hui de faire rap
p o r te r ces
6 q o o francs par celle .qui les a re ç u s , et de
les lui ô te r ; mais seulement de p ro u v e r que si le père
a pu les lui donner , c’est aux dépens de sa réserve.
A in s i il n’y a pas chose ju g é e , il n’y a pas eadem ca u sa
peten d i ; au contraire, c’est dem eurer dans le^cercle de
la chose jugée elle-m êm e.
L a troisième objection est ce que Benoît M a rc o u x a
vo u lu em bro u iller le p lu s , p ou r esquiver les éclaircissemens que la C o u r lui a demandés.
C ’est sur la foi (le sa parole q u ’il assure avoir pu
payer fort aisément en peu de mois une somme de
7 7 1 4 francs; et m ê m e , s’il faut l’en c ro ire , l’argent lui
abondoit si f o r t , q u ’en 1 7 9 4 , quand tout l’or de France
étoit m étam orphosé en p a p ie r , il avoit encore une somme
de 10830 f r . , précisément ¿t la portée du député J a vo g u e,
q u i , d i t - i l , le fit arrêter et prit son argent.
Ce député là 11e démentira pas la captu re; il est m ort :
et certes il faut bien se garder de l ’exh u m er p our q u ’il
nous rév èle ce q u ’ il en est. J a v o g u e , proscrit lui-mêine
p o u r ne pas s’être born e a tuer des aristocrates, ne seroit
digne de confiance p o u r p erso n n e; et Benoît M a rc o u x
a pu en toute sûreté de conscience le charger d’ une
iniquité de plus.
Jl faut au moins con ven ir que les biens temporels
abondoient grandement chez le sieur M a r c o u x , prêtre.
Q uand son père achète des m aisons, c’est lui qui les
�( 11 )
p aye; quand tout le m onde n ’a qu e des assignats, il lui
reste encore beaucoup d ’argent.
Ce n’est pas ce que la C o u r lui demandoit ; elle vo u lo it
juger par ses y e u x de la sincérité des quittances données
sous son n o m , qui m otivoient l ’obligation de 7 7 1 4 fr. :
mais il ne paroît pas qu ’il ait vo ulu les p ro d u ire , qu oique
l’acte de 1792 constate q u ’il se les est retenues.
- D ’a b o rd , il est p r o u v é , par l’o b lig a tio n , m êm e , >quer
la quittance la plus considérable étoit ^donnée R ivant
l ’émancipation. •
'
Jusque-là B e n o ît, p r ê tr e , étoit sous, la puissance pa
ternelle ; il u ’avoit pas 'dei fonctions ecclésiastiques ca
pables d’ém anciper; il n’étoit pas s u i ju r is : la loi donnoit
au père l’usufruit des choses m êm e venues d’ailleurs que
des deniers du p ère; et si on se pénètre bien de la p o
sition de B e n o ît, il y a du ridicule à le croire capable
de payer 7 7 1 4 francs en si peu de temps.
E t que f a u t - i l p ou r juger l ’avantage in d ire c t? des
preuves? n o n , car la fraude se cache sous les apparences
de la v é r i t é , n im ia p rcca u tio d o lu s , et la parenté de
ceux qui contractent est déjà le prem ier signe que les
auteurs exam inent et regardent com m e prépondérant.
Ricard ( 1 ) , D an ty ( 2 ) , C habrol ( 3 ) , disent sur cette
matière tout ce q u ’on peut penser. I , article 9 11 du
Code N ap o léo n réunit toute leur doctrine. « T o u t e
« espèce de disposition au
(1) P. i re. , ch.
3,
profit d’ un incapable. EST
sect. 16.
(2) Chap. 7 , sur Boiceau.
(3) Chap. 14, art. 26, sect. i 3 .
)
B a
�«
nulle
( 12 )
, soit q u ’on la déguise sou s la J b r m e d ’un
« co n tra t o n é r e u x , soit q u ’on la fasse.sous le nom de« personnes interposées. »
A in s i la loi ne com pose pas; elle ne se prête pas aux
arguties q u ’on peut tirer d’une précaution plus adroite.
E lle a n n ulle.
D u m o u lin n’avoit pas dit autrement sur les ventes et
quittances d’ un p ère à son fils ou à son gendre. C o n clusurn est qu od ven ditio fa c ta j i l i o , v el g en ero , n o n
y etiarnsi n o ta riu s d ic a t p retiu m num eratum .
f u i s s e cora m se. ( P a r is , 1 2 4 , n°. 1 2 . )
D isons donc aussi que B enoît M a r c o u x , f i l s et lé g i
timante, étant incapable de recevoir au delà de sa lé g i
v a le t
tim e au préjudice du donataire déjà s a is i, n’a à son
profit q u ’ un acte N U L et sujet à rapport.
M a rcoux p ère ne p ou vo it pas lui délaisser des biensfonds en 1 7 9 2 ; il n ’en avoit pas g re v é le donataire; e t ,
p o u r payer, il faut être p ro p riéta ire de la chose donnée
en payement (1). O r , le père ne l ’étoit plus après sa
donation de 1779.
B enoît M a rc o u x se p réva u t du consentement du do
nataire; mais ¿[lie ceux qui pourroient penser qu ’ un tel
consentement est obligatoire, lisent ce que dit R icard (2)
sur cette matière , et ils ne douteront plus. U n p ère
qui sollicite le consentement de son h é r it ie r , est tou
jours un père : h n p e r io sissim u n i rogandi g e n u s , eu tu ,
q u i itnperare p o te s t, rogat (3).
•
(1) Ccd. N a p . , art.
(2) P. i re. , ch.
1238.
?
.
.
3 , sect. 17, n°. 776»
(3 ) Plia, in Traj»
.ii r .
,
;
�( i3 )
D ’ailleurs,' Jean-Baptiste M a r c o u x , donataire, n ’étoit
encore saisi de rien : sa donation de biens présens et
ve n ir étoit en suspens jusqu’.au décès du donateur ; d ’après
l ’article 17 de l’ordonnance de 1 7 3 1 , elle étoit caduque^
en cas de prédécès ; ainsi les enfans seuls ont été dona
taires/«re sua : ils ont été saisis directem ent, et l ’option
n’a pu être faite que par eu x au jo u r du d écès. ] D c l
A in s i toutes les dispositions intermédiaires d u dona-.
taire p rédécédé sont résolues. Son consentem ent n’a p u
rien ôter au droit de ses enfans; ils ont opté p ou r les
biens p ré se n s, et par conséquent c’est lors dp décès.
seulement q u ’ils ont eu le droit de faire rapporter tout,
ce q u i ma'nquoit du x biens existans e n '1779.
,,,/ ? : 0
Ces principes étoient élémentaires jusqu’à nos jo u rs,
et c’est en 1808 q u ’ ils ont reçu une p rem ière atteinte:
mais quelque respectable que soit l’opinion qui les con
teste, la C o u r examinera si elle.doit laisser lesjidées plus
long-tem ps incertaines sur ce point de d r o i t , et quelle
influence doivent avpir,l’autorité de R icard et de C h abrol,
la lettre de la loi ( au jo u r du décès ) , et une lon gue
habitude de ne jamais pfcnser autrement.
>
• Si Benoît M arçou& pe, rapportait pas le dom aine q u ’ il
a ôté à la donation de 1 7 7 9 , il
devroit a u :jmoins la
plus-value : et c’est ce q u ’enseigne Duplessis ( 1 ) , p o u r
le cas m êm e où il n ’y a pas^d’incapacité de celui qu i
reçoit. Q uan d des experts auront estimé ce :dom aine(et
la m a iso n , la 1C o u r r a u ça q u i |ujLr^u;,ajimpcçsé; sui} la
valeur.
• , : :-p - '• • ••
r J, r ; -0{.
..
■•
,-r
'
(1) Des successions ,rliy. i cr. , ch. a. (,
, <.t h
r— ■■ . ,
)j(
�CM )
B enoît M a rc o u x prétend q u e cette demande en rapport
e s t 'n o u v e lle , et doit être ren voyée devant les premiers
jfigés p o u r subir les deux degrés''de juridiction.
" M ais sous tous les points de vu e cette prétention est
mal conçu e, et un autre procès seroit chose frustratoire.
n ' i ° . G’èât Berïoît‘)'M a rc o u x qui demande lu i-m êm e *
12000 fr. de réserve : s’ il l’a'dans les m ains, il ne peut
pas la5 demander.
D o n c les conclusions en rapport ne
sont q u ’une fin de n o n -re c e v o ir.
'
2°. Ses frèresr se joignent à lui p o u r demander ces
12000 fi-ancs : si l ’ ün des demandeurs en est nanti, c’est
à lui seul qü ’ il faut s’en prendre , ou bien le défendeur
est bien fondé à conclure contre lui à ce qu ’il rapporte
l ’objet de la dem ande, puisqu’il est dans ses mains. C ’est
donc encore là une exception légale qui est inséparable
de l ’action. • :
1 i •j -
i
< J3°. E n un m ot,' il àeroit ridicule de dire à celui q u ’on
assigne : P ayez-m o i aujou rd’hui avec Votre argent, et vous
m ’assignèrez demain p o u r obtenir!de m oi la restitution
de ce que vous aurez payé.
4°. L a v e u v e M a rc o u x a toujours demandé le rapport
parl;cliâôuri de ce q u ’il-?avoit reçu à titre de légitim e :
¿¿s^ébhclusionsf6ht été m êm e adoptées. M a r c o u x , p r ê t r e ,s’én eshpìaiht'^ p ou r ne pas rappot-ter le domaine. D o n c
les conclusions actuelles en rapport et désistement ne
sôrit pas' nôiïVellesi
«J't ;«t / , t *i
u, )
.?»•
Cë : q iiî)<ést:'clhii'f,'dans celte cause ;>c’eàt que M a rc o u x
p ère a retranché de sa donation de 1 7 7 9 , un dom aine
tirurnison a “payé" la-légitime-),- et -environ 20000 fr.
en capitaux. Le m om ent ’q u ’il ipcliofei^pouiv diifiinuer
�ainsi la donation , a été lorsque'des m oulins êt'dclüse«
à saumons furent détruits par une in o n d ation , avec/une
. *
;
7
i
pertfc de^plus de 60000, fraijcs.j nu O 1:f ¿b L?iu-»;r- i:J
Si le sieur M a rc o u x père a pu prendre sur ses<;biens
des capitaux aussi considérables, ce n’a pu être que sur
les biens. , lib r e s ,' c’est-à-dire:/sur
la réserve..
.. JjL k
'
.L ' \ k—
*.
» V o ilà l’im putation de droit.
Remarquons; encore q u c jM a r c o u x fils a payé 14000 fr.
sur les légitim es, avant l’ouverture de la succession. L e
p ère lui en doit l’intérêt par c o n v e n tio n , et il n’a pu
y obliger que ses biens l ib r e s , c’est-à-dire, encore sa
réserve. V o ilà une autre im putation de droit.
T elles sont les observations auxquelles les mineurs
M a r c o u x se bornent. Ils ne donnent aucuns dévelo pp emens à la question de cum ulation de la ré s e r v e , et p o u r
le soutien de l’arrêt de la C o u r de L y o n ; un précis aussi
rapide ne peut pas en com porter l’é te n d u e , et l ’arrêt
au reste plaide assez puissamment p o u r lui-m êm e.
L es mineurs M a rc o u x se sont plaints de la réserve
d’ un s u p p lé m e n t , dont le jugem ent de M ontbrison a
donné acte. Ce supplém ent ne peut être dem an d é, lorsq u ’après le décès il dépend des légitimaires de v o u lo ir
un partage ou une légitim e. L ’option des adversaires
est p ositive, et ne doit plus laisser de matière à procès.
Ils plaident s u r la su ccession . Q u ’ ils accum ulent au
jourd’hui toutes leurs prétentions, mais qu ’ ils ne prennent
pas texte dans un procès ju g é , p ou r un procès à naître:
cela n’est ni l é g a l , ni légitime. L e procès de la su c cess 1011 ■
M a r c a u x ;doitA,ê tvc ju g é c]cnnii(iruj L e tei^iple ;de
Janus ne çloitx pas: être o u y q r t 'f p ^ .^ .r n ê m e arrêt qu i
�( 16 )
doit le fermer ; et sî les oncles M arcoux trouvent du
plais ir à se menager un appendice de procès, il est de
la dignité de la Cour de leur ôter-'cette maligne jouissance.
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat. '
Me. M A R I E , licencié avoué.
A RIO M , de l'imprimerie de T hibaud Landriot , imprimeur
de la Cour d appel.. — 20 Mars 1809.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. La veuve et les enfants mineurs de Jean-Baptiste Marcoux. 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
prêtres non émancipés
donations
prêtres
doctrine
Description
An account of the resource
Précis en réponse pour la veuve et les enfants mineurs de Jean-Baptiste Marcoux, appelans ; contre Benoit Marcoux aîné, Benoit Marcoux jeune, et Noel Marcoux, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1779-1809
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0324
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Etienne (42218)
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Rights
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Domaine public
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doctrine
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prêtres non émancipés
Successions
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MEMOIRE
EN RÉPONSE
POUR
L A F O N T , *et L o u i s - A uguste
P E T A U T O N , son mari, habitant à Néris-lesBains, intimés;
C a th e rin e
CONTRE
L A F O N T J e a n -B a p t i s t e BOUR.
N E T J e a n F O R I C H O N , M a r i e et autre
M a r i e L A F O N T , leursfemmes, habitant aussi
à N éris, appelans.
G ilb e r t
;
C e n’etoit pas une assez grande douleur pour une mère
d’avoir perdu, en quelques mois d’intervalle, son époux
et son enfant; il a fallu que, pour satisfaire l'avidité de
A
COUR
D ’A P P E L
DE R I OM.
�( o
quelques collatéraux, elle fût contrainte d’entendre encore
les plus minutieux détails de ce douloureux sacrifice, et
d’en peser scrupuleusement toutes les circonstances.
Il étoit consolant pour elle de penser que sa fille avoit
eu rang parmi les enfans des hommes, et que des mains
de la religion elle étoit descendue heureuse dans le tom
beau : mais l’intérêt ne compte pour l’ien les opinions
et les mouvemens de la nature; il ne respecte pas plus la
cendre des morts que le repos des vivans.
Cependant si les tribunaux sont obligés de tolérer d’in
discrètes recherches, ce ne peut être qu’avec un sentiment
d’indignation qui force à désirer qu’elles soient infruc
tueuses ; et sans doute toute la rigueur de l’examen est
réservée à ceux qui, attaquant les actes les plus sacrés,
s’imposent la tache de les anéantir.
Cette vérité a servi de base à la décision des premiers
juges. Pour arguer de faux un acte de naissance, les
appelans s’étoient soumis à prouver que l’enfant de Ca
therine Lafont étoit né mort; mais ils n’ont présenté que
des doutes au lieu des faits positifs qu’ils avoient annoncés.
De sa part, au contraire, l’intimée a établi claii’ement la
vérité de l’acte de naissance qui faisoit son titre, et qu i,
pour faire pleine et entière foi, n’auroit eu nul besoin de
preuve auxiliaire.
Néanmoins les appelans ne se sont pas jugés vaincus;
et le secours qu’ils n’ont pu trou ver dans leurs enquêtes,
ils l’ont cherché dans des consultations de médecins dont
l’opinion auroit été sans doute bien puissante s’ils avoient
vu , mais qui ont été réduits ¡\ ne présenter que des
hypothèses et des incertitudes, et, sur lu foi de quelques
�( 3 )
faits insignifians, à -présumer que l’enfant pouvoit être
venu au inonde sans vie.
A u reste, la cour ne se rendra qu’à sa propre con
viction dans une cause entièrement réglée par les lois
civiles, et encore plus claire par les faits dont on va lui
rendre compte.
F A I T S .
Catherine Lafont épousa, le 14 brumaire an 1 o , GilbertMarie Lafont, son cousin.
Seule héritière de son père, qui lui abandonnoit dèslors tous ses biens, elle fut assez heureuse pour offrir à
son époux un sort avantageux. Quant à lui, il avoit vendu
tous ses droits successifs à Gilbert Lafont, son frère
partie adverse, pour une somme modique de 10000 fr.
Les époux stipulèrent un gain mutuel d’usufruit, en
cas qu’il n’y eût pas d’enfans survivans.
Ce mariage n’a duré que dix mois et demi; et le 27 fruc
tidor de la même année, Lafont est mort à vingt-trois
ans, laissant sa jeune veuve enceinte de six mois.
A u terme de scs couches elle appela, outre une sagefemme, des parentes ou des amies; mais, loin de sup
poser qu’elle pouvoit survivre à son enfant , plus loin
encore d’avoir réfléchi que cette survie lui donneroit
une succession , le hasard a voulu qu’elle ne s'entou
rât que de la famille de son mari : car, depuis sa dou
loureuse perte , c’éloit là sa société habituelle , pour
chercher des consolations dans ses entretiens et dans ses
souvenirs.
A 2
�( 4 )
Ses couches furent extrêmement laborieuses ; mais
n’ayant éprouvé aucune incommodité pendant sa gros
sesse, la vigueur de son âge seconda la nature, et elle
mit au monde une fille.
Il n’est que trop vrai que cette malheureuse enfant
avoit cruellement souffert de ces efforts. Ses mouvemens,
prolongés jusqu’à sa délivrance , indiquoient le besoin
du repos; car la môme fatigue qui accabloit la mèi’e dût
à plus forte raison agir sur une foible créature, qui avoit
besoin du plus grand repos pour échapper à la mort.
Mais la raison ne cède que trop souvent aux procédés
de l’habitude. On tourmente les enfans sous prétexte de
les soulager, et le souffle de vie qui les anime est quel
quefois incapable de résister à ces prétendus soulagemens.
On suivit donc pour l’enfant de Catherine Lafont la
méthode oi’dinaire. Le cordon ombilical coupé, on cher- ^
cha du vin pour lui frotter le visage et réparer ses forces;
on ne trouva que de l’eau -d e-vie, et on ne l’employa
pas moins au môme usage. Le résultat du remède ne fut
pas aussi heureux qu’on l’avoit pensé : les muscles du
visage se contractèrent, la respiration repoussée se dilata
par des soupirs , l’enfant remua les bras ; mais ce n’étoit
là qu’un dernier effort de la nature, bientôt la vie acheva
de s’é teindre.
Pendant que l’enfant luttoit encore contre la mort, le
curé fut mandé; et quoiqu’il n’arrivnt que long-temps
après l’accouchement , il ne trouva pas moins à cette
enfant des signes de vie, car il lui administra le baptême,
quoique la sage-femme lui eût rapporté l’avoir déjà ondoyée par précaution.
�(S)
Après le baptême, le curé se retira pour aller faire
l’acte de naissance ; car il étoit aussi adjoint et officier
public : il choisit, avant de partir, ses deux témoins.
Ces témoins en effet allèrent à la mairie , et on les
renvoya au lendemain. Comme alors l’enfant étoit mort,
les deux actes furent faits^ l’un à la suite de l’autre, le
21 frimaire an n .
Catherine Lafont étoit héritière de son enfant par la
loi du 17 nivôse, ce qui avoit dû peut-être exciter la
jalousie des adversaires.
Il est naturel qu’ils fussent plus occupés de cette suc
cession qu’elle-même ; et tout ce qui s’étoit passé devoit
leur être connu, puisque Catherine Lafont, comme elle
vient de le dire, avoit été entourée de la famille de son
mari, c’est-à-dire, de la famille des adversaires : la sagefemme elle-même étoit leur tante. Néanmoins, et dans
cet instant malheureux où le sacrifice de sa fortune lui eût
été totalement indifférent, aucun des adversaires n’ima
gina d’élever le moindre doute sur un acte de naissance
q u i, dans une petite commune, et d’après ce qui s’étoit
passé, n’avoit été un secret pour personne.
Trois mois se passèrent, et les adversaires laissèrent
prendre à la veuve la récolte de quelques vignes dépen
dantes de la succession : après ce temps, ils jugèrent con
venable de commencer sourdement les hostilités.
Comme Gilbert Lafont avoit acheté les droits de son
défunt frère, dont la succession étoit créancière du prix
de ces droits cédés, il se fit faire, une saisie-arrêt par scs
bcaux-irères Buuruet et Foriclion, dans lu vue u’embar-
�( 6 )
rasser Catlierine Lafont, et n’osant pas lui-même com
mencer le procès.
Gilbert Lafont, fit encore en ses propres mains une
saisie-arrêt, sans titre ni autorisation; et on en fit une
troisième ès-mains du sieur Soulier, notaire, débiteur
de la succession.
Le premier sentiment de la veuve Lafont fut d’être in
dignée d’une conduite qui paroissoit fondée sur un soup
çon injurieux pour elle; dès-lors elle ne voulut plus rien
ménager, et poursuivit ses adversaires en payement et
main-levée de saisie, le 12 ventôse an i i .Alors Gilbert Lafont fut forcé de s’expliquer, et il crut
l’intimider davantage en s’inscrivant en faux contre les
deux actes de naissance et de décès ci-dessus rappelés :
mais Catherine Lafont lui fit signifier sur le champ la dé
claration expresse qu’elle entendoit se servir de ces deux
actes, et Gilbert Lafont fut obligé de donner suite à sa
procédure. Gilbert Lafont présenta les faits par lui arti
culés, et offrit de prouver que l’enfant étoit m o rt-n é,
ayant la pâleur sur son visage, les yeux fermés, et que
tous les assistans s’écrièrent : Voilà un crifant m o rt ;
que l’adjoint n’avoit pas vu l’enfant, et n’avoit rédigé
les actes que sur la déclaration de deux témoins.
En vertu de jugement du 3 floréal an 1 1 , Gilbert
Lafont fit entendre cinq témoins. Il est essentiel de re
marquer qu’il affecta de ne pas appeler celui qui de voit
donner plus de lumières, la sage-femme. Quant à ceux
entendus à sa requête, voici ce qu’ils ont déclaré.
Lo premier témoin est le curé-adjoint, qui a admi-
�. ( 7 )
nisti’c le baptême et fait l’acte civil. Avant le baptême
il a touché l’enfant et lui a senti de la chaleur.
Le second témoin , François C orre, ne sait pas si
l’enfant étoit vivant ou mort.
Le troisième, M arie L a fo n t,fe m m e P ig n o t , la plus
proche parente des adversaires, sait tout, et a connu que
l’enfant étoit mort à l’éjection de ses excrémens. La sagefemme lui fît signe qu’il étoit mort; elle lui dit aussi de
toucher le cœur de l’enfant pour sentir qu’il battoit, mais
le témoin répondit qu’il ne s’y connoissoit pas. La sagefemme lava l’enfant, et lui mit les doigts dans la bouche*,
il ne donna aucun signe de vie. Puis la femme Corre le
prit sur ses genoux, et ses genoux tremblèrent par la
crainte qu’elle avoit de la mort de l’enfant, et ce trem
blement se communiquoit à l’enfant. Le curé vin t, le
toucha à divers endroits, et le baptisa ; puis la femme
Corre dit à son mari d’aller faire faire l’acte de naissance,
et de ne pas manquer de dire au curé ( qui venoit de
sortir) que l’enfant étoit né vivant. Après cela elle avoue
qu’elle a dit elle-m êm e à la mère que son enfant étoit
vivant, mais que c’étoit pour la tranquilliser; et que lors
qu’elle a voulu dire autrement, Louis Lafont lui a fait
beaucoup de menaces.
L e quatrième témoin, M arie B o u rn et, ne sait rien
par elle-même; elle confirme la proposition faite par la
sage-femme à la Pignot de toucher les battemens du cœur,
et la réponse de celle-ci qu’elle ne s’y connoissoit pas.
Enfin elle a ouï dire dans la maison que l’enfant étoit
vivant.
L e cinquième tém oin, Marguerite L a fo n t , v e im
�m
JBojinefoi, a vu la sage-femme inquiète, lorsqu’elle de
manda de l’eau bénite pour ondoyer l’enfant ; cependant
elle a dit plusieurs fois qu’il étoit vivant. Quand on a
frotté le visage de l’enfant avec de l’eau-de-vie, elle a
remarqué qu’il a fait un léger sou p ir , ce qu’elle a re
gardé comme un signe de vie ,• elle n’en a pas remar
qué d’autres.
Cette enquête, comme le disent très-bien les advei’saires,
étoit parfaitement inutile ; et en effet il n’y avoit rien de
moins prouvé que le faux matériel de la naissance de
l’enfant. Quatre témoins attestoient plutôt la vie que la
mort ; un seul attestoit la mort par ses paroles, et ce
qu’il a indiqué pour la prouver donne plutôt à présumer
pour la vie. Les faits du baptême et de la naissance restoient donc dans toute leur force.
Néanmoins, et par surabondance, Catherine Lafont
voulut aussi faire une enquête; et il ne faut que la par
courir pour être convaincu de la vie de l’enfant.
Le premier témoin est la sage-femme ; elle sentit les
mouvemens de l’enfant dans ses mains : elle sentit les
pulsations du CŒur, et proposa à la femme Pignot d’y
toucher. Quand l’enfant fut sorti elle ne sentit plus de
mouvement, c’est pourquoi elle demanda du vin. On lui
porta de l’e a u -d e -v ie ,' et quand elle en passa sur le
visage de l’enfant, il lit un soupir. Alors ayant à s’occu
per de la m ère, elle a remis l’enfant à la femme Corre
( quatrième témoin ci-après). Elle avoit ondoyé l’enfant;
lo curé est venu et l’a baptisé.
Le second témoin, François JDurin , a soupé avec le
curé le soir des couches. Le curé dit avoir vu l’enfant,
avoir
�C9 \
avoir touché son estomac, senti de la chaleur , cru remarquer de la viey et baptisé l’enfant.
Le troisième témoin est Marie B ournet , déjà entendue.
Le quatrième témoin, la fem m e Corre , a gardé l’en
fant sur ses genoux après que la sage-femme eut fait les
frictions d’eau-de-vie au visage ; elle a elle-même lavé
l’enfant avec du v in , lui a vu remuer les bras trois ou
quatre fois, lui a senti battre le cœ u r , a distingué des
mouvemens au visage quand on y passoit du vin , a re
marqué que l’enfant soupiroit j mais il est mort sur ses
genoux, sans qu’elle ait pu distinguer l’instant où il a
cessé entièrement de vivre.
L e cinquième témoin, Guillemin, a soupé avec le curé
quelque temps après les couches. Il dit qu’il avoit exercé
ses fonctions en baptisant l’enfant, ce qu’il n'auroit pas
*f a i t , s iln eût cru s'être assuré de son existejice, La sagefemme a dit encore au témoin que l’enfant étoit venu
au monde viva n t, et qu’elle l’avoit ainsi déclaré à son
confesseur.
Le sixième tém oin, Georges Forichon, a ouï dire au
curé qu’il avoit senti de la chaleur à l’enfant, et admi
nistré le baptême, sans pouvoir assurer qu’il fut vivant.
Il a ouï dire à plusieurs femmes que la Pignot (celle
qui a dit l’enfant m ort) avoit dit qu’il étoit né vivant;
et qu’elle-même, femme Pignot, lui avoit vu plusieurs
fois porter les bras à la tête , et avoit remarqué plu*
sieui's autres signes de vie.
L e 14 nivôse an 13 les parties en sont venues à l’au
dience où il ne s’agissoit que d’opposer l’acte de naissance
4 l’enquête directe, et même les enquêtes entr’clles. 11
B
�( 1° )
est vrai que le procureur impérial vouloit renvoyer la
décision à deux docteurs en médecine et en chirurgie,
mais le tribunal de Montluçon ne pouvoit se rendre à
cette opinion qui n’en étoit pas une; en conséquence,
après avoir pesé toutes les dépositions et la force des prin
cipes, il a fait droit aux parties par le jugement qui suit.
« Considérant que tous les actes de l’état civil font
cc foi jusqu’à inscription de faux ; qu’il est établi par un
« acte extrait des registres de la commune de Néris, que
« l’enfant de Catherine Lafont est né à trois heures et
« demie, le 21 frimaire de l’an 11 ; qu’il est établi par
« un autre acte que le même jour le même enfant est
« décédé à quatre heures apj ès m id i , c’est-à-dire, demi« heure ajDrès sa naissance; qu’ainsi il est prouvé par actes
« authentiques que l’enfant est né vivant; que pour décr truire ces deux actes, Gilbert Lafont a pris la voie
« de l’inscription en faux incident; que par conséquent
« il s’est imposé la tâche de prouver que cet enfant étoit
« mort avant que de naître ; et il s’agit d’examiner s’il
« l’a remplie; que le premier témoin par lui produit
« a senti un reste de chaleur à l’enfant, et lui a admi« nistré le baptême à telles fins que de raison, a ensuite
« interrogé, comme officier public, l’accoucheuse qui
« lui a attesté que l’enfant étoit né vivant; que le se« cond, quoique témoin dans les deux actes, a déclaré
« ne s’être pas assuré par lui-m êm e de l’existence de
« l’enfant; que le troisième a toujours regardé l’enfant
« comme mort avant que de naître ; qu’il l’a jugé ainsi
“ aux excréinens qu’il a vu tomber, aux signes que la
« sage-femme lui a faits ; que cependant la même sage-
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
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«
«
«
«
«
«
.«
«
«
«
«
«
«
«
«
C ii )
femme lui a dit que le cœur de l’enfant battoit encore,
lui a proposé d’y porter la main, ce qu’il n’a voulu
faire; qu’après qu’il fut entièrement sorti du ventre
de la mère, il ne lui a remarqué aucun signe de vie,
quoique la sage-femme l’ait frotté avec de l’eau-de-vie,
lui ait mis les doigts dans la bouche, et y ait soufflé;
que le quatrième ne s’est pas assuré par lui-même si
l’enfant avoit vie après sa naissance, mais qu’il a entendu dire dans la maison qu’il étoit encore vivant ;
que le cinquième lui a vu faire un léger soupir qu’il
a regardé comme un signe de vie;
« Que de ces cinq témoins , le troisième est le seul
qui soutienne que cçt enfant étoit m ort, parce qu’il
le pensoit ainsi d’après la chute des excrémens et les
signes de l’accoucheuse ; cependant cette même accoucheuse a dit ensuite que le cœur de l’enfant battoit,
a proposé au témoin d’y porter la main, ce qu’il n’a
voulu faire, disant qu’il n’y connoissoit pas.
« Considérant que le premier témoin a senti de la
chaleur à l’enfant, a interrogé l’accoucheuse, qui lui a
attesté que l’enfant étoit né vivant; que cette même
accoucheuse l’a ainsi déclai’é lorsqu’elle a été appelée
en témoignage par Catherine Laiont; que le quatrième
témoin a ouï dire dans la maison, après la naissance.
de l’enfant, qu’il avoit encore de la vie; que le cinquième lui a vu faire un soupir qu’il a pris pour un
signe de vie; que de l’ensemble de ces déclarations il
résulte plutôt que l’enfant a vécu après sa naissance,
qu’il n’étoit mort avant que de naître; qu’ainsi Gilbert
Lafont n’a pas détruit les deux actes de naissance et
B 2
�t
( 12 \
a de décès, ainsi qu’il se l’étoit proposé; qu’on en est
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
d’autant plus convaincu quand on considère que le
quatrième témoin ouï à la requête de Catherine Lafont,
à qui l’accoucheuse remit l’enfant, pour donner des
soins à la mère, a confirmé la déclaration de cette sagefemme, lui a vu battre le cœur, lui a distingué des
mouvemens dans le visage, et a remarqué qu’il soupiroit ; que d’ailleurs il paroît constant que cet enfant
étoit parvenu au terme prescrit par la nature; qu’il
n’a apporté au monde aucun vice de conformation ,
ni aucun signe de putréfaction; que ces dernières circonstances, jointes aux actes de l’état civil, aux déclarations des témoins, doivent suffire pour constater la
vie de l’enfant, ou au moins le faire présumer vivant;
de manière que Catherine Lafont, qui a été m ère,
qui en a couru les dangers, qui a perdu son enfant,
doit obtenir la consolation que la loi lui accorde.
« Le tribunal déboute Gilbert Lafont de sa demande
« en inscription de faux, le condamne en l’amende de
« 60 francs, consignée conformément à l’ordonnance de
« 1737, et aux dépens. Fait et jugé à Montluçon, le 14
« nivôse an 13, etc. »
Après ce jugement, Catherine Lafont en a obtenu un
second le 23 ventôse suivant, lequel prononce la main
levée des saisies-arrêts, et condamne Gilbert L^afont à
payer ce qu’il doit au défunt.
Quant aux Forichon et Bournet, autres parties, il avoit
déjà été rendu contre eux un jugement le 19 ventôse
an 1 1 , prononçant aussi contre eux la m ain-levée de
leur saisie-arrêt ; mais ils avoieut gardé le silence en
�' ( 13 )
attendant l’événement de l’inscription de faux que Gilbert
Lafont, débiteur, avoit seul osé hasarder. Gilbert Lafont
a interjeté appel du jugement du 13 nivôse an 1 3 ; les
autres parties ont interjeté appel de celui du 19 ventôse
an 11 : et quoiqu’ils ne se soient pas réunis en première
instance, ils ont fait joindre leurs appels.
M O Y E N S .
La jonction demandée par les Bournet et Forichon
est aussi singulière que le but de leur appel. On concevroit cette jonction, si Gilbert Lafont avoit interjeté
appel du jugement du 23 ventôse an 13, parce que ce
jugement et celui du ig ventôse an 1 1 , frappent égale
ment sur des saisies-arrêts. Mais le jugement du 14 ni
vôse an 13 prononce sur une inscription de faux à la
quelle les Bournet et Forichon n’ont voulu prendre aucune
part. Comment se fait-il donc qu’aujourd’hui ils veuillent
se rendre commun le jugement qui y fait droit ?
Dans leur appel lës Forichon ont demandé que les con
clusions par eux prises en première instance leur fussent
adjugées ; et ils n’en avoient pris aucune. Leur appel
au fait n’a aucune base , car ils n’ont pu fonder leur
saisie-arrêt que sur le faux de l’acte de naissance; et ce
pendant ce faux n’a jamais été articulé par eux.
Ces réflexions suffisent donc pour répondre à l’appel
de Forichon et Bournet. Il ne reste plus qu’à examiner
les moyens proposés sur l’appel de Gilbert Lafont.
Ils se réduisent h dire i c\ que les enquêtes p ro u v e n t
le faux de l’acte de naissance; 20. que les signes de vie
�.( I 4 )
remarqués par les témoins ne sont pas suffisans, d’après
les lois et les notions de la médecine.
Ce sont ces deux prétentions qu’il faut examiner, pour
en démontrer l’erreur.
P
r e m i è r e
q u e s t i o n
.
Les enquêtes prouvent-elles le fa u x de Tacte de nais
sance ?
Aucun acte ne mérite une foi plus grande que les
actes de l’état civil ; les ordonnances nous l'enseignent,
et la raison nous dit qu’il importe au bon ordre de ne
les détruire qu’avec la preuve claire et évidente d’un faux
matériel.
Car, comme le dit M. Cocliin, les registres de nais
sance sont des monumens publics auxquels la loi veut
qu’on donne une foi entière, comme dépositaires de l’état
des hommes.
Il ne faut pas être plus exigeant que la loi; elle se con
tente, pour la déclaration des naissances, du témoignage
du père s’il est vivant, et de celui de la sage-femme ou
l’accoucheur, si le père est mort ou absent; car l’accou
cheur a lui-même un caractère public, et seul il fait foi
de la naissance. (L o i du 20 septembre 1792, tit. 3, art 2.
Code civil, art. 56.) Il faut en outre deux témoins, mais
ce n’est pas pour attester la naissance, c’est seulement
pour attester la déclaration.
Enfin il faut que l’enfant soit porté à Vofiicier public,
ou qu’il vienne s’assurer de sa naissance. ( Loi du 20 sep-
�( i5 )
tembre, tit. 3, art.
) Voilà tout ce que la loi a exigé.
Quand elle a dit qu’un acte de l’état civil feroit foi, et
que la preuve ne seroit pas reçue contre ce qu’il énonce,
c’est une chose assez bizarre qu’on pense l’anéantir, sous
prétexte d’une inscription de faux, par la même voie de
la preuve testimoniale. Ce ne seroit qu’un pur changement
de forme, si les tribunaux, en expliquant la loi par le
sens qu’elle présente, ne pensoient que celui qui s’inscrit
en faux s’engage à quelque chose de bien plus positif qu’au
résultat d’une simple enquête, puisqu’un acte public ne
peut être anéanti par une preuve testimoniale.
Sans doute si on présentoit un extrait de naissance faux,
la justice ne devroit y ajouter foi que jusqu’à la preuve
du faux-, et c’est là le but de l’art. 45 du Code civil : mais
quand il s’agit de démentir la déclaration dont la loi s’est
contentée, sans contredit aucune preuve testimoniale ne
doit suffire pour faire tomber l’acte; ou bien il falloit
dire franchement que les actes de naissance ne faisoient
foi que jusqu’à la preuve contraire.
Ces réflexions, présentées à la prudence de la cour, ne
tendent point à éluder l’examen des enquêtes ; et pour
cela il n’y auroit qu’un seul mot à dire, c’est qu’au lieu
d’y voir la preuve de mort annoncée, on a peine à trouver
qu’un seul témoin ait certifié ce fait sans en douter luimême.
Que devoit prouver Gilbert Lafont? et qu’a-t-il prouvé ?
Ses faits de faux étoient clairs et précis. 11 se soumettoit
à établir, i°. que plusieurs personnes étoient présentes
lors des couches, et que toutes ces personnes s’écrièrent :
Voilà un enfant mort;
�(i 6 )
2°. Que la sage-femme ayant frotté l’enfant avec de
l’eau-de-vie, elle ouvrit sa bouche avec un de ses doigts,
mais que sa bouche se referma de suite; qu’il étoit pâle,
€t avoit les yeux fermés ;
3°. Que François Corre n’arriva dans l’appartement
que dans l’instant où la sage-femme plioit l’enfant pour
le faire enterrer;
4°. Que la femme Corre dit à son époux d’aller avec
Louis Lafont faire faire les actes de naissance et de décès,
qui furent rédigés dans le même instant;
5°. Qu’il n’a été fait aucune réquisition à l’adjoint de
sc transporter dans la maison où étoit l’enfant; qu’il n’a
par conséquent remarqué aucuns signes de v ie , et qu’il
n’a rédigé les deux actes que sur la déclaration de deux
témoins, dont l’un étoit l’aïeul, partie intéressée,* et l’autre
avoit seulement vu ensevelir l’enfant.
Le premier fait n’est attesté en partie que par un témoin
qui est démenti par tous les autres. Ce ne sont pas toutes
les personnes présentes qui s'écrièrent : Voilà un enfant
mort ; c’est la femme Pignot qui prétend seule l’avoir dit à
Marie Bournet, parce qu’elle a vu tomber des excrémens ;
mais Marie Bournet ne le confirme pas.
Cette Pignot qui a voulu tout dire est tombée dans le
piège ordinaire des menteurs; elle sc contredit elle-meme
sur tous les points. L ’accoucheuse lui fit signe que l’enfant
étoit mort, et cependant l’accoucheuse l’engagea à sentir
Lattre son cœur; elle refusa de s’assurer si l’enfant étoit
vivant, parce, qu "‘elle ne s y connaissait pas : cependant
elle avoit déjà dit que l’enfant étoit mort.
Ces contradictions s’accordent parfaitement ayep la dé
position
�( 17 )
position du témoin Forichon, qui a ouï dire à plusieurs
femmes que cette même Pignot leur avait attesté que
l’enfant étoit vivant, et qu’elle lui avoit remarqué plu
sieurs signes de vie. Cette malheureuse a ensuite changé
absolument de langage; et ceux qui la connoissent ne s’en
étonnent pas.
Toutes les personnes présentes n’avoient pas dit : Voilà
un enfant mort; puisque tous les autres témoins présens
ont remarqué des signes de vie plus ou moins prononcés.
L e deuxième fait n’est prouvé par aucune déposition,
si on en excepte la circonstance attestée par la même
Pignot, que la sage-femme ouvrit la bouche de l’enfant :
fait isolé, faux et inutile. Mais personne-n’a dit que la
bouche se refermât de suite, et que l’enfant eût, en nais
sant, ni de la pâleur, ni les yeux femiés.
L e troisième fait n’est encore déclaré par aucun té
moin. Corre n’a pas dit être venu seulement quand on
ensevelissoit l’enfant, mais l’avoir vu sur les genoux de
sa femme. La loi n’exigeoit pas même de l u i , comme
témoin, qu’il attestât la naissance, elle ne l’exigeoit que
de la sage-femme; et il étoit témoin de l’attestation seule
ment. S’il avoit déclaré la naissance, comme témoin ins
trumentale il feroit encore fo i, et ne seroit pas admis
à se rétracter.
lie quatrième fait étoit aussi insignifiant que le précé
dent, et n’est pas déclaré de la même manière par la
P ign ot, quoique ce soit elle qui ait dicté évidemment
les faits articulés par l’adversaire.
Il y a même quelque chose d’essentiel à remarquer dans
ce que disent Corre et la Pignot. Celle-ci assure avoir tout
vu depuis les couclics jusqu’à l’inhumation, et cependant
C
�( i8 )
Corre dit'que c’est elle qui vint le chercher à sa vigne;
elle s’est donc absentée quelque temps.
Le cinquième fait est démontré faux par tous les té
moins; car bien loin que le sieur Reynaud, adjoint, ait
rédigé ses actes sans se transporter dans la maison où étoit
l’enfant, et sans le v o ir, il dit lui-même y être venu et
l’avoir vu. Tous les témoins parlent de ce fait, et la Pignot
elle-même déclare que le sieur Reynaud toucha l’enfant
à plusieurs endroits, et le baptisa.
Ainsi rien de ce que Gilbert Lafont avoit offert de
prouver ne l’a été. L ’acte de naissance demeure donc dans
toute sa force.
Quand on ôteroit de son enquête tous les signes de vie
articulés par ses propres témoins, il ne resteroit que des
doutes sur la mort de l’enfant; et des doutes ne détruisent
pas un acte.
Ces doutes encore ne sont communiqués que par un
seul témoin qui a refusé de toucher l’enfant, et qui n’ayant
pas voulu s’éclaircir veut cependant communiquer tous
les éclaircissemens.
Il faut se méfier d’elle, puisqu’elle s’en est méfiée ellemême; d’ailleurs ses contradictions appellent aussi la mé
fiance, quand elle ne seroit pas personnellement suspecte,
comme la plus proche parente des adversaires. D ’ailleurs
c’est une chute d’excrémens qu’elle a regardée comme
signe de mort. Sur ce fait même, qu’il est étonnant qu’elle
ait pu vérifier avant la fin des couches, de quel poids
peut être un semblable témoignage? C’est là cependant
la seule preuve de la mort qu’elle donne, ou plutôt la
seule preuve que fournit l’enquête.
�C *9 )
L e cu ré auroit été un témoin important s’il avoit as
sisté au commencement des couches ; mais il a fallu l’en
voyer chercher et l’attendre : et quoique, dans ce délai
assez long, la vie de l’enfant n’ait pu que diminuer,
cependant à son arrivée il a encore senti de la chaleur;
et si l’enfant avoit été mort - n é , cette chaleur n’auroit
pas duré jusqu’alors , surtout à la fin de décembre. Ce
qu’il y a de certain c’est que le curé n’atteste pas que
l’enfant fût mort, c’est qu’au contraire il l’a baptisé comme
vivant, et après un premier baptême. O r , suivant les
règles, ce premier baptême suffisoit, n’y eût-il eu que du
danger, Canonistœ dicunt sufficere quod aliquod mernbrum baptizetur, ut sit irifans christianus .
Ainsi ce second baptême fait par un prêtre est une
présomption authentique de la vie, d’après les auteurs :
à cette présomption se joint la preuve légale de la vie
par l’acte de naissance fait par le même témoin. A insi,
quand il marqueroit les conjectures de mort les plus
fortes, jamais il n’y auroit lieu d’annuller son propre acte
public, qui parleroit plus haut que sa déposition.
On voit d’ailleurs dans cette déposition du curé une
retenue qui abrège trop les détails, et qui s’explique assez
par l’inquiétude que devoit lui donner malgré lui une
inscription de faux contre son propre acte.
Mais cette circonspection est corrigée par les témoins
Durin et Guillemin, à qui le curé a dit à diilerens inter
valles qu’avant de baptiser l’enfant il s’étoit assuré de
son existence.
Si à cela 011 ajoute les dépositions de la sage-femme
de la veuve Bonnefoi et de la femme Gorre, il n’y aura
plus à douter; car les m oum ncns de l’enfant dans la main
C 3
�( *> )
de la sage-femmè, les battemens du cœur, les soupirs ,
les bras remués trois à quatre fois, la contraction des
muscles du visage, sont sans contredit des signes évidens
d’existence.
. Cent témoins, qui diroient avoir vu un individu mort,
ne détruiraient pas le témoignage de ceux qui l’ont vu
vivant. Les apparences de la vie et de la mort sont sou
vent difficiles à reconnoître, et peuvent d’ailleurs avoir
lieu quelquefois alternativement.
S e c o n d e
q u e s t i o n
.
Les signes de vie remarqués par les témoins so n t-ils
suffisons ?
> Les lois françaises sont muettes sur cette question, et
la jurisprudence s’est toujours basée sur les lois romaines,
qui ne laissent presque rien indécis.
A peine l’enfant étoit conçu qu’il étoit compté parmi
les créatures, et réputé vivant toutes les fois qu’il s’agissoit de son intérêt.
Si cependant il mouroit avant de naître, il n’étoit pas
réputé avoir v é c u , parce qu’alors en effet son intérêt
étoit nul, et il étoit inutile qu’il eût vécu pour l’intérêt
d’autrui.
Mais dès l’instant qu’il étoit né, il devenoit capable de
succéder et de transmettre, quelle que foible et courte
qu’ait pu être sa v ie , licet i l l i c o decesserit. L. 2 , cod.
•ZJe post. hœr.
Cependant les écoles ne s’accordoient pas sur les preuves
de la v ie , lorsqu’il s’agissoit de savoir quand 1111 testa
ment étoit annullé par la naissance d’un posthume. Les
�( « )
proculeïens, qui étoient les rigoristes du droit, vouloient
que l’enfant, pour être réputé avoir vécu, eut crié, c/«rnorern erniserit. Mais les sabiniens n’étoient pas de cet
avis, et répondoient que la foiblesse ou un défaut d’or
ganes peuvent empêcher les cris de l’enfant, quoique visi
blement il existe. Justinien termina ce débat par la loi
Quod diù certatum , et dit, en approuvant l’opinion des
sabiniens, que le testament étoit rompu si l’enfant étoit
né vivan t, quand même il seroit mort immédiatement
après sa naissance, et même dans les mains de la sagefemme.
Sabiniani existim abant si vivus natus esset e t s i
v o c e m n o n e m i s i t rumpi testamentum : eorum etiam
nos laudamits sententiam , et sancim us , si perfectè natus e s t , lie et i l l i c o postquam in terrarn cecidit vel
i n m i n i b u s o b s t e t r i c i s decessit, run/pi testamentum. Loi Quod d iù , code D eposth. lib.
Cette supposition d’une mort aussi prompte, pour ainsi
dire, que la naissance, marque assez que la loi n’a pas
exigé des signes de vie bien prononcés, puisque le son
de la voix ne lui a pas même semblé nécessaire.
11 y a plus, car la loi encore a prévu le cas où un
accouchement auroit été tellement forcé et difficile que
l’enfant n’auroit pu être extrait qu’en partie. Si la por
tion qui a vu le monde est celle en qui consiste princi
palement l’existence, l’enfant n’en est pas moins réputé
avoir vécu, quoiqu’incapable de conserver la vie; et la
loi en ce cas se contente du moindre souffle.
S i non integrum anim al editum s i t , curn s p i r i t u
tam en , adeo testamenium rumpit. L. 12 ; lf. D e liberis
et posth.
�( 22 )
Ces principes ont toujours été adoptés par la jurispru
dence ; et les auteurs du droit les enseignent comme des
maximes certaines.
Lebrun se plaint avec éloquence de ceux qui veulent
pour signe de vie avoir entendu la voix de l’enfant ;
« comme si, dit-il, la nature attentive à d’autres choses,
« ne pouvoit pas, dans un petit espace de temps, vivre
« et mourir sans se plaindre : au contraire l’on peut dire,
« ajoute-t-il, que l’enfant qui se tait ainsi en naissant,
« subsiste en partie par ce silence, parce que la nature
« ménage ses forces pour prolonger sa v ie , et évite do
« la dissiper en accens superflus. » (L ivre i , chap. 4 ,
sect. 1.)
M . Domat, cité par les adversaires, s’occupe des cas
où l’enfant est né avant le terme ordinaire; et quoique
dans l’usage on n’ait jamais regardé comme viable un
enfant né avant le septième mois, M . Domat distinguo
le cas où il s’agit de son état personnel, de celui où il
est question de savoir s’il a succédé et transmis la succès*'
sion. Dans la première espèce, c’est-à-dire, cum agiturde statu e tjît qucestio statûs , M . Domat pense que l’en-r
fant, avant sept mois, n?est pas réputé avoir vécu : mais
quand il ne s’agit que de transmettre la succession à ses
héritiers, ciim agitur de transmissione hœreditatis , les
raisons ne sont plus les mêmes, et il n’importe plus que
l’enfant ait pu vivre, il suffit qu^il ait vécu; et M . Domat
cite des arrêts qui ont réputé successibles des enfans de
quatre et cinq mois, nés même par l’opération césarienne.
( Liv. 1, sect. 1, n°. 5 , p. 2. )
Remarquons qu*ici il s?agit d’un enfant venu à leruio
après neuf mois, et dès-lors légalement viable ,
�( 23 )
Henrys, cité encore par les adversaires, ne leur est pas
plus favorable que Domat; il parle d’une cause où il s’agissoit d’un enfant q u i, loin d’être regai-dé comme mort
pour avoir rejeté des excrémens, n’avoit au contraire
donné d’autres signes de vie constans. Voici littéralement
le fait l'apporté par M . Henrys lui-même. « Une mère
« n’ayant pu rendre son enfant qu’avec peine et violence,
« et cet enfant n’ayant donné d’autre signe de vie que
« par les excrémens qu’il avoit rendus, cela fit douter
« s’il avoit survécu la mère ou non. Ceux qui avoient
« intérêt qu’il fût plutôt né vivant que m ort, ne man« quèrent pas d’user de précaution, et de faire ouïr par« devant le juge la sage-femme et un médecin. Le prê
te texte qu’ils en prirent fut au sujet de l’enterrement,
« et sur le refus que le curé pouvoit faire de le mettre
« en terre sainte. Y ayant eu procès en ce siège, nous
« fûmes ouïs pour le procureur du ro i.... La sage-femme
« ne s’étant arrêtée qu’à l’éjection des excrémens, et en
« cela n’ayant pu parler que par l’organe du médecin...
« le rapport nous paroissoit précipité et affecté ; nous
« crûmes qu’il y avoit plus d’apparence d’en ordonner
« un second.... que puisqu’on n’avoit établi la vie de
« l’enfant que sur ce signe seul, les médecins en pou« voient aussi-bien juger que s’ils avoient été présens à
« l’enfantement. Nos conclusions furent suivies, et un
« nouveau rapport fut ordonné. Y ayant eu appel au para lement, la cour a cru que le premier rapport devoit
« suffire; en un m ot, que sur le doute , et dans les cir« constances du f a i t , il fa llo it plutôt juger que Tenfant
« avoit eu vie , que d'être mort-né. » ( Quest. 2 1} liv. 6.)
Enfin Acaranza, cité aussi par les adversaires, dit, au
�C 24
) *
rapport tle Bretonnier, dans son traité D e p a riu , ch. 16,
n°. 32, que le moindre signe de vie suffit s’il est certain.
Dans une cause qui dépend toute entière d’un fait pu
blic et légalement attesté, que de simples indices ne peu^
vent détruire, les réflexions des docteurs consultés par
les adversaires ne conduiront pas la cour à tout l’éclair
cissement qu’elle avoit lieu d’attendre de leurs lumières;
car ces docteurs n’ont pu se déterminer que par le vague
des enquêtes : aussi leur opinion se réduit-elle à un système.
Mais quelque brillant que puisse être un système, jamais
l’incertitude n’amena la conviction.
Le raisonnement des docteurs consultés se réduit à ceci :
La chaleur, les mouvemens de l’enfant, ses soupirs et le
battement de son cœur, peuvent avoir trompé les témoins,
parce que les genoux trembloient à celle qui tenoit l’en
fant sur ses genoux, et ce tremblement, communiqué k
l’enfant, a pu en imposer pour un mouvement qui lui fût
.personnel. Le seul soupir entendu étant un dernier soupir,
n’a été qu’un mouvement expiratoire, sans inspix*ation,
parce que les poumons n’ont pas eu la force de supporter
le volume d’air nécessaire à la respiration. Les signes de
vitalité remarqués ne sont qu’un reste de contractilité et
d’irritabilité tels qu’on les observe sur les têtes nouvel
lement coupées, sur le larynx des oies, et au galvanisme,
Tout cela 11’étoit qu’un indice de la cessation encore
récente de la vie animale.
La base de ce système est une simple possibilité : le fait
principal qui le motive n’est pas exact, et par conséquent
le système s’évanouit tout^entier,
Lo
�( 25)
Le tremblement des genoux, imputé à la femme Corre,
n’est pas attesté par elle; et sans doute sa déposition de voit
être la plus notable à l’égard d’un fait qui lui étoit per
sonnel.
_ Le soupir appelé un dernier soupir est encore une
.erreur ; car puisque les docteurs ont choisi les témoins
qui parloient de visu , ils ont dû remarquer que la sagefemme, après avoir lavé l’enfant avec de l’e a u -d e -v ie ,
entendit un gros soupir ; puis elle le remit à la femme
Corre pour s’occuper de la mère. O r, à son tour, la femme
Corre lava l’enfant avec du v in , et alors remarqua que
l’enfant soupirait, qu’il avoit des mouvemens dans le
visage, qu’il remua les bras trois ou quatre fois, et que
le cœur lui battoit.
Ces soupirs ne sont pas les mêmes que ceux entendus
par la sage-femme quelque temps auparavant. Il n’y a
donc pas, comme l’ont cru les docteurs, un seul et der~
nier soupir.
A lo rs, et sans examiner s’il est possible qu’un enfant
sortant du sein de sa mère rende de l’air par expiration,
sans en ayoir jamais aspiré, il est au moins certain que le
premier de ces soupirs, à supposer qu’il n’y en ait eu que
(deux, n’est pas un dernier mouvement expiratoire passif.
Après pette exanimation, il seroit impossible de conce
voir qu’un second soupir eût pu succéder au premier. C’est
bien assez d’admettre un premier soupir dans un nou
veau n é , si ses poumons n’ont pas eu la force de sup
porter le volume d’air nécessaire à la inspiration.
Les signes de vitalité remarqués aux têtes fraîchement
coupées ne semblent devoir rien prouver à l’égard d’un
enfant qui ne s’éteint que par foiblesse, Dans une tête
D
�( X
)
............................
coupée,la vie Surprise, pour ainsi dire, pendant sa force,
s’arrête encore dans une partie restée saine. Les muscles,
irrités ordinairémerit par la moindre blessure, le sont
bien davantage par leur section entière; et leur contrac
tion communique à tout ce qui en dépend un jeu mé
canique qui n’est pas la v ie , mais qui en est l’apparence.
A u contraire quand un corps entier s’éteint par débi
lité ou dissolution, ce mouvement des muscles ne peut
pas survivre à l’atonie de l’organisation ; à plus forte
raison dans un enfant nouveau, qui n’auroit pas eu la force
de supporter une seule a s p ir a tio n , toute contractilité et
irritabilité semble une Chose entièrement impossible.
Le larynx des oies ne répète leur cri que pendant la
durée du souffle qu’on y communique; ainsi il n’y a pas
de vitalité dans ce qui exige une fonction étrangère.
Le galvanisme peut bien, par une combinaison de mé
taux, produire sur des chairs inanimées une commotion
dont nos sens imparfaits ne peuvent pas apercevoir la
cause : mais, quelle qu’elle soit, elle est le produit d’un
appareil quelconque ; et jamais un corps n’a répété les
mouvemens galvaniques hors la présence de cet appareil.
'
Remarquons une vérité frappante. Dans leur propre
opinion les docteurs ont supposé que la vitalité même
qu’ils présumoient dans l’enfant, étoit l’indice de la ces
sation encore récente de la vie animale.
Voilà donc une présomption de mort attachée à la con
viction que l’enfant vivoit encore un instant auparavant.
O r, cet instant, où est-il ? qui peut le saisir aujourd’hui,
quand les assistons ne l’ont pu reconnoître? Gomment,
dans une matière aussi conjecturale que les signes de la
�( *7 )
mort, les docteurs assureront-ils que l’enfant de Cathe
rine Lafont, venu à terme en l’an n , soit mort avant,,
ou pendant l’extraction, ou une minute après sa ,nais
sance, avant, ou pendant son baptême, ou in manibus
obstetricis , suivant le langage de la loi.
La sage-femme l’a gardé quelque temps; après elle, la
femme Corre l’a gardé; puis le curé, mandé pour le
baptiser, est venu; et c’est après tout cela qu’on a été
certain de sa mort.
Quand il n’y auroit pas de signes de vie reconnus, rien
ne seroit plus conjectural que les signes de la mort, et
en ce cas même il faudroit seulement douter.
Car, comme le dit M . W inslow , « si la chaleur du
« corps et la mollesse des parties flexibles sont des signes
« incertains d’une vie encore subsistante, la pâleur du vi
te sage, le froid du corps, la roideur des extrémités, la
« cessation des mouvemens et l’abolition des sens externes,
« sont des signes très-équivoques d’une mort certaine....
s II est incontestable que le corps est quelquefois telle—
« ment privé de toute fonction vitale, et que le souille
« de la vie y est t e l l e m e n t caché, qu’il ne paroît aucune
« différence de la vie et de la mort. >3 ( Dissertation sur
l’incertitude des signes de la mort, page 84. )
Et c’est parce que les signes de la mort sont plus dou
teux que ceux de la vie, que les auteurs de médecine
légale se contentent des moindres indices pour présumer
la vie de reniant.
Si spirai’erit, dit Zacliias, si.membra distenderit , si
se r/éoverit, si sternutaverit., si urina/n reddat. (Quest.
m édico-lég. liv. i*?1*- tit. 5 ,11°. 123.) Cependant la plupart
D 2
�.
C ¡8 ) '
de ces cas pourroient se prendre encore plus pour de
simples mouvemens de vitalité musculaire.
Foderé marque une notable différence entre le cas où
l’enfant seroit mort dans le ventre de sa mère, et celui
où il ne meurt que pendant sa naissance. A u premier‘
cas, l’état qu’il décrit des souffrances de la mère ne laisse
pas de doute ; au deuxième cas, il indique comme signe
de mort le défaut de pulsation et de chaleur des artères
ombilicales : néanmoins i f cite encore des exemples où
ces signes mêmes ont trompé les praticiens. (Médecine
civile, tom. i , n ° . 288.)
Mahon ne pense nullement que la pulsation des artères
soit un simple indice de vitalité et de contractilité. « La
« continuation du battement du cœur et de la circulation
« du sang en général, dit-il, est un indice bien plus sûr de
« la vie de l’enfant après sa naissance. Cette fonction est,
« de toutes celles qui tombent sous les sens, la plus im« portante de la vie animale. » ( Médecine légale, tom. 2,
pag- 393 - )
Si donc nous ignorons quand est mort l’enfant de Ca
therine Lafont, au moins ne Fétoit-il pas quand son cœur
battoit encore; et si les mouvemens des bras et du visage
sont, comme les soupirs, des signes douteux de la vie, au
moins tous les r a i s o n n e m e n s de l’univers ne prouveroient
pas qu’ils sont des signes de mort.
Car il faut pour les adversaires des signes évidens de
mort, puisqu’ils attaquent un acte de naissance.
Eh ! où en serions-nous, si à chaque mort il falloit élever
autant de doutes et d’incertitudes?
Les hommes sont convenus de regarder comme l’ins-
�( ¿g ) ï
tant fixé de la mort'celui de la cessation totale de la cir
culation du sang, suivie de la roideur des membres; et
les intérêts de toutes les familles se règlent chaque joui*
sur la foi de cette croyance.
On sait bien qu’il est de loin en loin des exceptions
à cette règle, et que des personnes ont vécu, après avoir
eu tous les signes ordinaires de la mort.
Mais on ne voit pas pour cela que ces phénomènes
changent les notions de l’habitude ; et certes nul ne certifieroit vivant un homme sans pouls et sans flexibilité de
membres, parce qu’il en auroit vu vivre d’autres ayant
les mômes symptômes de mort.
Comment donc est-il possible de décider qu’un enfant,
qui conservoit du mouvement, étoit cependant m ort,
par cela seul qu’il est des exemples que des individus
morts ont quelquefois donné des signes de vie.
Cependant il ne s’agit ici que de fixer l’époque précise
d’une mort reconnue récente ; et au lieu de la rechercher
dans des possibilités et dans des hypothèses, pourquoi
ne pas supposer aussi une cause plus immédiate et plus
naturelle?
Les couches de Catherine Lafont ont été laborieuses;
voilà un fait connu.
L ’enfant a dû être très-accablé, et avoir besoin du plus
grand calme; si on l’a tourmenté on n’a pu que lui nuire :
voilà la première présomption certaine.
Mais au lieu de lui laisser du repos on lui a coupé le
cordon ombilical, on l’a frotté avec de l’eau-de-vie, puis
avec du vin.
Pourquoi donc np pas croire que ces opérations ont
�( 3° )
achevé d’éteindre une vie encore récente , plutôt q u e ’
d’assigner une époque antérieure, sans aucune certitude,
mais par simple soupçon.
'
Ici au moins nous présentons un système qui a une .
base, et cette base est assise sur une grande autorité.
« Lorsque l’enfant, dit Hippocrate, est sorti du sein
ce de sa mère avec effort, comme il est foible, il ne fautj
« pas lui couper l’ombilic qu’il n’ait crié et uriné. »
(*Hîppocr. de superf. ch. 5 . )
Et qu’on n’objecte pas que ce sont là des principes d’an*
cienne théorie; Alphonse Leroi, qui les rappelle, ajoute :
« Nous développerons ailleurs ce précepte excellent, que.
cc nous tâchons chaque jour de rétablir, » ( Alph. L eroi,
pratique des accouchemens. )
La section du cordon ombilical a donc pu nuire à un(
enfant déjà foible; des frictions d’eau-der-vie sur son
visage ont dû même lui causer une révolution qu’il étoit
hors d’état de supporter : c’est en ce moment que scs
soupirs ont annoncé le dernier effort do la nature; et
quand le spasme a arrêté le battement de son cœur, il
a résulté de cette suspension meme que c est alors seu-?
lement qu’il a cessé de vivre.
Si ce n’est là qu’une présomption, elle a pour elle les
dépositions des témoins qui ont vu des mouvemens jus
qu’après la friction d’eau-de-vie : mais d’ailleurs, dans le
doute même, la religion, la physique et les lois présument
que l’enfant a vécu.
Remarquons combien encore la présomption de la vie
pst ici plus favorable que dans l’espèce des lois romaines. L à
il s’agissait de rompre 1111 testament, et c’étoit en pure porto
�f
►
*
*t
'Cr3*
)
I
1pour le'posthum e, ;s’il mouroit■'iffïcù) 'ïn manibus ofotetricis j ici, au contraire, il s’agit de présumer la vie en
-faveur d’une mère, et de supposer que la nature a suivi
son cours ordinaire, en faisant naître vivant un enfant
q u i, venu à terme, étoit légalement viable.
1 On a articulé contre l’acte de naissance des vices de
forme, mais ils sont imaginaires, et Remporteraient au
cune peine de nullité. Le seul vice conséquent serait de
n’avoir pas porté l’enfant à la maison commune ; mais
la loi dit seulement qu’il sera présenté h l’officier public,
et l’officier public l’a vu.
On se fait un moyen de ce que Catherine Lafont a
contracté récemment un second mariage. Mais qui peut
lui reprocher ce que la loi et les bienséances autorisent:
depuis trois ans elle n’a plus le bonheur d’être épouse
ni mère, et l’obéissance qu’elle doit à son père ne lui a
pas permis de mettre un plus long terme au désir qu’il
manifestoit chaque jour de se'donner un nouveau sou
tien. Mais au reste, quelle influence cet événement peut-il
avoir pour la cause, et surtout pour infirmer un juge
ment antérieur ?
Ce n’est pas moins une mère qui réclame la succes
sion de son enfant, luctuosam hœreditatem , suivant le
langage de la loi. On a,blâmé les premiers juges d’avoir
dit que celle qui avoit couru les dangers de la maternité
méritait la préférence dans le doute ; mais ce motif, bien
loin d’être aussi absurde qu’on le prétend, est entière
ment puisé dans la nature et dans la morale, com m e il
l’est dans l’opinion des plus savans auteurs, et notamment
�( 32 )
-de Domat, qui parle de la faveur de la cause du père ou
de la mère qui survivent à leur enfant.
Cujas dit, comme les premiers juges, que la plus favo
rable interprétation devoit être pour la mère en sem
blable circonstance. Benignius est credere ordinem naturoe servasse f ortunam , ut in dubio m atri f aveam us ,
quœ in luctu est m agno , propter amissum f ilium et
m a ritu m , quàm agnatis, ( Cujac. ad leg.26
D e pact.
dot. )
A quels titres en effet seroient plus recommandables
des collatéraux, qui ne v o y a n t dans les dangers d’une
mère qu’une expectative, et dans ses malheurs qu’une
succession, veulent tout renverser pour en faire leur
p roie, e t, irrités de trouver une barrière dans un acte
authentique, osent rouvrir les tombeaux de leur famille,
pour chercher une heure incertaine, et recueillir pour
ainsi dire la vérité dans le néant ? La cour ne verra en
eux que des profanateurs avides, qui d’ailleurs, dans leurs
moyens impuissans, sont encore bien loin d’avoir satis
fait à ce qu’ils s’étoient imposés à eux-mêmes pour par
venir à renverser un acte d’ordre public, par le motif
unique de leur intérêt particulier.
M e, D E L A P C H I E R , avocat,
M e T A R D I F , licencier avoué.
A. R IO M , de l’im prim erie de Landriot, seul im prim eur d e la.
C o u r d'appel
N ivose an 14.
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Lafont, Catherine. An 14?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Tardif
Subject
The topic of the resource
posthume
successions
enfant né viable
médecine légale
accouchement
témoins
vices de forme
actes de naissance
faux
sage-femme
baptême
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Catherine Lafont, et Louis-Auguste Petauton, son mari, habitant à Néris-les-Bains, intimés ; contre Gilbert Lafont, Jean-Baptiste Bournet, Jean Forichon, Marie et autre Marie Lafont, leurs femmes, habitant aussi à Néris, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 14
1801-Circa An 14
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0323
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0722
BCU_Factums_M0723
BCU_Factums_G1508
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Néris-les-Bains (03195)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
accouchement
actes de naissance
baptême
enfant né viable
Faux
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Posthume
sage-femme
Successions
témoins
vices de forme
-
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1f959743d90f37eb02b82bb3bc65be28
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Text
M
É
M
O
I
R
E
POUR
L e sieur R O B E R T
d e
L E I G E , appelant;
CONTRE
François
ASTORG
et M a r i e
VIGIER,
sa f e m m e ,
intimés ;
«
ET
CONTRE
R O T Q U I E R et J e a n - B a p t i s
L A C R O I X , son mari , intimés.
B r i g i t t e
«
«
*
«
«
t e
L orsque les parties ont stipulé que les fruits (de
l'immeuble donné à a n tichrese) , se compenseront
avec les intérêts, ou totalement, ou jusqu’à due
concurrence, cette convention s’exécute, com me toute
autre qui n ’est point prohibée par les Lois. ( C o d .
« civ. art. 2089. ) »
A
�C2 )
Ce principe de la législation acluelle, conforme aux
lois romaines , adopté par les auteurs du droit qui se
sont le plus élevés contre l ’ usure , décide la contesta
tion sur laquelle la Cour aura à statuer. U n créancier
a joui pendant dix ans avant 1 7 1 4 , un très-petit pré
pour l’intérêt légitime de sa créance. L e débiteur ren
trant dans son héritage à cette époque, a continué le
paiement de l’intérêt pendant quarante ans, et a retiré
vingt-trois quittances, parmi lesquelles sont plusieurs
arrêtés de compte. Quand on lui a demandé le capital,
il a refusé de p a y e r, sous prétexte de l ’ancienne anticbrèse, et a demandé une vérification préalable pour
savoir s i , lors de l ’antichrèse et avant mil sept cent
quatorze, les jouissances de son pré avaient été ou non
d’une valeur supérieure h l ’intérêt échu pendant leur
durée. Voilà en précis tout l’objet de la prétention des
.Astorg ; et si elle a été accueillie par les premiers juges,
c ’e stq u e la cause a été deux foisjugée par défaut contre
Tappelant.
L a créance cédée a passé en plusieurs m ains, et la
résistance du débiteur a occasionné une foule de re
cours et de procédures, qui ont occupé les tribunaux
depuis 1764. Une partie de ces demandes en recours
est encore pendante devant les premiers juges, et il
n ’y a principalement eu litige actuel que l’eifet de l’anthicrèse. L ’appelant rendra donc compte
la Cour de
la convention qui a établi celle anticlnèse, et des actes
qui l’ont suivie.
�C
F A IT S
ET
3
)
PRO CED U RES.
Guillaume Soubie était créancier de Géraud Sales et
sa fem m e d’une somme de 600 fr. en capital, prove
nant d ’une dot, et produisant par conséquent intérêt
de sa nature. Les parties traitèrent sur cette créance
le 19 a o û t i
, et elle fut stipulée payable en quatre
iermeségaux avec intérêt. Il fui convenu que, pour cet
683
intérêt, ledit Soubie pourrait jouir du pré de L a v a l;
niais cette convention n’eut pas son exécution jusques
à un autre traité de 1703. Ainsi il est inutile de fixer
l ’atention de la Cour sur ce premier acte.
Guillaume Soubie-maria Pierre Soubie , son fils , en
1689 , et lui donna ladite créance pour légitime. Celuici la céda au sieur D o u lé, curé de Noailles, par acte
du 10 septembre 16 9 5 , et ce dernier obtint sentence
contre les débiteurs, le
5 octobre
suivant. Cette sen
tence encore n’adjugeait q u ’une hypothèque indéfinie.
lies héritiers du curé de Noailles cédèrent au sieur
E m e ry -R o b e rt, leur créance de 600 fr. et le droit de
jouir du pré L a v a l, par acte du i
5 juillet
1703.
Par ce même acte on voit que Marie Sales, fem m e
Sartiel, débitrice, intervint avec ledit S artiel, son mari,
pour s’obliger en outre de payer audit sieur Robert une
somme de 194 liv. i
5 sous,
provenant d ’arrérages do
rentes, adjugés par trois sentences. L ’acte termine par
la clause suivante, qu’il faut transcrire littéralement
A 2
,
�4
(
)
parce que c’est contre son exécution que les sieurs
Astorg veulent revenir (i).
Faute de paiem ent, Ledit Robert pourra jo u ir du,
su sdit pré de L a v a l, p o u r
le l é g it im e
in tér êt
des
tant et si Longuement que lesdits mariés
seront en demeure DE r e n d r e i c e l l e s , ce qu iLs pour
dites
sommes,
ront fa ir e quand bon Leur semblera , et Jusques à ce ,
se réserve ledit Robert l ’hypothéqué précitée et privilège
de ses hypothéqués. A in s i a été convenu et promis tenir
par lesdites parties sous C obligation , etc.
Après cet acte le sieur E m e r y - R o b e r t se mit en
possession du pré L a v a l, et en jouit pendant les années
1704 et suivantes, jusques en 1714.
Alors Marie Sales était remariée à Pierre V ig ie r ,
et ce nouvel époux s’empara du p ré , sans autre lorme.
L e sieur Robert aurait pu sans doule refuser la remise
de son gage jusqu’à ce q u ’il fût p a yé: mais il était fort
aise d ’en Olre débarrassé et d ’avoir le droit de deman
der son revenu annuel ; en conséquence il assigna les
dits Pierre Vigier et Marie Sales par exploit du 18 jan
vier 1716 .
Il exposa «• que ladite Sales ne saurait ignorer être sa
« débitrice i.° de 600 fr.; 2 ° de 194 ir. i
«• causes portées par acte du i
5 juillet
5 s. pour les
1708; que pour
( 1 ) Il y a une légère différence entre l’expédition qu’en rap
portent les A storg, cote i.rc , et la copie signifiée cote 5; mais
cette différence ne change rien au sens de la convention.
�.
(5 )
v
\
« l’intérêt desdîtes sommes elle n’a'ye consenti engage« ment des fruits du pré appelé de L a v a l, duquel led.
« instant a j o u i paisiblement jusqu’au trouble *.
En conséquence il conclut à ce que lesdits mariés
Vigier fussent solidairement condamnés à lui payer * la
«‘ somme de 3p fr. 14 s. 9 d . , faisant le revenu desdites
»■sommes ‘depuis le 14 juillet 1 7 1 4 , au lieu de La non
« jou issa n ce d u d it p ré , avec condamnation de tous
dépens , dommages et intérêts ».
<
, '
fj'j
# ‘
Il prit d’autres conclusions étrangères à l ’anticlirèse,
et tendantes au paiement des arrérages d’ une renie en
grain, qu’il évaluait pour le passé à 70 liv. 2 s. 6 d.
Cette deman.le fut accueillie par une sentence non
attaquée du 26 février 1 7 1 6 .
Peu de tems après cette sentence, le sieur E m e r y Robert céda sa créance à Joseph R otquier, avec le
#
,l
» •
droit de jouir du pré L a v a l, ou de sè faire payer de
l ’intérêt de ladite créance.
' Cet intérêt fut payé p a r Vigiér , ' et ses premières
quittances prouvent, comme les postéiieures, qu il ne
s’agissait plus du passé.
. .
•'
L a première quil lan ce, du 16 mai 1 7 1 7 , est de 80 fr.
pour les non jouissances du pré de Laval engage, et ce
pour les années l'-jiiJet 1716. (Com m e ces 80 lr. excé
daient de quelques sous l’intérêt légal, lesieur Rotquier
ajouta à sa signature qù’il les i m p u t a i t sur les 70 francs
ci-dessus ).
P a r l a seconde, du
3
*
.
o juillet 1724., le sieur Rotquiér
reconnaît aroir reçu l'intérêt à Lui d u (le la somme de
�794 h'v-
*5
( 6 )
s- en lieu des non jouissances du pré Laval
pour les années 1 7 1 7 et suivantes ,ju s q u e s et compris
la présente, échu au 14 du présent.
M arie Sales décéda, laissant pour héritiers testamen
taires Pierre V igier, son m ari, el Françoise Sales, sa
sœur. Ils ne furent pas exacts à payer, el le sieur R o tquier fit des poursuites en se-servant du nom du sieur
11
E m e ry -R o b e rt, son cédant.
assigna par exploit du
11 mars 1780 lesdils Vigier, et Sales, « pour voir décla«r rer contre eux exécutoire la sentence de 1 7 1 6 , et
« payer i.° 600 liv. d'une part; 2 0 194I1V. i s. d’au« tre ; .° 70 liv. 2 s. 6 d. d’autre ; 4.0 les intérêts adjugés
5
3
« par ladite sen ten ce, et ceux échus depuis el ceux
<r qui écherront à l'avenir, sauf à tenir à compte ceux
<f que les assignés justifieront avoir payés », ( parce que
l ’intérêt des 70 liv. 2 s. 6 d. était resté en suspens).
Cette demande fut reprise en 1735 ; M arie Sartier,
fille du premier lit de Marie Sales et fem m e de Joseph
V ig ie r , fut mise en cause; et le 18 janvier 1 7 3 6 , il
intervint sentenceadjudicalive,el encore non attaquée,
laquelle condamne au paiement desdits capitaux, et seu
5
lement à l ’intérêt échu depuis le i ju ille t 1714.
Celte sentence est suivie de saisie exécution en 1787.
A u lieu de contester, les débiteurs présentent un gar
dien volontaire. Ils font plus, ils paient.
Les Astorgproduisenl sixquiltancesdonnées en 1787,
1 7 3 8 , 17 4 0 , 1741 et 17 4 4 , a compte des intérêts et
frais. Elles sont sur la même feuille.
A u bas de celte m êm e feuille on voit que les parties
�(. 7 ) ,
•.
ont arrêté compie à 88 liv. 16 s., y compris un billet
de 1 liv. ; sur laquelle somme lesV igier paient
liv.
5
53
ledit jour n avril 1746- I-a quitlancc est conçue en
ces termes : de compte arrêté entre nous de tous les reve
nus échus ju sq u 'a u 16 janvier 1 7 4 5 , d e là rente qui
m ’est due par les dénommés de l autre pari (Pierre êt
Joseph V ig ie r), il s ’est trouvé ni être d u la somme de
etc. , sans préjudice, etc.
1
Il paraît que le 28 août 1 7 4 6 , Jean et Joseph R o t
quier, père et fils, débiteurs envers Antoine Rotquier
d’une légitim e, lui cédèrent ladite créance avec pro
messe de garantir et faire valoir.
L esV igie r agirent avec ce nouveau créancier com m e
avec les précédens ; ils produisent huit quittances don
nées par l u i , à compte des intérêts pendant les années
1747 et suivantes, jusques à 1755.
!
•
' **"J
Mais 011 vint à compte le 22 novembre 1 7 5 6 , non
seulement des intérêts échus, mais encore des condamr
' '
|
nations d’une autre sentence étrangère ausieurRobert :
■
*
‘
lout fût réglé jusqu’au jour, h 241 liv. 1 2 s ., après avoir
déduit les dixièm es et vingtièmes , est-il dit, depuis que
ledit Rotquier avait droit
des
sieurs Labianche et R o t
quier, sans préjudice de La somme principale de 864*//^,
I ' ' I(
***
' ■■ *")!J•i‘ •
11 s.) et des intérêts encourus depuis {e 28 août dernier.
Ce règlement fat tellement 'définitif .que^ les lsept
quittances postérieures règlent positivement l’intérêt
annuel à une somme fixe, lantôt de 38,liv. , Jantôt de
36 liv. 1 o s. pour l'intérêt échu.le. . . ; vingtièmes clèdiutsi
^ C e s sept quittances ont toutes la m ehie fo rm u le ,
�m
depuis 1757 jusques au a janvier 1 7 6 4 , date de la
dernière.
,
'! • • I! ( '
ix:?. - 1:
est essentiel d’observer à la Cour que le com pte
de 1766 fut fait avec M ichel Vigier.
3
11
Antoine Rotquier désira être payé de son capital;
et par exploit du 4 juillet 1 7 6 4 , il forma demande en
la justice du Doignon contre ledit M ichel Vigier fils,
et héritier de Joseph et de Marie Sartier, en exécutorialité de la sentence du 18 janvier 1736 , et en
5
paiement dessommes de 600 liv. d’une part, 194ÜV. i s.
d’autre, et 70 liv. d ’autre, portées par ladite sentence.
Ledit M ichel Vigier dit en défenses « que sans ap«• prouver les sentences de 1 7 16 et 17 3 6 , contre les* quelles il se réservait de se p ou rvo ir, il devait lui
« être fait compte des jouissances du pré de Laval qui
5
11 fut engagé par contrat du i juillet 170 3, pendant
«■leur durée , pour être compensées pendant ledit
«• teins avec les intérêts des sommes qui en étaient sus« ceptibles, telles que celle de 600 liv., et subsidiaipe* ment sur le principal, pour être ensuite par lui fairiç
« des offres , etc. »
C e langage évasif d’un débiteur qui voulait éloigner
sa libération , s’est changé en un système sérieux sur
lequel on plaide depuis 1764*
On se disputa de cette manière as^e^ long-tems sous
le nom du sieur E m e r y -R o b e r t. O11 opposa à Vigier
les arrêtés de compte et les quittances. 11 résista le
plus qu’il put à Les m o n trer, en disant qu’il n ’y était
pas obligé, qu’il n’y avait aucuns arrêtés dé c o m p te ,
'
et
�( 9 )'
et que s’il avait renoncé à son droit par quelque acte
qui réglât le passé, c'était an créancier à le produire.
Enfin une sentence ordonna que Vigier exhiberait
ses quittances, et en ferait le dépôt au greffe.
Quand les sieurs Rotquier eurent assez plaidé à
l ’inscu du sieur E o b e r t , ils jugèrent à propos d’inter
venir dans leur propre procédure , et de conclure
contre le sieur Robert à ce qu’il fût tenu de les garan-lir. Cette intervention eut lieu de la part de Joseph
R o tq u ie r, cédataire de 1745.
lie sieur Robert-D eleige, successeur du sieur RobertLablanche, premier créancier, apprenant pour la pre
mière fois qu’il existait sous son nom un procès relatif
h une créance du sieur E ru e ry -R o b e rt - Lablanclie ,
conçut un soupçon bien fondé, sur une manœuvre
dont il aurait dû être informé plutôt. Il se défendit
d’abord avec quelque humeur, parce qu’on avait abusé
de son nom. 11 désavoua toute participation à la pro
cédure déjà fa it e , dit que si on s’était servi d’an
ciennes sentences obtenues par le sieur Lablanclie ,
elles lui appartenaient; et soutint dans tous les cas que
toute action était prescrite.
Mais quand on lui exhiba la cession souscrite par
le sieur R o b e rt-L a b la n c lie , il n’hésita pas en reconnaîlre l’écriture.
Une sentence du 10 juin 1766 appointa les parties
en droit, joignit la demande en recours du sieur R o t
quier à la demande principale, et en m êm e teins réiB
�( IO )
léra contre Vigier les dispositions de celle de 1764 qui
avait ordonné le dépôt au greffe de ses quittances.
Enfin le procès fut jugé par forclusion contre ledit
Vigier et contre le sieur Robert , le 9 mai 1767. L ’es
timation des jouissances du pré de Laval fut ordonnée,
5
sous la déduction des charges foncières depuis le 1 juillet
170 3, jusques et comprise l’année 1714.
L e sieur Robert-D eleige interjeta appel devant la
sénéchaussée d’Aurillac et intima, comme il led evait,
les deux parties de la cause; c ’e s t-à -d ire , les sieurs
Rotquier et Vigier.
Cet appel fut suspendu pendant vingt ans. Il fut
repris en 1787 par M arie V igier, fille de M ich e l, et
par Astorg son mari. Elle interjeta mêm e appel inci
dent de la sentence de 1 7 6 7 , fonde sur ce que les
charges, disait-elle, 11’avaient pas dû être déduites de
l ’estimation ordonnée.
L e procès fut encore jugé à Aurillac, com me il l ’a
vait été' en la justice du D o ig n o n , c ’e s t - à - d i r e , par
forclusion, et toutes les conclusions des Vigier et Astorg
adoptées le i
3 août
1790* L a sentence du Doignon fut
confirmée en ce qu’elle ordonnait une estimation des
jouissances du pré Laval ; elle lut infirmée en ce qu’elle
ordonnait que les experts déduiraient les charges fon
cières.
lie sieur Robert interjeta appel de celte seconde sen-
1ence
au parlement de Paris. L a suppression de cello
cour en déféra la connaissance au tribunal du district
�( II )
de Mauriac. L à , les héritiers de Joseph Rotquier colludant avec les Vigier et Astorg , signifièrent, dit-on ,
à c e u x - c i qu'ils acquiesçaient aux sentences de 1767
et 1790.
Pendant cçtte procédure, les Rotquier enlr’eux en
introduisaient une a u t r e ;le sieur M eilhac, pelit-filset
héritier d'Antoine Rolquier , cédât aire de Pierre et
Joseph en 174Ü , ne voyant pas rentrer sa créan ce,
quoique ces derniers eussent permis de fournir et faire
valoir, assigna leurs héritiers (parties adverses), pour
le payer eux-mêmes.
Ceux-ci mirent encore le sieur Robert en cause, on
ne sait pourquoi. Après une procédure très-embarass é e , dont il est fort inutile d’occuper la cou r, les débatsse terminèrent par 1111 jugement qui donna un délai
aux Rotquier, parties adverses, pour faire finir le procès
actuel, sinon les condamna à paj’er le sieur M eilh ac;
il fut sursis à faire droit sur. les demandes en recours
et contre recours.
Déjà , et avant ce jugem ent, le sieur R obert, pour
n ’être plus harcelé de tant de débats étrangers , avait
repris en la cour son appel de 17 9 0 , contre les R o t
quier et Vigier.
Ces deux adversaires tiennent aujourd’hui un lan
gage bien diilerent.
Les Rolquier se prétendent follement intimés , et
disent que n’ayant pus interjeté appel de la sentence
d’Aurillac, et ne voulant prendre aucun intérêt dans
la contestation, ils doivent être mis hors de cause, sauf
B a
�( 12 )
à plaider en première instance sur la demande en ga
rantie pendante. Telles sont les conclusions de leur
requête du 8 thermidor an 1 1 , répétées et expliquées
dans une écriture postérieure.
Les Vigier et Astorg se défendent plus sérieusement,
et font les plus grands efforts pour prouver qu’il y a
lieu de revenir à examen sur l’antichrèse de 1703, et
de confirmer la sentence de 1790.
M O Y E N S .
L
e
sieur Robert a intimé deux parties, et ce qu’il
y a de bizarre ce sont ceux-là même qui l ’ont appelé
au procès, et ont pris des conclusions contre lu i, qui
Veulent qu’il ait dû les regarder com m e étrangers à
cette m êm e contestation.
L es sieurs Rotquier et Lacroix qui ont pris tant de
peine à prouver qu’on aurait dû ne les compter pour
rien , mais q u ’on est forcé de compter pour quelque
ch ose, ne se sont plus souvenus que si le sieur Robert
plaide, c ’est parce que le sieur Joseph Rolquier leur
au teur, l ’a assigné en garantie , le 28 octobre 1765.
Ils ne se sont pas souvenus qu’il y avait une sen
tence rendue le 10 juin 1 7 6 6 , qui joignait celte de
mande à celle soutenue par V ig ier; el qu’ainsi après
une jonction, toutes les parties sont parties nécessaires,
tant qu’ une seconde sentence n’a pas prononcé de dis
jonction.
�( i3 )
Ils ne se sont pas souvenus que le même Rotquier
leur au teu r, était en qualité clans la sentence définitive
du 9 mai 1 7 6 7 ; qu’il était aussi en qualité sur l'appel
porté à Aurillac ; et aussi en qualité dans la sentence
cofifirmative du i août 1790. Ils en auraient conclu
3
eux-mêmes que celui qui a été partie nécessaire en
p r e m i è r e instance, et sur un premier a p p e l, est aussi
p a r t i e nécessaire jusqu’à la fin du procès.
Q u’importe qu’il ait été fait pendant l’appel actuel
une procédure additionnelle, où les Rotquier ont de
nouveau appelé le sieur Robert en garantie , et que
les premiers juges en soient encore saisis. Celte super
fétation n’est pas un m o y e n .
Ou l’objet de cette nouvelle demande en garantie
est le même que celui de 1765 , et alors la cour en
est saisie comme elle l ’est de toute cette procédure:
ou il n’est pas le m êm e, et alors les premiers juges
n ’ont retenu qu'un autre procès.
Mais qui pourrait dire que ces premiers juges ont
demeuré saisis de ce qui était de 1 attribution d e l à
cour ; ils ne le pouvaient pas.
L ’acquiescement que
les
Rotquier ont donné en 1792
seulement, aux sentences de 1767 et 1790 , n ’empêche
pas que le sieur Robert n’ait pu et dû les appeler en
cause.
Il l’a pu,' parce qu’il avait intérêt d ’avoir un juge
ment convenu ; et que quand la cour aura slatué sur
la garantie pendanle, les Rotquier quelconques ne se
ront pas assez m a l-a v isé s pour l’appeler ensuite en
�( H )
première instance, et conclure à la m êm e garantie.
Il l’a d û , parce que le parlement de Paris, et par suile
la cour., étaient saisis du procès, et n’ont pas encore
prononcé sur l’efïet de cet acquiescement.
A u reste le sieur Robert est si éloigné d’élever au
cunes contestations, mêm e douteuses , qu’il déclare
s’en rapporter à la prudence de la cour, non-seulement
sur le renvoi demandé par les Rotquier et L a c r o i x ,
mais encore sur le fonds de la garantie e l l e - m ê m e ,
s’il y avait lieu d’y statuer.
Il importe peu au sieur Robert d'être livré seul à
repousser la prétention des Y igier et Aslorg ; elle est
si extraordinaire et mal conçue, qu’il n ’y a véritable
ment qu’un avantage certain à l ’examiner pour la
combattre.
Les Vigier et Astorg ont recueilli beaucoup d’au
torités pour prouver que la convention de 1703 était
nsuraire , et que la prescription n’a pas couvert celle
prétendue usure.
L e sieur Robert n ’a pas mêm e besoin d’invoquer
la prescription ; il lui suffit de rappeler le caractère de
l ’antichrèse, pour démontrer q u e , sur-tout dans l’es
p è c e , elle a été une convention très-commune et trèslégitime.
L ’antichrèse est définie dans la glose de la loi
3 , au fT
depignoribus, un gage donné au créancier, pour q u ’il
en compense l’usage et les fruits qui eu naissent, avec
l ’intérêt de l’argent qu’il a prêté. P ig n u s quod sub
�( i5 )
hoc nomitie credilor accipit, ut ejtts itsum pro
sibi cornputet. D ’autres interprètes ont donné
u s u r is
une dé
finition plus intelligible encore, en disant que l’antichrèse a lieu quand un immeuble est donné au créan
cier , ul percipiat rei fru ctu s i n v i c e m usuratium ,
donec dcbitor pccuaiatn soLçat.
Ce conlrat aussi commun en France avant
de L a w , que les contrais de rente Tétaient
le système
avant r é
mission des assignats, avait été le sujet de beaucoup
de controverses pour ou contre sa légitimité.
Les auteurs les plus scrupuleux sur l’usure, s’accor
daient tous a justifier l’anliclirèse, quand les fruits de
vaient se compenser avec un intérêt légitime , ou dû
de sa nature; ils n’y voyaient de conlrat usuraire que
dans le cas où le créancier percevait les fruiis d’un im
meuble pour l’intérêt du prêt ordinaire, parce que les
lois défendaient de stipuler l’intérêt de l’argent.
Dans le premier cas , il y avait encore une aulre
distinction à faire , et celle-là se puisait dans les lois
romaines.
Le créancier pouvait avoir fait une stipulation évidem
ment trop avantageuse. I/immeuble pouvait produire
plus que l’inlérêt légal, et alors il était suspect d’usure.
Mais voici le tempérament que prenaient les lois ellesmêmes.
Si le créancier affermait à un autre l’immeuble im pignoré; alors, parce qu’il avait un revenu certain , il
était clair qu’il y avait usure dans l'excédant de ce
revenu au-delà de l'intérêt légal;
�( 16 )
Mais quand le créancier jouissait lui-m êm e, la loi
ne voyait aucune usure, dans le fait, même prouvé,
que les fruits de l'immeuble dussent surpasser l’intérêt
légal, à cause de Yincertitude des récoltes.
Ainsi s’expriment les lois 1 4 et 1 7 ,au code de usuris.
Les auteurs du droit français confirment pleine
ment ces principes. Le sieur Deleige rappellera le sen
timent de Cujas, et celui du Dictionnaire canonique*
pour fnontrer qu’il a choisi ses autorités parmi les plus
grands ennemis de l’usure.
Quœ conventio l i c t t a e s t etiamsL p lu r i s do/nus Locari soLeat quam ejjiciat legitimarum usurarum ratio ,
çel ut f u n d i oppigneratifructus omnes
v i c e usu raru m
credUor percipiatj quœ conventio propter incertum eçentum fructuum adm issa est, et propter incertum f r u menti pretium. Observât. C u ja cii in lib. 3, ch. 35.
Le Dictionnaire canonique au mot antichrèse, in
dique cet avis de Cujas, en l’appliquant même à l’in
térêt du simple p rê t, pro credito pigtioris usus. A la
vérité il ajoute que le droit canon ne s’y conforme pas.
Mais, a jo u te -t- il « le droit civil 11’a pas usé de la
«• même rigueur. L ’incertitude des fruits qui peuvent
« être recueillisse risque même que l’on court jusqu’à
jt la perception, d’en être privé; enfin la tranquillité
« qu’acquiert le débiteur, par cet accommodement, ont
• persuadé que cette convention n’avait rien d’illicite.
Le droit français n’a donc vu qu’un contrat aléatoire
dans une convention qui présente en e i l e t des chances
aussi incertaines. Car, à moins d’une disposition cho*
quante
�*7
(
)
quante enlre l’étendue d’un champ et les intérêts d’ une
-créance, nul Ine jpourra assurer que-le créancier sera
certain d ’obtenir en produit net l’intérêt qui lui est dû,
sur-tout pendant plusieurs années consécutives.
S’il s’agit de vig n e s, une année d’humidité ou de
brouillards peut fairè perdre un an de „culture ; s’il
s’agit d’ nn pré , un printems de,sécheresse peut aussi
r u i n e r tout espoir de récolte.); '
C ’est pourquoi un arrêt de 1 7 6 4 , rapporté par Cat e la n ,« a jugé que le contrat d’anticlirèse devait être
r observé en la cause d’une fem m e villageoise qui avait
g baillé a jouir à son créancier, une vigne h titre d’an« ticlirèse , avec celte convention, que le créancier
« jo u ira it'd es fr u its pour.les intérêts , quoique celle
« femme soutînt que les fruits; excédaient ad double le
« légitim e'intérêt. U in certitu d e'■
des fn u its , qu i est
« la raison des lois f u t une des..raisons de l'a rrêt».
Catelan , liv.
5,
ch. I.er ; et Brillon , v.° antichrbse.
•Or, Catelan qui était magistrat, pouvait, sans se trom
p e r , donner le véritable m o tif des arrêts de sa cour.
Ces auteurs citent un-autre arrêt de 1 6 5 9 , qui or
donna l’imputation de l ’excédant du légitime intérêt
sur le capital; mais jSarce que le créancier’ avait donné
la maison im p ign orée, à lo y e r , et qu’ainsi,1e revenu
étant connu, il n ’y avait plus pour lui d’incerlilûdè.
A u ro ü x , sur l ’art. 421 de la coutume de Bourbon
n a is , dit que l ’anliclirèse est un contrat très-licite
quand les intérêts sont dus jauX'créanciers.
•
L o u e t , qu’il a'.pluiaux Astorg deiçiter fcn leur faC
�( i8 )
v e u r , on ne sait pou rq u o i, vante au contraire les
avantages d e l’anlithrèse, et après avoir dit que Dum ou
lin n’admet l’antichrèse que sous deux conditions , la
i . cre que le débileur ait toujours le droit de reprendre
l ’im m e u b le ;la 2.e que les fruits n’excèdent pas année
commune le quinzième du principal, « néanmoins, dit
« Loue! , cet avis n’a été suivi au palais pour la ré« duclion des antichrèses au denier quinze. Car le do
te
«r
«
«
maine du roi a été vendu au denier douze en anticlirèse; et pour juger des actions des hommes seIon l ’ u l il i lé p u b l i q u e , l ’a n t i c h r è s e a p p o r t e plus de
commodité au débiteur que la rente constituée, et
«■est plus tolérable. L ’antichrèse est sujette aux cas
« fortuits, g rê le , g u e r r e , tem p ê te , f e u : pour telle
« année les fruits sont perdus par la violence des tems.
« S’il y auberté de fruits, le créancier jouit de cet heur;
«
«
«
«
si stérilité , il la faut supporter; s’il faut des réparalions, cela tombe sur le créancier. Les débiteurs ont
cet avantage qu’ils ne sont en arrière pour les arrérages qui est leur plus grandë ruine. L e débileur
<r n ’est grévé de cautions, etc.-« Let. P. N.° 9.
Voilà l’auteur que les Astorg ont supposé l ’ennemi
des antichrèses; ils y ont recueilli çà et là plusieurs
arrêts relatifs à des réductions de renies au laux de la
lo i, el par conséquent si dislans de la contestation que
ce serait s’en éloigner soi-même de les réfuler parti
culièrement.
L e s Astorg ont encore cité Roussonu-Lacoinbe , mais
seulement les principes qu’il fait valoir au mot usure.
�19
(
)
Ils ont. évité dë rappeler ce qu’il dit aü mot antichrbse ,
p o u r établir q u e cet acte n’est réputé usuraire que quand :J
il *a eu pour objet *dè faire porter un.intérêt illégitime à
uii.sim pie prêt d’argent, te:
V. ^ ^
v r
( ■
>
Ils citent un arrêt du 22 juillet 1 7 1 3 , du Journal des
audiences 5 mais il s’agissait d un créancier qui faisait
porter intérêt à l’intérêt de son argent, etron n’y lit
pas un seul moi d’ànticlirèse. '
. v > v/
Enfin ils citent Denizart et M .r Chabrol. L e premier
ne fait que copier Lacom be sur l’anticlirèse ; mais M .r
C h a b ro l, bien loin d’être opposé à ce genre de contrat,
dont il ne s’occupe qu’en parlant du contrat pignoratif,
fait une grande différence entre l ’un et l’autrè. Il regarde
le contrat pignoratif comme usuraire, mais il dit que les
antickreses sont plus favorables , en ce quelles n ’ont
rien de déguisé n i simulé. 11 pensé au resteique «le point
« décisif est de savoir si le créancier avait un titre qui
et liii assurât l’intérêt de son argent, ou s’il n’a fait que
c prêter son argent loïs de Fantiçhrèse »;
A la vérité, car il ne faut rien dissimuler j M .r Chabrol
d’accord en cela avec L a c o m b e et quelques autres au
teurs, pense!que l ’excédant desjfriiils ¡dè.vaitij en cas
d’anticlirèse , être i m p u t é ¡sur le capital. 5 mais dan?
'quel cas?
I-,
' •*
-uaMiU f :
’ ;r
IiNon seulement ce n’est pas quancj les partiesise
Sont
réglées volontairement lors de l’acte : encore moins
(quand elles se sont réglées ensuite jiar plusieurs arrêtés
.de compte. Mais comme dit L a co m b e : « Si én'faisant
« une année commune- derr p lu s ie u r s le s fruits excé" C 2
�( 20 )
« chiient considérablement les intérêts ordinaires, Tex
te cédant serait imputé chaque année sur le capital ».
C e que dit Lacom be est recueilli de G o d e fr o i, qui,
sur la loi 17 cletisur, ne s’occupe encore que du contrat
pignoratif, ou du cas où il y a vente : mais la G lose, sur
la même loi, s’explique d ’une manière à ne pas laisser
de doute sur la question.
M ulier obligavit m ihi vineam, et in vicem usurarum
convertit ut recipercm vindemiam. Si plus emolumentl
consecutus sim e x fru ctibu s quam etiam sit in usurâ,
an ULud revocari p ossit quœritur ? IDicitur quod non.
Q uia potueratevenisse quod tuhil provenisset , et tatneri
necesse habe 'ret stare conventtoni} et propter -incertum
non erit retractanda.
Opposera-t-on que les Romains admettaient le prêt
à intérêt, et que ce n’est pas dans leurs lois qu’il faut
chercher des principes?
Mais l’objection serait de mauvaise foi, si on l’ap
plique au cas où il s’agit d’une créance française, por
tant intérêt de sa n atu re; car alors c’est précisément
com m e s’il y avait eu stipulation permise.
Les Romains p e r m e t t a i e n t le prêt à intérêt com me
il est permis en France depuis le
3 octobre
1789; mais
bien loin de tolérer l ’usure, qui est très-loin du prêt à
intérêt, on sait que leurs lois étaient sur ce point plus
restrictives que les nôtres.
Un seul exemple le prouve. Nous soufïrons la ruine
d’ un débiteur par une accumulation criante d’intérêts.
A v e c quelques exploits, nous autoriserions que cent
�C 21 )
ans d’intérêts fussent demandés, et lesHomains ne per-'
mettaient pas que les intérêts accumulés surpassassent
le capital.
>
Les lois romaines disaient comme les ordonnances
françaises : P ro usurls stipulari nerno supra modum
usurarum licitum potest. L . 44 'J F ' d e usur'
Pourquoi donc les lois romaines ne seraient-elles pas
pour nous un règlement en matière d’anlichrèse quand
il s’agit d’y appliquer une créance portant intérêt-de sa
nature ? Pourquoi la loi citée ne serait-elle pas ici ratio
scripta, lorsqu’elle n ’est pas une loi arbitraire, lors
qu’elle est m otivée, lorsqu’elle déclare que sa décision
est fondéé sur une convention vraiment aléatoire ?
Ce n’est pas seulement dans les lois romaines qu’il
faut rechercher les principes de l ’antichrèse ; puisque
/ tous les auteurs du droit français s’en occupent, et que
si plusieurs la regardent com me prohibée dans le cas
d’un intérêt illégitime ,a u moins voit-on qu’ils se réu
nissent tous à penser que si le contrat ne présente pas
de détriment notable au débiteur, il faut l ’exécuter;
et qu’il ne faut ordonner d’imputation qu’au cas où la
convention serait évidem m ent usuraire, et les fruits
disproportionnés à l’intérêt.
-i
. Mais combieniles Astorg sonl loin de cette dernière
h ypothèse, malgré leurs exagérations ridicules sur la
valeur des fruits de leur héritage, qu’à la vérité ils
.précisent pas.
r
ne
L eu r pré de L a v a l , qu’ils ont dénaturé depuis lonr
.gîtes années parce, qu’il était rnai'écagéux ôliplein de
�( 22 )
joncs, avait en surface deux petits journaux ; et certes;
en 1703 il est bien difficile de voir dans un revenu
aussi médiocre et aussi incertain , quelque chose de
supérieur au revenu de 864 livres.
Si des expertsy étaient en vo yé s, comment fixeraientils cette année commune sur dix, que les auteurs et
Tusage veulent être le seul mode de connaître le véri
table revenu appréciable? comment sauraient-ils s’il y
a eu des années sans récoltes? la tradition ne leur rappelera que 1709. Com m ent encore sauraient-ils le prix
du foin, puisque les mercuriales n’ont fixé que celui
des grains?
Eviteraient-ils l ’erreur en estimant ce prix annuel
à une époque critique, ou la rareté du numéraire fut
la première cause de la création des billets de banque?
Les Astorg ont compté sur l’arbitraire quand ils ont
voulu une estimation plutôt impossible que difficile ;
ils s’efforcent d’y voir de la possibilité, mais leurs bases
incertaines achèvent de convaincre qu’il n ’y aurait
rien qui éclairât la justice plus qu’elle ne l’est par elle
m êm e et par les règles du droit.
S’il y a dans l ’acte de 1703 un contrat aléatoire qui
ne présente pas au créancier une chance certaine, une
chance usuraire, pourquoi ne faudrait-il pas l’exécuter
plutôt que de jet ter les parties dans le vague de l’opé
ration la plus conjecturale.
U n intérêt de dot est un vrai capital susceptible luim êm e de produire intérêt e x ojjtcio Ju d icis. A v e c ce
capital rien n’empêchait d’aifermer les fruits d’uu im-
�.
*( a 3 )
m euble pour un certain nombre d’années ; c’était une
vente de récoltes a prix fixe.
Pourquoi au parlement de Paris faisait-on imputer
les fruits sur le iprincipal, quand l’intérêt n’était pas
dû. C ’est qu’alors il n’y avait pas de vente valable des
fru its, en ce que le prix convenu n’était pas réel ; il
n ’y avait plus res, consensus et pretium , et alors pour
d o n n e r un prix aux fruits vendus, il fallait le retrouver
sur le capital, qui était la seule chose q u e l ’aclieteur
eût pu offrir dans ce contrat de vente.
Mais quand l’intérêt est légal, voilà un prix certain;
la vente des fruits est donc légale et valable, et jamais
.personne n'osa prétendre qu’entre le prix et la chose
vendue , il fallût toujours une égalité mathématique.
Si c’était un contrat aléatoire, il était toléré et il
l ’est encore. L ’incertitude des fruits a été la règle des lois et celle de la jurisprudence.
L e sieur Deleige a cité plus haut un arrêt de Cater
lan sur l’anlichrèse d’une vigne ; le journal du parle
ment de Toulouse en rapporte un autre plus r é c e n t ,
"du 3 i juillet 1 7 1 4 , qui dans le cas meme où un mou
lin, tenu à autichrèse, avait, été donné a ferme par le
créan cier, pour un prix supérieur a l intérêt de son
argent, n’a pas ordonné l ’imputation de l ’excédant sur
.le capital ; par cela seul qu’un moulin est sujet à de
-grosses réparations et à des.cas fortuits, et qu'ainsi
.malgré la certitude du prix annuel, il restait toujours
l’incertitude du vrai revenu.
f
Si les arrêts du parlement de P a ris, dans des cir-
�( H )
constances d’usure manifeste, n ’ont pas favorisé l’anlichrèse, au moins est-il certain, que dans les cas d’in
térêts légalement dus, il l’a toujours regardé com me
un contrat très-légitime. L e rédacteur de ce m ém oire
a sous les y e u x l’expédition en parchemin d ’un arrêt
rendu au rapport de M .r Dudoj^er , le
25
mai 1 7 8 1 ,
entre le sieur Geraud-M abit et les dames de Caldaguès,
lequel arrêt ne laisse pas le plus léger doute sur la ju
risprudence de ce parlement.
U ne Jeanne Découblat s’était reconnue débitrice du
sieur de Caladaguès, pour légitimes et autres objets,
de 26,3oo liv., le 5 avril 1 6 6 7 , et lui avait donné deux
domaines à antichrèse, pour en jouir tant et si longue
ment qu’il serait en demeure, de payerlesd. 26,300 liv.,
avec convention que les fruits en seraient compensés
avec l’intérêt de ladite somme.
L e sieur M a b i t , acquéreur desdits domaines, et
cédataire des D écoublat, en demanda le désistement
par exploit du 2 juillet 1774 , avec restitution de
jouissances depuis 16 6 7 , aux offres de compenser les
fruits jusqu’à due concurrence avec les intérêts qui
se trouveraient légitimement d u s, et le surplus im
puté sur les capitaux.
L ’arrêt du 26 mai 1781 a condamné les dames de
Caldaguès, à se désister au prolit du sieur M ab il, des
héritages énoncés audit acte de 1 6 6 7 , à rendre et res
tituer les fru its d'iccLix , à compter du 2 ju ille t 1 7 7 4 ,
jo u r de la demande , lesquels seront compensés jus
q u ’à due concurrence, avec les intérêts de leur créance,
échus
�(25)
échus depuis Ledit j o u r 2 ju ille t 1774. Sur le surplus
des demandes, les parties sont mises hors de cour.
L e Code civil n’établit donc pas un droit nouveau,
lorsqu’il dit, article 2089 , que l’anticlirèse doit être
exécutée comme toutes Les conventions qui ne sont pas
prohibées par les lois.
Or il y a lieu de se régler par la loi nouvelle, toutes
les fois qu’elle n ’est pas en opposition à une loi an
cienne, toutes les fois qu’elle se réfère, au contraire,
aux anciennes lois qui existent. S i nempe declaret j u s
antiquum nom constitutio ,* si declaret tantummodo
quod anteà leges caverant. Morn. I n leg. 7 , jj\ d&
Pourquoi donc ici le Code civil ne s e ra it-il pas la
loi des parties? L ’art. 2089 est la copie de la loi 17 au
code de usuris : il n’y a pas de lois intermédiaires qui
aient disposé autrement.
N
Les Astorg ont voulu établir une perpétuelle com
paraison entre le contrat pignoratif et l ’anliclirèse.
Mais personne n’ignore que par le contrat pignoratif,
le débiteur vend son immeuble sous une faculté de
rachat limitée , et qu’il
devient aussitôt son propre
fermier.
*
Ainsi non-seulem ent il court risque.de perdre son
im m euble, faute d ’argent, mais l'incertitude des fruits
tombe encore sur lui seul annuellement.
,
La différence des deux contrats prouve seule la lé
gitimité de l’un, et l’usure de l’autre.*
D ’après cela, il semble parfaitement inutile de reD
�( 2 6 }
chercher s’il y a prescription conire la prétention des
Astorg; car s’ils l’avaient élevée en 1 7 1 4 , ils auraient
été déclarés non recevables à demander une com pen
sation.
Mais en 1 8 0 4 , c’est véritablement une folie de
vouloir revenir contre cette compensation convenue
par un acte, et ratifiée surtout par tant de paiemens
postérieurs.
Quand les parties ont plusieurs fois arrêté des comptes,
soit en 1 7 4 5 , soit depuis, n’y a-t-il pas unepiésom ption
très-raisonnable, que le débiteur a alors fait valoir tous
les excédans de jouissances qui pouvaient m i e u x se véri
fiera ces époques, et que les rabais qui étaient de justice
ont été faits, s’il y avait lieu.
A cela les Astorg opposent une bien pitoyable ré
ponse. Ils n ’ont pas f a i t ni signé ces quittances, disentils; elles sont du fait du créancier, et 11e sont pas dou
bles ; on ne peut les leur opposer.
Mais ce sont eux-m êm es qui les opposent, c ’est leur
libération ; sans elles ils devraient payer 1renie ans
d ’arrérages de plus qu’ils n ’oifrent. D onc ils s’appro
prient ces quittances , donc elles sont virtuellement
doubles, puisqu’elles sont communes aux deux parties,
puisqu’elles sont pièces du procès.
L a cour a jugé le 29 brumaire an 1 1 , contre le sieur
do l’ enautier, q u ’une quittance à lui donnée desinlérêls
d ’un capital, sans réserves, valait acquiescement à la
demande de ce capital. Cependant la quittance n’était
pas double ; il n ’avait pas signé cet acquiescement.
�C 27 )
A u reste et s e u le m e n t, pour ne négliger aucun
m o y e n , quand le sieur Deleige n ’aurait pas pour lui
le point de droit , les circonstances et les réglemens
multipliés qui font entre les parties la transaction la plus
irréfragable, lien ne l'empêcherait de faire valoir la
prescription de trente ans.
I l , a prouvé que l’anlichrèse n'était pas usuraire ,
quand elle a pour objet des intérêts légitim ement dus
Cela
seul répond aux Astorg qui ne prétendaient
h Timprescriptibilité qu'en y supposant de l ’usure.
Mais encore la question n’e s t-e lle pas jugée par les
deux sentences de 17 16 et 1 7 4 5 , qui n'ont ordonné
le paiement des intérêts, et par conséquent le compte
des intérêts, que depuis 1714.
Vigier sentit si bien qu’elles étaient une fin de non
recevoir contre lu i, que par ses défenses, du
août
3
1 7 6 4 , il se réserva de se pourvoir contre ces deux
sentences.
Mais il ne s’est pas p o u rvu , puisqu’il les a exécutées.
Faut-il encore
parler
de l’appel incident des Astorg,
fondé sur ce que le juge du Doignon , en ordonnant
l ’estimation des jouissances, avait prescrit aux experts
de déduire les charges.
Les Astorg supposent que le propriétaire les p ayait,
et non le créancier.
L e prouvent-ils? ils ne s’en sont pas mis en peine;
mais ils prétendent que cela a du être ainsi.
Ainsi cet appel est fondé sur une présomption.
D a
i
�( aS )
Cependant les Astorg auraient pu voir dans les au
teurs déjà cités, que dans les antichrèses, le créancier
étant mis en possession pour un tems indéterminé pro
s u o , doit le paiement des charges. Mais cette nou
velle question est si peu importante qu’il est inutile
de la discuter en point de droit.
Celui qui jouit est présumé payer les charges, car
les charges sont une diminution des fruits annuels. Il
y a quelquefois exception pour des fermiers, mais c*est
que le propriétaire reçoit un revenu annuel par le paie
m ent de la ferm e; et d’ailleurs le bail en fait toujours
le règlement.
Le sieur Deleige ne suppose pas que les Astorg aient
opposé sérieusement, qu’ayant subi deux degrés de
juridiction, il ne doit pas y en avoir un troisième.
Si cela était a in si, il aurait fallu que l ’assemblée
constituante décrétât que tous les procès pendans aux
parlemens étaient éteints, parce qu’ils étaient au troi
sième degré de juridiction. L a loi du 19 octobre 1790,
a au contraire indiqué où seraient portés les procès
alors pendans aux parlemens. O r, celui des parties
était pendant au parlement de P aris, par exploit du
2
3 août
1790.
Il était pardonnable aux Astorg d’opposer tant de
moyens faibles et tant de prétentions bizarres dans le
désespoir de leur cause; mais quand ils taxent d 'indé
licatesse un homme qui peut s’honorer de sa probité
sans craindre de démenti de personne ; quand ils écrivent
�( 2
9
)
que Leur réveil a été commandé par la nécessité de ne
pas laisser perpétuer plus long-tems la rapine de ce
créancier altéré d ’ usure , les Aslorg ont ils cru se rendre
plus recommandables par une injure grossière, qu’ils
s’étaient bien gardés de se permettre en première ins
tance, où les deux p a rt ie s étaient connues.
L à le s ie u r de L e i g e ne s’ en serait nullement offensé ;
là au contraire il aurait félicité Astorg sur un change
m e n t de principes que l’opinion médisante ou calom
nieuse ne suppose pas; et cette opinion même éta
blissait assez de distance entre la délicatesse du sieur
de Leige et celle d ’un Astorg , pour rendre inutile de
sa part toute espèce de justification.
Quoique le sieur de Leige ne soit pas très-sensible à
l'insulte d’un tel hom m e, il ne lui est pas moins pénible
d’être accusé, loin de son domicile, du vice le plus
opposé à son caractère. Heureusement l’homme de
bien n’est pas jugé par l’injure qu’il reçoit. L a raison
évalue l’injure et en scrute l’auteur ; et quand un
Astorg a du scrupule et f a i t de la morale, l’expérience
apprend qu’il n’en fait que pour les autres, et la mé
moire rappelle l’adage de tant de moralistes. Video
meliora , probo q u e , détériora sequor.
MARCHEIX, Rapporteur.
M.e DELAPCHIE R , Avocat.
M.e MARIE, Licencié-Avoué.
M .r
A RIOM, DE L ’IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
�
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
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Title
A name given to the resource
[Factum. Leige, Robert de. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
antichrèse
créances
Description
An account of the resource
Mémoire pour le Sieur Robert de Leige, appelant ; contre François Astorg et Marie Vigier, sa femme, intimés ; et Contre Brigitte Rotquier et Jean-Baptiste Lacroix, son mari, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1714-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0322
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pleaux (15153)
Laval (pré de)
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Domaine public
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Antichrèse
Créances
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db861774c3409e149173e175298fa0f0
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Text
c o ur
P
R
E
C
I
S
d
’a
d e
p p e l
RIOM.
POUR
A n t o i n e G A R D E T aîné, intimé ;
C O N T R E
t 'I G
J a c q u e s G A R D E T j e u n e , appelant.
r
L E sieur Gardet jeune élève une des prétentions les
plus choquantes que l’intérêt personnel ait pu concevoir.
P our lui payer une légitime conventionnelle de 1oooo f.,
le ;sieur Gardet aîné lu i a expédié, en vertu d’un jugement
arbitral, des immeubles estimés à la valeur de 1789.
L e sieur Gardet jeune,, qui demande un supplément
de l égitime veut qu’on estime ces immeubles de deux
m La n i è r e
. 1S u i v a n t lvaleur
a
de 178 9 , c ’est-à-dire, 13455 f r . ,
4
A- eù y
�e ^ a c « ¿4
U v s t 't o f i r - U i m u k S / V S Î , ^
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ïM U tu l/ -fo *
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(. 2 )
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pour accroître la niasse de la succession ,..et ‘opérer.un
êc^ ééf supplément en sa faveur; ; - ;•*
*J> ’ '•
2°* A la valeur seulement de 6606 ,fr. poiu^le rapport
✓ rr
„ fictif Ciu’
i l doit
doif en.faire,,
p n fiiir n .; /i
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s a voir
vm'r •s’il
s’ il lui
l u i est
pçf dû
du un
lin
Uy*/{¿U&
qu’il<
afin
dè.sa
¡^d / l ^ M a j/**1
¡11
y / , Ü Î-" ' »supplément.
L e moindre défaut de cette prétention , est d’être
(foJ\c/uuat^
contraire à la cliose jugée. Les circonstances dont le
^ a u sieur Gardet aîné va rendre compte, prouveront de plus
^
%i /A * v h i/fy
<| 'f'U S 'D d d tr*
qu’elle est d’une injustice révoltante.
Jacques Gardet et Marie -Barbarin, père et mère des
parties, ont eu cinq enfans.
Antoine Gardet, l’un d’eu x , marié le 29 avril 1783,
a été institué leur héritier, à la charge de payer, no
tamment à Jacques G ard et, une légitime de 10000 f r . ;
ils se réservent 4000 francs pour en disposer par e u x ,
ou le survivant d’e u x ,, avec condition q u e , s’ils n’en
' | \
V^ ^ ^ ' -i ' • !»1 ^ i
•
; disposoient p a s , la somme appartiendroit a - A n t o i n e
vG a rd et, institué.
Gardet père est mort en ! 7 9 2 “Et aussitôt que la loi
du 17 nivôse fut portée, Jacques Gardet profita de son
' •
.
*
(
•.y
w N''eTet rétroactif pour demander un partage pat égalité!,
' '*■"«*.: m algré l ' i n s t i t u t i o n . '
i
1
• - JJip ..
Ce partage eut lieu : mais îd riigW-e1 d ü ^ l W k>i fut
v
•
court; et après \ù 8 vendérniairfccan '4 •, ili'f1vllt>t? rttidi'e
à César ce qui appartenoit:à Gésar! " • '!
>- • *
Un tribunal de famille fut -cômpoéély et rendit un
jngemént arbitral, le 5 bruinairO''niii,4 v ,Uansî;léqiiel,|ôri
lit la disposition suivante : « En ce qui touche Jacques
« G ardet, oilicicr de santé ’ lui donne -acte d e ;la dé-
;
�( 3 )
« claradon par lui faite, qu’il s’cn tient à sa légitime
« conventionnelle de dix mille livres; lui donne pa« rreillemeht acte de la'déclaration faite par Antoine
« Gardet j héritier institué, qu?il le* tient quitte* sans
« imputation quelconque, de la somme de mille livres
« réclamée par ledit Jacques G ardet, dudit A n t o in e ,
« eu assignats, pour vente de quelques meubles.
« En conséquence, ordonne que ledit Gardet aîné
« sera tenu de lui payer ladite somme de dix mille livres
« en deniers, fonds ou effets de ladite succession, bien
«
«
«
«
«
«
«
et dûment garantis, conformément à son contrat de
mariage, bien entendu que ledit payement ne pourra
être fait qu’en numéraire métallique, s’il est fait en
deniers; et s’il est fait en biensTfon ds, ce sera suivant
la valeur de 1789, et l ’estimation par les experts ciaprès nommés : et en attendant que ledit Gardet aîné
lui expédie ladite légitime , il sera tenu de lui en
« payer l’intérêt au sou pour livre. »
E n exécution de ce jugement,1 le sieur Gardet aîné
offrit à son frère de traiter à l’amiable, et celui-ci y
accéda, en choisissant les immeubles. Les parties traitèrent
le 14 nivôse an 4 , su r Vacquittement de la légitime
conventionnelle, faite à Jacques Gardet par le contrat
de mariage de 1783, et définitivement réglée par jugement
arbitral : en conséquence’," 'Antoine Gardet, pour se li
bérer de la somme de 1 0000 francs, montant de ladite
légitim e, paya en écus 3400 fr. ; et pour les 6600 fr.
restans, il délaissa avec garantie', une maison et cinq
héritages, dit Jacques Gardet J q u i , au moyen de c e ;
déclara être satisfait et rem pli de sa légitime conven
tionnelle.
A 2
�t
W uJÙ " f y ? .
( 4 }
JltJJato*-' ■W/)'
Jacques Gardet jeune n’avoit voulu des immeubles,
'ufîtv-atM - ujOO- e t (3es immeubles p récie u x , que pou r|s’en défaire ,et
_grossir sa légitime; il vendit au nommé Pradier la maison
|.
i h JdLSttfttfiJfo 01 ci u^ venoit de lui être délaissée, 5400 francs; il vendit
——------^ d e u x vignes au nommé Besson, moyennant 1455 fr. ;
i
C[ enfin, il revendit à A ntoine G a rd et, son frè re , les
trois objets restans , avec deux héritages de peu de
t
valeui’, provenus de la succession d’un frère, moyennant
i
8400 francs ( 1 ).
4
Ces trois ventes sont: de l’an 5 ; et elles prouvent que
■
.y
Jacques Gardet, après avoir reçu une légitime de 10000f.
en immeubles, en retira dans l’année i 6855 francs, outre
les; 1000 francs de meubles qu’il avoit retenus, et qui
à l’écïîelle , valoient 440 francs.
'La mère des parties est morte en l’an, 10 ; et,quoique
sa succession ne présentât pas matière à procès, Antoine
Gardet ne fut pas m oin s. tracassé encore par ses cohé
ritiers , pour la réserve de 4000 francs dont l’électionavoit resté au- survivant des père et mère.
A lors les idées étoieut fort incertaines sur le vrai sens
du législateur , au sujet des réserves de ce genre ; la
Cour de cassation n’avoit pas rendu les deux ari’êts cé-
(¿) Le sieur Gardet jeune,,en avouant qu’il a gagné beaucoup
sur son frère par cette vente , dit que son fr è r e , en les re
vendant , gagna à son tour 3ooo francs : mais rien n’est plus
faux ; car le aieur Gardet aîné a encore dans les mains tous les
héritages qu’il a acquis de son- frère en l’an 5 , excepté une
vigne qu’il n’a vendue,que 1800 f r . , et suc laquelle par consé
quent il n’a pas pu gagner 3 ooct francs.
�( 5 \
lèbres des Grim ai et des G ra ilh e , qui ont jugé que la
faculté d’élire ayant été ôtée au survivant par la force
majeure de la loi du 7 mars 1 7 9 3 , et l’indication du
défunt ne pouvant être changée sans un effet rétroactif,
la réserve étoit due h celui à qui le défunt avoit dit qu’elle
appartiendroit en cas de non élection.
L e tribunal de Clermont, en ordonnant le partage des
biens maternels demandé par exploit du zô floréal an i i ,
ôta à Antoine Gardet la réserve que ses père et mère
lui avoient destinée, et ce jugement a été confirmé; de
sorte qu’Antoine Gardet a été forcé de se soumettre à ce
nouveau sacrifice.
Après avoir plaidé un an sur le partage de la suc
cession maternelle, Jacques Gardet imagina de demander
un supplément de légitime dans la succession paternelle,
par une requête signifiée peu de jours avant le jugement.
Antoine Gardet répondit à cette demande que la lé
gitime conventionnelle expédiée à son frère, en l’an 4 ,
excédoit de moitié les légitimes de droit accordées à ses
autres cohéritiers } par un partage judiciaire auquel il
avoit concouru.
Cependant le tribunal de Clermont ordonna, par son
jugement du i 5 frimaire an 12, que les mômes experts
chargés du partage de la succession maternelle, estimeroient les biens meubles et immeubles du p è r e , d’après
letir valeur à son décès; estimeroient aussi, d’après leur
valeur à la môme é p o q u e , les biens meubles et im
meubles donnés en Van 4 à Gardet jeune ; . . . . et dans
le cas o iiH l résulteroit de l’évaluation desdits biens
paternels, que les 4000 francs ou la valeur des objets
A
3
�( 6 )
donnés en pnyement, distraction faite de ce qu’il doit
en rapporter à la succession maternelle, ne le rempliroit
pas de sa légitime, et qu’il lui seroit dû un supplément,
les experts furent chargés d’indiquer un ou plusieurs
immeubles jusqu’à concurrence dudit supplément, et
d’en estimer les jouissances, p o u r, après ladite expertise
faite , être ordonné ce qu’il appartiendroit.
.Après l’arrêt confinnalif de la C o u r, les sieurs Mazin
et Pallet ont été nommés e x p erts, et ont été d’une
grande discordance dans leurs opérations : mais cette
discordance est assez insignifiante pour un supplément,
puisque toutes les estimations de chaque expert sont
faites dans la même proportion.
L e sieur Mazin a estimé la succession du père 1 23900 f.
et par conséquent la légitime de Gardet jeune, qui est
un dixièm e, à 12390 francs.
Il estime , i°. les immeubles délaissés à Jacques G a rd e t,
en l’an 4 , ù la somme de 13455 francs; 20. il ajoute
les 3400 francs payés en numéraire ; 3°. 44° francs
valeur du mobilier. Il en résulte donc q u e , suivant cet
expert, J a c q u e s Gardet a réellement reçu pour sa légitime
une somme de 1739^ f l’ancs‘
Mais le sieur Mazin décide à l’instant une question
de droit, et juge que Jacques Gardet jeune, au lieu de
rapporter la valeur des immeubles par lui reçus, d’après
sa propre estimation , ne doit rapporter que la somme
de 10000 francs qui lui a été constituée parson p è r e ,
et que le surplus de la valeur desdits immeubles est un
bénéfice pour lui ; en conséquence, qu’ il revient au sieur
Gardet jeune un supplément de 2617 francs, pour lequel
il lui expédie d’autres immeubles.
�C 7 )
L e sieur Pallet, autre expert, n’estime les biens pater
nels qu’à 70482 francs; et comme il réduit la légitime
et les immeubles reçus par le sieur Gardet jeune, dans
la même proportion, il résulte de son rapport que le
sieur Gardet jeune a reçu 2566 francs de plus que ce
qui lui revenoit.
Lorsque ces deux rapports ont été produits au tribunal
de Clermont, le sieur Gardet jeune a cru n’avoir besoin
que de faire nommer un tiers expert; mais Antoine
Gardet aîné s’y est o p p o sé, en faisant remarquer que
d’après le rapport même de l’expert Mazin , et en adop
tant toutes ces estimations, le sieur Gardet jeune auroit
reçu 4212 francs de plus qu’il ne lui revenoit, d’après
le propre calcul de l’expert lui-même.
C ’est ce qu’a jugé le tribunal de Clermont le 26 no
vembre 1807, en déclarant le sieur Gardet jeune non
recevable'dans sa demande en supplément de légitime,
sans qu’il fût besoin de tierce expertise, parce qu’il résultoit' tant d’un rapport-'que de l’autre', que Jacques
Gardet étoit rempli et au-delà de sa légitime de rigueur.
L e sieur Gardet jeune n’a pas voulu s’en tenir à cette
décision; il s’est pourvu en la C our, et il est parfaiteMnent de l’avis de son exp ert, qu’il doit garder dans sa '
poche les 16000 francs qu’il a retires de son frère pour
sa légitime, et ne rapporter fictivement que 10000 francs,
pour pouvoir réclamer un supplément de légitime.
. Ce n’est donc point assez pour le sieur Gardet jeune
d ’a v o i r obtenu de la bonté de son frère que pendant la
vie!'du père il tînt sa bourse ouverte pour son ét at ,
A 4
�(S )
ses deltes et scs besoins, et sacrifiât ainsi 7 à 8000 francs,
dont il n’a jamais demandé le recouvrement ; ce n’est
point assez encore à Gardet jeune, qu’après la mort du
père il se soit fait adjuger, par un premier procès, des
immeubles valeur de 1789, quoique le père ne fût mort
qu’en 1792; que par un second procès il ait aiTaché de
sou frère une réserve qui aujourd’hui ne lui seroit pas
disputée; il faut qu’il le tracasse une troisième fois, pour
obtenir utl supplément de lég itim e , lorsqu’il a dans les
mains une légitime double de celle qu’il pourroit actuelr
lement obtenir.
C est pour la première fois certainement q u ’ uni légir
timaire prétend ne pas devoir rapporter ce q u ’ il a reçu ,
pour faire vérifier s’il y a lieu à supplément de légitime.
Cette prétention résiste aux idées les plus élémentaires.
En matière de succession, le premier principe est qu'elle
«e compose de tout ce que le défunt a laissé, et que
6i des immeubles ont été .vendus , ils doivent être
rapportés au moins fictivem ent; ensuite de quoi on
déduit les dettes ces aliénant, et ce qui reste s’appelle
la succession.
.
,
/ r . •
En matière de légitim e, le premier principe.’est qu’elle
doit se prendre sur les biens méine, pars ho n ora n t, ex
substantiel p a trisj et le légitimaire a le droit de faire re
présenter par les héritiers ou détenteurs runiversalilé
des biens, afin d’y prendre son retranchement quartam .
Et si la légitime fixée par le défunt ne lui convient
pas, il a le même droit de laire rapporter tous les biens
provenus ex substantiâ paln'.s; par conséquent, s’il en
�( 9 )
possède de. cette nature, il doit lesiïiipJ)Qi’ter,lui-mêxne;
après quoi on vérifie ce qui lui; manque id qt,tod deest,
ou bien s’il a toute sa portion ,,e t s’ il n’a aucun sup
plément à demander nullam superesse repletioiiem.
La combinaison de ces termes de la loi de eo quod
deest avec c e u x -c i e x substantiâ p a t r i s po u vo it-elle
laisser un doute dans l’esprit du $ieur Gardet jeune; et
a-t-il.pu prétendre de bonne foi qu'il n ed evoit rapporter
que ioooo francs en écus, et non la légitime réelle qu’il
a obtenue en corps héréditaires ?
'
Mais les iooqo francs qu’il ¡veut rapporter n’ont jamais
été qu’une chose fictive ;! ce ne! sont point des écus qui
sont provenus de la succession du père e x substantiâ
p a tr is, mais des immeubles : par conséquent voilà ce
que le sieur Gardet jeune doit rapporter, pour savoir
s’il lui est dû un supplément de légitim e, et d’ailleurs
le mot supplément l’indique Lien assez.
Point du tout, le sieur Gardet jeune assure..( page 10
de son mémoire ) que ce n’est pas liii qui est tenu de
rapporter, puisqu’il n’est pas cohéritier;.mais que son
frère étoit obligé de faire le rapport fictif ou réel de tout
ice quircoitiposoitlla ;masse dé i la succession paternelle.
: U n principe aussi étrange ¡est cependant .honoré par
le sieur Gardet jeune du nom idc fo r t e objection - mais
sans doute il n’em n pas'médité toute l ’injustice. Il n’a
pas calculé qu’ il en - naîtrait contre Gardet aîné un
.double emploi , c’est-à-dire., unrdoijble détriment j parce
q u e , après avoir, donhé ,j pour,‘ 66 oo f r . , dcs iinméubles
que le sieur Mazin a estimés Ü3 4 5 5 ifrancs, il faudroit
qu’il rapportât du partage i 3 4 5 5 fr.-, c’est-à-dire, ce qu’il
�f( 10 )
a>perdu;--et ainsi Gai’det jeune, qui a gagné 6855 f r . ,
forceroit Gardet aîné à perdre une seconde fois, en rapportant'lè bénéfice avenu à Gardet jeune lui-même. On
ne vit jamais de proposition aussi révoltante.
Sans doute A ntoine Gardet, comme h éritier, doit
faire face à la légitime ; mais il ne doit rapporter que
ce qu’il a', ou ce qu’il auroit vendu ; il n’est point tenu
à raporter ce qu’il n’a pas, et ce qui est entre les mains
de celui-là môme qui demande ce rapport. " v
Quelque simples que soient ces id ées, le sieur Gardet
jeune veut les combattre par un principe de droit, trèsexact en lui-même , mais qu’il étoit difficile d’appliquer
plus mal à propos.
'
D a lio in solutum est ven d itio , objecte-t-il; ainsi, en
lui'délaissant des immeubles pour sa légitim e, il dit qu’on
les lui a vendus. ..
Mais où est la nécessité d’examiner cette question ,
lorsqu’il ne s’agit pas de disputer au sieur Gardet jeune
les héritages qui lui ont été délaissés? Sans doute si
après avoir payé une légitime ou toute autre dette, en
corps héréditaires, un héritier vouloit les reprendre,
en offrant en échange l’argent qu’il i de voit, ce seroit
le cas de lui opposer qu’il y a datio in solutum j et une
transmission de propriété. A u contraire, personne ne
dispute au sieur Gardet jeune ce qui lui a été donné :
il ne s’agit de part et d’autre que de rapportsfic t ifs pour
faire une évalution, un calcul, sollicités par lui-même.
Ainsi ou ne veut pas qu’il rapporte des. immeubles pour
s’en dessaisir, mais qu’ il les soumette à l’estimation de
la fortune paternelle^ puisqu’ ils eu sont provenus.
�(■11 )
Si Garclet jeune avoit obtenu la moitié dos biens pour
10000 francs, ce qui eût été fort possible, son invocation
du principe datio in so lu tu m , etc. j levconduiroit, sui
vant l u i , à disputer l’autre^moitié h l’héritier; et ainsi
il finiroit par devenir plus héritier que l u i , au lieu d’être
un simple légitimaire.
Que le sieur Gardet jeune soit^lonc conséquent avec
lui-même : il veut savoir s’il lui est dû un supplément,
et il demande qu’on estime la masse de la succession
pour le vérifier.
O r , la masse se compose de ce qui lui a été délaisé,
comme de ce qui est resté dans les mains de son frère.
L e mot rapport qui l’offusque n’est là qu’une expression
figurée et hypothétique, car il s’agit seulement d’évaluer :
et comme raisonnablement il ne peut pas vouloir que
pour estimer une succession il y ait deux p o i d s et deux
mesures, suivant son intérêt ou son caprice, il faut bien
que la succession de Jean Gardet soit appréciée par
classe et nature de fonds, comme toutes les successions
du monde.
Ainsi il est inutile de rechercher lequel des experts a
le mieux o p é r é , et si le sieur Mazin a mieux connu les
valeurs de V a y r e , que le sieur Pallet qui opéroit dans
son propre pays. L e sieur Gardet je u n e , qui reproche
h son frère d’avoir blâmé Mazin et loué P allet, ne s’est
pas aperçu que dans le même instant il trouve Mazin
fort intelligent et judicieux, tandis qu’il reproche à Pallet
une partialité dégoûtante.
Et à quel propos cette vespérie, q u a n d il est mathé
matiquement vrai qu’on peut réduire de moitié ou du
�( 12 )'
r -
quart uue estimation de succession, sans que le légitimaire ait un denier à y. perdre, lorsqu’il prend sa légi
timé en corps héréditaires?
sv
■
' 1.......1 I 1
Les experts n’ont donc été discordans dans leurs ¿va
luations, puisque cela étoit insignifiant ; et d’ailleurs
Gardet jeune n’a rien à dire, dès qu’on suit son propre
expert : ils ne sont discordans que dans leurs consé
quences et dans la question de droit que le sieur Mazin
a voulu juger, sans que la justice lui en eût donné la
commission.
L e mandat de cet expert étoit cependant d’une clarté
frappante; car non-seulement le j ugement du i5 frimaire
an 12 le chargeoit d’estimer les immeubles délaissés en
l ’an 4 à Gardet jeune, mais encore de vérifier si les objets
ainsi délaissés le remplissoient de sa légitime de droit.
C’étoit donc contre la chose jugée que Mazin vérifioît si la légitime de droit étoit remplie p ar la somme
de ioooo fr a n c s ?
^
L e sieur Gardet jeune se plaint encore de n’avoir pas
obtenu 126 francs que l’expert Mazin lui donnoit pour
supplément de la légitime maternelle.
Ce n’étoit que par suite de sa décision fa u tive, que
cet expert trouvoit encore un déficit dans cette succession;
et cela est sensible.
Comme les 10000 francs étoient pour légitime pater
nelle et maternelle, Gardet jeune se garda bien en l’an 4,
du vivant de sa mère , de ne pas s’y tenir , de peur
d’avoir moins par un partage : et ainsi , en obtenant
pour 10000 francs d’immeubles, valeur de 1789, il se
�( *3 }
trouvoit n a n ti, par anticipation, d’une part des biens
maternels* , ' )<: ■
. J
jr ) :-‘i uoitet n .
•i Aussi le jugement de l’an 1 2, en ordonnant l ’estimation
pour le supplément des objets, donnés en payement en
l’an 4 , à Jacques Gardet, dit qu’elle aura lieu, distraction
fa ite de ce q u 'il doit en rapporter à la succession m a
ternelle.
‘ 'i
L ’expert Mazin a évalué la légitime maternelle à 793 f.,
c’est-à-dire, au quinzième de la succession paternelle.
S ’il s’en fût tenu à sa propre estimation, il auroit dit
que le sieur Gardet jeune, ayant dans les mains 17395 f.,
avoit évidemment plus qu’il ne lui falloit pour être
rem pli, et des biens paternels, et des biens maternels.
A u lieu de cela , cet expert a continué de penser que
les biens maternels délaissés à Gardet je u n e , au lieu
d’être estimés en nature,, ne devoient être qu’une fraction
des 10000 fr. de légitime et des 440 fr. de m o b ilie r;,
d’où il a- conclu que Gardet jeune n’avoit à rapporter
que 667 francs.
! ’ 1.
En c o n s é q u e n c e p o u r atteindre les 793. francs-, il a
pensé qu’il falloit lui adjuger 126 francs de plus en
immeubles.
C ’est bien encore plutôt dans cette opération que rationes non concludunt j. car si’ le siéur ÎVlazin avoit aussi
le prétexte d’invoquer le principe datio non solution
est venditio, comment le pouvoit-il à l’égard d’une por
tion de biens dont Gardet jeune ne jouissoit que par
avancement d’hoirie ?
U n héritier peut bien retenir l'avancement d’hoirie
quand il le veut; mais ic i Gardet jeune demandoit le partage
�( 14 )
de la succession maternelle, et dès-lors il ne lui étoit plus
permis de rien retenir : tout étoit sujet à rapport réel;
et supposer qu’on a entendu vendre à Gardet jeune une
portion de succession non éch u e , seroit une hérésie ju
diciaire, qui ne mérite pas de plus longue réfutation.
En un m o t, tous les efforts du sieur Gardet jeune
viennent se briser contre cet unique et simple raisonnemen t :
Il avoit à réclamer, 1°. pour légitime de droit pater
nelle, d’après l’estimation de son propre expert, 1 2390 F.;
2°. pour légitime maternelle, 793 f r . ; total, 13183 fr.
O r , il est prouvé par l’estimation du meme expert,
q u’il lui a été délaissé par l’h éritier, 1 . 3400 francs
en argent; 20. 13455 fr. en immeubles; 30. 440 fr. en
m obilier; to ta l, 17395 francs.
D onc le sieur Gardet jeune, en rapportant la valeur
des objets à lu i donnés en l'an 4 , comme l’exige le juge
ment de l’an 1 2 , est rempli et a u -d e là de ce qui lui
revient ; et le tribunal de Clermont a dû proscrire sa
demande, puisqu’elle n’étoit qu’une injuste tracasserie.
M e. D E L A P C H I E R ,
ancien avocat.
M e. M A N D E T jeu n e, avoué licencié.
A RIOM , de l’imprimerie de T h i b a u d - L a n d r i o t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Février 1809.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gardet, Antoine. 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Mandet
Subject
The topic of the resource
successions
tribunal de familles
légitime
experts
Description
An account of the resource
Précis pour Antoine Gardet aîné, intimé ; contre Jacques Gardet jeune, appelant.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1783-1809
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0319
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0546
BCU_Factums_M0547
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53767/BCU_Factums_M0319.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Veyre-Monton (63455)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
experts
légitime
Successions
tribunal de familles
-
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78ec2842a9d7408bc73bc0764809b65c
PDF Text
Text
PRÉCIS
TR IB U N A L
F 0 U R
C ô me - D a m i e n
FAYOLLE,
SP ÉCI AL.
Accusé;
CO N TR E
J a c q u e s
D E F F A R G E S , Plaignant.
J ' a i des en nem is, ils se cachent : un mannequin est l’ instrume nt de leur
animosité. L e s lâches n’attaqueraient pas ma r i e , mais ils cherchent à m’ôter
l ’h o n n e u r , parce que dans ce genre d’agression, toute représaille leur est
moins sensible, et que sur-tout ils sont plus à couvert. I l leur a été si aisé
de supposer quelques motifs d’intérêt personnel à un hom m e totalement nul
et sans ressources, incapable de méditer lui-même ce qui a été fait sous sou
nom.
Qui donc se défendra du soupçon d’im probité, quand avec une fortune
au-dessus de mes besoins, et après soixante-deux ans d’ une vie sans reproche,
j ’ai la douleur de me voir accusé d’avoir vo lé 2,000 francs ; et à qui? A D e f-
fa rg es qui vit dans la pénurie la plus extrême ? A Deffarges q u i , depuis le
v o l , a laissé passer sept a n s , quatorze ans même sans s’eu appercevoir.
C eu x qui connaissent l’accusateur et l ’accusé rougiront de penser que
c’ est moi qui suis accusé par Def f arges , ils croiront qu’ une transposition
de noms les abuse ; et leur indignation justificative sera le seul examen qu’ils
feront des détails relatifs à la misérable calomnie dont je suis un instant la
victime.
Aussi n’est-ce pas pour eux que j’ écris. J e n’ écris pas m ême pour mes juges ;
car en leur demandant la prison et venant me justifier avec des pièces a u th e n
tiq u e s , si j’ osais douter de leur jugement, ce serait douter de leur conscience.
J ’ écris pour ceux q u i, ne méconnaissant p a s, n’ont pu que recevoir l’impres
sion désavantageuse qui résulte naturellement d’ une accusation de faux. L a
calomnie est expéditive et laconique ; une justification est compliquée et
ennu yeuse; mais ceux qui méritent que leur opinion soit comptée pour quel
A
�( a
)
que ch o se, se défient de l’exagération du vu lg a ire, sont en garde contre leur
propre ju g em en t, et se font un devoir de lire ce qui peut les désabuser.
C ’est donc à ceux-ci que je vais donner l’explication de ce qui a donné lieu
ou plutôt de ce qui a fourni matière à la dénonciation signée Deffarges. J e ne
chercherai pas.des moyens dans les lois et les auteurs. J e me contenterai de
laisser parler les faits ; eux seuls me justifieront.
FAITS.
A n n e et Marie Tisseron sœ urs, avaient épo u sé, l’ une le sieur C h a lu s ,
l ’autre le sieur Laroche qui avait des enfans d’ un premier lit.
D e M arie Tisserou issu reut Margueritte, Jean-Josepli et A m a b le Larochej
c’ est cette’dernière qui a épousé le'sieur Deffarges.
E n 1 7 8 7 , J e a n - J o s e p li Laroche me vendit divers héritages venant de
M arie Tisseron , sa mère', parce que ces héritages se trouvaient voisins de
mes propriétés de St.-Amaut ; il ue lui en reveugit qu’ un tiers, et voilà ce qui
a am ené d’autres actes.
A u mois d ’avril 1789, j ’arquis les droits de Margueritte L a r o c h e , dans les
mêmes biens provenant de M arie Tisseron.
Com m e Jean-Josepli L aroche avait vendu plus qu’il ne lui revenait dans
les immeubles de l’acte de 1707 , il y eut un traité entre l u i , Deffarges et m oi,
comme représentant Margueritte Laroche. Jean-Joseph nous céda en indem
nité une terre et deux prés sis à Gondinangue.
C o m m e encore la succession Tisseron devait au sieur L ad ey te une rente au
principal de 2,5oo fr . , qui devait être remboursée par nous trois, Laroche et
Deffarges me vendirent une moitié de terre et un petit jardin,plus quatre rentes
et l’effet d’ une sentence de 1 7 7 9 , à condition de rembourser M . Ladeyte.
de Gondinangue étaient si peu de c h o s e , si peu à ma bienséance,
à m’ en défaire ; un nom m é Antoine B o y les demanda
en rente ; l’acto allait en être p a s s é , et Deffarges était venu d’Aubusson à cet
effet, à la fin de 1790. Mais qui eût voulu Deffarges pour caution? on ne vou*
Ces biens
que je cherchai aussitôt
lait acheter que de moi. L ’acte n’eut pas lieu.
En 1791 , un autre acquéreur se présenta avec les mfimes propositions;
voulant en fin ir , j’achetai alors de Deffarges sa moitié desdits héritages, par
acte du 4 mai 1 7 9 1 , reçu R o ch e et P io te t, notaires, m ojennant une rente de
cinquante f r . , pour ne pas perdre le capital en cas d’ éviction ; et presqu’aussit6t je vendis le tout par acte notarié au sieur Tardif, juge de paix à St.-Axnant,
avec ma seule garantie.
L e sieur C h a l u s , époux do M arie Tisseron avait retiré des héritages d’un,
mommé G r o le t , en 1 7 7 7 , pour l’acquit d’une créance commune aux deux
�(3 )
sœurs Tisseroïl. D ’autres créances étaient hypothéquées sur un domains
appelé de L o b é n i c h e , acquis par moi j j ’avois doue intérêt de dégager mon
bien de ces hypothèques.
C e fut le sujet d’ un traité du 21 thermidor an 5 , acte si peu destiné à être
caché qu’il (ut fait à O lm e t , en présence de plusieurs persounes.
On conçoit aisément qu’en traitant avec D effarges, je ne devais pas faire
un acte partiel , et laisser encore mes intérêts en commun avec un homme qui
m ’entravait dans tout ce que j ’avais à fa ire , et q u i , toujours aux ex péd ieu s,
m ’ennuyait encore plus.
II fut donc convenu que Deffarges m e céderait sa portion dans plusieurs
créances, plus son tiers dans les immeubles retirés par C lialu sen 1 7 7 7 ; plus
enfin le capital de la rente à lui due par l’acte de 1791. L e prix eu était con
venu à z , 5oo francs.
*
M ais cet acte devait naturellement être divisé en deux parties ; car je vou
lais distinguer les créances qui m’ intéressaient personnellement; et Deffarges
mit encore cette circonstance à profit.
C om m e l’acte se réd ig ea it, et que j’allais écrire 5oo francs pour le prix de
ces créances, Deffarges éleva des difficultés, voulut une augmentation j cette --1
somme de 5oo francs fut laissée en b la n c , et l ’acte fut continué. L e secoud
prix , fixé à 2,000 francs, n’eut pas de difficulté, dès qu’il y avait un article
en blanc.
Quand l’acte fut terminé et bien l u , quand il n ’y manqua que cetl»
somme et l’approbation, nous traitâmes sur le prix en blanc: il fut porté à
600 francs. L e blanc fut donc rempli après coup. L ’approbation le fut dans
la même m inu te, et cette approbation est ainsi conçue:
N o u s so u ssig n és . . . . approuvons Les présentes et les f e u ille ts
autres pa rts.
F a it d o u b le , e tc . ......... F
a y o l l e ............
des
lio n p o u r ce que.
d essus, D effarg es.
A u moyen de cet a c t e , le sieur Deffarges ne devant plus rien de la créance
L a d e y t e , il fut écrit aussitôt q u ’il en était tenu quitte, sur la quitance
m êm e du remboursement.
C om m e je ne cachais pas celte acquisition , j’en fis usage aussitôt.
L u i 3 floréal an 5 , j’assignai le sienr Clialus en partage.
J e nommai
Deffarges.
pour mon expert le sieur M a g n in , beau/rère du sieux
L e 21 thermidor an 5 , par acte notarié , ce partage fut fait.
L e y fructidor an 5 , par autre acte n o ta rié , ja vendis m ou lot au sieur
Grolet.
!
V o ilà tout ce qui s’ est passé.
A
2
�( 4 )
D É N O N C I A T I O N ,
m o t i f s
,
c h a r g e s
.
J ’ étais donc propriétaire depuis 1 7 9 1 , et depuis l ’an 5.
J ’avais revendu en 1 7 9 1 , et en l’an 5.
Depuis ces diverses épo qu es, Deflarges n’avait réclam é de personneni
créances, ni r en tes , ni immeubles.
Son enfant meurt en l’an 1 0 , et les collatéraux réclament la succession.
Deflarges la revendique com me ascendant. I l y a procès.
L e sieur Magnin , un des colla té ra u x , le m êm e q u i f u t expert en
L’a n 5 , se souvenant que j ’avais fait des actes avec D eflarges, m’ écrit le
j 6 messidor an 10 , pour demander des renseignemens sur ce qui s’ est passé.
J ’avais perdu de vue tous ces actes auxquels je n’avais ou ne croyais
plus avoir d’ intérêt. J e les cherche pour en envoyer copie au sieur Magnin ,
n’ ayant en vue que de l ’ obliger.
J e réfléchis que ces débats peuvent tne susciter un procès à moi-m ême ,
et j ’ewvoie au contrôle de ma résidence l’acte sous seing privé de l’an 5.
E n l’an 1 1 , le sieur Magnin paraît désirer une expédition de cet acte
de l’an 5, et pour cela il fallait le déposer chez un notaire. J e le dépose,
et qui choisis-je pour ce dépôt de son double ?
C ’est le sieur C ro s m a rie, notaire à A m b e r t , homm e de confiance du sieur
D e flarges, son d éfen seu r dans le procès contre le sieur Magnin et autres
collatéraux.
Cet acte et celui de 1791 allaient être funestes au sieur D e fla rge s; car
s'attendant à être exclu de la succession de son fils par le s 'c o lla té ra u x ,
il demandait au moins l’ usufruit coutumier.
Ces deux ventes en faisaient prononcer la privation.
I l n’a plus qu’ un parti violent à prendre. I l examine à tant de reprises
l ’acte de l’an 5 , qu’ il croit avoir saisi un trait de lum ière; il va aux en
quêtes et se perd en rech erches; il demande des conseils à tout le m o n d e ,
et tout le monde ne lui donne pas ceux de la prudence j il part pour R io m ;
il dénonce.
I l eût bien voulu ne dénoncer que l ’acte de l’an 5 ; mais le besoin do
i a cause exigeait l’annullation des deux. En conséquence il se prétend
trompé , « i.* par l ’acte de 1791 ; . . . il est f a u x , il n’a jamais v e n d u .. . .
« Si la signature e x iste , elle est du fait de l’auteur du faux ; . . . 2.» par
« l'acte d e l ’a n S ; . . . i l n’est pas double
. il est dit 600 francs comp« tant, quoique cette somme fût compensée en partie avec la créance du
« sieur Ladeyte.
J ’ai intercalé
une feuille au m i li e u , l’acte n’en ayant
« d’abord qu’ u n e . . . . Cela se prouve par un extrait de l’enregistrem ent,
�( 5 )
« où on voit que l e receveur n’a perçu que 12 f r . , ce qui n’ est le droit
* proportionnel que d’une vente de 600 francs».
V o ilà sa dénonciation ; il y joint une liste de quatorze tém oins, et écrit
au b a s , « que les trois derniers déclareront que le 21 thermidor an 5 , il
« n’avait que 6 francs dans sa poche (après l’acte ) , et qu’il n’eut pas de quoi
« payer i 5 fr. que je lui gagnai à la bête ombrée ; ce qui prouve que je
« ne lui avais pas compté 600 fra n cs, et cependant l’acte avait été passé
k devant eux ».
Ces trois tém oin s, in d iq u é s particulièrem ent p a r D e jfa r g cs , ont en
effet d é p o s é , mais de manière à prouver que s’il y a un / a u x , c’e s t . . ..
dans La d én o n cia tio n .
Deux de ces témoins ( l e 2.e et le 4.® de l ’ in fo rm atio n ), ont vu faire
l’acte de l ’an 5 ; . . . il a été fait en d e u x feuilles ; . . . le prix a été couvenu devant eux à d e u x m ille et quelques l i v r e s . . . . I l fut souscrit des
effets par moi ; . . . . il fut fait d e u x d o u b le s .. . .
‘ L ’autre témoin in d iq u é ( le 3.a de l ’iu fo rm a tio n ), frère d e Deffarges ,
n ’a pas été témoin de l’a c t e ; . . . . il n’a assisté qu’au jeu , où je p a y a i .
dit-il, p our D effarges. . . . Son frère lui dit n’avoir vendu qu’ un petit o b je t ,
moyennant
cinq cents fr a n c s .
L e s deux notaires de l’actc de 1791 ont été entendus ; l’ un d’e u x , notaire
en second , n’ était pas à l’a c t e , c’est l’ usage. Mais R o ch e , notaire recevan t,
( l e 10.0 de l’ inform ation), déclare se rappeler très-bien que Deffarges est
venu chez lui en 1791 , faire cette vente.
Toutes les autres dépositions sont absolument insignifiantes.
V o ilà les ch a rg esj où plutôt, voilà la plus claire des justifications.
R E F L E X I O N S .
I l ne s’agit plus de la partie de la dénonciation qui concernait l’acte du
4 mai 1791.
L e sieur Deffarges qui accusait cet acte de f a u x , qui prétendait que sa
signature et celle du notaire étaient fausses, est reconnu avoir signé. L q
notaire est aussi reconnu avoir signé.
L ’acte a été contrôlé à Cunlhat en 1791- L e s registres du contrôle ont
été produits.
■
«
Aussi l’ acte d’accusation ne porte pas sur celte vente.
Cette première dénonciation est donc prouvée calomnieuse.
N ’aide-t-elle pas à juger la seconde ?
Dwffarges m’ a fait interroger. A mon tour je l’ interroge.
�(6)
Pourquoi a-t-il menti en disant qu’il n’ajamais vendu ? I l a vendu. Il est
forcé de ne plus le nier.
Pourquoi Deffarges a-t-il dit que l’acte n’avait pas été fait double? I l a
signé qu’il l’ était. Il a montré son double à A m bert.
Pourquoi Defiarges a-t-il dit à son f r è r e , le m ême jour de l’a c t e , n’avoir
vendu que pour 5oo fr. II dit aujourd’hui que c’ était 600 fr. I l reconnaît
la partie de l’acte où est écrit le prix de s ix cents fr a n c s .
Pourquoi Deffarges a-t-il dit que ces 600 fr. étaient com pensés a vec sa
portion d e là créance L a d e y te ? Et pourquoi a-t-il dit au procès qu’il lui fut
fait un b illet de 5oo francs, qti’il a cédé à G ateyrias ?.... V o ilà donc au
moins i j i o o fr. reconnus.... L e prix n’ était donc pas seulement de 600 fr.
L ’acte avait donc plus que la première feuille.
Pourquoi Deffarges a p p rou va it-il les feuillets d es Autres p a rts? I l y
avait donc plus d 'u n feu ille t, autre que celui de l’approbation.
P o u r q u o i Deffarges, propriétaire d’ im m eu bles, n’a-t-il jamais réclamé
ni ses propriétés, ni les j o u i s s a n c e s , ni aucuns fermages depuis l’an 5 ?
Pourquoi même a-t-il laissé le sieur T a rd if en,possession paisible depuis
1791 jusqu’à 1804, d ’im meubles dont auparavant lui Deffarges était si soi
gneux à percevoir les fruits ?
Pourquoi Deffarges ne s’est-il jamais mis en peine d e p u is , de savoir qui
payait les im p ô ts, ni de se faire cotiser s’il était propriétaire.
Pourquoi n’a-t-il jamais assigné ni averti les débiteurs de toutes ses rentes,
et m ’en a-t-il laissé rembourser plusieurs, sans se mettre sur les rangs pour
toucher.
P o u r q u o i m ’ a-t-il laissé partager avec C h a lu s ,e n l’an
5 , des immeubles
qu’il 11e m ’aurait pas vendus? Comment ce partage s’ est-il fait avec l'o n cle de
DefTargespar le beau-frère de Deffarges, sans queDeffarges l ’ait su?.. Il habite»
h trois lieues des biens partagés. J habite a plus de dix lieues de distance.
Si le sieur DefTarges s’ était fait toutes ces questions, ou si on les lui eût
fa ites, il n’y aurait pas de dénonciation.
S’ il avait réfléchi que rien ne m ’obligeait à délivrer un acte co n so m m é,
et sur-tout à le déposer en m inute chez son défenseur, dans le procès pac
lequel l’acte était produit , il n’y aurait pas de dénonciation.
Si Defrarge avait consulté les trois témoins qu ’il indiquait comme devant
me con d a m n er , en rappelant une partie de cartes, il aurait appris .d’eux
qu’ ils avaient une mémoire moins futile, ils l’auraient dissuedé ; et il n’y
aurait pas de dénonciation.
Si , pour parler plus ju ste, il n’y avait pas eu de demande en privation
d’ usufinîi fondée sur ces deux a ctes, il n’y aurait pas de dénonciation.
Si le sieur Delîargo n ’eût pas été aveuglé par l’impulsion d ’autrui et par
�(7
)
son i n t é r ê t , il aurait réfléchi que je n’ ai eu nul intérêt à être son acqué
reur , ou à ne l’ être pas ; puisque je suis exposé aux évictions des héritiers
de son fils , et que je- n’ai contre lui aucune gara n tie, aucune ressource.
N o n , a u c u n e , pas même pour la vengeance ; pas m ême pour la répa
ration du tort qu ’il m e cause.
J e sens bien qu’ un Def f arges ne portera aucune atteinte durable à ma
réputation, mais je ne trouve pas moins bien d u r , à mon â g e , de con
naître p ar lui, le séjour des prisons.
Quand un hom m e nul entreprend de louer ou de rendre se rv ic e , per
sonne ne s’aperçoit de sa tentative. I l est triste de penser qu’il est plus
heureux quand il veut nuire.
F A Y O L L E .
A RIOM, DE L’IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
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[Factum. Fayolle. Côme-Damien. 1805?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Fayolle
Subject
The topic of the resource
faux
acquisitions
successions
rentes
usufruit
jeux de cartes
Description
An account of the resource
Précis pour Côme-Damien Fayolle, Accusé ; contre Jacques Deffarges, plaignant.
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De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
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Circa 1805
1787-Circa 1805
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
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Format
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An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0318
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
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Le Monestier (63230)
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Text
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COUR
*
i
M
E
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O
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D ’A P P E L
SÉANT
P O U R
A R IO M .
Les
h é ritie rs
F L O U V A T
;
C O N T R E
Jeanne
I
l
A S T A N IE R E ,
veuve
M A RCON.
est peu d ’héritiers aussi maltraités par les procès de successions,
que l’ont été les sieur et dames Flouvat. L a veuve Marcon est
depuis vingt-un ans en possession de son lot et de la presque tota
lité des autres biens; cependant, après des variations sans nombre,
elle se dit aujourd’hui leur créancière.
Quoique toutes les difficultés soient réglées entre les parties par
deux arrêts; à en juger par le mémoire que signifie la veuve Marcon
il resteroit encore à statuer sur un compte inextricable.
A Dieu ne plaise que les sieur et dames Flouvat aient le projet
d ’y fournir des débats détaillés ! Après trente-cinq ans déjà passés
en procès, le reste de leur vie n ’y suffiroit pas.
A
�(2 )
II semble que la veuve Marcon ait oublié ce règlement des arrêts,
car la base de ses calculs repose sur des systèmes nouveaux. 11 faut
encore chercher ces systèmes dans l’entassement de chiffres sous
lequel elle a affecté de les cacher, pour que la lassitude de la suivre
fit adopter en masse un compte qu’on ne comprendroit pas.
C a r, il faut l’avouer franchement, les héritiers Flouvat, épou
vantés d ’avoir à combattre un ennemi fort de soixante-dix pages
in-40. de chiffres, et d ’un errata de deux pages, ont senti toute
la difficulté de lutter contre de telles armes; et, semblables aux
E gyp tien s,
qui
se v o y o ien t
forces de résoudre, sous peine de la
vie, une énigme du Sphinx, ils ont hésité d’abord si, dans l’im
puissance de répondre à celle de la^veuve Marcon, ils ne lui lais—
seroient pas plutôt dévorer ce qui reste de leur fortune.
Cependant il étoit dur de penser que la veuve Marcon, ayant
cédé scs droits pour 4 ° ° ° livres, dans une succession estimée
27000 liv ., jouissant de son lo t, et débitrice en sus de i 3goo liv.
depuis plus de vingt ans, pût cependant se trouver libérée et même
créancière.
Cette impossibilité étoit tellement palpable qu’elle devoit résister
à tous les chiffres du monde; et quand les héritiers Flouvat se sont
un peu enhardis à considérer les détails du compte de la veuve
M arcon, ils ont vu bientôt le bout d ’oreille percer en plusieurs
endroits, et ont trouvé très-simple que la veuve Marcon parvint
à se dire créancière, lorsqu’elle fait porter intérêt a ce qui lui est
d û , et n ’en fait porter aucun ?» ce qu’elle doit; lorsque pendant
quarante ans elle s’obstine à trouver qu’un sixième revenant à sa
mère est absorbé par les charges , tandis que la moitié qu’elle y
amincie elle-m êm e se porte chaque année ù une somme consi
dérable ; lorsqu'cnfm, de son autorité privée, elle ajoute ù son
�C3 )
actif clos valeurs arbitraires, des sommes inconnues, et éteint dès
l ’origine, par une compensation à sa guise, les capitaux qu’elle
doit, pour qu’ils ne portent plus intérêt.
Voilà cependant sur quelle base est fondé un colosse de. compte
qui pourroit séduire d ’abord par l’immensité du travail et par
les précautions minutieuses qu’on a affecté de prendre dans des
tableaux explicatifs. Les héritiers Flouvat ne l’attaqueront pas
dans sa masse, ils n ’y sont pas tenus, et n ’oseroient d’ailleurs
l ’entreprendre; mais ils se contenteront de revenir à leur propre
compte, sur l’une des premières années, de le comparer à celui
que présente la veuve Marcon à la même époque, et d ’en exa
miner les points de discordance. Cela suffira pour toutes les autres
années et pour l'éclaircissement du procès.
Pour se rendre intelligibles, les héritiers
donneront
Flouvat
quelques explications sur les faits principaux qui ont précédé le
compte ; et il est surtout nécessaire que la cour ait sous les yeux
l’état de la famille des parties et les deux arrêts principaux qui
ont statue sur leurs contestations.
F A I T S .
E t i e n n e A s t a n i è r e , m ort on 1722.
M a r i e A u t EROCIIE , m orte le n m ars 1743.
I
I
I
M a r ie .
F r a n ç o is e ,
J ean a s t a n iè r e .
A n t o in e ,
J e a n -J o s e p ii,
m orte a i in te s u t.
C laU D A A u T E R O C IIE .
m ort le 27 sep-
rnoiuQ.
tem b re 1738,
r~
I
i
A s t a n iè r e ,
C la u d e M a rc o n .
I
I
M 1- C é s a r ,
M a r c - A lf .x .
M a r ie .
m ort le i 5 si-Ptem -
m ort le 22 ju in
A n to in e F lo u v a t .
bre 1739.
174 o .
|
1
�(4 )
Jean Àstaniere, par son testament de 1738, avoit institué ses
quatre enfans héritiers par égalité, sauf un préciput à César, de
5ooo livres.
César et Marc étant décédés peu de temps après, en droit écrit,
leur mère avoit recueilli une portion virile : mais elle passa en
secondes n o ces, et perdit par conséquent la propriété de cette
virile, sauf l’usufruit; elle ne conserva la propriété que de la por
tion recueillie en collatérale du chef de M a rc, dans la succession
de César, comme n ’étant pas provenue e x substantiâ patris, sui
vant la
distinction d u droit.
L a dame M arcon, héritière pour moitié dans le surplus, con
tracta mariage le 3 septembre 1743, et céda au sieur Flouvat ses
droits successifs moyennant 4000 liv ., et à la charge detre libérée
de la moitié d’une pension de 3oo liv. due à sa mère par la succes
sion paternelle.
Sa mère, présente, lui constitua de son ch e f 3ooo livres, et la
moitié de scs meubles m eublans, à la charge de ne demander
aucun compte. Cette constitution étoit conforme au contrat de
mariage de la dame Flouvat, qui avoit été instituée héritière de la
mère en 1742.
En 17 7 1, la dame Marcon se pourvut contre sa cession, 60us
prétexte de minorité.
Un arrêt du parlement de Paris, du 3 i juillet 1779, annulla
cette cession, condamna le sieur Flouvat à rendre compte des jouis
sances des successions cédées, depuis le 3 septembre 1743, avec
intérêts depuis la demande, à la charge par la dame Marcon de
. lui faire compte de la moitié de la pension de i 5o livres, et de la
somme cle 4000 livres, avec intérêts depuis les payemens.
\
En exécution de cet arrêt, les biens furent estimés par experts
�(5)
le 24 février 1780. L e sieur Flouvat présenta l’état des charges dont
les biens étoient grevés, justifia du payement des 4000 li v ., et de
quelques dettes de la succession.
L e procès sembloit toucher à sa fin : mais la dame Marcon ne
trouva pas avoir assez gagné, et elle éleva la prétention singulière
que les 4000 livres ayant été reçues par son mari ( insolvable), on
n ’avoit de recours que contre lui ; elle fit naître une foule de dif
ficultés sur les dettes payées, sur les charges, sur l’usufruit dû à
la mère, représentée en cela par le sieur Flouvat; car la dame
Marcon avoit trouvé plus lucratif de scinder sa cession, et de s’en
tenir à la dot particulière que sa mère lui avoit constituée.
Ces nouvelles difficultés donnèrent lieu à second arrêt du a 5
juillet 1781. Cet arrêt condamne la dame Marcon à payer person
nellement, i°. la somme de 4000 liv., arec les intérêts à compter
du jour de chaque payement ( Us sont de 174^, 1745 et 1746. ) ;
2". la somme de 726 livres pour quatre ans et dix mois de la pen
sion de i 5o liv.; 5°. la somme de 1000 liv. ( pour une provision
payée ); 4°*
somme de 5oo liv. ( pour autre provision p ayée) :
elle est encore condamnée à faire compte de 279 livres 5 sous de
dettes payées.
Il
est dit qu’il ne sera pas fait compte des intérêts de ces articles,
mais que les sommes seront compensées sur les jouissances jusqu'à
due concurrence.
Et à l’égard des déductions à faire sur les jouissances, des cens,
rentes, et usufruit dont les biens étoient grevés, l’arrêt porte les
dispositions suivantes :
O rd o n n e que sur le montant desdites jouissances revenante» à la fem m e
M a r c o n , seront déduites les sommes c i - a p r è s ,
�(6)
S a v o i r , i°. celle de i 56 l i v r e s , portée en l ’a rtic le i d u troisième c h e f
des conclusions de ladite d em a n d e ;
a 0. C e lle de 37 livres 2 sous , portée en l ’article 2 ;
3°.
La m oitié des arrérages de la rente de i 37 l i v r e s , pa y ée aux sieu's
Costet de C r e s p a t , à c o m m e n c e r du
3
septembre 1 7 4 s , jusques et com pris
l'é c h é a n c e de la T o u ssain t de 1769 seulem ent; le tout sauf la d é d u c tio n
des impositions royales ;
E t en outre la som m e de t i g l i v 10 sou s, faisant m oitié des 2^9 l i v . ,
payée à c o m p te par F lo u v a t fils a u d it de C r e s p a t, le 20 juillet 1774« en
sem ble la m oitié de tous autres payem ens faits par lesdits Flouvat audit
de C r e s p a t , depuis 1 7 6 9 , sous les mêmes d é d u c tio n s ;
4°. L a som m e de 997 liv . 10 s o u s , portée en l'article 4 ( dî'oït de sur
f i e de la m ère ) , sur laq u elle néanm oin s seront retenues les impositions
royales ;
5 °.
C e l l e de
55
livres 10 s o u s , portée en l ’a rticle
6°. L a m oitié des intérêts de la som me de i
25o
5
;
l i v r e s , form ant le q uart
revenant à C la u d a A u ter o ch e dans le prélegs de M ich el-C ésa r A s t a n i é r e ,
depuis le 3 septembre 1 7 4 $ , jusqu ’au 8 jan vie r 1 7 7 2 ; ensemble la moitié
de la som m e à laquelle se trouvera m o n te r , depuis led it temps , le seizième
des jouissances des biens de Jean A stan iére, qu i a appartenu à ladite C lau d a
A u t e r o c h e , du c h e f d u d it M ic h e l- C é sa r Astan iére, à titre d ’usufruit seule
m e n t , d éd u c tio n faite des intérêts, tant des charges foncières que des rentes
annuelles et autres c h a r g e s, lequel seizième sera liq u id é d ’après l’estimation
générale qui sera faite ( si fait n ’a été ) des jouissances des biens d u d i t
Jean A s t a n ié r e ;
7 0.
L a m oitié de la s o m m e à laq u elle se trouvera m onter, p o u r le temps
et d ’ après les estimations et d éd u ction s ci-dessus énoncés , le d ouzièm e
des jouissances des biens de Jean Astaniére , q u i a appartenu à ladite C lauda
A uteroch e,
à titre d 'u su fru it se u le m e n t ,
d u c h e f personnel de M a r c -
A le x a n d r e Astaniére :
P l u s , pe n d a n t led it tem ps, la m oitié des intérêts de la som m e de 4 16 liv.
i 3 sons 4 d e n ie r s, faisant le tiers revenant«! ladite C la u d a A u te r o ch e dans
le quart r ecu eilli par ledit M a rc-A le xa n d re Astaniére, du prélegs de
5ooo
liv .
de M i c h e l - C é s a r , son f r è r e ; p l u s , la moitié de la somme à laq uelle se
trouvera m o n t e r , po u r le tem ps et d ’après le» estimations et déd u ction s
c i dessus é n o n c é s , le quarante - huitièm e des jouissances des biens d u d it
Jean A siatuire , q ui a appartenu à ladite C l a u d a Au teroch e , à titre d ’usu
fruit s e u le m e n t, du c h e f d udit M a r c-A le x a n d r e , coium a a y a n t eu droit
�C7 )
de jouir d ’un tiers dans le seizième échu audit M a rc-A lexa nd re par le décès
d u d it M ic h e l- C é s a r , son frère ( * ) .
D éb ou te les héritiers F lou va t de leur demande en p a y e m e n t du surplus
de la som m e portée en l ’a rticle
3,
et en condam nation d'intérêts des sommes
portées aux sept articles ci-dessus, sauf l ’im pu tation et la com pe n sa tion
sur les jouissances , ainsi q u ’il a été ci dessus o rd onn é.
C o n d a m n e lesdits F lo u v a t à a cq u itte r et faire tenir q uitte ladite M a r c o n
de toutes dem andes et répétitions qui pourroient être formées c o n tre elle
pour raison d ’a u cun e des dettes , rentes et charges ci-dessus allouées auxdits F lou vat.
E t dans le cas où , par l ’évén em en t des imputations et com pensations
ci-dessus ordonnées , soit avec les jouissances a n n u e l l e s , soit a vec les autres
sommes particulières qui po urroien t se trouver dues à lad ite M a r c o n , elle se
trou v ero it reliquataire envers lesdits F l o u v a t , c o n d a m n e ladite M a r c o n à
p ayer auxdits F lo u va t le m on ta n t d u d it r e l i q u a t , avec les intérêts à c o m p te r
du ôo mai dernier , jour de la d em a nd e , dépens c o m p e n s é s , fors le c o û t
de l ’arrêt , q ui sera supporté par c e lle des parties qui , d ’après les im p u
tations et compensations ci-dessus ordonnées , se trouvera d éb itric e.
Après une aussi ample explication, il ne sembloit plus rester de
difficultés; mais la dame Marcon ne jugea pa6 le procès assez com
pliqué ; elle prétendit qu’on n ’obéissoit pas à l’arrêt de 1779, en
se désistant sur le champ; et cependant elle n ’adoptoil pas le rapport
d ’experts de 1780, et concluoil à un amendement : à cela elle ajoutoit plusieurs conclusions nouvelles.
i°. Elle plaidoit, en première instance, sur le partage de la suc
cession de Marie Auteroclie, son aïeule, ouverte en 1745; elle le
fit évoquer au parlement.
(■*) C e ca lcu l do fraction * se réd u it A un s ix iè m e ; en e ffe t , r ï ’ î’ T ï + 7 1
C ’e»t donc un six iè m e que la m ère a en usufruit.
P l u s , il lu i est accordé un quart et uuo m o itié dans le p réleg s de fcooo l i v r e s , aussi en
u su fru it.
l'n fin , scs d roits en propriété sont fix és i un n e u v iè m e , plu s u n tr e n t e -s ix iè m e , par
l ’arre t ci-ap rès.
�(8)
2°. Elle plaidoit sur le partage de la succession de son père et
de ses frères, quoiqu’il fût virtuellement ordonne par les deux
premiers arrêts, dès qu’on devoit lui rendre compte de moitié des
jouissances; elle le fit encore évoquer.
5°. Elle plaidoit sur le partage de la succession de Clauda Autcroche, sa mère, ou du moins de la virile à elle due, de l’argenterie,
des gains de survie et du compte de tutelle, quoique son contrat
de mariage et les précédens arrêts eussent réglé tout cela : autre
évocation, et jonction du tout.
4 °. Enfin, elle demanda les jouissances de 178 1, qui étoient de
droit, en vertu du premier arrêt.
Ces nouvelles réclamations, et les débats qu’elles occasionnèrent,
embrouillant de plus en plus le procès, il fut rendu un troisième
arrêt le 1". août 1781.
« L es F lo u va t sont co n d a m n é s à se désister d e la p o rtio n de biens cédés
» en 1 7 4 3 , a v e c r estitu tion de jouissances et intérêts depuis 1 7 7 1 .
« I l est o r d o n n é une nouvelle estim ation aux frais a va ncés de la dame
« M arcon. »
F a isa n t d ro it sur la d em ande en partage de la su ccession d e M a rie
A sta n iè r e , évoquée en la c o u r , c o n d a m n e les héritiers F lo u v a t à p ayer
à ladite dam e M a r c o n la som m e <le
livres , faisant m oitié de celle
de i 5o liv r e s , à laquelle les m eubles délaissés par M a r ie A u te r o c h e ont
été estimés par le p r o c éj
verb al de d e sc r ip tio n
fait après son décès ,
le i 5 octob re 1 7 4 S ; ensemble la som m e de 18 livres i 5 sous po ur le quart
en sus de ladite e s t im a tio n , a vec les intérêts du tout à c o m p te r d u d i t
j o u r ; ensemble la moitié de la valeur de tous autres meubles qui seront
justifiés a v o ir apparten u à ladite M a rie A u teroch e , au jo u r de sa i n o r t ,
m êm e des l i t s , ta b le s , a r m o i r e s , coffres et chaises de M a r ie A s t a n ic r e ,
que led it feu An toin e F lo u v a t a reconnu avoir eus en sa possession , sui
vant l'estimation qu i en sera faite à l'amiable entre les parties , sinon
par experts conven u s d ev an t le juge royal d 'I ssoire, que la c o u r c o m m e t ,
ou par lui pris et nomm és d'office. Q u a n t aux autres d roits de la suc
cession
de ladite M a rie A u t e r o c h e , r é s u l t a n t , soit de son
contrat de
mariage
�(9 )
m ariage avec Etien ne Astanière , d u
25
jan vier 1681 , soit (le la recon-
noissance passée pa r -d e v a n t n o ta ires , d u 16 juin 1 7 1 7 , sans s’a rrêter à
tous traités q u i auroient pu être faits au p r éju d ice de l'institution conten ue
dans le contrat de mariage de Jean Astanière , d u 16 fév rie r 1722 ;
O rd o n n e que ladite M a r c o n , p o u r sa moitié dans lesdits droits , sera
p a y é e sur les biens de la succession d u d it Jean A s t a n i è r e , de la som m e
de
3/(.o8
livres ; s a v o ir , celle de i 85o liv . à la date du z 3 jan vie r 1681 , et
celle de i 558 livres à la date du 16 juin 1 7 1 7 , ensemble des intérêts
d u tout à c o m p te r d u
A u t e r o c h e (*).
12 mars
1 7 4 3 , date du décès de lad ite M a r ie
E n c e q u i tou ch e les d em andes en partage d e la su ccessï> n d e Jean
A s ta n iè r e , père c o m m u n , évoquées en la cour , sans s’arrêter à la d em a n d e
en n u llité de la d isposition de J ea n Astanière , r elative à son m o b i l i e r ,
fo r m ée par ladite M a r c o n , la d éclare n o n -rec ev ab le dans sa d em a n d e
afin de partage des m eubles ineublans d u d i t Jean Astanière.
A l ’égard des im m eu b les autres que la maison située sur la place d 'I sso ir e ,
ord on n e que dans la q u in za in e de la signification d u p rése n t arrêt à
personne ou d o m i c i l e , il sera à l ’a m iab le , si faire se peut , sin on par
deux experts autres que c e u x qu i o n t dressé le procès verb al du 24 fé v rie r
1780 , procéd é A la v i s i t e , arpentage et e stim atio n des terres , prés
vignes et bois , proven an s de la succession
d u d i t Jean A stan ière , au
n o m b re desquels ils c o m p r e n d r o n t le bosquet ou petit bois Saussay, a ctuel
lem en t join t au p r é M o u to n par la partie seulem ent que lesdits experts
r e c o n n o itr o n t être devenué une d ép en da n ce d u d it pré M o u to n , laquelle
partie sera , par lesdits experts , mesurée et estimée avec ledit pré M o u to n .
O r d o n n e que lesdits experts procéd eron t ensuite au partage et division
de tous lesdits biens en deux lots é g a u x , autant
que faire se p o u r r a ,
lesquels l o t s , chargés de leurs soultes ou retour en d en iers, si aucunes il
y a , seront tirés au sort.
Q u a n t à la maison située sur la p la ce d 'Isso ir e, ayant égard aux demandes ,
offres et consentemens respectifs des parties , ord onn e que par les mêmes
experts il sera p ro c éd é à la v i s i t e , toisé et estimation de ladite m a i s o n ,
en distin gu a nt dans ic elle les trois parties d o n t elle se trouve actuelle*
m e n t com posée ; sa vo ir :
La prem ière p a r i e acquise par feu A n to in e Flou vat , de Jean-Baptiste
T i x i e r et sa fem m e , tenant du m id i
à la
maison de C h a b r a t , et
bise , à la seconde partie ci-après.
( * ) C o tte «omme a é té p a y é e. V o ir l ’acte de 1 7 8 3 , ci-ap rè s.
B
de
�( 10 )
L a d ite seconde partie énoncée et décrite en un procès V e r b a l et rapport
d ’experts , du p rem ier octobre 1667.
L a troisièm e p a r t i e , q u i , à c o m m e n c e r des confins de la précédente ,
suivant ledit procès v e r b a l , form e le reste de ladite maison actuelle ju s
q u ’au c o in de la maison du nom m e le l î l a n c , de bise.
Lesquels experts examineront s i , dans l ’état a ctuel de la m aison, les trois
parties qui la c om po sen t p e u ve n t se partager en telle sorte que les héri
tiers
F lo u v a t aient Ja prem ière portion
ci-dessus
d é s i g n é e , la
fem m e
M a r c o n et la ve u ve F l o u v a t , aient chacun e m oitié dans le surplus ; auquel
cas ils in d iq u e r o n t et fixeront la m anière d ’o p é r e r , au profit desdits h é r i
tiers , le partage et séparation de la prem ière po rtio n d ’a vec le su r p lu s ,
ainsi que le partage et séparation d udit surplus.
E t dans le cas où lesdits experts seroient d ’avis que ladite maison ne
p e u t se partager , et q u ’il seroit de l ’intérêt de toutes les parties ou de
q u e l q u ’une d elles de l i c i t e r , soit les trois portions de maison e n s e m b le ,
soit seulem ent les deux dernières portions , o r d o n n e qu'ils estimeront la
valeu r de ch acu n e desdites portions qui seront à lic ite r.
O r d o n n e au s u r p l u s , par rapport à la n ou velle estim ation des fruits
et jouissances c i - d e v a n t p rescrite , que par les mêmes experts il sera dç
s u i t e , et par un procès verbal sép a ré, p r o c é d é aux frais de ladite M a r c o n ,
et sauf à r é p é t e r , c o m m e d it e s t , à la nou velle estim ation du produit de
ch acu n e pièce de t e r r e ,
pré ou
v i g n e , depuis le
3
septembre
1743,
jusques et c o m p r is 1779» année c o m m u n e , eu égard aux bonnes et m au
vaises a n n é e s , d é d u c t i o n faite <les tailles , vin gtièm es et autres im p o s i
tions
royales , m êm e
de 8 livres l 3 sous
4
des cens et rentes
foncières
( autres
deniers due aux B én é d ictin s , de
3
que c e lle
livres due aux
prêtres de S a i n t e - A n n e , de trois c o u p e s fro m en t due aux mêmes , sur ]a
v ig n e a u x . C h ap elles ; desquels
cens
et
rentes les parties ont c om pté
e n t i ’elles jusqu’ en 1778 et 1 7 7 9 1 su iv an t l ’arrêt du 2,5 ju illet dernier ) ,
ensemble des frais de culture et semailles , suivant I usage des lieux , sans
a v o i r , par lesdits experts , aucuns égards à la prétention des héritiers FIouvat , dans le cas où ils prétendroient a ppliq u er à feu A n to in e Flouvat la
jouissance
à titre de percière , des objets dont
les baux à pe rcière ont
cessé pe n d a n t sa possession ; desquels obj»ts I s fruits et jouissances , à
com pter de la cessation desdits baux à percière , seront estimés pu rem ent
et s i m p l e m e n t , et suivant la d é d u c tio n ci-dessus.
C om m e aussi ord onn e que lesdits experts estimeront la valeur du prod u it
d'> c hacu n de«lits objets d ’année en a n n é e , et c e , suivant les m e r c u r ia le s ,
minages ou pancartes de c h a c u n e a n n ée, s'il
s'en trouve
po u r chaque
espèce du f r u its, e t , ù défaut d i c t l l e * , suivant la c om m u ne r eno m m ée et
�( 11 )
leurs connoissances p e r s o n n e lle s , dans laquelle
estimation
toutefois de
fruits et jo u is s a n c e s , ne sera , du consonteinen' r esp e ctif des p a r t i e s ,
com pris le prod u it du bosquet ou petit bois Saussay , joign an t le pré M o u to n .
O rdo nn e pareillem en t que lesdits experts e s t im e r o n t, c o m m e dit est , le
p r o d u it ou la valeur de tous les objets ( autres que ceux expressément e x
ceptés par le présent arrêt ) qui leur seront indiqués par l ’ une ou l ’a ulre
des p a r tie s , com m e d ép en da n s des successions d o n t il s’a g i t , et c e , sans
p r é ju d ic e du d ro it de la partie q u i se c ro iro it fo n d ée à em p êch er ladite
e stim a tio n , défenses réservées au con tra ire ;
C o m m e aussi q u ’ils estim eront les loyers q u ’o n t dû prod uire les deux
dernières parties de la m a is o n , eu égard à l ’ état dans lequel elles étoient
a va n t les réparations et reconstru ction s faites p a r feu A n t o i n e F l o u v a t ,
d éd u c tio n faite sur le m ontant desdits loyers , x°. de ceux des cham bres et
logeinens stipulés au profit de M a r ie A stan ière et de C la u d a A u t e r o c h e ,
aux termes des contrats de m ariage des i 6 février 1722 et i 5 octobre 1 7 4 a ,
po u r le temps qu’elles en ont joui ou dû j o u i r ; 20. de ceux de la m oitié de
la secon d e partie d é c rit e au procès verbal du prem ier o c to b r e 1667.
R e la tiv em en t aux dem andes des héritiers F l o u v a t , afin d 'in d em n ité des
r ép a ra tion s, n ouvelles a c q u i s i t i o n s , im penses et r econ stru ction s par eux
prétendues faites dans lesditcs deux dernières parties de maison , c o n d a m n e
ladite M a r c o n , suivant ses o ffr e s , i°. à pa yer auxdits héritiers F lo u va t la
som m e de 460 l i v . , de laq u elle ils ont d éclaré se c onten ter p o u r une in d e m
nité de la moitié des droits cédés a!feu A n to in e F l o u v a t , dans la seconde
partie de lad ite m a is o n , par Jean-Baptiste T i x i e r et Jeanne M o u r n a t , son
épouse ; a0, à leur p ayer le m on ta n t des réparations utiles et nécessaires
faites par led it A n to in e F l o u v a t ; à l ’effet de quoi ord onn e que par les
e x p e r t s , et dans le m êm e procès verbal d ’estimation des f r u i t s , revenus
et jo u issa n c es, estimation sera faite desdites rép a ra tion s, r e c o n s t r u c tio n s ,
impenses et am éliorations utiles et nécessaires.
S u r les demandes de la dame M a r c o n , afin d in d em nité des aliénations
faites p a r An toin e F lo u v a t , d ’aucuns des biens de la succession de Jean
A s t a n i è r e , d éc la r e ladite M a r c o n non recevable dans sa d em a n d e en in
d em n ité de la valeur et des jouissances des im m eubles donnés par led it
F lo u va t à M a r ie A sta n iè r e , par la transaction du
23 septembre
1744> pour
l ’a cq u it de sa légitime.
Q u a n t aux in d e m n ité s prétendues pour l ’aliénation de la p e tite inuison
de S a u v a g n a c , v e n d u e à rente au n o m m é Canassy , et de la vig n e aussi
donnée à rente à un p n rtic u lirr de S au v a gn ac , or d o n n e que par les mêmes
expert» il sera p ro c éd é à la visite, to is é, mesure et e stim a tio n , tant de
l a d ite maison que de ladite v i g n e , eu égard à le u r va leu r a c t u e l le , dé-
B a
�( 12 )
duction faite toutefois des im p e n se s, augmentations et am élioration1: qui
seroient du fait des preneurs à r e n t e , ensemble à l ’estimation des lovais et
jouissances depuis le
3
septembre 1743 jusques et c o m p ris 1779 ; et, dans le
cas où le m on tant de l'estim ation excéderoit le p r in c ip a l des rentes m o y e n
n ant lesquelles lesdites maison et vig n e o n t été a liénées, c o n d a m n e dés à
présent les héritiers F lo u v a t à pa yer l ’excédent à ladite M a rco n .
A l’égard des im m eubles qui ont pu être c o n c é d é s à aucuns p a r tic u lie r s ,
soit par ledit An toin e F l o u v a t , soit par sa ve u ve ou ses h éritiers, à titre
de pe rciére , d on ne acte auxd its ve u v e et héritiers F lo u v a t , de leurs
offres de ren d r e sans e f f e t , dans le déla i d ’un an à c o m p te r de la date du
présent a r r ê t , tous les baux à perciére qui ont pu être consentis par led it
feu A n to in e F lo u va t ou par eu x , sans au cun e garantie toutefois du fuit
des tenanciers q ui se préten d roien t en droit d ’en jouir audit titre de perc i è r e , i n d é p e n d a m m e n t desdits nouveaux baux à p e r c i é r e , et en vertu de
titres en possession antérieure à iceux.
S u r les autres dem andes respectives des parties , afin d ’estimation des
dég ra d atio ns ou améliorations prétendues fuites aux terres, vignes et p r é s,
les met hors de cour.
D e toutes lesquelles estimations de jou issa nces, répa ra tion s, r ec o n stru c
t i o n s , impenses et am éliorations et i n d e m n i t é s , sera, par lesdits e x p e r t s ,
dressé procès verbal sé p a r é , c o m m e d it e s t , lors d u q u e l les parties p o u r
r o n t faire tels dires , réquisitions et observations que bon leur semblera.
P o u rr o n t lesdits experts, à l’effet de toutes les opérations des deux procès
verbaux ci-dessus o r d o n n é s, faire telles autres o p é r a t i o n s prevues ou non
prév u es q u ’ils jugeron t nécessaires ou c o n v e n a b le s, m ê m e , en cas de par
tage e n tr ’e u x ,
c o n v e n ir d ’un tiers expert devant
le juge royal d ’Issoire ,
q u e la c o u r c o m m e t à cet e f f e t , ou en req u é rir la nom ination d ’office;
p o u rro n t aussi consulter , si bon leur semble , les voisins , ouvriers , et
autres a yan t connoissance de l ’ancien état et valeur tant de la maison d ’Is
soire que de la maison et vig n e baillees à r e n t e , meine , com m e renseignemens , les titres et papiers q u i leu r seront remis par les p a r tie s , n o ta m
m en t le procès verbal du p rem ier oc to b re 1667 , celui dressé a la requête
enfin celui du z/t février 1780.
K n ce q u i touche la d em ande en partage d rs su ccessio n s de M ic h e l-
d u d i t A n to in e F l o u v a t , le 22 avril
César et d e M arc * A le x a n d r e A s L an ière. , frères c o m m u n s , form ée par
la d am e M.ircon ,
Donne acte à ladite M a r c o n de ses offres de faire état ou payem ent en
deniers , à la ve u ve F lo u va t , de la valeur à laquelle se trouvera monter la
portion virile de C la u d a A u t e r o c h e , mère c o m m u n e , dans la succession
d u d it M a rc - Alexandre Astnnlèro ; lui donne pareillem en t acte de ce q u e ,
�( i5 )
par leur requête du 4 juin d e r n i e r , lesdits Flou vn l a cc e p te n t Iesdites offres;
en co n s é q u e n c e , c o n d a m n e ladite M a r co n à faire état ou p a y e m e n t en d e
niers , à ladite ve u ve F l o u v a t , de la m o itié de la som m e de
2 deniers , faisant le neuvièm e des
5ooo
555
livres 11 sous
livres de prélegs fait à M icliel-C é sar
Astanière , par J<;an, son p è r e , ensemble de la m oitié du trente-sixième de la
valeur à laquelle les biens d e Jean Astanière se tr ouveront monter , d ’après
l'estimation ci-dessus ordonnée , d é d u c tio n faite des capitaux tant des charges
fon cières que des dettes , ensem ble d u d it prélrgs et autres legs , si a ucun s y
a e n ; auxquels neuvièm e et trente-sixième
A u te ro c h e
le
droit de portion virile de C lau d a
, q u an t à la p r o p r ié t é , dem eure fixé p a r lu présent a r r ê t , sans
pr éju d ice de l ’usufruit de la totalité des portions viriles de ladite C la u d a
A u tero ch e , dans les successions desdits M ic h e l -C ésa r et M a r c - A l e x a n d r e ,
ses enfans , suivant q u 'il est fixé par l ’arrêt du a5 juillet dernier.
C e fa isan t, sur la dem ande en partage desd iteï su c ce ssio n s, met les partiel
hors de cour.
E n ce q u i touche les demandes relatives à la su ccessio n d e C lau d a
stu tero ch e , déboute ladite M a r c o n de sa d em a nd e en n u llité de l ’o r d o n
nance <1(1 juge d 'îs s o ir e , du 29 mai 1 7 7 3 , qui n permis à la veuve F lo u v a t de
prendre la qualité d ’héritière par bénéfice d 'in ventaire de lad ite C l a u d a
Auteroche.
Sans s’arrêter aux autres demandes de ladite M a rcon , afin de p a r ta g e ,
tant des portions viriles recueillies par C la u d a A u t e r o c h e , que de ses gains
de survie , ni à sa dem ande afin de remise de sa p a rt de l ’argenterie p r é
tendue trouvée dans la succession de C la u d a A u t e r o c h e , desquelles d em a n
des elle est déb ou tée, d on ne acte aux Flouvat de la déclaration faite par
ladite M a r c o n , q u 'elle n ’entend point d em ander le c o m p te de tutelle à
elle dû par C la u d a A u te r o c h e ; en conséquence , cond am ne lad ite ve u ve
F l o u v a t , en ladite qualité d ’héritiere b én é ficia ire ,
i ° . A payer à ladite M a r c o n la somme de
3ooo
livres à elle assurée par
ladite Clauda A u t e r o c h e , tant p a r l e contrat de mariage d ’A n t o i n e F l o u v a t ,
que pnr celui de ladite M a r c o n , sous la cond itio n de ne p.is d em a n d e r
ledit co m p te de t u t e l le , avec les intérêts à c om pter du 8 jan vie r 1 7 7 2 ,
date du décès de ladite C la u d a A u t e r o c h e ;
2 e. A d élivrer à ladite M a r c o n la moitié de tous les meubles en nature '
( autres que c e u x d e cure ) , à elle pareillement assurée par lesdits contrats
de m a r ia g e , et c e , suivant les procès verbaux d'apposition de s c e l l é s ,
reconnoissance d ’iceux et inventaire , des 8 jan vier 1772 , fi et iq j u i l
let 177S ;
5°.
A payer en mêm e temps à ladite M a r c o n ln som m e de
35o
livre*,
à laquelle la c o u r arbitre les dommages - intérêts r é s u lta n s , soit du dé-
�C *4 )
faut de jouissance desdits m e u b le s , soit d u
ép ro u v e r .
dépérissem ent q u ’ils ont pu
Sera ladite veuve F lo u v a t tenue de satisfaire aux condam nations ci-dessus,
dans deux m ois p o u r tout d é l a i , à co m p te r de la signification du présent
arrêt à personne ou d o m i c i l e , si m ieux elle n ’aime rend ra son com pte de
bénéfice d'inventaire , ce qu'elle sera tenue de faire dans le m êm e délai de
deux mois , sinon , et à faute de c e faire dans l e d i t d é l a i , et icelui passé ,
en vertu" du présent a r r ê t, et sans q u 'il en soit besoin d'autre , la déclare
d é c h u e d u d i t bénéfice d ’i n v e n t a i r e , et la répute d é b itric e pure et sim ple
d e ladite M a r co n .
L e tout sans p r é ju d ic e et sous la réserve des droits et prétentions des
héritiers F l o u v a t , c o n tre la succession de ladite C lau d a A u t e r o c h e , d é
fenses réservées au contraire.
E n ce q u i lou che l.i deirtande île ladite ATarcon , afin de jo u issa n ce pa r
m o itié , en la présente année , tle tous le s fr u its e t revenus des biens
d o n t il s ' a g i t , ensemble afin d ’ind em nité de la p riva tion q u ’elle a essuyée
d ’a ucuns
d iceu x
en 1 7 8 0 ,
nonobstan t
l ’arrêt
prov isoire
du
8 juillet
de la m êm e an n ée, ordonne que le d it arrêt sera exécuté pour la présente
ann ée
com m e
i l d ev oit l ’être po u r
1780; en c o n s é q u e n c e , que
ladite
M a r co n jouira de tous les biens des successions d on t i l s’a g it, par égale
po rtio n avec la veu ve F lo u v a t , à la charge par elle , su ivant ses offres ,
i ° . de faire état ou payem en t à la ve u ve F lo u v a t pour les années 1780
et
1 7 8 1 , d es
intérêts de
la som m e
à laquelle
se
trouvera
m on ter,
q u an t à la p r o p r i é t é , d'après les estimations ci-dessus ordonnées , la por
tio n v ir ile de Clpu d a A u t e r o c h e , dans la succession de M a r c - A le x a n d r e ,
son fils, appartenante à ladite ve u ve F l o u v a t , en sadite qualité d'h éritière
b én é firi lire ;
20, D e c on trib u er pour m o itié au payem en t des c e n s , ta ille s , v i n g
t i è m e s , frais d ’exp loitation, rentes et autres charges desdites su c c e ssio n s,
m êm e de p a v e r , à la Sain t-M artin p r o c h a i n e , aux héritiers F l o u v a t , la
som m e de 218 livres po ur intérêts des 4000 livres, d ’ une pr.rt, et 725 liv.
d 'a u t r e , allouée par l ’arrct du
25
juillet dernier, plus celle de 18 livres
répétée par les F lo u v a t p a r leur requête du
juillet d e r n ie r ; lesquelles
som m es néanmoins ladite M a r c o n demeure autorisée à retenir entre ses
m a in s , sur et en déd uction du montant des sommes par elle répétées à
titre de non jouissance pe n d a n t l'année d er n iè re, de tout ou partie d ’au
cuns des objets detdites successions ; à l'effet de quoi ord on n e que par
les mûmes experts qui procéd eron t aux opérations c i-d e v a n t ordonnées ,
la moiti» revenante à ladite M a r co n
dans les loyers de la deuxième et
Uoisiéine portion de la maison sur la place d ’Issoire , pour les années 1780
�( J5 )
et 17S1 , sera estim ée , eu égard à l ’état dans lequel étoien t lesdites p a r
ties de maison avant les réparations et r econ stru ction s faites par A n t o i n e
F lo u v a t , et d é d u c tio n faite seulement des loyers de la m oitié de lad ite
d eu x ièm e partie ; desquels loyers , ensemble du m o n ta n t d u prod u it de*
autres objets dont ladite M a r c o n n 'a pas eu la jouissance , elle pourra
im p u te r et d éd u ire la som m e sur le total de celles allouées p a r ledit arrêt
du ï.5 juillet dernier.
S u r le surplus des demandes , fins et conclusions d tsd ite s parties , les
met hors de cour.
>
C o n d a m n e les F l o u v a t , pour tous dom m ages et in t é r ê ts , aux trois quarts
des é p ic e s , v a c a t io n s , et co û t de l ’arrêt du 6 septembre 1 7 7 9 , q u i a dû être
a v a n c é par A n to in e F lou vat et sa fem m e ; c ond a m ne la dam e M a r c o n à
l ’autre quart des dépens réservés par les p r é c é d e n s arrêts; p l u s , à supporter
ou rem bourser le quart des épices , vacations , et c oû t d u d it arrêt du 6 sep
tem bre 1779 , tous les dépens relatifs
à la
nouvelle estimation réservés : c o n
d am n e la ve u v e F lo u v a t en une m oitié des autres dépens faits depuis l ’arrêt
du 6 septembre 1 7 7 g , autres q u e ceux de la cause jugée par l’arrêt d u
25 juillet d er n ie r , de laquelle m oitié ladite ve u v e F lo u va t pourra e m p lo y e r
un sixième en frais de bénéfice d ’inventaire : c o nd a m ne les héritiers F lo u v a t
en un sixième' desdits dépens, les deux autres sixièmes compensés, que la dam e
ve u ve F lo u v a t et la fem m e M a r c o n em p loiron t r esp e ctiv em e n t en frais de
partage.
E t sera le r.oùt du présent arrêt supporté po u r deux cinq uièm es par la
dame veuve F l o u v a t , qui pourra en e m p lo ye r un sixième en frais de b én é
fice d ’i n v e n ta ir e ; po ur un a u tre cin q u ièm e par les héritiers F lo u v a t ; un
c in q u ièm e dem eurant com pensé entre l a d ite veuve F lou vat et ladite M a r c o n ;
et l'autre c in q u iè m e réservé pour être répété en définitif,
11 esl aisé de voir, par plusieurs dfis dispositions de cet arrêt,
que le parlement étoit lassé de statuer sans cesse sur les mêmes
difficultés ; il donnoit tout pouvoir aux experts ; il régloit des in
demnités d ’office: et il y avoil lieu de croire qu'enfia il n’y auroit
plus de procès.
Mais les sieurs Flouvat éioicnt assez malheureux pour qu’il n ’en
fût pas ainsi. Les experts nommés pour l’amendement requis
par la dame M arcon, employèrent un rapport de neuf cent vingt
�( i6 )
pages à être divisés d’opinion ; un tiers expert estima la succession
à 27905 liv. 5 sous, et fixa les jouissances.
«
Les héritiers Flouvat purent enfin s’exécuter ; et ils prouvent,
par ce qui se passa alors, combien ils éloient jaloux de terminer
avec la veuve Marcon par tous les sacrifices possibles.
i°. L ’arrêt lui adjugeoit, dans la succession de l’aïeule, une
somme de 3408 livres; ils lui délaissèrent des fonds pour cette
somme.
20. L ’arrêt lui adjugeoit 85 liv. i 5 s. pour le mobilier de ladite
succession, estimé; plus, la moitié de celui qu'Antoine Flouvat
reconnut avoir en sa possession ( d ’après une transaction de 1756).
Les héritiers Flouvat le fixèrent eux-mêmes à i 5 o livres, lors du
premier rapport d’experts : ce qui eut lieu sans réclamation.
5°. Par traité du 12 novembre 1783 , ils délaissèrent des im
meubles à la veuve Marcon pour la payer de tout ce qui lui étoit
dû dans la succession maternelle, c’est-à-dire , de 3ooo liv. pour
sa d o t, de 1714
Pour intérêts, de 35o liv. pour dommages-
intérêls arbitrés d ’office, et pour la somme de 55o liv. pour un
quart des frais du premier rapport.
Et comme les immeubles cedes excedoient lesdites sommes de
celle de 1400 livres, il fut dit que cette somme de i/,oo livres
resteroit entre les mains de la veuve Marcon ; pour être ensuite
imputée : elle en est débitrice.
4°. Par autre traité du i y décembre 1784, la maison d ’Issoire
fut licitée entre les parties à iôfioo livres; la femme Marcon la
retint pour cette somme, et il fut réglé qu’il ne lui en revenoit
que pour 25oo liv. ( à cause des réparations et augmentations
faites par le sieur Flouvat. )
Sur le surplus, elle paya 600 liv. aux sieurs Flouvat; elle retint
eu
�( *7 )
en scs mains la somme de i 25oo liv. pour en faire le rapport. Sur
quoi elle s’obligea d’acquitter ce qui restoit dû au sieur T ix i e r ,
vendeur ( environ 800 li v .) ; et il fut ajouté qu’elle feroit compte
de Vintérêt du surplus au taux de la lo i , sans retenue.
A i n s i , la voilà débitrice de 1400 liv. depuis 1783 , et d’environ
11700 liv. depuis 178 4, avec l’intérêt au denier vingt.
D e leur p a rt, les sieurs Flouval dévoient la restitution des jouis
sances de la moitié des biens de Jean Astanière depuis 174^; mais
tout prouvoit que les charges les reduisoient à r ie n , puisque leur
père avoit donné tous les biens à jouir à sa belle-mère pour ses
reprises: fait dont la dame Marcon se fait elle-même un moyen.
T elle étoit la position des parties, lorsque le 18 mai 1785 la
dame Marcon assigna les sieurs Flouvat pour exécuter les arrêts,
et voir homologuer les rapports.
Alors les sieurs Flouvat présentèrent leur compte le 1". février
1786.
Ils divisèrent chaque année en deux chapitres ; le premier se
composoit, i°. des sommes payées à la dame Marcon , avec l’in
térêt , 20. des reprises de la mère ( représentée par eux suivant les
arrêts ) , 3e. des charges annuelles et rentes ; et le deuxième cha
pitre se composoit de la moitié des jouissances ducs à la dame
Marcon , suivant le l'apport.
Par ce com pte, les héritiers Flouvat s’établirent créanciers de
3 i 52 liv. en 1780, époque où la dame Marcon s’étoil mise en pos
session; à cela, ajoutant les provisions payées, et autres sommes
ne portant pas intérêt, plus, les ia5o liv. prix du retour de lot
de la maison, et enfin les intérêts du tout jusqu’à la fin de 1785;
il en résulta que la dame Marcon étoit débitrice de 17985 liv.
liientôt les sieurs Flouvat s’aperçurent qu'ils avoient omis dans
G
�( i8 )
ce compte quelques articles, et notamment la somme de 1400 liv.
portée en l’acte de 1783, comme restée dans les mains de la dame
Marcon : ils rectifièrent cette erreur par des conclusions.
L a dame Marcon signifia, le 17 décembre 1786, des débats à
ce compte, ou plutôt elle en présenta un nouveau, où elle se
reconnut débitrice, en compte final, de462g liv., déduction faite
des 4000 livres et des i 5ooo livres; laquelle somme de 462g livres
elle prétendit devoir rester en ses mains pour sûreté des frais par
elle faits , offrant de payer Vintérét de ladite somme de 4G29 liv.
suivant l’acte de 1784.
Comm e par ce débat la damer IVIarcon avoit fait apercevoir
quelques défauts de calcul au compte des sieurs Flouvat, ceux-ci
les rectifierent par une écriture du 6 avril 178g. Ce n ’est qu’après
celte dernière rectification que le compte fut affirmé par-devant
M . Ferrand , conseiller, le 2 juillet 178 g: après ce la , la dame
Marcon fit encore signifier de très-longs débats le 17 décembre 1790.
T e l fut le dernier état au parlement, supprimé peu de jours après.
On fait grâce à la cour du détail fastidieux d ’une foule de pro
cédures frustratoires et occultes , qui furent laites sous le nom de
la dame Marcon , au sujet du même compte. O11 avoit fait inter
venir sa fille, comme curatrice du sieur Marcon; c’est à e lle q u ’on
rendoit un compte : on y faisoit paroitre plusieurs prétendus créan
ciers, et le procureur lui-même y intervenoit sous son nom. On
faisoit trouver les sieurs Flouvat débiteurs de 57000 liv.; et on surprenoit des arrêts par défaut , auxquels , faute d ’en recevoir copie,
il n'y avoit pas eu d ’opposition. Enfin le scandale de cette procé
dure appela l’attention: un arrêt du 5o août 1786, la déclara toute
entière nulle et frustratoire, et condamna le procureur (le sieur
Golct de lilacy) aux dépens en son nom personnel.
�( *9 )
L e procès fut repris à R io m , comme tribunal choisi par les
exclusions respectives, en 1792. 11 n ’y fut rien statué; mais ce qui
s’y passa est important pour la cause.
L e 1 3 prairial an 4 , les fils Marcon, agissant pour leur mère, signi
fièrent aux héritiers F lo u vat, que le jugement du procès en reddition
de compte étoil peut-être fort éloigné, parce que le tribunal civil étoit
encombré d’affaires ( et sans doute que les assignats approchoient
de leur fin); qu’ils avoient intérêt de se libérer de trois objets indépendans du compte; en conséquence, ils firent des offres, à porte
feuille ouvert et papiers déployés ( ce sont leurs expressions), de
*999® ^v* > pour le prix resté en leurs mains des deux actes de
1783 et 1784, et pour la virile due à Clauda Auteroche, dans les
successions de scs enfans ; ils augmentèrent ces offres par autre
exploit du i 5 , et les portèrent à 21000 liv.
Ces offres ont été déclarées nulles, par jugement du a5 prairial
an 7 , attendu qu’elles dépendoient d ’un compte non réglé. Il n’y
a pas eu d’appel de ce jugement.
Enfin, le procès a été repris en la c o u r , où la dame Marcon a
fait signifier le mémoire auquel on répond.
•
m o y e n
s.
L a dame Marcon s’obstine à 11c vouloir pas suivre les formes
reçues. L ’ordonnance de 1667 dit que l’oyant compte donnera ses
blâmes et débats dans la huitaine; et c’est un compte nouveau
qu’elle a voulu présenter. Mais où en seroit-on , et comment pourroit-on s’entendre, si le comptable étoit obligé de débattre 1111
second compte? et quelle raison y auroit-il pour qu’il n’en donnât
pas aussi un troisième, sous prétexte de corriger le second? II fauC a
�( 20 )
droit bien aussi le présenter avec ses apostilles et ses preuves j et
malheur à la patience même la plus exercée, si les héritiers Flouvat
eussent voulu rectifier le second ou plutôt le troisième compte de
la dame Marcon par un quatrième compte!
L a course passera certainement de cette surcharge de chiffres;
il est même difficile de ne pas lasser son attention , par ce qui
reste à lui dire. Mais au m oins, puisqu’un soutènement décompté
est chose nécessaire, les sieurs Flouvat en abuseront le moins pos
sible, et se contenteront de prendre pour exemple la première
année 1743 , c’esl-à-dire, les quatre mois comptés de l’année 17^3 ;
de là ils parcourront
quelques
articles
d ’années
subséquentes.
Il faudroit peut-être répondre auparavant à un calcul prélimi
naire que fait la veuve M arco n, aux pages 4 et 5 de son mémoire.
Mais la plupart de ces articles sont des objets étrangers aux arrêts,
et déjà proscrits par les hors de cour : tout cela d ’ailleurs exigeroit
des développemens nouveaux; e t , dans une cause aussi compli
quée, ce seroit brouiller les idées de la cour, et s’embarrasser soim êm e, que de s’éloigner de l’objet positif du procès.
II s’agit d ’un compte de jouissances , dû à la veuve Marcon, qui
doit, de son côté, des créances réglées, et des charges. Ce compte
a été présenté, il ne s’agit donc que d ’examiner en quoi on le
dit défectueux.
§. 1". D e 1745. ( Page 8 du mémoire. )
L ’article premier est un capital de 5oo liv. pour un terme de
la dot reçue par la dame Marcon ; elle l’alloue. L ’article 2 étoit
de 7 liv. 10 sous pour les intérêts de cette dot en 174^. L a dame
M arcon, par sa requête de 178 6, allouoit 7 liv. 7 sous 9 den. ;
�( 31 )
par sa requête de 1790, elle allouoit seulement 29 sous ; et enfin,
par son mémoire , elle n’alloue rien du tout.
Cette négation parolt d’abord peu conséquente ; mais elle s’é
tend ensuite à toutes les années du compte ; et par ce
m oyen ,
la dame Marcon se dispense de payer pendant quarante ans l’in
térêt des 4000 livres qu’elle a reçues, malgré l ’arrêt de 1779.
Son moyen (qui se trouve page 10) est de dire que le capital
est éteint par la compensation de sommes antérieures au 3 septem
bre 1743, et ne peut porter intérêt.
Quelles sont ces sommes? Elle n’en dit rien. Quelles peuvent*
elles être? Aucunes, sans contredit; car les héritiers Flouvat ne
doivent rien d’antérieur.
Ils ne doivent que du mobilier de la succession de l ’aïeule : le
total étoit de 86 liv. par l’arrêt, à quoi ajoutant j 5 l i v ., suivant
le rapport des sieurs Petit et R o b e rt, on sera toujours bien loin
de compenser 5 oo liv., et à plus forte raison, dans les années
suivantes, sera-t-on éloigné de 4000 hv.
D ’ailleurs , de quel droit la dame Marcon raye-t-elle un article
autorisé? L ’arrêt du 21 juillet 1779 la condamne à faire compte
de la somme de 4000 liv. ; savoir, 5oo liv ., etc. avec intérêt à
compter de chaque payement.
Les articles 3 , 4 , 5 , 6 ont pou de différence entre le compte
Flouvat et la correction. Cette différence sera aisément rectifiée
lors de l’apurement; et
quoique
les héritiers Flouvat croient avoir
raison , il est inutile d ’en occuper la cour.
L ’article 7 , relatif au sixième revenant en usufruit a la m è re ,
est rayé par la dame M arcon; et son m otif ( page 10 ) est de
renvoyer 5 un tableau par elle rédigé, pour montrer qu’il n ’y a
rien de reste dans la succession après les charges payées, et qu’ainsi
le sixième se réduit à rien.
�( 23 )
Il y a p lu s, car nous verrons ci-après , dans le
I I , que la
darne Marcon fait supporter à sa mère le prétendu déficit qu’elle
dit avoir observé.
Cet article est encore très-important ; car il se répète à toutes
les années suivantes; et il en résulte que pendant vingt-neuf ans
( jusqu’en 1772 ) les Flouvat n ’auroient rien à prendre pour le
sixièm e des jouissances dû à leur mère : cela n’est exact que pour
très-peu d’années , et les héritiers Flouvat n ’ont pas attendu le
tableau auquel la dame Marcon les renvoie, pour diminuer, ou
rayer même les années absorbées par les charges.
Far leur
requête de
178g,
ils o n t réduit l ’article
7,
de
1743 , à
3g so u s, et ont indiqué les autres années pendant lesquelles il y
avoit des déductions à faire.
Mais la loi doit être égale, et les héritiers Flouvat prennent acte
du tableau lui-m êm e, pour en induire que la moitié de ces mêmes
jouissances due à la dame Marcon doit aussi être réduite à rien.
C e n ’est cependant pas là le calcul de la dame Marcon ; elle
raye les articles du sixièm e, et conserve ceux de moitié.
Ne nous étonnons donc plus qu’avec de tels élémens, en ôtant
tous les ans d ’une part, et augmentant de l’autre , il y ait au bout
de quarante ans une si grande différence entre les deux comptes.
Il faut rétablir l’article 7 comme les sieurs Flouvat l’avoient
réduit eux-mêmes en 178«), et il est juste de partir de celte base
pour les années suivantes, jusqu’il 1772. Les héritiers Flouvat con
viennent encore que le*kixième des jouissances revenant à la mère,
et devant être prélevé avant partage, doit n ’être compté qu’en
dernier article, c’est-à-dire, après le dégrèvement des charges.
Les articles 8 et 9 ne sont diminués que de peu de chose : c’est
encore un objet de calcul lors de l ’apurement.
�( ^
)
L ’article 10 consiste en 277 liv. i 5 s. pour le neuvième en pro
priété du prélegs de 5ooo liv. adjugé par l’arrêt du 1". août 1781.
L a dame Marcon ne rejette pas indéfiniment cette somm e; mais
il lui plaît de la transporter à l'année 1772 , comme elle le dit à
la page 10.
Ses motifs seroient assez curieux , s’ils n ’éloient contradictoires
avec ceux qu’elle emploie dans son tableau relatif à la radiation
de l’article 7. Si cela étoit p ayé, dit-elle, en 1743, la mère n ’auroit plus dû réclamer les intérêts; et il vaut mieux lui payer la
somme au moment de sa m o r t , parce qu’elle a besoin jusque-là
de son revenu.
D ’après cela, on -va croire que la dame Marcon portera tous
les ans l’intérêt de cette somme à sa mère pour la dédommager :
point du tout.
On croira au moins que, dans le tableau en question, elle lui
en fait compte, avant de la grever d ’un sixième du prétendu
déficit. Au contraire; car elle porte la moitié du prélegs en dé
duction , quoique la mère ne le prenne p a s, et il résulte du tableau
que la mère n ’a rien dans les jouissances à cause du prélegs qui
aide à les éteindre. Il résulte aussi des pages 8 et 10, qu elle n ’a
rien dans le capital de ce prélegs, à cause qu’il faut lui conserver
ses revenus.
Il
11e reste plus qu’à savoir à quelle page on lui accorde ces
revenus; mais la dame Marcon 11’en a accordé nulle part. Cepen
d a n t, dans son acte d’offres de l’an 4 , elle comptoit Gooo livres
d ’intérêts, et par conséquent elle y comprenoit ceux du prélegs
de sa mère, puisqu’il faisoit partie des trois capitaux offerts.
A u reste, comme la veuve Marcon n’est pas libre de transposer
des sommes qu'un arrêt ne transpose pas , les héritiers Flouvat
�(=4)
demandent qu’elles soient laissées à l’année où ils les ont placées,
parce que jamais on n’a vu attendre le décès d’un créancier pour le
payer.
Ils remercient la dame Marcon d ’avoir bien voulu veiller à leurs
intérêts, en disant qu’elle opéroit ainsi pour ne pas priver la mère
de ses revenus. M a is, s’ils se sont fait tort, ils s’en consoleront;
et ce n ’étoit pas la peine de refondre tout un compte pour faire
semblant de ne pas les priver d ’un intérêt qu’ils ne veulent pas.
L ’art, i i est encore renvoyé à 1779» par un semblable effet de
la complaisance de la dame Marcon. Les sieurs Flouvat n’en persis
tent pas moins à demander que la somme reste à l ’année 1742 , au
risque d’être privés des intérêts à courir.
L ’art. 12 est rejeté tout à fait par la dame M arcon; et ses
moyens ( page 10 ) sont, sur ce point, beaucoup plus étendus.
C ’est qu’aussi sa tâche étoit pénible , car il ne s’agissoit de rien
moins que de lutter contre l’arrêt du i*\ août 1781.
En e f f e t , cet arrêt dit textuellement que la dame Marcon fera
compte au sieur Flouvat de 450 livres pour indemnité à lui due
sur partie de la maison.
L a dame Mqrcon ne se le dissimule pas ; mais elle prétend
prouver que c ’est une injustice, parce que l’arret supposoit un par
tage et non une licitation.
Précisément l’arrêt prévoyoit aussi une licitation. Il fixa une
gomme d ’office pour empêcher de nouvelles contestations ; et on
croit possible de faire tomber cette fixation.
Par q u o i, au reste, est-il prouvé que la moitié de la maison, qui
revenoit dans l’origine à la dame Marcon , ait eu pour moins de
45o livres de réparations? L a dame Marcon veut-elle encore une
expertise ? Mais elle tranche la difficulté en n’allouant aucune
somme
�( ^5 )
somme. Elle veut en revenir à une transaction de 1667 , et à une
explication qui tendroit ù rejuger partie du procès. Elle convient
cependant que la difficulté étoit née lors de l’expertise et du traité
de 1784 ; m a is , dit-elle, on ne pensa pas alors à ces 45 o livres.
On pensa à tout, mais personne ne s’avisa de meltre en question si
l ’arrêt de 1781 seroit réformé lorsqu’il adjngeoit ces 45 o livres , en
mitme temps qu’il ordonnoit partage ou licitation. Les héritiers
Flouvat persistent donc à demander ces 45o livres, et les intérêts
dont ils ont iormé demande additionnelle par leur requête de 178g.
L ’art. i 3 consiste en une somme de 27g livres 5 so u s, pour les
dettes payées par Antoine Flouvat. L a dame Marcon, dans sa requête
de 1786, allouoitcet article, à la charge de produire les quittances;
aujourd’hui elle le réduit à 11 livres 18 sous , et se permet de ren
voyer le surplus à d ’autres années.
C ’est ainsi q u e , sans raison et avec le plus léger prétexte, elle
dénature un compte tout entier, et nécessite, à pure perte, des
frais plus considérables cent fois que la différence qui peut exister
entre l’intérêt d’une foible somme divisée en trois années , et l’in
térêt de la même somme porté tout à la fois.
A u reste, et ce n ’est pas seulement une inutile tracasserie qu’il
y a à reprocher là-dessus à la veuve Marcon , l’ arrêt du 25 juillet
1781 est impératif; il a ordonné qu’elle tiendrait compte de 27g 1.
5 sous sans intérêts, et par simple compensation avec les jouissances.
L a loi ne doit donc pas être dure pour le débiteur seul, qui s’est
libéré en payant la detlc du créancier. L ’arrêt n ’a rien distingué sur
cette somme; et cependant, quant aux4«oo livres, il a distingué les
époques de payeinens : il a donc fallu distinguer quand l’arrêt le
vo u lo it, et ne pas distinguer quand il ne le disait pas. Les héritiers
Flouvat ont en effet divisé la somme de 4000 livres à ses diverses
D
�(
)
époques; et quant aux 279 liv. 5 sous, ils les ont portés à la pre
mière année , ce qui est absolument sans conséquence, puisqu’ils
ne les portent que pour déduire et non pour produire intérêt. Cet
article doit donc être maintenu.
Quant à l’article i 4 > relatif aux impositions à déduire, les sieurs
Flouvat les portoient au hasard à 120 livres par an ( ce qui étoit
très-peu pour une succession de 27900 livres d ’immeubles ) , parce
qu’il leur avoit été impossible de trouver les rôles.
L a dame M a r c o n prétendit avoir élé plus heureuse , et dit qu’elle
avoit un étal général. Il
se p o r l o i t , d i s o i t - e l l e ,
à 101
livres
4 sous
pour 1743 ; e t , par une différence assez inconcevable, l’imposition
n ’éloit que de 27 livres en 1749 , quoique les biens fussent les
mêmes.
Aujourd’hui la dame Marcon fixe les quatre mois de 174$ à
10 livres, et l’année 1749 a 5 francs 77 centimes( pages 8 et 17 ) ;
et pour prouver combien tout cela est intelligible, elle dit ( page 11 )
qu’on trouvera dans trois tableaux tous les renseignemens néces
saires.
L a première chose, également intelligible dans le premier tableau,
est que la cote des biens Astaniere etoit con fondue avec celle du sieur
l ’a y o t , deuxième mari de Clauda Auteroche, de sorte que la divi
sion h en f.iire a été à la pure volonté de la dame Marcon.
Mais c’est assez s ’occuper d ’un article qui doit encore rester tout
entier soumis au calcul définitil- Si la dame Marcon a des extraits
en règle (les rôles, comprenant toute la cote <1<‘ S biens Astanière,
et qu’il soit possible de la distinguer, pas de difficulté alors h suivre
cette déduction ; sinon il faudra bien s’en tenir à celle fuite par
les sieurs Flouvat, ou la cour la fixera d’office.
�C 27 )
§ . 2. D e 1743. (
9. )
Les héritiers Flouvat n ’avoient d ’abord, dans leur compte, porté
en déduction que la moitié des jouissances au profit de la dame
M arcon; mais, par leur requête de 1786, ils ont reconnu qu’i^
falloit y ajouter le deuxième article relatif aux meubles dont ils
avoient fait omission.
Aujourd’hui la dame Marcon se fait créancière de neuf articles
au lieu de deux.
L e premier article n’est pas contesté; mais il plaît
Marcon de le porter
à i 5i
liv.
18
à
sous au lieu de 137 liv.
C ’est, dit - elle ( page 11 ) , une erreur qui s’est étendue
la dame
10
à
sous:
toutes
les autres années : aussi augmente-t-elle sa créance tous les ans ; et
sa preuve est encore renvoyée
à
un tableau.
Mais un meilleur tableau se trouve dans le rapport lui-même
du tiers expert. En 1743, il a porté les produits à 375
livres
: donc
la moitié étoit iZq liv. 10 sous; ainsi de suite dans les années
précédentes.
O r , la dame Marcon a assigné en homologation de ce rapport en
1785, aussitôt qu’elle fut nantie de 16900 liv. et de deux provisions.
T o u t est donc terminé, et il est inutile de refondre un compte
pour chercher au delà de ce qui est définitif.
L es jouissances doivent donc subsister telles qu’elles sont en
17 4 3 , et à toutes les autres années , saui au commissaire de la cour
à examiner si les sommes portées en compte par les Flouvat sont,
chaque année, la moitié exacte de la somme réglée par l ’expert.
L ’article 2 est relatif au mobilier de l’aïeule j il est fixé par le
troisième arrêt : donc pas de difficulté. Les héritiers Flouvat ont
«voué l’omission.
D 2
�( ’ a» )
De même, pour l’article 5 , ils conviennent qu’il faut déduire
cette autre partie de mobilier ; mais on ne peut diviser leur décla
ration : ils ont offert, nu rapport Petit,
1. pour moitié de i 5o 1.,
et non çp liv. i 5 sous.
Les articles 4 et 5 sont une nouvelle découverte de la dame
M arcon, fondée sur deux transactions de i y 5S et 1744*
Si elle avoit voulu lire celle de i j 5 6 , elle y auroit vu que le
sieur Flouvat s'est chargé seulement de mobilier pour
i 5q
livres,
et que le surplus avoit été vendu au sieur Payot.
Elle y auroit vu que Marie Astanière avoit la majeure partie
du mobilier par elle laissé à titre d’usufruit, et
que
cela concorde
avec l’acte de 17^8, où il n’est parlé d’autre mobilier que de celui
q u ’on lui délaisse dans une chambre garnie.
L a transaction de 175G est la dernière : donc les autres s’y rap
portent. Dira-t-on que si Clawla Auteroche a vendu à son mari
du mobilier de sa belle-mère , la dame Marcon doit le retrouver
dans sa succession à titre de prélèvement , puisque les sieurs
Flouvat en sont héritiers?
Mais précisément l’arrêt de 1781 règle tout ce qui doit appar
tenir à la dame Marcon dans la succession de sa mère : elle y demandoit plusieurs espèces de mobilier ; elle en est déboutée, ainsi
que de tonte réclamation en compte. 11 y a plus, elle est, sur tout
le reste de ladite succession , mise hors de cour.
Si dJnc il y a lieu de débattre le compte de la dame Marcon ,
et de devenir o y a n t, on soutient que les articles 4 et 5 du §. 2
doivent être rayés.
11
en est de même de l'article G , il n ’est fondé sur rien ; et ce
n ’est pas après tant de débats et de difficultés qu’il faut élever
des prétentions nouvelles. Comment la veuve Marcon , payée do
�( 29 )
la succpssion tic son aïeule, a-t-elle pu laisser en arrière le revenu
de la seule année 174^ ?
L ’art. 7 n ’est qu’une transposition de l’art. 3 du §. x". L a dame
Marcon veut déduire les vingtièmes de la pension viagère de sa mère.
Elle y est fondée , dit-elle, par son contrat de mariage : on y
lit que sa mère a une pension payable de trois en trois mois par
avance, mais il n ’est pas dit qu’elle sera sujette à retenue.
A la vérité, le contraire n’est pas exprimé ; mais une pension
est par sa nature une chose alimentaire, et ce n ’est pas une rente .
Dans ses écritures , la dame Marcon se fondoit sur Pédit de
1 749, qui parle des rentes viagères. 11 est curieux de voir appli
quer à des arrérages de 17/^3 , un édit de 1749L'art. 8 se rapporte à l’art. 7 du § . 1 " . , qui étoit relatif au sixième
îles jouissances appartenant à la mère.
Ici la dame Marcon , non contente d ’avoir réduit ces jouissances
à rien , veut que la mère lui paye à elle le déficit de ces jouissances.
Demandons lui à quel titre ; pour toute réponse elle renvoie à
l’ un de ses tableaux.
C e qu’on y voit n ’est autre chose qu’un calcul des charges qui
absorbent les revenus, en y
comprenant
merae la moitié du prélegs
que la mère n’a pas, mais qu’on n en met pas moins sur son compte.
T o u t cela n ’explique pas par quel étrange système la mère, qui
avoit droit au sixième des biens , cl qu on réduit a 11e rien prendre
pendant trente-six ans sur quarante,
est
obligée de fournir au déficit.
Q u’un hérilier paye ultra 'vires , cela se conçoit ; mais qu’une
mère, usufruitière d’un sixième, paye à l’héritière de moitié le déficit
du sixièm e, parce que la succession est épuisée par les charges ,
cela est impossible à comprendre ; et tous les tableaux du inonde
ne peuvent pas en donner la solution.
�( 3o )
E n fin , l’article 9 est aussi une nouvelle découverte de la dame
Marcon. C ’est encore la mère q u i , n ’ayant pas assez de fournir
un sixième à la succession de son m a r i , doit fournir un autre
sixième à la succession d e l’aïeule. La dame Marcon a calculé qu’il y
avoit cinq mois et demi de différence entre l’époque fixée par
l ’arrêt pour le calcul des intérêts ; et le temps où ils doivent com
mencer à cet égard.
Mais , i°. il est trop tard , encore une fois , pour élever de nou
velles prétentions ; 20. ce n’est pas à la mère à rien fournir au profit
de la succession de l’aïeule; 59. les arrêts de 1781 fixent le point
de départ général au 3 septembre 174^ : c’est donc les attaquer
que d'exiger des intérêts au delà.
D e 1744 à 1785.
L a dame Marcon n ’ayant plus jugé à propos de donner de
motifs de sa manière de calculer, et de son habitude de réduire et
rayer presque tous les articles de l’actif des héritiers F lo u v a t, il ne
sera nécessaire que de parcourir quelques-unes des années ci-dessus,
pour y faire quelques observations sur quelques articles, autant
néanmoins qu’on aura pu les comprendre.
i°. À pirtir de 174^, la dame Marcon annonce qu’elle ne
comptera plus d ’intérêt6 des capitaux de sa dot ; e t , en effet, la
cour se convaincra que tous les ans chaque article premier est
par elle rayé du compte Flouvat.
C ’est , dit-elle ( pages 12 et 14 ) , parce que les capitaux sont
absorbés par la compensation qui s’est opérée en 1743.
E t , en signe d ’exactitude, 011 voit en 1 749
C
Pa8c *7 )» fî u,°lle
ne compte pas l'intérêt de 3ooo livres , mais qu’elle le compte des
I
�( 5i )
1000 livras restantes; on voit encore (page 9 ) , qu’elle 11e se dit
créancière qu’en 1771* O r , comment a-t-elle pu compenser, trente
ans auparavant, et tant qu’elle a été débitrice, ces 4000 li\res?
Cependant elle se pcrmetde détruire la disposition de l’arrêt de 1779,
qui la condamne à faire compte des intérêts.
Voilà donc près de quarante ans d ’intérêts de 4 °oo livres à
rétablir.
2". Quelle raison donne la' dame Marcon d’une triple division
qu’elle fait à chaque année ( à son profit ) des excédans, avec ou
sans intérêt ?
Dès 17+6, elle se trouve en discordance de 2000 livres, c’està-dire , elle s’adjuge 2000 livres de plus ; car il faut s’entendre : et
on conçoit sans peine qu’avec un aussi bon commencement, et de
bonnes dispositions à ne pas le laisser péricliter , on doit aller loin.
A i n s i , il ne faut pas s’étonner de la finale de son compte.
Cependant, dans sa note sur 1745 ( page x5 ), elle laisse pei’ccr
quelque chose de son plan sur le calcul des intérêts. Elle a fait
scs imputations, dit-elle, d ’après les principes de l’arrêt du a5
juillet 1781 ; e t , par exemple, elle a éteint des capitaux par com
pensation , notamment l’article 2 , comme la dette la plus dure :
on voit la même explication à la fin de la page 2.
O r , quelle est celte detle la plus dure? C ’est justement un capital
de iooo li v ., auquel on veut bien donner un intérêt pour 1745 ,
quoiqu’il ne soit payé qu’en septembre, mais qui n ’en produit
plus pendant toutes les années subséquentes.
Voilà donc comment on s’est affranchi de cet embarras de payer
les inlérêts du prix d ’une cession, tandis qu’on la fait annuller,
et qu’on se fait rendre compte du revenu des jouissances. T o u t
cela n ’est ni juste, ni légal; mais la dame Marcon n ’en donne
�C 53 )
de raisons que par deux lignes d ’une note, ou par des tableaux de
chiffres, si on les trouve plus aisés à concevoir.
5°. Que signifie, en 17G7 (page 55 ), celte séparation d’un capital
qui ne produira d ’intérêt qu’en 1771 ? Pourquoi seulement en 1771?
Effectivem ent, en 1771 se trouve un grimoire d’excédans de six
espèces , sans la moindre réflexion ; et tout cela se perpétue jusqu’à
la fin , sans le secours encore d ’aucun tableau.
P e u t- ê tr e bien la veuve Marcon aura-t-elle pitié de ce qu’on
renonce à la comprendre; mais il vaut mieux se confesser incapa
b l e , que de raisonner sur ce qu’on n ’entend pas.
4°. L a dame Marcon ( page 49 ) déclare qu’elle a séparé du
compte sa delte de i 5Goo l i v . , quoiqu’elle y ait porté celle de
1400 liv. de l’année précédente.
Elle ne dissimule pas que c ’est une finesse de sa part pour ne pas
payer les dépens qui sont réservés pour être payés par le débiteur.
Elle a même quelque soupçon encore d ’être débitrice, car, à la
page suivante, elle appelle à son secours 629 liv. qu’elle a portées
en compte sur les 1400 livres. L e compte plus régulier des Flouvat
prouve qu’ils éloient créanciers en 1785 : et si la veuve Marcon ne
le croyoit pas elle-même, pourquoi oifroit-elle 21000 liv. en l’an 4?
Les héritiers Flouvat n ’élendront pas plus loin l’examen du mé
moire île la dame Marcon , quoiqu’à plusieurs des dernières années
il y ait bien des choses inintelligibles. Mais des doutes ne sont pas
des moyens; cl les héritiers Flouvat croient en avoir assez dit pour
démontrer que tout le travad de la dame Marcon doit être mis de
côté, et qu’il faut s’en tenir au compte qu’ils ont présenté, sauf
les corrections que la cour jugera convenables.
OBSERVATIO NS
�C 33- )
>
’
, • i»
O B S E R V A T I O N S
-r
G E N E R A L E si
Quoique la dame Marcon cherche à hérisser de difficultés un
procès déjà jugé trois fois, il est un fait certain qui parle plus haut
v >' ■
C ’est qu’elle a dans les mains la presque totalité de la succes
sion paternelle, qui est aujourd’hui la seule chose litigieuse.
que tous ses chiffres. .
.
Cette succession est estimée toute entière 27905 liv. 5 sous^non
compris une partie d e là maison à laquelle elle n ’avoit rien à pré
tendre , puisque c’étoit un acquêt du sieur Flouvat.
(J.
O r , elle a reçu en sus de la succession maternelle , et à imputer
sur la succession paternelle, 1400 liy. d ’une p a rt, et, 16600 livres
d ’autre, à la charge de payer une seule créance, qu’elle fixe ellemême à 8 i 3 livres ; elle a reçu deux provisions de i 5oo livres;
et enfin elle a encore reçu 4000 liv. pour sa d o t, dont elle n ’a
fait compte qu’en chiffres.
E lle a donc environ 22000 liv, en ses m ains, depuis a i ans.
Elle doit au moins l’intérêt de ce qui ne lui appartient pas, puis
qu’elle réclame l’intérêt antérieur de ce qui lui appartient.
C e qu’elle doit, dira-t-elle, doit être compensé. O u i, mais jus
qu’à due concurrence; telle est la convention de 1784*
O r , c ’est elle-même qui a calculé qu’à chaque année , depuis
1785 jusqu’à 177 2 , les jouissances étoient absorbées par les charges
et les reprises de la mère ( dont elle n’est pas héritière). Elle
n ’a donc rien à prendre pour ces jouissances; car si son cohéri
tier les perd , pourquoi ne les perdroit-elle pas ?
A u contraire, tout ce qu’elle a reçu en 17S3 et 1784 lui a été
donné franc et quitte; elle jouit depuis cette époque, de plus du
double de ce qui lui revient.
E
�(34)
Un second fait duquel il est fort aisé aussi de tirer des consé
quence , est l’acte d'offres, qui fut fait en l’an 4» de 21000 livres.
A qui persuadera-t-on que celui qui est créancier, se dise lui-même
débiteur, et offre de son bon gré une somme aussi considérable.
Les assignats sont en cendres; mais l’acte d’offres existe avec tous
*
ses résultats.
:
Voilà ce que Monsieur le rapporteur est supplié de prendre en
principale considération, parce que si on peut fasciner les yeux
avec des pages d ’arithemétique, au'm oins elles in’éteignent pas
l’évidence, et l’évidence préserve de l’étourdissement.
i1,
L ’étourdissement naitroit sans doute de la grande étendue que
la veuve Marcon donne à son com pte, et encore plus du compte
préliminaire qui se Jit aux pages 4 et 5. j
'
!
Car on ne peut douter a la page 4 > que la veuve Marcon veuille
entasser de nouveaux faits par sa différence des valeurs de 1784
et de 1782, par une transaction inconnue d e ri 6 g i , par des viriles
plus inconnues encore, des ventes de mobilier dont on ne parloit
pas avant les arrêts, et tant d’autres innovations.
Mais ‘il ne s’agit pas d ’un nouveau procès.
" Les héritiers Flouvat ont été assignés pour rendre un compte de
jouissances , dont les élémens sont fixés avec détail. Ils l’ont rendu;
V c s t donc lui seul qu’il faut suivre , et rejeter d’autres comptes,
'puisqu’ils ne serviroient qu’à rendre l’opération interminable.
C e ne peut pas être un travail extrêmement pénible, puisque
toutes les sommes sont connues. Les héritiers Flouvat doivent des
jouissances ; ils les doivent après les prélèvemens des reprises de la
mère, après la déduction des charges; ils doivent encore deux
’ articles du mobilier de l’aïeule.
I
’
De sa part, la dame Marcon doit l’intérêt de ce qu'elle a reçu :
�(3 5)
les deux sommes se compenseront en se rencontrant, et ensuite
il courra des intérêts pour celui qui ne devra plus de capitaux.
Déjà on aperçoit un résultat quelconque, même avant d ’arriver
au temps où la dame Marcon a reçu des immeubles ; car les
sieurs Flouvat ne lui devoient pour capitaux que la moitié d ’un
mobilier de 5oo livres , plus le quart de 7 5 livres : de sa p a rt,
la dame Marcon devoit depuis 1743 un capital de 4000 livres;
à l’égard des revenus , l’un des cinq tableaux de la dame Marcon
prouve que le sieur Flouvat n'en avoit perçu aucuns.
A u reste , les arrêts sont là pour tout ramener à la chose jugée,
et dissiper toutes les incertitudes. Les héritiers Flouvat ne pré
tendent pas qu’eux seuls ont raison. En se dépouillant de t o u t ,
sans attendre les ordres de la justice, ils ont prouvé qu’ils savoient
sacrifier à leur repos leurs droits et leur fortune. C e qu’ils désirent
principalement, est de voir la fin d ’un procès qui a été la ruine
de leur maison, et que la dame Marcon a seule aujourd’hui intérêt
d ’éterniser. •
M . C A T H O L , rapporteur.
M*. D E L A P C H I E R , avocat,
Me. F A Y E , avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de L an d rio t , seul imprimeur de la
Cour d ’appel.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Flouvat. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Cathol
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
successions
généalogie
experts
créances
Description
An account of the resource
Mémoire pour les héritiers Flouvat contre Jeanne Astanière, veuve Marcon.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1738-Circa An 8
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
35 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0317
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0719
BCU_Factums_M0718
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Text
PRECIS
EN RÉPONSE,
POUR
L e sieur E S Q U I R O N - L A V I G N A C , propriétaire
à Aurillac , appelant et intim é ;
CONTRE
L e sieur R A G O U X , traiteur , habitant de la même
v ille, intimé et appelant.
P a r acte du 1
d ’A u terive
5 décem bre
vendirent
1 7 7 2 , les sieurs Croizet-
au sieur A lexa n d re - L auren t
�( o
F o r n i e r , prêtre , «ne maison sise en la rue N e u v e
de la ville d’Au'rilIac, com posée de deux corps de
logis séparés par une c o u r , çonfinée par le jardin
des vendeurs*, de b is e , e t c . , m oyennant
5,ooo
mille
livres.
I l est con ven u que l ’acquéreur pourra entrer dans
le jardin
des vendeurs , et se servir de la ruelle ,
large de trois pieds et d e m i, pour réparer sa m a iso n ,
placer des contrevents aux fen êtres, les élever 011
élargir pou rvu q u ’elles soient grillées ; com m e aussi
que le m ur scparant Ladite ruelle d u /a rd ifi, ne pourra
être é levé que de trois pieds et d e m i, sans préjudice
a u x vendeurs de pouvoir y placer des vases de fleurs;
et à la charge q u ’on ne ,pourra y jeter ni ordures,
ni eaux.
L a tnaison F orn iér a été aCqüise)par le sieur R a go u x,
qui en a fait une a u b e r g e , d e v e n u e , grâces à son
t a l e n t , la plus fréquentée d ’Aurillac.
Le
jardin
des sieurs
C roizet a passé ,
a vec la
maison dont il d é p e n d , au sieur Lavignac. L e sol de
ce jardin ,est plus é le v é que les croisées du rez-de«
(
_
f
chaussée de la maison R ago u x ; et précisémeut c ’est
a ce re z -d e -c h a u s s é e , du côté du jardin L a v i g n a c ,
q u e le sieur R a g o u x a placé sa salle à m anger prin
cipale.
C e n ’est pas le bruit de ce voisinage qui in co m m o
dait le plus le 'sieur L a v ig n a c ; m h is/ i.° les fen êtres‘du
p rem ie r;éta ge he*’sont'pàs; bhrréés 5 il’ fd lla it'q u e les
�(3)
dames de sa famille ou de sa société renonçassent à so
p ro m en er dansson jardin, ou q u ’il prît des mesures pour
faire cesser cette véritable com m unauté d'habitation.
A v a it-il le droit de se séparer du sieur R agoux par
un m u r? XI y aurait de la folie à dire absolument non;
et c ’est bien l’avis des premiers juges. M ais, à quelle dis
la n c e et hauteur devait-il faire ce m ur? voilà la difficulté.
L e sieur L avign ac n'usa pas de son droit dans toute
sa latitud e; on lui dit q u ’il pouvait bâtir à six pieds de
distance; il préféra de s’éloigner de sept pieds et d e m i,
pour é viter toute espèce de discussion avec son voisin ;
il laissa m êm e une porte à la ru elle , pour que le sieur
R ago u x pût aller réparer sa maison ^ quand elle en
a u r a i t besoin.
■ Ces précautions n ’ont rien épargné au sieur Lavignac,
et le sieur R a g o u x lui fit fa ir e , le i . er mai 18 0 6, une
sommation de cesser la construction de son m u r , que
le sieur L a vign ac ne pouvait cependant pas disconti
nuer sans de grands frais, puisque ses ouvriers étaient
reten us, et ses m atériaux à pied d ’œuvre.
Alors le procès a co m m e n cé , et le sieur R a g o u x ,
dans une re q u ê te, a manifesté ses prétentions a vec
exagération, et m êm e a vec hum eur. 11 a dit a v o ir ,
par sa vente , la servitude tout à la fois de passage
d ’aspcct et de prospect ; il a prétendu que pour éluder
la prohibition d ’élever le m ur alors exista n t, le sieur
L avign ac y en a substitué un nouveau, construit im m é
diatement après, et en quelque sorte plaqué contre te
pi entier; que déjà il dépasse de plus de douze pieds.
�(4)
Il assuré que ce m ur le prive de l ’a ir , de la clarté, et
de toute espèce de salubrité ; et là-dessus il reproche
au sieur L a vigu a c de traiter les lois et les conventions
comme les fr ê le s tissus de l ’araignée im puissante.
L e s juges d’Aurillac ont voulu savoir jusqu'à quel
point cet exposé du sieur R a g o u x était sincère; e t ,
le 9 août 1806, ils ont ordonné que des experts v é
rifieraient l ’état des lieu x; e t , après avoir dem andé
toutes les dimensions de la ruelle et des m u rs , ils
ont chargé les experts d’aller sur les lie u x , à quatre
heures après-m idi, et là de vérifier s i , malgré l’é lé v a
tion du nouveau m u r, les rayons du soleil peuvent
aboutir aux fenêtres du rez-de-chaussée de la maison.
R agou x ; dans quelle proportion, si le nouveau m ur
intercepte le jo u r des apparteniens d u re% de chaussée;
quel degré d ’obscurité il leur donne relativement à
Cusage auquel ils sont destinés ; à quelle hauteur du
m u r les apparteniens doivent recevoir le jour néces
saire. “
L e rapport des experts n'a pas confirmé ce qu'avait
dit le sieur L avign ac. Ils rem arquent qu’au lieu de la
distance ancienne de trois pieds et d em i, il y avait
sept pieds cinq pouces entre la maison R agou x et le
n o u ve au mur.
L e nouveau m u r, à partir du niveau ou accoudoir
des fen êtres, a n e u f pieds quatre pouces de hauteur
du côté du jardin, et dix pieds quatre pouces du côté
de la r u e lle , dont le sol est plus bas.
Et à partir du niveau de la ru elle, il 0, d ’un cô té,
�(5)
treize pieds, et de l ’autre douze pieds cinq pouces,
excède l ’ancien m ur de 9 pieds 9 pouces et demi.
L e s experts disent que Télé val ion actuelle du m ur
n ’em pêche pas les rayons du soleil d’aboutir aux fenê
tres du rez-de-chaussée. A deux heures et d e m ie , il a
com m encé à éclairer la façade de la maison en totalité,
à l’exceplion de la prem ière croisée de la cuisine.
A trois h eures, le soleil a pénétré ensuite dans le rezde-chaussée, par un rayon oblique de sept centimètres.
Cette lum ière intérieure a duré un q u a r t - d ’heure.
(iV. B. L a façade est au nord).
>
A quatre heures, les experts o n t,vu que les appartem ens du rez-de-chaussée recevaient le jo u r suffisan t
pour L'usage auquel ils sont destinés.
L e s experts pensent que le sieur L a v ig n a c a pu
élever davantage son mur que le premier, puisqu’il Ta
fait plus é lo ig n é ; mais ils s’abstiennent de décider
jusqu’à quelle hauteur il l ’a pu.
E n fin , com m e la prem ière visite avait été suivie d’une
médiation que rompit le sieur R a g o u x , les experts o nt (
voulu savoir quelle serait l ’obscurité de son r e z - d e chaussée dans l ’arrière-saison. E n co n s é q u e n c e , ils y
sont allés par trois fois et par un tems sombre et
n éb u leu x, les 10 septembre , 2 n o v e m b re et 9 d é
cem bre , tantôt une h eure après le lever du soleil,
tantôt une heure après son coucher. L à ayant pris
chaque fois un livre d’ un caractère assez m e n u , ils ont
lu à une certaine distance des fenêtres.
;
E n s o m m e } les experts disent bien que le m u r a
�(6)
donné de l ’obscurité au rez-de-chaussée de la maison
R a g o u x , mais qu'il entre asse% de lumière dans les
pièces de ce re%-de chaussée pour l ’usage auquel elles
sont destinées.
r
C ette relation des experts n’a pas satisfait le sieur
l l a g o u x , qui a sollicité les premiers juges de voir le
local eux-m êm es ; et on pense aisément que , dans
cette visite, il a dû exagérer le détriment q u ’il prétend
souffrir.
>
Q uoiqu’il en s o it, après cette descente non ordonnée
en jugem ent , le tribunal d’ Aurillac a condam né Ib
sieur L a vigu a c à réduire la hauteur de son mur à
neuf pieds.
-
I-es motifs de cette décision^ au nom bre de douze)
se réduisent à dire que le vendeur de 177 2 ne s’était
I;
*i! .
'*
i 'î
* ■
pas interdit la faculté de faire un mur de séparation
su r-to u t'en s’éloignant; mais q u ’il n’avait pas dû obs
curcir les appartemens d’une m anière nuisible.
:
L e sieur L avign ac a interjeté appel de ce jugem ent
3
en ce q u ’il l’oblige à dém olir une partie de son mur.
L e sieur R agoux en a aussi interjeté a p p e l, en ce
q u ’il ne condam ne pas le sieur L a vign ac à le déinolir tout entier.
M O Y E N S .
j
)
T o u t le système du sieur R agoux repose sur ce rai-
.aonuçment : J ’ai le droit de vu e { l u m i n u m ) sur
�( V)
ru e lle , e t p e u f - ê i i - e m êm e la ruelle tout entière. J ’ai
de plus la servitude d’em pêcher l ’élévalion du miir
‘ de celte ruelle (cilicàs non toLlendi). D o n c j ’ai aussi',
par une conséquence nécessaire, la servitude d ’aspect
'et prospect sur votre jardin; et vous ne p o u vez rien
changer à l’ancien élat des l i e u x p a r c e
que vous
m ’ôteriez non:seulement la ’ quantité d e 'lu m iè re que
j ’avais, mais encore l ’agrém ent que portait à m a mai
son la vue de votre jardin. C a r , dit le sieur R a g o u x ,
à moins de contester l ’é v id e n c e , il est dém ontré q u’il
a été concédé une vu e de prospect, et que la perspec
tive du jardin a été pour l ’acquéreur un m o yen de
séduction ou d’agrém ent qui a dû augm enter le prix
d e l à maison.
-
I l faut cependant que le sieur R ago u x soupçonne
que celte évidence prétendue ne soit pas sans réponse;
car il se plaint de ce que le sieur L a vig n a c ne lui a
présenté que des objections légères et dédaigneuses.
Sa fie r té , dit-il, a souffert de descendre dans l ’arêne
avec un traiteur.
C e reproche est bien dur, et le sieur L a vign ac y a
été sensible. L o in de lui tout mépris pour un art pré
cieux q u ’il honore, et dont il n’a garde de conteste^
l ’importance. S’il se fût senti coupable d’ un tel senti
m e n t, il l’aurait certainem ent dissimulé avec précau
tion. C ’est déjà un adversaire assez puissant q u ’ un
traiteur en rép u ta tio n :
tant d ’intérêts s’unissent au
s ie n , que tout ce qui peut le contrarier ou le dis
�(8)
traire, est exagéré par ce u x qui en gouffrent com m e
un e calam ité pu b liqu e, et le sieur L a vign ac ne se le
cache pas (i). Ainsi loin de se plaindre envers le S.r R a goux de sa juste fierté, fondée , plus que sa prétention,
sur des autorités précises (2 ), le sieur L a v ig n a c d é
clare en toute hum ilité q u ’il n ’a à s’accuser d’avoir
traité avec lég è re té , ni sa person n e, ni ses objections.
Il y a répondu de son mieux ; les m oyens qu'il a fait
valoir lui ont semblé très-solides; et il ne croira s’êlre
bien défendu encore q u’en les reproduisant sans les
affaiblir.
R evenons donc à la maison du sieur R a g o u x , et A
l ’arêne où il nous convie. V oyons com m ent la servi
tude a ltià s non toUendi pourra le conduire à la ser-
( 1) Pour aggraver les torts du sieur Lavignac envers ses con
citoyens, le sieur Ragoux s’est obstiné à s’expatrier jusqu’à la
fin de son procès. Mais le sieur Lavignac se liâte de dire , pour
sa justification, qu’il n’a porté aucun obstacle à un prompt ju
gem ent, et que forcé par ses affaires, de suspendre son départ,
il a mieux aimé s’abstenir d’être présent que de retarder d’un
seul instant la plaidoirie de sa cause.
» ( 2)
Faites cas de celui qui, fier de son talent,
S’estime votre égal, e t, d’un air im portant,
Près de son potager, que la flamme illum ine,
D onne, avec dignité, des lois.......dans sa cuisine.
G a str. Chant II.
?
vilude
�(9 )
Vitude de prospect, et • si elles dépendent nécessai
rement l’ une de l’autre.
E n matière de servitu d es, il n’est pas permis de
raisonner par analogie ou par simples conséquences.
Il faut trouver dans le titre qui les constitue tout ce
qu on veut exiger ou prohiber, sans que Tacle laisse
m êm e le soupçon du contraire; car les servitudes sont
de droit étroit ; et com m e elles font violence au libre
usage de la propriété du voisin, com m e la tendance
naturelle est pour l’affranchissement, il est de principe
que tout ce qui n’est pas m athém atiquem ent compris
dans la clause de servitude s’explique en faveur de celui
q u ’on v e u t,y asservir.'
C e n’est pas absolument aux lois romaines q u’il faut
recourir pour une question de servitudes urbaines. L a
coutum e de Paris était, sur cette m atière, le droit com
m un de la F ra n c e ; et qnand on compare les divisions
et subdivisions du digeste sur chaque espèce de servi
tude avec la brièveté de l ’article 686 du code civil ( i ),
on dem eure convaincu de plus en plus que l ’étendue
à donner à une servitude ne doit dépendre que du texte
liItérai et non équivoque de la clause qui la constitue.
L es lois romaines , au reste, distinguent très-expres
sément ce que le sieur R agoux veut confondre.
(i) Art. 686. Il est permis aux propriétaires d’établir sur leurs
propriétés telles servitudes que bon leur semble, pourvu que les
services établis. . . . n’aient rien de contraire à l’ordre public.
L ’usage et l'étendue des servitudes se règlent -par le litre qui
les constitue , et à défaut de titre, par les règles ci-après.
�C ro )
Il o , par son a cle , la servitude de jour (/u m in u m ),
et la servitude a ltius non toLlendi, non pas pour un
édifice en tier, ce qui est la plus fréquente supposi
tion des lois, mais bornée à un simple m u r , et pour
une distance convenue.
D e ces deux servitudes, il veut en faire quatre, car
il ajoute celle ne lurninibus officuatur, et m êm e celle
ne prospectai o jjicia tu r, qui sont très-distinctes dans le
droit, et qui portent une gên e bien différente.
A v e c sa servitude de jo u r, et sans celle a ltiu s non,
toLlendi, le sieur L avignac n’aurait eu nul besoin de
se reculer pour bâtir. Il aurait eu certainement la fa
culté d ’élever le mur ancien de sa ru elle , d ’après les
principes.
C ar la servitude de jours (lu m in u m ) n ’em porte que
nécessité de souffrir des vues droites, sans rien laisser
au prospect : il suffit de voir le c i e l , tel est le texte
des lois
et i du digeste de servit, prœd. urb. et
3
5
l'interprétation générale des auteurs.
C ’est pourquoi ceux qui veulent une gêne moins
grande à leurs vues doivent convenir de l’une ou
de l ’autre des servitudes d ’aspect; et alors ces lo is,
elles-m êm es, marquent une différence sensible au ré
sultat de ces servitudes.
Elles portent avec elles une dénomination qui en
m arque le sens ; ne lum inibus ojjiciatur exprim e a u
tant que possible , que si l ’acte porte expressément la
condition de ne pas offusquer la lum ière, on ne pourra
pas la diminuer par un b âtim en t, et çle m êm e ne p ros-
�( II
)
pectuí ojjlciatu r dénoie assez que tout ce qui ôterait
le point de v u e , m êm e dans l’éloignem en t, contrevien
drait à la convention.
T o u t le titre du digeste prouve que ces diverses
espèces de servitudes sont trè s-d istin ctes, et par con
s é q u e n t que l ’ une ne supplée pas l’autre, à moins que
sa plus grande étendue ne com porte de plein droit la
servitude moindre.
Ainsi la servitude ne lum inibus officiatur est à la
vérité comprise de plein droit dans celle ne prospectai
o fficia tu r, qui est la plus é te n d u e , parce que tout ce
qui tendrait ¿1 ôter la lumière d ’une f e n ê t r e , ôterait
bien, à plus forte raison, la perspective éloignée q u ’elle
doit avoir.
Mais on ne peut pas, com m e le sieur R a g o u x , ren
ferm er une servitude plus grande dans une servitude
moindre. Il fait beaucoup d’efforts pour prouver que
la servitude ciltiiis toLlendi em porte a v ec elle les ser
vitudes ne Luminibus , et prospectai ojjîciatur. C ’est
en effet de là que dépend toute sa défense.
V o y o n s sur quelles autorités celte prétention est
fondée : et pour ne pas m ériter une seconde fois le
reproche de,déd aign er ses moyens et ses objection s,
le sieur L avign ac va les suivre pas à pas pour y r é
pondre.
I . re o b j e c t i o n .
P a g . 16.
L es lois romaines, dil le sieur R.agoux , ne font
pas de différence e n tr ó la servitude aLtius ioL/endi,et
�( 12 )
celle ne Luminibus a u l prospectai ofjiciatur. L a loi 2 ,
a u / i D e ¿cr. pr. urb. le prouve.
RÉPONSE.
C e lte loi n’est que la série des différentes espèces
de servitudes : elle les classe et les distingue; par con
sé q u en t, elle ne les confond pas.
L e sieur R a g o u x veut lirer d’ une simple conjonction
une conséquence f o r c é e , q u’il n ’induit encore que
d’un argu m en t à c o n t r a r i o c a r ia loi parle des servi
tudes imposées par celui qui veut qu’on élève un mur
pour diminuer sa lumière. Mais cette servitude affir
m ative
ne juge ni n’indique rien pour la servitude
contraire.
U n e preuve que la servitude a ltià s non tollendi ne
ren ferm e pas celle ne Luminibus o jfîc ia tu r , c’ est q u e ,
suivant cette dernière ., il n ’est pas m êm e permis de
planter des arbres qui diminuent la v u e ; tandis que la
servitude altiiis non tollendi n'em p êch e pas de planter
des arbres à t o u t e distance. A l i u d est œ dificare, a liu d
est arborem ponere.
O11 pouvait m ô m e , chez les R o m a in s, en p lan ler,
en ce cas, au-dessus m êm e de l ’éd ifice , dont la hauteur
-était c e p e n d a n t déterm inée. Suprà eam a llitu d in em •
tandis que dans le cas des autres servitudes, cela aurait
été défendu.
II.* o b j e c t i o n .
P a g . 1 7.
Toujours la loi regarde la défense d ’élever plus haut
�(
*3
)
com m e le seul m o y e n d’em pêcher la lum ière. C àm
servitus im ponitur
ne
lu m in ib u s
o fficia tu r
, hoc
m a xim e adepti videtnur, ne j u s f i t vicitio invitis nobis
a ltiu s
æ d ifica re
, atqu.e ita rhinuere lum ina œ d ifi-
ciorum nostrorum.
RÉPONSE.
Il faut faire une inversion des termes de la lo i, pour
y donner le m êm e sens que le sieur R agoux.
Elle ne dit pas que celui qui aura la servitude a llia s
tollendi 'aura aussi celle ne Luminibus officiatur ■elle
dit, au contraire, que celui qui aura la dernière pourra
em pêcher d’élever plus haut. E t le sieur L a v ig n a c n ’a
jamais nié ce principe.
A insi, le sieur R a go u x n’a que faire de s’approprier
le minuere luminci qui term ine cette loi ; car il est
destiné à une autre espèce de servitude que celle de
son acte.
I I I .e O B J E C T I O N . P a g . 17.
L e s auteurs donnent le m êm e sens h ces lois. M . de
L am oign on a d it, en ses A rrêts, titre 20 , article 20 :
• S i, dans le litre de la servitude, il
cl
été convenu que
« l'on ne pourra obscurcir ou donner em pêch em en t
« au mur du voisin,, le propriétaire laissera les lieu x
« en l’élat où ils étaient lors de l’imposition, sans y
«< faire aucun plant d ’arbres ni bâtiniensjnouveaux, et
« sans pouvoir aussi élever les anciens biltimens-». T e l
est aussi le langage d’A u z a n e t , l e r r i é r e , L a la u r e ,
Desgodets.
�( i4 )
RÉPONSE.
A v a n t cet article 20 (qui ne s’applique toujours qu’à
la servitude ne lum inibus o jficia tu r) , M. de La moignon
avait dit ce que le sieur Rago ux a jugé à propos
d ’omettre.
Art. 19. « L e propriétaire d ’ un hé rita g e , sur lequel
« le voisin a droit de v u e , peut élever sur son fonds
* des bûlimens, et planter des arbres, pourvu qu’ il ij
« a it s ix pieds de distance entre le mur faisant sépara« tion des héritages des parties, et le bâtiment nou« v e a u , et douze pieds de distance entre le mur et
le pied des arbres ■
».
IV.e o b j e c t i o n .
P a g . 18.
11 a été dans l’intention des parties de donner à
l ’acquéreur une vue de prospect, tant qu’elle pouvait
s’ étendre; sans cela , il eût été inutile de stipuler que
le mur n’aurait que trois pieds et demi. La clause eût
. été sans i n t é r ê t , si le vende ur avait eu le droit de
. construire le lendemain un mur plus élevé à côté de
l ’aulre ; il eût été inutile aussi de se réserver la faculté
de placer des vases de fleurs. S’il n’y avait eu que l’in
tention de ne céder q u ’une simple vu e droite, on se
serait réservé le droit de construire à une distance
déterminée. L a perspective du jardin a dû augmenter
le prix de la maison.
�( i5 )
RÉPONSE.
Qu y a-t-il dans tout cela? D es présomptions.
E f c ’est par des présomptions que le s.r R a go u x veut
étendre une servitude au-delà des termes de son acte.
Il ne rem arque pas que les présom ptions, m êm e
de l ’intention des parties, se tourneraient contre lui.
L a latitude q u ’il prête à sa servitude serait une
grande injure aux sieurs d ’A u terive , et il faudrait
m ettre en problème si leur raison aurait bien.'présidé
à une convention aussi étrange.
^
5
N on conlens d ’avoir vendu pour ;ooo liv. une m ai
son qui avait deux corps de lo gis, une cour au milieu
et douze croisées d ’un seul c ô t é , se pou rrait-il q u ’ils
eussent ajouté à la souffrance de lum ière de ces d ouze
croisées, une prohibition perpétuelle de bâtir ch ez
e u x , et de n ’être, dans leur ja rd in , que sous la sur
veillance habituelle d’ une multitude d ’individus. Si
cela était supposable pour une maison de c h a m p s .»
com m ent adm ettre q u’ un propriétaire en ait m êm e
conçu l ’idée à l'égard d ’ un
d ’une ville populeuse?
jardin placé
au milieu
N e s t - il pas plus naturel de penser que le sieur
F o r n i e r , p r ê t r e , voyan t un petit m ur à trois pieds
de la maison q u ’il allait a c q u é rir, eût à l ’instant la
crainte q u’il ne fût élevé à une grande h au te u r? E t
com m e les parties doutèrent si le vendeur aurait droit
de le lever a ce lle d ista n ce, le sieur Forn ier demanda
�(
16
)
que ce m u r, si v o isin , 11e fût pas é l e v é , et le vendeur
y consentit.
Alors le ven deur n ’avait pas des projets de b â t ir ,
puisqu’il vendait une propriété. N e s’occupant doue
que de jouir de ce q u ’il avait, il ne voulut pas que
son con sen tem en t, de ne pas changer la hauteur du
m u r existant, s’opposât à ce qu’il y plaçât des fleurs,
1ant qu’il le conserverait.
V oilà la seule pensée que durent avoir les parties,
et la seule q u’il faut leur supposer, puisqu’elle est la
seule de bon sens. Voilà le vrai pacte de quo cogitatuni est, et au-delà duquel il est clair q u ’il n’y a pas
eu une ébauche de convention.
C e rte s , si les sieurs C roizet eussent le lendem ain
bâti un grand m ur à côté de l’an cien , e t , com m e le
disait d ’abord le sieur R ag o u x , plaqué contre le pre1m ie r, il eût été rép réh en sib le, parce q u ’une conven*tion ne s’élude pas a vec affectation.
Mais qui veut trop prouver ne prouve rien. Car ce
n ’ est pas en se jouant ainsi de ses engagemens, que le s.r
L a v ig u a c a bâti. Il a bâti a quatre pieds au-dela du pré
cédent m u r , c ’est à dire à 7 pieds et demi de la m ai
son Ragoux.
Sa convention n’était restrictive que parce q u ’ il était
en 1772 dans la dislance habituelle de la loi. Mais il
s’est conform e à la lo i; il a exécuté ce que dit M. do
T,amoignon ; et dès-lors, au-delà de 6 pieds, il retrouvo
le
droit
c o m m u n , par-delà lequel sa convention 11’cst
pas allé lui donner des entraves imprévues.
Co
�C 17 )
C e n’ est pas assez , dit le sieur R a g o u x , d’avoir sti
pulé q u’il ne bâtirait pas à trois pieds et dem i , il fa l
lait q u’il se réservât de bâtir plus loin.
Disons plutôt que c ’était à l ’acquéreur à stipuler
q u ’on ne bâtirait pas à une plus grande distance.
C ar c ’est lui qui avait besoin de la servitude, et par
conséquent du litre et de la clause.
O r , tout ce qui n’est pas dans la prohibition rentre
de plein droit dans la loi com m une.
C ette loi est l ’article 202 de la coutum e de P a r is ,
qui veut six pieds de distance entre les vues droites et
les murs voisins.
’
E l avec cette distance, la servitude altiics non toilen d i doit être bien moins rigoureuse que ch ez les ro
m ains, dont les maisons, presque toujours séparées en
îles, n’a v a ie n t, de distance lé g a le , que celle de deux
pieds (1 ).
V .e o b j e c t i o n .
P a g . 21.
M a i s , dit le-sieur R a g o u x , s’il y a de l ’incertitude
dans l’acte de 177 2 , elle doit s’interpréter conte le v e n
d e u r, q u i potuit legem apertiàs conscriberç.
RÉPONSE.
C ette règle de droit n ’est applicable q u’ci la r e
cherche (le la chose vendue et aux servitudes retenues
( 1 ) Si f/uis sepetn propè alienum prœdiurn fix e n t, tenninum ne excedilo. Si macerieïn, pedem relinquito y si verb do
nnait, pedes duos. L . ult. il', fin. reg.
3
�( i Q )
par le vendeur sur l’objet a lién é, mais pas du tout aux
servitudes q u’il s’impose. ;
i;
C a r d ’après la m a x im e non J i t eoçtensio in prohibitor i is , c ’est à celui qui fait constituerjla servitude à son
profit, à-lui donner plus de latitude. C ’est le vœu d e l à
coutum e de Paris, art. 216.
A v a n t de rechercher la règle de droit -1 7 2 , le sieur
R a g o u x pouvait s’arrêter à la 8 i , e qui paraît résoudre
pleiuem ent la difficulté.
Q u œ , dubitationLs toUendçe cçiusâ , contractibus in seru n tu r, j u s commune non Lœdunt. 1. 8 1 , de reg. jur.
O r com m e la convention de ne pas.élever un m ur ,
qui n ’élait alors, q u ’à trois'pieds et demi de la m aiso n ,
11e fut écrite visiblement que pour lever le doute du
droit de bâtir à cette courte distance, il ne peut pas en
résulter que les sieurs Croizet se soient abstenus à ja
mais d ’ user du droit c o m m u n , c ’est-à-dire de bâtir à
'six p ie d s , d ’après la coutume, $e Paris qui était la loi
générale.
N ’y aurait - il donc pas une injustice évidente de
forcer ainsi le sens d ’ un a c t e , au point de restreindre
une propriété à une a n n u la tio n absolue, pour le seul
avantage de donner une plus grande clarté à deux
pièces du rez-de-chaussée d’ une m aison; et si un v e n
deur étuil ainsi opprim é par le sens équivoque de sa
c o n v e n tio n , ne s e r a it- c e ' pas le cas de s’écrier a vec
la loi : iniquum . est périme pacto id de quo cogitaturn
non est, L . 9 ,
de trans.
L e sieur R a g o u x rejette fort loin l ’art, 2 1
5
de la
�I9
(
)
co u tu m e de Paris. Cependant c ’est cet article qui veu t
que le vendeur déclare spécialement quelles servitudes
il retient ou constitue tant pour Y en droit, h a u te u r ,
largeu r, que l ’espèce; autrem ent quelques espèces g é
nérales de servitudes, sans les déclarer comme dessus ,
dit l’article, ne valent.
■ Cet article est donc une preuve que la clause de
servitude ne doit pas s’expliquer par a n a lo g ie , ni
e x te n sio n , ni présom ption, mais spécialement et en
détail.
- O r Yendroit m arqué par la clause de 1 7 7 2 , est à
trois pieds et dem i : donc il n ’y a pas eu prohibition
de bâtir à sept pieds de distance.
V I.e O B J E C T I O N . P ag.
23 .
L e sieur R agoiix revient à une idée q u ’il avait aban
donnée devant les premiers juges. Il voudrait la pro-r
priété de la ru elle, parce q u e , dit-il, il est confiné(par
le jardin ; cela é t a n t , il en conclut que le sieur Lavignac ne devait au moins bâtir q u ’a six pieds au-delà
de la ruelle.
RÉPONSE.
. Voilà donc le sieur R ago u x forcé de s’em parer d’ un
m o t, pour se faire un m oyen.
E t quel m o t encore ! quel faible mot! Personne ne
l ’a m ieux évalué que lui; et il nous donne sa réfuta
tion lui m ê m e , à la fin de la page 22.
�( 20 )
Que signifierait alors la défense de je te r de l'eau oti
des ordures? 11 est clair en effet que si la ruelle eût été
ven d u e au sieur R a g o u x , il était contradictoire que
le ven deur s'occupât de ce qu’on jetterait ensuite sur
la chose vendue. C e n ’eût pas été immittere in alienum .
Ajoutons à cette réilexion : que sign ifierait a u ssi
la permission accordée au sieur F orm er de se servir
de La ruelle pour réparer sa m a ison ?
O n ne lui en a donc concédé que l’usage m o m en tané ;
et l’ usage est exclusif de la propriété.
l i e confin du jardin prouve seulement que la ruelle
était considérée com m e partie du jard in , et non de la
maison , ni m êm e com m e com m une. L a suite de l ’acte
explique parfaitement l’intention des parties, qui n e v e u lent accorder à l ’acquéreur q u ’un usage ou tolérance.
-j
CONCLUSION.
v l ia vente de 17 7 2 n e d o n n e à l ’acquéreur que le droit
de v u e et non de prospect.
" T o u te vu e droite com porte avec elle une dislance
de six pieds jusqu’au m ur voisin : et cela explique toutà-la-fois la convention dé ne pas élever un m ur alors
existant, parce q u ’il n ’élail q u ’à trois pieds et d em i, et
la faculté dem eurée au vendeur de bâtir à six pieds
de distance, par cela seul q u ’il ne s’est pas départi spé»
cia le nient de ce droit légal.
' Ainsi il a été m al jugé en ce que la hauteur du m ur
actuel a été d im in u é e , car un mur fait au-delà de la dis
tance voulue par la loi est hors d’atteinte.
�( 21 )
i
S’il y a lieu de dire que le sieur L a v ig n a c pouvait
bâtir à une distance quelconque , il n’y a pas d éra iso n
qui fusse penser que ce sera à quinze pieds, ou à d ix ,
ou à luiit, car la loi n’indique aucune variation ni ar
bitraire. Il faut donc que ce soit à six pieds.
D ’après c e la , il doit peu importer q u’il en résulte un
peu plus d ’obscurité à un rez-de-chaussée voisin ; c ’est
un mal nécessaire dans une ville. T o u t ce qui tend a
em p êch er la m itoyenneté des murs la térau x , et à peu
pler de jardins une rue p u b liq u e, ne m érite pas de fa
veu r.
.
Q u ’est-ce d’ailleurs que celte obscurité, si, le 9 dé
ce m b re , les experts ont pu lire un caractère m e n u , à
quelque distance des fenêtres, dans une salle plus basse
•que le sol d’ un jardin, par un teras n é b u le u x ?
E t c ’est pour une façade tournée au nord p l e i n ,
q u’on veut ménager les rayons du soleil pour quelques
m inutes de plus. T o u t autre croirait gagner à l ’élévation
d’ un mur à cet aspect. Mais le sieur R a g o u x avertit q u ’il
a des raisons particulières, et q u’il a intérêt d ’é g a y e r ses
commensaux par la vu e d’un jardin.
Voilà donc le secret principal du procès qu’il a sus
cité au sieur L avign ac. E n est-ce assez pour forcer le
sens d’une convention , et priver le sieur L avign a c du
bénéfice de la loi com m une.
L ’appel incident du sieur R agou x ne sert q u’à prouver
q u’il a cru en avoir besoin pour être conséquent avec
lui m ême.
Il fallait q u’il em pêchai le sieur L a v ig n a c de bâtir
�(
22)
nulle part, ou q u ’il avouât que le sieur L a v ig n ac en
avait le d r o i t , en reculant à six pieds. Alors il s’est
' donné la servitude de prospect ; et c’est là-dessus q u ’il
a fondé son appel.
M ais son titre n ’a rien qui ressemble à la servitude
de prospect ; et cette évidence achèvera de prouver que,
pour tacher d ’obtenir p e u , il dem ande beaucoup.
L ’exagération de ses plaintes et du tort q u’il souffre
sera appréciée com m e toutes les exclamations familières
aux plaideurs qui s’obstinent; ses m oyens de fortune
sont fort indépendans du prospect d’ un jardin qu’on ne
v eut pas q u’il m ontre à tout venant ; et le tems q u ’il
a perdu à plaider a dû lui être plus nuisible que ne le
sera jamais le m ur q u ’il voudrait détruire.
L e sieur L a v ig n ac , au reste, a usé de son droit par
nécessité et a v e c modération. Il fallait q u ’il renonçât à
son habitation et à son jardin, ou q u ’il y fût libre et
indépendant. Il a fait ce que tout autre eût fait et dû
fa ire; et
on
n ’est point un voisin inquiet et am b itieu x,
q u a n d , au lieu d’ usurper la propriété de son voisin, on
sacrifie à la décenc e et à son repos une partie de la
sienne.
M .e D E L A P C I I I E R , avocat.
M .c M A R I E ,
A
DE
licencié - avoué.
R I O M ,
L ’IM PRIM ERIE DU P A L A IS , CHEZ J.-C. SALLES.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Esquiron-Lavignac. 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
conflit de voisinage
servitude de vue
auberges
experts
Description
An account of the resource
En réponse pour Le sieur Esquiron-Lavignac, propriétaire à Aurillac, appelant et intimé ; Contre Le sieur Ragoux, traiteur, habitant de la même ville, intime et appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1772-Circa 1807
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0316
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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auberges
Conflit de voisinage
experts
servitude de vue
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631c96a4009084c19508b208c739610f
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P
R
É
C
I
S
P O U R
P i e r r e ES P A R V I E R D ’ E S T R E S S E S , appelans;
J o s e p h
et
C O N T R E
J ea n -H ugu e s
L
SAIN T-PO L ,
in tim é .
E sieur Saint-P ol veut v e n ir sous deu x titres incom
patibles à la succession de ses bisaïeux.
Son aïeule é toit
dotée par e u x , et il a demandé sa dot après leur m ort.
V i n g t - s e p t ans après l’avo ir o b te n u e , sans alléguer
aucune vo ie de nullité ni de rescision, il a intenté un
procès p ou r demander le partage de ces mêmes suc
cessions.
P o u r l’intelligence de cette demande et des diverses
contestations qui y ont pris leu r s o u r c e , il faut a vo ir
A
�( O
sous les j e u x le tableau g énéalogique des familles Esparvier
et Saint-Pol.
François Lavolpilière,
Françoise de Volonzac,
eurent huit enfans.
r
laris.
Anne Lavolpilière eut deux maris.
2°. François Esparvier de Lodière.
Pierre Bonafos.
François.
I
Anne.
Françoise,
religieuse.
Marc-Antoine
Esparvier.
|
Joseph
Esparvier.
Charles.
Françoise,
Gabriel
Saint-Pol.
I l
I I
I I .1
Quatre de ces enfans sont représentés
par Joseph Esparvier.
Jeanne,
Fr.de Touret.
P ie rre
Esparvier.
Appelons.
Jean-Hugues.
Intim é.
Françoise E sparvier fut mariée au sieur G ab riel SaintP o l le 24 n o vem bre 1718 .
Ses p ère et m ère lui cons
tituèrent en dot 4000 francs , dont m oitié p ou r biens
paternels. L e contrat porte quittance de 1700 francs, dont
700 francs en immeubles : il fut pris des termes p ou r le
surplus.
A n n e L a v o lp iliè re avoit fait un testament le 17 mai
1 7 2 0 , par lequel elle instituoit p our héritier M a rcA n to in e E s p a rv ie r, son iils du second lit. Ce testament
ne se trouve plus q u ’au répertoire du notaire; on ignore
i\ quoi attribuer sa suppression, à moins que l’éclaircis
sement n’en vienne des faits ci-apres.
M a rc -A n to in e Esparvier alla en Espagne, et y contracta
mariage sans l’agréincnt de son p ère; ce qui. lui valut
une haine constant# > q llc François E sparvier conserva
contre lui jusqu’au toinbcau.
�( 3 )
A n n e L a v o l p i l i è r e , sa m è r e , vo u lu t faire nn second
testament la veille de sa m ort : elle fit appeler le sieur
Costerousse, v ic a ir e , et des tém oins, le n ayril 1735*,
et elle dicta un testament par l e q u e l , après quelques
legs et augmentation de dot à ses enfans p u în é s , elle
instituoit p ou r ses héritiers universels Hugues B o n a fo s,
son fils aîné du prem ier lit , et M arc-A n toin e E sparvier,
son fils aîné du second lit.
M ais lorsque le vicaire, rédacteur de ce testam ent, en
cominençoit la l e c t u r e , le sieur François E s p a r v ie r ,
instruit de ce qui se passoit , entra brusquem ent dans
la cham bre de sa fem m e , arracha le testament des mains
du vicaire, et en empêcha ainsi la clôture.
H ugues Bonafos seul rendit p la in te , et un grand
nom bre de témoins furent entendus ; ils déposèrent ce
qui vient d’être dit.
A p r è s décret et in terrogatoire, le procès fut civilisé.
O n mit en cause toutes les parties nommées au testa
ment et intéressées à ce q u ’il fût m ain ten u , c’est-à-dire,
A n n e B o n a fo s, fille à F ran çois, Charles E sparvier, M arcA n to in e E s p a r v ie r , P ierre et Joseph la V o lp iliè r e , frères
de la testatrice.
C e procès fut considérable , et défendu avec chaleur.
François E sparvier disputoit même üi M a rc -A n to in e , son
iils, le droit de succéder à sa mère à aucun titre, com m e
m arié hors de F r a n c e , et ayant perdu la qualité do
citoyen français, suivant une ordonnance de L ou is X I V .
E n fin , le 7 mars 1 7 3 6 , intervint sentence sur procé
dures respectives , q u i , « ayant égard h ce qui résulte
« des dépositions des témoins ouïs dans les inform aA
a
�( 4 )
'tions des 14 et 17 mai 173 5 , condamne François
Espai'vier de L o d iè re à se désister de l’indue possession
et jouissance par lu i faite des biens meubles et im
meubles dépendans de la succession de ladite A n n e de
L a v o l p i l iè r e , son épouse , et en délaisser la libre
jouissance audit Jean-H ugu es B onafos, sieur D alozier,
et audit M a rc -A n to in e E s p a r v ie r , sieur de B la zè re ,
fils de ladite dame, e n q u a l i t é D E s e s h é r i t i e r s ,
avec restitution des fru its, suivant l’estimation qui en
sera faite par e x p erts, sauf à faire distraction sur la
totalité des biens de ladite succession, de la légitim e
telle que de d ro it, qui doit appartenir audit Charles
E s p a r v ie r , autre fils dudit François E sparvier, et de
ladite défunte A n n e de L a v o lp iliè r e ; et attendu la
voie de fait pratiquée p ar ledit François Esparvier \
et l’enlèvem ent par lui fait du testament de ladite A n n e
de L a v o lp iliè r e ,
son
ép o u se ,
le déclare décliu et
p riv é du legs à lui fait par ledit testament ; et avant
faire droit sur les conclusions prises par lesdits P ierre
et Joseph de L a v o lp iliè re o n cles, de mêm e que sur la
part et portion prétendue par ledit François Esparvier,
sieur de L o d iè r e , en conséquence du tra n sp ort,
cession ou subrogation q u ’il prétend lui avoir été
consentie par François de L a v o lp iliè r e , il est ordonné
que les parties contesteront plus a m p le m e n t, dépens
quant à ce réservés : François Esparvier est condamné
en tous les autres dépens. »
François E s p a rv ie rd e L o d iè re m o u ru t le 7 fé v r ie r i7 3 8 ;
et pendant le procès ci-dessus , il avoit fuit un testament
olographe, ab irato ; exprès pour déclarer q u ’il déshé-
�C 5 )
ritoit M a rc -A n to in e E s p a rv ie r, son fils; il institua p o u r
héritier universel Charles E s p a r v ie r , son fils cadet.
Celui-ci se porta héritier bén éficiaire, et fit inventaire
le 28 avril 1738.
Charles E sparvier ne tarda pas à décéder ; et p ou r
dédom m ager son frère de l ’exhérédation du père com
m un , i l l’institua héritier universel, par testament du 18
m ai 1 7 3 8 , et fit à Françoise E sp a rv ier, sa s œ u r; un legs
<le 300 francs.
Com m e les biens de Charles E sparvier p e se compor
soient que de la succession de F ra n ç o is, M a rc -A n to in e
E sparvier imita son f r è r e , en ne se portant q u ’héritier
bénéficiaire ; en conséquence il fit un inventaire le io s e p r
le m b re 1 7 3 8 , consistant au récolem ent du p ré c é d e n t,
et auquel il appela notamment le sieur S a i n t - P o l ,
com m e créancier.
A p r è s la m ort de François E sparvier et A n n e L a •volpilière, le sieur Sain t-P ol auroit eu le droit certaine
m ent de demander le partage de leu r succession ; mais
il avoit aussi la faculté de s’en tenir à la dot constituée
par le contrat de m ariage de 1718.
C ’étoit une option à faire qui décidoit de la qualité
d ’héritier ou créancier; l ’une com m e l ’autre ne perm ettoit plus de varier.
Gabr ie l S a i n t- P o l , m or t en 1738 , avoit institué sa
sœur héritière fiduciaire. E n cette qualité, elle assigna
M a r c - A n t o i n e Esparvier en qualité d ’héritier de ses père
et m è r e , par exploit du 28 juin 1 7 3 8 , po u r payer la
dot constituée à la dame S ain t -P o l, en 1718.
J e a n - Gabriel S a i n t - P o l , fils et héritier de Françoise,
�( 6 )
E s p a r v ie r , loin de ré p ro u v e r ladite d em a n d e, la reprit
lu i-m ê m e , en 1748 , contre M a r c - A n t o i n e E sparvier ;
il conclut au p a yem en t, i° . de 2300 francs p ou r le
reste à payer de la dot de son aïeule ; 20. de 300 fr.
p o u r le legs à elle fait par le testament de Charles Espar
v i e r ; 3 0. au payement d ’ une provision de i 5oo francs,
sauf, a jo u ta -t-il, réserve de demander le partage.
L e 2 septembre 1749 il obtint une sentence qui con
damne M a rc - A n to in e E sparvier à lui payer lesdites
sommes de 2300 francs et 300 fra n cs, et qui lui adjuge
une provision dq 5oo francs.
M a r c -A n to in e en avoit interjeté a p p e l, com m e ne
se croyant pas tenu à payer les 2000 francs constitués par
François E sp a rv ier, dont il n’étoit qu ’ héritier bénéfi
ciaire , du chef de Charles ; mais il se départit de cet /
appel au m oyen du traité ci-après.
*
1
• L e 9 décem bre 1 7 4 9 , les parties transigèrent. M arcA n to in e E sparvier paya au sieur Saint-Pol les 5oo fr.
de p ro v is io n ; et p o u r le payement du surplus de la dot
de Françoise E sp a rv ie r, m ère du sieur S a in t-P o l, M a rc A n to in e E sparvier lui délaissa des fonds à dire d’experts,
ou moyen de quoi les parties se tinrent respectivement
quittes; et le sieur S a i n t - P o l se réserva tous autres
droits que ceux de la sentence , exceptions contraires
demeurant réservées au sieur Esparvier.
P a r une contre - lettre du même jour il fut con
ven u que le sieur Saint-P ol rendroit lesdits héritages au
s i e u r E s p a r v ie r , m oyennant le payement de la somme
u lui d u e , suivant ladite sentence.
< M a rc-A n to in e
E sp arvier m ourut en
1761 , après
�C7 )
a vo ir institué
bénéficiaire.
J o s e p h , qui se porta encore héritier
L e 12 avril 1.765 , trente ans et un jo u r après le
décès d ’A n n e L a v o lp iliè r e , le sieur S a i n t - P o l assigna
Josep h E sparvier en partage, 1°. de la succession de
ladite L a v o lp iliè i’e, son aïeule; 20. de celle de François
E s p a r v ie r , son aïeul ; 3 0. de la succession de Charles
E sp a rv ie r, son oncle.
E n 176 8 , il obtint une sentence par d é f a u t , qui adjuge
ses conclusions.
L e sieur Saint-Pol avoit vendu à un nom m é Coste
rousse , en i 759 et 1 7 6 1 , un p ré à lui délaissé par le
traité de 1 7 4 9 ; mais il avoit eu la précaution de stipuler
aussi une faculté de ra c h a t, p o u r le reprendre quand
le sieur Esparvier le demanderoit.
Le
I er.
juillet 1 7 7 8 , Joseph E sparvier demanda en
effet au sieur S a in t-P o l l ’exécution de la c o n tre-lettre
du 9 décem bre 1 7 4 9 , et le désistement de l ’im m euble
délaissé par le traité du môme jour. P o u r éviter un
circuit d’actio n s, il assigna Costerousse en rapport.
L e 6 septembre 1 7 7 9 , „il intervint une sentence q u i
condamne Costerousse à se désister, à la charge par le
sieur Esparvier d ’acquitter au sieur Saint-Pol les sommes
à lui dues en vertu de la sentence du 2 septembre 1 7 4 9 ,
en payement
desquelles ledit
p ré lui avoit
été
d é
laisse; condamne S a i n t - P o l à la restitution des fruits
perçus pendant sa jouissance et celle de Costerousse, à
dire d’expert 5 ordonne enfin q u ’il sera fait compte et
�.
.
.
.
.
(
8 '}
compensation desdites sommes, et in térêts, avec les jouis
sances , jusqu’à due concurrence.
C e désistement à eu lie u ; la sentence de 1779 a été
e x é c u t é e , et Joseph E sparvier s’est remis en possession
du p ré délaissé pignorativem ent en 1749.
L o r s de la demande de 1 7 7 8 , le sieur Esparvier avoit
pris un autre c h e f de conclusions, fondé sur un acte
étranger a u x successions jusqu’alors en litige.
Françoise E sparvier et G ab riel Saint-Pol a voient eu
Jean -G abrlël et H ugues Saint-Pol. Celui-ci ayant passé
au service d’Espagne avant la m ort de ses père et m è re ,
Jüan-G abriël S a in t-P o l rég it tous les biens.
Hugues S a i n t - P o l, revenù en F ra n c e, fit à Joseph
E sparvier une cession de droits, sous seing p r i v é , en 1760 ;
puis en 1761 il en fit une seconde à son f r è r e , par acte
notarié.
Joseph E sp a rv ier, inform é de ce stellionat, s’en plaignit
à IIu gues S a in t-P o l, qui se repentit sans doute de l ’avoir
t r o m p é , et offrit de l’en dédom m ager autant qu’il étoit
1
en lui.
E n e ffe t , il rem it à Joseph Espnrvier les billets que
lui avoit faits J e a n -G a b r ië l S a i n t - P o l , son frè re , p ou r
p r ix de 6a cession de 1761 ; il sollicita des lettres de
rescision contre cette m êm e cession, et les rem it aussi
au sieur E s p a rv ie r; enfin il ratifia à son p ro fit, par acto
notarié du z 5 avril 1 7 6 9 ,5 a cession de 1 7 6 0 , et lui céda
tous ses droits rescindans et rescisoires contre celle de 1761,
C ’est en vertu de ce dernier acte que Joseph Esparv i c r , par la demande ci-dessus, du icr, juillet 1 7 7 8 ,5 e
subrogea
�( 9 ° . ,
subrogea à la demande en nullité et rescision de Hugues
S a in t - P o l, conclut à la nullité de la cession du 9 janvier
1 7 6 1 , et au partage des successions de G ab riel SaintP o l et Françoise Esparvier', avec toute reddition de
compte et restitution de jouissances.
L e procès fut appointé en droit.
L e sieur Saint-P ol donna une écriture le 27 février
178 3 , p ou r persister dans la demande en partage q u ’ il
avoit form ée en 1 7 6 5 , des'trois successions de François
Esparvier de L o d iè r e , A n n e L a v o lp iliè r e , et Charles
E sparvier-d’Estresses ; il dit q u ’il n ’existoit aucun testa
ment d’A n n e L a v o lp iliè r e , et que quand les informa
tions de 1735 en tiendroient lie u , le testament projeté
seroit nul p ou r n’avoir pas été lu à la testatrice et aux
témoins ; il a r g u a aussi de nullité le testament de Charles
E sp a rv ie r, du 18 mai 1738 , com m e n ’ayant pas été écrit
par le notaire ; enfin il soutint n’avoir point a p p ro u v é
la destination de légitim e faite à Françoise E s p a rv ie r,
par son contrat de mariage de 1 7 1 8 , sons prétexte des
réserves insérées dans sa demande de 1748^ 20. relati
vem ent à la cession d’Hugues S a i n t - P o l , il prétendit
que celle de 1769 étoit un s t e l l i o n a t , et qu’ il n’y avoit
pas lieu à rescision contre la cession h lui consentie
en 1 7 6 1 , parce que Hugues Saint-Pol avoit approuvé
les testamens de ses père et mère.
Dans les écritures en rép o n se, Joseph Esparvier dé
montra que le sieur Saint-Pol avoit parfaitement connu
les informations de 1 7 3 5 , et la sentence de 17 3 6 , lors
qu’ il avoit traité en 1 7 4 9 , et lorsqu’il avoit réclamé la
dot de sa m è re , au lieu de demander le partage.
33
�( 1° )
A l o r s , et par requête du n décem bre 1 7 8 3 , le sieur
Saiut-Pol forma tierce opposition à la sentence du 7
mars 1736.
Il demanda en outre la vérification d’écriture du tes
tament du 18 mai 1 7 3 8 , p our établir que la minute
n’ étoit point écrite de la main du notaire; il demanda
la même vérification du testament de Françoise Espar
v ie r , sa m è re , de 1 7 4 7 , p our établir que celui-ci étoit
écrit de la main du notaire.
Cette double vérification demandée par l ’adversaire fut
ordonnée par sentence du 28 février 1784.
L es choses restèrent en cet état jusqu’au 7 prairial
an 6 , que Joseph Esparvier assigna en reprise.
L e 17 floréal an 7 , le sieur Saint-Pol cita aussi en
reprise des demandes en partage par lui form ées; mais
paroissant revenir ù des prétentions plus justes, il de
manda subsidiairement l ’exécution de la sentence du 2
septembre 1 7 4 9 , portant payement de la dot, et une
provision de 3000 franps, attendu, d it-il, q u ’au moyen
de l’éviction de Costerousse il étoit redevenu créancier du
m ontant des condamnations de ladite sentence.
M ais cette m odération ne fut pas de longue d u r é e ,
et bientôt le sieur S a i n t - P o l
prétendit mêm e s’être
trompé en ne demandant q u ’ un quart de la succession
de François E s p a r v ie r , son a ïe u l, parce q u e , d i t - i l ,
M a r c -A n to in e ayant été déshérité par le testament dudit
F ra n ço is, et le testament de Charles Esparvier se trou
vant n u l, il en i*ésultoit que la succession dudiL Fi’ançois
E sparvier devoit se partager par é g a lité , et par tiers,
entre C h a rle s, Jeanne
et
Françoise E s p a r v ie r , sans
�( 11 )
com pter M nrc - A n to in e qui n ’avoit rien à recevoir.
T e l étoit l ’état de la procédure et 'des prétentions
respectives lors du décès de J ea n -G a b riël S a in t-P o l,
arrivé en l ’an 9.
L es demandes fui’ent reprises le 20 th erm idor an 10.
11 fut question de satisfaire à la sentence de 1 7 8 4 , et
de faire procéder à la vérification requise par Jean G abriël S a in t - P o l; mais son fils notifia, le 1 5 ventôse
an 1 2 , qu ’ayant pris communication des deu x testamens
de 1738 et 1 7 4 7 , il i-econnoissoit que son père avoit
erré sur tous les deux : que le testament de Charles
E sparvier étoit écrit de la main du notaire recevant ;
mais qu ’au contraire celui de Françoise E sparvier étoit
d’ une main é tra n g è re , d ’où il s’ensuivoit q u ’il étoit
inutile de faire ladite vérification.
' P a r requête du 13 messidor an 12 , le sieur Snint-Pol
changea absolument toutes ses conclusions précédentes.
N e pouvant plus com pter sur un tiers , ni mêm e sur
un quart de la succession de François E sp a rv ie r, sonbisaïeul, il vit bien qu’ une légitim e de rigueur seroit
fort inférieui’e aux 2000 francs de dot constitués par
le contrat de 1 7 1 8 , du ch ef dudit François E sp a rv ie r;
en conséquence il imagioa qu ’il p ou vo it reven ir u n e
seconde fois sur ses pas, et déclarer qu ’il se contentoit
des 2000 francs donnés de cet estoc , sans se départir'
néanmoins du partage de la succession d’A n n e de L a v o lpilière ; en conséquence il con clu t, i ° . au partage desi
biens d’A n n e L a vo lp ilière ; 20. à être mis hors de cou r
sur les autres demandes en p artage, et à ce que Josep h
E sparvier fût condamné ù lu i payer a o o e f francs pour.
B 2
�( 12 )
la dot constituée par François E sp a rv ie r; 30. à lui payer
5 o francs p ou r le legs fait à la dame S a in t-P o l, par ledit
François E sp a rv ie r, par son testament du 3 août 173^»
4°. à lui payer 300 francs p ou r le legs fait à ladite dame
S a in t - P o l, par Charles E sp a rv ie r, suivant son testament
du 18 mai 1738.
Cette variation continuelle de conclusions et de m oyens,
et ce retour p o u r moitié à la sentence du 2 septembre 1749*
ne de vo ien t se r v ir, ce sem ble, qu ’à ramener les choses à
leu r prem ier p o in t; car cette sentence ne p ou vo it pas
être en partie chose ju g é e , et en partie chose inutile,
vis-à-vis celui-là même qui l’avoit sollicitée. Cependant
la cause ayant été plaidée au tribunal civ il de Saint-Flour,
le sieur Saint-Pol réussit dans tous les points.
L e jugement dont est ap pel, du 21 mars 1807, a besoin
d’être connu dans ses motifs , dont le grand nom bre est
une p reu ve assez claire de la peine q u ’ont prise les pre
miers juges p ou r donner quelque couleur à leur décision,
à force de raisonnemens.
C o n s id é r a n t q u e la p r e u v e d e la s u p p r e s s io n <Tun te s ta m e n t p e u t ê tr e fa ite
p a r t é m o in s , p a r c e
que c ’ e st u n p u r f a i t , m ê m e u n fa it q u i t ie n t d e la nature
du c r i m e , d o n t la p r e u v e n e p e u t ê t r e fa ite c o m m u n é m e n t q u e p a r té m o in s ;
Considérant qu’une preuve de ce genre doit être faite avec toutes les parties
Intéressées, pour pouvoir leur être légalement opposée ; qu’ainsi si celui qui
demande à faire cette preuve n’a d autre objet que d obtenir des dommagesintérêts contre l’auteur de la suppression du testament, et de le faire priver
de l’avantage que ce testament contenoit à son profit, il suffit qu’elle soit faite
contradictoirement; mais que si elle a également pour objet de faire remplacer
le testament supprimé, par la déposition des témoins, elle doit être faite avec
tous les héritiers présomptifs du testateur;
Considérant que ces principes ont été même reconnus dans l’instance, puisque
le sieur Dalozier, un des héritiers institués par le testament enlevé, appela dan*
la cause terminée par la sçütcnçc de 176 6 , non-seulement les enfans du pre-
�( i3 )
mier lit ¿ ’Anne de Lavolpilière, testatrice, mais encore 'Charles Esparvier-d’Estresses, un des enfans du second lit; d’où il suit que conséquemment au prin
cipe reconnu, il eût dû également appeler en cause, et la dame de T o u rret,
et la dame de Saint-Pol, comme héritiers présomptifs de ladite Anne de LavoJpilière, leur mère;
Considérant, sous ce rapport, que la dame de Saint-Pol n’ayant pas été
partie dans la sentence de 17 6 6 , eût été recevable à y form er tierce oppo
sition; que l’information convertie en enquête ne faisant pas foi à son égard,'
elle eût pu reprocher les témoins, contre-enquêter, demander même une nou
velle enquête; q u e cep end ant le s circon stan ces et les tem ps écoulés d ep u is
exig en t qu'aujourd'hui on ajou te f o i à la d ép o sition d es tém o in s, dès qu’à
raison de leurs dires il n’ est plus possible de les faire entendre de nouveau ;
Considérant que si la dame de Saint-Pol eût été recevable à demander tierce
opposition à la sentence de 1756, ses héritiers ont eu et ont incontestablement
le même d roit; qu’il ne peut résulter contre eux aucune fin de non-recevoir,
de ce que le sieur de Lodière , père de la dame de Saint-Pol, étoit partie
dans la sentence , soit que dans l’état a c tu e l de l’instance le sieur de SaintPol ne procède pas comme son h éritier, et s’en tient à la destination de
légitime faite à la dame de S a in t-P o l, sa fille , soit parce que la présence du
sieur de Lodière dans l’instance terminée par la sentence de 173 6 , n’empèchoit pas que la dame de Saint-Pol devoit y être appelée, celle-ci devant
l ’être comme héritière présomptive d’Anne de Lavolpilière , et le sieur de
Lodière l’ayant été pour les dommages et intérêts auxquels l’exposoit la voie
de fait par lui commise;
Considérant que si le sieur de Sain t-P ol est recevable à former tierce
opposition à la sentence de 17 3 6 , cette opposition peut être au fond bien
ou mal fon d ée, suivant que les dispositions testamentaires de la dame do
Lavolpilière, suppléées p a rla déposition des t é m o i n s , seront ou non jugées
valides et régulières;
Considérant qu’à cet égard il est juste de distinguer les formalités inobservées par le fait de l’enlèvement et suppression du testament , de celles
qui proviendroient du fait de la testatrice, ou de l’officier public chargé de
la rédaction du testament, et qui se trouveroient constatées par la déposition
des témoins; que s’il n’est pas juste que les héritiers institués souffrissent du
fait d’autrui et de l’inobservation de quelques formalités empêchées par l’en
lèvement du testament, il ne seroit pas juste non plus qu’ils se fissent un titre
pour déclarer valide un testament qui, avec l’accomplissement des formalités
empêchées, se trouveroit nul d’ailleurs par d’autres vices indépendans de la
voie de fait commise ;
Considérant qu’avant d’examiner si les dispositions testamentaires constatées
�( 14 )
par la déposition des tém oins, sont ou non valides et régulières sous' le rapport
précédemment envisagé, il convient d’examiner préalablement s i, comme le
prétendent les sieurs de Píiulhine , le sieur de Saint-Pol ou ses auteurs ont
approuvé et acquiescé á ces mômes dispositions ;
Considérant, quant à ce qu’on ne peut approuver ce qu ’on ne connoît
pas, qu’à l’époque de la sentence du a septembre 174 9, et du traité du 9
décembre de la même année, la sentence de iySG n’avoit pas été notifiée au
sieur de S a in t-P o l; qu’elle ne le fut qu’en 1779, long-tem ps après la de
mande en partage formée par le sieur de Saint-Pol ; que lors des sentences et
traité de 1749, il ne s’agissoit point d’une destination portée par le testament
d’Anne de Lavolpilière, mais de la constitution de dot faite à la dame de St.P ol, par son contrat de m ariage; qu’en réclamant le payement de cette dot,
le sieur de Saint-Pol ne donna point au sieur de Paulhine la qualité d’héritier
testamentaire de sa mère , mais la simple qualité d'h éritier et biens tenant d e
sa su ccession ; que lorsque le sieur de Paulhinc-Esparvier prétendit que la
qualité d’héritier testamentaire a lui attribuée par sentence , dont il ne donna
ni date ni copie, étoit suspendue par la voie de l’appel qu’il dit avoir in
terjeté de cette sentence, le sieur de Suint-Pol se restreignit à suivre l’effet
de la demande contre ledit de Paulhine, en la seule qualité de biens tenans
de sa succession ;
Q u’à la vérité tous le s droits du sieu r d e S a in t-P o l étant ouverts p a r le
d ècès d es père e t mère de la dame de Saint-Pol, le sieur de Paulhine eût pu
repousser sa demande, en le forçant à prendre qualité, à se dire et porter héri
tier, ou à renoncer à cette qualité, pour s’en tenir à la destination et constitution
dotale, dont le payement étoit réclam é; mais q u e , au lieu de cela, le sieur
de Paulhine, défendant à la demande par d’autres m oyens, fu t constamment
averti que le sieur de Saint-Pol n entendoit approuver aucunes dispositions
testamentaires , puisqu’il se fit constamment des reserves de se pourvoir en
partage de la succession de la dame de Lavolpilière ;
Considérant enfin que ces réserves expresses consignées dans l’acte de reprise
au g re ffe , du 6 décembre 1748» dans la requête du même jour, dans celle
du i*r. février 1749 > dans la signification de la sentence du 2 septembre
17/ff) , et encore i n d i r e c t e m e n t , dans le traite du g décembre de la mémo
année, excluent toute idée d’approbation de la part dudit sieur de Saint-Pol, d’où
il s’ensuit qu’il est r c c c v a b l c à proposer et faire valoir les nullités dont
peuvent ótre viciées les dispositions testamentaires ;
Considérant à cet égard que sans examiner si avant l’ordonnance de 1 7^5 ,
l e testament devoit ótre dicté et écrit en présence des'témoins, comme sembla
l’exiger l’arrét rapporté par H eiirys, rendu en forme de règlem ent, contre
le* notaires du F o rez, ou s’il suffisoit que les témoins fussent présens, pour
�( i5 )
tm'iir la lecture du testament, en présence du testateur, il est au moins certain
q u e, dans ce dernier cas, le testateur devoit, en présence des tém oins, dé
clarer que le testament lu étoit sa dernière vo lon té; qù’il est constant que
cette déclaration de la dame de Lavolpilière n’est attestée par aucun tém oin,
si ce n’est par le vicaire Costerousse, qui ne dit pas encore qu’elle ait été
faite après l’ expulsion et le départ des témoins; qu’il est également constant
qu’elle ne peut ê t r é suppléée par la réquisition faite par e lle au vicaire Coste
rousse, de faire lecture du testament; que cette déclaration devoit être re
nouvelée après la le cL u re , o u a u moins , dans l’espèce , a u moment où le
testament fut enlevé des mains du vicaire, comme ce dernier le donne à’
entendre dans sa déposition ;
C o n s i d é r a n t enfin que la déclaration du vicaire ne suffit pas pour constater
l’observation de cette essentielle form altié, qu’il faut encore celle de tous
les témoins ;
Considérant que ce vice n’est pas le seul dont fussent infectées les dispo
sitions de la dame de Lavolpilière ; qu’elles l’étoicnt encore du vice de prétérition, en çe que la testratrice n’avoit pas rappelé les dames de Tourret et
de Saint-Pol, ses filles; que la déposition du vicaire à cet égard est encore
contraire à la déposition uniforme de tous les autres tém oins, qui auroient
aussi bien dû retenir les legs faits aux dames de Tou rret et de Saint-Pol»,
que tous les autres legs qu ils mentionnent dans leurs dépositions; qu’au surplus y
d’après même la déposition du vicaire , le legs fait aux dames de Tourret et
de Saint - P o l, ne l’auroit pas été à titre d’institution d’héritier , à la différence
du legs fait au chevalier d’Estresses, également rappelé et par le vicaire et par,
tous les témoins ;
C o n s i d é r a n t que cette prétérition eût di\ suffire et suffit'encore pour faire
annuller les dispositions de la dame de Lavolpilière ; que dès-lors les sieurs de
Paulhine et Dalozier ont été mal à propos c o n f i r m a s ses héritiers par la
sentence de 17 3 6 , et qu’ en recevant le s i e u r de S ain t-P o l tiers-opposant
à ladite sentence, il y a lieu d’ordonner à son profit le partage de la suc
cession, comme ouverte ub intestat.
■E n ce qui touche le payement de la somme de 2000 francs pour la légi
time paternelle de Françoise Esparvier, aïeule du sieur de Saint-Pol, et du
legs de 5o francs à elle fait par le testament du sieur de Lodièrc ;
Considérant qu’outre que le sieur de Paulhine ni le sieur Esparvier do
Blazèdes n e se sont dans aucun temps légalement pourvus contre le te s ta m e n t
du sieur d e Lodière, d u 3 août 1735, ils s e r o ie n t non recevalles, comme l’eût
¿té le sieur d e Blazèdes, leur auteur, à l ’a tta q u e r de n u llit é , ledit d e Blazèdea
¿tant héritier pur e t simple d u sieur E s p a r v ic r - d ’ E s tr e s s c s , son fr è r e ; que
lui-méme avoit a p r o u v é le testament; quoiqu’il eût déclaré ne vouloir accepter1
�(i6)
l’hérédité que sous bénéfice d’inventaire, la succession à lui déférée par*
ledit testament;
Q ue les sieurs de Paulhine n’ayant pas plus de droit que le sieur de Blazèdes,
leur père et aïeul, et celui-ci que le sieur Esparvier-d’Estresscs, son frère ,
ne pouvoient, sous prétexte de l’inventaire fait à la requête dudit sieur d’Estrcsses,
en 173H, après le décès du sieur de L od ière, se prétendre simples héritiers
bénéficiaires de ce dernier, puisque lesdits sieurs d’Estresses n’ont pas usé
dudit inventaire v is -à -v is de la dame de Saint-Pol, sa sœ u r, so it pour ne
l'a v oir ap pelée à l'inventaire com m e créancière de la succession, soit pour
avoir compris dans ledit inventaire le mobilier de la succession d’Anne de
LavoJpilière , n’avoir pas distingué celui propre et personnel au sieur de
Lodière , et s’étre emparés de tout confusément ; jouissance et confusion
qui s’est perpétuée tant dans les mains du sieur de Blazèdes que dans celles
du sieur de Paulhine ;
Q ue la sentence de 1749 n’avoit condamné M arc-Antoine Esparvier, sieur
de Blazèdes, au payement de la dot de la dame de Saint-Pol, qu'en q u a lité
d ’ h éritier et bien tenant d’Anne de Lavolpilière, et ce à raison de la solidarité
d’obligation portée par le contrat de mariage de la dame de S a in t-P o l, et
qu’ elle ne prononce contre lui aucune condamnation, comme héritier du sieur
de Lodière ;
Considérant que l’effet de la condamnation portée par ladite sentence de
174 9 , n’étant plus qu’ un objet de rapport au partage de la succession d’Anne
de Lavolpilière, les héritiers de la dame de Saint-Pol ne peuvent être privés
du droit de requérir contre les héritiers du sieur de Lodière, la condamnation
tant du legs porté par son testament au profit de la dame de Saint-Po!, que de
la dot qu’il lui avoit constituée en la m ariant, et de reprendre, quant à la
d ot, l’effet de la demande qu’ils en «voient formée en 1748, dès qu’ils se dé
partent de leur demande postérieure au partage de lu succession du sieur de
Lodière.
En ce qui touche la demande en payement du legs de 3oo francs, porté par
l e d i t testament d e Charles E s p a r v i c r - d ’ E s t r e s s e s ;
Considérant que la sentence de i 74D 11 cn Pron°nce pas la condamnation ;
que sur la demande qui cn avoit été formée en 1748, elle ordonnoit, à cause
des qualités contestées, une plus ample instruction ;
C o n s id é r a n t , à c e s u j e t , q u e M arc-Antoine Esparvier d e Blazèdes n ’a y a n t
p a s f a it fa ir e d 'inventaire au décès de feu Charles Esparvicr-d’ Estresses, n’a pu
ïe d ir e e t p r é t e n d r e ê tr e s o n h é r it ie r b é n é fic ia ir e ; q u e l u i , e t après lu i les sie u rs
de Paulhine, n e p e u v e n t a v o ir d ’ a u tr e s qualiLés q u e c e lle s d ’ h é r itie r s p u r s e t
s im p le s d u d it c h e v a lie r d ’ E s trcs sc s ; q u e la d e m a n d e c n c o n d a m n a t io n c o n t r e
eux r e p r is e , à fin d e p a y e m e n t d p le g s d e 3oo francs, esi. b ie n f o n d é e , d è s
que
�C *7 )
sieur de Saint-Tol Se départ de la demande e n partage que lu i o u ses
auteurs avoient formi-e de la succession dudit d ’Estresses, sous prétexte de
nullité du testament de ce dernier; que le sieur de Saiiit-lJol ne doit encourir
d’autres peines, à cet égard, que celle des dépens mal à propos occasionnas
par ladite demande en partage.
. E n ce qui touche la demande du sieur de Paulhine, à fin de nullité de la
cession faite à Jean-Gabriël de Saint-Pol par Jean-Hugues de S ain t-P o l, son
frè re , le g janvier 17 6 1, et à lin de partage des successions de père et m ère,
frère , oncle et tante dudit sieur de Saint-Pol ;
Considérant que l’acte de 17^1 renferme l’approbation la plus expresse des
testaméns d e s père et mère dudit cédant; que la nullité du testament du père,
résultante de ce qu’il avoit été reçu par M. le curé, postérieurement à l’ordon
nance de 1735, éto if une nullité apparente, qui devoit être d’autant moins
q u e le
ignorée de Jean-Hugues de S a in t-P o l, cédant, que M arguerite de Saint-Pol,
sa sœur, femme Azalbert, l’avoit déjà fait prononcer par arrêt rendu en 1749,
ainsi que l’ont annoncé les sieurs de Paulhine eu x-m êm es; que la nullité du
testament de la mère , résultante de ce qu’il n’est pas écrit de la main du notaire
recevant, pouvoit être considérée comme une nullité cachée; mais que c’ est
ici d’autant plus le cas de l’application de l’arrêt invoqué par le sieur de SaintP o l, rapporté par Chabrol, sur l’articlc 5o du titre ta de la coutume d’A u
vergne, rendu en semblables espèces, en i 76 8 , contre un sieur de Lavolpilière,
au profit du sieur de Chambona, qu il n’est ni c o n s t a n t ni vraisemblable que
Jean-Hugues de Saint-Pol n’ait eu connoissance de cette nullité qi,ic postérieu
rement à l’acte de 176 1, soit qu’on ne s’en est pas fait un moyen dans les lettres
de rescision prises sous son nom-, soit parce qu’il avoit les moyens de consulter
les minutes, puisque la quittance qu’il avoit antérieurement fournie à son frère,
le 14 mars 1769, d’ une somme de y 58 francs, à compte de ce qui lui avoit été
légué par le testament de ses père et m ère, attestant qu’il en connoissoit, et
la date, et le nom de ceux qui les avoient r e ç u s , soit enfin que d’après les
termes de l’acte de 1761 il est évident que Jean-Hugues de Saint-Pol n’avoit pas
seulement entendu approuver et céder les droits résultans en sa faveur des testarnens, mais tous scs droits successifs, d’après les anciens principes confirmés
par le Code c iv il, l’acte de 1761 n’est pas même susceptible de rescision pour
cause de lésion ;
Considérant encore que l’acte de cession de îyfîi > comme premier en d a te ,'
oit l’emporter sur celui de 176g, nu sieur de Paulhine, par Jean-Hugues de
,aint-Pol; que ce dernier acte suppose une première cession faite au sieur de
Paulhine, sous la date de 1760, dont l’existence à cette époque est d’autant
plus suspecte, qu’oulre que rien ne la constate légalement, c ’est qu’elle préjenteroit Jcan-Iiugues de Saint-Pol comme un stcüionatairc sans pudeur, qin
C
�fi8 )
fa r trois fo ’s se scroit alternativement fait un jeu de tromper son frère, et le
ticur de Paulhine, son cousin, sans cependant qu’aucune des parties ait osé
donner une telle idée de son caractère; que si la première cession de 1760 eût
existé , le fieur de Paulliine se fût empressé de l’opposer à la demande en par
tage du sieur de Saint-Pol, dès qu’elle fut formée; qu'enfin les termes de l’acte
de 176.9, les circonstances dans lesquelles la cession qu’il renferme a été re
cherchée, l’intervention de Jean-Hugues de Saint-Pol, même après la cession
fuite au sieur de Paulhine , la modicité du prix de cette cession , comparé à
celui de la cession de 1761 , le besoin que crut en avoir le sieur de Paulhine
pour combattre et atténuer la demande en partage formée contre lu i, tout
fait présumer qu’elle fu t feinte et simulée, ou que si elle fut réelle, elle ne fut
que le fruit de la suggestion et de la captation ; d’où il résulte que sans s’arrêter
à l’ acte de 17^9, les demandes, soit en rescision de l’acte de 1761 , soit à fin
de partage de la succession de la famille de Saint-Pol, doivent être rejetées.
Finalem ent, en ce qui touche la demande en provision de 3ooo fr. , formée
par ledit sieur de Saint-Pol ;
Considérant qu’ il est certain que scs auteurs ont perçu diverses sommes à
compte de la constitution de dot de Françoise Esparvier, son aïeule, ou intérêts
d’icclles; que sous ce rapport il est censé pourvu ; mais qu’au lieu d’une simple
destination de légitim e, ayant droit au partage égal d’une succession ouverte
dès 173 5 , les sommes reçues peuvent n’être considérées que comme une pro
vision insuffisante, si les contestations qui divisent les parties doivent encore
se prolonger.
Par ces divers m otifs,
L e tribunal faisant droit aux parties, sans s'arrêter ni avoir égard à la cession
prise par Joseph Esparvier, de Jean-Hugues de Saint-Pol, le 25 avril 176g, aux
lettres de récision prises sous le nom dudit de Saint-Pol, contre autre cession
par lui faite le 9 janvier i j Gi > a Jean-Gabriël do Suint-l’ol , son frè re , ni
à la demande en entérinement desdites lettres, formée sous le nom dudit
de Saint-Pol, au ci-dcvant bailliage de V ie , et reprise en ce tribunal par ledit
de Paulhine ; sans s’arrêter pareillement aux demandes de Joseph et Pierre
Esparvier, père et fils, tant à fin de nullité des testamens de Gabriel de SaintPol du Chnyla, et de Françoise Esparvier, son épouse, qu’à fin «le partage de
leurs successions, ainsi que de celle «le Iloch de Saint-Pol, Gabriel, FrançoiscBlizabelh et Anne de Saint-Pol; de toutes lesquelles demandes, fins et con
clusions lesdits Esparvier de Paulhine, pore et fils, sont déboutés; faisant droit
sur la demande contre eux form ée, à fin de jwrtage de la succession d’Anne de
la Volpilière , aïeule et bisaïeule des parties, reçoit, en tant que de besoin,
Jean-Hugues de Saint-Pol, lils et héritier de Je«n-Gabrü:l , tiers opposant n la
sentence du bailliage de V ie , du 6 mars 1756, qui a déclaré Charles Esparvier
�C T9 )
3 e Blazèdes , et Agnès de Pdnafos-Dalozier, héritiers testamentaires de ladite
Anne de Lavolpilière, déclare quant à ce ladite sentence nulle et comme non
avenue; ce faisant, condamne ledit Joseph Esparvier, et Pierre Esparvier fils,
et son donataire , tenancier des entiers biens de la succession d’ Anne de La
volpilière, à venir à division et partage avec ledit de Saint-Pol, de tous les biens
meubles et immeubles provenus de ladite succession, savoir du mobilier suivant
l ’inventaire qui en a été fait ou dû être fait à l’épo'que du décès d’Anne de La
volpilière, sinon, suivant l’état quclesdits dePaulhine seront tenus d’en fournir,
sauf tous contredits, même toute preuve en sus, et des immeubles en nature,
dans les formes voulues par le Code c iv il, pour du tout en être fait six lots
égaux , et l’un d’eux délaissé par la voie du sort audit de Saint-Pol, par re
présentation de Françoise Esparvier, son aïeule, avec restitution des fruits
et jouissances des im m eubles, et intérêts du mobilier , depuis le décès de
ladite Anne , et intérêts d es intérêts à compter de la demande formée au
bailliage de V ie , le 12 avril 17 6 5 , à la charge toutefois par ledit sieur de
Saint-Pol de rapporter audit partage ce qui sera établi avoir été par lui ou
scs auteurs perçu, tant en capital qu’intérêts, de la dot constituée à Françoise
.Esparvier, dans son contrat de mariage avec Gabriel de Saint-Pol du Chayla',
<lu ch ef d e là dame Anne de Lavolpilière, sa mère.;
O r d o n n e que jjour parvenir audit partage, estimation préalable des im
meubles sera faite par un ou trois experts dont les parties conviendront, dans
les trois jours de la signification dtr présent j u g e m e n t ; et faute par les parties
d ’ en convenir dans ledit délai , ordonne qu’il sera procédé à l a d i t e estima
tion par les sieurs Chyrol, Daude et R od ier, experts que le tribunal nomme
dès à présent d’office; lesquels experts procéderont à la division ci-dessus
ordonnée, pour être ensuite les lots formés de la manière voulue par le Code
civil , et estimeront en outre les dégradations et améliorations si aucunes
existen t, et encore année par année la restitution des jouissances du sixième
revenant audit de Saint-Pol, et ce depuis Je décès de ladite Anne de Lavol
pilière ; qu’ il sera procédé au partage ci-dessus, devant M, Loussert, jugccominissaire nommé à cet effet; qu’ il renverra ensuite, s’il y a lieu, les
parties devant tel notaire qu’ il avisera, et qui recevra le serment des experts ;
Au surplus, donne acte à toutes les parties de ce que ledit Jean-Hugues
de Saint-Pol s’est d ép a rti d es d em a n d es en partage formées au bailliage de
[Vie , tant de la succession de François de Lodière et de Charles EsparvicrU’ Estresses ; ce faisant, déboute ledit de S ain t-P o l desdites demandes en
partage ; et statuant sur les conclusions par lui prises le 3 messidor an 1 2 ,
précédemment prises au bailliage de V i e , et sur lesquelles la sentence de
1749 avoit sursis à faire d ro it, condamne lesdits Esparvier de Paulhinc,
père et fils ,
comme h éritiers purs e t sim p les de l'rançois Esparvier i[q
�(
20
)
Lodière , par représentation de Charles Esparvier-d’Estresses', à payer audit
de S.iint-Pol, en derniers ou quittances valables, la somme de 2000 francs,
formant Ja dot paternelle constituée par ledit François de Lodière à
Françoise Esparvier , sa fille , par son contrat de mariage avec Gabriel de
Saint-Pol du Chayla , avec intérêt de cette somme depuis la demande origi
naire qui en fu t formée au bailliage de V ie ; 20. celle de 5 o francs, montant
du legs fait à ladite Esparvier, épouse de Gabriel de S a in t- P o l, par ledit
François Esparvier de L odière, par son testamant du 3 août iy 5 5 , pareille
ment avec intérêt de ladite somme, depuis la demande qui en a été formée le
l 3 messidor an 1 2 ; condamne en outre lesdits Esparvier, comme héritiers
■purs et sim p les de Charles Esparvier-d’Estresses, par représentation de M arcAntoine Esparvier de Blazère, ¿p ayer audit de Saint-Pol, en deniers ou quit
tances valables, la somme de 3oo francs, montant du legs fait à ladite Espar
vier, épouse de Gabriel de Saint-Pol du Chayla, par ledit Charles Esparvierd’Estresses, son frère, par son testament du 18 mai iy 3 8 , avec intérêt de
ladite somme, depuis la demande originaire qui en fut faite au bailliage de V ie ;
C o n d a m n e e n f i n lesdits E s p a r v i e r , père et iils, en tous l e s dépens faits tant au
bailliage de V ie qu’au tribunal civil du département du Cantal, qu’en ce siège*
moins toutefois le cinquième des dépens, depuis la première demande du
partage, formée au bailliage de V ie , jusqu’au 3 messidor an 12, époque à la
quelle ledit de Sain t-P ol s’est départi des demandes en partage des succes
sions de François Esparvier de Lodière et de Charles Esparvier-d’Estresses;
lequel cinquième des dépens , ensemble le coût entier de la sentence du
bailliage de V ie , de 1784* demeurent à la charge dudit de Saint-Pol, suivant
la taxe qui e n sera faite en l a manière ordinaire ;
E t en cas d’nppel du présent jugement , fait audit cas provision audit de
Saint-Pol de la somme de mille livres ;
Ordonne que le présent jugement sera exécuté nonobstant l’appel, et sans
y préjudicier;
S u r le s u r p lu s d e s d e m a n d e s , fin s e t c o n c lu s io n s d e s p a r t i e s , le s m e t h o r s
d ’ in stn n e e.
Sur l’iippel de ce jugem ent, la cour a confirmé la dis
position relative à la provision.
A u jo u r d ’hui le sieur S t.-P o lse trouve payé absolument
de la dot de 4000 francs et des deux legs de 360 fraucs.
E n e f f e t , i° . son aïeul a reçu 1700 francs en argent,
ou biens fonds, dont l ’adversaire est encore détenteur;
�(
21
)
2 °. Son père a reçu 1225 francs, ainsi qu ’il est reconnu
en la sentence du 2 septembre 1 7 4 9 ;
3 0. Il a reçu encox-e une somme de
5oo
francs, suivant
le traité du 9 décem bre 1 7 4 9 ;
4 0. 11 étoit débiteur de Hugues Saint-Pol de 82 0 francs;
et Hugues Saint-Pol ayant cédé cette créance à Josepli
E s p a r v ie r , c e lu i- c i, porteur des effets, a le droit sans
difficulté de les opposer en compensation ;
5°. Il étoit débiteur des jouissances du pré et cham p
abandonné en 1749 , depuis ladite époque jusqu’au désis
tement ordonné par la sentence de 1 7 7 9 ; ces jouissances,
à 200 francs par a n , se porteront à 6000 fran cs, sauf la
déduction des intérêts dûs à l ’adversaire suivant ladite
sentence ;
6°. L e sieur E sparvier est porteur de quittances ou
billets pour prêts signés p n rle sieur Saint-Pol p è r e , p o u r
la somme d’environ 700 francs.
A in s i l’adversaire est nanti d’ une somme de 10945 fr.
lorsqu’ il demande un partage.
Il demande ce partage après avoir demandé et fait
payer une dot constituée à sa bisaïeule.
Sans doute si cette sentence avoit été obtenue pendant
la vie de ceux qui ont constitué la d o t, elle ne seroit
pas une fin de non-recevoir contre l’adversaire.
Mais c’est après la m ort de ceux qui ont fixé cette
d o t , qu’elle a été d em and ée, obtenue et p ayée; dès-lors
il faudroit oublier tous les principes p our admettre le
sieur Saint-Pol à revenir par une nouvelle a c tio n , in
com patible avec la première.
�( 22 )
E n effet, quand une succession s’o u v r e , tous les enfans
du défunt ont le droit d ’y ve n ir par action en p artage,
ou par action en payement de la dot ou légitim e fixée
p a r le défunt.
Dans le prem ier cas , on est héritier et chargé des
dettes ; dans le second cas , on est créancier, et affranchi
Lde toutes charges héréditaires.
Celui qu i ne se présente que p o u r réclam er une dot
con ven tio n n elle, q u i agnovit ju d iciu m d e fu n c ti, ne peut
plus ensuite se présenter com m e héritier et demander un
partage.
Seulement s’ il prétendoit n’a vo ir p a s , dans ce qu’ il a
r e ç u , une légitim e de r ig u e u r , il pourroit la demander;
mais son action ne seroit pas changée ; car ce seroit
encore à titre de créancier q u ’il viendroit à la succession,
et la demande en partage ne lui seroit pas ouverte.
Ici le sieur S a in t-P o l, à l’époque où il pou vo it opter,
après la m ort d’A n n e L a v o lp ilière et François E sparvier,
a choisi la qualité de créancier ; il a forcé Yhéritier de
le payer.
Com m ent auroit-il p u rester lui-m êm e héritier après
cette demande ? Il auroit été son p rop re débiteur.
L e sieur Saint-Pol a donc renonce au droit d’être coh é
ritier , dès l’instant q u ’ il s’est présente contre lh é r itie r
p o u r être payé d’une dot due p a r la succession .
E n vain a-t-il fait des réserves dans des procédures où,
le plus so u v e n t, elles sont de style : ces réserves étoient
démenties par sa demande m êm e, et elles ne peuvent le
relever de son p rop re fa it, qui les rend inutiles : Facta
potentiora su n t verbis , et actu s p rotestation i cojitra riu s
tolllt protcslationenix
�( *3 )
L e sieur Saint-Pol dira-t-il que lors du procès de 17 48 ,
il ne connoissoit pas l’étendue de ses droits ?
M ais on voit par une écriture signifiée par*le sieur
S a i n t - P o l , le 12 avril 1 749, que le procès
mations de 1 7 3 5 , lui étoient conn u s, ainsi
tence de 1736.
D ’ailleurs la sentence de 1748 règle ses
so llicité e, il ne l’attaque pas. 11 l ’a exécutée
et les infor
que la sen
droits; il l’a
par le traité
de 1749 ; et ce traité lui-m êm e n ’a point été attaqué dans
les dix ans.
Ce silence du sieur S a i n t - P o l n’étoit pas un simple
oubli.
A lo r s la
succession étoit
poursuivie par des
créanciers. L e sieur L a c a rriè re , ancien adjudicataire des
biens , ne les avoit rendus qu ’à la charge d ’être rem
boursé de t o u t ; il p o u vo it se remettre en possession;
et voilà pou rqu oi le sieur Saint - P o l laissoit tous les
dangers à la charge de l’héritier. L e sieur saint-Pol étant
m êm e assigné hypothécairem ent par le sieur L a c a r r iè r e ,
com m e détenteur d’immeubles à lui abandonnés p ar
le contrat de 1 7 1 8 , assigna en recours M a r c - A n t o i n e
E s p a rv ie r, et ainsi il se mit à l’abri de toutes recherches.
C ’est seulement après que ces dangers ont passé à force
de démarches et de sacrifices, q u ’il est venu a d p a ra fa s
e p u la s , renier la qualité qu ’il avoit prise p o u r se dire
héritier.
L e sieur S a in t-P o l, qui nedisputoit pas en 1748 au sieur
E sparvier la qualité d ’h éritier en ve rtu de la sentence
de 17 3 6 , veut aujourd’hui la contester, et p o u r cela il
form e tierce opposition à cette sentence.
P eu t - il y être éc o u té , après avoir connu et discuté
cette sentence avant le traité de 1749 ?
�( M )
Est-il môme recevable dans sa tierce opposition, sous
prétexte qu ’ il a dû être appelé à la p ro c é d u re ?
Il s'agissoit de la poursuite d’ un délit; les seuls intéressés
étoient d’une part l’auteur de la suppression du testament,
et d’autre p a r t, ceux qu i étoient nommés dans ce testa
m en t et qui perdoient à sa suppression.
L a dame Saint - P o l , dotée au-delà m êm e des forces
actuelles de la succession , n ’avoit pas d’intérêt d’être
appelée à discuter cette suppression.
Sa dot étoit présumée de droit la rem p lir de sa p ortion ;
et d’ailleurs elle n’étoit pas réputée héritière tant qu’elle
ne renonçoit pas ù cette dot. Com m ent d’ailleurs le sieur
S a i n t - P o l peut-il attaquer une sentence qui a passé en
force de chose jugée v is -à -v is François E s p a rv ie r? Il a
procédé comme héritier dudit E sp a rv ie r, depuis i j 65
jusqu’au 13 messidor an 1 2 , qu ’ il a changé ses conclusions.
O r , la qualité d’héritier est indélébile.
A u x’este, quand la sentence de 1736 to m b e ro it, les
informations de 1735 sufliroient p ou r donner à M a rcA n t o in e E sparvier et à François Bonafos la qualité d’h é
ritier d ’A n n e L a vo lp ilière .
L ’enlèvem ent du testament ne peut pas ôter à l’héritier
appelé le droit q u ’ il tenoit de la volonté du d é fu n t; et
c’est ici le cas d’appliquer la m axim e : P o tiu s id quant
action est quant quod scripturn est. En eiïet, il est de
principe qu’ un titre perdu par accident ou force m ajeure,
est suppléé par la p reu ve testimoniale.
O r , les témoins de 173^ déposèrent avo ir une par
faite connoissance de la teneur du testam ent, tenorem
in strum en ti au divissc (lut percepisse ; et le nom des
héritier^
�C *5 )
héritiers fut tellement co n sta n t, qu ’ils furent confirmés
com m e tels par la justice , en grande connoissance de
cause.
L es premiers juges o n t - i l s pu , sans un arbitraire
r é v o lta n t, ôter à ces héritiers un droit aussi ancienne
ment reco n n u , et réform er aussi légèrem ent une décision
contemporaine , fondée sur des élémens de vérité que
le temps a affa ib lis, mais q u ’il n ’a pas entièrement fait
perdre ?
Rem arquons l ’inconséquence, et des premiers ju g e s,
et de l’adversaire. C ’est en 1736 que la justice donna à
M a r c - A n t o in e Esparvier la qualité d’héritier. Elizabeth
Sain t-P o l la lui confirma dans l’exploit de 1738 -, le sieur
Sain t-P o l lui-m êm e la confirma dans l ’exploit de 1 7 4 8 ,
dans la sentence et le traité de 1749.
E t cependant il est admis , soixante ans a p rè s , h se
rétracter.
Q uant aux dépositions des témoins de 1 7 3 5 , n’est-il
pns d’ un scrupule m inutieux d’y chercher si les légitimes
ont été faites à titre d ’in stitu tion ? Ces témoins ne p o u voient pas connoître des subtilités de droit q u i , au
jo urd’ hui sont proscrites du Code c i v i l , parce q u ’elles
ont été jugées n’avoir aucune importance réelle.
L es témoins ont parlé des legs; et s’ ils y avoient ajouté
quelque chose de plus scientifique, on auroit p u , avec
ra iso n , se défier de leur témoignage.
Enfin il est ridicule d ’exiger que la lecture du testa
ment eût dû être faite, parce que l ’ordonnance l’exige.
Car précisément la suppression eut lieu lors de cette
lecture , et c’est ce que l’ordonnance n’a pas p révu .
Si donc la sentence de 1736 étoit annullée , la qua*.
D
�c
2
6
}
lité ¿ ’héritier se retrouveroit dans les informations, et
aucune prescription ne s’y opposeroit; car le sieur Es par
vi er et ses en fans ont toujours joui des biens et de la
qualité d ’héritier.
Quant à la succession de François Esparvier de L o d i è r e , il est difficile de concevoir comment l’adversaire,
âpres avo ir demandé sa légitime en 1 7 3 8 , puis le par
tage en 1 7 6 5 , a pu revenir h demander la légi tim e,
après avo ir plaidé trente-huit ans p o u r le p a r t a g e , et
surtout comment il a pu faire sanctionner cette étrangô
Variation.
Ce n’est pas qu ’on lui conteste le droit de prendre la
légitime conventionnelle; mais dans le système des pre
miers j u g e s , c’étoit une inconséquence; car si le traité
de 1749 n’étoit pas une fin de n o n - r e c e v o i r , la qualité
d ’héritier une fois prise ne p ou vo it pas être répudiée
p o u r en revenir à une dot qui n’étoit sujette ni aux dettes,
ni aux charges de l’hérédité.
Cette variation du sieur S a i n t-P o l, au lieu d’être prise
au m o t , d e v o i t tourner contre lui.
A u contraire, les premiers juges en tirent parti pour
dire que le sieur Saint-Pol n'étant plus héritier de Fra n
çois E s p a r v ie r , a qualité p o u r former tierce opposition.
Ils ont encore posé en règle générale q u ’on peut tou
jours diviser une d o t , et c’est une erreur.
H o u s s e a u - L a c o m b e , v°. dot , enseigne que la consti
tution dotale est indivisible; et que l’enfant doté ne
p e u t , après la m o r t , s’y tenir pour les biens maternels,
et répudier les paternels. Il cite un arrêt du i 5 juillet
"1745. 11 p ou vo it en citer un autre du 23 févri er 1 6 3 4 ,
�( a7 )
qu’ on trouve au tome i er. du Journ al des audiences.
S o u v e n t, en effet, avec des fortunes inégales, des pères
et mèi*es ont des motifs
égalité.
p o u r constituer une dot par
Ceci a voit lieu dans l ’espèce, où plusieurs actes anté
rieurs à 1700 p rou vent que la fortune du sieur E sparvier
étoit en litige avec celle d’A n n e L a v o lp iliè re , avant m êm e
son mariage : ce seroit un chaos que de v o u lo ir aujour
d ’hui séparer ces deux successions.
A u reste, si le sieur Sain t-P o l obtient 2000 francs'
du chef de son bisaïeul, il sera soumis au com pte du
bénéfice d’in v e n ta ire , et il y auroit m êm e de l’injustice
à obliger le sieur E sparvier à payer com m e héritier p u r
et simple.
M al
propos a-t-il été dît que les inventaires ont
été faits sans appeler les créanciers. Il eût fallu les lire
avant d’alléguer ce fa it; on y auroit v u que précisé
ment le sieur Sain t-P ol a été appelé à tous deux.
✓
Il reste à parler du partage de la succession Saint»
P o l , demandé
en vertu de la succession de H ugues
Saint-Pol.
Q uand on mettroit de côté la cession de 1 7 6 0 , celle
de 1769 suffit.
A lo rs H ugues S a i n t - P o l avoit obtenu des lettres de
rescision contre sa cession de 1761 , et elles étoient
fondées.
Il
n’avoit que cinq ans au décès de son père ; il avoit
quitté la maison en bas âge : il avoit traité avec son
protuleur.
<
Il s’étoit pourvu dans les dix ans.
�( 28)
• O n dit qu ’ il a a p pro uvé le testament de sa mère.
M ais il étoit n u l d’ une nullité latente, puisqu’il n’étoit
pas écrit de la main du notaire ; et l’approbation en.
ce cas n’em pêche pas d’attaquer ensuite le testament.
L a cour l ’a ainsi jugé en thèse dans la cause des
nom m és G rangeon et A c h a r d , par arrêt du 4 pluviôse
an 10.
O n a opposé au sieur E sp arvier qu ’il n’insiste sur ce
partage que par récrim ination de la demande du sieur
Saint-Pol. E h bien ! il avoue franchem ent qu ’on a ren
contré juste. Il ne p ou vo it pas m ieux se ven ger d’ un
procès de mauvaise f o i , qu ’en se défendant avec les
mêm es armes.
^
L e sieur de S a in t-P o l veut le tracasser en demandant
le partage de la plus inextricable des successions, après
avoir accepté une légitim e conventionnelle en temps utile :
il est donc bien licite au sieur Esparvier de le tracasser
l u i - m ê m e , p o u r lui m ontrer combien de tels procès
sont o n éreu x à celui qui est forcé de les soutenir.
L e sieur S a i n t - P o l aura bientôt la conviction qu’il
a intenté un fort mauvais procès , et qu’ il s’est attiré
une demande t r è s - fo n d é e ; accident qu’il faudroit
souhaiter à la plupart des p laid e u rs, pour les corriger
de la convoitise du bien d’a u t r u i, et de la manie des
vieilles recherches.
M e. D E L A P C H I E R , a ncien a vo cat.
Me . D A U D E ,
A
RIO M , de l'im p rim erie d E T
a vo u é licen cié.
h i b a u d - L a NDR i O T ,
im prim eur d e la C o u r d'appel.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Esparvier d'Estresses, Joseph. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
successions
partage
successions collatérales
mariage hors de France
déchéance de nationalité
généalogie
testaments
Description
An account of the resource
Précis pour Joseph et Pierre Esparvier d'Estresses, appelans; Contre Jean-Hugues Saint-Pol, intimé.
arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1718-Circa An 10
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0315
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Flour (15187)
Deux-Verges (15060 )
Rights
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Domaine public
Relation
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déchéance de nationalité
généalogie
mariage hors de France
partage
Successions
successions collatérales
testaments
-
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9d20ae3bf0d597a22edc756cff2887d6
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RÉPONSE
DE MARIE DEGREILS
AU
MÉ M O I R E
D E M. D E G R E L S D E M I S S I L I A C , S O N N E V E U .
V
o u s no co nc evez p a s , M . de Missiliac , que je
puisse vouloir jouir de ma fortu ne, parce que j ’a i ,
selon v o tre c a l c u l , q u a tre-vingt-dix ans. Vous m ’a
vertissez que l ’exploitation de mes biens sera a u dessus de mes forces ; e t , pour m ’alléger ce fardeau ,
vous désirez que je reste à la merci de votre g é n é
rosité , et dans votre dépendance.
P o u r inspirer à quelqu'un une telle abnégation de
i
�( 2 )
soi-même, il faudrait être plus persuasif, ou au moins
plus poli ; et vous ne m ’épargnez ni le ridicule , ni
les injures.
* .
C o m m e vous ne pouviez pas trop avoir raison en
racontant les faits tels q u’ils sont prouvés par é c r i t ,
vous avez voulu les acc om m oder aux événemens de
leur é p o q u e , et vous vous êtes fait un système.
_*_X.a„révolution , qui .est la cause ou le prétexte de
toutes les iniquités co nt emporaines , vous a paru le
m o t i f unique du procès actuel; vous l ’accusez de vous
avoir ôté une fortune immense , et vous m ’accusez
m o i - m ê m e de complicité ave c elle; car s’il faut vous
en c r o ir e , feusse é t é , sans la révolution , tenue de vivre
et mourir ave c i 5 o fr. de rente que je tenais de la
munificence de votre père; et si j ’ai ob te n u , par un
j u g e m e n t , une portion héréditaire, ce ne pouvait ê t r e ,
dites-vous, que pour la restituer à ce frère généreux.
A v o u e z , mon n e v e u , que cette histoire arrangée
dans votre c e r v e a u , pour n’être racontée q u ’à trente
lieues de notre domicile, n’a pus une grande vraisem
blance , et que ma perversité, q u i doit fa ire fté m ir
cThorreur ce u x à q u i il reste quelques idées de v ertu ,
est une chose fort in cro ya ble , a mon â g e ,
pour tous
ce ux qui m e connaissent, et sur-tout pour vous.
■,
Malheur eusement pour la foi due à votre na rra tion ,
une demande en partage, fort en règle, datée de 1786
est venue attester que je n ’avais pas attendu Immigra
tion et les séquestres pour prendre g oû t à la propriété^
qu’au lieu de ne vouloir ma portion héréditaire que
�(
3
)
pour la rendre à vofre p è re , je J’assignais avant la
rév olutio n, pour me la do nn er , et que je ne trouvais
pas alors au-des su s de mes forces de jouir par moimême.
C et exploit de 1786 qui dérangeait un peu le fil
de votre roman ^ n’a fait que vous donner de l ’h u m eu r,
sans que vous prissiez la peine de l’adapter à votre
ca d r e , autant que possible; vous n 'y avez v u q u ’un
acte extravagant qui ne devait rien produire alors
( c e qui n’est pas la ques ti on ), et je n’ai gagné à en
faire usage qu’une bien sincère félicitation de ma pré
vo yan c e à deviner la révolution, et une promesse pour
la vieille tante à Cesprit prophétique, de lui assurer une
place à côté de N ostradam us.
O u i , mon n e v e u , la vieille prophétesse (q ui vous
remercie d’avoir adouci l’expression), avait en effet
deviné beaucoup de choses avant la révolution; et pour
mériter la place auguste que vous lui assignez, elle va
vous les dire, en termes moins obscurs que ce ux de
son modèle.
• Elle avait deviné d’abord que quand une tante céli
bataire a accoutumé un collatéral à compter sur sa for
tu n e , ce collatéral s’accoutume à son tour à regarder
l ’existence de la vieille c o m m e une charge fort impor
tu n e; qu’on lui laissera bientôt entendre q u ’elle a vécu
déjà long-tems, et que le brevet de longévité, q u’il a plu
à la nature de lui donner, passe les bornes ordinaires.
Elle avait deviné que son dix-septième lustre la ren
drait le témoin de beaucoup d ’inconvenances sur les2
�.
(
4
}
quelles elle ne pourrait que gém ir * qu'il serait alors
utile aux siens q u ’elle eût quelque fortune , et q u’il lui
serait doux d ’en faire e lle-m êm e une distribution équi
table qui appelât sur ses derniers momens le respect
et la reconnaissance.
Quand on force une prophétesse à monter sur son
trépied, elle n’en descend pas toujours au gré des au
diteurs; mais tranquillisez-vous, m o n n e v e u , je n’ai
rien à vous dire d'offensant ; ce que la vieille a deviné
de plus lui restera in p etto , parce que cela lui est per
sonnellement é t r a n g e r , et q u ’ une tante bien née ne
doit pas répondre à son n eveu injures pour injures.
O u i , Monsieur de Missiliac , c ’est par pr évoyance
que j ’avais voulu sortir de la tutelle de votre père en
1 7 8 6 ; et c ’est encore par pr é v o y a n ce que j'ai voulu
sorlir de la vôtre en 1807. J e fus assez long-tems un
être inutile, et je v e u x cesser de l ’être. J e v e u x aussi
que la caducité de mon âge ne soit onéreuse à per
sonne, qu'elle tourne m ê m e au profit de ceux q u’elle
ne rebutera pa s, et que mes bienfails journaliers leur
fassent désirer plutôt la prolongation de ma vie que la
hâte de ma mort.
N e me reprochez pas cet espoir consolant qui déjà
m e dédom mage du passé. F û t - i l une chim èr e, il serait
cruel de me la ravir. Vous sentirez peut-être un jour
q u ’une illusion octogénaire est encore la plus réelle
des jouissances ; et que le premier besoin de cet âge
est de faire du bien pour croire à la reconnaissance.
Cependant il ne s’ensuit pas de ce que j ’ai dit, que
�(5 )
je prélende user d’une fortune qui ne sérail pas la
mienne. Nul autre que vous ne m ’aurait accusée de
vouloir m ’enricliir aux dépens d ’auirui, et par des voies
illégitimes. Mais vous me traduisez devant le public et
devant les tribunaux pour m ’en justifier. Cette tâche
ne sera pas bien pénible. Lés faits seuls parleront assez
haut pour démentir votre accusation.
J e suis orpheline depuis i y 35 . Louise Br ugier, ma
grand’mère demeura chargée d’administrer les biens de
la maison 5 elle avait sous sa tutelle Bertrand Deg reil
votre p è r e , nos deux sœurs A n n e et Magdele ine D e
greil, et moi.
Louise Brugier étail héritière de son mari, à la charge
de rendre l ’hérédité à Gaspard Deg reil mon père. A u
cun acte ne prouve q u ’elle lui ait fait cette remise.
L e seul où elle ait parlé, est le contrat de mariage
de votre p è r e , où se montre toute sa tendresse pour
votre père et son éloignement pour nous.
D a ns cet acte ( d e 1 7 4 7 ) elle donne tous ses biens
à votre père, en le chargeant de nous paye r i 5 o fr.
en capital pour tous droits successifs. U n oncle et une
tante ( M a g d e l e in e D e g r e i l ) lui assurent aussi toute
leur fo rt u ne; la future passait pour avoir une fortune
de 1 5 o,ooo fr.
Bertand Degreilsalla demeurer chez sa f e m m e , lais
sant sa grand’mère et ses sœurs dans la maison pater
nelle à Vigouroux. Louise Brugier mourut en 1 7 6 4 ,
et alors il se mil en possession de tous les biens.
�( 6 )
Notre aisance diminua tout d’an coup à cette époque.
V otre père, quoiqu’absent, se chargeait de nourrir mes
deu x sœurs et moi. Ce ne fut pas l'époque la plus riante
de notre vie. V o t re père nous exagérait toujours la
médiocrité de notre fortune ; il voulait nous acc ou
tumer insensiblement à croire que cela était ainsi : c e
pendant nous connaissions, dans le patrimoine de notre
père, le domaine considérable de Roupon , le domaine
de B o u s q u e t , la montagne de Trelissous , et les bâtimens, jardins et aisances de la maison paternelle.
T o u t cela était divisible entre nous par égalité, mon
père étant mort ab intestat • sau f seulement le quart
du domaine du Bou squet, q u’on pouvait nous disputer,
à cause d ’une substitution dont ~je parlerai
tout à
l ’heure.
Nous vivions dans une sujétion qui n’est pas encore
effacée de ma mémoire. Etiiin elle nous parut insup
portable , et nous demandâmes à jouir de notre for
tune. C ’est alors que tout fut mis en œuvr e pour que
la part du lion se trouvât telle , qu’ il ne nous restât
en partage que la misère.
D ’abord, nous dit votre p è r e , je dois prélever tous
les biens de Claude D e g r e il , co mme
donataire de
Magdeleine Degreil, parce qu’elle a profité (sans l ’avoir
jamais s u ) d’une substitution destinée à notre père
par un acte de 1694* mais q u ’il n ’a pas transmise à ses
enfans, parce qu'il est mort avant le donateur; 2.0 je
suis seul héritier de I i O u i s e Brugier ; et co m m e elle était
.elle-même héritière de notre grand-père , je prétends
�(7 )
q u e les biens de celui-ci sont compris dans ma do na
tion ; 3 .° j ’établirai que ce qui restera est grevé de dettes,
et qu’il ne vous revient rien.
Q u ’avaient à dire à cela de pauvres filles, habituées
dès leur bas âge à obéir, et à ignorer toutes les affaires
de la maison. L e moment était donc favorable pour
obtenir de nous un renoncement à nos droits. M o n
frère nous présenta un acte tout dressé, où il ne res
tait à remplir que nos n om s, et qui était signé à l’avance
par trois de nos parens, sans autre nécessité que celle
de nous ôter tout soupçon. Nous étions tellement per
suadées que c ’était là toute noire ressource, que , dans
notre a v e u g l e m e n t , nous reg ar d â m es, pour ainsi d i r e ,
cet arrangement co m m e une faveur.
C et acle est de i y 5 g; il y est dit que nous renonçons
à tout partage , moyenant 3 , 5 oo fr. payables en sept
ternies annuels, avec l’inlérêt, outre la jouissance via♦gère de la maison et jardin de V i g o u r o u x , et de vingt
à trente charretées de bois.
M o n frère nous promit de plus une somme de 4 5 ofr.
une fois p a y é e , à répartir entre nous , et en trois
termes. Mais ce don que vous annoncez c o m m e une
magnificence, n ’élail pas purement gé n é r e u x ; car l ’in
térêt des 3 , 5 oo fr. demeurait réduit à i 5 o francs, par
cette considération.
Voilà donc le sort brillant destiné à trois filles d ’une
maison a i s é e , et dont le frère vivait dans l ’opulence !
Bientôt votre p b v e fut plus riche en c ore; notre oncle
malernel lui donna la terre de Missiliac, mais noire situa
�C8 )
tion n’en fut pas changée ;heureu ses encore quand nous
r e c e v i o n s , de loin en l o i n , et en pelits lots, le mes
quin revenu auquel il lut avait plu de nous réduire.
Et admirez encore la prév oya nce de votre père : il
nous avait bien fait signer un acte pour lui, mais il ne
nous en avait remis aucun double, de sorte q u ’il était
de plus en plus l’arbitre de nos destinées. N ’ayant a u
cun titre pour le faire p a y e r , il eût fallu intenler un
procès à chaque besoin d ’a r g e n t , ou attendre son loisir
pour en recevoir.
Nous sûmes bientôt h quel point nous avions été
dupes. Bévoltées de l ’avoir été par un mensonge, et
nous reprochant une confiance trop a v e u g l e , nous m e
naçâmes de nous pourvoir; mais mon frère ne répon
dit à nos m e n a c e s q u ’en protestant de nous faire plai
der toute sa vie ; e t , certes, il faut se placer dans notre
situation pour sentir quel obstacle invincible devait
être pour nous la seule idée d’ un procès.
Cependant nous ne renoncions pas à l’espoir de
l ’entreprendre ; mais l ’habitude de notre sort soute
nait notre patience ; le travail de nos mains aidait a
nous procurer le nécessaire.
Enfin , la persévérance
et l’économie nous donnèrent les moyens d ’exister,
sans le secours de personne.
L e moment venait où il lallait prévoir des infirmités
qui tout h la fois nous ôteraient nos ressources et aug
menteraient nos besoins. L a terreur de cet avenir di
minua singulièrement 1 épouvante que nous avait causée
la perspective d’un procès. Nos conseils ne nous laissaient
pas
�( 9 )
pas de doute sur son issue, et notre résolution fut prise
de l’entreprendre.
Après avoir proposé des médiations à mon frère,
pou r la centième fois, nous le fîmes assigner, le 14 juin
1786, pour venir à partage de la succession paternelle,
et pour nous en abandonner les trois quarts a vec res
titution de jouissances.
J ’ignore quelles diligences fit , sur cette demande, le
procureur chargé de notre confiance. Soit q u’il eût
compté sur des propositions de p a ix , "soit que ses pour
suites ‘fussent faites 'avec l e n t e u r , la suppression des
anciens tribunaux suspendit l’effet de nos réclamations.
Vo u s s a v e z , mon n e v e u , que d’autres causes con
coururent bientôt à arrêter nos poursuites. V o t re nom
et celui 'de vôtre 'frère , mis sur la liste des é m i g r é s ,
attirèrent un séquestre général sur les biens de votre
père. Ce n ’était pas l e m o m ent de l’accabler par des
procédures ; et quoique nous souffrissions co m m e lui
de ces mesures révolutionnaires, nous sûmes attendre
avec patience, jusqu’à ce que la voix impérieuse du b e
soin nous fo rça t de reprendre les voies judiciaires.
En f in , en germinal an 4? nous donnâmes une péti
tion au département
pour
solliciter le partage que nous
avions déjà demandé. L e département ne crut pas d e
voir y st atuer, s’agissant de biens séquestrés et non
confisqués; il nous ren voy a en conséquence devant les
tribunaux , en ordonnant cependant que les fermiers
de Roupon el Trelissous verseraient en nos mains la
moitié des fermages à titre de provision.
3
�( IO )
Magdeleine ÜDegreil ma sœnr était morte en l’an 2;
■" Y
*
•
A n n e et moi assignâmes m on frère et le commissaire
du g o u v e r n e m e n t , pour adjuger les conclusions prises
en l’exploit de 1786.
Ce n’est qu’au bout de trois ans q u’il nous fut pos
sible d’avoir un jugement. Il est, à la vé r it é , par dé
faut confi e mon frère; mais toutes nos demandes furent
discutées avec chaleur par le commissaire du go u v e r
nem en t : il parvint à faire adjuger à m o n frère l’effet
de la substitution, ce qui nous ôtait un q u a rt , un n eu
viè me et un vingt-septième du domaine de Bousquet.
A u surplus, le partage des autres biens fut ordonnépou r nous en expédier les deu x tiers.
A la vue de ce jugement et de nos demandes, vous vous
écriez, M. de Missiliac, que monfrèreétait d ’accord a v e c
nous; et vous n ’avez jamais rien dit de plus vrai. I l est
très certain que le séquestre de ses biens avait singuliè
rement adouci pour nous ses procédés et son caractère.
Quand il vit que nous avions obtenu en l’an 4 la moitié
des fermages sur une simple pétition, il devint pou r
nous un bon frère, et se prêta de bonne grâce à ce que
nous obtinssions enfin ce q u e nous demandions depuis
si long-tems.
Vo u s avez voulu vous dissimuler la vérité, quand vous
attestez (page 1 0 ) , que le jugement de l’an 7 a resté sans
exécution pendant toute La vie de votre père. Car vous ave z
dans votre dossier la preuve du contraire, c ’est l'arrêté
du département du i 3 germinal an 7.
Cet arrêté prouve i.° qu’après le jugement du 2Z
�( 11 )
v e n t ô s e , voire père présenta une pélilion au départe
ment pour demander la liquidation de ses droits, en
conform ité d u d it ju g em en t ’ 2.0 que dans la déclara
tion q u ’il fit desdils droits, il ne porta que le tiers des
domaines de R o u p o n , Tretissou e!c., par le m o tif que
les deux autres tiers appartenaient à ma sœur et à moi?
en vertu d u même ju g em en t ; 3 .° que le partage fait
entre lui et la nation a eu lieu dans ce sens, toujours
en exécution de ce même jug em en t ■4.0 q u ’il déduisit
le montant des restitutions de jouissances auxquelles il
avait été-condamné envers nous , par ledit ju g e m e n t•
Voilà donc une exécution bien réelle de la chose jugée.
O ù donc tr ou vez-vou s jusqu’à présent la p r e u v e ,
l ’indice m ê m e , que dans cette procédure nous ne
demandions rien pour nous, et n ’étions que des prêténoms? Dans une première lettre sans date , où votre
père
poursuit l u i - m ê m e l’exécution de notre par
t a g e a i où il nous demande pour cela l’expédition du
ju g e m e n t ? mais il m e semble seulement que cetle
pr emière lettre prouve que votre père était plus pressé
que n o u s ; sa seconde
lettre d ’ailleurs expliquera la
p r e m i è r e , et ne se prêtera à aucune de vos équivoques.
Vo ic i au reste la première letlre en son entier.
« A u x C itoyennes R O U P O N et L A C O M B E - G R E I L S ,
A I i s s i l i a c , ce
m ard i,
M im i et Billiés arrivent d’A u rilla c ce soir; il ont remis tous
nos papiers au département. L e président leur a dit q u ’ils ne
pouvaient s’occuper du partage de nos b ie n s , sans avoir l ’ori-
4
�ginal de la sentence rendue à S a in t- F lo u r, si vous ne l’aviez
pas mise dans vos a r c h iv e s, et que vous l ’eussiez remise à
B illié s, vous m ’auriez évité la peine de l ’envoyer c h e rc h e r,
et de dépenser de l ’argent. N e faites faute de me l’envoyer par
mon exprès , afin que je l’envoye demain au département , si
nous voulons que noire p artage se fasse avant que la fatale loi
que l’on nous annonce n’arrive. Pliez cette sentence de façon
q u ’elle ne se gâte pas ; et recommandez au berger de ne pas la
perdre.
ROUPON.
Ainsi parlait m o n frère , qui visait déjà à se r e
mettre à son aise avec n o u s , quand la m ain-levé e dii
séquestre l ’aurait remis eu possession de ce que le
département nous avait permis de toucher.
Il n ’y manqua pas aussitôt que son partage fut fait :
mais pour q u ’il regardât co m m e très - constant notre
résolution de n ’être plus ses dup es, nous notifiâmes au
m é t a y e r de R o u p o n , le 4 complémentaire an 7, une
saisie-arrêt générale de tous les grains recueillis dans le
d o m a i n e , et des fromages de la m o n t a g n e , en vertu,
d u jug em en t du 22 ventôse an 7 , rendu à notre profit,
contre B ertra nd D eg teil.
Cett e saisie nous valut peu de jours après une lettre
de mon fr è r e , pièce tellement importante et pr éc is e,
q u ’il faut s’étonner d’avoir aujourd’hui un p r o c è s ,
dont tout le but est de nous opposer, que nous n ’étions
alors quq des pçê te-noms.
�C x-a )
Seconde lettre.
A M
is s u ia
Cj ce 8 vendémiaire an 8.
J e ne s a is , mes chères sœurs, qui vous a conseillé de mettre
u n e saisie sur un bien qui m ’appartient ; et je ne connais pas
les circonstances qui vous obligent à le faire. J e n e vous dis
p u te p as les d eu x tiers qu i vous ont é té accordés par la n a ti en
e t j e ne m 'op p ose p as à ce que vous en jo u is s ie z p a rticu lière
m en t. Q uant à mon t ie r s , vous n’ ignorez pas qu’ il n ’y avait de
tout tems que 18 vaches de montagne à R o u p o n ; que j ’y en
ai mis cinq du B o u sq u e t, qui sont iiôurries avec les prés que
j ’ai réunis à R oupon, et qui m ’appartiennent. Ensuite m on tiers
m ’en donne six du domaine de R oupon , et sept que j ’en fournis,
tous les ans au métnyer du domaine; c ’est donc i8 vaches q u i
m 'appartiennent. S u r trente herbages qui sont à R o u p o n , v o u s
n ’ ignorez pas que le tribunal de S a in t-F lo u r et le département
m 'en accordent d ix que j'a c c e p te p articulièrem en t. C ’est donc
huit herbages que je dois vous p a y e r , et seize des Tretissous ;
m on intention est telle. Si vous prenez sur vous de faire saisit
mon revenu , j ’ai, chargé M i m l, porteur de ma lettre , de passe«
à Roupon , pour dire au métayer de m ’apporter tout de suite
cette saisie pour y répondre. A lo rs vous déduirez, vos m oyens,
et moi les m iens; tout cela ne nous empêchera pas de vivre en
bons frères.
V o u s me marquez que votre âge et vos infirmités ne vous
permettent pas de faire des sacrifices ; le mien; et mes infirmités,
et la façon avec laquelle la nation m!a traité, ne me permettent
pas d ’en faire un grand ; je vais cependant vous faire voir que
je veux en faire u n , qui est de vous donner 600 livres de pen
sion , une charretée de b l é , prise à R o u p o n , une pièce de beurre
de 5 o livres , le bois que vous demandez , et le voyage au vin,
pendant votre-vie et la m ienne, ensuite le tiers de ce qui m ’ap-
�( 14 )
parlient à V igouroux. Si cela vous convient, vous ni moi 11’ irons
pas plus loin. Calculez bien , v o u s , ma chère sœur de R oupon,
à combien ça va , ensuite 200 livres de taille , et vous verrez
que mon tiers se réduit à rien; la grange que je serai obligé
de faire , le buron , et 100 livres d ’afferme de celle de M . de
Bassignac. Quant aux 60 livres que vous dem andez, et 60 liv.
que vous avez payées au consul , vous avez reçu trois setiers s
et demi de blé à Roupon , deux quintaux moins treize livres de
fro m age, et une pièce de beurre de 5 o livres. Si cela ne fait pas
plus que votre c o m p te , je suis prêt à vous le faire. Pour, la
taille que vous avez payée en 179 3 , je vous la rembourserai ;
et si nous fa iso n s un arrangement de j a m i l l e , pour ne p lu s y
rev en ir, j e vous rembourserai les fr a is f a it s à S a in t-F Io u r.
E n attendant votre réponse, je suis , mes clières sœurs, avec
toute l’amitié fraternelle , tout à vous ,
HOÜPON.
Rien n ’est plus clair sans doute que cette le tt re , et
quand elle ne contiendrait pas une approbation positive
et décisive du partage ordonné, elle servirait au moins
de comparaison entre le langage du père et celui du fils.
Car mon frère n ’avait pas m êm e idée de nous ren
v o y e r à l ’acte de 1769 , dont il ne dit pas un mot ; et il
entendait très-bien que nous prissions pour nous-même
la portion héréditaire qui nous était acc ordée; tandis
que vous, mon neveu , avez suppute, a part vous, q u ’il
iallait que je me réduisisse à mes i 5 o francs de re nte,
c o m m e n’ayant fait q u ’ un simulacre de procès, dont
les frais étaient payés pur moi, et dont le profit devait
être pour votre compte.
Quoiqu’il en soit, m on frère nous offrait ,p o u r ne plus
�( i5 )
y revenir, une renie bien différente de celle de 1 7 6 9 .
et encore prenait-il des précautions pour prouver que
son tiers se réduirait ensuite à peu de chose ; ses pro
positions ne fuient point acceptées. U n écrit, tout nul
q u ’il ét ait, nous avait opprimées trop long-tems pour
que nous succombassions à la tentation d ’en signer 1111
autre. J e dis à mon frère, que nous recevrions provi
soirement une somme annuelle, de sa part, à litre de
comptabilité ou de f e r m a g e , jusqu’à ce que le par
tage fût effectué , et sau f à nous à en retarder ou
presser le c o m p l é m e n t , selon que nous serions satis
faites de son exactitude à tp a y e r , ou de ses procédés
personnels.
A n n e D e g re il , ma sœur, n ’a pas survécu long-tems
à celte amélioration de notre sort; morle en l ’an 1 0 ,
elle m ’a légué une moitié de ses biens, par un testa
ment qui contient plusieurs autres legs.
}-
Ces legs vous onl paru fort insignifians et nuls; mais
ce n’est pas de quoi il s’agit ici. Il est au contraire fort
remarquable que ma sœur , après m ’avoir légué la
moiIié de ses meubles et im m eubles, a disposé encore
de 5 , 5 oo fr. par le môme testament; ce qui prouve
q u ’elle ne se regardait pas co m m e étrangère au juge
ment de l’an 7 , ni q u ’elle ne se croyait pas réduite à
la cession de 1759.
Puisque j ’en suis sur cet article , je dois vous dire
aussi que le rec eveur de l’enregistrement exigea de
moi 537 fr. 60 cent, pour le droit de succession imraobiliaire de ma sœur ; cela vous prouvera encore que je
�c
1
6
}
pensais com m e elle , et que je n ’ai p o i n t , ainsi que
vous le dites, attendu la mort de votre p è r e , pour m e
prévaloir du jugeme nt de l ’an 7 , et vous le signifier
c o m m e une cliose inconnue.
B r e f , j ’ai demandé l ’exécution de ce ju g e m e n t , et
aucune l o i , aucune circonstance ne s’opposent à son
exécution.
Vou s avez cru po uvoir en interjeter a p p e l , afin de
m e ram ener à votre soi-disant transaction ou cession
de 1 7 5 9 , que vous trouvez beaucoup plus con ven ab le,
et je n’en doute pas.
M ais le fils p e u t - î l interjeter appel de ce que le
père a approuvé et môme ex écuté?
11 l ’a approuvé : vous l ’a v e z vu par sa lettre; car il
distingue les d e u x tiers que le jugement nous attribue,
du tiers q u i ‘l ui r e s te , et il fait m êm e le compte des
bestiaux dans cette proportion.
C ett e lettre, dites-vous, a été conservée préciensemenl. Si cela était , ce ‘serait déjà une preuve que le
goût de ta propriété ne m ’est pas venu seulement à
quatre-vingt-dix ans; et que dès l ’an 8, je serrais dans
mes archives, soit les sentencesquand je les a vais payées,
soit les lettresquand elles contenaient un acquiescement,
parce que cela désoriente les chicanes. Mais détrom
pez- vo us : car ce ll e leltre enveloppait, pour que vous
le sachiez, des drogues à mon usage, au moment où
le genre de voire défense m ’a forcée do chercher avec
scrupule tout ce qui pourrait vous démentir. Beaucoup
d’mitres lettres, plus positives peut-être, ont été per
dues,
�( i7 )
due s, el je me garderai bien de vous dire ce q u ’elles
pouvaient contenir; car vous, M. de Missiliac, qui niez
le sens de ce qui est clairement é c r i l , que ne diriezvous pas pour cornmenler ce qui ne vous serait opposé
que par tradition?
. ■l
L ’approbation de votre père n ’a point é ié de sa part
un acte de son pur m o u v e m e n t ; car, en l ’an 8, il ne
pouvait plus la refuser. D é j à il avait exécuté le ju g e
ment, ave c l’administration; il avait^fail le partage, et
pris le tiers de la succession. Il avait fait m êm e le cal
cul des jouissances à nous dues, et auxquelles il était
condam né par ledit jugement. Il se les fait adjuger
c o m m e en étant comptable envers nous. Vou s avez vu
tout cela dans l ’arrêté du i 3 germinal. O r , on n ’inter
jette point appel d ’un jugement qui a été suivi d ’e x é
cution et d ’acquiescement : il a force de chose jugée.
Que de v i e n t, d’après c e l a , l’éternelle cession de 1 7 5 9 ,
que vous m ’opposez sans relâche? Eû t-elle pu au rcsle
soutenir les regards de la justice?
Des filles sans expérie nce avaient été horriblement
trompées par un frère qui avait dissimulé la succession,
ex agéré les charges , et abusé de la confiance q u ’elles
devaient avoir en lui, au moins pour l’exactitude des
étals q u’il avait à leur présenter.
Il était l’héritier de leur tutrice, et par conséquent
chargé envers elles du compte de tutelle des biens de
leur p è r e ; c ’e s t - à - d i r e , des trois quarts de sa suc
cession.
.
5
�( i8 )
Il avait géré après elle; et les papiers de la sudcession ont toujours été dans ses mains.
L ’acte de 1 7 5 9 n’avait m ê m e aucune régularitéextrinsèque. Il devait avoir plusieurs d o u b l e s , puisque ch a
cune des trois sœurs était personnellement créancièi’e
de 3 , 5 oo fr.
Maintenant cr oye z- vo u s que vous eussiez pu in vo
quer le privilège des cessions de droits, et rae d ir e ,
avec Daguesseau , ¿ncedo per ¿gnes? Mais ce grand
magistrat ne s’occupait que des actes vraiment aléa
toires, et ce n’est point sous les pus de votre père qii’ii
eût placé cvneres dolosos, s’il eût discuté l ’acte que vous
vo ud ri ez faire valoir.
Croyez-vous aussi que la demande de 1786 eût été
soumise, m ê m e en l’an 7, à la jurisprudence actuelle
de n’accorder que dix ans pour la nullité des actes viciés
par un défaut de compte tulélaire? Mais quand cette
jurisprudence serait constante et g é n é r a le ; quand elle
devrait s’étendre au passé, ce n’est point ici le cas de
s o n application; car un sous-seing p r iv é , qui doit obliger
plus d’ une personne, n ’est point un act e, si chacune des
parties n ’a pas le po u vo ir d e le faire notifieret exécuter.1
O r , on n ’a pas ce pouvoir quand on n ’a pas un
double pnr-devers soi.
V o u s m ’opposez q u’il suffisait que nous eussions un
double entre nous trois. Vous savez que nous n’en avons
jamais eu , mais supposons-le : un double seul pourrait
suffire, quand on a traité solidairement, et pour un in
térêt c o m m u n ; mais trois sœurs, cédant chacune leurs
�( T9 )
droits pour une créance séparée, peuvent ne pas toujours
vivre en bonne intelligence. Cellequi est nantiedudouble
est libre de le retenir, de le faire acheter m êm e au débi
teur; et alors que peuvent les autres sans litre?
* Vous m ’opposez encore que celui qui a exécuté de
sa part le sous-seing privé , ne peut pas opposer ce
défaut de forme.
Sans d o u t e , cela doit être ainsi, quand l ’acte est
pleinement exécuté ; c ’est-à-dire, quand dans une vente,
par e x e m p l e , l’acquéreur a payé le prix : celte exé cu
tion fait que le vende ur ne peut plus opposer le défaut
de deux doubles; en effet il n ’a plus besoin d’en avoir un.1
Mais cette exception à la règle ne peut pas s’ap
pl i q u e r , quand le capital de la créance reste e n t i e r ,
et q u ’il n’a été payé que des intérêts; l’acfe en ce cas
n ’est pas véritablement exécuté j et les motifs génér aux
de la loi restent dans toute leur fo rc e, tant que le créan
cier a besoin, pour réclamer le capital e n ti e r, d ’ uu
titre qui n’esf pas en son pouvoir.
( Si d’après vos propres &u\)^osi\\or\si{inceclo per ignés'),
toute la succession de mon père eût été absorbée par
des dettes, ne po uviez-vous pas nous dire .*«• J e ne vous
* dois rien; si vous vous croye z des d ro its , de mandez
« un partage;» quel litre aurions-nous eu à vous op
poser? A u c u n : car vous aviez en mains le seul e x e m
plaire qui existât de l’acte synallagmatique; vous aviez
les quittances que nous avions données; vous étiez donc
lo maître seul de faire exécuter la convention , ou
d’empêcher q u ’elle s’exécutât. O r , un acle n*est point
6
�(
)
exécuté par une pa rti e, tant qu’ il demeure au pou
voir de l’autre de s’opposer à cette exécution.
L a cession de I7&9 était donc bien nulle, com m e
n'étant pas un titre pour toutes les parties, et com m e
étant le résultat d’un dol manifeste,* mais quelque d é
montrée que soit ce ll e nullité, sous tous les'points de
v u e , il était véritablement oiseux d’en examiner le
mérite après un procès, après un j u g e m e n t , après une
exécution de ce jugement.
Et pouvait.-ce être de bonne foi que vous m ’op
posiez cetle cession, faite pour i 5 o livres de r e n t e ,
lorsque vous reconnaissez que votre père m ’offrait un
revenu de 600 livres, du bois, des denrées, et le tiers
des biens de Vi go uro u x ? Il regardait donc l u i - m ê m e
l ’ancien acte de 175 9 com m e anéanti.
Vou s ne vous êtes pas dissimulé toutes les consé
quences d e l à lettre de votre p è r e , mais vous c r o y e z
vous en tirer en disant que les lois existaient alors dans
toute leur rigueur, et qu'il était forcé d ’adopter tout ce
qui était f a it, jusqu’à un teins plus h e u r e u x , parce
q u ’il y avait pour lui défaut de liberté, et contrainte.
E s t - c e sérieusement que vous nous donnez avec
chaleur de semblables fa u x -fu ya n s ?S o n g ez que laleltrc
dont vous parlez n’est pas de 1 an 25 elle est de l’an 8 ;
et souvenez-vous que j étais assez vieille alors pour ne
pas confondre les phases de la révolution , au point de
placer la terreur à l ’an 8.
Mais si j ’avais oublié l ’heureux changement qui ar
riva en France à celte é p o q u e , vous m e l’apprenez
�( 21 )
v o u s -m ê m e à la page i 5 de voire mémoire ; »celle opé«• ration terminée, diles-vous (le procès de l’an 7 ) , le
« sieur Bertrand Degreil père , crut devoir se rassurer
<r sur les événemens : les lois devinrent moins rigoureu« ses. L ’année qui suivit ce jugem ent fut une époque
«• heureuse pour la France ; le héros magnanime qui
« nous gouverne parut dans toute sa gloire-». V o i l à ,
m on neveu , ce que vous a vez éc rit, et par conséquent
personne ne peut m ’aider plus que vous à prouver que
ce que vous avez dit (à la page 2 7 ) , de contrainte et de
lois existantes dans toute leur rigueur, ne peut pas s’ap
pliquer à une lettre écrite en l’an 8.
R em arq uez encore que cette lettre ne fut pas écrite
à une autorité constituée, mais à une vieille fille qui
ne pouvait pas inspirer de grandes (erreurs à sou frère.
C ’étail d’ailleurs , co m m e vous le dites très-bien, une
lettre confidentielle ,■et r i e n , ce me semble, n ’est plus
opposé à la contrainte q u ’ une confidence.
Vou s vo ulez, c o m m e votre père, me certifier encore
que la succession n’est point opulente; mais je saisaujourd’hui à quoi m ’en tenir. Vous me r e n v o y e z , pour
la valeur des biens, à ce que disait mon bisaïeul dans
un acte de 1694. Mais j ’aime beaucoup mieux consulter
l ’arrêté de l’an 7 , où votre père ne traitait plus avec
trois filles, mais avec un commissaire du gouvernement.
A u reste, si j ’ai moins , il vous restera dava nta ge , et il
vous restera assez; car si la révolution vous a ôté une
partie de vos biens, ce qui est certainement un grand
m alheu r, au moins votre père a vécu assez pour vous.
�(
2
2
)
conserver le resle ; et les dons accumulés sur vo ire tête
par plusieurs membres de la famille, vous assurent au
jourd’hui, quoique vous en disiez, une très-grosse for*
lune. Je ne vous l’envie pas; et j ’espère q u e , par r é
ciprocité , vous ne m ’envierez pas plus long-tems la
mienne.
Qu e vous importe l’ usage que je veux en faire? File
sera si modique! Vous affectez de dire que je suis dirigée
par un ambitieux. C ’est d’abord un signe de raison que
de se mettre en direction, quand on en a besoin. Mais
si c’est de votre frère que vous entendez parler, vous
savez mieux que personne que son intérêt ne le feia
point agir ; ainsi n’inspirez à personne des doutes que
vous n’avez pas vous-m ême.
Il
ne s'agit pas de faire décider si ce qui m ’a él é ad
jugé sera em ployé à marier vos filles ou celles d ’un
autre. 11 n’est question que de savoir si ce qui m ’a été
donné est à moi. O r , je crois a vo ir pr ou vé que cela
n ’ est pas douteux.
Je suis fâchée., mon neveu , que mes très-humbles
remontrances vous contrarient si lorl ; mais je vous ai
déjà dil que je n’ai point de vocation pour rester en
tutelle sous trois générations successives , et je vous prie
de le trouver bon. Vous in avez émancipée vous-même,
en annonçant à la Cour que j ai quatre-vingt-dix ans;
et comment voudriez-vous q u’elle ne ratifiât pas une
émancipation aussi peu prémalurée! Vous avez élé le
maître chez vous quand vous l’avez voulu; ainsi vous
serez assez juste pour m accorder le m êm e privilège.
�( 23 )
D'ailleurs les Magistrats interviendront entre vous et
moi pour suppléer à votre bonne volonté , et vous
déterminer à faire le sacrifice de ce qui ne vous a p
partient pas.
Sig n é D E G R E I L , f . d. p.
M . e D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M . e C O S T E S , avoué-licencié.
A
R I O M ,
D E L ’I M P R I M E R I E D U P A L A I S , C H E Z J .- C . S A L L E S .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Degreils, Marie. An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Costes
Subject
The topic of the resource
successions
ferme
partage
Description
An account of the resource
Réponse de Marie Degreils au Mémoire de M. Degreils de Missiliac, son neveu.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
1786-Circa An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0314
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Roupon (domaine du)
Bousquet (domaine de)
Trélissous (domaine de)
Saint-Martin-sous-Vigouroux (15201)
Malbo (15112)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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ferme
partage
Successions
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MÉMOIRE
*
POUR
DE SCEPEAUX, v e u v e
d e B l a i s e DAURELLE DE CHAMPÉTIÈRE , intimée
M a r ie -L o u is e -J o se p h
C O N T R E
DAURELLE DE
CHAMPETIÈRE sa f i l l e et J a c q u e s
BEINAGUET D E PENAUTIER, son
L o u ise - M a g d e là in e
y
,
m a r i , appelans.
E s t - ce toujours la révolution qu’il faut accuser des
mauvais procédés des enfans envers ceux qui leur ont
donné le jour ? M ais la révolution est passée, et les
mauvais procédés durent encore ! M e
de Cham pé-
A
�( o
•
tière, luttant contre sa fille de tribunaux en tribunaux,
devoit croire qu’après les débats fugitifs d’une audience,
un jugement éteindroit pour toujours cette cause de dis
corde et de scandale : mais M de. de Penautier, perdant
le sentiment des convenances, après a v o ir , dans des
écrits, fait peindre son père comme un im bécille, et sa
m ère comme abusant de cette im bécillité pour la dé
pouiller de son patrim oin e, a jeté dans le public une
consultation im prim ée , pour graver à jamais l ’exemple
de son respect lilial au profit de la postérité.
Xi’oubli de ce respect filial étoit au moins renfermé
dans le cœur d’une m ère ; et si quelquefois, portant
dans le passé un regard p é n ib le , M de. de Cliam pétière se demandoit comment, pendant les angoisses d’une
arrestation, il avoit été possible que sa fille refusât obs
tinément d’écrire la m oindre pétition pour elle; com
m ent pendant un long séquestre de toutes ses propriétés,
il avoit été encore possible que sa fille refusât constamment
de venir à son secours, ayant cependant une très-grande
fortu n e, et sachant que son père avoit besoin de tous
ses revenus pour lui-même-, alors peut-être la révolution
pouvoit être accusée de l’odieux de celte conduite : mais
quand M de. de Penautier a d o n n é, en l’an 7 , une
procuration pour mettre les scellés chez son p è re , qui
n ’est m ort que le 16 vendém iaire an 8; quand elle a fait
l ’honneur «1 sa m ém oire d’accepter sa succession par bé
néfice d’inventaire; quand depuis lo n g-tem p s elle fait
semer sourdem ent, sur le compte de sa m ère, des bruits
ridicules de projets d’exhérédation, qui ne prouvent rien
de plus, sinon qu’elle croit l’ayoir m éritée} quand enfin
4
�( 3 )
lui disputant une reconnoissance de 4r,ooo francs qu’ellen ’a jamais ignoré être Lien sincère et Lien légitim e, elle
n’avoue pas que cet acte a déjà été approuvé par un
prem ier payem ent; tout cela, sans doute, est le produit
de la m éditation, part du cœ u r, et le prétexte ne peut
pas en etre cherché dans des causes étrangères. U n jour
viendra peut-être que M do. de Penautier demandera
sa fortune à ses enfans : plaise à D ieu qu’elle ne retrouve
pas dans eux les procédés dont elle doit s’accuser ellemême. M de. de Cham pétière l’abandonne à cet avenir
q u i, heureux ou m alh eu reu x, n’en sera pas moins le
temps des remords.
L a cause ne présente pas la question posée par les
citoyen et dame de P en au tier, de savoir si une recon
noissance dotale faite à une personne p rohib ée, est censée
un avantage indirect, à moins qu’elle ne justifie du paye
m ent réel fait au mari. L a question est de savoir si quand
un mari n’ayant pas reçu toute la dot lors du contrat
de m ariage, et dès-lors ayant eu droit de la recevoir
après, a rendu son compte par une reconnoissance de
ce qu’il a to u c h é , les héritiers du mari sont fo n d és, cil
A u v e rg n e , à contester cette reconnoissance; s’ils sont
fondés à demander que leur m ère justifie les sommes
touchées par leur p ère, et rende le compte que celui-ci
devroit à elle-m êm e, si la reconnoissance u’existoit pas,
F A I T S .
• M da. de Cham pétière s’est mariée ,le 20 août 1770.
M do. de B a g lio a , veuve de Scepeaux , sa m è re , lu i
A a
�( 4 )
constitua en dot tous les biens échus par le décès de son
p è re; pour lesquels, f u t - i l d it, et subsidiairement en
avancement d’hoirie de la succession maternelle , M de.
de Scepeaux délaissa à sa fille la jouissance totale de trois
objets im m obiliers, à l’exception des droits seigneuriaux
en dépendans, qui lui demeui’oient réservés : de sa p a rt,
M do. de Scepeaux, en faveur dudit m ariage, prom it
à sa fille l’égalité dans sa succession, sans pou voir avan
tager son frère germain à son préjudice.
M . de Cliam pétière prom it à sa femme un douaire de
1,800 fi-ancs ; et pour son logem ent, le château de la
B a to n ie , avec les meubles qui s’y trouveroient.
M dc. de Scepeaux est morte en 1 7 7 3 , à Paris. Cette
m ort donna droit à M . de C liam pétière, en qualité de
m a ri, de demander le partage de la succession de M . de
Scepeaux, dans laquelle il n’avoit eu jusqu’alors qu’une
jouissance d’immeubles d’après son contrat; de demander
aussi le partage de la succession de M de. de Scepeaux,
qui venoit de s’accroître par une partie de celle de M de.
Plielippeaux , veuve Duguesclin , et d’un oncle m ort
chambellan du roi d’Espagne, et q u i, eu égard à sa fortune,
devoit avoir laissé un m obilier considérable, soit en A n jou
son dom icile ordin aire, soit à Paris où elle est décédée.
Ce m obilier fut-il inventorié? fut-il recueilli par M . de
Cliam pétière amiablement ou avec les formes judiciaires?
,cn quoi consistoit-il? Sans doute la réponse î\ ces ques
tions appartient au m a ri, maître de la d o t; et M dc.
de Cliam pétière, alors très-jeune el habitant l’A u verg n e,
ne devoit naturellement pas s’embarrasser des détails de
deux successions ouvertes en A n jou et à Paris.
�(6).
M ‘,c. de Cham pétière avoit deux frères ; l ’un ne
d’un autre m ariage, l’autre son frère germain ; et elle
n’avoit pas eu de sœurs. A in si la succession de M de.
de Scepeaux a dû etre partagée par m oitié avec son frère
germ ain , quoique les citoyen et dame Beinaguet aient
fait im prim er qu’il y avoit -plusieurs cohéritiers. Parens,
ils devoient savoir qu’il n’y en avoit pas plusieurs • étran
g ers, ils pouvoient consulter les Généalogies de France
et le Dictionnaire de M o ré ri, qui les eussent empêchés
de mentir. ( G en. de F r. tom. V I T , pag. 389. M o r é r i,
tom. I X , pag. 2 3 5 , édition de 1769. )
Il est échu d’autres successions h madame de Champétière depuis son m ariage; celle de M . l ’abbé de Chaillan,
en 17 7 9 ; celle de M . D u gu esclin , son oncle, en 1783;
enfin la succession de M . de Scepeaux, son frère, en 1786.
Ces ti’ois successions, à la v é r ité , furent paraphernales;
mais une partie n’en fut pas moins à la disposition de
M . de C h am pétière, qui pou voit les régir d’après la
coutume d’A u v erg n e; et les citoyen et dame Beinaguet
l ’ignorent si p e u , qu’un de leurs principaux moyens ré
sulte d’un acte de 17 9 3 , dans le q u e l, disent-ils, M . de
Cham pétière s’est départi a lo r s , en faveur de sa fem m e,
de ses biens dotaux et paraphernaux.
E n effet, on conçoit encore que si M de. de Cliam pétière a agi personnellement pour le partage des immeubles
de ces successions, au moins M . de Cham pétière n’a pas dû
être étranger au détail du m obilier, à la liquidation surtout
des dettes actives et passives, et qu’il a été à peu près
le maître de régler les choses à sa fantaisie; on conçoit
aussi que les meubles et l’argent qu'il a touché dans ces
�( 6 )
liquidations, n’ont, pas occasionné des débats en resti
tution. Il avoit toujours promis de faire une reconnoissance de ce qu’il avoit touché ; et M de. de Cham pé
tière, plus riche alors qu’à présent, ne mettoit pas un
grand empressement à ce que cet acte fût fait plutôt que
plus tard.
M d0. de Penautier s’est mariée en l ’an 2. Son père
alors, ayant partie de sa fortune sur des maisons d’émi
grés , ayant eu la facile complaisance d’en cautionner
d’autres, étoit très-gené dans ses affaires ; il institua sa
fille h éritière, mais ne se dessaisit de rien, parce qu’elle
faisoit un mariage très-riche; et si alors il ne fut pas
question de reconnoitre à M de. de Cham pétière ce
qui lui étoit d û , il faut en chercher la cause dans cet
état des affaires de son m ari, et dans la loi du 28 août 179 2 ,
qui eût donné une action à. M de. de P en au tier, en
cas de prédécès de sa mère. D ’ailleurs le droit de répé
tition de M d?. de Cham pétière ne péi’iclitoit pas, et
l ’institution ne pouvoit y porter aucune atteinte.
Enfin , M . de Cham pétière ayant eu une légère ma
ladie en l’an 5 , voulut mettre ordre à ses affaires, et se
décida à faire la reconnoissance qu’il retardoit toujours;
il reconnut le 16 germinal , avoir reçu sur les biens
dotaux et autres de sa fem m e, la somme de 41,000 francs
provenans tant du m obilier qu’il avoit retiré de la suc
cession de la dame Baglion veuve de Sccpeaux,que d’autres
successions échues depuis son contrat de mariage.
Cette somme que les sieur et dame Beinaguet semblent
trouver exagérée , étoit certainement bien au-dessous de
çe à quoi M do. de Champétière s’atten d oit, d’après
�( 7 3 l ’idée qu’elle avoit toujours eue de la fortune m obiliaire de
ses parens. Mais enfin le comptable étoit son époux ; et
l ’honneur défendoitde suspecter sa déclaration : ce même
honneur ne le défendoit pas à elle seule; mais quelque
grand que soit ce ju g e, son autorité n’a force de loi que
pour ceux qui veulent la recevoir.
L e 19 prairial an 5 , M . de Cliampétière a fait à
sa fem m e, non pas une donation , comme 011 le d i t , de
l ’usufruit de sa maison de B iom ; mais comme par
son contrat de mariage elle de voit avoir celui de toute
l’habitation
de
la
Batonie ,
qui
eût . em pêché
d e’
vendre la terre , M . de Cham péticre échangea ce
logem ent viduel contre celui beaucoup m oindre de sa
maison de Riom ,p o itr , d it - il, éviter les discussions que
ce logement pourroit occasionner entre sa femme et son
gendi'e. Sacrainte, comme on v o it, n’étoitpasunecliim ère.
M . de Cliampétière a survécu près de [trois ans
ù ces actes : peu de jours avant sa m ort , il a fait un
codicile dans lequel il ne montre nulle envie d’y rien
changer : il est m ort le 1 5 vendém iare an 8 ; et cet h o m m e,
que sa fille et son gendre osent peindre dans un de leurs
écrits comme une m achine désorganisée depuis l’an 5 , et
tendant à la dissolution, écrivoit une lettre d’affaires le
dernier jour de sa vie.
Aussitôt après sa m ort, le citoyen Despérouses, au
jourd’hui maire de Riom , se présenta pour faire apposer
scellés, muni d’une procuration ad h o c , que la ¡pré
voyance des citoyen et dame de Peinauticr avoit dictée au
citoyen Cases notaire à Carcassonne , le 4 fructidor an 7 y
quarante-six jours avant la m ort de monsieur de Chainpé-
le s
tière ! !
�Il ne se trouva sous les scellés que peu de papiers , qui
furent remis lors de l ’in ven taire, à l ’agent du citoyen
de Penautier. L e défunt tenoit ses papiers à D om aise,
dans un appartement appelé le Chartrier ; et si les citoyen
et dame de Penautier avoient alors le projet de contester
la reconnoissance qu’ils attaquent , qu’ils expliquent
pourquoi ils n’ont point appelé M do. de Cham pétière
à cet inventaire principal de Domaise , à celui de Cham
pétière , et à celui de la Batonie ; car là et là encore il
y avoit dès papiers.
M ais c’étoit une recherche que le citoyen Beinaguet
vouloit faire seul ; et Domaise surtout étoit une mine
qu’il vouloit exploiter sans témoins. L e m obilier considé
rable de cette terre fut bientôt vendu à v il p rix ( i ) ; un
parc planté de bois superbes faisoit les délices du m aître,
la hache en fit de l’argent. Ces deux objets produisirent
22?ooo francs. Il vendit ensuite un m oulin 14,000 francs :
c’étoit vin le u rre , pour m ontrer qu’il vouloit liquider
la succession ; mais m algré les n o m b re u se s affiches dont
v4 c citoyen Penautier couvrit les villes et les villages, au
Vfait il ne .voulut plus rien vendre.
M de. de Cham pétière qui voyoit que la succession
alloit se dévorer sans qu’il fut mention d’elle , et que les
coupes d ’a r b r e s étaient un attentat u son hypothèque, fit
des saisies-arrêts. Cet embarras força le citoyen Beinaguet
de s’exp liq u er: il paya
valeur des habits de deuil ; it
paya le prem ier terme du douaire de 1,800 francs ; il
(1) Faut-il dire que le citoyen Beinnguct vendit tous les portraits
de fam ille, et n ’excepta pas même celui de M . de Champétière !
paya
�X9 )
paya en outre une année d’intérêt des 41,000 francs , en
demandant quelque délai pour le capital : il prit pour ces
objets trois quittances séparées; il demanda m ain-levée
des saisies sous la foi de sa promesse qu’étan tp rêtà vendre
Cham pétière , M de. de Cham pétière seroit d élégu ée
la prem ière.
E n effet il vendit Cham pétière au Cen. l’IIé ritie r,
par acte du 17 therm idor an 8 , moyennant 58,960 francs,
dont il mobilisa 8,960 francs , pour en faire son profit
ne supposant pour les im m eubles, que 5o,ooo francs qu’il
voulut bien abandonner aux créanciers. M algré sa
prom esse, et quoique M do. de Cham pétière fût la
prem ière créan cière, précisém ent il afi'ecta de ne pas la
déléguer ; il choisit au contraire le citoyen D ucros dont
la dette n’étoit payable qu’à termes très-éloignés, et trois
créanciers cliirographaires qui n’avoient pas fait d’ins
cription.
. Ce procédé
m alhonnête
offensa
justement
M dc.
de Cham pétière : elle poursuivit contre l’acquéreur la
distribution du p rix de cette vente , devant le tribunal
d ’A m bert.
L e Cen. Beinaguet chercha alors à s’excuser par des
phrases insignifiantes. Son projet plus réel étoitde deman
der du temps ; il en obtint : il proposa un traité qui ne
contenoit que des termes pour la facilité des payemens des
41,000 francs; mais il vouloit trop prolonger ces term es,
et il n’y eut pas de traité.
L a promesse de payer le capital ne s’effectuant p a s,
M do. de Champétière se voyant jouée , reprit les
poursuites d’Àm bert. L e citoyen Beinaguet se fit défendre
B
�(• IO •)
en demandant que les titres fussent déclarés préalablement
exécutoires, et M de. de Ghampétière , qui eût pu s’en
dispenser, pour suivre une procédure simplement hypo
thécaire , voulu t éviter les chicanes en la suspendant T
pour suivre celle qu’on exigeoit.
E lle assigna donc les citoyen et dame de Penautier à
R io m , pour vo ir déclarer ses titres exécutoires ; et-il est
vraim ent honteux de v o ir dans cette procédure , avec
quelle élude scrupuleuse on lu i fit suivre toutes les
dilations et toutes les cascades de la chicane , avant
d’arriver à un jugement.
,kD ’abord réquisitoire de l ’exploit dé dem ande, quoique
la présentation mentionnât qu’on en avoit la copie ; puis
refus du citoyen Beinaguet d’autoriser sa fem m e; après
cela exceptions pour demander la nullité de l ’ex p lo it,
parce que l’original n’étoit pas sur du papier de l’A u d e ;
après cela autres exceptions déclinatoires pour demander
quela cause fût renvoyée devant le tribunal de Carcassonne.
E n fin , après tant d’épreuves de patience , M de. de
Ghampétière obtint un jugement le 2 iloréal an 9.
E lle revint à A in bert où l’ordre fut jugé avec tous les
créanciers, et elle fut avec justice colloquée la prem ière,
par jugement du 26 messidor suivant.
L e s citoyen et dame de Penautier ont interjeté deu x
appels de ces deux jugemens , la veille des trois mois de
la signification de celui d’A m b ert, et cinq mois après la
signification de celui deH iom .
Ils justifient cet appel, en disant que la reconnoissancc
de 41,000 francs est un avantage indirect , en fraude
soit de l’institution fuite à M dc. de Penautier , soit
�( 11 ^
de la loi du 17 nivôse ,• que M de. de Cham pétière
ne prouve pas la réalité du versement des deniers,
qui fait l’objet de cette reconnoissance; et qu’au con
traire ils prouvent, par un acte du 16 janvier 179 3, que
M . de Cham pétière s’étoit départi au profit de sa fem m e,
à com pter dudit jour de la jouissance, de ses biens dotaux
et de ses biens paraphernaux, et de tous droits sur ic e u x ,
promettant lui payer de son chef 3,000 francs par chaque
voyage qu’elle voudroit faire en A n jo u : de quoi ils font
résulter que M . de Cham pétière n’avoit rien retenu desdits
biens dotaux et paraphernaux; qu’ainsi la reconnoissance
a eu une fausse cause, et a été frauduleuse,
•
,
r
M O Y E N S .
L es citoyen et dame de Beinaguct n’ont donc plus
de moyens pour harceler leur créancière par des incidens, puisqu’ils lui perm ettent, pour la prem ière fo is,
de parler en faveur de la maintenue de sa créance, après
l ’avoir obligée tant de fois à ne se défendre que contre
des discussions étrangères ; grâces en soient rendues
aux lois abréviatrices des procès. Il ne s’agit plus que
de savoir si M de. de Cham pétière doit être payée.
Ses eiforts pour le prouver 11e doivent pas être bien
grands ; car les faits rapportés pourroient en quelque
sorte dispenser d’appeler des autorités et des raisonnemens
en faveur d’un titre clair et sincère, reconnu pour tel.
Déjà il n’est: plus douteux, sans doute, que la recon
noissance du 16 germ inal an 5 est incontestable ; i ° . parce
qu’elle est une dette légitim e; 20. parce qu’il n’y pas do
B 2
�( 1 2 ')
prohibition qui s’ opposât à sa validité ; 30. parce que
les appelans ne sont pas parties capables de la contester;
4 °. parce qu’elle a été reconnue valable.
§.
1er.
. L a légitim ité se prouve par le contrat de mariage.
I l y est dit que les parties se régiront par la coutume
d’A u vergn e : o r, cette coutume veut que tous les biens
qu’a la femme au temps du m ariage, soient réputés do
taux , s’il n’y a clause contraire.
Il y est aussi de principe qu’une institution portée par
le contrat de mariage est de droit dotale, s’il n’y a clause
con traire, par la raison que la fem m e, quoique n’ayant
pas les biens institués lors de son m ariage, a néanmoins
une espérance acquise sur iceux.
. Il y est encore de principe que quand le mari jouit
des biens pai-aphernaux de sa fem m e, les fruits lui ap
partiennent , mais qu’ils peuvent convenir qu’il lui en
rendra compte.
Il y est de môme en principe que tous les actes que
fait la femme avec son in a r i, ne peuvent diminuer sa
dot ni ses biens paraph ern aux, et que dès-lors ils sont
nuls.
E n fin , il est de principe du droit com m un, que le
m ari est maître de la dot de sa fem m e, qu’il peut en
çxei’cer en son nom les actions m obiiiaires, et qu’il est
le procureur naturel pour exercer les actions inunobilia irc s, sous le nom de l’un et de l’autre. Il est aussi
de prin cipe, dérivant de cette qualité et d e là justice,
�C *3)
que le mari doit un compte negotiorm ngeslorum ; qu’ainsi
la femme pourroit l’actionner en reddition de compte de
ses paraphernaux pendant le m ariage, et actionner ses
héritiers après la dissolution du m ariage, en reddition
de compte de tous les objets dotaux.
■ Cela p o sé, si la reconnoissance de l’an 5 n’existoit pas,
ou si M d8. de Cham pétière vouloit la contester, il
est d’abord certain qu’on ne pourroit la lui opposer.
~ Q u’en seroit-il alors ? c’est qu’il est tout aussi certain
que M de. de Penautier d evroit alors un compte negotiorurn gestorum du ch ef de son père : ce compte se,
com poserait, i° . de tous les objets que M . de Cham pétière
a recueillis ou dû recueillir de la succession de M . de Sce
peaux, suivant l’inventaire ou la preuve par com m une
renom m ée, ensemble de toutes les dettes ai'réragées avant
le mariage ayant form é des cap itau x, et de môme des
droits seigneuriaux paternels , réservés par M do. de
Baglion ; 2°. de tous les objets qu’il a aussi recueillis ou du
recueillir de la succession de ladite dame de B aglion,
veuve de Scepaux , lors de son décès en 1773 ; de même
suivant l’inventaire qu’il a dû en faii-e dresser, sinon sui
vant la preuve par commune renom m ée, parce que cette
succession est aussi dotale, y ayant une institution ou pro
messe d’égalité, ce qui est la même chose relativem ent
aux cohéritiers; 3^. de tous les capitaux des biens para
phernaux, touchés par M . de Cham pétière, ainsi qu’il
résulte soit de ladite reconnoissance, soit de l’aveu fait
par les adversaires, qu’un acte du 16 janvier 1793 con
tient la même mention de p a r a p h e r n a u x administrés jus
qu’a lo r s ;^ . enfin ; des revenus même de ces paraphernaux,
�( 14 )
puisqu’il résulte de ces deux actes que le mari a eu
intention d’en rendre com pte, et que tel est le vœ u de
la coutume d’A u vergn e.
Si donc M de. de Cham pétière a une action en
com pte in d u bitable, et si ce compte a été rendu par
son m a r i, certainement tout est terminé dès qu’elle l’a
dopte. E lle a mis dans les mains de son m a r i, en 177 0 ,
une partie de sa fortune à ven ir à titre de d o t; elle
doit la i'ctrouver intacte api'ès la dissolution du ma
riage ; car il est de l’essence de la dot qu’elle ne soit pas
dim inuée.
L ’acte contesté est entre les parties une transaction
sur procès; car la'fem m e avoit une action et le mari étoit
comptable. La reconnoissance est un apurement de com pte,
et certes, rien n’est plus indélébile contre les héritiers
du comptable , dès que la m atière du compte est connue.
• Ces moyens sont-ils détruits par l’acte sous seing-privé
du 16 janvier 1 7 9 3 ; mais qu’est-cc donc que cet acte?
une quittance de la d o t, disent les citoyen et dame
de Beinaguet. M ais est-il une hérésie plus grande que
de vouloir qu’une femme mariée puisse donner une dé
charge de la dot h son m ari, pendant le mariage.
M ais comment cet acte donncroit-il quittance de la
d o t? Il n’y a délaissement que de la jouissance ; et cette
expression seule est exclusive des capitaux. L e départe
ment de tous droits n’est que pour l'avenir; ainsi le passe
resteroit à régler. L ’induction tirée de la promesse du
m ari, de payer 3,000 fr. de son c h e f, n’est rien moins
qu’une preuve de tout abandon; au contraire, le mot
lui-même prouve qu’il distinguoit très-bien qu’il avoit
�( i5 )
de l’argent à sa femme et à l u i , dès qu’il devoit donner
les 3,000 fr. de son chef.
Q u ’étoit donc cet abandon de jouissance en 1 7 9 3 ,
quand déjà la guerre de la V endée occupoit la plupart
des possessions de M de. de Cham pétière.
A p rès la pacification, il falloit réparer pour jouir et
semer pour recueillir. M ais bientôt M de. de Cliampétière, heureuse par la révolution comme par les p ro
cédés des siens, a été mise sur la liste des ém igrés, à
cent lieues du dom icile qu’elle n’a jamais quitté. Si elle
a évité l’ostracism e, elle n’a pas évité un séquestre gé
néral , qui a duré jusqu’au décès de son m ari : ain si,
voilà le grand effet qu’auroit eu l’acte du 16 ja n v ie r,
s’il eût été réel et suivi d’exécution.
A -t-o n bien p u , au reste, argumenter sérieusement
d’un acte de 1793 , m arqué au coin de la terreur et des
séquestres, a cte ‘ de précaution sans doute in u tile, mais
to u jo u r s
nul et très-nul pour opposer à une femme m ariée,
à quelque époque qu’il ait été fait.
R ien donc ne s’oppose à la légitim ité de la recon
noissance du 16 p r a i r i a l : mais les citoyen et dame de
Penautier'opposent à M do. de Cham pétière des moyens
de
p r o h ib it io n
; il sera aisé de les écarter.
■ §
I
I.
Q u’a de commun l’acte du 16 prairial, avec les cou
tumes de Bourgogne , de Nivernais et de N orm andie,
qui prohibent les avantages entre ép o u x; et de p lu s,
toute espèce de contrats par lesquels ils pourroient s’ayan-
�( i6 )
tager. Ces coutumes appellent la suspicion et la nécessité
de prouver que tout acte récognitif est sincère; les auteurs
qui les com m entent, n’ont donc pas d û enseigner un
respect aveugle pour la con ven tion , et cependant encore ils
citent plusieurs cas où la validité de l ’acte se prouve par les
circonstances, sans recourir à des preuves ultérieures.
L a coutume d’A uvergne qui régit les parties, met la
femme seule dans l’interdiction de d o n n er, et ne met
aucunes bornes à la générosité du mari. A la v é r ité , on
oppose une institution ; mais si la maintenue d’ un tel acte
fait suspecter tous ceux qu’un pèreferoit ensuite en faveur
de ses autres enfans, c’est qu’il est dans la nature qu’il les
aime égalem ent; mais il n’en est pas de môme des actes
q u ’il passeroit avec sa femme ou des étrangers , parce
qu’il n’est pas dans la nature qu’il les préfère à ses enfans.
Aussi cette coutume ne défend à celui qui a fait un
h éritier que de faire ¡wz autre h éritier,ce qui est plus i-elatif
aux cohéritiers entre eux , qu’aux cohéritiers vis-à-vis une
tie r ce personne. Aussi D um oulin a-t-il expliqué, que si l’ins
tituant ne pouvoit faire un autre h é ritie r, il n’étoitpas
em pêché de donner ou léguer des choses particulières, et
la jurisprudence avoit fixé cette faculté au quart : ce taux
nesignifie rien à la cause, et il s’agit de conclure seulement
qu’en coutume d’A u v e rg n e , il n’y a pas de prohibition.
O n oppose encore la loi du 17 nivôse, qui veu t, non
pas qu’un époux ne puisse avantager sa femme ; mais que
1rs avantages qu’il pourroit lui faire soient convertis en
usufruit de moitié quand il y a des enfans. L a loi du 17
nivôse, n’est donc pas prohibitive des avantages; mais
elle les réduit, et ce n’est encore pas l’objet de la cause.
�( *7 )
Si M d0. de Cham pétière n’est pas une personne pro
h ib ée , il n’y a pus de suspicion proposable contre l ’acte
du 1 6 p ra iria l, au moins de la part de l’héritière de son
m ari, comme elle l’établira dans le paragraphe suivant.
Quelque portion que M . de Cham pétière ait pu donner,
elle suffit pour lui avoir donné droit de reconn oître,
dans le cas même où par un compte exact et apuré
de sa gestion com ptable, il seroit prouvé qu’il a reconnu
plus qu’il n’a reçu. Ce surplus devenant une libéralité
seroit encore v a la b le, parce que M . de Cham pétière a
pu donner.
Car il est de principe que les reconnoissances du mari
valent comme donation : Confessio de dote recepta, fa c ta
p er m a ritu m , constante rnatrim onio, valet saltem in virri
d o n a tio n is, dit R an cliin , et la loi 3 2 , au ff. de donat.
int. vir. et ux. avoit dit de même. L a loi 2. au cod. de dota
caut.a, avo itd it aussi qu’une telle reconnoissance ne pouv o it être contestée par les héritiers du mari. Cujas sur
ces deux lo is, D anty, page 1 3 9 , enseignent la m êm e
doctrine. Enfin la loi du 17 nivôse opposée à M do. de
Cham pétière, n’est qu’une confirmation de ces principes;
car elle ne veut pas qu’on annulle cc qui excéderoit
la quotité disponible, maisseulemont qu’on le réduise.
Quel a donc été le but des citoyen et dame de Penqutic r, en opposant la loi du 17 nivôse? est-ce qu’ils voudroient d’abord rendre compte de la d o t, et ensuite faire
réduire lo surplus ù un usufruit de m oitié? Certaine
m ent M Jo. de Cham pétière no pourrait qu’y gagner, si
les choses étoient entières. Mais se ro it-ce sérieusement
<juc le citoyen de Penaulier proposerait un partage %
C
�Ci8)
quand il a fuit les inventaires in cognito, vendu le m o
bilier le plus p récieu x, dém em bré et dégradé d’une ma
nière pitoyable la principale te r r e , et vendu déjà pour
e n viro n 80,000francs d ’im m eubles? Peut-être bien étoit-il
épouvanté alors d’une inscription ridicule de cent m ille
écus sur la succession, et dont aujourd’hui il y a main
levée. M de. de Chow pctièrc n'entre pas dans ces
considérations: on a tout gouverné, déplacé et dénaturé
sans lui rien com m uniquer ; donc on ne l’a jamais re
gardée comme ayant droit à un partage. E n vain lui
m ontrera-t-on que les dettes étrangèi’es n’absorbent pas
plus d’un tiers de la succession : elle en est très-convain
cue ; mais elle n ’a que faire de se jeter dans l’embarras
d’une liquidation et d’un partage dont l’idée seule est pire
pour elle, que celle de perdre ce qu’on lui dispute si
obstinément.
N e sero it-ce pas en avoir assez dit pour engager les
appelans à conclure à ce partage de m oitié en usuiruit,
par cela seul qu’il épouvante M de. de Champétière.
M ais ils ont dû rem arquer qu’elle n’en a parlé que p o u r
abonder dans leur sens, et y opposer une fin de non*ecevoir.
L a loi du 17 nivôse , pas plus qu’une institution, ne'
jxm vent p o r t e r atteinte à une dette réelle; car bona neque
d icu n ta r, n i s i dcducio œre alteno. M . de Cham pétière
en instituant sa fille, n’a entendu lui promettre que les
biens dont il m o u r r o i t saisi. Déjà il étoit comptable envers
sa fem m e, d’une dot. qui n’étoit qu’éventuelle lors de soncontrat de mariage. L a famille de Penauticr a dû savoir
que ce compte 11’étoit pas rendu, ou s’en inform er : ainsi elle
�t 19 ^
11’a <Ju com pter que sur les biens qui resteraient après ce
compte et après les dettes. M . de Cham pétière n’a pas
fait une donation : il a gardé la liberté de traiter et v en d re,
même celle de léguer jusqu’à concurrence d’un q u art;
il n’a donc fait dans la reconnoissance contestée qu’un
acte libre et valable; car q u i potest dare potest confiteri\
ainsi les moyens de prohibition opposés par les appelons
sont sans application.
§. I I I .
L ’exception non numerata; p ecu n iœ , admise p a rle s
lois rom aines, n’a pas lieu en France. N on seulementles
quittances de la dot constituée en espèces sont valables,
même contre les créanciers, lorsqu’elles portent réelle
numération ; mais encore les quittances de la dot supplé
mentaire , ou autrement advenue pendant la durée du
m a r i a g e , sont valables et irrévocables contre le m ari et
ses héritiers.
Toutes les autorités qu’on a citées ou pu citer pour
la cause des citoyen et dame Beinaguet, son t, ou en
faveur des créanciers pour lesquels les lois veillent sin
gulièrem ent dans cette matière , ou en faveur d’en fans
d ’un prem ier lit; et encore ces autorités supposent-elles,
en question préalable, une interdiction de donner,
P a p o n , C oqu ille, R ic a r d , Denizart et Lacom be se
réunissent à dire qu’on ne peut faire indirectement ce
q u’on no peut pas faire directement, et qu’ainsi si uno
i’cconnoissancc ou confession de devoir est faite i\ uno
C 3
�( âa )
personne p ro h ib é e , il faut enquérir et prouver la vérité
du fait.
Beaucoup d’autres auteurs enseignent les mêmes prin
cipes ; mais plus explicatifs, ils ajoutent, qu’en cas de
suspicion , les créanciers du m ari pourront déballi’e la
reconnoissance ; (Basset, 1. 4 , tit. 5 .) que celte reconnoissance est bonne contre le m a r i, mais que cela îrem pêcheroit pas les créanciers de faire preuve qu’elle est
frauduleuse à leur égard; (L eg ran d , sur T roies, art. 24.)
que la reconnoissance ne peut préjudicier aux créanciers,
et ne peut nuire qu’a celui qui l’a faite ; que la J'émule
n e s t obligée de rien prouver, et que la suspicion de
l ’acte n’est q ü e n fa v e u r des créanciers du m ari; (F err iè r e , sur Paris, art. 281. )
Les auteurs cités par les citoyen et dame Bçinaguet,
11e disent rien de contraire à cela. Papon , en exem ple de
ce qu’il a d it, cite un arrêt rendu pour Lucas c o n t r e
la veuve A m io t : mais Lucas étoit tin a c q u é r e u r pour
suivi ; mais la q u itta n ce donnée à la femme étoit sans
réelle num ération. Coquille n’ajoute rien à la coutume
qu’il com m ente, puisqu’elle prohib e, entre gens mariés,
toute espèce de contrats, par lesquelles ils puissent s’avania g e r, ce qui n ’a pas lieu en A u vergne. Ricard cite en
exem ple d’avantage indirect, celui q u i, après avoir donné
par testament tout ce que la loi lui permet de d on ner,
ajoute qu’il se reconnoît débiteur iVautres sommes. Sur
ce la , Bergier r e m a r q u e , en note, qu’il faut faire une
distinction entre les actes de dernière volonté, et les actes
entre vifs. D enizart et Lacom be ne font que citer ces
premiers auteurs.
�( 21 }
A u cun e de ces autorités n’est donc contraire à M Jo.
de Ghampétièrc ; elles s’accordent toutes à favoriser les
créanciers, et cela est légal; mais les héritiers du mari
le représentent, et il n’est pas difficile d’établir que la
laveur due aux créanciers ne les regarde pas.
M énochius a dit : doits recep tœ confessio f a c t a in
Jra udem creditonnn^prœ judicatm arito e t h æ r e b i b u s
e j u s . Fachinée dit qu’il n’y a plus de soupçon de fraude,
quand il n’y a pas de créanciers. Gatelan et Henrys
disent que la confession de d e v o ir , faite par un m ori
bond , ne nuit qu’à l’h éritier; D u n o d , Despeisses et
l ’auteur du traité de la d o t, enseignent de même que
les reconnoissances dotales authentiques, ou sous seingpx*ivé, ne peuvent pas être combattues par les héritiers
du mai’i. ( M cn och. 1. 3. prœs. 12. ; F a ch ù z. contr. ju r.
I. 8, c/iap. 87 ,• Cateïcm , /. 4 , c/iap. 20 ; H enrys , t.
Jer. ; p, 5^3, anc. éd. \ D u n o d , prœ scr., p. 180 ; D esp,
t. I , p. 4 7 4 ; tr. de la dot, t. I I , p. 201.
Cette doctrine est confirmée par une loi expresse.
L ’ordonnance de 1629 P ° rtc , art. 130, « toute quittance
s; de dot sera passée pardevant notaires, à peine de n u llité,
¡1 p o u r le regard des créanciers
seulem ent.
»
Elle est confirmée par un acte de notoriété du G hàtelet,
qui rapporte que l’exception non n u m era tœ p c c w ii œ
n ’est point connue dans la coutume de P aris; qu’ainsi,
sans réelle num ération, lu reconnoissance du inari est
suffisante pour le charger envers sa femme de ce qu’il a
recon n u , et pour l’o b lig er, lu i cl ses h é r itie r s , à en
faire la restitution. ( A c t e s de notor. i 5 m a i i 6 8 5 .)
Les citoyen et dame de Penautier prétendent que
�( 22 )
M de. de Cham pétière doit prouver la réalité du ver
sement des 41,000 francs, si elle veut les obtenir. C ’est
une erreur contre le droit et contre les circonstances.
Contre le d ro it; car pour cette preuve il faut distin
guer toujours entre les créanciers et les h éritiers, ce
que les nppelans confondent toujours. Les auteurs font
encore d’autres distinctions ; si la dot n’est pas dite reçue
de la femme elle-même , si elle est reçue de quel qu’autre,
il est certain qu’elle n’a rien à prouver. Cian ab alio
quàm ¿1 m u liere, v ir ja t e t u r se dotem accepisse, nulla
est suspicio taeïtee donationis ac proindè dos ver à num erata prœ sum itur. ( F a chin . ibîd. ch. 8 5 . ) E t si la
femme e lle -m ê m e
avoit donné des objets m o biliers,
qui ne parussent pas d’une valeur exagérée, la difficulté
de le prouver fait encore qu’elle n’y est pas obligée.
M u lie r quœ dédit augmentum dotis in rebus nw bilibus , non potest assurnere in se onus probandi reni
se m odicam dedà'se. ( M enoch. ibid.)
Basnage, sur l’article 41 de la coutume de N orm andie,
qui défend aux mariés de se faire ni donations, ni con
fe s s io n s tendantes à avantage direct ou indirect, n’en com
mande pas moins le respect dû aux reconnoissances,
quand la femme n’a pas payé elle-m êm e, et dit qu’il
seroit injuste que les femmes fussent obligées de le v é
r ifie r , et qu’on les dispense de faire ces preuves. Basnage
cite deux arrêts de 1664 et 1 6 7 1, qui ont validé des re
connoissances attaquées par les héritiers du mari. 11 en
cite aussi de c o n t r a ir e s ; mais sous des circonstances par
ticulières : dans l’u n , la femme s’étoit contentée de moitié ;
sans ce la , dit B a s n a g e , les héritiers du mari n’auroient
�( 23 )
pas été rccevables f\ contester la confession du m ari , et
la quittance qu’il avoit donnée , après tant d’arrêts qui
ont jugé de la sorte.
M ais dans les circonstances de la cause, c’est vraim ent
une abstention de raisonnem ent, que de vou loir que
M Je. de Cham pétière rende compte à l’héritière de
son m ari de la gestion que son mari a dit avoir eue,
et qu’ il a dix avoir en effet de sa dot éventuelle et de
diverses successions qui lui sont échues pendant son ma
riage , pour prouver que réellem ent c’est 41,000 francs
qu’il a touchés. N ’est-ce pas d ir e , en d’autres term es,
que c’est l’oyant compte qui doit fournir les pièces jus
tificatives à son com ptable; et par conséquent n’est-ce pas
résister aux principes les plus habituels.
« Quand pendant le mariage une femme recueille une
«succession, n’e s t-c e pas au m ari, maître des actions
« mobiliaires de sa fem m e, h faire toutes les diligences
« pour recouvrer le m obilier ? N ’est-ce pas à lui à com pter
« avec les fermiers et débiteurs, et à rapporter les pièces
« nécessaires pour fixer le m obilier échu à sa femme
« et dont la reprise lui appartient ? »
'
Ce que disoit Cocliin dans son 12 7e plaid oyer, en ton
nant contre ceux qui nicroient des principes aussi clairs,
prouve que les citoyen et dame Beinaguet ne sont pas les
premiers héritiers q u i, aveugles dans leurs prétentions,
demandent des comptes qu’ils doivent eux-mêmes; mais
prouve en même temps que Cocliin trouvoit la proposi
tion absurde , au point de 11’ajouler aucune autorité au
raisonnement.
�( 24)
M de. de Cham pétière n’a donc rien h p ro u v er, et
Yundè habu it est suffisamment éclairci par son contrat
de m ariage, et la rccounoissance elle-même.
Si elle plaidoit contre des créanciers, elle auroit une
action en recours contre sa fille, pour lui fournir les
pièces nécessaires ù la preuve de Vtmdè habuit. Si donc
elle plaide contre sn fille elle-m êm e, sa fille est garante,
à cet é g a rd , de sn propre demande.
s.
IV .
Jusqu’ici M do. de Cliam pétière a défendu sa cause,
comme si tous les moyens des appelans étoient propo
sâmes , parce qu’il lui coutoit peu de les détruire : mais
elle eût pu s’en dispenser ; car la reconnoissance des
41,000 francs est ap p ro u vée, et dès-lors il n’y a plus de
procès.
Cette approbation résulte de ce que M de. de Cham péticrc a reçu une année d’intérêts de celte somme , et
en a donné quittance. A la vérité , cette quittance n’a
été donnée que sous seing-privé ; mais il ne lui vint pas
m êm e en la pensée que ce fait put être désavoué, sans
quoi elle l’eût exigée pardevant notaires. Les citoyen et
dame de Penautier ne disent pas un mot de cette quit
tance dans leurs écrits ; mais pour leur éviter le poids
d’un mensonge , au cas qu’ils fussent capables de s’y dé
cider , M d°. de Cliam pétière leur rappello que le
payement de cette année d’intérêts a été fait eri présenco
de personnes dignes de foi j qu’ainsi elle pourroit
offrir
�( *5 )
offrir la p reu ve de ce payem ent, et sans doute cette preuve
seroit admissible; car c’est un fait et nullem ent une con
vention.
Il est à croire que les citoyen et dame de Penautier
n’éleveront pas une question de droit sur les conséquences
de ce payement ; car il est de p rin cip e, que « les débiteurs
« qui acquittent volontairem ent des dettes, que môme ils
« auroient pu faire annuller en principe , mais que l’é« quité naturelle rendoit légitimes , ne peuvent revenir
« contre cette approbation. » D o m a t , liv. 2 ,
7 , sect. 1 \
D e n iz a r t , v° payement.
M ais ce sont là de ces vérités élémentaires qu’on ne cher
che nulle p art, parce que le bon sens les rend fam ilières,
et qu’elles ne peuvent être autrement. U ne année d’in
térêts a été payée particulièrem ent ; donc la dette a élô
connue ; donc l’acte a été approuvé; et cette approbation
est d’autant plus irrévocable , que l’acte étant contesté,
l’acquiescement est une transaction de lite movendâ.
Il est impossible que les citoyen et dame de Penautier
contestent sérieusement la reconnoissance du 16 prairial j
ils n’ont de p r o je t, et ils le font dire à l ’oreille de tout
le m o n d e, que de traîner en longueur pour sauver le
capital qu’ils font semblant de croire devoir être mis en
viager : mais quel est le but de cette calom n ie, q u i , si
elle est réelle , auroit au moins la franchise de 11e pas
dissimuler que le trépas futur de madame de Cham pétière donne lieu à des calculs anticipés , comme celui de
son mari ? Si cette calomnie a pour prétexte les pertes
considérables que M de. de Cham pélière a faites pendant
la ré v o lu tio n , et les privations de tout genre qu’elle
D
�( * )
est obligée de s’imposer depuis lon g-tem p s, l ’invention
seroit adroite ; mais ceux qui raisonnent sans m alignité
se diront aussi, que M de. de Cham pétière a des pro
priétés qui ne la laisseroient pas dans le besoin d’attendre
l ’issue d’un procès ; elle ne doit compte de sa conduite
qu’à elle-m ême et à l’avenir qui la jugera. M ais comme
elle ne veut pas faire sa cour à l’opinion de ceux qui la
jugeraient comme son gendre , elle déclare que si elle a
conserve jusqu’ ici ses biens patrim oniaux en contractant
des dettes , m algré les procédés dont elle a ù se plaindre7V
elle y a tenu plus par honneur pour ses ancêtres , que
par rcconnoissance et orgueil pour sa postérité.
Signé, S c e p e a u x , veuve D
a u r e l l e d e C h a m p é tiè r e ,
L . F . D E L A P C I U E R , hom m e do lo i,
F A Y E , avoué.
T Æ
C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a lu le mémoire ci-d e ssu s,
la consultationdcs cit. Boirot et D artis, et les pièces mentionnées *
E stim k que M 1*0. de C ham pétière ne doit pas craindre le snccca
de l’appel interjeté contre elle des jugem ens de R iom et d ’A m b e r t,
et que ces jugem ens se sont conlorinés aux principes, en validant
la rcconnoissance du iG prairial an 5 .
L ’origine de la dette se trouve dans le contrat de mariage d«
1770. L e mobilier de M dc. <1° Baglion éloit un objet dolal. A in si
le mari en a été c o m p t a b l e , et a dù le rcconnoltre , pour éviter
une action de mandat contre la succession. L ’acte du iG prairial
£5t fait près (le trois aus avant le dcccs de i\I. de Champétière y
�il n’est point d’une somme disproportionnée à la fortune des parties;
c ’est l'acte libre, obligé et juste d’un père de fam ille qui descend
dans sa conscience pour fixer ce qu’il a reçu et éviter des procès à
sa succession. Cet acte est donc infiniment respectable, surtout
pour l’héritière unique du défunt. Si sa mere fû t décédée la pre
m ière, elle auroit eu une action contre M . de Cham pétière, en
restitution de ce qu’il a dû recevoir, suivant les inventaires qu’il
a dû fa ire, ou la preuve par commune renommée. M de. de C hampétière ayant le même d r o it, n ’a pu l’exercer qu’en viduité contre
l ’héritière de son mari. M de. de Penautier ne peut donc demander
que sa mère soit tenue d’établir le versement réel de la somme
totale des 4 1 ooo francs, puisque cette preuve dépend d’un compte
qu’elle devroit elle-même. L ’unde habuit est suffisamment prouvé
par le contrat de mariage et par le fait avoué de la mort de M de. de '
Baglion. L ’acte opposé de 1793 , sérieux ou non , n ’est pas un
m oyen, parce qu’une femme ne peut valablement donner décharge
de sa dot à son m a ri, pendant la durée du mariage. L ’institution
faite à M de. de Penautier, et la loi du 17 nivôse, ne sont de même
pas des obstacles à la validité de la reconnoissance qui fait l’objet
de la contestation ; car elles n ’auroient l’effet que de la réduire,
si elle étoit une libéralité, mais elles ne peuvent porter atteinte à
un titre sincère et légitime.
D
élibéré
à R io m , le 14 prairial an 10.
G RAN C H IER, P A G E S , G A S C H ON, D E V A L ,
L . F. D E L A P C H I E R , P R É V O S T , P A G E S M EIM A C, COUHERT-DUVERNET.
A R I O M , de l'imprimerie de L a n d R i o t , seul imprimeur du
T rib u n al d ’appel.— A u 10.
�
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Title
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Scepeaux, Marie-Louise-Joseph de. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Faye
Granchier
Pagès
Gaschon
Deval
Pévost
Pagès-Meymac
Couhert-Duvernet
Subject
The topic of the resource
successions
partage
Description
An account of the resource
Mémoire pour Marie-Louise-Joseph de Scepeaux, veuve de Blaise Daurelle de Champétière, intimée Contre Louise-Magdelaine Daurelle de Champétière, sa fille, et Jacques Beinaguet de Penautier, son mari, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
An 7-An 10
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0313
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0206
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Text
M
É
M
O
I
R
E
P O U R
A n t o i n e D U P I C , avoué à Am bert, accusé de com
plicité de faux ;
C O N T R E
Le
c o m m is sa ir e
du
g o u v er n em en t
T R IB U N A L
, -poursuivant,
C R IM IN EL
SPÉCIAL
et le citoyen B A R R I È R E , plaintif
du Puy-de-Dôme.
H :!U n avoué , en prison pour une accusation de faux , appelle
nécessairement sur lui l’attention publique. Son état est tout entier
dans le domaine de l’opinion, et elle exige qu'avant de se justi
fier devant ses juges, il donne publiquement le tableau de sa con
duite, quand il ne craint pas d’en rendre compte.
L e cit. D upic est accusé de complicité d’un fa u x , com m is,
dit-on, par un huissier, en supprimant les copies d’une notifica
tion de transcription à des créanciers inscrits.
L a participation du cit. Dupic consiste dans la rédaction du
projet de cette notification , faite par lui sur papier lib re, et
remise , non pas à l’huissier , mais aux parties, q u i, à ce qu’il
paroît, se sont adressées à plusieurs huissiers pour les corrompre.
L e cit. Dupic ignore si cette corruption a eu son e ffe t , et
cette incertitude lui a fait rechercher le corps de délit dans la
procédure, dont copie vient de lui être remise. M ais, au lieu d’un
original d’exploit sans copies, il y a vu une copie sans original.
Barthélemi Roussel, a-t-il dit, a donc f a i t usage de cet exploit
contre ses créanciers, et ceux-ci ont été privés de la faculté d’en
chérir. Mais n o n , Roussel interrogé ignore lui-même s’il y en a
A
�( a )
un; ot tout ce qu’on voit de certain dans la procédure, c’est que
le cit. Barrière a voulu deviner qu’il y avoit un exploit faux ;
qu’il n ’a pas même cherché à savoir si on le lui opposeroit pour
lui faire perdre scs créances , et qu’il a mieux aimé faire une
dénonciation, soi-disant civique, sous le prétexte ridicule d’un
tort possible et imaginaire.
Quoi qu’il en soit, le cit. Dupic est accusé , et dans les fers:
avec un état et une fam ille, il ne peut, sans doute, supporter que
très-impatiemment d’être compromis dans une querelle étrangère.
D ’autres considérations peut-être l’affligeroient plus encore; mais
l’expérience du malheur lui a appris qu'il faut toujours s’attendre
au pire, et que dans les événemens majeurs on doit moins compter
sur les hommes que sur la justice, le temps ou le hasard. Il lais
sera donc les réflexions et les plaintes, pour ne s’occuper que des
causes de l’accusation dont il est victime.
FA IT S.
L e cit. Dupic avoit été chargé, comme avoué, de plusieurs
affaires pour le cit. D um aret, de Lyon , qui a des propriétés à
Saint-Germ ain-l’Herm.
Il a eu aussi la confiance de Barlhelemi Roussel, cultivateur,
passant pour avoir une très-grande aisance , et auquel on ne
donnoit pas une mauvaise réputation.
Dumaret et Roussel eurent un procès pour arrérages de ferme,
pendant le papier monnoie. L e tribunal d’appel ordonna que
D um aret, demandeur, seroit interrogé sur faits et articles pour
des reçus qu’ils n’avouoit pas; Roussel ne consigna pas les frais
du voyage; l'interrogatoire n ’eut pas lieu, et il fut condamné.
Quel que fût le sentiment qui l’agilàt après celle condamna
tion , il alla demander au cit. Dupic s’il pouvoil vendre. La
réponse fut affirmative et devoit l’êlre ; il ne s’agissoil ni de la
quantité de biens à vendre, ni du prix; tout cela ne pouvoit être
que l’affaire du consultant.
�C 3 )
Roussel conduisit ensuite son'acquéreur, simulé ou non, chez le
cit. D upic, croyant qu'il pouvoit recevoir cette vente. Celui-ci les
mena chez le cil. C lavel, notaire, qu’il trouva dans la rue, et
auquel il dit qu’il s’agissoit de passer un acte : il les quitta sans
autre explication (i).
Vraisemblablement le cit. Clavel ne voulut pas recevoir cet acte;
si c’étoit faute de certificateurs, Roussel n’en dit rien, car Dupic
le connoissoit assez pour offrir de Pêtre. Mais il vint lui dire que
Clavel avoit pensé que Roussel ayant été protuteur ne pouvoit
pas vendre solidement, et qu’il le prioit de les mener à un autre
notaire. Alors on alla chez le cit. Ponchon.
L e premier mot de Ponchon fut de demander des certificatcurs ; pour cette fo is, Dupic étoit présent, et offrit de certifier
l ’identité de Roussel. Que ceux qui cherchent des raisons à tout
veuillent bien expliquer pourquoi ils refuseroient de certifier la
simple identité de ceux qu’ils connoissent.
Mais le cit. Ponchon rappela au cit. Dupic qu’il fnlloit deux
certificateurs: Dupic auroit pu sans doute s’en adjoindre un autre;
mais c’étoit bien assez de se croire obligé à ne pas refuser luim êm e; il fut bien aise que l’acte s’ajournàt.
Au départ de Roussel , le cit. Ponchon donna à quelqu’un la
commission de lui faire venir un nommé Girodon, de M arsac,
son débiteur. Roussel ayant ouï ce nom , dit au cit. Ponchon
qu’il connoissoit aussi ce Girodon, qui ne refuseroit pas d’être
son cerlificateur (2).
Peu de jours après, on retourna chez le cit. Ponchon: le cit.
Dupic se croyoit encore obligé d’être un des certificateurs; il n*y
voyoit aucun m otif réel de répugnance; l’acte fut projeté et dicté
par le notaire. D upic, absent pendant ce travail, attendoil qu’on
vint le chercher pour signer.
Lorsqu’il re v in t, la dictée en étoit aux certificateurs ; il en
(1) D é p o s itio n du cit. C lavel, ae. té m oin .
(%) péposition du cit. Ponchon.
A 2
�C 4 )
entendît nommer d eu x, et dès-lors il ne vit plus de nécessité à
être là , en troisième. Pour ne pas fatiguer Roussel, il appela le no
taire en particulier, et lui dit que sa signature devenoit inutile(i).
L e même jour, Roussel dit au cit. Dupic qu’il vouloit aller
à Lyon payer M . Dumaret , qui l’avoit tenu quitte pour 800 fr. ;
tandis que Barrière, son agent d’a ffa ire , qui se disoit cessionnaire de la créance, vouloit 6,000 f. L e cit. Dupic écrivit; et
il étoit si peu de moitié dans un projet de fraude, que dans celte
lettre il avertissoit Dumaret que Roussel venoit de prendre des
arrangemens. 11 croyoit si peu que Roussel eût projet de réduire
tous ses créanciers à 3oo f . , que dupe, lui-même, il s’offroit pour
caution de 800 f. et 20 quartons de blé au cit. Dumaret (2).
* T ou t sembloit terminé pour le cit. Dupic ; mais quand l’acte
fut enregistré et expédié, l’acquéreur vint le lui porter, pour le
prier de le retirer de la transcription, avec les extraits d’inscription.
Malgré la diligence recommandée par cet acquéreur, le cit. Dupic
avoit perdu cette affaire de vue; mais Couvert, plus pressé, vint
lui-même à Àmbert , et le cit. Dupic l’accompagna pour retirer
l ’acte et les extraits du bureau des hypothèques.
Il fut question alors de la notification de ces extraits aux créan
ciers; 011 chargea Dupic de la faire: il en fit le projet où il tacha
de renfermer tout ce qu’exige la loi pour les formes ; et comme,
par un hasard qui se trouve heureux, il n’avoit pas de scribe pour
en faire transcrire l’original et les copies sur papier timbré, il se
contenta d’écrire en marge qu’il lalloit écrire 1 exploit tel qu’il étoit,
sans rien omettre , et il le remit aux parités elles-mêmes (5), qui
l’emportèrent pour en consulter, à ce quelles dirent, la validité,
à Saint-Germain.
C ’est ici où il faut dire , puisque la position du cit. Dupic l’y
(1) Méine déposition.
(a-! Lettre écrite le 5 fructidor an 1 0 , au cit. Riboulct , cote 4 ^.
(3) D é c la r a t io n de R o q u e à tous les avoués , 1 2 '. 1 5e. 16 '. 20e. 2 1 e. 2 3e.
33 e. 34e. t é m o i n , cote 3q.
�( 5 )
oblige, que peu après la remise de ce projet d’exploit , Roussel
et Couvert ayant sans doute médité leur suppression de copies,
et peut-être ayant déjà tenté de l'exécuter, revinrent chez le cit.
Dupic lui dire, que, pour empêcher Roussel d'être victime de ses
créanciers, un homme très-capable leur avoit conseillé de suppri
m er les copies de la notification dont il avoit fait le projet, et
ils lui proposèrent, s’il vouloit s’en charger, de lui payer ce
qu’il voudroit, offres qu’ils portèrent jusqu’à 1,800 f. ou 2,000 f.
L ’indignation du cit. Dupic à cette proposition étoit contenue
par l’envie qu’il avoit de recouvrer son projet d’exploit : il le
demanda sous un prétexte; mais sans doute la leçon étoit bien
la ite ; on répondit que le projet avoit resté à Saint-Germ ain; et
alors le cit. D u p ic, par un reste d’égard pour son ancien client,
se contenta de le menacer d’une dénonciation, s’il usoit de ce projet,
ou s’il signifioit l’exploit sans copies.
11 paroit que les Roussel et Convert ne furent pas très-effrayés
de cette m enace, puisque le même jour, ou peu de jours après,
ils cherchèrent à acheter la probité de trois huissiers.
Il n’est pas question, comme l’a dit Barrièi'e dans sa dénoncia
tion, de Roque, huissier de confiance de D upic; de Roque fils,
clerc de Dupic ; de l ’exploit dicté à ce dernier par Dupic : tout cet
arrangement captieux, pour rattacher Dupic à tout, est démenti
par un fait du pur hasard.
C ’est que les Roussel et Convert, au lieu de s’adresser d’abord
à ce Ro^ue fils, pour écrire sous la dictée, et à ce Roque père, pour
signerde confiance, se sont d’abord adressés a un gendarme ( Privât,
qui est en jugement et en prison ) , pour le prier d’acheter une signa
ture d’huissier, moyennant 48 i*r* (0*
Privât n’alla pas chez R oque; il alla chez Achard, lui proposa
ses 48 fr. > Achard refusa.
Après A chard , Privât alla chez Monteillet : Monteillet refusa
(i) Déclaration de Monteillet, A ch ard, la veuve Pommier, et de Privât
lui-méme.
A
3
�(6 )
encore; et ce fut après ces deux huissiers qu’on s’adressa à R oque(i).
Roque, à ce qu’il parolt, alla boire avec Roussel et Convert.
L ’exploit fut fait : la signature fut payée, dit-on, avec une tasse
d’ argent; et l'huissier alla en pei’sonne faire enregistrer l’exploit à
St. Anthèm e, bureau étranger aux parties, aux créanciers, et à
l’huissier lui-même.
L e cit. Dupic ignoroit tout ce tripotage d’huissier, de gendarme
et d’enregistrement, se confiant dans l’idée qu’il avoit dissuadé
Roussel de tout projet frauduleux , lorsque le cit. Barrière est
venu avec fracas, à A m bert, dénoncer à la chambre des avoués
un prétendu exploit dont il avouoit suspecter seulement l’existence.
Si la chambre des avoués eût connu cet exploit supposé si nuisi
ble , elle auroit vu qu e, pour en détruire l’e ffe t, il n’éloit pas
besoin d’une procédure criminelle ; mais elle ne put le juger que
sur les rapports infidèles du cit. Barrière; elle demanda une dénon
ciation écrite. Le cit. Barrière sortit avec le cit. Crosmarie pour la
rédiger. C ’est après cela qu’on manda le cit. D upic, pour s’expli
quer et répondre (2).
A u premier mot d ’un projet d’exploit, il faut le dire, le cit. Dupic
se confirma dans l ’idée que les Roussel avoient eu peur de sa menace.
Il leur en sut intérieurement bon gré; e t, regardant dès lors toutes
les clameurs du cil. Barrière comme une terreur panique , il ne
voulut pas révéler leur turpitude, et les exposer à un procès crimi
n el, dès qu'ils s’étoient repentis.
M ais quand, au lieu d’un simple soupçon, il ouït dire qu’un
exploit avoit été fait réellem ent, et que, pour lui en cacher la
connoissance à lui-même, on l’avoit fait enregistrer à St. Anthêm e,
alors son premier mouvement fut de déclarer avec vivacité qu’il
étoil vrai qu’on lui avoit offert 1800 fr. pour supprimer les copies
de cet exploit; et il termina par demander que cette explication ne
fût pas réduite à une simple conversation entre collègues; mais
(îï Init rrogatoire de Privât et Roussel.
(z'j Déclaratiou des avoués.
�( 7)
que la dénonciation fût remise au substitut du tribunal crim ineVi).
C ’est ainsi qu’un prétendu coupable a provoqué lui-m êm e une
instruction judiciaire, au lieu de la redouter ; il a voulu être con
fronté avec ceux qu’on disoit n’avoir agi que par ses conseils. 11 est
en jugement avec eux ; et certes s’il avoit préparé et fa cilité le
fa u x , ils n’auroient pas manqué de tout rejeter sur son compte,
pour se disculper sous le prétexte de leur ignorance.
T e l est le précis exact des faits confirmés par les dépositions. S ’ils
ont suffi pour rendre le cit. Dupic suspect, il est au moins bien
certain qu’ils ne peuvent le faire considérer comme coupable. Ce
seroit sans doute assez, pour l’établir, de ce qu’il a déjà d it; mais
il doit suivre sa défense sous toutes les faces, parce qu’on ne peut
traiter légèrement une accusation qui attaque la liberté et l’honneur.
M O Y E N S .
§. I.
L e cit. Dupic est étranger au délit dénoncé.
Si le cit. Dupic jouissoit d’une fortune brillante, on n’eût pas
osé l’accuser d’un faux minutieux, et d’avoir vendu son honneur à
celui qui vouloit le commettre. Mais c’est un malheur inséparable
de la médiocrité qu’elle est en butte aux soupçons enhardis , et
qu’en rougissant de leur injure elle n’en est pas moins obligée de
les combattre.
M a is, quelle que soit la calomnie qui poursuit le cit. D upic,
ouvertement ou dans l’ombre ; s’il n’a pas reçu de ses ancêtres
l’héritage de leur illustration ( 2 ) , il en a reçu celui d ’une probité
qu’il n’avoit jamais ouï suspecter dans l'exercice de son état et des
(1) Procès verbal de la cham bre, cote 9 , expliqué par les déclarations de*
avoués.
(a) Guillaume D u p ic , l ’un d’eux, ¿toit grand bailli d’Auvergne en x35o.
A 4
�C8 )
fonctions qu'il exerce depuis 1789 (1 ) ; et cet héritage, quoi qu’on
en dise, il le transmettra intact à ses enfans.
L e cit. Barrière devoit voir le passé avant le présent, n ’épouser
la passion de personne; ne pas croire qu’il lui suffiroit, pour réussir,
d’indiquer trente-neuf témoins avec note de ce qu’ils devoient dire;
ne pas mentir à sa conscience, lorsqu’il savoit que le conseil d'un
faux venoit d’un autre que du cit. Dupic ; et enfin méditer un peu
p lus, avant de dénoncer, quelle étoit la nécessité et quelle seroit
la suite de sa diffamation.
Il est peut-être sans exemple qu’un défenseur soit en jugement,
¡parce qu’un huissier n’a pas posé des copies d’exploit; sous prétexte
que ce défenseur a conseillé cet exploit , et en a fait le projet.
Est-ce donc le conseil, 011 le projet, qui ont valu une accusation?
M ais ce seroit une chose bien périlleuse, que de donner des con
seils, s’ils exposoient aux résultats d’un commentaire fort différent
quelquefois du conseil lui-même, et si on couroit la chance d’être
incarcéré par provision, pour éclaircir jusqu’à quel point le conseil
a influé sur le mode de l’exécuter.
Si c’est le projet, c’est peut-être pis encore; car il seroit inouï de
trouver dans le projet d’un exploit quelque chose de relatif à la
suppression des copies qui en seront faites ensuite.
I l y a plus : c a r , dans l ’existence de ce projet m ê m e , tout autre
q u ’u n dén on ciateu r passionné doit voir la preuve que l’auteur du
projet n ’a pas entendu se m êler de ce qui seroit fait au delà.
Sans doute Dupic, voulant faire faire cette suppression de copies,
auroit écrit l’original, et même, si on veut, les copies; il auroit
tout fait signer par l’huissier qu’on suppose lui être si bien dévoué,
et il auroit tout retenu.
( i l Le cit. D u p ic , accusé , a été reçu au serment d’avocat au parlement
de Pari«, en 178 9; accusateur public au tribunal du district d’Ainbert,
procureur national des eaux et forêts, greffier, avoué à Amlx'rt avant l’an a
et depuis l’an 8. Depuis sa détention , il ¡1 ¿té nommé membre de l ’univertité de jurisprudence, sur la p résen tation du m aire d'^dinhcrt-
�c9 )
M ais on aime mieux choquer toutes les vraisemblances pour
l’accuser. On veut qu’il ail été assez imbécille pour faire marchander
des probités d’huissiers de nie en rue, avec son projet d’exploit à
la m ain, et que , pour comble de simplicité, après s’être mis en
évidence par le refus successif de deux huissiers, il ait donné ainsi
au troisième une pièce de conviction de cette importance.
On ne veut pas voir qu’il y a incompatibilité dans ces deux
suppositions. Mais il y a constitution d’un autre avoué, dit le
dénonciateur. Mais les parlant à ne sont pas en blanc; mais il y
a une note marginale et une date fixe; mais Dupic a nié devant
ses collègues avoir fait ce projet. Mais tout cela se lie à la vente
qui elle-même étoit frauduleuse; et Dupic y a participé, puisqu’il
est allé chez les notaires.
Voilà donc, sans l’affoiblir, tout le faisceau de l’argumentation
qui est résumée contre le cit. Dupic. Eh bien, que ce faisceau soit
divisé ou entier, il est impossible qu’il tienne contre le simple regard
de l’impartialité.
Oui, Dupic a constitué un autre avoué que lui : mais il étoit
l’avoué ordinaire du cit. D um aret; e t, dans un exploit qui devoit
lui être signifié, il a pu aviser, sans crim e, au moyen de ne pas
perdre cette confiance.
Oui, il a rempli les parlant à. L ’huissier auroit confondu entre
le domicile réel de chaque créancier, et leur domicile élu. L e ré
dacteur a voulu éviter une nullité, et il ne laissoit rien à fin ir,
précisément parce qu’il n’avoit à se mêler que d’un simple projet.
L a note marginale confirme ce qu’on vient de dire. Il étoit à
croire qu’un huissier de Saint-Germain transcriroit cet exploit.
L a date du i 5 fructidor, mise en marge du projet, n’est pas de
la main de D upic, quoi qu’en dise la dénonciation; donc il a passé
par d’autres mains : d’ailleurs l’enregistrement du 20 suppose un
exploit du 17 (1).
L e cit. Dupic a nié ce projet; il en a donné les raisons : il
(1) Cote 4 *
�( IO )
ne: croyoit pas qu’on eût osé faire l’exploit. Sans doute ce n’étoit
pas par supposition qu’on ignoreroit la part qu’ il y avoit, puisque
la dénonciation qu’on venoit de lui lire, et où il est dit que le
projet est de sa m ain, devoit dicter sa réponse. S’il a agi par mé
nagement, il n’a plus rien ménagé ensuite, lorsqu’il a vu qu’il y
avoit un abus de sa bonne foi ; et on ne dira pas qu’il ait agi comme
s ’il craignoit les éclaircissemens.
Ce n ’est donc pas là une objection contre le cit. D upic, et ce
seroit attaquer la chambre des avoués; car le moyen de croire
qu’elle ait voulu tendre un piège à un de ses collègues, en lui de
mandant s’il avoit écrit un projet dont elle étoit déjà saisie, et
qu’elle savoit bien être de son écriture? Aussi quand elle a inséré
dans son pi’ocès verbal qu’il avoit déclaré tous les faits calomnieux,
on voit que cette rédaction étoit pour abréger, puisque cette con
cision est démentie par tous les témoignages des avoués eux-mêmes,
et que l’un d’eux rapporte même l’explication que le cit. Dupic
donna à sa réponse (i).
Enfin, qu’y a-t-il de commun entre le transport de Dupic chez
deux notaires, et une suppression de copies d’exploit?S’il eût voulu
ou cru faire une fraude, auroit-il ainsi parcouru les études do
notaires avec Roussel? se seroit-il présenté pour son certificateur?
et après tout cela auroit-il fait courir et laissé son projet d’exploit,
pour consommer sa conviction? C ertes, la fraude ne marche pas
ainsi avec éclat, et ne laisse pas sur sa route des signaux de reconnoissance.
( i j Le douzième témoin dépose que Dupic expliqua « qu’avoir suivi les
» parties chez un notaire , avoir retiré létat des inscriptions , avoir fait un
» projet de notification, n’étoit pas repréliensible ; et qu’il n’appeloit faits
calomnieux que ceux qui tendoient à le rendre complice d ’un faux, >*
�( Il )
§.
11.
I l n’y a pas de fa u x ; le cit. Dupic n’en est pas complice.
L e cit. Dupic n ’a pas cherché à se défendre par des fins de non
recevoir, parce que, n’ayant rien à se reprocher, il lui étoit égal
d ’être accusé d’un délit quelconque : mais un crime de faux est un
poids si t e r r i b l e pour un homme public, qu’il doit, s’il le peut, en
détourner de lui jusqu’à la seule dénomination. C ’est donc déjà un
grand intérêt pour le cit. D u p ic, d’examiner s’il y a eu un fau x, et
s’il a pu y être compris sous prétexte de complicité. '
Déjà on peut d ire, en général, qu’il n’y a pas de faux dans
une suppression de titre, parce qu’un faux en écriture n’est pas un
acte d’abstension ou négatif, et qu’il suppose une action tendante
a altérer ce qui est, pour le transformer en ce qui n’est pas.
Aussi ne voit-on pas qu’en principe on mette sur la même ligne
les suppressions de titre et les faux qu i, dans le droit crim inel,
semblent faire deux délits bien distincts.
Lange, en traitant du fa u x , observe que « l ’on ne peut former
» une inscription de faux au sujet de la suppression des actes,
» parce que l'on ne peut déclarer fausse une pièce qui ne paroit
» pas ; mais que parmi nous on en fait la poursuite comme d’un
» larcin (i). »
L e tribunal de cassation a été plus loin encore, dans un jugement
du i5 nivôse an 1 1 , comme on va le voir par l’extrait entier copié
sur l’arrêtiste (2) : « Un créancier, porteur d une reconnoissance de
)> 55o f r . , reçoit du débiteur un acompte de i 5o f r . , et en inscrit
» le reçu au dos du billet. Par la suite, le créancier gratte et efface
t> cette quittance, et cite le débiteur en payement de 55o fr. L e
)> faux y est attaqué par le débiteur. L e tribunal spécial ( de la
(1) Pr.itic. f r . , chap. X I V , du faux , tom. I I , pog. G-j» édition de 1723.
(2j Journal du palais, n°. i 3 i , p l(ge 3 4 4 .
�( 12 )
» Manche ) a cru y voir un faux en écriture privée......... mais le
» tribunal de cassation n’a considéré ces rature et grattage d'écri» ture que comme une suppression d’acte tendant à libération.
» Sur ce m otif, il a cassé et annullé le jugement de compétence. »
L ’application de cette décision se fait sans peine ; car s i, entre
le créancier qui a gratté un écrit, et Fauteur d’un projet d’exploit
posé ou non, il faut chercher un faussaire, ce n’est certes pas le
premier qui sera jugé l’être moins.
Pourquoi d’ailleurs vouloir trouver un faux où la loi n’en indique
pas? C a r, sans doute, un huissier qui ne pose pas des copies, ne
commet pas un délit d’invention nouvelle ; et dès-lors il faut cher
cher comment la loi punit, pour juger la culpabilité par la peine.
L a première loi qui paroisse s’être occupée de ce délit, est l’or
donnance de i 555. A u tit. V I elle d it, art. X I : « Pour obvier à
)> plusieurs inconvéniens qui peuvent advenir de ce que souvente» fo is, quand les huissiers signifient quelques requêtes ou autres
» choses, ils n’en baillent copie, ce qui vient à gros intérêt des
» parties, nous avons enjoint et enjoignons auxdits huissiers de
» bailler promptement lesdites copies.......... sur peine de Go sols
» d’amende pour la première fois, et pour la seconde sur peine
» d’amende arbitraire. »
L ’ o r d o n n a n c e de 16G7 veut, en l ’art. II du lit. II, qu’il soit laissé
copie des exploits, à peine de nullité et 20 fr. d’amende ; et en
l’art. III) qu’il soit fait mention, en l’original et copie, de ceux à
qui elles ont été laissées, à peine de nullité et même amende. En
l’art. V II du tit. X X X I I I , elle veut qu’il soit laissé au saisi copie
de l’exploit. L ’art. X I X est consacré a fixer la peine de l’inobser
vation : « T ou t ce que dessus sera observé par les huissiers, à
» p e i n e de nullité, d o m n ia g e s - in t e r e ls .......in t e r d ic t io n , et 100 ir.
n d ’a m e n d e . »
Ainsi le pis-aller, dans les cas les plus graves, est l'interdiction
et des doinmagcs-intérêls, outre la nullité et une amende.
P o u r q u o i donc être plus sévère que la loi elle-même; augmenter
Jc§peines, quand,dans l ’incertitude, on doit les restreindre; appeler,
�( 13 )
sous le nom de fa u x , des peines corporelles, quand la loi en indique
textuellement d’autres?
L e genre de ces peines prouve donc que le délit dénoncé par le
cit. Barrière n’est pas un faux.
S ’il y avoit un fa u x , il y auroit trois distinctions à faire entre
les accusés : Fauteur du faux, celui qui l’a voulu, et ceux qui l’ont
facilité. L ’huissier tient le premier rang ; R ou ssel, le deuxième ;
D upic, P riv a i, Roque fils et Couvert, le troisième. Si les deux
premiers ne sont pas en d élit, c’est avoir prouvé que le cit. Dupic
n ’est pas complice.
L e faux consisteroit dans ce que l’original constateroit le con
traire de ce que l’huissier a fait. Mais pour dire qu’il y a un fau x,
il s’ agiroit de v o ir , dans cet original , s’il a certifié avoir porté
sept copies, tandis qu’il ne les a pas portées; car s’il n’y avoit pas
dit expressément les avoir portées, il est clair qu’il n’y auroit pas
ïnème l’ombre d’un faux.
Cependant on veut qu’il y ait un fau x, et cet original ne se voit
pas : on veut qu’il soit constant qu’il certifie autre chose que ce qui
a été fait, qu’il soit constant que les créanciers n ’ont pas reçu de
copies; et précisément l’un d’eux a été ouï en témoignage, et s’est
présenté avec sa copie. T out cela étonne, et fatigue l’imagination.
Aussi la loi ne permet pas, il faut le dire, que des accusations
de faux soient admises d’après la seule terreur des parties inté
ressées; elle entend voir la pièce suspectée, avant de s’enquérir
s ’il y a un délit et des coupables : sans cela, en e ffet, comment
jugeroit-elle qu'il y a un faux?
« Dans t o u t e s les plaintes en faux, dit l’art. D X X V I du code
» dos délits et des peines, les pièces arguées de faux sont déposées
» au greffe......... elles sont paraphées........... etc.
» Le tout ¿1 peine (le nullité'. »
Ici quelle est la pièce fausse? E st-c e la copie produite par le
dernier témoin? N o n ; puisqu'elle est la preuve contraire de la
dénonciation.Ce n ’est d’ailleurs pas elle qui adonné lieu au procès,
puisqu’elle n’a été connue que quand le cit. Dupic étoit en prison.
�( i4 )
Est-ce le projet ? Non ; car il n’a rien de commun avec les copies
supprimées, et avertit au contraire l’huissier qu’elles doivent être
posées. Est-ce enfin la relation de l’enregistrement? mais en ne
s’est pas même avisé de la dire falsifiée.
Voilà cependant tout ce qui est déposé au greffe; on n’a donc
pas satisfait à la première formalité que la loi exigeoit à peine de
nullité.
Ce n’est pas seulement parce que la loi le dit ainsi, qu’on l’ob
serve ; mais c’est qu’en effet il est inconcevable de préjuger qu’un
huissier a fait un faux sans connoître la pièce fausse.
Dira-t-on qu’il est intéressé à ne pas la produire? Mais le faux
est un délit m atériel, qui veut une culpabilité de fait. L a lo i, au
reste , ne se commente pas ; elle a voulu un dépôt de pièces avant
l’instruction, comme elle a voulu qu’avant de poursuivre un homi
cide de fait, on sût s’il y avoit un homme mort.
Evidemment un juri ne peut pas déclarer qu’il est constant qu’il
y a un. faux : alors il n’y a plus de questions subséquentes.
Si donc il n’est pas constant que l’huissier Roque soit l’auteur d’un
fa u x , comment concevoir qu’il y ait des complices? Roussel ne peut
être convaincu de l’avoir voulu et p a y é ; et m êm e, par respect
pour les principes, il faut dire qu’il est extraordinaire qu’un créan
cier ait pris l’initiative, avant de savoir s’il y avoit un exploit faux,
et si on le lui opposerait. H ne peut pas dire qu’il craignoit cet
exploit pour l’avenir, comme on le diroit d une obligation fabriquée
sans le débiteur. Sa créance étoit exigible; et, au lieu d’en pour
suivre le payement, au lieu de ne voir, même dans l’exploit en-*
registre à St. Anthêm e, s’il existoit, qu’un exploit nul ( i ) , il a
( 0 « Les huissiers feront enregistrer leurs actes, soit nu bureau de leur ré» sidence, soit au b u r e a u du lieu où ils les auront faits. » L . 22 frimaira
an 7 , art. X X V I .
« Toute violation des formes prescrites, en matière c iv ile , par les lois
» émanées des représentons du peuple, depuis 178^, donneiont ouverture à
» cassation , quand même elles 11e prononceroicnt pas la peine de nullité, >»
l,, 4 germinal an 2 , art. II.
�C l5 )
mieux aimé s’en croire empêché, et chercher un faux avec le même
zèle qu’un autre mettroit à en éviter le résultat; en un m ot, se
créer un fantôme pour avoir la jouissance de le combattre.
Mais si Roussel a voulu faire un fa u x , ne vaut-il pas autant
croire qu’il s’en est tenu au désir, et ne l’a pas consommé; ou, si
on veu t, qu’ayant son exploit dans sa poche, il a craint les suites
d’un fau x, et l’a déchiré sans en faire usage.
Alors la tentative du crime n ’est pas un délit ; car il fau t, cl’après
la loi ( i ) , q u ’ il n’ait pas dépendu du coupable que la tentative du
crime n’ait eu son succès.
Ce principe nouveau est conforme aux anciennes m axim es, qui
ne regardoient le faussaire comme coupable, que s’il usoit de l’acte
faux. S i talis utebatur illo instrumento fa ls o .... quia s i non prod iix erit, non potest com pelli producere ( 2) .
Les auteurs admettoient même la résipiscence en cette matière,
au delà de la production de la pièce fausse.
« Aujourd’hui, par l’usage, il est permis en France à tous ceux
» qui ont produit des pièces fausses, quoiqu’ils en aient été les
» fabricateurs ou non, de s’en départir, sans pouvoir être recher
c h é s .... Seulement ceux qui les ont produites sont, nonobstant
» cette déclaration, responsables des dommages-intérêts (3). »
Qu’on avoue donc que le cit. Barrière s’est grandement écarté
de ces principes, en faisant incarcérer plusieurs citoyens, pour la
prétendue falsification d’un exploit dont on pouvoit ne pas se
servir, cl qu’on ne lui avoit pas opposé, même indirectement.
Si Roussel aussi n’a pas fait un fau x, à plus forte raison faut-il
dire que le cit. Dupic n’est pas coupable de l’avoir préparé et faci
lité. Celte vérité est si claire, que le moindre raisonnement seroit
oiseux.
( 1 ) I,oi (lu 22, prairial an 4.
(a) Boerius , d e cis. 291. Jul. c la r ., liv. 5 .
(3 ) Bornier, toin. I I , png. 1 1 1 . Scceyola, a d leg.
livre 7.
d e ja ls is . Papon,
�C 16 )
Toute l’accusation, on le répète, porte sur Roque et Roussel.
Ils pourroient être coupables , sans que les autres le fussent : mais
s ’il n’y a pas de faux pour eu x, il n’y en a pour personne. II est,
au reste, démontré dans la première partie que le cit. Dupic y est
absolument étranger.
Aucune loi ne peut être invoquée contre ce qu’il a fait ; et sa
position est tellement favorable, qu'il peut défier son dénonciateur
de motiver un jugement qui le condamne.
L e conseiller d’état Portalis, qui a présenté la première loi déjà
décrétée du code civil, a dit : « Il faut que le juge ait le droit d’in» terpréler les lois, et d’y suppléer : il n’y a exception que pour
« les matières criminelles. L e juge, dans ces matières, choisit le
» parti le plus doux si la loi est obscure et insuffisante, et il absout
» l’accusé si la loi se tait sur le crime (i). »
Voilà le dernier état de la législation. Si le cit. Dupic craignoit
une peine, il trouveroit là l’expression positive de son absolution :
niais cet examen n’appartient qu’à ceux des accusés qui auroient
des reproches à se faire; le cit. Dupic ne veut se présenter qu’à
découvert et sans arm es, parce qu’il se repose autant sur l’impar
tialité du tribunal dont il attend la décision , que sur le témoignage
de sa propre conscience.
Chacun ici peut être sainement jugé par ce qu’il a fait. Privât,
accusé, avoue avoir cherché des huissiers, sur la réquisition de
R oussel; Roussel, accusé par Dupic lui-merne, ne l’accuse p as,
même en récrimination ; R oque, accuse, se cache : Dupic seul a
prévenu les recherches de la justice.
Mais il est accusé ; il est en butte aux conjectures. Que ceux qui
sont prompts à juger jettent un regard sur eux-mêmes : les actions
les plus indifférentes peuvent avoir des résultats fâcheux. Personne
ne peut se dire assuré d’être à l’abri d’une accusation.
E
n résu m k,
il n ’y a pas de f a u x , parce q u ’ il n ’y en a pas sans
la pièce latissc.
(») Code c i v i l , première livraison
page 17.
�C
17
)
Il n’y a pas de fa u x , parce qu’on 11e voit pas si l’original, sup
posé existant, mentionne faussement que les copies ont été ¡»osées.
Il n’y a pas de fau x, parce que le contraire de la suppression des
copies est prouvé par le rapport qu’un créancier a fait d’une copie.
Il n’y a pas de faux, parce qu’une suppression de copies n'est pas
un faux.
Il n’y a pas de corps de délit, et il y a nullité, parce que la pièce
arguée n’a pas été déposée au grefie, d après le texte de la loi.
Ainsi le délit n’est pas constant.
S ’il y a fa u x , il est constant qu’il a été machiné entre Roussel
et Roque seulement, et que le citoyen D upic, après avoir remis
un projet d’exploit aux parties, n’a eu aucune part directe ni in
directe à ce qui s’est passé ultérieurement,
Ce qu’il a fa it, lors de la vente et depuis, marque sa franchise
et l’absence des précautions que la fraude n’oublie pas. Ce qui a été
fait hors sa présence ne laisse pas douter que, s’il se inedi toit un
fiiux, on le préparoit et on l’a consommé sans lui.
Bien Idin donc qu’il soit constant que le cit. Dupic soit complice
d’un faux, il est au contraire très-constant qu’ il ne l’est pas.
Ainsi s’évanouit une accusation grave et pénible, dont le résultat
était aisé à prévoir, mais dont le caractère médité et haineux a
besoin de toute l ’attention d’un tribunal éclairé et intègre. L e cit,
Dupic la denianderoit à titre d’indulgence, s’il n’étoit certain de
l ’obtenir à titre de justice. II ose seulement demander célérité, dans
l ’impatience bien juste d’être rendu à son état, à sa femme, à scs '
çn fan s, et de ne plus courber sa tète sous le poids insupportable
d’une odieuse diffamation.
k
L . F . D E L A P C I I I E R , homme de loi,
�( i8 )
I j E JU R I S C O N S U L T E S O U S S IG N E , qui a vu le mémoire justifi
catif pour le cit. Dupic , signé du cit. Delapchier son conseil , adhère
entièrement aux principes qui y sont développés ; pense que l’application
en est juste; e t , par une su ite, il est d’avis que le cit. Dupic doit être
a c q u itté sans difficulté de toute inculpation , dans une affaire où la justice
est à la recherche d’un f a u x qui ne paroît pas e x is t e r , et qui d ’ailleurs ,
en le supposant r é e l , seroit absolument étranger à cet accusé.
I l n’y a point de corps d e d é l i t , ni par conséquent de coupables.
On prétend en effet que l’huissier Roque , chargé de notifier un contrat
d’acquisition, le certificat de transcription et les extraits des inscriptions
hypothécaires subsistantes , aux créanciers inscrits , pour satisfaire à l'ar
ticle X X X de la loi du 7 brumaire an 7 , se borna à faire un original
de notification, et supprima les copies, afin de priver les créanciers de
la faculté d’enchérir.
L a représentation d ’une des copies , faite par l ’un des créanciers , dément
déjà l’assertion qu’il ne fût fait qu’un simple original ; mais quand la sup
pression des copies seroit v raie , ce fait matériel ne constitueroit pas lui
seul un faux , il n’en résulteroit qu'une n u llité dans la notification. Pour
constituer le faux, il faudroit que l’huissier ne se fut pas borné à trahir
son devoir , en ne délivrant pas aux créanciers les copies commandées
par la loi , et qu’il eût attesté dans l ’original de la notification la d é li
vrance de copies qu’il auroit supprimées. Alors , mais alors seulement , il
auroil commis un f a u x , par la fa u sseté de la relation qu’il auroit faite,
d’ un point de fait sur lequel l’acte de son ministère qui la contiendroit ,
étoit destiné à fa ir e f o i .
E n un m o t , le faux consisteroit dans cette relation mensongère , et
ne peut se trouver que là. Eh bien , que l ’on produise donc l ’original
d ’exploit; qu’on le dépose au greffe, au désir de la loi. Qu’on dise au
tribunal : Prenez et lisez ; voyez dans cette piece la relation mensongère
d'un bail de copie qui n’a pas été fait : alors 1 accusation aura une base.
Mais cette relation mensongère, prétendue insérée dans un acte public ,
ne paroît point ; quel est le résultat ? qu’on poursuit une chimère , une
vision. «Dans tout jugement crim inel, la première question tend essen» tielleinent à savoir si le fait qui forme l ’objet de l’accusation, est cons» tan t ou non , » nous dit 1 article C C C L X X I V du code des délits et des
peines.
O r , lorsque le tribunal spécial, dont les membres cumulent les fonc
tions de jurés pour reconnoitre le fait, ayec celles déjugés pour appli-
�( 19 )
quer la loi , s'interrogera lui - même et se demandera : Le fait dénoncé,
savoir, que l ’h uissier Roque a m entionn é, da n s l ’o rig in a l d e n o tifica
tion dont i l s 'a g i t , qu’il avoit délivré copie à chaque créancier inscrit ,
e s t-il co n stan t? E t pourra-t-il, sans voir la p iè c e , répondre affirmati
vement , Oui , le f a i t est con stan t? Non sans doute, et par là croulera
tout l’édifice que l’on a bâti en l’air. L ’huissier sera nécessairement absous,
faute de corps de d é lit constant. O r, si le principal accusé est a b so u s ,
à défaut de corps de délit , comment pourroit-il avoir des complices ?
M ais, tout décisif qu’est ce moyen pour faire acquitter le cit. D upic
p a r le tribunal , il ne suffiroit peut-être pas pour le justifier de tout soupçon
aux yeux du public. La malignité diroit : S ’il a échappé à la peine , c’est
que la pièce arguée de faux a disparu. E h bien ! la malignité va se taire
aussi ; car en supposant qu’il eût été commis un faux par l’huissier Roque ,
et que le délit fût prouvé , la prévention la plus animée seroit dans l'im
puissance d elever contre Dupic , même un soupçon raisonnable d’avoir
participé à la prévarication de cet officier ministériel. Que produit-on
contre Dupic , en effet ? un projet de notification écrit de sa main.
Mais , dresser le projet d’un acte de procédure voulu par la loi , est-ce
commettre un crime ? Comme la passion est aveugle ! Au lieu de l ’accuser ,
la production de ce projet suffit seule pour publier son innocence. Car
enfin , un projet dressé par un avoué n ’auroit pas couru le monde , il
auroit resté entre les mains de l’avoué rédacteur , si c e l u i - c i avoit dû
être l ’artisan et le ministre de la dénonciation ; si la transcription du.
projet s’étoit faite chez lui ; s’il avoit fait signer l ’original de confiance
par l'huissier Roque , sans le charger des copies.
Du fait constant que le projet produit par les moteurs de cette affaire,
étoit sorti des mains de D u p ic , résulte donc la conséquence qu’il l’avoit
livré à l’acquéreur , pour qu’il fit faire sur ce type les notifications vou
lues par la loi ; que dès-lors rien de ce qui s’est fait depuis, n’a été f a i t ,
ni par lu i, ni sous sa direction. Enfin , que si l’huissier avoit prévariqué
dans ses fonctions , en vendant sa signature au bas d’un e x p lo it, par lequel
il auroit attesté faussement avoir délivré des copies qui n’ont jamais été
remises , tout cela seroit complètement prouvé étranger à Dupic , par la
seule production de son projet.
D é l i b é r é
à
Clermont-Ferrand , le 1 5 floréal an 1 1
B E R G IE R .
A R I O M , de l ’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du Tribunal
d’appel. — A n X I .
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dupic, Antoine. An 11]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Bergier
Subject
The topic of the resource
huissiers
faux
fausse identité
corruption
Description
An account of the resource
Mémoire pour Antoine Dupic, avoué à Ambert, accusé de complicité de faux ; contre Le commissaire du gouvernement , poursuivant, et le citoyen Barrière, plaintif.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
An 2-An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0312
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_G1225
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ambert (63003)
Saint-Germain-l'Herm (63353)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
corruption
fausse identité
Faux
huissiers
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MEMOIRE
COUR
d ’a p p e l
de riom.
EN R É P O N S E ,
P O U R
E t i e n n e
C A S T I L L O N , habitant à Rio m ,
intimé ;
C O N T R E
J e a n - B a p t i s t e A S S O L E N T , habitant à
P a ris, appelant.
C e u x qui se rendent cautions de leurs amis ou de leurs
proches, ne calculent pas toujours toute l’étendue de leurs
engagemens, et ne croient souvent remplir qu’une vaine
formalité. Ils veulent être généreux sans sacrifices et
sans risques, exaltant leur procédé quand ils en ont été
quittes pour leur signature ; mais invoquant toutes les
chicanes connues, si on s’adresse à eux pour payer ce
qu’ils ont promis,
A
�( 2 )
. ,
’ .
Voilà mot pour mot ce qui est arrivé au sieur
Assolent. Caution du sieur Blanchard, son beau-frère,
pour une entreprise de com merce, il s’en fût proclamé
le bienfaiteur et le patron, si l’entreprise eût réussi.
Mais Blanchard est insolvable et en fuite. L e sieur
A ssolent, sa caution, doit payer pour l u i , et c’est là
ce qu’il est difficile de lui persuader. D ’abord, le tribunal
qui l’a condamné ne lui convient pas. Il va même jus
q u ’à penser q u ’ u n acte par lequel un codébiteur paye
pour lu i, avec subrogation, est pour lui une quittance,
et le dégage de. son cautionnement.
Il s’agit donc de lui prouver tout à la fois qu’il a été
jugé par un tribunal com pétent, et qii’un transport ou
subrogation de créance maintient et confirme le titre,
bien loin de le dénaturer et d’opérer novation.
F A I T S .
Castillon et Blanchard voulurent entreprendre en
l’an 1 1 , à Riom , l’établissement d’un cylindre à indiennes.
Les premiers frais devoient être considérables, et Blanfchard n’a voit aucune fortune.
L e sieur Assolent, son beau-frère, domicilié à Paris ?
vint gén<ei’eüsenient à son secours, et lui promit son
cautionnement; en conséquence, Castillon et Blanchard
firent le Voyage de Paris : on y acheta un cylind re,
moyennant 8676 liv. 10 sous; et l’acte ci-après fut passé
le 18 prairial an 11.
D u fou r, serrurier, vend à Castillon et Blanchard un cylindre
�(
3
)
qu’il s’oblige de faire conduire et mettre en place à R i o m , dans
quatre mois. La conduite sera aux frais des acquéreurs, de même
que la maçonnerie du placement.
Dufour garantit pendant un an le cylindre vendu.
L e prix dudit cylindre ( 8^76 liv. 1 0 s . ) sera payé à Dufour à
P aris, par envoi de lettres de change ou autrement, moitié dans
un an et moitié dans deux ans, à compter du jour que le
cylindre sera en état de travailler , avec intérêt à 6 pour 100.
Castillon s’oblige à p ayer m oitié de ladite
som m e auxdits
term es ; B lanchard s’oblige à p ayer l’autre m oitié.
Assolent s’oblige , en cas que ledit Blanchard ne pût payer
la totalité ou partie de ses
4338
liv.
5
s. auxdits termes , après
toutes poursuites faites ; dans ce cas seulement, il promet et
s’oblige de payer audit Dufour les sommes qui pourroient lui
être dues par ledit Blanchard qu ’il cautionne.
Castillon s’oblige en outre , dans le cas où Dufour ne pût
être payé de Blanchard et d’Assolent, sa caution, après toutes
poursuites faites, à payer lui-méme. Alors le cylindre lui appar
tiendra en entier, sauf à rendre à Blanchard ce qu’il aura pa yé ,
après déduction des dommages-intéréts de Castillon. En ce cas
seulement il sera libre audit Castillon de faire vendre ledit
cylindre pour payer Dufour,
Il est convenu entre les parties que si Castillon et Blanchard
veulent avancer les termes de payem ent, Dufour leur fera une
remise de î a pour 100.
E n fin , Castilloi* et Blanchard s’interdisent la faculté d’exiger
la vente du cylindre jusqu’au parfait payement de Dufour.
Fait triple, etc.
Pour se mettre en étal de recevoir le cylindre, il fallut
faire une construction sur le modèle donné ; elle coûta
quatre cent et quelques livres. Mais Blancliard n’ayant
pas le premier denier, 011 emprunta la somme du sieur
�(4 )
A lb e rt, à qui il fut fait un effet signé de Castillon et
Blanchard, le 17 fructidor an 11. Castillon seul a été
obligé de l’acquitter.
Bientôt le cylindre arriva : il fallut payer 493 liv.
pour la voiture ; et Blanchard n’ayant encore rie n , il
fut aussi question d’em prunter, moyennant un autre
eilet que Castillon a de même acquitté seul.
D ufour vint à R io m , et plaça le cylindre le 30 frimaire
an 1 2. Il engagea ses débiteurs à lui avancer toute la
somme promise; mais comme Blanchard en étoit inca
pable, le sieur Castillon emprunta seul du sieur A lbert
la somme nécessaire; et comme il n’avoit garde de mettre
du secret à ce payement, il en fut passé acte notarié,
le 30 frimaire an 12 } entre les sieurs A lb ert, Dufour et
Castillon.
Par cet acte Dufour reconnoit avoir reçu par anticipation, de
Castillon se u l, et de ses deniers, 8676 liv. 10 sous pour le paye
ment par anticipation du prix du cylindre.
Dufour tient quitte ledit Castillon, et le subroge en tous ses
droits contre Blanchard, et contre le sieur A s s o le n t, sa cau
tion.
Il donne pouvoir à Castillon de se servir de son nom pour
la répétition de la moitié de ladite somme de 8676 liv. 10 s.
Castillon se reconnoit ensuite débiteur du sieur Albert, à qui
il fait des effets pour la somme prétée.
Bientôt le cylindre se dérange, deux rouleaux se cas
sent; et comme il y avoit garantie pour un an, Castillon
et Blanchard assignent D ufour au tribunal de commerce
de R iom , le 7 vendémiaire an 13.
D ufour n’eut garde de décliner la juridiction ; il vint
�(5).
à Riom ; et au lieu de soutenir un mauvais procès, il
répara l’un des rouleaux, et vit que l’autre avoit besoin
de refaire. En conséquence, par un acte du 13 brumaire
suivant, il s’obligea d’en délivrer un neuf dans cinq mois;
au moyen de quoi il fut libéré de toute garantie, et les
sieurs Castillon et Blancliard se désistèrent de leur as
signation.
L e premier terme de payement pour Blanchard devoit échoir le 30 frimaire an 13 , et non pas le 18 prairial
an 12, comme a affecté de le dire le sieur Assolent pour
son avantage. Car l’échéance n’étoit qu’un an après le
posement du cylindre. O r, déjà Castillon avoit fait des
démarches pour être payé ; et le sieur Assolent nous
l ’apprend lui-même.
Dès le 17 frimaire an 13, Castillon avoit écrit au sieur
Assolent une troisième lettre, pour lui faire part de la
position de Blanchard, son beau-frère , et de sa sœur, et
pour l’engager à prévenir la perte totale de cette famille,
par des frais et des poursuites. Si vous ne Taviez pas
caution né, lui m arque-t-il, je ne serois pas entré dans
la vente.... ,* le double est écrit en entier de votre m ain...;
en ne recevant pas de réponse, je ne sais à quoi rrfatten
dre.... Suivant la lettre de mon fr è r e , vous dites que
vous ri avez pas de réponse à me f a i r e , parce que vous
aviez écrit au sieur Blanchard.... I l a soutenu ri avoir
reçu aucune lettre de votre part.... ,* je ri entends pas
vous surprendre • je vous écris ce que je pense.,..
Ainsi Castillon éci'ivoit lettre sur lettre; et le sieur
Assolent ( qui se dit pris au d épourvu, après que Cas-
�( 6)
tillon a eu le temps de s’enrichir dans un commerce
productif ), Assolent noüs prouve lui-même qu’il savoit
tout dans l’année même du placement du cylindre, et qu’il
se défendoit déjà d’une manière évasive et mensongère,
en esquivant une réponse.
Quoi qu’il en soit, Castillon, ennuyé d’écrire, fit donner
à Blanchard une assignation qui ne se retrouve plus, et qui
seroit d’ailleurs aujourd’hui insignifiante. Ensuite, le n
germinal an 13 , il assigna le sieur Assolent à payer le pre
mier terme du cylindre; il l’assigna sous le nom de Dufour,
qui l’y avoit autorisé par l’acte du 20 frim a ire an 12.
C’est ici où on va connoître l’esprit de bonne foi qui
animoit déjà le sieur Assolent: le lendemain il courut
surprendre au sieur D ufour un désaveu de cet exploit;
et comme l’acte du 30 frimaire étoit connu, il crut se
donner quittance en faisant déclarer à D ufour qu’il n’avoit rien à réclamer contre lui Assolent.
Ce chiffon ne devoit pas arrêter les poursuites de Cas
tillon, qui, procurator ùi rem suatn, avoit le droit de
plaider sous le nom de D ufour, malgré Dufour lui-même.
Cependant, comme il ne retrouvoit plus les diligences
faites contre Blanchard, il a .voulu se mettre tout-à-fait
en règle de ce côté, pour éviter une chicane de plus.
En conséquence, le 30 fructidor an 12, il a assigné
Assolent au tribunal de commerce de Riom , pour payer
sa moitié de la dette cojnmune échue. L e 5 vendémiaire
an 14 , il a obtenu un jugement de condamnation. Il l’a
signifié à Blanchard le 26, et a fait constater son insolva
bilité le 3 brumaire, par un procès verbal de carence.
A ptes cette procédure, il a assigné le sieur Assolent,
�( 1)
le i8 brum aire, au même tribunal de commerce, pour
être tenu desdites condamnations.
L e sieur Assolent s’est d’abord laissé condamner par
défaut; puis sur son opposition il a conclu à la nullité
de l’exploit en la form e, et subsidiairement à l’incom
pétence du tribunal.
Par un second jugement du 28 mars 1806, il a été
débouté de ses conclusions, et a demandé la remise sur
le fond. Enfin il s’est laissé condamner par défaut par un
troisième jugement, et a interjeté appel.
Ses moyens sont consignés dans une consultation im
prim ée, qui décide que dans tous les sens le sieur Asso
lent a raison; c’est-à-dire, i ° . que les juges de Riom sont
incompétens ; 2°. que Castillon est non recevable à lui
demander le remboursement de la dette qu’il a acquittée
volontairement pour Blanchard. Telles sont les préten
tions auxquelles Castillon va opposer des moyens.
M O Y E N S .
i° . Compétence.
L ’objet de la demande est le payement de partie du
prix d’un cylindre vendu par un marchand ou fabricant,
de Paris, h deux marchands ou fabricans, de Riom. La
chose vendue a été livrée et posée à Riom. L e prix devoit être envoyé à Paris, soit en argent, soit erTefTets
de commerce.
L ’ordonnance de 1673 veu t, nu titre. 12 , que les juges
de commerce soient compétens en plusieurs cas.
�( 8 )
Entre marchands , pour marchandises ou billets de
change.
Entre toutes personnes, pour lettres de change ou re
mises d’argent de place en place. ( A rt. 2. )
Pour ventes faites à. des marchands et gens de métier,
pour revendre, ou travailler de leur profession. (A rt. 4).
L e créancier peut assigner à son choix, ou au lieu du
domicile du débiteur, ou au lieu auquel la promesse a
été faite et la marchandise fournie, ou au lieu auquel
le payement doit être fait. ( A rt. 17. )
Ainsi il résulte de l’ordonnance de 1673, que Castillon,
créancier de Blanchard et du sieur Assolent, par subro
gation de D u fo u r, a eu le droit d’assigner Blanchard et
Assolent au tribunal de commerce, i°. parce qu’il s’agissoit du prix d’un marché fait entre trois marchands ou
artisans , sous la caution accessoire d’un bourgeois ;
2°. parce que le prix devoit être payé en lettres de
change, ou par remise d’argent de place en place.
11 pouvoit assigner Blanchard et sa caution à leur do
micile; c’étoit Riom ou Paris : Dufour étoit même obligé,
par raison de convenance, à n’assigner ses débiteurs qu’à
Riom , lieu où la marchandise étoit fournie; car c’est le
juge de l’exception qui doit connoître de la demande. O r,
la défense naturelle des débiteurs n’eût pu être que le
mauvais état du cylindre; et il est sensible que la véri
fication d’un objet aussi matériel ne pouvoit se faire que
sur le local même.
Ici d’ailleurs le sieur Assolent n’est rie n , et ce n’est
pas lui qu’il faut considérer. Blanchard est la partie prin
cipale; et certes la juridiction compétente pour l’une des
parties
�(9)
parties doit l’être pour les autres, dans un acte solidaire
et indivisible ; à plus forte raison en ce qui concerne le
iidéjusseur qui s’est identifié avec l’obligé principal, eu
l’aidant de son cautionnement.
L e sieur Assolent convient que Blanchard a pu être
appelé au tribunal de commerce de Riom ; et par une
inconséquence difficile à bien comprendre, il veut qu’on
change à son égai’d de juridiction.
Sa première objection est de dire : Il y a incompétence
ratione loci, parce que D ufour et moi sommes de Paris,
et que la convention y a été faite. O r, j’étois obligé envers
Dufour seul, je ne devois donc être assigné qu’à Paris.
Mais n’est-ce pas là une pure équivoque? S’il s’est obligé
envers D ufour seu l, il n’a pas pour cela traité seul avec
Dufoui\ Sans doute D uiour pouvoit citer Blanchard au
tribunal de commerce de R iom ; il le devoit m êm e, et
le sieur Assolent l’avoue. Gomment donc étoit-il obligé
de faire contre la caution un procès séparé, et de plaider
en deux tribunaux éloignés pour le même payement?
V oilà le sieur Assolent retombé dans la difficulté qu’il
veut résoudre ; il ne se dissimule pas q u e , comme cau
tion, il seroit dans l’ordre qu’il suivît la même juridic
tion ; mais il répond à cela par un autre moyen.
L ’ordonnance de 1667 porte que ceux qui seront as
signés en garantie seront tenus de procéder en la juri
diction où la demande originaire sera pendante, encore
qu’ils nient d’être garans.
D onc, se líate de dire le sieur Assolent, je ne devois
être appelé à Riom que si le procès contre Blanchard y
étoit encore -pendant ; mais il est jugé.
B
t
�C 10 )
Quand il seroit vrai que l’ordonnance de 1667 ait voulu
ainsi, par un mot à double sens, décider une question
dont elle ne s’occupe p a s , le sieur Assolent ne pouvoit
se l’appliquer.
D ’abord il n’étoit pas possible que le sieur Castillon l’assiguât dans le temps que le procès contre Blanchard étoit
encore pendant,* car la convention du 18 pluviôse an 1 1 ,
porte expressément que le sieur Assolent ne pourra être
convenu qu’’après toutes poursuites faites contre Blan
chard.
En second lieu , ce que l’ordonnance établit contre
un garant, ne prouve pas que les cautions aient le droit
de s’y assimiler ; et quoiqu’il y ait de la parité dans la
garantie et le cautionnement, il s’y trouve cependant
une nuance qu’il est important de saisir.
L e garant, dans le sens de l’ordonnance, est étranger
au demandeur principal; il n’a pas contracté avec lu i:
conséquemment c’est tine exception au droit commun,
que de lu i ôter ses juges pour le faire suivi'e ceux de
la personne qui l’assigne.
Mais la caution d’une dette a contracté envers le de
mandeur principal ; elle a suivi le sort du débiteur : et
dès qu’il y a communauté d’obligation, il doit y avoir
aussi communauté pour les poursuites. Accessorium
. sequitur naturam rei principahs. L e marseillais qui
endosse un effet de commerce souscrit par un individu
de Paris, et passé à l’ordre d’un autre marseillais, peutil d ir e , sans violer tous les principes du commerce :
J ’ai traité à M arseille, avec un autre habitant de M ar
seille, donc je ne puis être assigné qu’à M arseille, ra-
�c *o
tione ïoci. Voilà cependant le système du sieur Assolent.
Sa seconde objection est de prétendre qu’il y a encore
incompétence ratione materiœ et personœ. Car, dit-il,
mon engagement est distinct de celui de Blanchard, qui
est marchand. Je suis employé à la comptabilité natio*
nale, donc je n’ai p a s entendu m’assujétir à la juridiction
du commerce, quoique Blanchard ait pu y être assigné.
La cour de cassation a fait justice d’un moyen sem
blable, par arrêt du 10 vendémiaire an 13 , au sujet
d’une vente de commestibles faite par un marchand et
un individu qui ne l’étoit pas.
« Considérant que quoique Martinet ne fût pas né« gocian t, il a suffi qu’il ait fait une association avec
« Chambon, en s’obligeant, conjointement avec lui, à
cc livrer. . . pour qu’il ait été soumis à la même ju ricc diction.
« Qu’il résulterait du système contraire, que le de« mandeur n’auroit pu agir devant les juges consuls,
« que contre Cham bon, et qu’il auroit été obligé d’agir
« contre Martinet devant les juges ordinaires. . . la cour
« casse, etc. »
D ’après cela il faut se dispenser sans doute d’examiner
encore si le sieur Assolent, caution d’un marchand, et
qui n’a pas traité par lu i-m ê m e , peut être présum é,
comme il le d it, avoir stipulé qu’il ne seroit pas distrait
de ses juges naturels.
,
Une troisième objection du sieur A ssolent, prouve
qu’il 11’avoit pas beaucoup de confiance aux premiers ;
car pour la présenter, il faut qu’il soit en contradiction
avec ce qu’il a dit lui-même.
B 2
�( Ï2 )
Il n’a pas nié que la cause ne fût de la compétence
consulaire à l’égard de Blanchard; et maintenant il va
jusqu’à dire que le tribunal de commerce étoit géné
ralement incom pétent, parce qu’un objet vendu à des
marchands , ou artisans, pour travailler de leur pro
fession , ne s’applique qu’à ce qui est destiné à convertir
en marchandises pour les revendre.
A la vérité, Jousse, sur l’art. 4 du titre 12 , qu’il a le
plus longuement commenté, prend à la lettre les compa
raisons de l’ordonnance, pour en induire que la vente de
poinçons à un marchand de vin, de métier à bas à un bon
netier, n’est pas de la compétence du commerce, pas plus
qu’une vente de bois, dit-il, ou de pierres à un meunier
pour réparer son moulin. Voilà ce que pense M . Jousse,
d’ailleurs si judicieux dans toutes ses observations.
Mais il semble que la raison ne peut adopter la restric
tion trop grande que cet auteur veut porter à une juri
diction qu’il ne faut pas laisser empiéter , mais qu’il est
de l’intérêt du commerce de voir protéger et maintenir.
Les réparations d’un moulin ne sont pas destinées immé
diatement au travail d’une profession; mais des tonneaux
et un métier le sont certainement, sauf quelques exceptions
qui doivent demeurer à l’arbitrage du juge. Sans cela le
marchand de vin qui achètera des tonneaux et les revendra,
sera le maître d’alléguer qu’il ne les a achetés que pour
son usage; le serrurier qui achètera du fer, dira qu’il n’a
voulu l’employer qu’à ses propres serrures ; et ainsi dans
ce chaos de questions de faits, un arbitraire décourageant
scroit substitué au texte de la loi.
Les tribunaux de commerce ont eu d’autres guerres à
�( 13 )
soutenir contre les présidiaux , que celles des commentai
res. Plusieurs arrêts de règlement y ont mis fin; et on
connoît notamment ceux de 1733 et 1734, entre les séné
chaussées d’Angoulèm e et de Bordeaux, et les juges con
suls de ces deux villes.
L à l’article de la loi se commente par lui - même :
« Afin de revendre, ou employer dans leur travail et
« au x ouvrages de leur art et profession. »
Ainsi travail ne veut pas dire seulement emploi aux
ouvrages, puisque l’arrêt se sert ici des deux expressions,
comme de deux choses différentes.
Remarquons encore que l’objection du sieur Assolent
n’embrasse pas le fait de la promesse de payer en lettres
de change, ou remise d’argent de place en place, ce qui
est bien sans équivoque de la juridiction du commerce.
Enfin le sieur Assolent ne peu t pas prétendre que Blan
chard a été mal assigné; non-seulement parce qu’il est
convenu du contraire, mais plutôt parce qu’il n’a point
attaqué le jugement qui concerne Blanchard, et qui règle
la juridiction.
2°. Fins de non-recevoir.
L e sieur Assolent les divise en quatre. i° . dit-il, Castillon n’a aucune action contre Assolent, parce qu’Assolent n’a contracté aucune obligation envers lui. 20. Asso
lent est déchargé du cautionnement, pai’ce que Castillon
ne peut plus le subroger. 30. Il y a novation par l’acte
du 20 frimaire an 12. 40. Blanchard est présumé avoir
payé Castillon; ce qui résulte des circonstances.
�(
*4
)
Castillon ne se propose pas de suivre le sieur Assolent
dans tout ce qu’il a dit sur cette partie de sa défense; elle
est fondée sur des erreurs de droit si palpables, qu’une
longue réfutation supposeroit que Castillon n’a pu s’em
pêcher de les craindre.
§. 1er.
Pas d'action.
Il est vrai qu’Assolent n’a pas promis à Castillon de lui
payer 4338 liv. 5 s. pour moitié d’un cylindre; et en effet
il ne lui devoit rien.
Mais il l’a promis à Dufour. Dufour a subrogé Cas
tillon; c’est-à-dire, il lui a vendu sa créance. Donc Cas
tillon est devenu créancier; donc il a une action.
[
L e sieur Assolent ajoute que Castillon n’a le droit que
de faire vendre le cylindre. Mais l’acte qu’il a imprimé
en entier lui disoit seulement que Castillon seroit libre
de faire v e n d r e le cylindre, si B la n c h a r d ne payoit pas;
et comme il seroit fort difficile de retirer 8600 francs d’un
objet dont l’expérience n’a pas favorisé le crédit, Cas
tillon n’a eu garde, en usant de cette faculté, de se faire
opposer une fin de non-recevoir, qui auroit été plus
puissante que celles où en est réduit le sieur Assolent.
§.11.
Défaut de subrogation.
L ’exception cedendarum aclionum étoit un principe
de droit avant l’article 2037 du Code civil; et il est cer
tain que le créancier ne peut plus forcer la caution de
�( i5 )
le payer, lorsqu’il ne peut plus la subroger à ses droits
et hypothèques par sa faute.
Cela s’entend, par exemple , lorsque le créancier a
laissé prescrire ou périr son action ; lorsqu’il avoit une
hypothèque, et qu’il l’a laissé pei-dre.
Mais qu’est-ce que cette hypothèse a de commun à la
cause? L e sieur Assolent ne peut l’y appliquer qu’avec
un sojohisme tellement subtil qu’il devient inconcevable.
Comment D u fou r, dit le sieur Assolent, pourra-t-il
me subroger? il ne lui est rien dû. Comment pourrezvous me subroger vous-même ? votre subrogation donneroit une action contre vous-m êm e, dès que vous êtes
codébiteur de Blanchard.
La p r e m iè r e in te r r o g a tio n n ’a pas b e so in de réponse,
car c e n ’est pas D u f o u r q u i d e m a n d e ; et il n ’est b e s o in
de répondre à la seconde que si Castillon a été o b l i g é pour
Blanchard vis-à-vis D u fo u r, il est ridicule de dire qu’il
l’est vis-à-vis le sieur Assolent. Comme Castillon-, il a payé
sa m o itié, et ne prétend à aucune action à cet égard ;
comme subrogé à D ufour, il a pu assigner et faire con
damner Blanchard qui ne paye pas : donc, à son défaut,
il peut faire condamner le sieur Assolent, et il peut aussi
le subroger en ses droits résultans du jugement du 5 ven
démiaire an 14.
§. I I I .
La novation.
Sans difficulté la novation éteint le cautionnement; il
ne s’agit plus que de savoir quand elle s’opère.
�(
1 6
3
.
,
L ’article 1271 du Code civ il, cité par le sieur Assolent
en sa faveur, porte qu’il y a novation « lorsque, par
« l’effet d’un nouvel arrangement, un nouveau créancier
« est substitué à l’ancien, envers lequel le débiteur se
« trouve déchargé. » O r, ajoute le sieur Assolent, l’acte
du 30 frimaire an 12 substitue un nouveau créancier à
D u fou r, à qui je ne dois plus rien; ainsi cet acte porte
novation.
C ’est-à-dire, suivant le sieur Assolent, que si un créan
cier cède sa créance à un tiers, la caution est libérée. V oilà
qui est un peu g én éral, et ne semble pas fa vo r ise r le
commerce, où chaque oi'dre passé d’une lettre de change
substitue un nouveau créancier, sans qu’on ait imaginé ce
pendant par là opérer novation et libérer les codébiteurs.
L ’objection du sieur Assolent se seroit affoiblie, s’il
avoit aussi imprimé les exceptions que le Code civil a
mises à l’article 1171. En voici une cependant qui sembloit
essentielle.
A rt. 1277. « La simple indication faite par le débiteur,
« d’une personne qui doit payer à sa place.
« Il en est de même de la simple indication faite par le
« créancier, d’une personne q u i doit recevoir -pour lui. »
L e sieur D ufour, en subrogeant Castillon, ou lui pas
sant l’ordre de sa créance, n’a donc pas opéré novation;
car il a cédé tous les droits qui résultoient de l’acte du
18 prairial an 11. Novatio est pnoris debiti in alium
debitum translatio u t p r i o r p e r i m a t u r . Aussi l’ar
ticle 1273 du Code civil dit que la novation ne se pré
sume pas , et qu’il faut que la volonté de l’opérer résulte
clairement de l’acte.
§. IV.
�( i7 )
§. I V .
Le défaut de poursuites.
Encore un principe inconnu, invoqué par le sieur
Assolent. Je ne devois être tenu de payer, dit-il, qu’après
les poursuites faites c o n tr e B l a n c h a r d , et dans ce cas seu
lement. D o n c vous deviez les faire au terme exprès du
payement, ù peine de perdre votre action.
Etrange conséquence !
L ’ordonnance de 1673 ne libère les cautions, même
des lettres de change, qu’après trois ans à compter de
l’échéance; et le sieur Assolent veut être libéré après
un an . . . . après huit jours.
Aucune loi n’exige que , hors les protêts, un créancier
fasse ses diligences aussitôt le terme échu ; et encore à
l’égard des protêts, il faut, pour alléguer la fin de nonrecevoir, prouver qu’il y avoit provision au temps de
l’échéance ; ce que le sieur Assolent n’articule pas.
A la vérité, il veut persuader que, lors de l’échéance ,
Blanchard n’étoit pas insolvable; mais il n’en trouve la
preuve que dans le silence des créanciei's à cette époque^
ce qui n’est autre chose qu’un cercle vicieux.
§. V .
Les présomptions.
Dans ce vaste champ des fictions et des hypothèses, le
sieur Assolent n’est plus entravé dans ses citations de lois
par des lois contraires; aussi il a paru se complaire prinG
�( 18 )
cipalement dans les preuves qu’il se fo u rn it, consistant
en six conjectui-es qu’il dit graves et concoi’dantes.
i re. Obj. Les deux associés ont dû payer le cylindre avec
ses premiers produits.
Rép. Mais le cylindre (brisé et réparé en l’an 12 ) n’a
pas produit de quoi faire exister les ouvriers.
2e. Obj. Castillon , en payant d’avance, a eu confiance
dans son associé, et le sieur A lbert a gardé le silence.
Rép. La c onfiance dans l’avenir ne prouve pas le paye
ment. I^e sieur Assolent aussi a marqué sa confiance en
Blanchard, six mois plutôt, puisqu’il a été sa caution;
ce qui ne prouve pas davantage. L e sieur Albert ri’avoit
que faired’assigner Blanchard, dès qu’il peut se faire payer
du sieur Castillon.
3e. Obj. L ’acte du 13 brumaire an 13 prouvequeÜ ufour
étoit payé. Il y dit que Blanchard est libéré envers lui : c’est
à une époque bien postérieure à l’échéance ; donc Blan
chard a payé.
Rép. Ce traitéest fait tf^fl/ziPécliéance, cela est prouvé;
D ufour n’y dit pas que Blanchard est libéré envers lui ;
donc Blanchard n’a pas payé.
4c. Obj. L ’exploit du 11 germinal , sous le nom de
D ufour, prouve une ruse entre Castillon et Blanchard,
pour faire payer la caution.
R ép. A quels signes se connoît cette ruse? L e sieur
Assolent ne ledit pas. Tous les jours le créancier subrogé
se sert du nom du cédant ; la loi 7, au tt. D e hœr. vel act.
vend, y est formelle. Ici un acte notarié endonnoitle droit;
et user d’un droit n’est pas une ruse.
5 e. Obj. L e désaveu du 12 germinal porte expressé-
�( *9 )
ment que D ufour n’a aucune réclamation à élever ; donc
il établit la libération de Blanchard.
R ép. Comment le sieur Assolent o s e -t-il répéter la
révélation d’une surprise qu’il a tentée sans succès. Certes
D ufour n’étoit plus créancier après avoir cédé sa créance.
C ’étoit du créancier actuel qu’il falloit avoir cette décla
ration; et D ufour, loin de la donner pour lu i, a au con
traire ajouté dans l’acte : Sans nuire à Castillon.
6 °. Obj. La lettre du 17 frimaire prouve qu’il existoit
une fabrique d’indienne, et qu’elle étoit en plein produit.
Castillon doit produire l’acte de société et les registres ;
la preuve de libération s’y trouveroit matériellement éta
blie.
R ép. C’est donc pour ce puissant moyen que le sieur
Assolent a imprimé une l o ng ue lettre où Castillon a l’a
vantage du moins de prouver î\ la cour combien est grande
la véracité du sieur Assolent. Il dit quron n’a songé à s’a
dresser à lui que long-temps après le terme : o r , la lettre
le devance de treize jours, et c’est la troisième lettre.
C’est là que le sieur Assolent veut voir la preuve d’une
fabrique en plein rapport; et c’est là qu’on voit au con
traire que Blanchard est entièrement perdu, s’il est pour
suivi, et si Assolent ne paye pas pour lui. A u reste, Cas
tillon produit un procès verbal de carence qui dément
toutes les allégations du sieur Assolent. C’est donc à lui
à le combattre, ainsi qu’il avisera.
T elle est la dernière ressource d’une caution qui voudroit être quitte de son engagement sans bourse délier.
Mais si l’honneur ne lui fait pas un devoir de respecter
�(2 0 )
cet engagement, sa convention l’y oblige; car « les con
ventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites;
« elles doivent être exécutées de bonne foi. » ( Code
c iv il, art. 1 1 34. ) Et certes s’il est malheureux pour le
sieur Assolent de payer la dette d’un b eau -frère, il le
seroit bien davantage pour Castillon de payer la dette
d’un étranger. Il n’a fait une entreprise avec Blanchard
que sous la foi du cautionnement promis par le sieur
Assolent, ainsi que la lettre produite l’atteste. Cette en
treprise n’a pas eu de succès ; et Castillon , qui déjà
perd sa propre m ise, ne doit pas éprouver une double
perte pour alléger le sieur A ssolen t, qui s’est imposé
un devoir sacré, et qui ne peut vouloir en rejeter le far
deau sur autrui, sans manquer à la probité et à la justice.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. B E A U D E L O U X , avoué licencié.
A R I O M , de l'imprimerie de L
a n d rio t ,
seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Novembre 1806.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Castillon, Étienne. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Beaudeloux
Subject
The topic of the resource
créances
cylindre à indiennes
textile
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, Pour Étienne Castillon, habitant à Riom, intimé ; Contre Jean-Baptiste Assolent, habitant à Paris, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1794-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0310
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0502
BCU_Factums_G1607
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
cylindre à indiennes
textile
-
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93867ad41ff4b0b9ff94236e6ab2518c
PDF Text
Text
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2SS*
l r e . SECTION.
C O I F F I E R , docteur-médecin, et Ajuger
C l a u d e C H A L A M B E L , son gendre, le aoûtappelans d’un jugement du tribunal du Puy ;
u l i e n
C O N T R . E
GARDE , p rop riétaire,
B a r th é le m i-F e r r é o l
intimé.
----------“
tt<*éu
DE R I OM .
-----------
~
Une femme grevée de substitution a-t-elle pu instituer
/* s S f r * d
esétrangers? Les lois de 17 9 2 , abolitives des substitu/ ^ ^ ^ T L i o n s , en la rendant propriétaire non grevée, ont-elles
validé ses institutions antécédentes?
Etienne Galien et Françoise Reynaud ont eu cinq filles;
savoir, Marianne, qui épousa Jean Fontane, dont est
y.
issue la dame Coiffier, Françoise, Magdeleine, Gabrielle
e t A n n e L e s deux dernières ont été faites religieuses.
2
L e 4 m a i 1 7 3 3 Etienne Galien fit son testament. Il
'I
'
légua 4000 fr. à ses filles.
:
Il institua Françoise Reynaud, sa femme , son héri!
/n n
/ tière, a la charge de remettre l’hérédité à l’une de ses
<riquatre filles puînées, quand elle voudroit. E n cas de non
remise , il désigna Françoise.
A
�Il évalua son mobilier 4000 francs, et prohiba tout
inventaire.
En fin, il légua à sa femme la jouissance de ses biens
jusqu’à ce qu’elle eût fait remise de l’hérédité : il lui légua
aussi la plus-value de son mobilier.
Six jours après, Etienne Galien lit un codicile, par
lequel il déclara qu’il n’entendoit pas excepter Marianne,
sa fille aînée, de la remise de son hérédité.
Il déclara qui si celle à qui devoit échoir cette héré
dité mouroit sans enfans, ou scs enfyns avant la puberté r
il entendoit qu’elle ne pût disposer de l’hérédité en
faveur d’aucune personne étrangère , et qui fût hors sa
ligne, mais bien en faveur de ses sœurs, la primogéniture observée.
f
Etienne Galien mourut aussitôt après ces actes; et par
testament de 1749, Françoise Reynaud , sa veu ve, remit
la succession Galien à Magdeleine Galien, qu’elle institua
aussi son héritière.
L a dame Magdeleine Galien contracta mariage avec
Balthazard Pauze, le 7 novembre 17 5 4 ; et oubliant déjà
la nature de son titre, elle institua son futur époux héritier
de ses biens; à la vérité elle ajouta la clause suivante r
« et ce, au cas où elle décéderoit sans faire d’autres dis « positions valables, ou avoir des descendans, sansa cependant que ladite institution puisse^nuire ni préju« dicier à ses volontés. »
Bientôt elle eut l’occasion qu’elle s’étoit réservée; elle
se crut en d a n g e r de mort, et rédigea un testament olo
graphe, par lequel elle nominojt héritière la dame Foutane, sa sœur.
�(
3)
Mais sa destinée étoit de faire beaucoup d’actes inutiles;
elle a survécu quarante-cinq années à ce testament.
L e 23 octobre 17 9 0 , le sieur Barthélexni Garde, partie
adverse, neveu du sieur Pauze, contracta mariage avec
une demoiselle Vissaguet.
L e sieur Pauze, qui n’ignoroit pas le vice de l’insti
tution de 17 5 4 , et qui vouloit s’assurer quelque chose,
institua et fit instituer par Magdeleine Galien, sa femme,
le futur pour leur héritier commun.
Mais ce fut à deux conditions; la première, que le
survivant des deux instituans jouiroit des biens des ins
titutions; la deuxième, que luiBalthazard Pauze touche
rait la dot de la futui’e, sans être tenu à la rembourser.
Magdeleine Galien est morte sans postérité le 1 1 nivôse
an 8.
Balthazard Pauze, son m ari, lui a survécu, et a joui
de ses biens.
Les héritiers de la dame Fontane le voyant en pos
session, et ignorant l’institution de 179 0 , l’ont d’abord
assigué en remise de l’hérédité, en germinal an 8.
L e sieur Garde a été ensuite appelé, et il a été pris
contre lui des conclusions en nullité de tous les actes par
lui opposés.
Leurs moyens étoient fondés sur ce que la substitution
I733 avoit ôté à Magdeleine Galien tout pouvoir
d’instituer jusqu’en 17 9 2; et qu’après cette époque, elle
n’avoit fait aucun acte qui transmît sa succession.
Cependant le tribunal du Puy a débouté le sieur Coiilier
de ses demandes, par jugement du 16 pluviôse an 12 , dont
est appel.
A 2
�(
4)
M O Y E N S .
De trois institutions qu’a faites la dame Pauze, une
seule auroit été dans l’intention des testamens de 17 3 3 ;
c’est celle de 1756 : car la dame Pauze, décédant sans
enfans, devoit remettre les biens de son père à sa sœur.
Mais le sieur Coiffier n’a fait aucun usage de ce testament.
Il reste donc deux institutions qui s’entre-détruisent,
et que cependant le sieur Garde appelle au secours l’une
de l’autre : car s’il n’est pas héritier direct de la dame
Galien en 1790, il veut au moins retrouver sa succes
sion dans celle du sieur Pauze, héritier en 1764.
Mais comment le sieur Pauze auroit-il été valable
ment héritier de sa femme en 1764? elle n’entendoit rien
lui assurer, puisqu’elle se réservoit de disposer; puis
qu’elle n’entendoit pas que cette institution pût préjudicier à ses volontés.
Une institution ne donne pas une chose- présente ,
mais il faut qu’elle donne au moins une espérance irré
vocable : sans cela elle n’existe plus, car elle est aussi
une donation de succession et du nom d’héritier. O ï,
donner et retenir ne vaut.
L e sieur Pauze ne comptait pas lui-même sur cette
institution, puisqu’il a autorisé sa femme, en 17 9 0 , à
en faire une autre. On ne peut alléguer pour lui de ci’ainterévérentielle : il étoit le chef de la puissance maritale ; il
autorisoit l’institution..
Voyons donc si la dame Pauze a pu valablement ins
tituer en 1790,
�m( 5 )
Depuis 17 3 3 elle étoit grevée de substitution envers
une de ses sœurs ; il lui étoit défendu d’instituer un
étranger. O r, celui qui accepte un don conditionnel ne
peut s’affranchir de la condition.
On objecte que la dame Fontane étant décédée avant
la dame Pauze, n’a pas transmis îl ses enfans l’espoir de
la substitution, d’après l’art. 20 de l’ordonnance de 1747.
Mais l’article 55 du titre 2 porte que pour les substitu
tions antérieures on suivra les lois, et la jurisprudence qui
avoit lieu. O r , les biens de la succession sont situés dans
le parlement de Toulouse, où on a toujours jugé que
les substitutions passent, en cas de prédécès, aux enfans
de l’appelé. L e statut est réel ; et dès-lors les enfans de
la dame Fontane ont été saisis après elle de la substitu
tion. ( Furgole, sur l’art. 20 , injine. )
On objecte encore que la substitution de 17 3 3 est
nulle , faute de publication et enregistrement.
Mais c’eût été à Magdeleine Galien à remplir ces formes.
Celui qui se dit son héritier fait valoir ici un moyen
étranger, proscrit par les articles 32 et 34 du titre 2 de
l’ordonnance de 1747•
Magdeleine G alien, qui avoit accepté une succession
grevée, étoit donc dans l’incapacité absolue d’en disposer
autrement que dans l’intention du testateur, et surtout
d’en disposer contre sa prohibition.
Les aliénations qu’elle eût faites à de tierces personnes
auroient v alu , parce qu’elles auroient acquis de bonne foi?
n’y ayant pas eu de publication.
Mais un don quelconque, ù titre universel, n’a pas la
�( 6 )
même faveur. Magdeleine Galien n’en avoit pas le droit;
et son prétendu héritier, s’identifiant avec elle pour la
succession, ne peut en sépai-er ses intérêts pour faire
valoir des moyens étrangers.
Ainsi Magdeleine Galien n’étant pas , en 17 9 0 , pro
priétaire des biens substitués, n’a pas pu, à cette époque,
les comprendre dans son institution.
A cela on objecte que la loi du 14 octobre 17 9 2, en
supprimant les substitutions , l’a rendue propriétaire. O r,
ajoute-t-on, comme une institution n’est qu’un testament
irrévocable, l’effet ne s’en règle que par le décès : elle a
donc pu tester valablement d’une chose qu’elle n’avoit
pas, pourvu qu’elle l’eût à son décès.
L e moindre défaut de ce raisonnement est d’être fondé
sur une base fausse et captieuse.
Une institution n’est pas un testament ; c’est , dit
D elaurière, un don irrévocable de succession ,• et cette
définition est adoptée universellement.
L ’institution participe de la donation entre-vifs et de
la donation à cause de m ort; si elle n’avoit qu’un seul
de ces caractères, elle seroit dénaturée.
A in si, quand les lois ont prohibé aux pères d’avan
tager leurs enfans, une institution auroit été nulle de
plein droit, parce qu’un père ne pouvoit rien assurer
entre-vifs; il ne pouvoit pas alors faire un don irrévo
cable de sa succession.
De même Magdeleine Galien, enchaînée par une subs
titution , n’a pu disposer des biens grevés qu’après le 14
octobre 1792 ; mais elle n’a pas pu faire un don irrêvo -
�m
cable de ce qui s’en trouvèrent lors de l ’ouverture de sa
succession.
L a loi du 18 pluviôse est absolument dans ce système:
car l’article i er. ne maintient les institutions antérieures
au 7 mars 17 9 3 , en ligne directe, qu’en tant que ce sont
des actes irrévocables de leur nature. Elle ne valide
point du tout les institutions postérieures à la prohibi
tion, parce qu’alors un pore ne pouvoit pas instituer,
même en survivant aux lois prohibitives.
L e sieur Garde ne peut se créer un moyen qu’en com
parant son institution à un testament : il a raison; mais
cela seul le condamne sans retour.
Ce testament, qu’il est impossible de dire irrévocable
pendant la substitution , contient une disposition uni
verselle.
Il devoit donc être refait d’après la loi du 22 ventôse
an 2 , parce que la dame Pauze a survécu à sa publi
cation. II ne l’a pas été : donc la disposition antécédente
est radicalement nulle.
Enfin, on ne voit aucune apparence de liberté dans cette
institution, et tout prouve que la dame Pauze l’a ignorée.
Une signature fugitive, extorquée on ne sait comment,
pour une simple procuration, afin d’éviter la solennité
d’un contrat de mariage, est déjà un motif de suspicion.
Et quand on voit le sieur Pauze s’adjuger un usufruit
et la dot de la lu turc sans remboursement, 011 voit qu’il
dicte les conditions.
O r, son domicile étoit en coutume d’Auvergne. Ce
�(8),
statut régissoit la personne des époux, et prohiboit tout
don de la femme au m ari, directement ni indirectement.
Peut-être bien le sieur Pauze n’espéroit-il pas survivre
à son neveu, mais il prenoit des précautions actuelles.
L e premier bénéfice de l’institution étoit pour lu i, et
dès-lors la loi étoit violée.
En résumé, la dame Pauze a fait ce qu’elle ne pouvoit
pas faire, et n’a pas fait ce qu’elle pouvoit faire. Quand
elle a institué le sieur Garde, elle n’a pu lui donner que
ses biens personnels ; elle n’a pu lui assurer des biens
substitués, dont il lui étoit défendu de disposer au préju
dice des siens. Lorsqu’ensuite la substitution a été éteinte
en 17 9 2 , elle auroit pu en disposer, et elle ne l’a pas fait.
Les moyens de droit se réunissent donc aux circons
tances pour anéantir l’effet d’une institution évidemment
subreptice, ignorée peut-être par l’instituante, faisant
violence à la volonté d’un père qui eût réglé autrement les
affaires de sa descendance ; institution, enfin, qui blesse
les principes et les convenances, en trompant l’intention
d’une famille, pour faire passer tous ses biens dans une
famille étrangère.
«
M . B O N A R M E , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R ,
avocat.
M° . M A R I E , licencié avoué.
A R IO M , de l’imprimerie de L
andriot,
seul imprimeur d e l a
Cour d’appel. — Août 1806.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Coiffier, Julien. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bonarme
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
coutume d’Auvergne
Description
An account of the resource
Précis pour Julien Coiffier, docteur-médecin, et Claude Chalambel, son gendre, appelans d’un jugement du tribunal du Puy ; Contre Barthélemi-Ferréol Garde, propriétaire, intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1733-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0308
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Germain-Lembron (63352)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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coutume d’Auvergne
Successions
testaments
-
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41286c982dbe0bfb5bb772fdc441d8c7
PDF Text
Text
■ i I
COUR
1 '
--
MÉMOIRE
D'APPEL
SÉANT
A RIOM.
P
o
Jacques
u
r
C H A V E , appelant
;
C O N T R E
J e a n n e V A L L A , et E l i s a b e t h F E R R I E R ,
1
sa f i l l e
majeure , intim ées.
L A recherche de la paternité est interdite , et c’est
dans nos mœur s u n scandale de moins. D ans ce secret de
la nature , le législateur ne pouvoit que s’en rapporter à
la crédulité de l’hom m e, ou se jeter dans le vague des
conjectures : le premier parti seul étoit juste; la loi l’adopte;
et aucun enfant naturel n’a le droit de nommer son p ère
que celui qui a voulu se déclarer tel.
Nul acte ne doit donc être plus légal, plus libre, que
cette déclaration. L e soupçon seul de contrainte est incomA
�O )
patible avec elle ; car si elle n’est pas clairement reflet
spontané de la réflexion , le but moral de la loi n’existe
plus*
L ’appelant réclame contre l’oubli de ces principes, et se
place sous la protection de la cour, pour faire annuller un
acte inform e} auquel on l’a fait participer par la violence ;
il demande à n’être par forcé de reconnoître un enfant
qui ne fut jamais le sien.
Les premiers juges, n’ont pas voulu admettre la preuvequ’il étoit à même d’offrir ; et si cette opinion pouvoit
prévaloir , il en résulterait que , contre le vœu de la loi,,
un homme donneroit son nom malgré lui à un enfant
naturel ¿seroit Contraint de prendre soin'd’un étranger^
et de lui laisser sa succession.
; n
v. ^ .
F A I T S .
C1
r
Jeanne V a lla , et Elisabeth Ferci.'er, sa fille, habitent lelieu de M azet, mairie de Chambon. Leurs habitudes et
leurs mœurs étoient à peine connues de Jacques Chave,.
qui demeure à la distance d’environ une lieue de leur
domiciLe.
Son âge, plus avancé même que celui de la mère, ne luii
eut donné aucun prétexte de se,rapprocher delà fille. U a
séducteur à cheveyx.blancs est rare ; au village-il ne connoît pas l'oisiveté qui nourrit les illusions, et la monotonie-,
de ses ti’avaux. rustiques avance l’amortissement de ses,
. sensations, en occupant toute son existence.
( Ces femmes étoient donc absolument étrangèresà Chnve,,
lorsque, tout d’un, coup il s’est trouvé mêlé à leur destinée;
�( 3 ;)
par une de ces sourdes manœuvres que l’enfer sçul.pçut
faire concevoir.;
yl . f
i;
. .!: •
■Un matin à huit heures ( le 21 germinal an 9 ) ’„ Jacques
C h a v e, malade, est brusquement arraché d,erson lit; par
deux frères de la fille Forrier ,.suivis de trqis.autres jeunes
gens armés de bâtons ou de iourch.es. Il se disent envoyés
par le sieur de Bannes, maire de Chambon , et comman
dent à Chave de les suivre dan^ la maison de ce sieur de
Bannes. Il Çs’habille
et les suit.
, itr.
'
1
. .
^
II. .
. ç
Là il trouve Jeanne Valla qui paroît en grande, co lère,
l’accueille par des.injures grossières, lui dit que sa fille est
accouchée , depuis |quinze jours , d’un garçon dont il est
le père , suivant le récit de sa fille et de Mv le maire ,de
Cham bon,, et qu’il'fautf,signer sur le champ l’acte de
naissance.
... .
Chave , étourdi d!uue, .vespériç aussi inattendue, pressé
entre les cris de la mère ,,les coups de poings des frères ,
et les menaces de leurs trois hommes d’escorte-,iveut élever
la vo ix , et invoquer la notoriété pyifyliquÇpdes¡bâtops sont
levés contre lui pour toute répons^ : il solli^itç la justice
du maire mais, le maire le prend à part pjsup lui dire
qu’il jÊ tÊ té céder à la circonstance, et q;ue sa vie n’é^#?
pas en sûreté. L ’avenir a appris AjÇhave quel intérêt pres
sant le maire lui-m êm e avoit à ce que la .calomnie eût
une direction certaine.,
On comprend alors que cette dernière insinuation a
ébranlé le courage de Chave. L e sieur de Bannes prend
aussitôt le registre des actes, y efface quelques mots, en subs
titue d’autres, et remet une plume à Chave : une seconde
résistance amène de nouvelles violences. Il fait enfin ce
quTon exige j il signe.
•
l
-
f
n
I
■' . i
j
.
. ••
/
�C4 )
En sortant de chez le ‘maire , *les satellites le inènëht ait
cabaret, se font donner à boire, le forcent à payer, mettent
Fehfant dans ses bras , lùi font les plus horribles- hlenaces^
s’il.dit un mot ; et èe'retirënt.
' Sans doute il’mâîiqùë'à.'ces füits beaucoup de circons
tances importantes; mais' Chave , glacé d’épouvante r
étoit-il1libre rde réfléchir'? La plupart de ces détails ont
échappé ;Ps;iJiVi^moirè/ou plutôt à son attention.
Enfin Chave, revenu de sdn étourdissement , put réflécliii* sûV lés cbn!st*qtfcnceâ‘ de 'Pacte'1qu’on vehoit de lui,
extorquer, ‘et ¿ur le p;a rti iju’il avoit» à prendre.-'
-:
X»a dém arche la plus pressée et la plus indispensable-,:.
ét6it‘id’é fsë d^ârraisier d e H ’innôceiitë* Créatü’re- qü’üriëmÔré'tdéniftüFéfe') avb itJire|é'tèc' ?dfe1^ës'^Biiàs^ pou r ’Pk'ban-i
donner aux soins d ’un étranger. Chave hésita «’ il las
rapj^brteroit1
, claris -la'1h u it,
la jp6rtexlés'Fert;ier!: cëpén-
darit lia r e lig io h ^ l’hündimit'é1, ‘peut-être- la térreUr pbuirlüi-Hlêittë / Péinipbrtëi’èht sur:son d'ég’cmt ,Jbt•il?1fït) '^drteifré iifa iit ;à.‘"iinfc‘ nourrice.., * 1'Ui5i'),: 1
" 10 t /;()V '
 ïaîs1a u s s it ô te t :en Signe* de sa pl&téstà tib ia il’ rendit
^ l'in te aii^juge 'de- paix d e'T én ce ; le juge^ ^ a ix lertÊiiroya au'magistrat'die 'sûreté : mais commë-wÇ|ainte*
etoit dirigée- ah^r'cOntre lé -¡Maire 7 ‘les autorités déli^
bérèrent¿t■
é
b,
: iî .
7 ’ne* itësôlüïehtr r
4î
Chave inquiet, et ne voulant pas'cjüe'sofr'¿{lfence put
déroger à son d ro it, sè décida- ;V citer, le 5 flol’éal iiri g ,
tant'Jeanne V alla' et'sa fille , que le maire Ihï -fncnie,
pour voir dire qu'il'kèrbit restitué contre la i'éiioniibissance dé paternité1qui ‘ltli‘ «voit été 6jitovipiéii!ipai;,'laviolence', et Ijùfe ïe maire seroit téüu de raycif du*registre
�( 5 )
ce qui çoEceVnoit' ladite ’ rèconnôissance y'èt la mere et
la fille pour être condaïnn^ès à Reprendre l’enfant, payer
ses alimens
chez la*1; '■nourrice
..avec
dommages-intéi’cts.
•
1. , j I J* : v“j ;
•
; J'
;
.' |
On pense bien .qu’au'bureau dé paix(la fille Ferrier
ne manqua pas de ¡faire, la réponse d’usage, qu’elle avoit
élé séduite et abusée sons promesse de mariage , et qu’elle
seroit en état de prouver les familiarités de Chave avec
elle j^cehii-cl l’on îdéfia^et¡ajouta même qu’il ofiroit de
prouver cëïtâ avèlc qui èïle avoitJeu fréquentation, i
T o u t cela étoit de trop de part et d’autre , puisqu’il
n’est permis de rien prouver ; et la fille Ferrier ne1
risquoit rien à faire bonne contenance. Quoi qu’il cri
soit, un premier jugement,' du 28 pluviôse an 10, mit
le inaire hors de procès, comme ne pouvant etre’ juge
sans autorisation , et appointa les autres parties en cjroit.
Cet appointement lie fburiyt’ pas plus d’eclaircissc-ment. Chave' persista toujours à offrir la .preuv.ç’ de la
violence exercée contre lui : et les femmes F errier, q u i,
y -ii.
■ -r"
•
’ . ' •
'.i;
.1. ■ i-.
au bureau de paix , n aVQient paru avoir aucune crainte,
firent leurs bil’orts pour soutenir cette preuve inadmis
sible. Leur système.j)rovaîut'; et le 14 fructidor an 10^
le tribunUl d’Yssengeaux rendit le jugement qui suit. ***
<r C orisîU étfan tqu e l^ à rticl^ i'tìu ' titre 20 de ¡’o rd o n n a n ce d e î GGj
ddfèttd’ ‘d e recevoir la preuve; pai1tditaoins c o n tre et ou tre le c o n te n u
a n x i é t é s ) p u b lic s ; q u ’à la vérité; la f o r c e , l a v i o l e n c ô , Sont u n
iï)o^erypo;qr ,leS fa ire rescin d er * m ais q u 'e n ce cas il fa u t a rtic u le r
d^. m çn a ce ç!g ra v e s, q ui fe ro ie n t cra in d re p ou r la-vie metus mords,
ou q u e la p a rtie o b lig é e a u ro it s o u ffe r t ch arte p riv é jî, ainsi q u e
l ’en seign en t D o m a i en ¿es L o is éiv ile s,, et! P o lliie r en son T r a i t é
<ì«'si ¿l'j^tidh’ÿj
• - ü» .
'
l'
c
il ?
.
u
�(S )
» Considérant que Jacques Chave n'a articulé qu’il lui ait été
fait aucune m çnace, ni qu’il ait été commis aucun excès sur sa
personne, ni dans son dom icile, ni dans celui du maire où il s’étoit
rendu pour reconnoilre pour lui appartenir l'enfant dont s’éloit
accouchée Isabeau Ferrier; et qu’étant dans ce dernier dom icile,
il pouvoit articuler sans crainte les excès ou menaces qu’il auroit
éprouvés, contre ceux qui s ’en seroient rendus coupables envers
sa personne. »
Jacques Chave est débouté de toutes ses demandes tant princi
pales que subsidiaires, et il est condamné aux dépens.
r
Cependant Chave avoit offert expressément de faire
preuve de menaces et violences : ses écritures en font foi.
Il «toit privé alors d’un mo}ren important. L ’expédition
de l’acte de naissance produite aimé au procès, ne mentionnoit ni les surcharges ni les ratures ; elle étoit délivrée
par le sieur de Bannes, m aire, qui avoit trop d’intérêt
à, en cacher l’irrégularité' pour la faire soupçonner. A u
reste, Chave s’est pourvu en la cour contre le jugement,
et il sera question d’examiner de quelle influence la forme
de cet acte doit être pour la décision du procès.
M O Y E N S .
*
L ’ancienne législation française étoit extrêmement dure
contre les enfans naturels; et cependant, par .une étrange
inconséquence, elle admettait les preuves de patèrriité
sans distinction. Aujourd’hui la loi a fait pour -eux
davantage : mais sans vouloir percer le mystère qui
couvre leur naissance, elle rejette désormais les proba
bilités et les fausses conséquences ; elle ne voit dans
l’enfant né hors le mariage qu’une innocente créature
�( 7 )
digne de la pitié de tout le m onde, mais ne tenant à la
société que par celle qui lui a donné le jour. Si cepen
dant un homme , guidé par des apparences qu’il aie droit
d’apprécier lui - même , et cédant à l’impulsion de sa
conscience, veut se donner le titre de père , la loi le
lui permet, s’il n’est engagé dans les liens du mariage :
mais comptant pour rien aujourd’hui toutes les démons
trations extérieures, elle exige une déclaration authenti
que et non équivoque ; elle prescrit à l’acte une solen
nité plus grande que pour la naissance même de l’enfant
légitime.
, L ’intention du législateur étoit si claire, qu’elle a ôté
tout prétexte à l’astuce, et n’a laissé de voies qu’au faux
ou à la violence. Mais à qui peut être réservée l’une ou
l’autre de ces voies criminelles ? Ce n’est pas à la fille timide
q u i, rougissant encore d’une première foiblesse, et par
tagée entre l’amour de son enfant et la honte de sa naissance, n’en ose nommer le père que dans le secret de son
cœur, et se fait l’illusion de penser que le mystère dont
elle s’enveloppe la protégera contre l’opinion qui fait
son supplice.
Mais que feront ces femmes déhontées , qui ne voient
dans la prostitution qu’une h abitudedan s leur avilisse
ment qu’un état, et dans leur fécondité qu’un accident?'
Incertainesi elles-mêmes d’une paternité qu’elles déféroient
naguères suivant leurs convenances, elles n’en arrachoient
pas moins des sacrifices pécuniaires aux hommes qui leu r
étoient souvent les plus étrangers,, mais qu’épouvantoit
la perspective d’une honteuse et publique discussion. Si
on leur laisse entrevoir aujourd’hui une tolérance quel-
�. r , .................. ■. . .
W ) .................. . .
coriqué, que Tevar cou fera-t-il de tenter d\iutres voies pour
en venir aux mêmes fins?'Et s’ il est près de leur demeure
un citoyen paisible, qui, par ses mœurs douces et réglées,
puisse passer pour pusillanime, quelle difficulté y aura-t-il
de rejoindre adroitement que c’est là le coupable, d’inté
resser contre lui quelque personne crédule, de l’effrayer
lui-même sur les’ dangers de’ sa résistance, d’ameuter s’il
le faut ceux qui ont un intérêt réel au succès de la négo
ciation ! Jadis il falloit des témoins,1aujourd’hui il ne faut
qu’une simple signature; tout cela peut s’exécuter avec
rapidité : ce n’est qu’un changement de complot.
Heureusement cette rapidité même ne laisse pas au
criminel le calme de la réflexion: souvent ses fautes le
trahissent, et, quelques légères qu’elles soient, il faut les
compter avec scrupule; car on est bien assuré qu’elles ne
sont pas un simple résultat de’ sa négligence, mais qu’elles
ont échappé à l’excès de sa précipitation.
Ceux qui ont guidé la fille Ferrier dans ses démarches
n’ont pas visé à l’exactitude ; la cour en sera convaincue
bientôt par la forme de l’acte de naissance qui fait son titre.
Une seconde découverte la convaincra encore qu’il ne
s’ agit point ici de réparer, envers une fille séduite, des
torts que' la malignité suppose toujours. La fille Ferrier
a , le 20 prairial an n , donné une nouvelle preuve de
sa continence, en faisant baptiser un fils sous les auspices
de son frère et de sa m ère, que l’acte apprend môme avoir
été sage-femme en cette circonstance.
Il ne paroît pas que pour cette fois la mère et la fille
Ferrier aient jugé à propos de réunir un conseil pour
disposer du nouveau n é , et lui élire un père à la plu
ralité
�( 9 )
ïalitc des suffrages; il est vraisemblable que la précédente
tentative lesavoit intimidées. .
Q u oiq u ’il en soit, et soumettant cette découverte pré
cieuse aux réflexions de la co u r, l’appelant ne s’en occu
pera pas plus long-temps, et se contentera d’observer
q u ’il n’y a rien de légal dans la prétendue déclaration de
paternité qu’on lui a fait signer, et au surplus que les faits
<3e violences articulés suffiront pour la détruire. C’est à
l’examen de ces deux propositions que l’appelant réduit
sa défense.
i°. L a déclaration de -paternité ri est pas légale.
La loi du 12 brumaire an 2. s’occupoit de trois espèces
d’enfans naturels, après avoir décrété eu principe qu’ils
étoient successibles.
i°. Ceux dont le pèreétoit décédé, et il leur suffisoit
de prouver une possession d’état, par des soins donnés
à titre de paternité, et sans interruption ; 2°. des enfans
dont le père et la mère seroieut encore vivans lors du
Code c iv il, et leur état civil y étoit renvoyé; 30. de ceux
dont la mère seule seroit décédée lors de la publication
du C od e, et alors la reconnoissance du père, faite devant
l’officier public, rendoit l’enfant successible.
Il s’agit ici d’un enfant de la seconde espèce ; et le pré
tendu père , quel qu’il so it, de même que la m ère, sont
dits vivans.
O r , quelle nécessité, quelle urgence y avoit~il de
prévenir la publication du Code civil , en faisant faire
«ne déclaration que la loi ne demandoit pas, et qu’elle
B
�C i° )
ajournoit au contraire ? N ’apercevroit - on pas déjà le
dol dans cette extraordinaire prévoyance ?
D ira-t-on que le Code civil prescrit aussi une décla
ration authentique, et qu’on n’a pas violé la loi en la
devançant? Mais qui blâmera les législateurs de l’an 2 ,
d’avoir voulu prévoir que leur système ne seroit peutêtre pas celui du Code civil ? qui leur reprochera d’avoir
supposé que les dispositions de ce code seroient déli
bérées avec plus de m aturité, et de s’être défiés de leur
premier systeme sur une innovation aussi importante?
Ils voulurent régler le passé seulement ; et les débats
qui ont eu lieu sur la loi transitoire du 14 floréal an 11
nous apprennent assez qu’il n’y a eu , dans l’intervalle de
l ’an 2 à l’an 11 , 'aucune législation touchant les enfans:
naturels. Les bulletins de la cour de cassation sont aussi
remplis d’arrêts qui ont cassé tous les jugemens dans les
quels les tribunaux avoient voulu ré g le r, même provi
soirement , le sort de quelques enfans naturels , pendant
cette lacune de neuf ans.
Il ne pouvoit donc être question de fixer l’état de
l’enfant d’Elisabeth Ferrier qu’après le Code c iv il, dont
l’art. 334 porte que la reconnoissance sera faite par un acte
authentique, si elle ne l’a pas été par Pacte de naissance.
Mais fût-il indifférent que la reconnoissance contestée
¿lit été faite avant ou après le Code civil, malgré la sus
pension totale exigée par la cour de cassation ,-et rappelée
par la loi transitoire ; cette reconnoissance n’en est pas.
moins irrégulière} car elle n’est faite ni par Pacte de
naissance lui-mèm e, ni par un acte séparé authentique..
Voiei comment cet acte est littéralement écrit au registre*
�C II )
À'CTÏ
DE N A I S S A N C E .
n D u huitième four dit mois de germinal, l’an g de la répu
blique française. A cte de naissance de Jacques, f ili.e ( Ce mot
est effacé, et on y a substitué au-dessus , dans l ’interligne,
F e r r ie r , que Von a encore efface', et Von a écrit à côté C h a v e . ),
né hors de mariage, né le septième jour du mois de germ inal,
à sept heures du soir, fils d ’Isabeau F errier, non m ariée, domi
ciliée du lieu de la M arette, susdite com m une, et Isabeau Ferrier,
non mariée; le sexe de l’enfant a été reconnu une ( On a couvert
d’encre la lettre e. ) f i l s , né hors de mariage : premier tém oin,
Jean-Pierre Ferrier, demeurant à C h am b o n , département de
la H a u te -L o ir e , profession de cultivateur, âgé de tren te-n euf
an s; second tém oin, Pierre R u e l, demeurant à C h am bon, dé
partement d e la H a u te -L o ire , profession de tailleur d’habits,
âgé de cinquante-quatre ans. Sur la réquisition à nous faite par
M arie R u e l, sage-fem m e de ladite accouchée, avons inscrit.le
sus-nommé Jacques F e rm e r ( Ce mot est raturé, et Von a mis
au-dessus, dans Vinterligne, C h a v e .) , portant l e nom de sa
mère ( Ces mots ont été rayés, et Von y a substitué ces mots :
l e nom du ri:nE. ) ; et ont la déclarante ne savoir signer, et les
témoins signé. F errier, R u e l, signé à Foriginal. »
u L ed it Jacques Chave père reconnolt ledit1Jacques son fils, de
» ladite déclaration de la présente, acte; le’ reconnoît pour son
» véritable fils, avoir droit à tous ses biens, en présence de Jean» Louis Riou. ( -{- Ic i est un renvoi. ) Constaté suivant la lo i, par
» moi A nn et de Bannes, maire de la commune de C ham bon, fai» sant les fonctions d ’officier public de l’état civil. Ledit maire
» approuve toutes les ratures ci-dessus. D e Bannes, maire, signé.
»
Et de Pierre C a llo n , et de Jean-Pierre Frescliet, et de Jean» Pierre Ferrier ; et dit Jacques Chave a signé avec les témoins.
’
B 2
�(
12
)
» O n t s ig n é , le d it P ie rre C a llo n a d é c la ré n e sav o ir s ig n e r , C h a y e ,.
n
R i o u , F r e s c h e t, F e r r ie r . D e B a n n e s , m a ire » sig n é . »
( N ota. L ed it renvoi est en marge, en travers. )
Pour copie figurée :
L e secrétaire général de la préfecturede la Haute-Loire ,
B A R R É S .
Il est aussi évident qu’il puisse l’ê tre , que cet acte se
Compose de deux parties bien distinctes , qtii ne sont pas
d’un même contexte , ne sont pas l’ouvrage du même
m o m e n t e t cependant ne sont pas deux actes absolu
ment séparés.
i°. Acte de naissance bien parfait et très en règle, d’ui*
enfant né d'Isabeau F e r rie r , sans mention du père*
O n lui donne le nom de sa mèi*e. Il y a deux témoinsde cet acte, Joseph Ferrier et Marie Ruel. L ’acte est
donc complet i le vœu de la loi du 20 septembre 1792
est rempli.
2°. Vient ensuite une déclaration de Chave, qui est à
la suite du premier acte, et qui a exigé des surcharges.
Mais peut-on , de bonne f o i , y voir un acte authen
tique , une reconnoissance de paternité telle que la loi
la commande et que la raison la conçoit ?
Cet acte n’a aucune date , parce qu’en effet il a eu lieu
le 21 germ inal, et a été ajouté a un acte terminé depuis,
le 8. Comment supposer en eflet que cette déclaration
finale fait partie de l’acte du 8? Les témoins dénommés au
premier ne signent pas la déclaration»
�( 13 )
On a rature et interligné le premier acte de naissance,
sans faire rien approuver aux premiers témoins. L e maire
seul approuve to u t, même ce qu’il lui plaii-a de raturer
encore; les autres tém oins, Chave lu i- m ê m e , ne font
aucune approbation. O r , il est de principe que les ratures
et interlignes sont inutiles dans les actes, s’il n’y a appro
bation des parties et témoins.
. Il est un autre principe élémentaire en rédaction d’actes,
quelque peu d’importance qu’ils aient, c’est que les témoins
dénommés en l’acte signent à la fin : ici la sage-femme et
le frè re, qui ont déclaré la naissance le 8 , n’ont pas signé
à la fin. Si c’est un seul et même acte, les uns Font signé
au m ilieu, et d’autres à la fin : chose bizarre et ridicule,
qui ne peut s’allier avec la gravité de l’acte qu’on prétend
maintenir.
Que p e u t-il résulter d’un acte de cette espèce, si ce
n’est de la pitié pour ses rédacteurs, et une conviction
intime que ce n’est pas Chave qui est allé déclarer la nais
sance d’un enfant comme s’en disant le père ?
L e but de la loi n’est donc pas rempli ; car dans quelque
forme que dût être une reconnoissance de paternité , il la
falloit dans l’acte même portant la déclaration de naissance,
ou bieta il falloit un acte particulier, daté lui-m êm e, et
qui ne fût pas rédigé dans une forme ayant pour but de le
rattacher à un autre acte, auquel il ne peut appartenir.
Car rappelons-nous que l’article 334 du Code civil d it
que la reconnoissance sera faite par l’acte de naissance,.
ou par un acte athentique ; à quoi l’article. 62 ajoute que
Pacte de reconnoissance sera inscrit sur les registres ¿1 sa
d ote, et qu’il en sera lait mention en marge de lVcte de
naissance..
�(( H l
RappelonsHnous encore que le but bien positif de la loi
est de ne compter pour rien les reconnoissancesantérieurea
au cod e, quand l’auteur est vivant. Il en est de cela comme
des testamens antérieurs à l’an 2, qu’il falloit refaire pour
les circonscrire dans les termes du droit' nouveau. La loi;
a eu ici un but plus .moral : les changemens apportés au
système passé justifient sa mesure dilatoire.
E t ne nous abusons' pas sur l'importance, des formes
dans une matière aussi délicate; : on est si scrupuleux
pour tant d’autres actes! Uri,seul mot équivoque en un
testament, détruit toute la volonté d’un père de famille-;
une donation exige encore des formes plus multipliées.
Ces actes sont-ils donc aussi importuns que celui où il s’agit
de transmettr^son nom et sa fortune ;,où il s’agit de plus
encore, de vaincre l’opinion et de surmonter sa propre
répugnance ? D ’ailleui's , pourquoi ne pourrions - nous
pas dire pour un tel acte ce que Ricard dit des testamens,
« que toute leur force consiste dans leur solennité, et toute
« leur solennité consiste dans les formes ? »
A ujourd’hui il faut y ajouter, une vérité bien certaine,
c’est que la seule supposition qu’un homme est tenu et
obligé de se charger d’un enfant naturel sans sa libre
vo lo n té, est incompatible avec le système indubitablement,
reçu sur la législation des enfans naturels,
)
O
20. Cette déclaration de 'paternité est nulle , s’il y a
violence. L e s J'aits articulés suffisent. Z,a preuve en
est admissible.
On est extrêmement sévère dans le monde pour juger
�( i 5 '}
des effets de la peui’ d’autrui ; e t , quand on en com
mente les particularités, on détaille très-ponctuellement
la conduite qu’on auroit tenue en pareille occurrence.
Cependant rien n’est plus difficile à régler pour soi-même;
car, en deux cas semblables , le même individu se con
duiront rarement deux fois de la même manière. Mais
celui qui raisonne ainsi est de sang-froid , par cela seul
qu’il raisonne; tandis que le premier effet de la terreur
est d’absorber toutes les réflexions , pour ne laisser place
qu’à une seule idée dominante, la conservation de soi-même.
Quelques auteurs, partageant sur ce point les idées du
vulgaire, sembleroient aussi se montrer difficiles à ad
mettre la plupart des excuses fondées sur la crainte. Il
faut distinguer, disent-ils, la crainte grave et la crainte
légère , et on ne peut trouver de moyen rescisoire que
•dans celle qui suiïiroitpour ébranler la fermeté de l’homme
le plus intrépide, metus non vani horninis , sed q u i in
hominem constantissimum cada t, 1. 6 , ff. Quod metûs
causâ.
Ces auteurs, s?en tenant à une loi isolée démentie par
«■beaucoup d’autresy n’ont pas voulu apercevoir, dans cette
rigueur étrange, un monument de la fierté romaine plutôt
qu’une règle générale. Ce peuple, qui avoit détruit le
temple élevé parT ullus à la Crainte, n’étoit, en la pros
crivant par ses lois, que conséquent avec ltii-même. Sons
un système de conquêtes sans bornes, et avec une consti
tution toute militaire, quel romain pouvolt alléguer une
crainte légère! Elevé dans les camps, son excuse même
•eût consacré sa honte , et la'loi étoit rigoureusement juste«n exigeant de lui l’intrépidité d’un soldat.
'
�( 10 )
La France militaire ne réprouvera pas cette législation
sévère; elle l’eût créée elle-même, s’il falloit un code au
courage. Mais les actes civils des simples particuliers ne
se x'ègleut pas par des maximes nationales; la théorie
principale des lois consiste à les approprier aux mœurs
de ceux quelles doivent régir.
Gardons-nous donc de l’exaltation , quand elle est hors
de mesure; ne nous obstinons pas à trouver un Scévola
dans un laboureur tim ide, qui ne connut depuis sa nais
sance que sa charrue et le hameau de ses pères.
Les auteurs les plus judicieux du droit n’ont eu garde
aussi d’appliquer sans distinction la sévérité des principes
romains. D om at surtout, î\ qui les premiers juges ont fait
l’injure de prêter une opinion si contraire à son discer
nement , D o m at, dont l’ouvrage immortel n’est que le
précis des lois romaines, bien loin de se fonder sur la
, loi 6, ne la signale que pour en blâmer la rudesse.
« Nous avons vo u lu , dit-il, rétablir les principes na« turels , et rendre raison de ce que nous n’avons pas mis
« cette règle du droit romain parmi celles de cette sec« tio n .........Toutes les voies de fait, toutes les violences,
c( toutes les menaces, sont illicites ; et les lois condam« nent non-seulement celles qui mettent en péril de la
« vie ou de quelque tourm ent, mais toutes sortes de
« voies défait et mauvais traitemens. Et il faut remarquer
« que comme toutes les personnes n’ont pas la même
« fermeté pour résister à des violences et î\ des menaces,
« et que plusieurs sont si foibles et si tim ides, qu’ils ne
« peuvent se s o u t e n i r contre les moindres impressions,
« un ne doit pas borner la protection des lois contre les
• « menaces
�( *7 ) '
menaces et les violences, à ne réprimer que celles
qu i sont capables d'abattre les personnes les plus
intrépides ; mais il est juste de protéger aussi les plus
timides...........
« Il est très - juste, et c’est notre usage, que toute
« violence étant illicite, on réprime celles même qui
« ne vont pas à de tels excès, et qu’on repare tout le
ce préjudice que peuvent causer des violences qui enga« gent les plus foibles à quelque cliose d’injuste et de con
te traire à leur intérêt : ce qui se trouve même fondé sur
« quelques règles du droit ro m ain ...........et ces règles
* sont tellement du droit naturel, qu’il ne pourrait y
« avoir d’ordre dans la société des hom m es, si les
« moindres violences n'étaient réprimées. >3 ( Sect. 2,
des vices des conventions , préambule. )
Il est peut-être inutile, après avoir cité Domat, de faire
d’autres recherches -, mais les premiers juges ont encore
fait l’injure à Pothier de lui prêter des principes qui ne
sont pas les siens.
Cet auteur cite les lois romaines, et par conséquent
les rappelle telles qu’elles sont. Mais il termine son
article de la crainte par dire que « le principe qui ne
ce connoît d’autre crainte suffisante pour faire pécher un
cc contrat par défaut de liberté, que celle qui est capable
« de faire impression sur l’homme le plus courageux, est
cc trop rigide, et ne doit pas être suivi parmi nous à la
cc lettre ; on doit, en cette m atière, avoir égard à Page,
« au sexe et à la condition des personnes (1) ,* et telle
«
«
«
«
(^Expressions copiées mot pour mot en Fart. 1112 du Code civil.
c
�C iS )
« crainte qui ne seroit pas jugée suffisante pour avoir
« intimidé l’esprit d’un homme d’un âge mûr ou d’un
« militaii’e , et pour faire rescinder le contrat qu’il aura
« la it , peut être jugée suffisante à l’égard d’une femme
« ou d’un vieillard, etc. » ( Traité des obligations,
page i re. , chap. I er., n°. 2 5 , in fin .)
Si l’opinion respectable de ces auteurs avoit besoin d’être
fortifiée par d’autres citations, on les puiseroit dans les lois
romaines elles-mêmes, qu’il ne faut pas juger par un
fragment unique, et qui, au contraire, nous enseignent
ce que Domat et Pothier viennent de nous apprendre.
T out consentement doit être lib re, disent plusieurs
lois; et, pour être restitué, il n’est pas besoin d’une vio
lence corporelle, mais seulement d’une crainte inspirée
à celui qui contracte; quoad justam restitutionis eau-,
sa/n niZiil refert utràm vi an metu quis cogatur. . ..
et quoad effectuai ju ris utrobi deest coiisensus, ac
libéra voluntas patientis, utveUe non vide a tur. L , 1 , 3 ,
7 et 8, ff. quod met. C. L . 116 , de reg.jur. ( in Corvino. )
Ces lois étoient bien moins dures que ne l’ont sup
posé les premiers juges; car elles ordonnoient de recevoir
la preuve de la crainte, quand même Chave auroit été
hors d’état de désigner aucun de ceux qui la lui avoit
inspirée; non tarnen necesse est designare personam
quœ metinn in tulit, sed sujjficit p r o b a r e metum, quia
metus habet in se ignoranham. I .
cod.
E nfin, ce qui achève de convaincre que ces lois savoient
aussi se mettre à la porlée de la foiblesse des hommes,
c’est qu’elles expliquent qu’il n’étoit pas nécessaire de
prouver l’cxisteiicc d’uu danger réel , mais seulement
j
�( 19 )
la crainte de ce danger, qui en effet devoit détruire le
consentement. S i causa fu isset, cur periculurn timeret j ’
quamvis periculurn verb non f u is s e t . . . . non consideratur eventus, sed justa opinio. L . 14. j f . eod.
L e tribunal d’Yssengeaux avoit donc un guide bien sûr.
A u lieu d’adopter l’antique rigueur d’une loi oubliée par
les Romains eux-mêmes , il a jugé que la crainte inspirée
à Chave n’avoit pas été un m otif suffisant pour le con
traindre ; et cependant il ignoroit jusqu’à quel point
Chave avoit été contraint ou menacé ; il l’ignoroit et a
voulu l’ignorer toujours, en refusant de s’éclairer par une
preuve : cependant les faits articulés étoient graves. Chave
oiïroit et offre encore de prouver ces faits articulés , et
notamment, x°. que le 21 germinal les frères Ferrier et
d’autres hommes armés de bâtons sont venus chez lu i;
2°. qu’ils l’ont forcé de se lever et de les suivre, en lé
menaçant; 30. que chez de Bannes ils se sont opposés à
toute explication, l’ont injurié, menacé et frappé; 40. que
de Bannes l’a pris à part pour l’exhorter à céder à la lorce
et éviter un plus grand mal ; 5 °. qu’on l’a forcé de venir
dans un cabaret, où on lui a remis un enfant, avec de'
nouvelles menaces.
. . . . . . . .
M ais, a dit le tribunal d’Yssengeaux, Cliave, sorti de
sa maison et conduit chez le maire, pouvoit réclamer.
Ce seroit une réflexion bien naturelle, si les faits même
de la cause n’étoient déjà venus la détruire ; car ce maire
lui-même étoit si peu disposé à user de son autorité ,
qu’il est difficile de ne pas le juger au contraire intéressé
à l’événement.
Mais à quelle protection., il fout le dire, auroit pu
�(r 20 )
s’attendre un malheureux à la merci de cinq individus,
dans le domicile isolé d’un maire de village? Battu à ses
yeu x, Cliave pouvoit-il se croire dans un asile inviola
b le ? L e maire lui-même, l’exhortant à céder à la force,
mettoit le comble à sa terreur, etdéclaroit, ou sa propre
com plicité, ou au moins son impuissance.
L ’acte le moins important de la vie seroit vicié par une
semblable violence , à plus forte raison celui de tous les
actes le plus incompatible avec la moindre coutrainte. Un
père de famille a contracté un engagement sacré envers
ses enfans par son mariage; mais celui-là même qui
auroit proci'éé des enfans naturels, ne tient à eux par
aucun lien civil : son honneur et les sentimens de la
nature deviennent leur unique titre , si la paternité lui
a semblé certaine. Les enfans naturels n’ont point de
famille ; tel est le langage de la loi : elle ne veut pas qu’ils
çn aient une. Quand leur père se nommeroit hautement
dans le monde, il ne seroit tenu à rien; la loi lui permet
seulement de se déclarer tel par un écrit libre et authen
tique : forcer sa volonté seroit donc se croire plus sage
qu’elle.
Mais si la loi n’exige rien d’un père , si elle consi
dère comme un vice moral de lui donner un lils que
sa propre volonté cependant n’a pas désavoué , peut-on
soutenir l’idée révoltante qu’un homme sera contraint
malgré lui d’adopter un enfant dont il n’est pas le père?
Qui lui donnera la force de supporter, dans sa de
meure, la vue habituelle d’une créature si étrangère,
placée là pour sa honte im muable, sans aucune com
pensation, satisfaisahte ? et qui oseroit répondre que dans
�( 21 )
cette situation de désespoir, aigri par un sentiment d’in
justice , il pût assez maîtriser une fureur convulsive,
qui seroit tout à la fois le tourment de l’innocence et
son propre supplice ?
Eloignons plutôt de vagues suppositions fondées sur une
pure chimère. L a prévoyance des magistrats distinguera
la vérité et les convenances , et éloignera d’aussi sinis
tres présages. On ne donne point à un homme l’enfant
qu’il repousse avec mépris , quand la loi n’en fait pas
un devoir. La cour doit prononcer ici sur les consé
quences d’un acte lib r e , et tout prouve qu’il n’y a pas
eu de liberté dans celui qui donne lieu au procès. Chave,
conduit par la forçe , menacé dans sa ro u te, a signe?
sous le bâton; et, pour se sevvir des expressions de Doinat,
§i un consentement de cette espèce étoit jugé valide , ce
seroit un attentat au droit naturel ; il n’y auroit plus
d’ ordre dam la société des hommes.
La conduite d’Isabeau Ferrier , l’époque de ses cou
ches, c’est-à-dire, de celles qui donnent lieu au procès,
le choix de ses croupiers, le lieu de la scène, la cir
constance qu’un acte de naissance a été changé, etc., tout
cela donneroit lieu à des réflexions beaucoup plus éten
dues , mais qui seroient oiseuses, tant que la preuve
de la violence ne sera pas ordonnée.
Cette preuve, sans contredit, e§t admissible; aucune
ordonnance ne la prohibe ; et ce qui étonne, c’est que
les premiers juges n’aient pas voulu prononcer en connoissance de cause.
Il est possible que la malignité toujours avide de calom
nie , et toujours difficile àdétrçynper, prétende que Chave
�( 22 )
n’a pas été tout à fait innocent envers Elisabeth Ferrier
de ce dont on l’accuse : mais il en prend le ciel à témoin,
cette femme lui fut toujours étrangère.
C h ave, maître de ses actions , célibataire, feroit sa
jouissance principale de se voir revivre dans un fils qu’il
croiroit le sien ; à son âge, et avec ses principes religieux,
il s’en feroit un devoir. Ces deux puissans mobiles ne
peuvent donc être vaincus que par quelque chose de
plus puissant encore , une conviction intim e, une insur
montable répugnance.
Il ne demande pas à être cru sur parole ; et si son
premier moyen ne suffit p a s, il offre la preuve des vio
lences qui l’ont forcé à donner sa signature : et certes,
quand la cour se sera assurée que Chave a été forcé de
sortir de son dom icile, mené chez le maire par cinq
hommes , menacé et battu , elle appréciera alors toute
la valeur d’une signature donnée dans de telles circons
tances ; et lo rsque la vertueuse Elisabeth Ferrier sera
convaincue qu’il ne lu i est plus libre de faire de sa pro
géniture une charge publique, peut-être s’efforcera-t-elle
de mettre un terme à sa fécondité et au scandale de sa
conduite.
M . G I R O T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. M A R I E , licencié avoué.
A R IO M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
C our d ’appel. — Therm idor an 13.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Text
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chave, Jacques. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Girot
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
reconnaissance de paternité
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jacques Chave, appelant ; contre Jeanne Valla, et Elisabeth Ferrier, sa fille, majeure, intimées.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1801-Circa An 13
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0307
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0705
BCU_Factums_G1502
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53755/BCU_Factums_M0307.jpg
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Chambon-sur-Lac (63077)
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reconnaissance de paternité
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29524a768f458a507a7e113018108eb8
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M. Jean-James B e a u f i l s , habitante de la f i — f a
Ville de S a in t-F lo u r, intim ée
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CO N TRE
Le sieur
R aym ond
v 'Îifa U '
drUAsàiH/ /JüMérfS A it r /il
D E M O L E N -D U M A S
a p p e la n t
________
¿A*to to U t'f*
mmmmm
^ ity G s f ¿ U ffK J
•»-
tU^ ' 'i
f i* JjtJ*
• L E grand-père de la dame Beaufils a acheté un domaine
et l'a revendu. Harcelé presque continuellem ent par des
demandes hypothécaires, il ne s’est toujours préservé de
l' éviction qu’en payant. L e sieur D em olen , qui prétend
représenter les vendeurs dudit dom aine, s’est fait l’illu sion de croire qu’il auroit une garantie contre celle dont;
($^Ê>Ù u*{<aa/
/ 'j '
.
diujàJ+ fiutkvJ
•
il est le garant lui-m êm e. P o u r y p a rven ir, il dénature
A
-
.
�et dément cq qui s’est fait il y a quatre-vingt-douze ans :
à l’en c r o ire , il faudroit remettre les parties au même
état qu’elles l’étoient à cette ép oqu e, et lui rendre un
domaine qu’il réclame sans savoir à quel titre.
Q uelque bizarre que soit ce système, il est enveloppé
de tant de faits, qu’il est devenu nécessaire de les simplifier
vpour les éclaircir. Quatre.-ving]t-dix ans.de procès doivent
¿'perm ettre à la fam ille Beauiijs de demander du repos;
et.si^le sieur Dem olen ne pense pas que ce soit avoir
fourîli^une assez longue carrière devant les tribunaux, il
faut espérer que la C o u r, plus compatissante, l'empêchera
" :'de p rép a rer'd e nouveaux; m atériaux de procès pour la
^yla. quatrième, génération.
^ w P a r acte du 10 décembre 1 7 1 8 , le sieur Jean B o y e r,
de Massiac ( représenté par la dame Beaufils ) , donna
*en «j^hange à C lau de, G abriel et G abriëlle Dussaulnier^
itères et sœur ( le sieur Dem olen prétend représenter
^ Mîaftï’iël et. G abriëlle X, un domaine appelé de Bijssac ^
Î1& lui donnèrent en contre-écliange un domaine appelé
Cham bon.
^ L o rsq u e le sieur B oyer voulut se mettre en possession
■- de^ce domaine, il'en fut empêché par un sieur Roucher,
* p r ê t r e , qui prétendit avoir droit d’en jo u ir , comme
; créancier d’une rente de 200 fran cs, constituée en 1 7 1 5
..xpar
C la u d e
D ussaulnier, avec assignat spécial sur ledit
domaine.
Il fallut donc soutenir un prem ier procès en 1720 j
s et ce procès fut assez vif. Enfin une sentence de la séné* chaussée’ d?A u v e r g n e , du 3 juillet 1 7 2 2 , condamna le
prêtre R oucher à- se! désister du domaine.
�■C 3 )
Les héritiers D ussaulnier, appelés en garantie par le
sieur B o y er, furent .condamnés par la même sentence à
faire cesser le trouble.
L e sieur R oucher interjeta appel au p arlem en t, et la
sentence de R io m fut confirmée par arrêt du ï8 août
1723.
E n fin , le sieur B oyer se m it en possession ; et par
traité du 2.6 juillet 1728 , il força le sieur R ou ch er à
lui payer 800 francs pour restitution de jouissances.
A p rès la m ort de Jean B o y er, arrivée e n . . . A n to in e,
son fils, fut assigné hypothécairem ent par un autre créan
cier du sieur Dussaulnier (le^sieur M atthieu R o d d e, de
Chalagnat ) , en 1736.
Il dénonça cette demande aux sieurs D ussaulnier, et
les fit condamner à la faire cesser, par^sentence du 4 mai
173 6.
C e u x -c i ne s’en m irent point en peine ; et le sieur
iBoyer fut encore obligé de payer la créance du sieur
R.odde, le 5 juin 1737. I l continua bien de poursuivre les
héritiers Dussaulnier en rem boursement de ses avances;
mais on ne vo it pas ce qui résulte de ces poursuites.
L e 28 novem bre 1739 , A n toin e B oyer et Claudine
B o y e r , sa sœ u r, croyant se délivrer de l’embarras que
leur donnoit ce domaine du C h am b on , le vendirent au
m ême sieur M atthieu R od d e, de Chalagnat, moyennant
6800 francs.
C est ici le Heu "de d ir e , pour l ’intelligence des faits
qui vont suivre, quel étoit l’état de la famille Dussaulnier
à cette époque.
A 2
�Jacques Dussaulnier.
Claude D ussaulnier du P o u z a t,
G abriel D ussaulnier, G abriëlle D ussaulnier,
m arié à
• cu ré de M o lèd e,
m orte sans postérité
Paule C lialvet de R o ch e m o n teix ;
m ort en 1758.
en 17 6 4 ;
m ort en 1746.
a tout donné
'|
au sieur D em olen.
M arie-A m ab le D ussaulnier,
m ariée à
A n to in e de T rem eu g e de la B arre J
décédée sans postérité en 174 2 ,
avant G abriel.
Jacques Dussaulnier étoit propriétaire de la terre du
P o u za t, d’ un domaine appelé le C ham bon, et d’une di
recte appelée de Serre. O n ignore si l’un de ses trois
en fans a eu quelque avantage. CJne procuration donnée
par G abriel D ussaulnier, le 7 novem bre 1 7 1 8 , pour le
faire entrer dans l’échange du domaine du Chambon ,
appartenant à Claude Dussaulnier , prouve qu’il étoit
seul propriétaire de ce d om ain e, et qu’il lui étoit échu
par un partage antérieur. D é jà , en effet, Claude D us
saulnier avoit seul constitué, en 1 7 1 5 , une l’ente sur ledit
domaine.
L a directe de Serre fut vendue p ar Claude Dussaulnier
à M . Farradesche de G rom ont, par acte du 8 juillet 1729,
moyennant 4610 fr. délégués à des créanciers de Jacques
D ussaulnier, son père.
La terre du P o u za t resta dans la famille Dussaulnier.
Claude et M a r ie , sa fille, l’ont habitée jusquVi leur décès:
G a b rië lle Dussaulnier qu i l’a habitée aussi, l ’a transmise
au sieur D e m o le n , son donataire.
�C'5 •)
Claude Dussaulnier se maria en i j i ô . La demoiselle
de Rochem onteix lui porta en dot 9000 francs payables
en différens termes.
M arie-A m able D nssaulnier, sa fille, se maria avec le
sieur de Trem euge le 6 février 1741. Son père ne lui
donna rien ; mais G abriel et G abrielle D ussaulnier, scs
oncle et tante, lui firent donation de tous les di*oits
successifs qu’ ils avoieut à recouvrer dans la maison , sous
la seule retenue d ’une pension viagère de 200 francs, et
de leur logem ent au Pouzat.
E lle ne survécut pas long-tem ps à ce m ariage, car
elle décéda en 1742 , sans postérité.
Comme ses on d e et tante n’avoient stipulé aucune
réversion des biens par eux donnés, Claude Dussaulnier ,
son p è re , héritier des acquêts eu coutume d’A u v e rg n e ,
réunissoit sur sa tête toute la terre du P ou zat, et tout
ce qui seroit provenu de G abriel et G a b riëlle, même le
domaine du C h am b on , s’il leur eût appartenu avant la
donation de 1741.
Claude Dussaulnier m ourut en 1746, ne laissant d’autres
héritiers que G abriel et G abriëlle D ussaulnier, ses frère
et sœur.
Ils pouvoient retrouver dans sa succession les biens
dont ils s’étoient dépouillés par la donation de 17 4 1 i
mais ces biens étoient devenus soumis aux dettes du
d é fu n t, et pour ne pas les payer ils répudièrent sa suc
cession , et un curateur y fut nommé. .
L a dame de R ochem onteix, veuve de C laude, obligée
par ce décès de quitter la m aison, fit donation a M arieFrançoise C halvet de N astra, sa n ièce, de toutes ses re
�( -6 )
prises, par acte du 9 septembre 17 4 6 ; et celle-ci obtînt
sentence contre le curateur à la succession vacan te, le
9 mai 17 4 8 , portant condamnation., i° . de 3000 francs
-touchés par Claude Dussaulnier ; 20. du gain -de survie
stipulé au contrat de m ariage de 1715 .
Aussitôt qu’elle eut cette sentence , la demoiselle de
Nastra fit assigner hypothécairem ent le sieur R o d d e, de
C h alagn at, com m e détenteur du domaine du Cham bon,
par exploit du 11 ju in ¡1748.
L e sieur Rodde dénonça cette demande le 9 mai 1749,
à A n toin e et Claudine B o yer, enfans de Jean B o y er, son
vendeur.
C eu x-ci d én on cèren t, le 9 mai 1 7 4 9 , à G abriel et
G abrielle Dussaulnier, non pas comme héritiers de Claude,
mais comme vendeurs eux-mêmes du domaine du Chamb o n , par l’acte du 10 décembre 1718.
L es Boyer dénoncèrent à leur tour à M .
com m e acquéreur postérieur de la directe
C ependant A n toin e et Claudine B oyer
sur la demande origin aire, firent valoir à
de G rom o n t,
de Serre.
se défendant
la demoiselle
de Nastra les créances payées par leur père, qui prim oient
l’hypothèque de la demoiselle de Nastra.
A cette é p o q u e , le sieur ¡Boyer étoit menacé d’un
autre procès de la part d’un sieur P o n s, de M o n servier-,
créancier de Jacques Dussaulnier d’environ 1000 francs.
Sa créance avo it été réglée le 2 décembre 1 7 4 1 , avec
le sieur de T r e m e u g e , qui s’étoit obligé de le p ayer;
mais comme il n’avoit stipulé qu’en qualité de m a r i,
il n’eut rien à payer après la m ort de sa fem m e, et le
sieur Pons n’avoit ù s’en prendre qu’aux biens venus du
�( 7 )
sieur Dussaulnier. Il fallut donc que le sieur B oyer payât
sa créance ; et en effet il lui en fut donné quittance avec
subrogation, le n juin 1749*
G abriel et G abriëlle Dussaulnier voyoient bien qu’ils
ne pouvoient éviter la garantie de tant de dettes de leurs
père et m è re , de la dette de leur frère envers ladite
demoiselle de Nastra ; ils le pouvoient d’autant moins
qu’ils jouissoient de la terre du P ou zat, m algré leur ré
pudiation : mais peu de personnes connoissoient leur
donation de 1741 , et ils passoient pour avoir un droit
indivis de deux tiers dans cette propriété.
A fin d’éloigner toutes les recherches sur ce p o in t, et
pour faire d iversio n , ils crurent embarrasser les enfans
Boyer par la plus étrange des prétentions ; et c’est ici
que commence la prétendue difficulté de la cause.
Jean Boyer , en recevant le domaine du Cham bon ,
avoit donné au sieur Dussaulnier le domaine de Bussac :
l ’acte de 1718 en prouve la tradition effective; et toutes
les sentences postérieures prouvent que le sieur Dussaul
nier n’articuloit rien de contraire.
\
Cependant le domaine de Bussac étoit rentré dans les
mains de Jean Boyer avant son décès. L ’avoit-il acquis
par acte sous seing privé ou notarié ? on l ’ignore; mais
les titres qu’il avoit remis en 1718 lui avoient été rendus :
t
aucune autre trace de cette nouvelle con%?ention ne se
retrouve; et les enfans Boyer ayant recueilli ce domaine
dans la succession de leur p è re , avoient continué d’eu
jouir paisiblement.
L eu r ignorance du passé parut une belle occasion à
Gabriel et G abriëlle D ussaulnier; ils dirent aux héritiers
�,
( 8 )
Boyer : Comm ent possédez-vous le domaine de Bussac,
et quel est votre titre ? Si vous n’en trouvez aucun , il
faudra croire que vous n’en jouissez que pïgnoraiiçem ent :
ainsi vous devez nous le rendre.
En effet, ils assignèrent, le 7 décembre 1748, les enfans
Boyer à se désister des deux tiers du domaine de Bussac,
avec restitution de jouissances.
M ais cette demande n’étant qu’ un épouvantail pour
repousser celle de la demoiselle de Nastra, du 11 juin
174 8 , les sieur et demoiselle Dussaulnier abandonnèrent
absolument cette demande; et la péremption en fut pro
noncée par sentence du 24 janvier 1764.
Lorsque la demande en garantie form ée contre eux fut
poursuivie activement contre eu x , ils voulurent réitérer
leurs prétentions par une requête incidente, du 8 mars
1 7 5 4 ; et comme le plus difficile auroit été de prouver
l ’im pignoration, ils voulurent donner une autre tournure
à leur demande en désistement ; ils dirent que l’acte de
1718 n’a vo it pas été exécuté , puisque le domaine de
Bussac étoit resté en la possession du sieur Boyer ; ils
soutinrent que leur action n’étoit pas prescrite, tant que
les héritiers B oyer étoient détenteurs du domaine de
Bussac, et que la demande en garantie pi'orogeoit celle
en désistement.
Les héritiers B oyer répondirent que leur jouissance
de Bussac ne venoit ni de l’échange de 1 7 1 8 , ni d’ une
jouissance pign orative; que l’action en désistement étoit
prescrite contre eux , et que d’ailleurs les sieur et de
moiselle Dussaulnier n’avoieut pas qualités pour exercer
cette actipn.
Gabriel
�( 9 )
G abriel Dussaulnier m ourut en 17 6 8 , n’ayant d’autre
héritier que G a b rië lle, sa sœur.
Celle-ci fit donation au sieur D e m o le n , le 16 janvier
1764 , du domaine du Pouzat ; et il fut ajouté dans l’acte
que ses droits contre le sieur B oyer faisoient partie de
la donation.
Aussitôt après cet acte, la demande im poursuivie depuis
1754 fut reprise par le sieur D em o len , par exploit du
19 mai 1764 , contre la demoiselle B o y e r, veu ve B iro n ,
héritière d’Antoine et Claudine Boyer.
L a veuve Biron m ourut quelques années après : MarieA n n e Boyer et Jean-James Beaufils, son m ari, reprirent
la demande contre ses héritiers.
Il est inutile de rendre compte d’une foule de procé
dures et de conclusions en recours, contre-recours, paye
ment de créances et actions hypoth écaires, qui eurent
lieu pendant les vingt-cinq années suivantes.
Enfin , il intervint sentence sur le tout en la séné
chaussée d’A u v e rg n e , le 22 août 1 7 8 9 , par laquelle la
demande hypothécaire form ée par la demoiselle de Nastra
fut adjugée contre le sieur R o d d e , pour le tiers seule
ment du domaine du Cham bon, qui appartenoit à Claude
Dussaulnier en 17 15 ; en conséquence, le partage dudit
domaine fut ordonné pour fixer la portion hypothé
quée; les Beaufils, héritiers B o y e r, furent condamnés à
garantir le sieur R o d d e; il fut ordonné plus ample con
testation , 10. sur j a demande en recours des Beaufils
contre M . Dem olen ; 20. sur leur demande en recours
contre M . de G rom ont; 30. sur ia discussion des créances
payées par Jean Boyer ; 4 0. sur la demande en recours
B
�( ro )
de M . de G rom ônt contre le sieur Dem olen ; 5 °. sur la
demande en désistement des deux tiers de Bussac.
'• Q uoique le siei.11* Dem olen ne fût tenu à rien par cette
'sentence , il'se jugea lu i-m êm e, et paya, à la demoiselle
’de'Nastra la créance qui avoit donné occasion à tant de
procès. Il articule avoir fait ce payement le 17 mai 1790.
Seize ans après, le sieur D em olen a voulu rentrer en
lic e ; il a repris-, le 5 août 1806, la demande en désis
tement des deux tiers de Bussac; et ajoutant à ses con
clusions, il a demandé le désistement du troisième tiers,
•comme exerçant les droits de la demoiselle de Nastra ,
qu’il a payée, si m ieux n’aim ent, a-t-il d it, les Beaufils
lui rem bourser ladite créance.
D e leur c ô t é , les sieurs B ’aufils ont repris leur de
mande en payement des créances de Jacques et Claude
«•Dussaulnier, payées par Jean Boyer.
C ’est sur ces nouvelles demandes qu’est intervenu au
tribunal de S ain t-F lo u r, le 16 mars 1 8 0 9 ,.le jugement
don t est appel : il juge que le sieur Dem olen n’a pas de
qualité du chef de ses donateurs, de demander le désis
tem ent; que d’ailleurs cette action est prescrite : il juge
’que ceux-ci étant garans du domaine du Chnmbon , le
sieur D em o len , en payant la créance N a s tr a , n’avoit
•acquitté que sa propre dette. En conséquence, le sieur
D em olen a été débouté de ses demandes; et faisant droit
sur celles des sieurs Beaufils, il a été ordonné une plus
am ple contestation , attendu que les titres des créances
par eux réclamés n’avoient pas été communiqués.
Sur l’appel que le sieur Demolen a interjeté de ce ju
gem ent, il s’agira de savoir, io,
a eu qualité pour
�( II )
demander le désistement des deux tiers de Bussac.; 2°. s i,
en lui supposant qu alité, l’action n’est pas prescrite; 30. s’il
a action pour demander le remboursement de la créance
]$astra qu’il a acquittée.
.
1
i
M O Y E N
S.
i° . IjC sieur D em olen n’a pas de qualité pour conclure
Contre la dame B eaufils, au désistement de tout ou partie
du domaine de Bussac.
: • ■
; j é ' , Il représente G abriel et G abrielle D.ussaulnier par une
donation de 1764.
*
! ./ ,7
.I:M ais ceux-ci n’étoient alors propriétaires1d’aucun im
meuble ni droit proveuant de Jacques D u s s a u lu ie r n i
de l’éclinrigé de 1718*
• n
Car ils avoient tout donné à M arie-A m ab le Dussauln ier, leur n iè c e , en 1741.
r
A la v é r ité , M arie-A m able Dussaulnier. étoit m orte
sans en fan s, en 1742 : mais C laude'I)ussaulnier > son
p è re , héritier des acquêts , avoit succédé aux biens ¡à
elle donnés.
r\ •
Î) - !■
■
■
'; ,
G abriel et G abrielle Dussaulnier ont répudié à la suc
cession de Claude : un curateur occupe ou a occupé la
succession-, ainsi lui .seul auroit qualité pour demander
Un désistement.
:
' nr.i’;
L e sieur Dem olen n’a jamais attaqué cette répudia
tion ; au con traire, il en excipe encore : et en effet il
ne p e u t, sur ce p o in t, changer ce qui a été fait par
ses donateurs.
. .
.
C e u x -c i ont toujours persisté dans leur répudiation;
B 2
�( i* )
et leur demande en désistement des deux tiers du doinaine de Bussac', suffit pour le prouver : car s’ils eussent
entendu se dire héritiers de C lau d e, ils auroient eu le
troisième tiers de son chef.
Ce n’étoit donc que ta donation de 1741 qu’ils dissim nloien t; mais point du tout la répudiation de 1746.
Cette lim itation à deux tiers du ch ef personnel de
G abriel et G a b rië lle , a duré depuis 175 4 , et dure en
core ; car en 1806 le sieur Dem olen n’a pas demandé
autre chose de leur chef : il a bien réclamé le troisième
tiers, mais ce n’est qu’en exerçant les droits d’un créancier,
et par la voie hypothécaire ; d’où résulte une double
preuve que le sieur D em olen ne prétend à rien comme
h éritier de Claude Dussaulnier.
•
Si donc il est prouvé que G abriel et G abriëlle n’ont
rien conservé, et que tout a passé à C laude, il en résultera
la conséquence nécessaire que le donataire de G abriël et
G abriëlle n’a rien à demander de leu r chef.
L e sieur D em olen a senti toute la force de ce m oyen,
et il y répond que la donation de 1741 n’a rien ôté à
G abriël et G abriëlle D ussaulnier, parce qu’elle est nulle
faute d’insintiation.
M ais on lui a déjà répondu que le donateur ne peut
pas opposer le défaut d’insinuation. T elle est en effet la
disposition de l’article 27 de l’ordonnance de 1 7 3 1 ,
réitérée par l’article 941 du Code civil. .
Si le sieur Dem olen croyoit p o u vo ir insister, en disant
qu’ il est h éritier du donateur, on lui répondroit encore
qu’ il n’a pu prendre les choses qu’en l’état où elles
étoient lorsque les biens présens de G abrëlle Dussaulnier
�(* 3 )
lui ont été donnés en 1 7 6 4 , et que celle-ci ayant déjà
form é une demande sans q u alité , en 1764 , n’a pas pu
lui transmettre plus de droits qu’elle n’en avoit ellemême.
L e sieur Dem olen objecte que le défaut de qualité
est couvert par plusieurs sentences, et ne lui a pas été
opposé dans l’origine.
D ’abord il verra dans une écriture du 29 mars 176 4 ,
que les héritiers B oyer ont fait valoir ce moyen d’entrée
de cause. Quant aux sentences, comment ont-elles pu
juger les exceptions du défen deu r, lorsqu’elles se sont
bornées à ordonner une plus ample contestation ? L a ’
sentence de 1789 , qui seule a jugé au fo n d , ne prononce
rien que dans l’intérêt de la demoiselle de’ Nastra ; et
dès-loi's il n’en résulte rien pour ni contre les héritiers
B oyer, ni le sieur D em o len , dans leur intérêt réciproque.
E n ajournant la demande en désistement, cette sentence a
aussi ajourné tous les moyens y relatifs; car l’exception est
inséparable de l’action, et dure autant qu’elle. Qucù annalîctr
sunt ad agendum yerpetua sunt adexcipiendum .
■Il faut rem arquer encore que si le sieur Dem olen avoit
pu avoir une q u alité, au moins ce ne pourroit pas être
pour une demande en désistement des deux tiers d’un
domaine.
,
Car ne prétendant rien à la propriété du tiers appar
tenant à la succession de Claude D ussaulnier, il n’avoit
à exercer qu’ une demande en partage contre le cu rateu r,
tant pour ce domaine que pour les autres biens indivis,
auquel partage il auroit appelé le détenteur du domaine.
C ’est en effet un p rin cip e, qu’il n’y a entre cohéritiers
�( i4 )
ou copropriétaires que l’action en partage : on n’est pas
recevable à assigner de -piano un tiers détenteur en désis
tement.
Cette action étoit si bien la seule admissible, que le
sieur Dem olen jouit à lui seul du domaine du P ou zat,
et que s’il suffit pour form er son lot (s’il en avoit u n ) ,
il n’a plus rien à demander à personne.
2°. Quand le sieur D em olen auroit une qualité pour
demander le désistement des deux tiers de Bussac, il
est évident que son action est prescrite.
Il n’indique pas l’époque de la mise en possession de
Jean B o y e r, mais il suppose que c’est en 1 7 1 8 , et que
Jean Boyer n’a jamais été dépossédé.
Si cela est ainsi, il s’est écoulé trente-six ans jusqu’à
la demande form ée par G abriel et G abriëlle Dussaulnier,
en 1754.
L e sieur D em olen d ir a - t - il que déjà il y avoit eu
une prem ière demande form ée le 7 décembre 1748.
M ais d’abord elle a été déclarée périm ée par sentence
du 24 janvier 17 5 4 ; et on sait qu’un ajournement
périm é ne sert pas à relever la prescription, suivant le
texte de l’ordonnance de 17 4 3 , et l’article 2247 du Code
civil.
Il fa u t, dit le sieur D em olen , avoir joui de bonne
foi pour prescrire, anim o dom ini et opinionc dom inii.
O ù a-t-il pris ce principe, pour l ’appliquer à une pres
cription trentenaire? Il le transpose de la prescription
décimale. M ais sans combattre avec plus d’étenduo une
aussi fausse doctrine, il suffit de lui rép on dre, avec l’ar
ticle 2268 du C o d e , que la bonne foi est toujours p ré-
�(
15)
sumée au possesseur, et que c’est à celui qui articule
'la mauvaise foi à la prouver.
< L a daine Beau fils , après une si longue période de
tem ps, 11’a besoin que de d ire, passïdeo quia possideo.
E lle succède aux faits d’au tru i, et n’a rien à prouver pour
rester propriétaire. Ñeque titulus, neque bona Jidcs
requirnntur sed soJa possessio per tnennium.
T ou te la doctrine ancienne, sur cette m atière, est ren
fermée dans l’article 2262 du Gode civil,
« Toutes les actions, tant réelles que personnelles,
« sont prescrites par trente ans, sans que celui qui allègue
« cette prescription soit obligé d’en rapporter un titre ,
« ou qu’on puisse lui opposer l’exceptiou déduite de la
« mauvaise foi. »»
A insi le sieur Dem olen n’a pas d’action pour de
mander un désistem ent, sous prétexte qu’il a un titre
d’acquisition de 1718 ; car ce titre est prescrit. Sans dif
ficulté il résultoit bien de ce titre une action eu déli
vrance pour les sieur et demoiselle Dussaulnier contre
le sieur Boyei”, mais cette action, e x empto > est ellemême prescrite, et ne peut plus s’exercer.
Ici le sieur Dem olen veut faire une différence entre
l’acte de vente et l’acte d’échange. Il prétend que le sieur
Boyer ayant dénoncé une demande hypothécaire aux
Dussaulnier, ¿\ cause de la garantie promise en I 7 ! 8 ,
il a rendu à ce titre toute sa vigu eu r, parce que, d’après
l ’opinion de Salvain g, nul ne peut demander l’exécu
tion d un titre sans l’exécuter soi-m êm e.
O n ne peut pas entasser plus de fausses applications
�( 1 6 }
de p rin cip es, vrais cependant en eux-mêmes. Sans doute
si le sieur Boyer n’étant pas en possession du domaine
du C h am bon , avoit voulu en demander la délivran ce,
il n’auroit pas pu l’obten ir, sans être forcé lu i-m êm e
d’exécuter l’échange par la tradition du domaine de
Bussac. Si des m inorités eussent p ro lo n gé, pour lui
seu l, jusqu’à soixante an s, son action en délivran ce,
il est encore incontestable que l ’obligation de livrer
Bussac eût duré pendant le même d é la i, parce que
l ’action des Dussaulnier n’eût été alors qu’ une véritable
exception.
Mais qu’est-ce que tout cela a de com m un avec l’espèce
actuelle? L e domaine du Cham bon a été livré. L e do
u t des n’est plus la question actuelle : la demande en
désistement de Bussac n’est donc plus une simple excep
tio n , c’est une action bien ré e lle , bien isolée, et dèslors sujette à toutes les règles de la prescription.
Il y a plus , car cette objection du sieur Dem olen
conduit m êm e à fortifier la réponse par des remarques
de faits.
Bussac fut liv ré à l’instant même de l’éch an ge, et la
remise du terrier, constatée par l’acte, en fait mention :
au contraire , Cham bon n’étoit livrable que dans deux
ans.
L orsque le sieur Boyer appela les Dussaulnier pour
être présens à sa possession ; lorsqu’il les assigna pour
faire cesser le trouble de R ou ch er, en 1720, et celui du
sieur R o d d e , en 1737» lorsqu’il obtint contre eux des
condamnations en garantie, entre-t-il dans la pensée que
le
�( i -7 )
le désistement de B ussacn ’eût pas été demandé par e u x ,
si cette action-eût été ouverte■
;& cette'époque ?
Si elle ne l’étoit pas alors, commerit'est-elle née depuis?
L e sieur D em olen ¡n’a qu’une m anière de Fexpliquer ;
c’est de bouleverser son propre syàtème, et de dire que
le sieur -Boyer s’étoit bienialors désisté'de Buseac, mais
qu’il l’a repris depuis.
E n q u e lle q u a lité , et par quel titre? P ig n o ra tif, dit le
■sieur Dem olen ; >ét aussitôt coule de sa plum e l’adagé
s é v è r e , m elius est non habere tituhm i quàm ‘habere
vitiosum .
O ù a-t-il pris encore cette im pignoratiön ? car e^est
l u i , dem andeur, qui doit fournir la preuve de tout ce
quMl articule; ¡mais il ne fuit .que le soupçonner. Il a v u
que le sieur Boyer a voit payé des créances,'et il en conclut
que <c’est peut-être pour le ¡gage de 'ces créances qu’il a
dû reprendre Bussac.
~
'Ces soupçons ne peuvent pas créer un titre vicieux et
précaire. L ’actede 1718 p ro u ve q u e le domaine de Bussaè
fut livré ; à l’instant même le terrier en fut rem is, et
quittancé par l’acte.
A ujourd'hui >ce terrier est revenu au pou voir des h é
ritiers Boyer ; ce iqui prouve qu’il y a eu une nouvelle
convention. V o ilà ce qu’on n e retrouve pas, mais ce dont
on est dispensépffr la prescription,<qui vaut titre; car la
prescription est un mode d’acquérir aussi solide qu’un
contrat de vente. L ’article 712 du Code civil rappelle
sur ce point les principes du droit romain ißt ceux de la
coutume d’A uvergne. Ce qui confirme pleinement lapresC
�( 18 )
crip tio n , c’est la'circonstance essentielle, et que rien ne
peut affaiblir, que dans les procès R oucher et dans ceux
qui ont su ivi, Claude Dussaulnier, poursuivi en gai’antie
sans ménagement , s’est toujours défendu comme un
garant véritable, au lieu de récrim iner comme il l’auroit
f a i t , et de soutenir que l’acte de 1718 étoit resté sans
exécution.
*
A in si , le sieur Dem olen ne peut pas s’attendre de
bonne foi à voir réussir une prétention q u i , sous pré
texte de forcer un possesseur paisible de chercher les titres
de sa possession, bouleverseroit toutes les règles méditées
par le législateur pour assurer le repos des familles.
30. L e sieur Dem olen n’a pas d’action pour demander
le remboursement de la créance qu’il a payée à la de
moiselle de Nastra.
Car il n’a payé que sa propre dette : il a fait volon
tairement ce qu’il eût élé forcé de faire.
L a demoiselle de Nastra étoit créancière de Claude
Dussaulnier, propriétaire pour un tiers du domaine du
Pouzat.
C ’est le sieur Dem olen qui le possède en entier; ainsi
il a dû payer une dette hypothéquée sur un immeuble
qui ne lui a été donné qu’avec ses charges.
En second lieu , le sieur Dem olen , comme représentant
G abriëlle Dussaulnier, est garant des évictions et troubles
quant au domaine du C ham bon, en vertu de l’acte de
1718.
O r , la demoiselle de Nastra, en poursuivant son hypo
thèque contre le domaine du Chambon? donnoit lieu à
�( T9 )j
une' action récursoire' qui devoit rem onter jusqu’au^
sieur D em o len , donataire du prem ier garant.
?
Il
est donc évident q u e , sous tous les points de. vue
possibles, le sieur D em olen n’a fait qu’acquitter sa;propre
dette, en faisant cesser la demande de la demoiselle de
Nastra.
Lorsque le sieur Dem olen a demandé le désistement
d’un tiers de Bussac, si on ne lui remboursoit pas cette
créance, il n’a véritablem ent réclamé qu’une chose plus
ridicule encore que le désistement des deux tiers : aussi
n’en fait-on pas un article particulier de discussion.
C ’est par la voie hypothécaire que le sieur Dem olen
veu t être remboursé de la créance Nastra par la dame
Beaufils, détenteur de Bussac; et en effet, il lui donne
l ’option de payer ou de délaisser l’immeuble.
IVIais s’il forme cette demande comme subrogé par la
demoiselle de N astra, il ne peut s’aider que de la sen
tence de 178 9 , qui ne prononce rien en faveur de la
demoiselle de Nastra contre la dame Beaufils. Quand il
seroit encore subrogé par le sieur R odde, on lui répondroit que la dame Beaufils ayant exercé contre lui une
demande en garantie, fondée sur l’acte de 1 7 1 8, il n’a
payé que pour éviter ce recours, et qu’il est gai’ant de sa
propre demande.
Il n’est pas moins curieux de rem arquer combien le
sieur Dem olen a mis d’incertitude et d ’exagération dans
ses demandes. Il reprend le procès des Dussaulnier, qui
demandoient le désistement des deux tiers d’un domaine;
et-le sieur Dem olen veut enchérir sur e u x , et réclame
/
*
�(2 0 )
l’autre tiers par hypothèque. M a is ces deux prétentions
Sont é ga le m en t mauvaises; et la dame Beaufils doit être'
r assurée su r une p ro p r ié té qu'u ne aussi longue possession
a co n so lid ée dans sa fam ille.
•
,J
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e, F A Y E ,
——■
— —
^
1
avoué licencié.
— —— —
m
A R I O M , de l ’im p. d e T H I B A U D , im prim . de la C our im périale, et libraire
ru e des T aules ? maison L a n d r iot . — A v ril 1810..
I
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Biron, Marie-Anne. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
successions
créances
terriers
coutume d'Auvergne
prescription
renonciation
possessions précaires
Description
An account of the resource
Précis pour Dame Marie-Anne Biron, veuve de M. Jean-James Beaufils, habitante de la ville de Saint-Flour, intimée ; contre le sieur Raymond Demolen-Dumas, appelant.
Annotations manuscrites
arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1718-1810
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0306
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pouzat (terre de)
Chambon (domaine de)
Bussac (domaine de)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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coutume d'Auvergne
Créances
possessions précaires
prescription
renonciation
Successions
terriers
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53751/BCU_Factums_M0303.pdf
7d1bf5415f90daab6f886f84aa489124
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MÉMOIRE
EN R É P O N S E
POUR
Louis BOISSIER, M a r i a n n e BOISSIER, et
le sieur CHAUV ASSAIGNE , son m ari,
M i c h e l - G a s p a r d BOISSIER , et P i e r r e
CHABRIDON , d e m an d e u rs ;
C O N T R E
Dame M a r ie - C a t h e r i n e D E R O C H E FORT
et sieur J e a n - A u g u s t i n - G u i l
laume D E F R E T A T D E C H I R A C , son
mari défendeurs.
L
A famille Boissier et V ialle plaide depuis 17 2 0 ,
contre la famille de R och efo rt, pour obtenir le payement
d’une créance considérable , hypothéquée en majeure
partie sur deux domaines.
A
�( o
Ces deux domaines furent pendant quelque temps en
la possession des V ialle : les héritiers Rochefort les leur
ôtèrent. Lorsqu’ensuite les V ialle ont demandé qu’on
payât leur créance, ou qu’on rendit les domaines, les
héritiers de Rocliefort ont Lcnu hon , et de moyens en
m oyens, de génération en génération, ils ont retenu
les domaines et la dette.
V oilà c o m m e n t la famille V ialle est ¿conduite depuis
quatre-vingt-dix ans! *>.
•
*
E t aujourd’hui q u ’elle veut en finir, on lui reproche
que c’est une vieille recherche : on lui dit des injures....
« C ’est une horde de plaideurs.... Ils seroient ruinés sans
« ressource, si la dame de Frétât exerçoit ses droits à la
v. rigueur.... Elle seroit creancieie de plus de 20000 fi.....
« L a fortune de ces éternels vexateurs ne suiliroit pas
« pour acquitter cette créance. »
Cette sortie un peu dure ne fera point oublier aux
sieurs Boissier les égards qu’ils veulent devoir à la dame
de Frétât. Il a pu lui être désagréable, au printemps d’une
belle vie , de se voir étourdir par un fort ennuyeux
procès. A tous les âges, un procès à défendre est toujours
une chose fort importune : cependant si le résultat devoit
être pour madame de Chirac une créance de 20000 fr.,
il n’y auroit pas de quoi savoir aussi mauvais gré aux
sieurs Boissier d’avoir troublé son repos.
Débiteurs ou créanciers, ceux-ci veulent en finir. Que
leurs a n c ê t r e s aient mérité aussi l e reproche de leur avoir
l a i s s é à débrouiller ce procès, ou qu’ils y aient été forcés
par des chicanes, les sieurs Boissier s’efforceront au moins
de ne pas le léguer eux-mêmes ù leur postérité.
�{ 3 )
F A I T
S.
I.a seule manière de se l’endre inteUig ble dans ce
long procès, consiste à préciser les faits et les époques,
sans'rien omettre de ce qui est connu-, et quelque pénible
que soit cette tâche, les sieurs Boissier croient devoir la
rem plir, parce qu’ils sont convaincus que les faits seuls
doivent tout éclaircir , et l’epondie à tout.
L e tableau généalogique des familles de Rocliefort et
de Boissier, doit d’abord être mis sous-les y e u x du tri
bunal , pour l’intelligence des actes et procédures dont
il y a à rendre compte,
Biaise C h a r d o n ,
A le x ie B o n n e t .
‘ise.
Antoinette.
Anne.
M a rie.’i M arie.
Françoise ;
Am able Rochefort.
G ilb.-A m able Rochefort,
___
François
Gilbert.
Antoinette Chardon,
Jean V ialle.
F ra n ço is C h a rd on ,
Jeann e F o u rn ier.
Réné Chardon,
Suzanne Fournier.
1
Joseph, Catherine, Annet. Jeanne, Franç
—_
■
V-%
.»
art 4 rrt
H flAl
Gaspard
Étiei
Marie
Étienne
M
om
et.
Payi
Auteroche. Boissier.
r'v.,. s~\
Guillaume. F rançois, Antoinette.
Suzanne
,
Mathieu.
H
Jean. R én é,
religieux.
7 7
François. Suzanne, Antoinette.
|
M , Valoi).
Madame
de Chirac.
I II
1 l 1
Ses enfans
Lcs_
ont cédé
Boissier
leurs droits
et
à leurs co- Chauvashéritiers.
saigne.
François Chardon se maria le 22 février 1645*, et
Jeanne F o u rn ier, sa fe m m e , lui porta une dot m obiliaire.
Il mourut au mois de mars 1662 , laissant quatre
enfans en minorité.
Par avis de parens, du 7 juin 1 6 6 3 , R éné Vialle
A 2
■ lì. 1
M om et,
les
Chabridon»
�(4)
fut nommé leur tuteur, quoique cette ciiarge dut être
déférée à Réné Chardon.
Mais par acte du même jour, passé entre R éné Chardon
et R ené V ialle , il fut convenu que R éné Chardon se
chargcoit de la tutelle.
R én é Chardon mourut en i 665. La famille fut as
semblée le 3 juin.
Il y avoit dans la succession de François C h a rd o n ,
trois domaines appelés L u c b a s , Bonabry, et A u r iè r e ,
une m aison, un ja rd in , un pré et un moulin à R o cliefort, et quatre rentes.
Les deux premiers furent donnés à bail judiciaire au
nommé Guillaudon : le domaine d’Au rière et les autres
objets continuèrent d’être jouis par Suzanne F ourn ier,
veuve de R éné Chardon.
‘ L e I er. mars 1666, elle communiqua
Réné Vialle
l ’état de la gestion faite par son mari, ou par elle-même.
R éné V ialle la déchargea de la tutelle pour l’avenir; mais
elle convint en être responsable jusqu’au jour.
Les pupilles continuoicnt de rester avec elle. Réné
Chardon, l’un d e u x , entrant dans la vie monastique,
elle se fit léguer par son testament le quart de ses biens.
Elle fit rég ler, par un acte du 2 octobre 1682, la
pension que le tuteur devoit lui payer pour les trois
autres. L e compte en fut fait pour tous arrérages à 3080 fr.
qui lui fu re n t payés par R éné Vialle.
Elle les engagea, aussitôt leur majorité, à prendre la
qualité d’héritiers bénéficiaires de François Chardon, leur
père , puis à répudier à sa succession, et à demander un
compte de tutelle à Réné Vialle.
�( 5 )
René V i aile défendit à cette d em án d ele i 5 janvier
1686. Il dit à Jean Chardon qu’il n’avo itp asp u répudier,
parce qu’il avoit vendu en majorité une terre du domaine
d’A urière et un jardin à Rocliefort. A l’égard de ses sœurs,’
il se contenta d’offrir le com pte, sauf à discuter ensuite
leur renonciation.
L e c o m p t e fut d o n c r e n d u p a r R é n é V i a l l e a u x risques
et p é r ils de S u za n n e F o u r n i e r , q u ’il assigna e n r eco u rs ,
ainsi q u e Biaise C h a r d o n , son iils..
Suzanne Fournier conclut incidemment au payement
d’une obligation de 2100 francs , consentie par François
C hardon , à R éné C hardon, le i 5 juillet 16 6 2 , et à la
délivrance du quart à elle légué par le testament de 1766.
Pendant ces débats on faisoit des diligences contre la
succession répudiée de François Chardon.
I>c 6 mai 1G89 , M arie et autre M arie Chardon ,
obtinrent une sentence contre Jean Taragn at, curateur
à ladite succession , qui « condamne ledit curateur, en sa
« dite qualité, à leur payer la somme de 8098 liv. 13s. 4d.
« pour les deux tiers à elle revenans dans la dot de Jeanne
« F o u rn ier, leur mère , et gains matrimoniaux, avec les
« intérêts depuis le décès de François C h ardon , arrivé
« au mois de mars 1662, jusqu’à l’entier payement d’icelle,
« liquidés jusqu’au mois de mars 1689 , à la somme de
« 10933 francs, sans préjudice d’autres droits contre la
« succession dudit François Chardon ».
Peu de temps ap rès, un nommé T h ie r r y , créancier
de la succession ,. lit des saisies-arrêts; il intervint au
procès pendant sur le compte de tutelle en treRéné V ia lle,
Marie et autre M arie Chardon , filles de François, Biaise,
�( 6 )
Antoinette et A n n e Chardon, assignés en qualité d’hé-
ritici’s de Réné Chardon , leur p è r e , et de Suzanne
Fournier, leur m ère, et ayant repris.
Il paroît que Jean Chardon avoit cessé d’être en.cause,
et qu’il étoit décédé avant 1688.
Ce procès fut enfin jugé à la chambre du conseil,
après un délibéré de onze séances, le 30 mars 1691.
Cette sentence, dont la dame de Frétât a une copie
(cote 12), iixc le reliquat de compte du par Réné V iallc
aux enfans de François Chardon, à 2494 liv. 12 s. 9 den.
et quarante-neuf setiers trois quartes seigle-, et condamne
R éné V ialle à. les leur payer , sauf déduction de trois
setiers d’avoine, avec intérêt depuis les six mois après la
clôture du compte rendu par la veuve de R éné Chardon,
sauf audit Réné V ialle son recours :
a E t faisant droit sur la demande en recours formée
contre lesdits Biaise, Antoinette et A n n e C hardon, les
c o n d a m n e en leu rs dites q u a l it é s , personnellement pour
leur part et portion, et hypothécairement sur le tout, à
gai-antir et indemniser ledit com ptable, aux termes des
traités des 7 juin 1663 , et I e r . mars 1666, tant du paye
ment de la somme de 2707 liv. 9 s. 7 d en ., et de ladite
quantité de quarante - sept setiers trois quartes seigle,
sous la déduction pour raison du reliquat de compte
rendu pour les années concernant l’administration de
défunt Réné C h a rd o n , leur p è r e , que de l’événement
des articles dépendans de ladite administration , ensemble
de l’intérêt de ladite somme et de la valeur dudit grain ;
et ce faisant, à payer a l’acquit et dechnrgedudit comptable,
la susdite somme de 2494 ÜV. 12 s. 9 d en ., ensemble lesditg
�C7 )
grains et intérêts ; autrement, et par faute de ce faire,
les condamne en tous les 'dommages-intérêts et dépens
envers ledit comptable à faire et à souffrir à l’avenir pour
raison de ce. — Et sur l’appel incident interjeté par la
requête desdits oyans compte, le 9 janvier 1689, ensemble
sur les iins et conclusions prises, portées par les requêtes
desdits Chardon , intervenons , des 28 mai 1688, 30 mars
1689, c *- 9 juin 1690, met les parties hors de cour
et de procès, sa uf audit intervenant de se pourvoir en
conséquence de la répudiation faite à la succession dudit
François C h ard o n , par lesdits oyans compte, tant pour la
délivrance du legs du quart porté par le testament de
Réné C hardon, frère desdils oyans com pte, du 9 août
1666, que pour le payement du contenu en l'obligation
du 13 juillet i 652, ainsi qu’ils verront bon être, exceptions
et défenses au contraire réservées: et faisant aussi droit sur
les saisies-arrêts dudit T h i e r r y , ensemble sur la préfé
rence et adjudication requise dudit reliquat de compte,
par les requêtes des 10 janvier et 6 février 16 8 1, ladite
sentence ordonne que les oyans compte et tiers y
viendront en contribution entr’eux au sou la liv r e , au
prorata de leurs créances sur lesdites sommes et grains. »
L e 10 octobre 1 6 9 1 , R éné V ialle transigea avec
M arie et autre Marie C h a r d o n . Elles lui cédèrent ce
qui po u voit.leu r rev en ir, soit de la dot et gains ma.Jrirnoniaux de leur mère et intérêts , soit du reliquat
de compte porté par la sentence d’apurem ent, et frais
d icelle, avec subrogation à leurs droits , actions et ltypothèques, moyennant la soirn»e de 6000 f r . , déduction
�( 8 )
Eiite des sommes par elles reçues pour leurs pensions
.
et provisions à elles adjugées.
Il fut dit que 3000 francs seroient payés dans dix ans,
et que les autres 3000 francs étoient donnés en pur
don au sieur R éné V ia lle , à la charge de leur payer
une rente de 300 fr. pendant leur v i e , de six en six
mois et par avan ce, à la charge aussi de les garantir
des poursuites de T h i e r r y , et de celles d’Antoinette
et A n n e Chardon, et autres, sans préjudice au recours
dudit sieur V ia lle contre lesdites demoiselles Antoinette
et A n n e C hardon , conformément à ladite sentence d’apu
rement.
R éné V ialle mourut en 1692.
M arie et autre M arie Chardon ne donnèrent pas un
moment de relâche à ses héritiers pour les poursuivre.
Elles obtinrent le 26 novembre 1692 une sentence contre
Joseph V ia lle , tuteur de scs frères et sœurs, portant
e x é c u t o r ia l it é du traité ci-dessus de 1691 : ensuite elles
v o u l u r e n t une"~i\atification notariée, que Joseph leur
consentit le 14 février 1693 -, et aussitôt qu’A n n et V ialle
fut m ajeur, elles lui en demandèrent une nouvelle.
Il paroît qu’aussitôt le traité de 1691 , R éné V ialle
avoit été regardé comme légitime propriétaire des deux
domaines de Lucbas et Bon abry, et que sans doute tous
les créanciers tournèrent tête contre l u i , et se firent
payer-, du moins il n’y a pas de trace qu’aucuns créan
ciers , et notamment T h i e r r y , aient fait de poursuites
ultérieures.
L a mort de R éné V ialle dut mettre beaucoup de dé
sordre dans ses affaires; Joseph V i a lle , son fils aîné,
ayant
�( 9 )
..
ayant eu la tutelle des autres enfans, ne les géra pas
fort bien. Il fit plusieurs affaires avec les nommés .¡Nicolas
et A u te ro c lie , qui ont occasionné à la famille V ialle
une longue suite de procès.
Il paroit que les 14 et i 5 mars 1696, Joseph V ialle
donna à ferme, au nommé Auteroclie, gendre d’Etienne
Nicolas, une porLion des biens provenus de François
Chardon ( l’a cte. ci-a p rè s supposeroit qu’il ne donna
que le domaine de Bonabry ; mais un .acte postérieur
suppose qu’il y eut d’autres biens).
L e 12 novembre 1699, il vint à compte avec M arie
et autre Marie Cliardon , de leur rente , et se reconnut
leur débiteur de 918 liv. 4 s. pour quoi il leur céd a,
i°. un bail à rente par lui consenti à Louis A uteroclie,
le 14 mars 1696, pour 130 francs; 20. le bail à ferme
de Bonabry, moyennant 125 fr. ; 30. deux rentes à lui
personnelles ; 40. une créance de 630 fr. avec subro
gation pour s’en faire payer à son lieu et place.
M arie Chardon aînée mourut le 20 mai 1701.
Ce décès persuada à Joseph V i a l l e , avec quelque
raison, que la rente viagère étoit diminuée de m o itié ,
et le refus qu’il fit de payer davantage lui attira beaucoup
de désagrétncns et le fit accabler de frais.
P o u r payer M arie Chardon , il falloit pouvoir re
couvrer soi-même la créance par elle cédée; et le pro
duit des deux domaines étoit à peu près nul à cette ^
epoque où les guerres ruinoient l’agriculture, et où les
propriétés étoient sans valeur.
Les cohéritiers de Joseph V i a l l e , mécontens de ces
arrangemens, qui ne leur faisoient tirer aucun parti utile
B
t
�C 10 )
du traité de 1691 , dont le principal étoit devenu exi
gible , voulurent e u x -m ê m e s se mettre à l’abri des
poursuites de M arie Chardon.
E11 conséquence, par acte du 6 août 170 9 , Annet
V ia lle , p rê tre , les sieurs Momet et Boissier, et Françoise
V ia lle , cédèrent à Etienne N icolas, les d ro its, actions
et hypothèques acquis u la succession de R ené V ia lle ,
leur p è r e , suivant la transaction du 10 octobie 1691 »
sur deux domaines appelés Bonabry et Lucbas , sur des
masures de maison, et un pré, situés à R ochefort, desquels
objets le sieur Nicolas a déclaré avoir parfaite connoissance, pour en avoir joui comme fermier depuis le i 5
mars 1696, et même sur . des rentes venues de la suc
cession de François Chardon. Ils le subrogèrent en leur
lieu pour par lui jouir desdites masures de maison, et
deux dom aines/com m e avoit fait ledit Réné V ialle de
son v iv a n t , et ledit N icolas, comme fermier, sans bes
tiaux. .
sous r é s e r v e a u x cé d an s de leurs autres droits
acquis par ladite transaction contre demoiselles A n to i
nette et A n n e Chardon y dénommées.
L a d i t e cession fut faite moyennant 7999 francs, dont
ils déléguèrent, i°. 3000 fr. à Marie C h ard on , pour le
principal à elle dû suivant ladite transaction ; 20. 1800 fr,
à la dame Carmantrand, veuve Desgiraud; 30. i 5oo fr.
aux créanciers de R éné V ialle ; 40. iô o o francs pour
rester entre lés mains dudit N ico la s, à l’effet de pro
duire 75 francs d’ intérêts qui furent délégués à ladite
M arie Chardon.
Ledit Nicolas fut encore chargé de rapporter aux
c é d a n s les quittances de ladite Marie Chardon , du prix
�des jouissances faites par ledit Nicolas et par A u teroch e,
desdits deux domaines et p rés, depuis le i 5 mars 1696,
à raison de ¿55 francs par a n , et de les en garantir.
L e 4 septembre 1 7 1 0 , M arie Chardon envoya des
huissiers chez le sieur A n n et V i a l l e , p r ê tre , pour l’exé
cuter , quoiqu’elle eût accepté la délégation des fermages
depuis 1699 , et qu’on eut pris des précautions pour
que tout le surplus lui fût payé.
Cette incursion inattendue et malhonnête excita les
cultivateurs d’ un domaine voisin à chasser ces huissiers
de chez un prêtre qu’on considéroit ; mais la résistance
des huissiers occasionna -des querelles et des excès ; un
huissier reçut un coup de serpe au visage, et il en ré
sulta une plainte.
I,e 10 octobre 1711 , la sénéchaussée rendit une sen
tence fort sevère qui bannit deux cultivateurs coupables
de ces excès ; et comme il étoit difficile peut-être de
ne pas présumer que le sieur A n n et V ialle avoit toléré
une rébellion qui n’avoit lieu que pour l u i , il fut dit
qu’il seroit mandé à la chambre du conseil pour être
admonété.
Cette sentence que la dame de Frétât s’est plue à
rappeler souvent, est bien peu de chose pour le procès
actuel j et nous verrons bientôt que M arie C h a rd o n , se
reprochant cette exécution eE ses suites , a voulu en
dédommager le sieur A n n et V i a l l e , en lui déduisant
400 francs pour les dépens.
En effet celte exécution étoit d’autant plus déplacée,
c]ue îsicolas, débiteur, n’avoit pas été mis en demeure;
B 2
�C 12
)
cl le 12 novembre T710, il avoit fait à Marie Chardon
des offres réelles de 300 francs pour sa pension , et de
continuer l’intérêt des 3000 francs, si mieux elle n’aimoit recevoir le capital desdits 3000 francs,
. A u préjudice de cet acte d’offres, Marie Chardon avoit
affecté d’assigner Joseph V ialle seul, et.elle avoit surpris
contre lui une sentence, le 16 décembre 1 7 1 0 , portant
condamnation à lui payer 3000 francs et les intérêts de
6000 francs depuis 1691 , sinon et faute de ce , la cession
étoit déclarée résolue.
E t par une inconséquence inexplicable, Marie Chardon
faisoit, dans le même temps, des saisies-arrêts entre les
m a i n s des Nicolas et A u te ro c h e , qui vouloient la payer.
Puis' elle poursuivit les héritiers V ialle en confir
mation desdites saisies. Les Nicolas furent mis en cause,
et il en résulta un procès considérable , lors duquel les
héritiers Vialle vouloient que le décès de Marie Chardon
aînée, eût diminué la r e n ie v i a g è r e de moitié. '
Ce procès fut jugé le 20 mars 1 7 1 1 ; les saisies-arrêts
furent confirmées; les héritiers Vialle furent condamnés
à payer la pension entière de 300 francs, et il fut fait
provision de 1200 francs à Marie Chardon. I,rs Nicolas
furent condamnés à garantir les Vialle jusqu’z\ concur
rence de 7800 francs, qu’ils resloient d evo ir, et à rap
porter quittance des jouissances qu’ils avoient dû payer
à. Marie Chardon depuis 1696 jusqu’à 170 9, à raison de
205 francs par an.
Il y eut appel de celte sentence au parlement, mais
elle fut confirmée par arrêt du 20 juin 1714.
L a dame de Frétât se plaint de ce que M arie Chardon
�( 13 )
_
ne reçut jamais rieri des Y ialle. Si cela éloit v r a i , ce
n’étoit pas au moins faute de poursuites.
Cependant elle reçut les 1200 francs de provision, et
elle en donna quittance le 26 mai 17 11.
Cela ne l’empêclia pas de faire vendre en place pu
blique les grains par elle saisis sur le sieur Joseph V ielle
de Brousse , qui n’étoit point en cause au procès de 1 7 1 1 . .
En 1713 e lle suscita u n procès d’une autre espèce aux
héritiers Y i a l l e ; elle fit cession et transport au sieur
G ilbert-Am able Rocliefort de 462 francs à prendre sur
e u x , en vertu de la transaction de 1 6 9 1 , et aussitôt le
sieur Rocliefort fit assigner A n n et et François Y ia lle en
payement.
C ’étoit le moment où ceux-ci plaidoient au parlement
sur l ’appel de la sentence de 1 7 1 1 , et soutenoient avoir
surpayé , en ce que la rente de 300 francs étoit réduite
à moitié. En conséquence ils opposèrent en défenses au
sieur Rochefort, i°. qu’étant magistrat, il n’a voit pas pu
prendre cession d’un droit litigieux •, 20. qu’il y avoit
alors procès, et qu’il ne pouvoit l’ignorer, puisque luimême avoit p o u rsu iv i, au nom de Marie C h a rd o n , la
sentence dont l’appel étoit pendant ; 30. que le procès
qu’il intentoit étoit bis in id em , et que les V ialle plaidant
avec la cédante pour l’objet par elle céd é, ne devoient
pas être traduits devant un autre tribunal par sou cédataire.
L e sieur Rochefort dénonça tout cela à Marie C h ard on ,
qui intervint. Enfin il obtint une sentence par défaut
contre les Y ia lle , le 6 février 1 7 1 7 , portant adjudication
de sa demande. Il en poursuivit l'exécution ; et ou a dit
�C Ï4 )
au procès qu’il aVoit été payé ; ce qui est au reste justifié
par son silence. Dans ce même temps .Marie Chardon
fit un autre procès en préférence de saisie contre la dame
Carmantrand, veuve Dësgiraud. Il fut jugé par sentence
du 6 mars 1717 *, Marie Chardon obtint préférence et dut
être payée,
E11 1 7 1 5 Marie Chardon avoit fait une autre saisie de
fourrages et grains sur Joseph V ialle -, mais après plusieurs
diligences , elle en donna main - levée moyennant un
acompte. D ’ailleurs cette année-là elle reçut de toutes
mains : on trouve six quittances d’elle en ladite année
1715 .
E n 17x8 Marie Chardon reçut encore 2,5o francs, et
en 1 7 1 9 , on ne trouve d’elle qu’ une quittance de 30 francs,
où elle ajoute q u e, pour raisons à elle connues, elle fait
remise aux sieurs V ialle de 400 francs, sur les frais à elle
adjugés au civil et au criminel ; mais il paroit que cette
s o m m e a c h e v o i t de p a y e r les arrérages de rente viagères
à elle dûs, lesquels d’ailleurs se payoient d’avance.
M arie Chardon mourut dans l’été de 1719.
L e 16 décembre de la même année 1 7 1 9 , le sieur
G ranchier fit une saisie-arrêt entre les mains de Joseph
V ialle de Brousse, comme créancier de Marie Chardon.
Joseph V ialle fit son affirmation au greffe le 4 janvier
172.0. Il déclara devoir 3000 francs en principal ; mais
ne devoir aucuns arrérages. ( M . Granchier a été paye
depuis de sa créan ce, montant à 825 francs, par les
Vialle. )
•
T e l étoit l’état des choses, lorsque le sieur Rochefort,
�( ï -5 )
héritier présomptif de M arie Chardon j prit la qualité
d’héritier bénéficiaire.
L e i 5 juillet 172 0 , Joseph V ialle déclara au greffe
se porter .héritier pur et simple de ladite M arie Chardon.
A lo rs les héritiers V ialle étoient rentrés en possession
des domaines de Lucbas et B o n a b ry , qu’ils ne gar
dèrent pas.
X^e 21 août 1 7 1 9 , ils a voient obtenu sentence contre
les Nicolas, p o r ta n t résolution de la cession de 170 9 ,
et permission auxdits V ia lle de se remettre en possession.
L e 6 juillet 1 7 2 0 , A n n et V i a lle , curé de D o n t r e ix ,
faisant tant pour lui que pour ses cohéritiers , fit cession
h M re. Pierre de Frétât des mêmes droits déjà cédés à
N icolas, c’est-à-dire, de tous les droits résultans de la.
transaction de 1691 , sur deux domaines appelés Lucbas
et Bonabry , moyennant 14000 francs, payés en billets de
b a n q u e , provenus de la dame Dagoneau , veuve de
F rétâ t, en qui ledit sieur abbé de Frétât déclara faire
son élection de mieux.
L a dame Dagoneau se mit en possession de ces deux
domaines, qui avoient été affermés à Louis Boucheix
pt François Chatagnier le 3 mars 1720.
P o u r consolider son occupation de la succession ,
Joseph V ialle prit possession authentique des biens le 30
juillet 1720.
L e même jour il fit un bail à ferme aux mômes métayers,
qui en avoient déjà un du 3 mars.
Ensuite il assigna le sieur Rochefort en remise des titres,
tneubles et autres objets restans de l’héréd ité, et il fit des
saisies-arrêts entre les mains des fermiers.
�( ï6 )
Ces actes ne furent d’abord point contrariés par le
sieur G ilbert-À m able Rochefort.
A n contraire, par acte du 28 décembre 1720, le sieur
Rochefort fit, comme héritier sous bénéfice d’inventaire
de Marie C hardon, une saisie-arrêt entre les mains desdits
Roûcheix et Chatagnier du prix de ferme des domaines
de Bonabry et L u c b a s , comme dépendons de la suc-r
cession de R é n é V ia lle.
Cependant le procès sur cette succession de M arié
Chardon devint sérieux , et le sieur Rochefort fit ses
efforts pour tout obtenir ; il soutint que le sieur V ialle
n’étoit point en ordre de succéder, et n’avoit pu l’exclure,
parce qu’Antoinette (]hardon, sa m ère, avoit été forclose.
Ces débats envenimèrent les parties, et les héritiers
V ialle agirent de leur côté en poursuivant à la fois le
sieur Rochefort à Riom et à Paris : voici à .quelle occasion.
1
L e 7 mai 1688, le sîeqr Amable R och efort, père de
G ilb e rt- Am able , s’étoit chargé de la procuration du
sieur Réné V i a l l e , pour faire le voyage de Paris et
poursuivre un procès pendant entre Gilbert Reynaud et
Gilbert Rochefort, son père, dans l’intérêt dudit V ia lle,
pour la portion à lui distribuée sur les effets de la sucçession dudit Gilbert Rochefort , montant à 1043 Hv. 11 s*
P ar ledit acte , le sieur Rochefort s’étoit engagé ù ne
répéter aucuns frais s’il succomboit; et au cas contraire,
il étoit dit q u ’ il auroit la moitié de la créance»
Il paroît qu’il obtint un arrêt le 14 février 1701.
L e 13 juin 1 7 1 0 , le sieur Rochefort donna un autre
écrit au sieur Joseph V ialle de Brousse, par lequel il
reconnu!
�C *7 )
reconnut tenir de l u i , i ° . un billet de 2000 francs du
sieur Gilbert Rochefort , son aïeul, portant promesse
de faire payer 2000 francs à Paris par le sieur Fauttrier,
valeur reçue dudit V ia lle ; 20. les causes d’oppositions
formées à Clerm ont, et le procès verbal de distribution
des effets dudit Gilbert Rochefort:, lesquelles pièces lui
étoient nécessaires pour suivre l’effet dudit arrêt de 1701 ;
qu’il s’obligea de nouveau de poursuivre aux mêmes
clauses et con d itio n s expi-imées en l’acte passé avec le sieur
R och efort, son p è r e , en 1688.
C ’est en vertu de ces deux actes que tons les héritiers
V ialle firent assigner le sieur G ilbert-Am able R ochefort,
par exploit du 12 juillet 1720; c’est-à-dire au bout de
d ix a?îs, pour voir déclarer exécutoire l’acte de 1688;
reconnoître l’écriture de l’acte de 1 7 1 0 , se voir con
damner à leur remettre tous les titres et papiers dont
son père et lui s’étoient chargés , et rendre compte de
l ’exécution, sinon leur payer, i ° . la moitié des 2000 fr.
suivant leur convention; 20. la moitié de 10 4 3 liv. 11 s-,
avec intérêt depuis le 7 mai 1688,
L e second procès intenté par les V ia lle , se réduisit
à poursuivre au parlement la péremption de l’appel in
terjeté par Antoinette et A n n e Chardon , de la sen
tence de 1691.
11
est vrai q u ’ il y avoit décès de part et d’autre; mais
la péremption étoit acquise lors desdits décès : en con
séquence, le i 5 juin 1720, les héritiers V ialle prirent
une commission au parlement pour faire assigner les
héritiers desdites Antoinette et A u n e Chardon ; et le
C
�C t8 )
12 juillet suivant, ils assignèrent le sieur Gilbert-Aniable
Rochefort en ladite qualité.
Ce procès fut appointé en droit. Il y eut des écritures
de part et d’autre. Et enfin , par arrêt sur productions
respectives, du 14 mai 17 2 2 , l ’appel fut déclaré p é r i,
et la sentence de 1691 maintenue en sa forme et teneur.
Pendant ce temps-là, on plaidoit à Clermont sur la
succession de Marie C h ard o n , et ce procès étoit consi
dérable.
t
Les cinq enfans de Gilbert-Am able Rochefort avoient
repris au lieu et place de leur père : ils concluoient à
être gardés et maintenus dans le d r o i t , et pour jouir
des biens de Marie Chardon.
L a dame Dagoneau de Frétât réclamoit ses droits en
vertu de la cession à elle faite le 6 juillet 1720.
Les métayers des deux domaines, ap pelés sur les saisiesarrêts , îigissoient e n recours c o n tr e elle et contre les
sieurs V i a l l e .
L e sieur Charmat, procureur de la défunte, réclamoit
5oo francs pour ses vacations, et jusque-là demandoit
l’autorisation de poursuivre le payement des dettes actives
de la succession , jusqu’à concurrence de son dû.
E n fin , à la veille du jugement, les cinq enfans R o
chefort déclarèrent qu’ils se portoient héritiers purs et
simples.
Sur tous ccs débats, et par sentence du 22 juin 1729,
lesdits irères et sœurs Rochefort furent gardés et main
tenus au droit et possession de jo u ir des biens meubles et
immeubles provenus de la succession de Marie Chardon.
�( *9 )
Les héritiers V ialle furent condamnés à rendre compte
des jouissances et dégradations depuis le 30 juillet 1720,
jour de la prise de possession. Il fut donné main-levée
de leurs saisies-arrêts. A v a n t faire droit sur les de•
mandes du sieur Charma t , il fut dit qu’il donneroit
état de ses vacations. Les dépens furent compensés entre
les Vialle et Rochefort , hors le coût de la sentence
auquel les Vialle furent condamnés. ( N ota. L e sieur
Charmat a été payé par les Vialle. )
Les héritiers Rochefort se mirent en possession de
tous les objets de la succession de Marie Chardon, dans
laquelle ils confondirent les deux domaines dont ils se
mirent aussi en possession, ainsi qu’ils en conviennent,
aussitôt après cette sentence.
L a dame D agon eau, veuve de F r é tâ t, ainsi évincée,
fit assigner les héritiers V ia lle , par exploit du 4 juillet
1 7 3 1 , pour la faire jo u ir, sinon lui rembourser 14000 fr.
L e 7 août 1731 , les héritiers V ialle dénoncèrent
cette demande au sieur François
R o c h e fo rt,y en lui oba
servant que Marie Chardon avoit cédé à leur p è re,
i°. l’effet de la sentence de 1691 , contre les auteurs
dudit R ochefort; 20. l’effet de la sentence de 1682,
contre la succession de François Chardon : ils ajoutèrent
que les biens jouis par la dame de F r é t â t, provenoient
dudit François C h ardon , et n’avoient jamais fait partie
de la succession de Marie Chardon, décédée. Ils l’assignerent en môme temps pour voir déclarer exécutoire
la sentence de 1691 , et se voir condamner comme
héritier de ses père et mère , personnellement pour sa
part et portion 7 et hypothécairement pour le t o u t , à
C 2
�payer 2707 liv. 9 s. 7 d en ., avec les intérêts adjugés
par ladite sentence, et qui ont couru depuis, ensemble
quarante-neuf setiers trois quartes de b l é , avec intérêts
de droit ; se voir faire défenses de troubler la dame
D a go n éa u , sinon être condamnés en leurs dommagesintérêts, sans préjudice à autres droits.
François Rocliefort signifia un committimus, et de
manda son 'renvoi aux requêtes de l’hôtel.
Il décéda peu de temps a p rè s, et les héritiers V ialle
reprirent la demande de 1 7 3 1 , contre Suzanne M athieu,
sa veuve, en qualité de tutrice, par exploit du 9 mai 1742.
L ’instance fut reprise par jugement du 2 août 174 2 ,
qui donne aux enfans la qualité d’héritiers de leur
père ; et le 14 du même m ois, Suzanne Mathieu défendit
à la demande.
Ces défenses, assez mal digérées, consistèrent à com
battre la cession et la sentence de 1691 , à opposer la
p r e sc rip tio n , et à p r é te n d r e q u e la sentence de 1729
avoit an n u llo ladite cession. Elle terminoit par dire que
si les domaines provenoient de François C hardon, elle
devoit être payée avant les V i a l l e , de son obligation
de i6Ô 2, antérieure à la dot de Jeanne F o u r n ie r , et
que s’ils ne provenoient pas dudit C h ard on , les V ialle
n’a voient aucun droit sur ces domaines.
L e sieur L ollier-C hateaurouge , héritier du sieur
de Frétât, intervint pour reprendre lès poursuites de la
dame Dagoneau.
Les héritiers Nicolas, de leur côté, assignèrent Suzanne
M athieu, et le sieur Guillaume Rocliefort, son filsP eu
�( 21 )
désistement des deux domaines. Ils opposèrent la sentence
de 1729.
Par requête du 7 avril 1 7 6 4 , les héritiers Vialle
ajoutèrent aux conclusions de leur exploit de 1731 ,
que la dame Matliieu fût condam née, en sa qualité, à
leur payer 8098 liv. 12 s. 4 d. adjugée à une demoiselle
Chardon par la sentence de 1689, avec les intérêts
depuis le mois de mars 1622 ; en conséquence, à les
garantir en ve rs le sieur Lollier jusqu’à concurrence des
sommes à lui dues, à diminuer sur celles dont lesdils
V ialle seront dits créanciers de ladite dame M a th ie u ;
et enfin , il demandèrent permission d’assigner les dé
tenteurs des deux domaines en matière hypothécaire.
L e 4 juillet 1 7 5 4 , le procès fut appointé ; et par
requête du 31 décembi-e 1 7 5 6 , les héritiers V ialle don
nèrent des avertissemens par lesquels ils prirent des
conclusions générales beaucoup plus précises et plus
régulières que celles prises jusqu’alors.
Ils demandèrent aux héritiers Rochefort, personnel
lement et hypothécairement, i°. les 8098 fr. portés par la
sentence de 1689, avec les intérêts adjugés; 20. 2494 fr.
et quarante-neuf setiers de blé portés par- la sentence
de *1691 ; 30. 2000 fr. portés par l’écrit de 1710.
crurent devoir ensuite, par exploit de 1 7 6 7 , si
gnifier cet écrit à dom icile, pour p a r v e n ir à la reconnoissance d ’ écritui;e ; mais quand il en fut question , Je
sieur Rochelort ne voulut pas s’exp liq uer, et se contenta
de dire q ue, de 1710 à 1 7 5 6 , le titre étoit prescrit.
La procédure fut de nouveau suspendue pendant plu
sieurs années; et on voit par ce qui en est rapporté dans
Ils
�des pièces postérieures, combien cette suspension eutuno
cause funeste pour la famille Vialle.
j
L e sieur L ollier se lit adjuger sa demande, sans doute
parce qu’elle fut disjointe, et il fit mettre en saisie réelle
tous les biens des V ia lle , qui le payèrent de sa créance;
ce qui leur coûta près de 40000 francs.
E n 1 7 7 1 , les V ialle reprirent leur demande contre
Suzanne Mathieu.
;
E lle signifia qu’elle n’étoit plus tutrice.
Ils assignèrent le sieur François Rochefort, son fils. Il dit
qu’il n’étoit pas héritier de François Rocliefort, son père.
Ils mirent en cause Antoinette Rochefort ; elle dit la
même chose.
Les sieur et demoiselle Rochefort signifièrent une
répudiation du 26 novembre 1771.
Les héritiers V ialle leur répondirent que cette répu
diation n’étoit pas sincère, parce que le sieur Rochefort,
leur p è r e , avoit laissé une maison à R io in , un bien ù
P o m o r t , et un autre bien à A u b ia t; de tout quoi le
sieur Rochefort étoit en possession.
Cependant les héritiers Vialle voulurent encore asrsigner la dame Valon en 1772 ; elle dit aussi n’être pas
héritière.
Eliifin, en 1773 , ils assignèrent Antoinette Rochefort,
tante des précédens, et elle répondit que son frère ayant
laissé des enfans, elle n’étoit pas en ordre de succéder.
A insi repoussés, les héritiers V ialle ayant lutté vai-r
ncment jusqu’en 1 7 7 6 , firent nommer un curateur à la
�( 23 )
succession répudiée du sieur Rochefort père, et ils com
mencèrent leurs poursuites contre lui.
' A lo rs le sieur François Rochefort se hâta de rétracter
une répudiation qui n’avoit été qu’ un moyen de procès:
mais ce ne fut que pour donner d’autres entraves aux
créanciers Vialle.
• L e 21 mars 1776 , il obtint des lettres de bénéfice
d’inventaire, et présenta R o y , cordonnier, pour caution.
11 notifia ces lettres, et le 13 juin suivant, il signifia des
moyens de défense fort étendus contre tous les chefs de
demande. Il est inutile de les analiser, parce qu’ils se
bornent à ce qui est opposé dans le mémoire de la dame
de Frétât.
L e 2 mars 1777 , le sieur de Rochefort vendit le
domaine de Bonabry à Louis et Martin Bouchet.
Ces acquéreurs prirent aussitôt des lettres de ratifi
cation-, mais elles ne furent scellées qu’à la charge des
oppositions des héritiers Vialle.
L e sieur de Rochefort, poursuivi par ses acquéreurs,
assigna les héritiers V ialle en m ain-levée, par exploit
du 30 décembre 1779. Cette nouvelle demande fut jointe
aux précédentes, par sentence du 7 mars 1780.
A près quelques autres procédures , des décès inter
vinrent , et le procès a resté suspendu pendant la l’é
volution. Enfin j en l’an 9 , il a été repris ; et depuis
le décès de M . de R o c h e fo rt, il l’a été encore contre
madame de C h i r a c , sa fille. Les héritiers Boissier ont
néglige ¿g remettre en cause les acquéreui’s du domaine
B onabry, parce que c’eût été compliquer encore plus le
�( M )
procès, et que cette précaution est parfaitement inutile.
V oilà en quoi consistent tous les détails de cette longue
contestation. 11 a été du devoir des héritiers V ialle de
n’en rien retrancher, pour montrer combien peu il a
été en leur pouvoir d’être jugés plu tôt, et combien il
auroit été de leur intérêt de l’être il y a cinquante ans.
Q u o iq u ’il en soit, les choses sont encore entières; et il
s’agit de savoir seulement qui sera créancier ou débiteur.
Ils von t prouver que cette question n ’est pas très-pro
blématique,
M O Y E N S ,
L a dame de Frétât est débitrice des héritiers V ia lle ,
en trois qualités différentes.
Comme représentant Réné V ialle et Suzanne F o w n ie r,
elle doit les sommes portées par la sentence de 1691.
Comme possesseur des biens provenus de François
C h ard o n , elle doit les sommes portées par la sentence
de, 1689,
Comme représentant Gilbert-Am able Rochefort, ma-,
dame de Frétât doit les sommes portées par l’acte de 1668,
et l’écrit de 1710.
Rien n’est plus évident que ces propositions qu’il seroit
oiseux de fortifier par des preu ves, après le détail dans
lequel on est entré : ce ne seroit que se répéter.
Cependant la dame de Frétât les réduit à un seul titre,
c’est-à-dire à la sentence de 1691 (p . 18 ) J et elle ajoute
que pour réclamer la somme portée par cette sentence,
h
j
■
�(25)
il faudroit établir l ’avoir payée à Marie C h ard on , ou
être poursuivi par ses représentans , et qu’il faudroit
encore prouver avoir payé T h i e r r y , tandis qu’il seroit
impossible aux V ialle de justifier aucun payement.
Mais d’abord le payement de T h ierry est étranger à
la dame de Frétât. Il est censé s’être fait payer, puisqu’il
avoit un titre , et que Réné V ialle étoit obligé de ga
rantir Marie Chardon de ses recherches : il a dû remplir
les engagemens , puisqu’on ne justifie d’aucune poursuite
de sa p art, et c’est là tout ce qu’ il s’agissoit de savoir.
Quant à ce qui étoit dû à Marie Chardon , il n ’en
est pas de même : la clame de Frétât a qualité pour s’en
inform er; et c’est pour cette raison que les héritiers V ialle
out mis sous ses yeu x tout ce qui prouve leur libération
jusques et à concurrence du moins de la renie viagère.
Ce n’est pas sérieusement sans doute que la dame de
Frétât oppose la sentence par défaut de 1 7 1 0 , qui a
prononcé la résolution de la cession.
Auroit-elle oublié la sentence de 1711 , sur laquelle
cependant elle a beaucoup insisté, comme obligeant les
V ialle à payer la pension entière, au lieu de moitié? Si
donc Marie Chardon s’occupoit du mode de payement
à venir de sa pension, il falloit qu’elle ne comptât la
sentence de 1710 , que comme condamnation d’arrérages,
sans s’occuper d’ une disposition qui étoit purement de
style ou comminatoire.
Tout ce qui s’es(; passy depuis prouve que cette sen
tence de 1710 n’a eu effet que pour les condamnations
y contenues. L a rente a été servie depuis 1710 jusqu’au
D
�( 26 )
décès de Marie Chardon ; et après son décès, le sieur
Rochefort a lui-même fait des saisies-arrêts comme hé
ritier, pour tous les arrérages échus jusqu’audit décès.
Ce n’étoit donc qu’un oubli de la pai't de la dame de
Frétât d’invoquer une résolution imaginaire, dont aucuns
de ceux qui ont plaidé avant elle n’avoient conçu l’idée,
parce qu’ils sa voient bien ce qui s’étoit passé après 1710.
L a cession , dit madame de F rétât, n’étoit que de la
dot mobiliaire de Jeanne F o u rn ier, et n’a aucun trait
aux domaines de Bonabry et Lucbas.
Cela est très-vrai à titre de propriété, mais non à titre
d’hypothèque ; car ces deux domaines provenoient de
François Chardon , mari de Jeanne Fournier, et débiteur
de la dot : ils éloient donc hypothéqués au rembourse
ment de cette dot et des reprises matrimoniales.
L a famille V ia lle , cédataire de cette d o t, a suivi son
gage depuis 1696 jusqu’à 1729, de gré à gré avec M arie
C h a r d o n , qui recevoit les fermages des domaines par délé
gation.
En 1729 la famille Rochefort a ôté ces domaines aux
nyans cause des sieurs V ia lle , qui ont voulu y rentrer en
1 7 3 i, 1742, 1757, 1 7 7 1 , et jusques dans les mains de l’ac
quéreur actuel, en 1777.
Ils ont dit à la famille Rochefort : Paycz-m oi, ou rendez
mon gage : aut cédai aut solvat est la règle la plus incon
testable en matière hypothécaire , et elle a été tout le
mobile de la procédure des héritiers Vialle depuis 1729
jusqu’à présent.
Que la famille Rochefort ait gardé ces domaines comme
�les croyant de la succession de M arie Chardon, ou de la
succession répudiée de François C hardon, ce n’est plus
aujourd’hui la question. Il ne s’agit pas de la propriété
de ces domaines, mais du i*ecouvrement de la somme de
8198 francs, dont ces domaines sont le gage depuis le
mariage de François Chardon.
A p rès l’éviction de 1729, les héritiers V ia lle pouvoient
exercer une demande hypothécaire ou revendiquer la
possession de leur gage ; ce qui étoit la même chose ,
puisque le but des deux demandes étoit de jouir p i g n o
ra ti vement.
Ils préférèrent d’abord le dernier p a r ti, parce qu’ils
ne voulurent pas reconnoitre l’usurpation de la famille
R o c h e fo rt, qui en effet ne s’étoit pas fait adjuger la
succession répudiée de François Chardon , mais celle de
M arie, qui avoit vendu son g a g e et son droit pignoratif
sur les domaines.
Ensuite les héritiers V ialle prirent indifféremment des
conclusions en remise des domaines ou en payement h ypo
thécaire des créances ; ce qui a été le dernier état en
1757 et en 1777 ; de sorte que leur droit a été parfaite
ment conservé , et sans prescription : ce qui est tout
l’intérêt actuel de la cause. Ils ont donc été fort consequens, et ne se sont jamais considérés comme pro
priétaires des domaines, ainsi que le leur reproche la
dame de Frétât (page 21 ) *, ils 11e se sont jamais consi
dérés que comme créanciers.
r
E t meme quand ils disposèrent des domaines en 1709
et 1720 , ils ne firent que céder leurs droits et hypo
thèques sur ces domaines.
D 2
�( ^8 )
Quand la dame de Frétât veut les renvoyer au curateur
à la succession vacante pour réclamer les 8198 francs, elle
ne réfléchit pas qu’il ne s’agit point ici d’une action per
sonnelle , et qu’il n’y a plus rien à demander au curateur,
dès qu’il a été condamné en 1691.
D ’ailleurs il faudroit remarquer (si les héritiers V ialle
a voient intérêt de l’examiner) qu’il ne peut plus y avoir
aujourd’hui de succession vacante, lorsque tous les biens
de François Chardon sont dans les mains des héritieVs
de sa fille , nonobstant sa répudiation.
M a is, dit encore la dame de Frétât, vous n’avez rien
demandé en 172 9, lorsqu’on vous évinçoit.
JSon erat Me lo c u s , et il ne s’agissoit alors que de la
succcession de Marie Chardon, disputée par deux héri
tiers ; il n’y avoit donc pas lieu de répéter des créances
dues par la succession répudiée de François.
S’il plut au sieur Rochefort d’abuser de cette sentence
c o n tr e la clame D a g o n e a u , il n e trouva son droit que
dans l’arbitraire ; d’ailleurs les héritiers V ialle étoient
désintéressés alors , ayant cédé leur créance ù la dame
Dagoneau ; il a fallu une éviction pour leur rendre le
droit de réclamer.
Ainsi les héritiers V ialle sont fondés à dire à la dame
de F rétâ t, comme i\ tous ses ancêtres: V ous vous êtes
emparés du gage de notre créance ; vous l’avez ôté ù
nos oyans cause ; vous devez donc payer la créance ou
rendre le gage : c’est à cela que se réduit toute la cause
relativement ù la créance de 8198 francs.
Quant à celle de 2194 francs ? elle est personnelle à la
�C 29 )
maison de R o c h e fo rt, et rétroagit tout à la fois sur la
succesion de Marie C hardon, occupée par la dame de
F r é t â t, parce que Marie Chardon doit faire valoir sa
cession.
A cet égard la dame de Frétât propose un seul moyen
(page 20) , et ce moyen est bien étrange. Elle veut qu’il
y ait cofifitsion de dette et créance, parce que le sieur
Rochefort est devenu héritier de M arie Chardon, créan
cière de Réné V ia lle , lequel avoit seulement un recours
contre le sieur Rochefort.
D ’abord il n’est pas trop aisé de concevoir comment
la confusion s’opère lorsqu’ il y a une troisième personne
intéressée , et que ce tiers n’est pas héritier : ici il y a
R éné Vialle.
Cependant l’objection auroit quelque chose de spécieux
dans un sens, sans la cession de 1691 , qui ôte toute idée
de confusion.
En e ffe t, Marie Chardon , par cette cession , donna
quittance finale à son tuteur du reliquat auquel il étoit
condamné envers elle ; elle n’avoit pas besoin de lui rien
céder à cet égard contre, Suzanne F o u r n ie r , veuve de
Réné C h ard o n , puisqu’elle n’étoit pas sa créancière di
recte , dès qu’elle avoit tout obtenu contre son tuteur.
C ’étoit ce tuteur q u i , en vertu de l’acte de 1666 et
de la sentence de 1 6 9 1 , étoit créancier direct de R én é
Chardon , comme forcé de payer seul le reliquat d’un
compte dû par ledit R éné Chardon.
Ainsi la qualité d’héritier de M arie Chardon n’a pas
pu dispenser les héritiers de R éné Chardon , de payer
a Réné Viulle les condamnations de la sentence de 1691.
�( 30 )
L e sieur R och efort, 0111:776, avoit fait une autre dé
couverte pour éluder ces condamnations de 1691.11 disoit
aux héritiers V ia lle : V ous n’avez fait condamner que
Biaise, Antoinette et A n n e C hardon, comme héritiers
de R éné en 1691 , et je ne les représente pas.
Mais , i ° . ce n’étoit là qu’éluder l ’application de la
sentence de 1691 , parce qu’elle étoit rendue contre
Biaise, Antoinette et A n n e Chardon , en qualité d’h é
ritiers de Réné Chardon et Suzanne Fournier. Ces trois
héritiers appelés sont condamnés personnellement pour
leur part et p o rtio n , et hypothécairement pour le tout.
A u jo u rd ’hui la maison Rochefort représente toute la
branche de Réné Chardon.
2°. L ’arrêt du 14 mai 1722 imprime au sieur GilbertA m a b le Rochefort la qualité d’héritier d’Antoinette et
A n n e C h ard on ; cet arrêt lui fut signifié ù domicile, et
il n’a jamais nié cette qualité.
A in si la sentence de 1691 est commune à la dame
de F rétâ t, q u i, non-seulement réunit sur sa tête la
qualité d’héritière de toutes les personnes condamnées,
mais qui encore a les biens des familles de Rochefort
et C h a r d o n , hypothéqués à cette créance.
Cette créance a toujours été en vigueur par des pour
suites. Elle le seroit au besoin par des minorités succes
sives ; mais au reste, on n’a jamais osé opposer la
prescription.
Il reste à parler de la créance résultante de l’écrit de
1710 : et ici le sieur de Rochefort crut n’avoir besoin
d’autre moyen que la prescription qu’il alléguoit de
�(3 0
quarante-sept années, en comptant de 1710 a 17^7* ï ja
dame de Frétât fait le meme calcul, et elle se trompe.
L ’exploit de 1720 d i m in u e d’abord cet intervalle, et
le réduit à trente-sept ans. Les minorités vont reduire
cet excédant.
E n 17 2 0 , Joseph V ialle
enfans Boissier ; les autres
dernier errement est du 6
On voit par la sentence
procédoit comme tuteur des
parties étoient majeures. L e
septembre 1720.
de 1 7 2 9 , que Joseph V ia lle
étoit décédé *, il étoit représenté alors par Marie A u te ro c h e, sa v e u v e , tutrice de leurs enfans.
E n 1 7 4 2 , Jean -G aspard et Jeanne Boissier étoient
majeurs ; ils procèdent avec Jeanne V i a l l e , veuve de
Gaspard M om et, et avec Françoise V i a l l e , épouse du
sieur Paye.
En 1767, les qualités avoient encore changé : la dame
Momet et les sieurs Boissier étoient décédés. L e procès
étoit poursuivi par Catherine et Antoinette M o m e t , et
par EtieDne Boissier.
Ainsi, en déduisant seulement les minorités de 1720 à
I 7 29 i ^ y a plus de temps qu’il n’en faut pour compenser
l’excédant qui se trouve sur trente ans, entre le 6 sep
tembre 1720, et la requete du 31 décembre 1766.
D ’ailleurs y a-t-il bien eu lieu à prescription dans la
circonstance où le sieur Am able R o c h e fo rt/ é to it rendu
dépositaire d’effets et papiers, et s’étoit chargé de pour
suivre le recouvrement d’ une créance?
lia prescription ne pouvoit pas courir contre lui le
j«ur meme de son écrit, et tant qu’il n’avoit pas achevé
les diligences nécessaires.
�(3 0
Il est impossible dépenser que le 'sieur Rochefort n’ait
pas été pnyé de cette créance; car Réné "Vialie avoit été
colloqué utilement pour 1090 francs, et la sentence de
Clermont fut confirmée au pui’lement. Il n’y eut besoin,
d’après le sieur Rochefort lui-même, que de justifier du
billet et de la demande, pour faire exécuter l’arrêt. Il
n’est pas possible de supposer que le payement n’ait pas
eu lieu, quand il y eut un arrêt; si cela étoit, le sieur
Rochefort n’auroit pas m anqué, en 1720 , de rendre les
titres ; son fils les auroit encore offerts en 1766 : mais on
n’a offert ni les titres ni l’argent.
Comment donc la dame de Frétât voudroit-elle pro
fiter, au détriment des héritiers V ialle , d’une somme
touchée par son aïeul pour le compte d’autrui ? Elle a
pu présumer qu’il n’avoit rien reçu ; et voilà pourquoi
les héritiers V ialle ont voulu la détromper, pour qu’elle
renonçât à proposer un moyen tel que la prescription.
I l est in u tile , d ’après ces remarques , de répondre
aux autres objections (page 16). L e sieur Rochefort, en
opposant que Gilbert-Amable Rochefort n’étoit pas héri
tier de G ilb e r t , n’avoit pas fait attention que GilbertA m able Rochefort avoit contracté une obligation per
sonnelle en 1688 et 1710.
A p rès avoir parcouru les trois chefs de créan ce, il
n’est pas difficile de présenter un compte par aperçu, de
ce que peut d e v o i r la dame de Iretat.
jo. Elle doit 8098 francs en principal, portés par la
sentence de 1689.
20. 10933 f. pour les intérêts liquidés par ladite sentence,
3°«
(
�( 33 )
3°. Les intérêts échus depuis 1689, jusqu'au payement
sous la déduction des jouissances dont il sera parlé ciaprès.
40. Les dépens adjugés par la même sentence.
5°. L a somme de 2707 liv. 9 s. 7 d. en vertu de la
sentence de 1691 , et en outre le coût de ladite sentence.
6°. Quarante-neuf setiers trois quartes de b l é , d’après
la valeur de ladite époque, qui paroît être de 299 f r . ;
sauf la déduction de trois setiers d’avoine •, sauf aussi au
tribunal à peser dans sa sagesse si c’est le total de ladite
som m e, ou seulement les deux tiers qui sont dûs aux
héritiers V ia lle , lesquels se font un devoir d’en proposer
eux-mêmes le doute.
7°. Les intérêts du capital porté en l’article précédent^
depuis la demande, ou au moins depuis la cession du 10
octobre 1691 , qui fait la quittance de Réné V ialle envers
M arie C h a rd o n , et son titre de répétition.
8°. L a somme de Ô2i liv. i 5 s. 6 d. pour la moitié
de celle de 1043 liv. 11 s., à laquelle R éné V ialle fut
colloque par sentence et a rrê t, sur Gilbert R o ch efo rt,
et que le sieur Gilbert-Am able Rochefort se chargea de
recouvrer par son écrit de 1688, à la charge d’un bé
néfice de moitié.
90. L a somme de 1000 francs pour moitié de la pro
messe de 1710 , sauf au tribunal ¿\ juger si le billet énoncé
audit acte ne fait pas double emploi avec l’objet de l’acte
de 1688.
io °. Les intérêts, soit des deux articles précédens, soit
de l’article 8 seulement , depuis la demande du 18 dé
cembre 1720.
E
�.'(34°
Les déductions à faire sur les créances ci-dcsRns pa.roissent devoir se composer principalement du capital
de 3000 francs, des dépens dûs à Marie Chardon , et des
jouissances des domaines.
L e capital de 3000 francs paroît diminué par deux
.quittances, l ’une du 22 décembre 17 2 0 , de 312 francs;
l ’autre du 10 janvier 1 7 2 5 , de 862 francs; toutes deux
postérieures au décès de Marie Chardon et ù l’affirmation
î
de Joseph Vialle.
Les sieurs V ialle pourroient contester l’intérêt de ce
capital, en ce qu’il n’a pas été demandé par les héritiers
R ochefort ; cependant , à titre de compensation, ils
croient juste d’offrir ces intérêts depuis l’échéance.
C a r , quant aux arrérages de la rente de 300 francs,
il paroît, par ce qui a été déjà d it, que tout est soldé
jusqu’au d écès, soit au moyen des quittances, soit au
moyen de la délégation des fermages à ladite M arie
Chardon , s o i t enfin d ’après l’affirmation sur la saisiea r r ê t du sieur Granchier.
Quant aux jouissances, il sembleroit d’abord qu’elles
doivent se borner à celles qui ont eu lieu depuis le 30
juillet 172 0 , jusqu’au 22 juin 1 7 2 9 , époque de la sen
tence et mise en possession de la famille Rochefort.
Cependant les héritiers V ialle ne veulent pas demander
une chose injuste; et dès que Joseph Vialle a jo u i, au
moins depuis le i 5 mars 1696, pour employer les fer
mages en son a c q u it au profit de Marie Chardon , ils
c o n s en te n t de rendre compte des jouissances depuis cette
époque; et même le tribunal examinera s’ils ne doivent
pas ce compte depuis 1691, époque de la cession.
�( 35 )
Seulement ils ne doivent le compte de ce qui est an
térieur au 30 juillet 172 0 , que suivant le prix des baux
de ferme.
Quant aux dépens adjugés à Marie C h a r d o n , que la
dame de Frétât représente, ils en sont débiteurs, sauf
la déduction de 400 francs, suivant la quittance de 1719*
A insi les déductions doivent se com poser, i°. du
capital de 3000 francs porté par la cession de 16 9 1 , dér*
duction faite de ce qui a été payé par les quittances de
T'jzo et 1725.
2°. Des intérêts du restant dudit cap ital, depuis 1701,
époque de son échéance, si m ieux.n’aiment les parties
le compenser à ladite époque jusqu’à due concurrence
avec les capitaux des créances des V ia lle , pour en éteindre
en partie les intérêts ; ce qui produira le même résultat.
30. Des jouissances des domaines sur le pied de 255 fr.
depuis le i5 mars 1696, jusqu’au 30 juillet 172 0 , sauf
au tribunal à prononcer s’il y a lieu d’en rendre compte
aussi depuis 1691.
4°. Des mêmes jouissances, à dire d’expert, depuis le
3° juillet 172 0 , jusqu’à la sentence du 22 juin 1729.
5°. D e trois setiers a v o in e , dont la déduction est or
donnée par la sentence de 1691 , avec les intérêts, ou
en procédant par compensation comme en l’article 2
ci-dessus.
6°. Des d é p e n s obtenus au civil et au criminel par
M arie Chardon , déduction faite de 400 francs.
Ce projet de compte est présenté par les héritiers
V ialle avec le sentiment de son exactitude. Ils ne der
�'mandent r i e n qui ne soit à eu x ; mais ils veulent obtenir
ce qui est juste , et rien n’est plus légitime. Tourm entés
par un siècle de procès, les héritiers V ialle n’ont pas été
les maîtres d’avoir justice plutôt; mais l a cause n’a jamais
été plus simple qu’aujourd’h u i , n’y ayant plus de débats
qu’entre le créancier et le débiteur; ils paroissent désirer
l ’un et l’autre de voir la fin de cette contestation,qui, pour
avoir été trop lo n g u e , n’en a été que plus onéreuse à la
famille V ia lle , et ne fait que lui acquérir plus.de droits
à une prompte justice.
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e. S I M O N N E T , avoué licencié,
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A. R I O M
de l’imprimerie de T
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L a n d r i o t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Juillet 1808.
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Dublin Core
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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[Factum. Boissier, Louis. 1808]
Creator
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Delapchier
Simonnet
Subject
The topic of the resource
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An account of the resource
Mémoire en réponse pour Louis Boissier, Marianne Boissier, et le sieur Chauvassaigne, son mari, Michel-Gaspard Boissier, et Pierre Chabridon, demandeurs ; contre Dame Marie-Catherine de Rochefort, et sieur Jean-Augustin-Guillaume de Fretat de Chirac, son mari, défendeurs.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1645-1808
Avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0303
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurières (63020)
Rochefort-Montagne (63305)
Bonabry (domaine de)
Aurière (domaine d’)
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Domaine public
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-
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2931f6f0bfea94e5a91c13256cdfc16f
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Text
COUR
P
R
E
C
I
S
POUR
.Vingt-huit habitans de la commune d’Aurière,
intimés ;
C O N T R E
Le sieur G U I L L A U M A N C H E D U
B O S C A G E appelant.
,
L e sieur du Boscage fit assigner, en 1 7 9 1 , un grand
nombre d’individus de la commune d’A u riè r e , pour lui
p a y e r , comme détenteurs d’immeubles non confinés La
percière à la cinquième g e r b e , due à sa terre d’Aurière.
L e 12 pluviôse an 10, il a donné vingt-huit assigna
tions à v i n g t - h uit de ces individus, pour reprendre la
demande de 1791 et alors il a notifié trois reconnoissances ; la prem ière, du 1 5 juin 1 7 9 1 , consentie par
A
D ’APPEL
DE RIOM.
2®. SECTION.
�(2 )
M az ue l , Beau fils, R igaud, Blanchet, ï o u r n i e r , Ratat,
Giraud , Ruffiat - M i g n o t , O llie r, Randane et Batifol;
la deuxièm e, du i 5 juin 1 7 7 3 , par Gabriè'lle L o u rd o n ,
et Bertrand Chabosson, son m ari; la troisième, du i 5
juin 1 7 7 1 , par le même Chabosson, tant en son nom
que comme.mari, par M eynial, M ign ot, G iraud, F ournier , Blan ch et, B a tifo l, Randane , Cohade , M a z u e l,
Brousse et Dauphin.
1
»
Comme ces copies ne contiennent pas les principales
expressions féodales dont lesdits titres sont entachés , il
est absolument nécessaire de mettre sous les yeux de la
cour les principales clauses de ces actes, telles qu’elles
èxistent sur le terrier même du sieur du Boscage, intitulé :
T errier des cens , d r o its, redevances , p restation s, et
autî'es droits seigneuriaux dûs à la terre et baronnie
d?A tir ie r e , etc.
"
36e. R e c o n n o i s s a n c e . « Par - devant les notaires
« commis au renouvellement du présent terrier, ont été
cc présens François M azuel, François Beaufils, etc., les
ee quels ont reconnu et confessé a v o ir , tenir, porter et
a posséder, eu x et leurs prédécesseurs, avoir tenu et
« porté de la ju stice h a u te, moyenne et basse de tres« haut, etc., M . de Chabanes de Curten.........et ce à
« cause de sa terre et baronnie cVAurière , savoir,
« art. I er. , etc. ( Onze-articles contenant les confins des
« héritages. )
« Toutes lesdites terres u la perd ère dudit seigneur,
(f à raison de la cinquième gerbe ou de la cinquième
« partie des fruits ; laquelle percière sera perçue dans
n lestjites terres et autour du plongeon, etc., et conduite
�(3 )
aux frais desdits cultivateurs dans la grange dudit seigneur. A ce faire, ainsi qu’à cultiver les terres toutes
et quantes fois elles pourront l’ê t r e , lesdits confessans
ont obligé leurs biens présens et à venir, et p a r exprès
lesdites terres et les fruits qui s’y recueilleront. Fait
el passé à A u r iè r e , etc., i 5 juin 1771 , etc. »
4 5 e. R e c 0N N 0ISSAN CE. ce P ar-d eva n t, etc., o n t é té
« présens dame Gabriêlle, L o u r d o n , et M . Bertrand
-« Chabosson, etc-., a de gré reconnu tenir, porter, etc.,
« cîe tout temps et ancienneté, du ce n s, cens'we et di« recte seigneurie, ju stice h a u te, moyenne et basse de
« très-haut, etc., de C liabanes-C urton, à cause de sa
«.terre et baronnie d?A u rière, les héritages qui sui« vent, etc. : A rt. i er. , etc. (S u iven t quatre-vingt-neuf
« articles d’immeubles , dont plusieurs ont un cens
« spécifié.
« A rt. 90. Reconnoit eiî outre ladite dame..... tenir
« de la. percière et directe dudit seigneur, les terres ci« , après confinées ( Suivent quatre articles d’immeubles. ),
« qui sont toutes les terres sujettes à la p e rciè re , sauf
« celles reconnues dans la percière gén éra le, et dans
« lesquelles ils promettent payer audit seigneur la per« cière à raison de la cinquième..... , etc. ( Clause comme
« ci-dessus.) Fait et passé, etc., i 5 juin 1 7 7 3 , etc. »
44e. R e c o n n a i s s a n c e . « P a r-d e v a n t, e tc ., ont été
« présens Me. Bertrand Ghabossori, etc., lesquels faisant
«
«
«
«
«
«
« tant pour eu x que pour les autres habitàns d ’A lix
cc rière , après avoir pris communication des anciens
« titres, terriers., lièves de la terre et seigneurie d’A u «. r iè r e , ont reconnu et confessé en faveur de très**
A 2
�(4 )
haut, etc., et ce , à cause de sa dite terre et baronnie
cCAurière et membres en dépendans, savoir, i°. que
ledit seigneur, en sa qualité de baron d’A u r ière, est
seigneur h a u t , bas et moyen ju s ticier, propriétaire
utile, direct et possesseurdes- 'terres et ténemens ciaprès, lesquels consistent en ceux qui suivent (Suivent
six ténemens de 321 septérées.); dans lesquels téne
mens lesdits habitans sont en usage, par la concession
précaire dudit seigneur, de faire des défrichemens,
en lui payant la cinquième partie de l ous les fruits
qu’ils y recueillent, franche de dîme ; laquelle partie
ils ont promis payer audit seigneur, autour des plon
geons, lesquels ne pourront être charriés qu’après La
perception de la cinquièm e partie revenante audit
seigneur, et qu’elle aura été conduite aux dépens du
c o lo n , dans la grange dudit seigneur , à A urière ;
2°. qu’il est haut ju sticier...a droit de guet et garde...;
d’instituer des officiers pour l’administration de la
justice... ; q u ’il a tous les droits seigneuriaux... - est
patron de l’église dudit lieu... ; a droit de tabellionage
et sceau aux contrats; 30. qu’il a droit de banvin...;
40. qu’il a droit de b a n a lité, et que les habitans sont
obligés de faire cuire tout leur pain... ; de fournir
chacun le bois et paille p o u r,la cuisson.,.; et outre
ce, de payer au fermier le droit qu’il est en usage de
percevoir; 5 °. que ledit seigneur a droit de guet fixé
à 5 sous, payé par chaque habitant, au jour de St.J u lien , et outre c e , sont tous les habitans tenus de
comparoir aux assises; 6°. qu’enfin, ledit seigneur a
droit de corvée, ch a rrois, bohades et m anœ uvres.,..
�(5 )
«
«
«
«
A l’exécution ont obligé........., sans préjudice audil
seigneur a u x autres droits réels et seig n eu ria u x, si
aucun il en a, à l’égard desdits habitans. Fait et passé
le i 5 juin 1 7 7 1 , etc. »
C ’est en vertu de ces trois reconnaissances choisies
dans son terrier, parmi un grand nombre d’autres reconnoissances plus féodales encore, s’il est possible, que
le sieur du Boscage avoit assigné au tribunal de Clermont.
Les défendeurs se contentèrent de dire que la demande
étoit nulle, parce qu’aucun des vingt-huit exploits ne
contenoit la désignation précise des immeubles pour les
quels chacun avoit été assigné : ils ajoutèrent que l’action
étoit éteinte.
Par jugement du 30 août 1806, le tribunal de Clermont , sans s’arrêter au moyen de form e, a jugé que le
droit de percière réclamé d’une manière aussi vo gu e,
par le sieur du Boscage, étoit féodal, et supprimé comme
tel.
L e sieur du Boscage a interjeté appel de ce jugement.
Tous ses griefs consistent à dire que la percière étoit
séparée de la directe , et que dans un pays allodial,
toute percière étoit nécessairement f o n c i è r e , quand il
n’y avoit pas retenue de la directe dans la concession
perciérale;
Sans doute dans lin pays allodial, un cliampart ou
percière n’est pas féodale de "plein droit j mais quand
elle appartient à un seigneur de fief, quand il la réunit
à son terrier parmi ses autres d ro its seigneuriaux, elle
�( 6 )
commence singulièrement à déroger à. la qualité allodiale.
Lorsqu’à cela se joignent des expressions précises qui
dans le titre même identifient la perrière et la d irecte,
il est difficile de croire que la percière ne soit cependant
qu’une redevance purement fon cière.
Sans doute l’Auvergne est un pays originairement
allodial ; mais cette antique tradition ne nous a été con
servée que pour mieux nous attester combien ont dû
être considérables les usurpations de la féodalité, puisqu’à peine il existoit en 1790 quelques surfaces non sujettes
à des cens ou autres droits seigneuriaux.
L e droit de percière 'introduit en A u vergn e seroit à
lui seul la preuve la plus convaincante de cette usur
pation ; car il résulte de sa définition m êm e, que quelques
seigneurs, ne voulant rien laisser d’allodial dans les parties
même les plus incultes de leurs terres, ont exigé des
reconnoissances tellement générales , qu’aucune propriété
de leur terre n’étoit épargnée.
.
Les percières , dit M . C h ab ro l, ont lieu ordinairement
pour les terrains peu fertiles.... Il y a des terres, comme
celle de Banson , où les terriers portent que tout ce qui
n’est pas reconnu spécialement en cens , appartient au
seigneur qui, en prendra la percière lors des défrichemens ; dans d’autres terres, . comme u Menât,, les per
cières sont reconnues par des titres particuliers,
Il ne faut que lire lo terrier d’A u rière, pour être con
vaincu que le cens et la percière ne laissent pus un pouce
de terre allodial,
f
Aussi le rénovateur dej 1.771, qui- a,voit sous les yeu x
les anciens terriers qu’il date',, annoncert-il dans sar pré
�(7 )
face que le cens et la percière couvrent t o u t , q u 'il rfy
a rien d 'a llo d ia l, et que tout est asservi à la seigneurie
<i’ A u rière.
Comment le révoquer en doute après toute la féodalité
que porte la 44^. reconnoissance ci-dessus ?
Les coutumes d’A u vergn e et B o urb o nnais, rédigées
dans des temps où la féodalité étoit singulièrement pro
tégée , favorisoient ou supposoient les usurpations féo
dales sur les fonds jadis allodiaux.
Car ces coutumes disoient que la première redevance
assise sur un héritage, même a llod ia l, emportoit droit
de directe seigneurie.
O n a souvent j u g é , il est v r a i , avant le décret im
périal de 1807 , que celte disposition de la coutume ne
s’appliquoit pas aux individus non seigneurs.
Mais seroit-il possible de 11e pas appliquer cette dis
position aux ci-devant seigneurs, pour toutes les rede
vances reconnues à leur profit sur des héritages situés
dans Vétendue de leur terre ?
Plaçons-nous même hors la coutume d’A u v e r g n e ,
pour savoir quand le ebampart étoit lin droit féodal.
P o t h ie r , qui a fait un traité sur le cham part, nous
enseigne en peu de mots quels étoient les principes du
droit commun sur cette question.
« Lorsque l’héritage qui est redevable du champart
« n’est chargé d’aucun cens , et que le champart est
a la première redevance dont l’héritage est c h a rg é , il
« est, en ce cas, censé avoir été retenu sur l ’héritage,
« 11011-seulement comme un droit u tile , mais encore
�(8 }
« comme un droit récog n itif de seigneurie que s’cst re«-tenu celui qui a donné l’iiéritage à ce titre; et consék quemment le ehampart est, en ce cas, un droit sei« gneurial.
« Lorsque le champart est seigneurial, il a les prcro« gatives des redevances seigneuriales......... il est im« prescriptible......... il emporte profit de ventes aux
« mutations, dans les coutumes q u i ne s’en expliquent
« pas. » ( art. i er. , §. I er. )
C ’en est assez pour se persuader qu’ une percière exigée
par un seigneur étoit une usurpation féodale , qui
presque jamais , en effet , n’étoit constatée par un titre
prim itif de concession.
L a loi du z 5 août 1792 n’a pas plus épargné le
cliampart que le ce n s, et elle ne l’a excepté , comme
toutes les redevances féodales, que lorsquil étoit dû ¿1
des particuliers non seigneurs n i possesseurs de fie fs .
E t remarquons que les lois ne se boi*nent pas à con
damner les titres lorsqu’il y a retenue expresse de la di
recte, mais lorsqu’ils sont récognitifs des droits supprimés,
les jugemens même qui en porteroient reconnoissance
ou qui les renseigneraient, les registres et cueillerets, etc.
( L o i du 17 juillet 17 9 3 , art. 6 , 8 , 9 . )
Si quelque temps ce» lois ont paru tombées en désué
tude, les décrets impériaux et les avis du conseil d’état
les ont renouvelées avec force, et 11’ont pas même permis
de séparer dans les titres déjà condamnés aux flammes,
les stipulations absolument étrangères à la féodalité.
Tels
�(9 )
Tels sont les décrets et avis des 30 pluviôse an ï i ,
2.1 fructidor an i r , 13 messidor an 1 3 , 13 avril 1807,
et 17 avril 1808.
Gomment refuser l’application de toutes ces lois qui
l’amènent à la stricte exécution de celles de 1792 et 1793 >
lorsque la lecture isolée des trois reconnoissances, choisies
parmi les plus muettes, ne laissent pas douter de la
féodalité de la percière ; lorsque surtout les autres re
connoissances du terrier, consenties par les mêmes inr
d iv id u s, achèvent- l’explication de la nature de cette
percière, qui est bien toujours la m êm e, en se.subdi
visant sur les fonds qui y étoient assujétis?
Car on n’a pas même entrepris de dire qu’il y eût à
A u rière deux espèces de p e rcière, l’une féo d a le, et
l’autre roturière.
O r , qu’on parcoure toutes les autres reconnoissances
perciérales ; elles portent avec elles la démonstration de
féodalité à. un point d’évidence qui se communiquera
à celles où le notaire, occupé d’une série/d’actes, ne
pouvoit pas toujours répéter les mêmes mots.
Les quarante-neuf premières feuilles du terrier ne
contiennent que des reconnoissances de cens : puis vien
nent des reconnoissances perciérales mêlées parmi d’autres
reconnoissances censuelles.
t
La 38e. et la 41e. reconnoissances qui sont consenties
par les assignés eux-mêmes pour d’autres héritages,
suffisent pour marquer la nature des percières de la
terre d’ Aurière.
La 38e. porte : « Tous lesdits héritages et propriétés
B
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«c
( IO )
à la percière accoutum ée , due audit seigneur à la
cinquième gerbe de tous les fruits qui croîtront
chaque année dans ic e u x , censuel et redituel en tous
droits de directe seigneurie, ju stice h a u te , moyenne
et basse, usage de ch ev a lier, tiers denier de lods et
ventes , et muages a cco u tu m és, toutes les fois que
les cas y adviendront ; lequel droit de percière lesdils
confessans ont promis payer et conduire à leurs
frais.... tant et si longuem ent qu’ils seront tenanciers
et propriétaires desdits héritages ; lesquels ils ne
pourront reconnoître à d’autres seigneurs, à peine de
confiscation, •comme aussi ne pourront laisser les
terres en friche plus de trois an s, à peine de perdre
la propriété , etc. »
L a quarante-unième a les mêmes clauses, à peu près
littéralement.
A p rès une explication aussi claire et étendue de la
natui'e de cette percière, dans les trente - huitième et
quarante-unième l’econnoissances, qu’étoit-il besoin que
le notaire en répétât toutes les qualités , avec un sem
blable détail, dans les reconnoissances postérieures.
Mais quand on pourroit dénaturer cette percière au
point de la croire tantôt seigneuriale et tantôt roturière
les trois actes signifiés ne laissent pas de doute qu’il n’y
ait au moins mélange de féodalité.
E t ce mélange suffit pour que le titre soit proscrit
en entier ; car, condamné aux flammes pour une por
tion quelconque de féodalité, il étoit indivisible.
Ce mélange est encore plus sensible dans la quarante-
�( 11 )
cinquième reconnoissnnce, qui est la cliartre générale
de la terre, et qui marque toute l’étendue des droits que
s’attribuoit le seigneur.
A cela le sieur du Boscage répond qu’ il faut séparer
les clauses féodales, parce que la loi n’entend par mé
lange, que lorsque c’est la même stipulation q u i porte
tout à la fois la redevance foncière et un article féodal.
C e système dtoit très en crédit , il est v r a i , avant
le 30 pluviôse an 11 ; mais la jurisprudence a rétro
gradé singulièrement depuis, comme on le voit par deux
arrêts de cassation , postérieurs à cette époque ; en voici
l’espèce :
L e 18 avril 1791 , un moulin et une terre furent
concédés par un seigneur. Il stipula un cens pour une
partie, et une rente foncière et rachetable p o u r l ’autre.
Il assigna en l’an 10 en payement de la x-ente foncière
seulement. ( Comme le sieur du Boscage, qui demande
l’art. 90 d’une reconnoissance, et abandonne le surplus. )
La cour d’appel de Paris avoit admis la demande ;
mais son arrêt fut cassé le 12 germinal an 12.
L e second arrêt est du 2 mars 1808. U n sieur Barrés,
seigneur de L a roch e, avoit concédé deux m oulins, l’un
à ven t, l’autre à eau, en 1 7 6 5 , moyennant une rente
de 8 setiers de seigle, stipulée fo n ciè r e et non autrement.
Il fut dit par une autre clause que le moulin à vent
seroit tenu censivement du fief de Laroche.
L a cour d’appel d’Angers avoit jugé la redevance
exigib le, parce qu’il est bien constant que la concession
du moulin à eau étoit toute foncière.
B a
�Cependant cet arrêt a été encore cassé, par le motif
que la clause stipulée à la suite du même a c te , faisoit
un mélange de féodalité.
L e sieur du Boscage a recours encore i\ l’arrêt de
Blanzat : mais à supposer qu’il puisse faire encore juris
prudence, il y avoit des différences notables ; car, i° . la
terre de Blanzat avoit été vendue en 177 2 , comme étant
en franc-ralleu ; 20. il n’y avoit pas une seule expression
féodale dans la,percière elle-même-, 30. les terres pcrcierales étoient confinées par les terres du fief; et ici elles
sont dans, l’enclave du fief.
P ou r citer plus à propos un arrêt de la cou r, il n’y
a, lieu" que de citer celui, rendu sous la présidence de
monsieur V e r n y , et sur les conclusions de monsieur
T o u tté e , entreles nommés Reynaud et autres, appelons,
et, la dame de Ghazeron , épouse du sieur de Fontanges,
le 9 mai 1808.
L ’acte à juger étoit ainsi conçu..... « Par-devant, ctc.,
lequel;confesse tenir et posséder à titre de terrage du
« sieur de Chazeron, seigneur des F o r g e s , à cause de
« sa seigneurie des Forges, un cliamp , etc. ; promet et
s’oblige, tant qu’ il sera possesseur d’ic e lu i, de payer
,auclit,-seigneur le droit de terrage, de sept sillons L’un,
«.en , la manière accoutumée, etc., 1618. »
L e tribunal de Moutluçon avoit condamné le détenteur
àvpayer lç terragq comme non féo d a l, en se motivant
sur l’arrêt de Blanzat, et sur ce que le.Bourbonnais étoit
alodial) com pie l’Auv.ergne,.
M a i l l a cour d’appel a infirmé ce jugement par les
moifs ci-a près :
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
cf
«
( i3 )
« Considérant que la cession à titre de terrage, percicre ou chnm part, portée par l’acte du 23 septembre
1 6 1 8 , a été faite par le ci-devant seigneur des Forges,
et stipulée payable à cause de sa seigneurie ;
« Considérant que cet acte est récog n itif de la sei~
gneurie des F o r g e s , et qu’ indépendamment de ses
énonciations, le droit qu’il établit est seigneurial par
lui-méme , aux termes des articles 3Ô2 et 392 de la
ci-devant coutume de Bourbonnais, du sentiment de
ses commentateurs, et de la jurisprudence qui a toujours
été uniforme sur ce point ;
« Considérant que s’il s’est élevé des doutes sur la
question, ils sont tous levés par l’avis du conseil d’état,
du 7 mars dernier, respectivement aux concessions à
titre perpétuel, pour lesquelles il est décidé que les
redevances sont pleinement anéanties, si les titres sont
« consentis par des seigneurs, à cause de leur seigneurie,
« ou récognitives de la seigneurie. »
Lors de cet arrêt, si conforme à la cause actuelle, le
sieur de Fontanges avoit voulu tenter un moyen que l é
sion r du Boscage n’a pas cru lui-même proposable, et
duquel d’ailleurs la cour avoit fait justice.
Il prétendit que les tenanciers de percière n’étoientque des colons qui ne pouvoient opposer la suppression
du cens. Il se fouda sur ce que leur titre les considéroit comme simples possesseurs, les obligeoit à cul
tiver , sinon à être expulsés. Plusieurs reconnoissances
sembloient même favoriser davantage cette prétention.
Mais la cour rejeta ce système, en regardant le titre
�( H )
de 1618 comme exclusif de toute’ concession temporaire.
Et en effet, n’est-il pas de l’essence même de la percière,
que le soigneur 11’ait qu’une portion des f r u i t s , cl par
conséquent rien à prétendre à la propriété.
Ce n’est point aux expressions du titre qu’il faut s’en
tenir; car quand la féodalité les dictoit, on sait bien
qu’ il s’établissoit des nuances de loin en loin; et c’est
celte habitude dont toute la France étoit bien convaincue,
qui a peut-être contribué davantage à faire considérer les
terriers comme plus remplis d’usurpations que de con
cessions légitimes.
A v a n t la révolution , les tribunaux corrigeoient ces
usurpations par la maxime A d primordium. tttuli posterior refertur eçentus. A u jourd’hui les habitans d’A u rièrc
n’ont pas cette ressource ; car les terriers de 1 58 o n’existent
plus. Celui de 1771 , conservé par le sieur du Boscage,
ne contient aucun titre de concession , et n’en suppose
pas m ê m e , pour les percières surtout.
L e sieur du Boscage seroit-il donc plus heureux après
la loi du 17 juillet 1793, qui a ordonné de tout brûler,
qu’après la loi du 28 août 179 2 , qui maintenoit les re
devances féodales , dont le titre primitif seroit rapporté ?
Ce seroit rétrograder doublement.
Il n’a pas dit que les habitans d’A u rière ne fussent
que ses co lo n s, et qu’il fut propriétaire ,• mais quand il
le prétendx*oit, tous ses titres y résistent.
O n n’y voit pas même que jamais la propriété soit
émanée des seigneurs; au contraire, les habitans disent
avoir tenu et porté de tout temps et ancienneté du seigneur,
à cause de sa seigneurie.
�(
i 5 )
Ils obligent leurs biens présens et à venir , et par
exprès lesdites terres perciérales.
V o ilà ce que disent deux des reconnoissances signifiées :
la troisième seroit plus équivoque ; mais précisément
il ne faut que la bien lire pour voir qu’elle est, d’un
bout à l’a u tre , l’une de ces usurpations féodales que
les lois ont eu le plus à cœur de détruire, sans en laisser
de traces.
C ’est en s a qualité de seigneur haut ju sticie r , que le
sieur de Curton se fait reconnoître, p a rle corps co m m u n ,
tous les di'oits de justice que l’habitude attribuoit au
seigneur haut justicier, dans les pays où existoit la maxime
Nulle terre sans seigneur.
Car remarquons bien que non-seulement il a tous les
droits féodaux attachés à la personne ; mais ce que les
cens ne couvrent pas est couvert par la percière. L ’ensemble
du terrier l’atteste, comme l’a attesté le rénovateur.
Il n’y avoit rien d’allodial à A u ri è r e , et dès-lors le
seigneur n’a pu s’emparer des terres non censuelles sans
exception , qu’en violant les antiques et fondamentales
maximes de l’Auvergne.
Cette reconnoissance du corps commun suppose que
c’est le seigneur qui a concédé le droit de défricher, en
payant la percière : mais il n’y a rien là qui s’écarte de
la nature du contrat de percière.
P o th ie r, en son traité du champart, n’appelle cons
tamment les débiteurs de percière que les possesseurs et cependant il ne lui vient pas même en idée d’enseigner qu’ils n’ont pas la propriété dans le sens du mot
percière.
�( 16 )
Ils peuvent seulement être expulsés, s’ils ne cultivent
pas.
L a percière est une emphytéose ; et il est de l’essence
de l’emphytéose, d’être perpétuelle, toutes les fois que
l’acte n’en limite pas la durée.
Quand M . Tronchet fit un rapport, en 179 0 , au co
mité des droits féodaux , sur la locaterie perpétuelle ,
qui , dans certains pnys , est ce qu’est parmi nous la
p e rc iè re , et qui porte un nom plus favorable encore
aux seigneurs, il eut à s’occuper de beaucoup de clauses
qui dans ces sortes de contrats sembloient bien davantage
marquer la retenue de la propriété par le seigneur.
i<\ L a défense de couper des bois ; 20. la prohibition
d’aliéner, faite au locataire, ne parurent pasà M . Tronchet
des motifs suffisons de décider que l’acte n’étoit qu’une
ernphytéose temporaire, parce que la limitation du temps
n’étoit pas dans l’acle , pai-ce que l’usage le plus ancien
faisoit i*egarder ces actes comme des aliénations, et parce
que toutes ces précautions du locateur n’avoient pour
objet principal que de lui assurer le service de sa re
devance.
Ici c’est une percière , dont le nom résiste à un simple
colonage temporaire ; et la cour 11e peut pas transformer
en simple bail à ferm e, une redevance qui dure depuis
des siècles, qui ne tomboit point en arrérages, et dont
le soi-disant colon n’étoit débiteur que si on venoit la
chercher sur les lieux.
L a cour de cassation a eu à juger si l’acte ci-aprè s
conféroit la propriété; le sieur du Boscage jugera si sa
44e. reconnoissance est aussi favorable à sa prétention.
Par
�( 17 )
Par acte du 20 août 1696 , le seigneur de Saint-Côme
céda à Jean Salesse le droit d’un moulin banal et terrains
en dépendans , pour en jo u ir par fo rm e de locaterie
perpétuelle de trois en tr o is , n e u f en n eiif \ et vin g t-n euf
en vingt - n e u f ans , afin d'éviter prescription de pos
session , m oyennant une rente annuelle de 460fr a n c s .
L e seigneur prétendoit n’avoir pas perdu la p ropriété,
et avoir le droit de réclamer la redevance entière. L e
preneur soutenoit qu’étant propriétaire, il avoit le droit
de demander la réduction de la redevance pour la partie
de banalité supprimée par la loi du i 5 mars 1790.
M . le procureur- général pensa que le preneur étoit
p ro p riéta ire, et qu’il avoit droit de demander la ré
duction de la rente. L a cour de cassation, par arrêt du
7 ventôse an 12 , cassa un arrêt de Montpellier , et décida
qu’il y avoit lieu k réduction de la rente.
Cet arrêt ne donne pas de motifs sur la question de
propriété ; mais il a , par le f a it, considéré le preneur
comme p ropriétaire, en jugeant en sa faveur et en cette
qualité.
E t qu’on parcoure les arrêts de cassation qui sont
assez nombreux sur ces matières, on se convaincra qu’il
n’y a eu difficulté sur les emphytéoses tem poraires, que
lorsque le titre a marqué expx’essément une limitation
du temps que le preneur devoit jouir.
Sans cela tout le monde sait que le plus grand nombre
des emphytéoses de toute espèce ne contient pas le mot
à perpétuité. L es baux au quart des v ig n e s , ou autres
semblables, sont tous de ce genre : les clauses de cu l
ture y abondent ; et cependant les preneurs aliènent
C
�( 18)
depuis des siècles, et nul n’a songé à troubler leurs
acquéreurs, sous prétexte qu’ils n’étoient que des colons,
.E n fin comment la cour pourroit - elle juger que les
habitans d’A u r ière ne sont que des colons ? Ce seroit
dénaturer la demande du fieur du Boscage.
Il a conclu à Clermont au payem ent d’ une redevance,
et, n ’a pas demandé une propriété. V o ilà tout ce qu’ il
a présenté à juger au tribunal de Clermont. Il ne peut
donc pas, sur l’appel, changer la nature de sa demande :
et si la redevance qu’il a demandée a des caractères et
des mélanges de féodalité qu’il faudroit s’aveugler pour
ne pas v o ir, il sera certain que le tribunal de Clermont
s’est conformé aux lois, en refusant d’admettre une rede
vance que ces lois lui ordonnoient de rejeter.
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e. D E V È Z E ,’ avoué licencié.
R I O M , de1l’imprim erie d e T h i b a u d - L a n d r i o t , imprimeur
de la Cour d ' a p p e l . J uillet 1808.
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum, vingt-huit habitants de la commune d'Aurière. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Devèze
Subject
The topic of the resource
percière
droits féodaux
terriers
coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
Description
An account of the resource
Précis pour vingt-huit habitans de la commune d'Aurière, intimès ; contre le sieur Guillaumauche du Boscage, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1791-1808
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0301
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurières (63020)
Rights
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Domaine public
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coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
droits féodaux
Percière
terriers
-
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PDF Text
Text
MEMOIRE
t
SUR
UNE C O N T E S T A T I O N
RELATIVE
A
LA
POSSESSION
ET
PR O PR IÉ T É
DE MINES A CHARBON.
i
A R I O M,
d e
l’ i m p r i m e r i e
IMPRIMEUR
d e
t)E L A
L A N D R I O T ,
COUR D ’ APPEL.
A o û t 1804.
s e u i
�MEMOIRE
COUR
EN RÉPONSE,
D’APPEL
SÉANT G
A RIOM.
POUR
P ierre - J ean - B aptiste T R E I C H L A
P L E N E , appelant
'
M a r ie
CONTRE
,
T R E IC H -D E S F A R G E S
L achaud ,
Jean
COUDER ,
veuve
et
Léo
n a r d C H A D E N I E R , in tim és.
A V E C des titres de propriété , et la garantie des lo is ,
le sieur T reich a été jusqu’à présent à la m erci de tout
•le monde. U n ancien vendeur qui se croyoit intéressé
A
�,
.
.
( 2 \
. . .
à luî faire un procès y associa deux autres individus
absolument étrangers à ce débat ; et pendant que les tri
bunaux en étoient occupés , pendant l’appel d’une sen
tence qui n’a besoin que d’être lue pour être condam née,
un intendant disposa du sujet de la querelle au profit
d’un inconnu. Bientôt c e lu i- c i trouva en son che
m in la révolution , qui lui ôta sa p r o ie , et la remit
aux mains du possesseur, sous la surveillance adminis
trative. M a is, dans la l'apide succession des surveillans,
ceux du lendemain détruisirent la volonté de ceux de
la v e ille ; e t, après uncalios d’arrêtés administratifs con
tradictoires , la confusion alloit devenir d’autant plus
g ra n d e , que le procès sur la propriété étoit encore en
suspens devant les tribunaux. U ne cour d’appel pro
nonça sur cette propriété : m ais, comme si c’étoit un
attentat d’avdir éclairci la difficulté , on fit un crime à
son arrêt d’avoir confondu l’accessoire avec le principal;
et, ce qui d o itle plus étonner, la cour de cassation, étourdie
sans doute par cette Babel de décisions et d’incohé
rences , a adopté ce système et cassé l’arrêt comme in
com pétent', non pas quant au jugement d elà p rop riété,
mais quant à celui de la possession , qui néanmoins étoit
aussi en litige. Q uoi qu’il en so it, cette m ultitude d’ar
rêtés ne peut plus aujourd’hui embarrasser la cause;
le ministre de l’intérieur les en a écartés ; et il s’agit
simplement de savoir si le vendeur d’une jn in e, qui l’a
vu exploiter pendant 46 ans sans y rien prétendre,
a p u , après ce long espace, et sous prétexte que dans
sa vente il existoit une réserve dont il n’a jamais fait
usage , réclam er une copropriété contre un tiers deten-
�.
( 3 \
.
tèur ; si encore il le p e u t, après avoir vendu le surplus
de ses droits sans aucune mention de ceux qu’il veut
faire x*evivre. Gomme cette cause est tout entière dans
les faits ; que les intimés nient aujourd’hui une posses
sion qu’ils ont avouée dans d’autres temps ; et qu’ils se
fondent sur un seul acte qui est détruit par plusieurs
autres actes et circonstances , l’appelant est obligé de pré
senter. ces mômes faits avec un certain détail absolument
nécessaire à l’intelligence de ses moyens.
F A I T S .
\ . . . i ;! »
■
• •i •
A u village de la P le a u , dans le département de la
Gorrèze , sont des mines de houille ou charbon de
terre appartenantes à divers particuliers. Jean T reich ,
père de l’ap p elan t, en étoit le principal propriétaire^
En 1 7 4 7 , il acquit de Pierre Beynes sa portion dans
la terre appelée im proprem ent le communal de la Pleau,
parce qu’elle appartenoit à quatre propriétaires.
L e 25 mars 1 7 55 , il acquit du même P ierre BeynesJ
tout le terrein où étaient ses-mines et carrières à charbon,
dans lequel fut comprise la terre appelée la Charoulière
qui fait l’objet de la contestation. L ed it héritage vendu^
est-il d i t , tant pour ce qui concerne les mines et car
rières à charbon , que pour les bois , terres et buges qui
sont au-dessus , m oyennant 3000
Il fut dit que l’ac
quéreur entretiendroit un marché fait avec le m aréchal du
lieu pour sa provision de charbon , et que le vendeur,
auroit lui-inême sa provision annuelle dans les carrières
vendues. ,
'
W
'
•
,
”
,
,
.
A a
•
’
�.
.
'( 4 )
.
Cette terre de la C h aro u lière, qui a' en surface troiâ
septerées , avoit 'été vendue audit Pierre Beynes par
François Beynes, aïeul d’A n to in ette, femme Chadenier;
sa v o ir, deux septerées avant 17 3 6 , par un acte que
l ’on ne conrioît pas ; l’autre septerée fut vendue avec une
autre terre par acte
du
I er, décem bre 1 7 3 6 ; et cette
septerée vendue y est conjïnée de jou r avec autre partie
de la même terre, ci-devant délaissée par ledit vendeur
audit acquéreur.
O n y rem arque encore la clause suivante : « Sous
« la réserve expresse que fait ledit v e n d e u r, du consen« tement dudit acquéreur, de la m oitié de tout le cliar« bon qui pourra se creuser dans ladite terre appelée la
« C haroulière, une des deux ci-dessus vendue, h la charge
« que les frais et dépens qui conviendront faire pour
« le déterrem ent du charbon , se répartiront également
« entre ledit vendeur et ledit acquéreur. »
M ais tout prouve que cette charge fut rédim ée bientôt
après, indépendamment encore de ce qui résulte de l’acte
ci-dessus de 1755.
.
A n to in e Beynes , fils et héritier dudit F rançois, tant en
son nom que com m ecédataire de ses frères et sœurs, vendit
à M arianne la Plène , veu ve dudit Jean T reicli (m ère de
l’app elant), par acte du 29 août 176 8 , un terrein appelé
Chazalas, « confrontant de toutes parts avec le chemin
« de T u lle s , les carrières communes dudit village de la
« P lea u , avec autres carrières et terrein de ladite de—
« tnoiselle la P lè n e , etc. ' ensemble les carrières à
« bon de p ie rre , pratiquées et à pratiquer dans ladite
« pièce de terrein , etc.; comme aussi a vendu à ladite
�a
«
«
a
te
«
«
«
«
«
«
.
,
( 5 }
demoiselle la rPlène la part et portion appartenante
audit vendeur, èsdites qualités, sur les carrières situées
dans le communal de P leau , etc. ; sans par le vendeur
se faire aucune réserve de sa portion dans ledit com
m u n a l, etc. ; demeure chargée ladite acquéreuse d’exécuter les conventions portées au contrat du 29 septem
bre 176 6 , etc.; de même aussi sera obligée ladite ac
quéreuge , de délivrer au vendeur et aux siens la quantite de soixante quartes de charbon annuellement^
tant et si l ong ue me nt qu’il se recueillera du .charbon
dans lesdites .carrières ci-dessus ven d u es, à la charge
« que le vendeur ou les siens seront tenus de les creuser
« eux-mem es ou faire creuser à leurs dépens, etc. »
Cet acte de 1766 (leq u el seul A ntoine Beynes voulu t
rappeler) étoit un traité par lui fait avec Bernard D odet
pour extraire le charbon de ladite terre C hazalas, con
frontant,, disoit—il lui - môme audit acte, d’une part la
charbonnière commune , et d’autre part la charbonnière
des héritiers du fo u sieur Treich le .cadet. ,
A n toine Beynes n’avoit guère d’autre ressource que sa
rente de soixante -quartes de charbon , qu’il lit valoir
quelque tem ps, sans avoir garde de réclam er aucun autre
droit en vertu de l’acte de 1736. Il la vendit le 6 janvier
1 7 7 1 , et M arianne la Plène la remboursa par acte du 27
du même mois.
T o u t se réunissoit donc à séparer entièrement les in
térêts de M arianne la Plène d’avec ceux dudit Bevnes,
lorsque M arie T reicli-D esfarges, par jalousie de voisi
nage , à cause de la charbonnière du communal dont elle
avoit acquis une partie depuis quelque temps, après avoir
�.
.
C 6 )
•
essayé de faire à M arianne la P lè n e ,e n 1 7 7 5 , un p ro
cès crim inel qu’elle fut forcée d’abandonner, découvrit
l ’acte de 17 3 6 , e t, ne pouvant en user elle-m êm e, elle
eut recours à un m oyen jusqu’alors inconnu pour chi
caner un voisin. E lle se fit associer par ledit Beynes ,
en 1 7 7 7 , avec Jean C o u d e r, à la fa c u lté de creuser
dans la terre de la Charoulière en entier , et en échange
on associa ledit Beynes au charbon à recueillir dans le
communal,
A la vérité on ne supposa pas tout à fait que le droit
de Beynes fût bien certain ; car il fut ditque si ledit Beynes
n avoit pas ce droit de creuser dans la terre de la Charo u liè re , la société ( évaluée à 4 t t ) n’auroit aucun effet.
L es trois associés se m irent en œ uvre au mois d’août
1781 , furent une fouille dans le com m unal, où la veuve
Desfarges avoit une portion, et de là ils poussèrent leurs
travaux sous la terre de la Charoulière , qui dom ine ce
communal.
M arie la Plèn e aussitôt présenta une re q u ê te , de
manda le transport du juge de S a in t-A n g e l, lequel fit sur
les lie u x , le 8 août 1 7 8 1, un procès verbal qui fixa les
prétentions des parties, et qu’il est essentiel d’analiser,
parce que les intimés feignent d’ignorer comment le
prem ier juge a constaté des dires qu’ils désavouent à
présent.
'
Les Desfarges, Beynes et C ou d er, qui d’abord ne sembloient se défendre qu’en soutenant que leur fouillo
n’avoit pas pénétré sous la C haroulière, essayèrent néan
moins le ton offensif, et déclarèrent audit procès verbal
qu’ils preuoient les démarches de la veuve la Plèue poui
�,
C7 )
un trouble à leur p ro p rié té ; que les causes dont se servoit et s'êtoit ci-devant servie ladite demoiselle la P lèn e,
pour tirer du charbon de la terre de la C h a ro u liere,
portoient un préjudice notable audit Beynes et autres, au
droit de retirer du charbon de ladite terre, et que ladite
demoiselle la Plène ne pouvoit s’empêcher de leur faire
compte de la m oitié de. ce charbon depuis le temps qiCetle
avoit acquis.
ajoutèrent la demande qu’il leur fût donné acte de
leurs réquisitions et réclamations , sous réserve de la
restitution de la m oitié du charbon ci-devant retiré de
la Charouliere par la demoiselle la Plene depuis son
acquisition , et autres que de droit.
Ils
D e son cô té, la demoiselle la Plène se plaignit de ce
qu’on avoit fait un chemin souterrein, pour venir, par cette
feinte adroite, dans sa charbonnière ouverte ,• mais qu’on
ne pouvoit s’aider du titre de 1736, parce qu’il n’avoitpas
d’application , et que d’ailleurs il étoit doublem ent
prescrit.
Pendant cette première diligence les intimés ne se liâtoient pas moins de fouiller le charbon ; ils avancèrent si
rapidem ent, et avec si peu de précautions, qu’ils pensèrent
se trouver pris sous la galerie de la veu ve la P lè n e ,
parce qu’ils ne se donnoient pas la peine de mettre des
étais. L a veuve Desfarges crut faire une heureuse diver
sion en rendant plainte.
. L a veuve la Plène et scs ouvriers furent décrétés de
soit o u ï, et interrogés ; mais la veuve Desfarges en fut
pour sa tentative, et la procédure fut civilisée.
O n continua le procès c iv il, et les intimés priren t, le
�c 8 }
.
•
20 novem bre 17 8 1, les conclusions qu’ils avoient annon
cées lors du procès verb al, c’est-à-dire, i° . qu à Vavenir
le charbon fût partagé par m oitié ; 2°. que pour le passé
la demoiselle la Plène fût condamnée à leur restituer
6000 cartes du charbon qu’elle a retiré et J a it creuser
sous le champ de la Charoulière , et ce pour leur
m oitié , à quoi ils se restreignent 30. à la m oitié dudit
charbon retire de ladite terre depuis Tinstance 4°* erl
^000
de dommages-intérêts.
j
L e 17 mai 1782 intervint la sentence du prem ier ju g e,
qui déclare les intimés propriétaires de m oitié des car
rières de charbon qui sont dans la terre de la Charou~
Hère , et de m oitié de celles du communal de la Pleau
(q u i n’étoient pas en litig e ); mais, attendu, est-il d it, que
les intimés n’ont pas réclam é dans le temps contre l’ex
ploitation de charbon faite avant Vinstance par la de
moiselle la P lè n e , publiquement et ouvertement , en
vertu de son contrat de i'/ 55 , au vu et su dudit Beynes et
de ses associés, sans réclam ations , la veuve la Plène est
renvoyée de la demande en décharge de tout compte du
charbon extrait, et ils sont renvoyés eux-mêmes de toute
demande. L e surplus de cette sentence règle le mode
d ’exploitation pour l’avenir.
Les Beynes, Couder et veuve Desfarges n’ont point
attaqué ce jugement.
L a veuve la Plène en interjeta appel en 1782. Cet appel
fut instruit en la sénéchaussée de T u lle : elle étoit sur
le point d’obtenir justice.
M a is, Sic vos non n o b is , un nomm é Saint-Victou*’
profita do ces querelles pour persuader que l ’ e x p l o i t a t i o n
de
�.
, .
< •* > )
de ces mines étoit en m auvaises„ rnains +ril çn
d’abord de l’intendant dei.Lim oges la concession poui;
un an ; puis-il ¡fit valoir ses dépenses, l ’excellence de son
administration^ spn0i^tUit;é ,
.p ^ in t éfi. 1783 une
concession,de q^m ze.jris.
ob ar»*: ' J S 15{
L L a •loi du .28 juillpt;fi ^9.1;e ^ u ^ a < ,Sa;nt-„yiCtour4
qui néanmoins ne fut pas découragé, -et q u i, dans toutes
les phases de la ré v o lu tio n , se f.t iiït ,iu x avenues des
administrations etTdes, ministère^, ppur solliciter quelquesuns des arrêtés ci-après,
en veniir.4pr,longue mfvin à,
réussir.
, ,
r> q
^ f, s;i{
.,_T '
Les mines étant seulement sous la surveillance, admir
nistrative , les propriétaires de Pleau obtinrent , le
6 novem bre 1791^ un arrêté du département de la.Gorrè z e , qui les remettpit en possession de, leurs carrières..
Saint-Yictour intrigua et prétendit que lui seul avoit mis
les charbonnières en état de produit; i l fallut .des enquêtes
pour le vaincre. E n fin , en 179 3 ,, il p aru t,céd er, et fit
faire par B ettinger, son associé ,..un,traifcé^avec Pierre-,
Jean T reich appelant , lequel, conçédoit, ¿1 p rj,x fixe ,
audit Bettinger, l’exploitation de ses mines pendant vingt
ans. L e département hom ologua ce traité le 19 juin 1793.
D ’autres cliangemens amenèrent d’autres intrigues. O n
fit écrire au ministre de l’intérieur .par le ministre de la
m arin e, pour les mines de Pleau ; pn eut des avis de la,
leommission des m ines, d’autres de celle des travaux pu
blics. O n fit ordonner que les, propriétaires ex;ploiteroient en commun. •
L e département de la Corrèze p r it, les
viôse on
5,
5
et i5 plu
deux arrêtas qu’il crut etrje en conform ité
.j ;; illf
'
�r,
.. , . ............. C ™ / ) .
.
.
_
de ces feglemèris-, maïs ils furent cassés par le ministre
de l’intérieur, le 8 floréal an 5.
‘
Les propriétaires des minés se réunirent, le 24 nivôse
an 6 j poiir Organise^ une* exploitation en-commun, sous>
là direction de Mazaud. O n prëssent que T reich appe
lant, ét principal propriétaire, ne pouvoit y ! participer à
cause du traité^qü’il avoit fait avec Bettinger.
U n autre obstacle s’opposôit à cette union. Les arrêtés
des 6 n o v em b re2 1791 et 1 9 " 'juin ' 1793 subsistoient
enbdre', et élloiént exécutés.’
' Mais le ‘bien ’général ne permit pas sans doute- à l’ad
ministration dé"la C oirèze de se laisser guider servile
ment par des décisions sous la foi desquelles on avoit
traité , et de se laisser maîtriser par des Considérations
particulières. L e pliis difficile né fut donc pas de vaincre
te léger empêchement ':'
;
:
D ir u it , œ d ijic a t, '■m u tâ t q u a d ra ta ro tu n d is .
L e département de l ’an 6 ' cassa, le 23 ventôse, les1
arrêtés du département 611 plutôt des départemens
de 1791 et de 1793. L ’union de la compagnie Mazaud
fut liom oiogu ée, et il f u t 1enjoint à T reich de déclarer
sous "quinzaine s’il entendoit s’y r é u n ir , sinon il étoit
censé avoir renoncé h son droit.
T reich se pourvut près des autorités supérieures; il
osa même élever sa vo ix jusqu’au chef de l’état ; et
bientôt nous verrons qu’il n’a pas supplié en vain.
Cependant cet arrêté de l’an 6 étoit le dernier état
des choses, lorsque l’appel de T r e ic h , fils et héritier
de Marie la P l è n e , fut porté ci T u lle s , comme tribunal
choisi par les parties : il fut ensuite dévolu a la cour
d’appel de Limoges.
�.
c n,
_
,; ■
Les
adversaires
,
forts
cje
la
.décision
adm
,i . • . '■
» •j 'j \j! -.y' -;a i j i * '>1' ;um ; *¡J .- .)¿jinistrative.
. • ;•
contestèrent, ^d’abord la xpm pçtence .judiciairp ; mais
comment un arrêt^. ^ r o it - i l pu suspendre un aj>pél
pendant?
D ’ailleurs„rarrêfp.pe
régloit rien.sur
la .*];•
p ro
r
^ I - ‘ â ;
j >V k> • *; v ! S \ > ¿ J : !
x i ' l f X ' ■ ...O
- f\,
priété des parties : la, çouç dp ,ïfifn p ges,retin t donc ,1a
J-c
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i <r.-\ í t . - c : . - i ;
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contestation. , ;
¿•y-(rKi' Wï
t Les parties. plai<lèreftt;(^u^fyn^0;
' } xi
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j-< ,r*y »
germ inal
an g intervint Î’arrçt..suivait
’ *r . . . • .
k Considérant qu’il résulte du contrat.du i«”-. dccein•
• .
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« bre 1736 ,une : y ^ t ç -¡pure tj siniple)} et parfcifeo.de
« Tentier fonds,de.la portion de la, terre la, Charoulière,
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« qui fut vendue,par cet acte,: que la réserve énoncée
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cc à la suite ,de cet acte , même du consentement de
« l’acquéreur, n’y est apposée que comme un su gplé« ment du p rix déjà stipulé ; qu’ainsi cette clause n’avoit
« point fait -retenir au vendeur; la. p r o p r ié té ( de. la
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moitié
sous le tér. de la
1- mine- de
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il* 1. . II.èxistante.
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« rein aliéné ; qu’il n’en dériyoit contre: l’acquéreur
cc qu’une simple action en réclamation de cette m oitié
« de charbon ; que; cette action QU^soi, ^st; prescriptible
« comme toutes les autres , par le laps^de rtrerite annéès;
« que les in tim és.ont avoué et soutenu, au p r o c è s. que,’
« n i François Beynes , auteur d A n to in e ' , 7 i i ledit
« A ntoine lui-même , navoient jam ais jo u i de la mine
cc à ch a rb on , depuis ledit contrat d e i ^ 6 ,ju s q u e n
c* 178 0 ; ce qui embrasse un espace ^de quarante-quatre
ce ans , plus que suffisant pour prescrire ;
.
cc Considérant que cette action est prescrite par le
« non-usage; que Jean B eyn es, prem ier a cq u é re u r,
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« ÀWt |)dskecl6 ïad^c'mciîtie1cl;éJnfaiïe 3 avec titre èiiifisant
« pour eri àcqütéWi*' ïa ^ropriiké^Wee b o û W f d r e t saris
« interruption pendant plus'de trente ans; qu’ainsi cette
« prescription së tro u ve acquise en faveur d e ‘ l’acqué-
« reür que dès-tors Tèxiiîioeii èï îü Solution dçÿ autres
« questions agitées au procès deviennent in u tile 1 etc.
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... ' : ,r...
L e tribüntîl tfit'q u ’il a été friil ju g é;'....
et
« maintient l ’appelant aü d roit et possession de jouir 1
« d e s.m in e s a charbori existantes dans la terre la Cha« roülière [ ...' le ' ' rel'a'xô d 'e 'Î’aBcü^tioh ;et plainte;
condamne'" les intimes à-! lui Véùd'rë le ’ charbon par'
euX ^ e rç u dans ladite 'tërr'è ;./. depuis le trouble jus
te qu’au jo u r .... de l’arrêté du 23 ventôse an 6 ,... et
« ioo'ri~ de dommqges-intérêts ,.... sans préjudice à la
« restitution en temps et lieu , s’il y é c h e t, du charbon
'"«
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« ‘ perçu depuis ledit joür ¿ ¿ ' ventôse an 6 ,' etc. »
•
.Les intimes se pourvurent en cassation sur quatre
moyens: Celui de l’incompéteiice fut réjeté à l’unanimité
en la section des requêtes. L e prétexte de la m inorité de
B e yn esV cjù ’ il lie jirbuyoit encore pas régulièrem ent,
fit réussir Tàdriiission. L a "section civile rejeta à son
tour fce nVo'yfcn , et s’attacha à l’ incompétence : il en est
résulté que l’avis de huit j tiges l’a em porté sur celui de
vingt-trois.
Quoi qû’ilc n so it , Tes deu?i arrêts de Lim oges ont été cas
sés le T4'mvôsc an 1 1 , pour avoir statué sur la possession
en m êm e.tem ps ejue sur la p ro p rié té , parce q u e , dit
¿’a r r ê t, la possession dérivôit de l’arrêté du 23 ventôse
àn 6 ,\ ..e t cependant cet arrêté avoit été respecté à L im o
ges comme une barrière insurmontable. Les parties sont
�. V . . . . .-C'^ )
■ .
. ...
E n voyées à ’ faire statuer sûr leur appel en (cette cour.
* Les intimes seîigurèrent que cet arrêt de cassation étoit
un triomphe définitif, et ils allèrent de suite se mettre en
possession des/m ines de Charoulière : ils y disposent
aujourd'hui 'eri'’maîtres.
,
.
’
u M ais bientôt les plaintes que T reicli avoit portées au
pieçt du trôneront été’ fructueuses. L e ministre a donné
Ordre aupréfet>Jdè la Corrèze de casser l’arrêté du 23 ven
tôse an 6. Cela a‘ été effectué par arrêté du 27 floréal
a n 'lV ^ q u V permet polir un an à T reich et. autres d’ex
ploiter (illacuii dans sa p ro p rié té , à la charge de s’exp li
quer dan"sJce délai pour régler le m ode d’extraction à
venir.
' N ’y ayant donc plus d’em pêchem ens. administratifs ,
Fappel a été suivi en la cour. lies intimés ne voudroient
y plaider que sur la -p ro p riété; ils prétendent que leur
droit est im prescriptible, et qu’il ne s’est pas écoulé de
prescription , soit à cause de la clandestinité , soit quant
au délai suffisant pou r prescrire.
M O Y E N S .
v
Ce n’est pas un très-grand malheur' qu’une bonne cause
soit remise en jugement après avoir été gagnée en der
nier ressort , lorsque la cour suprême n’a blâmé cette
décision que dans un très-petit accessoire. Mais 011 ne
peut s’empêcher de s’étonner grandement que l’arrêt
d’une cour d’appel., reconnue com pétente pour h fond
du procès et pour la majeure partie des accessoires, ait
été pleinement cassé, sans que cet a r r ê t, au fond , soit
suspect d’aucun vice.
�.
( .H )
#
A u re ste , le sieur T re ic li se consolera aisément de
cette vicissitude , q u i, en jugem ent comme en adminis
tration , n’épargne pas les choses les plus irréfragables;
car si son arrêt de Lim oges a été cassé, il a au moins
l ’avantage que le m oyen de non-prescription, sur lequel
les intimés avoient insisté davantage, n’a pu être accueilli
ni à la section des requetes , 'ni à la section civile , et
que l’arrêt de la cour de cassation, dan^ tous ses m otifs,
n’attaque aucunement l’arrêt de Lim oges dans les ques-,
tions de la p ro p rié té , et m ême de la possession antérieure,
à l’an 6 , mais seulement pour s’être mis en opposition,
à l’arrêté du départem ent, du 23 ventôse an 6.
, ,
Les motifs de cassation font naître une idée bien na
turelle : car ils sont fondés , non pas sur le droit qu’avoit
la compagnie M azaud à la possession, mais sur la pos ■
*
sibilité qu’elle y eût d ro it, quand le gouvernem ent auroit
ratifié l’arrêté de l’an 6.
.
O r , M azaud n’ayant plus ni arrêté ni expectative , ne
faudroit-il pas dire que sublatâ sausâ tollitur effectus?
et que la cassation étant fondée sur une condition nonsuivie d’événem ent, il n’y a aucun obstacle à ce que l ’arrêt
de Lim oges subsiste.
O11 répondra qu’il y a chose jugée ; mais on se dem anderoit laquelle ? et cette réponse même nous con
duira au moins à être persuadés que c’est bien sans
nécessité, et surtout sans motifs existans , que le droit
des parlies est remis en litige.
D’A rgen lréd ép lo ro it la inisçre des plaideurs et l’étermte
des procès: M iscri litigantes ! de quibus n ih il ccrti est
constitulum , et quo i ah arhitrio cujusque et opuiationo
putiùs pendet, quàrn àccrtis regulis, M ais q u ’ a uroit-il dit
�■V
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(
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.?•
■ ,
si, 'ouixë les tribunaux, il eût fallu parcourir u n cercle d’admirii'strations sans etreplus certain le lendemain que la veil
le', et!sans que,ces administrations le fussent elles-mêmes?
Q uoi qu’il en soit, supposons, car il faut bien le sup
p o ser, quë lés dioses sont au même état que lors de la
cassation ,'e t par conséquent qu’il existe un arrêté du
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^I1 ' *f ! Jr' -J -| J '
>
¿3 ventôse an 6.
' Si cet arrêté subsistait aujourd’h u i, la cour auroit à exa
m iner encore la même question de compétence relative
m ent à lîr possession des m ines; et il seroit bien difficile,
o ï f oser le^dh-'e , qu’elle se conform ât m ieux que la cour
de Lim oges à la 'démarcation dès pouvoirs; car pourroitelle faire p lu s, que d’arrêter ses condamnations à l ’époque
où l’administration avoit disposé de l’avenir ?
M ais , dans tous les sens possibles,, le passé étoit dans
le domaine judiciaire ; lés jouissances de 1781 à 1791
étoient en litige par?la sentence de S a in t-A n g e l, et par
l’appel dë la veuve T reich .
Les jouissances de 1791 à l’an 6 étoient encore l’objet
de l’a p p e l, et on ne peut pas inyoquer l ’art, i^r. de la
loi du'28-juillet' Í791 ; car s’il place les mines sous la
surveillance adm inistrative, il n’ôte pas le fait de la posséssion", et d’ailleurs elle étoit autorisée par deux arrêtés
de 1791 et de 1793.
Ces deux arrêtés n’ont été rapportés que le 23 ventôse
an 6 ; mais jusque-là ils avoient eu leur exécution, et ce
dernier arrêté ne les i*apporte aussi que pour l’avenir.
'A in si L im o ges, loin d’être en opposition à des arrêtés
administratifs, s’y étoit au contraire entièrement con
formé : ainsi la co u r, en statuant de m êm e, s’y conform eroit encore.
�(*6)
_
M ais elle n’a pas même l’empêchement de cet arrête
de l’an 6 ; e t , quoi qu’en disent les in tim és, rien ne
s’oppose aujourd’hui à sa pleine compétence ; car l’arrêté
du p réfet, en cassant celui de l’an 6 par ordre du mi
n istre, n’a pas borné cette infirmation à un seul c h e f,
comme ils- le supposent. L ’arrêté est cassé.
A u reste, il est toujours vrai que la com pagnie M azaud
n’a plus le p rivilège • exclusif. L e droit d’exploiter est
rendu à chaque propriétaire, au moins provisoirem ent;
et d’ailleurs encore il est véritablem ent oiseux de recher
cher quel reste d’existence a l’arrêté de l’an 6 ; car si les
intim és ont joui avant l’an 6 , ils ne doivent rien à la
com pagnie M azaud y qui n’existoit p a s, mais à T r e ic h ,
qui avoit le droit de jouir. L a question de propriété
em porte donc avec elle la question des jouissances.
' A in s i, bien'ldin de se restreindre à moins que n’a jugé
L im o g e s, il semble que la cour n’a aucun empêchement
<Y adjuger même les jouissances postérieures à l’an 6 ;
car la com pagnie M azaud n’a jamais eu de droit ni de
possession sur les propriétés de l ’ap p elan t, seulement elle
y avoit une expectative au cas que T reich ne réussît pas
dans sa réclamation auprès du ministère. M ais l ’arrêté do
l’an 6 n’est plus. L a com pagnie M azaud , d’après même
les intimés ( page 14 de leur m ém oire ) , n’a plus (la
droits ; et s’il est vrai que la possession ' dés mines ait
besoin d’une autorisation , le sieur T reich l’a encore
obtenue. A insi l'effet le plus immédiat de cette obten
tion doit être que ceux qui posséderont dans ses pro
priétés m algré lui , doivent lui rendre compte.
.
A u reste , il s’agil ici de com pétence, et par conse:
quent
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.
quent d’ordre public : la.cour y>statuera dans sa sagesse.
Il suffit à l’appelant de rentrer, dans ses propriétés ; et
il n’y voit d’autre obstacle ' que l’obstination de ses
adversaires.
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.
• ,•
- Soit que la cou r'ju ge toute la .possession,' ou seule
ment une partie de 1la . possession / il est au moins cer
tain qu’il n’y a ' de vrai litige que sur la propriété.
D ’après cela, si l’arrêt de-Lim oges est cassé, même pour
ce qu’il avoit com p’é temment jugé , le sieùr T reicli ne
sera pas plus embarrassé d é prouver à R iom q u’à
Lim oges qu’il est seul propriétaire de la Charoulière
et des mines qui en dépendent. Ses preuves à cet égard
ne sont pas équivoques.
•„
•
i ° . Il tient cette propriété de Pierre Beynes. E lle
est vendue sans charges.
'
2°.. Son titre est fortifié par le fait même du pre
m ier vendeur , q u i , achevant d’aliéner ses propriétés
adjacentes et droits de mines , ne s’est fait aucune
espèce de réserve. •
,
, 30. Il a joui plus de 10 ans avec titre et bonne foi :
il a’ joui même plus -de 30 ans sans trouble ni récla
mation.
40. , Cette jouissance est constante au procès,
Les intimés ne se sont pas dissimulés toute la puis
sance de ce dernier moyen ; aussi ils s'efforcent de la
dim inuer par des négations.
' Ils n’ont jamais avo u é, disent-ils, que M arie la P lè n c ,
.
/,
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veuve T re ic h , ait jo u i, et ils netrôuyeh t aucunes traces de
cet a v e u ; et l ’ap p elan t, au co n tra ire, a toujours d it,
suivant e u x , au bureau de paix , et dans ses écritures,
n’avoir ouvert de carrière dans la terre de la Charo.ulière que depuis dix-huit mois.
A u bureau de paix ? les parties n’y sont jamais allées.
Dans les écritures de l’appelant ? il a toujours d i t , ab
ovo , qu’il y avoit jouissance et prescription. C ’est.donc
dans les interrogatoires? M ais de quel interrogatoire a-t-on
voulu p a rle r? est-ce de celui de 17 7 5 ? est-ce de celui de
.178 1 ? car la veuve Desfarges est armée de deux procès
crim inels qu’elle a soin de produire avec son procès civil.
L e prem ier interrogatoire est vraim ent une pièce
curieuse; e t, s’il faut juger la sentence de 1782 par les
interrogats de
, la comparaison ne sera pas trèsavantageuse par la senténce. L e juge demande à la veuve
la Plèn e s’il n’est pas vrai qu’elle est propriétaire de
m oitié du com m unal, et autres carrières ; ..... s’il n’eçt pas
vrai qu’elle tient sous son joug les habitons du v illa g e ;...
s’il n’est pas vrai qu’elle a coutume de lasser les parti
culiers qui ont essayé de creuser du charbon , etc. Elle
répond qu’elle est propriétaire de m oitié du com m unal,
et d e plusieurs autres carrières particulières ; ...q u ’elle
n’em peche pas les particuliers de creuser où ils ont droit,
mais qu’elle a toujours fait ses efforts pour les empêcher
de creuser dans ses fonds.
Ce ne sont là que des pauvretés , cela est vrai ; mais,
au lieu d’y trouver une preuve que la veu ve la PJene
11e jouissoit p a s, 011 y voit au contraire qu’elle enlendoit très-bien jouir seule de scs carrières, envers etconl*c
tous ; clic ne s’en défondoit pas.
�.
f 19
-"Sont-ce les interrogatoires de 1781 ? 'Car il est parle
de dix-huit mois dans l ’interrogatoire de M artin Beynes
èt dans celui de sa fem m e, qui Ont rendu compte de! la
derniere excavation qui donnoit lieu à la plainte. M ais là
veuve la Plène explique., dans son interrogatoire du
même jo u r , que cette carrière n’est .qu’une continua-,
îion 4e creusement ; et plus loin elle parle encore de
ce nouveau creusement.
'
*
Comment la veuve la P lèn e.au roît-elle, en effet, m ènti
à la vérité contre elle-m êm e, lorsqu’on lit dans les écri
tures de ce même procès de 1781 , qu’elle a »toujours
joui. « Les contrats de vente , dit-elle’( dans la requête
« copiée à la suite de ces interrogatoires dans les pièces
« des intimés ) , ont toujours été suivis d’exécution
« par la jouissance paisible et tranquille que la sup« pliante a eue seule des' fonds y m entionnés, notam
te meut de la terre de la Charoulière , à l’exclusion de
« tous autres, et sans opposition. »
’
Non-seulement la veuve la Plène a parlé de sa pos
session constante , mais les intimés ne l’ont jamais désa
vouée en prem ière instancè'. Leurs réquisitions au procès
verbal du 8 août 1781 , leurs conclusions dans la reqùêté
du 20 novem bre su ivan t, qui en font le com plém ent,
ne laissent aucun doute à cet égard. L ’appelant ne les
rappellera pas, parce que la cour a dû se con vain cre, par
le seul récit des fa its, que ce point de jouissance exclu
sive étoit constant dans la cause.
'
Q u’y a-t-il encore de plus .exprès et de plus concluant
que la fin de la sentence de 1782, pour prouver que cette
Ca
�.. .
C 20 )
.
.
.
possession a eu lieu au vu et su des adversaires, 'publi
quement et sans réclamation.
Ils n’ont pas interjeté appel de cette sentence; donc le
débouté, m otivé sur la jouissance exclusive à leur nu et su,
demeure inattaquable : le m otif et le dispositif n epeuven t
se séparer. E n fin , peut-on douter de la possession constante
de T re ic h , après avoir vu lés aveux faits devant la cour
de L im o g e s, et rappelés dans les motifs de son arrêt ?
A in si la jouissance des T reich est constante; ainsi les
Beynes n’ont jamais joui ni fait de réclamation de la
réserve qui se trouve au contrat de 1736. O r , avec ces
points de fa it, il sera aisé de prouver que l’appelant
doit être tranquille par la prescrip tion , indépendam
ment des moyens qui résultent des actes de 1768, 1769
et 177 1.
'
'
V e u t- o n considérer A n toin e Beynes isolém ent, et
comme s’il plaidoit contre Pierre Beynes son acquéreur?
alors, à la v é rité , il faudroit une prescriptioo de trente ans.
O r , cette prescription s’y tro u v e , car A ntoine Beynes
n’a jamais articulé avoir joui ; et , de l’époque de sa
vente en 1736 jusqu’à 1 7 8 1, il y a prescription, comme
l ’a jugé la cour de L im o ges, car il y a quarante-quatre
ans.
Les intimés essayent d’en diminuer la durée en di s a n t
qu’Antoine Beynes étoit mineur. D ’abord, oulre q u ’ il
n’étoit p:is seul héritier du ven d eur, il n’y pas moins
trente-deux ans utiles sur sa tête; et si les intimés, dans
leur mémoire ( pag. 1 1 ) , veulent trouver neuf ‘mS c^°
moins, c’est qu’ils 11e comptent pas l'intervalle de 1736
1705.
�.
( ' 2I )
#
1 P ou r justifier cette. Réduction, ils disent .que c’est en
i y 55 seulement que la cause de la possession a été changée.
M ais il n’est .pas né cessa ire‘de changer la cause d’une pos
session pour prescrire1par tyente ans; car cette pi*escription n’exige aucune autre condition que la possession à
titre de propriétaire; neque bonajîdes requiritur, sedsola
possessio per tricennium. L e Code civil encore rappelle
sur ce point les anciens principes.
« On, peut prescrire contre son titi-e, en ce sens que
« l’on prescrit la libération de l’obligation que l’on a
« Contractée. » ( A l ’t. 2 2 4 1 . )
’
Nous avons considéré la prescription du côté de Beynes
ven deur, et elle est acquise par trente ans; mais il reste à la
considérer du côté de T reich acquéreur en i y 5 5 ; e t, sous
ce point de v u e , il suffit de dix ans de prescription.
L a loi comprend expressément dans la prescription de
d ix ans les charges 1 auxquelles le fonds est asservi, et
personne ne doute que* dans la plupart des pays de droit
é c r it, cette prescription n’ait été constamment admise.
L e parlement de B o rd eau x,¡d ’où il paroît que ressortissoit l’ancien Lim ousin ,,açlmettoit la prescription de dix
ans en faveur du tiers possesseur, ainsi que l’enseigne
L ap eyrère, lettre P , n°. 83.
? .
A la v é r ité , son'annotateur inconnu prétend que B or
deaux n’admet que la prescription de trente ans. Mais la
cour jugera lequel des deux mérite d’être préféré , au
cas qu’il V eût lieu d'aborder,cette question secondaire.
Lapeyrère avoit di t, au n °.5>6 o , que la prescription
s’acquéroit par dix ans au tiers possesseur/suivant arrêt
de règlement de 1626.
�( 22 )
#
M a is , au reste , deux moyens prouvent qu’elle doit
«voir lieu dans la cause.
i ° . T o u s les parlemens qui ont refusé d’admettre la
prescription de d ix ans se fondent sur l’A uthentique Malœ
j i d e i , et en tirent l’induction que la bonne foi ne se
présum e pas contre le propriétaire, parce qu’on ne peut
pas présum er qu’il ait connu son droit et n’ait pas réclamé.
Cessât io/igi temporis prcüscr/ptio, si verus doniinus ignoret ju s suum et alienationem fa cta m . Dans ce
cas il n’y a que la prescription de trente ans.
M ais comment ne pas v o ir q u’A n to in e Beynes n’est
point dans le cas de cette lo i? Il n’a pas ignoré son droit,
puisque l’héritage vient de lu i-m êm e, puisque ce droit
est porté par un titre de son fait.
Il
n’a pas même ignoré la vente de 17 5 5 , car en 1 7 66
et en 1768 il reconnoissoit les héritiers T reich pour
propriétaires des catrieres voisines et du ténement de la
Charoulière.
E n second lieu , l’A uthentique Malçe fidei ne se rap
porte qu’à la vente d’un im m euble; et les parlemens qui
la reçoivent ont néanmoins continué d’adopter la pos
session de d ix ans quant aux charges et hypothèques
dont l’ iminoublo lui-m êm e est g re v é , et que D u n od m et
sur la môme ligne quant à la proscription de dix ans.
O r , la réserve de partager le charbon à extraire,
énoncée en l’acte de 17 3 6 , qu’est-elle autre chose qu’ une
charge, une servitude, un droit à des fruits temporaires?
E t n’étoit-il pas ridicule que le juge de Sainl-Angcl
appelât ce droit une propriété, et jugeât que les intimes,
même Couder et la veuve Desfarges, èlQiei\tpropriétaucS
�po u r moitié , comme si après une vente le vendeur dem euroit pi’opriétaire ; et comme si dans un fonds il y avoi,t
deux propriétés,, l’une du tréfonds et Fuutre de la super
ficie.
Mais.,, dans tous les cas, il est superflu de rem onter à
cette, réserve de 1736, parce que Jean T re iç li ayant acquis
en 1755 , sans, q u e lle fût m entionnée , a joui avec bonne
foi., au om et su du ven d eu r, qui connoissoit son droit
ainsi l’appelant a prescription suffisante,
.
Les intimés, répondent que la prescription n’a couru
dans l’espèce par aucun laps de temps; d’ab o rd , parce que
.c’est un droit de pure faculté ; en second lieu , parce que
s’agissant de possession sous la teri*e, il y a clandestinité.
. A u tan t vaudi’oit avoir dit etiam pet- mille annos ,
.comme le dit D um oulin sur le T itre vicieux. Cependant,
il faut en con ven ir, il seroit un peu dur de songer que
de vieux titres portant i-éserve d’un droit peuvent tom
ber des'nues, à la vingtièm e gén ération , et dessaisir ceuxlà même qui ont pour eux le titre et la bonne foi sans
s’attendre à aucun trouble.
L ’espèce de Cancérius, l'apportée par D u n o d , parm i les
exemples qu’il donne des droits de pure faculté, est déjà
contraire à l’ un des faits principaux de la cause ; c’est que
si le propriétaire d’un château ruiné n’a pas perdu la fa
culté de le faire réparer par les liabitans, c’est parce qu’ il
ne l’a pas réparé sans e u x ; sans quoi le droit seroit pres
crit. O r , ici Beynes avoue qu’on a joui sans lui.
M ais, à la page suivante, Dunod explique la cause d’une
-manière à épargner à l’appelant une discussion plus éten
due sur les droits de pure faculté.
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
'
( 24 5 .
,
.
« Il faut distinguer entre la pure faculté, qui a son
fondem ent dans la n ature, dans le droit public commun
à tous ou à plusieurs d’une même société, et dans la
liberté de faire ou de ne pas faire certaines choses ?
sa?is aucune ’p réexistence ou m élange de t it r e , de
convention ou d’action; et celle qui vient d’un titre,
q u i tire son origine d'un contrat , qui est propre à
celui qui a le titre , qui résulte d’un droit fo rm é , qui
produit line action , et qui peut être déduite en jugement.
.- .
« L a prem ière de ces facultés n’est pas sujette à la pres
« cription , tant qu’elle n’est pas intervertie. M a is la se'-*
« conde se prescrit sans interversion , parce qu’elle dé« riv e d’une convention et d’une action qui sont pres
« criptiblcs et dans le com m erce o rd in aire, à moins
<x qu’elle ne tombe sur des choses qui sont d’une condi« tion à ne p o u vo ir être prescrites. » (D u n o d , pag. 90.)
Ces principes s’appliquent sons effort à la cause. L e
vendeur de 1736 avoit son droit dans son propre titre;
il a pu. le faire valoir ; il avoit une action : donc sa ré
serve étoit prescriptible, comme l’avoit jugé la cour d’appel
de Lim oges.
Rem arquons d’ailleurs qu’en cette partie les moyens
des intimés s’entredétruisent. Ils prétendent que Beynes
a eu le d ro it, non pas seulement d 'attendre qu’ou c r e u s â t
pour p a rta g er, mais de creuser lui-m êm e.
La p re u ve , c’est qu’il a associé pour creuser ; la p reu ve,
c’esl qu’on a creusé soi-même , et plaidé pour soutenu*
qu’on en avoit le droit.
L a preuve en fin , c’est que la sentence de 1782 ndjugc
ce
�¿■2 5 , h
'
ce droit; c’est qu’elle déclare lesj intimés propriétaires de,
la m oitié de4 la Imine.
.
,\
•* \
*
■ U ne propriété n’est donc pas une pure faculté ; et
conçoit-on un 'propriétaire qui conserve son droit sans
prescription'.quand un autre en jouit d’après lui-m êm e.
•exclusivement.or
> • : < •, . '
.
,
t
<
, / t
•'
/
.
.
•
M ais Cette jouissance', d it-o n , a été clandestine.
.
 cela il n’y auroit qu’un m ot à ré p o n d re ; c’est
qüe la sentence de 1782 dit que la jouissance a eu lieu.
au vuxet su d’Antoine Beynes. O r , cette sentence n’est
jjas attaquée par les intimés. D ira-t-on que cette, sentence
est annullée par l’appel ? M ais il n’y a appel nécessaire
ment par celui qui perd son procès, que pour la partie où
il le p ep d ., .
. ,}
^ ' '. .
.
•
D ’ailleurs, il est de principe que les aveux consignés
dans un acte subsistent m algré son annulation , com m e
F&nseîgne Cochin , tome 5 , page 2 7 4 , et com m e.l’a jugé
la cour de cassation’ le 29 floréal an 7.
*. Ce qui vient d’être dit s’applique à l’arrêt de L im oges,
q u i . mentionne l’aveu de^la possession.
jÿlais l’appelant ne veut pas écarter ce moyen de clan
destinité seulement par une fin de non-recevoir. Car ici
. [I 1 ' " '
’■! ' ‘t ' ' 1 >■
'
les parties sont loin de ce qu’on peut appeler une posses
sion clandestine : il n’y en a ni dans le fa it ni dans le droit.
Dans le fa it, aucun habitant de la Pleau n’a m ieux su
que. Beynes tous les tours et détours des charbonnières ;
et quand il se'fait un moyen de ce que la Charoulièrc
n’a pas eu d’cxcavalion verticale, il sait bien qu’à la Pleau
.
•' g V
.
' ‘
.
..
D
�26
on n’a jamais, comme en Flandre , exploité ces mines
(
par des puits.
.
) .
•
■ . •-
v
L a montagne où est la houille est,en cône ré g u lier;
p a r conséquent, pour creuser dans une surface, il fout
creuser par une tranchée horizontale au pied du plan
incliné. Par ce m o yen , qui est le seul usité à la P leau , rien
n ’indique m ieux où se dirige la fo u ille, et il est impos
sible de s’y tromper.
..
L a procédure prouve d’ailleurs que c’est dans un tertre
de la Charoulière que s'e trouve l’une des ouvertures ;
d’autres sont au corhm nnal, mais au pied de la Charou-r
l iè r e , et eu direction de cette mine.
.
"
. r;
A u x termes du d r o it, une possession clandestine sup
pose le d o l , c’est-à-dire , l’intention de cacher ce qu’on
fait à celui qui a intérêt de le savoir. 11 n’est pas besoin,
pour l’établir, d’aller rechercher d’autres principes c^iie
ceux-là même consignés au mémoire des intimés
Glcim possidere eum d icim u s, q u i f u r t i v e ingressus
est possessionem , i g n o r a n t e e o quern sib i controv ersia m fa ctu ru m s u s p i c a b a t u r , et ne fu c e r e t t j m E b a t . L . 6 , il’. D e a cq . P u ss.
V o ilà donc trois choses qu’ il faut regarder comme
constantes: i°. que M arie la Plène ait ]o\i\fr(7tive?nenll
2°. qu’elle ait cra in t une action de la part d’Antoine
Beynes; 30. qu’Antoine Beynes a it ignoré la possession.
L:i sentence de 1782 répond à tous ces faits, en disant
que Marie la Plène a joui publiquem ent. La plainte de
1775 prouve aussi qu’elle ne craignoit pas les mauvaises
�( 27 )
# <
^
contestations ; èt enfin les écritures des intim és, ci-dessus
rappelées, contiennent la meilleure réponse à leur m oyen.
M ais quand tout cela n’existeroit pas , vit-on jamais
appeler clandestine la possession de celui qui a un titre ?
■ L a clandestinité n’est réprouvée que pour celui qui'h
voulu prescrire par le seul secours de la possession, et
parce que sans possession publique il' n’a vraim ent pas
de possession.
'
v M ais celui qui a un titre n’a besoin d ’avertir per
sonne qu’il jouit ; car c’est en vertu de son titre qu’il pos
sède , et le vice de clandestinité ne lu i est‘point appli
cable.
'
'
lu i
. ■
D unod , invoqué par les intim és, après avoir cité la
loi 6 , dit à la page suivante : « Celui qui a joui en verlu
* d’un .'titre ne peut être regardé comme possesseur d a n
ce destin \ son titre le faisant supposer de bonne1foi dans
le commencement; ce qui suffit pour prescrire suivant
« le droit civil. »
;
:
. . .
. L e Code civil répète que la bonne f o i, quand il y a
.un titr e , est toujours présumée , et que c’est à celui qui
allègue la mauvaise foi à la prouver. ( A rt. 2268. )
'
Les intimés disent qu’on -devoit avertir Beynes pour
fouiller le charbon ; mais ils conviennent au moins que
l’ usage n’étoit pas de le faire par écrit : et d’ailleurs, ori
le répète , ils se sont dits copropriétaires.
•
Il
n’y a donc aucun obstacle à ce 'que la prescription
ait eu son cours ; et T reicli ayant-un’ titre et bonne foi
depuis 17 5 5 , a valablement prescrit contre les entreprises
des associés de 1777. -, ■
'•
;
Ce n’est pas que la prescription lui soit un moyen néD 2
�.
.
,
(
2
8
3
.
.
cessaii’e ; c a r, indépendamment de la présomption bien
fondée , que la réserve de 1736 a dû être rachetée comme
l’a été celle de 17 6 8 , par un acte que T reich avoit dés
espéré de trouver ; il doit d em eu rer, ce semble , pour
chose absolument évidente, qu’Antoine Beynes a renoncé
à cette réserve de 1736 par tous les actes qu’il a passés
ensuite.
•
C o m m en t, en e ffe t, Antoine B eyn es, qui a toujours
habité le village de la P le a u , qui a passé sa vie dans les
mines de l’endroit ( et on peut en offrir la preuve ) ;
A n to in e B e yn es, q u i en 1766 faisoit un traité pour ex-»
traire du charbon dans ses p ro p rié té s, aui’oit-il manqué
d ’y com prendre la C h aro u lière, s’il y avoit eu le même
d roit d’extraction ?
Com m ent A n toine B eynes, qui vendoit en 1768 tous
ses droits aux m ines, en se réservant du charb on , n’auro it-il pas rappelé l’ancienne réserve ? T o u t prouve dono
qu’elle a ’existoit p lu s, ou qu’il y renonçoit.
L ’appelant avoit proposé un subsidiaire à Lim oges ,
et il étoit fondé ; c’est q u e , dans tous les c a s , n’y ayant
qu’une septerée de la C h arou lière, vendue en 1736 , et
cette terre ayant trois septerées, la réserve ne pouvoit
frapper que sur la terre alors v en d u e, e: non sur celle
qui l’a voit été depuis long-tem ps : car les conventions 11e
se réfèrent qu’à l’acte présent, s’ il n’y a stipulation con
traire ; e t , dans le doute , l’interprétation se ièroit contre
le ven d eu r, in eu ju s potestnie fu it lisent, apertius di
cure. L a sentence do S a in l-A n gel étoit donc encore v i
cieuse, même sous ce rapport.
x Cette défense su résume en peu de mots. L a propriété
�( 29 )
,,
.
de la Charoulière est sans difficulté à Jean T re ic h L es
actes qu’il a passés avec les Beynes , p rouvent que cette
propriété est affranchie de toutes charges. Il est constant
d’ailleurs qu’A n toin e Beynes n’a jamais joui , depuis
1736 , du droit qu’il réclame. Il est constant que T re ic h
et M arie la Plèn e ont joui .exclusivem ent et publique
ment , au v u et su dudit B eyn es, sans réclam ation de
charges ni de copropriété.
A in si Beynes a -perdu son d r o it, soit contre son acqué
reur , soit contre le tiers-détenteur , par une possession
de trente ans.
A in si T reich a acquis la franchise de la terre la Cha
rou lière, p a r la possession de dix ans entre présens, comme
acquére u r; et m ême surabondam m ent, en ajoutant sa
possession à celle de son vendeur , comme il a droit de
le fa ire , il peut invoquer la prescription de trente ans.
Conséquem m ent, sous tous les points de vu e possibles,
la prétention des intimés n’est qu’une tracasserie , et la
sentence de Saint-Angel avoit été justement infirm ée par
la cour de Lim oges.
M . B A R B E T - D U C O U D E R T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. M A R I E , licencié-avoué .
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Title
A name given to the resource
[Factum. Treich la Plène, Pierre-Jean-Baptiste. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
mines
charbonnière communale
charbonnière privée
propriété du sol
concession d'exploitation
charbon
intendants
Description
An account of the resource
Mémoire sur une contestation relative à la possession et propriété de mines à charbon. Mémoire en réponse pour Pierre-Jean-Baptiste Treich la Plène, appelant ; contre Marie Treich-Desfarges, veuve Lachaud, Jean Couder, et Léonard Chadenier, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1747-1804
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0249
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_M0407
BCU_Factums_G1306
BCU_Factums_G1307
BCU_Factums_G1308
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Rights
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Domaine public
charbon
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
intendants
Mines
propriété du sol
-
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10ca2d33409c80e1131fde20d17c2276
PDF Text
Text
M
E
L e citoyen
N icolas
■r:i '
L es
O
I
R
J U G E , demandeur;
C O N T R E
h éritiers
E
de la dame M
‘
. :
:
arguerite
D U B O I S épouse S O U B R A N Y , défendeurs;
j
'
e t
C O N T R E
H é l è n e D U B O I S et M a r t i n
son mari
9 aussi
VALLEIX
.
,
défendeurs
C E T T E cause est plus remarquable par sa singularité que
’difficile pour la décision.
Une fille naturelle, baptisée sous le nom de père et
de mère inconnus, qui depuis, soit dans son contrat de
A
�m ariage, soit dans d’autres actes , s’est qualifiée ellemême Hélène D u b o is , qui n’a jamais été connue sous
d’autre n o m , cherche tout d’un coup à se transporter
dans une autre famille.
Elle n'est plus D ubois.
Elle prétend qu’elle est fille naturelle de Marguerite
M ercier et de Jean-Pierre Carraud ; qu’elle a été légi
timée par le mariage- que le père et la mère ont con
tracté ensemble , peu après sa naissance ; que cette lé
gitimation a opéré le môme effet que si elle étoit née
pendant le mariage, et lui a donné tous les droits de famille..
J e a n -P ie r r e Carraud avoit un frè re , Jean - L o u is
Carraud' c P U j'b is e q u i est décédé en 1 7 8 3 , sans pos
térité. Ce frère a laissé un patrimoine assez considé
rable : c’est ce patrimoine qu’Hélène Dubois voudroit
s’approprier.
Elle ne réclame pas la succession du père qui lui a
paru peu avantageuse j c’est la succession de l’oncle qu’elle
ambitionne.
F A I T S .
L ’extrait baptistaire, ou pour mieux dire l’extrait d’ex
position d’Hélène Dubois à la porte de l’hôpital des enfans
trouvés, fixe sa naissance à l’année 1761 • elle est nommée
simplement llélèn c , sans désignation de père ni de mère»
Jean-Pierre Carraud à qui on voudroit déférer la pater
nité, a con tracté mariage en 1762, avec Marguerite M ercier.
Dans le contrat de mariage on lit les clauses suivantes.
« E n fa v eu r du présent mariage ladite Mercier et
�( 3 J
y> donné et donne flw lit ¿futur \époux^\ acceptant pàr do
» nationentre v ifs, tous les biens qu i lu i appartiennent
» présentement, meubles et immeubles , desquels le fu tu r
»' époux fera la ,recherche comme il avisera.
i
- » E n secondlieulafuture se.réserçe, en cas de viduité,
» Ja jouissance et usiifruit des hien's-donnés, et même la
»réversion en-cas de prédécès du ¿futur époux sa?is
j) enjansi
.
» Ladite donation tiendra lieu .az*d¿tfiitu r époux de
» gain de surv** n»
• '
O n prévoit le cas contraire, où la femme su rvivroit, et
il est stipulé pareillement en sa faveur un gain de survie et
un douaire viager.
Nulle mention de l’enfant prétendu né de leur com
merce antérieur.
JLe mariage a duré trente ans. Pendant tout ce temps ,
nulle reconnoissance, ni de la part de Jean-Pierre Carra u d , ni de la part de Marguerite Mercier.
.
Ce qui est à remarquer., ce qui rend le silence sur l’état
de l’enfant plus étonnant, c’est qu’il n y en a point eu du
mariage.
'
.
’
Jean-Pierre Carraud est décédé en 1781.
N ul écx*it encore, nulle parole, nul signe, même au der
nier moment* dont on puisse induire qu’il ait jamais ima
giné être le père de l’enfant qu’on lui attribueaujourd’ hui.
Il décède : Hélène Dubois paroît-elle pour'recueillir sa
succession? N on ; c’est Jean-Louis Carraud d’Urbise, frère
du défunt, qui se présente.
Ce frère répudie la succession par acte au greffe du a
janvier 1783. Sur cette répudiation, la v e u v e , Marguerite
A a
�C4}
,
.
M ercier, fait nommer un curateur à la succession vacante;
Jacques Labat est nommé par procès verbal du 7 du même
mois de janvier.
L e 10 , la veuve présente une requête aux juges de la cidevant sénéchaussée de cette ville , dans laquelle elle ex
pose q u e , comme créancière de la succession de son mari,
elle a x-equis l'apposition des scellés; que depuis Jean-X/Ouis
Carraud d’U r b is e , seul habile à succéder, a répudié la
succession, et que Labat a été nommé curateur à la succes
sion vacante. Elle demande en conséquence, qu’il soit pro
cédé à la rémotion des scellés, le curateur présent, ou
dûment appelé ,* qu’il lui soit permis de faire procéder ¿1
l ’inventaire par le premier notaire sur ce requis, et ensuite
à la vente dudit mobilier.
18 mars 1 7 8 3 , sentence de la ci-devant sénéchaussée de
R i o m , qui liquide ses reprises, et condamne le curateur ù
la succession vacante à en payer le montant.
En vertu de cette sentence, la veuve ne s’est pas conten
tée de faire procéder à la vente du mobilier j elle a encore
poursuivi la vente judiciaire des immeubles ; et sur qui l’at-elle poursuivie? sur le curateur à la succession vacante,
et vacante par la répudiation du frère.
8 juillet 1783, procès verbal de saisie réelle, notification,
criées, certification de criées, et enfin vente et adjudica
tion , toujours sur le curateur à la succession vacante d’après
la répudiation du frère.
Jean-Louis Carraud d’U rbise, qui avoit répudié la suc
cession de son frère , est décédé aussi sans en fans le 22 fé
vrier 1 7 8 3 , laissant aux collatéraux une succession aussi
opulente que celle du premier avoit paru obérée.
�................................................................................... '
-C’étaitleinowrentmirbtui oit la mère devoît reconnoître
l’état de sa fille ; toutlui èn faisoit ua devoir.
Elle’ laisse passer tranquillement ce riche patrimoine à
des collatéraux;- !
. ” ..rri î. :
L e citoyen J u g e , alors domicilié à Grenoble, n’a ,été
instruit t'u -décès de' ¡C à rra ù d 'd ’Urbiié j 'dont il étoit
unique héritier paternel, que long-temps après. ' v
- lia dame Marguerite Dubois , veuve Soubrany, qui sc
cioyoit en ordre de-succéder, s'est mise en possession de
l’universalité cio la succession. >j -îo *j
^
' L e 18 décembre 178 6 , le citoyen' Jugé à fait assigner la
dame D u b o is, veuve Soubrany, en la ci-d eva n t séné
chaussée de Clerm ont, en vertu d’arrêt d’attribution.du
ci-devant parlement de Paris., en désistement, avecrresli-;
tution des jouissances et des dégradations.! "
. \.
Sur cette citation la veuve Soubrany s’est pourvue par
opposition contre l’arrêt du parlem ent, qui attribuoit la
connoissance de la contestation à la sénéchaussée de Cler
mont. A rrêt est intervenu qui en recevant ladite Soubrany
opposante, a délaissé les parties à se pourvoir en la séné
chaussée de Riom.
Divers événemens survenus depuis cet arrêt, ont sus
pendu les poursuites du citoyen Juge.
L e i 5 fructidor an 2 , après ‘plus de 40 ans de silence,
Marguerite Mercier , alors octogénaire , déclare devant
notaires, qu’IIélène Dubois est sa fille, et de Jean-Pierre
C arraud , née du commerce qu’ils avoient eu avant leur
mariage. C ’est sur cette déclaration qu’Hélène Dubois
fonde sa métamorphose. ■
.
E n frimaire an 5 , le citoyen Juge a repris ses poursuites
�contre la veuv'e Soubrany ; il l’a fa \ijasâigner ciofn'©,uyeau
au tribunal civil'du département du Puy-de-Dôme. r ' '
A u moment où il s’attendoit'à recevoir une décision, la
dame Soubrany est décédée elle-même, le 27 prairial au y \>
sans postérité..
' ■
' h '1’
v r.
'
Après son d é c è s l e s scellés ont'été appèsfesur ses effets.'
L,e citoyen Juge, pour la conservation de-ses droits, a fait
faire différentes saisies-arrêts, entre les mains des débi
teurs et des dépositaires: des .effets de la succession.
Marguerite Mercier est décédée en l’an 8.
'
A v a n t son décès elle avoit fait un testament et un codi
cille. Par ce testament et ce codicille, elle iaijt differens legs
à safemme-de-chambre, au fils de son ancien domestique,
et à d’autres particuliers. Elle nomme pour son exécutrice
testamentaire Catherine de F rétât, veuve Mercier , sa bellesœur. Il n’est point question d’Hélène Dubois. Elle y ou
blie entièrement -celle qu’elle avoit reconnue pour sa fille.
Elle meurt. Hélène Dubois assure qu’après son décès
elle s’est mise en possession de sa succession , sans aucun
obstacle de' la part de la famille Mercier. C ’est ce qu’on
ignore.
Quoi qu’il en s o it, elle a prétendu avoir également droit
à la succession de Jean-Louis Carrand d’Urbise.
Elle a fait différentes saisies - arrêts, entre les mains des
débiteurs et des détenteurs des effets de la succesion de lu
veuve S o u b ra n y, détentrice e lle -m ê m e de celle dudit
Carraud.
E n cet état le citoyen Juge a fait citer , et les liânliers de
ladite veuve Soubrany , pour reprendre l'instance pen
dante entre lui et la veuve S o u b ra n y, et voir adjuger les
�I ?}
conclusions prises en kditciJmslahce ; et' ladite Héléne
BllbOis^êt:.VallelX',- son rmn>i j pour voir faire m ain-levée
d'e&-sa^it\^«aïn-êts',i-.éÊ' \Foir'ii<iblai!©r eommtm'avec euhri le
j^gëmëttt'âiitttevwftii’iponitré les héritiers Soubranyj -y\l(j
• 1‘I l m ¡peut ÿiayoii! âerdifS'oiilté relativènaehC -aux héritiers
de la dame Soubrany. L e citoyen Juge leur a com m uniqué
les titres établissant sa qualité. '
ïï. i : -, ' I
T oute la contestation est relativement à H élène Dubois.
OVd•à'ïÇw qûdllî: èst là’vpuétentîôn qu’elle élèvé. ' .r
1.
A la déclaration de M^i‘s « ^ irc’M ercicr du 1 5 fructidor
an 2 , elle demande à ajouter la preuve testimoniale.
Elle offre'suèsidiairementide p r o u v e r , '-r •
■ 'iovfQüal\e9t!qatotrie(:âansrl0lcüœfaiia)0p';de' Riom ¿qu'elle
a*-toùjours>ipassé poinr» êtrempaidusMÎxynmerce' de Jean-*
Pierre CaiTaüdav.ëc JVi'iirgiieritéîMetcier , avant lenaQria’g ej
z Q. Que Jettn-Bierrô-Garratud a;payé tesmaiside'la’riour*
rice ^eùa recommalndé àila>‘n ourrice cet e n f a n t ; t
. 3«. Q^àpuèsi quelle fùtseVréeij ijl la fit transporter dan»
son dotoaîne de 'Re^v^alleîyicliargeaMt Ses fermiers ou: mé~
tayers de sa subsistance et de son entretieii'^ët leur-en-four»
nissant tous les frais
a . * - ■-.•rr • > iV
r n i ) 40. Q u ’il'a ,a voué a pluçtetixs. personnes , qu’if ¡avoit eu;
cette fillô\dë -Margum'kü\^U:raiieuv.-.aVaiit<sow.niaviage'j* • >">
5 °. Que Jean-Pierre Car rnud.Tink'tuiVmêmo a Reyyial 1(\
pour régler les conditions dû» nxâciageldèisa; fille*;-qoîiÎlui
donna des Héritages’ pour, coroposeh'sa dot'; qu’à i]iù vérité
l’acte fut déguisé sous le nom de v e n te , mais que'Ciirraud
n’en reçut’pas le prixvceoqui'fut"dcmiu db-'toutes lèü per
sonnes iqui s’enU;emimïfr pour le mariage^ ’dont le?e<!)ntrat
iut passé le'lendemain'mûrhtifde- la' veiite-; eü recïtf par l é
môine notaire.-
�_
.
£ .V ;
.
.
• V o ilà les faits qu’elle artiotile.î r
' “'rr; • ' :
L a déclaration de Marguerite. Merciçr ést-elle un titre?.
• ; S i e lle n ’est!ip oin t
e tre adm ise subsidiâi’r éirieni 'ària pi'dav.q qiViîll'e.^Ç’llicite?
s-roieiles sont . l e s r ' d e L l K r q u ^ t i o i n s f q i f i l i d e discuter.
'
tt*
•
'r,r>
1; : :.T. novo)') -
P r e m i è r e
■ j ^ u J ' /.*
\
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h
'
;'
q u e s t ?i , o n .
.
' r.
coriTOvilnfo'i j.vj noij.'i.i - lri(/> /il îJij-
L a déclaration dp iMtt?^ucriïà M ercier estrelle
- ' ' on-' ■j: . .
Su.uri. litre ? - • ;oiJn- ' ¡/ , fi* •
■ : l ‘ •' '
ü
.‘ fil
~
. ■■ ’
E lle ne seroit point) un titre , quand, même H élène
D u bois seroit néeijpettdrmtolo.mariage j à plus forte /raison
dès qu’e lle ‘.e«t>néej,(jdeisbnj;propiiè avcuj, Iro n ie mariage.
Nous ■
disons, quand'inéine ellc\ seroit néc\pendant le
mariage : lés ¡principes à cet égard sont conslans. .
N on seulement Ja) 'déclaratiah de la moce , . mais I.r
déclaration !incnüèudiü <père,et dcj'la ‘. m crqjréunisîjyic' $uflïseï it-pas.jj'sausawlücs? rçdmibiçolès i,; polir établir :1a 11égitimité .de l’êilfant.■>ijO,jJaü ne : . J'.: ojnnl - ^\n;\ v* • ■o-i‘
‘
Il y en a une loi expresse: non'f nudis asseveration ib u s, dit Ja l o i , nev. ;en u\n ttiâ profession e , licet utr-ique
consçntiantr. scdin airùuxm w ■
legitimo con àêptijilii civili
ju re p a ir i.. cannl i tribu thr.hu - . n - v
•• ’
'
• A .cette ■IojUÙu t-il ajo uter dés a u td rité s ?
Quand frie me, disoit'lc célèbre avocat général Talon,lors
de l’arrêt du 12 janvier 1686, rapporté dans le cinquième
tome d u Jou mul des audiences, connu sous le nom de Marsîint, les sieur fct demoiselle.do Marsant voudroient aujour
d'hui avouer l'intimée, pour leur fille légitime, ils ne le
pourvoient
�(9 >
pourroient pas sans rapporter eux-m êm es des preuves
par écrit et incontestables de la filiation; et il cite à ce
sujet la fameuse loi que nous venons de rapporter.
C ’est ce qui a été jugé dans les plus forts termes,
dans une cause ¿1 la première des requêtes du palais, et
qui intéressoit un magistrat du premier ordre et d’un
des plus grands noms du parlement. Dans cette cause la
déclaration de ce magistrat, partie dans l’instance, qu’une
fille qui aspiroit à être reconnue pour sa iîlle légitime,
étoit réellement
légitim e, ne fut d’aucune con
sidération. On donna acte à ce magistrat de sa déclara
-
tion, et sans s’y arrêter, la prétendue fille fut déboulée
de sa demande, afin de faire preuve des faits justificatifs
de filiation. Get arrêt est cité par M. A u b r y , qui en connoissoit les circonstances, dans la cause contre la demoiselle
.Ferrand.
Il faut que la déclaration soit soutenue non seulement
.par la vraisemblance, mais par d’autres indices, par d’au
tres preuves.
' ■ <
Telles sont les maximes; telle a été constamment la
jurisprudence.
, ,L a déclaration de M arguerite M ercier ne seroit donc
pas un titre , quand même Hélène Dubois seroit née
pendant le mariage.
,
Dira-t-on que les nouvelles lois ont dérogé à ces prin
cipes; que la loi du 12 brum aire an 2 , et les lois sub
séquentes qui ont admis les enfans illégitimes ù succéder,
admettent en même temps la simple reconnoissance pour
preuve de la filiation.
,
Cette objection s’écarteroit facilement.
B
�,
.
.
(
1
0
)
.
.
i ° . Il ne s’agit point de nouvelles lois. L a succession
soit de Jean-Pierre Carraud , soit de Carraud d’U rbise,
11e s’est point ouverte depuis la révolution; l’un et l’autre
sont décédés long-temps avant.
2°. L a loi de brum aire an 2 ne concerne que les enfans illégitim es, et H élène Dubois n’agit point comme
illégitim e; elle n’a git, et ne peut a g ir , que comme fille
lég itim e, comme légitim ée p a r le m ariage subséquent.
L a raison en est simple.
L a loi de brum aire an 2 a accordé aux enfans nés
hors le m ariage, le droit de successibilité que les anciennes
lois leur refusoient.
E n ligne collatérale elle ne l’a accordé que pour les
successions qui s'ouvriroient à com pter de la publication
de la loi.
E n ligne directe elle a fait rem onter le droit de suc
cessibilité aux successions ouvertes depuis le 14 juillet
1789 : cette disposition, comme renfermant un effet ré
troactif, a été rapportée par le décret du i 5 therm idor
an 4 , qui form e à cet égard le dernier état de la légis
lation. Ce décret a lim ité le droit de successibilité en
ligne directe aux successions ouvertes depuis la loi du
4 juin 1793O r , Carraud d’Urbiso est décédé lo n g -tem p s avant
l’une et l’autre époque.
H élène Dubois ne peut donc rien prétendre comthe
illégitim e; elle seroit exclue par la loi m ême qu’elle invoqueroit.
Cela est sensible.
Llic ne peut donc exciper de la loi de brumaire an 25
�.
,
11 5 ,
. .
elle ne le pourroit qu’aulant qu’elle agiroit comme illé
gitime , ce qui seroit d’un autre côté détruire sa propre
demande.
3°. La loi de brumaire an 2 admet la simple reconnoissance pour preuve de la filiation, mais contre qui?
contre celui qui a reconnu; dans quelles circonstances?
lorsque la déclaration ne tend à donner un héritier qu’à
celui qui a reconnu ; mais n o n , lorsque comme dans
l’espèce elle tendroit à donner un héritier à celui même
qui n’a point recon»«*
^
D ans l’ancienne législation, qui n’admettoit point les
bâtards à succéder, la question ne pouvoit se présenter
que dans l’une de ces deux hypothèses; ou dans le cas de l’en
fant né pendant le mariage m êm e , auquel le mari est
de droit réputé le père; ou, comme dans l’espèce actuelle,
dans le cas de l’enfant né ayant le m ariage, mais qu’on
prétendoit légitimé par le mariage subséquent. Dans l’un
et dans l’autre cas, la déclaration de la mère tendoit
nécessairement à donner un héritier au mari ; mais
comme d’un côté il eut été de la plus dangereuse con
séquence, et contre la raison, qu'un des conjoints eût
pu être lié par le fait seul de l’autre conjoint ; et que
d’un autre côté on ne pouvoit scinder l’ état de l’enfant;
on jugeoit avec raison que la déclaration seule du père
ou de la m è re , n’étoit pas suffisante, même pour la suc
cession de celui qui avoit reconnu.
Maintenant les enfans illégitimes succèdent. Dans ce
nouvel ordre de choses, il n’est pas étonnant que le lé
gislateur ait ajouté que la rcconnoissance feroit preuve
de la filiation. ; niais comment cela doit - il s’entendre ?
B 2
�( 12 )
contre qui doit-elle faire foi de la filiation? contre celui
seul qui a reco n n u, et non contre celui qui n’a point
reconnu. V o u lo ir l’entendre différemment, vouloir ap
pliquer ]a loi à l’espèce particulière dont il s’agit, au cas
où la déclaration tendroit à donner un héritier à celui
même qui n’a point reconnu, ce seroit prêter une absur
dité au législateur; ce seroit supposer qu’il a consacré en
principe qu’on peut être dépouillé par le fait d’autrui.
Quel a été le but de la loi ? le but de la loi a été d’a
doucir le sort des enfans nés hors le m ariage, de leur
accorder le droit de succéder qui leur avoit été jusquelà r e f u s é . L a loi n’a donc eu en vue que les enfans illégi
times; elle n’a eu ni pu avoir eu en vue les enfans légi
_
^
^
timés par le mariage subséquent. Il ne falloit pas de loi
pour accorder à ceux-ci le droit de succéder.
Lors donc que la loi a admis que la reconnoissance
feroit preuve de la filiation, elle n’a point porté atteinte
aux anciens principes, en ce qui concerne les enfans lé
gitimes , et pour les cas où la reconnoissance d’un des
auteurs de la naissance tendroit h donner un héritier i\
l’un et à l’autre. Elle a établi un droit nouveau , mais
pour les enians illégitimes, demeurés dans l’état d’ illé
gitim ité: elle a voulu à leur égard que la reconnoissance
fît preuve de la f i l i a t i o n ; mais pourquoi ? parce que
dans ce cas la reconnoissance ne tend à donner un héritier
qu’à celui qui a reconnu.
J3ie.ii loin qu’Hélèno Dubois puisse s’aider des nouvelles
lois, elles lui sont contraires.
Ces lois ont supprimé les déclarations de paternité;
et lu confession de Marguerite M ercier, qui recounoît
�,
( '* 3 )'
\
elle-même qu’IIélène Dubois est néei avant lë m ariage,
est-elle autre chose qu’uneIdéclarationjde paternité?
E t qu’on ne dise pas que s’agissant d’une succession
ouverte avant la révolution, cette.déclaration.se'.reporte
à un temps où ces déclarations étoient permises. Il ne
s’agit point de .reflet; il s’agit de-jfacte eri.lui-mê.më"Marguerite Mercier a f a i t ’ cé qu’elle ne pouvoit faire,
et n’a'point fait ce qu elle pouvoit. faire : elle n’a point
fait la déclaration lorsqu’elle■
po.Uvjpit.la-;fair£et elle l’a
faitei^ôrsque^la
Jui^lûterdisoit.
Hélène Dubois n’avoit aucun drbit acquis avant les nou
velles lois. On n’a pu dépuis lui en donner un.
• U n jugement; du tribunal de cassation d u '2 ï prairial
an 10 , à cpnfirraé iun j'ùgement clailrib.una], civil du Pasde-Calais, qui avoit'Cu:égard àune'^éèlaratipn de paternité.
Mais par quèls motifç ? -i^r.^arce ¡que* la déclaration- avoit
été faite, à la yéritéydepuis-la révolu tion , mais antérieu
rement 'à la loi de brumaire j quë le procès avoit même
étë intenté-antérieurement y la Iqv; a ° 4 ça^’ce .qu’il s’agissoit à’alim ent , et.non dii droit.de suçcess{.bilité.
Q u’Héièxie Dubois fasse;elle-m êm e l’application de ce
/•
f.
.
.* r
préjugé." a . - *
' ^ .
Ce n’est pas tout. La déclaration de Marguerite Mercier
li’es't même point1dans la)formëiY.oulue par la loi, '
I^a reconnoissarice iesfc^devant notaires et la .loi veut
qu’elle soit devant l’ ojjioifi'yubhQ dcü’etat civil.
.
L a reconnoissauce devant notaires pourroit peut-etre
suffire pour alimeris; mais pour succéder, il faut qu’elle
soit devant foflicier publie.
' .!
.
;
N ’oublions pas que lu déclaration de, Marguerite M er-
�((*4* r .
cier a été'ftfitc postérièurèmeiit tiu^' nouvelles lois., quelle .
a dû dès-lors être faite en la forme prescrite par ces
mêmes lois.
* -r. ,
- ‘
'■C ’est*done umactc informe qit’on .présente comme, un
titre. : ■’ ■ ' ( ■. i
îTjfil'v ■ v )j ' >
..
Hélène Dubois assure-qu’après le- décès de. M argue
rite M ercie r, elle a recueilli sans -obstacle sa succession.
O n ignore ce qui s’est passé à !cét égard; vrai ou-Sup
posé, le -fait est indifférent. .
,: •
Marguerite Mercier est. décédée en 1an 8 , postérieuremént aU& nouvelles lois quii:ont accordé aux 'eiifans
naturels les-mêmes avantagés qu’à ceux-, nés d’une union
lé g itim e ? d’après ces lois, Hélène Dubois a pu recueillir
.
sa succesion. Maig^ànquel titre ?: comme illégitime.
.
• P o u r être (autoriséèfjà»;s’eri "mettre' en posspsgion, elle
n’avoit à prouver qutttneictyoée.'; .quelle étoit- fille de
Marguerite" Merbier : •la loi ne l’appéloit pas seulement
comme légitime; elle l’appeloit encore.comme illégitime.
Mais ici elle a à prouver , et que Marguerite M ercier -lui
a donné -le jour, et que Jèan-Pierre Carraüd est le père;
elle a ¿i p ro u v e r, et la m aternité, et la'paternité. '
Si Hélène Dubois étoit née pendant le m ariage, la
preuve de la maternité emporteroit celle de la pater
nité ; l’une seroit la conséquence d e .l'a u tre , d’après la
maxime paler est queni ju.stœ nvqitiœ demonslrani j
maxime fondée sur riionnêtcté publique et sur la dignité
du mariage; maxime admise non seulement chez les R o
mains , mais chez tous les peuples.
Mais Hélène Dubois n’est pas née pendant le mariage;
elle est née avant : et alors la preuve du premier fait
n établit pas le second.
�S lÿs) ,
U n cas est Lien différent de l’autre. L ’enfant naît-il
pendant le mariage? le mari est de droit réputé le père;
la femme mariée ne peut pas'être mère sans que le mari
•soit le père.
>■*., ' ■. h
Mais hors le m ariage, il faut d’autres preuves pour
déférer la paternité. Marguerite Mercier auroit pu être
m è r e , et Jean-Pierre .Carraud n’être pas le père.
.
.
-Dans la circonstance o ù ’ l’enfant est né pendant le
■mariage, tout ^se réduite à un seul p o in t, «« fiiit de la
naissance. L e f a i t d c i a naissance établit, et la mater
n ité, et la paternité. Il n’en est pas de même de la cir
constance où l’enfant est né hors le mariage ; la mater
nité peut être établie sans que la paternité le soit. ' ■
Si on se fixe sur les anciennes lois, la déclaration de
Marguerite Mercier ne peut être d’aucun effet, ni pour
la succession du père, ni pour celle de la mère.
.. Si on se fixe sur les nouvelles lois, Marguerite M e r
cier aura p u , si l’on veut, donner un titre et un droit
à sa succession. Mais a-t-elle pu donner un titre et un
droit à la succession de Jean-Pierre Carraud, et des pa
rens de Jean-Pierre Carraud? non sans doute.
‘
S e c o n d e
q u e s t i o n
.
Hélène D ubois peut-elle être admise ci la preuve testimoniale. ?
■■
’
Il est des arrêts qui ont autorisé cette preuve. Mais si
l’on a pensé que la preuve testimoniale ne devoit pas
être interdite dans tous les cas, on a pensé aussi quelle
�f 16)
ne devoit être reçue qu’avec beaucoup de peine et de
circonspection; qu’on ne devoit pas légèrement faire dé
pendre la destinée d’une famille, son repos, sa sûreté,
de la déposition de témoins passionnés, surpris ou çoi>
.
rompus.
• L a loi. 2 au code de testibus , en a une disposition pré
cise..Telle est l’espèce de cette loi. Un affranchi prétendoit
être né libre et dans l’état d’ingénuité. Que répond ¡’em
pereur ? defende causcim tuairi instrumentis et argumentis quibus potes ; soli enini testes' ad ingenuitàtis
probationem non siifficiunt.
•
L ’auteur de la consultation en faveur d’Iiélène Dubois
répond singulièrement à cette loi ; il cite la note de Denis
Godefroi. Et que dit cette note? elle dit que ce m ot, s o li,
doit s’entendre, non solummodo. N e dites p a s ,' c’est ainsi
que l’auteur de la consultation fait pai’ler Denis Godefroy,
ne dites pas que la preuve de l’ingénuité ne peut être
faite que par témoins. Ce n’est là ni le sens ni l’esprit de la
loi : dites plutôt avec elle , que la preuve testimoniale n’est
pas la seule qui soit décisive , non solummodo ; mais que
tout autre genre de preuve aura la même autorité, pourvu
qu’il conduise à connoître la vérité.
Mais qui a jamais douté qu’à la preuve testimoniale, on
ne pût joindre la preuve résultante des actes ?
\ oilà , certes, line grande vérité que Godcfroy a mise
an jour ! Il valoit bien la peine de faire une note expresse,
pour apprendre ce que personne n’a jamais imaginé de ré
voquer en doute,
Accurse , Bartole , Paul de Castres, que l’autour de la
consultation cite égalem ent, n’ont fait que copier la note
de
�.
_ ( r7 )
p
de Denis Godefroy. Us disent comme lu i, que la preuve
testimoniale n’exclut pas les autres ; ce que personne ,
encore une fois , n’a mis en problème.
Mais ce n’est pas là la question. Il ne s’agit pas de savoir
si la preuve testimoniale peut marcher avec les autres
preuves; mais si elle peut être admise , sans le concours
d’autre preuve, ou commencement de preuve; ce qui est
bien différent.
L ’auteur de la consultation cite d ’A g u essea u 7 fils de l’il
lustre chancelier, ¿«na sou plaidoyer lors de l’arrêt de
Tocqueli«^
A v a n t d’en venir au fils nous citerons d’abord le père,
rimmortel d’Aguesseau lui - même. On ne dira pas, sans
.doute, que ce savant magistrat n’a pas entendu le texte de
la loi ; voici comme il s’exprim e dans la cause d’Henriette
d’A v r i l , se prétendant fille de Pierre d’A v ril et d’A nne
de L a va l, rapportée au second volum e de ses œuvres.
-■il « .Quand il.s’agit de prouver la naissance, permettra-t-on
» à une partie, sans in dice, sans présomption , sans commenceinent de preuve par écrit, de faire entendre des
■
» témoins pour déposer en sa faveur? C ’est un doute qui
» est éclairci par la loi 2 au code de testibus, »
^‘ Il rappelle les termes de cette loi et il continue : « Voilà
» donc trois sortes de preuves’que l’empereur distingue
•» i dans les questions d’état ; les actes, les présomptions, les
» témoins : il décide nettement que les témoins seuls ne
* peuvent pas suiïïi*e pour faire une preuve certaine; il
» faut nécessairement que les dépositions de témoins soient
» soutenues ou par la foi des actes ou par la force des pré
» somptions j et par là on concilie l’intérêt public avec
C
�.
.
.
ç 18 }
. .
celui des particuliers. L ’utilité publique est satisfaite en
ce qu’on n’admet pas légèrement la preuve par témoins,
et les particuliers ne sauroient se p laindre, puisqu’on ne
les réduit pas à l’impossibilité de prouver leur état, lors
que les actes qui ne peuvent l’établir sont perdus. Telle
est la disposition du droit civ il, à laquelle nous ne voyons
pas que les ordonnances, qui sont notre d ro it, aient
dérogé. »
L e iils de cet illustré m agistrat, invoqué par l’auteur de
la consultation, ne s’est pas expliqué différemment lors de
»
»
»
»
»
»
•»
»
l’arrêt de Tocquelin. Il rapproche les divers textes des lois
civiles et les ordonnances : il établit que la preuve qui sc
tire des actes n’est pas la seule preuve légitim e de l’état;
que, ni le droit c iv il, ni les ordonnances, n’interdisent au
juge de chercher une autre route pour parvenir à la connoissance de la v é r ité ; qu’il ne lui est pas interdit d’ad
mettre la preuve testimoniale; mais que la loi l’avertit en
m êm e temps de ne l’admettre qu’avec la plus grande cir
conspection et la plus mûre réflexion.
Il ajoute : « Les arrêts qui paroissent opposés entre eux
x> sur de pareilles contestations, peuvent se réunir pour
» l’établissement de la m ême maxime ; et ils prouvent
» tous que la preuve par témoins peut être adm ise, mais
» qu’elle ne doit l’être qu’avec une extrême réserve. Les
»
»
»
»
»
*
mis font voir ce que le juge peut fa ire , lorsque les circonstances l’exigent absolument ; les autres, ce que la
sagesse lui fait faire, lorsqu’elles 11e peuvent pas balancer
la juste appréhension qu’il y a de renverser l’ordre d'une
fa m ille, en y faisant entrer line personne qu’elle regarde
t-ounne étrangère. >1
�C 19 )
Que fa u t-il pour que les juges puissent admettre la
preuve testimoniale, sans cette juste appréhension ?
L a loi le dit : instrumenta , les actes ; il faut q u ’il y ait
au moins un commencement de preuve par écrit.
A rgum enta , les présomptions.
C ’est surtout, lorsque l’enfant qui réclame n’a pas en
sa faveur la possession d’état, lorsqu’il demande à acquérir
un titre n ouveau, un titre dont il n’a jamais j o u i, que la
preuve doit être admise difficilement. C'est alors qu’il n’ est
pas permis aux juges de s’érax^c de la disposition de la l o i,
des conditio«»' imposées par la loi : defende^causam tuani
argumentis et instrumentis .
- O u celui qui réclame a la possession, ou il réclame un
état dont il n’a jamais joui. A u premier cas, il n’a presque
pas besoin de prouver; il lui suffit presque de dire, comme
dans les matières communes, possideo quia possideo.
A u second cas, dit Cochin , celui qui réclame un état
dont il n’a jamais joui, trouvant le même obstacle dans la
possession , ne peut réussir dans son entreprise, s’il n’a en
sa fa veu r, ou des actes, ou des présomptions très-fortes !
Il n'est personne qui ne se pénètre, et de l'importance,
et de la nécessité de cette distinction.
Que seroit-ce, si la possession étoit même contraire!
Enfin il faut que les faits soient pertinens.
P rem ière
c o n d i t i o n
.
Commencement de preuve par écrit.
Y a-t-il ici le moindre acte du fait de Jean-Pierre Car-
C 2
�^
raud , dont on puisse induire un commencement de preuve
par écrit ?
Si Jea n -P ierre Carraud avoit dû reconnoître Hélène
Dubois pour sa fille, c’étoit principalement au moment où
il s'est marié avec Marguerite Mercier ; c’ étoit le moment
.
.
(
d’assurer son état.
Il n’en est fait m en tion , ni dans le contrat de mariage ,
ni dans aucun autre acte.
M ôm e silence pendant toute la durée du m ariage, et de
la part du p è r e , et de la part de la mère. '
L e i l mai 1779 , et la veille du mariage 'd’Hélène
D u b o is , un fondé de p o u v o ir , ou soi-disant fondé de pou
v o ir de Jean-Pierre Carraud, lui vend une portion d’hé
ritage, moyennant la somme de 700 francs. On argumente
de cette circonstance. Mais que signifie cette vente ? ren
ferme-t-elle le moindre indice que Jean-Pierre Carraud
ait reconnu q u ’Hélène Dubois étoit sa fille ? Bien loin
quTIélène Dubois puisse se faire un moyen de cet acte, on
le lui opposera à elle-même. Comm ent y est-elle qualifiée?
prend-elle le nom de Carraud ? Elle y prend le nom ÜH é
lène D ubois. Dans le contrat de mariage du lendemain ,
elle prend le même nom.
Cet acte prouve donc contre elle ; ou du moins ne
prouve pas pour.
On n’en produit point d’autre.
L a déclaration de Marguerite Mercier ! Cette déclaration
peut-elle même être proposée comme un commencement
de prouve par écrit?
i«. T o u t commencement de preuve par écrit doit être
du lait m êm e de celui à qui ou l’oppose.
�.
.
t 21 ï
Ensuite, il faudroit au moins que cette déclaration ne
fût pas combattue par des aveux contraires ; que M argue
rite Mjercicr ne fût pas en opposition avec elle-même.
Dans la requête du 27 janvier 1 7 8 3 , après le décès de
Jean-Pierre Carraud, elle a déclaré en termes exprès, que
Jean-Louis Carraud d’Urbise éfcoit seul habile ci lui suc
céder. Sur la répudiation de celui-ci, il a été nommé un
curateur à la succession vacante, et elle a dirigé toute sa
procédure contre ce curateur. N ’est-ce pas là la déclaration
la plus form elle, quelle ne reconnoissolt poi«t H élène
Dubois p o u r > Æ1Ie ^ Jean-Pierre C arraud, légitimée
le mariage subséquent ?
par
Hélène Dubois dit avoir la déclaration de Marguerite
Mercier en sa faveur. L a déclaration est contraire. Dans l’arrêt cité plus h a u t, la déclaration du père, d’un
magistrat du parlement , non seulement ne servit point de
preuve , mais même de commencement de preuve par
écrit ; et dans cette espèce le père n’étoit point en contra
diction avec lui-inême ; il n’avoit point donné deux décla
rations opposées.
. V o ici deux autres arrêts plus récens, qui ont jugé con
form ém ent aux mêmes principes.
L e premier a été rendu au parlement de Paris, sur
délibéré, le 23 mai 1765.
Par cet a rrê t, le sieur de Rougcm ont et la veuve Hatte
qui s’étoit réunie à lui , furent déclarés non-recevables
dans leurs demandes; et il fut fait défense au sieur de
Rougem ont de prendi’e le nom de Hatte.
Dans cette espèce, la maternité ,(et le sieur de Rougemont
étant nê pendant le mariage, la maternité faisoit preuve
�.
#
.
( 22 )
p
.
de la paternité), étoit établie par l’éducation fournie aux
dépens de ladite Hatte. Elle étoit attestée par la déclara
tion de la mère qui offroit de la faire judiciairement ; elle
étoit avouée, ce qu’il y avoit de plus particulier, par pres
que tous les parens paternels dont on rapportoit nombre
de lettres qui contenoient la reconnoissance la plus formelle;
il articuloit trente-huit faits dont il demandoit subsidiaireinent ù faire preuve. Par l’a r r ê t, la preuve fut rejetée.
.Voici les réflexions de l’arrétiste.
« L e sieur Rougem ont n’a v o it, d it-il, ni acte baptis>3 taire conforme à l’état qu’il réclam oit, ni aucune pos>3 session du même état. Il avoit titre et possession d'un
» état contraire ; déclaration tardive de la dame H atte
» au bout de quarante-quatre ans ' silence -perpétuel
» pendant plus de quarante ans que son m ari avoit sur53 vécu ¿1 la naissance du sieur Rougemont. Nulle date
» certaine, nulle preuve de l’aveu de la maternité qui lui
» avoit été fait; aveu fait, suivant lui-m êm e, au bout de
>3 trente-sept ans de silence ; silence dans les premiers
» momens de la mort du sieur H u tte , et au moment
» du partage de sa succession ,• reconnoissance de la
» dame H atte, tant avant qu’après le décès du m a r i,
» qu il Tt étoit issu de son mariage que deux jilles. Ce
» sont les motifs qui déterminèrent les juges. »
Est-il un arrêt dont les circonstances se rapprochent
davantage de l’espèce actuelle?
L e second est du parlement de Toulouse.
L e 3 juin 17 3 2 , une fille est baptisée sous le nom de
Jeanne-Gabriclle, Cille de père et mère inconnus. Lorscpi il
est question de régler la succession du c o m t e d e Sainton ,
�t
,2 3
)
qiii avoit pour fils, seul et unique h é ritie r, l’abbé de
Sainton, Jeanne-Gabrielle prétendit être fille légitim e des
sieur et dame de Sainton.
L e 28 janvier 176 5 , elle demande à partager la suc
cession, par m o itié , avec l’abbé de Sainton, qu’elle dit
être son frère.
'
P o u r constater l’état qu’elle vouloit s’attribuer, elle
articule et offre de prouver devant le sénéchal de Toulouse :
Que vers la fin de 173 1 , la dame de Sainio», quoique
séparée de son
¿toit devenue enceinte;
Q u ’avant et pendant sa grossesse, le sieur de Sainton
son m ari, lui rendoit de fréquentes visites, qu’il mangeoit
.chez elle , et y faisoit sa partiè;
Que le 30 mai 1732, la comtesse de Sainton étoit accou
chée d’une fille, dans, sa maison , rue V eïa n n e, qu’elle
avoit donné ordre ùraccouchèur de faire baptiser Fenfanta
sous le nomade père et mère in conn us , de lui faire
donner les noms de Jeanne-Gabrielle C l o t j l h e .
■ Que l’accoucheur avoit i-emis cet enfant à Jeanne-M arîe
-Loubert, femme de Laurent B ou cé, habitant de la paroisse
de Saint-M ichel de Tou lou se,-qui la fit baptiser sous le
•nom de père et mère inconnus.?.. . ■
Que la dame de Sainton avoit-payé sept mois de nour-rice, pension, et fourni «tout ce qui lüL étoit; nécessaire
jusqu’en 1743 , que la dame de Sainton, devenue vjouve!,
l’avoit retirée auprès d'elle, lui avoit apprisqu,’elle ¿toit
sa fille; que depuis elle étoit restée dans la maison, au
milieu delà famille, appelant la dame de Sain ton sa m am an ?
et'celle-ci la nommant sa\fdl&., /
; 'i ; !
Jeanne-Gabrielle rappbrtoit,au soutien dedix-septfaits.
�I h ) ............................................................
quelle articuloit, un acte extrajudiciaire du 29 janvier
1 7 6 5 , dans lequel la dame de Sainton convenoitde tous
les faits articulés;
■
- Les déclarations' données devant le notaire, par un
ancien chirurgien-accoucheur et par sa fille ;
l/n testament mystique fait en 1 7 6 2 , par la dame de
Sainton, dans lequel elle reconnoît Jeanne - Gabrielle
•pour s a jille , et lui léguoit sa légiLime et son mobilier;
D ix -h u it lettres de parens et amis, entr’autres, trois
de l’abbé de Sainton lui-m êm e, à la dame sa m ère, datée
de 176 4, où l’on parloit de Jeanne-Gabrielle, comme d ’un
enfant des sieur et dame de Sainton.
Sentence du sénéchal de T o u lo u se, qui permet la
preuve des faits articulés.
' ' , ,
Appel. A r rê t du parlement du. 11 mars 1766, qui in
firme la sentence, et fait défense à Jeanne-Gabrielle de
prendre le nom de Sainton , sous les peines de droit.
Jeanne - Gabrielle se pourvoit en cassation. Pendant
l’instruction, le comte de Betout contracte mariage avec
elle : et p o u r'd o n n er plus de consistance a la réclama
tion contre l’arrêt, ils) produisent dix nouvelles lettres
et une déclaration devant notaires, concernant la nais
sance et l’éducation privée de Jeanne G abrielle , et comme
îformarifciüne suite de preuves de l’ état qu’elle s’attrii>uoit. *’!
'
r ’
. ’ T je'23 juillet¡1 7 7 1 , là danie de Sainton fait devant
notaire les mêmes déclarations que celles consignées dans
son acte extra judiciaire.
•
>
’
Elle fait plus, elle intei’-vient daiis l’instance an conseil,
forme un incident en suppression de la requête impri
mée
.
�( 25 )
^
ïnée par l’abbé de Sainton, comme lui étant injurieuse,
et réitère les déclarations précédemment faites en faveur
de Jeanne, Gabrieïïe.
L a dame de Sainton est déboutée de sa demande.
Enfin, arrêt du conseil du 8 août 1 7 7 2 , qui déboute
le comte et la comtesse de Betout ( Jeanne-Gabrielle ),
de leur demande en cassation.: J
.
Dans 1’un- ek^dans l’autre 7 o o a
la déclaration
de la
malgré divers adminicules, n’a point été
re g a rd é e même comme un commencement de preuve.
Ici il y a un moyen de plus. L a déclaration de M ar
guerite Mercier a été faite en un temps où la loi l’in
terdisoit, même pour alimens; elle est donc nulle : et si
elle est nulle, quel effet peut-elle produire?
S e c o n d e
, 'V
‘
’r
'1
c o n d i t i o n
Précomptions."
:• - . .
’
.
••
i. '
,
' • .! ;J.’’
■ \x . <
A défaut de commencement de preuve par écrit,
Hélène Dubois a-t-elle au moins les présomptions en sa
faveur, argumenta? Mais ici, au contraire, toutes les
présomptions ne militent-elles pas contre elle ? '
A qui persuadera-t-on, si Hélène Dubois avoit été
effectivement la fille de Marguerite Mercier et de Jean
Pierre Carraud, qu’ils ne se fussent point empressés de
la reconnoître lors du mariage.
• '
Hélène Dubois expose elle-même, dans la consultation
im prim ée, que les deux fa m illes engagèrent Carraud
à se marier avec Marguerite M ercier j c’étoit donc
D
�( 26)
ru,
pour donner un état à l’enfant ; et il n’eil est point
question!
P ar le contrat de mariage, M arguerite Mercier donne
tous ses biens à son m a r i, en cas de survie : cette do
nation n’est* elle pas une preuve directe du contraire de
ce qu’on avance?
'
i , e mariage dure trente ans ; point d’enfans de ce
m ariage; et le père et la mère
, et paroissent ne s’accorder, qu’à ne pas reconnoitre celui provenu
avant le mariage , celui à qui la nature et la religion
leur faüsoient également un devoir d’assurer l’état.
Jean - Pierre Carraud meurt. Carraud d’U rb is e , son
frè re , répudie sa succession : sur cette répudiation, un
curateur est nommé à la succession vacante. L a veuve
poursuit contre ce curateur, et la liquidation de scs re
prises, et la vente du m obilier, et la vente judiciaire
des immeubles.
Elle n’avoit, diva-t-on, aucun intérêt à déclarer l’état
de sa fille : Jean-Pierre Carraud laissoit une succession
obérée. Mais n’y avoit-elle pas in térêt, au moins pour
la validité des poursuites et de la saisie réelle qu’elle
poursuivoit ?
Mais Carraud-d’Urbise meurt à son tour; voilà une
succession opulente, et elle continue à garder le silence.
Elle se détermine enfin à la reconnoitre. Après cette
rcconnoissance , il semble qu’elle auroit dû s’empresser
de la recevoir dans sa maison, de l’investir en quelque
sorte de son état : elle ne l’a vu e, ni avant, ni après.
Enfin, dans ses dernières dispositions elle l’oublie en
tièrement.
�.
(
2
7
^
.
Toutes les circonstances ne se réunissent-elles pas pour
démontrer que la déclaration dont on veut se faire
■un titre,, n’est que l’eifet de la surprise ; qu’elle n’est
rien moins qu’un hommage rendu par Marguerite M er
cier , à la vérité.
.
'
Hélène Dubois n’est donc pas dans le second cas de
la loi.
,‘
T a o - I S l È M B
ÇON.Dia-xoW.
»■
Possession d'état.
■
!
'
A-t-elle cette possession? Qu’est-ce que la possession
cl’état? .c’est le rapport des parens entr’e u x ; c’est le rap
port sous lequel l’enfant quitréclame a été considéré, ou
reçu dans la famille; lorqu’il a'co n n u un tel pour son .,
p è r e , une telle pour sa mèi*e , celui-ci pour son f r è r e ,
ceux-là pour ses cousins, et qu’il a été reconnu par eux.
Anciennem ent, dit C o c h in , et avant qu’on eût ima
giné la formation de registres publics, la possession étoit
la seule preuve de la naissance . C’était par cette pos
session , par cette dénomination réciproque de père, de
fils, de frère, de cousin, que'les hommes se connoissoient.
- ■
1
.Hélène Dubois peut - elle invoquer cette possession ?
A-t-elle jamais été connue dans. la; famille Carraud, pour
iille de.iJean-Pierre Carraud?
‘
L o in d’avoir la possession, elle a la possession con
traire.
*
Elle demande ¿1 prouver qu’elle est fille de Marguerite
Mercier, et de Jean*Pierue Carraud. E t dans la vente
‘
D *
'
•
"
�.
.
.
.
.
d u - i l im i 1 7 7 9 , dont' elle a cru pouvoir se'faire tin
moyen ; dans le contrat de mariage du lendemain, elle
s’est qualifiée du nom d’Hélène Dubois. Elle demanderoit donc à prouver contre ses propres titres , contre *
les titres qu’elle a produits, contre la possession, qu'elle
est C arraud , et non D ubois.
.
L e jurisconsulte, auteur de la consultation imprimée,
a voulu aller au-devant de cette objection.La réclamante,
dit-il, est qualifiée dans son contrat de mariage Hélène
D u b o is ; mais cette qualification ne peut faire preuve
d’une possession contraire ; on n’y a désigné ni le père
ni là mère. Ce nom d’ailleurs n'est point étranger à Jean
Pierre C arraud ; il a été pris dans sa famille m i m e ,
puisque c’est le vrai nom de la veuve Soubrany, qui
après la mort de Garraud-d'Urbise, s'est présentée pour
être "son héritière.
. Il faut convenir que c’est une singulière raison. L e
p è re'n ’est point désigné! Mais qu’est-ce donc que le nom
D u b ois ? c’est un nom de la famille de la veuve Sou
brany, parente des Carraud; et parce que c’est le nom d’un
parent, ou d’un parent des parens Carraud, il s’ensuit qu’il
faut l’attribuer à Carraud ! Ne suit-il pas au contraire que
le parent dont elle porte le nom est aussi le pere ?
V o ilà le mystère éclairci! L e père n’est point incer
tain. C ’est un Dubois ; et effectivement il existoit dans
ce temps, dans cette même commune de iliom , un D u
bois , olïicier.
Que devient maintenant la prétention d’Hélène D u~
bois ?
Dem ander j disoit Cochin ; dans la cause de la dame
�(C a # T
B'ruix^ii conquérir par là preuve par témoin un état
nouveau , non seulement^ sans possession , m ais lors
qu'on a un état.-et..une possession contraires ,■n est-ce
pas le comble de Vaveuglement^ . r i
viio-! ' ü
•
'v.. . iifi:■A)'i -■ 3 '
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■. >’ . Pertinence des faits.
'
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'
- Hélène D>’W s ^demande à prouver premièrement
qu’il esc notoire dans la commune de R i o m , quelle a tou
jours passé pour être née du commerce de J e a n -P ie rre
Carraud avec Marguerite M e rcie r, avant le mariage.
O n le demande.-Si le'fait ayoit été si n o toire, Jean
Louis Carraud se seroit -• il présenté après la m ort de son
frè re ,n o n pour accepter, mais pour répudier une succes
sion à.laquelle il n’auroit eu aucun droit? fa u t- il d’autre
preuve que ce fait si public étoit ignoré de la famille m êm e,
et des plus proches de la famille ?. auroit-on sur la répu
diation du frère , nomm é u n curateur à la succession va
cante? au ro it-o n poursuivi sur ce curateur la vente des
meubles et des immeubles ?
L e premier fait est dorïc démenti par écrit, par les
pièces de la procédure, par les jugemens existans au greffe.
Les autres faits sont insignifians.
Les bienfaits, les soins, les faits d’éducation et de libé
*
.
ralité, ce que les docteurs appellent tractatus eteducatio ,
ne sont pas seuls une preuve de filiation. Comme on peut
aim er, dit encore C o ch in , dans la même cause contre la
dame de Bruix ? comme on peut éle v e r, gratifier un en-
�c 3° y
. .
fa n t, sans lui avoir donné le jour , la preuve de ces faits
est entièrement mutile quand il s’agit de prouver la filia
tion. Ces faits, ajoute-t-il, ne sont importans que quand il
s’agit de prouver Tidentité.
Ici, il ne s’agit point de l’identité. L e citoyen Juge ne
contestera p as, si l’on v e u t , qu’ïïé lè n e Dubois ne soit la
m êm e que celle qui est née de Marguerite Mercier avant
le mariage ; mais il désavoue , il soutient du moins qu’il
n’est pas constant,que Jean-Pierre Carraud ait été le père;
c’est la filiation qu’il s’a g it'd ’établir ; et pour prouver la
filiation , les faits seuls d’éducation et de libéralité ne suf
fisent pas.
Menochius dans son traité, des présomptions exige trois
circonstances : la p rem ière, que. l ’enfant ait été élevé dans
la m a iso n , et qu’il ait été traité comme tel par les père et
m ère ; la seconde , que les--père et mère l’aient souvent
nommé et appelé leur fils; la troisième, que l’enfant ait
été connu et traité dans le public comme l’enfant des père
et mère qu'il s’attribue: Sic à pâtre habitum fu is s e - sic
ab eo sœpius nomination et appellation ,• sic ab omni
bus com m unij'am u et voce habitum et creditum.
Il faut que les bienfaits, le traitement ne puissent sc
rapporter qu’à la paternité , et non à un sentiment de
bienfaisance. N on pronedit , dit encore Menochius , con
jecturafdiallonis quœ co tracta tu eteducatione provenit ,
quando is iractatus servare points in causa/n pielalis
quant fdiationis , ut pote in eo q u i simpliciter alimenta
prœ stitil ,• est ratio quia alimenta, quœ in altéram c#11'
s<*m quant Jilialionis prœ slari potuerunt} non ojjvrunt
concUalanlcm probalioneni,
�( 3i )
' Que faut-il polir que les soins se réfèrènt à la paternité?
les auteurs encore üous l’apprennent. Il faut que l’enfant;
non seulement ait-été élevé , mais qu’il l’ait été propor
tionellement à l’état d’enfant légitime de celui qui l’a élevé.
S’il n’a été dans la maison qu’à titre de domesticité, on
n’en peut rien conclure pour la filiation.
Helene Dubois ne sait ni lire ni écrire j elle a t o u jo u r s
gardé les bestiaux
? eE n’a tout au plus été re
gardée qu*> comme domestique et fille de peine.
La loi du 12 b ru m a ire , si favorable aux enfans illégiti
mes, 11 a point dérogé a ces principes; elle les a au contraire
consacres : quand elle parle de soms donnés , elle ajoute x
à titre de paternité.
' Quels sont les faits articulés par Hélène Dubois ?
Articule-t-elle avoir été élevée dans la maison même'
de Carraud ?
A rtic u le -t-e lle que Carraud et Marguerite Mercier
l’aient jamais appelée leur fille ?
Articule-t-elle que les voisins l’aient jamais appelée du
nom de Carraud , et traitée comme là fille de Carraud ?
O n l’appeloitau contraire D ubois; elle-même ne s’est point
donnée d’autre nom ; elle expose elle-m êm e qu’elle n’a
connu son état que par la déclaration de la mère en l’an 2.
Elle a été élevée chez le m étayer; mais à quel titre?
comme les autres domestiques. Que suit-il de là ?
Carraud s’est entremis de son mariage! la vente de 1779
est une libéralité déguisée ! Quand tous ces faits seroient
vrais , en résulteroit-il une preuve de filiation? il en résulteroit au plus, une preuve de bienveillance.
Le quatrième fait, que Carraud a avoué ¿1 plusieurs
�•
_
ï 33 >
__
personnes qu’il étoit.Je père', est encore plus insignifiant.
Quoi ! .la déclaration écrite et judiciaire du p è r e , n’a pu
servir de preuve, ni de commencement de preuve ; et l’on
admettroit la preuve par témoins d’un aveu verbal !
L e p è re , dit-on, a avoué à tout le inonde qu’Hélène
Dubois étoit sa fille. Il vient lui-même à Reyvialle pour
régler les conditions du mariage. II donne la dot. Ce q u i ,
ajoute-t-on , f u t connu de toutes les personnes qu i s'en
tremirent du mariage. E t il ne paroît point au contrat
qui se passe le lendemain ! Marguerite M ercier auroit dû
également s y rendre ; et elle n’y vient point ! et après ,
comme ayant, ni le père ni la mère ne lui donnent aucun
signe quils la regardent comme leur fille !
A u inoinsauroit-il fallu construire une fable vraisemblable?
A u défaut de commencement de preuve par é c r it, au
défaut de présomptions, au défaut de la possession, se joint
rinsullisance des faits. En faudroit-.il davantage pour
faire rejeter la p re u ve, quand même Hélène Dubois seroit née pendant le mariage?
L ’auteur de la consultation cite l’arrêt de T ocqu elin , de
la demoiselle de Choiseul, de la demoiselle Ferrand; mais
Hélène Dubois se rencontre-t-elle dans la même espèce?
L a demoiselle Ferrand a été admise à la preuve; mais
elle avoit dans les registres de la paroisse de Saint-Sulpice ,
et dans le procès verbal fait le meme jour, à la requête du
président Ferrand son père,un e preuve légale, une preuve
d’ordonnance de sa naissance, et de l'accouchement de la
r
présidente F erra n d , soutenue p a rla reconnoissance prL’~
ci se du la présidente Ferrand. La demoiselle icrra n d étoit
née pendant lo mariage même ; la naissance étant établie
par
�( 33 )
>
par les preuves écrites les plus authentiques, la paternité
étoit également constante, d’après la maxime , yater est.
On pülit vérifier ces circonstances dans Cochin, qui rap
porte cet arrêt.
.
Dans celui de T o c q u e lin , l’acte de baptême contenoit
une énonciation démontrée fausse; 011 l’avoit baptisée sous
le non de L ouise D u fe u , de la paroisse de Saint-Dénis
d’A n jo u , et il étoit établi a » * i ï - y «volt Jamais eu d eL o u ise
D u feu dar>c cette Par° isse* L ’acte de baptême contenoit
don« la preuve d’un d élit, la preuve d’un dessein marqué
de cacher au public la naissance de l’enfant. L e père avoit
fait les premières démarches pour donner l’état à sa fille ;
enfin il y avoit des comrnencemens de preuves par écrit.
L a demoiselle de Choiseul joignoit à des commencetnens de preuves par écrit, non une simple déclaration de
l’accoucheur, qui auroitpu paroître avoir été donnée pour
le besoin de la cause, comme dans l’espèce de l’arrêt du
président de T o u lo u se, cité plus haut; mais le livre-journal
de l’accoucheur, mort huit ans avant la contestation ,*
journal où il écrivoit, jour par jour, les opérations de son
a r t , et où il rendoit compte, dans le plus grand détail,
de l’accouchement de la demoiselle de Choiseul. Ce journal
étoit une espèce de monument authentique de la naissance.
' Mais sans entrer dans les circonstances particulières de
ces arrêts, qu’ont-ils ordonné? L a preuve de la maternité.
Soit la demoiselle de Choiseul, soit la demoiselle T o c queiin , étant nées pendant le m ariage, il n’y avoit à
établir que le fait de la naissance; la loi désignoit, démoniroil le père.
fait
Le
de la naissance çst un fait extérieur , un
E
faitsen-
�C
34 )
'
p
sible, un fait du ressort des y e u x , dont les témoins peu
vent déposer avec certitude.
Mais Hélène Dubois est dans une espèce tout#autre.
Elle ne demande pas à prouver la maternité : nous avoue
rons,. si l’on v e u t, que la maternité est constante; la mère
est co nn u e, c’est Marguerite Mercier : mais Hélène Dubois
demande à prouver la 'paternité.
L a preuve du premier fait, peut être certaine, mais non
la preuve du second.
E t de là la différence extrême entre l’espèce où elle se
ren co n tre, et l’espèce des arrêts qu’elle invoque ; ce qui
seul écarteroit toutes les inductions qu’elle veut en tirer.
Lorsque l’enfant est né pendant le mariage, la loi dé
cid e, la loi prononce, que le mari est le père.
A l’égard des enfans nés hors le mariage, qui sont,
pour nous servir de l’expression de la l o i, vu/go concepti ,
la paternité est toujours flottante.
V in g t témoins déposeront du com m erce, de la liaison
d’une personne avec une autre 3 c’est une présom ption, et
non une preuve.
Des témoins déposeront de visu : ce n’est pas encore une
preuve certaine ; rien ne constate que la mère 71a pas eu
commerce nçec (Vautres.
Les témoignages ne peuvent opérer qu’une présomption..Ici i l y a une présomption plus forte; c’est celle fondée
sur la nature. On ne présumera jamais, si Jcan-Pierrc
Carraud avoit été le père, qu’il eût persisté trente ans, et
jusqu'au dernier m om ent, à ne pas reconnoîtrc l’enfant,
surtout n’ca ayant point d ’autres do son mariage.
Enfin [[ n'y a point, pour nous servir des expressions do
�C 35 )
>
.
d’Aguesseau, de rapport intime entre le fait de la naissance,
et le fait qu’on veut prouver, qu’un tel est l’auteur.
Dirart-on que la déclaration de la fille, et la preuve des
hantises et fréquentations, a toujours suffi, en pareil cas?
C ’est encore ici un abus, et une extension de principes.
Lorsqu’il ne s’est agi que des alimens de l’enfant, et les
bâtards dans l’ancien régime ne pouvoient prétendre autre
cliose , cette présomption suffisoitO n t r o u v e , B a s s e t , un arrêt par lequel plusieurs par
ticuliers , au nombre de quatre ou cinq, ayant connu une
jeune fille le même jour , furent condamnés solidairement
à se charger de l'enfant. L u i auroit-on donné cinq pères ?
L ’objet des magistrats, dit F o u rn el,d an s son traité de
la séduction , n’est pas de rencontrer nécessairement l’au
teur de la paternité naturelle ; mais seulement la possi
b ilité, pour assurer des alimens à l’enfant.
Mais pour prétendre à succéder, pour demander à dé- .
pouiller une famille déjà en possession des biens, il faut
outre chose que la possibilité; il faut la certitude. E s t
majoris momenti.
.
E t voilà pourquoi les nouvelles lois ayant admis les bâ
tards à succéder , ont supprimé les déclarations de pater
nité; et c’est ainsi qu’en saisissant toutes les conséquences
d’une lo i, on en admire la sagesse.
Ce n’est pas seulement dans la nouvelle loi qu’on trouve
cette distinction ; elle es t encore tracée dans les anciens usages.
L e mariage subséquent opère la légitimation. L ’ usage
étoit que lors de la célébration du mariage, on faisoit passer
les enfans sous le poêle. Cet usage ne subsiste plus ; mais
il eu résulte toujours la uçcessilé d’une recoonoissauce pu-
�.
( 3 5 ,
blique, authentique. La paternité est alors d’ une au tre
conséquence ; et il ne faut pas s'étonner si on exige alors
d’autres preuves.
Il ne reste qu’à répondre à un passage de P o th ie r, cité
par l’auteur de la consultation.
P o th ier rappelle l’usage de-faire passer les enfans sous
le poêle; il ajoute que cette cérémonie n'est pas néces
saire , lorsque les -parties contractantes les ont recon
nus pour leurs enfans , de quelque manière que ce so it,
soit avant , soit depuis le m ariage, et en un m ot , lorsque
les enfa n s peuvent, de quelque manière que ce so it, ju s
tifier leur état.
L ’auteur dit : Lorsque les parties contractantes les ont
reconnus. Il faut donc que l’un et l’autre les aient recon
nus. O r , i c i , Jean-Pierre Carraud a-t-il jamais reconnu?
L ’auteur ajoute : Lorsque ces enfans peuvent justifier
leur état, de quelque manière que ce soit. Cela veut dire
par écrit ou par témoins.
Il
résulte de là, si l'on v e u t , que la preuve testimo
niale n’est pas entièrement exclue; mais cela ne dit pas
qu’elle doive être admise indistinctement.
La prétention dH élène Dubois n’est donc que le fruit
d’une vaine imagination.
'
Les anciennes et les nouvelles lois concourent également
à la faire proscrire.
Par conseil, P A G E S - M E I M A C , anc. jurisc.
M I O C H E , avoué.
•A-R I O M , do l’imprimeric de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d’appel, — A n 10
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Juge, Nicolas. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Mioche
Subject
The topic of the resource
abandon d'enfant
fausse identité
captation d'héritage
possession d'état
Description
An account of the resource
Mémoire pour le citoyen Nicolas Juge, demandeur ; contre les héritiers de la dame Marguerite Dubois, épouse Soubrany, défendeurs ; et contre Hélène Dubois et Martin Valleix, son mari, aussi défendeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1752-Circa An 10
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0248
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
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Domaine public
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abandon d'enfant
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fausse identité
possession d'état
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47adc67ff277359d0e73dce0f09f1482
PDF Text
Text
M
É
M
O
P
O
I
U
R
R
P i e r r e B A R D , cultivateur , habitant
d ’A g n a t j
E
de l a com m une.
dem andeur et défendeur en tierce opposition } t
C
O
N
T
R
E
S A B Y , fils a Pierre y défendeur,
Et C a t h e r i n e S A B Y y et J e a n M A G A U D
J
e a n
,
■ tous cultivateurs, habitans du lieu de B a listr o u x , com
mune de C h am pagnat , demandeurs en tierce opposition ,
.A .P R È S qu’une affaire, volumîneusement instruite, a eu reçu sa décision!
par un ju g e m e n t souverain et en dernier ressort ; après que l ’on a eu
é p u isé , dans le cours de l ’instruction, tous les moyens qu'un esprit
in g é n ie u x peut imaginer pour se maintenir dans un bien qui né lu i
appartient p a s, et au moment où une preuve était sur le point d’être
o r d o n n é e , où une expérience par expert devenait indispensable, où Bard
q u i r éclamait l'un et l ’autre depuis plus de trois an s, pressait, sollicitait
une audience pour les faire ordonner, de nouveaux athlètes se sont
présentés sur la scène t ils viennent proposer à la justice de prononcer
une seconde fois sur les questions que le premier adversaire de Bard
avait mis au jo u r, et de changer à leur égard un mode de partage qui a
é té ordonné contre leurs frère et beau-frère; ils font même p lu s, il a
poussent leurs prétentions jusqu’à soutenir que Bard n ’a aucun droit
contre eux. Seront-ils plus heureux que celui qui a déjà succombé
dans tous les in c id c n s qu’il a élevés ? c’est ce qu’on ne croit pas.
Jean S a b y , fils de Pierre , qui en suivant le genre de défense em ployé
par c e lu i-c i, a toujours soutenu que Pierre Saby et A ntoinette Lachaud
n ’avaient laisses aucuns biens m eubles, et qu’à l’égard des immeuble»
A
'
�il n ’en connaissait que quatre , même que deux qui leur eussent appar
tenus et qui fussent sujet?, au partage ordonné par le jugement rendu
contre son p è re , qui a toujours persisté dans ce système malgré la
justification qui lui a été faite de plus de quarante titres d'acquisition,
toup translatifs de propriété en faveuif de P ie rre . S a b y , ' de la succession
duquel il s’agit, persisterart-il toujours dans sa prétention ï E t aujourd’hui
que des témoins ont été entendus , que l ’application de tous les titres
produis par Bard a été faite, ne rçconnaîtra-t-il pas que c’est injustement
qu’il a toujours prétendu qu’il n ’y avait que ' quatre , même que deux
héritages sujets au partage ! O ji croit bien qu’il ne s’avouera pas vaincu,
mais oii a laicertitude que la justice lui en fera un devoir , et qu’elle le
forcera à reconnaître cjue celui qui retient injustement le bien d ’autrui
est) tôt ou tard, oblige de cesser d’en jouir.
■
F A I T S
E T
P R O C É D U R E
.
D u mariage d’André Saby avec Jeanne V id a l, issurent qua^e enfans ^
Catherine, A ntoinette, Marguerite et Pierre Saby.
Antoinette et Marguerite furent légitimées ; ni elles., ni leurs descen
dons , ne sont pour rien dans la contestation.
. . . . . .
Catherine Saby fut mariée deux fois ; en premier lie u , avec. Antoine
Saby., et en second lieu , avec Antoine Bruliat, et lors de ses deux contrats
de mariage, des 8 novembre i G74 et 2o aoiit 16 8 7 , ellg fut instituée
héritière , par son père , de tous les biens dont il mourrait saisi et vêtu ,
à la charge de payer à ses frère et sœurs des légitimes qui furent fixées.
Marguerite Bruliat, fille et héritière d’A ntoine et de Catherine Saby;,
se maria avec Jean Ma,gau,d , çt de ce mariage issurent deux enfans,
Antoine, et Gabrielle Magaud.
•
; L e premier se maria avec Catherine S a b y , fille de N o ë l, et Gabrielle
¿ppusli Pierre Saby, fils de ce dernier : c’est ce qui est prouvé par un seul
Contrat de mariage du 25 janvier 1744.
Antoine Magaud a laissé deux enfans, A nne et Marie ; la première a
¿pousé Jean D ègeorge, la seçonde François Mestrc ; et lui-même étant
décédé , Catherine Saby, sa vçuve, a cçmvolé en secondes noces avec.
Jean Magaud; ces deux derniers sont les tiers opposans.
Pierre Saby, fils d’André, et frère de Calheriiïc Saby , se maria avec'
Antoinetti; Lachaud , et lors de son contrat de mariage, qui est du 16
février 1G94, il s’associa avec Antoinç Bruliat, son beau-frère, en tous
et un chacun leurs biens , meubles et immeubles pn'scns et à venir,
avec convention qu’en cas de dissolution de leur société. , tous leurs lien s
seraient partagés entre eux par égalité.
Cet Antoine Bruliat survçquit plusieurs années à celle société, et
pendant tout ce temps les associés firent des profits assez considérables;
nuis étant décédé , Catherine Saby, sa veuve, héritière instituée dTYndré,
�.
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.
.
■Sâby , 'ttùT né 'p as pouvoir ïnfêiïx faire quê de s'aresôcië? éllë-Jrhêmfe' avec
l'ie ïre Soby y feon frère, et pdir acte public ctu 3 jà’n viër 1706-; ils 'ihirêrlt
ën communaut é ünivérseile tous- leurs biens meublés et immeubles 'préSëns
gt à ven ir, uveb éó'nvèfitìóti expieés'e 'Çà’éri cas de partage, ’tous làùi^s '
biens acquêts et conquets seraient partagés par moitié et égale, portion. \
- Suivons' l â ’géiVéaldgië de "Pierre7 Saby et d’Antôiiiette L àch'àud;' ils
üohAère’n t le jour à trois erifans nótìiift'és Nô'ël , André è't Catherine Sâbÿ.
L ors dû contrat dò mariage de celle-ci avec Etienne RôuX', du; 8 jànviéV
^7 19» elle fut constituée par son p è re , à’ ùnë s'onimè de trois cénts
fran cs, ét N o ci Saby qui n’éiait point partie contractante, fu t institué
héritier général ut universel- die fottà’ les biens doni sôxl pèrè mbürrâït
saisi
• Q uelque 'temps après , et'l'é 1 " . février 172 5 , N o ë l Saby pïssà son
tontrat de màriaigè' avec Marie Curabet, et Pierre Saby , son père ,, y
paraissant, a}>pràüva ét ratifia l’institution d’héritier qu’il avait f^'ae Cji
sa fa v e u r , dans le contrat dé mariage dé Catherine Sabir ¿t de Pierre
■Houft, et consentit qu’elle sortit son p lein et entier effet. . ■
- André Saby së iriaria avec Marie Héritier ^
lors de , leur contrat
de mariage, du a'i février 17 3ÿ , _i l . ^ _CQ’TisfUûa lui-même ïrne' somme
ûe trois-cerit cinquante francs qu’il àVait par devers lui," et N o ël' § a b y .
son frère s’obligea de lui payer celle de deux cents francs pour ses droits
légitimaires dans lés biens'de ses pèrè ét mère.
1
• D e ce mariage issut Antoinette Saby, mère" du demandeur » laquelle sé
'maria avec André Bard.
.
.
, . .
- O n voit dans leur contrat de m ariage,, du^ 2 i. septembre 1749 ,. que
Marié H éritier, y prit e n ’ présence de toute sa fam ille, et notamment de
N o ë l Saby, son bèaü-frère, la' qualité de veuve d’André S a b y ç é .q u l
était un preuve cjiie celu i-ci, qui s’était absente depuis plusieurs années,
¿tait alors décédé ou qu’au moins toute la famille le croyait ainsi.
, .\'r
■ N oël Saby eut de son mariage, avec Marie C urabet, deux ,e n fa n s>
Catherine et P ierre, qui comme 011 l ’a déjà dit en parlant d e là <;lpscenr
darice de Catherine Saby, épousèrent Antoine et Guillaume Magaud. , , '
L eur contrat’de mariage du 2 4 janvier' 17 4 4 , prouve, que les quatre
parties contractantes furënt instituées héritières générales et .universelles
de tous les biéns dont leurs père et mère mourraient saisis et, vêtus.
E nfin, Piérre Saby, second du nom, a laissé _plusieurs enfans, mais
Jean Saby , son fils aîné et son héritier institué, est en possession de tous
ses biens, et lui seul est défendeûr dans la c a u s e ..............
.
1
‘ L e 20 rniars 178 6, Pierre Bard , forma contre Pierre Saby fils de
N o ël , la demande en partage dé tous les biens meubles, et immeubles
provenus de Pierre Saby et d’Antoinette Lachaud , demande qui fut ad
jugée par sentence rendue en la ci-devant justice de la Motte , le 10'
juillet ‘ suivant;
'
A 2
�Cette sentence Rit attaquée par la voie de l'opposition presque aussi-«'
tôt qu’elle fut signifiée ; l ’affaire fut ensuite appointée en droit ; mais
par une autre sentence du 6 avril 1787 , Pierre Saby fut débouté de son
opposition, et il fut ordonné que la première sentence serait exécutée'
suivant sa forme et teneur.
C e dernier se pourvut bientôt après par appel contre ces deux sen
tences. L a sénéchaussée d’Auvergne connut de cet appel , et le 11 dé»
cembre de Ja même année , elle confirma ces deux sentences.
Il restait encore une autre dégré de juridiction à suivre : Pierre
Saby ne manqua pas d’y avoir recours , et par exploit du 28 du même
mois de décembre 1787 , l ’affaire fut portée au ci-devant Parlement de
Paris.
L ’état de détresse de Bard ne lui permit pas de poursuivre l ’arrêt
qui devait mettre fin à toutes les chicanes de Saby ; il était dans l'im
puissance absolue de • pouvoir fournir aux dépenses que nécessitait ce
procès , niais heureusement pour lui les choses ayant changées de face ,
de nouveaux tribunaux ayant été substitués aux anciens ; la justice ayant
été rapprochée des justiciables , l ’affaire fut portée, du consentement ex
près des parties , au ci-devant tribunal du district de Brioude.
,
L à , des volumes d’écritures furent faits de part et d’autre ; l à , Pierre
Saby eut recours à tous les moyens qu’un esprit ingénieux peut ima
giner pour combattre des réclamations justes , et parmi toutes les dif
ficultés qu’il éleva , on remarque qu’il donna lieu .à traiter trois ques
tions principales qui étaient de savoir , i.° si l ’institution d'héritier
faite dans le contrat de mariage de Catherine Saby., en faveur de N oël
Saby son frère non contractant , du 8 janvier 17J9, était valable , ou au
moins si elle n'avait pas été validée par la ratification portée dans son
propre contrat de mariage de 1725 ; 2.° si un absent n ’est pas réputé
vivre cent ans respectivement à ses héritiers ; 3 .° si en Auvergne lesr
enfans des cultivateurs , travaillant hors la maison paternelle , peu
vent faire des profits qui leurs soient propres , ek si la somme de trois
cent cinquante francs qu'André Saby s’était constituée en dot dans son
contrat de mariage de 1787 , n’était pas sujette à rapport !
Ces trois questions furent jugées contre la (prétention de Pierre S a b y ,
par jugement souverain et en dernier ressort du 3o août 1792 , qui en
confirmant toutes les sentences sus-datées , ordonna que tous les biens
provenus de Pierre Saby et d’Antoinette Lachaud seraient partagés par
égalité entre Pierre Saby et Pierre liard.
Celui-ci provoqua alors une nominaUon d’experts; Saby déclara qu’il youlait se pourvoir en cassation contre ce jugement , qu'au surplus il n»
■connaissait que quatre parties de terrein sujettes au partage , et q u ’il
consentait , sans préjudice de scs droits , que le partage en fut lait.
C ’est ce q u e l’on voit dans un procès-verbal du 2o octobre
�D es experts furent nômmcs , mais gagnés sans cloute par Saby , i l s
furent sourds à toutes les assignations qui leur furent données pour
opérer. U n premier jugement du 3o septembre 1793 , révoqua l ’expert
de Saby et en nomma un autre pour lui.
■
; Celui-ci fut également sourd à toutes; les diligences que put faire
Bard , et un nouveau jugement du 2 i messidor an I I , porte que tous
les premiers experts ont été valablement récusés par Bard, et que les
nouveaux qui seront nommés par les parties , seront tenus d’opérer
dans le mois.
_ Ces nouveaux experts nommés contradictoirem ent, tardèrent assez
long-temps à s’occuper des opérations qui leur étaient confiées, car ce ne
fu t que le 6 Messidor an I I I , qu’ils se transportèrent au lieu de.
Balistrour,
.
t
. ^ à , ils trouvèrent Pierre Saby, qui ne se rappelant plus de ce que la
mauvaise foi lui avait dicté lors du procès-verbal du 2o octobre 179 2 ,’
déclara qu’il n’y avait cjue deux héritages sujets au partage ; il eut même
la bonté de les leur designer, et comme de cette désignation il résulte
q u ’il n ’y a qu’un de ces deux héritages qui puisse s’identifier avec un
des quatre qu’il avait indiqué lors du procès-yerbal de 17 9 2 , il en.
résulte, qu’il y aurait au moins, cinq héritages sujets au partage.
C e s experts dressèrent procès-verbal des dires respesctifs des parties;
ils eurent même la complaisance d’y insérer des dires qui furent fait*'
par Jean M agaud, mari de Catherine Saby , et ils terminèrent par
renvoyer les parties -devant qui de droit pour faire fixer les bien*
sujets au partage.
Obligé de plaider encore avec Saby, >Bard le fit assigner au tribunal
civil du Puy,_et après que l ’affaire eut été reprise contre Jean Saby, son
fils., il intervint en ce tribunal un jugem ent, le G fructidor an V , par
lequel il fut juge en these que celui qui reclame un partage, doit
designer nommement les biens meubles et immeubles qui peuvent y être
sujets, et que celui contre qui la demande est formée n’était obligé à rien ,
quoiqu il eut toujours . demeure dans la maison des auteurs communs ,
quoiqu il fut présume nanti de tous les titres constitutifs des propriétés
des auteurs communs, quoiqu’il dut avoir par devers lui ou qu’au moins
il lui fut facile de se procurer les titre» des acquisitions qu'il pouvait
avoir faites
' ,
Quelque rigoureux que fut ce jugement contre Bard , il ne lui
restait aucun moyen pour revenir contre ; il ¿lait en dernier ressort
quoiqu’il ne dut pas l'&t;re, et son état de détresse ne lu i permettait
pas d’avoir recours à la cassation.
.Par un premier exploit, du 21 brumaire an V I , Bard motiva et
circonssUmcia la preuye . qu’il voulait faire de la consistance des bien*
meubles et irmneublcs provenus de__ Pierre Saby et d'Antoine lie Lachaud
�X
v
j
e î le i 3 fructidor suivant, son défenseur apréë aVoir diffé ;é fVTS'qifeslà,
de présenter sa cause , obtint contre Saby un jugement par défaut, q u i,
au iteu d’ordonner la-preuve qui était réclarhée, et à laquelle Bard s’Ctâit
soumis , lui permit de compulser les minutes de quelques notaires. • J
D o cile aux ordres que lu i donnai son ■
défenseur, Bard éru-t Entrevoir
dans ce jugement un .m oyénpour parvenir ty'lus facilem ent à un jugemCiit
définitif ; il ne fit pas attention que sa preuve vocale dépérissait, et qü’à
chaque jour il perdait quelqu’un de ses tém oins; il se livra à la recherché
de plusieurs actes; il parvint à en découvrir quarante, qui tous'Constatent
différentes acquisitions faites par André 8aby , ou par pierre i?aby,
*011 fils, ou par A ntoine Bruhat et Catherine Saby, associés de ce dernier.
Tous ces actes furent; signifiés à' Jeàil Saby , avec nouvelle assigna
tion , pour voir ordonner la preuve à laquelle Bard s’était soumis ^dirô
que de nouveaux experts feraient l ’application de tous ces titres , et
être condamné à payer une -provision de six mille francs.
Comm e si 8on defenseur eut été fêché de le voir admettre à cette
preuve , il se borna, à. réclamer une provision , et par jugement du 4
fructidor an VII , rendu encore par défaut contre Jean Saby , il fut ac
corde à Bard une modique somme de trois centfe francs : on dit medi*
que , parce, quîelle n e lui’ a pas suffit , n i à ‘ beaucoup jbrès , poufc
faire face aux dépenses que lui a occasionné la recherche des actes
q u ’il s’est procuré.
:
. ■
Cette provision parut cependant trop considérable à Jean 8abyV
il forma opposition.à.ce jugement ; et par un autre du 6 germinal an V I I I ,
il parvint à faire réduire cette provision à la somme de deux cents- francs*
C ’est dans ce jugement que l’on v o it jusqu’à quel point le défen
seur de Bard a compromis ses intérêts ; non seulement il ne fit
pas; ordonner la preuve à laquelle Bard
s’etaib soumis depuis le 2 i
brumaire an V f ; non seulement il ne dit pas: un mot) pour l ’obtenir;
non seulement il n’argumenta pas des quarante titres de propriété que
Bard lui avait remis pour soutenir que la provision accordée n'appro
chait môme pas do celle qui aurait dû; l ’étro , mais même il negli*
gea de faire prononcer sur des conclusions qui avaient été prises par
exploit du y brumaire an VIII , et qui avaient pour objet de faire déclaJ
rer Jean M agaud, Catherine Saby sa. femme , Krançois Mcstre e t ’ Marid
Magaud sa fem m e,non recevables dans l’opposition qu’ils avaient formée ait
jugement rendu contre Jean Saby , attendu q u e c e jugement n ’était point
rendu contre eu*; q u ’ils n’avaient jamais été en instance avec B ard; et que
dès lors leur opposition était insoutenable, ( i)
Q uoiqu'il en soit; l'affaire a été portée au tribtinal de Brioude ; Bard
( 0 Ce détail po u r ra p a r a î t r e f a s t i d i e u x , m n i i il a p a r u e s se n tie l p o u r i l c i n û n t r i r , d ' u n e p a r t j
t o u s les inciilcn^ (juc l 'a d v e r s a i re de Bard lui a fa it é p r o u v e r , e t «le l 'a u t r e j u s q u ’à qu el p o i n t
« et d r o its o n t etc c o m p r o m i t p r r lo-son fian cc
a en en so n 'd cfc iiscu r.
�• / ,
- 7r 1 a insisté pour, être admis à la preuve de la consistance du mobilier *
,
provenu dè Pierre Saby et d’Antoinette Lachaud , des titres de créance
qui existaient et qui faisaient partie de leur su ccessio n , et à ce que
lés conclusions qu’il avait prises depuis l ’an V I , lui fassent adjugées.
^D ’üÀ àutre côté et par
exploit du i . er nivôse an I X , Bard après
avoir épuisé les voies de la conciliation , avait fait assigner Catherine
Saby et Jean MâgaudJ son m a r i A n n e Magaud et Jean D egeorge
son m a ri, Marie Magaud et français Mestre son m ari, pour voir
déclarer exécutoire" contre eux les sentences et jugemens rendus contre
Pierre Saby, tout ainsi et de même qu’ils l’étaient contre ce dernier.
C e ' n’a 'été qu’alors et .par exploit du 11 du même m o is, que
CatherineSabÿ/et Jean,Magaud son mari, seulement, ont attaqué p arla voie
d£ la tierce opposition ces mêmes sentences et jugem ent, pour d’une part
empêcher’ ' l'admission à la preuve à laquelle Bard s’était soumis contre
Jean Saby n et de l ’autre pour reproduire et faire juger de nouveau
toutes les questions que-Pierre Saby avait mis au jour dans le cours de
la constestation,
' Jean Saby, fils de ce d ern ier, invoquant cette tierce opposition , s’est
opposé1 -de toutes ses forces à la preuve offerte et réclamée par Bard r
mais tous ses efforts ont été vains ; son espoir à été déçu et il a vu
adjuger contre lui , par un jugement très - contradictoire du 2 i nivôse ,
an I X , toutes les conclusions qui avaient été prises.
'
Des témoins, ont été produits de part et d’au tre, ils ont été enten
des,,; des experts ont été . nommas, ils ont opéré; des- expéditions
authentiques prouvent l ’un et l ’autre.
T e l est l ’état actuel de l ’affaire. Après en avoir présenté les fa its;
après avoir remis sous lt s yeux d e - la justice une partie des incidens
que Bard a éprouvé depuis l ’époque de sa demande , il est facile de v o ir:
qu’il doit aujourd’hui repousser la tierce opposition formée par Cathe
rine Saby et- Jean Magaud ; démontrer en même temps que ses pré
tentions , sont justes et légitimes ; et prouver que des dépositions des
témoins, du rapport, des experts et des titres produits, il en résulté te
preuve la plus convaincante , en sa faveur.r
V É R I T É S
I N<C 0 N T E S T A B L E S.
L e s biens qui doivent composer la succession de Pierre Saby sont
la moitié de ceux qu’il avait lui-mêine acquis , de ceux acquis par
A.ntoine Bruhat et par Catherine S a b y, et enfin la moitié de tous
les biens provenus d’André Saby et de'Jeanne V id a l, ses père et mère.
C e la résulte positivement des actçs de sociétés générales faites en-'
lie l u i , 'Antoine Bruhat et Catherine Saby, les iG février if,q/. et
3 janvier 1706 , par lesquelles ils mirent en commun tous Leurs biens
�§-
•
•
' - (
5
ptésens et à venir avec convention expresse qu'en cas de dissolution
'> ç de so ciété, ils seraient tous partagés par égale portion.
Dans tous ceà biens , Pierre Bard amende un quart avec restitu' £ tion de jouissance ei intérêts dp la valeur du mobilier depuis 1788,.
"i? > époque, du décès de Pierre Saby premier du nom.
v.
C'est ce qui résulte du jugement souverain et en dernier ressort du
a °Û t
17 i)2 *
1
■
'
;
II est vrai que ce jugement est attaqué par la voie de la tierce
^ opposition de la part de Catherine Saby et de. Jean M agaud, mai»
^ les droits de Bard sont irrévocablement acquis contre Jean Saby
ÎC Î"G.finent dont on vient de parler. L a tierce opposition de
Catherine Saby et Jean Magaud ne peut rien changer à son égard ,
^ •quoiqu’on soit le résultat; parce que dans taua les cas , le jugement
^ Jv^rçndu doit toujours, être exécuté contre luî. ^
C ’est ce qui résulte des principes les plus certains, les plus i'nscon-.
~ ïstestables sur la matière des tierces oppositions; principes consacrés
T^l^d’une manière bien solennelle par deux jugemens rendüs au tribunal
V* fc de cassation les 26 germinal an V I et i 5 pluviôse an I X 'r a p p o r t é s—
d&ns le bu'Ilêtin des'jâ^omens de ce tribunal Is10. 2.~
, R s P a s s o n s ~ 'â c tu e lie m e n t à la discussion des questions Teproduites p a rle s
tiers opposans.
.
*'J
^ £
^
-
P R E M I È R E
De
quel jour un
.
Q U E S T I O N .
absent est-il réputé mort respectivement à ses
.
héritiers ?
I ».
Il n’y a rien de problématique , rien qui mérite une discussion séY ^ rieuse dans cette question. Presque tous les jurisconsultes anciens et mo
dernes assurent qu’un absent est réputé mort respectivement à ses
.> héritiers , du jour de son départ ou de celui des dernières nouvel„^
les qu’on a eues de lui. Il n ’y a qu’une envie de plaider , une intenJs ^ tion de se maintenir injustement dans un bien, qui. puissent aujourd'hui
faire soutenir le contraire.
.^ 5 Cette doctrine est consacrée d’un manière bien précise dans les arrê^ *h lés de M. le président de Lam oignon, où l’on lit : L ’absent est répu
té mort du jour qu'il n’a pas paru ou de la dernière nouvelle qu'on
~
a reçue de lui.
/v
Cette décision, dit un auteur plus moderne ( Bretonnîer page i 5 du
$ ' premier volume ) , est dans les règles , parce que l ’absent dont on n’a
point de nouvelles , est réputé mort par fiction, et que les fictions ont
$ tou jou rs un elfct rétroactif.
^
E n vain objecterait-on qu'un absentes! présumé vivre 100 ans, et que rc&ç pectivement à scs créanciers il n ’est réputé moi t qu’après cet espace de
temps, qu’ainsi il doit eu étie de même relativement à scs héritiers.
h*
�'
■ C- 9 . )
L a première partie de cette objection, est fausse et absurde, la
f seconde ne rcyjose que sur U n e erréur.
Toute présomption doit être fondée sur quelque vraisemblance èt
sur ce qui arrive le plus souvent, l ’ rœsumptio ex co quod plerumque
:f:t. 11 faudrait pour qu’un absent put être présumé vivre cent ans,
que ce fut le temps ordinaire de la vie des hommes ; et certes , l'ex
périence prouve bien le contraire.
•
L es lois 5 G, au d igeste, D e usuf. et qvemad. , et 8 D e usuf. leg; ,
invoquées par Saby et Magaud ne disent pas qu’un homme est présumé
vivre cent ans , mais seulement qu’il est présumé ne pas vivre au delà
de cent a n s, ce qui est bien d ifféren t, Placuit centinn annos tuendos esse
municipes , quia is finis vit.ee longuœvi hominis est. Jusqu’à ce que le temps
, de cent ans se soit écoulé depuis la naissance d’un absen t, il n’est ni
présumé vivre , ni présumé m oi.t, et c’est à ceux qui ont intérêt qu’il
soit vivant, à prouver sa vie. Pothier > sur le ckap. ly de la coutume
d ’Orléans.
.
, C et auteur , ni Brétonnier , dont nous avons déjà rapporté les propres
expressions , ne disent pas ce que Magaud et sa femme leur font d ir e ,
ou plutôt ils disent tout le contraire.
Voici les propres expressions de Polluer , traité des successions,
cliap. 3 . sect. i . ere §. i .er i « c’est une question difficile à décider, de
» quand doit être présumée ouverte la succession d’une personne dont
» on ne sait ni la vie , ni la mort. L ’opinion la plus probable est de
» réputer sa succession ouverte du jour des dernières nouvelles qu'on a
» eues de lui ; ce n ’est pas qu’il y ait lieu de le présumer mort dès
» ce temps plutôt que dans un autre , mais c’est que n’y ayant aucune
» raison d’assigner sa mort à un temps plutôt qu’à un autre, et étant
» néanmoins nécessaire de fixer le temps de l’ouverture de sa succes» sion , on n e peut mieux le fixer qu’au temps où on a cessé d’avoir
» des nouvelles de lu i; parce que s’il n ’est pas effectivement mort
^ dès ce temps , il 1 est au moins cquipollem ent par rapport à la
société des hommes ; car par rapport à la société , c’est à peu prè.»
» la même chose qu’un homme n ’existe pas , ou qu’on n ’ait aucune
» connaissance de son existence. »
, Q ue Magaud et sa femme qui ont cru en imposer en citant l'o p i
nion de ce jurisconsulte , pèsent actuellement ses expressions qu’ils n ’a
vaient sans doute pas lues ; qu’ils conviennent que c’est sans réflexion
qu’ils l’ont invoqué , et qu’il en est de même à l ’égard de Brétonnier
et Rousseau - de - Lacombe.
Celui qui s’est perdu , dit ce dernier , est réputé mort du jour qu’il
a disparu ; c’est la règle en succession. Même dans tous les cas si ceux
qui ont intérêt ne justifient que l ’absent est vivant.
S ’il est vrai que quelques arrêts puissent être invoqués à l ’appui de
B
�(
10
)'
'
la seconde partie de l ’objection , il est aussi certain qu’il y en a de
contraires , et que l ’arrêt de T iellem ent qui a été tant invoqué par Saby,
perd de son autorité quand on le rapproche de celui i 683 , rapporté
par H e n ri, tom. 2. page 890; de celui du 11 août 1 7 1 9 , rapporté au
journal des audiences ; et que cet arrêt de Tiellem ent q u i, comme le
dit P o th ier, n'est fon d é apparemment que sur cette vieille erreur , qu’un
homme est présumé vivre cent ans , ne doit pas être suivi.
T ous les anciens tribunaux paraissaient avoir embrassé cette opinion.
Ils l ’avaient consacrée par différents airèts. O n en trouve la preuve dans
les questions de droit de Brétonnier , où il est d it , qu’on ne doit pas
douter que cette jurisprudence n& soit la meilleure.
Monvallon dans son traité des successions , après avoir embrassé cette
même opinion, en rapporte à l ’appui un arrêt rendu à son rapport, le
: 21 mai 1 7 5 1 , par lequel il fut jugé que l ’hoirie de l!absent avait du
appartenir au parent le plus proche lors de l ’absence ou de la dernière
nouvelle , et avait passé aux héritiers de ce parent. A in si il ne peut pas
y avoir de doute sur la vérité du système que l’on soutient.
Mai3 pourquoi invoquer des autorités à l ’appui d’une opinion qui paraît
incontestable ? l\e suffirait-il pas , si elle pouvait être combattue avec
su ccès, de s’appuyer sur un fait particulier qui se rencontre dans l’a ffa ire ,
pour démontrer que quelques efforts que fassent les adversaires de Bard,
pour soutenir un système contraire, ils ne pourront jamais parvenir à
le faire adopter ] N e suffirait-il pas de dire que Marie Héritier ayant
pris "dans le contrat de mariage de Catherine S a b y , sa fille , du 2t
septembre 1749 , la qualité de veuve d'André Saby , en présence de
toute sa fam ille , et notamment de N oël Sa b y, père et beau-père des tiers
opposans ; qu’ayant repris cette même qualité de veuve d ’André Saby,
dans une quittance donnée au même Noël Saby', le 11 novembre de la
même année, les nouveaux adversaires de Bard qui représentent ce
N oël S a b y, a titre d ’héritiers universels, ne peuvent pas désavouer,
contester ce qui a été reconnu par lui en 1749? C e seul fa it, celte seule
circonstance, ne seraient-ils pas sulfisans pour persuader qu’au moin*
en 1 74 i).i André Saby était décédé; que toute la famille en était convain
cue , et par conséquent pour faire rejeter, proscrire tous les efforts, tous
les raisonnemens que pourraient faire Magarnl et sa femme.
Term inons celte discussion, et disons que dès qu’il est établi en point
de droit qu’un absent est réputé mort du jour de son départ ou des
dernières nouvelles qu’on a eues de lui ; dès que le fait particulier qui se
rencontre dans la ca u se, et qui résulte du runtrat.de mariage et do la
■quittance de 1741) , dans lesquels Marie 1lérilier p rit la qualité de veuve
d ’Andrc. Saby, vient d’ailleurs à l ’appui de celle vérité; dès qu’il (;5t
-ptouv«-' dan? lc procès que l ’action de Bard était'en tière en 17 8 6 , paf
�lc jn o y e n des minorités qui se sont perpétuées clar*s sa famille, ( i ) ; il en
risriiiLe' que c’est sans fondement qne ses adversaires ont donné lieu à
celte discussion.
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
Une institution d'hcr Hier fa ite dans un contrat de mariage, en faveur ,
d’un non-coîitractant, est-elle valable /
Cette question est décidée par le texte précis de la loi- m unicipale
ne permet
les institutions d ’héritier qu’en faveur des mariés ou de leurs descendans
seulement; elles ne peuvent jamais ê tre,fa ites en faveur de ceux qui
ne contractent pas mariage ; ain si, un père qui marie un de ses c n fa n S '
et l ’institue son héritier avec un autre qui ne se marie p a s, fait un acte-'
inutile et nul à l ’égard de celui - ci , s’il ne charge le premier de
l'associer à l’effet de l’institution] parce que disent les jurisconsultes, l&
premier ca r a c tè r e d’une institution d'héritier, est qu’elle soit fa ite en.
faveur des mariés ou de leurs descendans : c’est d’ailleurs ce qui résulte
des dispositions de l’art. 26 du tit. 14 de cette coutume.
Cette nullité dont était infectée l ’institution d’héritier faite par Pierre
Saby , en faveur de N o el Saby , son fils , dans le contrat de mariage de Ca
therine Saby avec Étienne Ilo u x, du 8 janvier 1719 , était une nullité abso
lue qui ne pouvait jamais être mise à couvert que par une nouvelle dispo
sition qui eut tous les caractères distincts et nécessaires pour transmettre
la propriété d’un bien ; elle n ’attribuait par elle-même aucuns droits à
N o e l Saby; il n’était saisi de rien par cette disposition; elle était abso
lument nulle à son égard; elle ne pouvait jamais être validée, quod
nullum est nullo modo convalescere potest.
Mais disent les adversaires de B a rd , en supposant que cette institu
tion d’héritier fut n u lle , cette nullité a été couverte par la ratification
faite par Pierre Saby, en faveur de N o ël Saby , lors de son contrat de
mariage, du 1." février 172&: cette objection nous porte à examiner la
question suivante.
qui ré "it les parties. L a coutume de la ci-devant Auvergne
T R O I S I È M E
Q U E S T I O N
Une ratification pure et simple d'une disposition nulle dans son principe y
d ’une nullité absolue, peut-elle produira quelque effet ! A
« L a nature de la ratification n ’est pas d’introduire un droit nouveau ‘
C O P i e r r e S a b y , de e/y a», es t décédé le î i o c to b r e 173S» cil c a l c u l a n t d e p u i s c e tte é p o q u e u u o u ' u .
c i s e p t e m b re 17^9 , d ate du c o n t r a t de m a r i a g e d’A n t o i n n c t t e S a b y av ec A n d r é B a rd , 011 n e t r o u v e nnio n z e a n s m o in s un m o is ; a u m o i n s a e s tte é p o q u e , 1e co u rs de la p r e s c r i p t i o n a été s u s p e n d u e h w i n
«S j a n v i e r 1781 i car A n t o i n e t t e i a b v , n w le s S f é v r i e r i 7 m , « t a i t e n c o r e m i n e u r e à l 'é p o q u e de “ o a
•lé c è s, a r riv é le 9 octflhre 1760 , et P ie r re B a rd s o n f i l s , ne le « j a n v i e r 17^ , n 'a été n r l i u r a u c le
i ç ja n v i e r 1781 ; a insi à 1 é p o q u e de la d e m a n d e d u 20 m a r i 1 7 *6 , 1 a c t i o n é t a i t e n t i è r e - a in s i le m o v e a
de p r e s c r i p t i o n d i s p a r a î t sa n s i c t o u ï . .
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ju y /o-
ohut'
H' 1
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12
)
'dit un auteur moderne ; de donner un nouveau titre , de faire une
nouvelle disposition ; mais au contraire d’approuver un droit an cien , de
fortifier un titre précédent, d’affermir les premières dispositions et
d’en assurer l ’exécution. »
Toute ratification suppose un droit existant, un droit acquis; elle a
un rapport et une liaison immédiate avec le titre primordial. Ratificatio
ad hoc tantum Jîngitur ut quasi continuations duorum actuum contractus
validetur. E lle ne peut dans les règles ordinaires ni l ’étendre , ni
l ’.augmenter.
L ’esprit de celui qui confirm e, n ’est pas de faire une nouvelle dispo
sition, mais d’approuver celle qu’il avait déjà faite, qui confirmât, nihil
dat. T oute ratification, toute confirmation simple , renferme toujours
cette condition tacite , que le titre originaire soit valable , ou qu’au moins
il attribue quelque droit : aussi M. Charles Dumoulin après avoir dit que
la ratification qui est faite d’un acte nul , avec connaissance de la nullité
qu’il renferme et l ’intention île la réparer, valide cet acte, s’exprime-t-il
ainsi : seats in confirmationibus quœ jieren t sine causez cogn'dione , sivb
in forma communi ; ratio, quia hujus modi confirmatio nihil d a t, nihil
novi juris confert , nec invalidum validat. Non enim f i t ad finem dispon en d i, sed solum ad finem approbandi confirmabile, tale quale est , et
in quantum est verum , validum et efficax si taie est et non aliter ;
ainsi si le. titre est nul dans le principe , d’une nullité absolue ; s’il
n’attribue aucun droit ; si celui qui a disposé, n’est point lié à l’égard
de celui en faveur de qui la disposition est faite; si celui-ci enfin, ne peut
invoquer cette première disposition, ni en tirer aucun avantage, la
ratification la plus précise , la plus formelle , ne peut opérer l ’effet de
la valider, si elle n'énonce sa nullité elle-m êm e, avec l ’intention de la
réparer. Quod nullum est ipso ju r e , perperàm et inutiliter confirmatur.
T els sont les vrais principes qui s’élèvent contre la prétention des
nouveaux adversaires de Bard; principes qui ont été reconnus et confirmés
par le jugement rendu en dernier ressort, le 3o août 1792.
Mais dira-t-on encore , comme Saby l ’a répété plusieurs fo is , la rati
fication équivaut ù une nouvelle disposition ; elle est elle - mémo une
nouvelle disposition, et d’ailleurs la première disposition n’était nulle
que d ’une nullité relative.
C e sera toujours en vain qu’on voudra donner le change sur la ratifi
cation faite en 1t 2 S, de l’institution d’héritier portée dans le contrat de
mariage de Calheiiue Saby, du 3 janvier 1719 , en faveur de N oël Saby,
son frère, non contractant ; on rappèlera toujours les adversaires de Bard
au* termes que ni.ferm ent ces deux acies.
Par <clu i de
i îurre Saby niotituç Notil Saby, son fils, nonconl.ractant , «un ! ' u îu t gén.'îul et universel; celle disposition était:
ïiulle et illejv l e ,
pouvait produire aucun eilet ; elle n ’attribuait a
»
»
»
y
�,V 3
)'
,
.
ce d ern ierJ
, aucuns droits ni presens ni futurs , dans les biens du
premier ; parce que le premier caractère de l’institution d'héritier , est,
on le re p è te , qu’elle soit fa ite en faveur des mariés ou de leurs
descendons.
L a nullité dont était infectée cette disposition, était une nullité
absolue qui n’a jamais pu être couverte par une ratification quelqu’expresse , quelque précise qu’elle ait été , parce que quod nullum,
est ipso jure , perperùm et inutiliter confirmatur.
'
L ’acte de 1725 ne contient point une nouvelle disposition, la rati
fication est pvire et simple , elle n’énonce point la nullité dont était
infectée la première disposition, ni l ’intention de la réparer. Il y est dit
seulement que Pierre Saby approuve et ratifie l ’institution d’héritier
faite en faveur de N o ël Saby son fils , dans le contrat de mariage de
Catherine Saby , du 8 janvier 1719 , et consent qu’elle sorte son plein
et entier effet.
Cette ratification ne contient donc point une nouvelle disposition;
L a première disposition est ratifiée et confirmée , elle doit sortir son
plein et entier effet. Mais si par elle-m êm e elle ne pouvait avoir au
cun effet ; si elle ne liait point celui qui l ’avait faite ; si celui en fa
veur de qui elle avait été faite ne pouvait pas l’invoquer , il faut
dire affirmativement , que la ratification , la confirmation ne peut pas
l ’avoir validée ; parce que l ’esprit de celui qui confirme n ’est pas de
faire une nouvelle disposition , d’attribuer un droit nouveau , mais com
me l’a clairement exprimé Pierre Saby lui-même , d’approuver seulement
la première disposition qu’il avait faite : qui confirmât, nildl dat.
E n vain dirait-on que le vice de la première institution a été cou
vert par la ratification ; cela serait vrai si la première institution n’ a
vait cté infectée que d’une nullité relative ; mais étant frappée d'une nul
lité absolue , l’objection ne peut avoir aucune force.
O n distingue en- droit deux sortes de nullités , les unes absolues qui
sont de droit public , et que plusieurs auteurs ont appelé nullités p o
pulaires , parce qu’elles appartiennent au public et aux membres de
l ’Élat qui ont intérêts -de les proposer ; les autres relatives , parce
qu’elles ne concernent que ceux au profit de qui elles sont établies ;
qu’elles dépendent absolument de leur volonté particulière , et qu’ils
peuvent y renoncer soit expressément , soit tacitement.
A insi 11ue vente faite par un mineur qui n’est nulle que relativement
à lui-même , peut être ratifiée par lui , lorsqu’il a atteint sa majorité ,
ou par le laps de dix ans , s’il n’a pas réclamé pendant ce tem ps,
après sa majorité.
_
A in si une vente des biens d’une femme faite prndant son mariage
n'.est mille que d’une nullité relative , et la femme devenue veuve v e u t
par une ratification expresse la confirmer.
.
�.
.
<■ ^
y
.
.
I,c mineur -devenu majeur et la lemn\e veuve sont alors, libre? , vnaî-,
1res de leurs dioits ; iis peuvent valider ce qu’ils ont fuit en m inunlé.
ou eu puissance de mari , et qui ne se trouve nul qu’à cause de ces
circonstances , et la seuie différence qu’il y ait entre leur ratification,
est que ceilç faite par ie mineur, a toujours un effet rétroactif au pre
mier acte , tandis que celle faite par la femme ne l ’a pas , et que
celui qui a traité avec elle en puissance d,e m ari, n’a de titre valabiej
que du jour de la ratification.
'
. Ces actes faits par le mineur ou par la femme en puissance du mari,,
ne sont nuls que d’une nullité relative ; nul autre, qu’eux-mêmes ne
peut s’en plaindre; eu*c seuls peuvent les attaquer, revenir contre , ou
les approuver, les confirmer.
. Mais il n ’en est pas de même d’un acte qui est nul d ’une nullité
absolue qui intéresse des tiers , et que des tiers peuvent faire valoir.
A in s i, par exem p le, un testament fait en pays de droit écrit, qui
pécherait par le défaut d’institution en faveur de ceux qui ont droit de
légitim e; une donation qui pécherait par le défaut d ’acceptation de la*part du donataire ; une donation qui pécherait par le défaut de tradition
de la part du donateur , ou dans laquelle celui-ci se serait réservé la liberté
¿ ’hypothéquer les biens donnés ; une donation qui ne serait pas faite,
en contrat de m ariage, et qui aurait pour objet les biens présens et à
venir du donateur; une donation, enfin, qui aurait été révoquée par
survenance d’enfans; de pareilles dispositions, disons-nous, seraient en
vain ratifiées, et quelques précises, quelques fo rm elles, quelques écla
tantes que fussent les ratifications, elles ne peuirrraient pas produirere fle t de les valider, parce que ces actes étant nuls d’une nullité absolue,
ne pourraient jamais être confirmés valablement. Quod nullum est ip so ,
ju r e , perpcrùm et inutiliter confinnatur.
'
Dans tous ces cas , il faudrait un nouvel acte revêtu de toutes les
formalités légales pour la validité cl’un testament, d’une donation, parce
qu’il est de l ’essence des testamens faits en pays de droit é c rit, qu’ils
contiennent institution d’héritier en faveur de ceux qui ont droit de
légitime ; parce qu’il est de l ’essence des donations , qu’il y ait une
acceptation , qu’il y ait une tradition; parce qu’il est de l ’essence des
donations qui ne sont pas faites en contrat de mariage, qu’elles ne com
prennent que les liiens présens du donateur ; et parce qu’en fin , à
l ’égard du dernier exemple proposé, une donation révoquée par surve
nance d ’enfans, ne peut jamais revivre , et que dans tous ces cas des
ratifications ne pourraient produire aucun effet.
Quand un acte est nul par lui-m êm e, il est loujours ratifié inutilem ent;
r.e contenant point d’engagement valable de la part de ceux qui l ’ont
souscrit, ne pouvant jamais être validé par le tem ps, la ratification qu*
tu est faite par les parties, ne les oblige pas à P^lis (i uc ne ^es obligeait
l ’acte même.
�.
,
?
V5
)
L'institution d'héritier portée dans le contrat de mariage de 1719,'
était nulle par elle-même ; elle n ’attribuait aucun droit à N o ël Saby; elle
e lle ne liait en aucune manière Pierre Saby, son père ; et la ratification
q ue celui-ci.en fit en 17 2 5 , était absolument insignifiante, et ne le liait
pas à plus envers N o ël Saby, qu’il ne l ’était par l ’acte de 1719.
Toute la difficulté se réduit, enfin, en peu de mots. O u la première
disposition était nulle par elle-m êm e, ou elle était seulement susceptible
d ’ètre annullée ; dans ce dernier cas, c’est-à-dire si la disposition n'était
pas nulle par elle-m êm e, sed venit tantum annulandus, la ratification
l ’aurait fortifié, corroboré, validé; mais dès que la première disposition
était nulle par elle-même, la ratification, la confirmation qui en furent
faites ne purent pas la valider; parce que , comme le dit quelque part
B o ëriu s, coufrmatio vihil novi d a t , sed prius habita et possessa
confirmât.
C es principes , ces distinctions , sont enseignés par tous les juriscon
sultes , et ils furent consacrés d’une maniéré bien précise par un arrêt
du 26 février 1 7 2 6 , rapporté par Lépine-de-Grainvile page 408, dans
une espèce qui était tout aussi favorable pour les donataires , que veulent
l ’être lés nouveaux adversaires de Bard ; ils ont été renouvellés dans le
p ro je t du code civil qui peut être regardé comme raison écrite , quoiqu’il
n ’ait pas encore force de lo i; voici ce qu’on y lit, art. 22g du 2.me liv. ;
« l ’acte confirmatif suppose un contrat antérieur et un contrat valable. »
« Si l ’acte confirme est radicalement n u l, il n’est point validé par la
*» simple confirmation , à moins qu’il n’énonce, la connaissance de la
» nullité du premier, ave: l'intention de la réparer, qu’il n’en rapporte la
# substance et ne Contienne la déclaration de la volonté de vouloir lu i
» donner l ’exécution. »
Ces principes ont encore été consacrés par le premier jugement que
Bard a obtenu contre Pierre Saby; jugement qui a été attaqué par la
voie de la tierce opposition, mais qui doit nécessairement être confirmé,
quelques efforts que fassent Magaud et sa femme pour le faire réformer.
Ces derniers insistent et invoquent encore en leur faveu r, l ’autorité de
l ’immortel Dum oulin; et nous aussi nous l ’avons invoqué ! nous avons
rapporté les expressions de ce célèbre jurisconsulte, et certes nous sommes
éloignés de l«s croire en leur faveur.
11 est vrai que Dum oulin après avoir d it, ainsi que les adversaires de
’Bard en conviennent ( car ce sont leurs propres expressions que nous
trani'.crivons ) , que la confirmation d’un acte antérieur auquel celui qui Le,
confirme, se référé sans en rapporter la teneur, ni en relater les vices
pour les réparer, n’a d'autre but que de maintenir l'acte- dans sa valeur
primitive-, qu'elfe ne couvre pas la n u llité, ni les 7/ices de l’acte , ignorés
par L'auteur de la confirmation, et qu'ells n'empêche ni lui ni les siens de
fa ire valoir cas vices , pour se 'dispenser d’exécuter l’acte , ajoute que si
�.
.
.
je
>
.
.
îa confirmation d’une cüspositionr nulle est faite avec la connaissance de
cette n u llité, et intention formelle de la réparer, la ratification valide
.alors ce qui.était nul. Tn tantum quod etiamsi corjirmaium esset nv.h.um
x e l nw aiidnni, vahdarctur per coirfimiationem potestatem halerilis, scicnlis
nuilitatem et vilium confirmati.... Tune propnè non discilur corfirmatio,
sed nova et principaiis dispositio.
L es célèbres jurisconsultes , rédacteurs du projet du code civil qui est
.attendu avec tant d’impatience par toute la H a n c e , pour faire cesser la
bigarrure de nos lois , n ’ont-ils pas puisé dans' l'immortel D u m o u lin ,
. l ’article que l ’on a déjà rappelé, et cet article et les suivans ne sont-ils
pas la traduction presque littérale de ce que dit ce grand maître.
E n un m ot, l ’acte de 1725 11’enonce pas la connaissance de la nullité
dont était infectée la disposition contenue dans celui de 1719 ; ii n’y en
est pas dit un m ot; on n’y voit pas l ’intention formelle de Pierre S ab y,d e
.vouloir réparer ce-vice qu'il devait connaître, que la l o i ne lu i p erm etta it
pas d’ign orer, et dès-lors il faut dire avec D um oulin, avec les auteurs
du projet du code civil, que la confirmation d ’une disposition radicale
ment n u lle , n’est point validée par une simple ratification qui n'énonce
point la connaissance de la nullité, avec l ’intention de la réparer ; que
la disposition contenue dans l ’acte de 1719 , n ’a point dès-lors été
.validée par la-ratification contenue dans celui de 1725.
Q U A T R I È M E
Q U E S T I O N *
E n Auvergne , les en/ans des cultivateurs , travaillant hors la maison
paternelle, peuvent-ils fa ire des profits qui leur soient propres J
O n ne rappèlera point ici les distinctions faites par les lois sur les
différentes espèces de biens. O n se contentera de dire qu’en A u v e r g n e
et dans le Forêt, l ’usage constant a toujours été que les sommes gagn ées
par les enfans des cultivateurs, soit en s'expatriant, soit dans l ’etat de
domesticité ont toujours restées en leur libre disposition; qu’ils ont cu
le droit d’en disposer à leur gré; et que leurs pères n’ont jamais consi
dérés ces sommes comme faisant partie de leur patrimoine.
E lles ont toujours été classées, ces som m es, dans l’ordre des biens
désignés par la loi sous le nom de quasi-castrence, dont les pères n ’on t
ni l ’usufruit, ni la propriété , et qui ne sont jamais sujets à rapport à leur
succession. Nec castrense, nec quasi castrense peculium fratribus co n fcr lu r .
Tous les ans et à des époques périodiques on voit , des nuées de cul
tivateurs quitter "nos montagnes pour aller à la scie ou <\ la marre ; on
les voit à d’autres époques revenir, portant dan s leur m a iso n les fruits
de leurs sueurs et de leurs travaux ; les prêter le plus souvent <\ leur
frère ainé , et s’en fairo souscrire de8 obligations , d es re co n n a issa n ce s.
Tous les jours 011 voit les enfans des cultivateurs se constituer euxmèmea
�,
,
< ' > 7 "5
xnêrtics , dans leur contrat de mariage, des sommes provenues d e leura
épargnes et de leurs travaux ; on voit même des filles en faire autant
dans leur contrat de mariage , en présence de leurs parents , san* que
dans aucun-cas , dans aucun temps il soit encore entré dans l ’idée des
héritiers institués , des légitimâmes, de demander le rapport de ces- som
mes pour en grossir la masse des biens paternels. O ui , il est sans exem
ple que des héritiers aient exigés qu’un légitimaire mécontent de la
part qui lui était fixée, pour lui tenir lieu de ses droits, rapportai à la masse
des biens à partager , ce qu’il s’était liii-mème constitué dans son con
trat de mariage , comme provenant de ses épargnes , parce qu’encorô
une fois on a considéré ces profits comme devant participer de la na
ture des biens quasi-castrence , et que sous ce point- de vue ils’ n ’étaient
pas sujets a rapport.
Si c’était une erreu r, comme l ’â dit Pierre S a b y , qui contrarie le i
principes puises dan* la loi sur la puissance paternelle, il faudrait la
confirm er, parce- qu’étant devenue générale , elle a acquis force de loi;
F.rror fommunis fa ç it legem. E lle devrait être consacrée, parce qu’elle
sert d’un aiguillon puissant aux enfans-des cultivateurs pour les déter
miner à abandonner nos contrées , et à aller chercher chez les habitans
d'autres contrées , qui ont des richesses, mais non de l ’industrie
le n u
méraire qu'aucun autre canal ne pourrait- faire parvenir dans nos
montagnes.
.
Mais pourquoi se tant appéèantir sur l ’usage , sur la force qu’ik d o it
a v o ir, sur l ’avantage qui en résulte pour nos contrées ? N e suffit-il
pas à Bard d'invoquer en sa faveur ,. pour faire rejeter , proscrire la
prétention de ses adversaires , les dispositions • du contrat de maria«fe
de son ayeul ?
°
O n y voit dans >ce contrat’ dé manager qui est du 2 i janvier 1737V
qu’Andre Saby a ete constitue par N o ël Saby son frère , à une somme
de deux cents francs
pour ce qui lui revenait dans les biens de ses
père et mere , et qu il s est constitue lui-même une somme de trois
cent cinquante francs qu’il avait par devers lui , comme provenant de
ses épargnés.
D e la distinction de ses deux sommes n’en résulte-t-il pas évidem
ment q u d n y a que la somme de deux cents francs qui puisse êtrfc
sujette a rapport, si e lle 'a étépayée ? N ’en résulte-t-il pas sur-tout que
N o ël Saby père et beau-père des adversaires de B ard, était convaincu
que la somme de trois cent cinquante francs qu’André Saby son frère
se constitua lui-même , comme provenant de ses épargnes , lui était pro
pre , et que dans aucun cas , dans aucun temps il 11e pourrait y avoir
droit ? N ’en résulte-t-il' pas qu’il y a fin de non-recevoir contre là
prétention de Magaud et de sa femme , qui a pour objet le rapport
a t cette somme’ de trois c u it embuante francs à la succession dont
C
�'(
ï
ïe partage est ordonné. Concluons donc,' et
cette prétention qu’injustice, absurdité ( i) .
C I N Q U I È M E
..
..
disons qu’il n*y a dans
Q U E S T I O N .
U aclion en partage dirigée contre un des détenteurs des biens, possédant
' par indivis avec ses cohéritiers, interrompt-elle la prescription v is - à vis ces derniers ! (2).
C e n’est pas seulement par les mêmes moyens que Pierre Saby a fait
valoir contre B a rd , que la prétention de ce dernier est combattue ; ses
nouveaux adversaires , les tiers opposans, en les reproduisant, en a jou ten t
un qui leur est propre ; ils prétendent que l ’action en partage n ’ayant été
dirigée que contre Pierre S ab y, n ’a pas pu leur nuire, leur préjudicier ,
interrompre la prescription à ieur égard.
L a discussion de la question qu’ils mettent au jour, ne sera ni longue,
n i difficultueuse, et il sera facile de leur démontrer qu’il n ’y a encore
qu'erreur dans leur nouvelle prétention.
U n point essentiel à rappeler , pour ^parvenir à la solution de cette
q u estio n , est que les nouveaux adversaires de Bard et leurs auteurs ont
toujours jouis avec Pierre Saby, second du nom, contre qui la demande
en partage fut dirigée en 1736, de la totalité des biens sujets au p a rta g e ;
que cette jouissance commune qui avait pris naissance, qui était fondée'sur les
actes de sociétés générales et universelles contractées entre Pierre Saby,
premier du nom , d’une p a r t, et Antoine Bruhat et Catherine Saby,
.d’autre, par les actes publics qui sont rapportés et qui sont des 16
février 1694 et 3 janvier 170 6 , s’est perpétuée jusques à présent, de sorte
que quoiqu’il soit de principe en droit que toute société est r o m p u e ,
.dissoute par la mort d’un des associés , morte solvitur societas, il est
cependant certain que par une volonté tacite et bien exprimée par Ie
fait, les sociétés générales contractées entre les auteurs communs, se sont
perpétuées entre leurs descendans ; et que par le fait de la jo u issa n ce ,
de la cohabitation commune ; par la circonstance qu’ils ont toujours mis
en commun les profits qu’ils ont faits , et que dans plusieurs actes
.publics qu’ils ont passés , ils se sont dits communs et associes cfl
biens; il en résulte qu’il faut considérer ces sociétés générales établies
en 1694 et en 1706 , comme ayant été renouvellées e x p ressém en t *
.chaque génération.
Ci^ Q u o i q u e d a n s le urs m o y e n « en ti erce o p p o s iti o n , M a r a u d et sa f e m m e n ' a i e n t pas r e n o u v e l é
c e l u i q u e l ' u n v i e n t île d i s c u t e r , o n a c r u i l e v o i r l e p r é v o i r , p a r c e q u e P i e r r e S a b y l ’i v a i t e m p i
aveu f o r c e , et qu'cnx-niéines p e u v e n t to ujours y avoir recours.
, .
•
i . le I*
( î ) M a^ a tu l et sa f e m m e a p r i s a v o i r o p p u s é la p r e s c r i p t i o n , o n t dit q u ' e l l e était ac q u is e lor 1
d e m a n d e j n r t i u e c o n t r e P i e r r e S i l i y , e t o n t a j o u t e p a r é c r i t , i/u’iUr ttm t h i v plus im -ou tn tiélc enJ *
]lS
A ' C.tlhivs'it Snhy ; il on t d i t p u b l i q u e m e n t q u e l.t i l er . i ni i . l e n ' a y a n t p J s e t i f o r m e e dans l e m e m
¡v
c o n t r e cctt'-* d e r n i è r e , U p r e s c r i p t i o n a v a i t c o n t i n u é d e c o u r i r e n s a l a v e u r . L j l i mi t e ' j u ü s o n t t .
les p r o p o i qu 'i ls p u t te n u s o n t d é t e r m i n é à t r a i t e r l a q u e s t i o n p r o po s ée .
�^
y
. 1 e fait de la j'ouissance commune qui a toujours eu lieu entre tou»
les adversaires de Bard, qui existait- à l ’époque de la demande en partage
formée en 178G, et qui n’a cessé pour les biitimens seulement que d.epma
•
le 5 janvier 1792, époque d’un acte public reçu Vissae notaire, suffit seul'*
pour faire décider la question.
•*
t « l i e n est des héritiers du débiteur, comme des coobligés m êm es,1
» tant que ces .cohéritiers n ’ont pas (fait départage entr’eux. D es co -'
*> héritiers qui sont encore dans l ’indivision, sont réputés associés pour
y tout ce qui est relatif aux biens de la succession; ils sont çenscs jnaji- •
V dataires les uns des autres à cet égard; ainsi l ’interruption qui est
» faite contre l ’un d'eux, est réputée faite contre la succession elle
» même; » c’est ainsi que s’exprime sur cette question le dernier com
mentateur de la coutume de la ci-devant Auvergne.
• Écoutons ce que disent plusieurs coutumes de France, qui ont prévu$i
la difficulté :
,
« Interruption de prescription faite contre l ’un des frères ou communs Bourfconnaîs.
» p o s s é d o n s par indivis ; aucune chose sert et profite comme si elle
art-35» était, faite contre les autres communs personniers en ladite chose. »
« L ’interruption civile par ajournement lib e llé , ou convention judiBerry.
» claire, ou autrement, faite pour le regard de l ’un des possesseurs ou tlt- 1S',rt-l6» détenteurs par indivis , de la maison ou héritage que l ’on veut prescrire
» a effet contre tous les autres possesseurs et détenteurs par indivis ,
>> dudit héritage , et leur nuit et préjudicie. »
« Interruption de prescription faite contre l ’ùn des. frères ou communs. Nivcrneis.
ü> possédans par in d iv is , aucune chose ,. nuit aux autres frères o u t!t 36 art- ?•
>> communs. »
. .
,
.
.
.
« Pour empêcher prescription- de trente ans, ou icelle interrompre
Anjou
» entre frarescheur , suffit à celui frarescheur contre lequel on objicerait art. 435..
» p r e s c r ip t io n , montrer et enseigner quant aux choses communes et
» iiidivisees entre lesdits fraresclieurs , que l ’un d’eux a été inquiété , ou
2 sa possession interrom pue, car en ce cas où les choses sont encore
y indivisées , l ’interruption faite à l ’un préjudicie aux autres. »
T el est le langage unanime de ces coutumes sur la question à laquelle
donne lieu la prétention de, Jean Magaud et de sa femme. L eur décision
imiiormè prouve que cette question ne devrait pas même en faire une. Il
suffit qu’une action soit dirigée dans un temps utile , contre un des
détenteurs d’un bien possédé par indivis avec d’autres, pour que l ’action
n u i s e , préjudicie à tous, qu’elle interrompe la prescription à l ’égard
de tous.
« Quand on s’adresse contre l ’un des possesseurs , par indivis , dit
énergiquement Coquille , 1 adresse est faite poiius in rem , (¡uam
» in personnarn , et nuit à tous ceux qui y ont part. » A in si il est
certain que liard en Xormaut en 1786 la demande en partage deo
.
.
.
'
C 2
�biens <5e scs auteurs , contre Pierre S a b y , avait moins en vue d e
s'adresser directement à c e lu i- c i, qu’aux biens auxquels il prétendait
dxoit ; que les biens seuls m en ta ien t, attiraient toute son attention;
qu’eux seuls étaient le mobile de son action ; qu’ainsi et quoiqu’il ne
s’adressa alors qu’à Pierre S a b y , un des détenteurs des biens , son action
n'a pas moins eu l ’effet d’interrompre la prescription contre tous les
autres détenteurs , parce qu’elle était dirigée potius in rem quam in
personnam.
Q u ’on ne ’ dise pas que les autorités de ces coutumes ne peuvent
être d’aucun p o id s, d’aucune autorité en A u v e rg n e , leurs dispositions
ont de tout temps été reconnues si sages , et tellement fondées sur la
justice et la raison qu’elles ont toujours été approuvées par les juriscon
sultes , et regardées comme devant formeF le droit commun ; c’est ce
qui a fait dire à Chabrol , qu'il en est des héritiers d ’un débiteur
,
comme des coobligés même et que tant qu'ils n’ont pas f a i t de partage
entr'eux le principe est le même.
O n convient qu’il en ;est autrement à l ’égard des cohéritiers qui
ont cesse d etre dans l ’indivision, et que dans ce cas l ’action dirigée
contre un ne peut pas nuire aux autres. O n convient qu’il en est encore
autrement dans le cas ou un demandeur restreindrait sa demande contre
un cohéritier jouiesant par indivis avec d’autres, à la portion pour
laquelle il serait personnellement tenu de l’objet de l ’action , et que
dans ce cas encore l’açtion dirigée contre un ne nuirait point aux autres,
mais hors ces cas, et tant qu’il y a indivision entre des cohéritiers , tant
qu’ils jouissent en commun d'un bien , il est certain , il est incon
testable que l ’action dirigée contre
, n u it, préjudicie à tous.
;
Pour demeurer convaincu que ce qu’on vient de dire ne peut pas
être combattu avec succès , il suffirait de rappeler les expressions de
M . Charles Dumoulin sur l ’art. i 5 du titre i2 d e là coutume du Berry t
et sur ce mot prejudicie.
Fntellige , dit ce savant et profond jurisconsulte quando reus supeT
toto convcnitur et super toto procedit et H oc e s t v a l v e j v s t v m , quam -
,
t Îs
sit contra, ju s scriptum individuis : secits si aclor conveniat unnmE x possessoril us pro parte sud t ant um, quia tune re.mcmct. régula ju vis
commuais quoad ahos. Il suffit donc que celui qui réclame des droits
contre un des détenteurs d’un bien possédé par indivis , réclame la lo
calité de ce qui lui revient , pour que son action nuise , préjudicie à
tous les autres détenteurs. H oc e s t v a l v e j u s t u m (i).
_____ t
(0 Dv la nole mise nu Iws île h premii'rc question, il réjulte qu'ü l'époque île l:i ile*iamle forme;
cor.>'r;pj,.rrC Sahy tn t7HJ>, il ne l’etnit écoulc une ans un mois et >jours île temps utile pour
jee* motion . et en calculant tlepuis cette époque jiuqu’nu premier mmsiilnr a n V I ( 19 juin t; i'<
date Oc ln *•!t-nti-,n en 'rnncilintitm portée à Mi'.;:uii| et à si femme, il ii't a Tne H »lis : 11101^
■jour', ceji'ii r.ijr nn total Je 2« .111s4 mois 4. jour«, aütsi point île preterijuion en supposant
que Iïs l'rinv.fccilpUiuitnc l'ussmt pas en favïisr dî Bard.
.
�-
S I X I È M E
Q U E S T I O N .
-
IV a-t-il quelques biens meubles sujets au partage ordonné par ls jugement
en dernier ressort de 1792 / Y a-t-ïl plus de deux immeubles , mèm®
. ¿lus de quatre sujets à ce partage î
Nous avons terminé la discussion de toutes les questions de droit
âiix qu’elles a donné lieu la tierce opposition formée de la part de Catherine
Saby et de Jean Magaud. N ous sommes arrivés au moment d’établir deux
points dé faits qui sont certains, incontestables , c’est-à-dire qu’il y a
des meubles sujets au partage dont il s’agit ; qu’il y a plus de deux ,
même plus de quatre immeubles qui doivent y être compris , et cette
tâche 11’est pas aujourd’hui pénible à remplir.
• Dans tout le cours de la procédure qui a eu lieu depuis 1786 jusques à présent , Jean Saby et avant lui son père se sont toujours obs
tinés à soutenir qu’il n’y avait aucuns biens m eubles, aucuns biens im
meubles sujets à partage. U n jugement contradictoire l’a cependant or
donné , et ce jxigement est celui du 3o aoiit 1792.
• A lors l ’obstination de Pierre Saby à soutenir son système parut s’ac
croître de plus en plus , et cependant rentrant un peu en lui-mème, il
convint dans un procès-verbal du 2o octobre de la même année , qu’il
y avait' seulement quatre héritages sujets à ce partage , et il eut la
bonté de les désigner d’une manière assez précise.
Fâché sans doute d’avoir fait un pareil aveu , après avoir cherché par
tous les moyens possibles à éviter le transport des experts qui furent
nommés successivement ; après avoir donné lieu à plusieurs incidens ,
et voyant arriver les derniers experts nommés pour procéder au parta
ge , il soutint à ces mêmes experts ( ce fait est consigné clans un rap
port du t 6 messidor an. III ) qu’il n’y avait que deux héritages sujets*
à ce partage , et il eut encore la bonhommie de les désigner.
. E nfin, après plusieurs contestations il a été décidé par un jugement du 6
fructidor an V que Pierre Bard indiquerait 1ns biens sujets au partage, et
par un autre du 2i nivôse an IX , il a été chargé de faire la preuve de
la consistance des biens meubles , des titres de créance e t des immeu
bles provenus de Pierre Saby et d’Antoinette Ladiaud.
.
Par ce même jugement , il -a été ordonné que des experts pris par
les parties ou nommés d’office feraient l ’application des titres produiu
par Bard , et comprendraient, dans leurs rapports tous les immeubles
qui avaient etc donnés pour confins aux .héritages acquis , et qui étaient
dits dans les a t.es, appartenir à ou aux acquéreurs , c’est à-dire, à Pierro
Saby, à André Saby, à Antoine Bruliat, ou à Cathcrino Saby, qui tous sont
désignés comme acquéreurs dans tous les actes produits par Bard.
Des témoins ont été produits de part et u’autre , ils ont élé enton•dus. Des experts on t. été nom m és, ils ont .opéré. 11 ne Va^it dvue
�C
255
)
.
.
,
,
.
plus que de jeter tiB côitp illceil rapide 'sur cc qui résulte des déposi
tions des tém oins, et du rapport des experts , pour juger du peu de
fondement de la prétention de Jean Saby.
D ’abord, relativement'aux dépositions des témoins qui ont trait à la
consistance des biens meubles , nous trouvons quatre dépositions pres
que 'uniformise dans l'enquête’ faite à la diligence -de Bard.
L e troisième témoin déclare qu’il y avait constamment dans la mai-*
son de Pierre Saby deux paires de bœufs, dix v a ch es, deux jumens
pBuiiniairjs , d ix chèvres , entour deux cents moutons , mais qu'en hiver
le troupeau diminuait quelquefois.
L e quatrième dit qu’il y avait quatre paires de bœufs, douze vaches,
deux jumens et un troupeau de moulons qui s’élevait quelquefois jus*
qu'à quatre cents , mais qui était quelquefois de deux cent cinquante.
■ L e sixième assure que la maison des Saby fa isa it le commerce d&
moutons , nu’habduellement i l y ayait un troupeau de deux cents bêtes
« laine , huit ou dix vaches et deux jumens, pouhniaires.
L e septième ne . parle que de deux paires de bœufA ; mais le hui-.
tième parie encore de deux paires de bivufs , d’un troupeau de moutons
de deux cents à deux' - cent quarante , de sept à huit vaches 3 de sept
à huit clùvres et d’une jument.
.
.
Jinfm T. tous ces témoins s’accordent parfaitement sur un point essen
tiel : ils disent que la maison des Saby passait pour être pécitnieuse eh
qu'elle jouissait d ’une aisance notoire.
Si nous jetons actuellement les yeux sur les dépositions des témoin*
qui ont été produits par Jean Saby ; si imus rapprochons ces déposilio n s'd e celles des témoins qui ont été produits par B ard, nous veri
iori6 que ce qu’on dit ces derniers , et que l ’on vient de rappeler , ac
quiert un nouveau degré de force et de vérité , et qu’on ne peut faire
autrement , d’aprèa la réunion de toutes ces dépositions , que de demeu
rer convaincu que Pierre Saby et Antoine Bruhat son beau-frère et son
associé , Catherine Saby sa iccur et aussi son associée, après le décès de ce
dernier , jouissaient d’une fortune opulente ; qu’ils avaient constamment
au moins deux ou trois paires de bœufs , d.ix vaches , un troupeau
moutons a entour deux cents , sept à huit chèvres et deux jumens.
U n pareil nombre cle bétail suppose nécessairement l ’existence de
tous les inslrumi. ns aratoires , des chars , des charrues, jougs , clefs de
parc elc. et tout cela suppose encore l'existence d'un mobilier quel
conque dans la maison de Tierre Saby , proportionné à l ’opulence dont
il jouissait.
,
.
Nous avouerons cependant , que d'après les dépositions des témoins
produits par Saby , il résulte que sa maison s’est cou.Vukrablement
accrue depuis le déct-s de Pierre S ab y, de cujus ; mais qu'il sache
*piu Bard n’a jamais poussé ses prétention.1* jusqu’il soutenir que 9
�J
M
)
...
.
totalité des biens dont il jouit actuellement 'e s t sujette au partage
'ordonné; mais qu’il a soutenu qu’il y avait plus de deux , même
plus de quatre immeubles sujets à ce partage ; qu’il y avait des meu
bles , et que convaincu par les dépositions des témoins qui ont été
entendus ; qu’accablé même par la réunion de ces dépositions , Saby
jentre une fois en kii-mêmeet qu’il convienne au moins aujourd’hui que son.
obstination et celle de son père , à soutenir qu’il ri’y avait aucuns
.biens sujets au partage n’ont été propres qu’à faire faire des frais
■dont il doit nécessairement être victim e, comme Bard avoue franche
m ent de son côté que lui Saby a droit à des distractions incontesta
bles et qu’il n ’a qu’à les faire connaître pour les obtenir.
L e jugement du 2 i nivôse an I X , ordonnait que Saby remettrait
entre les mains des experts, le9 titres qui devaient servir à établir ces
•distractions, mais il s’y est constamment refusé. L e s experts qui ont
opéré l’attestent dans leur rapport , et si ces experts n’ont point fait
jen sa faveur les distractions qu’ils auraient pu faire ; s’ils ont compris
dans leur plan une quantité plus considérable de terrein que celle qui doit
•en dernière analise être comprise dans le partage , il ne peut l ’impu
ter qu’à lui-m êm e, au refus constant de remettre ses titres.
D ’après le rapport de ces experts , tous les titres produits par Bard
.ont reçu une application parfaite sur les héritages jouis encore par
indivis par Jean S a b y , Catherine Saby et Jean Magaud. Ces experts
'ont
constaté l’identité
des héritages énoncés dans ces mêmes
’titres , avec ceux possédés par ces derniers , et enfin il résulte de leurs
opérations, de l’échelle jointe au p la n , du calcul que l ’on a fait d’a
près cette é ch e lle , que plus de soixante septerées de terre sont sujet
tes au partage ordonne ; ainsi , que Saby cesse donc de dire qu’il n’y a que
deux héritages même que quatre qui doivent être compris dans ce
partage.
Si cependant il lui restait a Saby quelque espoir de pouvoir répondre
à c? que nous venons de dire ; de pouvoir combatiré soit les déposi
tions des témoins , soit le rapport des experts, qu'il écoute avant de
l ’entreprendre ; qu’il lise avec attention une preuve littérale , une preuve
authentique et légale qui vient corroborer , fortifier soit la preuve vocalo,
soit le rapport des experts , et qu’il nous dise ensuite si l ’un ou l ’au
tre peut être critiqué avec succès.
V oici mot à mot en qu’on trouve dans le rôle de la commune (le
•Chainpagiiat-le-vieux , quartier de L ach au d , pour l’aunée 1 7 8 7 , rôle
rendu exécutoire le i 3 novembre 1 7 3 6 , et enregistré à Issoire le même
jour.
-
Ticrrc et N o ël
Suby , p ire et fils , et Jean Magaud
neveu dudit
�.
.
<
24
5
.
,
Pierre , communs en biens , labourant à deux- paires de - bœufs et une
paire dz vaches , cent quinze francs , ci. . . . . i i 5 fr.
» sois.
Capitation , quarante-sept francs trois sols , ci. . 4 7
3
.
1
Crue , vingt - deux Lancs un s o l, ci.............................22
T o t a l, ccnt quatre vingt-quatre francs quatre sols , ci.
184 fr.
4 sols
re u t-il d’après cela rester encore quelque doute sur la vérité des fait*
. nites-lés p a rle s témoins à l ’égard des meubl.es et des bestiaux , sur la quan
tité des immeubles sujets au partage ordon n é, tel qu’il résulte da
rapport des experts ? L'énonciation qui se trouve dans ce rôle ne les
dissipe - t - elle pas tous d’une manière irrésistible , et' Saby ne
scra-t-il pas forcé d’avouer que les témoins n’ont rien dit que de con-*
forme à la vérité ; que le rapport des experts n’embrasse pas même peut*
être tout cc qui devrait y être compris? Entrons maintenant dans un cal
cul simple mais palpable.
L e rôle de Champagnat., quartier de Lacliaud , comprend neuf villages,
Lachaud , Toiras , I\eyrolles , Leglial , Gcnestoux, le Boucharel ,.Balistre,
Balistroux et Olpignat, Ces neuf vdlages payaient en.principal ou acces
soire d’impositions 2673 francs i 3 sols. L a seule maison des Saby payait
184 francs 4 sois , c’est-à-dire à peu près le treizième des impositions ,
ce qui suppose que cette maison possédait à peu près- le treizième des'
biens ’des neuf villages. Faisons un autre calcul.
"
Il est de notoriété; publique', et il 11e faut pas avoir des connaissances
bien étendues pour savoir que les impositions ont considérablement ac
crues depuis 1787 jusques à nos jours; que tel bien qui à cette époque
payait 2oo francs d'impositions-doit aujourd'hui en payer 3 oo même 400
francs : mais supposons que cette augmentation d’imposition n’est pas ar
rivée ; supposons que le même bien qui.existait à cette époque n’est grevé
aujourd’hui , comme il était alors , que de 184 irancs 4 sols d’imposition,
et calculoii.3 d’après nos lois. •
L es impositions sont le cinquième du revenu net des biens. Pour
connaître le capital il faut donc quintupler le. montant des imposi
tions et par cette opération nous trouvons que le bien qui existait
en 1787 , grevé de 184 francs 4 sols d’im position, doit au moins
fitre en valeur de 18400 irancs : ce calcul ne peut pa* être com b a ttu avec
succès.
t
Ce rôle de l ’année 1787 , a donc non seulement corroboré , fortifie
la preuve qui résulte des dépositions de tous les témoins qui ont etc
cnU-iidus , mais encore, il a conduit à la découverte d e là valour au moins
Approximative, des immeubles sujets au partage ; ainsi il ne peut plus res
ter aucun «luutc sur la consistance des biens immeubles; ainsi le ra p p ort
des exports mj
pas paraître embrasser une plus grande quantité
de biens que Cyllc q u i est sujelty au par'.agc.
.LCS
�. f
ft5t
)
Le* titres translatifs de p r o p r e s rapportés par Bard , qu’il n ’a recueil
lis qu’à grands frais et qui ont été souscrits par différents particuliers
en favçur des auteurs communs , depuis 3 , jusqu’en 1 7 0 7 , constatënt 'q'iiëices dem iérs' ont acquis dans x e t espace de temps pour plus
de trois m ille 'liv re s d’immeubles.
:
■
11
est »de fa it in'scontestable que depuis la fin de 'l ’avant - dernier siè
cle jusqües à* présent, les propriétés foncières ont fait plus que quin-’
tiipler de valeur ; et cela conduit à la-certitude que les biens énoncés
dans le*s ventes rapportées par Bard doivent être aujourd’hui en valeur
aii m o in s de quin ie m ille francs; et si nous observons que les auteurs,
des parties jouissaient avant' ces acquisitions d’une fortune honnête ;
qu’iis étaient au morns présumés en jouir ( car les acquisitions qu’ils fai
saient le prouvent -), on demeurera convaincu que le premier calcul que
l ’on a fait n’a rien d’exagéré ou plutôt qu’il est au-dessous de la valeur
té e lle des biens sujets au partage.
N e pouvons - nous pas dire maintenant avec certitude, qu’il y a des
biens meubles sujets -au partage .ordonné ; que tous les immeuble*
énoncés dans les titres rapportes par Bard doivent y être compris • quç
la prétention de Sal>y est injuste et absurde , et que soutenir qu’il ne
devait: être compris que deux même qwe quatre immeuhles , c’etait
soutenir une'erreur qui n’était'propre qu’à faire faire des frais dont nul
autre que Saby ne peut être tenu? ■
L e s tribunaux saisis de la connaissance des contestations des parties,
ont à prononcer sur des intérêts majeurs ; ils ont à mettre fin à un procès
qui dure depuis lougues années, et à statuer si une famille plongée dans la
misère , privée depuis 60 ans et plus de la portion qu’elle amende dans un
bien conséquent,peut enfin espérer de voir la fin des incidens que ses adver
saires , qui sont dans l’opulence , ne cessent d’élever malgré un jugement
en dernier ressort, rendu depuis plus de 10 anç. L a tierce opposition
formée par Magaud et sa femme contre ce jugement, donne lieu à statuer
de nouveau sur les mêmes questions qui ont été décidées par ce jugement.
Ces tiers opposants seront - ils plus heureux que celui qui les a précédé
dans l'arêne ? Parviendiont - ils à prouver d’après les circonstances
particulières qui se rencontrent dans la ca u se , et qui résultent des
actes publics passés en présence de toute la famille , les 2i septembre
*749 et 11 novembre suivant , qu’un absent est répute vivre 100 a n s ,
que
pendant cet
espace de tem ps, toute action
est
inter
dite à ses héritiers de droits l i.tabliront-ils , en convenant qu’une ins
titu tio n d’héritier faite dans un contrat de mariage , en faveur d’un noncontractant, est nulle d’une nullité absolue ; que cette nullité a été co u
Verte par Une ratification pure " et simple faite postérieurement dans son
«ontrat de mariage ? Seront-ils assez heureux pour faire oublier les princi
pes, jusqu’au point de persuader qu’en Auvergne les enfaris des cultiva«
’
'
D
�partage, n’interrompt pas la prescription contre tous ! ils peuvent se flatter
de réussir , mais qu’ils n ’invoquent pas au moins P o th ier, Brétonnier ,
Rousseau-de-Lacombe, Dum oulin, qui tous prononcent leur propre condam
nation, et disent tout le contraire de ce qu’ils leur ont fait dire : et Jean
Saby qui en suivant le genre de défense embrassée par son p è re ,a toujours
soutenu qu’il n’y avait aucuns biens meubles sujets au partage , convien
dra-t-il au moins aujourd’hui q u ’il doit y en avoir quelques-uns ? et aban
donnant les assertions de son père à l’egard des immeubles, avouera - t-il
q u ’il y en a plus de deux , même plus de quatre sujets au partage ! Si
les uns et les autres continuent d ’esperer que fo .misère dans laquelle
Bard est plongé ne lui permettra pas de poursuivre jusqu’à jugement défini
t i f la réclamation de ses droits , qu’ils se désabusent ; cet espoir fonde
sur l ’indélicatesse , sur la mauvaise f o i , sera déçu , et ils a p p re n d ro n t
que la détresse la plus absolue peut quelquefois lutter contre l ’opu
le n ce.
'
"
‘
'
A L L E Z A R D ,
AU
homme de loi à Brioude
P U Y , de l’imprimerie de C r e s p y et G u i l h a u m e , Im p rim eu r
Libraires, rue du Collège.
A u X»
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bard, Pierre. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allezard
Croizier
Subject
The topic of the resource
communautés familiales
partage
absence
testaments
coutume d'Auvergne
droit romain
Description
An account of the resource
Mémoire pour Pierre Bard, cultivateur, habitant de la commune d'Agnat, demandeur et défendeur en tierce opposition, contre Jean Saby, fils à Pierre, défendeur, et Catherine Saby, et Jean Magaud, tous cultivateurs, habitans du lieu de Balistroux, commune de Champagnat, demandeurs en tierce opposition.
Annotations manuscrites
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l''Imprimerie de Crespy et Guilhaume (Puy-en-Velay)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1674-Circa An 10
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0247
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Agnat (43001)
Champagnac-le-Vieux (43052)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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absence
communautés familiales
coutume d'Auvergne
droit Romain
partage
testaments
-
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25bc946bc217202ffb203795c226a0cf
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É
J a c q u e s
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O
’
I
R
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P O U R
C H E M E L ,
in tim é
• CONTRE
•
P h i l i p p e S A I N T - B U T , appelant.
L
’ a p p e l est d’un jugem ent du tribunal d'arrondisse
ment de M o u lin s , du 7 germinal an 11 , par lequel
l’appelant a été déclaré purement et simplement non
t
r
recevable dans la demande qu il avoit
form ée contre
l’intimé en payement d’une rente de 24 boisseaux de blé
seigle, et l’intimé quitte et absous, avec condamnation
des dépens contre l ’appelant.
L 'u niqu e question est de savoir si la rente réclamée
par l’appelant est du nom bre de celles qui sont com
prises dans l’abolition générale des droits fé o d a u x , p ro
A
�noncée par les lois de
1792 et
17 9 3 ; et c’est cette
question qui a été décidée pour l’affirmative par le juge
ment dont est appel.
L ’article X V I I du décret du z 5 août 1792 porte que
dans l’abolition des droits féodaux ne sont pas com
pris les ren tes , champarts et autres redevances qui
ne tiennent point à la féo d a lité , et qu i sont dûs p ar
des particuliers à des particuliers non seigneurs ou
possesseurs de Jiefs.
• 'v
D e là la conséquence nécessaire que les rentes, cliàmparts et
autres r ede vanc es
qui
t iennent
à la féodalité >
et qui sont dûs à des seigneurs ou possesseurs de fiefs,,
sont compris dans l’abolition.
Si la redevance de vingt-quatre boisseaux de seigle,
réclamée par l’âppelant, tenait à la féodalité, et si elle
étoit due à un seigneur de fief, il a donc été bien jugé
par le tribunal de M oulins, et l’appel est inai fondé.
O r , il suffit de rappeler les titres qui ont été pro
duits en cause principale, pour porter jusqu’à la démons
tration la preuve que la redevance dont il s’agit tenoit
à la féodalité, et qu’elle étoit due à un seigneur de fief.
On pourvoit même l’établir par la seule disposition
de la coutume de Bourbonnais, dans l’étendue de laquelle
se trouvoit situé l’héritage sur lequel étoit assise la rente
dont il s’agit.
L ’article C C G X C II de cette coutume dit que la pre
mière rente constituée sur aucun héritage allodial >
�(3 )
■s'appelle rente fo n cière, et emporte droit de directe
seigneurie et de lods et ventes. L a directe seigneurie
attachée à une rente, et les droits de lods qui en sont
une suite, n'impriment-ils donc pas à une pareille rente
le caractère de féodalité?
Mais c’est surtout dans les titres produits au p r o c è s ,
qu’on trou vera, A ne pouvoir s y m épren d re, que la
rente tenoit A la féodalité, et qu’elle étoit due A un sei
gneur de fief, A cause de son fief ; et ce n’est qu’en,
omettant la plupart de ces titres, ou en mettant de côté
leurs principales expressions, qu’on a tenté vainement
de dénaturer la rente dont il s’agit.
L.e fief
et
domaine
de
Pouzeux,
d’où dépend
cette
rente, fut adjugé sur une saisie réelle en la sénéchaussée
de M oulins, par une sentence du
25
juin 1697 : l’ad
judication qui fut faite A la demoiselle Françoise A ubert
comprend le domaine de P o u z e u x , cens et droits en
dépendants.
Il y eut trois ans après une reconnoissance de la
rente , du 20 mai 1700, par Pierre Jam in , alors proprié
taire de fhéritage sujet A cette ren te, en faveur de la
demoiselle
Aubert ,
maîtresse de la seigneurie
de
P o u zeu x. Cette reconnoissance n’est pas un titre nou.
.
*
.
veau : il y est dit qu’elle est faite conformément au
titre primordial que la demoiselle A u bert en a ’ et il
•y est dit encore que la rente sera portée et payée èa
■
ladite seigneurie de Pouzeux.
A 2
�4
(
)
II y a lieu de croire que le titre prim ordial, s’il étoiü
rapporté, donneroit encore plus ¿ ’éclaircissement sur lar
nature de la rente ; et l’on verra bientôt que ce titre
primordial doit être au pouvoir de l’appelant.
L e 23 août 1720, la demoiselle A u bert vendit le fief
de Pouzeux à la demoiselle T ix ie r de la Nogerette. Il
est dit que la vente est faite du domaine de P o u z e u x ,
bâtimens, terres, etc. avec ‘le fo n d s des cens et devoirs
q u i sont dûs et dépendans de ladite maison de P o u zeux. Il y est encore dit que parmi les titres délivrés à
1 acquereur est une expédition en papier portantperéque-
ment des devoirs vendus entre les codétenteurs, passée
pardevant Duclier en 1660; ce qu’on appelle en A u
vergne également de cens est connu en Bourbonnais et
ailleurs sous le nom de peréquement. Enfin il est ajouté
que la venderesse se réserve les arrérages des devoirs
qui sont échus dudit terrier.
L e même jour d e là vente il y eu t, de la part de la
demoiselle T i x i e r , un acte de prise de possession du
domaine de P o u zeu x , otVil fut dit qu’elle prenoit posses
sion dudit domaine avec lejbn ds des cens et devoirs qu i
en dépendaient.
L e 11 octobre 1 7 6 1 , nouvelle vente du fief de P ou zeux , par un procureur constitué de Jean - Baptiste
T ix ie r de la N ogerette, à Pierre D u ran d, où il est dit
que dans la présente vente sont aussi compris quelques
articles
de
devoirs qu i étoient dus au vendeur a
cause
�C 5
)
du terrier acquis avec ledit domaine. II est aussi dit, dans
cette vente, que le vendeur a remis à l’acquéreur quel
ques titres qui sont désignés, et qu’il s’est obligé à lui
remettre tous les autres titres, papiers et enseignemens
et terrier concernant la chose vendue.
' -
L e fief de Pouzeux étoit mouvant du duché de B ou r
bonnais ; aussi voit-on , à la suite de là vente du 11 octobre
5
i y i , l’acte d’investiture qui en fut donné àTacquéreur
par les officiers de la chambre du domaine de ce duché,
le 24 février 1762.
r
L e 26 juin 1 7 7 6 , Jean Dubost et Jacques Chemel
firent l’acquisition du domaine des C h o p in s, dans la
paroisse de Treb an , d’où dépendoit la terre des M o n taix,
assujétie à la rente dont il s’a g it, à la charge de servir
i\ l’avenir les cens et devoirs qui se trouvoient sur les
objets vendus.
Soit pour faire courir le délai du retrait lignager,
soit pour empêcher le retrait censuel sur les fonds qui
dépendoient d’ une censive , et q u i étoient tenus en
directe seigneurie, il étoit nécessaire, suivant la coutume
de Bourbonnais, de prendre l'investiture des seigneurs
directs : c’est à
quoi les acquéreurs du domaine se
conformèrent ; et on trouve aux marges du contrat du
26 juin 1776 les actes d’investiture des différentes sei
gneuries qui avoient des censives sur des héritages dépendans de ce domaine.
•
Dans le nom bre de ces investitures est celle donnée
A3
�.
(6)
par le sieur de Saint-But, appelant, et qui contient en
m êm e temps quittance des droits de lods. Il n’est pas
inutile de transcrire cet acte : « Investi le présent contrat
» pour ce q u i relève de notre terrier de P o u z e u x ,
» après que l’acquéreur nous a payé les simples et doubles
» lod s, pour raison de ladite acquisition, sans préju» dice aux droits d’a u tru i, et à l’année de cens qui
» écherra à la saint Michel prochaine, l’année échue à
» la saint M ichel dernière ayant été payée, et à tous
5> autres droits et devoirs seigneuriaux , à
» les acquéreurs de
».
zaine. Fait
» Sa
in t
-B u
à
t
reconnoitre
de
la
charge par
n o u v e a u dans q u i n
V e r n e u il , le 28 novembre 1778. Signé
. »
de
'
V o ilà un acte d’investiture qui n ’eût pas été néces
saire pour la vente d’héritages qui n’auroient été sujets
qu’à de simples rentes ; au lieu qu’il étoit indispensable,
pour des héritages sujets à des rentes en directe sei
gneurie : mais ce même acte renferme de plus la quit
tance des droits de lods, qui ne pouvoient être dûs qu’à
raison d’un héritage asservi à une rente seigneuriale.
Il qualifie de cens la redevance dont il s’agit.
Sans doute on 11e prétendra pas que l'investiture et
les quittances des droits de lods se rapportoient à tout
autre héritage du domaine qu’à celui des M on taix, qui
étoit sujet à la rente dont il sagit. Il faudroit pour cela
qu’on fît voir qu’ il y avoit dans ce domaine d’autres
héritages qui relevoient du terrier de P o u z e u x , ce qui
�(7 )
seroit impossible à l’appelant: et m ê m e , dans son mé
m oire, n’applique-t-iJ pas l’acte d’investiture, et le paye
ment de lods et ventes, à d’autres héritages qu’a celui
des M ontaix; mais d’ailleurs on va démontrer qu’il ne
r el ev oi t
du terrier de Pouzeux que l’héritage des M on-
• taix sujet à la rente dont il s’agit, et cela par un' acte
de fait même de l’appelant.
'
L e 9 mars 178 4 , il fut présenté une requête au senéclial de Bourbonnais, par Philippe de Saint-But, écuyer, ’ •
sieur de P o u z e u x , et la dame D urand sa femme de
lui- autorisée, où ils disent que comme propriétaires du
f e f de P o u ze u x , il leur est dû une rente annuelle et
foncière de vingt-quatre boisseaux de seigle, su r une
terre appelée des M o n ta ix , dépendante du domaine des
Cliopins, dans la paroisse de Treban j ils répètent, dans
plusieurs endroits de cette requête, que le devoir de
vingt-quatre boisseaux de seigle f a i t une dépendance
du f i e f de P o u z e u x , et que devenant propriétaires du
f e f de P o u z e u x , ils le sont devenus du même, devoir f
puisqu’ ils ont acheté et le f e f et ses dépendances. C ’est
après cet exposé que Saint-But et sa femme demandent
permission d’assigner Chem el, qui étoit propriétaire du
,
domaine des Chopins, situé dans la paroisse de T r e b a n ,
comm e
propriétaire détenteur et jouissant de la terre
des M o n ta ix , pour être condamné à payer la rente
de vingt-quatre boisseaux de seigle , et leur en passer
nouvelle reconnaissance , et leur justifier du titre en
a
4
�C8 )
vertu duquel il jouit de ladite terre, pour être pris par
eux telles conclusions qu’ils aviseront, même en paye
ment des lods et ventes , s’il y échoit.
Cette requête fut répondue d’une ordonnance de per
mis d’assigner, et suivie d’une assignation donnée à Ghemel le
5 avril
1784.
Il étoit bien étonnant que Saint-But et sa femme de
mandassent, en 178 4 , à G hem el, la représentation du
titre en vertu duquel il possédoit la terre des M o n ta ix ,
tandis que Saint-But l u i- m ê m e , six ans auparavant, le
28 novembre 1 7 7 8 , avoit donné
l ’i n ve st it u re en
marge
de la vente de 1 7 7 6 , faite à Ghemel du domaine d’où
dépendoit la terre des Montaix. L a réserve de conclure
au payement des droits de lods, dans la requête de 1784 ,
étoit encore bien étonnante, puisque l’investiture donnée
par Saint-But en 1778 contenoit expressément la quittance
des simples et doubles droits de lods.
D u concours de tous les actes et titres qu’on vient de
rappeler avec la plus grande exactitude, de leur parfait
accord, des aveux même les plus positifs qu’on y trouve
de la part de 1 appelant, sort évidemment la démonstra
tion entière que la rente de v in g t-q u a tre boisseaux de
seigle, qui étoit due sur la terre des M o n ta ix ,
là féodalité, et q u’elle étoit due
à
des
t en o it
p art icul iers,
à
sei
gneurs et possesseurs de fiefs.
Q u ’est-il compris dans l’adjudication du fief de Pouzeux
en 1697? le fonds des cens et devoirs en dépendent s. Ces
�C9 )
mots cens et devoirs ne peuvent pas sans doute s’appliquer
à de simples rentes qui n’auroient pas emporté la directe
seigneurie ; et si on avoit voulu y comprendre la rente
dont il s’agit comme une simple rente non censuelle et en
directe, il auroit fallu l’y exprimer nommément.
Quand on consent en 1700 une nouvelle reconnoissance,
au profit de la demoiselle A u b ert, de la rente dont il s’agit,
dont il est dit qu'elle en a le titre p rim itif, la demoiselle
Aubert prend dans cette nouvelle reconnoissance le titre
de maîtresse de la seigneurie de P o u zeu x . C ’est à ce
titre qu’elle se fait faire la nouvelle reconnoissance ; et il
est ajouté que la rente sera payée et portée en la seigneurie
de P o u ze u x .
Quand en 1720 la demoiselle A ubert vend le fief de
P o u ze u x , elle comprend dans la vente le fonds des cens
et devoirs qui sont dûs et dépendans de la maison de
Pouzeux. Nulle mention de simples rentes ; et on ne peut
entendre sous les mots de cens et devoirs que des rentes
en directe seigneurie. Elle délivre une expédition d’un
peréquement des devoirs vendus entre les codétenteurs;
et par cette expression de peréquement on en ten d, en
Bourbonnais, ce qu’on appelle en A u vergn e également
de cen s' c’est-à-dire, l’acte par lequel les codétenleurs
font entr’eux la division des cens, pour la portion que
chacun d’eux doit en payer. L a demoiselle A u bert se
réserve dans le même acte les arrérages des devoirs qui
sont éclius dudit terrier: et qu’est-ce qu’on entend géné-
�( ÏO )'
raleraent par un terrier , sinon le recueil des reconnoissances des cens et de la directe seigneurie.
Quand la demoiselle T i x i e r , qui venoit d’acquérir de
la demoiselle Aubert le fief de P o u ze u x , en prend pos
session , il'est dit dans Tàcte qu’elle prend aussi possession
du fo n d s des cens et devoirs qu i en dépendent.
5
Quand en i y i le fief de Pouzeux est vendu à Pierre
' D u ra n d , c’est aussi avec les articles de devoirs q u iéio ien t
dus au vendeur à cause du terrier acquis avec ledit do•
»
inaine.
L e domaine de Pouzeux ¿toit
un
fief du duché de
Bourbonnais; et c’est aussi pour cela que la vente en est
présentée aux officiers du domaine de ce du ch é, qui en
donnent l’investiture.
Quand ensuite, en 1 7 7 6 , Chemel acquiert le domaine
d’où dépendoit la terre des M o n ta ix , qui étoit sujette à
la rente dont il s’agit, pourquoi s’en fait-il donner l’inves
titure par l’appelant lui-m êm e, alors propriétaire du fief
de P o u z e u x , investiture qui ne pouvoit avoir lieu que
pour des fonds sujets à des rentes censuelles et en directe
seigneurie, et non pour de simples rentes? Mais surtout
pourquoi l’appelant se fait-il payer des simples et doubles
droits de lods, à raison de la terre des M o n ta ix , si la renie
due sur cette terre n'étoit pas une rente en directe seigneu
rie? et pourquoi même Saint-But porte-t-il la rigueur
jusqu’à se faire payer un double droit de lods, parce que
la payement du simple droit n’avoit pas été payé dans les
�quarante jours de délai prescrits par l'article 394 de la
coutume de Bourbonnais ? Pouvoit-il y avoir une rcconnoissance plus formelle que la rente assise sur la terre
des Montaix étoit une rente en directe seigneurie, qui
par conséquent tenoit à la fé o d a lité , et qu’elle étoit due
à un seigneur ou possesseur de fief? R ien n’est plus plaisant
que la réponse sur ce dernier article, dans le mémoire de
l’appelant. Ghemel a , dit-on, demandé l’investiture sans
nécessité ; il l’a demandée sans doute pour éviter des droits
de francs fiefs, qui auroient été considérables. Mais où
a-t-on pris qu’il fût dû des droits de francs fiefs sur la vente
d’un héritage sujet à une rente foncière ? et p u is , les
droits de francs fiefs eussent même été fort au-dessous
d’un simple droit delod s, et bien plus encore d’un double
droit de lods.
Il est encore plus pitoyable de dire que S a in t-B u t a
fait un fau x em ploi du m ot cen s , q u ’il a fait une per
ception illégitime qu’ on auroit pu lui contester en p ro u
vant que la rente n’étoit pas féodale. T o u s les actes p rou
vent au contraire la féodalité de la rente,* et l’investiture
et la réception des droits de lods n’en sont que la con
firmation de la part de celui qui avoit alors intérêt q.u’elle
fût féod ale, et qui ne change aujourd’hui de système
que parce qu’il auroit un intérêt contraire.
,
Il n’ est pas inutile de parler d’ une transaction du 1
septembre 1790, passée entre les parties, dont l’appelant
dans son m ém oire paroît vouloir tirei^avantage : mais
�( 12 )
on croît pouvoir établir quelle prouve au contraire
de plus en plus la qualité féodale de la rente dont il
s’agit.
Voyon s ce qui avoit donné lieu à cette transaction,
et quel en fut le résultat.
L a transaction nous apprend que G herael, proprié
taire de la terre des M on taix, qui faisoit l’assiette de la
rente dont il s’agit, prétendoit que toute cette terre des
M ontaix étoit entièrement couverte par des cens qui
étoient dûs, soit au domaine du roi, soit au seigneur de
Iiamotte-Juliet ; d ou il
prétendoit
qu’il
ne
pouvoit pas
devoir la rente dont il s’a g it , qui ne pouvoit pas avoir
son assiette sur la terre des Montaix.
Cette prétention ei\t été bien ridicule, si de part et
d ’autre les parties n’avoient pas reconnu que la rente dont
il s’agit étoit due en directe seigneurie; car il n’est pas
douteux qu’on peut donner à titre de rente foncière sans
directe des fonds déjà assujettis à des censives,
Néanmoins sur cette prétention les parties nommèrent
des experts qui vérifièrent que de l’objet qui avoit fait
l’assiette de la rente, il y en avoit une partie dans la
censive du ro i, et une autre dans celle de la seigneurie
de Iiamotte-Juliet; mais en même temps il fut reconnu
qu’il en resloit une autre partie sur laquelle no porloient
pas les censives du roi et de Lajnotle-Jullct; et le résultat
de la transaction fut que Chemcl ne pouvoit point se
dispenser de payer la rente; en conséquence il paya les
�*3
(
)
arrérages, et s’obligea de continuer la rente ;\ l ’avenir.
Voilà donc par cette transaction la rente dont il s’agit
bien assise sur un terrain qui n’étoit sujet ni'à la censive du roi ni à celle de Lamotte-Juliet, qui par con
séquent avoit été allodiale dans le principe, dans la main
du seigneur de fief de Pouzeux, qui ayant donné à rente
ce terrain allodial , cette rente par la disposition de
l’article G C C X C II de la coutume de Bourbonnais empor*
toit droit de directe seigneurie et lods et ventes ; ,et
une rente dépendante du f i e f de P o u z e u x y comme l’é
noncent tous les titres qu’on a rappelés, et qui étoit due
au seigneur de lief de Pouzeux. L a transaction de 1790
feroit donc , s’il en étoit besoin, une nouvelle preuve que
la rente dont il s’agit tenoit nécessairement ¿1 laféodalité.
Après tout cela , après des preuves si multipliées et
¿les aveux si positifs, le tribunal dont est appel auroit-il
pu laisser subsister la redevance dont il s’a g it , sans con
trevenir
formellement à la disposition de la l o i ?
Q ue
l’on s’écrie tant que l’ on v o u d r a , Q u ’elle est d u r e , cette
loi! ceux qu’elle affranchit des droits féodaux ne la trou
vent pas telle; et c’est sans doute le plus grand et le trèsgrand nom bre des F ra n ça is, p e u t - ê t r e plus des n eu f
dixièmes : mais d’ailleurs elle est écrite, ,cctte lo i , et les
•
•
m
f
juges ne pouvoient pas s en écarter.
Il
est maintenant facile de pressentir les motifs qui ont
dû dicter la disposition du jugement dont est a p p e l, et
�14
(
)
on va les répéter pour en rendre le b ie n -ju g é d’autant
plus sensible.
P rem ier motif. — Q u ’à l’époque de la transaction de
1 7 9 0 , Saint-But étoit, comme il est aujourd’ fîui, à cause
de son épouse, propriétaire du ci-devant fief et seigneurie
de Pouzeux.
Deuxièm e m otif.'■
— Que la reconnoissance de la rente
dont il s’agit ne fut consentie en 1700, à la demoiselle
A u b e r t , qu’en sa qualité de maîtresse de la terre et
seigneurie dudit P o u z e u x ; que cette rente y fut stipulée
payable et portable en ladite seigneurie, et que Jamin
èt sa femme ne reconnurent la rente que comme d’un
terrain appelé des Montaix.
Troisièm e motif. — Que des contrats de vente de 1720
et de 1751 il résulte qu’il dépendoit du fief de Pouzeux
un fonds de cens et devoirs consignés dans un terrier.
Quatrième motif. — Que lors de l’acquisition faite en
1 7 7 6 , par Chem el, du domaine des C h o p in s, dont dé
pend la terre des M on taix, Saint - But étoit tellement
persuadé que la rente à lui due étoit la première rente
constituée, conséquemment cens, qu’il investit le même
contrat, perçut les lods et doubles lods du prix de la
vente de la terre des M o n ta ix , qualifia cette rente de
cens dans sa réserve de l’année à éch o ir, et se fit de
plus réserve de tous autres droits et devoirs seigneuriaux.
Cinquième motif. — Que dans la demande formée en
�C
15
)
1784 ( à la requête de Saint-But et de sa f e m m e ) , on y
annonce que ce n’étoit qu’en qualité de fief, et en vertu
de la reconnoissance précitée (d e 1700 ) , qu’onréclam oit
ladite rente.
Sixième motif. — Que la transaction de 1790 n’ayant
eu lieu que parce que les censives du roi et de Lamotte
ne couvroient pas tout le terrain des M o n t a ix , et qu’il
en restoit d ix - h u it boisselées pour l’assiette de la rente
en question, ( cette transaction ) peut d’autant moins être
considérée comme le titre constitutif, que la reconnois
sance de 1700 y est rappelée comme le véritable titre ,
d’après un autre titre primordial que la demoiselle A u b e rt
y
convient
avoir pardevers elle.
Septième motif. — Que la constitution de la rente doit
être considérée comme la première q u i , aux termes de
l’article C C G X C II de la coutume, étoit qualifiée cens em
portant. droit de directe seigneurie et lods et ventes.
Huitième motif. — Q u’il est prouvé que la rente a
toujours été regardée, par ceux à qui elle étoit d u e , et
par ceux qui la devoient, comme seigneuriale.
Neuvième motif. — Que suivant les lois de 1792 et
1793 , toutes redevances seigneuriales et droits féodaux
ont été supprimés sans indemnité; et les arrérages, m êm e
ceux dûs en vertu du jugement ou de convention , ne
sont pas exigibles.
Dixièm e motif. — Q u’enfin nrayant été excepté que
les rentes qui ne tenoient pas à la féodalité, et qui étoient
�•
( 16 )
•
'
d ues par des particuliers à des particuliers non seigneurs
ni possesseurs des fiefs de P o u z e u x , il s’ensuit que SaintBut est non recevable à l’exiger.
■
Tels sont tous les motifs d’après lesquels le jugement
déclare en effet l’appelant non recevable dans sa demande,
en renvoie l’intimé quitte et absous, et condamne SaintB u t aux dépens. L e dispositif est justifié par les motifs;
et les motifs ne sont que l’application des conséquences
qui dérivent des titres et actes qui sont produits. L a féo
dalité de la
rente
dont il s’a g it, et dans la main d’un
seigneur ou possesseur de fief, est si
é vi d e nt e
par elle-
m êm e, que ce seroit perdre du temps que de répondre
aux objections du mémoire de l’appelant, qui ne sont
que des efforts d’imagination ; et ce seroit par trop se
défier des lumières du tribunal d’appel.
L e citoyen A N D R A U D , avocat.
L e citoyen V A Z E I L L E , avoué.
R
I O M , d e l' impr im erie de L
a n d r i o t
, seul imprimeur du
T r i b u n a l D’appel. — A n 1 1 .
�
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chemel, Jacques. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Vazeille
Subject
The topic of the resource
rentes foncières
reliquat féodalité
contentieux post-révolutionnaires
franc-alleu
fiefs
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jacques Chemel, intimé ; contre Philippe Saint-But, appelant.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1697-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0246
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0245
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53745/BCU_Factums_M0246.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chopins (domaine des)
Montaix (terre des)
Treban (03287)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
contentieux post-révolutionnaires
fiefs
franc-alleu
reliquat féodalité
rentes foncières
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53744/BCU_Factums_M0245.pdf
1e5328d6257faad47380f00218fc1207
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Text
1**Uuv* ']u y < ÿ u ^
TRIBUNAL
D’APPEL
P
UR
PO
OU
R
P h ilip p e SA IN T-BU T,
S É AN T A R I O M ,
propriétaire, habitant
au lieu de Pouzeux, commune de Comps, et
M a r i e D U R A N D , son épouse, appelans d’un
j u g e m e n t rendu au tribunal d ’arr ondissem ent de
M oulin s le 7 germinal an 1 1 ;
CONTRE
J a c q u e s C H E M E L , propriétaire, habitant de
la commune de Tréban, intimé.
QUESTION.
Rente -purementfo n ciè r e , dont on veut éviter le -paye
ment sous prétexte de féodalité.
I l n’est que trop fréquent de voir des débiteurs de
mauvaise fo i, s’aider des lois révolutionnaires pour se
A
�.
.
( 2 )
..
.
dispenser d’acquitter une dette légitime ! ces tentatives
sont rarement couronnées du succès; cependant le nouvel
arrêté du conseil d’état, dont on fait une fausse applica
tion , enhardit la plupart de ceux qui doivent des rentes.
Il est facile de trouver un prétexte avec la loi du 17 juillet
1793. Mais ce qui doit étonner, c’est que les tri'b^unaju'x ^
admettent légèrement des prétentions aussi odieuses J%sub-j?*;:i;
versives du droit sacré de propriété.
' * , ••
'"'‘''s
F A I T S .
L e cit. Saint-But et son épouse sont propriétaires du
ci-devant fief connu sous le nom de P o u z e u x , situé dans
le département d’Allier.
Il leur est dû par Jacques Chemel une rente fo n cière
de vingt-quatre boisseaux de blé-seigle. Cette rente, par
les titres les plus anciens, est qualifiée de foncière ; elle
n’a aucun caractèi’e de féodalité; elle n’entraîne avec elle
ni mutation ni droits de lods, et par conséquent ne peut
être comprise dans la suppression que prononce les lois
des 20 août 1792 et 17 juillet 1793.
On voit dans un titre du 20 mai 1700, que Pierre
Jamin et Philiberte R o llie r, représentés par l’intim é,
reconnoissent, au profit de demoiselle Françoise A ubert,
propriétaire de la seigneurie de Pouzeux, (a u x droits
de laquelle sont les appelans ) la quantité de vingt-quatre
boisseaux de b lé -seig le , mesure de M oulins, bon blé
loyal et marchand, de rente foncière duc à la demoiselle
A u b ert, annuellement, par les sieur et dame Jam in, af
fectée et hypothéquée sur une terre appelée les M ontaix,
�C 3 )
dépendante de leur domaine des Chopins, située en la
paroisse de Tréban; et généralement sur tous leurs autres
Liens, conformément au titre primordial de cette rente.
Il est dit que les sieur et dame Jamin ont promis et
seront tenus de payer annuellement ces vingt-quatre bois
seaux seigle , à chacun jour et fête de saint M ichel de
_ chaque année, et de les porter à la seigneurie de Pou- ..
zeux ; comme aussi de payer et porter les. arrérages .qui pourroient en être dûs.
..............
.
Il n’est rien ajouté qui puisse faire présumer cette rente
féodale : nulle obligation de payer les droits de lo d s, ou
autres casualités. La vente est pure et simple, sans aucunes
stipulations qui accompagnoient ordinairement les presta
tions seigneuriales.
Cette propriété passa dans la suite au citoyen T ixier de
la Nogerette, q u i, n’étant pas payé de la rente toujours
qualifiée fo n c iè r e , obtint le 23 mars 1735 une sentence
en la sénéchaussée de M oulins, qui déclaroit le contrat de
rente exécutoire contre Louis Jam in, héritier de Pierre.
Cette instance fut reprise contre Antoine Baratlion, tu
teur d’autre Louis Jamin , fils de L ou is, et ensuite contre
le curateur à la succession vacante de Louis Jamin ; et la
sentence condamna ce curateur à passer titre n ou vel, et à
payer les arrérages de cette rente.
Il arriva dans la suite différens cliangemens. La dame
T ro lle t, mère des appelans, obtint encore une sentence
le 4 septembre 1771 , qui condamna le nouveau pro
priétaire des héritages assujétis à la rente, au payement
d’icelle. Une autre sentence contradictoire, du 20 août
A 2
�(4 )
17 7 6 , porte encore condamnation de cette même rente
foncière.
"
Enfin, en 1784, les appelans se virent obligés d’assigner
l’intimé pour être tenu de payer cette même rente foncière.
Il s’éleva sur cette demande une assez longue discussion :
Cheme l , intim é, prétendoit que cette rente ne pou voit
avoir son assiette sur sa terre des M ontai x , parce que cette
^ terre se trou voit couverte par les reconnoissances consen
ties au profit du r o i, et au profit d’un sieur Lamotte-Juliet.
Il y eut une expertise sur le fait allégué par Chem el; mais
la contestation fut terminée par une transaction passée
entre l’appelant et l’intimé , le 7 septembre 1790. Chemel
reconnut, par cet acte, qu’il étoit possesseur et détenteur de
la terre assujétie à cette rente; en conséquence, il.s’obligea
de pa^er, a chaque jour de saint M ichel, la rentef o n d ère
de vingt-quatre boisseaux de blé-seigle, mesure de M ou
lins. Il acquitta les arrérages qui étoient dûs jusqu’alors,
ainsi que les frais du traité.
Chem el, intim é, a acquitté la rente pour l’an 1791 ;
m ais, étant en retard de payer l’année 1792, il lui fut fait
un commandement de payer, à la requête de l’appelant,
le 29 janvier 1793. Depuis, le citoyen Saint-But fut obligé,
et pour cause, de discontinuer ses poursuites. Mais , le 4
thermidor an 10, il fit citer l’intimé au bureau de paix du
canton du M ontaix, pour se concilier sur la demande ten
dante au payement de la rente Jbn cière dont il s’agit,
ainsi que des arrérages échus.
•
L ’intimé fit comparaître son fils au bureau de paix ; mais
il refusa de s’expliquer sur la demande ; il déclara qu’il ne
�.
i* ? .
.
se présentait que pour obéir à justice, et ne voulut pas se
concilier.
•
Assigné au tribunal de M oulins, par exploit du 24 du
même mois de thermidor , Chemel donna plus de déve
loppement à sa défense. Il prétendit que cette rente f o n
cière étoit entachée de féodalité ; il excipa des lois des 25
août 1792 et 17 juillet 1793 qui suppriment toutes rede
vances seigneuriales. La reconnoissance de 1700 n’étoit,
suivant lu i, qu’un titre féodal; Saint-But lui-même s’étoit permis de donner l’investiture de l’héritage assujéti à
la rente; dans la demande qu’il avoit formée en 1784, et
sur laquelle étoit intervenu le traité de 1790 , Saint-But
s’étoit réservé tous devoirs seigneuriaux. Enfin Chemel
argumenta de l’article CCG X C 1I de la coutume de Bour
bonnais , qui dit <x que la première rente constituée sur
» aucun héritage allodial, s’appelle rente foncière, etem» porte droit de directe seigneurie et de lods et ventes, a
Chemel conclut de toutes ces circonstances, et surtout
de ce que la rente étoit due à un propriétaire de fief,
qu’elle étoit évidemment abolie par la loi du 17 juillet
1 793*
.
.
.
Il fut facile au cit. Saint-But de repousser ces objections :
la coutume de Bourbonnais est allodiale ; les héritages y
sont présumés francs et réputés tels, tant que le contraire
n’est pas établi.
Un seigneur de fief^ comme tout autre propriétaire f
peut posséder de simples rentes qui n’entraînent avec elles
aucune redevancê'Teôdaïe?
’
Des expressions hasardées, des réserves insignifiantes,
ne peuvent changer la nature de la rente. -
�(6 )
^
L a disposition de la coutume de Bourbonnais ne con
sidère la rente en directe, qu’autant qu’elle est la première
constituée sur un héritage allodial de sa nature ; et cette
disposition, dans tous les cas, seroit aujourd’hui supprimée
par la loi ; c’est-à-dire, que le propriétaire de la rente ne
pourrait plus exiger le droit de lods, mais la rente n’en
seroit pas moins due.
lie tribunal de cassation s’étoit déjà prononcé en faveur
du propriétaire, et avoit proscrit la prétention des débi
teurs de mauvaise fo i, q u i, sous des prétextes aussi frivoles,
avoient cherché à se dispenser de remplir leurs obligations.
Cependant les argumens de Chemel prévalurent : un
jugement contradictoire, du 7 germinal an 1 1 , déclara le
citoyen Saint-But non recevable dans sa demande ; et ce
jugement est m otivé, i°. sur ce q u e, à l’époque de la
transaction de 1790, le citoyen S a in t-B u t et son épouse
étoient, comme à présent, propriétaires du ci-devant fief
et seigneurie de Pouzeux.
2°. Sur ce que la reconnoissance de la rente du 20 mai
iyoo n’avoit été consentie à la demoiselle A ubert, qu’en
sa qualité de maîtresse de la terre et seigneurie de Pouzeux.
30. On expose que cette rente a été stipulée payable et
portable à ladite seigneurie.
4°. Il résulte des titres, et notamment des contrats des 23
août 1720 et 11 octobre 17 5 1, qu’il dépendoit du ci-devant
fief de Pouzeux un fonds de cens et devoirs seigneuriaux
consignés dans un terrier.
O11 ajoute, en cinquième lieu , que lors de l’ncquisitiori
du domaine des Chopins , faite en 1776 par Chem el, le
cit. Saint-But étoit tellement persuadé que la rente et oit
;
�( 7 }
en directe, qu’il investit le même contrat, en perçut les
lods, qualifia cette rente de cens, dans la réserve de l’année
à échoir, et se réserva de plus ses autres droits et devoirs
seigneuriaux.
.
O n observe encore que , lors de la demande de 1784,
le citoyen Saint-But annonça qu’il répétoit cette rente
comme propriétaire du fief , et en vertu de la reconnoissance de 1700.
- 7°. O n dit que la transaction de 1790 n’a eu lieu que
parce que les censives du roi et de Lamotte-Juliet ne couvroient pas toutes les terres du M o n taix, et qu’il en restoit dix-huit boisselées pour l’assiette d elà rente.
8°. La reconnoissance' de 1700 ne peut pas être con
sidérée comme le titre constitutif, puisque la demoiselle
A ubert reconnoît en avoir un autre plus ancien.
90. Il n’est pas justifié que les dix-huit boisselées de terre
n’étoient pas allodiales, ou qu’elles étoient chargées d’une
redevance quelconque, lors de la constitution de cette
rente.
'
O n en conclut qu’elle doit être considérée comme la
première rente, q u i, aux termes de l’art. C C C X C II de la
coutume de Bourbonnais, étoit qualifiée cqyis emportant
droit de directe, seigneurie, et de lods et ventes.
10°. On prétend qu’elle a toujours été considérée, par
ceux à qui elle étoit d u e , et par ceux qui la devoient,
comme rente seigneuriale.
i i °. Que d’après les lois de 1792 et 1793, toute rede
vance seigneuriale et droits féodaux ont été supprimés sans
indemnité, ainsi que tous arrérages, même ceux dûs en
vertu de jugemens et de conventions.
�(8 )
. ,
. i2 °. Q u’il n’y a eu d’exceptées que les rentes qui n’avoient rien de féodal, ou possédées par des particuliers
non seigneurs on non possesseurs de fiefs.
Et celle en question étant due au seigneur ou posses
seur du iief de P o u zeu x, il s’ensuit que le cit. SaintrBut
n’est pas recevable à l’exiger.
- L e citoyen Saint-But, qui ne peut concevoir comment
on peut abuser ainsi des lois pour se dispenser de payer
une rente purement foncière, a interjeté appel d’un juge
ment qu’on peut qualifier de révolutionnaire; et c’est sur
cet appel que le tribunal a à prononcer.
A vant de proposer les moyens de l’appelant, et de dis
cuter les motifs^ du jugement dont est a p p el, il est à
propos d’examiner ce qu’on entend par première rente,,
et comment on doit expliquer l’art. C C C X C II de la cou
tume de Bourbonnais.
.
. Cet article est à peu près basé sur la disposition des
premiers articles du tit. X X X I de la coutume d’Auvergne.
Il seroit aujourd'hui bien difficile de définir ce qu’on entendoit par assiette de rente ; car le dernier commenta
teur observe lui-m em e que, quoique ce genre de con
venions fût très-essentiel pour le commerce des choses ,
dans les temps reculés, les rédacteurs, malgré tous leurs
eil’orts, n’ont pas réussi à l’éclaircir pour la postérité.
. Ce qu’il y a dé plus évident, c’est: que la première rente,
qualifiée de rente seigneuriale est celle qui avoit été créée
ou concédée par la constitution d’un héritage allodial , et
non une simple rente constituée à prix d’argent sur un héri
tage allodial. C’est ainsi que l’a observé Dumoulin sur cet
article C C C X C II de la coutume de Bourbonnais : Jtiiellige
�C9 )
lige , d it - il, n on p er emptionern sub p ecu n iâ , sed per
concessionem j'u n d i ■alitis consuetudo esset valdè stulta
et ineptci. Duret et Semin ont fait la même remarque.
A u roux des Pom m iers, sur cet article, nombre 16 ,
observe que quand le seigneur direct est maître du cens
et de la justice, et qu’il demeure sur le lie u , pour lors
le cens n’est point quérable; mais le tenancier est tenu
de payer et porter au seigneur censier, sans être de
mandé , à la seigneurie ou cliâteau où il est dû , si le
titre n’est contraire.
D e ces observations préliminaires il semble résulter
que l’article de la coutume ne s’applique pas à la rente
dont il s’agit. Rien ne prouve qu’elle soit le prix de la
concession d’un fonds allodial; tout annonce au contraire
que ce n’est qu’une simple rente assise sur un fonds ro
turier et non allo d ial, qui par conséquent n’emporte
point directe ni droit de mutation.
En effet, suivant l’acte du 20 mai 1700, on voit que
Pierre Jam in, et Philiberte R o llier, sa femm e, reconnoissent, au profit de Françoise A u b ert, la quantité de
vingt-quatre boisseaux de blé-seigle , mesure de M oulins,
bon blé loyal et marchand, de rentefo n ciè r e due à la
dite demoiselle A u b e r t, annuellement, par les sieur et
dame Jam in, affectée et hypothéquée sur une terre ap
pelée des M on taix, dépendante de leur domaine des
Chopins, et « généralement sur tous leurs autres biens,
» conformément au titre primordial de la rente que ladite
» demoiselle Aubert en a. »
’ Il est ajouté : « Laquelle quantité de vingt-quatre bois
» seaux seigle, comme dit est, ils seront tenus de payer
'
B
�.
( 10 )
.
,
» et porter a ladite demoiselle, à chaque jour et fête de
» saint M ich el, à la seigneurie de Pouzeux.
Rien n’annonce, dans ce titre, le prix de la concession
d ’un héritage allodial.
Si c’eût été une première rente emportant directe, il
eût été inutile de stipuler qu’elle seroit portable à la
seigneurie de Pouzeux, puisque, d’après A u ro u x , cette
rente étoit portable de droit au manoir du fie f, sans
aucune stipulation; dès-lors jusqu’ici elle n’a aucun des
caractères des premières rentes emportant directe.
D ’un autre cô té , C hem el, représentant le preneur à
rente, soutenoit, lors du traité du 7 septembre 17 90 7
que cette rente ne pouvoit.pas avoir son assiette sur la
terre des M ontaix, parce que cette terre se trouvoit cou
verte par des reconnoissances consenties au profit du roi
et du seigneur de Lam otte-Juliet ; de sorte que, dans le
système de l'in tim é, l ’héritage spécialement affecté au
payement de la rente ne pouvoit être allodial, si elle
étoit déjà couverte par d’autres terriers.
Il faudroit donc conclure, d ’après l’intimé lui-m êm e,
que l’article C CCX CII de la coutume ne reçoit pas son
application à la rente dont il s’agit; qu’elle n’emportoit,
de sa nature, aucune directe seigneurie; que par consé
quent le payement pouvoit en être exigé.
E n effet, toute renie qualifiée foncière, et sans aucun
accompagnement féodal, doit continuer à être servie. L ’ar
ticle II de la loi du 17 juillet 1793, cette loi si souvent in
voquée , et qu’on trouve encore à regret dans notre code
de législation , du moins pour tout ce qui est le prix de la
concession d’un fonds, excepte formellement toutes les
rentes foncières.
�c * o
Et certes, il est bien difficile de confondre des rentes
de cette nature avec des rentes féodales : les ci-devant
seigneurs n’étoient que trop soigneux de stipuler toutes
les clauses qui donnoient le caractère de féodalité ; on
les accusoit plutôt d’augmenter dans les nouvelles reconnoissances les charges d’une ren te, que de les modifier.
Combien de ratifications postérieures qui rendoient féo
dales des rentes qui n’étoient dans le principe que fon
cières ! Ne remontoit-on pas tous les jours au titre primitif',
pour vérifier si les reconnoissances postérieures étaient
conformes aux premières ? Tous les jours des plaintes
nouvelles sur les usurpations des seigneurs. E t dès que la
reconnoissance de 1700, qui, dans l’espèce, ne rappelle
qu’une rente foncière , n’a ajouté aucune clause, aucune
trace de féodalité , il faut en tirer la conséquence que c’est;
une simple rente foncière, dont la prestation ne fait pas
la matière d’un doute.
>
L e caractère d’une rente foncière ne peut se distinguer
que par les expressions du titre qui en porte la création.
L ’hypothèque spéciale donnée à la rente n’est pas une
preuve que la rente soit le prix de la concession. Il est
reconnu qu’on pouvoit constituer une rente purement
foncière en concédant un fonds roturier et non allodial.
L ’article CCCXGII de la coutume suppose deux faits constans ; l’un que la rente est la première constituée sur l’hé
ritage *, le second que l’héritage sur lequel la rente est cons
tituée , est allodial. O r, la preuve de ces deux faits ne se
trouve point dans la cause. Rien n’établit que la rente
dont il est question, soit la première constituée; rien ne
constate que l’héritage sur lequel elle a été constituée
B z
�(12 )
'
soit allodial. Chemel avoit même une prétention toute
contraire, puisqu’il soutenoit que son héritage étoit cou
vert par deux terriers diiFérens.
L e mot a llo d ia l, employé par la coutum e, prouve
qu’une rente foncière peut être assise sur un fonds non
allodial. Si aujourd’hui le citoyen Chem el, changeant de
langage, prétend que le fonds hypothéqué spécialement
à la rente, étoit allodial, ce seroit une exception, et c’est
à lui à le prouver.
M ais, en le supposant allodial, oseroit-on soutenir au
jourd’hui que la disposition exorbitante de la coutume
peut imprimer à la rente un caractère de féodalité te l,
qu’elle en entraîne la suppression ; ne peut-on pas d ire ,
au contraire , que la loi a fait disparoître l’article de la
coutume établissant la directe, mais laisse subsister une
rente qualifiée simplement dq fo n cière’, cette idée recevra
dans la suite un plus grand développement. On va s’oc
cuper d’analiser les motifs qui ont servi de base au juge
ment dont est appel.
L e premier consiste à dire que lors de la transaction
de 1790, le cit. Saint-But et son épouse étoient comme
à présent propriétaires du iief et seigneurie de Pouzeux.
Mais qu’importe la qualité des appelans ? n’arrive-t-il
pas tous les jours qu’un seigneur de fief possède des rentes
purement foncières, même dans l’élcndue de son fief ;
aucune loi n’a établi qu’une rente purement foncière de
sa nature, dût être réputée féodale, par cela seul qu’elle
étoit dans la main d’un ci-devant seigneur.
T e l fut le m otif d’un jugement du tribunal de cassa
tion, en date du 3 pluviôse an d ix , qui confirma un juge-
�( 13 )
ment rendu en dernier ressort au tribunal de Strasbourg,
portant condamnation contre les débiteurs de la ren te,
quoiqu’elle fût due à un ci-devant seigneur.
L e deuxième motif n’est qu’une suite du prem ier, et
s’écarte par le même moyen : on dit que la reconnoissance
de la rente n’a été faite à la demoiselle Aubert qu’en sa
qualité de maîtresse de la terre et seigneurie de Pouzeux.
Mais on n’apei'çoit pas dans l’acte que ce soit à cause de
sa qualité. Si elle prend celle de maîtresse du fief de Pou
zeux, on ne dit pas que la rente soit due par la raison
qu’elle est dame du iief. E t comme un propriétaire de fief
peut posséder de simples rentes, ce motif est tout à la fois
erroné et inconséquent.
Comment les premiers juges ont-ils pu relever, dans le
troisième m otif, que la rente avoit été stipulée payable et
portable à la seigneurie de Pouzeux -, tandis que si elle étoit
seigneuriale , elle seroit portable de sa nature sans stipula
tion, ainsi que l’a remarqué A uroux des Pommiers? Cette
clause tendroit donc au contraire à effacer le caractère de
féodalité qu’on veut lui im prim er, puisqu’on a jugé néces
saire d’imposer cette condition, pour qu’elle fût portable.
On d it, en quatrième lie u , qu’il est prouvé par titres
qu’il dépendoit du ci-devant fief de Pouzeux un fonds
de cens et devoirs seigneuriaux consignés dans un terrier.
Mais de ce qu’il a pu dépendre de cette terre des rentes
féodales, doit-on en conduire que celle dont il s’agit, qua
lifiée de fo n c iè r e , est une rente féodale ? D ’abord on ne
justifie pas que la rente réclamée fasse partie de ce terrier,
n i que l’acte du 20 mai 1700 y soit inséré; et quand il y
seroit, pourroit-on la regarder comme féodale, contre la
�.
.
(. I 4 )
teneur du titre qui la qualifie de rente purement foncière.
On sait qu’en général les terriers renfermoient tout à
la fois des redevances seigneuriales , comme des rentes
simples; il suffisoit qu’elles appartinssent à des seigneurs,
pour les consigner dans le môme terrier ; et le tribunal
d’appel, n’a pas eu égard à ce m oyen, dans la cause du cit.
de X/assalle, contre plusieurs habitans de Blanzac.
' Ces particuliers se refusoient à payer des percières, sur
le fondement qu’elles étoient dues à un seigneur, et que
la reconnoissance étoit extraite de son terrier.
- Mais ils n’en furent pas moins condamnés au payement,
parce qu’il fut vérifié que ces percières n’étoient nullement
féodales, et qu’un seigneur, surtout dans un pays où on
admet la maxime nul seigneur sans titre}pou voit, comme
tout autre particulier, posséder des rentes non féodales.
La teneur du titre, qui n’entraînoit aucun droit de mu
tation, ni aucun caractère de féodalité, détermina le ju
gement.
Cette décision est conforme à la doctrine qu’on trouve
consignée dans un jugement du tribunal de cassation du 29
thermidor an 10. On va môme jusqu’à dire, dans les motifs
de ce jugement, « que le faux emploi', dans un acte , de
» quelques mots appartenais A La féodalité, ne peuvent
» pas rendre féodale une concession qui ne pouvoit être
» telle, et qui d’ailleurs est caractérisée par l’acte de bail
à renie foncière. »
Ici on n’a employé aucune expression qui appariîenno
à la féodalité, on a caractérisé la rente àe purenient fon
cière., le juge ne devoit y voir que ces mois : la teneur du
liti-y est au-dessus de toutes les ¿illégations ou interpréta-
�( Z5 )
tions. D n’est pas justifié qu’elle fasse partie du terrier de
Pouzeux : si elle n’en fait pas partie, il faut en conclure
que la rente n’est pas féodale ; si elle y est consignée, on
ne pourroit en tirer aucune conséquence sur sa nature. Ce
motif n’est donc d’aucune considération.
On reproche dans le cinquième motif, au cit. Saint-But,
d’avoir investi le contrat d’acquisition fait en 1776 , par
Chem el, d’en avoir perçu les lods, d’avoir qualifié cette
rente de cens dans la réserve de l’année à échoir ; et enfin
de s’être réservé, dans sa demande de 1784, ses autres
droits et devoirs seigneuriaux.
■
Mais si le cit. Saint-But a donné une investiture qu’on
lui a demandée sans nécessité, s’il a perçu des lods qui ne
lui étoient pas dûs, s’il a qualifié sa rente de cen s, quoi
qu’elle fût fon cière, peut-elle être devenue féodale ? le
cit. Saint-But peut-il en avoir changé la nature ?
Chemel sans contredit pouvoit se passer de l’investiture;
il l’a demandée sans doute pour éviter des droits de franc
fief qui étoient considérables; il a payé des lods qu’il pou
voit refuser. Saint-But a fait un faux emploi du mot cens
qui appartient à la féodali té : qu’en peut-il résulter ? rien
autre chose sinon que le cit. Saint-But a fait une percep
tion illégitime qu’on auroit pu lui contester en prouvant
que la rente n’étoit pas féodale; mais il seroit injuste et con
traire à tous les principes de la matière, d’inférer d’une
circonstance indifférente en elle-meme, que la rente dont
il s’agit est comprise dans la suppression de la loi du 17
juillet 1793.
Certes, par cette perception, ou ces réserves inconve
nantes, Saint-But a fait eucore moins que si, dans des ra-
�.
.
.
' ,( , 5 } .
.
tifications postérieures, il eût fait reconnoître la rente
comme seigneuriale, emportant droit de lods, etc.
Cependant on sait que des ratifications de ce genre , ^
même souvent répétées, n’auroient rien ajouté à ses droits,
ni changé la nature delà redevance; il auroit toujoui*s fallu
remonter au titre prim itif, pour déterminer l’origine et
la nature de la rente.
.
“
E t pourroit-on croire que parce qu’un débiteur ignorant
a payé sans demande, sans jugem ent, des droits de lods
qui n’étoient pas dûs, ce même débiteur peut profiter de
sa faute, pour se dispenser de payer aujourd’hui la même
rente ?
O n lui répondroit avec succès : Ce que vous avez fait
dans un temps où on pouvoit errer sur la nature cl’une
redevance, où le créancier pouvoit avoir des prétentions
exagérées, n’a pu augmenter ni diminuer les droits de
chacun , n’a pu donner l’empreinte de la féodalité à une
rentcjo n cière; et comme les rentes foncières sont excep
tées de la suppression portée par la lo i, vous ne pouvez
vous dispenser d’en 'continuer la prestation.
Qu’importe encore que la transaction de 1790 n’ait eu
lieu que par la raison que les censives du roi. et de Lam o tle -J u lie t ne couvroient pas toutes les terres du
M ontaix, et qu’il eu restoit dix-huit boisselées pour l’as
siette de la rente.
Quand bien même tout ce terrain eût été couvert par
d’autres censives, ne p o u v o it- 011 pas reconnoîtrc une
rente foncière sur des héritages asservis à un cens? Que
voit - on dans l’acte de 1700? on n’y voit autre chose
qu’une hypothèque générale sur tous les biens du débi
teur ,
�#
( *7 )
teur, et une affectation spéciale de l’héritage y désigné
pour la sûreté de la rente. Chemel, dans la transaction
'de 1790, se déiendoit ,par la plus mauvaise objection. La
rente étoit assise sur tous ses biens': de ce que ces mêmes
biens étoient couverts par d’autres censives ,! c’étôit le
moyen le plus infaillible poùr établir que la rente due
au citoyen Saint-But n’étoit pas seigneuriale.
M ais, d it - o n , il restoit d ix-liu it boisselées de terre
qui n’étoient pas couvertes. Il n’est pas justifié que cette
quantité clc terrain fût chargée cl’une redevance quel■
conque, lôrs de la constitution de la rente. Ces dix-huit
boisselées de'terre étoient donc allodiales : c’est donc une
première rente q u i, aux termes de l’article C C C X C II de ■
la coutume de Bourbonnais, emportôit directe seigneurie.
i° . Il est difficile de penser, il est même impossible
que dix-huUJboisselées de terre aient pu servir cl’assiette
h une rente de vingt-quatre b oisseaux de blé. L e titre
annonce, au contraire, 'une affectation spéciale de toute
la terre du M ontaix; et si tout est couver^, excepté dixhuit boisselées, la rente ne peut être uné prémière rente:
la coutume ne peuT recevoir aucune applicationir'
Sur cette disposition p a r t ic ïïïï^ “dcTlïPc ou turn c de
►
Bourbonnais, qui en ce point est conforme à celle d’A u
vergne, voici comment a raisonné le conseil de l’appelant,
' sur les lieux :
« Ce n’est point la rente, a-t-il dit, qui seroit féodale,
53 c’est l’article C CCX CII de la coutume qui est une loi
» féodale; conséquemment ce n’est pas la rente, qui par
» sa nature ne tient en rien à la féodalité, qui seroit
C
>'
�.
.
.( i 8 )
» abolie; mais c’est l’article même de la coutume, parce
» que c’est en lui que réside la féodalité.
'
» On peut même dire qu’il y a long - temps qu’il est
» aboli : il l’est depuis que le territoire du Bourbonnais
» a été solennellement àéclavèjranc-alleu-, car l’article est
» visiblement une émanation de cette maxime féodale,
» nulle terre sans seigneur.
» Les lois de la révolution ont frappé la féodalité là où
» elle se trouve: si elle est dans la convention, si elle ré
» suite du titre constitutif, c’est le titre qui est aboli:
» mais si les parties n’ont voulu constituer qu’une simple
» rente ; c’est un contrat ordinaire qui n’a rien d’odieux,
» qui se pratiquera toujours dans le nouveau comme
» dans l’ancien régime. Cette convention ne prenant le
» caractère de servitude féodale que dans la disposition
» d’une l o i , c’est la loi qui est abolie ; mais la rente est
» maintenue. »
O n va plus lo in , et on soutient que la disposition de
cette loi est abolie pour le passé comme pour l’avenir;
parce que les lois suppressives du régime féodal sont
allées le rechercher jusque dans sa source, et interdisent
toutes répétitions d’arrérages échus pour le passé, aussi
loin qu’ils puissent remonter , eussent-ils été suivis d’o
bligations ou de condamnations en justice.
On doit adopter cet argument avec d’autant plus de
confiance, que cet article de la coutume ne peut s’expli
quer avec Pallodialité des héritages et la prescription des
cens et devoirs seigneuriaux établis par l’arlicle X X II de
la coutume.
�C 19 )
Aussi M . A uroux des Pommiers , tit. X X V I I I , n°, 4
et suivans, d on n e-t-il en m axim e, que de tout tem ps,
avant comme après la rédaction de la coutume, on a tou
jours reconnu la liberté et franchise des héritages ; de sorte
que c’est au seigneur à tout p ro u ver, et à établir par des
aveux et dénombremens, et autres titres de la tenuredu
fief, que tel héritage est dans sa censive ou m ouvance, par
le titre primitif et originaire de la constitution du cens, qui
est la concession de l’héritage et la charge de telle rede
vance , ou par d’autres titres équipollens.
Si sa qualité de seigneur est contestée, ajoute A uroux,
c’est à lui à l’établir. S i negatur se dominum prœstare
dcbet, dit le président D u ret, etpro régula est utalligans
qualitatem super quant ju s su u m fu n d a t, sip ro eo non
est prœsumptio , qualitatem probare teneatur, sive sit
a cto r, sive sit reus.
Il résulte de cette doctrine, que dans le doute, une rente
est présumée foncière ; que celui qui la prétend seigneu
riale est obligé d’établir cette qualité.
A combien plus forte raison, doit-on regarder la rente
comme purement foncière, dès qu’elle est qualifiée telle
par le titre constitutif-, qu’elle n’est accompagnée d’aucuns
caractères de féodalité ; lorsque d’ailleurs tout annonce
que l’héritage sur lequel elle est assise, se trouvoit déjà
dans toute autre censive.
C’est donc contre tons les principes de franchise recon
nus en coutume de Bourbonnais, que les premiers juges
ont refusé la prestation de la rente dont il s’agit.
C’est étendre la disposition d’une loi rigoureuse et
qualifiée môme inique dans les jugemens du tribunal
�.
,
20 )
...
.
de cassation , tandis que tous les efforts dés magistrats doi
vent tendre à la restreindre dans ses bornes ; puisqu’ils
n ’ont pas le pouvoir de la réformer.
Les difficultés dont on se hérisse, les entraves qu’on
fait naître nuisent singulièrement au commerce et aux
mutations : quel sera le père de fam ille, le propriétaire
' assez insensé pour oser aujourd’hui donner son bien en
rente? En privant une foule de citoyens de cette ressource,
on éloigne le plus grand nombre de la propriété ; on
dégoûte les cultivateurs d’un travail qui devient stérile;
l’industrie est éteinte; l’agriculture ne peut plus pros
pérer.
L e jugement dont est appel est donc tout à la fois
inconvenant, im politique, injuste; et c’est aux juges
supérieurs, dont les idées sont plus élevées, plus libé
rales, qu’il appartient de réformer des décisions dan
’ gereuses dans leurs conséquences ; de faire respecter le
droit sacré de propriété , que le gouvernement veut
essentiellement protéger.
L e citoyen P A G E S ( deRiom ) anc. jurisc.
L e citoyen M A N D E T , avoué.
A. R I O M , de l'im p r im e r ie fie L
a n d rio t
, seul im p rim eu r du
Tribunal d ’appel. — A n 1 1
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Saint-But, Philippe. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Mandet
Subject
The topic of the resource
rentes foncières
reliquat féodalité
contentieux post-révolutionnaires
franc-alleu
fiefs
Description
An account of the resource
Mémoire pour Philippe Saint-But, propriétaire, habitant au lieu de Pouzeux, commune de Comps, et Marie Durand, son épouse, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Moulins le 7 germinal an 11 ; contre Jacques Chemel, propriétaire, habitant de la commune de Tréban, intimé. Question : Rente purement foncière, dont on veut éviter le payement sous prétexte de féodalité.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1697-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0245
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0246
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53744/BCU_Factums_M0245.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Comps (03092)
Treban (03287)
Montaix (terre des)
Chopins (domaine des)
Rights
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Domaine public
contentieux post-révolutionnaires
fiefs
franc-alleu
reliquat féodalité
rentes foncières
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M
a g a u d
^
^
p r in c ip a l a c q u e r e u r d u b ie n d e v e r v a fs e
p r o v e n u d e J e a n -F r a n c o is M a r ie d e
V
ic h y
d é f e n d e u r e n a s s is ta n c e d e
incidem m ent
appelan t
de
ju g e m e n t
c a u se a
rendu
au
t r i b u n a l . d e p r e m iè r e in stan ce d e C lerm o n t, l e
3 M e fs id o u a n 1 1 ;
"
C o n t r e l e s h é r i t i e r s d ' AI n t o i n e R I C A R D '
e t a u tr e s c r é a n c ie r s in s c r its d e J e a n F r a n c o is M a r ie d e V ic h y , in tim é s
E n p résen ce d e T h érése L A N G L A R D ;
é p o u s e d iv o r c é e e t c r é a n c iè r e p r in c ip a le d u d it
.
d e V ic h y a p p e la n te a d e m a n e r e fs e e n
a f s is t a n c e d e c a u s e
L
es
créanciers inscrits qui n’ont point fait d’ ench ères dans le délai ,1
sur la notification de la transcription des ventes faites par leur débiteur ,
peuvent-ils, après deux ans d’inaction , se prévaloir de l ’enchère irréguliere ,et nulle > projettée mais non con s o m m é par un
autre créancier
qui l’abandonna aussitôt qu’il en eut apperçu les vices irréparables ,
et qui eu supprima tous les actes ?
‘
�..........................................................
( 2 )
^
Sont-Ils en droit de faire revivre ce germe d’enchère anéanti, de forcer
le créancier qui L’avait hasardé , à lui donner suite , ou de s’y subroger
et de poursuivre
eux-mêmes la revente du bien enchéri ,
par expro
priation forcée ?
Le
Tribunal de Clermont a jugé l’affirmative ; mais son
jugement
viole trop ouvertement la lo i et la justice , pour n’être pas réformé au
Tribunal d’appel.
L e fait s’explique en deux mots :
Antoine-Jean-M arie de V ich y , dom icilié à B ois-le-D u c en H ollande ,
vendit à Bernard-Antoine Magaud , par contrat du i.e r floréal an 9 , au
prix de soixante-huit m ille francs , un corps de biens appelé Yarvasse ,
situé dans la commune de Chanonat.
Son contrat d’acquisition fut transcrit au bureau des hypothèques à
C lerm on t , le 3 du même mois , et notifié avec le certificat de trans
cription , le
12 , aux créanciers inscrits ,
conformément à l’article
X X X de la loi du n brumaire an 7.
L e délai d’ un mois , accordé aux créanciers inscrits pour faire des sou
missions d’enchérir etrequérir la revente par expropriation forcée , expirait
le 12 prairial. On prétend que Thérèse Langlard , épouse du ven d eu r,
fit notifier le 11 , conséquemment en temps utile , une soumission d’en
chérir d’ un vingtième ; mais à qui fut faite cette notification , d’après
l’extrait de l ’enregistrement nui est produit ? à Bernard-Antoine M agaud ,
et aux autres acquéreurs habitans de Saint-Sandoux. Pas la moindre trace
d’ une notification pareille faite en même temps à M . de Vichy vendeur ,
ni à sou domicile réel en Hollande , ni à son dernier dom icile
connu
en France , qui était à Varvasse , en le considérant comme français
absent et hors de France , conformément à l ’article V I I I , titre II de
l'ordonnance de 1667 '■
> ni au domicile du Commissaire du Gouvernement
près le Tribunal d’apptl , conformément à l’article VII , même titre II
de l’urdo mance , en le considérant comme
étranger ; ni enfin au do
m icile élu qu’on lui suppose chez le citoyen B onnefoi, avoué à Cler
mont : on 11e trouve que la relation d’un acte notifié à ce prétendu do
micile élu , le 12 messidor ; et quel est cet a cte? une
sommation à
M. do V ich y de payer à sa ci-devant épouse j 3/j,f>77 l*vr° 9 > ainsi qu il
résulte d’ une dénonciation qui en lut faite à l’un des acquéreurs , dont
onjproduit quelques fragmens.
D elà résulte donc la preuve positive et irrésistible , qu’il 11’y avait eu
�(
»
)
.
de notifications d’enclièies .avant le délai fatal expiré le 12 prairial ,
qu’aux acquéreurs seuls , et qu’il n’en fut fait aucune à M. de V ich y
vendeur : cette omission rendait sans conséquence les notifications faites
aux
acquéreurs ; car l ’article X X X I de la loi du 18 brumaire an 11 ,
exige que les réquisitions de mise aux enchères soient signifiées ta n t à
l'acquéreur qu'au vendeur , à peine de nullité.
Ce n’était vraisemblablement pas la seule nullité de la soumission
d’ enchérir, dont il s’agit ; mais ce lle-là suffisait seule pour rendre l’ en
chère
imparfaite et sans effet : ne soyons donc pas étonnés que Thérèse
Langlard , qui en reconnut les vices , ait .pris le sage parti d’en retirer
les copies et de les supprimer.
D eux années entières d’oubli de cette tentative manquée ont succédé :
le citoyen Magaud s’est en conséquence établi à Varvasse ; il s’y est ar
rangé ; il y a disposé de tout en m aître ; et pour se mettre en état de
payer son acquisition
Saint-Sandoux.
E n fin , lorsque les
plus prpfonde , ils
pulser de Varvasse.
} il a vendu le patrimoine de ses pères situé à
héritiers Ricard le voient dans la sécurité la
se réveillent tou t-à-cou p , et visent à l ’ex
Cependant ils n’osent pas l ’attaquer en fr o n t ,
et ils s’adressent à la dame Lan glard-de-V ichy.
Ils
font
entendre
le langage du rep ro ch e , et poussent l ’indécence jusqu’à l ’accuser de
connivence avec les acquéreurs des biens de son mari , sous le prétexte
qu’elle abandonne
le
projet qu’elle avait annoncé en l’an 9 ,
de
poursuivre la revente de leurs acquisitions aux enchères ; ils la som
ment de reprendre ses poursuites , et faute de ce faire dans le mois,
ils demandent d’être autorisés à s’y subroger.
Les acquéreurs sont mis en cause ; on en vient à l ’audience ; la
discussion est vive , et le combat se termine par un jugement qui
a étonné ceux mêmes
dispositif :
qui l ’ont obtenu. E n
voici les motifs et le
« A ttendu , y est-il—d it , que l’acte de notification fait à la requête
» de Thérèse Langlard , à François Brochet , etc. ,
le
i 3 messidor
» an neuf , constate suffisamment l ’existence de l ’enchère par elle noti5> fiée aux acquéreurs de
son mari.
» Attendu que l ’article X X X I de la lo i
* accorde aux créanciers inscrits la
» enchères
de l’immeuble
du 11 brumaire an 7
faculté de requérir la
mise aux
vendu par son débiteur.
I 5
�(
’ » Attendu que
4
)
d’après l’article XVIII de la loi du
n
brumaire
» an 7 , sur les expropriations forcées, la soumission de porter l ’immeuble
» vendu à un vingtièm e en sus de celui stipulé en la vente volon
» taire , tient lieu de première enchère j qui nécessairement profite à
» tous les créanciers , et leu r donne la faculté de poursuivre la
>> vente par expropriation forcée.
» Attendu que des créanciers inscrits qui peuvent n’avoir négligé de
» faire des soumissions d’enchérir, que parce qu’ils avaient connaissance
» de celle faite par un autre créancier , et dans la confiance de re
» cueillir les avantages de cette soumission , ne peuvent être privés
» de cet avantage.
» L e Tribunal ordonne que Thérèse Langlard sera tenue de donner
» suite à ses soumissions , dans le mois
sinon déclare
» les créanciers Ricard subrogés à son lieu et place , et les autorise
» à poursuivre, par
expropriation forcée , la revente des objets énoncés
» et désignés dans la notification du i 3 messidor an 9 ».
L a dame de
V ich y n’a pas hésité à se rendre appelante de
étrange jugem ent, et le
réclamation sera-t-elle
citoyen Magaud a
cet
adhéré à l ’appel. Leur
sans succès ? Non : les
lumières et l ’impar-
partialité du Tribunal d’appel leur en sont garans.
Jtt
O j j r Æ
x r ê
J P tem iev
30 ) ’
J P 3É X , .
^ÏÏL ojjen.
L e Tribunal de Olermont a déclaré , en point de f a it , que l ’existence
de l’enchère faite par la dame L aaglard -d e-V ich y, sur les acquéreurs
de son mari , est suffisamment constatée ; mais il
est encore mieux
constaté par ce que nous avons dit dans le récit des faits , et par les
dates que donnent eux-mêm es les héritiers Ricard aux actes qu’ ils
prétendent avoir été notifiés à M. de V ich y ; que s’il a existé un acte
de soumission ,
dans le
il n’a point été notifié à M . de Vichy vendeur ,
ni dans le délai. Ce fait étant certain , la
même temps ,
nullité absolue d e l à soum ission, prétendue signifiée aux acquéreurs,
en est la conséquence forcée ; car l ’article X X X I de la
brumaire an 7 , la prononce expressément.
Il porte ;
loi du
11
�(
5
)
« T out créancier , dont les titres ont été inscrits , peut requérir la
» mise aux enchères et l’adjudication publique de l’immeuble ,
à la
» charge i . ° ,e tc .
» z .° D e se soumettre de p o rter, ou faire porter le prix: au moine
» à un vingtième en sus du prix stipulé dans le contrat.
» Cette réquisition est signifiée tant à l'acquéreur qu'au vendeur ;
le tout à peine de nullité ».
Or
s’il est indubitable que la soumission
L an glard -d e-V ich y, aux acquéreurs de
notifiée
son mari ,
par
dans
la dame
le
d é la i,
était nulle pour n’ avoir pas été notifiée au vendeur , dans le même
délai , n’est-il pas ridicule de vouloir
réprouvé
qu’elle donne suite à cet acte
par la lo i ? qu’elle établisse une procédure en expropriation
forcée sur une pareille base ? qu’à son défaut les
créanciers inscrits
soient autorisés à suivre à sa place une expropriation qu’elle n’a pas
le droit de provoquer ? E t n’est-il pas plus ridicule encore de vouloir
que les acquéreurs souffrent cette expropriation vexatoire ?
•
cPecotiè
^TTLoyen.
C e n’est pas tout ; quand la soumission éclipsée de la dame Langlardd e-V ich y reparaîtrait sous les yeux du T rib u n a l, et quand sa régularité
serait à l’abri de toute critique, le jugement dont est a p p el, qui autorise
les créanciers à s’en emparer , n’en présenterait pas moins une fausse
application de la loi.
L e Tribunal de Clerm ont s’est étrangement mépris , en e ffe t, lorsqu’il
a cru que la soumission d’enchérir faite , dans le d é la i, par madame de
V ich y , de sa seule vo lo n té, pour sa seule utilité , comme première et
principale créancière, et entièrement à se3 risques } appartenait à tou3
les créanciers inscrits.
Il serait contre toute raison qu’ un créancier inscrit n’eût pas le pouvoir
de renoncer seul aux actes conservatoires qu’il avait eu le pouvoir de faire
s e u l, et que le bénéfice de ces actes , non seulement profitât aux autres
créanciers qui n’encouraient pas les risques , mais qu’il leur eût attribué
dè3 le premier instant de son existence, un droit irrévocablement acquis
L a loi du 11 brumaire an 7 a conféré , par l ’article X X X I , à t >ut créan
cier inscrit la faculté de requérir la mise aux enchères, sans que lu réqui
sition de l’un empêche la réquisition des autre?.
�(
6
)
• D e ce que tous peuvent requérir , il suit que chacun n’agit que pour
lui-m êm e particulièrem ent et isolément.
,
Ç elui qui reste dans l ’inaction préfère de se contenter , en ce qui le
çoQcem e-,du prix stipulé au contrat de. v en te, plutôt que dp courir les
hasards attachés à la provocation des enchères. Il con sen t, par cela seul
qu’il se t a it , à ce que la valeur de l’immeuble demeure définitivement
fixée au pied convenu entre le vendeur et l’ach eteur, conformément à l’ar
ticle'X X 'X II de la loi.
’
1
t C ’est pour cela que l ’article XXXIII de la môme lo i n ’attribue le droit
de poursuivre la revente sur enchères , qu’au plus diligent , soit de l’ac
quéreur , soit du créancier qui /’ a requise lim itativem ent , et qu’aucun
droit n’est déféré à ce sujet aux autres créanciers. C ’est pour cela enfin
que l ’acte , par lequel la revente aux enchères est requise , ne doit être
notifié qu’au vendeur et à Vacquéreur seuls.
. Si la loi avait voulu que la soumission d’enchérir profitât à tous les
créanciers , pour être conséquente , elle en aurait prescrit la notification
à tous , comme elle l’a fait à l ’égard des affiches ordonnées pour parvenir
à l’expropriation forcée ( * ). E lle les aurait autorisés tous à en poursuivre
l ’effet. Hé bien ! elle
a
fait tout le contraire. Que faut-il en conclure ?
qu’elle a voulu que le créancier vigilant restât seul maître d’un acte de
diligence dont il avait seul voulu courir le danger , et conséquemment
qu’il eût. la faculté de s’en désister quand il le jugerait utile à ses intérêts,
sans consulter les autres créanciers , et sans recevoir des conditions de
leur part. Les créanciers qui se sont abstenus de faire des soumissions
d’en ch érir, ont formé par leur silence leur contrat extra-judiciaire avec
l ’acquéreur , comme ils l’ont voulu 5 de quel droit s’opposeraient - ils
donc à ce que le créancier qui a pris un parti différent, exécute le sien
de son côté comme il lui plaît ?
Nous nous y opposons , diront-ils , en vertu du droit que nous donne
l ’article XVIII de la loi du 11 brumaire sur
l’expropriation fo rcée, de
profiter de l ’enchère lorsqu’ il y en a une. L e créancier qui l’a faite , s’il
ne se présente pas au jour indiqué pour l ’adjudication, h l ’effet de pour
suivre son e n ch ère, n’en est pas seulement d éch u , il en est puni par
une condamnation aux frais de poursuite, et en outre , à p a y e r , comme
excédant du p r ix , la somme à laquelle il s'était obligé de porter où
fa ir e porter f immeuble en sus du prix conventionnel. Cette peiue tourne
( * ) A r t ic le V I do la loi du 11 iru m a irt: , »ur l ’e xp rop riation .
�( 7 )
t
nécessairement au profit de tous les créanciers dans l ’ordre de leurs hypo
thèques respectives ; donc l’enchère , quoique faite par un seul , est une
amélioration commune à tous , et , par su ite , il n’appartient pa 3 à celui
qui l’a faite de la rétracter.
.
A ce raisonnement qui est le principar m otif du jugement dont est ap
pel , nous répondrons que l’on confond ici les choses et les temps. C e
n’est pas aussitôt que la soumission d’enchérir est faite, que l ’enchère est
déclarée appartenir sans retour aux créanciers, c’est seulement lorsque la
mise aux enchères, provoquée par le soumissionnaire , a été effectuée par
l ’acquéreur; lorsque les affiches ont été posées , qu’ elles ont été notifiées
tous les créanciers inscrits , en exécution de l ’article V I de la loi sur
l ’expropriation forcée 3 lorsque cette notification leur a rendu l ’objet et le
bénéfice de la poursuite, communs ; enfin , lorsqu’au jo u r annoncé pour
l'adjudication, le soumissionnaire ne se présente pas pour l ’accepter.'
Alors la partie est engagée avec tous les créanciers inscrits, puisque les
affiches ont été notifiées à tous. L e provoquant qui ‘a attendu le dénoue
m ent pour se retirer du jeu , doit y laisser sa mise imprudente , sans doute ,
et c’est à tous les créanciers qu’il doit la laisser, puisqu’il jouait avec tous.
Mais qu’ a de commun le soumissionnaire q u i, comme madame de V i
c h y , se retire d’entrée de je u , et avant que la partie s’engage ; qu’a-t-il
de com m un, disons-nous, avec celui qui persévère dans sa provocation
jusqu’à la fin , et ne se retire qu’au dénouement ? L e contrat est formé
avec ce dernier par l’appel de tous les créanciers auxquels l’affiche^ pour
la revente a été notifiée, au lieu qu’ il n’en existe aucun entre le premier
et la généralité des créanciers auxquels rien n’a été notifié. Concluons
qu’il nsy a point de parité à établir entre deux cas si différons, et que la'
démarche imprudente de madame de V ic h y , ayant été rétractée avant que'
1 oreille des créanciers en eut été frappée'par aucune notification, elle ne
leur a ouvert aucune action contre elle.
Ils sont d’autant moins fondés à dicter des lois à madame de V ich y ,
dans les circonstances
particulières de cette affaire , et à lui reprocher
l ’abaudon de ses premières démarches , qu’ayant tardé à requérir la m ise'
aux enchères jusqu’aux derniers jours du d é la i, ils ne peuvent pas dire
qu’elle les a empêchés d’agir eux-mèmes , en les endormant dans une '
fausse sécurité , ni que l’abandon de ses poursuites trompe leur attente • •
car ils n’ont pu être instruits de sa soumission d’enchérir , qu’après l’ex
piration du délai 3 et par conséquent U est im possible qu’e lle ' ait influù’
�(
8
)
sur la détermination qu’ils prirent de s’ en tenir au prix stipulé par le
contrat de vente.
Des vérités si frappantes n’ont pas besoin , pour réunir tous les suf
frages , d’être appuyées sur des exemples ; mais s’il pouvait être utile
d’ en indiquer , nous renverrions les intimés au n .° n 5 d u
journal du
palais , où l’on trouve à la page 38 un préjugé qui les a consacrées dans
des circonstances bien plus délicates que celle où la question se présente
aujourd'hui.
. Il ne s’agissait pas seulem ent, en e ffe t, de savoir si un acquéreur pouvaitêtre contraint de subir la mise aux enchères de l’immeuble par lui acquis ,
sur la simple allégation qu’il avait existé une soumission d’enchérir
non rapportée , une soumission désavouée , abandonnée par le créancier
au nom duquel elle avait été faite irrégulièrement , et qui , n’ayant pas
¿té signifiée au vendeur , était repoussée par la loi comme insuffisante et
nulle : il s’agissait de savoir s i , d’après la loi de l ’an 7 , le créancier
qui a requis la mise aux
enchères , qui persiste à la
requérir , qui a
rempli toutes les form alités, qui représente tous les actes exigés par la l o i ,
peut être forcé à s’en désister , en le mettant hors d’intérêt par des olfres
réelles du montant de sa créance ; et si les autres créanciers , que l’on
ne désintéresse pas de m im e , peuvent intervenir pour se subroger à la
poursuite , dans le cas où l’enchérisseur serait condamné à recevoir son
paiement , à se désister de son enchère , et à se taire. Hé bien ! la résis
tance du créancier soumissionnaire , l ’intervention des autres créanciers ,
et leur demande en subrogation ,
L e i.e r germinal an i o ,
furent également repoussées.
le Tribunal de première instance , séant i
Meanx , où l’affaire fut d’abord portée , condamna le créancier à recevoir
les offres , à se désister de la réquisition qu’il avait faite pour la revente
de l ’imnieuble aux enchères , et
à consentir la radiation de son ins
cription.
Appel au Tribunal séant a Paris.
Intervention , en cause d’appel , de la cito yen n e Poucet créancière ,
pour requérir d’être subrogée à la poursuite.
16 thermidor an 10 , jugement contradictoire par lequel le Tribunal
rejette l’intervention, dit qu’il a été bien jugé par le jugement dont est
appel , et ordonne qu’i l , ^ ^ exécuté suivant sa forme et teneur.
Le Tribu nal d’appel de Riom a décidé la même question de la même
manière , par jugement du 11 prairial an 11 , dans l’espèce suivante :
Alexis
�C 9 )
Alexis Reynaud vendit quelques immeubles à Jean-Baptiste Trellet ;
celui-ci fit notifier son contrat d’acquisition aux créanciers inscrits. Bablantier , l’ un d’eux , déclara , tant à l ’acquéreur qu’au vendeur , qu’il
entendait enchérir d’un vingtièm e en sus du prix exprimé au contrat de
vente. Lartaud , autre créancier in s c rit, garda le silence ; mais Bablantie r , s’étant départi de son enchère , Lartaud se réveille ; il le fait as
signer j ainsi que l’acquéreur , au Tribunal de Gannat , pour voir dire
qu’il sera subrogé à l’enchère. Jugement du Z nivôse an 10 , qui déclare
Lartaud non
recevable.
Les motifs
de
ce
jugement
sont
ainsi
conçus :
« V u les articles X X X I , X X X II , XXXIII de la lo i du 11 brumaire
» an 7 , considérant que l’acquéreur est tenu de notifier son contrat d’ac» quisition aux créanciers inscrits , et que tout créancier a le droit de
» surenchérir ; qu’ainsi le créancier , qui veut profiter du bénéfice de la
» l o i , est personnellement tenu de satisfaire aux obligations qu’elle
» impose.
» Attendu qu’aucun des articles du code hypothécaire ne rend commun
» à tous les créanciers la réquisition de mise aux enchères faites par l’un
» d’eux , puisque par l’article X X X II cette réquisition ne doit Être sig » nifiée qu’à l ’acquéreur et au vendeur , et que d’après l’article XXXIII la
» revente ne peut être poursuivie que par l’acquéreur , ou le créancier
» qui l ’aura requise.
» Attendu qu’aucun article de la lo i n’accorde aux créanciers le droit
» de se faire subroger à l’acte de réquisition de mise aux enchères faite
» par l ’un d’eux , et que ses dispositions sont telles , que la supposition
» ne peut s’en faire sans lui donner un sens contraire.
» A ttendu que la partie de AJancel a pu renoncer au bénéfice de son
» acte de réquisition, qu'elle n'avait f a i t que pour la conservation de
» ses droits ; qu’il est de principe que chacun peut renoncer au droit
» qui lui appartient, lorsqu’il est facu ltatif, à moins que la loi n’y at
» tache des conséquences formellement exprimées et utiles pour des
» tiers , ce qui ne s« rencontre pas dans la loi du u brumaire an 7 ».
L e T rib u n a l, etc.
Appel de la part de Lartaud. Jugement du
11 prairial an 11 , par
lequel le Tribunal d’appel , séant à Riom , par les motifs exprimés au
Jugement du Tribunal de G a n n a t, confirme ce jugem en t, sauf à Lartaud,
a p p ela n t, et aux autres créanciers inscrits , leur action contre Bablan-
tier pour lui faire rapporter le montant de son enchère.
2
�C
i°
)
S i, dans ces deux affaires, deux Tribunaux d’appel différons ont refus*?
aux créanciers inscrits la subrogation à
l’enchère d’un autre créancier
qui ne voulait pas ou qui ne pouvait pas y donner suite , quoique tous
les actes prescrits par la loi eussent été régulièrement faits et
qu’ils
existassent, combien à plus forte raison le citoyenM agauddoit-iltriom plier
des efforts des intimés qui veulent être subrogés à une soumission d’en
chérir , dont les actes n’existent p lu s , et qui n’a jamais eu une exis -
tence légale (*).
On est prévenu qu’ils se proposent de tirer un grand parti de l’article
X C X IX de la nouvelle loi sur le
régime
hypothécaire , formant le
titre V I , livre III du Code c i v i l , adopté par le corps législatif le 28
ven tô se, qui admet leur système pour l’avenir , et autorise tous les créan
ciers inscrits à se subroger aux enchères faites par un seul. Mais ils
s’ab usen t , s’ils placent quelque confiance dans ce m oyen tiré d’une lo i
de trois ans postérieure
à l’anéantissement de la soumission d’enchérir
qu’ils essayent de faire revivre.
D ’un côté , les lois n’ont point d’effet rétro actif, et ne disposent que
pour l’avenir (**). La disposition du
Code civil qu’ ils invoquent, est
nouvelle ; elle ajoute à la loi du 11 brumaire an 7. Cette disposition
nouvelle et additionnelle fixera le sort et l ’effet des enchères qui seront
fa ites à l'avenir ; mais elle est sans influence sur le sort et les effets des
enchères fa ite s et abandonnées depuis trois ans.
E n second lieu , si l’article X C X IX de la loi nouvelle est favorable
au système des intimés , d’ un autre c ô té , l’article X C V I qui le précède
détruit leur espoir sous un autre point de vue ; car il ne donne d’effet
( * )
Q « ’on n ’ e s ia y e pas Je b a la n ce r ce s p réju g e s par le ¡ligam ent ren d u au trib u n al do
c a ssa tio n , lo
an 10 ,
dans l ’a ffa ire
G e n io u s t
a b so lu m e n t sans a p p lica tion ; c a r il n ’é ta itp a s q u estion , dans l ’a ffa ire
et
V c r s e p u y ; il est
V c r s c p u y , de sa vo ir
si des créan cier» in scrits d ovaien t etro reçu s h so su b roger à l ’cn ch èro faito p a r un
autre
c ré a n c ie r , p o u r re q u é rir la m isa d’un bion v en d u a u x e n ch è re s. Il s’ agissait se u le m e n t dfl
s a v o ir si un c ré a n c ie r in sc rit » vait la facu ltu do 6e su b roger à la p ou rsu ite d’une exp ro p ria
tion f o r c é e , su r la q u e lle lo p o u rsu ivan t sem b lait disposé à ne pa> re q u érir la m iso aux en ch è
re« , lo jo u r indiqué par les affich es d even ues com m u n es à tous les cré a n ciers par la n o ti
fic a tio n qui le u r en avu it e 'té fa ito , on exé cu tio n do l ’a rtic le V I do la lo i du 11 h m m airo an
7
su r l ’oxprop riatio n fo rc é e ; c e qui n ’a rie n de com m u n ave c la su b rogation aux en ch è re s
faito su r uno vonto v o lo n ta ire qui no sont n otiliées qu ’ à l ’a cq u éreu r et au ven d eu r. D ’a illeu rs >
1» question de sa vo ir si la su b rogation a la p ou rsu ite do l ’exp rop riation fo rcée e st a d m issi
b le i ne fu t m êm e pas jugéo dans l ’a ffa ire V o rs e p u y , puisque le p o u rsu ivan t l ’a vait écartés
•n con tin uan t la p o u rsu ite , et on requ éran t l ’ad ju d icatiu n qui fu t p ro n o n cé e .
( * * ) Article I I , titre préliminaire du Code.
�( 11 )
qu’aux soumissions ¿ ’enchérir qui seront légalem ent faites; et il e x ig e ;
comme la loi du 11 brumaire an 7 , que ces soumissions soient notifiées
tant à l’acquéreur qu’au vendeur, dans le délai , à peine de nullité . L a
soumission d’enchérir de la dame Langlard n’avait point été signifiée
à M. de V ich y , vendeur , dans le délai , encore une fois ; ce point de
fait est constant ; elle était donc radicalement nulle et déclarée te lle .
par la loi. Or , ce qui est nul ne peut jamais fonder d’action contre per
sonne ; quod nullum e s t , nullum producil effectum.
S’il fallait couronner des moyens si’ victorieux par les considérations
de la faveur , nous ferions remarquer le défaut d’intérêt de l ’attaque des
intimés , et l’intérêt majeur de la défense du citoyen Magaud.
L ’attaque des intimés est sans in térêt, et comment ? parce que si elle
obtenait quelque su ccès, la créance de la dame de V ich i qui est anté
rieure aux leurs , absorberait les enchères qu’ils p rovoq uen t, et qu’il ne
leur en reviendrait rien.
L ’intérêt de la défense du citoyen Magaud est majeur , au contraire ,
et comment ? parce qu’il a vendu j au cours de l ’an 9 , son bien de S t.Sandoux , pour acheter Varvasse ; qu’il n’avait fait d’abord que des
ventes conditionnelles, et qu’ il les a rendues pures et simples lorsqu’il
a du croire la propriété de Varvasse.immuablement fixée sur sa tête , par
l ’expiration du délai des enchères , et le désistement de la
V ich y du projet qu’elle avait annoncé d’en former.
sa position , si cette
prix des fonds
acquisition lui échappait
dame dey
Q uelle serait donc
aujourd’hui que les
ont acquis un tel accroissement de valeur , qu’il ne
la remplacerait pas avec un tiers de perte ? Égalem ent dépouillé , et de
son
ancien et de son nouveau patrim oine, par l’acharnement des Ricard à
le vexer sans p ro fit, il serait difficile de concevoir une situation plus
pénible que la sienne : mais la justice
et la
lo i qui le protègent ,
le garantiront de ce malheur.
"
T elle est l ’opinion du Jurisconsulte ,
soussigné.
Délibéré à Clermont-Ferrand , le trois gernrinal an 12.
b e r g i e r
.
Les soussignés qui ont lu le mémoire à consulter pour le citoyen Magaud
contre les créanciers de V ic h y , et la consultation du citoyen B ergier, du 3
de ce mois ,
*
Sont absolument du mJme avis que le citoyen Bergier, et par les infimes
motifs.
2 2
�( 12 )
^
•’
Il faut d’abord ne pas perdre de vue un point e s se n tie l, qui est que la fa-i
culte d’enchérir tendant à l'inexécution d’un contrat, doit toujours être jugéerigoureusem ent: il faut avoir rem pli strictem ent les formalités prescrites par
la lo i, à peine de déchéance.
\
•A près cette observation prélim inaire, et en supposant même qu’il y eut ,
dans le délai fixé par la loi, une notification d’enchère de la part de la dame de
Y ic liy au citoyen M agaud, acqu éreu r, ce qui est douteux , puisque l ’acte -de
notification n’est point rapporté', et que le tribunal de Clerm ont s’est con
tenté de la supposer , d’après une mention vague contenue dans un autre acte ,
L a dame de Y ic h y n’aurait-clle pas eu la faculté de se départir dans la suite
de la prétendue enchère, sans que les autres créanciers pussent en profiter î
A cet égard , la loi du 11 brumaire an 7 étant m u ette, on pourrait invo
quer le principe g én éral, que tout privilège est personnel. On pourrait dire
avec fondem ent, que la faculté d’enchérir concernait personnellem ent chaque
créancier , et que le seul qui ait enchéri sc désistant de son enéhère , le droit
qui en résultait n ’est point communicable aux autres.
En supposant ce point d outeux, on ne pourrait qu’être fortem ent touche
d ’une jurisprudence qui s’est déjà formée par les jugemens cites dans la con
sultation du citoyen Bergier.
I l est vrai q u e, suivant la nouvelle loi sur les hypothèques, art. X C I X , le
désistem ent du créan cier, requérant la mise aux enchères , n’empêche pas
les autres créanciers de poursuivre l ’adjudication.
M ais on sait aussi que les lois n’ont point d’effet rétroactif.
M ais un moyen q u i, en faisant abstraction de tous autres , serait seul tran
chant et décisif en faveur du citoyen Magaud , que l’on peu t même dire n ’êtro
point susceptible de répliqué, résulte de ce qu’il n’est prouvé, en aucune ma-,
n ière , qu’il y ait eu de la part de la dame de V ich y une notification de l'en
chère à son m ari, vendeur. S'il y en avait eu u n e , il serait très-aisé de le
prouver par la m ention sur les registres du percepteur de l ’enregistrem ent :
o r , il n ’existe à cet égard aucune preuve.
Cependant il est incontestable, d’après l ’art. X X X I de la loi du
11 bru
maire an 7 , que cette notification ne devait pas seulem ent être faite à l'ac
quéreur , qu'elle devait encore l'être au vendeur ; et çct article dit : le tou t, à
peine de nullité.
Il
n'y avait donc pas d’enchère , à proprem ent p arler; car ce qui est mil ,
est aux yeux de la loi comme ce qui 11’existe pas. Aussi la loi nouvelle qui ,
comme o n l ’adéjà d it , ne doit pas régler les intérêts des parties, cil allant
plu* luin que celle du 11 brumaire an 7 , ne parle, art. X Ç I X , que du simple
désistem ent, et suppose une enchère régulière : on avoue qu’on ne prévoit
aucune réponse à ce moyen.
T<e tribunal de Clermont , en motivant son jugem ent, a dit que << l ’acte do
» notification fait à la requête de Thérèse Lunglaid a François Brochet, etc.,
�(
13
)
» lo i3 messidor an g , constate suffisamment l'existence de l'enchère par elle
» notifiée aux acquéreurs de son mari ».
O n a déjà observé que cette existence n’était pas légalem ent prouvée. Mais ,
en la supposant tou jou rs, était-il suffisant que la notification fut faite aux
acquéreurs du mari ?
O u le tribunal n ’a pas songé à cette insuffisance , et une pareille inatten
tion ne déposerait pas en faveur du jugem ent ; ou il a pensé que cette notifi
cation suffisait ; et dans ce cas , il est tombé dans une erreur qui doit être
réformée.
Enfin , les circpnstances dans lesquelles se trouve le citoyen Magaud sont
tclleinent favorables, elles préviennent tellem ent contre la réclamation tar
dive des créanciers qui n ’ont évidemment songé à faire valoir un pareil m oyen,
qu’à raison de l ’augmentation survenue dans la valeur des fonds , qu’on peut
tlire que les raisons qu’on vient de déduire en recev ra ien t, si elles en avaient
b eso in , un nouveau degré de force.
Délibéré à Paris par les anciens Jurisconsultes , soussignés
an ix de la République française.
GRENIER
et F A V A R D ,
le zS germinal
. .
du Puy-de-Dôme.
L e soussigné, qui a vu et examiné la consultation ci-dessus et des autres
parts , est du même avis et par les mêmes raisons.
D ’une p a r t , la circonstance que l ’enchère n ’a pas été notifiée au précé
dent propriétaire , débiteur p rin cip a l, annullant évidemment cette enchère
aux termes de l ’ancienne comme de la nouvelle loi , les autres créanciers
n ’auraient pu en tirei avantage , q u an d , en thèse générale , ils y seraient
autorisés.
D autre part , ce n e s t pas la simple enchère faite clandestinem ent, pour
ainsi dire , entre le créancier , l’acquéreur et le débiteur , qui peut donner
ce droit aux autres créanciers ; mais la mise aux enchères effective qui a
lieu par la signification à tous les créanciers inscrits , et par les affiches.
Cette démarche publique étant une fois faite , elle ne peut pas être illu
soire , et tous les créanciers ont droit d’en profiter.
C'est ie seul sens raisonnable qu’on puisse donner à l ’article X C I X du litre
V I de la nouvelle loi sur les privilèges et hypothèques.
D ’autre part enfin , tout doit avoir son terme ; tout est prom pt et rapide
dans la marche de la loi sur les hypothèques. L a transcription , la notifica
tion , l ’cnchùrp, l ’expropriation, tout doit être lait dans les plus brefs délais
puisque le plus long ne passe pas /(o jours,
1
C ep en d an t, dans le plan des adversaires du c.cn Magaud , un créancier
pourrait , pendant 3o ans , expulser de sa propriété un acquéreur , parce
qu’il a plu à un créancier de faire uuc enchère à laquelle il a cru ne devoir
donner aucune suilc.
�(
i4
)
On dit pendant 5 o ans , parce que si on admet Une pareille action
après deux a n s, il n ’y a pas de raison pour ne pas l ’étendre à tr o is , à
q u atre, à d i x , et jusqu’à trente ans ; ce qui serait absolument contraire à
l ’esprit de cette loi , dont l ’unique but est de fixer , d’une manière prom pte
et absolue , l ’irrévocabilité de la propriété sur la tète de l ’acquéreur.
Délibéré à Clermont-Ferrani , le $ floréal an 12.
B 0 I R 0 T.
L e Conseil so u ssign é, qui a vu la présente C on sultation , est entiè
rem ent du même avis et par les mêmes raisons. Les résolutions qui y
sont prises sont appuyées sur les principes les plus certains , et d’une
application absolument indispensable à l'espèce.
D é lib é r é à
R io r n ,
le
io
flo r é a l a n
n ,
A N D R A U D.
L e Conseil soussigné est entièrement du même avis et par les mêmes rai
sons. Rien ne constate d’abord l ’existence de la déclaration d’enchère; on ne
rapporte d’autre preuve que la m ention qui en est faite dans l ’acte de notifica
tion fait à la requête de T h érèse Langlard , le 17 messidor an 9. Cette men
tion suffit-elle l non, sans doute ; ce n’est pas le cas d’appliquer la maxime ,
in antiquis enuntiativa probant. lies créanciers ne peuvent pas avoir plus de
droit que T h érèse Langlard ; et celle-ci pourrait-elle se dispenser de rappor
ter l’acte même ? Serait-elle reçue à y su p p léer par la m ention insérée dans
l ’acte du i 5 messidor ? Ensuite , cette m ention pourrait-elle être regardée
comme une preuve suffisante de l ’existence de la déclaration d’enchère î L ’ac»
quéreur serait toujours fondé à exiger la représentation de l ’original qui peut
être infecté de vices de forme. Ces raisons , jointes à celles développées dans
la consultation , ne doivent laisser aucun doute sur le mal jugé du jugem ent.
Délibéré à R io m , ce to floréal an ix.
PAGES -MEIMAC.
J
O
Æ
£
Î
D u citoyen BERNARD M A G A U D , appelant, sur le mémoire imprimé
que viennent de fa ir e paraître les héritiers R IC A R D } intimés.
L e mémoire des héritiers Ricard n’est qu’ une déclam ation insipide
qui n’apprend rien au Tribunal d’appel de ce qui doit fixer son juge
ment dans cette affaire.
�(
i5
)
Pas un m ot , dans z 5 pages d’impression , de la nullité de l’enchère
prétendue faite par la dame L au glard -d e-V ich y , faute d’avo ir été
notifiée au vendeur dans le délai fatal.
Le point de d r o it, que la soumission d’enchérir l ’immeuble , dont
la transcription de la vente a été notifiée aux créanciers inscrits ,
doit être sig n ifié , tant à l'acquéreur qu’au vendeur , dans le mois de la
notification du certificat de transcription, à peine de nullité , ne peut
pas être mis en problème puisque l’article X X X I de la lo i du 11
brumaire an 7 en a une disposition textuelle , confirmée par l ’article
M M CLXXXI du nouveau Code civil , n.os i.e r , 3 et 4.
L e point de f a i t , que la réquisition de mise aux enchères de la dame
Langlard-de-Vichy ne fut point signifiée à son m a r i, ven d eu r, dans le
mois de la notification de la transcription , qui expira le 12 prairial an
q , ne peut pas être mis en doute non plus , puisque les héritiers Ricard
ont dit eux-mêmes , page 6 de leur mémoire imprimé , que les réquisi
tions de mise aux enchères notifiées à Bernard Magaud le 1 x prairial ,
et aux autres acquéreurs le 16 , ne furent dénoncées au sieur de V ich y ,
vendeur , à son dom icile élu chez le citoyen Bonnefoi , que les 11 et
i 3 messidor suivant , c’est-à-dire, un mois , au m oin s, après l’expiration. ..^ du délai fatal ; et les extraits des registres de l’enregistrement confirment
çette vérité.
Q uelle est la conséquence irrésistible et forcée de ces deux points
l ’ un de droit , l’ autre de f a i t , également incontestables ? que la sou
mission d’enchérir de la dame de V ic h y , eût-elle existé , elle serait nulle
pour n’avoir pas été notifiée dans le délai au vendeur , et par une su ite ,
que la soumissionnaire serait tombée en déchéance.
Or , comment justifier après cela le jugement dont est appel , qui
ordonne à la dame de V ich y de poursuivre une pareille réquisition nulle et
tombée en déchéance ? q u i, à son refu s, autorise les héritiers Ricard à se
subroger à la poursuite , et qui enfin condamne Bernard Magaud ,
acquéreur , à subir cette vexation ? un acte de d ilig en ce, n u l , ne peut
produire d’effet pour personne ; quod nullum e s t , nullum producit effectum. La soumission nulle de la dame de V ich y , quand on en représen—
le ra it les actes , ne donnerait donc d r o it, ni à elle , ni à aucun autre
créancier , de déposséder Bernard Magaud de son acquisition. Il est
inconcevable qu’une vérité si frappante n’ait pas été sentie par les
premiers juges.
2 .° Les dissertations à perdre h a le in e , dans lesquelles les héritiers
Ricard se jettent sur d’autres questions , sont peine perdue. Bernard
Magaud se gardera bien de lasser l’attention de ses juges , en s’enfonçant
dans les ténèbres avec ses adversaires,pour faire appercevoir leurs écarts.
Quand une affaire peut se vuider par un m oyen tranchant qui s’explique
en deux mots , et qui est de nature à porter la conviction dans les esprits
les plus r e b e l l e s , comme celui de la nullité de l’enchère que les héritiers
Ricard voudraient ressusciter à toute force , pourquoi ne pas s’y tenir ?
Pourquoi ne pas épargner au Tribunal l’ennui des dissertations assom
mantes dans lesquelles ou voudrait nous engager sans utilité ?
*
3 .° Mais nous 11e pouvons pas également nous dispenser de dire quelques
mots de cet amas de déclamations injurieuses ^ dont le mémoire des
héritiers Ricard est un dégoûtant tissu.
* v
�(
i6
)
Ils crient , d’un bout à l ’autre , à la fraude , à la collusion. A les
entendre , le citoyen Magaud s’est ligué contr’e u x , avec la dame de
V ich y , pour leur faire perdre la créance la plus favorable et la plus
légitim e , en s’emparant du bien de leur débiteur à v il prix. Mais , de
bonne f o i , y a -t-il de la raison à prétendre que la dame de V ich y ,
n’a abandonné que par collusion et à dessein de nuire aux créanciers ,
une soumission d’enchérir nulle et insoutenable , à laquelle elle n’au
rait pu donner suite qu’en s’exposant à faire et à perdre cinq à six m ille
francs de frais ? Il n’y eu a pas davantage à crier contre le c.en Magaud ,
parce qu’il résiste à ce que la dame de V ich y exerce contre lui une action
en expropriation qu’elle n’a pas.
E û t-il fait une acquisition aussi avantageuse qu’on veut le dire , ni la
justice la plus sévère , ni la délicatesse la plus généreuse ne lui impose
raient l ’obligation d5y renoncer au profit des créanciers du vendeur après
avoir vendu les biens de ses pères , pour la payer.
Mais d’ailleurs il fit cette acquisition au plus haut prix dans le
temps , et si bien au plus haut p r ix , qu’il couvrit l’enchère de
messieurs Ducrohet , d’Albignat , de Riom , et Margeride de C lerinont , qui se retirèrent sans vouloir surenchérir.
Ce bien vaut 100 m ille francs aujourd’hui , dit-on T et n’en coûte
que 68 au citoyen Magaud : quand cela serait , on ne pourrait voir là
que l’effet de la progression des valeurs des im m eubles, depuis l’an
neuf ; et bien loin qu’il en résultât un m otif de le dépouiller , après
qu’il a vendu ses biens de Saiut-Sandoux , au même prix proportionnel
rie l’an 9 auquel il a acheté , ce serait une puissante considéra
tion pour le maintenir dans son acquisition , dont il ne pourrait C-tre
déchu sans éprouver la perte de 3o m ille francs ou davantage , qu’il
aurait à subir pour remplacer son bien de patrimoine aliéné.
Enfin , le bail général de Varvasse , lorsqu’il fut vendu au citoyen
Magaud et à cinq à six autres acquéreurs p a r tie ls , n’était que de
35 oo francs , et les fermiers ne payaient les impositions qu’en déduc
tion de ce prix.
L e produit des différentes ventes passa quatre-vingt-dix m ille francs.'
Peut-on sérieusement crier à la vilité d’ un tel prix ?
Des aboiemens si ridicules ne peuvent inspirer d’autre sentiment que
celui de la pitié.
M A G A U D .
Clcrmont-Fcrrand, de l'imprimerie de L IM E T , P ère et F ils.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
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Factums Marie
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Magaud, Bernard-Antoine. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Grenier
Favard
Boirot
Andraud
Pagès-Meymac
Magaud
Subject
The topic of the resource
ventes
nullité
enchères
Giscard d'Estaing (famille de)
châteaux
Description
An account of the resource
Consultation pour Bernard-Antoine Magaud, principal acquéreur du bien de Varvasse, provenu de Jean-François-Marie de Vichy, défendeur en assistance de cause, et incidemment appelant de jugement rendu au Tribunal de première instance de Clermont, le 3 Messidor an 11 ; contre les héritiers d'Antoine Ricard, et autres créanciers inscrits de Jean-François-Marie de Vichy, intimé ; en présence de Thérèse Langlard, épouse divorcée, et créancière principale dudit de Vichy, appelante et demanderesse en assistance de cause.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Limet (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1801-Circa An 11
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0244
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0243
BCU_Factums_G1409
BCU_Factums_G1410
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chanonat (63084)
La Varvasse (château de)
Saint-Sandoux (63395)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
chateaux
enchères
Giscard d'Estaing (famille de)
nullité
ventes
-
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M É M O I R E
P o u r les h é r i t i e r s R I C A R D
Vichy
T R IB U N A L D
c r é a n c i e r s du ci-d e v an t m arquis de
, intim és ;
C o n t r e la D a m e L A N G L A R D : épouse se disant divorcée dudit
du V ic h y , ap pelante ;
E
t
c o n t r e l e C itoyen B e r n a r d
E n p résen ce des
C ito y en s
R
M A G A U D > aussi a p p e la n t;
ich a r d - C or b e r y
,
G
r im a r d ia s
,
J u g e , et autres créanciers de V i c h y .
Ergo est Isx , juslorum injuslorumque distinclio , ad tllam anliquissirnam et rerum omnium principem expressci naturam , ad
quant leges hom inum dirigunlur.
Cic. do Legib. lib. 2 .
11 est donc sûr que la loi consiste essentiellement à distinguer ce
qui est juste de ce qui ne l’est pas , et qu’elle se mesure sur ta
nature , cette pruni ¡ère et principale rfcglc de toutes choses ,
qui dirige les lois humaines.
Cicéron , traité des L o is, liv, 2.
La
fraude peut-elle jamais être consacrée , sn r-to u t lo rs q u ’elle
e st en évidence , et d o it-o n penser q u 'il ait été , ou m êm e q u 'i l
ait p u ê tre dans l'intention du législateur de la favoriser ? T e lle
�esl la question vrn'nient étrange , (¡ne !a darne rie V i c h y
et Te
c it oyen Magaud élèvent de concer t dans ceLLe c a u s e , et dont ils
n e craignent pas de soutenir l ’affirmative.
4
L a dame de V i c h y , qui se dit créancière de son mari de i o,ooo fr.
s ’o p p o s e , contre toute raison d’intérêt légitime . à ce que lçs biens
de ce d é bi t e ur , q u ’il n ’a vendus q u ’a une s omme de 80,000 fr , moitié
de leur valeur , soient r evendus à leur juste p ri x , par la voie des
enchèr es juridiques ; contre ioute p ud eur , elle nie d ’avoir elle—
nume
fait une enchèr e sur ces ventes , lorsque les preuves les
mo i ns
équivoques de ce fait sont rapportées ; enfin , lorsqu’elle
e6t convaincue
d ’a v o i / collusoirement c h er ch é à s u p p r i m e r ces
preuves , pour frustrer les autres créanciers , elle ose se plaindre
de ce q u ’en subrogeant c eux -c i à l ’effet de
sa soumission , sur
le refus q u’elle fait de la poursui vre e l l e - m ê m e , on l é s a i t admis
à se char ger de f a i r e , p o u r l 'i nt érêt de la masse c o mm u n e
ce
q u ’elle ne voulait plus exécuter.
E t de sa part , le citoyen Magaud r l ’un des acquéreurs , tandis
jjue ses co-i nl éres sés se Tendent justice pa r un acquiescement vo
lontaire au juge me nt qui a r e c o n nu l’exi stence des enchères et en
a ordonné la poursuite , vient seul se plaindre de ce q u’ on lui fait
p e r d re le b é n é fi ce , sur lequel il n ’avait jamais dû c o m p t e r , d ’une
acquisition- frauduleuse , ainsi que le fruit des man œuv re s i n g é
nieuses q u ’il-avait e m p l o yé e s avec la dame de V i c h y ,
p r i m e r et
faire
disparaître
toutes les
traces
de
pour s u p
l ’e nc hè re qui
faisait cesser l’eflet de sa vente.
O n voit aisément ce qui fait mouvoir le citoyen Magand dans cette
affaire. Si ses motifs ne sont pas licites , ils ne s’accordent pas moins
avec son intérêt ; ce ne serait pas un mince
bénéfice p our lui,,
que de conserver un bien en valeur de plus de 100,000 fr. , pour
58
le prix modique de ( ,000 fr.
auquel il lui a été seulement vendu.
Mais la d a m e d e V i c h y ! comment e xpli quer sa conduite , l orsqu’on
I11 voit agir d ’une manière si opposée à ses intérêts appareils ? Coni -
4
nif.Mil concilier avec ses prétentions d ’une m ' u i u c de j o, oooIi
nir
les biens de son mari r non seulement q u ’elle ait abandonné et voulu
s up pr ime r l ’e nc hè re qui devait faire valoir ces biens à un p r i x bien
�s u p é r i e u r , et
,
(
3
)
.
lui assurer (Vaillant le p aie me nt de sa d e t t e , niais
encore q u ’elle résiste à ce que les autres créanciers fassent valoir
cette e nc hè re en se chargeant e u x - m ê m e s de la poursuite ? V o i c i
le mot de l ’éni gme ; c ’est q u ’au lieu d ’être créancière de son mar i
de i 4o , o o o fr. , c o mm e elle le, s u p p o s e , elle ne l ’est
pas m ê m e
de 20,000 IV. , et q u ’ayant traité avec l ’acqué re ur Ma ga u d , elle a r e ç u
de lui en secret le p r i x de son acquiescement : en sorte que c ’est
lui qui , sous son npm , agit et parle p o u r elle. Ainsi la fraude est
ma ni fe s te , et dès-lors le j u g em en t du tribunal de C l e r m o n t qui l’a
proscri te , pourrait-il ne pas r ece voi r sa confirmation ?
A n t o i n e R i c a r d , architecte et e n t re p re ne u r de b àt i me ns à C l e r
m o n t , père des intimés , avait été e m p l o y é par les ci- devant c omt e
et marquis de V i c h y , à différentes constructions. L ’h o n n e u r de les
se r vi r devait être sans doute d’ un grand p r i x ; car ils t r ou v è r en t le
m o y e n , non seulement de ne rien lui p a y e r p o u r ses travaux , niais
e nc or e de le po rte r à se r e ndr e l eur caution , p a r voie d ’endosse
m e n t , p o u r une lettre de change q u’ils avaient souscrite en 1780
au sieur Camb efo rt.
A l ’é c h é a n c e , les sieurs de V i c l i y , suivant l ’usage de leu rs s e i
gneuries , ne p ayè re nt pas : l e sieur C a m b e f o r t fit p r o t e st e r e t
obtint sentence de condamnation solidaire et pa r corps , t a n t c ont r e
e u x que contre l ’e n d o s s e u r , en la jurisdiction consulaire de C l e r n i o nt - Fe r ra nd , le i o j anvi er 1781 , p our la s o mm e de 4,667 fr. en
principal
portée p a r l a lettre de c h a n g e , a vec intérêts et dépens.
L e C i t o y e n R i c a r d allait être e m p ri s o nn é en ve rt u de
cette
s entence , sans que les 8ieurs de V i c h y , qui lui avaient p r omi s , dans
les mouv eme ns de leur fr a n c h e reconnaissance , d ’e m pê c h e r q u ’il
11e f ût jamais inquiété pour le service qu’il leur avait rendu , fissent
aucuns efforts p our faire h o n n e u r à leur parole ni a l a deLte ; il
f ut donc obligé de payer l u i - m ê m e la totalité des c onda mna ti ons ,
s a u f son recours qui lui était adjugé par la m ê m e sent ence co nt r e
les sieurs de V i c h y .
Ceux-ci
ônl trouvé constamment le secret de r e n d r e ce recour»
illusoire par des ventes de leurs biens et des délégations simuloes ;
^ et le Cit oyen Ri card , p ei e , est \ en u a deceder étant toujous reste
�( 4 )
_
.
c ré an ci er de cet objet , c o mm e des autres avances q u ’il l eur avait
faites.
C e p e n d a n t , le 11 pluviôse an 7 , les héritiers Ri c ar d f ormè re nt
l eur i nscription h y p o t h é c a i r e sur les siturs de V i c h y au bur ea u
de C l e r mo n t } pour sûreté et paiement de la s omme de 9,667 fr. ,
à laquelle montai t leur créance résultante du j ug e m e n t de 17 8 1 ,
en princi pal et accessoires.
Ils ne f ur ent pas les seuls qui eussent usé de cette précaution ,
v i n g t - s i x autres inscriptions avaient été ou f ur ent f ormées sur les
si eur s de V i c h y .
P a r m i ces i nscriptions , on
distinguait
celle faite p ar la dame
L a n g l a r d , épouse se disant divorcée du ci-devant marquis de V i c h y ,
p o u r créances portées à 104,677 fr- 9^ c. , qu’elle prétendait faire
ré sul te r de son contrat de mariage du 18 mars 1 7 7 1 , et lui avoi r
été adjugées p a r sentence p or t an t sa séparation de b i e n s , rendue
en la sénéchaussée de Moulins le 8 j ui n
17 8 1 , et pa r j u g em en t
du t ri bunal de l’A ll i e r du 16 b r umai r e an 7.
D e p u i s plusieurs années , l’e x - m a r q u i s de V i c h y s’était réfugié en
H o l l a n d e ; mais avant sa r e t r a i t e , après avoir plaidé assez sérieu
s e me n t avec la dame
L a n g l a r d , son é p o u s e , au parl ement de
P a r i s , où il avait interjeté appel d e l à sentence de séparation q u ’elle
avait o bte nue contre lui , il paraît que les de ux é p ou x
r ap p ro c hé s en 17 85 et que leur réconciliation fut
s’étaient
dès-lors basée
sur le projet de r endr e dupes les autres créanciers du mari , et de
l e u r soustiaire tous ses biens , au profit et sous le nom de la f e m m e ,
s a u f à elle a faire p ar t
p our ra it en résulter.
s e cr èt eme nt à celui-ci du bénéfice qui
D e s ventes et des saisies collusoires firent i o m be r , en eiïet y
depuis cette é p o q u e , sous la main de la dame de V i c h y tout ce qui
f u t r e co uvr é sur son m a r i , tant en pr inci paux q u ’en revenus. L a
niasse é n o r m e et e x agér ée de ses créances el le privil ège qu ’elle
l eur su p p o sa it, avaient élé p our elle des m o ye n s d ’écarl er la c on
c urrence des autres créanciers plus sérieux e t plus légitimes , pur
la crainte 0O1 elle les avait jetés
q u ’ils agiraient i n u t i l e m e n t , et
�(S )
ne feraient q u ’fljouter à l eur perte p ar les n ou ve au x
frais q u’ils
auraient à faire.
A u mois de germinal an g , le sieur de V i c l i y
se rendit
dans
ce département p our y faire la v e n te de tout ce qui lui restait de
p r o p r i é t é s ; il en passa quatre c ont r ats , sous les dates des 26 et 28
«erminal et 1 . " floréal m ê m e a n n é e , savoir:
o
L e I . " au cit oyen Nicolas , j e u n e , p our la somme
5 ,000
de cinq mil le l iv r e s , c i ................................................
L e 2.0 au citoyen F a y o n , p o u r pareille s o mm e
de cinq mille l i v r e s ,
Le
5 .'
au
fr.
5 ,000
ci...................................................
citoyen Magaud , ayant p o u r objet
u n superbe domaine . p o u r la s o mm e de soi xant e
huit mille l iv re s , c i ........................................................ 68,000
4
E t le .* aux nommé s Brochet, Sabatier et antres ,
p o u r la s omme de trois mille vingt- cinq l i v r e s ,
c i ..................................................................................................
Ainsi le total
5,02
5
de ces ventes f orme seul ement
une s omme d e .................................................................... 8 1 , 1 2 5 fr.
E t les objets vendus sont en val eur de plus de cent t rente mille
francs ; le domaine qui a passé au citoyen M a g a u d , vaut à lui seul
plus de cent mille francs ; il y a donc lieu de croire que le sieur
de V i c h y n ’avait souscrit ces ventes que moye n na nt un s uppl ément
de p r i x assez considérable qui lui avait été assuré par des actes
secrets.
Ces contrats furent déposés par les acquéreurs et transcrits au
bureau des hypot hèques de C le rmo n t F e r ra nd , les
g , 12
Dans
28 g e r m i n a l ,
et 16 floréal an g.
le mois de la transcription , chacun d ’eux dénonça son
a c q u i s i t i o n
créanciers
,
avec l’état des inscriptions subsistantes
inscrits
,
,
a u x dirl'érens
et fit la déclaration prescrite par l ’article X ! X X de
la loi du 11 brumaire an 7 , sur le régime hy po t hé ca ir e , q u ’il acquit
terait les charges e x i s t a n t e s , mais seul ement jusqu’à concurrence
du p ri x énoncé dans son contrat.
�.
.
Plusieurs
créanciers et
proposaient d ’e nc hé r ir sur
de V i c h y
6
(
}
n o t am me n t
cette
le6
. .
.
héritiers Ri c ar d , se
dénonciation , mais
là
dame
vint en personne les assurer q u ’ils pouvaient se r e p o se r
sur elle de ce soin ; qu' el l e était la plus intéressée à faire p or t er
les objets vendus à leur véritable valeur. L e s
tant sur
créanciers , c o m p
ct-s p - o liesses , s ’absti nrent de faire a uc une
procédure
relative à cet objet.
C e pe n da nt la dame de V i c h y fit etTecüvement notifier a ux a c
q ué re ur s sa déclaration et réquisition de revente des i mme ub le s
dont il s ’agit
par voie de mise a u x enchères , avec soumission
de les p or t er ou faire p or t er au moins à un vingtièm e en .susdit
p r i x é noncé dans les contrats , ce qui
eut lieu par exploits en
date des 11 et 16 p r a ir ia l an g ; — et les i ÿ et
i
5 messidor
sui
v ant , elle dénonça le tout au sieur de V i c h y , son m a r i , a vec com
m andem ent tendant à la revente sur lu i p a r expropriation des
biens
compris a ux contrats susdatés. El l e fit aussi la dénonciation
de ce c o mm an de me nt aux a c q u é r e u r s , avec déclaration q u’elle allait
p o u r s u i v r e la revente.
C et te e nc hè re e xé c ut ée p a r l a datne de V i c h y , force
que
cette
fois elle ne s ’était pas trouvée
p ens er
parfaitement d ’accord
avec son mari ; sans doute il avait voulu s’attribuer à lui seul, pour
l ’e m po r t e r en
Ho ll ande
où il
allait r et our ne r , le bénéfice
des
arrangemens secrets pris avec les acquéreurs , ou n ’en faire q u ' u n e
très-petite part à la dame de V i c h y , et c ’est vrai semblablement
ce qui avait excité celle-ci à r efuser sa sanction aux ventes : mais
les enchères a ya nt amené le sieur de V i c h y et les acquéreurs à lui
cé de r ce q u ’elle d é s i ra it , il en est résulLé q u ’au m ê me instant elle a
consenti à s u p pr i m er ou tenir cachés les originaux de ses actes de
notification d ’enchères , réquisition de r event e et c o m m a n d e m e n t
en e x propr ia tion , et q u ’elle a
fait c h e rc h er et retirer les copies
qui en avaient été distribuées , afin parei llement de les anéantir et
de faire ainsi disparaître toutes les traces de la procédure q u' el le
avait entreprise.
L e s créanciers qui ignoraient ces circonstances , attendaient tou
j our s que la dame de V i c h y fît procéder a ux uil khes sur lesquelles
�(7 )
devait s ’o p ér e r la r event e en j u s t i c e , l orsqu’au mois
de f rimnire
an 10 , elle rompit le silence et leva le masque sur le plan qu'elle
avait, f ormé de les frustrer.
E n effet , elle se présenta
me nt de C l e r m o n t , pour y
au greffe du
requérir
tribunal d ’a rr ondi ss e
l’or dr e
et
distribution du
p r i x des ventes faites par son mari aux cit oyens Magaud , F a y o n ,
Ts’ icolas ,
Brochet et autres acquéreurs , c o mm e si elle n ’eût pas
fait d ’enchères sur ces ventes , et elle
appela ensuite les divers
créanciers inscrits p our c ompar aî tr e au procès-verbal
d ’ordre
et
produi re leurs litres.
5 pluviôse an 1 0 , les héritiers Ri car d p ar ur e nt à ce p r o
Le
cès-verbal et opposèrent q u ’avant d ’aller plus avant ¿ l a dame de
V i c h y devait mettre a f i n les enchères p ar elle faites el que jusques-là il n ’y avait pas lieu de pr océder à ordre ni à distribution ,
la revente devant s ’eflecluer au profil de tous les créanciers.
L a dame de V i c h y osa soutenir par un dire en r ép ons e du 8
du m ê me m o i s , q u 'e lle n ’ a v a it p a s J'ait d ’ enchères , et au
s u r p l u s , quand
abandonner
qu’il n ’y
il eu aurait existé , q u’il lui avait été
et de s’en
a jamais
départir.
eu de
sa
Mais
il
est
bon
libre de les
d ’obs erver
part aucun désistement en
souscrit ni notifié , en sorte que son e n c h è i e
est toujous
f o rm e
subsis
tante.
L e s parties ayant
été r envoyées à l’audience sur ces difficultés
et autres survenues au procès verbal , la discussion s ’engagea d ’ab o i d entre le cit oyen
K i c l u u ' d - C o r b é r y , l’ un des créanciers et la
daine de V i c h y , d ’après les conclusions prises par c el ui -c i, à ce que
les
créances de la dame de
V i c h y fussent
préalablement réglées
et fixées , attendu q u e , loin d ’être créanci ère , c o mm e elle le s up
posait, de 154 ,6 77 f r . , elle ne l ’était tout au plus que de s o ,
aux
tenues du c o mp t e
devait
Le
encore
tribunal
débattu
q u ’ il
44 o fr.
représentait ; sur quoi elle
i m p u t e r différentes sommes q u ’elle avait touchées.
sursit par jugement, à s ’o c cu pe r
de celte discus
sion y j us qu’à co q u’il aurait été reconnu s il avait été lait des e n c h è r e s
et s’il
devait être procédé à la revente , afin de
d ét e r m i n e r quel
serait le p r i x qui ferait l’objet de 1 ordre et distribution.
�(8 )
A lo r s fut plaidée la question
dans l eur
dire
é l evé e
par
les cit oyens Ri card
au procès-verbal .
Ils i nte rpe lè re nt la dame de V i c h y et le citoyen M a g a u d , l ’ un
des a c q u é r e u r s , qui seul faisait contestation de s’exp li que r cal liégoriqui=nient , s ’il avait été ou non signifié par la dame de V i c h y
des
réquisition de revente judiciaire , avec soumi s
actes portant
sion d ’e nc h èr e d ’un vingtième.
'
L a da me de V i c h y et le citoyen Magaud r é po ndi r ent n é g a ti
vem en t , et ajoutant PefFrontei'ie au m e n s o n g e , mi re nt les h ér i
tiers Ri car d au défi de p ro dui re , non seul ement
aucune p r e u v e ,
mais m ê m e aucun indice de l ’exi st ence de ces enchères. .Les a u
tres acquéreurs
faisant défaut , étaient loin de
vouloir partager
c ette t é m é r i t é , ils s ’en r ap po r ta ie nt à justice par leur silence.
E n ré pons e à la dénégation et au défi de la darne de V i c h y et du
c i t o ye n Ma ga u d , les héritiers Ri c ar d , qui étaient parvenus a se
p r o c u r e r des preuves positives du fait
i . ° des extraits du
des
e nc h è r e s , justifièrent
bureau de l ’enregi st rement qui relataient
les
notifications faites à la requête de la dame de V i c h y aux acqué
re ur s , par exploits des 1 1 et 16 prairial et i
2.0 E t ce qui
achevait de
3
messidor an 9 ;
l ever toute équi voque , de la copie
d ’e xploi t de signification faite à la requête de la dame de V i c h y ,
a u x no mmé s B r o c h e t , Sabatier et Pla ne ix ( trois des acquéreurs ) ,
le 10 messidor an g , c ont enant
la
dénonciation
des soumissions
d ’enc hèr es par elle faites envers Ions las a cq u ér e u r s , et du c o m
m a n d e m e n t tendant à la l'evente pa r e xp ropr iation, q u ’elle avait fait
au sieur de
échappé
V i c h y , son
à la r ec he r ch e
mari : celt e copie était la seule qui eût
de la dame
de V i c h y
p our
s up pr ime r
les traces de la p ro cé d ur e q u ’elle avait tenue.
Ine x is t enc e des enchères étant ainsi établie, et le concert f rau
d ul eu x de la dame de V i c h y avec les acquéreurs étant démontr é ,
les
héritiers
la dame de
Ri card soutinrent q u ’il
Vichy
de faire cesser
n ’était pas
au
p ouv oi r
de
Pell'et des enc hèr es ; que
les
contrats se ti ouvant anéantis, il fallait nécessairement
procédera
la r e v e n t e , et que dans le cas où la dame de V i c l i y ne voudrait
pas y do n ne r suite, e u x , c o mm e tous autres créanciers intéressés ,
�,
(9).
devaient y être subrogés : ils ajoutèrent que la dame rie V i c l . y était
sans intérêt et c ons équemment sans droit p o u r
contester celte
subrogation q u i , loin de lui n u i r e , we pouvait que lui être avan
t a g e u s e ; et à l’égard du citoyen Magaud q u’il était égal ement sans
droit pour s ’y opposer , parce que la loi n ’avait a uc une me nt eu p o u r
b ut de
le favoriser
tion de
et de lui
maintenir une v e n t e à l ’a n nu l la -
laquelle il avait dû s ’attendre dès q u’il paraîtrait
enchère.
une
.
L a , dame de V i c h y r épondi t que tout ce q u ’elle avait
pu faire
n ' é t a it que pour son seul intérêt et pour son p r o p r e c o m p t e ; que
dès-lors il lui étflit libre de ne pas y do nne r suite ; que les autres
créanciers devaient
s’i mp ut er de
ne pas
avoir e nc hé r i et veillé
’
e u x - m ê m e s à la conservation de leurs intéiêts.
L e Ci to y en Ma ga ud tint le m ê me langage , et ajouta q u ’il était
impossible d ’a dm e t t r e des créanciers qui avaient gardé le silence
dans le délai de la loi , et qui par cela seul devaient être réputés
s’en être tenus au p ri x des ventes à e u x notif iées , à profiter des
enchères et pr océ dur e
des motifs dont il se
qu’avait
p u faire un autre
créancier p ar
désistait.
L ’ un et l ’autre ne rép onda ie nt rien au surplus aux preuves
collusion qui l eur étaient opposées ; au contraire
de
( c o m m e s ’ils
avaient eu à s ’applaudir de la fraude et à enc hé ri r sur son évi dence
p ar un excès d’i mp u de u r dont, il
était réservé à cette
donner l ’e x e mp l e ) , la dame de V i c h y et
firent
intervenir
oéomêtre à
un
de
le c it oye n
Magaud
p r ét e n d u créanci er , le ci to ye n C h o u s s y ,
Cusset , dont
p ar ce que i ndé pe nda mme nt
date
cause de
ils
ont le
de la
rôle
à l eur
disposition ,
simulation de sa créance ,
la
son h y p o t h è q u e qui est des dernières en ordre , ne lui
p e r me t pas de rien e sp ére r dans la
distribution
du
prix
des
immeubles dont il s' agi t , et ils firent conclure cet adhérent offi
cieux à ce que
le s c ito y e n s
en
les ventes fu s s e n t'm a in te n u e s à leu r p rix , et
R ica rd déclarés n on - recevables dans l eur demanda
subrogation d’encheres.
L e s autres
créanciers , intéresses u yoir admettre cette s ubro—
B
�n
V
( j°)
-
gaticn , en désiraient a r d em me nt le succès et s’en remel.laient à
justice , dans l ’espoir q u ’elle 11e pourrait jamais consacrer un c o n
c e r t de fraude aussi manifeste.
E n cet état , i ntervint au tribunal d ’arrondi ssement de C l e r m o n t F e r r a n d _ , l e a messi dor an 11 , le jugement dont voici les 1er m e s :
« A l t e n d u que l ’acle de notification d.i î â messidor an 9 0 0 n s )) tate suffisamment l ' ex is te nc e de l’e nc h èr e fuite p ar la üame de
)> V i c h y a ux acquéreurs de son m a r i ;
» Atte ndu
que l ’article X X X I de la loi du 1 1 b r um a i r e an 7 ,
)) sur le régime h yp ot h éc a ir e , accorde
» faculté de requérir la mise aux
aux créanciers inscrits la
enchères de l ’i mme ub le v en du
par le débiteur ;
)) A t t e n d u
que,
d ’après l’art. X V I I I de la loi du 11 br umai re an
>, 7 , sur les e x p r o p r i i o n s f or cé e s, la soumission de p or t er l ’i m » me ub le
vendu , à lin vi ngti ème en sus de celui
stipulé
par
» la vente
vol ontai re, tient lieu de pr emi èr e e n c h è r e , qui né ce s -
)) sairement profite à tous les créanciers et leur donne la faculté
» de poursuivre la vente par ex prop ri ati on forcée ;
» Att e ndu que des créanciers inscrits , qui p euv e nt ne
)> fuit de soumission
de mise a ux e n c h è r e s ,
)) connaissance de celle faite par un autre
)) confiance de recueillir
pas avoir
pa rc e q u ’ils avaie-nt
créancier et dans la
les avantages résultant de celte s o u m i s
)> sion , 11e pe uv ent être privés de ces a v a n t a g e s ;
)) L e tribunal ordonne que la dame de V i c h y sera tenue de don ne r
)) suite a ses soumissions , dans le mois de la signification du présent
)) j ug e m e n t ; huite de ce f a i r e , déclare les héritiers Ricard subrogés
’
» à son lieu et pince, c l les autorise , en c ons é que nc e, à poursui vre
)) par ex pro p ri at io n forcce , c onf o rm ém ent a la ldi , les objets dé
)) signés dans la notification dudit jour 10 messidor an ç);déclure le
)) j ug eme nt c omm un avec les autres p a rt i es , et condamne la dame
,
» de V i c h y aux d é p e n s » .
L a Dame de V i c h y et le citoyen Magatid .«ont , chacun à l eur
é g a r d , nppidans de ce j ug e me nt envers les héritiers Ricard.
Ils ont mis en cause sur ces appels , les autres créanciers de l ’c x marquis de V ichy , pour yoir déclarer co mm un avec eux le j ug eme nt
�à int ervenir. L a p l u pa r t de ces créanciers assignés font défaut* ; les
seuls qui aient c ompa ru , sont les citoyens Juge , G r i m ar di a s et
B a rdo na ud , qui vi ennent d ’adhérer et se réunir par des conclusions
expresses , aux c it oye ns R i c a r d , p o u r de ma nd er la conlirmation
du j ug eme nt dont est appel.
T e l est
l ’état dans lequel la cause se présente. L e s héritiers
R i c a r d y ont combat tre successivement leurs d eu x adversaires.
§. I.er
Contre la D a m e de V ic h y .
Il est impossible à la dame de V i c h y , non s eul eme nt de réus
s i r , mais m ê m e de pouvoir être écoutée sur son appel , du moins
quant a ux dispositions principales du j ug eme nt attaqué ; car elle y
est n o n - r e c e v a b l e par défaut d ’intérêt réel et légitim e.
' E n p r i n c i p e , l ’intérêt est la mesure dès actions ; t oute d e m a n d e ,
toute contestati on, doivent d o n c a vo i r p ou r base un intérêt réel de la
p ar t de c e ux qui les s ou ti e n ne nt , a ut r eme nt elles t omb ent d ’elles—
mêmes. ¿Ictio ealenhs competit c/uale/iàs in lerest , nec com petit
antequàm cœ perit interesse. Il en est de m ê m e des a p pe l s ; c e u x
qui sont dépourvus d ’ i nté rê t, ne pe uv ent être admis. N on soient
ctudiri (impelíanles n id là quorum inlerest. I. 1. JJ\ de appellat.
recipiend. v el non.
Da ns l ’e s p è ce , quel intérêt p e ut avoir la dame de V i c h y à se
plaindre du j ug eme n t r endu par le tribunal d ’arrondi ssement de
C l e r m o n t , a u x c h ef s qu i o n t o r d o n n é , i . ° q u ’ elle serai t t e n u e de
donner suite à ses soumissions dans le m o i s ; 2.0 q u e , faute de ce
faire , les héritiers R i c a r d de me ur er aie nt subrosés
en son lieu et
t*
p la ce ; ." que ceux-ci étaient, en conséquence , autorisés à poursui vre
5
p a r ex pro p ri at ion f o r c é e , c o n f or mé me nt à la l o i , les objets d é
signés dans la notification du
i
5
messidor an 9 ;
4 ."
et que
le
j u g e m e n t était déclaré c o m m un avec toutes les auLres pat lies a p
pelées ?
L a p r emi è re de ces di sposit i ons, il est v r a i , reconnaît et j uge
l ’e xi st e nc e de l’e nchèr e , et prescrit à la dame de V i c h y d ’ y do nne r
sui te -, mais le fait de la notification d ’e nc hè r e ne p e ut être cont esté,
�( 12 )
il est p r o u v é j u s q u ’à l ’ é v i d e n c e , p a r les p i èc e s qui s o nt r a p p o r l e e s ;
( x ) mais la dame de V i c h y n ’a poi nt d ’intérêt légitime , p our en nier
l ’exi st ence et p our se refuser à continuer de poursuivre lu r e v e n t e ,
p u i s q u ’elle a r eco nnu , au c o n t r a i r e , pa r le l'ait m ê me de la p r o
cédure par elle e ntr epr ise , que son intérêt était de faire t o mb er
les pr emi èr es ventes. Mais e nf in, cette disposition n ’est a uc une me nt
coactive , elle est de p u r e faculté ; car aucune pei ne , aucune condi
tion o n é r e u s e , ne sont attachées au 1 efus que ferait
V i c h y de l ’exécuter : il lui est libre à son g:é de
la dame de
suivre
ou de
n e pas suivre , eile n ’est donc pas fondée à se plaindre.
L a seconde disposition non seul ement ne lui nuit pas , mais se
t r ouv e encore toute à son a vant age; car en subrogeant p u r e me nt
e t simplement en son lieu et place les héritiers R i c ar d à la pour
suite , on la décharge de tous les risques et évènemons attachés à
la qu a lité d en chérisseuse et p o u r su iv a n te , pour les r ep or te r e n
tièrement sur les s ub r og é s; de manière q u ’elle n ’a plus
que du
bénéfice a r e c u e i l l i r , soit de la revent e si elle pr odui t une plusvalue telle q u ’on a lieu de l ’c s pé i er , soit de la condition
qui est
( i ) La copie qui est rapportée (cl, dont il est parle page 8 ) de la notification
faite le i3 messidor an 11 , par ta dame de Vichy , aux acquéreurs Brochet ,
Salmlier et Plancix,contient dénonciation et transcription, entre autres pièces,
i.° de l’état et désignation des biens vendus au citoyen Magaud et aux autres
acquercurs, comme appartenait!) au sieur de Vichy ; 2 .° du commandement fait
h la suite )e t i messidor, môme année, par la dame de Vichy , à son mari , por
tan t « qu’a delaut de paiem ent, elle, entend porstiivre la vente et expropriation
p ar 1(1 voie de l enchere , dt'.s biens dont la désignation est faite en tête (/rs pré—
æen/es, lesquels biens ont été acquis par les citoyens Favon , M agaud, Nicolas,
B rochet, Sabaticr et Plancix , auxquels il « été J'uit déclaration d ’enchères par
actes des onze et seize, prairial dernier.
A l’appui de celte pièce décisive , on rapporte encore t°. l'entrait du bureau
d’enregistrement , qui pronve que l’original de cet exploit de dénonciation a
été enregistré le moine jour i3 messidor an g ; a ° l’exIraiL des eiircgislremcns
des actes d’enchères des il et l(> prairial précédent ; 3 u l’exlrait dY nrc'istrcnx iil de la procuration passée devant Chnssaigne , notaire à Clermonl , par la
clame de Vichy , le la prairial an y , pour la suite deadites caciièrcs.
�t r\
V iû)
i mposée aux héritiers Ri car d , au m o y e n de la subrogation p a r e u x
.
demandée et a c c e p t é e , de
fournir !e m o nt a nt de
l ’e n c h è r e , et
d'acquitter les (rais dans le cas où l’on ne trouverait pas d ’acquéreurs
p o u r couvrir cctte e n c h . r e : et c ’est ici ia différence qui
se r e n
c ontre dans l’espèce particulière , avec les causes qui se sont déjà
présentées en celte matière : car dans celle-l« les demandeurs en s u b
rogation voulaient laisser tous les risques à la cha rge de l ’ en
ch érisseu r qui abandonnait son enchère.
L e s troisième et quatrième dispositions n ’étant que la conséquence
des de ux précédentes, ne préjudicient. pas davantage à la dame de
V i c h y , d ’autant q u ’elles n ’ajoutent rien qui puisse la f r a p pe r ou
r e t o m b e r sur elle.
Il n ’y a do n c que la disposition qui la c on da mn e aux dépens ,
qn^elle
puisse t r ou v er onéreuse. Mais il fallait alors q u ’elle
traignît son appel à ce seul
c or e e sp ér er d ’y réussir ?
res-
c h e f j et c o mm en t pour rait- ell e e n
L a condamnation des dépens est la p ei ne des t émé ra ir es plai
de ur s, de ceux qui soutiennent d ’injustes contestations et qui y s uc
c o m b e n t . Il n ’est pas permis a u x tr ibunaux de leur en faire grâce ni
r emi se à cause de leur quali té, pas m ê m e sous p ré te xte d ’équité ,
ni pour quelque autre m ot if que ce puisse être. ( A r t . I . " du lit.
XXXI
de l’ord.ce de 1667 ).
O r la
daine de V i c h y avait i nd éc e mme n t nié des
et établis ; elle av,iit
qu elle
,
11 avait
pas
faits
vrais
té mé ra ir eme n t et fraudul eusement soutenu
fait
d e n c hè r es ni de c omm an de me nt
pour
engager la revente par e x p r op r ia t io n des biens de son mari. Klle
a v a i t , injustement
et sans cause léüilitne
./ contesté la c onti nuation
'
O
de la poursuite , elle s ’etail aussi injustement e l bien p l u s , c o n tr e
son propre intérêt , opposée ù la subrogation p ure el .sumple
m an dé e
par les héritiers Ilicard : elle devait
elle l’a é t é , c onda mné e aux dépens de c el l e
de
do nc être , c o m m e
t é m ér ai i e
el injuste
contestation , et le jugement dont est appel ne pourrait êi re l è f o r m é
en
ce point , sans blesser à la fois el la disposition textuell e de
l ’ordo nna nc e e l toutes les idées îe^ues eu justice.
�(i4)
$.
II.
Contre le Citoyen M agaucl.
la qualité du c i t o y e n Magnud dans cette affaire ?
Quel le est
c Jest c eüc d ’un acquéreur à titre s u s p e n s if et p u r e m e n t éventuel.
Que ls droits lui assure celte qualité , di aprés not re code h y p o l l i é caire , p our s’opposer a ux enchères qui ont frappe
son contrat et
e m p ê c h e r la revente qui doit en être la suite ? aucuns : car p our
avoir des droits acquis , il faudrait
que sa vente fût devenue d é
fin itiv e faule d ’enchères survenues
dans le délai pr esc ri t p ar la
loi; et il est r eco nnu et p rouvé en point de f a i t , q u ’il est s u r ve n u
dans ce
délai une enc hè re faite par la dame
de V i c h y sur son
acq ui si t ion, e nc h èr e qui , de d r o i t , n ’a jamais cessé d ’être e xi s
tante , p u i s q u ’ elle n ’a pas été retirée ni annullée légalement.
Par
le
de me ur é
doit se
seul Fait de l ’émission de celte e n c h è r e , son litre est
en
suspens
j us qu ’à l ’évé ne me nt
poursui vre p o u r la
d ’attendre
ce résultat
de l 'adjudication
revente. J1 est obligé
qui l 'expos e
qui
de soulTiir et
à la dépossession.
C ’est
condi ti on formelle que lui ont imposée les art. X X X I et X X X I I I
de la loi du
11 br umai re an 7 , et à laquelle il s ’est assujetti en
r e me t t a nt son contrat à la transcription.
C ’est donc contre le sens é vi de nt de la loi et contre sa dispo
sition que le cit oyen Magaud vi ent se plaindre de ce que le j u g e
m e n t de I.tru instance l ’a soumis à un évé ne me nt qui était a ll ac hé
à la nature
de son titre. Il a dû nécessai rement
c o m p t e r sur la
résolution de son c o n t r a t , dès q u ’il y élait survenu
dont l’exist ence
plus
q u ’à
11e peut actuel lement êl rc
re co uvr er
bour se me nt lui
ses
frais
et
l o y a ux
était offert , à moins
une
e nc h èr e
d és a v o u é e ; il n ’avait
coûls
dont
le r e m
q u ’il n ’arrivât , l o rs q u’ on
voudrait pr oc éd er à l ’adjudication , que le silence de tous les c ré
anciers inscrits et intéressés à faire valoir l’enc/ièie , ne vînt lui
restituer
XVIII
l ’ctlèt de son acquisition, c o m m e il est pr évu par
l ’ar(.
de la ¡oi sur les ex pro p ri ati on s forcées.
Ainsi son appel n ’est pas plus rcc cva ble que celui de la damo
�c i5 )
.
de Vieil y. C e t appel doit. «Vantant mie ux c ire r ep o us s é, qu’ii a été
encore interjeté d ’ une manière indéfinie , et q u ’au lieu de le r es traindre à ce qui touchait seulement la vente de ce qui lui
était
r e l a t i f , le citoyen M a g a u d , en le faisant poi ter sur le tout , de
mande également la reformal ion du jugement- de 1 . ' " instance dans
ce qui concerne les autres acquéreurs qui lie s ’en plaignent pas ,
et pour lesquels sans doute il n ’est pas en droit de se p l a i n d r e ,
l orsqu’ils
ne j u g e n t pas ' e u x - m ê m e s q u ’il leur a ppart i enne de le
faire.
E nf i n ce qui achève
de rendre le ^citoyen Ma ga ud défavorable
aux y e u x de la j us ti ce ,
et no n-r ec eva bl e à soutenir aucune c o n
testation ou a ppe l envers les créanciers de V i c h y , c ’est l ’e x c e p
tion qui naît du
dol dont il s ’est é v i d e m m e n t r endu coupable ,
soit en se prêtant à céler une partie du prix de son acquisition ,
p o u r la soustraire ?ux créanciers dont elle était Je gage , soit en
colluHant avec, la d a i n e de V i c h y p our c acher , désavouer et sup
p r im e r les enchères qui devaient met tre ces créanciers dans le
cas de relever cette première fraude , et de r am ene r la vente à son
véritable prix par une adjudication publique.
Cette except ion le rep ous se , et ne lui p e r me t pas m ê m e d ’être
entendu : p r œ lo r , dit la loi j
varias et dolosos qu i
fl' de dolo m alo , subvenil a d versus
a liis obfueru/it c a llid ita le
(¡uddain , ne
ve.l illis m nlitia sua s il lucrosa , vol ipsis si/nplicitas dmnnosa. O r
l ’objet de sou appel n’est-il pas de recueillir le bénéfice de la fraude
q u ’il a pratiquéeavec le sieur de V i c h y et son é p o u s e , au préjudice
des créanciers de celui-ci t Sa fraude lui serait donc utile , il en r ec e
vrait la r éco mp ens e , si cet appel pouvait êti,e écouté , tandis que
la loi naturelle v e u t ,
ail contraire, q u ’il en soit p u n i , lors m ê me
q u ’il pourrait trouver dans la r igueur ou dans la subtilité du droit
quelques
F
er
a rg ume ns à
p rosit L.
Qu'il
ait
l ’appui de sa cause.
o c c a s io n km JU iits
1
A V c/ii dolus suus
c i v u . i s conlrà n aluralem œ quitatem
. ii.d e (loi. m al. excep t.
ne dise pas au surplus que
eu pour
o b j e t , dans
de favoriser les moyens
son
la loi
esprit
frauduleux,
du
c o mm e
1 i b r umai r e an <j
dans
son
t ex te
qui p our ra ie nt ¿Lie concertés
�,
.
(16)
,
.
e nt r e l ’acquéreur et le vendeur, au préjudi ce des créanciers ; c’est
de sa part calomnier la loi et l ’intention du législateur dont elle a
été l ’ouvrage. II n ’a pas é t é , en e l f e t , ni pu être dans son
v œ u de
f a v o r i s e r ni de r éc o mp e ns e r la fraude , et si par une fausse in
t e r p r ét a t i o n de q ue lqu’une de ses dispositions , on pouvait induire
im a rgument contraire
il ne serait pas possible d’y avoir égard ;
car l a l o i ne peut vouloip que ce qui est juste et honnête , et doit
toujours
se r a pp o rt e r au p ri nci pe de l ’é q u i t é
naturelle.
Ma is si 011 c h er ch e les motifs de cette loi dans les r appor ts dont
elle fut précédée , on trouve q u ’elle a eu p o u r
objet , loin de
c r é e r de no u ve au x a b u s , d e r e mé d i e r à c e u x qui étaient nés
de
la législation p récédente. « Depui s longtems, disait le r ep ré se nt an t
)) Ja cquem inot , dans un de ces r a p p o r t s , tous les h o mm es éclai)} rés demandaient q u ’en écartant les préjugés , en surmont ant les
)> anciennes h a b i t u d e s , on établît enfin un mode conservatoire des
)) h yp o t h è q u e s , basé su r les p rin cip es de la loy au té et de la bonne
)>f o i , qui facilitât les transactions , qui les environnât (Vun g ra n d
)> j o u r , qui s’opposât i nv i n c i b l e m e nt à ce (jue la confiance f à l d c )) son n a is victim e des
détours de la fr a u d e , en un m o t , qui
» garantit à chacun ses droits et sa p rop riété n.
E t si
facile
de ces mo ti fs
de reconnaître
précautions
qui
velles , toutes
exposés
que cette
loi , sans
rien
existaient d éj à , n ' a fait q u' en
en faveur
sollicitude , et
on passe aux dispositions, il est'
r e tr a n c h e r
des
ajouter de n o u
des créanciers , qui méritaient toute sa
dont elle n ’avait en vue
que le seul intérêt
et
avantage , tandis q u’elle n ’a rien fait ni voulu faire p our les acqué
reurs
q u ’elle ne considère que dans un état p r é c a i r e , et n ’a y a n t
q u ’un litre incertain , j us q u ’à ce que l ’adhésion des créanciers i n
tervienne p ou r sanctionner leur contrat p ar le silence ou p ar lo
défaut d’e n c h è r e s , et le r e ndr e définitif.
Les
héritiers
Ricard
p our ra ie nt
te rmi ne r ici l eur discussion,
dès q u ’ il est p ro uv é que l ’ un et l’autre de
leurs adveisaircs sont
égal ement uoii-rcccvaldes dans leurs appels : mais ils ne doi vent
pas craiiulîu de les suivre et c ombat tr e jusques dans les moyens'
q u ’ils mettent
en avant p our
accuser d ’erreur^ ou mal j u g é au
�(
17
)
f o n d le j ug e me nt de I.cre instance, puisque ces objections 11e
posent véritablement que sur la subtilité.
$.
re
I I T.
Réfutation du système des appelcms 'sur le sens des lois du
11
brumaire an 7.
A v a n t le dernier code h y p o t h é c ai r e , 011 ne se serait pas permis
sans doute de met tre en question , que des créanciers
opposans
s ur les biens de leurs débiteurs , dans le cas de vent e par
volontaire
ou
lettres de ratification ,
décret
n ’eussent le droit , p o u r
l eur intérêt
l orsqu’il était survenu une e n c h è r e sur le p r i x de ces
ventes , de
la part de l ’un d’entr’ e u x , et que ce lu i-c i se montrait
négligent à suivre celte e nc hè r e ou l ’abandonnai t, , de se s ub ro g er
au bénéfice et à la poursuite de cette m ê me enc hè re et de re le
ver la négligence ou l ’abandon de l’ enchérisseur qui le plus sou
vent avait été désintéressé.
C e l l e opinion était fondée sur deux p ri nci pe s bi en
prem ier,
trouve
r econnus : le
que toute enchère, dès le m o me n t q u ’elle est f ormée, se
acquise
, soit
à la partie saisie, soit à tous les créanciers
intéressés , parce quo c’est un contrat que Venchérisseur passe
a v e c la justice et p a r lequel il s'engage à se rendre ad ju d ica
,
taire du bien décrété en
cas q u ’ il ne se
forte enchère , contr at qui
est obligatoire dès
et ne p eut
trouve p a s
de plus
le m o m e n t m ê m e
p l u s s e rétracter ( d ’ H é r i c o u r t , traité de la vente des
irnmeub. chap. 1 0 , n°. 18 g ) ; le s e c o n d , que
s ai sissant , et
tout opposant
est
q u’à ce t i t r e , dans toutes les poursuites qui se f o n t
sur un débiteur commun , soit q u ’il s’agisse d ’apposition de scellés
saisies et ventes mobiliaires , ou décrets et ventes immobiliai res ,
soit q u’il s ’agisse
niers saisis ,
il
a le
d ’ordre , distribution
droit
ou c o nt r ib ut i on
de faire po ur l ’intérêt de
p o u r le sien p ro pr e , tout ce que le poursuivant aurait
et de
de de
la masse
et
du faire ,
se faire s ubroger en son lieu et place , lorsque
néglige ou cesse d ’agir 5 c ’est ce q u i a été c o n s t am me nt
celui-ci
pratiqué
c
�( iS )
de tous les tems , c o m m e l ’ai lestent tous nos
( _
auteurs ( d ' H é r i -
c o ur t , traité de la vente des immeubl es , ch ip. 6 , 11."
4. me p a r t i e ,
traité de la pr océ dur e civile
24 . ; P o i t i e r ,
cliap. 2 , art. 8. j Rayant,
p r o cé d u r e du palais . etc. ).
E n f i n , c' est ce qui se pratique encore j our nel lement dans tou
tes les instances de saisie ou
ordre. C o m m e n t donc la dume de
V i c h y et le c i t o ye n Magaud ont-ils
pu
aurait dû être changé depuis la loi du 11
i maginer que cet usage
b r u m ai r e an 7 , sur le
ré gi me h yp o th é c a i r e , et q u ’il ne devait plus c i r e admis en m a
tière d ’ enchères ? E s t - c e que les principes et les motifs sur lesquels
il
était fondé , ont cessé d ’exi st er ?
-
Ils r ép o nd en t que cette loi ne parle pas de cette subrogation
aux enchères
;
m a i s , si
elle
n ’en parle pas
pour
l ’a ut oi i se r
n om in a tivem en t , elle n ’en parle pas non plus pour la défendre ;
dès-lors c ’est un p o i n t resté sous le droit c o m m un p r éc éd e mm en t
observé. L/édi t de jui n 1 7 7 1 ne parlait pas non plus de la sub ro
gation a ux enchères , et cependant 011 n' avai t jamais entrepris de
p ré te ndr e
que celte
voie ne dût avoir
lieu. Que ll e
en était la
raison ? c ’est que le concours des oppositions , c o m m e celui des
inscriptions
l ’ordre et
qui y o nt été substituées , engageant nécessairement
distribution entre tous les créanciers opposans ou ins
crits , tout ce qui se fait dès le m ê me m o me n t par l’un des o p p o
sans devient
c ommun
c ’est un incident
aux
autres.
survient
une enchèr e ,
h e u r e u x dont le bénéfice est acquis à Ions ; de
ni eme , s ’ il survient des lenteurs
tions
S ’il
, des distractions ou
au préjudice de la masse , dans le cours de
c o nda mna
la poursuite ,
tous sont obligés d ’en s up p or t er les évènemens.
Nos
adversaires
ex c ip e nt des art. X X X I et X X X H ; suivant eux,
d ’après ces ai l i c l e s , chaque créancier inscrit doit enchérir pour
son compte. A
défaut
d ’enchèr e de sa part dans
le délai pres
crit , la valeur do l’i mme ub le demeure définitivement fixée envers
lui au p r i x stipulé par le
contrat.
C ’oht-à-dire, suivant e u x, q u e dans le c a s d ’une vente qui serait por*
t é e p a r fraude
à un p r i x t rè s-i nf éri eur , et sur laquelle subsisterait
�(
]9
)
néanmoi ns,par e x e m p l e , un no mb re de vingt inscriptions, il faudrait
que chacun des vingt créanciers inscrits , ne pouv an t c o m p t e r sur
ce qui serait fait par les autres pour l’intérêt c o m m u n , fît son e n
c hè re parti cul ière, p our ne pas être dupe de la ruse du d éb it eu r:
mais les frais de ces vingt enchères , c eux de leurs dénonciations
et poursuites , devant être pris en privilège sur la val eur de l ’i m
m euble affecté ; il s’ensuivrait que le p r i x de cet i mme ub le serait
dans
le cas d ’être absorbé en', son entier par ces frais , et de ne
p ouvoi r m ê m e y suffire ; que dès lors il ne resterait r ien a ux cré
anciers à rece voi r sur ce qui l eur serait dû ; et q u’ils se trou
veraient nécessairement condamnés à re spe c te r la f ra ude pratiquée
p a r l eur débiteur , sans p ouvoi r
s ’en
plai ndre , à moins de s’e x
pos er à voir aggraver l eur perte.
U n e disposition aussi
absurde ne p eut se supposer dans l ’i n
tention de la loi. No u s vo yons au contraire dans
le
m ê m e art.
X X X I I et dans Fart. X X X I I I , que dès q u ’il est survenu une
déclaration d ’e n c h è r e , le contrat qui en a été f ra pp é , loin de d e
ve ni r définitif envers aucun des créanciers , se trouve au c on
traire , sinon anéanti , du moins suspendu
dans ses effets envers
toutes les p a rties intéressées , et que la poursuite à fin de revent e
doit nécessairement avoir l i e u ; ce qui ne peut se faire encore q u ’au
profit de tous les
créanciers i n s cr it s , puisque tous
appelés a l ’adjudication ( art. V I de la loi sur
doivent être
les expropr iat ions
forcées ).
L e contrat étant suspendu dans ses effets p a r l ’intervention de
l ’e nc hè re faite par un seul des c ré a n c ie r s, il en résulte également
que la
p ro pr ié té de
n ’a ya nt pas
avait
l ’objet ve ndu doit être considérée
c omme
cessé de résider en la personne du débiteur
qui en
consenti la vent e , et que l ’acquéreur
qui
s ’en tr ouv e e n
possession ne p eut être regardé que c o mm e en étant
le déposi
taire. C ’est aussi ce que déclarent les art. III et X V I I I
même
de
la
loi sur les e xpropr ia tions forcées.
C e n ’est pas t o u t , le m ê m e
art. X V I I I p or te que la soumis
sion faite p a r u n des créanciers d’aug me nt er le p r i x de la vente
vol ontai re sert de prem ière e n c h è r e , lors de l ’adjudication pour
�}
(
la revente : donc cette soumission est obligatoire tin j o ur où elle
est faite ; donc elle appartient el. doit profiter à tontes les par
ties i nt ér es sées; donc enfin elle
ne peut é h e séparée de l ’adju
dication a f i n de r e v e n t e , p ui squ’elle en lait
partie e l
torme la
p r e m i è r e mise.
Mais , disent les a d v er s ai re s , cell e soumission n ’est
p a r acte
exlra ju d icia ire ; pour q u ’on piiL
contrat f ormé en j u s t i c e , il
on faire résulter
faudiait q u ’elle fût
c o m m e sous le r égi me de l ’édit de
faile
que
un
faite au greffe ,
1771.
C e l l e objection n ’est q u ’u n e mauvaise équivoque. P a r le dé pô t
çt la transcription que l’acquéreur fait de son titre au bureau de
la conser vat i on des h y p o t h è q u e s , il contracte légalement envers
t ous les
créanciers
inscrits la condition
de r a pp o rt e r son p r i x ,
s ’ils y adhèrent ; ou , si quel qu’ un d ’e n l r ’eux ne veut pas y adhérer et
e n c h é r i t , il contracte l ’obligation de r ap p o r t e r l’objet vendu p our
ê tre soumis à la revent e pa r adjudication publique.
reau des h y p o t h èq ue s est le greffe institué par
voi r au profit des c ré a nci ei s inscrits
Ainsi l e b u
la loi pour r e c e
toutes les
soumissions et
obligalions des acquéreurs.
L e contrat élant ainsi une fois formé, la loi n ’a pas exi gé ni dû
e xi ge r que les
actes subséquens
qui
se r éféreraient à son e x é
cution , fussent également déposés ou transcrits ; elle s ’est con
tentée de simples
notifications : mais
ces notifications ptofi e ut
nécessairement a tous les créanciers , puisqu’elles sont la suite de
l ’engagement légal opéré par la
transcription , et que d ’ailleurs
elles doivent, être faites tant
ve nde ur qui s ’en
au
trouve
saisi
p o u r tous ses c ré me io rs appelés à e x e rc er scs d r o i t s , q u ’à l ’ac
q ué r eur qui est conslitné leur d ép os i la ir e, et q ui , dans foui ce qui se
fuit p a r s u i l e d e l à transcription , esL si bien censé agir pour e u x ,
que ! arl. X X X I V
le droit de
de la pr emi èr e loi du
se faire r emb ou rs e r
adjudicataire et sur le p r i x de
fhi
oppose
contraire } l ’lul
deux
j u g eme us
11 br umai re lui donne
de lotis ses frais par
le
nouvel
la chose.
rendus dans 1111 sens
pr étendu
p Ur ]« tributial d ’appel do Paris , le 1 (i thermi dor
�( Si )
an
lo
,
prairial
l'autre par
le
tribunal
d’appel
de
Riom
au 1 1. Mais , quelque respectables que soient
niens , ils- ne peuvent
f ormer aucun
dus
ces
le
n
juge-
préjugé dans la cause ; car ,
outre que les motifs qu’ils ont adoptés
sés par
,
se sont, trouvés c ont rove r
décisions di¡Terenies i nt ervenues
dans d ’antres tri
b u n au x , q u ’il est é g a e m e n t possible que la discussion qui les a
précédés
n ’ait pas
été assez ap pr of ondi e
ils
difîerenL encore
essentiellement de la cause actuelle.
D ’abord , on ne rencontrait pas dans les affaires
auxquelles ils
se r a p p o r t e n t , c e l t i connivence frauduleuse , ce (loi évident
qui
dans l’espèce actuelle ont été pratiqués e nt r e le vendeur , l ’a cq ué
r e u r et
l’enchérisseur p o u r f rustrer les créanciers légitime.*., et
- q u i , c o m m e ou l’a d é m o n t r é , doivent suffire seuls pour faire déclieoir la dame de V i c h y
et le citoyen
Magaud de toute e x c e p
tion et m o ye n s q u’ils voudraient i nvoquer en leur faveur.
E n second l i e u, il y avait eu clans l’une et l ’autre espèce , désis
t e m en t fo rm ellem en t et légalem ent notiJié par 'les enchérisseurs ;
ils pouvaient donc , avec quelque raison, soutenir q u ’ils n ’étaient
volonté ,
pas obligés d’aller plus loin c oni re leur i n t ér ê t et leur
s au f aux autres
à
leurs
ciéanciers à poursuivre
risques ,
comme
ils
aviseraient.
p our
leur
Ici , au
c omp te et
contraire
,
il n ’existe point ni n ’a jamais existé de désistem ent fait par la dame
de V i c h y de la soumission et déclaration d ’e nc hè r e , qui est prouvée
avoir été par elle (aile envers les citoyens Magaud et autres ac
quéreurs , sous les dates des i l
que
de la pr océ dur e par elle
commandement
ensole
que ces
et
16 prairial
an 9 , non plus
engagée p o u r la r event e
et dénonciation des 11
par ses
et 10 messidor sui vant ;
enc hèr es el c el l e pr océ dur e sont toujours s u b
. s if- tan les.
En
troisième lieu , dans l ’espèce jugée au tribunal d appel de
Paris , aucun des créanciers 11e demandait la mai ntenue de l’e nc lière ni sa subrogation.
Qua ti i ème i ne nl e n f i n , dans l’espèce
de Ri om , le 11
rogution ,
jugée au tribunal d ’appel
p i a i i u l an 11 , le créancier qui réclamait
la demandait
lafub-
a ux risques de l’enchérisseur qui s'éiait
�32
if
)
départi , et voulait que cet e n c h é r i s s e u r , non-olbstant son
désiste
m e n t et sa déclaration q u ’il était désintéressé , f ût tenu non seu
l eme nt
de
p arf our ni r
Venchère
du
vingtièm e
portée par sa
soumission , mais encore fût garant des frais de la p ro cé d ur e à fin
de revent e par adjudication : ici , au contraire , les citoyens R ic ar d
n ’ont dema ndé et obtenu q u ’ une subrogation p u re et sim ple
à
leurs pr opr es risques ,
l ’avantage de tous les
qui , loin de nuire à pe rsonne ,
et
fait
créanciers intéressés , celui de la dame de
V i c h y e ll e- mê me qui se dit la créanci ère la plus c o ns i dé r ab l e, et
celui de son mari qui est la partie saisie.
\ oyons , au surplus , si l ’opinion q u ’on nous oppose
n ’a
pas
été pui ssamment c omb att ue , et si en ce m o m e n t il p eut m ê m e
être permi s de la soutenir davantage.
O n trouve dans le r ap p or t fait p a r l a commission du tribunal de
cassation , sur le p r o j e t de code civil , 1om. 2 , pag. 1 7 7 } le pas
sage suivant : « Il pourrait souvent arri ver que le p ri x de la vente
» f ût inférieur à la vraie v a l e u r , et les créanciers ne doivent pas
» en s o u f f r i r . L ’édit de 1 7 7 1 l’avait prévu et avait autorisé les c ré a n
)> ciers à s ur e nc hé r ir d ’un di x iè me , ensuite d^un vi ngti ème l ’ un sur
« l ’autre ; mais il n Javait autorisé que les créanciers eu x-m êm es ,• ce
« qui e xé cuté à ia rigueur pouvait être injuste par l ’état de la f ortune
» des c ré a n c ie r s, leur impuissance ou leur i nc onvenanc e d’acquérir
» p o u r e ux -mê me s : ce qui d ’ un autre côté , était bien facile à éh » der , en faisant arr ange me nt avec un t i e r s , p o u r lui transmettre le
» bien adjugé , après lui avoir prêté son nom p our enc hérir.... L ’art.
» X X X I de la loi du 1 1 b r umai r e an 7 , est plus simple et plus rai
» sonnable : L e s créanciers inscrits ne sont pas seul ement autorisés à
sur enchér ir , mais à requérir la mise a u x enchères et adju dication
» p u b liq u e ..... L^edit de 1 7 7 1 autorisait l ’a cq ucr eu r à c ons e rv er
)) l’iinmeuble , en p a y a n t le plus h aut
p r i x auquel il aurait été
)) p o r t é ......Q u e l créanci er ou quel é tr ang er se résoudrait à enc hé ri r
)) et à don ne r à l’i m m e ub l e .tout son véritable p r i x , s’il était au
» c h o i x de l ’a cqué re ur , ou de laisser la chose à l’adjudicataire, ou de la
» prendre pour soi au m ê me p r i x ? Cela étuit moins déra iso nna bl e,
)) quand ou n ’avait affaire q u ’à des créanciers enchérisseurs et n on à
�(23)
)> des ét r angers ..... Mais p our des étrangers , il faut a vou er que cette
y> option <le l’acquéreur serait une règle décourageante, et le plus sûr
)> m o y e n d’e mpê ch er ,s oi t naturellement.soit par convention s ec rè te ,
» que la chose 11e parvînt à son véritable prix. I l ne f a u t c e r ta in e - !
» 1lient p a s q u e le s e u l d ésistem en t d u c réa n c ier q u i a r e q u is la \
)) m ise a u x e n c h è r e s , su jfise p o u r em p ê ch e r q u 'o n ne p ro cèd e ci '
« V a d ju d ic a tio n ; car alors le mois serait e x p ir é pour les autres
» créanciers
ils ne pourraient plus faire cetle r é q u i s i t i o n ^ et
)> ^acquér eur en désintéressant le p re mi er r e q u é r a n t , ou en faisant
» avec lui quelque autre a r r a n g e m e n t , obtiendrait le désistement
« et p r é ju d ic ie r a il to u jo u rs , p a r le v il p r ix , à V in térêt d es crèa n —
» cie rs : il faut donc q u ’en cas de dé si stement , les a u tr e s créa n ciers
)) p u is s e n t , après la n o tifica tio n du d é s is te m e n t, se su b ro g er a u
)> p r e m ie r r e q u é r a n t et su iv r e l'a d ju d ic a tio n p u b liq u e ».
L a subrogation
a ux soumissions
d ’e nc hè r es et
réquisition de
r eve nt e , d ’après l’opinion de ce r a p p o r t , devrait donc avoir lieu de
plein d r o i t , sous l’e mpi r e de la loi du i l br umai re an 7 , c o m m e
sous celui.de l ’édit de 1 7 7 1 . Aussi la question s’étant présentée à
j ug er au tribunal de cassation le i 5 germinal an 11 , sur le pourvois
du nommé G ir ou st contre V e r s e p u y et la Boullée , ce t r i b u n a l , dans
les motifs de son j u g e m e n t , reconnut et déclara « que l’art. iXX X V I
» de la loi du 11 b r umaire an 7 , abrogeant seulement les lois p r é
» cédentes en ce q u ’elles auraiêrit~tê c ontraire à ses di spositions«.
» et n >in te r d isa n t
)> créa n ciers
pas^ n om m ém en t la su b ro g a tio n de l'u n des
in scrits
au
cr é ancier^
p o u r s u iv a n t,
subi ogati on
)> que les lois précédentes autorisaient , on n e j j e ut p a s d ire q u e
)) cette su b ro g a tio n soit d éso rm a is p r o h ib é e ».
E n v a i n on oppose que dans l’espèce de ce j u g e m e n t , la p o u r
suite se trouvait engagée par l’alRche des biens
était demandée ; mais s i ,
on
dont la revente
c o mm e le p ré te nde nt nos a d v e r s a i r e s ,
devait regarder c o mm e p u rem en t p e r so n n e lle s à celui qui les
f a i t , les notifications d ’enclière et jy;oc:edure p our la r eve nt e , do
maniè re q u’aucun autre créancier 11e put demander a s ’y s ub ro
ger , il n’y aurait pas plus (le raison pour adme tt re cette s ub rogalion, dans le cas où ces pr emi er s actes auraient été suivis d ’alïï-
�( 24 )
clies : car ^ on pourrait dire de mémo que ces affiches et tout' ce
qui se fait pa r s u i t e , de la part
sont que p our son seul c o m p t e ;
a ux créanciers qui
du créanci er p o u r s u i v a n t , ne
on p our rait
n ’auraient pas fait
de m ê m e opposer
de nolificalion d ’enchères
dans le mois de la dénonciation du contrat
r e no nc é à e nc hé r ir , et doivent e x éc ut e r
t r a n s c r i t , q u ’ils ont
le
contrat. — Si donc
on reconnaît q u e , dans le cas d ’affiches , il y a lieu à la subroga
tion , on doit conveni r que c ’est parce que l ’e nchèr e survenue par
l ’ un des créanciers a e m p ê c h é le contrat de d even ir d é fin itif ^l'a
suspendu dans ses eifets, et faisant considérer le débiteur c omme non
dépoui ll é de la p ro pr ié té vendue , a mis chacun de ses
dans le
cas d ’en poursui vre
créanciers
sur lui la revente et adjudication ,
c omme il auruit pu le faire avant la transcription.
Mais toutes les objections doivent di sparaî tre, en ce m o m e n t ,
devant l ’art. X C 1 X , cliap. 7 , de la loijportée le 28 ventôse dernier
sur le r égi me h yp ot h éc a ir e , p our faire suite au code civil.
« L e désistement , y est-il dit , du créancier requérant la mise
» aux enchères , ne p e u t , m êm e q u a n d le c ré a n c ier p a y e r a it le
)) m o n ta n t d e la so u m issio n , em p êch er V a d ju d ic a tio n p u b liq u e ,
» si ce n ' e s t du consentement e x p rè s de tous les autres créanciers
)> hyp oth éc ai re s ».
Dira-t-on
que cette loi ne peut avoir d ’effel r é t r oa ct i f : mais
nous invoquons l’article cité , non pas c o m m e établissant le p r i n
c i p e , p ui squ’il est r econnu q u ’ il existait et a toujours existé : nous
l ’opposons c omme une r é pé t i t io n , c o m m e une confirmation de ce
princi pe.
Enfin , à ente ndr e la dame de V i c h y et le citoyen Magaud , les
hériti ers Ri car d plaident sans intérêt , et n ’agissent que par h u
m e u r dans cette cause ; l’ insuffisance de la valeur des biens du dé
biteur pour acquitter toutes les c ré a n c e s , et la postériorité du rang
d ’ h yp ot hè que des citoyens R i c ar d , 11e leur permettent pas d ’espérey
d ’obteni r la
Mais
reproches
m oindre
p e u t - 011
collocation «ur le p r i x des biens dont il s ’agit.
s ér ieusement
et
dé ce mme n t
proposer
des
uussi f au x et ridicules ? Q u o i ! les créanciers se trou
v e r o n t mi eu x traités et a ur ont
plus de ressources p o u r se payer
�(25 5
lorsque le p r i x
des ventes restera m oindre
d e m oitié
du t a u x
auquel il peut s ’é l ever p ar l’adjudication publique.
D ’a i l l e u r s , sur quoi la
soutenir qu' il ne doit rien
dame de V i c h y
s’appui e t - e l l e ,
pour
rester du p r i x de cette r eve nt e a u x
citoyens R i c ar d et autres créanciers ? c ’est sur sa p r ét ent i on de tout
4
a b s o rber en se disant créancière de son mar i de i o, ooo fr. M a is
cette
p r é tention n ’est
bien
craint
d ’ètre
q u ' u n e fiction ; e t
la da me de V i c h y a si
démasquée à cet égard , q u ’elle s’est r efusée
f o rt em ent à soutenir et laisser j ug er l ’i nci dent élevé par le c it o ye n
R i c h a r d - C o rb e r y , qui attaquait ses créances et pr ouvai t q u ’elles
devaient se réduire au-dessous de 20,0,00 fr.
A in si s ’évanouissent les suppositions e t les sophi smes accumulés
p a r le citoyen Magaud , de concert avec la dame de V i c h y , p ou r
faire prévaloi r des
appels téméraires.
L e j u g e m e n t du
t ri bunal
de p re mi èr e i nstance est basé s ur l’ esprit et sur le t e x t e de
la loi ; il a p ou r objet à la fois de mai nt e ni r la f aveur due à des
créanciers l é gi t ime s, et de garantir leurs intérêts contre les tenta
tives injustes de la fraude et de l ’avidité qui s ’efforçaient de les
frustrer. I l ne p e ut donc q u’o bte ni r sa confirmat ion des magistrats
supérieurs.
Signé R I C A R D .
L e C .”" D E V È Z E - C H A S S A I N G ,
avoué.
A C lerm ont-Ferrand , chez J. V e y s s e t , Im prim eur de la Préfecture
du P u y - d e - D ô m e , rue de la T reille.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ricard. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Ricard
Devèze-Chassaing
Subject
The topic of the resource
créances
hypothèques
doctrine
rétroactivité de la loi
Description
An account of the resource
Mémoire pour les héritiers Ricard, créanciers du ci-devant marquis de Vichy, intimés ; contre la Dame Langlard, épouse se disant divorcée dudit de Vichy, appelante ; Et contre le Citoyen Bernard Magaud, aussi appelant ; En présence des Citoyens Richard-Corbery, Grimardias, Juge et autres créanciers de Vichy.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J. Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1780-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0243
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1409
BCU_Factums_M0244
BCU_Factums_G1410
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53742/BCU_Factums_M0243.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chanonat (63084)
La Varvasse (château de)
Saint-Sandoux (63395)
Rights
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Domaine public
Créances
doctrine
hypothèques
rétroactivité de la loi
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519907059d3ed7420d2a5a3744ec831f
PDF Text
Text
• P OUR
L e sieur R O B E R T
d e
L E I G E , appelant;
C ONTRÉ
F r a n ç o i s A S T O R G et M a r i e V I G I E R , sa fem m e ,
~
intimés ;
ET
'Br i g i t t e
CONTRE
R O T Q U IE R
L A C R O IX ,
son
et
J
e a n
m ari ,
-B a p t i s
t e
in tim é s.
« . L o r s q u e les parties ont, stipulé que les fruits (d e
« l ’i m m e u b l e d o n n é à a n t i c h èse) , se c o m p e n se r o n t
«• av ec les . i n t é r ê t s , ou t o t a l e m e n t , ou j u s q u ’à due
« c o n c u r r e n c e , cette convention s 'e x ê c u le , c o m m e toute
« a utre qui n e s t point prohibée par les~Lois. ( C o d .
« civ. art. 2 0 8 9 .
A
�C
2 )
C e principe de la légïslalion actuelle, conform e au x
lois romaines , adopté par les auteurs du droit qui se
sont le plus élevés contre l ’usure , décide l a contesta
tion sur laquelle la C ou r aura à statuer. U n créancier
a joui pendant dix ans avant 1 7 1 4 , un très-petit pré
p o u r l ’in térêt légitim e de sa créance. L e débiteur r e n
trant dans son héritage à celte é p o q u e , a continué le
paiem en t de l’intérêt pendant quarante an s, et a retiré
vingt-trois q u itta n ce s, parmi lesquelles sont plusieurs
arrêtés de com pte. Q uand on lui a dem andé le capital,
il a refusé de p a y e r , sous prétexte de l ’ancienne anlich rèse, et a dem andé une vérification préalable pour
savoir si , lors de l ’antichrèse et avant m il sept cent
q u a to r z e , les jouissances de son pré avaient été ou non
d ’une valeur supérieure à l ’intérêt échu pendant leur
durée. V o ilà en précis tout l’objet de la prétention des
.Aslorg ; et si elle a été accueillie par les premiers jug es,
c ’est que la cause a été deux fois jugée par défaut contre
l ’appelant.
L a créance cédée a passé en plusieurs m a in s, et la
résistance du débiteur a occasionné une foule de re
cours et de procédures, qui ont occupé les tribunaux
depuis 1764* U n e partie de ces demandes en recours
est encore pendante devant les premiers juges, et il
n ’y a principalem ent eu litige actuel que l ’effet de l ’anlliicrèse. L ’appelant rendra donc com pte à la C our de
la convention qui a établi celle anliclirèse, et des actes
qui l’ont suivie.
�C
F A IT S
ET
3 )
PR O CE D U R E S.
. Guillaum e Soubie était créancier de G éraud Sales et
sa fem m e d’ une som m e de 600 fr. en cap ital, p r o v e
nant d’ une d o t, et produisant par conséquent intérêt
de sa nature. L es parties traitèrent sur cette créance
le i p a c û t i 6 8 3 , et elle fut stipulée payable en quatre
term eségaux a vec intérêt. I l fut co n v en u q u e , pour cet
in té rê t, ledit Soubie pourrait jouir du pré de L a v a l ;
mais cette convention n’ eut pas son exécution jusques
à un autre traité de 1703. Ainsi il est inutile de fixei*.
l ’alention de la Cour sur ce prem ier acte.
G uillaum e Soubie maria Pierre Soubie , son fils , en
1689 , et lui donna ladite créance pour légitim e. Celuici la céda au sieur D o u lé , curé de N oailles, par acte
du 10 septem bre 1 6 9 5 ,,et ce dernier obtint sentence
contre les débiteurs, le
5 octobre suivant. C ette sen-
tence.encore n’adjugeait q u 'u n e 1h ypo th èq ue indéfinie.
Les- héritiers du curé de Noailles cédèrent air sieur
E m e r y - R o b e r t, leur créance de 600 fr. et le droit de
jouir du pré L a v a l , par acte du 1 5 juillet 1703.
P ar ce m êm e acte on voit que M arie Sales, fem m e
Sartiel, d é b itric e , intervint a ve c ledit Sartiel r son mari,
pour s’obliger en outre de p a ye r audit sieur Robert une
somme de 194 liv. i
5 sous, provenant d arrérages de
ren tes, adjugés par trois sentences. L ’acte term ine par
la clause suivante,, q u’il faut transcrire littéra lem en t,
A 3"
�( 4 )
parce qne c ’est contre son exécu tio n que les sieurs
A storg veulent revenir (i).
.
F a u te de p a iem en t, Ledit Robert pourra jo u ir d u
su sd it pré de L a v a i, p o u r l e l é g i t i m e i n t é r ê t d e s
d i t e s sommes, tant et s i Longuement que Lesdits maries
seront en demeure d e r e n d r e i c e l l e s , ce qu Us pour
ront fa ir e qua nd bon Leur semblera , et Ju sq u es à ce ,
se réserve ledit Robert L'hypothéqué précitée et privilège1
de ses hypothéqués, jé in s i a été convenu et promis tenir
p ar lesdites parties sous Cobligation , etc.
A près cet acte le sieur E m e r y - R o b e r t se mit en
possession du pré L a v a l , et en jouit pendant les années
170 4 et suivan tes, jusques en 1 7 1 4 .
Alors M arie Sales était rem ariée à Pierre V i g i e r ,
et ce n o u vel ép ou x s’empara du p r é , sans autre forme.
L e sieur R obert aurait pu sans doule refuser la remise
de son gage jusqu’à ce q u ’il fût p a y é : mais il était fort
aise d ’en être débarrassé et d ’avoir le droit de dem an
der son revenu annuel 5 en conséquence il assigna les
dits P ierre V ig ier et M arie Sales par exploit du 18 jan
v ie r 1 7 1 6 .
11 exposa « que ladite Sales ne saurait ignorer être sa
« débitrice i.° de 600 fr.; 2 ° de 194 fr. i 5 s . pour les
«• causes portées par acte du i
5 juillet 17 0 8 ; que pour
( 1 ) Il y a une légère différence entre l ’expédition qu’en rap
portent les A s to rg , cote i . r e , et la copie signifiée cote
cette différence ne change rien au sens db la convention.
5 5 mais
�'
(' 5 j
0
« l ’intérêt desdites sommes elle n’a y e consenti engage« m ent des fruits d u 'p r é appelé de L a v a l, duquel led.
« inslant a joui paisiblem ent jusqu’au trouble».
- E u conséquence il conclut à ce que lesdiis mariés
V igier lussent solidairement condamnés à lui p a ye r ^la
«■somme de 39 fr. r i p . 9 d; , faisaiit'le reven u desdites
« sommes depuis le 'i 4 -juillet i'7 1 4 ¡"àu Lieu de La nori
« jo u is s a n c e 'd u d it p r é , avec condam nation de tous
«• dépens , dom mages et intérêts ».
I l prit d ’autres conclusions étrangères h l ’antichrèse,
et tendanfesvau paiem ent des arrérages d’ une rent'è en
g r a i n , ‘q u ’il évaluait pour le passé à 70 liv. 2 s. 6 d.1
C e lle dem ande fut accueillie par une sentence non
attaquée du 26 fé v rie r 1 7 1 6 .
P e u de tems après cette sen ten ce, le sieur E m e r y R ob ert céda sa‘ créance à Joseph* R o lq u ie r , a v e c le
droit de jouir du pré L a v a l , ou de se faire p ayer de
l ’intérêt de ladite créance.
-
C et intérêt fut p a yé par V ig ie r , et ses premières
quittances p ro u ven t, co m m e'les postérieures,■q u ’il 11e
s’agissait plus du passé:
! '!
-
L a prem ière quittan ce, du 16 mai 1 7 1 7 , est dé 8 0 fr.
pour Les- non jo u issa n ces d u pré de L a v a l engagé, et ce
pour Les• années i r]ï'b et 1 7 1 6 . ( ‘C o m m e ces 8d Ir. ex c é
daient de quelques sous l’intérêt légal, lé'Siëûr R o tq u ièr
ajouta h sa signature q u’il les imputait sur les1 70 francs
ci-dessus).
P a r la seconde,-du
:’ 1 ' ! ;
;
3 o juillet 1 7 2 4 , l é ;sieur R o tq u ier
reconnaît avoir reçu L’intérêt w Lui d û .dei la'sbmxHe'de
�.
794 liv. i
.
( 6 ) .
.
5 s. en, lieu*des, non jouissances du pré L a v a i
pour les armées, r 7,i'7 et suivantes , ju s q u e s et com pris
La présente, échu au 1.4; d u présentVi
'
M a rie Sales d é c é d a , laissant pour héritiers testamen
taires P ierre Vigier* son m a r i, et Françoise Sales, sa
sœur. Ils n e.fu iien tjp a sj^ a cts à dp a y e r , et le sieur R o tquier fit /îes'ppi}rsui;les en: se^servanfcdu nom du sieur,
Emery-ï^oberjt ,■son, cédant. Il assigna- par .exploit du.
1 1 mars 173 0 lesdits,Vigier et .Sales, «.pour voir décla«• rer c.pntre eux 'exécutoire la sentence de 1 7 1 6 .^ et
« p a y e r i..° 600 liv. d'une part; 2 °' 1 9 4 liv. i 5 s. d ’a u « tre 3.° 70 liv. 2. s. 6,d. d ’autre. 5 4.°-les intérêts adjugés
« par ladite sentence.» et ceu x échus depuis et>ceux
«■qui écherront à l’a v en ir, sa u f à tenir à com pte ceux
« que les assignés juslineront avoir/payés », ( parce que
l'intérêt des 70 liv. 2, s. 6,dfi était restér-en suspens).
Cette,,demande fut reprise err 173,5,; M arie.Sartier,
fille du prem ier lit de Marie,Sales et fem m e de; Joseph
y i g i e r , fu t mise en, cause $ et le 18 jan vier 1,786, il
intervint sentence açljudicalive,;et encore non atta q u ée,
laquelle condam ne au paiement desdits capitaux, efseu-r
le m e n t'à ;l’intérêt échu depuis Le i 5 ju ille t 1 7 1 4 .
C ette sentence est suivie de saisie exécution en 178 7.
A u lieu de contes.ler, lesfdébiteur^ présentent,un gar
dien vpjoptaire. Ils font plus, ils paient.
lie s A storg produisent six quit tances cJonnées,eii; 1 7 3 7 ,
1 7 3 8 , 1 7 4 0 , 1 7 4 1 et i744> à compte des in térêts.et
frai£. Elles sont sur Ja m êm e feujlle.
;
,A u bas d.Q cette m êm e feuille pp iVoit que les parties
�•
.
( 7 )
ont arrêté com pte à 88 liv. 16 s., y compris un billet
de 1 5 liv. 5 sur laquelle somme les Y ig ie r paient
53 'liv,’
l ë d i t j ô u r i i avril 1 7 4 6 ’. L a quittance est conçue en
ces termes : de compte arrêté entre nous de tous Les'reve
nus échus ju s q u ’ au 16 janvier 1 7 4 5 , de La rente qui
m ’est ‘due par Les dénommés de l ’autre part (P ierre et
Joseph V i g i e r ) , IL s’ est trouvé m ’ être d u La somme de
etc. , sans p r é ju d ice , etc.
■
'
_
Il paraît que le 28 août 1 7 4 5 , Jean et Josepli R o t •quier, père et fils, débileurs envers A n to in e R olq u ier
d ’une lég itim e , lui cédèrent-ladite créance avec pro
messe de garantir et faire valoir.
L e s V igie r agirent avec ce nouveau créancier com m e
avec les précédens • ils produisent huit quittances don
nées par l u i , à compte des intérêts pendant les années
1 7 4 7 et suivan tes, jusques-à 175 5.
Mais on vint h com pte le 22 n ovem bre *1756, non
seulement des intérêts éch u s, mais encore des condam
nations d’une autre sentence étrangère au sieur R obert }
tout fut réglé jusqu’au jo u r , à 241 liv. 1.2s. , ’a près avoir
d éd u it Les d ixièm es et vingtièm es, esl-ildit, depuis que
led it R o lq u ier avait droit des sieurs L ab ian clie e t'R o tq u ie r, sans p réjudice.de La somme principale de 864 Liv.
11 s., et des intérêts encourus depuis Le 28 aouldernier.
C e règlem ent fut tellem ent définitif que les sept
■quittances postérieures règlent positiveinent l ’intérêt
tinnuel à une som m e fixe, tantôt de
38 li v ., tantôt de
36 liv. 10 s.pour L’intérêt échu Le... ; vingtièmes déduits*
‘Ces s t p t : quittances 'ont toutes la imêiïie f o r m u l é ,
i
�.
.
depuis 1 7 5 7 jusques, au
^ 3 jan vier 1 7 6 4 , date de la
dernière. ■
'
.
'
8 }
.
.. •
•
;; x f; )
Il /est essentiel d ’observer à la C our que le ,co m p te
de 175 6 fut fait a vec M ich el Vigier.
:
•
,
A n to in e R ofq u ier désira êIre p a yé de son cap ital;
et par exploit du 4 juillet 1 7 6 4 , il forma dem ande en
la justice du D oign o n contre ledit M ich el V igier fils,
et héritier de Joseph, et de M arié Sartier, en e x é c u torialité de la sentence du 18 jan vier 17 3 6 , et en
paiem en t des som m esde 600 liv. d ’une p art, i9 4 l i v . i
5 s.
d ’a u tre , et 70 liv. d 'a u tre , portées par ladite sentence.
L e d it MicheL V igier dit en défenses << que sans a p ff prouver les sentences de 1 7 1 6 et 1736 , contre les
* quelles il se réservait de se p o u r v o ir , il devait lui
» être fait com pte des jouissances du pré de L aval qui
«■fut engagé par contrat du i
5 juillet 1 7 0 3 , pendant
« leur durée , pour être compensées pendant ledit
«• tems avec les intérêts des sommes qui en étaient sus
ceptibles, telles que celle de 600 liv., et subsidiaire« m ent sur le principal, pour être ensuite par lui faire
« des offres, etc..*.
-,
‘
,
C e langage évasif d ’un débiteur qui voulait éloigner
sa libération , s’est changé en un systèm e sérieux sur
leq uel on plaide depuis 1764. ,,
,
O n se disputa de cette manière assez long-tem s sous
le n om du sieur- E m e r y - R o b e r t . O n opposa à V igier
les arrêtés de com pte et les . quittances. Il résista le
plus q u ’il put à les m o n tr e r , en disant q u ’il n ’y était
pas ob ligé, q u’il n ’y avait aucuns arrêtés de c o m p t e ,
et
■
�(
9 )
'
et que s’il avait renoncé à son droit par quelque acte
qui réglât le passé, c'était an créancier à le produire.
Enfin un e sentence ordonna que V igier exhiberait
ses quittances, et en ferait le dépôt au greffe.
Quand les sieurs R o lq u ier
eurent assez plaidé à
l ’inscu du sieur R o b e r t , ils jugèrent à propos d’inter
v en ir dans leur propre procédure , et de conclure
contre le sieur R o b ert à ce q u ’il fût tenu de les garan
tir. C ette intervention eut lieu de la part de Joseph
R o f q u i e r , cédataire de 1745.
L e sieur R o b ert-D eleig e, successeur du sieur RobertL a b la n c h e , prem ier créancier, apprenant pour la p re
m ière fois q u’il existait sous son nom un procès re la lif
à u n e c r é a n c e du sieur E m e r y - R o b e r t - L a b k i n c h e ,
conçut un soupçon bien fo n d é , sur une m an œ u vre
dont il aurait dû être inform é plutôt. Il se défendit
d’abord avec quelque h um eur, parce q u ’on avait abusé
de son nom.
11 désavoua-toute participation à la pro
cédure déjà f a i t e , dit que si on s’était servi d’an
ciennes sentences oblenues par le sieur L a b la n ch e ,
elles lui appartenaient; et soutint dans tous les cas que
toute action était prescrite.
M ais quand on lui exhiba la cession souscrite par
le sieur R o b e r t - L a b la n c h e , il n’hésila pas en reco n
naître l’écriture.
N
U ne sentence du 10 juin 1766 appointa les parties
en droit, joignit la demande en recours du .sieur R otq u i e r à l a dem ande principale, et en m ê riie !teins réiB
�'
( 10 )
léra contre V igier les dispositions de celle de 17 6 4 qui
avait ordonné le dépôt au greffe de ses quittances.
Enfin-le procès fut jugé par forclusion contre ledit
V ig ier et contre le sieur R o b e r t, le 9 mai 17 6 7 . L ’ es
timation des jouissances du pré de L a v a l fut o rd o n n ée,
sous la déduction des charges foncières depuis le 1 5 juillet
17 0 8 , jusques et comprise l ’année 1 7 1 4 .
■ L e sieur R o b e rt-D e le ig e interjeta appel devant la
sénéchaussée d ’A urillac et in tim a , co m m e il le d e v a it,
les deu x parties de la c a u se ; c ’e s t - à - d i r e , les sieurs
R o t q u ie r et Vigier.
C e t appel fut suspendu pendant vingt ans. Il fut
repris en 178 7 par M a rie V ig ie r , fille de M i c h e l , et
par Astorg son mari. Elle interjeta m êm e appel inci
dent, de la sentence de 1 7 6 7 , fondé sur ce que les
ch arg es, disait-elle, n ’avaient pas dû être déduites de
l ’estimation ordonnée.
L e procès fut encore jugé à A u rilla c, co m m e il l ’a
vait été en la justice du D o ig t io n , c ’e s t - à - d i r e , par
forclusion, et toutes les conclusions des V ig ie r et Astorg
adoptées le i
3 août 1790. L a sentence du D oignon fut
confirm ée en ce q u ’elle ordonnait une estimation des
jouissances du pré L a v a l; elle fut infirmée en ce q u ’elle
ordonnait que les experts déduiraient les charges fon
cières.
L e sieur R o b ert interjeta appel de celte seconde sen
tence au parlement de Paris. L a suppression de cette
cour en déféra la connaissance au tribunal du district
�C ” )
de Mauriac. L à , les héritiers de Joseph R o lq u ie r colludant avec les V igier et Astorg , signifièrent, d it - o n ,
à c e u x - c i q u ’ils acquiesçaient au x sentences de 1 7 6 7
et 1790.
Pendant cette p ro céd u re, les R o lq u ie r entr’eu x en
introduisaient une autre; le sieur M e illia c , petit-fils et
héritier d’ A n toin e R o iq u ie r , cédataire de Pierre et
Joseph en 1 7 4 5 , ne voyan t pas rentrer sa c r é a n c e ,
quoique ces derniers eussent permis de fournir et faire
v a lo ir , assigna leurs héritiers (parties ad verses), pour
le p a y e r eux-m êm es.
C eu x -c i m irent encore le sieur R ob ert en cause, on
ne sait pourquoi. Après une procédure très-embarassée , dont il est fort inutile d’occuper la c o u r, les d é
bats se term inèrent par un jugem en t qui donna un délai
aux R o tq u ie r, par lies ad verses, pour faire finir le procès
actuel, sinon les condam na à p a y e r le sieur M eilliac;'
il fut sursis à faire droit sur les dem andes en recours
et contre recours.
:•
■
D é jà , et avant ce ju g e m e n t, le sieur R o b e r t, pour
n ’être plus harcelé de tant de débats étra n g ers, avait
repris en la cour son appel de 1 7 9 0 , contre les R o t quier et Vigier.
Ces deux adversaires tiennent a u j o u r d ’h u i un la n
gage bien différent.
L es R o lq u ier se prétendent follem ent intimés , et
disent que n ’ayan t pas interjeté appel de la sentence
d’A u rilla c, et ne voulant prendre aucun intérêt dans
la contestation, ils doivent être mis hors de cau se/sau f
B 2
�(
;
à plaider en prèm ière instance sur la dem ande en ga
rantie pendante. T elles sont les conclusions de leur
requête du 8 iherm idor an n , répétées et expliquées
dans une écriture postérieure.
L e s V igier et Astorg se défendent plus sérieusem ent,
et font les plus grands efforts pour prou ver q u ’il y a
lieu de revenir à exam en sur l ’anticlirèse de 1 7 0 3 , et
de confirm er la sentence de 1790.
'
•
M O Y E N S .
L
e
sieur R ob ert a intim é deux parties, et ce q u ’il
y a de bizarre ce sont ceux-là m êm e qui l ’ont appelé
au procès, et ont pris des conclusions contre l u i , qui
veulent q u ’il ait dû les regarder co m m e étrangers à
cette m êm e contestafion.
L e s sieurs R otqu ier et L a cro ix qui ont pris tant de
peine à prouver q u’on aurait dû ne les com pter pour
rien , mais q u ’on esl forcé de com pter pour quelque
ch o se, ne se sont plus souvenus que si le sieur R o b ert
p laid e, c ’est parce que le sieur Joseph R o lq u ier leur
a u te u r , l ’a assigné en g a r a n tie , le .28 octobre 176 5.
Ils ne se sont pas souvenus q u ’il y avait une sen
ten ce rendue le 10 juin 1 7 6 6 , qui joignait ce lte de
m ande à celle soutenue par V ig ie r ; et q u ’ainsi après
un e jo n ctio n , toutes les parties sont parties nécessaires,
tanL q u ’ une seconde sentence n’a pas prononcé de dis
jonction.
�( i3 )
Ils ne se sont pas souvenus que le m êm e R otqu ier
leur a u te u r , était en qualité dans la sentence définitive
du 9 mai 1 7 6 7 ; q u ’il était aussi en qualité sur Cappel
porté à Aurillac ; et aussi en qualité dans la sentence
confirm ative du i
3 août 1790. Ils en auraient conclu
eux-m êm es que celui qui a été partie nécessaire en
prem ière in stan ce, et sur un prem ier a p p e l } est aussi
partie nécessaire jusqu’à la fin du procès.
Q u ’im porte q u ’il ait été fait pendant l ’appel actuel
une procédure addition n elle, où les R o tqu ier ont de
n ou veau appelé le sieur R o b ert en garantie , et que
les premiers juges en soient encore saisis. C ette super
fétation n'est pas un m oyen .
O u l ’objet de celte nouvelle dem ande en gàrarrtie
est le m êm e que celui de 17 6 5 , et alors la cour en
est saisie com m e elle l ’est de toute cette p r o c é d u re :
ou il n ’est pas le m ê m e , et alors les premiers juges
n ’ont retenu q u ’un autre procès.
Mais qui pourrait dire que ces premiers juges ont
dem euré saisis de ce qui était de l ’attribution de la
cour : ils ne le pouvaient pas.
L ’acquiescem ent que les R o tqu ier ont donné en 1792
seulem en t, aux sentences de 176 7 et 1790 , n ’em pêclie
pas que le sieur R obert n’ait pu et dû les appeler en
cause.
,
11 l ’a p u , parce q u ’il avait intérêt d avo ir un ju g e
m ent con venu ; et que quand la cour aura statué sur
la garantie pendan te, les R otquier quelconques ne se
ront pas assez m a l -avisés pour 1 appeler ensuite en
�t
( 14 )
.
^
prem ière in s ta n ce , et conclure h la m ê m e garantie.
Il l ’a d û , parce que le parlem ent de P a ris, et par suite
la c o u r, étaient saisis du procès , et n’ont pas encore
prononcé sur l’effet de cet acquiescem ent.
A u resle le sieur R o b ert est si éloigné d ’élever a u
cunes con testation s, m êm e douteuses , q u ’il déclare
s’en rapporter à la prudence de la co u r, non-seulem ent
sur le renvoi dem andé par les R otqu ier et L a c r o i x ,
mais encore sur le fonds de la garantie e l l e - m ê m e ,
s’il y avait lieu d ’y statuer.
I l im porte peu au sieur R o b e rt d’être livré seul à
repousser la prétention des V ig ie r et Astorg ; elle est
si extraordinaire et mal co n ç u e , q u’il n ’y a véritable
m en t q u ’ un avantage certain à l ’exam in er pour la
com battre.
L e s V ig ie r et A storg ont recueilli beaucoup d’au
torités pour pro u ver que la co n ven tion de 1703 était
usuraire , et que la prescription n ’a pas cou vert cette
préten du e usure.
L e sieur R ob ert n ’a pas m êm e besoin d’in voq uer
la prescription; il lui suffit de rappeler le caractère de
l’antichrèse, pour dém ontrer que , sur-tout dans l ’es
p è c e , elle a été une convention très-com m une et trèslégitim e.
t
■ L ’anticlirèse est définie dans la glose de la loi
3 , au fF
de p ig n orib u s, un gage donné au créa n cie r, pour q u ’il
en compense l ’ usage et les fruits qui en naissent, a vec
l ’intérêt de l’argent q u ’il a prêté. P lg n u s quod sub
�( i5 )
' hoc nomine creditor a ccip it, u t eju s usuin
pro u su ris
sib i com puttt. D ’autres interprêles ont donné une d é
finition plus intelligible e n c o r e , en disant que l ’an tichrèse a lieu quand un im m euble esl donné au créa n
cier , ut p erapiat reí J r u c tu s
in
vicem
usurarum
donec debitor pecuniam solvcit.
C e contrat aussi com m un en F ra n ce avant le systèm e
de L a w , que les contrats de rente Tétaient avant r é
mission des assignats, avait été le sujet de beaucoup
de controverses pour ou contre sa légitim ité.
L e s auteurs les plus scrupuleux sur l'usure, s’accor
daient tous à justifier l ’antichrèse, quand les fruits de
vaient se com penser avec un intérêt lé g itim e , ou dû
de sa nature \ ils n ’y voyaien t de contrat usura ire que
dans le cas où le créancier percevait les fruits d ’ un im
m eub le pour l’intérêt du prêt ordinaire, parce que les
lois défendaient de stipuler l ’intérêt de l ’argent.
D ans le prem ier cas , il y avait encore une autre
distinction à faire , et c e lle - là se puisait dans les lois
romaines.
L e créancier pouvait avoir fait une stipulation évid em
m en t trop avantageuse. L 'im m e u b le pouvait produire
plus que l’intérêt Légal, et alors il était suspect d ’ usure.
M ais voici le tem péram ent que prenaient les lois ellesmêmes.
Si le créancier affermait à un autre l’im m euble im
p ign oré; alors, parce qu'il avait un revenu certa in , il
était clair qu'il y avait usure dans l ’excédant de ce
r e v e n u au -d elà de l'intérêt légal.
�.
( 1 6 }
.
M ais quand le créancier jouissait l u i - m ê m e , la loi
ne vo ya it aucune usure, dans le f a i t , m êm e p r o u v é ,
que les fruits de l'im m eu b le dussent surpasser l ’intérêt
lé g a l, à cause de Yincertitude des récoltes.
_
Ainsi s’exprim ent les lois 14 et 17 ,a u code de usuris.
L es auteurs du droit français confirment plein e
m en t ces principes. L e sieur D eleige rappellera le sen
tim ent de Cujas, et celui du D iction n aire canonique?
pou r m ontrer q u’il a choisi ses autorités parmi les plus
grands ennemis de l ’usure.
• Quce conventio l i c t t a e s t etiam si p l u r i s dom us loca ri soleat quant ejjicia l Legitimarum usurarum ra tio ,
çeL ut f u n d i oppignerati fr u c tu s omnes v i c e u s u r a r u m
creditor percipiat; quœ convenlio propter incertum eçentum fr u ctu u m adm issa est, et propter incertum f r u
m enti pretium. Observât. C u ja c ii in Lib.
3 , -ch. 35 .
L e D ictionnaire canonique au mot a ntic lire se, in
dique cet avis de Cujas , en l ’appliquant m êm e à l’intéi'êt du simple p r ê t, pro credito pig/ioris usus. A la
vérité il ajoute que le droit canon ne s’y conform e pas.
M a is j a j o u t e - t - i l « le droit civil n’a pas usé de la
« m ê m e rigueur. L ’incertitude des fruits qui p eu ven t
« être recueillis-,le risque m êm e que l ’on court jusqu’à
je la p e rcep tio n , d’en être p riv é ; enfin la tranquillité
« q u’acquiert le débiteur, par cet a cc o m m o d em en t, ont
« persuadé que celte convention n ’avait rien d ’illicite.
L e droit français n ’a donc vu q u ’un c o n tr at aléatoire
dans une convention qui présente en eflet des chances
aussi incertaines. C a r , à moins d ’une disposition clio*
q u a n le
�( *7 )
•quanfe entre l’étendue d ’un chqmp et les intérêts d ’ une
c r é a n c e , nul ne pourra assurer que le créancier sera
certain d’obtenir en produit net l ’intérêt qui lui est dû 3
sur-tout pendant plusieurs années consécutives.
S ’il s'agit de vignes , une année d ’humidité ou de
brouillards peut faire perdre un an de culture ; s’il
s’agit d’ nn p r é , un printems de sécheresse peut aussi
ruiner tout espoir de récolte.
>
C ’ est pourquoi un arrêt de 1 7 6 4 , rapporté par Ca-r
-telan, « a jugé que le contrat d’antichrèse devait être
« observé en la cause d’ une fe m m e villageoise qui avait
«
«
«
«
baillé à jouir à son créancier, une vigne à titre d ’ai>
tichrèse , avec cette co n v e n tio n , que le créancier
jo u ira it des fr u it s pour les intérêts , quoique c e lle
fem m e soutînt que les fruits excédaient au double \e
« légitim e intérêt.
L ’incertitude des f r u it s , q u i est
« la raison des lois f u t une des raisons de l ’ arrêt».
Catelan , liv.
5 , ch. I.er ; et Brillon , v.° antichrèse.
O r , Catelan qui était m agistrat, p o u va it, sans se trom
p e r , donner le véritable m o t if des arrêts de sa cour.
Ces ailleurs citent un autre arrêt de 1 6 5 9 , cl u^ or~
donna l’im putalion de l’excéda nt du légitim e intérêt
sur le capital, mais parce que le créancier avait donne
la maison im pignorée , à lô.y,er, et q u ’ainsi le rev en u
étant c o n n u , il n ’y avait plus pour lui d ’incerlilude..
A u r o u x , sur l ’art. 4 2 1 de la c o u t u m e de B o u r b o n
nais , dit q u e l ’antichrèse est un contrat t r è s - l i c i t e ,
q u a nd lés intérêts sont dus a u x créanciers.
L o u e l , q u’il a plu aux A slo rg de citer en leur far
C
�( 18 )
_
v e u r , on ne sait p o u r q u o i, va n te au contraire les
avantages d e l ’an tich rèse, et après avoir dit q ueD urnoulin n ’ admet l ’antichrèse que sous deux conditions , la
i . ere que le débiteur ait toujours le droit de reprendre
l ’im m e u b l e ; l a 2.* que les fruits n’excèden t pas année
co m m un e le quinzièm e du principal, « n éan m oin s, dit
« L o u e t , cet avis n ’a été suivi au pillais pour la r é « duction des antichrèses au denier quinze. C ar le d o
te maine du roi a été vendu au denier douze en an
o- tichrèse; et pou r juger des actions des liom m es se« Ion l ’ utilité p u b l i q u e , l ’antichrèse apporte plus de
« com m odité au débiteur que la rente con stitu ée, et
est plus tolérable. L ’antichrèse est sujette aux cas
« fortuits., g r ê le , g u e r r e ,
t e m p ê t e , f e u : pour telle
« année les fruits sont perdus par la violence des teins.
« S’il y a uberté de fruits, le créancier jouit de cet h e u r;
« si stérilité , il la faut supporter; s’il faut des répara«- lions, cela tom be sur le créancier. L e s débiteurs ont
« cet a v a n ta g e 'q u ’ils ne sont en arrière pour les ur« rérages qui est leur plus grande ruine. L e débiteur
r n ’est grévé de cautions, etc.-» L et. P. N.° 9.
V o ilà l ’auleur que les A storg ont supposé l ’ennem i
des anlichrèses; ils y ont recueilli cà et là plusieurs
arrêts relatifs à des réductions de rentes au taux de la
lo i , et pa r conséquent si dislans de la contestation que
ce serait s’en éloigner soi-m êm e de les réfuter parti
culièrement.
L es Astorg ont encore cité R o u sse a u -L a co m b e, mais
•seulement les principes q u ’il fait valoir au m ot usure.
�( 19 )
Ils ont évité de rappeler ce q u ’il dit au m ot antichrhse ,
pour établir que cet acte n ’est réputé usuraire que quand
il a eu pour objet de faire porter un intérêt illégitime à
un simple prêt d ’argent.
Ils citent un arrêt du 22 juillet 1 7 1 3 , du Journal des
audiences ; mais il s'agissait d’ un créancier qui faisait
porter intérêt à l’intérêt de son a rg en t, et on 11’y lit
pas un seul m ot d’antichrèse.
•
Enfin ils citent D enizart et M . r Chabrol. L e prem ier
11e fait que copier L a c o m b e sur l ’antiçlirèse ; mais M .r
C h a b r o l , bien loin d’être opposé à ce genre de contrat
dont il ne s’occupe qu’en parlant du contrat pignoratif,
fait une-grande différence entre l ’ un et l ’autre. Il regarde
l e contrat p ig n o r a t i f c o m m e u suraire, mais il dit que Les
antichreses sont plus favorables , en ce qu elles ri ont
rien de déguisé n i sim ulé. Il pense au reste que «le point
« décisif est de savoir si le créancier avait un titre qui
« lui assurât l’intérêt de son a rg e n t, ou s’il n’ a fait que
« prêter son argent lors de l ’antichrèse ».
A la v é r ité , car il ne faut rien dissimuler, M .r Chabrol
d’accord en cela avec L a co m b e et quelques autres au
teurs, pense que l ’excédant des fruits d e v a it, en cas
d ’an tich rèse, être im puté sur le ca p ita l; mais dan?
quel cas?
N on seulem ent ce n ’est pas quand les parties se sont
réglées volontairem ent lors de l’acte : encore moins
quand elles se sont réglées ensuite par plusieurs arrêtés
de compte. Mais co m m e dit L a co m b e : « Si en faisant
“ une année com m une de plusieurs, les fruits c x c é C 2
�^
(
20
)
« daient considérablement les intérêts o r d i n a i r e s T e x
te cédant serait im puté chaque année sur le capital ».
C e que dit L a c o m b e est recueilli de G o d e f r o i, q u i,
sur la loi 17 d e u s u r , ne s’occupe encore que du contrat
p ign ora tif, ou du cas où il y a v e n te : mais la G lo s e , sur
la m êm e lo i, s’explique d ’ une m anière à ne pas laisser
de doute sur la question.
. :
M-uUer obligavit m ih i vinecim, et in vicem usurarum
conven.Lt u t reciperem vindemiam. S i p lus emoliirnentL
consecutus sim e x fr u c tib u s quant etiam sit in u sa râ ,
an illu d revocari possit quœritur ? D ic itu r quod*non.
Quta potuerat evenisse quod m lxiLproçenisset, et tamen
necesse haberet stare conventioni, et propter incertum
non erit retractanda.
O p posera-t-on que les Rom ains adm ettaient lé prêt
à in té rê t, et que ce n ’est pas dans leurs lois q u ’il faut
chercher des principes ?
-
•
M a is -l’objection serait de mauvaise fo i, si on l’ap
plique au cas où il s’agil d’ une créance française ^ por
tant intérêt de sa n a tu re ; car alors c ’est précisém ent
co m m e s’il y avait eu stipulation permise.
L e s Romains perm ettaient le prêt ¿1 intérêt com m e
il est permis en F rance depuis le
3 octobre 1 7 8 9 ; mais
bien loin de tolérer l ’usure j qui est très-loin du prêt à
in térêt, on sait que leurs lois étaient sur ce point plus
restrictives que les nôtres.
U n seul exem ple le prouve. Nous souffrons la ruine
d’ un débiteur par une accum ulation criante d’intérêts.
A v e c quelques exploits nous autoriserions que cent
�C 'a i )
ans d’intérêts fussent dem andés, et lèsR o m a in s ne p e r
m ettaient pas que les intérêts accum ulés surpassassent
le capital.
L e s lois rom aines disaient com m e les ordonnances
françaises : P r o usuris stip u la ri tiemo supra m oduin
usurarum Licitum potest. L . 4 4 , f f . de usur.
P o u rqu o i donc les lois romaines ne seraient-elles pas
pour nous un règlem ent en m atière d ’anliclirèse quand
il s’agit'd’ y appliquer une créance portant intérêt de sa
nature ? Pou rqu oi la loi citée ne serait-elle pas ici ratio
scrip ta , lorsqu’elle n ’est pas un e loi arbitraire, lors
q u ’elle est m o tiv é e , lorsqu’ elle déclare que sa décision
est fondée sur une conven tion vraim en t aléatoire ?
C e n’est pas seulement dans les lois romaines q u ’il
faut rechercher les principes de l ’antichrèse ; puisque
tous les auteurs du droit français s’en o ccu p en t, et que
si plusieurs la regardent com m e prohibée dans le cas
d’ un intérêt illégitim e ,a u moins v o it-o n q u ’ils se r é u
nissent tous à penser que si le contrat ne présente pas
de détrim ent notable au d é b ite u r , il faut l ’exécu ter;
et q u ’il ne faut ordonner d’im p u lalio n q u ’au cas où la
conven tion serait évid em m en t usuraire, et les fruits
disproportionnés à l ’intérêt.
M ais com bien les A storg sont loin de celte dernière
h y p o th è se , malgré leurs exagérations ridicules sur la
valeur des fruits de leur h érita ge, q u’à la vérité ils ne
précisent pas.
■
L eu r-p ré de L a v a l , q u ’ils ont dénaturé depuis lo n
gues années parce q u’il était m aréca ge u x et plein de
�O O
'
jo n cs, avait en surface deux petits journ aux ; et certes,’
en 1703 il est bien difficile de voir dans un reven u
aussi m édiocre et aussi incertain , quelque chose de
supérieur au reven u de 864 livres.
.
Si des ex p e rtsy étaient e n v o y é s , com m en tfixeraien tils cette année com m un e sur d ix , que les auteurs et
l ’usage veulent être le seul mode de connaître le véri
table revenu appréciable? com m ent sauraient-ils s’il y
a eu des années sans récoltes? la tradition ne leur rappelera que 1709. C o m m en t encore sauraient-ils le prix
du fo in , puisque les m ercuriales n ’ont fixé que celui
des grains?
Eviteraien t-ils l’erreur en estimant ce prix annuel
à une époque critiq u e, où la rareté du num éraire fut
la prem ière cause de la création des billets de banque?
L e s Astorg ont com pté sur l ’arbitraire quand ils ont
v o u lu une estimation plutôt impossible que difficile ;
ils s’efforcent d’y voir de la possibilité, mais leurs bases
incertaines ach èven t de convaincre q u ’il n ’y aurait
rien qui éclairât la justice plus q u ’elle ne l ’est par elle
m ê m e et par les règles du droit.
.
S’il y a dans l ’acte de 1703 un contrât aléatoire qui
n e présente pas au créancier une chance certaine, une
chance u su ra ire, pourquoi ne faudrait-il pas l ’exécuter
plutôt que de jetter les parties dans le vagu e de l ’opé
ration la plus conjecturale.
U n intérêt de dot est un vrai capital susceptible luim êm e de produire intérêt e x ojjicio ju d ic ts : A v e c ce
capital rien n ’em pêchait d ’ail’e n n e r les fruits d’un iin-
�(
2 3 )
.
m euble pour un certain nom bre d ’années ; c’ était une
ven te de récoltes à prix fixe.
.
Pou rqu oi au parlem ent de Paris faisait-on im puter
les fruits sur le p rin cip al, quand l ’intérêt n ’était pas
dû. C ’est q u ’alors il n’y avait pas de ven te valable des
fru its, en ce que le prix con ven u n ’était pas réel^ il
n ’y avait plus r e s, consensus et p re tiu m , et alors pour
donner un prix aux fruits ven d u s, il fallait le retrouver
sur le cap ital, qui était la seule chose que ra cliete u r
eût pu oiîrir dans ce contrat de vente.
Mais quand l ’intérêt est lég a l, voilà un prix certain;
la ven te des fruits est donc légale et v a la b le , et jamais
personne n ’osa prétendre q u ’entre le prix et la chose
ven d u e , il fallût toujours une égalité m athém atique.
Si c ’était un contrat aléato ire, il était toléré et il
l ’est encore. L ’incertitude des fruits a été la règle des
lois et celle de la jurisprudence.
L e sieur D eleige a cité plus h a u t un arrêt de Catelan sur l’anticlirèse d ’une vigne ; le journal du parle
m en t de Toulouse en rapporte un autre plus récent ,
du
3 i juillet 1 7 1 4 ? qui dans le cas m êm e où un m ou
lin , tenu à antichrèse, avait été donné à ferm e par le
c r é a n c ie r , pour un prix supérieur à l ’intérêt de son
a rgen t, n ’a pas ordonné l ’im putation de l ’excédant sur
le capital ; par cela seul q u ’un m o u l i n est sujet à de
grosses réparations et à des cas fo rtu its, et q u ’ainsi
m algré la certitude d u pr ix a n n u el, il restait toujours
l ’incertitude du vrai revenu.
f
■
Si les arrêts du parlem ent de P a r is , dans des cir-
�,
.{ H )
.
constances d ’usure m an ifeste, n ’ont pas favorisé l ’antichrèse, au moins est-il certain , que dans les cas d ’in
térêts légalem ent d u s, il l ’a toujours regardé co m m e
un conlrat très-légitim e: L e rédacteur de ce m ém o irè
a sous les y e u x l'expédition en parch em in d ’un arrêt
rendu au rapport de M .r D u d o y e r , le
25 m ai 1781:,
en Ire le sieur G e ra u d -M a b it et les dames de Caldaguès, '
leq u el arrêt ne laisse pas le plus léger doute sur la ju
risprudence de ce parlem ent.
U n e Jeanne D éco ub lat s’élait reconnue débitrice du
sieur de C a lad ag u ès, pou r légitimes et autres objets ,
de 2.6,?>oo liv., le 5 avril 1667 , et lui avait donné deux
domaines à anticlirèse, pour en jouir tant et si longue
m ent q u’il serait en dem eure, de pa}^erlesd. 26,300 liv. ,
a v e c conven tion que les fruits en seraient compensés
a v e c l’intérêt de ladite somme.
.
L e sieur M a b i t , acquéreur desdits d om ain es, et
cédafaire des D é c o u b la t, en dem anda le désistement
par exploit du 2 juillet
1 7 7 4 , a v ec restitution de
jouissances depuis 1 6 6 7 , au x offres de com penser les
fruits jusqu’à due concurrence a vec les intérêts qui
se trouveraient légitim em ent d u s , et le surplus im
puté sur les capitaux.
L ’arrêt du 20 m ai 178 1 a condam né les dames de
C aldagu ès, à se désister au profit du sieur M a b it, des
héritages énoncés audit acte de 1 6 6 7 , à rendre et res
tituer Les fr u its d 'ic e u x , à compter d u 2 /juillet 1 7 7 4 ,
jo u r de La dem ande , lesquels seront compensés jusq u à due con cu rren ce, avec les intérêts de leur créa n ce,
échus
�.
.
.
,
(2 *'V.
é c h u s depuis Ledit J o u r 2 ju ille t 1 7 7 4 . S u r'le'su rp lu s
des dem andes, les parties sont mises hors de cour.
\
■ L e C od e civil n ’établit donc pas un droit n o u v e a u ,
lorsqu’il d it, article 2 0 8 9 , que Tanticlirèse doit être ;
exécu tée comme toutes'Les conventions qui. ne sont pas
prohibées par les lois.
”
'
! ■
O r il y a lieu de se régler par la loi .n ouvelle, toutes
les fois q u’elle n ’est pas en opposition à une loi an
c ie n n e , toutes les fois q u ’elle se r é fè r e , au co n tra ire ,
a u x anciennes lois qui existent. S i nempe declaret j u s
antiqu um nova constitutio ; s i declaret tanlum m odo
q uod anteà leges caverant. M orn . I n leg. 7 , j f . d&
legibus.
.
P o u rqu o i donc ici le Code civil ne serait - il pas la
loi des parties? L ’art. 2089 est la copie de la loi 17 au
code de usuris : il n ’y a pas de lois intermédiaires qui
aient disposé autrem ent.
L e s A storg ont voulu établir un e perpétuelle co m
paraison entre le contrat pignoratif et- l ’anlichrèse.
M ais personne n ’ignore què par le contrat pignoratif,'
le débiteur vend son im m eub le sous une faculté de
rachat l i m i t é e , et q u ’il
ferm ier.
■-••••.
d evien t aussitôt son propre
<
r '
‘
.
,
Ainsi n o n -se u le m e n t il court risque de perdre son
im m e u b le , faute d ’a rg en t, mais Y incertitude des fruits
tom b e encore sur lui seul annuellem ent.
L a différence des d eu x contrats prouve sëule la lé
gitim ité de l’ u n e t l ’usure de l’autre.
'
'
«D’après cela , il semble parfaitem ent inutile de re
D
�_ ( *6 >
_
chercher s’i l y a. prescription contrfe la préten tion des
A sto rg ; car s’ils l’avaient é le v é e 'e n 1 7 1 4 * ils auraient'
été déclarés non recevables à dem ander une co m p e n
sation.
M ais en .1 8 0 4 , c ’est véritablem en t une
folie de
vo u lo ir revenir contre cette compensation co n v e n u e
par un a c te , et ratifiée surtout par tant de p a iem en s
postérieurs..
Quand les parties ont plusieurs fois arrêté des com ptes,
soit en. 1 7 4 5 , soit depuis., n ’y a-t-il pas une présom ption
très-raison n able, que le débiteur a alors fait valoir tous
les excédàns de jouissances qui pouvaient m ieu x se véri
fiera ces époqu es, et que les rabais qui étaient de justice
ont été faits, s’il y avait lieu.
’
A cela les A s to r g ’ opposent -une bien, pitoyable r é
ponse. Ils n ’ont pas f a i t ni signé ces quittances, disentils; elles sont du fait du créan cier, et ne sont pas dou
bles ; on ne peut les le u r opposer;
M ais ce sont eu x -m ê m e s qui les op p o sen t, c ’est leur
libération ; sans elles iis d evraient p a y e r trente ans
d ’arrérages de plus q u ’ils n ’ offrent. D o n c ils s’app ro
prient. ces quittances , donc elles sont virtuellem ent
doub les, puisqu’ elles sont com m unes aux deux.parties,
puisqu’elles sont pièces, d u procès.
,
L a cour a jugé le 29 brum aire an 1 1 , contre le sieur
de Penautier, q u ’ une quittance à lui donnée désintérêts
d’ un capital, sans réserves, valait a c q u i e s c e m e n t à la
dem ande de ce capital. C ependant la quittance n ’était
pas double ; il n ’avait pas signé cet acquiescem ent.
�G
A u reste
37 )
et seulem ent , pou r ne négliger aucun
ï n o y e n , quand le sieur D eleig e n ’aurait pas p o u r lui
le point de droit , les circonstances et les réglem ens
multipliés qui font entre les parties ^ tran sa ctio n la plus
irréfragable., rien ne l'em p êch erait de faire valoir la
prescription de trente ans.
‘
.. •
,
,,i
. Il a p ro u vé que l'antichrèse n'était pas nsuraire ,
quand elle a pour objet des intérêts légitim em en t dus
¡; Cela seul répond aux A sto rg qui n e prétendaient
à rim prescriptibilité qu'en y supposant de l'usure.,
M ais encore la question n 'e s t - e ll e pas ju g ée par les
deux sentences de, 1 7 1 6 et 1 7 4 5 , qui n'on t ordonné
le paiem en t des intérêts, et par conséquent le com pte
des in té rê ts, que depuis 1 7 1 4 .
V igier sentit si bien q u ’elles étaient une fin de lion
recevoir contre l u i , que par ses défenses ,< du
3 août
1 7 6 4 , il se réserva de se pourvoir contre ces d eu x
sentences.
•-1
.
M ais il ne s'est pas p o u rv u , puisqu'il les a exécutées.
.
■ ■■
'
.
y1
.■ ;
^■
?:' ‘ :
F a u t-il encore parler de l’appel incident des A sto rg,
fondé sur ce que le juge du D o ign o n , en ordonnant
l ’estimation des- jouissances ? avait'prescrit aux experts
de déduire les charges.
'
-
f' '
L es Astorg supposent que le,propriétaire les p a y a it,
et non le créancier.
•
L e prouvent,-ils? ilsi;ne s'en sontjpas m is en p e in e ;
;mais ils prélen den t que cela a dû* être ;ainsi.
a Ainsi c e t ;appel est fondé sur une présom ption.
' *
D 2.
,
�(
23 )
^
C ependant les A storg auraient pu vo ir dans les a u
teurs déjà cités, que dans les antichrèses, le créancier
étant mis en possession pou r un tems indéterm iné pro
s u o , doit le paiement des charges. Mais cette n ou
velle question est si peu im portante q u ’il est inutile
de la discuter en point de droit.
C elui qui jouit est présumé p a y e r les ch a rg es, car
les charges sont une diminution des fruits annuels. Il
y a quelqùéfois exception pour des ferm iers, mais c ’ est
que le propriétaire reçoit un reven u annuel p a r le paie
m en t de la fe rm e ; et d’ailleurs le bail en fait toujours
le règlem ent.
. . . . . . . .
L e sieur D ele ige ne suppose pas que les A storg aient
opposé sé rieu sem e n t, q u ’aya n t subi deux degrés de
juridiction, il ne doit pas y en a vo ir un troisième.
Si cela était a in s i, il aurait fallu que l ’assemblée
constituante décrétât que tous les procès pendans a u x
parlem ens étaient é tein ts, parce q u ’ils étaient au troi
sième degré de juridiction. L a loi du 19 octobre 1 7 9 0 ,
a au contraire indiqué où seraient portés les procès
alors pendans aux parlemens. O r , celui des parties
était pendant au parlem ent de P a r is , par exploit du.
2.3 août 1790.
;
I l était pardonnable a u x Astorg d’opposer tant de
m o y e n s faibles et tant de prétentions bizarres dans lè
désespoir de leur cause; mais quand ils taxent
in dé
licatesse un h o m m e qui peut s’honorer de sa probité
§ans craindre de dém en ti de personne ;q u a n d ils écrivent
�( 29 )
q u e Leur réveil a été com m andé par la nécessité de n e
pas laisser perpétuer plus lo n g-tem s La rapine de ce
créancier altéré d ’ usure , les A storg ont ils cru se rendre
plus recom m andables par une injure grossière, q u ’ils
s’étaient bien gardés de se perm ettre en prem ière ins
ta n ce, où les deux parties étaient connues.
L à le sieur de L e ig e ne s’ en serait nullem ent offensé ;
là au contraire il aurait félicité Astorg sur un ch an ge
m e n t de principes que l ’opinion m édisante ou calom
nieuse ne suppose p as; et cette opinion m ê m e éta
blissait assez de distance entre la délicatesse du sieur
de L e ig e et celle d ’un A s t o r g , pour rendre inutile de
sa part toute espèce de justification.
Quoique le sieur de L e ig e ne soit pas très-sensible à
Tinsulle d’un tel h o m m e , il ne lui est pas moins pénible
d ’être accusé, loin de son dom icile , du vice le plus
opposé à son caractère. H eureu sem en t l’h om m e de
bien n ’est pas jugé par l’injure q u’il reçoit. L a raison
évalue l’injure et en scrute F a u te u r ; et quand un
A storg a du scrupule et f a it de la m o ra le , l ’expérience
apprend q u ’il n ’en fait que pour les autres, et la m é
m oire rappelle l’adage de tant de moralistes. V ideo
meliora , probo q u e , détériora sequor.
M . r M A R C H E I X , Rapporteur;
M .e D E L A P C H I E R , A v o ca t.
M .e M A R I E , L ic en cié-A v o u é.
,
A RIOM, DE L ’IMPRIMERIE PU PA LA IS CHEZ J.-C. SALLES,
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Leige, Robert de. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
usure
créances
antichrèse
quittances
Description
An account of the resource
Mémoire pour le Sieur Robert de Leige, appelant ; contre François Astorg et Marie Vigier, sa femme, intimés ; et Contre Brigitte Rotquier et Jean-Baptiste Lacroix, son mari, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1714-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0242
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Laval (Pré de)
Pleaux (15153)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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Antichrèse
Créances
quittances
Usure
-
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5c9250f0e87c08d26313a29fa891d3ab
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OBSERVATIONS
P O U R
Y
Les Q U A Y R U T , T H O M A S et V I L L E M A U D , intimés ;
CONTRE
'
, A n t o i n e Q U A Y R U T , appelant.
C iia r l es Q u a y r u t a-t-il été comptable envers A n toin e, M arie et M agdeleine
Q u a y ru t, ses frère et sœurs ?
A n to in e , qui soutient aujourd’hui qu’ il ne l’étoit pas , a dit le contraire deux
fois ; i°. par un exploit du 2 nivôse an ; 2°. par l’exploit même de sa demande.
A u jou rd ’hui il objecte que C h arles, n’ étant pas m ajeur au décès de son père,
n ’ a pas été protuteur ni com ptable , d ’après la jurisprudence d ’un jugem ent
du i nivôse an i o ; que ses sœurs ont reconnu en m ajorité avoir perçu leur por
tion de m obilier à l ’échéance de chaque succession, avoir donné leur consente
ment aux actes passés par C h arles, et avoir joui chaque année en com m u n ;
q u ’ainsi elles ne.peuvent s ’élever contre leur f a i t ; qu’enfin Charles les a ins
truites suffisam m ent lors de leurs cessions de 178 9 et de l ’an 6 .
Ce qu’il y auroit de plus fort dans ces objections seroit la jurisprudence du
tribun al, si elle étoit applicable.
M ais le jugement opposé éloit dans une autre espèce : c’étoient des frères et
sœurs qui avoient habité ensem ble, et il n ’y avoit pas d ’actes faits par un seul
pour tous; il n ’y avoit que la présomption de jouissance exclusive par l’aîn é, à
cause de son âge plus avancé.
Aussi les m otifs du tribunal sont assez précis, pour qu’on ne puisse pas abuser
de sa jurisprudence : « Attendu , est-il d it, qu’ il n’y a pas de preuve de gestion
» exclusive. » L e dernier m otif prouve aussi qu’il ne s ’agissoit que de simple
jouissance.
L e tribunal a si peu entendu fixer pour jurisprudence qu’il falloit etre indiqué
pour tuteur par la coutum e, au moment du décès du père, pour,etre protuteur
et com ptable, qu’il a jugé depuis, le 18 ventôse an 10 , dans la cause des R e y et
R o u g ie r, qu’ un b e a u - h è r e , demeurant dans la m aison, avoit été com ptable
¡envers les frères de sa fem m e, m i n e u r s a u décès du p e re , par cela ;eul qu’étant
m ineurs quand il étoit m ajeur, il ctoit p r é s u m é avoir joui pour eux. L a cession
qu ’ils lui avoient consentie, et même une ratification, ont été déclarées nulles
comme non précédées d ’un compte:
Com m ent donc Antoine Q uayrut a-t-il osé prétendre que, par un renversement
total de la jurisprudence constante et des principes, le tribunal vouloit à l ’avenir
5
3
5
TRIBU!
d
’a
p p
J
de Ridl
�(
2)
adopter cîes actes suspects de frau d e, contre le texte précis des ordonnances cîe
i c) et de 1667 ^
U n 'y a eu diversité d ’opinions que sur la question des dix ans, c o m b a tt u e
entre l’ordonnance de i55() et les m axim es de l’arrêt de 17 0 6 ; m axim es adoptées
par le parlement tant qu’il a régné. L a jurisprudence en est revenue a u x dix
a n s; mais les principes sur l’incapacité des comptables n ’ont reçu aucune atteinte.
Personne ne conteste que la première règle dans les ventes est de savoir ce
q u ’on ven d ; que dans le cas même où la chose vendue étoit distincte, il y avoit
l ’action rescisoire; et que dans le cas où elle n ’étoitpas distincte, comme dans les
droits successifs, il falloit que l ’acheteur et le vendeur eussent fait le jactum relis ,
c ’est-à-dire, que. l’un n ’eût pas su plus que l’ autre ce qu’ il y avoit dans le filet.
H ors de cela il y a fraud e, on n ’en a jam ais d o uté; et ja d is, dans ce c a sr
les cessions faites étoient nulles : aujourd’hui encore le Code civil ne valide que
celles qui sont sans fraude. ( L iv . III, art. C L X X I X . )
Com m ent donc contester de bonne foi que Charles Q uayrut ait été com ptable,
depuis 17 7 8 jusqu’à l’époque des cessions qu’ il s’est fait consentir? tous les actes
écrits de la gestion des affaires sont de son fait.
Com m ent concevoir que ses sœ u rs, et même A ntoine, partie adverse, aient
•joui et géré en com m un, comme on le leur a fait déclarer, lorsque dans tous
•les actes, les traités, les ventes et acquisitions, ori ne voit toujours que Charles
Q uayrut seul ?
,
Veut-on dire que c’étoit pour éviter les frais d'une procuration ? mais les actes
faits dans le lieu même n’en avoient pas besoin ; il falloit appeler les sœ urs, si
on les comptoit pour quelque chose.
Charles Q u ayru t, allant en A n jou acheter les droits de son oncle contre là
succession com m une, étoit chargé de payer 200 francs à ses sœurs : il ne leur
en a jam ais dit un m ot. Il y a là deux procédés d ’infidélité et de fraude.
Il a traité en 178 2 sur la succession personnelle de cet oncle; il n ’ a jam ais
dit à ses sœurs le résultat de ce traité : cela seul annulleroit la cession faite. C a r
com m ent o n t-e lle s pu connoltre la chose vendue, même par approxim ation?
S ’il y a fraude et nullité quant à la succession de l’oncle, il y a nullité pour le
to u t; car 1« vente est pour un seul prix.
D ans la cession de 1789 il n ’a rien dit de la créance M andon (
liv. 14 s. ).
D an s le traité de l ’an G il Fa réduite à 240 francs en principal et intérêts.
Il n ’a parlé dans l’une ni dans l ’autre d’ un traité fait avec les T h om as , en
17 8 8 , portant établissem ent d ’une servitude pour i o francs qu’il a reçus.
L ’inventaire, fait après son décès, m entionne, i°. un échange qu’il a fait en
17 7 8 ; 2°. plusieurs ventes d ’immeubles à son profit; °. une sentence consulaire
par lui obtenue en 17 7 9 ; 4*- une procédure suivie en son nom dans le même
tem ps; 5°. une quittance par lui donnée en 17 8 1 ; G*, u n e obligation de 178G , fie .
Ces actes, connus de 1 adversaire seu l, qui en e st dépositaire, et qui s’est tout
approprié au déccs du frère com m u n, achèvent de prouver tout à la fois que
Charles Quayrut géroit, plaidoit et recevoit se u l, sans que sr>s sœurs fussent
jam ais comptées pour rie n , même dans les procès; ils prouvant rncore que
Charles Q u ayrut, en faisant les affaires de la m aison, les i’aisoit au moins 1resbien pour son com pte, puisqu’il adicloit des im m eubles, même avant sa mur*
55
5
5
�jo rité , tandis que ses sœurs n’ont e u , en se m arian t, que ce qu’il a bien voulu
leur donner. E t qui croira que des filles, généralement plus économes que des
jeunes gen s, n’eussent fait aucune épargne, si elles eussent pris la moindre part
dans les jouissances, le m obilier, les achats, les ventes des bestiau x, etc.?
D ans tous les procès où des cessions étoient attaquées, on n ’a p e u t-ê tre
jam ais réuni autant de preuves écrites d ’une gestion exclusive.
M a is, dit l'adversaire, vous avez reconnu, en m ajorité, avôir joui en commun ,
avoir pris le mobilier à chaque ouverture de succession, avoir consenti à ces actes.
Rem arquons d’abord que si l’acte pèche en lui-même par le défaut d ’un com pte,
toutes les déclarations pèchent aussi. Elles étoient en effet une précaution néces
saire, l ’ouvrage du comptable plutôt que celui du cédant, comme dit Chabrol.
( T o m . i , pag. 4 14 . ) E t avant de m ériter une pleine croyance, le comptable
devoit instruire, et non exiger des déclarations tendantes à la décharge implicite
du compte, pour nous servir des expressions littérales d ’un jugement du tribunal
de cassation, rendu en semblable espèce. ( messidor an > bull. )
Com m ent ici encore, ajouter foi à ces déclarations, lorsqu’ elles sont démentie*
par des faits évid en s, et d'un genre absurde?
Dém enties par les faits. Depuis 17 7 8 jusqu’ aux cessions, on voit Charles dans
tous les actes con n u s, on ne voit pas une seule fois ses sœurs. Charles stipuloit
pour tous ses cohéritiers sans les appeler, donc il n ’y avoit pas gestion commune.
A insi la fausseté de la déclaration contraire est prouvée par écrit.
D ’un genre absurde. E n effet les deux sœurs ont dit avoir pris leur portion
de mobilier , à l’échéance de chaque succession. O r au décès du père ( 1 7 7 2 ) ,
l'une avoit trois ans et l’autre huit : au décès de la m ère ( 1 7 7 5 ) , l’une avoit
•six ans et l’autre onze. Elles ont dit avoir consenti à l’ acte important de 17 8 5 ,
où Charles ratifioit une cession de sa mère , après un procès g ag n é , après un
jugem ent qui annulloit celte cession ; mais alors elles étoient m ineures, la cadette
avoit quinze ans et demi. Or qui croira qu’on ait cherché le consentement de
deux filles mineures pour une vente d ’im m eubles? E t en quoi ce consentement
avoit-il de la v a le u r;
• T o u t se réunit à vicier les deux cessions de 178 9 et de l’an 6 , m algré les
fausses déclarations y insérées par le notaire , homme de confiance des frères
Q uayrut, à tel point qu’ il s'est attaché aux audiences du tribunal, sur la cause
actuelle, pendant presque deux semaines entières; malgré encore sa précaution
de faire ratifier un exploit son ouvrage, donné par une des cédantes , la veille
du traité de 1 7 8 9 , parce qu’ il y avoit énoncé aussi l’aveu d’une jouissance
commune.
Charles Q uayrut a été évidemment comptable envers ses sœurs , comme
envers son frè re , quoiqu’il ne le prétende plus aussi positivem ent; il l’a été au
titre d’ administrateur ou protutcur, et de nrgottorum gestor.
Il a été adm inistrateur, ayant ou n ’ayant pas le consentement de ses sœ urs;
c a r, dans les actes qu’il a passés, il s’est fait fo rt pour e lles; il a promis leur
laire agréer et ratifier.
. . , .
A insi dans les actes qu’il a commencés en m ajorité, il n 'a plus d ’initio inspecto à in voqu er, ces actes n ’éloient plus une suite nécessaire de sa gestion en
m in o rité; il géro it, m ajeu r, pour des sœurs m ineures, non émancipées.
5
4
�Désigné p a r la coutum e, comme le prem ier dans l ’ordre des tutelles } c’est lui
qui auroit été nommé s'il eût convoqué la fam ille ; il a m ieux aimé gérer et passer
des actes im portans, sans même faire émanciper ses sœurs ; donc l’obligation
qu’il a contractée en se faisant fort pour ses sœ urs, est une obligation de comp
table, de proluleur ( f f . qui pro tutore gerunt).
C e m oyen paroît puissan t, et ne se détruit par aucun des faits de la cause.
L e premier acte des filles devenues majeures a été de vendre, sans qu’elles aient
pu connoitre un seul instant ce qu’elles vendoient.
Charles Q uayrut a été negotiorum gestor, puisqu’il n ’ avoit pas de procuration
écrite, et qu ’il ne pouvoit pas même en avoir de ses sœurs non émancipées.
Or le negotiorum gestor est tenu de l ’action en reddition de com pte, comme
le tu te u r; il doit, comme le tu teu r, actus sui rationes reddere, suivant les
expressions de la loi qui s o n t , comme on v o it , les mêmes que pour le tuteur.
( L . 2 , ff. Neg. gest. )
doit les rendre ad exactissimam diligentiam. ( Inst. de
obi. quæ ex quasi contr. nasc. )
.
L ’ordonnance de 1667 déclare tout adm inistrateur comptable ; l’ordonnance
de 15 3 9 défend toutes dispositions au profit des tuteurs et adm inistrateurs, avant
qu’ils aient rendu le compte qu’ils doivent; et c’est sur le m o tif de cette ordon
nance, que le tribunal de cassation, se conform ant en cela à une jurisprudence
de deux siècles, a annullé une cession faite à un com ptable, qui cependant n ’étoit
pas tuteur , par cela seul qu’il y trouvoit la décharge implicite ae son compte.
L ’arrêt même de 170 6 étoit dans les termes de la cau se; c’étoit un fondé de
pouvoir, étranger, qui encore avoit rendu un com pte, mais qui n ’y avoit pas
donné assez de détail; il fut jugé que n’ ayant pas suffisam m ent instruit ceux à qui
il devoit ce compte , il n’avoit pu valablem ent traiter avec eux sur ce qu 'ils ne
connoissoient pas aussi-bien que lui. A insi ubi eadem ratio, etc.
Ce que demandent les intimés ne tend pas à obtenir une reddition de compte
coûteuse et difficile ; c’est au contraire pour empêcher qu’il n’en soit rendu un
¡1 l’appelant qui le dem ande, quoiqu’ il se soit ingéré dans les affaires , comme
cela est prouvé par quelques quittances. Antoine Q uayrut ne s’est absenté que
pendant cinq à six a n s, et pour quelques mois seulement. A son retour il participoit aux a ffa ire s, quand ses sœurs gardoient. les troupeaux. C e qu’il veut
obtenir laisseroit les parties dans un long procès , tandis que la demande des
intimés ne tend qu a obtenir un égal d ro it, pour tout confondre et compenser
dans la succession de Charles Q u ayru t, dont chaque partie est héritière, et à la
quelle il s’agira seulement d ’ajouter en rapport les sommes reçues par chaque
cohéritier.
.
A insi les premiers juges ont été conduits par la loi, et par un moyen puissant
de considération, ;i adopter un mode de juger qui amène la fin des procès entre
les parties, et qui tend à l ’égalité, considérée de tout temps comme l’âme des
partages.
D E L A P C I I I E R , homme de loi.
11
M A N D E T je u n e , avoué.
A R IO M , de l'imprimerie d e L a n d r i o t seul im prim eur du Tribunal d ’appel.
�
Dublin Core
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A name given to the resource
Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Quayrut. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Mandet
Subject
The topic of the resource
successions
tutelle
conflit de lois
coutume d'Auvergne
Description
An account of the resource
Observations pour les Quayrut, Thomas et Villemaud, intimés ; contre Antoine Quayrut, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1785-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0241
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0735
BCU_Factums_M0333
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Coverage
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Giat (63165)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conflit de lois
coutume d'Auvergne
Successions
tutelle
-
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f95707a386f1ccd98161479b8a017c4f
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Text
CONSULTATION
P
our
le citoyen
à n n e t
_
PERISSEL
avoué au
i bunal d’appel, appelant;
r
T
i
C o n t r e scs frè re s et sœurs légitimaires, intimés,
.
/
/
--------------------------------- -
FAIT
^<0M4JL
A rf
j
T
ierhe
.
Périsscl et Michelle L a b r y , père et mère des parties,
ont laissé huit enfans ; de ces huit enfans deux filles furent mariées,
|
en 1 7 6 7 , l'autre en 1 7 7 3 , dotées et forcloses.
|
A n n e t Périssel, fils aîn é, par son contrat de mariage du 4 mai
i
1789 , fut institué héritier universel de ses père et m ère, à la charge
de payer des légitimes fixes, en argent, à chacun de ses frères et
sœurs non établis, et un supplément, également en deniers, à ses
deux sœurs mariées.
L e père mourut dans les premiers jours d ’octobre 179 0; la mère
I
n ’est décédée qu’en floréal an 8.
L e s légitimaires, après l’ouverture des successions, préférèrent
les dons ou legs particuliers que leur frère aîné avoit été chargé de
.
leur p ayer, à leurs légitimes en corps héréditaires. Celui-ci voulut
se dispenser de payer ces dons ou legs particuliers, en offrant par
tage égal à ses frères et sœurs : mais les choses n ’étoient plus en-
_
tières lorsqu’ il prit ce parti ; ses offres furent rejetées par jugement
du tribunal d’ appel; il fallut p a y e r , et il paya en argent.
L e s légitimaires, remplis de tout ce qu ’ils avoient dem andé, se
sont rappelé que leur p ère, dans le contrat de mariage de l’héritier
universel, s’étoit rendu caution solidaire de la restitution de dot
de sa b r u , et du payement de scs gains éventuels de survie ; ils
prennent l ’alarme, et ils disent : Nous avons ruiné notre frère ; où
*
en serions-nous s'il ne laissoit pas assez de biens, a sa m ort, pour
répondre de la dot et des gains de sa fe m m e ? nous ne craindrions
�( 2 )
pas d ’action hypothécaire de la part de notre belle-sœur ni des siens,
dès que nous ne possédons pas un seul immeuble de la succession
de notre père, qui s’éloit constitué caution solidaire du payement de
ses reprises matrimoniales; mais l’action personnelle ne nous atteindroit-elle pas com m e héritiers lég itim aires? Oui certainement, çlle
nous atteindroit; car le premier engagement de tout héritier est
de succéder aux obligations contractées par le défunt, et de payer
ses dettes : o r , nous sommes véritablement des héritiers, puisque
nous sommes des légitimaires. E t les voilà qui se hâtent de former
une inscription hypothécaire de 26,000 fr. sur les Liens d ’Â n n e t
P e r isse l, pour la conservation de leur hypothèque de garantie des
suites du'cautionnem ent fourni par leur père.
A n n e t Périssel, justement surpris de voir ses frères et sœurs
sonner ainsi l ’alarm e, et mettre un embargo général sur les négo
ciations que l’arrangement de ses affaires pourroit exiger, a réclamé
contre une inscription om brageuse, à laquelle il est impossible
d ’assigner un fondement raisonnable, et il en a demandé la radia
tion, mais sans succès en première instance; sera-t-il plus heureux
en cause d ’appel? il doit le croire, car il sera jugé par un tribunal
également distingué par ses lumières, par l’amour de la justice, et
par son ardeur à réprimer les tracasseries.
M O Y E N S
D É C I S I F S .
D éjà il est évident que quand on considéreroit les intimés comme
héritiers, en partie, de leur p è r e , n ’ayant à redouter, de la part
des créanciers, que la seule action personnelle qui se divise de plein
droit entre tous les héritiers , et ne peut être exercée contre chacun
que proportionnellement à son a m en d em en t, ils n ’auroient à se
précautionner contre les recherches de la dame Périssel, dont la
perspective les inquiète, que pour sept seizièmes de sa créance :
l’ inscription conservatoire qu’ils ont form ée pour la garantie de la
dette entière est donc incontestablement exagérée pour les neuf'
seizièmes.
M ais elle n ’est pas moins évidemment dénuée de fondement pour
�(3 )
les autres sept seizièmes. L es intimés en conviendront, si la frayeur
qui les égare leur permet un instant de réflexion.
Us se dem anderont, Qui so m m e s-n o u s? E t certes, quoiqu’on
n 'y voie pas très-bien quand on a peur, ils ne pourront pas prendre
le change sur leur véritable qualité; ils s’apercevront q u ’ils ne res
semblent pas plus à des héritiers de leur p è r e , q u ’un légataire
étranger à qui il auroit légué cent écus par son testament. Ils ont
rêvé quand ils se sont crus héritiers de fait, chacun pour une seizième
portion de leur père; ils étoient habiles à le de ve n ir, oui : mais ils
. ne le sont pas devenus; ils se sont non-seulement abstenus, mais
opiniàtrément défendus d ’accepter la qualité d ’héritier, et de prendre
part au p artag e , pour s’en tenir au don ¡>arliculier qui leur avoit
été fait dans le contrat de mariage de leur frère , héritier universel,
par la voie de la charge qui lui, fut imposée à leur profit en l’ins
tituant. N ’ e s t héritier q u i ne veut. Us n ’ont pas voulu être hériritiers de leur pore ; ils ne le sont donc pas. U n donataire, un lé
gataire principal ou su b o rd o n n é, n ’im porte, lorsqu’il n ’est que
donataire ou légataire d’ un objet p a rticu lier, n ’est pas un héritier
et n ’en contracte pas les engagem ens, en acceptant le don ou le
legs qui lui est fa it ; il n ’épouse pas les dettes de son auteur, il
n ’en est aucunement tenu : les créanciers sont sans droits et sans
action contre lui. Ces règles, qui sont de tous les pays et de tous les
te m p s, du droit romain comme du droit fran ça is, viennent encore
d ’être consacrées de nouveau p arle tit. I". liv. III du co decivil, adopté
par le corps législatif le 29 g erm in al, art. C L X I , ainsi conçu :
« L e légataire à titre universel contribue avec les héritiers, au
» prorata de son ém olum en t; m ais le légataire particulier n’ est
h pas tenu des dettes e t charges : sa u f toutefois l’action hypothé« caire sur l’immeuble légué. »
E t cette règle est répétée dans la loi du i 3 floréal, iorm ant le
litre II du même livre du c o d e , art. C C C X I N , qui porte :
« L e légataire à titre particulier ne sera point tenu des dettes
m
de la succession ; saut l’action hypothécaire des créanciers,
h
V oilà un antidote.bien capable, ce semble, de guérir les intimes
�(4
)
de leur frayeur enfantine, sur les recherches des créanciers de leur
père.
V oilà aussi un m o t if bien tranchant pour le trib u n a l, de pro
n o n ce r, sans hésiter, la radiation de leur inscription de garantie
contre un danger imaginaire.
D
é libér é
à
C le r m o n t-F e r r a n d , par le jurisconsulte soussigné,
le 11 prairial an 11.
BERGIER.
L E S O U S S I G N É , qui a vu et examiné la consultation des autres
parts,
E
st d u
m êm e a vis et
par les mêmes raisons.
D a n s le f a it , les frères et sœurs du citoyen Périssel ne sont,
dans l’espèce, que des donata ir e ou légataires particuliers d ’une
somme de deniers.
C ’est un point jugé entre les parties, puisque le citoyen Périssel
aine a succombé dans sa prétention de vouloir les faire considérer
com m e héritiers légitimaires.
D a n s l’ancien d r o i t , de simples donataires ou légataires parti
culiers n ’étoient pas tenus des dettes du d é f u n t , quoiqu'ils fussent
ses héritiers présomptifs; com m e on le voit dans L e b r u n , traité
d es successions, liv. I V , chap. II, sect. II, n°.
52.
D ans notre droit nouveau ils le sont encore m o in s, d ’après les
deux articles du nouveau code qui sont cités de l’autre part.
O n pense donc que l’inscription faite par les frères et sœurs du
citoyen Périssel ne peut subsister, et que le jugement qui l’a main
tenue doit être infirmé,
D
é libé r é
à C lerm o n t-F erra n d , le i 5 prairial an 1 1 .
B O I R O T.
A R I O M , de l’imprimerie de
L
a n d r i o t
,
T r ib u n a l d ’appel. — A n 1 1
seul imprimeur du
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Périssel, Annet. An 11?]
Creator
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Bergier
Boirot
Subject
The topic of the resource
successions
Description
An account of the resource
Consultation pour le citoyen Annet Périssel, avoué au tribunal d'appel, appelant ; Contre ses frères et sœurs légitimaires, intimés.
annotations manuscrites.
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De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1767-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0240
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
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Riom (63300)
Aigueperse (63001)
Rights
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Domaine public
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5dc3861c75576ee8c1a86567cd994c2d
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M
E
M
O
I
R
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T R IB U N A L
P O UR
É tie n n e
C O N T R E
E t
L
P R U G N A R D et M
sa femme, Intimés.
J e a n 'B a p t is t e
c o n t r e
A U D
1G 1E
a r ie
DEMURAT,
T
G R A N E T , A p p e llan t.
R f N o ta ir e ,
In te rv e n a n t.
a p rin cip a le q u e s tio n , qui d ivise les p arties , est c e lle de savoir si le
cito y e n G ra n et , qui s ’est m is à la tête de la m aison G en d ra u d en 1 7 6 3 ,
e t en
a
fait toutes les affaires com m e m ari ,
doit la com m unication,
à ses co h éritiers d ’une acqu isition q u ’il a faite ju d iciairem en t p en dan t
l ’instance du partage , com m e pou rsuivan t po u r la s u c c e s s io n , e t sans
bourse d élier.
L es autres questions son t rela tives aux rapports et prélèvem en s à faire
au partage ordonné en tre le s parties , e t sur leq u el i l n ’y a pas de con
testation.
.
P ou r l ’in te llig e n c e de la difficulté p rin cip a le , il est nécessaire de re
m on ter à des f a i t s , antérieurs à l ’ou vertu re des successions d iv isib les.
F
A
I
T
S
.
M ic h e l et autre M ic h e l M e rc ie r , fr è r e s , v iv a n s au m ilieu du d ix-sep
tièm e siècle ,
ach etèren t en com m un un m o u lin app ellé B o tte,
et d eu x
jardins y attenans ; il p aro ît que l ’aîné y am andoit deux cinquièm es , et
l e cadet trois cinquièm es.
C elu i-ci se fit M e û n ie r , re t gard a tou t le m ou lin ; i l
acte de 1659 ,
o b lig e a par un
de donner tà so n frère pour ses deux çinqièm es in d iv is
deux s etiers de b lé et dix sous d ’arg en t par année.
A
d’ a ï p b i
d e r io m
.
�.
.
.
.( 2 )
.
M ic h e l M e r c ie r , aîn é , a vo it laissé deux fils ; L a u r e n t , qui fut C uré e n
D au p h in é ; et M ag d e la in e ,
qui fu t m ariée à L e g e r G en d rau d ,
souche
dç la fa m ille de cujus.
P ou r form er le titre clé ric a l de L au ren t M e r c ie r , M a g d e la in e M e g e , sa
_ m ère , lu i constitua ces deux cinquièm es du m ou lin et ap p a rten an ces., u n
b an c sous la h a lle de R o c h e fo r t, une m aison et ja r d in , un pré et une b u ge.
, L a u ren t M e r c ie r , ren o u vela lu i-m ê m e e n 1692 , a v e c Jean M e r c ie r ,
fils
de M i c h e l, j e u n e , les arrangem ens pris par so n père en 1669 ; e t
i l fit d on ation en 17 2 6 à la fem m e de L e g e r G en d rau d , sa sœ ur ,
die
tout ce qui lu i a vo it été constitué p ar son titre clérica l.
Jean. M ercier,' détem pteur du m o u lin in d ivis éto it alozs d écé d é, laissant
deux enfans , dont A n n e C h a rd o n , sa v e u v e , éto it tutrice. L e g e r G e n
draud
et sa fem m e la firent assigner ,
e n cette q u a lité ,. p o u r p a y e r le»,
arrérages de ferm e des d eu x cinquièm es du m o u lin , Le 26 m ars 17 2 7 .
C e tte poursuite fut suspendue pendant b ien des ann ées ,
ch a n g em en s qui su rvin ren t dans la fa m ille G endraud ,
.
çu p er m ain tenant.
à cause de*
dont il faut s’o c-
>
M ag d e la in e M e g e éto it m orte e n 1 7 3 0 , laissan t u n seul e n fa n t , L a u
ren t G endraud ,
qui fut m arié à A n to in e tte M a lle t ,
et q u i décéda lüi.-
m êm e e n 17 3 5 j L e g e r , son père , n e décéda qu’en 174 2.
L au ren t G endraud et A n to in e tte M a lle t , eu rent trois en fans ; sa v o ir
Jacqu elin e , M a rie et C atherin e y i l n e p a ro ît pas que cette dern ière a it
eu de la postérité.
Jacqu elin e fut m ariée à A n to in e D em u rat ; ils m oururen t peu de tem *
après le u r m ariage , laissant trois enfans ; sa v o ir , A n to in e tte , m ariée à
A n to in e F o u m ïe r 3 M a rie , fem m e P ru g n a rd , intim és s et A n to in e , q u i
est représenté par lesdits Prugnard.
A p rès la m ort d’A n to in e D em u rat et de sa fem m e , A n to in e tte M a lle t,.
h a b i t a n t dans la. m aison de R.ochefort a vec les enfans de sa f i l l e , j; fa iso it
u n p etit com m erce , et v iy o it de ce produit , et de ce lu i des h éritages de
la fa m ille
'
G e n d ra u d , réunis p a r l a d onation de 1 7 2 6 .
M a rie G en d rau d , sa fille , é to it a llé e en co n d itio n ch ez M . de C h a z e r a t*
et ch ez le C., D . m arquis
de L in iè re .
E lle paTtit d elà en 17 5 8 ,
après
a vo ir em prunté tren te lou is du C u isin ier de la m aison pou r fa ire le co iü r
»xerce à R o c h e fo r t , ou sa m ère d eyo it lu i céd er so n m agasin,.
�..
( 3 )
A u s îl- tô t qu’e lle y fût a r r iv é e , v o y a n t dans la m aison de p etites nièce»
•
q u i a vo ien t le m êm e
droit q u ’e lle , e lle a v is a , e n fille
qui a v a it v u
le inonde , aux m oyens de tou rner les choses a son bén éfice exclu sif.
E lle présen ta requête ,
pour n ’habiter la m aison p a te rn elle ,
qu’a v e c la
p erm ission de la justice. E lle répudia le i . er m ars 17^9 à la su ccéssion
de son père ,
et le 3 , e lle se fit co n sen tir p a r sa m ère , m oyen n an t
cin q liv res u n
b a il de la m aison pour
une
an n ée ,
a v e c la
fausse
d éclaration q u ’il n ’y avoit pas d ’autres biens.
M a rie G r a n e t , après toutes
à R o ch efort deux ou trois ans ;
q u elle q u a lité ,
ces précautions , vo u lu t b ie n dem eurer
après c e la ,
e lle a lla , o n n e sait en
dem eurer à C lerm o n t ou à C h am alière ; et c ’est là , que
le 2 i m ars 176 8 , e lle con tracta m ariage a v e c le c ito y e n G r a n e t ,
alor*
c h iru rg ie n .
' 11 est dit dans le co n trat que la future se co n stitu e ses biens e n dot ;
il est dit aussi qu’en cas qu’e lle p r é d é c è d e , le futur g ag n era ses m e u b le s,
tels qu ’ils seront d ésig n és, p ar un acte q u ’ils se p rop osen t de passer en
sem ble ; et la jouissan ce de ses biens présens , d ’un reven u de cinquante
liv re s , à la eh arge de nourrir et entretenir sa m ire i laq u elle , de son
côté , sera tenu de lu i d on n er ses petits travaux et soins ; ce qui p rou ve
déjà que la m ère n e g o u v e m o it pas.
E lle g o u vern a b ien en core m oin s , quand le cito yen G ra n e t fut étab li
dans la m aison. 11 n ’éto it pas attiré à R o ch efort pour l ’ex ercice de son
é t a t , puisqu’il le
quitta bien tôt pour
en trer dans la g ab elle. M a is il j
a v o i t là une m aison , u n p e tit c o m m e rce , des im m eubles et des créances ;
c ’étoit de quoi com m en cer une fo rtu n e , ou tro u ver du m oins son existen ce.
11 a été dit plus h a u t , que J ea n M e r c ie r , détem pteur du m ou lin B o tte ,
a v o it laissé deux e n fa n s, appellés A n to in e et L o u is ; A n to in e étoit m ort
lors du m ariage de G ra n et , laissan t aussi d eu x enfans ; s a v o ir , A n to in e
et M ag d e la in e.
L e citoyen G r a n e t , e n son n o m et celu i de sa fe m m e , sans s’o c c u p e r
de* enfans D e m u r a t, fit a s s ig n e r, le 14 juin 176 6 lesdits enfans de Jean
M e rc ie r , en reprise de l ’ex p lo it du 26 m ars 17 2 7 . Ils ren o n cèren t a la
•u ccession de le u r pere.
•
A u m oyen de cette ré p u d ia tio n , la succession de Jean M e rc ie r n ’étant
o ccu p ée par Aucun t s d iv id u de la branche de M ic h e l; jeu n e , son p^re }
A. 2
�’
toute la lig n e étant décédée ,
.
excep té
. .
le s deux r e n o n ç a i s , il est clair
que les biens de cette lig n e re v e n o ie n t de d roit à la b ra n ch e de M i c h e l ,
aine , et que la créan ce se con fon doit dans la succession. M ais ce n ’éto it
pas le com pte du cito y en -G ra n et. Il aim a m ie u x supposer la su ccessio n
vacan te ; il y fit nom m er un curatcur.
i l co n clu t con tre ce
curateur , à la rep rise du m êm e e x p lo it de 17 2 7 ,
conten an t-dem an de des arrérages du blé dû pour la ferm e des deux c in
quièm es du m ou lin Botte , et au partage dudit m ou lin et jardin.. Ge* co n
clusions furent adjugées , par sen ten ce du 3 septem bre 1767..
C ette sentence ordonna le partage du m o u lin , p erm it au cito y en G ra n e t
et à sa fem m e de se m ettre en possession du m ou lin et autres im m e u b le s,,
jusqu’à ¿extinction de leurs créanecs
*
ou de faire vend re s u r placard..
L o rsq u ’il fallu t faire exécuter cette sentence , le
cito yen G ra n e t s ’ap-
perçu t que le sieur de Chabanes-de-G urton , G. D . se ign eu r de R o ch efort,
éto it en possession
de tous les im m eubles de la branch e de J ea n M e r
cier , à titre d ’acquisition de L ou is M e rc ie r , ou par hypothèque. Il le fit
assigner en 1 7 6 8 , toujours com m e m a r i , d ’abord en d éclaration .d’h yp o
thèque ; s u r , i . ° un pré à faire sep t chards de foin ; 2 .° un pré de tro is
ch a rd s.; 3 .° u n 'ja r d in d ’une quartelée ; 4 .0 u n e terre de trois septérées.
E n su ite il ch a n g ea ses con clu sion s , et d e m a n d a , o n n e 's a i t p o u r q u o i,
le partage co n tre lu i en 176 9.
U n e sentence de là sé n é ch a u isé e , du 6 se p te m b re , adjugea' ces dernières,
co n clu sio n s ,' ordonna le partage d es'bien s de J ea n M e rc ie r , pour en êtredélaissé un sixièm e au sieu r de C u rton , com m e acquéreur de L o u is M e r
c ie r ;. et cinq sixièm es au cito y e n G ra n et e t sa fem m e a vec restitu tion
de jouissan ces depuis
176 3.
L e sieur de Curton in terjetta
firm ée por arrêt de
des
qui fut co n
17 7 7 . D es experts, lui attribuèrent l ’article quatre de'
la dem ande de 17G8 ,
tio n
appel de cette sen ten ce ,
et le surplus aux G ran et. Ils fixèrent la restitu
jou issan ces, depuis 175 9 jusqu ’à 17 7 8 , à
1,4 2 5 liv .
L e cito y en G ran et reçu t ces 1,4 25 liv re s , sur lesqu elles i l 1 déduisit , à
q u ’il d i t , 56 y liv . de cens. Il reçu t aussi le m ontant des frais de R io m
e t du Parlem ent.
’ A p rès-a v o ir "ainsi term iné a v e c l e f sieur de C u rfo n , il' rep rit ses dilirgônees contre le curateur, de là sùccessiou M ir c i e r ; _fit liq u id e r le 4 avril'
�( 5 )
1780 , le s arrérages de jouissances du m ou lin B o tte , ju squ ’à 1 7 2 7 , seu
le m e n t à 408 liv . i 3 sous
6 deniers ; e t o btin t un exécu toire de dépens
de 246 liv . 18 s. 4 dcn.
L e cito y en G ran et dut se m ettre en possession en
ijj
Q. C ar on v o lt
sur l ’expéd ition de la sentence d’h o m o logatio n du rapport ,
que M . dâ
C u rto n n e paya les jouissances que jusqu ’en 1778 ; l ’é v ic tio n éto it p o u r
su iv ie et obtenue par G ran et > c ’est donc lu i qui se m it en possession alors.
C e p e n d a n t, le 6 ju in 1 7 8 0 ,
il fit saisir sur placard ,
de sa fem m e et la sien n e , sur le
son et un jardin jo ig n a n t ,
à la requête
cu rateu r ; i . ° une m azure de m ai
d ’une quartonnée ;
2.0 ,
3 .°
et 4 .0 les
deux prés e t le jardin ou ch en evière , m en tion n és en l ’e x p lo it de 1768 ,
5 .° une terre d’ une ém inée , sise au terro ir de la croix-p en d u e 5 G.° u n e
terre d ’une ém in ée , si*e à g rig n o l.
Le
3o août 1 7 8 0 ,
ces héritages
^
fu ren t adjugés , au sieu r A c h o n >
p rocu reu r des poursuivons-, m o y en n a n t i,2 o o liv re s ,
qui d em eu rero n t,
(
est-il d i t , en tre les m ains de l ’ad ju d icataire, à compte de • SES' créances*
L e sieu r A c h o n lit,sa d éclaratio n de m ieu x , et dit qu e'son ,.m ieux éto it
le cito y en G ra n et
..
„
. ..
•
-
,
.
L e cito yen G ra n et prit possession le 27 se p te m b re , tan t en. son rtom ',:
qu’en qualité de mari de A larie Gendraud , sa fem m e , de lui autorisée. Il1
r é p é t a q u e les h éritages lu i avo ien t été adjugés pour j,2 o o l i v . , à com p te
dé SES créances.
'
O n s ’étonne , sans doute , de n e plus entendre p arler dans .cette lo n g u e
procédure des deux cinquièm es du m ou lin B otte et des deux jardins. L e
sieu r de C u rto n a vo it vend u ces objets', à ce qu’il p a ro it, au, nom m é L a s s a la s , et le cito y en G ra n et a v o it fait assigner ce d ern ier en. d ésistem en t, ’
le 14 juin 1766*
•
.
Sans doute , il éto it n atu rel de faire effectuer ce désistem ent , en m êm e
tem s que celu i du sieu r de C u r to n , ;le succès en auroit été encore plus*
sûr. M a is les cio yen s G ra n et pen sant que leu rs cohéritiers p erd raien t la
trace de cet. o b je t , a vo ien t traité pour leu r com pte avec L a s sa la s, le
ju in 17 7 8 ,
et lu i a vo ien t cédé leurs
droits sur le m ou lin et jardini
attenant. D e sorte què v o ilà un o b je t perdu peu t-être par la p rescrip
tio n et par le u r faute , avec les jouissances depuis. 17 2 7 jusqu ’à p résent. '
Te^le é t o it la
m anière d’adm inistrer, des citoyen s G r a n e t ,
/
o u b lia n t
�. . . .
toujours qu ’iU a v a ien t
Ils a vo ien t
des
( « )
c o h é r itie r s , et qu’ils é to ien t
leurs
comptables^
en co re en 1768 assigné un nom m é A n n e t G irau d , en dé
sistem ent d’une ch en ev ière , ap p elée c h a m p m ia le t, a v ec restitution de
jouissan ces. Ils traitèren t a v ec l u i , le m êm e jo u r 16 ju in 1 7 7 8 . R en tra n t
dans la c h e n e v iè r e , ils reçu ren t 18 liv . pour frais , mai® firent g râ ce de
toutes les jou issan ces , pour raisons à eux connues.
P en d an t ces diverses p ro c é d u re s, le cito y en G r a n e t , d even u capitaine
de g a b e ll e ,
éto it a llé a v e c sa fam ille dem eurer à E b re u il ,
m ais il j
iivo it em porté les m archandises , et sur-tout les papiers.
P ru gnard et sa fem m e se disposoient d’assigner les citoyen s G ra n e t en
p a rta ge , lorsque ceu x-ci im agin èren t de les p ré v e n ir , pou r se ren d re plu*
fa v o ra b le s: ils form èren t eux-m êm es la dem ande en partage con tre les P ru
gn ard , en 177 6 .
L a fem m e G ran et décéda e n 1780 , laissant une fille unique j al or«
G ra n et reprit la d em a n d e, com m e lé g itim e adm inistrateur , e n la sén é
ch a u ssée', où le procès fut appointé.
L e s P rugnard "dirent p o u r défenses , qüe b ien lo in de contester le p ar
tage ,
ils y co n clu o ien t eu x-m êm es ^ m ais que G r a n e t s'é ta n t femparé de
to u t, le u r d evo it le rapport du m o b ilie r , su iva n t l ’ in v e n ta ire , et les jou is
sance* , à dire d’expert* ; que , s ’il éto it de b o n n e foi , il n ’avoit q u ’à dé
cla rer ce qu’il avo it p r is , et qu’il n ’y aurait plus de procès : ils co n clu ren t
aussi à u n e p rovisio n .
'
G ra n et refusant toujours de s ’e x p liq u e r ,
fut si lon g-tem s à prod u ire ,
qu ’ il laissa rendre par fo r c lu s io n , le 2 ju ille t 178 8 , la sen ten ce dont est
a p p e l, qui ordonne le partage des successions ,
de L e g e r G e n d ra u d , M a -
g d ela in é M e rc ie r et L au ren t Gertdraud , auquel G ra n et rapportera le m o
b ilie r et jouissances , y fera procéder dans le m o is ; s in o n , et en cas d ’ap
p e l , il est fait p rovisio n aux P ru gn ard de 2oo liv .
L e cito yen G ra n et in terjetta appel au P arlem ent. Dan$ ses g riefe du
l 3 d écem bre 17^ 4
1
se defendoit de d evo ir n i m o b ilie r , n i jo u issan ces t
en disant que sa b e lle-m ere s’éto it em parée de tout ; et à l ’égard de la
créan ce M e rc ie r ,
i l re c o n n o is s o it, q u ’ayant a gi pour la » u ccessio n , il
fera it le rapport des bien s adjugés en 1730 ; et il offrait ce r a p p o r t , à
la charge d ’être indem nisé, de ses frais et faux-frais.
Il répétoit cette offre dans une requête d u 2o d écem bre , et c o n c l u o i t
lu i-m êm e au partage de ces im m eu bles adjugés.
�( 7 )
D 'ap rè» c t la , si les choses eussen t restées en c e t é t a t , i l n ’y auroit
plus de d ifficu lté en tre les parties sur cet objet m ajeur dans la cause. M a is
u n e m ain infidèle et am ie des p ro c è s, a bâton né , tant dans les griefs que
dans la requête ,. tout ce qui a vo it rapport à cette offre de partage , p o u r y
substituer celle en rapport de i,2 o o l i v . , p rix de l ’adju dication .
Il est aisé de v o ir que les co rrectio n s fu ren t faites , p arce que G ra n et
ch a n g ea n t d ’a vo cat en 178 5 , fut in d u it à croire qu ’il p o u vo it refuser ce
partage. O n n ’osa d ’abord in terca ler dans la co p ie prise en com m u n ica
tio n , q u e l ’offre du partage
du
P R IX des b ien s , p ou r n e rie n effacer ;
et on fu t o b lig é , par u n e requête
du 18 juin 178 5 ,. de rectifier ces p ré
tendues c o n c lu s io n s , e n offrant la totalité de la créan ce M e rc ie r , au
lie u de
i , 2 oo l i v .
'
G ra n et produisit p a r cette m êm e requête u ne
tra n sa ctio n , du 9 ju in
178 2 , de laq u elle il résu ltait que les F o u r n ie r , co h éritiers de P ru g n a rd
a vo ien t traités
avec
lu i pour
la
quitte de leu r portion po u r 600 liv . ;
le s dires
pas
créan ce
M e rc ie r ,
l ’a vo ien t
ten u
et lu i avo ien t laissé in sérer dans
de l ’acte tou t ce q u ’il lu i a v o it p lu ,
pou r p rou ver qu’il n ’é to it
débiteur. IL e n in d u iso it que le s P ru gn ard
d evo ien t
adopter
cette
tran sactio n .
L es P ru gn ard rép o n d iren t p ar une é c r itu r e , du 7 septem bre 178 5 , q u e
cette transaction leu r étoit étran gère ; et n e co n n oissan t dans la créan ce
M e r c ie r , que ce qu ’ils en a vo ie n t lu dans l'é c ritu re de G r a n e t , ils so u tin
re n t qu’ayant poursuivi une créan ce com m une ,
il d evo it le rapport e n
nature des biens qu’il avo it retirés.
L e procès s’est co n tin u é au P arlem en t jusqu’en 1 7 8 8 , «ans beaucoup plu*
¿ ’e x p li c a t i o n
sur le m ode du p artage. E n l ’a n
2,
G ra n et a vendu les
deux pré* provenans du placard au cito y e n A u d ig ie r , m o yen n a n t 1,70 0 l i v . ,
a v ec ch arg e de payer aux P rugnard le u r p o rtio n de la créan ce M e rc ie r ;
« Et
attendu ,
a -t-il dit , qu ’il y a co ntestation
pou r raison
de cettft'
» créa n ce et autres prétentions ; l e d i t G ra n et su bro ge A u d i g i e r , tant à
» l ’effet du procès., qu’à tous les droits en rcsultans pour lu i j A u d ig ie r est
» chargé d ’en reprendre le s poursuites, et de faire p r o n o n c e r sur le tou t» ..
P ru gn ard qui ig n o ro it cette cession litig ie u se a repris le procès en ce'
t r ib u n a l, le 10 flo réal an 9 *, co n tre le cito yen G ra n et ,■com m e usufrui
tie r seu lem en t * attendu, le décès de *a fiUer
�...
, ..
..
A u d ig ie r est in te rv e n u le
( « )
................................................
23 plu viôse an u , et fidèle au p lan
ûq
v a cilla tio n qu’ il a trouvé dans la procédure de P a r ia , il a com m encé p a ï
dire q u ’il d evoit le tiers de la créance M e rc ie r , m ontant à
l3
sous , sur quoi il a vo it à se reten ir ;
i.°
1,4 6 6 liv ,
pour frais et faux-iraU
Soo liv . ; 2 .° pour une créance payée à u n nom m é E p in erd 240 livre# }
3 .° pour réparation 1 1 6 liv . ; 4 .0 pour la provision 2oo l i v . ; total des
retenu es 1 ,1 5 6 liv . ; de sorte q u ’il con sen toit de p ayer le
tiers du sur
p lu s , a vec les intérêts.
et par une requête , du 5
M a is bientôt il a trouvé qu’il o ffroit trop ;
g erm in a l an 11 ,
il a dit qu’au lie u de 1,4 5 6 liv . , il n e d evoit que le*
408 l i v . , portées par laliq u id a tio n de 17 8 0 , a vec les intérêts depuis 17805
su bsidiairem ent en suite
i l a offert 1,200 liv . ; enfin il a dit que si cette
dim inution étoit ad o p tée, i l consentoit de ne déduire que 2 oo liv . au lie u
de 5 oo liv . sur les fau x-frais.
'
D ès qu’A u d ig iè r paroissoit se m êler de tout , il n e sem bloit pas que le
cito y en G ran et eût à s’ingérer davantage dans ce débat ; cependant il e3t
ve n u a son tour , dans une écriture , du 4 fr u c tid o r , faire de n o u veau x
calcu ls , qu’on n e répétera p a s , de peur d ’a ch ever de rendre cette partie
de la cause com pliquée e t obsçure 3 car il dim inue en core sur A u d ig ie r ,
a v e c leq u el il collude.
Il étab lit un systèm e n o u veau pou r lui-m êm e. Q uan t
au com pte des
jouissances , il dit , pour la prem ière f o i s , après .28 ans de p r o c è s , que
c ’est A n to in e D em u rat qui a tout géré dans la m aison G endraud. Il ex
p liq u e divers prélèvem en s à faire de sa part. T e l est le dernier état de la
procédure.
t
M
O
Y
E
N
S
.
Il n ’y a pas de difficulté sur le partage en lui-m êm e ; il n ’y en a que
sur les raports a faire , et peu im porte q u ’ils soien t faits par le citoyen
G r a n e t , ou par le cito y e n A u d ig ie r , qui n ’avo it que faire de ve n ir se
m êler dans une caus# déjà assez em barrassée, pour qu’il n e fût pas besoin
d’y m u ltip lier les procédures. Q u o iqu ’il en soit , les intim és s’occu peron t
de fixer les rapports qui d oiven t être faits au partage , et après c ela ,
d ’en d éterm iner la form e. A i n s i , la discussion se réduit aux
question*
suivantes. i.° Le» citoyen s G ran et 'et A u d ig ier d oiven t-ils le rapp ort de*
biens
�bien s p r e v e n a tii
des
m
_
M o reier ? a .q S u b s id îa ire m e n t, q u el rapp ort d a -
v ro ien M la / relativem en t à cette créa n ce ? 3 .° G ra n e t d o it-il le rapport
du m o b ilie r et dea jouissances f 4 -° Q uels p rélèvem en s gont dus à G ra n e t
et A u d ig iç r ? 5 .Q Q u elle doit ê t r e , d’après le s ex p licatio n s ci-dessus , la
form e du partage ?
6°. Q u i doit les dépens ?
I.°
Granet et A u d ig ier, doivent-ils le rapport des biens venus des M ercier .*
C ette question dépend m oins du d roit rig o u reu x , que du fait et de»
circon stan ces.
L a dem ande en partage éto it pendante depuis 4 a n s , lorsq ue les citoyen s
G r a n e t firen t saisir les biens sur le curateur.
1
A lo r s l ’effet de la sen ten ce de 1 7 6 y , qui o rd o n n o itle partage du m o u lin
B o tte , et perm ettoit de se m ettre en possession des bien s M e r c ie r , éto it
un accessoire in séparable de la dem ande en p a rta g e . L e s condam nations
obtenu es , éto ien t tout à la fois u ne ch ose h éréd itaire ,
de la ju stice.
et sous la m ain
•
•
A in s i , de m êm e que le co h éritier 11e peu t ven d re u ne p o rtio n de la
su ccession in d ivise , si ce
pendente , pars rei communis ,
aussi ,
et
p a r parité
n ’est antè intentatum ju d iciu m ;
cceteris invilis ,
alienari
eo enim
nequit. D e m êm e *-2 .e t3 .C 0 r .
de droit , un co h éritier ne p eu t faire sa co n d i
tio n m eilleu re aux dépens de la ch ose com m une ,
profit seul , l ’effet d’une
en détournant
sen ten ce lu cra tiv e pour la succession .
Com. d iv id ,
à son
'
O n n e peut pas o b jecter que les biens M e r c ie r , autres que le m o u lin ,
n ’éto ien t q u ’ une sim p le hypothèque dans la su ccession G endraud ; quand
ce la s e r o i t , l ’hypothèque n ’en tom boit pas m oins dans la m asse com m une
et d iv isib le , su ivan t le texte de la lo i : Pignori res data in fam ilial erctscundce ju d iciu m venit. E n g én éra l , tout ce qui a pour o rig in e la succès- ^
sion ,
en tre dans le partage. Res haredïlariœ omnes ; sivè in ipsâ hære-
ditate inventer sint ; s i r k
M a is
e jv s
occasion e
a c
QUISITÆ.
que répondra le cito y e n G ra n et à la circon stan ce im portan te ;
que par la répudiation de» enfans d ’A n to in e M e r c ie r , et par la d éfaillan ce
de toute la lig n e de M ic h e l M e r c ie r , je u n e , les seuls h éritiers du san g
éto ie n t
le# G e n d r a u d ,
déscendan*
de M iç h e l
M e rc ie r / a î n é ,
B
in-
• 1 9 * f£ fara.
crise.
�.
.
( 10 )
>diqués par la lo i , com m e su ccessibles par la rè g le de la représen tation .
C o m m en t donc adopter qu’un protuteur ait abusé
de la m ain - m ise
gén érale qu ’il a v o it faite sur la su ccession com m une , au po in t de faire
m ettre en ven te jud iciaire , sans nécessité , des h éritages advenus à cette
su ccession , pour les acquérir lu i-m ém e à v il prix ?
L a justice m ain tien d ra-t-elle cette opération frauduleuse , d ’un hom m e
qui d evo it g ére r de bonne fo i,p o u r t o u s , et qui n e p o u vo it rie n dénaturer ?
L e cito yen A u d ig ie r , se p révau t d ’ une co n su ltatio n de jurisconsulte*
estim és , auxquels il n ’a
m ais
eu garde de soum ettre les pièces du procès ,
seulem en t un m ém oire à co n su lter , où il a posé la question lu i-
m êm e : C ’étoit de savoir , si en g én éra l le m ari qui a ch è te .a v e c les de
niers de sa fem m e
a ach eté uxoris nomine', ou-pour lu i-m ê m t. M a is rce
n ’estpas-là la difficulté , et J.e cito y en A u d ig ie r n ’a pas obtenu u ne solu
tio n pour la cause.
.
•
'
Il seroit peu t-être difficile de fo rcer le cito y en G rà n e t à don ner com
m u n ication
d ’une acquisition qu’il auroit faite , m êm e avec les deniers
co m m u n s,
si . cette acqu isition avo it été faite expressém ent pour
son
com pte particu lier , et d ’un objet tout-à-fait étran ger , et indépendant de
la succession com m une.
.>
‘ '
M a is , c ’est au nom de la su ccession ,
qu’ il pou rsuivoit la
"
'
.
r
et pour une dette com m une ,
v e n te jud iciaire ; c ’est com m e
protuteur ,
ou au
m o in s . negotiorum gestor , qu ’il a cond u it la! p rocédu re jusqu ’à exprop ria
tio n ; ¡et q u ’il a fait adju ger les im m eubles au p rocureu r des poursuivans ,
et par suite à lu i-m êm e j en cette qualité.
C e qu’il a- fait adjuger , éto ien t des im m eubles
de la su ccession G e n
d ra u d , pour laq u elle il auroit pu s’en m ettre en p o ssession , soit à titre
d ’h éritier , soit d’apres la sen ten ce de 1 7 6 7 .
Il
en
éto it réellem en t en
possession lu i- m ê m e , d ’après la sen ten ce du 10 d écem bre 177 8 ; e t la
su ccession
y auroit trouvé un g ag e suffisant , n o n seulem en t des a rré
rages du m ou lin , antérieurs à 1 7 2 7 , auxquels il lu i a p lu de s ’en t e a i r ,
m ais en co re des arrérages échus , depuis 17 2 7 , jusqu’en 1780 , qu’il a
m ieu x aim é p aroître abandonner po u r son avantage p articu lier.
Cent. 3 : cii.jt.
C e p e n d a n t,
com m e dit L ep rêtre , l ’on tie n t pour m axim e au palais ,
que ce que l ’un des c o h é ritie rs, retire ou achète , qui a été dépendant de 1*
succession c o m m u n e ,
/
b ie n que ce soit en son n o m p a r tic u lte r , peu t être
�. .
( ” .)
néunmoins réclamé p w tous les autres cohéritier
commun, en le remboursant. r
*, pour être partagé
.
en
'
.
T e l est aussi le vceu de la lo i, Coheredes debent inter se communicare l . rg.fjf.familcommoda et
incommoda. E t c ’est le devoir du ju ge ,
d it-e lle ailleu rs , de
W1C*
v e ille r à ce qu’un co h éritier ne fasse pas seul ça co n d itio n m eilleu re a vec
le s
deniers co irm u n s : Prospiceredcbet ju d e x ut quod unus exhœredibus ex re -
hœreditariâ p ercep it, stipulatusye est , ncn ad ejus solius lucrum pertineat.
Ces p rin cip es n e son t n u llem en t in com p atibles avec ceu x rapp elés dans
la consu ltation du cito yen A u d ig ier. L e tuteur peut ach e te r en justice le s
biens du pu pile , o u i , c e la est quelquefois v ra i ; m ais il n ’a pas poursuivi la
v e n te po u r ach eter ; e lle a été au con traire p o u rsuivie contre lu i ; m a is
il
a fa llu , avan t d ’exprop rier , que la nécessité de vendre fût c o n s ta té e ,
et qu’il n ’y eût pas d ’autre vo ie de lib éra tio n . Ici ,
G ra n e t p o u vo it se
m ettre en p o sse ssio n , il auroit co n servé un g a g e suffisant pour répondre
d ’une créance qui n ’est co u verte q u ’en u ne fo ib le partie.
L e m ari , peut ach eter pou r lu i-m êm e a vec les deniers d o ta u x , sans que
la ven te soit pou r sa fem m e , cela est vrai en core en g én éra l ; m a is, c ’est
q u ’il est le seul m aître de la d o t ,
a v e c laq u elle il a fait l ’a cq u isitio n , et
le citoyen G ra n et n ’étoit pas le seul m aître de la créance M e r c ie r , dont
il a pris prétexte pour se faire adjuger.
Il seroit d ifficile , après a vo ir lu la procédure , de p la cer G ra n e t dans
la classe d’un m ari qui achète a vec les deniers dotaux. D ’a b o rd , la dot de
«a fem m e con sistait dans ses droits successifs u n iversels , a vec pou vo ir de
le s rech erch er. E n secon d l i e u , le C ito y en G ra n et a ex écu té ce m a n d a t,
e n faisant les poursuites , co n cu rrem m en t a vec sa fem m e ; ce qui prouve
q u ’il ne consideroit
pas la créan ce M e rc ie r
com m e uniqu em ent m o b i-
lia ire. 11 a. fait faire la saisie aux m em es nom s. Il a eu so in de faire insérer
que l ’adjudicataire retien d ro it le p rix , à com pte de ses créances. E n fin ,
après la ven te , au m om ent de p arler en son nom s e u l , s ’il vou loit que
les
poursuivans et l ’adjudicataire n e fussent pas la m êm e chose ,
p ris possession des biens , tant en son nom ,
fem m e n ’étoit donc pas étran gère à
la ven te ,
il a
qu’en guatite de mari. Sa
puisqu’il l ’a cru e partie
nécessaire à la tradition.
O n pou rroit donc dire avec fondem ent que le cito y e n G ra n et a vou lu
ach eter pour la succession , ou dum oins uxoris nomine. Car dans le ca3
xnûme où la lo i dit en g én éra l que le m ari n ’acquiert pas pour U fem m e ,
ifcid.
'
�( 12 )
t . Penult. G . * 116 dit 3U3si qu,il
■
^u e ,la
Cotn. utr, jud, tra& ta fu erit possession
C ’est en sem b lable espèce ,
>
trad it’l o n ait été faite à lu i-m êm e . S i ei
que C o ch in argum ente de la qualité prise
n.pla^d. pa r l e m a r i J ans ie3 poursuites , à la vérité d ’une licita tio n . M ais ce qu’il
•
dit es; trop rela tif a la cause , pour l ’om ettre. « S i le m ari se rend adjudi—
y cata,ire, on ne peu t pas dire que ce soit à lui p erso n n elle m en t que l ’adjudi'
» cation est faite ; il ne ch inât pas de qualité au moment de l ’adjudication, ;
» et com m e jusqu es-lk il n ’a procédé q u ’en qualité de m a r i , ot pour fa ire
» valoir les droits de sa fem m e ; de m êm e ,
dans l ’adjudication , ce n ’est
» que pour elle q u ’il se rend adjudicataire ».
A u reste , le cito yen G ra n e t, après avo ir si b ien exp liqué en q u elle qua
lité il s ’é to it rendu adjudicataire , a vo it d on n é une exp licatio n p lu s p o sitive
e n co re dans ses g r ie fs , et sa requête , des 18 et 2e> décem bre 1784. Il se
ren d o it justice ,
en
offrant le
partage ,
il y co n clu o it lui-m êm e. F a u -
d ro it-il donc que des coh éritiers , qui o n t eu un protuteur dans sa per
son n e , et qui n ’ont jam ais eu ni pu avo ir un seul p ap ier de la su cces
sio n , fussent victim es
d’une infidélité , qui
a em pêché les parties de
s ’accorder sur le point p rin cip a l. L es in terlig n es ajoutées n e sont pas de
la m êm e plum e. O n lit e n co re dans
cito y en G r a n e t ,
ce
qui a été bâton né ,
l ’aveu du
qu ’ il a acquis pour sa fem m e e t ses coh éritiers un b ien
de leu r fam ille , et qu’il
en
doit la com m u n ication , m oyen n an t ses
reprises. E n fin , si G ra n e t n ’avoit pas acquis pour ses co h éritiers , il au ro it au m oins, d ’après sa prise de p o ssessio n , acquis pour sa fem m e. A lo r s
le pis a lle r pour les intim és sero it d’attendre son d é c è s, puisqu’il est usu
fruitier. M ais il est cla ir que le
cito y en G ra n e t ,
doit la com m un ication
de ce qu ’il a a cq u is, parce que les lois n e v e u le n t pas q u ’il se soit en rich i
aux dépens de ses cohéritiers , avec une créan ce com m une , dont il s ’éto it
em paré seul ; il la d o it , parce que c ’est à tort qu’il a regardé la succession
c o m m e
vacante ; lu i qui étant de la fa m ille, ne peu t s ’autoriser du p rétexte
de sa bonn e f o i , com m e un étran ger ;
il la d o i t , parce qu’il n ’a
m êm e entendu acheter en son nom seu l j
pas
il la doit enfin , parce qu ’il
l ’avoit offerte lu i-m êm e.
I I.°
Quels rapports devroit le citoyen G ra n et, hors les biens-fonds des M ercier ,
'
S’il
et pour en tenir lieu.
fa llo it décider cette
question subsidiaire > p ar les proposition»
�( 18 )
qu ’ont faites les adversaires , il n ’y auroit certain em en t
rien de
p lus
difficile , car ils n e son t pas d’accord en tr’ eux à ce t égard ; b ien plus , ils
n e le sont pas , chacun a vec lui-m êm e.
G ra n et offroit le prix de l ’adjudication en 17 8 4 ; puis la cré a n ce M e r
cie r en 178 5. Il a revu et corrigé tout cela en l ’an 1 1 .
A u d ig ie r o ffroit d ’abord un tiers de 1 , 4 5 6 liv . ,
a vec l ’in térêt d epuis
1 7 2 7 . Ensuite il offre le tiers de 408 liv . , a vec l ’in térêt depuis 178 0 . E t
le
cito y en G ra n et , charm é de cette d im in u tion est ve n u par delà e x p li
qu er qu’il ne fa llo it paver que deux neuvièm es au lie u d ’un tiers.
A quoi donc s’en ten ir dans cet em barras ? à rien de ce qui est p rop osé.
Q u ’éto it G ra n et dans la fam ille G en draud , un p r o tu te u r , s>ans doute»
il éto it m ajeur au
décès du père de la fem m e P ru gn ard , c e lle ci étoit
a lo rs au berceau ; G ra n et s ’e3t em paré des bien s P ru gnard et D em u rat ;
•1
,
.
„
,
. L. 1 j C. </e to
11 n a donc pu jouir que com m e protuteur. C a r , pro tutore gerit qui qui p [utt
r0
munere tutoris fu n gitur in re impuberis , siv'e se putet tutorem , sivè non esse i
Jîngit tamen esse.
M a is si G ra n et n ’éto it pas p r o tu te u r , il n e contestera pas au m oins
q u ’il ne fût v is-à -vis de la fem m e P ru gnard , negotiorum gestor.
L .y . de negot.
L es procès M e rc ie r , de C u rton et autres ; les traités d e 1 7 7 8 , n e p e r-
Vc,t‘
m etten t pas d’en douter. A in s i abrégeon s la discussion à cet égard.
O r , le negotiorum gestor est com ptable de la faute lé g è re e t d’une ex a c
titude scrupuleuse. Spondet solertiam et exactissimam diligenliam.
V oyons
s ’il a tenu cet en gagem en t.
cont. natc.
L e cito yen G ra n et s ’étant em paré des poursuites de 17 2 7 , a fait rendre
en
17 6 7 une sen ten ce
qui ord o n n o it un p a r ta g e , et condam n oit à des
arrérages de ferm e , antérieurs à
17 2 7 .
M a is pourquoi n e co n clu o it-il pas
aux arrérages échus jusqu’à 176 7 ?
Pourquoi en 1 7 8 0 , en reprenant ses poursuites , n e co n clu o it-il pas aux
arrérages postérieurs ; il n e d evoit pas crain dre la prescription , il l ’a vo it
r e le v é e en 1 7 6 7 .
A in s i , il a fait tort à la su ccession com m une de ces arrérages.
D iro it-il que c ’éto it la mCme ch o se de faire ordonner le p artage du
m ou lin ; m ais ici plus grande n é g lig e n c e , et m êm e in fid élité. C a r au lie u
d ’y faire procéder depuis 1 7 6 7 , il a vendu ses droits p erso n n els ,
et a
laissé prescrire la portion de ses coh éritiers 5 dem eurant n éan m o in s n an ti
de tous le s titres et diligence».
�C 14')
t
,
après a vo ir dem andé un désistem en t au sieur da
P ourquoi en core ,
C u rto n , a -t-il ch a n g é ses co n clu sio n s pour se born er t\ un partage ? II
co n sen to it de lu i laisser la p o rtio n acquise de L o u is M e rc ie r j
m ais c ’é -
to it-là culpa lata. C a r l ’hypothèque des G en d rau d éto it assise sur les b ien 9
de l ’a ïe u l et du père de L o u is M e r c ie r , depuis
A in si , lou is M e r
c ie r n ’avo it pas pu ven d re sa portion h éréd itaire franch e d ’h ypoth èqu e j
pas plu s que
de C u rto n ,
le surplus des b ie n s , dont cep end an t o n é v in ç o it le sieur
à cause de la m êm e hypothèque.
C ette dem ande en partage , n ’é to it-e lle pas elle -m ê m e un e x e rc ic e de 9
d roits successifs des M e rc ie r , à cause des répudiations. Q u o iq u ’il en s o i t ,
par l ’effet du partage demandé par G r a n e t , il a perdu deux septérées et de
m ie de
terre , plue les jouissances
en core u ne
depuis
176 9 jusqu’à p résent. V o ilà
d édu ction co n sid érable dans le g a g e d ’une créan ce , que le*
adversaires cependan t disputent
à qui m ieux m ie u x ,
s ’ils
d oiven t la
réduire au tiers , ou aux deux neuvièm es de 408 liv . en p r in c ip a l,
saujf
en core des dim inutions exagérées et rid icu les.
Sans d o u te , le cito y en G ra n et n e préténd pas , de b o n n e fo i, avo ir traité
de tous ce3 droits ou créances à sa guise et à sa plus gran d e u tilité , et
cependan t
d ’en être quitte aujaurd’h ui pour d ir e , v o ilà les titres ; vous
adopterez ce que j ’ai fait pour v o u s , e t je garderai ce que j ’ai fa it p o u r
m oi ;
cette p réten tion n e sero it pas so u ten able.
11 est juste que ce lu i qui a été Hanti pendant 40 ans de tous le s titre»
d’une
fam ille ,
qui a retardé pendant 27 ans un partage
dem andé lu i- m ê m e ,
qu ’il
avo it
qui s ’est établi au m oins le negoliorum gestor de la
fa m ille , rende en tières les actions héréditaires dont il s’est e m p a ré , jus
tifie au m oins qu’elles
p lo y é
exactissimam
son t dim inuées sans sa faute ,
diligentiam. S in o n ,
de vo u lo ir reten ir pour lui-m êm e
fa m ille P rugnard ,
ou qui
il
seroit
et qu’il y
des b ien s devenus héréditaires
éto ien t au
m oins
le
a em
absurde de sa part
gage
à
la
d ’une créan ce
considérable.
E n fin , pour resum er ce subsidiaire , le cito y e n G ran et doit rapporter au
partage , s ’il retien t les bien s à lu i adjugés ; i . ° les 1,200 l i v . , p rix de
»on adju dicatio n , qu ’il doit aux créanciers , a vec l ’in térêt depui» la ven te*
2 .° la som m e q u ’il a tou chée du sieur de C u r to n ,
le paiem ent.
a v ec l ’intérôt depui*
�C 15 )
V o ilà
d ’abord ce qu’il doit , sans difficulté , p arce qu ’il n e retien t cela
q u e pour le com pte de ses cohéritiers.
E n second lieu , il doit le rapport fictif de3 deux cinquièm es du m o u lin ,
et des jouissances depuis 17 2 7 ; faute p ar lu i d ’a vo ir p o u rsu iv i la sen ten ce
de 17 6 7 . (E t c e la , il le doit dans tous les c a s, outre les bien s saisis en 178 0 ).
L a lo i y est expresse. Debet rationem. reddere de eo quod gessit et de eo quoi
rion g e ssit, aut ut non oporluit.
..
I MP VNÉ negotium periturum deserit.
P ar cette sen ten ce , les M e rc ie r éto ien t condam nés au rapport des jou is
san ces depuis 172 7 . A in s i , leurs biens possédés par G ran et d evo ien t ré
p o n d re de cette condam nation.
A lo r s , si le cito yen G ran et n ’é to it pas tenu de ces jou issan ces e lle sm êm es , il
acquis ,
saces ,
C u rton ,
doit représen ter leu r g a g e ,
pour
c ’est-à-d ire , les b ien s par lu i
être hypothéqués à ces condam nations ,
a v ec les jouis-
â com pter de 177 8 ; et en outre , la terre laissée au sieu r de
par le partage fait a v e c lu i en 1 7 7 8 , a v ec les jouissances de
puis 1 7 5 9 , faute d ’avo ir aussi exercé les droits de la succession sur cette
terre , parce qu’e lle étoit hypothéquée aux m êm es créances.
L e cito yen G ra n et doit rapporter aussi les dépens faits en T727 ,
a du faire com prendre dans son exécu toire
Sur ces dem an les
qu’il
du i . er m ai 1760.
en rapp ort , il faut p réve n ir deux objections , que
fera peut-être le cito y en G ra n e t.
i ° . D ir a - t-il , j ’ai obtenu des lettres de ratification sur l ’adjudication
du 3 o août 1780 , donc j ’ài purgé v o tre hypothèque. J e n e dois , d’après
l ’é d it de 1 7 7 1 , que le rapport du p rix de l ’adjudication.
L e s lettres de ratification , il est vra i , p u rgen t les hypothèques à l ’é
g ard de toutes les créances des vendeurs. I c i , le ve n d eu r et
l ’acq u éreu r
son t la m ôm e personne. I c i , celu i qui dem ande l ’extin ction de l ’hypothè
que éto it dépositaire des titres constitutifs de cette m êm e hypothèque. N e
sero it-il donc pas m onstrueux de prétendre qu’il a pu l ’éteindre à son profit.
L e dépôt com m e le g a g e o b lig e celu i qui s ’en ch arge , de le rem ettre
e n nature et sans altération , au m oins de
son fait ; sub îege ejusdem in
Specic restiluenioe. Com m ent donc co n ce v o ir que le cito y e n G ra n et ,
qui
éto it n a n ti en 17 6 7 et 1780 , de tous les titres constitutifs d ’une créan ce»
d evan t prod u ire ce
'L
^
. Qui tamen negotium aliquod suscepit non ntg. gej’t.
qui est dit ci-dessu s', ait le droit d ’étein d re p artie de
cette c r é a n c e , e t néanm oins de reten ir les im m eu bles qui p o u vo ie n t en
�.
(
1 6
,
)
.
re fo n d re , C ’est com m e ei le porteur d ’uno procu ratio n gén érale 80 fa u o ij
u ne o b lig atio n à lu i-m ê m e ,
,
L e cito y en G r a n e t , dépositaire des titres d ’une créan ce de 363 c o h é r i
t i e r s , n ’a pu v a la b lem en t pren d re pen dant son nan tissem ent des lettre»
de ratification ;
e lle s
son t n u lles et de n u l effet à leu r égard ; i l n ’a pu
l ie n in n o v er à leu r é g a rd , en co re m oin s lo cu p k ta r i, eorum dctrimento, II*
d oiven t retro u ver le u r créan ce et l ’hypothèque de cette cré a n ce , au m êm e
état qu’avant, le nan tissem ent du citoyen G ra n et.
,
E n fin , les bien s M e r c ie r é to ien t deven us partie de la su ccession P ru g n a rd ; or le s lettres de ratification n e p u rgeo ien t pas la prop riété.
2 .° Il o b jectera que L assalas est détem pteur du m o u lin B o tte ,
le
et que
p artage n e peut en être ordonné qu ’avec lu i.
M a is le m o u lin est hors la fam ille M e rc ie r depuis 17 6 9 . L a se n ten c e
qui o rd onnoit le partage
est b ie n de 17 6 7 ; m ais e lle n ’est pas rendue
a v ec L assalas , n i le sieur de C u rton. A in s i , L assalas pou rroit opposer la
.prescription . L e cito y en G ra n et savoit b ie n cette o ccu p atio n de Lassalas ,
p u isq u ’il l ’a vo it assigné en 17 6 6 ,
et q u ’il a traité a v ec lu i en 177 8 . Il
é t o it , lors de ce t r a it é , com m e à p ré se n t, n a n ti de la sen ten ce de 1 7 6 7 ; i l
a don c laissé p érir par sa fa u te un effet de la su ccession ; il en est com pta
b le ; d on c il
en
doit le rapport com m e s ’ il e x is to it, sauf à le faire
éch eo ir à son lo t. S’il prétend qu’il n e l ’a pas laissé prescrire , c ’est à
lu i à en p ou rsuivre le reco u v re m e n t 3 et le s in tim és
lu i o ffren t tou te
su b ro gatio n de le u r part.
I I I.°
Qui doit le rapport du mobilier et des Jouissances !
» S i on s ’en rapportoit aussi à ce qu ’a écrit le cito yen G r a n e t, et à un
dossier qu’il a in titu lé « preu ve de l ’in d igen ce d’A n to in ette M a lle t » , il
n e doit rien.
Sa fem m e et sa b e lle-m ère o n t déclaré par plusieurs a c te s, cop iés l ’un
«ur l ’a u tr e , avan t son m a r ia g e , que toute la succession consistoit en u n e
m aison délabrée ; et le citoyen G ra n et rapporte dans le m ê m e dossier u ne
espèce d’enquête à fu tu r, du 3
ju ille t 1 7 8 7 ,
où des tém oins par lu i
m e n d ié s, ae disoient cependan t ferm iers de quelques parcelles d ’héritages.
Il y avo it donc quelque chose. Q uant au m o b ilie r , on y fait dire que les
créancier*
�-
(
l7
)
créan ciers l ’avo len t fait vendve \ m ais pou r év ite r de p lu$ lo n g s débats , le»
in tim és offrent de p rou ver qu’il y avoit notam m ent u n e ju m en t p o il B a y ,
que le cito y en
G ran et a vendue i 5 o francs 3 treize ou quatorze b reb is ,
u n e petite boutique de m ercerie , en v a le u r à peu près de 800 fra n cs, que
le s citoyen s G ran et ont em porté en a llan t dem eu rera E b r e u il; enfin qu’a
près son départ de R o c h e fo r t, le citoyen G ran et y reven an t de tems à
a u tr e , a vendu du m o b ilie r , et notam m ent une arm oire de frên e à deux
battans , au nom m é Joseph H ugon , cordonn ier.
E n v o ilà a sse z, sans doute > pour d ém entir le cito y en G r a n e t; a lo r s ,
com m e un m enteu r ne doit jam ais être c r u , c e la suffira pour faire ordon
n e r la preu ve de la consistance du m ob ilier par com m une renom m ée.
Il en est de m êm e des jouissances. L es intim és offrent aussi de prou ver
que G ra n et se m it en p o ssessio n , aussitôt après son m a r ia g e , de la m aison
de R o ch e fo rt, du jard in en d é p e n d a n t, du banc de la h a lle et de deux ter
res , sises au lie u de Chedias. Il a jou i du to u t, 9oit par lu i-m êm e à R o
c h e fo r t, soit p ar des colon s quand il a été à E b reu il.
L e traité de 1 7 7 8 , fait a vec G ir a u d , p rou ve l ’existen ce d ’une autre t e r r e ,
e t que le cito yen G r a n e t , pendant son séjour à E b r e u il, con tin u oit de
rech erch er et jo u ir ce qu ’il savoit apparten ir à la succession de son b eau père. A cet égard il doit le rapport des jou issan ces, m êm e antérieures à
1 7 7 8 , puisqu’il en a fait rem isé de son a u to rité , et pour raisons à lui
connues.
D e sa p a rt, P rugnard rapportera les jouissan ces depuis l ’an 7 , de deux
t e r r e s , dont il a évin cé la com m une de R o ch efort qui s ’en éto it em parée ;
plus les jouissances de la m aison depuis qu ’il l ’a v e n d u e , car auparavant
il ne s ’en est jam ais m is en possession.
A u reste, si G ran et persiste à n ier ce qui est de son fa it, une preu ve
su ppléera aux raisonnem ens qui p o u rraien t co n v ain cre le t r ib u n a l, qu’un
gen d re n ’éto it pas a llé s’établir à R o c h e fo r t, pour laisser tout entre les
m ains d’une belle-m ère de 6 1 a n $ , r e m a r ié e , et p o u r ne se m ê ler lu i.
m êm e de rien.
.
L e cito yen G ran et a prétendu pour la prem ière fois en l ’an 1 1 , qu ’A n toin e D em urat avoit été l ’adm inistrateur des biens jusqu’en 175^ ; m ais n ’y
a-t-il pas de l ’inconséqueuce à prétendre q u ’A n to in ette M a lle t éto it à la
tête de sa m a is o a , après 1768 , et cependan t qu e lle éto it en quelque sorte
«n tutele ; 5 ans auparavant.
C
�( 18 )
i v.°
Prélèvemens réclames par le citoyen Granet ou par Audigier.
i . ° Ils de.nandent 5 oo fr. pou r le3 fa u x -fra is em ployés dans les p our
suites des procès.
11 est assez bizarre que le cito y en G ra n e t prétende être payé pour des
affaires dont il ne veut pas com m un iquer le bénéfice. Ils offrent le tiers
ou les d eux-neuvièm es d j 408 fr. et ils osent dem ander 5 oo fr. de fauxfrais ; cela est ridicule. A la vé rité ils o n t eu honte eu x-m êm es de leu r
prop osition , et ont réduit hypoth étiquem ent les 5 oo fr. à 2oo fr. ; m ais
d an s'l’ un com m e dans l ’autre cas , et pour év iter les discussions inutiles ,
cet a rticle dépend du sort d ’un autre.
Ou Us seront condam nés à com m uniquer l ’adjudication , ou n on .
D a n s le prem ier c a s , ayant fait
les affaires com m unes , les intim és
o ffrent d ’a llo u er ce qui sera rég lé par le trib u n a l, s ’il y a lieu .
D aus le second c a s , G ran et n ’ayant pas l ’action mandati contraria, n e
peut répéter que ce qui est porté en ta x e ,
et il a eu soin de s ’en faire
payer.
.
L e procureur fondé a b ie n , quand il a agi de bonn e fo i, une action pour
I n s lit oblig,
quœ ex quasi
l ’indem nité de ses faux-frais 5 mais le negoliorum geslor n ’a actio n que pour
cvntracc nasc.
les frais utiles qu’il a faits. Repetit sumplus quos u t i l i t e r f e c i t
,
.
2f.° Ils dem andent 240 fr. pour une créance E pinard : elle n ’est pas éta
b lie ; quand e lle le s e ra , les intim és n e la con testeron t p a s , si e lle est
légitim e .
.
5 .° Ils dem andent 222 fr. p our réparations à la m a iso n ; m ais on ne
p arle que d’un devis estim a tif, et o'n ne rapporte aucune quittance qui éta
b lisse le paiem ent de la som m e ; e lle n ’est don c pas due.
4 .0 Ils dem andent le s 3 oo francs de p rovisio n s ; pas de difficulté.
6 .° G ra n et dem ande i2 o francs payés à Josep h G iro n : on p ou rrait le*
con tester 5 m ais les intim és s ’en rapp ortent a la prudence du tribunal.
6 .° Il parle d ’une dette payée à Battu , d ’après une sen ten ce co n su laire
de 1 7 6 6 , sans cepend an t y co n clu re. Il n ’est donc pas question de la dis
cu ter 5 d ’ailleu rs c ’est une créan ce p e rso n n elle à la fem m e G ra n et j il n e
peut en être question au partage.
/
�( *9 )
V °.
Quelle
*
doit être la forme du partage i
L e s rapports et prélèvem en s étant co n n u s, cette question n ’est plus que
le co rro laire des précédentes.
L a m asse doit être com posée de la m aison et jard in de R o c h e fo rt; 2 .°
des deux te rre s , sises au C liedial ; 3 .° de c e lle retirée de G irau d ; 4 .0 du
b a n c de la h alle ; 5 .° des deux jardins qui ont été retirés de la com m une
de R o c h e fo r t, par les P rugnard ; 6 .° des h érita ge s portés par la sen ten ce
d ’adjudication du 3 o août 1780 , et su bsidiairem en t des rapports à faire
par les citoyen s G ra n et et A u d ig ie r , d’après le §. 2 ci dessus; j . ° du m o b i
lie r de la su ccessio n ; 8.° des jouissances à rapporter par ch acu ne des par
ties , su ivan t qu’ il a été éxpliqué au §. 3 .
D a n s le cas où les deux derniers héritages ,
én on cés en la sen ten ce de
1 7 8 0 , ne feraien t pas double em p loi avec ceu x ci-d essu s, le cito y en G ran et
e n devra aussi le rapport à la m asse , a vec les jouissances 3 car il a déclaré
par un e x p lo it du 16 septem bre 17 8 0 , qu’ils éto ien t de la fa m ille G endraud
e t a vo ien t été com pris m al à propos au placard.
A p rès la m asse ainsi com posée, les adjudicataires p ré lèvero n t ce qui a
été dit au §. 4 , et les Prugnard p rélèvero n t leurs créances au procès con tre
la m u n icipalité de R och efort et autres , s ’il y a lieu .
L e surplus doit être partagé d ’abord en deux portions , dont l ’une de
m eu rera en usufruit a u 'cito y e n G r a n e t ,
son
pour être réunie à l ’a u tr e , après
décès 5 l ’autre form era le lo t de Jacq u elin e G e n d ra u d , et sera sou-
divisée en trois.
D e u x parts de cette so u s-d ivision seront allouées aux P rugnard , tant
pou r eux ,
que com m e représentans A n to in e D e m u ra t; la troisièm e sera
d éla issée, pour form er le lo t de la fem m e F o u r n ie r , sauf au citoyen G ran et
à s’arran ger a v ec e lle , p o u r ce qui co n cern e le résultat de sa transaction
de 1782.
V I.°
, Qui doit les dépens
L e cito y en G ra n et y a été condam né
par la sénéchaussée ; c ’étoit h
�t
2 0
juste titre, Il refusa constam m ent de s 'exp liq u er
n î communiîquer a u c u n e
p ièce , quoiqu’il fût nan ti de tout,
Il a interjetté ap p el ,
ç t n ’a cessé de v a rie r
dans sés m oyen s et se§
co n clu sio n s ; cette incertitude a o ccasio n n é le plus de frais , il doit les
supporter.
S ’il est ju g é qu ’il doive un rapport de m o b ilier et de jouissances , i l
d oit les depens par cela seul , car c ’éto it le m otif unique de son appel.
E n fin , il a jette dans le procès une tie rce partie , qui n ’a in térêt qu’à
p laid er et à contester sans m oyen term e ; car il lu i a v e n d u , et le droit
de p laid er , et ce qui éto it le g a g e de la paix. Ce n ou veau venu a rem p li
sa
tache
et certes , il sero it de la d ern ière in ju stice de reje te r sur la
m asse ce su rcroît de dépens in u tiles et
em barrassans pour la cause.
A u reste , le s dépens sont la p ein e la plus juste de ceu x qui soutien
n e n t de m auvaises contestation s ; et c ’est b ie n la m oindre qu’on puisse
in flig er à celu i qui résiste à un partage ,
depuis
dont la dem ande est form ée
2 7 ans.
C ertes ,
ce n ’est pas le cito y en G ra n et qui m érite de la Faveur dan»
cette cause , c ’est en core m oins le
cito y en A u d ig ie r : ca r c e lu i qui a
vo u lu acheter n o m in ativem en t un p r o c è s , celu i qui s ’est classé parm i ces
ergolabos , litium. redemplores , que la lo i rep rou ve et d écrie , n ’est d ig n e
d ’aucun succès dans ses prétention s , pour peu q u ’e lle s soien t douteuses j
e t sur-tout quand e lle s sont com battues par des considérations d’équité »
qui , de toutes m anières ,
m ériten t la p référen ce.
M A N D E T ,
D E L A P C H I E R ,
Rapporteur
H om m e
de lo i.
D E M A Y , A voué.
—
A
C h ez
M
a r t i n
R
1
O
D É G O U T T E ,
—
—
—
»
M ,
Im p rim eu r-L ibraire ,
la F on tain e des L ig n e s . ( 1804 ).
vis-à-vis
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Title
A name given to the resource
[Factum. Prugnard, Étienne. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mandet
Delapchier
Demay
Subject
The topic of the resource
successions
biens dotaux
immeubles
partage
moulins
Description
An account of the resource
Mémoire pour Étienne Prugnard et Marie Demurat, sa femme, Intimés. Contre Jean-Baptiste Granet, Appelant. Et contre Audigier, Notaire, Intervenant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1659-1804
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0239
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0238
BCU_Factums_M0731
BCU_Factums_G1405
BCU_Factums_G1406
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53738/BCU_Factums_M0239.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochefort-Montagne (63305)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
immeubles
moulins
partage
Successions
-
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abd7d20643b359877cf6ec4e81a233f6
PDF Text
Text
C O N S U L T A T IO N S .
�CONSULTATIONS.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris lecture
du m ém oire à consulter pour le citoyen Pierre Audigier ,
notaire p u b lic , habitant de la commune de R o ch e fo rt,
Contre Étienne Prugnard , et Marie D em u rat, sa
fe m m e ,
'
que le citoyen A u digier doit seulement res
tituer les deniers dont Granet est débiteur envers les héri
tiers de sa fem m e, conformément à son contrat de vente ;
et que la propriété des immeubles adjugés par sentence
du 31 août 1780, appartient incontestablement au citoyen
E stim e
Audigier , subrogé aux droits de Granet.
Quel seroit donc le prétexte d’Étienne Prugnard, et
de Marie Dem urat, sa fem m e, pour faire rapporter ces
héritages à la succession de Laurent Gendraud ? Seroit-ce
parce qu’ils voudroient prétendre que l'adjudication a été
A 2
�..
.
(4 )
.
.
faite avec les deniers dotaux de Marie Gendraud ? Mais
on sait que l’acquisition, faite par le mari avec les deniers
dotaux de la fem m e, n’est pas dotale à la fem m e, et
qu’elle ne peut réclamer que les deniers.
Seroit-ce parce que la créance qui a conduit à l’adju
dication étoit une créance commune aux héritiers de
Jean G endraud, père de Marie , femme Granet ? Mais
l’adjudication a été faite à Jean-Baptiste Granet, en son
nom et pour lui. L e mari n’achète uxorio nom ine , qu’au
tant qu’il acquiert une portion indivise dans les biens
de sa fem m e, ou par la voie de la licitation, ou à titre
de cession. I c i, il n’y a d’indivis que des deniers ; le m ari,
- qui a acheté avec ces deniers, ne doit autre chose que
la restitution des deniers. E n fin , le mari a vendu ces
„mêmes immeubles qui lui avoient été adjugés; et, quand
il auroit acquis uxorio nom ine , il auroit toujours eu la
faculté d’aliéner.
La prétention d’Etienne Prugnard
murat est donc une véritable chimère.
trer , en rappelant quelques principes
en analisant succinctement les faits qui
question.
et de Marie D eOn va le démon
de la matière, et
donnent lieu à la
Il paroît que Laurent Gendraud avoit trois filles: Marie
G en draud, mçiriee Jean-Baptiste Granet, représentée
aujourd’hui par le citoyen A u d ig ie rj Jacqueline Gen
draud , femme D e m u r a t, d’où est issue Marie D em urat,
épouse d’ Etienne Prugnard • et Catherine Gendraud, ma
riée à Michel Labonne.
La succession de Laurent Gendraud étoit créancière
d’Antoine Mercier. Ce dernier mourut sans avoir payé
�(
5 )
les sommes dont il étoit débiteur ; et sa succession fut
répudiée. Jcan-Baptiste Granet fit liquider et adjuger la
créance due à la succession de Laurent G en draud, contre
le curateur à la succession répudiée d’Antoine M ercier;
il en poursuivit le recouvrem ent, et fut obligé de passer
à la saisie et vente des biens de la succession débitrice.
L e 31 août 1780, sentence de la ci-devant sénéchaussée
d’A u v e r g n e , qui fait étrousse et adjudication des immeu
bles saisis, à M .A c h o u , procureur, pour lui ou son m ieux,
moyennant la somme de 1.200 francs. L e m ême jour de
la sentence d’adjudication, Aclion fait sa déclaration de
m ieu x , au profit de Jean-Baptiste G r a n e t, en son nom.
Granet notifia la sentence d’adjudication , toujours en
son nom ; la déposa au bureau des hypothèques, et obtint
personnellement des lettres de ratification.
L e i 5 septembre 1780, Marie Gendraud, et G ranet,
son m a r i , formèrent contre Marie Dem urat , fille de
Jacqueline G en draud, la demande en partage des biens
de Laurent Gendraud, père et aïeul commun ; et ceux-ci
imaginèrent de demander le rapport au partage, des biens
vendus sur le curateur à l’hoirie M ercie r, et adjugés à
Granet.
Granet soutint qu’il n’étoit pas tenu à ce rapport; qu’il
ne devoit autre chose ù ses cohéritiers que le prix de son
adjudication. Il y eut même erreur en ce p o in t, parce
que la créance due à la succession de Gendraud étoit infé
rieure au prix de l’adjudication ; et il ne devoit que le
rapport du montant de la créance.
Les choses ont resté en cet état : mais , le a 5 prairial
an 2 Granet a vendu au citoyen Audigier les héritages
A 3
�.
.
.
.
( 6 )
..
qui lui avoient été adjugés, provenans de l’hoirie M er
cier. Cette vente a été faite moyennant la somme de 1,700 f.
e t, en outre , « A la charge par l’acquéreur, de payer en
« l’acquit du vendeur, à Etienne Prugnard et à Marie
« D em urat, sa fem m e, ce qui restoit dû du tiers seule« ment de la créance dont Granet est débiteur envers
« les ci-dessus dénommés , et qui a donné lieu à la vente
« judiciaire des biens. Et attendu, est-il d it , qu’il y a
« contestation pour raison de cette créance et autres pré• tentions, Granet subroge Audigier , tant à Feffet du
« procès , qu’i'i tous les droits en résultant pour lui. Audi« gier est chargé d’en reprendre les poursuites, et de faire
« prononcer sur le tout. »
C ’est Marie Demurat et Prugnard qui ont repris les
poursuites. Audigier est intervenu, et a offert,ainsi que
l’avoit fait G ran et, de rapporter 1,200 francs, prix de
l’adjudication des biens Mercier. Mais Prugnard et sa
femme ont refusé ces offres; et, comme Marie G endraud,
femme G ran et, et Françoise G ran et, sa fille, sont décé
dées; que Marie Demurat leur a succédé; elle insiste sur
le désistement des immeubles adjugés à Granet.
II s’agit de prouver que cette prétention est sans fon
dement.
1
On établira, i ». Q ue l’acquisition, faite p a r le mari
avec des deniers d o ta u x , n’est pas dotale à la fem m e, et
qu’elle ne peut réclamer que les deniers ; 20. que l’ad
judication étant faite en justice appartient au mari seul ;
30. que le mari, dans l’espèce, ne peut avoir acquis uxorio
nomme.
�( 7)
PREMIÈRE
PROPOSITION.
Il est de principe généralement reconnu, que celui qui
achète des deniers d’autrui, acquiert pour son com pte, et
non pour le maître des deniers. F a b e r , sur le code ,
livre I V , titre S i quis alteri vel s ib i , def. X , dit même
que quoique la chose achetée ait été livrée à celui qui a
fourni les deniers , il n’en est pas moins tenu de rendre
tous les fruits qu’il a perçus, à l’acquéreur. M azuer, au
titre D e vendit, nomb. 23 et 38, enseigne également que
la chose achetée appartient à celui au nom duquel l’acqui
sition a été faite, et non à'celui qui a fourni les deniers de
la vente. Telle est la disposition de la loi S i eapecunia , V I,
au code D e rei vendit.
Par une suite de ce principe, lorsque le mari achète
avec les deniers dotaux de sa fem me, il acquiert pour lui,
et non pour sa femme, à qui il n’est jamais dû que la resti
tution des deniers. C ’est ce qu’enseigne Bacquet, traité des
droits de justice, tome I er. chap. 2 1, n°. 302 et suivans,
et M. d’Aguesseau dans ses plaidoyers, tome 2, page 643.
Despeisses, tome 1 e1'. page 5o o ,n o m b . 1 1 , s’exprime ainsi :
« Lorsque la dot a été constituée en deniers, bien que
« desdits deniers le mari en ait acheté un fonds, ncan« moins elle doit être rendue en deniers. Il n’est pas au
« pouvoir de la femme de contraindre son mari ou ses
« héritiers de lui rendre le fonds acheté de ses deniers,
« puisqu’il n’est pas dotal. P a r e i l l e m e n t , continue D e « peisses, il n’est pas au p o u v o i r du mari de bailler
t. ledit fonds, contre la volonté de sa femme même.
A 4
�•
A
( 8 )
•
« Bien que par le m ême contrat de mariage, par lequel
« la constitution de dot a été faite en deniers, il soit dit
« qu’en payement des deniers constitués, le mari a pris du
cf père de sa femme certains fonds évalués à la somme
« constituée; néanmoins le mari ou ses héritiei’S, après la
« dissolution du m ariage, ne sont pas recevables à vouloir
« contraindre la femme à reprendre ledit fonds : mais ils
« sont tenus de lui bailler lesdits deniers, ainsi que cela a
« été jugé par un arrêt du 30 mars 1635. Toujours la
« même raison demeure, que les deniers ont été constitués
«r en d o t, et non pas un fonds : et si le mari a voulu prendre
« en payement un fonds, il doit imputer cela à sa facilité,
« qui ne doit pas être préjudiciable à sa femme. »
D ’après ces différentes autorités, qui sont encore dans
la raison, Marie D e m u ratetso n mari ne peuvent réclamer
les immeubles adjugés à G r a n e t, quand bien même ils
auroient été acquis avec les deniers dotaux de la femme
Granet, puisque Granet a acheté pour lui et en son nom ;
qu’il ne pourroit contraindre sa femme ou ses héritiers à
prendre ce fonds en payement. Il est donc juste alors qu’il
soit autorisé à conserver cette propriété.
On ne peut pas même dire, dans l'espèce particulière,
que Granet a employé exclusivement les deniers dotaux
de sa femme à cette acquisition. La créance due à l'hoirie
Mercier appartenoit à la succession Gondraud; la femme
Granet n’en amendoit qu’une portion; le prix de l’adjudi
cation excède le montant de la créance : dès lors Granet a
employé à l’acquisition partie des deniers dotaux, partie
des deniers d’autrui, et partie des siens propres; ce qui est
une raison de plus pour que les immeubles adjugés lui
�( 9)
appartiennent, et qu’il ne soit pas tenu de les rapporter
au partage, ou de les restituer aux héritiers de sa femme. Il
ne doit autre chose que les deniers ; sous ce point de v u e ,
la prétention de Marie Demurat et de son mari est donc
inadmissible.
'
SECONDE
PROPOSITION.
L ’adjudication des immeubles, ayant été faite en justice j
ne peut appartenir qu’à l’adjudicataire.
S’il n’a jamais été interdit au mari d’acheter pour lui avec
les deniers dotaux de sa fe m m e , on d o it , à plus forte
raison, regarder une adjudication judiciaire comme propre
au mari. O n sait qu’il est interdit aux tuteurs et curateurs
d’acquérir les biens de ceux dont ils ont l’administration.
Telle est la disposition de la loi In emptLone, I V , §. Tutor
nït. au ff. D e contrahenda empt. S’il en étoit autrement, il
y auroit à craindre que bientôt les pupilles seroient op
primés par leurs tuteurs, qui s’empareroient, à vil prix ,
de tous les biens de leurs mineurs. Cependant si les biens
des mineurs se vendent en justice et aux enchères, alors le
tuteur peut s’en rendre adjudicataire, parce q u e , dans ce
cas, tout soupçon de fraude cesse, et qu’il est utile aux
pupilles qu’il y ait plusieurs enchérisseurs. C ’est ce qui
a été jugé par un arrêt du 12 janvier 1620, rapporté par
T ro n ç o n , sur Paris, titre X V I , des criées, article C C C L IX .
O r , si le tuteur peut se rendre adjudicataire, en justice,
des biens de ses m in eu rs, à plus forte iviison le mari, dont
l'administration n’est pas aussi rigoureuse. E l ici le mari
île s’est pas même rendu adjudicataire d u n bien apparte-
�.
( 10 )
.
nant à sa fem m e, mais seulement de quelques immeubles
affectés et hypothéqués à une créance indivise entre sa
femrne et ses cohéritiers. Il est donc personnellement adju
dicataire et propriétaire incommutable des immeubles
adjugés, sans autre charge que d’être tenu de rendre
compte de la créance, soit à sa femme, soit à ses cohéritiers.
TROISIÈME
PROPOSITION.
L e mari n’a pas acquis uxorio nom me .
O n dit communément au palais , et on tient comme
vérité certaine, que le mari qui achète une portion de biens
indivise avec sa fem m e, acquiert uxorio nom m e , c’est-àdire , pour le compte de sa femme , et qu’il ne peut
réclamer autre chose que les deniers qu’il a fournis pour
l ’acquisition. Quoique personne ne semble douter de ce
principe, lorsqu’on veut remonter à la source, on trouve
un très-petit nombre d’autorités pour l’appuyer. On p e u t,
à la vérité, l’induire de la disposition de la loi unique, au
code D e rei uxoriœ actione , q u i, expliquant tous les cas
de restitution de dot, semble dire qu’un fonds commun
entre la femme et un autre, ayant été licite et adjugé au
m a r i, celui-ci est obligé de le restituer tout entier à sa
femme. Dumoulin, tome Ier. titre Ier. des fiefs, page 303,
glose i ere. nombre 48, examine si le retrait féodal, exercé
par le mari à cause de sa fem me, est un conquit de commu
nauté, ou s’il doit appartenir à la femme. Il décide qu’il
appartient exclusivement à la femme. E t n ota , quod
j'cudwnyjure etpotestatefeodah à viro rétention,77on cen~
x'Uur inter conquestus vel acquestus, nec ejjicitur corn-’
�C ” )
mune inter conjuges ? sed propnw n sohus a x o n s à
cujus propriis dependet. Quomam vi retractus fco d a lis
unitur et incorporatur jnensŒfoudi dommcintis, nec in
eo habet maritus nisi iisumfructum et administrationem , sicut in reliquis propriis uxoris. Tarnen soluto
matrimonio media parspretii est legalium impensarum
solutarum à marito , debeht ¿psi vel ejus hœredibus
restitui.
Il résulte de cette autorité, que lorsque la femme est
propriétaire du fief dom inant, et que le mari exerce le
retrait féo d a l, ce qu’il a acquis par la voie de ce retrait
appartient â la femme et non à lui, et que le mari ou ses
héritiers ne peuvent réclamer que la moitié du prix dans
le pays de communauté.
C ’est en raisonnant par analogie, et d’après cette opinion,
qu’on a introduit dans notre droit la maxime que le m ari,
qui achetoit une portion indivise dans les biens de sa
fe m m e , acquéroit pour la femme et non pour lui. C ’est
ainsi que l’a expliqué M r. l’avocat général B ignon, lors
d’un arrêt du 22 décembre 1639, rapporté dans Bardet,
tome 2. Dans l’espèce de cet arrêt, une femme étoit pro-'
priétaire du quart d’une maison située à Paris. L e mari
avoit acquis les autres trois quarts à titre de licitation et de
cession. Après la mort de la m ère, le fils exerça le retrait
des trois quarts acquis par son père. L e père soutenoit avoir
agi pour lu i, et prétendoit d’ailleurs que le fils étoit non
recevable à exercer le retrait, parce que le délai en étoit
expiré. Mais, sans examinerce point, M r. l’avocat général
établit qu’un fonds commun entre la femme et un autre,
ayant été licité et vendu au m a ri, il étoit obligé de le resti-
�.
( 12 )
.
tuer tout entier à sa femme. Cette m axim e, ajoute-t-il, fit
dire autrefois à un empereur que l’on sollicitoit de répudier
sa femme dont il tenoit l’empire : S i dimittamus uxorem ,
reddamus et imperium. En conséquence la maison fut
adjugée en entier au fils.
M ais, en partant de ce principe, on voit que le mari
n ’achète pour sa fe m m e , qu’autant qu’il acquiert une por
tion indivise avec les cohéritiers, par la voie de la licitation
ou autrement. Ici les immeubles adjugés ne proviennent
pas de la femme ni d’une succession indivise; ce sont des
immeubles étrangers à la succession. Granet n’a fait autre
chose que poursuivre le recouvrement d’une créance com
mune. Pour y parvenir , il s’est vu obligé de faire saisir et
vendre les biens du débiteur ; il s’en est rendu adjudicataire
personnellement ; il a fait, en cela, le bien de la succession ,
en faisant rentrer la créance ; il a rempli son objet; mais il
n’est pas tenu de rendre l’immeuble qu’il a acquis. Il n’est
ici qu’un acquéreur étranger; il n’a fait que ce que tout
autre enchérisseur auroit pu faire : et comme on ne p ourroit pas demander à un enchérisseur étranger la restitution
des immeubles adjugés, de même 011 ne peut les demander
au mari q u i, en ce point, est étranger à la succession de sa
femme.
O11 ne peut pas étendre une maxime rigoui’euse. P ou r
que le mari acquière uxorio nom ine , il faut lui en sup
poser l’intention ou la nécessité. Celte intention ou cette
nécessité ne peut se présumer que lorsqu’il s’agit d’un
bien indivis entre sa femme ou ses cohéritiers. Aucune
de ces circonstances ne se rencontre dans l’cspèce particu
lière: point d’indivision d immeubles, intention bien ma-
�( i3 )
^
#
nifestée par le mari d’acquérir pour lu i, adjudication en
son nom personnel ; signification , d ép ô t, obtention de
lettres de ratification , toujours en son nom personnel :
donc il n’a acquis que pour lui, et non pour sa femme.
Il a donc pu transmettre cette propriété à un tiers, puis
qu’il n’a acheté que pour lui. Eût - il acquis uxorio no
mine , il eût même été le maître de vendre. Dès-lors ,
le citoyen A u d ig ie r, subrogé aux droits de G ran et, n’a
rien à redouter de la demande de Marie Demurat et son
mari : leur prétention est exagérée, et contraire à tous
les principes du droit.
Délibéré par les anciens jurisconsultes soussignés," à
R io m , le 25 ventôse an n .
PAGES.
ANDRAUD.
L E S O U S S I G N É , qui a vu la consultation ci-dessus,
et des autres parts, e s t AB S OL UME NT DU MÊME A V I S ,
et par les mêmes raisons.
L a demande formée par la femme P ru gn ard , est d’au
tant plus déplacée, qu’en supposant qu’il eût acheté les
immeubles dont il s’a g it, uxorio n om in e , ce qui n’est
pas, il n’y a pas de sens de prétendre qu’il a acheté pour
sa belle-sœur.
D élibéré à Clermont-Ferrand, le
I er.
germinal an n .
BOIROT.
�(
14
)
L E J U R I S C O N S U L T E A N C I E N , S O U S S IG N É ,
EST
DU
MÊME A V I S , et par les m ê m e s raisons.
L a i ere. section du tribunal civil de Riom , présidée
par le citoyen B on arm e, a poussé plus loin la rigueur des
principes en cette matière ; car elle a jugé en principe,
en messidor an 4 , ainsi que l’a rapporté le défenseur
officieux de l’une des parties, que le mari qui achetoit
des biens indivis avec sa femme , n’acqucroit pas uxorio
nom ine , à moins que l’acte ne le portât expressément,
mais bien pour son compte personnel. On auroit de la
peine à adopter cette jurisprudence qui est contraire aux
principes; m ais, dans l’espèce des parties, il ne peut y
avoir de doute que l’adjudication dont il s’agit ne doive
profiter à l’adjudicataire.
Délibéré à Clermont-Ferrand, le
I er.
germinal an 11.
DARTIS-M ARCILLAT.
L E J U R I S C O N S U L T E S O U S S IG N É e s t d u MÊME
A V I S , par les mêmes raisons ; et il ne voit pas com
ment il seroit possible de dire rien de raisonnable pour
l’opinion contraire.
Délibéré à Clermont-Ferrand, le 4 germinal an n .
B E R G I E R.
�C
)
L E C O N S E IL S O U S S IG N É , en adoptant les principes
ci-dessus d éveloppés, n’y ajoutera qu’une réflexion. A u
moment de la mort de Laurent Gendraud, père commun
de la mère de la femme Prugnard et de la femme G ran et,
il n’existoit dans sa succession, outre ses biens immeu
bles , qu’une créance de 1,200 fr. due par Mercier.
En se m ariant, les filles de Gendraud se sont consti
tué cette créance. Il n’y a donc jamais eu que cette somme
qui fût dotale. Les poursuites, et l’adjudication pronon
cée au profit de G ranet, n’ont pu avoir la force d’im
primer le caractère de dotalité à des immeubles acquis
par G ra n e t, en son nom personnel ; pour opérer la dota
l i t é , il auroit fallu , ou que les immeubles eussent fait
partie de la succession du père commun , ou qu’ils eussent
été acquis en remplacement d’un fonds dotal aliéné.
O r , dans l’espèce , les immeubles ne proviennent ni
de la succession de Laurent Gendraud, ni ne servent au
remplacement d’un fonds dotal aliéné.
Que doit Granet, adjudicataire? le rapport du prix de
l’héritage affecté à cette créance. En supposant qu’ il se fût
trouvé plusieurs créanciers hypothécaires, et que quel
ques-uns eussent primé les héritièresde Laurent Gendraud,
dira-t-on que l’adjudicataire auroit dû le rapport du prix
aux créanciers premiers en hypothèque ; et qu’à l’égard
des Glles Gendraud, il étoit tenu au rapport de la chose.
Son sort ne’ sauroit: s’aggraver par la qualité de mari; e t,
�16
dans tous les cas, il ne d o it, comme tout autre adju
dicataire , que le prix devenu le gage de cette créance.
D élibéré à C lerm ont-Ferrand, le 5 germinal an 11.
"
M A U G U E.
A- R IO M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d'appel. — An 11.
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Audigier, Pierre. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Andraud
Boirot
Dartis-Marcillat
Bergier
Maugue
Subject
The topic of the resource
successions
biens dotaux
immeubles
partage
moulins
Description
An account of the resource
Consultations [Citoyen Pierre Audigier, notaire public, habitant de la commune de Rochefort, contre Étienne Prugnard, et Marie Demurat, sa femme].
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1780-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0238
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0239
BCU_Factums_M0731
BCU_Factums_G1405
BCU_Factums_G1406
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochefort-Montagne (63305)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
immeubles
moulins
partage
Successions
-
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PDF Text
Text
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C 44Z ^I^/^Ï^7
M E M O I R E l t
EN
RÉPONSE,
P o u r J e a n n e et M a r i e -G a b r i e l l e N O Y E R , P i e r r e
et J osep h G R E L I C H E , leurs m a r i s , habitant à
M o z u n , intimés ;
i
Contre J o s e p h N O Y E R - D U B O U Y , habitant à
Chamaliere, appelant ; en présence d ’ A n n e N O Y E R
L A G A R V E , avoué au Tribunal civil de C 1ermont t
intimés.
'
|
'
�M É M O I R E
EN
RÉPONSE,
P o u r J e a n n e et M a r i e - G a b r i e l l e N O Y E R , P i e r r e
et Jose p h G R E L IC H E , leurs m a r i s , habitant à
M o z u n , intimés ;
Contre J o s e p h N O Y E R . - D U B O U Y , habitant à
Chamalière, appelant,- en présence d 'A n n e N O Y E R L A G A R D E avoué au Tribunal civil de Clermont,
intimés.
L e citoyen Noyer-Dubouy crie au voleur, pour qu’on
ne le soupçonne pas; il se plaint de tout le monde: il
ne veut pas tout-à-fait, comme Harpagon,, faire pendre
la ville et les fauxbourgs, mais après avoir mis une foule
de personnes à l’index de sa colère, il va grondant
encore contre ceux qu’il ne désigne pas. Son mémoire
est un acte d’accusalion contre son pere , ses frères,
ses sœurs , ses beau-frères, le juge de paix et assesseurs
de M ozun, les juges, le commissaire et le greffier du
A
�( a )
Iribunal civil de,Clermont, le magistrat de sûreté, etc.
Il ne s’agit rien mqins que de v o l , bris de scellés , pré
varication ; et véritablement son procès semble être la
matière d’une conspiration vaste,méditée depuis l’an 5,
et dont les ramifications sont sans nombre.
Ces personnalités si multipliées, mêlées à des moyens
présentés cependant avec talent et adresse , doiventelles ajouter plus de persuasion en faveur de la narra
tion du citoyen Noyer-Dubouy, et convaincre davantage
de la sincérité des faits qu’il avance ? non ; la vérité
plus simple et plus naïve n’a pas pour escorte des in
jures et des accusations. Les daines Greliche diront au
citoyen D u b o u y, avec moins d’aigreur et plus de fran
chise , qu’il a voulu les faire ses dupes; qu'elles résislent
de tout leur pouvoir à le devenir ; et que c’est là tout
le secret de ses plaintes et de la contestation : qu’après
avoir fait régler ses droils dans les successions confon
dues des père et mère , il a voulu faire distinguer la
succession de la mère pour s’en créer de nouveaux ;
et sur une réponse équivoque au bureau de paix , il a
bâti l’édifice gigantesque de ses préfenlions toujours
croissantes, et du procès interminable qui menace de
dévorer toute la succession.
D ans ce cahos de faits, de débals minutieux el de
" procédures, s’il y avait un point de départ positif, il
faudrait s’en emparer pour se rendre plus promptement
intelligible; mais malheureusement la cause le serait
moins, si les détails en étaient omis, si l’ensemble en
était rompu ; car le système du citoyen Noyer-Dubouy
�( 3 }
.
est fondé principalement sur la procédure; il faudra
donc la parcourir toute entière. Il s’attache aussi à
prouver que sa mère a laissé une succession opulente;
il sera donc nécessaire d’en examiner la consistance.
F A I T S .
Jean-Baptisle-Joseph Noyer épousa,en 17^0, Fran
çoise T ix ie r , fille de Marien Tixier , commis-greffier
de la cour des aides.
• Marien Tixier , marié à Jeanne L e y m e rie , qui lui
porta 5oo livres de d o t , avait de son chef une petite
maison , un jardin de deux œuvres, une vigne de huit,
à dix, une terre de trois quartonnées ; tout cela était
imposé , à son décès, pour un revenu présumé de 168
livres. Il avait trois enfans.
'
L e contrat de mariage de 1760, a des clauses pro
portionnées' à cette richesse ; i.° la future porte un
.trousseau estimé 35o liv. ; 2° elle est instituée héritière
par égalité avec Gabrielle sa sœur, sauf 1111 préciput
de 1000 liv. ; 3.° ses robes, ses bagues et joyaux font
un total de 120 liv.; 4.0 riche douairière, la future a
l'expectative d’un gain de survie de 120 liv. en capitai.
Marien Tixier, qui dans sa qualité était commis ail
paiement des gages de la cour des aides, mit de la
négligence dans ses comptes. A sa mort, en 1760, il
avait été condamné à plus de 80,000 liv. de contraintes
ou d’amendes. Sa succession se trouva en outre d éb i-•
trice de sommes assez considérables envers une seconde
femme.
.
A 2
�I
'
■'
,
.
.
Le fisc s'empara de la succession ; le mobilier fut
vendu publiquement, et produisit 1269 livres; il fallut
en distraire 264 liv. de frais, et le surplus fut déposé
au greffe.
L a dame Noyer et sa sœur répudièrent au greffe ,
le 14 avril 17*60. Jean Giraudias fut nommé curateur.
L e sieur Noyer avait acquis les créances de la veuve;
il en donna l’é t a t , de même que des siennes, p a ru re
requête du 16 avril. L e total de ses demandes se por
tait alors à 5029 liv. 5 sous 7 à prélever sur la succession.
L e curateur fit faire le bail judiciaire des immeubles.
Beaucoup d’enchérisseurs se présentèrent ; des remises
furent ordonnées; l’adjudication fut faite à 95 livres.
Cependant le citoyen Noyer fit des démarches pour
l’honneur de son beau-père et pour sauver quelque
chose de sa succession ; il fit des voyages à Paris ,
sollicita des modérations, et enfin obtint, le 29 mai
1 7 6 4 , un arrêt du conseil qui réduisit les droits du
fisc à 2000 livres, chargea le ’citoyen Noyer de payer
cette somme au trésor public , outre ce qui serait dû
au sieur de Pille, procureur c'i la chambre des comptes
(il paraît que c’était 1200 liv.), au moj^en de quoi le
citoyen Noyer fut subrogé aux droits du fisc conlre la
succession.
Celle liquidation néanmoins n’engagea pas la dame
Noyer à se rendre héritière. On voit qu’ un auire cura
teur fut nommé après Giraudias , et que ce curateur
vendit ;'i M.r Reboul la petite maison Tixier, moyen
nant 3 i 2o livres, dont 2000 livres furent déléguées au
�. .
( 5 5 .
trésor, et ioôo liv. à M .r de Pille. M .r Reboul voulut
la garantie clu sieur N oyer, créancier principal, qui in
tervint pour la donner.
L e m ê m e jour le sieurNoyer,toujours comme person
nellement créancier, obtint la main-levée de deux saisiesarrêts, faites sur les deniers consignés au greffe, sur
le sieur Rérard de Chazelle, débiteur de 1400 liv., et
sur le sieur de Vicliy-Varvas, débiteur d’une rente de
25 livres. On ne voit pas s’il toucha ces deux sommes.
En 1 7 6 7 , il vendit le jardin au sieur Reymond ,
chirurgien , à la charge de payer une rente de 2 5 liv.
et moyennant 748 liv. (Marien Tixier l’avait acheté,le
6 avril 1742, moyennant 35 liv. de rente ). Quant à la
vigne et à la terre , le citoyen Dubouy dit que son père
les a aussi vendues.
'
'
Françoise Tixier, femme N oyer, n’était pas seule
héritière de Marien , elle avait une sœur religieuse ;
l’autre était Marie-Gabrielle, vivant avec elle.
Quand la succession du père fut liquidée, celle-ci
voulut y avoir part, et demanda un compte, non à sa
sœur, mais au cit. N oyer, qui, comme créancier, oc
cupait la succession. Il fut, à ce sujet, fait entre eux un
traité, le 27 décembre 1767. L e citoyen Noyer y rend
compte delà succession fixée à 11,088 liv.; sur quoi il
dit qu’y ayant pour 5,689 liv. ^ sous de dettes, il reste
net 5,399
^ sous ; que Françoise Tixier ayant un
prélèvement de 1,000 liv-, il reste a Gabrielle Tixier
prendre la moitié du surplus, c est-a-dire 2,200 liv .,
a quoi le cit. Noyer ajoute 700 liv. quJil a touchées pour
�■
(
6
?
.
sa belle-sœur sur d’autres affaires;'de sorte qu’il se re
connaît son débiteur de 2,900 liy., pour laquelle il crée
une rente rachetable de 146 liv.; et comme Gabrielle
"‘Tixier avait projet de resler près de sa sœur, il est dit
qu’en cas d’incompatibilité, elle pourra demander rem
boursement des 700 liv.
,
;
Y eut-il'séparation? La rente fut-elle rachetée? on.
l’ignore ; mais ce qu’on remarque, c’est qu’en 1766 et
1 7 6 7 , Gabrielle Tixier acheta une maison et des im
meubles dans le village de Provarel prèsSermentizon,
par trois ventes, moyennant 658 liv. On remarque aussi
que par acte du i 5 janvier 1775 , elle revendit tous ces
héritages au cil. Noyer son b e a u -frè re , moyennant
600 liv. dont elle lui donna quittance.
Ainsi ces immeubles s’effacent de sa succession, qui
consisterait tout au plus dans ses vêlemens et dans la
rente de 145 liv.,s’il n’est pas jugé queles ventes qui l’ont
suivie de si près, en prouvent le remboursement.
Les sieur et dame Noyer avaient cinq enfans, trois
mâles et deux filles; le'tems était venu de les établir;
mais la fortune de la mère était toujours incertaine,
ou plutôt elle était réputée entièrement nulle, puis
qu’elle n’avait pas révoqué sa répudiation.
Pour ne pas jouer un rôle tout-à-fait neutre lors de
rétablissement de ses enfans, on voit qu’elle sollicita
de son mari une reconnaissance de 5,000 liv., qui lui
fut faite le 8 novembre 1 7 7 5 , pour deniers, est-il dit,
louches de la succession de son père, et prix des ventes;
lion compris ce qui serait porté par quittance donnée
�( 7 )
par Annet Tardif audit défunt Tixier. La dame Noyer
accepte cette reconnaissance.
■ Elle avait cinq enfans; la générosité de son mari la
mettait à même de leur donner à chacun i,oco liv. On
voit en effet par les contrais de mariage de ses enfans ,
et notamment de ses deux filles mariées aux deux ci
toyens Greliche, en 1775 et 1777 , qu'elle leur promet
de son chef une somme de 1,000 livres, payable après
son décès.
.
Gabrielle Tixier étant décédée, il paraît que la dame
N oyer, sa sœur, fit assigner son mari en 1783, pour
obtenir u#é moitié de la succession de ses père et mère,
comme héritière de sa sœur, attendu que cette succes
sion lui était paraphernale. Elle reprit cette demande en
1788, et on ne remarque dans l’un ni l’autre des ex
ploits qu’elle se plaignit de la reconnaissance de 1775,
ni aucun des faits que son fils Dubouy lui fait dire six
mois après, dans un testament.
Ce testament, daté du 20 juillet 1789 , qui n’est
revêtu d’aucunes formes, ne mériterait pas les regards
de la justice, si le cit. Dubouy ne s’en faisait positive
ment un titre. Mais il en argumente expressément, il
en fait une pièce de sa production ; il faut donc en
rappeler le contenu.
La dame Noyer institue le cit. D u b o u y , son héritier
universel; elle prie son époux de lui reconnaître ce qui
lui est dû en conscience et probité.
Autant que je puis m’en souvenir, dit-elle, mon mari
a recu , i.° 7 à 8,000 liv. déposées chez M .r Reboul.
�( 8 ' ) ...................................
2.° Environ 2 5o louis d’or de 24 liv. que je pris moi-même
dans l’armoire de mon père, à L’instant de sa mort. 3.° Les
Liens qu’il a vendus...... Je n’ai de reconnu que 5,oooliv.
Je prie mon époux de reconnaître Le surplus, en con
science et probité, à Jean-Joseph Noyer-Dubouy, mon
héritier, q u e j e p r i e d ’ é v i t e r l a r e c h e r c h e d e m e s
D R O I T S P A R C O MM U N E R E N O M M E E .
Qui ne voit, dans ce testament, une copie, une
caricature du légataire universel?
■
:
On devient certain de la captation, quand on re
marque que le citoyen Noyer-Dubouy s’est marié un
an après, en 1790., sans que la mère ait répété cette
institution. '
Par son contrat de mariage, on voit que son père
lui Lègue les biens du Bouy, pour lui être remis après
son décès et celui de sa fem m e, la jouissance desquels
leur demeure réservée : ledit Legs fait pour lui tenir lieu
de sa porlion héréditaire quand elle sera échue.
A la charge de pa}Ter, après Le décès desdits sieur
et dame Noyer, 2,000 liv. à chacune des dames Grelic lie , pour pareille somme qui leur sera due par La
succession desdits sœur et dame Noyer 7 pour reste de
leurs dots, à elle faites par ledit sieur Noyer et sa femme;
plus 2,000 livres aux héritiers de droit, faisant au total
6,000 livres.
La mère ne paraît à ce contrat de mariage, que par
un fondé de pouvoir, ayant charge d'autoriser le ma
riage; mais elle n’inslitue pas. L e legs est évidemment
fait pour tenir lieu des deux successions.
Le
�.
,
(
9
.
.
L e cit. Noyer père, fut mis en réclusion à Billom;
le neuf thermidor ne l’en délivra pas. Un chagrin
profond, dont il est inutile de dire les causes, fer
mentait dans son ame. Il mourut le huit fructidor
an deux.
Quinze jours avant sa mort, il avait fait un testament
en présence des citoyens Girodias , Lasteyras, MartinGibergue , Bom pard, Fournier et Quesne, détenus
comme lui ; en présence des citoyens Beynaud et
Bouchardon, commissaires du comité de surveillance,
et de Voltaire-Lausset, concierge de la maison de ré
clusion.
La loi du 19 ventôse devait lui inspirer des craintes
de confiscation. Il était encore fortement occupé du
projet de diminuer le legs, qu’il avait fait au citoyen
Dubouy, de son principal immeuble, et la loi du 17
nivôse ne le Rassurait pas assez. Dans celte double
occurence, le parti le plus prudent était de tenter une
reconnaissance au profit de sa femme; il déclara donc
lui devoir 12,000 liv. pour le prix des ventes des meubles
et immeubles de son beau-père et de sa belle-sœ ur,
sans préjudice à d’autres reconnaissances.
A tout é v é n e m e n t , il lui légua l’usufruit de ses biens,
et institua ses cinq enfans héritiers par égalité.
Cependant le district de Billom décida sagement et
légalement, le 11 fructidor, que les biens d un detenu
mort et non ju gé, n’étaient plus susceptibles de con
fiscation ni de séquestre; il permit aux héritiers Noyer
de faire lever par le juge de paix , les scellés mi?
B
�( 10 )
par le comité de surveillance, lors de l’arrestation (i).
Les droits de la dame N o yer, sur la succession de
son mari, étaient plus confondus que jamais dans la
succession du père, par le legs.d’usufruit à elle fait par
le leslament. A la vérité, ce legs ne devait être que de
moitié, et il restai! des difficultés pour liquider ses droits
sur l’autre moitié.
Ces difficultés, elle voulut les applanir toutes de son
vivant, pour ne laisser à ses enfans aucune semence de
discorde. Elle les réunit tous pour leur céder ses droits
•et reprises, moyennant une pension viagère de i , 5ooliv.,
son logement, la jouissance d’un jardin, et moyennant
le délaissement de deux vaches, et tous les comestibles.
Cette pièce est rappelée au jugement.du 25 ventôse
an 5. Folio 5 , E°.
Ce traité liquidait entièrement la succession pater
nelle; les cinq héritiers en firent vendre tout le mobibilier. Mary Noyer aîné, vendit sa portion à ses frères
et sœurs, moyennant 16,000 liv ., sous la réserve du
mobilier qui se trouverait chez sa mère, à son décès,
c’est-à-dire, de ce que les uns et les auLres entendaient
par la succession effective. Au moyen de quoi le partage
fut fait par quart ou par égalité , comme le voulait le
père par son testament.
. ( i ) Cette expression de scellas prouve que le comité n’avait
pas fait un inventaire général, comme le prétend le cit. D ubouy,
pour ajouter qu’on l’a soustrait ; si quelqu’un est suspec t de cette
soustraction , ce ne peut être ceux d ’entre les parties qui n’ont
lihnlé les comités révolutionnaires que comme supplûuis.
�( II
)
Les deux dames Greliche eurent les biens de Mozun.
Les citoyens No.yer-Lagarde et Noyer-Dubouy eurent _
indivisément le domaine du B ouy, que l’intimé a au
jourd’hui seul.
...
L a dame;Noyer ne survécut pas long-tem s à ces
arrangemens de famille: elle décéda le 8 messidor an 3 ;
et comme ses. héritiers supposaient toujours que sa suc- ,
cession n’était que dans son mobilier, il en fut fait un. .
partage sans réclamation.
.
Mais bientôt advint, le rapport de l’effet rétroactif :
de la loi du 17 nivôse ; et malgré le testament de Son ;■
père, le citoyen Noyer-Dubouy se crut autorisé à pour
suivre ses frères et sœurs, au moyen de son contrat de .
mariage. Il ne perdît pas un iuslaul.
.
La loi qui permet lait de revenir à partage élait du
4 vendémiaire an 4. Il commença les liosliliiés le 28,
par faire poser les scellés sur une armoire du père com
mun , dans laquelle restaient des papiers de sa succèssion , de même que d’autres objets restés indivis.
Il est à remarquer que dans le procès-verbal du juge de paix, il signe N ojer-D uboujj, requérant seulement
l'apposition des scellés , en qualité d ’acquéreur et de
légitimair.e, conformément ci son contrat de mariage.
C ’est qu’en effet, il ne prétendait pas alors que celle
armoire contînt des papiers si précieux pour la suc
cession: maternelle; il était nanti de ces litres lui-meuie,
et savait que celle succession' 11 était rien.
On y voit q u e la clef de cette armoire était au pou
voir du citoyen Noyer-Lagarde.
B 2
�( 12 )
^
Celte hostilité fut le signal des procédures. I^e cit.
I.cigarde, qui avait vendu à Dubouy sa moilié du do
maine du Bouy, et qui sans doute en était mécontent,
assigna ses cohéritiers en partage.
Au bureau de paix, le citoyen Dubouy dit qu’il s'en
tenait à la donation fuite par son contrat de mariage,
et qu’il entendait seulement venir \\ partage des biens
de sa mère , sauf ses droits, dans le cas où il se trou
verait un litre qui le rendrait héritier.
A l’audience, il ne s’occupa plus de celte succession
maternelle, parce qu’il savait bien que tout était con
fondu dans le domaine du Bouy: et par jugement du
26 ventôse an 5 , les ventes faites par Mary Noyer
et par N o y er-L a g a rd e , de même que le partage du
22 fructidor an, 2 , relatif aux biens paternels , furent
annuités, comme prenant leur source dans l'effet rétroactifde la loi du 17 nivôse. 2.0 Le domaine du Bouy
fut délaissé au citoyen Noyer-Dubouy comme dona
taire contractuel; 3.° le partage de la succession pa
ternelle fut ordonné enlre les quatre autres en fans
N oyer; 4.0 il lut réglé ce que chacun devait payer à
l ’autre, soit Dubouy à ses frères, pour les réserves de
la donation, notamment les 6,oool. dont il était tenu, et
p o u r c e q u ’ i l a v a i l louc hé en mobilier,soil les deux frères
à Dubouy,pour ce qu’ils avaient touché de leùrsvenles.
Ce jugement tout avantageux qu’il était au citoyen
D u b o u y , élait un règlement de famille; les quatre
cohéritiers appelés au purlage nouveau, ordonné par
ledit jugement, s’empressèrent de l’exécuter.
�.
.
(
1
3
}
.
Ils avaient besoin pour cela des papiers de famille
et effets paternels, contenus dans l’armoire oii étaient
les scellés du 28 vendémiaire an 45 le juge de paix
était sans doute tenu de les le v e r , sur la représenta
tion du jugement du 25 ventôse : mais avec le.cit.
D u bo u y, il fallait des précautions.
Les copartageans l’assignèrent donc le 5 germinal
an 5 , pour être présent à la rémotion, sans que cela
fût bien nécessaire; le 6 germinal au soir, en son
absence, il fut fait un inventaire.
L e juge de paix était îi la vérité beau-frere des beaufrères des copartageans; mais quand un juge de paix a
niis des scellés sur les titres d’une succession , il n’y a
pas de prévarication , quand un juge de paix les lève
sur la réquisition de ceux indiqués par un jugement,
pour partager seuls cette succession.
L e juge de paix et ses assesseurs firent un inven
taire , contenant quatre-vingt-dix-sept coles de titres.
Cet inventaire n’est pas une pifece occulte, le citoyen
Dubouy en a une expédition.
A la suite de l’inventaire les copartageans, voulant
éviter d’autres frais, firent un partage en deux lots de
la succession Noyer ;Noyer-Li)gaide, pour lui et Mary
Noyer , eut à son lot les 6000 liv. à prendre sur NoyerDubouy, en vertu de la donation de 1790,0! du juge
ment de l’an 5.
L e cit. Dubouy, favorablement traite par la justice,
trouva dans celte opération les matériaux d’un procès
kien plus lucratif que le premier. 11 fit citer ses colié-
�'
•
C 14 )
ïitiers pour être condamnés à réintégrer le mobilier
enlevé. Il demanda en outre pour dommages-intérêtS'
60.000 livres écus, quoique les écus ne fussent pas alors
très-communs. Il prétendit qu’on avait soustrait l’or,
l’argent,
O ' les titres,' les bordereaux des ventés '* et Le
testament du 20 ju illet 17^9. ( Menteur!' il est dans ses
pièces, cote 14 de sa production).
On pense bien que sur une telle demande , la séance’
du bureau de paix dut être orageuse (18 floréal an 5 ).
Comme Dubouy voulait faire représenter les effets
d ’ u n e succession qu’il n’avait pas voulue, on lui demanda
en quelle qualité il entendait agir ; il répondît : que
c’était comme héritier universel de sa mère, aquéreur
de ses frères, et légitirnaire de son père.
Alors lescitoyeusGreliche, faisant pourleurs femmes,
lui disent qu’ils en étaient bien aises, parce qu’ayanl:
1.000 liv. du clief maternel par leur contrat de mariage.,
et ne sachant où les prendre , puisque La mère avait
répudié à la succession de ses père et mère, ils lui de
mandaient chacun ladite somme dë 1,000 liv.
N oyer-D ubou y, qui en savait plus qu 'eu x, quoiqu’il
les accusât d’avoir pris tous les titres, répondit qu’il
acceptait la renonciation qu’ils faisaient de la succession
maternelle, et qu’il se chargeait d elesp ayer, si la somme
leur était due.
Les cito}rens Grcliclie alors, quoiqu'ils né soupçon
nassent pas un piège, dirent qn ils n avaient jamais
renoncé à la succession maternelle, commeleprélendait
le cil. Dubouy, mais qu’ils acceptaient les 1,000 liv.
�( i5 )
Au surplus ils répondirent que s’ils avaient fuit-lever
les scellés, ils en avaient le droit, en vertu du jugement
du 16 ventôse.
Voilà le précis exact de ce procès-verbal du 18 floréal
an 5 , sur lequel le cil. Dubouy a basé toutes ses pré
tentions, pour ruiner la succession ab intestat de son
père, par la recherche de celle de Marien Tixier son
aïeul.
Cependant le citoyen N oyer-Dubouy avait interjeté
appel du jugement du 25 ventôse. Il prétendait ne de
voir pas rendre compte delà majeure partie du mobilier
qu’il avait retiré de la succession paternelle, parce qu’il
l’avail, disait-il, acheté en vente publique, et payé à
ses cohéritiers, c’est-à-dire, mis en dépôt dans ta r
moire sceUée.
.
L e i i ventôse an 6 , cet appel fut jugé au P u y, et
le jugement de Riom fut infirmé dans l’objet de la con
damnation ci-dessus rappelée.
L e cit. N oyer-Lagarde, qui dans tout le procès a pris
mal à propos bien des choses sur son compte, déféra
le serment décisoire au cit. Dubouy , qui en consé
quence fut autorisé à retenir le mobilier, à la charge
d affirmer.
Comme la levée des scellés lui avait fai! naître l’idée
d obtenir le partage des droits maternels , il plaida forlûinent pour l ’obtenir5 mais il ne put obtenir que la
réserve de son action, qu’on ne pouvait lui refuser, et il
est même essentiel de remarquer qu’il ne plaidait pas
pour être héritier universel 5 car i.° il ne dit rien de la
�(
)
m
'
'
prétendue répudiation du 18 floréal ; 2.0 il fait dire au
premier m olif que la succession de la mère est divi
sible en cinq.
L'affirmation ordonnée fut un autre sujet de discorde
entre les frères Noyer. Le cito}ren Dubouy fut accusé
d’avoir soufflé les copies de signification du jugement,
pour faire son affirmation incognito. L ’huissier fut mis
en prison ; mais les choses se pacifièrent : Mary-Noyer
déclara par-devant notaires avoir reçu sa copie; l’huis
sier fut mis en liberté. Enfin le cit. Dubouy a affirmé,
et on ne lui dira pas par récrimination quJil a volé ce
mobilier j car res j a die ata prô veritate habetur.
L e cit. Dubouy reprit sa demande relative à la suc
cession maternelle, le 7 prairial an 6. Il cita au bureau
de paix ses frères et sœurs pour lui remettre la succes
sion, les papiers, le testament, etc., comme étant seul
héritier, à cause de l’abdication faite le 18 floréal, si
non à lui payer 60,000 liv. (1). Au bureau de paix on
(1 ) Il rciut être bien osé pour motiver des conclusions aussi
exagérées , sur le fait présumé que les titres, relatifs à la succes
sion de la m ère, ont été enlevés , lorsqu’on les a soi-même.
L e cit. D u b o u y est porteur, i .° de l'o rig in a l du contrat de
mariage de sa m è r e , expédié à ellc-m cm e, cote i . r* de sa pro
duction ; 2 ° du traité orig in a l de 1765, cote 4 ; 3.° de l’expédi
tion originale de la reconnaissance de 1 7 7 5 , cote 11 ; 4.0 des
orig in a u x d ’exploits donnés a la requête de la mère contre son
m a r i , en 1787 et 1788 , et du pelit d é fa u t, délivré au greffe , sur
ces exploits , cote i3 ; 5.° du testament de sa m ère, du 20 juillet
1789, toujours en o rig in a l, cote 14«
ne
�.
.
^ 17 )
neditrien. L e cit. Dubouy expliqua sa citation par son
assignation du 18 thermidor, el demanda i.° le mobilier
suivant l’inventaire; 2.0 5,ooo liv. pour la reconnaissance
de 1775; 3.° 12,000 liv. pour celle de l’an 2 ; 4.0 43,000
liv. pour les autres reconnaissances énoncées dans celle
de l’an 2.
Sauf à déduire 4,000 liv. dues; savoir: 1,000 livres à
Mary N oyer, lesquelles lui resteront comme son aquéreur , et 3,000 livres aux citoyens Greliche et NoyerLagarde.
,
Il saisit en ses mains 4,000 liv. (il avait écrit 6 ), par
lui dues en vertu de sa donation ; ladile somme prove
nant de La succession dit père ■
l’huissier lui fait défenses
de s’en désaisir.
Cetle demande ne pul être jugée à Riom ; il la reprit
en l’an 8, devant le tribunal de Clermonl; là il pré
senta une pélilion pour demander 6,000 liv. de provi
sion ; puis il augmenta même ses conclusions principales
et demanda 3,900 livres de plus , par un exploit du 9
fructidor an 8 , pour la succession de Gabrielle Tixier,
comme échue à sa mère en paraphernal.
L e cit. Dubouy se croyait si bien prêt à obtenir ces
sommes imaginaires, qu’il fit des saisies arrêts., des
inscriptions au bureau des hj'pothèques, etc.
Q ui donc-esl le vo le u r?
Mais il a avoué avoir eu une clef lors des scellés , el Laghrde
'lue aulre. Peut-être voit-on là pourquoi il veut absolument
persuader que L agarde collude avec tous les autres , et pour
quoi. il le signale comme sou ennemi déclaré.
�( 18 )
La translation du procès de Riom a Clermont semble
peut-être une chose très-ordinaire et indifférente au
procès; elle n ’est cependant rien moins que cela; car
on pressent bien que le cit. Lagarde, étant avoué à
Clermont et partie lui-même en son nom dans la cause,
dut naturellement en suivre l’instruction. Elle l’inté
ressait d’ailleurs seul en quelque sorte ; car il plaidait
pour conserver les 6,000 1. échues à son lot, par le par
tage du 6 germinal an 5.
L a copie d'exploit était posée à son domicile ; il pou
vait donc se présenter sans en attendre d’autres. Il
n’avait nul besoin de procuration, et il n’en demanda
pas; ce qu’il y a de certain, c’est qu’il a toujours agi
seul et à sa guise.
Il paraît vrai qu’il y eut sur la demande provisoire
de Dubou}7une plaidoirie, non pas le 1 5 fructidor, mais
le 2 vendémiaire an 9, etqu ’ilfut rendu un jugementqui
joignit le provisoire au fonds. Ainsi il était inutile de nom
mer et placer les juges et les auditeurs, de crier tollé
contre le greffier qui a dû faire son devoir. Le tribunal
sera indigné de ces injures qui n’avaient pas d’o b je t,
et qu il /allait au moins appuyer par un certificat. Mais
c’était perdre l’occasion cle dire que le jugement lût
motivé sur la répudiation - ce qui est faux.
L e cit. Lagarde étant dans la cause avoué pour luim ê m e , et procurator in rem sua/n pour ses beau-frères,
ne s’en tint pas à l ’instruction ordinaire de sa cause; il
fit donner, le 25 ventôse an 9, une assignation à sa re
quête et à celle des citoyen et d a m e G r e l i c h e , p o u r con-
^
�( *9 )
dure le citoyen D u bou y, i.° au paiement de r,ooo liv.
pour chacun en sa qualité d’hérilier de la mère ; 2.0 à la
radiation des inscriptions par lui faites; 3.° en 12,000 1.
de dommages-intérêls.
Certes ce ne sont pas les cit. et dame Greliche qui
firent pour cet exploit ; i.° ilsliabilentMozun , et l’huis
sier est de Clermont ; 2.0 c’est le cit. Lagarde qui s’y
constitue avoué ; 3.° il est écrit en entier de la main du
cit. Lagarde; mais jusques-là il n’y avait pas de répu
diation, et cet exploit n’en ferait pas une. A u reste,
quand les citoyens Dubouy et Lügarde o n tp u se p ar’tager des titres , ils ont bien pu aussi arranger un ex
ploit entre eux.
L e 6 floréal an 9, le cit. Dubouy se laissa condam
ner par défaut, et par conséquent il se laissait débouter
de ses demandes; mais aussi il se faisait condamner à
payer les 1,000 liv. en qualité d’hérilier. C ’était là son
but et son piège. La collusion est-elle donc tout-à-fait
imaginaire?
D u b o u y , dans son appel, déclara expressément
acquiescer au ju g em en t, en ce qui concernait la répu
' dial ion et son acceptation de la qualilé d’héritier.
Beaucoup plus urgent sur l’appel, parce qu’il croyait
avoir atteint son but, il donna ses causes d’appel quinze
jours après son exploit ; c’est là que jouissant de son
adresse, il appelle le citoyen Lagarde, praticien tressubliL, et le raille, en feignant le louer ou le craindre.
11 argumente du testament de sa mère pour prouver
l ’opulence de la succession Tixier; il dit que le traité,
•
C 2
�fiiil avec elle, est une démission de biens, révocable
et inutile, qui ne l’a pas empêché de transmettre sa
succession à ses héritiers, et par conséquent à lui seul,
puisqu’il est reconnu seul héritier maternel.
L e citoyen T ard if, constitué avoué pour tous les
intimés, tenant sa correspondance et les pièces du ci
toyen Lagarcle, y voyant les citoyens et dame Greliclie,
en qualité, étant dès-lors suffisamment autorisé de faire
sa procédure , et n’ayant ni ne pouvant avoir aucun
sujet de méfiance dans celte affaire, donna sa réponse
à causes d’appel , et ne put qu’écrire en faveur du
jugement, attaqué pour en obtenir la confirmation.
L a cause avait été au rôle de l’an 9; le cil. D u b o u y
surprit un ju geme nt par défaut , sur ce m êm e r ô l e ,
le 11 ventôse an 10. 11 se fil adjuger les deu x recon
naissances de 1 7 7 5 et de l’an 2. Mais il n ’osa pas sans
doute conclure aux 43,000 livres pour les reconnais
sances présumées ; le jugement ne lui adjuge , à cet
ég ard , que des d o m m a g e s - in t é r ê l s à donner par d é
claration , de m êm e que pour le mobilier.
11 signifia sa déclaration en exécution de ce juge
ment, et ne parla que du mobilier.
Les citoyens et dame Greliclie ne se doutaient guère
qu’il se fil en leur nom une telle procédure; mais ils
avaient peine à croire que le ciloyen Dubouy les eût
laissés si long-teins sans procès. Dans leur méfiance,
ils s’informèrent, et quand ils eurent appris la vérité,
ils se hâtèrent de réparer ce qui avait été l’ail en leur
nom ; leur seule voie légale et juste était un désaveu.
�( 21 )
Ils ne pouvaient ni ne devaient le proposer contre le
ciloyen Tardif ; sa procédure était régulière et de bonne
foi. Tout partait du ci toyen Noyer - Lagarde ; c’était
donc lui qu’il fallait désavouer.
En verlu de leur déclarai ion le désaveu fut mis au
greffe de Clermont, l’assignation pour le voir statuer,
fut donnée non seulement au ciloyen Lagarde, mais
au ciloyen D ubouy, pour qu’il y veillât à ses intérêts;
et n’eût pas le prétexte de crier à la collusion. lie 20
prairial an 10 ,1 e désaveu fut prononcé par défaut;
le ciloven Dubouy a interjeté appel de ce jugement.
Dans cet intervalle encore, survint un nouveau pro
cès; le citoyen Lagarde se plaignit de ce que les 6,oool,
qui lui avaient été cédées par le partage du 6 germinal
an 5 , ne lui étaient pas payées, et il cita les ciloyens
et dame Greliclie , au bureau de paix, le 26 prairial
an t o .
.
.
C e u x - c i lui répondirent qu'ils n’entendaient plus
rien aux chicanes qui s’élevaient journellement sur la
succession ÎVoyer. Qu’ un jugement de R io m , et un ju
gement du Puy y condamnaient le citoyen D u b o u y,
et qu’il n’y avait qu’à les exécuter. Il fut donné as
signation néanmoins par le citoyen Lagarde aux cit.
Greliclie qui la dénoncèrent au citoj^en Dubouy.
Ainsi se termine cette éternelle procédure ; l’appel
du désaveu a été instruit de part et d autre , et joint
à l’opposition pendante, sur la demande du cil. Dubouy.
La cause a clé plaidée sur le toul, le 14 fruclidor an io ;
et le tribunal a prononcé un appointerne 11t.
�-
.
( * o
M O Y E N S .
L e cit. D u b o u y, dans son m ém oire, prétend que le
désaveu n’est pas recevabie, parce qu’il est couvert par
désapprobations suffisantes, et que l ’opposition au ju
gement du 11 ventôse an 10, n’est aussi pas recevabie.
Il ne s’occupe que par subsidiaire du fonds de la con
testation. Pour suivre son plan d’attaque, il faut éta
blir comme lui plusieurs questions. L a première sera
de savoir si le désaveu du cit. Noyer-Lagarde doit être
reçu; la deuxième, si l’opposition au jugement du 11
ventôse an i o , doit être admise, quoique la cause ait
été au rôle; la troisième, en quoi consiste la succes
sion de Françoise Tixier ; la cinquième , quel est le
droit des parties sur ladite succession.
P R E M I È R E
Q U E S T I O N .
L e désaveu doit-ii être reçu ?
Ce désaveu a été prononcé par défaut, le 20 prairial
an 10; le ciloyen Dubouy en est appelant; ainsi il ne
devait avoir rien à combattre que l a demande. Mais le
citoyen Dubouy s’attache à tout, et il trouve un vice
de forme dans le jugement du 20 prairial, comme non
motivé. Mais il n’a pas bien lu sa propre copie, car
elle porte un motif et la loi n’en exige pas un plus
Eçrand nombre. D ’ailleurs attaquer le jugement d a n s sa
forme ne serait pas faire tomber la demande; le tri
b u n a l d’appel n’en jugerait pas moins le fonds, ainsi
�( 23 ) .
le premier moyen est tout à la fois inexact et inutile:
passons donc au désaveu en lui-même.
Pour qu’il ait lieu , dit le citoyen Dubouy ; il faut
que ce que l’avoué a fait, l’ait été hors de ses pouvoirs,
sans consentement et sans approbation postérieure. Or
y ayant eu instance avec les dames Greliclie , le cit.
Lagarde en étant l’avou é, y ayant eu plaidoirie et
jugement en fructidor an 8 et le 6 floréal an 9 , les
dames Greliclie les ont approuvés, et par conséquent
l ’avoué et la procédure. Or encore le citoyen Lagarde
avait plusieurs pièces pour constater son pouvoir , i.° le
procès-verbal du 18 fructidor an 5 ; 2.0 l’exploit du 21
Ventôse; 3.° la signification du 21 floréal an 9. Enfin
le citoyen Dubouy oppose que le cit. Tardif, avoué
des dames Greliclie, au tribunal d’appel, n’est pas
désavoué pas plus que les huissiers Cliassaing et Massis
qui ont signifié des actes de la procédure.
Sans doute, s’il y avait une approbation postérieure
du citoyen Lagarde , elle équivaudrait à une procu
ration précédente, car ratikabilLo ma/idalo comparalur:
mais peut-on raisonnablement voir, dans des actes faits
sous le nom des citoyens et dame Greliclie, des appro
bations de la procédure du citoyen Lagarde.
Il était, dit-on, nanti de la copie d’exploit et du
procès-verbal du 18 floréal an 5. Et certainement on
ne peut pas nier qu’une copie d’exploitet procès-verbal,
contenant des dires, ne soient un pouvoir suffisant à
un avoué pour se présenter, et répéter les mêmes dires
en jugement. Mais le cil. Lagarde n ’avait pas besoin
�.
.
#
#
de la copie posée aux citoyens Greliche ; il avait la
sienne, car il était partie au même exploit 3 et il s’est
présenté pour tous.
Les dires du procès - verbal ne l’autorisaient pas à
répudier, car ce procès - verbal du 18 floréal, porte
au contraire que les citoyens Greliche nentendent pas
répudier.
D ’ailleurs, c’était une successioa paraphernale ou
verte aux dames Greliche. Les maris, exclus par la loi
de jouir même les paraphernaux , ne pouvaient pas
disposer de la propriété de ces paraphernaux. Ils ne
l’eussent pas pu davantage, quand la succession aurait
été dotale, parce que le mari n’a que Y administra
tion de la d o t , et n’a aucune qualité pour répudier
une succession ouverte au prolit de sa femme ; car ce
serait aliéner.
L e cit. Noyer-La garde ne pouvait ignorer ces prin
cipes; ainsi quand même il aurait eu une procuration
pour occuper, il ne devait pas répudier en jugement,
si la procuration n ’en portait le mandat exprès, et
n’était donnée pour cela par les dames Greliche ellesrnêmes.
L e jugement do fructidor an 8 , est un être imagi
naire. Lors du jugement du 2 vendémiaire an neuf,
il paraît qu’on attaquait les reconnaissances, ce qui
esl l’opposé d’une répudiation ; enfin le jugement de
iloréal an 9, est précisément l’objet principal du désaveu.
L ’exploit du 21 ventôse lait partie de la procédure
suivie parle cit. Lagarde. Il l’a lait donner pour fixer
les
�■
( a5 )
les conclusions prises dans l’instance, et s’y est consti
tué avoué; il paraît même qu’il est écrit de sa main. (
L a signification du a i floréal ne fait qu’un avec l e jugement du 6 , qui est la .principale pièce désavouée.
Et tout le monde sait b ie n , que quand un avoué ins
truit une procédure, dans laquelle ily a lieu de faire des
significations, c’est lui qui charge l’huissier de les faire.
Si d onc, il fallait désavouer aussi l’huissier, ce serait
un cercle vicieux , car l’huissier dirait : je tiens mon
pouvoir du cit. Lagarde , et ce serait î\ celui-ci qu’il
faudrait revenir.
Enfin, et par les mêmes raisons, le citoyen Dubouy
ne peut pas argumenter de' ce que les dames Greliche
n’ont pas fait aussi un désaveu contre l’avoué qui a
occupé pour elles, au tribunal d’appel. Elles se sont
bien donné garde de faire celle injure à l’exactilude
et la délicatesse du cil. Tardif qui a été induit en erreur
par le c. Lagarde. A vec l’expédition du 6 floréal et la copie
d’appel , il était en règle et à l’abri de tout reproche;
il aurait même eu une action en dommages-intérêts.
Toute la question du désaveu consiste donc dans les
déclarations qui ont pu être faites en justice, à Cler
mont; car dans les pièces précédentes, rien n’autori
sait le cit. Lagarde à répudier pour les dames Greliche.
L e procès-verbal du 18 floréal devait au contraire l’en
empêcher.Il s’est donc exposé à un désaveu, et comment,
sous prétexte d’ une collusion qu’il plaît au cit. Dubouy
de supposer, ce désaveu serait-il rejeté s’il est fondé.
N ’y aurait-il pas plutôt lieu de croire que celle
•
D
�( ^6 )
collusion a eu lieu entre le citoyen Lagarde son ven
deur, et lui. Quand on mit les scellés, l’ un d’eux prit
la clef de l’armoire , et l ’autre la porte du cabinet,
cela est avoué au mémoire Dubouy. L e cit. Lagarde
a dans son dossier tous les titres de la succession du
père ; et le citoyen Dubouy a dans le sien tous les
litres originaux de la succession de la m è re , quoiqu’il
se fasse un moyen de n’avoir pas assisté à l’inventaire
du 6 germinal. Enfin, le citoyen Lagarde fait des dé
clarations en jugement, et le citoyen Dubouy se laisse
condamner par défaut pour les accepter incontinent.
A la v érité, il serait difficile de croire à ce que ces
deux frères fussent en bonne intelligence, lorsqu’on
lit tout ce que le citoyen Dubouy exprime aux pages
21 et 22 de son m ém oire, pour insinuer fraternelle
ment ^que le cit. Lagarde s’est mis dans le cas d’une
destitution. Mais qu’il ne fasse pas tomber l’odieux de
ce danger surles cit. Greliclie ; car dussent-ils encourir en
core le reproche de collusion, ils déclarent qu’ils auraient
fait les sacrifices les plus grands, si l'insidieux anatliême
du cit. Dubouy eût dû être le résultat de leur demande.
Ils déclarent aussi que lorsqu’ils ont fait , amère
ment peut-être, au citoyen Lagarde le reproche d’avoir
usurpé leur confiance et d’avoir sacrifié leurs intérêts,
le citoyen Lagarde lenr dit avoir agi d’après une con
sultation des citoyens Bergier, Boirot et D artis, par
laquelle ces jurisconsultes étaient d’avis que toute la
succession maternelle était confondue dans celle du
père, par le traité de l’an 2; qu’elle ne consistait que
�( 27 )
dans ce que la mère a laissé en mobilier, après son
décès, et qu’ainsi il avait vu plus d’avantage à la laisser
toute entière au citoyen D u b o u y , pour qu’il payât
les sommes promises par les contrats de mariage.
Que le cit. Dubouy trouve inconséquent ou non de
rapporter un fait qui disculpe le citoyen Lagarde ,les
dames Greliclie n’en ont pas moins cru de leur devoir
de ne pas le taire. Mais tout en reconnaissant que le
citoyen Lagarde a pu agir de bonne foi et même avec
précaution , elles n'en sont pas moins fondées à dire
qu’une consultation n’est pas un mandat, et que le
cit. Dubouy , en faisant une procédure et des décla
rations sans pouvoir, s’est mis dans le cas d’ un désaveu.
Ce n’est pas que ce désaveu eût-été absolument né
cessaire, puisque la succession de Françoise-Tixier est
à peu près nulle, comme on l ’établira sur la troisième
question. Il aurait .peut-être même-été plus avanta
geux aux dames Greliche d’adopter ce qui a été fait
en leur nom j car une répudiation conditionelle doit être
acceptée, comme a voulu la faire le renonçant, ou toutà-fait rejetée. Mais la ténacité du cil. D u bou y, à.vou
loir ruiner la succession de son père par celle de sa mère,
a fait que les dam es'Greliche, venant pour la première
fois en cause, ont voulu s’y présenter sans 1 entrave
des faits d’autrüi. Ne pouvant préjuger 1 opinion du
tribunal, elles auraient véritablement débuté avec té
mérité et en dupes,-si pour ménager.le cit. Lagarde ,
elles avaient ratifié sa procédure. Le désaveu a'é té
pour elle un acte prudent, nécessaire, et-quoiqu’on
D a
�.
.
. c a8 )
#
v
dise le cit. D u bouÿ, il ne peut être rejeté , parce qu’il
ne s’agit pas ici d’une simple instruction de procédure,
qu’il y a répudiation en jugement, et que pour cela
seul il fallait un mandat spécial.
D E U X I È M E
Q U E S T I O N .
«
X?opposition au jugement du 11 ventôse an 10, est-elle
recevabLe ?
les prétentions du c i t o y e n Noyer-Dubouy
sont nouvelles et singulières. Aucun autre que lui n’a
vait imaginé, depuis 1790, de rappeler un article de loi
T
o u t e s
qui ne peut plus s’adapter aux formes actuelles, et on
peut dire,presqu’avec certitude,-qu’il n’est pasde journal
parmi ceux qui rapportent depuis long-tems la jurispru
dence du tribunal de cassation et des autres tribunaux de
la république, qui contienne aucun jugement, ni même
aucune tentative pareille. Mais le cit. Noyer-Dubouy
veut être modèle , il veut faire juger la question: on n’a
pas le droit de l’en empêcher. Cependant cette oppo
sition est antérieure au désaveu; ainsi la question n’int’éresserait les dames Greliche , que dans le cas où le
désaveu serait rejeté. Elles ne vont donc s’en occuper
que par subsidiaire, et pour répondre à tous les moyens
opposés par le citoyen Dubouy.
Il est très-vrai que l’ordonnance porte en l’art. III
du titre X X X V , que les parties ne peuvent se pour
voir, par opposition, contre les jugemens en dernier
ressort, quand ils ont été rendus à tour de rôle.
�; ( *9 )
Il est très-vrai aussi qu’une loi rie tombe en désué
tude que tdcito omnium consensu; et il était assez inu
tile de transcrire un plaidoyer de Merlin pour corrobo
rer ce principe, et appliquer à la cause toutes les au
torités qui y sont rapportées. Il ne s’agissait, dans ce
plaidoyer, que delà fin de non recevoir de l’opposition,
après La huitaine, mais' non à tour de rote ; et lé cit.
Merlin n’y a recueilli des extraits des arrélistes de plu
sieurs parlemens, que pour établir que la jurisprudence
du parlement dè Paris, d’admettre les oppositions après
la huitaine, n’était pas uniforme dans le royaume.
Ces citations ne peuvent rien sur la question de
l’opposition aux jugemens pris à tour de rôle , car il
n’y a pas parité de raison ; c’était une jurisprudence
particulière au parlement de Paris, et dans quelques
autres, d’admettre l’opposition après la huitaine; mais
^
le parlement de Paris ne l’admettait pas, quand la cause
était venue à tour de rôle. Il y avait donc une dis
tinction à faire, et cette distinction même juge la ques
tion qui nous occupe.
Avant la révolution, on faisait une différence entre
les causes venant sur placet, et les causes appelées h
tour de rôle. Celles-ci étaient placées au rôle bien longtemsavantd’être appelées. L e rôle était public, à Hiom,
deux fois dans l’année, à la St. Martin et a la St.-Jean, v
et tous les mois au parlement. La lecture publique des
causes prévenait les parties long-teins à l’avance ; et
comme la loi était précise, et l’usage: des tribunaux
constant sur ce point, il fallait bien se tenir prêt au
�.
( 30 '}
.
tour de rôle; ce qui, au reste, n’était pas très-urgent ;
caria multiplicité des placets occupait la majeure partie
des audiences.
Aujourd’hui, toutes les causes doivent être placées
au rôle, sans distinction, d’après la loi du 24 août 1790,
et la loi du 21 ventôse , relative aux droits de greffe.
Ainsi il est contraire aux principes reçus, qu’une loi
rigoureuse qui ne s’étendait qu’à une partie des causes,
s'étende aujourd’hui facilement à toutes les causes ; car
les peines ne peuvent être que restreintes, mais non
étendues au-delà de leurs strictes dispositions} et certes
la fin de non recevoir d’une opposition, est bien une
peine prononcée contre le plaideur en retard.
Si le tribunal de cassation a jugé que l’article de l’or
donnance n’était pas tombé ¡en désuétude pour Top
position après la huitaine, c’est que dans la révolution
la fin de non recevoir avait été presque généralement
prononcée par les tribunaux : mais il ¡n’en est pas de
même de la fin de non recevoir des causes venues à
tour de rôle. Aucun jugement conforme au système du
cit. Dubouy ne peut être cité par lui depuis 1790 ;
et comme le mode d’appel des causes a changé à cette
époque, il est clair que ce changement a fait tomber
en désuétude l’article de l’ordonnance tacito omnium
consensu. L ’usage universel a expliqué la loi du 24 août
1790. En cette partie, tous les tribunaux ont admis l’opposiiion aux jugemens en général, pourvu qu’elle fût
formée dans la huitaine. Ainsi il ne s’agit plus de re
chercher la loi ancienne qui permettait aux parties de
�( 3i )
mettre au rôle les causes qu’il leur plaisait, puisque
la loi nouvelle ôte cette liberté et y assujettit toutes
les causes. L e mode d’interprétation de ces lois est donc
suffisamment justifié par quatorze ans de jurisprudence 5
car consuetudo optima est legum ¿nterpres (1).
Mais au reste le cit. Dubouy est non recevable luimême à demander la fin de non recevoir, par deux
motifs ;
'
i.° L ’opposition au jugement a été formée le 18
ventôse an 10; elle a été suivie de la procédure du
désaveu dont Dubouy a interjeté appel.
Orj par requête du 28 thermidor an 10, il a conclu à
ce que son appel du désaveu fût joint à ¿a cause pen
dante stir Copposition.
Il a donc reconnu que cette opposition était rece
vable , puisqu’elle faisait une cause. Ainsi il a couvert
la fin de non recevoir qu'il oppose.
2 ° L a cause a été contradictoirement plaidée sur
Le fo n d s } le 14 fructidor an 1 0 , quand le tribunal a
appointé. L a fin de non recevoir devait encore y être
proposée à Limine litis ■elle est donc couverte, et le
cit. Dubouy doit, malgré. Lui, plaider le fonds.
( 1 ) D epuis la rédaction de ce m ém oire, le tribunal de cassa
tion a jugé la question en thèse. I l a cassé, le 3 pluviôse an 12 ,
un jugem ent du tribunal de N eufchâteau, qui avait déclaré une
opposition à un jugem ent en dernier ressort non recevable ,
parce q u ’il était rendu à tour de rôle.
Voy. le Journal des audiences de cassation, par D en ev ert,
an 1 2 , page 2 i a .
�32 )
C
T R O I S I È M E
QUESTION".
E n quoi consiste la succession de
F r a n ç o is e T i x
ie r
?
Françoise Tixier n’a traité avec ses enfans que pour
éviter que cette question se présentât après elle.
T ous ses enfans étaient seshériliers par égalité, même
avant le 17 nivôse , puisqu’elle n’en avait avantagé au
cun. La forclusion de ses filles était abolie depuis le 8
avril 1791.
A la vérité, le cit. Dubouy dit : Je suis donataire de
mon père ; et après le prélèvement de ma donation ,
mes cohéritiers ont partagé le surplus sans moi : mais
je dois prélever aussi sur le surplus ma portion, au
moins des biens de ma mère ; ainsi il faut connaître sa
succession.
Mais le cit. Dubouy ne veut pas se rappeler que par
son contrat de mariage , son père , en lui léguant le
domaine du Bouy après son décès et après le décès de
Françoise T ix ier, en le chargeant de payer à chacune
de ses deux sœurs 2,000 liv. qui leur resteraient dues
alors, par la succession des sieur et dame Noj/er, a dou
blement marqué par ces expressions que les deux suc
cessions étaient confondues, et que les dettes de la
mère devaient se payer indifféremment par la succes
sion du père, qui les englobait toutes deux. Aussi la
mère, qui se fuit représenter à ce contrat, ne donne
rien.
,
L a mère n’a donc fait que ratifier en quelque sorte
celle
�'( 33 )
cette confusion des deux successions, en traitant avec
ses enfans, réunis en l’an deux(i). A la vérité on peut
objecter qu’alors les circonstances n’étaient plus les
mêmes, parce que la loi du 17 nivôse voulait un par
tage par égalité. Mais ce ne sont pas les enfans seuls
qui ont traité én vertu de cette loi ; la mère elle-même,
que la loi n’obligeait pas, est venue traiter avec eux
pour ses droits et reprises; et qu’a-t-elle fait autre chose
que de les confondre dans la succession du père, comme
déjà ils l’étaient respectivement à Noyer-Dubouy.
Ainsi, que la loi du 17 nivôse soit ou ne soit pas, il
( 1 ) L e cit. Duboivy conteste , à la page 41 de son m ém oire,
l ’exislence de cet acte comme non vérifié ni enregistré. Il le
produisait d’abord lu i-m ê m e; il en argum entait, et il l ’a sans
doute retiré de ses pièces. Mais il produit, sous la cote 1 8 , un
acte du même jo u r , quoique aussi non enregistré, et il y a
souligné lui-même ce qui suit : C onvenu en outre que dans la
p résente cession sont com pris les droits cédés par notre mère
com m u n e, p ar acte de c e jo u r d h u i; 2.° dans ses causes d ’appel,
cote 4 0 11 il excipe plusieurs fois du traite fait entre la mère et
les enfans , et il le date, à chaque fois , du 22 fructidor an 2;
3.° il en assure encore l’existence à la page 7 de son mémoire ;
4 0 on lit dans le jugement du 25 ventôse an 5 , folio 5 R . ° , ce
qui suit : « ¿¡.près que tous les héritiers eurent pris des arran~
gem ens avec F ra n ço ise T ix ic r leur m ère, relativem ent à sa
co n stitu tio n de d o t, gains , avantages m atrim oniaux et autres
créances qiCellc avait à répéter contre la su ccession de so n
mari , e tc . « Ce traité est donc un acte constant au procès. L e
c ^- D u b o u y , qui en a toujours e xcipé, 11e peut donc refuser de
le remettre dans sa production.
E
�pas m o i n s vrai que le: cit. Dubouy n ’a eu- à
prendre que le domaine du Bouy après le décès de, ses
père et 'mère, a la charge de payer 6,ooo liv. dus par Les
deux successions : et le s a u t r e s héritiers o n t eu à p r e n d r e
ces 6,000 livres , et le surplus des biens comme formant
l a succession ab intestat, p l u s les bestiaux et C o m e s
tibles qui furent laissés à la mère lo r s de l ’a r r a n g e m e n t ,
et pris sur l a succession paternelle.
' C ’est ainsi que toutes les parties l’ont e n te n d u non
'seulement en l’an 2 , mais lors du ju g e m e n t de ventôsè
an 5, puisqu’elles laissèrent toutes ordonner le partage
de la succession du père, sans demander celui de la
n ’ e n est
mère ; puisque le cit. Dubouy se laissa notamment cont
.
»
Í■
^
damner à rapporter les 6,000 liv. dues par la sucçession
du père et de La mère, sans proposer de compensation
de cette somme avec les prétendues reprises qu’il de
mande aujourd’h u i, et qu’il fait frapper sur la succès
.
. .
.
<,
sion paternelle.
'
_
Cette intenIioti des parties est claire; elle é.jait fon
dée sur les actes de famille, à l’exéculion- desquels
chacun se rendait; aucun ne doutait alors que la suc
cession de la mère ne fût composée seulement de son
m obilier, tel qu’il était spécilîé parle Irailé de l’an 2 *
et si l’appelant a varié au P u y, c’est que la levée des
scellés lui avail donné le prélexle de se créerune nou
velle source de réclamations.el de procès.
Ce n ’est pas toul que lesiparlie-s l’aient eYilendu ainsi>
car c’est aussi de celle manière qu’elles devaient l’en
tendre j les actes les y obligeaient.
' l ' '■ ,l
�'
. .
(
35
}
Françoise Tixier avaitf-elle le droit de traiter avec
ses enfans eu l’an 2? et peut-on appeler1l’acte'qu’elle
a fa it, un partage anticipé d’une succession qui s’est
ouverte cle nouveau à son décès ; car voilà le système
actuel du citoyen Dubouy. ■
‘ ’Les principes sur les démissions ne s’appliquent pas
à la cause; ce n’est pas ici un abandon fait par une mère
de ses
biens meubles et immeubles ', évidens. connus,'
1
desquels elle se désaisisse pour eux, et qu’ils partagent
en sa présence.
“
1
Il n’y a dans l’espèce ni biens connus, ni désaisisse
ment effectif, ni partage actuel. Ce n’est donc pas ce
partage anticipé dont excipe le cit. Dubouy comme
moyen principal; il n’y a donc pas de démission.
C ’est un traité sur des droits inconnus , litigieux;
c’est une vente à fonds perdu de ces mômes droits,
autorisée par l’article 26 de la loi du 17 nivôse;, qui
était encore en vigueur au décès de la mère.
Dans le cas même où la mère aurait prévu le rétablisse
ment des actes de sa famille et le rapport de la loi du
17 nivôse dans son effet rétroactif, la cession qu’elle
faisait était valable ; car le cit. Dubouy devait s’en tenir
à son domaine, et alors ses reprises fra p p a ie n t sur la
succession ab intestat, c’est-à-dire, contre les autres
héritiers.
E h bien, elle vend ses reprises à fonds perdu à ceux-«
ci ; et comme il lallait, suivant la loi, que les autres
successibles y consenlissent et y intervinssent, le cit.
Dubouy y est intervenu et y a consenti. L e vœu de la
loi a donc été re m p li.
�.
,
(
3
6
)
.
.
...
Il ne dira pasqué c’est un acte forcé par la crainte
révérentiellé; car la loi n’admet pas ce m oyen, lors
qu’elle exige le consentement des successibles, sans
distinction. •
,
\' <
A u reste , quand ce ne serait pas là une vente h
fonds perdu , on demanderait en vertu de quelle loi
il peut être défendu à une mère de traiter avec ses
enfans,sur des droits susceptibles du plus grand litige;
les lois protègent les transactions comme l’acte le plus
utile à la société , puisqu’il éteint les procès ; et se
pourrait-il que les procès, entre une nière et dés enfans,
fussent une chose nécessaire et non susceptible d’ar
rangement ?
;.
Ce système choque; car si Françoise Tixier pouvait
agir et plaider, sans conlredit elle pouvait transiger ;
car la transaction a lieu de Lite motâ aut moçendâ.
Or qui contestera à Françoise Tixier le droit de de-mander ses droits et reprises en l’an 2? Mais parce que
rien n’était plus confus et inextricable que ses droits;
parce qu’elle savait elle-m êm e que son mari, en lui
donnant l'usufruit de moitié , n’avait pu reconnaître
12,000 liv. a u -d e là de la quotité disponible; parce
qu’elle .savait qu’il landrail prouver Y Linde habuit de
la première reconnaissance, Françoise Tixier a fait,
avec ses enfans, une transaction, que la nécessité et son
intérêt rainaient obligée de faire avec les étrangers les
plus divisés d’intérêt avec elle; et c’est là cette transac
tion qu’on veut confondre avec une démission , avec
une simple libéralité dictée par la tendresse maternelle,
�*
■( 37 )
spontanément, sans nulles circonstances, et pour;la seule
utilité de ses enfans.
.
Si la mère a traité avec tous, il n5y a là que de la
ressemblance avec une démission, parce que la mère
était bien obligée de traiter avec tous ceux qui avaient
jun procès à soutenir contr’elle.
Ainsi, vouloir que cette réunion nécessaire de tous
les enfans change la nature de l’a c te , ferait .retomber
dans le système qu’on ne peut transiger avec ses enfans.
Lorsque le fils du sieur de Langhac(i) a demandé par
deux fois, au tribunal de cassation, la nullité d’ un traité
fait avec son père pour ses droits maternels, il n’osait
pas même plaider qu’on ne peut pas traiter avec son
père; il faisait valoir des moyens rescisoiresi, et cepen
dant le traité a été maintenu. Une transaction peut donc
être à l’abri, même de la puissance paternelle. Préten
dre que le rapport de l’effet rétroactif de la loi du 17
nivôse a annullé le traité fait avec Françoise T ix ie r ,
c'est vouloir oublier qu’elle n’avait que faire de la loi
»
du 17 nivôse. Car d’une part, elle traitait pour ses re
prises, et de l’autre pour un usufruit qui n’en a pas
été moins maintenu par les lois postérieures.
Françoise Tixier n’a donc laissé de succession que dans
son mobilier et non dans ses reprises; et en partant de
cette vérité la plus évidente, la plus naturelle, le tri
bunal élague toutes les autres questions du procès. Car
le cit. Dubouy a pris sa portion du mobilier, il n’a pas eu
idée de prétendre qu’on en eiit volé : il a donc tout sou lot.
( 0 Journal de Sirey. Jugcm cnldecassationclu 25friiu.rf an 10.
�( 38 )
^
Tout conduit h penser que telle a toujours été Fintention elle but des parties, et que c’est là la plus exacte
justice à leur rendre. Mais pour suivre le cit. Dubouy
dans ses prétentions, et s’il pouvait faire composer la
succession de Françoise Tixier de ses droits et reprises,
voyons quel en serait le résultat.
•Qu’aurait obtenu Françoise Tixier, si elle eût voulu
plaider en l’an 2?
Ses droits étaient-ils fixés parles deux reconnais
sances, ou par la consistance réelle de la succession de
son pèrë et de sa sœur ?
Pour celte explication, il faut se baser sur quelques
principes.
Toutes les reconnaissances que fait le mari, après le
mariage, sont réputées des libéralités, si la femme ne
prouve undè habuit, et alors ces libéralités n’ont d’efïet
que pour la portion dont le mari pouvait disposer. ConJessio de dote receplâ facta per m aritum , constante
matrimonio, valet Lu vim donationis. Et il faut, comme
dit Coquille , enquérir et prouver la vérité du fait, si
on veut faire valoir la reconnaissance a u -d e là de la
portion disponible. Ainsi renseignent encore Ricard et
Furgole. Ainsi l’a jugé le tribunal, le 21 prairial an 10,
en ordonnant l’apport de l’inventaire d’une succession
indiquée comme 1 undè kabuit , dans une reconnais
sance semblable.
Il est encore de principe, qu’en pays de droit écrit,
où fe sieur Noyer était domicilié, le mari et la femme
ne peuvent se faire de donations pendant le mariage,
�( 39 )
et cela par une prévoyance de la loi, ne mutuoamore
inter se Lnvlcetn spoLLentur.
A la vérité ces donations prennent leur effet par
la m o rt, si elles n’ont pas été révoquées auparavant.
Mais parce quelles ne font qu’une donation à cause
de mort, elles se règlent par la quotité disponible qui
a lieu à l’ouverture de la succession.
O r , au décès du sieur N o y e r , la loi du 17 nivôse
régissait toute la république; et si elle effaçait les prohi
bitions du droit é c r it, en donnant toute latitude aux
dispositions entre époux, au moins elle les restreignait,
quand il y avait des enfans, à l’usufruit des choses don
nées, si elles n’excédaient pas la moitié des biens. (Art.
i 3 et 14).
Ainsi Françoise Tixier devait prouver en l’an 2, la
consistance de la succession liquidée de son père.
Il fallait faire estimer les biens vendus non par le
/
curateur, mais par le sieur Noyer en son nom ; non
pas-suivant les évaluations ridicules, que le cit. Dubouy
leur donne au taux actuel, mais à la valeur de 1760.
11 fallait établir la consistance du mobilier, et ensuite
déduire les charges et les dettes. Ces dettes sont con
sidérables, puisque le seul article des reprises du sieur
N o yer, justifiées par la requête du 16 avril 17 6 0 , se
porte à une somme de 5,029 liv. 16 s., outre les 2,oool.
payées au trésor public, 1,200 liv. au sieur Üepille, et
Ö9.liv. 7 s', au sieur Dufraisse. P é jà , par la comparai
son de celle seule dette avec les biens, il est évident
en simple aperçu,'que si le sieur .Noyer fit une recon-
�.
,
(
4 0
3
.
naissance de 5,ooo à sa femme, c’était pour qu’elle ne
fût pas humiliée de n’avoir rien à donner à ses enfans,
lors de leur établissement, et pour la mettre à même
de donner à chacun 1,000 liv.
Mais quand il y aurait quelque excédant, tout ce
que Françoise Tixier n’aurait pas justifié lui apparteten ir, dans les reconnaissances , devenait simple libé
ralité, et alors combien de diminution cette libéralité
n ’éprouvait-elle pas?
D ’abord le cit. Dubouy faisait passer, avant tout,
le don ou legs du domaine , puisqu’il lui était assuré
par son contrat de mariage, et puisque les reconnais
sances ne prenaient effet qu’à la mort.
Les deux reconnaissances de 5,000 liv. et de 12,000 1.
ne valaient en l’an 2 que pouV l’usufruit de ces deux
sommes, mais cet usufruit était confondu dans l’usu
fruit de moitié qui était aussi légué par le sieur Noyer
à sa femme ; il absorbait toute la quotité disponible.
Les deux reconnaissances devenaient donc nulles et
sans effet.
Non seulement l’usufruit de moitié absorbait tout,
mais il ne pouvait avoir lieu concurremment avec lo
don du domaine, sur lequel l'usufruit ne frappait pas ,
qu’autant que la légitime des puînés devait rester inlacle, et sans charges suivant les principes, ce qui ne
se pouvait pas. Françoise Tixier n’était donc pas fon
dée à plaider pour obtenir les deux reconnaissances.
Il est inutile d’occuper le tribunal de la demande ridi
cule que le sieur Noyer avait formée de 43,000 liv. ,pour
représentation
�■
.
1
4
1
)
Teprésentation des reconnaissances supposées enlevées,
et du testament de sa mère (quoiqu’il en soit nanti) ;
.il a abandonné celle demande qui d’ailleurs ne méri
tait pas qu’on s’occupât sérieusement de la combattre.
Françoise Tixier était encore héritière de sa sœur,
mais les droits de celle-ci étaient liquidés par un traité
dont le cit. Dubouy n'a demandé le prix qu’en l’an 8.
Or ce traité ne donne pas une somme exigible, mais
une rente qu'on ne peut forcer à rembourser : et tout
prouve qu’elle avait été remboursée par le cit. Noyer
p ère, puisque sa belle-sœur acheta des immeubles pour
à peu près ce qui lui était dû.
Ces immeubles ne font pas partie de sa succession,
puisqu’elle les a revendus au sieur Noyer père ; ainsi
quand celte succession ne serait pas confondue dans le
traité, elle n ’en serait pas moins absolument nulle.
Voilà donc à quoi se réduit la pré ten lion du citoyen
D ubouy, sile tribunal veut faire discuter, à grands frais,
le mérite des reconnaissances; et si, en les approfondis
sant de plus en plus , il ne se trouve pas encore plus
fortement convaincu , que Françoise Tixier a fait une
transaction respectable et nécessaire, et qu’en traitant
avec ses enfans, ut à fraterno certamine eos prœserva•'et, elle a prudemment calculé leurs intérêts et le sien.
Quel est Le droit des parties sur La succession T i x i e r ?
L
e
citoyen D u b o u y a un testament de sa mère qui
le fait héritier universel. Ce testament est ologra ph e, et
F
�,
. .
( 42 )
.
.
.
daté de 1789 î mais il n’est pas enregistré, ainsi ce n’est
pas une pièce à produire.
Ce testament, dicté évidemment parle cit. Dubouy,
semble tacitement révoqué par son contrat de mariage
qui est postérieur, et dont les clauses semblent con
traires à ce testament, au lieu d’y renouveler l'institu
tion , il serait aussi annullé de droit par le traité de
l ’an 2. Car un testament est ultlmœ çoLantatis testatio.
Or un acte de 1789 n’était pas la dernière volonté de
Françoise Tixier.
Mais à quoi servirait ce testament, dès que la succes
sion de la mère ne consiste que dans son mobilier ;
il est partagé ; et voilà ce qui faisait prendre au mot
le cit. D u b o u y , lorsqu'il se disait seul héritier d’une
succession nulle , parce que cette nullité même rendait
illusoire la promesse de 1,000 livres, que la mère avait
faite à ses filles lors de leur mariage.
Il ne servirait à rien encore si le tribunal voulait
annuller le traité de l’an 2 ? et fixer la succession de la
m ère, carie pis aller serait d’adjuger la reconnaissance
de 5,000 liv. la seule que son époque puisse faire res
pecter; et alors les dames Greliclie y auraient i^oooliv.
chacune, des que cctle somme leur est promise avant
le testament. Ce serait donc à leur égard un partage
par égalité, malgré l’institution.
Mais soit que la succession maternelle se compose de
mobilier j ou de ces 5,000 liv., ou de toute autre chose,
le cit. Dubouy doit toujours rendre compte des 6,oool.
qui sont une charge de sa donation, ce qui est Iota-
�'
( 4 3 ')
lement distinct du procès actu el, et ce qui est jugé.
Il a cherché jusqu'à présent à retarder le paiement
de cet le somme , et il y est parvenu, en plaidant qu’il
fallait attendre la décision relative au partage de la
mère; le moment est donc venu, non'pas d’y rapporter
ces 6,000 liv. mais de les payer , car il n’est donataire
qu’à cette condition.
Ainsi ce procès si compliqué par les conclusions si
souvent changées du cit. D u b o u y , se simplifie extrê
mement, et se réduit à dès points certains.
L ’opposition au jugement par défaut est recevable;
ainsi le jugement surpris par le cit. Dubouy est comme
non avenu.
L e désaveu est fondé au cas qu’il ait été nécessaire;
mais quand les sieurs Greliche auraient répudié au
bureau de p aix, et même en jugement, une succession
parapliernale à leurs femmes, celles-ci ne sont pas liées
par cette répudiation ; c’est une nullité viscérale ; les
maris n’ont promis aucune garantie. S’il y avait enga
gement de leur p a rt, ce serait le sujet d’une action
particulière à diriger contre eux; mais cela ne produi
rait pas une répudiation.
' D ’après cela, le partage de la succession de Françoise
Tixier doit êlre ordonné enlre toutes les parties ; mais
celle succession se réduit au mobilier, puisque les droits
liligieux et incorporels, dont elle pouvait se composer,
sont vendus par transaction.
Si le tribunal annullail celle transaction, alors la suc
cession de Françoise Tixier n’en serait pas moins réduite
•
J
F 2
�( 44 )
à rien , soit parce qu’elleiest décédée sans avoir révoqué
sa répudiation de 1760., soit parce que les recouvremens des biens de son père sont absorbés par les dettes,
soit parce que sa sœur ayant ^acquis des ¡biens, pour le
prix de sa cession: de droits , les a revendus.
Si le tribunal donnait efiet aux reconnaissances sans
les compenser avec les reprises du cit. Noyer père, il
annullerai sans doute ¡celle de l’an 2 , -comme n’étant
qu’ un avantage indirect, tendant à surpasser la quotité
disponible par la loi du 17 nivôse, et ne donnerait effet
qu’à celle de 1775.
La succession de Françoise Tixier une fois connue,
se régie aisement; il est à peu près égal que'le citoyen
Dubouy en soit héritier ou ne le soit pas; mais le tri—
bunalnepeul avoir égardautestamentde 17 8 9 ,puisque
i.° il n’est pas enregisti’é; 2.0 il est annullé par le con
trat de mariage de 1790 , et le traité de l’an 2.
Il faut donc en revenir au point d’où on est parti,
c’esi-à-dire , au jugement du 25 ventôse an 5 ; tout est
réglé par lui, et le tribunal n’a pas de guide plus sûr;
car le cil. Dubouy avait tout demandé alors, comme
on peut le voir par le procès-verbal du i . er pluviôse
precèdei)I , el ce iait n’est pas détruit par de simples
réserves qu’il a laites au Puy postérieurement et dans
d’autres circonstances. Ces deux pièces du procès mar
quent assez que les parties entendaient faire terminer
toutes leurs contestations a celle époque, el celle in
tention fait crouler toutes les procédures, toutes les
conclusions, toutes les injures du cil. N oyer-D ubou y;
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.
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5
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car il devait alors bien expliquer ses prétentions, et il
les avait expliquées ; toutes les considérations ont été
pesées alors, et il ne p eu t, sans mauvaise f o i , faire
renaître un procès d'un autre procès, et exiger que la
Justice partage avec lui ses embûches et ses cavillations.
s
M .r M A R C H E I X , Rapporteur.
L . F. D E L A P C H IE R , Homme de loi.
E A Y E , Avoué,
iI
.
*
L
.
R I O M , DE L ’I MP R IM E RI E DU P A L A I S t CHEZ J.-C. SALLES.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Noyer, Jeanne. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
successions
confiscations
fisc
abus de confiance
avoués
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Jeanne et Marie-Gabrielle Noyer, Pierre et Joseph Greliche, leurs maris, habitant à Mozun, intimés ; contre Joseph Noyer-Dubouy, habitant à Chamalière, appelant ; en présence d'Anne Noyer-Lagarde, avoué au Tribunal civil de Clermont, intimé.
annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1750-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0237
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0236
BCU_Factums_G1319
BCU_Factums_G1320
BCU_Factums_G1322
BCU_Factums_G1324
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53736/BCU_Factums_M0237.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chamalières (63075)
Mauzun (63216)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
avoués
confiscations
fisc
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53735/BCU_Factums_M0236.pdf
a78e1507435a379a61898c62ff18e691
PDF Text
Text
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MÉMOIRE_
P o u r Je a n -Jo s e p h -M a rie
N o y e r - D u b o u y t , habitant
de la commune
C h amalières -
de
,
appelant ;
N O Y E R et P i e r r e
G R E L I C H E , son mari ; M a r i e G a b r i e l l e
N O Y E R
et J o s e p h
G R E L I C H E , son ma r i , habitans la
commune de Mozun } et A n n e N O Y E R -
C o n t r e
Jeanne
L A G A R D E , avoué près le Tribunal
civil de première instance de l’arrondissement
de C lerm ont-Ferrand, intimés.
Quand une causc a été appelée a u tour du rôle;
que le jugement a été rendu par défaut!. faute de
plaider , et en dernier ressort, il est définitif,
l'opposition ne peut plus être reçue. -Art. I I I du titre
X X X V de L'ordonnance de 1667. Domat, lois civ les , litre I I , art. X V I I , page 230.
-
F
MA
A
R I E N T ix ie r ,
I
T
.
commis
S
.
„
...
...........
greffier et receveur des gages de la
cour des aides de C lermont - Ferrand
et Jeanne de L eym erie , son
�( a )
.
. .
ép ouse, eurent trois enfans ; i.Q M ichelle T i x i e r , qui fut religieuse ;
2.° M arie-Gabrielle T ixier
qui vécut célibataire ;
3 °. Françoise T ixier
qui fut mariée à Jean-Baptiste-Joseph N o y er-D u b o u yt,
le 9 novem
bre 1750.
Sont nés de ce mariage cinq enfans ;
1 .° Marie N oyer , fils aîné.
2 .° Anne N oyer-Lagarde , fils cadet.
3 .° Jeanne N o y e r, épouse de Pierre G reliche.
4 .0 M arie-Gabrielle N oyer , épouse de Joseph G reliche.
5 .° Jean-Joseph N oyer-D ubouyt.
'
Les quatre premiers enfans sont héritiers testamentaires de Jean-baptisteJoseph N oyer-D u b o u yt, p è re , à l ’exclusion de J e a n - J o s e p h N oyerDiibouyt.
Noyer-Dubouyt est héritier de Françoise T ixier , sa mère , soit par
son testament olographe du 20 ju illet 1789 , soit par la répudiation qu'en
ont faite le8 héritiers du père co m m u n , par acte du 18 floréal a a V ,
réitérée par le jugement du 6 floréal an 9 ; enfin par l’acceptation qu’ il a
faite, soit par acte du 18 floréal an
5 , par autre acte du 1 5 thermidor an
9 , par jugement en dernier ressort du 11 ventôse an 10 ,
et par l ’acte de
signification d’ice lu i, le 29 prairial même année.
Françoise T ix ie r , mère com m une, en se mariant avec Jean-BaptisteJoseph N oyer-D ubouyt, fut instituée héritière de Marien T ix ie r , son père,
à la charge d’associer à ladite institution M arie-Gabrielle T ix ie r , sa sœur.
E lle eut en avantage et préciput 1,000 l i v . , son trousseau fut estimé
35o
l i v . , les .bagues et joyaux 120 l i v . , le gain de survie 120 l i v . , les habits
île deuil 60 liv ., et la pension viduaire 75 liv,
Marien Tixier mourut le 25 mars 1760. N oyer-D ub ou yt, p ère, se saisit
de la succession pour sa femme et pour sa belle-sœ ur, M arie-Gabriello
Tixier.
Il prit lui-même au moment du décos
5 6,000 liv. en or qui étaient dans
¡une armoire de la maison.
Françoise T ix ie r, son épouse, trouva dans un secrétaire 6,000 liv, en
2 5 o louis en or qu'elle remit à son mari.
L e lendemain du d é cè s, N oyer-D ubou yt, p ère, fit emporter dans sa
m aison, à M o z u ij,le s meilleurs meubles qui étaient daus la maison,
�.
3 } .
.
.
.
Il se saisit des papiers et des titres actifs qui constituaient la fortune de
son beau-père, b ille ts, promesses , contrats de rente , obligations, etc.
Il retira une somme de 8,000 liv. qui ¿tait en dépôt chez M. Reboul ,
ancien lieutenant général.
Comme Marien T ix ie r, en sa qualité de receveur des gages de la cour
des aides de Clermont-Ferrand , était comptable de ses exercices à la
chambre des comptes de Paris ,
Il fut réputé débiteur, soit d’ un prétendu débet de 10,000 l iv ., soit
d’une somme de 70,000 liv . pour am endes, d isait-on , encourues par dé
faut , faute de formalités.
L e i.e r avril 17 6 0 , huit jours après son d écès, le fisc fit apposer le3
scellés sur tout ce que
Jean-Baptiste-Joseph N oyer-D ub ou yt, mari
de
Françoise T ix ie r , avait laissé dans la maison ; il fit aussi séquestrer les
immeubles.
L ’on fit vendre judiciairement le m obilier qui avait été saisi': la vente
procnra une somme de 1,259
qui resta déposée au greffe.
L ’on fit procéder au bail judiciaire des im m eubles; ils furent portés à
un très-bas p r ix , parce que les adjudicataires n’étaient que les prêtp..
noms du mari de Françoise Tixier. ■
Les choses restèrent en cet état jusqu’au 9 mai 1 7 6 4 , où N oyer-D ubouyt,
p ère, présenta une requête au roi par laquelle, comme il est d’ usage , il
amoindrit absolument la succession; il fut bien éloigné de parler de l’ar
gent dont il s’était em paré,
de celui que lui avait remis son épouse, du
dépôt qui était chez M. R eb ou l, ni des contrats, obligations, b illets, etc.
Par arrêt du conseil d’état du r o i, la succession fut acquittée de la de
mande énorme, qui lui était faite , moyennant 2,000 liv. ; et il fut dit dan 3
l ’arrêt, que si le mari payait cette som m e, il était subrogé sur les biens
de son épouse pour cette somme de 2,000 liv.
11 est dit dans la requête présentée au r o i , que les héritiers de Marien
T ix ie r, Françoise et M arie-G abrielle T ix ie r, avaient, par acte déposé au
greffe du 14 avril 176 0 , répudié à sa succession. ( Cette répudiation n’a
jamais été connue au p rocès, on ne peut la retrouver au pr^ffp )
Enfin en supposant cette répudiation avoir existé, elle 11’eut plus lieu ,
après l ’arrêt du conseil d’état, et la succession fut reprise.
N oyer-D ubouyt, en sa qualité de mari et de b eau-frère, en fit la ges».
1
2
�.
(4 ).
..
.
tio n le 19 juin 1764511 obtint les mains levées des saisies-arrêts qui
avaient été faites par les cautions de la charge de receveur des gages de
Marien T ix ie r, et il toucha 1,400 liv. chez M. Berard-de-Chazel, 600 liv.
chez M. de Y ic h y -d e -V a rv a s, et 1,2 5.9 liv. qu’il retira du greffe; de sorte
que sans les immeubles et meubles qu’ il avait emportés, il avait en ses
mains , non compris les contrats , obligations , etc. , près de 54,000 liv .
L e même jour ig juin 1764> sans besoin et sans formalité de jus
tice , il vendit la maison de Marien
T ixier , située à Clermont.
Par
l ’énoncé de cette vente , il paraît qu’un huissier , qui sans doute avait
été nommé curateur pour la forme , figure à cette vente ; il délègue au
mari 3,000 liv . , et ce dernier délègue à payer les 2,000 liv. portées par
l ’arrêt du conseil , fixant le débet de la succession. Cette maison vaut
aujourd’hui 10,000 liv.
L e 14 juin 1765 , il fait un espèce de compte à Marie - Gabrielle
T ixier , sa belle-sœ ur , et porte la succession de Marien T ix ie r , son
beau-père à 1 1 ,0 8 4
5 et Par une réduction qui n’est pas expliquée ,
Marie-Gabrielle T ixier paraît fixe? Cé qui llii 'doit revenir à 2,200 i i v . ,
et de suite elle cède ses droits à sa sœ u r, Françoise T ix ie r , et à son
beau-frère
uxorio nomine. Il annonce devoir encore à sa belle - sœur
700 liv. q u i, d it- il, proviennent de titres qui étaient parmi les papiers
de Marien T ix ie r , son beau-père ; il n’est point expliqué ce que sont
ces titres , ni par nature, ni par quantité".
.
M arie-Gabrielle T ix ie r , qui restait à C lerm o n t, fit l’acquisition d’ un
bien situé à P ro u va re l, commune de Serm entison, canton de C om v
pière ; les actes d’acquisition sont en date des 27
décembre 1765 .,
i'-i février 17G 6 , i 5 avril 1767 : ce bien vaut aujourd’hui 6,000 liv.
L e y mai 1767 , le mari vendit encore en son nom les jardin , grange
et colombier de son épouse : on ne voit aucun m otif ni autorisation de
justice pour ces ventes ; il a vendu encore les vignes , les terres , etc.
L e 12 février 17 7 5 > Marie N oyer épousa Joseph G reliche ; on lui fit
une dote de 6,000 liv. ; savoir
5 ,000 liv . du chef du p ère, et 1,000 liv.
du c h e f de Françoise T ixier ; .on la fit renoncer aux deux successions.
L e 8 novembre 1775 , Noyer-Dubouyt , p ère, fit à soi} épouse une
reconnaissance de
*j,000 liv. provenant , est-il dit , (les deniers reli~
rds du g reffe , d’autres deniers provenons de la vente
des maisons ,
�.
.
, ( 5 }
ja r d in , vignes et terres situés à Clermont ; contrat d e rente à prix d’ar
g en t , et meubles , le tout provenant de la succession de Maricu T ixier ,
son
beau-père; n'est point comprise dans cette reconnaissance la créance
duc par A/met. Tardif.
L e a i juillet 1 7 7 7 , Jeanne N oyer épousa Pierre G reliche: comme à sa
sœur M arie-^abrielle N o y e r, on lui fit une dote de 6,000 l i v . , dont
5,ooo Uv. du clief du \>ère,et 1,000 du c h e f de Françoise T ix ie r ; 011 la
fit aussi renoncer aux deux successions.
Marie-Gabrielle T ixier , sœur de la mère com m une, mourut au mois
de décembre 1779 *, sa succession, tant mobiliaire qu’ im m obiliaire, échut
à Françoise Tixier ; N oyer-D ub ou yt, son m a ri, s’en empara.
Le 25 juin 1783 , Françoise T ixier voulut jouir à part du ménage de
ses biens paraphernaux , de ce qui lui appartenait provenant de la suc
cession de sa soeur ; elle fit donc assigner son mari à cette fin ; il ne
comparut pas , elle obtint un petit défaut.
L e 20 ju illet rySQ , Françoise T ixier fait un testament olograp he;
elle institue Jean-Josepli-Marie Noyer-Jbubouy 1“ süll illy le plus jeune ,
son héritier géut-nil et universel.
Toutes les expressions de ce testament portent avec elles le tableau
de la candeur , de l’ingénuité , de la vérité -et de l’exacte probité. La
dame Noyer parle à sou mari , elle Pinvite de reconnaître à son héritier
tout ce qui lui peut revenir, en conscience et p robité, des successions de
M arien T i x i e r , son père , et de M a rie- G abri elle T ix ie r , sa sœur.
E lle dit à son mari ;j e vous ai remis moi-même la somme de 6,000 Uv.
en 2 5 o louis en o r , que j ’avais prise dans l’armoire de mou père.
Vous avez louché de M .
Reboul
8,000 liv. qu’il avait en d ép ô t,
appartenant à mon père.
Vous avez vendu mes biens ; j e n’ ai rien de reconnu que 5,000 liv. Je
vous supplie de reconnaître tout le surplus à mon héritier , Jean-JosepkM a rie Noyer-Dubouyt.
Jean-Joseph-M arie N oyer-D ubouyt , fils p lus jeiiQe > a p p elan t,
s’est
marié le 21 novembre 1790. L e père com m un, de son "chef seulement ,
iui donna le domaine du Bouyt 5 il le clu ugea, après sa m oit , de payer
4 ;ooo iîv-, , d© son çh ef ) u ses lient.ers , et 2,000 liv. a Jeanne et
�.
.
.
(6 )
.
.
..
Marie-Gabrielle N o yer, qui leur avaient été promises par Françoise T ix ier,
leur mère.
L e 19 thermidor an 2 , Jean-Baptiste-Joseph Noyer-Dubouyt , père ,
fit un testament authentique ; il reconnut à Françoise T ix ie r, son épouse,
la somme de 12 .0 0 0 /¿V. provenant du prix des ventes qu’ il avait faites
de d ifférais meubles et immeubles des successions de son beau - père et
de sa ■belle-sœur. îl déclare que cette somme ne se confond point avec
les reconnaissances précédemment faites.
Comme il avait fait renoncer ses filles et ses fils à sa succession , il
les rappela et les institua tous ses h éritiers,
,/ / •
‘lu lltftV fr
à la charge de rapporter ^à
la masse de sa succession ce qu’ils avaient reçu.
*
yL e 8 fructidor an 2 , le père commun mourut.
L e lendemain 9 fructidor , les dames N oyer et G re lic h e , leurs maris 5
Marie N oyer , fils aîn é, et Aune N oyer-Lagarde , qui n’étaient qu’héri
tiers en vertu du testament du ic) thermidor , s’empressèrent de le faire
enregistrer ; ils firent aussi enregistrer la reconnaissance de
12,000 liv .
faite au profit de Françoise Tixier.
L e 11 fructidor , ils se déclarèrent héritiers en vertu de ce testament ;
ils le présentèrent à l’administration du district de Billom avec une péti
tion tendante à obtenir la m ain-levée du séquestre et des scellés qui
avaient été apposés par le comité de surveillance de la v ille de
Billom ,
L e même jour intervint un arrêté de cette administration qui ordonna
qu'il serait f a i t rêmotion des scellés par le ju g e de p a ix , que délivrance
des objets séquestrés serait fa it e aux pétitionnaires ;
gardien déchargé.
à '* * * ''. ,.
quoi fa is a n t , le
L e juge de paix lève les scellés le même jour ; l ’inventaire fait par le
c omité de surveillance fut vérifié. Cet inventaire a disparu par le fa it des
in tim és, parce qu il relatait les titres de la succession de AJarieu T ix ier
et de M arie-G abrielle T ix ie r , et qu’il était f a i t avec la mère commune,
Françoise T ix ier , qui avait été établie gardienne.
Comme tous les héritiers étaient majeurs et qu’il fallait mettre à part
tout ce qui pouvait appartenir à Françoise T ixier , mère commune , qui
ava it, outre ses biens et droits à elle , la moitié de l’usufruit des biens de
son mari , il était nécessaire de faire un inventaire détaillé et exact de
toute la succession du père com m un, ce nnTfut Tait à l’amiable entre tou
tes les p arties, sous je in g -p riv é , mais très-exactement; cet inventaire
�.
^ 7 )
commença l e i l fructidor et ne fut fini que le
'
i 5 . Toutes les
parties
signèrent et arrêtèrent, chaque séance , avec Françoise T ix ie r, mère com
mune; les titres et droits de Françoise Tixier y étaient détaillés et marqués.
Au bout de cet inventaire et dans le même a cte, il fut traité et convenu
que tout le mobilier serait vendu , à l’exception de celui de la mère qui
avait été reconnu lui appartenir comme provenant de la succession de
son père et de Marie-Gabrielle Tixier , sa sœ; j .
L e i 5 fructidor , la vente du m obilier fut commencée , le public y fut
ad m is, et elle dura jusqu’au 22.
L e 2 2 , Françoise T ixier fit à tous ses enfans un abandon anticipé de
sa succession , un partage, un département de tous ses b ien s, à la charge
par eux de lui payer une pension viagère de i 5co liv. ; cet acte fut fait
sous seing-privé ; il était un vrai et réel acte de partage ; c a r , au même
m o m e n t, les héritiers du père partagèrent les deux successions, celle
du défunt et celle de la mère vivante.
Par le dernier de ces actes, Marie N oyer , fils aîné , vendit sa portion
des deux successions à ses cohéritiers ; il fit la reserve du mobilier qui
se trouverait chez la mère lorsque son décès arriverait: cet acte contenait
en partie le mode du partage entre les quatre acquéreurs.
IL fa u t observer que N o yer-D u b ou y t, appelant \ ne fg v r a .it dans
tous ces actes , soit du départem ent, démission ou p a r ta g e , soit de
l’ acquisition des droits du frère aîné , soit du partage de la succession
paternelle , que comme h éritier, par l’existence que l’ effet rétroa ctif de
la loi du 17 nivôse an 2 , et tous les actes fa its en conséquence avec lu i,
quoique la plupart fu ssen t des actes de vente , fu ren t regardés et ju g é s
être réellement des actes de partage : aussi les intimés ont-ils tout f a i t
annuller ,
soit Le département , démission ,
acte de partage de la
succession de Françoise T ix ie r , soit toutes les ventes qui avaient pré
cédé ou su iv i, parce que N oyer-D ubouyt, appelant, y fig u ra it connue
h é r itie r , en vertu de L’effet rétroactif de la loi du 17 nivose.
L e 6 germinal suivant an
5 1 le jugement fut signifie a N oyer-D ub ou yt;
le même jour à 4 heures du soir , les intimés brisèrent les scellés qu’il
avait lait apposer le 28 vendémiaire an 4 ■
>p ° ur l*1 conservation dos titres
de la succession de Françoise Tixier.
Cette opération se fit avec le juge de paix , leur beau-frère , hors la
présence de N oyer-D ubouyt, sans «pic justice l’ciit ordonné. Dès et Linstant,
�.
.
.
.
(
8
}
.
.
.
,
tous les titres qui constituaient la succession de Françoise T ix ie r , n’on^
■
plus reparu, ont é té , ou lacérés , ou divertis , ou recelés .par les intim és,
■
à l ’aide de la prévarication du juge de paix qui est leur beau-frère.
N oyer-D ubouyt, appelant , ayant appris cette vio latio n , cite les inti
més en co n cilia tio n , à l’effet de réintégrer tous les effets confiés à la garde
des scellés , et il leur demande de gros dommages et intérêts.
L e 18 floréal an
5 , les intimés et l ’appelant comparaissent au bureau
de paix ; les daines N oyer y étaient avec leurs maris. Dans le procèsverbal de conciliation, les dames N oyer et leurs maris
demandent à
N oycr-D uboiiyt en quelle qualité il form e sa demande : c e lu i- c i leur
rép ond, que c’est en qualité d’héritier général de Françoise T ixier ,
sa mère.
L es dames N oyer et G re lich e , leurs maris , reconnaissent à Noyer—
D ubouyt cette qualité, et en conséquence, à la conciliation, ils forment
contre lui une demande incidente, tend ante, attendu qu’il a pris la
qualité d ’héritier général de Françoise T ix ie r , à ce qu’il ait à leur payer
à chacun la somme de 1,000 liv. à eux due parleur contrat de m ariage,
du c h e f de lad ite Françoise Tixier. Noyer-Dubouyt accepte leur option
leur répudiation 5 il offre de leur payer à chacun les 1,000 liv. portées
par leur contrat de mariage. D ès cet instant, toute la succession mater
nelle appartjent à Noyer-Dubouyt.
Comme le jugement du
>.
de famille faite
25 ventôse an 5 , qui annullait tous les actes
avec Noyer-Dubouyt , contenait des dispositions de
détail qui nuisaient à ses intérêts ; que, par le f a it,
•
,
.
^ / ', '
ce jugement le con-
t raignait à payer les légitimes maternelles , tandis que les objets de cette
succession étaient encore entre les mains des adversaires ; il interjeta
appel de ce jugement.
^
' *
L e tribunal civil de la Haute-Loire fut choisi pour être le tribunal
-
d’appel.
L e r 1 ventôse an 6 , intervint jugement qui régla , en dernier ressort,
ï*
^
* GS *llt(-‘r^ts
fi
i
y
Successl0n (*u P®rc commui1. *
Le 7 p rairia l, Noyer-Dubouyt obtient une cédule du juge de paix de
■
M ozim , pour reprendre la demande des droits maternels.
ax
28 p rairial, l’on paraît au bureau de paix sans se concilier.
Le 18 thermidor an 6 , Noyer-D ubouyt fit assigner les dames Noyer
a»
�#
X d )
et G reliche , leurs m a ris, et N oyer-Lagarde. Il leur fit donner copie de»
procès-verbaux de conciliation qui avaient eu rapport à cette succession ;
celui du x.er pluviôse an 4 , où Noyer-Dubouyt demande cette succession ;
ceux des 4 et 18 floréal an
5 , et celui du 28 floréal an 6 , ainsi que la
copie des reconnaissances qui avaient été faites à Françoise Tixier.
Il conclut à ce qu’ils soient condam nés, en leur qualité d’héritiers du
père commun , à lui remettre et lui payer en sa qualité de seul héritier
_
de François T ixier ; i . ° Tout le m obilier qu’elle a laissé lors et après
son décès 5 2 °
à lui payer le montant des reconnaissances ; 3.® à lui
payer une somme considérable pour les dommages - intérêts , aux intérêts de tout et aux dépens ; sauf à eux à se retenir les 1,000 liv. à eux
dus et promis par leur contrat de mariage.
L e 1 3 fructidor an 6 , la cause fut mise au rôle publique et appelée ;
les intimés com p aruren t, elle fut remise pour être plaidée à son tour ,
e lle était au n.o 677g.
L e Z m essidor an 8 , N oyer-D ubouyt fit assigner les intimés , en re
prenant tous les actes déjà énoncés.
.
L e i 5 m essidor, la cause fut appelée , les qualités furent posées, e t
elle fut remise pour être plaidée à son tour.
L e 26 thermidor an 8 , N oyer-D ubouyt présenta requête au tribunal
civ il de Clermont - Ferrand, à l ’effet d’ obtenir permission d’assigner, à
bref délai , pour obtenir une provision de la somme de 6,000 liv . ; inter-'
vin t ce même jour jugement qui permit d’assigner, et indiqua l ’audience
pour le
Le
5 fructidor an 8.
3 fructidor , la requête et le jugement furent signifiés ; le 5 , la
cause fut appelée et plaidée ; N oyer-Lagarde agissait pour lui et pour Ie3
dames
N oyer et G re liclie , leurs maris. Il prétendit n’avoir pas la copie
d’un procès-verbal de conciliation ; la cause fut continuée et remise au
l
5 fru ctid or; ce jour e lle.fû t plaidée. N oyer-Iagarde plaidant toujours
pour lui et pour les dames N o y e r , et G reliclie leurs maris, qui étaient
presens à l’ audience; pour éviter le paiement de la provision dem andée,
n em ploya d’autre m oyen que celui que lui et les dames N oyer et Grelic h i!, leurs maris , avaient répudié à la succession de Françoise T ixier;
jl«« leur acte de répudiation étaient authentique ,
que Noyer-Dubouyt
avait accepté,
a
■
}'} ^
�( 10 )
Que les titres sou9 lesquels N oyer-Dubouyt fondait sa demande en pro
vision , ils les contestaient; que l ’on ne pouvait accorder une provision à
Noyer-Dubouyt
sur
ces titres ; que ce serait juger le fonds en même-
temps que le provisoire ; qu’eux-m êm es ayant répudié, et Noyer-Dubouyt
ayant accepté leur répudiation, et s’étant soumis à leur payer les 1,000 1.
à eux dus par leur contrat de m ariage, pour lesquelles sommes ils avaient
fait leur option , que c’était eux plutôt qui seraient dans le cas d’obtenir
une provision ; que lorsqu’à l ’audience du
5 ils avaient demandé la remise
de la cause pour obtenir des secondes copies du procès-verbal du 11 flo
réal an 5 , c’était pour faire constater, dans le jugement qui allait être
rendu , l’existence de leur répudiation et de l’acceptation q u ’e n avait
faite N o yer-D u b o u yt, afin qu’il ne put plus revenir sur ses pas.
L e commissaire du G ouvernem ent , Picot
-r
Lacombe
,
porta la parole
dans cette cause ; il conclut au renvoi de la demande en provision au
fonds , motivée sur la répudiation des dames
N oyer à la succession de
Françoise T i x i e r p a r acte du 18 floréal an S , sur l’acceptation qu’en
avait fait l ’appelant.
Intervint jugement m otivé et conforme aux conclusions du commissaire
du Gouvernement,
Le jugement a été rendu et prononcé publiquement à l’audience , en
présence des dames N oyer et de leurs maris , de N oyer-Lagarde plai
dant pour elles , de N oyer-D ubouyt. L e citoyen Boyer faisait les fonc
tions de président ; le c.en Jeudy fut un des juges en rem placem ent
d’un absent : les c.ens T iolier et T ou m ad re, juges au tribunal d’a p p e l,
étaient dans l’auditoire assis au fond de la salle d’audience ; ils entendi
rent plaider et prononcer le jugement,.
Mais par une collusion coupable entre le greffier de
ce tribunal et
les intim és, le jugement n’existe plus dans les registres du greffe ; cette
pièce qui jugerait la ca u se , disparut. Les juges sont aussi coupables de
ne point veiller à la conservation des litres authentiques qui reposent au
greffe. L ’on voit que les intimés sont familiers à cet exercice ; c’est la
B :conde fois q u e , de concert avec les officiers ministériels , des pièces
essentielles sont soustraites.
Mais ce qu’il y a de plus horriblement m erveilleu x, c’est le pouvoir
magique qu’i k ont de paralyser l ’action publique sur de pareilles viola
tions de dépôts publics , au point que personne n’ose élever la voix pour
éviter? daus la suite , de pareils abus.
�Le 21 ventôse au g , les dames N oyer et G re lic h e , leurs m aris, et
Noyer-Lagarde, font assigner N oyer-D ubou yt, aux délais de l’ordonnance
de 1667 , pour aller en avant sur les demandes par lui formées relative
ment à la succession de Françoise T ixier 5 ( cet exploit est rédigé par
Antoine-Jean-Baptiste C hassaing, huissier ) , et se voir condamner , en
conséquence de la qualité qu’il a prise d’héritier de Françoise T ixier ,
à leur payer à chacun la somme de 1,000 liv. à eux promise par leur
contrat de m ariage, se voir débouter de toutes ses demandes , aux offres
qu’ ils font de lui remettre ce qu’ ils ont touché du mobilier de Fran
çoise T ix ie r; se voir condamner à leur payer 12,000 liv . de dommagesintérêts , et aux dépens.
L e 6 floréal an g , ils obtinrent dn tribunal de première instance de
Clermont-Ferrand un jugem eut, après que la commissaire du Gouver
nement fut en ten du , qui a été ainsi rendu et rédigé.
A ttendu que depuis la mise à exécution de Pordonnance de 16G7 ,
Noyer-Dubouyt n'a point comparu ;
A ttendu que , dans son exploit de demande , il ne ju stifie d’aucinis
titres , que par conséquent sa demande n’est point établie quant aux
sommes par lui réclamées ;
A tte n d u , quant à la valeur du mobilier de la succession de Françoise
T ix ie r , des offres fa ite s par N oyer-Lagarde e t consorts de remettre
ce qu’ils ont touché du mobilier;
Attendu qiien conséquence de la demande de Noyer-Lagarde et consorts,
que cette demande est fo n d ée sur leurs contrats de mariage , par les
quels Françoise T ix ie r , mère commune,
leur a constituée à chacun la
somme de 1,000 liv. ;
Attendu, que ledit N oyer-Lagarde et consorts ont [répudié à la succession de
ladite Françoise T ixier , pour s'en tenir à leur constitution
dotale.
>
Attendu que cette soumission a été acceptée par N oyer-D ubouyt, et
qu'il ne ju stifie pas que N oyer-Lagarde et consorts aient été payés du
montant desdites constitutions ;
A tte n d u , d'ailleurs , que lors de la conciliation il a déclaré se charg er de payer l esdites sommes.
■
E n ce qui concerne la main-leY<ie des inscriptions faites par Noyera
2
�( 12 )
D u b o u yt, les dom m ages, intérêts reclamés par ces derniers , relative
ment à ses inscriptions.
.
Attendu que d’après la l o i , aucune inscription ne peut être reçue
qu'autant que le créancier qui la fo rm e , rapporte un titre authentique ;
Attendu que dans Vétat des choses a ctu elles, Noyer-Dubouyt ne ju s
tifie d'aucuns titres ;
Attendu que par suite du défaut de rapport de titr e , les inscriptions
de N oyer-D ubouyt doivent être rad iées;
A ttendu que l’ existence des inscriptions a pu nuire à N oyer-Lagarde
e t consorts y et qu’il est ju s te , tant qu’ il
n'apparaîtra point de titres
authentiques , d’accorder à Noyer-Lagarde et consorts des dommages ,
intérêts proportionnés aux torts qu’ils ont pu éprouver ;
L e tribunal condamne Noyer-Lagarde et consorts , de leur
consente-
ment et suivant leurs offres contenues en leur exploit de demande du 21
ventôse an 2 dernier , à remettre et délivrer à Noyer-D ubouyt ce qu’ils
ont touché du mobilier personnel à Françoise T ix ie r , mère commune ;
sin on , e t fa u te de ce f a i r e , dans la décade de la signification du pré
sent jugem ent à personne ou dom icile, les condamne à en payer la valeur
suivant l’estimation qui en sera fa ite sur l’éta t qu’en fournira NoyerD ub ouy t, s a u f tous légitim es contredits ; aux intérêts de la valeur, â
compter du jou r de l’ ouverture de la succession ; déboute N oyer-D ubouyt
du surplus de la demande.
Faisant droit sur la demande de N oyer-Lagarde et consorts, condamne
N oyer-D ubouyt, en sa qualité de seul héritier de Françoise T ix ier ,
piere commune , à. payer à chacun des demandeurs la somme de 1,000 l,
qui leur a été constituée par lad ite défunte T ixier , par leur contrat de
mariage , avec l'intérêt desdites som m es, depu'is le décès de ladite
Tixier.
•
F a it main-levée des inscriptions fa ite s par Noyer-Dubouyt sur NoyerLagarde et consorts > ordonne que radiation en sera fa it e aux bureaux
des hypothèques où eües sont é té mises.
Condamne Noyer-Dubouyt aux dom m ages, intérêts des demandeurs,
à donner par déclarations, aux intérêts et aux dépens.
'
L e 21 floréal môme m o is , ce jugement fut signifié à N oyer-D ubouyt ,
A
requête de« dames Noyer et Greliclie , leurs m ari», à son dom icile,
�.
.
(
I j
)
par François G a illa rd , huissier ; Noyer-Lagarde y est encore de nouveau
constitué
avoué
pour en
poursuivie
l ’exécution et faire taxer les
dépens.
L e i 5 therm idor, N oyer-D ubouyt fait signifier qu’il acquiesce à plu
sieurs parties du ce jugrment.
i . ° A la réitération de leur répudiation énoncée , soit dans le proccsverbal du 18 floréal an
5 , soit dans l’exploit du 21 ventôse , dans le
jugement du 6 floréal au 9 ,
et dans la signification d’ icelui.
2 .0 Qu’ il acquiesce audit jugem en t, quant aux condamnations pronon
cées contre eux , tendant à lui remettre et payer la valeur du mobilier
de Françoise Tixier , ainsi que des intérêts.
Par le même acte , il interjette appel des dispositions de ce jugement
qui blessent ses intérêts.
10.
D e la disposition qui le déboute de ses demandes coutenues en
l ’exploit du 18 thermidor an 6 , et exploits subséquens.
2.0 D e celle qui ordonne que les inscriptions faites à son profit seront
rayées.
3.0 D e celles qui le condamnent aux dommages , intérêts et aux
dépens.
Le 28 brumaire an 1 0 , les dames N oyer et G relich e , leurs maris , et
N oyer-Lagarde , par le ministère du c.en T a r d if , leur avoué , et par
le ministère de Sim on et, huissier , font encore signifier le jugement du
6 floréal an 9 .
L e 8 nivose an 10 , à la requête de N oyer - D u b o u y t, on leur fait
signifier que la cause est mise au rôle publique sous le n.o 460, et l’huis
sier fait sommation de venir plaider au tour du rôle.
L e 18 nivose an 1 0 , les intimés font s ig n if ie r leurs réponses aux cau
ses et m oyen d’a p p e l, par le ministère du c.en T a rd if, leur a vo u é, et
par celui du c.en Mazin , huissier ; à toutes les p a ges, la réitération de
ï-a répudiation et de l’acceptation qui en a été faite , est répétée 5 à tou
tes ces p a ges, ils parlent du bien jugé du jugement du 6 floréal an 9 >
et enfin ils concluent ainsi :
■Attendu que rien, n'établit la sincérité
Noyer-Duboityt réclame le paiement ;
.
des reconnaissances dont
�( H )
.
,
A ttendu que tout concourt , au contraire , à les fa ir e considérer
comme des avantages indirects f a it par le père commun à son épouse ;
A ttendu qu’il a épuisé envers elle
le maximum de ses libéralités par
la donation d’usufruit de La moitié de ses biens ;
Attendu que Noyer-Dubouyt , en qualité d’héritier de sa mère ,
est
tenu du paiement des constitutions fa ite s à ses frères , sœurs et beaufrères ;
A ttendu que ses fr è r e s , sœurs et beau-frères ne lui contestent pas la
remise des effets mobiliers dont elle est morte nantie, et que le ju g e
ment dont est appel les lui adjuge ;
D ire qu’il a été bien ju g é par le jugem ent rendu au tribunal d e
l ’arrondissement de Clermont-Ferrand , le 6 floréal an g, mal e t sans
cause appelé; ordonner que ce dont est appel, sortira son plein et entier
e ffet , condamner Îappelant en l’amende et aux dépens.
L e 27 nivôse , la cause fut appelée au tour du râle public 5 le s qua
lités furent posées , les intimés demandèrent la remise.
L e 27 nivôse, la cause fat appelée au tour du râle , les qualités furent
encore posées. L ’avoué Tardif s’attacha dans sa plaidoirie, et se borna
à obtenir des secondes copies des reconnaissances fondées sur son réqui
sitoire du 6 pluviôse précédent ; il fut ordonné que les copies deman
dées lui seraient signifiées dans le jour , et la cause fut continuée.
Les copies réclamées lui furent signifiées dans le jo u r, et on lui fit
sommation de venir plaider , à peine de défaut.
L e 1 t , la cause fut appelée encore au tour du rôle ; l’avoué fit refus ,
à l’audience de plaider : intervint jugement définitif et en dernier’
fessort, ainsi rendu et prononcé.
Attendu la rénonciation fa ite par les intimés à la succession de Fran
çoise T ix ie r , leur m ère, pour s’en tenir chacun à la somme de 1,000 L
A eux promise par leur contrat de mariage ;
Attendu l’acceptation fa ite au bureau de p a ix , les 4 et 18 floréal an.
■5 , par l’appelant ;
A ttendu que les intimés , par jugem ent rendu par la tribunal de
première instance de l’arrondissement communal de Clermont-Ferrand ,
le 6 floréal an ( j , ont f a i t ju g e r contre l'appelant leur répudiation e t
�.
.
.
.
( 15 )
.
.
renonciation à ladite succession ; que le 21 dudit mois ils ont f a i t signi
fie r ce jugem ent avec sommation de l’exécuter ;
Attendu que l’appelant leur a f a i t signifier son acquiescement audit
ju g e m e n t,
en ce qui était r e la tif au mobilier trouvé lors et après le
décès de la mère commune, dans sa maison, et qu’il s’est soumis de
compenser , avec la valeur dudit mobilier , lesdites sommes de 1,000 liv.
promises à chacun d’eux par leur contrat de mariage
Attendu que le 6 germinal an
5 , les intimés ont violé les scellés
apposés à la réquisition de l’ appelant, le 28 vendémiaire an 4 , sur l'ar
moire contenant les papiers relatifs à la succession de ladite Françoise
T ixier , ceux des successions de Marien T ixier , son père, de Jeanne de
L eym erie, sa mère, et de M arie-G abrielle T ixier , sa sœur ;
Attendu que les inscriptions fa ite s à la conservation des
hypothè
ques par l’appelant sur les biens des intim és, sont fo n d ées sur des titres
authentiques ;
L e tribunal d’a p p el, par jugem ent en dernier ressort , d it qu’il a
été mal ju g é par le jugem ent rendu par défaut contre l’appelant, au
tribunal d’arrondissement de C lerm onl-Ferrand, le 6 floréal an (j t
quant aux dispositions qui le déboutent de ses demandes qui fo n t main
levée des inscriptions par lui fa ite s sur les intimés ;
M a l ju g é encore , en ce qu’ il est condamné aux dommages - intérêts
de ses frères , sœurs e t beau-frères , résultant desdites inscriptions et
aux dépens ; bien appelé quant à c e , émandant ,
condamne les inti
m és, solidairement , tant en leurs noms , qu’ en qualité d’héritiers de
Jean-Baptiste-Joseph N oyer-D ubouyt, père commun , à payer à l ’appe
lant , en qualité de seul héritier de Françoise T ix ie r , mère commune ,
les quatreJ cinquièmes
son trousseau; 2.0
3 .o de celle de
1.0 de la somme de 35o liv. pour la valeur de
de la somme de 120 liv. pour bagues et jo y a u x ;
120 liv. pour gain de survie ; 4.0 de celle de 60 liv. pour
habits de d e u il; 5.o de celle de yb liv. pour une année de pension viduaire ; toutes les sommes ci-dessus fa isa n t ensemble celle de 725 liv. ;
l ’ intérêt d e ladite somme , depuis l’ouverture de la succession de Fran
çoise T ix ie r ,* 6.0 de la somme de 2,300 liv. portée par !a reconnaissanc e
f a it e ¿1 Gabrielle T ixier , sœur de ladite mère commune , le 1 4 ju in
x765 ; p lus ¡a sommc de 200 liv. pour la valeur du mobilier y reconnu,
�.
.
(
i
6
)
.
les intérêts desdit es sommes , à compter du mois de décembre 1779 >
époque de l’ouverture de la succession de M arie - Gabrielle Tixier ;
7.0 de celle de
5 ,000 liv. portée en la reconnaissance fa ite par le père
commun , au profit de Françoise T ix ier , le 8 novembre 1775 ; 8.0 de
celle de 12,000 liv. portée par la reconnaissance fa ite par le père com
mun , le 12 thermidor an 2 , par acte reçu P é tu r e l, notaire à Billom ;
les intérêts desdites deux sommes de 5,000 liv. et de 12,000 liv. , depuis
le décès de Françoise T ix ie r , sa u f aux intimés à se retenir sur lesdites
sommes et sur La valeur du mobilier auquel
ils ont été
condamnés par
le jugem ent du 6 floréal an 9 , ainsi que des intérêts , celle de 1,000 l.
chacun , à eux due par leur contrat de mariage. Condamne de plus les
intimés aux dom mages-intéréts de l’appela nt, à fournir par déclara
tions résultées de la violation des scellés par eux commise le 6 germ inal
an S sur les effets , papiers et documens servant à établir la consis
tance des successions de M arien T ixier et de Gabrielle T ixier , lesquels
effets ont été soustraits et recelés : lesd its dommages - intérêts , pour
tenir lieu de toutes autres reconnaissances, même de celles énoncées
dans celles des 19 thermidor an 2
et 8 novembre 1775 ; ordonne que
les inscriptions fa ite s sur les in tim és, à la requête de l’appelant, seront
maintenues ju squ ’ à Ventier paiement de ce qui
lu i est dû ; condamne
les intimés aux dépens des causes principales et d’appel.
L e jugement fut signifié à avoué le 12 ventôse an 10.
L e 18 ventôse même mois , le s dames N oyer , et G reliche leurs ma
ris , et Anne N o yer-L agan le, par le ministère du c.en T a r d if, leur
avoué , présentèrent une requête au tribunal d’appel , le 18 ventôse
même m o is, par laquelle ils demandèrent à être reçus opposans au juge
ment du 1 r ventôse an 10 , parce que , disent-ils , ce jugem ent a infirmé
celui du 6 floréal an 9 ,• ils concluent à ce qu’il soit
d it qu’il a été
bien ju g é par le jugem ent du G floréal an 9 , mal appelé ; que ce dont
est appel sorte son plein et entier e f f e t , et que N oyer-Dubouyt , appe
lant , soit condamné en l’amende et aux dépens.
F a its relatifs au prétendu désaveu.
L e 17 germinal suivan t, Jeaune et M arie-Gabrielle N oyer , autori
sées de Pierre et Joseph G reliclie , leurs m aris, par a’cte reçu
notaire à B illo m , douneat pouvoir au c.eu M oaestier,
P étu rel,
avoué près le
tribunal
�( x7 )
.
tribunal civil à C le rm o n t, de comparaître pour elles au greffe dudit tri
bunal , e t d ’y déclarer, en leurs noms, qu'elles désavouent Anne NoyerLa garde qui parait avàir occupé pour elles audit tribunal,
tance qui y éta it pen d an te,
entr’ eux
en l’ins
et Jean-Joseph-M arie N oyer-
D u b o u y t, leur frère et beau-frère , relativement à la succession de
Françoise .Tixier , leur mère et belle-mère ; et avoir , par exploit- du
21 ventôse an 9 , f a i t renoncer lesdits Noyer et Greliche à ladite suc
cession de Françoise T ixier ; renonciation qu’il a encore réitérée lors
d’ un jugem ent du même tribunal du 6 floréal su iv a n t, dont il y a appel
au tribunal à Riom , et qui y est encore pendant ; qu’ils n’ont jamais
donné pouvoir d’y renoncer, entendant au contraire s’en porter héritier,
sous la réserve de tous leurs droits et dommages - intérêts contre ledit
N oyer-Lag arde, et de réitérer le présent désaveu au tribunal d’a p p e l,
ainsi que leurs droits e t actions contre ledit N oyer-D ubouyt.
L e 21 germinal an 10 le c.eu Monestier accepta la procuration ; il
comparut au greffe , et y fit la déclaration de d ésaveu , en remettant la
procuration pour minute au greffe.
L e 22 germinal an 1 0 , par cédule , les dames N oyer , et G reliche
leurs maris , appellent en conciliation N oyer - Lagarde , à l’effet de for
mer demande contre l u i , tendante à fa ir e déclarer le désaveu f a i t au
greffe bon et valable , et à ce qu’il soit tenu de leur payer des domma
g es - intérêts ; ils citent également l ’appelant pour faire rendre le juge
ment commun avec lui.
L e premier floréal an 1 0 l ’on comparaît au bureau de paix; là NoyerLagarde déclare et consent par écrit à être désavoué, il s’en rapporte
à la prudence du tribunal pour prononcer
contre lui les dommages et
intérêts auxquels il consent d’ être condamné.
N oyer - Dubouy.t répond au bureau
de
paix que la demande ,
la déclaration et soumission de N oyer - Lagarde sont un concert fraudu
leux pour chercher à revenir sur la chose ju g é e , soit au tribunal de pre
mière instance , le 6 floréal an 9 , soit au tribunal d ’a p p e l le 11 ventôse
an 10 ; que les deux jugemens sont définitifs et en dernier ressort, et
qu’en conséquence , i l 11e p r e n d aucune part a la conciliation.
L e 18 floréal, les dames N o y e r , et Greliche leurs maris , font assi8ner , tant Noyer-Lagarde que Noyer-D ubouyt a comparaître au tribu
nal civil de première instance a Clermont , 1 . 0 pour voir déclarer le
■
3
�.
( î 8 )
.
.
désaveu f a i t au g r e ffe , ban et valable ; 2.0 voir déclarer nul l’exploit
du 21 ventôse an y ; voir égalem ent déclarer nul le jugem ent du 6 floréal
an 9 / 3.o voir aussi déclarer nuls tous les actes qui ont suivi ledit ju g e
ment du 6 floréal an 9 ; 4.0 pour voir condamner N oyer-La garde aux
dommages - intérêts
auxquels il s’é ta it soumis au bureau de paix ;
5 .° leur voir donner acte de ce qu’ils se portent héritiers de Françoise
T ix ie r ; voir dire qu’ils seront mis au même et semblable état oh, ils
étaient avant ledit jugem ent ; voir condamner N oyer-Lagarde aux dépens,
et voir déclarer que le d it jugem ent sera commun avec Noyer-Dubouyt.
N oyer-D ubouyt qui avait vu que par leur demande ils avaient eu xmêmes fait justice de leur opposition formée par la requête présentée
par le c.en Tardif leur avoué , le 18 n ivô se, et qu’ils venaient de l’annuller en demandant que tous les actes qui avaient été faits pour eux ,
postérieurement audit jugement , fussent déclarés nuls , que d’ailleurs
cette opposition faite contre La disposition textuelle de l’ordonnance de
1 667 ne pouvait pas être reçu e, le ur fit signifier à d o m icile, le 29 prai
rial an 10 , le jugement en dernier ressort et d éfin itif, rendu le 11 ven
tôse an 1 0 , avec sommation de l’exécuter : à dater du jour de cette
signification , ils n’ont formé aucune demande tendante à s’y opposer ;
ils ne se sont point pourvus dans le d é la i, ni en requête c iv ile , ni en
cassation.
Le
3 o p ra iria l, par le ministère de Dubois , huissier à C lerm on t, les
dames N oyer et G reliclie firent signifier à N oyer-D ubouyt le jugement par
défaut qu’ils avaient obtenu
contre N oyer - Lagarde ; il a été rendu
£t prononcé ainsi qu’if suit :
Attendu que le désaveu n'est pas c o n te s té , et que le défendeur f a i t
défaut en ce qui concerne Noyer-Lagarde , déclare le désaveu f a i t con
tre lui au greffe du tribunal, bon et valable ;
.
E n conséquence , déclare nul et de nul effet la répudiation de la
succession de Françoise
T ixier , fa ite en leur nom par exploit du 21
ventôse an Q , réitérée par jugem ent du 6 floréal suivant.
Ce fa is a n t, remet lesdites N o y er, femm es G relich e, au mérrie ef sem
blable état ou ellçs étaient avant lesdits exploits et jugem ent.
Leur donne acte de ce qu’ elles entendent se porter héritières de ladite
Françoise T ix ie r , leur mère.
Condamne N oyer-Lagarde aux dommages - intérêts , « donner pqr
déclaration, et le condamne aux dépens.
�(
19 )
D éclare le présent jugem ent commun avec N o yer-D u b ou y t.
P arle m ô m e exploit de signification,on donne assignation àNoyer-Lagarde
pour comparaître à la chambre des avoués , pour voir taxer contre lui les
dépens. Noyer-Lagarde a acquiescé à ce jugement ; il ne s’est point
pourvu contre, ni par op p osition, ni par a p p e l, dans les trois mois de
signification à domicile.
L e 16 messidor an 10 , par acte extra-judiciaire , les dames N o y er, et
Greliche leurs m aris, font signifier à Noyer-Dubouyt un procès-verbal
de conciliation qu’ils ont rédigé avec Noyer-Lagarde ; ils font sommation
à N oyer-D ubouyt de payer pour eux à Noyer-Lagarde ,le s io o o liv. qui
leur avaient été promises par leur contrat de mariage.
L e 26 messidor an 10 , N oyer-D ubouyt a interjeté appel du jugement
du 20 prairial an 10 , qui a désavoué N oyer-Lagarde, en ce qui était rela
tif aux dispositions qui - portaient atteinte à ses droits
de lui Noyer-
Dubouyt.
.
Sur l ’a p p e l, les dames N o y e r, et G reliche leurs maris , et N oyerLagarde , ont fait encore cause commune , ils ont pris le même avoué ;
et le 12 thermidor an 1 0 , Germain Faye a signifié à l ’avoué de NoyerDubouyt qu’il avait charge d’occuper sur l’appel du désaveu , pour les
dames Noyer et G reliche , leurs maris , et pour N oyer-Lagarde.
Le
3o thermidor an 10 , l ’appelant fit présenter requête au tribunal
d’a p p e l, tendante à faire joindre l'appel sur le désaveu à la cause sur
l ’opposition ; par jugem ent, il fut ordonné qu’il serait prononcé sur le
tout par un seul et même jugement.
Le
3 fructidor su iva n t, les daines N oyer et G reliche firent signifier la
révocation du c.en T ardif, et veulent que la procédure ne se fasse qu’avec
le c.en Faye.
L a cause en cet état fut p] aidée à plusieurs audiences ; le tribunal
d appel crut devoir ordonner l’a^pointcment au conseil.
M
O
Y
E
N
S
.
L e tribunal d’a p p e l, d’après l’état dû la cause et l’exposé des faits ,
a à ju g e r , If0 l’ appeL interjeté par Noyer - D u b o u y t, par acte du 26
3
a
�.
( 20 ^
messidor an i o , du jugem ent rendu sur le désaveu
..
le 20 prairial
même année, cet appel étant un incident de la cause.
2.0
S i l’opposition form ée par requête à un jugem ent rendu par d éfa u t,
fa u te de p la id er , peut être reçue contre les dispositions textuelles de la
lo i , l’arrêté des Consuls , l’ordonnance de 1 6 6 7 , et contre la volonté
des intimés q u i, trois mois après, Pont eux^mémes déclarée nulle et
sans objets , e t ne Üont pas form ée de nouveau après la signification
dudit ju gem ent à d om icile, le 29 prairial an 10.
\em ieio
S L u e tfio n .
L e désaveu form é par les dames Noyer , et Greliche leurs m aris,
est-il valable , relativement au c.en Noyer-Dubouyt ?
L a disposition du jugem ent du 20 prairial an 10 , rendu par le tri~
bunal de première instance de l’arrondissement de Clermont-Ferrand ,
qui déclare nulle la répudiation des dames Noyer à la succession de
Françoise T ix ie r , qui les remet au même et semblable éta t oh elles
étaient avant le jugem ent du 6 floréal an 9 , et qui leur donne acte de
ce q u elles se portent héritières de ladite succession , peut - elle être
maintenue ?
^ Ü eu jciem o
- 2 -ucttiovi.
"
N oyer-Lagarde avait-il abusé de la confiance de [5« cliens ? L es
ficles qu’il avait f a i t s , comme avoué , lui
flétrissant du désaveu (*).
avaient-ils mérité l ’acte
‘Czouiemo J^uetfiou,
'
(
f
Les dames N oyer, et Greliche leurs maris, n’avaient-ils pas approuvé,
par actes judiciaires postérieurs , tout ce qui avait été f a i t pour elles
dans le ministère de cet avoué ?
„ r
.
*nntfak(K ) U tout observer que l ’iMiinw, ne pose cette question que relativement
ii scs m terits et nullement pour ceux (Je NoycrrLngnrdc,
�( 2 0
E n examinant le jugement du 20 prairial an 10 , qui prononce sur le.
désaveu , on le voit entaché d’u 11 vice de forme , qui seul en constitue la
nullité; c’est que les juges n’ont ni prononcé ni donné des motifs à leurs
décisions. A in si, la loi est violée dans son texte ; ce m oyen suffirait seul
à N oyer-Dubouyt pour eu faire prononcer la nullité par rapport à lui ;
mais les autres moyens qu’il propose sont également péremptoires pour
obtenir une décision qui lui soit favorable, et dont la justice soit la base.
L e désaveu est une voie de droit qu’a la partie contre son procu
reur ou avoué, lorsque, sans pouvoir u’e lle , il a formé en son nom quel
ques demandes , donné quelques consentemens , ou fait quelques déclara
tions qu’elle croit être contre ses intérêts, et contre lesquels elle croit
avoir droit de réclamer.
Cette procédure, toujours déshonorante
pour le procureur ou avoué
qu’elle attaque , n’intéresse pas que l u i , elle intéresse également la par
tie adverse ; aussi cette partie adverse a-t-elle le droit de la faire déclarer
nulle par rapport à elle.
En principe , la présomption est que l’avoué n’a point manqué à son
devoir , ni voulu nuire aux intérêts de son client ; aussi quand il est
reconnu in n o cen t, il obtient de gros dommages-intérêts contre ceux
qui l ’ont attaqué ; mais lorsqu’il a été reconnu en justice, coupable , la
partie publique a toujours provoqué sa destitution, et les tribunaux la
prononcent
de suite , parce
que l’abus de confiance est un crime x
non seulement qui nuit aux particuliers , mais qui offense les mœurs.
E n ouvrant les pièces de la cause , il est impossible d’admettre que
par une procédure de désaveu collusoire , concertée entre N o y e r - L a g a i'd e
et ses c lie n s , ils puissent annuller le jugement du € floréal an y , dans
la partie qui est la chose ju g é e par les consentemens postérieurs qu’ont
donné toutes les parties intéressées.
Ce que N oyer-La garde n’a pas voulu, ce qu’il aurait dû faire , s’ il se
fut guidé par les lois de l’honneur, Noyer-Dubouyt doit et peut le faire
pour la conservation de ses intérêts; il est indispensable qu il lasse valoir
contre le désaveu tous les movens que Noyer - Lagarde eut dû faire
valoir , s’il n’ eut pas voulu se laisser avilir , ni dégrader sou état.
Si les avoués pouvaient ainsi être désavoués, sans sujets ni réels ,
ni apparents ; si eux-mêmes pouvaient colluder aussi honteusem ent, aussi
frauduleusem ent,il n’y aurait iav.ais rien d\-.ssuré d a n sl’ordiv ji dioiaire ;
�( 2» )
.
^
les procr'1ures et les ii io n ien s ne seraient qve des illu sion s, que des pièges
teudus impunément à la bonne foi , à la confiance 5 l’avoué qui aurait
reçu des pouvoirs , qui sont dans ses mains , les dissimulerait 5 il décla
rerait n’en avoir point reçus , il faudrait replaider de nouveau ; les
jugemens qui interviendraient seraient toujours attaquables par les mêmes
m oyens , et cela ne finirait jamais.
Il 11e sera pas difficile à N oyer-D ubouyt d’établir la collusion et lafraude concertées entre N oyer-Lagarde et ses cliens.
Lorsque Noyer-Lagarde a été appelé en conciliation , sur la demande
formée contre lui
en validité de désaveu , et en dommages-intérêts 5
après qu’on eut déposé au greffe cet acte aussi honteux pour lu i, il répond
au bureau de paix qu’il s ’en rapporte et la décision du tribunal, de sorte
qu’il a approuvé le désaveu déposé au greffe contre lui ; il a consenti à le
voir déclarer v a la b le , il a consenti à payer à discrétion des dommagesintérêts et les dépens 5 les dames Noyer et Greliche , aujourd’h u i, n’ont
plus d’ intérêt à plaider contre Noyer-Dubouyt ; Noyer-Lagarde les dé
dommage süffisaui'nent eu capital , intérêts t t frais , de ce qu’elles pré
tendaient avoir perdu: Noyer - Lagarde a poussé la générosité ou l’aveu
de sa culpabilité, au^point d’engager le mi ri is p r ë~ptibll£ et les tribunaux,
mais sur-tout le G ouvernem ent, à prendre des m oyens prompja._et sévères
pour ôter l’effroi qu’ une conduite aussi criminelle pourrait donnera ceux
que leurs intérêts attirent dans les temples de la justice.
Si le tribunal , qui doit aujourd’hui juger la cause , ne voit pa9 le
c.en
Noyer-Lagarde comme coupable envers les
intérêts des dames
N oyer et Greliche ; au moins verra-t-il une collusion horrible consignée
dans le procès-verbal de conciliation, par le consentement qu’il a donné
en se laissant condamner sans murmurer ; par la
confiance que les
intimés onteu en l u i, postérieurementà ce jugem en t, dans d’autres affaires
que les dames N oyer avaient contre N oyer-D u b ou yt, et enfin en se pré
sentant devant vous , c.ens Magistrats , ayaut le même avoué que les
dames Noyer et G re lic h e , ses co m p lices, pour soutenir letbieu jugé
de ce jugement.
«
L e désaveu peut être valable , c’est-à-dire qu’il peut avoir été fait
avec des formes régulières, mais il ne s ’ensuit pas de là qu’il doive pro
duire effet entre le 9 parties plaidantes ; il faut que ce que l’avoué est
�.
.
. •
' ( 23 )
.
•
••
accusé avoir f a i t , l’ait été hors de ses pouvoirs, sans consentement ,
et sur-tout sans approbation postérieure de Ta part de ses çliens.
E n lisant l ’acte de désaveu , on voit que les dames N oyer déclarent
^qu’ elles étaient en instance avec Noyer-D ubouyt ; elles n’avaient point
d’autre avoué que Noyer-Lagarde , elles ont dû conférer avec lui de
leurs intérêts.
Au tribunal civil de première instance de l'arrondissement commu
nal de Clermont-Ferrand , à la dernière audience du mois de fruc
tidor an 8, lo rsque Noyer-D ubouyt demandait une provision de 6,000 liv .
aux intimés , Ñoyer-Lagarde était chargé de la confiance des dames
Noyer , et Greliche leurs maris ; c’est en plaidant en leur présence leur
m oyen unique , la répudiation ; c’est en la faisant plaider au com missaire_du_Gouveriiement, leur protecteur lé g a l, de p lu s, leur ami iutim e,
qu’elles parvinrent à obtenir un jugement qui réunit la demande provisoire
au fond.
.
Les dames Noyer ont trouvé ce jugement ju s te , éq uitab le, parce
qu’ il était en faveur de leurs intérêts. Noyer-Lagarde pouvait donc suivre
la môme marche au fond , sans craindre d’être compromis ; les dames
Noyer l’ayant approuvé , ne peuvent plus aujourd’hui avoir l’air d’igno
rer les pouvoirs qu elles lui avaient donnés.
Mais avant de
colluder les moyens de désaveu , les intimés ont
em ployé leurs pouvoirs magiques dans les registres du greffe; ce juge
ment rendu sur le provisoire , n’y est plus ,
il 11’y en a pas la moindre
trace ; s’il y avait possibilité de le faire revenir dà’ns le lieu que la loi
lu i d e s tin a it, la cause serait toute jugée,
Y o iià deux fois que , dans la même affaire, les actes nécessaires à la
cause ont été enlevés dans les dépôts publics ; voilà
neuf ans , depuis
le décès de Françoise T ix ie r , que ces soustractions ont traîné l ’appe
lant devant les tribunaux, et nécessairement amené la ruine
de sa
fortune.
L e Gouvernement et ses magistrats trouveront nécessairement des
moyens pour que les actes qui reposent dans les greffes y restent inva
riablement pour la conservation des intorots des justiciables , d'ailleurs
c est le vceu de l'ordonnance de 1667 ? tiLre 26.
Mais quoique ces actes aient disparu, il resto encore assez, de moyens
�lf
C24)
à l’appelant pour établir que Noyer-Lagarde avait des pouvoirs des daines
Noyer et G reliche , et prendre des conclusions qui ont fait la base du
jugement.
Les pouvoirsqu’ ila va itreçu s, les fonctions qu’il avait à remplir étaient
tracés et écrits dans deux pièces de la procédure qui sont du fait des
dames^Nflyer , et G reliche leurs maris.
L ajireiïû ère est l’expédition du procès-verbal de conciliation du juge
de pa>x du canton de Mozuu , du 18 floréal an_ 5_, ou les dames N oyer
et Greliche leurs maris ont fait leur option pour leur légitime maternelle,
portée par leur contrat de mariage , et ils ont répudié au surplus la
succession de Françoise
T ix ie r , mère
commune ; ils
n’ont pas dit
alors qu’ils voulaient se réserver la succession de Françoise Tixier ,
en vertu de la démission de b ie n , de l ’acte de partage du 22 fructidor an
2 , acte qui a été annuité .jT a p rès leur dem ande, par le jugement du 25
ventôse an 5 , rendu au tribunal civil à Rioin , jugement exécuté selon
«a teneur.
Dans
le
jugement du 6 floréal an 9 , ils ont demandé seulement
l ’effet de leur option, les 1,000 liv. à eux promises par leurs contrats
de mariage ; et si alors ils eussent voulu ou pu retenir l a succession
m aternelle, il y aurait contradiction frappante d’exiger les 1,000 liv. ,
d’en faire prononcer la condamnation ; car la mère , en faisant la démis
sion générale de tous ses biens , en partageant entre ses cinq enfans par
égalité , ne devait plus les 1,000 liv . qu’elle avait promises par les con
trats de mariage. Ils
ont reconnu à Noyer-Duboilyt la qualité d’héritier
général de cette succession ; là ils ont formé contre l u i , à raison de
cette qualité , la demande qu’il ait à leur paÿér~ce qui leur était dû d’a
près leur contrat de mariage 5 N oyer-D ubouyt s’y est soumis , il a accepté
leur option et répudiation. Cette expédition de procès-verbal, entre les
mains de Noyer-Lagarde , était uiTpouvoir suffisant? '
L a seconde piece est l e x p to if tlu 2 1 ventôse ; l’huissier qui a rédigé
cet exploit avait dans ses mains le procès-verbal de conciliation , il en
est la conséqueuce ; dans cet exploit , Noyer-Lagarde y est constitué
avoué des dame3 N oyer , et Greliche leurs maris. L ’original lui a été
remis pour exercer ses fonctions.
L e 6 floréal au 9 , la cause est appelée ; Noyer-Lagarde , comme avoué,
lit les conclusions de l’e x p lo it, il fait aussi lecture du procès-verbal de
conciliation ,
�( 25 )
conciliation ; il remet lès pièces aux juges pour les vérifier : le tribu
nal , après un examen réfléchi , rend un jugement qui contient onze
m otifs; tous ces motifs sont pris dans le procès-verbal du j8 floréal an
et il est nommément cité ; il est impossible de trouver dans les
5,
opéra
' lions du ministère de N oyer-Lagarde} qu’il ait a b u sé, qu’il ait fait plus
qu’il ne devait faire.
'
Mais après le jugement rendu , les dames N oyer l’ont approuvé , ont
ratifié les pouvoirs de Noyer-Lagarde par des actes postérieurs , par des
actes judiciaires et authentiques.
L e 21 floréal an q , par le ministère de G a illa rd , huissier , elles ont
fait signifier ce jugement à l ’appelant à son dom icile , avec sommation
de l ’exécuter ; elles ont constitué de nouveau N oyer-Lagarde pour leur
a vo u é , pour les actes relatifs à son exécution, et pour faire taxer les
dépens. V o ilà un acte judiciaire qui confirme les pouvoirs de N oyerLagarde ; ni l ’huissier Chassaing qui a fait l'exploit du 21 ventôse , ni
l’huissier G aillard qui a signifié le jugement du 6 floréal an g , ne sont
désavoués.
'
L e 1 5 thermidor an 9 , presque deux mois après cette signification ,
Noyer-Dubouyt fait signifier aux intimés qu’il acquiesce à partie de ce
jugement ; il indique les dispositions où se fixe son consentement : les
parties auxquelles il a consenties sont La chose ju g é e . Il interjette appel
des dispositions qui blaissaieiit ses intérêts ; sur cet a p p e l, signifié à
personne et dom icile , les_dames N o y e r , et G reliche leurs maris retirent
le urs ]j)ieces d’entre les mains de N o yer-L agarde , les remettent avec
leurs copies d'appel "au c.en T a r d if, avoué
près le tribunal d’appel ;
parmi ces pièces étaient l’expédition du jugement et l ’original de sa signi
fication , et les copies de l’acte d’adhésion de Noyer-D ubouyt.
.
L e jugement du 6 floréal an c) est de nouveau signifié à N oyer-D u
bouyt , le 28 brumaire an 1 0 , par le ministère
de T ard if,' avoué ,
et
celui de Sim onet, huissier.
L e 18 nivose an 1 o , par requête présentée au tribunal d'appel , les
dames N oyer et Greliche donnent leur répoose aux causes et m oyens
d’a p p e l, elles concluent au bien jugé du jugement du 6 floréal an g ;
cette requête est signifiée à l’avoué de N oyer-D ub ou yt, elle est signé©
de Tardif , avou é, et de Mazin , huissier.
�( 26)
Ni l’huissier Simone t , ni Mazin , ni l ’avoué Tardif n’ont point été
désavoués ; ainsi il est donc établi- q u e , postérieurement au jugement
du 6 floréal , les dames N oyer , et G reliche leurs maris ont approuvé
les pouvoirs qu’ils avaient donnés au 'c.en Noyer-Lagarde ; ce désaveu
n?est donc qu’un jeu , une collusion sans exemple.
Mais pourquoi ce désaveu a -t-il été concerté et mis en pratique ? pour
quoi les intimés ont-ils eu recours à un m oyen si extraordinaire ?. c’est
que le procès pendant au tribunal d’appel était perdu , tant pour les
dames N oyer , et G reliche leurs maris que pour Noyer-Lagarde. Il avait
été jugé le 11 ventôse , définitivem ent, sans qu’il put être attaqué ni
par opposition, ni par requête civile , ni par pourvois en cassation.
A la vérité, l’avoué Tardif avait présenté requête pour les intimés au
tribunal d’appel le iQ ventôse ,
G reliche ,
tendante à ce que les dames N oyer et
et Noyer-Lagarde , fussent reçus opposans à ce jugement
du 11 ventôse. Cette requête n’a d’autre m otif que de
se plaindre de
ce que le jugement du n ventôse a infirmé celui du 6 fioréal an 9.
L e jugement du 20 prairial an 10 , donne acte aux dames N oyer de ce
qu’elles entendent se porter héritières de la succession de Françoise
Tixier ; cette partie dn jugement confirme les dispositions de celui du
T1 ventôse an 1 p , relativem ent à la validité des reconnaissances ; elles
se sont déclarées elles-mêmes non recevables à les contester , elles ont
reconnu que leurs moyens contenus dans leur requête du 18 nivose
an 10 , n’étaient pcs soutenables ; en e f fe t , si la succession de Françoise
Tixier n’eut été qu’une chimère , il serait inconséquent de vouloir ea
être l'héritier. Mais cetle-volonté sert à éclairer les juges , mais ne peut
rien changer au sort des intimés ; le jugement du 11 ventôse an i o , est
rendu en dernier ressort, il est inattaquable, c'est la chose ju g é e . Ce sont
le vœux et les expressions de la l o i , de L'arrêté des C onsuls, de 1‘ordon
nance de 16 6 7 , litre
35 , art. 3 , paragraphe Z.
Mais Noyer-Lagarde , eu colludant pour se faire désavouer, en y con
sentant , approuvait par avance les demandes en dommages - intérêts
que N oyur-D ubouyl aurait faites contre lu i; car 1111 procureur désavoué ,
uou seulement est tenu aux dommages - intérêts envers celui de la con
fiance duquel il aurait ab usé, mais il est encore
condamné aux dom-
nia^cs-init'rêls envers la partie adverse; ou ne se joue point de la fortune
r!\;n cito yen , en le faisant plaider sans su^et pendant iq ans; c’est oiiCok »
�( 27 )
une loi de la nature et de la justice , et l’opinion générale de tous les
auteurs.
Ce jugement du 20 prairial au 10 , qui déclare le désaveu bon et
valable , etc. , porte également nne disposition qui le rend commun
avec Noyer-Dubouyt ; si le jugement eut été motivé , on ne serait point
embarrassépour en appliquer les dispositions. L ’appelant pense que le défaut
de m otif , dans la forme , que la collusion et la fraude sont si évidem
ment prouvées, que les conclusions suivantes, quant à ce c h e f, lui seront
adjugées avec dépens.
Attendu que les dispositions du jugement du 20 prairial an 10 , par
lesquelles le jugement est rendu commun avec N o y e r-D u b o u yt, ne sont
point m otivées;
Attendu qu’il y
a évidemment
Noyer-Lagarde , désavoué,
concert
de
fraude et
et les dames N o y e r , et
dol
entre
G reliche leurs
maris qui désavouent que ce concert est établi par le consentement de
Noyer-Lagarde au bureau de paix le i.er floréal an 10 par l’adhésion
q u ’il a donné audit jugem en t, en ne prenant que le même avoué que
les dames N oyer , et G reliche leurs maris 3 pour en soutenir le bien
jugé contre Noyer-Dubouyt ;
Attendu que le concert de fraude et le dol sont établis parce que R éel
lement et de fait , N oyer-Lagarde était l ’avoué , l’avait toujours été ,
et'avait des pouvoirs des dames N oyer , et G reliche leurs maris , ayant
toujours eu leur confiance dans la même affaire et dans d’autres posté
rieures ; que les conclusions qu’il a prises sont celles contenues eu l’ex
ploit du 21 ventôse an 9
et l’acte de conciliation du
18 floréal an 5 ;
qne les huissiers qui ont fait cet exploit et signifié le ju gem en t, n’ont
point été désavoués.
Il
plaise
au tribunal dire qu’il
a
été
m al
jugé
ra r le juge
ment du 20 prairial an 1 0 , relativem ent à N oyer - Dubouyt ,
appelé ;
ordonner
bien
que le jugement dn 6 floréal an 9 , quant aux
dispositions auxquelles N oyer-D ubouyt avait acquiesce par acte judiciaire
du i5 thermidor an 9 , seront exécutées suivant leur forme et teneur ;
condamner les intimés aux dépens ; ordonner que 1 amende cousignée
par N oyer-D ubouyt lui sera restituée.
�.
.
C 28 )
'S L u etfio v i Juv
L ’ opposition form ée à la
f ’op p ofitw n .
requête des dames N o y er, et Greliche
leurs maris , e t Anne N oyer-Lagarde , au jugem ent du 11 ventôse an
10 , rendu en dernier ressort à tour de rôle , fa u te de plaider , est
elle recevable , contre les dispositions textuelles de Varrêté des Con
suls du 18 fru ctid o r an 8 , et le te x te précis de l'article
3 du titre 35
de l’ordonnance de 1 6 6 y , même après avoir été annullée par la volonté
des intimés , en form ant leur demande en désaveu.
L a solution de cette question est dans la loi , elle est encore dans la
conduite des intimés qui y ont renoncé en demandant que tout ce qui
avait suivi le jugement du 6 floréal au g , fut déclaré nul 5 elle l ’est
encore quand après avoir reçu à dom icile la signification de ce jugement
le 2Q prairial an 1 0 , ils n’ont point manifesté la volonté par aucun acte
d’en arrêter l'exécution ; alors il est absolument la chose ju g é e .
L ’arrêté des Consuls du 18 fructidor an 8 , est impératif et non facul
tatif.
.
L ’article
3 du titre 35 de l ’ordonnance de 1 6 6 7 , ne souffre ni inter
prétation , ni modification , ni restriction ; son exécution est tracée par
la lettre de la loi , elle est de rigueur.
Cet article permet de se pourvoir par simple requête contre les jugemens , en dernier resso rt, qui auraient été rendus faute de se présenter,
ou à l ’aud ien ce, faute de plaider , pourvu que la requête soit
donnée
dans la huitaine du jour de la signification.
Mais il excepte expressément les jugemens rendus à tour de r ô le , si
ce n’e s t , est-il d it , que la cause ait été appelée à tour de rô le, auquel
cas
les parties ne se pourront pourvoir contre les arrêts et ju gem en s, en
dernier resso rt, intervenus en conséquence , que par requête civile.
l.e jugement du 11 ventôse an 10 , est un jugement en dernier ressort;
11 a été rendu à tour de r ô le , faute de plaider , en présence du l’avoué
qui s’y est refusé, il n’est donc pas susceptible de l’opposition par simple
requête , dans lu huitaine de sa signification.
Dans l’esp èce, 011 pourrait dire que c’est un jugement contradictoire,
parce que les qualités avaient été posées , que l ’on avait plaidé pour
fleniauder c l obtenir des remises.
�( 23 )
Le
3
ventôse
l ’on plaida
an
io ,
les
qualités
contradictoirement sur le
tendant à obtenir "ties 'seco n d es
furent
encore
réquisitoire
copies
des
p osées J
du 6 pluviôse ;
reconnaissances ; ces
copies furent de nouveau signifiées le même jour , l ’on donna même les
pièces en com m unication; l’on fit de plus sommation de venir plaider e t
continuer la cause qui serait encore appelée^au tour du rôle , à peine de
défaut fatal ; il est donc certain que ce jugement ne pouvait être atta
qué que par la requête civile ou le pourvois en cassation, si l’on était
dans le cas ou dans les délais.
Avant la révo lu tio n , cela n’a jamais éprouvé de contradiction , car
personne ne doute que la disposition de l ’ordonnance ne fut rigonreusement suivie dans les anciens parlemens et tribunaux.
Il n’y a pas un commentateur , pas un compilateur , pas un auteur
en droit , qui ne l’atteste ; les ordonnances publiées en i 53 g , article
C X IX ; D o m a t, titre II , article X V II , page 23 o ; le répertoire uni
versel de jurisprudence , rédigé par M erlin-d e-D ou ay , ex-directeur ,
actuellem ent commissaire du Gouvernement près le
tribunal de
cassation ; par G uyot , jurisconsulte , attaché au ministère de la ju s
tice , chargé d’ expliquer et interpréter les questions contentieuses de
ce ministère , e t autres jurisconsultes etc. Aux mots défaut , opposi
tion , procédure, requête civile , cassation. BriU on , dictionnaire des
arrêts , Dénisard , Rousseau-de-Lacom be , P othier etc.
L a question a été ju g é e par arrêt du parlement de Paris , le ‘i.'j
août 1 668 ; par arrêt du parlement de Flandres en
1767.
D ans l’ espèce du prem ier, au parlement de Paris , l’ avocat chargé
de la
cause
se présenta à l'audience
lorsquelle fu t
appelée , il
f i t une remontrance et demanda la remise ; il refusa de plaider ainsi
q ue le procureur , il f u t donné défaut ; le
défaillant form a opposi-
s itio n , l’ autre partie le soutint non-rp.r.pvahle . parce que le jugem ent
éta it rendu après une remontrance ; l’arrêt prononça
l’opposition non
recevable.
'
Dans l’espèce du seco n d , au parlement de Flandres , l avocat s'éta it
présenté, et. np. demandait qu’ un d éla i;
on lui dit de plaider , il dé
clara qu’ il ne pouvait le fa ir e fa u te d 'in stru ction ;
défaut , on y form a opposition , l’opposition f u t
ivable.
on prononça le
déclarée non rece
L ’ auteur qui cite les arrêts , d it que les causes étaient venues »tir
�.
(zo)
,
placets et qu'elles n'étaient point sur le rdle ; l ’espèce dans laquelle
la cause de N oyer-D ubouyt se trouve , est bien plus favorable , puis
que la
cause était au rôle public , que des sommations avaient averti
le N.o du rôle , et appelé les adversaires pour venir plaider ; que les
qualités avaient été posées plusieurs fois ; mais les intimés y ont 1énoncé
par le fuit , en
demandant la nullité de tous les actes qui avaient
été faits à leur requête depuis le jugement du G floréal an 9.
En un mot c’est la jurisprudence de tout les
tribunaux d’appel et
notamment de celui de Caen , qui vient de le juger dans la même
espèce.
C ’est encore l’opinion
des anciens jurisconsultes du
Puy-de-D ôm e , qui l’ont
délibéré , les
commissaire du gouvernement près le uibunal
ment législateur , Dartis - Marcillac , etc.
Les adversaires objectaient que cette
département du
citoyens A ndraud, D e v a l,
criminel , actuelle
disposition de
l’ordonnance
était tombée en désuétude depuis la révolution.
D ’abord ce serait une erreur de croire qu’il ait été un temps où
toutes les dispositions de l ’ordonnance de
1667 ayent cessé de de
voir être suivies ; la loi du 24 août 1790 avait réglé l’organisation
des nouveaux
n’avait rien
tribunaux
changé à
et détermine
la forme
leur compétence y mais
de procéder ; celle du
elle
19 octobre
suivant leva les doutes qui pouvaient rester à cet égard , son
article
II porte : les tribunaux de district suivront provisoirement en toutes
matières les formes actuellement existantes tant qu’il n’en sera pas autre
ment ordonné. Les formes de la procédure existante , lorsque cette loi
a été ren d u e, étaient celles prescrites par
Les lois des 20 et 27 mars 1791 , et celle du
plusieurs c h a n g e mens
l’ordonnance de
1667 5
3 brumaire an 2 , ont fait
; la première détruit la
vénalité des
offices
et leur hérédité dans les tribunaux, elle y établit des avoués ; la seconde
détermine d’après quel tarif leurs frais doivent être réglés; la der
nière les
parties
supprime , ainsi que l’ usage des requêtes , elle
laisse aux
le droit de se faire représenter par de simples fondés de pou
voirs , mais ni les unes ni les autres ne parlent de l’ordonnance de
1 6 6 7 , ni ne l’abrogent, elle a donc dû continuer à être exécutée et
suivie dans toutes les dispositions qui ne lui
sont pas contraires , et
par conséquent dans celle qui veut qu'il ne puisse être form ée d'op-
�( 5 0
position aux jugem ens en dernier ressort , rendus par défaut fa u te
de plaider à tour de rôle.
Aussi n’y a-t-il pas eu besoin d’une nouvelle l o i , un simple arrêté des
Consuls a suffi pour la remettre dans toute sa vigueur , cet arrêté a été
lu et publié dans tous les tribunaux sur le réquisitoire du commissaire
du Gouvernem ent, il n’en est aucun qui ayent refusé de l’enrcg’ oi.rer ,
aussi s’exécute-t-il par-tout ; on peut défier les adversaires de citer
un jugement où lorsque les parlies ont exigé l’exécution d e T o rd onnance de 1667 T Tes tribunaux ayent rftTKÏÏTTtés jugemens qui ne l’ayent
pas
ordonnées. ~Si là
maxime
que Tes
intimés voudraient"”- intro
duire était suivie , il n’y aurait plus besoin de rôle ; sa p u b licité, son
existence , son enregistrement , son authenticité , tout cela serait des
chimères ; les procès seraient éternels , il ne sexaient plus nécessaire _
de plaider que pour faire le sort des officiers ministériels , l ’intérêt
des parties serait à la merci de toutes
les chicanes.
Les intimés ont prétendu qu’au tribunal d’appel à Riom , cet arrêté
des Consuls et l’ordoniutnce de 1667 dans Iam spositition de cet ar
ticle n’y avait jamais été suivie , et que c’est une disposition parti
culière du règlement de ce Tribunal , que l’ordonnance de 1667 y est
tombée en désuétude.
Se serait donner de l ’ importance à cette objection que d’y répondre,
se
serait même un moydn
et
jurisconsultes ou officiers ministériels qui composent ce tribunal ,
dont les connaissances
de blesser
en droit ,
leur
la délicatesse des
membres
attachement aux lois de la
République , et leur impartialité , sont connus et cités avec éloges.
11 est dans l’ordre des choses possibles , que personne
n’aye récla
mé l ’exécution de l’ article de l’oWonuance de 1667 à cet é g ard ; mais
si la loi s’exprime ainsi , son application peut être invoquée , sans
qu’il y ait rien d’extraordinaire; l’appelant n’aurait-il que ce seul m oyen ,
les intimés 11e pourraient le
combattre , parce que quand
la loi est
écrite , ou doit l’applinuer même sans que la partie 1 invoque , a plus
forte raison,quand la p a n ie le
r e q u ie r t .
Les intimes 11e peu\entarguer avoir
été surpris , trompés , la i>rocédure s’est
faite trop lentem ent pour
^appelant qui est toujours dépouillé de ses biens. Si l ’on examine l ’usage
ou lu jurisprudence des anciens tribunaux , les
(i u^‘ la jurisprudence
parlemens , on verra
du parlement de Bor?Îeaux
était l’exécution de
�( 52 )
l ’article III du titre X X X V de l’ordonnance de
sa jurisprudence du parlem ent, imprimée en
i ÇGy ; S a lv ïa t, dcms
1787 ,
page 5 g 6 , s’ex
prime ainsi : l’opposition formée par requête dans la huitaine est reçu e,
hors le cas oii_Jta cause a été appelée à tour de rôle.
O n vo it, en parcourant Rodier sur l’article III du titre X X X V , que
telle était la jurisprudence du parlement de Toulouse.
^
L e parlement de Grenoble était aussi sévère et aussi e x a ct observa
teur de la loi , que celui de Toulouse et de Bordeaux ; c’est ce que
prouve un arrêt de règlement de cette c o u r, du 5 septembre 1 7 8 5 ,
portant que l’opposition formée à un jugement rendu en dernier ressort
lorsque la cause a été appelée à tour de rôle , n’est point recevable.
L e parlement de Douay jugeait
reusement observé
de même ,
et a toujours rigou
la même jurisprudence.
E n thèse générale , l ’usage peut-il abroger la loi ?
Sur cette question, on trouve dans le droit romain deux textes qui
sem blent, au premier apperçu , se contredire.
L a loi X X X I I , paragraphe I.er , au D ig e ste de
l ’usage
général et universel
peut quelquefois
legibus , dit que
déroger aux actes de
l ’autorité législative : Nam quid interest , suffragio populus voluntatem suam d ec la r et,
illud
an rebus ipsis et fa c tis ? quarè rectissimè etiam
receptum e s t , ut leg es non solum suffragio legislatoris , sed
etiam tacito
consensu omnium per desuetudinem
abrogi^tur.
Au contraire la lo i II au code , quæ sit longa consuetudo , déclare
que l’usage, quelque respectable qu’ il soit , ne peut pas prescrire contre
la raison et contre la
loi.
Consuetudinis ususque
longœvi
non vilis
autoritas est ; verum non usque a d eQ su i valitura momenlo , ut aut
rationem v in ca t, aut legern.
Mais à supposer que les adversaires voulussent persister à invoquer
un usage qu’ils prétendraient avoir
Riom , depuis son organisation ,
été
on leur répondrait
l ’usage fasse ainsi cesser l’empire de la
fut concentré dans
une partie du
suivi au tribunal d’appel à
que
pour que
l o i , il* ne suffirait pas qu’il
territoire dans lequel la loi a été
originairement l u e , publiée et enregistrée , il faut qu’il soit commun
à tout le territoire de la république.
Lorsque l ’usage n’est pas commun à tous le pays pour lequel la
loi;
�,
loi a été faite
( 33. )
il n’a pas pour lui la volonté
il ne peut conséquemment
générale du peuple ;
faire loi , et par une conséquence u lté- ■
rieure -, il ne peut abroger une disposition législative.
L a première loi citée , la lo i
X X X II, paragraphe I , au digeste de
legibus , n’attribue pas à des usages locaux le pouvoir de faire tomber
en désuétude les lois- générales ; il ne le donne qu’aux usages qui
sont l’expression tacite du consentement unanime du peuple : Tcicito
consensu omnium per desuetudinem abrogantur.
.Voilà le principe ; il a été consacré par le tribunal de cassation,
par deux jugemens des
12 vendémiaire an q e t u
pluviôse an 1 0 ,
où il n’a eu aucun égard à l’usage qui était établi contraire au texte
de l’ordonnance de 1667.
L ’usage que l’on voudrait invoquer 3 ne peut donc pas déroger au
texte de la loi et à la raison. L a loi dans la République
dit que sa volonté souveraine
française
doit être respectée. E n conséquence, le
législateur a-t-il voulu dans la lo i du 27 ventôse an 8 , article L X X X ,
que le Gouvernement, par la voie de son commissaire, et sans préjudice
du droit des parties intéressées , dénonce au tribunal de cassation,
section des requêtes , les actes par lesquels les ju g e s auraient excéd é
leurs pouvoirs , c’est-à-dire jugé , contre les dispositions textuelles de
la loi.
L ’art.
L X X X V III
de la même loi veut que si le commissaire du
Gouvernement apprend qu’il ait été rendu en dernier ressort un ju g e ment contraire aux lois et aux formes de v ro céd er, ou dans lequel
un ju g e ait excédé ses pouvoirs , et contre lequeF~cepeTidant aucune
des parties n’ait réclamé dans le délai jix é ; après ce délai expiré*,
il en donnera connaissance au tribunal de cassation ; et si les form es
ou
les lois ont été violées, le jugem ent sera
parties
cassé sans que les
puissent se prévaloir de la cassation pour éluder les dispo
sitions de ce jugem ent , lequel vaudra transaction pour elles.
D ’après la disposition textuelle
des
lois
françaises
actuellement
en vigueur , on 11e peut donc opposer l’usage, et la jurisprudence
ne peut l ’emporter sur le texte de la l o i , ni l’abroger. Le texte de
la loi
2y ventôse an
8
veut que
l’on
ne
puisse juger contre
les dispositions des lois. L ’arrêté des Consuls a ordonné que l’ordonnauce du 1667 serait mise à exécution dans tous les tribunaux de la
5
�.
. '
( 54 }
République ; le commissaire du Gouvernement est chargé de la part du
Gouvernement de l’honorable commission de requérir l’exécution des lois,
même contre la volonté des parties ; c’est la disposition textuelle de l’ar
ticle L X X X V III de ladite loi du 27 ventôse an 8 ; le citoyen N oyer-D ubouyt l’invoque, il conclut donc ainsi :
Attendu que d’après les dispositions textuelles de'l’arrêté des Consuls ,
du 18 fructidor an 8 , l’ordonnance de 1667 a été mise à exécution dans
tous les tribunaux de la R épublique, pour la forme de la procédure ;
Attendu que le paragraphe III de l ’article III du titre X X X V de
l’or
donnance de 1667 défend de recevoir les oppositions formées aux jugemens rendus en dernier ressort, par défaut faute de p laider, lorsque la
cause a été appelée au tour du rôle ;
Attendu que les articles 80 et 88 de la loi du 2 7 ventôse an 8 ordon
nent textuellement l’exécution des lois ; que quand même les parties vou
draient et consentiraient à ne pas les exécuter, le commissaire du Gou
vernement, près les tribunaux, doit requérir et se pourvoir en cassation
contre de pareils jugemens 5
’
.
Atteudu que l’ opposition formée par l’avoué T a rd if, le 18 ventôse an 10,
avait pour seul m otif que le jugement du 11 ventôse an 10 avait annullé
le jugement du 6 floréal an 95 que les dames N o y e r , et G reliche leurs m a
ris, ayant demandé ensuite la nullité
de ce même jugement du 6 floréal
an 9 , en désavouant le citoyen N oyer-Lagarde, et faisant juger le désaveu
bon et valable contre lu i, le citoyen Noÿer-Lagarde y ayant consenti >
l’opposition qui avait été formée en leur nom par l’avoué T ardif, était par
conséquent annullée par la volonté de toutes les parties ;
Attendu qu’après ce jugement ( qui par le
tion
fait annullait l ’opposi
) le jugement du onze ventôse an 10 a été signifié à
dom i
cile , et qu’aucune des parties condainuées ne s’est pourvue contre ses
dispositions ;
Attendu qu’on ne peut invoquer un usage local et particulier, lorsque
cet usage est en opposition avec une loi précise et formelle faite pour la
généralité de la République française; que pour qu’ nue loi générale puisse
être; envisagée comme étant tombée en désuétude, il est nécessaire d’éta
blir le non usage dans la généralité de l’htat ;
Il plaise au tribuual débouler les intimés de l’opposition formée en leur
nom par l’avoué Tardif au jugement du 11 ventôse an 10 , ou en tout cas1
�Ç - 35’ )
les déclarer non recevables; ce faisant, ordonner que; ledit jugement, ren
du le i l ventôse an 10 sera exécuté suivant sa forme et teneur, condam
ner les intimés aux dépens.
.
•
, ■
o^CoyenùL- JuênviauecL..
L ’appelant aurait pu s’eri tenir à établir ses faits et prendre des conclu
sions, soit sur l ’appel du désaveu, soit sur le débouté ou la fin de non
recevoir de l ’opposition formée à la requête des intim és, le 1 8 ventôse
an i o , par l’avoué T a rd if, au jugement du n ventôse an io .
Mais comme dans les ci-devant parlemens ou cours souveraines, aujour
d’hui représentés par les tribunaux d’ a p p e l, l ’on plaidait et l ’on écrivait
à toutes fins; quoique convaincu que l’adjudication de ses conclusions n’é
prouvera aucune difficulté ; s i , contre son attente, il y en avait, en ce
cas , et sans aucune approbation de sa p a r t, il va prendre des conclusions
à tontes fins, et établir ses moyens subsidiaires.
i . ° L es dames N oyer, et Greliche leurs maris , et N oyer-La g a rd e, in
timés , héritiers de Jean-Baptiste-Joseph N oyer-D ubouyt, par son testa
ment du 19 therm'dor an 2 , qui n’ont recueilli sa succession qu’ à ce titre,
peuvent-ils être recevables à critiquer les reconnaissances que leur père
avait fa ite s à son épouse Françoise T ixier , soit celles antérieures à la.
révolution, soit celle contenue dans son testament ?
Comme il est incontestable q u e , sous aucun rap p o rt, ils ne peuvent
être admis à les quereller ni à les critiquer , vidht naturellem ent la question
suivante.
2 .0
Peuvent-ils retenir la succession de Françoise T ix ie r , autre que
son m obilier, sous le prétexte que Françoise T ixier avait f a i t A tous ses
etfa n s , du nombre desquels éta it N oyer-D ubouyt, en
q u a lité
d’héritiers
de Jean-Baptiste N oyer-D ubouyt, son m ari, une démission de biens, un
acte réel de partage de sa succession, par acte sous seing privé ?
Cette prétendue démission ,
cet acte de partage ne faisant point
pièce de la procédure , n’étant ni vérifié , ni enregistré , ni signifié s
ni connu , peut-il faire un titre pour les intimés ?
Sur la première question , il suffit d’observer qu’étaut au lieu
place du mari de Françoise
•
et
Tixier , comme étant ses héritiers , ils
5 a
�.
.
(
5
6
.}
.
n’ont pas plus de droit qu’il en avait lui-m êm e
.
.
il n’aurait pu reve
nir contre ses prqpres actes.
2 .0 Ce qui les rend
non-recevables à les quereller , ces reconnais
sances , c’est que celle de
dans le testament qui les
12 ,000 liv res , qui est la dernière , est
rend
héritiers ; ils. la
reconnaissance , puisqu’ils en ont payé
saisir de la succession ; celle-là
connaissaient cette
l’enregistrement avant de se
maintient
les
autres , puisque
la
clause y est , ainsi les héritiers du mari n’auraient pas osé la dispu
ter à leur mère
de son vivant ; ils
n’ont pas plus de droit à les
Contester à son héritier , après sa mort.
Mais le père a motivé ces reconnaissances ; il dit qu’elles
pro
viennent des biens qu’il a vendus appartenant à son épouse ; ces biens
étaient des immeubles
qu’il n’avait pas le
droit de vendre , dans
lesquels sa femme pouvait rentrer , dans lesquels son héritier pour
rait et peut rentrer s’ il l’eût jugé convenable à ses intérêts.
En quoi consistaient ces biens ? en une maison que M. Reboul avait
acquis pour le prix extrêmement modique de 3,120 livres : cette maison
vaut aujourd’hui 10,000 livres,
2 .° En un jardin , grange et colombier , placés dans la ville
Clef-mont ,
dans
un des quartiers des plus
de
agréables , qui ont été
vendus , on peut le dire , au sixième de leur valeur 1,200 livres : cet
objet vaut aujourd’hui au moins 8,ooo~Iîv.
Une vigne de 10 œuvres située dans urç des meilleurs coteaux de
.Clermont : cette vigne v a u f aujourd’hui 4,000 liv.
4.0 Une terre, également à C lerm ont, que l ’on estime 1,200 liv.
Ces reconnaissances ont encore d’autres sources; la vente des meubles
que le père a déclaré avoir faite; les 1 ,2 5g liv.
qu’il a avoué avoir retiré
du greffe; les 1,400 liv. qu’ il avait touché chez M. Berard-de-Cliazelle ;
les 600 liv. qu’ il-avait aussi touché chez
M. de V ich y-de-V arvasse; de
plus les contrats de rente à prix d’argent, les obligations, etc.; la créance
duç par sieur Ajmet. Tardif, etc.
Ai.qiis ces objets ou valeurs, il faut ajouter les
36 ,000 liv. prises par lui
dans l’armoire de sou beau-pcrc; les 8,000 liv. en dépôt chez M. de Het)m l , et les 6,000 liv. que la mère lui avait remis en louis d’or : cette déclaiation de 6,009 liv,, les adversaires 11e la diront point fuile pour la cause.
�.
3
7
}
Ainsi l’on voit que les reconnaissances ne font pas le quart des droits
de Françoise T ix ier; il faut ensuite y ajouter la succession de M arie-Gabrielle T ix ie r, sa sœur.
Mais une autre fin de non recevoir contre les intimés, c’est qu’à suppo
ser que l ’appelant dût établir la consistance des biens de sa m ère, qu’il
fût dans une hypothèse où la lo i l’y contraindrait, ou il y aurait du doute,
il dirait à ses adversaires : vous êtes non recevables, parce que le crime
que vous ave/, commis en violant les scellés , en recelant les titres de l a
fam ille. m’en ôterait les moyens, et c’est par v otre fait que je suis dépouillé •
de ma propriété, c’est par votre coadulte répréhensible
sans doute que
j’en suis empêché ; mon titre est la bonne foi de mon père; la sincérité
des actes qu’ il a faits, il n’a pu ni voulu rien faire qui pût être soupçonné
d’illégitime ; ces actes étaient pour lui des actes de devoir qu’il a rempli et
qui ne pouvaient nuire à personne ; et v o u s , si vous vous croyez, en droit
de les contester, commencez par abandonner sa succession qui ne vous était
donnée qu’à la charge de respecter et honorer tous les titres qu’il avait
faits , et tous les engagemens qu’il avait pris.
Les reconnaissances portent le caractère de la sincérité par elles-m ê
mes , parce que la fraude ne se suppose pas ; celui qui ? allègue doit la
prouver.
M a is ,
disent les intim és, ce sont des avantages indirects que la loi
défend.
Reconnaître ce que l’on d o it, ce que l’on a tou ch é, n’est pas faire un
.don, c’est payer sa dette; la lo i ne défend pas de payer ses dettes, et l’a
vantage est pour celui qui s’acquitte.
S je u x ie m o
^2netfoovi.
Peuvent-ils retenir cette succession , à Vexception du mobilier trouvé
lors et après le décès de Françoise T ixier , ou ne la fa ir e consister que
dans ce mobilier qu'ils abandonnent à l'appelant , sous lep rétcx te d’une
démission d’un partage de succession anticipé, f a i t par suite de Pexécu
tion de l’effet rétroactif de la loi du 17 nivose an 2 ; dém ission, départe
ment ,a c te d e partage qui nefont, point pièce auprocès que Noyer-D ubouyt
/l(" reconnaît p a s , parce qu’elle n’est ni sig n ifié e , ni reconnue, ni
�( 38 )
avouée , e t qui en outre a été annullée par tous les actes fa its par les
adversaires , et spécialement par jugem ent du
25 ventôse an 5 .
Cette prétendue démission de biens , cet acte de partage annullé est
un acte qu’ils n’ont pas fait connaître , que l’ on ne retrouve point au
contrôle, qui n’est ni reconnu , ni vérifié , ni~enregistré^, ni signifié ;
pour qu’ il pût faire pièce au pro c è s , il faudrait le mettre dans les for
mes voulues par la lo i.
Cet acte , en le supposant ex istan t, est un acte de partage de succes
sion an ticip é, un département que faisait Françoise Tixier à tous ses
enfans , en qualité d'héritiers de Jean-Baptiste-Joseph N oyer-D ubouyt ,
son mari.
C et acte avait donc été fait avec l ’appelant en qualité d’héritier de
son p ère, et il ne l’était héritier que par l’existence de l’effet rétroactif de
la loi du 17 nivose an 2 , qui a été rapportée.
Il est incontestable que la mère avait la faculté de l’antiuller , parce
que tous les actes faits par les ascendans à leur descendans en ligne
directe , quelque forme qu’ait l’acte , quand il opère transmission de la
totalité des biens aux descendans , sont toujours regardés comme des
partages par anticipations de succession qui sont révocables à volonté T
à moins qu’ils n’aient été faits par contrat de mariage.
Mais les intimés ont été si fort persuadés que cet acte avait pris
son fondement dans l’effet rétroactif de la loi du 17 nivose au 2 ,
comme étant fait avec l’appelant en qualité d’héritier du père com
m ua
; qu’eux
mômes ont fait annuller tous les actes faits avec l u i ,
môme les actes de vente
qui avaient été la suite de cet acte ’ de
partage , et
qui avaient pris leur
jugement du
25 ventôse an 5 , la nullité de tous les actes faits daii3
fondement dans c e lu i-c i; par le
la famille a été -prononcée comme étant fies partages
qui
naissance et qui n’avait d’effet que par l’eflet rétroactif de
ont pria
cette loi.
L ’exemple que l’on va citer, que les adversaires 11e peuvent contre
di re, eu est la p re u v e ,
L ’on ne pouvait faire
puisque c’est eux qui en sont les acteurs.
le partage de la succession du
père sans
faire celui de la succession de la mère , parce que tous les biens de
�.
la mère étaient
était
( 39 } ,
dans ceux du père ; la première
fondas
donc celui de la mère ,
l’engageant à
faire
un
et l ’on ne
pouvait le
opération
faire
qu’en
acte de partage entre ses enfans , qui avec
N oyer - Dubouyt étaient alors tous héritiers de son mari -, aussi l’acte
fut-il fait avec eux en cette qualité : au même moment Marie Noyer ,
fils aîné , vend à ses quatre cohéritiers le cinquième
qu’ il prenait
dans la succession du père et de la mère , qui n’en faisait qu’ une ;
il
fut expliqué que la portion de la succession de
partie ,
pourrait lui contester lorsque le
Au
la more en faisait
sous la réserve du cinquième de son mobilier , que l ’on 11e
décès de la mère arriverait.
moyen du partage fait par la
m è re , et de la vente faite par
l’aîné des héritiers , il ne resta plus qu’ à diviser ces deux successions
entre les
4 héritiers , du nombre desquels était Noyer-Dubouyt ; il
fut divisé en deux lots , un pour Noyer-Dubouyt et Noyer-Lagarde,
et l’autre pour les dames Noyer et leurs maris.
L a succession de la mère et du père fut donc ainsi divisée , par
Fexistence de l’effet rétroactif de la loi du 17 nivose , puisque NoyerDubouyt y figurait comme héritier de son père , et qui 11’a plus été
héritier , lorsque cet effet rétroactif a été aboli^ que les adversaires
l’ ont fait juger contre lui.
Trois mois
après , Noyer-Lagarde vend à N oyer-D ubouyt sa por
tion à lui revenante dans les immeubles ; l’ acte était du 1 5 nivose
an
3.
L’effet rétroactif fut rapporté au mois de fructidor an
4
fut faite la
3 , et en l’au
loi du 4 vendémiaire an 4 , qui ordonnait le mode
des partages à refaire , lorsqu’ils l’avaient été par la
rétroactif dont était iniectée la loi du
17
suite de l’effet
nivose.
Immédiatement après , N oyer D ubouyt est' attaqué par les intimes ;
N oyer-Lagarde
et Marie
N oyer prétendent que les actes
de vente
qu’ils ont faits ne sont que des partages qui avaient pris leurs sour
ces dans l ’effet rétroactif de la loi du 17 nivose an a , puisque tous
les actes de
famille avaient été faits
avec N oyer-D ubouyt en cette
qualité ; en conséquence ils ou demanderont et firent prononcer la nul
lité : ce partage du bien <le la mère , cet acte du 22 fructidor an 2
<st du nombre , puisque
les eflets qu’ il produisait
ju m Noyer-Du-
�(
4o
)
’
bouyt ont eu le même sort ; et s’ils eussent
alors voulu
et enten
du le faire considérer comme tout autre acte , même comme vente
ordinaire dont ils auraient voulu souteuir l’e ffe t, ils l’auraient fait pro
noncer par exceptions.
Ils auraient bien fait ordonner que Noyer-Dubouyt prendrait avec eux
un cinquième , puisque l ’acte était
fait à son profit
comme au leur ;
ils n’auraient pas fait ordonner que N oyer-D ubouyt leur paierait à chacun
1,000
liv. d’après leur contrat de mariage , somme qui
pas d u e, ne pouvant pas cumuler la qualité d’héritiers et de légitimâmes ,
y
j s Æ G• 4
avoir la succession par le moyen du partage du 22
fructidor, et les
ïjOoo liv. chacun par l’effet de leur contrat de mariage.
Ce n’est que dans leur écriture du 18 nivôse qu’ils ont essayé à
balbutier quelques moyens pour tâcher de faire considérer cet acte
comme une vente pure et simple ; mais dans la plaidoirie , leurs défenseurs
qui étaient fort embarrassés, pour d’ une très-mauvaise cause en faire en
apparence une passable, abandonnèrent ce m oyen; ils s’ attachèrent seule
ment à contester la valeur des reconnaissances ; ils embrouillèrent leurs
plaidoiries par des demandes de créances comme héritiers de le ur père
envers la -succgssicm de la mère"7 ils ne savaient de quelle manière con
clure pour revenir sur leur répudiation , et la combiner avec la qualité
d’héritiers et de créanciers qu’ils voulaient prendre d’une succession qu’ils
représentaient comme n’ayant rien ; enfin ils mirent le tribunal dans la
nécessité d’appointer la cause au conseil.
_ Il reste pour constant, et les intimés ne peuvent donner des moyens
pour empêcher que la cause 11’ait été jugée définitivement et en dernier
ressort , sans pouvoir recommencer ; la loi est écrite , elle est invoquée.
L appelant est convaincu qu ils 11 en auraient pas été plus heureux quand
ils seraient dans le cas de revenir sur leurs p a s, par la voie de l’opposi
tion ; toute leur con du ite, tous leurs actes sont marqués au coin de la
mauvaise foi ; et les cliicaues sans nombre mises en actions , n’ont servi
qu’à retarder l’exécution du jugement du 11 ventôse an 1 0 , contre eux.
Néanmoins et ^subsidiairement seulement , sans aucune approbation
préjudiciable
de sa*pdrt-‘,‘ Ktfipelànt croit devoir proposer au tribunal
d’appel les conclusions suivantes ;
'
En
ne leur serait
�(4 0
‘
E n ce qui touche la réalité et la sincérité des reconnaissances, attendu
que la fraude ne se présume pas , que l’existence d’un titre en établit la
vérité ; que c’est à ceux qui l’allèguent à en faire la preuve ;
.
Attendu que les intimés sont n o n recevab les, i . ° à alléguer la fraude ,
puisque c’est eux-mêmes qui ont brisé ou violé les scellés où reposaient
les titres de famille ; 2 .0 non recevables à contester les reconnaissances,
puisqu’ ils ne sont héritiers du père commun qui les a faites que par le
même acte qui les contient, et qu’ils ne peuvent séparer le commodo de
Vincommodo.
j
Attendu d’ailleurs que les sommes touchées ,
chez M.
soit au greffe ,
soit
B erard-de-C hazelle, V ich i-d e-V arvas , et la valeur des biens
im m eubles, sont d’une valeur au-dessus du montant des reconnaissances ,
que d’ailleurs elles représentent aussi la succession de M arie-Gabrielle
En ce qui touche la démission de b ie n s, l’acte de partage des biens
de la mère ;
.
•
Attendu que l ’acte ue fait pas pièce au procès , qu’elle n’est ni con
nue , ni vérifiée , ni enregistrée , ni signifiée , et qu’elle a été annullée
par les actes judiciaires faits par les intim és;
Attendu que quand il existerait, ayant été fait avec N oyer-D ubouyt;
en qualité d’héritier de son père , il aurait pris sa source dans l ’effet
rétroactif de la loi du 17 nivose ,
que conséquemment il serait nul ;
Attendu que les intimés l’ont considéré eux-mêmes comme t e l , puis
qu’ils l’ont fait aunuller par jugement du
25 ventôse, que les effets qu’il
avait produits avec N oyer-D ubouyt ont été aunullés ;
Il
p la’se au tribunal débouter les intimés de leurs oppositions au juge
ment du 11 ventôse an 1 0 , ou ea tout c a s , les déclarer non r e c e v a b l e s ,
ordonner que ledit jugement sera exécuté suivant sa forme et teneur j
condamner les intimés aux dépens.
.
N O Y E R - D U B O U Y T .
V A Z E I L L E S ,
père , avoué.
im iS / u tY
~
Clem o n t fe r r a n d d e l’imprimerie de L IM E T , P èr e et F us.
i
c
t
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Noyer-Dubouyt, Jean-Joseph-Marie. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Noyer-Dubouyt
Vazeilles père
Subject
The topic of the resource
successions
confiscations
fisc
abus de confiance
avoués
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jean-Joseph-Marie Noyer-Dubouyt, habitant de la commune de Chamalières, appelant ; contre Jeanne Noyer et Pierre Greliche, son mari ; Marie-Gabrielle Noyer et Joseph Greliche, son mari, habitans la commune de Mozun ; et Anne Noyer-Lagarde, avoué près le Tribunal civil de première instance de l'arrondissement de Clermont-Ferrand, intimés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Limet (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1750-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
41 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0236
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0237
BCU_Factums_G1319
BCU_Factums_G1320
BCU_Factums_G1322
BCU_Factums_G1324
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53735/BCU_Factums_M0236.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chamalières (63075)
Mauzun (63216)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
avoués
confiscations
fisc
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53734/BCU_Factums_M0235.pdf
3fc7521144966e16fb27a815dd190eb4
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Text
OBSERVATIONS
S O M M A I R E S .
.
\
�Généalogie
RIBAUD.
des
G é n é a l o g i e
d e s
SA M PIG N Y.
G é n é a l o g i e des
E tie n n e D a g o n n e a u
à
M a r ie B ib r ia n t.
P ie r r e V e r n a i s o n .
S é b a s tie n R ib a u d
à
A n n e F erra n d .
G ilb e r t
à
C a th e r in e F i l l a s t r e ,
G iifcrt
i
G ilb e rte ta y n a u d .
I
/V A ^
G il b e r t R i b a u d
à
C la u d in e D e g a n e .
Anne ï.ib au d
à
François B u b o is .
P ierre D u b o is
à
M arguerite D agonneau,
*
f^A^\
O.B, LufeoU
à
F ran ço ise Y ernaison,
jim ab le-M irg u erite,
de c u iu s ,
à
.Anuble S ju b r a n y .
Jacqu es
à
F r a n ç o is e M a y e t ,
J o s e p h R ib a u d
à
î iic h e lle C o u c h a r d .
I
Jacq u es R ib a u d
à
E lizabeth C h o u v ig n y .
J .B , Ribaud,
appthnt.
N ..... R i b a u d
à
N ......L o n g u e i l ,
F r a n ç o is e
A n to in e tte
à
_
G a b r i e l d e S a m p ig n y .
I
i
2
François-CharleSi Jgnace-Jiyacintiie
à
M a r g u e r it e *
à
P ie r r e D u b o is .
E tie n n e
à
M a r g u e r ite G ir a r d .
J . B . D u b o is
à
_
F r a n ç o is e V e r n a is o n .
A n to in e
à
A n t o in e t t e P é lis s ie r .
A m a b le - M a r g u e r it e
à
A m a b le S o u b r a n y ,
G ilb e r te - A n to in e tte ,
fe m m e M a c h e c o ,
J . B . D u b o is .
A m a b le - M a r g u e r it e
J e a n n e - A n to in e tte
à
Michel-Amable Ferrand.
\
DAGONNEAU.
A m a b le S o u b r a n y ,
de cu jus.
âe cujus,
intimée.
�OBSERVATIONS SOMMAIRES
S E R V A N T
DE
R É P O N S E
A C A U SE S E T M O YE N S D ’A P P E L
ET
D’O PPOSITION ;
P O U R dame G i l b e r t e - A n t o i n e t t e
D A G O N N E A U , épouse de J e a n - C h r é t i e n
M A C H E C O , autorisée en justice , habitante
de cette ville de Riom , intimée ;
C O N T R E J e a n - B a p t i s t e R I B A U D -L A C H A P E L L E , habitant du lieu de la Chapelled’Andelot, appelant d’un jugement rendu au
tribunal d'arrondissement de cette ville, le 11
nivôse an 10.
L ’ A P P E L A N T élève une prétention déjà proscrite
par trois jugemens successifs de la premiere autorité judi
ciaire il se croit appelé à la succession de la dame veuve
A
TRIBUNAL
d’appel
.
séantàRiom.
v^ v^ j
�,
, en cette
( 2 ville,
}
. . an 7 ; il
.
Soubrany, décédée
le 27 prairial
convient qu’il ne descend que du quadrisoïeul de la dame
Soubrany ; il ne conteste pas à la branche Sampigny la
moitié affectée à la ligne maternelle ; mais il réclame une
portion dans la moitié affectée à la ligne paternelle, et
veut concourir avec la dame de M aclieco, cousine issue
de germaine de la dame Soubrany, comme descendante
du bisaïeul de la défunte.
L e citoyen Ribaud fait donc renaître la question connue
sous le nom de refente ; il se félicite que cette question
soit enfin soumise à la décision du tribunal d’appel, et
ne doute pas qu’avec le système de représentation à l’in
fini, établi par la loi du 17 nivôse an 2 , il ne parvienne
à ses fins.
Il réclame encore subsidiairement la dot qui fut consti
tuée à Anne Ribaud, femme de François Dubois, bisaïeul de
la dame Soubrany, sous le prétexte que Gilberte Reynaud,
en mariant Anne R ibaud, sa fille , le 16 février 1640,
a voit stipulé la reversion de cette dot à son profit.
La dame dé Maclieco ne devoit pas s’attendre à éprouver
des contestations de ce genre. L ’appelant est sans qualité,
sans droit comme sans intérêt : il sera facile de l’établir.
On voit par l’extrait de la généalogie ci-jointe, qu’en
effet la dame de Maclieco est cousine issue de germaine
de la dame veuve Soubrany de cujus ,• que la dame de
Maclieco descend du meme bisaïeul, tandis que JeanB iptiste Ribaud ne descend que du quadrisaïeul : c’est
un fait convenu.
,
Une foule d’autres parons au meme degré que le citoyen
R ibaud, notamment la dame de L on gu eu il, sa sœ ur,
�( 3 )
'
s’ étoient présentés lors de l’ouverture de la succession ;
depuis, ils ont fait notifier leur département à la dame
de Maclieco. On n’a pas cru devoir les rappeler dans la
généalogie ; mais en supposant que la refente eût lie u ,
ces prétendans étoient en si grand nom bre, que d’après
le calcul le plus exact, et en admettant, comme le sou
tient le citoyen R ib a u d , que la succession fût en valeur
de 300,000 francs, il ne reviendroit pas 300 francs à l’ap
pelant.
Il est vrai qu’il fait sa portion plus grande ; car il s’est
im aginé, dès que tous ces prétendans s’étoient départis ,
que toutes leurs portions d evo ient lui accroître, et alors
il s’attribue le quart de toute la succession. .
Ce n’est pas la seule extravagance du citoyen Ribaud ;
ses prétentions choquent évidemment la disposition de
la loi du 17 nivôse, et bientôt le tribunal d’appel fera
disparoître ce rêve ambitieux, en proscrivant sans retour
toutes ses demandes.
»
Il est difficile de concevoir comment a pu s’élever la ,
question de la refente, d’après la lettre de la loi du 17
nivôse an 2.
L ’article L X X Y I I porte : « L a représentation a lieu
» jusqu’à l’infini en ligue collatérale'; ceux qui descendent
» des ascendans les plus proches du défunt, excluent ceux
» qui descendent des ascendans plus éloignés dans la
» môme ligne. »
Certes, il n’y a pas d ’é q u ivo q u e dans cette disposition
de la loi. L a représentation a lieu ju sq u ’ à Pinfini en
ligne collatérale ; voilà le principe général : il est ensuite
modifié par la seconde partie de l’article. Cette repuéA -2
�.
.
( 4 )
.
sentation n’a lieu qu’entre ceux qui descendent de l’àscendant le plus proche. La loi l’explique bien clairement
dans les articles suivons : « A in si, est-il d it, les descen» dans du père excluent tous les descendans des aïeul
» et aïeule paternels \ les descendans. de la mère excluent
» tous les autres descendans des aïeul et aïeule maternels. »
' Cette première explication ne paroît pas encore suffi
sante ; la loi ne veut laisser aucun doute. E ll e d it, ar
ticle L X X I X : « A défaut de descendans du père, les des
» cendans des aïeul et aïeule paternels excluent tous les
» autres descendans des bisaïeul et bisaïeule de la même
» ligne; de même à défaut de descendans de la mère. » Et
enfin l’art. L X X X I porte : « La môme exclusion a lieu en
» faveur des. descendans des bisaïeux et bisaïeules, ou
» ascendans supérieurs contre ceux des ascendans d’un.
» degré plus éloigné dans la même ligne. ».
Sans contredit, les argumens les plus simples sont les
meilleurs. Comment se fait-il cependant que l’ambition
ou l’avidité aient pu faire naître des difficultés contre la
teneur de ces articles? Quelque clairs qu’ils soient, des,
descendans d’ascendans supérieurs ont voulu concouriravec des descendans d’ascendans plus proches. Ce système'
a eu des partisans éclairés, et le tribunal de cassation a.
été bientôt investi de la question..
V oici l’espèce du premier jugement qui“ a été rendu..
. M arie-Pliilippe W aghenart étoit décédée sans posté
rité le i nivôse an ; la moitié de sa succession, suivant
la loi du 17 nivôse an 2 , fut dévolue à sa ligue pater
n elle, et l’autre moitié à sa ligne-maternelle..
L a portion affectée à la ligne maternelle fut recueillie
sans difficulté par un parent de cette ligne,.
5
5
�5
C )
L a défunte avoit laissé pour parens, dans la ligne pa
ternelle, Jean-Baptiste-François ; et Catherine Chauvet,
épouse d’Adrien-Louis Bourla.
Jean-Baptiste-François descendoit de l’aïeul maternel
de Françoise D utelot, qui étoit grand’mère paternelle de
la défunte de cujus. Catherine Chauvet descendoit, au
contraire, du père de Léon W agh en art, qui étoit aïeul
paternel de la défunte de cujus. Dès-lors Jean-BaptisteFrançois descendoit d’un ascendant de la défunte., plus '
éloigné d’un degré que l’ascendant dont descendoit Qatlierine Chauvet ; et ces deux ascendans, quoique tous deux
dans la ligne paternelle de la défunte , étoient-de deux
lignes ou de deux branches étrangères l’une à l’autre.
Jean-B aptiste-F rançois p réte n d it, co m m e H i b a u d , qu’il
étoit appelé par la loi à recueillir mpitié de la portion
affectée à la ligne paternelle. Catherine Chauvet soutint,
de son cô té , qu’en sa qualité de descendante d’un ascen
dant plus p roch e, elle devoit recueillir toute cette por
tio n , à l’exclusion de Jean-Baptiste-François, descendant
d’un ascendant plus éloigné dans-la même ligne.
Un jugement du tribunal civil,de, Jemmapes , du z 5
thermidor an , accueillit la prétention de Jean-BaptisteFrançois. Sur l’appel, le tribunal civil de la I>3rs infirma
fcelui de première instance , et attribua exclusivement à
Catherine Chauvet la portion affectée h la ligne paternelle.
Demande en cassation de la part de Jean-BaptisteFrançois : requête admise; mais par jugement du 12 bru
maire an 9 , Jean-Baptiste-François fut débouté de sa
demande en cassation.
Cette décision solennelle est entre les mains de tout le
5
A
3.
�. . .
t
C f i ) .............................................
inonde : il est inutile d’en rappeler* lés motifs déjà fort
connus ; on se contentera de rappeler qu’il y est dit que
l’art. L X X V II , en établissant la représentation à l’in fin i,
en détermine à l’instant même l’effet, en posant pour règle
'générale que ceux qui descendent des ascendans les plus
proches du défunt, excluent ceux qui descendent des
ascendans plus éloignés de la même ligne.
■‘ On y observe que le mot ligne appliqué à la succession
'Collatérale, ne désignant qu e la manière dont le collatéral
est lié au défunt, et tout collatéral n’étant jamais lié à un
défunt que de deux manières, ou par le père ou par la
mère de ce d éfu n t, il s’ensuit que le sens propre du mot
ligne en cette'm atière, est d’indiquer uniquement le lien
paternel ou celui maternels.
•
Ce seroit forcer, ajoutè-t-on, lé sens naturel du terme-,,
que de vouloir comprendre dans cette expression prise au
singulier <
} non seulement les lignes paternelles et mater
nelles , mais encore les branches de chacune de ces lignes;
branches qui ne font que des'ramifications ou divisions du
lien paternel ou m aternel, auxquelles on est obligé de
donner les dénominations- arbitraires de lignes secon
daires , par- opposition, à la dénomination' de lignes p r i n
cipales que- l’on donne aux deux premières..
E t d’ailleurs, la transmission des biens par succession,,
quoique subordonnée aux lois positives, a toujours eu
■pour règle fondamentale- la présomption naturelle de>
l’aifeGtion- du défunt en faveur de ses parens les plus
proches ; et la loi du 17 nivôse- elle-même- a pris en.
considération cette présomption naturelle , dans ses dis
positions sur les cliiFérentes espèces de successions..
�m
.
,,
- Depuis ce jugement, la questiori a é t é encore de nou
veau agitée au tribunal de cassation, section des requêtes,
dans l’affaire relative aux successions dçs frères Trudaine,
jugée à Paris le 13 fructidor an ,7 , et à Versailles, sur
l’appel, le 18 ventôse an 8 , toujours contre le système de
la refente. L e pourvoi en cassation contre le jugement
en dernier ressort a été rejeté.
1
•
Enfin un .troisième1jugement du même tribunal, du
13 floréal an -1,0 , ja cassé et annullé un jugement du
tribunal civil de la Seine-Inférieure , qui avoit admis le
système de la refente dans l’espèce qui suit.
Il s’agissoit de la succession de la fille Calais, décédée’
au Havre le floréal an 3 , sans héritiers en ligne directe.
Elle avoit laissé dans la ligne m aternelle, pour parens
collatéraux , les filles Lecacheux, et A nne - Thérèse
Hérouard_
.
Les filles Lecacheux descendoient d’un bisaïeul ma
5
ternel;
Anne - Thérèse Hérouard descèndoit. d’un, trisaïeul
maternel..
'
A n n e-T h érèse Hérouard v o u lo it, comme Ribaud-r
concourir avec les filles Lecacheux, et réclamoit la moitié
de la portion* affectée à la ligne maternelle ': les parties
compromirent devant des arbitres-, à la charge de l’appel..
Anne - Thérèse Hérouard réussit' dans sa prétention
et sur l’ap p el, le jugement arbitral fut confirmé par
lè tribunal civil de la Seine-Inférieure y le 3 . thermidors
an 7 : pourvoi en cassation par les filles Lecacheux. '
- Jugement du 13 floréal an 10 , qui casse et- annuité;
celui de la Seine-Inférieure , comme ayant violé l’article1
L X X V I I de la loi du 17 nivôse an 2..
�.
.
.
c
8
5
.
• - O n peut en Voir les motifs "développés plus au long
<daris:'le',:journal du .tribunal de cassation, ou les; faits
fitr les moyens' sont rappelés avec exactitude.' '
■ Ces décisions me sont pas’ ignorées du citoyen Ribaud;
Tnais il n’est pas effrayé' par des exemples. Suivant lu i,
les jugemejis ne sont bons que pour ceux q u i les
obtiennent ce sont les expressions qu’il emploie. « T ou s1
i»‘les hommes sont sujets à des vicissitudes; et si on a
» jugé hier de telle m anière, on peut juger demain d’une
» autre. »
'
L e citoyen Ribaud compare la loi à. une source claire
tet limpide , qui bientôt obscurcie par le limon lorsqu’elle
forme^ un ruisseau
est .encore plus méconnoissable
lorsqu’elle se jette dans une riv iè r e , et on ne la reconnoît plus lorsqu’elle est dans l’Océan,
.
T o u t le monde , dit - i l , croit la comprendre ; mais
quand elle a passé par les mains des commentateurs, les
interprétations, les difficultés, la l'endent inintelligible.
V oilà ce que le citoyen Ribaud appelle des- moyens :
la jurisprudence m êm e, toujours versatile, n’est qu’un
commentaire plus obscur.
On pourroit lui répondre que la loi la plus sage n’est
jamais sans inconvéniens ; tel est le sort de l’humanité ,
que tout ce qu’elle touche est empreint de ce caractère
d’imperfection qui lui est propre.
Cependant, une des lois les plus sages qui soit sortie
de la convention, est celle qui règle l’ordre des succes
sions. En ne considérant plus l’origine des bien s, pour
en régler la transmission, on a évité des difficultés inex
tricables, soit pour remonter aux estocs, soit pour régler
le payement des dettes.
�'C 9 )
En transmettant les Liens aux parens les plus proches,
on a suivi la loi de la nature, l’affection présumée d’un
parent pour ceux qui lui appartiennent de plus p rès..
C o m m e cette loi n’a pas eu jusqu’ici de commenta
teur , que toutes les explications ont été données par
les législateurs eux-m êm es, elle n’a pu être obscurcie
dans ses dispositions..
Une jurisprudence constante est,le complément d e là
législation, et c’est faire injure aux tribunaux , que de
les accuser de versatilité dans leurs décisions, sur un point
de droit aussi certain..
Aussi le jugement du tribunal c iv il, dont se plaint
le citoyen R i b a u d , n’a-t-il pas varié; il a proscrit une
pretention choquante , et il y a lieu de croire que le
tribunal d’appel confirmera une disposition qui est basée
.sur l’évidence, sur la lettre et l’esprit de la l o i , et sur
les exemples que le tribunal de première instance a eu.
sous les yeux..
L e citoyen Ribaud ne doit pas être plus heureux dans
sa demande relative à la revendication de la dot cons
tituée à Anne R ibau d , bisaïeule de la dame Soubrany«.
: D ’abord, le citoyen Ribaud est sans qualité' pour reven
diquer cet objet. La dot fut constituée en 1640 par G il
berte Reynaud, mère d’Anne Ribaud. La mère qui étoit
alors v e u v e ,. stipula la réversion à son profit dans le cas
où sa fille décéderoit sans enfans , et ses enfans sans
descendans.. L ’appelant ne représente pas Gilbcrte R eynaud; dès-lors il ne pourroit pas réclamer cette consti
tution ; le plus grand vice qu’on puisse opposer, c’est „
sans contredit, le défaut de qualité..
�( 10 )
En point de d ro it, d’après la loi V I , an ff. de jure
dotiurn, jure suceurs uni est y a t r i, ilfaudroit distinguer
la réversion légale de la réversion conventionnelle. La
première , d’après Lebrun et Ricard , n’a lieu qu’en
faveur des ascendans donateurs et non en faveur des
héritiers collatéraux.
A l’égard de la réversion conventionnelle, la question
a été fortement controversée. Plusieurs auteurs ont pensé
qu’à l’imitation de lu loi,/«re succursuni, elle ne pouvoit
avoir lieu qu’en cas de prédécès du donataire ; d’autres
estiment qu’elle a lieu aussi en faveur des héritiers du
donateur, nam plerum que, tamhœredib lis nos tris quàm
7 iobismetipsis cavernus. L o i I X , de pj'obat.
Mais un point sur lequel tous les jurisconsultes sont
d’accord, c’est que la réversion conventionnelle dépend
entièrement de la stipulation des parties ; qu’ainsi il faut
la restreindre à ce qui est exprimé. A in si, par exemple ,
s’il est dit qu’elle aura lieu dans le cas que le donataire
décéderoit sans eiifa n s, plus de réversion , si un enfant
survit; s’il est exprimé sans enfans, ou les evfans sans
descendait.y, plus de réversion, lorsqu’il y a des petitsenlans qui survivent; et, dans tous les cas le retour ne
peut s’étendre au delà. On peut consulter, à cet égard,
Lebrun, Ricard , d’O live, liv. III, chap. X X V I I , et le
dernier commentateur, sur l’art. X X I V du til, X I V de
la coutum e, tom. 2 , pag. 317.
Dans l’espèce particulière, Anne R ibaud, fille de la
constituante, a eu un (ils, Pierre Dubois qui lui a survécu ;
de Pierre Dubois est issu Jean-Baptiste, père del à clamé
veuve Soubrany, de cu ju s, d ès-lo rs il y a eu enfant,
�C 11 )
petit-enfant et arrière-petit-enfant ; par conséquent, plus
de retour.
Un motif également puissant pour écarter toute idée
de^ réversion, c’est qu’il est de règle encore dans notre
c o u t u m e , que la dot mobiliaire estoque et se confond
in secundo gradu dans la personne du petit-fils : voir
le dernier commentateur, art. I V du tit. X I I , tom. i ,
pag. 2.6g. Ici la confusion s’est opérée sur Jean-Baptiste
D ubois, petit-fils d’Anne R ibaud, et père de la dame
veuve Soubrany ; que vient donc réclamer le citoyen
Ribaud ? Sa prétention seroit une chim ère, en admet
tant même qu’il eût qualité.
On se gardera bien de suivre le citoyen Ribaud dans
sa longue dissertation, relativement au x déjuens. Il nous
apprend son secret ; il voudroit éviter l’amende \ il se
plaint surtout de ce qu’il n’est pas le seul qui ait fait
apposer les scellés, qui se soit opposé à la rémotion ; il
n’a pas fait plus de frais qu’un autre ; il trouve injuste
de payer tous les dépens.
Cette discussion intéresse peu la dame de Macheco ;
elle se contentera d’observer que le jugemtfïit dont est
a p p el, prononce une condamnation pure et simple des
dépens personnels au citoyen Ribaud; et que dans l ’exé
cutoire du i ventôse an 10, qui comprend les depens
généralement faits par tous les prétendans droit qui avoient
formé opposition à la rém otion des scelles , on a distin
gué la portion de chacun ; que sur la somme totale
de 1,877 fr*
cent, à laquelle sont calculés et arrêtés
ces dépens, Jean-Baptiste Ribaud, appelant, n’y est com
pris que pour celle de 390 fr. 8 cent.
5
�( 12 )
D e quoi le citoyen R ibaud peut-il donc se plaindre ?
Ses réclamations, sous tous les rapports, sont sans intérêt
comme sans objet ; partout il est sans droit et sans qualité.
'
>
Par conseil, P A G E S , ancien jurisconsulte.
'
D E V È Z E , avoué.
A
De l ’imprimerie de
L
a h
d
R I
0
r i o t ,
d’appel.
M,
seul imprimeur du tribunal
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dagonneau, Gilberte-Antoinette. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Devèze
Subject
The topic of the resource
successions
successions collatérales
coutume d'Auvergne
Description
An account of the resource
Observations sommaires servant de réponse à causes et moyens d'appel et d'opposition ; pour dame Gilberte-Antoinette Dagonneau, épouse de Jean-Chrétien Macheco, autorisée en justice, habitante de cette ville de Riom, intimée ; contre Jean-Baptiste Ribaud-La-Chapelle, habitant du lieu de la Chapelle-d'Andelot, appelant d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de cette ville, le 11 nivôse an 10.
arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1799-Circa An 10
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0235
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Vensat (63446)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53734/BCU_Factums_M0235.jpg
coutume d'Auvergne
Successions
successions collatérales
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53733/BCU_Factums_M0234.pdf
78e90b66d07aefbf4e6875d40d25fe59
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Text
MEMOIRE
Ire. Section.
P O U R
J
acques
B R U N E L D E P R IV E Z À C , proprié
taire, habitant actuellement du lieu de C h a n z y ,
mairie de B esset, département d’A llie r, intimé
et défendeur en opposition
C O N T R E
C h a r l e s - P i e r r e et G a b r i e l L A N D R I E V E
,
,
fermiers, habitans du lieu de Chantagret mairie du
,
Peyrouse appelans et demandeurs en opposition.
le cours du papier-m onnoie, le citoyen de
Privezac a réafferm é aux appelans deux domaines où
leur famille a trouvé le germe d’ une fortune très-con
séquente pour eux. L e bail a été fait en l’an 4 pour
commencer eu l’an 5 ; le p rix en a été exprim é en nuA
P
en d an t
�.
( 2 }
.
méraire. E n abusant des nouvelles lois sur les t r a n
sactions entre particuliers, les appelans veulent se jouer
de leurs promesses ; ils ont conçu le projet inique de
payer plus de moitié moins que ce- à. quoi ils sont
obligés. Il en résulte la question de savoir si un fer
m ier qui a requis la réduction d’un bail à ferme
germ inal an 4 , au p rix d’un bail ancien, peut obtenir
cette réd u ctio n , quoiqu’il n’ait pas payé dans le mois
de la publication de la lo i du 6 messidor an 6 , l’arriéré*
des fermages. Les premiers juges ont dit non ; leur langage
est celui de la loi..
F A IT S.
L e sieur de T illy , m aréchal des camps et armées de
France, demeurant à P aris, étoit propriétaire de la terre
de B eauvoir, située arrondissement de R iom ,. canton de
M ontaigut-les-Com brailles.
D e cette terre dépendoient deux domaines très-con
sidérables, connus sous les noms de Cliantagret et C ornassat. Les L an driève en ont été fermiers pendant plu
sieurs générations. Ils y ont acquis plus de 80,000 francs;
la commune renommée leur donne 60,000 francs d’ar
gent' comptant.
L e 5 août 178 4, le sieur de T illy étant alors en son
autre terre de B ostes, département d’A llie r , distante
de huit lieues de celle de Beauvoir, le sieur de T illy re
nouvela au profit des L andriève la ferme des domaines
de C liantagret, et Cornassat. L e cours de ce nouveau
bail devoit commencer seulement î\ la Saint-Jean 178&,
et finir à lu Saint-Jeun
1797*
Pr^x ostensible fut de
�(3 )
'
îa somme de 1,300 francs argent, quarante - cinq- livres
cle beurre et douze poulets. L e bail contient plusieurs
clauses inutiles à rappeler ici.
L e sieur de T illy habitait la capitale ; sa naissance
et son rang l’attaclioient à la cour. E loigné de ses biens,
il n’en connoissoit pas le produit réel : les L an driève
les exploitaient depuis longues années; il avoit la bonté
de s’en rapporter trop à eux : aussi s’y sont-ils enrichis.
D ’ailleurs, le sieur de T illy étoit n ob le, et par cette
raison exem pt de taille; comme noble, il ne de voit que.
des vingtièmes : cette imposition étoit assise en propor
tion des p rix de ferme. Par ce m otif, tous les gentils
hommes a voient un grand intérêt a mettre en évidence
des fermages moindres en sommes; mais ils 11’y perdoient
rien. Ils recevoient des pots de vin conséquens. T o u
jours il y avoit Ou des co n tre - lettres ou des eiTets an
nuels , qui pour l’ordinaire égal oient le p rix exprim é
au bail.
I l en fut ainsi entre le sieur de T illy et les L an
d riè v e , en 1784. L e sieur de T i l l y , dont les alfaires
n ’étoient pas en très-bon état, passant alors une reno
vation de bail qui ne devoit commencer que quatre ans
après, (à la Saint-Jean 17 8 8 ), le sieur de T illy , disonsnous, reçut beaucoup d’argent com ptant, et le p rix écrit
dans l’acte pardevant notaire, en fut d’autant moindre.
L e 13 juillet 1 7 9 0 ,1 e citoyen de Privezac acquit la
terre de Beauvoir et dépendances, par acte passé devantnotaire à Paris : la vente comprenoit beaucoup de droits
féodaux que la révolution a fait disparoîlre.
L e citoyen de Privezac arrivé sur les lie u x , trouva
A u
�( 4 ) _
tontes choses dans le plus mauvais ordre. II vit les L a n driève en possession des deux domaines de Chantagret
et Cornassat -, il fut frappé de la vilité du p rix du bail :
mais il étoit obligé à l’exécuter ; il le lit.
' L orsq u ’il fut question de passer nouveau b ail, les
L andriève se m irent sur les rangs. Plus d’un an avant
l ’expiration de celui de 178 4 , ils prévinrent le citoyen
de Privezac ; ils devinrent très-pi'essans. Celui-ci étoit
dom icilié dans le département de l’A v e y ro n , où l’on attachoit peu de p rix au papier-m onnoie. Q uoiqu’il eût
à se plaindre de ce que les Landriève l’avoient payé aussi
avec ces non-valeurs, ce ne fut pourtant pas une raison
d’exclusion contr’e u x -, il se contenta de faire avec eux les
conventions qu’on faisoit alors pour n’avoir que des écus,
ou tout au moins la valeur représentative des écus.
A in si il fut passé bail entre les parties, ( et pardevant
n o ta ire,) le 8 germ inal an 4 ; il fut fait pour neuf ans,
qui devoient commencer le 24 juin 179 7, (id e s t, le 6
messidor an 5 ) ; il y est dit : à titre de b a il à fo r m e et
PRIX
D’ARGENT.
. C e bail contient à peu près les mêmes clauses que celui
de 178 4; il y a pourtant cette d iffére n ce, que p ar
l ’article X I I , le citoyen de Privezac donna aux L andriève
le droit de prendre chaque année dans un b o is , appelé
les Saulzeixr la m oitié d’une douzième portion de bois,
avantage que ne leur accordoit pas le bail de 1784; il
y a aussi cette autre différence, que p a rle bail de fan 4 ,
les Landriève
furent chargés
des contributions,' tandis
«
^
qu’ils 11’y étoient pas obligés par celui de 1784.
.
L e prix, annuel du bail de l’ail 4 fut convenu à la
�( 5 }
..
.
Somme de 3,000 francs, payable au dom icile dn citoyen
de Privezac et en numéraire (1).
Cette somme est le juste p rix de la ferme de.ces deux
domaines ; et les fermiers peuvent encore y faire de trèsbonnes affaires.
A la suite viennent les bestiaux de ces deux domaines.
Les Landriève reconnoissent a v o ir, depuis 1782, six
bœufs arans, neuf vaches m ères, un taureau, line v êle,
trois suivans et tx-ente brebis. Les bestiaux à cornes sont
estimés à la somme de 5a 6 francs : les L an driève s’en
gagent à en rendre pour môme somme en fin de ferm e;
quant aux b rebis, ils doivent seulement les remettre
tête pour tête.
Toutes ces précautions étoient dictées par les circons
tances d ’a lo rs. Instruits par le passé, les propriétaires
en usoient ainsi p o u r éviter l’écueil d u papier-monnoie.
I,e citoyen de Privezac étoit dans la ferm e persuasion
d’en avoir exprim é assez pour s’en mettre à l ’abri ; mais
il ne fut pas long-temps dans cette sécurité, les L a n d rièv e,
dans lesquels il lui avoit paru quelque honn êteté, se
m ontrèrent tels qu’ils sont. L e 9 vendém iaire an 6 , ils
lui notifièrent, en son domicile dans l’A v e y ro n , que le
(1) A rt. X Y I . E l enfin pour le p r ix de ladite ferm e , lesdits
preneurs ont promis et se sont obligés de payer audie citoyen
bailleur} chacun a n , a u x lieuoc portés ci-dessus, l a somme de
3,000
l'HANCS EN NUMÉltAIUE OU VALEUR nEHlÉSENTATTVE , Cil deUX
termes égaux tic chacun i , 5.oo francs; le premier payem ent échoira
le 11 novembre 1797 , le second le 24 ju in 1798 et a in si con
tinuer, etc.
�.
.
(6 )
,
bail du 8 germinal an 4 , se trouvant passé entre le pre
m ier janvier 1792 et la publication de la loi du 5 ther
m idor an 4 , ils en requéx’oient la réduction au taux
de celui existant en 179 0 , (d e celui du 5 août 1784 ).
Celui de 1784 n’ayant qu’un p rix ostensible, un p rix de
1,300 francs , tandis que lors de ce bail ils a v o i e n t versé
beaucoup d’ax*gent dans les mains du sieur de T illy ;
il suivroit de cette perfidie que les L andriève jouiroient
des biens du citoyen de P rivezac, pour une somme infi
niment inférieure à la valeur réelle de son produit.
L e 16 nivôse an 6 , le citoyen de Px*ivezac fit aux
Landi’iève commandement de payer la somme de i , 5oo fr.
montant du demi-terme alors échu. P ar cet acte, il fit
élection de domicile en sa maison à Pagas dans l’A v e y r o n ,
( et encore en la m aison .et dom icile du citoyen J e a n
B r u n , habitant du lieu de L a - M o iso n -N u e, com m une
du P e jr o u s e , -pour la décade seulement. Il nous a semblé
nécessaire de rapporter ici le m ot pou r mot de cette
élection ).
L e 21 du même mois , les Landrièv.e firent au citoyen
de P rivezac, ( au domicile du citoyen Brun ), des offres,
i ° . de la somme de 65o fran cs, formant le demi-terme du
ferm age sur le taux du bail de 178 4 ; 2°. de celle de
42 li'ancs pour la dîme supprimée ; 30. de celle de 6 liv,
I.o sous pour frais du commandement -de payer ; et
rien pour le beurre et les poulets; et rien pour le bois
des Saulzeix. L e citoyen Brun n’avoit pas pouvoir de
toucher ; ces offres ne furent pas reçues.
A p rès avoir cité au bureau de p a ix , et en vertu de
procès verbal de non conciliation, le 26 du même m ois,
�(
7
).
.
les Landriève assignèrent le citoyen de P riv e z a c , au
tribunal civil du département du P u y-d e-D ôm e, i ° . en
réduction du prix du bail de l’an 4> au taux de celui
de 1784; 20. en réitération et consignation de leurs offres.
Cette assignation fut donnée au dom icile du citoyen Brun.
A cette époque, le citoyen de Privezac étoit dans sa
terre de Pagas ; les Landriève profitèrent de la circons
tance pour prendre contre lui jugem ent par défaut ; il
est du 27 messidor an 7.
P ar ce jugem ent, le p rix du bail de l’an 4 est réduit
au p rix de celui de 178 4, en y ajoutant 42 francs pour
la dîme. Les Landriève réalisèrent leurs offres de la
somme de 692 fra n cs, seulement pour le terme échu le
2,1 brumah-e an 5 , ou frais, pas un centime pour ceux
échus depuis. Leurs offres sont déclarées suffisantes; la
consignation leur en est permise aux frais du citoyen de
Privezac ( 1 ) .
(1)
Attendu que d’après l’article V I de la loi du 9 fructidor an 5,
tous les haux passés entre le 1". janvier 1792 et la publication de
la loi du 5 thermidor an 4 , sont réductibles aux prix des baux des
mêmes objets en 1790, en y ajoutant les droits supprim és, quel
ques expressions et dénominations de inonnoie que les baux em
ploient.
A ttendu que tous cloutes à cet égard sont levés par l'article II de
la loi du 6 messidor an 6.
A llen d u que le bail consenti par le défendeur, le 18 germinal
an 4 , est placé au nombre de ceux sujets à r é d u c t io n .
A llen d u le fait constant que le bail desdils biens ne s’élevoit,
en I 79°> (Iu’à une somme de i,5oo frîmes.
•
Attendu que conformément aux dispositions de ladite loi du.
�.
.
.
.
( 8 )
.
P oin t de signification de ce jugem ent, point de con
signation des offres; les Landriève demeurent nantis de
tout.
L es prem ier fructidor an 8 et 5 frim aire an 9 , oppo9 fructidor an 5 , les demandeurs ont ajouté à leurs offres la
somme de 65 o francs pour un dem i-term e du bail a ferm e , la
somme de 42 francs pour les droits supprimés, plus celle de 6 fr.
5 o centimes pour frais; que dès-lors leurs offres sont régulières.
L e tribunal, par jugement en dernier ressort, donne défaut
contre le défendeur, faute de plaider ni personne pour lui ; et pour
le profit, ordonne que le prix du bail à ferme par lui consenti aux
demandeurs le 8 germinal an 4> demeurera réduit et fixé, pour
toute sa durée, tant pour les termes échus que pour ceux à échoir,
à la somme de i , 3oo francs d’une p art, comme faisant le prix
du bail existant en 1790; à la somme de 42 francs d’autre p a rt,
pour la valeur de la partie de la dîme qui doit être ajoutée au prix
de cedit bail ; en conséquence, donne acte a u x demandeurs de
leurs offres réalisées sur le bureau de F audience, 1*. de la somme
de 65o francs pour le terme de leur ferm e échu le 2 1 brumaire
an 6 ; 2°. de celle de l\2 fra n cs pour la 'valeur de la dlme sup
prim ée, qui doit être join te au prix- de l ’ancien bail ; 5°. de celle
de G francs 5o centim es pour fra is ; déclare lesdites offres bonnes
et 'valables et suffisantes ; ordonne que ledit Brunei sera tenu de
les recevoir et d’en fournir quittance aux demandeurs; faute de
c e , leur permet de les consigner entre les mains du receveur établi
en la commune de R io m , aux frais dudit Brunei : ordonne, en
con séqu en ce, que la quittance de consignation délivrée par le
receveur, leur tiendra lieu de quittance et valable décharge,
tant du p rix du bail échu le 21 brumaire an G , que de la totalité
de la 'valeur de la dîme des fru its récoltés en l'an 5 , qui doit en
faire p artie, ainsi que des fra is fa its par le citoyen B ru n ei; et
coniUimne ce dernier a u x dépens.
_
silion
�.
t 9 )
sition du citoyen de Privezac. Il demande la nullité des
offres et la continuation des poui'suites commencées.
L e 3 floréal an 9, jugement contradictoii-e rendu entre
les parties, au tr ib u n a l civil de l’arrondissement de R iom ;
l ’opposition du citoyen de Privezac au jugement par
défaut du 27 messidor an 7 a été reçue; les L andriève
ont été déclarés non recevables en leur demande en*
réduction -, l’exécution pleine et entière du bail de l’an.
4 a été ordonnée ; le citoyen de Privezac a été auto
risé à continuer ses poursuites (1).
(1) Attendu que quoique les parties du citoyen Bayle jeune,
par leur acte du g vendémiaire an 6 , aient requis en temps utile
la réduction du bail dont il s’agit, autorisée par la loi du g fruc
tidor an 5 ., néanmoins elles n ’ont donné aucun effet à ladite ré
duction , en faisant les offres des arrérages cchus, d’après les formes
voulues par les;lois’subséquentes.
Attendu que-l’article VJIII de la loi du 6 messidor an 6 , pour
autoriser la demande en réduction des b au x, exigeoit de la part
des fermiers le payement de tous 'les termes desdits baux échus
antérieurement à ladite demande.
^ A tten d u que lés parties du citoyen Bayle n ’ont pas fait des offres
de tous les termes qui éloient éclius à cette époque. ‘
Attendu pareillement qu’à ’l’qudicnce du ci-devant tribunal du
départem ent, 'eîle6 r>\}nt fait les1 6ffres: intégrales de tous lesdits
ternies échus à> cette époque. ‘ ■
'*
Attendu que les oflies cPuh denlùlerme par elles faites, et autres
accessoires* <n’onl pas'été renouvelées à dom icile, ni'-'cilecluees ait
bureau do conciliation, en consignant du in o ii'S ^ '1^0' 1^ 1^ dû çé
qu’elles avoient offert ù l’audNmfce.
"
'* "
1
Attendu que d’après toutes ces c o n s i d é r a t i o n s , lès parties du
C i t o y e n Bayle n ’ont pas satisfait, n i £1 ce qui étpit prescrit par la
‘
B
�*■ . ^10) .
.
c L e 28 du même m o is, signification de ce jugement au
domicile des Landriève.
. L e 3 prairial suivant, appel des Landriève.
• L ë 4 du même m ois, offres réelles faites par les Landriève au citoyen d e P riv e z a c , (en son
domi
cile actuel ii Chanzy, département d’A llie r ,) de la somme
de 6,352 francs 90 centimes pour les arrérages de la
ferme sur le taux du bail de 1784 échus alors, pour
intérêts et frais; offres non acceptées.
L e 26 messidor an 9 , demande par les L an d riève, en
défenses, contre l’exécution du jugement dont est appel.
Jugem ent qui ordonne que les parties en viendront à
l'audience du 6 th erm idor, toutes choses demeurant en
état.
L e 6 therm idor an 9 , jugement contradictoire 'q u i
don n e, i°» aux L a n d rièv e, acte de leurs offres de la
somme de 6,362 francs 90 centim es; 2«. au'citoyen de
P rive za c, acte de ce qu’il offre de recevoir'à bon compte
et sans aucune approbation préjudiciable. "
1 . ‘
loi du g fructidor an
6 messidor an G.
5,
ni à ce qui ctoit ordonné par celle du
•
,
r
l
i
, L e tribunal, par jugement en premier ressorly reçoit,la partie
de Lorignon opposante au jugement par d é fa u t, du 27 thermidor
an 7, lequel demeurera sans effet ; et sans s ’arrêter à la demande
en réduction du p rix du bail d u ¡8 germinal an 4> dans laquelle
les parties du citoyen B a y lc sont déclarées noiv-recevablès, fai-.
6ant droit au ioïid , ordonne que ledit lj;iil du '8 germihal an
sera exécute suivant sa form e et .teneur, jusqu’à l ’expiration d ’iceJui;
ordonne en oulreque les poursuites commencées seront continuées,
condamne les parties du citoyen lîajle aux dopçns,.
,.
,
�C rô
..
_
Réception par le citoyen de Privezac «le' la somme de
S,682 fran cs, et le 20 fructidor su ivan t, réception par
le citoyen Gourbeyre de la somme de 672 francs ; total
6,354 francs, avec la clause, le surplus et moyens res
pectifs demeurant- réservés a u x parties.
L e premier floréal an 10 , défaut contre les L an driève,
défaut non expédié.
L e i 5 du môme m ois, opposition par les Landriève,
1
M O Y E N S .
j
Dans cette cause, nous avons des lois très-positives,
rien n’est laissé à l’arbitraire. Les premiers juges ont
appliqué bien exactement ces lois ; leur jugement est le
résultat d’une m é d ita tio n sage. D a n s le n o m b r e d e ces
lois ils n e se so n t p as m é p r is ; ils o n t a p p r o p r ié à l ’espèce
celles qui lui appartiennent.
'
•
Il
en est une du 9 messidor an 4 , qui soumettait à la
réduction tous les baux à ferme passés après la publication
de celle du 4 nivôse an 3 , portant levée du maxim um . (1).
U ne autre loi du 5 therm idor an 4 , autorisa tous les
citoyens à «contracter comme bon leur semblerait. E lle
voulut que les obligations qu’ils auraient souscrites fussent
exécutées dans les termes et valeurs stipulés (2).
(1) A rt. X . Les prix des baux non stipulés en denrées, et qui
Ont été passés postérieurement i la publication de la loi du 4 ni
vôse an 3 , qui a levé le m axim um , seront réduits au p r ix du
bail précédent, etc.
(2) A rt, I", A dater de la publication de la présente lo i, chaqu»
B 2
�.
t 12 )
,
,
- Celle du 18 fructidor an 4 , .fit une exception à la r é •duclion exprim ée en l’art. X de celle du 9 messidor
précédent. ;Dans cette exception elle com prit les baux
.stipulés en denrées ou en N u m é r a i r e , E u sorte que
p a r-là , le propriétaire qui ayoit contracté moyennant
des'éctts, fut assuré de n’èti’C'payé qu’en écuset' sans aucune
réduction. Il est à remarquer ici que cette loi se sert seu
lement du .substantif num éraire , parce qu’en l’an 4 ,
quand 011 disoit n u m éra ire, l’on entendoit parler d’es
pèces sonnantes et non de;'papier-monnoie. Les mots non
stipulés en deiirées ou en num éraire ? qui y sont aussi r
signifient bien clairement que la réduction ne s’étend pas
jusqu’aux baux qui contiennent la .stipulation en numé
raire ( 1 ).
’
' '
1-'-V ient ensuite la -loi.si connue 'du 9 therm idor an
.5 :
par l’article V I , elle assujettit ù la réduction les baux
passés entre la publication de la loi du 4 nivôse an 3
et celle de la loi du 5 therm idor an 4 ; i ° . au taux du
ci'loycn sera libre de contracter comme bon lui semblera. L e s
obligations qu’ il aura, souscrites seront exécu tées dqns les ternies
et valeurs stipules.
,
(1) A rt. III. L a réduction prononcée par l’article X de la loi
du 9 messidor dernier, des prix des baux qui ont été passés pos
térieurement à la levée du m axim um , aura son effet pour l’an 5
comme pour l’an 4 >et en général pour toute la durée desdits baux.
L a même réduction pourra être demandée, sur les b a u x non
STirur.ÉS en df.nhkes ou kn •numkrauik, postérieurs au - i " . ja n
vier "179 3 , dont les anciens p r ix sont augmentés' 'de p lm J ’ un
cinquième.
'
'
�•X 13 )
b ail de 1790 , s’il en existe'u n ; 20. au, taux fixé par des
.experts, s’il n’y a point de bail èxistant en 1790. Dans
les deux cas elle veut ( article V U ) que pour le p rix o.u
l ’évaluation du pi‘ix de 1790 , on ajoute lés dunes et asulres
.charges supprimées p a rla loi du 10 avril 1791
a^ res.ï
.elle;veut que l’on comprenne aussi les sommes q:ui^pro
m ises, soit a titre d ép ôt de v in , so it par]contre-lettre5
s o itd e toute autre m a n ière, seront reconnues avoir f a i t
dajis le temps partie du p rix.
/ ' '>•
- L ’article X oblige le fei'm ief y ;depa,ander p ar éqrit la
réduction : il doit le faire dans le m ois.de la publication
de la lo i; après ce d éla i, il y est nonrecevablej (r). ‘ ,
IVarticle I I de-la loi du
messidor ari 6., (expliqua
l ’article V I de celle du 9 fructidor a n '5 , ¡¡ainsi;qu^ii suit'*
« Sont compris clqns l ’article V I'd e lu ¡loi ilu.'9:J[iîuçfeidor
» an 5 , et .suscepliblcs'de la ryductiünjlipe.ntiounéc, audit
p article, les baux stipulés, en tout ou en ¡partie,, à p rix
» d’argent, passés entre le prem ier'jajjvier;::i792, et La
6
» publication de la loi du
5 tliennidor an 4 , r elative aux
» transactions entre citoyens, quelques expressions et dé
» nominations derm om ioie , cjui1y aient été'çmployées ».
••
'r
• 1 • 11.*1 *1 *
‘ •* T7 'î •' [’ ' ’ 1» '4ï
. Mais
V III')
les ferm iers,
.) A la 'môme 1loi
’• iv‘article
*
' 'i astreint
'Y 'ft
"r
1°. à .¿requérir dans le mois la .rédiicfion
à payer
dans le jrnômc délai .au. propriétaire,-, soit-Je ipontant des
t ■ îl
(1) A rt. X . Ceux des
f e r m
t
; . . V •i : i f .f\ *i
.^’après jes.articles
i e r s , q u i
précédons, droit à la réduction du prix de l.e y r .Î w l 1 - a u r q i ç n t
pas encore demandée 011 obtenue, s e i v f . i t : >iA •
.p V i
ΔX’he d éch u s, de la demquder par écrit, dans le¿n o is fjiu¡s^iiyra
la publication de la présente.
.
•V »
1
�.
C 14)
ternies échus suivant le bail de 1 7 9 0 , soit le montant
de quatre fois la contribution foncière assise en l’an 5 ,
sur les objets afferm és, et cela dans le cas où il n’y auroit
point de bail existant en 1790. Ces deux conditions sont
de rigueur : sans demande et sans payement dans le m ois,
le ferm ier encourt la peine de la fin de non recevo ir,
parce que la loi ne veut pas que le ferm ier abuse des
circonstances, et tienne le propriétaire en état de souf
france ( 1 ).
.
^
P a r l’article X V , la même loi veut que toutes contes
tations à ce.sujet soient réglées suivant ses dispositions (2).
L ’article X V I I porte que les dispositions de cette loi
ne sont pas faites pour les baux passés par anticipation,
et dont le preneur ne seroit pas encore entré en jouis
sance. L e »bail du 8 germinal an 4 , a commencé en
m essidor'an 5. Les adversaires sont d ès-lors entrés en
jouissance avant la loi du 6 messidor an 6 ; elle est
donc applicable à la cause.
_________ 7 . '_______
-
'
'J. • i y
'
'
(1) A rt. Vlir. L es fermiers qui provoqueroient la réduction
du prix du b a il, n e l e p o u r r o n t , a p e i n e d ’ ê t r e d é c l a r é s n o n recevab les,
que
p r é s e n te ,
q u ’e n
e t
dans
le
m ois
p a ya n t
g u i suivra la p u blica tio n de la
dans le
même
m ois,
ou
au proprié
ta ir e , ou au receveur des dom aines, suivant les cas,
m o n ta n t des term es
échus,
d 'ap rès l e
d ail
exista n t
soit
en
le
1790,
so it, h défaut do b a il ou dans le cas de l’article V c i-d e s s u s ,
q u a t r e f o i s l A c o n t r i b u t i o n F O N C I E R E de Vau 5 , des objets
dont il s’agit, s a u f à com p ter, m êm e à répéter s’il y a lieu, lors
de la liquidation définitive.
(a) A rt. X V . Tontes contestations non définitivement terminées,
seront jugées eu conform ité de la présente.
�( i 5 )
- E ’analyse de ces lois met Lien en .évidence-le point
de droit. O n peut donc juger bien aisément dans quels
cas il y a lieu à réduction, quelle marche et quelles con
ditions sont à suivre pour l ’opérer légitimement.
*
t
•
A in si donc nous aurions à traiter deux questions ;
l’une de s a v o ir si le bail du 8 germ inal an 4 est'sujet
à réd u ctio n ; et l’autre d e 'sa vo ir si les Là'ndrièvë ÿ.
sont rècevables : nous nous attacherons principalement
à cette, dernière. Nous ne ferons ressortir; que comme
m oyens de considération les circonstances ¡relatives à la
p rem ière, parce que s’il y a Æn dei nonrrecevoir cei>.
ta in e , une discussion plus étendue seroit superflue^ u
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r L e 9 'vendémiaire^an ' 6 r, les ‘’Lan drièvèiion t signifié
<|u’ils' requéraient-lit ¡réduction du prixi du :'<bail r du 8
germ inal an 4 , au taux de celui de 178 4, en ;vertu tde
la loi f du 9 fructidor an 5» r i l! 1-> v'ji !i iJ- 'i ' î ' .
’ • Cette réquisition paroîtroit ê tre veriue! dansde/m ois,
3u com p tei\ dé la 'p u b lica tio n de cettei lo i'; parce ’gué
ceLte publication -n’a 'é té faite au département d u 1Puy~
de-Dôme'^ que Ae1 231 fructidor an* 5 .rio;b u b ' -i ;;i
•
’" M ais-il ne' suffisait; pas d’une simple; ré q u is itio n de la
part des fermiers. Elle constitiioitseulemëntrmieideriiande;et une demande n’est pas toujours un droit, invariable
ment acquis. Une demande n’est que le commencement
d’une contestation.
;-
1)1 -
‘
�.
( 16 )
.
P o u r que tout soit réglé , il -faut "entre les fermiers et
lé p ro p riétaire, ou un consentement récip roq u e, qui
form e un contrat entre eux , sur lequel les deux puissent
rep o ser, ou un jugement qui en tienne lieu. P ou r que
tout soit'certain de la part des fermiers , il faut qu’ils
signent leur réquisition et en l’original et en la copie
il faut qu’ils le fassent ou par* e u x ’ ou par un fondé- de,
pouvoir:spécial j etm ëm d que l’on donne au propriétaire
copie de' la procuration, parce que les fermiers y con
tractent ùn engagcrttenty celui de payer sur l’ancien bail.
Sans signature ÿlar réquisition peut être désavouée : il n’y.
a rion>deçanstâratji
t
' ;
Ici point de signature de la part des L an d riève, ni d’un
fondé de pouvoir spécial. L?ex!plôit du 9 vendémiaire an 6 ,
a été posé par un nommé A u b in , huissier reçu en vin
tribunal de distijôfci'idans lV k v e ÿ r o n 'h u is s ie r qui ne
présente aucune assurance en cas de désaveu. En sorte
qitê. Îes-Laaadidè^èrfiiiroient !pu(Yen;moqùer ■impunémen t ,
di l’on ¡¿.véitLVüiilitcles prendre! au m’ot sur lleffet de-leur
réquisitions -à 8 "i l > iuioj 'ï >
ni; , ¡\ r» i¿.ri•rrrt
A u reste il n’y avoit rien.de term idé’en(i-e,les)par,tîesy
lorsqu’à.' ipîirLÏï laulor-dui6 imossidoii an,j6.'iydrei )quoi le
etqit leuivposi‘ti'én‘ji’ti8peotive oit môj0a£nt<de<lai publication;
île cfcUeloL:,nous venons de le dire', leSrLandrièvc avoiei^t
requis la réduction.île 9 vendém iaire aü 6,: lp' citojyeifc
dé -PriiVGiiâc! n>’y[a^oit«-pas adhéré ;’hu contraire', il leur
av6it faitblerr 6'nivôse su iv a n t, commandement de payer
k fe^mme' de' rôboi francs, pour le d e m i- te r m e échu de
lftiJarme’-Siir le pied de 3000 Irancs par an. L e 26 du
moine mois , lçs Landriève l’avoient fait assigner au
tribunal
�( i7 >
tribunal civil du département du Puy-de-D ôm e , pour
vo ir prononcer sur la réduction requise par l ’exploit
du 9 vendémiaire. A u moment de l’apparition de la lo i
du 6 messidor an 6 , il n’y avoit encore rien de réglé
ni par les parties , ni par les tribunaux ; les parties en
étoient seulement en état d’une contestation bien form elle.
Elles se trouvoient donc précisém ent dans le cas de
l’article X V . -L’affaire devoit donc être conduite et jugée
en conform ité de cette loi. Il falloit donc aussi que les
L an driève payassent dans le mois de la publication
(suivant l’art. V I I I) tout l’arriéré des ferm ages, sur le
taux du bail de 1784 , existant encore en 1790 ; sans cela
fui de non recevoir écrite très-expressément dans la loi.
O r , c ’est ce que 11’ont pas fait les L an driève : en effet,
au moment de l ’é m is sio n de ceLle l o i , étoient échus les
termes de novem bre 1797 ( ou brumaii-e an 6) et de juin
1798 ( ou messidor an 6 )-, ces deux termes form oien t,
suivant le bail de 1784 , un total de 1300 francs de p rix
principal. Les Landriève devoient dès-lors payer et cette
somme et les accessoires expliqués en ce bail , et les
objets supprimés par les lois nouvelles.
. Il est vrai que les L an driève ont offert au citoyen de
Privezac ( au dom icile du citoyen Brun ) , le 21 n iv ô s e
an 6 , la somme de 65 o francs pour le demi-terme écliu
le 11 brum aire p récéd en t, plus celle de 42 francs pour
la dîme supprimée , et enfin celle de 6 francs 10 sous
pour frais.
M ais , i°. ces offres n’ont pas été faites ni a la personne,
ni au domicile du citoyen de Privezac. IiC p rix du bail
etoit payable au dom icile de ce dernier ; cela est dit dans
c
�.
.
( ï8 } .
.
,
le bail du 4 germinal an 8. Celui de 1784 portoit même
engagement de la part des Landriève. D ’ailleurs c e u x -c i
l’ont jugé eu x -m ô m es ain si, puisqu’ils sont allés au
dom icile du citoyen de Privezac pour faire leurs offres
tardives du 4 p r a i r i a l an 9. L e domicile élu par le citoyen
de P rivezac chez le citoyen Brun , n’autorisoit pas les
Landriève à y faire leurs offres du 21 nivôse an 6. Des
offres réelles ne peuvent être valablement faites à un
domicile élu , qu’autant que le créancier a notifié au
débiteur l’indication de payer là , ou que ce créancier
a donné à celui chez lequel est l’élection de domicile ,
le mandat form el de toucher ( 1 ). Ici rien de tout cela.
2°. Ces offres seraient encore insuffisantes, parce que le
( 1 ) D en izart , verbo o f f r e s , r i . 20, dit : « Les offres doivent
» être faites en temps et lie u , c’est-à-dire ( pour le lieu ) à la
v personne du créancier, ou à son dom icile, ou à celui qui a été
» désigné pour la convention. On ne peut pas valablement les
» faire au domicile élu chez un procureur, s’il n’y a sur cela une
» convention expresse entre le créancier et le débiteur. L a cour a
» jugé de pareilles offres insuffisantes, par arrêt rendu le 17 déj) cembre 1714» entre le sieur le Breton et la dame Jossure, quoi
» qu’elles eussent été réitérées ù l’audience sur le bureau ( en cause
}> principale ). »
Pigeau, en sa procédure civile, liv. II, part. I V , tit. I, chap. I,
note B , dit : « Elles ne peuvent l’être au domicile élu par les actes
» de procédure, tel que celui de procureur ou autre, parce que
» cette élection n ’est faite que pour que les actes que l ’on veut
n signifier à une partie parviennent sur le champ à scm procureur,
» et qu’il fasse en conséquence ce qu’il estime convenable; mais
» elle ne donne pas au procureur pouvoir de recevoir pour sa
» partie. »
�C T9 )
_
bail de 1784 , comme celui du 8 germinal an 4 , obligeoit
lesL an driève à payer annuellement quarante-cinq livres
de beurre et douze poulets rendus et conduits au château
de Bostes. Les Landriève n’ont rien offert pour cela.
30. Dans le bail du 8 germinal an 4 , le citoyen de
Privezac a accordé aux L andriève une portion à prendre
annuellement dans le bois des Saulzeix ; celui de 1784
ne leur donnoit pas cet avantage. Dans leurs offres, pas
un centime pour raison de cet objet : autre moyen d’in
suffisance.
4 0. Lorsque les Landriève prirent au tribunal civil
du département du P u y-de-D ôm e, le 2 7 messidor an 7 ,
un jugement par défaut contre le citoyen de P rivezac,
il étoit échu une autre année de ferme en son entier ;
ils devoient donc a lo rs deux années q u i, suivant le bail
de 1 7 8 4 , auroient monte à 2,60 0 fra n cs de prix prin
cipal, à 82 francs pour dîmes supprimées, à quatre-vingtdix livres de beurre , et à vingt-quatre poulets. Néanmoins
ils ne réalisent sur le bureau de l’audience , que les
sommes offertes le 21 nivôse an 6 , c’est-à-dire, 65 o fr.
d’une part, pour prix principal d’un demi-term e, 42 fr.
pour dîme supprim ée, et 6 francs 10 sous pour frais. 11
y auroit donc insuffisance énorme.
5 °. D e simples offres ne suffisent pas, et suivant les anciens
principes, et suivant les nouveaux principes sur les tran
sactions entre particuliers. Dans l’ancien droit, l’on tenoit
pour maxime que des offres labiales n e libéroicnt pas.
Les tribunaux les jugeoient toujours c o m m e non-avenues,
quand elles iréloiept pas suivies ou de réception par le
créancier, ou de c o n s ig n a tio n par le débiteur. Dans le
G %
�.
,
/ 20 ]
~
.
nouveau d ro it, même règle (i) : il faut que le débiteur
ne plaide pas les mains garnies; il faut qu’il soit dessaisi
des deniers offerts ; il faut que sa libération soit opérée
par une consignation.
- I c i ,■point de consignation par les Landriève ; ils sont
toujours demeurés rétentionnaires des deniers offerts ;
ils ont plaidé les mains garnies.
Les choses en étoient en cet état de dénûment absolu
de la part des L an d riève, lorsque la cause a été portée,
plaidée et jugée au tribunal de prem ière instance à R io m ,
le 3 floréal an g : même en cet instant point d’offres
réalisées sur le bureau de l’audience, pas même de&
sommes expliquées au procès verbal du 21 nivôse an 6.
L ’article V III de la loi du 6 messidor an 6 , est de la
plus grande rigueu r; il veut très - form ellement deux
choses infiniment essentielles : i ° . demande en réduction
dans le m ois; 20. payement de tout l’arriéré, aussi dans
le mois. L ’une de ces conditions m anquant, fin de nonrecevoir très-expresse. N e le p o u rro n t, A p e i n e d ’ê t r e
D É C L A R É S N O N - R E C E V A B L E S , que dans le m ois qui
suivra la publication de la présente, E.T q u ’ e n p a y a n t
d a n s l e m ê m e m o i s . Si l’on ne requiert pas dans le
m ois, et si l’on 11e paye pas aussi dans le m o is, c’en est*
fa it; le fermier est obligé d’exécuter le bail sans réduc
tion aucune. T elle est la peine prononcée par la lo i; efe
les tribunaux ri ont qu’a en faire l’application.
'
(1) A rt. X V de la loi du 9 fructidor an
5.
I l en est de même
de ceu x qui ont f a it des offres et consignations valables et suf
fisa n tes.
'
�(
21
)
^
Que les L andriève ne disent pas que tout a été réparé
par leurs offres du 4 prairial an 9 ; qu’ils ne disent pas
que le citoyen de Privezac les ayant reçues, il en résülte
qu’il est payé , et qu’il ne souffre plus aucun tort.
i° . Ici tout est de rigueur. L e délai donné par la loi
du 6 messidor an 6 n’est pas comminatoire', il est fatal.
L e mois écoulé sans payement de rla part du ferm ier,
la fin de non-recevoir est acquise au p rop riétaire, èt il
n’est pas au pou voir des tribunaux de le priver d’un
avantage assuré par la loi.
•
-2°. A u temps des offres du 4 prairial an 9 , le mois
donné par la loi étoit plus que passé;; la firi d e-n on recevoir étoit encourue ; la justice avoit prononcé la
peine ; les choses 11’étoient plus entières.
30. Suivant la loi du 6 m essidor, c’étoit ici une a ffa ire
d’argent ; les L andriève dévoient commencer par l ’offrir
et le consigner dans le temps utile ; ne l ’ayant pas fait à
propos, ils sont dans la même position que s’ils avoient
exercé une faculté de rém éré contre le citoyen Privezac.
S ’ils en avoient été déchus par une sentence sujette à appel,
pour n’avoir pas offert et consigné, sur l ’appel ils seraient
non-recevablcs à purger la demeure : la sentence seroit
confirmée purement et simplement.
Ici il s’agit uniquement de décider si les premiers
juges ont bien fait en prononçant la fin de non-recevoir
écrite dans la l o i , faute dir payement dans le mois. Il
est constant qu’alors il n’y avoit point de payem ent, point
d’offres suffisantes, point de consignation tenant lieu de
payement. P ar conséquent le tribunal de R iom a trèsbien jugé. C ’est l’état des choses au temps du jugement
�»
t C 23 )
du 3 floréal an 5 , qui est déterminant. A cette époque,
y a v o i t - i l oiYres et consignation ou payement ? Non. Ce
qui a été fait après le jugement et même après l’appel ,
lie peut pas faire que ce qui n’existoit pas encore lors du
jugem ent, eût existé avant ce jugement. Comme ici il ne
peut êtr« question ’que du an henè an m a lè , il faut
nécessairement remonter à l’état des choses au temps de
ce jugement.
•
’4°.' L e citoyen de P riv e za c, en recevant les sommes
offertes en cause d’q p p el, ne les a touchées qu’à bon
.compte ; il s’est réservé tous ses moyens de fait et de
droit.' Il lui étoit- dû pltis de 12,000 francs , il n’a reçu
q u’èntour j6,000 francs ; il ne risquoit donc rien en
prenant cet acompte.
■
0 ‘ 5 °. Quand au tort résultant de la conduite des adver
saires envers le citoyen de P rivezac, ce tort présenteroit
une lésion de plus de moitié , si leur projet réussissoit.
:Nous, allons le dém ontrer dans le paragraphe suivant ;
mais en attendant il doit paroître démontré que les
premiers .juges ont parfaitement bien jugé en déclarant
les adversaires non reçevables en leurs demandes en ré-r
dnçtion, ‘
: ; ■
>
•
§
II.
C eseroitpour le citoyen de Privezac un grand m alheur,
6i les L andrieve pouvoient se soustraire impunément
aux engagemens qu’ils ont contractés envers lui parole bail
du 8 germinal an 4* S’ils avoient obtenu la réduction de
ce bail au p rix de celui de 178 4, ils y auroient l’avantage
�( 23 )
^
Criminel de jouir de ses biens moyennant un prix moindre
que celui qu’ils ont p^yé au sieur de T illy .
En effet, dans l’exactitude des faits, le vrai p rix de
ferme des domaines de Cliantagret et de Cornassatj est
celui s t i p u l é au bail de germ inal an 4 .' L e bail de 1 7 8 4
et antres antérieurs avoient été préparés et faits par des
agens d’affaire, qui auraient dû m arquer plus de fidélité
envers le sieur de T illy . C e lu i-c i liabitoit la capitale;
entraîné par le tourbillon des affaires de l’état, éloigné
de ses propriétés, il étoit obligé de s’en rapporter à autrui,
et ses intérêts n’en étoient que plus m al soignés. Par cette
raison ses biens n’étoient pas affermés comme ils devoient
l ’être. D ’un autre côté, l’on faisoit donner en pot de v in ,
et sans en fa ir e m e n tio n dans les b a u x , des sommes con^
sidérables. Par ce biais , le sieur de T illy obtenant de l’ar
gent comptant ( dont il avoit très-souvent b esoin ), il avoit
cet autre profit que ses domaines ne paraissant affermés
que moyennant 1,300 francs, il ne payoit des vingtièm es
que sur ce revenu ostensible. L e bail de 1 7 8 4 a été passé
pour commencer seulement en 1 7 8 8 . Cette anticipation
nous présente sûrement la pensée bien exacte , qu’alors
il y eut de l’argent donné en secret, parce qu’il n’est pas
ordinaire qu’un propriétaire renouvelle ses baux quatre
ans avant l’expiration de ceux déjà ex is tan s.
Si aujourd’hui le citoyen de P rivezac étoit r é d u it au prix
du bail de 178 4 , au prix ostensible de i,3 ° ° francs, il
s'ensuivrait qu’il n’auroit pas le p rix réel. Il n’aurait
aucune ressource pour se faire faire raison du p rix supplé
mentaire et caché, parce que tout se passa en secret entre
le sieur de T illy et les Landriève : en sorte qu’il y aurait
�.
.
.
.
,
(
2
4
)
impossibilité absolue de rem plir le vœu des lois nouvelles
sur les fermages. Ce vœu est que le pi’opriétaire ait au
moins le p rix an cien , et ici le citoyen de Privezac ne
l ’auroit pas.
Q u’à cette considération entraînante on ajoute les ex
pressions et les inductions que présente le bail du 8
germ inal an 4 , il ne restera pas le moindre doute que
les parties ont traité en écus , et que sans la vue cer
tain e, autant que possible alors, d’être payé de cette
manière , le citoyen de Privezac n’auroit pas affermé.
E n e ffe t, i l est dit dans ce b a il, i° . que le citoyen de
P r iv e z a c a ffe rm e à p r ix d'argent. E n F ran ce, quand en
l’an 4 on disoit argent, p e r s o n n e ne se trom poit sur
l ’acception du mot. T o u t le monde entendoit des espèces
sonnantes, et non du papier - monnoie ; les plaies pro
fondes qu’avoit faites ce signe monétaire étoient encore
toutes vives , toutes saignantes ; et alors on évitoit avec
soin' ces m aux pour l’avenir.
20. Ce bail exprim e encoi*e que la somme de 3,000 fr.
sera payable en num éraire ou valeur représentative.
N um éraire signifioit alors des espèces métalliques. L a
loi du 18 fructidor an 4 , n’emploie que le mot num é
raire , pour rendre que les baux stipulés en écus, ne
seroient pas réductibles. Par valeur représentative, l’on
entendoit aussi des denrées, etc. qui représentoient aussi
des écus.
L ’usage est la m eilleure explication du sens des termes
dont on se sert dans certaines contrées; cet usage donne
toujours la mesure de l’ intention des parties. O l-, une
preuve que dans le canton de M ontaigut, par le mot
num éraire
�.
(
_
’ um éraire on vouloit dire é c u s , et non assignats ou
n
m andats , se trouve dans la relation du contrôle du
bail de germinal an 4 , faite au bureau de M o n taig u t,
le 12 germinal. Dans cette relation, 011 voit que le con
trôleur a perçu i o 5 francs; savoir, 100 francs en mandats,
et 5 francs en num éraire ( 1 ). Delà il suit, que dans ce
canton l’on ne considéroit pas les mandats comme du nu
méraire ; il s’ensuit que l ’on ne considéroit comme numé
raire que le num éraire proprem ent dit, et non ces valeurs
fictives qui ont désolé tant de Français.
30. L e bail du 8 germinal an 4 , contient rém unéra
tion et l’appréciation des bestiaux garnissant les domaines
du citoyen de Privezac. Ces bestiaux consistoient en six
bœufs arans, n e u f v a c h e s m ères, un taureau, une je u n e
vache et trois suivans; total, vin gt bêtes à co rn e s. E h Lien,
ces vin gt bêtes n’ont été estimées qu’à la somme de
5z 6 francs. Cette circonstance dépose bien clairement que
toutes les stipulations des parties ont été faites en espèces
sonnantes ; car en papier-m onnoie, vingt bêtes à cornes
auraient été portées à plusieurs m ille livres.
Considérons, enfin, que le citoyen de P riv e za c , en
affermant pour n euf années, moyennant 3,000 francs
par a n , a dû com pter sur 27,000 francs à toucher pour
toute la durée du bail , tandis qu’ il ne recevrait que
11,700 francs dans le sens du bail de 1784. L a différence
serait én o rm e; elle serait de 15,300 francs: elle vaut
(i) Enrcgislró à M onlaigut le 12 germinai an /{. Kecu 10Zfraitcs
en mandatile 100 Jvancs et 5 fra n cs de numéuaiue. Signe Pietre.
'
D
�( 25 )
b ien la peine qu’il résiste aux prétentions déloyales des
Landriève.
Que les Landriève aient fait une fortune de 8 0 ,0 0 0 francs,
on ne la leur envie pas : on la croit légitim em ent acquise ;
mais ils d evroien t être bien contens d’un aussi grand p rofit,
et ne pas viser à avoir injustement le bien du citoyen
de Privezac. Ils se sont engagés à le payer en numéraire.
C ’est chose qui appartient incontestablement à ce dernier ;
et le ti'ibunal d’appel partagera la sorte de satisfaction
q u’a dû éprouver celui de l’arrondissement de R io m ,
en trouvant dans les circonstances de l'affaire et dans la
lo i du 6 messidor an 6 , une fin de non-recevoir invincible ,
un moyen infaillible pour forcer les Landriève à tenir
leurs promesses , à rem plir un engagement sacré sans
lequel ils n’auroient plus eu la ferme des deux domaines
en question.
G OURBEYRE.
A R I O M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
T rib u n al d ’appel,— A n 10,
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Brunel de Privezac, Jacques. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
bail à ferme
loi Emptorem
conflit de lois
cadastre
bail
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jacques Brunel de Privezac, propriétaire, habitant actuellement du lieu de Chanzy, mairie de Besset, département d'Allier, intimé et défendeur en opposition ; contre Charles-Pierre et Gabriel Landriève, fermiers, habitans du lieu de Chantagret, mairie du Peyrouse, appelans et demandeur en opposition.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1784-Circa An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0234
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0233
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53733/BCU_Factums_M0234.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Peyrouse (63187)
Paris (75056)
Chantagret (domaine de)
Cornassat (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail à ferme
cadastre
conflit de lois
loi Emptorem
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53732/BCU_Factums_M0233.pdf
71020f039f7e2494bb57ca332f6e629a
PDF Text
Text
TRIBUNAL
MEMOIRE
EN
d ’a p p e l
,
séan tàR iom .
RÉPONSE,
POUR
et G i l b e r t L A N D RIE V E ,
père et fils, cultivateurs, habitans du lieu de
C h a r le s , P ie rr e
C h a n t a g r e t , commune d u P e y r o u z e , appelans
d ’un jugem ent rendu au tribunal d’arrondisse
ment de cette ville d e Riom, le 3 floréal an
et demandeurs en opposition ;
9,
C O N T R E
J A c q u e s B R U N E L D E P R I V E Z A C , pro
priétaire, habitant du lieu de Chauzy , commune
de B esset, département de l ' a l l i e r et
défendeur en opposition.
J a c q u e s Brunel de Privezac a afferme, le 8 germinal
an 4 deux domaines aux appelans , le prix de ce bail
A
�( a ) ‘
^
est de 3,000 fr. par année. Les appelans étoient précé
demment fermiers des mêmes objets depuis 1784', et le
prix de ce bail ancien n’étoit que de 1,300 fr. argent,
quarante - cinq livres de beurre et douze poulets pour
chaque année.
Les appelans ont demandé la réduction du nouveau
bail au prix de l’ancien, et leur notification a été faite
dans le temps prescrit par la loi.
Par une singulière fatalité, les premiers juges ont
refusé d’admettre la réduction demandée, et ont con
damné les fermiers à payer la somme de 3,000 fr. chaque
annee, pendant la durée du bail.
Les fermiers reclament contre ce jugement qui viole
ouvertement la disposition des lo is, et blesse tous les
principes de justice et d’équité.
L ’intimé qui affiche un grand désintéressement, a
des raisons personnelles pour ne pas désirer qu’on paye
toujours sans réduction ; il prétend néanmoins que le
jugement dont est appel est sage dans ses motifs, et juste
dans ses dispositions : il a cru devoir rendre sa défense
publique, et s’imagine que des déclamations bannales
contre les fermiers peuvent servir de moyens.
Les appelans se flattent au contraire de démontrer que
sa prétention est exagérée, et qu’en payant le prix du
bail ancien ils sont entièrement libérés.
FAITS.
L e 5 août 1784, un sieur T i ll y , propriétaire de deux,
domaines appelés de Chantagret et de Cornassat ; situéa
�( 3 )
#
Commune du Peyrouse, les donna à titre de ferme aux
appelans : ce bail fut consenti pour neuf années consécuti
ves, qui ne dey oient prendre cours qu’à compter du 24
juin 1788.
L e prix de la ferme est de 1,300 fr. par année ,
payables en deux termes égaux ; et pour droit de surv in e , les fermiers doivent payer en outre quarante-cinq
livres de beurre et douze poulets.
L ’intimé devenu acquéreur de ces deux domaines de
puis le 13 juillet 1790, avoit droit d’interrompre le bail
. en vertu de la loi JEmptorem ; mais il le trouva assez
avantageux pour ne pas user de cette faculté, et il en
perçut le prix pendant toute sa durée.
Quoique ce bail ne dût échoir que le 6 messidor
an 5 , néanmoins il voulut le renouveler un an avant ;
et le 8 germinal an 4 , il fut passé entre les parties un
nouveau bail pour neuf années, moyennant la somme
de 3,000 fr. par an. Il est dit que ce bail est consenti à
■prix d’argent, que la somme est payable en numéraire
ou valeur représentative : mais on verra que cette énon
ciation , dont l’intimé voudroit abuser, ne peut être
d’aucune importance; elle ne s’appliquoit qu’aux man
dats qui devoient être reçus comme espèce m étallique,
d’après la loi du 8 ventôse précédent.
Bientôt les mandats furent retirés de la circulation ;
il falloit dès-lors concilier les intérêts divers, et déter
miner la nature des engagemens de ceux qui avoient
contracté pendant les assignats ou les mandats.
L e législateur s’occupa principalement du prix des
fermages, et la loi du 9 fructidor an 5 , art. V I } régla
A a
�( 4 )
.
tpae tous les baux qui avoient été passés entre la publi
cation de la loi du 4 nivôse an 3 , portant suppression
du m axim um , et celle de la loi du 5 thermidor an 4?
seroient sujets à réduction, c’est-à-dire, que le prix en
seroit réduit à celui des baux existans en 1790.
Une loi postérieure du 6 messidor an 6, veut, art. II,
que tous baux stipulés en tout ou partie à pi'ix d’ar
gen t, passés entre le Ier- janvier 1792 et la publication
de la loi du 5 thermidor an 4 , soient susceptibles de
la i-éduction mentionnée en l’article V I de la loi du 9
fructidor précédent, quelques expressions ou dénomi-,
nations de monnoie qu i y aient été employées.
Les appelans avoient fait leurs diligences avant l’émis
sion de cette dernière loi. Dès le 9 vendémiaire an 6
ils firent signifier au domicile de l’intimé un acte par
lequel ils déclarèrent qu’ils enlendoient profiter du bé
néfice de la loi du 9 fructidor an 5 , et réduire le prix
du bail du 8 germinal an 4 , à celui du bail qui existoit en 1790.
Cette notification n’arrêta point le citoyen de Privezac.
Iæ 16 nivôse an 6 , il fit commandement à ses fermiers
de lui payer la somme de i,5oo fr. en num éraire, pour
le premier terme échu le 21 brumaire précédent.
Les fermiers , pour éviter des poursuites plus rigou
reuses , se déterminèrent à faire un acte d’offre au domicile
du cit. de Privezac , le 21 nivôse an 6 ; i°. de la somme de
65o fr. pour la moitié du prix du bail du domaine existant
en 1790; 20. de la somme de 42 fr. pour la valeur de
la dîme ; 30. 6 fr. 5o cent, pour les frais du commande
ment ; total 698 fr. 5o cent.
�( 5 )
_
Refus de recevoir : citation au bureau de paix en réa
lisation et validité d’offres ; assignation au ci-devant tri
bunal civil du département du Puy-de-D ôm e, pour voir
dire que conformément aux art. V I et I X de la loi du
6 fructidor an 5 , et en conséquence de la demande en
réduction, le prix du bail du 8 germinal an 4 demeu
rerait fixé à la somme de 1,300 fr. d’une part, comme
faisant le prix du bail existant en 1790, à celle de 42 fr.
d’autre, pour la valeur de partie de la dîme, dont les
fermiers devoient compte, et pour voir donner acte de
la réitération des offres; à défaut de les recevoir, per
mission de consigner les sommes offertes.
U n premier jugement par d éfau t, du 27 messidor
an 7 , adjugea les conclusions des appelans.
L a cause n’ayant pu être vidée sur l’opposition du
citoyen de Privezac , il fit citer ses fermiei's au tribunal
d’arrondissement de cette com mune, pour procéder sur
cette opposition.
L a cause portée à l’audience , il y est intervenu, le
3 floréal an neuf, un jugement contradictoire q u i, sans
s’arrêter à la demande en réduction du prix du bail
du 8 germinal an 4, dans laquelle les fermiers sont déclarés
non-recevables , ordonne que le bail du 8 gei’minal an 4
sera exécuté selon sa forme et teneur jusqu’à son expi
ration ; que les poursuites commencées seront continuées:
les fermiers sont condamnés en tous les dépens ; et il est
ordonné que le jugement sera exécuté nonobstant oppo
sition et sans préjudice de l’appel.
Ce jugement est principalement motivé sur ce que les
fermiers n’ont donné aucun effet à la réduction par eux
A 3
�(
6
)
demandée, enne faisant poiiitles
offres des arrérages échus,
d’après les formes voulues par les lois subséquentes.
O n prétend que l’article V III de la loi du 6 mfessidor
an 6 n’autorise la demande en réduction, qu’autant que
les fermiers payent préalablement tous les termes des baux
échus antérieurement à la demande : on ajoute que, dans
l’espèce, le's fermiers n’ont point fait des offres de tous les
termes échus à cette époque; on en conclut qu’ils n’ont
point satisfait à la loi du 9 fructidor an 5 , ni à ce qui
étoit ordonné par celle du 6 messidor an 6.
Les fermiers ont interjeté appel de ce jugement; et
pour ne pas plaider les mains garnies , ils ont, le 4 floréal
an neuf, renouvelé au domicile du citoyen de Privezac
les offres qu’ils lui avoint déjà faites, en y ajoutant tous
les termes échus.
L ’intimé n’a pas cru devoir se rendre à ces nouvelles
offres ; il a fait signifier de nouveau le jugement portant
nonobstance, avec sommation de se trouver au greffe
pour y voir présenter sa caution, et pour éviter des
poursuites plus rigoureuses. lies appelans ont présenté
requête au tribunal pour demander acte des offres réalisées
sur le bureau de l’audience delà somme de 6,362francs
90 centimes : il a été rendu sur cette requête un jugement
qui donne acte de l’appel et des offres , renvoie les parties
à une audience extraordinaire , toutes choses jusqu’à ce
demeurant en état.
Ce jugement a été notifié au citoyen de Privezac ; et,
le 6 thermidor an 9 , jugement contradictoire qui
dorme aux appelans acte de leurs offres, acte au citoyen
de Privezac de ce qu’il offre de recevoir à' bon compte
,
•
-
.
�C7 )
et sans aucune approbation préjudiciable; le surplus des
moyens respectifs demeurant réservé aux parties : c’est
en cet état que se présente la cause.
Pour prouver que le jugement dont est appel, est con
traire à la disposition des lois , et qu’il y a nécessité de
le réform er, il est essentiel d’analyser les différentes lois
rendues sur les fermages ; e t , quoiqu’en général on puisse
reprochera ces lois une grande obscurité dans la rédaction,
leurs dispositions ne sauroient être plus claires relative
ment à la question particulière qui divise les parties.
L ’article X de la loi du 9 messidor an 4 , porte « que
» les prix des baux non stipulés en denrées et qui ont
» été passés postérieurement à la publication de la
» loi du 4 nivôse an 3 , qui ¿1 levé le m axim um ,
» seront réduits au prix du bail précéden t, en y ajou» tant la valeur des dîmes et autres charges supprimées,
» conformément à la loi du 10 avril 1791 , et autres.
» S’il n’existoit pas de bail antérieur , ajoute le
» même article , le prix du nouveau bail sera réglé
» par experts , valeur de 1790 ; dans les deux cas, le
» prix de ce nouveau bail sera payé de la même manière
» que le seroit celui d’un bail passé en 1790. »
L ’article V I de la loi du 9 fructidor an 5 , dit « que ,
» si le bail a été passé entre la publication de la loi
» du 4 nivôse an 3 , portant suppression du m axim um ,
» et celle de la loi du 5 thermidor an 4 , le prix doit
» en être réduit à celui du bail existant en 179°* a
L ’article V II de la même loi veut « que l’on com
» prenne dans le prix, outre l’évaluation du prix de 1790,
a la valeur des dîmes et autres charges supprimées pair
'’
A 4
�.
.
( 8 )
■
.
» la loi du io avril 1790 , et autres, et dont étoient
»
»
»
»
tenus les ferm iers, ainsi que les sommes q u i, promises,
soit à titre de pot de v in , soit par contre-lettres, soit
de tout autre manière, seront inconnues avoir fait dans
le temps partie dudit prix. »
Enfin , l’article IX de cette même loi porte « qiie les
» b au x , soit à ferme, soit à portion de fruits dont une
» partie de loyer a été stipulée à prix d’argent , sont
» soumis pour cette partie du prix et suivant le cas, aux
a dispositions des articles précédens , dans lesquels se
» trouve compris l’article Y I précité. »
Il est ajouté « que la somme stipulée en argent dans
» le nouveau bail sera réduite à celle portée dans le bail
» existant en 1790 , augmentée de la valeur des objets
» mentionnés en l’article V I I , si la quantité des fruits
» ou denrées promises, est la même dans l’un et dans
» l’autre. »
'
L ’article I I de la loi du 6 messidor an 6 , « comprend
» dans l’article V I la loi du 9 fructidor an 5 , et regarde
» comme susceptibles de la réduction mentionnée audit
» article tous baux stipulés en tout ou partie à prix
» d’argent, passés entre le I er. janvier 1792 et la publi» cation de la loi du 5 thermidor an 4 , quelques ex
» pressions et dénominations de monnoie q u i y aient
» été employées. »
L ’article V III veut « que les fermiers qui provoque
» roient la réduction du prix de Leur b ail, ne le puissent
» à peine d’être déclarés non - rccevables , que clans le
55 mois qui suivra la publication de la présente, et qu’en
» payant dans le même mois , ou au propriétaire } ou
�( 9 )
_
» au receveur du domaine , suivant les-cas, soit le mon
» tant des termes échus suivant le montant du bail de
» 1790, soit à défaut de bail ou dans le cas de l’arti» cle V , quatre fois la contribution foncière de l’an 5 , des
» objets dont il s’a g it, sauf à compter et parfaire , ou
» même à répéter, s’il y a lieu, lors de la liquidation dé
» iinitive. »
T elle est l’analyse des différentes lois sur les fermages;
on a cru devoir la présenter de suite pour ne pas inter
rompre la discussion , et en faire plus facilement l’appli
cation au cas particulier.
Il s’agit d’examiner si les appelans ont satisfait à la
disposition de ces lois , et si le défaut d’exécution de
l’article V III de la loi du 6 messidor, peut être opposé
avec succès aux appelans , et faire obstacle à leur demande
en réduction?
Point de doute d’abord sur la faculté de réduii’e.
L e bail est du 8 germinal an 4 , par conséquent il a été
passé antérieurement à la loi du 5 thermidor an 4 ,
époque déterminée pour la réduction.
lia dénomination argent ou de numéraire ne change
pas la nature des engagemens : déjà l’article IX de la
loi du 9 fructidor an 5 , l’avoit ainsi expliqué et déter
miné , et l’article II de la loi du 6 messidor an 6 , 11e
laisse plus d’équivoque à cet égard.
Maintenant il faut se lixer sur l’époque de la demande
en réduction qui a été formée par les appelans , et ne
pas perdre, de vue que la notification par eux faite est
du 9 vendémiaire an 6 ', c’est-à-dire, antérieure à la loi
du. 6 messidor.
“
A 5
�L ’acte d’offre, la citation au bureau de paix , l’assi
gnation au tribunal c iv il, ont également précédé l’émis
sion de la loi du 6 messidor , puisque tous ces actes sont
du mois de nivôse an 6.
Ils ont tous été faits en exécution de la loi du 9 fruc
tidor an 5 , en exécution des articles Y I et IX cle cette
loi qui n’astreignoit point les fermiers pour obtenir la
réduction à faire des offres des termes éclius.
Cependant même avant la loi du 6 messidor, ils avoient
fait des offres de la moitié du pi'ix du bail précédent :
c’étoit alors tout ce qu’il y avoit d’écliu ; ils avoient donc
satisfait même au delà de ce que la loi du 9 fructidor
sembloit exiger.
V ouloir astreindre les fermiers à l’exécution de l’ar
ticle V III de la loi du 6 messidor, c’est alors donner évi
demment un effet rétroactif à la loi ; c’est lui faire régler
pour le passé ce qu’elle n’a voulu déterminer que pour
l’avenir. En effet , la loi ne parle que des fermiers qui
n’ont point encore fait de diligences ; elle veut que ceux
qui n’ont pas encore provoqué la réduction de leur bail,
ne le puissent faire que dans le mois qui suivra la pu
blication , et qu’en payant dans le même mois au pro
priétaire le montant des termes éclius d’après le bail
existant en 1790.
Mais les fermiers qui s’étoient déjà mis en règle, qui
avoient manisfesté leur intention de réduire, conformé
ment à la loi du 9 fructidor an 5 , ne sont point astreints
à la même obligation ni aux mêmes délais. L ’article X
de la loi du 9 fructidor an 5 , n’obligeoit les fermiers
qu’à la formalité de demander cette réduction par écrit,
dans le mois de la publication.
�( 11 )
L ’article X I de la même loi donnoit dans ce cas au
propriétaire la faculté de résilier, si la réduction blessoit
ses intérêts , et en avertissant le fermier dans les deux
mois de la même loi du neuf fructidor.
Cette loi du 9 fructidor n’exige pas le payement des
arrérages : faculté de_ réd uire, faculté de résilier ; voilà
tout ce qu’elle accorde.
La notification des appelans est du 9 vendémiaire
an 6 ; c’est-à-dire , qu’elle est dans le mois de l’émission,
et avant celui de la publication. Ainsi , il ne faut donc
consulter que la loi du 9 fructidor, celle du 6 messidor
est étrangère à l’espèce : ce n’est qu’une loi additionnelle
toujours favorable aux ferm iers, qui proroge encore le
délai de la notification , mais qui aggrave la condition
de ceux qui ont été négligens , en les contraignant de
payer tout ce qui est échu.
D ’ailleurs les appelans, au moment de leur acte d’offre
du 21 nivôse an 6 , ayant offert la moitié du prix du
bail antérieur, offroicnt tout ce qui étoit échu. Leur
bail a commencé le 24 juin ; il étoit payable en deux
termes égau x, l’un au jour de Noël , le second au jour
de St. Jean , et il est clair qu’à l’époque du 21 nivôse
an 6 , qui représente le 11 jan vier, il n’y avoit que le
premier terme d’échu ; c’est-à-dire , la moitié du prix
du bail ; par conséquent les fermiers ont offert tout ce
qu’ils devoient, même dans le sens de la loi du 6 ther
midor.
Comment donc concevoir d’après des raisonnemens
aussi simples, le jugement dont est appel qui oblige les
fermiers à payer 3,000 francs par année, pour un bail
�.
.
^ 12 ) .
qui, avant le papier monnoie, n’étoit que de 1,300 francs,
et qui a été augmenté de plus de moitié ?
Les fermiers, dit-on, n’ont donné aucun effet à leur
demande en réduction , dès qu’ils n’ont pas offert les ar
rérages échus, d’après les formes voulues par les lois
subséquentes ; et on explique qu’on entend par lois sub
séquentes, l’article V H I de la loi du 6 messidor.
M a is, d’une part, on a démontré que cette loi sub
séquente n’avoit aucun rapport avec les appelans qui
avoient fait leurs diligences antérieurement à sa publi
cation , et en vertu d’une loi différente. D ’un autre côté ,
on a prouvé qu’au moment des offres les fermiers avoient
offert tout ce qui étoit échu.
M ais, dit-on, lors du jugement du tribunal civil, les
fermiers n’ont pas oiï’e rt ce qui étoit échu à cette époque.
Ce motif est bien extraordinaire : la loi même du 6 mes
sidor n’astreignoit qu’au payement des termes échus à
l’époque de la notification ; elle n’obligeoit point de
faire à chaque échéance de nouvelles offres ; si la discus
sion se prolongeoit ; et si, lors du jugement du tribunal
civil qui a été rendu en thermidor an 7 , il étoit échu
d’autres termes, l’intimé pouvoit en faire prononcer la
condamnation, et même obtenir des dépens contre les
fermiers débiteurs. A u lieu de former sa demande, il
s’est laissé condamner par défaut ; les appelans 11e pouvoient donc encourir aucune peine, et, rien ne les obligeoit à faire de nouvelles olires.
Il est plus difficile d ’expliquer pourquoi on reproche
dans ces motifs aux appelans de n’avoir pas renouvelé
leurs offres à domicile. L ’acte d’offre du 21 nivôse a n 6 j
�( i3 )
étoit fait au domicile du citoyen de Privezac; il y a eu
refus de recevoir ; il n’étoit donc pas nécessaire de re
nouveler à dom icile, il suffisoit de les reitérer à l’au
dience ; et c’est ainsi que cela a toujours été pratiqué.
Les motifs du jugement une fois écartés, il n’est plus
question que de discuter les moyens proposés par l’intimé;
et on va voir qu’ils n’ont rien de spécieux.
D ’abord, l’intimé présente de prétendus motifs de
considération ; suivant lui les Landriève ont fait une
grande fortune dans cette ferme : il auroit trouvé le
''meilleur moyen d e là dim inuer, ou d e là détruire, s’il
pouvoit se faire payer, pendant neuf années, une somme
de 3,000 francs pour deux domaines qui n’étoient af
fermés auparavant que 1,300 francs par année.
Il prétend aussi que le sieur T i ll y , peu soigneux dans
ses affaires, répandu à la cour et livré aux plaisirs, faisoit peu d’attention à la valeur de ses biens, s’en rapportoit à des gens d’affaire , ou recevoit à l’avance des
sommes considérables de la part de ses fermiers.
Mais ces allégations ne sont que ridicules ; elles ne sont
appuyées sur aucun adminicule de preuves, et les appelans
ont toujours désavoué d’avoir payé par anticipation aucun
pot de vin ; ils ont soutenu que les domaines étoient
portés A leur juste va le u r, et que le prix du premier
bail ne leur promettoit aucun bénéfice.
L ’intim é, aii fond , examine deux questions : la pre
mière , celle de savoir si le bail du 8 germinal an 4
est sujet à réduction ; et la seconde, si les Landriève sont
l'ccevables ¿1 la proposer. Il observe judicieusement que
fin de non-recevoir doit être examinée lu prem ière,
�( H )
parce que la question principale seroit surabondante, si
les Landriève étoient non-recevables.
L ’intimé convient cependant que la demande en ré
duction a é.té signifiée dans un temps utile ; mais, sui
vant l u i , une demande n’est que le commencement d’une
contestation : on ne sait pas trop où il veut en venir
avec cette distinction, Il faut toujours commencer par
demander; mais au moins le jugement doit toujours se
reporter à la demande.
U n des grands griefs contre cette demande, c’est que
l ’exploit n’est pas signé des fermiers, ni d’un fondé de
pou voir; l’huissier, dit-il, ne présente aucune assurance
en cas de désaveu , et les Landriève auroient pu s’en
moquer impunément.
C ’est la première fois qu’on a imaginé de prétendre
qu’il falloit signer un exploit pour constituer une de- „
mande : comme il y a beaucoup de gens qui ne savent
pas signer , il faudroit en tirer la conséquence que toutes
les personnes illitérées n’ont pas capacité de former une
demande, ou de faire donner un exploit.
. L ’intimé ajoute qu’il n’y avoit rien de terminé entre
les parties, loi'squ’a paru la loi du 6 messidor an 6; et
quoiqu’ils fussent en litige au tribunal civil du Puy-deD ôm e, il n’y avoit encoi'e rien de réglé, ni par les par
ties , ni par les tribunaux.
O r , dit-il, l’article X V de la loi du 6 messidor an 6 ,
porte que toute contestation non définitivement terminée
sera jugée en conformité de la présente loi. Si l’ail’aire doit
ctre jugée en conformité de la loi du 6 messidor, les fer
miers doivent donc offrir tous les arrérages échus \ et c’est
ce qu’ils n’ont pas fait.
�( x5 )
Il se présente deux réponses péi^emptoires à cette ob
jection ; et d’abord les appelons eux-mêmes peuvent in
voquer avec succès les dispositions de cet article, relati
vement î\ la dénomination de numéraire qui a été em
ployée dans le prix du bail. Cette loi d it, article I I , que
le bail sera toujours sujet à réduction, quelques expres
sions et dénominations de monnoie qui y aient été em
ployées ; donc le citoyen Privezac ne peut pas dire que,
parce qu’il s’est servi de l’expression num éraire, le bail
ne peut pas être réduit.
Mais c’est aller trop lo in , que de soutenir que les fer
miers doivent offrir tous les termes échus ; il suffirait
qu’ils se fussent conformés à la loi précédente du 9 fruc
tidor an cinq : on a vu que l’article V III de la loi du
6 messidor , en exigeant le payement des termes échus,
n’avoit entendu parler que des fermiers qui jusques-là
ü’avoient fait aucune diligence.
D ’un autre côté, les Landriève, lors de leur acte d’offre,
avoient offert tout ce qui étoit. échu à cette époque,
quoiqu’ils n’y fussent pas obligés , et le citoyen Privezac
est forcé d’en convenir. M ais, d i t - i l , ces offres n’ont
été faites ni à ma personne, ni à mon dom icile, quoique
le prix du bail fût payable à mon domicile; elles ont été
faites au domicile par moi élu chez le citoyen B ru n , et
des offres réelles ne peuvent être valablement faites à un
domicile élu.
Quelque prépondérance qu’ait l’autorité de Denisart
sur laquelle le citoyen de Privezac s’appuie, ce ne seroit
point i\ lui à proposer une semblable objetiou. L e citoyen
de Privezac a changé cinq ou six lois de domicile pendant
�'
,
.
(i6)
.
la révolution ; et comme il n’a pas toujours été en de
mandant , plusieurs de ses créanciers ont éprouvé souvent
l’embarras de ses changemens de domicile : mais il n’est
pas exact lorsqu’il annonce que le prix du bail est payable
à son domicile. L ’article X V - du bail du 8 germinal an 4
porte que le beurre, ou les poulets que doivent les fermiers
pour survine , seront conduits à Riom ou à C lerm on t,
ou à une distance égale ; et l’article X V I dit que la
somme de 3,000francs, formant le prix du bail, sera payée
par eux aux lieux portés ci - dessus : ce n’est donc point
au domicile que Privezac a pris dans le département de
l’A veyron , que les fermiers doivent porter le prix du
bail.
D ’un autre côté, la notification en réduction du 9 ven
démiaire an 6 a été faite en la commune de Pagas, dé
partement de l’A veyron , en parlant au fils de l’intimé.
Lors de son commandement du 16 nivôse an 6, l’intimé
a élu domicile, pour une décade, chez le citoyen Jean
B run , cultivateur du lieu de la Maison-Neuve, commune
du Peyrouze près Montaigut ; et c’est à ce domicile
que les fermiers ont fait les offres le 21 nivôse an 6, le
cinquième jour du commandement, et avant l’expiration
du délai pendant lequel il y avoit domicile chez le citoyen
Brun.
Enfin , le citoyen Brun a répondu à l’acte d’offre, qu’il
n’avoit aucun pouvoir de B runei, et que cela ne le concernoit pas; et lorsque les appelans ont fait citer Brunei
au bureau de paix du canton de M ontaigut, pour voir
déclarer les ofires valables, et en cas de refus, qu’il fût
permis de consigner, Privezac a comparu par Desmaroux,
�C1 7 )
son fondé de pouvoir, et a persisté dans la réponse faite
par le citoyen Jean Brun.
Sur l’opposition formée au jugement du tribunal civil du
27 thermidor an 7 , le citoyen Brunei a assigné les appe
lons au tribunal d’arrondissement de Riom ; il a donc
reconnu, et le domicile par lui é lu , et la juridiction du
tribunal d’arrondissement : mais ensuite, en renouvelant
son opposition par exploit du 5 frimaire an 9 , il n’est
plus domicilié dans le département de l’A v e y ro n , il élit
domicile dans la commune de Cliauzy , département
d’A llier.
.
Comment pourroit-on saisir le citoyen Brunei avec des
changemens de domicile aussi fréquens ? Voudroit-il que
les offres eussent été faites aux lieux où le prix du bail
étoit portable ? c’est à Riom ou ù Clerm ont, ou à une
distance égale, et sans aucune désignation que l’indication
qu’il voudroit en faire. V o u d r o i t - i l que les fermiers
allassent au lieu de Pagas , département de l’Aveyron ?
mais il se dit tantôt domicilié de l’A v e y r o n , tantôt du
département d’A llie r , suivant l’intérêt qu’il a à em
barrasser ses créanciers ou ses débiteurs, comme il l’a fait
pour les héritiers Tassy qui ne savent où le prendre.
En un m ot, le bail est fait en la commune du Peyrouze
près Montaigut ; point d’indication déterminée pour
le lieu du payement-, élection de domicile chez le citoyen
Jean Brun-, c’est donc là ou ces fermiers ont dû s’adresser;
et il peut d’autant moins s’en plaindre, qu’il a connu l’acte
d’oifre , qu’il a comparu au bureau de paix sur la citation
par tout autre fondé de pouvoir que B ru n , et qu’il a
adhéré à la réponse de Brun.
�,
( 18 )
En un m ot, la loi qui ordonne que les offres seront
faites au domicile du créancier, doit être entendue civile
ment : elle n’a pas exigé l’impossible , elle a voulu prin
cipalement favoriser la libération ; et il est absurde de
prétendre qu’un débiteur soit obligé d’aller faire des offres
à deux cents lieues, lorsqu’il n’y a point d’indication
précise pour le payement, et lorsqu’il y a un domicile élu
dans le lieu où sont situés ces immeubles affermés.
O n ne peut pas reprocher aux appelans le défaut de
consignation de leurs offres ; il y a toujours eu litispen
dance sur la suffisance ou la validité de ces mêmes offres,
rien de déterminé à cet égard jusqu’au jugement définitif:
et comment consigner, lorsqu’il y a toujours des doutes ?
Les appelans ont réitéré leurs offres après ce jugement ;
l ’intimé a reçu à bon compte ; les appelans ne plaidoient
donc pas les mains garnies comme voudroit le prétendre
le citoyen de Privezac.
Telles sont les fins de non-recevoir singulières qu’oppose
le citoyen Privezac à ses fermiers. Bientôt par une con
tradiction choquante, et tout en invoquant la loi du 6
messidor an 6 , il vient dire q u e , dès qu’il a stipulé le
payement en num éraire, il ne peut pas y avoir lieu à la
réduction ; il croit appitoyer sur son sort en disant qu’il
a du compter sur 27,000 francs , et qu’il ne toucheroit
que i i , 5oo francs dans le sens du bail de 1784 : cette
différence, d it-il, seroit énorm e, et vaut bien la peine
qu’il résiste aux prétentions déloyales des Landriève.
Mais Icsljandriève n’ont promis 3,000 francs par année,
que parce qu’ils devoient croire qu’ils payeroient en
mandats; mais ils n’ont promis 3,000 francs, qu’à raison
�( 19 )
de la progression survenue dans les denrées pendant
l’émission du papier-monnoie ; et aujourd’hui que tout
est rentré dans l’ordre, on ne peut exiger d’eux que la
juste valeur des immeubles affermés. L a loi a prononcé ,
les appelans ont satisfait à la loi ; et le jugement qui les
condamne présente une contravention manifeste à la
disposition des lois de la matière.
s
Par conseil, PAGES ( de Riom ), anc. jurisconsulte.
BAY L E ,
avoué.
A R io m , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur
du Tribunal d’appel. — A n 10.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Landriève, Charles. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Bayle
Subject
The topic of the resource
bail à ferme
loi Emptorem
conflit de lois
cadastre
bail
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Charles, Pierre et Gilbert Landriève, père et fils, cultivateurs, habitans du lieu de Chantagret, commune du Peyrouze, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de cette ville de Riom, le 3 floréal an 9, et demandeurs en opposition; contre Jacques Brunel de Privezac, propriétaire, habitant du lieu de Chauzy, commune de Besset, département de l'Allier, intimé et défendeur en opposition.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1784-An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0233
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0234
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53732/BCU_Factums_M0233.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Peyrouse (63187)
Paris (75056)
Chantagret (domaine de)
Cornassat (domaine de)
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Domaine public
bail
bail à ferme
cadastre
conflit de lois
loi Emptorem
-
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3403b504dff06b6f62ea4d87e67c823b
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A P P E RCU
TRIBUNAL
DE
CASSATION.
POUR
le C.en J U D D E -L A R IV IÈ R E ,
-,
,
..
d e fen d eu r ;
‘
C O N T R E la dame B R A N D Y
demanderesse.
L a
J
dam e B r a n d y n e cesse d e p r é te n d r e q u ’en la d é c la ra n t
non-recevable , q u a n t à p r é s e n t , a e xcip er d e son d iv o rc e (e n
ce qui tou ch e la c o m m u n a u té de biens) , à I’ég a rd d ’ un cré a n
cier , o n a porté atteinte à son éta t c iv il de femme divorcée.
E lle ne veut pas entendre qu e son état d e fe m m e ou d e d i~
vo r cé e ne fait rien au procès.
P o u r éc laircir le sens d u jugem ent attaqué , p o u r q u ’ il p a r o isse bien
n’a v o ir a ucu nem ent disposé sur l 'état civil d e l a
dame; B r a n d y , rem ontons aux élém ens de cette affaire à l ’état
origin aire de la contestation.
L a d a m e -Brandy , pen dan t q u ’clle était fem m e G o u r s a u - D u mazé , était co m m u n e en. bieus . soit eu v e rtu d e son co n trat de
SECTION CIVILE
raPI orteur.
�m a r ia g e ,
soit p ar la force d u stalxit mûri c pal qui r é j i t R o -
ehouart ( jadis généralilé de Poitiers. )
D u r a n t le m a ria g e , et sans a vo ir cessé d ’être com m uns en
biens , les d e u x époux v e n d ire n t c o n jo in te m e n t un domaine.
C e tte vente sera n u lle , sans doute ; p arce qu e la venderesseé t a t m ineure. — Il s’agit seulement de déterm iner q u an d sera
ouverte l ’action en restitution.
Judde L a r iv iè r e , q u i a acquis de la com m unauté ou société,
p rétend ne p ou v oir être r e c h e r c h é , ju s q u ’à ce q u ’il y ait dissolu
tion effective de la com m unauté ou société qui lu i a vendu.
Il prétend que la dam e B r a n d y ne peut re v e n d iq u er ce d o
maine , tant q u ’elle sera de fait a s s o c ié e , com m u n e avec G o u r sau -D u m a zé tant qu e réclam er au nom de m adam e 6era récla
m e r p o u r le p rofit d e monsieur.
C ’est parce que la d am e B r a n d y avait encore son m ari p our
a s s o c ié que , lors d e sa p rem ière aclion en restitution , Ju ddeL a r i v i è r e fut fond é à lu i opposer une fin d e n o n -re ce vo ir.
Si la dam e B r a n d y , au lieu d ’être en co m m u n a u té d e b ien s
eut été mariée avec c occlus ion d e co m m u n a u té e t sép a ra tion d e
b ie n s ; si entre elle et son mari il n ’y avait eu ni société pour
les acquêts , ni société p ou r le m énage ; si elle avait eu à part
ses propriétés , scs revenus et ses dépenses , (ainsi q u ’une femme
de pays de droit écrit exerçant ses droits para p lie r n a u x ') lu.dame
B r a n d y aurait été recevahle , m êm e d u r a n t son m a r ia g e , à reve
n ir contre la vente par elle faite étant m ineure.
D a n s cette h y p o t h è s e , il n ’y aurait eu ni d r o i t s , ni intérêts
d u mari à opposer -, la dam e B r a n d y ,
fem m e G o u r s a u - D u -
mazé , eût été pleinem ent accueillie à r e v e n d iq u e r le dom aine
vendu.
A i n s i , la fin de n o n -re ce vo ir opposée à la dam e B r a n d y (lors d u
p rem ier procès) ne reposait au cu n em en t sur son é ta t c i v i l , sur
la q u alité àa fe m m e G o u r s a u - D u m a z c ; mais sur le f a i t d e s o
c i é t é , sur ce lle circonstance de f a i t , q u ’ elle était co m m u n e e n
b ien s avec le citoyen G oursau-D um azé.
C o n s é q u e m m e n t, p our ôter to u l fondem ent à la lin de non-
�r e c e v o ir , il fallait faire cesser , non l ’état c iv il, mais \qf a i t d e
s o c ié t é : il fallait , non cesser d ’ être ép o u se , mais cesser d ’être
réellem ent com m u n e e n b ien s. C on séquem m ent enfin , dans ce
n o u vea u procès com m e dans le p rem ier, la question se réd uit à ce
p oint : les intérêts sont-ils encore co nfond us? y a-t-il encore com
m unauté , m élange de L ie n s , s o c ié té entre la dam e B r a n d y et
G oursau-D um azé ?
« L a dam e B r a n d y est co n ven u e q u ’elle habite , mange et
« couche avec G oursau-Dum azé-, que leurs b ie n s , leurs r e v e n u s ,
« leurs dépenses sont a d m in istrés p ar lu i -, q u ’ainsi
l ’ exige
« son intérêt et celui de ses enfaus. — M ais elle nous défend
« d ’appeler cette com m ixtion un e s o c ié té d ’aucune espèce.
« N o n une s o c ié t é c o n ju g a le
puisqu’il n ’y a plus d e ma-
« riage qui en soit la source.
« N o n une s o c ié t é o rd in a ire , p u is q u ’il n ’ existe pas d 'é crit
« qui la constate. »
Q u e lle ([lie soit l’espèce d e société existante, peu nous importe ;
l ’essentiel est de savoir s’il en existe uue qui ren d e les in térêts
com m u n s entre G ou rsa u -D u m a zé et la dam e B ra n d y .
O r ce p'.iiul pouvait être constaté sa n s écrit. — L e principe
« que les sociétés doiven t êlre écrites » ne regard e que les a sso
c ié s c n lr ’ cuæ ; il ne re ga rd e pas les tie rs : à l ’égard des t ie r s , il
suilit que la société soit p ro u vée par des faits, p ar des a v e u x , par
la notoriété publiq ue , ( ainsi jugé le 23 messidor an 9 , au
rapp ort du citoyen Babille , sur la d e m a n d e r e je té e de la veuve
N o r m a n d et fils contre Peros. )
D ’ailleurs , et dans l ’ espèce , la fusion d ’intérêts , la société
résulte légalem ent d u fait s e u l , de la réunion des personnes ,
et d u mélange des biens.
L a dam e B r a n d y , habitante de R ochouart , est régie par la
coutume d u Poitou , dont l ’article
admet la s o c ié té ta isib le ,
ou ta cite , e n tr e d e s m a jeu rs ha bitant e n s e m b le , e t vivant
d e s m êm es b ie n s d e p u is un an e t un jo u r.
« C ette société taisible , (d it B o u ch e u d sur l ’article 2'ïi , 11".
5 7 , ) e u tr ’aulrcs que le mari et la i e m in e , a souvent
l ’un
�( 4 )
* d ’eux q u i en est le c h e f, com m ande a u x autres ,fa it toutes les
« affaires de la communauté , et en est appelé le maître ,
<? d ’après la loi i , ff. de Pactis. »
,
5
L e tribunal d ’appel pou voit d o nc , en p rc sc 'n d a n l d e l ’acle
de divorce , décider dans l ’espèce q u ’il y avait fusion d ’intér é t s , c o m m u n a u t é , ou société véritable; q u e , sous ce r a p p o r t , la
revendication
faite
au nom de
m adam e
devait to u r n e r
au
profit de jîionsieur.
L e trib un al pouvait d é cid e r que la com m unauté d e biens , née
jadis avec le lien conju gal , était a u jo u r d ’h u i conservée ou re
n o uvelée par la volonté des divo rcé s , par le fait d ’habitation et
administration commune.
O h ! si la question
qui nous divise a
pu être décidée
en
p rescin dan t de l ’acte de d ivo rce et de ses effets , en ne considé
ra n t qu e le fait de com m unauté
ou
société c o n v e n tio n n e lle ,
le jugem ent est loin d ’avoir m é co n n u l ’essence d u d i v o r c e , d 'a v o ir
statué sur une question d ’état.
A ctu ellem en t que nous voilà fixés sur l ’état précis de la co n
testation , exam inons le jugem ent.
E t p u is q u ’il ne s’agit qu e de savoir s’il existe encore commu
nauté, ou s’il y a séparation de biens, souvenons-nous que la d é
cision sur le d ivo rce ne doit être considérée que dans ses rapports
avec la com m unauté de biens ■
, que le mot m êm e divorce ne
doit pas être pris dans un sens absolu, qui tou ch e à la personne,
mais dans le sens relatif au p ro c è s , en ce qui touche la co m
m unauté de biens.
L e ju gem ent déclare la da m e B r a n d y n o n -r e ccv a b le h e x c ip e r
d e son d ivorce ; c ’c s t - a - d i r e que tel que soit l ’acte de d i v o r c e ,
tels que soient ses effets naturels , elle s’est ôié , p a r son f a i t ,
le droit d ’en tirer avantage > (fuant a p r ése n t.
L e jugem ent déclare le divorce non opposable, quant a pré
sent; c ’est-à-d ire que tel (pie soit l’acte de d iv o r c e , tels que soient
scs effets n a tu rels, sa vertu légale ou naturelle se trouve ncutraUsée ou suspendue par le f a i t , par la volonté positive et toute
puissante de la dam e B ra n d y .
�C 5 )
L a dam e B r a n d y est réputée en état d e société continuée ou
renouvelée avec G o u r s a u - D u m a z é ,
N o n par défaut d e vertu originaire dans l ’acte de son d i v o r c e ,
mais p ar suite d ’une restriction apposée a u x effets natui’els d u
d ivo rce , p ar le fait de sa volonté -, ou p a rce q u ’il lu i a p lu de
r e n o n c e r aux eiïcts d u d ivo rce en ce q u i touche la séparation
des biens , ou parce q u ’il lui a p lu d e r e n o u v e le r l ’association,
au cas q u ’elle fû t dissoute.
Q u els sont les faits , quels sont les actes de volonté qui ont fait
p résu m er au tribunal cette société continuée ou renouvelée , qui
ont fait d é cla re r le divorce sans effet, en ce qu i touche les biens?
L e fait de co-ha! itation et de co-administration -, — le fait d e
sim ulation ou d e fra u d e , — tel est le ju gem ent d é n o n cé :
D a n s son d is p o s it if , il déclare la dam e B r a n d y non recevable
à opposer son d ivo rc e ( en ce qui touche scs effets sur la com
m unauté de biens. )
D a n s ses m otifs , il considère qu e le d iv o rc e ( relativem en t
à la séparation des biens ) est simulé ou fr a u d u le u x
et no n
exécuté.
O r , est-il un e loi qui dise positivement q u 'u n e fem m e est
recevahlc à exciper de son d iv o rc e , ( p ou r se d ire séparée d e
biens) alors m êm e qu e le d ivo rc e n ’ a pas reçu d ’exécution , en
ce qui touche le bien , et encore q u ’il y ait simulation au p r é ju
dice des créanciers ?
N o n , aucune loi n ’a tenu u n langage si p e u r a i s o n n a b l e
si peu moral.
L a d a m e B r a n d y invoquait d ’abord les art. I cl H d u §
,
3
de la loi d u 20 septem bre 1792 sur le divorce.
M ais ces d e u x articles ne disposent qu e sur la facullt; de se
rem a rier : s'ils assurent V in d é p e n d a n c e des ép o u x , c est en ce
sens q u 'ils sont alfrancbis d u jo u g c o n ju g a l, ([lie le lien p e r
s o n n e l est dissous. — Point de rapp ort avec notre espèce , où il
s agit seulement d u sort des bien s.
E lle invo quait aussi l ’art. X I , p ortant q u ’à l ’ ég a rd d e s c r é a n
c ie r s le d ivorce n ’ a d 'e j f e l q u e com m e u n e sé p a r a tio n .
�-
( 6 )
Mais le sens naturel de celte disposition est tout en fa v e u r du
jugement :
C a r si le ju gem ent déclare q u ’un d ivo rce simulé , ou fra u d u le u x
et non exécuté , 11’a pas effet à l ’é g ard d e créanciers , c ’est p ar la
raison q u ’une séparation sim u lé e , frau d u le u se , et non e x é cu té e ,
n ’aurait pas d ’effet à l ’égard des c r é a n c ie r s , et parce qu e le d i
vo rce n ’a effet que com m e une séparation.
En vain la dam e B r a n d y s’évertue p our p ro u v e r que la sim u
lation n ’est pas réelle , et que ce q u ’elle a fait n ’a rie n d e fr a u
d u le u x ou d ’illicite.
L a l o i , qu i lu i a perm is d e cesser d ’être l ’épouse d ’un m ari par
qu i elle serait m a lh e u r e u se , n ’a certainem ent pas v o u lu q u ’elle
cessât d être son épouse p ou r d e v e n ir sa co n cu b in e \ q u ’elle
conservât p our elle seule toutes les do uceurs d u m ariage , en
faisant rejaillir tous les effets d ’ un d ivo rc e sur ses créanciers , ou
sur les m a lh e u r e u x fruits de ses voluptés illégitimes.
Il y a f r a u d e , en ce q u e V in te n tio n d e la loi est h o rrib le
m ent trompée , à la fa veu r de l ’observation ju d a ïq u e d e la le ttre
de la loi.
Il y a sim u la tio n ou f r a u d e , en ce qu e la dam e B r a n d y a con
senti 1111 acte de divorce p ou r p a ra ître séparée de biens -, alors
que de fait il y a fusion d ’ intérêts , com m unauté ou société de
biens , identité d ’administration -, alors q u ’ elle confesse que cet
état de choses est le seul réel et profitable p our elle.
I o u t le public est convaincu , ( et la dam e B r a n d y se glorifie
de cette croyance) q u ’aussitôt le dom aine r e v e n d i q u é , ou le procès
fin i, l ’aclc de d ivo rce sera d é t r u i t , ou p ar une transaction ju d ieiaire qui le dé clare n u l , ou , s’il en est b e s o in , p ar un nouvel
acte de mariage.
O r , il y a dans ce m anège tant d 'im m o r a lité , tant d ’incon
venance , tant d ’oppositiou avec les vues d u lé g isla te u r, q u ’il est
impossible de ne pas y
vo ir simulation , artifice , fraude.
l'.l dans les cas de divorce , com m e dans les cas de séparation ,
comme dans tous les cas possibles, nul n e d o it profiter de la fraude
qu'il a machinée au d étrim en t d ’autnii.
L i d:i ne B randy dénature le sens de la disposition légale-.
/
�p o u r lui faire dire seulement qu e le divorce ne dispense pas
les époux de remplir leurs obligations , contractées pendant
le mariage •• mais ce n ’est là q u ’ une interprétation h a s a r d é e ,
d ’où il ne pourrait jamais résulter u n e ou vertu re d e cassation.
D e notre p a r t , ce n ’est pas interpréter , c’est s’attacher au
texte de la loi , d e d ire q u ’un d ivo rc e simulé , ou f r a u d u le u x ,
et non exécuté , reste sans effet à l ’ é g ard des créanciers.
C a r s’il ne restait pas sans e f f e t , dans ces cas , le divo rce aurait
plus d ’effet q u ’un jugem ent de séparation , p u is q u ’un jugem ent de
séparation simulée ou frauduleuse , et no n exécutée , reste sans
effet à l ’égard des créanciers.
L e législateur a u ra it-il d û établir u n e différence entre les actes
d e d ivo rce et les jugem ens de séparation , quant à leurs effets à
l ’é g a rd des créanciers?
Ici la dam e B r a n d y p eu t p a rco u rir u n clia m p v a ste en c o n
jectures.
«
Q u an t à nous , nous avons suffisamment dém ontré q u ’ en ce qui
touche le sort des b ie n s , et relativem ent a u x c r é a n cie r s, le d ivo rc e
est absolum ent un acte de mêm e nature q u ’une séparation.
11 nous suffit de dire q u ’à cet é g ard le divo rce et la séparation
sont assimilés par la loi ( bo n n e ou m auvaise ) ; que l ’un et l ’autre
ont les mêm es effets , en ce qui touche le sort des biens , relative
ment a u x créanciers.
L a dame B r a n d y ne ré p o n d ra jamais à cet argument.
« Si u n d iv o rc e s im u le , fr a u d u le u x et non exécuté avait eflet
« à l ’égard des c r é a n c ie r s, il aurait plus d ’effet q u ’ un jugement
«. de séparation.
« O r , la loi asshnile le d ivo rc e et la séparation, dansleui-s effels,
« à l’éim id des créanciers.
« D onc,
à l ’égard de créanciers , un d ivo rc e simulé ou f r a u
d u le u x et non exécuté doit rester sans eflet. »
L a d a t n c B r a n d y se retranch edalis l a d sposition de l'a rticle IV du
même p a r a g r a p h e ,— qui ne dit rien de la co m m u n a u té ou s o c ié té ,
�(
8
)
continuée ou re n ou ve lé e après l ’acte d e divorce. — V o i c i le
texte d e la d is position :
•
D e quelque manière que le divorce ait lieu , les époux
divorces seront réglés par rapport à la communauté de biens,
ou à la société d’acquêts
qui
A EXISTÉ
entre
eux
, soit
par la loi , soit par la convention, comme si lu n d’eu x était
décédé.
A in si , et d 'après cette disposition , si des épo ux divorcés
avaient à régler la com m unauté qui a e x isté entre e u x , ils a u
raient les m êmes droits respectifs que si l ’un d ’eux était, décédé.
Mais s il le u r plait
de continuer ou de renouveler cette
communauté ou société , la loi n ’oppose au cu n obstacle , a u cu n e
restriction à l ’exercice de leu r volonté.
L a dam e B r a n d y a le courage d e professer q u e des époux
d ivo rcés peuvent rester amans. — E lle serait p a r trop in co n
séquente d e n ie r q u ’ ils puissent rester associés.
E t s'ils p eu ven t rester, ou seulem ent d e v e n ir associés, la
question d e communauté ou de société n ’est presque plus q u ’une
question d e f a i t , dont la décision , q u a n d elle serait e r r o n é e ,
ne serait jamais u n e contravention à la loi.
D a n s tous les cas , que ce soit un e simple question de f a i t ,
que ce soit, une question com pliquée de fait et de d roit , Reste ,
q u ’ en
déclarant la dam e B r a n d y
non - recevable
à exciper
de son divo rce , p ou r se dire séparée d e biens , pour opposer
cette séparation a des
cré a n cie rs, le jugem ent n’a pas
ju gé
une question d ’eta t , n ’ a contrevenu à aucune loi , et s'est a u
contraire conform é a l'article X I d u p aragrap he III d e la loi
d u o septembre 1 7 9 2 qui assimile le d ivo rc e et la sé p a ra tion
dans leurs e ffets à l ’égard des créanciers.
3
C o n c lu s io n s , com m e p ré c é d e m m e n t au rejet d e la d e m a n d e
en cassation.
L e C SlREY ,
p o u r le d é fe n d e u r.
Le C.eMÉJAN
p o u r la dem a n deresse..
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Judde-Larivière. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Sirey
Méjan
Subject
The topic of the resource
divorces simulés
communautés familiales
fraudes
coutume du Poitou
Description
An account of the resource
Apperçu pour le Citoyen Judde-Larivière, défendeur ; contre la dame Brandy, demanderesse.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1790-AN 11?
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0232
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0616
BCU_Factums_G1218
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53731/BCU_Factums_M0232.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochechouard (87126)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
communautés familiales
coutume du Poitou
divorces simulés
fraudes
-
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da34ec3e37cd2367e23a1c142ff259bd
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MEMOIRE
POUR
DOUV RELEUR DE G À R D E L L E ,
homme de loi, demeurant à A rlane , fils et
- héritier universel de défunt M i c h e l DOU
V RELEUR DE G A R D E L L E , notaire pu-
J
oseph
X) N T R
**r <------ ----- ------
W -
.
^
.
^
A N T O I N E V E L A Y , cultivateur y habitant du
village de Capartel, mairie d’Arla n c tant en
son nom que comme f ils et héritier de défunt
^ S^M
^^trDEV E L A Y , dit le m en so n g eA NTOiNE
B R A V A R D , jardinier, demeurant en la ville
d'A rlanc; et M a g d e l a i n e V E L A Y , sa femme,
aussi. fille et héritière de C l a u d e V E L A Y
,
intimés.
une affaire due au système du papier-m onnoie ! Ce signe a fourni à la famille des V elay des moyens
trop faciles, pour donner à leurs ruses et à leur mau
vaise foi tout l ’ e s s o r qu’ils ont voulu. Depuis le commen
E n c o r e
cement du 18e siècle, cette famille nous devoit une rente
'
A
.
�(2 )
.
foncière , que d’abord elle servit très-m al, et puis qu’elle
ne servit pas du tout. A la fin , mon père obtint une
sentence de résolution du contrat ; il se m it en possession
des biens ; il les afferma à A n toine V e la y , l’un des adver
saires , fils du débiteur de la rente, parce que cet A ntoine
V ela y lui montra de la conduite et une grande envie de
prospérer. L a révolution ven u e, le père et le fils V ela y
se sont coalisés pour tourner contre nous le bienfait de
mon père envers V ela y fils. Les dénonciations, les réclu
sions révolutionnaires ont grandement aidé leurs projets
iniques. M on père a demandé que V elay fils évacuât les
fferfoé»r<x>j V æ ky f i l w & u y ' P r o p r i é taire..,L e*
p ère étr^6k$on^«Sifcuite offert des assig^ ts« fta arJ xi^ l^ t^ )
de la rente : ils les onV ^consignés/ Une •sofitoace -rerïflue
■
>
^
<
au tribunal de district à A m b e r t, le 26 juin 1793 , lui a
donné gain de cause sur ces deux points : j’en demande
la réform ation ; je dois l’obtenir.
F A I T S . .
% * V
Par acte du 17 septembre 1 7 1 4 , Jeanne C o te , veuve
de Jean D o u v re leu r, ma bisaïeule, et Pierre-Joseph D ouvrcleur d e là Barba te , mon grand o n cle, donnèrent en
rente à G régoire et Sébastien V e la y , père et fils, un
m oulin appelé C apartel, et d’autres im m eubles, moyen
nant la prestation annuelle d elà somme de 140 fr. et d’un
cochon, en valeur de 5 fr. le tout payable à la S. M artin.
L e capital de cette rente fut déterminé à la somme de
2,900 francs j elle fut pourtant stipulée non rachetable.
lie contrat contient la clause résolutoire que voici : « $ e
’ y
.
�C3 )
-
« "pourront non plus les acquéreurs arrenter icelle ; et
« f a u t e par eu x de payer ladite rente et de rapporter
« quittances des cens q u i se trouveront asservis, année
« p a r a n n ée, demeure permis auxdits vendeurs de ren« trer dans lesd itsfon d s sans aucune fo r m a lité à ju s -
« tice. »
L e 21 juillet 17 4 4 , il fut passé entre P ierre-Joseph
D ouvreleur de la Barbate et Sébastien V e l a y , l’un des
preneurs, tant en son nom que comme tuteur de ses frères
et sœ urs, un traité par lequel le p rix de l’empli ithéose
fut réduit à la somme de 125 francs, et au co c h o n , en
Valeur de 5 fr. par an. L a 'c a u se de cette réduction
procéda de l’éviction de partie des immeubles compris
t
* au bail de 1714.
1 7 4 4 , il y eut dans la fam ille D o u v re le u r
^‘^
^ ^arrâng e iiie n t, p ar lequ el cette rente fut attribuée à
L y jJ tîo s e p ir D o u v r e le u r de G a r d e lle , m on aïeul.
octobre i y 5o , ce Joseph D ouvreleur de Gardelle
au bailliage d’A riane une sentence contre les des“^-cendans de G régoire et Sébastien V e la y , preneurs; il les
fia*/
condam ner, i° . au payement de la rente de 130 fr.
J744> jusques et compris 1749, avec intérêts ; 20. au
^ » ^ « / ¿ ^ 'a p p o r t des’ quittances des cens ; 3°. au rétablissement des
J ^ ^ £ ^ ^ b â tim e n s en bon état. Il fut dit q u e , faute de c e , le bail
.
à rente seroit résolu.
L e 21 octobre
, ce Joseph D ouvreleur de G ar
delle obtint au même bailliage , contre un autre descen
dant des
une autre sentence portant les mômes
condamnations pour les années 17 5o , jusques et compris
1756 j elle prononça aussi la résolution faute du payement
A 2
�,
{ 4 }
.
des arrérages de la ren te, faute du rapport des quittances
des cens, et faute du rétablissement des bâtimens en bon
état.
•
___
L e 9 octobre 1766, 00 Josepli D ou vreleur de Gardelle
prit une troisième sentence en la même justice, contre
Claude V e la y , pèi’e des adversaires, et contre Sébastien
V elay son frère. P ar cette sentence, le bail à rente de
I 7 I 4? Ie traité d u '21 juillet 1744 , eflessen ten ces.d e
17.50 et 17 5 7 , furent déclarés exécutoires contre e u x ; ils
furent condam nés,
à payer les arrérages de la rente,
depuis 1744 jusqu’en iy 65 inclusivem ent, avec intérêts,
h com pter de la demande; 20. à rapporter les quittances
des cens ; 30. à faire aux,bâtimens les réparations néces
saires pour les mettre en bon état , sinon, et faute d e c e faire dans le m ois, le bail à rente étoit déclaré résolu. . \ >
L e 23 décembre 1772 quatrième sentence, portant
mêmes condam nations, et disposition résolutoire?**'”
Joseph D ouvreleur de Gardelle étant d écéd é, -il »T-nHf
fait entre mon père, son héritier universel, et les autf&î^..
emans , un partage qui donna h mon père la rente dont
il s’agit.
D
1
lie 12 novem bre 1 7 8 4 , mon père fit assigner en lût***”1
sénéchaussée d’Au.vergne Claude Y e la y , A ntoine V elay '/ "
cousin de ce dernier ; A n d ré V e la y , Sébastien V e la y ,
cinquième du n om ; Sébastien V e la y , sixième du nom ;""*
-et Antoinette B œ uf, femme de Jean Grangier ; tous petitsenfans et arrière petits-enfans de G régoire V e la y , pre
neur à rente en 1714*
L e 22 juin 178 5, mon père obtint contre eux , en cette
sénéchaussée, sentence, par laqu elle, i°. le bail de 1714
�. ( 5 )
f
et les autres titres subséquens furent déclarés exécutoires ;
2°. les ¡Velay furent condamnés 'chacunf personnellement
pou r-sa p a rt, e t ’ hypothécairem ent pour le to u t,,.a u
payement des vingtrneuf dernières années de la ren te,
avec intérêts , à compter de la demande. Les Y e la y furent
aussi condamnés à rapporter les»-quittances des cens , çt
à l'emettre les bâtimens en bon 'état;>3°l les sentences de
i y 5 o y . 1 7 5 7 1 7 6 6 et 1 7 7 2 ; fureht aussi déclarées exé
cutoires , et les V elay condamnés à-en »acquitter le m on
tant : faute de payement des arrérages de. la rente,, faute
du rapport des quittances des cens , et faute du rétablis
sement des choses en bon état dans le m ois, le bail à rente
r
t
/
* •’ j
‘V .
^ >. j
lut déclaré résolu com m e non f a i t * et a v e n u , et il fut
perm is à mon père de rentrer en possession des immeu
bles ar rentés. '
’
Cette sentence fut signifiée aux V e la y , le 25 du même
mois.
L es V elay ne payèrent point les arrérages de la rente ;
ils ne rapportèrent point les quittances des cens ; ils ne
firent aucune réparation aux bâtimens qui étoient dans'
dans un état déplorable : dans cette position , mon père
se détermina à les déposséder.
- y•
^
/
iU U lU Ctv
L e 4 août 178 5 , mon père fit Htfiwiaer la sentence
de résolution ; et le 1 7 , près de deux mois après la signi
fication de cette sentence, il en lit faire aux V elay une nou
velle signification. Il les fit assigner au 19 ,pour être présens
a sa rentrée en possession, et au procès v e r b a l de l’état des
.lieux •, par son exploit il se réserva l’exécution entière
île la sentence du 22 juin p r é c éd e n t.
L e icj il y eut prise de possession pardevant notaire.
�( 6)
.
Claude V e la y , A ntoine V e la y , l’un des adversaires, son
fils; autre A n toine V elay et A n d ré V elay y parurent:
ils répondirent n ’être p oin t surpris de notre tra nsport,
■
(nous rapportons ici le mot à m ot) et n être point à même
présentement de- satisfaire a u x condam nations portées
par ladite sentenceyà aucun égard, et qu'ils ne pouvoient
empêcher la m ise en possession dudit sieu r requéran t,
(>mon pèrè ) / en conséquence-nous avons auxdïis V e la y
présens donné acte de leurs dires et consentement.
Sur c e , mon père prit possession sans q u e , a écrit le
"notaire, personne se so it présenté, pour fo r m e r opposi
tion à la présente possession.
*
‘
') 0
Claude V elay et mon père demandèrent que le notaire
dressât procès verbal de l’état des lieux : le notaire 1-e fit.
Antoine V e la y , l’un des adversaires, pria mon père
de lui affermer les immeubles dont il s’agit. M on père
crut pouvoir prendre confiance dans l’honnêteté du fils;
mon père crut devoir venir au secours de cet homme qui
lu i manifesta le plus ardent désir de bien faire *, mon père
lui afferma ces biens moyennant la somme de i5 o francs
par an , à em ployer d’abord aux réparations des bâtimens
qui en avoiçnt „Le,,plus grand besoin.
. L e 31 août 1792, mon père, mécontent d’Antoine V elay
.fils, le fit citer pour qu’il eût à vider les lieux , et à lui
payer les fermages.
L e lendemain , Claude V ela y père, et Antoine V e la y ,
son fils, firent à mon père des offres de la somme de 4,000 f.
assignats-, savoir, de celle de 2,600 fr. pour le capital de la
•rente, et de celle dp 1,400 f. pour les arrérages, intérêts et
�(7)
.
fra is, ia u fd e suppléer, -parfaire oit recouvrer : ces offres
tendoient au rachat de la rente,
>
1P o u r toute réponse, mon père s’en référa à la citation
de la veille, et demanda copie du procès verbal d’offres.
L e procès verbal fut clos, et on n’en donna pas copie
à mon père.
L e 3 septembre 179 2 , Claude et A n toine V ela y citèrent
m on père sur leur demande en rachat de la rente.
L e ¿14 septembre il y eut deux procès verbaux de
non conciliation entre les V elay et mon p ère; le pre
m ier sur la demande de mon p è r e , et le deuxièm e sur
celle en rachat de la rente par les V elay.
r
A n toin e V ela y ills répondit à la demande de mon
p è re , que lui et Claude V e la y , son p è re , avoient joui
des biens en question, non en ferm e, mais en rente.
M on père répondit au rachat des V e l a ^ ^ j i ï i n’avoit
pas reçu copie de l’acte d’offre ; qu’il ^ rotoetoit^ n son
dire consigné au commencement de ces actes, et qu’il
protestoit de nullité.
L e même jour (4 septem bre), mon père fît assigner
A ntoine V ela y fils, aü tribunal de district à A m b e rt; il
conclut à ce que V ela y fils fût condamné à lui payer,
en deniers ou réparations, sauf vérification , la somme
de i 5o francs par chaque année depuis 1 7 8 5 , pour la
ferme verbale des biens en question. M on père conclut
à ce qu’Antoine V elay fût tenu de vider les lieux dans
la huitaine. Dans le cas où V elay fils dësavoueroit les
conventions verbales sur la ferm e, mon père demanda
subsidiairement que celui-ci fut condiftnné au désistement
�,
( 8 )
_
' ,
, . ■
de ces immeubles , avec-restitution des jouissances, à dire
d’experts, depuis iy 85. • ■
1
J- L e 6jdu .mêiïiQ rmois {septem bre)y -Yelay^ père.et>‘fils
firent assigner, m on pèr.e au m êm e-tribunal, i ° . au 12
de ce mois
en réitération» ; et, consignation
des offres de
. . .
o
la somme de 4,000 francs assignats, toujours avec la'
clause soirf, de suppléer ., parfaire ou recouvrer ; 2°. aux
délais
de 1Tordonriance
en pvalidité de ces, offres'.
,
■y t ‘
|^ J i
^
'
.Le i2^du même m ois, sentence par défaut contre mon
p è r e , 'laquelle d o n n é ’aux V éla y acte décimalisation de
leurs offres1de la somme de 4*000 francs assignats s a u f
Jl
•/,
‘h t
i'« ..
('
ü
. ,
, •( ’
J
de suppieer, parfaire ou recou vrer, et leur permet de
T
•
J S.'ij'tM' 'mii
i.
/
la consigner a jo u r et heure certains \ ( cette sentence
lie'fixe point les’jour et heure)!'
0
* L e 20 du m êm e'm ois, signification de cette sentence à
mon p è re, avec assignation pour le 22 au bureau d e là
1*•
T I
*
recette.. "/• .
1
. : •
■
Le; 22-du-m êm e mois consignation 'de la somme de
4,000 f. assignats, s a u f de' suppléer,parfaire ou recouvrer.
A n toine V elay défend à la demande de mon père :
comme 011 doit b ie n ‘s’y attendre, il nie la convention
verbale du bail à'ferm e ; il dit qu’il est inconciliable de
con clure, par le même e x p lo it, à l’exécution d’un bail
à ferme et àm n désistement. Il invoque la demande en
rachat de la ren te, et par un trait d’esprit adm irable, il
fait à mon père un crime de repousser des assignats : la
phi*ase d’Antoine V e la y est si heureuse, que l’on me saura1
peuUêlre quelque gré de la publier. M a is la d versa ire,
dit Antoine V e la y , en parlant de mon père , ?ic peut pas
s’expliquer : il lu i "en coûte de recevoir des a ssign a ts,
Aü
�'
(9 )
.
A U L I E U Q ü ’ l L D E V R O I T LES RESPECTER. O u i , s a n sd o u te ,
m on père devoit les respecter ; aussi l’a-t-il fait de ma
nière à ne. pas y tou ch er; mais il a i-especié davantage
sa propriété ; et certes il n’y avoit pas à balancer sur le
choix.
Ces deux demandes respectives furent jointes par une
sentence contradictoire, du i 5 septembre 1792.
A lo rs s’engagea un combat très-vif entre les V elay et
mon père, dont l’objet divers étoit pour les V e la y de'
forcer mon père à se contenter d’assignats pour des valeurs
territoriales, et pour mon père de ravoir la jouissance de
son b'en.
M o n p è r e opposa la sentence de r é so lu tio n et la prise
d e possession de 1 7 8 5 .
M on père opposa le bail verbal fait
îi
Antoine V elay fils.
M o n pè re opposa son in d ictio n au rôle des v i n g t i è m e s ,
au lieu des V e l a y ; in d ic tio n p r o u v é e p a r u n ex trait de
ce r ô le , extrait fo u r n i p a r le c it o y e n L u s s i g n y , c o n t r ô le u r
des v in g tiè m e s (1).
(1) En 178G il cxistoît deux cotes au rôle des communes tl’A rlaric et de Champeaux.
A rt. i 5 a. Claude V e la y , fils de Sébastien , dit le M ensong er,
................................................................................... l6 liv. l 5 S0US.
A rt. i 53 . Annet V elay, dit Cachouille , ci. . 9 liv. 11 sous.
En 1787 ces deux cotes ont été réunies sous l’article 5/¡o, sous
la dénomination suivante :
Claude et Antoine V e la y , le sieur Dottrrelrttr île G ardelle ,
et ai il res actjuereiirs , ou lieu de V eloy-M en son g er, et si^né
ijtissigny.
Appert que pnr r|iiiltance notariée du 29 avril 179$, Michel
Douvreleur a payé lçs vingtièmes de i j 85.
\
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~
�M on père opposa le payement des cens faits par lui
aux; fermiers des directes, desquelles relevoient les biens
en question (t).
( i) J’ai reçu du citoyen D ouvreleur de G ardelle la somme de
1,076 liv. qui me sont dues comme devenu propriétaire du moulin
que jouissait Claude V elay et consorts, situé à Capartel, pour
arrérages de cens sur ledit moulin , comme fermier des rentes
des prêtres du bourg d ’Arlanc et de Beaufranchet, conformément
aux obligations , sentence et exploits que j’ai remis audit sieur
D ouvreleur, et le subroge en m on lieu , droit et place, sans autre
garantie que de mes faits et promesses. A A ria n e , le 28 septembre
a s,gné Barthélémy Y a c iiie r.
Appert que par sentence rendue au bailliage d’Arlanc , le 18 août
1790 , Michel Douvreleur de Gardelle, notaire , Claude et Antoine
V elay ont été condamnés solidairement à payer au citoyen de
Merle et à son épouse, ‘alors seigneurs d’Arlanc , les cens y expli
qués pour les années 178 7, 1788 et 1789.
Je soussigné, Jacques Meilhon , fermier de la directe d ’A rla n c ,
reconnois avoir reçu des deniers de M . Michel Douvreleur de Gardelle,
notaire royal à A ria n e, et ce en plusieurs fo is, et en numéraire
m étallique, la somme de 3G2 fr. 17 sous, qui me restoit due, toutes
déductions faites pour les cens assis sur deux moulins et d’autres
fonds situés à C apartel, montant annuellement argent 20 fr. 3 d.
fro m en l, sept quartons quatre coupes et demie un huitième ; seigle,
Üeux quartons deux coupes trois quarts un huitièm e; avoine, deux
coupes un huitième et un seizième ; à raison desquels cens il y avoit
eu des diligences, tant contre ledit sieur Douvreleur de G ardelle,
que contre Claude et Antoine V elay , dit Cavalier, père et fils , et
c.onlre André et Sébastien Velay , frères, lesquelles diligences j’ai
remises audit sieur Douvreleur de Gardelle, le subrogeant en mon
lieu et place, sans garantie, si ce n ’est de mes faits et promesses.
D ans la somme ci-dessus sont compris les intérêts et frais. Fait
le 20 septembre 1791 ,, a signé M eiliion .
�(ll)
< *V
M on père opposa enfin le bail à ferme par lui consenti •
Vv
à A n toine V elay fils; et pour preuve de ce b a il, il articula v;
;
le fa it, que cet A ntoine V elay iils a vo it, depuis i y 85 , v-« .*!.^ v W
« . -\
joui seul de tous les biens de C ap artel, à l’exclusion de v-.-ci .*%
Claude V elay son père , et des autres V elay compris en
\ »W \
>»«
la sentence du 22 juin 1785.
‘
>.4V , >-«a
M on père soutint qu’il n’y avoit pas lieu au rachat de •k s,
\ . .*
V •i%¿s
la rente.
'
M on père soutint les offres irrégulières et insuffisantes.
• ; •..:■•
■J
•
vA »«4* f jll
D e leur côté les V elay attaquèrent la prise de posses
( <.'*■.>•■
'v »>f.
«%>•
sion du 19 août 1785. Ils dirent qu’elle étoit nulle ou
* .
-, ■
tout au moins inutile : n u lle, pour n’avoir pas été signée
•v * v
par e u x , ou pour ne pas contenir la mention qu’ils avoient
■
*
été requis de le fa ire , et parce qu’ils supposent qu’il n'y
a eu qu’un témoin signataire : inutile, parce q u e, disent- ils , ils n’ont jamais été dépossédés de fait ; parce que
depuis ils ont continué le payement de la rente; parce que
.
en pareil cas tout est com m inatoire, et qu’ils ont toujciîùV
été à temps de purger la demeure en faisant des offres. „
P o u r juger de la suffisance ou de l’insuffisance des offres,^(
ils ont demandé qu’il soit fait un compte ; ils ont demandé
' -A1
que mon père y rapportât ses titres, même le livre-journal
q u i l a dû tenir p our suppléer a u x quittances qu'i/s ont •
pu adhirer.
U ne sentence par défaut fut rendue contre mon père :
il y forma opposition.
L e 26 juin 1793 intervint au tribunal d’A m b ert sen
tence contradictoire, dont il est important que les juges
supérieurs aient sous les y e u x , et les m otifs, et le dispositif, a .*%«;
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« A tten d u , 1 °. que ledit Claude V ela y a vendu à A n “ V 1 *•
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4 YeMml.* toine V e la y , dit T o in ette, par contrat passé devant R io taire, le 17 novem bre 17 7 8 , deux coupées du
etrde la chenevière appelés la Pradon et la Routisse,
^"!2^#i*c^.^fcrticii{oyennant 24 francs; lesquelles deux coupées de terrain
font partie de dix-sept vingt-quatrièm es, que lesdits Claude
^ ^ ét^ A ntoine V elay ont prétendu leur appartenir dans les
‘^ '^ ^ ^ b ie n s baillés à rente foncière à G régoire et Sébastien
} par Jeanne Cotte et P ierre-J o sep h D o u vreleu r,
iils , par l’acte du 17 septembre 1714*5 lesquelles deux
=v
t -TAtt 3,7 coupées de pré et chenevière ont été revendues audit
ff f i^ ^ ir r D o n v r c le u r et à ses cohéritiers par ledit Antoine V e la y ,
dit T o in ette, moyennant la somme de 48 francs, par acte
k ^ -p a s sé devant ledit R iga u d o n , notaire, le 12 avril 1783:
li
que par l’eilet de ladite vente et reven te, ledit
*)uvreleur est devenu propriétaire desdites deux coupées
terrain , et que la demande en éviction est incontesPour cet o])JcL
’
20. que lesdits Claude et Antoine V elay, père
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et iils , possèdent le surplus des dix-sept vingt-quatrièmes
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^^s ùnmeubles , en vertu du bail à rente dudit jour
\éhu/jduA ydLt fa iiç y ! septembre 1714 ? et de l’acte de ratification du 21
fé * 2«*^—»■«
Ilet 1744 ? et que l’acte de possession fait à la requête
y ^ ^ ^ ^ ^ T / i.^ ih u lit D ouvreleur, par le mijiistère de Rigaudon, notaire,
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a£,e C()m,ne auparavant ; ce qui est p ro u v é , soit par les
qu il tances que ledit D ouvreleur leur a données depuis
— ledit acte de prise de possession, soit par leur habitation
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cu conséquence de la sentence de la ciI s é n é c h a u s s é e d’A u v e rg n e , du 22 juin précédent,
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j,’a pas été suivi d’exécution, puisque lesdits Claude et
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Antoine V elay ont continué leur possession depuis ledit
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' ap artel, dans les Lirais sujets à la re n te , soit par la
•rception des loyers,
et revenus desdits moulins
perception
loyei’s, fruits
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fonds
nds d’héritages, soit par le payement de d i f f é r e^ n j
charges , soit par la continuation des cotes d’impositions
faites sous leurs noms ; attendu sur cette question, q u e Océui
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bien que ledit acte de possession ne soit pas nul en la form e^ ™ ^ '
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p a r le défaut de nombre suffisant de tém oins, pu i squ’ il/?*^ /^ 4 - / y T îÿ^\
contient la dénomination de quatre, dont deux ont signé
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il est insignifiant, comme n’ayant pas opéré la dép ossession ^ <^ 1»lifcr'^-/'<^*'‘j(
réelle; attendu aussi que rien ne prouve qu’il y ait eu d esy ^ ** *
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conventions nouvelles entre ledit D ouvreleur et l ’un ou
’?il
l’autre desdits V e la y , et que dès-lors il doit demeurer
constant que le titre de leur possession remonte à celui de
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1 7 x 4 ? et qu’il n ’a jamais changé.
« A tten d u , 30. que lesdils Claude et A ntoine V elay ne
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.
,
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sont présumés jouir des autres sept vingt-quatrièm es desd.
moulins , bâtiinens et h éritages, que pour et au nom des
enfans et héritiers d’A n n et V e la y , pour lesquels ils nn p
A 9JiY ‘A*J,~
sont ni obligés, ni parties capables de défendre à la d e - ^ w ^ ^
mande en désistement dudit D ouvreleur.
« Attendu , 40. que quoiqu’ il soit de principe que le
droit de racheter la renie dont il s’a g it, accordé par I
loi , ayant passe
passé aux herm
héritiers
ers des premiers q
qui ont suc cédé aux héritages , et qui en sont possesseurs en tout ou
en partie , néanmoins ledit Douvreleur ayan t, par son
écriture du 1 ‘i décembre 170 2, reproché auxdits Claude
et A ntoine V e la y , père et fils, que quand ils auroient
été à temps d’exercer le rachat, il devoit paroitre é t o n - ^
nant qu’ils eussent voulu l’exercer sur la totalité , tandis
c\. /. '¿l.. ^ / / /
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„ qu’ils ne représentoient pas les enfans et héritiers dudit
 n n et V elay , qui en avoient à peu près un tiers avant
îa sentence dudit jour 22 juin 178 5; et lesdits Claude et
A n t o i n e V e l a y a ya n t r é p o n d u , p a r le u r r e q u ê te signifiée
le 11 février 1793 , qu’ils n’avoient offert que ce que ledit
•
D ouvreleur pouvoit exiger d’eux à cause de la solidité ;
^ niais que ledit D ouvreleur ri’avoit qu’à s’expliquer. S’il
„ '
.. ^ouloit diviser sa rente et la dégager de la solidité , ils
^
•
•
•
*
î**’ restraindroient leurs offres aux dix-sept vingt-quatrièmes
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q u ’ils am endoient, et qu’ils possédoient de leur chef dans
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Ues héritages baillés à rente; ce que ledit D ouvreleur a
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v" * ’ ^ ^¿formellement accepté par les conclusions qu’il a prises lors
• ^ .{L^ de .sa plaitlpirie dus20 du présent mois.
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\
« Attendu , 5y . q ueïèdit D ouvreleur a soutenu les offres
{ ^ ^ ^ f ^ ' « * ^ i nsuflisantes; qu’il a prétendu que les arrérages, intérêts
frais à lui dûs , et les sommes payées sur les objets qui
(^ # i X g y r é t o i e n t à la charge desdits V e la y , excédoient de beaucoup
les sommes offertes ; que lesdits Claude et A n toine V e la y ,
' ' àe leur p a r t, ont proposé différentes exceptions aux p ré
tentions dudit D ouvreleur , et que la décision de cette
, ^partie de la contestation dépend de l’événement d’un
compte entre les parties, lequel doit être ordonné e
' .v
l’hôtel d’un des juges; et at tendu néanmoins, sur la même
¿ Q
u i uesli on , que ledit D ouvreleur a été mis en demeure de
sa déclaration du montant de la créance , et cjue jus^ ." q u ’au compte les offres, sauf de suppléer, sont valables.
Sur tous ces motifs , après que les parties ont été ouies par
7
l’organe de leurs défenseurs rcspec tifs, a près que les pi èces
............ *
ont été mises entre les mains du^citoyen Guillaum e Pellef,
�( i5 )
qui en a fait son rapport , et qu’il en a été délib éré;
« L e tribunal jugeant en prem ier ressort, a rendu et
prononcé le jugement dont la teneur suit :
« L e tribunal reçoit ledit M ichel D ouvreleur opposant
au jugement par défaut, faute de plaid er, contre lui rendu
le prem ier mai dernier ; ordonne que ledit jugement de
meurera nul et sans effet ; faisant droit sur la demande en
désistement formée par ledit D ou vreleur , contre ledit
A n toine V e la y , fils de Claude, par exploit d u 4 septembre
179 2 , et sur la demande en validité et suffisance d’offres
form ée par lesdits Claude et A ntoin e V e la y , père et fils,
contre ledit D ouvreleur , par exploit du 6 du même mois
de septem bre, laquelle a été jointe à celle en désistement
par celle du 21 novem bre suivant; condamiie lesdits Claude
et Antoine V e la y , pèi*e et fils, à se désister en faveur
dudit D ouvreleur des deux coupées de pré et clienevière,
mentionnées aux deux contrats de vente et de revente desd.
jours 17 novem bre 177 8 , et 12 avril 1 7 8 3 , à rendre et
restituer audit D ouvreleur les jouissances par eux perçues
sur lesdites deux coupées de terrain , depuis et compris
l ’année 1786, jusqu’au désistement , suivant l’estimation
qui en sera faite par experts, dont les parties convien
dront devant un des juges du tribunal, dans la huitaine, à
com pter de la signification à personne ou d o m icile, du
présent jugem ent, ou qui seront par lui pris ou nommés
d’office , même un tiers-expert, s’il y échet, aux intérêts
du montant desdiles jouissances ; sa v o ir, pour celles per
çues avant la dem ande, à compter du jour d’icelle ; et'
pour les postérieures , à compter de chaque p ercep tion ,
jusqu’au payement.
�.
(i6)
.
.
« E t pour ce qui concerne le surplus des dix-sept vin gtquatrièmes desdits moulins , bàtimens et héritages , le tri
bunal débouté ledit D ouvreleur de sa demande en désis
tement.
« E t à l’égard des sept vingt - quatrièmes que lesdits
A ntoine et Claude V elay sont réputés jouir ponr et au
nom des enfans et héritiers d’ Annet Velay-, le tribunal
déboute aussi ledit D ouvreleur de sa demande en désis
tement à cet égard, sauf à lui à se pourvoir contre lesdits
héritiers d’A nnet V e la y , à raison desdits sept vingt-qua
trièm es, ainsi qu’il avisera.
« En ce qui concerne les offres faites par lesdits Claude
et Antoine V ela y, père et iils , le tribunal les autorise à
retirer des mains du receveur des consignations près du
tribunal, sept vin gt-q u atrièm es de la somme de deux
m ille six cents livres offerte pour le rachat du principal
de ladite rente, d’une part, et sept vingt-quatrièmes aussi
cle la somme de quatorze cents livres , offerte pour les
arrérages de ladite rente , intérêts, frais et dépens ; ce qui
réduit la somme consignée à deux m ille huit cent trentetrois livres six sous huit deniers; sa v o ir, dix-huit cent
q uaran te-un e livres treize sous quatre deniers pour les
dix-sept vingt-quatrièmes dont lesdits V elay sont tenus
dans le capital de ladite rente, et neuf cent quatre-vingtonze livres treize sous quatre deniers pour les sept vin gtquatrièmes des arrérages de ladite rente, intérêts, frais
et dépens.
« Déclare les offres desdils V elay , ainsi réduites, bon
nes , val ailles et suilisanles pour les dix-sept vingt-qua
trièmes du capital de ladite rente qui étoientà leur charge,
comme
�( r7 )
_
comme étant lesdites offres conformes à la disposition des
art. II et X I V de la loi du 29 décembre 1790.
« D éclare aussi les offres desdits Claude et A n to in e
V e la y faites sauf de suppléer , parfaire ou recou vrer,
bonnes et valables pour les dix-sept vingt-quatrièm es des
arrérages de ladite rente et des in térêts, frais et dépens i
et pour .en déterminer la suffisance ou l’insuffisance , or
donne que dans la huitaine, à com pter de la signification
du présent jugem ent, à personne ou à domicile , les pay<",*
ties se retireront devant un des juges du trib u n a l, pouiwii*$2^ ->»^*0pr
être procédé à un compte desdits arrérages, intérêts, *'■ V .À C
frais et dépens, lors duquel compte lesdits C l a u d e T e t i - ' w V
A n to in e V ela y rapporteront leurs quittances , et ledit
^ ^ * **
D ou vreleur sera tenu de rapporter tous ses titres, pièces
et procédures, même le liv re- jo u r n a l qu i l a dû tenir
\pour suppléer au rapport des quittances q u i pourraient
étrc adhirées ,• et s i après Tévénement dudit compte il
se trouve un d éjicit auxdites offres, lesdits Claude et A n
toine V ela y f père e t f ils , seront tenus de le rem plir dans
la huitaine précise après ledit com pte, aux peines de
d roit; et si au contraire il se trouve de l’excédant, ils sont
autorisés à le retirer des mains du receveur des consigna
tions.
« Ordonne que dans la huitaine après que le compte
ci-dessus ordonné aura été fa it, et qu’il sera établi que
ledit D ouvreleur a été entièrement satisfait des dix-sept
vingt-quatrièm es à la charge desdits C la u d e et A ntoin e
V ela y dans le principal de la rente dont il s’a g it, ainsi
que dans les arrérages , intérêts , frais et dépens , ledit
D ouvreleur sera tenu de leur rem ettre, s’ils le requièrent,
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et à leurs frais, les extraits de tous les titres, pièces et procédnres qu’il a en son pouvoir , relatifs à ladite rente en
p rin cip al, arrérages, intérêts et dépens, et qu’il sera pa
reillement tenu de consentir à leur profit quittance du
rachat et du payement dudit capital, et desdits arréi’ages,
intérêts et dépens •, sinon et faute de ce faire dans ledit
d é la i, et icelui passé , le tribunal ordonne que le présent
, i
jugement tiendra lieu de ladite quittance. Sur le surplus
demandes , fins et conclusions des parties, le tribunal
met hors de cause et de procès ; condamne ledit D ou_ r
.yreleur aux trois quarts des dépens envers lesdits Claude
^ ^ - ^ ^ ¿ ♦ / ÿ l^ e ^ în to in c Y e la y , à com pter depuis la signification de
l ’acte de consignation exclusivem ent, suivant la taxe qui
\
3
en sera faite en la manière ordinaire ; compense l’autre
quart desdits dépens , et condamne ledit D ouvreleur à la
totalité des tbds.^expédition cl'iL-Présent ju^emen.L, aussi
suivant la taxe; le tout fait et ju g é , etc. »
L e 6 juillet suivant, mon père appela de cette sentence :
cet appel fut porté au tribunal de Brioude.
M ou père et moi avion s, avant la révolu tion , la con
fiance du seigneur d’Ariane. Ici je dois publier que nous
avons toujours eu en horreur ces faits qui ont désolé la
France ; j’ai osé le dire : itidè iras. Nous avons été en
butte à la tourmente révolutionnaire : j’ai été reclus jus
qu’après le 9 thermidor. L e chagrin m ’a enlevé mon
p è re ; il est m ort le 17 janvier 1 7 9 4 .
Les V ela y ont poursuivi sur l’ap p el, contre Jean
Joseph D o u vreleu r, mon frère, et contre Jeannc-M arie
et Julie D ouvreleur, mes sœurs, qui n’a voient à me de
mander qu’une légitim e. C e u x - c i , cités au bureau de
�.
.
( r9 )
#
p a i x , avoient beau d ire , en germ inal an 2 , que les
papiers étoient sous les scellés ( le moyen d’en avoir la
rém otion ! j ’étois sous les verroux forgés par les auteurs de la loi du 17 septembre 1793 ) , les V elay n’en furent
que plus ardens : il leur étoit si facile de combattre des
personnes sans défense !
A in si donc les V ela y m ’ont mis de c ô t é , quoique je
fusse la partie p rin cip ale, la partie la plus intéressée,
comme héritier universel; ils n’ont agi que contre mon
frère et mes sœurs : la reprise d’instance a été ordonnée
avec e u x , par un jugement du 8 messidor an 2.
E n fin , la cause portée à l’audience du 4 vendém iaire
an 3 , époque si voisine du 9 th erm id o r, dont à Brioude
on n’a voit pas encore x'essenti les effets; la cause, dis-je,
portée à l’audience entre les V e la y , d’une part; Jeanne
M arie D ouvreleur, son m ari, et Jean-Josepli D ouvreleur,
d’autre part; ma sœur et mon frère, sans papiers aucuns,
furent hors d’état de se défendre utilement ; aussi y eut-il
un jugement confirmatif de la sentence d’A m bert : mais
heureusement Julie D o u v re le u r, mon autre sœ ur, n’est
point partie dans ce jugem ent; je n’y suis pas p lu s; les
choses sont donc encore entières à cet égard.
I<e 19 du même mois (vendém iaire an 3 ), les V elay,
armés de ce jugem ent, firent assigner au tribunal d’A m
bert J e a n n e-M a rie D o u v re le u r, mon frère, et Julie
D ou vreleur (n o n partie dans ce ju g em e n t), pour être
procédé au compte ordonné par la sentence du 26 juin
J793 ; ils demandèrent le î-apport de nos titres, et no
tamment du journal de notre aïeul et de notre p è r e ,
pour suppléer a u x qu itta n ces, a tten d u , disent-ils , que
C a
�D o u v releu r, a ïe u l, n e n donnait p o in t, a in si qu il est
notoire sur les lieu x.
L e 3 brumaire an 3 , nouvelle assignation par les V elay
à mon frère et à mes sœ urs, toujours pour ce com p te,
toujours demande en rapport des livres-jo u m a u x, et
toujours attendu que D o u v r e le u r , a ïe u l, ne donnoii
ja m a is de quittance.
L e 26 du même mois ( brum aire an 3 ) , ti’oisième
assignation à mon fr è r e , à mes sœ urs, et enfin à m oi
( contre lequel il n’y avoit pas encore de jugement coniirm atif de la sentence du 26 juin 1*793, avec lequel les
choses étoient toujours en état d ’appel de cette sentence ),
pour vo ir adjuger les conclusions ci-devant prises.
L e 22 frim aire suivant ( an 3 ) , sentence par défaut
nous tous : cette sentence oi-donne que les pièces
"seront mises es mains d’un des ju ges, et que nous y
j0iuj r0ns particulièrem ent le journal supposé tenu par
notre père.
T ro is assignations ont suivi cette sentence. J ’ignore ce
que les V elay ont fait depuis; mais je proteste contre
tout ce qui nuiroit à mes intérêts : quand on in’en aura
donné cennoissance, je me pourvoirai.
Ceux qui ont étudié les révolutions, se sont convaincus
de cette très-grande vérité , que l’homme sage doit s’at
tacher principalement à gagner du temps, parce que le
temps est le prem ier maître : par lu i, les idées extra
vagantes sont chassées; la raison reparoîl sur l’ horizon;
elle éclaire les torts de la majorité ; l’on revient au point
de départ.
A in s i, j’ai dû gagner et j’ai gagné du temps. En atten-
�( 21 )
.
.
clant, les' orages se sont dissipés ; j’ai vu l ’ordrè renaître :
des tribunaux d’appel ont été créés; j’ai senti renaître
aussi la confiance ; j’ai i’epris au lieu et place de m on
p è r e , sur son appel du 6 juillet 179 3, de la sentence
d’A m b e rt, du 26 juin précédent. Claude Y e la y , pèi’e ,
est m ort ; j’ai assigné ses héritiers en reprise d’instance.
L a procédure est en règle ; et je vais démontrer le mal
jugé de la sentence dont est appel : je ne m ’occuperai
pas de tout ce qui a été fait à A m b e r t, depuis le juge
m ent rendu à Brioude, le 4 vendém iaire an 3 ; je m ’at
tacherai à la sentence du 26 ju in , parce qu’en la faisant
•anéantir, tout ce qui a suivi aura le môme sort.
D I S C U S S I O N .
L a cause a deux objets : le p rem ier, est dans la de
mande de mon père contre A ntoine V elay fils; le second,
est dans celle en rachat de la rente , form ée par les V elay
contre- m on père. Je vais discuter ces deux objets sépa
rément.
§.I.
Cette partie de la cause présente la question principale
de savoir si, après la sentence du ¿«»juin 1786, et la prise
de possession du 19 août suivant, les V elay ont dû être
considérés encore comme propriétaires des biens arrentés
en 1714.
Ici le contrai: de 1714 contient le pacte commissoire le
plus lormel. Il y est stipulé q u e, faute du payement de
la rente et du rapport des quittances des cens, le bailleur
�(2 2 )
^
auroit le droit de rentrer en jouissance des im m eubles,
sans aucune fo r m a lité à justice.
Ici il paroît, par les sentences de i y 5o , 17^ 7, 1766 et
1 7 7 2 , que les V elay étoient d’âge en âge dans l’habitude
de ne point .payer la rente, de ne pas acquitter les cens,
et de laisser les immeubles en très-mauvais état. Il paroît
qu’à chacune de ces époques mon aieul avoit été obligé
d’obtenir des condamnations à payement, ou la résolution
du bail à rente.
E n fin , en 1784 mon père fut contraint d’em ployer les
mêmes voies rigoureuses contre les V elay. E n 1785 il les
fit condamner r i° . au payement des arrérages des vingtneuf dernières années antérieures ; 2.0 au payement du
montant des condamnations portées par les sentences
de i j 5o , 176 7, 1766 et 1772. Il obtint contr’eux la réso
lution du bail à ren te, faute de payement dans le m ois,
à compter de la signification de la sentence; cette sentence
a été signifiée, et point de payement dans le mois. Aj>ors
mon père a dépossédé les V e la y ; il a fait Mi&'inor la
sentence de résolution ; il a pris possession civile et régu
liè r e , le 19 août 1785. La résolution du bail a été par
faite; il a été ensuite imposé au rôle des vingtièm es; il
a payé les cens postérieurs à sa mise en possession, même
les antérieurs, ceu^rA?tant à la charge des V elay. Il a
affermé verbalement les mêmes biens à Antoine V elay (ils,
qui n’a voit jamais été possesseur des biens arrentés; et
Antoine Velay fils en a joui seul depuis.
Suivant l’ancien d r o it, suivant la loi 2 , au code de
jure em p hileu tico, le pacte comrnissoire devoit être suivi
à la lettre; s’il étoit convenu qu’à défaut, de payem ent,
�( 23 )
le bailleur rentreroit dans son fonds , le cas arrivé , il
pou voit de sa propre autorité expulser le preneur, faute
du payement d’une année. In em phiteuticis contractibus
sa n cirn us, s i quidem aliquœ pactiones in em pliiteuticis
in s tr u m e n tis f u e r in t conscriptœ , easdem et in omnibus
a i iis capitulis obserça ri, et de rejectione ejus q u i emphiteusïm su scep it, si solitam pensionern, vel publicarum
J'unctionum apochcts non prcestiterit.
S’il n’y en avoit point de stipulation , il falloit alors
une cessation de payement pendant 3 ans. S i per totum
tnenniitrn , neque pecunias so lv e r it, 71eque apochas
domino tributorutn reddiderit.
Dans les deux cas de stipulation o u d ê non stipulation,
le maître du fonds pouvoit évincer le preneur à rente :
P ü te st do m inus proprid auctoritate citraque rninislcr i uni ju d icis expellere.
Notre droit français a tem péré cette rigueur. L a juris
prudence a voulu qu’il y eût non seulement arrérages de
la rente, mais encore jugement de résolution. M orn ac,
sur la loi 2 précitée , dit : Legem com m issoriam 7ion
obtinere in G a lliâ , nisi post acception judicium . La
raison en est écrite dans la police attachée aux bons gouvernemens. C lan auteni invisuni n il m a gis apud n o s ,
quàtn s i quis v i auctoritnteque propriâ sib i ju s d ixen t.
L a jurisprudence française est allée plus lo in ; elle a
exigé que la dépossession du débiteur de la rente fût
constatée par un acte authentique. E lle a exigé de la part
du bailleur un acte de possession civile.
Quand il y a une sentence de résolu tion , quand elle
est suivie de possession c iv ile , tout est fini : il n’y a plus
i
�(2 V .
.
de contrat de rente. L e propriétaire de la rente, qui aupa
ravant n’avoit sur le fonds que la propriété directe, en
reprend la propriété utile. E lle est incommutable dans ses
mains. Il n’y a plus aucun retour en faveur du débiteur.
A u tre fo is, en la sénéchaussée d’A u v e rg n e , on exigeoit
deux sentences pour opérer irrévocablem ent la résolu
tion de l’empliitéose : la prem ière disoit que le débiteur
pnyeroit dans; et la seconde prononçoit la résolution.
M . C habrol, tom. HE, page 7 4 , dit qu’après cette der
nière sentence, la chose étoit sans retou r; il ajoute, et
nous avons vu de nos jours qu’il sufïit d’une sentence ,
et que le débiteur qui laisse passer le délai cle grâce sans
p a y e r, et quand il y a acte de possession, est déchu pour
toujours.
■y<
Il
est certain , en point de d ro it, qu’en vente d’im
m eubles, la possession civile du fonds est le complément
du contrat; si le vendeur aliénoit le fonds à un autre,
celui qui auroit la possession civile auroit la préférence.
P ar parité de raisons, le créancier de la rente, qui a ■
obtenu la résolution du contrat, qui a poursuivi l’exé
cution de sa sentence, qui a pris possession civile du
fonds , a mis le dernier sceau à la résolution ; elle est sans
aucun retour pour le débiteur de la rente; c e lu i-c i en
est expulsé pour jamais. P o th ier, au contrat de bail à
ren te, chap. 111, art. I I , §• I , n. 4 0 , dit : jip r è s que
l'arrêt (1) a été e x é c u té , et que le bailleur est rentré
(1) L a sentence de résolution, du 33 juin i 785 , inc vaut arrêt;
elle a acquis la force de chose jugée; il n y on a point d’appel :
les Velay y ont acquiescé par leurs d ires, u la possession civile
du 19 août 1785.
�( 25 )
_
en -possession de Théritage , il ne seroit plus temps
d'offrir le payem ent des arrérages. S’il y avoit auparavant
un contrat, il est effacé.
. '
Les adversaires diront ici, comme devant les premiers
juges , i° . que la possession du 19 août 1785 , n’est point
régulière; 20. qu’elle n’a eu aucun effet, puisqu’ils n’ont
pas discontinué de jouir, et-que depuis, mon père a éga
lement perçu la rente. Ils citeront encore une sentence
rendue en 1 7 7 2 , en la sénéchaussée d’A u v e rg n e , au
rapport de M . Vissac.
i ° . L a signature des V elay n’étoit pas nécessaire à la
prise de possession du 19 août 1786; il n’étoit pas plus
nécessaire d’y insérer la mention que le notaire la leur
avoit demandée. Il s’agissoit ici d’un acte judiciaire, d’un
acte fo r c é , et en pareil cas on n’a pas besoin ni du con
sentement , -ni du seing de la partie condamnée. M on
père avoit une sentence de résolution ; il en poursuivoit
l’exécution ; pour cela il lui falloit seulement un notaire
et deux tém oins, pour constater sa rentrée en possession;
d’ailleurs le notaire a terminé son acte par ces mois :
L esd its V ela y n ’ont rien voulu signer. CeLte relation
prouve suffisamment ; elle prouve que le notaire leur a
demandé s’ils vouloient sig n er, et qu’ils ont répondu
négativement : la réponse signifie l’interpellation préa
lable , et le vœu de la loi est rempli.
I<e notaire qui a rédigé l’acte de possession, étoit as
sisté de quatre témoins; deux ont signé : c’en est assez
suivant la loi. A u reste, les premiers juges l’ont décidé
ainsi, dans ia sentence dont est appel : les adversaires
1
D
�. . ,
(2<s )
.
.
ont signifié cette sentence sans protestation ; ce point est
donc terminé irrévocablem ent.
2°. Les V ela y ont été dépossédés de fait et de droit; ils
l ’ont été de fait par la prise de possession, du 19 août i j 85.
Cette prise est certainement un fait extérieur, un fait
très-positif : par le procès verbal , il est bien constant,
en f a it, que mon père s’est transporté sur les lie u x , et
qu’il y a fait toutes les démonstrations propres à mani
fester sa volonté bien form elle de rentrer en jouissance de
ses biens. Ceci caractérise parfaitement une dépossession
de fait de sa p art, contre les V elay.
c
Les V e la y , débiteurs de la ren te, ont été dépossédés
en ré a lité , puisque depuis le 19 août 17 8 5 , ce ne sont
plus tous les V ela y réunis qui ont jo u i, c’a été A ntoine
V ela y fils, seu l, tant de la portion de Claude V e la y ,
son p è r e , que de celle appartenant aux descendans
d’A n n et V ela y : cet A n toin e V elay fils ne l’a fait ainsi
qu’en vertu du bail verbal que lui avoit consenti mon
père.
N ’aurois-je pour moi que ma possession civile du 19
août 178 6; elle me su lfiro it, parce q u e, appuyée sur la
sentence de resolution , elle auroit opéré la destruction
totale du bail à rente. Personne ne peut me contester q u e,
aussitôt la clôture de ce procès v e rb a l, le bail à rente a
cessé d’exister. D ès cet instant, il a été comme non f a i t
et avenu ; ( la sentence du 22 juin le prononce ainsi : elle
a force de la chose jugée. ) M on père avoit acquitté le
droit de transmission ; il avoit fait insinuer sa sentence de
ïésoliuiou ; il étoit propriétaire incommutablc. Les V e la y
�.
( 27 ^
. .
avoient cessé de l’être ; la sentence et la possession civile
réunies, valoient contre eux tout autant que s’ils avoient
consenti pardevant notaire un acte de résolution du bail
à rente ; s’ils avoient passé cet acte vo lo n taire, ils n’auroient pas pu se prétendre encore propriétaires sans un
nouvel acte de transmission de la part de mon père. Ici
il y a même raison : il faut donc juger de même. Réso
lution complète opérée en faveur de mon p è r e , et par
la sentence, et par l’acte de possession. P oint de nouvel
acte de transmission de la part de tnon père en faveur des
V e la y ; point d’acte destructif de la résolution devenue
parfaite : par conséquent, les V ela y ne sont pas redevenus
propriétaires.
Les adversaires répéteront-ils >que m algré la possession
du 19 août 178 5, tout étoit encore comminatoire ; que
depuis, mon père a reçu des à-com pte sur la rente, et
qu’ainsi il a renoncé à la résolution.
E n jurisprudence, l’on tient qu’une renonciation à un
droit acquis doit être form elle ; ce seroit une e rre u r, que
vouloir l’établir par des inductions : il la faut expresse, ou
il n’y en a point.
O r , je défie mes adversaires de rapporter aucun acte où;
mon père ait renoncé au bénéfice de la résolution pro
noncée par la sentence du 22 juin 178 5 , et assuré par la
possession du 19 août suivant.
E n cause principale , les adversaires ont donné copie
des quatre quittances fournies par mon père les 9 avril
178 8 , 24 mars 178 9 , 17 mars 1790? et 10 avril I 7 9 ï.
En cause d’appel mon conseil, mon défenseur a pris com
munication de leur dossier ; il y a trouvé seize quittances
•
D 2
�(-* 8 )
ou notes qu’ils ont envoyées à leur défenseur, sans doute
pour établir leur libération des.arrérages de la rente. Je
ne parlerai que de celles qui sont postérieures au 19 août
1785 : je vais les analyser.
Il
en est une du 16 janvier 178 6; elle est fournie par
mon père à Claude et A ntoine V ela y ; elle est de la somme
de 96 fr. à compte des arrérages de rente q u i nie sont
dûs, y est-il d it , et prem ièrem ent sur les intérêts et f r a i s ,
et sans préjudice à la so lid a rité , à Texécution parée de
la sentence du 2 2 ju in i j 85 , à la possession du 19 août
1785 , et a u x jouissances à venir.
U ne seconde, du 13 mars 17 8 7 , est de la somme de
114 fr. à compte des arrérages de rente d û s, avec la
clause, sans préjudice du surplus et de tous autres droits
que je me réserve expressément.
C elledu 9 avril 1788 renferme encorcla clause, à im puter
prem ièrem ent sur les intérêts et f r a i s , et sans me f a i r e
préjudice à tous mes droits , sentences et diligences,
Teffet desquels je me ' réserve expressément.
M ôm e réserve dans celle du 24 mars 1789.
Celles des 17 mars 179 0 , et 10 avril 1791 contiennent
seulement Vimputation etabord su r les intérêts et fra is.
D e tout ceci l’on ne peut raisonnablement conclure
une renonciation de la part de mon père à la résolution
du bail <\ rente. D ’une part, il n’y a pas renonciation for
m elle; d’un autre côté, il n’y en a pas même une im plicite,
puisque par la quittance du 16
1786 mon père
s’est réservé la possession du 19 rmtrs 1786, et même les
jouissances à venir. .l?*ïr ces jouissances à venir il faut
entendre celles qu’Antoine V elay fils leroit en vertu de
�( 29 )
t
_
la ferme verbale. Il ne sauroit y en avoir d’autre sens bien
juste.
■
i
...... • -, ; .
lies réserves apposées dans les quittances postérieures
embrassent tous les droits de mon père. Elles se réfèrent
à celle du 1 6 janvier 1786. Elles sont clairement expliquées
par celle-là, et en somme il faut dire que non seulement
mon père n’a pas formellement renoncé -, mais qu’il a tenu
constamment- à la résolution, à sa prise de possession.
lia sentence rendue en 1 7 7 2 , au rapport de M . Vissac,
en la sénéchaussée d’A u v e rg n e , ne fait pas préjugé pour
les adversaires : elle est contr’eux. E n effet, M . C h ab ro l,
qui la c ite , tome 3, page 7 5 , en son commentaire sur la
coutume d’Auvergne-, tit. 2 1 , art. III, après avoir posé les
principes exacts sur la m atière, dit : « Il a été ju g é , en
« 1 7 7 2 , au rapport de M . V issa c , contre M . D e ja x ,
y avocat à Brioude , que le débiteur contre lequel il avoit
« été prononcé une sentence de résolution, avoit pu ï é « parer sa demeure pu* des offres : mais des circonsv tances particulières avoient donné lieu à ce jugement :
« le sieur JDejax n avoit pas pris possession des héri*« toges , et il avoit reçu volontairem ent les arrérages
« antérieurs à la sentence ».
Ici il n’y a pas identité d’espèces. M on père a pris
possession. L e m ais de M . Chabrol signifie bien claire
ment que si le sieur D ejax avoit mis le sceau à la résolu
tio n , en prenant possession, la sénéchaussée d’A uvergn e
auroit jugé tout autrement. Elle auroit été obligée de
juger que la résolution’ étant parfaite par la possession,
le débiteur de la rente étoit déchu pour toujours.
Toutes les ibis que le “bailleur obtient la résolution du
�.
( 3o )
contrat, le preneur n’en est pas quitte par la perte du
fonds :,il doit encore les arrérages antérieurs à la réso
lution ; il faut qu’il les paye ; et le b ailleu r, en les recevant
après la sentence, après sa mise en possession, ne renonce
pas pour cela à sa propriété du fonds. E n reprenant son
fonds , il ne. prend qu’une portion de la chose qui lui
revient : en touchant les arrérages il perçoit l’autre. M ais
cette autre n’est pas destructive de la prem ière ; le fonds
lui demeure toujours.
I c i , qu’a fait mon père ? Il a reçu à compte des arré
rages, intérêts et frais qui lui étoient dûs. Il a fait chose
légitim e. M ais il n’a pas r e n o n c é à la r é so lu tio n ; il a au
contraire fait réservé de ses droits. Il s’est r é se rv é expres
sément la sentence de résolution et la possession.
L es adversaires rep ro d u iro ien t-ils sur la scène le
m oyen qu’en cause principale ils avoient tiré des con
clusions prises par m on père? D iront-ils qu’il est incon
ciliable de demander tout à la fois l’exécution d’un bail
'
<
f
à ferme verbal d’un bien , et le désistement du même
bien ?
iñ.
M ais , qu’on neyÉ^Tméprenne pas sur la con textu re,
sur la substance de ces conclusions. Elles sont très-conci
liables; elles sont très-bien appropriées à la position des
parties. J e vais même jusqu’à dire qu’elles sont alors
d ’usage.
E n eifet, mon père avoit affermé verbalement. Il de
mande qu’on lui paye les ferm ages, et qu’on vide les lieux.
M ais il n’a point de titre écrit pour constater la ferme.
Si Antoine V ela y fils nie la convention, m onp ère ne peut
eu faire la preuve testimonia l e , parce que l’objet est en
�C 31 )
.
^
^
Valeur de plus de 100 francs. Mais alors il a un titre dans
la jouissance faite publiquement par cet A n toine V elay.
Celui-ci est détenteur du bien de mon père : il faut bien
l ’en so rtir, et pour cela il n’y avoit que la voie du désis
.
tement.
.
.
E n cet état de choses, mon père a dem andé, i ° . dans
le sens de l ’aveu du bail verbal 3 qu’A ntoine V elay eût
à vider les lie u x , et à lui payer les fermages ; 2°. en cas
de déni de la ferme verbale, et subsidiairement seulement,
qu’A ntoine V elay fût condamné’à se désister, et à rendre
compte des jouissances, suivant l’estimation par experts.
M ais il est très-clair que les conclusions subsidiaires, néces
saires dans les circonstances, n’étoient pas exclusives des
conclu sions p rincipales.
J ’en ai dit assez, je crois, sur cette prem ière partie de
ma cause : mes moyens me paroissent victorieux ; en les
comparant avec la première disposition de la sentence
dont est app el, il est très-clair que les premiers juges ont
erré en ne condamnant pas Antoine V ela y à vider les lieu x
et à payer les fermages sur le taux de i 5o francs par an ,
ou à payer les jouissances de notre b ien , suivant l’esti
mation par experts.
4
*
a
Je ne vais traiter que très-subsidiairement la partie
•
relative au rachat de la rente.
Il
seroit inutile d’exam iner, s’il y avoit oü non lieu au
l’achat de la rente : cette question est subordonnée au sort
de la prem ière, que je viens de développer \ si sur la pre-
À
�,
. ^ 32
-, .
•
,
m ière, il est jugé que je suis propriétaire, mes juges n’au
ront que faire de descendre à la seconde.
A in si donc, je dirai seulement à toutes fins, et'parce que
nous sommes en tribunal souverain; je dirai que le procès
verbal d’offres du prem ier septembre 1792 est nul', parce
qu’on n’en laissa point copie à mon père ; il demanda,
cette copiç, parce que l’ordonnance de iô ô y l’exige, à peine
de nullité. Les notaires, comme les huissiers , peuvent
bien faire des actes d’offres ; mais ces actes alors ne font
que remplacer ceux des huissiers ; par cette raison , ils
sont soumis-ci- la même règle ( l ’ o r d o n n a n ce de 16 6 7 \
. . ¡''u,«..;,:
■
in 1
.
' '
L ’acte d’offres est ici la base de l’édifice : s’il est nul ; tout
.
-' V * ' î * .
ce qui a suivi l’eSt aussi.
■ Je dirai que.dans l’exploit d’assignation du 4 septembre
179 2, et'dans la signification du jugement ordonnant la
consignation, il n’est pas dit à qui les copies de ces exploits
ont été laissées : autre moyen de n u llité, suivant l’art. III
du tit, II de l’ordonnance de 1667 ( 1 ) .
Je dirai que les délais de l’ordonnance sont de ri
gueur , et pour le défendeur ; il n’est donné de les abréger
que par une permission de la justice, et dans les cas urgens.
t■ r d o ,fl^fb^é^latic^ : du ^premier se]>jo
téinbre^Y^^^n 12-dumôm e m ois, jour tÎu jug£irven| cjuj N
a ordonné la consignation, il n’y ¿1. qu’un intervalle de .dix.,
jours francs , et il en falloit vingt-sept, avant qu’011 pût
donner défaut contre mon père.
Pour ne pas ennuyer davantage par cette discussion
( I ) Sera fait mention en l’ original [et en la copie, des pet'sonnes auxquelles ils auront été laisses, a peine de nullité.
sèche
�,
C 33 )
sèche sur la form e, je terminerai par dire que les offres
des V elay sont insuffisantes d’abord suivant eux , et puis
bien davantage dans la réalité.
Leurs offres faites à domicile sont du prem ier septembre
1792; elles sont de la somme de 4,000 fr. assignats pour
capital de la rente , arrérages, intérêts et frais. Il les
ont réalisées le 12 du même mois , et consignées le 22 :
mais ils n’ont réalisé et consigné que 4,000.
E n point de d ro it, le débiteur n’est libéré que , ou par
une quittance finale de la part du créan cier, ou par une
quittance du receveur des consignations, et à l’instant de
la quittance. Jusqu’à cet instant l’intérêt court, si la créance
en porte : cela posé, les V ela y auroient dû consigner l’in
térêt co u ru , depuis le prem ier septembre 179 2, jour des
offres, jusqu’à la consignation : ne l’ayant pas fait, il y
auroit insuffisance dans la consignation, et nullité dans
tout ce qui a suivi.
Les adversaires voudroient-ils soutenir que la somme
de 4,000 francs étoit plus que suffisante? mais alors leur
consignation seroit encore vicieuse : les offres et la con
signation sont faites avec la clause , S a u f de suppléer,
parfaire ou recouvrer. Un débiteur doit faire l’appoint
du créancier ; il ne doit offrir ni plus ni moins que ce
qu’il d o it; il faut que l’affaire finisse là; il ne lui est pas
permis d’exposer le créancier à une action en restitution.
U ne pareille faute a fait annuller nombre de cons'gnations en papier-monnoie : les registres du tribunal civil
du P u y - d e - D ô m e , sont pleins de jugemens sur cette
matière.
A in si je dis aux V ela y : O u vous m’avez offert le preE
�.
( 34 )
.
, . *
m ier septembre 179 2, rigoureusement ce qui m’ étoit dû.
alors, ou vous m ’avez offert plus; dans le prem ier casr
votre consignation est insuffisante, puisque vous n’y avez
pas ajouté l’intérêt couru depuis le prem ier septembre jus
q u ’au 23 ; dans le second cas, j’aurois eu raison de ne
pas accepter, puisque vous m’auriez exposé à une action
en resti tution , en m ’induisant à prendre plus qu’il ne
m ’étoit dû.
‘
Mais ce n’est pas tout. Dans la réalité , il étoit dû
beaucoup plus le prem ier septembre 1792 : les V ela y
dévoient, 1». le principal de la rente; 20. les arrérages
adjugés par les sentences de 1760, 1 7 5 7 , 176 6, 1772 et
178 5; 30. les intérêts de ces arrérages depuis les demandes
qui en avoient été formées ; 40. les dépens adjugés par
ces sentences. Par celle du 22 juin 178 5, ils avoient été
condamnés à payer, i° . en deniers ou quittances, les
vingt-neuf dernières années échues à la-Saint-Martin 1784;
20. le montant des condamnations prononcées par les
sentences de 1760, 176 7, 1766 et 1772. Celle du 22 juin
1785 n’est pas attaquée; elle est inattaquable aujourd’hui.
C ’est à eux de rem plir ces condamnations en quittances
ou en deniers. Les arrérages de la rente s’élèvent à plus
de 5,ooo francs; ajoutez-y les intérêts et les frais, vous
aurez un total de plus d<* 8,000 francs : que l’on juge
donc de la suffisance de la consignation !
' Il est vrai qu’en cause p rin cip ale, les adversaires ont
demandé et fait dire que mon père représenteroit le livre
journal qu’il a dû tenir pour suppléer aux quittances
adhirées; ils ont fait dire que s i, par l’événement du
compte , il y a déficit dans les offres consignées, les V elay
�■
(
3
5
°
.
.
Seront tenus de le rem plir dans la huitaine; et que s i,
au con traire, il y a de l’excédant, ils le retireront du
bureau de. la recette.
,•
• •r
*
Cette dernière disposition de la sentence dont est appel,
est totalement opposée aux vrais principes. C ’est au dé
biteur a faire le compte juste du créancier; ce lu i-c i ne
peut pas être jeté dans les évolutions de la procédure ;
pour vérifier si on lui a offert assez ou trop : c’est au
„débiteur à établir, par ses titres et par ses quittances,
qu’il n’a offert et consigné que ce qu’il devoit.
Jej i ’ai point de journal de recette : c’est ù vous h pro
duire vos.qu\ttnnc :s; vous devez nous payer le montant
des condamnations prononcées contre vo u s, en deniers
ou quittances. V ous dites aujourd’hui que vous avez
adhiré des quittances; mais c’est un mensonge de votre
part : vous ne voulez pas montrer celles que vous avez,
parce qu’elles contiennent des clauses qui vous sont con
traires : mais les sentences que j’ai vous y forcent. M ais
ce qui vous convainc de mauvaise f o i , ce qui devroit
vous faire ro u g ir, c’est la manière contradictoire dont
vous vous êtes expliqué devant les premiers juges. Dans
une requête du n février 179 3 , vous avez demandé le
rapport d’un journal, p o u r s u m ,'{(i w a u x q u itta n c e s q u e
v o u s a u r ie z p u a d h ir e r . \ m t , a excvez donc eues, ces
quittances, dès qu’alors vous d1 b^nç.culemcnt en avoir
ad h iré? Dans vos exploits des 19 vendém iaire et 3 bru
maire an 3 , vous dites que m o n a ïe u l n e d o n n a it
j a m a i s de q u itta n c e s , et q u e ce la é ta it n o to ir e s u r les
Il y a opposition absolue dans ces deqx façons de
s'exprim er; elles sont l’ouvrage de la ruse et du nienl ie u x .
�1 36 )
songe; et nos juges doivent être bien en garde contre
les assertions de mes adversaires et de leurs adhérens.
Nos juges doivent se renfermer dans la règle; cette règle
est que le débiteur doit payer en deniers ou quittances
valables : mais toujours est-il bien évid en t, et par les
sentences que j’a i , et par la somme offerte et consignée,
qu’il y a insuffisance de plus de 4,000 francs. Si les ad
versaires soutiennent encore le con traire, ils sont obligés
de le prouver mathématiquement : jusque-là, le mal—
jugé des premiers juges est palpable.
G OU RBEYRE.
A R IO M , de l'imprimerie (h L a n d r i o t , seul imprimeur du
T ribunal d ’appel. — A n 10.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Douvreleur de Gardelle, Joseph. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
assignats
bail
bail emphytéotique
surnoms
contre-révolution
Description
An account of the resource
Mémoire pour Joseph Douvreleur de Gardelle, homme de loi, demeurant à Arlanc, fils et héritier universel de défunt Michel Douvreleur de Gardelle, notaire public, appelant ; contre Antoine Velay, cultivateur, habitant du village de Carpatel, mairie d'Arlanc, tant en son nom que comme fils et héritier de défunt Claude Velay, dit le Mensonge ; Antoine Bravard, jardinier, demeurant en la ville d'Arlanc ; et Magdelaine Velay, sa femme, aussi fille et héritière de Claude Velay, intimés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1714-An 10
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0231
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0712
BCU_Factums_G1221
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53730/BCU_Factums_M0231.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Arlanc (63010)
Capartel (63010)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
bail
Bail emphytéotique
contre-révolution
surnoms
-
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37592bc24019a3e3cd2fa93c875bb30f
PDF Text
Text
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OBSERVATIONS-
■
�OBSERVATIONS
P O U R
La dame D O U V R E L E U R DE G A R D E L L E ,
et son mari, appelans;
CONTRE
i
Jea
Q
n
-J
oseph
u a tr e
!
C H O U S S Y - D U P I N , intimé.
questions sont élevées entre les parties.
§•
Ier-
L e citoyen C houssy d o it-il rembourser aux appelant
les frais d’extraits d’oppositions formées sur lu i, et por
tant sur une vente immobilière consentie par lui à
M atthieu Pough o n , p ère de la dame de Gardelle , ainsi
A
�.
( 2 >
que les frais de dénonciation de ces oppositions au cit.
Choussy ?
Dans le fait, le citoyen Choussy a vendu un domaine
appelé Chazeaux, à Matthieu P o u gh on , par contrat du
8 octobre 1792, moyennant 18,632 francs. 16,632 francs
ont été payés en écus ; les autres 2,000 francs ont été
stipulés payables aussi en écus.
L e 13 juin 1793, Matthieu Poughon a pris des lettres
de ratification scellées , à la charge de six oppositions sur
le citoyen Choussy, y compris celle conservatoire formée
par Matthieu Poughon en 1793.
Ces oppositions ont été dénoncées au citoyen ChoussyD u p in , en conformité de la déclaration du 5 septem
bre 1783.
Dans le d ro it, le vendeur est obligé de faire cesser
tous les troubles dérivés de lu i, et apportés à la tran
quillité de son acquéreur; il doit le renvoyer indemne;
il doit payer tous les frais y relatifs : par cette raison il
est tenu de ceux d’extraits d’oppositions et de dénon
ciation. Eu la sénéchaussée d’A u vergn e, où l’on jugeoit
tout au moins aussi-bien que dans les parlemens, c’étoit
une jurisprudence coustante, une vérité en droit.
D e là il suit que les premiers juges ont erré, en re
jetant la demande de la dame de Gardelle et son m ari,
en remboursement de ces frais.
§•
I l
L e ciloyen Choussy pou voit-il forcer la dame de Gar
delle el son mari i lui payer la somme de 2,000 francs
�•
( 3 )
restante (lu prix de la vente du 8 octobre 17 9 2 , sms
leur remettre les expéditions des main-levées des oppo
sitions , ou tout au moins le certificat du conservateur des
hypothèques, constatant la radiation de ces oppositions ?
Dans le fait, le 9 du présent la dame de Gardelle et
son mari ont payé au citoyen Clioussy la somme de
2,000 francs , ainsi que les intérêts et les intérêts des
intérêts jusqu’à ce jour. Il y en a quittance devant le
citoyen F lo u rit, notaire à Riom.
Cette partie de la contestation est terminée. La dame
de Gardelle et soh mari ne doivent plus rien.
Mais le citoyen Clioussy doit à la dame de Gardelle
et à son m ari, i°. le remboursement des frais d’extraits
d’opposition et dénonciation ; z n. au moins la tradition
du certificat du conservateur, probatif de la radiation
des oppositions frappant sur leurs lettres de ratification.
A cet égard, nous avouons que le citoyen Choussy
nous a fait signifier les main-levées des oppositions.
M ais, i°. cette signification n’est que par extrait; et per
sonne ne pense qu’il suffise de donner, par appert, copie
d’actes qui doivent opérer la tranquillité parfaite d’un
acquéreur : il faut que cette copie soit entière.
20. Ce n’est point assez d’une copie signée par un huis
sier. Les huissiers copient tous les actes qu’on leur remet;
ils n’ont point ni le pouvoir ni les lumières nécessaires
pour en assurer la sincérité. D ’ailleurs un désaveu jugé
dans les formes de droit peut effacer leur ouvrage.
3°. L e seul fonctionnaire public ayant caractère légi
time pour allesler qu’il n’existe plus d’oppositions, ce
A a
�.
. C4 )
seul fonctionnaire public est le conservateur des hypo
thèques : tout comme s’il scelle des lettres de ratification
sans la mention d’oppositions, quoiqu’il y en ait, l’ac
quéreur est à l’abri de toutes recherches de la part des
opposans; de même quand il délivre un certificat de radia
tion , l’acquéreur est également en règle ; sauf la respon
sabilité du conservateur envers les créanciers opposans.
Mais alors il faut que le vendeur rapporte et remette
à l’acquéreur le certificat lui-m êm e, parce que c’est dans
ce certificat que l’acquéreur doit voir et trouver sa ga
rantie contre tous les créanciers opposans.
A cet égard, le citoyen C h oussy-D upin n’a jamais
offert, ni en cause principale, ni en cause d’ap p el, la
délivrance'de ce certificat; il n’en a pas dit un mot dans
ses conclusions, lors de la plaidoirie qui a eu lieu le 9 du
présent.
Que l’on ne dise pas que nous pouvons aller au Puy,
et en retirer un duplicata de la part du conservateur.
L e trouble qui résulte des oppositions contre nous,
vient de vous, citoyen Choussy, vous devez le faire cesser;
vous devez faire tous les frais nécessaires pour cela; vous
devez apporter chez nous toutes les pièces probatives que
nous n’avons plus rien a craindre : vous ne.pouvez pas
nous laisser les fatigues et les dépenses d’un voyage, pour
nous forcer ù faire ce que vous êtes obligé de faire vous-
même.
L ’on dit
c h ie r, etc.,
sieurs cents
i° . C’est
que les m ain-levées des oppositions Fausont portées par des jtigeniens qui ont plu
de rôles en expédition.
à tard qu’on le confesse.
�( 5 )
.
2°. S’il en est ainsi, remettez-nous au moins le certi
ficat du conservateur; nous nous en'contentons ,■pourvu
qu’il soit bien en règle.
g.
I I I .
L e citoyen Choussy est-il fondé à demander main-levée
et radiation de l’opposition faite en 1793, par Matthieu
P oughon, et des inscriptions faites en prairial an 7 , par
la dame de Gardelle et son m ari, pour conserver leur
hypothèque en cas d’éviction?
Cette partie de la cause est sans contredit celle à la
quelle la dame de Gardelle et son mari attachent le plus
d ’importance, parce que de là déjîend la sûreté qui leur
a été formellement promise.
Dans le fait, par le contrat de vente du 8 octobre 1792,
le citoyen Choussy a contracté l’engagement de g a r a n tir ,
f o u r n i r et f a i r e v a lo ir envers et contre to u s , à p e in e , etc. :
ce sont les termes même du contrat. Il a ensuite
p ro m is
e x é c u te r ce c o n tr a t , sous îo b lig a tio n de ses biens.
Cet acte n’étoit que sous seing p rivé; mais il a été
passé devant notaire le 4 mars 1793. L à Choussy a o bligé,
affecté et h y p o th éq u é tous ses biens présens et à v e n ir ,
à T e x é cu tio n du co n tra t de vente.
D e là il suit que tous les biens p résen s et à v e n ir du
citoyen Choussy ont été hypothéqués à l’exécution de
tout le contenu aux engagemens du citoyen Choussy, et
notamment de g a r a n t i r f o u r n i r e tfc u r e v a lo ir e?ivers
et contre t o u s , ¿1 p ein e , d e .
.
�,.
.
( 6 }
' D e là il suit encore que la dame de Gardelle et son .
mari ont une action hypothécaire à exercer sur ces autres
biens, si jamais ils sont actionnés en désistement du do
maine de Chazeaux. Ces autres biens répondent de ce
domaine; ces autres biens sont leur gage; ils ont le droit
de les surveiller, en quelques mains qu’ils passent, et cela,
pour que ces biens répondent toujours de ce domaine.
Par contrat du 4 messidor an 8, le citoyen Choussy
-a vendu sa terre de Fiolgoux aux citoyens Touzet ,
Celeyron et Buisson, négocians à A m b e rt, partie en
viager et partie en argent payable prochainement. L ’on
y remarque ces mots : L e d i t C h o u s s y d é c l a r e n ’ a
v o i r d ’ a u t r e s i m m e u b l e s ; d’où il faut conclure qu’il
a tout m obilisé, et q ue, tout opulent qu’il est encore
réputé, il peut dire : Omnia mecum porto. Mais une
richesse en porte-feuille, sur les banques de L yo n , etc.,
est nulle pour un acquéreur qui n’a acheté que dans la
vue d’une hypothèque de garantie.
Les citoyens T o u zet, etc., ont fait transcrire et notifier
leur transcription à la dame de Gardelle et aux autres
créanciers inscrits.
Dans le droit, l’article V I de l’édît de 1771 oblige à.
■prendre, à ch a q u e m u ta tio n , des lettres de ratification,
pour purger les hyp oth èqu es dont les im m eubles vendus
so n t grevés.
L ’article V II porte que ces lettres purgeront les hypo
thèques et privilèges à l’egard de ceux qui auront né
gligé de fa ire leur opposition.
L ’article X V dit : « Les créanciers, e t t o u s c e u x
�( 7 )
f ■
» QUI P R É T E N D R O N T DR OI T DE P R I V I L E G E E T HYPO
, A QUELQUE T I T R E QUE CE SOIT , seront
» tenus de former opposition. »
Matthieu Poughon avoit droit d’hypothèque de ga
rantie sur tous les autres biens du citoyen Choussy. D ’après
l’article X V , Matthieu Poughon devoit donc former
opposition, ou il auroit perdu son hypothèque, dans les
cas des articles V I et V II. V o ilà , nous le croyons bien
fermement, voilà tout ce- qu’il faut pour légitimer les
oppositions formées sous l’empire de l’édit de 1771.
' Quant aux inscriptions faites en prairial an 7 , dans le
délai utile, par la dame de Gardelle et son m ari, deux
points sont très-certains ; le prem ier, qu’en vertu de la
vente du domaine de Chazeaux, la dame de G a rd e lle et
son mari ont une h y p o th è q u e générale de garantie sur
les autres immeubles du citoyen Choussy; le second point
est que si la dame de Gardelle et son mari n’avoient pas
fait d’inscription, le citoyen Touzet et consorts auroient
purgé par le fuit de la transcription de leur contrat, et
la dame de Gardelle et son mari-n’auroient plus eu au
cune sorte de droit sur la terre de F io lg o u x, leur hypo
thèque auroit été effacée.
Pour conserver cette hypothèque , la dame de Gar
delle et son mari ont fait inscription. Ils en avoient
l>ien le droit, parce qu’il leur étoit dû une action de
garantie.
Il est vrai que cette garantie n’est pas encore exigible,
et que l’exercice doit en être renvoyé à l’événement,
c’est-à-dire, à l’ instant où la dame de Gardelle et son
mari seront actionnés en désistement. Mais la loi du
» THÈQUE
�.
,
.
.
11 brumaire an 7 , autorise tous les créanciers à ins
crire ; elle y autorise même les créanciers conditionnels;
Une action en garantie est une dette conditionnelle , uiîe
dette dont l’exigibilité arrive aussitôt la demande en
éviction ;.par cette raison il y a lieu à inscription.
'
Qu’oppose le cit. Choussy pour avoir main-levée des
inscriptions? Il dit, i° . Je vous rapporte main-levée des
oppositions qui avoient frappé vos lettres de ratification ,
aucun créancier ne peut donc vous inquiéter ; 2°. vous
ne pouvez pas me tenir perpétuellement dans la gêne.
Si votre prétention étoit accueillie, un homme qui auroit
fait une première vente ne pourroit plus aliéner le res
tant de ses biens ; il lui seroit impossible d’arranger ses
affaires, parce qu’il seroit empêché par l’opposition du
premier acquéreur. Il cite la loi S i sciens ignoranti et
la loi Q u i rem emit. Il cite divers arrêts qui, selon l u i ,
ont jugé qu’un premier acquéreur ne peut pas former
opposition aux hypothèques sur son vendeur. 30. Enfin,
le cit. Choussy allègue que la dame de Gardelle et son
mari n’ont rien à risquer, parce qu’il a acquis de la
famille Carie , et que cette famille avoit acheté de la
maison de Frétât, q u i, depuis un temps im mém orial,
avoit possédé le domaine de Cliazeaux.
*
L a loi S i sciens ignoranti, qui est la 30°. au'lit. D o
ont. emp. et vend, , n’a aucun rapport à la cause d’entre
les parties ; elle est seulement pour le cas où le .vendeur
auroit vendu sciemment la chose d’autrui à quelqu’un
qui Pau roi t ignoré. A lors l’acquéreur n’est pas obligé
d’attendre l’action en éviction pour se pourvoir contre
Son vendeur.
La
�( 9 )
f
La loi Q ui rem ém it, qui est la 3e. au tit. D e evictionibns , est étrangère aux parties. Elle porte : Q ui rem
ém it, et post possidet, quandiîi eçicta non est, aitctorem
suur/ij proptereà quàd aliéna vel obhgata res d ica tu r,
concentre nonpotest.
L ’interprète nous enseigne que, jusqu’à la demande en
éviction, l’acquéreur ne peut pas agir contre son vendeur,
quoique la chose soit à autrui ou hypothéquée à un tiers ,
n isi in limine contractus evictio im m inent, vel n u l
venditor fu e r it sciens, etc.
Ici la dame de Gardelle et son mari n’ont pas agi contre
le cit. Choussy; ils ont fait seulement un acte qui leur
conserve le droit d’agir, si jamais ils sont poursuivis en
éviction du domaine de Cliazeaux. D e là il suit que la
loi S i scien s ign oran t l et celle Q u i rem o m it sont inap
plicables à notre espèce.
Quant aux arrêts de 1779, 1784 et 1786, rendus aux
parlemens de Normandie, Toulouse et Paris, i°. ceux
qui les rapportent ne sont pas des auteurs accrédités; peuton prendre confiance dans leur relation ? 20. ce qui paroît
y avoir été jugé est si étrange , si contraire aux vrais
principes, qu’il faut croire que ce sont des arrêts passés
de concert : 30. le cit. Grenier q u i, dans son c o m m e n
taire sur l’édit de 1771 , parle de celui de 1786 rendu
entre le sieur de Maçon et les héritiers de Gironde ,
l'improuve fortement; il lui oppose la jurisprudence de
la sénéchaussée d’A u vergn e, qui est hien plus conforme
aux principes : 4°. c’est ici plus que jamais le lieu de
d i r e , avec Charles D u m o u l i n , non exem phs, sed legibus
judicandum.
\\
�( 10 ) .
Ici le principe et la jurisprudence ancienne sont tota
lement contre ces arrêts.
L e principe est dans l’art. X V I de l’édit de i 55 i , sur
les ventes' par décret. Suivant cette lo i, un acquéreur
pouvoit former opposition, afin de conserver à la saisie
réelle que l’on faisoit d’autres biens de son vendeur,
et cela afin de conserver sa garantie en cas d’éviction.
V oici le tempérament ordonné par la loi : « Sera passé
» outre pour le regard des oppositions de recours de
» garantie, pour lequel n’y.auroit procès commencé,
» a la charge que les opposans postérieurs seront tenus
» obliger et hypothéquer tous et un chacun leui*s biens ,'
» et bailler caution idoine et suffisante, de rendre et,
» restituer les deniers qui par eux seront reçus à Pop
» posant ou opposans pour raison de ladite garantie,
» qui seroient trouvés être précédens en hypothèque aux
» dits opposans,auxquels la distribution auroit été faite. »
D ’H éricourt, en son traité de la vente des immeubles
par décret, chap. V III, N °. 17 , dit : « C’est ce qu’on doit
» px-atiquer pour les demandes en garantie contre la
» partie saisie. »
Rousseau de Lacombe , en son recueil de jurispru
dence civ ile , verbo G a r a n t i e , N. 1 4 ,dit : « Le bien ac
» quis par un second acquéreur, étant mis en décret, et le
» premier acquéreur, avec garantie du même vendeur,
» y ayant formé opposition, par arrêt du 17 août 1618
» l’opposition déclarée valable; ordonné que les créan
» ciers postérieurs, qui toucheront les deniers , bailleront
» caution de les rapporter en cas d’éviclio n , si mieux
» n’aiine l’héritier du vendeur bailler bonne et sullisante
» caution de ladite garantie. »
�S’il en étoit ainsi en saisie réelle, en ventes par décret,
qui purgeoient le droit de propriété, à fo r tio r i, doit-il
en être de même pour les ventes volontaires, pour la
transcription aux hypothèques et pour les lettres de ratifi
cation. Tout cela n’a fait que remplacer successivement
les décrets volontaires qui purgeoient seulement les hy
pothèques.
D e tout ceci il suit, i Q. qu’un premier acquéreur
avoit le droit de former opposition pour conserver sa
garantie ; 2°. qu’en saisie réelle les créanciers de sommes
exigibles, et postérieurs à cet acquéreur opposant j ne
pouvoient toucher qu’en donnant caution idoine et suf
fisa n te de rendre en cas cCéviction. Si les opposans posté
rieurs y étoient astreints , peut-on en co n clu re l’aisonnablement que le vendeur v o lo n ta ire doit avoir plus de
pouvoir que ses créanciers, et qu’il peut obtenir main
levée d’une opposition, d’une inscription ? L e citoyen
Choussy est peut-être le seul q u i, de nos jours, ait osé
concevoir une prétention aussi extravagante.
Aujourd’hui, et depuis la loi du n brumaire an 7 ,
nous 11e connoissons d’hypothèque volontaire que la
spéciale. La spéciale est aujourd’h ui, relativement à son
objet, ce qu’étoit autrefois l’hypothèque générale, rela
tivement à tous les biens de l’obligé. Une hypothèque
générale et ancienne, quand elle est conservée par une
inscription , doit encore produire tout son e lïe t, comme
h spéciale, sur l’objet qu’elle embrasse. O r, si le citoyen
Choussy nous avoit vendu Chazeaux depuis la loi du 11
brumaire an 7 , et si à la garantie de la vente il avoit
hypothéqué Fiolgoux spécialement, auroit-il main-levée
.13 2
�C 12 ')
de notre inscription ad hoc ? La raison répond non, et
le repousse. E li bien! par la vente de Chazeaux, il nous
a hypothéqué tous ses biens ; il a donc hypothéqué
F io lg o u x , et point de main-levée à lui accorder.
Pour notre tranquillité parfaite, nos lettres de ratifica
tion du 13 juin 1793 ne suffisent pas ; elles n’ont point
purgé le droit de propriété.
En vain dit-on que nous avons des terreurs paniques,
et que , par cette raison puérile, nous n’avons pas le droit
de tenir le cit. Choussy perpétuellement dans les liens de
notre inscription conservatoire, qui l’empêclie de toucher
le prix de la vente de Fiolgoux.
'
i° . Un bon p è r e de fam ille, un administrateur sage,
quand il achète, prend toutes ses précautions pour le faire
solidement. Il considère la solvabilité du vendeur; il con*s d'Tela valeurdesautresbiensquidem eurentàce vendeur,
pour répondre des objets vendus; il se fait hypothéquer
ces autres biens; ces autres biens-deviennent son gage;
c’est à cette condition qu’il a acquis ; cette stipulation est
essentielle, et sine qua 7ion.
2°. En acquisitions immobilières, l’on ne sauroit avoir
trop de prévoyance. On stipule pour les cas prévus et pour
les cas imprévus. On calcule non-seulement l’élat présent,
mais encore l’état futur. lia garantie est exprimée non
pour les cas présens de p é ril, parce qu’on ne seroit pas
assez insensé pour acheter un bien avec un procès à la
suite du contrat; mais celte garantie est exprimée pour les
événeinens futurs, tels qu’une anliehrèse qui se découvre '
souvent au bout de cent années; pour une demande en
désistement, conservée depuis soixanlc ans, ou par des
�( 13 )
diligences faites sans bruit et puis interrompues, ou par
des minorités successives ; pour une saisie réelle pendante
depuis plusieurs siècles, suivie d’abord de baux judiciaires
et puis de jugemens qui ont tenu le commissaire aux saisies
réelles pour diligent faute d’enchérisseurs, etc. dans tous
.ces cas point de prescription.
3°. Quand j’ai acquis de v o u s , vous avez hypothéqué
tous vos autres biens à ma garantie. C’est un engagement
que vous avez contracté. Vous avez dû prévoir que je
n’abandonnerois pas mon hypothèque. Vous avez dû pré
voir que je suivrois de l’œil F iolgo u x, et cela dans quel
ques mains qu’il passât. Si vous ne vouliez pas de cet empê
chement, if falleit vous en expliquer ; il falloit dire que je
ne pourrois pas former opposition. A lors, ou je n’aurois
pas acheté, ou, si je Pavois fait, j’aurois pris tous les ris
ques sur mon compte. Mais en hypothéquant tous vos
biens, vous n’avez pu vous jouer de votre obligation.
Je sens bien qu’il est dur pour vous d’être perpétuelle
ment entravé par mon inscription; mais c’est la loi écrite
entre nous que j’ invoque : vous l’avez faite, vous n’avez
pas à vous en plaindre; et puis, en vous y soumettant,
vous n’avezcon t racté que l’obligation de vous soumettreaux
règles de droit. Oui,dans le droit, la garantie est perpét uel le;
elle ne se prescrit point, dit M e. A uroux sur l’art. X X I! I de
la coutume de Bourbonnais. L e cours de la prescription
ne commence qu’à l’instant de la demande en éviction (i).
(i) JYori rurr/t />n.vscn/>lio ct’ictiom s (intccjiùim ev ictio n asc a tu r , û l e s t } aulequani res J'uerit evicta , dit Godefroy sur la
loi X X I , au til. d e ev ielion ibu s.
�. .
( 14 )
.
Ce principe n’est pas nouveau -, 011 le trouve dans la loi
X X I , au tit. de evictionibus (1) et dans tous les livres
élémentaires ; il est consacré par nombre de décisions des
tribunaux tant anciens que modernes.
Si vous pouviez demander, et si les tribunaux vous
accordoient main-levée de mon inscription, il en résul
tèrent que vous porteriez atteinte à la perpétuité de mon
action; vous la feriez prescrire avant le temps, puisque
vous la rendriez n u lle, puisque vous auriez vendu impu
nément tous les biens sujets à mon hypothèque, sans qu’il
me fût permis de réclamer : ce seroit une subversion de
principe,
40, Dans les circonstances, le cit. Choussy ne peut pas
dissimuler que le péril de l’éviction peut bien ne pas être
- très-éloigné, et que Matthieu Poughon ne s’est décidé ù
iiclieter, que par la perspective d’une très-grande surface
de garantie que lui présentoient les autres biens du cit.
Choussy, et, par dessus tout, la terre de Fiolgoux.
Ce péril d’éviction , on l’entrevoit dans la famille
Carie : en 1784, l’un des enfans a vendu le domaine de
Chazcaux au cit. Choussy.
(1) Em pti actio longi temporis prcescriptione non submovetur,
licel post multa spacia rem cvictam emplori fueric comprobatuni.
S i ¡laque is quem te comparasse commémoras , mine liberlatem
proclamet : interpellare yenditorem sive successorem ejus debes,
ut tibi assistai,
causamque instrual. Quem si liberum esse ,
v e l servum non e s s e , fuerit proimneialum ; nec te convenlione
remisisse periculum eviclionis fuerit comparatum : prœses pro
vincial ,
si res integra e s t, quanti Uni interest, restilui libi
yrovidebit,
.
�( )
En premier lie u , ce domaine a été acheté par Joseph
Carie, aïeul, qui a laissé cinq enfans, savoir, A n toin e,
Claude, Joseph, M arguerite, et autre M arguerite, femme
Bertrand. Antoine est moi’t avant Joseph, son père; par
conséquent les enfans d’Antoine ont succédé de suo à
Joseph, aïeul.
Claude est décédé , et a laissé des enfans mineurs.
'
Marguerite est dans la démence.
•
M arguerite, femme Bertrand, est représentée par des
descendans qui sont en minorité.
L ’on dit qu’il n’y a pas eu de partage entre les descen
dans de Joseph, aïeul.
C ’est Jean Carie, fils à A ntoine, qui seul, en 1784, a
vendu au cit. Choussy.
Si les descendans de Joseph Carie, aïeul, demandent le
partage de ses biens ( ils sont encore dans leurs délais ) , la
dame de Gardelle et son mari seront assignés en rapport
du domaine de Cliazeaux : premier danger d’éviction.
En second lieu, en vendant en 1784 au cit. Choussy,
Jean Carie a fait tant pour lui que pour Joseph et JeanBaptiste C arie, ses frères ( Jean-Baptiste encore mineur ) ;
il a promis de faire ratifier par ceux-ci ; il ne paroît pas
qu’ils l’aient fait : second danger d’éviction.
Il est vrai que le cit. Choussy opposoit, h la dernière
audience, que Joseph et Jean-Baptiste Carie ont foi’mé
opposition aux hypothèques sur Jean Carie, et qu’ils en
ont donné main-levée : le tribunal a remis la cause, pour
que le cit. Choussy ait le temps de rapporter cette main
levée.
M ais, i°. Jean C arie, ayant seul jo u i, devoit à ses
�p .. r
( 1.6 )
. . .
.
frères deux- choses : d’aboi’d le partage de tous les biens,
et puis leur portion dans les jouissances. Pour ces jouis
sances, Joseph et Jean-Baptiste Carie «voient besoin de
former et ils ont formé opposition aux hypothèques ;
mais cela ne diroit rien pour la propriété, parce qu’à ce
sujet les lettres de ratification étoient impuissantes.
'
2°. Il ne suffiroit pas d’une simple main-levée des oppo
sitions-, il faudroit encore une ratification formelle de la
vente de 1784.
En troisième lie u , Jean Carie a vendu au cit. Choussy,
à\>cc p rom esse de g a r a n tir , f o u r n i r et f a ir e v a lo ir en
vers et contre to u s , de toutes d e tte s , h y p o th è q u e s, d o t s ,
d o u a ires ,
s u b s t it u t io n
} a lié n a tio n , prescription et
: ( ce
sont les termes du contrat ). Cette clause n’est pas ordi
naire; la garantie de su b stitu tio n en fait craindre une :
troisième danger.
En quatrième lieu , par une des clauses du contrat
de 1784 , le cit. Choussy a été chargé de payer la somme
de 5 ,000 francs ou à là dame veuve d’Antoine Carie ou au
sieur chevalier Beau. Il né paroît pas que le cit. Choussy
ait rempli cette indication de payement : quatrième
danger de recherche contre la dame de Gardclle et son
mari.
En cinquième lieu, suivant le contrat de 178 4,1e cit.
Choussy devoit payer au cit. Jean Carie la somme do
4,000 francs, lorsque celui-ci en trouverait l'em ploi en
a u tres em pêchem çns gén éra lem en t q u elcon qu es
f o n d s certa in s , p o u r L A
SÛRE TÉ
d u d it
seign eu r,
Cette clause signifie bien clairement que le cit.
Clumsfy n^étoit pas saris inquiétudes sur son acquisition :
cinquième
Acquéreur.
�C *7 )
cinquième danger contre la daine de Gardellc et son
mari.
En sixième lieu , Jean Carie , vendeur en 1784 , a
épousé une demoiselle Richard : il est aujourd’hui insol
vable; il est employé dans la régie des mines de Brassac.
La demoiselle Richard a des gains matrimoniaux à pré
tendre contre son mari. Les lettres de ratification prises
en 1790 par le cit. Choussy, sur son acquisition de 1784,
et les lettres prises en 1793 par Matthieu P ough on , n’ont
pas purgé les droits non ouverts de la demoiselle Richard *.
sixième danger d’éviction contre la dame de Gardelle et
son mari,
§,
IV .
L e cit. Choussy peut-il exiger de la dame de Gardelle
et son mari la représentation des anciens baux à ferme
du domaine de Chazeaux , et contre-lettre y relative,
p o u r, par l u i , en prendre une copie çollationnée à ses
frais ?
•
Dans le fait, par la vente du 8 octobre 1792, le cit.
Choussy s’est obligé à remettre, dans six mois, à Matthieu
Poughon, tous les titres relatifs audit d om ain e ,1e con
trat de vente Carie, les lettres-de ra tifica tio n , b a u x ci
fe r m e et autres. Le cit. Choussy n’a fait aucune réserve
a cet égard.
Le i5 juin 1793? le c ît Choussy a écrit à Matthieu
Poughon : « J'attends ¿1 la fin de la semaine L e merle ici.
(L e cit. Lemerle est notaire h Saint-Germain-riIerm e ; il
est l’ajïii. le plus officieux du cit. Choussy ). p os titres
.
C
�........................ ( i8 )
t
. ‘
» sont prêts ‘ f a i fa it une copie coîlationnêe d'¿ceux
» pour m o i, au besoin • il la signera conune notaire,
» et vous portera les originaux. »
■L e 29 du même m ois, le cit. Choussy a écrit à Mat
thieu Pouglion : « J'attends dûune heure à Vautre M .
» L e m e r le , pour lui remettre les titres de Cliazeaux^
» vous les aurez bientôt. »
' L e 2 juillet 1793, Matthieu Pouglion a ëcri-t au cit.
Choussy : « E n remettant les titres de Cliazeaux à mon
» gendre, il vous donnera décharge, et je ne vous en
» refuserai pas la communication lorsque vous en aurez
» besoin. »
L e 14 du même m ois, le cit. Choussy remet les titres
et les baux au gendre de Matthieu P o u glio n , suivant
un inventaire fait entr’eux. L e cit. Choussy ne fait aucune
réserve.
D e cette série de faits naît la preuve bien lumineuse,'
que le cit. Choussy a la copie collationnée qu’il demande.
Suivant sa ’lettre du 1 5 ju in , cette copie est prête ; il attend
L em erle, notaire, pour la signer -, il l’attend sur la f i n
de la semaine. Suivant sa lettre du 29 ju in , il l’attend
d’une heure à Vautre. L ’arrivée de ce notaire est donc
.très-proclîaine. Ce n’est que le 14 juillet suivant, c’est-àdire , quinze jours après la seconde lettre, que Choussy
rend les papiers à de G ardelle, sans aucune sorte de
réserve. D e là la conséquence toute simple, toute naturelle,,
xjue Lemerle est venu dans l’intervalle du 29 juin au 14
ju illet, et qu’il a signé la copie collationnée : il paroît qu’il
retenoit tous ces papiers jusqu’à ce qu’il auroit celte copie.
Les ayant rendus, il nous apprend qu’il a la copie.
�.
19 ^ .
.
.
■Remarquons ensuite-, que du vivant de Matthieu Pourghon, le cit. Choussy n’a point réclamé ce collationné.
•C’est le 14 juillet 1793 qü’il remet les b au x, etc.; et ce
-n’est que le 11 fructidor an 5 , id est, le 28 août 1797.,
•qu’il l’a demandé à la dame de Gardelle ; d’une époque
à l’au tre, il y a plus de quatre ans. L e cit. Choussy, qui
test le plaideur le plus ardent que l’on connoisse au palais,
•auroit-il gardé un .silence si lo n g , s’il n’avoit pas eu ce
■collationné?
A u reste, par sa lettre du 2 juillet 1793., Matthieu Pou,ghon ne s’est pas obligé formellement à ce que demande
le cit. Choussy. Matthieu Poughon a écrit seulement qu’il
<ne refuseroit pas la communication .des papiers , lorsque
le cit. C h o u ssy en a u r o it besoin .
r°. D ire q u ’on ne refusera p as, n’est pas promettre
-expressément; c’est seulement une manière obligeante de
parler qui ne lie pas ; c’est une fam iliarité, une tolérance
■dont on peut se défendre quand on veut.
2e». En prenant à la lettre les expressions de Matthieu
P o u gh o n , il faut au moins convenir que le cit. Choussy
ne pourroit demander la communication des baux à ferme
<et contre-lettre, que s’il en avoit besoin.
O r , non-seulement le cit. Choussy ne prouve pas ce '
'besoin, mais encore nous allons démontrer, par Jui-mêmc,,
ique ce besoin n’existe pas.
En effet, c’est en l’an 5 et en l’an 6 qu’il nous a demandé
le collationné des b aux, ou la somme de 2,5oo francs pour
lui tenir lieu de sa créance contre les anciens fermiers du
-domaine de Chazeaux.
3£n i’an y ? ie cit. Choussy fait ? dans le délai utile;? une
�.
. .
( 20 )
inscription aux hypothèques sur ses débiteurs. Par ce
m oyen, rien n’a périclité : il a conservé son hypothèque
ancienne.
L e 19 fructidor an 7 (1), le cit. Choussy rè g le , ( devant
le cit. Lem erle, notaire à Saint-Germain ) , sa créance
avec ses débiteurs à la somme de 2,000 francs, qui doit lui
être payée par 200 francs chaque année, Dans ce règlement,
il énonce ses titres par leurs dates; il énonce qu’ils sont
D û m e n t e n f o r m e . Par titres dûment en f o r m e , l’on
doit entendrè des actes signés d’un notaire. L e cit. Choussy
se’,reserve ses titres de créa n ce et in scrip tio n ait bu reau
V 1,1
1,1
"
— — ■ ■■
' ■—■■■ ■"
I
............................... ........
Ci) P a rd ev an t, etc. ont été prësens M arie F e ro d e t, etc. Jean
Joseph C h o u s s y , etc. lesquelles parties sont entr’elles venues à
compte des arrérages des baux de ferm e
dudit domaine de
Chazeaux , et autres traités par actes passés entre ledit Choussy
et C roze , ou Claude C a rie , qui avoit vendu ledit domaine audit
C h ou ssy le 18 mars 1782 et 19 novembre 1 7 8 6 ,
et
autres
d û m e n t en f o r m e , par l’effet duquel co m p te , grâce et remise
faite par ledit C houssy du surplus en faveur de ladite veuve et
Bonjour se u lem e n t; ces derniers se sont trouvés reconnus débi
teurs envers ledit Choussy de la somme de 2,000 francs, la
quelle somme , solidairement comme dessus , ils se sont obligés
payer audit Choussy à raison de 200 fr a n c s , dont le premier
terme écherra
d ’iiui en un an , avec convention expresse , et
condition qui ne pourra être réputée com m inatoire, qu ’à défaut fie
payem ent d 'u n seul terme ; ledit Choussy pourra en exiger la
totalité des termes à é c h o ir , sous l a
C h o u s s y de ses t i t r e s de c h a n c e
DES
h
HYPOTHEQUES ,
Tjuoi
POUR
I.A
r é s e r v e f a i t e rAR l e d i t
e t in s c r ip t io n a u b u r e a u
CONSERVATION
I)E
SES
PRIVILEGES ;
faire ils ont so lidairem ent, conjm e dpssug, obligé leurs
jfnens. F a it et passé, etc,
�( 21 )
e
des hypothèques ; donc il a la copie collationnéë de ce*
titres.
L e citoyen Choussy est exactement payé par ses débi
teurs; s’il ose le nier, la dame de Gardelle et son mari
se soumettent à rapporter les quittances qu’il en a données
à ces débiteurs.
Enfin lorsque, le 19 ventôse an 10 , le citoyen Choussy
a assigné de nouveau, au tribunal d’A m b e rt, la dame
d e Gardelle et son m ari, il a repris, il a corrigé ses con
clusions, et n’a plus dit un mot sur le collationné des
b a u x , etc. Pourquoi ce silence sur ce point? La raison
eu est é crite dans le règlement du 19 fructidor an 7 , et
dans la ré ce jîtio n de sa cx-éance.
!L’on dit en vain q u e la d am e de G-aixlelle et son mari
sont sans intérêt pour refuser. i°. Il est toujours inté
ressant de n’avoir rien à démêler avec un homme aussi
processif que le citoyen Choussy. 20. L ’époux de la dame
de Gardelle a subi la réclusion pendant la tourmente
révolutionnaire ; rendu à la lib erté, il a trouvé dans le
plus grand désordre, et ses papiers, et ceux de son beaupère.
Dès qu’011 parle d’interet, il est clair que le citoyen
Choussy n’en a aucun dans sa demande, puisqu’il est dé
montré qu’il a déjà ce qu’il poursuit. Il est clair qu’il n’y
entrevoit que la jouissance criminelle de faire un procès
à la dame de Gardelle et à son mari ; il est aussi bien
clair qu’il a cherché a abuser des circonstances, pour
tirer d’un même sac deux m outures, puisque par l’acte
du 19 fructidor an 7 il a réglé su créance à 2,000 francs
�( 22- )
que-lui payent exactement ses débiteurs, et que par l e
jugement du tribunal d’Am bert il a fait condamner la
dame de Gardelle-et son mari à. lu i payer la somme de
2,5 oo francs, fautede la délivrance du collationné. A u r i
sacra f am e s ,etc.
G .O U R B E Y R E .
xi:■
5y\
s.
t;
A R IO M , de l'imprimerie de L
a n d rio t
, seul imprimeur du
T r ib u n a l d ’appel. — A n 1 1 .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Douvreleur de Gardelle. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
mains levées d'opposition
ventes
Description
An account of the resource
Observations pour la dame Douvreleur de Gardelle et son mari, appelans ; contre Jean-Joseph Choussy-Dupin, intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1792-Circa An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0230
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_G0930
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53729/BCU_Factums_M0230.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chazeaux (domaine des)
Folgoux (terre de)
Ambert (63003)
Malvières (43128)
Rights
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Domaine public
mains levées d'opposition
ventes
-
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MÉMOIRE
POUR
_
_i
__
J e a n - B a p t i s t e D E V E Z E , appelant ;
CONTRE
A
n t o in e
L A M O U R O U X , intimé ;
EN RÉPONSE
L
’a
p p el
A CELUI DE L' I N TI MÉ.
est d’une sentence de la Sénéchaussée
d'Auvergne, du 29 mars 1790. U ne simple réflexion
suffirait pour en établir le mal-jugé. Elle a refusé l'ho
mologation d’un jugement arbitral qui devait être ac
cordée , sans se permettre le moindre examen du bien
ou mal-jugé. Elle a fait, plus, elle a jugé le contraire
de ce qui l’avait été par le jugement arbitral : en un
mot , la Sénéchaussée s’était érigée en tribunal d appel
d’un jugement arbitral. Tout cela ne peut être consi
déré que comme une monstruosité dans l'ordre judi
ciaire.
A
�( s )
#
Il ne doit donc pas paraître difficile de justifier l’appel
de la sentence de la Sénéchaussée d’A uvergn e; on fera
plus., et on espère de prouver surabondamment qu ’abstraciion du jugement arbitral, si la contestation eût été
portée directement en la Sénéchaussée , la sentence
eût été aussi injuste qu’elle a été irrégulière après le
jugement arbitral.
Commençons par rappeler les faits etlescirconstances
singulières de cet te affaire.
Par un acte sous seing pri vé, du 2 avril 17 8 6 ,
Lamouroux vendit à Devèze l’élat et office de greffier
en ch ef de la maîtrise des eaux el forêts de Si.-Flour.
L e vendeur promit de remettre à l’acquéreur, quand
l<on semblerait à celuî-ci,la procuration a d resignandum. L e prix de la vente fut de 18,000 fr., pa}rab!es
aux.termes convenus, avec intérêts. Il est convenu , par
la vente, que Lamouroux partagera avec Devèze tous
les arrérages qui pouvaient lui être dus dans le greffe,
même les gages et chauffages jusqu’au jour de la vente;
de loul quoi, est-il dit, D evèze se chargera de faire le
recouvrement , et d’en faire compte à Lamouroux à
fur et mesure qu’ils rentreront. Lamouroux se réserva
seulement les revenus el profits casuels du greffe, de
l ’année i y B ô , tant dans l’élection de S l.- F lo u r, que
dans celles d ’Aurillac et de Mauriac. Lamouroux avait
affermé à Daude le greffe de la maîtrise de St.-Flour,
et il avait aussi affermé a Seriez les droits de ce greffe,
qui se percevaient dans les élections d’Aurillac el de
Mauriac.
11 fut stipulé dans la vente , que D e vè z e serait
�.
c.
3
}
.
.
obligé d’entretenir le bail de Daude jusqu’à son ins
tallation , et qu’alors, s’il voulait l’interrompre, il ga
rantirait Lamouroux des dommages-intérêts que Daude
pourrait exiger pour l’interruption ; et à l’égard du bail
de Seriez, Devèze lut obligé de l ’entretenir dans toute
sa durée.
,
Lamouroux se repentit sans doute d’avoir vendu à
D evèze l ’office de greffier ; en vain celui-ci le pressait
chaque jour de lui remettre sa procuration a d resignandu/n, ses provisions, quittances de marc d’or et de
centième denier, et autres pièces nécessaires pour se
faire pou rvoir; en vain lui demandait-il toutes les
pièces, sans lesquelles il ne pouvait se faire payer des
gages et chauffages qu’il devait partager avec L a m o u
roux, et dont il était chargé de faire le recouvrement,
et les baux des fermiers Daude et Seriez , pour se faire
payer du prix de leurs fermes, qui ne devait point en
tier en partage avec Lamouroux; celui-ci trouvait tou
jours des prétextes pour ne pas remettre tous les actes
nécessaires, et cependant l’intérêt du prix de la vente
courait toujours.
Déjà huit mois s’étaient passés , lorsque Devèze se
vil obligé de faire , par un acte du 2 décembre 1786 ,
une sommation à Lamouro ux, de lui donner et déli
v r e r , dans les 24 heures, sa procuration a d resignand u n i, ses provisions , quillanc es de marc d or et de
centième denier, et autres pièces nécessaires. Celle
sommation ne put pas être ignorée par L a m o u ro u x ,
puisqu’elle lui fut faite, parlant à s.a personne, par
A 2
�(4
)
Biron , huissier audiencier au bailliage
_
de Saint-
Flou r.
Il n ’est pas inutile de remarquer que danscettesommation, D evèze ne fit pas mention de l ’acte de vente
•du 2 avril 1786, pour ne pas se mettre dans la nécessité
de le faire contrôler et d’en payer les droits; ce qu’il
voulait éviter avec raison , puisque l’acte devait ensuite
être passé par-devant notaire: il se contenta d’énoncer
dans la sommation , que Lamouroux lui avait vendu
l ’office de greffier des eaux et forêts, et qu’en cas de
déni, il offrait de le pi’ouver tant par titres q u e par
témoins. Cette remarque répond d’avance à une ob
jection faite à cet égard par Lamouroux.
Après cette sommation , Lamouroux ne put pas re
culer plus lon g-tem s, et se trouva enfin obligé de
manifester son repentir. La sommation était du 2 dé
cembre; et le 7 du même mois, il fit signifier à Devèze ,
par Pertuis, premier huissier audiencier de l’élection
d’Aurillac, un acte , par lequel, «en répondant à la
« sommation qui lui avait été faite par D e v è z e , le 2
« du même mois , il lui déclara qu’il n’enlendait point
« donner la procuration acl res/^nandunide son office
* de greffier en c h e f de la maîtrise des e a u x et forêts
k
d e S t . - F l o u r ; q u ’à la v é r it é , par des c o nv en t io ns faites
* entre parties, au mois d avril dernier, il avait vendu
« son office à Devèze , mais que dès le lendemain même,
« et depuis, il s’en était repenti; qu’élan! encore jeune,
<r et ayant plusieurs enfans maies pour le remplacer,
« il ne pouvait pas raisonnablement se défaire d’un
�5
C
)
office qui lui donnait un état, et auquel il était atta
ché par le long exercice qu’il en avait f a i t , et,qu’en
outre cet office lui avait ete transmis par son p e r e ,
qui le tenait aussi de ses auteurs, et attendu encore
les privilèges et prérogatives qui y étaient attachés :
c’est p o u rqu o i, bien loin de donner la procuration
a d resignandum , il se propose de, se servir de l a
faculté que la jurisprudence accorde à tous les offi
ciers ; et en exerçant le regrès de son office, il se
croyait fondé à demander que les conventions faites
entre les pariies, fussent déclarées nulles et comme
non avenues ».
>’
Par ce même acte, où il est dit q u e . ¡D e vè z e ;;a
fait refus d’acquiescer au repjrès., quoique l’a c t e .n e
soit fait qu’e/i parlant à sa servante, il est donné
assignation à De.vèze, au bailliage de Saint-Flour,
pour voir prononcer la nullité, et déclarer, en con
séquence, queLamouro ux demeurera libre et déchargé
des conventions faites avec Devèze.
,
Celui-ci était absent au moment de ce^ acte fait
en parlant à sa .servante, et à son retour* l/^ç/e lui
ayant été remis, s’étant c o n s u l t é e ! ayantappris qu’il
ne pouvait pas résister à Taction en regrès ; voulant
d ’ailleurSj se débarrasser de toutes tracasseries avec
L a m o u r o u x , le 12 du, même mois, lui ,fit signifier
un açle par Ceuille, h u i s s i e r audiencier en l’ élection
de Saint-Hour , par lequel il déclara, en réponse à
la déclaration et à l ’assignation de L a m o u r o u x , q u ’il
consentait et acquiesçait aux conclusions prises par
�,
.
(
6
}
.
.
.
.
Lam o u roux , par l'assignation qu’il luiavaitfait donner,
et à ce que les conventions faites h raison de l ’oflice
de grdfïier, demeurassent nulleset comme non avenues,
el que Lamouroux pûl disposer de son office comme
bon lui semblerait.
T o u t alors-paraissait consommé entre les parties:
L a m o u ro u x avait fait le regîès,- et D evèze l’ avait
accepté. Devèze eut toute raison de se croire dans
la plus grande sécurité. Déjà huit mois s’étaient passés
dans un profond silence de part et d’autre. Devèze dut
e lle donc bien surpris lorsque , le i août 1787, Lamou roux lui fit faire, à son domicile et en son absence,
3
im acte insfmmenlaire, contenant sommation de se
trouver le lendemain, luiil heures du matin, en l’étude
d’uri notaire de Sainl-Flour, pour passer la vente de
l'office, ou voir déposer l’acte sous seing p rivé, du
2 avril i786,etacce[)tersii procuration a d résignandum.
L e lendemain 14 août, procès - verbal de défaut
chez le notaire, où D evèze n’avait garde de se 1rouVer, étant encore absent, et 11e pouvant avoir con
naissant^ de lh' sommation qui lui avait été faite la
veille; el ■ée'même j
14 août, assignation à D evèze
par Lain0tirori;x >en veVlu de com m illim us en la sénéchausséé d'/Urvergne, pour reconnaître les écritures el
signMlurefc"dè l’acle dé’ vente Sons seing privé, du 2
avril 1 786 ,; el ;n't principal, pour ratifier la vente, sous
olfre de délivrer la procuration ad resignanduni.
Lors de celle assignation, le grand-m'ai Ire des eaux
C-t forêts ¿e trouvail dans la ville de Sainl-Llour. Lii
�7
(
)
contesta lion élevée par Lamouroux fut connue , .et
plusieurs personnes s’entremirent pour
engager les
parties à la faire terminer par la médiation du grand
maître. Lamouroux et D e v è z e passèrent un compromis
sous seing privé, le premier septembre 1 7 8 7 , par lequel
ils convinrent de s'en rapporter, pour le procès pen
dant entr’e u x , à L'avis et médiation du grand-m aître,
promirent de lu i envoyer, incessamment, dans l’espace
de trois m ois, tous leurs titres, papiers nécessaires,
et pièces y afférentes, même chacun , le double sous seing
privé de la vente, se soumettant de s’en rapporter à
son a v is , à peine-de 4000 liv. qui demeureront encou
rues , de pLein droit, contre le contrevenant.
Les parlics envoyèrent leurs pièces et mémoires au
grand-mai:re, alors de retour à Paris; ¡1 ne les reçut
qu’au mois do décembre 17 8 7; mais il ne pouvait
prononcer son jugement qu’après avoir fait-contrôler
le compromis, ce qui fut fait à Paris le 9 décembre
1 7 8 7 , et le dépôt en fut fait cjiez un notaire de Paris,
le même jour. L e 9 février suivant, 1788, le grand
maître rendit son jugement arbitral.
.
'
I»
Dans ce jugement il est énoncé que toutes les pièces
et mémoires despariiesont été vus par le grand-maître,
et notamment la sommation faite par D e vè ze à L a
mouroux , le 2 décembre , 1786 , l’acte signifié par
L amouro ux, le 7 du même mois, contenant son regrès
et la vente de l’office ; enfin , l’acte d’acceptation
du regrès.,signifié par D evèze à La mouroux , le 12 du
même mois. On doit croire que ce furent les origi-
�C8 )
naux de tontes les pièces qui furent vus par le grand
maître, sans quoi il aurait énoncé qu’il n ’avait pro
noncé que sur les copies.
Après le vu de tou les les pièces, voici comment s’ex
prime le
« Sans
« ployés
« nullité
«
«
«
«•
grand-maître dans son jugement arbitral:
enlrer dans la discussion des moyens e m
par les parties pour soutenir la validité ou la
de l’acte du 2 avril 1 7 8 6 , j ’ai considéré
l'affaire sous son véritable point de vue; et la queslion qu’elle présente, n’est pas de savoir si l’acte
de 1786 est valable j mais s’il est détruit par la réponse
du sieur 'Lamouroux , à la sommation qui lui fut faite
« de délivrer la procuration ad resignandum , et par
« l ’acquiescement du sieur D e vè z e aux conclusions
« portées en ladite réponse.
« L e sieur Lamouroux a bien senti le faible de sa
k
demande; aussi n’est-il nullement question de ces
« actes dans son mémoire à consulter, et c ’est son
«
«•
«
«
silence’ sur l’existence'de ces pièces qui lui a procuré des avis favorables. Si l’acte du 2 avril 17867
est valable, comme contracté entre majeurs , pourquoi les actes subséqiiens ne le seraient-ils point ?
« L e sieur Lamouroux avait vendu : malgré Tacquies-
« cernent à son regrès, il entreprend de suivre Follet
« du premier a c te ; sa marche est contradictoire, et
« sa procédure est dérisoire.
"
« Eu conséquence, nous disons que le traité dudit
« jour 2 avril
1786 , sera cl demeurera comme 11011
« avenu, et que ledit Lamouroux pourra disposer,
« ainsi
�9
C
)
« ainsi que bon lui semblera, de son office de greffier
« de la maîtrise de Saint-Flour, le condamnons eu
« tous les dépens.; sur les demandes en dommages
* intérêts, mettons les parties hors de cour ■
».
C e jugement était du 9 février, et le 12 du même
mois, il fut envoyé par le grand-inaîlre (Boisneuf de
Chenevière ), au sieur M u ret, garde-marteau des eaux
et. forêts de Saint-Flour, pour en faire lecture aux
parties, et le déposer chez le notaire qu'elles v o u
draient choisir. La. lecture et prononciation du juge
ment arbitral furent faites aux parties par le sieur
Muretjet par acteinstrumentaire du premier avril 1788,
D e vè ze fit sommer Lamo uroux de déclarer entre les
mains dequel notaire il voulait que le jugement fût dé
posé, lui protestant, qu’à défaut de s’expliquer, le dépôt
serait fait entre les mains du notaire, sur ce requis.
Lamouroux feignant d’être absent de chez l u i , ne fit
que présenter sa servante, en parlant à laquelle, il
fut déclaré que le dépôt du jugement arbitral aurait
lieu entre les mains du syndic des notaires de SaintFlour, le lendemain huit heures du matin, dans le
cabinet du sieur M u ret, o ù , en conséquence, L a m o u
roux fut sommé de se trouver pour y voir faire nou
velle lecture et prononciation, et le dépôt entre les mains
du notaire.
On conçoit bien dans la conduite qu avait déjà
tenue L a m o u rou x , et par celle qu’il a tenue dans la
suite, qu’il n’avait garde de se rendre à la sommation;
en conséquence, procès-verbal par défaut contre lui,
B
�( 10 )
de la lecture, prononciation et dépôt du jugement, 1©
2 avril 1788.
L ’inaction où demeura L a m o u ro u x , après avoir eu
connaissance du jugement arbitral, dut persuader à
D e v è z e , que toute contestation entr’eu x, sur la vente
de l ’office de greffier, était terminée; il fut d’ailleurs
confirmé dans cette idée, par les renseignemens qui
lui parvinrent, que L a m o u r o u x , depuis la vente de
1786 , n’avait jamais cessé de prendre la qualité de
greffier, et d’en faire les fonctions; mais que de plus,
il avait perçu les gages, chauffages et émolumens du
greffe, qui devaient appartenir h D e v è z e , du jour de la
vente. D e v è z e s’était aussi rendu certain, que même
après l’acte de dépôt, du 2 avril 1788, du jugement
arbitral, Lamo uroux avait obtenu , contre Sériez, une
sentence de la Sénéchaussée d’A u v e r g n e , l e 6 m a i 1788,
qui condamne Sériez à lui payer les fermages du bail
de l’année 1787561 dans laquelle sentence, Lamouroux
se qualifie, comme dans tous les actes précéderas, de
greffier en c h e f de la maîtrise de Saint-Flour. Et ce
pendant, si la vente du 2 avril 1786 , avait dû avoir eilet,
si Lamouroux n ’avait pas cru qu'elle était anéantie par
son actede regrès, et par l’acceptation de D e v è z e , quel
droit aurail-il eu au mois d’octobre 1 7 8 7 , après tous
ces actes, de demander et de percevoir le prix des
baux, pour les années postérieures à la vente, puis
que aux termes de celte ve n te , tous les droits et prix
de baux de fe rm e, devaient appartenir à D evè z e ?
T o u t concourait donc à affermir D e vè ze dans sa sé-
�( 11 )
eu ri té, et a lui faire croire que Lamouroux avait
persisté dans son regrès, puisque après le regrès, il
avait tout perçu , ce que sans cela il n’aurait pu
faire ; tout lui prouvait que Lamouroux approuvait
le jugement arbitral, puisque après ce jugem en t, il
avait exercé des actions, et obtenu des sentences pour
se faire payer des prix de baux, que ce jugement
seul pouvait l’autoriser à recevoir.
- A u reste, tous les faits dont on vient de rendre
comple, ne sont pas même contredits, et ils sont
établis par les pièces authentiques qui seront jointes
a la production de D e v è z e , et notamment la sen
tence de la Sénéchaussée d’Auvergne , rendue en
faveur de Lamouroux, contre Sériez, le 6 mai 1788.
La confiance de D e vè z e fut bientôt troublée par
des menaces qui lui parvinrent de Lamouro ux, de
sorte que pour plus grande précaution, il crut devoir
présenter le jugement arbitral, à l’homologation de
la Sénéchaussée d’Auvergne. La mouroux s’opposa à
,cetle homologation, et prétendit faire revivre l’action
q u ’il avait originairement formée contre D e v è z e , pour
l ’exécution de la vente du 2 avril 17 8 6 , et il s’y crut
fondé par un acte de désaveu qu ’il fit du regrès qu’il
avilit notifié à D e v è z e , le 7 décembre 1786, pré
tendant même que l’acte précédent, du 2 du merae
mo is, et celui d’acceptation du 12 , étaient des actes
faux.
Ces nouvelles prétentions de Lamouroux donnèrent
lieu à une assez longue discussion, sur laquelle interB 2
�( 12 )
vint la sentence de la Sénéchaussée d’A u v e r g n e , du
24 mars 1790, dont est appel, et par laquelle ayant
égard au désaveu formé contre les héritiers de l’huissier'
P e r f u i s , d e l’acte du 7 décembre 1788, cet acle fut
déclaré nul et de nul effet ; D evèze débouté de
la demande en homologation d e i a sentence arbitrale,
la vente du 2 avril 17 86 , fut confirmée, et D evèze
condamné à payer le prix d e l à vente, el les intérêts.
E n exécution de celle sentence , et même aupa
ravant Lamo uroux avait fait faire des saisies-arrêts
entre les mains des débiteurs de D e vè ze ; et pour se
procurer une plus prompte exécution de la sentence
qui était ordonnée, nonobslant l’appel, il s’était hâté de
donner caution, mais D evèze interjela appel au Par
lement, où il obtint un arrêt de défense, et demanda, en
même-tems,la main-levée des saisies-arrêts: Lamouroux
de son côté,demanda,par une requête du i
5 mai 1790,
l ’exécution provisoire de la sentence de la Sénéchaussée.
Ces demandes firent la matièred’ unapoinlé à mettre, sur
lequel inlervinl un arrêt du i juin 1790 , qui accorda
5
à D evèze la main-levée des saisies, en ordonnant, que
sur le fond et le surplus des conclusions des parties,
elles feraient diligence pour faire juger, el en viendraient
à l’audience; les dépens furent reservés, hors le coût
de l’arrêt qu ’il fut ordonné que Lamouroux serait lenu
d’avancer, sauf à répéler s’il y avait lieu.
L ’arrêt fut signifié à Lam ouroux, le 9 juillet 1790.
I^amouroux 11c paraissant pas encore rebuté de ses
poursuites , avait fait faire à Devèze deux actes instru-
�13
(
)
mentaires; le premier ,le 7 janvier 1791 ; el le second ,
le
3o juillet suivant.
Alors la suppression des offices des
eaux et forêts, depuis long-tems annoncée, avait été
effectuée.
Par le premier de ces actes il fît
D eveze des oiires
de quelques pièces nécessaires à la liquidation de l’office
de greffier en chef, notamment de trois quittances du
centième denier, depuis et compris 1 7 7 9 , jusques et
compris 1789 ; ces quittances étaient sous les dates,
l ’une du
3o décembre
1 7 7 9 , la seconde du ‘do septem
bre 1 7 8 0 , et la troisième seulement du 11 décembre
1788.
3
P a r l e second acte, du o juillet 1 7 9 1 , Lam ouroux
somme Devèze de déclarer s’il entendait que la liqui
dation de l’oflice de greffier , que Lamouroux avait an
noncé vouloir poursuivre comme créancier du prix de
la vente , fût faite eu égard au prix de la ve n te , ou
autrement d’après les bases déterminées par les décrets.
D e vè ze répondit ¿1 ce dernier acte, qu ’il était bien
étonnant que Lamouroux demandât l’exécution de la
vente dont il s’agit , pour faire la liquidation de l ’office,
tandis que cette vente avait été déclarée non avenue
par le jugement arbitral du 9 février 17 88, depuis
confirmée par Lamouro ux, et par lui exécutée par la
continuation de l’exercice de cet office; que sa préten
tion pour faire revivre une vente anéantie , était le
comble de la mauvaise foi; qu ’il était constant q u e c e
n ’était que l o r s q u e Lamouroux avait appris, aux mois
de juillet et d’août 1 7 8 7 , qu’il était question de la sup-
�.
A .
(
14
\
.
pression des maîtrises , qui avait depuis été effectuée
par Tédit du mois de mai 1788 , qu ’il n ’avait plus voulu
garder son office au préjudice de la résolution de la
vente qui en avait élé faite : c’est pourquoi D e vè ze
déclara qu’il n’empêchait Lamouroux de faire pour la
liquidation de son office , tout ce que bon lui sem
blerait.
A partir de ce dernier acte de la part de Lamouroux,
3
du o février 1791 , on ne voit de sa part qu’un pro
fond silence pendant près de six ans, c’e s t - à - d i r e ,
jusqu’en l’an 6 de la république.
Néanmoins il méditait dans le silence les moyens de
se procurer par la violence ce qu’il ne pouvait pas espé
rer d’oblenir par la justice, et l’occasion s’en présenta
bientôt, lorsque survinrent les tems désastreux des pre
mières années de notre révolution.
Alors Lamouroux fut trouvé digne d’être procureur
de la commune de St.-Flour; il se persuada aisément
pouvoir effrayer D evèze , et sous le faux prétexte d’é
migration, par l'autorité de sa place, il le fit incarcé
rer. Sans doute si Devèze eût voulu céder à la crainte
des maux dont il était menacé, en consentant une vente
déjà annullée par un jugement arbitral, il eût bientôt
obtenu sa libel l e } mais les efforts de Lamouroux furent
vains, et D evèze trouva d’autres moyens plus légitimes
d’échapper aux malheurs que lui préparaient les effré
nés suppôts de la tyrannie décernviiale. D evèze invite
Lamouroux à se rappeler les horreurs de ces tems-là,
et l’assassinat d’un magistrat respectable, le lieutenant.
�( i5 )
-
Criminel d’Àurillac, commis sous les ye u x de tous les
membres du département, qui siégeait alors dans celle
ville, sans'qu’aucun d’e u x , loin d’arrêter les fureurs
des brigands, y donnât le moindre signe d’improbalion.
Grâces à la journée du 9 thermidor, il y eut un mo
ment de calme, qu’une autre journée de fructidor fit
bientôt disparaître , jusqu'à ce qu’enfin la Providence
suscitât le héros qui devait réparer les maux de la France
opprimée.
Ce ne fut donc qu’en l’an 8, que Lamouroux imagina
de reprendre les poursuites de l ’appel qui avait été
pendant auparlement, de la sentence de la Sénéchaussée
d’Au ve rgn e , de 1790; et on n’a pas oublié qu’au parle
ment il avait déjà échoué dans la demande qu ’il y avait
formée , tendant à l ’exécution provisoire delà sentence
de la Sénéchaussée. Ce fut par deux exploits, l’un du
8 thermidor an 8 , et l’autre du 26 brumaire an 9, que
X.amouroux assigna D evèze au tribunal d’a p p e l , pour
procéder sur l’appel qui avait été pendant au parle
ment , de la sentence de la Sénéchaussée, de 1790, et
pour voir confirmer cette sentence.
Comme la sentence avait été rendue sur apointement en droit, elle fait la matière d’un procès par écrit
au tribunal d’appel , sur lequel D evèze a déjà fourni
des griefs, qu’on a cherché à combaltre dans un m é
moire im prim é, que Lamouroux a fail signifier ; et
c ’est à ce mémoire qu ’on se propose de ré p o n d r e ,
après avoir rétabli, comme on vient de le faire, les
faits, les actes et autres circonstances de cette affaire.
�]
L
a
sentence dont est a ppel, a été irrégulièrement
et mal rendue. D ’un côté elle ne pouvait pas refuser
Tliomologalion qui était demandée, par D e v è z e , du
jugement arbitral qui avait été rendu entre lui et Lamouroux; elle devait prononcer cette homologation,
sans même prendre connaissance de ce qui avait été
décidé par le jugement arbitral. D ’un autre côté,
elle 11e pouvait prononcer sur des demandes de Lam ouro ux, qui ne tendaient qu’à détruire la décision
du jugement arbitral. On se propose, enfin, de prou
v er surabondamment,que lesdemandescîeLarnouroux,
n ’eussent elles pas déjà été jugées par une sentence ar
bitrale , et eussent-elles été portées directement en la
Sénéchaussée, loin de pouvoir être accueillies, elles au
raient dû être rejetées. Ce n'est point là l’ordre qui a
été observé dans le mémoire de La mouroux; il aurait
rendu sa défense plus difficile ; mais c ’est celui qui a
paru le plus naturel à celle de D e v è z e , et qui paraît le
mieux convenir aux véritables questions que le tribu
nal doit juger dans cette aflaire. A u reste, ce nouvel
ordre ne laissera rien échapper des réponses qui peuvent:
se faire aux objections du mémoire de Lamouroux.
P
r e m i e r
M
o y e n
.
»
L ’homologation demandée ne pouvait être refusée.
L ’article i . er de la loi du mois d’août 1790, concer
nant l'organisation judiciaire, dit : que l’arbitrage est le
mo yen
�17
(
)
m o y e n le plus raisonnable de terminer les conlestations entre les citoyens. C ’est une vérité reconnue dans
tous les tems , que cet article de la loi ne fait que pro'clamer et confirmer.
" l/article 5 veut que les sentences arbitrales dont il
n ’y aura pas d ’a p p e l , soient rendues exécutoires par
une simple ordonnance du président du tribunal, qui
sera tenu de la donner au bas, ou en marge de l’expé
dition qui lui sera présentée.
Ces termes de l’article, qui sera te n u , annoncent
assez que le juge auquel le jugement arbitral est pré
senté , pour le rendre e x é c u to ire , ne peut pas entrer
en connaissance du bien ou mal-jugé ; et ce n ’est point
encore là une loi nouvelle.
Que nous disent tous les auteurs qui ont parlé des
sentences arbitrales? voici comment ils s’en expliquent,
et particulièrement ceux du Recueil de jurisprudence,
1om. i.er pag. 549. «La partie qui poursuit llio m o lo g a * tion d’une sentence arbitrale, doit faire assigner l’au« ire partie devant le juge c o m p é t e n t, lequel doit en
« conséquence procéder sommairement, à celleliomo « logation, sans prendre aucune connaissance du fo n d
« du procès, sauf aux pallies à se pourvoir par appel,
l< contre la senlence arbitrale, si elles le jugent à proc< pos : ainsi aucune des parties ne peut empêcher l’ho
" mologation , sous prétexte que La sentence arbitrale
« est irrégutiere, ou autrement vicieuse ».
D ’après ces principes, il doit paraître évident que,
quelque moye n qu’on pût opposer contre la senlence
C
�.
( 18 }
.
arbitrale, la Sénéchaussée ne pouvait pas refuser l’ho
mologation , elle devait la prononcer sommairement,
et sans entrer en aucune manière en connaissance de
cause, ni du fond de ses dispositions, ni des irrégula
rités ou des vices qu ’on pouvait opposer à cette sen
tence. Les moyen du fond, les vic es, les nullités, les
irrégularités de la sentence arbitrale, étaient autant
de griefs contre cette sentence, qui ne pouvaient être
proposés et jugés qu’au tribunal d’ap p e l, si en effet
1 appel en était interjeté.
Un de ces moyens par lesquels on voulait empêcher
l ’homologation, était une nullité prétendue du com
promis, tirée de ce que ce compromis ne déterminait
pas à l’arbitre un délai pour juger: mais cette nullité
n ’eût mêm e été proposable que devant le tribunal
d ’appel, s’il y eût eu un appel d’inlerjeté; et même
en ce cas , elle n’aurait pu être accueillie par le tribu
nal d’appe l, q u ’autant qu ’une révocation du compro
mis aurait eu précédé la sentence arbitrale.
3
Que nous dit encore sur cela l’article
du lit. des
arbitres , dans la loi du 16 août 1790? « Les compromis
« qui 11e fixeront aucun délai dans lequel les arbitres
« devront prononcer; et ceux dont le délai sera expiré,
seront néanmoins valables , et auront leur exécution,
«■jusqu’à ce qu ’ une des parties ail fait signifier aux ar
« bilres, qu ’elle ne veul plus tenir à l’arbitrage».
Ce n’est pas là encore un règlement nouveau. Que
nous disent tous nos auteurs qui ont écrit avant la ré
volution ? l is o n s ce
qui
est écrit par llousseaud- *
�9
( i )
Lacombe au mot Compromis , n. 2. «■Après que les par
ti lies ont subi volontairement la jurisdiction des ar
« bitres , asqae ad fm em negotiù,e\. que les arbitres ont
« rendu leur sentence arbitrale, les parties ne sont plus
« recevables à dire qu’il y avait nullité au compromis,
« de ce qu’il ne contenait aucun tems limité. Ainsi
« jugé par arrêté du 27 janvier 16 26 , sur les conclu« sions de M. Bignon , avocat général, rapporté au
« Journal des audiences ». L'auteur aurait encore pu
citer un arrêt semblable, du 16 janvier 1628. rapporté
5
par Mornac, sur la loi ¿ . ff. D e recept. qui arbitr.
Il était étonnant qu ’en la Sénéchaussée d’A u ve r gn e ,
on eût osé combattre ce principe, et plus'étrange en
core qu’aujourd’hui au tribunal d ’a p p e l , dans le m é
moire de Lamouroux , un jurisconsulte ait prétendu
le réfuter par l ’autorité de M orn ac , à l’endroit m êm e
où l’on vient de le citer. 11 faut être exact dans ses cita
tions, et on ne l’est pas dans cette occasion.
1 5
M orn ac , sur la . 2
ff. de recept. qui a rb ilr., cite
deux arrêts, l’un du 16 janvier 1628 3 l’autre du 27
mars 1618. L e premier adjugea la peine d’un comproniis, quoique ce compromis ne contînt pas de délai pour
juger; le second au contraire réfusa la peine du c om
promis qui n’exprimait pas non plus de délai. Mais il
11e faut pas croire que ces deux arrêts furent contradic
toires. Dans l’espèce de l’arrêt de 1628 , M. l’avocat
général Servin observa, que la partie qui avait appelé
do la sentence arbitrale, s’était soumise à la jurisdiclion
des arbitres, en écrivant et produisant ses litres et méC 2
�( 20 >
moires; devant les arbitres. JEutn qui appellaüerat et
scripsisse et instruxisse penitus instrumentes 3%tabules-*
que obsignatis arbitraient litem. M. Servin citait à cette
occasion les termes des lois. Quis est ferendus a d appellationis veniens a u xiliu m in iis quœ ipse fa cien d a
procuraçit. En conséquence l ’arrêt de 1628, adjugea
la peine du compromis , quoiqu’on y eût omis le délai.
Senatus ergo ex kis pœtiam deberi p ron u n cia çit, tametsi tempus omissum esset compromisso.
Mais l ’arrêt de 16 28 , que cite aussi Mornac, n’élait
pas dans la meme espèce. Celui qui se refusait i'i la peine
du compromis, n ’avait rien écrit ni produit devanl les
arbitres; ainsi Mornac, après avoir rapporté l’arrêt de
16 2 8 , qui avait adjugé la peine du compromis dans le
quel il n’y avait pas de d é l a i , parce que l’appellant
avait produit aux arbitres ses titres et mémoires, Mornac
dit qu’il en serait autrement, si, lorsque le compromis
ne contenait pas de délai, celui qui appelle de la sen
tence arbitrale, n’a rien dit ni produit devant les arbi
tres , et que c’est ce qui a été jugé par l ’arrêt de t 6 i 8 .
Secus enim s i, prœler omissum in compromisso d iem ,
nihU ab eo qui postcà appellavit, prolatum , productum que fu erit ; eo enim casu judicaturn pœnam non
deberi ab appellatore ; et c ’est en ellet ce que Mornac
dit avoir été jugé par l’arrêt de 1618.
.
O r , nous ne sommes pas ici dans l’espèce de ce der
nier arrêt, mais bien dans celle de l ’arrêt de 1628. L a
mouroux avait produit devant le juge arbitre ses titres
el mémoires.
�C 2ï )
_
• L ’auteur du mémoire de Lamouroux n ’est pas plus*
exact dans la citation de l’arrêt du 22 décembre 1627 ,
rapporté‘au journal des audiences, et il faut qu’il ne
se soit pas donné la peine de lire tout le chapitre,
quoique très-court, où cet arrêt est rapporté.
D e quoi était-il question dans l ’espèce de cet arr êt?
il y avait un compromis sans fixation de délai; mais il
n ’y avait pas eu de sentence arbitrale,rendue sur le
compromis.Une des parties, qui avait produit ses titres
devant les arbitres, avait traduit l’autre partie'devant,
le juge du M a n s , pour l’obliger à produire de sa part
devant les arbitres. C elle partie s’y était refusée, 'et la
sentence du juge dù Mans l’y avait condamnée. C ’était
de cette sentence qu ’il y avait appel ; mais comme il
n ’y avait pas de délai: dans le compromis, l’arrêt in
firma la sentence du juge du Mans; et dans le fait,le
refus de produire devant les arbitres, emportait avec
lui la révocation d’ un compromis qui ne fixait pas de
délai : mais pourquoi ne s’est on pas donné la peine
de lire ce que dit encore le journaliste? «Toutefois si
K les arbitres avaient rendu la sentence arbitrale, ce
« ne serait pas nullité en icelle, de ce qu’en compro
" mis il n’y aurait point eu de jour, d’autant que lorsK qu’ils l’auraient rendue , les parties pouvaient encore
K se soumettre devant e u x , et les prendre pour arbitres1;
K et de fait, la cour l’a jugé ainsi par ses arrêts».
L e journaliste a eu raison de dire que les arrêts l ’a
vaient ainsi ju g é : outre celui de 1628, que rapporte
M o r n a c , le journaliste lui-m êm e rapporte celui du
5
�( 22 )
janvier 16 2 6 , dont a parlé Rousseaud-Lacombe,- par
lequel il fut jugé que toute audience devait être d é
nuée à un appelant., jusqu’à ce qu’il eût payé la peine,
encore que l’on remontrât qu ’il y avait nullité au com
promis, en ce que par icelui on n'était convenu d ’au
cun tems, ni jour, dans lequel les arbitres pourraient
rendre la sentence-, et le m otif f u t , dit le journaliste,
que ce n ’est point une nullité en une sentence arbitrale ,
de ce que au compromis i i n i j avait eu aucun tems n i
jo u r lim ités, parce les parties l ’ai/ant ainsi convenu,
et ensuite subi volontairement la jurisdictiori des ar
bitres, usque ad finem negotii, ils l’avaient pu fa ir e ,
et ne sont plus recevables à s'en plaindre.
'
« M ais, ajoute le journaliste,'quand il n’y a point de
« jour ni de tems limité au compromis, c ’est une nul« lité qui donne matière à s’en retirer; en sorte que
« la partie qui ne veut plus l’entretenir, n ’y peut être
« contrainte, parce que autrement la jurisdiclion des
« arbitres serait prorogée , in infinitum ».
C ’est donc un principe inébranlable que le jugement
arbitral est valable, quoiqu’il n’y ait point de délai
dans le compromis, lorsqu’il n’y a point eu de révoca
tion qui ail précédé le jugement, et que les parties se
sont soumises à la jurisdiclion par la production de leurs
litres el mémoires.
'
‘
On ne se serait pas livré à une si longue discussion à
cel égard , si l’on n’eûl pas cru nécessaire de rappeler
à plus d’exactitudo dans les citations.
’
Il doit donc paraître démonlré que le défaut d ’ex-
�(
*3
)
.................................................................
pression de délai dans le compromis, lie pouvait pas
.empccher l’homologation de la sentence arbitrale.
M a i s , a-t-on dit e n core , le compromis n’a pas été
représenté en la Sénéchaussée, quoiqu’ on n’ait cessé
d’en demander la représentation. Il est bon de rappeler
ce qui est dit à ce sujet à la page 22 du mémoire de
Lamouroux ; on va le transcrire mot pour mot.
•
« L e citoyen Lamouroux allait même ju s q u à con« venir, que si Le citoyen Deve&e rapportait un compro«■mis régulier, il n'aurait d ’autre moyen que de se
« pourvoir au parlement , pour fa ire réformer une sen
»«
«
«
«
te
tence qui sera le fr u it de la surprise et de la fraude;
il somma en conséquence le citoyen D e v è z e d’exhiber du'compromis , qui n ’est cité ni dans la sentencearbitrale , ni dans aucun acte. L ’appelant s’est tou
jours refusé à représenter ce compromis ; dès-lors la
« sentence arbitrale n ’était plus qu’un simple a v i s ,
« émané d’ un particulier sans caractère. Sous ce rapport
« la Sénéchaussée a donc pu connaître d e l à demande
« en nullité et défaut de l’exhibition du compromis:
« et quand le citoyen D evèze rapporterait aujourd’hui
« un compromis régulier, cette discussion serait sans
“■intérêt , parce que le tribunal d’appel représente le
cc ci-devanl (1) parlement, et qu’il suffirait alors d ’interjeler incidemment appel de cette prétendue senff tence arbitrale ».
C1) Que v e u l e n t d i r e c e s mo t s cL -d c v a n t? q u a n d on
PaRO d A t h è n e s , ou d u Sénat d e U o u i e , il f a u d r a d o u e
A r é o p a g e , l e c i - d e v a n t Sénat.
p a r l e r a tie
dire,
le
l’Aréo-
ci-devaut
�( H )
^
Il y avait inexactitude dans les cilations d’arrêt faites
dans le mémoire ; et dans le passage qu’on vient de
transcrire, il y a mensonge et erreur.
Mensonge , en ce qu ’on dit à la page 22 du mé
moire, qu’en la Sénéchaussée le compromis n ’avait pas
été représenté; mensonge à la page
, en ce qu’on y
36
suppose qu’il n’exisle pas de compromis, et qu ’on est
hors d’élal de représenter; et le mensonge est prouvé
par une requête donnée par D evèze en la Sénéchaus
sée, le 14 janvier 17 89, par laquelle il fit production
du compromis
et la signification de cette requête ,
faite au procureur de I^amouroux, fait aussi mention
du bail de copie du compromis.
D on c alors, et dès que le compromis avait été re
présenté en la Sénéchaussée, il riy avait d'autre moyeu,
suivant Lamouroux lui-même, que de se pourvoir au
parlement; par conséquent la Sénéchaussée ne pouvait
pas juger; par conséquent l’appel de son jugement est
bien fondé.
Inutilement ajoute-t-on qu ’il fallait un compromis
régulier ,• on vient d ’établir invinciblement que le com
promis était régulier, et <|iie, quoiqu’il n’y eût pas
de délai fixé , dès qu ’il n’y avait pas eu de révocation ,
dès que les parties avaient produit à l’arbitre titres et
mémoires, on 11e pouvait plus arguer de nullité ni le
compromis, ni la sentence arbitrale.
Mais, dil-on encore, dans le passage que l’on vient
de transcrire, la discussion est sans intérêt, parce que
le tribunal d ’appel représente le parlement , et qu’il
suffirait
�.
..
(
)
suffirait alors d ’interjeter appel incident de la sen
tence arbitrale.
Il y avait mensonge dans la première partie du pas
sage ; il y a erreur dans celle-ci. L ’appel'incident du
jugement arbitral serait aujourd’hui non recevable ,
parce que'ce jugement a passé en force de chose jugée.
L e jugement fut signifié à La m o u roüx , le 2 avril 1788 ;
et mêm e encore aujourd’hui il n’en a pas été interjeté
5
d ’appel. Voilà plus de 1 ans de la signification ; mais
suivant la disposition de l’article 17 du titre 27 de l’or
donnance de 17 67 , les sentences acquièrent force de
chose ju gée, après dix ans du jour de leur signification,
et on ne p eu t plus alors en in te rj et e r appel.
Jousse, sur ccs mots de l’article après d ix ans , dit
qu’ils sont trop précis pour vouloir en changer la dis
position , en étendant jusqu’à o ans la faculté d’ap-
3
On ne doit cependant pas dissimuler qu’au parlement
de Paris on s’était écarté de celte disposition de l’or
donnance , et que les appels y étaient reçus pendant
3o ;
niais que pouvail la jurisprudence contre la dispo-
silion de la loi? une jurisprudence, et sur-tout celle
d un seul parlement ne peut pas c h a n g e r la loi ; el l’on
«si toujours fondé à réclamer contre la transgression
de la loi. Aussi aujourd’hui Ions les tribunaux d’appel
se conforment-ils à la disposilion de l’ordonnance de
*667 , même pour les senlences pendues avant la sup
pression du parlement, et s’il y a eu quelques jugemens
contraires, ceux du tribunal de cassation les ont anéauD
�.
( 26 }
■
.
tis. On pourrait même soulenir qu’à compter de la loi
de 1 7 9 0 , il n ’y a eu qu ’un délai de
3
mois pour se
pourvoir par appel contre les jugemens antérieurs; mais
cela devient inutile^ parce que même les dix ans de
l ’ordonnance de 1667 , ont constamment donné à la
sentence arbitrale la force de la chose jugée.
C ’est donc aujourd’hui par une erreur bien reconnue
qu’on voudrait
prétendre qu ’on pourrait interjeter
appel incident d ’une sentence signiiiée il-y a plus de
10 ans, et qui a constamment acquis la force de chose
jugée.
Enfin un dernier moyen ^ par lequel on prétend jus
tifier la sentence de la Sénéchaussée d’Auvergne.dont
est appel, est le désaveu qu’avait fait Lamouroux de
l ’acte de regrès, signifié à Devèze par l'huissier Pertuis.
On examinera dans la suite le mérite de ce désaveu;
mais pour ce moment-ci il suffit de remarquer que le
désaveu eût été bien ou mal fait , ce ne pouvait pas
être en la Sénéchaussée qu ’il devait l’être, et que ce
désaveu lel quel ne l’aulorisait pas à refuser 1 homo
logation de la sentence arbitrale ; et pour s’en con
vaincre, il n’est besoin que de rappeler et de répéter
ce que l'on a dit ci-devant des principes enseignés par
les auteurs, que «le juge auquel l'homologation d ’une
« sentence arbitrale est demandée, doit procéder som« mairement à cette homologation, sa/is prendre aa« cune connaissance du fo n d du procès' sauf aux par
te tiesà se pourvoir par appel, si elles le jugent à propos.
« Ainsi aucune des parties 11e peut empêcher l'hom o-
�27
(
)
« logation, sous prétexte que la sentence arbitrale est
« irrégulière, ou autrement vicieuse ».
D ’où il doit se conclure nécessairement que le désaveu
sur lequel on voulait élablir le vice de la sentence ar
bitrale , bien ou mal fo n d é , n ’aurait pu être jugé qu’en
tribunal d’a p p e l , et que le vice du désaveu, quel q u ’il
pût être, ne pouvait pas empêcher l’homologation de
la sentence arbitrale.
Mais on aura d’ailleurs occasion de prouver dans la
suite de ce mémoire, que le désaveu n’était pas receYable, dans le ’cas même où l ’affaire n’eût pas été jugée
par une sentence arbitrale, et qu’elle eût été portée
directement en la Sénéchaussée. Ce sera la dernière
proposition de ce m é m oire , d’ailleurs par elle-même
très-surabondante, comme on l’a déjà dit, et parce que
le désaveu n’aurait pu être jugé que par un tribunal
d’appel, qu’il n ’y a jamais eu d’appel de la sentence
arbitrale , et que celui qu’on en interjetterait aujour
d ’hui , serait non recevable.
Ainsi donc mal-jugé évident de la sentence dont est
appel, en ce qu’elle a refusé l’homologation de la sen
tence arbitrale.
'
-
�(
D
*8
e u x i è m e
)
M
oyen
.
L a sentence de La Sénéchaussée ne pouvait prononcer sur
des demandes déjà ju g ées par une sentence arbitra Le,
et détruire par des dispositions contraires celles de la
sentence arbitrale.
I>a proposition du mo yen semblerait seule devoir
l ’établir, parce que la proposition elle-même n’énonce
qu’ un principe., et ce principe a déjà été suffisamment
développé dans la discussion du premier moyen.
Une sentence arbitrale ne peut être réformée, quel
que vice qu’elle renferme , que par un tribunal d’appel;
elle n ’est sujette qu’à l ’homologalion du juge inférieur,
et cette homologation ne peut être refusée p a rc e juge
inférieur. D onc il ne peut connaître, lorsqu’on lui de
mande l ’homologation, ni du fond du procès déjà jugé ,
ni des vices du jugement déjà rendu par les arbitres.
N e serait-il pas ridicule, quand une sentence arbi
trale a été rendue sur les demandes d’une partie , de
prétendre q u e l ’aclion peut être renouvelée devant des
juges autres que ceux devant lesquels doit être porté
l ’appel de la sentence arbitrale , el que les juges infé
rieurs jugeassent tout le contraire de ce qui l’aurait été
par les arbitres ? et c ’est ce ridicule, on pourrai! même
dire celle absurdité, qui se rcnconlre dans la sentence
dont est appel.
L a sentence arbitrale avait déclaré comme non avenue
�C 29 )
la vente de l’office de greffier, et celle de la Sénéchaus
sée déclare celte vente valable, et en ordonne l’exécu
tion. Voilà donc une contrariété évidente de jugement ;
niais le premier ne pouvait être réformé , ne pouvait
être détruit que par des juges d’appel, el la Sénéchaus
sée n ’avait pas ce caractère. Donc son jugement est
nul , et le mal-jugé est par cela seul démontré.
Si par la sentence de la Sénéchaussée il eût été dit
en termes formels , qu’il avait été mal jugé par l e juge
ment arbitral, oserait-on proposer qu ’une pareille sen
tence pût être confirmée? mais n’esl-ce pas la même
chose, quand la sentence de la Sénéchaussée a jugé
absolument le contraire de ce qui l ’avait été par la
sentence arbitrale? En un m o t , la Sénéchaussée s’est
elle-même érigée en tribunal d’appel. C ’est ce qu’on a
eu raison d’appeler une monstruosité dans l’ordre judi
ciaire. En voilà assez, sans doute , pour justifier l’appel
de la sentence , sans qu’il soit nécessaire de le qualifier
comme de juge incompétent.
T
r o i s i è m e
M
o y e n
.
S i ta contestation rieût pas été déjà ju g é e par une seti
. lence arbitrale, et quelle eût été portée directement
en la Sénéchaussée, la sentence de ce tribunal eût été
aussi injuste dans te jo n d , quelle a etc irrégulière,
après une sentence arbitrale.
•Ai' ivüs l’élablissemenl des deux premiers moyens, on
comprend aisément que celui-ci ne peut être que subsi-
�. .
( 30 3
diaire et surabondant; aussi ne veüt-on le présenter,
qu’afin d ’avoir occasion de justifier la conduite de'
De vè ze dans toute celte affaire , et de rendre sensibles ^
les variations et la mauvaise foi qui ont régné dans toute
celle de Lamouro ux, et qui l’ont amené à un désaveu
q u ’il a regardé com meun edernièreplanched e naufrage,
enfin pour démontrer l’infidélité de ce désaveu. Ici il
est nécessaire de rappeler quelques-uns des faits dont
•on a déjà rendu compte.
Lamouroux était propriétaire de l’office de greffier
en ch e f de la maîtrise de St.-Flour. A u mois d ’avril
1 7 8 6 , il vend cet office à D evèze , par un acte sous
seing privé, moyennant 18,eoo francs, et il l’oblige
de remettre à Devèze sa procuration a d resigna ada/n,
et tous les titres nécessaires, p o u r, par D e vè ze s’en
faire pourvoir, lels que ses provisions, quittances de
finance et de centième denier.
Lamouroux nous apprend lui-même dans son m é
moire , que la vente laite à D e vè z e , qui n’était que
sous seing privé, étant encore inconnue , il se pré
senta d’autres acheteurs, et entrJautrcs un citoyen
M alb e t, cjni lui offrit 24,000 francs au lieu de 18,000,
prix de la vente qu’il avait faite à Devèze. Un béné
fice de 6000 francs était bien fait pour le tenter. Mais
comment taire une nouvelle venie à Malbel ? il y avait
la voie du regrès. Mais un regrès si prochain de la pre
mière v e n t e , et une seconde vente faite incontinent,
lout cola aurait paru bien frauduleux. Hésitant alors
sur le parti qu'il avait ;à prendre, il prit du tems pour
�C 3i )
y réfléchir, en différant de remettre à D evèze sa proJ
curation ad resignandum , ses provisions. quitlànceS
de finance et d e . centième
denier. Mais toutes ces
pièces étaient nécessaires, et Devèze ne pouvait, sans
les avoir toutes, se faire pourvoir de l'office.
Cependant Devèze impatient de tous ces délais,
prit enfin le parti de faire faire à Lamouroux une
sommation de lui délivrer la procuration a d resignand u m , et toutes autres pièces nécessaires pour parvenir
à obtenir des provisions. Cette sommation est du 2
décembre 1786.
-
Lamouroux ne pouvait plus reculer. Il se repen
tait do la vente par l’espérance d’ un plus grand prix
que Malbet lui avait offert. Il sentait bien qu’il ne
pourrait p as , sans se perdre de réputation * profiter
de ce bénéfice par un regrès qui. serait aussitôt suivi
d ’une nouvelle v e n t e ; mais il se flattait qu’en exer
çant ce regrès et conservant l ’oiïice de greffier, il
pourrait s’en défaire plus avantageusement dans un
tems plus éloigné. Il se vit donc forcé, par la som
mation de D evèze d’exercer ce regrès contre la vente
qn’il lui avait faite, ce qu’il fit en effet par l’acte qu’il
iitsignilier à D evèze, le 7 du mêm e mois en répon
dant à lu sommation du 2; ce D evèze à son tour ins
truit qu’il ne pouvait pas résister au regrès que le ven
deur d’ un office est toujours fondé à exercer, tant
qu’il
st pas dépoudlé par les provisions de l’acheteur,
pour se débarrasser d’ailleurs de toute inquiétude
sur une affaire de cette nature, et employer à son
�,
. c 32 }
.
.
ulilité les fonds qu’il avait destinés au prix d’une
acquisition qui ne pouvait plus avoir lieu, se déter
mina à faire signifier à Lamôuroux un nouvel acte,
par lequel il accepta le regrès. Cet aclè fut signifié
le 12 décembre, cinq jours après le regrès. Après ce
dernier acte, huit mois se passèrent dans le plus
profond silence de la part de Lamouroux envers
Devèze qui crut d ’autant mieux que tout était con■sommé à l’égard de la vente, que depuis le regrès
I,amoureux n’avait cessé d’agir comme lilulaire et
propriétaire de l’office de greffier, percevant les émolumens courans qui auraient appartenu h D e v è z e ,
si’ la vente avait ,dii subsister^ se faisant payer des
arrérages des gages et chaüflàges antérieurs ¿1 la vente,
q u e , s u i y a n l les clauses de l’acle, il devait partager
avec Devèze,, et don t celui-ci devait seul faire le re
couvrement.
'
Mais les événemens survenus dans l'intervalle , firent
craindre à Lamouroux une suppression prochaine des
maîtrises,, ef par conséquent', de son office de Greffier.
O n conçoit qu’ il dnl alors se repentir de sou regrès.
Les discours prononcés; à rassemblé des-notables*, le
25
mai 1 7 8 7 , et devenus publics, lui annoncèrent
le projet de s occuper de la suppression des
maîtrises,
el le risque q u ’il courait de perdre- un office dont î;i
liquidation ne pouvait jamais se porter au prix qu’ il
l ’avait vendu. Mais comment put - il se flatter de faire
cesser l’eilèl du regn>s qu’il avait e x e r c é , surtout après
l ’acceplation de Devèze ?
Cependant
�'
(
3 3
5
.
,
Cependant dans cette confiance illusoire, il voulut
revenir sur ses pas. Il imagina de faire signifier à
D e v è z e , le i 3 août 1 7 8 7 , un acte par lequel il lui
fil sommation de se trouver chez un notaire, pour
y voir déposer la vente du 2 avril 1786. D e vè z e ne
’pouvait se rendre h l’heure de la sommation remise
chez lui en son absence ; en conséquence * le 14
a o û t , procès-verbal de défaut chez le notaire, et le
même jour assignation à la senéchaussée d’A u v e r g n e ,
pour reconnaître la signature, et pour être condamné
a l ’exécution de la vente, sous offre de délivrer la
procuration a d resignandum.
.
Il 11’est pas inutile de remarquer que dans la som
mation faite pour se trouver chez le notaire, et dans
l’assignation donnée le lendemain, on fait bien offre
de délivrer une procuration a d resignandum , maiso n
ne fait point d’offres réelles de la procuration ellemême , et on ne pouvait pas le faire, parce que cette
procuration n’existait pas encore, et 11’a même jamais
existé : cependant un tel acte pouvait se faire sans
la présence de D e v è z e ; il n ’était pas même d ’usage
<I'ie ces sortes de procuration fussent acceptées dans
le même acte par l’acheteur de l ’office. Mais il n’au
rait pas même suffi d’offrir réellement la procura l io n ,
il aurait encore fallu offrir les provisions du vendeur,
les quittances de finance et celles du centième denier,
pièces qui devaient nécessairement accompagner la
procuration, et sans lesquelle s l’acheteur n’aurait pas
pu obtenir les provisions de l’office.
E
•
�.
( 34 }
.
.
* ,
On a v u ci-devant les causes qui avaient empêché
qu ’il ne fût donné suile à la demande portée par
L am ouroux en la Sénéchaussée d’Au vergne, c’est-àdire, le compromis par lequel les parties so u m ir e n t
l a contestation à l’arbitrage du grand-maître, et le
jugement arbitral qui déclara Lamouroux non receVable dans sa demande, en déclarant la vente comme
non avenue. On a vu que la conduite que tint L a
mo u ro u x, après le jugement arbitral, après qu’il lui
en eût été fuit lecture et qu’il lui eût été signifié avec
bail de copie : on a vu que de tous les actes qu ’il
avait exercés en prenant la qualité de greffier, en se
faisant payer du prix des bau x, et percevant les émolumens, on a vu, dit-on, que de cette conduite résul
tait nécessairement de sa part l ’ap pr o ba tio n et l'exé
cution du jugement arbitral. Mais nous avons promis
que dans ce mo yen subsidiaire et surabondant que
nous examinons, nous mettrions à l’écart le compro
mis, le jugement arbitral et toute leur suile, pour
attaquer la sentence de la Sénéchaussée d’Au vergne,
dans la supposition même que les demandes de L a
mouroux n’eussent jamais été soustraites à la juris
diction da ce tribunal par un compromis, et jugées
par une sentence arbitrale.
Remarquons cependant que ces demandes, portées
en la Sénéchaussée d’Auvergne, par une assignation
du
14 août 1 7 8 7 , lie lurent reprises dans celle Sé
néchaussée, que long-tems après, et lorsque Devèze
y eût fait assigner Lamouroux pour voir ordonner
�3 5
.
.
l'homologation de la sentence arbitrale, la résistance
(
}
à l’homologation, qui ne devait pourtant pas l’ar
rêter comme on l ’a prouvé c i- d e v a n t , et sa persévé
rance à demander qu’il fût fait droit sur des deman
des éteintes par un compromis et par une sentence
arbitrale, étaient d’ailleurs repoussées par le regrès qu’il
avait e x e r c é ,e t l ’acceptation de D e v è z e ; e t ce fut alors
qu’il eut l ’audace de faire un acte de désaveu du re
grès, et d’assigner les héritiers de l’huissier, pour faire
juger avec eux le désaveu, car prudemment il avait
attendu la mort de cet huissier pour former ce dé
saveu. ,
On a vu , dansla discussion des deux premiers moyens,
que le désaveu n’aurait pu se proposer en la Séné
chaussée d’Auvergn e, et qu’après la sentence arbitrale,
ce n’eût pu être que sur un appel de cette sentence
qu’on eût pu se faire un moyen d’appel qui, par con
séquent alors, n’aurait pu être jugé qu’au parlement.
Mais nous supposons ici qu’il n’y aurait eu ni com
promis, ni sentence arbitrale; qu’en un m ot, la Séné
chaussée aurait seule été saisie de la contestation, et
alors même on va prouver que la Sénéchaussée ne
pouvait avoic égard au désaveu dans les circonstances
où on venait de le produire.
Il ne faut pas se persuader qu’on puisse désavouer
les actes d’un officier public, par la seule raison qu’ils
110 sont pas signés de la partie, ou qu’elle n’a pas
donné par écrit un pouvoir de faire ces actes, lorsque,
d ailleurs, il se rencontre des circonstances et des préE 2
�.
.
(
36 }
somptions puissantes que l’officier n ’a pas agi sans pou
voir, et que les actes ou des faits postérieurs sont
des suites naturelles de l’acte qui est désavoué, sur
tout encore lors qu ’il y a preuve que l’acte a été
connu de la partie qui le désavoue, mais qui reste
long-tems dans le silence, après qu ’on lui en a donné
connaissance, et attend, pour en iaire le désaveu,
la mort du ministre de l’acte.
Quelques praliciens, et même Denisart , avaient
voulu donner en m a x i m e , que le procureur ou l’huissier
lie pouvaient être désavoués après leur mort 5 mais
cette maxime générale eût été trop dangereuse ;aussi
les arrêts l’avaient-ils fait dépendre des circonstances,
Observez néanmoins, disent les auteurs du réper
toire de jurisprudence, que quoique le désaveu puisse
avoir lieu après le décès du procureur , on ne doit
l ’admetlre que quand les circonstances font présumer
qu’il y a eu dol et malversation de la part de cet
officier. L a raison en est qu’on doit supposer, en
g é n é ra l, qu’ un procureur n ’agit pas sans pouvoir, et
que les héritiers ne sont pas instruits suffisamment
de ce qui pouvait l'autoriser.
O r , quelle circonstance plus propre à prouver que
ce désaveu est fait de mauvaise foi, lorsqu’on établit
que l’acte a été connu par la partie qui le désavoue,
long-tems avant le désaveu, cl qu’on a attendu, pour
faire ce désaveu, la mort du minislie d e l ’acle qui est
désavoué.
Ici on ne peut pas mettre en doute la connaissance
�37
(
)
qu’a eue Lamouroux de V^cte de regrès. D e v è z e lui
fait, le 2 décembre 1786, une sommation de lui déli
vrer une procuration ûd résignaridu/n, et les autres
pièces nécessaires pour se faire pourvoir de l’office de
greffier. Lamouroux ne peut pas dire qu’il n’a pas connu
cette sommation, qui a été faite en parlant à sa per
sonne ; il ne pourrait le dire qu’aulant qu’il formerait,
contre cet acte, l’ inscriplion de faux.
•Après cetle sommation, que devait-il faire, s'il vou
lait accomplir la vente? C ’était de délivrer la procu
ration a d resignandum , et les autres pièces qui lui
étaient demandées par la sommation.
Que pouvait-il faire., s'il ne voulait pas accomplir la
vente? Il u’avait pas d’autre mo yen que d’exercer le
régi ès.
Il a exercé ce regrès cinq jours après la sommation,
le 7 décembre;" et le 12 du même mois le resrès
a été
O
accepté par D e v è z e , par un acte signifié à Lamouroux.
11 ne peut donc pas dire non plus qu ’ii n’a pas connu
l ’acte par lequel le regrès a été accepté, puisque cet
acte lui a été signifié, et il ne pourrait le prétendre
encore qu’en s’inscrivant en faux contre la signification
qui lui a été faite de l’acceptation du regrès.
D e là donc qu e , d’ un côté, il n’a point satisfait n i a
sommation du 2, en délivrant à D e vè ze la procuration
et autres titres nécessaires, on doit conclure qu ’il n ’a
plus voulu que la vente s’accom plît, puisqu’elle ne pouvau l’être qu’après la remise de tous les litres.
D e là q u e , par l ’acte du 1 2 , D evèze lui a fait si-
�#
^
( 38 )
............................
gnifier l’acceptation d’un regrès qu’il disait lui avoir été
signifié à la requêle de Lamouroux , si le regrès n’avait
pas été de son fait, s’il n ’en avait pas donné pouvoir
à l’huissier, il devait s’empresser de désavouer l’huissier.
Mais dès qu’alors il n’a rien fait pour contredire le
regrès, que le désaveu n’est venu que plus de deux ans
après, et que,, pour le faire, il a attendu la mort de
l ’huissier, tout cela ne manifeste-t-il pas la mauvaise
foi de ce désaveu tardif?
N en sera-l-on pas même encore plus convaincu , si
toutes les actions de L am ou rou x, postérieures à l’acle
de regrès, se concilient parfaitement avec la vérité de
ce regrès, si ces actions emportent avec elles la consé
quence que Lamouroux avait l ’intention de se main
tenir dans le titre et la propriété de l'office qu’il avait
vendu à D e v è z e ?
A u t re m e n t , de quel droit aurait-il perçu lui-même
les émolumens du greffe, qui devaient appartenir à
D e v è z e ? de quel droit aurait-il perc;u les arrérages an
térieurs à la vente des gages et des chauffages qu ’il
devait partager avec D e v è z e , mais dont, aux termes
de la vente, D e vè ze devait seul faire le recouvrement ?
de quel droit a-t-il poursuivi Seriez, l’a f;)ii condamner
au paiement du prix de la ferme, et s’en est (ait payer?
11 n a pu faire tout cela qu’en manifestant son inten
tion do conserver le titre et la propriété du greffe, et
par conséquent sans approuver le regrès et reconnaître
le pouvoir qu ’il avait donné à l’huissier; et ce ne pou
vait être que par l’effet du regrès qu ’il pouvait con
server le titre et la propriété de l’oflicc.
�3
( 9 )
C ’est d’ailleurs en vain que pour rendre suspeci l’acte
de regrès du 7 décembre 1 7 8 6 , et pour fortifier le
désaveu, on prétend qu’il se trouve un acte du même
jour, fait par le même huissier à plus de dix lieues de
distance de Saint-Flour; d’où l’on conclut que l’huis
sier ne pouvait pas être à Saint-Flour ce même jour.
i°. Il ne serait pas physiquement impossible qu’un
huissier fit le même jour deux actes en deux lieux différens, à la distance de dix et douze lieues l’un de
l'autre.
2.0. Devèze produit un acte signifié à Saint-Flour le
6 d é c e m b re , la veille de celui qui a été signifié le 7 à
D ev èze ; et ce même huissier pouvoit être encore à
Saint-Flour le lendemain 7, signifier le regrès de Lamouroux le même jour au matin, et parlir de suite pour
al!er plus loin faire d’autres exploits. On ne pourrait
pré'endre qu’il n’était pas à S a in t -F lo u r le 7 , qu’en
formant l'inscription de faux contre l ’acte par lui si
gnifié ce même jour à la requête de Lamouroux.
3 .°
Mai* Lamouroux a eu connaissance du regrès,
par l ’acceptation que D evèze lui en a fait signifier le
12. S’il n ’avait pas donné de pouvoir à l'huissier, il ne
pouvaû pas trop se presser de le désavouer, et ilallend
plus de deux an s, et la mort de l’huissier, pour faire
ce désaveu.
4 *°
Pour admettre le désaveu de Lam ouroux , il fau
drait qu’il y eût trois actes faux, ceux du 2, du 7 et
du ï2 du même mois, et trois actes faits par trois différens huissiers. Comment supposer qu ’011 eût pu cor
rompre trois huissiers ?
�40
(
)
A lors , de foule manière le mal-jugé de la sentence
de la Sénéchaussée d’Auvergne, en ce qu’elle avait jugé
le désaveu valable, ne doit-il pas paraître évident,
même en faisant abstraclion de la sentence arbitrale,
et en supposant toujours que le compromis et la sentence
arbitrale n’auraient jamais existé?
Mais on peut encore aller plus loin, et soutenir avec
fondement q u e , n ’y eût-il jamais eu d ’acte de regrès,
ou que jamais Lamouroux n ’eût montré l’intention de
se conserver le titre et la propriété de l’office , malgré
la vente qu il en avait faite, la sentence de la Séné
chaussée aurait encore mal jugé en ordonnant l’exéculion de la vente.
Pour cela il suffit d’observer que D e vè z e ne pouvait
devenir titulaire et propriétaire de l’office, que par reflet
des provisionsqui lui en auraient été accordées, et qu'il
ne pouvait obtenir ces provisions qu ’autant qu ’il aurait
eu en son pouvoir les provisions de Lamouroux, sesquittances de finance et de centième denier, qui ne lui
avaient jamais été délivrés par L am o u rou x , et que
jusques-la , Lamouroux restait absolument le maître et
le propriétaire de l'office, d ’où doit résulter la consé
quence que cet office ayant été supprimé , il l'a été sur
la tôle de [/¡imouroux , et que la perle n'en a pu re
tomber que sur lui , par la règle de droit , res petit
Domino.
' 11 est bon de rappeler les principes de la matière,
nous en ferons ensuite l’application.
L a vente ne peut recevoir sa perihelion que p;ir la
tradition ÿ
�41
(
)
tradition ; elle ne peut transférer la propriété qu’autant
qu’elle est suivie de la tradition ; traditionibus dominia
rerum transferuntur, non m idis pactis. 1. 20, cod. de
pactis 1 ainsi jusqu’à la tradition, la propriété de la chose
réside toujours dans la personne du vendeur; ce qui est si
vrai que dans le droit , le propriétaire qui a fait une
première v e n t e , venant à en faire une seconde d e l à
même chose à un autre ach e te u r, s’il lui en fait la tra
dition, ce dernier acquéreur est préféré.
L a tradition et la délivrance des choses qui sont
fermées sous clef, ne s’opère que par la remise des
clefs que fait le vendeur à l’acheteur : sed qui nier~
ces in horreo depositas vendiderit, simuL atque ciaves
tradident em pton, transfert proprietatem merciutn a d
cmpiorern. In st. §. 4b de ter. divis.
L a délivrance des immeubles, dit D o m a t , d’après
la dispostion des lois, se fait par le v e n d e u r, lors
qu’il en laisse la possession libre à l ’acheteur, s’en
dépouillant lui-meme, soit par la délivrance des ti
tres , s’il y en a , ou des clefs, si c ’est un lieu clos,
comme une maison.
En ne parlant que de ces principes généraux, car
on verra bientôt qu’il y en a de particuliers pour la vente des offices, la tradition de l’oflice vendu ne pour
rait se faire que par la remise des titres nécessaires
pour en faire pourvoir l'acheteur; c ’e s t - à - d i r e , de
la procuration ad resignanduni, des provisions de
Latnouronx, de ses quillances de finance el centième
denier. L a remise de loutos ces pièces était nécessaire
Y
�4
.
( 2 )
pour opérer la tradition de la chose vendue , de mémo
que la remise des clefs du grenier dont on a vendu
les grains qui y étaient renfermés, de même aussi
que la tradition d’une maison qu’on a vendue, et qui
n ’a pu aussi s’opérer que par la remise des clefs.
Ainsi, n’y ayant pas eu de délivrance des litres né
cessaires pour faire pourvoir D e v ò t e , et le faire jouir de
la chose vendue , il n’a pu y avoir de tradition, sans la
quelle la propriété de l'office ne pouvait lui être transfé
rée, tradi-twmbus dominici rem ni Irans/cmntur, non m i
dis p aclisj mais comme Liinioiu oux ne pouvait perdre la
propriété qu’au moment qu’elle passerait à D e v è x e ,
ce qui était impossible par le défaut de la remise dos
titres qui n ’a jamais été faite, dès que l’ofiicd a été sup
primé, la perte n’en
pu retomber que sui' Lamon-
roux , q u i , au moment de la suppression , en était seul
propriétaire.
Lamo uroux voudrait-il dire qu ’il Avait fait desoflies
de délivrer la procuration ad rcsignandutn , et autres
titres nécessaires? mais dans quel teins a-t-il lait ces
ollres? il devait les faire au moins aussitôt après la som
11
mation que lui en lit D c v è / e , le 2 décembre 1786.
avait annoncé qu ’il ne voulait j oint les faiie dans l’acte
du regrès du 7 du même mois, cl qui fut accepté par
Dovèze dans l'acte signifié le 11 à Lamouroux.
Et ces offres tle délivu r, il ne le-, a laites que deux
ans après , et long-tems même apn s lu sentence arbi
trale qui avait déclaré la vente comme non avenue.
.Mais supposons mémo q u ’il n ’y eût eu ni rciirès, ni
�43
(
)
_
acceptation, ni compromis, ni jugement arbitral, qu’eniin Lamouroux ne se fût pas toujours porté et .qualifié
propriétaire en recevant les éinolumens du greffe, les
gages, les droit de chauffage, qui auraient dû appar
tenir à D evèze , en percevant les droits du greiïe, en
poursuivant le paiemen t, obtenant des jugemens où
il se qualifiait toujours de greffier en chef, et touchant
le prix des fermes ; niellant tous ces faits à l’écart,
quelle est doue cette espèce d’offres tardives faites
par L am ouroux?
J1 olliait , disait-iUde délivrer une procuration ad
rcsignandum ; mais ce n’était pas là une offre réelle
qui seule pouvait le libérer de l'obligation qu ’il avait
coul raclée ; il aurait fallu qu’il eût réellement une pro
curation loule faile, et non pas une procuration à faire,
et qui 11e l’a jamais été.
jKien d'ailleurs n'aurait pu l'empêcher de faire celle
procuration el de l'offrir réellement; il n’avait besoin
pour cela ni de la présence de D e v è z e , ni de son conseulement; et jamais dans ces sortes de procurations
il n’y eut d’autre partie que le constituant.
Lors même q u ’il lit ces oflres, et quand elles auraient
été réelles, D e vè z e aurait élé fondé à les refuser, parce
qu elles auraient élé tardives et i’a i k s à couli*'-tem.s. (.ts
offres miraient dû être laites inum'diaUnm ni a^r>s H
scinmalion que Dev -zelui avait fail faiiv k* z d *cembro
; mai;; on nr- 1: > aviit laites que pu : Ij d:*ux ans
*4 * *• , et
1«:; -que lu mm i u
i-ti cî .v nuàlnses ét'ût d j;’i
�44
C
)
On croit donc avoir démontré par les principes gé
néraux de la vente et de la tradition, que Lamouroux
élait seul propriétaire de l’office lorsqu’il a péri par la
suppression des maîtrises ; et alors quelle est la règle?
res périt Domino. Mais il y a de plus des principes par
ticuliers pour les ventes d ’offices : nous ne pouvons pas
les puiser dans une source plus pure que le traité des
offices de Loyseau ; c ’est là vraiment le siège de la
matière.
« C e l u i , dit Loyseau, liv. i , ch. 2, n. 2 1 , qui après
« avoir composé de l’office, e.l payé le prix d’i c e l u i,
« a relire de son vendeur une procuration irrévocable
« pour le résigner en sa fa veur, même un acle exprès
« de résignation, n ’a point encore de droil en l’ofiiGe
« jusqu’à ce que la résignation soit admise par le col« Ialeur et la provision expédiée à son profil; de sorte
« que jusqu’alors l’office est encore in bonis du rési« gnant
et par conséquent peut être saisi pour ses
« dettes , comme a décidé la Coutume de Paris, art.
® 97, et peut par lui-même êlre résigné à un au tre,
« s’il prévient par eflet son premier résignalaire ».
(( Dont la raison est, conlinue Loyseau , que la ré
* signalion n'est pas une tradilion de l’office, attendu
« que les offices ne sont pas en la libre disposition des
«• pourvus, pour les pouvoir directement et imnié« dialement transporter à autrui ; mais il iaut qu’ils
« passent auparavant par les mains du collaleur, duquel
« leur disposition dépend principalement ».
Ainsi, d’après la doctrine de L o y s e a u , celui qui a
�(
)
vendu l’office en reste toujours propriétaire, lorsmême
qu’il a délivré sa procuration ad resignandum ,• 1ant
qu’il n’y a pas eu de provision, l’office est toujours l u
bonis du vendeur; mais si l’office vient à être supprimé
dans l'intervalle, il ne peut périr qu ’entre les mains du
vendemvpuisque celui-ci en reste toujours propriétaire.
Si cela est vrai, même à l’égard du vendeur qui
a déjà délivré la procuration a d resignandum, à com
bien plus forte raison do'.i-il en être de m ê m e , lorsque
non seulement la piocuration a d resignandum
n’a
pas été délivrée , mais lorsque encore il n’y en a ja
mais eu de faite , surfont encore lorsqu’il y a eu som
mation de la 06'iv.ei , comme on voit qu ’il en fut
Dait une le duux. décembre 1786 ; et qu ’ensuite ,
prés de deux ans après, Lamonroux a offert de déli
vrer la procuration ad. resignandum , alors les choses
n ’étaient plus entières, et d’ailleurs ce ne sont pas
des offres réélles de la procuration elle-même, mais
de simples offres de délivrer une procuration qui n’exislait pas encore, et qui n’a jamais existé , procuration
qu’on pouvait faire sans la présence de D e v è z e , où
il n’était pas besoin qu ’il concourut.
1
Il
doit donc paraître démontré que quand même
a flaire eût été portée directement en la Sénéchaus
sée d’Auvergne , la sentence qui y fut rendue était
de toute injustice.
Comment cette sentence avait - elle d ’ailleurs pu
]"ger valable le désaveu d’ un regrès qui devait paraître
constant par toute la conduite de L a m o u ro u x , surtout
�46
(
)
par une suile des actes des 2, 7 et 12 décembre 1786,
_
trois actes faits par trois huissiers différens qu’il aurait
fallu corrompre tous les trois pour leur faire faire ail
lant de faux , le premier et le dernier, en ne donnant
pas copie de ces actes à Lam o u rou x, quoique leurs
exploits énoncent le bail de copie, et l’huissier qui
avait fait le regrès de L am ou rou x, pour l’engager à
faire cet acte sans l’aveu de Lamouroux. L ’acte du
12 décembre 17 86, donna connaissance à Lamouroux
d’un regiès signifié à D e vè ze le 7 , par l’acceptation
du regrès faite par cet acte qui ne pouvait être atta
qué que par l’inscription de faux. Pourquoi donc le
désaveu n ’a - t - i l pas suivi de près, et attendre à le
faire, deux ans après la mort de l’huissier. Nulle autre
cause vraisemblable du désaveu, que la connaissance
qu’a eue Lamouroux de la suppression prochaine de
l ’office qu ’il avait , vendu à Devèze.
Et quant à ce qu’on dit que la relation du con
trôle dans le registre de l’acte de regrès, parle d ’un
acte signifié à D e v è z e , qualifié habitant du Pont du Vern e t , au lieu qu'il, est habitant de Saint-Flour, de quelle
conséquence peut être celle énonciation, contraire à
celle de la copie du regrès signifié à D e v è z e , où il est
qualifie habitant de Saint-Flour? I,e contrôleur ou le
commis qui a fait 1 enregistrement, pouvait avoir dans
l'idée quelque acte précédent, où il était question d’un
habitant du V e r n e l , et il a pu confondre. D ’ailleurs il
n ’existe pas d'individu du nom de D e v è z e , qui soit ha
bitant du Pont du Vernel. Mais ce qu ’011 veut ensuite
�47
(
)
•supposer, que c’était Devèze lui-m êm e qui avait écrit
sur ie registre la mention du controle ^ est lout-a-lait
niai adroit. Si le fait était vrai, comment D evèze luim ê m e , habitant de Saint-ïlour, se serait-il donné un
domicile au Pont du V e r n e t ?
Dans de telles circonsîances, il est impossible de con
cevoir comment la sentence dont est appel, a pu dé
clarer valable le désaveu de L am o u roux, et ordonner
l ’exécution de la vente. Cette sentence est donc évi
demment injuste, en écartant même le compromis et
le jugemen arbitral qui l’avait précédé.
Mais la sentence est encore plus insoutenable : elle
est nulle et irrégulière, en ce qu’elle a jugé le con
traire de ce qui l’avait été par un jugement arbitral
qui ne pouvait être détruit que par un appel, dont la
Sénéchaussée n’aurait pas pu connaître. C ’est ce que
l ’on se persuade avoir démontré dans les deux premiers
moyens.
On finira par observer que L am ouro ux n’avait cessé
de se répandre en injures contre D e v è z e , dans tout le
cours du procès. 11 semblait s’en être repenti, lorsqu'il
avait dit à la page1 i x de son mémoire, q u il éviterait
avec soin tes personnalités, pour ne s'occuper que de La
cause, et que sans doute Devele lu i saurait gré de sa
Modération ,• mais on a bien mal tenu parole en ter
minant le mémoire par celte phrase, que Le citojen
Devèze est parvenu ci ce p oin t, qu il. est difficile de le
calomnier. Quand on est méchant, on ne devrait pas
�promettre, par réflexion, ce qu’on ne peut pas tenir
par caractère. Mais qu ’est-ce que cela fait à la cause?
L e citoyen T
L e citoyen A
io lier ,
ndraud,
rapporteur.
avocat.
L e citoyen C r o i s i e r avoué.
A R I O M , DE L 'IM P R IM E R IE DU P A L A I S , C1IEZ J.-C. SALLES.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Devèze, Jean-Baptiste. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tiolier
Andraud
Croisier
Subject
The topic of the resource
ventes d'office
arbitrages
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jean-Baptiste Devèze, appelant ; contre Antoine Lamouroux, intimé ; en réponse à celui de l'intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1786-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0229
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1411
BCU_Factums_G1412
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Aurillac (15014)
Mauriac (15120)
Saint-Flour (15187)
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arbitrages
ventes d'office
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E
.
�Ju lie n ,
décédé sans
postérité.
V ital,
décédé sans
postérité.
Antoine Ier,
décédé sans
postérité.
Antoine II,
marié à
Marie-Thérèse
Delchier.
Anne-Marie,
mariée au cit.
T artel,
de cujus.
ont donné tous leurs biens
à Julien Dejax.
I
2
V italJu lie n ,
François, appelant.
décédé
•ans postér.
il
3
AnneM a rie ,
mariée à
Peyronnet.
4
A gn ès,
m ariée à
Pierre
Dalbine
intimés.
,
i
2
3
Anne
Marie ,
mariée à
Robert
G izaguct,
intimée.
Joseph,
intimé.
M arie,
intimée.
�MÉMOIRE
EN
R E P O N S E ,
P O U R
Dame A g n è s D E J A X , et le citoyen P i e r r e
. D A L B I N E , son mari, juge au tribunal d’ar
rondissement de Brioude;
D ALB IN E , M a r ie D ALBIN E ,
A n n e - M a r i e D A L B I N E , veuve de Robert
C r o z e - M o n t b r i z e t - G i z a g u e t , tant en
son nom que comme tutrice de ses enfans ;
tous intimés :
J oseph
C O N T R E
•
.
I
D E J A X , homme de lo i, habitant de la
ville de Brioude, appelant d’un jugement rendu
au tribunal de cette même ville , le 6 messidor
an 10.
J ulien
Sous
l’em pire des lois p ro h ib itiv e s, les transactions
les p lus ordinaires étoient toujours suspectées de fraude;
l' injustice , la c u p id ité , l’a m b itio n , avoient un cham p
vaste pour leurs spéculations ou leurs calculs. Quelle jouis
sance p our le cit. D e ja x , connu p ou r avoir la passion
A 2
�.
-( 4 )
,
du procès! Il doit sans cloute regretter le temps où la
loi du 17 nivôse étoit en vigueur. Il paroît que la loi du
4 germinal an 8 lui a singulièrement d é p lu ; il sera bien
plus irrité contre le code civil, qui perm et des dispositions
universelles en ligne collatérale; et son m om ent n’est pas
bien choisi p o u r attaquer des règlemcns de famille dictés
par la reconnoissance, ou des ventes aussi sincères que
légitimes.
Ce n’est pas assez p o u r le cit. D eja x d’avoir o b te n u ,
par im portunité ou par lassitude, la majeure partie de
la succession de l’un de ses oncles, d ’a vo ir été donataire
universel de deux a u tres, il est jaloux de la plus légère
préférence de la tante qui lui restoit. Il l’a négligée dans
sa vieillesse; l’auroit abandonnée à des soins mercenaires,
sans la généreuse bienfaisance de la dame D albine : mais
aujourd’hui il en ve u t à sa succession; et tous les actes
q u ’a faits la dam e T a rtel sont à ses y e u x des libéralités
frauduleuses et déguisées, que la loi proscrit et lui réservoit exclusivement.
Ses prétentions sont défavorables et odieuses, sa récla
m ation impolitique et injuste, attentatoire au droit sacré
de propriété : en l’adoptant, ce seroit récompenser l’in
gratitu de, blesser la reconnoissance, et proscrire les con
ventions les plus légitimes.
F A I T S .
L a dame D e j a x , ve u v e T a r t e l , de la succession de la
quelle il s’agi.t, a été la bienfaitrice de toute sa famille.
E lle donna une somm e de 3?000
^ A n n e-M a rie D e ja x ,
fem m e P e y r o n n e t, lors de son contrat de mariage.
�C 5 )
Elle fît également un clon de 6,000 fr. à Julien D e j a x ,
son n e v e u , ap pelan t, lors de son mariage avec la dem oi
selle C r o z e , du 2,5 novem bre 1 7 7 1 . Ce sacrifice fut absolu
de sa p a rt, et sans aucune réserve d’ usufruit.
L e 9 décem bre 1 7 7 1 , A gn ès D e ja x épousa le citoyen
D a lb in e , et la dame T a rtel lui fit donation de quelques
immeubles situés à F ontanes, évalués à
5 ,000 francs, et
non d’un d o m a in e , com m e le prétend D e ja x ; p lu s, d’une
somme de 2,000 fr. ; mais elle se réserva, pendant sa v ie ,
l’usufruit des objets donnés.
L e 19 juin 1 7 7 8 , la dame v e u v e T a rtel fit donation à
A n n e -M a r ie D a lb in e , sa petite-nièce, de six parties de
rente au principal de 4,000 fr.
L e 17 germ inal an 2 , elle fit donation du sixième de
ses biens î'i A n n e - M a r i e , Josep h et M arie D a lb in e , ses
petits neveu et nièces.
I æ 6 messidor an 8 , elle a fait un testament par lequel
elle a institué p our son héritière de la m oitié de tous ses
biens, par p récip u t et avantage à ses autres héritiers de
d r o it , A gn ès D e j a x , femme D albine.
T elles sont les libéralités qu ’a exercées cette fem me
bienfaisante. Mais le citoyen D e ja x conviendra lui-m ém e
qu’A g n è s , sa s œ u r, m éritoit quelque préféren ce, et devoifc
obtenir la prem ière place dans l ’affection de sa tante.
D ep uis longues années la dame D albine lui a rendu les
services les plus empressés et les plus généreux. L a dame
T a r te l, indépendam m ent des infirmités qui accompagnent
la vieillesse, étoit atteinte d’une cécité c o m p lète; sa nièce
ne l’a pas quittée, lui a prod igu é ces tendres soins qui c o n
solent les m alheureux et les dédom m agent des privations.
Julien D e j a x , au c o n traire, s’occupoit peu de sa tante
�( 6 ]
.
pendant q u ’elle a vécu ; il n y pense que depuis qu ’elle
est m o r t e , parce qu ’ il est très-h a b ile à succéder. Il lui
sera sans cloute diilicile d’attaquer des libéralités que les
lois autorisent : mais il fait rém unération des ventes que
la clame T a rtel a consenties ; il est donc essentiel de les_
rappeler.
L e 31 août 1 7 9 1 , le cit. D albine se rendit adjudicataire,
au ci-devant district de B rio u d e , de deux maisons natio
nales, m oyennant la somme de 2 ,g 5 o fr. ; et l’adjudication
lui fut faite au nom de M arie D e ja x , veuve Tartel.
L e 26 floréal an 2 , cette dernière subrogea A g n ès
D e ja x , autorisée de so a m a r i, à l’effet de ces deux adju
dications, à la charge par elle de payer 1,960 francs q u i
étoient encore dus à la nation ; de payer le montant d’un
devis qui avoit été d o n n é p ou r quelques réparations; et
m oyennant le rem boursem ent qui fut fait de deux sommes
qui avoient déjà été payées par la dame T a r t e l; savoir,
celle de 1,221 fr. dJune p a r t , versée à com pte du prin
cipal ou intérêts dans la caisse du r e c e v e u r , et celle de
'1,200 fr. pour les réparations déjà faites.
. L e 24 vendémiaire an 5 , la dame veuve Tartel a vendu
a R o bert G ro zu -G iza g u ct, é p o u x d’^ n n e -M a rie D albin e,
sa petite-nièce, un domaine appelé de VW.elieües, l’a su
b ro g é à une vente nationale de partie d’1111 domaine appelé
le P o u x , et lui a également cédé les meubles qui garnissoient ce domaine de V azelicttes, dont l’inventaire est
«
annexé au contrat.
Celte vente est faite sous la réserve de l'usufruit de tous
les objets vendus et des bestiaux du dom aine, moyennant
la s o m m e de 2Ô,ooo IV. qu ’elle reconnoît avoir reçue
comptant lors çle la vente,
�( 7 ) r
t '
L a clame veu ve T a rte l est décédée le I er. vendémiaire
an 9 , c’est-à-dire, q u ’elle a survécu quatre ans à la vente
par elle consentie au profit de R o bert Croze de Gizaguet.
A p rè s son décès, les intimés espérèrent, pendant quel
que tem ps, que le cit. D ejax n’ éleveroit aucune contesta
tion ; il sernbloit se rendre justice : il nomm a son arbitre,
lit estimer les fonds, et on procéda à l’inventaire du m obi
lier; cet inventaire fut écrit par son fils en sa présence.
Mais bientôt il changea d’opinion. Il éludoit toujours
les propositions qui lui étoient faites : la dame D a lb in e
se vit contrainte de le faire citer p o u r procéder au par
tage des biens délaissés par la dame ve u v e Tartel.
C ’est alors que le cit. D eja x manifesta ses intentions
hostiles. Il demanda d’abord la nullité de la donation faite
p ar la tante c o m m u n e , le 17 germ inal an 2 , du sixième
de tous ses biens au profit des enfans de la dame D a lb in e,
sa nièce ; 20. il attaqua l’acte de subrogation de floréal
an 2 , au profit de la dame D albine ; 30. il conclut à la
nullité de la vente faite au profit du cit. R o b e rt CrozeG iz a g u e t, le 24 vendém iaire an
5 ; 4 0. il soutint la nul
lité du testament du 9 messidor an 8 , qu i attribuoit à la
dame D albine la m oitié des biens de sa tante, en préciput;
5 °. il prétendit que la dame D a lb in e , épouse M o n t b r iz e t ,
devoit lui faire raison des arrérages d’une rente d’un seticr
seigle, faisant moitié d’une rente de deux setiers par elle
perçue
d’un nom m é P o u g h o n de R e illa c , tant avant
q u ’après le décès de la dame Tartel ; 6°. il conclut à ce que
la dame D albine fût tenue de déposer, entre les mains de
tel notaire qui seroit com m is, tous les titres, papiers et
docuinens de la succession, p our que chacune des parties
put en prendre co m m u n ica tio n , ainsi
qu’elle
aviseroit.
�,
.
c 8 ) .
.
Il prétendît que la dame D albin e devoit demeurer cau
tion de toute prescription qui auroit pu s’opérer depuis
le décès de la tante com m une jusqu’au dépôt des titres
de créance ; il demanda q u ’elle fut tenue de faire raison
de tous les arrérages de rente , b a u x à fe r m e , et gén é
ralement de tout ce q u ’elle peut avoir perçu des créances
dépendantes de la succession ; que tous les biens meubles
et im m e u b le s, effets , créances , composant cette succes
sion , m êm e
ceux dont la dame T a r te l avoit disposé
entre-vifs, en faveur de ses héritiers de d r o i t , fussent
rapportes à la masse com m une par les détenteurs, avec
restitution de jouissances et intérêts, depuis le décès de
la dame T a r t e l , jusqu’au partage effectif,
, E nfin il conclut subsidiairem cnt, dans le cas où tout
ou partie des actes attaqués ne seroit pas a n n u llé , et q u e ,
par l’effet de ceux co n servé s, ou de tout autre disposi
tion non contestée , plus de la m oitié des biens de la
dame T artel se trouveroit absorbée , il fût ordonné que
les dernières dispositions de la dame T artel seroient re
tranchées jusqu’à due concurrence , de manière qu’il
restât toujours à diviser la m oitié des biens meubles'et
immeubles composant cette succession.
L e cit. D ejax , en expliquant ses p réten tion s, se fondoit , p ou r la nullité de la donation de germinal an 2 ,
du sixièm e des bien s, i° . quant aux meubles, sur ce
que cette donation n’en contenoit pas l’é ta t, qu oiqu ’il
n’y eût q u ’ une tradition feinte.
P a r rapport aux im
m eu b les, il prétendoit que la loi du 17 nivôse ne p ermettoit pas la forme des donations entre-vifs; et que la
d(ime T artel ne p ou voit disposer du sixième de ses b ie n s ,
que
�(9)
que par donation p our cause de m o r t , ou par testament.
L a subrogation de floréal an 2 , étoit suivant lui une
libéralité déguisée , faite au profit d’une successible. L a
dame Tartel avoit ép ro u vé une lésion énorm e, en ce qu’elle
avoit acquis dans un temps 011 les assignats perdoient peu
de leur v a le u r; tandis qu’ils étoient discrédités à l’époque
de la subrogation , en supposant m êm e q u ’elle en eût
reçu le rem bo u rsem en t, ainsi que celâ a été dit dans l’acte.
Il prétendoit encore que cette maison, avoit acquis une
grande valeur dans l’in te rv a lle, par la démolition de plu
sieurs bâtimens
nationaux , qui auparavant embarras-
soient ou obscurcissoient les avenues de la maison.
L a vente du domaine de Vazeliettes éloit aussi une
donation d é g u isé e , faite à vil p r ix au gendre d’ une successible, h un h o m m e dont la fortune ne lui permettoit
pas de payer 2Ô,ooo ft\ comptant. A l’en te n d re , cette
vente étoit faite sans nécessité, sans ca u se, sans em ploi
du p r ix , qui auroit du se trouver dans sa succession,
q u atre ans après son décès.
L e testament du 6 messidor an 8 étoit encore n u l ,
parce que le notaire n’ avoit pas indiqué p o u r quel dé
partem ent il étoit établi; l’un des témoins n’avoit pas
signé son vrai nom ; ce m êm e témoin étoit parent avec le
gendre de celle au profit de laquelle les dispositions étoient
laites ; enfin , on n’ avoit pas suffisamment désigné le
huitièm e témoin , qui avoit été appelé h raison de la
cécité de la testatrice.
L e cit. D e ja x , dans toutes ses demandes, a eu le désa
grément de ne pas trouver de son avis des cohéritiers qui
avoient le môme intérêt. L a dame v e u v e P cyronn et a
B
�IÔ )
demandé acte de ce qu'elle consentait au partage de la
succession de la dame v e u v e T a r t e ! , conform ém ent à son
testament; 2°. de ce q u ’elle n ’entendoit point contester
la vente du domaine de Vazeliettes et dépendances, faite
au profit de R o bert C ro z e -G iz a g u e t, ni aucune des do
nations partielles faites par la dame veu ve Tartel.
L es petits-neveux, donataires du sixièm e, ont consenti
que la donation demeurât sans effet quant au mobilier ;
mais ont demandé son e x é c u tio n , par rapport aux im
meubles.
L a dame D a lb in e , de sa p a r t , a soutenu que la subro
gation faite à son p r o f it , le 27 floréal an 2 , n’étoit pas
du nom b re des actes prohibés par la loi*, que toutes les
circonstances en prouvoient la sincérité ; que la loi ne
défendoit pas de v e n d r e , et q u ’elle validoit ce qu ’elle
n’annulloit pas.
•
.
A l’égard du testament, le notaire avoit désigné le lieu
de sa résidence, qui est la ville de B r io u d e , et cette dé
signation étoit suffisante. 20. L es noms et prénom s de
jVlontbrizet-d’A u v e r n a t , un des tém oins, étoient expli
qués dans le testament. Dans tous les actes publics et
p r i v é s , jamais ce tém o in -n ’avoit signé d’autre nom que
celui de d’A uvernat. Ce témoin n’est pas parent de l'hé
ritière instituée. L a parenté n’est pas une cause de p ro h i
bition. E t l’ordonnance de 1735 ne dit pas qu'on désignera
nom inativem ent le huitième tém oin, qui doit être appelé
p o u r cause de cécité.
L a dame veuve M ontbrizet , com m e tutrice de ses
enfans, a o b s e rv é , relativement à la vente du domaine
de V azeliettes, qu’elle étoit consentie en laveur du mari
�( 11 )
d’ une personne non successible. EUe a p ro u v é que la
prohibition rigoureuse de la loi ne s’étendoit q u ’à ceux
qui étoient appelés au partage de la succession. Son m ari,
acquéreur , étoit d'ailleurs étranger à la dame T artel :
les b ie n s , qu’elle lui transm ettoit, à titre de v e n te , passoient à tout autre famille que la sienne. Il est invrai
semblable q u elle l’eût p ré fé r é , si elle avoit eu des in
tentions libérales. Croze-Gizaguet tro u vo it, dans sa for
tune , et dans son ertiploi de capitaine de gendarm erie ,
des ressources suffisantes p o u r payer le montant de cette
acquisition : la dame T a rte l avoit survécu quatre ans à
cette vente , et devoit naturellement en avo ir em p lo y é
le p rix à ses affaires ou à ses besoins, dans un fige sur
tout où ils se font plus i m p é r i e u s e m e n t sentir, et où les
i nf irmit és augmentent nécessairement les dépenses.
Ces défenses si simples devoient faire présager à Julien
D e ja x , quelle seroit l'issue des prétentions de ce collatéral
avide. L e jugement dont est appel « l'a débouté de
» sa demande en n u llité, tant contre la subrogation à la
» vente des deux maisons nationales, consentie par la
» dame D e ja x , veuve T a rtel, au profit de la dam eD albine,
« par acte du 26 floréal an a , que de la demande en
» nullité de la yente du domaine de Vazeliettes, au profit
» de llo b e r t Croze-M ontbrizet, du 21 vendémiaire an
5,
» et encore de celle intentée contre le testament de la
» dame T a r t e l, en date du 6 messidor an 8.
» Il est ordonné que les v e n te , subrogation et testa
ment sortiront leur plein et entier effet j il est donné
» acte aux parties de ce qu’elles s’en réfèrent à leur
» qualité d’héritiers, et offrent de rapporter tout ce qu ’elles
B 2
�( 12 )
'
» tiennent à titre de libéralité particulière, et c e , de la
» 'm ê m e manière q u ’elles l’ont pris ou dû le recevoir. E n
» conséquence il est dit que , par experts nommés par les
»
»
»
»
parties ou pris et nom m és d’o ffic e , il sera procédé au
partage des biens meubles et immeubles provenans
de- la succession de la dame T a rtel , pour en être
délaissé à la dame D a lb in e , héritière testam entaire,
» une m oitié en cette q u a lité , et un tiers dans l’autre
» moitié com m e successible \ le second tiers au cit. D e ja x ;
» et le dernier à la dame D e ja x , veuve P eyro n n et ;
» auquel partage chaque partie rapportera les jouissances
» perçues dans les immeubles , suivant l’estimation qui
» en sera faite par les e x p e rts , et les in té rê ts , revenus
» et autres objets dépendans de la succession, sauf tous
» les prélèvem ens de droit que chacune d'elles aura droit
» de faire.
» Il est ajouté que dans la m oitié p o u r l’institution
» de la dame D a lb in e , sont comprises toutes les facultés
» de disposer de la dame T a r t e l, faites depuis la p u b li»
»
»
»
»
cation de la loi du 17 nivôse an 2 : en conséquence
la disposition du sixième en faveur des enfans D albine
dem eure sans effet quant à p résent; ils sont mis de
leu r consentement hors d’instance p our ce c h e f, sa u f
h se p o u rv o ir contre leur m ère ainsi q u ’ ils aviseront.
» Il est ordonn é q u e , dans le délai d’ un mois à com pter
» de la signification du ju gem en t, le cit. D eja x sera tenu
» de faire faire inventaire du m ob ilier, papiers et titres
» de créances laissés par la dame T a rtel à l’époque de
» son décès, si m ieux il n’aime s’en rapporter à l’état
» qui en a été dressé par son f ils , laquelle option sera
» censée faite le délai passé.
�( 13)
» Il est encore ordonné que la dam e G izaguet sera
» tenue de rapporter le contrat de rente annuelle d’un
» septicr seigle, qui fait partie intégrante de la succession
» de la dame T a r t e l , et à en rendre compte suivant le
» p rix des pancartes des années par elle perçues depuis
» l’ouverture de la succession , sauf au cit. D eja x de
» faire raison de ce qu’il a touché de la m êm e rente.
» Sur le surplus des demandes respectives, les parties
» sont mises hors de jugem ent; e t , en cas d’a p p e l, il est
» ordonné que tous les papiers et titres de créances
» dépendans de la succession de la dame T a r t e l , seront
» déposés ès mains du cit. B e lle m o n t, notaire public de
» B r io u d e , désigné par les parties, et com m is par le
» tribunal ; et le cit. D e ja x est condam né au x dépens
» envers toutes les parties. »
Il est bon de connoître les motifs qui ont déterm iné
ce jugem ent ; on verra q u ’ils sont tous m arqués au coin
de la sagesse, de l’équité et de la raison.
E n ce qu i touche la subrogation faite au profit de la
dame D albine , « il est dit que cette form e d’acte n’a
» point été interdite par la loi du 17 nivôse an 2 ; que
» le lég isla teu r, en interprétant dans ses décisions sur
» diverses questions relatives à ses effets, a décidé que
» ce qui n’étoit pas annullé par la loi étoit validé par
» elle.
» Q u ’en anéantissant les ventes h fonds perdu entre
» successibles, la loi n’y a pas compris les autres transac55 tions com m erciales, contre lesquelles on n invoque ni
» lésion ni défaut de payement ; que l’acte p rou ve que
M le prix dont il porte quittance a été c o m p té , et que
�( M )
» le surplus l’a également é t é , ainsi q u ’il résulte des quit'» tances rapportées. »
E n ce qui concerne la vente du domaine de V azeliettes,
faite au profit de R o b e rt Croze de G izag uet, on remarque
« que R o b e rt G izaguet n ’étoit point dans la ligne de
» ceux sur qui frappe la proh ibition des nouvelles lo is ,
» qu ’il n’étoit ni successible ni m êm e é p o u x de successible.
» O n observe que la jurisprudence constante du tri—
»
»
»
»
bunal de cassation, est de ne point ajouter à la rigueur
des prohibitions des lo is, mais au contraire de se re n
ferm er dans le texte précis de ces p ro h ib itio n s, sans
les étendre,
» L es ventes pures et simples et à p rix fixe ne sont
» pas interdites en faveur des successibles ; et quand
5) bien m êm e R o b e rt Croze-G izaguet eût été successible
» de la dame T a r t e l , la vente n’en seroit pas moins valide
» et inattaquable, tant qu ’aux termes précis des lois on
» ne l’argueroit pas de fraude ou de lésion. Enfin il
» est d i t , dans cet a c te , que le p rix en a été com pté
» présentement à la dame T a rtel ; et dès-lors on ne peut
.» élever aucun doute sur ce point de fait. »
E n ce qui touche ,lcs nullités résultantes contre le tes
tam en t, « A ttendu que la lo i, sur l’organisation du nota
» r i a t , astreignant les notaires A. indiquer le lieu de
» leur résidence et du d ép a rtem en t, n’a eu en vu e que
» d’em pêcher les Iraude’s qui pourroient être commises
» par des hommes qui usurperoient faussement la qu a
» lité de n o ta ire, ou par des notaires m ê m e , recevant
» des actes hors de l’arrondissement p ou r lequel ils sont
p
institués; mais q u ’un n o taire, en indiquant le lieu de
�( i 5 )
'» sa résid e n c e, fait connoître assez qu’ il ne sort point
» des limites qui lui sont fixées, et satisfait suffisamment
» à ce que la loi lui impose; que s’il falloit annuller les
» actes dans lesquels la désignation du départem ent est
» omise,-ce seroit p orter le trouble et la confusion dans
» la société.
» A tten du que d’A u v e rn a t , l ’un des tém oins, a été
» désigné par le notaire sous les noms et prénom s portés
» en son acte de naissance, de Jean-Baptiste C ro ze-M o n t» brizet-d’A u v e r n a t , et que par sa signature d’A u v e rn a t
» il a suffisamment attesté sa présence audit acte.
» A tten du que dans tous les actes généralem ent quel
» conques il ne signe que d’A u v e r n a t , et qu ’il n’est connu
» dans le public que sous ce nom.
» A tten du que sa parenté avec la fille et les petits
» enfans de l’héritière testamentaire ne dérive que du
» lien d’affinité , ne suffit point p o u r annuller un acte
» auquel il n’est appelé que com m e témoin.
» A tten du que la loi n’impose point aux notaires l’obli
» gation de désigner nominativement lequel des tém oins
» a été appelé en huitième par le m o tif de la cécité de la
» testatrice, et qu’il su ffit, aux termes de l’ordonnance
» sur les testainens, que le nom bre des témoins requis
» soit constaté.
» A tten du que le cit. D eja x ne demande point à être
» admis à p ro u ve r le dol et la fraude dans les actes qu’ il
» attaque , ni que ces actes aient été l’effet de la sug» gestion ou de la violence.
» A t t e n d u que les successibles ne peuven t cum uler
» les qualités de donataire et d’héritier.
�(' i 6 )
» A tte n d u que la faculté de disposer étant bornée à
» la m o itié , par la loi de germ inal an 8 , toutes les dis
.
» positions qui exeéderoient cette quotité doivent y être
» restreintes. »
T els sont les motifs qui ont déterm iné la décision des
prem iers ju g e s ; ils sont certainement très-ju dicieu x. Il
s’agit d’examiner si les objections du cit. D e ja x , qui a eu
le courage d’interjeter appel de ce ju g e m e n t , peuvent
balancer ces motifs , et faire annuller des conventions,
légitimes.
D o n a tio n du 17 g erm in a l an 2.
L e cit. D ejax d’abord p ou vo it s’épargner une discus
sion oiseuse sur la validité ou la nullité de cette dona
tion du six ièm e , faite au profit des petits-neveux de la
dame T artel. L e jugem ent dont est appel ordonne que
cette disposition demeurera sans e i f e t , et la réunit h la
disposition de m o it ié , faite au profit de la dame Dalbine.
Mais s i , en thèse-générale , on devoit exam iner le
mérite de cette donation , il seroit aisé d ’établir q u ’elle
doit avoir son e x é c u tio n , puisque les donataires ne sont
point successibles de la donatrice.
E n effet, l’article X V I de la loi du 17 nivôse perm et
de disposer du dixième de son bien en ligne directe, ou
du sixième en ligne collatérale, au profit d’autres que
des personnes appelées p a r la lo i au partage des s u c
ce ssio n s: d o n c, on ne peut tirer d’autre conséquence de"
cet article, sinon que tous ceux qui ne son t p o in t appelés
au 'p a rta g e sont susceptibles de recevoir la disposition de
cette quotité.
Les arguinens les plus simples sont les
meilleurs j
�C *7 )
. •
meilleurs ; toutes les subtilités , tous les raisonnemens
captieux disparoissent devant les termes de la loi , qui n’a
exclu que ceux qui sont appelés directement au p artage,
et on ne doit point étendre les prohibitions.
O n trouveroit encore la preuve , que le descendant du
successible , loin d’être exclu par la l o i , est au contraire
capable de recevoir. L ’article X X I I lui permet de profiter
de la retenue , quoique son ascendant prenne part â la
m em e succession.
•
L o in de nous ces discussions inutiles sur l'incapacité
des enfans! P o u rq u o i rappeler cette m axim e a n cienne:
P a t e r et J iliu s una eadernque person a ? ' V o u d ro it - on
iaire concourir l’ancienne législation avec la n o u velle?
lorsque la loi veut q u ’elles n’aient plus rien de com m un
par la suite, ainsi que cela est dit textuellement par la
réponse à la question 47 de la loi du 2a ventôse an 2.
Si l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse a com pris les
descendans du successible dans la prohibition des ventes
h fonds perdu , le m otif en est assez exp liq u é dansJa loi
du 22 ventôse. Ces ventes à fonds p e r d u , dit-on, sont
une source trop fréquente de libéralités indirectes. C ’est
une exception qui confirm e la règle. Ces sortes de vente
m êm e ne sont annullées qu’autant qu ’elles seroient sus
pectes ; elles peuvent être validées par le concours ou
le consentement des autres successibles. M ais précisément,
parce que la loi a com pris dans cet article les descendans
du successible , qu ’elle ne les a point nommés dans les p ré
cédons , on ne doit pas raisonner d ’ un cas à un autre ,
ni exclure d’oiïice ceux que la loi n’a pas déclarés inca
pables.
c
�Il
C 18 )
faut au surplus laisser au .cit. D ejax le plaisir de
dire que cette donation est nulle pour le mobilier. L ’ar
ticle X V de l'ordonnance de 1731 le veut ainsi ; les intimés
y ont consenti ; enfin cette donation n’a aucun effet par
rap port au cit. D e ja x : pourquoi donc a-t-il pris tant de
p e in e , p o u r discuter un point qui n’est pas con testé,
et p o u r lequel il n’ép ro u v e aucune perte ?
Subrogation
du 17 flo r é a l an 2.
P a rc c t acte, la dame veuve T a rtel a subrogé la dame D a l
bine sa nièce à une acquisition nationale. L e p r i x ¿toit
encore dû en majeure p artie; cette subrogation n’est (aile
q u ’c\ la charge de verser dans la caisse du district tout
ce qui n’a pas été p ayé; elle est laite sans aucune garantie ;
les sommes que la daine veuve T a rtel avoit payées sont
infinim ent m od iqu es; et il faut a vo ir une grande manie
du procès p o u r attaquer une subrogation (pii préseule
aussi peu d ’ importance. C e p e n d a n t, le cit. D ejax épuise
les autorités, se livre à une intempérie de citations pour
p r ouver la .simulation de cet a c te ; il met ;\ contribution
les lois et les auteurs , dans une matière où il y a peu
de décisions certaines, et où tout dépend des circons
tances ou des présomptions.
L e savant R i c a r d , dans son traité des d onations, p re
m ière partie, chap. III,>ect. X V I , nomb. 7 ^ 7 , dit bien
qu'une vente étant passée entre personnes qui sont p ro h i
bées de se d o n n e r ,
peut être prise pour un awinta^e
in d ire ct, et que des présomptions violentes puurroirnt
quelquefois suffire : com m e si le donateur veuoii à décéder
�.
( 19 )
.
bientôt après une semblable vente simulée , et que le
p rix fût considérable , sans qu ’ il se trouvât dans sa m ai
son aucune somme proportionnée aux deniers q u ’ il devroit avo ir reçu s, cl que d’ailleurs il ne parût pas qu’ il
en eût fait aucun em ploi dans ses a lia ires; avec quoi
qu ’autre conjecture résultante du fait particulier. Ricard,
com m e on le vo it, ne se décide pas légèrem ent à prononcer
la nullité d’un contrat de vente. L a présom ption la plus
forte suivant l u i , c’est lorsque le vendeur décède b ien
tôt après : on peut alors supposer aisément que ce v e n
deur , m ortellem ent a ttein t, cherche à transmettre ses
p r o p r ié t é s , A titre gratuit, à celui q u ’il préfère ou qu’ il
affectionne le? plus. T e l est le m alheureux effet des lois
prohibitives, qu'on cherche toujours à les é lu d e r, surtout
clans ces derniers momens. Mais , il n’est pas dans la na
ture qu'on cherche A se dépouiller , lorsqu’on a l’es
poir de jouir encore : 011 préfère souvent un héritier ù
tout au tre, rarement on le préfère A so i-m êm e; e t, parm i
nous, les donations entre-vifs deviennent infiniment rares.
L t peut-011 ici argum enter de présom ptions, de fraude
ou de simulation , lorsqu’on
voit (pu: la dame v e u v e
1 arlcl a subrogé en l’an 2 , et n’est décédée q u ’en l’an 9 ;
lorsqu'il est établi, que le p rix , ou au moins la majeure
partie de la subrogation , étoit encore dû par l'adjudica
taire; qu'il a été payé à la caisse national-1 par la su bro
g é e : ¿Alors, sans d o u te , doivent disparoitro toutes ces
Conjectures , tous ce* mov^’n» 1 anauv de simulation ,
qu'on v ou droit faire ré'ult-'r de la loi A W < /, ou d<> l’aut n r it'• 1; Papou , qui , même sur la 1 n Sufi>icius , 11c
P- • <* pi.; pour avoir tj'ijo u i'j dit la v o n t* .
C 2
�'
( 20 )
L e célèbre Cochin plaidoit sans cloute p our un hom m e
qui com m e D e ja x ne revoit que simulations; et le plai
doyer d’ un orateur fameux peut donner de grandes leçons,
et apprendre à bien discuter; mais on ne doit pas le citer
com m e un ouvrage doctrinal.
D ’ailleurs si la loi du 17 nivôse a défendu de d o n n e r,
elle n’a point défendu de ve n d re; et le législateur veut
bien nous apprendre lui-m êm e que la loi valide ce qu’elle
n’annulle pas.
V e n te du 24 vendém iaire an
5 , au profit du cit. G iza g u et.
Cette vente est faite en l’an
5 au profit d’un étranger
ù la venderesse ; mais cet acquéreur étoit le gendre de
la dame D albine ; et com m e il est dans le système de
D e ja x d’étendre les prohibitio n s, il veut les porter à
l’infini : quoique l’objet vendu passât à une famille étran
gère à la dame T a r t e l , qu ’il appartînt aux héritiers M ontbrizet plutôt q u ’aux héritiers D a lb in e , cependant D eja x
veut encore que cette vente soit simulée.
L e tribunal de cassation n’a pas pensé com m e le cit.
D e j a x , lors d’un jugement du 6 prairial an 1 0 , qui a
confirm é une vente à fonds perdu , faite h l’ascendant
d’un successible. Samuel Dalau avoit vendu tous ses biens
a M arie B o n n a u , veuve D a la u , sa belle-sccur, moyennant
une rente viagère. Samuel Dalau n’avoit point d’enfant,
et les enfans de M arie Bonnau , ses n e v e u x , étoient du
nom bre de ses successiblcs. L es autres héritiers atlaquoient
celle vente de nullité; ils se fondoient sur la disposition
de l’art. X X V I du la loi du 17 nivôse; ils rappcloient
�( 21 )
toutes les autorités qu’invoque le cit. D e ja x , et ne manquoient pas de dire que les arrêtsavoient toujours confondu
le père avec le fils, d’après la maxime : P a t e r et f û i u s
nna eadem quc persona. L e tribunal d’appel de P oitiers,
sans égard pour cette m axim e , avoit validé la vente :
pou rvoi en cassation; e t , com m e le tribunal de cassation
apprend qu’on doit restreindre les lois proh ibitives, il
est à propos de rappeler les motifs qui l’ont déterm iné
y rejeter le pourvoi.
« Considérant que l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse
» an 2 ,■est p ro h ib itif, et ne peut par conséquent s’éten» dre d’un cas à un autre.
» Considérant qu ’il ne com prend que les successibles
» et leurs descendans, et que s’il y a quelques i n c o n v é » niens de ne l’a vo ir pas éte n d u , soit aux descendans,
» soit à l’époux en com m unauté avec le successible, ou
» avec les descendans du successible, il y en auroit encore
» davantage, à c r é e r , sous le prétexte d’an alogie, des
» prohibitions que la loi n’a pas établies.
» Considérant que créer ces nouvelles prohibitions, ce
» seroit ( quelque justes qu ’elles puissent être ) entre
» prendre sur l’autorité législative ; ce q u i , dans l’espèce,
» seroit d’autant moins pardonnable, qu ’il n’y avoit pas
M de question plus controversée avant la loi du 17 nivôse,
M que celle de l’étendue des prohibitions : d’où il suit quç
t e s t en connoissance de cause que les législateurs l o n t
M restreinte expressément aux successibles et à leurs desM ceudans.
a Considérant enfin qu ’ il ne peut pas
yaVoir ouverture
» a cassation d’un j ugement auquel on ne peut faire d’autre
�(
22
)
» reproche que d’etre conform e à la lettre de la l o i , etc.
T els sont les véritables principes en matière de p ro h i
bition. Cette décision de l’autorité normale doit servir
de règle invariable en cette matière. Il en résulte que
R o b e rt Croze - Gizaguet n ’étoit pas personne p ro h ib é e ,
quoiqu'il fût r é p o u x de la descendante du successible ;
qu ’il p ou voit traiter, acquérir d e là dame v e u v e T a r te l:
e t , en écartant aussi victorieusement la prohibition , on
fait disparoître toute idée de simulation ou de déguise
ment du contrat.
- X/es conventions doivent être généralement exécutées:
tous les efforts des tribunaux doivent tendre à valider
les actes plutôt qu’à les ann uller, U tp o tiù s a ctu s v a le a t,
qucim u t y erea t. N ulle présomption de fraude dans la
vente dont il s’agit: celle qui a si fortement touché R i c a r d ,
la m ort prochain e du v e n d e u r , ne se rencontre pas dans
l’espèce particulière , puisque la dame T artel a survécu
quatre ans à cette vente. E t s’ il falloit annuller tous les
contrats qui portent quittance, il faut convenir qu’il n’y
auroit plus rien de solide ni de certain parmi les hommes.
Dans les mutations actuelles, presque toujours les con
trats portent quittance , quand bien m êm e le prix ne
scroit pas entièrem ent payé. O n y supplée par des effets
ou des reconnoissances particulières, p o u r éviter de plus
grands droits.
Ici le p rix principal n’est pas e x o rb ita n t, et ne choque
en aucune m anière la vraisemblance. D e quel droit le
cit. D eja x voudroit-il scruler la solvabilité ou les res
sources du cit. Gizaguet ? N est-il pas notoire qu ’il appartenoit à une famille rich e, q u ’il avoil uu patrimoine con-
�C 23 )
sid érable, un em ploi dont les appointemens étoient de
3,ooo francs par ann ée? ne sont-ce pas là des ressources
suffisantes p ou r payer une somme de 2Ô,ooo francs? pourroit-on , sur des prétextes aussi légers, dépouiller une
famille , des o rp h elin s, d’un bien légitimement acquis ?
quiconque oseroit le penser , n’auroit aucune idée des
principes du droit et de l’équité.
,
L e cit. D eja x , dans son aveu g lem en t, va jusqu’à cri
tiquer les intentions libérales et bienfaisantes de la dame
T a r t e l; il rappelle avec affectation ses dispositions anté
rieures et subséquentes : p ou rqu oi a - t - i l oublié celles
dont il a été l’o b je t, et dont il étoit si peu d i g n e , puis
q u ’il attaquç la m ém oire de sa bienfaitrice ? N ’a-t-il pas
reçu d’elle , en se m a ria n t, une somme de 6,000 francs ,
avec tradition réelle ? tandis que les libéralités faites au x
autres ont toujours été grevées de l ’usufruit envers la
donatrice.
P o u rq u o i n ’a-t-il pas dit qu’il étoit donataire universel
de deux de ses o n cle s, qu ’il a profité exclusivement de
leurs d épouilles, et que la dame D albin e , sa s œ u r , en
a été p r iv é e ; que par ces donations il a tro u vé le moyen,
de r é u n ir , en majeure partie , les biens de J u lie n , son
o n c le , p rem ier du n o m ? Il a craint sans doute de justes
reproches d’avidité , lorsqu’il se m ontre aussi jaloux de
ce que sa sœur a reçu la récompense des soins les plus
tendres et les plus assidus. Dans son hu m eur in q uiète,
il va jusqu’à reprocher les quittances et la décharge que
1Q dame ve u v e T a rtel a données à sa nièce pour la gestion
de ses biens ou la perception de ses
r e v e n u s.
T artel devoit-elle quelque chose sur
ses
Mais la dame
revenus au cit.
�CH )
#
D ejax ? n’étoit-elle .pas au moins la maîtresse d’en dis
poser à son g r é ? Si la dame D albine a pris la précau
tion de se faire donner une décharge, c’est q u ’elle avoit
la procuration de sa tante, et qu ’elle devoit crain d re,
avec raison, que son frère lui demandât com pte de son
m a n d a t; mais on ne voit rien là que de très-ordinaire.
L a dame T artel a pu dissiper ses revenus com m e ses capi
taux , sans que personne eût le droit de critiquer sa con
du ite; elle en a fait tel em ploi que bon lui a sem blé; et
ce n est pas la p rem ière fois que des collatéraux avides
ont été trompés dans l’espoir qu ’ils avoient de trouver
des capitaux ou des deniers à la m ort de celui dont ils
convoitoient la succession.
L a coutum e de N orm andie ne les leur a pas fait rendre;
et l’article C C C C X X X I V , quia servi de base à un jugem ent
du tribunal d’appel de R o u e n , rapporté au m ém oire
du cit. D ejax , ne reçoit aucune application à une suc
cession ouverte en droit écrit.
T esta m en t du 6 m essid or an 8.
L e notaire qui a reçu ce testament , en dé>ignant la
ville de B rio u d e , a-l->il dû désigner le département dans
lequel il éloit d om icilié? A -l-il dû faire mention du nu
m éro de sa p atente?
O n défie le cil. D ejax de citer
aucune loi qui o b lig e , à peine de n u llité, les notaires
d.; désigner leur département ou lu num éro de la pa
tente: ils n'ont m êm e jamais pratiqué cet usage, lorsqu’ ils
reçoivent dans les villes de leur résidence, et pour des
personnes qui y soul domiciliées. Lu désignation du dé-
parlem ent
�2 5
.
partement ne seroit utile q u ’autant qu ’ on recevroit un
*
(
}
,
acte p ou r un tiers étranger au département dans lequel
il transige ou fait un testam ent, parce q u ’il peut y a v o ir
des formes ou des règles diftérentes de tester d’ un dé
partement à l’autre : m ais, dans l'esp èce, cette mention
n ’avoit aucun bu t; e t , com m e l’ont o b s e r v é les premiers
juges, la désignation de la résidence à B rio u de étoit sans
Contredit suffisante. L es huissiers seuls sont astreints par
les lois à rappeler le n u m é ro de leur patente : les no
taires auroient dû être dispensés d’en prendre ; et la
nouvelle loi qui organise le n o taria t, les en dispense
expressément.
L e tém oin M o n tb rizet d ’A u v e r n a t , en signant sim
plem ent ¿ L u v e m a t, ne l’a fait que d ’après l’usage cons
tant où il est de signer ainsi; c’cst ainsi q u ’il a signé le
contrat de mariage de son frè re ; c’est ainsi q u ’ il a signé
tous les actes publics ou p riv é s , depuis q u ’il a l’exercice
de ses droits; et les intimés rapportent un acte de no
toriété qui le constate, et qui apprend m êm e qu ’il n*est
pas connu ni désigné sous d’autre nom.
O n a satisfait à tout ce qu’exige la loi qui veut q u ’on
prenne le nom de sa famille, en rappelant dans les qua
lités des témoins le p rénom et le nom de la famille du
témoin d’Auvernat.
L a parenté de ce témoin avec R o b e rt C ro ze-G iza g u ct,
ép o u x de la petite-nièce de la testatrice, n’est point une
incapacité •. F u r g o l e , des testament, chapitre I I I , section
I I , nom bre 1 0 , nous donne en principe que les parens
collatéraux peuvent être témoins aux testümens de leuré
parens, et qu’ on doit dire la m êm e chose des parons de
D
�l’ héritier; car le paragraphe X , aux instituts, de testam .
ordin. n’ exclut du tém oignage le père et les frères de l’hé
r itie r , q u ’autant q u ’il est en la puissance de son p è r e ,
et que ses frères sont aussi en la puissance de leur père
co m m u n ; à plus forte raison le parent du parent de l’hé
ritière p eu t-il être tém oin dans un testament.
L e cit. D e ja x n’insiste pas fortement sur ces singuliers
m oyens de nullité ; mais il se plaint de ce qu ’ en sup
posant ce testament valable, les prem iers juges n’ont pas
com pris dans la disposition de m oitié toutes les dispo
sitions faites antérieurement à la loi du 17 nivôse. C ’est
u ne erreur de sa p a r t ; et les prem iers juges ont sage
m ent restreint cette confusion aux dispositions faites de
puis la publication de la loi du 17 nivôse an 2.
P o in t de doute d ’abord p o u r les objets v e n d u s , qui
sont hors de la succession du testateur; et il doit en être
de m êm e p o u r les donations e n tr e -v ifs faites dans un
temps utile , parce q u ’une donation a le m êm e effet
q u ’une v e n t e ; elle dépouille le d o n a te u r, dès l’instant
m êm e : les objets anciennement donnés ne peuvent faire
partie d’une succession ouverte sous l’em pire des lois
nouvelles.
L e cit. D eja x a la prétention d’intéresser le public dans
]a décision de cette cause. O n ne voit pas trop com m ent
l ’ordre public seroit t r o u b l é , parce que le cit. D e ja x
n’auroit pas u ne portion égale dans la succession de sa
tante. Mais la société seroit b o u le v ersé e, si les fconventions des hom m es pou vo ien t être anéanties sous
des
prétextes futiles; si des ventes ou des mutations qu’il im
porte de faciliter et d’assurer ? pouvoient être annullées
�( 21 )
par des chimères ou des allégations de fraude. Ce seroit
porter atteinte au droit de p ro p r ié té , au droit le plus ch er
à l’h o m m e , de dispenser ses bienfaits, de récom penser le
m érite ou de p rotéger la foiblesse, si on s’écartoit jamais
du respect qu ’on doit avoir p ou r les volontés du défunt.
L e code civil nous rappelle sagement à des idées plus
saines, à des principes plus sages, en rendant aux testamens toute leur ancienne faveur. A u jo u r d ’ hui nous p ou
vons répéter cette m axim e des Rom ains : Q u id q u id legassit} lia lex esto !
PAGES
'
( de R io m ) a n c. ju r is c .
V A Z E IL L E ,
-RIO M de l'imprimerie de
L
a n d r i o t
,
avoué
.
seul imprimeur du
Tribunal d’appel. — A u 11.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dejax, Agnès. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
donations déguisées
donations
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Dame Agnès Dejax, et le citoyen Pierre Dalbine, son mari, juge au tribunal d'arrondissement de Brioude ; Joseph Dalbine, Marie Dalbine, et Anne-Marie Dalbine, veuve de Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, tant en son nom que comme tutrice de ses enfans ; tous intimés : contre Julien Dejax, homme de loi, habitant de la ville de Brioude, appelant d'un jugement rendu au tribunal de cette même ville, le 6 messido an 10.
Annotations manuscrites
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1771-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0228
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Vazeliettes (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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donations
donations déguisées
Successions
testaments
-
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04d76e4e9599152200cc722c2a6e3cb5
PDF Text
Text
M
É
M
O
I
R
E
P O U R
A n to in e
DUPIC,
a v o u é à A m b e r t , accusé d e c o m
p l i c it é de f a u x ;
C O N T R E
t r ib u n a l
Le
com m issaire
et le citoyen
du
gou vern em en t,
BARRIÈRE,
-poursuivant ,
plaintif.
C R I M I NE L
SPÉCI AL
duPuy-de-Dûme.
U
N avoué , en prison pour une accusation de faux , appelle
nécessairement sur lui l’attention publique. Son état est tout entier
dans le domaine de l'opinion, et elle exige qu'avant de se justi
fier devant ses juges, il donne publiquement le tableau de sa con
duite, quand il ne craint pas d'en rendre compte.
L e cit. D upic est accusé de complicité d ’un fa u x , com m is,
dit-on, par un huissier, en supprimant les copies d ’une notifica
tion de transcription à des créanciers inscrits.
L a participation du cit. D upic consiste dans la rédaction du
projet de cette notification , faite par lui sur papier lib re , et
rem ise, non pas à l’huissier , mais aux parties, q u i, à ce qu'il
paroît, se sont adressées à plusieurs huissiers pour les corrompre.
L e cit. D upic ignore si cette corruption a eu son e ffet , et
cette incertitude lui a fait rechercher le corps de délit dans la
procédure, dont copie vient de lui être remise. M ais, au lieu d ’un
original d ’exploit sans copies, il y a vu une copie sans original.
Barlhélemi R oussel, a-t-il d it, a donc fait usage de cet exploit
contre ses créanciers, et ceux-ci ont été privés de la faculté d’en
chérir. Mais non , R.oussel interrogé ignore lui-meme s'il y en
A
�( O
'
un; et tout ce qu’on voit de certain clans la procédure, c’est que
le cit. Barrière a voulu deviner qu’il y avoit un exploit faux ;
qu’il n’a pas même cherché à savoir si on le lui opposeroit pour
lui faire perdre ses créances , et qu’il a mieux aimé faire une
dénonciation, soi-disan t civique, sous le prétexte ridicule d’un
tort possible et imaginaire.
Quoi qu’il en so it, le cit. D upic est accusé , et dans les fers:
avec un état et une fam ille, il ne peut, sans doute, supporter que
très-impatiemment d’être compromis dans une querelle étrangère.
D 'autres c o n s id é r a t io n S ( peut-être l’affligeroient plus encore; mais
l’expérience d u malheur lui a appris qu'il laut toujours s’attendre
au pire, et que dans les événemens majeurs on doit moins compter
sur les hommes que sur l a ju stice, le temps ou le hasard. Il lais
sera donc les réflexions et les plaintes, pour ne s’occuper que des
causes de l’accusation dont il est victime.
7 .
F A I T S .
L e cit. D upic avoit été chargé , comme avo u é, de plusieurs
affaires pour le cit. D u m a ret, de L y o n , qui a des propriétés à
Saint-G erm ain-l’Herm.
11 a eu aussi la confiance de Barthélemi R oussel, cultivateur-,
passant pour avoir une très-grande aisance, et auquel on ne
donnoit pas une mauvaise réputation.
D um aret et Roussel eurent un procès pour arrérages de ferme,
pendant le papier monnoie. L e tribunal d’appel ordonna que
D u m a ret, dem andeur, scroit interrogé sur faits et articles pour
des reçus qu’ils n ’avouoit pas; Roussel ne consigna pas les frais
du voyage ; l’interrogatoire n ’eut pas lie u , et il fut condamné.
Quel que fût le sentiment qui 1 agilùt après cette condamna
tion , il alla demander au cit. Dupic s’il pouvoit vendre. L a
réponse fut affirmative et devoit l’etre; il ne s’agissoit ni de la
quantité de biens à vendre, ni du prix; tout cela ne pouvoit être *
que l’affaire du consultant.
�C 3 )
•
Roussel conduisit ensuite son acquéreur, simulé ou n on, chez le
cit. D u p ic, croyant qu'il pouvoit recevoir cette vente. Celui-ci les
mena chez le cit. C la v e l, notaire , qu’il trouva dans la ru e , et
auquel il dit qu’il s’agissoit de passer un acte : il les quitta sans
autre explication (i).
Vraisemblablement le cit. Clavel ne voulut pas recevoir cet acte;
si c’étoit faute de certificateurs, Roussel n ’en dit rien, car Dupic
le connoissoit assez pour offrir de l'être. M ais il vint lui dire que
Clavel avoit pensé que Roussel ayant été protuteur ne pouvoit
pas vendre solidem ent, et qu’il le prioit de les mener à un autre
notaire. Alors on alla chez le cit. Ponchon.
L e premier mot de Ponchon fut de demander des certificateurs ; pour cette fo is, D upic étoit présent, et offrit de certifier
l ’identité de Roussel. Que ceux qui cherchent des raisons à tout
veuillent bien expliquer pourquoi ils refuseroient de certifier la
simple identité de ceux qu’ils connoissent.
M ais le cit. Ponchon rappela au cit. Dupic qu’il falloit deux
certificateurs : Dupic auroit pu sans doute s’en adjoindre un autre;
mais c’étoit bien assez de se croire obligé à ne pas refuser lui—
m êm e; il fut bien aise que l’acte s’ajournât.
A u départ de Roussel , le cit. Ponchon donna à quelqu’un la
commission de lui faire venir un nommé G irodon, de Marsac ,
son débiteur. Roussel ayant ouï ce n o m ,
dit au cit. Ponchon
qu’il connoissoit aussi ce G irodon, qui ne refuseroil pas d’être
son certificateur (2).
Peu
Dupic
voyoit
pur le
de jours après, on retourna chez le cit. Ponchon: le cit.
se croyoit encore obligé d’être un des certificateurs; il n'y
aucun m otif réel de répugnance; l’acte fut projeté et dicté
notaire. D u p ic , absent pendant ce travail, attendoil qu’on
vint le chercher pour signer.
Lorsqu’il revint , la dictée en étoit aux certificateurs ; il en
(1) D ép o sitio n du cit. C l a v e l , 2e. té m oin.
J’ai D ép osition du c it.
Ponchon.
A
3
�( 4 )
entendit nommer d e u x , et dès-lors il ne vit plus de nécessité à
être là , en troisième. Pour ne pas fatiguer R oussel, il appela le no
taire en particulier, et lui dit que sa signature devenoit inutile (i).
L e même jo u r, Roussel dit au cit. D upic qu'il vouloit aller
à L yo n payer M . D u m a ret, qui l’avoit tenu quitte pour 800 fr. ;
tandis que B arrière, son agent d ’affaire , qui se disoit cessionnaire de la créance, vouloit 6,000 f. L e cit. Dupic écrivit; et
il étoit si peu de moitié dans un projet de fraude, que dans cette
lettre il avertissoit Dum aret que Roussel venoit de prendre des
arrangemens. Il croyoit si peu que Roussel eût projet de réduire
tous ses créanciers à 3oo f . , que dupe, lui-m êm e, il s’offroit pour
caution de 800 f. et 20 quartons de blé au cit. Dumaret (2).
T o u t sembloit terminé pour le cit. D upic ; mais quand l’acte
fut enregistré et expédié, l ’acquéreur vint le lui porter, pour le
prier de le retirer de la transcription, avec les extraits d’inscription.
M algré la diligence recommandée par cet acquéreur, le cit. D upic
avoit perdu cette affaire de vu e ; mais C onvert, plus pressé, vint
lui-même à A m b e r t, et le cit. D upic l’accompagna pour retirer
Pacte et les extraits du bureau des hypothèques.
Il fut question alors de la notification de ces extraits aux créan
ciers ; on chargea D upic de la faire : il en fit le projet /jù il tacha
de renfermer tout ce qu’exige la loi pour les formes ; et com m e,
par un hasard qui se trouve heureux, il n’avoit pas de scribe pour
en faire transcrire l’original et les copies sur papier tim b ré, il se
contenta d’écrire en marge qu’il falloit écrire l’exploit tel qu’il étoit,
sans rien omettre , et il le remit a u x parties clles-rnémes (3), qui
l’emportèrent pour en consulter, à ce qu’elles dirent, la validité,
à Saint-Germain.
C ’est ici ou il faut dire , puisque la position du cit. Dupic l’y
(1) M êm e déposition.
(2) Lettre é c r ite le 5 fr u c tid o r an 1 0 , au cit. R ib o u le t , cote
(3) D éc laratio n de R o q u e à tous les avoués , 12e. i 5e. 16e. 20e, 2 1 e, a g e.
33e. 34e. té m o i n , cote 3g.
�G5 )
■
. oblige, que peu après la remise de ce projet d ’exploit , Roussel
et Convert ayant sans doute médité leur suppression de copies,
et peut-être ayant déjà tenté de l’exécuter, revinrent chez le cit.
D upic lui dire, que, pour empêcher Roussel d’être victime de ses
créanciers, un homme très-capable leur avoit conseillé de suppri
m er les copies de la notification dont il avoit fait le p ro jet, et
ils lui proposèrent, s’il vouloit s’en ch arger, de lui payer ce
qu’il voudroit, offres qu’ils portèrent jusqu’à 1,800 f. ou 2,000 f.
L ’indignation du cit. D upic à cette proposition étoit contenue
par l’envie q u ’il avoit de recouvrer son projet d ’exploit : il le
demanda sous un prétexte; mais sans doute la leçon étoit bien
fa ite ; on répondit que le projet avoit resté à Saint-Germ ain ; et
alors le cit. D u p ic , par un reste d’égard pour son ancien client,
se contenta de le menacer d ’une dénonciation, s’il usoit de ce projet,
ou s'il signifioit l’exploit sans copies.
Il paroît que les Roussel et Convert ne furent pas très-effrayés
de cette m enace, puisque le même jo u r, ou peu de jours après,
ils cherchèrent à acheter la probité de trois huissiers.
Il n’est pas question, comme l'a dit Barrière dans sa dénoncia
tion , de R oqu e, huissier de confiance de D u p ic; de Roque fils,
clerc de D upic ; de l ’exploit dicté à ce dernier par Dupic : tout cet
arrangement captieux, pour rattacher D upic à to u t, est démenti
par un fait du pur hasard.
C ’est que les Roussel et C on vert, au lieu de s’adresser, d’abord
à ce Roque fils, pour écrire sous la dictée, et à ce Roque père, pour
signer de confiance, se sont d’ abord adressés à un gendarme (Privât,
qui est en jugement et en prison), pour le prier d’acheter une signar
.turc d’huissier, moyennant 48 lr. (1).
'
Privât n ’alla pas chez R oque; il alla chez Acliard, lui proposa
ses 48 fr.,; Acliard refusa.
. , .
• •
''
Après Acliard , Privât alla chez M o n t e i l l e t : M onteillet refusa
(0
D éc laration de M o n t e i ll e t , A c h a r d , la ve u ve P o m m i e r , et de P riv â t
lu i-m êm e.
!
•
A
3
)
�(
6)
encore; et ce fut après ces deux huissiers qu’on s’adressa à R o q u e(i).
R oque, à ce qu’il paroît, alla boire avec Roussel et Convert.
L ’exploit fut fait : la signature fut payée, dit-on, avec une tasse
d’ argent; et l'huissier alla en personne faire enregistrer l’exploit à
St. A n th êm e, bureau étranger aux parties, aux créanciers, et à
l’huissier lui-même.
L e cit. Dupic ignoroit tout ce tripotage d'huissier, de gendarme
et d’enregistrem ent, se confiant dans l’idée qu’il avoit dissuadé
Roussel de tout projet frauduleux , lorsque le cit. Barrière est
venu avec fracas, à A m b e rt, dénoncer à la chambre des avoués
un prétendu exploit dont il avouoit suspecter seulement l’existence.
Si la chambre des avoués eût connu cet exploit supposé si nuisi
ble , elle auroit vu q u e , pour en détruire l’e ffe t , il n ’étoit pas
besoin d’une procédure criminelle ; mais elle ne put le juger que
sur les rapports infidèles du cit. Barrière; elle demanda une dénon
ciation écrite. L e cit. Barrière sortit avec le cit. Crosmarie pour la
rédiger. C ’est après cela qu’on manda le cit. D u p ic, pour s’expli
quer et répondre (2).
A u premier mot d ’un projet d’exploit, il faut le dirp, le cit. D upic
se confirma dans l ’idée que les Roussel avoient eu peur de sa menace.
Il leur en sut intérieurement bon gré; e t, regardant dès lors toutes
les clameurs du cit. Barrière comme une terreur panique, il ne
voulut pas révéler leur turpitude, et les exposer à un procès crimi
n e l, dès qu'ils s’étoient repentis.
M ais quand, au lieu d’un simple soupçon, il ouït dire qu’un
exploit avoit été fait réellem ent, et q u e , pour lui en cacher la
connoissance à lui-même, on l’avoit fait enregistrer à St. A nthêm e,
alors son premier mouvement fut de déclarer avec vivacité qu’il
étoît vrai qn’on lui avoit offert 1800 fr. pour supprimer les copies
de cet exploit; et ¡1 termina par demander que cette explication ne
fût pas réduite à ;une simple conversation entre collègues; mais
( O iln ti rrog atoire de P r iv â t et Roussel,
(a) D é c la r a t i o n des avoués.
�(
7)
que la dénonciation fût remise au substitut du tribunal crîm inel(i).
C ’est ainsi qu’un prétendu coupable a provoqué lu i-m êm e une
instruction judiciaire, au lieu de la redouter; il a voulu être con
fronté avec ceux qu’on disoit n ’avoir agi que par ses conseils. 11 est
en jugement avec eux ; et certes s’il avoit préparé et f a c ilité le
fa u x , ils n ’auroient pas manqué de tout rejeter sur son com pte,
J)our se disculper sous le prétexte de leur ignorance.
T e l est le précis exact des faits confirmés par les dépositions. S’ils
ont suffi pour rendre le cit. D upic suspect, il est au moins bien
certain qu’ils ne peuvent le faire considérer comme coupable. C e
seroit sans doute assez, pour l’établir, de ce qu’il a déjà d it; mais
il doit suivre sa défense sous toutes les.faces, parce qu’on ne peut
traiter légèrement une accusation qui attaque la liberté et l’honneur.
M O Y E N S .
•
S- I.
L e cit. D u p ic est étranger au d élit dénoncé.
Si le cit. Dupic jouissoit d’une fortune brillante, 011 n ’eût pas
osé l’accuser d ’un faux m inutieux, et d’avoir vendu son honneur à
celui qui vouloit le commettre. Mais c’est un malheur inséparable
de la médiocrité qu’elle est en butte aux soupçons enhardis , et
qu’en rougissant de leur injure elle n ’en est pas moins obligée de
les combattre.
M a is, quelle que soit la calomnie qui poursuit le cit. D u p ic,
ouvertement ou dans l’ombre ; s’il n ’a pas reçu de scs ancêtres
l ’iiéritage de leur illustration ( 2 ) , il en a reçu celui d’une probité
qu’il n’avoit jamais ouï suspecter dans lJexercice de son état et des
(1) P rocès verbal de la c h a m b r e , cote g , exp liq ue par les d é c la r a tio n s de*
avoués.
(») G u illa u m e D u p i c , l ’ un d ’e u x , étoit gra n d bailli d 'A u v e r g n e en i 35o.
A
4
�( 8 )
fonctions qu'il exerce depuis 1789 ( 1 ) ; et cet héritage, quoi qu’on
en dise, il le transmettra intact à ses enfans.
L e cit. Barrière devoit yoir le passé avant le présent, n ’épouser
la passion de personne; ne pas croire qu’il lui suf'firoit, pour réussir,
d’indiquer trente-neuf témoins avec note de ce qu’ils devoient dire;
ne pas mentir à sa conscience, lorsqu’il savoit que le conseil d'un
ja u x venoit d’un autre que du cit. D upic ; et enfin méditer un peu
plus , avant de dénoncer, quelle étoit la nécessité et quelle seroit
la suite de sa diffam ation.
11 est peut-être sans exemple qu’un défenseur soit en jugem ent,
parce qu'un huissier n ’a pas posé des copies d ’exploit; sous prétexte
que ce défenseur a co n seillé cet e x p lo it, et en a fait le projet.
Est-ce donc le conseil, ou le projet, qui ont valu une accusation?
M ais ce seroit une chose bien périlleuse, que de donner des con
seils, s’ils exposoient aux résultats d’un commentaire fort différent
quelquefois du conseil lui-m êm e, et si on couroit la chance d ’être
incarcéré par provision, pour éclaircir jusqu’à quel point le conseil
a influé sur le mode de l’exécuter.
.
Si c ’est le projet, c’est peut-être pis encore ; car il seroit inouï de
trouver dans le projet d’un exploit quelque chose de relatif à la
suppression des copies qui en seront faites ensuite.
Il y a plus : car, dans l’existence de ce projet m êm e, tout autre
qu’un dénonciateur passionné doit voir la preuve que l’auteur du
projet n’a pas entendu se mêler de ce qui seroit fait au delà.
Sans doute D upic, voulant faire faire cette suppression de copies,
auroit écrit 1 o rigin al, et m êm e, si on veut, les copies; il auroit
tout fait signer par l’huissier qu’on suppose lui être si bien dévoué,
et il auroit tout retenu.
(1)
L e cit. D u p i c , a ccusé , a été reçu au serinent d ’a vo c a t au p a rle m en t
de P a r i s , en 1 78 9 ; a cc u sa teu r p u b lic au tribun al «lu d istr ict d ’A m b e r t ,
p ro c u re u r national des eaux et forets, greffier , avoué à A m b e r t a va n t l'an 2
et depuis l ’an 8. D epuis sa d éte n tio n , il a été n om m é m em b re de l ’u n iv er
sité de j u ris p ru d e n c e , sur lu p résen ta tio n du m aire d ‘A m b e r t.
�( 9 ) M ais on aime mieux choquer toutes les vraisemblances pour
l’accuser. On veut qu’il ail etc assez imbécille pour faire marchander
des probités d’huissiers de rue en rue, avec son projet d exploit à
la m a in , et que , pour comble de sim plicité, après s etre mis en
évidence par le refus successif de deux huissiers, il ait donne ainsi
au troisième une pièce de conviction de cette importance.
On ne veut pas voir qu’il y a incompatibilité dans ces deux
suppositions. Mais il y a constitution d ’un autre a vo u é, dit le
dénonciateur. M ais les parlant ci ne sont pas en blanc ; mais il y
a une note marginale et une date fixe; mais D upic a nié devant
ses collègues avoir fait ce projet. M ais tout cela se lie à la vente
qui elle-même étoit frauduleuse; et D upic y a participé, puisqu’il
est allé chez les notaires.
V oilà d on c, sans l’affoiblir, tout le faisceau de l’argumentation
qui est résumée contre le cit. D upic. Eh bien , que ce faisceau soit
divisé ou entier, il est impossible qu’il tienne contre le simple regard
de l’ impartialité.
O u i, D upic a constitué un autre avoué que lui : mais il étoit
l’avoué ordinaire du cit. D um aret; e t, dans un exploit qui devoit
lui être signifié, il a pu aviser, sans crim e, au moyen de ne pas
perdre cette confiance.
O u i, il a rempli les parlant à. L ’huissier auroit confondu entre
le domicile réel de chaque créancier, et leur domicile élu. L e ré
dacteur a voulu éviter une nullité, et il ne laissoit rien à fin ir,
précisément parce qu’il n’avoit à se mêler que d’un simple projet.
L a note marginale confirme ce qu’on vient de dire. Il étoit à
croire qu’un huissier de Saint-Germ ain transcriroit cet exploit.
L a date du i 5 fru ctid or, mise en marge du projet, n ’est pas de
la main de D u p ic, quoi qu’en dise la dénonciation,* donc il a passé
par d’autres mains : d’ailleurs l’enregistrement du 20 suppose un
exploit du iy (1).
L e cit. D upic a nié ce projet; il en a donné les raisons : il
�(
10 )
ne croyoit pas qu’on eût osé faire l’exploit. Sans doute ce n ’étoit
pas par supposition qu’on ignoreroit la part qu’ il y avoit, puisque
la dénonciation qu’on venoit de lui lire, et où il est dit que le
projet est de sa m a in , devoit dicter sa réponse. S’il a agi par mé
nagem ent, il n’a plus rien ménagé ensuite, lorsqu’il a vu qu’ il y
avoit un abus de sa bonne fo i; et on ne dira pas qu’il ait agi comme
s’il craignoit les éclaircissemens.
C e n ’est donc pas là une objection contre le cit. D u p ic, et ce
seroit attaquer la chambre des avoués ; car le moyen de croire
qu’elle ait voulu tendre un piège à un de ses collègues, en lui de
mandant s’il avoit écrit un projet dont elle étoit déjà saisie, et
qu’elle savoit bien être de son écriture? Aussi quand elle a inséré
dans son procès verbal qu’il avoit déclaré tous les faits calom nieux,
on voit que cette rédaction étoit pour abréger, puisque cette con
cision est démentie par tous les témoignages des avoués eux-mêmes,
et que l’un d’eux rapporte même l’explication que le cit. D upic
donna à sa réponse (i).
E nfin, qu’y a-t-il de commun entre le transport de D upic cliex
deux notaires, et une suppression de copies d’exploit? S’il eût voulu
ou cru faire une fraude, a u ro it-il ainsi parcouru les études de
notaires avec Roussel? se seroit-il présenté pour son certificateur?
et après tout cela auroit-il fait courir et laissé son projet d’exploit,
pour consommer sa conviction? C ertes, la fraude ne marche pas
ainsi avec éclat, et ne laisse pas sur sa route des signaux de recon->
noissance.
(i)
L e d o u zièm e té m o in dépose que D u p i c expliqua « q u ’a vo ir suivi les
» parties chez un n o ta i r e , avoir retiré l e t a t des i n s c r ip tio n s , a voir fait un
» projet de n o t i f i c a t i o n , n e t o i t pas repreliensible ; et q u ’il n ’appeloit faits
» calom nieux que ceux q u i tendoient à le ren d re c o m p l i c e d ’un fa ux, »
>.
�( «
§.
)
1 1.
I l n’y a pas de f a u x ; le cit. D u p ic n’ en e s t pas complice.
L e cit. D upic n ’a pas cherché à se défendre par des fins de non
recevoir, parce que, n ’ayant rien à se reprocher, il lui étoit égal
d ’être accusé d’un délit quelconque : mais un crime de faux est un
poids si terrible pour un homme public, qu’il doit, s’il le peut, en
détourner de lui jusqu’à la seule dénomination. C ’est donc déjà un
grand intérêt pour le cit. D u p ic , d’examiner s’il y a eu un fa u x , et
s’il a pu y être compris sous prétexte de complicité.
D éjà on peut d ire , en général, qu’il n ’y a pas de faux dans
une suppression de titre, parce qu’un faux en écriture n ’est pas un
acte d ’abstension ou négatif, et qu’il suppose une action tendante
à altérer ce qui est, pour le transformer en ce qui n ’est pas.
Aussi ne voit-on pas qu’en principe on mette sur la même ligne
les suppressions de titre et les faux q u i, dans le droit crim inel,
semblent faire deux délits bien distincts.
Lan ge, en traitant du fa u x , observe que « l’on ne peut form er
» une inscription de faux au sujet de la suppression des actes,
» parce que Pon ne peut déclarer fausse une pièce qui ne paroit
» pas ; mais que parmi nous on en fait la poursuite comme d’un
» larcin (i). »
L e tribunal de cassation a été plus loin encore, dans un jugement
du i 5 nivôse an 1 1 , comme oh va le voir par l’extrait entier copié
sur l’arrêtiste (2) : « U n créancier, porteur d’une reconnoissancd de
« 55o f r ., reçoit du débiteur un acompte de i 5 o f r . , et en inscrit
» le reçu au dos du billet. Par la suite, le créancier gratte et efface
n cette quittance, et c ite 'le débiteur en payement de 55 o fr. L e
» faux y est attaqué par le débiteur. L e tribunal spécial ( de la
( ï ) P r.itic. f r . , cliap. X I V , du faux , toin. I I , png. G4, é d itio n de 1729.
(2) Jou rn a l d u palais , n°. i 5 x , page
344*
�(
12 )
» Manche ) a cru y voir un faux en écrilure privée..........mais le
» tribunal de cassation n'a considéré ces rature et grattage d'écri» ture que comme une suppression d’ acte tendant à libération.
« Sur ce m o tif, il a cassé et annullé le jugement de compétence. »
L ’application de cette décision se fait sans peine ; car s i, entre
le créancier qui a gratté un écrit, et l’auteur d’un projet d ’exploit
posé ou n o n , il faut chercher un faussaire, ce n’est certes pas le
premier qui sera jugé Pêlre moins.
Pourquoi d’ailleurs vouloir trouver un faux où la loi n’en indique
pas? C a r, sans doute, un huissier qui ne pose pas des copies, ne
commet pas un délit d’invention nouvelle ; et dès-lors il faut cher.cher comment la loi punit, pour juger la culpabilité par la peine.
L a première loi qui paroisse s’êlre occupée de ce délit, est l ’or
donnance de 1555 . A u lit. V I elle d it, art. X I : « Pour obvier â
» plusieurs inconvéniens qui peuvent advenir de ce que souvente» fo is, quand les huissiers signifient quelques requêtes ou autres
» choses, ils n’ eu baillent copie, ce qui vient à gros intérêt des
»
»
»
»
parties, nous avons enjoint et enjoignons auxdits huissiers de
bailler promptement lesdites copies.......... sur peine de 60 sols
d’ amende pour la première fois, et pour la seconde sur peine
d’amende arbitraire. »
L ’ordonnance de 1667 veut, en l’art. II du lit. II, qu’il soit laissé
copie des exploits, à peine de nullité et 20 fr. d’amende ; et en
1 art. III, qu’il soit fail m ention, en l’original et copie, de ceux à
qui elles ont été laissées, à peine de nullité ol même amende. En
l ’art. VU du lit. X X X III, elle veut qu’il soit laissé au saisi copie
■de l’exploit. L ’art. X I X est consacré à fixer la peine de l’inobser
vation : « T o u t ce que dessus sera observé par les huissiers, à
,» peine de nullité, dommages-inlérdts......interdiction, et 100 fr,
d ’amende. » ■
Ainsi le pis-aller, dans les cas les plus graves, est l’interdiction
et des doinm ages-intérêls, outre la nullilé et une amende.
Pourquoi donc être plüà sévère que la loi elle-m êm e; augmenter
les peines, quand, dans l’incertilude, 011 doit les restreindre; apj>elcr,
�(
13 )
sous le nom de faux , des peines corporelles, quand la loi en indique
textuellement d’autres?
,
L e genre de ces peines prouve donc que le délit dénoncé par le
cit. Barrière n’est pas un iaux.
S ’il y avoit un fa u x , il y auroit trois distinctions à faire entre
les accusés : Fauteur du fau x, celui qui l’a voulu, et ceux qui 1 ont
facilité. L ’huissier tient le premier rang ; R o u ssel, le deuxième ;
D u p ic, P rivâ t, Roque fils et C on vert, le troisième. Si les deux
premiers ne sont pas en d é lit, c’est avoir prouvé que le cit. Dupic
n ’est pas complice.
L e faux consisteroit dans ce que l’original eonstateroit le con
traire de ce que l’huissier a fait. Mais pour dire qu’il y a un fa u x,
il s’ agiroit de v o ir , dans cet original , s’il a certifié avoir porté
sept copies, tandis qu’il ne les a pas portées; car s’il n’y avoit pas
dit expressément les avoir portées, il est clair qu’il n’y auroit pas
même l’ombre d ’un faux.
Cependant on veut qu’il y ait un fa u x , et cet original ne se voit
pas : on veut qu’il soit constant qu’il certifie autre chose que ce qui
a été fa it, qu’il soit constant que les créanciers n ’ont pas reçu de
copies; et précisément l’un d’eux a été ouï en témoignage, et s’est
présenté avec sa copie. T o u t cela étonne, et fatigue l’imagination.
Aussi la loi ne permet pas, il faut le dire, que des accusations
de faux soient admises d ’après la seule terreur des parties inté
ressées ; elle entend 'voir la pièce suspectée, avant de s’enquérir
s ’il y a un délit et des coupables : sans cela, en e ffe t, comment
jugeroit-elle qu'il y a un faux?
« Dans t o u t e s les plaintes en faux, dit l’art. D X X V I du code
» des délits et des peines, les pièces arguées de faux sont déposées
» au greffe......... elles sont paraphées........... etc.
» L e tout ci peine de nullité, n
Ici quelle est la pièce fausse? E s t-c e la copie produite par le
dernier tém oin? Non ; puisqu’elle est la preuve contraire de la
dénonciation. C e n ’est d’ailleurs pas elle qui a donné lieu au procès,
puisqu’elle n ’a été connue que quand le cit. Dupic éloit en prison.
�C 14 )
Est-ce le projet ? Non ; car il n’a rien de commun avec les copies
supprimées, et avertit au contraire l’huissier qu’elles doivent être
posées. Est-ce enfin la relation de l’enregistrement? mais en ne
s’est pas même avisé de la dire falsifiée.
'
Voilà cependant tout ce qui est déposé au greffe; on n’a donc
pas satisfait à la première form alité que la loi exigeoit à peine de
nullité.
C e n’est pas seulement parce que la loi le dit ainsi, qu’on l’ob
serve; mais c’est qu’en effet il est inconcevable de préjuger qu’un
huissier a fait un faux sans connoître la pièce fausse.
D ira-t-on qu’il est intéressé à ne pas la produire ? Mais le faux
est un délit m atériel, qui veut une culpabilité de fait. L a lo i, au
reste , ne se commente pas ; elle a voulu un dépôt de pièces avant
l ’instruction, comme elle a voulu qu’avant de poursuivre un homi
cide de fait, on sût s’il y avoit un homme mort.
Evidemment un juri ne peut pas déclarer qu’il est constant qu’il
y a un faux : alors il n’y a plus de questions subséquentes.
Si donc il n ’est pas constantque l’huissier Roque soit l’auteur d’ un
fa u x , comment concevoir qu’il y ait des complices? Roussel ne peut
être convaincu de l’avoir voulu et p a y é ; et m êm e, par respect
pour les principes, il faut dire qu’il est extraordinaire qu’un créan
cier ait [»ris l’initiative, avant desavoir s’il y avoit un exploit faux,
et si on le lui opposeroit. Il ne peut pas dire qu’il craignoit cet
exploit pour l’avenir, comme on le diroit d ’une obligation fabriquée
sans le débiteur. Sa créance étoit exigible; e t, au lieu d ’en pour
suivre le payem ent, au lieu de ne vo ir, même dans l’exploit en
registré à St. A n th êm e, s’il existoit, qu’un exploit nul ( 1 ) , il a
(i) « Les huissiers feront en registrer leurs actes, soit au bureau de leur réu sid e n c e , soit au bureau du lieu ou ils les auront faits. » L . 22 friuiairo
an 7 , art. X X V I .
« T o u t e violation des formes p r e sc r ite s, en matière c i v i l e , pnr les lois,
» émanées des représenlans du p e u p le , depuis 1 7 % , d o n n e io n i ou v e r tu re à
i> cassation , quand m êm e elles lie pro iio n ce ro ic n t pas la peine de n u llité. »
l-.. 4 germ inal an 2 , art. If.
�( i5 )
mieux aimé s’en croire empêché, et chercher un faux avec le mcme
zèle qu’un autre m cttroit à en éviter le résultat; en un m o t, se
créer un fantôme pour avoir la jouissance de le combattre.
M ais si Roussel a voulu faire un fa u x , ne vaut-il pas autant
croire qu’il s’en est tenu au désir, et ne 1 a pas consommé; ou, si
on v e u t, qu’ayant son exploit dans sa poche, il a craint les suites
d ’un faux, et l’a déchiré sans en faire usage.
Alors la tentative du crime n ’est pas un délit ; car il fa u t, d’après
la loi ( i ) , qu’il n ’ait pas dépendu du coupable que la tentative du
crime n ’ait eu son succès.
C e principe nouveau est conforme aux anciennes m axim es, qui
ne regardoient le faussaire comme coupable, que s’il usoit de l’acte
faux. S i talis utebedur illo instrumento fa ls o .... quia s i non produæerit, non potest com pelli producere (2).
Les auteurs admettoient m êm ela résipiscence en cette m atière,
au delà de la production de la pièce fausse.
« Aujourd’h u i, par l’usage, il est permis en France à tous ceux
« qui ont produit des pièces fausses, quoiqu’ils en aient été les
w fabricateurs ou n o n , de s’en départir, sans pouvoir être recherHchés.... Seulement, ceux qui les ont produites so n t, nonobstant
» cette déclaration, responsables des dommages-intérêts (3). »
Q u’on avoue donc que le cit. Barrière s’est grandement écarté
de ces principes, en faisant incarcérer plusieurs citoyens, pour la
prétendue falsification d ’un exploit dont on pouvoit ne pas se
servir, et qu’on ne lui avoit pas opposé, même indirectement.
Si Roussel aussi n’a pas fait un fau x, à plus forte raison faut-il
dire que le cit. Dupic n’est pas coupable de l’avoir préparé et faci
lité. Celte vérité est si claire, que le moindre raisonnement seroit
oiseux.
.
(1) L oi il» 22 prairial au 4(2) Boerius , d r cis. 291. .lui. cla r.
,lîv. 5.
(3 ) B o r n i e r , toui. I I , pag. 1 1 1 . S cc ey o la , a d Icg.
liv r e y.
d e ja ls is . P ap o n ,
�.
■
.
C*6)
v
T o u te l’accusation, on le répète, porte sur Roque et Roussel.
Ils pourroient être coupables, sans que les autres le fussent : mais
s’il n’y a pas de faux pour eu x , il n’y en a pour personne. Il est,
au reste, démontré dans la première partie que le cit. D upic y est
absolument étranger.
Aucune loi ne peut être invoquée contre ce qu’il a fa it; et sa
position est tellement favorable, qu'il peut défier son dénonciateur
de motiver un jugement qui le condamne.
’
L e conseiller d’état Portalis, qui a présenté la première loi déjà
décrétée du code civil, a dit : « Il faut que le juge ait le droit d’in» tei’préter les lois, et d ’y suppléer : il n ’y a exception que pour
» les matières criminelles. L e juge, dans ces m atières, choisit le
» parti le plus doux si la loi est obscure et insuffisante, et il absout
» l’accusé si la loi se tait sur le crime (i). »
'
V oilà le dernier état de la législation. Si le cit. Dupic craignoit
une peine, il trouveroit là l’expression positive de son absolution :
mais cet examen n’appartient qu’à ceux des accusés qui auroient
des reproches à se faire; le cit. D upic ne veut se présenter qu’à
découvert et sans armes, parce qu’il se repose autant sur l’impar
tialité du tribunal dont il attend la décision , que sur le témoignage
de sa propre conscience.
•
Chacun ici peut être sainement jugé par ce qu’il a fait. Privât,
a ccu se, avoue avoir cherché des huissiers, sur la réquisition de
llo u s s e l; Roussel, accusé par Dupic lui-m êm e, ne l’accuse p as,
même en récrimination ; R oque, a ccu sé, se cache : Dupic seul a
prévenu les recherches de la justice.
Mais il est accusé ; il est en butte aux conjectures. Que ceux qui
sont prompts à juger jettent un regard sur eux-mêmes : les actions
les plus indifférentes peuvent avoir des résultats fâcheux. Personne
ne peut se dire assuré d’être a l’abri d ’une accusation.
En
iiksumé ,
il n ’y a pas de fa u x , parce qu’il n’y en a pas sans
la pièce fausse.
( i ) C o d e c i v i l , prem ière liv r a iso n »«-8°., page 17,
�C 17 )
-
Il n’y a pas de fa u x , parce qu’on ne voit pas si 1 original, sup
posé existant, mentionne faussem ent que les copies ont été posées.
< Il n ’y a pas de fa u x, parce que le contraire de la suppression des
copies est prouvé par le rapport qu’un créancier a fait d une copie.
Il n’y a pas de faux, parce qu’une suppression de copies n'est pas
un faux.
Il
n ’y a pas de corps de délit, et il y a nullité, parce que la pièce
arguée n’a pas été déposée au greffe, d’après le texte de la loi.
Ainsi le délit n ’est pas constant.
S’il y a fa u x , il est constant qu’il a été machiné entre Roussel
et Roque seulem ent, et que le citoyen D u p ic, après avoir remis
un projet d’exploit a u x parties, n’a eu aucune part directe ni in
directe à ce qui s’est passé ultérieurement.
C e qu’il a fa it, lors de la vente et depuis, marque sa franchise
et l’absence des précautions que la fraude n ’oublie pas. C e qui a été
fait hors sa présence ne laisse pas douter q u e, s’il se méditoit un
fe u x , on le préparait et on l’a consommé sans lui.
Bien loin donc q u ’il soit constant que le cit. D upic soit complice
d’un faux, il est au contraire très-constant qu’il ne l’est pas.
Ainsi s’évanouit une accusation grave et pénible, dont le résultat
étoit aisé à prévoir, mais dont le caractère médité et haineux a
besoin de toute l’attention d’un tribunal éclairé et intègre. L e cit.
D upic la demanderoit à titre d’indulgence, s’il n’étoit certain de
l ’obtenir à titre de justice. Il ose seulement demander célérité, dans
l ’impatience bien juste d’être rendu à son état, à sa fem m e, à ses
e n fan s, et de ne plus courber sa tête sous le poids insupportable
d ’vuie odieuse diffam ation.
L , F . D E L A P C Ï I I E R , homme de loi,
�'
Î iE
( i8 )
JU R ISC O N SU LTE SO U SSIG N É ,
qui a vu le m ém o ire justifi
c a t if p o u r le cit. D u p i c , signé du cit. D e la p c h ie r son conseil , adhère
en tièrem ent aux prin c ip e s q u i y sont développ és ; pense q u e l ’a p p lic a tio n
en est ju ste; e t , par une s u i t e , il est d'avis que le cit. D u p i c doit être
a cq u itté sans d ifficu lté de tou te in c u lp a tion , dans une affaire où la justice
est à la re c h e r ch e d ’un f a u x q u i ne paroit pas e x is t e r , et q u i d'a illeurs ,
en le supposant réel , seroit abso lum ent étranger à cet accusé.
I l n ’y a p o i n t de corps d e d é l i t , n i par con séqu e n t d e coupables.
O n p r é t e n d en effet que l'huissier R o q u e , c h argé de notifier un contrat
d ’a c q u i s i t i o n , le certificat de tran scrip tion et les extraits des in s crip tio n s
h y p o th éca ires subsistantes , aux créan ciers inscrits , po u r satisfaire à l ’a r
tic le X X X de la l o i d u 7 b ru m a ire an 7 , se borna à faire u n o r ig in a l
de n o tific a tio n , et su p p rim a les c o p ie s , afin de pr iv e r les créanciers de
la faculté d 'e ncliérir.
L a représentation d ’ une des copies , faite p a r l ’un des créanciers , d ém e n t
déjà l ’assertion q u ’il ne fût fa it q u ’un sim ple original ; mais quand la su p
pression des copies seroit v r a i e , c e fait matériel ne constitueroit pas lui
seul un faux , i l n’en résu lteroit qu'une n u llité dans la notification. P o u r
constitu er le f a u x , .il fa u d ro it que l ’huissier ne se fût pas borné à trah ir
son d e v o ir , en ne d é liv r a n t pas aux créanciers les copies c o m m a n d ée s
p a r la loi , et q u ’il eût attesté dans l ’o r ig in a l de la notification la d é li
vrance de copies q u ’il auroit supprim ées. A l o r s , mais alors s e u le m e n t , il
auroit c o m m is un f a u x , par la fa u s s e té de la relation q u ’il auroit f a i t e ,
d 'u n p o in t de fait sur leq u el l ’acte de son m inistère q u i la c o n tie n d r o it ,
ètoit destiné à fa ir e f o i .
E n un m o t , le faux consisteroit dans c e tte relation mensongère , et
ne pe u t se tro u v er que là. E h b ien , q u e l ’on produise d o n c l ’o rigin al
d e x p lo it ; q u ’on le dépose au g r e f fe , au désir de la loi. Q u ’on dise au
t r ib u n a l : Prenez et lisez ; voyez d ans cette p iè ce la relation m en son gère
d ’un bail de cop ie qui n ’ a pas été fa it : alors l ’a ccusa tion aura une base.
M a is cette relation mensongère , préten d u e insérée dans un acte p u b lic ,
ne paroît p o i n t ; q uel est le r é s u lta t? q u ’on poursuit une c h i m è r e , u n e
vision. « D a n s tout j u g e m e n t c r i m i n e l , la prem ière question te nd essen
» tiellein en t à savoir si le fait qui form e 1 objet de l ’a c c u s a tio n , e st cou s
» ta n t ou non , » nous d it 1a rtic le C C C L X X I V du cod e des délits et des
peines.
O r , lorsque le tr ibunal s p é c ia l , d o n t les membres c u m u le n t les f o n c
tions de jurés po u r r e c o n n o itr e le f a i t , a vec celles de juges p o u r a ppli-
V
�( i9 )
quer la loi , s'interrogera l u i - m ê m e et se demandera : Le fait d éno n cé,
sav o ir, que l ’huissier Roque a m en tion n é, d a n s l ' orig ina l d e n o tifica
tion dont i l s ’a g i t , qu’il avoit délivré copie à chaque créancier inscrit ,
e s t-il c o n sta n t? Et pourra-t-il , sans voir la p iè c e , répondre affirmati
vement , O u i , le f a i t e st constant ? Non sans d o u te , et par là croulera
tout l ’édifice que l’on a bâti en l’air. L ’huissier sera nécessairement a bsou s ,
•faute de corps de d é lit constant. O r , si le principal accusé e st a b s o u s ,
a défaut de corps de délit , comment pourroit-il avoir des complices ?
M a is , tout décisif qu’est ce moyen pour faire acquitter le cit. D upic
p a r le tribunal , il ne suffiroit peut-être pas pour le justifier de tout soupçon
aux yeux du public. La m alignité diroit : S ’il a échappé à la p ein e , c ’est
que la pièce arguée de faux a disparu. Eh bien ! la malignité va se taire
aussi ; car en supposant qu’il eût été commis un faux par l’huissier Roque ,
et que le délit fût prouvé , la prévention la plus animée seroit dans l ’im
puissance d ’élever contre Dupic , même un soupçon raisonnable d ’avoir
participé à la p révaricatio n de cet officier ministériel. Que produit-on
contre D upic , en effet ? un projet de notification écrit de sa main.
Mais , dresser le projet d ’un acte de procédure voulu par la l o i , est-ce
commettre un crim e Comme la passion est aveugle ! Au lieu de l ’a ccu ser,
la production de ce projet suffit seule pour p ub lier son innocence. Car
enfin , un projet dressé par un avoué n ’auroit pas couru le monde , i l
auroit resté entre les mains de l ’avoué rédacteur , si celui - ci avoit dû
être l ’artisan et le ministre de la dénonciation ; si la transcription du.
projet s'étoit faite chez lui ; s’il avoit fait signer l ’original de confiance
par l ' huissier Roque , sans le charger des copies.
Du fait constant que le projet produit par les moteurs de cette affaire,
étoit sorti des mains de D u p ic , résulte donc la conséquence qu’il l’avoit
livré à l ’acquéreur , pour q u ’il fit faire sur ce type les notifications vou
lues par la loi ; que dès-lors rien de ce qu i s’cst fait d ep uis, n ’a été f a i t ,
ni par l u i , ni sous sa direction. Enfin , que si l’huissier avoit prévariqué
dans ses fonctions , en vendant sa signature au bas d ’un e x p lo it , par lequel
i l auroit attesté faussement avoir délivré des copies qui n’ont jamais été
remises , tout cela seroit complètement prouyé étranger à Dupic , par la
seule production de son projet.
D é l i b é r é à Clermont-Ferrand , le l 5 floréal an 1 1
b e r g i e r .
A R I O M , de l ’im prim erie de L a n d r i o t , seul im p r i m e u r d u T r ib u n a l
d ’ap p e l. — A n X I .
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dupic, Antoine. An 11]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Bergier
Subject
The topic of the resource
huissiers
faux
confirmation d'identité
corruption
Description
An account of the resource
Mémoire pour Antoine Dupic, avoué à Ambert, accusé de complicité de faux ; contre le commissaire du gouvernement, poursuivant, et le citoyen Barrière, plaintif.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
An 2-An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0227
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1225
BCU_Factums_M0312
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53726/BCU_Factums_M0227.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ambert (63003)
Saint-Germain-l'Herm (63353)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
confirmation d'identité
corruption
Faux
huissiers
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53725/BCU_Factums_M0226.pdf
5b8f9f510e08e279dab9a89c07259c28
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Text
CONSULTATION
�CONSULTATION.
L e C O N S E IL S O U S S I G N É , qui a vu les pièces de
l’instance pendante au tribunal d’appel séant en la ville
et commune de Riom , sur l’appel interjeté par le citoyen
Teyssèdre , du jugement interlocutoire rendu au tribunal
d’arrondissement de M u râ t, le 24 thermidor an 8 , entre
le citoyen D u b o is, in tim é, et le citoyen Teyssèdre,
appelant ;
E s t i m e qu’ il paroîtroit d'abord que le-citoyen T eyssè
dre est, quant à présent, non recevable en son appel.
L e jugement du tribunal n’est qu’un jugement prépa
ratoire qui ordonne, avant faire droit, une seconde visite
par de nouveaux experts. O r , suivant l’article V I de la
loi du 3 brumaire an 2 , on ne peut appeler d’aucun juge
ment préparatoire pendant le cours de l’instruction ; et
les parties sont obligées d’attendre le jugement définitif ;
ce qui ne peut pas leur être nuisible, puisque le même
article ajoute, qu’on ne pourra cependant pas leur opposer
A 2
�.
.
•
.
.
(4 )
ni leur silence, ni même les actes faits en exécution de
jugement de cette nature.
• *
On ne peut pas dire que l’arrêté des consuls, du 18
fructidor an 8 , ait dérogé à la loi du 3 brumaire an 2 ;
d a b o r d , parce que cet arrêté n’exprime point de déro
gation. On ne croiroit pas même qu’un arrêté piît déroger
A une loi. Mais d’ailleurs, cet arrêté, en disant que les
avoués suivront exactement la procédure établie par l’or
donnance de 1667
règlcmens postérieurs, ne peut avoir
aucune application au cas de l’appel d’un jugement prépa
ratoire qui appartient à la discipline de l ’o rd re ju d ic ia ir e ,
et n’a aucun rapport à la procédure que doivent suivre
les avoués ; un acte d’appel n’étant pas même de leur
ministère, mais seulement de celui des huissiers.
•Mais la fin de non-recevoir ne dût-elle pas être accueillie,
l’appel ne seroit pas mieux fondé.
O n veut l’appuyer principalement sur ce que le juge
ment dont est a p p e l, ordonne une seconde visite par
experts; et on s’autorise pour cela de la disposition de
1 article C L X X X I V de la coutume de P aris, qui porte ,
qu en rapport d ’experts on ne pourra demander amen
dement.
Mais premièrement, les coutumes en général n’ont pas
d’einpire hors de leur territoire, et celle d’Auvergne ne
renferme pas de pareilles dispositions.
Pourquoi d’ailleurs nous reglerions-nous plutôt par les
dispositions de la coutume de Paris, dans cette matière,
que par celles des coutumes voisines, comme celles de
Bourbonnais, qui, dans l’article D X X I , a une disposition
absolument contraire à celle de Paris > et qui autorise
�(5)
expressément l'amendement de rapport; et celle de Ni
vernais, chap. X , art. X V I I , absolument conforme à celle
de Bourbonnais? N ’est-il pas reconnu en jurisprudence,
que quand une coutume est muetle sur une question, il
faut se régler p«r les coutumes voisines? Les deux cou
tumes de Bourbonnais et de Nivernais ne sont pas les
seules qui aient une semblable disposition ; i l y en a plu
sieurs autres, parmi lesquelles est celle de M e lu n , article
C L X X X I I I , et celle d’Etampes, article L X X I .
Il y a plus encore : ne sait-on pas que le droit romain
est le droit commun de l’Auvergne ; que la coutume n’en
est qu’une exception , et que c’est au droit romain de
préférence, qu’il faut recourir, pour les questions que la
coutume n’a pas prévues. O r , les lois romaines admettent
l’amendement de rapport, comme on peut le voir dans
la l o i , Jf. D e verborurn obligationibus. Et à eet égard,
il est d’autant plus nécessaire, dans l’affaire présente, de
se conformer au droit romain , que les parties sont dom i
ciliées dans la partie de l’A uvergne régie par le droit écrit.
Mais dans la coutume même de Paris, est-il bien vrai
qu’ il ne puisse pas y avoir d’amendement de rapport ?
L e contraire se démontre invinciblement. Ün se fait un
fantôme de l’articleC L X X X IV " de cette coutume: mais il
est aisé d’en dissiper l’illusion.
Cet article dit bien qu’en rapport d’experts on ne peut
demander amendement de rapport ; mais il est tout de
suite ajouté : P e u t néanm oins le juge ordonner autre
ou plus ample visitation être J a i t e , s'il y échet.
Il est aisé de concilier ces deux parties du même article.
La nouvelle visitation, qu’est-ce autre chose que l’amen
A
3
�( '( 6 )
_
dement de la première ? Mais cette nouvelle visitation
ne peut êlre ordonnée que s’i l j échet.
Ces mots, s il y échet, sont laissés l’arbitrage du juge ;
mais rien n’empêche aux parties de demander cette nou
velle visitation , en exposant les motifs qui la rendent
nécessaire. C ’est alors au juge à peser ces m o tifs, pour
connoître s’ il échet une nouvelle visitation.
E t quand la coutume de Paris avoit dit auparavant,
sa 7is q u o n puisse demander am endem ent, cela ne veut
dire autre chose, si ce n’est qu’on ne peut pas le demander
sans causes et sans motifs légitimes. Mais si les motifs qu’on
expose, manifestent q u i l échet une nouvelle visitation,
soit parce que la première est irrégulière ou insuffisante ;
c’est moins alors sur la demande de la p a rtie , que la
nouvelle visitation est ordonnée, que par l’office même
du juge, qui ne trouve pas dans la première une instruc
tion suffisante.
Aussi comment l’article C L X X X I V de la coutume de
Paris a-t-il été entendu et expliqué par les commentateurs
de cette coutume, et par les jurisconsultes et gens de loi
qui ont pratiqué dans cette même coutume ? L ’explication
qu ils en ont faite est exactement conforme à ce que l’on
vient de dire.
R icard, sur cet article, dit que puisqu’il laisse au juge
la liberté d’ordonner une nouvelle visitation, il estime
que quand le juge reconnoît qu’une première visite a été
mal faite, il peut ordonner d office, pour une plus grande
instruction , qu il en sera fait une seconde \ et on doit
surtout remarquer ce qui est ajouté par R icard, que cette
nouvelle visite a coutume d’être ordonnée aux dépens de
�( 7 )
.
.
.
celui qui la requiert : ce qui fait bien vo ir que la partie
elle-même peut la requérir, puisqu’elle doit être faite à ses
dépens.
A u z a n e t, sur ce même article, dit que 1 article est b o n ,
niais qu’il faut ôter ces mots : sans qu'on puisse demander
am endem ent; car cela se fait tous les jours : mais il faut,
ajoute-t-il, laisser cela à l’office du juge en connoissance
de cause, et obliger la partie qui demande un nouveau
rapport, d’en avancer les frais.
Ferrières, autre commentateur de la coutume de Paris,
sur l’article C L X X X I V , n. 1 6 , dit aussi que le juge peut
ordonner une autre ou plus ample visitation, au cas qu’il
la trouve nécessaire.
,
I/auteur des interprétations ajoutées au commentaire
de Ferrières, s’explique ainsi au n. 8 : Lorsque les juges
n’ont pas assez de connoissance et de lumière par le rapport
fait, et que quelqu’une des parties désire qu’un autre
rapport soit fait, pour lors les juges doivent ordonner un
second rapport ou une plus ample visitation ; et quoique,
ajoule le même auteur, le présent article ôte l’espérance
aux parties d’obtenir une nouvelle visitation ou amende
ment de rapport à leur requête, néanmoins plusieurs ne
laissent pas de l’obtenir, soit en blâmant le rapport pré
cédent, ou bien en offrant d’avancer les frais du second,
si en fin de cause il est dit.
Ajoutons à l’autorité des commentateurs de la coulume
de Paris, ce que dit un grand magistrat, M. le Camus,
dans ses observations sur ce même article : Je crois qu il
faut retrancher de l’article, ces mots : sans q u o n puisse
a
4
�(8)
demander am endem ent, parce que tous les jours on en.
demande et on en ordonne.
Enfin , des auteurs plus récens , élevés et pratiquans
dans la coutume de Paris, ont entendu de la même ma
nière la disposition de l’article C L X X X I V . Rousseau de.
L a c o m b e , dans son Recueil de jurisprudence, au mot
E x p e r ts , dit que quand le juge reconnoît qu’une pre
m ière visite a été mal faite, il peut ordonner d’oilice ,
pour une plus grande instruction, qu’il en sera fait une
seconde, et qu’elle a coutume d’etre ordonnée aux dépens
de celui qui la requiert ; et Denizart s au même mot
E x p e r ts , dit aussi que si le juge ne trouvoit pas sa re
ligion suffisamment instruite par un rapport d’experts,
il pourroit de son chef, et sans aucune réquisition des
parties, en ordonner un nouveau, quand même l’avis des
premiers experts seroit trouvé unanime.
V oilà donc bien évidemment quelle est la véritable in
telligence de l’article C L X X X I V de la coutume de Paris;
quand on voudra ne pas en séparer les deux parties, celle
où il est dit : sans q u o n puisse demander am endem ent,
et celle par laquelle il est ajouté : pourra néanm oins le
juge ordonner nouvelle ou plus ample v isita tio n , s 'il y
écliet.
C ’est-à-dire , en un m o t , que la partie ne peut pas, sans
cause légitim e, demander l’amendement de rapport, mais
qu’elle peut exposer les motifs qui exigent une nouvelle
visite; et si le juge se trouve frappé de ces motifs, c’est
moins sur la demande de la partie que de son propre
office, qu’il ordonne un nouveau rapport.
�C9 )
,
.
il ne s’agit cloilc plus que d'examiner si les motifs qui
ont déterminé les premiers juges à ordonner ce nouveau
rapport, sont raisonnables et justes : c’est ce que nous
verrons dans un moment , après avoir rappelé quelles
étoient les opérations prescrites aux premiers experts, par
le jugement intei'locutoire en vertu duquel ils avoient
procédé.
y
Sur la demande en restitution pour cause de lésion,
fo rmée par le citoyen D u bo is, à raison de la vente qu’il
a voit faite au citoyen Teyssèdre, du domaine delà Courdon,
il étoit intervenu, au tribunal du district de M u râ t, un
premier jugement, le 4 thermidor an 3 , par lequel il
avoit été ordonné que les biens vendus seroient estimés
par experts, eu égard à leur valeur à l’époque de la vente,
a 1 eilet de déterminer s’il y avoit ou n y avoit pas de
lésion. Les experts furent chargés d’estimer séparément
les meubles tant morts que v ifs , faisant partie de la vente,
et de déduire sur la prisée des bestiaux, les indemnités
accordées aux fermiers par les lois rendues sur les cheptels,
et avoir égard aux prix de 179 0 , et faire distraction, sur
le prix entier de la ven te, de la valeur des meubles morts
et vifs; enfin, il étoit aussi ordonné aux experts d’avoir
égard à l’entretien du prix du bail auquel le cit. Teyssèdre
avoit été obligé par le contrat de vente.
'
. L ’exécution de ce jugement interlocutoire se trouva
arrêtée par la loi qui survint au mois de thermidor de
la même année , qui abolit pour l’avenir les actions en
restitution pour cause de lésion, et qui suspendit 1 exer
cice de celles qui étoient déjà pendantes devant les tri
bunaux. Les choses restèrent au même état jusqu’à la loi
�( r <> )
^
f
du 19 floréal an 6 , qui leva la suspension, mais qui en
môme temps prescrivit un nouveau mode d estimation,
et q u i, par une disposition particulière, voulut que pour
juger s'il y avoit lésion dans les ventes, dont les prix
avoient été payés en papier-monnoie entre particuliers,
depuis le premier janvier 1791 , époque de la dépré
ciation des assignats jusqu’à la publication de la loi du 14
fructidor an 3 , les tribunaux ordonnassent l'estimation
par experts de la juste valeur, contre assignats, qu’avoit
1 immeuble vendu au temps du contrat, eu égard, 1°. à
son état et a son produit à la même époquej 2°. à la
valeur contre assignats qu’avoient dans le canton ou dans
les lieux les plus voisins les immeubles de même nature,
à l’époque de la ve n te, et aux époques les plus rappro
chées j 30. aux facilités et avantages résultans des termes
accordés pour le payement du prix de la vente.
Dès que cette nouvelle loi eut p a r u , le cit. Dubois
reprit ses poursuites au tribunal civil du département du
Cantal, où il fut rendu un second jugement le i 5 ther
midor an 6 , qui ordonna que celui du tribunal de dis
trict de M u rât, seroit exécuté selon sa forme et teneur,
et que lors de l’estimation qui seroit faite en consé
quence, les experts se conformeroient à la loi du 19 floréal;
et il fut ajouté que les experts fixeroient séparément la
valeur des immeubles, et celle des meubles et outils d’a
griculture.
C'est donc d’après les bases prescrites par le jugement
du tribunal civil du Cantal, que les experts devoient
procéder i\ l’exécution de celui du tribunal du district
de Murât.
�( II )
lies parties ayant respectivement nommé les exp erts,
le citoyen Dubois leur administra entr’autres une pièce
qui étoit bien popre à remplir le vœu de la loi du 17
floréal an 6 , et à leur faciliter le moyen de s’y confor
m er; c’ étoit l’adjudication du domaine du Marcbadial':
ce domaine étoit,situé dans le mcme canton, dans le
même vallon, et presquecontigu au domaine de la Courdon , vendu par le citoyen D ubois; les deux domaines
composés d’héritages de même nature, p r é s , champs et
pacages, et les deux ventes faites presqu’à la même épo
que ; celle du domaine de la Courdon est du 18 floréal
an 3, et celle du domaine de Marchadial est du premier
germinal de la même année; il n’y a pas cinq décades de
distance de l’une ù l’autre. O n ne pou voit trouver entre
ces deux ventes un point de co m p a r a iso n plus a p p r o p r i é
aux dispositions de la loi de floréal an 6 ; deux domaines
de même nature, situés dans le même canton, presque
contigus l’un à l’autre, vendus en assignats, et à la même
époque.
L e citoyen Dubois administra aussi aux experts le bail
du domaine de la C o u rd o n , et rien aussi n’étoit plus
propre à les rendre certains du produit de ce domaine ?
au moment *de la vente.
.
D e son côté, le citoyen Teyssèdre remit aux experts
quelques ventes de biens faites en assignats, à peu près
à la même époque, et entr’autres la vente d’un domaine
appelé le F ayet, faite par Claude Borel î\ P ie r r e Esdieu,
de Murât ; c’est surtout le prix de la vente de ce domaine
que les experts ont pris pour point de comparaison dans
leur estimation du domaine de la Courdon.
'
�(
12
)
Mais ils ont absolument écarté la vente du domaine
du M archadial, que leur avoit administrée le cit. D ubois;
on pour mieux dire , ne voulant pas voir l’ensemble de
ce domaine, ils en ont choisi deux ou trois héritages aux. quels dans l’adjudication du domaine du Marchadial, il
.avoit été donné des prix distincts, et c’est aussi sur le prix
de ces héritages particuliers qu’ils se sont appuyés dans
leurs opérations.
Quoi qu’il en soit, ils ont terminé par estimer la va
leur du domaine de la Courdon , à un prix tel que l'on
n’y trouveroit pas la lésion d’outre moitié.
^ L a discussion, du rapport des e x p e rts entraîne des dé
tails et des longueurs que ne comporte pas une consul
tation. Cette discussion se trouve d’ailleurs faite avec le
plus grand so in , avec exactitude, et la plus grande clarté,
dans la réponse qui a été faite par le cit. D u b o is, aux causes
et moyens d’appel du cit. Teyssèdre : il paroît d’ailleurs
sulïire de présenter le moyen le plus saillantet le plus effi
cace, qui se présente pour prouver l’irrégularité , la par
tialité évidente des experts, et qu’ils se sont absolument
écartés des dispositions de la loi du 18 floréal, auxquelles
ils dévoient strictement s’assujettir dans leur estimation.
Ils sont obligés de convenir que le domaine du Marcliadial est le plus voisin et le plus rapproché de celui
de la Courdon; qu’il est situé dans le même vallon; d’où
se tire naturellement la présomption qu’il doit y avoir à
peu près meme qualitc des fonds dos deux domaines
également composés de prés , de champs et de pâturages.
Les experls ont vu d ailleurs qu’il n’y avoit qu’un mois
et demi de distance des dates des deux ventes. Voilà bien,
�( 13 )
r
•
sans doute, le point de comparaison qui leur étoit marqué
par la loi du 18 floréal, et dont ils ne pouvoient s’écarter
sans contrevenir à la loi, mais cest précisément ce pointde comparaison qu'ils ont négligé \ et quelles raisons en.
donnent-ils ?
D ’abord il faut écarter leur assertion, de la différence
de qualité dans la valeur des fonds de même nature dont
sont composés les deux domaines ; leur situation dans le
même canton, dans le même vallon, et leur presque conti
guïté, élève la plus forte présomption contre leur asser
tion. Il y a sans doute, dans chacun de ces deux domaines,
certains fonds plus ou moins bons; mais c’est l’ensemble
qu’il falloit envisager , et sur cet ensemble qu’il falloit
opérer.
Mais qu’ont fait les experts ? bien loin de saisir l’enseinble, ils ont détaché deux ou trois héritages du do
maine du Marchadial , qu’ils ont choisi entre les plus
mauvais, et ils ont pris les prix distincts et séparés de ces
deux ou trois héritages, pour les assimiler à tous ceux de
toute qualité du domaine de la Courdon : c’est assurément
une opération pitoyable.
•
Ensuite quelles raisons ont-ils données, pour s'excuser
de n'avoir pas pris l’ensemble du domaine de Marchadial?
c’est, ont-ils dit, que par sa situation il devoit présenter
une plus grande concurrence d’acheteurs. Mais ces deux
domaines étant situés dans le même canton , dans le même
v a llo n , et presque contigus l’ un à l’autre, ils se trouvoient
également à la bienséance et à la p r o x i m it é de ceux qui
ont acheté le domaine du M a r c h a d i a l , et par conséquent
1 v avQit même raison de concurrence.
�.
.
( 14 )
Enfin il y avoit de plus en faveur du domaine de la
C o u rd o n , que c’étoit un bien patrimonial, au lieu que
celui du Marchadial ctoit un bien national; et qui est-ce
qui ignore qu’un préjugé, sans doute mal fondé, a cons
tamment d o n n é , dans les ventes qui se sont faites des biens
de l’une et l’autre espèce, aux biens patrimoniaux un prix
infiniment supérieur à celui des biens nationaux?
Mais ce qui est encore bien plus essentiel, et qui ne
peut qu'inspirer une juste indignation contre le rapport
des experts, c’est de leur voir prendre pour point de com
paraison la vente faite par le cit. Borel au cit. Esdieux du
domaine du F ayet, quoique plus éloigné de celui de la
Courdon que celui du Marchadial. Ce n’est pas ce qui paroîtroit plus révoltant; mais ce qui l’est outre mesure, c’est
que la vente du domaine du Fayet n’est vraiment qu’une
vente simulée , et que c’est proprement un acte d’échange.
L a preuve en est évid en te, puisque le même jour que
Borel vend à Esdieux le domaine du F a y e t, Esdieux , de
son cô té , vend à Borel un autre domaine. Pourquoi ne
pas prendre la voie de l’échange, au lieu de faire deux
ventes? La raison en est toute facile à comprendre. En
faisant un échange , les droits d’enregistrement eussent été
pris sur la valeur réelle des deux domaines ; et si l’éva
luation qui en auroit ete laite dans l’acte n’avoit pas atteint
la vraie valeur , les employés de la régie de lenregistrcmcnt n’auroient pas manqué de prendre les échangistes
en fausses déclarations, et de leur faire subir les doubles
droits, et autres peines prononcées par les lois dans le cas
de fausse déclaration : au lieu que faisant deux ventes sépa
rées, les deux parties éloient maîtresses d’en fixer le prix
�( i5 )
^
ù leur g r é , et de le rendre bien inférieur à la vraie valeur,
et par là de réduire les frais d’enregistrement, sans donner
prise à l’avidité fiscale.
Les experts n’ignoroient pas les circonstances des deux
ventes du même jour: c’est donc vraiment une astuce de
leur part de se les être dissimulées, et de prendre pour
valeur du domaine du Fayet le prix d’une vente que le
vendeur et l’acquéreur avoient un égal intérêt de porter
le plus possible au-dessous de la valeur de la chose.
Il
y a sans doute bien d’autres critiques à proposer contre
le rapport des experts, et elles l’ont été dans toute l’étendue
et la force dont elles sont susceptibles, dans les réponses
à causes et moyens d’appel du citoyen Dubois. Mais n y
eût-il que celles qu’on vient d’observer, elles sont trop
frappantes pour q u ’elles ne suffisent pas pour juger de
.¡’irrégularité du rapport des experts, de la violation de
la loi du 18 germinal, à laquelle ils devoient se conformer,
et de leur partialité évidente dans le choix qu’ils ont fait
pour point de comparaison de la vente du domaine du
F a y e t, qui n’est vraiment qu’un échange , et qui n’a eu
par conséquent qu’un prix idéal et fictif, que l’intérêt du
vendeur et de racheteur a dû leur faire rabaisser infini
ment au-dessous de la vraie valeur de la chose, dès qu’il
y avoit vente réciproque du même j o u r , et r i e n , par
conséquent, à débourser de part ni d’autre.
E n voilà assez, sans doute, pour justifier la nécessité
ou se sont trouvés les premiers juges, d ’ o r d o n n e r un second
rapport par de nouveaux experts , afin de se procurer les
instructions nécessaires qu’ils ne pouvoicnt pas trouver
dans le premier rapport, pour juger en connoissancc de
�, ( 16 )
cause. On a d’ailleurs établi au commencement de cette
consultation , qu’ils y étoient autorisés non seulement par
la disposition des lois romaines qui régissent les parties,
' et par celle des coutumes voisines, mais même encore par
celle de la coutume de Paris, suivant l'intelligence que nous
en donnent tous les commentateurs et autres auteurs qu’on
a cités, et surtout d’après les termes de l'art. CLXXXIV ,
que néanm oins le juge ordonne autre ou plus ample visi
tation , s il y échet. Le tribunal de Murât auroit pu même
aller plus loin , en déclarant nul le rapport des experts,
pour ne s’être pas conformés à la loi du 18 floréal ; ce
qui leur avoit même été prescrit par le jugement inter
locutoire : c’est une grâce qu’on a fait au citoyen Teyssèdre, d’avoir soumis le citoyen Dubois à avancer les frais
du nouveau rapport.
A in s i, quand le tribunal supérieur ne prononceroit pas
c on tre l’appel par fin de non recevoir, au moins croit-on
avoir prouvé que l’appel est mal fon dé, et que le juge-»
ment doit être confirmé.
D é l ib é r é
à R i o m , le 28 frimaire an 10.
A N D R A U D ,
A
R
i o m
,
de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur
du tribunal d'appel. An 9. — 1801,
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Marie
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dubois. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Subject
The topic of the resource
coutume d'Auvergne
droit romain
droit écrit
doctrine
experts
coutume du Bourbonnais
coutume de Paris
Description
An account of the resource
Consultation [Citoyen Dubois, intimé ; contre citoyen Teyssèdre, appelant]
Annotations manuscrites.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1801
1800-1801
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0226
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Murat (15138)
La Courdon (domaine de)
Marchadial (domaine de)
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Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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coutume d'Auvergne
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
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droit écrit
droit Romain
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826e81f69e265c5ccb6d0da33fa165cc
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******
PRÉCIS
,
T R IB U N A L
P OUR.
Côme- D amien
SPÉ C IA L.
EAYOLLE,
Accusé;
C O N T R E
J a c q u e s
J
’a
i
D
E F F A R G E S ,
P la ig n a n t.
des e n n em is, ils se cachent: un mannequin est l’ instrument de leur
animosité. L e s lâches n’attaqueraient pas ma vie , mais ils cherchent à m’ôter
l ’ h o n n e u r , parce que dans ce genre d’agression, toute représaille leur est
moins sensible, et que sur-tout ils sont plus à couvert. I l leur a été si aisé
de supposer quelques motifs d’intérêt personnel à un Hom m e totalement nul
et sans ressources, incapable de méditer Iui-mêmee ce qui a été fait sous son
nom.
v
Q u i d on c sè d éfend ra du soupçon d’ im p r o b i l é , q u a n d a v e c u n e fortune
au-dessus de mes b e s o in s , et après so ix a n te -d eu x ans d ’ une v i e sans r e p r o c h e j
j’ai la d ouleur de m e v o ir a ccusé d ’a v o ir v o l é 2,000 francs ; et à qui ? A D e f o rg es ! qui vit dans la p é n u r ie la plus e x tr ê m e ? A D e ffa rg e s q u i , depuis la
v o l-, a laissé passer sept a n s , q u a to r z e ans m ê m e sans s’ en a ppero evo ir.
C e u x qui connaissent l’accusateur et l’ accusé rougiront de penser que
c’ est moi qui suis accusé par Deffarges. ils croiront qu’ une transposition
de noms les abuse ; et leur indignation justificative sera le seul examen qu’ils
feront des détails relatifs à la misérable calom nie dont je suis un instant la
victime.
Aussi n’ est-ce pas pour eux que j’ écris. .J e n’ écris pas m ême pour mes juges ;
car en leur demandant la prison et venant me justifier a vec des pièces a u th en
tiq u e s , si j’osais douter de leur jugem ent, ce serait douter de leur conscience*
J ’ écris pour ceux qu i, ne me connaissant p a s , n ont pu que recevoir l’impres
sion désavantageuse qui résulte naturellement d une accusation de faux. L a
calomnie est expéditive et laconique ; uns justification est compliquée et
ennuyeuse ; mais ceux qui méritent que leur opinion soit comptée pour quelA
�( 2
)
que chose, se défient de l ’exagération du vu lgaire, sont en garde contre leur
propre ju g em en t, et se font un devoir de lire ce qui peut les désabuser.
C ’est donc à ceux-ci que je vais donner l’explication de ce qui a donné lieu
ou plutôt de, ce qui a fourni matière à la dénonciation signée Deffarges. J e ne
chercherai pas des moyens dans les lois et les auteurs. J e me contenterai de
laisser parler les faits 3 eux seuls me justifieront.
’
FAITS.
'
A n n e et Marie Tisseron sœurs, avaient épo u sé, l’ une le sieur C h a lu s ,
l’autre le sieur Laroche qui avait des enfans d’ un premier lit.
D e M arie Tisseron issurent M argueritte, Jean-Joseph et A m a b le Laroche;
c’ est cette dernière qui a épousé le sieur Deffarges.
E n 17^7 > J eai>-Joseph Laroche me vendit divers héritages venant de
M arie T iss e r o n , sa m è r e , parce que ces héritages se trouvaient voisins de
m es propriétés de St.-Amant ; il ne lui en revenait qu’ un tiers, et voilà ce qui
a am ené d’autres actes.
■
A u mois d ’avril 1789, j’acquis les droits de Margueritte L a r o c h e , dans les
mêmes biens provenant de M arie Tisseron.
1
Com m e Jean-Joseph Laroche avait vendu plus qu’il ne lui revenait dans
les immeubles de l’acte de 1787 , il y eut un traité entre l u i , Deffarges et m oi,
Comme représentant Margueritte Laroche. Jean-Joseph nous céda en indem-
c ité une terre et deux prés sis à Gondinangue.
,
Com m e encore là succession Tisseron devait au sieur L ad e y te une rente au
principal de 2,5oo fr. , qui devait être remboursée par nous trois, Laroche et
Deffargesme vendirentune moitié de terre et un petit jardin,plus quatre rentes
et l’effet d’une sentence de 1 7 7 g , à condition de rembourser M . Ladeyte.
Ces biens de Gondinangue étaient si peu de chose , si peu à ma bienséance)
que je cherchai aussitôt à m’ cn défaire ; un nommé Antoine B o y les demanda
en rente j l’acte allait en être p a ss é, et Deffarges était venu d’Aubusson à cet
e f f e t , à la fin de 1790. M ais qui eût voulu Deffarges pour caution? on ne vou
lait acheter que de moi. L ’acte n’ eut pas lieu.
E n 1791 , un autre acquéreur se présenta avec les mêmes propositions j
voulant en fin ir , j ’achelai alors de Deffarges sa moitié desdits héritages, par
acte du 4 mai 1 7 9 1 , reçu R o c h e et Piolet t notaires, moyennant une rente de
cinquante f r . , pour ne pas perdre le capital en cas d’ éviction ; et presqu’aussijôt je vendis le tout par acte notarié au sieur Tardif, juge de paix à St.-Amant,
a v ec ma seule garantie.
.
L e sieur C h a l u s , époux do M arie Tisseron avait retiré des héritages d ’un
üomiaé G v o le t, eu 1 7 7 7 , pour l’acquit d ’uno créance cotnmuno aux deux
�( 3 )
sœurs Tisseron. D ’ autres créances étaient hypothéquées sur un doroaino
appelé de L o b é n i c h e , acquis par moi j j’avois donc intérêt de dégager mon
Lien de ces hypothèques.
■
C e fut le sujet d’ un traité du z i thermidor an 5 , acte si peu destiné à être
caché qu’ il fut fait à O lm e t, en présence de plusieurs persounes.
O n conçoit aisément qu’en traitant avec D e flarges, je ne devais pas faire
un acte partiel , et laisser encore mes intérêts en commun avec un homme qui
m ’entravait dans tout ce que j ’avais à fa ir e , et q u i , toujours aux expéd ieu s,
m ’ennuyait encore plus.
I l fut donc convenu que Deffarges me céderait sa portion dans plusieurs
créances, plus son tiers dans les immeubles retirés par Chalus en 1 7 7 7 ; plu*
enfin le capital de la rente à lui due par l’acte de 1791. L e prix en était con
venu à 2,5 oo francs.
,
, M ais cet acte devait naturellement être divisé en deux parties ; car je vou
lais distinguer les créances qui m’intéressaient personnellement} et Deflarges
mit fencore cette circonstance à profit.
,
C o m m e l’acte se réd ig ea it, et que j’allais écrire 5oo francs pour le prix de _
ces créances, Deffarges éleva des difficultés, voulut une augmentation 5 cette
somme de 5oo francs fut laissée en blanc , et l ’acte fut continué. L e second
prix , fixe a 2,000 francs, 11’eut pas de difficulté, dès qu’il y avait un article
en blanc.;
■'
.
,
,
,
Quand l’acte fut terminé et bien l u , quand il n’y manqua que cetl®
somme et l’approbation, nous traitâmes sur le prix en blanc: il fut porté à
. 600 francs. L e blanc fut donc rempli après coup. L ’approbation le fut dans
la même m inu te, et cette approbation est ainsi conçue:
•
N o u s so u ssig n é s . . . . approuvons Les présentes et les fe u ille ts
d essu s,
D
des
B on p our ce que
a u t r e s p a r t s . F a it d o u b le , etc ........... F a y o l l e ............
effarges.
-
A u moyen de cet a c t e , le sieur Deffarges ne devant plus rien de la créance
L a d e y t e , il fut écrit aussitôt q u ’il en était tenu q u ille , sur la quitauce
m êm e du remboursement.
Com m e je ne cachais pas celte acquisition , j’en fis usage aussilôt. L e i 3 floréal an 5 , j’assignai le sieur Chalus en partage.
J e nommai
.
pour mon expert le sieur M a g n in , beau-frère du sieu*
Deffarges.
.
L e 21 thermidor au 5 , par acte notarié , ce partage fut fait.
L e 9 fructidor an 5 , par autre acte n o ta rié, je vendis mon lot au sieur
Ci rôle t.
"V o ilà tout ce qui s’ est passé.
'
.
.
,
A
2
�( 4 )
D É N O N C I A T I O N ,
M O T I F S ,
CHARGES.
J ’ étais donc propriétaire depuis 1 7 9 1 , et depuis l ’an 5.
J ’avais revendu en 1791 , et en l’an 5.
Depuis ces diverses époqu es, DeiFarges 11’avait réclam é de personne ni
créances,, ni ren tes, ni immeubles.
Son enfant meurt en l’an 1 0 , et les collatéraux réclament la succession.
DeiFarges la revendique comme ascendant. Il y a procès.
L e sieur Magnin , un des collatéraux , Le même q u i f u t expert en
L’ an 5 , se souvenant que j’avais fait des actes avec DeiFarges, m’ écrit le
16 messidor an 1.0 , pour demander des renseignemens sur ce qui s’ est passé.
J ’avais perdu de vue tous ces actes auxquels je n’avais ou ne croyais
plus avoir d intérêt. J e les cherche pour en en v o y e r copie au sieur Magnin ,
n ’ayant en vue que de l’ obliger.
J e réfléchis que ces débats peuvent me susciter un procès à m o i- m ê m e ,
et j ’envoie au contrôle de ma résidence l’acte sous seing privé de l’an 5.
E n l’an 1 1 , le sieur Magnin paraît désirer une expédition de cet acte
de l’an 5 , et pour cela il fallait le déposer chez lin notaire. J e le dépose,
et qui choisis-je pour ce dépôt de son double ?
C ’est le sieur Crosinarie, notaire à A m b e r t , homme de confiance du sieur
DeiFarges, son d éfen seu r dans le procès contre le sieur Magnin et autres
collatéraux.
Cet acte et celui de 1791 allaient être funestes au sieur Deffarges ; car
s’ attendant à être exclu de la succession de son fils par les collatéraux,
il demandait au moins l’ usufruit coulumier.
Ces deux ventes en faisaient prononcer la privation.
I l n’a plus qu’ un parti violent à prendre. Il examine à tant de reprises
l ’acte de l’an 5 , qu’il croit avoir saisi un trait de lum ière; il va aux en-*
quêtes et se perd en recherches ; il demande des conseils ù tout le m o n d e ,
et tout le monde ne lui donne pas ceux de la prudence ; il part pour Rioni ;
il dénonce.
I l eût bien voulu ne dénoncer que 1 acte de Lan 5 ; mais le besoin de
sa cause exigeait l’annullation des deux. Xl>n conséquence il se prétend
trompé , « i.° p ar L'acte de 1791 ; . . . il est f a u x , il n’a jamais v e n d u .. . .
« Si la signature e x iste , elle est du fait de 1 auteur du faux ; . . . 2.0 par
•f L'acte de L’an 5 ; . . . il n’est p a s double ; . . . il est dit 600 francs comp
« tant, quoique cette somme fût compensée en partie avec la créance du
« sieur Ladeyte.
J ’ai intercalé
une feuille au milieu , l’acte n’ en ayant
« d’abord qu’ u n e . . . . Cela se prouve par un extrait de l’enregistrem ent,
�(5)
« où on voit que le receveur n’a perçu que 12 f r . , ce qui n’ est le droit
« proportionnel que d’ une vente de 600 francs».
V o ilà sa dénonciation ;'il y joint une liste de quatorze tém oin s, et écrit
au b a s , « que les trois dorniers déclareront que le 2,1 thermidor an 5 , il
« n’avait que 6 francs dans sa poche (après l’acte ) , et qu’il n’ eut pas de quoi
« payer i 5 fr. que je lui gagnai à la bête ombrée ; ce qui prouve que je
* ne lui avais pas compté 600 fr a n c s , et cependant l’acte avait été passé
« devant eux ».
Ces trois tém oins , in d iq u és particulièrem ent par D effa rg es , ont en
¡effet d é p o s é , mais de manière à prouver que s’il y a un / a u x , c’e s t . . . .
dans la d én on cia tion .
D eux de ces témoins ( l e 2.e et le 4.“* de l’in fo r m a tio n ), ont v u faire
l’a c l e d e l ’an 5 ; . . . il a été fait en d e u x feuilles ; . . * le prix a été con
venu devant eux à d e u x m ille et quelques l i v r e s . . . . Il fut souscrit des
effets par m o i ; . . . . il fut fait d e u x d o u b l e s . . . .
L ’autre témoin in d iq u é ( l e 3.6 de l’iuformation ) , frère de D effa rg es ,
n’ a pas été témoin de l’a cte; . . . . il n’a assisté qu’au jeu , où je p a y a i,
{lit-il , p o u r D effarges. . . . Son frère lui dit n’avoir vendu qu’ un petit o b je t,
moyennant cinq cents fr a n c s.
L e s deux nplaires de l’acte de 1791 ont été entendus ; l ’ un d’ e u x , notaire
en second , n’ était pas à l’acte , c’est l’ u sa ge . M a i s R o ch e , notaire recevant,
( l e i o . e de l’ inform ation), déclare se rappeler très-bien que Deffarges est
venu chez lui en 1791 , faire cette vente.
Toutes les autres dépositions sont absolument insignifiantes.
V o ilà les charges; où plutôt, voilà la plus claire des justifications.
#
R É F L E X I O N S .
«
Il ne s’agit plus de la partie de la dénonciation qui concernait l ’acte du
4 mai 1791.
L e sieur Deffarges qui accusait cet acte de f a u x , qui prétendait que sa
signature et celle du notaire étaient fausses, est reconnu avoir signé. L e
notaire est aussi reconnu avoir signé.
L ’acte a été contrôlé à Cuulhat en 1791. L e s registres du contrôle ont
été produits.
Aussi l’acte d’accusation ne porte pas sur celle vente.
Celte première dénonciation est donc prouvée calomnieuse.
N ’aide-t-elle pas à juger la seconde ?
Deffarges m ’a fait interroger. A mon tour je l’ interroge.
�( 6 )
Pourquoi a-t-il menti en disant qu’ il n’ajamais vendu ? I l a vendu. Il est
forcé de ne plus le nier.
Pourquoi Deffarges a-t-il dit que l’acte n’avait pas été fait double? I l a
signé qu’il l’ était. Il a montré son double à Am bert.
Pourquoi Deffarges a-t-il dit à son f r è r e , le m ême jour de l’a c t e , n’avoir
vendu que pour 5oo fr. Il dit aujourd’hui que c’ était 600 fr. I l reconnaît
la partie de l’acte où est écrit le prix de sôa~, cents fr a n c s .
Pourquoi Deffarges a-t-il dit que ces 600 fr. étaient com pensés avec sa
portion d e là créance L a d e y te ? Et pourquoi a-t-ihdit au procès qu’il lui fut
fait un b illet de Soo francs, qu’il a cédé h G ateijrlas
V o ilà donc au
moins 1,100 fr. reconnus.... L e prix n’ élait donc pas seulement de 600 fr.
I i acte avait donc plus que la première feuille.
'
P o u rq u o i Deffarges a p p r o u v a i t - il les feuillets des autres-parts ? 1\ y
a v a it donc plus d'un f e u i l l e t , -autre que c elu i de l’approbation.
Pourquoi Deffarges, propriétaire d ’ im m eubles, n’a-t-il jamais réclamé
ni ses propriétés, ni les jouissances, ni aucuns fermages depuis l’an 5 ?
Pourquoi m ême a-t-il laissé le sieur T a rd if en possession paisible depuis
1791 jusqu’à 1804, d ’im meubles dont auparavant lui Deffarges était si soi
gneux à percevoir les fruits ?
Pourquoi Deffarges ne s’est-il jamais mis en peine d e p u is, de savoir qui
payait les im p ô ts, ni de se faire cotiser s’il était propriétaire.
Pourquoi n’a-t-il jamais assigné ni averti les débiteurs de toutes ses rentes,
et m ’en a-t-il laissé rembourser plusieurs 3 sans se mettre sur les rangs pour,
toucher.
Pourquoi m ’ a-t-il laissé partager avec Chalu s, en l’an 5 , des immeubles
qu’il ne m’aurait pas vendu?? Comment ce partage s’ est-il fait avec L'oncle de
Deffarges par Le beau-frère de Deffarges, sans queD effargesl’ait su?.. Il habile
à trois lieues des biens partagés. J ’habite à plus de dix lieues de distance.
Si le sieur Deffarges s’ était fait toutes ces questions, ou si on les lui eût
fa ite s, il n’y aurait pas de dénonciation.
S ’il avait réfléchi que rien ne m’ obligeait à délivrer un acte co n som m é,
et sur-tout à le déposer en m inute chez son défenseur, dans le procès pat
lequel l’acte était p ro d u it, il n’y aurait pas de dénonciation.
Si DefFarge avait consulté les trois témoins qu’il indiquait comme devant
m e condam ner ^ en rappelant une partie de cartes, il aurait appris d’eux
qu ’ils avaient une mémoire moins fu tile, ils 1 auraient dissuadé; et il n’jr
aurait pas de dénonciation.
Si , pour parler plus ju ste, il n’y avait pas eu de demande en privation
d’ usufruit fondée sur ces deux a ctes, il n’y aurait pas de dénonciation.
Si le sieur Dellarge n'eût pas été aveuglé par l’impulsion d ’autrui et par
�(7 )
son i n t é r ê t , il aurait réfléchi que je n’ ai eu nul intérêt à être son acqué
reur , on à ne l’ ctre pas ; puisque je suis exposé aux évictions des héritiers
de son fils , et que je n’ai contre lui aucune g ara n tie, aucune ressource.
N o n , a u c u n e, pas même pour la ven g ean ce; pas m êm e pour la répa
ration du tort qu ’ il me cause.
J e sens bien qu’ un Deffarges ne portera aucune atteinte durable à m a
réputation, mais je ne trouve pas moins bien d u r , à mon â g e , de con-,
naîtré p a r Lui le séjour des prisons.
•
Quand un hom m e nul entreprend de louer ou de rendre se rv ice , per
sonne ne s’aperçoit de sa tentative. I l est triste de penser qu’il est plus
heureux quand il veut nuire.
FAYOLLE.
A R I O M , D E L ’I M P R I M E R I E D U P A L A I S , C H E Z J .- C . S A L L E S .
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Fayolle, Côme-Damien. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Fayolle
Subject
The topic of the resource
successions
rentes
usufruit
jeux de cartes
faux
Description
An account of the resource
Précis pour Côme-Damien Fayolle, Accusé ; contre Jacques Deffarges, plaignant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1787-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0225
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0318
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Saint-Amant-Roche-Savine (63314)
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Faux
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rentes
Successions
usufruit
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Text
P R É C IS
C O U RS
D’APPEL.
POUR
SÉANTS
A RIOM;.
D am e A n n e L A G U L H E , veuve de F r a n çois - X a v i e r C E L L IN -D U M O N T E L , appe
lante ;
C O N T R E
M onsieur J
oseph
C O R N U D E T ,
membre
du sénat conservateur, et madame J e a n n e
C E L L I N , son épouse , autorisée en ju s tic e , intimés.
LA dame v e u v e D u m o ntel a eté traduite devant les
tribunaux par sa fille et son gendre. Cette provocation
lui fait éprouver un sentiment p enible, L es querelles.
A
�.
.( 2 >
.
.
de famille laissent toujours des traces d ’animosité et
d’a ig re u r, qui s’effacent difficilement.
P ar quelle fatalité la dame Dum ontel se voit-elle forcée
d’entrer en lice avec sa fille unique ? Des prétentions
exagérées remplacent ce tendre resp ect, ces soins touclians qu’une fille doit à sa m ère, et qui consolent des
m aux de la vie.
L a dame Dum ontel ne veut pas descendre jusqu’aux
reproches ; elle avoit même pris la résolution de ne rien-:
publier pour sa défense : m ais, inform ée que'’ sà^fhle-et
son gendre avoient fait circuler un m ém oire , elfe se.croit
dans la nécessité de présenter un extrait des réglemens
de fam ille qui ont fait naître le procès’, et
doijcter *
une idée de ses m oyens, qui recevront un plus grand
développem ent lors de la plaidoirie.
.FAITS.
'
L e 20 août 1765 la damé L agulhe a épousé le sieur
D um on tel; elle s est constitué en dot tous ses biens
échus et à échoir. Il a été stipulé un gain de survie
de 20000 if~, 2000
de bagues et joyaux , des habits
de d e u il, et un douaire de 600
par année.
L e sieur D u m on tel, légitim aire, avoit tout au plus
alors 40000^ de foi lune. Bientôt après il lui échut
une succession qu’il accepta indiscrètement sans en conïioître les forces. Assiège de demandes hypothécaires et
personnelles de la part des créanciers de M . V in p fa u d ,
dont il s’étoit porté h é r itie r , les amis et les conseils
de madame D um ontel l’engagèrent à recourir au remède
de la séparation de biens.
�( 3 ),
..
.
Cette séparation fut prononcée par une sentence de
la sénéchaussée d’A u vergn e , du 20 juillet 1779. L e
m ari est condamné à restituer à sa fem m e, 1°. 26637
5o centimes qu’ il avoit reçus d’elle;, suivant une reconnoissance du 28 janvier de la même année ; 20. celle de
12950
pour vente d’immeubles faite par le mari.
Il falloit encore trouver d e s, moyens pour em pêcher
la saisie des revenus. M . D um ontel con sen tit, au profit
de sa fem m e, un bail de ferme qui ne com prenoit cepen
dant qu’une-foible portion de ses biens. Son domaine
de Chanteloube , le domaine de B rughail et le pré de
Combes ne faisoient point partie de ce bail.
L a dame D um ontel n’a eu qu’une fille de son mariage.
• U ne fille unique qui a l ’espoir d’une fortune considé
rable est toujours fort recherchée. M . Cornudet obtint
la préférence. Son mariage est du 17 avril 1787. Madame
D um ontel institue .sa fille son héritière universelle, sous
la réserve de 5o,ooo
: elle lui constitue en avancement
d’hoirie tous les biens immeubles qui lu i appartiennent
dans le lieu de C h astrix, elle n’en excepte que les rentes
foncières ou pécuniaires qui dépendoient des biens qu’elle
possède dans ce lieu -, elle lui délaisse encore au mên e
titre l'eiTet d’une créance en p rin cip al, intérêts et fra is,
qui lui étoit due par la succession d’un sieur M orin
du Sauzet.'
Cette institution et le délaissement sont faits à la charge
p a r la dame Cornudet de payer au sieur D um ontel, son
père, dans le cas où il survivroit a la dame son cpouse,
une pension viagère et annuelle de 2400
mais cette
pension n’étoit payable qu’en cas d’incom patibilité entre
A 2
�'£ 4 )
’là fille et le p ère; et dans le même cas madame C or
nudet est obligée de laisser à son père un m obilier con
venable. •
L e sieur D u m o n tel, au moyen de cette pension, ne
*se réserve aucun usufruit; elle doit lui tenir lieu de tous
gains n uptiaux qui lu i sont a cco rd és, ou p a r son con
t r a t , ou p a r la-Coutum e.
P a r une autre clause, les sieur et dame D um ontel
délaissent dès à présent la jouissance de tous les biens que
le sieur D um ontel pouvoit avoir dans le lieu de Chastrix
ou ailleurs, quelque part qu’ils soient situés, ensemble
les contrats de rentes foncières et constituées , actions
m obilières ou im mobilières généralem ent quelconques,
-«‘ans autre réserve-que de la maison que les sieur et dame
D um ontel habitoient dans la ville d’A rd e s, du domaine
■du FromentaL, et d’une rente due par la dame Savignat;
desquels objets réservés, e s t-il dit., la dame D um ontel
•-contiauera de jou ir en dim inution de ses créances contre
son m ari.j^ aux im putations de d r o it, et en exécution
du bail à ferm e que son mari lui en a consenti / le q u e l,
•quant au -dom aine, accessoires, maison et ren te, sera
exécuté suivant sa form e et teneur.
<"Ce délaissement de jouissance et avancement d’hoirie
^sont faits par les pere et m ère, a condition que les époux
acquitteront, comme ils s’y obligent, en décharge du
T-aieur D u m o n te l, la somme de 10800^" de dettes chixograpluiires ou hypothécaires personnelles au sieur
;D u m o n tc l, ou rt la daine son epouse , pour s’être obligée
personnellement et conjointement avec lui.
<
sM. -Coruudet est aussi obligé d’acquitter son beau-
�'( -s :)
f
_
¡père, envers son procureur ,a R iora , des dépens qui
.peuvent lui être dûs sur une action hypothécaire qu’il
-poursuit contre les débiteurs de la succession des sieurs
D u m on tel et Vinpfaud.
’
.
- L a dame D um ontel se -réserve Vhypothèque q u ’elle
•à su r les biens de son m a r i, soit en vertu de son con
t r a t de m a r ia g e s o it en vertu de la sentence de sépa
r a tio n portant liquidation de ses d ro its, sans aucune
-novation n i dérogation. • .
,
- E lle -subroge cependant, sans aucune garan tie, les
-époux à cette .h yp o th èq u e, p o u r , sûreté de la jouis
sance des fonds <que son m ari leur a délaissés:, afin qu’en
;cas de trouble de la part des créanciers de son m ari,,
¿ils se servent de cette hypothèque-, de m anière cepen
dant que-la jouissance réservée par la dame Dumontel,,*
¿-sur. les biens de son m ari, ne soit pas diminuée.
• ,
Les père et m ère consentent que M . Cornudet aliène
:tous les immeubles réèls ou fictifs dont-la jouissance vient
de lu i être délaissée v qu’il en dispose à titre o n é re u x , en
tout ou en partie, par un ou plusieurs contrats, à ’tels
p rix et conditions qü’il jugera l e plus convenables; l’au
torise à traiter-et transiger sur les actions mobilières ou
im m obilières comprises dans le délaissement, <et de la
m anière qu’il jugera la plus;convenable et la plus avan
tageuse ; qu’il fasse telles .remises que l’ insolvabilité, des
•débiteurs ou l’incertitude de l ’événem ent d un procès
■
p o u rro n t, de bonne fo i, lui faire -juger . convenables,
■•sans qu’en aucun cas sa f e m m e , ou les siens, puisse se plain
dre des ventes ou traités qui in terviendront, soit pour lè
¿prix,, -soit pour, les conditions, ni qu’elle puisse revenir
�• S 6),
contre les ventes ou traités, prétendre aucuns dommagesintérêts contre son zn ari, cette clause faisant partie ex-^
presse des conventions du mariage.
M . Coi'nudet est te n u , conjointem ent et solidaire
ment avec son père , d’em ployer les deniers qui pro
viendront des traités ou aliénations , par préférence, à
l ’acquittement des dettes personnelles du sieur D u m on tel,
dont les époux ont été chargés.
Dans le cas où M M . Cornudet , père et fils , n’eus*
sent pas fait em ploi du reste des deniers qui provien
dront des ventes on tra ités, et que restitution de la
dot ait lie u , ils seront tenus de rem bourser ce qu’ils
auront reçu des deniers, à raison de 2 0 0 0 ^ par an ,
avec l’intérêt du surplus des sommes à restituer ; mais
ils doivent prélever les frais et dépenses qu’ils auront
été obligés de faire pour la poursuite ou recouvrem ent
des effets.
Cette clause de r e m p lo i, au surplus , n’est ajoutée
que pour expliquer la manière dont M M i Cornudet père
et fils pourvoient en disposer-, les acquéreurs sont dispensés
de veiller ù cet em ploi ou de l ’exiger ; les sieur et dame
D um ontel et leur fille ne prétendent d’action que sur
les biens des sieurs Cornudet.
Enfin , il est stipulé que la pension et logement réservés
au sieur D um ontel seront insaisissables pou r quelque
cause que se so it, même par les créanciers du sieur
Dum ontel.
L e sieur D um ontel père a vécu jusqu’il la fin de 1787.
L e deux janvier 178 8, madame Cornudet a obtenu des
lettres de bénéfice d’in ven taire, et u’a accepté la succès-
�( 7 ) .................
sion de son père qu’en la qualité d’héritière bénéficiaire,
L a dame D u m o n t e l à son tour a poursuivi contre sa
fille , en cette qualité d’héritière bén éficiaire, la liq ui
dation des gains qui venoient de s’ouvrir par sa survie
à son époux : elle a ob ten u , le 28 avril 1789 > une
sentence par défaut, faute de plaid er, en la sénéchaussée
d’A u v e rg n e , qui déclare son contrat de mariage exécu
toire contre la dame Cornudet, en sa qualité d’héritière
bénéficiaire de son p è r e , et la condamne au payem ent,
i ° . d’une somme de 20 00^ pour bagues et jo y a u x ;
2°. de celle de 20000 ^ pour gain de survie ; 30. de
celle de iô o o ^ " pour habits de d e u il, e t , en fin , de
celle de 600 1i~ par année pour sa pension viduelle.
Il est bon d’observer que cette sentence ne frappe
précisément et exclusivem ent que sur les droits qui ve
noient de s’ouvrir en faveur de la dame D um ontel \
qu’il n’y est nullem ent question des sommes dont la
condamnation avoit été prononcée par la sentence de
séparation de 1779*
L a dame D um ontel n’avoit point exercé son action
dans des vues hostiles ; elle vouloit être en règle sur ses
droits : mais elle se borna à obtenir celte sentence qui
n’étoit jamais sortie du g re ffe, et qu’elle 11’a fait expé
dier qu’après l’oppositiûn *, elle n’a même pris aucune
précaution conservatoire qui pût gêner son gendre et sa
fille dans leurs spéculations ou leurs transactions. Q uel
a dû être son é t o nn e me nt , lorsq u e, le i 5 brum aire an
11 , 14 ans après l’obtention de cette sentence, elle a
reçu une o ppo sit io n, de la part de son gendre et de sa
fille , à cette même sentence, aycc assignation au tri—
�( 8 y
bunal d'Issoire pour procéder 'su r cette opposition ? ;
L e môme jo u r, i 5 brum aire, M . et M c1e, Gornudet
ont 'fait une inscription j au bureau des hypoth èques, sur
les biens de .leur défunt père et beau-père , pour une
somme de 13600
qu’ils prétendent avoir payée en
décharge de cette succession; de sorte q u e, plus soigneux
que la dame D um on tel, ils ont acquis une hypothèque
antérieure à la sienne ,, et apprennent au moins les
sommes dont ils se prétendent créanciers.
D evant le tribunal d’Issoire les sieur et dame Cornudef,,
en concluant à être reçus opposans à la sentence du 28
avril 1789-, ont soutenu, que la dame D um ontel devoit
être déboutée de toutes ses demandes. Seulement ils ont
consenti que- son contrat de- mariage fût déclaré exécu
toire contre la dame G ornudet, en sa qualité d’héritière
bénéficiaire de son père ; mais ils ont voulu en l’estreindre
l’exécution sur les biens paternels dont la dame D um ontel’
s’étoit réservé la jouissance par leur contrat de m ariage,
si m ieux elle n’aim oit leur abandonner le quart de tous
les biens qui lui appartenoient à l’époque du mariage de
sa fille , d’après l’article 6 du titre 14 de la Coutume
d’A u v e r g n e , avec restitution des jouissances depuis le
décès du sieur Dum ontel.
M . et M cl'c. Cornudet fondoient cette singulière pré
tention, i ° . sur la circonstance que la dame D um ontel
leur m ère avoit délaisse , conjointement avec son m a r i,
les biens propres î\ ce dernier ; 20. sur ce q u’elle avoit
renoncé , par le contrat de mariage de sa fille, à l'exer
cice de son hypothèque sur les biens délaissés , et avoit
mi,me subrogé sa fille ¿l cette môme hypothèque.
M..
�( 9 ) .
M . et M<ï<v Gornudet ajoutoient' que Îe sieur D u-,
montel étoit m ort insolvable. L a sentence de séparation
prouvoit cet état d’insolvabilité ; dès-lors la dame D u m ontel étoit ten u e, aux termes de l’article 6 du titre 14
de la Coutume , de doter sa fille jusqu’ù concurrence du
quart de ses biens : elle devoit d o n c , ou se désister de.
ses prétentions, ou abandonner à sa fille le quart de tous,
les biens qu’elle possédoit à l’époque du mariage.
.
L e jugement du 2 therm idor an n , rendu au tribunal
d’Issoire, a adopté ce système dans son entier.
.
M . et M de. Gornudet - ont été reçus opposons à la
sentence par d éfau t, du 28 avril 1789 , en ce que , par
ce ju gem en t, tous les biens immeubles ayant appartenu
au sieur Cellin ont été affectés et hypothéqués au paye
ment des gains nuptiaux et douaire , et en ce que fes
biens immeubles délaissés par le sieur Cellin à M . Cor-,
nudet et à sa fem m e, par leur contrat de mariage , n’en
sont pas exceptés. Faisant droit sur cette opposition , les
biens délaissés sont déclarés affranchis de cette hypo
thèque : la dame D um ontel est d é b o u té e , quant à c e ,
de sa demande hypothécaire; il est ordonné qu’au résidu
le jugement sortira effet, sans dépens.
•
L es motifs de ce jugement sont très-nom breux, O n a.
posé deux questions principales. « L a première est de.
» savoir si la dame Cornudet peut être tenue personnel
» lem en t, on qualité d’héritière par bénéfice d’ inven» taire de son père , au payement des gains et avantages
» m atrim oniaux réclamés par la dame Dum ontel.
>3
O n exam ine,'dans la seconde question , si les biens
» immeubles dépendais de la succpssion paternelle, qui
*
B
�C 10 )
>5
»
»
»
ont été délaissés en avancement d’h o irie , doivent être
affranchis de l’hypothèque éventuelle que la dame
D um ontel avoit sur ces mêmes biens pour le paye
ment de ses gains et avantages matrimoniaux,
» O n subdivise ensuite cette seconde question en point
» de fait et en point de droit. Dans le fa it,la dame veuve
» Dum ontel s’est-elle départie de son hypothèque en
» faveur de sa fille ?
» Dans le d ro it, ce département fait sous la puissance
» maritale est-il valable?
33 Sur la pi’emière question , on reconnoît que la
>3 dame C o rn u d et, en sa qualité d’héritière bénéficiaire,
» est tenue des dettes de son p è r e , jusqu’à concurrence
j> des forces de la succession.
n Sur la seconde, considérée dans le point de fa it,
»
33
»
»
»
»
la dame veu ve Cellin a délaissé, conjointement avec
son m a ri, tous les biens meubles et immeubles de ce
d e rn ier, sauf la réserve de quelques objets. Ce délais
sement de la part de la dame D um ontel lui impose
au moins l ’obligation de garantir de toutes actions
provenantes de son fait les biens qu’elle a délaissés.
» Ce délaissement n’a pas été gratu it, puisqu’il est fait
» sous la condition que la dame Cornudet et son m ari
» payeront les dettes personnelles du sieur Dum ontel.
33 L a réserve faite par la dame veuve Cellin de la
» maison d’A r d e s , du domaine de F rom en tal, et de la
» créance de Savignat, pour en jouir en dim inution de
» scs créan ces, est une restriction de son hypothèque ,
» afin qu’elle ne portât que sur les objets réservés.
» Cette restriction résulte encore d’ une manière plus
�»
»
»
»
»
( " 5
.
manifeste de la clause du contrat de mariage de la dame
C o rn u d et, par laquelle la dame veuve C e llin , en se
réservant l'hypothèque qu’elle a sur les biens de son
m a r i, soit en vertu de son contrat de mariage , soit
en vertu de la sentence de ^séparation , subroge cepen-
»
»
»
»
»
dant sa fille et son gendre à cette h ypothèque, pour
sûreté de la jouissance des fonds que le sieur Cellin
vient de leur délaisser y afin de s’en servir en cas de
trouble de la part des créanciers, et qu’elle ne met
d’autre condition et d’autre lim itation à cette subroga
» tion à son hypothèque , que la conservation intcCte
» de la jouissance des biens de son m a r i, qu’elle s’est
,
,
.i .
»
» reservee.
» Les termes de cette clause annoncent que cette sub
» rogation renferm oit non - seulement l’hypothèque
» qu’elle avoit pour le payement.de ses reprises liquidées
» par le jugement de séparation, mais e n c o re . l’hypo» thèque éventuelle qui'résu ltait de son contrat de raa
» riage pour la sûreté de ses gains et avantages m atri» moniaux.
J
» L e consentement donné par la dame veuve C e llin ,
conjointement avec son m ari et sa fille , à ce que son
»
»
»
»
»
»
gendre aliénât tous les immeubles réels et fictifs dont
la jouissance lui étoit délaissée, sans que la darre
Cornudet pût s’en p la in d re, et seulement sous l’obli
gation d’em ployer le p rix pr ove nant des ventes par
préférence à l’acquittement des dettes du sieur C e llin ,
est une abdication formelle et sans retour , de l:i part
» de la dame son épouse, de son hypothèque sur les
» immeubles dont elle"autorisoit la v e n te , et une renon
-
‘
'
y
E> z
�.
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
>
.
( *2 )
d ation à être payée sur le p rix en p roven an t, parce
qu’il n’est pas possible de concevoir qu’un créancier
consente que le gage de sa créance soit v e n d u , que
le p rix en soit payé à d’autres créanciers, sans con
sentir en même temps que le gage soit affranchi de
l’hypothèque de sa créan ce, cette conséquence étant
la suite forcée et nécessaire de la faculté d’aliéner.
» Si le délaissement fait à la dame Cornudet et à
son m a ri, des biens de son père , ne fut qu’en jouis
sance et ¿\ titre d’avancement d’hoirie , ce délaisse
m ‘nt a pris un caractère d’irrévocabilité par l’aulorisation d’aliéner.
» L a déclaration faite par les sieur et dame D u m o n tel,
» que pour raison du rem ploi des deniers provenans de
»
»
»
»
»
la vente des biens délaissés, avec restitution du p rix
du restant d’iceux , ils ne prétendoient action que sur
les biens du sieur C o rn u d et, écarte sans retour toute
idée d’hypothèque de la dame veuve D um ontel sur
les biens de son m ari délaissés à la dame Cornudet.
» En point de d r p it, la dame D um ontel avoit la
» faculté de se, départir , sous la puissance m aritale,
» de son hypothèque éventuelle sur les biens délaissés :
» d’après l ’article 6 du titre 14 de la Coutume d’A u
» v e r g n e , la femme m ariée peut disposer du quart de
ses biens dotaux pai contrat entre—vifs, pour le mariage
* de ses iillcs ou autres desccndans, lorsque son mari
» n’a pas de quoi les marier selon son état.
» O11 ne peut regarder comme une dot l’institutiVui
» faite par la dame D um ontel à sa il]le : une riispo» sition de ce genre ne présente que des espérances
�( *3 )
» éloignées et souvent très - fugitives ; elle n’offre au
» mari aucunes ressources pour le soutien de sa famille
»
:
»
'»
pendant la vie de l ’instituant.
"
>3 Sans la renonciation de la part de la dame veu ve
Cellin à son hypothèque éventuelle , pour le paye
ment de ses gains et avantages m atrim oniaux sur les
» biens délaissés, il étoit impossible au sieur Cellin. de
» doter sa fille selon son état.
3) Son insolvabilité étoit notoire ; elle résultoit de
» la sentence de séparation de biens , de l’abandon par
» lui fait à sa fille et à son gendre de tous ses b ie n s,
» à la .'charge de payer ses dettes moyennant une pen
sion an n u elle, viagère et insaisissable , q u i‘"ne lui fut
33 même assurée que par sa femme.
•
33 T o u s ses biens étoient g revés de l ’h y p o t h è q u e de
33 son épouse , soit pour le payement de ses reprises
33 liquidées par la sentence de séparation, soit pour la
33 sûreté de ses gains et avantages m atrim oniaux. Il n’au33 roit donc donné à sa fille qu’une ch im ère, une chose
33 illusoire , s’il lui avoit constitué une dot dont sa
-.33 femme auroit pu détruire tout l’e ffe t, soit pendant
>3 la vie de son m a r i, soit après sa m o rt, par l’exer3) cice de son hypothèque.
33 P o u r marier sa fille selon son état, il falloit le con
» cours du mari et de la femme ; du mari , comme pro
» priétaire des biens délaissés en d o t; et de la fem m e,
» comme créancière , et c ouv rant de son hypothèque
» toute la fortune de son mari.
» E n supposant que l’hypothèque éventuelle fût
» d o t a le , le département de cette hypothèque étoit
» indispensable pour faire une dot «\ sa fille.
�( i 4;)
» Mais on ne peut considérer comme dotale l’h ypo» thèque éventuelle que le contrat de m ariage donne
» à la femme pour le payement de ses gains. L e bien
» dotal est celui qui est donné au m ari par la femme
» pour supporter les charges du mariage : on ne peut
» donner cette dénomination à des gains n u p tia u x , qui
» doivent être p r is , en cas de survie de la fem m e, sur
» les biens mêmes du m a r i, et qui ne peuvent être
» jouis par elle que lorsque ce dernier est décédé.
» Quoique les principes s’opposent à ce que la femme
» puisse pendant le mariage se départir de cette hypo
» thèque éven tu elle, comme étant une convention sur
» la succession d’un homme v iv a n t , néanmoins cette
» stipulation est permise lorsqu’elle est faite dans un
»
»
j)
»
»
contrat de mariage susceptible de toutes les conven
tions qui ne heurtent pas les bonnes m œ u rs, en présence et du consentement de celui de la succession
duquel on traite ; enfin , lorsque cette stipulation
devient nécessaire pour doter une fille selon son état. »
T els sont les motifs qui ont déterm iné les premiers
juges. Ils violent ouvertem ent les principes du d ro it:
on n’y a pas même abordé la question , et la cause n’a
pas été connue.
L a dame Dum ontel s’est pourvue par appel contre ce
jugement', elle a droit d e n espérer la réform ation eu la
c o u r , et va soinmaii'ement enoncer ses moyens.
T o u s les biens de la dame Dum ontel sont dotaux; ils
sont donc inaliénables de leur nature. L ’article 3 du
titre 14 de la Coutum e (Jéfcncl au mari et à la fem m e,
conjointem ent,ou séparém ent, pendant le m ariage, de
�( i 5 )
ven d re, alién er, perm u ter, ni autrement disposer des
biens dotaux de la femme au préjudice d’icelle. L e der
nier commentateur observe qu’il n'y a point d’article
dans la Coutume où elle s’explique en termes plus im
périeux et plus irritans.
L ’article I er. du titre 18 ajoute encore à cette prohibi
tion. Il est interdit à la femme de s’obliger pour le fait
de son m ari ou de ceux à qui il peut succéder : elle ne
peut aussi renoncer aux obligations et hypothèques à elle
appartenantes.
En supposant pour un instant , dans le système des
intimés , que la dame D um ontel eût renoncé à son hypo
thèque , elle auroit fait ce qui n’étoit pas en son p o u v o ir ,
puisque la Coutum e le lui défend im périeusem ent 5 et
veut que ce telles obligations soient de nul effet et valeur ,
» qu’elles ne puissent même être validées par serment. »
Cette interdiction absolue ne pouvoit être m éconnue
des premiers juges. L a disposition de la Coutum e est con
form e aux lois romaines ; la lo i unique au C o d e , D e rei
uxoriœ a c tio n e , ne perm et pas m ême à la femme d’h ypothéquer sa dot pendant le mariage.
M ais la dame D um ontel a-t-elle abandonné son h ypo
thèque ? O n vo it tout le contraire dans le contrat de
mariage de sa fille ; elle s’y réserve expressément Vhypo
thèque q u elle avoit su r Ids biens de son m ari f soit en
vertu de son contrat de m ariage , soit en vertu de la sen
tence de séparation, et sans aucune novation ni déro
gation. Comm ent expliquer cette réserve avec le dépar
tement qu’on veut supposer? Il faut bien qu’une réserve
expresse ait un effet q u elcon q u e} et on ne peut lui en
�( 16 )
donner d’autre que la conservation de cette même hypo
thèque qu’on veut lui enlever aujourd’hui !
Mais elle a subrogé sa fille à cette m ême h ypothèque?
Sans doute, vis-à-vis des tiers, parce que la dame Dum ontel
nç vouloit pas que les créanciers postérieurs pussent gêner
sa fille dans sa jouissance. M ais de ce qu’elle a voulu
c o uv r i r sa fille de son é g id e , pour la mettre à l’abri des
recherches des créanciers , s’en su it-il qu’elle a voulu
renoncer à ses droits personnels ? droits qu’elle se réserve
avec tant de soin et sans dérogation n i novation.
E lle a restreint son hypothèque aux biens dont elles’étoit
réservé la jouissance ? M ais comment peut-on voir une
restriction dans une clause qui tend au contraire à étendre
ses droits? E lle dit qu’elle continuera de jouir des biens
réservés en dim inution de ses créances et a u x im puta
tions de droit. Si elle jouit en dim inution de ses créances,
elle les réserve au lieu de les abandonner. Jou ir en dim i
nution , c’est sans doute conserver; c’est précom pter sur
ses jouissances une portion de ce qui lui est dû pour re
prendre le reste sur les autres biens , si les jouissances
q u e lle a fuites n’ont pas absorbé ses créances.
V eut-on prétendre encore contx*c l’évidence qu’il existe
lin département de l’hypothèque ? Mais au moins ce
dépnrtement ne pourroit frapper que sur les biens qui
éloient alors acquis k la dame Dum ontel. Il résulte bien •
clairement des termes du contrat de mariage , qu’elle
ne s’est pas occupée de ses droils non-ouverls.
On y voit que la dame D um ontel n’a voit en vue que
la survie de son mari. E lle n’a lait une institution au
profit de sa fille , elle ne lui a délaissé en avancement
d’hoirie
�C 17 )
d’hoirie des biens personnels , qu’à condition que..la.
dame Cornudet payeroit,à son père une pension viagère
et annuelle de 2400 /f". •
■
; L a dame Duraontel ne pou voit pas s’occuper de ses
droits non-ouverts , lorsqu’elle ne prév^ yoit et ne pensoit
qu’à la survie de son époux ; et ;cela est d’autant plus
é v id e n t, qu’au moyen de cette pension 'le .mari se départ
de tout droit d’usufruit
sur les biens de sa fem m e, et der
1
tous gains nuptiaux coutam iers ou conventionnels.
O r , si on a porté l’attention à faire départir le mari
de tous ses gains n up tiau x, coutumiers ou conventionnels,
n ’auroit-on pas pris la m ême précaution pour la dame
D u m o n te l, si telle avoit été son intention ? D ès qu’on
l ’a expliqué disertement pour le mari , et qu’on ne l’a
pas fait pour la femme , il faut en tirer la conséquence
que la dame D um ontel n’a pas voulu le faire, qu’elle n’a
point pensé à ses droits éventuels ; et on conviendra bien
au moins qu’il falloit une renonciation expresse pou r des
1 ♦
•
.
•
• *
.
‘
1
droits qui pouvoient ne jamais s ouvrir.
Q u’a demandé la dame D um ontel par la sentence de
178 9 ? E lle pou voit sans doute faire déclarer la sentence
de séparation exécutoire contre sa fille , faire prononcer
la condamnation des sommes liquidées par celte sentence;
elle s’est bornée au payement de ses gains, e til paroît qu’on
ne lui sait aucun gré de cette modération.
Mais la dame D um ontel a délaissé, conjointem ent avec
son m a r i, la jouissance des biens qui appartenoient à ce
dernier? P ar ce délaissem ent, la dame D um ontel n’a
contraclé aucune obligation solidaire *, elle jouissoit d’ une
portion de ces mêmes biens en vertu d’ un bail de ferm e:
G
�( i8 )
*
.•
il y avoit donc nécessité «qu’elle se prononçât sur ce dé
laissem ent, noii pour les abandonner sans reto u r, mais
au moins pour se départir de la jouissance qui lui étoit
assurée par son bail. E lle n’a contracté par là d’autre
o b l'ga tio n , que de''céder sa jouissance comme ferm ière.’
X/’article 6 du titre 14 de la Coutum e d’A u vergn e per
m et à la femme d’aliéner ses biens dotaux jusqu’à concur
rence du quart, pour doter ses filles, lorsque le mari est
liors d’état de le' faire;1 et le m a ri, dans l’espèce, étoit
insolvable?
C ’est faire une étrange application de cet article, dans
le fait comme dans le droit.
Dans le fait, il n’y avoit point insolvabilité de la part du
mari. L a sentence de séparation ne fut qu’une précaution
superflue. Les biens paternels que la dame Cornudet a
reçus en jouissance sont en valeur de plus de 70000 11~; ils
existent encore en nature : c’est un point de fait aisé à
vérifier.
Q u’a payé M . Cornudet sur ces mêmes biens ? Son
inscription nous l’apprend. Il a acquitté une somme de
13600 th en principal ou intérêts. Il est le seul créancier
inscrit : la dame Dumontel rapporte un certificat négatif
de toute autre inscription. Il 11’y a donc pas insolvabilité;
le mari est donc en état de doter.
Dans tous les cas, la dame Dum ontel n’a-t-elle pas doté
sa fille p a r l’avancement d’hoirie qu’elle lui a fait sur ses
propres biens; délaissement qui excédoit ses pouvoirs, et
sur lecjuel elle a la bonté (3e ne pas revenir.
’
jVIais dans quel cas la Coutum e pennet-elle à la femme
d’a lién er, poul- doter sa fille ? C ’csl avant le m ariage,
�■
( T9 )
lorsqu’ on doit forclore ou-exclure la fille de la succession :
car laîd o t d’une fille , père et m ère viva n s, entraînoit
nécessairement.la forclusion coutumière. Ici la fille étoit
retenue dans la maison ; c’étoit une iille u n iq u e, héritière
de tous les biens; et cet espoir sufïisoit sans doute pour
trouver un parti convenable. Il est véritablem ent ridicule,
après seize ans de m ariage, d’entendre dire qu’une m ère
est tenu e, ou d’abandonner ses d ro its, ou de délaisser le
quart de ses biens pour le mariage de sa fille.
'
Il n’est pas plus sage de soutenir qu’ une hypothèque
éventuelle n’est pas dotale, et qu’une femme peut s’en
départir sous la puissance maritale. O n répondra à cette
assertion par un préjugé bien précis de la cour d’a p p el,
en date du 26 prairial an 10. M a r i e Suchet, femme B o y ,
n’avoit porté aucune dot à son m ari; elle n’avoit que des
droits éventuels, pour la conservation desquels elle fit une
inscription sur les biens de son époux. Son m ari avoit
aliéné une maison : cette vente étoit avantageuse; la femme
consentit à la radiation de son inscription. L e conservateur
refusa de ra d ie r, et soutint qu’en Coutum e d’A u verg n e
la femme en puissance de m ari ne pou voit se départir
d’une inscription h yp o th écaire, même pour ses droits
éventuels. M arie Suchet se pou rvoit contre le conserva
teur. E lle fut déboutée de sa demande par jugement du
tribunal d’arrondissement; e t, sur l’appel, ou la cause fut
très-solennellement plaidée, le jugement fut confirm e.
A in si s’écroulent les motifs qui ont déterm iné le juge
ment du tribunal d’Issoirc. L a prétention des intimés est
une véritable chim ère. Ils auroient dû avoir plus d’égards
pour une m ère indulgente qui avoit conservé ses droits
�10}
sans les'exiger. L e u r opposition est inconvenante e t mal
fo n d ée; et sans doute que M . et M de. C ornudet, en reconnoissant leurs to r ts , reviendront à ces sentimens de
respect qu’une m ère a toujours le droit d’e x ig e r, et sur
lesquels repose la morale publique.
.
P A G E S , ancien avocat.
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul im prim eur de
la C our d ’appel — A n 1 2 .
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Lagulhe. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Subject
The topic of the resource
biens dotaux
droit coutumier
gain de survie
douaire
Description
An account of the resource
Précis pour Dame Lagulhe, veuve de François-Xavier Cellin-Dumontel, appelante ; contre Monsieur Joseph Cornudet, membre du sénat conservateur, et madame Jeanne Cellin, son épouse, autorisée en justice, intimés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1765-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
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BCU_Factums_M0224
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
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Text
MÉMOIRE
SUR
LA N U L L IT É ET LA R É C LA M A T IO N
C O N T R E DES V Œ U X EN RELIG IO N .
A
DE L* IM P R IM E R IE
IMPRIMEUR
DU
R IO M ,
PE
L A N D R I O T , SEU L
T R I B Ü H A L D APPEL.
i 8 o 3. =
x i i
.
,
�MEMOIRE
PO UR,
J
e a n
- J
a c q u e s
D A N C E T T E ,
prêtre,
habitant de la commune de B e a u z a t , départe
ment de la H a u t e - L o ir e , défendeur en tierce• opposition, et aussi demandeur en tierce-oppo
sition
CONTRE
F rançoise
F A U G IE R
et J a c q u e s
M A S S A D I E R son mari, de lui autorisée
,
demandeurs et défendeurs.
JEa n - J a c q u e s DANCETTE est défendeur à une tierceopposition form ée par Françoise Faugier et son mari ?
à une sentence do l ’officialité du diocèse de M à co n , qui a
A
�C2 )
déclaré nuls ses actes de vêture et de profession dans
l’ordre de Cluny, et l’a renvoyé au siècle, et h ùn arrêt du
parlement de P aris, qui a déclaré n’y avoir abus dans la
sentence de l’officialité. D ’un autre côté, Dancette a formé
opposition à un arrêt du parlement de Toulouse, où il
n’est point partie, et qui cependant attribue à Françoise
Faugier le patrimoine de Dancette.
Si Françoise Faugier et son mari doivent succomber
dans la tierce-opposition à la sentence de l’ofïicialité de
Mâcon et a l’arrêt du parlement de Paris, alors il ne peut
y avoir aucune difficulté dans la tierce-opposition de
Dancette à l’arrêt du parlement de Toulouse. C’est donc
principalement à la tierce-opposition à la sentence de
l’olïicialité de M âcon, et à l’arrêt du parlement~de Paris,
qu’il faut s’attacher.
r:
- Celte affaire tient tout à la fois à l’ordre public et à l’in
térêt privé. C’est du développement des faits que naîtront
les questions sur lesquelles le tribunal d’appel doit pro
noncer.
F A IT S .
»
D u mariage d’André Dancette et de Marie Robin
étoient nés trois enfans, Claude, Marguerite et Jean
Jacques Dancette.
.
Toute l’ailection des pere et merc s’étoit portée sur
Claude Dancette, leur fils aîne, qui ilsdestinoient toute
leur fortune, qui étoit considérable, en lui sacrifiant sou
frère et sa sœur. Dès les premières années de c e u x -c i,
ils les vouèrent au célibat dans l’état monastique. A lVige
de huit ans, la fille fut mise dans un couvent de religieuses
�•
C 3.)
ursulines, où, sans qu’elle en fût jamais sortie, dès qu’elle
eut atteint sa seizième année, on lu i■
fit faire.le sacrifice
qu’on exigeoit d’elle : les caresses et les menaces, et les
insinuations des'religieuses toujours portées 'à faire des
prosélytes, rien ne fut épargné.
'^ 1 v
On trouva plus'de résistance de la part du fils cadet.
•Aux caresses employées vainement succédèrent les mena
ces , qui étoient aussi sans succès. Bientôt les mauvais traitemens suivirent et s’accrurent chaque jour : on en vint
à le forcer de partager avec les domestiques les travaux
les plus pénibles de la campagne, que son âge et somiîtat
ne pouvoient com porter; il fut privé de la tableiderses
parens.
i
•.
• Peut-être le cœur du père se seroit-il ouvert aux prières
et aux gémissemens de son fils ; mais que ne peut sur un
mari foible l’ascendant et l’empire que prend sur lui une
femme audacieuse , que sa-prédilection pour u n 1de ses
'enfaris veut enrichir- aux dépens des autres, et q u i, pour
parvenir à son b u t, les livre à la persécution, en faisant
partager à son mari ses caprices, sa'haine et ses mauvais
traitemens!
• .
Il n’est pas surpi-enant après cela qu’un enfant si cruel
lement persécuté, pour échapper peu t-être à de plus
grands dangers, se jette en désespéré dans la captivité
d’un cloître. T elle futla malheureuse destinée qui entraîna
Jean-Jacques Dancette dans la maison de Cluny.
Cependant la providence permit que son entrée dans
le monastère ne fût pas accompagnée des formes prescrites
par les lois pour l’y retenir à jamais; elle lui ménagea des
ressources assurées' pour reprendre sa liberté ’ lorsqu’il
A a
�C4 )
.
n’auroit plus à craindre lés effets funestes dé la haine ,et
de la violence. .C'est cè qu’on établira dans la discussion
des moyens. Continuons le,récit des faits.)
'
Jean-Jacgues Dancette n’avoit céssé de protester contre
la violence qui l’avoit conduit dans la maison de Cluny;
il avoit fait des actes dé protestation par-^devant notaires
en 1761, en 1766, en 177.1., exi 1776, en 1781 et en 1785.
Claude Dancette, son frère aîné, étoit mort en 1767.
Cette circonstance paroissoit devoir le rendre à l'affection
de ses père et mère : il tenta auprès d’eux toutes les voies
pour les engager à venir à son secours; mai$ les sentiment
de haine conçus contre lui par sa mère avoiejit pris dan?
son cœur de trop profondes racines, et la perte de son fils
aîné ne lui fit que reporter ses affections sur ses parens
collatéraux; elle prit d ès-lors le dessein dé leur faire
passer non-seulement ses propres biens, mais ceux même
de son m ari, au préjudice de ses enfans', ses héritiers
naturels; en sorte qu’abusant toujours de l’empire qu’elle
s’étoit donné sur un maili foible, elle le rendit insensible
aux prières et aux larmes de son fils, et se fit faire par lui,
dans un testament, une institution d’héritière universelle,
autorisée par les lois du pays de droit écrit, qui régissoit
les parties et leurs biens. Le testament qui contenoit cette
institution'étoit do'r*7;68.
.
Une circonstance bien remarquable dans ce testament,
c’est qu’oa instituant sa femme son héritière universelle,,
et faisant à son fils, par le môme testament, Je legs d’une
pension.viagère, ily est d itqu’il mstitueson iils,son héritier
particulier dans celte pension ¡ pourquoi ce legs h titre
d’institution particulière ? CeLa n’étoit pas nécessaire si le
�.
c 5 )
fils étoit vraiment mort au monde par une profession en
religion, libre et régulière ; mais il falloit prévoir le cas où
le fils réelameroit contre sa profession, ou laferoit déclarer
nulle : et si cela arrivoit, et qu’il n’y eût pas d’institution
particulière en sa faveur, l’institution universelle faite à la
femme eût été nulle par la prétention du fils. Cette précau
tion annonce suffisamment que le père et la mère connoissoient les vices de la profession de leur fils.
L e père, qui'avoit fait son testament en 1768, mourut
en 1773. En vain encore alors Jean-Jacques Dancette agitil et fit-il agir auprès de sa m ère, pour la rappeler à la
tendresse maternelle : vains efforts, la haine étoit trop
t
i
invétérée.
- Cependant, dès après la mort de son p ère, il avoit aban
donné la maison de Cluny , et quitté l’habit monastique ,
continuant toujours de renouveler ses protestations. Les
religieux de Cluny n’eurent garde d’user des voies qui
auroient pu le contraindre à rentrer-clans le cloître; ils
savoient trop eux-mêmes que sa vocation avoit été forcée,
et ils connoissoient sans doute la nullité des actes qui l’y
avoient introduit. Sorti de la maison de Cluny dès la mort
de son p è re , ne trouvant point d’asile auprès de sa mère, il
n’avoit cessé d’errer çà et l à , chez des parens et des amis
compatissans et sensibles à ses malheurs.
Mais sa mère étant morte en 1782, il se mit dès-lors en
possession des biens de son père, et n’a cesse depuis ce temps
d’en jouir et d’en disposer pendant un grand nombre cl an
nées, sans éprouver de contradictions de qui que ce soit.
Sa mère avoit fait un testament par lequel elle avoit ins
titué son héritier Barthclemi Robin son neveu, et par un
�C 6 )
codicile elle avoit fait en faveur de Jean-Barthelemi R obin,
autre de ses neveux, le legs d’un domaine considérable qui
venoitdesonm ari; et, dans la vue sans doute d’engager son
fils à ne pas contrarier ses volontés par les voies qu’elle
sa voit bien lui être ouvertes contre la profession en religion, .
elle lui avoit donné la jouissance du domaine dont elle avoit
disposé par son codicile en faveur de Jean - Bartlielemi
Robin : mais, ce qu’il y a encore à remarquer dans le testa
ment de la mère, elle qualifie son fils de prêtre sécularisé ,
et elle a aussi la précaution de lui faire un legs d’usufruit,
à titre d’institution particulière.
Il n’est pas non plus inutile d’observer que depuis 1773,
époque de la mort du père, jusqu’en 1782 qu’arriva celle
de la m ère, les collatéraux du père n’imaginèrent pas d’at
taquer le testament d’André Dancette, et laissèrent toujours
sa femme, son héritière testamentaire, jouir de l’universa
lité de sa succession. Ils auroient pu cependant demander la
nullité du testament, comme ils l’ont fait dans la suite ; et
s’ils ne le firent pas alors, ce ne put être que par la connoissance qu’ils avoient de la nullité de la profession de Jean
Jacques Dancette, qui seul alors pouvoit avoir le droit
d’attaquer le testament de son père : mais, même après la
mort de la m ère, le fils n’éprouva aucun obstacle dans la
possession où il se mit aussitôt des biens de son pèue.
Cependant,peu de temps après, Claude Faugierqui vivoit
encore alors, qui étoit fils et héritier d’Anne Dancette, la
quelle étoit sœur d’André Dancette, et qui auroit eu droit
à la succession de son o n d e, si Jean-.Jacques Dancette son
cousin-germain eût pu être considéré comme mort civile
ment par une profession en religion régulière, Claude
�( 7 ) ^
Faugier imagina d’attaquer les héritiers de Marie Robin ,
et de demander contre eux la nullité du testament d’André
Dancette.
Il doit paroîlre étrange que Claude Faugier ne se fût
adressé qu’aux héritiers de Marie R o b in , qui n’étoient pas
en possession des biens, ou qu’il n’eût pas en même temps
dirigé son action contre Jean-Jacques Dancette, qui s’étoit
emparé de ces mêmes biens après la mort de sa mère.
L ’action de Claude Faugier fut portée en la sénéchaussée
du P uy, où elle fut reprise après sa mort par André Faugiei',
tant en son nom que comme tuteur de l’enfant mineur de
Claude Faugier son frère, et par Françoise Faugier sa sœur,
et Massadierson mari; et, après une assezlongue instruction,
le testament d’ André Dancette fut déclaré nul, e ties Faugier
envoyés en possession de ses biens. Les Robin interjetèrent
appel de la sentence de la sénéchaussée du Puy au parle
ment de Toulouse , où elle fut confirmée.
Mais l’envoi en possession prononcé contre les R o b in ,
ne pouvoit pas être effectué à l’égard de Jean-Jacques Dan
cette qui s’étoit mis en pleine jouissance après la mort de
sa mère. Cependant, craignant d’être troublé parles collaté
raux, à la faveur de la sentence de la sénéchaussée du P u y ,
et de l’arrêt coniirmatif, il se persuada qu’il étoit de plus
grande précaution de faire prononcer judiciairement la
nullité des actes de vêture et de profession qu’on pourroit
lui opposer.
Il se pourvut en conséquence en l’oflîcialite du diocese
de M/icon, où étoit situé le monastere de Cluny, et demanda
la nullité des actes de v ê t u r e et de profession. Il appela ,
pour faire prononcer la nullité, non-seulement les religieux
�C8 )
de C lun y, mais aussi ses parens paternels et maternels, qui
à son défaut auroient été en droit de succéder à ses père et
mère. Les parens paternels étoient André Faugiei;, prêtre,
tant en son nom qu’en qualité de tuteur de l’enfant de
Claude Faugier son frère, tous deux héritiers d’Anne Dancette leur mère, sœur d’André Dancetté. Les parens mater-*
nels étoient Barthelemi et Jean-Bartlielemi R obin, neveux
de Marie Robin sa mère.
Par une sentence contradictoire de l’officialité deM âcon,
et sur les conclusions du promoteur, les actes de vêture et
de profession de Jacques-André Dancette furent déclarés
nuls, et il fut renvoyé au siècle en état de prêtre séculier.
I/a sentence est du . . . . juillet 1790,
Les Robin, parens maternels, interjetèrent appel comme
d’abus de cette sentence, au parlement de Paris, où ils ap
pelèrent en même temps André Faugier, tant en son nom
qu’en qualité de tuteur de Fenfant mineur de Claude Fau
gier , pour voir déclarer commun avec lui l’arrêt qui interviendroit sur l’appel comme d’abus; ils appelèrent aussi
les religieux de Cluny. L ’affaire ayant été discutée au parle
ment par des écritures de part et d’autre , intervint arrêt
contradictoire le 6 octobre 1790, sur les plaidoieries de
quatre avocats, et sur les conclusions du ministère public,
par lequel il fut dit qu’il n’y avoit abus dans la sentence
de I’oilicialité de M âcon , et il fut ordonné qu’elle sei’oit
exécutée selon sa iorme et teneur; et cet arrêt fut bientôt
après signifié aux parties.
De ce moment Jean-Jacques Dancette continua do
jouir paisiblement de la succession de son père, et eu
disposa librement ; il fit même des ventes de quelques
héritages
�(9 )
héritages détachés, sans que ses acquéreurs éprouvassent
aucun trouble de la part de ses pareils.
' Mais bientôt après survinrent les décrets funestes contre
les prêtres insermentés, et Dancette étoit du nombre : il
fut obligé de se cacher, et il fut même mis sur une liste
d’émigrés. Lesagens nationaux le considérèrent tellement
comme vrai propriétaire des biens de son père, qu’ ils
s’empressèrent de faire mettre le séquestre sur ces mêmes
biens, meubles et immeubles, et comme lui appartenans,
en vertu d’un arrêté du district de M onistrol, du mois
de floréal an 2 ; et l’administration du district adjugea la
ferme de ses p r o p r ié té s s u r la réquisition du receveur
de l’enregistrement.
îv
'
Cependant les temps étant devenus moins orageux, et
les prêtres commençant à repai'oitre, Dancette obtint du
directoire du district de Monistrol un arrêté du mois de
thermidor an 3 , qui le rétablit dans ses propriétés. Le
juge de paix vint avec les officiers municipaux de la com
mune de Beauzat lever le séquestre, et le remettre en
possession des meubles qui se trouvoient n’avoir pas été
vendus, et-de ses domaines, à la charge toutefois de laisser
subsister l’adjudication qui en avoit été faite, pour le
temps de sa durée.
L a jouissance de Dancette fut encore paisible. L e 25 fri
maire an 4 il afferma son domaine de Confolent au citoyen
Porchier, pour neuf ans; et le 7 nivose suivant son do
maine de la D orlière, pour six ans', au citoyen Rey.
Jean-Jacques Dancette avoit pris en affection AndréM arie Faugier, son neveu à la mode-de Bretagne, et qui
étoit son héritier présomptif du côté-paternel ; il l’avoit
B
�C I0. )
retiré auprès de lui : mais il eut le malheur de le perdre
le 6 comp’ émentaire an 5. A vant de m ourir, ce jeune
homme , qui avoit été mécontent de l’administration
d’A ndré Faugier, son oncle et son tuteur, lui avoit fait
signifier qu’ayant atteint l’âge de puberté il n’avoit plus
besoin de tuteur, et qu’il choisissoit Jean-Jacqucs Dancette pour son curateur. On conçoit aisément que cette
démarche dut déplaire à l’abbé Faugier, surtout en ce
que Dancette lui étoit préféré pour la curatelle. Cepen
dant tant que le jeune Faugier vécut on n’imagina pas
de troubler Dancette dans sa possession-, ce ne fut qu’après
sa mort que l’abbé Faugier et la femme de Massadier,
sa sœur, prétendirent se prévaloir de la sentence de la
sénéchaussée du Puy et de l’arrêt coniirmatif du parle
ment de Toulouse, qui les a voient envoyés en possession
de la succession d’André Dancette, et qu’ils se persua
dèrent qu’ils pourroient, par une tierce-opposition, faire
cesser l’effet de la sentence de l’officialité de Mâcon et de
l ’arrêt du parlement de P aris, qui avoient annuité la
profession de Dancette et l’avoient renvoyé au siècle.
Il seroit assez inutile de rendre compte de toutes les
procédures tenues dans les tribunaux du Puy et d’Issengeaux; il suffit de remarquer que Massadier et sa femme,
qui ont acquis les droits d André Faugier, ayant formé
tierce-opposition a l’arrêt du parlement de P aris, et
Dancette à celui du parlement de Toulouse, ces oppo
sitions ont enfin été renvoyons au tribunal d’appel, seul
compétent pour juger des tierces-oppositions à des jugemens rendus par des tribunaux souverains. M ais, comme
011 l’a déjà observé en commençant, c’est seulement à la
�( 11 )
tierce-opposition à l’arrêt du parlement de Paris qu’il
faut s’attacher, parce que si cette tierce-opposition n’est
ni recevable ni fondée, l’arrêt du parlement de Toulouse,'
absolument étranger à Jean-Jacques Dencette, n’a jamais
pu produire aucun effet contre lui.
Si la tierce-opposition à l’arrêt du parlement de Paris
est non recevable, on pôürroit se dispenser d’établir
qu’elle est mal fondée. L a fin . de non recevoir est le
moyen principal; le mal fondé n’est qu’une proposition
subsidiaire. Cependant c’est par l’examen de celle-ci que
l’on va commencer : la fin de non recevoir, qui sera la
seconde proposition, n’en sera que plus favorable.
>
M O Y E N S ,
'
Prem ière -proposition.
Dans cette proposition il faut mettre à l’écart l’arrêt
du parlement de P a ris, qui avoit déclaré n’y avoir abus
dans la sentence de l’oificialité, qui avoit annullé les actes
de vêture et de profession, et qui avoijj ordonné l’exé
cution de cette sentence : il faut supposer que la sentence
n’eût pas été attaquée.
Elle n’auroit pu l’être que par un appel simple à l’ofiicialité métropolitaine, ou par un appel comme d’abus au
parlement de Paris. Mais l’appel simple n’auroit pas été
recevable après que, sur l’appel comme d abus, il auroit
été dit qu’il n’y avoit pas d’abus, et que 1 execution de
la sentence auroit été ordonnée. Mettons-nous donc dans
la position où il n’auroit pas été prononcé sur l’appel
.
B 2
�( 12 )
comme d’abus , et que ce fût aujourd’hui le tribunal
d’appel qui dût y faire droit. En un m ot, y a u ro it-il
des moyens d’abus contre la sentence de l’officialité ?
Il n’y en a pas certainement, si cette sentence, en pro
nonçant la nullité des actes de vêture et de profession de
Dancette, s’est conformée à la disposition des oi’donnances,
en jugeant que ces actes n’étoient pas revêtus des forma
lités qu’elles prescrivent.
,
C ’est sans doute une mauvaise objection que ce qu’on
a dit que l’official n’avoit pas énoncé les motifs de son juge
ment : ce n’est que dans ces derniers temps que les juges
ont été assujétis à cette énonciation ; et la sentence de
l’officialité est antérieure à la loi qui a prescrit dans les
jugemens cette nouvelle forme jusqu’alors inconnue dans
les tribunaux. C ’est dans la lo i, la justice et la raison
qu’on cherchoit seulement le m otif du jugem ent, sans
qu’ il fût exprimé dans le jugement même : aujourd’hui
même il n’est pas sans exemple de voir de bons jugemens
rendus sur de mauvais m otifs, et qui sont confii’inés
par d’autres motifs que ceux qui paroissoient avoir déter
miné les premiers juges.
Il y a deux moyens pour attaquer les vœux monastiques :
la nullité des actes par lesquels on veut les établir, pour
n’avoir pas observé dans ces actes les formalités prescrites
par les lois pour les rendre valides; et la nullité des vœux
dans leur substance, parce qu’ils n’ont été produits que
par la crainte ou la violence; et cette seconde nullité a
tout son eifel, lors même que, dans les actes, les forma
lités ont été gardées. Commençons par examiner la pre
mière de ces deux, nullités.
�/
( 13 )
■
Prem ière nullité,
./
•
■
•
'
L ’ordonnance de Moulins et celle de 1667 avoient
réglé les formalités des actes qui devoient assurer l’état
des religieux. Ces formalités ont été non-seulement con
firmées, mais exprimées et prescrites avec plus d’étendue
dans la déclaration du 9 avril 1736, dont il est néces
saire de rappeler les dispositions.
A rticle X X V . « Dans les maisons religieuses, il y
« aura deux registres en papier com mun, pour inscrire
« les actes de v ê tu re, noviciat et profession , lesquels
« registres seront cotés par premier et dernier, et para
« pliés sur chaque feuillet par le supérieur ou la supé« rieure -, à quoi faii’e ils seront autorisés par un acte
« capitulaire qui sera inséré au commencement du
« registre. »
A rt. X X V I. « Tous les actes de vèture, noviciat et
« profession , seront inscrits en français sur chacun desd.
« deux registres, de suite et sans aucun blanc; et lesd.
« actes seront signés sur lesd. deux registres par ceux
« qui les doivent signer, le tout en même temps qu’ils
« seront faits; et en aucun cas lesdits actes ne pourront
« être inscrits sur des feuilles volantes. »
Art. X X V I I . « Dans chacun desd. actes il sera fuit
« mention du nom et surnom et de l’âge de celui ou
« de celle qui prendra l’habit ou fera profession ; des
« nom s, qualités et domicile de ses père et m ère; du
« lieu de son origine, et du jour de l’acte, lequel
« sera signé sur lesdits registres, tant par le supérieur
�( i4 )
«
«
«
«
«
ou la supérieure, que par celui ou celle qui prendra
l’habit ou fera profession ; ensemble par l’évêque ou
autre personne ecclésiastique qui aura fait la cérém onie, et par deux des plus proches parens ou amis
qui y auront assisté. »
A rt. X X V I I I . « Lesdits registres serviront pendant
« cinq années consécutives, et l’apport au greffe s’en
« fera , savoir : pour les registres qui seront faits en
« exécution de la présente déclaration, à la fin de
« l’année 174 1, et ensuite de cinq ans en cinq ans, » etc.
C est d après ces dispositions de la déclaration de 1736,
que la sentence de l’officialité de Maçon a dû juger
de la validité ou de l’invalidité des actes de vêture et
de profession de Jean-Jacques Dancette. Voyons si dans
ces actes on s’est conformé aux dispositions de la lo i,
et si l’on y a observé les formes qu’elle prescrit.
Commençons par l’acte de vêture, qui est celui qui doit
constater l’introduction dans le noviciat.
Cet acte de vêture, comme celui de profession, devoit
être inscrit sur deux registres, et autorisé par un acte
capitulaire inséré au commencement du registre, suivant
l'article X X V de la déclara tion de 1736. On n’a pris pu
savoir s'il y «voit eu deux registres, et il y a lieu de croire
qu’il n’en avoit ele tenu qu un seul, puisque dans le procès
jugé par la sentence de 1 oilicialité, ni les religieux de
C lm iy, ni les parons de Dancette, qui étoient parties
dans ce ‘p rocès, n’ont pu représenter le regislrequi auroit
dû rosier dans les archives du monastère, et que leur oppo
sant des nullités dans le registre déposé au greffe, 011
n’auroil pas majiqué de tenter de les faire cesser par la
�( 15 )
représentation du registre qui devoit demeurer dans le
monastère, si dans le lait ces mêmes nullités n’eussent pas
existé dans ce second registre. Ce seroit déjà une première
contravention à. la disposition de la loi.
En second lie u , dans le registre déposé au greffe du
bailliage de M âcon, il n’y a point eu d’acte capitulaire
qui ait autorisé le supérieur à recevoir les actes de vêture
et de profession , formalité encore prescrite par le même
article. Et cette formalité n’est pas sans raison, puisque
la réception au noviciat et à la profession ne peut se faire
qu’après avoir recueilli les suffrages des religieux qui ont
droit de les donner, et qu’il n’y a qu’un acte capitulaire
qui puisse constater la pluralité des suffrages, sans laquelle
l’entrée au noviciat ne peut pas être accoi'dée. Les actes
de vêture et de profession sont des contrats synallagmatiques, qui doivent engager le novice ou le profès envers
la communauté, et la communauté envers le novice ou
le profès.
.
Eu troisième lie u , l’acte de vêture n’a pas été signé
par Dancette; et cette signature est exigée par l’art. X X V II.
E t comment ne l’auroit-elle pas été ? Un pareil acte est.
un acte authentique dont le supérieur du monastère est
le ministre établi parla lo i; et en général tous les actes
volontaires n’acquièrent l’authenticité qu’au tant qu’ils sont
signés par les parties, et le défaut de signature ou de la
mention que les parties ne savent pas signer, les rend par
cela seul radicalement nuls.
En quatrième lieu, l’acte de veture, comme celui de
la profession, doit être fait, suivant le môme article X X V II,
en présence et signé par deux des plus proches païens ou
�( r f)
amis. O r, clans celui dont il s’agit, il n’y a ni présence ni
signature de parens ni d’amis : et si l’on disoit qu’il n’y
avoit sur les lieux ni parens ni amis , au moins auroit-il
fallu les remplacer par deux tém oins, la présence des
témoins pouvant seule constater l’authenticité des actes,
et les ordonnances prononçant la nullité des actes publics
qui sont faits sans témoins.
En cinquième lieu, suivant l’article X X V I I I , le dépôt
de l’un des deux registres doit se faire, dans les cinq ans,
au greffe cta la justice royale. O r, ce n’est que huit ans
après l’acte de vêture dont il s’a g it, qu’il a été déposé
un registre au greffe du bailliage de M açon; en sorte que
pendant les trois ans qui ont suivi le délai prescrit par
la loi on a eu la facilité de faire ou refaire le registre à
volonté, pour y faire tous les changemens possibles.
En sixième lieu , suivant l’article X X V I I , il doit être
fait mention, dans les actes de vêture et de profession,
non-seulement des noms des père et mère de celui qui
est admis au noviciat ou à la profession, mais même de
leurs qualités ; et dans l’acte de vêture dont il s’« g it,
nulle mention des qualités des père et mère de Dancettc,
Ce u’est donc pas en un seul point qu’on s’est écarté
de la disposition de la loi ; elles ont toutes été violées dans
l’acte de vêture, ou l’on n’a observe aucune des formalités
essentielles qu’elle prescrit. D e là doit s’ensuivre néces
sairement la nullité de l’acte de vêture.
Mais la plupart des formalités négligées dans l’acte de
vêture, l’ont été également dans celui de la profession.
i°. Point d’acte capitulaire qui ait autorisé à recevoir la
profession. 2°. Point de double registre. Ni en l’ofïicialité
de
�( i7 )
dé M âcon, ni au parlement de Paris, les religieux de
C lu n y , ni les parens de Dancette n’ont pas pu justifier
de celui des deux registres qui devoit demeurer déposé
dans les archives du monastère. Il est possible que ce
registre n’ait jamais existé, ou que l’acte de profession
qui devoit s’y trouver manquât des formalités nécessaires;
sans quoi on n’auroit pas négligé de le représenter, soit
en l’officialité, soit au parlement. 30. Dans le registre
déposé au greffe, l’acte de profession n’énonce pas les
qualités des père et mère ; formalité exigée par l’ar
ticle X X V I I de la déclaration de 1736. 40. Une autre
formalité essentielle dans l’acte de profession, également
exigée par l’art. X X V I , c’est que cet acte soit entièrement
écrit en français ; au lieu que le plus essentiel de l’acte de
profession , le serment qui devoit attacher le religieux
au monastère, se trouve écrit en latin.
L e défaut d’observation d’un si grand nombre de for
malités , soit dans l’acte de v ê tu re , soit dans celui de
profession, doit donc nécessairement rendre ces deux
actes invalides, et les faire considérer comme n’ayant
jamais existé.
Et qu’on ne dise pas que les lois, en prescrivant ces
form alités, n’ont pas prononcé la nullité des actes où
elles n’auroient pas été gardées. Ecoutons sur cela ce
que nous dit notre célèbre Domat.
« Les formalités ont été inventées pour rendre les
« actes valables, c’est-à-dire, pour faire qu’ils aient leur
« effet, par la preuve qu’elles font de leur vérité. Que
« s’il est nécessaire qu’ils aient quelque forme qui en
« prouve la v é r ité , il y a autant ou plus de nécessité
n
*.4
�( 18 )
«
«
«
«
«
«
«
qu’un acte sérieux et important soit accompagné des
preuves de la vo lo n té, qui non - seulement excluent
tout soupçon d’autre volonté que de la sienne, mais
qui donnent à ses dispositions le caractère d’une volonté bien concertée, et dont la fermeté et l’autorité
doivent établir le repos des familles que ces dispositions peuvent regarder. »
Il est vrai que l’observation de Dom at, que l’on vient
de rapporter, est placée dans son ouvrage sous le titre
des formalités des testamens : mais le principe qu’il établit
est général ; il parle de toutes sortes d’actes, et ce n’est
que l’application du principe qu’il en fait aux testamens.
L a preuve en est dans ce qu’il dit que les form alités des
actes n ont été inventées que pour les rendre valides,
c e s t - à - d i r e , pour fa ir e q u ils aient leur effet. D ’un
autre côté, lorsqu’il ajoute, à l’égard des testamens, qu’il
y a nécessité qu’un acte sérieux et important soit accom
pagné des preuves de la volonté, qu’il fait résulter de
l’observation des formalités, quel acte plus sérieux et
plus important que celui qui exclut un individu de la
société, et qui attribue à des tiers les droits qu’il a déjà
Ct qu’il pourroit avoir à l’avenir; qui enfin intervertit
l’ordre des successions dans les familles? quel acte par
conséquent où il soit plus indispensable de garder lesf o r
mai: lé s , qui n'ont été inventées que pour rendre les actes
valides, c'est-à-dire, pour fa ir e q u ils aient leur effet.
Si donc l’acte de vêturc et celui de profession sont in
valides, s’ ils sont nuls, ou, c:e qui est la même chose,
s’ils sont censés n’avoir jamais existé, comme nos lois
exigent impérieusement une profession écrite où l’on ait
�( ï 9 ’)<
obsérve les formalités qu’elles prescrivent, on ne peut pas
argumenter d’une profession tacite par la résidence sous
l’habit monacal qu’eût pu faire -Dancette dans le monas
tère , quelque longue qu’eût pu être cette résidence.
X/ordonnance de-M oulins, celle de 1687, et la décla
ration de 1736, n’admettent d’autre profession que celle
qui est faite dans un acte par écrit, revêtu de toutes les
formalités; erl un m ot, c’est une maxime générale en
France qu’on n’y reconnoissoit point de profession tacite.
C’est ainsi que s’en expliquent tous nos canonistes : T/i
Galliâ minime prorsùs admittitur ulla tacita professio j
dit le père Cabassut; et après lui tous nos autres canonistes , et entr’autres d’Héricourt et Rousseau-Lacom be,
s’en expliquent de même ; et c’est ce qui a été cons
tamment jugé par les arrêts.
Ces arrêts l’ont ainsi jugé; bien que celui qui opposoit
la nullité ou qui réclamoit contre ses vœux eût demeuré
d ix , vin gt, trente ans et même plus dans le monastère
et sous l’habit religieux. D e là l’axiome du droit canon :
L ’habit ne fait pas le m oine, H abitas n o n fa c it monac h i n n ce que les canonistes expriment encore en d’autres
termes : L e capuchon ne fait pas le m oine, mais la pro
fession, Cuculla n o n fa c it monachwn , sed professio.
On trouve les arrêts qui l’ont ainsi jugé dans presque tous
les arrêtistes : on peut citer en particulier celui du 28 mai
1603, rapporté par M . Bouquier,'dans l’espèce duquel
il y avoit vingt-huit ans de résidence dans le cloître, sous
l’habit monacal; mais surtout on doit remarquer l’arrêt
du Journal des audiences, du 16 juillet 1657, rendu en
faveur de Christine de Haro contre son frère. Elle avoit
C 3
�( 2° )
résidé pendant trente ans dans le monastère de la Saalle,
dépendant de l’ordre de Cluny, toujours sous l’habit de
religieuse; i l y avoit de plus contr’elle cette circonstance
que dans plusieurs actes capitulaires où elle avoit assisté
elle y a v o i t pris la qualité de professe : son frère offroit
môme la preuve du vœu et de la profession, et il avoit
déjà obtenu monitoire à cet effet. Cependant elle fut
admise au partage des successions de ses père et mère.
L ’arrêt fut rendu en grande connoissance de cause, après
l’instruction qxii suivit un appointements
Parmi beaucoup d’autres arrêts semblables qu’on pourroit citer, et dont quelques-uns sont même rappelés dans
les Mémoires du clergé, il y en a surtout un bien remar
quable, en ce qu’il a été rendu pour cette province, et
pour une profession qui avoit été faite dans le couvent
des cordeliers de cette ville. En voici l’espèce.
Pierre de Pannevert de la Rocliette avoit pris l’habit
religieux dans le couvent des cordeliers de Riom . Son
acte de vôture étoit du 3 août 1690, et il avoit fait pro
fession le 6 août 169 1, après un an et quelques jours de
noviciat. Quelques années après il avoit déserté le monas
tère; il fut lieutenant au régiment d’Orléans; il fut ensuite
interprète dans les ordres du M ont-C arm el et de SaintLazare, écuycr du duc de la Force; et, dans tous les actes
qu’il avoit faits, il avoit toujours pris le nom de Pierre de
Pannevert, écnyer ou chevalier, seigneur de la Rochette.
Il se maria en 1729 avec la demoiselle M ansion, et ne prit
d’au Ire qualité que celle d’écuyer, sieur de la Rochette.
Il mourut sans enfans en 1743*
Un au après sa m o rt, sa veuve fit assigner au chûtelet
�)
le sieur de Pannevert, frère du défunt, pour voir ordonner
l’exécution d’une donation réciproque de tous les biens
du prédécédé en faveur du survivant, portée par leur
contrat de mariage.
'
On lui opposa que le mariage n’avoit pu produire
aucun effet c iv il, parce que Pierre de Pannevert étoit
engagé par des vœux en religion dès l’année 1692.
11 y eut appel comme d’abus du mariage, interjeté par
M . le procureur général; et le frère du défunt adhéra
ù cet appel.
Sur cet appel la veuve opposa la nullité des actes de
vêtui’e et de profession de Pierre de Pannevert, sqp mari.
Elle dit que l’acte de vêture n’avoit pas été signé par
Pierre de Pannevert; que l’acte de profession n’étoit signé
qu’imparfaitement Pierre de la R ocliette, sans exprimer •
le nom de famille Pannevert; qu’il y avoit plusieurs fa
milles dans la province du nom de la Rochette, et qu’une
signature imparfaite ne valoit pas plus qu’ un défaut absolu
de signature. Elle opposa que dans l’acte de vêture ni
dans l’acte de profession il n’y avoit aucune signature de
parens ni d’amis. Elle disoit que tant de vices rassemblés
dans ces actes formoient autant de moyens d’abus, parce
que toutes contraventions aux lo is , commises par les
ecclésiastiques séculiers ou réguliers dans les actes de leur
juridiction volontaire ou contenticuse, etoient des abus;
qu’il n’étoit pas nécessaire que la peine de nullité lût
prononcée par la loi pour caractériser l’abus, qu’il suffisoit que ce qu’elles ont ordonné, de quelque manière que
ce soit, n’eut pas été suivi et exécuté de la part dis ecclé
siastiques. On ajoutait que les formalités prescrites par
.
(
�C
)
les ordonnances, pour la solennité des mariages, n’étoient
point ordonnées à peine de nullité, et que cependant les
mariages qui pèchent dans l’une ou dans plusieurs de ces
formalités étoient abusifs, et jugés tels journellement par
les arrêts.
Tels furent les moyens sur lesquels fut rendu l’arrêt
du 16 mai 1746, par lequel il fut dit qu’il n’y avoit point
d’abus dans le m ariage, et qu’il y avoit abus dans la pro
fession de Pierre de Pannevert. On a î-ecueilli cet arrêt,
l’espèce et les moyens sur lesquels il fut rendu, dans le
traité de la mort civ ile, de Riçher ; et il est encore rappelé
dans le Répertoire de jurisprudence,
Il y a sur cet arrêt une observation qui n’échappera pas
au tribunal, c’est quependant cinquante-un ans qui s’étoient
écoulés depuis la profession de Pierre de Pannevert en
1692, jusqu’à sa mort en 1743, il n’y avoit jamais eu de
sa part aucune réclamation conti’e ses vœ ux; et par con
séquent ce ne fut que sur la nullité des actes de vêture et de
profession, que l’arrêt prononça qu’il y avoit abus, quoique
la nullité opposée ne fût pas prononcée par les lois, mais
parce qu’on jugea l’inyalibilité des vœux par l'inobserva
tion des formalités.
Il y a donc entre l’espèce présente et celle de l’arrêt de
1746, des rapports sensibles et même encore plus frappans.
Point de signature dans l’acte de vêture, point d’acte capi1Hlai rc qui ait autorisé ni l’entrée au noviciat, ni la profes
sion ; point de présence ni de signature de parons ou amis,
ni même d’aucun témoin, et la présence et la signature des
témoins est une formalité indispensable pour donner aux
actes qui doivent ê tre publics rauLhenLici té, et dont le défaut
/
�C *3 )
est même une nullité prononcée paf les ordonnances. Point
d’expression des qualités des père et mère. Il y a même une
autre nullité qu’on n’opposait pas dans l’affaire de Pannev e rt, c’est celle qui résulte de ce que l’acte de profession
se trouve écrit en latin : il est vrai que celui de Pannevert
étoit également en latin ; mais la nécessité de l’écrire en
français n’avoit pas été établie par l’ordonnance de 1667,
au lieu qu’elle fut prescrite par la déclaration de 173 6 ,
postérieure à la profession de Pannevert, mais antérieure
ù celle de Dancette*
Les actes de vêture et de profession de Dancette abondent
donc de nullités parle défaut d’observation des formalités*
mais on va présenter une autre nullité qui tient directement
à la substance des vœux.
Seconde nullité.
.
L e droit canonique, comme le droit civil, déclare nuls
tous les actes qui sont l’effet de la crainte ou de la violence ;
mais surtout la profession en religion exige la plus parfaite
liberté dans les personnes qui l’embrassent : de là la récla
mation autorisée par le concile de Trente et par l’ordon-*nance de Blois, contre les vœux de religion forcés par la
crainte ou la violence.
■
Il est vrai cependant qu’en g én éra l, et le concile et
l’ordonnance exigent que la réclamation soit faite dans les
cinq ans; mais, suivant tous les canonistes et la jurisprudence
constante des arrêts, et comme le disent les Mémoires du
clergé , tome 4 , pages 208 et 289 , « les cinq ans donnés
« à ceux qui sont entrés par force dans les monastères ,
« pour réclamer contre leurs v œ u x , ne doivent point être
�( 24 )
«
«
«
«
«
«
expliqués précisément de cinq ans après la profession y
sans avoir égard aux circonstances et empecliemens qui
n’auront pas laissé la liberté de réclamer; mais on doit
les entendre de cinq années utiles, qui sont comptées du
jour que la violence a cessé, et que celui qui a été forcé
à faire profession a pu agir pour se faire restituer. »
D ’un autre côté, il n’est même pas nécessaire que l’action
en réclamation ait été exercée dans les cinq ans utiles après,
que la violence a cessé; il suffit qu’il y ait eu des protesta
tions de la part de celui qui veut réclamer : c’est encore le
principe enseigné par tous les auteurs. Il suffit de citer
d’H éricourt, titre de la réclamation contre les vœux ,
article XIII. « Quoique le religieux, dit cet auteur, qui
« veut réclamer contre ses vœ ux, soit obligé de proposer
« ses moyens au supérieur, et à l’ordinaire dans les cinq
« ans de sa profession, il n’est pas nécessaire qu’il fasse des
« poursuites dans le même temps pour être relevé, ses pro
« testations conservant le droit qu’il a de demander à ren
« trer dans le siècle, pourvu qu’il n’ait pas laissé écouler
cc depuis un assez grand nombre d’années, pour qu’il soit
« ccnse avoir i-atifié tacitement sa profession. »
Pour appliquer ces principes , nous avons à établir ,
i° . que les vœux de Dancette ont été l’effet de la crainte et
de la violence; 2°. qu’il a protesté dans un temps utile ,
pendant et après que la violence et la crainte ont cessé;
3°. qu’il a exercé son action en réclamation et nullité des
vœux , dans un temps prochain de ses dernières protesta
tions. Trois articles qui doivent justifier pleinement la
Bcntence de l’ollicialité, qui a déclaré nuls les actes de veturo
et de profession , et qui l’a renvo3Té au siècle.
A r t ic l e
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• En l’officialité-, Dancettç a,voit m isen fait la violence et
la crainte qui avoient-forcé son entrée dans le monastère
de Cluny : il en avoit offert la preuve par témoins; mais
il en avoit.dejplus rapporté, des -.preuves écrites, et ces
preuves écrites-furent jugées suffisantes;, sans être obligé
de recourir à la prejive par témoins ; et ce motif joint
d’ailleurs aux nullités des actes, de vêture et de profession,
déterminèrent la sentence de l’ofKcialité à prononcer la
nullité et le renvoi au siècle. Çes mêmes preuves écrites
furent présentées au parlement; sur l ’appel comme d’abus;
et elles sont dfautant plus éyi^e^tep quelles actes qui lea
renferment procèdpnt du fait; même ¡des personnes qui sont
aujourd’hui nos seules parties dans la tierce-opposition à
l ’arrêt du parlement de Paris.
’
'
'
Il faut ici se rappeler le procès jijgé en la sénéchaussée
du Puy et au parlement de Toulouse , entre les parens
collatéraux de Dancette , paternels et maternels : procès
dans lequel les-parens paternels liront déclarer nul le tes-,
tament d’André Dancette qui avoit donné tous ses biens
a Marie Robin sa femme , et se firent envoyer en'posses-»
sion d es- biens d’André Dajjcctt.ç , père de Jean-Jacques
Dancette.
,• •
Quels étoient les' parens paternels parties dans le procès?
C ’étoit André Faugier , Françoise Faugier sa sœur , et,
Massadier «on mari. Quellcî?sont aujourd'hui nos parties
adverses? C’est la même Françoise Faygierj et Massadier
son m ari, qui agissent n o n - seulement en leurs'nom s,
mais encore comme ayant les droits d’Aline Faugier, ' ,
D
�( 26)
Dans le procès en la sénéchaussée du Puy> et au par
lement de Toulouse, Annet F au gier, sa sœur, et Massadier son mai’i, étoient entrés dans les plus grands détails
sur la conduite de Marie R o b in , mère de Dancette, pour
faire passer à ses propres héritiers tous les biens de son
m ari, au préjudice des héritiers de celui-ci; et ils s’étoient expliqués on ne peut pas plus clairement sur les
violences exercées contre Jean-Jacques Dancette et sa
sœ ur, pour les forcer à prendre l’état religieu x, dans
deux mémoires imprimés et signifiés au parlement de
Toulouse : mémoires qui ont été heureusement conservés.
Dans le premier de ces mémoires, signifié le 7 avril 1789,
après avoir dit que du mariage d’André Dancette et de
Marie Robin éloient issus trois enfans, du nombre des
quels étoient Jean-Jacques et Marguerite Dancette, voici
comment ils s’expliquoient sur les mo}Tens employés par
M arie R o b in , pour obliger ces deux derniers enfans à
prendre l’état religieux :
« L e sieur A ndré Dancette étoit d’un caractère timide
« et foible, se laissant aisément conduire et subjuguer par
« ceux qui vouloient prendre de l’ascendant sur lu i; il fut
« marie avec la demoiselle Marie R o b in , femme d’un
« caractère difficile, acariâtre, im périeux, exigeante,
« n’aimant rien qu’elle-même.
.
«
«
«
«
«
« Il provint de cette union trois enfans, Claude Dan
cette, avocat, qui deceda en 1767, Jean-Jacques et
Marguerite Dancette , qui furent forcés d’embrasser
l’état monastique, ne pouvant plus supporter l’humeur
difficile, les tracasseries et les mauvais traitemens de
leur mère.
�( 27 )
. Après avoir forcé,ses enfans à faire profession, l’un
« dans l’ordre de' Cluny , l’autre dans le couvent des
« ,ursulines,.il ne manquoit à la demoiselle R obin , pour
« être au comble de ses v œ u x , que de se revêtir des
« dépouilles de ses enfans, etc. »
•
Dans un autre mémoire imprimé, en réponse à celui-ci,
que firent signifier les héritiers de la demoiselle R o b in ,
qui soutenoierit la validité du testament par lequel elle
avoit été instituée héritière d’A ndré Dancette son mari,
ils se récrièrent contre les imputations qu’on faisoit à la
mère contre ses enfans, et traitèrent de fable et de calom
nie le reproche qu’on lui faisoit d’avoir par ses mauvais
traitemens forcé deux de ses enfans à embx-asser l’état
religieux.
Mais comment A ndré Faugier, sa sœur, et Massadier
çon mari répondirent - ils à ces dénégations , dans un
second mémoire signifié le 3 juin 1789, Il faut encore
rappeler les termes de ce second mémoire,
« On n’a pas calomnié la demoiselle R o b in , quand
« on a dit qu’elle avoit forcé ses enfans à faire profes« sion dans l’état monastique, Comment les adversaires
« peuven t-ils soutenir le contraire? eux qui ont été
« témoins, ainsi que tous les habitans.de la ville de
« Beauzat et des environs, des reproches que le religieux
« Dancette a faits à lçi demoiselle R obin, d’avoir contrarié
« ses goûts et son inclination décidés pour le commerce,
« Les tentatives inutiles de ce religieux, sa conduite, sa
« ,fu ite, ne prouvent que trop l’aversipn qu’il a toujours
« eue pour un état que sa mèx’e lui fit embrasser malgré
« \m, ?
D 3
�M >
.
.
.
Qui est-ce donc qui a terni ce langage?'C'é sont ceuxlà même qui âùjourd’liui1attaquent lés jügenïe:ns qui ont
annullé des vœux formés'pàr la crainte, par la violence
et par les mauvais traitem ens,qui, de leur propre aveu,
ayoient forcé l’entrée en religion de Jean - Jacques
Dancette.
.
:
::
V oilà donc la preuve par écrit, et la preuve la plus
irrécusable, puisqu’elle est sortie de la bouche des adver
saires de D ancette, et qu’ils l’ont rendue d’autant plus
éclatante dans des mémoa-es imprimés , que les vœux
de Dancette n’ont pas été libres', qu’ils n’ont été que
l’effet de la crainte et de la violence.
Après des aveux si formels dans des mémoires imprimée
et signifiés, et qui furent produits au parlement de Paris,
sur l’appel comme d’abus, comment le parlement auroit-il
pu ne pas dire qu’il n’y avoit pas d’abus dans la sentence
de l’oflicialité qui avoit déclaré nuls les vœux de Dancette,
e t l ’avoit renvoyé au siècle? et comment, encore aujour
d’hui, s’il pouvoit être question de prononcer de nouveau
sur l’appel comme d’abus , nos adversaires pourroient-ils
sans impudeur rejeter la preuve qu’eux-mêmes nous ont
fournie dans leurs mémoires imprimés et signifiés , qui
tiennent une place intéressante dans les productions de
Dancette.
.
A
r t i c l e
II.
On a vu ci-dévant qu’il est de principe que les cinq
ans accordés pour réclamer contre des vœux qui sont
l’elïèl de la crainte et de la violence, ne commencent à
courir que du jour où la crainte ou la violence ont cessé.
�i
-
‘
( 29 )
_
Mais la crainte et la violence n’ont jamais cessé. D ’abord
ces motifs ont toujours subsisté jusqu’à la mort du fils
aîné Dancette : c’étoit l’envie d’enrichir ce iils aîné aux
dépens des autres enfans, qui avoit excité les mauvais
traitemens de la mère et du père , qui forcèrent leurs
enfans à prendre l’état religieux.
A près la mort de ce fils aîné, la m ère, qui voulut se
rendre maîtresse des biens de son m ari, auroit eu de justes
sujets de craindre de ne pas réussir dans son p ro jet, si
elle n’eut pas entretenu son mari dans les sentimens de
haine qu’elle lui avoit inspirés et fait partager avec elle,
contre ce fils malheureux qu’on avoit entraîné dans la
captivité d’un cloître, la réclamation n’eût fait encore
que confirmer et envenimer la haine. I-e iils sortant du
cloître sc seroit trouvé sans ressource, et sans asile dans la
maison paternelle : ainsi la mère eut toutes les facilités
que son ascendant et son empire sur son mari pouvoient
lui donner pour se faire instituer héritière universelle
dans son testament ; et aussitôt après la mort de son mari
elle se mit en possession de sa succession.
Cependant, long-temps avant la mort du père, dès
176 1, le fils avoit fait des protestations pardevant notaires,
qu’il avoit renouvelées en 1769.01 en 1771- M ais, son
pere m ort, il espéra trouver grâce auprès de sa mère. Il
n’hesita pas dès ce moment à déserter le monastere et à
•quitter l’habit monacal. Tous ses efforts, toutes ses solli
citations auprès de sa mère furent inutiles, et il lut oblige
d'errer cà et là chez des parens ou des amis compatissans
cl sensibles à ses malheurs, toujours pourtant renouvelant
ses protestations en 1776, en 1781 et en 1785.
�( 3° )
.
Mais sa m ère, depuis la mort de son fils aîn é, avoit
tourné toutes ses affections du côté de ses parens et de
deux de ses neveux, l’un desquels par son testament elle
fit son héritier universel, laissant à l’autre un legs consi
dérable par un codicile. Touchée sans doute de quelque
rem ords, elle ne fit le legs d’un domaine venu du patri
moine du p è re , à un de ses n eveu x, qu’à la charge d’en
laisser la jouissance à son fils ; e t , ce qui est surtout à
remarquer, c’est que dans ce dernier actç la mère étoit si
pénétrée de la nullité des vœux de son fils, qu’elle ne le
qualifie pas de religieux, mais bien de prêtre sécularisé.
Elle eut encore la précaution qu’elle avoit déjà fait pren
dre dans le testament du p è r e , de faire faire une insti
tution particulière en faveur du fils, de faire elle-m êm e
une pareille institution dans la jouissance du domaine
dont la propriété fut donnée à son neveu par son codicile j
institution particulière, qui ne put être faite que dans
la prévoyance que le fils pourrait un jour faire déclarer
la nullité de ses vœ ux, et pour, dans ce cas, ne pas vicier
ses dernières dispositions par la prétérition.
A lo rs, qui est-ce qui ne comprendra pas que jusqu’à
la mort de la mère la volonté et la liberté du fils ont tou
jours été enchaînées, que les motifs de crainte et de vio
lence n’ont cessé de subsister tant que le fils a pit craindre
que sa m ère, par des voies extraordinaires qui n’échap
pent pas à la haine, le privât de toute ressource et de tout
secours pour réclamer les biens de son père, qu’elles’étoit
fait donner par un testament, testament que le fils ne
çonnoissoit que par la vo:e publique, sans qu’il en eût
jamais eu une counoissance particulière qui pût i’iijslruire
�( 3i )
des moyens par lesquels il pouvoit attaquer ce testament.
M ais, même encore après la mort de sa mèi’e, il renou
vela ses protestations en 1785. Il fit plus encore; il se
mit en possession de tous les biens de son père , sans
éprouver aucune opposition de la part de ses parens ni
paternels ni maternels, et sans même qu’il se crût obligé
de réclamer contre ses vœ ux, qu’il de voit regarder comme
absolument nuls,'non pas seulement parce qu’ils étoient
l’effet de la crainte et de la violence, mais parce que
tous les actes qui auroient pu les rendre valables étoient
frappés de nullité par l’inobservation des formalités né
cessaires pour les rendre valides.
•
Cependant ayant dans la suite été informé des contes
tations qui s’étoient élevées en la sénéchaussée du P u y ,
et au parlement de Toulouse , entre les Robin et les
Faugier, les premiers demandant la validité du testament
d’André Dancette, et les Faugier demandant la nullité
de ce testament, qui avoit été en effet ordonnée par la
sentence de la sénéchaussée dù P u y , et par l’arrêt confirmatif du parlement de Toulouse, Jean-Jacques Dan
cette , pour se mettrè à l’abri des contestations qu’à la
faveur de ces jugemens on pourroit lui élever pour le
dépouiller des successions de ses père et m ère, il prit
le parti de se pourvoir à l’oflicialité du diocèse de M âcon,
pour faire prononcer la nullité de ses vœux.
Ainsi on croit avoir établi la seconde proposition,
que Dancette avoit protesté dans un temps u tile, puis
que ses protestations avoient non - seulement précédé ,
iriais même suivi immédiatement le temps où la crainte
et la violence avoient pu cesser.
�C 32 )
A
r t
. III.
Enfin , il avoit exercé l’action en réclamation et en
nullité dans un temps prochain de ses dernières pro
testations.
Ou a vu ci-devant, dans les Mémoires du clergé, que
les cinq ans dans lesquels doit se faire la réclamation,
ne courent que du jour où la crainte ou la violence
ont cessé.
•
On a vu également dans d’H éricourt, qu’il n’est pas
nécessaire d’exercer l’action en r é c la m a tio n dans les cinq
ans, pourvu que dans ce temps il ait été fait des pro
testations, et que ces protestations conservent l’action,
si depuis les protestations on n’a pas laissé passer un
assez grand nombre d’années, pour qu’on ne soit pas
censé avoir ratifié tacitement la profession,
D ’après ces principes, quand même la nullité des
vœux n’eût été fondée que sur la crainte ou la violence,
abstraction faite de l’invalidité des actes de vêture et de
profession par l’inobservation des formalités, l’action
de Dancette seroit venue à temps, puisqu’elle lui avoit
été conservée par scs actes de protestation , dont le
dernier n’étoit pas antérieur de cinq ans à l’action
en nullité. La dernière protestation étoit du i 5 avril
1785 , et l’action en nullité fut exercée au mois do
mars i'tqo. D ’ailleurs, cette dernière protestation avoit
été précédée de plusieurs autres, dans l’intervalle des
quelles il ne s’étoit jamais écoulé cinq ans. Enfin , u’étoit-ce pas une protestation continuelle de la part de
Dancette,
�C 33 )
Dancette, d’avoir, d’abord après la mort de son père,
abandonné le monastère, et quitté l’habit m onacal, et
de s’ètre, après la mort de sa m ère, mis en possession
des successions paternelle et maternelle ?
On se persuade donc d’avoir établi invinciblement
les trois articles annoncés pour prouver l a secondé
nullité. i°. On a établi que la profession en religion de
Dancette a été l’effet de la crainte et de la violence ;
et toutes les lois civiles et canoniques déclarent nuls les
actes qui ne sont pas faits dans une parfaite liberté. z°. O n
a prouvé que Dancette avoit protesté dans un temps
U t i l e , avant et après les cinq ans où la crainte et la
violence avoient ce9sé. 30. On a encore prouvé que
l’action avoit été exercée dans les cinq ans de sa der
nière protestation, précédée de plusieurs autres qui
toutes avoient continué de conserver son action.
Mais on avoit encore, auparavant établi une première
nullité par l’inobservation des formalités dans les actes
de vêture et de profession. .
Tout concourt donc à justifier la disposition de la
sentence de l’oilicialité qui avoit déclaré nuls les actes
de vêture et de profession de Dancette, et l ’avoit renvoyé
au siècle. Tout démontre qu’ il n’y avoit pas d’abus dans
cette sentence, et que déjà n’eût-il pas été fait droit
au parlement sur l’appel comme d’abus, et put-il être
question de le juger de nouveau, les appelans ne pour
voient pas attendre du tribunal d’appel un jugement dif
férent de celui qui fut prononcé par l’arrêt du parle
ment. Mais alors quel avantage ne peut-011 pas se pro
met Ire de la lin de non-recevoir contre la tierce-oppopilion?
Ji)
�( 34 )
Seconde proposition.
Quels sont les tiers-opposans ? C’est Françoise Faugier,
et Massadier son mari. A quel titre se présentent-ils
pour former la tiei’ce opposition? C’est d’abord au nom
d’A ndré Faugier dont ils disent avoir les droits. Mais
A ndré Faugier étoit partie dans la sentence de l’ofïicialité et dans l’arrêt du parlement.
Sous ce premier rapport , et comme cessionnaires
d’A ndre F au gier, Françoise Faugier et son mari sont
constamment non-recevables dans la tierce-opposition.
L ’article II du titre X X X V de l’ordonnance de 1667 ne
permet la tierce-opposition contre les arrêts et jugemens
en dernier ressort, qu’à ceux qui n’y ont pas été parties:
or, A ndré Faugier avoit été partie non-seulement dans
la sentence de l’officialité, mais encoi’e dans l’arrêt du
parlement. Ainsi la tierce-opposition qu’il auroit formée
lui-même seroit évidemment non-recevable ; et elle l’est
également contre Françoise Faugier et son mari, q u i, à
cet égard, n’ont pas plus de droits que leur cédant.
Eussent-ils même obtenu la cession d’A ndré Faugier
avant l’arrêt auquel ils forment la tierce-opposition, ils
y seroient également non-recevables, étant do principe
que les successeurs et ayant-cause de ceux qui ont été
parties dans les jugemens en dernier ressort ne peuvent
pas plus qu’eux y former tierce-opposition. C ’est ce que
tous les auteurs et les praticiens nous cnseigncnl, et ce
qui a été jugé par une infinité d’arrefs : on eu trouve
jusqu’à onze dans Denizart et dans le Répertoire de juris
�prudence, qui ont été recueillis dans les arrêtistes. C’est
la faute de l’acquéreur ou du cessionnaire de celui contre
lequel a été rendu le jugement contradictoire en dernier
ressort, de n’avoir pas fait connoître sa vente ou sa cession,
et de n’être pas intervenu.
S’il en est ainsi lorsque la vente ou la cession est anté
rieure au jugement, à plus forte raison doit-il en être de
même lorsqu’elle est postérieure.
La fin de non-recevoir du chef d’A n dré Faugier doit
même paroître d’autant plus accablante, que l’arrêt du
parlement fut rendu de son consentement : c’est ce que
l’on voit dans le contexte même de l’arrêt.
Ce n’étoit d’abord que les R obin, parens maternels de
D ancette, qui avoieht interjeté l’appel comme d’abus de
la sentence de l’officialité ; mais sur cet appel ils avoient,
en vertu d’une commission, assigné A ndré Faugier au
parlement, pour se joindre à eux dans leur appel, et à fin
d’arrêt commun. O r, nous voyons dans l’arrêt qu’André
Faugier avoit donné une requête par laquelle il avoit
conclu à ce que les R obin fussen t déchirés noji-receçcibles dans leur demande en déclaration d'arrêt com
mun par eux form ée contre M e. A n d ré Faugier, ou
en tout cas et subsidiairement seulement qu'ils en f u s
sent déboutés. On ne pouvoit pas un consentement plus
formel de la part d’André Faugier à la sentence de l’officialité , et un aveu plus précis qu’il n y avoit pas
d’abus dans cette sentence : aussi l’arrêt qui intervint et
qui jugea qu’ il n’y avoit pas d’abus, ne condamna pas
seulement les Robin aux dépens envers Dancette, il les
y condamna également envers André Faugier.
E 2
�( 3^ )
Il seroit donc impossible de se refuser à l’évidence des
fins de n on -recevoir contre la tierce-opposition que
Françoise
Faugier
et Massadier son mari ont formée du
j
ii
chef d’André F au gier, et comme cessionnaires de ses
droits.
’
Mais cette tiei’ce-opposition a encore été formée du
chef de Françoise Faugier, en son nom propre et per
sonnel, sous le prétexte qu’étant elle-m êm e héritière
d’A ndré Dancette par la profession en religion de son fils,
elle auroit dû être appelée soit en l’officialité , soit au
parlement sur l’appel comme d’abus de la sentence de
l’oiiicialité.
Il y a trois réponses ù cette objection.
i°. Il n’est pas exact de dire qu’il faille que celui qui
demande la nullité, ou qui réclame contre ses vœ ux, soit
obligé d’assigner sur sa demande ceux de ses pareils qui
sont directement intéressés à ce que sa profession subsiste.
Il n’y a absolument aucune lo i, ni canonique, ni civile,
qui exige cette nécessité. Onproposoit néanmoins la même
objection lors d’un arrêt du mois d’avril i 665 , rapporté
par M . de Catelan ; et voici ce qu’on y répondoit : « Une
« religieuse, par sa profession et scs vœ ux, n’est engagée
« qu'à D ie u , dont les intérêts et les droits résident dans
« la communauté qui l’a reçue, et à laquelle 011 laisse le
« soin de les menager et de les défendre. Ainsi on n’u
« point dû y appeler son frerc, qui n’y a qu’un intérêt
« bien moins considérable en comparaison, et à regarv der la vraie importance des cl 1oses; un intérêt d’ailleurs
« accessoire, et qu’on nomme un intérêt per couse« quentias- tout comme, selon nos arrêts, les seigneurs
�( 37 )
« ne sont point appelés à l’entérinement des lettres de
« grâce-, quoique intéressés aux condamnations-, et tout
« comme les substitués ne sont point appelés dans des
« procès où il s’agit de la validité ou invalidité des ma
lt riages, et dont l’événement peut servir d’obstacle ou
« d’ouverture à la substitution. Aussi la chose'fut-elle
« décidée de même dans le cas pareil d’un frère non
« appelé à la fulmination du rescrit obtenu par la sœur
« qui réclamoit contre ses vœ ux, par l’arrêt du 30 mars
« 16 61, qui déclara n’y avoir point d’abus dans la sen
« tence de l’officialité de M ontauban, qui avoit fulminé
« le rescrit sans appeler le frère. »
Ce que l’on vient de rappeler de Catelan est répété par
les auteurs du Répertoire de jurisprudence, au mot P r o
fe s sio n , où ils disent que n’y ayant aucune loi canonique
ni civile qui exige la nécessité d’appeler les pareils, il est
à croire que l’inobservation de cette formalité ne seroil;
pas regardée comme abusive.
2°. Si 011 étoit obligé cl’appeler les parens, au moins
ne seroit-ce que ceux qui seraient alors directement inté
ressés a ce que la prolession- subsistât. Mais Françoise
F au gier, ù l’époque de la demande en nullité et de lu
réclamation de Dancette, n’avoit pas droit à la succession
(Tu père de Dancette. A la vérité elle étoit sa nièce; mais
elle ne pouvoit venir à la succession que par représenta
tion d’Anne Dancette, sa m ère, sœur d’André, Dancette,
et. laquelle elle-m êm e 11’étoit mor[o qu’après soiijlrère.
Ainsi c’eût élé la mère de,Françoise Faugier qui auroit
succédé à André Dancette, si, les vœux du lils n’eussent
pas été nids.
_ • \ •
�( 38 )
Mais Françoise Faugier, par son contrat de mariage
avec Massadier, du 28 avril 17 18 , avoit renoncé à la
succession de son père et à celle de sa m ère, moyennant
une dot qui lui fut constituée tant pour biens paternels
que maternels, et dans laquelle il fut distingué ce qui
lui étoit donné pour chaque espèce de biens. Par con
séquent sa mere auroit eu recueilli la succession d’André
Dancette son frère, si les vœux du fils eussent été vala
bles ; et cette succession auroit fait partie de celle d’Anne
Dancette, mere de Fi’ançois Faugier, à laquelle elle avoit
renonce. Donc alors , et au temps où Jean-Jacques
Dancette avoit demandé la nullité et réclamé contre ses
vœ ux, Françoise Faugier n’avoit aucun intérêt à ce que
la profession de Dancette subsistât. Il n’eût donc pas été
nécessaire, pour former la demande en nullité et en récla
mation , d’y appeler Françoise Faugier.
30. On croit avoir prouvé que quand les choses seroient
entières, et qu’il s’agiroit de prononcer de nouveau sur
l’appel comme d’abus, étant d’ailleurs démontré qu’il
n’y a point d’abus, la nullité des actes de vêture et de
profession se trouvant évidente par l’inobservation des
formalités prescrites par les lois, et d’ailleurs n ’a ya n t été
que l'effet de la crainte et de la violence, la tierce-oppo
sition seroit sans objet, puisqu’il fa adroit toujours déclarer
la nullité des vœux. A quoi donc pourroit servir la tierceopposition?
'
Il doit donc paroître démontré que Françoise Faugier
et Massadier son mari sontI non-recevables
dans leur tierce-*
*
opposition du chef de Françoise la u g ie r, soit parce qu’cu
général aucune loi civile ni canonique n’exige d’assignej’
�( 39 )
les parens sur les demandes en nullité des vœux, soit parce
que si cela étoit nécessaire, ce ne pourroit être que pour
les parens qui au moment de la demande en nullité
auroient un intérêt présent à ce que les vœux subsistassent,
et qu’à cette époque Françoise Faugier ne pouvoit pas
avoir cet intérêt, parce qu’elle avoit renoncé à la succession
de sa m ère, et par conséquent ne pouvoit pas la repré
senter dans celle d’A ndré Dancette-, soit parce qu’enfin
on ne pourroit jamais empêcher que les vœ ux de Dancelte ne fussent déclarés nuls.
f
Mais Françoise Faugier n’a voit renoncé qu’à la succes
sion de sa m ère, et non aux successions collatérales de
l’estoc ni paternel ni maternel. Sa renonciation aux suc
cessions directes avoit profité ù Claude et André Faugier
ses frères : or, Claude ayant laissé un fils qui est ensuite
décédé sans postérité, Françoise Faugier la tante a dû lui
succéder conjointement avec A ndré Faugier son autre
frère ; c’est une succession collatérale dans laquelle elle a
dû trouver la moitié de la portion que Claude Faugier
et son fils après lui auroient eue dans la succession d’A ndré
Dancette; et si le fils de Claude Faugier avoit dû être
appelé dans la demande en nullité et réclamation contre
les vœ ux, la tierce-opposition du chef du fils de Claude
Faugier, que Françoise Faugier représente, devroit être
accueillie.
D ’abord cette objection se réfuterait par ce qu’on a
déjà v u , qu’il n’y a aucune loi, ni canonique, ni civile,
qui exige d’appeler les parens dans les demandes en nullité
ou en réclamation contre les vœux; mais d’ailleurs le fils
de Claude Faugier s’est trouvé partie dans l’arrêt du par-
�( 4° )
.
lemcnl de Paris, dans la personne d’André Faugier, son
oncle et son tuteur.
'
Il est vrai qu’on a répondu à cela qu’André Faugier,
lors de l’arrêt, ne pouvoit pas figurer pour son neveu,
parce que la tutelle avoit cessé au moment de la puberté
que le mineur avoit acquise à cette époque, ayant accom
pli sa quatorzième année au mois de mars 1790, c’est-àdire, quelques mois avant l’arrêt du mois d’octobre de
la même année.
Mais comment Jean-Jacques D ancette, qui avoit été
si long-tem ps éloigné de sa fam ille, au ro it-il pu être
informé de l’âge du fils de Claude Faugier, tandis surtout
qu’A ndré Faugier procédoit lu i-m ê m e en qualité de
tuteur ? et s’il n’avoit plus cette qualité, ne devoit-il pas
cesser de la prendre, et en instruire Dancette ? Si lui—
même aujourd’hui proposoit cette objection, pourroit-il
y être recevable, lui qui auroit induit Dancette en erreur?
est-elle donc plus proposable dans la bouche de Françoise
Faugier et de Massadier son m a ri, qui se présentent
comme ccssionnaires d’André Faugier? ne pourroit-on
p-is même ajouter qu’André Faugier n’avoit cessé dêfre
tuteur jusqu’au moment de l’acte par lequel son neveu
lui signifia qu’il avoit atteint sa puberté, et qu’il s’étoit
choisi un curateur?
11 (¡1111enfin toujours en revenir y cotte vérité, qu’aucune
loi canonique ou civile n’exige la nécessité d’appeler les
parens; et il ne faut pas non plus perdre de vue que la
liei'ce-opposilion seroit sans ol^jcl, puisqu’ il faudroit tou
jours prononcer la nullité des vieu x, soit à cause qu’ils
n’étoient que l’eilet de lu violence, soit parce que les
actes
�( 41 )
actes de vêture et de profession n’avoient pas été revêtus
des formalités prescrites par les ordonnances, soit enfin
parce que les protestations avoient conservé l’action en
réclamation qui fut exercée dans les cinq ans de la ces
sation de la crainte et de la violence.
Une autre fin de non-recevoir se tire de l ’approbation
de la sentence et de l’arrêt, par l’exécution qu’en ont
soufferte tant André Faugier que Françoise Faugier et son
mari.
Déjà avant la sentence et l’arrêt, et dès l’instant de la
mort de sa m ère, Dancette s’étoit mis en possession tant
des biens de sa mère que de ceux de son père*, et après
la sentence et l’arrêt il s’étoit conservé dans cette posses
sion sans obstacle de la part de ses parens, et notamment
de Françoise Faugier. Si Dancette , par la rigueur des
décrets rendus contre les prêtres insermentés, dans les
temps désastreux de notre révolution , est mis sur une
liste d’émigrés et obligé de fuir et de se cacher, qui est-ce
qui met la main sur les biens de son père qu’il possédoit?
ce ne sont pas ses parens, ce n’est point A ndré ni Fran
çoise Faugier; c’est la régie nationale qui s’empare de ces
biens,comme appartenans à un prêtre déporté ou émigré;
rc’est la régie qui les met en séquestre et qui les afferme :
et dès l’instant que le'm alheureux Dancclle peut reparo ître, c’est lui seul qui demande la main-levce du sé
questré, c’est à lui seul qu’elle est accordee; et ses parens
continuent et ne cessent de le laisser jouir.
Françoise Faugier et son mari ont prétendu, dans leur
mém oire, que tant que le fils'de Claude Faugier avoit
vécu c’étoit lui qui attennoit les biens; mais c’est de leur
F
�C 42 )
part une fausse assertion, et qui est démontrée par les
baux de ferme consentis par Dancette lui-même avant la
mort du fils de Claude Faugier. Un de ces baux, du do
maine de la D orlière, est du 4 nivôse an 4 ; un autre,
du domaine de Confolent, est du 5 fructidor de la même
année : et la mort du fils de Claude Faugier est posté
rieure à ces baux; elle n’est arrivée que le 5 complémen
taire an 5.
Quel est le moment où Françoise
Faugier
et son mari
3
O
imaginèrent de troubler Dancette dans une possession où
ils l’avoient laissé si paisiblement pendant plusieurs an
nées? c’est seulement lorsqu’il a fait quelques dispositions
. de ces mêmes biens qu’ils espéroient de recueillir un jour
dans sa succession : ce n’est donc qu’ambition et cupidité
de leur part. Toutes ces circonstances se réunissent pour
rendre de plus en plus favorables les fins de non-recevoir
d’ailleurs bien fondées contre la tierce-opposition.
Après cela il est inutile d’observer que si Françoise
Faugier et son mari pouvoient réussir dans leur tierceopposition du chef du fils de Claude Faugier, la sentence
de l’ofiicialité et l’arrêt du parlement de Paris ne devoient
pas moins avoir tout leur eifet du chef d’A ndré Faugier,
constamment partie en son nom dans la sentence et dans
l ’arrêt«, suivant ce que dit Jousse sur l’article X du titre
X X V II de l’ordonnance de 166 7, d’après la disposition
de l’article L I de l’ordonnance de M ou lin s, qui porte
en eifet que « Si un jugement portant condamnation
« de délaisser un héritage, il survient des oppositions
« formées par des tierces personnes, néanmoins celui qui
« a obtenu le jugement sera inis en possession en laquelle
�( 43 )
« étoit le condamné, sans préjudice-aux droits desdits
« opposans. »
,
O n pourroit ici rappeler avec avantage la savante dis
sertation du jurisconsulte M erlin , aujourd’hui commis
saire du gouvernement près le tribunal de cassation, qui
se trouve dans le Répertoire de jurisprudence à la suite
des questions qui y sont traitées sur les mots V œ u x
solennels, et où l’auteur, par les plus profondes recher
ches puisées dans les saintes.écritures et dans les pères de
l’église, établit toute la faveur que méritent les demandes
en réclamation et en nullité contre les vœux. Il suffit de
renvoyer à cette dissertation, dont on se bornera à saisir
quelques traits. « A in si, dit-il, l’intérêt des familles ( dans
.« cette matière ) ne doit être d’aucune considération ; il
« n’entre pour rien dans ]a profession religieuse : ce n’est
« ni pour elles ni avec elles que l’on contracte; elles n’ont
« donc rien à voir dans le contrat, et ne peuvent em
it pêcher sa résiliation. Up religieux qui rentre dans le
« siècle est, par rapport à ses parens, ce qu’est un absent
« dont on partage la succession, dans la fausse persuasion
« qu’il est m ort, et qui reparoît ensuite........Puisque les
« vœux monastiques sont devenus une affaire capitale,
« c’est bien la moindre chose que les conditions requises
« pour leur validité s’observent en rigueur, etc. etc. »
Voilà sans doute qui justifie ce qu’avoit dit D om at, que
les formalités n’ont été inventées que pour rendre les
actes valides, et pour faire qu’ils aient leur eflet; d’ou
suit nécessairement la conséquence que l’inobservation
des formalités doit rendre les actes non valides et sans
elfe t.
�( 44 )
Il n’y a plus qu’un mot à dire sur la tierce-opposition
qu’à son tour Dancette a formée à l’arrêt du parlement
de Toulouse. Il n’a pas entendu former cette opposition
sur ce que cet arrêt a annullé le testament d’A ndré Dan»
cette , son p è re , mais bien sur ce que les Faugier ont
été envoyés en possession des biens de sa succession.
E t m ôm e, à cet égard, la tierce-opposition n’eût pas
été absolument nécessaire, parce que n’étant pas partie
dans cet arrêt, il lui devient tout à fait étranger, et qu’il
n’a pu lui porter aucun préjudice ; ce principe est incon-i
testable: Tes inter alios judicata, aliis neque prejudicium ,neque emolumentum afferrepotest. L . 2 God. quib.
jud. Ce n’est donc que par exhaberance de droits, qu’il
a été formé tierce-opposition à cet arrêt ; et la tierceopposition est recevable, dès que l’arrêt qui n’a pas été
rendu avec l u i , tendroit à le dépouiller d’un bien qui
lui appartient, et sur lequel ceux qui ont été condamnés,
pas plus que ceux à qui il a été adjugé, n’avoient aucuti.
droit.
O n ne peut mieux terminer ce mémoire qu’en rap
pelant encore une foui les aveux des parties adverses, que
l ’entrée en religion do Dancette n’avoit été que l-elfet de
la iorce et de la violénce; aveux consignés dans les deux
mémoires imprimés qu’ils avoiènt signifiés au parlement
de Toulouse.
'
.
v
Page 2 du premier mémoire. L e sieur D ancette
otoit d’uii caractère timide et foible
3 se
laissant
�( 45 )
.
aisément conduire et subjuguer par ceux qui vouloient prendre de l’ascendant sur lui ; il fut marié
avec la demoiselle R o b i n , femme d’un caractère
très - difficile , acariâtre , impérieuse, exigeante,
n’aimant rien qu’elle-même.
11 provint
de cette union trois enfans, Claude
D a n c e t t e , a v o c a t , qui décéda en 1 7 6 7 , Jean
Jacques et Marguerite D ancette qui furent forcés
d’embrasser l’état monastique , ne pouvant plus
supporter l ’humeur difficile, les tracasseries et les
mauvais traitemens de leur mère.
‘ Après avoir forcé ses e n f a n s ' à faire p r o f e s s i o n ,
l’un dans l’ordre de C l u n y , l’autre au monastère
des ursulines de M o n istro l, il ne manqua à la
demoiselle Robin , pour être au comble de ses
vœux , que de se revêtir des dépouilles de ses
enfans ; il ne lui fut pas difficile d’obtenir du
caractère foible de son époux une disposition en
sa faveur, telle qu’il lui plut de l’exiger,
etc.
P a g e 7 du second mémoire. On n ’a pas calomnié
la demoiselle R o bin , quand on a dit qu elle avoit
forcé ses enfans à faire profession dans 1 état mo
nastique. Com m ent les adversaires peuvent - ils
soutenir le contraire , eux qui ont été témoins ,
ainsi que tous les habitans de la ville de Beauzat
�( 46 )
et des environs, des plaintes amères, des reproches
que le religieux D ancette a faits à la demoiselle
R o b i n , d’avoir violenté ses goûts et son inclina
tion décidée pour le commerce. L e s tentatives
inutiles de ce religieux, sa conduite, sa fuite et
sa position actuelle, ne prouvent que trop l’aver
sion qu’il a toujours eue pour un état q ue sa mère
lui fit embrasser malgré lui.
Com m ent, après de tels aveu x, a -t-o n assez peu de
pudeur pour vouloir dépouiller un malheureux fils du
patrimoine de ses pères, à la faveur d’un titre que l’on
reconnoît soi-même n’avoir été produit que par la force
ou la violence ? Les parties adverses reprochoient à la
mère de Dancette de s 'etre ,revétue , par ces mauvaises
voies, des dépouilles de ses enfa n s j et eux-mêmes7 que
tentent-ils dans ce moment ?
L e citoyen M A R C H E IX , juge-rapporteur
Le citoyen A N D R A U D , avocat,
L e citoyen V A Z E I L L E ,
avoué,
�
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A name given to the resource
Factums Marie
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An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dancette, Jean-Jacques. 1803]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Andraud
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
actes de vêture
droit canonique
droit civil
mort civile
Description
An account of the resource
Mémoire sur la nullité et la réclamation contre des vœux en religion. Mémoire pour Jean-Jacques Dancette, prêtre, habitant de la commune de Beauzat, département de la Haute-Loire, défendeur en tierce-opposition, et aussi demandeur en tierce-opposition ; contre Françoise Faugier et Jacques Massadier son mari, de lui autorisée, demandeurs et défendeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1803
1761-1803
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
46 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0223
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0725
BCU_Factums_M0726
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53722/BCU_Factums_M0223.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Beauzac (43025)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes de vêture
droit canonique
droit civil
mort civile
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53720/BCU_Factums_M0221.pdf
65b545069d60f9da5d0c0616666d7d9e
PDF Text
Text
CONSULTATION
P O U R
L a dame C H A P A V E Y R E , habitante de la
ville de M u r at, département du C a n t a l , appe
lante d’un jugement rendu au tribunal civil de
l'arrondissement de R i o m , le 9 thermidor an 10;
C O N T R E
I e citoyen A n t o i n e T E I L H ARD
D U C H A M B O N , propriétaire, habitant de
ladite ville de Ricm, intimé.
LE C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a vu le mémoire
à consulter de la dame C hapaveyre, ensemble copie d’un
jugement rendu au tribunal civil du R io m , le 9 thermidor an 10 ,
�( 2 )
^
E s t i m e que ce jugement renferme une évidente
erreur, en ce qu’il déclare valable une donation mutuelle
faite par contrat de mariage entre futurs conjoints, quoi
que cette donation n’ait pas été revêtue de l’insinuation,
dans les quatre mois du décès de l’un des donateurs; q u e ,
par conséquent, l’appel interjeté par la dame Chapaveyre
est parfaitement bien fondé , et que le succès le plus com
plet doit couronner sa juste réclamation.
Il résulte du mémoire à consulter, et de l’exposé des
faits insérés au jugement dont il s’agit, que, par le contrat
cle mariage de Marie-Jeanne Chapaveyre du Saillant avec
Antoine Teilhard-du-Chambon , la future s’est constitué
en trousseau, meubles, effets, linge et liardes à son usage,
même ses meubles meublans, etc. jusqu’à concurrence
de 2,000 fr. à quoi ces divers effets ont été amiablement
- estimés entré les parties.
%
D e plu s, et en d o t , elle s’est constitué, i ° . les biens
meubles et immeubles à elle éclius par le décès de son
père ; 20. la somme de 60,000 fr. faisant partie des biens
par elle recueillis de la succession testamentaire de Jacques
Philippe du Saillant, son oncle.
Par le même contrat, le futur est spécialement autorisé
à poursuivre la rentrée et le remboursement de tout ce
qui peut être dû à la future, à demander partage, aliéner
les immeubles réels et fictifs , toucher le remboursement,
comme les interets ou revenus échus ou à écl\oir, à la
charge néanm oins de f a i r e emploi des fo n d s à f u r et
mesure q u i l en touchera le m o n ta n t, soit en acquisi
tions d’ immeubles réels ou fictifs, soit en acquittement
de dettes hypothécaires de l’un ou de l’autre des futurs.
�C
3
)
Il est d’ailleurs stipulé, que tous .les autres biens, de
quelque nature qu’ils soient, non compris dans les cons
titutions précédentes, sont réservés à la future, comme
extradotaux et parapliernaux.
Enfin, et à la suite de quelques autres clauses particu
l e res , dont il est inutile de rendre co m p te, parce qu’elles
n’ont aucun rapport à la question ci-dessus proposée ,
il est dit : « Que pour se témoigner leur amitié récipro« que, les futurs se sont mutuellement donné et donnent
« l’usufruit de tous et chacun les meubles et droits qui
« seront délaissés par le premier mouraut ; laquelle dona
« tion , est-il ajouté, qui est mutuellement acceptée, aura
« lieu , y ait enfans ou non du mariage. »
Quelques années après ce mariage, la dame Teilhardtlu-Gharnbon n’ayant point d'enfans institua pour son
héritière universelle Marguerite Chapaveyre, sa sœur.
L'institution fut faite par le contrat de mariage de celle-ci
avec le citoyen Pardoux - Fayolle, sous la réserve par
l’ instituante de pouvoir disposer d’une somme de 18,000 f.
q u i, en cas de non disposition de sa part, devoit fairj
partie de l’institution : l’instituée ne fut d’ailleurs soumise
ù aucune autre condition que celle de ne pouvoir attaquer
les ventes partielles qui avoieut été faites par TeilhardChambou , mari de l’instituante, de quelques portions
détachées du domaine de Saint-Bonnet-Laehamp.
La dame Teilhard-du-Chambon étant morte dans le
mois d’août 179 0 , Marguerite C hapaveyre, sa sœur et
son héritière instituée, forma contre le mari survivant une
demande tendante à ce q u e , faute par lui d avoir fait
emploi des sommes reçues de son épouse, pour avoir ,
A 2
�.
.
( .4:)
,
.
au contraire, aliéné, depuis le décès de celle-ci, la tota
lité de son domaine de Saint-Bonnet-Lachamp, et faute
d’avoir fait inventaire, au décès de sa fem m e, des biens
par elle délaissés, qu’elle s’étoit réservés en paraphernal,
il fût déclaré déchu de l’usufruit stipulé en son contrat
de m ariage, condamné à restituer les biens dotaux , et
la somme de o,ooo fr. pour les biens paraphernaux,
si mieux il n’aimoit suivant leur valeu r, à donner par
renseignement, ou à constater par voie de commune re
nommée.
5
Cette première demande a été suivie d’une a u tre,
formée dans le cours de l’an 10 par la dame Chapaveyre,
qui a conclu par celle-ci, à ce que le don m utu el, porté
au contrat de mariage de sa sœur avec le cit. Teilbarddu-Chambon , fût déclaré nul et de nul effet , f a u te
d'avoir été insinué dans les quatre m ois du décès de
la dame son épouse ,• en conséquence, que le citoyen
Teilhard-Cham bon fût condamné à restituer, avec inté
rêts, à compter du jour du décès, savoir, les biens dotaux,
ainsi quV.s étoient énoncés et fixés au contrat de mariage,
et les biens paraphernaux , suivant leur consistance ,
d après la preuve par commune renommée, ou la somme
de 5o,ooo fr. etc. etc.
Ces deux demandes ayant été jointes; par un jugement
du i l prairial an 1 0 , le tribunal ordonna, avant faire
droit , que le citoyen reilhard-du-Chambon scroit tenu
de justifie]’ d’ une manière legale, q u e , soit en quittances
de dettes pour le compte de Marie - Jeanne Chapaveyre ,
sa femme, soit en acquisitions d'immeubles réels ou fictifs,
il avoit suffisamment satisfait ù 1 emploi des deniers dotaux
dont ¡1 éloit expressément chargé.
�5
(
)
( _
A in si la contestation présentoit deux questions à jm-ei\
L ’ une de savoir, si, faute d’insinuation dans les quatre
mois du décès de la dam eTeilhard-du-Cham bon, la dona
tion mutuelle, portée en son contrat de mariage, devoit
être déclarée nulle.
L ’autre, si, en tous cas, le citoyen Teilhard-du-Ghambon
ne devoit pas être déclaré déchu de son usufruit, faute
par *lui d’avoir satisfait aux obligations que la l o i, son
. contrat de mariage et le jugement interlocutoire du n
prairial lui imposoient. Car il est bon d’observer qu’il
n ’a aucunement justifié des payemens par lui articulés
des dettes de sa fem me; et qu’au lieu d’être propriétaire,
comme il l’avançoit, d’un domaine de 1 12,000 fr.j il étoit
de notoriété publique , qu’à peine il en possédoit la moitié,
Mais , quoique les principes du droit civil et les cir
constances du fait se réunissent en faveur de la dame
Cbapaveyre pour assurer le succès de Tune ou de l’autre
de ses demandes , les deux questions ont été décidées
contrelle par le jugement du 9 thermidor an 1 0 , q u i,
sans s arrêter à sa demande en nullité, dont il l’a déboutée,
a repoussé pareillement sa demande subsidiaire en priva
tion d’usufruit, de même que celle en provision d’une
somme de 6,000 f r . , qu’elle avoit incidemment formée.
L e tribunal civil de Riom a donc ju g é, en principe,
que les donations mutuelles, faites par contrat de mariage,
n’avoient pas besoin, pour être valables, dêtre revetues
d e là formalité de l’insinuation , et que la loi qui les y
assujétissoit ne présentoit, à cet égard, qu une disposition
purement bursale, d o n t l’infraction n’entraînoit point la
A 3
�. ,
.
{ 6 )
.
nullité de l’acte , mais seulement une peine pécuniaire.
L e soussigné estime, au contraire, que le défaut d’in
sinuation dans les quatre mois du décès de l’un des dona
teurs , emporte la nullité radicale de ]a donation faite
par contrat de mariage ; que la distinction qui sert de
base au jugement du 9 thermidor an 10, contredit éga
lement la lettre et l’esprit de la loi.
P o u r se bien convaincre de cette v é r ité , il n’e s t ‘pas
besoin de rappeler ici nos anciennes ordonnances , notam
ment celle de M ou lin s, qui soumettent indistinctement
et la formalité de 1 insinuation toutes les donations entre—
v i f s , de quelque nature qu’elles puissent être. On se
bornera simplement à rapporter les dispositions de l’or
donnance de 1 7 3 1 , et celles des lettres patentes de 1769,
qui ont modifié le principe g é n é r a l, relativement aux
donations de survie d’entre mari et femme.
L ’article X I X de l’ordonnance de 1731 porte « que
« les donations faites dans les contrats de mariage en ligne
« directe ne seront pas sujettes à la formalité de l’insi« nnation. *
E t l’article X X » que toutes les autres donations ,
« même les donations rénumératoires ou m u tu elles,
« quand même elles seraient entièrem ent égales, ou celles
« qui seroient faites à la charge de services ou de l'onda« tions , seront insinuées conformément aux anciennes
« ordonnances, à peina de nullité. »
Ainsi , à l’exception des donations en ligne directe,
faites par contrat de mariage, toutes les autres donations,
indistinctement, sont assujéties à l’observation rigoureuse
�C 7 )
de cette fo rm alité ; et comme la nature des donations
mutuelles, qui ne sout, au fait, que des contrats c*ornm 11ta tifs, intéressés de part et d’autre, pouvoit laisser
quelque doute sur la nécessité de les comprendre dans
la classe des actes de pure libéralité, le législateur, pour
dissiper toute espèce d’incertitude à cet égard , les y a
spécifiquement comprises, même dans le cas où elles sel’oient parfaitement égales.
' A u x termes de l’ordonnance de 1731, il n’est donc pas
douteux que les donations mutuelles d’entre mari et
fem m e, étoient, comme toutes les autres, assujéties à la
formalité de l’insinuation dans les quatre mois de leur
date; les articles X I X et X X sont si formels, si clairs et
si précis, qu’il faudroit volontairement fermer les yeu x
à l’évidence pour méconnoître la règle qu’ils établissent.
' Cependant le caractère particulier de ces espèces de
donations pouvoit et devoit même les placer dans une
classe particulière, non pour les dispenser de l’insinuation,
mais du moins pour reporter au décès de l’un des dona
taires 1 obligation de remplir cette formalité.
Dans la donation mutuelle , effectivement, ni l’un ni
l’autre des donataires ne se dépouille de la propriété des
choses qu’il donne 5 il en conserve, pendant toute sa vie,
la libre disposition ; et s'il ne peut plus les aliéner à titre
purement gratuit, nu préjudice de son codonataire , du
moins.peut-il les v e n d r e , les échanger, ou les hypothé
quer au payement de ses dettes.
- O r , comme l’insinuation, qui n’est que le moyen de
donner la plus grande publicité possible aux actes de libéra
lité, n’a pour unique but que de prévenir ou d’empêcher la
a
4
�,
(8 )
..
fraude qu'un donateur déjà dessaisi de la propriété de
choses par lui données , pourroit commettre envers des
tiers qui ne connoîtroient pas la donation, il est clair que
ce motif cesse nécessairement pour les donations mutuelles,
q u i, ne dépouillant pas les donateurs de la p ropriété,
leur laissent conséquemrnent la disponibilité en tière et par
faite de tous les objets qui composent leur donation.
D ’un autre c ô t é , si cette forme extrinsèque devenoit
complètement inutile pour ces sortes de conventions, il
pouvoit etre dangereux de les y assujétir, en ce qu’elle
gênoit la libre disposition que conservoientles deux époux,
par les inquiétudes qu’elle donnoit aux tiers avec lesquels
ils avoient à contracter.
P o u r concilier ces différentes vues, il falloit donc néces
sairement faire deux choses.
I/ u n e , reculer le terme de l’insinuation jusqu’après le
décès de l’un des deux donateurs.
•
1/autre, obliger le donataire survivant à faire insinuer
dans les quatre mois de la mort du prédécédé, afin de
prévenir, par ce m oyen, les dispositions frauduleuses que
l’héritier pourroit faire des choses données; car la dona
tion mutuelle saisit le survivant à l’instant même du décès
de son codonuteur. Elle dépouille, conséquemrnent,l’héri
tier de celui-ci ; et, si elle n’étoit pas rendue publique par
rinsinualion, le même inconvénient qui résulte du défaut
de publicité des donations ordinaires, se rencontreroit dans
celle-ci, puisque l’héritier, ainsi investi de tous les biens
de la succession, par la règle le rnort saisit le vif\ pour
roit également tromper des tiers qui ne connoîtroient
pas la donation.
�,
C9)
Ce double but a été rempli par les lettres patentes cln 3
juillet 176 9 , qui ont ordonné « que tous les dons de
« survie faits dans les contrats de m ariage, par un mari à
<r sa fem m e, ou par la femme à son m a r i, tous les dons
« mutuels, réciproques, rénumératoires, faits par l’un et
« l ’autre, dans lesdits contrats, seroient exempts, ju s
« qu'au, jo u r du décès du d on a teur, de la fo r ni alité e
« üin sin ua tion , soit au domicile des contraetans, soit aux
« bureaux des lieux de la situation des biens donnés \ à la
« ch a rg e, n éa n m o in s, que lesdites donations seroient
« insinuées au dom icile du d o n a teu r, dans les quatre
« m o is , à com pter du jo u r de so?i décès. »
Remarquons, avant d’aller plus lo in , que l’exception
faite par cette loi en faveur des donations mutuelles, ou
de survie, par contrat de mariage, n’a lieu que pour le
temps de l’insinuation : sont dispensées ju sq u 'a u jo u r du
décès du dona teur,* q u e , par conséquent, la règle reprend
tout son em piré, lorsque le terme de cette suspension est
arrivé. E t, par une conséquence ultérieure, que l’obli
gation de faire insinuer, dans les quatre mois du décès,
est H»pTJsée à peine de nullité , puisque l’ordonnance
de 1 7 3 1 , à laquelle il n’ est dérogé que pour le tem ps,
punit de la môme peine l’ inobservation de cette formalité.
Il y auroit donc une absurdité com plète, à ne v o ir ,
dans les lettres patentes du 3 juillet 176 9 , qu’une dispo
sition purement bursale, puisque les mêmes motifs, qui
fondent la nécessité de l’insinuation des donations ordi
naires , dans les quatre mois de leur d ate, provoquent
également celle des donations réciproques, dans les quatre
mois du décès de l’un des donateursj et q u e, d’un autre
A
5
�(
IO )
^
côté, ces mêmes lettres patentes n’ont dérogé a l’ordon
nance de 1 7 3 1 , que pour le temps ou la formalité devroit
être rem plie, sans anéantir la peine de nullité, qui en
punit l’inobservation.
Ces principes posés, rien de plus facile que d’ écarter
les prétendus motifs qui servent de base au jugement du 9
thermidor an 10.
L e pi’emier consiste à dire : « que, d’après l’ordonnance
« de 1 7 3 1 j les lois antérieures et celles qui ont su iv i, l’in •
a sinuation n’est ordonnée à peine de nullité, que pour les
« donations entre-viis, pour les seules libéralités présentes
« et absolues. »
Nous venons de v o i r , au contraire, que les donations
mutuelles, même celles qui seroient parfaitement égales,
et généralement toutes les espèces de donations, sans autre
exception que celles en ligne directe, sont soumises parles
articles X I X et X X de l’ordonnance de 1 7 3 1 , à la for
malité de l’insinuation, sous peine de nullité : que celles
d’entre mari et femme en ont été dispensées, il est v ra i,
pour le temps de la vie des donateurs ; mais qu’en
laissant à la disposition de l’ordonnance de 1731 tout
son empire et son effet, relativement à l'obligation
d’insinuer dans les quatre mois du décès, les lettres pa
tentes de 1769 n’ont établi qu’une exception temporaire,
sans déroger au surplus des autres dispositions de l’ordon
nance.
L e second m otif du jugement est fondé, « sur ce qu’une
« donation mutuelle de biens qui se trouveront après le
« décès, ne peut être réputée ni une libéralité purement
« gratuite, ni une donation présente et absolue, puisqu’il
�( ri )
r n’y a de véritables donations entre-vifs, que celles qui
« dépouillent, dès le m oment, le donateur au profit du
« donataire; et q u ’ainsi la donation dontils’agit n’est qu’une
■
■véritable donation à cause de mort, a
Ce second m otif renferme autant d’erreurs que de mots.
D ’abord il est faux qu’il n’y ait de véritables donations
entre-vifs, que celles qui dépouillent le donateur dès l’ins
tant même de la donation ; car les institutions contrac
tuelles sont, par exem ple, de vraies donations entre-vifs ,
et réputées comme titres irrévocables de leur n a tu re ,
quoiqu’elles laissent à l’instituant la faculté de disposer à
titre onéreux de tous ses biens, et ne le dépouillent d’au-»
cun de ceux qui composent l’institution ( i ).
Les donations faites par contrat de m ariage, à la
charge de payer les dettes q u e laissera le donateur, et
qui sont formellement autorisées par l’article X V I I I de
l’ordonnance de 1 7 3 1 , sont encore des donations entre
vifs , et parfaitement irrévocables, quoique le donateur
conserve la faculté d’aliéner ses biens en les hypothé
quant à ses créanciers.
Les donations de survie , autorisées également par
la même l o i , sont encore des donations entre-vifs ; et
jamais personne n’a imaginé jusqu’il présent qu’on pût
les ranger dans la classe des donations à cause de m o rt,
( 1 ) Voyez L e b r u n , des successions, livre 3 , chap, z , numéro 7,
Pothier , introduction au titre des successions de la coutume d Orléans f
numéros 17 et 18.
L o i du 18 pluviôse an 5 , article premier.
�.
.
. ( 12}
qui en diffèrent essentiellement p a rle caractère de révo
cabilité qui leur est propre.
.
L a donation à cause de mort est essentiellement révo
cable jusqu’à la mort du donateur, non-seulement par
le fait, c’est-à-dire, par l’aliénation qu’il peut faire à
titre onéreux , mais par le d ro it, en ce qu’il n’a besoin
que d’ un simple acte de sa volon té, pour les anéantir,
les rév o q u er, les m odifier, ou disposer en faveur de
tout autre que le donataire.
^ Les donations de survie , au contraire, les donations
mutuelles et réciproques, celles à la charge de p-yer les
dettes du donateur, les institutions contractuelles, les
promesses de conserver, et autres de même nature, sont
bien révocables en ce sens, que le donateur ou l’insti
tuant conservent la liberté d’aliéner à titre o n é re u x ,
même la totalité des objets donnés.
Mais elles sont irrévocables en cet autre sens, que le do
nateur ou l’instituant ne peuvent disposer à titre gratuit en
faveur d’un autre que le donataire, et qu'il n’est plus en
son pouvoir de les anéantir ou de les modifier de quel
que manière que ce soit. L ’ordonnance des substitutions,
article X I I , le décide formellement pour les institutions
contractuelles d’héritier, et sa disposition s’applique à
J'ortio ri aux autres conventions de même nature , c’està-dire , à celles qui ne dépouillent pas le donateur de la
propriété des choses données, quoiqu’elles lui ôtent la
liberté de disposer à titre gratuit.
D e cela seul que les donations mutuelles , et en général
les donations de survie, sont irrévocables de leur nature,
il s'ensuit donc nécessairement qu’elles ne sont point
�13
(
)
donations à cause dè mort ; e t , par une conséquence ulté
rieure , qu’on doit les ranger dans la classe des donations
entre-vifs ; ce qu’il falloit démontrer.
A u surplus, si les donations mutuelles n’étoient pas de
véritables donations entre-vifs, soumises comme telles à
l’insinuation , on demanderoit pourquoi l’article X X de
l’ordonnance les a rangées dans la même classe pour les y
assujétir, et pourquoi les lettres patentes de 1769 ne les
ont exceptées de cette disposition générale que pour reculer
le terme de l’insinuation, en le plaçant au décès de l’un
des donateurs, sans anéantir d’ailleurs la peine de nullité
que l’inobservation de cette forme doit nécessairement
leur faire encourir.
.
L e troisième m otif du jugement est fondé sur ce que
« la déclaration d e ’ 1729 n ’a soumis à l’insinuation les
« dispositions testamentaires et autres à cause de m o rt,
.« que pour les assujétir à un droit bursal, et les a expres« sèment exceptées de la peine de n ullité, en cas de
« non insinuation. »
Si les donations mutuelles, par contrat de m ariage,
pouvoient être regardées comme dispositions
taires ou h cause de m o rt, rien ne seroit plus
ce raisonnement qui ne laisseroit aucun lieu à la
.mais on vient de faire vo ir qu’elles étoient
testamen
juste que.
répliqué :
essentiel
lement donations entre-vifs; qu’elles en avoient le prin
cipal caractère, celui de la parfaite ir r é v o c a b ilit é ; et la
conséquence directe qui résulte de li , c’est qu on ne peut
leur appliquer les lois relatives aux testamens.
Les jugés du tribunal de Hiom donnent pour quatrième
•motif, que les lettres patentes de 1769 n ont p o in t dérogé
\
�4
( i )
a u x lois a ntérieu res, relativem ent à la-peine de nullité
f a u t e d 'in sin ua tion , et il semble que l'on pourroit tirer
pour conséquence dii’ecte de cette assertion incontesta
b le, que si l’exception qu’elles introduisent n’est que pour
le terme de l’insinuation, la peine de nullité subsiste faute
d’ insinuation dans celui qu'elles établissent, c’est-à-dire,
dans les quatre mois du décès du donateur.
O n ajoute, dans le jugem ent, « que cette loi ( les lettres
« patentes de 1769 ) a seulement pour objet, en déterc< minant le temps et l’époque de l’insinuation, de fixer
« le temps précis auquel les peines du double et triple
« droit seroient encourues. »
Mais les lettres patentes de 1769 ne parlent ni du
double ni du triple droit ; elles disent seulement que les
donations de survie, comme les donations mutuelles, sont
dispensées pendant la vie du donateur de la formalité
de l’insinuation . . . . pour y dem eurer assujéties seulem ent dans les 4 m ois du jo u i' de son décès.
E t comme les raisons de l’exception sont puisées dans
Ja nature même des donations de survie, q ui, laissant au
donateur la iaculté de disposer à titre onéreux , n’exposent
point à être trompés les tiers qui conlracteroient avec lui j
C o m m e, d’ un autre côté, la nécessité de l’insinuation
doit commencer au moment où cette faculté s’anéantit,
c’est-a-dire, au moment ou 1 héritier du donateur est
pleinement dépouillé, entièrement dessaisi de la propriété
et de la libre disposition des choses données, c’est-à-dire,
au moment du décès de lu n des donateurs;
Comme cette nécessité se trouve fondée alors sur les
ïpêmes motifs que celle qui rend indispensable l’insinua-
�5
( ï )
^
tïon des donations présentes et absolues, c est-a-dire, sur
la crainte que des tiers de bonne foi ne contractent avec
un propriétaire dessaisi par la donation;
Comme enfin les lettres patentes de 1769 n’ont point
dérogé aux lois antérieures, quant à la peine de nullité;
Il s’ensuit, par la plus directe et la plus évidente de
toutes les conséquences, que le défaut d’insinuation dans
les quatre mois du décès , emporte la nullité radicale de
la donation.
•
Si d’ailleurs les lettres patentes de 1769 ne prononcent
pas cette peine de n u llité, c’est qu'il étoit parfaitement
inutile de la rappeler dans une lo i, q u i, n’ayant pour
objet que d’établir une dispense de temps, laissoit d’ail
leurs subsister toutes les dispositions de l’ordonnance
de 1731 , auxquelles le législateur n’entendoit aucune
ment déroger.
E t s i , en parlant des donations entre-vifs et absolues
de la femme au mari ou du mari à la fem m e, la même
loi veut qu’elles continuent d’être assujéties à l’insinuation,
sous peine de nullité, c’est uniquement pour mieux indi
quer la différence des unes et des autres, en ce que les
unes doivent être insinuées dans les quatre mois de leur
date, sous la peine voulue par l’ordonnance de 1 7 3 1 ,
tandis que les autres sont dispensées de cette peine
pendant toute la vie du donateur.
C ’est donc une grande e rre u r que celle des premiers
juges, q u i ont cru voir une différence réelle entre ces
deux dispositions des lettres patentes de 1 7 6 9 , et qui en
ont conclu qu’elles a b r o g e o ie n t, au moins tacitement, la
peine de nullité pour le défaut d’insinuation des dona-
�.
.
( ,i 6 )
.
tîons mutuelles, tandis qu’elles la prononçoient textuel
lement par rapport aux donations présentes et absolues
du mari à la femme ou de la femme au mari. En matière
de formes extrinsèques , on ne connoît point d’abrogation
tacite : elle doit être formelle ou elle n’existe pas. O r ,
non - seulement les lettres patentes n’ont point abrogé
tacitement la peine de nullité prononcée contre les dona
tions mutuelles non insinuées; mais il est de toute évi
dence que le législateur ne pouvoit pas même en avoir
l’intention, sans tomber dans la plus absurde contradiction
avec l u i- m ê m e , puisqu’encore une fois les motifs qui
rendent l’insinuation nécessaire, dans les quatre mois du
décès, sont identiquement les mêmes que ceux qui l’ont
fait introduire pour les donations présentes et absolues.
Quant au dernier motif du jugem ent, qui est encore
fondé sur ce faux principe, que les donations mutuelles
sont de véritables donations à cause de mort , on se
croit dispensé d’y répondre, parce que ce seroit tomber
dans des redites aussi fastidieuses qu’ inutiles ; seulement
on observera que les premiers juges ont perpétuelle
ment confondu les donations entre-vifs qui n’ont d'effet
qu’après la mort du donateur , avec les donations à
cause de m o r t , lorsqu’ils devoient s’attacher au c.iractère essentiel qui les distingue, savoir, l’irrévocabilité
parfaite des premières , et la laeulté conservée par le
donateur jusquVi son dernier soupir, de rév o q u er, anéan
ti r , ou modifier les autres. A v e c cette distinction , ils
auroient évité l’erreur dans laquelle ils sont tom bés, ef
ne seroient pas contrevenu« , comme ils l’ont fa it, aux
dispositions textuelles de l ’ordonnance de 1731.
�' ( *7 )
.
L é soussigné ne doute donc pas un seul instant que
l'appel de madame Chapaveyre ne soit couronné du
succès le plus com plet, et que le tribunal devant lequel
se trouve portée sa réclamation ne rende aux vrais prin
cipes l’hommage que le premier leur a refusé.
D élibéré par le soussigné, ancien jurisconsulte, à P a ris,
ce
5 frimaire
an n .
'
^
PO IR IER .
L E C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a vu la présente
consultation, est également d’avis de la nullité de la
donation mutuelle dont il s’a g i t , par le défaut d’insi
nuation dans les quatre mois du décès de la donatrice.
L ’auteur de la consultation a très-bien développé les
principes de la m atière, et parfaitement accordé la dispo
sition de l’article X X de l’ordonnance de 1731 , et celle
des lettres patentes du 3 juillet 1769, en ce qui concerne
les dons mutuels faits entre mari et femme. L ’ordon
nance de 1731 prononce textuellement la nullité de ces
sortes de donations, faute d’insinuation; celles-ci, comme
tontes les autres, devoient être insinuées dans les 4 mois
de leur date , on , tout au moins pendant la vie du dona
teur : c’étoit ainsi que l’avoit prescrit l’article L X V I I de
ordonnance de M ou lin s; et celle de 1 7 3 1 > dans l’ar
ticle X X V I , s’est référée aux délais de l’insinuation por
tés par les anciennes ordonnances.
Les lettres patentes du 3 juillet 1769 n ont rien changé
y la nécessité de l'insinuation des dons mutuels, ni à la
1
1
�.................................
(
18 ) ..............................
nullité qui devoit résulter du défaut d'insinuation ; elles
n’ont opéré d’autre changement que sur le temps où
cette insinuation devoit se faire, et elles ont déterminé
ce temps, dans les quatre mois du décès du donateur;
mais elles n’ont pas moins laissé subsister la nécessité
de l’insinuation du don mutuel , et sa nullité lorsque
l’insinuation n’a pas été faite dans le délai.
L ’auteur de la consultation donne d’ailleurs des raisons
sensibles de la nécessité de l’insinuation, même dans ce
cas; il est inutile de les répéter.
On ne peut donc qu’applaudir aux principes de la
consultation , et adhérer aux résolutions qui en sont la
conséquence. O n ajoutera seulement , pour démontrer
de plus en plus que les lettres patentes de 1769 ont laissé
subsister la nullité des dons mutuels, faute d’insinuation,
la décision de l’article X X I de l’ordonnance de 1731 , à
l’égard des dons mobiles, augment, contre^augment, etc.
On avoit douté long-temps si les donations faites par
forme de dons mobiles, augm ent, etc. étoient sujettes à
l’ insinuation , lorsqu’ une déclaration du 20 mars 1708
les y assujétit positivement; ce qui paroissoit aussi les y
soumeltre, peine de nullité. iVlais cetle rigueur fut tem
pérée , à leur égard , par une seconde déclaration de 1729 ,
qui les affranchit de la peine de nullilé, et n’ imposa à
l’inobservation de l’insinuation de ces sortes de donations
que les autres peines port ces par les edits et déclarations,
c’est-à-dire , des peines purement bursales.
S ’il eut été dans l’ intention du législateur d'en user de
même à l’égard des dons mutuels, dont le défaut d'in
sinuation, dans le délai prescrit, empurtoit, dans les termes
�( 19 )
précis de l’ordonnance de 1 7 3 1 , la peine de nullité; si,
dit - o n , le législateur eût voulu retrancher cette peine
dans les lettres patentes de 1769 , il n’auroit pas manqué
de le d ir e , comme il l’avoit fait pour les dons m obiles,
augm ent, etc. dans la déclaration du 30 mars 1729.
Ce seroit donc aller contre le texte précis de la l o i ,
et c’en seroit une violation, que de valider le don mutuel
dont il s’agit.
D élibéré à R i o m , le 19 pluviôse an 1 1
;
A N D R A U D .
A. RI O M , de l’imprimerie de L
an drio t
,
Tribunal d ’appel, — An 1 1
seul imprimeur du
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chapaveyre. An 2?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Poirier
Andraud
Subject
The topic of the resource
insinuation
enregistrement
donations entre époux
donations
doctrine
Description
An account of the resource
Consultation pour la dame Chapaveyre, habitante de la ville de Murat, département du Cantal, appelante d'un jugement rendu au tribunal civil de l'arrondissement de Riom, le 9 thermidor an 10 ; contre le citoyen Antoine Teilhard-Duchambon, propriétaire, habitant de ladite ville de Riom, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 2
1790-1802
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0221
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Murat (15138)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53720/BCU_Factums_M0221.jpg
doctrine
donations
donations entre époux
enregistrement
insinuation
-
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47ea75bacd2238721c6f74191cc9620a
PDF Text
Text
R
i
E
P
O
N
I*
S
E
.
MEMOIRE
IMPRIME,etc.
P O U R
Les enfans L E C L E R C - C H A M P M A R T IN ,
demandeurs e n intervention et subrogation, et
subsidiairement appelans ;
i»
C O N T R E
É tien n e
D U S S O N - P O I S S O N défendeur
et
intimé.
L e citoyen Dusson retiendra-t-il, pour 5 i?6oo francs,
des Liens qui ; au temps de leur adjudication, en l’an 9 ,
v aloient plus de 100,000 francs? les retiendra - t - il au
A
�( 2)
'
.
,
détrim ent de nombre de créanciers auxquels il est dû
entour 5o,ooo francs, et q u i, dans le sens de la maintenue
de cette adjudication, ne seroient pas entièrement payés?
lie citoyen Dusson réussira-t-il à rendre notre père insol
v a b le , tandis que le vrai prix de ces biens payeroit et
au delà tous les créanciers ? L e citoyen Dusson et l’homme
a u x algarades rép o n d ro n t, avec une extrême d u re té ,
oui ; et nous répliquerons, non. N otre prétention, tout
équitable, toute légitim e qu’elle est, fait leur désespoir;
ils s’en irrite n t, et crient au fie l, à la calom nie, à l’ab
surdité, au déraisonnement, etc. comme si l’on n’étoit
pas bien convaincu de cette grande v érité , que, soit qu’ils
s’abaissent bien aisém ent, soit qu’ils s’élèvent pénible
m en t, ils sont incapables d’offenser personne. Q ui les
connoîtra leur rendra cette bonne justice : on leur doit
aussi celle de laisser dans leurs mains le rameau d’or ; il
y fructifie si bien !
”
1
Nous ne rendrons pas ici compte des faits de la cause ;
nous sommes forcés de le renvoyer à la plaidoierie. L e
citoyen Dusson n’y perdra rien : alors on n’oubliera aucune
des circonstances propres à prouver qu’il ne se présente
pas aussi favorablement qu’il le publie.
�i °. L e s enfans Cham pm artin peuvent-ils intervenir en
la cause de Tappel de leur père ?
.
2°. P e u v e n t- ils suivre soji appel du 9 p ra iria l an 9 ,
nonobstant le traité du 10 m essidor an g ?
Intervention des enfans Cham pm artin.
Il p aro ît constant, dans la cause, que les enfans C ham p
martin ont qualité suffisante pour intervenir. i ° . Ils sont
tout au moins créanciers inscrits contre leur père : cette
qualité est établie par la substitution du 18 novem bre 17 7 9,
et par la quittance donnée par le citoyen Dusson le
3 janvier 1783; enfin, cette qualité est bien form ellem ent
reconnue par le citoyen Dusson. Ce n’est pas le m oment
d’examiner de quelle quotité est la créance. Ils sont créan
ciers d’ une somme quelcon que, et cela su ffit, dans les
circonstances, pour constituer leur qualité.
Ce n’est pas plus le m oment de discuter la question de
savoir si les enfans Champmarli,n sont ou non copropriétaii’es des biens acquis par le contrat du 22 octobre 1782;
s’il s’en agissoit aujourd’h u i, il sci'oit facile de dcm ontrer
au citoyen Dusson qu’il est non recevable à en élever la
d ifficulté, parce qu’il a concouru à la vente du 2z oc-
4. 2,
�( 4 )
<
tobre 1782; parce que le citoyen de Champmartin père
l’a approuvée en faits et en écrits authentiques.
■
M ais ce n’en est point ici le lieu. I,es enfans Champmartin ne peuvent se pourvoir que par action en reven
dication, en conform ité de la loi du 11 brum aire an 7 ;
et l’on accorde -que cette demande ne peut être portée
d’abord qu’au tribunal civil de G a n n a t, sauf l ’appel .111
doit en être de même de leur demande en restitution contré
leur renonciation, du 12 fructidor an 9 , au bénéfice de
~"iir*-vente du 22 octobre 1782 ; elle est accessoire à la reven• $icyiion,>-.Le tout est sujet aux deux degrés de juridiction.
* .*■
attendant, les enfans Champmartin peuvent
toujours ’être considérés au -moins com m e créanciers.
L a question de savoir si certains des enfans Champttiartin, n’étant ni nés n i conçus au temps du testament
du sieur-Lecïerc-de-Beauvoisin, du 18 novem bre 1779?
doivent participer à la substitution, est sans intérêt p o u r
le .citoyen-Dusson ; parce que si les non nés ni conçus n’y
participoicnt p o in t, le tout appartiendroit aux nés ou
conçus, et le citoyen Dusson n’y gagneroit rjen. Les nés ou
conçus auroient droit pour le tou t; et si aujourd’hui tous
les enfans Champmartin sont d’accord entre eux , il n’a pas
qualité pour s’en plaindre.
20. Les enfans Cham pm artin ont figuré en cause prin
cipale : à leur é g a rd , le prem ier degré de juridiction a
été stibi ; ils ont donc pu demander d’in terv en ir, potir
le u rs’ intérêts , en caisse 'd’apjjel ? dans une aiiaire où ils
ont figuré en prem ière instance.
M a t s y avoit-il instance en tre-le citoyen Cham p.maviiji
(»t i c citoyen PusjüîU Î
'
�......................................
( 0 )
.
' "L e citoyen Dusson soutient la négative ; i ° . parce que,
dit-il,"(contre sa science, et profitant sans doute de l’igno
rance des enfans Gliampmartin sur les fa its ), l’appel du
citoyen de Cliam pm artin père étoit sim ple, et que
celui-ci n’avoit pas intim é le citoyen Dusson*, ( i l nous
-renvoie à l ’article X X V I I I du titre X I de l’ordonnance
de 1 6 6 7 ) ;- 2 ° . parce q u e, par le traité du 10 messidor
arf 9 , le citoyen de Cliampmartin s’est départi de son
appel.
Ici l’on répond au prem ier moyen seulem ent, et l ’on
renvoie la réfutation
du second au §. su iv a n t, parce
qu’il s’y rapporte plus particulièrem ent.
L e moyen du- citoyen D usson, contre l’ intervention,
m anque par le fait. En e ffe t, il est bien vrai que le
citoyen de Chiim pm avtin lî’a pas in tim é le citoyen
Dusson; mais celui-ci a anticipé le citoyen de C ham pm artin, par exploit du 12 prairial an* 9 ; il l ’a assigné
pour procéder sur l’a p p el, pour vo ir confirmer la sen
tence du 8 floréal an 9 : s’il est certain que les tribunaux
ne sont saisis des affaires que par les assignations don
nées devant e u x , ils le sont, très-certainem ent, aussitôt
l ’assignation donnée. A lo rs les_tierces parties intéressées
peuvent intervenir , et prendre les conclusions utiles
a leur position. D e là une conséquence irré sistib le , que
c’est le conseil du citoyen Dusson q ui, après un travail
p é n ib le , a accouché de l’absurdité q u ’il nous impute.
- ,»
;
t .* ., * . ’ | ■ . . • §.
o» »>I I . , : j j /
.¡¿ippel du .g p ra iria l an 9.
-,
•
. ,
Ce p oin t d épen d de la ‘va lid ité du traité du 10 mes-
U
/
•pi1
$
�(6 )
, .
sidor an g. Dans les termes où en étoit le citoyen de
Cham pm artin, a-t-il pu le passer valablement à l’insu,
sans le concours des créanciers inscrits ?
A cet égard , nous avons dans le digeste des lois faites
pour la cause, au titre X I , quœ in fr a u d , cr e d .fa c ta
.
s u n t, UT RESTITUANTUK, liv. 42.
>
Dans ce titre sont deux édits du p réteu r, et des dé
cisions des jurisconsultes romains , qui font loi en
France.
L e prem ier édit porte : « Quœ fr a u d a tio n is causa
« gesta erunt cum eo q u ifr a u d e m non ig n o r a v e r itd e
« his cu ra to ri bon oru m , vel ei c u i de ea re actionem
« dare opportebit, intrii annum quo experiundi potesc< tas f u e r i t , actionem dabo : idque etiam adçersüs
t< ipsum q u i fra u d em f e c i t , serçabo. »
.
Sur ces m ots, quœ fr a u d a tio n is causa gesta e r u n t,
V u lp ie n d it , n °. 2 : « H œ c verba generalia s u n t, et
« c o n t i n e n t in se om nem omninà in fr a u d e m f a c t a m ,
« vel alienationem , vel quem cw nque contractant. »
E n la loi 3 , V u lp ien d it , §. I : Gesta fra u d a tio n is
ca u sâ accipere debem us, non solîim ea quœ contrahens
gesserit a liq u is , v e r u m e t i a m s i e o i i t È d a t a o r E R A
ad
JUDICIUM NON ADFUIT , VEL
LITEM MORI
PA
TI AT UR. (H parle du débiteur). E t § . I l , E t q u i a l i QUID FECIT UT DESINAT HABERE QUOD HABET, ad
hoc edictum perlm et.
.
.
D e là il suit , i 9. que tous les actes passés entre un
débiteur et celui qui n ’ignoroit pas la fraude, au détri
ment des créanciers, donnent lieu à l’action révocatoire,
et que cette action dure un a u , à com pter de' l’instant
�C7 )
.
^
où les créanciers ont pu a g ir , c’est-ù-dire , du jour où
ils ont découvert ces actes, à die detectœ J ’r audis ;
2°. qu’il y a fraude contre les créanciers, toutes les fois
que le débiteur ne se défend pas, lorsqu’il Je peut, sur
une demande qui lui est formée. S i ad ju d iciu m non
a d fu it, ì>el litem m o ri p a tia tu r, gesta fr a u d ottoni s
causa accipere debemus. Cela sétend jusqu’à un traité
sur p ro cès, par ce que dit A ccurse : Ciim p otuit litem
'con testari, et non fe c it etc. quod non placet \ parce qu’il
ne peut pas faire qu’il n’ait plus ce qu’il avoit aupara
v a n t : desinai habere quod h a b etj p u tii, ajoute A ccu rse,
patiendo se ju d icio v in c i, vel alias in jr a u d e m obli
gando se.
.
' Dans la lo i 10 , est le second édit du préteur ; il porte:
A I T p r æ t o r : quce L u c iu s T ìtìu s ( le civi^iexiv^fraudandi
*( ses créanciers) causâ^ sciente te ( l’accepteur) , in bonis
q uibus de ea re agitur f e c i t '; ea illi (au x créanciers),
s i eo nom ine quo de agitur, actio e i e x ed icto 'm eo
competere esse-ve o p ortet, e i se non plus quàm annus
e s t , cum de ea re qua de agitur experiun di potestas
o s t , RESTITUAS. I n t E R D U M CAUSA COGNITA , ET SI
SCIENTIA NON S I T , IN FACTUM ACTIONEM PERMITTAM.
«
«
'«
«
«
U lpien d i t , n°. 2 : « Q uod a it præ tor s c i e n t e ( et
non pas SCIENTER, comme l’a fait imprim er le c o n seil Dusson ) TE , sic a ccip im u s, te conscio et J ra u d en i
participante : non enim s i sim plicitçr scio ilium ereditores ha bere, hoc sufficit ad contendendurn te n e r i,
cutn in fa c tu m actione ; sed si particeps fr a u d is est. »
E t n°. 3 : « S i quis particeps quidem fr a u d is non f u i t ,
« verum tam en vendente debitore testato conventus à
�«
«
-K
«
«
cc
( 8 )
crcditorìbus , ne em eret : an infa c tu m actione teneatur s i co m p a ra ie n t ? et magi s est ut teneri debeat.
N uyi enim caret f r a u d e , q u i consenties testato perseverat. »
v
I,a loi 1 5 , invoquée .par le citoyen D ü sson , porte : « S i
qais cùni haberet T itium crèditorem et\sciret se sof
vendo n o n e s s e hbertates dederit testamento : deindè
dim ïsso T itio , posteà Sem pronium creditorem habere
cœpei'it • et eodem testamento manente decesserit :
hbertates datœ ratœ esse deben t, etsi hœreditas sol
s’endo non sit: qm a Hbertates ut rescindanturi u t ;ru m QUE IN EORÜMDEM.rERSOKAM EXIGIMUS, ET GONSILIUM ET EVENTUM. »
.
.
Dans le cas p ro p o sé , Sempronius-n’a^pas'à se plaindre,
.
«
«
«
■
«
■
«
ie
■
.
.
parce qu’au temps où il-est devenu créancier, libertates
datœ erant. L a chose étant faite avant /qu’il y<eût, inté
r ê t , il n’a pas été trom pé. Titius'.seul auroit eu rqualité
pour réclam er, et il a-été satisfait.
<. •
A
..
• Il en seroit autrem ent, si .l’argent prêté»par Sempro,nius avoit seryi à payer T itiu s , parce-que c e lu i- c i en
auroit pris la plncc. Aussi la loi 16 dit - elle -, nisùpripreç
pecunia postenorum dilu issi probentur. A u ssi, Bartole
d it- il, « Q u i scit se habere creditores, et fa cu lta tes suas
n on su fficere, videtur a l ion arenitif r a udem , credito ru m .
.L'insolvable qui v e n d , est jugé vendre in fra u d e m creditorum . D e là il suit tju e, si Sempronius avoit rem
place TiLius, le jurisconsulte Julianus auroit dit qu’ il y
¿1voit consilium et eventus ; et d è s - lo r s , lieu à l'action
,révocatoirc : cela nous paroît h o rs'd e doute, ,
. Dans l’espèce, le citoyen Dusso.11 prétend pue le citoyen
de
�(S Ü
,
dë Champmartin est insolvable : cela seroit v r a i, si l ’ad
judication étoit m aintenue, puisqu’il y a aux hypothèques
pour plus de 80,000 fr. de créances inscrites, et qu’ il y
auroit seulement 5 i , 6 oo fr. à distribuer. Ce seroit donc
.
le cas de dire avec Bartole, i ° . que le citoyen de Cham pmartin scit se habere creditores , et J'acultates suas non
su fficere’, 20. que le citoyen Dusson le savoit tout aussi
b ie n , puisque l’état des créances inscrites qu’il a retiré
du bureau des h yp o th èq u es, puisque cet é t a t , disonsnous , comparé au p rix de l ’adjudication , dém ontre l’in
solvabilité ; 30. que dans l ’acte du 10 messidor an 9 ,
le citoyen Cham pm artin et le citoyen Dusson videntur
y a cisci in fr a u d e n t creditorum . L ’adjudication étoit à
v il p rix ; les créanciers derniers en h y p o th èq u e, tels
que les enfans C ham pm artin, n’avoient d’espoir que dans
la valeur réelle. Sans y appeler ces créan ciers, on fait
le traité ; on sacrifie ce qui constitue leurs espérances ; 011
leur fait un tort qui seroit irréparable , si le citoyen
D usson réussissoit.
•
.
D ira-t-il qu’il ne s’agissoit pas ici d’aliénation? i° . Il
s’agissoit de l’approbation d’une aliénation, q u i, quoique
ju d iciaire, étoit funeste aux créanciers inscrits, parce
qu’il y a vilité dans le prix. 20. L e jurisconsulte U lpien
comprend dans la proscription quem cunujue coniractum .
C ’est ici le lieu de dire que Champmartin p erc, ad
ju d iciu m non a d fuit ,* litem n iori passas est. Il avoit
appelé des deux sentences du 8 floréal an 9 ; il étoit assigné
sur son appel. L e tribunal d’appel étoit saisi de l’afia ire:
il 11’avoit qu’à poursuivre et à faire ju g e r -, tout auroit
été- annuité. N e l’ayant point f a it, scs créanciers ont le
B
�:
l
.
.
C IO )
droit de reviser sa conduite et celle du citoyen Dusson.
:
Ils ont droit de faire révoqu er ce qui a été fait à leur
*
^
^
**
Q
^
*
préjudice.
C ’est encore ici le lieu d’appliquer le n°. 3 d elà lo i 10 ,
au tit. quœ in fr a a d . cred. L a position du cit. Dusson
étoit telle, qu’il ne pouvoit pas traiter valablem ent avec
le saisi, à l’insu et sans le concours des autres créanciers
inscrits; il étoit consent us ¿1 cred itoribu s, ne erneret y
c’est-à-dire, ne pacisceretur.
'
E n e ffe t, en expropriation forcée , il en est aujour
d’hui comme autrefois dans les saisies - réelles. i° . L e
créancier poursuivant ne saisit pas et ne poursuit pas
pou r lui seulem ent, mais bien pour la généralité des
V
.
créanciers inscrits.
r
L e citoyen Dusson pose lu i-m êm e
vce prin cipe, pages i 5 et 21 de son m ém oire im prim é.
'tlA
! .
t
'J
-f-
2° ‘ Pendant les poursuites, le saisi est en état d’interdic.j.*on a])soj ue ^ respectivem ent à la propriété des objets
/m 'Jx/JJvî.
saisis ; il en est seulement dépositaire de justice; il ne peut
pas en disposer directement ni indirectement.
En effet, l’art. V III de la deuxièm e loi du 11 brum aire
an 7 porte : « Pendant toute la durée des poursuites, le
« débiteur reste en possession, comme séquestre et dé« p ositaire de ju s tic e , sans préjudice néanmoins du droit
« q u ’ont les créanciers de faire procédera la saisie m obi« lia ire des fru its, conform ém ent aux lo is, etc. »
« 11 ne p e u t , à compte?' de Vinscription prescrite
« p a r ¡'art. V I , de la notification des procès verbaux
« d'affiches , disposer de la propriété , etc, »
Celte interdiction est contre le saisi, en laveur de la
généralité des créanciers inscrits : ce qui le p ro u v e , c’est
�( 11 )
,
. .
que la loi constitue le saisi seulement dépositaire de jus- î
tice; ce qui le p ro u v e , c’est que l ’interdiction date seu
lement de la notification des affiches, tant aux saisis qu’aux
créanciërsTnscnts.'' .......
“
i Q. D e ces principes il suit que;, la poursuite étant
, ,
-i
,
.
,
.
„ ,
commune a tous les créanciers, le poursuivant ne peut
^
>
1
r
faire rien qui préjudicie aux autres, et que tous traités
doivent être passés aussi avec e u x , à peine de n u llité;
parce q u e , sans cela, ces traités sont à leur égard res
inter alios acta.
J* /'vrv/i'tutA'ajZf
, *
,
j'*‘■
'i'U-J itfV
'
,
f
3 °. D e ces principes il suit q u e , les biens saisis étant
sous la main de la justice, ils le sont à la conservation
des intérêts de tous les créanciers ; il n’y a que la justice
«jui puisse en disposer. I l s’ensuit que le saisi ne peut
les alién er , sans le u r concours ; cela est incontestable
ment v r a i, même jusqu’au tribunal d’a p p e l , lorsque l’une
des parties a appelé du jugement d’adjudication. Jusqu’à
ce que le tribunal supérieur ait prononcé , les choses de
m eurent dans le même état; c’est-à-dire , en état de dépôt
de justice, en état d’interdiction d’aliéner par le saisi,
*
ni d’approuver rien de ce qui serçit aliénation, quem cion que coiitractum . L ’adjudicat-fta^est, respectivement
aux créanciers, réellem ent conventus ne erneret, id est,
ne pacisceretur cuni debitorc.
S’il en étoit autrem ent, il en résultcroit des inconvéniens énormes. Ce seroit ouvrir à la fraude une porte
inconnue jusqu’à la loi du n brum aire an 7. U n créancier et un saisi, quiseroient de concert, pourroient frus
trer impunément les autres créanciers. L e créancier saisiroit les bien s, et feroit à dessein des nullités dans la
B
s
/
[
�( procéd u re: le saisi les opposerait; les créanciers inscrils
1 ne diroient m o t, parce qu’ils verroient le saisi faire valoir
les moyens : des ju ges, peu versés dans ces m atières, J es
j rejetteroient : les enchérisseurs, épouvantés par la dis—
/ cu ssion , n’oseraient pas faire une mise. L ’adjudication
( auroit lie u ; le poursuivant aclieteroit à vil p r ix , parce
j q u’alors il n’auroit pas de concurrens : la partie saisie
j appellerait et transigerait ensuite ; s’il n’y avoit pas moyen
} de revenir co n tre, l’exécution de la loi du 11 brum aire
) serait donc un coupe-gorge pour les créanciers.
.
Dira-t-on que ces créanciers, appelés par la notifica
tion de l’afficlie, peuvent paraître à l’adjudication, pro
poser eux-mêmes les moyens de n u llité, et appeler du
j
jugem ent, s’il leur paraît m auvais? O u i, sans doute ; ils
èn ont le d r o it, la loi le leur donne : m a is, ils se ¡Drésentent ; ils voient le saisi opposer les moyens qu’ils op
poseraient eux-mêmes ; ils jugent qu’ils n’ont rien à y
ajouter ; ils croient que tout se passe avec sincérité ; ils
croient dès-lors d evoir se taire. Des créanciers ne deman
dent que d’être payés; ordinairem ent ils sont très-avares
jjou r les frais ; ils tyÿÿgnent justement d’avancer de l’ar
gent : le saisi le iaiT**rFaudra-t-il qu’ils m ultiplient les
êtres? quand le saisi fait en apparence tout ce qu’il fa u t,
sont-ils obligés d’aller jusqu’au superflu? il ne serait pas
raisonnable de le prelcndre. Faudra-t-il qu’ils soient en
suite dupes de leur bonne "foi? iaudra-t-il qu’ ils soient
ainsi volés im punément par deux hommes m alhonnêtes?
L a raison se révolte contre cette idée.
E n fin , rappelons ce qui se passe ordinairement dans
toutes les ven tes, m êm e volontaires. U n particulier an-
�( 13 )
_
nonce qu’il veut se défaire de tels biens : celui à qui il
plaît le plus , le décrie et le fait décrier ; il répand et
fait répandre qu’il n’y a pas sûreté : c’en est assez pour
éloigner quelques gens sages et tim ides, parce qu’ils veu
lent acquérir pour jouir paisiblement.
S’il s’agit d’une vente judiciaire, les enchérisseurs peu
vent arriver en foule. Chacun a fait, préalablem ent, son
calcul particulier sur la qualité et la valeur des b ie n s,
et a , par dessus tou t, com pté sur la solidité attachée à
la form e de la vente. Des moyens de nullités sont dé
veloppés par le saisi. Sur trois juges de prem ière ins
tance, deux ne sont pas en état d’apprécier ces m oyens-,
ils les rejettent. Il est passé outre à l ’adjudication. M ais
le mal est f a it, il est sans rem ède pour le moment. I<a
confiance des assistans sages a fui ; il n’est pas possible
de la l'am ener, parce qu’ils ne veulent pas acheter un
procès. L e bien saisi devient nécessairement la proie d’un
avide poursuivant ; de là extrêm e vilité dans le p r i x ,
et dès-lors anéantissement infructueux du gage des créan
ciers. C eux-ci sont horriblem ent dupes de leur bonne foi :
ils le seroient bien davantage, si le saisi, ayant appelé
du ju gem en t, pou voit ensuite, -après avoir été séduit
par le saisissant devenu adjudicataire, p o u v o it, disonsnous , transiger avec lui sans le concours des créanciers
inscrits.
L ’on peut et l’on doit parer a cet inconvénient bien
vivem ent senti ; l’on peut y parer par un moyen v ra i,
parce qu’ il est dans la loi et dans la raison. Il huit dire
alors que l’appel interjeté par le saisi ne lui appartient
p lu s , mais aux créanciers inscrits j il faut dire alors qu’il
�( i4 )
ne peut plus s’en désister sans leur participation. D é p o
sitaire de justice dès l’instant de la notification de l’alliche
aux créanciers in s c rits , dépositaire de justice envers la
généralité de ces créanciers, ce dépôt doit continuer
jusqu’à cc que les juges supérieurs ont prononcé sur son
appel. Il peut et doit faire tout ce qui convient pour la
conservation du d ép ô t, et rien pour le détruire; s’il fait
Quelque chose de nuisible , les créanciers ont le droit
d’en demander la révo catio n .—
D e tout ce que nous venons de d ir e , il résulte que les
enfans C h am p m artin , comme créanciers légitim es et
inscrits, sont fondés à révoquer le traité du 10 messidor
an 9 , à suivre l ’appel de leur p ère, du 9 prairial an 9 ,
et à faire valo ir les moyens de nullité qu’il a proposés
devant les premiers juges. Ces moyens se lient à ceux
qu’ils ont de leur ch ef; nous les présenterons en même
temps.
C H A P I T R E
II.
¿îp p cl incident des enfans Cham pm artin ^de suo.
I,e citoyen Dusson le soutient, i ° . irrégu lier; 20. non
recevab le, comme fait hors du délai; 30. non recevable,
parce q u e , d it-il, les enfans Cham pm arlin sont sans
qualité ,
cojmhc
sans in tér êts, pour le soutenir.
§. I.
Les enfans Cham pm artin o n t , par leur requête signi
fiée d’avoué ù avo u é, le 26 th erm id o r d ern ier, demandé
�_ ( 15 )
acte de ce que subsidiairement ils in terjetten t, de leur
c h e f , appel de la sentence.d’adjudication , du 8 floréal
an 9 , ensemble, de ce qui a précédé et suivi.
.
i? . Cet appel est régulier , parce que le citoyen
D evèze, constitué avoué par le citoyen D usson, l’est pour
toutes les dépendances de l’affaire. Cet appel çst régulier,
parce que , dans la règle et l’usage, il auroit pu être in
terjeté, m ême sur le barreau, lors de la plaidoirie de la
cause. A u surplus, voyez l’art. X X I I I de l’ordonnance
de 1667 , qui autorise les appels incidens, par requ ête de
procureur à procureur.
20. Par exploit du 6 frim aire d e rn ie r, les enfans
Chainpm artin ont, en tant que de besoin, et sans aucune
approbation préjud iciable, réitéré leur appel à dom icile,
et assigné le citoyen Dusson en adjudication de leurs
conclusions. Ils y ont repris ces conclusions.
§• II.
L e citoyen Dusson soutient l’appel n o n -reccv a b le,
parce que, d it-il, le jugement d’adjudication a été signifié
au dom icile du citoyen Cliam pm artin p è re, le 12 prairial
an 9 , et que l’appel des enfans 11’est venu qu’en thermi
dor an 1 0 , et la réitération en frim aire an 11.
■
> Cette prétention est une erreur. L a signification d’un
jugement d’adjudication à la partie saisie ne fait pas courir
le délai des trois m ois, prescrit par l’article X I V du titre
V de la loi du 24 août 1790 > snv l’ordre judiciaire.
E n effet, cette loi dit qu-’aiicun appel ne pourra être
signifié, APRÈS L’EXPIRATION DE TROIS MOIS, A COMP
TEE DE L A SIGNIFICATION DU JUGEMENT (coûtl'adic-
�( i6 )
t o il ’e ) FAITE A PERSONNE OU DOMICILE. E lle d i t q u e
ccs deux termes sont de rigueur, et leur inobserva
tion emportera la déchéance de l'appel.
i ° . O diosa restringenda et fa vores am pliandi. Ici
il s’agit de matière rigoureuse; il s’agit d’une prescription
très-courte. Si donc il y avoit du doute , il faudroit
l ’expliquer en faveur de celui auquel on oppose la fin
de non recevoir.
2°. Ici point de doute : la lo i est claire ; elle porte en
principe général que , pou r faire courir le délai des
trois mois de l’appel, il faut une signification du juge
m ent (contradictoire) à personne ou dom icile. Sans cette
signification, point de cours du délai. Ce délai d o r t , et
il dureroit trente ans, s’il n’y avoit point de signification
aux parties intéressées.
N e perdons pas de vue que cette lo i d it, en termes
précis, « signification fa ite ¿1 personne ou dom icile. »
Ces termes signifient bien fo rt, bien sacramentellement,
que la signification doit être faite individuellem ent à
chacune des parLies intéressées; q u e'la signification doit
être faite à la personne ou au vrai dom icile de la partie
intéressée.
Il ne suffiroit même pas d’ une signification à un do
m icile élu.
E n effet , l ’arliclc X I V
de la loi du 24
» août 1790, n’a lait que îaccouicn le délai accorde par
l’ordonnance de 16 6 7 , titre X X V I I , article X V 1L Cet
article de l’ordonnance ne donnoit que d ix ans pour
l’appel, à com pter de la signification de la sentence.
O r , M . Jousse dit : « C ette signification doit être laite
« au vrai dom icile de la p a rtiej c a r , si elle avoit éLé
« faite
�C 17 )
t
« faite au dom icile du procureur , ou à un dom icile
« élu par un acte passé entre les parties, elle ne pou r« roit opérer la fin de non recevoir qu’après trente ans. »
S’il en étoit ainsi pour une iin de non recevoir après
dix ans, à j o r t i o r i , doit-on être plus rigoriste sur une
fin de non recevoir après trois mois.
3 °.L a signification faite au citoyen Cham pm artin p è re ,
le 12 prairial an 9 , n’a pas fait courir le délai des
trois mois envers les enfans, comme créanciers inscrits.
E n e ffe t, la partie saisie et ses créanciers inscrits ne
sont pas une seule et même personne ; ils sont au con
traire très-opposes entre eux : ainsi la signification faite
par le poursuivant ou l’adjudicataire au saisi, ne sa u ro it,
sous aucun ra p p o rt, être considéi’ée comme fuite aux
créanciers.
Il y a plus : une signification faite à cinq cohéritiers
sur s ix , ne seroit bonne que contre les cin q; la fin de
non recevoir des trois mois n ’auroit pas lieu contre le
six ièm e, suivant la règle nom ina ipso ju re dividuntur.
4°. 1 /article X X II I de la loi du 11 brum aire an y ,
donne au saisi et aux créanciers la voie de l ’a p p el, tant
contre le jugement qui déchoit des moyens de n u llité, que
contre celui d’adjudication. M ais le saisi et les créanciers
nejio n t pas liés entr’eux ; le saisi peut appeler sans les
créanciers ? et vice ve r s a , ceux-ci le peuvent sans lésai si.
Il n’y a entr’eux de rapport que celui que , en cas de
reform ation du jugem ent, le bénéfice en reflue égale
ment sur le saisi et sur les créanciers, en cas de vilité
du p rix de l’adjudication.
Cela posé ; le saisi ayant la faculté d’appeler sans les
G
�( 18 )
_
créanciers, et ceux-ci le pouvant également sans le saisi,
il s’ensuit que lorsque l’on veut acquérir la fin de non
re ce v o ir, lorsque l ’on veut donner à l ’adjudication l’au
torité de la chose ju g ée, il faut la signifier à toutes les
parties intéressées : n’en om ettcroit-on qu’u n e , elle seule
peut appeler dans les trente ans.
V o u d ro it-o n considérer le saisi comme le procureur
des créanciers inscrits, contre le poursuivant et adjudi
cataire? M a is, suivant Jousse, une signification, faite au
dom icile 'du procureur-,--même-à un-dom icile é lu , ne faisoit'pa? -courir--la- fin..de.non recevoir , des d ix ans : mais
la loi de 1790 exige une signification f a i t e à personne
ou dom icile.
L es m ots, signification f a i t e â personne ou dom icile,
sont de la même rigueur que le délai de trois m ois; en
m atière rigoureuse , on ne peut rem plir par équipol
lence ce que commande une loi.
A in si, la signification, faite par le poursuivant, ne
sauroit jamais être considérée comme faite ni explicite
ment ni implicitement par les créanciers inscrits.
E lle ne sauroit l’être explicitem ent, parce q u e, si le
poursuivant s’avisoit de les y com pren dre, ils pourroient
le désavouer.
^
_
E lle ne sauroit l’etre implicitement , parce que le pour
suivant 11’est point le mandataire des créanciers inscrits.
Ils ne l’ont chargé de rien ; ils ne l’ont pas chargé de
faire vendre. S’ils avoienl voulu en venir là , ils l ’auroient fait eux-m êm es, et m ieux que le citoyen D usson,
et sans détours. L eu r inscription aux hypothèques n’a
d’autre objet que de veiller à leurs intérêts, de les infor-
�( i9 )
mer de ce qui se passe , et de les mettre à même de
s’e x p liq u e r, suivant les cas.
P ar ces raisons, c’est une grande erreur , de la p aît du
cit. Dusson, que de prétendre que le poursuivant rep iesente la généralité des créanciers inscrits ; cela n’étoit pas
vrai avant la révo lu tio n , et cela ne l’est pas plus depuis
la loi du i i brum aire an y.
A v a n t la ré v o lu tio n , dans les discussions sur saisies
réelles , la masse des créanciers n’ étoit point représentée
par le poursuivant : cliacun y discutoit ses m terets; il n y
avoit de réunion entr’e u x , que lorsqu’il s’agissoit de choses
communes à tous ; et alors ils figuroient dans la personne
du procureur ancien des opposans.
Depuis la lo i du n b ru m aire, les créanciers inscrits
sont contre le poursuivant. C elu i-ci e s t, p ar l’art. V I de
cette l o i , obligé de les appeler à la vente ; eux sont
autorisés, par l’art. X X I I I , à proposer des nullités contre
la procédure : s’ils ne sont pas conTens clü'jugement inter
venu sur leurs m oyens, ils peuvent én interjeter appel.
Dans cette p o sitio n , il est ridicule de prétendre que
la signification, faite par le poursuivant ou l’adjudicataire,
est censée faite également au nom des créanciers ins
crits, et qu’elle suilit pour faire courir le délai de l’appel.
Ce ridicule est d’autant plus g ra n d , que ccseroit mettre
le pour et le contre dans la même m ain; cc seroit icndre
impossible l’exécution de l’article X X 11I de la loi du 11
brum aire.
E n effet, cet art. porte: « L e saisi NI LES CRÉANCIERS
« ne peuvent exciper contre Vadjudicataire d'aucun
« moyen de n u llité, ou om ission de fo r m a lité s , dans
C a
'
�« les a c te s de la p oursuite, q u ’a u t a n t q u ’i l s l e s a u
« R.OIENT PROPOSÉS àV'audience oiiTadjudication aura
« eu lie u , s a u f l ’a p p e l t a n t d u j u g e m e n t i n t e r
« VENU A CET É G A R D , QUE DE CELUI D’ADJUDICATION,
k s i Ton opposoit à ce dernier quelque nullité ou Vomis-
« s ion de q u elq u u n e des form a lités prescrites. »
A in s i, point de doute que les créanciers peuvent ap
peler. O r , contre qui le peuvent-ils, si leurs moyens de
nullité sont rejetés, ou si le jugement d’adjudication est
v ic ie u x ? contre celui qui a fait rendre ces jugem ens,
c’est-à-dire, contre le poursuivant. Il ne faut donc pas
accorder que la signification qu’il fait au saisi, est cen
sée faite au nom de tous les créanciers in scrits, parce
qu’alors la voie de l ’appel seroit impossible ; parce que
ce poursuivant auroit p a r là un moyen trop facile, pour
se dérober aux vices de sa procédure.
. '
5 °. Enfin , les enfans Cham pm artin n’ont pas été ouïs
dans le jugem ent d’adjudication du 8 floréal an 9 ; il est
par défaut à le u r é g a r d , ~ëfTT~ne leur a pas été encore
signifié ; ain si, le délai de l’appel n’a pas encore com
m encé de courir.
E n vain le citoyen Dusson dit-il , qu’il représenloit
la masse des créanciers, et que d è s -lo r s il est réputé
contradictoire avec tous.
'
Ceci n’est qu’ une subtilité. i ° . Nous avons prouvé que
le poursuivant ne représenle pas les créanciers, puisqu’il
est leur partie adverse , et q u ’ils peuvent lui opposer des
moyens de n u llité, ap p eler, etc. 2.0 A u palais, nous ne
connoissons que deux espèces de jugem ens, les contra
dictoires, cl ceux, par défaut : dans les contradictoires,
�il est fait mention que telles et telles-parties ont ete ouies
par tel leur avoué ; lorsque cette mention n’y est p oin t,
le jugement est par défaut. I c i , pas de mention que les
enfans Cliam pm artin ont été ouïs : le jugement est donc
par défaut : ce fait répond à tout ce que dit le citoyen
Dusson.
• D ira-t-on e n c o re , comme le citoyen D u sson , que s’il
en était a utrem en t, les juge?nens cCadjudication ne trans
m e tta ie n t qu’u'nê propriété précaire pendant trente ans.
M ais .pour éviter le précaire , vous avez un moyeu
facile ; faites signifier aux créanciers inscrits.
M ais les choses ne peuvent pas être-en fluctuation
pendant trente ans. Introduisez Tordre du p rix de l’ad
judication ; demandez que les créanciers produisent leurs
titres : vous en avez le droit par l ’art. X X X I I de la loi
du 11 brumaire. S’ ils paraissent et demandent collocalion ,
ils acquiescent à l’adjudication-, et vous êtes tranquille :
si.certains ne paroissent pas, l’ordre est fait et h om ologué;
les créanciers colloqués sont p a y é s, les défaillons sont
d éch us, e t vous êtes également tranquille.
D ’apres cela , nous voyons bien clairem eut que le
citoyen Dusson *a créé des monstres pour se rendre un
peu reeommandable. M a is , dans le fa it, son véritable
objet est de couvrir les fautes énormes qu’il a faites, h
dessein peut-être , dans sa procédure en expropriation ,
pour éloigner les enchérisseurs, et avoir pour 5 i , 600 ir. «•
des biens que tous les conuoisscurs du canton portent ù
plus de 100,000 fr.
- Dans son m ém o ire, le citoyen Dusson a mis en pro-*''*
position .que les enfans Cliampmartin sont sans qualité ,
�I
( 22 )
com m e sans in té r ê t, pour soutenir leur appel. Nous
avons bien trouve et débattu ce qu’il a écrit sur le défaut
de qiiiilité , mais il n’a dit mot sur le sans intérêt : pour
quoi ? c’est là sans doute le sujet de sa colère , de son
d ésesp o ir , et de ses ruades contre tous ceux qui prennent
la défense des m alheureux enfans Chainpm artin.
E h quoi ! les enfans Chainpm artin n’ ont pas d’intérêt
à soutenir leur appel ! et si l’adjudication est maintenue
ils n’ont r ie n , et le citoyen Dusson bénéficie de plus
de 50,000 fr. et le citoyen Dusson insulte à leur misère!
L ’homme a u x algarades ose lu i prêter assistance pour
cela : le cœur s’en ir r ite , la raison s’en r é v o lte , et la jus
tice en vengera nos infortunés cliens!
'
r
t*
ry
A .
.
!
j
C H A P I T R E
III.
N u llités ou om issions de fo r m a lité s contre Vadjudi
cation j etc.
t
Les enfans Chainpm artin ont des- moyens qui nous
paroissent bien forts, et contre la sentence d’adjudication,
et contre tout ce qui a précédé. Examinons-les séparé
'
m ent , et commençons par ceux contre le jugem ent d’aduidicatiou.
'
ü o A iï, f
§-
Ior-
A d ju d ica tion .
A'jpfdZ*
ï>rcm ii.rcm cnt ; dons ce jugement les qualités des enfiins
Chainpmartin lie sont pas exprimées. Ceci est une omis-
r
i
�( 23 )
sion de ce qui est prescrit par l’art. X V du titre V de la
lo i du 24 août 1 7 9 0 , portant : « L a rédaction des juge« m en s, tant sur appel qu’en prem ière instance , con« tiendra quatre parties distinctes.
« D a n s la prem ière , les nom s et les qualités des
'« parties seront énoncés.
« Dans la seconde, etc. »
'
L ’art. II de la loi du 4 germ inal an 2 , porte : « A
« l’avenir toute violation ou om ission d es,fo rm es près« cri tes en m atière civile , p a r les lois ém anées des
ft représentans du peuple , depuis 1 7 8 9 , QUAND MÊME
« ELLES NE PRONONCEROIENT PAS EXPRESSÉMENT LA
« p e i n e d e n u l l i t é , d o n n e r a o u v e r t u r e <1 c a s s a t i o n . »
A rt. I V . « Cette violation ou omission ne peut donner
« ouverture à la cassation, que lorsqu’elle a été alléguée
« par l ’autre partie ( celle contre laquelle il y a viola
it tio n , etc. ) devant le tribunal dont celle-ci prétend
« faire annuller le jugement, pour n’y avoir pa<= eu égard. »
D e ces deux articles il suit que ce qui est moyen de
cassation au tribunal de cassation, est sûrement m oyen
de nullité au tribunal d’appel.
Ici les qualités des enfans C h am pm artin, et autres
créanciers, n’étant pas énoncées dans le jugement d’ad
judication, il en résulte , i° . omission de l’ une des quatre
formalités voulues par la loi du 24 août ; 20. nullité du
ju g em en t; suivant la loi du 4 germ inal an 2.
L e citoyen Dusson convient du la it de l’omission; mais
il soutient que les enfans Cham pm artin n’éloient pas dé
fendeurs , parce qu’en expropriation forcée il n’y a que
�( 24 )
deux parties, le p o u rsu ivan t, qui est le demandeur, efc
le saisi, qui est le défendeur.
L e citoyen Dussonest dans l’erreur; il est démenti par
la lettre et l’esprit de la loi du n brum aire an 7. Sui
vant cette l o i , les créanciers sont, tout aussi-bien que le
saisi , défendeurs en expropriation , ou il faut aller jus
qu’à dire que le saisi lui-m êm e n’est pas défendeur.
E n « ffe t, 1 '\ après avoir , dans ses premiers articles,
déterm iné les formes des affiches, du dépôt au greffe et
des procès verbau x d’apposition des affiches, cette loi ,
article V I , porte : « Ces procès v e r b a u x , ainsi que les
« affiches, seront n otifiés, et copie en sera laissée , tant
« au s a isi q u a u x créanciers in s c r its , etc. »
V o ilà tout ce que dit la loi pou r exprim er de quelle
m anière seront appelés et le saisi et les créanciers; elfe
n’exige pas plus respectivement au saisi que respective
ment aux créanciers.
.
Cependant le citoyen Dusson est obligé de convenir
que le saisi est défendeur en expropriation. D ès que les
créanciers sont appelés en justice dans la même form e
que le saisi, il faut en conclure que les créanciers sont
défendeurs, et que leurs qualités doivent être énoncées
dans le ju g em en t, à peine de n u llité , suivant la loi du
4 germ inal an 2.
20. Les créanciers inscrits o n t, de s u o , le droit d’ap
peler du jugement d’adjudication. Ce droit leur est donné
par l’article X X 1U de la loi du 11 brum aire an 7 ; ils
doivent donc être parties dans ce jugement : sans cela ils
uepourroient pas interjeter appel, parce que cette voie ne
peut
�'
O B
.
S U R
■
L E
S E R
V A
D É F A U T
T I O N S
D ’ I N T É R Ê T .
CSuite du paragraphe I I ypage 16. )
| Ï - J e s enfans Champmartin répètent éternellem ent
,
^ ns leur mémoire , que la valeur du bien de Bierrë ,
r|
acquis en 1 7 8 2 ,au prix de 92,000 liv. , a suivi la pro
u Sression des tem p s, et qu’il vaudrait aujourd’hui au
j\ moins 100,000 liv. Mais on dissimule i.° que 1 acqui«ition de 1782, fut un coup de tête de la part du cit.
Champmartin et de sa m è r e , car un autre acquéreur
„1
‘/en avait fait marché qu’à 6 3,000 liv.
i . a.° Que ledit Champmartin s’y est ru in é , et qu’il
I
doit plus que le prix de ladite acquisition; 3.0 que
|
dîme de vin et de grain perceptible dans les terri-
I
toires de Clairac et
M arsillac , était de la comprise
|
de la v e n t e , et qu’elle a été supprimée ; 4 .u qne la
^ *ecolte qui devait être conduite aux frais du vendeur
(
)usqu’à la St.-Jean
1783, faisait
partie
de la
v en te;
^ 0 était aussi de la comprise de ladite vente , partie
|
I
|
t
mobilier de la m aison, le cuvage tout m eublé et
Ustencilé de ses • cuve» grandes et petites, la futaille ,
tous les outils et harnais de labour , enfin les chevaux
®t bêtes à corne qui ameublaient la co u r; 6. quo
\
ledit Champmartin a aliéné 12. à 15 septérées de terre
�des m eilleures qui envoisinaient ses bâtimens ; 7 .0 (î1'/
l ’époque de ladite acquisition, les héritages étaie^
entourés d’arbres et qu’ils ont été tous arrachés ; ^
qu’il a laissé dépérir la maison et bâtimens , - que u
granges et étableries se sont éboulées; 9.® qu’une ri13
vaise administration réduit ledit bien à tel état
gradation, qu’il faudrait pour le rétablir plus de 2A10 ^
liv. de mise de fonds;
i©.° que le revenu net ilïlP,
.sable n’en e st, d’après les matrices des, rôles , que de
fr. 18 sous ; de sorte qu’en achetant ce bien 6o»°
liv. j compris les charges d’affiches et tous les fi'alS
procédure, le C. Dusson l ’a acheté au prix de vi1^ l
huit fois le revenu imposable.
,
Mais quand il y au ra it, par im possible, une ^
mentation de 20 à 2Ô3ooo liv. s ils n ’en seraient V ,
plus avancés, voulant faire honneur, à ce quils tl,s®
aux dettes de leur père ; car celles qui sont inscflte *
suivant les extraits qu’en a retiré le C . Dusson,
tent en principal
à 7 4 , 0 13
l i v , non compris i ’enc° ^
de l ’année du capital desdites inscriptions; les “e
privilégiées, q u i, suivant l ’art. XI du chap. IV
^
loi du 11 brum aire, doivent passer avant toutes ^
d ettes; l ’inscription indéfinie des enfans C ham pm ^ '^ ,
on peut aussi m ettre en ligne de compte- 20 à 2^ jj/
liv. dus à différens émigrés rentrés, dont réclai^ 11 |
de leur part.
Ainsi la déchéance de l ’adjudication de l ’an 9 ’
leur procurerait aucun profit; par
conséquent l ‘l
nem ent avec lequel ils poursuivent le G. Dussofl*
d’autre intérêt que celui de la passion.
j
(
�- ( 25)
#
peut être em ployée qu’après l’épuisement du prem ier i)Vy i .'
degré de juridiction.
L e citoyen Dusson p eu t, s’il le juge à p ropos, se traî
ner tant qu’il lui plaira sur ce m oyen ; il peut , à son
g ré , le taxer de chicane absurde; cela ne nous em pê
chera pas de croire que les enfans Cham pm artin ont
raison, et que sa réponse n’est qu’une pitoyable algarade.
Secondement. Il saute aux yeu x que le citoyen Dusson
■
.
.
.*
a imaginé tout ce qu’il a pu pour éloigner les concurrens , et devenir adjudicataire à v il prix. P o u r s’en con
•
vaincre , il suffit de lire les conditions de son affiche et
d’exam iner sa conduite lors de l ’adjudication,
A F F I C H E S .
■
'
'
•
1 °. E lle s , contiennent, par le m enu, le détail de tous
les immeubles saisis, Ghaque h éritage, composant les
divers d o m a in e s y est désigné par sa n a tu re , son éten,d u e , sa situation, et ses nouveaux tenans et aboutissans.
'
2P. Dans les conditions de l’adjudication , le citoyen
Dusson im pose, n°. 4 , à l’adjudicataire, l’obligation de
lui p a y e r, sans terme n i délais la somme de 32,000 fr.
ainsi que ses intérêts et frais, et cela, avant tous autres
créa n ciers, qu’il renvoie à l’ordre (1),
N°. 4 . « De payer audit cit. D usson-Poisson, s a n s t e r m e n i
» h é la i , les 3a,000 fr. en prin cip al, et tous les intérêts éclms et
» irais , pour raison de q u o i la vente est poursuivie, a v a n t t o u s
•» a u t u k s c r é a n c i e r s , comme bailleur de fo n d s, suivant Tar
(i)
D
pL,
�'y jf c
,
[ / Xy fr :
Aie*'
.
(
2
6
}
.
' 3°* L e citoyen Diisson y stipule que, si dans l ’affiche
sont compris des immeubles appartenons à des tiers,
ils en seront rayés sur la simple justification des titres,
ec sans jugement de revendication (i). A insi donc le
citoyen Dusson se met au-dessus de l a - l o i , et se rend
juge absolu, (p uisqu e la loi dit que la revendication
sera jugée avant l’adjudication ).
4°. L e citoyen Dusson avertit le p u b lic, que les biens
-saisis seront vendus', ou partiellem ent ou en masse,
et que dans le cas où les enchérisseurs pour le tout
» ticle X I V , cliap. Y de la loi du x i brumaire an y , e t l e s u r
« p l u s d u d i t p r i x , e t î c a s d ’ e x c é d a n t , aux créanciers inscrits
i> qui seront utilement colloques par le jugement qui en homolo~
v>guera l’ordre et distribution, ainsi qu’ il sera ordonné par le
» jugement, et les.bordereaux qui seront délivrés aux créanciers. »
Pourquoi cette clause contre la vérité des principes ? Parce
que 32,000 fr. ne naissent pas sous la main ; parce que le citoyen
Dusson vouloit épouvanter les enchérisseurs ; parce qu’il vouloit
les priver du délai qu’il y a forcément entre l'adjudication et la
perfection de l’ordre.
’
I c i, le citoyen Dusson en a imposé : les créanciers que le sieur
D uroset avoit chargé le sieur D claboulaic d’acquitter, en lui
vendant en 1774 lcs Billauds et la Jonclière, doivent passer avant
le citoyen Dusson ; de ce nom bre, la citoyenne A lla rd , etc.
le citoyen Dusson a donc cherché à induire en erreur.
(1)
N°. 8. Si parmi les immeubles ci-énoncés, il s’en trouvoit
apparlenans à des tiers, en justifiant du titre de propriété ou
d’acquisition, h l’audience indiquée, l’héritage revendiqué sera
rayé de la susdite affiche , sans qu’ il soit besoin d’un juge
ment de revendication, art• X X V I c la loi du 11 brumaire an 7).
�( ^7 )
'
couvriroient les enchères partielles, ils auroi ent la p ré
férence (i).
5 °. L e citoyen Dusson ne garantit point ni les objets
m eubles, ni les mesures des immeubles : il en laisse le
plus ou le moins de contenue en perte ou gain pour l’adjudicataire (2) ; c’est-à-dire , qu’il présente des incertitudes
pour que les mises soient moins fortes.
6°. Enfin le citoyen Dusson ne veut pas q u e , après
l ’adjudication, le saisi, l’adjudicataire, ni les créanciers ,
puissent avoir aucun recours contre lui poursuivant (3).
(1) TS°. g. « Uadjudication sera faite ou partiellemeut, con
» fermement aux lozs ci-après énoncées, » ( c ’est le cit. Dusson.
lui-même qui iait ces lo is, il ne peut donc pas les récuser, si
elles prononcent contre lui , les voici teltes qü’il les a dictées ) :
)! mais à condition que la vente n’aura lieu par parties détachées1,
» q u ’autant qu ’elle le sera en m êm e tem ps de tous les objets com
» pris en la présente affiche ; le poursuivant ne vo u lan t séparer les
» im m eubles qui sont grevés de son h yp o th è q u e , qu’autant q u ’il
» seroit payé de toute sa créance tant en p rin cip a l, intérêts que
» frais. »
Les enchérisseurs pour le tout, d a n s le cas ou i l s
couviutvoiENT les e n c ii Èues p a r t i e l l e s , auront la préférence. »
N °. 10. «
(2) N°. 12« « L ’adjudication sera faite avec toutes les charges
» dont les immeubles peuvent être légitimement grevés, et s a n s a u
» C U N E G A R A N T I E D E S O B J E T S , M E U B L E S E T M ESUIIES DES IM M E U B L E S ,
» portés aux étals de sections et matrices des rôles, indiqués par
» la présente affiche, l e t l u s o u l e m o i n s é t a n t a l a c h a r g e
» d e t / a d j u nie a t a 1 n e , et sans aucune garantie des dégradations.»
( 3 ) N “. i3 . » Enfin que le citoyen Leclcre C ham pm artm ,
j) l’adjud ica taire et tous créanciers ne pourront conserver la plént-
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V o ilà bien des entraves ; elles font sentir que le citoyen
Dusson convoite le bien saisi : s’il l’obtenoit justem ent,
nous nous garderions bien de nous en plaindre. Il est
créancier , cela est incontestable ; et notre désir le plus
c h e r , est qu’il soit payé de ce qui lui est du légitim e
ment. Nous disons légitim em ent, parce q u e , dans le fa it,
il demande plus qu’il ne lui appartient : cela sera dé
m ontré en temps et lieu. Mais que le citoyen Dusson ait
em ployé des moyens tortueux pour atteindre son b u t;
qu’il ait hérissé la vente de difficultés telles , que tout
hom m e sage en ait été repoussé, c’est ce que nous ne pou
vons lui pard on n er.,
•
A D J U D I C A T I O N .
L e citoyen M ancel , a v o u é , requiert la mise aux en
chères , et l ’adjudication. D es feux sont allumés pour
l ’adjudication du tout : quatre enchérisseurs seulement se
présentent, le cit. D ussonjlu i-m ê m e , le cit. M an cel, son
a v o u e ,le cit. Tessot et le cit. M ou illard , gendre et com
----mensal du cit. Dusson.
Dans le f a it , le citoyen Dusson n’avoit pour concur
rent que le citoyen T esso t, parce que le citoyen M ancel
et le citoyen M ouillard n’étoient là que pour la forme.
T o u s les autres assistans avoient été écartés par les moyens
de nullité : personne n’auroit osé acheter un procès.
» tude de leurs droits et de leurs moyens respectifs
» POURSUIVANT,
U N E FOI S L* A DJ I NDI C A T I ON
» cO« eu la présente af fi che, rn0îi0?<c£E.
conthe
i ,e
et YClUC tlca objets 011011
�*9 )
L a présence du citoyen Tessot contrarioit les vues du
citoyen Dusson. Pour l’é lo ig n e r, le citoyen Dusson fait
observer que , son afïiclie portant que la vente auroit lieu
par enchère totale et par enchères partielles, la totale ne
l’em porteroit que dans le cas où elle surpasseroit les par
tielles : l’adjudication sur la totalité ne seroit que p ro v i
soire , et subordonnée aux enchères partielles.
L a dernière mise étoit de 40,000 francs sur le citoyen
M ouillard , gendre du citoyen Dusson. A utres deux feux
sont allum és, et s’éteignent sans que personne dise m ot.
L e cit. Tessot, qui aperçoit du manège , et qui d’ailleurs
ne veut pas se jeter dans un p ro cès, se retire et ne reparoît plus. L ’audience est levée , et continuée à quatre
heures de relev ée.
L ’in terv alle est em ployé très-u tilem en t : on se pro cure
quelques citoyens com plaisans p o u r figu rer aux enchères.
Les biens saisis sont divisés en quatre lots.
L e prem ier com prend la maison de Bièvre, l’enclos, etc.
et trois des personnages nommés par le cit. Dusson font
enchère. Les citoyens M a n ce l, Dusson et M ouillard n’y
sont plus pour rien. Dans l’afïiche , le citoyen Dusson
avoit fait enchère de 10,600 fr. lia dernière mise est à
18,000 fr. de la part du citoyen D eboudard.
L e second lot embrasse tout le domaine des Billauds.,
composé de bûtimens , p r é s , terres et vignes : dans l’affiche , le citoyen Dusson l ’avoit porté à la somme de
n , 5oo fr. U ne seule enchère est faite par un citoyen
N euville ; elle est de 11,600 fr. Tous les autres feux sont
allum és, et éteints, sans q u e personne dise mot.
L e troisième lot est du domaine de la B ou lau d e, com~
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^ 30 ^
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posé aussi de bâtimens , p rés, terres et vignes. Dans l’af
fich e, le citoyen Dusson l’avoit mis à n , 5oo francs: un
M . Papon le porte à 11,600 francs. D ’autres feux sont
a llu m és, et éteints , sans aucune autre mise.
L e quatrièm e lot est de la locaterie de la Jonchère.
T ro is enchérisseurs la portent successivement à 4,000 fr.
et en demeurent là.
'
Les enchères partielles forment un total de 45,200 fr.
L ’on en revient aux enchères pour le tout : alors se
présentent d’abord le cit. M ancel et le cit. M ouillard pour
le cit. Dusson; après, un citoyen D eboudard; et enfin, le
citoyen D usson, qui parle et dit le d ern ier m o t, lorsque
les "choses sont au point convenu entre les conjuréscontre l’intérêt du saisi et ses créanciers légitimes.
Les enchères des cit. M ouillard , M ancel et D eb ou dard,
s’ étoient élevées graduellem ent ^ la somme de 5 i , 55 o fr.
le cit. Dusson y ajouta 5 o francs, et fut proclam é adju
dicataire, m oyennant 5 1,600 fr.
L a mise aux enchères partielles qui a été em p loyée,
n ’est pas celle avancée par les affiches. L e citoyen Dusson
y avoit annoncé que les biens saisis seroient vendus p ar
tiellem ent ou en gros , et que le mode qui donneroit le
plus auroit la préférence. P ar vente en d étail, on doit
entendre que chaque immeuble se vend séparément. L e
citoyen Dusson l’avoit donne à entendre ain si, puisque
son affiche contcnoit la description du tout , article par
article. Si on l’eût fait ain si, tous les biens saisis auroient
rendu plus de 120,000 francs. Tel achète un héritage plus
qu’ il 11e v a u t, parce qu’il le jo in t, ( quôd sœpè confines
Jhn dos supra ju sta n i ccstuncitionem mterest nostra
�( 31 )
acquirere ) ; et qui ne veut pas ou ne peut pas acheter
un domaine entier : les petits objets ont beaucoup d’ama
teurs ; la concurrence fait la hausse.
A u lieu de cela , on a mis à l ’enchère des domaines
en entier : on a donc trom pé les créanciers et le public ;
on a fait autrement qu’on avoit annoncé.
Nous concevons que le citoyen Dusson auroit pu se
dispenser de requérir la vente partielle ; mais l’ayant in
séré dans son affiche, en ayant fait une l o i , il a dû s’y
con form er, h peine de nullité.
.
L a vilité du p r ix , à 5 i , 6 oo francs , saute aux y e u x :
on la touche avec l a main.
i°. L a maison de B iè v re , etc. sont mis dans l ’afficlie
par le citoyen D u sson , seulement à 10,600 francs; les
enchères partielles sont de 18,000 fr. en résultat : il y
auroit donc une différence de 7,400 fr. à l’avantage du
saisi, ce qui ferait près de quatre cinquièmes en sus.
L e citoyen Dusson avoit porté chacun des domaines
des Billauds et de la Boulaude à n , 5oo fr. Suivant lu i,
chacun d’eux valoit donc plus que B ièvre; et néanmoins
ses prétendus enchérisseurs n’ont fait au-dessus de lui
q u ’une mise de 100 francs; ce qui présenterait un p rix
de u ,6 o o fr. pour chacun de ces deux domaines. S ’il y
.avoit eu du sé rie u x , si les enchères n’avoient pas été un
jeu peu lo u a b le , il est à croire que ces deux domaines
auraient eu la même progression dans les enchères : il
est à croire que, même en adjudication, ils auraient donné
plus de 5 o,ooo francs ; surtout si l’on considère , i°. qu’en
1774 le sieur de la Boulayc avoit acquis le domaine des
Billauds ? la locaterie de la Jon clière, et line petite dîmerie ?
�( 32 )
moyenant 30,900 fr. ( nous en avons le contrat ) ; 2°. qu’en
-1782 le citoyen Cliam pm artin , p è r e , acquit B iè v r e ,
les B illau d s, la Boulaude , la Jonchère et la d îm erie,
moyennant 92,000 fr.
Dans l’addition à son m ém oire, le citoyen Dusson d it,
i° . queCtiam pm artinpèreavoit acheté chèrem ent en 1782.
•( L ’acquisition fut faite par madame L eclerc-B eauvoisin
a ieu le , qui eut la sagesse de se p r o c u r e r, préalable
m ent, des renseignemens certains sur la véritable valeur),
20. Que la dîmerie a été abolie par la révolu tion, et
;que notre pere a vendu douze à quinze septcrées des
meilleures terres. ( L a dîmerie et les terres aliénées par
Cham pm artin père, valoient à peine 10,000 francs en
17 8 2 , et depuis 1782 jusqu’en l ’an 9 , le p rix des biens
ruraux est plus que tiercé. D ’ailleurs les biens en ques
t io n devoient des cens , etc. puisqu’en 17 7 4 le sieur
D uroset en chai'gea le sieur de la B o u la y e , et q u’en
1782 celui-ci en ch argea, à son to u r , Cham pm artin
,père ).
•
3°. Que Champmartin père a dégradé les bâtimens
de B iè v r e , et fait couper les arbres enradiqués autour
des héritages. ( L e citoyen Dusson parle ici contre sa
science : en l’an 9 , les choses étoient en m eilleur état
qu’en 1782. Q u ’il ne nous parle plus de son procès ver
bal du 18 messidor d ern ier; il sait bien comment il a
été fait ).
4 0. Q u e , suivant les matrices des rôles, le revenu
présumé n’est que de 2 ,14 2 livres 18 sous. ( Il est inouï
• que l ’on ait jamais calculé la valeur des b ien s, d’après
les matrices des rôles. L ’on sait bien que dans les temps
chaque
�\
( 33 )
#
.
cliaque contribuable a fait tout ce qu’il a pu pour rendre
ses revenus moins apparens. L e terrain des biens en
question est aussi productif que celui des meilleurs
fonds de la Lim agne d’A u vergn e ).
5°. Que le citoyen Cham pm artin fils aîné, et le citoyen
S im on n et, curateur des trois m in eurs, étoient présens
lors de l ’adjudication , et qu’ils n’ont dit m o t , parce
qu’ils ont jugé que les 5 i , 6 oo francs et les frais de l’adju
dication balançoient la valeur des biens. ( D ès que le
citoyen Dusson en appelle au citoyen Sim onnet, celui-ci
lu i répond que ce bien vaut plus de 100,000 fran cs, et
qu’un administrateur bien entendu en retirera constam
ment. 5,ooo francs de re n te , toutes charges déduites ).
6°. Que ce bien est encore dépi'im é p a r les dégradad a tio n s et les exp o lia tîo n s faites après l'a d ju d ica tio n .
( D ’une part, ces cxpolialions et dégradations sont une
calomnie ; d’un nuire côté , suivant le citoyen Dusson
lu i- m ê m e , elles seraient postérieures à l’adjudication,
et elles n’influeroient point sur l ’appréciation. du b ie n ,
au temps de l’adjudication ).
Troisièm em ent, les enchères faites par les citoyens
M o u illard , T esso t, D eb ou d ard , P a p o n 'et autres, ont
été faites sans l’assistance d’un avoué ; le citoyen Dusson
seul avoit le sien à côté de lui. Les enchères M ouillard ,
etc. sont nulles, et opèrent la nullité de l ’adjudication }
suivant la m axim e, q u i cadit à sy lla b a , cadit ¿1 toto. •
• Nous convenons que la loi du 11 brum aire an 7 f
porte , article X I X : « T o u t citoyen peut enchérir par
« lu i-rnônic ou par autrui. Ceux qui enchériront pour
« un tiers , 11e peuvent être contraints de justifier de leurs
E
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( 34 )
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« pouvoirs ; mais ils sont tenus de faire , dans les v in g t« quatre heures, leur déclaration en com m and, etc. »
L ’article X X dit , que le saisi ne pourra se rendre
adjudicataire, et que celui qui l’aura fait pour lui ( saisi )
en dem eurera responsable.
L e m ême article dit : Que dans le cas où l’on se rendroit adjudicataire pour un insolvable , celui qui pren
dra l ’adjudication en sera responsable. .
• L ’article X C I V de la loi du 27 ventôse an 8 , porte:
« L es avoués auront exclusivem ent le droit de pos«_ tuler et de prendre des conclusions dans le tribunal
« pou r lequel ils seront établis. »
P o s tu le r , disent les praticiens, et notamment D enizart,
verbo
«
«
«
«
po stu latio n ,
est l’exercice du droit « q u e les
procureurs ad lites ( aujourd’hui les avoués) ont de
représenter leurs cliens en justice; de procéd er, fo r m er des dem andes , d éfendre, et généralem ent signifier des actes en leu r nom . »
A in si donc toutes les fois qu’ il s’agira de postuler ou
de conclure, il faut un a v o u é , k peine de n u llité , sui
vant les lois des 27 ventôse an 8 , et 4 germinal an 2.
O r > pour les enchères, il faut postuler, il faut con
clure. S i, sur une enchère à la somme de 10,000 francs,
un feu s’éteintsans autre enchère, il faut demander q u e ,
faute de plus haut m e tte u r, le bien soit adjugé à l’en
chérisseur. Quand on fait une m ise, 011 dit a la justicer
Je prends cet objet moyennant cette somme; je conclus
à ce que vous me l’adjugiez moyennant celte som m e;
je contracte envers la justice l ’engagem ent de payer celte
�( 35)
somme ; mais tout cela ne se peut faire sans l’assistance
d ’un avoué.
Ce que disposent la lo i du 11 brum aire an 7 , et celle
du 27 ventôse an 8 , réunies, n’est que la répétition de
ce qu’avoit déjà statué l’édit de i 55 i , et ce qu’ensei-..
^
grioient M . le président Lem aître et d’H éricourt.
,^ .
Gomme la loi du 11 brum aire an 7 , l’article X de
l ’édit de i 5 5 i défendoit de recevoir l’enchère du s a is i;comme la loi du 11 b rum aire, l’a rticle X I défendoit la
* •
même chose par rapport aux personnes insolvables.
r I/article I X de cet édit porte : « E t seront tenus les
« enchérisseurs de nommer, leur p ro cu reu r, en faisant
« leur en ch ère, et élire^erTÎa maison dudit procureur ;
« e t a u t r e m e n t n e s e r a r e ç u e la d ite e n c h è r e .»
M . le président IiCmaître dit que si l ’enchère n ’est point
faite de cette m an ière, elle est-nulle, à raison de ces termes :
E t autrem ent ne sera reçueladite enchère. Q uando enim
statutum concipitur verbis prohibitions, elia in si non
adjiciat actum fo r e t-.nullw u, non tamen valet quod
agitur. L . non d u b iu m , cod. de legibus.
lia lo i du 11 bïurnnire an 7 laisse bien aux parties la
faculté d’enchérir; celle du 27 ventôse an 8 ne la leur
ôte pas, mais elle ex ig e , comme l’édit de i 55 i , l’assis
tance d’ iiu.ayoué.
'
•
* « L ’enchère,,dit d’IIéricou rl,. chnp. I X , a r t - X X V I I I ,
est un (iontrat q u e 'l’enchérisseur passe avec la justice,
« et par lequel il s’engage à se rendre ad judicataire, etc. »
Ce contrat 11’e peut pas se faii’e sans dem ande, sans pos
tulation; il fatil donc.rtn avoué. ^
.
D e cc que nous venons de dire il suit que les enchères
k
-
E 2 ‘
'
�.
(
3
6
)
faites par les citoyens M o u illa rd , etc. sans l’assistance
d’a v o u é , sont nulles; et cette nullité produit le même
effet que s’ il n’en étoit pas fait mention dans le jugement
d’adjudication.
\Mî
O r , par jugement du 14 floréal an 10 , plaidant le
.
citoyen M arie pour une partie saisie, et le citoyen D evèze
1
•.
A il
1
• •
-1 > 1 .
.
,
/ y
pou r le citoyen A lb a n e l, saisissant et adjudicataire , le
Mwvutf&vbf tribunal a annullé une adjudication sur exp ropriation,
f/ a W r
V
*
parce q u e , dans la sentence, l’on n’avoit pas fait mention
des noms des autres enchérisseurs; l’on avoit dit seule
ment qu’il y avoit eu plusieurs feu x, pendant lesquels
plusieurs enchères, etc. • .
^
I c i , plusieurs enchères, mais nulles; mais non mention
lég a le; e t, à p a r i; nullité de l’adjudication.
§.
II.
N otification a u x enfans Chanrpm artin, com m e créan
ciers inscrits.
Cet acte est infecté de nombre de vices : pour en bien
ju g e r , il faut commencer pai' établir certains principes.
i°. L ’article X X III de la loi du n brum aire an y , dit :
A u c u n m oyen de nullité ou om ission deform alités.
Il
faut rem arquer que cette lo i, dans aucun de ses ar
ticles, ne porte les expressions usitées dans celles d’avant
la ré v o lu tio n , les expressions a peine de n u llité ; en sorte
que celle du 4 germ inal an 2 est applicable dans toute sa
latitude; en sorte que lu znoinclre omission opère une
nullité.
�'
C 37 )
2°. Il ne faut pas croire q u e, par la loi du n bru
m aire, il y ait dérogation absolue aux anciennes lois, aux
anciennes coutumes et aux anciens usages qui iaisoient
lo is ; son article X X X V I dit seulement : « Toutes lo is,
« coutumes et visages antérieurs, demeurent abrogés E N
« CE
q u ’il s
« SENTE.
»
AÜB.OIENT
DE
CONTRAIRE
A
LA
PRÉ-
‘
D e cette disposition il suit, en prem ier lieu , que toutes
les fois que les lo is, les coutumes et les usages antérieurs
n’ont rien de contraire à cette lo i, ils ne sont pas abrogés;
ils sont encore lois. Il s’ensuit, en second lie u , que lors
que la loi du 11 brum aire est muette ou équivoque sur
quelque p o in t, elle doit être expliquée par les anciennes
lois. N on est novurn ut priores leges ad posteriores tra hantur. X/. 2 6 , au Lit. de legibus. Seci et po sterio res leges
ad priores p ertin en t, m si contrariœ sin t, idque m ultis
argiimentis prnbatur. L . 28, eod.
P o u r les exploits, nous connoissons deux sortes de for
m alités, les formalités intrinsèques , qui sont la substance
des exp loits, et les formalités extrinsèques et sans les
quelles les exploits sont nuls. Cette explication nous est
donnée par Jousse, tome 1 , page i 5 .
Dans l’espèce , la notification aux créanciers inscrits
pèche, et par les formalités intrinsèques, et par les forma
lités extTinsèqtTC57'Cornmençons par les e x t r i n s è q u e s .
A u nombre des formalités extrinsèqives^'iïoussü «place4a
nécessité d’écrire les exploits sur papier timbré. Il dit
tome 1 , page 16 : « Une autre formalité nécessaire aux
« exploits, est qu’ ils doivent êlro écrits su r papier thnhrê,
« même ceux laits à la requête des procureurs du r o i, à
�.
.
. . .
( s? )
.
...
« peine db nullité. » Il s’appuie sur l ’ordonnance du mois
de juin 1680, et les autres règlemens sur cette matière.
Dans la nouvelle législation, la loi du 13 brum aire an
7 , p o rte , i°. article X I I : « Sont assujétis au droit du
« tim b re, en raison de la dim ension, tous les papiers i\
, « em ployer pour les actes et écritures soit publics, soit
« privés. Savoir :
« 1 • L e s actes des n o t a i r e s , et les e x t r a i t s , c o p i e s et
« e x p é d i t i o n s q u i en s o n t d é l i v r é e s .
« C e u x d e s h u i s s i e r s , e t l es c o p i e s e t e x p é d i t i o n s q u ’ ils
« en d é liv r e n t. »
L ’a r l i d c
III a d é t e r m i n é l es p a p i e r s d e d i m e n s i o n ,
c e s o n l les f e u i l l e s d e 5 o c e n t . ,
cl les d e m i - f e u i l l e s d e
v
«
«
«
c e n t . , u n f r. 5 o c e n t ,
zü> c e n t .
L ’arl. X Y J I porlo. : c< Les notaires, huissiers , elc. ne
pourront em p loy er, pour les actes qu’ ils réd igero n t,
et leui's copies cL expéditions, d'autre papier que celu i
tim bré des déparlemens 011 ils exercenl leurs fonclions. »
L ’artirle X V i l I p o r lo : « L a
faculté ( d e
« extraordinairem ent) accordée,
faire t i m b r e r
p a r ¡ l' ar ti cl e Y II d e l à
« p r é s e n t e , a u x c i l o y r n R q u i v o u d r o n t e m p l o y e r d ’a u t r e
« p a p i e r j j j U ’ c x' h u f <mr m p a r l a r é g i n ^ e n le faisant t l m « brer
«
«•»vaut d ' e n ' i T . m '
usage7 t"st
ivtfiiditk
aux
ils seront fë?ius de so
rwr~ïTÏÏ~poj'!<’r timbré débité par la régir, n
n o t a it î^,
I
nuissirp,«!,
etc.
l i r a - t - o n q u e c e t t e l o i , p >r *011 nriicb* W V I ,
n°. 5 ,
p r' M; -’ r <* u n e ¡ m o n d e d ’ * 1 0 0 fr. e n e;:- . l e c o n t r a v e n t i o n
à 1’ . r . \ \ i I i , et q i i ‘ ’ l'-ni n e p Mt J' i - n j ' U ' e r la f x ' i n e
�( 39) '
M ais il n’y a pas m oyen de fuir la rigueur de la dis
position de la lo i du 4 germ inal an 2. Celle du 13 bru
m a ire 'a n 7 dit que les huissiers écriront leurs actes,
tant en originaux qu’en copies, sur du papier timbré de
dimension , et qu’ils 11e le pourront sur du papier tim bre
extraordinairem ent : elle est tout à la lois im pérative et
prohibitive*, comme im pérative, elle doit être obéie, u
peine de nullité , dit celle du 4 germ inal an 2 ; comme
p ro h ib itiv e , elle frappe forcém ent de nullité tout ce qui
seroit contraire à sa disposition : Q uando cni/n s(atulum
concipitur verbis prohibitivis , ctiam si non adjiciat
actum fo re nu Hum , non larnen valet quod agi tur.
ÜN’ im porle l’amende des to o IV. contre l'huissier *, celle
peine lui est personnelle*, s'étendroit-elle jusqu’à la partie,
il y aumit é g a l e m e n t milliu' : Scd cl s i /ex ulteriùs procedat cl peenaru- a d jic ia t, idem ad/tue diccndum e s t ,
modo pœ/ta a djic iatur a u n ulla tio u iactus , ut loquuntur;
nam et lune nullum est ipso jure quod factum e s t ,
f
,
tn-HWult
ÿ if
et prœtereà pivna , et adjecta annullationi prœstanda
est. E sem p la , dit V innius , habem us in /. 4 , /. 6 , cum
•
autli. seq. C. de incest, n u p .cl^ .
A in s i, amende par la loi du 13 brumaire an 7 , et
nullité par celle du 4 germ inal an 2 , el par l'ordon
nance de 1680 : conséquence irrésistible aux veux de la
raison.
Dan* l'espèce, la co p ie de l'alliehe de* procès v e r b a u x
.
t
d a p p o s i t i o n , de l'acte du d épô t tic l'alliehe au g p ' i . e de
C un; t , et de h n<'liticaiiôîiT^-i c*o|»ir ,,,> t,ul' <'•'* «ctr«
s u p p t w e lai.vM-e , dans le t e m p s . au\ 1 ;.| ns C’ h- mj>—
mu lti li } ^
n/-eA
JiTp; irtïcT u r ' ’p p i ê r timbre e x t r a o r d in a i r e -
^ .
S
/w
«A. .. / -
�#
( 40 )
m en t, en partie sur papier marqué au tim bre des jour
naux ( et non de dimension ) , et en partie sur papier
non timbré.
.
V o ic i l ’état exact de cette copie : elle est en trois grandes
feuilles. L a prem ière est m arquée au timbre de 1 franc
5o centim es; la deuxièm e, au tim bre de 5 centim es; et
la troisième est sans aucun timbre. Sur cette troisièm e,
est la copie du procès verbal d’apposition d’afïiclies à
Gannat. L a nullité ne sauroit en être m ieux établie : il
y a om ission, même violation d’une form alité extrin
sèque.
L ’on va jusqu’a articuler que l ’o rigin al de l ’affiche est
infecté du même vice. M ais le citoyen Dusson l ’a sous
trait de son dossier, dont nous avons pris com m unication:
le pourquoi en est frappant.
Quant aux formalités intrinsèques , il y en a de plu
sieurs sortes dans la procédure -du eitoyen D u sson , res
pectivem ent aux enfans Champmartin.
'cvJ-Tïi
_ "if
l0* ^ ’originsil de la notification aux créanciers est im , prim é en son entier. Peut-on croire que l ’huissier qui
faite éloit accom pagné d,’uix.impu jjuieiir ^ qui im prim oit sous la dictée de l’huissier à mesure que celui-ci
exploitoit ? L e citoyen Dusson p ro u v e ra -t-il que l’im prim eur ait prom ené ses caractères, ses presses et scs
<•
ouvriers à G a n n a t, à C h an tel, à Gharroux , etc. pour
im prim er l’exploit- 4 e l’huissioi-? —
'.U n v
^
V,
v
T o u t est im p rim e, ni£me Ja^matti-e-ulc de l ’huissier.
Cependant l’article II du t it r a i! de.l’iiixLQi:uiançc de 1667,
* 7
7 * *
x
porte; « Déclitrcron^flUSSi^M^. hms&ier^çt sar^cjis , pyr
% •->».%'. « leurs exp loits, les ju rid ictio n s où ils sont im inatriV'
« cillé s.
�( 41 )
« c u lé s , leur domicile , etc. le tout à peine de nullité. »
L e mot déclareront, signifie que c’est à l’huissier de
déclarer lui-m êm e, qu’il l’écrira de sa propre main : sa
m atricule doit être écrite par lui-mêm e. E n la sénéchaussée
d’A u v e r g n e , nombre d’exploits en retrait lignager ont
été annullés par cette seule raison; pourquoi? parce qu’il
s’agissoit de matière infiniment rigoureuse. I c i , il y a
même raison : une expropriation l ’est tout autant. A
A thènes , à R o m e , et en France , les subhastations ont
toujours été soumises à toute la sévérité de la- m axim e,
q u i cadit <i syllaba cadit à toto,
21°. Les enfans Ghampmartin o n t , par leu r inscrip
tion , élu dom icile chez A lexandre B ^ l l a t n o t a i r e à
G annat; la notification paroît avoir été faite chez un
cit. Rollat. Point de nom de baptême donné à ce citoyen
R ollat ; en sorte que l’on ne peut pas dire très-exaetement
que c’est le même Rollat.
Dans la même in scription , les enfans Champmartin
\
\
Jt
sont dits habitans du lieu de B iè v r e , village de Culhat ,
mairie d’Etroussat ; dans la notification , ils sont dits seu
lement demeuranfcen la commune d’Etroussat.
3°. C ’est le citoyen Baudet, huissier, qui a posé l’exploit
de notification. A u n °. 4 , il y dit qu’il a laissé aux enfans
Champmartin « copie cCautre procès verbal d’apposition
« de ladite affiche , j a i t e en la com m une de G a n n a t,
« EN MA niÉSENCE, p a r le cit. L a ssim o n n e , le ia
« germ inal an 9 , après m idi. »
Dans les numéros précédons , Baudet dit que les procès
verbaux d’apposition ont été faits-par V m cen t, huissier.
Dans le n °, 4 , il 11e dit pas que V incent a fait l’appoF
2
Io.
Cl/a.
CM LU a. b/KilcUJU.
�...............................
"
'
( 4 0
-sition d’affiches, à Gannat j il dit seulement, faite en la
com m une de G a n n a t, en ma présence, p a r le citoyen
Ija ssiin o n n e. Gela signifieroit que Lassim onne.auroitposé
l’affiche (et Lassimonne n’est point huissier) : cela signi
iieroit que Baudet, huissier, auroit fait le procès verbal
d’apposition ; ce qui n’est pas v r a i, puisque c’est l’huis
sier V incent, qui l’a fait. Il y a donc divergence entre
la notification et le procès verbal d’apposition. U n créan
cier inscrit a dû en induire qu’il y avoit fausseté, ou dans
la copie de notification , ou dans celle du procès verrbiriT"
d ’apposition. E n cet état des choses , il a dû ne pas y
c r o ir e , 'et. demeurer tranquille chez lui.
4 °. L a copie^de la notification aux créanciers ne con
tient point, assignation à l’audience du 8 floréal an 9 ,
jour indiqué pour l’adjudication. Il n’y a point d’assigna
tion ni aux enfans Charnpmartin., ni au cit. Slm on n et,
cu ra teu r, pour assister ses mineurs ; les uns et les autres
« ’ont donc pas été tenus d’y com paroir.
...
11 est vrai que l’art. V I de la loi du 11 brum aire an 7,,
d it: « S u r m it n o tifié s , et copie en sera laissée ta n t au
c< sa is i q u 'a u x créa n ciers , etc. » L e législateur ne se sert
........
pivs du terme ussig/rés.
■
M a is, c’est ici le lieu de ré p é te r, non est novitm ut
t p 7'io n s leges ad posteriores trahantnr. L ’art. X X X V I
de la loi du 11 brumaire an 7 11’abroge les ]ois., cou
tumes cl usages antérieurs , (,.ie dans les parties où elle
leur seroit contraire. Hors celle contrariété, point d’abrogaliou. Quand la loi nouvelle ne dispose pas sur un
p o iu t, l’ancienne loi et 1 ancien usage y suppléent.
1/
Les anciennes forjnes préliminaires aux ventes d’ im-
�\
'
C 43 )
‘
meuble?, sont remplacées par l’affiche. L ’affiche renferm e
ci elle seule la saisie réelle, les criées, la certification des
criées, et le congé d’adjuger. O r , la coutume de Bour
bonnais', art. C L , l ’édit de i 55 i p è t l’usage attesté par
tous les praticiens, voüïoient et’veûlent encore ùne.assignjr5'“
tion au saisi et aux créanciers. Il y en a plusieurs raisons
très-puissantes.
L a prem ière de ces raisons est qu’une affaire ne peut
être portée devant les tribunaux que par une assigna
tion. Sans assignation, les tribunaux ne sont pas saisis..
A in si celui q u i, par un e x p lo it, déclarerait simplement
qu’il demande telle chose, et s’il n’assignoit pas, il ne
pourrait pas dire qu’il a saisi même tribunal j il n’y aurait
pas moyen de statuer sur sa demande.. A in s i, celui qui
déclarerait simplement”, "jpà'r'exploil^-qu’ il appelle de" tel
jugem ent, ne pourrait pas dire qu’il a saisi le tribunal
d’appel. Il n’y aurait pas moyen de rendre un jugement
sur son appel.
L a seconde raison se tire de la loi du 11 brum aire an 7 ;
en l’article X X I I I , elle parle de jugement qui rejette les
moyens de n u llité , et de jugement qui adjuge. Dans la
règle, point de jugement sans demande préalable; et point
cfodemande légale sans assignation aussi préalable.
lia troisième raison se tîrô~üncôrê dé 'FürtT'XX^ I de
la même lo i, ainsi "conçu : « Ceux qui , avan-t-i ad judî«” cuti0rr,"voÎidroie 111 exercer aucunes des revendications
« mentionnées en l’article précèdent, poCtritvnE icirriie ,
«"ÊN SE RENDANT rÂlVTÏES INTERVENANTES , 'DANS
« la
p rocédure
ci-après. »
cCadjuiiLCii^o^ ■> s u i v a n t les fo rm es,
■
t
.
.
F ^
�( 44)
'
D ’ une p a r t, point de procédure sans assignation préa
lable : cela est certain.
D ’ un autre c ô t é , point d’intervention , s’il n’v a j oa^de cause; s’il n’y a pas d’instance ni procès ; et point
"cTêTcause, point d’instance, point de procès, s’il n’y a pas
eu d’assignation : le cit. Dusson le dit lui-m êm e, p. 8 et 9
de son mémoire. Il nous cite l’auteur du dictionnaire de
droit et de pratique, et l’ordonnance de 1667. Nous lui
opposons les mêmes autorités : s’il est de bonne f o i , il
s’y rendra.
E n cet état, par les quatre moyens que nous venons
de d évelop per, nous avons démontré que la notification
aux créanciers est n ulle ; il s’ensuit que les enfans C hann>
martîï^ n ’o n tp a s été obligés de com paroir. L ’on nous
diroit en vain , que Bien ou mal assigné , il faut se pré
senter. Cette règle signifie seulement que lorsque l’on est
assigné régulièrem ent, il faut p a ro ître, quoique la de
mande ne soit pas juste ; m ais, lorsque l’exploit est n u l,
le défendeur peut se dispenser d’y répondre : il a ensuite
la liberté d’en demander la n u llité , parce qu’un exploit
nul ne doit produire aucun eiTet légitim e.
A insi donc , les enfans Champinartin n’ ont pas dn se
présenter à l’audience du 8 floréal an 9 , et point'de iln
(Îè^noïï recevoir contr’eux.
, sur l’art. X X V I
àeT ïrto T flii n b ru m a ire, dit,, n°. 192 : « L e s défaillons
« y seraient néanm oins recevablex t d^iiTs~7e cas où le
te procès verbal d appositio n ne je in 'jiu ro it pas été notjr
« fié. » U ne notification nulle et l’absence de la notifica
tron sont synonym es, parce que ce q u i est nul ne peut
*
■—
produire aucun effet. R ien n’empêche donc que les on-
�( 45 )
fans Champmartin puissent exciper de moyens de nullité
contre la procédure antérieure à l’adjudication.
§.
III.
A c te du dépôt d u n exem plaire de Vaffiche a u greffe.
■V
Cet acte est du 12 d u m ême mois : il constate que le
■citoyen Dusson a d é p o sé , au greffe- du tribunal de
G a n n a t, i°. un exem plaire de l’affiche; 20. l ’extrait de /
la matrice du r ô le , et en a requis acte à lu i o ctro y é,
y est-il dit m ot pour mot.
11 faut rem arquer , x°. que le citoyen Dusson a fait
seul cet acte , et sans l’assistance d’un avoué ; 2,0. qu’il ne
• l’a point signé ; 30. que cet acte esUdaté du i a germ iliai a\>ant m idi.
- A u jo u rd ’hui le citoyen Dusson produit une. expédi
tion de cet acte de d ép ô t, où il est fait m ention qu’il
a signé sur la minute. Mais., i°. il y a une différence
entre cette expédition et la copie qui en a été donnée
aux créanciers inscrits. Dans l’ex p éd itio n , il est dit : L e
citoyen E tien n e D u sso n - P o is s o n , •p ropriétaire, sans
profession sp écia le, tant en son nom q u e n qu a lité .
de m a r i, etc. Dans la co p ie , après l’adjectif sp écia le,
■est le participe du présent a g issa n t, qui n’est point
dans l’exp éd itio n ; ce qui conduiront à l’idée q u e, depuis
-que la copie a été don n ée, il y a eu quelques change
mens sur la minute. D ’ailleurs il s’agit ici de m atière
rigoureuse ; notre copie nous tient lieu d’ original : il n’y
est pas dit que le citoyen Dusson a signé sur la minute*
'
�(46)
Il peut d’autant moins récuser cette co p ie , que lui-m em e
y a écrit plusieurs mots.
2°. Cet acte atteste que le dépôt de l’affiche a eu lieu
le 12 germ inal avant m id i (i). L e m ême jour paroît
avoir été fait le procès verbal d’apposition de l’affiche
à G a n n a t, lieu du bureau des hypothèques de la situa-
\<T-V
f
/■
* 'êf'DiJ'' tlou ^es biens. Ce procès verbal est daté d'après m idi.
O r , il est dit qu’alors l’affiche n’étoit pas encore dé
n*.
posée au greffe ; il y est dit seulement qu’elle 1&
seroit (2).. .
.
Dans cette position, il y a nécessairement un faux bien
evid en t, ou dans 1 acte de depot au greiïc, daté du 12 ger
m in a l avant m id i, ou dans le procès verbal d’apposition
d’affiche , daté du 12 germ inal après m idi • c a r, en rap
prochant ces deux .actes, ils s’entredétruisent. En e lle t,
le greffier atteste en avoir reçu le dépôt avant m idi ■
l’huissier y au contraire, certifie en avoir fait la publi-
(1) Aujourd’ hui 12 germinal an 9 , avant midi, a comparu
au greffe , etc.
'
(2) L ’huissicr y dit : « M e surs transporté dans tous les lieux,
» places publiques , et entrées de la commune de G a n n a t, et à
» tous endroits accoutumés'. »
A u x q u e l s lie u o c l e
h a u te v o ix ,
s ib le ,
c it o y e n iM S S im o n e a p u b lie e t a n n o n c é
et. a u s o n d u t a m b o u r , e t d e l a m a n i è r e l a p l u s o s t e n
la . v e n t e
des
m e u b le s
et
J ^ e c lc r c -C h a m p n ia r lin , d é s i g n é s
cistkée
a
DÉPOSÉE ,
ÇIVIL
1JE
il
G a n n a t,
le
ii
CONI ' OI t M É j t t E N T
im m e u b le s
I' IUiJUlÈRE I N S T A N C E
a u d it
d a n s i.’ a f f i c h e q u i a é t é e n k i ; -
germ in al
A
a p p a r ie n a r is
hies-kn t m ois, e t
LA
LOI,
AU
UK
GANNAT.
G HEF I' E
UU
qui
seha
TUIÜUNA^
�.
.
r ‘4 7 )
,
■cation après midi ' il-enonce 6n son procès verbal qu elle
sera déposée au greffe, Si le greffier dit v r a i, il s’ensuit
.que l’huissier a in e n ti, en certifiant l ’avoir publiée après
m id i; parce que,-si dès avant m idi l'affiche étoit déposée
au greffe, il étoit impossible que l’huissier la publiât après
m idi dans la .commune de Gannat. Si au contraire l’huissier
dit v r a i , il s’ensuit que le greffier a m en ti, en attestant
que l’affiche lui a été déposée avant m id i; parce que l’huis
sier , dans'son prücès~verbal*ï2la p r ê y 7?nW-,-assure^'avoir
publié ralRcIicT,~ct~'as5trre enee-rer rpreife sem dépotée au
greffe du tribunal de Gannat. E n disant qu’elle sera dé
posée , il donne à entendre bien-clairement que., après
m id i, elle ne l’étoit pas encore.
Dira-t-on que 1’liui.ssier a fait sa publication sur des
copies de .l’ailiche , et que déjà l’original en étoit au greffe
du tribunal de Ganuat ?
(
‘•
\
^
V
Nous répondons qu’il a été fait un, original de l’affiche
en question ; que cet original a été enregistré au bureau ^
de G annat, le n
germ in al; et que cet original est dit
^ ^
'}
avoir été déposé au greffe du tribunal cl,^ G an n at, le
12 germinal avant midi. A in s i, cet original ne pou voit
^>;is être au pou voir de l’huissier le même jour après midi.
Cependant l’huissier cite l ’original de l’ailiche ; il en
cite la date de l’enregistrem ent; il dit qu’elle sera déposée
au. greffe : donc elle ne l’est pas en core, donc elle est encore
dans ses mains , parce que., sans être nanti de l’original^
iJ lui étoit impossible de faire son opération.
A in si donc , il y a faux ou dans l’acte du dépôt au
greffe, ou dans l’apposition d’affiche à Gannat : dans le
prem ier cas, point d ’acte de dépôt ; dans le second cas,,
¿ fti
J t
�.
.
v
c 48 )
point d’affiche à Gannat : et dans l’un de ces deux cas ,
nullité absolue de toute la p ro céd u re, suivant la m axim e
q u i cadit à syllaba cadit à toto.
Que l’on ne dise pas que ce vice puisse être pallié par
aucune iin de non recevoir : c’est ici un faux , un faux
bien évident ; et toutes les fois que l’on vient à le décou
vrir , l’on est toujours à temps de s’en plaindre. A u reste,
nous en serions quittes pour passer à l’inscription de faux
incident ; èFlious sommes tous décides à êiT venir là , si
le citoyen Dusson pousse plus loin son obstination à
garder notre bien.
Sur la nécessité de l’assistance d’un avoué pour la régu
larité de cet acte, il suffit de rap peler, i ° . que la loi
du 27 ventôse an 8 rend le ministère des avoués néces
saire dans tout ce qui tient à la postulation et a u x conclu
sions ’ et que , sans cette assistance, il y a nullité des
actes de postulation, suivant la loi du 4 germ inal an 2 ,
et même suivant l’ordonnance de 1667 , remise en acti
vité-, 2°. que l’acte en question est un acte de postulation.
D ’abord , cet acte est nécessaire dans la procédure en
expropriation. 1°. L ’art. V de la loi du 11 brum aire dit :
« I l en est déposé un exem plaire au greffe ». 2.0. L ’art, 1
de la loi du 22 prairial an 7 , sur les droits de greffe,
porte : « Sont assujétis, sur la m inute, au droit de rédac« tio iy etc. i°. Pacte de dépôt de Vexemplaire d?affiche t
« en exécution de Varticle V d e l à loi du 11 brumaire. »
En second lie u , cet acte est de postulation. Rien ne
le prouve m ieux que sa contexture et sa dernière partie :
cl en a requis a c te , y est-il d it, à lui octroyé. C ’est lo
citoyen Dusson lui-m êm e qui a demandé et requis a cte ,
et
i
�C 49 )
et sans l’assistance de son avoué. J1 a_donc fait un acte
de postulation : et il ne le pouvoit pas. Il y a donc nullité.
§.
IV .
P ro cès verbaux (Vapposition cTaffiches, etc.
Les appositions sont nulles pour avoir été faites les 11 et 12
germ inal an 9 , qui n’étoient pas les jours convenables à
leur publicité. Elles auroient dû l’être un décadi, et renou
velées un jour de m arché suivant.
Il
est vrai que la loi du 11 brum aire an 7 est abso
lum ent muette sur le jour de l’apposition.
M ais elle n’abroge pas absolument les lo is, coutumes
et usages antérieurs, q u i, lorsqu’elle ne dit rien sur un
p o in t, doivent encore servir de règle; prîorcs leges ad
posteriores trahuntur. P o sterio res leges ad priores
p ertin en t, n isi contraria} sint. Ici point de contrariété
sur le jour des affiches, puisque celle de brum aire.n’en
dispose rien. Il faut dès-lors rem onter aux lois et usages
an teneurs.
A v a n t la ré v o lu tio n , et jusqu’à la loi du 17 messidor
an 7 , les criées pour parvenir à la vente des biens par
décret sur saisie ré e lle , les affiches pour les ventes sur
simple placard, dévoien t, suivant la coutume de B ou r
bonnais régissant le bien de B iè v r e , suivant l’édit de 1 55 i ,
devoient, disons-nous, être faites les dimanches, a l’ issue
des messes de paroisse, pour en instruire le plus grand
nombre de citoyens, pour opérer un plus grand nombre
d’enchérisseurs. Cela se pratiquoil ainsi dans toute la
France.
G
�C 5o )
La^loi du 19 messidor an 5 changea cet ordre ; elle
voulut quelles criées fussent faites les décadis, et rennuveléos le jour du marché le plus prochain. E lle l’avoit
voulu ain si, parce que les décadis étoient des jours de
cliornme, et que, ces jours-là, l’oisiveté conduit à écouter
les proclamations et à lire les affiches*, parce que les
marchés attirent beaucoup de m onde; parce q u e, par ces
m oj’cns, la vente acquiert toute la publicité nécessaire,
et que les enchérisseui-s se présentent ensuite en foule.
E n l’an 9, temps où l’expropriation dont il s’agit a eu
lie u , il y a v o it, sans con tredit, mêmes raisons de con
venance et d’utilité , pour exiger que les affiches pour
expropriation fussent posées le décadi, et renouvelées le
jour de marché suivant. L e citoyen Dusson n’étoit donc
pas maître de choisir le jour pour l’apposition des affiches :
ayant pris des jours ordinaires, il s’ensuit que la vente a
été en quelque sorte clandestine. Aussi y a - t - i l eu peu
de concours; aussi un bien en valeur de plus de 100,000 f.
a-t-il été adjugé pour 5 i , 6 oo fr. Cela est révoltant.
Des expressions même de la loi du 11 brum aire, il
suit que celle du 19 messidor an 5 est maintenue. E n
e iïe t, l’article V I dit que la notification sera faite dans le
délai de cinq jours de la date du dernier procès verbal
d'affiches. Ces m ots, dernier procès verb a l, donnent à
entendre qu’il en faut plusieurs; et il n ’en faut plusieurs
que dans le sens de la loi du 19 messidor an 5 ; c’est-àd ir e , dans le sens de l’apposition un jour de décadi, et
de la rénovation au jour de marché suivant.
Dans les procès verb«n\ d’alliches, on remarque une
autre faute bien essentielle. L ’huissier n’a pas rem pli lui-
�C 5i )
^
même sa matricule ; son nom et son surnom sont écrits
par une main étrangère ; la mention de la juridiction ou
il est l’c ç u , est en caracteres cl impression : tout ceci est
contraire à l’article II du titre II de l’ordonnance de 1667.
L a loi du 7 nivôse an 7 y a ajouté la form alité de la
(¿ ¿t^ J^
-j,
.
. .
—
¿ 7 " '“' • u
y
patente.
T o u te la procédure du citoyen Dusson est donc nulle.
E lle doit être déclarée telle.
Il
est cruel sans doute pour le citoyen Dusson , d’avoir
à combattre si longtemps pour obtenir la i-entrée_de_S£j
créance. Sur ce p o in t, il se plaint de beaucoup plus de
mal qu’il n’en a réellement. L ’on sait même que pour
appitoyer davantage sur son sort, il va jusqu’à des sup
positions invraisem blables, et qu’il espère infiniment de 4
certains moyens bons partout ailleurs.
Si
le citoyen Dusson n’est pas encore payé , qu’il s’en
accuse lui seul, et m êm e, s’il le v e u t, la bonhom m ie du j
citoyen Champmartin père.
P ar acte sous seing p r iv é , du 4 vendém iaire an 10 , le
citoyen de Champmartin père avoit vendu une portion
de son bien au citoyen Reynaud de Blanzat, moyennant
la somme de 5o,ooo fr. dont 36,000 f’r. payables le 30 prai
rial au citoyen Dusson. Il paroît que le citoyen Dusson
n ’a pas voulu recevoir cette somme. L ’on a été dans l’ im
puissance de contraindre le citoyen Reynaud en prairial,
le temps cle l’enregistrement étant passé. Depuis la date
du sous seing p r iv é , le double droit etoit encouru. P o u r
agir contre le citoyen R eynaud, il eut fallu faire enre
gistrer le double ; il en aiiroit conte ü,ooo francs. On ne
les avoit pas; 011 u’avoit pas crédit sullisaul pour les cm -
�( 52 )
_
prunier, E n sorte qu’après une conférence dans le cabinet
du citoyen B o iro t, avocat à C lerm on t, l’on a été obligé
de biffer les signatures au bas du sous-seing.
L ’ o n a v o i t préparé la vente d’une autre portion de biens.
U n citoyen estimable en donnoit 2 5,000 francs. M ais on
a craint d’avoir affaire au citoyen Dusson : la confiance ne
se commande pas.
C ’est ainsi que la famille Champmartin est aujourd’h u i
reduite à une misèi'e extrêm e, par l’épouvante qu’a inspi
rée le citoyen Dusson.
D epuis la contestation actuelle, en vendém iaire dernier,
est venue chez le citoyen G ourbeyre la demoiselle Bosredon de St. A v it , adressée p a rle citoyen Boirot. E lle désire
% acquérir le bien de B ièvre et dépendances. E lle en offre son
vrai prix. E lle ¡rayera 5o,ooo francs comptant. Suivant le
conseil du citoyen G o u rb eyre, elle a fait écrire au citoyen
^ D usson, pour lui proposer de x'cnoncer à l’adjudication ,
et recevoir de suite ce qui lui est légitim em ent dû. ( L a
demoiselle de Bosrcdon nous a autorisé à le publier. ) L e
citoyen Dusson n’a répondu que par un redoublement de
poursuites. Il a donc décrété la perte absolue de la maison
Champmartin.
A u reste, le combat n’est plus entre le poursuivant et
le saisi ; le combat est entre le poursuivant, et des indi
vidus qui sont au moins créanciers.
P ar certaine ru b riq u e , le poursuivant a accaparé le
gage des créanciers : il l’il & vil prix. S’il le g a rd e , il
profite au moins de 5o,ooo lrancs; et les en fans Champmarlin perdent to u t: ils sont sans ressource. A in s i, le
citoyen Dusson certat de lucro ca çta n d o , et les enfans
�( 53 )
Cham pm artin certant de danmo vitando. Dans cette
position, si le citoyen Dusson se dit favorab le, les enfans
Champmartin le sont bien davantage. Beaucoup moins
h abiles que le citoyen Dusson , ils mettent à découvert
leur situation, tandis qu’il dissimule la sienne, pour tâcher
de com bler la mesure de leurs maux.
Nous finirons par une assertion sur laquelle on peut
compter. Nous dirons q u e, le lendemain de l'annullation
de l’adjudication, le bien est vendu sa valeu r, et le citoyen
Dusson est payé com ptant; les acquéreurs sont prêts,
ainsi que l’argent revenant légitim em ent au cit. Dusson :
nous irions m ême jusqu’à lui garantir son payement.
G O U R B E Y R E.
A
de
l ’i m p r i m r r i o d e
L
a n d
RI
o t
,
T ribunal d’appel. — An 11,
seul imprimeur du
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Leclerc-Champmartin. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
créances
affichage
droit de criées
droit romain
adjudications
expropriations
Description
An account of the resource
Réponse à mémoire imprimé, etc. pour les enfans Leclerc-Champmartin, demandeurs en intervention et subrogation, et subsidiairement appelans ; contre Étienne Dusson-Poisson, défendeur et intimé.
annotations manuscrites. 2 pages insérées entre page 24 et 25 et intitulées « Observations sur le défaut d'intérêt (Suite du paragraphe II, page 16.)
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1779-An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
53 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0220
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Bierre (domaine de)
Rights
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Domaine public
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adjudications
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droit de criées
droit Romain
expropriations
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MÉMOIRE
PO UR
DE
LES
LA V I L L E
PAU VRES
D’A U R I L L A C ,
LÉGATAIRES d’ u n e
SOM M E
DE
4
80000
'
4
¿ktyiA/ty,
n
/'y^V
<kitÂxP\i/\x
Sm ^l/o^^tuX bijflcS
6 4 t.
A RI OM,
ee
l’im prim erie
IMPRIMEUR
de
DE L A
LANDRIOT,
COUR D ’ A P P E L »
Ju in 1804.
se u l
/
�M
É M
O
I R E
PO U R
'
L e s Pauvres d’A u rillac, représentés par le Bureau
de bienfaisance de cette v ille , ap p elan t;
r
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V
C ONT R E
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t .
#•.
•
-
*
Le sieur C A P E L L E , héritier de madame
G
a l i e u
de,
.
I l existe un corps q u i, né avec la société, est destiné à
durer autant qu’elle. Objet de la prévoyance du législa
teur, de la bienfaisance des particuliers, des sollicitudes
de la religion, les lois veillent pour le protéger, des mains
généreuses le nourrissent, la piété se charge’ de le consoler, et tous les hommes le resp ecten t car le respect est
du au malheur.
A 2
�_
.
u ?
L es pauvres composent ce corps; ïes pauvres, c’està-dire, cette portion des citoyens de chaque état, h qui
le ciel a donné la vie, et refusé les moyens de la soutenir :
membres souffrans de la société, en les recevant dans son
sein elle contracte l’engagement sacré de les secourir,
X/’arbre fertile ne prive aucun de ses rameaux de la sève
qui les féconde.
L ’homme a donc ménagé des ressources à l’homme
¡contre les disgrâces de la nature ou de la fortune. Il est
des biens mis en réserve pour ceux qui n’en ont point :
la société encourage et protège les dons faits à la pau
vreté par l’opulence. Ces biens, ces dons, fruits de la
munificence des princes ou de la générosité des parti
culiers,-se-nomment également fondations : ce sont des
dépôts inviolables consacrés par la charité publique; ce
.sont des eaux salutaires dont rhumanîtë, la bienfaisance,
la religion gardent la source.
Des pauvres se présentent aujourd’hui pour réclamer
une de ces fondations : c’est l’unique débris échappé au
naufrage qui a englouti tous leurs biens; c’est un legs de
80000 1i~, dei'nier gage du souvenir d’une femme ver
tueuse dont ils pleurent encore la pei’te. Ii’héritier le
refuse ; des premiers juges Îont annullé : mais le gouver
nement l’approuve, mais toutes les lois l’autorisent___
les magistrats supérieurs le coniiinieront» Il est -digne de
la justice de protéger les monumens de la bienfaisance ;
<et l’autorité publique doit consacrer, les dernières volontés
d’ujiç ferpmq assez généreuse pour vouloir faire le bien
a,u delà, même
-■* * ■du
* .tombeau,
- * • * et assez heureuse pour le
pouvoir*
�(5)
’
^
C’est à des femmes que madame de Galieu ayoit confié FA IT S,
la distribution de ses bienfaits. Les femmes semblent des
tinées par la nature à soulager les infortunés; leur pitié
est plus douce, leur compassion plus affectueuse, leurs
soins plus délicats que ceux des hommes : elles sont des
gardes avancées, placées sur la route du malheur pour le
•découvrir ; elles apparoissent dans ces obscurs asiles où
il se dérobe'aux regards, telles qu’un Dieu bienfaisant
qui ramène avec lui l’espérance. Quels pleurs ne se sèchent
point à leur approche ! quels maux ne sont pas adoucis
par leurs soins! que de consolations sorties de leur bouché!
que de dons échappés à leurs mains !
iSans parler ici des Sœurs de la charité , des Hospitaliè
res et des autres femmes <jui se consaeroient par des vœux
au service des pauvres, plusieurs villes comptoient avant
àa révolution des associations de dames pieuses, réunies
par le seul intérêt de la religion et de l’humanité : on
les -nommoit indifféremment Dames de la :c harité, Dames
de la miséricorde, Trésorières des pauvres. Rio'm, Cler
mont avoient les leurs, et parmi «lies comptoient leurs
noms les plus illustres. On en trouvoit dans toutes les
paroisses de Paris : -on en trouvoit aussi dans la ville
d’Aurillac.
Les Dames de la charité étoient ordinairement les
dames les plus respectables et les plus distinguées de
•chaque ville: c’ étoient des femmes du monde, les unes
mariées, d’autres veuves, d’autres célibataires. Elles ne
knsoient aueun vœu ; libres ^abandonner à leur gré
un joug qu’elles s’imposoient librement. Elles ne for—
«noient point de corps; dégagées de tous liens publics s
�(6 )
ne retirant d’autres fruits de leurs travaux que le plaisir de
faire le bien, distinguées non par des signes particuliers
•mais parleurs vertus', connues de l’autorité seulement par
.leurs bienfaits, comme la ‘fleur modeste par ses parfums.
. Solliciter la piété dans les temples, et la bienfaisance
rdans les maisons ; obtenir dé l’avare pitié des dons qu’elle
refuse a un homme, et qu’elle accorde à une’ femme ;
secourir l’infortuné qui se cache, en lui dérobant la main
■qui le nourrit; assister l’artisan malade, trop pauvre
pour soutenir sa famille privée de ses travaux, trop fier
pour mendier vin lit à l’hôpital ; porter aux douleurs
des remèdes, et des consolations aux chagrins : voilà les
fonctions et les plaisirs des Dames de la charité. Dirai-je
des maux plus secrets qu’elles soulageoient? parlerai-je
des nourrices récompensées , des orphelins recueillis ,
des filles dotées, et de tant d’autres bienfaits oubliés
avec les bienfaitrices ?
J ’ai dit que la ville d’Aurillac avoit Ses Dam es de la
charité : on les nommoit dans cette ville, comme dans
la plupart des provinces méridionales, Dames de Vœuvre
de la miséricorde,' ce qui veut d ire, dames chargées
du travail de la charité. Tel étoit leur titre à Grenoble,
à Montpellier, etc. A Figeac, on en trouve la preuve
dans le testament de madame' de Galieu, qui lègue le
revenu cle l’une de ses terres aux pauvres de Cœuvre de
la miséricorde de 1(igeac. Croira-1-011 que ce titre par
ticulier soit le seul fondement du procès que l’héritier de
madame de Galieu intente aux pauvres? C roira-t-on
que ce procès n’auroit jamais existé , si quelques dames
pieuses .d’Aurillac n’avoient été connues que sous le
nom de Dames de la miséricorde ?
•
�c 7 y
. "
'
' Leurs aumônes / leurs quêtes, leurs soins, étoient le
seul Lien des pauvres de cette v ille , dont la population
s’élève à plus de dix mille âmes. Il n’y avoit alors qu’une
seule paroisse, et cette paroisse étoit sans fabrique et
sans marguilliers. Toutes les oblations, les fondations,
et les autres objets affectés aux fabriques dans la plupart
des paroisses du royaume, se trouvoient à Aurillac entre
les mains des prêtres connus sous le nom de Communalistes , érigés en titre de collégiale par des lettres pa
tentes , et q u i, après avoir prélevé les frais du service
de l’église ,. se partageôieïit' ce: qu’il y avoit de reste ,
sans en faire aucune part aux pauvres. ‘ La ville avoit, à la vérité, un hôpital; mais cet éta
blissement ne jouissoit que d’un revenu médiocre. La
classe indigente et laborieuse du peuple-attaclxoit d’ailleurs
une espèce de honte aux secours qu’elle auroit pu trouver
dans l’hôpital. On ne comptoit de fonds destinés au sou
lagement des pauvres, qu’une rente de 4 3 2 ^ , payable
sur la quittance des échevins et du curé ; ils en confiè
rent la distribution aux Dames de la miséricorde.
• Le zele de ces dames: sembla s?accroître lorsque la
marquise de Fontanges se joignit à elles : le trésor des
pauvres s’enrichit de ses libéralités. L ’évêque de Troyes,
son oncle, y ajouta les siennes. Plusieurs femmes riches,
jalouses d’imiter de si nobles exemples, rivalisèrent dë
charité avec madame de Fontanges. On fit aux pauvres,
dont les Dames de la miséricord'e prenoient soin , divers
legs dont plusieurs sentences du bailliage de Vie ordon
nèrent la délivrance. X>es quêtes devinrent plus nom
breuses ; les assemblées de charité plus régulières ; le
)
�( 8>
çuré d’Aurillae les présidoit, en son absence madame
de Fontanges prenoit sa place : cet honneur, dû à son
nom, l’étoit plus encore à son zèle. C’est sans doute ce
qui fait dire à madame de Galieu, dans son testament,
que la marquise de Fontanges étoit Ja supérieure des
Dames de l’œuvre de la miséricorde. Jamais elle ne reçut
çe titre de supérieure ; il n’étoit donné, comme on sait,
qu’aux femmes qui étoient à la tète d’un couvent, d’une
communauté. Comment des dames qui avoient des époux,
des enfans, des engagement avec le monde, auroient-*elles formé une communauté ? Comment madame d©
Fontanges, épouse et mère, en auroit-elle été la supé»
rieure ? ce titre est incompatible aveç çeux qu’elle avoit
yeçus des lois et de la nature.
- A cette époque, vivoit à Aurillae une veuve extrême-*
ment riçhe et sans enfans : on la nommoit Françoise^
Dorothée de Cabridens. Elle avoit été mariée au sieur
de Galieu de Eigeac, qui lui avoit laissé tous ses biens,
sous la condition de rendre la terre de Grialou, située
dans le Querci, à l’un de ses parens. Pour remplir la
substitution, madame de Galieu fit une donation de cette
terre à l’abhé Cabridens de Clavières, son frère, parent
d’ailleurs du sieur de Galieu. L a donation fut passée
à Paris en 1774? et l’abbé de Cabridens a joui de la
terre jusqu’il sa mort,
C’étoit un homme aussi recommandable par sa piété
que par sa bienfaisance. Il fut question, en 17 7 7 , d’éta
blir à Aurillae une école de Frères de la doctrine chré
tienne, pour l’instruction des enfans des pauvres. L ’abbé
de Cabridens donna, pour cet établissement, une rente
de
�( 9 )•
de 65o , et un capital de 10000 ft. Il-voulut que ces
sommes demeurassent à jamais consacrées à ■l’instruc
tion de la jeunesse, même en cas de retraite des Frères
de la doctrine chrétienne. L ’acte authentique fut passé
avec les officiers municipaux d’Aurillac, le 29 septembre
I777'
.
. .
*
. ' . '
L ’abbé deCabridens destinoit encore d’autres bienfaits
aux pauvres de sa ville natale. Il jouissoit d’une grande
fortune. La succession de madame de Galieu, sa sœur,
est composée de biens situés en Auvergne et en Querci.
Tous ceux d’Auvergne appartenoient à l’abbé de Cabridens ; savoir, les domaines de Faillitou et de la Bartassière , qui viennent d’être vendus plus de 80000 ^ , et
le fief de Clavièrcs, qui vaut à peu près cette somme.
Je ne parle pas de plusieurs maisons et de quelques
autres immeubles de médiocre valeur. La fortune de
l’abbé de Cabridens s’étoit encore accrue par le don de
la terre de Grialou, dont il pouvoit disposer à son gré.
Madame de Galieu, sa sœur, n’avoit point d’enfans. Il
crut devoir a son état, à son caractère , d’adopter les
pauvres pour les siens; mais, pressé par l’âge,.et assiégé
par les iniirmités qu’il traîne à sa suite, il confia à sa
sœur L’exécution des pieux desseins qu’il avoit conçus.
Il la chargea de vendre les biens qu’il possédoit en A u
vergne, au profit des pauvres. Il lui indiqua ceux qu’assistoient -les Dames de la miséricorde pour l’objet de
scs secours , et il la chargea de payer jla=rente qu’il avoit
destinée à l’éducation de la jeunesse.': Ces' dispositions,
il ne les consigna point dans un testament. Sa sœur pos
sédoit toute sa confiance. Il ne vouloit pas, lui dit-il,
B
�X
)
'que le public pût en douter. H lui laissa donc àb iritéstdt
sa succession tout entière. Mais madame de Galieu a
pris soin dé nous apprendre à quelles conditions : en
léguant ^oooo7*" aux pauvres, pour remplir, dit-elle.,
les pieux desseins qui lui ont été communiqués p ar
'son fr è r e avant sa m ort, et «n ordonnant de vendre,
pour acquitter ce legs, tous ses biens d’Auvergne, c’està-dire tous ceux qui ,lui venoient de -l’abbé de'Gabridéns.
■Cependcntla maison de madame de Gaiieu étoit assiégée.
"Que d?amis, que dei parens ne se trouve pas une testatrice
opulente'! 'Qui poürroit dire-toutesles manœuvres*, pein>dre toutes les intrigues qu’on employa pour obtenir la
;prëmière .place, ou du moins une place dans son testraient'?
- X e .jour si'long-temps attendu arriva enfin :'ee fut le
- 4 'octobre 1785. Madame de Galieu avoit-, à "ce qu’il
rparoît, plusieurs.parens au même degré-: ¿’étaient des
'enfans de ses cousines germaines, -c’est-à-dire, ses neveux
bretons. Deux habitoient Aurillac. L e troisième vivoit
à-Saint-Constant, yillagie à.quelques lieuesde cette -ville-:
eon te nommdit le sieur Capelle, et il avoit quatre enfana,
-¿Leux ifilles et detix> fils. Madame de Galieu •choisit l’aîné,
alors âgé de cinq ans, ' pour son héritier ;;elle lui substitua
*s©n f r è r e , sans faire aucune mention des-îillcs. La substi
tution ne 1s’est rpas ouverte-, et -:Pierrc-Anloine-Urbain
’ Gapelle,cousin auquatrième degré de madame deGalieu, •
jouit seul aujourd’hui d’une fortune dont il'ne pouvoit
^espérer qu’un .douzième, 'suivant l’ordre de la nature.,
¿puisqu’il aüroit‘ été'obligé de _parl/iiger avec son irètfe
�c ï't y
.
Qt ses deux sœurs le tiers, qui revenoit à- soa père..
Ces détails feront juger si l’extreme faveur que croit
mériter l’iiéritier de-madame de Galieu-,, si çetle pi:édi—
lection spéciale que lui- portoit, dit-il, sa. bienfaitrice r
si. ces droits respectables du sang et de la nature qu’il
invoque, sont des prétentions fondées ou de vaines çlii-<
mères. Quelle faveui: extrême ne inéiiite- pas un héritics?préféré à des païens pki? rapprochés! préféré à son propre*
-père, à son frère , à ses sœurs ! Quelle prédilection spé~.
eiale n’a pas témoignée madame d.e Galieu à un enfant
de cinq ans, qu’elle n’avoit jamais vu 5l qu’elle n’a choision le sait, que parce que la- foiblesse- de son âge semi
bloit ne pas. lui permettre de contrariée les volontés de
sa bienfaitrice ! Combien sont respectables les droits du
sang et de la nature lorsqu’ils sont invoqués par un
héritier que ni le sang ni La nature n’appeloient person~>
Bellement à la succession ?
Madame de Galieu laissoit environ 5ooooo de biens y
■ en meubles, en créances., ou; en terres.. E lle possédoit.
le fief de Grialou, celui de. Claviçres, les domaijaes.de
Feicelle,, de Lacombe, de Faillitou , de la Bartassière,
etc.; des, maisons, à Arpajon.,, à,Aurillac, k Figeac; ua
mobilier considérable. E lle a fait, il- est vrai, des legs,
en très-grand nombre ils s’élèvent, dit l’héritier, à
270000 tir. On veut l’en croire : mais, enfin la moitié
de cette somme est consacrée à acquitter les dettes, de la
nature ou de l’amitié ; il n’y a que* l’autre, moitié qui *■
soit destinée à des œuvres de charité ou de religion. Ces
liegs ne paroîtront pas exorbitans relativement aux forces
4 e la succession , et quand ou songera aux conditions
B 2
�1 12 )
'
imposées par l’abbé de Cabridens à madame de G alleu,
sa sœur et son héritière.
Entre les legs pieux, on remarque celui du revenu
de la terre de Grialou, laissé pendant,un ¿ra aux pau~
vres de Tœuvre de Ici miséricorde de la ville de Figeac.
Ce legs a été fidèlement payé ; il devoit l’être avant la
révolution ; il n’étoit pas considérable. L ’on n’a point
demandé si les Dames de la miséricorde de Figeac avoient
des lettres patentes. ' ■ :
■
t
Il est une autre disposition qui excite de vives récla
mations , qui ( s’il eu faut croire l’héritier ) est nulle
faute de lettres patentes , qui du moins a fait retour à
la succession , qui enfin doit être réduite, toujours sui
vant l’héritier. Elle est faite en faveur des pauvres de
l’œuvre de la miséricorde d’Aurillac : elle est l’objet de
ee mémoire.
.
On sait que l’abbé de Cabridens avoit laissé tous ses
biens à sa sœur, à de certaines conditions. Voici de quelle
manière madame de Galieu les a remplies.
' « E t -pour rem plir, dit-elle, les pieux desseins qui
¥ ni ont été communiqués par J 'a i monsieur Cabri« dens , mon f r è r e , avant son décès , je lègue aux
« pauvres de l’œuvre de la miséricorde de la ville d’Auc rillac, laquelle •oeuvre est administrée par de pieuses
« dames, et dont madame’'la marquise de Fontanges est
« la supérieure, la somme de 80000 ; à la charge
« néanmoins que les administrateurs de l’œuvre seront
« tenus de payer annuellement, et à perpétuité, aux
« Frères de l’école de la doctrine chrétienne établis à
* Aurillac, la pension et rente annuelle que monsieur
�( i3 )
« i’abbq de Cabridcns, mon frère ,• s’étoit obligé de
« leur payer par les actes passes avec eux, et avec les
« consuls et communautés, d’Au villa c , .sans ’laquelle
« condition je n’aurois légué-jù li\dite œuvre que lq
« somme de 60000
Je veux qu’il soit employé le
« revenu de 20000 pour, assistermessieurs les prêtres
« de la ville et çom?nunauté d’^Aurillac^ qui seront
« ,dans le besoin , .et encqre les autres•prêtres des çeh
« virons de ladite v ille ,r si le retenu de ladite,somme
« de 20000
peut le comporter ; et que le revenu des
« 40000 restantes soit employé à soylager et assister
« le surplus des pauvres- que. Iqdiie, .çsupvexa. cputumG
« d'assister. Je ?,*reux en conséquence' que la .^pnime de
« 80000 , ci-dessus léguée aux conditions mentionnées}
« .soit payée auxdjtes dames administrant ladLte opuvrp ,
« sur la quittance qui en sera fournie par-ladite dame
« marquise de Fonümges, leur supérieure , et aux termes
« ci-dessous .fixés. » ,
;
• ; . , ..
Madame de Galieu 11e fixa aucun terme précis pour
le payement de ce legs : mais elle chargea,son exécuteur
testamentaire de recueillir, jusqu’à ce que son héritier
eut atteint l’âge de vingt-cinq ans, fous les revenus de sa
succession , et d’employer ces revenus à acquitter nonseulement le legs fait à l’oeuvre dp la miséricorde, mais
tous ceux qu’elle laissoit. Elle destina au môme usage le
prix d.e tous ses biens d’Auvergne, dont elle ordonna la
vente conformément aux intentions de l’abbe de Cabridens. Elle nomma le fils de son exécuteur testamentaire
pour remplacer son père, s’il venoità mourir avant que
le sieur Gapclle eût atteint vingt-cinq ans. Enfin elle prit
�( i -4 y
toutes lès- précautions que pouvoit suggérer la prudence*
<V une bienfaisance éclairée; Vaines précautions! soins*
inutiles ! Tant de mesures, si sagement concertées, n’ont
servi qu’à faire voir que personne nepeut se flatteraujour—
d’hui d’étendre son pouvoir au delà de son existenee; que^
les héritiers testamentaires , aussi avides et plus ingrats,
que ceux du sang, -ne trouvent jamais assez considérablela-succession qu’ils nrosoient espérer; et qu’ils regardent
presque comme un vol' personnel les legs que leur bien
faiteur's’est permis de faire, et ceux dé ces legs surtout
que la religion a dictés, la religion qui seule plaide au lit
de la mort la cause des malheureux.
Madame de (ïaliëu survécut quatreans à son testament.
Ses résolutions ne- se démentirent point relie mourut sans,
y avoir rien changé-, au mois de janvier 1785:; heureuse
de quitter, pour le séjour deTéternel repos, une terre où
fërmentoient déjà tant de semences de discorde! Elle
mourut : les pauvres la pleurèrent, et ils.la; pleureront
l:ong-temps_
Surveillante fidèle des intérêts des pauvres,.la marquise
de Fontanges , qui se trouvoit à Paris à cette époque
s’occupa de leur faire délivrer le legs de 8toooo ti") que1
madame de Galièu- leur avoit laissé. L ’article 3 d’un édit
de 1749 veut que toutes les fondations; faites en- faveur
des pauvres soient approuvées par le- parlement, qui
nommera- des administrateurs au legs ( sans doute si le
testateur n’en a pas nommé ). La marquise de Fontanges
se rendit chez M. le procureur général, pouir le prier de
demander en son nom l’homologation nécessaire. M1. le
procureur général y. consentit.. Il traça la- marche qu-’oii.
�( i'5 )
''âevoit srîivre. Il falloit, dit-il-, remettre une rcopie du.
•'testament au procureur du roiprès le*bailli âge d’Aurillac,
qui la lui advesseroit, en l’invitant à requérir.quelle lçgs
fût approuvé >par le parlement.- M. le procureur général
promit de -le demander. Ce fait est certain ^madame de
ï ’ontanges, qui v it1encore., madame^de Fontanges, -.qui
-liabite Aurillac -, l’attesteroit -, et un ;tel témoignage ne
-sera pas-récusé,
,, ' . .1 • ' ■
'
'Le testament fut ènvoyé à Paris, vers la Æn de 179-..
Les troubles survenus alors, les alarmes de la magistrature
sur son état,'firent négliger cetteaffaixej comme beaucoup
d’autres, par le procureur général, Il.étoit peu question
•de fondations, lorsqu’on ne s’oceupoit qu’à détruire. Bien
tôt le parlement fut supprimé /.et Sans lui;l’homologation
-devenoit impossible.
'
-Cependant l’exécuteur testamentaire de madame de
IGalieu s’étoit -mis en possession .de tous ses biens,, con
formément à ses volontés; il devoit les,garder jusqu’à ce
■quë<l’héritier eût "atteint vingt-cinq ans. Il fit l’inventaire
des-meubles,-et les'vendit pour acquitter une partie des
legs.-Il voulut ensuite «faire procéder,, suivant les ordres
de la testatrice, à la-vente des:biens d’Auvergne. Le sieur
■Capelle ,'père de l’héritier qurn’avoit alors que neuf ans,
•s’ opposa à cette vente : il représenta.que le-moment n’étoit
¿pas favorable à'ia ventesdes immeubles; et il-avoit-raison,
-l’année 1789 achevoit son; cours. *
,
-Mais les troubles qubcommençorent, et les-désordres
‘•plus grands Encore dont ils éfoient avant-coureurs, inquié^oient.peu le.père du sieur Capelle : ce . qui l’alarmoit ?
�(
16 X
c’ctoit la nécessite de payer des legs qu’il regardent comme
son b i e n ' et'sa conduite, l’a assez montre.
: (Je* ne fut’1tfù’eja 1792 ,.et api'ès ayoir laissé »¡écouler les
aimées moins orageuses àe.l<jgo et 17 9 1, que l’exécuteur
testamentaire fit rendre un. jugement qui l’^iutorisoit à
vendre les biens désignés pan madame dé Galieu ; ce juge
ment est du 27 janvier 1792. Dès que le sieur Gapelle père
le connut, il lit solliciter une suspension de vente; ^exé
cuteur testamentaire y consentit..Mais enfin, press,é sans
doute par les légataires, et après !un délai de six mois,
il fit poser des affiches qui indiquaient au i 5 juillet les
premières enchères^ e t l’adjudication définitive au 30 du
même mois.- >an >
•
•
•
1 lié '30 juillet 1 yg2, l’assemblée déjà formée, les enché
risseurs réunis, le sieur Capelle père, manifestant alors;
le projet qu’il avoit formé depuis long-temps de ne point
acquitter les legs-faite par madame de Galieu, projet suivi
depuis par son fils; le sieur Capelle, dis-je, fit signifier
à l’exécuteur testamentaire, et au notaire chargé de rece
voir les enchères, un acte d’appel du jugement qui ordonnoit la vente. Cet incident surprit et troubla l’assem
blée; et ori vendit seulement quelques petits biens épars,
à l’aliénation desquels consentoit le père de l’héritier.- ■
L ’cîüécuteur testamentaire auroit fait sans doute statuer
sur l’appel du jugement du 27 janvier; mais il n’y suxvécut pas long-temps : son. fils prit alors l’administration
et la jouissance dés biens de la succession. Ainsi Tavoit
ordonné lu testatrices jusqu’à ce que son héritier eut
atteint l’âge de vingt-cinq arts : mais ce qu’elle ne vo.ulqit
pas,
�'
C *7 )
p
pas, mais ce qu’elle défendoit, il abandonna bientôt après
les rênes de l’administration qui lui ëtoit confiée, et toute
■la succession 7 au sieur Capelle’ (père, qui mourut avec la
joie de la transmettre entière à son'fils, mais avec leremords
peut-être d’avoir payé dUngratitudè la bienfaitrice de sa
famille, qui s’étoit défiée de lui avec raison, et qui avoit
■nommé à son ^héritier d’autres ’ administrateurs >que son
père.
: Ainsi l ’héritier de madame 'de Galieu possède depuis
douze ans une fortuné qui ne lui appai'tiendroit même pas
encore, car il n’aura vingt-cinq ans que Tannée prochaine!
Ainsi n’ont pas été'acquittées les dettes dè ¡la charité-et
de la religion, -que les revenus -dont il jouit devoient
éteindre ! Ainsi s’accomplissent les volontés suprêmes de
ces hommes que la justice place sur leur lit'domort comme
des législateurs dont toutes les paroles deviennent des
oracles! Les exécuteurs testamentaires exécutentiainsi les
vœux les plus chers de leurs amis qui ne sont plus! - i .
Si quelque chose peut excuser lafoiblesse derceux q u V
voit choisis madame de'Galieiij c’est (le sinistre, étatde’la
. France au moment où ils remirent ou plutôt laissèrent
échapper le pouvoir confié à leurs mains. Le'soleil de 1793
avoit lui : tout se bouleversoit, toutpérissbit, et les talens
*et la vertu, et la religion et la ‘patrie.
•
Alors parurent ces lois à ja m a i s inémorable's, qui dé
clarèrent qu’il 11’y avoit plus.de pauvres-, que la bienfai
sance nationale 11’en souffriroit plus. Puisqu’il n’y avoit
plus de pauvres, les biens que les siècles avoient accu
mulés pour leur soulagement devenoieut inutiles : /a bicnJaisance nationale s’en empara. Un décret rendu cil 17.94
G
�(i8)
réunit au domaine de l’état toutes les propriétés des hos
pices, toutes les fondations particulières faites en faveur
de l’indigence ; en un mot, l’actif et le passif de tous les
établissemens de charité. Les hôpitaux devinrent des ca
sernes, les maisons de secours des maisons de force , les
églises, le dirai-je! des écuries.........Qùi auroit alors ose
réclamer la fondation faite par madame de Galieu? Les
Dames de la miséricorde étoient dispersées plutôt que
supprimées ; les unés avoient fui aux approches de l’orage,
d’autres habitoient les prisons, le reste gémissoit en silence.
Ges jours affreùx semblent déjà loin de nous. Un héros
a paru, suivi de la victoire, et de la sagesse plus utile que
la ^victoire : sesi premiers soins ont- été de rendre leur
cours-à rces soùrces salutaires, et pures qu’alimente la cha
rité publique*. Il à-rétabli les hôpitaux dans leurs biens;
il a relevéi ces autels à l’ômbre desquels les infortunés
trouvôient toujours un refuge ; il a remplacé, s’il est pos
sible \ les Dames de la miséricorde, les Dames de la cha
rité , et tant d’auti’és anciens et dignes tuteurs des pauvres,
en créant; dans'la,plupart'des villes de l’empire, des bu
reaux de bienfaisance, i
.Les administrations de ces nouveaux établissemens sont
distinctes descelles des hôpitaux, aussi-bien que leurs attri
butions. Le gouvernement a ordonijé que les hôpitaux
aüroient des administrateurs particuliers, chargés de-régir
les biens qui leur étoient rendus, et ceux que des personnes
bienfaisantes consàcreroient a fonder de nouvelles places,
ou h conserver les anciennes, dans ces tristes asiles des dis
grâces de la nature et de la fortune.
,
Les bureaux de bienfaisance sont une réunion d’hommes
�( 19 )
charitables, qui,nommés par le gouvernement, recueillent
sous ses auspices les dons que la pitié oiï’re à l’infortune,
et surtout à l’infortune qui se cache; ils sont chargés de dis
tribuer ces secours qu’on appelle à domicile. Un arrêté du
gouvernement leur attribue tous les biens affectés à l’entre
tien des Hospitalières et Filles de charité, toutes les fon
dations relatives à des services de bienfaisance, à quel titre
et sous quelque dénomination que ce soit. C’est pour les
bureaux de bienfaisance que le comte de Rumford a ima
giné ses soupes économiques. Ce sont eux qui sont chargés
- de les distribuer.
Un de ces établissemens a été formé à Aurillac ily a trois
ans : d’anciens magistrats le composent; et les pauvres n’ont
qu’un l’eproche à. leur faire, c’est de ne leur offrir que du
zèle, et de ne leur donner que des promesses.
- On a dit quelle étoit la misère des pauvres d’Aurillac
avant que les Dames de la miséricorde s’occupassent de les
soulager. Ces dames, dont plusieurs vivent encore, n’ont
pas repris leurs fonctions, devenues sans objet, depuis que
le gouvernement a chargé de l’administration des biens des
pauvres les bureaux de bienfaisance : celui d’Aurillac se
propose d’engager quelques-unes de ces femmes respectables
à se joindre à lui pour la distribution des secours à domicile.
Ces secours ont été nuls jusqu’à ce jour; la seule esperance
des pauvres, c’est le legs qui leur a été fait par madame de
Galieu.
On a dit que ce legs n’avoit été paye ni par l’exécuteur
testamentaire, ni par l’héritier de madame de Galieu. Le
bureau de bienfaisance, chargé par les lois de veiller aux
intérêts des pauvres, ne tarda point à le demander au siçur
G 4
.
.
�(
20
)
Capelle, qui fut cité en conciliation , et ensuite devant les
juges de première-instance d’Aurillac, pour être condamné
à le payer. Le sieur Capelle commença par récuser tous ses
juges, sur de futiles prétextes ; et bientôt il obtint de la cour
de cassation un arrêt qui renvoya la connoissance de l’af
faire aux juges de première instance de la ville de Saintl'Iour.
Xes pauvres auroient- pu1 se plaindre de cet arrêt, et
peut-être le faire réformer. Il- avoit .été obtenu sur une
requete qui ne leur avoit pas-été communiquée : il étoit
rendu sur un faux exposé des faits. Mais., certains de la
justice de leur cause, ils crurent qu’aucun tribunal ne
devoit leur paroître suspect, et ils citèrent à Saint-Ftour
l’héritier de madame de Galieu.
Cependant-, suivant les dispositions de l’article 3 de
l’édit de 1749, toutes les fondations devoient être homo
loguées par le parlement, qui, par attribution spéciale,
remplaçoit le prince dans cette fonction. Cette formalitén’avoit pas été remplie à l’égard du legs fait par madame
de Galieu ; la suppression des parlemens ne l’avoit pas
permis. Les pauvres crurent devoir demander au gou
vernement un arrêté q u i, tenant lieu d’homologation,
approuvât le legs, autorisât le bureau de bienfaisance
à l’accepter en leur nom, et fit connoitre à l’héritier de
madame de Galieu que le bureau exerçoit tous les droitsdes Dames de la miséricorde.
Toutes les pièces, tous les renseignemens nécessaires
furent envoyés h Paris. Le ministre de l’intérieur se fit
rendre compte de l’aflaire, et, sur son rapport, fut donné,
le 7 juillet 1802, l’arrêté du gouvernement qu’on va lire.
�( 21 )
Copie de VArrêté des Consuls.
Les consuls de la république, sur le rapport du mi
nistre de l’intérieur ,
- ’
Le conseil d’état entendu,
'
•
Arrêtent ce qui suit :
A r t i c l e i er.—Le legs de 80000
fait à l’Œuvve delàmiséricorde de la ville d’Aurillac, par madame Françoise-;
Dorothée de Cabridens, veuve Galieu, suivant son tes
tament du 4 octobre 1785., reçu par Marmontel, notaire'
à Aurillac, enregistré, sera accepté au- nom des pauvres ■
de ladite ville par le bureau de bienfaisance , rempla
çant aujourd’hui l’Œ u vre de;la m iséricorde, pour la dis-)
tribution des seco.ui’s à domicile.
A r t , 2 .— Le montant de ce legs sera réuni aux autres
biens et revenus des pauvres de. la ville d’A urillac, pour
être administré et régi par les membres du bureau de
bienfaisance, a l’instar des autres biens des établissemens
de charité.
A r t . 3. — L e legs étant fait en argent, il sera employé
en acquisition de rentes sur l’état.
A r t . 4 . — Les administrateurs du bureau de bienfai
sance fero n t, sur les biens de la succession de la tes
tatrice, tous les actes conservatoires qu’exigera la garantie1
des droits des pauvres d’Aurillac.
A r t . 5 . — En cas de contestation ou de refus de la
part des héritiers, les administrateurs du bureau de
bienfaisance poursuivront la délivrance du legs devant
�( 22 )
les tribunaux, en s’y faisant préalablement autoriser, dans
'
les formes voulues par les précédens arrêtés.
A r t . 6. — U ne somme annuelle de 65 o ^ sera pré
levée sur le revenu du legs, pour être employée par
le maire à l’instruction de la jeunesse, sous la direction
et la surveillance du préfet du département.
A r t . 7. — Pour remplir les autres intentions de la
testa’trice, il sera pareillement prélevé, sur le montant
des rentes, une somme annuelle de 100 0^ , représen
tant au denier vingt un capital de 20000
, pour êti'e
employée chaque année à secourir les prêtres de la ville
et des environs, qui se trouveront dans le besoin.
- A r t . 8. — E n cas’ qu’il n’y ait pas de prêtres indigens,
ou en assez grand n o m b re, la somme ou le restant de la
somme sera distribué aux pauvres par le bureau de bien
faisance.
■ A r t . 9. — Le ministre de l’intérieur est chargé de
l’exécution du présent arrêté, qui sera inséré au Bulletin
des lois.
L e premier consul; signé B o n a p a r t e ,
Tel est l’arrêté du gouvernement, en faveur des pauvres
d’Aurillac. Le bureau de bienfaisance, autorisé par le pré
fet, a poursuivi le jugement de 1 aiïaire, qui lui paroissoit
décidée à l’avantage des pauvres par cet arrêté, l/es pre
miers juges n’en ont pas eu cette idée ; le procureur im
périal seul a conclu au payement du legs. Quant aux juges
de St.-rFlour, ils ont pensé que madame de Galieu n’avoit
pas fuit un legs aux pauvres d’Aurillac, mais bien à l’Œuvre
�C 23 )
de la miséricorde, qu’ils ont considérée comme un corps ;
ils ont jugé que ce prétendu corps étoit une communauté
illicite, non approuvée, qui n’avoit pas été fondée par des
lettres patentes; que par conséquent elle étoit nulle et inca
pable de recevoir des libéralités. Par ces motifs, les premiers
juges ont déclaré le bureau de bienfaisance non-recevable
dans sa demande. '
Analyser les erreurs qui servent de base à leur décision,
et réfuter successivement les fausses conséquences déduites
de ces deux faits supposés constans et qu’il falloit prouver,
savoir, que les Dames de la miséricorde formoient une
communautéet que madame de Galieu a légué à cette
communauté, et non aux pauvres, la somme que son frère
avoit destinée h des œuvres de charité , ce seroit vouloir,
sans être utile à la cause , aifoiblir l’intérêt qu’elle doit
inspirer. Etablissons la justice de la demande , et laissons
l’éclat de la vérité dissiper les ténèbres de l’erreur.
.
La cause, en cet état,présente des questions également MOYENS,
importantes aux yeux du barreau et des hommes du monde.
On n’agite plus ici des discussions purement civiles. Ce
n est point la fortune d’un particulier • c’est l’ordre, c’est le
droit public qui est en suspens.
Sera-t-il permis à un tribunal inférieur de s’ériger en
reformateur des arrêtés du gouvernement, et de déclarer
les pauvres d’une ville considérable incapables de recevoir
un legs, lorsque le gouvernement les a reconnus capables
d’en profiter ?
Ces mêmes juges, s’ils n’ont pas excédé leur compétence,
n’out-ils pas porté atteinte au droit public, en déclarant les
�( 24 )
,
pauvres d’Aurillac non -recevables à demander un legs
qui leur a été fait en 17 8 5 , et que l’arrêté du gouver
nement, tenant lieu d’homologation, a rendu valable?
Voilà les deux questions de droit public que fait naître
cette affaire; leur examen est l’objet principal de ce méïnoire. On y ajoutex’a une seconde partie, dans laquelle on
réfutera rapidement les moyens subsidiaires opposés par
l’héritier de madame de Galieu devant les premiers juges ;
savoir, que le legs a fait retour à la succession, et que du
moins les magistrats doivent le réduire.
P R E M I È R E
PARTIE,
On a dit que les deux propositions qu’il s’agit de prou
ver dans la première partie de ce mémoire, l’incompétence
des premiers juges, l’erreur dans laquelle ils sont tombés,
sont des questions de droit public. C’est que les fondations
et tout ce qui les concerne font partie du droit public. Pour
le faire v o ir , et pour établir en même temps la capacité
des .pauvres en général à recevoir des libéralités, il est
nécessaire de rappeler des principes qui s’appliquent
également aux deux propositions à démontrer.
Les pauvres, en nom collectif, dit J . M. Ricard,
forment un corps irrégulier que les lois n’ont point créé,
et qui subsiste par soi-meme, toujours renouvelé, tou
jours existant, Les législateurs de Rome, aussi-bien que les
nôtres, ont toujours autorisé les dispositions faites à leur
profit. Elles sont même de toutes les libéralités les plus
favorables.
XI est inutile d’en donnor la raison, Chacun voit que lo
nécessaire
�( *5 )
^
nécessaire du pauvre fait le superflu du rich e, et que c’est
à la bienfaisance éclairée à réparer les injustices de l’aveugle
'fortune.'
,■
‘ Les dons faits aux pauvres, considérés comme un corps f
se nomment en général fondations. Les fondations sont
de droit public, parce que le gouvernement seul crée t
établit les corps, et'prononce sur tout ce qui les regarde.
C’est par cette' raison que divers édits ont pourvu à la
manière dont les’ fondations pourvoient être faites, à leur
acceptation et à leur administration au nom des pauvres.
La déclaration de 1749 formoit le dernier droit sur cette
matière avant la révolution. En voici les dispositions r o
latives à la cause :
.
'
<
Déclaration de 17 4 9 .
A r t i c l e ïe r.— Voulons qu’il ne puisse être fait aucun
nouvel établissement de chapitres, collèges, séminaires,
maisons ou’ communautés religieuses, même sous prétexte
d’hospices; congrégations, confréries, hôpitaux ou autres
corps, et communautés, soit ecclésiastiques, séculières
ou régulières, soit laïques, de quelque qualité-qu’elles
soient; ni pareillement aucune nouvelle création de chai
pelles, si ce n’est en vertu de notre pei'mission expresse,
portée par nos lettres patentes , enregistrées en nos p arlemens ou conseils supérieurs.
A r t . 2 . — Défendons de faire à l’avenir aucune dispo
sition par acte de dernière volonté, pour fonder un nou
vel établissement de la qualité de ceux qui sont menv
tionnés'dans l’article précédent, à peine de nullité, quand
D
�»
.
..
( 26 \
.
même la disposition seroit faite à la charge cPobtenir nos
lettres patentes. ,
'
A r t . 3. — N ’entendons comprendre dans les deux ar
ticles préeédens les fondations particulières qui ne tendroient à l’établissement d’aucun nouveau corps, collège
ou communauté, ou à l’érection d’un nouveau titre de
bénéfice, et qui n’auroient pour objet que la célébration
subsistance d?étudions ou de pauvres
ecclesiastiques nu séculiersyetc*, ou autres oeuvres pieuses
de messes ou o b i t s
de même nature et également utiles au public j à. l’égard
desquelles fondations il ne sera point nécessaire^’obtenir
nos., lettres patentes, et il, suffira, de faire h&mologuer les
actes ou dispositions qui les contiendront,, eh nos parle*mens et conseils supérieurs, sur les conclusions ou réqui
sitions de'nos procureurs généraux. Voulons qu’il soit en
même temps pourvu par nosdits parlemens à l’adminis
tration des biens destinés àTexécirtion' desdites
fondations /*
•
et aux comptes- qui en seront rendus-..
A r t . 9* — Annulions tous les actes ou: dispositions qui
pourroient avoir été faits directement ou indirectement
en. faveur des- établissement mentionnés en l’article I er..
A r t . 29-— Toutesles demandes formées en exécution du
présent edit seront portées.directement en la grand’ehambue du parlement, et ce privativement à tous autres juges,
pour y être statue sui’ lfîS conclusions de notre procureur
général.
-
,
*
^
*
.
D ’après cette déclaration , il a sufii jusqu’il nos jours
pour faire valoir ,les fondations destinées à la subsistance'
des pauvres, d’obtenir l’homologation du.parlement, qui
�( *7 )
^
rcmplacoit le prince dans cette fonction, et qui étoit
clj«rgé de nommer des administrateurs aux legs qu’il
approuveroit.
Depuis que l’ompereur a pris les rênes de l’état, le
droit public a changé relativement aux fondations. Ce
ne sont plus les cours d’appel qui les autorisent. Le gou
vernement s'est réservé ce soin*, et il a nommé à jamais,
pour les administrer, les/bureaux de bienfaisance et les
administrateurs des hôpitaux. Cette prérogative du chef
de l’état lui demeure attribuée pour toujoui’s par l’article
910 du Code civil, portant : a Que les dispositions au
« profit des hospices, des pauvres d’une commune, ou
« des établissemens d’utilité publique , n’auront leur
« effet qurtautant qu’elles seront autorisées par un arrêté
.« du gouvernement.
^
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.
En cet état de choses, il s’agit d’examiner s’il a été
T
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.
Incompepermis a un tribunal inférieur de s’ériger en réformateur tence des pred’un arrêté du gouvernement, et de déclarer les pauvres ¡¡¡^ipJnond’Aurillac incapables
cer
?".r des
,la
, # de recevoir un don dont le gouverO
capacité
îiement les avoit jugés capables de profiter.
pauvres.
Jamais le tribunal de Saint-Flour n’a pu s’arroger
ce droit. Ce n’est point à ceux qui tiennent la balance
de la justice, à diriger le gouvei'uail de l’état. Le chef
de l’empire prononce seul sur l’existence et la capacité
des corps qui font partie de son empire. Ses actes su
prêmes ne sauroient être ni suspendus, ni, réformés, ni
annuités par les autorités secondaires. Le droit public
est aujourd’hui l’arche sacrée que les cours elles-mêmes
ne peuvent toucher ; et des magistrats inférieurs ont bien
D a
p r o p o s itio n
Jj
j’
*
’
�( 28 )
osé y porter atteinte, en déclarant nul un legs approuvé,
autorisé parle gouvernement, sous prétexte que le gou
vernement n’a pas autorisé, approuvé le corps auquel
il a été laissé, et par conséquent le legs lui-même !
Eh quoi! le gouvernement aura reconnu la capacité
des pauvres d’Aurillac pour accepter des libéralités en
i y 8 5 , par l’entremise des-Dames delà miséricorde; et
un tribunal de première instance déclarera les pauvres
non - recevables dans leur demande, précisément par
défaut de capacité! Cependant le gouvernement-est l’uni
que juge, de cette capacité : le gouvernement seul peut
donner ou refuser aux( pauvres les qualités nécessaires
pour recevoir comme pour demander. Ainsi c’ est en vain
que le ministre de l’intérieur, que le conseil d’état, que
l’empereur lui-même, ont jugé que les pauvres avoient
été l’objet, et les Dames de la miséricorde les ministres
de la bienfaisance de madame de Galieu ! c’est en vain
, que l’empereur, voyant que de pieuses dames avoient
été remplacées ,par des hommes charitables, leur a or
donné d’accepter et de recueillir les dons de madame de
' Galieu au nom des pauvres ! en vain il a réglé remploi
du bienfait,• ( #conformément
aux
vœux de ■la
bienfaitrice!
•
'
i
t.- :/ . 1
.
inutilement il a voulu qu’une partie du legs fût appliquée
ü i’inslruction de la jeunesse
y une. autre consacrée au
soulagement des ecclésiastiques indigens ; une autre des
tinée à secourir,- dans leurs( humbles demeures, les pau■vres de toutes les classes! Ce règlement d’administration
publique a été
pesé-dans
la balance des juges de Saint-
jFlour; e t, trouvé trop léger, il s’évanouira comme un
songea devant l’intérêt personnel de l’héritier de madame
�C 29 )
de Galieu. Nous avons droit de mieux augurer de la
sagesse des magistrats suprêmes : c’est à eux qu’il est
réservé de venger l’ordre public d’un tel scandale.
}
Il seroit superflu de prétendre que l’arrêté du gou
vernement est contraire aux deux premiers articles de
rédit de 174 9 , puisqu’il autorise le bureau de bienfai
sance à accepter, au nom des pauvres, un legs qui n’a
pas été laissé aux pauvres, mais à l’Œuvre de la miséri
corde, communauté non approuvée, nulle par consé
quent , et au nom de laquelle le bureau ne peut rien
demander. Il est certain d’abord que l’arrêté n’est point
Contraire à l’article 1 e1'*, mais bien conforme à l’article 3
de l’édit de 1749- Cet article autorise les legs laissés aux
pauvres, à condition qu’ils seront homologués. Lie gouver
nement approuve et homologue le legs fait par madame
de Galieu, parce qu’il le considère comme fait aux pau
vres seuls, par l’entremise des Dames de la miséricorde.
Il ne faut que relire le texte de l’arrêté, pour se convainci’e de cette vérité. Mais enfin, et quand on supposerroit que le gouvernement a dérogé à l’édit de 174 9 , il
n’appartient pas, cncore une fois, aux autorités judi
ciaires d’annuller les actes émanés du pouvoir suprême.
Si l’arrêté a été surpris, que l’héritier de M cle. de Galieu
se pourvoie au conseil d’état pour le faire réformer.
Une objection plus solide, en apparence, sera de sou
tenir qu’en vain le gouvernement, par l’article 5 de son
arrêté, auroit renvoyé aux tribunaux la connoissance
des contestations qui pourroient s’élever au sujet de la
délivrance du legs fait par madame de Galieu , s’il ri’étoit
pas permis aux juges de s’écarter de l’tUTÔté.. Il est vrai
�C
3°
)
que l’ un des articles porte : « Qu’en cas de contestation^
« ou de refus de la part de l’héritier, le bureau de bien
« faisance poursuivra la délivrance du legs devant les
tr tribunaux. » On convient que l’autorité judiciaire est
chargée d’ordonner le payement du legs, en cas que Fhér
ritier s’y refuse, ou qu’il élève des difficultés mal fon
dées. C’est une formule répétée dans tous les arrêtés semr
blables, dont sont remplies les archives des lois. Mais
i’héritier ne peut contester, les juges ne peuvent exa
miner, que ce qui a rapport au droit civil; savoir,
la validité du testament, la capacité de disposer de la
testatrice , la quotité du legs , par exemple. Tout ce qui
est de droit public est au-dessus de leur atteinte. La capa
cité des pauvres, pour recevoir comme pour demander,
fait partie de ce même droit public ; et le gouvernement
seul s’est réservé d’en décider. Cependant c’est précisée
ment par défaut de capacité que les premiers juges ont
déclaré les pauvres d’Aurillac non-recevables dans leur
demande. C’est trop abuser sans doute de l’ambiguité
appax*ente des clauses de l’arrêté. Comment supposer le
gouvernement assez contraire à lui-même dans les arrêtés
qu’il rend chaque jour au profit des pauvres, pour per
mettre aux tribunaux de prononcer sur la capacité des
demandeurs , lorsqu il a reconnu cette capacité par l’acte
même qui saisit les juges? Comment concevoir le sens
de l’article 910 du Code civil, qui yeut que les disposi
tions en faveur des pauvres n’aient d’eiïét qu’autant qu’ils
auront été autorisés à recevoir et à demander par le gou
vernement, si les juges peuvent, après l’arrêté rendu,
déclarer que les légataires n’ont pas de qualité pouy
demander.
�( 31
3
^
Il est inutile d’employer d’autres raisons à réfuter une
objection qui n’est que spécieuse; et l’on croit avoir suf
fisamment prouvé que les premiers juges ont excédé leur
compétence , en déclarant les pauvres d’Aurillac nonrecevables dans leur demande, par défaut de capacité. Si
cependant on pouvoit penser encore que le tribunal de
Saint-Flour a eu le droit, malgré l’arrêté du gouverne
ment, de prononcer sur la capacité des demandeurs, il
sera facile d’établir que ce tribunal a y dans tous les cas,
porté atteinte au droit public, en déclarant les pauvres
d’Aurillac non-recevables à demander un legs qui leur
avoit été fait en 178 5, et que l’arrêté du gouvernement,
tenant lieu d’homologation,, a rendu valable..
On l’a déjà prouvé : les legs farts aux pauvres sont les p r o p o s i t i o n .
plus favorables de tous. L ’article 3 de l’édit de 1 7 4 9 ren- Le legs a
ferme à ce sujet des dispositions précises, que voici : « Les été fait aux
1
pauvres d’ Au« jondations laites pour la subsistance de pauvres étu- riiiac, et rar
« dians, ecclésiastiques ou séculiers, seront valables , à la veme^nent"1",
« charge de faire homologuer par le parlement les actes d’homoioga-'
« qui les contiendront. » Le parlement est chargé, par tion >le rcntl;
le raeme article, de nommer des administrateurs aux iondations qu’il approuvera*
Le legs fait par madame de Galieu, s’il a été laissé aux
pauvres, et non à l’œuvre de la miséricorde,, comme le
prétendent les premiers juges, devoit donc, pour devenir
Valable, être homologué par le parlement.
La révolution n’a point permis aux tuteurs des pauvres
de remplir cette' formalité : mais le gouvernement actuel
y a suppléé; et ou a fait voir que son arrêté tenoit en-
�C-3 * )
'fièrement lieu d’homologation. L ’évidence de cette vérité
frappe d’ailleurs tous les yeux. Il ne s’agit que de prouver
1 que le legs fait par madame de G-alieu a été.laissé nom
mément non moins qu’uniquement aux pauvres d’Aurillac.
Mais cela même devient évident par les circonstances
qui ont précédé le legs, par les termes du legs lui-même.
L ’abbé de Cabridens, homme d’une bienfaisance éclairée
-par la religion, se voit riche au delà de ses espérances >
•et par son patrimoine, et par le don de la terre de Grialou
que lui a fait sa sœur : il n’a que des parens éloignés ; il
veut faire d’utiles aumônes ; il jette les yeux autour de
lui, et voit les pauvres d’Aurillac dénués de tout secoursr
et même du bienfait inestimable de la première instruc
tion. Il commence par donner, en 17 7 7 , une rente de
6 5o
et une somme,de 10000 ^ pour l’instruction de la
jeunesse. Et qui nom m e-t-il pour diriger cette bonne
œuvre? les Frères de la doctrine chrétienne.
Résolu de verser d’autres bienfaits encore sur.les pauvres
de la ville qui l’a vu naître, il ne veut pas charger ses
derniers jours des pénibles soins de vendre ses propriétés;
, i l ne veut pas dépouiller une sœur qui lui est chère : c’est
à elle qu’il confie, avant de mourir, l’exécution de ses
pieux desseins. Etoit-ce en effet les Dames de l’œuvre de
la miséricorde qu’un homme aussi bienfaisant avoit en
vue, ou les indigens qu’elles soulageoient? Cet ecclésias
tique éclairé, qui, dans l’acte de 17 7 7, prévoit que les
Frères de l ’ é c o l e chrétienne pourroient être supprimés,
■et donne en ce cas la rente de 65o
à la ville, pour
l’instruction de la jeunesse, ne fondoit-il que sur le pré'tendu corps appelé l’Œuvre de la miséricorde^ et non
pas
�( 33 )
pas sur les pauvres, objet des secours de l’ GEuvre ? N e
l’en tend-on pas parler par la bouche de sa sœur, partager,
distinguer les indigens en trois classes, pauvres à instruire,
pauvres ecclésiastiques, pauvres honteux? Ecclésiastique,
il témoigne une prédilection spéciale aux ecclésiastiques
indigens; bienfaiteur éclairé, il secourt, par préférence,
l’infortune qui rougit de solliciter des secours.
Non, jamais les magistrats ne croiront que l’abbé de
Cabridens ait eu de pieux desseins en faveur des Dames
delà miséricorde, et non en faveur de ces pauvres qu’elles
avoient choisis pour l’objet de leurs soins : cependant
madame de Galieu ne fait, dit-elle, qu'exécuter les pieux
desseins de sonfrère. Si donc l’abbé de Cabridens n’avoit
en vue que les pauvres, si madame de Galieu 11’a fait
qu’exécuter ses charitables volontés, ce n’est qu’aux pau
vres qu’elle a pu , qu’elle a dû léguer, qu’elle a légué, et
à trois classes de pauvres distinctes et clairement désignées :
aussi dit-elle qu’elle lègue aux pauvres. Voici les expres
sions dont elle! s’est servie : « Et pour exécuter les pieux
te desseins qui m’ont été communiqués par l’abbé de
« Cabridens , mon frère, avant sa m ort, je lègue aux
« pauvres de TŒuvre de la miséricorde d’Aurillac, la
« quelle Œuvre est administrée, etc........ la somme de
*' 80000
dont une partie sera employée à l’instruction
« de la jeunesse, une autre au soulagement des pauvres
« ecclésiastiques, le reste enfin à secourir les autres peu« vres que l’Œuvre a coutume d’assister. »
Les circonstances qui ont précédé le legs s’accordent
donc avec les termes dans lesquels il est conçu , pour
montrer qu’il a été fuit aux pauvres, et à trois,classes de
E
�( 34 ) '
*
pauvres, et que par conséquent les Dames de l’œuvre
n’étoient chargées que d’en toucher le capital, de le placer
en contrats de r e n te e t d’en distribuer le revenu -, le tout
de l’agrément du parlement.
>
.
•Tous les esprits ne sont pas également frappés de la
justesse d’une preuve qui n’est formée que par une réunion
de circonstances et d’inductions tirées de ces circonstances.'Appelons le raisonnement au secours des faits , et que
toutes les armes de la parole fassent triompher la vérité.
• Si le legs étoit laissé aux pauvres d’Aurillac, sans autre
explication-, personne ne douteroit qu’il ne fût valable.
Toute la difficulté vient donc de ce qu’il est laissé aux
pauvres de l’Œuvre de la miséricorde, d’où l’on prétend
induire qu’il est fait à l’Œuvre elle-même. Eh bien, qu’on,
admette l’hypothèse où il seroit fait simplement aux pau-,
vres d’Aurillac : que seroit-il arrivé? .
•
•
Il
étoit nécessaire que le parlement homologuât le tes
tament. Qui auroit demandé l’homologation ? L ’exécuteur
testamentaire, dira-t-on, l’auroit demandée. . . Soit; mais
qui auroit reçu les fonds, qui les auroit administrés? Les
administrateurs choisis par le parlement; car l’édit de 1749
le charge d’en nommer. Eh bien ! s’il eût plu au parle
ment de choisir les Dames de la miséricorde, pour dis
tribuer les fonds, et leur supérieure pour les recevoir,
n’étoit-il pas le maître? Et quel choix plus sage auroit pu
faire l’autorité publique? C’étoit doubler le prix du bien
fait que d’en confier la distribution à de si pures mains ;
c’étoit commettre la vertu'modeste, la piété éclairée, la
charité vigilante, à l’exécution des derniers vœux de la
vertu, de la piété, de la charité.
'
■-
�'•
C 35 )
;
'
- Objectera-t-on que le parlement n’auroit pas nommé
les Dames de la miséricorde? Pourquoi? parce qu’elles
formoient un corps illicite. 11 faudroit d’abord prouver
qu’elles formoient un corps. Mais ensuite, et toujours en
supposant que le legs eût été fait simplement aux pauvres
cl’Aurillac, l’autorité publique ne reconnoît pour corps J
dans l’état, que ceux que sa volonté a créés. Le parlement
n’auroit donc point jugé illicite un corps qu’il n’auroit
pas même reconnu pour corps. Informé par le substitut
du procureur général, auprès du bailliage d’Aurillac, des
bienfaits et du zèle des Dames de la miséricorde, lepar->
lement les auroit sans doute commises à la distribution du
don de madame de Galieu. Peut-être même il auroit or-
donné que les fonds seroient versés entre les mains de ces
dames; peut-êti-e aussi il auroit exigé alors que les échevins veillassent à l’emploi des sommes en contrats de rente,
suivant l’intention de la testatrice , et que les contrats
fussent passés en leur nom : précaution sage, parce que
les Dames de la miséricorde n’étoient qu’une associationpassagère , et parce que la ville et son corps municipal
devoient toujours durer. ,
Ici triomphe la justice de la cause des pauvres; la vérité
paroît ici dans tout son jour. Ce que le pax-lement auroit
fait', auroit pu faire, la testatrice l’a pu faire : elle l’a fait.
XiC parlement auroit pu choisir , pour administrer les*,
fonds laissés par madame de Galieu, les Dames de la mi
séricorde; madame de Galieu les a choisies, elle a pré-.,
venu le choix de l’autorité : elle l’a indiqué du moins
car les fondations, on le répète, sont de droit public, et
l’autorité publique peut changer les administrateurs nom
E 2
�(3 0
més par le fondateur, comme elle peut confirmer son
choix. Il falloit bien que le legs fût reçu au nom des
pauvres, fût placé au profit des pauvres, fût distribué à
ces mêmes pauvres. La testatrice a chargé les Dames de
la miséricorde de tous ces soins, toujours sous la condi
tion que l’autorité publique ratifieroit ses volontés particulièi*es.
i
Que les premiers juges viennent dire maintenant que
l’Œuvre de la miséricorde étoitun corps, et un corps non
approuvé ; qu’ils tirent des termes mêmes dans lesquels est
conçu le legs, la preuve que la testatrice regardoit l’CEuvre
de la miséricorde comme une communauté, comme un
corps existant dans l’état, et qui devoit toujours exister.
Cela n’est pas constant : mais enfin qu’importe l’opinion
qu’avoit la bienfaitrice de ceux qu’elle chargeoit de la dis
tribution de son bienfait, si elle ne les regardoit en effet
que comme des administrateurs, comme on vient de le
prouver ?
.
•
i L ’Œuvre même, fût-elle un corps (ce qu’on nie), ce
corps ne-fût-il pas approuvé, quelle loi empêehoit la
testatrice de préposer un tel corps i\ la distribution de
son bienfait, toujours sous la’ condition que le parlement
approuveroit ce choix?
.
,
L ’édit de 1749 v e u t-il que les dispositions faites aux
pauvres soient annullees, lorsque la distribution en a été
confiée à des personnes incapables, ou à des corps non
approuvés? Non.: l’article 3 de 1édit- confirme toutes les
fondations en faveur des pauvres, à la charge de les faire
homologuer: mais il ne dit pas que si l'administration a
été- laissée à des mains incapables, les fondations seront
�(
37
)
aimullécs; il'ordonne seulement au parlement de nom
mer des administrateurs à la fondation. N’est-ce pas dans
le cas où ceux qui auront été nommés seront indignes ou
incapables de cette honorable fonction? Peut-on eXpli*
quer autrement cette dernière disposition de l’édit, et
seroit-elle applicable, si-les administrateurs choisis étoient
des personnes dignes de toute la confiance publique, oii
des corps légalement établis, tels que des hôpitaux ou
des fabriques ?
• *
L
C’est en vain que l’on s’aveugle sur la justesse de cetté
conséquence, et que l’on soutient que, s’il en étoit ainsi,
rien ne seroit plus facile que d’éluder la prohibition de
l’édit, en léguant indirectement à des corps illicites, qu’on
nommeroit simples administrateurs en apparence. Erreur
évidente ! Le corps, ou la personne à qui le legs seroit
laissé, ne s’opposeroit-il pas à l’avidité du corps chargé
de l’administration? Le parlement ne nommeroit-il pas
d’autres administrateurs? Eh quoi! madame Galieu choisit
trois classes de pauvres pour ses légataires ; elle rend son
testament public, notoire dans la ville entière d’Aurillac,
par l’ordre de vendre tous ses biens d’Auvergne ; elle or
donne de placer le capital de son legs, pour n’en distribuer
que les revenus; et l’on osera dire que l’Œuvre de la misé
ricorde , que ce corps chimérique qui n’existe que dans
l’imagination du sieur Capelle et des premiers juges, auroit
pu s’enrichir des dépouilles des pauvres, et détourner à
son profit la source des charités d’une femme vertueuse!
C’est trop abuser de l’obscurité qu’on voudroit répandre
sur la cause la plus claire.
Ne laissons pas môme à l’erreur le dernier retranche-
�...
-
C 38 )
•
ment qu’elle rélève contre la vérité. L ’Œuvre delà misé
ricorde, ce corps illicite! cette communauté illégale! qui
avoit une supérieure! une assistante! un receveur! un
titre particulier ( disent les premiers juges)! n’étoit point
un corps, n’étoit point une communauté; c’étoient quel
ques dames vertueuses rassemblées pour foire le bien. Les
communautés-ne meurent-jamais. Ce sont des personnes
dans l’état. Elles ont leurs biens, leurs statuts, leurs chefs:
Les dames de la miséricorde étoient des femmes du monde,
jnariées, veuves , célibataires, qui ne faisoient pas de
vœux, qui n’avoient pas de biens. Elles s’étoient chargées
seulement de distribuer ceux qu’on donneroit aux pauvres.
Qui a appris aux premiers juges qu’elles avoient un titre
particulier, une assistante, une supérieure, un receveur?
Les Dames de la miséricorde n’avoient pas de titre par
ticulier. On les nommoit à Aurillac D am es de l’œuvre
de la m iséricorde, comme dans d’autres villes Dam es
de la charité. Ce mot d'œuvre ne désigne point un corps
nouveau : il signifie travail, et indique les modestes fonc
tions des femmes pieuses qui s’étoient dévouées au service
des pauvres. X<es Dames de la miséricorde n’avoient pas
d’assistante. Iæur prétendu receveur, c’étoit l’une d’elles,
çhoisie entre les autres pour recueillir les dons des per
sonnes généreuses. Elles n’avoient pas de chefs. Madame
de Fontanges, il est v ra i, est appelée par madame de
Galieu leur supérieure ; mais c’est un titre imaginé par
la testatrice, ou uniquement inventé pour désigner celle
que scs égales a voient cliargee de présider leurs assemblées
en l’absence du curé d’Aurillac. Le curé d’Aurillac, qui
étoitleur véritable chef; ejevoit assister, comme 011 vient
�. ( 39 )
cle le dire, à toutes leurs réunions, et on en rapporteroit
la preuve, s’il le falloit. Ces dames s’étoient réunies naguère :
leur société se seroit rompue à la mort des plus zélées,
comme toutes les sociétés. Elle est rompue en effet aujour
d’hui , quoique plusieurs des associées vivent encore, et
entr’autres la plus illustre.
.•
Mais, à quoi bon tant de détails pour apprendre ce qu’à.
Saint-Flour seulement on ignore, ce que chacun sait à
Aurillac comme à Clermont, comme dans la ville où on
écrit ce mémoire. Cette ville aussi avoit ses Dames de la
charité. Furent-elles jamais considérées comme une cornmunauté ?
■ •
' • C’en est assez sans doute pour montrer que le legs fait
par madame de Galieu n’a été laissé qu’aux pauvres, et
non point à un corps imaginaire. Il est donc valable, puis
que l’arrêté du gouvernement supplée à l’homologation;
et les premiei’s juges ont porté atteinte au droit public j
en déclarant les pauvres d’Aurillac non recevables à de
mander un legs qui leur a été laissé nommément non
moins que directem entun legs que le gouvernement, a
autorisé. D’ailleurs, le gouvernement avoit déjà reconnu
la capacité des pauvres pour recevoir et pour demander :
il n’appartenoit plus au tribunal de Saint -Flour d’en
décider. Ce tribunal a donc à la fois excédé sa compétence
et mal jugé au fond. Son jugement doit donc être infirme
sous ces deux rapports.
1
D E U X I È M E
'
PARTIE.
Moyens sub
. L ’héritier de madame de Galieu, plus instruit que s,dlfIr,:5,0P
,
x
posésparl he
personne de la foiblesse de sa cause, après que la validité riii«.
�' ( 4° )
du legs qu’il prétend nul a été démontrée, soutiendra,
Comme il l’a fait devant les premiers juges, que du moins
le legs a fait retour, si l’on peut ainsi s’exprimer, à la
succession dont il étoit séparé, et il se fera une dernière
ressource de la condition de retour écrite dans le testa
ment de sa bienfaitrice.
1°. Prétendu
retourdu legs
à la succes
sion.
La voici : « Et dans le cas, d it-elle, où l’Œuvre de
« la miséricorde viendroit, par la suite des temps, à être
« réunie à l’hôpital général d’Aurillac, ou à tout autre
« hôpital, je veux et entends qu’en ce cas le legs de
« 80000
que je fais a ladite (Euvre, fasse retour à mou
« héritier. »
Que peut-on espérer d’une clause aussi extraordinaire,
qui est contraire au droit du pouvoir suprême, et qui
fait dépendre le retour du legs d’un événement qui n’est
pas encore arrivé, et n’arrivera vraisemblablement ja
mais? Cependant le sieur Capelle a fait de ce moyen un
des principaux motifs de ses refus. Foible , impuissant
auxiliaire, qui ne défendra point une cause privée de
ses appuis les plus solides depuis que la validité du legs
est démontrée! Inutile et dernièi'e ressource, qui ne
résistera point à la force du droit public et de la v é rité!
Dans les matières qui appartiennent au droit public,
il faut se garder de cette opinion, trop générale, que
l'intention du testateur est la supreme loi; qu’il peut
resserrer les siècles dans le cercle de sa volonté ; et donner
des chaînes aux générations qui n’ont pas encore reçu
le jour. Il faut mettre de sages restrictions à ce raisonnejnent des âmes généreuses, que le bienfaiteur est libre d’im
poser
�'
^ 41 ^
.
.
,
poser des conditions à des bienfaits librement accordes.;
Ce raisonnement peut être-fonde, lorsqu il s agit, dans
le droit civil, de savoir si un légataire a droit à un legsqui ne lui a été fait qu’à de certaines conditions ; c’est
alors la volonté du testateur qu’il faut considérer. Mais'
les fondations sont de droit public ÿ comme l’héritier
dé madame de Galieu en convient sans doute*, et les
vrais principes du droit public sont que le bienfaiteur
peut ne point donner, mais qu’il n’est pas toujours libre
de reprendre. Il est le maître de ses biens ; mais ils appartenoient avant lui à la société, et ses dons ne sont en
effet qu’une dette. Le bien public est son but ; mais
c’est à l’autorité publique à le remplir de la manière la
plus utile à l’état, la plus convenable aux circonstances.
On trouve le développement de ces principes dans les
préliminaires de l’ouvrage nommé par l’illustre Grotius
le Droit de la guerre et de la p aix, et dans la première :
partie du Droit public, de M. Domat.
. •
• ,
C’est ainsi que des sommes, destinées par le fondateur
à élever une église, ont été employées par le prince à.
doter un hôpital ; c’est ainsi que divers arrêts ont changé,
les administrateurs nommés par un testateur à la fonda
tion , et que le gouvernement actuel a chargé le bureau
de bienfaisance d’Aurillac de distribuer aux pauvres les
dons de madame de Galieu, qui avoit confié ce soin aux
Dames de la miséricorde.
Toutes les clauses par lesquelles un fondateur met des
entraves aux droits de l’autorité publique sur sa fondation,
sont donc regardées comme non-écrites ; c’est une maxime
de la jurisprudence romaine, comme de la nôtre. Telle est
'
F
�..
.r
c 42 ) ■
t
la condition mise par madame de Galieu à son bienfait.
On diroit qu’elle-m êm e en a reconnu le vice ; elle l’a
placée ou plutôt cachée à la fin de son testament, comme
une idée étrangère à son cœur, et qui ne lui avoit pas été
inspirée aù moment où elle commençoit son testament
par laisser 80000
aux pauvres.
! Madame de Galieu vouloit bien soulager les pauvres : mais
elle vouloit que les Dames de la miséricorde fussent les
seuls ministres de sa bienfaisance; elle leur attribuoit ex
clusivement le droit de distribuer ses dons.- C’est, dira
t-on , parce qu’elle les destinoit uniquement aux pauvres
que l’Œuvre soulageoit, c’est-à-dire ¿ aux pauvres honteux,
aux pauvres qui n’alloient point à l’hôpital. Si cependant
le parlement avoit jugé qu’il seroit plus utile à la ville
d’augmenter les fonds de l’hôpital général que d’employer
lés dons de madame de Galieu en secours à domicile, s’il
n’eut voulu homologuer le legs qu’à cette condition, peuton douter que la ville tout entière n’eût réclamé contre
la clause de retour stipulée par la testatrice ? Le parlement
sans doute n’y auroit eu aucun égard : il eût usé du droit
que lui attribuoit l’édit de 1749, de nommer des admi
nistrateurs aux fondations soumises à l’homologation, et
il auroit attribué aux administrateurs de l’hôpital celle de
madame de Galieu, s’il avoit jugé plus utile d’en faire
cet usage.
E n iin , un moyen victorieux contre la-pré tendue clause
de retour invoquée par l’héritier, c’est l’arrêté du gouver
nement qui prononce tacitement qu’elle est comme nonécrile. Quand on supposeroit même que l’événement
prévu par la testatrice est arrivé, ce qui est fa u x , le chef
�(
43
)
r
de l’état, usant de son autorité suprême, a déclare que
la réunion du legs à la succession ne s’est point opérée ;
il a reconnu la capacité des légataires; il a nommé de
nouveaux administrateurs aux dons de madame de Galieu.
L ’autorité judiciaire n’a point le droit de réformer cet
acte, émané de la première des autorités.
’
Mais la clause de retour, non-seulement est contraire
au droit public, non-seulemetft est annullée par l’arrêté
du gouvernement, elle est encore illusoire autant qu’inu
tile. L ’événement qu’elle prévoit n’arrivera jamais, sui
vant toute apparence; du moins il n’est point encore
arrivé, comme il est facile de le démontrer.
Est-ce le prétendu corps appelé l’Œuvre de la miséri
corde qui a été réuni à un hôpital? cela est impossible.
On a prouvé que ce corps n’existoit point. La testatrice,
d ir a -t-o n , pensoit qu’il existoit, car elle suppose que
l’Œuvre de la miséricorde pourroit être réunie à un hô
pital. Cette objection rentre dans la proposition déjà
réfutée, que les Dames de la miséricorde formoient une
communauté. Ce n’est pas la lettre, c’est l’esprit de la
clause qu’il faut chercher. La testatrice a voulu prévoir
le cas ou les biens destinés à être distribués aux pauvres
par les Dames de la miséricorde seroient réunis à ceux
de l’hôpital général d’Aurillac ou de tout autre hôpital ;
elle ne vouloit pas que ses bienfaits, consacrés à soulager
l’indigence laborieuse, servissent à nourrir l’oisiveté et la
paresse dans un hôpital, comme il arrive quelquefois. Ses
craintes ne se sont pas réalisées, ses desseins n’ont pas été
trompés; aucune loi^de la révolution n’a confondu les
biens desïiinês aux secours à domicile} avec ceux que la
F 2
�( l44 -/)
générosité publique offre à tous les pauvres indistincte
ment dans les hôpitaux : ces biens ont toujours été dis
tincts, comme les administrateurs qui les régissoient. Je
le prouve.
La première loi rendue au sujet des étnblissemens de
bienfaisance, c’est celle du 18 août 17 9 2 , qui supprime
toutes les associations, confréries et congrégations de piété
ou de charité, et qui ordonne que leurs biens seront
administrés et vendus comme les autres domaines natio
naux. Dès ce jour plus de secours à domicile, mais point
de réunion des biens des pauvres qui les recevoient aux
biens des hôpitaux.
.
La loi du 19 mars 1793 rétablit les secours à domicile:
elle ordonna qu’il seroit formé, dans chaque canton, une
agence chargée de la distribution du travail et des. secours
aux pauvres; que ces secours seraient divisés en_secours
pour les pauvres valides „ et secours à domicile pour les
pauvres infirmes.
,
,
Enfin parut le fameux décret qui déclara propriété
nationale l’actif et le.passif des hôpitaux et des autres
établissemens de bienfaisance. L ’article 4 ordonne à la
commission des secours publics de faire parvenir ( aux
administrateurs des hôpitaux ) les fonds nécessaires aux
besoins de ces établissemens, pour leur dépense courante,
jusqu’à ce que la distribution des secours soit déimitivement arrêtée. •
'
• • .
• -,
Ainsi furent conservés, et les administrateurs des hô
pitaux, et les secours que tous les pauvres indistinctement
recevoient „dans ces établissemens ?/ comme 1 ^ sexH^r^ iV
domicile l’avoient été par la loi du 19 mars ,1:793,,.,£jui
�(
4$
)
charge de leur distribution les agences cles cantons; ainsi
n’ont jamais été confondus,. ni les biens des diverses classes,
de pauvres, ni, les administrateurs de' ces biens.
L e s . choses sont demeurées en cet état jusqu’à la loi qui
maintient les hôpitaux dans ceux de leurs biens qui n’ont
pas été vendus. Çeu de temps après, et en 17 9 6 y fut
rendu le décret qui crée des bureaux de bienfaisance,
chargés spécialement de la distribution des secours à do
micile. Ges bureaux remplacèrent les agences établies par
la. loi du 19 mars 1793 ; et bientôt un décret leur rendit
les biens des pauvres qui avoient échappé à la vente
ordonnée par le décret du 18 août 1792. Le legs fait par
madame de Galieu est de ce nombre»
Ces détails ont paru nécessaires pour montrer que
jamais les biens destinés aux secours à domicile n’ont été
réunis à ceux des hôpitaux, comme le prétend le sieur
Capelle : il faut fermer les yeux à l’évidence, pour sou
tenir une pareille opinion. Il est vrai que pendant quel
que temps les biens destinés au soulagement de toutes les
classes de pauvres ont été réunis au domaine national,
et confondus, si l’on veut, dans le même trésor, dans
le trésor public : mais cette source commune se divisoit,
pour ainsi dire, en deux ruisseaux dont le cours éloit
séparé. Bientôt les sources sont devenues distinctes comme
les ruisseaux; mais jamais celui que devoit alimenter la
bienfaisance de madame de Galieu n’a été tari.
C’est donc inutilement que l’héritier de madame de
Galieu prétendroit que le legs réclamé par les pauvres
¿ifait retour à la succession., Ses raisons sont aussi foibles
�•
c "
4
6
3
.
.
à cet égard que les prétextes qu’il allègue pour obtenir
la réduction de ce même legs.
Une somme de 80000
est exorbitante, s’écrie-t-il,
relativement aux forces d’une succession que la révolu
tion a presque anéantie. La suppression des cens lui a causé
d e s pertes immenses, incalculables. Il est vrai: des rentes,
et en assez grand nombre, sont perdues pour lui; mais
enfin l’héritier de madame Galieu ignore-t-il que la réduc
tion d’un legs ne peut plus être demandée quinze ansaprès l’ouverture de la succession, et lorsqu’en acceptant
l’hérédité sans condition , il s’est exposé aux disgrâces
comme aux faveurs de la fortune ? Mais encore quelles
preuves, autres que ses plaintes, a-t-il'donné jusqu’ici
de l’insuffisance de la succession ?' Où est l’inventaire des
meubles ? On sait qu’il existe : pourquoi ne pas le pro
duire ? Où est celui des créances? L ’état des immeubles,
les baux à ferme, où sont-ils ? Quels contrats de rentes
établissent les dêtrimens énormes que la suppression des
cens lui a causés ? Il sera un moins riche héritier, il est
vrai; mais il sera riche encore': devoit-il l’être, s’il n’avoit
été héritier? on en appelle à lui-même. Il sera un moins
riche héritier : mais il vient de vendre les domaines de
Faillitou et de la Bartassière, plus de 8 0 0 0 0 ^ ; mais il
lui reste la terre de Clavières, qui vaut cette somme; mais
la terre de Grialou lui appartient ; mais il possède des
vignes dans le Querci ; mais il ne compte que vingt-quatre
ans, et depuis dix années la succession de madame de Ga
lieu lui produit 10000
de revenus. Grâce à ces événejnens qu’il accuso, il les reçoit, ces revenus, qui, suivant le
�_
.
( 47 )
.
..
'
testament de sa bienfaitrice, ne devoient lui appartenir qu’à
sa majorité ; ces revenus qui jusqu’alors devoient être
employés à acquitter les dettes del’aniitie et de la religion;
ces revenus que grossit encore l’intérêt produit par le ca
pital du legs que les pauvres attendent depuis quinze ans.
Que l’héritier de madame de Galieu se garde donc d’in
voquer des motifs de considération à l’appui de ses foibles
droits ! Des motifs de considération en faveur de sa cause !
il auroit mieux fait de garder le silence ; ce n’est pas à lui
de les réclamer. Ils se présentent en foule pour combattre
ses prétentions. La morale, la religion, la pitié, l’intérêt
public, viennent au secours des pauvres. La morale, invo
quant le respect dû aux derniers vœux d’une femme ver
tueuse , s’écrie que le legs qu’ils réclament est une dette
plutôt qu’un bienfait. La religion, offrant à nos regards
le lit de mort de l’abbé de Cabridens, le montre dépo
sant dans le sein d’une sœur chérie ses volontés expia
toires ou bienfaisantes, et précédé dans le séjour céleste
par les prières reconnoissantes des pauvres , comme par
un doux encens. La pitié attendrit les cœurs sur les souf
frances des indigens d’une ville entière, gémissans sans
secours depuis quinze années, n’espérant plus qu’en ce
legs, dernière ressource qu’on veut leur ravir. L ’intérêt
public peint »les malheurs des temps ; la misère, fille de
la guerre extérieure et des discordes intestines; les hô
pitaux dévastés, les établissemens de charité détruits: il
représente que ces jours ne sont plus, où il sembloit néces
saire de refroidir la bienfaisance : il repousse ces pré
jugés trop funestes et trop répandus, que c’est un abus
de fuira l’aumône $ que semer les dons, c’est faire naître
�48
les pauvres, qui, malgré ces idées libérales , sont plus
nombreux que jamais. Enfin, toutes les affections nobles
et généreuses appellent à protéger cette cause les hommes
vertueux, les hommes religieux, les hommes du monde,
les hommes d’état:leurs efforts, réunis à la force du droit
public et des lois, entraîneront la balance de la justice.
L.
j.
L
e
JULES,
b. M A L L E T , avoué.
C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a lu le mémoire ci-dessus,
E stim e
que les moyens qui s’y trouvent développés sont con
form es aux principes du droit public, auquel appartient la cause.
II est certain, d ’abord, que l’arrêté du gouvernement est une reconnoissance form elle de la capacité des pauvres d’A u rilla c , et que
les juges de Saint-Flour ont excédé leur compétence en les décla
r a n t n on-recevables dans leur dem ande, précisément1 par défaut
dé capacité. A u fo n d , les droits des demandeurs ne sont pas moins
evidens que l'erreur des premiers juges. Les circonstances et les
termes du legs démontrent assez qu'il a été laissé aux pauvres, et
à trois classes de pauvres j et que les Dam es de la miséricorde
étoient seulement chargées d ’en faire la dis tribulion. On ne parle
pas des m otifs de religion et d’ intérêt public que les pauvres in
voquent à l’appui de leur demande. L a justice n ’a pas besoin dans
cette cause du secours de l ’équité] et l'esprit n’est pas moins satis
fait que le cœur.
D é lib é ré à
C lerm o n t, le 10 juin 1804,
BO IR O T , B E R G IE R , B E IL L E -B E R G IE R .
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bureau de bienfaisance de la ville d'Aurillac. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jules
Mallet
Boirot
Bergier
Beille-Bergier
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
doctrine
testaments
Description
An account of the resource
Mémoire pour les pauvres de la ville d'Aurillac, légataires d'une somme de 80000 francs. Mémoire pour les Pauvres d'Aurillac, représentés par le Bureau de bienfaisance de cette ville, appelant ; contre le Sieur Capelle, héritier de madame de Galieu.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1785-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0219
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
BCU_Factums_G1311
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53718/BCU_Factums_M0219.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
doctrine
legs
testaments
-
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62acddb602fa7eba1dcf78cda40691d0
PDF Text
Text
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jU U su /
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^MEM OIRE
SU R
LA N U L L I T É D’ U N L EGS
DE 8 0 0 0 0 * ,
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F A I T A L ’Œ U V R E D E L A M IS É R IC O R D E
É T A B L I E EN L A V I L L E D ’A U R I L L A C .
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4 aM XcUiMA*'
A
DE
R I O M ,
L’ I M P R I M E R I E
IMPRIMEUR
DE
DE
LA
L A N D R IO T ,
COUR
Juillet 1804.
D’APPEL.
SEUL
�M E M O I R E
cour
D ’A P P E L
EN
RÉPON SE,
s£antk
A RI OM.
POUR
P
ierre
- A
ntoine
- U
rbain
CAPELLE,
propriétaire, habitant du lieu et commune de
S a i n t - C o n s t a n t , intimé ;
C O N T R E
Les A d m i n i s t r a t e u r s
b i e n f a isance
du
B ureau
de
de la ville d ’A u rilla c , appe
lans d ’un Jugement rendu au Tribunal d'arron
dissement de S a in t-F lo u r , le 20 flo réa l an 11.
administrateurs du bureau de bienfaisance de l a
ville d’A u rillac réclament la délivrance d’un legs de
A
L
ES
►
�( O
t
80000 fran cs, fait par la dame Galieu aux Dames de
la miséricoi’de de cette ville. Ils seront lus avec in térêt,
lorsqu’ils feront valoir le sentiment.
L e pauvre a des droits incontestables sur l’abondance
du riche. L ’humanité , la religion nous font un devoir
de soulager nos semblables dans le malheur.
M ais la politique doit mettre des bornes à ces libéralités
indiscrètes qui dépouillent les familles et m ultiplient les
pauvres au lieu d’en diminuer le nombre.
N ’a-t-on pas remarqué qu’en faisant vivre gratuitement
un grand nombre d’hom m es, on soudoyoit l’oisiveté et
tous les désordres qui raccom pagnent ? et lorsqu’on a
voulu exam iner l’ utilité des fondations particulières,
par rapport au bien public , on n’a fait qu’en démontrer
les inconvéniens, comme l’impossibilité d’en maintenir
l ’exécution.
C ’est à la société tout en tière, c’est au gouvernem ent,
q u ’il appartient de créer des établissemens durables pour
les besoins généraux de l’humanité.
L ’homme p r iv é , qui a la noble passion d’être u tile ,
et veut secourir les infortunés, doit dispenser ses bien
faits avec discernement. Il lui est interdit de verser ses
largesses sur des corporations illégales, qui ne peuvent
être perm anentes, dont les membres peuvent avoir des
vues louables, mais finissent presque toujours par dégé
nérer.
'
L e sieur Capelle applaudit à l’écrivain, lorsqu’il rend
hommage aux vertus et à la piété de ces dames respec
tables qui trouvoient le bonheur dans la bienfaisance,
visitoient la chaum ière du - p a u v r e , soulageoient ses
�( 3 )
t .
besoins, et lui donnoient ces marques de pitié touchante
qui consolent sans hum ilier. Sexe aim ab le, digne de
tout notre resp ect, qui fut créé pour notre bonheur !
femmes vertueuses et tend res, qui prodiguiez vos soins
à ces membres souffrans de la société ! comment vous
a-t-on traitées dans ces temps m alheureux de trouble et
de confusion ? par qui avez-vous été rem placées? dans
quelles m ains, grand D ieu ! seroit tombé le legs de la
dame G a lie u , si vous aviez eu qualité pour en obtenir
la délivrance ?
Ces cruels souvenirs font disparoître l’illusion ; le pres
tige s’évanouit, et on peut froidement discuter la ques
tion de la validité du legs que les administrateurs deman
dent au sieur Ca pelle.
F A I T S .
Françoise D orothée G abridens, veuve et héritière de
sieur Geraud G a lie u , est décédée à A u rilla c dans le
'courant de janvier 1789. E lle avoit fa it, le 4 octobre
1786 , un testament mystique et secret, dont il est néces
saire de connoître les dispositions principales.
E lle institue pour son héritier universel P ie rre -A n toine-U rbain Gapelle , fils aîné du sieur G apelle, son
neveu. E lle fait aussi des legs considérables, qui sont
divisés en trois classes. Les legs pieux s’élèvent a la
somme de 128600 fr. Les autres legs se portent a une
somme de 77300 fr. ; ce qui donneroit en totalité une
somme de 205900 f r ., sans y comprendre des legs par
ticuliers en u su fru it, de m obilier non apprécié , et de
A 2
�.
.
,{ 4 )
plusieurs immeubles en toute p ro p riété, dont on peut
porter la valeu r, sans exagération, à 64000 fr.
Parm i les legs p ie u x , un seul, de la seconde classe,
et le plus considéi'able de to u s, donne lieu à la contes
tation. Ce legs est fait en ces termes :
« P o u r exécuter les pieux desseins qui m’ont été
« com m uniqués par feu M . C abridens, mon frè re , je
« lègue a u x pauvres de VŒ uçre de la m iséricorde de
« la ville d’A u rillac, laquelle Œ u vre est administrée par
« de pieuses dames, et dont madame de Funta/iges est
« la supérieure , la somme de 80000 f r ., à la charge
« néanmoins que les administrateurs de ladite Œ uvre
« seront tenus de payer annuellem ent, et à perpétuité,
« aux Frères macédons de l’école chrétien ne, établis à
« A u rillac , la rente et pension annuelle que feu M.
« C abridens, mon fr è r e , s’étoit obligé de leur payer
« par les actes passés avec eux et avec les consuls et
« communautés d’Â u rillac ; sans laquelle condition je
« n’aurois légué à ladite Œ u vre que 60000 fr. ; qu’il
« sera em ployé 20000 francs pour assister messieurs les
« prêtres de la ville et communautés d’ A u r illa c , qui
« seront dans le besoin, et encore les autres prêtres des
« environs de la v ille , si le r even u de ladite somme
« de 20000 lr. peut le com porter; et que le revenu de
« la somme de 40000 fr. restant de celle de 60000 f r . ,
« soit em ployé à assister et soulager le surplus des pau« vres que ladite Œ u vre a coutume d’assister. Je veux
« en conséquence que ladite somme de 80000 fr. ci-dessus
« léguée, aux conditions m entionnées, soit payée auxa dites dames administrant ladite Œ u vre, sur la quittance
�.
.
c
5
« qui en sera fournie par ladite dame d e-F on tan ges,
« leur supérieure, et ce aux termes ci-dessous fixés.
« Je veux et entends qu’au cas où ladite Œ u vre de la
« miséricorde v în t, dans le tem ps, à être réunie à l’h ô« pital général de la ville d’A u rilla c , ou à tout autre
« hôpital; je v e u x , d is -je , audit cas, que le legs de la
« somme de 80000 f r ., que je fais à ladite Œ u v re , J'asso
« retour à mon héritier. »
- Il résulte d’une délibération du bureau de bienfaisance
d ’A u rilla c, du 16 pluviôse an 9 , que l ’Œ u vre de la m isé■ricorde, qui étoit administrée par des dames pieuses,
•mères de fam ille, ne s’étoit form ée en cette même ville
q u ’en 1777.
•
A p rès le décès de la dame Galieu , il fut procédé à
l’ouverture de son testament. E lle avoit nommé pour son
exécuteur testamentaire un sieur C iiyla, qui étoit chargé
■
de vendre son m obilier et divers immeubles désignés ,
et qui en même temps devoit jouir de tous les revenus
.de la succession, jusqu’à ce que l’héritier eût atteint sa
vingt-cinquièm e année.
L e p rix des ventes et des revenus de la succession devoit
être employé par l’exécuteur testamentaire à l’acquiLtcment des legs.
L e sieur Cayla se m it en possession des biens de la
testatrice, et il fut procédé à un inventaire du mobilier.
Les legs de prem ière classe, autres que celui qui lait
l’objet de la dem ande, dévoient être payés dans l’année
du deces. L e p rix du m obilier lut insuilisant pour les
acquitter : tout le surplus devoit donc être pris sur les
revenus de la succession.
�_
C6 )
II est probable qu’en 178 9, époque de l ’ouverture de la
succession, l’association des Dames de la miséricorde étoit
dissoute. Il est au moins certain que cette'Œ uvre n’a jamais
réclamé ni form é aucune demande en délivrance du legs
de 80000 fr.
M ais le sieur C a y la , exécuteur testamentaire, vouloit
faire procéder à la vente des immeubles désignés pour le
payement des legs de la seconde classe. Il s’y fit même
autoriser par un jugement du tribunal de district d’A u ril
la c, du 27 janvier 1792; et il en avoit vendu pour la somme
de 58ooo fr. lorsque le sieur Antoine Capelle, pore et tuteur
de l’héritier de la dame G alieu, se rendit appelant de ce
jugem ent, et fonda son appel sur ce que les intérêts de
son m ineur seroient blessés par l’aliénation d’autres biens.
Il y avoit des ressources suffisantes pour l ’acquittement
des legs, dans le remboursement des dîmes et autres droits
casuels, qu’on pouvoit alors espérer. D ’ailleurs, le sieur
Capelle père soutint que le legs de 80000 fr. avoit pour
objet rétablissement des Sœurs-grises (*), et une rente au
profit des Frères macédons; que dès que toutes congréga
tions étoient supprim ées, ce legs devenoit cadu c, et beau
coup d’autres étoient également susceptibles de réduction.
Pendant ces discussions le sieuv Cayla père vint à décé
der. S011 fils, en vertu du même testament, prit la jouis
sance des biens, qu il a gardée jusqu’en 179^. Il n’est pas
exact de dire qu’il rem it 1 hérédité au sieur Capelle père.
Ce dernier refusa constamment de s’en charger; et ce n’est
(*ï C ’est une erreur qui s’est glissee dans les copies : il n’est point question
de Sœ urs-grises dans le testam ent.
�( 7 )
qu’après son décès que le sieur Cayla fils, voulant se dé
barrasser d’une administration onéreuse, rendit La succes
sion au sieur Ray, tuteur du sieur Capelle fils.
Il n’y avoit aucune époque déterminée pour le paye
ment des legs de la seconde classe, dont celui-ci fait partie.
Ï1 est dit, dans le testament, « que ceux de la seconde classe
K seront payés suivant l’ordre qu’ils ont dans le testament,
« et seulement à fur et mesure que le sieur Cayla aura
« en main des fonds suffisans, soit au moyen des produits
« des ventes, effets, meubles et im m eubles, soit des reve« nus des biens de l’hérédité, sans que pour le payement
« des legs le sieur Cayla puisse être pressé pour la vente
« des immeubles que la testatrice veut être faite de ses
« biens d’A u v e rg n e , lui donnant p ou voir exprès de ne
« faire la vente qu’autant qu’il trouvera être plus utile
« p o u r T in té rêt de so n h é r it ie r , et encore sans qu’ il soit
« tenu de payer aux légataii-es aucun intérêt de leurs
« legs. »
Les employés de la régie nationale furent les premiers
à vouloir exiger un legs qui étoit nécessairement devenu
caduc par la suppression des corporations, ou qui étoit
nul comme fait ù une corporation illégale.
F ort expéditifs en la form e, les employés de la régie
décernèrent une contrainte contre le sieur C apelle, h éri
tier de la dame G alieu, pour le payement de cette somme
de 80000 fr. L e 8 thermidor même aim ée, ils firent un
nouveau com m andement; e t, s u r l’opposition qu’y forma
le sieur C ap elle, il s’engagea au tribunal de prem ière
instance une contestation qui n’a pas eu de suite.
Certes! si le sieur Cnpelle avoit encore à discuter contre
�.
•
,
•( 8 ) r
la rég ie, cette prétention bursale n’obtiendroit pas la fa
veu r des tribunaux. Il est permis de douter que la régie
voulû t faire de cette somme l’emploi auquel elle étoit
destinée.
Bientôt api'ès, l’hospice d’Aurillac voulut encore s’attri
buer le le g s, et en forma demande contre le sieur Capelle,
Cette prétention ne tendoit qu’à faire exécuter la clause
de réversion contenue au testament, au profit de l’héritier;
et l’hospice n’a pas cru devoir insister.
M ais, le 19 brumaire an 9 , on a organisé à A u rillac
un bureau de bienfaisance, dont les membres fuirent nom
més par le préfet du Cantal; et, le 16 pluviôse suivant,
les administrateurs prirent un arrêté pour faire citer le
sieur Capelle en payement de ce legs.
C ’est dans cet arrêté qu’on voit que l’Œ uvre de la
m iséricorde s’étoit form ée en 1777. Les administrateurs
y disent que cette Œ uvre n’a jamais été. supprim ée,
qu’elle 11’a fait que changer d’administration.
Suivant e u x , d’après l’article 3 de l’édit de 1749 ,
l’Œ uvre de la miséricorde n’avoit pas besoin de lettrespa tentes;
L e cas prévu par la testatrice, pour le retour à l’héri
tier de la somme de 80000 f r . , n’étoit pas ax-rivé ; le
legs devoit donc être versé dans leux-s mains.
Tels sont les moyens sur lesquels ils appuyèrent leur
cilation devant le tribunal d’A urillac. L e sieur Capelle
crut devoir récuser ce tribunal. Et comme on a paru
im prouver la récusation, il est de son devoir de rap
peler les motifs qui le déterminèrent à cette démarche.
L e sieur D e lo r tz - L a b a r th e , l ’un-des juges, est m em bre
du
�C9 )
du bureau de bienfaisance -, les sieurs L aval et Serieys,
juges, avoient déjà actionné le sieur Capelle , comme ad
ministrateurs de l’hospice de la même ville ; ils avoient eu
la délicatesse de se récuser.
L e sieur D esta in g , président, avoit ouvert son opi
nion sur la cause. Les trois suppléans, les sieurs G u ita rd ,
Julhes et V e rn io ls, l’un étoitle défenseur du sieur Capelle,
les deux autres étoient membres du bureau de bienfai
sance. Il ne restoit que deux défenseurs au tribunal d’A u rillac, qui ne pouvoient rem placer les juges, et qui d’ail
leurs refusoient d’en connoître comme juges, par des rai
sons particulières.
E n fin , cette affaire intéresse les pauvres de la ville
d ’A u rilla c, et devoit fixer l’attention ou l ’intérêt de tous
les habitans ; il étoit de toute nécessité de faire juger la
cause par des hommes dégagés de toute prévention : eu
conséquence, la cour de cassation, par arrêt du 4 plu
viôse an d i x , renvoya la cause et les parties devant le
tribunal civil de Saint-Flour.
'
Ce jugement lut signifié le 23 pluviôse an 10 ; et, le
3 ventôse su ivan t, les administrateurs citèrent eux
) memes le sieur Capelle devant le tribunal commis par
la cour de cassation.
Il est remarquable que jusque-là les administrateurs
s’étoient permis de procéder sans aucune autorisation.
Ils justifièrent postérieurem ent, i ° . d’un arrêté du gou
vernem ent, du 18 messidor an 10 , qui autorise le bu
reau de bienfaisance à accepter , au nom des pauvres
de la ville d’A u r illa c , le legs dont il s’agit, et à en p ou r
suivre la délivrance devant les tribunaux j 20. d’un arrêté
B
�( 10 )
du conseil de p réfectu re, qui autorise les administrateurs
à continuer, devant les tribunaux, les poursuites com
mencées contre le sieur Capelle, pour raison du même legs.
O n verra dans la suite que l’arrêté du gouvernem ent,
obtenu sur pétition non-com m uniquée, et toujours sauf
le droit d’autrui, est la pièce principale sur laquelle s’appuyent les administrateurs.
D evant le tribunal de S a in t-F lo u r, les administrateurs
entreprirent de prouver différentes propositions.
i . Suivant e u x , les legs faits pour cause pie dévoient
recevoir leur exécution , et être jugés favorablement.
I/incapacite du légataire ne rend pas même n u lle legs,
mais autorise seulement les tribunaux à en désigner l’em
p lo i et l’application.
2°. Les pauvres en nom collectif n’ont jamais été
regardés comme incapables de recevoir des le g s , et
l ’exécution des libéralités exercées envers eux a toujours
été ordonnée.
3°. L ’édit de 17 4 9 , et autres édits et ordonnances
antérieurs, en prononçant la nullité des legs faits au
profit des corps et communautés non patentées, ont
toujours excepté les legs qui avoient pour objet des
fondations particulières pour la subsistance des pauvres.
40. Ils vouloient faire considérer l’arrêté du gouver
nement comme une homologation suffisante pour sanc
tionner ces sortes de legs.
5 °. L e legs dont il s’agit n’avoit pas été fait à l’Œ u
vre de la m iséricorde, comme corps et com m unauté;
mais ¡1 fut laissé nominativement aux pauvres d’A u rilla c;
et si la testatrice a ajouté de VŒ uvre de la m iséricorde,
�'
( II )
cela n’a été que pour désigner l ’espace et la qualité des
pauvres auxquels elle vouloit que le revenu du legs fût
distribué , et les personnes auxquelles elle vouloit en
confier la distribution.
6°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
remplacent dans leurs fonctions les Dames de la miséri
corde, et sont les vrais administrateurs des pauvres en
faveur desquels le legs a été fait par la dame Galieu.
7°. L a M iséricorde n ’a jamais été réunie à l’hôpital
d’A urillac ni à aucun autre hospice. Les fonctions des
personnes chargées de la distribution des secours à dom i
cile , n’ont jamais été supprimées. L e corps législatif n’a
pas été à portée de statuer sur la fondation pieuse de
la M iséricorde •, mais cette fondation est du nombre
de celles qui ont été consei'vées.
8°. L a condition clu retour n’est pas arrivée telle
que la testatrice l’a voit p révu e; et, en matière favorable,
on ne peut étendre la condition d’un cas à un autre.
9°. On ne peut subordonner l’exécution d’une fon
dation pieuse, contre l’intention même du fondateur qui n’a
pu les prévoir, à des circonstances extraordinaires, illé
gales, momentanées, et qui n’ont dû leur existence qu’aux
orages et aux excès inséparables d’ une grande révolution ,
surtout lorsque tout est l'entré dans la ligne presci’ite par
le fondateur.
io°. L a réduction du legs n’est pas admise en général.
E n supposant qu’elle pût l ’être, elle doit être demandée
d’abord après l’ouverture de la succession, et les choses
étant entières. L ’héritier qui accepte une succession se
soumet à toutes les charges ; et court tous les risques :
B «
‘
�R e s périt domino.
C 12 )
L ’héritier n’a même pas fait de
pertes considérables.
i i ° . L ’héritier pur et simple ne peut être admis à la
distraction de la quai'te falcidie. E lle n’a lieu qu’au profitde l’héritier surchargé, qui établit les charges par un loyal
inventaire : d’ailleurs la distraction n ’a pas lieu pour les
legs pies. Il irapliqueroit de demander tout à la fois, et
la réduction du le g s , et la distraction de la quarte. Enfin
rien n’établit l’insuilisance de la succession pour faire face
aux legs.
D e son c ô té , le sieur Capelle soutint, i°. que le legs fait
â l’Œ uvre de la miséricorde étoit caduc, soit lors de sa
con fection , soit au m oment de l’ouverture de la succes
sion de la testatrice : le prétendu légataire ne form oit
aucune corporation , aucune dotation, aucun établisse-’
ïnent avoué par la loi.
2°. L a condition prévue par la testatrice étoit arrivée.
L e gouvernem ent, en supprimant tous les établissement,
même ceux qui n’avoient pas une existence lé g a le , a
cumulé l’actif et le passif de toutes les corporations,
associations et hospices : d’où il résultoit qxie le legs auroit
cessé d’être e x ig ib le , du moment que l’intention de la
testatrice ne pouvoit être rem plie, que le legs ne pouvoit
être versé dans les mains à qui elle le con/ioit exclusi
vem en t; et alors la reversion devoit avoir lieu au profit
de l’héritier institué.
3°. Le patrim oine de la dame Galieu avoit éprouvé
des diminutions de tout g e n re , des pertes considéra
bles , par l’effet de la force majeure.
4°. L a dame veuve Galieu n’a voit été instituée liéri-
�f 13 )
tière par son m a r i, de qui elle tenoit la plus grande
partie de sa fortune , qu’à la charge expresse de trans
mettre l’hérédité au sieur Capelle , son petit-neveu et
son héritier p résom ptif’, et la dame Galieu devoit moins
se considérer comme propriétaire , que comme usu
fruitière de son mari.
5°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
étoient sans qualité pour réclamer les 20000 fr. affectés
aux Frères macédons , ainsi que la même somme affectée
aux ecclésiastiques malades et pauvres ; et le sieur Capelle,
ne pouvoit être tenu que cl’en payer annuellement l’in
térêt.
.
6°. En pays de droit é c r it , l’héritier institué ou
ah intestat est autorisé à distraire la quarte falcidie ;
et la succession de la dame G alieu est ouverte en pays
de droit écrit.
7 0. L ’édit de 1 7 4 g , et la déclaration de 1 7 7 4 , auto
risent le débiteur de legs pieux à acheter des rentes
sur 1 état ; et le sieur C a p e lle, en ce c a s , pouvoit user
de cette faculté , et fournir des rentes sur l’état pour le
payement du legs ; en supposant qu’il y eût capacité
pour le recevoir.
L a cause portée en cet état au tribunal de Sain t-F lou r ,
le 20 floréal an 11 , il est intervenu un jugement contiddictoire , qui déclare le legs fait par F ran çoise-D o ro
thée d e C a b rid e n s , ve u ve de G eraud G alieu , à l’Œ u v r e
de la miséricorde de la ville d’AurillaC , par son testa
ment du 4 octobre 1785 , nul et de nul eiîèt : en con
séquence déclare les administrateurs du bureau de bien
faisance de cette mêm e ville non - recevables dans la
�.
( r4 )
#
demande par eux form ée contre le sieur C a p elle, héri
tier de la dame G a l i e u , en délivrance de ce même
le g s , et condamne les administrateurs en tous les dépens.
Ce jugement est fondé sur les motifs suivans :
' « i° . D ’api*ès la disposition des lois romaines, cons« tamment adoptée par la jurisprudence française, aucun
« corps ou communauté quelconque ne peut légalement
« exister sans l’approbation du gouvernem ent ; et de
« tels établissemens sont incapables de recevoir aucun
« legs.
« 2°. Par une exception néanmoins établie par la
« jurisprudence des tribunaux en faveur de la cause
« pie , les legs pieux faits au profit des communautés
« illicites étoient appliqués aux pauvres ou autres
« œuvres p ie s, et la disposition, même
imparfaite ,
«
«
«
«
«
«
«
n’empêchoit pas que les legs y contenus n’eussent
leur effet. Mais le privilège de la cause pie a reçu
une première restriction par les ordonnances de 1731
et 1735 , et il a reçu une restriction plus forte par
l’cdit de 1749. Les arrêts qui établissent une jurisprudence favorable à la cause p i e , sont tous antérieurs
à l’édit de 1749.
« 30. Dans les dispositions de cet é d it, qui renou« velle les défenses de form er aucun établissement
« de corps ou communauté quelconque , sans l’obtencc tion préalable de lettres-patentes, sont nommément
« compris les hôpitaux et toutes maisons ou com m u« nautés sous prétexte d’hospices. Par une disposition
k rigoureuse et nouvelle 5 qui ajoute a celle des precé-»
« dentes lo is, il est défendu de fonder de tels établis-
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
( i 5 )
semens par disposition de dernière volonté , quand
même la disposition seroit faite à la charge d’obtenir
des leí tres-patentes.
•
tc 4 °' L ’exception portée en l’article 3 de l’édit qui
dispense de l’obtention des lettres-patentes, et n’exige
que l’homologation du parlement pour fondation de
messes ou o b its, la subsistance d’étudians ou de pauvres ecclésiastiques séculiers, et non l’établissement
d’aucun nouveau corps ou com m unauté, ne peut rai
sonnablement recevoir son application lorsque la
disposition est faite à un corps ou communauté non
approuvé , parce qu’en ce cas l’exception seroit en
contradiction avec l ’article 9 de l’é d it, q u i, pour la
pleine exécution de l’article i er. , non - seulement
déclare nuls tous établissemens du genre de ceux
mentionnés en cet article , mais encore déclare nuls ,
sans distinction, tous actes ou dispositions qui seroient
faits en leur faveur, directement ou indirectem ent,
sans qu’il soit besoin de lettres de rescision , nonobs-
« tant toute prescription et tout consentement exprès
« ou tacite donné à l’exécution des actes contenant la
« disposition.
«
«
«
«
«
«
« 5°. Adm ettre l ’exception portée en l’article 3, au
profit d’un corps non-approuvé , seroit fournir un
moyen indirect de fonder réellem ent, contre le vœu
de la l o i , des établissemens qui , quoique déjà existan s, n’auroient eu jusque-là qu’une existence épliém è r e , fa ute de moyens suilisans.
K 6°. L ’article 10 de l’édit , par une disposition inftniment rigoureuse, veut que les enfans ou héritiers
�( 16 )
« présom ptifs, du vivan t môme de ceux qui ont fait
« les dispositions mentionnées en l’article 9 , puissent
« réclamer les biens donnés ou aliénés, et s’en faire
« envoyer en possession , même avec restitution de fruits,
« du jour de leur demande. Cet article, innovant à celui
« de l’ édit de 1666, q u i, pour peine de l’inexécution
« de la lo i, en cas de disposition au profit de l’établis« sement non-aj>prouvé , en appliquoit le bénéfice aux
« hôpitaux , fait entièrement cesser le privilège de la
« cause pie.
‘
cc 7 0. Les déclarations de 1 7 6 2 , de 1774 et 178 0 ,
« qui contiennent quelques dispositions nouvelles rela« tivem ent aux biens dont on peut disposer au profit
« des h ô p ita u x , ne contiennent aucune innovation aux
« articles 1 , 2 , 9 et 10 de l’édit de 1749. Si les cir«
«
«
«
‘ «
‘
constances ont apporté quelques changemens aux
motifs qui ont dicté la loi de 1749 ; si la législation
même étoit changée d ep u is, elle ne pourroit avoir
d’effet rétroactif; et les tribunaux doivent juger suivant le droit acquis antérieurement aux parties.
« 8°. L e legs qui fait l’objet de la contestation a été
cc fait à une corporation ou com m unauté non légale-,
cc ment établie , h l’Œ uvre de la miséricorde de la ville
cc d’A u rilla c,q u i n’avoit point obtenu de lel tres-patentes,
« S’il est dit que le legs a été fait aux pauvres de l’Œ uvre
cc de la m iséricorde, il n’est pas raisonnable de pré-« tendre que ce soit uniquement pour désigner la classe
te des pauvres à laquelle la testatrice entendoit faire du
cc bien. L ’Œ uvre de la miséricorde avoit tous les carac->
ce tères qui peuvent faire distinguer un corps , une
com m unauté,
�( 17 ) _
^
« communauté , puisqu’elle avoit une su périeure, une.
« assistante, un receveur; elle étoit désignée et reconnue
« sous un titre particulier, l Œ uvre de la m iséricorde.
« Cette Œ uvre devoit toujours subsister -, c’est l’Œ uvre,
« que la testatrice avoit envisagée, plus encore que les
« individus qui la fo rm o ien t, puisqu’elle vouloit qu’il
« n’y eût que les revenus de 60000 fr. qu’elle léguoit,
« qui fussent employés à perpétuité à secourir les pau« vre s, ecclésiastiques et séculiers, -qu’elle .avoit en v u e ,
« et que l’Œ uvre avoit coutume de soulager ; puisqu’elle
« chargeoit l’Œ uvre de p ayer, en l’acquit de M . de Cabri« d en s, et à p erp étu ité, la pension à laquelle il s’étoit
« obligé envers les Frères macédons ; puisqu’elle avoit
« prévu le cas de la réunion de l’Œ u vre à l’hôpital
«r g é n é r a l, ou à tout autre hôpital. Toutes ces choses« ne sont applicables ni aux pauvres individuels , tels« que les pauvres lionteux que la testatrice avoit en
« vue , ni aux dames composant l ’Œ uvre de la m isé« rico rd e, considérées comme individus.
« 9 0. L a loi elle-m ême , comme la raison , s’accordent
cc pour cette interprétation avec l’arrêté des consuls,
c< q u i, autorisant le bureau de bienfaisance à accepter le
« legs dont il s’a g it, l’a qualifié de legs f a i t à ï Œ uvre
« de la miséricorde quoique le gouvernem ent ait eu
a sous les yeux la clause du testament p o rta n t, f a i t
« a u x pauvres de Y Œ uvre d e la m iséricorde.
« io ° . C ’est à ce titre que le gouvernem ent, qui a pu
ignorer que cet établissement n’avoit pas été précédé
« de lettres - patentes ; l’a considéré comme légalem ent
4
�.
c 1 8 -}
,
..
« représenté, par suite des lois des 16 vendém iaire et y
« frim aire an cinq.
« Cet arrêté d’ailleurs ne préjuge rien sur l'invalidité*
« ou la validité du le g s, puisqu’en cas de contestation:
« il renvoie les parties devant les tribunaux.
« E n fin , en appliquant les lois précédemment ana
« lisées, le legs fait à l ’Œ uvre de la m iséricorde d’A u « rilla c, est nul et caduc comme fait à un incapable;
« 'e t, d’après l’article 10 de Fédit de 17 4 9 , l ’héritier seuî
« doit profiter de la nullité ou de la caducité du legs. »■
Ees administrateurs du bureau de bienfaisance on t
interjeté appel de ce jugem ent, et insistent sur la déli
vrance du legs de 80000 fr. L e sieur Capelle va s’occuper
de répondre à leurs griefs; m ais, avant d’entrer dans la
discussion des moyens qui militent en sa faveur, il est à
propos de relever quelques inexactitudes qui ont échappé
aux administrateurs dans le récit des faits.
Q uoiqu’il paroisse peu im portant de savoir si l’hôpital
c^Aurillac ne jouissoit que d’un revenu m édiocre, com m e
Font prétendu les appelans , on doit d ir e , d’après lanotoriété p u b liq u e , que cet hospice étoit et est encore
convenablement et richem ent d o té , proportionnellem ent
à la population de îa ville. M ais on ne connoît pas les
sentences de V ie , qui ont ordonné la délivrance des legs
faits à l’Œ uvre de la miséricorde.. L e bailliage de V i e
n’auroit pas été competent pour connoitre de ces deman
des; et ces prétendus jugemens n’existent pas.
L ’Œ u v re de la m iséricorde n’étoit pas même une cor-,
poration. O n se souvient avec reconnoissance de ces r é u
nions pieuses qui s’étoient formées dans les. villes princi*-
�( 19 ) .
_
.
pales. Les daines charitables qui en faisoient partie form oient une société particulière, et parfaitement lib re ,
qui n’étoit assujétie à aucune règ le , n’étoit point établie
d’une manière perm anente, et dès-lors ne pouvoit re
cevoir aucun legs. O n doit supposer que l’intention du
testateur, lorsqu’il fait un legs p ie u x , cherche à main
tenir l’exécution de ses volontés ; il désire survivre à
lui -m êm e, faire respecter sa m émoire par des actes de
bienfaisance durables, et il ne 'peut l ’espérer qu’autant
qu’il choisit des corporations légales, dont l’existence est
nécessaire et protégée par le gouvernem ent.
'
L a dame veuve G alieu, que l’on représente comme ex
trêmement riche, et sans enfans, tenoit la plus grande par
tie de sa fortune delà tendresse de son époux : elle avoit été
chargée par lui de remettre leur hérédité au sieur Capelle
son n eveu, père de l ’in t i m é , et qui étoit aussi le cousin ger
main de la dame Galieu. Brouillée depuis long-tem ps avec
le sieur Capelle p è r e , et ne voulant point qu’il fût l’ob
jet de ses libéralités , elle crut tout à la fois pou voir satis
faire son propre penchant, et rem plir les intentions de
son m a r i, en faisant passer ses biens au sieur Capelle
fils. L ’abbé de Cabridens, frère de la dame G alieu , étoit
sans doute un homme recommandable par sa piété et par sa
charité; mais la fortune dont il jouissoit provenoit de sa
sœur, ou du moins de la donation qu’elle lui avoit faite en
1774. A la vérité on prétend qu’il étoit propriétaire de tous
les biens situés en A u v e r g n e , et auxquels madame de
Galieu avoit succédé. O n cite avec emphase les dom ai
nes de F aillitou , de la Bartassière, et du fief de Clavières.
Ces deux premiers domaines ne s’élèyent point à une
C 4
�C 20 )
Sommede 60000 fr., et le dernier, que l’on a qualifié im pro
prement de fief, puisqu’il ne l’a jamais é té , ne vaut pas
la même somme. Il n’a fait aucune disposition, et tout
ce qu’ont dit les appelans, page 9 de leur m ém oire, 11e
sont que des allégations dénuées de toute vraisemblance.
P o u rqu oi dire encore que la dame G alieu a préféré le
sieur Capelle à des parens plus proclies : elle n’en avo it
aucun dans la ville d’À u rilla c , qui fût au même degré.
L e sieur Capelle p è re , neveu du sieur G a lie u , étoit
cousin germain de la testatrice sa v e u v e , et son parent
le plus proche. A in si le sang et la nature, pour se ser
v ir des expressions des appelans , appeloient personnel
lem ent le sieur Capelle à la succession de la dame G alieu.
O n vante aussi le fief de G ria lo u , qui faisoit partie de ses
propriétés, et q u i, dans l ’état actuel, ne produit pas 800 fr„
de rente*
A la page 12 du m ém oire, on prétend que l ’Œ u v re
de la m iséricorde de la ville de Figeac avoit été payée du
legs porté p a r le testament, et on ajoute que l’héritier n’a
point demandé si les Dames de Figeac a voient des lettres**
patentes. M ais les administrateurs n’ignorent point sans
doute que l’Œ uvre de la miséricorde de Figeac est une
corporation patentée, une communauté de iilles de l’éta
blissement de saint V in cen t de P a u le , q u i, depuis plus
d>un siè cle, jouissoit d’une existence légale, et en voyoit
¿es sceurs de son ordre dans un© foule de villes.
L es administrateurs sont également inexacts, lorsqu’ils
disent, page 14? Q110 niadame deFontanges, se trouvant
à Paris après le décès de la testatrice, 'avoit fait des dé
marches pour obtenir la délivrance du legs. Ce fait est
�( 21 )
absolument faux et controuvé : on peut môme assurer
qu’à l’ouverture de la succession de la dame G a lie u , la
société des Dames de la m iséricorde étoit dissoute ; et les
administrateurs sont hors d’état de prouver que depuis
le décès il ait été fuit aucune démarche par qui que ce
soit pour obtenir la délivrance du legs.
L e sieur Capelle désavoue également que son père se
soit jamais immiscé dans la jouissance des biens de la dame
Galieu ; ils n ’ont été remis- au fils qu’après la m ort du
p è re, et il n’en jouit que depuis iy g 5 . Si le sieur Capelle
père s’opposa , en 179 2 , à la vente de quelques immeu
bles, c’est que déjà le sieur Gayla en avoit vendu pour
58ooo
assignats, dont il n ’a fait aucun u sage, et qui
n’ont été remis à l’héritier qu’en l’an 4 , époque de la
plus grande dépréciation du papiei'-monnoie.
L e s membres du bureau de bienfaisance p r é t e n d e n t ,
page 19 , qu’ils ne peuvent oifrir aux pauvres que du zèle
et des promesses ; cependant ils jouissent d’un revenu de
1000 f r . , ce qui présente déjà quelques ressources. M ais
les membres du bureau de bienlaisance peuvent-ils espérer
déposséder jamais des revenus considérables ? Ils doivent
tout obtenir de la confiance de leurs concitoyens , de leur
ch arité, de leur piété : les q u êtes, les aum ônes, les dons
m anuels, doivent composer principalem ent et exclusive
ment leurs revenus; ils en sont les distributeurs, et c’est là
l ’unique but de leur établissement.'
r
Maintenant il s’agit de présenter quelques observations
préliminaires sous le point de vue de l’intérêt public }
car s’il faut en croire les administrateurs , qui paroissent
avoir des v u es.é lev é e s, leur.cause ®st une question de
droit public.
�( 23 )
M a is com m ent Tordre et le droit -public seroievt-ïls
en suspens ( pour se servir des termes des app elon s),
parce que le legs de 80000 fï\ fait à l’Œ uvre de Ici misé
ricorde serait contesté?
■ Q u’étoit l ’Œ u vre de la m iséricorde? une association
libre , composée de dames distinguées par leur piété et'
leur bienfaisance, et qui recevoient de la confiance de
quelques citoyens généreux des souscriptions volontaires.
Ces établissemens étoient bornés à certains lieux et à
certains tem ps; ils n’entroient point dans le système de
l ’administration générale ; ils pouvoient obtenir des secours
particuliei’s , lorsqu’il s’agissoit de rem édier aux m aux
d une disette, d une epidemie , ou de pourvoir à l’en
tretien de quelques vieillards et de quelques orphelins.
Ces corporations m om entanées, qui pouvoient se dis
soudre à chaque instant, avoient cet avantage inestimable
qu’elles n’étoient sujettes à aucun abus im portan t, parce
qu’elles avoient des vues vraim ent utiles, comme la con
tribution de chacun étoit entièrem ent volontaire.
Mais pouvoient-elles recevoir des le g s , des fondations
perpétuelles, lorsqu’il étoit possible que , par la disso
lution de la société , les fonds fussent détournés de leur
destination ? N ’étoit-ce pas laisser aux fondateurs le regret
de les avoir confiés? et bientôt la source devoit tarir!
Dans ces sortes d’établissemens on ne considère que
l’utilité actuelle; cest toujours elle qui détermine la gé
nérosité des bienfaiteurs : mais le besoin cesse-t-il, la libé
ralité cesse, et son cours se tourne vers d’autres besoins.
Q u’on cesse donc de s’ecrier que les bureaux de bienfai
sance, comme autrefois l’Œ uvre de la m iséricorde, avoient
�C 23 3
capacité pour recevoir des legs et des fondations perpé
tuelles. Ce n’étoit pas là le but de leur institution et le
préambule de l’édit du mois d’août 1749 nous apprend
suffisamment, que le législateur a senti le danger de ces
fondations , et a voulu Fempêclier pour l’avenir. « Les
« familles, est-il d it, ont souvent le déplaisir de se vo ir
« privées de leur fortune , par les dispositions que les
« liommes ont à former des établissemens nouveaux qui
« leur soient propres , et faire passer leur nom à la pos
« térité avec le titre de fondateurs. L e meilleur usage
« que l’on puisse faire de l’autorité dans une matière si
« importante, est de concilier autant qu’il est possible
« l’intérêt des familles avec la faveur des établissemens
« véritablement utiles au public. »
On aura bientôt occasion de revenir sur les dispositions
de cet édit; mais pour suivre le même ordre de défense
des administrateurs, qui ont soutenu que le tribunal de
Saint-Flour étoit incom pétent, et n’avoit pu connoître
de la validité du legs , il convient d’abord de discuter
cette première proposition.
;
Les administrateurs du bureau de bienfaisance ont
transcrit dans leur mémoire l’arrêté des consuls, en date'
du 18 messidor an 6 , qui les autorise à recevoir le legs
contenu au testament de la dame Galieu. I/article 5 de
cet arrêté porte, « qu’en cas de contestation ou de refus
« de la part des héritiers , les administrateurs du bureau
« de bienfaisance poursuivront la délivrance du legs
« devant les tribunaux , en s’y faisant préalablement
« autoriser dans les formes voulues par les précédons
« arrêtés. »
’
�( 24 )
Il est bien évid en t, d’après cet article, que l ’a rrêté,
comme l’ont dit les premiers ju g es, ne préjuge rien sur
la validité ou invalidité du legs. Il étoit inutile sans doute
de renvoyer devant les trib u n au x, pour prononcer sur
les contestations qui pou voient s’élever à cet égard , si
l ’arrêté du gouvex-nement, comme ou veut le prétendre,
çût été im pératif et absolu.
C ’est un acte de simple adm inistration, qui autorise à
recevoir si le legs est dû , et en règle l’em ploi en cas que
l ’on reçoive. Il en est de cet a rrê té , comme il en étoit
autrefois des lettres de bénéiice d?inventaire ou des let
tres de restitution. Ces lettres , qui émanoient du souve
rain , étoient indispensables, soit pour accepter condition
nellement une succession, soit pour se pou rvoir contre
un engagement indiscrètement contracté. Mais pour
qu’elles eussent leur ex écu tio n , les faits devoient être
vérifiés par les tribunaux , qui n’en px’ononçoient l’enté
rinem ent qu’autant qu’ils reconnoissoient la légitim ité des
motifs. A uroit-on pu dire aux tribunaux , lorsqu’ils refusoient d’entériner de semblables lettres , qu’ils s’érigeoient
en réformateurs des arrêtés ou des ordres du gouverne
ment , qu’ ils refusoient d’admettre une demande que le
gouvernem ent autorisoit? T e l est cependant le vice du
raisonnement des administrateurs. Ils ont obtenu , sur
pétition non com m uniquée , un arrêté qui les* autorise,
à recevoir un legs. Cet arrêté n’est point donné en connoissance de cause: on ne voit aucune contradiction, et
on autorise à recevoir ; mais c’est toujours sauf le droit
d’a u tru i, sauf à faire juger devant les trib u n a u x , en cas
de contestation, si le legs doit etre ou non acquitté. T e lle
est
�c
*5 )
_
est la seule idée raisonnable, le seul point de vue sous
lequel on puisse faire considérer l’arrêté du gouverne
ment ; et les administrateurs n’ont pas voulu s’apercevoir
qu’en présentant cet acte d’administration comme im pé
ratif et absolu , ils transformoierit une simple form alité
en un acte de despotisme qui répugneroit à tous les prin
cipes de lDoerté si solennellement proclam és, si soigneu
sement maintenus. Q u’on ne dise donc plus que le tri
bunal de S a in t - F lo u r , en examinant le m érite de la
demande du bureau de bienfaisance, s’est arrogé le droit
de réform er les actes du go u vern em en t, que ce n’est
point à lu i ci diriger le gouvernail de f état. Ces expres
sions im propres sont absolument vides de sens. Il faudroit
•au moins rayer l’article 5 de cet arrêté, parce qu’en vain
le gouvernem ent auroit-il renvoyé devant les tribunaux
lë droit de prononcer sur la délivrance du legs dont il
s'a git, s’il n’avoit pas été permis aux juges de s’en écarter.
; Les appelans ont senti toute la force de cet argum ent;
mais ils veulent restreindre l’objection pour tout ce qui
a'rapport au droit c iv il, savoir: la validité du testament,
la capacité de disposer de la testatrice , la quotité du legs,
par exemple ; mais tout ce qui est de droit public est
au-dessus de leur atteinte, et, suivant eu x , la capacité des
pauvres pour recevoir com m e pour demander fait partie
de ce même droit public.
' Il est assez difficile de com prendre ce que les adminis
trateurs ont entendu par ce raisonnement. O n ne conteste
pàs la capacité en général des bureaux de bienfaisance
pour recevoir ou demander des legs qui leur seroient
confiés depuis leur création. O n sait que le gouvernem ent
D
�C
)
seul* s’est, réservé le droit de .les y autoriser, et ce n’est pas>
ce que les juges de Sain t-Flour, ont examiné. Ils ont seule
m ent décidé que ce n’étoit pas au bureau de bienfaisance
que le legs avo it été fait, puisque ce bureau n’existoit
pas l o r s - d u décès de la testatrice. Ils ont décidé que l’as
sociation des. dames pieuses à laquelle le legs avoit été,
fa it:, étoit incapable de le recevoir ; et s i , d’après les
appelons •eux-mêmes ,;les premiers juges avoient droit de
connpître de la validité du testament , de la capacité de
disposer et de la quotité ,du le g s, on ne voit pas comment,
ils n’auroient pas eu. le droit de prononcer sur la validité
de ce meme legs,, comment il auroit été interdit à l’iié-riticr de discuter devant les tribunaux la capacité de la'
testatriee ou. du légataire..
-, O n doit donc écarter ce premier moyen d’incompé—
tencej'pour s’occuper de la. validité du legs ou.fondation!
de la dam e-G alieu,; et, pour en apprécier le m érite, il.
faut en l’evenir, à i ’édit de 1749,, qui fait la loi dans cettematière.
■. ..
/
]D’a près l’article 1". de cet é d it, il ne peut être forméaucun établissement qu’en vertu- de lettres-patentes enre
gistrées .dans les cours. Sous ce mot gén éral,d’établisse
ment. , ■
on y: com.prend nominativement les Ziospices y,
congrégations ,, confréries hôpita ux ,. etc, .
.
L ’art. 2 défend de faire à l’avenir aucunes dispositions
par acte de derniere volonté pour, fonder un nouvel, éta
blissement,, ou au p,r°fit des personnes qui seroient ch ar-'
gées de le form er , le tout à peine de n u llité, ce qui sera,
observé quand même la disposition seroil faite à la ch arged’obtenir des lettres-patentes..
�( 27 )
. .
■ L ’article g déclare nuls tous les actes et dispositions qui
pouiToicnt avoir été faits en faveur des établissemens uon
autorisés, directement ou indirectem ent; et tons ceux qui
auroient été chargés de form er ou administrer ces établis
semens, sont déchus de tous les droits résultans des actes ou
dispositions, sans qu’il soit besoin de lettres de rescision,
nonobstant touté prescription , tous consentemens exprès
ou tacites qui pourroient avoir été donnés à l’exécution de
ces actes ou dispositions,
' Par l’article 10 , les enfans ou présomptifs héritiers
seront admis, même du vivant de ceux qui auront fait
lesdits actes ou dispositions, à réclamer les biens par eux
^donnés ou aliénés ; ils doivent en être envoyés en pos
session pour en jouir en toute p ro p riété,a vec restitution
des fruits ou arrérages, à com pter du jour de la demande
qu’ils en auront formée.
r Ces dispositions rigoureuses et prohibitives viennent
naturellement s’appliquer au legs dont il s’agit. L ’Œ u vre
de la miséricorde n’éloit qu’ une association libre non
a p p ro u vée, une congrégation sous -prétexte d’ h o sp ice,
qui n’avoit point été revêtue de leitres-patentes : donc
les dispositions faites ù son profit, directement ou indi
rectement , à elle-même ou à ceux qui l’administrent 7
sont nulles d’ une nullité viscérale. L e sieur Capelle pour-roit en réclamer la restitution, si le legs avoit été p ayé,
nonobstant tou te prescription , toute approbation expresse
Q.Utacite : c’est la seule conséquence qui puisse résulter des >
termes irritans des articles 9 et xo de l’édit dé 1749. ' .
' Les administrateurs prétendent que cet édit n’est point
applicable. Ce n’est point à ¥ Œ uvre de la m iséricorde que x
‘
D a
*
�.
.
. c 28
}
le legs A 6tê fa it,’ mais bien a u x pauvres dé l’Œ uvre.' Les
pauvres en nom collectif sont capables de recevoir.
r
L e sieur Capelle avoit déjà répondu en cause principale
à ce foible argument. « L e legs fait aux pauvres de l’Œ uvre,
« a-t-il dit dans son m ém oire, est fait â l’Œ uvre. Civibus
« civitatis legatum, velJldei com m issum , datum ciçita ti
« relictum videtur, loi 2 , D e rébus dubüs. L a lettre
« du testam ent, con tin u e-t-il, n’est pas moins expresse.
« C ’est au corps qu’il a été lég u é , car ce n’est que les re-*
« venus'dés 80000’^" qui doivent être employés à soulager
« les pauvres que l’Œ uvre a coutume d’assister; et p ar
« qui doivent-ils être employés ? par l ’Œ u v re ,q u i a cou—
a tume de les assister. Ce n’est point aux p au vres, mai»
« au corps que l’on a légué , puisqu’on le charge d’uner
« rente annuelle envers les Frères macédons , d’une fon
« dation perpétuelle envers les prêtres pauvres de la v ille
«
a
«
«
«
«
«
«
cc
d’A u rillac. Ce n’est point aux pauvres qu’on a légué ,
puisque ce n’est point eux qui peuvent dem ander,
recevoir et quittancer. Il n’y a pas même fidéicommis ,*
car ils n’auront jamais de droit et d’action pour posséder ; c’est pour leur soulagem ent, mais ce n’est pas sur'
eux que l’on a fondé. Ils sont l’objet et non les dépositaires de la fondation : ce n ’est point eux q u i forment
le corps et la congrégation de l’Œ u vre de la m iséri-:
c o r d e , mais bien les pieuses dames qui administroient
« cette Œ u vre ; £ar les pauvres n’auront jamais de puis« sance et de d ro it, ni dans ^administration , ni contre^
« les administrateurs. »
Xæs administrateurs invoquent l’article 3 de l’édit de
1749 ? cl u* excepte les fondations particulières, qüi ne ten.-* '
�( 29 )
droient à rétablissement d’aucun nouveau corp s, college
ou com m unauté, ou à l’érection d’un nouveau titre de
bénéfice , et qui n’auroient pour objet que la célébration
des messes ou obits , la subsistance d étudians ou de
pauvres ecclésiastiques ou seculiers, etc. A 1 égard des
quelles fondations, il ne sera point nécessaire d’obtenir
de lettres-patentes , il suffira de faire hom ologuer les actes
ou dispositions qui les contiendront, dans les parlemens
ou conseils supérieurs, chacun dans son ressort, sui les
conclusions des procureurs généraux. E n se plaçant dans.
ces exceptions , les appelans ajoutent : La révolution n a
point permis aux tuteurs des pauvres de rem plir la fo imalité de l’hom ologation, mais l’arrêté du gouvernem ent
doit tenir lieu de cette hom ologation.
Cette objection, souvent renouvelée , et toujours detruite, n’a pas échappé aux premiers juges. Ils ont sage
ment pensé que l ’exception portée par l ’article 3 étoit.
étrangère à la cause, puisque la disposition est faite au^
profit d’un corps ou communauté non approuvée. Dans
ce cas, disent-ils, l’exception seroit en contradiction avec
l ’article 9 de l’édit ; ce seroit fournir un moyen indirect
de fonder réellem ent, contre le vœ u de la l o i , des établissemens q u i, quoique déjà existans, n’auroient eu jusque-là
qu’une existence éphém ère faute de moyens suffi sans.
L ’article 3 ne dispense de la formalité des lettres-pnten
tes , auxquelles il substitue l’h o m o lo g a tio n , que les ion
dations particulières et les actes qui les c o n tie n n e n t , et
non les corps à qui elles sont confiées. Dos font ations
confiées à un corps non approuvé tendent n< cessai] <m< nt
à établir un nouveau corps, contre la prohibition expresse
de l’édit de 1749.
�(
30
)
t
^
O n poiuToît citer un exem ple particulier et très-récent,
pour établir que le legs fait à l’Œ uvre de la miséricorde
est caduc, et doit appartenir à l’hériLier. M . de Séguiran,
évêque de N e v e r s , fit son testament le 3 avril 1789 , et
m ourut le même jour. Par une clause de ce testament, il
veut et entend que les biens qu’il laissera soient em ployés
à l’exécution des établissemens de charité qu’il avoit coxn-r
m encés, et principalement de celui de la maison des Frères
de l’ instruction et charité chrétienne, et des fonds néces^
saires pour leur subsistance.
Les héritiers du testateur se pourvurent auprès du corps
législatif1, ils soutinrent que le legs étoit caduc, et par là
réversible a ses héritiers légitimes. Un de leurs principaux
moyens étoit que les légataires n’en avoient pas demandé
la délivrance. Cependant les Frères de l’instruction et les
Sœurs de la charité, que ce legs concernoit, étoient revê
tus de lettres-patentes, et dès-lors sembloient avoir capa
cité pour en réclamer la délivrance.
O n convient de tous ces faits, dans le rapport qui fut
fait au conseil des Cinq-cents, le 21 germinal an 6 , par.
le représentant Desmoulins. L e rapporteur est d’avis que
la succession doit être remise à l’h éritier; il se fonde
sur ce que le légataire n’a pas été saisi, lorsque le legs
p o u v o it ê t r e demandé, etle nouvel ordre de chosesen ayant
changé la destination, l’intention du testateur ne seroit pas
rem plie
p ;n' conséquent le legs doit être-reversible pour
les héritiers. Cet acte de justice lui paroît indispensable,
et le projet de décret qu il propose a été converti en loi
par le conseil des Anciens.
Cette loi particulière et locale n’a point été im prim ée;
�( 3T )
mais le sieur Capelle est nanti du rapport, et sans doute
on trouvera une grande aiïinité entre cette espèce etcelle
qui donne lieu à la contestation.
Comme M . l’évêque de N evers, la testatrice n est
décédée qu’en 1789; le legs fait à l’Œ uvre de la M isé
ricorde n’a point été réclam é; les dames à qui il étoit
destiné n’en ont pas demandé la délivran ce, elles n’en
ont jamais été saisies; le nouvel ordre de choses a changé
la destination du legs ; il n’existe plus de Dames de la
m iséricorde; les Frères macédons sont supprim és; les
intentions de la testatrice ne peuvent plus être remplies :
le legs est donc caduc ; il est donc réversible à l’héritier.
E t comment les intentions de la dame Galieu pou rroient-elles être rem plies? elle a principalement et exclusi
vement en vue les Dames de la m iséricorde, et notam
ment madame de Fontangcs , leur supérieure; les revenus
de la somme de 80000 fr. doivent être distribués à une
classe de pauvres particulièrement désignés, et que ces
dames avoient coutume d’assister. I l ne peut y avoir de
véritable substitution à une corporation de ce genre : ce
n’est plus le même objet ni les mêmes individus. L ’arrêté
du gouvernem ent même, que les appelans veulent regarder
comme absolu, change la nature du legs. L ’article 3 veut
que la somme principale soit employée en acquisition
de reu tessu r l’état. Etoit-ce à la décharge du gouverne
ment que la dame Galieu avoit légué cette som m e? Les
hospices en gén éra l, comme les bureaux de bienfaisance,
ne peuvent aujourd’hui recevoir des capitaux ou des
remboursemens qu’en les versant dans les mains du gou
vernem ent, qui en paye l’intérêt à quatre pour cent; oui
�( 32 )
en achetant des rentes sur l’état, qui ne représentent
point l’intérêt que la testatrice avoit stipulé.
Il n’est donc plus possible de maintenir l’exécution des
volontés de la testatrice. Dès-lors le legs ne peut plus
être exigé.
Q u ’im porte que l’abbé de Cabridens ait eu de pieux
desseins en faveur des pauvres que les Dames de la miséx-icorde assistoient ; il n’a manifesté ses volontés par aucun
acte. Si la dame Galieu a déclaré qu’ elle vouloît exé
cuter les pieux desseins de son fr è r e , elle a expliqué en
quoi consistoient ces pieux desseins. Comme elle, il avoit
en vue les Dames de la miséricorde , les Frères macédons. N i les unes ni les autres n’existent plus; il est donc
impossible d’ordonner la délivrance du legs, et l’héri
tier seul peut en profiter.
'
Les appelans, qui veulent faire triom pher la vérité par
toutes les arm es de la p a ro le, disent que si le legs
étoit laissé aux pauvres d’ A u r illa c , sans autre explica~
tion , personne ne douteroit qu’il ne fût valable. M ais
c’est précisément mettre en fait ce qui est en question.
Les pnuvres forment un corps irrégu lier, qui n’est suscep
tible ni d’adm inistrer, ni de recevoir. IL faut un inter
m édiaire pour la distribution , et 011 ne peut confier
cette même distribution qu’à un corps dont l’existence
est approuvée par les lois de letat. Si le corps ou l’hos
pice 11’est pas fondé en vert,u de lettres-patentes, le legs
est caduc, et revient à l’héritier en vertu de l’article 10
de l’édit de 1749- Bientôt les appelans s’égarent et tirent
des conséquences bien étranges. L e parlem ent, disent-ils,
auroit hom ologué un legs fait aux p a u vres, ilnuroit au
torisé
�( 53)
torisé les Dames de la m iséricorde à en faire la distribu
tion. Ce que le parlement auroit fait, la testatrice a pu
le faire. Dans tous les ca s, les fondations sont de droi(
public ; l’autorité peut changer les administrateurs nom
més par le fondateur, comme elle peut confirmer sou ..
choix.
•
.
Si ce sont là des maximes de droit p u b lic, on ignore
où les appelans ont pu les puiser. L a règle la plus cer-,
taine en matière de testamens, c'est que la volonté du
testateur fait la règle ; il n’est point permis d’aller contre
ses intentions ; e t, lorsqu’il y a impossibilité dans l ’exé
cu tio n , le legs devient caduc et retourne à l’héritier.,
V o ilà les vrais principes du droit public et social. L ’au
torité a ses limites : comme elle doit respecter les pro
priétés , efle est protectrice et non usurpatrice.
S’il est en usage parmi nous de dire que les fonda
tions sont de droit p u b lic , ce n’est qu’en ce sens , que l a ,
société est intéressée à leur conservation ; mais elles ne
peuvent exister sans la sanction de ceux qui agissent en
cette partie au nom de la société. A l’époque de la fon
dation faite par la dame G-alieu, le legs ne pouvoifc
avoir d’effet, qu’autant que la corporation désignée pour
le i-ecevoir eût été revêtue et autorisée par des lettrespatentes.
L ’G iuvre de la miséricorde n’avoit aucune existence
légale. V oudroit-on même raisonner dans le sens le plus
favorable aux administrateurs •, ils conviennent qu’il Fal—
loit au moins l’homologation du parlement : ils ne sup
pléent à ce vice de forme , que par l’arrêté du gouver
nement, de l’an dix j et vouloir qu’un arrêté, postérieur
'
E
'
*
�C 34 )
de treize années à l’ouverture du legs, puisse faire re
v iv re une disposition caduque, lorsque les choses ne sont
plus entières, après une révolution qui a bouleversé
les fo rtu n es, supprimé tous les établissem ens, c’est évi
demment donner un effet rétroactif à un acte de simple
administration , qui n’a rien décidé sur la validité du»
le g s , ou a présumé le consentement de l’héi’itier à en
verser le montant.
«
/ Il est contre toutes les règles , contre toutes les idées
l’eçues ,de prétendre qu’un legs dont l’effet s’est ouvertr
en 1789? puisse être réglé par' les lois actuelles; qu’ un,
legs essentiellement nul dans l’ancien oi*dre de choses,
puisse être valable dans le nouveau ; qu’ une libéralité
faite à l’Œ iivre de la miséricorde depuis 1785 , puis e
être acceptée, dix-sept ans après, par un bureau de bien
faisance , dont la création est toute récente. Ce seroit
succéder avant de naître , ce seroit renverser l’ordre de
la nature.
E t le sieur Câpellë ne doit-il pas espérer la faveur de
la justice, lorsqu’il se •trouve dans une position si dif->
férente de celle qu’il avoit le droit d’espérer? l^a fortune
de sa bienfaitrice a éprouvé une dim inution si considé
rable depuis la rév o lu tio n , qu’elle suffiroit à peine pour
le remboursement des legs des trois classes. Etoit-ce là
l’intention de la testatrice'? eû t-elle'été aussi lib érale,
si elle n’avoit pas été opulente?
E lle veut que les legs soient payés de la manière la
plus favorable à son h éritier; elle ne suppose aucune di
m inution dans ses revenus , qu’elle affecte spécialement
à l’acquittement des legs, pendant la.m inorité de son hé-
�( 35 h
#
ritier. Si cile, permet, de vendre quelques • im m eubles,
elle désigne les moins -précieux -, .encore a-t-elle excédé
ses pouvoirs en ce p o in t, parce que c’est éluder la dis-,
position des r.rt:cles 1 4 i 5 et 16 de l’édit de 1749.
(
.-E t cependant-, si le sieur Capelle pouvoit être tenu
d’acquitter l e ’ legs de 80000 f n , il seroit dans l’indispen
sable nécessité de vendre tout ce qu’il possède, tout ce
q u ’il a obtenu de la testatrice. O r , a-t-elle voulu le dé
pouiller ? L ’institution universelle seroit-elle donc un
titre illusoire?
, .
D ’après ces considérations m ajeures, le sieur Capelle
doit-il s’occuper de ses demandes subsidiaires? Comme en
cour souveraine elles sont sans conséquence , et n’affoiblissent pas les moyens p rin cip au x, le .sieur Capelle pro
posera quelques observations à cet égard.
L e bureau de bienfaisance, établi par une loi du 7 fri
maire an 5 , ne s’est pourvu qu’en l’an 10 pour obte
nir la délivrance du legs: il le demande en entier ; ce
pendant le capital de 20000 fr. destiné aux Frères macédons, et pour l’éducation de la jeunesse, n’est point
dans les attributions du bureau de bienfaisance, qui est
spécialement et exclusivem ent chargé de la répartition
des secours à dom icile ; dès-lors il est sans qualité pour
réclamer la somme destinée à l’instruction.
2°. Il y a encore à prendre sur le legs .pareille somme
de 20000 f r . , dont le revenu est affecté au soulagement
des ecclésiastiques; le sieur C ap elle, dans tous les cas,
ne pourroit être obligé que de payer le revenu de cette
somme , sans qu’on puisse le contraindre à en verser le
principal.
.
.
�( 35 3
.
3®. E t toujours dans l’hypothèse que le surplus du
legs pourroit être e x ig é , le sieur Gapelle au moins seroit
autorisé à le payer en rentes sur l’état. Il seroit assez
extraordinaire qu’on voulût le contraindre à verser la
somme pour être employée par les administrateurs en ac
quisition de rentes sur l’état; ce seroit vouloir q u ’il ver
sât les deniers dans les coffres du gouvernem ent, et certes 1
ce n’est pas là ce quTa entendu la testatrice. Il faut d’ail
leurs se reporter à l’époque de l’ouverture du testament
( 178 9) : alors , d’après l’article 18 de l ’édit de 1749 , les
gens de main-morte étoiènt dans l’interdiction d’acqué
rir autre chose que des rentes constituées sur le r o i , sur
le clergé, diocèses, villes ou communautés; et l ’article 13
de la déclaration du 20 juillet 176 2 , enregistrée au par
lement en 1 7 7 4 , autorise les héritiers et représentans des.
donateurs ou testateurs à donner, en payem ent, des rem
boursemens des rentes de la nature de celles dont if est
perm is a u x gens de m ain-m orte de f a i r e ta c q u is itio n ,
par Varticle 18 de Védit de 1749. C e subsidiaire, au
m oins, ne pourroit être refusé à Pintimé ; il a pour lui
la disposition expresse des lois qui étoient alors en
vig u eu r, et qui ont dû régir le legs dont il s’agit.
40. L e sieur Capelle est encore lé maître de distraire
la quarte falcidie sur une succession ouverte en pays de
droit écrit. , O n sait que cette quarte est la quatrièm e
partie des biens de l’hérédité; qu’elle se prend eu'égard’
à la valeur des biens au temps du décès, et non à ce
qui est arrivé depuis, soit diminution ou augmentation.'
h o i 30 , lo i 7 3 , ad J'aie. §. 4 , a u .C o d .
’
T o u t héritier testamentaire ou ah intestat a le droit
�( 37
'
e
de la distraire, lorsqu’il a été fait inventaire; et, dans
l ’espèce, cette formalité a été rem p lie.'E lle se distrait
des legs, quelle que soit leur nature; pour alimens, ou
à une com m unauté, ou pour legs destinés aux œuvres
publiques. L o i 6 ,a d fa lc . §. i , au Cod. E t le sieur Capelle
se réserve, dans tous les cas, de demander cette distraction,
s’il y a lieu.
:
5 °. E n fin , p o u rro it-o n obliger le sieur Capelle de
payer ce legs sur le cham p? Il n’est point encore parvenu
à la majorité prévue par le testament il n’atteint sa
vingt-cinquièm e année qu’en l ’an 13 : d’après le testa
ment , il ne doit aucun intérêt jusqu’à cette époque ; on
n e peut même exiger le principal. Il avoit conclu subsidiairem ent, en prem ière instance, qu’il lui fût accordé
cinq ans pour le rem boursement; et on rend assez de
justice aux administrateurs pour croire qu’ils accéderoient
à cette modification.
M ais c’ est trop s’arrêter à des subsidiaires auxquels
le sieur Capelle ne conclut qu’à toutes fins. Il n’est pas
un riche h éritier, et il étoit né pour l ’être. Pourquoi
donc vouloir lui ravir les foibles débris de la fortune
qui lui étoit destinée? D e quelle considération peut être
un legs de cette nature pour les besoins généraux d’une
classe aussi nombreuse ? c’est une goutte d’eau répandue
fiur une vaste m er, et dont l’ utilité ne sera jamais sentie.
Les bienfaits particuliers ne diminuent pas la pauvreté
générale. Toutes les fféctiotrs nobles et généreuses
s’opposent à ce qu’on dépouille un héritier légitim e,
sans nécessité pour l’intérêt public. L 'h om m e d ’état 11e
s’occupe que de grandes choses, et connoît les abus des
£3
�particulières, qui absorberoient à la longue
toutes les propriétés. L 'hom m e religieux vient au secours
de ses semblables ; et garde le silence sur ses bienfaits.
L ’ h o m m e d u m o n d e pense que les fondations sont presque toujours des-monumens de van ité et d’o rg u eil, et
les apprécie à le ur-juste valeur. L e m agistrat, impassible
com m e la loi dont il est l’organe, prononce sans pré
te n tio n sur les questions qui lui sont soum ises et ne
-fait point acception des personnes. C ’est dans le temple
de la justice que les hommes sont véritablem ent 'égaux
-en droits.
fondation
M e. P A G E S ( d e R iom ) ancien avocat,
M e. - M A R i E , a v o ué,
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle, Pierre-Antoine-Urbain. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
doctrine
testaments
Description
An account of the resource
Mémoire sur la nullité d'un legs de 80000 francs, fait à l’œuvre de la Miséricorde établie en la ville d'Aurillac. Mémoire en réponse pour Pierre-Antoine-Urbain Capelle, propriétaire, habitant du lieu et commune de Saint-Constant, intimé ; contre les Administrateurs du Bureau de Bienfaisance de la ville d'Aurillac, appelans d'un Jugement rendu au Tribunal d'arrondissement de Saint-Flour, le 20 floréal an II.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1785-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0218
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
BCU_Factums_G1311
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53717/BCU_Factums_M0218.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Saint-Constant (15181)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
doctrine
legs
testaments
-
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6e3d15ba0ca9269529430c1f958cbd19
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Text
POUR
C O N T R E
le Sieur C
le B
a p e l l e
u r e a u
de
B
,
d é fe n d e u r,
i e n f a i s a n c e
de
la v ille d'A u rilla c, demandeur.
L
a
D am e G a
l i e u
d écéd ée en
17 8 9 , a v a it, par
son testam ent du 5 octobre 1 7 8 5 , institué pour son
h éritier le sieur C a p e lle , son n eveu , à la charge
d ’une quantité considérable de legs divisés en trois
classes.
,
A la tête de ceux de la seconde est un legs de 80,000
fait à l ’O Euvre de la -m iséricorde de la V ille d ’A u rilla c,
C o n grégatio n non approuvée.
C e legs est ainsi conçu :
« Pour exécu ter les pieux desseins qui m ’ont été
com m uniqués par feu M. C abredens , m on f r è r e ,
» je lègu e aux pauvres de l ' o e uvre de la m iséricorde
» de la V ille d’A u rillac , laquelle oeuvre est administrée
» par de pieuses dames, et dont M e. Fontanges est la
« S upérieure, la somme de 80,000, à la charge néan» moins que les Adm inistrateurs
de ladite
œ u vre
» seront tenus de p a ye r annuellem ent et à perpétuité
�( 2 )
,
» aux F rères m acédons de l’école ch rétien n e établis
» à A u r illa c , la rente et pension annuelle que feu M,
» C abreden s s’était obligé de leur payer par acte e t c .,
» sans laqu elle condition je n ’aurais légu é à ladite
^ œ u v r e que 60,000 ; qu’il sera em p loyé 20,000 pour
assister M M . les Prêtres de la V ille et Com m unauté
d’A u rillac qui seront dans le b e s o in , et m êm e ceu x
yy des environs si le reven u de ladite somme le p erm et;
» que le reven u des 40,000 restans sera
em p loyé à
» assister et soulager les pauvres q ue ladite Œuvre a
?? coutume d'assister , etc. etc.
« Je veu x et entends qu’au cas que l’œ u vre de la
» rniséricorde vînt à être réunie dans le temps à
» l ’hôpital gén éral , ou à tout autre hôpital, le legs de
» 80,000 que je fais à ladite œ uvre , fasse retou r à
» mon héritier. «
^
L e testam ent porte en outre que cette somme sera
p ayée aux termes ensuite fixés aux Dam es adm inistrant
ladite œ uvre , sur les quittances à fournir par M e. de
F on tan ges leur Supérieure.
E t attendu l’im possibilité de payer des legs si con
sidérables , ( ils se portent à près de 3 oo,ooo ) avec
le p rix du m o b ilie r , il est dit qu’après le décès de la
testatrice il sera p ro céd é à la vente du m obilier et de
divers im m eubles d é s ig n é s , parmi lesquels se trouvent
¿ es
t à l ’effet de quoi elle nom m e le sieur C a y la
�'
exécu teu r testam entaire ,
,
.. •
ou plutôt fiduciaire , pour
3 5
que celui-ci acquitte lesdits legs avec le prix desdites
ventes , ou des revenus de la succession qu’il percevra
jusqu’à ce que l ’h éritier ait atteint sa
25 me
année ,
(p rairial an i 3 ) , term e jusqu’ auquel doit durer l ’exé
cution testam entaire ou plutôt la fid u c ie , bien que
par le décès du sieur C ap elle il arrivât un autre h éritier
qui ne fût pas m in e u r, voulan t que cet exécuteur
testam entaire ne puisse être rech erch é ni pressé par
personne , mais que pour ven d re il puisse choisir et
attendre le m om ent qui lui paraîtra con ven able ; de
sorte q u ’il n’y pou vait être forcé , et que par suite il
pouvait retard er le payem ent du legs jusqu’au dernier
m om ent de l’exécu tio n , jusqu’en prairial an i3L e payem en t des legs de la prem ière classe devait
être fait dans Fan du décès. C es legs absorbaient plus
que le prix du m o b ilie r, de sorte que les legs suivans
ne pouvaien t être acquittés qu’avec le reven u
des
biens resta n s, et le produit de ceux vendus. C e tte
i circonstance est précieuse à recueillir.
Q uan t aux legs de la seconde cla sse, ils devaien t
être payés à fur et m esure que les ventes des l iens '
ou les reven us de l ’h éréd ité auraient produit des
fonds sufiisans.
L a révo lu tio n survint ; au m ilieu d’un désordre
■épouvantable, toutes les corporations furent dissoutes,
�et les
biens de
toutes
les Institutions aum ônières
allèrent se fondre et se perdre dans la m ain de la Nation.
D e p u is , un G ouvern em ent sage , travaillant de
toute m anière à réparer tant de m a u x , a rétabli ou
créé des B ureaux de bienfaisance.
'
\
C e lu i de la V ille d ’A u rilla c , autorisé par un arrêté
du G o u v e rn e m e n t, dem ande la délivrance du legs
fait à l’œ uvre de la miséricorde,.
Pour
com m encer , supposant
le legs valid e
au
fonds , nous nous bornerons d’abord à proposer les
exception s qui tendent à reculer l’époque du payem ent
ou à restreindre la quantité.
Il devrait être accordé term e à l’h éritier jusqu’en
prairial an i5 .
L ’exécuteur testam entaire ou plutôt le fid u c ia ire ,
car le sieur C a y la d o it être regardé com m e t e l , puis
que selon le testam en t, il d evait rester en possession
de toute l’h é r é d ité , à la charge seulem ent de rendre
tout ce qui se trouverait entre ses mains , à la iin de
l’exécu tion ; le sieur C a y la , disons-nous, avait term e
pour acquitter ce legs , jusqu’en prairial an i5 ; c’està-dire , jusqu’à ce que led it C ap elle eût atteint l ’àge
de 25 a n s, soit q u’il restât h é ritie r, ou qu’ un autre
m êm e m ajeur fût appelle a son défaut. C e la résulte
�( ' ) •
I
du testam en t, car d’un coté on ne peut supposer que
les revenus accum ulés pussent rem plir le legs avant
cette époque ; de l’autre , l ’exécuteur qui ne pouvait
être recherché et pressé par p erson n e, pouvait re
tarder et ren v o yer les ventes à ce temps.
O r , quoique l’exécution et la fiducie ayen t cessé
avant l ’époque p révu e par la te sta tric e , et qu’avant
ce temps l’h éritier ait été mis en possession , il ne
doit pas pour cela être p rivé du term e : car il avait
été accordé , non en faveur de l’exécuteur et du fi
duciaire qui d evait to u t r e n d r e , mais seulem ent en
faveur de l ’h é ritie r; et cela est si v r a i, qu’il n ’avait
pour objet que de faciliter l ’acquit des legs , e t de
d égrever la succession d ’a u ta n t, en perm ettant d ’ac.cum uler les reven us, ou en donnant le temps de vendre
avan tageusem en t, au m oyen de quoi jusqu’à cette
ép oqu e il ne pouvait être dû aucun intérêt. T e l est
d ’ailleurs le sens de la L .
36
de cond. et demonst.
D ans ces 80,000, une somme de 20,000 est légu ée
a condition que l’œ u vre
de la m iséricorde payera
aux F rères m acédons de l’ école ch rétie n n e , la rente
et pension à laquelle feu M. C abredens s’était o b ligé
envers eux par acte du
etc. ; con d ition sans la
quelle il n’ eut légué que 60,000.
C ette partie du legs est donc subordonnée à l’acte
dont s’agit : cette disposition n ’a pour ob jet que de
�'
(
6
} .
.
■
.
.
lixer le m ode suivant leq u el il devra être exécu té ,
de d éch arger l’h éritier de cette o b lig a tio n , et de la
rem ettre à un tiers. T e lle est la cause et la condition
du le g s , sans cela. J lI n'eût été léguée que 60,000.
M ais le Bureau de bienfaisance qui en dem an
dant les 80,000, dem ande aussi cette partie du legs ,
aurait du d ’abord prouver que les F rères m acédons
ont obtenu des lettres patentes sur cet a c t e , ou tout
au moins qu’il est dans la classe des exceptions por
tées par l’art. 3 de l’édit de 17 4 9 ; ce que nous n io n s ,
et sans quoi il est nul : que l’acte est postérieur à la
D éclaration de 1762 , et qu’en ce cas les F rères m acé
dons étaient proprem ent une école
de charité , sans
quoi l’acte serait nul encore , parce q u ’il donnait une
ren te constituée , tandis qu’aux term es de l’éd it de
1740 il ne pou vait être
donné que des rentes sur
l ’E tat ou autres de cette espèce.
Ainsi tom be et l’acte par lequel feu M . C abredens
s’ était obligé envers les F rères m a céd o n s, et la dis
position testam entaire qui lui correspond.
L e legs est d’ailleurs caduc , car son o b j e t , ainsi
que l ’obligation de M. C abreden s ont péri avec les
F rères m acédons ; dq sorte que la condition pour la
q u elle on a expressém ent lé g u é , sans laquelle on n’eut
légué que 60,000 , n existe plus.
A joute/ à cela q u ’une partie du capital de la rente
�C 7 )
.................
pour le service de laquelle le legs avait été l a i t , se
trouve rem boursée , ainsi qu’il résulte des quittances
produites par le sieur G apelle.
Sur les
Gûjooo restans
,
20,000 sont légués pour
que le reven u soit em ployé à soulager M M . les Prêtres
pauvres de la v ille d ’A u rillac.
11 n’est m alheureusem ent que trop sûr que cette
classe , h orriblem ent d écim ée par la révolu tio n , est
en
proie à la plus
affreuse m isère ; mais le G o u
vernem ent va faire cesser ce scandale ; les
titulaires
auront un
anciens
traitem ent ; les E vêq u es , sans
doute , se feront un d evo ir de placer ceux qui n ’en
auront pas ; de sorte que sous peu tous les prêtres
existans se trouveront à l ’abri du besoin ; les prêtres
à ven ir n’auront pas plus à craindre ; car les titres
cléricaux seront désormais de 5 oo de rentes.
A in si d o n c , si le reven u des 20,000 ne suffit pas
pou r les besoins actuels des prêtres , à l’avenir il sera
plus que su fiisa n t, et il serait juste que l’excéd en t
revien n e à l’h éritier. Il
dem ande en conséquence à
être autorisé à retenir ces 20,000, tant qu’il le vo u
d ra , à la charge d ’en payer l ’ entier reven u , ou partie
suivant qu’il en sera b e s o in , par ce m oyen le retour
sera exact et parfaitem ent d ’accord avec les volontés
de la testatrice j il ne sera ni m o in d re , ni excessif.
�(
8
)
_
L ’h éritier dem ande à p rélever la quarte falcidie
sur le legs entier ou réduit.
O n a répondu que pour p rélever la quarte , il fallait
être h éritier bénéficiaire. Si cela é ta it, le sieur C ap elle
n ’étant pas encore parvenu à sa 3 5 me- année pourrait
se faire relever d ’une acceptation faite en m inorité ,
mais nous ne ferons pas valoir ce m o y e n , parce que
le principe avancé par le B u reau de bienfaisance est
absolum ent faux. Il est vrai que pour p rélever la fal
c id ie , il faut avoir fait inventaire , pour constater la
masse de la succession. ( ici il a été fait )
M ais il
ne l’est p a s , qu’il faille être h éritier bénéficiaire. L à dessus nous renverrons aux auteurs qui ont traité la
m atière.
O n a ensuite s u p p u té , accum ulé des zéros. C es
brillantes exagérations d oiven t être réduites de plus
de m o itié ; et quand cela ne -serait-pas, la testatrice
chargée envers l ’h éritier d ’un riche iid eicom m is, a du
le lui rem ettre franc et quitte'; et ce fideicom mis p ré
le v é , on verra que ce q u ’elle laisse de son c h e f ne
rem plit pas lés legs qu’elle a faits.
Enfin , com m e il sera établi dans le cours de la
discussion qui suit
1 h éritier a le d r o it, aux termes
de la D éclaration de 1762 ou 1774 > d ’offrir le p aye
m ent de ce legs en rentes sur l ’E ta t, et le T rib u n a l
ne pourrait le lui refuser.
'
.
M OYENS
�(- ° ' )
MOYENS
AU
.
FONDS.
..
“
L ’affaire présentée sous ce prem ier r a p p o r t, nous
l ’exam inerons au fo n d s, et nous discuterons la validité
du legs.
L e legs dont il s’agit est une fondation. L e s fonda
tions sont .définies ; « une dotation faite à un E tablis
sem ent pour l’acquit d ’une o u de plusieurs charges. »
P ou r déterm iner la valid ité d ’une fo n d a tio n , il faut
con sid érer quatre choses : i °. q uel est le C orps auquel
on donne ; 2°. quelles sont les form alités nécessaires
pour saisir ce C orps ; 3 °. quels biens, on peut lui don
n e r ; 4°. quels sont les termes dans lesquels on a
donné.
C ’e s t, je pens,e, traiter la question sous tous ses
rapports p o ssib les, et sous tous ces rapports il sera
constant que le legs est nul.
i° . Q u e l est le C orps auquel on a légu é ?
C ’est un principe de droit public qu’il ne peut exister
de co rp o ratio n s, et qu’ elles ne p eu ven t obtenir d ’exis
tence légale que par l’approbation du G ouvernem ent.
C e principe consacré par les lois rom aines, a traversé
les siècles , et a été reçu par tous les em pires raison*
r.ablem ent constitués.
2
�(■ 1 ° )
Il a été régularisé en F ran ce par divers édits y
notam m ent par ceu x de 16 6 6 , de 1 7 4 g , et par 'la
déclaration de 1762 qui n ’a été enrégistrée au Parle
m ent de Paris q u ê n i 774Ils se réunissent tous pour déclarer illégau x
les
C o rp s non approuvés , et pour prononcer la nullité
de tous actes faits à leur profit."
Q u ’on lise l’édit de 1749- G ela se trouve à chaque
a rtic le ; nous nous contenterons de rapporter L’art. 9
ainsi conçu :
ce D ésirant assurer pleinem ent l ’exécution du présent
» é d it, concernant les Etablissem ens m entionnés dans
» l ’art. 1.
( qui sont tous C hapitres r Sém inaires ,
» C o llèg es , M aisons ou Com m unautés , re lig ie u se s,
}•> même sous prétexte d'hospice , Congrégations, C onfrai-
. » ries , H ô p ita u x , ou autres C orps , Com m unautés
» ecclésiastiques , séculières , religieuses ou laïques ,
« de quelque qualité qu’elles soient etc. etc. ) déclarons
« nuls tous ceux qui seront fa its sans avoir obtenu nos
lettres patentes , et les avoir f a i t enregistrer dans les
yy form es ci-après prescrites, voulons que tous les actes
» et dispositions qui pourraient avoir été fa its en leur faveur
» directement ou indirectement, ou par lesquels ils pourjy raient avo ir obtenu des biens de quelque nature
n que ce s o it, u titre g iatu it ou o n c r c u x , soient dé~
�'
^ 11 ) .
...
» 'cla rés nuls , sans qu il soit besoin d’ obtenir des lettres de
m récision contre lesdits actes , et que ceux; qui se
>> seraient ainsi établis , ou qui auraient été chargés
» de form er lesdits Etablissem ens , soientr déclares de
» chus de tous droits résultans desdits actes , nonobstant
» tous consentem ens exprès ou tacites qui pourraient
« avoir été
donnés à l’exécution d e sd its, actes ou j
» dispositions. »
. ■'
"
' L ’article 2 prononce la n u llit é , quand même ces
dispositions seraient fa ite s à la charge d’ obtenir des lettfes
patentes .
,
- ,
: ' >
» t t - -‘t | ’ .
;f
1 >? ‘
C es articles sont formels , et-tom bent d ’aplom b sur
l ’e s p è c e , ils prononcent égalem en t la n u l l i t é des
C orps non a p p ro u v é s, et des dispositions faites à
leu r profit.
1 1 ......
.
:
Ici ^Etablissem ent , la 'C orporation , l’t t o p it a l, la
C o n gréga tio n , sous prétexte d’hospice y dite l’œ u vre d e là
m iséricorde n ’est poin t approuvée ; donc elle est n u lle,
donc aussi les actes faits à son profit directem ent ou
in d irectem en t, à, e lle - m ê m e o u à ceu x qui l’adm inis
tr e n t, sont n u ls , d ’une n u llité a b s o lu e , car il n ’est
1
.
1
'
'
1
.
.
1
pas besoin de lettres de récisÎQ n; (d ’i^ne nullité irré
parable , et dont ils ne pourraient être relevés dans
Ip cas où ils seraient approuvés par la suite-; car l’art. 2
prononce, la n ullité quand; m êm e les dispositions se-
�C 12 ) >
raient faites à la charge d ’obtenir les lettres p aten tes;c ’est-à-dire , quand
m ême le bienfaiteur v o u d ra it,
autant qu’il est en l u i s e conform er à la loi de T E t a t ,
v o u d r a it, autant q u ’il est en l u i , cou vrir et réparer
l ’incapacité du C orps auquel il donne ; enfin ces actes
sont n u ls , d’une nullité que le m inistère public doit
p ou rsu ivre, « nonobstant tous conseritemens exprès ou
tacites des parties intéressées » , et ainsi qu’il est plus
expressém ent dit dans divers autres articles de cet édit.
L e B ureau de bienfaisance écrasé p ar cet article
tâche de se r e le v e r , et dit : c’est aux pauvres de
Fceuvre de la c h a r ité , et non à l’œ uvre que l’on a
donné. '
;
■' •
L
.
•
i
.
F aib le et m isérable argu m en t, que pulvérise la rai
son d ’accord avec les lois , et la lettre du .testam ent.
« C ivibu S ciyitfitis legatum , v e l iidei commissum
datum • civitati re lic tu m , videtur. » L . 2. de reb.
f.
,
w
I
.
dub. L e legs fait aux pauvres de -l’œ u vre est fait à
l ’œ uvre.
,
•
. ...
L a lettte du testam ent n’es-t' pas' moins - exp resse1,
c’est au coi'ps qu’il a!:été lég u é ; rar ce^n’èst que les
reven us d e s 80,000 q u ivd o iven t être em ployés à sou-,
lager les paiiVres , que f a t ivre à coutume d'assister ; et
par qui d o iven t-ils -être em ployés ? par Poeuvre qui
à coutum e do lès a s s is té
c^ n’-est' poin t aux pauvres
�'
( >3 )
mais au corps que l ’on a l é g u é , puisqu’on le charge
d ’une rente
annuelle envers les F rères m acéd o n s,
d ’une fondation p erpétuelle envers M M . les prêtres
pauvres de la V ille
d ’A u rillac. C e
n’est p oin t aux
pauvres qu’on a lég u é , puisque ce n’est 'p o in t eux
qui peuven t dem ander , recevo ir , et quittancer. 11
n ’y a pas m êm e fideicom m is , car ils n’auront jamais
de droit et d’action pour posséder. C ’est pour leur
so u lag em en t; mais ce
a fon d é : ils
sont
n ’est pas sur eux que
l’o b je t , et non
l’on
les dépositaires
de la fondation : ce n ’est point eux qui form ent l e ’
corps et la con grégation de l’œ u vre de la m iséri
corde , mais -bien les pieuses dames qui adm inistrent
cette œ uvre ; car les pauvres n ’auront jamais de puis
sance et de droit ni dans l ’adm inistration , ni contre
les adm inistrateurs.
. .
• L ’on a ensuite préten du que par un acte ordinaire
on pouvait légu er à un être étranger , non existant ;
que le le g s v a u d r a it, si le légataire ven ait à exister ,
et le Bureau de bienfaisance appliquant ce prijiçipç ,
a dit : nous représentons l ’œ uvre d e là m iséricorde ,
nous existons lég a lem en t, donc le legs vaut ; et il
a cité en preuve deu x arrêts qui déclarenjt valables
«les legs
faits à des posthum es^nés 11 et i 5 m ois
après le décès de leur P ère testateur.
'
A u tan t d ’erreurs quo d e mpts. L e J legs fqit à uii
�J
. 1
,
.
C
)
.étranger non existant ne vaut p o in t , car il n ’aurait
-
pas de m o tif raisonnable : ces dispositions permises
dans les contrats de mariage .par une exception au
droit , n e le sont qu’en faveur des descendans , et
on t un m o tif, car on les affectionne d ’avance.
Il n ’est pas possible que le B ureau de bienfaisance
représente civilem ent l’œ uvre de la m isé ric o rd e , car
on ne peut pas représenter civilem en t ce qui n’a point
existé civilem ent ; N ous reviendrons ailleurs sur cet
argument.
'
•Quant aux arrêts cités , s’il n’y avait pas e r r e u r ,
il y aurait m auvaise foi. E n e f f e t , ils n’ont, pas jugé
que des legs faits par le P ère à ses enfans pdsthumesnés i i
ou i5
mois après son
d é c è s , étaient faits
à des enfans qui n ’existaient p o in t, car ils auraient
ju g é que des enfans posthumes étaient bâtards , et il
y aurait eu contradiction entre le m ot et la chose ;
mais ils ont jugé que des enfans nés 11 et i 3 mois
après le décès étaient légitim es , et par conséquent
étaien t conçus au temps du décès.
O n a ajouté que le legs fait à des incapables pour
r e n d r e .à des capables était b o n ; ce qui est vrai des
incapacités re la tiv e s, et non des absolues, comme celle
du C orps dont n o u s1 parlons,
�■ ( -5 )
_
M ais à quoi bon ces argumeris. L ’article est fo rm e l,
les dispositions en faveur des C orps non approuvés
sont nulles , d’une n u llité radicale , absolue , irrépa
rable , quand m êm e ils seraient faits à la charge d’ob
tenir des lettres patentes ; et on ne peut con cevoir un
événem en t qui ressuscite une pareille disposition.
O n oppose aussi mal à propos l ’article
3
de l’édit
de 1749 , que l’on a em brouillé avec art pour en faire
le n œ ud de l’affaire : pour le résoudre,, il suffira
d ’expliquer ce t article conçu
com m e il suit :
« N ’entendons com prendre dans les deux articles
« précéd en s , les fondations. particulières , qui ne ten
draient a Rétablissement d’aucun nouveau corps , c o llè g e ,
» ou com m u n au té , ou à l ’é re c tio n d ’u n n o u v e a u titre
» de bénéfice , et qui n ’auraient pour ob jet que la
y? célébration de messes o b it s , la subsistance d ’étu-
» dians, ou de pauvres ecclésiastiques ou séculiers etc.,
» ou
autres œ uvres pieuses de m êm e nature et éga-
» lem en t utiles ; à l’ égard desquelles fondations il ne
» sera pas besoin d’obtenir nos lettres patentes , et il suffira
de faire hom ologuer lesdits actes ou dispositions en
» nos parlemens etc. e tc ., q u i , est-il ajo u té, p o u rvoi
» r o n t à l ’adininislration desdites fondations.^
C e t article ne dispense de la form alité des lettres
patentes auxquelles il substitue l’hom olagation , que
>
V.
�,
c «> )
;
..
les fondations particulières et les actes qui les co n
tiennent , et non les Corps à qui elles sont confiées.
E n effet , il n’y est question que de fondations parti
culières qu i ne tendraient point à établir un nouveau corps,
à Végard
desquelles il ne sera point nécessaire d'obtenir
des lettres patentes , mais il suffira de Vhomologation
dans les cours supérieures ; cela est clair.
O r , des fondations confiées à. un C orp s non apr
p r o u v é , tendent nécessairem ent à établir iin nouveau
C orps , soit qu’il les em ploie à obtenir des lettres p a
tentes pour se faire approuver , soit qu’il les em ploie
à exercer le but de son institution , et par-là à s’éta
b lir plus fortem ent quoi jue d ’une m anière illégale.
L ’article 3 de la d éclaration de 1762 ou 1774 con
firm e cette exp lication : « déclarons R a v o ir voulu
» com prendre au nom bre des fondations
m en tion
» nées en l’article 3 de l’édit de 1749 > les fonda-?
y> tions 'des vicairies , ou secondaires am ovibles , des
)} chapelains qui ne sont point en titre de b é n é fic e ,
des services , p rières , lits , p laces dans les hôpitaux f
)3 et autres établissemens duement autorisés, des b o u illo n s,
» tables des pauvres des paroisses ; ( les fabriques '
?> sont des
»corps duem ent autorisés ) des distribu
ai tions à des pauvres ou autres établissem ens q u i ,
» ayan t
pou r obje|t des peuvres de religion
et de
» ch arité
�.
. c ' p . ,
.
'
» charité , ne tendraient point à établir des
nouveaux
yy Corps , collèges , etc, : voulons ,(]u à l’ égard desdites fo n
» dations , il en soit usé com m e il est dit par
»
3
1 article
de l ’éd it de 1749- »
C ’ est ic i qu’il faut rem arquer la prudence et l ’éco
nom ie de la loi : elle a vo u lu d’un côté em pêcher
que les corporations ne devinssent trop riches , et de
l ’a u tr e , asssurer l’exécu tio n des fondations.
L e G o u vern em en t est de d roit le protecteu r et le
conservateur n é de toutes les fo n d a tio n s, et le lé
gislateur a vo u lu que les C o rp s approuvés l ’avertissent
à chaque fois qu’ils en recevraien t ; mais pour les
fondations p a rticu lière s , c ’est-à-dire qui n’auraient pour
o b jet que q u elq u es in d iv id u s , et q u i par conséquent
seraient p eu considérables , il a vo u lu que quand elles
seraient faites à des hôpitaux et fabriques ; car c ’est à
jeux seuls que pevjv.ent se rapporter ces espèces con
tenues
dans
les
articles
précités.
L e lé g is la te u r ,
disons-nous, a vo u lu que ces C orp s ne fussent point
tenus d’avertir le G o u v e r n e m e n t, et les a dispensés
de la form alité
gênante e t dispendieuse des lettres
p a te n te s, sau f l’h om ologation , faite dans une cours
su p é rie u re , de l’acte qui étab lit la fondation : ( ce
qui n’a point été fait ici. )
E t cela était
ra iso n n a b le, car les hôpitaux étan t
5
�Ç ' 8 )
_
alors adm inistres par les prem iers m agistrats de l’errd r o i t , et les fabriques par les C u rés qui avaient u n e
existance lé g a le , et un office c i v i l , le G o u v e rn e m e n t
avait des agens auprès de ces C orps , pour surveiller
l’exécu tio n et l ’em ploi
de la fondation ; mais cela'
n ’est plus applicable aux C orps non approuvés. T e l l e
est leu r p o s itio n , que d'un côté , le G ou vern em en t
n’a point auprès d ’eux des agens qui les su rv e ille n t,
e t l ’avertissent des dispositions faites à leur p r o fit, et
que de l ’autre , ils ne p euven t eux-mêmes l’en avertir,
car le prem ier regard de sa tou te puissance les ferait
ren trer dans la poussière et le néant dont ils n ’auraient
pas du sortir.
Si donc le G ou vern em ent nra pas des surveillans;
auprès des C o rp s
dem ander
sa
correspondre
leu r
fidélité ?
non approuvés , s’ils ne p eu ven t
surveillance
avec
faute
lu i , q u’est - ce
de
m oyen
qui
de
garantira
q u ’est - ce qui garantira ^ exécution '
des fondations qui leur auront été confiées ? q u ’est-ce
qui em pêchera qu’un C orps é t a b li, sous' p rétexte'
d ’hospice et de charité , n’abuse de la confiance du
fo n d a te u r, pour détourner la fondation à son profit ?'
Ici le B ureau de bienfaisance n’osera pas présenter
l ’arrêté du G ou vern em en t
qui- üautorise à accep ter
le le g s , com m e ,des lettres patentes portant appro
bation de la con grégation de l ’œ uvre de la m iscri-
�< ¿9 )
corde. T o u t 'c è qu’il p e u t fa ire , c'est de le présenter
com m e lettres patentes confirm ant le legs : ce
que
nous discuterons dans le paragraphe suivant.
D o n c la con grégation de l ’œ uvre de la m iséricorde
n’est pas a p p ro u v é e , donc le legs qui lui a été fait
est absolum ent nul.
'
iDes formalités prescrites pour saisir le Corps sur lequel
' on fon de.
' L a n ullité résultan t de l’illégalité du C orp s sur le»
¿fuel on fonde , est une n u llité principale , e t qui em
porte toutes les n ullités secondaires ; de sorte , que
pour traiter de celles-ci , il faut pou r un m om ent
o u b lier la prem ière.
•
II suit des édits
rendus sur la m atière , et de ce
q ue nous avons d i t , qu’en p rin cip e gén éral les fon
dations d oiven t être confirm ées par lettres patentes»
C e tte form alité à - 1 - elle été observée ?
L e B ureau d e bienfaisance, présen te l ’arrêté .qui
l ’autorise à accepter Je le g s , com m e des lettres pa
tentes.
N ous lui répondrons que , si ce sont des lettres
p a te n te s, elles sont obreptices , e t que le Gouverne-*
nient a été trom pé sur l’état du corps légataire.
�'
.
( 20 )
•
Ï 1 est en effet de principe , que les lettres paténtes
ne sont accordées que
co n d itio n n ellem en t, et sous
cette clause expresse ou tacite , s a u f notre d ro it, sa u f
le droit d’autrui.
S a u f notre d r o it , c’est-à-dire, sauf le
d ro it pu blic et les lois politiques ; sau f le droit d ’au
trui , c ’e s t- à - d ir e , sauf les lois civiles.
O r , l’arrêté qu’on nous, o p p o s e , s’il était au tre
chose qu’une simple au torisation , et un règlem ent
éven tu el du m ode d’ad m in istration , répugnerait aux
lois politiques , car . il serai£_en contraven tion a v e c
l ’é d itd e 174 9 ; il répugne aux lois c iv ile s , car, com m e
il sera -prouvé ailleurs , le legs est caduc à cause d é
l ’évén em en t p révu par la testatrice.
C e s principes sont de droit public et s o c ia l, Ws
appartiennent à ce droit que J u s tin ie n , au com m en
cem en t de ses institutes, appelle le droit im m uable des
nations; sans eux il n’y aurait plus que despotism e, d ’où
il faut conclure qu’ils sont non seulem ent re s p e c té s,
mais encore recom m andés par notre gouvernem ent.
Ils ont été de tout temps admis en F r a n c e , ils
appartiennent au droit ancien com m e au droit n ou
v e a u ; car la m onarchie aussi avait sa liberté et son
respect pour les propriétés : ils sont consacrés par le
concours unanim e et im posant des auteurs de la juris-,
pruden ce et des édits.
�E t sans aller plus lo in , v o ilà pourquoi l’éd it de 1749
in trod u it u n -grand procès sur la vérification des lettres
paten tes, pourquoi l’article 7 v e u t , sous peine de nullité,
q u ’il soit fait une en quête de com m odo et incom m odo,
q u ’elles soient com m uniquées aux procu reu rs-gén éraux des cours souveraines , pour être par eux requis
ce qu’ils a v is e ro n t, aux supérieurs m édiats et im m é
diats du C orps sür leq u e l on fo n d e , aux seigneurs
des biens donnés , e t enfin aux autres personnes dont
l'avis et le consentement seront jugés n écessa ires, qui
s o n t , comme on peut vo ir par l’article X , les enfans
et les héritiers m êm e
présom ptifs d u bienfaiteur.
V o ilà pourquoi l’article 8 parle des oppositions faites
soit avant soit après l’enrégistrem ent desdites le ttr e s ,
sur lesquelles oppositions il devra être statué ainsi
qu’il appartiendra ; de sorte que tantôt il pourra arriver
que la lettre patente ( com m e aujourd’hui l ’arrêté du
G o u v e rn e m e n t, s’il pou vait être regardé com m e t e l,
ce qui n’est pas : ) de sorte , disons-nous , que tantôt
il pourra arriver que la lettre patente soit écartée par
•les cours so u vera in e s, et tantôt que cette lettre p a
ten te ,•revêtu e d e la sanction ju d ic ia ire , v é r ifié e , h om o
lo gu ée , dev/enWe' loi , soit annullée par les m êmes
cours qui
1ont
enregistree.
■
L ’autorité ro yale et .celle des parlem ens n’ont pas
hon te de se rétra cte r'e t de reculer devant la simple
�'
(a a -)
_
'
apposition d’un particulier , que dis-je, elles procla
m ent ce droit donné contr’elles au dernier des indi
vidus , et s’en font un titre de gloire.
E t si cela était ainsi sous la m o n arch ie, à plus forte
ra iso n , cela doit être sous notre G ouvernem ent plus
lib re et plus populaire.
A in si d o n c, si cet arrêté était une lettre p a ten te, il
d evrait etre écarté comme obreptice et conti'aire au
d roit politique et civil.
Il d evrait encore être annullé conform ém ent aux
articles 5 , 6 et 7 de l’édit de 17 4 9 , qui prononcent
la n ullité en cas d’inobservation des form alités qu’ils
prescrivent.
M ais le T ribun al n ’aura point cette p e in e , car cet
arrêté n ’est point dans l’e s p è c e , ce que devraient être
des lettres patentes ; et cela ' résulte de ce q u ’il n e
p e u t recevo ir les form alités nécessaires pour leur vali
d ité , de ce qu’il ne peut d even ir la base d ’un grand
p r o c è s , magni processûs , de ce qu’il n’est point destin é
à d even ir une l o i , com m e des lettres patentes enrér
gistrées , de ce qu ’il n’est q u ’ un acte de simple admir
n is tra tio n , un acte qui autorise à re c e v o ir , et régie
l ’e m p lo i, en cas que l’on reçoive.
Q u e le T rib u n a l se rassure , il n’aura point à com
battre cet arrêté , car il ne raisonne que condition-?
�C 25 )
nellem ent / et dans là supposition d e la valid ité dti
legs ; car il ne tou ch e p oin t au fond de la q u estio n ,
qui de droit est rem ise à la décision des T r ib u n a u x ,
e t sur laquelle le G o u vern em en t n’a poin t em piété.
L e Bureau de bienfaisance oppose ensuite l ’article
3
de l ’ édit de 1749 et de la déclaration de 1 7 7 4 , qui
dispense certaines fondations de la form alité des lettres
patentes^
Il est v r a i, mais cet article ne parle que des fon
dations particulières >fa ite s à des Corps duement autorisés :
o r , d ’un côté * l’œ u vre de la m iséricorde n’était pas
a u to ris é e , de l ’a u t r e , la fondation n’était point parti
culière , c’est-à-dire in dividu elle , ou relative seulem ent
à quelques individus*
D e p lu s , cet' article im pose la form alité de l’hornolo g a tio n , et ici il n’y en a pas rla .d e m a n d e en d éli -5
vrance du legs ne p e u t e n tenir lie u y c a r on ne procède^
pas devant urfe cour s u p é r i e u r e o n ne .procède pasdans les form es nécessaires pour hom ologuer. -
.•
A in si le Bureau de bien faisance né rapporte pas de
lettres patentes qui ratifien t la fondation ; cette fon
dation et le C orps sur leq u el on a fondé ne s o n t point
dans les exceptions portées par l’article
3
;
quand'
on le su pposerait , il n ’y pas eu hom ologation com m e
�.
• ..................................................C ' ¿4 )
.
_
il est prescrit, à peine de n u llité ; ainsi q u ’on pou rrait
le prouver.
'
D ’ailleurs la disposition fût-elle revêtue des form a
lités req u sies , le Corps n’étant pas approuvé , e lle
est absolum ent nulle,
■ ' •
'
L e legs est-il fait en biens dont il soit permis d e
disposer en faveur des gens de main-morte ?
L ’article 14 de l’édit de 1749 défend aux gens d e
m ain-morte d’a c q u é rir, p o sséd er, recevoir à l ’avenir
aucuns immeubles , rentes
fo n ciè re s, droits réels ,
rentes constituées sur les p a rticu liers, sans avoir au
paravant obtenu des lettres patentes pour l’amortis
* isement.
L e s articles i 5 e t
’
16 éten den t la disposition aux
fonds , droits r é e ls , e t rentes réputés m eubles par les
coutm ues et statuts , aux acquisitions , échanges ,
v e n te s , e t c ., donnations simples ou à charge de fonda
tion , etc. e t c ., à titre gratuit ou onéreux.
L ?article 17 défend à l’avenir toutes dispositions de
d ern ière vo lo n té pour donner au*: gens de main-morte
des biens de la qualité m arquée par l’article 14 , quand
m êm e elles seraient faites à la charge d’obtenir des
lettres patentes , QP
lieu d,e donner directem ent
des
�( 25)
des biens fonds aux gens de m ain-m orte , celui qui lés
aurait donnés, aurait ordonné quils seraient yendiis ou
régis par d’autres , pour leur en remettre le prix ou les
revenus.
C e t article com m e on v o i t , contient deu x parties ,
l ’une prononce la n ullité des dispositions de der
nière volon té qui donneraient aux gens de main-morte
•des im m eu b les, et autres biens désignés par l’art. 14L ’autre assim ile aux dispositions prohibées d’im
m eubles e t c ., celles par lesquelles le testateur aurait
ordonné que les biens seraient vendus ou régis par
un tiers , ch argé de rem ettre au C orp s institué , ou
légataire , le prix desdits biens vendus ou des revenus
perçus.
,
L e s arrêts appliquent rigoureusem ent la seconde
partie de cet article. L e s Parlem ens ont pensé en fait,
q u ’il était de leur d evo ir de rejeter et de p réven ir tous
les m oyens -détournés , toutes les fraudes par les
quelles on ch erch erait à éluder
les dispositions d e
l ’édit i y49 y ds ont pensé en d ro it, que dans ces c a s , le
p rix représentant la chose vendu e , devait être sujet
à la rigueu r de l’article.
•
" A in si un arrêt de i 755 déclare nulles , quant aux
im m eu b les, les dispositions d ’un h u issier.d e Y itr i ,
par lesquelles il avait lég u é tous ses biens à l’hôpital
4
�f c a G ) ..................................................
de cette- ville. L e testateur avait a jo u té , si la dis
position est contraire à l ’éd it de 1749 , je charge m on
exécu teu r testam entaire de vendre tous mes biens
fonds et c o n tra ts, pour le prix en être em ployé en.,
rentes , dont il soit permis de disposer en faveur des>
gens de m ain-m orte.
,
L e C u ré de B ern euil lègue à sa fabrique 12,000 'a
prendre chez des tiers où ils sont d ép osée C eu x -ci
avaien t aliéné les sommes , et en avaient donné deu x
reconnaissances, portant prom esse de passer contrat :
au bas de chacune de ces recon n aissances, le C u r é
dresse un co d icile par lequel il les lègu e à- sa fabrique.
L a cause était favorable , la promesse de* passer con‘ trat avait été
ignorée du m aître , elle n ’avait point
eu d ’effet ; la fabrique arguait encore des dispositions
de la déclaration
de 1762
enregistrée et exécu tée
d an s. les autres p arlem en s, mais non. encore dans celui
d e Paris ; cependant arrêt de
codicilles.
.
i 764 qui casse les
L a /dame C oqu etariat lègu e à la fab riqu e d’ A illan t
3,40° , pour faire un fond destiné à l ’entretien d ’un
vicaire : de cette somme 1,000 doivent être pris sur
ses m eubles , et
2 ,4 ° °
sur ses inimeubles . . . . co n
testation'. . . L a fabrique disait qu’on ne lui avait légu é
qu’une somme p é cu n ia ire , qu’on n’avait pas rappelle
�.
C 27 5
,
.
les im m eu b les, pour ordonner q u ’ ils seraient ven d u s,
maïs seulem ent pour fixer la part contributoire des
divers h éritiers , car la testatrice avait des héritiers
de m e u b le s, e t des héritiers d ’immeubles. A rrê t des
1764 qui casse le legs pour la partie qui doit être
prise sur les im m eubles.
- V o y o n s si le legs dont s’agit est dans l ’e s p è c e , et
s’il est aussi favorable.
„
L a dame G a lieu a fait trois classes de legs. C e u x
de la prem ière classe d oiven t être acquittés dans l’an
du décès , pour ceu x de la seconde , l ’exécuteur tes
tam entaire chargé de les p a y e r , ne pourra être pressé ,
de sorte qu’il pouvait retarder la délivrance du legs
jusqu’au dernier m om ent de l’exécution.
. P ou r le payem ent de ces l e g s , elle ordonne qu’aprèsson décès on ven d e ses m eubles. M ais le prix qui
pouvait en p roven ir ne d evait pas suffire, il était visible
q u ’il serait absorbé par ces legs exigibles dans l’an du
décès de la testatrice. E lle a donc voulu qu’ils fussent
payés avec c e prix q u’ils d evaien t a b so rb er; quant
aux legs de la seconde classe non
exigibles , elle a
donc su q u ’ils ne p o u vaien t être payés avec le prix
d ’un m obilier déjà absorbé ; elle a donc voulu q u’ils
fussent payés avec le prix des im m eubles v en d u s, et
des revenus perçus.
.
*
�\
( 28 )
C e la est m an ifeste, quant on se rappelle qu’elle veuf;
d ’un c ô t é , que l’exécu teu r testam entaire ne puisse être
pressé pour l’acquit de ces legs, et de l’autre , qu’il n e
puisse être pressé pour vendre.
E lle
v eu t qu’il n e
puisse être pressé d’acquitter les l e g s , parce qu’il nep eut être pressé de vendre et réciproquem ent ; d e
sorte q u e , comme nous l ’avons d éjà d it , il peut re
tarder jusqu’aux derniers m om ens d e l’e x é c u tio n , e t
la ven te des im m eubles, et l’acquit des legs. C e s
d eu x volontés se correspondent.
D o n c la dame G alieu a sçu que son legs ne pour
rait être acquitté qu’avec le prix des- im m eubles et
des revenus , donc elle a vou lu qu’il le f u t , donc
elle a légu é le prix d’im m eubles à ven dre et de re
venus à p e r c e v o ir , donc la disposition est dans le
cas prévu par l’art. 17 de l’édit d e 17 4 9 , donc au x .
termes de cet article elle est nulle. C e la est aussi évi
d e n t qu’une proposition dé m athém atiques, v
L ’article 9 de la, déclaration d e 1762 ou 1774
vo u lan t favoriser les H ôpitaux et autres établissemens
de c h a r ité , leu r perm et de recevo ir des im m eubles,
dérogean t à.cet égard à 1 art. 17 de
1édit
1 749> qui p ro
nonce la n ullité des actes de dernière v o lo n té , par
lesquels il leur en serait légué.
\
�0 * 0
O n observera d ’ab ord , q u ’il n ’est d érogé à l’art. 17
d e l ’édit
1749 que pour la partie qui prononce la
nullité r mais non pour la partie qui assimile aux dis
positions de biens fo n d s, celles qui ordonneraient que
-
des im m eubles seront ven dus , ou le reven u perçu par
des tiers , pour le prix en être rendu aux C orps lé
gataires. Ainsi- cette partie de l’art, étant m aintenue ,
les héritiers d e ceux qui auront ainsi lé g u é , devront
être traités com m e les héritiers de ceux qui auraient pu
rem ent légu é des im m eubles. A in si aux term es des art.
suivans et notam m ent du i 3 / ( déclaration de 1762
o u i 774 ) le sieur C a p elle aurait le droit d’offrir en
rentes sur FEtat f le payem ent des 80,000 qui devaient
être acquittés avec le produit des im m eubles à v e n
dre , et des revenus à percevoir.
Il est vrai que l’art, X I o b lig e les h éritiers qui
profiteront de cette faculté , à retirer les im m eubles
dans l’année de l’o u vertu re de la succession. M ais le
sieur C a p elle ne p ou vait être ten u de retirer le prix
considéré ici com m e d ’im m euble légu é , puisqu’il ne
,
i
l’a pas fourni ; il a fait plus que le r e t ir e r , puisqu’il
la retenu.
>
1
■
M ainten an t, ces articles ne sont poin t applicables à
un C orps non approuvé , et nous n e sommes entrés
;
dans ces détails q ue pour prouver de plus en plus la
'i
m ilit é du legs,
•
(
•
�/
■
.
.
Ç
5o
) _________
.
'
Q uels sont enfin les term es dans lesquels on a ’légu é?
O utre la clause de retour exprim ée dans l’acte ,
e x pressis verbis , il est une condition réso lu to ire, qui
résulte des ternies darçs lesquels on a légué.
L e legs est fait aux pauvres que l’ æuyre a coutumç
d ’assister, c ’est-à-dire aux pauvres que l ’œ uvre c h o isit,
d on t le choix est laissé 3 son
pouvait la gêner.
arbitre j car rien ne
O r il est de principe général que quand un arbi
trage , un droit d ’élection sont laissés à un tiers , lui,
seul peut arbitrer et choisir ; que s’il ne le peut , ou
ne le v e u t , la stipulation tom be.
L a L.
43
de verb. ob. , après l’avoir expressém ent
d écid é , dit : «
magis
probandum
est à personâ ,
non esse recedendum cui arbitriurn confertum est. »
L a L . 44 ajoute : « si non arbitretur stipulatio non
v a le t , adeo ut si pœ na adjecta s i t , ne ipsa quidem
pœ na commitatur. »
C e principe ainsi exposé au titre général des o b li
gations , est répété au titre de chaque obligation par
ticu lière , v o ir ceux de contrah. empt, au c o d e , pro
socio : de locat. e tc ., etc., de hæred. inst. de légat,
etc. , etc. , etc. ,
L a loi multa de cond. et démonst. pose , le cas
où un h éritier ou légataire a été chargé d’é le v e r un
�(
3.
)
_
_tom beau sur les plans d ’un tiers , e t elle dit : « si
cujus arbitrium est, non v iv a t, v e l adesse rei non possit,
v e l arbitrari n o lit, m u lta n o n com m ititur ab hæ rede. »
L a peine , la d éch éan ce portée par le testam ent n ’est
pas encourue , pourquoi ? parce que l’obligation est
tom bée.
Ici l ’h éritier était chargé de donner 80,000 pour
.être em ployés suivant l ’arbitrage des pieuses dames
com posant- l’O E u vre de la m iséricorde , en d’autres
term es pour être em ployés à l'assistance des pauvres
q u’elle a coutume d’assister. L a
congrégation n ’existe
p lu s , on ne peut savoir quels sont ceux qu’elle aurait
choisis , car ce n’est pas la gén éralité des pauvres
qu’elle a ssista it, puisqu’elle n ’était point hospice g é
n éral, c ’étaient des pauvres choisis dans la gén éralité :
ce n’est pas à la gén éralité des pauvres que la dam e
G a lieu avait lé g u é , mais
seulem ent à ceu x choisis
dans cette généralité.
, .
•
t
E h b ie n , la C o n g rég a tio n chargéé d’a r b itr e r , de
choisir, la C o n grégatio n qui d evait fournir le plan sui
van t leq u el le monument aumônier devait être é le v é ,
n ’existe plus. « N o n a d e s t, non v i v i t , non potest
arbitrari » donc « stipulatio ( legatum ) non valet. «
.
L e Bureau de bienfaisance oppose à cela qu’il repré
sente l’œ uvre. N ous avons prouvé que cela n’était pas
�■
.
(3 0
^
'
.
p o ssib le , et dans un m om ent nous ajouterons à la
preuve donnée ;
mais
en a tte n d a n t, supposons-le
puisqu’il le veut.
« N o n recedendum est à personâ cui arbitrium
con fertu m est. » L e droit d’é le c tio n , d’arbitrage étant,
fondé sur la con fian ce, est p e rso n n e l, coinm e elle :
c e d roit donné à l’œ uvre ne peut passer au C orps
qui la rep résen te, non plus que celui donné à un in
d ivid u ne peut passer à son h éritier ; aussi les lois ne
distinguent p o in t , elles prononcent absolum ent : celle
d e obligat. dit « stipulatio non valet » , et la loi m u lta ,
avan t de prononcer , « m ulta non com m ittetur » n’exa
m ine pas si l ’architecte a laissé des héritiers , pu plutôt
îles élèves qui aient pris son g e n re , son faire, son style.
D o n c de d ro it l’a rb itra g e, l ’élection sont person
n e ls , >et cel^i est juste : car cjui^sait si M e. G a lie u ,
lié e avec M e. de Fontanges , n ’était pas dans le secret
de ses coutumes ,, de ses choix ; qui sait m êm e si elle
ne lui avait pas fait des recom m andations particulières
e t verbales.
E t cela est d’un grand poids dans la cause ; car en
m atière d ’aum ône, et de legs p ie , les recom m andations
verbales sont adjnises et exécutées contre la lettre du
te sta m en t, sur la déclaration de l'exécu teu r testa
m entaire ou du fiduciaire.T ém o in
�.
.
c 53 )
,
: T é m o in u n arrêt du parlem ent de P aris, du 2 août:
1 7 3 4 , dont voiei l’espèce : 1\ 1. D e v a u x , chanoine à
Chartres fait son testam en t, après quelques disposi
tions pieuses , il ordonne que le restant de ses biens
sera em ployé au soulagem ent des pauvres. 11 nomm e
ensuite un exécuteur testam entaire. L e Bureau de
l’hôpital de C hartres réclam e le legs j com m e fait à
l’hôpital ; l?exécuteur testam entaire conteste , et pré
tend avoir des recom m andations particulières et v e r
bales en faveur des jeunes étudians : arrêt au profit
de l’exécuteur testam entaire.
■
. Mais la disposition de la testatrice a corroboré celle
du d roit; en e f f e t , elle a ordonné que le legs ferait
retour à l’h éritier aussi-tôt qu’il ne serait plus adm i
nistré par l’O E u v re , aussi-tôt qu’elle serait réunie à
l’ h ôp ita l, ou à tout autre hôpital ; N ous ' reviendrons
bientôt sur le sens de cette c la u s e , qui dans la cause
est profond et décisif. *
M ais le B ureau de
C o rp s que l’O Euvre ?
"
bienfaisance est-il le m êm è
Q u ’est-ce qui établit l’m dentité d ’un C orps ?
C ’est i°. sa continuation par des m embres indi
viduellem ent aggrégés , et non par un nouveau C orps
.qui le rem placerait brusquem ent , ce qui exclud
tou te id é e de continuation.
5
�\
C 54 p
,
C ’est 2°, l’id en tité de principes de régies , enfin d e
tout ce qui forme l’esprit d’un C orps.
O r , y a -t-il id en tité à cet égard entre l’O E uvre e t '
le B ureau de bienfaisance. Rendant égalem ent ju s tic e ,
e t applaudissant égalem ent aux principes des hom m es
bienfaisans qui le co m p o sen t, et des pieuses dames
qui adm inistraient l’œ u v r e , j’oserai cependant dire
q u ’il n ’y a pas id e n tité , et là-dessus j’en appellerai
à la conscience de tout homme qui ne sera ni en têté
ni prévenu. J ’ajouterai en preuve , que M e. de Foritange exerce et continue de son côté les œ uvres de
la m iséricorde. Si ses principes étaient les m êmes que
ceu x du Bureau , ne viendrait-elle pas se placer à leur
.
tête ou parmi e u x , e t joindre des e ffo rts, qui réunis ,
•
seraient plus heureux.
•
E lle ne le fait pas , et si elle voulait le faire elle ne
serait pas reçue : de sorte que 'ce C o r p s , qui se prétend
le même que celui de l’œ u v r e , rejetterait la S u p é^ rieure de l’œ uvre.
'
Il y a p lu s , le G ouvern em ent n’a pas voulu que les
C orps qu’il créait eussent les mêmes règles , les mêmes
p rin cip e s, le même esprit q u e ceu x qu i étaient dé
/
/
truits. S ’il l ’avait v o u lu , il les aurait ré ta b lis, comme
■. «
il a rétabli les herm ites du M ont St. Bernard , ou tout
au m oins il aurait com posé les nouveaux C orps des
débris des anciens ; s’il ne voulait pas de femmes , il
ne m anquait pas d ’hommes élevés dans ces institutions.
�(
35)
O r il rie Fa pas f a it , et dans tous les B u reau* de
bienfaisance de la R épublique , il n 'y a peut-être pas
un seul in divid u ayant appartenu à ces C orps ; du
moins il y en a très-peu. D o n c , etc.
L e Bureau de bienfaisance oppose qu’ il a été appelle
à représenter l’œ uvre. Pour l ’é tab lir, il allègue qu’il
est institué pour le m ême ob jet ; s a v o ir, pour l’assis
tance des p a u v re s, et la distribution des secours à
dom icile.
•
Mais de droit un corps ne représente pas tous les
corps institués pour le m êm e o b je t; de d r o it , il n’est
pas le m êm e , sans quoi il faudrait dire que l’œ u vre
représentait les F illes et les P ères de la ch a rité, etc. etc.
D e d r o it , un corps ne représente pas et n ’est pas
l ’h éritier de tous les c o rp s, q u i, institués pour le m êm e
o b je t, viennent à p é r ir , à plu$ forte raison de ceux'
qui ont, péri avant qu’il/ existasse«!?-»
S i’ le Bureau de bienfaisance était aujourd’hui d é
claré l’h éritier de l ’œ u v r e , d em ain , par la force des
m em es p rin cip es, il pourrait dem ander à être d éclaré
l’héritier des T em pliers ou de toute autre institution
du même g e n re , qui aurait péri m ille ans avan t lui.
E n fin , il est des corps com m e des in d iv id u s, on
n’a jamais prétendu que ceux-ci fussent de la m êm e
famille et fussent appellés à se représenter et à se suc
céd er , parce qu’ils exerçaient la m êm e profession.
�C 36)
.
A in si donc le legs doit faire retour à l’h érilier par
l ’effet et l’événem ent de la condition résolutoire ta
citem ent exprim ée par ces mots : les pauvres que Vœuvre
a coutume d’assister.
Exam inons m aintenant quel d o it être l’effet de la
condition résolutoire expressém ent énoncée dans la
clause qui suit. '
'
« E t au cas que l’œ uvre d e l à m iséricorde vin t à,
être réunie à l’H ôpital général , ou à tout autre hôpital,
je veu x que le legs fasse retour à mon héritier. »
L a condition a eu lieu , puisqu’il y a eu confusion
des C orps e t des biens.
-
11 y
a eu confusion des C o r p s , car toutes les insti
tutions aumônières de F ran ce ont été réduites à une
seule e s p è c e , qui les a toutes rem p lacées, savoir le s
hospices généraux.
Il y a eu confusion de biens , elle s’est op érée
dans la main de la N ation , qui s’en est em parée ;
tém oin entre autres lois celle du 19 mars 1 7 9 3 , qui
ordonne q u e les biens des hôpitaux , ceux des d o tâtions e t donations en faveur des p a u v re s, seront
vendus com m e nationaux : la N ation par ces 'lois'
et autres , a délaré l ’assistance des pauvres , dette na
tionale , et s’en est chargée : ainsi d o n c , comme 011
l ’a d i t , elle est devenue le véritable h ôp ital, l ’hôpital
universel d e l’em pire ; et les hôpitaux qui son t restés,
»
�..
.
.
.
.
.
n’ étant plus propnétaire's èt iridépéndans , n’ont été
que l’a g e n t, et l’interm édiaire par leq u el cet hôpital
universel exerçait l ’hospitalité.
M ais dit-on , il n’y à plus co n fu sio n , et de nouveaux
C orps ont été établis ; c’est parce
que de nouveaux
C orps ont été établis , que la confusion des anciens
n ’a pas c e ssé , et qu’elle dure encore ; quand il n’y aurait
plus confusion , qu’ im porte ? le droit du légataire
n ’en a pas moins été résolu , le legs n’en a pas moins
_ dès l ’instant fait retour à l ’h é ritie r, tout n’en est pas
moins consom m é.
A u re ste , je vais plus lo in , je soutiens que les rapports,
que le B ureau de bienfaisance nous dit exister entré
l’œ uvre e t l u i , sont une preuve que la condition
prévue est a rriv ée , et que l’événem ent dont i l s’a g i t ,
sa v o ir la réunion , a eu lieu en sa faveur : je le prouve.
t )
E n cas de réunion de deux C o r p s , qu’est le.
C orps auquel on r é u n it ,
par rapport à celui qui
est réuni ? il h érite de ses droits , il lui est substitué ,
il le rem place , il le représente.
O r , le Bureau de bienfaisance ne cessé de répéter
qu’il hérite des droits de l’oeüvre , qu’il lui ést subs
titué , qu’il la rem place , qu’il la représente ; c’est ëri
vertu de ce prétendu titré qu’il ftg it, qu’il deiiiandé»
D o n c , etc.
�. c 38}
' Q uand la tentatrice a é c r it, au cas que l’oeuvre
vin t à être réunie à l ’hôpital général , ou à tout autre
h ô p ita l , c’est com m e si elle avait é c r it , au cas que
l ’hôpital g é n é r a l, ou tout autre hôpital vienne à rem
placer et à représenter l’œ uvre.
M ais pourquoi a -t-elle dit l ’hôpital g é n é r a l, ou touf,
autre h ô p ita l, parce qu’elle a vo u lu s’énoncer d’une
m anière g é n é r a le , qui put em brasser toutes les insti
tutions de ce genre -, et cela était conséquent à la
clause dont nous avons parlé plus h a u t, par laquelle
elle léguait exclusivem ent à l’œ uvre de la m iséricorde ,
e t rejetait tout autre C orps çle ce genre , tou t autre
institution aumônière, charitable , pitoyable , pour nous
servir des term es des anciennes chartes.
^
O r , .on ne peut douter que le Bureau de bien^faisance^sôit
une institution aum ônière , pitoyable ,
charitable , donc il est compris dans
l’expression :
thôpital général ou tout autre hôpital.
' D o n c les rapports qui le lient à l’œ u vre de la mi
séricorde , et dont il prétend tirer son d r o it, sont une
preuve qu’ il n’en a pas : donc le titre auquel il d e
m ande , prouve qu’ il n’a point de titre pour „demander.
M ais enfin qui lui aurait donné les droits qu’il
vien t exercer ici ? de qui tient-il sa mission ? ce n’est
que du G ouvern em en t ; or le G ouvernem ent n’avait
point de d roit au legs dont s’agit ; donc il n’a pu
^Jui en donner.
�J
( 3<)'5
Com m e cette partie de l ’affaire est non pas la plus
contraire aux ad versaires, car les autres ne le sont
pas moins , mais celle où l’injustice de leu r dem ande
frappe le plus ceux qui n 'on t aucune connaissance du
d r o it; c’est sur ee p o in t, que pour en imposer au
public , ils ont entassé les sophismes.
C ’est là leu r dernier r e fu g e , c’est là
que nous^
allons les forcer:
O n a d ’abord opposé que toute'clause résolutoire
apposée à un legs pie était im m orale, et partant nulle.
L ’argum ent est n e u f : c ’est la prem ière fois qu’on
l’avance , faisons en sorte' que ce soit la dernière.
C e tte proposition est à contre sens de la raison et
des lois.
E n e ffe t, une condition réso lu to ire ou n égative n e
peut être im m orale, q u’autant que l’obligation qu’elle
r é s o u t, est com m andée par les m œurs
lois : telle serait la condition
ou par les
résolutoire de l’ob li
gation de payer les im pôts, ou de nourrir son. père
pauvre.
.
Mais quand l’obligation n’est pas recom m andée par
les mœurs ou par les l o is , la condition qui la résout
ne peut pécher con tr’clles.
C elui qui a la puissance et le droit de ne pas fa ire,
a bien la puissance et le droit de ne faire qu’à m o itié ,
en tel cas , en tel te m p s, en un m o t , de ne faire que--
l
�C
conditionnellem ent. E t
4o
> ‘
la D am é
.
G alieu,, qui avait
incontestablem ent le droit de ne pas: d o n n e r, avait
bien aussi celui de ne donner que souis les conditions
im plicites et explicites dont nous avons parlé. •
L e s lois n e sont pas moins! formelles- ; nous en ' ci
terons une dans- l’espèce , d ’une fondation 'de- jeux
funèbres.
O n sait que ces jeux étaient dans l’im tiquité ce que
sont dé nos jours les oraisons- fu n è b re s, les prières ,
les m esses; la différence est que les anciens appelaient
autour du tom beau, l’am bition avec ses jeux , ses tu^
mult.es ., ses d ispu tes, ses combats , ses haines et ses
vengeances ; tandis qu’aujourd’hui nous y appelions
l ’indulgence et les bénédictions du C ie l, des réflexions
m orales sur la double nécessité de m ourir et de bien
fa ire , des souvenirs honorables pour celui qui n’est
plus, et des idées consolantes pour ceu x qui sont restés.
H é b ie n , la L . Titius Lucius de anuuis lég a t., pose
l ’espèce qui suit : T itiu s L ucius lègue à la R épublique
une certaine so m m e, à condition que les revenus en
seront em ployés à des jeu x funèbres en son honneur.
E lle d écid e que si la condition n’est pas re m p lie ,
les h éritiers rép éteron t ce qui aura été payé , et retien
d ront ce qui sera du.
L a glose fait plus , elle renvoie à la, loi n de cond.
indeb.
« Si hceres. arbitratu
lib e r t i, m onumentum
,
facere
�.
-
C4 0
.
.
facere jussus, (^testam ento) pecuniali! liberto dederii,
e t is accepta pecunia m onumentmn non faciatt, con
dì tione tenetur. « L a glose décide donc que la R épu
blique est tenue des conditions qui lui sont im posées,
aussi rigoureusem ent que le dernier affranchi.
Il n’y a d ’exception à ces principes que quand les
conditions sont illicites , com m e celles de célébrer
ces jeux dans un em placem ent prohibé par les lois ,
ou quant la condition étant purem ent m o d a le , n e
peut être exercée : alors le testateur est censé avoir
principalem ent v o y lu d o n n e r, et n’avoir fixé le m ode
que secondairem ent.
.
O n trouve des exem ples da.ns le droit romain.
O n a ensuite opposé une loi de 17 9 0 , q u i, à l’égard
des fondations dont la N ation s’est e m p a rée, veu t que
les héritiers du fondateur n e puissent profiter des
clauses de reto u r, apposées dans les actes constitutifs.
L ’argum ent tout m isérable q u ’il e s t , ne prouve
point en faveur de la conséquence des adversaires
qui citent cette l o i , après avoir prétendu que les
clauses de retour apposées dans ces actes étaient im
m orales, et par conséquent nulles.
Si ces clauses étaien t im m orales et nulles , pour
quoi le L égislateu r a - t - i) eu besoin d ’en préven ir
1 effet par une l o i , peut-être odieuse ?
Exam inons m aintenant la loi qu’on nous oppose.
6
�■
(4 0
U n e lo i qui d éroge au droit com m un n e peut être
étendue. Dans c e lle -c i, il ne s’agit que de fondations
d éjà v a lid é e s, d éjà exécutées , dont les biens se trou
vaie n t entre les mains des C orporations supprim ées ,
e t dont la N ation s’était em parée ; mais il n’y est au
cun em ent question de celles dont les biens n e sont ni
saisis ni re m is, qui ne sont poin t exécu tées ni vali
dées , dont le droit est contesté.
T e l est donc le systèm e des m oyens avancés par le
sie u r C apelle.
L e C o rp s n’était point a p p ro u v é , de là une n ullité
a b s o lu e , irréparable.
•
L e C orps étant a p p ro u vé, l’acte de fondation au
rait du être ratifié par des lettres p a te n te s, tou t au
moins par l’hom ologation dans une cour supérieure.
L e s biens donnés n e sont point de la nature de
ceu x dont il est permis de d isp o ser, aux termes de
l’article i 4 d e l ’é d itd e 1749. L e s C orps non approuvés
ne p eu ven t être compris dans les exceptions portées
par les déclarations suivantes.
E n fin , le legs est nul par l ’ événem ent des condi
tions
r é s o lu to ire s , explicitem ent ou im plicitem ent
portées dans le testam ent.
�(43)
Il nous reste m aintenant à répondre à quelques ob
jections détachées.
L ’adversaire a prétendu que le legs pie r é d u it , ne
faisait point retour à l ’h é ritie r, mais devait être em
p lo yé à des usages pieux. '
•
N ous nous contenterons de lui répondre qu’apparamment il n’a pas lu les articles 1 0 , n et 12 de
l ’édit de 1749Q n a blâm é la dem ande et la réclam ation de l ’h é n t i e r , elles ont été représentées com m e l’acte d ’une
avid ité co n d a m n a b le, que les T rib u n au x devaient
s’empresser de flétrir.
.
•
C ertes , telles ne furent point les o p in ion s, tels ne
furent poin t les exem ples de ces homm es illustres
7
.dont le nom sera toujours ch er à la m agistrature , des
D aguesseau , des G ilb e rt de
V o is in s , des Joli de
F le u ry , des S e g u ie r, e t c . , etc. Ils savaient et ils pu
b liaien t que ces dem andes et ces réclam ation s, loin
d ’être répréh en sib les, sont au contraire encouragées
e t recom m andées par le législateur.
•
E n e ffe t, les articles 1 0 , 11 et 1 1 , donnent lé droit
d e réclam er les biens ainsi d o n n és, non seulem ent
�(-4 4 )
aux h éritiers , mais encore aux enfans e t autres h éri
tiers présom ptifs q u i, vivant même le donateur , seront
envoyés en possession ; que s’ils ne veu lent ou n’osent
exercer ce d r o it , la loi de suite et sans a tte n d re , le
rem et au Seign eur dont les biens dépendent ; et si
celui-ci se t a i t , alors les procureurs-généraux. doiven t
en poursuivre la confiscation.
.
L ’article ajoute : il vrai que ces biens ainsi con
fisqués au profit du r o i , seront par lui em ployés en
faveur d’un autre h ô p ita l, au soulagem ent des pau
vres , ou à quelque usage publie.
M ais ce n’est là qu’une mesure p a rticu lière, qui est
étrangère aux principes constitutifs de l’édit ; le prince
écartant toute idée de fiscalité, n’a pas voulu se gorger
de la dépouille des citoyens.
.
Il
a été opposé que l ’intérêt public exigeait que la .
fondation fût acquittée , que tou t devait se taire d e
van t cette considération d ’un ordre su p é rie u r, et on
s’est com plaisam m ent arrêté sur ce t argument.
M ettons ici de côté la se n sib ilité , affection toujours
hon n ête et g é n é re u se , mais qui doit aussi céder à la
raison ; et voyons si l’in térêt public exige que toutes
les lois politiques et civiles d’un E tat soient im m olées
aux prétentions du simple Bureau de bienfaisance.
L ’in térét de l’E t a t , l ’intérêt public , c’est le respect
pour les lois politiques et c iv ile s , et par suite pour
les propriétés.
.
�■
(
45
y
.
C e n’est poin t l ’in térêt d ’un jour , d ’u n e h e u r e ,
d ’un m o m e n t, celui d’un ou de quelques individus.
L a société qui reste , ne considère
ni l’instant qui
s’é c o u le , ni l’hom m e qui passe, et l’un et l’autre ne sont
pour elle qu’un point fu g itif, que le temps absorbe et
d évore : ses jours â elle sont des siècles , ses enfans
sont
des masses entières ,
c’est eux seuls qu’elle
considère quand il s’agit de stipuler ses in té rê ts , et
non quelques individus , qui tour-à-tou'r se présentant
sur son théâtre , n ’y sont que des usufruitiers d’un
instant , pour lesquels tout est viager , tout est m o
m entané dans l ’ordre social.
Mais quel serait enfin le produit de cette grande
mesure , de cette considération d’uu ordre su p érieu r,
à laquelle on veu t , sans h é site r, faire lé sacrifice d ç
tout ce que les N ations d o iven t respecter sous pein e
de vie , des lois de l’E tat et de la propriété.
.
C e t intérêt p u b lic, nous le diron s, n’est autre chose •
d ’un c ô té , que la facilité donnée au G ouvern em ent
d ’économiser' quelques écus , en le
dispensant dé
payer ce qu’il d o n n e , et ce qu’il d oit pour l’assistance
des pauvres ; de l’a u tr e , celle de recevo ir quelque
a rg e n t, parce que le fonds du legs doit être placé
en. rentes sur ¡’Etat.
;
�'
■
c . 46 ?
. , ,
.
E h 'bien ! ce' n’est poin t là l’intérêt public : nous
irons plus lo in ; ce n ’est pas la volonté du G o u v e rn e
m ent ; en douter serait ne pas lui rendre justice.
M alheur donc à cette opinion vaine et dangereuse,
qui renversant les id é e s , place l’intérêt public dans
une économ ie m o m en tan ée, à laquelle il fait céder
toutes les lo is , et appelle des conséquences funestes.
A n ath êm e à ces principes q u i, s’ils étaient connus »se
raien t égalem ent ré p ro u v é s, et par le G o u v ern em e n t,
fier de com m ander à un peuple gén éreu x et lib re , et
par la N ation qui s’applaudit d ’avoir trou vé un C h e f
qui se fait honneur de respecter ses droits.
E n fin , Y on a prétendu que le legs est favorable.
M ais sur quoi donc serait fondée cette fa v e u r ,
serait-ce sur les articles 2 , 3 , 9 ,
10 , 11 , 12 , i 4 ,
i 5 , 16 , 17 , 1 9 , 2 0 , 21 , 1 1 , de l’éd it de 1749»
sur les déclarations qui l’expliquent ? serait-ce sur les
clauses du testam ent ?
S i la faveur n’est qu’une couleur hon nête donnée
à l ’ in ju stice , ah ! sans doute le B ureau de bienfaisance
a d ro it de la réclam er. E t encore sera-t-il difficile ,
se ra -t-il im possible de tro u ver un vernis qui puisse
effacer et cou vrir ia u t de nullités : mais si au con
traire ce m ot exprim e le respect dû à une réclam ation
qui réunit pour elle la force du droit et de l’é q u ité ,
v
�( 4 7
)
.
alors c’est à l’h éritier qu’elle est d u e , car il a pou r lui la
lo i de l’E t a t , qui défend de donner aux C orps non
ap p ro u vés, e t la loi de l’éq u ité qui ne perm et point que
les familles soient dépouillées pour .enrichir des C o r
porations , m êm e des h ôpitaux , parce que la spolia
tion d’une fam ille produit plus de m isé ra b les, que
n ’ en peut soulager l’opu len ce d ’un hôpital. Il a pour
lui la lettre du testam ent. E t si la dam e G alieu ( i )
im prudem m ent évo q u ée par l’adversaire , pou vait un
m om ent sou lever la pierre du sépulchre , et franchir
les barrières de la m ort , son om bre pâle et in d ig n é e ,
ne crierait-elle pas à l’adversaire.
« Pourquoi êtes-vous venu troubler le silence et la
yy paix du to m b ea u , pourquoi m ’avez-vou s appellé ?
55 quare inquietasti me u t suscitarer.'
« M a vo lo n té n’est-elle pas claire, n’est-il pas eviden t
5> que j’ai voulu vous exclure , que vous n’avez pas
55 plus de droits que l’autorité qui vous envoie : pour
quoi donc m ’avez-vous appellé ? quare inquietasti me
55 ut suscitarer. E h bien , je vous ré p o n d ra i, je vous
« dirai que vous-m ême ne cro yez point à la valid ité
« du l e g s , je vous dirai que vous confiant en des
3? circonstances étrangères , vous avez osé mentir à
^ votre co n scien ce; que vous avez espéré séduire les
( ’ ) M. Jullic Avait dans sa plaidoirie '¿vcqnc l’ombre de Udamc 'Galieu.
�.
C 4 8 )
.
.
Juges en leu r proposant de s’associer à la bienfaisance
« d ’un te sta te u r, mais vous vous serez trom pé : vos
Juges savent que le legs est révoqu é , ils savent,
» que leu r d evo ir est de dire rigoureusem ent droit à
» t o u s , et que là où la justice fin it, l ’injustice co m» m ence. »
.
P. S. Le st. Cape|le n’a pu se procurer le testament du sr. Gérauld
Galieu 5 mais il n’en est pas moins vrai qu’il y a eu une substitution.
Au reste , cela est étranger à la question, et c’est par les principes
qu’il faut décider.
Le sr. Capelle a découvert que la quittance dont nous avons parlé
au commencement, est relative à un autre acte que celui rapporté
dans le testament ; il doit à sa loyauté d’en avertir les Juges.
Le citoyen Lamouroux, Président,
Rapporteur du délibéré.
B E R T R A N D , fils.
S E V E R A C , Avoué.
A Saint-Flour, de l'imprimerie de V e. S A R D I N E ,
�
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Title
A name given to the resource
[Factum Capelle. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Lamouroux
Bertrand fils
Séverac
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
doctrine
testaments
Description
An account of the resource
Précis pour le Sieur Capelle, défendeur, contre le Bureau de Bienfaisance de la Ville d'Aurillac, demandeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Veuve Sardine (Saint-Flour)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1749-1805
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0217
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
BCU_Factums_G1311_0CR
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
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Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
doctrine
legs
testaments
-
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47a0bf12ee766875e43fbe9cdb44d392
PDF Text
Text
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MÉMOIRE
E N
R E P O N S E ,
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PR O PR IÉTÉ
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DES
ET
LE
PARTAGE
EAUX.
IfrhÀÛâ/'ï
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y*/ ja.
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A
de
l ’im p r i m e r i e
IMPRIMEUR
du
R IO M ,
de
L
ANDRIOT,
t r i b u n a l
1804. =
XII.
s e u l
d ’a p p e l.
��MEMOIRE
POUR
J e a n - A n d r è C A B A N E S , n otaire, habitant du
lieu d’A utrières, commune de Saint-C ham ant,
appelant de la sentence des requêtes du palais,
du 2-0 mai 1789 j
CONTRE'
P ie r r e
"
’
C O U D E R T , négociant, habitant de
la ville d’Aurillac intimé;
,
EN RÉPONSE AU MÉMOIRE DE L ’INTIMÉ.
“ ‘
t
T
•
•
.
.
cit. Cabanes a-t-il d r o it, à titre de servitude i pou r
l’arrosement de ses prés de l’Espinasse et du C lo u x , aux
eaux qui naissent dans le P ré du Chûteau, appartenant
au cit. Coudert ? C ’est la matière du procès soumis au
jugement du tribunal d’appel.
■
- A v an t de poser les questions auxquelles la contestation
A
�C a )
peut donner lie u , il est essentiel de rappeler les faits et
de présenter l ’état du lo c a l, qui sera d’ailleurs rendu
sensible par le plan géom étrique qui en sera mis sous les
y e u x du tribunal.
Il d é p e n d o i t de la terre de Saint-Cham ant, dont le cit.
Coudert est devenu acquéreur, un pré d’une étendue assez
c o n s id é r a b le , appelé le P ré du Château. Ce pré jo ign o it,
entre le nord et le couchant, à un petit pré appelé del
P ra d e l, qui étoit à la tête du pré de l’Espinasse, appartenant
à un nom m é M alp rad e, q u i , par une acquisition , avoit
réuni le petit pré del Pradel à celui de l ’Espinasse ; d’un
autre côté, et entre nord et m id i, le P ré du Château joi
gnoit en partie au pré du C lo u x , appartenant également
à M alprad e; mais au m ême aspect il y avoit un petit in
tervalle dans lequel le P ré du Château confinoit à des
terres appartenantes à différens particuliers, et c’étoitcet
intervalle qui em pêchoit la jonction des prés de l’Espinasse
et du C lou x , l ’un et l’autre appartenans à M alprade.
O n vient de pai’ler du petit pré del Pradel que M alprade
avoit acquis pour le joindre à celui de l’Espinasse. U ne
partie de ce pré del Pradel faisoit avancement dans le
P ré du Château, e t , pour rendre celui-ci plus ré g u lie r,
le seigneur de Saint-Cham ant désiroit que M alprade lui
cédât l’avancement que faisoit le pré del Pradel dans
celui du Château.
D ’un autre c ô té , on a remarqué qu’entre le pré de
l ’Espinasse et celui du C lo u x, tous deux appartenans à
M alp rad e, il y avoit un intervalle du P ré du C hâteau,
qui cm pechoit la jonction des deux prés de l’Espinasse et
du C lo u x , et M alprade désiroit que le seigneur de Saint-
�(3 )
Chamant lui cédât la très-petite partie du pré du Château _
qui séparoit le pré de l ’Espinasse de celui du C loux.
Ces avantages réciproques que désiroient le seigneur de
Sain t-C h am ant et M alprade , déterm inèrent l’acte d’é
change qui se fit entr’e u x , le 30 juin 1713 ? Par l ecIuel
M alprade céda au seigneur de Saint - Chamant la partie
du pré del Pradel qui faisoit avancement dans le P ré du
C hâleau, et le seigneur de Saint - Chamant lui céda en
échange l’espace du P ré du Château nécessaire pour join
dre le pré de l’Espinasse à celui du C loux.
Il est encore essentiel de rem arquer qu’il existoit aur
dessus du pré del P ra d e l, joint à celui de l’Espinasse, une
petite fontaine, appelée du Coudert de M any , dont les
eaux se partageoient pour l’arrosement du pré del Pradel
et de celui du Château-, e t , dans l ’acte d’échange de 1713 ,
M alprade consentit que les eaux de cette petite fontaine
du Coudert de M any appartinssent tout entières, à
l ’a v e n ir, au P ré du Château.
.
Il fut convenu , dans le même acte , que le seigneur de
Saint-Chamant feroit, à ses fra is, un m ur de séparation
entre l’avancement de ce pré del Pradel qui lui étoit cédé
et le reste de ce même pré.
'
.
Il fut également convenu que M alprade feroit à’ ses
frais un m ur de séparation entre l’espace du P ré du
Château qui lui étoit c é d é , et le reste de ce même pré ;
et il fut dit que l’espaco cédé du P ré du Chateau é to it« à prendre d e là dernière rase du P ré du Château, qui
« sort du P ré de l’Espinasse, et qui entre dans le P ré
« du C lo u x , laissant la rase dans le P ré du C hâleau,
« p o u r, par M alprade, joindre ladite portion d’environ
A 2
�r( 4 ')
« soixante-trois toises aux prés de l’Espinasse et du C lou x
« dudit M alp rad e, lequel sera tenu de faire la m uraille
« ’ pour la séparation desdits prés, au-dessus de ladite rase
te et b i a l l u r e , à ses frais et dépens. »
Cette dernière rase est une de celles qui recevoient les
eaux des sources qui naissoient dans le P ré du Château,
pour les traduire dans le P ré de l’Espinasse, d’où elles
rentroient encore dans le P ré du Château, pour se rendre
dans le P ré du C loux par une ouverture ou aqueduc
pratiqué dans le m ur de séparation ; aqueduc suffisam
m ent désigné dans le langage du pays par le terme de
biallure.
O utre cette dernière rase, il y en avoit une autre qui
traduisoit encore les mêmes eaux dans le pré du C lo u x ,
après avoir traversé une petite partie du P ré de l ’Espinasse, en sortant du P ré du C hâteau, dans lequel elles
rentroient encore , et n’en ressortoient que pour arriver
dans le P ré du Cloux.
M a i s ce qui est su r to u t x-em arquable, c’est que le P ré du
Château, dans les parties qui jo ig n o ie n t les p r é s de l’Espinasse et du C lo u x , étoit environné de murs anciens à
travers lesquels étoient pratiqués des ouvertures ou aque
ducs pour donner l’issue des eaux naissantes dans le P ré
du C h âteau, soit dans le P ré de l’Espinasse, soit dans
celui du C lou x ; ouvertures et aqueducs pratiqués dans
ces murs lors m ême de leur première construction, et
qu’il est encore aisé de reconnoître et de vérifier dans
ces mêmes murs toujours existans.
Indépendamment des eaux naissantes dans le P ré du
Château, le pré de l ’Espinasse jouissoit encore, pour son
�C 5 5
arrosement dans sa partie su p érieu re, des eaux de la
grande fontaine de M a n y , différente de la petite fon
taine du Coudert de M a n y , dont on avoit abandonné les
eaux pour le P ré du Château, dans l ’acte d’échange de
1713. Les eaux de cette grande fontaine de M a n y , qui
existent au delà du P ré du Château où elles entrent par une
grande rase qui le traverse, se versent de suite à la te te
du P ré de l’Espinasse par une ouverture ou aqueduc pra
tiqué dans l’ancien m ur de séparation du P ré du Châ
teau de celui de l ’Espinasse, dans cette partie ; ouverture
pu aqueduc q u i, comme les autres dont on a p a r lé , avoit
été pratiqué dans le temps même de la construction
de l ’ancien m ur , ce qui est encore aujourd’hui facile a
reconnoitre et à vérifier.
.
. U n e o b se rv a tio n q u ’ o n ne doit pas non plus n é g l i g e r ,
c’est q u e les p r é s d e l ’Espinasse et d u C l o u x n e p e u v e n t
être arrosés, le P ré de l’Espinasse dans sa plus grande
partie, et le P ré du C lou x dans sa totalité, que par les
eaux naissantes dans le P ré du Château-, et il n’est pas
possible de croire que l ’on eût fait des prés du terrein
qu’ils o ccu p en t, prés qui existent de toute ancienneté,
si l’on n’eut pas eu le droit de les arroser par les seules
eaux qui pouvoient y parvenir.
- U ne dernière observation non moins intéressante, c’est
que si l’on retenoit les eaux qui naissent dans le P ré du
Château , comme les sources d’où elles découlent sont
situées dans les bas fonds de ce même p r é , elles y seroient
stagnantes, et en inonderoient toute la partie intérieure.
Ce 11’est alors que par ém ulation , et sans aucun objet
�(
6 )
d’utilité ni d’agrém en t, que le propriétaire du P ré du
Château voudroit p river de ces eaux les prés inférieurs;
ce qu’il ne peut faire qu’en rejetant ces mômes eaux dans
la voie publique qui est au levant du P ré du Château,
d’où elles vont se jeter dans la rivière, sans aucun avan
tage ni pour le propriétaire du P ré du C hâteau, ni pour
aucune autre propriété, mais tout au détrim ent des prés
de l’Espinasse et du Cloux.
T e l étoit l’état des choses lorsque la terre de SaintCham ant, d’ou dépendoit le P ré du Château, fut mise
en vente judiciaire par les directeurs des créanciers du
duc de Caylus, seigneur de St.-Chaînant.
D é jà , et avant la vente, le cit. Cabanes avoit acquis de
M alprade les prés de TEspinasse et du C lo u x , et il avoit
conservé la possession q u ’avoit eue M alprade de la ser
vitude des eaux naissantes dans le P ré du Château. Ce
f u t alors que les gens d’affaires du duc de C aylus, et les
directeurs des créan ciers, voulurent s’assurer si dans la
vérité le cit. Cabanes avoit un droit de servitude sur les
eaux d u P r é d u C h âte au . P lu s ie u r s lettres fu re n t écrites au
cit. Cabanes, soit par l’intendant du duc de Caylus, soit par
le chargé d’affaires de la direction des créanciers; lettres
qui sont jointes au procès et qui annoncent que ce fut
pou r les satisfaire que le cit. Cabanes demanda un acte
de notoriété des plus anciens habitans cl voisins des prés
dont il s’a git, dans lequel ils attestèrent la possession im
mémoriale de M a lp rad e, vendeur du cit. Cabanes, de
prendre les eaux des sources du P ré du Château pour
l’irrigation des prés de l’Espiiiasse et du Ç lou x; et parmi
�C7 )
.f f
les particuliers qui donnèrent cet acte de n o to riété, le
16 avril 1781 , étoient plusieurs anciens fermiers ou
métayers de la terre de St.-Chamant.
Ce fut quelque temps après que le cit. Coudert devint
adjudicataire de la terre de St.-Cham ant, et qu’il entreprit,
après trois ans de silence, de contester au cit. Cabanes le
droit de servitude dont lui et M alprade s o n vendeur avoient
joui de tous temps sur les eaux du P ré du Château pour
l ’arrosement des prés de l ’Espinasse et du C loux.
L e cit. Coudert avoit trop à.crain dre des tribunaux
ordinaires, dans une coutume où les servitudes peuvent
s’acquérir sans titre, par la seule prescription; il profita
du com m ittim us que lu i donnoit une charge de secrétaire
du roi qu’il avoit acquise, pour porter aux requêtes du
palais la contestation qu’il vou lo it élever c o n t r e le cit.
Cabanes, p r é v o y a n t que sa prétention seroit m ieux ac
cueillie par des juges imbus de la m axim e de la coutum e
de P a ris} qui ne reconnoît point de servitude sans titre.
Il est nécessaire de rappeler les conclusions qui furent
prises par le cit. C o u d ert, dans la demande qu’il form a
contre le cit. Cabanes aux requêtes du palais. D ’ab ord , à
l’égard des eaux des deux fontaines, celle du C oudert
de M any et celle de M a n y, quoique le cit. Coudert p ré
tendît y avoir seul d ro it, cependant à cause de l’usage
qu’il fut obligé d’avouer qui en avoit été fait pour l ’ar
rosement des prés de l’Espinasse et du C lo u x , il en con
sentit le partage, et demanda qu’il fût fait par exp erts,
dans la proportion de l’étendue de son pré du Château
et de celle des prés de l’Espinasse et du C lo u x , se réser
vant toutefois de révoquer son consentement au partage,
�(S )
.
s’il venoit à découvrir des titres qui lui attribuassent le
droit exclusif des eaux de ces deux fontaines.
.
M ais à l ’égard des eaux des sources existantes dans le
P ré du Château, il demanda à y être maintenu exclusi
vem ent , soutenant que la possession que pou voit en avoir
le cit. C a b a n e s n’étoit qu’une possession p réca ire, qu’il
s’étoit attribuée dans le temps que lui-même étoit' ferm ier
de la seigneurie de Saint-Chamant et du pré du Château
qui en dépend, ayant profité de cette circonstance p o u r,
pendant la durée de sa fe rm e , user des eaux du P ré du
Château pour en arroser les prés voisins dont il étoit
propriétaire.
Sans rappeler les moyens par lesquels le cit. Cabanes
combattit les demandes du citoyen Coudert aux requêtes
du palais, parce que ces moyens seront employés dans
la suite de ce m ém oire en plus grand nombre et avec
plus d’étendue, il est néanmoins essentiel de rem arquer
ce que d isoit le cit. Coudert dans une requête signifiée
le 22 f é v r i e r 178 7, a u x pages 33 et suivantes de la grosse
de cette r e q u ê te. O n va le transcrire m o t p o u r mot.
cc II a été fait anciennem ent, entre le seigneur de Saint
« C ham ant, propriétaire du pré du Château, et le procc priétaire des prés de l’Espinasse et du C lo u x , un tra ité
« par lequel ce dernier a renoncé à se servir jamais des
« eaux de la fontaine du Coudert de M any. D e p lu s ,
« le suppliant prétend des droits de p ro p riété, en sa
« qualité de seigneur de Saint-Chamant, sur le com m un,
« et par conséquent sur les deux fontaines dont l’eau
« lui appartiendrait entièrement. Il est donc important
« pour le suppliant, dans la ca s où dans la suite il
youdroit
�( 9 )
t/
<* voudrait f a i r e usage de Vacte passe entre le proprié
té taire des prés de Y Espinasse et du C lo u x , et le pro
« priétaire du pré du C h â tea u , et au cas où il voudroit
« exercer son droit de propriété sur ledit commun en
« question, qu’on ne puisse lui opposer le partage des
« eaux desdites fontaines, qu’il a lui-m êm e p ro v o q u é ,
« et le soutenir non-recevable de prétendre à la totalité
« desdites eaux. V o ilà quel a été le m otif de la réserve,
« faite par le suppliant. »
.
•
O n voit par ce -passage de la requête signifiée par le
cit. Coudert le 22 février 17 8 7 , qu’il avouoit form el
lement l’existence d’un ancien traité fait entre le seigneur
de Saint-Chamant et le propriétaire des prés de l’Espinasse et du C lo u x ; traité q u ’il c o n v e n o i t a v o i r en son
p o u v o ir, p u i s q u ’i l se r é s e r v o it d’en faire usage. O r , ce
traité est celui dont on a p a rlé, du 30 juin 1 7 1 3 , puisque
la copie produite par le cit. Cabanes lui fut remise par
le cit. C o u d ert, et que le cit. Cabanes offre de prouver
au besoin l’aveu de cette rem ise, de la part de l’abbé
Y e y rin è s, beau-frère du cit. Coudert.
D ’après l’allégation de ce tra ité , faite par le citoyen
C oudert, il im portait au cit. Cabanes d’en avoir une
parfaite connoissance; c’est pourquoi il fit au cit. Coudert
deux sommations successives, le 9 et le 24 mars 17 8 7 ,
de lui donner copie du traité, sous protestation, en cas
de refu s, de le rendre garant de tout événem ent : mais
sans doute le cit. Coudert ou son conseil avoit réfléchi
sur l’avantage que le cit. Cabanes pourroit lui-m êm e tirer
de ce. traité, pou r'p rouver son droit aux eaux naissantes
‘
'
B
�( IO )
dans le pré du Château aussi refusa-t-on obstinément
d’en donner connoissahce au cit. Cabanes 3 et de lui en
fourn ir copie.
C ’est en cet état qu’intervint la sentence des requêtes
du p a la is , du 20 mai 1789, qui ordonna le partage des
eaux de la fontaine du Coudert de M any et de celle de
JVIany, mais qui maintint le cit. Coudert dans le droit
exclusif des eaux naissantes dans le pré du Château ; en
quoi ne fut pas trompée la prévoyance qui a voit engagé
le cit. Coudert à porter cette affaire devant des juges
imbus de la maxime de la coutume de Paris, qui n’admet
point de servitude sans titre. M ais, dans ce système m êm e,
il est inconcevable que les premiers juges n’eussent pas
forcé le cit. Coudert à justifier du traité de 1 7 1 3 , dont
il a voit excip é, et qui auroit lui-m êm e été un titre à la
servitude.
L e cit. Cabanes interjeta appel de la sentence des re
quêtes du palais , au parlem ent, où la cause fut appointée
au conseil, et où il avoit déjà été signifié p lu sieu rs é c ri
tures de part et d’autre, causes ou moyens d’app el, ré
ponses , salvations, etc. lorsque survint la suppression
des parlemens ; en sorte que la décision est aujourd’hui
soumise a ce tribunal d a p p e l’, et c est au mémoire im
prim é que vient de repandre le cit. Coudert qu’il s’agit
de répondre.
M ais auparavant il y a encore quelques faits à exposer.
A v a n t d’introduire l’alfaire dans ce tribunal, les parties
avoient successivement passé deux compromis pour la
faire décider par un jugement arbitral. Les premiers
�■
( II )
arbitres s’étoient transportés sur les lieux pour les exami
ner. Cependant ces premiers arbitres, on ne sait par quels
motifs, pressés par le cit. Cabanes de rendre leur juge
m ent, et même long-tem ps après que le délai du com
promis étoit e x p iré , d ilajan t toujours de prononcer sur
la contestation, le cit. Cabanes se v it forcé de révoquer
le com prom is, toujours cependant dans l’intention de se
faire juger par des arbitres, mais autres que ceux qui refusoient de juger. Aussi se prêta-t-il à passer un nouveau
compromis par lequel les parties nomm èrent pour arbitres
les cit. D u cla u x , D o liv ier et G ro s; le prem ier président,
les autres deux juges du tribunal d’arrondissement de
M auriac.
•
Ces trois nouveaux arbitres se transportèrent aussi sur
les l i e u x p o u r vérifier l’état des fontaines de M any et du
c o m m u n de M a n y , les sources existantes dans le P ré
du Château, les rases et fossés, les ouvertures et aqueducs
•placés dans les murs de clôture du- P ré du Château , par
lesquels les eaux couloient ordinairement dans les prés
de l’Espinasse et du Cloux. Ils entendirent les observations
des parties; et ce fut même devant ces arbitres que l’abbé
V e y rin è s , beau-frère de C ou d ert, et qui assistait pour
lui à la visite des arbitres, convint que la copie du traité
de iy ig a v o it été remise au cit. Cabanes p arle cit. Coudert:
les arbitres pourroient même le témoigner. Les arbitres
étaient encore dans le délai du com prom is, et ils alloicnt
rendre leur jugem ent, lorsque l’abbé V e y rin è s, frère de
la femme de C ou d ert, et son conseil, p révo ya n t, par
l’attention que portaient les arbitres à exam iner scrupu
leusement l’état des lie u x , que leur jugement ne seroit pas
B 2
�( 12 )
favorable, pria les arbitres de le suspendre de quelques
jours, pour lui donner le temps d’aller chercher à A u rilla c , au dom icile du cit. Coudert, un acte de partage
des eaux , qu’il dit exister, et qui pourroit apporter quel
que c h a n g e m e n t dans la décision. Les arbitres ne crurent
pas d evoir refuser un si court d é la i, et le cit. Cabanes
lui-m êm e ne s’y opposa point. Mais le m otif pour lequel
il avoit été demandé n’étoit qu’un vain prétexte pour
laisser passer le temps du compromis ; et aussi, presque
aussitôt, il fut fa it, à la requête du cit. C o u d e rt, une
révocation du com prom is, qui fut signifiée tant au cit.
Cabanes qu aux trois arbitres; et c’est à la suite de cette
révocation que l’afFaire a été portée en ce tribunal pour
juger l’appel de la sentence des requêtes du palais.
Il n’y a plus qu’ une remarque à faire sur ce qui a été
dit dans une requête signifiée de la part du cit. Coudert,
le 9 fructidor an 11.
Dans cette req u ête, le cit. C o u d ert, après avoir nié
l’existence de l’acte de 1 7 1 3 , après avoir soutenu que la
copie qu’en représentoit le cit. C a b a n es étoit in form e,
qu’elle ne pouvoit faire aucune foi en justice, il a ajouté
« qu’il avoit sommé formellement le cit. Cabanes de
« s’exp liq u er, s’il entendoit exécuter cet acte ou n o n ,
« parce qu’il l ’exécuteroit de son côté dans tout son
« co n ten u ; » et il lui dit avec justice et vérité : « V ous
« ne p o u rrie z, cet acte fût-il en form e, vous dispenser de
« l’exécuter dans toutes ses clauses, parce que les clauses
et d’un acte sont de leur natureindivisibles. 33 O r, le cit. Ca
banes déclare dès<\ présent qu’il accepte cet aveu et ce con
sentement du cit. Coudert ; et que de son côté il consent
�( *3 )
•
formellement à l’exécution de l ’acte de I 7 I 3 * A insi il
pourra en tirer toutes les conséquences qui en peuvent
.
résulter.
A lors il est vrai qu’il pourroit être prive des eaux de
la petite fontaine du Coudert de M any , parce que dans
le fait, par l’échange de 1 7 1 3 , M alprade son auteur avoit
consenti que les eaux de cette fontaine appartinssent en
entier au seigneur de Saint - d ia m a n t , propriétaire du
P ré du Château-, mais le cit. Coudert s’est abusé en croyant
trouver dans le même acte un abandon des eaux de la
fontaine de M a n y, toute différente de celle du Coudert
de M any ; ces deux fontaines se trouvent à une grande
distance l’une de l’autre.
Il est vrai q u e , m a l g r é l’abandon des eaux de la petite
fon tain e d u C o u d e r t de M a n y , M a l p r a d e , et après lui
le cit. C a b a n e s , les a v o ie n t to u jo u r s partag é e s a v e c le sei
gneur de Saint - C h aîn an t, et que le cit. C oudert, dans
l’instance pendante aux requêtes du palais, avoit lui-mêm e
provoqué et fait ordonner un nouveau partage de ces
eaux. Mais le cit. Cabanes renonce quant à celles de
la petite fontaine du Coudert de M any , dès que , de sa
part, le cit. Coudert consent à l’entière exécution de l’acte
de 1713 ; consentement que le cit. Cabanes vient d’accep
ter. Mais il 11’en est pas de même des eaux de la fontaine
de M a n y , à l’usage desquelles il n’a été fait aucune re
nonciation par le traité de 1713- E n sorte que le citoyen
Coudert, consentant à l’exécution de tout le contenu de
ce traité , il ne peut pas y comprendre l’abandon des
eaux de la fontaine de M a n y, qui ne fut point fait dans
le traité, mais seulement celui des eaux de la petite fon-,
�{ T-4 ) r
taine du Coudert de M a n y, différente de celle de M any.
M aintenant il ne s’agit plus que de répondre au m é
m oire imprimé du cit. C oudert, de présenter les questions
qui peuvent s’élever dans cette affaire, d’établir les prin
cipes de la m atière , et d’en faire l’application aux faits
dont on vient de rendre compte.
m
o
y e
n
s
.
L e m em oire auquel on répond a pour objet principal
d’établir le principe général que celui dans le fonds du
quel naît une source d’eau a le droit d’en disposer à son
g r é , q u o iq u e, même d’un temps im m ém orial, les eaux
de cette source, à la sortie de l’héritage où elle naît, aient
servi ù l’irrigation des fonds inférieurs. O n s’est épuisé en
citations de lois, d’auteurs et d’arrêts, pour établir ce prin
cipe; mais c'est peine inutile, pour prouver ce que per
sonne n’entreprendra de contester, aux exceptions près
dont il est susceptible.
lia v ra ie , la principale q u estio n d e cette affaire, est de
savoir si le propriétaire de l’héritage inférieur à celui où
naît la source peut acquérir la prescription des eaux de
cette source , pour l’irrigation de son h érita g e, par des
travaux de main d’homm e pratiqués dans l’héritage supé
rie u r, et par une possession continuée pendant l’espace
de 30 ans. M ais on n’a pas osé aborder franchement celle
question; on s’en est presque tenu ù la négative, au lieu
que l’allirmative est fondée sur la disposition des lois , la
doctrine des auteurs , même de quelques-uns de ceux cités
dans le m émoire auquel on répond, et sur la jurispru
dence, même sur celle du tribunal d’appel.
�C ^ )
Il y aura une question secondaire à examiner : celle de
savoir si le propriétaire du fonds in férieur, qui est devenu
fermier du fonds supérieur , mais qui avant d’etre fer
m ier étoit déjà, par lui ou par son vendeur, en possession
de la servitude,' en continuant d’en jouir pendant le temps
de sa ferm e, a fait interversion de la possession anté
rieure , de manière que la prescription n’ait pas pu con
tinuer de courir en sa fa v e u r, comme elle auroit fait pour
son vendeur, s’il n’eut pas cessé de jouir de l’héritage et
de la servitude.
'
< Commençons par développer les principes relatifs à ces
deux questions ; il ne sera pas difficile d’en faire l’appli
cation ; elle se présentera comme d’elle-m ême , d’après
les faits exposes/
■
P rin cip es sur la première question.
'
L a loi Prœ ses, I V , God. D e servitutibus et a q u â , que
l’on cite communément dans cette m atière, mais dont on
abuse sou ven t, comme on l’a fait dans le m émoire du cit.
Coudert ; cette loi p o rte , il est v r a i , que celui dans le
fonds duquel naît une source d’eau, peut en disposer ;\ son
g r é , et la retenir dans son h érita g e, ou la faire couler dans
d’autres héritages qui peuvent lui appartenir. Eu cela cette
loi n’est que l’application de la règle générale par laquelle
chacun est maître de disposer de sa chose comme hon lui
semble.
• Il est vrai encore que cette même loi veut qu’ il en soit
usé ainsi, bien que , de tout tem ps, les eaux de la source
aient servi à l’irrigation des héritages inférieurs, contra
�( i6 )
statulam consuctudinis Jo rm a m , carere te non per
m itid .
■ Mais la disposition de la loi Prœ ses souffre deux excep
tions.
Xi’une, q u a n d celui dans le fonds duquel naissent les
eaux ne veut les retenir ou les détourner que par émula
tion , sans aucune utilité pour l u i , et uniquement pour
nuire à ses voisins : la raison et l ’équité suffiroient pour
dicter cette exception. Mais toutes les lois qui défendent
de faire quelque chose par ém ulation, s’entendent quand
ce que 1 on fait est seulement dans l’intention de’ nuire ,
sans aucune utilité pour soi—m em e, cltivtïio nocdzdi non
utilitatis causa ; en un m o t, quand te que l’on fait ne
profite point à soi-m em e, mais nuit à autrui, quando non
prodest f a c ie n t i, et alteri nocet. O n peut vo ir sur cela les
lois citées par H enrys, tom. 2 , liv. 4 , quest. rj5 .
O r ici ce n’est vraiment que par émulation que le cit.
Coudert voudroit reteñirles eaux qui naissent dans le P ré
du C hateau, pour en priver les prés in férieurs du cit.
Cabanes, puisque ces eau x, qui suffisent à l’irrigation du
P ré du Château, et qui arrosent ensuite les prés inférieurs,
si elles étoient retenues dans le Pré du Château, deviendroient stagnantes dans les bas fonds de ce p r é , où sont
situées les sources, et par lâ non-seulemeut ne luiseroient
d’aucune utilité, mais même lui scroient nuisibles; et si
pour les faire sortir de son pré le cit. Couder t ne peut en.
procurer le versement q u e dans la rue publique, d’où elles
iroient se jeter dans la riv ière, d’un côté la rue publique
en seroit dégradée, et deviendroit moins praticable-, et
d’un autre côté ces eaux ne pourroient plus être utiles
personne,
�.
(. 17 ^ .
.
. .
personne, et'les prés in férieu rs,q u i en ont toujours jo u i,
souffriroient un préjudice notable de leur privation.
Si donc les faits qu’on vient de rappeler etoient vérifiés
par un rapport d’experts s’il étoit constant que ce n’est que
par pure ém ulation,sans utilité pour son propre héritage,
et au contraire au préjudice de ce même h éritage, que le
cit. Coudert veut priver le cit. Cabanes du bénéfice de
.ces mêmes eau x, à la sortie du P ré du Château , et que
d’ailleurs il ne pourroit les en faire sortir que par la voie
publique , sans utilité pour qui que ce s o it, il devroit
■paraître évident que son opposition à la possession du
cit. Cabanes ne seroit form ée que par pure ém ulation,
anim o n o c e n d i, non utilitatis causâ ; et sans doute le
cit. Cabanes n’eût-il que ce seul moyen à. faire valo ir, la
justice du tribunal le déterm ineroit à. ordonner une v é
rification p a r experts.
M ais la loi P rœ scs souffre encore une autre exception
dans laquelle se trouve le cit. Cabanes. Cette loi ne s’entend
que dans le cas où les eaux de la source qui naît dans l’hé
ritage supérieur, p a rle u r pente naturelle ont coulé dans
les héritages intérieurs, qui en ont profité pour leur irri
gation, et non lorsque les propriétaires des héritages in
férieurs ont été eux-mêmes prendre les eaux dans le fonds
supérieur, et y ont pratiqué des o u vrages, des fossés, des
rigoles , des aqueducs, pour faire parvenir ces eaux dans
leurs héritages ,• et qu’ ils en ont conservé la possession
pendant trente ans. V o ilà la doctrine constante de tous
nos bons auteurs.
Celui qui m érite d’être cité le p rem ier, D u m o u lin ,
cet oracle de notre jurisprudence française , et qui n’étoit
C
�( i 8
)
.
pas moins versé dans la jui’isprudence rom aine, s’en exp li
que avec énergie dans sa note sur le conseil 69 d’Alexandre.
Il p a r o ît, d’après ce que dit D u m oulin , que dans ce
conseil A lexan dre avoit été d’avis généralem ent que le
propriétaire de l’héritage inférieur, queD u m ou lin appelle
J o a n n e s , pouvoit empêcher le propriétaire de l’héritage
supérieur de retenir la source des eaux qui y naissoient,
au moyen de l’usage qu’il avoit eu de ces eaux pour l’arrosement de l’héritage inférieur ; sur qUQj[ D um oulin dit
qu’A lexan dre auroit mal con su lté, s’il n’y avoit pas eu
d’autres circonstances dans le fait qui lui avoit été exposé :
¿id çerte , si 71071 esset aliud quarn in prœdïcto ihem ate ,
A le x a n d e r pessim è consuhiisset. E t la raison qu’ il en
d o n n e ; c’est q u e , quoique d’un temps im m ém orial l ’eau
eut coulé naturellement dans le m oulin du fonds infé
rieu r, elle n’étoit pas censée y avoir coulé par droit de
servitude , mais par droit de pure faculté : Q u ia e tia m si,
per ternp us im m ém oriale, aqua sic p e r se flu x isset ad
m olciidinum dom ini J'un di inferioris , non censetur labi
ju r e servitutis , sed merœ fa cu lta tis. E t il faut bien
prendre garde à ces mots per se , qui veulent dire que l’eau
a coulé par sa pente naturelle; et c’est ce que fait bien
entendre D um oulin en ajoutant: Si le propriétaire de l’hé
ritage inférieur n’a rien lait dans le fonds supérieur pour
en faire parvenir les eaux dans le sien : Si dom inus i/if c r i o r nihH f o c i t in fu n d o superiori ut aqua sic flu a t.
E t ain si, pour justifier le conseil d’A le x a n d r e , D um oulin
dit qu’ il faut supposer que dans l’espèce qui lui étoit p ro
posée le propriétaire de l ’héritage inférieur avoit fait quel
que ouvrage dans l’héritage su p érieu r, pour en faire
�( 19 )
parvenir les eaux dans le sien : Ideo prœsupponendurn quod iste Joan n es in fu n d o superiori , domino
scie?ite et patiente, et ju re serv itu tis,jecit et du xit n vu m .
Seulement D um oulin ajoute qu’en ce cas la possession
de la servitude de la conduite des eaux ne commence que
du jour qu’à titre de servitude a été pratiqué dans l’ hé
ritage supérieur l’ouvrage nécessaire pour faire arriver
les eaux dans l’héritage inférieur : T a m en q u a si posses
sio servitutis aquœductûs non incipit antequànide fa c to ■
,
ju re servitutis , f a t rwus per quem aqua ducatur.
Nous avons un traité de Cæpola , D e servitutibus ,
où dans le chapitre I V , au titre D e servitute aquœ duc
tûs , il examine notre question •, et cet auteur se trouve
cité au nombre 5 i , dans le m ém oire du cit. Coudert.
C æ p o l a , dans ce n o m b r e 5 i , d ’après la loi P r œ s e s ,
établit la r è g l e g é n é r a le q u e le p r o p r ié t a ir e d u fon d s dans
lequel naît une source d’eau peut la retenir et en disposer
à son gré , malgré l’usage qu’en ont fait de tous temps les
propriétaires des héritages inférieurs., à la sortie de L’hé
ritage supérieur. M ais il fall'oit aller plus lo in , jusqu’au
nombre 5 6 , où cet auteur excepte de la règle générale le
cas où les propriétaires des héritages inférieurs ont euxmêmes été prendre l’eau dans l’héritage su p érieu r, et y,
ont pratiqué des aqueducs, des fossés, des rig o les, pour
la faire arriver dans leurs héritages inférieurs.
Cæpola distingue les eaux qui naissent dans un fonds
qui appartient au p u b lic, ou dans un fonds qui appar
tient à un particulier. Dans le prem ier cas, il exige une
possession im m émoriale; mais dans le second, il se con
tente de la prescription ordinaire , q u i, même chez les
C 2
�( 20 )
R om ain s, en matière de servitudes, n’étoit que de dix ans
entre p résen s, et de v i n g t ans entre absens.
■
Puis venant à la m anière dont il fau t, pour déroger à
la règle gén érale, que les eaux aient été prises dans le
fonds supérieur par les propriétaires des héritages infé
rieurs , afin d’acquérir la prescription ju re servitutis ,
il veut qu’on en juge par la nature des actes qui ont été
exercés , comme si celui qui prétend avoir prescrit la
servitude a coupé la haie du fonds supérieur, s’il y a fait
ou fait faire des fossés, s’il les a nettoyés pour y introduire
les eaux et les faire arriver dans le fonds inférieur; autant
d ’actes qu’il ne pouvoit exercer qu’à titre de servitude :
E x quo quis f u e r i t usus ju re serv itu tis, com prehendi
potest e x actibus quos J e c it , per quos q u i per se ipsum
non posset J u cere ni fu n d o v icin i citra ju s et nomen
serv itu tisy ut prœcedere sepem , mundcire vel m undari
fa cere Jv ssa tu ra m in f u n d o v ic in i, vel ducere aqitcim
per fim d im i v ic in i, q u œ jie r i non possunt regulariter,
n isi ju re servitutis.
Quand on lit un a u t e u r , il ne faut pas s’arrêter à l’en
droit où il établit la règle générale, il faut poursuivre la
suite de son discours où il établit les exceptions que doit
souffrir la règle. G est ce qui arrive souvent à ceux qui
prennent dans D um oulin 1 objection pour la solution,
pour ne pas s’etre donne la peine d’aller jusqu’au bout.
On trouve la m ê m e doctrine, la règle générale et l’excep
tio n , dans le traité des Prescriptions de D u n o d , o ù , à la
page 8 8 , i l dit que le maître de l’héritage où naît une
source d’eau , peut la retenir ou la conduire ailleurs pour
son u tilité, q u o i q u ’e lle ait coulé d’uu temps im m éino-
�(
21 )
rial dans ceux de ses vo isin s, et qu’ils s’en soient servis,
à m o in s, a j o u t e - t - i l , qu’elle n’ait coule par un droit de
servitude prouvé par actes , ou parce que les voisins
auroientfait un canal dans le fonds duquel la source sort,
pour en conduire l’eau dans les leurs.
A u cun des auteurs qu’on nous oppose, ni H c n ry s, ni
Bardet, ni B erro yer, ne disent rien de contraire à cette
doctrine. L a dissertation d’H enrys, l’arrêt qu’il rapporte,
et celui-qui est dans B ard et, ne sont que dans l’espèce de .
la règle générale. Les propriétaires des héritages infé
rieurs n’avoient d’autre possession que de r e c e v o i r les eaux
par leur pente naturelle, à la sortie de l’héritage supérieur.
A l’égard de la citation de B e r r o y e r , on en est étonne;
car l ’ o b s e r v a tio n q u ’ o n lu i fait faire n’existe point
dans l ’ é d itio n q u ’ il n o us a d o n n é e de B a r d e t , il n ’y en a
a u c u n e sur l ’ arrêt de B a r d e t dont on a p a r lé . I l est v r a i
qu’il y a une nouvelle édition de Bardet , qui a paru
en . . . . et où on a ajouté des notes de Delalaure. O n n’a
pas sous les yeux celte nouvelle éd itio n , et il pourroit
bien se faire qu’on eût confondu une observation de D e lalau re,avec une note de Berroyer. Cependant on auroit
peine h croire que Delalaure eût p u , dans une de ses notes,
combattre la doctrine générale q u e l’onvient d’établir, puis
que ce même D elalaure, dans le traité qu’ il nous a donné
sur les servitudes réelles, c o n firm e lu i-m ê m e cette d oc
trine, comme on peut le voir à la page 1 7 ° ? ou cet au
teur , traitant de la p r e s c r i p t i o n des servitudes dans les
provinces du Lyonnais , Fore/, et Beaujolais, pays de droit
é c rit, où les servitudes s’ a c q u iè r e n t sans titr e , par la
seule force de la prescription, comme eu coutum ed’A u -
�( 22 )
ve rg n e , il dit qu’on admet une exception par rapport aux
servitudes d’aqueducs et d’égoûts incorporés , et qu’elles
peuvent s’acquérir sans titre , par une prescription de dix
ans; et entre les motifs qu’il en donne est celui que ces sortes
de servitudes exigent nécessairement que l’on fasse des
constructions sur le fonds d’autrui, n’étant pas possible
de penser que ces constructions aient pu être faites sans
le consentement du propriétaire sujet à la servitude.
On pourroit m ultiplier ù l’infini les autorités ; mais il
suffit de terminer par celle du dernier commentateur de
la Coutum e d’A u v e rg n e , aux pages 7 17 et suivantes du
second tom e, où, après avoir rappelé le principe gén éral,
que le maître de l’héritage où il naît une source d’eau
peut l’y retenir ou la faire couler dans d’autres héritages
lui appartenans, sans que le propriétaire des héritages
inférieurs qui avoient joui de cette eau à sa sortie de l’hé
ritage supérieur, d’un temps im m ém orial , puissent s’en
p la in d re, et après avoir rappelé les arrêts qui ont con
sacré ce p rin cip e, M . C habrol ajoute : « M ais si ceux
« contre qui ces arrêts ont été rendus avoient eu une véri« table possession de prendre l’eau des sources dont il
« s’agissoit; s’ils avoient pratiqué, depuis plus de trente
« ans, un aqueduc dans l’héritage où elle nnissoit, pour
« la conduire dans les leurs; ces ouvrages extérieurs et
« appareils, soulierls p a r le propriétaire, auroient tenu
« lieu de titre; il en seroit résulté une vraie possession
« q u i, ayant continué pendant trente ans, auroit opéré
« la prescription dans une coutume où les servitudes sont
« prescriptibles. » L e commentateur prouve la distinction
p r les passages de D um ouliu et de Cæpola que nous
�avons cite s, et il y
excellent traité D e
tuent une servitude
d eles écui’er et de
( 23 )
ajoute ce que dit M . D uval dans son
rebus d u b a s , que les actes qui consti
en pareil cas , sont de faire des rases,
les rétab lir, n vu m f a cere, 'purgare}
reficere.
E n fin , comment pourroit-on désormais élever la ques
tion , après que le titre des servitudes, dans notre nouveau
code c iv il, a de plus en plus .confirmé les pyincipes que
nous venons d’é ta b lir, par l ’article 63 5 , qu’on, ne doit
pas regarder comme une loi nouvelle , mais comme
le développem ent des anciens principes sur cette m atière?
A près q u e, dans l ’article 634, il est dit que celui qui a
une source dans son fonds peut en user ù sa volon té ,
sauf le droit que le propriétaire inférieur pourroit avoir
acquis par titre ou par prescription , l’article 635 ajoute
que 'la prescription , dans ce cas , ne pevit s’acquérir
que par une jouissance non interrompue pendant l’espacé
de trente années, à compter du m oment où le propriétaire
du.fonds inférieur a fait et terminé des ouvrages appurens
destinés ù facilitei* la chute et le cours des eaux dans sa pro
priété : ce qui n’est proprem ent que la traduction de ce
qu’on a rapporté,de D um oulin dpns ses notes sur les con
seils d’Alexandre.
^
.
A des principes quiidpi.y.ent ppr pitre si incontestables,
on nous oppose deux arrêts’, fu n d e 178 6 , l’autre de 1788,
que l’on dit avoir été rendus , le prem ier en faveur des
tfordelicrs d’A u rilla c,.e t le second au profit d’ un nommé
Pradier. D ’un côté, c e s deux arrêts ne nous sont connus par
oucun ouvragti p u b lic; de l’autre , ce n’esL rien , comme
dit un de nos anciens praticiens ( R u u ilh ard ) , d’avoir le
�( 24 )
corps des arrêts, si l’on n’a pas l’âme des hypothèses. L a va
riété des espèces est infinie-, il est rare qu’on puisse raison
ner juste de l’une à l’autre; et il n’y a guère que les arrêts
de règlemens , ceux qui étoient autrefois publiés aux au
diences solennelles en robes rouges, sur lesquels on puisse
établir "quelque fondement. E nfin, tegibus , non exemp'Us
■jùdïcahdum • et l’on terminera par rem arquer que déjà
la jurisprudence du triblrnal d’appel s’est fixée sur la
question.
'
’
■
O n doit sentir à présent la juste application des prin
cipes établis aux faits et aux actes dont il a été rendu
com pte.
'
;
■
>
U ne s’agit pas ici d’une simple possession de recevoir les
eaux par leur pente naturelle. Il existe des rases'et des
rigoles pratiquées de tout temps dans le P ré du Château,
par le propriétaire des prés de l’Espinasse et du C lou x;
des rases et rigoles', que le propriétaire a toujours net-r
toyées et entretenues pour faire arriver' dans ses p ro
priétés les e a u x naissantes dans le P ré du C h â te a u . Il
existe des o u v e r tu r e s et des aq u e d u cs dans les m urs de
clôture du P ré d u C hâteau,pour traduire les eaux; ouver
tures et aqueducs que Foh reeonnoît -aussi anciens que
les murs de clôture eux-memes , que l’on voit être de la
môme c o n s tr u c t io n et du même terri])};, qui existent peutêtre depuis des siècles. Ces rasés, ces'rigoles, ces aqueducs
tracés . dans le plan géom étrique
de l’état des lieux.
|
Ce plan est connu du cit. C ouderl;'il n’a p'aS énlreprisde le
so n t
contester, non plus que l’ancienneté des rases, des rigoles
et des aqueducs; et surtout' l’ancienneté des aquediics-so
manifeste à l’inspection des mura dans lesquels ils sont
pratiqués,
�( 25 )
'
pratiqués. T^e cit. Coudert n’a pas meme ose contester
formellement la très-ancienne possession de la servitude ;
et cette possession se trouve même proüvee par 1 ancien
neté des aqueducs, qui ne peut être m éconnue, et q u i,
quand il n’en resteroit que des traces, et qu’on n’en auroit pas fait u sage, auroient toujours conservé la posses
sion de ceux qui les avoient construits.
C ’est en effet un principe certain q u e, quoiqu’on n’ait
pas fait usage de la servitude, on n’en a pas moins con
servé la possession , tant, qu’il se trouve des vestiges des
ouvrages qui ont été faits,pou r l’exercer ; c’est ainsi que
s’en explique d’A rgen tré, sur l’article C C L X V I de la cou
tume de Bretagne , pag. 1092 : Signa ternporis succes
sion et perm anentis, signatura retinent i/i possessione
ju r is j et il dit encore au meme endroit : V estigia pos
sessionem retinent. L ’on trouve la m ême doctrine en
seignée par M ornac ,sur la loi 6 , ff. D e rerum diçisione.
E t quand même le cit. Coudert entreprendroit de con
tester la possession du cit. Cabanes et de M alprade son
-vendeur , le cit. Cabanes seroit en état, et offre même
d’en faire la preuve par tém oins; ce qu’il 11e croit pour
ta n t pas nécessaire, la preuve de la possession pouvant
se faire par la vériiication des experts, qui reconnoîtront
la haute antiquité des rases, fossés et aqueducs qui sont
désignés dans le plan géom étrique.
P rin c ip e s s u r la deuxièm e question.
Celte question est, comme ou l’a dit en com m ençant, de
savoir si le propriétaire du fonds in férieu r, qui est devenu
D
j
�( 26 )
^
ferm ier du fonds supérieur où naît la source des eaux,
mais q u i, avant'd’être ferm ier, éto it, ù la suite de son ven
d eu r, en possession de la servitude, en continuant cette
possession pendant la dui'ée delà ferm e, a fait interversion
de la possession qu’il avoit déjà , de manière que la près*
c r i p t io n n’ait pas pu continuer en sa fa v e u r, comme elle
a u r o i t f a i t p o u r son vendeur, s’il avoit continué de jouir
d e l’héritage inférieur et de la servitude sur l ’héritage
su p é rie u r.
Il n’y a sur cette question qu’un seul principe à in vo
q uer; c’est celui que rappelle ' notre célèbre D o m a t, au
titre de la possession, sect. I I , n. 27 : que « celui qui entre
cf en possession d’une chose qu’il a cq u iert, succède aux
ce mêmes droits, et ne possède ni plus ni moins que son
« auteur avoit possédé. » Ce n’est là que la traduction
m ême de la loi X X , if. D e acquir. rerum dom inio,
Q uoties dom iniuin tran sfe r tur ad eum q u i a ccip it, taie
transfiîitur q u a le fu it apud eum q u i tradidif.
D e là vien t, comme le dit D u nod dans son T raité des
p r e s c r i p t i o n s , pag. 2.0 , que « quand le titre vient de l’ail« teur qui avoit la possession, on peut joindre sa possession
« à la sienne. » C ’est ce que l ’on appelle en droit, accèssio.
L ’accession de la possession est pleinement accordée à
ceux qui succèdent aux droits d’a u t r u i P la n é tribuitur
h is q u i in loco aliorum succedunt, sive ex con tracta,
sive ex voluntate. L . I ,
diçersis te/nponb.
prœscrip. et accessionibus. Grodefroy, dans sa note 65 sur
cette lo i, dit que les accessions des temps sont des conjonc
tions des temps par lesquelles deux ou plusieurs personnes
ont joui successivement de la xneme chose, adccessiones
�C 27 ■
)
tem porum , sunt conjunctiones tem porum , quibus duo
a utp lu res separatïm eamdem rem possident. E t lem em e
G odefroy, dans la note
dit encore que l’accession du
vendeur est accordée à son acquéreur: V en d it or is accessio
tribuitur ejus emptori.
Il est donc certain que l ’acquéreur succède à tous les
droits qu’avoit le ven d e u r, à raison de la chose qu’il lui
a vendue, soit quant à la propriété , soit quant à la posses
sion ; c’est ce qui s’induit aisément des termes de la loi
T a le quale.
A i n s i , par ex e m p le , on ne pourroit pas douter que la
complainte possessoire ne pût bien être exercée par l’ac
quéreur du fonds dont son vendeur avoit la possession
d’an et jo u r; et la possession annale, donnant l’action en
com plainte possessoire, si elle est continuée pendant trente
an s, doit, par la même raison, opérer la prescription.
Il est bien v r a i , en g é n é r a l, que le ferm ier et tous
autres qui ont reçu la chose à titre de p récaire, ne prescri
vent contre le maître de la ch ose, pas plus que leurs h éri
tiers ou successeurs; mais quelle en est la raison? c’est
qu’on remonte à l’origine et à la cause de leur possession ,
et qu’ils n’ont pas pu en changer la cause par le prin
cipe : N em o sib i causant possessionis m ut are potest.
M a is, si l’origine de la possession remonte à un temps an
térieur à la fe rm e , si la possession du ferm ier se trouve
avoir tout autre cause que celle de la ferm e, si cette pos
session n’est que la continuation de celle qu’avoit son ven
d eu r, lequel étoit étranger à la ferm e, ce n’est plus alors
le cas où on puisse lui opposer qu’il a changé la cause de
sa possession. Ce n’est plus alors comme ferm ier qu’il
B z
�( ^8 )
a possédé ; il n’a fait que continuer la possession de son
vendeur, qui a conservé dans sa personne la même qua
lité , la même nature qu’elle avoit dans la personne du
vendeur : en un m o t , sa possession esl la même que celle
du vendeur, taie q u a lc , et doit produire le même effet à
son égard qu’elle auroit eu pour le vendeur lu i-m ê m e .
A in s i, de même que le vendeur, s’ il n’eût pas ven d u , et
qu’ il eut continué de jouir pendant (rente ans de la ser
vitude sur le fonds supérieur, l ’auroit acquise par la pres
cription ; l’acheteur, quoique ferm ier du fonds supérieur,
doit avoir le même avantage, puisque sa possession esl de
la jnême nature, et qu’ il succèdeau même droit, ta/e qualc.
C ’est une bien foible objection que de dire que le fer
m ier auroit dû avertir le propriétaire des entreprises qui
se faisoienl sur son fonds par le propriétaire de l’hérilage
inférieur. D ’ab ord , où est la loi qui l’y obligeoil ? D 'un
au Ire c û lé , le ferm ier q u i, entrant dans la ferm e, avoit
trouvé le propriétaire du fonds inférieur en possession
de la servitude dans le fonds supérieur, avoit dû croire
que celle possession nvml u n titre légitime. K m l i n , le
marquis de l.ig n era c, rl après lui le duc de C aylus,
seigneurs de Sainl-C ham ant, avoieul loujours ru sur les
lieux un intendant ou agent d'affaires, chargé de veiller
¡) la conservation de leurs biens, soit à l'égard des étran
gers , soit à l’égard des fermiers eux-mêmes.
M ais il y a plus : In possession de la servitude par
M alprade étoit bien antérieure a la vente qu'il fit au cil.
Cabanes, des prés de l'Iv-pi nasse et du (,lo u \ ; et le cit.
Coudert, prétendant que le cit. Cabanes , riant ferm ier,
auroit dû avertir le propriétaire du pré du Chateau de
�C 29 )
-
l'entreprise que faisoit M alpradc sur les eaux du pré du
Château, c’est bien co n v en ir, de sa p a rt, (pie M alpradc
avoit d ès-lo rs la possession de prendre ces eaux. Cette
possession étoit même im m ém oriale, suivant l’acte de
notoriété qui en fut donné au cit. Cabanes par les plus
anciens habitans de la terre de Saint-C ham ant, dans le
nombre desquels étoient même plusieurs des anciens fer
miers ou métayers de ccLte même terre de Saint-Chamant.
Cet acte de notoriété est du 16 avril 1781.
En vain a-t-011 dit que cet acte de notoriété avoit été
m endié par le cit. Cabanes; il 11e fut au contraire qu’une
suite des doutes qu’011 avoit voulu inspirer au duc de
Caylus sur le d r o i t de servitude dont il s’agit. Il existe
deux lettres qui élablisseut la nécessité où se trouva le
c i l . (.,¡1 b a n c s de d e m a n d e r e e l a e l e d e n o l o r i é l é . 1 <a pre
mière d e e e s l e t t r e s , d u 3 a v r i l 1 7 8 1, e s t c e l l e q u i lut
écrite au cit. Cabanes par un sieur Bussy, intendant du
duc (h' C aylu s, a Paris, par laquelle, après l avoir entre
tenu d’autres objets qui concernoient la ferme de SaintChamant , il ajoute : J l / égard de Veau que vous avez
pour votre pre , je ne p eu x prendre de p a rti que cette
affaire n a î t etc éclaircie : envoyez - m o i un petit M é
m oire bien e x a c t , et je vous fe r a i rendre ju stice. Ce fut
aussitôt après avoir reçu cette lettre, que le cit. Cabanes
se fit donner l\.cte de notoriété dont il s'agit ; et il an
nonça , d o n s le mémoire qu'il en vo ya, l'acte de notoriété
qu'il s'etoit fait d on n er, pour répondre à la plus grande
pv elitu-le qui lui étoit dem indée.
Presque
da ns
le m ê m e
t e mp s
les bi ens d u
d u c de
C ' v l u s f u i e n t nü> e n d i r e c t i o n ; et le cit. C i I k i u o m u t .
�( 30 )
.
.
une seconde lettre d’un sieur J o ly , agent de la direction, ^
datée du 4 septembre 1 7 8 1 , par laquelle il lui rappelle
la promesse q u ’il a ço it f a it e cCun acte de notoriété pu
bliq u e, su r le droit p a r lu i prétendu de prendre, trois
fois p a r se m a in e, Veau de la fo n ta in e de S a in t- d i a
m ant , et autres sources v iv es, pour Varrosem ent de
son pré.
L ’acte de notoriété dont il s’agit n’est donc pas, comme
le cit. Coudert veut bien le d ire, un acte m endié, une
enquête à fu tu r; c’est un acte de notoriété p u b liq u e,
nécessité par les circonstances où se trouvoit alors le cit.
Cabanes, provoqué par le duc de C aylus, o u , ce qui
est la même chose, par son intendant, et redemandé par
ses créanciers lorsque ses biens furent mis en direction.
O r , comme on l ’a d it, cet acte de notoriété atteste une
possession immémoriale de la servitude par .M alprade,
ancien propriétaire des prés de l ’Espinasse et du C lo u x ,
et continuée par le cit. Cabanes, son acquéreur.
E n fin , une preuve de plus en plus décisive de la posses
sion de M alprade, est celle q u i résulte de l’acte d’échange
de 1713 ? antérieur de près de cinquante ans à la vente
faite par M alprade au cit. Cabanes, des prés de l ’Espinasse et du C lo u x , auxquels est duc la servitude des
eaux naissantes dans le pré du Château.
P o u r s’assurer de la preuve qui se tire de l’acte de 1713,
il faut se mettre sous les yeu x le plan géom étrique de
l ’état des lieu x (1). O n y vo it d’abord toutes les sources
( 1) C e plan géo m étriq u e, q u ’a fait faire depuis lo n g-tem p s le
cit, C a b a n e s, sera joint au procès. 11 existe un autre plan <jue le
�C 31 )
qui naissent dans la partie basse du P ré du Château : les
eaux de ces sources, très-rapprochées les unes des autres,
vont se répandre et se distribuer dans deux rases, l ’une
supérieure, qui est la prem ière, et l’autre in férieu re,
qui est la seconde; l ’une et l’autre, après avoir parcouru
quelque espace dans le pré du C hâteau, viennent ré
pandre leurs eaux dans le pré de l’Espinasse, par deux
ouvertures ou aqueducs pratiqués dans le m ur de clôture
du pré du Château ; alors les rases continuent dans le
pré de l’Espinasse , et rentrent ensuite dans le pré du
Château par deux autres ouvertures ou aqueducs égale
ment pratiqués dans le m ur ; ces rases se prolongent
encore quelque temps dans le pré du Château, d’où elles
sortent encore par deux autres ouvertures toujours pra
tiquées clans le m ur de c lô tu r e du pré du C hâteau, pour
introduire leurs eaux dans le pré du C loux. T e l éto it,
à l ’époque de l’échange de 1 7 1 3 , et tel est encore l’état
des lieux parfaitement désigné dans le plan géom étrique.
V oyon s maintenant ce que dit l’acte de 1713 . Il s’y fait
un échange entre le seigneur de Saint-Cham ant, à qui
appartenoit le pré du C h âteau , et le sieur M alp rad e,
alors propriétaire des deux prés de l ’Espinasse et du Cloux.
M alprade cède au seigneur de Saint-Cham ant une por
tion du pré del P rad el, qu’il avoit nouvellem ent réunie
à son pré de l’Espinasse, pour par le seigneur de Saintcit. C oudert a fa it faire lui-m êm e. M a is ces deux plans son t con
fo rm e s, ù bien peu de chose p rè s; et le tribunal trou v era, dans
l’un et dans l’a u tre , les ra se s, fossés et aqueducs dont on a rendu
com pte.
�( 32 ) #
Chamant réunir cette môme portion à son pré du Chan
teau ; e t, de sa part, le seigneur de Saint-Chamant donne
en échange à M alprade la portion de son pré du Château
qui séparoit les deux prés de l’Espinasse et du C loux ,
appartenans à M alprad e; et il est dit que cette portion
du pré du C h âteau, cédée à M alprade dans la longueur
de soixante-dix toises, est à prendre de la dernière rase
dudit pré q u i sort du p ré de l’JEspinasse, laissant la
rase dans le pré du Château. M ais cette dernière rase
est la seconde marquée sur le plan géom étrique : cette
seconde rase, sortant du pré de l’Espinasse, n’étoit ellem ême q u’une suite de celle qui existoit dans le pré du
Château, pour traduire les eaux dans le pré de l’Espinasse,
d’où elles rentroient dans celui du Château pour parvenir
dans le pré du C loux. A in si il doit paraître évident que
la dernière rase dont il est parlé dans l ’échange de 1 7 1 3 ,
que l’on y dit être dans le pré du C h âteau , mais sortant
du pré de l ’Espinasse; que cette dernière rase ne pouvant
recevoir d’autres eaux que celles des soui’ces qui étoient
dans le pré du Château, et qui y rentroient après être
sorties du pré de l’Espinasse, le seigneur de S a in t-d ia
mant avoit recon n u , dans l ’échange de 1 7 1 3 , le droit
du pré de l’Espinasse aux eaux des sources du pré du
Château,
‘
Ce que l ’on vient de dire de la dernière rase, doit se
dire également de la prem ière, prenant aussi les eaux des
mêmes sources, les transmettant d ab ord dans le P ré de
l ’Espinasse, d’où elles rentrent, comme celles de la der
nière rase, dans le P ré du Château, pour se verser ensuite
dans le Pré du C lo u x; ce qui a nécessité toutes les ouver,
tures
�( 33 )
tures et aqueducs, au nom bre de s ix , existons de tout temps
dans le m ur de clôture du P ré du Château, pour en faire
sortir les eaux dans le P ré de l’Espinasse, les faire rentrer
ensuite dans le P ré du Château, et enfin les en faire res
sortir pour les verser dans le P ré du C loux.
A in si la possession de la servitude dont il s’agit, est au
moins prouvée depuis la date de l ’échange de 17135 dans
la personne de M alp rad e, alors propriétaire des prés de
l ’Espinasse et du C lo u x , et par l ’aveu du seigneur de St.Chamant lui-m êm e, qui résulte des termes de cet échange,
qui pourroit même être regardé comme un titre dans les
coutumes qui n’admettoient pas de servitude sans titre.
E t la possession 5 au moins constante depuis 17135 avoit
continué dans la personne de M alprade pendant près de
soixante ans ju s q u ’en 1 7 7 2 , qu’il vendit au cit. Cabanes
les prés de l’Espinasse et du C lou x ; possession continuée
depuis 1772 jusqu’à présent, par le cit. Cabanes, dans la
même qualité et la même nature que M alprade l’avoit
eue jusque-là.
M ais, nous d it-o n d e là part du cit. Coudert : V ou s
ne présentez qu’une copie inform e de ce prétendu échange
I 7 13 5
qui n’a aucun caractère d’authenticité ; c’est
un chiffon qui ne peut faire foi en justice. Cette objec
tion est pleine de mauvaise foi.
Lorsque les parties plaidoient aux requêtes du palais,
le cit. Cabanes n’établissoit sa défense que sur la posses
sion de trente ans ; il ignoroit absolument l’échange de
1 7 1 3 ; ce fut le cit. Coudert lui-m êm e qui le lui app rit,
comme on l’a v u dans le récit des faits, par une requête
signifiée le 22 février 1787. Rappelons encore les termes
E
�t
( 3 4 ')
de cette requête du cit. Coudert. « Il a été fait ancien«
« nement ( on ne dit pas en 17 13 , mais on dit ancienne« m e n t), e n t r e le seigneur de St. - Ghamant et le pro
«
«
«
«
«
priétaire des prés de l’Espinasse et du C lo u x, un tra ité
p»£ l e q u e l ce dernier a renoncé à se servir jamais des
eaux de la fontaine du Coudert de M any. D e plus,
le suppliant prétend des droits de propriété , en sa
qualité de seigneur de Saint - C h am ant, sur le com
'« m un , et par conséquent sur les deux fontaines, dont
« -les eaux lui appartiendraient entièrement. Il est donc
« im portant pour le suppliant, dans le cas où dans la
« suite il voud rait faire usage de l’acte passé entre le
ce propriétaire des prés de l’Espinasse et du C lou x, et le
« propriétaire du P ré du Château, et au cas où il vou « droit exercer son droit de propriété sur ledit commun
«
«
«
«
«
en question, qu’on ne puisse lu i opposer le partage des
eaux desdites fontaines, qu’il a lui-même p ro v o q u é ,
et le soutenir non-recevable de prétendre à la totalité
des eaux. V o ilà quel a été le m otif de la réserve faite
par le suppliant. »
D e l’aveu m ême du citoyen Coudert, il y a donc eu
a n c ie n n e m e n t un traité entre le propriétaire des prés de
l’Espinasse et du C lo u x , et celui du P ré du Château; de
son aveu c’est par ce traité que le propriétaire des prés
¿e l’Espinasse et du C loux abandonna au propriétaire
du P ré du Château la totalité des eaux de la fontaine du
Coudert de M any. J u s q u e -lâ il y a un véritable rapport
entre ce traité fait a n c i e n n e m e n t , et la copie que l’on
rapporte de l’acte de 1713 >011 ^on trouve en effet l’aban
don des eaux de la fontaine du Coudert de M any \ mais
�.
C 3*5 )
ce traité pouvoit contenir d’autres clauses, et expliquer
les causes de l’abandon de ces eaux du Coudert de M a n y ,
et les conditions sous lesquelles il étoit fait. Pourquoi
donc Coudert se refusa-t-il obstinément de satisfaire aux
sommations qui lui furent faites aux requêtes du palais,
les 9 et 24 mars 17 8 7 , de justifier de ce traité lait an
ciennem ent, dont il avoit argumenté dans sa requête du
22 février précédent, et qui par là 'é to it devenu un titre
commun au cit. Cabanes.
' M ais, dans la suite, ce fut le cit. Coudert lui-mêm e qui
remit au cit. Cabanes la copie du traité de 1 7 1 3 , que
celui-ci présente aujourd’h u i, et qui ne peut être autre
que celui fait a ncienn em en t, dont le cit. Coudert avoit
argumenté dans sa x-equête du 22 février 178 7, puisqu’on
y trouve l’abandon de la totalité des eaux de la fontaine
du Coudert de M any. Ou bien si le cit. Coudert prétend
que ce n’est pas celui dont il a entendu parler sous le titre
d’un traité fait ancienn em en t, qu’il rapporte donc cet
ancien traité dont il a lui-m êm e argum enté, et que par
là il a reconnu être en son pouvoir-, sans quoi il faut
qu’il avoue l’exactitude de la copie du traité de 1713
qui lui est opposé, et alors doivent subsister dans toute
leur lorce les inductions que l’on a tirées de ce traité
de 1713.
M a is il y a même plus, et ceci devroit trancher toutes
les difficultés du procès : c’est le consentement form el
donné par le cit Coudert à l’exécution, dans tout son
contenu, de l’acte de 1 7 1 3 , tel qu’il est conçu dans la
copie qui en est produite par le cit. Cabanes, s i celu i - c i
voulait de sa part V exécuterj consentement que le cit.
�.
(
3
6
3
.
.
Cabanes a ci - devant accepté. Comment le cit. Coudert
auroit-il pu avouer plus form ellement l’existence du traité
et l ’exactitude de la copie qui en est p ro d u ite , surtout
tant qu’il n ’en représentera pas l ’o rigin al, qui est certaine
ment en son p o u v o ir, puisqu’il en avoitargum enté dans
la r e q u ê t e qu’il avoit signifiée aux requêtes du palais,
le 22 février 1787 ? A lors il faut donc prendre dans tout
leur ensemble toutes les clauses et tous les termes du traité,
et par conséquent souffrir toutes les preuves et les induc
tions qui en résultent. O r , il a été établi que ce même
traite atteste la possession de la servitude des prés de l’Espinasse et du C lou x sur les eaux naissantes dans le P ré du
C h âteau, par l’existence , au temps même du traité de
1 7 1 3 , des rases qui commencent dans le P ré du C h â t e a u ;
qui conduisent les eaux dans lès prés de l’Espinasse, où elles
se prolongent, rentrent ensuite dans le P ré du Château
pour se verser dans le pré du C lo u x , et par l’existence des
six aqueducs pratiqués dans les murs du P ré du C h âteau,
et q u i, à la seule inspection , paroissent avoir été prati
q u é s dans le même temps q u e la c o n s tr u c tio n des murs
de clôture.
D e là donc que la copie du traité de 1713 est avouée
par le consentement du cit. Coudert de l’exécuter, si le
cit. Cabanes veut aussi l’exécuter de sa part, ce qui a été
accepté par le cit. Cabanes, il ne peut plus y avoir de
difficulté à réform er la sentence des requêtes du palais,
et à maintenir la servitude dont le cit. Cabanes est en
possession, par lui ou par M alprade son vendeur, depuis
plus de quatre-vingt-dix ans. L a seule chose qui en pourra
résu lter, est qu’il n’y aura point lieu au partage des eaux
�.
.
• c 37 ) .
f
de la petite fontaine de M an y, qui avoit etc ordonné par
la sentence des requêtes du p alais, qui n’avoit pas été
demandé par le citoyen Cabanes , mais qui avoit été
provoqué par le cit. Coudert lui-m êm e; et, en cela, le
cit. Cabanes ne fait que consentir l’exécution du traité de
1 7 I 3 5 Pav lequel M alp rad e, son atfreur, avoit fait au
propriétaire du Pi'é du Château abandon de la totalité
des eaux de cette fontaine.
U ne dernière réflexion n’échappera pas au tribunal :
comment concevoir qu’on eût pu mettre en pré des terreins qui ne pouvoient recevoir d’arrosemens que par les
eaux naissantes dans le pré supérieur , si on ne se fût pas
assuré auparavant du droit à la servitude de ces eaux.
O n croit donc avoir déjà suffisamment établi dans ce
m ém oire la possession même im m ém oriale de la servitude
dont il s’agit, par les ouvi’ages dem ain d’hom m e, existans
de tout temps dans le P ré du C hâteau, pour en faire par
venir les eaux qui y naissent dans les prés de l’Espinasse
et du C lo u x ; et l’on se persuade q u e , dès à présent, le
tribunal d’appel pourrait prononcer définitivem ent sur
la contestation des parties. M ais y trouvât - il encore
quelque d ifficu lté, une vérification par experts leveroit
jusqu’au m oindre d o u te, en constatant l ’antiquité des rases
et fosses et des aqueducs pratiqués dans le m ur de clô
ture du P ré du Château, et que ces aqueducs pratiqués
dans le mur de clôture sont de la même construction que
le m ur lui-même. L e cit. Cabanes est même encore en
état de prouver par témoins que M alprade son vendeur
éto it,lo n g - temps avant la vente, dans celte possession
im m ém oriale, qu’il a transmise au cit. Cabanes son acqué-
�.
(
38
}
.
re ur , telle qu’il pouvoit l ’avoir lui-m êm e, tale quale. E t
ce m ém oire r e n fe r m e les motifs les plus puissans qui
fondent les conclusions qui ont été prises par le citoyen
Cabanes.
.
L e cit. ARM AN D , ju g e, rapporteur.
L e cit. A N D R A U D , avocat,
L e cit. D E V È Z E , avoué,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Cabanes, Jean-André. 1789?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Armand
Andraud
Devèze
Subject
The topic of the resource
jouissance des eaux
successions
prescription acquisitive
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse sur la propriété et le partage des eaux. Mémoire pour Jean-André Cabanes, notaire, habitant du lieu d'Autrières, commune de Saint-Chamant, appelant de la sentence des requêtes du palais du 20 mai 1789 ; contre Pierre Coudert, négociant, habitant de la ville d'Aurillac, intimé. En réponse au mémoire de l'intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1789
1783-1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0216
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0215
BCU_Factums_G1407
BCU_Factums_G1408
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53715/BCU_Factums_M0216.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Saint-Chamant (15176)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Jouissance des eaux
prescription acquisitive
Successions
-
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c4adc091ed25b74ff059c80908088eaa
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Text
P
R
É
C
I
S
POUR
COUDERT,
P ierre
n é g o c i a n t , habitant de la
ville d ’A u r i l l a c , propriétaire de la terre de St.C h a m a n t , intimé ;
t r ibun a l
d
C
J e a n -A
ndr
O
N
T
R
E
SÉANT A RIOM .
É C A B A N E S , notaire p u b lic, ha
bitant du Lieu d’Autrières , commune de S aintd ia m a n t, appelant de sentence rendue aux re
quêtes du p a la is, a P a ris , le 20 mai 1789.
QUESTION
'A Î T E L
PRINCIPALE.
L e p roprietaire d un héritage dans lequel naissent des
e a u x , peut - il se servir de ces m êmes ea u x ex clu si
vement ?
L E cit. Coudert a acquis, en 1783 , la terre de SaintC h am a n t, de la maison de Lignerac.
D e cette terre dépend un pré considérable et précieux,
connu sous la dénomination de P r é du C hâteau ; il joint
le chemin de Saint-Cham ant, et trois prés appartenans au
cit. Cabanes, appelant.
2
�•
c
2
.
.
.
L e cit. Coudertse sert, pour l’irrigation de son héritage,
d’abord des eaux de la fontaine appelée de M an y , située
au-dessus du p ré , et désignée dans le plan visuel par la
lettre A ; 2°. des eaux de la fontaine du Coudert, ou com
mun de M an y, qui est également située au-dessus du pré
et sur la g a u ch e , et désignée au plan par la lettre E.
Les eaux de ces deux sources sont peu abondantes; elles
ne suffiroient même pas à l’irrigation du P ré du Château,
q u i, par sa position naturelle, doit les recevoir le premier :
mais il existe, dans le pré m êm e , plusieurs sources q u i,
par leur ré u n io n , fertilisent et arrosent pleinement cet
héritage.
'
A u couchant et au midi du P ré du Château, sont situés
deux autres prés, l’un appelé de l’Espinasse, et l’autre du
Cloux , qui avoient été vendus en 1772 à Marie-Thérèse
Malprude de Berthandy, et q u i, bientôt après, a subrogé
à sa vente le cit. Cabanes, appelant.
La terre de Saint - Chamant a toujours été administrée
par des fermiers; le citoyen Cabanes ou son père en ont
jo u i, à ce titre, pendant plus de quarante ans; il avoit
à peine cessé sa jouissance, lorsque le citoyen Coudert
est devenu propriétaire.
M . de L ig n c r a c , et après lui le duc de Caylus son fils,
propriétaires de la terre de Saint - C h am an t, résidoient
l ’ u n et l’autre habituellement ù Paris, et s’inquiétoient peu
du mode d’administration de leni fermier.
L e cit. Cabanes, pendant sa jouissance, a jugé à propos
de pratiquer des rases et fosses dans le P ré du Chateau,
pour conduire et distribuer les eaux dans les prés qui lui
appartiennent, et continuoit cette manœuvre lorsque le
�( 3 )
,
cit. Coudert est devenu acquéreur. Plus soigneux que ses
prédécesseurs, et ne voulant point souffrir de servitudes
aussi onéreuses dans un héritage p r é c ie u x , connoissant
d’ailleurs toute l’étendue de ses droits, il traduisit le cit.
Cabanes, en vertu de co m m ittim u s, aux requêtes du pa
lais, par exploit du 30 mai 1786.
Il distingua par son exploit les eaux qui naissent audessus et hors de son p ré , d’avec les sources qui se trou
vent dans sa propriété. Il dem anda, i ° . pour la fontaine
de M a n y , que le cit. Cabanes fût tenu de venir h division
et pai-tage de ses eaux, eu égard à l’étendue du P r é du
Château, qui par sa position doit les recevoir le premier,
et aussi eu égard h l’étendue du P ré l’Espinasse, apparte
nant au cit. Cabanes, suivant le règlement ou la fixation
qui en seroi.t fuit par des experts, qui seroient aussi char
gés de déterminer la largeur et profondeur du canal ou
aqueduc.
.
L e cit. Coudert demanda un semblable règlement pour
la fontaine du C o u d e rt, ou commun de M an y ; et enfin il
conclut à être gardé et maintenu en la propriété et paisible
jouissance des sources qui naissent et jaillissent dans son
P re du Chateau, privativement et exclusivement à tous
autres : en .conséquence, qu’il fût fait très - expresses
inhibitions et défenses de le troubler dans le droit et
possession de ces mêmes eaux; q u’il fût interdit au cit.
Cabanes d’entrer à l’avenir dansle P ré du Château, p o u ry
pratiquer de petites rigoles, afin de prendre les eaux de ces
mêmes sources et d’en priver le propriétaire. Il demanda
que le cit. Cabanes, pour s’êlre permis une pareille voie
de fait, fût condajnné en des dommages - intérêts ; et il
.
3
�( 4 )
§
>
n’est pas inutile de remarquer que le cit. Coudert ajoute
par sa demande qu’il n’entend se faire aucun préjudice
aux droits qu’ il peut avoir de jouir seul, pour l’arrosement de son pré , des eaux de la fontaine de M an y et de
celles des communaux du même nom.
Cette demande donna lieu à une assez longue discus
sion. Cabanes commença par acquiescer à la demande en
règlement ou partage des eaux des deux fontaines de
M a n y ; mais il prétendit aussi avoir le droit de profiter
de celles qui naissent dans le P ré du Château. 11 convenoit bien du principe général qui veut que des eaux
de cette nature appartiennent au propriétaire de l’héri
tage dans lequel elles naissent; mais, suivant lu i, ce prin
cipe étoit sujet à une modification ou exception en faveur
de celui qui avoit perçu ces eaux pendant plus de trente
ans, au moyen de rases ou aqueducs pratiqués de main
d’homme. Il soutint que ce droit lui étoit acquis ju re servitn tis, puisqu’ il avoit une possession plus que trentenaire.
L e cit. Coudert à son tour i n v o q u a la disposition de la
lo i, et la jurisprudence des arrêts, qui attribuoient exclu
sivement au propriétaire la source qui naît dans son héri
tage. Il démontra que ce droit de prise d’eau est un droit
de pure faculté , qui ne peut jamais se prescrire ; que le
propriétaire peut en user dans un temps opportun, et
l’abandonner dans la suite ; qu’ il peut tolérer q u’un voisin
la prenne dans un moment ou il ne veut pas s’en servir,
mais sans qu’on puisse jamais lui opposer du possession.
D ’un au Ire cô té , l'intimé observa que la préLenduc
possession de Cabanes ne p o u v o illu i ci re d’aucune utilité.
Ferm ier depuis plus de 40 ans, il n’uvoit qu’ une jouissance
�précaire1, il lie pouvoit acquérir aucune prescription au
préjudice du seigneur’, il étoitm êm ë garant de celle qu un
tiers auroit pu acquérir , s’ il avoit é té!assez négligent pour
ne pas s’y opposer : en conséquence, les pretendus faits de
possession, allégués par Cabanes, ne pouvoient lui être
d’aucune utilité.
*
E n cet état, le 30 mai 1786, il intervint aux requêtes du
palais une sentence contradictoire, après d é lib é r é , qui
donne respectivement acte aux parties de ce que Cabanes
a acquiescé aux conclusions du cit. C o u d ert, en ce qui con
cerne le partage et règlement des eaux des deux fon
taines de M any •, ordonne que Cabanes sera tenu de venir
à division et partage, avec le cit. Coüdert, des eaux pro
venantes de la fontaine de M a n y , eu égax-d à l’étendue
de la partie du P ré du Château qui peut être arrosée
par ces mêmes eaux , et eu égard à l ’étendue de la partie
du pré de l’Espinasse , qui pouvoit aussi être arrosée par
les eaux de la même fontaine, et ce suivant la fixation qui
en sera faite par experts dont les parties conviendront en
la manière ordinaire, lesquels experts fixeront et déter
mineront en meme temps la largeur et profondeur du
canal qui reçoit les eaux de cette fontaine.
• Cette sentence contient une semblable disposition pour
les eaux du communal de Many. M a i s , sans avoir égard
aux faits articulés par Cabanes , le cit. Coudert est gardé
et maintenu dans la propriété et jouissance des sources
qui naissent dans son Pré du Château, privativement et
exclusivement à tous autres. Il est fait défense à Cabanes
de troubler à l’avenir le cit. Coudert, dans la possession
de ces mêmes e a u x , d’entrer dans'’ le P ré du Château
4
�C6 )
pour y faire des rigo les, afin de prendre les eaux de ces
mêmes sources, et d’en priver le cit. Coudert.
Il est ordonné que les rigoles qui peuvent avoir été
faites à cette fin seront bouchées. Sur le surplus des de
mandes respectives, les parties sont mises hors de cour.
Cabanes est condamné en tous les dépens.
• L e cit. Cabanes interjeta appel de cette sentence, au
parlement de P aris, et, par cet appel indéfini, il con
clut à ce qu’en infirmant; la sentence, et procédant par
jugement n ouveau, partage des eaux des sources de M any
et du commun fût ordonné proportionnellement aux*
parties de pré qui étoient dans le cas d’en profiter ; qu’il
fût maintenu dans le droit ut possession où il étoit de.
tout temps, par lui ou ses auteurs, de prendre et per
cevoir, pour l’irrigation de ses prés de l’Espinasse et du
G lo u x , la portion des eaux de ces deux fontaines qui
lui seroit assignée par les experts , de los conduire dans,
ses prés; par les rases et béai pratiqués dans le pré du
Château, et ce d’après la pr»ofojidcur q u i en seroit fixce>
par les experts, sous la réserve qu’il faisoit de l’exécu-*
tion d’anciens partages de ces e a u x , s’il en existoit.
Il conclut ensuite à être gardé et maintenu dans lodroit et possession où il étoit, de tout temps et ancien^,
n eté, par lui ou ses auteurs, d’entrer ou faire entrer ses
domestiques dans le pré du Cliùteau, lorsque le cas
l'exi^eroit, etque cela seroit nécessaire, ù l’effet d’y renoua,
voler les rases, les nettoyer, en extraire les corps étran
gers q ni
s’opposer .ou faite obstacle a 1 écoule
p
ment
o
u
r r o
i e
u
t
des eaux dans ses prés de l’Espinasse et du C lo u x;
tins. oiu-es qu'il faisoit d u ser tUî son dioit d e n tie i dups
�( 7 )
le P ré du Château d’ une m anière civile et hpnfiéta, q u il
fût fait défense au cit. Coudert et à(tous autres de l’y trou
b le r , aux peines de droit.
\ov:r :iic ", t 1* 1 j.
Il conclut encore à ce que., sans s’arrêter au surplus
des demandes du cit. C o u d ert, dans lësquellefe il serojt
déclaré non-*recevable, ou en tous cas d éb o u té, il fût gar.de
et maintenu dans le droit et.possession qu’il a, dé tout temps
et ancienneté, tant par lui que par ses auteurs/de prendre
et percevoir par des rases, canaux et aqueducs travaillés
de main d’h o m m e, de temps im m ém orial, tant dans le
P ré du Château que dans le m u r 'd e réparation du pré
d’avec ceux de l’Espinasse etdù C lo u x , les eaux des sources
naissantes dans le P ré du Château, pour l ’irrigation de ciês
mêmes prés ; de les conduire par les rases , canaux ou
aqueducs, depuis le lundi, soleil levé, de chaque semaine,
jusqu’au jeudi à pareille h e u re; comme aussi d'entrer,
soit par lui ou ses domestiques, dans le P ré du Châteâu,
lorsqu’il sera nécessaire de renouveler, nettoyer les rases,
ou d’en enlever les corps étrangers * aux -offres qu’il re^
nouvelle d’user de son droit avec civilité et m odération.
E t , dans le cas de difficulté, le cit. Cabanes demanda
qu il lui fut donne acte de.ee qu’il ayticuloit et m.elfoit
en fait, que de temps im m ém orial, et notamment depuis
plus de trente ans avant la demande du cit. C ou d ert, lui
Cabanes est en possession, par lui ou ses auteurs, de pren-i
dre et percevoir, des rases, canaux et aqueducs travaillés
de main d’homme , tant dans le P ré du Château que dans.
les murs de séparation, les eaux des soui'ces naissantes
dans le P ré du Château, de les conduire dans ses’ prés
de l’Espinasse et du C lo u x , et cc depuis le lundi de clia-
à.
5
�_
(
; 8 )
......................................................................................
que semaine, soleil lev é, j u s q u ’a u jeudi à pareille heure ;
comme aussi d’entrer ou faire entrer dans le pré , toutes
les fois qu’il jugeoit à propos de renouveler ou nettoyer
les rases. Il offrit la preuve de ces faits de possession;
il demanda que l’état des canaux et aqueducs fût vérifié
par des e x p e r t s , pour en constater l’existence et l ’ancien
neté , ainsi que celle des murs de séparation.
O n ne doit pas s’étonner qu’une pareille demande, ex
pliquée avec autant de détail et de prétention, ait donné
lieu au parlement à une procédure volumineuse. 11 y
eut d’abord un appointement au.con seil, des causes et
moyens d’appel, des salvations, des contredits; de ma
nière qu’on ne peut envisager aujourd’hui sans effroi l’état
de cette procédure. Cependant les questions soumises à
la décision du tribunal qui remplace le parlem ent, sont
infiniment simples.
'
L a contestation a deux objets qu’il faut bien distinguer.
i° . Les eaux qui découlent des'fontaines du M any et du
communal du inùmc tiom , et dont le partage a été or
donné par la sentence dont est appel, du consentement
de toutes les parties. Il est difficile d’expliquer pourquoi
cit. Cabanes est revenu sur cet objet. T o u t devoit ètro
irrévocablement consommé entre les parties; et certes,
il faut cil c o n v e n i r , le cil. Goudert a fait grâce au cit.
Cabanes. Peu éclairé sur scs droits, le cit. Coudert a luimême conclu au partage de ces eaux, lorsque par sa po
le
sition il dovoit les recevoir le prem ier, sauf à les rendre
ensuite aux prés inférieurs. Mais il ne d o v o i t pas s’ im
poser une servitude, ni pratiquer un canal dans sa pro
priété : il a m écQ U U U ses droits, et la conséquence qui
�( 9 )
.
.
résultait d’un pareil acquiescement ; mais enfin il y a con
senti, et il ne doit pas aujourd’hui récriminer.
Comment donc le cit. Cabanes a-t-il pu prendre de nou
velles conclusions, et attaquer la sentence en ce chef ? Il
reconnoît aujourd’hui ses to rts, et a voulu rectifier son
erreur par les conclusions qu’il a fait signifier en ce tri
bunal ; mais cette réminiscence tardive ne sauroit lui
éviter les dépens auxquels cette discussion a donné lieu ;
et le cit. Coudert ne croit pas devoir s’occuper davantage
de ce premier objet.
'
O n passe à l’examen de la sentence dont est appel, re
lativement aux eaux qui naissent et jaillissent dans le Pré
du Château.
Ces petites sources sont infiniment précieuses pour le
cit. Coudert. Sans elles une grande partie de son pré ne
seroit point arrosée, et ne présenteroit dans cette portion
qu’une surface aride et desséchée,
Il est de principe g én éra l, en cette m atière, que les
sources qui naissent dans un fonds appartiennent au pro
priétaire de l’heritage. N ul n’a le droit de les lui enlever
contre son g r e , quelle que soit la possession ou l’usage
contraire.
•
O n a toujours invoqué avec succès, dans cette m atière,
la disposition de la loi P r e s s e s , au code D e servit, et
a q u â , liv. I I I , tit. X X X I V . V o ici comment s’exprime
cette loi : P rœ ses provinciœ usu aquœ , quant e x fo n te
ju r is tin projluere allegas , contra statutam consuetutudinis form a w carere te nonpernnttet : cùm sitd u ru m ,
&t crudeUiatl p ro xim u m 3 e x tuis prœd 'us aquœ agrnen
6
�( IO )
^
ortam ysitientibns agris tuisad aliorum usumvicinomnn
injuria propagari.
Cette l o i , nous dit M .H e n rys, t. II, quest. C L X X X I X ,
est fondée sur ce principe de la nature , que lu chante bien
réglée doit commencer par soi-même, et qu’elle nous oblige
à préférer notre utilité propre à celle des autres. Il cite un
arrêt fort connu, rendu en faveur du propriétaire du Bois
de C ro s, près Clerm ont, le 13 août 1664 : arrêt qui est
souvent rappelé dans les tribunaux, mais dont les circons
tances particulières ne sont pas très-bien connues; ce qui a
donné lieu à quelque confusion. T o u t ce qu’on sait, c’est
que le sieur Brunei étoit en possession de se servir des eaux
qui naissoientdans un héritage, pour l’irrigation d’un grand
pré qui lui appartenoit; etcesmêmes eaux servoientencore
à l’usage de tous les habitans du village de Chamallières.
L e sieur Fayet, propriétaire du Bois de Cros , imagina
d’acheter l ’héritage où naissoient les sources, détourna les
eaux de leur cours ancien et naturel, et les fit conduire, par
des canaux souterrains, en sa maison du Bois de Cros. Ces
canaux souterrains sont particulièrement remarquables.
Non-seulement le sieur Fayet s’emparoit des eaux au pré
judice de la possession immémoriale de ses voisins : mais,
pour les conduire jusques dans sa maison du Bois de Cros,
il l'alloit leur faire traverser des chemins publics ; car on
sait encore que l’héritage où naissent les sources ne joint
pas , sans moyens , le jardin du Bois du Cros.
Ces eaux, qui servoientauparavantà l’irrigation des prés,
et par conséquent un objet d’utilité publique, n’éloient
employées par le sieur Fayet qu’a des objets particuliers
�( ” )
d'embellissement, comme fontaines et jets d’eau: aussi fut-',1
vivement contredit dans son entreprise. Cependant il fut
maintenu dans le droit de se servir de ces e a u x , par sentence
du 11 septembre 1644; et cette sentence fut confirmée par
arrêt du parlement. Bretonnier, sur TIenrys , a la suite de
cet arrêt, donne en p rin cip e , que quoique la loi Prccse?
ne parle que de la nécessité d’arroser les héritages de celui
dans le fonds duquel la source d’eau prend sa naissance;
néanmoins , il faut étendre sa décision à la commodité et
à l ’agrément. Il enseigne que celui qui a une source
dans son héritage peut s’en servir à faire des jets d’eau
et autre chose semblable, quoique par ce moyen les hé
ritages des voisins ne soient point abreuvés. Bretonnier
combat également l’opinion de Mox*nac, qui paroît con
traire à. celle de Hcnrys. L ’arrêt cité par iVIornac , du 16
juillet 1 7 0 5 , a seulement jugé qu’un particulier ne pouvo it détourner l’eau d’un ruisseau qui passoit sur ses héri
tages; mais Bretonnier observe que ce ruisseau ne prenoit
pas sa source dans l’héritage de ce particulier, qu’ainsi ce
n ’étoit ni l’espèce de la loi P r œ s e s , ni l’espèce de l’arrêt
l'apporté par Iienrys.
U n arrêt plus précis a jugé en thèse qu’ une servitude
d’aqueduc ne se peut prescrire par le propriétaire de l’héritageinférieur contre celui de l’héritage supérieur où est
la source. Cet arrêt, en date du 10 juillet 1719, est rapporté
par Bardot, tom. I. liv. Ier. cliap. L X V ; en voici l’espèce.
Antoinette Brossettc de Lyonnais détourne le cours de l’eau
de deux fontaines qui sortoient de son h é rita g e, pour la
conduire à un moulin qu’elle avoit fait construire nouvel
lement , en un autre fonds plus éloigné. Claude Faurc
7
�( 12 )
avoit un pré adjacent, dans lequel couloient les eaux de
ces fontaines, et de tout temps s’étoit servi de ces eaux pour
arroser et abreuver son pré ; elles alloient encore tomber
dans l’écluse d’un moulin quiluiappartenoit. ClaudeFaure
se plaignit de l’entreprise d’Antoinette Brossette ; les parties
com prom iren t, et Faure fut maintenu par la sentence
arbitrale dans sa possession de prendre les eaux : appel de
la part d’Antoinette Brossette. Elle soutint que l’eau ayant
$a source et sa saillie dans son fonds, elle avoit pu s’en ser
v ir comme de sa chose propre, et la conduire où bon lui
sembloit. L e seul moyen allégué par Faure, étoit la pres
cription, parce qu’il s’étoit librement servi de ces eaux, de
temp simmémorial. Mais nonobstant cette possession, qui
n’étoit pas désavouée, l’arrêt mit l’appellation et ce au
néant, et permit à Antoinette Brossette de conduire les
eaux de ces fontaines où bon lui sembleroit.
Berroyer, annotateur de Bardet, ajoute h cet arrêt une
assez longue dissertation , pour prouver que si on par
court les lois, si on examine la jurisprudence des cours
souveraines, si on consulte les auteurs qui ont traité la
question, on la trouvera décidée conformément à l’arrêt
rapporté par M e. Bardet, d’une manière si clairectsi précise,
qu’ il ne sera pas possible de rien opposer à cette décision.
Berroyer cite le §. X I I de la loi prem ière, au if. D e
aquâ et ttquce pluvice arcen✠,• la lo iX U , au même titre ;
la loi V I , au code D e servit, et a q u â , qui est la loi
Prœ-sexj l’opinion de Ciepola , en son Traité des servitu
d e s , nombre 5 r , q u i décide que le propriétaire peut con
server l’eau , et s’en servir à son g ré , sans que les proprié
taires des héritages inférieurs puissent s’y opposer, quia
in re suâ jure id J a ce re videtur.
�( *3 )
.
.
L e même auteur Cæpola, nombre 67 , insiste plus for
tement encore sur le droit de propriétaire : Q u i jo d i t in
sua , n i hit rniltit in a lien u m , necde àlieno a liqu u l aufert.
F ro m en ta l, en ses Décisions du droit civil , au mot
Servitudes, enseigne que celui qui a une s o u r c e d’eau dans
son héritage , peut s’en servir ou l ’employer à son usage,
contre l’usage accoutumé; de sorte, d it-il, que dans le cas
même que les eaux de cette source, par des veines souter
raines , ou coulant sur la superficie de la terre , auroient
arrosé des prairies inférieures, le propriétaire a le droit de
la co u p e r, et par là empêcher l’irrigation des prés , sans
que les propriétaires des prairies puissent y former obs
tacle ; ce qui doit être entendu dans le cas même où elles
auroient été arrosées pendant mille ans.
Pocquet de Livonières, en ses Règles du droit français,
livre I V , section II, des Servitudes > nombre 1 3 , donne
en principe, que le propriétaire d’un héritage où il se
trouve une fontaine ou source d’eau, peut disposer à son
gré de l’eau qui en provient, même à ¡’exclusion de ceux
qui ont des héritages inférieurs, qui ne peuvent en cela
opposer la prescription ni le long usage contraire. Telle
est aussi l’opinion de Bouclier d’A r g i s , en son Code rural,
chapitre XV.III, nombre 5 . Eu un m ot, on pourroit rap
peler une immensité de citations sur cette matière, qui
deviennent d’autant plus inutiles , que la maxime est cons
tante et a été invariablement adoptée par la jurisprudence
des arrêts.
L e cit. Coudert a rapporté dans ses défenses deux
arrêts plus récens, l’ un du 6 août 1785 , rendu en faveur
des cordeliersde la ville d’A u rilia c , contre les religieuses
�.
C 14 )
de la même ville. Cet arrêt confirma la sentence du bail
liage d’A u rilla c, qui avoit maintenu les cordeliers dans le
droit de disposer des eaux qui naissoient dans leur pro
p r ié té , quoique les religieuses articulassent des faits de
possession immémoriale , et q u i l y eut des aqueducs et
des i'ases pratiquées dans le ¡wf/rdescoi’deliers. Un second
arrêt ; du 12 juillet 1786, a jugé de la même manière, sur
l ’appel d’ une sentence de la sénéchaussée d’A u v e i’g n e,
quoiqu’il y eut preuve de possession, ainsi que des fo s s é s
et rigoles pratiqués dans Chéritage où la source naissoit,
po u r la conduire dans le pré vo isin , et quoique la sen
tence de R iom eut admis à la preuve de ces faits. Cet
arrêt fut rendu au profit d’un sieur Pradier, propriétaire}
de l’héritage dans lequel naissoit la source; il é toit défendu
par le cit. Dartis de Marsillac.
L a jurisprudence étant aussi constante, il est diflicilq
d’expliquer l ’insistance du cit. Cabanes : il propose ce
pendant contre la sentence dont est appel, plusieurs ob
jections qu’on va discuter-, il fait valoir des motifs de con
sidération et des moyens de droit.
Suivant lui, le cit. Coudert est déraisonnable et injuste;
il plaide contre son intérêt. Les eaux qu’il veut conserver,
loin de fertiliser son p r é , ne font fju’endoirunager ses foins;
elles sont t r o p abondantes, elles n’auraient aucun écoule
m ent; ce foin «e changeroit en joncs; et le cit. Cabanes lui
rend le plus signalé service en allant creuser dans le pré
de; son voisin, et en faisant écouler les eaux pour l’ irrigrt ion du sien. Ce langage extraordinaire n’est que ridicule :
le cit. Coudert ne sacriiieroit pas une grande partie d’un
héritage précieux , pour l’unique plaisir de nuire à ses,
�( ï5 )
voisins; et ces motifs de considération ne sont pas d’une
grande importance.
En point de d r o it, il prétend que la loi Prceses ne peut
recevoir d’application dans la coutume d’Auvergne. Mais
il n’a pas voulu .faire attention que l’arrêt rapporté dans
Ilenrys est rendu contre les habitans de C h a m a l l i ères, lieu
qui est précisément situé dans cette coutume ; que l’arret
rendu en faveur du cit. Pradier , est également intervenu
pour cette coutume. D ’ailleurs, on ne voit pas que la cou
tume d’A u vergn e ait aucune disposition contraire à la loi
Prœ ses. Si elle dit que toutes servitudes se prescrivent par
le laps de trente ans continuels et accomplis , c’est une dis
position gén éra le, qui est aussi admise eu pays de droit
écrit ; et môme dans le droit écrit de la haute A u v e rg n e ,
on y reconnoît une prescription moins longue, celle de dix.
ans entre présens, et celle de vingt ans entre absens. Mais
la loi et la coutume n’ont entendu parler que de choses
qui pouvoient se prescrire et se posséder, et on vient
d’établir que la possession ou un usage contraire ne pouvoit empêcher le propriétaire de l ’héritage de se servir à
son gré , et pour tous usages, des eaux qui naissoieut dans
sa propriété.
L e cit. Cabanes a prétendu aussi q u e, suivant une an
cienne tradition, le soigneur de Saint-Chamantavoit usurpé
la partie du pré où naissent les sources dont il s’agit. Mais
ce n’est là qu’une injure gratuite, faite aux anciens posses
seurs de cette terre, qui ne l’avoient jamais habitée, et qui
par conséquent ne pouvoient être accuses d’ usurpation.
L e cit. Cabanes en vient ensuite à son grand moyen , la
I>ossessiou immémoriale, l’ usage constant et ancien de pra-
�( 16 )
tiquer dans le pré du cit. Coudert des rases et aqueducs,
de les nettoyer ou renouveler; l’existence de ces aqueducs
danè le mur même de séparation du Pré du Château avec
ses héritages particuliers : et, pour établir ce fait de pos
session, le cit. Cabanes, qui snnsdoule prévoyoit les choses
de l o i n , imagina de faire prendre la déclaration de plusieurs
habitans sur cette possession qu’il invoque aujourd’hui. Il
est porteur d’un acte du 16 avril 17 8 1, acte bien antérieur,
comme on v o it, soit à l’acquisition du cit. C o u d e r t, qui
n ’est que de 1783, soit à sa demande qui est du 30 mai 1786:
par cet acte, plusieurs particuliers, parmi lesquels se trou
ver] t des sexagenaireset des octogénaires, se rendent spon
tanément sur une place publique, où on fait venir un
notaire ; là ils déclarent qu’ils se sont, volontairement etsans
induction aucune, assemblés sur cette p lace, où ils ont fait
appeler le notaire pour recevoir leurs déclarations etasseï*tions sincères et véritables, par forme d’acte de notoriété
publique, sur les faits dont voici le détail.
« Ils ont appris, par rumeur publique, qu’on vouloit
» p riv e rM °. Jean-Antoiue Cabanes, notaire royal, ci-des> vont fermier de M . le duc de Caylus, marquis de L i
» g ncra c, de prendre et percevoir l’eau de la fontaine
« publique de ce lieu, et autres sources vives, pour arroser
» les prés de l’Espinasse et du
CI
o u k
,
adjacens à celui
>3 du seigneur, et acquis par ledit Cabanes des héritiers
» Malprade, ou quoi que ce soit de leurs créanciers qui
»
»
»
»
les avoientfait vendre judiciairement : en conséquence
les coinp'irans, pour rendre hommage à la vérité, ont
l’ honneur de certifier au seigneur , avec tout le respect
qu’ils lui doivent, que dç tout temps, de leur connois-r
�> ( T7 )
.
» sance et m ém oire, ils ont vu trois'grandes rases pra» tiquées dans le pré du seigneur, appelé du Chateau;'
» trois canaux ou aqueducs, aussi pratiques dans les m urs,
»> formant séparation de son pré d’avec les prés de PL » pinasse et du C lo u x , qui existent actuellement dans la
» même forme qu’ils les ont toujours vu exister, et de
» temps im m ém orial, suivant qu’ils le savent par la tra
» dition des anciens; par lesquelles rases, canaux et aque» ducs, les héritiers M a lp rad e, avant eux leurs auteurs ,
» et postérieurement le sieur Cabanes, ont toujours pris
» et perçu, sajis interruption ni trouble, les eaux delà fon
» taine, et autres sources v iv e s, depuis le lundi de chaque
» semaine, soleil l e v é , jusqu’au jeu d i, môme h eu re’,
» pour l’arrosement des prés l’Espiuasse et du C loux ; ce
» qui s’est pratiqué de même sous les ÿeux et connois» sance des auteurs du seigneur , dans le temps qu’ils ha
n bitoient le château de Saint-Cliamant.
» Ils attestent que l’usage constant de cette province
» est que les eaux de sources vives se divisent entre les
» prés du même ténement, qu’elles ne souffrent pas d’ex>3 tension aux prés des ténemens différons , qu’au contraire
»
»
»
»
»
»
les eaux casuelles appartiennent au premier aboutissant.
Ils regardent et appellent les rases, canaux et aqueducs
anciens, comme sont ceux dont ci-dessus est question,
des témoins muets et invariables, constituant titre; ce
qu’ils attestent en toute vérité, loyauté et conscience, sans
supposer aucun fait. »
Il n’est pas inutile d’observer que parmi ces témoins
complaisans , l’un est fermier du domaine de C o r , ap-
�r 18 )
pnrtenant au seigneur, et l’autre est ancien fermier du
même seigneur.
D e quel poids peut être une semblable déclaration,
arrachée par un homm e a d ro it, et qui n ’est que l’effet
de l’importunité ou de la crainte que pouvoit inspirer
le cit. Cabanes à des gens qui lui étoient subordonnés ?
Ce n’est là qu’ une enquete à fu tu r, abrogée par l’ordon
nance de 1667. Cette prévoyance du cit. Cabanes, qui
vouloit se faire un titre avant qu’il y eût aucune con
testation , lui sera plus nuisible qu’utile. Cet acte prétendu
de notoriété annonce toute l’inquiétude'qu’avoit un fer
m ier infidèle sur son usurpation.
•
O n croit avoir établi en point de droit que quelle que
soit la possession ou l’usage contraire, elle ne peut ac
q uérir aucun droit au possesseur. Ce seroit aller ouverte
ment contre la disposition de la loi P r c e se s , qui a prévu
le cas de la possession contra statutam consuetudùiis
'fo rm a m . L ’opinion de D u n o d , dans son Traité des Pres
criptions , les arrêtés de M . de Lam oignon, invoqués par
le cit. G ibanes, ne peuvent pas faire fléchir une règle
aussi invariablement observée. B erroyer, sur B ard et, en
observant que quelques auteurs ont été d’une opinion
contraire, dit que cette opinion ne dérivoit que de la
confusion q u ’ils a voient faite de l eau qui prenoitsa source
dans un cham p, avec celle qui ne faisoit qu’y couler*,
et c’est sur ce fondement qu Îlenrys et Bretonnier ont
critiqué l’avis de M ornac et de plusieurs autres, en prou
vant que les arrêts sur lesquels ilsappuy0ient leur sentiment
avoient été rendus contre le propriétaire d’un champ à
travers lequel couloit un ruisseau, et qu’il ayoit été sa-
�.
( 19 )
....
gement décidé qu’on ne pouvoit détourner le coürs d’une
eau publique, au préjudice des riverains.
L a possession, les rases, les aqueducs n’ont été d’au
cune considération lors des arrêts rendus en faveur des
cordeliers et du sieur Pradier. Ce dernier arrêt est d’au
tant plus remarquable, que la sentence de la sénéchaussée
avoit ordonné la preuve de la possession de net Loyer et
renouveler les rases et aqueducs .
L a question reproduite par lé cit. Cabanes a donc été
jugée en thèse contre lui.
A u surplus, pour que la possession puisse acquérir un
droit rée l, en admettant poUr un instant le système du
cit. Cabanes, il faut qu’elle ait été continuelle, publique , •
et a titre de propriétaire. O V , ces qualités ne pourraient
jamais se rencontrer dans la prétendue possession du cit.
Cabanes, fermier de la terre de St.-Cliamant. Il n’a pu
jouir, qu’au nom et pour le compte du' propriétaire.
Si en effet un fermier, pendant la durée de son bail,
pouvoit s’attribuer des droits de servitude sur les biens
dont il a une' jouissance p réca ire, quel est le propriétaiie qui p u t se‘>flatter de'conserver ses biens ? Quel est
le fermier qui ne cherclieroit'pas à agrandir ses propriétés1
aux dépens de celui d on t il cultive*les biens? Aussi la
loi et la justice*ont sagement* paré à ces inconvéniens.
L e fermier.ne peut acquérir’ pour lu i, il n’acquiert que
pour le propriétaire; et cesprincipes sont trop connuspour
meriter un plus grand développement.
Dès-lors il faudroit décider, sous ce rapport, que le ci t. Cabanes, ayant été fermier, par lui ou par son père, depuis'
1 année1 1768', n’a pu acquérir aucune espèce de posses-
�( 20 )
sioir, quelle qu’ait été sa manière de jouir des eaux nais
santes dans le Pré du Château.
L e cit. Cabanes, forcé d’admettre ce principe, a cherché
à l’éluder. Il a dit qu’il n’avoit acquis les prés de l ’Espinasse
et du Cloux que depuis 1772. Ces prés appartenoient aux
héritiers M alprade; et le cit. Cabanes ne manque pas de
dire que les héritiers Malprade avant lui étoient en pos
session de prendre ces mêmes eaux, par les rases ou aque
ducs qu’il dit exister; il appuyé son assertion sur ce cer
tificat qu’il a obtenu de quelques particuliers soudoyés.
Mais qu importe à la cause, que l’acquisition de Cabanes
ne remonte qu’à 177 2 ? il n’en étoit pas moins auparavant
ferm :er de la terre de Saint-Chamant. Cette qualité lu iim posoit le devoir de veiller à la conservation des biens qu’il
tenoit à titre de ferme; il devoit s’opposer à toute usurpa
tion y il devoit empêcher qu’on établît des servitudes oné
reuses sur des biens confiés à sa vigilance, puisque les pro
priétaires étoient absens et ne pouvoient prévoir ni em
pêcher les usurpations.
D e toute ancienneté, la terre de Saint - Chamant a été
tenue à titre de ferme. Leurs droits n’ont pu péricliter par
la négligence d’un fermier contre lequel ils auroient une
garantie. A i n s i , que 1 on considérele cit. Cabanes comme
propriétaire des près d Espinasse et du C lo u x , la qualité
de fermier de la terre de Saint - Chamant s’oppose à ce
qu’ il ait pu acquérir aucune servitude sur le P ré du Châ
teau. S’ il n’est devenu propriétaire que plusieurs années
après son entrée en jouissance, il a du veiller comme fer
mier à la conservation des droits du seigneur.
L'attestation qu’il a mendiée de quelques individus,
�( 21 )
_
_
pour prouver l ’ancienneté de sa possession, ne rem p lit'
pas même son b u t, du moins pour les eaux qui naissent
dans le P ré du Château. E n e f f e t, ces témoins officieux
ne parlent que des eaux de la fontaine publique de St.Chamant, et autres sources vives ; mais ils ne disent pas
un mot des sources qui naissent dans le pré. S’ils ont
parlé de sources vives , ils n’ont entendu parler que de
la fontaine ou de la source qui naît dans le commun ; car
on se rappelle qu’il y a deux fontaines, l’une appelée de
M a n y , qui est à la gauche au-dessus du P ré du Château,
et l’autre du co m m u n , qui est à la droite et au-dessus du
même pré. L e cit. Coudert n’a élevé aucune difficulté sur
ces deux fontaines; il a même fait le sacrifice de ses droits
à cet égard , puisque comme premier occupant il avoit
le droit de s’en servir avant et exclusivement à tous autres.
A in s i, ce certificat est absolument muet sur le point de la
contestation.
.
L e cit. Cabanes a produit aussi un semblable certificat,
signé d’un nommé Jean D c g iro l, du 10 mai 178 5, et
obtenu sur sa réquisition. Ce n’est encore là qu’ une en
quête a futur, qui ne peut être d’aucune considération, et
que la loi proscrit.
Vainement le cit. Cabanes diroiL—il que l’acte de 1781
fut commandé par l’intendant de la direction des créan
ciers du duc de Caylus. Il a même produit plusieurs let
tres de ce particulier : dans la prem ière, qui est du mois
d’avril 1 7 8 1 , on lui marque, à l’égard de l’eau qu’il réclame
pour l’arrosement. de son pré, qu’on ne peut pas prendre
de parti, que cette affaire n’ait été éclaircie; d’envoyer un
mémoire bien exact, et qu’on lui fera rendre justice.
�(
2.Z
)
Mais l ’agent de la direction, par ces expressions, ne
s’oblige à rien, et d’ailleurs n’a voit aucun titre pour im
poser une servitude sur des héritages dont il n’étoit pas
propriétaire.
U ne s e c o n d e lettre d’un autre agent, en date du 4 sep
tembre 1 7 8 1 , ne dit autre chose, sinon que Cabanesavoit
promis d’envoyer un acte de notoriété publique, sur le
droit qu’il prétendoit avoir de prendre, trois jours par se->
maine, l’eau de la fontaine de Saint-Chamant, et autres
sources vives, pour l’arrosement de ses prés.
C ’est donc lui Cabanes qui avoit offert cet acte de
notoriété ; c’est donc lui qui a sollicité ou payé ce certi
ficat, pour colorer son usurpation.
Il
argumente encore d’un post - scriptum d’une troi
sième lettre, en date du 13 novembre 1 7 8 1 , où on lit ce§
mots : A u ssitô t après le retour du con seil de la d iïe c tio n ,
je vous écrira i su r vos comptes et su r les ea u x de la
fo n ta in e .
Cette mention insignifiante ne sembloil pai*ler que de la
fontaine publique, pour laquelle il n’y a eu aucune diffi
culté. Mais on s’est aperçu que le cit. Cabanes avait altéré
ce p o s t - s c r i p t u m ; il avoit ajouté des S , et au lieu de la
f o n t a i n e , on y lisoit desdites f o n t a i n e s : ces mots supposcroîent q u’on a déjà parlé de ces mêmes eaux dans le
cours de la lettre, tandis que le contexte de la lettre est
étranger a cet objet. Il est ridicule d’avoir recours à d’aussi
petites ruses, surtout quand 011 ne peut argumenter que
d’une correspondance d’agens étrangers à. l’objet, et qui
n’avoient aucune qualité pour prononcer sur la prétention
du cil. Cabanes. Ces misérables subtilités ne tendent qu’à
�( 23 )
surcharger d’incidens une question aussi simple que facile
à décider.
D oit-on encore s’occuper d’un acte dont le cit. Cabanes
à voulu tirer des inductions dans le cours de l’instance •,
acte qu’il qualifie d’échange, et qu’il date du 26 juin 17135
qu’il prétend passé entre le marquis de L ig n e r a c , seigneur
de S ain t-C h am a n t, et le sieur M alprade, prédécesseur
de l’appelant ?
Suivant le cit. Cabanes, le sieur M alprad e, par cet acte,
donne en échange au seigneur de Saint - Chamant une
portion de son p r é , appelé D elp rade, par lui acquis de
Pierre Chibraud. Cet te portion, de la contenue de cinquantesept toises, étoit à prendre du côté du pré du seigneur,
au coin et angle dudit pré, tii-ant droit ù un buisson, lequel
buisson doit rester dans le pi’é du seigneui* \ pour la sépa
ration de laquelle portion il sera fait, est-il dit , une mit
raille p a r le seigneur, et à ses frais et dépens. Au-dessus
du buisson, dans la portion restante à M a lp r a d e , qui re
nonce a tous droits qu’il pourroit prétendre aux eaux cou
lantes de la fontaine de M an y , « consent que le seigneur
» les prenne et perçoive lui seul, sans que M alprade puisse
» détourner icelles. »
L e seigneur délaisse une portion de son P ré du Château
à Malprade, à prendre de la dernière rase du pré , qui sort
du pre d’Espinasse, et qui entre dans le pré du C lo u x,
laissant la rase dans le pré du seigneur ; pour par ledit
Malprade joindre la portion reçue en contre-échange à scs
prés du Cloux et de l’Espinasse ; lequel Malprade sera tenu
de faire la muraille pour la séparation desdits p r é s , audessous de la rase, à ses frais et dépens-, etc.
�( 24)
' '
Cabanes convient n’avoir qu’ une copie informe de cet
acte, qui par conséquent ne peut faire aucune foi en jus
tice. Mais il dit que le duc de Caylus avoit écrit de sa main,
au dos de cet acte , c e s mots : Echcmge açec M alprade au
P r é du C hâ tea u , et qu’au-dessous la marquise de Lignerac
avoit écrit c e u x -c i : Sauri-C haînan t, ce 30 ju in 1713.
Cabanes prétend que cet acte 11e contient qu’ une renoncia
tion aux eaux coulantes de la fontaine du Coudert, et il
en tire la conséquence que Malprade s’étoit réservé les
autres. L a renonciation à la fontaine du Coudert n’a pas été
exécutee; et, dès lors, suivant le cit. Cabanes, il faut aussi
q u’ il ait l’usage des eaux qui naissent dans le pré. Les rases
dont il est fait mention dans cet acte de 1 7 13 , sont les mêmes
que celles qui existent actuellement, et leur destination est
de procurer l’eau au pré du Cloux.
.
Si Cabanes n’a qu’une copie informe de cet acte,le cit.
Coudert, clit-il, en a un double dans les mains, et se garde
bien de le faire paroître.
M ais, d’abord , cet échange prétendu n’est pas rapporté,
et la copie informe ne mérite aucune confiance; 2n. il n’a
jamais eu d’exécution , puisque Malprade renonçoit aux
enux de la fontaine du C o u d e r t, et que cependant le par
tage de ces eaux est ordonné; 30. en supposant l'existence
de cet acte, il faudroit l executer dans toutes ses parties,
et il scroit plus nuisible qu utile au cit. Cabanes.
En e ile t, loin de prouver que Malprade a le droit de
prendre les eaux naissantes dans le Pn; d u Château , il établiroitau contraire que les eaux du Coudert ont été aban
données au seigneur de Saint-Chaniant, (>( que Malprade,
ou Cabanes qui le représente, 11’avoit aucun droit de ser-
�( 25 )
.
.
vitude sur le pré dont il s’agit. L e seigneur de Saint-Chamant n’auroit eu d’autre b u t , d’autre dessein, que d affran
chir son pré de toute servitude-, et quelle apparence que
le seigneur de Saint-Ghamant eût exclu Malprade du droit
de prendre des eaux étrangères, pour lui en céder qui lui
appartenoient exclusivement? On ne peut présumer une
cession tacite, il faudroit qu’elle fût expresse, et dès-lors
l’acte de 1 7 1 3 seroit opposé avec plus de succès a u citoyen
Cabanes lui-même.
Mais pourquoi discuter si longuement sur un point de
droit aussi évident? Les eaux contentieuses n a i s s e n t dans le
pré du cit. Coudert ; c’est un fait constant et avéré.
Cette circonstance lui donne le droit d’en user à son gré,
au préjudice de ses voisins , et contra statutarn consuetudim s f o r m am .
•
Ce droit est de pure faculté , imprescriptible de sa na
ture ; toute possession contraire ne peut être d’aucune
utilité.
.
Cabanes, fermier, dans tous les cas n’auroit pu possé
der utilement. Comme fermier, il n’a pu acquérir que pour
le propriétaire; comme acquéreur,il ne pourroit argumen
ter de la possession de celui qu’il représente, puisqu’il
devoit empêcher toute usurpation.
E t le cit. Cabanes a mal choisi son moment pour grever
une propriété d’ une servitude aussi onéreuse. Les proprié
tés sont essentiellement lib res;l’intérêt public exige que les
propriétaires soient dégagésde toutes les entraves qui pourroient les gêner dans l e u r jouissance ou dans leurs spéculat.ons ; le gouvernement protège essentiellement les pro
priétés. C ’est le m oyen, a dit le cit. Portalis, orateur du
D
�C 26)
gouvernem ent, d’allier la stabilité de la patrie à la stabi
lité même du territoire; et c’est en consacrant des maxi
mes favorables à la propriété, qu’on inspire l ’amour des
lois , qu’on cree un esprit public ; c’est par là qu’on ouvre
les véritables sources de la prospérité gén é ra le, et qu’on
prépare le bonheur de tous.
Le cit. A R M A N D , rapporteur,
L e cit. P A G E S (d e R i o m ) , ancien avocat.
L e cit. C O S T E S , avoué
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Coudert, Pierre. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Armand
Pagès
Costes
Subject
The topic of the resource
jouissance des eaux
successions
prescription acquisitive
Description
An account of the resource
Mémoire sur quelques questions relatives à la propriété et jouissance des eaux. Précis pour Pierre Coudert, négociant, habitant de la ville d'Aurillac, propriétaire de la terre de St-Chamant, intimé ; contre Jean-André Cabanes, notaire public, habitant du lieu d'Autrières, commune de Saint-Chamant, appelant de sentence rendue aux requêtes du palais, à Paris, le 20 mai 1789.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1783-1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0215
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0216
BCU_Factums_G1407
BCU_Factums_G1408
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53714/BCU_Factums_M0215.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Saint-Chamant (15176)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Jouissance des eaux
prescription acquisitive
Successions